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f
COUR R O YA LE
MEMOIRE
EN RÉPONSE,
P
our
™
'
les héritiers C A P E L L E , A p p e l ans;
C ontre la dame N O U V E A U et le S r V A L E N T I N ,
SON m a r i , I n t i m e s ;
EN
PR É SE N C E
D es dames L A N G H E A C D E
M O N TLO G IS
et autres aussi Appelans.
L
e s
héritiers Capelle pensaient avoir suffisamment
développé leur défense
déjà publié;
clans l ’écrit q u ’ils avaient
Ils avaient tâché d ’etre courts sans être obscurs;
Ils avaient voulu sur-tout être vrais dans l’exposé
des faits ;
Ils avaient cru raisonner juste dans la discussion
des moyens.
*"
-
M. Tassin de Vîllepion*
rapporteur.
�^
Lj^
( 2 )
Mais par un long mémoire en réponse, le sieur
Valentín les a avertis, en termes fort d ou x, que leur
défense était établie sur des suppositions erronées; que
les sacrifices dont ils parlaient n’.étaient que des rêves;
que leurs moyens de droit étaient plus subtils que
solides.
L e sieur Valentín a consacré trente-neuf pages à un
exposé destiné, d it-il, à rétablir des faits, dans les
quels tout était in exa ctitu d e 3 et à prouver à chaque
pas a u x héritiers C a p e lle , le contraire de ce q u ’ils
avancent.
Soixante pages ont eu pour but de leur enseigner
la vraie doctrine sur les substitutions.
Les héritiers Capelle ne parcourront pas tous les
détails dans lesquels on est entré; mais ils doivent
démontrer que s’il y a des inexactitudes, elles ne leur
appartiennent pas ; que si quelqu’un a rêvé des sacri
fices, c’est le sieur V a le n tín ; et que si leurs moyens
avaient été sans force, ou ne les aurait pas éludés au
lieu de les combattre.
D IS C U S S IO N D E S FAITS.
Le sieur Capelle était père de plusieurs enfans nés
d ’un premier mariage, lorsqu’il épousa, en 178 6 , la
demoiselle Marie-Judith Langheac de Montlogis.
Toute la fortune de celle-ci se composait d ’uue dot
de 10,000 francs.
Celle du sieur Capelle était considérable.
�Il n’y avait entre les deux fortunes aucune propor
tion : il y en avait peu dans les âges.
Mais une parente de la demoiselle de M ontlogis, la
dame veuve Jalinques, qui avait reçu ses richesses des
libéralités de son époux, voulut les répandre sur une
personne de la même famille ; et le sieur Capelle était,
parent du sieur Jalinques.
L a veuve Jalinques ménagea une union q u ’elle dé
sirait , et la récompensa par ses bienfaits envers les
deux époux.
E lle leur donna les biens dépendant de la succession
Jalinques ; elle entendait les donner à l ’époux comme
à l ’épouse*, à celle-ci, dans le cas seulement où elle
aurait des enfuns du présent mariage. Dans tous les
autres cas, les biens donnés deyaient a p p a r t e n i r au
sieur Capelle, o u , si celui-ci prédécédait, à ses héri
tiers naturels, ou à l ’héritier de son choix (i).
Des charges très-onéreuses, imposées au sieur Capelle
lui-inéine, grevaient la donation. L e sieur Capelle s’y
soum it, parce que ses sacrifices devaient enrichir ses
en fans.
Telles furent les principales circonstances de l ’union
du sieur Capelle et de la demoiselle de Montlogis.
U n mémoire imprimé les avait exposées, avec plus
de détail même, en première instance.
On ne les avait ni contredites, ni censurées alors :
elles étaient trop notoires.
( i) . N ota. L a veuve Jalinques disposa, en faveur de sa sœur seu le,
de
3ooo
fr. de d o t , formant sou patrim oine particulier.
�( 4 )
On a cru devoir les critiquer avec amertume devant
la Cour.
On a parlé de spéculation, de v ieille J i llc .........
épousée uniquement p our sa fortun e.
Enfin l ’on a moralise sévèrement*, et néanmoins, dans
la page précédente, méconnaissant sa propre morale,
le sieur Valentin nous apprend que c’est sous la f o i de
la fortu n e q u ’on lui dispute, q u o n t été contractés
cleuæ mariages successifs , ce lu i du sieur Nouveau ,
et c e lu i du sieur V alen tin .
Les sieurs Nouveau et Valentin ont donc sp écu lé
eux- mêmes.
Les spéculations du sieur Capelle avaient au moins
de louables motifs. Ses enfans étaient en bas âge 5 il
trouvait dans sa nouvelle union le double avantage,
et de les confier aux soins d ’une seconde m ère, et de
leur procurer une
fortune
considérable , dont les
charges n ’étaient que p o u r lui.
L e s i e u r N o u v e a u n’avait point d ’enfans et n ’en a
jamais eu. Il se fit donner des biens litig ie u x , et prévit
le litige.
L e sieur Valentin s’est marié pendant le procès
actuel.
A in si, pour lui et pour le sieur Nouveau, tout a
élé calcul d ’intérêt personnel.
Pour le sieur Capelle, au contraire, les calculs
n ’avaient été que ceux de la tendresse paternelle.
Que le sieur Valentin s’applique donc à lui-meinc
scs propres leçons.
Les héritiers Capelle avaient fait observer l ’éienduc
�des charges qui grevaient la donation de 1786,, l ’obli
gation solidaire qu ’on avait imposée à leur p è re , les
sacrifices q u ’il avait faits pour s’acquitter.
Ils en avaient tiré non-seulement de puissans moyens
de considération, mais encore un argument décisif en
droit, et propre à écarter toute idée de substitution.
Ils avaient dit que les principes sur les substitutions
ne permettaient pas de supposer que des substitués,
dont les droits, incertains jusqu’au décès du grevé,
pouvaient ne jamais s’ouvrir, eussent été soumis euxmêmes , et solidairement avec le grevé, a acquitter les
dettes et les diverses autres charges de la libéralité.
A u lieu de répondre à l ’argument , on a tenté
d’affaiblir les considérations, en alléguant des inexac
titudes , et en soutenant :
Que les charges n ’étaient pas aussi grandes q u ’on le
supposait ;
Q u e , si la réserve de 120,000 f r . , que s’était faite
la dame de M u râ t, fut réduite à 100,000 f r . , ce f u t
une véritable générosité ;
Que les sommes payées furent peu considérables 5
Que les biens donnés étaient d ’une grande valeur ,
et qu e,
les charges ne devant s’acquitter que par
termes d e ' 3 000 francs, les revenus couvraient^ à
chaque terme, l ’intérêt et le principal 5
Que le sieur Capelle n ’y employa pas le prix de ses
biens propres, et qu ’il avait de quoi payer, par le
résultat de la doua lion.
foutes ces assenions des sieur et dame Valcnlin
�ont été ornées des mots in exa ctitu d es} i l n’ est pas
v r a i......... , ils osent d ire, et d ’autres expressions du
même genre, toutes d ’une urbanité remarquable.
Examinons si leurs propres traits ne réfléchissent
pas sur eux-mêmes.
L ’étendue et la valeur des charges de la donation
ne sauraient être sérieusement contestées. On en trouve
le détail dans l ’acte.
Payer à la donatrice une réserve de 120,000 francs;
Servir une rente viagère de Goo francs, due à la
dame Delons de G iro n d e , et lui laisser la jouissance
du domaine d ’Ayrolles-Vieille \
L oger, nourrir à l e u r p o t e t f e u et compagnie ,
éclairer, chauffer et blanchir, tant en santé q u ’en
maladie, le sieur Bouquier de Labro pendant sa vie ;
Acquitter toutes les dettes de la succession du sieur
Jalinques ;
Telles étaient les obligations que le sieur Capelle et
son épouse avaient contractées solidairement.
Elles n ’étaient pas légères, sans doute.
Nous osons d ire, il est vrai, que la réserve de
120,000 francs ne fut réduite à 100,000 francs, par
le traité du 20 décembre 1-91 , q u ’en retranchant les
paiemens faits par le sieur Capelle.
O r , selon les sieur et dame Valentin , les d eu x
traités de 1-86 et de 1791 prouvent que ce f u t une
véritable générosité de la dame de 3 Iurat.
Q ui 11c croirait, à ce ton de confiance, que le sieur
�Valentín a lu. dans les traités qu ’il indique, les preuves
de ce q u ’il assure?
Cependant le traité de 178G n’existe pas, ou au
moins, s’il existe,, il n’est pas connu : il ne se trouve
dans les pièces d’aucune des parties. L e sieur V alentin
en argumente, et ne le produit pas; on le demande à
son avoué qui ne peut le représenter.
C e prétendu traité serait même en contradiction et
avec celui de 1791 , et avec l ’arrêt du 28 août 1790,
qui condamnait le sieur et la dame G apelle à exécuter
la donation selon sa form e et teneur.
L e traité de 1791 est dans les deux dossiers.
On y lit cette clause remarquable :
« Savoir : que déduction et compensation faite de
« toutes les sommes généralement q u e l c o n q u e s , que
« ladite dame de Lanzac-Murat se trouve avoir payées
« à l ’acquit des sieur et dame C a p e lle , et que le sieur
« Capelle peut avoir payées à la clame de L a n za c« M urât ou ¿1 son acquit 3 ainsi que de celles que
« ladite dame de Lanzac-M urat avait perçues sur les
« fm itse t revenus du domaine de Saint-Michel, faisant
« partie des biens par elle donnés auxdits sieur et dame
« Capelle, la somme de cent vingt mille livres que
« ladite dame de Lanzac-Murat s’était réservée dans la
« donation par elle faite en faveur desdits sieur et
« dame Capelle , dans leur contrat de mariage ,
« demeure réduite et modérée à celle de cent m ille
<< livres en principal. »
On demandera au sieur Y alentiu lui-même si de
�OU
( S )
telles expressions, écrites dans un traité authentique,
n’autorisaient pas les héritiers Capelle à dire que la
réserve avait été réduite à 100,000 f r . , en retranchant
les paiemens fa its par le sieur Capelle ?
On lui laissera d ’ailleurs à décider de quel côté sont
les inexactitudes.
On lui fera cependant une petite observation ; c'est
q u ’il a en son pouvoir les titres de la famille Capelle,
les livres-journaux de leur père, ses quittances, tous
ses papiers en un m o t, q u i , des mains de la veuve
Capelle , sont passés d ’abord en celles du ‘ sieur
Nouveau , en l ’an 3 , et depuis en celles du sieur
V alen tin ; et qu ’ il est peu généreux, en retenant leurs
documens, de les accuser d ’incxar.Litudes.
On vient de voir combien l ’accusation a été peu
réfléchie quant aux charges; vérifions si l ’on a été plus
vrai touchant les paiemens.
Il suffirait peut-être de remarquer que les charges
étant considérables, les paiemens ont dii l ’être aussi,
et jeter le sieur Capelle, ou dans de grands embarras,
ou dans de grands sacrifices.
Mais entrons dans quelques détails.
D ’après le traité du 20 décembre 1 7 9 1 >
principale
des charges, celle de 120,000 francs, lut acquittée en
très-grande partie : il ne resta plus dù que 5 3 ,000 fr.
D epuis, le sieur C apelle, si l’on en croit les époux
Valenlin ou le sieur Nouveau q u ’ils représentent,
aurait payé sur cette réserve une somme de 18 ,118 fr.;
�( 0 )
en sorte q u ’il n’était d u , au décès du sieur Capelle,
que 34.5882 francs de principal.
Nous disons, si Von en croit les ép ou x
a l en tin
et le sieur N ou vea u ; car q u ’on ne s’y trompe pas;
c’est sur les renseignemens fournis par leurs adversaires
eux-mêmes, que les héritiers Capelle calculent. Ces
renseignemens sont consignés dans l ’écriture signifiée à
la requête du sieur N ouveau, le
avril 1817 (p. 89).
Les héritiers Capelle ne connaîtront rien person
nellement , tant que leurs pièces ne leur seront pas
rendues.
■Une réserve de 120^000 fr. réduite à 34,882 f r . ,
prouve, par une simple soustraction, q u ’il avait été
payé en principal 8 5 ,118 fr.
L e sieur Capelle avait été en o u t r e c li a r g é d ’acquitter
toutes les dettes dé la s u c c e s s io n J a l i n q u e s , et il
parait q u ’il en a payé pour une assez grande valeur,
Quelles on.t. lé té ses ressources pour ces paiemens?
Leâ biens donnés, dit-on ; il y avait beaucoup de
créances actives ; les termes exigibles 11’étaient que
de 3 ooo f r . , et les revenus des immeubles couvraient,
a chaque terme > l ’intérêt et le capital1.
. Pour justifier ces allégations, les époux Valentiu
évaluent les immeubles à 120,000 francs; les créances
à 46,108 francs (1).
Ou indiquera bientôt ce que sont devenues les
créances.
>
,(j) V oyez le M ém oire des in tim es, page
�( 10 )
Quant à la valeur des immeubles, c’est un agréable
Îiction qui donnerait à croire que les époux Valentin
spéculent aussi sur des ventes futures, si le succès les
couronne devant la Cour.
L e sieur Capelle a plusieurs fois offert tous ces
immeubles, y comprises les rentes seigneuriales qui en
dépendaient, pour C 5 ,ooo fr. : il n’a jamais pu lesobtenir.
Vaudraient - ils davantage aujourd’ hui que les
rentes seigneuriales sont abolies, quoique la valeur
des biens ait pu augmenter?
L e sieur Capelle avait le pouvoir de vendre les
immeubles ; ce qui prouve que les revenus ne suffisaient
pas pour acquitter les charges : car c’élait à cause des
charges, que le pouvoir avait été donné.
Heureusement pour les époux Y a le n t in , le sieur
Capelle n ’a pas usé de son pouvoir. S ’il en eut usé, le
procès actuel n ’existerait pas.
Malheureusement pour ses enfans, il a payé de ses
propres r e s s o u r c e s , d a n s l ’ e s p o ir de leur laisser des
biens dont 011 veut les priver aujourd’hui.
Les 46,108 fr. de créances dont parlent les époux
Valenlin n’ont pas été d ’un grand secours au sieur
Capelle. Ce n’est pas lui q u i a louché ces créances 5
c’est le sieur Nouveau, qui nous l ’apprend lui-meme
dans cette écriture déjà citée, du 26 avril 1 8 1’j , où
il reconnaît q u ’il en a reçu,
Savoir : en assignats, pour . . .
2/1,893 fr. 90 c.
J£t en numéraire , p o u r ................
22,394
lin tout....................
4 7 ; ?-^7 h - 9 ° c '
�(,
IX
w
-;
•"
E n sorte que les créances s’élevaient réellement à.
plus de 4.6,000 francs, mais que le sieur Gapelle n’ en
a pas profité.
L e sieur Capelle a cependant payé 8 5 , n 8 fr. sur
la réserve , et de quelle manière ?
Cela est facile à expliquer.
Avant le traité de 1 7 9 1 , il avait payé
réellement ou par compensation................
Lors du tra ité , il paya de ses deniers
20,000 fr.
une somme d e ............... ’...................... 12,788
P l u s , en délégation , une somme de
11,8 12
f r . , composée d’un capital de
10,000 f r . , dot de son épouse, et des in
térêts qui lui appartenaient à lui-même
comme mari, c i...............................................
E n principaux des rentes dépendant
1 1 ,8 12
des biens donnés..............................................
24,000
Par le délaissement du domaine de 1
S a in t - M ic h e l...................................................
8,000
Depuis le traité de 1791 , il a payé . .
18 ,118
9 4 j 7 *8
Desquels il faut retrancher 9G00 francs
T
o t a l ....................
fr'
d’intérêts dus d’après le traité de 1791 ,
C1....................................................................................
9>6oo
Ce qxii réduit le capital payé par le
sieur Capelle, à ...............................................
8 5 , n 8 fr.
Ces détails sont fastidieux sans d o u te ’, mais au
�moins sont-ils exacts, et convaincront-ils les époux
Valentin
d ’accuser.
q u ’il
est
nécessaire
de réfléchir avant
Si de cette somme de 8 j , i i 8 fr. on retranche les
rentes et le domaine délaissés, ainsi que le capital de
la d o t, on verra que le sieur Capelle a acquitté, à ses
j)ropres dépens, une somme de
1 18 fr.
Il a de plus acquitté beaucoup de dettes de"la suc
cession Jalinques.
Il n’est donc pas -étonnant q u ’il ait été obligé de
vendre
d ’aussi
besoin
m en t,
le domaine de Mallaret pour l ’aider à remplir
grandes charges; sans elles, il n’aurait pas eu
de le vendre ; car il no devait’ rien personnelle
quoiqu’en ait dit le sieur Valentin.
Q u ’importe q u ’il ait emprunte 10,000 francs à la
demoiselle Chaunac de Montlogis : cet emprunt ne
suffisait pas.
Au reste, s i, comme on le prétend,
il avait eu des besoins, n ’aurait-il pu emprunter
pour lui-m êm e, et éviter par-la de vendre? ]N" est-il
donc pas évident que ce sont les trop nombreuses
charges de la donation, qui ont causé les embarras de
la fortune du sieur Capelle?
Les époux Valentin ne disent q u ’ un mot sur les
dettes de la succession Jalinques; ils 11’en parlent que
pour assurer q u ’il n ’y avait pas de dettes.
Les héritiers Capelle assurent le contraire; et l ’on
peut dire q u ’entre le oui et le non, l ’esprit doit rester
incertain.
Mais l ’inccrtilude est facile à lever.
�( :3 )
On l ’a déjà dit-, tous les papiers de la famille C a
pelle sont au pouvoir du sieur Valentin.
Ces papiers sont rappelés dans l ’inventaire du 4 jan
vier 1794*
Il y est parlé , page 9 , d’un journal contenant
l ’état des créances dues à la maison de la Rouquette;
Page 10, d’un auti'e livre-journal, par ordre alpha
bétique, des contrats de rente et obligations consen
tis à feu sieur L a Ilouquette ;
Page 2 6 , d’un journal couvert de basane, où sont
plusieurs notes et mémoires, et certains autres papiers
et mémoires écrits tant par f e u Pierre Ja lin q u es, que
par ledit fp u CappTley
Page 48 j à ’ u n r e le v é e t é t a t d e s c r é a n c e s e t d e s
r e p r is e s ,
é c r i t d e la m a in d e f e u
C a p e lle , p our' lu i
s e r v ir d e m é m o ir e e t in s t r u c t io n .
A la fin de l ’inventaire il est dit q u e , du consen
tement du tuteur des m ineurs, tous les papiers portés
dans Uinventaire sont demeurés au pouvoir de la
dame veuve C a p elle, ainsi que toutes les c le fs , la
quelle en demeure chargée.
L a veuve Capelle l’emit tous ces papiers au sieur
Nouveau, lorsqu’elle l’épousa.
Le sieur Nouveau, à son décès, les a laissés aux
sieur et dame Valentin.
Les héritiers Capelle les ont souvent demandés.
L e jugement dont est appel a. condamné à les res
tituer. Mais, cités devant un notaire à cet eflet, les
�époux Valentin ne se sont pas présentés (V o ir un
procès-verbal du i cr mai 1819).
Q u ’on produise tous ces papiers, et la vérité s’éclair
cira.
>
Il est plus prudent de ne rien produire et de
déclamer beaucoup, et de se présenter soi-même comme
ayant fait de grands sacrifices.
C ’est ainsi q u ’on parle souvent de quittances dans
le mémoire, et q u ’on n ’en représente aucune.
C ’est ainsi q u ’on affirme avoir exactem ent p a y é
EN
n u m é r a ir e
, cle ses propres deniers, les sommes
considérables qu i étaient dues à la dame M urât ( 1 ) ,
quoique n o n - s e u le m e n t ,
n e soit pas établi, mais
même que le contraire soit facile à prouver avec les
propres écrits du sieur Nouveau.
Arrêtons-nous un instant sur ce point.
Les héritiers Capelle avaient dit que les sieur et
dame Nouveau avaient d ’abord remboursé, en as
signats, à la clame Murât ce qui lui était d û ; q u ’en
suite ils s’étaient adressés au
tuteur des mineurs
Capelle pour leur faire un semblable remboursement.
Les sieur et dame Valentin ont répondu par deux
i l n’est pas v r a i (2).
Civilité à p a rt, recherchons la vérité.
Les sieur et dame Valentin assurent, en parlant
de la daine M u rât,
i° q u ils ne Vont remboursée
(1) V o ir page 96 du mémoire des intimes.
(2) Pages a 4 ct
�( *5 )
fjii après les mineurs C a p elle; 20 q u ’ils ne l ’ont pas
remboursée en assignats : t o u t A é t é p a y é e n
NUM ÉRAIRE.
L a première circonstance serait assez indifférente :
on ne la relèvera qu’à cause de la forme de l ’assertion.
Que les sieur et dame Valentin lisent
signifiée par le sieur Nouveau, le 26 avril
ils y verront, page 7 9 , article 2 9 , q u ’une
u ,o o o francs fut payée, le 11 germinal an
l ’écriture
1 8 1 7 ; et
somme de
3 , par le
sieur Nouveau, aux sieur et dame Murât.
O r , le tuteur des mineurs Capelle n ’a reçu luimême que le 2 5 messidor suivant.
L a seconde circonstance est plus importante.
Ils ont tout pctj-c en num éraire, disent-ils ; et de
leurs propres deniers, ajoutent-ils ailleurs (1).
On les renvoie à la page 79 , et à l ’article cité de
l ’écriture de 1817 ; ils y verront q u ’au moins le paie
ment des 11,000 francs fut fait en assignats.
Ils peuvent aussi consulter ce q u ’a dit le sieur
Nouveau, page 93 , où il déclare q u ’il a payé les sieur
et dame Murât., partie en assignats, partie en numé
raire.
Mais ont - ils réellement
deniers ?
payé
de
leurs propres
On pourrait les croire sur parole , quoiqu’ils ne
produisent aucune qu itta n ce, si la même écriture ne
nous apprenait pas que le sieur Nouveau avait touché,
(1) V oir le mémoire des iulinj.es, page 96.
�^ iG )
sur les créances comprises clans la donation, la somme
de 24,89.3 francs 90 centimes en assignats, et celle de
22,394 fr. en numéraire; et q u ’ainsi, sans avoir besoin
de ses propres deniers, il avait plus q u ’il ne lui fallait
pour acquitter les 34,852 fr. q u ’il déclare avoir payés
aux sieur et dame M urât, partie en assignats, partie
en numéraire (V o ir page 93 de l ’écriture\ voir aussi
pages 7 4 , 80 et 87).
Ainsi s’évanouissent les illusions des sieur et dame
V a len tín , tandis que ce q u ’ils voulaient faire considé rer comme des inexactitudes, de la part des héritiers
C apelle, sont des faits très-réels, et dont les consé
quences seraient, pour ceux-ci des plus funestes, si,
après avoir été. dépouillés d ’une partie de leur patri
moine pour acquitter
de nombreuses charges , ils
étaient aujourd’hui privés des biens qui étaient le
prix de tant de sacrifices.
Sans doute il eut été à désirer pour les enfans
C apelle, que leur père eût persisté dans la répudiation,
q u ’il avait faite en 1790. L a donation aurait disparu,
il est vrai; mais s’ils n’eussent pas eu les biens q u ’on
leur dispute aujourd’h u i, au moins n’auraient-ils pas
éprouvé de pertes; e t , dans ce cas, q u ’auraient à de
mander les sieur et dame Valentín ?
Sera-t-il nécessaire de répondre à quelques autres
observations du sieur V alentín et de son épouse?
Ils se plaignent du reproche q u ’on leur a fait sur lo
remboursement, en assignats, de messidor an 3. Ils sc
�(
*7
)
justifient par l ’offre q u ’ils font aujourd’hui de ne
compter les assignats que pour la valeur réduite.
Mais ils devraient ajouter que leur offre n ’a de la
générosité que l ’apparence. Aujourd’hui que c’est avec
les héritiers de la dame Nouveau seuls, que les héritiers
Capelle ont à régler leurs comptes, il importe peu aux
représentans du sieur Nouveau, que les sommes rem
boursées soient calculées en argent ou en valeur
d ’assignats. Le sieur Nouveau qui avait payé pour son
épouse , ne pouvait, dans tous les cas , réclamer contre
elle ou ses héritiers, que des valeurs réduites.
Ils crient à la calomnie, relativement à quelques
plaintes de spoliation dirigées contre la dame et le
sieur Nouveau.
Mais ils oublient q u e , dans un mémoire imprimé
en première instance, les héritiers Capelle avaient fait
entendre les mêmes plaintes, avaient aussi parlé de la
négligence de leur tuteur sur cet o b je t, et avaient
même offert la preuve des spoliations (i).
Enfin ils allèguent une collusion entre les héritiers
Capelle el ceux d e là dame Nouveau, s’étendent lon
guement sur ce sujet, font de brillantes remarques,
et disent que le langage des seconds a été dicté par les
premiers.
Il faut avouer que s’il y a eu collusion , on n’a pas
au moins cherché de déguisement. E n la supposant, il
( i ) Voyez le Mémoire de première instance , pages i5 , 19 , 80, 88.
3
�( '8 )
eût été facile aux héritiers Capclle d ’empécher q u e ,
dans une écriture, on ne d it , au nom des sieurs et
daines de Moutlogis, q u ’ils n ’avaient aucun intérêt
dans la cause , parce q u ’on leur avait remboursé les
deux dots, seul objet de leurs prétentions. Quanti on
collude, 011 se sert mieux mutuellement.
Il n’y a e u , entre les uns et les au tres, de collusion,
que celle de l ’amour de la vérité.
Les sieurs et dames de Montlogis n ’ont employé
dans la cause que le langage tenu par la dame de
M urât seule, dans le traité du 20 décembre 1791 , où
elle répète, à chaque phrase, que la donation a v a i t été
fa ite a u x sieur e t clame Cap e l l e ; où sont des clauses
exclusives de toute idée de su bstitution, et qui 11e
présentent que celles-d’une donation conditionnelle,
dont les avantages devaient profiter, suivant l ’événe
ment , à la dame C apelle, si des enfans naissaient
de son premier m ariage, à l ’époux et aux héritiers de
c e l u i - c i , s’il n ’y a v a i t pas d ’enfans du mariage.
Les héritiers Capelle ont invoqué le témoignage de
la dame de M u râ t, donatrice, dans leur mémoire
imprimé en première instance, c’est-à-dire, avant la
mort de la dame Nouveau, sa sœur, e t, par conséquent,
à une époque oil cette déclaration 11e pouvait être
suspecte (1). Pourquoi n’en a-t-011 pas déféré alors à
cette respectable attestation?
(1) Voyez ce Mémoire, page 92 , inJinc,
�( *9 )
' Oïl le voit : il a été facile aux héritiers Capelle
de repousser tous les argumens tirés des faits, tous
les reproches hasardés d ’inexactitude', et de ren
voyer, a l ’adresse qui leur convient, les complimens
q u ’ils ont reçus des sieur et dame Valentin.
Peut-être se sont-ils trop arrêtés à combattre tant
de vaines allégations; mais ils trouveront leur excuse
dans leur désir de se montrer, aux yeux de la C o u r ,
tels q u ’ils sont réellement, tels q u ’ils ont toujours été.
'
O B SE R V A T IO N S SUR L E S M O Y E N S .
Les sieur et dame Valentin ont fait de longs efforts
pour prouver que la disposition q u ’ils attaquent ren
ferme une substitution fidéi-commissaire. N ’auraientils pas par-là même décelé leur impuissance ?
Ramenons l ’examen de la difficulté à des idées plus
simples.
Les substitutions étaient autrefois faciles à recon
naître aux termes de l ’acte.
L ’esprit des lois anciennes qui les avaient permises,
celui des lois nouvelles qui les ont prohibées, ne sont
pas équivoques.
Les caractères principaux qui les distinguent sont
aussi faciles a signaler.
Il semble donc que , pour juger sainement de la
libéralité qui nous occupe, 011 ne saurait mieux faire
que de rechercher si l ’on y trouve les termes usités
poui les substitutions ; si 1 on peut y appliquer l’esprit.
�( 20 )
des lois de la m a tière,_ e t si l ’on y remarque les
caractères principaux de ces sortes de dispositions.
Q uoiqu’il n ’y eut pas autrefois de termes sacra
mentels pour constituer une substitution, cependant
il était d ’usage d’employer des expressions qui ne
laissassent aucun doute sur la volonté du bienfaiteur.
Les mots j e
charge de rendre à un te l......... , j e
substitue...... j e mets à la p la c e .......... ^ étaient les plus
familiers. On peut voir ce que dit à cet égard
M. Thevenot d ’Essaules (chapitre 1 1 , § 6 , 7 et 8).
O r , ces formules ne se rencontrent pas dans la
donation de 1786. L a dame Capelle n’est pas chargée
de rendre à son mari-, il n’est pas dit que celui-ci ou
ses héritiers lu i sont substitués } sont mis à sa p la ce.
Seulement un événement est prévu, celui de la mort
de la dame Capelle sans enfans nés du mariage; e t ,
dans ce cas, les biens, au lieu d ’appartenir à la dame
Capelle , a p p a r tie n d r o n t au mari ou aux héritiers de
celui-ci, ou'a l'héritier de son choix.
L ’observation n ’est pas indifférente, sur-tout si l ’on
remarque aussi q u ’à cette époque on 11’était pas gêné
dans le choix des expressions; que l’on ne pouvait pas
prévoir q u ’ un jour les substitutions seraient abolies
par une loi à laquelle un effet rétroactif serait attaché;
et q u ’ainsi les parties n ’avaient aucun intérêt à éviter
des mots qui pussent prêter à l’application rigoureuse
de cette loi future.
Il faudrait être sans doute plus sévère dans Tinter-
�A 2 1 -)
prétation d ’une disposition faite sous la loi prohibitive,
parce qu ’on serait autorisé à croire que l ’ambiguité des
termes a été un moyen de fraude pratiqué pour éluder
la prohibition.
Mais dans quel esprit les substitutions avaient-elles
été établies autrefois, et par quels motifs ont-elles été
abolies depuis?
Elles avaient été établies dans le but de conserver
le lustre des familles puissantes : aussi les biens qui
en étaient l ’objet ne pouvaient pas être aliénés} aussi
le donateur établissait-il lui-m êm e, par une vocation
personnelle} un ordre de succession qui dérogeait à la
succession légitime, et dont il n ’était pas permis au
grevé de s’écarter.
Elles ont été abolies pour faire renti-er les biens
dans le commerce, et pour faire cesser les fraudes si
faciles à l ’égard des tiers, q u i, ignorant l ’existence de
la substitution , contractaient avec le grevé, auquel ils
supposaient une fortune opulente qui leur échappait.
L ’esprit des lois anciennes, les motifs des lois nou
velles , sont également inapplicables a la donation de
1786.
La
veuve Jalinques, donatrice , en
libéralités sur les deux
versant scs
époux ; en donnant
tous
ses biens au sieur Capelle , dans le cas prévu} en dé
clarant qu e, s’il ne naissait pas d’enfans du mariage,
les biens appartiendraient au sieur Capelle ou à ses
héritiers naturels} ou à l ’héritier de son ch o ix y la
veuve Jalinques n’établissait pas elle-même un ordre
�particulier de succession; elle ne faisait pas d évocation
personnelle ; elle s’en référait à la loi, ou au choix du
sieur Capelle, son donataire; elle voulait que celui-ci,
mourùt-il même avant son épouse, transmît les biens
donnés à ses propres héritiers légitimes ou testamen
taires ; elle n ’avait q u ’ un b u t , celui de gratifier un
des parons de son premier époux, des biens q u ’elle en
avait reçus.
»
Aussi ne prohiba-t-elle pas l ’aliénation de ses biens ;
elle l ’autorisa au contraire expressément ; et si elle
exigea le concours de la dame C a p e lle , c’est q u e ,
jusqu’à l ’événement prévu, celui du décès sans enfans
nés du m a r i a g e le don n’était que conditionnel.
Toute la propriété d s v a it, selon l ’événement, appar
tenir , dès
l ’o rigin e , ab initio , à celui des deux
donataires auquel cet événement l ’attribuerait; (mais
tant que le cas n’était pas arrivé, l ’incertitude com
mandait la précaution de faire concourir les deux
donataires éventuels aux ventes qui seraient faites,
afin q u ’elles fussent valables, quel que fut l ’événement.
Les appeians avaient déjà fait remarquer, dans leur
mémoire, la faculté d’aliéner, écrite dans le contrat
de mariage de leur père, et le peu d’application à leur
cause des motifs qui ont dicté l ’abolition des substi
tutions.
Que leur a-t-on répondu?
« Q u ’il pourrait se faire que certaines dispositions
« particulières se trouvassent comprises dans la prohU
�( *3 )
« b ition , quoique leur esprit ne fût pas celui qui a
« été le m otif de la loi. »
I l p o u rr a it se f a i r e !
L a réponse n’est pas lumineuse. N ’eùt-il pas été plus
adroit de se taire que de dévoiler ainsi son embarras?
L ’on ajoute, il est v rai, que la dame Capelle et
son mari ne pouvaient disposer l ’un sans l ’autre.
Mais cette circonstance n’empêchait pas que les biens
ne fussent dans le commerce, et que les tiers ne
fussent exposés à aucune fraude.
Ou
remarquera
d’ailleurs
q u ’il n ’est
pas exact
d ’assimiler le sieur Capelle à un substitué, puisque
m êm e, en cas de prédécès, il devait transmettre les
biens à ses héritiers. S’il y avait eu substitution, les
héritiers Capelle auraient été les vrais substitués , et
leur consentement eût été nécessaire, dans le système
des in tim és, pour la validité des aliénations.
Nous venons de démontrer q u ’on ne pouvait invoquer
contre les héritiers C ap elle , ni les termes usités pour
exprimer une substitution, ni l’esprit de la législation
ancienne, ni celui de la législation n ouvelle, sur ces
sortes de dispositions.
Il sera facile de prouver aussi q u ’on ne trouve pas,
dans la donation de 1786 , les principaux caractères
qui distinguent les substitutions fidéi-commissaires.
Il n y a substitution que lorsqu’il y a c h a rg e
c o n se rv e r , et charge d e rendre
a
un
t ie r s
de
.
Quelles que soient les expressions employées dans la
clause, il faut que la charge de conserver en résulte
�24 )
nécessairement; sinon, les biens pouvant disparaître,
la charge de rendre serait sans effet ( i ) ; et le tiers,
gratifié en second ordre, ne recevrait q u ’une libéralité
illusoire, dont le sort dépendrait, non de la volonté
du donateur, mais de celle du premier donataire. O r ,
il est de l ’essence des substitutions que ce soit le
donateur et non le grevé, qui gratifie le tiers substitué.
Si dans leur premier mémoire les héritiers Capelle
avaient fait usage de la définition donnée par le Code,
c’est parce q u e , quoique plus courte, elle est plus
parfaite; car elle embrasse dans ses termes tout ce que
doit contenir une bonne définition, c’est-à-dire, les
principaux caractères de la substitution, savoir, la
charge de c o n s e r v e r c e l l e de rendre} et la vocation
personnelle du tiers substitué.
L a définition donnée par Thevenot d ’Essaules avait
paru moins parfaite, en ce sens seulement q u ’elle ne
s’exprimait pas en termes aussi précis et aussi clairs,
q u o i q u ’ e lle établisse absolument la même règle, comme
nous l’apprend l’auteur lui-même en fixant le résultat
de sa définition (2).
