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S u r l’effet des renonciations convention*
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}et des Forclusions coutumières*
d ’après le décret du 8 avril 1791;
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CHEZ BEAU VERT E T R OUSSET.
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�CONSULTATION
Sur l'effet des renonciations conventionnelles , et
des forclusions coutumières , d ’après le décret
du 8 avril 1 7 9 1.
L
E CONSEIL SO U SSIG N É , qui a vu le contrat de
mariage de Marie Boyer avec E tienne P allier, du
19 novembre 1764 ; celui de Marguerite Boyer
avec Antoine B a rb a t, du 1 5 février 1 7 7 0 ; celui
de Catherine Boyer avec Biaise M éranville, du 14
février 1 7 7 8 ; et celui de Marie Boyer avec Jean'
Tourent, du 11 novembre 1779; lesquels contrats,
passés du vivant du père , contiennent des renon
ciations , de la part desdites Boyer , à tou tes suc
cessions directes et collatérales ; qui a aussi v u le
contrat de mariage de Jean Boyer , leur frère ,
avec Catherine Malsang , du 3 juin 1767 ; lequel
contient une institution contractuelle en sa faveur,
sur l’exposé qui lui a été fait que Joseph Boyer et
Jeanne V idal ont laissé huit enfans; savoir: lesdites
Marie , Marguerite , Catherine et autre Marie
B o yer, Jean , Antoine, autre Antoine , et Étienne
Boyer ; que Jean Boyer et Antoine Boyer , pre
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Tnier du nom , so n tm ariéi et ont des enfans ;
leu r frère A n to in e, second du nom , n’est pas
marié ; qu’Étienne B oyer, curé de Charbonnièreslès—V ie ille s, vient de décéder intestat ; que Marie,
Marguerite , Catherine , et autre Marie Boyer ,
veulent partager cette succession collatérale , con
jointement avec leurs trois frères, malgré les renon
ciations portées par leur contrat de mariage , sur
le fondement que cette succession n’a été ouverte,
que postérieurement au décret de l’assemblée na
tionale constituante , du 8 avril 17 9 1, sanctionne
le i 5 du même mois ; consulté sur la question de
savoir, si cette prétention est fondée ou non ;
E s t d ’ a v i s que Jean, Antoine,et autre Antoine
B oyer , sont en droit de partager la su ccession
d’Étienne Boyer, leur frère , exclusivement à leurs
sœurs ou à leurs descendans. Il ne doit y avoir »
à cet égard , qu’ une seule modification, c’est qu’il
ne faudra pas , lors du partage , confondre toutes
l e s portions que les filles auroient eues , si elles
n’eussent pas renoncé, pour les partager entre les
trois frères. Il faudra distinguer celle de M a r g u e r ite
B oyer , femme B a rb a t, pour la laisser à Jean
B oyer s e u l, attendu que l’effet de la renonciation
d e Marguerite Boyer a été dirigé par son contrat
d e mariage , au profit de ce dernier.
L e motif de cette décision est que les contrats de
mariage des fille s Boyer contiennent, de leur part,
une renonciation conventionnelle à toutes succes
sions directes et collatérales h échoir.
. Dans le contrat de mariage de Marie Boyer ayec
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Étienne Pallier , du ig novembre 1764 j; on lit
cette clause : “ A u moyen de la constitution de dot,
» ci-dessus faite à ladite future épouse , lesdits
» sieurs Boyer et V id a l, ses père et mère , l’ont
« privée et forclose de leur future succession , et
» autres échues et à échoir , directes et collaté»> raies , aux termes de la coutume de cette pro» vince d’Auvergne ».
Il est inutile de rapporter les clauses contenues
dans les autres 'contrats de mariage ; elles sont
conçues à-peu-près en mêmes termes. On observera
seulement qu’ on y a encorè plus manifesté l’inten
tion oh, l’on é to it, que les filles qui se marioient
fussent privées des successions directes et collaté
rales à échoir , abstraction faite de la disposition
de la coutume ; et que l’on n’y a pas inséré ces
expressions , qu’ on trouve dans la. clause qu’on
vient de rapporter , aux termes de la çoutume de
cette province d’Auvergne.
Ces clauses présentent nécessairement l’idée d’une
renonciation conventionnelle. U ne convention ,
en quelques termes qu’elle soit écrite n’est autre
chose que le résultat des volontés des parties con
tractantes. Par conséquent une stipulation qui porte
précisément qu’une fillç n’aura rien à prétendre
dans des successions, au moyen d’une dot qui lui.
est constituée , est une convention.
On convient que dans les pays , 011, au défaut
de renonciation conventionnelle , on ne pouvoit
4>as invoquer la forclusion coutumière , on a vij
élever des difficultés s u t l a validité de pareille*
A 3
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Renonciations, la. fille sera privée ou déchie, ou
père prive , etc. On se fondoit sur ce que la fille
h ’avoit pas parlé , et qu’on ne voyoit pas une
expression suffisante de sa volonté.
Mais ces objections ont toujours été r e g a r d é e s
comme de déplorables subtilités. Parmi plusieurs
jugemens qui les ont rejetées , on se c o n t e n t e r a
de citer une sentence de l a ci-devant sénéchaussée
d’ Auvergne , du 2 septembre 1782 , rendue pour
le pays de droit écrit. Elle est rapportée par le der
nier commentateur de notre coutume , tom. 1 >
page 4 0 3 . Dans cette espèce , l a clause p o r t e n t »
qu’au moyen de la dot constituée , la future époIl$e
demeureroit privée et forclose de toutes prétentions ¿uX
successions de ses père et mère, etc.
S’agissant donc , non pas simplement d’une forcîusion coutumière , mais bien d’une renonciation
conventionnelle , le droit des milles à la s u c c e s s i o n
d’Étienne Boyer , exclusivement à leurs sœ urs,
> pst indubitable.
A v e c quelqu’empressement qu’on ait dû re c e
voir le décret du 8 avril 1791 , qui rétablit dans
t, ms ses droits la nature trop long-temps m éco n n u e
çt subjuguée par la vanité , il est impossible de
penser qu’il ait un effet rétroactif ; ce qui arriveroit si , au préjudice de semblables re n o n c ia
tions , les filles venoient prendre leurs portion5
dans des successions échues même après la publi
cation de ce décret. Ces renonciations sont dev~
nues des arrangemens de famille , qu’il seroit d’im ,
danger évident de troubler ; et personne ne sup- '
�(7 )
posera que telle ait été l’intention de l’assemblée
nationale. Aussi , est-on convaincu de ces vérités ,
lorsqu’ on se pénètre des dispositions du décret.
Les législateurs ont d’abord effacé la forclusion
coutumière , ou ce qui est de même , toute inéga
lité établie à raison de la distinction des sexes : c’est
ce qui résulte de l’article premier , dont les termes
doivent être pesés.
« Toute inégalité ci-devant résultant, entre héri» tiers ab-intestat, des qualités d’aînés ou puînés ,
» de la distinction des sexes ou des exclusions couv tumières, soit en ligne directe , soit en ligne co l» latérale, est abolie; tous héritiers en égal degré ,
» succéderont par portions égales aux Liens qui leur
» sont déférés parla loi : le partage se fera de même
V par portions égales dans chaque souche, dans les
» cas ou la représentation est admise ».
» En conséquence, les dispositions des coutumes
» ou statuts qui excluoient les filles ou leurs des»cendans du droit de succéder avec les mAles, ou
» les descendans des mâles., sont abrogées , etc ».
N e voilà, sans doute, que l'abrogation des coutumes
ou statuts qui excluoient les filles. Et on ne pourroit
pas ¿ire raisonnablement que cet article renferme
une abrogation des renonciations conventionnelles
antérieurementfaites.
Les législateurs ont bien senti que des mâles , à.
l’époque du décret, pouvoient être assurés de l’es
poir de recueillir seuls des successions qui ne pour
voient s’ouvrir qu’aprbs la publication du décret ;
que ces mâles a y oient reçu ce droit, ou par l’effet
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d’une renonciation conventionnelle , o\i par l’effet
de la simple forclusion coutum ière, et ils ont réglé
ce qui devoit avoir lieu dans ces deux cas.
Le premier cas; c’est-à-dire, celui où l’assurance
a. été donnée aux mâles par une renonciation con
ventionnelle , est prévu par l’article 4 ainsi conçu:
« Les dispositions des articles premier et trois ci» dessus, auront leur effet dans toutes les successions
» qui s’ouvriront après la publication du présent
n décret, sanspréjudice des institutions contractuelles,
« ou autres clauses qui ont ¿té légitimement stipulées,
n soit par contrat de mariage, soit par articles de
*> mariage , dans lespays où ils avoientforce de contrats,
» lesquelles seront exécutées conformémentaux anciennes
7 ) lois ».
Les renonciations conventionnelles so n t, sans
contredit, comprises sous ces mots, ou autres clauses
qui ont été légitimement stipulées , etc. Et dès-lors ,
d ’après cet article , elles doivent être exécutées,
ïriême pour les successions à éch oir, après la publi
cation du décret, puisque cette dernière partie de
l’article, sans préjudice, etc. a été ajoutée unique
ment pour former une exception relativement au par
tage de ces mêmes successions.
Le second cas, celui où les mâles ne tiendroient
l’espoir de succéder exclusivement aux filles , que.
d’une simple forclusion coutumière , a été prévi}
dans l’art. V du décret, qui est conçu en ces termes:
« Seront pareillement exécutées dans les succes» sions directes et collatérales, mobiliaires et immo
lé biliaires, les exceptions contenues dans la seconde.
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» partie de l’article X I du tit. premier du décret dû
» i 5 mars 1750, en faveur des personnes mariées,
» ou veuves avec enfans , et ces exceptions auront
» lieu pour toutes les espèces de biens ».
L ’article X I du décret du i 5 mars i 7 g o , porte
que toutes féodalités et nobilités des biens étant
détruites, les droits d’aînesse et de masculinité à
l’ égard des fiefs, domaines, et alleux nobles, et les
partages inégaux , à raison de Ta qualité des per
sonnes, sont abolis ; qu’en conséquence, toutes les
successions tant directes que collatérales , tant mobiliaires qù’immobiliaires qui écherront, à compter
du ju r de la publication de ce décret, seront, sans
égard h l’ancienne qualité noble des biens et des
personnes , partagées entre les héritiers ; suivant les
lo is, statuts et coutumes qui règlent les partages
entre tous les citoyens, et il ajoute : « Exceptons
» des présentes ceux qui sont actuellement mariés
?i ou veufs avec enfans , lesquels dans les partages
» à faire entr’eux et leurs cohéritiers , de toutes
7>les successions mobiliaires et immobili aires , di» rectes et collatérales, qui pourront leur échoir,
» jouiront de tous les avantages que leur attribuent
?> les anciennes lois.
En combinant l’exception portée en cet article
avec les articles V et V I du décret du 8 avril 1791,
on voit que lorsqu’il n’y a pas eu, avant la publica
tion de ce décret, une renonciation convçntionn elb ,m a is simplement une forclusion coütumière,
*t qu’il s’ouvre une succession après cette publicaA 5
�( 1° )
tïo n , alors le droit d’exclure les filles n'appartient
qu’aux mâles qui sont engagés dans des mariages
contractés avant la publication du décret, ou aux
descendans de ces mariages. Ensorte que si un mâle
n’étoitni marié ni veu f avec enfans lors de la publi
cation du décret , il n’y auroit point de forclusion
£. son égard : ses sœurs auroient le même droit que
lui.
D e tout ce qu’on a déjà d it, il résulte que la suc
cession d’Étienne Boyer appartient à ses trois frères,
exclusivement à leurs soeurs. Ils tiennent évidem
ment ce droit des renonciations conventionnelles de
ces dernières. Il importe peu qu’il ne soit pas dit ,
dans tous les contrats de mariage des filles , que les
renonciations étoient faites au profit des mâles ; la
renonciation stipulée au profit d’un des m âles,
a dû. profiter à lui seul , et celle faite sans direc
tion particulière a dû nécessairement profiter à tous
conjointement. On a bien dû entendre que les re
nonciations fussent pour eux , puisqu’elles ne pouvoient exister que par eux.
On va plus loin : on suppose qu’il n’y eût pas de
renonciations conventionnelles, qu’il n’y eût qu’ une
forclusion coufumière , Jçan Boyer et Antoine
B o y e r , premier du nom , par cola seul qu’ils sont
m ariés, viendroient toujours prendre deux tiers des
portions des filles ; celles - ci ne pourroient prendre
que le tiers restant qui seroit revenu ;l Antoine
Boyer, second du nom. Ce dernier n’étant pas marié,
feroit le seul qui ne pourroit pas invoquer la for-
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clusion ; de manière q u e , ce qui dans l’epèçe, rend
le sort d’Antoine Boyer , jeune, égal à celui de ses
frères , c'est l’existence de la renonciation conven
tionnelle. L ’ article IV du décret du 8 a v ril, conser
vant l’effet des conventions, d’une manière absolue
et indéfinie , il ne faut pas distinguer si les mâles
sont mariés ou non. JJbi lex non distinguit, nec nos
distinguere debemus. L a circonstance du mariage ,
celle de la paternité des mâles ne sont à considérer,
d’après l’aiticle V , que dans le cas où les filles
eussent été repoussées d’une succession par le vœ u
seul de la loi, non soutenu de la convention.
J.es Boyer çonsultans ont exposé, que le mari
d’une de leurs soeurs fondoit l’espoir du succès d?
sa prétention , sur une consultation qui lui a été
donnée par un jurisconsulte célèbre de Clermont.
L e conseil soussigné ne connoît pas cette consultation. Mais il a vu pne consultation du même jurisconsulte, donnée dans une affaire semblable, entre
des particuliers de Ricm, dans laquelle il soutient en
effet une opinion contraire à celle ci-dessus. Il y a
& présumer q u e, dans la première , il fait valoir
les mêmes raisons que dans la seconde ; ensorte qu’en
réfutant celle-çi, on croira avoir réfuté l’autre.
Les objections , à l’appui des filles , se réduisent
deux.
i° . Toute inégalité résultant de la distinction dçs
sexes , est abolie sans exception; donc , les renondations des filles, desquelles résultaient de pareilles
inégalités , sont abolies. Il n’y a aucune différence
à faire entre la renonciation conventionnelle et la
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�forclusion coutumière. L ’ une comme l’autre est
une suite de la coutume ; puisque , dans l’article
a 5 du tit. 12 , elle forclot la fille mariée qui ne
renonce pas , tout comme celle qui renonce , ait
quitte ou non.
2°. En disant que dans le cas même de renon
ciation conventionnelle , les filles doivent partager
les successions qui s’ouvrent après la publication du
d écret, ce n’est pas soutenir qu’il doive avoir un
effet rétroactif ; que si ce décret ne doit pas avoir
d’effet rétroactif, c’est seulement en ce sens, qu’il
ne doit pas s’appliquer aux successions ouvertes
avant sa publication.
Les réponses à la première objection abondent.
C est un principe , que la disposition de l’homme
fait cesser celle de la loi. D e-là résulte la con
séquence que , quoique notre coutume prononçât
la forclusion contre la fille qui se m arioit, lorsque
l’espoir successif ne lui étoit pas réservé , il ne
falloit pas moins considérer la renonciation con
ventionnelle, lorsqu’elle avoit été stipulée, et aban
donner alors la forclusion coutumière , pour ne
juger le sort de la fille , que par la renonciation
conventionnelle. En coutume d’Auvergne , le père
conservoit, comme en droit é c r it, l’exercice de
sa volonté , indépendamment du vœ u de la loi.
Q u’ un p ère , en faisant renoncer sa fille , eût
dirigé l’effet de la renonciation au profit d’un des
mâles , exclusivement aux autres, cette direction
avoit son effet. Ce n’étoit cependant que par l’effet
de la volonté du père ; c’est-à-dire , de la conven-
�(i3)
jicn. Que la fille eût renoncé au profit des frère*
germains seulement; en cas de défaillance de ceux-ci
et de leur postérité , la renonciation ne profitoit
pas aux frères utérins ou à leurs descendans , et
vice versâ. Dans ce cas, la fille recouvroit ses droits.
Les frères qui n’étoient pas appelés,par la conven
tion , à recueillir l’effet de U renonciation , fai-r
soient valoir en vain la disposition de la l o i , qui
leur donnoit ce d ro it, dès qu’il n’y avoit pas de
réserve d’espoir successif} en faveur de la fille ; ils
apposôient inutilement que la clause portoit seu
lement une préférence , en faveur de ceux qui
étoient appelés par la convention , en cas da
concurrence entr’eux et leurs autres frères, mai§
qu’il n’en résultoit pas une exclusion contr’e u x ,
en cas de défaillance des mâles , au profit de qui la
renonciation étoit faite. Les tribunaux réhabilitoient la fille, par la raison qu’il ne falloit pas con-,
sidérer la l o i , mais bien la convention ( 1 ). D onc,
la convention a toujours été prise indépendamment,
et abstractivement de la loi.
D ’ailleurs , il se présente une réflexion bien
simple , qui démontre que ce raisonnement ne peut
se soutenir.
En e ffe t, l’on n’oseroit certainement pas dire,
qu’en droit é crit, et dans les autres pays où il n’y
(1) C’est ce qui a été jugé pqr un arrêt du 12 juülci;
1786 , confirmatif d’une sentence dç la ci-devant séné
chaussée de Clcrnxont, du 6 juillet 1784, entre lus Iiüii-,
tiers Godivel.
�(H )
avoit pas. de forclusion légale , les renonciations
conventionnelles antérieures à la publication du
décret, nedussent pasavoirleur effet,lequel résulte
évidemment de l’exception portée en l’article IV .
O r , comment seroit-il possible de respecter ces
renonciations conventionnelles , et d’anéantir les
a u tres, parce qu’elles auroient été faites sur un sol
différent , et souvent à une lieue des premières ?
Les frères qui habiteroient le pays de coutume ne.
diroient-ils pas avec fondement : quelle est donc
la raison de cette différence que l’on veut mettre
entre une renonciation stipulée en coutume , et
celle stipulée en droit écrit ? Quoi ! la renonciation
faite en droit écrit n’a d’e ffe t, que parce que le
droit commun , contraire en cela aux lois romai
nes , qui sont les lois primitives du droit écrit ,
a permis de la stipuler ! Mais ce droit commun n’a
permis la stipulation des renonciations, que par
les mêmes principes qui l’avoient fait introduire par
notre coutume. Y auroit-il de la justice à anéantir
une convention, par la seule raison que la loi du
pays dans lequel elle auroit été faite , n’y seroit pas
contraire , et à adopter cette môme convention,
souscrite dans un autre pays , parce qu’il y avoit
une loi primitive qui se seroit élevée contre son
execution , s’il n’y avoit pas été dérogé par un
droit devenu commun à tout le royaume?
Il ne seroit possible de sauver l’inconséquence
de cette objection, qu’en allant jusqu’à dire que tant
en droit écrit qu en pays de coutume , les renoncia
tions conventionnelles doivent être considérées
�( >5 )
comme non écrites- Mais pour vouloir trop prouver,
on ne prouveroit rien.
Il est vrai que, pour tâcher de foire adopter le rai
sonnement que Ton fait en faveur des filles, 011
ajoute que l’exception contenue dans l’article IV ,
et commençant par ces termes, sans préjudice , etc.
n’est relative qu’à des clauses q u i, comme les insti
tutions contractuelles sont stipulées à l’avantage des
époux , et qu’elle est étrangère à des renonciations
de la part des filles , qui sont d’un genre différent.
Mais cette dernière objéction ne peut pas plus se
soutenir. Lorsque dans l’article IV , après avoir dit
que les dispositions des articles I et III auroient leur
effet dans toutes les successions qui s’ouvriroient
après la publication du décret, on a ajouté , « sans
» préjudice des institutions contractuelles, çu autres
clauses qui ont été légitimement stipulées, soit par
» contrat de mariage, soit par articles de mariage dans
» les pays où ils av oient force de contrats, lesquelles
» seront exécutées conformément aux anciennes
» lois 7>. Il est évident qu’on a eriten du conserver l’effet
de toutes dispositions quelconques qui, antérieure
ment au décret, a voient assuré aux mâles le droit de
prendre les successions qui écherroient après. Il est
impossible de donner un autre sens à ces expression s,
ou autres clauses. Cette exception a été rédigée uni
quement en faveur des mâles , et une renonciation
écrite de la part d’une fille au profit d’un m âle, e s t,
sans contredit, une clause du mémo1 genre qu’ une
institution contractuelle ; car l’une n’a dû prendre
effet comme l’autre , que par la mort de ceu:: aux
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successions desquels le mâle et la fille étaient d’abord
appelés.
L a seule conséquence qu’on pourroit tirer de
l’objection qu’on vient de combattre , c’est qu’à l’a
venir on ne pourra pas faire renoncer les filles.
Mais ce n’est pas de quoi il s’agit. On ne peut
considérer du même oeil une renonciation faite avant
la publication du d écret, et une renonciation qui
ne seroit faite qu’après»
Venons à la seconde objection: on convient qu’elle
seroit décisive en faveur des filles , si elle pouvoit
être adoptée. On se rappelle qu’elle consiste à dire
que l’égalité étant rétablie par l’abolition de la dis
tinction des sexes, la renonciation conventionnelle,
ainsi que la forclusion légale doivent disparoître ,
lorsqu’il s’agit d’une succession qui ne s’ouvre
qu’après la publication du décret ; qu’alors il n’y a
pas d’effet rétroactif dans le décret ; qu’il n’y en
auroit que dans le cas , où on voudroit l’appliquer
aux successions qui seroient ouvertes , avant cette
publication.
Mais il faudroit se faire bien illusion pour ne pas
sçntir d’abord le vice qui règne dans ce raisonnement.
L ’article I V a été écrit pour déterminer l’effet
que devoit avoir l’abolition portée par les articles I
et III ; et suivant cet article IV , les dispositions des
articles I et III doivent avoir leur effet dans toutes les
successions qui s’ ouvriront après lapublicationdu décret.
Mais que resulte-t-il de ce qui suit dans la rédac
tion de cet article ? C ’est sans doute une exception
sur cet effet. L ’exception d o it, sans contredit, s’ap»
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pliquer à l’objet de la disposition, si la disposition a
trait aux successions qui s’ ouvriront après la publication
du decret ; l’exception ne peut donc concerner que
ces mêmes successions. D onc ces m o ts, sans préju
dice des institutions contractuelles ou autres clauses, etc.
lesquels , comme on a déjà d i t , comprennent les
renonciations conventionnelles, emportent néces
sairement avec e u x , l’idée que les conventions quel
conques qui établissent un mode inégal de partage*
et qui sont faites antérieurement à la publication du
décret, doivent avoir leur exécution , même pour
des successions ouvertes après cette même publi
cation.
Q uel est donc l’esprit de la loi à cet égârd ? L e
voici : Quand il s’ouvrira une succession après sa
publication, il ne faudra pas régler le droit de ceux
qui se présenteront pour la recueillir , par les lois
existantes k cette époque. On devra se décider par
les conventions antérieures à la publication du dé
cret. On ne pourra venir à une succession qu’en
vertu d’une lo i, ou en vertu d’une convention : s’il
n’y a pas de disposition ou convention , il faudra
suivre la loi qui aura lieu lors de l’ouverture de la
succession ; s’il y a une disposition ou convention
valable , elle tiendra lieu de loi. O r , cette disposi
tion ou convention sera valable, si elle est conforme
aux lois qui étoient en vigueur, à l’époque où elle
a été arrêtée. Il ne répugne en aucune manière que
le mode du partage d’ une succession ait été fixé
avant le temps de son ouverture. Le pacte successoire une fois établi valablement, doit toujours êtr?
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respecté. Le particulier de la succession duquel il
s’agit, ne sera considéré , dans la suite, que comme
le dépositaire de son hérédité. Pour la partager , il
faudra se reporter k l’époque de la convention , et
feindre qu’elle se soit ouverte à cette même époque.
Prétendre le contraire , ce seroit vouloir anéantir
des conventions sur la foi desquelles des familles se
seroient unies ; des enfansseroient nés, ce seroit ré
veiller »des passions propres k diviser ceux que les
liens du sang doivent plus particulièrement réunir.