Au reste, c’est l’espèce de substitution définie par
l’article 896 du C o d e ,
qui seule a été l ’objet de
l ’abolition ordonnée par la loi du 25 octobre 17 9 2 ,
et de la prohibition prononcée par le Code civil même.
(1) V o ir D icvcnot d ’Essaules, dans son T raité des Substitutions ,
chapitre I er, n° a i .
(2) V oir chapitre
I er,
paragraphe
3.
�( 25 )
Les discours des orateurs du Gouvernement en font
foi.
On
lit
dans
l ’exposé des
motifs présenté^ par
M. Bigot-.Préameneu :
« Parmi les règles communes k tous les genres de
« dispositions, et que l ’on a placées en tête de la l o i ,
« la plus importante est celle qui confirme Vabolition
« des substitutionsfidéi-com m issaires. »
Plus bas, le même orateur rappelle les motifs qui
ont déterm inéj dit-il , à confirmer Vabolition des
substitutionsj déjà prononcée par la lo i d'octobre
1792.
Reconnaissons donc
que la vraie définition des
substitutions abolies est celle que nous avons posée, et
que l ’on ne doit trouver une substitution que dans
les dispositions qui renferment :
i° Charge de conserver*,
20 Charge de rendre à un tiers que l ’on gratifie en
second ordre (1)
Nous avons prouvé par le premier mémoire, q u e ,
dans la donation de 17 8 6 , il n ’y avait pas charge de
conserver, puisqu’il était permis d’aliéner la totalité
des biens donnés*, et puisque le résultat de cette faculté
indéfinie pouvait être de priver de la totalité des biens,
les héritiers C apelle, q u i , cependant, étaient appelés
par l’acte à recueillir ces b ie n s , dans le cas où leur
père décéderait avant son épouse.
V oyez Thevcnot d’E ssaulcs, cliapitrc
4
I e r ,
n° 7
»
�( 2(5 )
De cette circonstance importante nous avons conclu
q u ’il n’y avait pas de substitution.
Cette vérité, nous l’avons appuyée de l ’opinion des
auteurs les plus recommandables, et de l ’autorité de
plusieurs arrêts ( i) .
Que nous a-t-on répondu?
Q u ’il y avait aussi pouvoir de vendre les biens
dotaux ;
Que le pouvoir n ’était donné q u ’a la charge de re
connaître;
Que d ’ailleurs, d ’après l ’essence des substitutions,
une telle faculté était toujours de sa nature considérée
comme restreinte;
Enfin q u e , pour savoir s’il y avait substitution, il
fallait consulter , non les principes actuels et les
s
auteurs nouveaux, mais seulement les lois romaines.
Ces objections sont-elles bien sérieuses?
On parle du pouvoir de vendre les biens dotaux.
Mais ce pouvoir était un simple mandat donné par
la femme au m ari, que celui-ci exerçait seul sans le
concours de l ’épouse de laquelle il émanait; qui ne
s’appliquait q u ’aux biens propres de la femme, à des
biens q u ’elle ne tenait de la libéralité de personne,
dont elle pouvait disposer librement elle-même, et à
la conservation desquels des tiers n ’avaient aucun
intérêt.
U n tel pouvoir de vendre n ’a rien de commun avec
( i ) Voir le Mémoire des intimés , pages
3o , 3 i , 5a.
�(
27
)
la faculté de tout aliéner, émanée d’ une donatrice *, de
cette faculté accordée à des donataires ; de cette faculté
inconciliable avec la charge de conserver, avec celle
de rendre , et
par
conséquent avec
l ’idée
d ’ une
substitution.
\
L e sieur Gapelle devait, dit-on, reconnaître sur ses
biens propres le prix des aliénations.
L ’objection est peu considérable.
La
reconnaissance pouvait bien être de quelque
utilité à la dame C a p e lle , si par l ’événement les biens
donnés lui appartenaient.
Mais elle était absolument illusoire pour les substi
tués , s’il y avait eu réellement substitution } car,
d’après le con trat, les substitués auraient été les
héritiers naturels du sieur Capelle ou l ’héritier de son
c h o ix ; et, comme cette, qualité d'héritier était indis
pensable pour leur attribuer un droit aux objets
donnés , que pouvait signifier pour eux une reconnais
sance du sieur Capelle? Elle n ’aurait pu évidemment
les autoriser à agir contre les tiers détenteurs des biens
propres du sieur Capelle, si celui-ci, usant d ’un droit
illimité , avait aliéné tout à-la-fois et son patrimoine ,
et les biens donnés; o r , personne n ’ignore que c’est
dans l ’intérêt des substitués, que la loi impose la
charge de conserver.
Donc cette charge n’existait ni directement ni indi
rectement.
Est-ce avec plus de vérité q u ’on prétend que le
�( =8 )
pouvoir d ’aliéner devait être restreint de plein d r o it ,
d’après l ’essence même des substitutions?
Si l’on avait lu avec plus d ’attention les auteurs
que l’on a c ité s , on y aurait vu une décision toute
contraire. Thevenot d ’Essaules traite la question dans
son chapitre 4 8 , n° 787.
Voici comment il la pose :
« Est-il de l ’essence de la substitution fidéi-coin« missaire , que le grevé n’ait pas la liberté indéfinie
« d ’aliéner? » N o n , répond-il. L e substituant peut
permettre Valiénation indéfinie.
L ’auteur cite ensuite l’opinion de Peregrinus.
M. T o ullier, au tome 5 , n° 38 , parle de la charge
de rendre
i d q u o d su p e r er it ,
et dit que ces sortes de
dispositions étaient valables en Bretagne, quoique les
vraies substitutions y fussent défendues.
Nous avons déjà rappelé l ’opinion de M. Grenier.
Celle de Rolland de Villargues et les lois romaines
s’appliquent seulement au cas où la perm ission d e tout
a l ié n e r
n ’était pas écrite dans l ’acte même. ( Voir
Thevenot d ’Essaules, n° 788).
Dans le contrat de mariage de 1786, on donne aux.
futurs époux la liberté
de vendre ,
a l ié n e r
en
tout
ou en p a r tie les biens donnés.
Ainsi il y a erreur dans le principe invoqué par les
intimés.
C e n’est pas plus heureusement q u ’ils prétendent
qu e, pour interpréter la disposition, et dans le but de
ra n n u lle r, il faut consulter les lois romaines, non les
�( *9 )
;
- .:J b
nouveaux principes. Cette idée qui leur s o u rit, car ils
la présentent plusieurs fois ( i) ; cette idée, à l’appui
de laquelle ils citent M. T o ullier, est en opposition
directe avec ce que dit M. Toullier lui-mème.
C et auteur, aussi équitable que savant, remarque,
dans plusieurs parties de son ouvrage (2) , que si les
lois romaines interprétaient les actes de manière à
admettre facilement une substitution, c’était dans le
bu t de faire valoir la disposition, et que ce serait aller
directement contre Vesprit de ces lois, que d’appliquer
leurs règles afin de détruire, et non afin de conserver.
On ne doit jamais oublier-cette maxime ancienne,
dictée par la sagesse et la justice, et q u i, dans le droit
Français comme dans le droit Romain, servit toujours de
règle en matière d ’interprétation d ’une clause ambiguë:
L ’interprétation doit tendre à maintenir l ’acte plutôt
.q u ’à l ’annuller. Potin s ut actus valeat quant ut pereat.
A u reste, nous avons démontré plus haut que la
loi du a 5 octobre 1792 et le Code civil s’appliquaient
aux mêmes dispositions; que les législateurs du Code
avaient seulement confirm é Vabolition déjà prononcée
par la loi de 1792 (V o ir l ’exposé des motifs). Ainsi
une disposition qui serait permise aujourd’ hui , n ’a
pas été annullée par la loi antérieure. On sait que dans
la législation ancienne, il existait beaucoup d ’espèces
de substitutions : les vulgaires, les pupillaires , les
(1) V o ir notamment pages 69 et 95.
(2) V oir notam m ent n° 43 , page Gi , et n° 45.
�(
3o
)
compendieuses, celles qualifiées de
eo q u o d su p e r e r it,
et qui valaient même dans les coutumes prohibitives,
enfin les fidéi-commissaires proprement dites. La légis
lation nouvelle n’a aboli que cette dernière espèce de
■substitution ; elle a respecté toutes les a u tre s , et
notamment les charges de rendre
q u o d supererit
: tous
les auteurs nouveaux s’accordent à professer cette
doctrine. M. Rolland de Yillargues lui-même l ’établit
lumineusemént dans son chapitre i
et il cite plusieurs
arrêts qui l’ont consacrée.
Q u ’importe donc que l ’on qualifie de substitution
la disposition dont il s’agit?
Cette disposition n ’attribue au sieur C a p e l l e O U à
ses héritiers, que
les biens q u i r e s t e r o n t d e c e u x
c i-d e s s u s d o n n é s ,
est-il dit 5 elle n ’est donc pas une
vraie substitution fidéi-commissaire; elle ne serait tout
au plus q u ’une substitution
e ju s q u o d su p e r e r it ,
c’est-
à-dire une disposition maintenue par la loi de 17 9 2 ,
comme par le Code civil.
Sera-t-il nécessaire de répondre au plus futile des
argumens, présenté sous la forme d ’un dilemme? Ou
la faculté d ’aliéner était lim itée, dit-on, et alors il y
avait substitution; ou elle était indéfinie, et alors la
dame Capelle, n’étant gênée par rien, a pu disposer
de tout au profit du sieur Nouveau.
Nous avons répondu à la première partie de l ’ob
jection.
Q uant à la seconde, y a-t-on bien réfléchi?
Q u ’on relise lu clause du contrat de mariago, et
�l ’on y verra-, i° que s’il y avait pouvoir de vendre ,
c’est-à-dire d’aliéner-à titre onéreux, .il n?y avait pas
celui de disposer à titre gratuit ; 2° que la dame C a^
pelle n’avait pas même seule la faculté d ’aliéner, et
que cette* faculté, qui exigeait le concours du mari et
de la femme, a disparu au décès du sieur Capelle ,
parce q u e , dès cet instant, les héritiers de celui-ci ont
été saisis de la propriété des choses données.
On sera de plus en plus convaincu de la validité de
la disposition invoquée par les héritiers Capelle ,« si
l ’on considère que, dans la clause qui la renferme, il
n ’existe pas de charge
de rendre
à
un
t ie r s
: second
caractère distinctif et essentiel des substitutions pro
hibées.
L a clause est conçue en ces termes :
« Dans le cas que ladite future épouse vienne à dé« céder sans e n fa n s d u p résent m a r i a g e , audit cas
« seulement, les biens qui resteront de ceux ci-dessus
« donnés
seront remis et ap p a rtie n d ro n t a u d i t f u t u r
«
é p o u x ; et_, en c a s d e p r é d é c è s } à ses héritiers > ou
«
(i c e l u i d ’entr e u x q u ’i l a u ra ch o isi. »
On a beaucoup disserté sur les mots
appartiendront
seront rem is et
y ,011 a cherché à y voir une charge de
rendre imposée à la dame Capelle j on a dit que les
biens ne devaient appartenir q u ’au moment où ils
seraient remis, et que la propriété n’était que reflet
de la remise faite au décès de la personne grevée, la
dame Capellç.
On 11’a pas voulu considérer q u e , dans les substi-
�tutions, les charges de rendre n ’étaient jamais expri*
mées en de tels termes; que les expressions seront remis
et appartiendront indiquent plutôt le cas d ’un simple
usufruit laissé à la dame Capelle pendant sa vie.
Si l’union du sieur et de la dame Capelle donnait le
jour à des enfans, la dame Capelle devait être pro
priétaire des biens donnés. Mais si elle n’avait point
d ’enfans, sa propriété conditionnelle disparaissait ab
solument , en sorte q u ’elle était réputée n’avoir jamais
été propriétaire. D ejiciente conditione j u s resolvitur.
A u contraire, l ’événement rendait le sieur Capelle
propriétaire dès le jour même du c o n tra t, parce que
les biens lui étaient donnés, au cas où il n ’y aurait
pas d ’enfans nés du mariage; l ’événement a accompli
la condition en sa faveur, et la condition accomplie a
eu un effet rétroactif au jour même du contrat (Voir
Code civil, articles 1 1 77 , 1 1 7 9 .).
Dès-lors le sieur Capelle est devenu donataire pur
et simple, et doit être considéré comme ayant toujours
été le seul donataire.
Dès-lors aussi la dame Capelle n’a été q u ’une simple
usufruitière; aussi n’est-elle pas chargée de rendre les
biens. Il est dit que les biens seront remis et appar
tiendront 3 ce qui indique une propriété antérieure à
l ’époque de la remise. La propriété est la cause; la
remise est l ’effet : ils doivent être remis à ceux à qui
ils appartenaient dès l’origine. C ’est ainsi que l ’on dit
tous les jours, q u ’au décès d ’ un usufruitier les bien»
seront remis et appartiendront au propriétaire.
�< » )
M ais, pour se convaincre de plus en plus que la
disposition dont il s’agit était un don conditionnel, et
non pas une substitution fidéi-commissaire, considé
rons les autres caractères des dons conditionnels, et
comparons-les à ceux qui distinguent les substitutions
prohibées.
Dans les dons conditionnels, le donataire, saisi, dès
le jour du con trat, par l’accomplissement futur de la
condition, transmet la chose donnée à ses héritiers,
môme lorsque la condition n’est accomplie q u ’après le
décès de ce donataire.
Dans les substitutions, au contraire, si le grevé
survit au substitué, celui-ci ne transmet rien à ses
héritiers : la substitution disparait.
Dans les dons conditionnels, le donataire est partie
contractante.
Dans les substitutions, le substitué est un tiers qui
n’est pas ordinairement partie au c o n tra t, q u i , au
moins, est toujours étranger aux stipulations.
Ces principes ne sauraient être contestés.
Ricard examine la nature et les effets des dons con
ditionnels dans plusieurs de ses ouvrages (i).
Il établit que la condition opposée à une donation
entre-vifs n’empêche ni la tradition de fait ni celle
de droit.
(») Y o ir notamment son T raité des D onations, partie i Te, n0' io 3p
et suivans; et celui des Dispositions C onditionnelles, n05 191 et suivans,
gi2o et suivans.
5
�I II distingue
.. les conditions apposées aux dispositions
, (
3
4
)
testamentaires, de celles contenues dans les contrats,
et enseigne q u e , dans les actes entre-vifs , la condi
tion est présumée échue au tems du contrat (i).
De ces règles découle la conséquence que le dona
taire conditionnel transmet le don à ses héritiers ,
quelle que soit l ’cpoque à laquelle la condition s’ac
complisse, ne fut-ce q u ’après le décès du donataire..
M. Toullier,
dans son Traité des Droits civils ,
examine aussi avec beaucoup de détail la nature et
1’effet des conditions apposées aux contrats; il consi
dère notamment les conditions casuelles et suspensives.
E t comme ces sortes de conditions sont indépendantes
de la volonté de celui qui s’est ob ligé, il pense que le
créancier, quoique son action soit suspendue, n’en a
pas moins acquis, p ar la convention, un droit éven
tuelj qui ne peut lu i être enlevé sans son consente
ment y un droit irrévocable , quoiqu incertain et qui
ne peut s é v a n o u ir q u e p ar le d é f a u t d ’accom plisse
ment de la condition (Voyez tome 5 , n° 528.).
Il fait observer (n° 543 ) que 1’efFet de la condition
suspensive j lorsqu’ elle est arrivée, est de r e m o n te r au
jo u r du contraty et il cite plusieurs lois romaines à
l ’appui de son opinion.
Il remarque aussi (n° 53 o) que le droit du créan-
( i) V oir notamment le T raité des Dispositions C onditionn elles, e t
les observations faites au n° 222.
�(
35
)
cier conditionnel passe à ses héritiers 3 s’i l meurt avant
Vaccomplissement de la condition.
L e Code civil a consacré cette doctrine par l’ar
ticle 1 1 7 9 , qui déclare que la condition accom plie
'
a un effet rétroactif au jo u r du contrat 3 et que,
si le créancier est mort avant l ’accomplissement de
la condition, ses droits passent à ses héritiers.
Ces règles s’appliquent aux donations entre-vifs ;
car des conditions peuvent être apposées aux donations
comme aux autres actes, pourvu q u ’elles ne dépendent
pas de la volonté du donateur (V o ir Code c iv i l , ar
ticle 9 4 4 .); et l ’on sait que la donation, dès q u ’elle
est faite, devient une obligation pour le donateur, et
un droit ou une créance pour le donataire.
Mais ces diverses règles ne conviennent pas aux
substitutions fidéi-commissaires.
Pendant la vie du grevé, le substitué n’a aucun
droit acquis; il n’est saisi de rien
: il n ’a q u ’une
simple espérance; et cette espérance s’évanouit s’il
meurt avant le grevé. Tel est un des caractères prin
cipaux de la substitution fidéi-commissaire. Tel est le
caractère qui établit l ’ ordre su ccessif s et ce q u ’on
appelle, en droit, le trait de tems.
Dans les substitutions, il y a ordre s u c c e s s if,
parce que le grevé est seul propriétaire pendant sa
vie; q u elq u e soit l'événement, la propriété aura tou
jours résidé sur sa tête; le droit du substitué ne com
mencera qu ’au jour de l ’ouverture du fidéi-commis ; ce
droit n’aura pas d'effet rétroactif au jour du contrat.
�( 36 )
Dans les dons conditionnels, au contraire, la pro
priété est suspendue jusqu’à l ’événement. Alors, par
un effet rétroactif qui remonte au jour du contrat, la
propriété est réputée avoir toujours résidé sur la tête
de celui à qui l ’événement l ’attribue. I l n y a pas
d ’ordre successif.
C ’est ce caractère important qui distingue la substi
tution du don conditionnel.
On peut consulter sur la différence de ces deux
dispositions, M. Thevenot d ’Essaules, chapitre 2 6 ,
S 1 , 3 et 4 ? et chapitre 28, § 8.
« L ’ouverture est la form ation du droit au profit
« du substitué , en telle sorte que le fidéi- commis
« commence à lui être du (V o ye z n° 4 ^4 )*
« Par l ’ouverture il acquiert un droit q u ’il transmet
« à ses héritiers } en cas de décès (Voyez n° 487)« Si l ’appelé décède avant que la substitution ait
« été ouverte en sa faveur, il ne transmet rien à son
« héritier ( n° 5 2 1 ). »
Cette doctrine de M. Thevenot d ’Essaules est fondée
non-seulement sur les lois romaines, mais même sur
un article formel de l ’ordonnance des substitutions.
L ’article 20 du titre I er s’exprime ainsi :
« Ceux qui sont appelés à une substitution , et
« dont le droit n ’aura point été ouvert avant leur
« décès 3 ne pourront en aucun cas en avoir transmis
« l'espérance à leurs enfans ou descendans, encore
« que la substitution soit faite en ligne directe par
« des ascendans. »
�X»
3? )
M. Thevenot fait observer que la caducité du fidéicommis, par le prédécès du substitué ,v ne s ’ applique
pas moins au fidéi-com m is p ar donation entre-vifs ,
qu au fidéi-com m is par testament (n° £>28).
« L ’ordonnance des substitutions elle-même n’admet
« point à ce sujet de distinction. »
Nous avons vu q u ’il n ’en était pas ainsi des dons
conditionnels faits par actes entre-vifs.
1
« Par cette espèce de donation , il n ’est pas néces« saire d’exister, 1lorsque la condition arrive, pour
« transmettre à son héritier le bénéfice de la dispo
s itio n .
(
•
«
«
«
«
1
•
■
I
j
« Dans les actes entre-vifs, la donation a effet
rétroactif au tems de l ’a c te , en telle sorte que le
droit est censé avoir été fo r m é des V origine j quand
définitivement la condition arrive (V o ye z le même
auteur, n° 53 o et 5 3 1). »
•’ V *
E n appliquant cette doctrine à la cause des héritiers
Capelle, pour reconnaître si la libéralité était un
fidéi-commis ou un don conditionnel, il 'suffit de
considérer si le décès du sieur Capelle, étant-antérieur
à l’événement de la condition , devait ou non rendre
le don caduc, et empêcher le sieur Capelle de le
transmettre à ses héritiers.
.
O r , q u ’on lise la clause constitutive de la libéralité,
et 1 011 y verra littéralement stipulé q u e , si la demoi
selle fu tu re épouse décède sans enfans du présent
mariage, les biens qui resteront de ceuæ ci-dessus
donnes seront remis et appartiendront audit f u t u r
�m
( 38 )
ép o u x ; e t,
ENyCAS DE PRÉDÉCÈS , A SES HÉRITIERS
OU A CELUI
d ’e
N T r ’ e U X QU I L AURA CHOISI.
L ’expression n ’est pas équivoque. L e sieur Capelle,
quoique décédé avant l ’événement p r é v u , pouvait
transmettre à ses héritiers, pouvait même exprimer
une volonté, faire un ch oix, et attribuer les biens
donnés à celui de ses héritiers qui serait l ’objet de son
affection spéciale.
Donc il n’était pas un simple substitué; donc il était
saisi d ’un droit dès l ’instant même du contrat de
mariage ; donc l ’événement de la condition ^devait
avoir en sa faveur un effet rétroactif q u i, remontant
au jour du contrat, lui attribuait ab initio la pro
priété des biens donnés, et lui permettait de transmettre
cette propriété; donc la clause du contrat était consti
tutive d ’un don conditionnel, non d ’une substitution
fidéi-commissaire.
C et argument avait été présenté dans le premier
mémoire des appelans, avec moins de développement
peut-être (i). On a ‘ feint de ne pas le remarquer; on
s’est dispensé d ’y répondre.
, E t q u ’aurait-on pu y répondre de sérieux?
Pour le «détruire, il eut fallu renverser toute la
théorie des principes sur les substitutions.
Aurait-on’ dit que les héritiers du sieur Capelle
étaient les vrais substitués, en cas de prédécès de
celui-ci ?
( i)
V o y e z
pages 39 c l suivantes.
�( 39 )
M i '''
Mais ne serait-ce pas éluder le moyen au; lieu de le
combattre? Ne serait-ce^ pas1 vouloir; transformer tout
don conditionnel en substitution.Pc: Ne serait-ce pas
confondre toutes les règles , dans l'injuste but de par
venir à détruire une convention écrite, et de se jouer
de la volonté d ’une bienfaitrice?
Mais que deviendrait alors la vocation personnelle ,
qui est aussi un des caractères des-substitutions? C a r,
selon Thevenot d ’Essaules r il faut q u ’il y ait charge
de rendre à un tiers que Von gratifie èn second ordre
(V oyez son Traité, chapitre i " , n0 '])'■
Il faut donc que le substituant désigne lui-même le
tiers ; il faut que le substituant gratifie lui-même.
O r , en devait-il être ainsi dans l ’espèce, puisqu’en
cas de prédécès du sieur Capelle, les biens donnés
devaient appartenir à ses héritiers } quels q u ’ils fussent,
enfans ou collatéraux , ou à Vhéritier du ch o ix du
sieur C a pelle? L a donatrice n’avait d’affection pour
aucun des héritiers \ elle n ’en désignait aucun : peu lui
importait. Ce n ’étaient pas e u x, mais le sieur Capelle
spécialement q u ’elle enténdait gratifier; c’était aussi
le sieur Capelle seul qui devait désigner et gratifier
lui!- même, si tel eût été son désir, celui auquel il aurait
entendu attribuer les biens donnés.
Ce serait donc, il semble, se refuser 'a reconnaître
1 évidence m êm e, que de soutenir encore q u ’il y a
substitution.
Sera-t-il nécessaire de répéter ici que le sieur C a-
�-v ^ v x
( 4» )
pelle n ’était pas un tiers, dans le sens q u ’attachent à
ce mot les principes s u r les substitutions ?
Les sieur et dame Valehtin ont fait beaucoup d ’ef
forts pour écarter ce m oyen, présenté dans le premier
mémoire; ils ont visé à être profonds : n ’auraient-ils
été q u ’obscurs?
L eur réponse à l ’argument est difficile à saisir ; et
ce q u ’on y trouve de plus remarquable, ce sont quel
ques vérités naïves, telles que celle-ci : P o u r se marier,
i l f a u t être d e u x :
A-t-on voulu dire un bon mot ? Soit ; mais il fallait
y,ajouter de bonnes raisons; e t , par exemple, prouver
q u e, dans les substitutions même, il est nécessaire
d ’être deux pour recevoir la première donation ; q u ’il
est nécessaire d ’être deux pour en accepter les charges;
q u ’il est nécessaire d ’être deux pour s’obliger solidaire
ment envers le donateur.
\'
i.) ,
.i
-' 1
Sans doute, on peut être présent dans un contrat,
et être un tiers par rapport à l ’une des dispositions que
ce contrat renferme. Telle eut été-la position du sieur
C ap elle, s i , le don étant fait à son épouse se u le ,
elle seule aussi, eût été soumise par la donatrice aux
paiemens considérables, aux charges nombreuses qui
furent le prix de la libéralité.
Mais il n’en fut pas ainsi.
f
Il
fut expressément stipulé que le sieur Capelle
supporterait aussi ces charges, et q u ’il en serait tenu
solidairement. Partie contractante dans la disposition
même , le sieur
Capelle pourrait-il être considéré
�comme un tiers , comme un simple substitué ? Ne
sait-on pas q u ’un substitué n ’est soumis à aucune
charge, tant que son droit n ’est pas ouvert-, et q u e ,
si son droit ne s’ouvre jamais, s’il n’a aucun avantage
à transmettre à ses héritiers, au moins il n’aura rien
payé, et ses héritiers ne pourront être exposés à au
cunes poursuites.
1 Cette position n ’est pas celle des héritiers Capelle :
leur père s’était obligé, et a beaucoup payé ; et ils
seraient contraints de payer eux-mêmes à la dame
M u rât, s’il lui était encore dû; aux créanciers de la
succession Jalinques, s’il s’en présentait. C ar l ’obliga
tion solidaire, contractée par leur p ère, a passé sur
leurs têtes. Comment concevoir q u ’ils ne doivent être
étrangers q u ’aux bénéfices?
Reconnaissons donc que la disposition critiquée n’est
pas une substitution. Reconnaissons q u ’elle n ’en pré
sente ni les termes, ni la n a tu re , ni les principaux
caractères; q u ’on n ’y remarque ni charge de conserver,
ni charge de rendre, ni tiers substitué. Reconnaissons
que la libéralité q u ’elle renferme est un don condi
tionnel et éventuel, dont l'effet, déterminé par l ’évé
nem ent, et remontant au jour du contrat, a saisi, dès
ce jour-là même, le sieur Capelle seul de la propriété
des biens donnés, et l ’a rendu capable de transmettre
6es droits à ses propres héritiers, quels q u ’ils fussent,
ou a 1 héritier de son choix.
Mais, y eût-il doute sur le sens du contrat, l ’inler-
6
�4 >•
( 4a )
prétation devrait tendre à conserver plutôt qu’à dé
truire.
Les intimés ont daigné je te r un regard sur cette
dernière proposition. Leur vue faible sans doute ne
leur a pas permis d ’y fixer un œil scrutateur; car leurs
observations SOtlt'‘à peu près nulles. Cependant les
auteurs invoqués, les arrêts cités sur ce point dans le
mémoire des-appelans, paraissaient dignes d ’un peu
plus d ’attention ; et l ’on doit présumer que si une
réponse eût été possible, ils nous en auraient fait part.
Mais il fallait glisser sur la difficulté, parce que les
lois romaines que l ’on invoque veulent que l ’interpré
tation soit favorable à l ’exécution de l ’acte ; parce
que Toullier que l ’on cite, dit lui-même que ce serait
a ller directement contre l ’esprit des lois romaines 3
que d ’appliquer ,
pour détruire , des dispositions
q u e lle s n avaient établies que p our conserver.
M. Rolland de Villargues professe la même doctrine
dans tout son ouvrage, et notamment dans le cliap. 7;
et il en conclut que toutes les fois q u ’on pourra, sans
blesser les principes, attribuer à l ’acte un sens dif
férent, un sens d ’après lequel les dispositions conser
veraient leur effet, un effet p lu s ou moins éten d u ,
c est-là l ’interprétation que l ’on doit admettre.
Il
serait superflu de rappeler ici la jurisprudence.
Aucun des arrêts opposés ne s’applique aussi parfaite
ment à la cause que ceux invoqués par les appelans.
D’ailleurs la diversité de la jurisprudence ne pourrait
�. ( i3)
que laisser les esprits incertains , et dans le------- ----la disposition devrait être maintenue.
M a is , nous l ’avons prouvé , il n ’ y a pas même
doute. L a disposition est un don conditionnel, non
une substitution fidéi-commissaire; et les héritiers
Capelle, pleins de confiance dans l ’esprit lumineux
et méditatif de leurs magistrats, doivent attendre
avec sécurité la décision de cette cause importante.
CAPELLE.
i
Me A L L E M A N D , A vocat.
R I O M , IM P R IM E R IE D E SA LL ES , PRÈS LE PALAIS D E JUSTICE.
* 9 *
'O Y A L E
1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Subject
The topic of the resource
donations
contrats de mariage
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
assignats
élevage bovins
immeubles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour les héritiers Capelle, appelans ; contre la dame Nouveau et le sieur Valentin, son mari, intimés ; en présence des dames Langheac de Montlogis et autres, aussi appelans.
Table Godemel : Bestiaux : Pour l’ancien législateur, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi, ils ne faisaient point partie de la donation du domaine, s’il n’y avait clause expresse et spéciale. Instruments aratoires : sous l’ancienne législation, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi ils ne faisaient pas partie de la donation du domaine, s’il n’y avait point de clause expresse et spéciale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1786-1819
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2505
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2503
BCU_Factums_G2504
BCU_Factums_G2506
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53491/BCU_Factums_G2505.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Calvinet (15027)
Cassaniouze (15029)
La Rouquette (château de)
Agrovieille (domaine d')
Saint-Michel (domaine de)
Mallaret (domaine de)
Ladinhac (15089)
Vézac (15255)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
contrats de mariage
donations
élevage bovins
fideicommis
immeubles
pensions viagères
renonciation à succession
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53492/BCU_Factums_G2506.pdf
5e71d9a8dd1c16f25591efdff1a820e8
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Text
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MEMOIRE
COUR R OYALE
d e ri om .
EN RÉPONSE,
P o u r dame Marie-Sophie L
an g heac
I T® CHAMBRE-
de
M
o n tlo g is
,
procès par é c ri t
religieuse, habitante de la ville d’Aurillac: Marie- s—
^
.
M. Tassin de VillepionJ
Judith L a n g h e a c , veuve de sieur P i a l e s ; Marierapporteur.
Honorée L a n g h e a c - L i g n a c , toutes deux propriétaires,
habitantes du lieu et commune de Viviers , sieur
B rassat- M
urat
, docteur en médecine, et autres,
A p p e la n s ;
C o n t r e s ie u r F é l i x V a l e n t i n
p r o p r ié t a ir e , et la
d a m e S o p h ie -M a rie N o u v e a u , son épou se , d e lu i
autorisée
héritière , sous b én éfice d ’in ven taire ,
d e s ie u r Jo s e p h - A y m a r d N o u v e a u , son o n cle /
lesd its m ariés V a l e n t i n habitans d u lieu et c o m
m une d e C a lv in e t , In tim és ;
EN P R É S E N C E
De
s ie u r
P ie r r e -A n t o in e
C a p e lle -P e u c h -Je a n ,
et d es d e m o ise lle s S o p h ie et M a r ie C a p e l l e , f r è r e
et sœ urs
habitans d e la v i l l e d ’A u r i l l a c , héritiers
de M e A n to in e C a p e l l e , le u r p è r e , a u ssi Appelans.
L
es sieurs et dames de Montlogis n’ont dans la cause
qu un intérêt secondaire. Leurs droits sont subordonnés
à la décision d’ une question importante qui s’agite
entre les héritiers Capelle et les époux Valentin.
C est sur l'interprétation et l’effet d’une donation
�( » )
portée par 1111 contrat de mariage du 23 septembre 1 786,
que roule la difficulté principale.
Les héritiers de l ’époux réclament les biens donnés,
comme donataires directs dans un cas prévu, et qui
est arrivéLeurs adversaires présentent la condition comme
une substitution que les lois nouvelles ont abolie.
S ’ il n’y a pas de substitution, les sieurs et dames
de Montlogis n’auront aucun droit aux biens compris
dans la donation.
Au contraire , s’il y a substitution , une portion
des biens donnés, portion faible, il est v ra i, doit leur
appartenir.
Cependant ils ne prendront aucune part à la
discussion de cette question.
L ’intention connue de la donatrice ne leur permet
pas de s’élever contre les droits des héritiers Capelle.
Cette intention , manifestée dans une transaction
du 20 décembre 17 9 1 , exprimée de nouveau devant
les premiers juges, leur impose le devoir de s’en rap
porter à droit sur l ’objet principal , et d’examiner
seulement quelques questions subsidiaires.
Leur examen ne peut être ni long ni difficile.
Faire ajouter au jugement une disposition que l ’inat
tention seule a pu omettre, et réfuter deux prétendus
griefs, incidemment présentés par les époux Valentin :
tel est le but que se proposent les sieurs et dames de
Montlogis.
FA IT S.
Il serait inutile de retracer avec détail des faits que
l’on trouve dans deux mémoires déjà publiés. Les
�• .t
<»>
v
sieurs et dames de Montlogis ne rappelleront que ceux
qui se rattachent au développement de leurs droits.
On sait que la dame Marie-Judith Langheac de
Montlogis, leur sœur ou leur tan te, avait épousé le
sieur Capelle : le contrat de mariage est du 23 sep
tembre 1786.
L a future se constitua personnellement tous ses
biens présens et à venir. Les biens présens consistaient
en une somme de 10,000 liv. , due k la future pour
ses droits légitimaires paternels et maternels.
Au contrat intervint la dame Judith Langheac de
Montlogis, une des appelantes. Cette dame, qui était
alors veuve du sieur Jalinques, et qui depuis a épousé
le sieur M u râ t, répandit sur les deux époux des bien- faits qui sont devenus la source de la contestation
actuelle.
Le sieur Capelle décéda le i 5 janvier 1794*
U n inventaire fut dressé le 17 février et les jours
suivans, entre la veuve Capelle et le tuteur des enfans
mineurs du défunt.
Dans l’ inventaire sont détaillés divers objets mobi
liers dépendant de la succession Capelle ; certains
meubles réclamés par la veuve, comme sa propriété
particulière-, plusieurs livres-journaux du défunt-, des
papiers qui lui appartenaient, et un grand nombre de
titres, notamment ceux de diverses créances comprises
dans la donation faite eu 1786.
L ’année suivante , la veuve Capelle épousa en
secondes noces le sieur Nouveau.
Dans leur contrat de mariage, en date du i!\ fri-
�(4 )
maire an 3 , elle lui donna, en cas de survie, la
propriété et la jouissance d e s d o m a in e et en clo s d e la
Rouc/uette et d é p e n d a n ce s.
Mais comme ce domaine était un des objets donnés
par la dame M urât, en 1 7 8 6 , la veuve Capelle, incer
taine si elle en était propriétaire, prévit le cas où elle
ne pourrait en disposer; et, dans ce cas, elle fit don
au sieur Nouveau de ses autres biens meubles et
immeubles.
Dans la suite diverses contestations s’élevèrent entre
la dame Nouveau et les héritiers Capelle.
Alors on exam ina principalem ent h. qui devaient
appartenir en propriété les biens donnés par la dame
M u râ t, dans le contrat de mariage de 1786. Des
mémoires respectifs furent publiés. Dans celui des
héritiers Capelle, on invoqua l ’intention de la dame
M u rât, et l’on s’en référa à l ’attestation même de
celle-ci, pour dém ontrer q u ’en vou lan t que les biens
donnés
fussent a c q u is
au s ie u r
C a p e lle
ou
à ses
h éritiers , elle n’avait pas entendu les leur attribuer à
titre de substitution iidéi-commissaire.
Si elle eût été appelée en cause a lo rs, la dame
Murât eût été prête à dire la vérité toute entière y
même contre l’intérêt de sa propre sœur.
Depuis, son intérêt personnel n’a pu l’engager à la
dissimuler.
La dame Nouveau décéda le G avril 1 8 1 5 , laissant
pour héritiers des neveux et plusieurs sœurs, l ’une
desquelles était la dame de Murât elle-même.
11 fut fait, le 2 octobre i 8 i 5 , et les jours suivans,
�H
( ' >
en présence du sieur Nouveau, du sieur Capelle et de
la dame Judith Langheac de Montlogis,' un inventaire
descriptif du mobilier qui existait dans les biens
qu’avait possédés la dame Nouveau. On allait com
prendre dans l ’inventaire les divers titres de créances
et tous les papiers, lorsque le sieur Capelle et la
demoiselle de Langheac déclarèrent qu’ il était inutile
d ’en Taire un second inventaire, « d ’a p rès les o ffres
« présentem ent f a it e s par le sieur Nouveau, de faire la
« représentation de tous les titres d e cré a n ce s et
« p a p ie rs énoncés au premier inventaire, par nous
« fait au décès de feu sieur Capelle, et de justifier de
« l ’emploi des créances par lui levées et perçues, et
« de représenter tous les autres titres et p a p ie i's en
« nature. »
Telles sont les expressions même des offres faites par
le sieur Nouveau.
Les titres de créances et les papiers ne furent donc
pas inventoriés.
Cependant le sieur Nouveau assigna en reprise
d’instance les héritiers naturels de son épouse.
Au nombre de ces héritiers était la dame de Murât,
qui avait fait la donation portée au contrat de mariage
de 1786.
Cette donatrice connaissait mieux que personne les
intentions qui avaient dicté ses bienfaits. Elle savait
qu elle avait entendu donner au sieur Capelle et à ses
enfans'j et, dans cette conviction, réunie à s e s cohéri
tiers , elle s était contentée de la dot que sa sœur
s c ia it personnellement constituée en 178G, et de celle
*v»
{¿ fc
�I f 'k
( 6 )
qu’elle avait elle-même apportée au sieur Jalinques,
son premier m ari; (lots dont le sieur Capelle père
s’était chargé, et dont sa succession était par consé
quent débitrice-, dots sur lesquelles elle traita avec les
enfans Capelle.
Ces arrangemens, faits dans la pensée qu’il n’y
avait pas de substitution, et que les héritiers Capelle
étaient seuls propriétaires de tous les biens donnés en
1 7 8 6 ; ces arrangemens furent suivis d ’une déclaration
que la loyauté commandait.
D an s une écritu re signifiée le 18 novembre 1 8 1 6 ,
la dame de M u râ t et ses cohéritiers reconnurent les
droits des héritiers Capelle a u x biens p ro ven a n t d e la
su ccessio n J a lin que s , et f a is a n t p a rtie d e la donation
p o rtée p a r le con trat d e
m a ria g e d u
23
septem bre
1786.
Ils déclarèrent que leur seul intérêt était de se f a i r e
restituer les som m es apportées en d o t 3 soit p a r la d a m e
M u r â t 3 soit p a r la d a m e N o u v e a u , et reçu es p a r
leu rs p re m ie rs m a ris; m ais q u à cet é g a r d , le sie u r et
les d e m o ise lle s C a p e lle le u r en avaien t f a i t raison .
Ils en tiraient la conséquence qu’ ils devaient être
mis hors de cause.
Cette déclaration fut spontanée. Elle ne fut refFct
d’ aucune impulsion. L a vérité seule la d icta, quelque
favorable qu’elle put être aux héritiers Capelle.
Cependant le sieur Nouveau voulut en profiter,
pour s'affranchir de l ’obligation de rendre compte des
biens de la défun te, et notamment pour rétracter
�l'offre qu’il avait faite dans l'inventaire du 23 octobre
1 8 1 5.
Cet étrange système ^ proposé dans une écriture
du 26 avril 18 1 7 , fut repoussé par les héritiers de la
dame Nouveau, dans une réponse signifiée le G août
suivant.
Les sieur et dame de Montlogis firent observer
« qu ’il ne pouvait plus être question de leur mise hors
« de cause, dès que la déclaration qu’ ils avaient faite
« pouvait tourner au profit du sieur Nouveau , contre
« leur volonté hautement manifestée depuis long« tems. »
E n . .conséquence , ils demandèrent que le sieur
Nouveau fut condamné « à se désister en leur faveur,
« ou en celle des sieurs et demoiselles Capelle , de
* « tous les biens immeubles possédés par la dame
« Nouveau à son décès, provenant principalement de
« la succession Jalinques;
« Qu’il fût aussi condamné à leur remettre :
« i° Le mobilier existant à la Rouquette, au décès
« de la dame Nouveau, leur sœur et tante, constaté
« par les inventaires des 7 février 1794 5 et 2 octobre
« 18 15 ;
« 20 Les cheptels de la réserve et des domaines de
« la Borie-Basse , outils aratoires et autres objets
« mobiliers existant dans lesdits domaines et réserves,
« aussi d’après les susdits inventaires}
«
A représenter et remettre tous les titres de
« créances, papiers, livres-journaux , et documens
« appartenant à la succession Jiüinques, et par exprès
�KQ&
( 8)
«j ceux énoncés en l ’inventaire du 7 janvier 17 9 4 ; k
« justifier de l ’emploi des créances par lui perçues et
« levées, le tout en exécution de l!obligation qu’il a
« contractée dans le procès-verbal du 2 octobre i 8 i 5 ;
« à rendre ' compte de)( toutes les autres sommes non
« portées audit inventaire de 1794? appartenant k la
« succession Jaliuques. »
On voit que, par les conclusions que l ’on vient de
transcrire, la dame de Murât et ses cohéritiers deman
daient que les condamnations fussent prononcées en
faveur des héritiers Capelle; la raison en fut qu’ils
connaissaient le vrai caractère de la donation de 178G,
et l ’intention qui l’avait dictée.
Cette intention que la dame de Murât pouvait
d’autant moins méconnaître , qu’elle avait été la
donatrice; cette intention qu’elle avait exprimée for
mellement dans le traité de 1 7 9 1 , a dû être aussi
manifestée par elle, dès qu’elle a été appelée dans la
cause.
Les sieurs et dames de Montlogis lui rendront un
nouvel hommage, en répétant que leurs intérêts n’ont
rien d ’opposé à ceux des héritiers Capelle; que s’ils
ont rèr.u
de ceux-ci la restitution des deux dots,' c’est
s
parce qu’elles 11’étaient pas comprises dans la donation
éventuelle faite au sieur Capelle ou k ses héritiers ( 1) ;
( 1 ) L ’ une de ces dots appartenait à la (lame Nouveau ; elle était de
10 ,0 0 0 fr. L ’autre était celle <le la dame de M u r â t; elle ne s’élevait
qu’à 3000 fr. E lle en fit don pur et simple à sa s œ u r , par le contrat de
mariage même de 17 8 6 .
�(
9
)
et que s’ils réclament aujourd’hui de plus grands
droits, c’est en faveur des héritiers Capelle, auxquels
seuls ils entendent que ces droits soient attribués,
comme faisant partie des biens qui leur étaient donnés '
conditionnellement.
Les mêmes conclusions furent prises lors du juge
ment contradictoire du 3 i décembre 1 8 1 7 .
L e tribunal décida la question principale en faveur
du sieur N o u v e a u , et lui attribua en conséquence la
propriété du domaine de la Rouquette et de ses dépen
dances; mais il jugea en principe, par les motifs du
jugement , que les bestiaux et
les outils aratoires
n’ étaient pas compris dans le don d ’ immeubles que lui
avait fait son épouse.
L e dispositif condamne le sieur Nouveau « h resti« tuer aux sieur et demoiselle C apelle, ou aux héri« tiers naturels de son épouse, tous les meubles
« meublans qui garnissaient le château de la Rouquette
« au décès du sieur Capelle, compris dans l ’inventaire
«
«
«
«
de 1794? ainsi que ceux qui avaient été délaissés
par la dame Murât à sa sœur, distraction faite de
ceux qui avaient été remis au sieur R e y, tuteur des
enfans Capelle •,
« E t vu les offres faites par lui dans l ’ inventaire
» de 1 8 1 5 , et acceptées par les héritiers de son épouse,
« de représenter tous les titres et papiers compris dans
<i 1 inventaire de 17 9 4 ? de justifier de l ’emploi des
« créances par lui levées et perçues, et de représenter
« tous les autres titres et papiers en nature,
« Le tribunal le condamne à faire ladite représen-
�«
«
«
«
tation et remise, ou à faire raison aux sieur et
demoiselles Capelle, ou aux héritiers de la dame
Nouveau, du montant des titres qu’il ne représentera pas. »
Le dispositif est d’ailleurs muet sur les bestiaux et
outils aratoires, que les motifs attribuaient cependant
aux héritiers de la dame Nouveau.
Ceux-ci ont interjeté appel de ce jugement, par
exploits des 12 féyrier 1 8 1 8 , et 9 mars suivant.
Ils ont demandé l ’adjudication des conclusions qu ’ils
avaient prises en première instance.
L e sieur Nouveau a interjeté lu i-m êm e un appel
in c id e n t, dont les griefs sont développés dans son
mémoire imprimé.
L ’appel principal a pour but de faire dire que tout
le mobilier qui s’est trouvé dans le château de la
Rouquette et dans les domaines dépendant de la suc
cession Jalin q u es, sera attribué aux héritiers de la
dame Nouveau , sous l ’exception seulement des objets
que le sieur Nouveau a lui-même achetés.
Il tend aussi à faire exprimer que les bestiaux et
les ustensiles aratoires seront considérés comme faisant
partie du mobilier.
Par son appel incident, le sieur Nouveau a demandé :
i° Que les bestiaux fussent déclarés une dépendance
des immeubles donnés au sieur Nouveau , dans son
contrat de mariage du 14 frimaire an 3 .
, 20 Que le sieur Nouveau fut affranchi de l ’obligation
à laquelle il s’élait soumis par l’inventaire de 18 1 5 .
�( 11 )
L ’examen des deux
appels présente trop peu de
difficultés, pour exiger de longues réflexions.
S I er.
A P P E L P R IN C IP A L .
Quel est le mobilier que doit remettre le S r Nouveau >
E n épousant la veuve C ap elle, le sieur Nouveau
est venu habiter dans le château de la Rouquette,
dont celle-ci était en possession.
»
Ce château était garni de mobilier.
Les domaines qui en dépendaient, et les autres
domaines dont jouissait la veuve Capelle , étaient
aussi garnis de meubles, d’instrumens d’agriculture,
et de bestiaux.
L a consistance des divers objets q u i , par le second
mariage de la veuve, passèrent en la possession du
sieur Nouveau, pourrait être en grande partie déter
minée par l ’inventaire du
29 pluviôse an 2 , ou
17 février 1794*
Mais il se pourrait aussi que, dans l ’intervalle delà date
de cet inventaire à celle du second m ariage, d’autres
objets mobiliers eussent été placés par la dame Capelle
dans ses domaines.
r
O r, le second mariage est seulement du 14 frimaire
an 3 j et le sieur Nouveau ne prit alors aucune précau
tion pour faire constater ce qui lui était remis.
Dans de telles circonstances, 011 doit lui appliquer
une règle d’équité et de justice, qui est élémentaire
en droit, savoir : (jue tout le mobilier q u i , au' décès
�de la clame Nouveau, s’est trouvé dans les bâtimens
qui lui appartenaient, est présumé lui avoir aussi
appartenu, et doit être compris dans la masse de sa
succession.
Le principe est enseigné par M. Chabrol, sur l ’art. 4
du chapitre 12 de la coutume d ’Auvergne (tome i er,
page a 5 3 ). L ’auteur l’applique non-seulement aux
bestiaux, mais aussi au mobilier ordinaire.
1
« S i , la femme étant héritière, dit-il, le mari avait
« été demeurer dans sa maison, qu’il aurait trouvée
« meublée, le fonds de ce mobilier serait réputé
« appartenir à la femme , et le m a ri ne p o u rra it
« re tire r que les m eu b les q u ’il p ro u v e ra it avoir
« apportés ou acquis . »
M. Chabrol atteste sur ce point la jurisprudence
de la sénéchaussé d’Auvergne. Celle de la Cour y a
toujours été conforme, lorsque l’occasion s’est présentée.
Cependant les premiers juges n’ont condamné le
sieur N ou veau q u ’à la restitution des meubles meublans 3 compris dans l ’inventaire de 1794*
Ce n’est sans doute que par inattention, qu’ils n’ont
pas généralisé la disposition, en condamnant le mari
à rendre non-seulement les meubles meublans existant
en 17 9 4 , mais aussi tous les autres objets mobiliers
alors existant y de quelque nature qu’ils fussent5 mais
encore tout le mobilier qui s’est trouvé dans les bâti
mens, lors du décès de la femme, sous la seule excep
tion de ceux que le sieur Nouveau prouverait avoir
acquis pendant le mariage.
. Cette omission doit être réparée par la Cour.
�( i3 )
On conçoit que les observations que l ’on vient de
faire s’ appliquent aux bestiaux et aux outils aratoires,
sur lesquels le dispositif du jugement est muet.
Ce silence n’est sans doute que l ’eifet de l ’oubli j
car les motifs du jugement déclarent que les bestiaux
et les outils aratoires doivent appartenir aux héritiers
de la dame Nouveau. Aussi le sieur Nouveau a-t-il
considéré ce point comme jugé, puisqu’il en a fait un
des objets de son appel incident.
:
Cependant il est bon que l ’arrêt ajoute au jugement
une disposition formelle, qui puisse prévenir des
difficultés ultérieures.
Les sieurs et dames de Montlogis se borneront à ces
courtes observations, pour justifier leur appel prin
cipal.
L ’appel incident est facile à repousser.
§ II.
A P P E L IN C ID E N T .
Cet appel est fondé sur deux griefs :
L ’un relatif aux bestiaux et aux outils aratoires;
L ’autre ayant trait aux titres, papiers et créances
que le sieur Nouveau avait offert de représenter.
Pour justifier le premier grief, le sieur Nouveau fait
remarquer (pages 100 et 10 1 de son mémoire)
Que son épouse lui donna, par leur contrat de
mariage de frimaire an 3 , « les domaines et enclos de
« la Rouquette et dépendances........... •
« Que le mot domaine, employé dans sa significa» tion commune , ne saurait permettre même k la
�( *4 )
« pensée de séparer les bestiaux du labour des terres
« labourables-,
« Que le mot dépendances ne pouvait s’appliquer
« qu ’aux bestiaux ;
« Que la dame Nouveau l ’avait reçu de sa sœ ur,
« qu ’elle l ’a livré de même au sieur Nouveau. »
Ces diverses raisons sont peu solides.
On pourrait même se dispenser d’y répondre •, car le
sieur Nouveau prend soin de se réfuter lui-même, en
convenant qu ’autrefois , avant le Code c i v i l, on ne
connaissait pas les immeubles p a r destination.
C om m en t donc alors des objets mobiliers au raien t-
ils pu- être considérés comme une dépendance d’un
immeuble ?
Si les bestiaux, les ustensiles aratoires, sont aujour
d’ hui réputés dépendre des immeubles, c’est unique
ment parce que le Code civil (article 52 4) les a déclarés
im m eubles p a r d estin a tio n .
Auparavant , ils n’en dépendaient pas davantage
que les meubles meublans ne dépendaient du château
de la Rouquettej observation consignée dans l’un des
motifs du jugement, et à laquelle le sieur Nouveau a
cru superflu de répondre.
On lui a fait aussi remarquer que le sieur Jalinques,
premier mari de la dame M u râ t, en laissant à la
dame de Gironde la jouissance du domaine d ’AyrollesY ieilles, léguée à celle-ci par le père Jalinques, l ’avait
privée des cheptels et des ustensiles aratoires, parce
q u ils n avaient pas été nommément spécifiés dans le
�(•5 )
legs. Cet exemple de famille n’a pas excité l'attention
du sieur Nouveau.
Mais s’il le croit nécessaire, qu ’il consulte tous les
auteurs anciens, et tous les recueils de la jurisprudence
antérieure au Code civil $ il y verra qu’autrefois on ne
considérait jamais comme donnés, ni même comme
vendus avec un corps de domaine, les bestiaux et les
instrumens d’agriculture qui y avaient été p l a c é s à
moins qu’il ne fût expressément déclaré dans l ’acte
qu’ ils étaient donnés ou vendus (i).
L a Cour a jugé la question en thèse, par un arrêt
du 22 janvier 1 8 1 9 , rendu pour la famille Veyni. Le
père du marquis de Veyni l ’avait institué, par testa
ment du 9 août 1767 , héritier universel de tous ses
biens de droit écrit, et légataire du quart des biens
de coutume. L e testateur était domicilié à C lerm on t,
pays de droit écrit. L a Cour lui a attribué les bestiaux
qui servaient a la culture de plusieurs domaines situés
dans le territoire des coutumes d’Auvergne et de
Bourbonnais.
« L a Cour a considéré que par leur nature les
« bestiaux sont meubles \ que l’esprit général des
« coutumes les considérait comme meubles ; qu ’à la
«< vérité un petit nombre de coutumes les regardaient
« comme immeubles par destination, mais qu ’on ne
(1)
On peut consulter notamment M azuer, au titre des Successions;
Latliaum assière, sur la coutume de B erry , titre 4 , page 10 6 ; A u r o u x ,
sur l ’article a 85 de la coutume du Bourbonnais ; M e r l i n , au mot
b e stiau x, u° 4»
^
*
�( >G )
trouve point une disposition de ce genre dans les
coutumes d’Auvergne et de Bourbonnais; que par
conséquent, sous l ’empire de ces coutumes , les
bestiaux qui garnissaient les domaines et servaient à
la culture, conservaient leur qualité de meubles;
que cette espèce de biens, en quelque lieu qu ’ils
fussent situés^ était régie par la loi du domicile du
défunt ; que' le marquis de Yeyni père était domi
cilié dans un pays régi par le droir écrit; que dèslors les bestiaux, même existant sous les coutumes
d ’Auvergne et de Bourbonnais, appartiennent exclu
sivement au marquis de Y e y n i, héritier universel*
du mobilier de son p è re ; que l ’on ne peut invoquer
la disposition du Code civil , qui considère ces
bestiaux.comme immeubles par destination, parce
que ce serait donuer à cette disposition un effet
rétroactif. » .
-,
Ainsi la Cour a cru qu’ il, lui était permis de
S ép a rer las b e stia u x d u la b o u r des terres la b o u r a b le s ,
et de ne pas regarder les b e stia u x co m m e une d é p e n
d a n c e d e s d om ain es.
Il est à croire que la Cour se donnera encore une
semblable permission.
Les dépendances d’un corps immobilier ne peuvent
être que des objets de même nature , c’est-à-dire ,
immobiliers comme la chose principale; par exemple,
des héritages détachés qui ont été réunis au domaine.
L e sieur Nouveau’ a présenté largement cette idée
devant les premiers ju ges; il s’est fait attribuer,
comme d é p e n d a n c e s d u d o m a in e et d e l ’e n clo s d e la
�(
*7
)
des héritages qui étaient attachés à la ré
serve du propriétaire, et dont la donation ne parlait pas.
L a dame Nouveau avait re çu , dit-on , le domaine
R o u q u ette,
garni de bestiaux ?
Mais on ne fait pas attention que sa sœur lu i‘ avait
donné non-seulement les biens immeubles, mais aussi
tous les biens meubles, sous quelques réserves qui ne
s’appliquaient pas aux bestiaux ?
Qu’y a-t-il de semblable dans le don fait au sieur
Nouveau? L a comparaison n’est pas heureuse.
C ’est trop sans doute s’arrêter à l’examen d’un grief
futile.
. !
Passons au second chef de l’appel incident.
On se rappelle que, lors de l ’inventaire du 2 octobre'
i 8 i 5 , au moment où l ’on allait faire la description
des titres de créances et des papiers qui se trouvaient
dans la maison où était décédée la dame Nouveau, le
sieur Nouveau, pour éviter cette m esure, offrit de
f a i r e la représentation d e tous les titres d e créa n ces
et p a p ie rs én on cés au p r e m ie r in ven taire , f a i t
au
d é c è s d u sie u r C a p e lle ; d e ju s t ifie r d e l ’e m p lo i des
créa n ce s p a r lu i levées et p e rç u e s 3
s e n t e r
t o u s
l e s
a u t r e s
t i t r e s
e t
e t
d e
r e p r é
p a p i e r s
EN
n a t u r e .
Cette offre formelle empêcha le second inventaire.
Aujourd’ hui qu’ il a obtenu l ’avantage qu’il se pro
posait, le sieur Nouveau voudrait éluder l’exécution
de son offre.
Les pretextes ne lui ont m anqué, ni en première
instance, ni en cause d’appel.
3
�Il (lisait, devant les premiers ‘ juges, que l ’offre
n’avait été faite qu ’aux demoiselles de Montlogis; que,
si le sieur Capelle avait assisté à l ’inventaire, c’était
seulement en qualité de procureur fondé; que, les
demoiselles de Montlogis ayant déclaré être sans intérêt
dans la contestation ,i l ’offre devait disparaître, parce
qu’elles seules et non le sieur Capelle pouvaient exiger
qu ’elle fut remplie.
Il ajoutait que la veuve Capelle avait reçu beau
coup de créances pendant son veuvage , en avouant
cependant qu’il n’avait pas encore découvert ce qui
lui avait été payé (i). '
Il reconnaissait néanmoins avoir touché lni-même,
savoir, en assignats, une somme de 24,898 fr. 90 c .,
et, en numéraire, une somme de 2 2,39 4 fr. (2).
L a première objection est futile; car, en supposant
que les sieur et demoiselles de Montlogis eussent cédé
leurs droits au sieur C apelle, celui-ci devait être au
torisé à exercer toutes les actions des cédans. Mais les
demoiselles de Montlogis conclurent elles-mêmes à*
l’exécution de l ’offre : le prétexte dut alors disparaître.
Aujourd’hui le gieur Nouveau se réduit à une hy
pothèse.
S ’il prouve, dit-il, par des quittances, que la dame
Nouveau avait reçu, avant son convoi, certaines des
créances, il aura rempli son obligation.
( 1 ) V o i r , dans le dossier d u sieur N ou veau , une écriture signifiée
le aG avril 1 8 1 7 .
(2) V oir la môme écriture.
,
�(
)
L e sieur Nouveau, au reste, s’embarrasse peu de
prouver- Il ne rapporte aucune quittance. Son but est
donc d’obtenir la permission de faire des preuves quand
bon lui semblera, c’est-à-dire d’embarrasser de diffi
cultés futures la liquidation et les comptes.
N ’est-ce pas se jouer de la justice, que de demander
à rétracter ou à restreindre une offre solennelle, une
offre acceptée, sans chercher même à en démontrer
l ’erreur ?
M ais, produisit-il des quittances de son épouse, le
sieur Nouveau ne serait pas affranchi de l ’obligation
qu ’il a contractée par son offre ; car la dame veuve
Capelle n’était pas une dissipatrice-, et si elle a touché
quelques sommes pendant son court veuvage, elle a
dù les remetti’e au sieur Nouveau ; celui-ci en aurait
donc profité, et par conséquent il en doit compte.
Ces faits auraient été éclaircis lors de l ’inventaire
de 1 8 1 5 , si le sieur Nouveau eût laissé faire la des
cription des titres et des papiers. On eut trouvé peutêtre, ou des notes de la main de la dame Nouveau,
ou quelque état sous seing privé, constatant ce que
le sieur Nouveau avait reçu d’elle au moment du
convoi, et remplaçant l ’inventaire qu ’aurait dù faire
alors le sieur Nouveau. Celui-ci avait intérêt que rien
ne fût connu. Cet intérêt le détermina à offrir la
représentation de tous les papiers et des titres de
créances énoncés dans l’ inventaire de 179/j , ou à
rendre compte de leur valeur. L ’offre doit être rem
plie intégralement, parce que les choses ne sont plus
dans le même état où elles étaient en 1 8 1 5 ; parce
�( 50 )
q u ’il serait impossible aujourd’hui de rien vérifier, et
parce qu’il serait injuste d’abandonner les héritiers
Montlogis à la discrétion du sieur Nouveau ou de ses
représentans.
L e second grief est donc aussi illusoire que le
premier.
E t ne doit-on pas s’étonner de cet appel incident?
Ne sem blait-il pas que les époux Valentin avaient
^ obtenu auprès du tribunal de première instance un
succès assez brillant pour en être satisfaits? Ne devaitil pas leur suffire d’avoir fait adopter une interpré
tation rigoureuse et forcée, et d’avoir été déclarés ,
contre l ’ intention de la dame de M u r â t , propriétaires
de biens considérables, que la donatrice avait destinés
aux héritiers Capelle?
L ’appel incident, hasardé peut-être pour faire
diversion à l’objet important de la cause, sera facile
ment apprécié par la C o u r; et si, dans sa sagesse ,
la C o u r pensait q u ’ il y a substitution, au moins
n’ hésiterait-elle pas à repousser les griefs chimériques
de la dame V alentin, et à rectifier ou à expliquer le
jugement, en la condamnant à restituer les bestiaux,
les ustensiles aratoires, et en général tout le mobilier
compris, soit dans l'inventaire de 1 7 9 4 , soit dans
celui de 1 8 1 5 .
Me M A R I E , Licencié-Avoué.
RIOM , IM PR IM E R IE DE SALLES , PRÈS LE PALAIS DE JU S T IC E .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Langheac de Montlogis, Marie-Sophie. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marie
Subject
The topic of the resource
donations
contrats de mariage
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
assignats
élevage bovins
immeubles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Marie-Sophie Langheac de Montlogis, religieuse, habitante de la ville d'Aurillac ; Marie-Judith Langhéac, veuve de sieur Piales ; Marie-Honorée Langhéac-Lignac, toutes deux propriétaires, habitantes du lieu et commune de Viviers ; sieur Brassat-Murat, docteur en médecine, et autres, appelans ; Contre sieur Félix Valentin, propriétaire, et la dame Sophie-Marie Nouveau, son épouse, de lui autorisée, héritière, sous bénéfice d'inventaire, de sieur Joseph-Aymard Nouveau, son oncle ; lesdits mariés Valentin habitans du lieu et commune de Calvinet, intimés ; En présence de sieur Pierre-Antoine Capelle-Peuch-Jean, et des demoiselles Sophie et Marie Capelle, frère et sœurs, habitans de la même ville d'Aurillac, héritiers de maître Antoine Capelle, leur père, aussi appelans.
Table Godemel : Bestiaux : Pour l’ancien législateur, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi, ils ne faisaient point partie de la donation du domaine, s’il n’y avait clause expresse et spéciale. Instruments aratoires : sous l’ancienne législation, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi ils ne faisaient pas partie de la donation du domaine, s’il n’y avait point de clause expresse et spéciale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1786-1819
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2503
BCU_Factums_G2504
BCU_Factums_G2505
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53492/BCU_Factums_G2506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Calvinet (15027)
Cassaniouze (15029)
La Rouquette (château de)
Agrovieille (domaine d')
Saint-Michel (domaine de)
Mallaret (domaine de)
Ladinhac (15089)
Vézac (15255)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
contrats de mariage
donations
élevage bovins
fideicommis
immeubles
pensions viagères
renonciation à succession
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53489/BCU_Factums_G2503.pdf
181338465512a0752a39a52964da5ee6
PDF Text
Text
MÉMOIRE
PO U R
L e sieur P ierre - A ntoine C A P E L L E - P E U C H - J E A N ,
et les demoiselles S ophie et M a r ie C A P E L L E ,
frères et sœurs, habitans de la ville d’Aurillac ,
héritiers de M e A n t o i n e C a p e l l e , leur père,
appelans
CO NTRE
Sieu r F élix V A L E N T I N , - pro p riétaire,
et la dam e
son épouse , de lu i
autorisée h éritière, sous bénéfice d'inventaire
de sieur Joseph-Aym ard N ouveau , son o n cle, lesdits mariés V a le n t in , habitans du lieu et commune
de Calvinet intim és
S o p h ie - M arie
NOUVEAU,
EN PRÉSENCE
D e dame Marie - Sophie Langheac de Montlogis ,
religieuse} habitante de la v ille d ’A u rilla c ; MarieJudith Langheac, veuve de sieur P ia le s Marie-
�Honorée Langheac-Lignac, toutes d eu x propriétaires,
habitantes du lieu et commune du V^iviers y sieur
Brassat - M u râ t, docteur en m édecine, et dam e
Judith Langheac, son épouse¿ de lu i autorisée ,
habit ans de la v ille d ’A u b ie r ; autre Marie-Juclith
Langheac de Montlogis-Chanat, propriétaire„ habi
tante du lieu de la Rouquette} commune de Cassaniouse
canton de JSIontsalvy y sieur Mai’sillac ,
docteur en médecine ; Olympie-Silvie Langheac de
Montlogis, son épouse 3 de lu i autorisée y MarieChristine Langheac de Montlogis, Marie-Anne
Chaudesaignes de Turrein, veu ve de Claude L a n
gheac de Montlogis, tutrice de leu r f i l s mineur y
Joséphine - Judith Langheac de Montlogis, tous
propriétaires, habitans du lieu de Dov.sques, com
mune de J^ eza c; Pierre-Alexandre Rigobert, JeanAlexandre et Pierre-Honoré Langheac de Montlogis,
propriétaires 3 habitans du lieu de M o n tlo g is c o m
mune de Laden hac 3 susdit canton de JSIontsalvy }
■aussi appelans.
I l n’est pas de loi dont la cupidité n ’abuse, et dont
elle ne cherche à s’emparer pour favoriser une préten
tion injuste.
L a loi qui a aboli les substitutions fidéi-commissaires
est une de celles qui a fourni le plus de prétexte aux
arguties de l'intérêt personnel.
Cependant son but était marqué j elle avait celui
�( 3 )
de prévenir les fraudes, et de faire rentrer dans le
commerce une grande masse de propriétés qui en étaient
sorties.
Mais ce Lut a été méconnu. E n détournant le sens
de la lo i, on a voulu l ’appliquer k toutes les dispositions
conditionnelles, k celles même qui ne présentaient
aucun des caractères du fidéi-commis ; et delà sont
nées des discussions multipliées, des argumentations
subtiles, qui ont répandu le désordre et l ’obscurité sur
les idées les plus simples, et qui ont créé .une branche
fécondé de nouveaux procès.
E n vain les tribunaux ont-ils, par des décisions
nombreuses, tenté de ramener les esprits k la vérité
et a la justice ; en vain même, dans les cas douteux ,
se sont-ils décidés d’après la maxime équitable qui
veut que l ’interprétation tende k faire valoir l ’acte
plutôt qu’k l ’ a n n u lle r . L ’ in té r ê t p e rs o n n e l ne s’est pas
tenu pour battu j et des contestations toujours renais
santes apprennent aux magistrats que les leçons de
1 expérience sont ordinairement perdues pour les
plaideurs.
Les héritiers Capelle réclament des biens dont la
pioprieté leur a été assurée par le contrat du second
mariage de leur père.
Ces biens sont d’ une valeur assez considérable-, mais
ils ne sont pas le fruit d’une pure libéralité : de grands
sacrifices en ont été le prix.
La demoiselle Nouveau prétend que ces biens lui
appartiennent. Son titre est postérieur -, c’est une
�( 4 )
donation faite au sienr Josepli-Aymard Nouveau, son
oncle, et sur laquelle même cet oncle n’avait pas dû
compter 5 car elle porte avec elle la* preuve que la
donatrice doutait qu’elle eut le droit de disposer de
ce qu’elle donnait.
Ce titre équivoque, le seul que fasse valoir la
demoiselle Nouveau , est devenu puissant à ses y e u x ,
parce q u e , selon ses idées, une substitution , annullée
par la loi du il\ novembre 17 9 2? serait le seul fonde
ment des droits des héritiers Capelle.
C ’est donc sur les principes des substitutions, com
parés aux termes du contrat de mariage du sieur
Capelle père, que doit rouler la discussion.
F A IT S.
M* Antoine Capelle, avocat, avait épousé, en pre
mières noces, demoiselle Hélène Bastid.
T r o is e n fa n s é t a ie n t n és d e ce m a ria g e : ce so n t les
a p p e la n s .
L e sieur Capelle contracta, en 17.86, un second
mariage avec demoiselle Marie - Judith Langheac de
Montlogis.
Les illusions du goût et l ’espoir d’une paternité
nouvelle ne présidèrent pas à cette seconde union. La
demoiselle Montlogis était d’un âge avancé.
L e sieur Capelle y fut déterminé par sa tendresse
pour les enfans de son premier mariage.
L a demoiselle Montlogis n’avait elle-même qu’ un
�( 5 )
.
tnodique patrimoine ; mais une sœur opulente, enrichie
des dons d’un premier m a ri, assurait ses biens aux
deux époux, sous des réserves cependant, et sous des
charges très-onéreuses.
Le sieur Capelle croyait avoir assez de fortune pour
satisfaii'e aux charges. Il était dédommagé de ses sacri
fices par les richesses qu’ il devait laisser à ses enfans.
Telles furent les intentions qui dictèrent le contrat
de mariage, du a 3 septembre 17 8 G , dont on va faire
connaître les principales dispositions. <
« Ladite demoiselle future épousé Vtést constitué en
« dot tous Ses biens présens et à’ v e n ir, avec pouvoir
« audit futur époux d’en faire la recherche, traite r,
« t r a n s i g e r c é d e r , transporter, vendr'é1, engager,
« aliéner, toucher, recevoir, fournir quittance et dé« charge valable, îi la charge par lui de re c o n n a îtr e
« to u t ce q u ’ il re c e v ra s u r to u s ses biens présens et
« à venir ^ lesquels deméùrent dès à présent affectés
« pour la restitution, le cas arrivant-,
« E t aux présentes est intervenue dame Judith
« Langheac de Montlogis, veuve de sieur Jean-Pierre
« Jalinques de la Rouquette;, ancien gendarme, habi« tant en son château , paroisse de Cas'saniouse ,
« laquelle, de gré, pour l ’amitié particulière qu’elle a
« pour la future épouse, sa scèur, a , en faveur du
« picsent mariage, donne h titre de donation entre« 'v iis, pure, simple, et à jamais irrévocable, a sadite
« sœur, future épouse, ce acceptant, tous les biens
“ meubles, immeubles, et effets dépendant de la
�(6 )
«
«
«
«
«
«
«
«
succession dudit sieur Jalinques de la Rouquette,
son mari, dont elle est héritière testamentaire,
suivant son testament olographe, du 3 juillet 1782 ,
déposé ès-mains de Bouquier, notaire, le 1 1 février
suivant, en forme, en quoi que lesdits biens consistent et puissent consister , ensemble la somme de
3ooo francs, qui lui a été reconnue par ledit
sieur Jalinques, dans leur contrat de mariage, du
«, 10 avril 17 7 2 .