L a loi a jeté un voile sur ce q u i étoit déjà fait avant
sa promulgation , même d’après nos préjugés. Elle
n’a pas voulu qu’ un bienfait pour l’avenir devînt
une source de maux pour le présent ( i ).
( i ) O n tro u v era p e u t-ê tre q u e l’o n v ie n t d e d o n n e r
tro p d 'é te n d u e > à l’effe t des re n o n cia tio n s c o n v e n tio n
n e lle s a n té rieu re s à la p ro m u lg a tio n d u d é c re t; m ais ce tte
é te n d u e p a ro ît ré su lte r d e la ré d a ctio n d e la lo i m ê m e , e t
le ju risco n su lte n e d o it ra iso n n er q u e d ’après la loi.
11 y a lie u de p ré su m e r q u e c e tte loi sera in te rp ré té e e t
m o d ifié e p a r u n e n o u v e lle , et alors o n
n e sero it pas
é to n n é d e v o ir so u te n ir q u e la r e n o n c ia tio n c o n v e n tio n
n e lle faite p ar la fille , d ’u n e m a n iè re va g u e et in d éfin ie
avan t la p u b lic a tio n d u d é c re t d u 8 avril 17 9 1 , n e d o it
pas a vo ir son e ffe t p o u r te u te s sortes d e su ccessio n s q u i
s 'o u v riro ie n t »près. Il ne sero it p e u t-ê tre pas ju ste de la
faire v a lo ir p o u r des su cce ssio n s co llatérales a u x q u e lle s la
fille e t ses frères no p o u v o ie n t pas s o n g e r , su r-to u t si les
p erso n n es des su cce ssio n s d esq u elles il s’a g iro it , n ’é to ie u t pas n é e s , lors d e la re n o n cia tio n : n/ais q u e lq u e
�( 19 )
On ne douterait pas de la certitude des consé
quences que l’on vient de tirer des dispositions du
décret du 8 avril 1791, quand on n’auroit eu d’autre
base que ce décret. Mais on en doute encore moins,
si l’on consulte la feuille du M oniteur, du 3 du
même mois d’a v r il, n°. 9 3.
On y voit qu’avant que la loi sur les successions
ab-intestat eût été décrétée, le comité avoitfait k ce
sujet un projet de décret ; que dans l’article 17 de
ce projet, il avoit prévu le cas où il y auroit des
renonciations conventionnelles de la part des filles,
à des successions non encore ouvertes, et qu’il avoit
décide que ces renonciations ne pourraient être op
posées aux filles, lors de l’échéance delà succession.
Mais , M. Chapelier , rapporteur du comité , ayant
mis cet article à la discussion, il fut vivement com
battu, sur-tout par M. Vieillard qui, quoiqu’il eût
personnellement un grand intérêt k ce que cet article
- passât, s’y opposa néanmoins , parce qu'il falloit
craindre les commotions funestes que cette loi nouvelle
soit la re strictio n q u ’o n p o rto clans la suite à l’effet des
re n o n cia tio n s c o n v e n tio n n e lle s , et à ce lu i des fo rclu sio n s
c o n tu m iè r e s ( lesq u elles fo rclu sio n s co u tu m iè re s n e p e u
v e n t a v o irlie u q u e p o u r les m âles m ariés , o u veufs avec cn f a n s , lors de la p u b lic a tio n d u d é c r e t), o n a p e in e à cro ire
q u ’elles soien t a n é a n tie s , q u a n t au x su ccessio n s d irectes
e t a u x succession s co llatérales des degrés les plus p ro ch e s ;
c ’e st-à -d ire , des frères et s œ u rs , o n cles et tan tes, existan s
lo rs de la r e n o n c ia tio n , p arce q u e l’o n a plus p a rtic u liè re
m e n t co m p té su r ces succession s q u e la fam ille d e là fille
rcA o n çan tc avoit l’esp o ir de re c u e illir.
�pourroit produire, si on lui donnoit un effet rétroactif'.
E n conséquence de ces observations qui furent ap puyées par plusieurs autres membres , l’article fut
rejeté, parce qu’il fut dit qu’il n’ y avoit pas lieu à
deliberer. Ce fut ensuite que le décret fut rédigé en
neuf articles, tel qu’il a été sanctionné et envoyé.
^Il est donc démontré, jusqu’au dernier degré d’évidence , et par la toi elle-m êm e, et par les discus
sions qui l’ont préparée , que l’exception portée en
l ’article IV se rapporte aux renonciations conven
tionnelles ; que ces renonciations doivent subsister,
même pour les successions qui ont du échoir après
la publication du décret ; que dès - lors le droit de
Jean, Antoine et autre Antoine Boyer, à la succes
sion d Etienne B o y e r, exclusivement à leurs soeurs,
n e peut être raisonnablement contesté.
Délibéré à Riom, le 20 fév. 1792. S ig n é,G R EN IER .
B E A U L A T O N , L A P E Y R E , G R A N C H IE R i
T O U T T É E , fils, J O U R D E , P A G È S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boyer, Marie. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Beaulaton
Lapeyre
Granchier
Touttée, fils
Jourde
Pagès
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
rétroactivité de la loi
contrats de mariage
forclusion
coutume d'Auvergne
intention du testateur
Description
An account of the resource
Consultation sur l'effet des renonciations conventionnelles, et des forclusions coutumières, d'après le décret du 8 avril 1791.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Chez Beauvert et Rousset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1764-1792
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
BCU_Factums_B0134
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Charbonnières-les-Vieilles (63093)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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contrats de mariage
coutume d'Auvergne
forclusion
intention du testateur
renonciation à succession
rétroactivité de la loi
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MÉMOI RE
A CONSULTER,
E T
CONSULTATION.
L e 19 février 1 7 5 9 , le sieur G r a s , pere com m un des
parties , fit son testament.
Par ce testam ent} il fixa la légitim e de chacune de
ses filles à douze mille liv r e s , payables à leur mariage
ou majorité , et sans intérêts jusques à cette époque.
Il donna a la dame Gaudin son épouse l’usufruit et
jouissance de ses biens immeubles , jusques à la majorité ou
mariage de son héritier ; en payant par elle les charges
annuelles et courantes , et telles qu’un usufruitier y est tenu,
et à la charge du soin, nourriture et éducation de leurs
enfants,
i l institua pour son héritier son f ils , et lui imposa
l ’obligation de ne p ou voir dem ander l ’envoi en pos
session qu’a mariage ou majorité
D e plus , la dame G au din fut nom m ée tutrice de
ses enfants , et dispensée de rendre compte.
L ’h é ritie r, à sa majorité, se mit en possession de
l’hoirie.
L es filles légitim aires répudièrent leur legs de douze
A
�m ille livres , et firent p rocéd er à la fixation de leur
légitim e. Cette légitim e s’ éleva plus haut que leur legs.
L e s filles demandèrent qu ’elle leur fut p ayée en corps
héréditaires.
On sait que de droit la légitim e porte des intérêts ou
des fru its , et que ces intérêts ou ces fruits sont dus
depuis le jour du d écès de la personne , sur les biens de
laquelle la légitim e est à. prendre.
E n conséquence , les filles légitim aires demandèrent à
l ’héritier et le prin cip al de leu r légitim e 5 et les fruits
courus depuis le d eces.
L e prin cipal n ’a donné lie u à aucun litige , mais
¡ ’héritier a prétendu qu ’il ne pouvoit être actionné pour
les fruits qui pouvoient avoir été acquis aux légitim aires
pendant l ’usufruit de la mere.
Cette prétention de rh éritier a donné lieu à une
instance.
U n prem ier jugem ent a donné gain de cause à l ’héritier.
L e s filles légitim aires ont appellé de ce jugem ent. E lles
demandent si leur appel est fondé , et , pour mettre
leu r conseil à portée de leu r donner un avis so lid e ,
elles vont exposer les raisons de part et d’autre.
Notre m ere commune , dit l ’h é ritie r, avoit l ’usufruit
de la succession paternelle jusques à ma m ajorité. Pendant
le tems de cet u su fru it, je n ’ai jou i de rien ; il seroit
injuste de m e condamner à restituer des fruits que je
n ’ai point perçu , et qu’il m ’a été m êm e im possible de
percevo ir. L e s légitimaires devoient s’adresser à celle qui
a réellem ent joui. J e ne puis être comptable que des
fruits courus depuis la cessation de l ’usufruit arrivée
en 1784. .
.
L a m ere usufruitière étoit encore tutrice de ses enfants.
E n cette qualité , elle administroit pour eux. E lle doit
doit donc un com pte. Pourquoi ne pas recourir à elle
�( 3)
.
pour des fruits qui font nécessairem ent partie de ce
compte ?
De plus , la m ere usufruitière étoit chargée de l ’ é
ducation , de la nourriture et de l ’entretien de ses enfants,
e t , en considération de cette charge , elle avoit été
libérée de tout intérêt des sommes auxquelles les lé
gitimes avoient été fixées par le testateur. Il est donc
absurde que l ’on vienne réclam er contre l ’h é ritie r, des
fruits que l ’on ne pourroit m êm e réclam er contre la
mere.
T elles ont été les raisons que les filles légitim aires ont
eues à combattre,.
E lle s ont répondu que leu r nourriture et entretien n ’ont
p u absorber les fruits de leur légitim e ; que le testateur
n a pu leur interdire la réclam ation de l’excédent que
la nourriture et l ’entretien laissoient libre ; que , pour
cet excédent , elles avoient , ainsi que pour la somme
principale dont les fruits ou les intérêts ne sont qu’un
accessoire , une action personnelle et hypothécaire
contre l ’héritier possesseur des biens de l’hoirie ; que
conséquemment elles ont p u exereer contre lui celte
a c tio n , dès qu’il a été mis en possession de l ’h éritag e,
sau f à lu i son recours contre la mere usufruitière , poul
ies fruits courus pendant le tems de l ’usufruit ; qu’en
matiere de légitim e , ce sont les biens du défunt qui
répondent et du p rin cipal et des fruits ou intérêts ;
que la véritable action des légitim aires doit donc être
dirigée contre l ’héritier qui représente le défunt et qui
possédé les biens * qu’il importe p eu , dans l'hypothèse
actuelle , que la mere com m une des parties ait été tutrice
et usufruitière pendant un certain tems ; que cette cir
constance accidentelle n ’a p u dénaturer Faction des
légitim aires qui , pour le fond et pour les fruits de leur
lég itim e, ont directem ent droit sur les biens exisian is,
•
A
a
�et contre celu i qui possède ces biens , et q u i , en sa
qualité d ’héritier , est seul débiteur proprement dit des
portions légitim aires ; qu’e n fin , l ’adversaire se trouvant
de droit et de fait nanti de l ’hoirie au moment où la
réclam ation des légitim aires a été form ée , il ne pouvoit
exiger que ces enfants légitim aires , qui avoient pour le
fo n d , et pour les fruits de leur lé g itim e , un droit indi
visible com m e leu r hypothèque , fussent réduits à diviser
leur action et à intenter une demande divergente pour
une partie des fruits , contre une m e re , dont l ’usufruit
avoit cessé , et qui se trou voit entièrement d ép o u illée
de tous les biens sur lesquels l ’hypothéque des portions
légitim aires et des fruits en provenants , étoit assise.
É n cet état , les enfants légitim aires désirent savoir
ce qu’ils peuvent espérer ou craindre de l ’appel q u ’ils
ont émis du jugem ent qui les condam ne.
CONSULTATION.
V u le M ém oire ci-dessus :
L e soussigné estime que le jugem ent } dont les enfant*
légitim aires sont appellants , et qui décide que ces
enfants n’avoient point une action directe contre l ’h é
ritier pour la restitution des fruits de leu r légitim e q u ’ils
au roien t dû percevoir pendant l ’usufruit de leur m ere
com m une , sera infailliblem ent réform é com m e contraire
à tous les véritables principes.
.
Il résulte des faits exposés , que le sieur G ras pere
n ’avoit laissé à chacune de ses filles que douze m ille
livres pour leur tenir lieu de légitim e ; que cette somme ,
p ayable à leur mariage ou m ajorité , leur avoit été
laissée sans intérêts jusqu’a lo rs, et que leu r m e r e , u su
fruitière et établie leur tu tric e , avoit été chargée de les
éduquer > nourrir et entretenir.
�C5 )
Il résulte encore que l ’usufruit de la mere n ’ avoit de
durée que jusques à la m ajorité de l ’héritier.
L e s filles légitim aires , parvenues à l ’âge où elles
pouvoient veiller elles-m êm es sur leurs propres intérêts ,
répudièrent leu r le g s , firent procéder à la fixation de
leur lé g itim e', et demandèrent qu ’elle leu r fût p a y é e
en corps héréditaires.
R ie n de tout cela ne fut contesté et ne p o u vo ii
l ’être.
t v
L e s fruits de la légitim e sont dus du jou r du d é cè s.
L e s filles légitim aires à qui l ’on ne contestoit pas le
fond de leur légitim e , se pourvurent } pou r être payées
des fruits , contre l ’héritier qui étoit devenu m ajeur etqui , depuis sa m ajorité , jouissoit de l ’hoirie.
C et héritier a distingué alors les fruits que les lé g i
timaires auroient dû percevoir pendant l ’usufruit de leur
m ere , des fruits qui leur ont été acquis depuis que cet
usufruit a cessé. Il n ’a pas hésité à se déclarer débiteur
des fruits acquis aux légitim aires pendant ce dernier
tems ; mais il a soutenu que , pour les fruits des années
précédentes , l’action des légitim aires auroit dû être
dirigée contre la m ere usufruitière , et non contre u n
héritier qui n ’a p erçu au cu n fruit pendant la durée de
l ’usufruit de la m ere. C e systèm e a été adopté par le
jugem ent dont est appel.
Pour démontrer toute l ’injustice de ce ju g e m e n t, il
suffit de développer quelle est la véritable nature de
l ’action exercée par les légitim aires.
O n a dit , dans les défenses contre l’héritier , que
i ’action en légitim e est à la fois personnelle et hypo
thécaire. D ’où l ’on a con clu que cette action su it les
biens , et q u ’en con séq u en ce, l ’héritier , possesseur des
b ie n s, ne p eu t jamais s’y soustraire ni pour le fo n d , ni
pour les fruits de la légitim e réclam ée.
�.
< s >
.
.
il ne paroit pas que la conséquence soit une suite
nécessaire du principe.
De ce qu’on a une action hypothécaire sur certains
biens , il ne suit pas qu’on ait toujours une action
directe contre le possesseur de ces biens. Dans combien
d ’occasions l ’action hypothécaire n ’est-elle que subsi
diaire à l ’action directe et personnelle ? cela se vérifie
toutes les fois que l ’on est tenu de discuter un prem ier
débiteur , avant que d ’en venir à un second coobligé ;
et ces cas de discussion préalable ne sont pas rares
dans le droit.
Dans les circonstances de la cause , dire que les
légitim aires ont une action hypothécaire sur les biens
de l’hoirie tant pour le fond que pour les fruits de
leur légitim e , ce n ’est donc pas dire assez pour ju s
tifier l ’action directe que les consultantes ont exercée
contre l ’h éritier, pour des fruits que cet héritier n ’a point
perçu et n ’a p û percevoir 3 tandis que l ’usufruit de
l ’hoirie appartenoit à tout autre. On pourroit toujours
répondre avec su ccès aux légitim aires : votre action
hypothécaire pourra vous donner un recours subsidiaire
sur les biens de l ’héritage; mais avant tout , vous deviez
directem ent vous pourvoir contre la mere usufruitière
pour des fruits échus pendant la durée de l’usufruit.
Il faut donc remonter à des principes plus puissants
que ceux qui régissent le sim ple droit ¿ ’hypothèque ,
p ou r autoriser la procédure des consultantes.
Q uels sont ces principes ? ils naissent de l a nature
mêm e des choses.
L a légitim e n ’est pas simplement une dette , mais une
portion de l’h o irie , pars bonorum. C ’est la loi elle-m êm e
qui nous le dit.
L e légitim aire est donc plus que créancier , il est
portionnaire , il est co-propriétaire des biens de l ’hérédité.
�7
*
(
).
C ela posé , quelle est l ’action d ’un dem andeur en
légitim e ? c ’est l ’action d’un co-propriétaire , c ’est une
véritable action en partage : sancimus repetitionem ex
relms substantiæ pair h fieri. L .
, cod. de inojf. testam.
Car toute division qui subsiste entre co - portionnaires
d ’une mêm e hoirie , est un partage proprem ent dit ,
quelques petites ou inégales que soient les diverses
portions des co-partageants , chacun prend selon son
droit ; mais chacun , pour sa portion , prend à titre de
propriété ; et c ’est ce qui caractérise le partage.
Il y a entre l ’action en p a rta g e , et ’action hypothé
caire , la m êm e différence qui existe entre un sim ple
droit d’hypothéque et un vrai droit de propriété.
Toute action en partage suppose que Ton a jus in r e ,
et conséquemment , que l ’on a le droit de se p ayer d i
rectement et sans détour sur les biens qui sont à partager.
C e droit, infiniment sup érieu r à l ’h y p o th é q u e , suit les
biens par-tout où. ils se trouvent , et dispense de discuter
les possesseurs précédents de ces m êm es b ie n s , s’il v
en a eu.
A u ssi, il a été constamment ju gé qu’un légitim aire est
autorisé à s’adresser à un tiers-possesseur des biens de
l ’hoirie pour avoir le paiem ent de sa légitim e , et
D ecorm is , tom. 2 , col. 6 17 , enseigne que ce tierspossesseur peut directem ent être attaqué sans discussion
préalable de l ’héritier.
Il a été jugé encore , et il est universellem ent reconnu
que l ’action pour dem ander la légitim e contre le tierspossesseur dure trente ans , com me l ’action que l ’on peut
exercer contre l ’héritier lui-m êm e. D uperier , maximes de
d ro it, titre de la légitime. D ecorm is , tom. 2 , col. 589.
Or pourquoi le tiers-possesseur , qui n ’a plus à craindre
après dix ans l’action sim plem ent hypothécaire ,s c trouvet-il soumis pendant trente années à. l ’action du légi-
36
1
�(.8 )
.
.
•
timaire ? c ’est que cette action , qui est celle , non d ’un
sim ple créancier ; mais d’un vrai propriétaire , est entiè
rement assim ilée à une action en revendication ; c ’est
encore , parce que l ’action du légitim aire est com parée
à l’action condictio ex leg e, laquelle est mixte et tient à
la fois de l ’action personnelle et de l ’action réelle , suivant
les lois qui se tro u ve n t au cod. de condict. ex leg. > ce
qui la fait durer trente an si c ’est enfin, parce que Faction
du légitim aire est regardée , par tous les docteurs , com me
l ’action appellée actio in rem scripta , comme une véritable
action en pétition d ’hérédité , actio petitionis hœrcditatis >
dont la durée est de trente ans contre l’héritier , ainsi
q u ’on le voit dans la loi hœreditatis 7 , cod. de petitionc
haercditatis.
II n ’est donc pas possible de se m éprendre sur la nature
de l ’action d’ un dem andeur en lé g itim e , et sur les p ri
vilèges attachés à cette action.
L e droit d ’un légitim aire est infiniment au-dessus de
[’hypothèque d ’un c ré a n c ie r, c ’est un vrai droit de
propriété. Or , par son essence , un tel droit assure à
celui qui est autorisé à l ’exercer , une action directe
sur la chose m êm e , actionem in re , et par conséquent
la faculté de revendiquer son bien et de le prendre d irec
tement dans les mains où il le tro u v e, sans être tenu de
discuter préalablem ent les personnes qui ont p û p ré c é
demment avoir joui de ce bien.
Dans notre hypothèse , p eu importe donc qu ’il y ait
eu une usufruitière. Il suffit que l’héritier se trouve
aujourd’hui nanti des biens de l ’hoirie , pour que les
consultantes , qui ont une action réelle sur ces biens ,
aient p û directem ent attaquer cet héritier. Si un tierspossesseur , nanti des immeubles d ’une h é ré d ité , peut
être directem ent attaqué par les légitimâmes , sans que
ceux-ci soient obligés de discuter préalablem ent l ’h éritier,
à
�à plus forte raison l ’héritier lui-m êm e , quand il tient
dans ses mains les biens du défunt , peut-il être d irec
tement attaqué , sans que les légitim aires aient besoin de
discuter un usufruitier dont l ’usufruit a cessé.
Vainem ent voudroit-on distinguer la demande du fond
de la légitim e d ’avec celle en restitution des fruits.
L e s fruits sont l ’accessoire du fond. O r , l ’accessoire p ar
ticipe de la nature du prin cipal , accessorium sapit naturam
principalis. C ’est to u jo u rs, non un sim ple titre de créa n ce,
mais un vrai titre de propriété qui donne droit au légiti maire de poursuivre sur les biens du d é fu n t, en quelques
mains qu’ils se tro u v e n t, le payem ent , o u , pour parler
avec plu s d ’exactitude , la revendication , la désemparation
de son fond et de ses fruits. C on séq u em m en t, tant pour
le fond que pour les fruits , c ’est toujours une action
réelle et directe que le légitim aire est autorisé à exercer
sur une hoirie dont il est portionnaire. A ussi M onvalon,
dans son traité des successions , tom. i , ch. 2 , art. i 5 ,
Pâg. io , nous dit que le légitimaire a le droit d'agir sur
les biens de Vhoirie, t a n t p o u r l a p r o p r i é t é q u e p o u r l e s
F r u i t s , quoique l'usufruit ait été légué ci tout autre que l'hé
ritier• les consultantes n ’ont donc fait qu’ user de leur droit,
q u a n d , pour la restitution de leurs fruits légitim aires ,
elles se sont directement adressées à l ’héritier com me
tenant le% biens du défunt sur lesquels , pour leurs portions
et pour les fruits en proven an ts, elles avoient un véritable
titre de co-propriété.
* ^ n jV°k je cte qne , dans notre cas , la mere usufruitière
jusqu a la majorité de l'héritier , se trouvoit encore tutrice
de ses enfants ; qu’en sa qualité de tutrice , elle doit
u n compte , et qu’on devoit lu i demander ce com pte ,
au lieu d ’exercer une action im m édiate contre l ’héritier.
R ie n de plus frivole que cette objection.
D abord , en point de fait , la m ere usufruitière et
B
5
�.
, .
.
( 10 )
.
tutrice étoit dispensée de rendre compte , par la loi du
testament.
E n second l i e u , pen dan t la durée de l ’usufruit et
de la tutelle de la mere , on ne savoit point à quoi la
légitim e des consultantes pouvoit s’élever. E lles n ’avoient
qu’un legs de douze m ille livres , payable à leur mariage
ou à leur m ajorité , et il étoit dit que ce legs seroit sans
intérêt ju sq u ’alors , voulant seulement le testateur que la
m ere usufruitière et tutrice , pourvût à l ’éducation 3 à la
nourriture et à l ’entretien de ses filles.
N ous savons et nous prouverons bientôt que la légitim e
ne peut êtrq arbitrairement réduite par la volonté de
l ’h o m m e, qu ’elle est acquise de droit aux enfants en
fonds et en fru its, et que conséquem m ent toutes les dis
positions testamentaires tendantes à fixer à douze m ille
livres la légitim e des consultantes , et à prohiber les
intérêts de cette somme ju squ’à une certaine époque ,
étoient comme non écrites par rapport à l ’intérêt des
légitim aires. •
Mais la mere tutrice et dispensée de rendre c o m p te ,
se tro u vo it, par cette clause de dispense , d élivrée au
moins de toute administration rigoureuse , ab scrupulosâ
administratione, com me disent les auteurs. E lle n ’étoit
pas tenue devoir au -delà de ce que le testament lui
présentoit à administrer. E lle ne pouvoit donc être obligée
de faire entrer dans son com pte de tutelle , des fruits ou
des intérêts prohibés par le titre même qui l ’établissoit
tutrice. D ’ou il suit qu a ne considérer que les circons
tances , la tutelle de la mere est une considération trèsindifférente pour des objets qui ont dem euré étrangers
à sa com ptabilité.
E n d ro it, peu importe que la mere ait perçu les fruits
comme usufruitière ou comme tutrice : les légitim aires
n’ont pas moins 3 dans tous les cas 3 une action directe
�,.
..
( 11 )
et réelle sur l ’h o ir ie , une action qui , par sa nature ,
le s dispense de discuter, et les autorise à se p ayer , sans
d étou r , sur les biens de cette h o irie , par - tout où ils
le s trouvent. C ’est ce qui fut jugé par un arrêt rapporté
p ar Bezieux , liv . 6 , ch. 9 , pag. 472 , et rendu au
rapport de cet auteur magistrat. Dans l ’hypothese de cet
arrêt , on vouloit ren voyer les enfants légitim aires , pour
le recouvrem ent des intérêts de leu r lé g itim e , dans
l ’hoirie de leu r mere administreresse, tutrice et usufruitière
des biens de son mari. Com m e l ’on voit , l ’hypothese
étoit semblable à la nôtre. On so u ten o it, à l ’instar de
l ’adversaire , que la m ere ayant 3 en sa qualité d’adminis
treresse , tutrice et usufruitière , perçu les fruits sur lesquels les
intérêts devdient se prendre , c ’étoit à elle ou à ses rep ré
sentants à répondre dé ces intérêts ; mais ce systèm e fut
condam né , parce que, dit B e z ie u x , la légitime étant due
p l e n o j u r e en propriété et en usufruit par /’hoirie de celui
qui la d o it, le légitimaire a droit et action d'agir sur cette
hoirie pour l’un et pour l ’autre, quoique le peré en ait laissé
Vusufruit à sa femme.
Il est donc évid en t, dans le cas a c tu e l, que les con
sultantes , nonobstant l’ usufruit et la tutelle de leur m e re ,
ont pu et dû s’adresser directement à l'héritier comme
tenant les biens du défunt , pour être p ayées des fruits de
leurs portions légitim aires.
L a derniere ressource de l ’adversaire est de nous dire
q u e , par la loi du testam ent, les consultantes n ’avoient
ni intérêts ni fruits à prétendre jusqu ’à leur mariage ou
majorité , au m oyen de l ’éducation , de la nourriture et
de l ’entretien dont leur mere usufruitière et tutrice étoit
chargée à leur égard. On conclut de là que la matiere
manque à notre action en restitution des fruits de ce
prem ier tems.
Q ue l ’adversaire se mette donc d ’accord avec lui-m êm e.
B 2
�.
.
( 12 )
. .
Tantôt il renvoyoit les consultantes , pour la restitution
des fruits dont il s’a g it , dans le compte qu’elles sont
autorisées à faire rendre à leur mere usufruitière et tutrice.
Il reconnoissoit donc que les fruits étoient dus. Dans ce
moment , il semble vouloir faire disparoître le fond ,
l ’aliment m êm e de notre action. T ou t cela n ’est pas trop
conséquent.
_
Cependant ne négligeons rien , et , puisque l ’adversaire
fuit uniquem ent pour se faire suivre , poussons-le jusques
dans ses derniers retranchements.
N ous convenons que le testament ne portoit la légitim e
de ch a cu n e des consultantes qu’à la somme, de douze
m ille livres , sans leur laisser le choix d ’être p ayées en
corps héréditaires. N ous convenons encore que la somme
de douze m ille livres , qui n ’étoit payable qu’au mariage
ou à la majorité des légitim âm es, ne devoit produire
jusqu’alors aucun intérêt 5 attendu l ’ éducation , la nour
riture et l ’entretien dont la mere usufruitière et tutrice
étoit chargée envers ces légitim aires.
Mais il est de p rin cipe incontestable, que la légitim e
est due de p lein d r o it, q u ’elle est due en fond et en
fruits du jou r du d é cès ; qu’elle n ’est susceptible d’au
cune con d itio n , d ’aucune c h a rg e , neque diem neque conditionem recipit ; qu’étant fixée £>ar la l o i , elle ne peu t être
ni modifiée , ni réduite par la volonté de l ’homme ; et
que toute disposition testamentaire 3 tendante à soum ettre
la légitim e à quelque restriction 3 charge , délai ou
condition , est essentiellement nulle , et doit être regardée
comme non écrite : hoc addendum esse censimus, dit la
l o i , quoniam
, cod. de inojf. testant., ut si conditionibus
quibusdam veî dilationibus aut aliqua. dispositions moram vel
modum vel aliud gravamen introducente , eorum ju ra qui ad
memoratarn actionemvocabantur, imminutaesse videantur, ipsa
condition vel dilatiovel alla dispositio moram vel quodcumqueonus
32
�.
. , ( 13 )
introducens , tollatur : et ità res procédât quasi nihil eorum in
testamento additum esset.
Donc y nonobstant toutes les dispositions du testam en t,
les consultantes ont pu répudier le legs qui leur avoit
été laissé. Elles ont pu faire procéder à la liquidation de
leur légitim e , et demander que cette légitim e leur fut
p ayée en corps héréditaires. T out cela est convenu.
Par une suite des mêmes p rin cip es, on sera forcé de
convenir encore , que les fruits de la légitim e ont la
mêm e faveur que la légitim e m êm e ; que conséquem m en t, les fruits de la légitim e des consultantes, sont dus
du jou r du d é cès de leur pere , quoique l ’usufruit de
toute l ’hoirie eût été légué à leu r mere com m une , et
quoiqu’il eût été d it, que le legs qui leur avoit été laissé
seroit sans intérêts.
N o u s àvons m êm e des décisions particulières sur les
fruits. L a novelle i 8 , chap. 3 , p ro h ib e , à tous ceux
qui ont des enfans , de laisser l ’entier usufruit de leurs
biens à un tie rs, et elle veut que les fruits des lég iti
mes ne soient jam ais com pris sous un pareil legs d ’usu
fruit , quelque g é n é ra l, quelque universel que soit ce
legs : N on licebit igitur de caetero ulli omninô jîlios habenti,
taie aliquid agere ( id est, relinquere suarum rerum usumfructum 5 filiis autem proprietatem nudam ) sed modis omnibus eis
hujus legitimae partis quam nunc deputavimiis 3 usumfructum
insuper etproprietatem relinquat, si vultfiliorum non repenti famé
morientium , sed vivere vaientium , vocari paîer. E t hacc om~
nia dicimus 3 non in pâtre solo, sed in matre , et avo et
proavo. . . . et avia et p ro a viâ , sive paternae, sivc maternae
ùnt.
A in s i, la légitim e doit être libre en fonds et en fruiis.
E lle ne peut être sou m ise, ni pour le fo n d s, ni pour les
fru its, à aucune ch arg e, à aucune condition. E lle doit
�.
<
*4
)
..
être absolument pleine cl jra rch e : Legitimae partis et usvmjructum et proprietatem pater relinquat.
L a clause du testam en t, qui privoit les consultantes
des intérêts du legs qui leur avoit été la issé , pour leur
tenir lieu de légitim e - est donc nulle et prohibée par
la loi : non licebit ulli filios habenti taie aliquid agere.
Objectera-t-on que , dans la cause actuelle , les intérêts
de la légitim e se trouvoient com pensés par l ’éducation ,
la nourriture et l’entretien , dont la mere usufruitière et
tutrice étoit chargée envers les légitim aires ?
N ous répondrons qu’il faut distinguer les cas.
Q uelques auteurs en seignen t, par e x e m p le , qu’un
pere qui institue son fils héritier u n iv e rse l, en laissant
l ’entier usufruit de ses biens à sa fem m e, ne contrevient
point aux lo ix , et fait une disposition hors de toute cen
sure , pourvu d ’aüleurs qu’il assure les alimens et l ’en
tretien de son fils héritier , pendant la durée de l ’ usu fru it,
bien que le montant de cet entretien et de ces alimens ne
soit pas équivalent aux fruits de la légitim e. Ces auteurs
rép o n d en t, à la difficulté déduite de cc que la lé g i
time ne doit re ce v o ir, ni c h a rg e , ni diminution ; q u e ,
dans leur hypothese , la diminution éprouvée par le fils
h é ritie r, sur les fruits de sa légitim e , est com pensée
p a r le total de la propriété de l’h o irie 5 le fils h é ritie r,
disent-ils , n ’est point grevé par celte com pensation, puis
que , au con traire, sa condition a été rendue m eilleu re,
que si on ne lu i avoit laissé que la légitim e en fonds et
fruits; ce qui dépendoit de la volonté du testateur.
C ep en d an t, mêm e pour le cas dont nous p arlo n s, Decorm is, tome 2 , col. 489 et su ivan tes, est d ’ un avis con
traire , et pense qu’on ne doit point s’écarter de la rigueur
des p rin c ip es, p uisqu’il d it, dans l’hypoihese d’une mere
qui institue ses enfans, et qui laisse l’usufruit à son m a ri,
qu’/Vfaut que le 'mari soit chargé de la nourriture et entre-
�fieri de ses enfans , et que même ( alors ) les enfans ont tou
jours le droit de se faire jcive raison des fruits de leur légi
time , depuis le décès de leur mere , quand ils rout émancipés .
Q ue faudra-t-il donc penser de l ’hypoihese , où un
pere laisse à des enfans moins que leur lég itim e, et où
il ajoute à cette prem iere injustice , celle de les priver
jusqu’à une certaine époque dos intérêts qu'il leur fait ,
et ne leur assure que les sim ples alimens ? N ’est-il pas
v isib le , dans un pareil c a s , que les enfans légitimantes p e u
vent déploye’r , dans toute leur é te n d u e , les maximes
qui veulent que la légitim e . tant en propriété qu’en
fruits , ne soit soumise à aucune con d ition , dim in ution ,
ni ch arg e, et que l ’on regarde comme non écrite , toute
disposition q u i, à cet é g a rd , peut contrarier le vœ u des
loix?
Sans d o u te, on doit précom pter sur les fruits , le m on
tant de la nourriture et entretien. Mais toute la partie
des fruits qui excede ce m ontant, doit être restituée.
Il est donc clair que les consultantes , nonobstant la
clause qui les privoit des intérêts de leur lég itim e, en
considération de leur nourriture et entretien dont leur
mere usufruitière avoit été c h a rg ée, ont à prétendre les
fruits de leurs portions légitim âm es, courus depuis le d é
cès de leu r pere. E lle s doivent seulement offrir de tenir
com pte de ce que , relativem ent à leur âge et à leur
cta t, leur nourriture et entretien ont coûté. C ette liqu i
dation ne peut venir qu’en exécution du jugem ent qui
interviendra. 11 suffit de sa v o ir, pour le m o m en t, que
les fruits de la légitim e sont dus depuis le d écès \ et que
le testam ent, quelles q u ’en soient les clauses , ne peut
présenter aucun obstacle légal à la demande de ces fruits.
M ais, qu ’avons-nous besoin d ’insister davantage sur cet
objet ? L e ju g e m en t, dont les consultantes ont appelé ,
et qui les renvoie à la m ere usufruitière , pour la de-
�( 16 )
mande des fruits échus pendant la duree de l ’u su fru it,
suppose et juge que cette demande en soi étoit juste et
rég u lière , et qu’on ne peut reprocher aux consultantes,
que le prétendu tort de l’avoir mal dirigée.
L a demande en restitution des fruits , considérée en
elle-m êm e , ne peut donc plus donner lieu à aucun li
tige. Il ne s’agit que de savoir s i , pour cette d em an d e,
les consultantes pouvoient s’adresser directem ent à l ’hé
ritie r, sau f son recours contre qui il verroit bon ê tr e , ou
si elles dévoient actionner la mere usufruiftiére. O r , sur
ce p o in t, nous avons démontré que l ’h éritier, com me te
nant les biens du d é fu n t, sur lesquels les consultantes
ont un droit de p ro p rié té , ju squ ’à la concurrence de leurs
portions légitim aires, et des fruits en p roven an t, est la
véritable partie , la partie directe qu’on a dû attaquer.
D onc le jugem ent qui renvoie les consultantes à leur
m ere , blesse les principes de la matiere , et ne peut
com me nous l ’avons dit en com m ençant, qu’être réform é
par le tribunal d ’appel.
D élibéré à L y o n , ce 23 juillet 179 2. Signé, P O R T A L IS .
A L Y O N , d e l’imprimerie d ' A M A B L E L E R O Y ,
place ST J E A N 1 7 9 2
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Gras. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Portalis
Subject
The topic of the resource
légitime
testaments
usufruit
tutelle
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter, et consultation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie d'Amable Leroy (Lyon)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1759-1792
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0117
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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testaments
tutelle
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P R É C IS
Î
'
P O U R P i e r r e G I A T , Chef de Bataillon
de la Garde Nationale du Canton de Randans ;
et L o u i s C H A L V O N , Citoyen, tous deux
habitans du lieu de Randans , Appelans de
.. deux Jugemens rendus au Tribunal de Police
Correctionnelle du même lieu.
,
’établissem ent des juges de
paix est une institution
bienfaisante qui a été adoptée avec reconnoissance
mais ces fonctions précieuses doivent être confiées à
des mains,,p ures ; l’appel soumis au jugement du
tribunal,, va faire sentir tous les dangers, d’un, mauvais,
L
c
h
o
i x
�\ * î£ >
(
1
)
L e c ito ye n V ig o u ro u x est ju g e de paix du canton
de Randans ; depuis son installation, son nom a souvent
retenti dans c e tribunal. Sa conduite lui a mérité une
injonction
d ’être plus
circonspect à l ’a v e n i r , de n e
plus compromettre la liberté individuelle des citoyens.
C e tte le ç o n ne l’a point corrigé : voici un nouvel
exem ple qui mérite d ’être connu.
L o u is C h a l v o n , un des appelans, étoit cité à l ’audience
de la police correctionnelle du 3 1 octobre dernier ; il pria
Pierre G iat d ’être son défenseur officieux dans cette
affaire ; G ia t se rendit à l ’audience à dix heures du
m a t in , heure captée.
' L e ju g e de paix se fît attendre jusqu’ à onze qu ’il
‘.arriva-chez sa m è r e , où il rend la justice. „ . G ia t ,e t
C h a lvo n le suivirent jam ais l ’audience ne
com m ença pas encore : .les assesseursAn ’étoient point
rendus. L e ju g e de paix S p p e r c e v á ñ t lé cito yen G i a t .
qui est c h e f de b a t a i l l o n 'd u TVc a n t o n l e . reqüit ver
b a l e m e n t de lui donner^quatrev lioirim es.dè garde pour
son audience.
C e lu i-ci répondit qu ’il alloit instruire la municipalité
de cette réq u isitio n ; le j u g e - d e paix répliqua que la
municipalité n ’avoit rien à faire à son a u d ie n c e , et q u ’il
vouloit être obéi. — Giat à son tour dit qu ’en obéissant,
il vôVrïtoit en instruire la municipalité qui d evo it con n o ître
toutes les réquisitions "dé c e genre.
r'
“ ' "
'
L e ju ge de paix s’écria "avec émotion , " rque G ia t n e
connoissoit pas la loï
G iat fép ô w d it'a V ec'd o u ceu F q u ’il
croybit la co n n o ître;,tius$i ‘bien ^ùe l u i , et sortif ’p'oür
aller conférer de cette réquisition avec les officiers
�( ï )
municipaux. Mais à la porte
il 'e n te n d it, V igo urô u x
annonçant au public que G iat avoit d it' que le ^üge de
paix n e connoissoit pas la loi ; il rentra pour s’expliquer
et désavouer . le propos ; le ju g e de paix poiir toute
ré p o n s e dit qu’il dresseroit procès verbal du refus qu’avoit
fait le c h e f de bataillon d ’obéir à sa réquisition ; qu’il
enverroit le procès verbal à la convention n a tio n a le , et
q u e , conformément â la loi , Giat seroit déclaré infâm e,
e t dégradé du titre de citoyen français.
G iat n ’avoit p a s Jréfusé de donner une g a rd e ; il vouloit
seulement en conférer avec la municipalité'; il répéta
Cette observation , et demanda à mettre sa réponse au
procès verbal : le ju g e de paix répondit .q u ’il le lui
. •:
i..t ■• '
r ¡ i ' i •. : : ~
:o'\> *
permettroit.
. r ,
,
.r
G iat alors sortit d e la salle . p o u r aller. trouver la
municipalité ; il rencontra à la porte le citoyen S o a lh a t,
et bientôt ’¿près lé cito yen G i a t , p è r e , tous deux officiers
m u n icip au x; il leur fit1part de là réquisition du ju ge de
p a ix , et sur lë c h a m p , ayan t' appris que le commandant
en second ¿toif absrenf, il sé rendit chez le citoyen B oudet,
capitaine de là ^rémïefe c o m p a g n ie , lui donna un ordre
par' écrit de commander quatre hommes de gardé p o u f
l ’audience ; Boüdet à son tour donne ün second ordre à
l ’officier qu ’il nomme * ( ï e ^ a id e 'f a i t les b i ^ f V ; lés.sig ç e/
les' envoie c f â i ’ le ' ' c l i ^ a ) ;;g u i 'p i ; e h < J ^ » fusiliers^ et_
dans le même instant fa 'gafdé°fut à son posté^ ' '
'
C e s faits sont établis par le duplicata de l'ordre écrit
par G i a t , de celui de B d u d e t , et d'u nJ certificat'de la.
m u n ic ip a lité , qui atteste que le service a été fait corifor-'
mémerit à la réquisition.
A 2
�'( j4 0
L e juge de paix tient son audience, sans interruption
’ î]C*rVr
tiDnOlfTD il rj r ' \ ' •
r■
' » y 9T^ i
ju s q u ’à six heure? du soir ; .mais il ju g e à propos ’d ’e x p é
dier toute autre affaire que ceile de C h a lv o n , qui avoit
appelé G iat com m e .défenseur officieux. ,
,
r.kF-t
:an«i ou iiZ'U- ui : ¿oc
î.- .
A .six heures,, e t rlorsque toutes les affaires furent ex:T
¡PJ
1 jr/r>
h-.>
.
p e d ie e s , a l’exception de celle de C halvo n , le juge d e
V
r;o
i i: ■
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r) - ' i
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.
:■r.oir,
.
.
.
o i j ’
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J
• _»
j.r
;
paix suspendit, son audience ; il se mit à table avec ses
assesseurs et le greffier ; le repas fut long : on avoit fait
porter du v i n , et qu and .il n^err resta p lu s / le ju g e de
paix alors rédigea le procès verbal q u ’il avoit m enacé
fio'L'Ov if •.
i>ar; i fnrr.).> i>:, v :u-.r* r. : !:ov- n rr.t- ^
d e dre?sér le matin,
,
■ *
Mais quoiqu’il fut sept heures du so ir, le procès verbal
est daté de onze heures du matin. Il porte « que G iat a
refusé d ’o b é ir à la ré qu isition du j u g e d e p a ix ; q u ’il lui a
dit qu ’il n e çonnojssoit pas la l o i , et q u e , sur la remoniKi .¡¡t i; ¿¿Ut:
•*:. : : ■ ■< ' A
„
tra n ce.q u i lu i^ v o it été faite qu.e, par ces propos p eu
réfléchis , t.il s’éc^rtoit du respect dû à la loi , et à ses
organes , q u ’il,p o u r r o it être, condam né par la police
correctionnelle! à un. em prisonnem ent, C h a ivon présent
avoit répondu que personne n ’obéiroit; q u e x e t t e réponse
an n on çait une sédition j que l ’insulte étoit d ’autant plus
grave ^¡que le ju ge de paix étoit dans ses fo n c tio n s, et
q u e le procès verbal qui constatoit cette insulte seroit
e n v o y e à la convention nationale ».
Sur le c h a r ftpytet sans aucun intermédiaire , le ju g e de
paix dicte au greffier les conclusions, du procureur de la
com m une, quoique.cçlui-ci n ’eût pas dit le m o t , et q u ’il
n ’eût pas fi,xé.ses conclusipns
n i .verbalem ent ni par
écrit.
‘
]
'•••
C es conclusions tendent ^ c e que G ia t' et C halvon
soient
�(
i
)
soient condamnés à une am ende de dix fois leur contri
bution mobiliaire ,_à un emprisonnement de six m ois, et
aux dépens.
A la suite vient le jugem ent q u i , modérant ces con
clusions , condamne seulement les délinquans à u n mois
de détention , à une amende de quatre fois leur contrit
bution m obiliaire, et aux dépens. Il est e n outre ordonné
que le présent jugem ent sera en v o yé à la convention
nationale : le procès v e rb a l, les conclusions du procureur
de la commune et le ju g e m e n t , le to u té c r it d ’un seul
contexte et sans in te rm éd ia ire, sont signés du ju g e de
paix , du procureur d e la com m une et de quatre asses
seurs , quoique ces assesseurs ne fussent pas présens le
m a t in , et que Durantin notam m en t, l ’un desx assesseurs *
n e fût arrivé qu ’à cinq heures e t d e m ie ^du s o ir , assez tôt
pour se mettre à table avec le ju g e de p a i x , mais trop
lard pour avoir été témoin des prétendues injures.
O n doit observer aussi que l ’audience se tenoit à
Randans ; que G ia t et C halvo n habitent ce lieu. C e p e n
dant parmi les quatre assesseurs qui ont coopéré au jugem e n t , il n ’y en a aucun de Randans. L e procureur de h
com m une qui a fait les fonctions, n ’est pas même le pro
cureur de la commune de Randans.
A v a n t de continuer le récit des faits, il est nécessaire
d ’expliquer ce qui a donné lieu aux condamnations pro
noncées contre Chalvon .
Lors de la réquisition du ju ge de paix à Giat, il n e to it pas
encore en fonctions ; son audience n ’étoit pas commencée ;
il attendoit ses assesseurs; il lui échappa de dire e n 'c o n
versation que G iat mériteroit d ’être emprisonné, pour
B
�;c6)
avoir dit que le îju g e de paix ne connoissoit pas la loi ;
Chalvon , se mêlant à la conversation avec les^ autres
assistans, dit en riant : Q ui voudriez-vous qui o b éit, si
vous Jaisie^ emprisonner notre commandant ? \
i :. C ’est ce propos fa m ilie r, et sans c o n s é q u e n c e , qui a
été si bénignem ent interprété dans le procès v e r b a l , et
q u ’on se perm et de traiter de séditieux,
» *
L orsque le ju gem en t fut rédigé par écrit, et prononcé
par son a u t e u r , celui-ci interpela G ia t et C h a lv o n de
déclarer s’ils, a c q u ie s c o ie n t, ret sur leur réponse q u ’ils
en tendoien t user des;m oyens de la loi , .le ju g e de paix
e n rend un secbnd sur les conclusions du même procureur
de la, commune , toujours: dictées au greffier par le ju ge
d e p a i x , q u i o r d o n n e q u e G i a t et C h a l v o n seront co n
duits de guite eh là maison d ’arrêt d tn 'd istrict, ,pour y
demeurer .jusqu’à ce. q u ’iLIen ait été autrement ordonné
par le. tribunal du district enjoint au gardien de les
recevoir conform ém ent à la loi. :
C e 's e c o n d j jugem ent est .contraire à un arrêté du
tribunal b ie n o c o n n u 'd u ju g e de p aix du canton de
Raridans :yjet q u ?ilîa peüt-ctüe lui-même provoqué
la lo i
autorise l’appel des jugem ens de la police correctionnelle;
mais restreint le délai de l ’appel à q u in z a in e , à compter
de la signification pendant cette quinzaine , il est dans
l ’esprit de.Ja ldi que le ,ju g e m e n t n e soit pas mis à exé
cution ; parce que si> nonobstant la faculté accordée à
ceux qui ont à se plaindre du j u g e m e n t , on pouvoit le
mettre à exé cu tio n , il arriveroit fréquemment que l ’appel
seroitiijlus.oire'i et que le tort .souffert par une exécu tion
précipitée n eisero it pas réparable en définitif :: aussi le
�.(7)
tribunal Sur les conclusions de la partie p ublique, aVoic-il
fait défense au gardien de recevoir les prévenus qui seroienfc
envoyés avant le délai de q u in zain e; mais le ju g e de
paix qui auroit satisfait sa haine et sa ven gean ce par un
emprisonnement, voulo it, malgré le jugem ent du tribunal,
faire arrêter deux citoyens qui lui déplaisent, et les faire
constituer prisonniers ; il sait bien que la censure du
peuple est s é v è r e , et q u ’un emprisonnement quelque
injuste q u ’il so it, s’il n ’imprime pas une t a c h e , au moins
donne lieu à quelques reproches dans le cours de la vie ;
ainsi son but étoit rem pli,
■Pour le prévenir , les citoyens G iat et C halvon se sont
empressés d ’interjeter appel de ces deux actes d ’iniquité;,
ils ont obtenu une ordonnance sur requête, qui renvoie
les parties à l ’audience du p novem bre présent mois ,
toutes choses jusqu’à ce demeurant en état ; enjoint au
greffier, sur la première sommation qui lui en sera fa ite ,
d ’envoyer au greffe du trib u n a l, copie des jugem ens ,
procès verbal et des actes qui peuvent l’avoir p récéd é.