« Ladite donation ainsi faite, sous les réserves,
« charges et conditions ci-après 5
. : Savoir : i° de tous les meubles meublans, qui
« sont dans le château de la Rouquette........... \
« 2 0 D ’ u n e ju m e n t .................5
t
. « 3 ° De tout ce qui est dù par le sieur. Auriac de
« C alsary............., par le sieur Jalinques de Barsagol,
« tant en principal q u ’accessoires5 de tout ce qui peut
« être aussi dù par le sieur Delcamp , greffier de
« Calvinet.............. j
« 4° D e tous les -arrérages de rentes et revenus
« actifs, échus jusqu’à çç jour, ainsi que de tous frais
« et dépens dus à ladite succession, liquidés ou à
« liquider.
c 5 ° Sous la réserve de la somme de cent vingt
« m ille fr a n c s , que ladite dem oiselle fu tu re épouse }
« et ledit sieur fu t u r é p o u x , s o l i d a i r e m e n t Vun
« p o u r Vautre, sans division ni discussion, sous
« quelque prétexte que ce soit y seront tenus , ainsi
« q u ’ils s’y obligent, de payer îi ladite dame Lan-
�( 7 )
« gheac de la Rouquette, savoir : 20,000 livres dans
« six mois, à compter de ce jour-, 10,000 livres dans
« un an d’après, et les 90,000 livres restant, 'a raison
de 3 ooo liv. par a n , dont le premier terme écherra
un an après celui ci-dessus de 10,000 livres, avec
l ’intérêt de ladite somme totale de 120,000 livres,
à compter de ce jo u r , lequel diminuera à proportion
des paiemens qui seront faits sur le principal \
« 6° A la charge p a r ladite dem oiselle fu tu re
« épouse y et ledit fu t u r é p o u x , ainsi q u ’ils s’y obli« gent aussi solidairem ent, de payer la pension viagère
« de la somme de 600 livres, due à la dame Delom de
« Gironde, veuve du sieur Joseph Jalinques, à com« mencer au i er octobre 1787 , et ainsi continuer
« jusqu’au décès de ladite dame de Gironde, et ce,
« outre et au par-dessus la jouissance du domaine
« d’Agrovieille, sa vie durant, cjui lui a été léguée
« par le testament dudit sieur Joseph Jalin ques, son
«
«
«
«
«
« mari.............. • de loger, nourrir à leur pot et feu et
« compagnie; éclairer, chauffer et blanchir, tant en
« santé que maladie, sieur Antoine Bouquier de
« L abro, sa vie durant-,
,
« 70 A la charge encore, par lefcdits futurs époux,
«« d acquitter toutes les dettes de ladite succession }
« ainsi qu’ils s 'y obligent comme dessus;
(( 8° D ans le cas que ladite dem oiselle fu tu re
« épouse vienne à d écéder sans enfans du présent
« m ariage} audit cas seulem ent, les biens qui reste« ront de ceuçc ci-dessus donnés 3 seront remis et
�( 8)
appartiendront audit fu t u r é p o u x y et j en cas de
prédécès 3 à ses héritiers, ou à celu i d 'en tr’e u x
q u ’il aura choisi, avec néanmoins liberté à la de
moiselle future épouse de disposer de la somme de
trois mille livres, reconnue sur les biens dudit
sieur Jalinques, à ladite dame de Langheac son
épouse, en faveur de qui bon lui semblera; et au
moyen de tout ce que dessus, ladite dame de Langheac de la Rouquette s’est dessaisie et dévêtue
desdits biens donnés, et en a saisi et invêtu, tant
en propriété qu ’en usufruit, ladite demoiselle future
épouse, pour, par elle et ledit futur époux, en jouir
dès à-présent j avec liberté audit fu t u r épo u x de
vendre } alién er} en tout ou en partie lesdits biens
donnés, à tel p r i x , charges, clauses et conditions
q u ’i l avisera 3 du consentement de la d it e fu tu re
épouse y de recevoir le montant du p r ix , ainsi que
des sommes dues fa isa n t partie des biens donnés y
t r a i t e r t r a n s i g e r s u r to u s p ro cès^ in s t a n c e ; du
tout fournir quittance et décharge valables 5 à la
charge de la reconnaissance des sommes qu ’il rece
vra, pour le tout être rendu, le cas dé restitution
arrivant, à qui il appartiendra; et à cet effet, ladite
dame Langheac de la Rouquette promet remettre et
délivrer, audit sieur futur époux, les titres de
créances, jusques à concurrence de la somme de
quatre-vingt mille livres en principal, intérêts ou
frais, soit en rentes constituées ou autrement, pour
par lui en faire le recouvrement............. E t dans le
�( 9 y
_
y,
« cas que lesdites créances, en principal, intérêts et
« dépens, ne monteraient point à ladite somme de
« quatre-vingt mille livres, audit cas, la réserve de
« cent vingt mille livres ci-dessus demeurera d’autant
« réduite, jusques à concurrence de ce qu’ il se trou« vera manquer pour parfaire ladite somme de quatre« vingt mille livres, et lesdits futurs époux déchargés
« d’autant a prendre sur les derniers ternies de ladite
« somme de cent vingt mille livres. » '
Tel est l ’acte où l ’on croit trouver une substitution
fidéi-commissaire, grevant la demoiselle Montlogis en
faveur de M. Capelle ou de ses héritiers ; comme si le
principal caractère d’une telle substitution n’était pas
la charge de conserver et de rendre la totalité des
biens, et non celle de restituer seulement ce (jui res- '
lerait dès biens donnés; comme si un simple substitué
pouvait être lui-même partie c o n tr a c ta n t e clans l’acte
de d is p o s it io n , et d e v a it être astreint personnellement
à quelques obligations, à quelques charges, avant
meme que la substitution fût ouverte.
Oii n’aurait pas exigé, sans doute, du sieur C a
pelle, et celui-ci n’aurait pas contracté des engageméns aussi onéreux, s’il n’eut pas été considéré, et
s il ne se hit pas considéré lui-même comme donataire
direct, dans le cas prévu par le contrat.
Ses engagemens, il commença h. les remplir; mais
bientôt il s’aperçut qu’ils excédaient scs forces , et
qu’ ils compromettaient toute sa fortune personnelle ,
parce que
plupart des créances comprises dans
2
*
�les biens donnés étaient d ’une valeur nulle, à cause
de l ’insolvabilité des débiteurs, soit parce que les im
meubles n’offraient qu’une vente difficile.
Il voulut échapper à la rigueur de ses obligations et
h la vivacité des poursuites qu’exerçait contre l u i , à
raison des 120,000 livres qui lu i étaient dues, la dame
veuve Jalinques, alors remariée avec le sieur Murât j
il renonça donc à la donation, en ce qui le concernait,
par acte du 1 4 j uin 1 78S ; et réuni, à son épouse, il
dénonça sa renonciation à la donatrice, par acte du
25 février 1789.
Alors s’éleva, entre la donatrice et les donataires,
un procès sérieux, qui fut porté au bailliage du Palais,,
à Paris, et qui y fut jugé par une sentence du 28 août
179 0 .
L e sieur Capelle renouvela sa renonciation devant
la justice; il offrit de rendre tout ce qu’ il.avait reçu :
il demanda en conséquence à être affranchi de. toutes
ses obligations.
L a dame Capelle consentait à conserver le titre et
les droits de donataire; elle demandait que les objets
donnés lui fussent remis; elle offrait d ’acquitter les
charges de la donation.
L e but des deux époux Capelle était de dégager les
biens du mari. Dans ce cas, le,sieur Capelle aurait
consenti à ne profiter d’aucun des avantages que la
donation lui assurait.
,
Mais alors, réduite aux seules, ressources que présen
tait la dame Capelle, la donatrice eût été mal payée :
�)
aussi ré sista -t-e lle et k la renonciation du mari e t aux
offres de l ’épouse. Elle demanda, ou que la donation
f u t annulée pour le to u t, ou que l ’acte fut exécuté
dans toutes ses clauses.
C ’est cet qui fut décidé, le 28 août 1 7 9 0 , par les
magistrats du 'bailliage du palais.
Voici les termes de leur sentence :
« Sans nous arrêter aux répudiations faites par la
« partie de Me Rimbert (le sieur C ap elle), disons que
« la donation dont il s’agit sera exécutée selon sa forme
« et teneur ; en conséquence, ordonnons que les pour"« suites commencées seront continuées*, et à faute par
« les parties de Mc> Rimbert et Populus (1) de remplir
^ lès clauses et les conditions portées en ladite dona« tion, dans le tems et espace de trois mois, à compter
« du jout de notre présente sentence, disons qu ’en
« vertu ¿le la d it e s e n te n c e , e t sa n s cju ’i l en soit besoin
« d’autre, ladite* donation et tous actes postérieurs
« itératifs seront révoqués; en conséquence, autorisons
«^lesdites parties de Me ^le'unier (la dame «t le sieur
« Murât) a entrer en jouissance, possession et pro« priété de tous les biens immeubles, meubles et effets
« compris en 'ladite donation , etc. »
Cette sentence était juste-, car l ’acte de donation
était •indivisible.
Cependant les débats se prolongèrent par un appel;
ils furent terminés par une transaction du 20 dé(T) M Populus était Vavocat do la dumc Capelle,
y
�eembre 1 7 9 1 ? qui fut faite par la médiation et de
l ’avis de trois anciens jurisconsultes.
Le sieur Capelle se décida à ne plus persister dans
une répudiation qui eut privé son épouse, comme lu i,
de tous les avantages que pouvait présenter la donation.
Aussi cette donation fut-elle considérée comme com
mune à l ’un et à l ’autre.
On remarque dans l ’acte des expressions non équi
voques sur le sens et l ’eifet de la donation.
« Les parties, est-il dit dans l ’exposé, désirant ter« miner les différentes contestations pendantes entre
« elles en différons tribun aux, tant en première ins« tance que par appel, à raison de l ’exécution de la
« donation fa ite p a r ladite dame de Lan gh eac. de
a M urât , en fa v e u r de ladite dame de Langheac
« Lascom bes} et dudit sieui' Capelle son m ari 3 dans
« leur contrat de mariage du 23 septembre 1786. »
Plus b a s, et dans le corps de l ’acte, des expressions
semblables sont employées.
Ou y parle du domaine de Saint-Miçhel, comme
fa isa n t partie des biens donnés auxdits sieur et daine
C apelle.
On y rappelle la somme de 120,000 f r . , que la dame
de Langheac de Murât s’était réservée dans la dona
tion p a r elle fa it e en fa v e u r des sieur et dame Capelle.
O11 cède h compte le domaine de Saint-Michel, tel
et de même q u 'il f u t délaissé auxdits sieur et dame
C apelle , p a r la donation fa ite en leur fa v e u r.
On abandonne aussi en paiement une rente faisant
�( ' 3 )'
p a rtie, est-il ajouté, de la donation fa ite p a r ladite
dame de M urât a u x sieur et dame C apelle.
Nulle part la dame Capelle n’est déclarée, n’est
môme indiquée comme seule donataire.
E t cependant des jurisconsultes habiles concouru
rent au traité.
S ’ils s’exprimèrent ainsi, ne fut-ce pas parce qu’il
était juste j parce qu’ il était conforme à l ’intention des
parties et au sens bien entendu du contrat de mariage,
que le sieur Capelle , qui participait aux charges,
devait aussi participer dès-lor.s même aux bienfaits, et
avait le droit d’être considéré comme un codonataire ,
non comme un simple substitué.
Par cette transaction , après avoir retranché les
paiemens faits par le sieur Capelle à la dame M u rât,
la somme de 120,000 fr ., que s’était réservée celle-ci, 1
fut réduite a 100,000 fr. en principal, et à 9600 fr.
en intérêts.
L e sieur Capelle paya un,à-compte de 12 ,7 9 8 fr.
Il consentit au paiement d'une somme de 1 1 , 8 1 2 f r . ,
valeur des droits légitimaires de son épouse, en prin
cipaux et en întcrets, et cette somme fut aussi touchée
par la dame de Murât.
11 lui laissa le domaine de Saint-Michel pour le prix
de 8000 francs’ 5
.
. Il lui céda une rente foncière d’ un principal de
4 °°o francs j
.
Il lui remit 20,000 fr. de créances, faisant partie
des objets donnés.
�< *4 )
Tous ces paiemens réduisirent la dette k 5 3 ,ooo fr .,
qui furent stipulés payables par termes.
Le sieur Capelle a exécuté fidèlement, depuis, la
donation et le traité.
Il a payé les dettes qui grevaient les biens donnés.
<
Il s’est aussi acquitté en partie envers la dame
M u râ t, à laquelle, selon le sieur Nouveau lui-même,
il ne devait q u ’environ 3 4 >ooo fr. lorsqu’il décéda.
E t comme les ressources que lui offrirent les biens
donnés étaient insuffisantes; comme il ne put retirer
que 4ooo francs des créances comprises dans la dona
tion , il fut forcé, pour satisfaire k ses engagemens ,
d’aliéner à vil prix une partie de ses propres biens, et
notamment le domaine de Mallaret , vendu pour
21,0 0 0 francs, et qui en vaut aujourd’hui plus de
60,000'fr.
Cependant le sieur Capelle, qui devait se considérer
désormais comme propriétaire des biens donnés, y fit
de grandes réparations, augmenta les cheptels du bien
de la Rouquette, principal immeuble, et y plaça un
mobilier d’ une grande valeur.
Le sieur Capelle ne jouit pas long-tems d ’une for
tune qui lui avait coûté tant de sacrifices : il décéda
presque subitement , le i 5 janvier 1704*
Ses enfans du premier lit étaient mineurs.
Il n’avait pas eu d’enfans du second mariage.
Des scellés furent apposés huit jours après son décès:
un inventaire fut fait dans le mois suivant.
Ou a reproché k la veuve d’avoir soustrait l’argent,
�C. ‘5 )
les effets, u n e partie du mobilier. Des poursuites en
spoliation avaient même été dirigées contre elle. Mais
les tuteurs des enfans Capelle négligèrent ces pour
suites.
Cependant là dame veuve Capelle passa à de secondes
noces avec le sieur Joseph Aymar-Nouveau.
Leur contrat de mariage, en date du i 4 frimaire
an 3 , est le titre invoqué aujourd’hui par le sieur
Nouveau.
Voici les clauses utiles à connaître.
« L a citoyenne Langlieac, future épouse, donne et'
« lègue audit citoyen Nouveau, son futur époux, aussi
« en cas de survie, la propriété et jouissance des do« maïnes'et enclos de la Rouquette et dépendances,
« francs et quittes de toutes charges, dettes et hypo« thèques présentes et à venir, sous la réserve de tous
« ses autres droits, actions et prétentions, dont elle
« pourra disposer, ainsi et comme bon lui semblera. »
L a future épouse donne ensuite au sieur Nouveau
pouvoir de vendre ses immeubles, à la charge d’en
employer le prix en acquisitions, ou en paiement des
dettes auxquelles ils étaient affectés.
Enfin on remarque la clause suivante :
« 11 demeure encore convenu que, dans le ças où
*< ladite future épouse ne pourrait disposer ni aliéner
« ses biens immeubles, e t, par exprès, ceux par elle
“ donnés audit futur époux, à titre de gain de survie,
« comme il çst dit plus haut} en ce cas, elle donne,
« à titre de donation entre-vifs, pure^ simple et irré-
�« vocable, audit futur époux, tous ses autres biens
« mobiliers et immobiliers, présens et à venir. »
Cette donation secondaire indique assez l ’opinion
de la dame Langheac elle-même sur le droit qu ’elle
s’arrogeait de disposer de la terre de la Rouquette ,
objet principal des libéralités contenues dans son pre
mier contrat de mariage.
Cependant les sieur et dame Nouveau agirent en
propriétaires.
Ils remboursèrent d’abord à la dame Murât , en
assignats d’une valeur presque nulle, les sommes qui
lui restaient dues d’après la transaction de 17 9 1 •
Us s’adressèrent ensuite aux mineurs Capelle , et
firent a leur tuteur, par acte du 5 floréal an 3 , offre
de i i j 835 francs d’assignats, somme à laquelle ils
fixèrent, par leurs calculs, les rembourscmens dont
ils étaient débiteurs envers les mineurs Capelle, pour
les paiemens faits par leur père à la dame Murât.
Le tuteur refusa les offres, comme insuffisantes et
immorales. Il demanda un compte.
Le sieur Nouveau obtint, le 25 floréal, un jugement
par défaut qui déclara les offres valables.
Un second jugement par défaut débouta le tuteur
de son opposition.
Celui-ci reçut, comme contraint, ces valeurs idéales,
le 25 messidor an 3 , le jour même oii fut rendue cette
loi si connue, q u i, réprimant les spéculations peu ho
n o rab les de certains débiteurs, déclarait nids les remboursemens en papier-monnaie, si ruineux pour les
créanciers.
�( *7 )
E n l ’an 12 commença le procès principal.
Les sieur et dame Nouveau formèrent la première
demande.
Par un exploit du 27 nivôse an 12 , ils récla
mèrent , i° 6938 livres qu’ils disaient avoir été
touchées par le sieur Capelle sur les capitaux de la
dame Nouveau; 2° 80 livres pour les frais funéraires
du sieur Capelle; 3 ° i a 35 livres pour frais de la nour
riture et de l ’entretien des enfans pendant deux ans
et cinq mois; 4° 275 francs pour les dépenses du procès
de l ’an 3 ; 5 ° la remise des quittances justificatives des
paiemens faits par le sieur Capelle à la dame Murât.
Depuis, les sieur et dame Nouveau ont reconnu le
ridicule de plusieurs de ces réclamations, et les ont
abandonnées.
L e s héritiers Capelle s o u t in r e n t d a n s le u r s défenses
q u ’ ils é ta ie n t se u ls propriétaires des biens compris
dans la donation faite par le contrat de mariage de 1786.
Ils conclurent aussi :
i° A la restitution du mobilier de la Rouquette;
20 A la remise des papiers et livres-journaux de
leur père ;
3 ° Au paiement d’une somme de 3 oo fr. en argent,
et de Goo fr. en assignats, qu’avait laissés leur père;
4 ° Au compte des arrérages de rente et des intérêts
de créances, qui étaient dus au sieur Capelle à son décès,
et dont avaient profité la- dame et le sieur Nouveau.
L a cause ayant élé portée a l’ audience, il fut ordonné
qu’elle serait instruite par écrit.
3
�( .8 )
Tel était l’état (les contestations, lorsque la dame
Nouveau décéda, laissant pour héritières les demoiselles
de Montlogis, ses sœurs.
Celles-ci ont été mises en cause à la requête du sieur
Nouveau.
Elles ont comparu, et ont fait signifier, le 18 no
vembre 1 8 1 6 , une requête dans laquelle la dame
M u rât, l ’une d’elles, déclare qu’elle avait entendu ,
non pas substituer, mais associer le sieur Capelle à la
donation qu’elle avait faite dans le contrat de mariage
du a3 septembre 1786.
Les héritiers Capelle ont demandé, par requête du
i 5 fé v r ie r 18 17 , le désistement de tous les biens donnés
à leur père.
Le sieur Nouveau a soutenu qu’ ils lui appartenaient,
parce que le sieur C apelle, simple substitué , avait
perdu ses droits, à l ’émission de la loi du 2 5 octobre
1 7 9 2 , et que la dame Capelle, saisie dès-lors irrévo
c a b le m e n t de la propriété, avait pu la transmettre à
son second mari par leur contrat du 5 novembre 1 79A•
C ’est sur ces prétentions respectives, et sur quelques
autres, qu'a prononcé le tribunal d’Aurillac, par juge
ment du 3 i décembre 18 1 7 .
Ce jugement déclare « que la donation portée en
« l ’article 8 du contrat de mariage de la demoiselle de
« Montlogis avec le sieur Capelle, en date du a 3 sep« tembro 17 8 6 , contenait une substitution en faveur
« du sieur Capelle et de ses héritiers, abolie par la
« loi du 25 octobre 1 7 9 2 ; maintient et garde le sieur
�( *9 )
Nouveau clans la paisible possession et jouissance des
« deux domaines de la Rouquette, enclos et dépen« dances, composes de tous les héritages qui étaient
« attachés à la réserve du propriétaire. »
Les motifs de cette décision n’ont pas coûté beaucoup
de méditation.
« Attendu, disent-ils, que l ’on trouve dans la clause
« du contrat «de mariage charge de rendre, trait de *
« tems, et ordre successif, qui étaient les principaux
« caractères par lesquels on distinguait les substitutions
« fuléi - commissaires des autres espèces de substitu« lions ; que dès-lors la donation faite par la dame
« veuve Jalinques à sa sœur, contenait une véritable
« substitution iidéi-commissaire, du moins de eo quod
« supereritj en faveur du sieur Capelle et de ses
« héritiers ;
« Attendu que cette substitution n’était pas encore
« o u v e rte h l ’ époque de la publication de la loi du
« 25 octobre 17 9 2 , qui abolit les substitutions fidéi« commissaires qui n’étaient pas encore ouvertesj que
« dès-lors les biens qui étaient compris dans cette do« nation devinrent entièrement libres sur la tête de
« la dame Capelle, q u i, par une conséquence natu« relie, put en disposer à son gré, tant à titre gratuit
« qu’à titre onéreux5 et que par conséquent la dona« tion par elle faite, à titre de gain de survie, au
« sieurNouveau, dans le contrat de mariage, du /j dé
cembre 17 9 4 , doit être confirmée et maintenue. »
Le jugement prononce sur d’autres objets dont il
n est plus question dans la cause, à l ’exception d’ un
�( 20 )
chef relatif au mobilier qui garnissait les bàtimens (le
la Rouquette.
11 ordonne notamment un compte relatif aux sommes
payées et reçues par le sieur Capelle, compte qui sera
le germe d’une foule de difficultés, et que rendrait
inutile une décision contraire sur la question principale.
Les héritiers Capelle ont interjeté appel du jugement.
Les dames Montlogis se sont aussi rendues appe
lantes.
Depuis l ’appel, le sieur Nouveau est mort. Une
nièce, son héritière, a repris l ’instance ; et c’est contre
cette héritière collatérale, que les. enfans Capelle ont
déjà discuté leurs droits devant la C our, à plusieurs
audiences.
Un arrêt du 18 août dernier a ordonné que la cause
serait instruite par écrit.
Les héritiers Capelle démontreront :
i° Que le contrat de mariage ne contient pas de
substitution fidéi-commissaire;
a° Que, dans le doute même, la disposition devrait
être maintenue.
P
r em ièr e
p r o po sitio n .
L e contrat de mariage de 1786 ne contient pas de
substitution J i d e i -commissaire.
Nous n’entrerons-pas ici dans le détail des diverses
espèces de substitutions. Ce serait nous livrer à une
théorie aussi compliquée qu'inutile.
�Il suffit de savoir que les substitutions fidéi-commissaires sont les seules qu’ait abolies la loi des
oc
tobre et 14 novembre 179 2.
C ’est ce que déclare M. Merlin dans son Répertoire
de Jurisprudence (1).
C ’est aussi ce qu’a remarqué M. Bigot-Préameneu,
en présentant au Corps législatif le titre du Gode civil
sur les donations et le§ testamens.
« Parmi les règles communes à tous les genres de dis« positions, a-t-il d it, la plus importante est celle qui
« confirme l ’abolition cles substitutions jicléi-com m is« saires. »
Cet orateur, qui était en 1792 membre de l ’assem
blée législative, nous fait aussi connaître les motifs
qui dictèrent cette première innovation de nos lois
anciennes.
« L ’esprit de fraude introduisit les substitutions ;
« l ’ ambition se saisit de ce’m oyen, et l ’ a perpétué.......
« L ’expérience a prouvé que, dans les familles opu«
«
«
«
lentes , cette institution^ n’ayant pour but que
d’enrichir l ’un de ses membres en dépouillant les
autres, était un germe renaissant de discorde et de
procès..............
« Chaque grevé de substitution, n’étant qu’ un
« simple usufruitier , avait un intérêt contraire à
« toute amélioration.
(1) Voir lo Répertoire do M. Merlin , au mot Substitution Jidéi-commissaire, section i " , § i3.
�( 22 )
« Unetrès-grande masse de propriétés se trouvait
« perpétuellement hors du commerce.
« Ceux qui déjà étaient chargés des dépouilles de
« leur fam ille, avaient la mauvaise foi d’abuser des
« substitutions pour dépouiller aussi leurs créan« ciers...........
« Ce sont tous ces motifs qui ont déterminé à con« Jîrm e r l’abolition des substitutions, d éjà prononcée
« par la loi d’octobre 179 2. »
On voit qu’il y a conformité parfaite sur la matière
entre la loi de 1792 et le Code civil; en sorte que les
raisonnemens, les principes, les arrêts applicables à
l ’une des législations, peuvent aussi être invoqués pour
l ’autre.
L ’on doit faire une autre remarque très-importante,
que nous empruntons des auteurs les plus distingués (1).
Personne n’ignore qu’il y a des rapports sensibles
entre les substitutions et les conditions : mais il n’est
pas défendu de donner sous condition. Il faut donc bien
se garder de c o n fo n d re les conditions qui forment une
substitution fidéi-commissaire, avec celles qui n’en
ont pas les caractères; ce serait compromettre le sort
de dispositions que la loi respecte;
Ainsi les magistrats ne sauraient user de trop de
circonspection, lorsqu’ils ont à prononcer sur des ques
tions aussi délicates.
(1) Voyez le Commentaire de M. Chabrol, tome 2 , page 12G, et le
Traité des Donations de M. Grenier, observations préliminaires, n° 9 ,
tome i " , pages i i 3 , 114 , 2' édition.
�Mais examinons la nature de la disposition qiii a fait
naître le procès, et pour cela rappelons en analise la
principale clause du contrat de mariage.
« Dans le c a s, est - il d i t , que ladite demoiselle
« future épouse vienne à décéder sans enfans du p ré-
« sent m ariage ^ audit cas seulement, les biens qui
« resteront de ceux ci-dessus donnés, seront remis et
« 'appartiendront audit sieur futur époux*, e t , en cas
« de prédécès, à ses héritiers, ou à celui d’entr’ eux
« q u ’ il aura choisi, etc. »
Le
futur époux a la lib erté de vendre , a lié n e r,
en tout
ou e n . p a r t i e , lesdits biens donnés, à tels prix,
charges, clauses et conditions q u ’ il avisera, du con
sentement de la future épouse ; de recevoir le montant
du p r i x 3 ainsi que des sommes dues fa isà n t partie des
biens.
C e s s t ip u la t io n s c o n te n u e s clans le p lu s solennel des
contrats , ces stipulations qui furent la condition du
mariage même, ne pourraient être critiquées, q u ’ autant
q u ’on prouverait q u ’elles renferment nécessairement
une substitution fidéi-commissaire.
Toute
autre convention',
toute autre disposition
faite dans un lel acte doit être considérée comme in
violable.
Mais à quoi reconnaît-on
une substitution
fidéi-
commissaire ?
A ses expressions ou à ses caractères.
A ses expressions. C a r q u o iq u ’on ne fût pas obligé
autrefois d ’employer des termes m arqués, cependant il
�( 24 )
y en avait de consacrés par l ’usage, tels que ceux-ci :
J e substitue.. .. J e charge mon mandataire de con
server et de rendre......... J e le prie de rendre.
O r, aucune expression semblable ne se trouve dans
la clause; aucune charge n’est directement imposée à
la future épouse.
On lui donne dans un cas ;
Mais dans un -autre cas, dans celui où elle mourrait
sans enfans, les biens sont donnés au futur époux :
c’est à lui qu’ils appartiendront, est-il dit.
Cette observation serait peu considérable, s’il s’agissait d’une disposition faite depuis les lois nouvelles,
parce qu’on pourrait croire qu’on a cherché à. éluder
leur prohibition.
Mais elle est importante , si l’on considère qu’à
l ’époque du contrat de mariage, les substitutions étaient
permises; q u ’ainsi on n’élait pas gêné dans le choix des
expressions; qu’on n’aurait donc pas hésité à employer
les te rm e s usités, et à d ire : J e su b stitu e 3 o u j e c h a rg e
d e c o n s e r v e r et d e r e n d r e , si l ’on avait entendu réel
lement faire une substitution fidéi-commissaire.
-Fixons-nous aussi sur les caractères de cette sorte de
substitution.
Ces caractères sont indiqués dans la définition que
donne l’article 896 du Code civil, dont voici le texte :
« Les substitutions sont prohibées.
« Toute disposition par laquelle le donataire, l ’héri« tier institué, le légataire sera chargé de conserver
« et de rendre à un tiers, sera nulle.' »
�( 25 )
l û<)
Nous avons clioîsi cette définition comme la plus
claire et la plus juste; comme ayant été donnée par
le législateur lui-m êm e afin de prévenir toute équi
voque ; comme convenant aussi aux substitutions sur
lesquelles a frappé la loi d’octobre 1792 ; car nous
avons vu que cette loi et le Code civil s’appliquaient
à la même espèce de substitution.
L a définition du Code civil est d’ailleurs, à peu de
chose près, la même que celle donnée par M. Thevenot
d’Essoles, q u i, a p r è s y a v o i r l o n g - t e m s r é f l é c h i ,
définit la substitution fidéi-commissaire u n e d i s p o s i
tio n
de Vhom m e j
p a r l a q u e l l e 3 en g r a t if ia n t q u e l
q u 'u n , e x p r e s s é m e n t o u t a c it e m e n t } o n le c h a r g e d e
ren d re la ch o se à lu i d o n n é e ,
A
un
t ie r s
ou
une
a u tre
ch o se,
q u e l ’ o n g r a t if ie e n s e c o n d o r d r e ( 1 ) .
Quoique dans cette définition imparfaite ne soit pas
placée la charge d e c o n s e r v e r , il est é v id e n t que cette
charge résulte de la définition même ; la condition
de rendre la chose donnée suppose nécessairement
qu’on la conservera; aussi l ’auteur explique-t-il, au
même chapitre, n° 2 1 , que c e l u i q u i e st c h a r g é d e
ren d re
n ’a p o in t,
en
g é n é r a l,
la
lib e r t é
in d é f in ie
d 'a l i é n e r , p u i s q u e , s ' i l a v a i t c e tte l i b e r t é i n d é f i n i e ,
l a c h a r g e d e r e n d r e s e r a it p r e s q u e t o u jo u r s s a n s e ff e t .
On voit donc que la définition du Code c iv il, soit
par sa conformité avec les anciennes définitions, soit
(1) Voyez le Traité des substitutions fidéi-commissaires, par M. Tlievenot d’Essoles, section i re, chapitre 1 " , S 2.
4
�(
)
par sa simplicité et son exactitude, soit par le but que
se sont proposé les lois nouvelles en annulant les
substitutions, est la seule à consulter pour vérifier si
une disposition ancienne est comprise dans l ’abolition
prononcée par la loi de 1792.
De cette définition ressort avec évidence le principe
que l ’on va poser :
Ce qui constitue essentiellement une substitution
jidéi-com m issaire
est
la
D E R EN D R E A UN T IE R S .
ch arge
de
co n server
et
_
Ce principe, nous l ’avons puisé dans une source
abondante en doctrine (1).
O r, rien de ce qui constitue essentiellement une
substitution ne se rencontre dans la clause ci-dessus
transcrite.
Il n’y a pas charge de conserver.
Il n’y a pas aussi charge de rendre h. un tiers.
§ I er.
I l n’y a pas charge de conserver.
Cette vérité n’est pas douteuse, d’après les termes
du contrat de mariage.
Le futur époux a la liberté d’aliéner, en tout ou en
partie , les biens donnés ;
Il peut les vendre à tel p r ix } clauses ou conditions
q u ’il avisera;
(1) Voir le Traité «les donations, déjà cité, tome i*r, page n \ }
a® édition. Voir aussi le Droit civil de M. Toullier, tome 5 , n° 1.
I
�( 27 )
Seulement il faut le consentement de l ’épouse}
Mais avec le consentement de celle-ci, il est permis
de ne rien conserver, de faire dispaxaître, par des alié
nations , la totalité des biens donnés.
Comment reconnaître, dans une faculté aussi illi
mitée , le principal caractère d’une substitution fidéicommissaire, la charge de conserver, qui constitue
essentiellement une telle s u b s t it u t io n disent les au
teurs , et sans laquelle, par conséquent, il ne saurait,
y avoir de substitution ?
Par une conséquence du pouvoir indéfini d’aliéner,
l ’on dit seulement dans le contrat que les biens qui
resteront de ceu x ci-dessus donnés appartiendront au
futur époux ou à ses héritiers.
Singulière substitution, qui n’assure rien aux per
sonnes qu’elle indique, et de laquelle il résulterait que
celles-ci n’auraient pas la moindre chose à réclamer,
dans le cas où to u t aurait etc vendu !
Comment trouver aussi dans la clause l ’application
des motifs principaux qui ont dicté l ’abolition des substi
tutions, la crainte des fraudes envers les créanciers, le
but de faire rentrer les biens dans le commerce?
Les biens donnés îi la dame et au sieur Capelle
n’étaient jamais sortis du commerce, et leurs créan
ciers ne pouvaient être trompés, puisque le pouvoir de
s’obliger à leur égard était évidemment renfermé dans
celui de vendre, de traiter, transiger, recevoir toutes
sommes, etc.
Cependant l ’argumentation s’est emparée de ces
///
�( =8 )
expressions m êm e, qui resteront des biens donnés 3
pour y puiser diverses objections.
Prem ière objection. Si la clause ne s’applique qu’à
ce qui restera des biens donnés, la dame Capelle aurait
fait une disposition valable en faveur du sieur Nouveau,
son second mari.
L ’objection n’est qu’ une équivoque.
L a dame Capelle n’était pas propriétaire absolue des
biens compris dans la donation } elle n’y avait qu’un
droit subordonné à un événement} et cet événement
était l ’existence d’enfans nés de son premier mariage.
Propriétaire dans ce dernier cas, elle eut pu disposer
k son gré des biens donnés.
Non propriétaire dans le cas contraire, elle n’avait
aucune qualité pour en gratifier qui que ce soit.
Aussi, par le contrat même, la faculté de disposer
à titre gratuit fut-elle restreinte à une somme de
3 ooo francs.
Mais e lle p o u v a i t , c o n jo in te m e n t a ve c son premier
m ari, tout aliéner à titre onéreux} et c’est en ce sens,
que l ’on ne peut pas dire qu’il y eût dans le contrat
charge de conserver, ni par conséquent substitution.
»
D euxièm e objection. Dans l ’ancien droit, on con
naissait la substitution ejus quod supercrit; ainsi,
fût-elle de cette nature , celle dont il s’agit n’en
aurait pas moins été annulée par les lois nouvelles.
Deux réponses écartent l ’argument.
*
Dans l’ancien droit même, la substitution ejus quod
�( 29 ) '
supererit n’ était considérée comme fidéi-commissaire,
q u ’autant que le pouvoir d ’aliéner était restreint.
Lorsque l ’ acte gardait le silence sur la quotité de
l ’aliénation permise, cette mesure était à l ’ arbitrage
du ju ge; il le fallait ainsi, pour que le fidéi-commis
ne fût pas vain.
In totum diminuere non potest, dit C u ja s, alioquin
inane esset fideicom m issum . L e x ait posse diminuere
bond fid e et e x ju s tâ causa (i).
Mais la loi n’avait rien à régler, lorsque l’acte dé
terminait lui-même la faculté d’aliéner, et lorsqu’il la
déclarait indéfinie. Alors, qu’on qualifiât la disposition
conditionnelle de substitution ou de toute autre ma
nière, ce qui était indifférent dans l ’ancien droit, au
moins ne pouvait-elle pas être considérée comme J id é icommissaire (2). O r, nous avons vu qu’il n’y avait
que cette dernière espèce de substitution qui eût été
abolie.
Dans le contrat de mariage du sieur Capelle, la
donatrice ne s’est pas bornée aux premières expressions,
par lesquelles elle attribuait au sieur Capelle ou à ses
héritiers, seulement ce qui resterait des biens donnés;
elle y a ajouté expressément un pouvoir indéfini de
vendre, la lib e rté , est-il d it, d 'a lién e r, en tout ou
en p a rtie 3 les biens donnés, c’est-à-dire, qu’elle a
autorisé à rendre complètement illusoire le don éventuel.
(1) Voir Thcvenot «l’Essoles, section 3 , chapitre 22.
(2) Voir Thcvenot d’Essoles, section i re, chapitre 1 " , n° a i.
�( 3o )
Donc il n’y a pas de substitution fidéi-commissaire.
Au reste, si l ’on consulte la législation nouvelle, on
verra que la substitution ejus quod supererit n’est
pas comprise dans l ’abolition qu’elle prononce.
Les auteurs et la jurisprudence s’accordent sur la
question.
M. Tou llier, dans son droit c iv il, remarque, en
deux endroits différens ( i ) , que la charge de rendre
ce qui restera des biens, à la mort du d o n a t a ir e id
quod supererit y ne constitue pas une substitution
prohibée. Il rappelle l ’ usage de ces sortes de disposi
tions sous la coutume de Bretagne , qui cependant
n’admettait pas les substitutions. Il dit qu’on doit
les considérer comme valables aujourd’h u i, « parce
n qu’elles ne contiennent pas l ’un des caractères essen« tiels des substitutions prohibées, la charge de
« conserver. »
L ’auteur du dernier Traité des Donations cite un
a r r ê t r e n d u , le i 4 n o v e m b re 18 0 9 , par la Cour
de Bruxelles, qui a jugé qu’ il n’y avait pas de substi
tution fidéi-commissaire, dans une clause par laquelle
l ’institué dans la propriété de tous les biens était chargé
de rendrej a u x héritiers de Vinstituant} ce q u 'il 1 1 au
rait ni dépensé ni alién é.
Ce profond jurisconsulte, en approuvant l ’arrêt,
fait observer qu’il ne faut pas avoir égard,'au moins
(1) Voir tome 5 , a0* 38 et 47 1 première édition.
�( 3. )
sur ce point, aux lois romaines, dont le génie était de
favoriser et d’étendre singulièrement les substitutions.
« On doit ne v o ir, ajoute-t-il, de substitution fidéi« commissaire , que la où l ’on doit nécessairement
«< supposer une charge de conserver et de rendre à un
« tiers (i). »
On pourrait trouver quelques opinions contraires;
Mais ces opinions rigoureuses ne s’appliqueraient
qu’à des cas où le pouvoir d’aliéner aurait été limité ;
sinon elles seraient en opposition directe avec les termes
comme avec l’esprit de la législation nouvelle, qui a
aboli seulement les substitutions dans lesquelles il y
avait charge de conserver; qui les a abolies, principa
lement par des considérations politiques, afin de pré
venir les fraudes dont elles étaient le germe, et pour
faii'e rentrer dans le commerce des biens considérables,
que ces sortes de substitutions en avaient fait sortir.
Ni les termes, ni l ’esprit de cette législation ne
s’appliquent à la disposition qu’invoquent les héritiers
Capelle, puisque la totalité des biens donnés pouvait
être vendue, et par conséquent perdue pour eux.
Une troisième objection est présentée.
Ce qui restera des biens donnés, dit-on, doit s’en
tendre de ce qui restera, les charges remplies : or, il
y en avait un assez grand nombre.
L ’objection est peu sérieuse.
Ï1 eût été fort inutile de dire qu’ori rendrait seule(i) Voir observations préliminaires j pages 1 1 2 et J i 3.
�( 3> )
ment ce qui resterait après le paiement des dettes.
Cela était de droit. Personne n’ignore la maxime :
B ona non dicuntur nisi deducto œre alieno. Il n’y
avait de donné à la dame Capelle elle-même que ce qui
n’était pas dù.
Ainsi ces expressions du contrat, les biens qui resteront de ceu x ci-dessus donnés, ne peuvent s’en
tendre que de ce qui n’aurait pas été aliéné, en vertu
du pouvoir illimité accordé au sieur et à la dame
Capelle.
Au reste, ce n’est pas sur les mots les biens qui
resteront, etc. , qu’il faut seulement se fixer. C ’est
cette liberté indéfinie d’aliéner q u ’il faut considérer,
ce droit de vendre la totalité des biens, droit extraor
dinaire en matière de substitution fidéi-commissaire,
droit évidemment exclusif de la charge de conserver,
qui forme l ’essence d’une telle substitution.
Ici se présente une dernière objection qui pa
r a ît r a p lu s f u t ile e n c o r e , p o u r p e u qu’on l ’approfon
disse.
On oppose que, si le sieur Capelle pouvait vendre,
et toucher le prix des ventes, il était tenu de recon
naître, sur ses propres biens, les sommes qu’il rece
v ra it, p o u r le tout être ren d u , le cas de restitution
arrivant, à qu i i l appartiendra.
On veut trouver dans cette clause une charge de
conserver, puisque ce qui ne se trouverait plus eu
nature devait se recouvrer en valeur.
�On répondra que la stipulation pouvait bien être
quelque chose pour la daine Capelle elle-même.
Car si elle avait eu des enfans de son premier ma
riage, événement qui l ’eût rendue propriétaire des biens
donnés, elle aurait pu exercer ses reprises sur les biens
de son mari; et si celui-ci avait vendu ses propres
biens, elle aurait conservé, à l ’aide des précautions
prescrites par les lois, le droit d’agir hypothécairement .
contre les tiers-détenteurs.
Mais si l’on considère à qui devaient appartenir les
biens donnés, dans le cas où la dame Capelle n’aurait
pas d’enfans de son premier mariage, on s’apercevra
que la reconnaissance des sommes reçues par le sieur
Capelle devenait absolument insignifiante, et ne pou
vait équivaloir à une charge de conserver.
E n effet, ce n ’ est pas un tiers étranger au sieur
C a p e lle , à qui les biens donnés devaient appartenir
par l ’ événement.
C ’est au sieur Capelle lui-même 3 ou à ses héritiers.
Or, dans ce dernier cas., le seul où la prétendue
substitution aurait eu son effet, il est évident que la
dame et lesieur Capelle pouvaient tout dissiper, savoir,
l ’ un et l’autre, en vendant les biens donnés; ou le
sieur Capelle seul, soit en disposant du p rix, soit en
contractant des dettes qui auraient absorbé la valeur
des biens.
Quel effet aurait produit alors la reconnaissance des
sommes ?
�( 34 )
Que serait devenue cette
conserver ?
prétendue charge de
Le sieur Capelle lui-même n’aurait pu se plaindre
de ses dissipations.
Ses héritiers n’auraient pas eu plus de droits que
lui} car tenus de ses faits, en leur qualité d’ héritiers,
ils auraient été obligés ou d’acquitter ses dettes, qui
auraient absorbé les biens, ou de renoncer a leur titre
d’héritiers, ce qui eût été renoncer aussi à la donation.
O r, il n’y a charge de conserver, dans une substi
tution fidéi-commissaire, que lorsque c’est en faveur
du substitué lui-même que la charge est établie.
Donc l’on ne peut pas dire qu’il y a substitution,
si celui que l ’on indique comme substitué a cependant
pu être privé de tous les biens.
Comme la charge de conserver constitue l ’essence
des substitutions aujourd’ hui proscrites, les héritiers
Capelle ont dû s’attacher à démontrer que cette charge
n ’ e x is t a it pas dans le contrat du mariage de leur père}
ils croient avoir rempli cette tâche} et ils pourraient
sans danger se borner à cette première discussion ,
parce qu’en l ’absence du principal caractère d’ une
substitution, d ’autres caractères moins importuns ,
fussent-ils même reconnus dans la clause dont il s’agit,
ne suffiraient pas pour faire déclarer la disposition
nulle.
Mais les autres caractères indiqués par les auteurs
n'existent même pas.
�(35)
'
§ II.
I l ri y a pas charge de rendre à un tiers.
Il est dit dans le contrat qu’au cas où la future
épouse vienne ¿1 d écéder sans enfans du présent m a
riage , les biens qui resteront seront remis et appar
tiendront au fu t u r é p o u x y et en cas de p ré d é c è s, a
ses héritiers> ou à celu i d 'e n tr e u x qu il aura choisi.
Nous démontrerons bientôt que ces expressions n’ in
diquent pas une charge de rendre, plutôt qu ’un don
conditionnel ou tout autre convention, q u i , même au
jourd’hui , serait licite dans un contrat de mariage.
Mais remarquons que ce n ’est pas un tiers y c’est
une partie contractante, le futur époux à q u i, dans
le cas prévu, doit appartenir la chose donnée.
Cependant ce qui indique en général une substi
tution fuléi-commissaire, c’est qu’un tiers non présent
à l ’acte est appelé à en recueillir le bénéfice, après la
mort du grevé (i).
L e grevé seul accepte ; et son acceptation su ffit,
parce que l ’obligation de rendre étant la charge de la
libéralité qui lui est faite , produit une action en
faveur du substitué.
Mais aussi lorsque le subtitué meurt avant le grevé,
la substitution s’éteint; l ’ héritier du substitué ne peut
demander les biens au grevé qui demeure affranchi de
la charge (a).
(1) Voir llicvcnot d’Essoles, section i , chapitre i et, n® n .
(2) Voir Thcvcnot û’Essolcs, sect.
chap, 28 el 29 , u05 5a 1 , 534
^
�( 30)
Pourquoi cela ?
Le même auteur nous en explique les raisons (i).
C ’est que les fidéi-commis diffèrent des stipulations
conditionnelles.
Dans les stipulations conditionnelles, l’espérance se
transmet à l ’ héritier ; e t , même après notre m o rt,
celui-ci recueille si la condition s’accomplit.
Ex
condition a li stipulalione t a n t u m s p e s e s t
D E B I T U M j r i y eamque ipsam spem in hœredem
transm ittim us, s i, priusquàm conditio extet 3 mors
nobis contigerit. Instit. De verb. oblig. , § 4 Cela est fondé sur ce que, dans les contrats, on est
censé stipuler, tant pour soi que pour ses héritiers.
Quia plerum que tant j i æ r e d i b u s N O S T R IS quàm
nobismet ipsis cavemus. L . 9 , ff. De probat.
Il en est ainsi notamment dans les legs et les ildéicommis, où il n 'y a personne qui stipule.
In hœreditatibus et legatis 3 dit C u jas,
T R A N S m it titu r i n
sp es
non
h æ r e d e r i j qu œ tam en tra n sm it-
titur in stipulationibus et omnibus contractibus.
E t remarquons avec M. Thevenot d ’Essoles, que ce
principe de la caducité du fidéi-commis, par le pré
décès du substitué, 11e s’applique pas moins au fidéieoinmis par donation entre-vifs 3 qu’au fidéi-commis
par testament (2).
Aussi l ’article 20 du litre i er de l’ordonnance des
substitutions déclare-t-il, d’une manière générale et
(1) Voir aux n05 5 iG ,
, 5 18 , 528 , 529 , 53o.
(a) Numéros 5a8 et suivaus.
�absolue, que ceux qui sont appelés à une substitution,
et dont « le droit n’aura pas été ouvert avant leur
décès, ne pourront en aucun cas être censés en avoir
« transmis l ’espérance à leurs enfans ou descendans. »
E t M. Furgole, sur cet article, en rappelant le § l\.
aux instit. D e verb. o b lig a t.j qui établit la trans
mission de l ’espérance aux héritiers, dit que ce para
graphe peut bien « être appliqué aux stipulations et
« aux contrats à titre onéreux, ou bien aux donations
« entre-vifs, en faveur du donataire ; mais il ne peut
« pas être appliqué a u x substitutions. »
Tels étaient les principes en vigueur, lors du contrat
de mariage du sieur Capelle père avec la demoiselle
Montlogis.
D ’après ces principes, l ’idée d’ une substitution pré
sentait celles :
i° D 'u n tier-s appelé à recueillir après le grevé, mais
non partie au contrat qui renfermait la libéralité;
a° D ’une libéralité conditionnelle, mais gratuite,
et qui ne soumettait le substitué à aucune charge, à
aucun sacrifice anterieur au moment où son droit serait
ouvert.
3 ° D ’une simple espérance qui s’évanouissait par le
prédécès du substitué, et que celui-ci ne transmettait
pas à ses propres héritiers.
Recherchons si ces idées caractéristiques d’une
substitution fidéi-commissaire conviennent à la dispo
sition qui est l'objet de notre examen.
Nous l’avons déjà dit ; ce n’est pas un tiers : c’est le
futur époux, c’est le sieur Capelle lui-même, rune
�( 38 )
des parties principales du contrat, à qui est attribué
la propriété des biens donnés, si le mariage qu’il con
tracte ne donne le jour à aucun enfant.
Cette libéralité conditionnelle ne lui est pas faite a
titre g ratu it, mais elle est le prix de sacrifices consi
dérables qu’on lui impose, et auxquels il s’oblige ,
puisqu’ il se charge de payer les dettes nombreuses
auxquelles étaient affectés les biens donnés, et de plus
une somme de 120,000 francs à la donataire.
E n fin , en se soumettant à des obligations, il stipule
par réciprocité ses propres intérêts -, car dans tout acte
synallagmatique, et sur-tout dans un contrat de ma
riage, toutes les clauses, quelle que soit la forme de
leur rédaction, sont réputées corélatives, et être les
conditions les unes des autres.
Bien plus, non-seulement il stipule pour lu i, mais
il stipule aussi pour ses héritiers, puisqu’il est expres
sément convenu que le droit conditionnel qui lui est
a t t r i b u é a p p a r t i e n d r a , en c a s d e p r é d é c è s , à ses h é
r itie rs ,
ou
à
c e lu i
d 'e n
tr eu x
(¡u i l
a u r a c h o is i.
(Expressions littérales de la clause.)
Ces diverses circonstances n’écartent-elles pas toute
idée de substitution ?
Ne caractérisent-elles pas, au contraire, des conven
tions réciproques, dont les conditions ont été dictées
par toutes les parties, même par le sieur Capelle, qui
achetait h grand prix, pour lui ou pour ses enfans, un
droit encore incertain ?
Com m ent conciliera-t-on , sur-tout avec les principes
des substitutions, la transmission, stipulée dans le
�( 39 )
I 9fi>
contrat, du droit ou de l ’espérance du sieur Capelle
à ses héritiers, ou même à l ’héritier de son choix?
Supposera-t-on que la donatrice, quoiqu’étrangère
à la famille Capelle, et sans autre motif qu’une pure
générosité, ou un étrange caprice, eût préféré, nonseulement le sieur Capelle, mais encore l ’héritier que
celui-ci choisirait un jour} qu’elle eût préféré, disonsnous , un inconnu à sa propre fam ille, aux enfans
qu’aurait pu avoir sa soeur d’un second mariage, à
elle-même enfin , qui pouvait succéder à cette soeur, et
qui réellement lui a succédé ?
Que l ’on cesse donc de parler de substitution fidéicommissaire.
Que l ’on reconnaisse dans l ’ensemble des clauses du
contrat de mari.age du sieur Capelle le do ut i/eidu droit
romain , c’est-à-dire des obligations et des avantages
réciproques, et auxquels le s lo is n o u v e lle s n ’ o n t pu
p o r te r a t t e in t e }
Que l ’on y cherche si l ’on veut une libéralité con
ditionnelle, mais une libéralité de la nature de celle
dont parle le savant auteur du Traité des Substitu
tions } une libéralité dont le droit est censé avoir été
fo rm é dès Vorigine,, quand définitivem ent la condition
arrive ( i ) ; une libéralité q u i, dans l ’acte même, n’a
pu être déclarée transmissible aux héritiers du sieur
Capelle, que parce qu’on a considéré celui-ci comme
saisi dès-lors des biens donnés, si révénemen€Çprévu
avait lieu dans la suite.
Quoique conditionnelle, une donation n’en est pas
( i ) Numéro 53o.
*
�( 4o )
moins valable, et n’en doit pas moins être fidèlement
exécutée, si la condition s’accomplit.
« Car cette donation, qui est faite pour avoir son
« effet en un cas, ne laisse pas d’être parfaite en sa
« disposition, dès l ’instant de la donation, quoique
« la condition ne soit pas échue (i). »
L e Code civil indique, dans l ’article 1 1 7 9 ? l ’effet
de l’accomplissement de la condition.
« L a condition accomplie a un effet rétroactif au
« jour auquel l ’engagement a été contracté. Si le créan« cier est mort avant l ’accomplissement de la condi« tio n , ses droits passent à son héritier. »
Tels sont les seuls principes applicables à la dispo
sition faite en faveur du sieur Capelle et de ses héritiers.
Un don est fait dans le contrat de mariage.
On déclare, il est vrai, qu'il est fait à la future épouse.
Mais aussitôt cette déclaration est modifiée par une
clause expresse.
L a future épouse ne sera propriétaire, qu’autant
qu’elle aura des enfans nés du mariage même qu’elle
contractait.
Si elle n’a pas d’enfans de ce mariage, en eùt-elle
d’une seconde union , son droit s’évanouit.
Alors, est-il d it, les biens s e r o n t r e m is et a p p a r
t ie n d r o n t
a u f u t u r é p o u x e t à s e s h é r it ie r s .
A in si, dans l ’ un des cas , c’est l ’épouse qui sera
donatiiiure.
Dans l’autre cas, c’est à l’époux, que les biens ap
partiendront.
(1) Ricard, Traite des Donations, partie première, u° io44 >
�( 4* )
D o n c , dès l ’ instant même du contrat de m a ria g e,
l ’époux a été saisi conditionnellement aussi bien que
l ’épouse.
L ’événement seul devait apprendre quel serait le
propriétaire des biens donnés.
L ’époux était saisi, puisqu’il transmettait à ses hé
ritiers, et que nul ne peut transmettre un droit qu ’il
n’a pas.
Donc la disposition contestée est un don condi
tionnel , non une substitution iîdéi-commissaire.
Argumentera-t-on des expressions seront rem is, pour
en induire une charge de rendre ?
Mais des inductions hasardées, des interprétations
forcees ne suffisent pas pour établir une substitution.
C est moins aux mots qu’aux choses } c’est moins à
1 ecorce qu’à la substance, qu’on doit s’ari’êter pour
juger de la nature d’une disposition : potîüs 'voluntatem qucim verba spectari placu it.
Ici la volonté des parties n’est pas équivoque ; et la
substance de la disposition résiste, comme nous l’avons
démontré , a toute idée de substitution.
Les mots seront remis s’entendent de la cessation de
1 usufruit des biens*, car la dame Capelle devait en
jouir jusqu à son décès. On dit tous les jours, dans le
langage du droit, qu ’à la mort de l ’ usufruitier les
biens seront remis au propriétaire.
Aussi la clause porte-t-elle que les biens seront remis
et appartiendront , ce qui indique la remise comme
(levant être l’eifet de la condition, dont l’accouiplisseG
�ment atirait attribué cl’avancc la propriété au sîeur
Capclle et à ses héritiers. (Voyez l ’article 1 1 79 du
Code civil.)
La distinction que nous venons de faire entre les
substitutions fidéi-commissaires et les dons condition
nels, est écrite dans l ’ancienne comme dans la nouvelle
jurisprudence.
Autrefois, dans plusieurs de nos provinces, les cou
tumes prohibaient les substitutions iidéi-commissaires.
Nous rappellerons notamment les coutumes d’A u
vergne et du Bourbonnais.
E t cependant, sous l ’empire de ces coutumes, on
considérait comme valables des dispositions semblables
à celle qui nous occupe.
t
Nous citerons deux des exemples rapportés par
M. Chabrol, sur l’article 53 du titre 12 de la coutume
d ’Auvergne. (Pages 1 2 6 , 12 7 .)
P rem ier exem ple. Gabriel Dossandon, qui avait
deux fils, et plusieurs filles, avait légué le quart de
ses biens à celui de ses deux fils qui vivrait jusqu’à
l ’àge de vingt-cinq ans; et s’ils atteignaient tous les
deux leur majorité., il donna les trois quarts du quart
à l ’aine, et le reste seulement au cadet.
L ?un des frères décéda mineur; le survivant réclama
le quart entier.
Les sœurs le lui disputèrent , prétendant qu’il y
avait substitution réciproque.
L a sénéchaussée d ’Auvergne jugea que la disposition
-n’éiait qu ’un legs conditionnel.
�D euxièm e exem ple. U n testateur avait fait u n
legs conçu en ces termes : « Je lègue 100 liv. à Titius j
« et où il viendrait à mourir sans enfans ou désun
it Mans, ledit légat retournera à mon héritier ab in« testât. »
L a sénéchaussée décida aussi que la disposition de
vait avoir son effet.
On pouvait dire cependant qu’il y avait charge de
conserver et de rendre à un tiers, si le légataire mou
rait sans enfans.
Mais les magistrats pensèrent que l ’on ne devait
pas interpréter avec rigueur, dans le but d’anéantir
la disposition.
M. Auroux , sur l’article 3 2 $ de la coutume du
Bourbonnais, rapporte, au n° 1 8 , plusieurs sentences
qui déclarent valables des legs conditionnels , dont
l ’analogie avec des substitutions paraissait frappante.
La
sé n éch a u ssé e (le M o u lin s c o n fir m a u n legs fa it
par Madeleine Bidon à Jean Bechonnet, son m ari, au
cas que leurs enfans vinssent à m o u rir, et non au
trement.
Elle ordonna aussi l ’exécution de deux autres legs
semblables •,
L ’ un fait par Antoinette Poincet , en faveur de
Jacques Ilermant, son m ari, p o u r avoir lieu après le
décès de la disposante et de sa f i l l e ;
L ’autre par lequel Gervaise Martin avait aussi
donné le quart à son m a ri, après le décès de G ilbert
Ja rm et, leur fils,
�( 44 ;
Ces diverses dispositions prêtaient plus aux subti
lités de la critique, que celle invoquée par les héritiers
Capelle; et cependant elles furent maintenues.
Telle était la jurisprudence en Auvergne et en BourbonnaiSj lorsqu’à été publiée la loi du i4 octobre 179 2,
qui n’a fait que rendre commune à toute la France
une prohibition qui était restreinte à quelques pro
vinces.
Doit-on être plus sévère aujourd’ h u i, pour anéantir
des actes faits de bonne foi, q u ’on ne l ’était alors
contre des actes dont on pouvait croire que les expres
sions avaient été déguisées dans le but d ’ éluder la loi?
L a jurisprudence nouvelle a été aussi sage et aussi
juste.
L a Cour de Riom a donné, par un arrêt du 28 avril
18 0 6 , un des premiers exemples de l ’équité des déci
sions nouvelles en cette matière.
Par leur contrat de mariage, du 3 mai 1 7 7 8 ,
Marien Bâtisse et Marguerite Chaumelte s’étaient
d o n n é ré c ip ro q u e m e n t to u s leurs b ie n s présens et à
venir, pour, par le survivant, en jouir en toute pro
priété, avec convention que les biens qu’ils pourraient
avoir seraient partagés par moitié entre les héritiers
de chacun des contractans, après la mort du survivant.
Marien Bâtisse meurt sans enfans, le i 5 juin 1790.
Sa veuve reste en possession des biens qu’ il avait
laissés.
Elle décède elle-même en fructidor.
Ses héritiers veulent tout retenir, sous prétexte que
�la clause renfermait une substitution iîdéi-com m is
saire , non ouverte à la publication de la loi d ’ octobre
1 7 9 2 , et abolie par cette loi.
L e u r système, accueilli en première instance, fut
rejeté par la C o u r , qui ordonna le partage de tous
les biens, par moitié, entre les héritiers du mari et
ceux de la femme.
Voici les motifs de l ’ arrêt :
1; Attendu que la disposition réciproque portée au
« contrat de mariage du
3 mai 1 7 7 8 , n ’a aucun ca-
« ractère de la substitution, et que les lois abolitives
« des .substitutions ne s’y appliquent pas;
«
«
«
«
«
« Attendu que le but de la substitution, et son effet
sont de réserver à l ’appelé nominativement en second ordre, les biens confiés au grevé, et que, dans
l ’espèce, non-seulement le survivant p o u v a it tout
a lié n e r o u d is s ip e r , m a is même qu’il ne s’y rencontre
pas de vocation personnelle; qu’au contraire, les
« héritiers de l ’un et de l ’autre des époux doivent
« recueillir, aux termes de droit, ce qui restera ;
«
«
»
«
«
«
« Attendu que cette disposition, purement conditionnelle, a eu pour objet unique de confondre les
biens des époux, de n’en faire q u ’une seule masse,
de laquelle le survivant aurait eu la pleine propriété,
mais qu i, au décès de celui-ci, et pour ce qui en resterait, devait se répartir par égalité entre les héritiers des deux époux ;
'< Attendu que cette clause n’a rien de contraire
�« aux bonnes mœurs , et qu’elle est licite en elle« même. »
Trois circonstances ont décidé la Cour :
L e pouvoir qu’avait le survivant de tout aliéner ou
dissiper y
L e défaut de vocation personnelle d’ un individu
t
désigné ;
L a restriction de la disposition à ce qui resterait des
biens.
Ces trois circonstances se rencontrent dans la cause
des héritiers Capclle.
Aucun d’eux n’était personnellement appelé dans le
cas du prédécès du sieur Capclle.
Il y avait liberté indéfinie d’aliéner et de dissiper.
Les héritiers du sieur Capelle ne devaient avoir que
ce qui resterait des biens donnés.
Quoi de plus frappant qu ’ une telle similitude!
L ’espèce étant semblable, la décision pourrait-elle
être différente ?
U n arrêt de la Cour de Bruxelles, du 17 avril 180 6,
a décidé qu'il n’y avait pas de substitution dans la
disposition par laquelle un époux avait donné à son
conjoint l ’usufruit de ses biens, dans le cas où les
enfans que V époux donateur laisserait à son décès 3
mourraient avant le conjoint donataire (1).
L a Cour de Rouen, par un arrêt du 10 juin 1 8 1 4 >
a déclaré qu’il n’ y avait pas substitution dans une
( 1 ) Sircy, tome G, a* partie, page 271.
�disposition faite en faveur de plusieurs pérsonnes, avec
la condition que la part de ceu x qui seraient décéde's
sans postérité 3 et sans avoir disposé, accroîtrait a u x
survivans.
Pourquoi? Parce qu’ il n’y avait pas charge de con
server (i).
L a Cour de Poitiers a considéré comme un don con
ditionnel , non comme une substitution, une disposi
tion entre-vifs, par laquelle le donateur avait déclaré
qu’en cas de prédécès du donataire, il fa is a it la même
donation à un tiers (2).
rL a Cour de Montpellier n’a pas vu de substitution
dans un testament par lequel un héritier avait été
institué pour « par lui jouir et disposer de l ’hérédité
« en bon père de famille, et à la charge de la rendre
« à ses enfans légitim es. »
Le principal motif fut que l ’ héritier n’avait pas été
soumis à Vobligation de conserver.
L a Cour de cassation a respecté celte décision, par
arrêt du 12 mai 1 8 1 9 (3).
L a Cour de cassation a jugé aussi qu’il n’y avait pas
substitution dans un testament par lequel, en insti
tuant Pierre et Paul ses héritiers, le testateur avait
(1) Voir l ’arrêt dans le Journal du continuateur de Denevers, t. 12 ,
suppl. , page 63.
(2) L arrêt est du 3 avril 18 18 ; il est rapporté dans le J o u r n a l du
continuateur de Denevers, volume de 1818 , suppl., page
(3) Voir 1 arrôt dans le Journal de Sirey, tome 20 , première partie ,
page 79. •
�déclaré que si l'un (Veux venait à m ourir sans posté
rité, sa portion profiterait au survivant.
L ’arrêt est du 19 juillet' 1 8 1 4- (1).
La même Cour avait jugé, le 12 pluviôse an 4 >
sous l ’empire de la loi du \l± novembre 1 7 9 2 , que la
disposition par laquelle plusieurs propriétaires d ’un
immeuble se donnent mutuellement leur portion, avec
accroissement entr’euæ à mesure clu décès du prém ou
rant, ne contient pas une substitution prohibée (2).
On pourrait multiplier les citations, mais cela de
viendrait fastidieux autant qu’ inutile.
Peut-être argumentera-t-on de décisions différentes.
Il serait peu étonnant q u ’il s’en rencontrât sur des
questions où l'argutie des raisonnemens et l ’arbitraire
des opinions sont livrés à un vaste champ.
Cependant les héritiers Capelle ne croient pas qu ’on
puisse leur opposer un seul préjugé qui ait considéré
comme substitution fidéi-commissaire, une disposition
qui ne r e n fe r m a it p a s , au m o in s im p lic it e m e n t , la
charge de conserver} réunie à celle de rendre à un
tiers non présent à l ’acle, et à un tiers qui n’aurait pu
transmettre son droit à ses propres héritiers , avant
d’en avoir recueilli lui-même le bénéfice.
C ’est l’absence de toute charge de conserver, charge
incompatible avec la liberté indéfinie d ’aliéner;
(1) Voir le Journal du continuateur de Dcncvcrs, tome 1 2 , p.
(2) Voir cet arrôt dans lo Journal dcDencvers, vol.de 1791 à l’an ta,
page 3a8.
�m
49 )
C ’est le concours du sieur Capelle au contrat qui
renferme la disposition éventuelle*,
C ’est la stipulation expresse, d’après laquelle les
droits du sieur Capelle sont transmis à ses héritiers
ou à l’ héritier de son choix, s’il meurt avant son
épouse.
1
Ce sont toutes ces circonstances, si opposées aux
caractères distinctifs des substitutions fidéi-commissaires, qui ne permettent pas de donner un tel nom
à la disposition dont il s’agit, et qui doivent la faire
considérer, ou comme un don conditionnel, ou comme
toute autre convention, que l ’on devrait respecter clans
un acte quelconque, que l ’on doit maintenir sur-tout
dans un contrat de mariage, le plus favorable des
contrats, celui que la législation a toujours entouré
d’une protection spéciale, et dans lequel elle autorise
le s p a c t e s , quels qu’ils soient, lorsqu’elle ne les in
terdit pas formellement.
Les héritiers Capelle doivent donc espérer que la
Cour ne verra pas de substitution fidéi- commissaire
dans le contrat de mariage de leur père , et qu ’elle
ordonnera l ’exécution d’un pacte solennel, sous la foi
duquel deux familles s’étaient unies.
Mais si quelques doutes s’ élevaient, les principes et
les circonstances devraient faire pencher, en faveur
des héritiers Capelle, la balance de la justice.
7
AVI
�D E U X IÈ J IE
P R O P O S IT IO N .
D ans le doute > la disposition devrait être maintenue.
C ’est un principe de justice admis par la législation
de tous les tem s, que « dans le doute sur le sens d’une
« clause, l'interprétation qui tend à valider l ’acte
« dont cette clause fait partie, doit être préférée à
« l ’interprétation qui tendrait à le faire annuler (i). »
Tel était le langage que tenait M. Merlin , en exami
nant la validité d ’une disposition testamentaire, atta
quée comme contenant une substitution.
Ce langage était emprunté de la loi 1 2 , ff. D e rebus
dubiis.
1
»
Quotiès in actionibus aut in exceptionibu's ambigu a
oratio est} commodissimum est id a c c ip i, cjuo res 3 de
qu d agiturj magis v a le n t, quàm pereat.
Cette rè g le b ie n fa is a n te est ra p p e lé e p a r tous les
auteurs., comme devant servir de guide h la décision
des magistrats.
L ’auteur du dernier Traité des Donations dit que
l ’on ne doit voir de substitution fidéi-commissaire que
là oii l ’on doit nécessairement supposer une charge de
conserver et de rendre.
M. ToUllier, dans son Droit civil français, enseigne
(1) Voir le Répertoire tic Jurisprudence , aux mots Substitution fulci~
commissaire, sect. 8, n° 7.
�(50
'V
que l ’esprit général de la loi, et celui’*de la jurispru
dence est de n’annuler une disposition qu ’ a u t a n t
q x iid le p r é s e n t e
n éc essair em en t
u n e s u b s t it u t io n , et
q u ’ e ll e n e p e u t ê tr e s o u t e n u e d ’ a u c u n e m a n iè r e ( i ) .
L ’équité 'des Cours royales a rendu de fréquens
hommages à ce principe.
’
La Cour'de Riom (premièré chambre) l ’a'appliqué ,*
notamment par un arrêt rendu le 28 mai 1 8 1 9 , dans
la cause de la famille Maret.
*
Il
s’agissait d’un legs universel fait par Bonnet
Maret en faveur de ses trois neveux, mais grevé de
1 usufruit de leur père.
Le testament contenait la clause suivante :
« Je veux que si quelqu’un d’eux (des légataires)
« vient à d é c é d e r s a n s e n f a n S j sa portion soit r e v e r « s ib le sur les'autres héritiers ci-dessus institués.;»
L e testament avait précédé de quelques jours seule
ment la mort du testateur.
Les légataires étaient non m ariés, et mèche im pu
bères.
‘
*
Le décès d’u n ’des légataires sans enfans ne parais
sait pas devoir ¿’entendre du cas où ce légataire mour
rait avant le testateur; car les enfans, n’étant pas
institués eux-mêmes, n’auraieni pas recueilli la portion
donnée à leur père.
*
'* '• ,
Les circonstances, comme le''sens le plus naturel
de la phrase, indiquaient donc que, dans l ’ intention
«
'
I
(1) Voir lomc 5 , page 68, première édition.
‘ »1
�clu testateur, après l ’ouverture même du legs, si l ’uix
dos légataires qui aurait recueilli mourait sans enfans,
la chose léguée retournerait aux autres , ,c’est-à-dire
serait rendue, ce qui emportait charge de conserver.
Cependant la Cour pensa qu’on pouvait interpréter
(
la clause dans le sens d’une substitution vulgaire, et .
qu ’il suffisait qu ’elle pût être entendue dans un Sens
propre à maintenir l ’acte, p o u r cju o n .d ü t p ré fé rer
cette interprétation..........;
.'
« Parce qu’il est de principe que les'clauses d’ un
« acte susceptible de plusieurs sens, doivent être inter« prêtées dans celui qui tend à maintenir l ’acte, plutôt
« que dans celui qui en entraînerait la. n u llité, potiùs
* ut actus va lea t quàm ut pereat ; ,
« Parce q u e , dit aussi la Cour , 011 ne voit pas, dans
« cette clause, la condition expresse de conserver et
« de ren d re, caractère essentiel aux substitutions que
« l ’article 896 a voulu défendre. » . > _ .