L e greffier a satisfait à cette sommation: : les appçlans
v o n t présenter leurs m oyens en la.forme et au,fond.
:!\,
E n la fo rm e, ces jugemens sont n u ls , i ° . parce qu ’ils
ont été rendus par le ju g e de paix et quatre assesseurs.
L ’article 4 6 du tit. 2 de la loi relative à la police cor
rectionnelle , pcfrte que dans les lieux où, il n/y; a ïq u ’un
ju ge de p a ix , le tribunal de¿ police,correctionnelle ser^
composé du ju ge de paix et de,deux assesseurs j s’il y a.deujç
juges de paix , il sera composé de ces deux, juges ¡et d ’un
assesseur ; et s’il y a trois juge? de p a ix , il sera composé
de ces trois juges,,.
!;
" r■: , ■■? ;r,
�.
, .
<8 > .
L a loi veut impérativement qu’il n ’ y ait que trou
et on en sent aisément la raison : deux assesseurs honnêtes
et im partiaux, p eu ven t être maîtres du ju gem ent contre
l ’opinion du ju ge de p a ix ; si c e lu i- c i, au lieu de deux
assesseurs, en prend q u a t r e , c ’est parce qu’il en a deu x
qui lui sont d é v o u é s , et par là brave les avis et les efforts
des deux dont il craint l ’influence : d ’ailleurs, au tribunal
de police correctionnelle, trois personnes seules ont une
mission de la loi; les deux autres sont donc sans caractère,
et n e p eu ven t remplir aucunes fonctions ; ainsi cette
première circonstance sufHroit seule pour faire annuller
le ju g e m e n t, dès qu ’elle est contraire à la loi : donc on
doit toujours suivre passivement les dispositions,
2 ° . L e s q u atre assesseurs, qui on t co o p é ré au j u g e m e n t ,
n ’ont pas été pris dans le lieu de Randans q u ’habitent les
appelans ; ils n ’ont donc pas pu assister le ju g e de paix à
R andans : les juges d ép en d en t essentiellem ent du choix
des citoyens ; on ne d o it , on ne peut être jugé que par
des juges qu ’on a choisis : tel est l’esprit d e la l o i , telle
en est la lettre ; elle a voiilu qu e, dans chaque municipalité
du c a n t o n , il y fût nommé des assesseurs ; mais la mission
d e ces assesseurs se borne au ressort de la municipalité
qu ’ils habitent ; ils n ’ont de caractère que dans l ’étendue
de cette municipalité qui les a choisis. D ’après c e la , il eût
fallu des assesseurs de la municipalité de Randans pour
ju ger des habitans de ce l ie u , autrem ent il en résulteroit
le grand inconvénient d ’être ju g é par ceu x à qui on n ’a
pas d o nn é sa confiance.
3 °. C e n'est pas même le procureur de la commune de
Randans qui a fait les fonctions du ministère public ; c ’est
le
�(
9
)
le procureur de la commune de B a rn a z a t, e t cet officier
n ’avoit aucune m ission, aucun caractère à Randans. U n
officier municipal est un citoyen privé hors de sa
municipalité : le procureur de la commune de Barnazat
n e pouvoit connoître d ’un délit commis à Randans ; il ne
pouvoit y remplir aucunes fonctions ; et sa présence suffit
pour faire anéantir des jugem ens auxquels il n ’avoit pas
le droit de coopérer.
Mais quelque tranchans que soient ces m o y e n s , les
appelans y m ettent peu d ’importance ; ce n ’est pas par des
m oyens de n u llité , q u ’ils entendent faire réformer ces
jugem ens iniques.
L e juge de paix a prévariqué dans ses fonctions ; il s’est
rendu coupable de faux.
L a scène entre le ju ge de p a ix , G iat et C h a l v o n , s’est
passée à o n z e heures du matin ; le procès verbal n ’a été
rédigé q u ’à six heures du soir ; il porte qu'il l ’a été à onze
heures du matin : Giat et Chalvon offrent de prouver que
le ju ge de paix ne l’a rédigé q u ’à six heures, et après avoir
bu et mangé long-temps avec ses assisians.
2 0. L e ju g e de paix a prétendu que Giat avoil refusé
d ’obéir à sa réquisition, et cependant les quatre hommes
de garde
arrivèrent aussi-tôt sur l ’ordre qui leur fut
donné par G ia t; le juge de paix s’est bien gardé d ’en faire
mention dans son procès verbal : Giat n ’a pas refusa d obéir
à la réquisition ; il a seulement dit qu’il alloit en instruire
la municipalité ; il offre encore la preuve de ce fait.
5 0. L e procès verbal porte que Giat a dit au juge de
paix qu’il ne connoissoit pas la l o i , ce qui est également
feux. Giat lui a répondu avec d o u c e u r, et comme tout
C
�•
;
o
( io )
c ito ye n a droit de le d i r e , qu ’il la connoissoit aussi bien
que lui.
4 ° . L e ju ge de paix dit q u ’il ¿toit en fo n ctio n , il en
im pose; son audience n ’étoit pas commencée ; ses asses
seurs n ’étoient pas rendus.
5°. Il dit que le procureur de la commune a req u is, et
le procureur de la commune n ’a pas porté la parole ; il n ’a
point fixé ses conclusions par écrit ; le ju g e de paix a tout
fait lui-même ; il a d ic t é , requis] et ordonné : les appelans
offrent la p reuve d e tous ces faits.
6 Q. L e procès verbal et le prem ier ju gem en t sont
signés des quatre assesseurs ; Durantin l ’un d ’eux n ’est
arrivé q u ’à cinq heures et dem ie du soir ; il n ’a donc
p u être p résent aux faits qui ont donné lieu au procès
verbal ; il n ’a donc pu en connoître. L a preuve de l ’absence
des assesseurs résulte du procès verbal où le ju g e de paix
et le procureur de la commune figurent seuls , sans
q u ’il
soit
fait mention des
assesseurs ; et cette
cir
constance prouve égalem ent que le ju g e de paix n ’étoit
pas encore en fonctions.
L e second ju gem en t est infecté des mêmes vices :
on fait parler le procureur de la commune de Barnazat ;
il observe , il requiert com m e dans le p r e m ie r , et il n ’a
rien observé ni requis : V igo u ro u x
seul a tout fait.
C e p e n d a n t , suivant l ’article 59 du même titre de la loi
relative à la police correctionnelle , le procureur de la
commune devoit fixer ses conclusions par écrit.
L e tribunal sera sans doute frappé de ces m oyens
de faux , et le commissaire national s’empressera d e
les
dénoncer
pour que
la société
soit
v e n g ée , et
�( ’ i )
l ’auteur puni proportionnellem ent à la gravité du délit.
.
A u fond, les m oyens sont égalem ent tranchans. L e ju g e
de p a ix , pour prononcer les peines'portées par so n 'ju ge
ment , est parti de Part, ip du 'tit. 2 de 11 lo i relative à
la police correctionnelle.
C e t article porte : « L es outrages ou m e n a c e s , par
» paroles ou par g este s, faits aux fonctionnaires publics,
» dans l’exercice de leurs fo n c tio n s , seront'punis d ’une
?» amende qui ne pourra excéder dix fois la contribution
» mobilière , et d ’un emprisonnement qui ne pourra
5> excéd er deu x années.
O r , il n ’y a ici ni outrages, ni menaces par paroles o r
gestes ; le procès verbal n ’en fait aucune; menti on.
J
i ° . L e ju g e de paix n ’étoit^pas en fo n c tio n s, ainsi
q u ’on a offert de le p r o u v e r ; et sous Je prem ie r point de
vue , la loi ne recevroit aucune application.
20. Il n ’y a point d ’outrage ; G iat a dit au ju ge de paix
qu ’il connoissoit aussi bien que lui les dispositions de la
lo i; tout cito yen n ’a-t-il pas le droit de dire q’u’il connoîr.
la l o i , puisque personne ne doit l’ig n o re r, et que tout le1
m onde doit s’y soumettre ? on suppose meme que Giat eût
dit au ju ge de paix qu ’il ne connoissoit pas la lo i, ilau roit
eu le droit de lui faire ce rep ro ch e, puisque ce fonction
naire public s’écartoit évidemment de la disposition de
la l o i , en ne faisant q u ’une réquisition verbale ; G iat
devoit au contraire refuser d ’obéir jusqu’à ce que le ju ge
de paix eût donné une réquisition par écrit ; la loi l’or
donne impérativement. L a réquisition par écrit seule
entraîne une responsabilité ; et si le c h e f de bataillon eût
fait son d e v o ir , il eût attendu un ordre par é c r it, pour y
obtempérer.
�{
12}
Mais le propos qu ’on lui reproche n ’est pas un outrage ;
un outrage est une injure atroce qui attaque l ’ honneur de
la personne à qui on l ’adresse, et il faut bien distinguer
l ’outrage de l ’offen se; o r , V ig o u ro u x se prétendoit-il
outragé dans sa person ne, dans son h o n n eu r, parce q u ’on
lui auroit dit q u ’il ne connoissoit pas la loi dans un moment
où il s’en écartoit ? se prétendoit-il outragé, parce que
C h a lvo n lui auroit dit en badinant : S i vous voule^ fa ire
mettre notre, commandant en p riso n , qui voulez-vous qui
obéisse ?
C a r voilà à quoi se réduisent tous les faits imputés aux
gp pelan s; m ais, en prenant comme le ju g e de paix les
choses du mauvais .côté, q u ’en résulteroit-il ?
U n e simple irrévé ren ce, mais non une insulte g ra v e ,
et cep end an t les insultes ou irrévérences graves, commises
envers les juges de p a i x , en p e r s o n n e , ou envers les
assesseurs en fo n c tio n s, n e sont p u n ie s , conforménifcht à
l ’article 4 du titre 7 du code de la justice de p a ix , que dé
la prison jusqu'à huit jo u r s , suivant la gravité du d é lit , et
par forme de correction seulement.
A in si , quand le procès verbal seroit aussi exact qu ’il
est infidèle , il n ’y avoit pas même lieu à une prison de 8
jo u rs, puisqu’il n ’y a point d ’irrévérence grave envers le
ju g e de paix en fonctions.
E t , c e p e n d a n t, ce n ’e s t p a s assez d ’une amende de
quatre fois la contribution mobilière , d ’un mois de d é
te n tio n , il est encore ordonné que le procès verbal et le
ju gem en t seront en voyés à la convention nationale.
C e tte dernière disposition est infamante ; il en résulte
i]nç diffamation publique contre des jeunes gens honnêtes,
qu ’on
�( 13 )
qu ’on veut peindre comme de mauvais cito yen s
représentan s du p e u p le , à la France entière.
aux
V igourou x n ’a rien respecté; aucune considération n ’a
pu l ’arrêter. L ’inquiétude d ’un père honoré de la c o n
fiance de ses c o n cito y en s; les larmes d ’une jeu n e épouse
sur le point de devenir mère , qui , depuis ce m om ent
c r u e l, languit dans la douleur et le d é se sp o ir, n ’ont fait
q u ’attiser la fureur de cet im placable ennemi. E t d 'ou
vient cette colère ? V igo u ro u x vouloit être député à la
fédération du 14 ju illet; il étoit maire de sa m unicipalité.
Giat observa qu’il devoit donner sa démission
il tenoit
à sa place ; il refusa de se démettre ; il n e fut pas
nommé. i n dé iræ ? quod genus hoc homïnum
C it o y e n s , paisibles habitans de nos ca m p a g n es , cessez
d ’écouter la voix de ceux qui se disent vos amis ; qui vous
prom ettent d ’exterminer , de fa ir e ramer tous les bour
geois ; ils vous trompent ; ils surprennent votre facilité
c e sont des agitateurs et des factieux,
S ig n es , G i a t ,
A
C h alvon .
RIOM,
D E L ’ I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T . 1 7 9 2.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Giat, Pierre. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Giat
Chalvon
Subject
The topic of the resource
abus de pouvoir
juge de paix
diffamation
faux
diffamation
garde nationale
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Pierre Giat, chef de bataillon de la garde nationale du canton de Randans ; et Louis Chalvon, citoyen, tous deux habitans du lieu de Randans, appelans de deux jugemens rendus au tribunal de Police correctionnelle du même lieu.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
13 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1229
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Randan (63295)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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abus de pouvoir
diffamation
Faux
garde nationale
juge de Paix
-
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bd10b19b18f18aa74adbbffb5a612b8d
PDF Text
Text
6 ïf-
EMOIRE
DÉPARTEMENT
du
P u y - d e -D ô m e .
T
J U
POUR J . J
S
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I F
I C
A
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,
D U B O IS -L A M M A R T IN IE ,
L i e u t e n a n t surnum éraire des troupes d ’A rtille rie
de la Marine, Accusé.
Do nobis tristis sen tentia fertur.
J UVENAL.
J
E suis accusé d’avoir fait usage d’une fausse com
mission du pouvoir exécutif pour l’enlèvement des
chevaux de luxe. Sur des bruits vagues et sans fon
dement , on m’arrête à Aurillac , on me traîne ignomi
nieusement dans les prisons de C lermo n t , et bientôt
dans la maison de justice du tribunal criminel de ce
département.
A
r ib u n a l
mè
�< V .j
Sans inquiétude, sur une accusation frivole qu’il
m’est aisé de détruire , j ’attendois impatiemment le jour
qui doit éclairer mon innocence , lorsque j ’apprends
que mes ennemis cherchent à prévenir contre moi l’opi
nion publique ; on répand que j ’ai contribué à la mort
de l’infortuné Colinet de Niaucel , l’intime ami de ma
famille, le mari de la sœur de mon beau-frère. On ajoute
que j ’ai participé aux journées désastreuses des 2 et 5
septembre à Paris ; on me représente comme un factieux,
1111 agitateur, un faussaire.
J e dois à ma famille , au public , à moi-même , une
justification complète de ma conduite , et le récit exact
de mon malheur : citoyens impartiaux , qui devez pro
noncer sur mon sort , lisez et jugez !
J ’habite le lieu de Fontenilles, paroisse de Jussac ,
district et canton d ’Aurillac , département du Cantal.
Mon père , originaire de Saint-Céré , département du
Loth , a servi avec distinction ; il a fait toutes les cam
pagnes de l’Hanovre, et s’est retiré capitaine de cavalerie ;
il a épousé Ailarie-Anne Farganel , dont la famille est
illustre par les grands hommes qu’elle a produits.
Mon frère a în é , sert en qualité d’officier dans le
corps d’artillerie de terre, en garnison à Nancy. Mon
frère c a d e t, commande en second le dépôt du 220 régi
ment de cavalerie , ci-devant N avarre, en garnison à
Aurillac.
Voulant suivre la carrière des armes, j ’entrai dans
la marine de la division de Rochefort. Une maladie
considérable occasionnée par l’air des marais qui envi
ronnent cette ville , m'obligea de quitter ce service j
�( 3)
mais depuis, les ministres do n t'je suis connu, m’ont
engagé à me faire inscrire sur la liste des lieutenans sur
numéraires d ’artillerie de la marine: on savoit que j ’étois
expert dans cette partie , et j ’eus la promesse de m’em
barquer sur la première flotte qui armeroit pour la répu
blique.
J e jouissois paisiblement dans mon domicile des
bienfaits de la révolution , lorsque mes concitoyens, qui
connoissoient mon ardent amour pour la chose publique ,
mon respect et ma soumission aux lois , mon empres
sement à les exécuter, me firent l’honneur de me nommer
commandant de la garde nationale de Jussac.
J e me rendis digne de leur confiance en leur inspirant
les scniimens du véritable patriotisme ; c'est-à-dire,
amour de l’ordre , soumission aux l o i s , respect pour les
personnes et les propriétés.
Au mois de mars 1 7 9 2 , une foule d’individus égares
partirent pour Mont-Salvi, et vinrent me solliciter de me
mettre àleur tête ; je refusai constamment de m’y rendre,
quelque danger qu’il y eût dans ce refus. Je prévoyois
des troubles ; je leur écrivis avec fermeté pour les dé
tourner de leur dessein, pour prévenir toute infraction à
la loi ; ma lettre qui fut imprimée dans le temps, fit
le plus grand effet ; elle est jointe aux pièces de mon
procès.
Quelques ennemis de la chose publique , suscitèrent
peu de temps après des troubles dans la ville d’Aurillac ;
je m’y rendis à la première réquisition, à la tête de mes
camarades ; mais j ’arrivai trop tard pour prévenir les
premiers excès } j ’appris avec douleur que l’infortuné
A 2
�<W o
(4 )
Colinet avoit été victime de la fureur du peuple : sa
mort m’arrache encore des larmes ; il ¿toit l’ami de ma
famille , ma sœur a épousé Alexis Vigier de Fumel s
frère de la veuve Colinet.
N e pouvant lui donner des secours, j ’arrêtai les
progrès du m al; je rendis la liberté, au péril de ma v ie, à
plusieurs prêtres réfractaires qui alloient être immolés.
C ’est cette conduite généreuse qu’on voudroit lâchement
calomnier : ces faits néanmoins furent consignés dans
une adresse lue à l ’assemblée nationale par le citoyen
Pages Vixouse , député pour solliciter une amnistie en
faveur de quelques habitans d’Aurillac. Dans cette
adresse , devenue publique par l’impression, on rend
justice à mon zèle dans l ’exercice de mes fonctions, à
mon amour pour la liberté.
E h quoi ! un citoyen généreux, ami de l’ordre et des
lo is , qui a reçu plusieurs fois des éloges publics, seroit-il
donc un faussaire, un factieux? Cette idée me fait fris
sonner d’horreur. Livré à moi-même, confondu avec des
criminels, je croyois du fond de mon cachot inspirer à
ceux qui me connoissent au moins un sentiment de
compassion et de pitié : sentiment bien stérile , mais un
peu consolant; j ’apprends au contraire que l ’acharnement
de mes ennemis ne fait qu’augmenter ; leurs efforts
seront impuissans.
Au mois de mai 1792 , je fus député à Paris ; j ’assistai
à la fédération du 14 juillet ; je fus n o m m é président du
comité de subsistance des fédérés des quatre-vingt-trois
départemens : j ’en ai le certificat dans mes pièces. Ma
conduite m’attira quelque confiance ; le 10 août 3 je
�( 5 )
commandai le peloton qui enleva le drapeau des Suisses
au château des Tuileries ; je m’y iis remarquer par
quelques actions d ’éclat ( i ) ; je n’entends pas m’en
¡prévaloir1; si' dans cette journée mémorable, je fus utile
à laf cliose publique, ma récompense est dans mon cœur,
et mes foibles services ne diminueroient pas la gravité du
délit dont on m’accuse, si j ’en étois coupable.
J e ne dois cependant pas passer sous silence que le
même jour, je haranguai avec courage l’assemblée que je
présidois, et j ’eus le bonheur de ramerier-à des sentimens
de modération une foule de citoyens égarés, qui vouloient
massacrer sans pitié les signataires de la protestation des
vingt-hilit mille v ils durent la vie à mes efforts.
' - J é me' retirai avec calm e, et vécus en citoyen privé :
j ’étois bien 'élôigné de. prévoir les scènes abominables
des 2 e t ' 3 septem bre, moins d’y participer ; je n ’en
appris les détails que par le bruit pu b lic, et le seul
souvenir me fait dresser les cheveux ; affreuses , exé
crables joüPnéés 1 que la> postérité n’apprendra qu-’avec
horreur ; qui seroient l ’opprobre de la nation’ , si on
pouvoit les reprocher aux Français: Mais dans ces grands
mouvemens, il se trouve bien peu de personnes qu’on puisse
étt accuser ; il né faut qu’tin.soélérat, hardi et entreprenant , :la multitude jk’émeut en aveugle , le crime des
mouvemens populaires ne tombe que sur celui qui les
cause.
‘ Oh mb -pardonnera sans doute cette courte réflexion;
( i ) ' J ’ëtt Vâppôrfê' une<atte&fofioïï
H
^oV ( j )
A 3
�IV
/
o
je n ’ai pu résister au plaisir de justifier mes concitoyens
des reproches injustes de nos voisins à la nation française^,
toujours magnanime et généreuse.
j,
J e passai toute la journée et une partie de-la nuit du
2 septembre chez la dame B e lleville, avec le citoyen
Contrastin , prêtre constitutionnel d ’Aurillac ; le lenr
demain, je me rendis dès lè matin chez le citoyen Pages,,
bourgeois, mon compatriote, qui habite Paris, rue Mauconseil, n ° . 50 : j ’y dînai avec une compagnie nombreuse;,
je partis deux jours après pour M elun, avec une commis^
sion de la commune de Paris, et du pouvoir exécutif,,
pour la levée des chevaux de lu x e , que l’assemblée
nationale avoit mis au pouvoir des ministres : ma commis
sion concernoit principalem ent les chevaux des émigrés;.,
je m’en acquittai- avec succès : les papiers publics du temps
vantèrent mon patriotisme, etmonzèle éclairé(1). Enfin,
je revins à Paris avec le projet de me retirer dans ma
famille, où j ’étoisappelé pour quelques affaires; d éjaj’avois
arrêté ma place à la diligence, pour le 12 novembre, ainsi
que je le prouve par la feuille des messageries , lorsque
je me présentai, dans les hureaux des ministres pour,
annoncer mon départ à ceux que je connoissois. Dans ce
temps, l ’armée manquoit. généralement de chevaux : il
étoit naturel, que les chevaux de luxe appartenans aux
émigrés,.fussent employés aussi utilement ; la levée n ’en
avoit pas été faite dans les départemens du C a n t a l, du
L o t h , de l ’Aveyxon.^du Puy-de-Dôme et de la Corrèze...
'*
"
1
■—
1
1
'
11
'
CO Voyez les annales patriotiques du 20septembre, n°,.a6^.
..............
�.
£> v\
(7 )
Orr me crut propre à donner des renseignemens, et m in e
à faire cette levée ; on me dit de passer aii; bureau' de la
guerre, où je recevrais des ordres i^mais , n ’ayant point
trouvé le chef du bureau à qui je devois m’adresser, je
me rendis chez le citoyen B ru n e, commissaire - général
du pouvoir exécutif ; je priai un de ses commis de me
dresser un projet de commission que je devois envoyer
au ministre du premier endroit , où je m’arrêterois ,
parce que la diligence devant partir le même soir, je ne
pouvois retarder mon départ sous aucun prétexte.
L e commis fit le projet; il prit dans le tiroir de son bureau
un cachet du citoyen Brune et l’adapta à ce projet; il me
remit ensuite le tout. J e ne peux pas être soupçonné sans
douted’avoircherchéàcontrefaire les ordres duministre.,ou
le cachetde la république : j ’avois déjà étépourvu de sembla
bles commissions ; je savois qu’elles étoient imprimées, et
celle dont il s’agit est une écriture privée ; je savois que les
véritables commissions sont munies d’un sceau sur lequel
est inscrit : République française > et sur le projet dont il
s’agit,, le sceau qui y a été adapté'porte : Commissairegénéral du pouvoir exécutif. On dit que la signature du
ministre Pache qui se trouve sur ce projet, n ’èst pas le
seing du citoyen Pache ; mais cette signature n’avoit été
mise a p p a rem m en t que pour que le projet fût figuratif;
d’ailleurs il est reconnu que l’écriture de ce projet, et du
seing du ministre , n’est pas la mienne ainsi on ne
peut me faire aucun reproche de l’avoir contrefaite.