Ces motifs remarquables.peuvent être littéralement
a p p liq u é s a la disposition contenue dans le contrat de
mariage de 1 7 8 6 , puisque la clause constitutive de la
libéralité peut s’entendre d ’un don conditionnel, plutôt
même que d’une substitution fidéi-commissaire; puisqu’aussi on ne trouve pas dans cette clause la condition
expresse de conserver et de rendre , caractère essentiel
des substitutions proscrites par la loi de 1792 comme
par le Code civil.
L a Cour de Limoges, dans un arrêt du 3 janvier
1 8 i G, eu déclarait valable uu legs, attaqué de nullité
�(
53 )
commeprésentantunesubstitution prohibée, s’était alissi
fondée sur le principe q u e, « lorsqu’un acte quelconque
m présente un sens qui peut le faire valoir , il doit être.
« préféré à celui qui l ’anéantirait. »
L e legs était conçu dans des termes qui prêtaient
singulièrement k la critique : « J e donne et lègue à
Joseph et à M arie M eu lliera t, mes petit-fils et petitef i l l e , la m oitié de tous mes biens.........; et dans le
cas ou l ’un de mesdits petits-enfans meure sans enfa n s j e lu i s u b s t i t u e Vautre survivant.
Ici le mot même j e substitue venait ajouter an
danger du sens* que présentait le surplus de la clause.
Cependant la Cour de Limoges décida qu’il n’y avait
pas de substitution fidéi-commissaire prohibée, mais
seulement une substitution vulgaire autorisée par la
loi •, et la Cour de cassation a confirmé cette décision,
par arrêt du 1 1 ju i n 1 8 1 7 , en rappelant la règle d’une
interprétation favorable à l ’acte.
«
«
«
«
«
«
«
« A tten d u , dit l’arrêt de rejet du pourvoi, què les
termes dans lesquels était conçue la clause, pouvant
se prêter à l ’une ou a l ’autre interprétation , la Cour
royale n’a vio lé, ni l'article1 896 du Code c iv il, ni
faussement appliqué l’article 898', en interprétant
la vo lon té du testateur dans le sens q u i donne
fo r c e et exécution à l ’acte testamentaire dont il
s’agit (1). »
f.
Les expressions de ce m otif de la Cour suprême rie
v
(1) Voir cet arrôt dan» lu Journal de Sirey-, t. ^ y !*• partio, p. 294*
�p*
"
( 54 )
bont-ils pas xinéi invitation indirecte aux Cours royales,
d ’éviter toute interprétation tendant h annuler i les
actes, et à autôriser les donataires à se jouer de la vo
lonté de leurs bienfaiteurs? .
Cqtte volonté si respectable sera-t-elle blessée par les
magistrats eux-mêmes, destinés par la loi à l ’entourer
d ?une protection spéciale?
Cette volouté ne doit-elle pas être au contraire le
principal guide des décisions de la justice?
O r, dans la cause des héritiers Capelle , rien de
moins équivoque que l ’intention de la donatrice.
A la simple lecture du contrat de mariage de 1 7 86,
on reconnaît qu’elle a voulu que sa fortune! appartînt
au sieur Capelle, ou aux héritiers de celui-ci, si des
enfans ne naissaient pas de ce mariage même.
Il est donc évident qu ’elle a donné , dans ce cas, ses
biens au sieur Capelle.
E t les doutes même ne seraient-ils pas dissipés par
la c o n s id é ra tio n d es c h a rg e s c o n s id é ra b le s imposées au
sieur Capelle?
Croira-t-on que le sieur Capelle eut consenti h con
tracter pour lui et pour ses héritiers, des obligations
aussi. grandes, si lui-même et ses héritiers n’avaient
pas dù être indemnisés de leurs sacrifices par le don
conditionnel, mais irrévocable, qui lui était fait?
Le vrai sens du contrat de mariage n’aurait-il pas
été fixé, sur-tout par cette transaction du 20 décembre
x 7 0 1 » lerine (l’ un procès qui durait depuis plusieurs
années; par cette transaction à laquelle concoururent
�(55)
toutes les parties'intéressées , i la donatricë, la< dame
Capelle et le sieur Capelle; par. cette transaction où
les deux époux furent, également qualifiés de dona
taires , et où il fut répété plusieurs fois que la dona
tion avait été faite au mari comme à la femmei^par
cette transaction sans laquelle la*contestationîactuèllë
n’existerait pas; car si le sieur Capolle avait persisté à
renoncer à la donation, afin de s’ affranchir des charges
qui pesaient sur lu i, la donation aurait été révoquée,
ainsi que l’ordonnait la sentence ,du 28 août 17 9 0 ’ ;
la donatrice serait rentrée en possession de ses biens;
la dame Capelle les aurait perdus; et si le sieur C a
pelle en avait été privé lui7m ème, au moins aurait-il
conservé et transmis à ses enfans les sommes qu ’il em
ploya et les biens qu’il vendit pour remplir les obliga
tions auxquelles il se soumit une seconde fois par-le
traité.
v.*
: 1 . 1
Serait-il juste que la demoiselle Nouveau, c’est-àdire qu’une étrangère à la donation;, aux; donataires ,
à toutes les parties contractantes, profitât seule aujqurd hui du prix de tant de sacrifices P^Yc vo s non
vobis. .
.
.
.
I, —
.1 •
.•!(* ;; 1 "
-La veuve Capelle elle-même, et le sieur NôuSveau ;
son second m ari, n’ont jamais cru à une aussi grave
injustice. Qu’on se rappelle, en eifel les doutes exprimés
par la veuve Capelle dans sou seOoiul contrat de 111*1r^ 8 e ) où, tout en donnant au sieur Nouveau le bien
de la Rouqaette, elle prévoit que ce don pourra ne
�^
•
( 56)
pas être valable, et lui fait une libéralité secondaire
de tous ses autres biens.
p i.
t .
Les plus puissans moyens, les plus grandes considé
rations protègent la demande dtís héritiers Capelle.
L a clause qu ’ils invoquent résiste à l ’idée d’une
substitution fidéi-commissaire.
E lle ne présente ni charge
d e ren d re
a
un
t ie r s
d e co n server> n i ch arge
.
On y remarque au contraire le pouvoir indéfini
d’ aliéner.
L e sieur Capelle, destiné, dans le cas prévu, à
profiter de la libéralité, n’est pas u n t i e r s ; il est une
des parties contractantes, et même une des parties
principales.
Bien plus, il stipule non-seulement pour l ui , mais
aussi pour ses héritiers; car s’il meurt avant son épouse,
il tr a n s m e t à ses h é r it ie r s n a t u r e ls , ou à l ’héritier de
son choix, les avantages qui lui étaient promis.
Com m ent dès-lors l’assimiler à un simple substitué,
dont les espérances incertaines disparaissent, si le grevé
lui survit, et qui ne transmet rien , s’ il n ’a rien re
cueilli lui-même avant son décès?
Comment ne pas reconnaître à cette transmission de
droits une disposition étrangère aux substitutions,
c’est-à-dire, un don conditionnel,qui, par l'accomplis
sement de la condition, avait saisi le sieur Capelle dès
�l’instant du contratj d’ un droit que son décès a fait
passer à ses héritiers ?
Comment concilier aussi avec l ’ idée d’ une substitu
tion ,
les engagemens
les sacrifices
auxquels s’ est
soumis le sieur C a p e lle , sous la foi de l ’ exécution de
l ’avantage éventuel qui lui était assuré ?
L a loi du 14 novembre 1.792 n’a pu atteindre une
pareille disposition-, elle n’a frappé que les charges de
conserver q\xi avaient placé les biens hors du commerce,
et les charges de rendre à des tiers qui n’ étaient saisis
de rien.
L a loi a respecté les conventions réciproques, celles
sur-tout qui , consignées dans un contrat de mariage,
avaient été le gage de l ’ union des deux familles.
Les héritiers Capelle pourraient-ils avoir à redouter
une d é c isio n fa ta le à le u r s d r o its , eux qui ont en leur
faveur les principes unis à une jurisprudence constante
qui ne permet pas d’annuler une donation, si elle ne
présente nécessairement une substitution, et s’ il n’est
impossible de l ’ interpréter dans un sens propre à la
maintenir ?
L ’acte serait-il plus rigoureusement interprété par
des magistrats, qu’ il ne l ’a été par la donatrice et par
toutes les parties intéressées, lors du traité de 1 7 91 ?
Les tribunaux douteraient-ils moins des prétendus
dioits de la iamille Nouveau, que n’en doutait la
dame Nouveau elle-m êm e, lorsque, cherchant à. les
attribuer à un second mar i , elle exprimait si ciairc8
�ment ses craintes sur l ’exécution de ses injustes vo
lontés.
Les lois, les opinions des auteurs, les arrêts, l ’équité,
tout ce qu’il y a de recommandable devant la justice,
semble inviter les héritiers Capelle à attendre avec
sécurité l ’arrêt qui prononcera sur leur sort.
S ’ils succombent cependant, malgré tant d’avan
tages, ils se résigneront avec respect. Mais leur exemple
ne prouverait-il pas qu’elle est un guide quelquefois
infidèle, cette fière raison dont on fait tant de bruit!
L eu r exemple ne rappellerait-il pas cette sentence d’un
philosophe romain, selon laquelle il n’y a , dans les
opinions des hommes, rien de certain que l ’incertitude :
Solum certum nihil esse certi.
Monsieur TA SSIN D E V I L L E P I O N , Rapporteur.
Me A L L E M A N D , A vocat.
Me M A R IE , L icen cié-A vo u é.
RIOM, IMPRIMERIE DE SALLES, PRÈS
PALAIS DE JUSTICE.
�
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[Factum. Capelle-Peuch-Jean, Pierre-Antoine. 1819?]
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Allemand
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Titre complet : Mémoire pour le sieur Pierre-Antoine Capelle-Peuch-Jean et les demoiselles Sophie et Marie Capelle, frères et sœurs, habitans de la ville d'Aurillac, héritiers de maître Antoine Capelle, leur père, appelans ; contre sieur Félix Valentin ; propriétaire, et la dame Sophie-Marie Nouveau, son épouse, de lui autorisée, héritière, sous bénéfice d'inventaire, de sieur Joseph-Aymard Nouveau, son oncle, lesdits mariés Valentin, habitans du lieu et commune de Calvinet, intimés ; en présence de dame Marie-Sophie Langheac de Montlogis, religieuse, habitante de la ville d'Aurillac ; Marie-Judith Langheac, veuve de sieur Piales ; Maire-Honorée Langheac-Lignac, toutes deux propriétaires, habitantes du lieu et commune du Viviers ; sieur Brassat-Murat, docteur en médecine, et dame Judith Langheac, son épouse, de lui autorisée, habitans de la ville d'Aubier ; autre Marie-Judith Langheac de Montlogis-Chanat, propriétaire, habitante du lieu de la Rouquette, commune de Cassaniouse, canton de Montsalvy ; sieur Marsillac, docteur en médecine ; Olympie-Silvie Langheac de Montlogis, son épouse, de lui autorisée ; Marie-Christine Langheac de Montlogis, Marie-Anne Chaudesaignes de Turrein, veuve de Claude Langheac de Montlogis, tutrice de leur fils mineur ; Joséphine-Judith Langheac de Montlogis, tous propriétaires, habitans du lieu de Dousques, commune de Vezac ; Pierre-Alexandre Rigobert, Jean-Alexandre et Pierre-Honoré Langheac de Montlogis, commune de Ladenhac, susdit canton de Montsalvy, aussi appelans.
Table Godemel : Bestiaux : Pour l’ancien législateur, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi, ils ne faisaient point partie de la donation du domaine, s’il n’y avait clause expresse et spéciale. Instruments aratoires : sous l’ancienne législation, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi ils ne faisaient pas partie de la donation du domaine, s’il n’y avait point de clause expresse et spéciale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1786-1819
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
58 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2504
BCU_Factums_G2505
BCU_Factums_G2506
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53489/BCU_Factums_G2503.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Calvinet (15027)
Cassaniouze (15029)
La Rouquette (château de)
Agrovieille (domaine d')
Saint-Michel (domaine de)
Mallaret (domaine de)
Ladinhac (15089)
Vézac (15255)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
contrats de mariage
donations
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53490/BCU_Factums_G2504.pdf
9e8a2baf7ee2bafdc40ef575b0fff936
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Text
MEMOIRE
EM PLOYÉ PO U R RÉPONSE A GRIEFS
k“ '
J
DE RIOM.
EN E X E C U T IO N
**"•
DE L’ARRÊT DE LA COUR
DU
18
AOUT
1819,
‘Wl p“ écriu
iïa*ÙÊ t&J.
.
PO UR
Sieur
Pier r e- F
élix
V A LENTIN
et
dame
N O U V E A U , son épouse,
propriétaires, habitant le lieu de la Rouquette,
^ commune de Cassaniauze , arrondissement
d 'A urillac, département du Cantal, intimés;
M
ar ie
-S
Chambre.
ophie
CONTRE
Sieur P i e r r e - A n t o i n e C A P E L L E , P u e c h J e a n d e m o is e lle s M a r i e et S o p h i e CA-
�c o
P E L L E y frère et sœurs , propriétaires,
habitant ladite ville ¿CAurillac, appelons
de jugement rendu par le Tribunal civil
d'Aurillac , le Si décembre 1 8 1 7 3 suivant
les exploits des 12 février et 11 mars i 8 i 8 y
E T EN C O R E C O N TRE
La dame M arie-So ph ie L A N Z A C D E
MOJSTLOGIS¡religieuse^habitante de la
ville d ’Aurillacy M a rie-Ju d ith L A N Z A (7,
veuve du sieur P I A L E S >et M arie-H on orée L A N Z A C ^ toutes deux habitant le
lieu et commune du Viviers y le sieur
P . B R A S S A T -M U R A T , docteur en médecïney et la dame Ju d ith L A N Z A C 3 son
épouse, de lui autorisée, habitans de la
v ille d 'A u b ie r y autre M a r i e - %f üDi Tt t
L A N Z A C D E M ONTL 0 GIS-CH ANAT\
propriétaire, habitante au lieu de la Rou(juette } commune de Cassaniauze 3 canton
de Montsalvj y le sieur M A R S IL L A C y
docteur - médecin , O l i m p i e - S i l v i e L A N
Z A C D E M O N T L O G IS , s o j i épouse, de
lui 'autorisée y M a r i e - C h r i s t i n e L A N
Z A C D E M O N T L O G IS y M a r i e - A n n e
�( 3 )
C H A U D E S A I G U E S D U T U R R I E U 'y
veuve de C lau de L A N Z A C D E M O N T L O G I S , tutrice de leurjils mineur; Jo s é
p h i n e - J u d it h
L A N Z A C D E M O NTL O G I S , tous propriétaires 3 habitans du
lieu de Dousques , commune de V éza c y
P ie r r e -A le x a n d r e et P ie r r e -H o n o r é
L A N Z A C D E M O N T L O G I S , proprié
taires , habitans du lieu de Montlogis , com
mune de Ladinhou y susdit canton de Monts a lv j 3 aussi appelans du même jugement,
S ’IL falloit en cro ire les h éritiers C a p e lle , ils au ro ien t
à com battre u n e préten tion odieuse, et leur cause
toute favorable, appelleroit, au contraire, la bienveil
lance de la justice, Donataire direct de la dame Jalinques,
par la stipulation de son contrat de mariage, leur auteur
auroit acheté par d’immenses sacrifices les biens qu’on
paroissoit lui donner à titre purement gratuit. U n moyen
de substitution, péniblement inventé par un donataire
postérieur, 6eroit aujourd’hui opposé à ses enfans, pour
les dépouiller, pour leur arracher violemment une pro
priété qui lui avoit coûté tant de soins, d’inquiétudes,
et jusqu’au sacrifice de sa propre fortune. Suivant eux,
1 idée de substitution n’est qu’une chimère que la cupi
dité a rêvée, et dont elle veut abuser aujourd’hui; enfin,
I *
�( 4 )
c’est des appelons qu’il faut dire que malgré les décisions
nombreuses qui ont tenté de ramener les esprits à la
vérité et à la ju stice, les leçons de Vexpérience sont
ordinairement perdues pour les plaideurs.
Les intimés ne nieront pas ce que cette assertion
peut avoir de vrai, même dans la contestation actuelle;
mais ils la repousseront loin d’eux, et laisseront à la
justice de décider si les appelans n’ont pas fait en cela
le tableau de leur propre cause. En rétablissant les faits,
ils démontreront que les héritiers Capelle ont établi
leur défense sur des suppositions erronées, sur des moyens
de droit plus subtils que solides.
Nous verrons, en effet, combien le tableau qu’ils ont
présenté diffère de la cause. La dame Jalinques, en
donnant sa fortune à sa sœur, avoit, il est vrai, témoi
gné de la bienveillance à son futur beau-frère; elle
l’avoit gratifié en second ordre, et ordonné que les biens
lu i seroient remis au cas mais seulement au cas où
la fu t u r e , sa sœur, décéderoit sans erifans. Le sieur
C ap elle n’âvo it ni efforts ni sacrifices à faire p o u r exé
cuter les conditions de cette libéralité, et il n’eut pas
le mérite d’y avoir satisfait. Possesseur de biens consi
dérables, en vertu de la donation, il fit des procès à la
bienfaitrice de son épouse, qui étoit la sienne propre ; car
il participoit au bienfait comme mari et comme substitué.
Sa veuve, maîtresse de ses biens, en gratifia un nouvel
époux; long-temps on ne contesta à l’un ni à l’autre la
légitimité de leur possession, et certainement on n y
eût jamais pensé, si une demande formée par les intimés,
en restitution de quelques sommes, n’en eût inspiré
�( 5 )
l’idée; mais on n’avoit pas encore eu l'ambition de s’appro
prier une fortune sous la foi de laquelle ont été con
tractés deux mariages successifs, celui du sieur Nouveavi
et celui du sieur Yalentin. On n’avoit pas rêvé de
prétendus sacrifices qu’on avoit jamais faits ; des dan
gers imaginaires qu’on n’avoit jamais courus; des faits
qui n’ont jamais existés. On ne savoit pas encore qu’en
acquérant les droits des héritiers de la dame Nouveau,
on pouvoit, sous leur nom, prêter à la disposition de
la dame Jalinques un caractère autre que le sien propre,
et se faire un moyen auprès de la justice d’une décla
ration émanée des sieurs Capelle eux-mêmes, sous le
nom de la dame de Murât. Le temps des rêves est
arrivé et le procès a commencé. Il ne devoit pas s’ar
rêter en première instance ; le grand intérêt qu’il
comporte ne le permettoit pas, et il appartenoit à la
Cour d’y mettre le sceau de sa sagesse. Les intimés
esp èren t lui d ém on trer que la décision des premiers
juges est à l’abri de la censure, au moins dans la dis
position principale dont se plaignent les héritiers Capelle.
F A IT S .
Le 23 septembre 1786, le sieur Capelle épousa MarieJudith Lanzac de Montlogis.il étoit veuf alors, et avoit
trois enfans de son premier mariage. Nous n’avons pas
à rechercher s’il fut porté à ce nouvel hymen par ¿es
illusions de goût ; il est peu ordinaire que ce motif
soit celui qu’on donne à l’union conjugale ; il ne nous est
pas difficile, d’ailleurs, (le discerner un motif beaucoup
�( 6 )
plus naturel, beaucoup plus respectable. Le sieur Capelle
avoit trois enfans en bas âge, un garçon et deux filles;
il avoit besoin de quelqu’un pour soigner leur enfance,
et rester à la tête de sa maison. Un homme livré à luimême est ordinairement peu capable de ces soins minu
tieux et délicats qui sont pourtant indispensables. Le
sieur Capelle le pensa pour lui-même ; il crut devoir
donner une seconde mère à ses enfa ns, et nous ne craignons
pas de dire qu’il avoit atteint son but. A entendre les
appelans, sa tendresse pour eux ne lui auroit fait faire
que des calculs d’intérêt personnel, et son second mariage
n’auroit été qu’une spéculation ; il auroit épousé une
vieille fille, qui ne lui offroit x^as même des illusions ,
et il l’auroit épousée uniquement pour avoir sa fortune.
Nous ne savons pas s’il y avoit de sa part absence totale
de goût; mais si cela étoit vrai, le motif de cet hymen
ne rendroit pas sa spéculation plus recommandable aux
yeux de la justice, et peut-être ses enfans eussent-ils
mieux fait de le taire. Quoiqu’il en soit, nous pouvons
facilem ent supposer que le sieu r Capelle n’avoit pas
sacrifié toutes les convenances, et foulé aux pieds le
respect dû à une union sainte par elle-même, pour n y
faire qu'un marché et n’y voir qu’un intérêt pécuniaire;
et qu’au moins il avoit mêlé à ses calculs un motif plus
noble et plus digne du mariage. Au reste, l’âge de la
demoiselle de Montlogis et le sien, sa condition et la
sienne, sa fortune et la sienne, sans parler de celle de
sa sœur ; tout cela étoit assorti, et la future épouse étant
capable de donner à ses enfans les soins d’une m ère,
elle offroit au sieur Capelle un avantage de plus,
�( 7 )
Nous ne répéterons pas ici les conditions de ce mariage,
déjà transcrites dans le mémoire des appelons} page
et suivantes; ils en ont fait ressortir toutes les expressions
auxquelles ils ont cru pouvoir trouver un sens qui leur
fût avantageux. Il est si facile d’y voir la véritable inten
tion des parties; elles se sont exprimées si simplement,
qu’il nous suffira de rappeler les dispositions principales.
Nous ne parlerons que de la clause qui donne lieu au
procès; car c’est elle qui doit nous apprendre à qui la
clame veuve Jalinques a donné et voulu donner. Après
la constitution dotale de tous biens présens et à venir et
le pouvoir de vendre donné au futur époux par clés
clauses qui lui sont étrangères , elle intervient au contrat,
et s’exprime ainsi :
« Laquelle, pour Vamitié 'particulière qu elle a pour
« la fu tu re épouse, sa sœur, a , en faveur du mariage,
K donné, à titre de donation entre-vifs pure et simple,
« A SADITE SŒUR, future épouse, CE ACCEPTAN TE,
« tous les biens meubles et immeubles dépendans de la
« succession du sieur Jalinques, son. m ari, dont elle est
« héritière testamentaire....................................................
Cette donation est faite sous diverses réserves et con
ditions, notamment de payer à la donatrice une somme
de 120,000 liv. ,dont 20,000 liv. dans six mois, 10,000 liv.
un an après, et les 90,000 liv. restant, par 3,000 liv.
d'année en année ; de payer une pension viagère de
600 livres à une dame Delom, et d’acquitter toutes les
dettes de la succession du sieur Jalinques. Cette dernière
condition n’étoit que de forme. Le sieur Jalinques avoit
laissé un actif considérable en créances, billets et obli-
5
�( 8 )
gâtions, qui faisoient partie de la donation faite à la
future épouse ; par conséquent, pas de dettes; il n’en
existoit que pour 2,000 livres, et le sieur Capelle nen
paya jamais une obole ; cette somme a été acquittée par
le sieur Nouveau, après le second mariage.
Enfin, et c’est là le grand, le principal moyen des
appelans, les fu tu rs époux, le sieur Capelle comme la
demoiselle Lanzac, s’obligent solidairement à remplir
ces charges.
Il faut en convenir, si le contrat de mariage s’arrêtoit
là , si on ne savoit pas autre chose, la charge imposée
au sieur Capelle, solidairement, pourroit paroître exor
bitante; car il est bien incontestable que la donation n’étant
faite qu’à la fu tu re épouse, n’étant acceptée que par
elle, le sieur Capelle, qui ne figuroit pas du tout dans
la disposition, et qui n’avoit que son droit de jouissance
comme m a ri, auroit contracté un engagement un peu
sévère; mais lorsqu’on saura que par la suite de l’acte, la,'
donatrice s’engage à remettre aux futurs pour 80,000 liv.
de créances actives ; que ces effets étoient livrés au sieur
C a p e lle , comme mari et maître des biens dotaux, quoique
sa fortune ne présentât pas une garantie suffisante;
lorsqu on saura que le recouvrement des effets devoit
couvrir, et bien au delà les 30,000 livres payables en
dix-huit mois ; qu’enfin, et indépendamment de ses effets
actifs, la dame Jalinques liyroit au sieur Capelle des
immeubles dont le revenu excédoit de beaucoup les
3,000 livres qu’il devoit payer par année, on ne sera
plus étonné d’une précaution que commandoient les
circonstances, et qui nétoit plus du tout onéreuse pour
le
�( 9 )
le sieur Capelle ; car il est peu de ¿futurs époux qui
refusassent leur engagement personnel de payer 30,000 1.
en recevant personnellement des effets pour 80,000 liv.,
et de payer 3,000 liv. par an en prenant la jouissance
d’immeubles qui produisissent beaucoup au delà. Les
avantages qui en résultaient dès lors pour les époux,
ceux que le mari pouvoit lui-même en espérer par lu
suite, et enfin l’impossibilité qu’il pût entrevoir pour
lui-même aucun danger; tout cela, sans autre motif,
étoit suffisant pour lui faire donner son propre enga
gement, sans qu’il fût besoin d’aucun autre don propre
a lui seul. Il ne faut donc pas supposer la nécessité
dune donation directe au mari lui-même, qu’on s’efforce
de trouver partout, parce qu’on ne la trouve nulle part;
et le contrat de mariage se fût - il borné à ces dispo
sitions , elles n’auroient rien d’inconciliable avec la
position des parties, rien même d’extraordinaire en soi.
Mais les parties n e s’a rrê te n t pas à ces premiers termes j
une stipulation secondaire suit cette première disposition;
elle concerne le fu t u r époux qui n’avoit aucune part
à la précédente. Qu’est-elle? que peut-elle être? Voilà
ou résidé la difficulté de la cause. L ’esprit doit être
prépare d’avance à la nature de cette disposition, puisque
déjà il en existait une parfaite, absoluç, et qui constituoit
a elle seule une véritable libéra/î^i; on s’attend dès
lors à voir une clause qui contienne une disposition se
condaire. Au reste, lisons-la immédiatement.
« D ajis le cas où la demoiselle future épouse vienne
« à décéder sans enfans du présent mariage, audit cas
»
�( 10 )
« seulement, les biens qui resteront de ceux ci-dessus
« donnés, s e r o n t r e m is et appartiendront audit futur
« ép oux, et en cas de prédécès, ¿1 ses héritiers ou à
r< celui d’entr’eux qu'il aura choisi , avec néanmoins h•< ber té à la future épouse de disposer de la somme de
■< trois mille liv r e s ................. en faveur de qui bon lui
« semblera; et au m oyen de tout ce que dessus, ladite
« dame de Lanzaç de la Ilouquette s’est dessaisie et
« dévêtue desdits biens donnés , et en a saisi et vêtu,
a tant EN PROPRIÉTÉ qu’en usufruit, LAD ITE DEMOI« s e lle
f u t u r e é p o u s e , p o u r , par elle et lesdits
c< futurs ép ou x, en jouir dès à présent....................
Voilà la clause. Ne nous occupons pas encore des
facultés qui y sont ajoutées; ce n’est pas là ce qui cons
titue le don ni ses c a ra c tè re s; la disposition entre la
donatrice et ceux qui reçoivent directement ou indirec
tement est complète ; elle est terminée par ces expressions
finales : et au moyen de ce que dessus, ladite dame
s’est dessaisie et dévêtue.
Considérons cette^ stipulation avec une entière fran
chise; dépouillons-nous de toute prévention; voyons la
pensée des contractons avec cette simplicité qui se trouve
dans la clause m êm e, et
qui est immanquablement
compagne de la v é r ité , et nous serons convaincus,
sans qu’il nous en ^ A t e beaucoup de méditation, que
cette clause n’est qu’une véritable substitution.
E h ! que pouvoit-elle être autrement? Il existoit déjà
une donation parfaite, entre-vifs, dirigée au profit de
la femme seule, acceptée par elle seule; toute autre dis-
�/ f*
( ” )
position ne pouvoit donc être qu’une substitution ou
une association à la donation primitive, avec ou sans
accroissement, c'est-à-dire, une autre donation directe
de la dame de Lanzac au sieur Capelle ; donation q u i,
en ce cas, devroit se trouver dans l’acte, en termes
exprès, et qu’on n’eût pas manqué de faire accepter
par le sieur Capelle, comme on l’avoit fait pour la
future, si on eût eu la volonté, et surtout la volonté
préméditée de faire une véritable donation.
Mais, au lieu de cela, on voit la dame de Lanzac
stipuler, qu'en cas de décès de la future, et audit cas
seulement, les biens.............................seront remis et
appartiendront au futur époux, et en cas de prédécès,
a ses héritiers; assurément il n’y a pas là d’association à la
donation ; on n’y fait pas la part de chacun des pré
tendus donataires; on ne donne pas conjointement, avec
droit d’accroissement ; il eût cependant fallu l'un ou
l’antre, s’ils eussent été donataires dix’ects tous les deux.
Ne nous occupons pas encore de savoir si l’obligation
de remettre portoit sur tous les biens, ou seulement sur
çeux dont la dame Capelle n’auroit pas disposé ; ne
parlons pas encore principes; mais ne perdons pas de vue
que c’est ¿1s o j i décès, et seulement en cas de décès sans enfans du mariage, quelle doit remettre les biens au futur
ou à ses héritiers. Nous verrons, lorsque nous serons à l’ex
position des principes, que tous les docteurs reconnoissent
cette condition comme celle qui est le plus essentiellement
caractéristique de substitution. Remarquons aussi qud
pour ne laisser aucun doute, c’est après avoir stipulé au
profit du sieur Capelle, cette remise conditionnelle des
3 *
«
�biens, ou de ceux qui resteront, peuimporte, que la clona*
trice ajoute ces expressions désespérantes : et au moyen de
ce que dessus , ladite dame s’est dessaisie et dévêtue des
biens donnés , et en a saisi et v ê t u .............qui ? Si deux
donataires sont appelés directement, c’est le cas de les
vêtir tous les deux; mais, pro/idolor ! on a saisi et vêtu,
tantEN p r o p r i é t é qu’en usufruit, LAD ITE DEMOISELLE
fu tu re
É p o u s e ; elle seule et personne q u e lle , parce
qu’on n’avoit, donné qu’à elle, que personne qu’elle
n’avoit accepté le don, et que si elle et le futur époux
doivent jo u ir , c’est comme une conséquence nécessaire de
ce qu’on venoit de donner des biens à sa fu tu re, tant en
-propriété qiüen usufruit , et de ce que ces biens étant
dotaux, il lui appartenoit d'en jo u ir , mais seulement
d’en jouir en sa qualité de mari.
Nous ajouterons, puisque cela peut faire plaisir aux
héritiers Capelle, qu’on donne ensuite la liberté au futur
époux de vendre et aliéner les biens donnés, mais du
consentement de la fu tu re épousej de recevoir le prix
des ventes et des sommes dues, mais à la charge de les
reconnoitre et de les rendre à qui il appartiendra ; et s’il
est besoin de quelque réflexion sur ces clauses accessoires,
et sur lesquelles les appelans ont tant glosé, nous verrons
plus tard combien elles sont insignifiantes pour arriver
au but où les héritiers Capelle veulent atteindre par
tant d’efforts. Nous devons nous borner, en ce mo
ment, à ce récit simple et exact du fait qui concerne la
difficulté principale du procès, et ne pas pousser plus
loin les réflexions. La cause se voit toute entière dans ce
peu de mots; elle se présente d’une manière nette et
�3
( i )
concise. Nous verrons si la discussion y changera quelquè
chose, car il faudra bien discuter, ne fût-ce que pour
répondre, par des principes positifs, aux arguties, aux in
terprétations de mots dans lesquelles se retranchent les
héritiers Capelle.
Poursuivons le récit des faits.
Peu après le mariage, il fut question de réaliser la
promesse de la dame Jalinques, de remettre pour 80,000 .
d’effets ; elle n’en eut que pour 70,108 livres. A in si,
d’après la convention du contrat, elle devoit diminuer
95892 livres sur les 120,000 livres qu'elle s’étoit réservées.
Elle fut plus généreuse, car par un traité du 4 décembre
*7^6, deux mois après le mariage, elle fit remise de
20.000 livres sur sa réserve, qui fut dès lors réduite à
1
100.000 livres, et elle abandonna aux sieur et dame
Capelle une quantité assez considérable du mobilier qu’elle
s’étoit égalemant réservé, notamment six lits de maître,
beaucoup de linge et d’ustensiles de ménage.
Bientôt après, la dame Jalinques contracta un nouveau
mariage avec le sieur de Murât. Nous devons dire ici que
le sieur Capelle, au nom duquel on dit beaucoup aujour
d’hui qu’il n’aimoit que les donations directes et positives,
avoit compté sur un avantage qui ne lui étoit promis
nulle part, pas même par substitution, pas même par
une assurance verbale. Il comptoit bien ne jamais payer
ou voir revenir dans ses mains, comme mari, les 100,0001.
réservées par la dame Jalinques; c’étoit une partie de
sa spéculation. Le second mariage de la donatrice la
faisoit disparoître; avec elle s’évanouirent les illusions,
car elles avoient duré jusque-là. Le sieur Capelle prit
�4
( i )
de l’humeur, la manifesta, et ne se croyant pas donataire
direct, ne voyant pas un dédommagement suffisant de sa
solidarité, dans l’espoir d’une saisine à venir , ne voyant
là que le bien être futur de ses en fans et non pas le
sien propre, il parut exiger de la dame son épouse qu'elle
répudiât à la donation; celle-ci refusa d’y consentir.
De cette époque, le sieur Capelle se retira à SaintConstant, et laissa la dame Lanzac à la Rouquette. Il
çst vrai qu’alors il montra moins d’attachement à son
épouse que de regrets de voir évanouir des espérances
qu’il n'avoit pas été autorisé à concevoir.
Quoiqu’il en soit, plusieurs procès et non un seul,
s'élevèrent sur le refus de payer; quoiqu’on en dise dans
le mémoire des appelans,le mari et la femme n’avoient
pas le même but; l'un vouloit répudier, et vraisem
blablement répudier seul, quoiqu’il parût vouloir aussi
la répudiation de son épouse , car il lui auroit été
bien doux de conserver les biens comme m ari et de
ne rien devoir solidairement; l’autre répugnoit à ce
m o y e n peu con ven ab le. Si l’obligation personnelle du
mari eut été causée par une donation directe qui
lui fût propre, sans; cloute, il eût eu le droit de s’en
affranchir‘en répudiant; mais ne faisant qu’abandonner un
droit de substitution non encore ouvert, ce qui ne sign:iioit rien dans l’intérêt de la donatrice, et son obligation
ayant d’autres causes, les conventions du contrat étoient
indivisibles. Aussi la sentence du 29 août 1790 ne laissat-elle d’autre option que celle d’exécuter la condition ,
faute de quoi, elle déclara la donation révoquée;. Il faut
convenir qu’en refusant de satisfaire à la condition, soit
�(«5 )
pcrsounellement, soit comme m ari, le sieur Capelle avoit
uu excellent moyen de s'en' affranchir, puisque la révo
cation s'ensuivoit. Il eut ses raisons, sans doute, pour ne
pas prendre ce parti, auquel il n’avoit qu’à perdre.
r
A u reste, un acte positif, la transaction du 20 décembre
17 9 1, nous apprend ce qu'il en avoit coûté jusque-là au
sieur Capelle pour satisfaire aux charges de la donation.
lJas une obole n’étoit payée .sur le. capital, quoiqu’il y
eût 36,000 livres d’échus, et 9,600 livres étoient dues sur
les intérêts. Certes, le sieur Capelle qui avoit joui des
biens, et sans, douté reçu des capitaux de créances, étoit
bien débiteur personnel des intérêts, et il ne résultait
pour lui aucune perte, même momentanée, de l’obli
gation de les payer; pourquoi ne l'avoit—
il pas fait?