J e partis avec ce projet dans ma poche : le plaisir de
me réunir à ce qiie j ’ai de plus c h er, me fît Bientôt
oublier pour quelques instans 3 et le projet de commission^
'
�et les ordres que j ’avois reçus : j ’arrive; màis voulant être
utile à la république, je m’informe à Clerm ont, s’il y a
beaucoup de chevaux de luxe qui appartiennent aux
émigrés dé cette v illè <;1j ’écrià-'ràu ; ministre pour' lui
apprendre1 mon arrrvéé ;''ët lui" dfemaridër'- de nouvéaux
ordres ; je crois pouvoir -m’ouvrir à quelques citoyens; sur
l ’objet de ma mission et de mes'Recherches. J e leur dis
que je-suis commissaire du ■pouvoir exécutif; mais là
preuve que: j e ne voiilois faire aiicun usage d e ;cë projét
de commission, c?ëst que jè^né'-I’ai pas présènté auxxorps
administratifs ; c’èst que je n’ai fait aucune levée , aucune
demande.
•„
*
,
* *j
' 1 [• OI. * ' Í*' '
''
U n jour oïl me conduisit avec affectation Háns l’éciirie
d ’une aubergé, pourm‘y faire vóir qiíátrb chJéVaüx superbes1^
qui appartenóíéñt, disoit-on, ’au’^itqy'én C haret, Amé
ricain , demeurant actuellement°én cette ville de Riom ,
chez la citoyenne . Deçhapte*
sá párente,' Sur une
fdflexio'ïi qui °ínwéchappa‘V que c$s|fch£vaú¿ seroient
plus utilement employés à traîner les charriots dè'i’armée
oii conçut quelques inquiétudes. Ón me'párlá du proprié-2
taire, comme d’un homme honnête et estimable ; on me
vanta l’amabilité et1 les ciiarmes de tsa,parente.; et peu de
' (i
üj
¡
in
,
Tours après on me du qu elle etoit instruite de mes
*• «i»
i :;n*irf «-i oA . .»tôt íji ir
- ir- • • - •
observations, et 'qu’elle .en çtoit alarmée.*
..
■■ :
.■
Í
115’ il'O ’ 'f
• il
’ .
J ’et oís alóte "sur le point db partir pour Aurïllac ;
d é jà 'j’avois fait mon marché pour m’y Faire conduire' ; je
vins à Riom ; je me présentai chèz la clame Dechaptes
•
: ‘jii - qx/.i
*vî,.?;ri
H
pour la, rassurer sur. ses craintes ; . je ne voulois donner
! ;ii
, *'-fb pjî.i »> u- r
- •su -i ¿.n
uonibraire a personne.; ae retour à Clermont , je.,tus
V; h
II.-- ’ iííiiint ZOUt l /Uî>
'»OJICJC
mande u la municipalité ; on m interrogea; je ne craignis
�<
■
9
-
y
pas de m’ouvrer,ayec confiance au conseil' de;Ia comirume ;
je dis que j ’étois commissaire du pouvoir exécutif ; que
cependant je ne faisois aucun usage des ordres quô
j ’avois reçus ; que je n ’ignorois: pas qu’un, décret de la
convention révoquoit toutes les commissions du pouvoir
exécutif ; que je ne in’étois permis aucune infraction à
cette lo i, et qu’on pouvoit être tranquille.
On me demanda si je comptois faire quelque séjour à
Clermont ; je répondis que j ’y étois encore pour deux pu
trois jo u rs, et tel étoit mon dessein : un -incident que
personne n ’ignore, me fit partir le lendemain ; ce ne fut
point un motif de crainte qui hâta mon départ ; j ’avois
l’intention de revenir peu de jours a p r è s p a r c e que
j ’attendois des ordres. J ’étois d’ailleurs maître de mes
actions , dès que je ne troublois pas, l ’ordre public. Quel
fut mon étonnement, lorsqu’arrivé à Aurillac, je me
vis arrêter en vertu d’un mandat d’amener du juge
de paix de Clermont, qui avoit pris la précaution d’en
envoyer plusieurs expéditions sur les routes circonvoisines ; on me conduisit comme un criminel dans les
prisons ; je fus placé dans un lieu, où la pluie et la neige
pénétroient jusqu’à mon lit. J e contractai une maladie
sérieuse dans un séjour aussi mal sain ; je crus que sans
blesser la ju stic e,.o n pouvoit soulager l’humanité souf
frante ; je fis parvenir ma réclamation aux magistrats
du peuple : des commissaires de la municipalité se trans
portèrent dans ma prison; e t , pour toute réponse , je
leur entendis dire ironiquement , qu’il falloit me faire
faire une cheminée la polonoise, et faire dresser un lit
de damas.
�( 10 )
Enfin , j ’ai été mis en état d ’accusation ; je suis pré
venu d ’avoir méchamment et a dessein Je nuire , présenté
à plusieurs personnes une pièce que je savois sciemment
être fausse , et d ’en avoir fait usage.
J ’ai été transféré dans la maison de justice de ce tri
bunal ; pendant le voyage , on m’a chargé de chaînes
pesantes , et serrées si fortement que j ’en ai été assez
grièvement blessé en plusieurs endroits ; je me ressens
encore de mes blessures.
Sont-ce là les précautions que recommande la loi pour
s’assurer des prévenus ? jé m’abstiens de toutes réflexions
sur un traitement aussi cruel ; je ne cherche point à atten
drir. Fort de mon innocence , je n’ai pas besoin d’em
p lo y e r cette ressource pour co n vain cre mes juges.
J e sais qu’on a fait entendre contre moi un nombre
prodigieux de témoins ; je me réserve de discuter leurs
dépositions, lors de l’instruction publique de mon procès;
j ’ose assurer d’avance que le résultat de toutes ces dépo
sitions ne donnoit pas lieu à un mandat d’amener contre
moi ; il n’est aucun témoin qui ait dit ou puisse dire que
j ’aie jamais fait usage de ce projet de commission ; que je
me sois permis de mettre ;\ contribution aucun citoyen ; '
j ’ajoute même que j ’en aie eu l’intention ; et quand je l’aurois eue , comment juger l’infention ? où est la loi qui la
punisse ? on n ’en trouvera point dans le code pénal ; il ne
peut pas en exister dans le code de l'humanité.
Ci toyens, l’em] loi dont je suis honoré , m’appelle au
service de la république : l’artillerie de la marine sur-tout
a besoin de gens experts dans cette partie. J ’ose dire que
�je serai utile à ma patrie par mes services; je n ’attends
que votre jugement pour voler à mon devoir , et je
l ’attends avec autant de sécurité que de confiance.
D
ubois
-L
A R I O M , D E L’ I M P R I M E R I E
am m artin ie
DE
.
LANDRIOT.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dubois-Lamartinie, J. Justin. 1792?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dubois-Lamartine
Subject
The topic of the resource
faux
prison
marins
contre-révolution
troubles publics
homicides
prêtres réfractaires
réquisition de chevaux
émigrés
témoins
opinion publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour J. Justin Dubois-Lamartinie, lieutenant-surnuméraire des troupes d'Artillerie de la Marine, accusé.
Table Godemel : Faux : 3. imputation d’avoir fait usage d’une fausse commission du pouvoir exécutif pour l’enlèvement de chevaux de luxe.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1228
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Jussac (15083)
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53186/BCU_Factums_G1228.jpg
contre-révolution
émigrés
Faux
homicides
marins
opinion publique
prêtres réfractaires
prison
réquisition de chevaux
témoins
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53119/BCU_Factums_G1021.pdf
c52b3bdca1bc0e12bfd53200b20e36be
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Text
DÉLIBÉRATION
DU DIRECTOIRE
D U D É P A R T E M E N T D U P U Y -D E -D O M E ,
E T
CONSULTATION SUR ICELLE.
L
E d ix - n e u f mars mil s e p t c e n t q u a t r e - v i n g t - d o u z e , le
d ire cto ire r é u n i, a été com posé d e M M . B essey vice-pré
s id e n t ; Riberolles, C handez on F a v ier , C hollet , P eyronn et
P uray ,
3
M o n e s t ie r , procur eu r-g én éra l- syn dic .
L e p ro c u re u r-g é n éra l-sy n d ic a dit :
M e s s i e u r s ,
D e p u is lon g-tem p s les troubles re lig ie u x d éso le n t n o tre
A
�( o
.
d é p a rte m e n t ; e t , p o u r les a p p a is e r, vou s a ve z mis eitu s a g e , n o n s eu le m en t les m o y e n s que la loi a r e m is e n t r e
vos m a in s , mais e n co re c e u x q u e des circon stances im pé
rieuses vous o n t co m m a n d e s; vous a ve z p resq u e toujours
réussi à ra m en e r la p aix ; q uelqu efois vous a v e z été forcés
d e recou rir à la force a r m é e , tant p ou r rétablir l ’o r d r e ,
q u e p ou r protég er le cours des informations faites contreles fon ctionnaires publics qui n ’o n t pas obéi à la loi du 26
d éce m b re , et leurs t u t e u r s
e t vous a v e z retiré les troupes,
lorsq u e les officiers m u n ic ip a u x sont ve n u s vous assurer
q u e le - c a l m e - r é g n o i t , et- q u ’ils p o rte ro ie n t leurs soins à
l ’e n treten ir. "Vous a v e z d e m a n d é p a r m o n o rg a n e à l ’as
sem b lée n a tio n a le co n stitu a n te un d écret qui.réprim ât les
e xcès des p ïêtrâs fanatiques et d e leurs adhérens. C e t t e
assem blée qui étoit alors s u ç la rfïn d e ses tr a v a u x , r e n v o y a
ce tte p étition au m inistre d e l ’intérieur. V o u s a v e z atten d u
a v e c sovimission le d é cre t d e l ’assem blée n a tio n a le législa
t i v e , d o n t l’ex écu ti on a été arrêtée par le veto. De p u is p e u
vo u s a v e z réclam é p a r mon. o rg a n e auprès d e l ’assem blée
n a tio n a le lé g is la tiv e , u n n o u v e a u d é cre t qui vous m e t à
m êm e d e vou s op p oser aux m en ées so u rd e s , mais c o n ti
n u e lle s des prêtres réfractaires. V o u s espériez p o u v o ir
a tte n d re c e tt e l o i , et n e tfô p ^ s forces à p re n d re des arrêtés
d e c ir c o n s t a n c e s , ruais c h a q u e jo u r vous re c e v e z des p la in tes
co n tre les prêtres dissidens e t leurs adhérons. T antôt vous
a p p re n e z q u e des co m m u n es les ont expulsés d e vo ie d e
fa it, p ou r faire cesser le trou ble q u ’ils p o rto ie n t dans leurs
foyers. T a n t ô t vous êtes instruits q u e les adhérons d e ces
prêtres égarés par le fa n a tis m e , ont attenté à la vie des
pasteurs lé g itim e s, d e c e u x qui sont honorés du ch o ix du
�p e u p l e ; q u ’ils les i n s u lt e n t , les m e n a c e n t , les tro u b le n t
d an s l ’e x e r c ic e d e leurs fo n c tio n s , et em p êch en t les fidèles
attachés à la co nstitu tion d ’ assister à leurs instructions.
Il est d e votre d e v o ir , M
essieurs,
d ’arrêter l e cours des
m a n œ u v re s d e ces e n n em is d e l ’état qui p ro fiten t d e l ’as
c e n d a n t q u ’ils ont sur les ames foibles , p o u r leu r faire
croire que la religion est attaqu ée par les décrets d e l'as
s em b lée n a tio n a le co n stitu a n te q u i , sous ce m a sq u e d e la
r e l i g i o n , c a c h e n t des vues d ’intérêt p e r s o n n e l e t - p o r t e n t
le p e u p le à l ’insurrection.
Il est p eu cle com m unes où la pré se n ce d e ces fo n c tio n
naires qui n ’ont plus d e fonctions à rem plir , n ’irrite les
uns , n e sou lève les autres. Il est u rg e n t d e r e m é d ie ra ces
m a u x qui p ou rroien t e n tra în e r d es atten ta ts'a u x propriétés
e t aux p e r s o n n e s , ou u ne g u erre civ ile . É lo ig n e z -c e s prê
tres des paroisses où ils n ’ont plus d e fonctions à r e m p lir ;
q u ’ils a ille n t jo in d re les foyers d e leur p ère , ou q u ’ils se
r e n d e n t dans les villes ou leurs discours et leurs e x e m p le s
n e p e u v e n t pas influ er sur des ames fortes , sur d es p e r
sonnes é c la ir é e s , ou la v ig ila n c e des corps a dm in istratifs,
e t le vrai p atriotism e des c ito y e n s a p p r e n n e n t q u ’il faut
re sp e c te r les o p in io n s r e lig i e u s e s , et souffrir dans son sein
c e u x qui d ifféren t d e c e lle s qui sont le plus g é n é r a le m e n t
adoptées dans l’e m p i r e , et sur-tout dans ce d é p a rte m e n t.
S ’ils n ’ont pas le p erfid e dessein d ’être p ertu rb a teu rs d u
repos p u b lic , q u ’ils v ie n n e n t dans les villes où leur c o n
d u ite sera à d éco u v ert ; ils ren dron t la paix au p a y s q u ’ils
q u i t t e r o n t , et s’il est vrai q u ’ ils soien t p ersé cu té s, c o m m e
ils s’en p la i g n e n t , ils y tro u vero n t la tran q u illité , la sûreté :
p o u r leurs p ersonnes.
A 2
�(
4
)
II est n é c e s s a ir e , M e s s i e u r s , d e p rë n d re un parti sa g e,
mais v ig o u r e u x . C h e r c h e z la source des insurrections qui
se m a n ife s te n t dans plusieurs co m m unes d e c e d ép a rte
m e n t , vous la tro u vere z dans l’in d ig n a tio n q u ’a e x citée le
fanatism e d es ennem is d e la constitu tion ; p re ss e z-v o u s
d e c o u p e r la ra cin e des m a u x qui n ou s m e n a c e n t ; h â te zvo u s d e re n d re la p a ix à ce d é p a rte m e n t qui ju s q u ’ici
a vo it eu le b o n h e u r d ’en
jo u ir ; faites im prim er v o t r e
arrêté ; c o n fie z - e n l ’e x é c u tio n aux directoires d é districts
d o n t le ze le et l ’a tta c h e m e n t aux vrais p r i n c ip e s , se sont
montrés ju s q u ’à ce jo u r ; in v ite z les officiers m u n ic ip a u x
qui le n o t if ie r o n t , d e se servir d e la vo ie d e la p ersu asion
e n v e r s c e u x q u e c e t arrêté frappe , à reten ir les habitons
de le u r s c o m m u n e s , dans les bornes du patriotism e d o n t
la base est le re sp e ct p ou r les person n es et p ou r les p ro
priétés , et à n ’user e n vers les prêtres dissidens d ’a u c u n e s
voies qui pu issent être rép rou vées p a r la raison et p a r le
cri d e leur c o n s c ie n c e .
L es A d m i n i s t r a t e u r s c o m p o sa n t le d ire cto ire du
d é p a rte m e n t du P u y - d e - D ô m e , o u ï le rap p ort du p ro c u re u r-g é n é ra l-s y n d ic ;
C o n s id é r a n t q u e le m a in tie n d e l ’ordre et d e la p a ix ,
la sûreté d es p e r s o n n e s e t des propriétés , d o iv e n t être
l ’o b j e t , d e . la
su rveilla n ce la plus a tten tiv e
des
corps
administratifs ;
Q u e les troubles qui se m anifestent dans c e d ép a r
te m e n t o n t en général p o u r m o tif la d ifférence des o p i
nions religieuses ;
Q u e ces troubles sont, p a r leur essen ce et leur m u ltip li-
�4
(
5
r& ,
)
c i t é , d e n a tu re à e x c ite r to u te la sollicitude d és corps
administratifs ;
Q u ’il est instant d e
assurant le re s p e c t qui
p r e n d r e des m o y e n s q u i , e n
est dû a u x p erso n n es et aux
propriétés , m e tte n t les prêtres réfractaires à l ’abri des
suites q u e p e u v e n t e x cite r d es m a n œ u v re s cla n d estin e s ;
A r r ê t e n t q u e dans quatre jours d e la notificatio n d e
la présen te d é lib é r a tio n , e t à la p ou rsu ite et d ilig e n c e d u
p ro c u re u r - g é n é r a l- s y n d ic , tous, curés e t vicaires n o n
asserm entés seron t tenu s d e sortir d e la paroisse où ils
o n t c i - d e v a n t e x e rc é des fonctions curiales , e t d e
se
r e n d r e dans le lieu d e leu r n a i s s a n c e , ou dans le oheflie u du d ép a rte m en t.
. • '
''
E n j o i g n e n t a u x c i - d e v a n t ch a n o in e s , d ’e x é c u te r p o n c
tu e lle m e n t les dispositions d u d écre t du 13 mai d e r n i e r :
e n c o n s é q u e n c e ils n e p o u rro n t se p résenter dans les
é glises paroissiales q u e p o u r y dire la m esse s e u le m e n t.
O r d o n n e n t l ’e x é cu tio n d e c e tte m êm e loi aux co in m u nalistes e t prêtres - filleuls qui n e d e sserv e n t p o in t les
fon dations , c o n cu rre m m e n t a v e c les curés.
C h a r g e n t les m unicipalités d e ¡veiller à l ’e xécu tion d u
p ré se n t arrêté ; les r e n d e n t resp on sables d e tous les évéïie m en s qui p o u rro ie n t résulter d e son in e x é cu tio n ; le u r
e n jo ig n e n t d ’e n faire le c tu re
à l ’issue d e la messe p a
roissiale , e t d ’en certifier au d irectoire d e le u r d is t r i c t ,
ainsi q u e d e soji e x écu tio n .
C h a r g e n t p a re ille m e n t lesd ites m unicipalités d ’adresser
au directoire d e leur d is tric t, un état n o m in a tifd e s prêtres
n o n sermentés q u i é to ie n t dans leur a r r o n d is s e m e n t ,
A
5
�vVv' »
( « )
d ’instrüire le d it d irectoire des m o y e n s q u ’elles auront em
p lo y é s p ou r faire sortir lesdits curés et vicaires , e t d e
l ’é p o q u e d e leur sortie.
In viten t les prêtres assermentés d e p o rter dans leur
c o n d u ite et leurs instructions , cet esprit d e tolérance et
c e t am our d ’ordre e t d e paix qui sont la b ase d e la c o n s
titution , et qui d o iv e n t anim er tous les F ra n ça is.
A r r ê te n t eniin q u e la p résen te délibération sera im pri
m é e , l u e , p u bliée et affichée dans toutes les m unicipalités
d u d épartem en t.
E t ont signé, B esse, v ice -p ré sid e n t, R iberolles,C /lande^on,
Favier , C k o lle t , Purciy , Peyronnet , Alonestier , p ro cu re u r-g én é ra l-sy n d ic ; et G oigoux , secrétaire-général.
TÆ
c o n s e i l s o u ss ig n é , qui a v u la délibération prise
p ar le d irectoire du d é p a rte m e n t du P p y - d e - D ô m e , le
19
de
ce m o is,
consulté sur la question d e savoir si
c e tt e délibération est c o n fo rm e à la n o u v e lle co n stitu tion
f r a n ç a i s e , et dans le cas où elle y seroit c o n tr a ir e , q u e ls
sont lçs m o y e n s que les an cien s curés ou vicaires d o iv e n t
e m p lo y e r p o u r se soustraire à la p ersécu tion q u ’on leu r
p répare ?
E s t d ’ a v i s , i ° . q u e la deliberation du d é p a rte m e n t
du P u y -d e -D ô m e est un attentat à la constitution française.
2 °. Q u e les adm inistrateurs qui l’ont p r is e , ont e xcéd é
les pouvoirs qui leur o n t été délégués par la constitu tion.
3 °. Q u e ce tte d élibération n e p e u t être exécu tée sans
l ’ap p rob ation du roi.
�4rs
(
7
)
C ’est dans 11 constitu tion m êm e q u e nous pu iseron s
les p re u v e s d e ces trois prop ositions.
t S i q u e lq u ’un s’éton n o it d e la discussion à laq u e lle nous
allons nous livrer , q u ’il sache q u e les actes des pouvoirs
c o n s titu é s , sont sujets à. la ce n su re.
L a censure sur les <actes des pouvoirs constitues , est
permise ; mais les calomnies volontaires contre la probité
des fonctionnaires publics , et la droiture de leurs intentions
dans Vexercice de leurs jonctions,pourront être poursuivies
par ceux qui en sont l'ob jet; c h a p . V , art. X V I I du p o u
vo ir ju d icia ire.
N o u s censurerons d o n c c e tte d é lib é ra tio n , p u isq u e la
co n stitu tion nous e n d o n n e le d r o it ; mais nous n e c e n s u
rerons q u ’elle.
Dispositions garanties par là constitution.
« La
constitu tion ga ran tit à t o u t . h om m e la liberté
s d ’a lle r , de r e ste r , d e p a r tir , sans p o u vo ir être arrêté n i
9 d é t e n u , q u e selon les formes déterm inées p ar e lle ».
» T o u t c e qui n ’est pas d éfend u p a r la l o i , n e p e u t
» être e m p ê c h é ; et n u l n e p e u t être co n tra in t à faire c e
v q u ’elle n ’o rd o n n e pas ».
Oii est la loi qui o rd o n n e au x curés e t vicaires
non
assermentés d e sortir d e leurs paroisses , p ou r se retirer
dans le lieu d e le u r naissance , ou dans le ch ef-lieu d e
leu r d ép a rte m e n t ? C itero it-o n le décret } ar le q u el c e t
ordre a v o ité té p ron on cé ? L ’e xécu tion en a été su sp e n d u e
p a r le veto: mais s’il n ’ y a pas d e loi ( et l’on n ’en- tro u ve
pas u ne sem blable dans toute la constitution ) , la d élibé
ra tio n d u d ép a rte m en t du P u y - d e - D j i n e est d o n c u n
�(
3
)
ordre arbitraire attentatoire à la c o n s titu tio n , à la liberté
d e ces m a lh e u re u x p rê tre s, e t à leu r existe n ce .
E h ! q u e l ’on n e c ro ie pas justifier c e tt e d élibération, e n
la qualifiant d'arrêté de circonstances ; en la disant n é c e s
saire au m ain tie n d e la tranquillité p u b liq u e ! N ’avonsnous pas d es lois p ou r p u n ir c e u x qui e n tre p re n d ro ie n t
d e la trou bler ? E h b ie n ! q u ’on les a p p liq u e à ces anciens
fon ction n a ires publics ( si toutefois il en est qui se soient
rendu s co u p a b les des excès q u e le u r re p ro ch e si amère
m en t le p ro c u re u r-g é n é ra l-s y n d ic , dans son réquisitoire ) ;
mais q u e l ’on re sp e c te la liberté d e c e u x qui n ’o n t rien
fait d e contraire à la loi.
L a d iffére n ce des opinions religieu ses n ’est pas u n
d é l i t , s e u le m e n t e lle p e u t le d even ir.
N u l ne peut être inquiété pour ses opinions même reli
gieuses ^pourvu que leur manifestation ne trouble pas l ’ordre
public établi par la lo i; art. X d e la d éclaration des droits
d e l ’hom m e.
L a libre communication des pensées et des opinions , est
un des droits les plus précieux de l'homme. Tout citoyen
peut donc parler , écrire , imprimer librement , sa u f à répondre
de l'abus de cette liberté , dans les cas déterminés par la lo i,
art. X I .
1
D a n s le cas d e ces d e u x a rtic le s , ce lu i-là seul d o it être
p u n i ( p a r lés tribun aux d e ju stice ), qui a abusé d e la liberté
d e m anifester son o p in io n , ou d ’exprim er sa p en sé e.
M ais le d ire cto ire du d ép a rte m en t n e fait a u cu n e dis
tinction : sans j u g e m e n t , sans inform ation p r é a l a b l e , il
co n fo n d l ’in n o c e n t a v e c lé c o u p a b le , en bannissant d e
leurs paroisses des a n cien s curés e t vicaires n o n asser-
�jfTT
( S> )
m en te s,' en les p r iv a n t du droit accordé par la co n stitu
tion m êm e à tous les autres h o m m e s , d ’a lle r , de rester où
b o n leur sem b le.
S u p p oson s q u ’un d e ces an cien s fon ctionnaires p u blics
soit trouvé hors du lieu d e sa n a is s a n c e , ou d u c h e f - l i e u
d e son d é p a r te m e n t : se saisira-t-on d e sa p e rso n n e ?
M a i s , su ivant l ’article X du ch ap itre V d e la co n sti
tution , nul homme ne peut être saisi que pour être conduit
devant l'officier, de police ; e t su iva n t ; l ’article X I , s'il
résulte de l'exam en qu'il n 'y a aucun sujet d'inculpation
contre lui , il sera remis aussi-tôt en liberté.
S u p p oson s aussi q u e l ’on n ’ait à re p ro ch e r à c e fo n c
tion n a ire p u b lic , q u e l ’in e x é cu tio n d e l ’arrêté , et q u ’il
o p p o se à c e t acte l ’article d e la co n stitu tion q u i lui p e r
m e t d ’aller , de rester, etc. q u e fera alors l ’officier d e
p o lic e ? R e n o n c e r a - t - il à la loi p o u r m ettre à sa p la c e la
v o lo n té <des adm inistrateurs ? Q u e l l e p e in e p o u rra -t-il
in flig e r ? L a co nstitu tion n ’en p résen te pas co n tre c e u x q u i
lu i sont soumis : il y en aura d o n c u n e arbitraire ! E n
vérité , : il eût été difficile au x plus gran ds en n em is d e la
co n stitu tion d e faire q u e lq u e ch o s e d e plus in co n stitu
t io n n e l, q u e c e t arrêté, et c e p e n d a n t, il est l ’o u v ra g e d ’un
corps ad m in istra tif, établi pour fa ir e chérir et respecter une
constitution qui doit assurer à jam a is la liberté de tous les
citoyens.
É t r a n g e liberté
q u e c e lle qui p riv e
u n e classe d e
c ito y e n s d e faire c e q u e la loi leur p e r m e t j elle re sse m b le
a ces ordres arbitraires , à ces lettres de cachet co n tre le s
q u e ls on a tant déclam é.
Il est assez p ro u vé q u e la d élibération d u d ire cto ire d u
�*I
-
(
IO )
d ép a rte m en t du P u y - d e -D ô m e est atten tatoire h. la co n s
titution i v o y o n s m a in ten a n t si les adm inistrateurs o n t
eu droit d e la p re n d re .
« L e s administrateurs de dép artem ens e x e rc e n t, sous la
y> su rveilla n ce et l ’autorité du roi , les fonctions adm inisv» tratives. D é cre t du 22 d éce m b re 1789 ».
* v> Ils n e p e u v e n t ni s’im miscer dans l ’e x e rc ic e du pou» voir lé g is la tif, ni su sp endre l’e x é cu tio n des lois , ni
rien e n tre p ren d re sur l’ordre j u d i c i a i r e , art. III.
L ’instruction sur c e d écret leu r a p p ren d q u e « le fon * d e m e n t essentiel d e c e tte im portante partie d e la cons» t it u t io n , est q u e le p o u v o ir adm inistratif soit toujours
* m a in te n u tre s -d is tin c t, et de la puissance législative a.
•t> laquelle il est soum is , et du p o u vo ir j u d ic ia ir e , d o n t il
» est in d é p e n d a n t» ; e lle leur a p p re n d aussi que la cons
titution scroit violée , si les adm inistrateurs d e d épartem en s
7
ch erch o ie n t à se soustraire a Vautorité législative
, ou à
O
usurper aucune partie d e ses fo n c tio n s , et q u e to u te e n tre
prise d e c e tt e n atu re seroit , d e leur part une forfaiture.
O n re tro u v e les mûmes principes dans l'instruction du
2 août 1790 , sur les fonctions des assemblées adm inis
tratives
: on les exh orte d abord à faire resp ecter
et
c h érir, par un régime sage et paternel , la constitution , qui
doit assurer à jam ais la liberté de tous les citoyens.
Il leur est reco m m a n d é par le chap. I, d e co n sid érer
* a tte n tiv e m e n t ce qu’elles sont dans l ’ordre d e la consti» tu tio n , p ou r n e jamais sortir des bornes d e leurs fonc> tio n s , et pou r les rem plir toutes ave c e x a c titu d e ; elles
> d o iv e n t ob server q u ’elles n e sont ch arg ées que d e l'a d -
t ministration ; qu’aucune fonction législative ou ju d icia ire
�v ne leur appartient , et q u e to u te entreprise d e le u r p a r t ,
> sur l ’u n e ou l ’autre d e ces fonctions , introduirait la
» confusion des pouvoirs , q u i.p o r te r o it l ’a ttein te la plus
*> funeste aux p rincip es d e la co n stitu tio n ».
E n i i n , ce tte instru ction p o rte e n termes e x p r è s , que
* les adm inistrations d e dép artem ens n e p e u v e n t faire
* n i d é c r e t s , ni o r d o n n a n c e s , ni règlem ens ; q u ’elles n e
» p e u v e n t agir q u e par v o ie de simples deliberations j u r les
» matières générales , ou d ’arrêtés sur les affaires p a rticu » libres; q u e leurs délibérations sur les o b jets particu liers
> qui c o n c e rn e ro n t leur d é p a r te m e n t, mais qui intéresse -
•> ront le régime de l ’administration générale du royaum e ,
» n e p e u v e n t être e x é c u té e s , q u ’après q u ’elles a u ro n t été
» p ré s e n tie s au r o i , et qu elles auront reçu son approbation ».
S i l ’on e x a m in e sur le d écret du 22 d éce m b re 1 7 8 9 ,
e t sur les instructions qui l ’o n t su iv i, la délibération p rise
p a r les m em bres du d irectoire du d é p a rte m e n t du P u y d e - D ô m e , on est forcé d e c o n v e n ir q u e c e tte d élibéra
tio n est u n e entreprise sur les fonctions du p o u v o ir légis
l a t i f , u ne u surpation sur les fon ctions du p o u v o ir ju d i
ciaire.
L ’u n e e t l ’autre sont m arquées clans le réquisitoire du
p r o ju r e u r -g é n é r a l- s y n d ic . O n y v o it q u e « le d irectoire
» a y a n t d e m a n d é à l ’assem blée co n stitu a n te un d écret
> co n tre les prêtres fanatiq ues et leurs adhérens , ce tte
v> assem blée r e n v o y a la pétition au ministre d e
> rieur ; q u ’après
l ’inté-
le d é cre t d e l’assem blée lé g is la t iv e ,
> d o n t l ’e x é cu tio n a été arrêtée par le v e to , il r e n o u v e la
» la m ême d e m a n d e ».
E n d e m a n d a n t , soit à l ’assem blée c o n s t it u a n t e , soit
�(
12
)
à l ’assem blée lé g is la tiv e , u n e loi co n tre les prêtres n o n
asserm entés, le d irectoire du d ép a rte m en t du P u y - d e - D ô m e
s’est d o n c re co n n u in co m p é te n t pou r la faire lui-m êm e ;
il sen toit d o n c alors le b eso in des autorités a u xq u elles il
s’adressoit ; c e n ’ est q u ’à le u r r e f u s , après le veto , et au
mépris d e c e tt e p ré ro g a tiv e r o y a l e , q u ’il a cru p o u v o ir se
d o n n e r, sous le n o m de délibération , u n e loi sem b la b le à
c e lle q u e sa m ajesté a réfusé d e s a n c tio n n e r, p a rce q u ’elle
étoit contraire à la co n stitu tion .
C e t t e en trep rise m érite to u te l ’attentio n du g o u v e r
n e m e n t et des a d m in istré s , p a r les co n sé q u e n ce s d a n
gere u ses qui p o u rro ie n t e n résulter ; les adm inistrations d e
d ép a rte m en s qui n ’e x e r c e n t leurs fonctions q u e sous la
surveillance et Vautoritê du roi , d e v ie n d r o ie n t législa
tiv e s , et se jo u e ro ie n t d e sa s a n c t i o n , e n transform ant
e n délibération ou r è g le m e n t p a r t i c u li e r , c h a c u n e p o u r
le u r d é p a r te m e n t , u n e loi faite par l’assem blée lé g isla tive ,
pré se n té e à la sanction r o y a l e , e t refusée à ca u se d es inco n v é n ie n s q u ’on y auroit trouvés p o u r l ’adm inistration
g é n é ra le du ro y a u m e .
C e t t e usurpation d e p o u v o ir s’é te n d ro itb ie n tô t des dépar
tem e n s aux districts, des districts au x m unicipalités : p a r c e
m o y e n , nous n ’aurions
p ou r l o i s , q u e la v o lo n té
d es
adm inistrateurs e t la co n stitu tion seroit re n v e rs é e .
C o n c lu o n s : le d irectoire d u d ép a rte m en t d u P u y - d e D ô m e a usurpé sur le p o u v o ir lé g is la tif, en r e n o u v e la n t
sous la forme d e délibération ; e t après le veto , u n e loi
re je té e co m m e in con stitu tio n n elle ; il a entrepris sur le
p o u vo ir j u d i c i a i r e , en in flig e a n t u ne p e in e au x anciens
£urés et vicaires îiojo, ^ssçrm catcs j ca r c ’en est u ne b ie n
�441
>3
(
)
c r u e l l e , q u e d e les c o n tra in d re d e sortir de leurs paroisses,
p o u r se retirer dans le lieu d e leur naissance ou dans le
ch ef-lieu du d ép a rte m en t. C e t t e d élibération a été frappée
d ’a v a n c e d ’u n e n u llité ra d ica le , p a rce q u ’elle rep résen te
le d é cre t refusé par le roi. E n la p r e n a n t , le d irectoire
s’est exp osé au x p e in e s p ro n o n cé e s par l ’a rticle III d e la
d éclara tion des d ro its ,c o n tre c e u x qui expédient, exécuten t,
ou f o n t exécu ter des ordres arbitraires.
L a d élibération d o n t il s’agit , q u o iq u e p articu lière au
d é p a rte m e n t du P u y - d e - D ô m e , intéresse le ré g im e d e
l ’adm inistration intérieure du r o y a u m e , p a rce q u ’il im p o rte
à la société en tière q u ’u n e ce rta in e classe d ’hom m es n e
soit pas persécu tée dans q u e lq u e s d ép a rte m en s, e t tolérée
dans d ’autres ; p a r-to u t on d o it etre g o u v e rn é p a r les
memes lois ; q u e lle s sont ces lois ? C e ll e s q u e la co n stitu
tio n nous a d on n ée s ; il n e d o it pas y en avoir d ’autres : il
falloit d o n c a v a n t tout q u e les m em b res du d ire cto ire d u
d é p a rte m e n t d u P u y - d e - D ô m e présentassent le u r d é lib é
ration au roi ; s’ils la fo n t e xé cu te r sans avoir re ç u son
a p p r o b a t io n , ils c o n tr e v ie n n e n t fo rm elle m en t à l ’in stru c
tion sur le d ére t du 22 n o v e m b r e 17 8 9 .
Il n e nous reste q u ’à in d iq u e r les m o y e n s d e se p o u r
v o ir co n tre c e tt e d élib éra tion .
<i L e roi a le d ro it d ’a n n u ller les actes d es adm inistra» tions d e d ép a rtem en s, contraires aux lois 011 aux ordres
9 q u 'il leur aura adressés ; ch ap . I V , sect. I I , art". V d e la
> co n stitu tion ».
C ’est d o n c au roi q u e les an cien s curés et vica ires n o n
assermentés
d o iv e n t
adresser leurs p la in te s
d élibération d u d irectoire d u d ép a rte m e n t d u
/
co n tre la
Puy-de-
�14
(
)
D ô m e , q u i les attaqu e ju s q u e dans le u r e x is te n ce ; et
co m m e ce tte d élibération n ’est autre ch ose q u e le d écre t
a u q u el sa m ajesté a refusé sa s a n c tio n , on d o it croire q u e ,
fidelle à ses p r in c ip e s , e lle annullera un acte d 'ad m in is
tratio n aussi contraire à la constitution.
M ais le recours au roi en tra în era peut-être u n plus
lo n g d élai que ce lu i accordé par la délibération p o u r y
satisfaire ; c e la d ép e n d d e la d ilig e n c e q u e m ettra le
p ro c u re u r-s y n d ic à la faire notifier : ca rce n ’est q u e du
jo u r d e la notilication q u e c o m m e n ce ra à courir le délai
d e quatre jours.
Dans
c e tte i n c e r t i t u d e , v o i c i la co n d u ite à te n ir , à
l ’instant d e la n o tificatio n ( on p eu t la d e v a n c e r ). M M .
les curés et vicaires qui ne ju g e r o ie n t pas à p rop os d ’y o b
tem p érer , p ré se n te ro n t au tribunal d e district du lieu d e
leu r d o m icile , u ne requ ête exp o sitive d e la d élibération
d u d irectoire du d ép a rte m e n t du P u y-d e -D ô m e , et d e sa
co n tra d ictio n ave c les p rin cip es d e liberté consacrés par
la constitution. Ils d e m a n d e ro n t à y ê tre reçu s o p p o s a n s ,
e t des d éfenses d ’attenter à leur person n e.
C e t t e requête sera co m m u n iq u é e au com m issaire du ro i:
nous n e d ou tons pas q u e ce m a g is t r a t , chargé par l ’art.
X X V . du cha;>. V , tit. III d e la constitution , d e requérir
l ’observation
des lois dans les ju g e m e n s à re n d re , n e
s’élève a v e c force co n tre ce tte d é lib é ra tio n , q u ’il n ’en d e
m an d e la n u l l i t é , co m m e co n traire à la liberté é ta b lie p ar
la constitution.
A u moins devons.-nous croire q u ’a v a n t d e consentir à
l ’exécution d e c e tte délibération , il consultera le ministre
d e la ju stice sur le p arti q u ’il d oit p re n d re ; q u e la denon-
�5
( 1 )
c iation q u ’il en fera au roi p ar c e t o rg a n e n e p e u t m a n
q u er d ’en accélérer la cassation , et d e nous procurer un
régime p lu s sage et p lu s paternel.
A p rè s ce q u e l ’on v ie n t d e d ir e ,q u i p ou rroit d o u te r de
la nullité de la d élibération d u d irectoire du d ép a rte m en t
du P u y - d e -D ô m e , d e son in c o m p é te n c e et de son o pp osi
tion à Îa co n stitu tion . N o u s avons mis à l’exam in er autant
d ’intérêt q u e si nous avions eu à la d é f e n d r e , e t nous
n ’avons pu la ju stifi e r , sous au cu n r a p p o r t , pas m êm e en
la considérant co m m e u ne p ré ca u tio n p o u r le m a in tie n
d e la tranquillité p u b liq u e ; nous nous sommes dit q u e si
c e soin im p o rtan t a été confié aux adm inistrations d e
d é p a rte m e n s , c e n ’est q u ’à la ch a rg e d ’e m p lo y e r d es
m o y e n s autorisés par les l o i s , avoués p a r la c o n stitu tio n ;
nous d evo n s d o n c présum er q u e les m unicipalités u n e
fois averties q u e c e tte d élibération est co n traire à la c o n s
titu tio n , s’em p resseron t p ar c e la seul d ’e n d e m a n d e r la
ré v o ca tio n .
D élib éré à R i o m , c e 30 mars 1 7 9 2 .
T O U T T É E ,
père, A N D R A U D ,
G R A N C H I E R ,
A
L A P E Y R E ,
T O U T T É E ,
fils.
RIOM,
DE L’ I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T . 1793.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Délibération du Directoire du département du Puy-De-Dôme. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Touttée, père
Andraud
Lapeyre
Granchier
Toutée, fils
Subject
The topic of the resource
prêtres réfractaires
contre-révolution
ordre public
antagonisme entre campagnes arriérées et villes éclairées
troubles publics
droits de l'Homme
caractère anticonstitutionnel de la délibération du Directoire
abus de pouvoir
constitution de 1790
droit de rester
séparation des pouvoirs
distinction entre villes et campagnes
Description
An account of the resource
Titre complet : Délibération du Directoire du département du Puy-de-Dôme, et consultation sur icelle.
Table Godemel : liberté individuelle : une délibération départementale, du 19 avril 1792, portant, « que dans les jours de sa notification, tous curés ou vicaires non assermentés seront tenus de sortir de la paroisse où ils ont ci-devant exercé des fonctions curiales, et de se rendre dans le lieu de leur naissance, ou dans le chef-lieu du département, &c. », constitue-t-elle excès de pouvoir, attentat à la constitution et à la liberté individuelle ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1021
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Puy-de-Dôme
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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abus de pouvoir
antagonisme entre campagnes arriérées et villes éclairées
caractère anticonstitutionnel de la délibération du Directoire
constitution de 1790
contre-révolution
distinction entre villes et campagnes
droit de rester
droits de l'Homme
ordre public
prêtres réfractaires
séparation des pouvoirs
troubles publics
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53103/BCU_Factums_G1005.pdf
63ad709365d119088506808fd95c18a0
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Text
TRO ISIÈM E MÉMOIRE.
RÉPONSE
A U S E C O N D M É M O IR E D U D É F E N D E U R .
PO U R J e a n D E V È Z E , J e a n n e D E V É Z E , sa sœur, fille
majeure tant en son nom propre et privé, qu’en qualité
de cédataire de Michel et Marie D evèze, ses frère et
sœ ur, tous héritiers de Jeanne G azard, leur m ère,
; e t par représentation de Gabriel G azard, leur a ïe u l,
. et de Marguerite Bouchet, leur grand’m ère, deman
deurs.
C O N T R E G a b r i e l G A Z A R D , second du nom, leur
oncle, notaire royal, habitant de Saint-Mary-le-Plein 3
défendeur.
L a
sentence interlocutoire du 5 septembre 17 8 6 ,
paroît avoir réduit la contestation à savoir si la dot
constituée à Jeanne G azard, mère des demandeurs, a
A
�( o
excédé la portion qu’elle amendoit dans la succession
de Gabriel G azard, premier du nom , son père,, de manière
q u ’on puisse lui trouver dans l’excédant, une somme quel
conque pour le prix de sa renonciation à la succession
de Marguerite Bouchet, sa mère, ou si au contraire cette
même dot n ’est qu’égale ou même au-dessous de sa portion
dans la succession du père, ensorte qu’il soit évident que
la renonciation à la succession maternelle a été faite sans
prix.
E n cela, la sentence interlocutoire paroît avoir adoptéle principe de l’arrêt da Pont - Carré, suivant lequel la.
renonciation faite par une f i l l e , en même temps à une
succession échue et à une succession à échoir pour un
seul et même p rix , ejfuso sermone, et sans distinguer
ce qu’il y a dans ce prix pour la succession échue 4
et ce qu’il y a pour la succession à échoir, n’est valable
qu’autant que, dans le prix convenu, il se trouve pour la
succession à échoir un excédant au-delà de ce qui devoit
revenir i la renonçante pour sa portion dans la succes
sion échue , sans quoi la renonciation est absolument
n u l l e pour l’une et l’autre successions. C ’est une modifica
tion établiepar cet arrêt à la doctrine de l’auteùr'du traité
des. successions qui avoit enseigné en général que la renon
ciation faite unico pretio à une succession echue et à une
succession â échoir, étoit radicalement nulle.
Pour la décision de la contestation , il faut donc prin
cipalement s’attacher à connoître la valeur des biens de
Gabriel Gazard , premier du nonx, Qt comparer ensuite la
portion que devoit y avoir Jeanne Gazard avec la dot qui
lui fut continuée, pour juger si dans cette dot il y a eu un
�excédant au-dessus de sa portion, qui ait pu faire un prix
quelconque de sa renonciation à la succession à échoir de
Marguerite Bouchet, sa mère.
Voyons d’abord ce que nous apprend le rapport d’ex
perts, fait en exécution de la sentence interlocutoire, et
nous parlerons ensuite des omissions faites dans ce même
rapport, mais qu’il faut nécessairement y suppléer.
Les experts ont évalué les immeubles de la succession
de Gabriel Gazard, premier du nom, qui leur ont été indi
qués à la somme de 5,240'*'; mais quoique la sentence in
terlocutoire l’eût ordonné , ils ont omis de faire l’estima
tion du m obilier, et l’inventaire de ce mobilier commencé
par Gabriel Gazard lui-même avant sa m ort, et continué
par le juge des lieux après sa mort, ne porte point d’esti
mation particulière des meubles et effets qui y sont dé
taillés. Seulement il fut fait mention en marge de l’inven
taire, que les parties avoient déclaré que les meubles étoient
en valeur de 1,7 0 0 ’*', compris les obligations, chetels et
autres effets. O r, 011 sent parfaitement que cette évalua
tion ne pouvoit pas faire la lo i, n ’étant faite que par une
simple déclaration de la tutrice, partie intéressée. D ’ailleurs
on comprend qu’on n ’avoit principalement en vue dans
cette déclaration que de fixer les droits de contrôle et de
les réduire le plus possible. Quoi qu’il en soit, adoptons
pour un moment cette évaluation, sauf à la rectifier.
V oila donc 1,700'*' à ajouter à la somme de 5,240"** à.
laquelle les experts ont estimé les immeubles. Cela fait un
total de 6,940'*'.
On a vu dans les écritures et mémoires du procès, que
Gabriel G azard, second du nom , devoit prélever un quart
A 2
�, ( 4 )
(le la succession de son père par les dispositions de son tes
tament. L e quart ¿toit donc de
5 ^ , ce qui réduiroit
la masse à 5 ,2 0 5 ^ , formant les trois quarts divisibles par
égalité entre le frère et la sœur , et dont la moitié revenant
à Jeanne G azard, eût monté ^.2,602^ 10
Sous ce point de v u e, la dot constituée à Jeanne
Gazard étant de 5,0 0 0 ^ , et sa portion dans les biens pa
ternels ne montant qu’à 2,6 0 2 ^ 10 J , elle auroit reçu un
excédant de 3 9 7 ^ 10 J qu’on pourroit appliquer au prix de
la renonciation à la succession à échoir de sa mère ; et
alors dans le préjugé de l’arrêt de Pont-Carré , elle se fut
trouvée, elle ou ses enfans^ hors d ’état de réclamer contre
la renonciation.
Mais il s’en faut bien qu’on doive ainsi réduire la masse
de la succession de Gabriel G azard, premier du nom.
i ° . Les experts ont estimé infiniment au-dessous de
leur valeur les immeubles de la succession qui leur ont
été indiqués , et à cet égard on ne pourroit pas refuser aux
demandeurs l’amendement de rapport qu’ils ont demandé
subsidiairement, et qui porteroit ces immeubles à une
valeur bien supérieure.
2 ° . L e rapport des experts contient l’omission de plu
sieurs immeubles qui ne leur ont pas été indiqués , et il
est de toute justice d’ajouter à la niasse la valeur de ces
immeubles.
5 0. Nous n ’avons pas non plus l’estimation de l’office
de notaire royal dont étoit pourvu l’auteur commun,
autre objet encore qu’on n e peut se dispenser d’ajouter à
la masse.
4 ° . E n fin , il faut encore augmenter la masse de la
�(
5
)
valeur du mobilier au par-dessus la somme de 1,7 0 0 ^ , à
laquelle on l’avoit seulement évalué par la déclaration
mise en marge de l’inventaire ; et c’est encore un reproche
tr'es-grave à faire aux experts, de n’avoir point fait cette
estimation qui leur étoit expressément prescrite par la
sentence interlocutoire.
Or si l’on ajoute tous ces objets à la masse de la suc*
cession de l’auteur commun, il en résultera évidemment
,un déficit considérable dans la dot de 3,000^ constituée
à Jeanne G azard, pour la remplir de ses droits dans la
succession de son père, et il restera démontré qu’elle n’a
absolument rien pu recevoir pour la succession à échoir
de sa mère. Reprenons en détail tous les objets.
1 9. On est persuadé que les experts ont estimé à moins
de l,ooo'tt' de leur valeur les immeubles qui leur ont été
indiqués, ce qu’on pourroit vérifier par l’amendement de
rapport qu’on a demandé subsidiairement ; mais laissons
cet article dans ce moment pour mémoire seulement.