Quoiqu’il en soit, par ce traité la dette est liquidée
a i ° 9 ,6°o livres : le sieur Capelle payé. . . 12,728 liv.
D o n t 9,600 liv re s sur les in té rê ts, en sorte
q u ’ il ne p a y e de ses d e n ie rs, ’su r le’ cap ital,
q u e la m od iqu e som m e de 3 ,18 8 liv res.
Le sieur de Lanzac, frère de son épouse,
paye sur sa dot.........................................i. . ^ 8 1 2 liy.
La dame de Murât reprend le domaine
de Saint-Michel, faisant partie de la donation,
Pour..................................................... ...
. . . .
8,000 liv.
Enfin, elle reprend de ses propres créances
ou capitaux de rente, jusqu’à concurrence de 24,000 liv.
Voilà donc 46,990 livres acquittées, sans que le sieur
Capelle, qui prétend avoir fait de si grands sacrifices,
ait l)ay t de ses deniers au delà de 3,188 livres; le sur-
�( 16 )
plus est couvert par la reprise d’une partie des biens
donnés et les deniers de son épou sequ i étoit donataire,
et qui n’avoit pas voulu cesser de l’être. Quant au sur
plus , il est stipulé par la transaction qu’il sera payé par
termes de 3,000 livres chaque année.
Pour y satisfaire, il lui restoit :
i°. Le domaine de Lauriol, qui a été vendu
dans la suite...................................
20,000 liv,
20. Trois gros corps de domaine, composant
les propriétés de la Rouquette et d’AirollesVielle, dont on a trouvé plus d’une fois. . . ioo,OQoliv.
30. Des prés, terres et bois détachés, et
environ quarante setiers de rentes seigneu
riales qui étoient encore dues à cette époque.
Ne les portons que pour mémoire.
40. Enfin, des créances pour. . . . .
46,108 liv.
En tout.
? 166,108 livT
C’est-à-dire, plus de trois fois la somme de 53,000 liv,
dont il restoit encore débiteur. Ajoutons que, devant
payer par termes de 3,900 livres chaque, les revenus
couvroient à chaque terme l’intérêt et le capital, et les
couvroient d’autant mieux, que le sieur Capelle, jouis
sant des biens, ne payoit et n’étoit obligé de payer qu’en
assignats, soit le capital, soit les intérêts; et qu’en outre,
il reçut dans l’intervalle plusieurs remboursemens de
créances; cela est établi.
Disons encore que dans cette récapitulation, nous
n’avons pas compris la valeur des cheptels et du mobilier
éjuü le contrat de mariage porte à une valeur considé
rable ,
�( 17 )
rable, puisqu’il estime à 102,708 livres les choses mo
bilières comprises en la donation, et que la donatrice
ne s’oblige à remettre que pour 80,000 liv. de créances,
ce qui laisse 22,600 livres pour les meuble9 et cheptels.
Voilà quelle étoit la position du sieur Capelle après
le traité de 1791^ il est aisé, dès lors, de juger des sa
crifices qu’il dut faire, et de la nécessité oü il f u t mis
par cette donation, de vendre ses biens à vil prix, pour
en acquitter les charges, pour augmente?' les cheptels,
et surtout pour placer au bien de la Rouquette un mo
bilier d’une grande valeur ( mémoire des appelans,
page 1 4 Certes, si le sieur Capelle eût été tellement
gene par les obligations qu’il avoit contractées envers la
dame de M urât, c’eût été un acte d’une bien mauvaise
administration que de vendre ses biens à vil p rix, et
d en employer une partie notable à un mobilier de luxe,
surtout lorsq u e déjà le m o b ilier étoit considérable. Mais
comme tout est inexactitude dans les faits exposés par
les héritiers Capelle, il n’est pas difficile de leur prouver
à chaque pas le contraire de ce qu’ils avancent.
Ils osent dire (page 13 ) que la réserve de 120,000 liv.
avoit été réduite à 100,000 livres , en retranchant les
payemensfaits par le sieur Capelle à la dame de M urât,
et les deux traités de 1786 et 17 9 1, prouvent que ce
fut une véritable générosité de la dame de Murât.
Ils présentent le m obilier, les cheptels, comme ayant
besoin d’augmentations considérables ; et le contrat de
mariage, par son évaluation, établit qu’ils étoient d’une
valeur énorme,
3
�( i8 )
Ils disent qu’il ne put pas payer, parce que les dé
biteurs étoient insolvables, et le traité de 17 9 1 Prouve
que la donatrice reprit pour 24,000 livres de ses propres
créances, dont la majeure partie en contrats de reilte.
Ils ajoutent que dans l’intervalle du traité à son décès,
le sieur Capelle paya 18 ,118 livres, et qu il fu t fo r c é ,
pour y parvenir, de vendre pour 22,000 liv. le domaine,
de Maillcret qui vaut 60,000 liv., et les faits même qu’il
articule ou qu’il avoue, prouvent tout le contraire.
Nous devons examiner ces faits d’un peu plus près.
Le traité de 179 1 fixoit les payemensau 20 décembre
de chaque année, à commencer le 20 décembre 17 9 2 ,
et nous avons bien établi que jusque-là le sieur Capellen’avoit pas payé un denier, si ce n'est les 3 ,1 88-livres
portées par le traité.
Avant son décès arrivé le i janvier 1794, il échut
3,000 livres le 20 décembre 17 9 2 , et 3,000 livres le 20
décembre 17 9 3, en tout 6,000 livres, dont le paye
ment ne pouvoit pas être bien onéreux, car les pre
m iers 3,0 0 0 liv r e s v a lo ie n t à l’échelle 2 ,1 3 0 livres, les
autres valoient i , o livres, en tout 3,780 livres. O r, in
dépendamment des revenus et de ce dont les appelons
ne conviennent pas sur les capitaux, ils reconnoissent
que leur père avoit touché 4,000 livres sur les créances
données. Il est difficile de concevoir, dès lors, par
quelle circonstance prise dans la donation, il avoit été
Jb r c é d’aliéner ses biens à vil prix.
5
65
Allons plus lo in , et nous verrons encore de l’inexactituue.
�C 19 0
Au lieu de payer 6,000 livres seulement, le sieur
Capelle paya 18 ,118 livres: cela est vrai; mais d’abord,
qui l’y obligeoit? Certes, il y auroitbien du mérite à
nous prouver aujourd’hui qu’il fut fo r c é à vendre des
.biens à vil prix, pour payer ce qu’il ne devoit pas, et
user d’une clause qui lui permettoit d'anticiper les payemens, parce qu’il voyoit du bénéfice à payer en assignats.
Mais, d’ailleurs, il est prouvé au procès que ce ne fut
pas avec le prix de ses biens qu’il paya les 18 ,118 livres.
D ’abord, on ne prouve pas que cela soit.
En second lieu, il avoit, par les résultats de la donation,
'de quoi en payer au moins une partie.
Enfin , n’est-il pas reconnu qu’à la même époque, et
pour faire ces payemens, il emprunta à la demoiselle de
Montlogis, sa belle-sœur, une somme de 10,000 livres?
qu’il lui eu fitiun billet? qu’il mourut sans l’avoir payé?
.qu’après le second mariage de sa veuve a v e c le sieur
N o u v e a u , ceu x -ci l’ont ‘retiré et y ;ont substitué un
payement effectif ou leur engagement personnel, ce qui
■est«-la môme chose?'Ces faits sont prouvés par des «pièces
produites,-et dont nous aurons une autre occasion de
parler; et cependant les héritiers Capelle^qui, en pre•jnière instance, avoient osé prétendre que‘leur père avoit
remboursé ces 1 0,000 livres, assertion qu’ils furent obligés
.d’abandonner, avancent encore aujourd’hui.que leur père
paya 18 ,118 livres, tde ses ‘deniers et aux dépens de ses
-biens propres; ils s’en font, tout à la'fois, des moyens
'de faveur et un moyen de droit; comme leur père, ils
sont sujets aux illusions. Celles-là ne sont pas les seules dont
leur'esprit se soit enveloppé. En première instance, Üs
3
*
�( 20 )
en eurent plus d’une autre non moins grave, sur lesquelles
nous ne pouvons pas garder le silence.
Nous insistons sur les faits , non qu’ils changent
quelque chose aux caractères de la donation qui cons
tituent la véritable question de la cause ; ils ne sauroient,
en effet, la dénaturer , pas plus que les expressions
qu’on a pu employer dans la transaction de 1791 ne
sauroient la changer; tout cela n’empêche pas que la
disposition ne soit et ne reste ce qu’elle est; mais il n’est
pas hors de propos de montrer la vérité dans la série
des faits qui ont amené le procès,, lorsqu'on voit les ap
pelons tirer tous les argumens de leur cause de certains
moyens de faveur qu’ils invoquent sans cesse, et qu’ils
ne manquent pas d’assaisonner de quelques calomnies
contre la seconde femme de leur père. C’est pour se
rendre plus favorables, sans doute, qu’après avoir, aban
donné une action qui n’étoit que ridicule, ils glissent,
dans le cours d’une narration peu fidèle, que la veuve
de leur père avoit soustrait, dans sa succession, de l ’a rgc?it, des effets, du m obilier; que des poursuites en
spoliation avoient été dirigées contr’e lle , mais qua
leurs tuteurs négligèrent ces poursuites.
Peu de mots suffiront pour repousser cette calomnie.
A l’époque du décès de son m ari, la dame Capelle
étoit venue à Saint Constant pour lui donner des soins.
I<e sieur Capelle avoit auprès de lui une de ses sœurs
et un beau-frère qui ne le quittoient pas. A peine eutil fermé les yeux qu’on apposa les scellés ; sa veuve
revint à la Rouquette et trouva déjà les scellés apposés
pendant sa courte absence : ils l’avoient été même sur
�( 21 )
ses armoires; en sorte que revenue, dans l'habitation
qu’elle occupoit seule depuis plusieurs années-, elle-fut
privée ¡de son linge, denses hardes; en un mot, des
objets les plus nécessaires.
Un tuteur fut nommé aux enfans du défunt,jet ce
tuteur fit procéder à l’inventaire , en présence du sieur
Chaule, oncle des mineurs , qui avoit rçsjté auprès de
leur père jusqu’au dernier moment. L ’inventaire prouve
que tout fut trouvé sous les scellés, même, le livrejournal du défunt qui fut dans la suite un grand sujet
de difficultés; aussi ne sc plaignit-on de rien, ne paruton pas soupçonner la moindre soustraction, dansjous les
actes qui furent faits en présence de la veuve, à l’occa
sion de cette succession; mais on le prétendit dans la
suite. Qui intenta cette action? fut-ce le tuteur et fut-ce lui
qui la négligea ensuite? Les appelans osent le dire, tandis
qu’au contraire,, il est d ém o n tré, par la p ro céd u re,, que
cette demande, loin d’étre isolée, étoit une branche du
procès actuel; que ce fut après six ans et demi depuis
la demande formée en Van ix contre leur tuteur, par
les sieur et dame Nouveau, que par des conclusions
incidentes prises à l’audience du 20 juillet 18 10 , les
appelajis eux-m êm es et non leur tuteur, formèrent
une demande relative à ces prétendues soustractions,
demande si déplorable qu’ils ont été obligés de l’aban
donner pour se réduire à une question qu’ils ne sou-»
tiennent encore que par un long tissu de subtilités.
Ces inexactitudes multipliées dont les héritiers Capelle
sentent le besoin pour se rendre favorables, se sont
�X 122 )
encore' acbrues siir l’appel : nous les relèverons à me
sure et *sdnsircinticiper sur le s‘faits.'Quelle triste res
source! Si‘ tout cela étoit vrai , • qu’en résulteroi t-il ?
quelques moyens de faveur qui ne changeraient pas
la cause ; mais par quoi est remplacée cette faveur, lorsqu’ori’ iaperçoit que les faits ne sont pas exacts, et qu’on
'les 'a faussement articulés ? quel est le sentiment qui
’naturellement se substitue à la place de ce mouvement
-tle bienveillance qui indique la faveur ? Ce n’est pas à
nôüs de répondre; il nous suffit de savoir que la justice
“liesse laissé pas aussi Facilement prévenir.'
Poursuivons :
- La dame Capelle se remaria; le sieur Nouveau ne
la trouva pas indigne de sa recherche, quoiqu’elle-eût
alors quelques années de plus qu’en 1786. Les appelans
ont rapporté deux clauses de son contrat de mariage
'(‘ page i ); nous n’en dirons donc qu’un mot. On voit
que la dame Capelle donna à son nouvel époux le bien
de la Rouquette, et que prévoyant le Icas où cette dis
position pourvoit être contestée, elle lui donna tous ses
'autres biens préséns et à venir.
« Cette donation Secondaire, ‘ disent ici les *enfans
« Capelle, indiquePassez l’opiniôn de 'la dame Lanzac
« elle-même sur le droit qu’elle s’arrogeoit de disposer do
« la terre de la Rouquette. »
Et de là il semble j'à les‘entendre ,¡que par cela-seul
elle a long-temps d’avance jugé tout le procès.
Il n’est pas difficile encoi'e de repousser cette argutie,
jA côté de cette claùsfc, écrite ouvertement et sans dé«
5
�3
(* Î
tour clans un acte public, se trouve la donation formelle
de la propriété; d’où il est évident1que la dame Capelle
croyolt et prétendoit l’avoir ; que'seulement, par une
stipulation de pure'prévoyance^ élléirëhtendoit prévenir
les difficultés. Mais, en écrivant sans mystère cette clause
dans le contrat, eile li’enteÀ&oit'pas assurément affoiblir
ni'dénaturer lés droits dont elle Venôit d’user, ni donner
à ses adversaires un témoignâ^b public de son opinion,
contre elle-même. A u reste, que signifieroit l’incerti
tude d’une femme sur les effets d’une substitution? sur
la question de savoir si une disposition est à la fois directe
et actuelle, ou seulement oblique et en second ordre ?
il est aujourd’hui même'des esprits plus exercés, plus or
nés de la science du droit, plus méditatifs enfin, qui ont
sur ce point des idées divergentes, qui sq trompent sur
les règles q u ’il faut y a p p liq u e r; com m ent donc attri
b u e r q u e lq u e conséquence à ces expression s de la veuve
Capelle ?
1
Au reste, et des clauses mêmes de'ce contrat de mariage, nous tirerons contre les héritiers Capelle des con.
séquences bien plus fortes. Nous verrons bientôt, par la
conduite qu’ils ont tenue, quelle opinion ils ont de leur
cause, lorsque,pendant le procès, pendant qu’ils étoient
entourés de jurisconsultes qui pouvoient, mieux que la
dame Nouveau, juger les effets de la clause, ils ont cru
prudent d’acquérir les droits de ses héritiers naturels;
droits qui ne peuvent exister qu’en cas d’exécution de
la donation faite au sidur Nouveau ; car si les héritiers
Capelle étoient donataires directs de la dame de M u râ t
tous les biens qu’elle avoit donnés à la dame Capelle, sa
�( H )
sœur, leur appar tiendraient, et alors le sieur Nouveau,
ou ses ayant droits, recueilleroient tout le surplus des
biens qui provenoient à la dame Nouveau d’un autre
chef que de su sœur, c’est-à-dire, ce qui constituait sa
dotproprement dite. E n ce cas, il n’y auroit pas do
succession ab intestat, et l&sœuride la dame Nouveau
n’auroient rien à prétendre. A quelle fin les appelans
ont-ils donc, avec beaucojip dp méditation, remboursé
la dot ou acheté les droits de ces héritiers, si ce n’est
parce qu’ils ont jugé, en grande connoissance de cause,
que le bien de la Rouquette appartenoit au sieur Nou
veau , parce qu’il? ne pouvoient pas y prétendre en vertu
d’une donation directe, et que les aufjes biens de la dgnie
Nouveau demeurant libres, ils appartenoient à ses héri
tiers; que, dès lors, il y avoit du bénéfice à les acqué
rir? Certes oui, il y avoit du bénéfice, car, en acquérant
pendant le procès, oij argumentait contr’eux de rincer?
titude; on obtenoit une cession à v il p rix , et en faisant
cela par des actes secrets, on se réservoit encore de parler
en leur nom devant la justice; de leur faire tenir un langage
dont on pût se servir contre le sieur Nouveau ; de leur
faire déclarer ouvertement qu’il n’y avoit pas de substi
tution, mais une donation directe, et autres petits moyens
de ce genre,qui peuvent aider lorsqu’on n’en connoît
pas le principe, mais qui perdent tout leur prix lorsqu’on
le découvre; or, c’est encore un fait prouvé au procès.
N ’y auroit-il pas, par liazard, des conséquences beaucoup
plus sérieuses à tirer de là, sur l’opinion secrète qu’ont
eue les adversaires eux-mêmes, entourés de leur conseil,
qu’on ue peut en trouve;’ dans une clause de prévoyance,
jîcrito
�( ^ )
écrite de bonne foi dans un Ucte publié par la daine
N ouveau ?
En poursuivant le récit des faits, les appelans con
viennent ( page 16 ) que les sieur et dame Nouveau
agirent en propriétaires ; puis, ils ajoutent :
» Ils remboursèrent d’abord à la dame de M urât, en
» assignats d’une valeur presque nulle, les sommes qu1
» lui restoient dues d’après la transaction de 1791*
» Ils s’adressèrent ensuite aux mineurs Capelle, et firent
» à leur tuteur, par acte du
floréal an 3 , offre de
» 11,8 35 livres d’assignats, somme à laquelle ils fixèrent *
» d’après leur calcul, les remboursemens dont ils étoient
» débiteurs envers les mineurs Capelle, pour le rem» boursement des payemens faits par leur père à la
» dame de Murât.
» Le tuteur refusa ces offres comme insuffisantes et
» immorales, et demanda un compte. »
Ils ajoutent enfin q u e par la force de deux jugemens,
le tuteur reçut, comme contrain^ ces valeurs idéales ,
le 2Ô messidor an 3 , le jo u r même où fut rendue cette loi
si connue , qui, réprimant les spéculations peu hono
rables de certains débiteurs, déclaroit nuls les rem
boursemens en papier monnoie, si ruineux pour les
créanciers.
Très-bien: encore des inexactitudes, et toujours à
dessein de prévenir la justice ; il faut encore les relever.
i ° . Il n’est pas vrai que les sieur et dame Nouveau
aient commencé par rembourser la dame de M urât; ils
ont été exacts à remplir à cet égard leurs engagemens,
5
4
�( 2 6 )
mais ils ne l'ont remboursée qu’après les mineurs Capelle.
2°. Il n’est pas vrai qu’ils l’aient remboursée en assi
gnats; tout a été payé en numéraire. Nous n’aurions
besoin que d’une simple négation pour détruire l’assertion
contraire, puisqu’elle est dénuée de preuves ; puisque,
d’ailleurs, ce fait n’intéresse point les héritiers Capelle;
mais les intimés ont dans les mains toutes les quittances
dont la date embrasse tout l’intervalle, depuis le 27
thermidor an 6 jusqu’au 14 décembre 1810.
De quel œil faudra-t-il donc voir ces accusations
irréfléchies ?
Il est vrai que les sieur et dame Nouveau firent des
offres en assignats au tuteur des mineurs Capelle; que
ces offres furent maintenues par deux jugemens; que
le tuteur fut obligé de les recevoir et d’en donner quit
tance; mais les circonstances du fait ne sont pas moins
inexactes dans le mémoire des appelans; car, suivant
eux, on leur auroit offert 11,836 livres, et rien de
plus, quoiqu’il y eût eu 18 ,118 livres de payées. Mais
il falloit passer sous 90 silence un fait essentiel, parce
que ce fait détruit une assertion à laquelle on tenoit
beaucoup.
Rétablissons le fait en cette partie.
Nous l’avons déjà dit: le sieur Capelle, depuis la tran
saction de 17 9 1, avoit payé, sur le capital, 18 ,118 livres,
dont la majeure partie par anticipation ; s’il étoit do
nataire direct, il avoit payé pour lui-méme; s’il ne
l’étoit pas, il devenoit créancier de 21,306 livres, en
y ajoutant 3,188 livres payées avant la transaction.
�27
(
)
Remarquons bien que les 18,188 livres avoient été
payées en assignats, motif réel qui avoit excité le sieur
Capelle à anticiper les payemens, et que pour cela Capelle avoit emprunté 10,000 livres de la demoiselle
de Montlogis, sa belle sœur ; les sieur et dame Nouveau,
qui avoient retiré le billet après le décès de Capelle,
ne se soucioient pas du tout de rembourser en numé
raire 21,306 livres payées en assignats ; ils voulurent
payer; on refusa; ils firent des offres, non-seulement
de 11,8 35 liv. pour le capital et les intérêts, mais, en outre,
du billet (de 10,000 livres ) de Capelle, avec Vacquit
en marge en fa v e u r du sieur Nouveau, Ce sont les
termes du jugement qui valida les offres.
Ainsi, ils offroient aux héritiers Capelle, en payement
de 10,000 livres, les mêmes 10,000 livres qu’ils avoient
empruntées pour les payer à la dame de Murât. A la
vérité, le surplus offert étoit d’une moindre valeur que
les 3 ,1 8 8 liv. argent et les 8 , 1 1 8 liv. assignats payées
par le sieur Capelle; mais, d’une part, il étoit impossible
de calculer aussi juste; de l’autre, la loi du
messidor
an 3 ne s’appliquoit pas aux remboursemens de ce genre,
et on ne faisoit rien d’injuste en offrant des assignats pour
des assignats ; enfin, on ne disconviendra pas, sans doute,
et d’ailleurs la procédure le prouvoit sans réplique, que
dès l’origine les sieur et dame Nouveau ont offert judiciaire
ment auxhéritiers Capelle de compter les payemens respec
tifs pour ce qu’ils valoient à l’époque des payemens, et de
rembourser l’excédent dont ils se trouveraient débiteurs ;
offre admise par le jugement dont est appel, quoique sans
cesse refusée par les Capelle, parce qu’ils préféroient so
25
4
*
�( *8 )
•
servir du fait comme un moyen de défaveur contre les in
timés ; mais il leur importait aussi de ne pas trop s’expli
quer sur ce point, pour ne pas découvrir le fait relatif
au billet de 10,000 livres, emprunté par Capelle pour
payer la dame de M urât en assigjiats , et réduire
à sa véritable valeur, c’e st-à -d ire à rien, le grand,
l’indispensable moyen tiré de l’obligation où on prétendoit avoir été de vendre un domaine au plus vil prix,
pour payer les réserves de la dame de Murât.
Il est vrai, néanmoins, que le sieur Capellc vendit le
domaine de Mailleret, mais déjà ce que nous venons
de dire prouverait que ce ne fut pas pour payer
j forcément les sommes dues pour les réserves de la do
nation , puisqu’il avoit emprunté pour anticiper les
payemens. S’il falloit ajouter autre chose, nous répé
terions ici ce que déjà on a dit et redit en première
instance aux héritiers Capelle, et ce à quoi ils n’ont
pu faire aucune réponse solide, savoir: que leur père
n’étoit propriétaire que d’un vingt-deuxième de ce do
maine ; qu’il avoit acheté les autres portions de ses co
héritiers, et que n’ayant pu les payer, il avoit été obligé
de revendre. Certes, on voit bien plutôt là le motif
d’une vente forcée, qu’on ne peut le trouver dans un
payement fait par anticipation. Preuve évidente que
jamais Capelle n’a été forcé de vendre pour payer la
dame deMurat ; preuve encore, par la position de sa propre
fortune, qu’à lepoque de son contrat de mariage, il
ne pouvoit calculer, ni sur son aisance, ni sur ses res
sources pécuniaires, pour s’imposer, dès lors, des sacrifices
personnels, comme l'équivalent d’une donation directe
�/;/
C 29 )
et actuelle que lui auïoit fuite la clame de Murât; que,
par conséquent, on se méprend en voulant prouver par
cela seul la nécessité d'une donation directe.
Nous arrivons h l’époque de la demande: elle fut for''
mée le 27 nivôse an 12 , par les sieur et dame Nouveau;
ils réclamèrent, i ° . 6,938 ,livres perçues par le sieur
Capelle, des débiteurs de la dame Nouveau; 2°. la ga
rantie des 21,000 livres payées à la dame de Murât, et dont
on ne leur avoit, ni remis les quittances, ni justifié le
•payement; ils y joignirent trois autres chefs de demande,
dont deux ont été abandonnés pour cause de leur peu
d’intérêt; le dernier avoit trait aux frais qu’avoient coû
tés à la dame Nouveau la noui’riture et entretien des
deux demoiselles Capelle, pendant vingt-un mois qu’elles
avoient resté auprès d’elle après la mort de leur père.
Ce chef de demande étoit certainement fondé en'droit;
mais il répugnoit à la dame N o u v e a u , p arce q u ’en pre
nant auprès d’elle les enfans de son premier mari, elle
n’avoit eu d’autre idée que celle de leur donner des
soins plus convenables à leur enfance; elle abandonna
encore bientôt après ce chef de réclamation.
Jusque-là les héritiers Capelle n’avoient rien dit, et
n’avoientpas pensé à réclamer le bénéfice d’une prétendue
donation directe, «\ laquelle personne ne croyoit, et qui,
si elle eût existé, eût reçu son accomplissement par la
mort de Capelle, puisqu’il en résultoit la certitude qu’il
ne naîtroit pas d’enfans du mariage. Cinq ans et plus
se passèrent sans qu’on osât élever cette prétention ;
enfin, on la proposa dans une écriture du 3 mai 1809.
L a dame Nouveau mourut avant le jugement. S’il n’y
�( 30 )
avoit pas de substitution, si les biens de la Rouquette
et autres, provenans de la dame Jalinques, devoient être
remis aux héritiers Capelle, les sœurs de la dame Nouveau
n’étoient pas intéressées dans le procès ; car la dot de
la dame Nouveau et le surplus de ses biens personnels
appartenoient en ce cas au sieur Nouveau, et les sœurs
de sa femme n’avoient rien à réclamer; les sieurs Capelle
les mirent néanmoins en cause, et ceux-ci firent signifier
une requête le 18 novembre 1816.
Il est assez curieux de voir cette requête et les cir
constances q u i l’accompagnent. Les enfans Capelle ont
voulu mettre les héritiers Lanzac dans leurs intérêts ;
p lacer dans leur bouche des moyens dont ils pussent
se servir ; pour cela il a fallu ach eter, non leur silence,
mais la permission de les faire parler; aussi, on a com
mencé par leur rembourser la dot de la dame Nouveau,
qui ne pouvoit leur appartenir qu’autant que le sieur
Nouveau seroitpropriétaire de la Rouquette; on a acheté
d’eux les répétitions qu’ils pouvoient avoir contre le sieur
N o u v e a u p o u r des som m es q u ’il auroit re çu e s do son
épouse, et qu’il doit rendre s3il conserve la Rouquette ;
et après cette opération , les Capelle ont présenté, au
nom des héritiers Montlogis,la requête du 18 novembre
18 16 .
Ne doutons pas que cette requête ne soit l’ouvrage
des héritiers Capelle personnellement; le langage qu’on
y tient sulhroit seul pour le prouver; mais, pour qu’on
n’en fasse pas de doutes, la grosse de cette requête est
réunie ù leur propre dossier. Elle est fort courte ; elle
avoit moins pour objet de discuter et de faire des frais
�31
(
)
que de présenter des moyens saillans, dont les Capelle
pussent tirer avantage.
On y dit que « les héritiers de la dame Nouveau,
« appelés en cause après son décès, ont été instruits que
« les sieur et dame Capelle soutenoient que d’après le
« contrat de m ariage................les biens..................leur
« appartenaient; tandis que les sieur et dame Nouveau
« avoient prétendu que la clause du contrat n’étoit qu’une
« substitution fidéicommissaire ; — qu'ils ont appris d’ un
« autre côté que le sieur Nouveau entendoit conserver
« le domaine de la Rouquette ; ...................que les ex« posans, en leur qualité d’héritiers naturels de la dame
« N ou veau ,forces de prendre un parti dans Vinstance
« où ils ont été appelés, APRÈS AVOIR F A IT MUREMENT
« EXAM INER LES CLAUSES DU CONTRAT DE M A« RIAGE ........................... SE SONT CONVAINCUS de la
« légitimité de la réclamation des sieur et demoiselles
« C apelle , avec d’autan t p lu s clc i-aison q u e la dam e de
« Murât q u i avoit fait la donation, et qui connoît mieux
« que personne l’intention respective des parties con« tractantes, déclare que sa volonté fo rm elle étoit d’as« socier directement le sieur Capelle ; .................... que
« la pensee d'une substitution ne vint à aucune des
« parties , NI AUX CONSEILS qui présidèrent aux con*
« vendons ; — qu’ainsi leur seul intérêt seroit de se faire
« restituer les sommes apportées en dot, soit par la
« dame de Murât, soit parla dame Nouveau, et reçues
« par leurs premiers maris. »
V o ilà, excepté un, tous les motifs de ces conclusions.
Les héritiers Lanzac ont été instruits ; ................. ils ont
�3
( * )
appris, à*un autre côté; ils sont fo rc é s de prendre un
p a jtij cela peut être; car, s’il y a substitution, ils seront
propriétaires du domaine d’Airolles-Vielle et autres
immeubles provenans de la dame de Murât, et non donnés
au sieur Nouveau par son épouse ; plus, de toutes les
reprises, soit de la dame de M urat, soit de la dame Nouveau,
personnellement; si, au contraire, il n’y a pas substi
tution , mais une donation directe, il ne leur revient
rien du tout; car, en ce cas, tous les biens provenans
de la dame de Murât appartiennent aux héritiers Capelle,
et le surplus des biens de la dame Nouveau appartient
à son mari par la stipulation même du contrat. Par quel
eiïet magique les héritiers de la dame Nouveau, instruits
par hasard, et encore d’un autre côté, et fo rcés de
prendre un parti, sont-ils assez débonnaires pour recon
noitre de prime abord, et sans contestation, qu’il n’y
a pas de substitution, mais une donation directe, faite
au sieur Capelle, lorsque cette donation doit les dépouiller
entièrement ? Ils vont nous le dire : c’est parce qu’ils
n'ont à réclamer que les som m es apportées en dot, soit
par la dame de M u r â t , soit p a r la dame Nouveau; que
le s s ie u r e t d e m o is e lle s c a p e l l e l e u r en o n t
f a i t r a i s o n ; q u il ne leur reste ¿1 dém êler , n i avec
le sieur Nouveau, jii avec les héritiers Capelle, et
qu’ils doivent être mis hors de cause. C’est le motif
qui complète leurs conclusions. Très bien: nous voyons
maintenant pourquoi les héritiers Lanzac ont été si complaisans ; on les a payés ; on leur a donné le montant
de reprises qu’on ne leur devoit pas. Vraisemblablement
( et il n’en faut pas douter ) , on y a ajoulé quelque
chose
�( 33 )
chose pour la propriété du domaine d’Airolles-Vielle et
des autres biens qui leur appartenoient en cas de subs
titution ; mais les héritiers Capelle ne sont pas obligé de
le dire; toujours est-il vrai, d’après leur déclaration,
qu’on leur a remboursé les reprises qu’on ne pouvoit
leur devoir que dans le seul cas où on reconnoîtroit
l’existence de la substitution ; c’est déjà, de la part dès
Capelle, avoir assez défavorablement jugé leur propre
cause.
Il fait réellement pitié de voir le certificat de la dame
de Murât que la pensée d’une substitution ne vint à
aucune des parties. Qu’étoit la pensée, l’opinion des
parties, et particulièrement de ,1a dame de Murât qui
assurément ne sait pas ce que c’est qu’une substitution?
Aussi compte-t-elle son opinion pour peu de chose ; car
elle atteste immédiatement la pensée des conseils. Qui l’a
„chargée de cette mission? sont-ce ces conseils? Mais leur
pensée toute en tière doit se tro u v e r dans l’acte qu’ils ont
rédigé, et c’est toujours là qu’il faut en revenir. D ’ailleurs,
qu’elle est donc cette autorité si imposante pour faire
un acte ou l’expliquer à sa manière, trente ans après sa
date, lorsqu’elle n’a plus aucun intérêt à le soutenir,
et, il faut le dire, qu’on l’intéresse pour aider à le dé
truire. Quelle foi mérite encore la déclaration de tous
ces cohéritiers, qu'ils ont J a i t mûrement exam iner le
contrat , et qu'ils se sont convaincus qu’il n’y avoit pas
de substitution, et que la prétention des héritiers Capelle
est légitime? qu’est-ce que tout cela veut dire, lorsqu’ils
conviennent qu’ils ont reçu ce qui leur reviendroit en
cas de substitution, et que tout leur intérêt est d’étr<$
5
�(3 4 3
mis hors de cause ? Ce n’est pas seulement de la mala
dresse; on ne peut pas être plus dépourvu de raison et
mettre plus évidemment au jour une collusion peu hon
nête.
Mais ce, n’est pas tout : ces héritiers Lanzac, désin
téressés et plus que désintéressés, ne s’en sont pas tenus
là. Après cette déclaration formelle, ils ont cru, ou ceux
qui parloient en leur nom ont cru qu’il auroit mieux
valu parler autrement, et le 6 août 18 17 , ils ont pré
senté une nouvelle requête, par laquelle ils ont conclu
contre le sieur Nouveau, à ce qu’il fut tenu de se dé
sister en leur faveur ou en faveur des sieur et dame
Capelle, de tous les biens compris en la donation, et ils
ont ajouté que leurs moyens étoient les mêmes que ceux
des héritiers Capelle : ces conclusions sont répétées lors
du jugement dont est appel. On rougit, en vérité, de
Ja petitesse de ces moyens qui démontrent la triste idée
que les,sieur et dame .Capelle avoient de leur cause, après
avoir fa it exam iner mûrement la clause du contrat.
•Les héritiers Capelle éprouvèrent un certain embarras
su r le fo n d de la contestation. Ils n e se bornèrent pas
à prétendre que le contrai de mariage de 1786 contenoit,
au profit de leur père, une donation directe et actuelle;
mais, dirent-ils ( et ils le disent.encore à demi ) , cette dispo
sition n’étoit pas du tout gratuite. Les sacrifices personnels
du sieur Capelle, les obligations qu’il contracta solidai
rement, tout cela déxnontroit dans la disposition une
espèce de contrat xommutatif qui en faisoit plutôt une
vente ou cession des biens qu’une véritable donation. On
repoussa ce système,<etil fut .de suite abandonné; mais
�( . 35 v
les appelans l’ont converti en moyen de considération ,
et c’est pour cela qu’il a fallu bien établir les faits, pour
démontrer l’inexactitude de ceux dans lesquels ils s’étoient
enveloppés.