2 0. On a omis dans le rapport des experts l’estimation
de trois corps d’héritages quineleur ont pointété indiqués.
Ces héritages ont été désignés dans l’écriture signifiée de
la part des demandeurs, le 2 septembre 17 9 0 , qui est sous
la cote I du second sac de leur production. C e sont des
héritages connus dans le pays sous le nom vulgaire de
Brughas; c’est-à-dire, des terres froides qui servent le plus
ordinairement de pacages, mais que cependant on défriche
quelquefois pour leur faire produire des récoltes de temps
à autre. On veut bien ne porter ces trois héritages qu’au plus
bas prix possible , et n’en supposer la valeur qu’à 600^.
Mais les experts ont encore omis un objet immobilier
A 3
�( O
'
dont il est facile , sans leur secours , de fixer la valeur ;
c’est une boutique de maréchal qui, à l’époque de la mort
de Gabriël Gazard, premier du nom , étoit affermée par un
bail encore alors subsistant, moyennant 1 8 cartons de seigle
par a n , avec la charge du ferrage des bestiaux de la mai
son. Quand on n’évalueroit le carton de seigle qu’à 1 5 ^ ,
les 18 carrons monteroient à 1 3 ^ io ^ , dont le capital
seroit de 2 7 0 ^ ; et à l’égard du ferrage, ce seroit bien peu
l’estimer que de le fixer à 40’*" par an ; mais réduisons-le
de moitié , et ne le portons qu’à 20 ^ . L e capital seroit
de 4oo't+' à ajouter aux 270'*' pour le capital des 18 car
tons de seigle ; ce qui feroit un tout dè 6 70^ .
L e défendeur n ’a point contesté ni l’existence de la
boutique dont il s’ag it, ni qu’elle fît partie de la succes
sion de l’auteur commun. Mais il a prétendu que cette
boutique faisoit partie de la maison qui a été estimée par
les experts. A cet égard , le rapport des experts ne
confirme pas cette assertion ; il n ’y est fait nulle mention
de cette boutique. D ’un autre côté, on peut d’autant
moins présumer qu’ils aient entendu la comprendre dans
leur estimation de la maison , que cette boutique en est
absolument détachée , et à plus de 18 toises de distance.
A u reste , on trouve dans l’inventaire la preuve que
cette boutique dépendoit de la succession , puisque le
bail de ferme de cette boutique fait la cote 31 de cet
inventaire , qui fait encore foi que le prix du bail étoit
de 18 cartons seigle. Il est vrai qu’il n’est pas parlé, dans
l’inventaire , de la condition du ferrage des bestiaux de
la maison , que l’on s’est borné à évaluer à 2 0 ^ par an ;
mais les demandeurs avancent le fait comme positif j et
�il doit passer pour t e l , jusqu’au rapport du bail com
pris dans l’inventaire, le q u el, ainsi que celui de tous
les titres inventoriés , est constamment à la charge du
défendeur.
Un autre objet encore , qui doit être ajouté à la
m asse, pour une somme quelconque, est l’office de no
taire royal , d o n této it pourvu l’auteur commun. Il est
vrai que cet office étoit tombé aux parties casuelles ,
d ’où il fut relevé par le défendeur ; mais il n’en doit pas
moins rapporter la valeur de cet office à la masse, sous la
déduction de la finance qu’il a payée aux parties ca
suelles , d’après les quittances qu’il en doit représenter.
Indépendamment de l’office de n otaire, il faut encore
ajouter à la masse la valeur de la pratique. A cet égard,
l’inventaire fait foi de l’exercice de cet office , par
l ’auteur com m un, pendant les années 1 7 1 5 , i j i 6 ,
1 7 1 7 , 1 7 1 8 , 1 7 1 9 , 1720 et 1 7 2 1 ; c’est-à-dire ,
pendant sept ans , puisqu’on trouve dans cet inventaire
l ’état des minutes des actes qu’il avoit reçus pendant ces
sept années.
On ne croit donc pas excéder, en portant la valeur ,
tarit de la pratique que de l’office , et déduction faite
de la finance payée aux parties casuelles , à une somme
de 1,0 0 0 'tt'.
Au surplus , on a prouvé dans les précédentes écri
tures et mémoires , par l’autorité de deux arrêts du
conseil , de 1 636 et de 1 61 9 , rapportés par Denisart,
que pour un office levé aux parties casuelles , la préfé
rence est accordée aux plus proches parens du défunt ;
que c’est en considération de la succession 5 que
A 4
�(
8
)
cette préférence est établie. C ’est en vain que le défen
deur a prétendu que la préférence n’a lieu qu’en faveur
des plus proches parens qui auront fait les diligences
pour lever l’office , et contribué au paiement du prix ,
dans le temps de préférence. Cette objection se dissipe
facilem ent, si l ’on fait attention qu’à la mort de son
père , Jeanne Gazard avoit à peine deux ans , et
qu’elle étoit hors d’état de faire aucune diligence pour
la levée de l’office. E lle étoit encore mineure, lorsqu’elle
se maria en 174^ ; à cette époque , l’office de son père
n ’étoit pas encore levé aux parties casuelles ; son frère
n ’en étoit pas encore pourvu , puisque , dans le con
trat de mariage de sa sœur , il ne prend que la qualité
de praticien , et non pas celle de notaire. Or , par ce
contrat de m ariage, Jeanne Gazard ayant fait une renon
ciation au profit de son frère , il n ’est pas surprenant
que celui-ci ait seul fait les diligences nécessaires pour
la levée de l’office ; mais comme ce n’est qu’à la faveur
de sa renonciation , que Jeanne Gazard a été éloignée
de concourir à ces diligences , il en résulte justement
que j la renonciation se trouvant n u lle , son frère doit
lui communiquer le bénéfice obtenu , par la levée aux
parties casuelles de l’office du père commun , à la suc
cession d u q u el, elle ou ses enfans se trouvent rappelés
par la nullité de sa renonciation.
5 0. Enfin , on doit augmenter la masse de la succes
sion , de l’excédant de la valeur du mobilier , au par
dessus la somme de 1,700 ^ , à laquelle il se trouve seu
lement évalué , par la déclaration mise en marge de
l’inventaire 3 pour la fixation des droits de contrôle ;
�( 9 )
.
et cet excédant doit plus que doubler et tripler la som m e/
de 1,7 0 0 ^ . C ’est ce qu’il est facile de ju ger, seulement
par le détail de ce mobilier , compris dans l’inventaire ,
et dont on a déjà présenté un tableau estim atif, par
approximation , dans l’écriture du 2 septembre 1 7 9 0 ,
sous la cote i ere. du second sac de la production des
demandeurs , et par lequel on a porté ce mobilier à
3,079 ■*" 19 ^ ; mais réduisons-le encore , si l’on veu t,
à 2,4.00'*' ; ce sera cette somme de plus à ajouter à la
masse.
E n réunissant toutes les sommes qu’on vient de prou
ver devoir être ajoutées à la masse de la succession de
Gabriel G azard , premier du nom , sans y comprendre
l ’augmentation de valeur des immeubles indiqués aux
experts , augmentation qu’opéreroit certainement un
amendement du rapport d’experts, et qu’en attendant on
n ’a présentée que pour mémoire, toutes ces sommes monteroient à celle de#4,67o'tt\ Otons un quart à prélever
par le défendeur, qui seroit de 1,16 7 '* ' 10 6 ; les
trois quarts restans sont de 3,502 ’**" 10 J , dont il
xevenoit la moitié à Jeanne Gazard, qui est de 1 , 7 5 1 ^
5 J , qui , ajoutée aux 2,6 0 1'*' 10 J , pour sa part ,
expliquée ci-devant dans l’estimation des experts , ou
dans les 1,70 0 ^ de la déclaration du m obilier, mise en
marge de l’inventaire , détermineroit l’intégrité de son
amendement dans la succession de son père , à une
somme de 4,3 53
15 J , et par conséquent à 1 , 353^*
15 J , au-delà de la dot de 3,000 ^ , qui fut le prix dû
sa renonciation à la succession échue de son p è re ,
et à celle à échoir de sa mère j d’où il reste démontre
�( IO )’
qu’il n ’y a pas eu de prix pour la renonciation de la
succession à échoir, puisque la dot est même fort infé
rieure à ses droits dans la succession échue.
Encore n ’a-t-on pas parlé des restitutions de jouissan
ces que Jeanne Gazard auroit eues à réclamer de sa por
tion , dans les biens de son p'ere. Sur quoi il est bon
d ’observer que , quand on auroit pu déduire sur ces
jouissances sa nourriture et son entretien, toujours
auroient - elles présenté un excédant assez intéressant ,
sur-tout eu égard à la fortune des parties ; mais même on
n ’auroit pu répéter ces nourritures et entretiens que pour
les premières années de l’enfance de Jeanne Gazard ;
parce qu’une fois parvenue à l’âge de 1 1 à 1 2 ans, elle les
avoit bien gagnés par son travail ; car il ne faut pas seu
lement considérer l’état de notaire de son père et de son
frère , il faut aussi faire attention qu’ils ténoient en même
temps auberge dans leur maison, et Jeanne Gazard y
faisoit le service d ’une domestique. On ne' doit pas être
étonné qu’un notaire fut en même temps aubergiste ; le
fait est vrai, et ne peut être contesté par le défendeur.
Ensuite il y en avoit sur-tout dans ces temps-là plusieurs
exemples dans les campagnes, et on en connoît de temps
encore moins reculés.
Concluons que dès à présent il est plus que démontré
que la dot de 3,000 ^ faite à Jeanne Gazard, ne remplissoit
pas à beaucoup près ses droits dans la succession de son
père ;q in ls ’enfalloitaum oinsdeplusde i^ o o ^ e t p a r c o n
séquent qu’on ne peut pas trouver dans cette dot un prix
quelconque applicable à sa renonciation à la successsion
échoir de Marguerite Bouchet, sa mère : donc nous sommes
�y
( 11 )
dans l ’ espèce la plus favorable du principe enseigné par
l’auteur du traité des successions, qui annulle la renoncia
tion faite unico pretlo à deux successions, Tune échue et
l’autre a échoir , puisqu’il est évident que le prix de cette
renonciation n’a pas même, à beaucoup près, rempli les
droits de la succession échue, et n’a rien laissé pour le
prix de la succession à échoir, comme il le faudroit dans
l ’adoucissement apporté à la règle générale par le préjugé
de l’arrêt de Pont-Carré.
M ais, encore une fois, ce que l’on ne présume p a s, s’il
restoit encore l’ombre de difficulté, au moins n’y en auroitil pas à ordonner l’amendement de rapport, dont en tout
les demandeurs ont offert d’avancer les frais.
E n fin , si cet amendement de rapport étoit ordonné, il
seroit à propos pour ne plus y reven ir, de tracer la marche
des bouveaux experts, il faudroit leur prescrire , i Q. outre
la nouvelle estimation des immeubles indiqués aux pre
miers exp erts, d’estimer encore les trois héritages connus
vulgairement sous le nom de B ru ghas, et désignés dans
l’écriture des demandeurs, du 2 septembre 1 7 90; 2 °. d’es
timer la valeur de la boutique de m aréchal, omise par les
premiers experts 5 3 0. d’estimer aussi l’office et pratique
de notaire, sous la déduction de la finance payée par le
défendeur aux parties casuelles; 40. enfin, d’estimer éga
lement les m eubles, bestiaux et effets mobiliers compris
dans l’inventaire de la succession de Gabriel G azard ,
premier du nom.
ü n pourroit sans doute borner ici la défense des de
mandeurs, et négliger ses objections auxquelles on a déjà
suffisamment répondu dans les mémoires et écritures qui
�( 12 )
ont précédé ; aussi ne va-t-on que parcourir et rappeler
.rapidement les principes qui détruisent la seule objection
sur laquelle le défendeur paroît encore insister; c’est celle
de la prescription.
On ne parle que du moyen de prescription ; c a r ,
pour la fin de non recevoir des dix a n s , quoique le
défendeur ait encore voulu en p a rle r, il faut absolument
récarter dans l’espèce où il s’agit de la renonciation faite
sans prix à une succession , et on vient de voir qu’il n’y
a point eu de prix pour la succession maternelle à échoir.
Or 5 le dernier commentateur de notre coutume , M.
Chabrol , qui avoit été le défenseur du défendeur dans
toute cette affaire , et qui étoit l’auteur de tous ses mé
moires et écritures, enseignoit sur l’art. 25 du tit. 14 ,
tom. 2 , pag. 4 15 , que l’action pour faire prononcer la
nullité d’une renonciation faite sans p rix , avoit la même
durée que l’action en partage des biens de la succession,
et par conséquent q u ’il ne peut y avoir à cet égard d’autre
prescription que celle de 30 ans.
On ne doit pas non plus faire attention à la garantie
de la renonciation que l’on avoit fait stipuler au mari ,
parce qu’une telle garantie d’une renonciation n u lle, et
¿ ’une nullité qui ne procède pas seulement de la minorité ,
jiiais qui se tire ex visceribus rei> doit suivre le sort de la
renonciation qui est annullée.
D ’ailleurs, la sentence interlocutoire a nécessairement
préjugé qu’il ne pouvoit y avoir lieu à la lin de non rece
voir de dix ans ni à la garantie du m ari, sans quoi l'inter
locutoire eût été absolument inutile , et les demandeurs
eussent dû dès-lors être déchus de leurs prétentions.
�( >3 ) .
. Venons-en donc à la prescription. ..On( pourroit direr
encore à cet égard que la sentence interlocutoire a aussi
préjugé qu’il n ’y en avoit p a s , puisque l’interlocutoire
auroit été également inutile , s’il y avoit eu prescription.
Mais dans le fait il n’y avoit pas lieu à l’opposer.
Cela est d’abord certain à l’égard de Jean n e Devèze
et de Jean Dev'eze, deux des défendeurs. E n effet, à la
mort de Jeanne G az ard ,leu r mère , qui étoit née le 27
janvier 1744 , et qui décéda.le premier décembre 1765 ,
la prescription n ’avoit pu courir que pendant les 20 ans
et 1 5 jours de majorité qui se trouvent dans^cet intervalle.
O r, Jean n eD evèze n ’a été majeure que le 2 août 1 780 ,
et de ce jour à celui de la demande qui est du 25 juillet
1 783 , il ne se trouve pas trois années entières : donc il
n ’y avoit eu à son égard que 23 ans d’utiles pour la pres
cription , et il en auroit fallu 30. Il y a encore un an de
moins à l’égard de Jean Devèze qui ne parvint à sa majo
rité que le 24 septembre 1 781 .
Il faut avouer cependant qu’à l ’égard des trois autres
enfans , Gabriël, Michel et Marie D evèze, il auroit couru
plus de 30 ans utiles; mais dans la circonstance, Gabriël
Gazard ne peut point leur opposer la prescription ; parce
que si elle avoit l ieu, ce ne seroit pas à lui, mais aux
deux autres enfans, Jeanne etJean D evèze, qu’elle pourroit
profiter, et sans doute, ils sont bien les maîtres de ne pas
s’en prévaloir contre leurs frères et sœurs.
C ’est aussi ce que la sentence interlocutoire paroît
encore avoir préjugi , sans quoi ils auroient été dès-lors
déclarés déchus de leurs prétentions, et cet interlocutoire
n ’auroit été ordonné qu’avec les deux enfans contre les
quels il n ’avoit pas couru 30 ans utiles.
�..
. '( <I 4 )f f' •i ' Tr‘ f- j r
-s ~
Mais on a d’ailléurs parfaitement'démontré dans le
premier mémoire des demandeurs par l ’autorité des l oi s,
et la doctrine de le Brun et celle du savant R icard , que
‘les enfans seuls contre lesquels la prescription n’auroit
pas opéré , auroient profité des portions de ceux contre
lesquels elle se seroit accomplie par l’effet de l’accroisse
ment qui a lieu entre les héritiers ab-intestat, et qui ne
se fait qu’à ceux de la même branche , et non à ceux d’une
autre branche. L e cas particulier de la prescription ne
change rien à l’effet de l’accroissement qui auroit lieu par
une répudiation ou une abstention des cohéritiers de la
même branche ; idemque e r it, dit la lo i, et si tempore exçlusus sit. Ainsi il est évident c[ue si Gabriël, Michel et
Marie Devèze .avoient pu perdre par la prescription les
droits qu’ils avoient comme héritiers de leur mère dans
la succession de leur a ï e u l , et de leur grand’mère , ces
droits n ’auroient accru'qu’à Jeanne et Jean D evèze, leur
sœur et leur frère^ e.t non à Gabriel G azard, second du
n o m , leur oncle.
On se persuade donc d’avoir solidement établi les de
mandes qui ont été formées contre le défendeur. Il doit
même dès-à-pjésent paroître très-évident que Jeanne
Gazard n’a pas été repiplie, à plus de 1,2 0 0 ^ près, de sa
portion dans les biens de son père, par la dot de 3,0 0 0 ^
qui fit le prix de sa renonciation , et que par conséquent
la renonciation à la succession de la mcre se trouve sans
prix ; c,e qui opcre la nullité de la renonciation, tant pour
l ’une que pour l’autre successions. L ’insuffisance dé la
dot de 3,ooo‘t+' devroit donc des-à-présent être regardée
comme démontrée , sans ^u’ilfut besoin d’en venir à une
�(1 5 )
nouvelle estimation. C e ne peut donc être que très-subsi~
diairement qu’on a demandé un amendement de rapport
ma i s , en tout c a s , s’il pouvoit encore rester l’ombre
difficulté, cet amendement ne pourroit etre refusé, dès
. que les demandeurs offrent d’en avancer les frais.;
Monsieur D E V A L , Rapporteur
Me. A N D R A U D , Avocat
a
M A N D E T , je une , Avoué
. à
ihsuS-iAjti »4 i 4jûmMA4 ClUw.
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D E L’ I MPR I M E R I E D E L A N D R I O T . 1792.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Devèze, Jean. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Deval
Andraud
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
renonciation à succession
donations universelles
dot
tutelle
office de notaires
pays de droit coutumier
prescription
doctrine
experts
fraudes
minorité
Description
An account of the resource
Titre complet : Troisième mémoire. Réponse au second mémoire du défendeur. Pour Jean Devèze, Jeanne Devèze, sa sœur, fille majeure, tant en son nom propre et privé, qu'en qualité de cédataire de Michel et Marie Devèze, ses frère et sœur, tous héritiers de Jeanne Gazard, leur mère, et par représentation de Gabriel Gazard, leur aieul, et de Marguerite Bouchet, leur grand'mère, demandeurs. Contre Gabriel Gazard, second du nom, leur oncle, notaire royal, habitant de Saint-Mary-le-Plein, défendeur.
Annotations manuscrites avec transcription de l'arrêt, les 3 héritiers majeurs ont été déclarés non recevable et la demande en partage a été acceptée pour les deux autres.
Table Godemel : Mineur : une renonciation faite par une fille mineure, dans son contrat de mariage en 1743, autorisée par sa mère qui était sa tutrice, au profit de son frère, à la succession échue du père et à la succession à échoir de la mère, moyennant un prix unique, est-elle nulle, surtout, lorsque dans le même contrat la mère commune fait au fils donation universelle de tous ses biens, sans avoir rendu compte de la tutelle ? si la prescription trentenaire est acquise contre quelques-uns des demandeurs, et que la minorité des autres ait conservé leurs droits, les mineurs ont-ils relevé les majeurs ? en tout cas ces mineurs peuvent-ils profiter des droits des majeurs par droit d’accroissement ? 2. une renonciation faite par une fille mineure, dans son contrat de mariage, en 1743, autorisée par sa mère qui était sa tutrice, au profit de son frère, à la succession échue du père et à la succession à échoir de la mère, moyennant un prix unique, est-elle nulle, surtout lorsque, dans le même contrat, la mère commune fait, au fils, donation universelle de tous ses biens, sans avoir rendu compte de la tutelle ? le délai pour se pourvoir en rescision contre cette renonciation est-il de dix ou de trente ans ? Rescicion : le délai pour se pourvoir en rescision contre une renonciation à succession échue du père et à échoir de la mère, est-il de dix ou 30 ans ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1721-1792
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1005
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1002
BCU_Factums_G1003
BCU_Factums_G1004
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53103/BCU_Factums_G1005.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Mary-le-Plain (15203)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
donations universelles
dot
experts
fraudes
minorité
office de notaires
pays de droit coutumier
prescription
renonciation à succession
Successions
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53097/BCU_Factums_G0936.pdf
332f905acce22ca04152cde66959ac8d
PDF Text
Text
P
R
É
C
I
S
P O U R L o u i s B O I S S O N , citoyen de la
ville de RiOM plaintif.
,,
CONTRE les sieurs TRAPET, MARCHAND
PELLABO U T, ASTRE, garçons tanneurs
et PE TIT, dit TIX IE R , voiturier, tous de cette
ville de Riom , accusés.
couru les risques de perdre la vie dans mon
ja rd in , où les accusés se sont introduits exprès pour
m’assassiner. Pour en avoir le prétexte, ils me provoquent
par les outrages les plus sanglans , et les obscénités les
plus infâmes.
L a présence de mes enfans, auxquels je dois l’exemple
de la prudence , et la crainte de les voir victimes de-la
fureur de ces forcenés, me rendent patient au-delà du
croyable je souffre les outrages sans y répondre ; ils
durent trois quarts d’h eu re, au m oins; e t , lorsque je
A
J ’A I
�\
■:
■ c o
v *
crains de voir pousser ma patience à b ou t, j ’ai recours à.
la fuite. J e quitte mon chez moi avec mes enfans ; je
l ’abandonne aux assaillans ; mais ils me poursuivent sur
le grand chemin ; ils se jettent sur moi : les coups de
pierres et de bâton pleuvcnt sur ma personne ; ils veulent
m’arracher un fusil , que je remporte de mon jardin à
la ville , sans doute pour consommer plus facilement,
avec cette j&rme , le crime cpi’ils ont médité : lorsqu’ils
sont trompés dans leur ^espW'j ils: ameutent le peuple
contre moi par le^cri qui leValîie f e f s i j ’ai Conservé la
yie 3 je la dois à plusieurs gardes nationaux qui accourent
au secours d’un, homme qu’on assassiné ( i ).
Pour me soustraire ai là *îiiréiir ^d’e^cé^peuple trompé
gar_ me^ ^ssassins^, qui^ crioient que j ’avois tué deux
hommes à coups'de fùsil , je suisv'<àBligé? de demander à
la m u n icip a lité un asile*dans le/séjour des c r im in e ls ,
tândis-que le s cciim in els;vtQnt coucher tra n q u illem en t dans
leur lit : pour comble de disgrâce ? j ’apprends qùfe l’on
impute mon malheur à une imprudence de ma part ; qu’on
répand que j ’ai tiré'su fiîes enfaris'qui se b a ig n o ie n t, et
p e n d a n t q u ’ils é to ie n t dans l ’eau.
i ■
~ J ’apprends encore que ces malheureux ont ,des pro
tecteurs , et qu’ils espèrent fermer la bouche à mes té
m oin s, et se.soustraire^à la punition de leur crime. Je dois
donc détromper mes concitoyens, et leur faire connoître
la vérité, les coupables, et la satisfaction qui m’est due.
( i ) MM. Barbat du Clozcl et Loriette, de Clermont; Dumontj
ci-deyant procureur ; Forel, oratoiienj Rougier, fils J Faure , grç*
nadier de la garde nationale.;
'
,
9
�yy ° )
< j. )
y ^
.Tout le jnbnde saif 4 u e rje suis adjadic^ita ire.cje l ’en cios
de Bardon , dont j ’ai fait un jardin à gros frais. Il est
fermé de murs à trois aspects ; un faux ruisseau , amené
du moulin des Boules, et-démembré du grand ruisseau,
à la faveur d’un droit de prise d’eau , le ferme à l ’aspect
de bise. Mon ja rd in , le Champ-Redon , et, le ruisseau
qui les sépare, ne form oient, avant mon adjudication ,
qu’une même propriété des dames religieuses de la visita
tion, de cçtte v ille , et la moitié de son lit fait aujourd’hui
partie de la mienne.
■
3;, ; ,
,■ * ,
. Au bout de mon enclos, à l’aspect de jo u r, les anciens
propriétaires avoient fait un rutoir ou une serve, aux
dépens du terrein qui en fait partie ; et à la faveurjd’une
digue qui en soutient le terrein , l ’eau „est retenuejî la
hauteur nécessaire, soit pour faciliter l ’irrigationfdes deux
héritages, soit pour faire chute au moulin .Bardon ,,.dont
les dames religieuses de Sainte-Marie étoient aussi pro
priétaires.
:
...
Depuis la digue jusqu’au mur de clôture , , à l ’aspect
de jo u r, le ruisseau porte le nom de ruisseau Beaum é,
parce qu’il l ’est effectivement; entre le ruisseau Beaumé
et l’ancieii rutoir, il y a une langue de terrein de 12 à
15 pieds, sur lequel sont d’anciens arbres qui font partie
de mon adjudication ( 1 ).
•j
. . . i;
Ainsi je suis seul propriétaire de l’ancienne .serve ou
( 1 ) Cela est établi par un plan géométrique des sieurs Manneville et Savarin qui ont fait 1arpentage de mon jardin , par ordre du
district, et j’ai fait l ’année dernière et celle-ci les mayères qui ont
été successivement en coupe.
A 2
�Ÿùtolï
jfcôifteèdelalànguedutetéiriquiestau-delà
.
■<*■>
du tnur qui rénfefrftie le tout dans l’enceinte de mon
jardin*. A l’égard dü lit du ruisseau, j ’en suis co-propriétâife dans toute sa longueur s depuis le pré de M .
Sàm pigny, jùsqu’à mon mur de clôture.
L e public n ’a donc aucun droit dé venir se laver dans
ce ruisseau qui n’est pour ainsi dire qu’un b é a i, environné
de propriétés particulières, et pratiqué pour l'usage du pro
priétaire s cela est si v r a i, c ’est qu’on ne peut y arriver
qu’en traversant ces propriétés particulières, ce que nul
ii’adroit de faire, pas même du consentement d’un des ri
verain s, dont la Co-jouissanee n’est pas cessible , dès que
là propriété ta’est que promiscue entr'eux.
Cependant sur le fondement que dans les tettips où la
ctiltùre des deux héritages que ce ruisseau divise , étoit
livtée à 60 ou r8o fermiers ou sous-fermiers, on hantoit
familièrement ce ruisseau, et même l’ancien rutoir, prati
qué dans mon jardin : quelques jeunes gens de la ville se
iônt persuadés que cettë tolérancè des anciens jouissans
leur forme aujourd’hui un droit acquis : il sem ble mêmô
îqu’ils ont entrepris de me faire tenoncer à la jouissance de
taon jardin.
Ils viennent journellement se baigner, et dans mon ruis
seau , et dans mon rutoir ; ils s’y mettent exactement
hus , sans s’embarrasser s’ils peuvent être v u s, ou non r
par des personnes du sexe ; ou pour mieux d ire , c’est
lorsqu’ils en v o ie n t, soit dans le Cham p-Redon, soit
dans mon jardin , qu’ils affectent de se montrer davan
tage ( 1 ).
( r ) Quelques personnes mieux élevées et mieux instruites n y
�Ils font p lu s, ils s’attachent à me provoquer et à me
braver, lorsque je suis dans mon jardin ; ils y viennent en
troupe pour être en force et m’insulter impunément ( i ).
Parmi ces jeunes gens se sont fait sur-tout remarquer le
sieur T rap et, fils j un sieur Marchand ( a ) , et un sieur
P ellab ou t, tous garçons tanneurs de cette ville , et
un sieur Petit, dit Tixier , fils du voiturier, qui se sont
mis dans la tête qu’ils avoient autant de droit que m oi, non
seulement au ruisseau, mais même au rutoir qui fait
essentiellement partie de mon jardin, comme renfermé
dans les murs qui en forment l ’enceinte.
J ’ai reçu en conséquence, de leur p a r t , plusieurs in
sultes, et sur-tout de très-graves, de la part du sieur Trapet
t[ui m’a toujours paru être le chef et le principal acteur
des scènes que j ’ai eues à supporter, qui s’est montré
chaque fois non seulement un homme qui est sans mœurs,
tnais qui se fait encore une gloire de les braver et de se
livrer aux actes et aux propos de la plus infâme obscénité.
sont venues que de mon agrément, et d une matière décente : toutes
personnes honnêtes auroient cet agrément, sans le demander, s’ils y
venoiçnt de la même manière.
(i)
Il y en eut même un qui poussa l'audace jusqua menacer
de battre mon enfant, parce qu’il vouloit chasser de mon jardin un
chien qui pouvoit y faire du dégât.
A la vérité tous n’ont pas été aussi malhonnêtes; et dans la même
société , il s’en trouvoit qui paroissoient reconnoitre la justice de
mes plaintes.
( 2 ) Il est mon parent; j’ai même été assez heureux pour rendre
quelques petits services à sa famille > dent une partie est venue
me témoigner les plus vifs regrets de sa conduite.
�( O
J e m’étois tu sur les premiers motifs de plainte que ces
jeunes gens m’ont donnés ; une seconde scène plus grave
me détermina à me plaindre à un de MM. les officiers
municipaux : je nommai principalement le sieur T ra p e t;
je ne voulois pas en faire encore une matière à p ro c è s(i);
je sollicitois une ordonnance de police contre les indé
cences de la jeunesse ; j ’espérois que l’ordonnance que
je sollicitois, en défendant à toutes personnes de paroître
nuesj dans les endroits fréquentés , me débarrasseroit de
cette foule d ’étourdis et d’m solens, qui rendent impos
sible toute jouissance de mon jardin ; je ne voulois leur
faire d’autre mal que de les chasser de chez moi.
L ’impunité enhardit les ames basses et malhonnêtes ;
ils imputent à crainte et à foiblesse les ménagemens dont
on use à leur égard ; et cette espèce d’hommes mesure
toujours sa hardiesse sur le degré de crainte qu’ils s’ima
ginent inspirer ; tels ont été les accusés ; parce que j ’ai
_ ( i ) Entre les insultes que le sieur Trapet vomit , il me dit que
son père étoit procureur, comme m oi, mais avec cette différence que
son père étoit u n h o n n ê t e h o m m e , e t q u e j'étois un coquin; je me
contentai de lui répondre , que si son père étoit aussi honnête
homme qu’il le disoit, il devoit payer à la communauté des procu
reurs l’argent qu’elle lui avoir prêté et qu’il leur fait perdre. J ’avois
alors été provoqué à tel point par le sieur Trapet qui s’étoit, ainsi
que ses camarades, armé de pierres contre moi, et q u i, pour me les
lancer sapprochoit du bord de mon p ré , qu’un sieur Rougier'qui
de mon agrément faisoit baigner son cheval, fut obligé de le prendre
par le corps pour le retenir , et lui dit qu’il étoit bien heureux qu«
je fusse plus prudent que lui : ce jeune homme qui m’a parit fort
honnête , et que j ’ai appelé en témoignage , rendra assurément
compte de ce fait.
�c 7 }
souffert de premières insultes, lors même que je pouvoia
avoir pour moi l’avantage des armes et du nombre : parce
que je n ’ai pas même cherché à les en faire punir par la
lo i, ils ont cru qu’ils pouvoient venir m’assassiner impu
nément.
j C ’est dimanche dernier qu’ils ont choisi pour exécuter
ce complot : sur les six heures et demie du soir,ils s’introdui
sirent dans mon jardin, en passant sous-le pont, non pour
y prendre les bains, car le temps ¿toit si froid, que l’usage
ne pouvoit qu’en être funeste : l’air furieux avec lequel
ils entrèrent, annonçoit leurs desseins et les fit suivre par
plusieurs particuliers ; ils ont à peine les pieds dans l ’in
térieur de l ’enclos, qu’ils crient qu’il faut me tuer; ils
s’excitent à ce meurtrç à haut cris ; ils s’imaginent que
le bruit qu’ils font m’attirera vers eux ; ils se trompent,
J ’étois au haut de mon jardin avec mes enfans, où je
cueillois quelques fruits, et récoltois quelques grains; ils
étoient alors dans l’ancien rutoir à 80 pas de nous , je
feignis de ne pas les entendre, et ne bougeai point. Alors
ils moptent dans le pré qui fait partie de mon enclos; ils
le traversent dans toute sa largeur.en crian t, ou pour
mieux dire en hurlant; ils vont jusqu’au ruisseau Beaumé ;
ils reviennent dans mon pré ; j ’affecte de leur tourner le
dos : alors ils m’appellent et m’insultent; je fais la sourde
o re ille ; j ’ai déjà dit les raisons de ma m odération,j’avois
mes enfans avec m oi, mais ellenefaisoit pas leur compte:
ils prirent un autre moyen pour m’émouvoir et m’attirer. '
Trapet.se déshabille ; il se met nu , exactement nu ; en
cet état il s’ étale sur mon p ré, et, tourné de mon côté, il
affecte de montrer sa nudité, en appelant ma fille et
�C 8 )
moi ( i ) , en nous provoquant à l ’acte de la plus grande
obscénité , et en tenant et répétant des propos tels qu’on
rougiroit de les prononcer dans les lieux mêmes destinés
à la débauche la plus crapuleuse. A ce spectacle , à ces
horreurs, mes enfans et moi courûmes nous cacher dans
ma maison basse ; nous en étions éloignés : il profita du
temps que nous mîmes à y arriver, pour s’approcher, nous
répéter les mêmes propos, et nous les faire mieux entendre:
arrivés à notre m aison, nous fermons portes et fenêtres;
ses camarades et lui s’approchent alors davantage ; il vient
nu jusqu’au milieu du p r é , et nous les y entendions
comme auparavant ; les obscénités , les insultes, les me
naces se succédoient et se répétaient sans discontinuation.
Soit pour ne plus les entendre , soit pour être plus en
sûreté, je monte avec mes enfans en ma maison haute(2),
je m’y ferme derrière, et me contente de regarder par la
fenêtre ce qu’ils deviendroient.
Trapet nous voyant échapp er, courut s’habiller en
partie ; car il ne prit pas le temps de se chausser, et
re v in t comme un furieux , avec q u e lq u e s-u n s de ses
cam arades, jusqu’au milieu du jardin ; l à , armé de
pierres qu’il frappoit l’une contre l’au tre, il m’appeloit,
en me menaçant et en me défiant de venir j il insulta
ma domestique ; il menaça de la battre : lorsqu’il vit
que je ne me mettois pas en mouvem ent, il traversa,
( 1 ) Elle aura bientôt quinze ans.
( 3. ) Mon domestique, qui (levoit sortir le même soir de chez moi
m'avoit rendu un outil, et un fusil que je lui avoit donné pour la
garde du jardin , <t je l'emportais ¡)vec moi.
avec
9
�(> ))
avec quelques-iins de ses camarades'qui s6 contentoient
de m’insulter de plus loin , la partie basse de mon jardin
dans toute sa longueur ; il revint sur ses p a s, s’approche
de moi en me disant qu’il vouloit venir sortir par la
po rte, et en invitant ses camarades à lui porter un bâton.
A ces mouvemens, à la fureur qui se manifestoit chez
ces assaillans , je ne doutai pas que leur projet étoit de
m’assassiner ; la frayeur s’étoit emparée de mes enfans ,
nous résolûmes de venir à la ville avant qu’il fût plus
nuit j nous sortons, et laissons ces assaillans dans mon
jardin. Mais pendant que nous les évitons, ils nous
cherchent j nous venions à la ville par le chemin de
Bardon"; les compagnons de Trapetnous voient sortir ;
une partie passa sous le pont, et vint nous couper le pas.
Trapet ne nous avoit pas vu sortir , et ne m’appercevant
plus à ma fenêtre, vint à ma maison haute , en m’appe
lant et en criant : Où est-il, ce coquin de Boisson, où estil que je le tue ? Cependant nous voyions en venant ici
ses camarades sortir de dessous le pont, et déjà au-devant
de nous. Pour les éviter, nous rebroussons chemin , et
nous enfilons un sentier qui conduit au faubourg de
Clermont ; mais déjà Trapet et un autre sont sortis par
le portail de mon jardin ; et les autres étoient venus à
bride abattue sur nos pas. J e vois leur dessein de nous
suivre par ce petit sentier peu fréquenté ; nous nous
arrêtons, je prends témoins ; ils passent en se tenant
sous le bras et m’insultant : je me contente de le faire
remarquer. Ils feignent de prendre un chemin qui
conduit à la Varesne. Nous revenons sur Je grand
chemin j ils y sont aussi-tôt de retour que nous i ils
B
�4'
( 10 )
s’arrêtent près de moi en continuant leurs insultes ; alors
plusieurs personnes passent , et nous les suivons, dans
l ’espérance que ces forcenés n’oseroient nous attaquer en
leur présence; m ais, vaine précaution l ils se contentent
de nous suivre en chantant jusqu’à ce que nous sommes
arrivés en face de la porte du moulin Bardon ; là , ils
avoient des amis et des soutiens dans le m eunier, son
domestique et ses enfans, contre lesquels j ’ai déjà rendu
plainte pour mauvais traiteniens commis sur la personne
de ma fille a în é e , à coups de pierres.
> C e fut devant le moulin que mes assassins, confians
dans le secours que le meunier leur avoit promis , sans
doute , viennent m’assaillir ; j ’étois au milieu de mes
deux en fan s, Trapet s’approche en m’insultant; je
rapportois de mon jardin à la ville le fusil que j ’avois
confié à mon jardinier ; je le tenois sous le bras droit,
la crosse en arrière , le canon en avant ; il fa u t que tu
rendes cé fu s il à ma compagnie , dit-il , ou j e te coupes
la fig u re à coups de bâton ; et dans le même in stan t,
pendant que de la main gauche il s’em pare du bout
de mon fusil , de l ’autre il me porte deux coups d’un
bâton à nœuds , beaucoup plus gros en bas qu’en haut ;
il espéroit , sans doute , que cette attaque imprévue
me feroit lâcher plus aisément mon fusil ; mais elle
produisit l’effet contraire ; il m’étoit aisé de voir que ces
assassins vouloient s’en emparer pour s’en servir contre
moi , et je le saisis des deux mains ; en vain Trapet
continuoit de me porter des coups de bâton à la tête ?
pendant qu’aidé d’un ou deux de ses cam arades, il
tiroit le fusil par le bout du canon, que d’autres cher-
I
�itr
( 11 )
choient à m’arracher la crosse des m ain s, et que
d ’autres me lançoient des pierres ; je tins bon , lorsque
le valet du meunier accourut , se précipita sur moi ,
me porta deux coups à la tête et me terrassa. Cependant,
dans les efforts respectifs de mes assassins pour m’ôter
le fusil, et des miens pour le retenir, le coup partit( i ) ,
mais il n ’atteignit aucun de mes meurtriers qui avoient
eu soin , en essayant de l’ô ter, d’en placer la bouche
entr’eux , de manière que le coup en partant ne pût
les atteindre ; car ils sentoient bien qu’ils ne méritoient
aucun ménagement de ma part ( 2 ) ; ce qu’il y a de
v r a i, c’est que Trapet , ses camarades et le valet
( 1 ) Sans doute il s etoit armé , lorsque Trapet en le prenant par
le bout l ’avoit tiré de dessous mon bras.
(2 )
Trapet a montré une meurtrissure à la poitrine ; elle ne peut
être du coup de fusil, parce que, ou il étoit boutonné, ou il avoit la
poitrine nue : dans le premier cas, si le coup avoit porté à bout tou
chant à l’endroit qu’il indique , dès qu’il n y a aucune blessure , ce
seroit une preuve que le fusil n etoit chargé qu’à poudre ; mais
alors ses habillemens auroientbi en em p o ch é le coup de marquer sur
sa poitrine:si sa poitrine eût été nue, ou seulement couverte de sa
chemise, alors la poudre auroit brûlé le linge ou la poitrine dans la
largeur d’une assiette, et il auroit dû le faire constater par le juge
de paix , lorsqu’il se transporta chez lui , sur la suppositiun qu’il
ne pouvoit sortir: l’assertion est donc fausse; mais quelqu'un qui dit
avoir vu le sieur Trapet, m’a assuré que sa peau sur le côté du bas
ventre présente , comme de petites, vessies ou levures, ce qui
annonce que la poudre en sortant du canon l’a eiïïeuré légèrement
et brûlé en cette partie , et confirme ce que j ’ai dit que le coup
n avoit pu passer qu’entre lui et son camarade.
. t,
�du m eu n ier, ne cessèrent de me frapper jusqu’à ce
<jue, m’arrachant de leurs mains , je me sauvai dans
Ia maison voisine , dont la porte étoit ouverte, dans
l ’espoir que cet asile ne seroit point v io lé , et que je
pourrois y retirer mes enfan s, dont l ’état faisoit mon
plus grand mal et ma plus grande inquiétude ; mais
les meurtriers m’y poursuivirent avec fureu r, et s’y
précipitèrent aussi promptement que moi ; le meunier
et un autre y furent les premiers ; ils sautèrent sur moi
pour me terrasser : je vis alors que j ’allois être; assas
siné dans cette maison, sans espoir de secours : j ’es
quivai , en me baissant , les mains qui vouloient me
saisir ; ils ne purent prendre que ma perruque et mon
chapeau qui quittèrent ma tête ; je profite du moment';
je m’arme de force et de courage , je repousse et
éloigne de moi , par un effort du. bras d ro it, les deux
coquins qui s’étoient jetés sur moi , et en poussai en
avant trois ou quatre autres qui étoient sur le pas de
,1a porte pour entrer dans la m aison, et je m’échappai,
la tête n u e , et en parant du bras les coups de bâtons
qu’on me portoit.
Mes enfans, plus morts que v ifs, jetoient les hauts
cris ; j ’appelois du secours , et ne pouvant me résoudre
à les laisser seuls au milieu de mes assassins , je ne
courois qu’en proportion de leur force pour me suivre ,
et cependant j ’étois accablé de coups de bâtons et de
coups de pierres ; les scélérats, ils ne sont pas assez de
huit contre un , ils ameutent contre moi le peuple ,
ils le provoquent en criant : A rrête£ L'aristocrate, il a tué
deux enfans y et dans l'instant j e suis’ assailli par cent
�C
)
personnes; j ’allois perdre la v ie , j ’en aurois perdu mille,
si je les avois eu es, sans le secours des braves gardes
nationaux qui m’arrachèrent aux assassins , me condui
sirent à la municipalité , me défendirent généreusement
contre les coups qu’on me portoit en chemin.
• Tout le monde sait le reste de cet événem ent, le
rassemblement populaire qui eut lieu auprès d e là maison
de ville , et le parti que je fus obligé de prendre
pour ma sûreté.
.
; '
...
Mais ce que l ’on ne conçoit p a s , c’est la ^situation
de mon fils qui me suivit à la maison de ville et en
prison , et qui s’évanouit à différentes reprises ; c’est
celle de ma fille qu’on avoit portée évanouie chez moi}
et que la douleur et le désespoir tinrent pendant'deux
heures entre la mort et la vie ; eh ! qui pourra, s’il n’est
pas père, se peindre ma situation pendant tout le temps
que j ’ignorois le sort de cet enfant, et jusqu’à ce qué
je l’eus vu e; les scélérats, sera-t-il jamais en leur pouvoir
de réparer tout le mal qu’ils m’ont fait ? quelle,,puis
sance humaine le pourroit? Voilà les faits ( i ) : je n’ai
besoin d ’a u cu n e réflexion. Il suffit de la connoître pour
juger les coupables et la punition qu’ils méritent. Qui
n e verra qu’ils ont cumulé les délits lés plus graves; ils ont
violé ma propriété; ils l’ont souillée ; ils "¡sont vernis dè
dessein prémédité ppur m assassiner 3 puisqu aucun ne
( i ) Toutes les dépositions des témoins , en forment la preuve,
et ils se seroient exprimés bien plus disertement encore , si.lors de
leur déposition, leur mémoire eût été rafraîchie sur cliaqiie fait de
la plainte, et si la s l^ ifit é du juge ne les-eût pas interdits.
�(
H
)
s’est m ouillé, ni mis à même de le fa ir e , si ce n’est
le sieur Trapet qui voüloit aggraver l ’insulte. Ils ont
commisr• ou servi de soutien à des obscénités horribles
devant une jeune personne de quinze ans. Ils sont
vpnus ensuite m’attaquer en grand chemin pour m’homicider ; ils m’y ont assailli ; ils auroient consommé leur
crime , s’ils Pavoient pu ; enfin , ils ont provoqué une
émotion populaire pour faire faire par le peuple ce
qu’ils n ’avoient pu faire eux-mêmes , m’arracher la vie.
Pour mettre le comble à leur scélératesse , ils se sont
livrés à la plus noire calomnie ; quels hommes ( i ) !
( i ) Trapet dit à la maison commune , que je lui avois tiré un
coup de fusil et deux coups de pistolet. Dans sa déclaration devant
le juge de paix ( M. Polignat ) , il a dit d’abord que dans la
chem in, je lui avois tiré un coup de fusil ; qu’il avoit ra té , et
que de la maison où je m’étois réfugié, je lui avois tiré un coup
de pistotet ; ce n’est que par réflexion , et par un renvoi, qu’il
a ajouté que j’avois réarmé mon fusil et tiré un second coup : dans
son i n t e r r o g a t o i r e , il a dit qu’il ne savoit pas si le c o u p de pistolet
étoit parti ; mais que je l’avois sorti, et qu’il avoit eu tant de
p e u r, qu’il s etoit évanoui, et qu’il ne sait s’il a raté ou s’il esc
parti. Dans le fa it, j ’ai déposé à la municipalité le pistolet bien
chargé , bien amorcé , et je réponds qu’ujx essai prouveroit que sur
cent coups, il ne rateroit pas un seul. Il est plaisant d’entendre dire
au sieur Trapet qu’il a été raté d’un premier coup de fu sil; qu’il
en a reçu un second dans la poitrine; qu’il 11e s’est pas trouvé mal,
puisqu’il a dit qu’après le coup , il avoit voulu m’arracher mon
fu sil, et qu’il s’est trouvé mal à la vue d’un pistolet. Cet homme là
n’est-il pas aussi bête que scélérat? A coup sûr, depuis qu’il m’afteignit, jusqu’à la maison-commune, il nd^essa de me frapper, ou
d’essayer de le faire. A mon égard, si je m\rois servi, à dessein, ds
�1
5 )
mon fu s il, si je m’étois servi de mon pistolet, je n’aurois besoin ni
de désavouer , ni de me justifier ; eh ! où est le doute que je me
s erois servi , et de toutes mes forces , et de toutes mes armes, pour
écarter ou diminuer le nombre de mes assassins, sans un sentiment
plus fort que celui de ma conservation , la crainte de faire assas
siner mes enfans : ouï, ce n’est ni dans ma foiblesse, ni dans ma pru
dence que j ’ai puisé, et ma patience, et ma modération; c’est à ma
tendresse paternelle qu’ils en ont l ’obligation : sans la présence de
ces êtres chéris, ils auroient vu ce que peut un homme arm é, quand
il a à défendre sa vie mais j ’ai mieux aimé leur laisser assouvir
leur rage sur m oi, que de la voir tomber sur ceux-ci.
B O I S S O N .
^
mmmmmtmé——— —
A R IO M , D E L ’IM P R IM E R IE DE L A N D R IO T , 1752.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boisson, Louis. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boisson
Subject
The topic of the resource
violences sur autrui
violation de domicile
jouissance des eaux
béal
troubles publics
atteintes aux bonnes mœurs
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Louis Boisson, citoyen de la ville de Riom, plaintif. Contre les sieurs Trapet, Marchand, Pellabout, Astre, garçons tanneurs, et Petit, dit Tixier, voiturier, tous de cette ville de Riom, accusés.
Table Godemel : Violation : de domicile et voies de fait.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1792
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0936
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53097/BCU_Factums_G0936.jpg
atteintes aux bonnes mœurs
béal
Jouissance des eaux
troubles publics
violation de domicile
violences sur autrui