<
Le jugement dont est appel, en statuant sur la ques
tion principale , embrasse aussi les accessoires par des dis
positions secondaires. Il seroit superflu de nous en oc
cuper. Deux de ces dispositions exigeront cependant
quelques explications prises dans des faits positifs; mais
il est inutile de les donner en ce moment ; elles ne feroient
que détourner l’attention sur ceux qui sont relatifs à la
question principale. Il faut, ce semble, la discuter immé
diatement. Nous appliquerons ensuite à ces deux dispo
sitions particulières , les faits qui leur appartiennent, et
qui n’exigeront pas de grands développemens.
Nous allons p o ser les prin cip es ¿ non des principes
d o u teu x et susceptibles de controverse, mais des règles
constantes et avouées par tous les docteurs, comme celles
qui sont en cette matière les fondemens du droit. Nou9
nous bornerons à une exposition simple et précise, sans
l’embarrasser de l’examen des objections. Nous ne les dé
daignerons que pour cela; et après avoir montré com
ment, d’après les principes, il faut considérer la disposition
dont il s’agit,-nous ferons voir la futilité des objections
qui nous sont faites.
'v.
M O YEN S.
Nous n’aurons point à contester pour savoir ce qui
constitue essentiellement une substitution fidéicommis5 *
�*\ 1
C 3« )
saire; avec les appelans, nous prendrons la définition de
Thévenot d’Essaules; elle est d’autant plus incontestable ,
qu’elle a été adoptée par tous les docteurs qui ont écrit
après lui. C’est, dit-il, «une disposition de l’homme,
« par laquelle, en gratijiant quelqu’un expressément
« ou tacitement, on le charge de rendre la chose à lui
« donnée, ou une autre chose, à un t i e r s Von gratifie
« en second ordre. »
Cette définition , simple, exacte, est en même temps
la plus juste qu’on trouve dans les auteurs, quoique les
appelans la qualifient imparfaite. Remarquons que c’est
le donateur lui-même qui doit gratifier au second ordre
comme au p rem ier ; m ais la disposition diffère suivant
les cas. Lorsqu’il gratifie deux personnes conjointement,
ou que les saisissant l'une et l'autre, il prévoit un évé
nement qui doit attribuer à l’une exclusivement, tout
ou partie de l’objet donné, il a fait à l’une et à l’autre
une donation directe , car la condition simple n’en
change pas les caractères. M a is lo rsq u ’il donne à un seul
d’a b o r d , et q u ’ il stipule qu’après le décès de ce dona
taire, les biens seront remis à un tiers, c’est-à-dire,
à une autre personne que le donataire lui-même, il n’y
a plus qu’une substitution fidéicommisaire, parce qu’il
n’y a plus don actuel, tradition actuelle, avec ou sans
condition, mais qu’il y a trait de temps et ordre suc
cessif.
Ainsi, nous n’aurons aucune difficulté sur ces prin
cipes généraux ; mais nous en avons sur les conditions qui
établissent l’ordre successif et le trait de temps, la charge
de rendre et celle de conserver. C’est, en effet, sur ces
�37
C
)
principes particuliers, que les appelans dissertent, expli
quent, obscurcissent; car cela paroît si simple, et le
sens.de ces conditions si naturel, qu'on ne conçoit pas
le moyen de faire une difficulté sérieuse.
Nous ne devons pas omettre d’observer que, dans
l’origine , les substitutions étoient faites verbalement et
n’exigeoint aucune formalité. Lorsqu’ensuite, on exigea
quelles fussent écrites, on ne les assujétit à aucuns termes
mai’qués ; on les reconnoissoit aux caractères de la dis
position , a l’ensemble de l’acte, sans les rechercher dans
des expressions obligées; aussi, disoit-on qu’elles s’établissoient par conjectures.
Cependant on ne voulut pas donner trop de latitude
à 1 esprit de l’homme ; on ne voulut pas que les con
jectures fussent entièrement livrées à l’arbitraire, et elles
furent pour la plupart d éterm inées par les lois, c’est-àdire, q u ’on jugeoit l’acte par le caractère que telle ou
telle circonstance imprimoit à la disposition.
Celle qui fait le sujet du procès a été faite sous les
anciennes lois ; elle n’étoit donc assujétie à aucun5terme*;
elle pouvoit et devoit s’établir par les conjectures légales,
et c’est en quoi nous ne sommes pas tout-à-fait dans la
même position que s’il s’agissoit d’une libéralité stipulée
depuis le Code.
Nous avons dit que la définition de Thévenot étoit
parfaite ; rien n’est plus vrai, quoiqu’il y manque la
charge de conserver, ce en quoi les appelans la soutien
nent imparfaite. On pourroit penser, d’abord, que la
charge de rendre suppose nécessairement l’obligation de
conserver, par la nature même des termes, et cela étoit
�( 38 )
vrai dans l’ancien droit. Ce seroit cependant une erreur
si on généralisoit trop cette proposition; car, aujour
d’hui que le Code civil interdit les substitutions, qu’il
les définit nettement, en exigeant que le donateur soit
précisément chargé de conserver et de rendre ,• qu’enfin,
il annule, non-seulement la substitution, mais encore la
donation qui en est grevée; que, dès lors, tout doit
tendre au maintien de l’acte, et toute incertitude doit
s’interpréter favorablement, on pourroit juger que l’obli
gation de rendre, imposée à un donataire, sans aucun
terme, doit s’exécuter au moment même de la tradition;
qu’ainsi,il n’y a pas de trait de temps, pas de substiution,
mais un fidéicommis pur et simple qui s’ouvre en même
temps que l’effet de l’acte qui le contient.
Mais, dans l’ancien droit, il n’en étoit pas de même ;
la charge indéterminée de rendre supposoit que le grevé
devoit conserver les biens pendant sa vie ; la condition
de la mort du grevé n’avoit pas besoin d’être annoncée
expressém en t n i im p licitem en t ; c’est en core ce que nous
dit Thévenot, qui explique en cela le sens de sa défini
tion ( chap.
), et c’est ce que nous dit M, Toullier,
. 3 , tit. 2 , chap. I er., n°. 22. « C’est cet usage constant
« d’entendre en ce sens la charge de rendre, qui l’a faite
« employer simplement et sans y ajouter à la mort du
« donataire, dans l’article 896.
« Cette expression est ici ( dans l’article ) d’autant moins
« équivoque, qu’elle est accompagnée de la charge d&
« conserver. »
E n sorte, poursuit-il, n°. 2 3 , que « quoique dans Tan
ce cienne jurisprudence française, la simple charge de
1
56
�39
(
)
a rendrefCtt suffisante pour faire présumer que le gr,evé
« n’étoit obligé à restituer les biens qu’à sa m ort, ou pour
« établir ce qu’on appeloit une substitution, à moins
« qu’il n’y eût dans l’acte quelque tejrme ou quelque
a circonstance qui indiquât le contraire, sous l'empire
« du Code, elle ne suffiroit pas si elle n'étoit accoin
te pagnée de la charge de conserver, et ne contituemoijt
« qu’un ildéicommis pur et simple, etc. »
On voit par là que la condition de remettre les biens
à la mort est celle à laquelle on s’attache le plus pour
reconnoître la substitution fidéicommissaire, tellement
qu’autrefois il falloit la supposer de droit par la seule
charge de rendre, quoiqu’on n’y trouvât pas la charge
de conserver. Mais s’il n’y avoit pas de doute en ce cas,
il y en avoit moins encore lorsque ce terme du décès
du donataire
contrat; c’est
temporis , et
qui faisoient
se trouvoit textuellement écrit dans le
cette condition qui constitue le tractus
ce trait du temps est une des conjectures
légalement présumer la substitution.
Quant à l’ordre successif, c’est encore chose plus
simple; comme nous l’avons dit ci-dessus, il se trouve dans
la disposition qui renferme d’abord une donation faite
à une personne nommée, et ordonne ensuite la remise
à une autre personne non comprise dans la donation ;
c’est-à-dire, toute disposition faite à deux personnes qui
ne sont pas conjointes, et dont l’une ne doit recueillir
qu’après l’autre.
Lorsque le legs a été fait conjointement à plusieurs,
avec déclaration qu’il appartiendroit au survivant, il
n y a pas substitution, dit M. Toullier, n°. 46; » on
�C 40 )
« peut dire, en effet, que chacun des deux légataires ne
» doit être, jusqu’à l’événement de la condition, con» sidéré que comme usufruitier de sa moitié, usufruit
» qui se consolidera à la propriété du tout, en faveur
» du survivant; que la propriété est suspendue jusqu’au
» décès d\i prémourant, ce qui rend le legs conditionnel
» (Jliant à la propriété, sans qu’il y ait de substitution. »
Nous devons ajouter, pour ne pas donner trop de
latitude à cette pensée de la suspension de propriété,
qu’elle ne demeure pas incertaine pour le temps qu’a
duré la condition ; car on sait que l’accomplissement d’une
simple condition a un effet rétroactif qui fait valoir
la disposition ab in itia, comme si elle eût été exécutée
de suite et sans condition.
>
Mais, ajoute M.' Toullier , n°. 49/ » on ne peut
» s’empêcher de voir une substitution dans le legs fait
» à plusieurs, non pas conjointement, comme dans
» l’espèce du n°. 46, et avec déclaration que le tout
» appartiendrait au survivant, mais séparément à
» chacune d’elles, lorsqu’elles se marieront, avec la
» clause qu’en cas que l’une d’elles vienne à mourir sans
» enfàns de son mariage, sa part retournera aux autres
» légataires. La Cour de Bruxelles l’a ainsi jugé, et avec
» raison, dans l’espèce suivante: Ja c q u e s - Jo s e p h Drion
» avoit institué françois Drion, son frère, son héritier
» universel, et Favoit chargé de donner à chacun des en» fans encore à marier de leur frère Adrien Drion, une
» somme de 6,000 francs, lorsqu’ils se marieront de son
» consentement.
« Ju s q u e -là point de substitution; mais le testateur
« ajoutoit
�«
I
(4 0
« ajoutoîfc qu'en cas qu’un desdits enfans vint à mourir
« sans laisser de ’génération de son mariage, sa p a rt’
« retourneroit à ses autres frères et sœurs. Cette clause
« de retour rénfermoit évidemment et nécessairement
« la charge de conserver et de rendre, c’est-à-dire, une
« substitution conditionnelle et réciproque des légataires
« les uns aux autres, et, par arrêt du 14 juillet 1808,
« rapporté dans le recueil de jui'isprudenee du Code,
k la Cour de Bruxelles déclare nul le legs de 6,000 livres.
« Cette espèce est bien différente de celle du n ° . 46,
« ci-dessus ; dans celle-ci, le legs étoit fait conjointement
« îi plusieurs légataires, et au survivant d’entr’eux ; on
« prouvoit donc que chacun d’eux, jusqu’à l’événement,
« n’étoit considéré que comme usufruitier de sa moi« tié, etc. »
Ainsi, tenons pour certaine la différence qui existe
dans les effets que leur donne la l o i, e n tre la donation
conjointe et avec droit d’accroissement, qu’autorise, même
aujourd’hui, l’article 1044 du Code civil, et la donation
à un seul, avec la condition de remise à un autre, après
le décès de ce donataire.
Nous ne parlons pas de plusieurs distinctions que fait
M. Toullier, de plusieurs exemples qu’il cite, et qui
tous confirment ce que nous venons de dire; nous en
rappellerons ce qui sera nécessaire dans la réponse aux
objections des appelans ; pour le moment', nous nous
retranchons ) dans un court exposé de principes; nous
tuchons de les réduire à des idées nettes et simples, autant
que la matière peut le comporter.
r
Nous pourrions nous borner à cette seule autorité,
6
�( 42 )
elle est assez respectable ; elle est, d’ailleurs, si conforme
aux principes connus et aux idées de raison, qu’elle nous
su/ïiroit, sans doute ; mais nous pouvons la fortifier par
celle d’auteurs non moins recommandables. Nous ne
citerons pas directement les docteurs de l’ancien droit,
ni Ricard , ni Furgole , auteurs profonds autant que
judicieux; on nous accuseroit peut-être de mêler à cette
discussion de la métaphysique, de la subtilité, à laquelle
prête nécessairement une foule de nuances des substitu
tions dans l’ancien droit ; nous resterons sur le terrain où
les appelans nous ont placés ; nous nous bornerons aux
auteurs qui ont écrit depuis le Code civil, et cela par
deux raisons.
L ’une, que la loi actuelle étant plus favorable à ceux
qui repoussent l’existence d’une substitution, par cette
raison qu’elle les interdit, et qu’on doit naturellement
présumer qu’une disposition est faite dans l’esprit de la
loi ; les appelans ne pourront pas récuser cette doctrine,
si elle les condamne.
L ’a u t r e , que ; des auteu rs ont ré d u it les p rin cip es à
des idées plus simples, et les ont dégagés de toutes les
distinctions, souvent subtiles, cjui les obscurcissoient dans
l’ancien droit.
.'
Nous citerons notamment M. M erlin, et l’auteur du
dernier traité des donations, M. Grenier.
Nous devons, cependant, relativement à ce dernier
auteur, faire une remarque que commandent les cir
constances. Sans doute, il est permis de citer des auteurs
vivans; mais lorsque l’autorité dont on se prévaut est
celle d’un magistrat devant lequel on parle ; lorsque 1 au-
�43
(
)
leur que l’on'interpelle est lui-même assis sur les lys,>
tenant d’une main sûre et équitable la balance de la justice,
dans laquelle il est appelé à peser les moyens respectifs
des parties, cette position commande le respect, et on
doit user de circonspection en interprétant devant lui
ses propres pensées. Aussi, nous tenant dans les bornes
d’une respectueuse discrétion, nous ne citerons de cet
auteur que ce qui sera nécessaire pour repousser les
moyens que les appelans ont voulu se faire à l’aide de
quelques-unes de ses expressions.
-*M. Merlin, v°. substitution fidéicommissaire, enseigne
la même doctrine que M. Toullier. Après avoir adopté
la définition de Thévenot, et posé quelques principes
généraux, il s’explique plus particulièrement sur les con
ditions qu^nous examinons en ce moment; il s’explique
ainsi, section 8 , n°. 3.
, . >n .
« Une autre condition essentielle pour établir un
« fidéicommis, est que les termes dont on se sert pour
« l’exprimer emportent l’ordre successif ou trait de temps,
« c’est-à-dire , qu’ils n’appellent le substitué qu’en second
« ordre', et -après que Vinstitué ou donataire immédiat
« aura recueilli.
v
Ainsi, le testateur qui dit: J ’institue un tel et ses
« enfans, ne fait pas de substitution, parce qu’il n’y a
« rien dans sa manière de parler qui indique l’ordre suc« cessif ; tout y annonce, au contraire, qu’il y appelle le
«1 père et les enfans ENSEMBLE ................. ou qu’il subs« titue vulgairement les enfans au père.
« Mais si je dis : J ’institue un tely et APRÈS LUI ses
« eiifans, il y aura fidéicommis, parce que les enfans sont
6 *
�44
(
)
« appelés pour recueillir après leur père, et non pas)
« concurremment avec lui.
« II en sera de même , si je dis : J'institue un tel et
<c ses héritiers, car le mot héritier désigne une qualité
« qui ne peut avoir lieu qu’après la mort de Vinstitué ,
« et, par conséquent, emporte l’ordre successif.
>2
« Si j’instituois quelqu’un pour l u i , ses héritiers ou
« ayant cause , ces termes , uniquement relatifs à la
« transmission qui a lieu de droit au profit des héritiers,
« ne pourroient pas caractériser un fïdéicommis.
\.
« Mais si à ces termes se trouvoit jointe quelque qua« lification particulière qui intervertit Vordre des suc« cessions légitimes; ily auroitfidéicommis, par exemple:
« J e donne à un tely pour lui et ses hoirs mâles *
« I l en seroit de même de toute autre désignation
« particulière qui, sans produire nécessairement. une
« pareille interversion, emporteroit toujours le trait du
« temps ; par exemple: J e donne à tel et à ses enfans àr
« naître ; en ce cas, le père est saisi par la donation ,
« m a i s les enfuns ne peuvent pas l’ê t r e , puisqu’ils n’existent
« p a s ; il n’y a donc pasvocation simultanée, mais ordre 1
« successif, par conséquent, jidéicom m is. »
y
Après avoir dit au n°. 4. que les mots je substitue em
portent de droit le trait de tempsy parce qu’ils com
prennent tous les genres de substitution, M .-M erlin
examine ensuite s’il en seroit ainsi des mots ye .mets à
*a place, et il.pense qu’oui; car, substituer et mettre à
la place n’ont qu’une seule et même signification, commele prouvent la loi romaine et l’article 67 de l’ordonnance
de J
*
747
�( 4$ )
a Cependant, dit-il, Thévenot pense quails ne pro« duiroient la fidéicommissaire qu’autant qu’ils seraient
« joints à des termes emportant trait de temps, comme
« si on disoit : J'institue un tel, et A son d écès je mets
« un tel à sa place. »
jn
• Il se demande ensuite si les mots, eli cas de décès^
auroient le même effet que ceux à son décès; il sem
blerait, dit-il, qu’ils'n’emportent d’autre idée:que celle
d’une substitution vulgaire ; et il rapporte l’arrêt de
Pompadour, qui l’avoit ainsi jugé le 2 juillet
Mais il ajoute immédiatement qu’i l ne faut pas croirè
cette décision exacte; que Thévenot pense le contraire,5
et qu’il finit adopter sa doctrine. Il en donne la preuve
la plus convaincante, en rapportant un arrêt rendu sur
les conclusions de M : l’avocat-général d’ Aguesseau, qui
admit la requête civile contre celui du 2 juillet 1766,
et déclara la substitution existan te.
A in s i, lo rsq u ’on recherche si un acte contient des dis
positions conjointes ou simultanées, ou seulement des
dispositions successives marquées par des termes divers,
an voit quelle importance les auteurs donnent à ces ex
pressions : à son décès, lors du décès, en cas décès.
Sans anticiper sur ce que nous serons obligés de dire
lorsque nous réfuterons le moyen tiré de la différence
que font les appelans entre les substitutions et les con
ditions, nous devons faire ici quelques observations cer
taines en principes.
i°. Toutes les conditions ne sont pas des substitutions,
car il en est beaucoup qui n’ont pas ce caractère, et ce
�(4 6
y
sont celles dont nous avons entendu parler plus haut sous
le nom de conditions simples. Mais toutes lesjconditions
ne sont pas valables; il en est d’impossibles, de contraires
aux bonnes mœurs, de prohibées par la loi, et de ce
nombre sont aujourd’hui les substitutions, car les subs
titutions fid,éicommissaires sont de véritables conditions.
2°, Un fidéicommis peut être pur et simple ou con
ditionnel ; je lègue à'tel une terre', à la charge de donner
20,000 francs à telrautre; voilà un fidéicommis pur et
simple qui ’exécute au moment ou l’acte commence
d’piyoU’cson;jeffet ; qui saisit le donataireudirectement;
qui ne saisit., à la vérité, celui-qui est dans la condition
quq p ar ^entremise du donataire direct, mais qui le saisit
de suite ; et alors il n’y a pas trait de temps, comme
nous l’avons déjà observé ; ou bien, je lègue à tel ma
terre;, et il remettra 520,000 francs à tel autre lorsqu'il
mourra ; ic i, le fidéicommis devient conditionnel et
emporte substitution.
. v 1
3°. La substitutionfidéicommissaire peut', elle-même,*
être pure et simple-ou conditionnelle.
>
E lle est pure et simple, lorsqu’on dit : J e donne à tel
ma terre, à la charge de la rendre à so?i décès, ou de
la conserver et faiivndre à tel autre* 1
;.v
-H
• JîllCiqst conditionnelle^ lorsqu?on dit: à la charge de
la rendfe, s'il meurt sans énfans, parce que si le dona
taire a ¡dés enfans qui lui survivent, la substitution n’existe
pas.
Mais qu’elle soit conditionnelle ou pure et simple,
elle n’est :pus moins substitution ; elle n’est pas moins
6
�47
(
)
interdite pas le Code ; elle n’a pas moins été abolie pài*
la loi du 14 novembre 1792, si elle u’étoit pas ouverte
auparavant.
Ces observations nous étoient nécessaires pour ne pas
confondre la condition simple mise A une institution ou
donation', et celle qui accompagne une substitution à la
quelle seule elle est apposée ; elles sont d’ailleurs utiles pour
saisir les nuances de chaque espèce ,* et appliquer saine
ment la jurisprudence des ai*rêts : nous devons en citer
quelques exemples.
'JiioJ r i
« J ’institue P aulm o n héritier universel, et s 'il meurt
« sans eirfans, je le charge de rendre ma succession à
« Pierre: Voilà, dit M .3Toullier, page i , une subs-»
« titutiôn conditionnelle ,' et cette substitution est abolie
« comme les autres, quoiqiié'1l’ordre Successif ne soit
« établi qûè conditionnellement, car la'loi n’a pas disfc tingué en tre celles q ui sont p u res et sim ples et celle»
« qui sont faites sous condition. »
:
' À l’appui de cela, M. TouHier cite un arrêt’ •trèsremarquable. Jean Mérendol avoit institué Alexandre
Merendol sorïhéritier universel,- pour jouir ét dispose^ du
tout, lorsqu’il auroit atteint lage de vingt-quatre ans, et en
cas de moi t avant Vâge de vingt-quatre ans, le testateur
léguoitLà Jean-Baptiste C avy, 10,000 liv ., et à Jacques
Merendol pareille somme , à prendre sur' tous ses biens.
C ertes,ily uvoit dans cette espèce grande facilité à disser
ter sur la différence des simples Conditions avec les subs
titutions proprement dites; 011 pou voit dire ( et rien n’étoit
plus spécieux'^ que le testateur n’avoit ni substitué ni
chargé de rendre ou de remettre ; qu’il avoit légué direc-
5
�tementà tous, que tous tenoient de lui, mais sauf l’évé
nement d’une simple condition qui n’empêchoit pas la
saisine du légataire pour le tout. Cet argument étoit à lui
seul plus capable d’ébranler que tout ce que peuvent
appliquer les appelans à la clause qui nous occupe.
Mais la différence des termes établissoit que l’un ne
devoit recueillir qu’après l’autre, et ne permettait d’y
voir, ni une substitution vulgaire, ni un legs fait con^
jointement ; la condition elle-même établissoit le tractus
temporis, et la Cour de cassation jugea que le testament
se réduisoit à une substitution des deux sommes de
1 0,000J'y. yfa ite sous la condition de la mort de Vhéritier
avant sa vingt-quatrième année (T o u llier, n°. 37, à la
n o t e E t en effet, il y avoit là, n on un fidéicommis pur
et simple , mais un fidéicommis conditionnel en cas de
mort ; et quoiqu’il s’agît d’une disposition faite depuis le
Code, que, par conséquent, la fayeur fût du côté des léga?
taires, et que l’interprétation tendante à maintenir l’acte,
dût être adoptée de préférence; tout-fut annulé, soit la
disposition p r in c ip a le , soit la condition,
M . M erlin, s. 10 , §. I er., rapporte un arrêt très-:
remarquable encore.
l.e 6 janvier 1792, Joseph Arboré fait son testament;
instituera mèi’o son héritière, et fait à l’abbé Raynal un
legs de 30,000 livres. Jusque-là tout est bien; mais il
ajoute : dont je l’engage à disposer enfa v e u r dç madame
de K ercado, sa nièce. Il meurt le 6 février 1792 ; l’abbé
Raynal survit à la loi du 14 novembre, et meurt pen
dant la ; durée,,dç quelques.contestations, cjui|,avoient ar-r
rîtlé le payement du leg s., .
-, ,. • •
Demande
�( 4 9 )
Demande eu délivrance par la dame Kercado, qui
se prétend la véritable légataire ; elle ne peut nier le
fidéicornmis qui résultoit alors des termes de prière,
comme des termes impératifs ; mais elle soutient qu’il
étoit pur et simple et non conditionnel, parce qu’elle
étoit l’objet direct de la disposition ; qu’elle étoit faite
dans son intérêt et non dans celui de l’abbé Raynal, qui
étoit simple 7ninistre.q\iel\e étoit saisie de suite et sans
term e; qu’ainsi il n’y avoit pas substitution.
Jugement qui le décide ainsi.
Appel et arrêt de la cour de Paris qui infirme.
Pourvoi en cassation.
M. Merlin fit ressortir , avec sa profondeur ordi
naire, les principes relatifs aux fidéicornmis condition
nels ; il les établit par plusieurs lois romaines, par les
principes du droit français. Il prouva que l’abbé Raynal
n’étoit pas chargé de rendre à l’ouverture de la succes
sion ; qu’il pouvoit conserver jusqu’à l’époque où il lui
plairoit de restituer, ou jusqu’à sa mort, et le 4 août 1808,
un arrêt de la Cour de cassation rejeta le pourvoi par ce
motif très-simple, et dont on eût dit peut-être q iC ilri avoit
pas exigé beaucoup de méditation :
« Attendu qu’en supposant que la question dût être
« résolue par les principes du droit romain, on ne pour« roit néanmoins disconvenir que la jurisprudence des
« arrêts, fondée sur l’autorité des docteurs les plus dis« tingués, n’y eût apporté cette modification, qu’unjid éi« commis de l’espèce de celui dont il s'agit ne pouvoit
« être réputé que. conditionnel. »
E t cette ju risp ru d en ce étoit celle dont nous avons
7
�. ( 5 0 }
parlé plus haut, et qui avoit fait admettre, dans nuire
usage la charge de rendre, comme emportant le droit
de conserver jusqu’à la mort.
Ces arrêts, comme on le voit, établissent des prin
cipes. Nous verrons quelle application il faut en faire
à la disposition qui nous occupe.
Nous ne devons pas omettre un pi’éjugé du plus grand
poids,,un décret impérial du 31 octobre 1 8 1 0 , inséré
au bulletin des lois, et rapporté pai M. Grenier, tom. I er..,
page 121.
Le pluviôse an 1 3 , codicille de la dame Malloz; elle
lègue à l’hospice de Bois commun quatre arpens de pré.
5
L e 7 m ars 1 8 0 9 , elle m odifie cette disposition par un
second codicille ; elle v e u t q u ’un arp en t soit distrait au
p ro fit de Ju lie n n e -F ra n ç o ise , sa fille n a tu re lle ; mais que
si Ju lie n n e v ie n t à décéder sans enfans , l’arp en t dont
elle aura foui re to u rn e à l ’hospiceCertes, tout étoit, dans cette espèce, susceptible d’une
interprétation favorable. Deux codicilles qui prenoient
effet le m êm e jo u r p a r la m o rt du te sta te u r, q u i conten oien t l’un et l’autre l’ensemble de ses dernières vo
lontés, devoient être censés un seul et même acte. Les
deux dispositions qui y étoient contenues, embrassoient
simultanément deux personnes qui pouvoient être consi
dérées l’une et l’autre comme l’objet direct de la dispo
sition. ü n pouvoit dire, avec beaucoup de raison, que
l’hospice étoit légataire de tout, sous une simple condition,
et qu’au cas de décès sans enfans ( ce qui netoit qu’une
condition suspensive de l’exécution, mais non de l'effet
de la disposition ), Julienne-Françoise n’étoit et n’avoit
�5
( i )
jamais été, dans riutention de la testatrice, qu’une simple
usufruitière ; qu’enfin, cette intention se manifestoit par
les propres termes du testament, les biens dont elle aura
joui.
Cependant, le gouvernement décide qu’il y a subs
titution; « et néanmoins, voulant concilier le respect
« dû à la lo i, avec celui qui est dû aux intentions de
« la bieirfuitrice de l'hospice, » il lui laissa la jouissance
de l'arpent de pré.
On voit, par cette décision,combien on jugeoit formelle
la disposition de la loi et ses conséquences, sous le Code,
où la charge de conserver et de rendre semble devoir être
expresse ; où le testateur, quand il ne dit pas le contraire,
est présumé de droit n’avoir pas voulu faire ce que la
loi lui défendoit ; cependant, comme c’est la nature des
dispositions qu’il faut voir, on se croit obligé d’y recon
noitre une v é rita b le su b stitu tio n , parce qu’il y avoit
fidéicommis, qu’il étoit conditionnel, qu’il établissoit
ordre successif et-irait de temps, que, par conséquent,
les termes dont elle aura jo u i, ne pouvoient pas être
appr°priés à ce genre de disposition, dans un sens res
trictif, et ne pouvoient pas la dénaturer.
Nous ne devons pas ometttre de citer un auteur dont
l’ouvrage, pour être nouvellement publié, n’en a pas
moins bien du mérite (*). Destiné à fixer les caractères
auxquels on doit reconnoitre les substitutions, il réunit,
en un seul corps, la doctrine des auteurs les plus distin
gues, et réduit celte matière à des termes simples et à des
(*) M . Roland de V illarg u es, des caractères auxquels on doit reconnoitre let
substitutions prohibées p a r le Code civ il, publié en 1820.
7 *
�52
(
)
principes positifs. Nous n’en citerons que quelques traits
principaux sur la question qui nous occupe.
Il établit, page 4 7 , qu’il faut, pour la substitution,
qu’il y ait ordre successif ; « il faut donc, dit-il, d’après
« Pérégrinus, que les deux donataires soient appelés
« successivement, et non pas concurremment , ordine
« successivo et non conjunctivo , seu simulta?ieo.
Il recherche, page o,ce qui autrefois constituoit Z’ordre
s u c c e s s ifet le reconnoît à trois caractères; il falloit,
i ° . Que le droit de l’appelé fût éventuel, c’est-à-dire,
soumis à une condition suspensive’
20. Qu’il dût s'écouler un temps avant la remise du
fidéicommis ;
3 0. Que l’époque de la remise fut celle de la mort
du grevé.
Le premier de'ces caractères indique la substitution,
parce que la condition laisse reposer la propriété sur la
tête du grevé, jusqu’à son accomplissement, et la fixe
sur la tête du substitué, lors de cet accomplissement ;
ce qui , dit - i l , est bien différent que si le droit de
l’ap p elé n’étoit suspendu par aucune condition, mais
seulement par un terme ; car, en ce cas, la transmis
sion s’opéreroit directement et immédiatement du tes
tateur à l’appelé. N ’est-ce pas^ en effet, poursuit-il,
parce que l’appelé n’a qvüune simple espérance , subo?donnée à Vaccomplissement de la condition j n'est - ce
pas cette incertitude de la propriété qui est la princi
pale cause de la prohibition des substitutions ? . . . .
car nos substitutions sont ce qu’étoient, dans le droit ro
main, les fidéicommis conditionnels.
5
�53
(
)
Le second caractère, le temps, indique la substitution ,
parce qu’il établit un ordre particulier de succession ,
et, pour cela, il sufïïsoit, dans notre ancien droit, que le
disposant eût entendu appeler le second donataire après
que le prem ier auroit recueilli ou reçu. Verba trac tum temporis habentia , ita ut substitutio post a d i t a m h æ r e d it a t e m videatur fa cta .
Et comme, dans notre usage, la mort du grevé étoit
toujours censée ajoutée à la charge de rendre ( à plus forte
raison si elle étoit écrite); cela cônstituoit le troisième
caractère.
« Remarquons , dit-il page 6 i , que dès que la m oit
« du grevé doit être le terme de la rem ise, toutes les
« fois que la charge de rendre sera conçue dans ce sens,
« la substitution réunira, par cela seul, les différens ca« ractères que nous venons de parcourir et qui doivent
« constituer l’ordre successif. »
De là , cette conséquence que si on trouve dans un
acte deux donations à deux personnes différentes, il faut
principalement considérer si elles sont faites concurrem
ment, de manière à ce que toutes les deux, ou celle
des deux dans l’intérêt de laquelle est faite la disposi
tion, recueille au moment où l’acte commence d’avoir
son effet; ou si elles sont successives, en ce sens, que
la propriété repose pour un temps sur la tête de l’un,
et doit, après ce temps, et surtout après la mort du
premier donataire, se placer, p a r la remise, sur la tête
du second. Voilà la pierre de touche pour reconnoître
les caractères de l’acte et les effets qu’il doit produire.
Nous nen dirons pas davantage ici; nous ajouterons
�seulement qu’aux chapitres 6 , 9 et 10 , il développe cette
doctrine, d’après Ricard, Bergier, Thévenot, M erlin,
Toullier , Grenier , qui lui servent constamment de
guides, mais revient toujours à la distinction d’entre les
fidéicommis purs qui ne forment qu’une condition, et
les fidéicommis conditionnels qui emportent toujours
substitution, lorsque la mort du grevé est l’époque de
la remise.
Nous pourrions citer de nombreux arrêts qui ont con
sacré ces principes; par exemple, le 22 décembre 18 10 ,
la Cour de Turin a jugé que l’institution faite au profit
d’un tel, pour lui et ses descendans mâles, renferme
substitution (1).
Le 17 messidor an n , même décision de la Cour de
cassation, pour le cas d’une institution faite*pour lui et
ses eirfans à naître (2).
Plusieurs arrêts ont jugé que le rappel des héritiers
légitimés, en cas de prédécès du donataire, étoit subs
titution.
E n f in , le 2 2 juin 1 8 1 2 , la C o u r de cassation, en
cassant u n arrêt de Montpellier, a jugé qu’après une
donation entre-vifs, avec réserve, le don de la réserve
à un tiers, avec stipulation de retour pour le donataire
lui-même y emportait substitution (3).
Observons que la plupart de ces autorités si respec
tables s’appliquent aux principes du Code civil, où, ce( O D e n e v e r s , 1 8 1 1 , supplément, page 12G.
(a )D e n e v e rs , 17 9 1 à l’an i a , page 714*
( 3) Denevcrs, 1 8 1 3 , page 557-
�( 5 5 )
pendant, tout s’interprète avec bienveillance, par deux*
raisons également puissantes.
L ’une, que la substitution étant défendue, le donateur
est censé, dans le doute, n’avoir voulu faire que ce que
la loi lui permettoit.
L ’autre, que par cette même cause, l’existence de la
substitution tendant à détraire l’acte, on ne doit l’y
voir que lorsqu’elle y est nécessairement.
Avec quel avantage n’appliquerons - nous donc pas
ces principes à vin acte fait sous les anciennes lois, où
la substitution étant permise, on doit beaucoup plus
facilement présumer que le testateur avoit voulu subs
tituer, plutôt que de chercher dans l’acte qu’il a fait
une disposition embarassée, insolite, fût-il même possible
de la concilier avec l’ensemble de l’acte et les caractères
qui lui sont propx-es? A une espèce où la nullité de la
substitution, bien loin de re n v e rs e r tout l’édifice des
volon tés du testateur, ne fait que rendre pure et simple,
par la défaillance de la condition, la disposition la plus
naturelle, la disposition directe de la dame de M urât,
la seule, il faut le dire, qui fût dans le contrat de ma
riage une disposition réelle et parfaite.
C’est ce que nous allons démontrer par quelques ap
plications très-simples de ces principes à la disposition
dont il s’agit.
Y verrons-nous] une donation faite conjointement à
deux personnes appelées chacune pour le tout, ou avec
accroissement de l’une à l’autre de la portion de chacun ?
Y lirons-nous une vocation simultanée ?
�56
(
)
Si cela n'y est pas, y aura-t-il un fidéicommis?
Ce fidéicommis sera-t-il pur ou conditionnel ?
N ’cn doutons pas : il faut qu’une de ces choses se trouve
dans la disposition; car, quelle autre chose pourroit s’y
trouver, et s’y trouver valablement?
Voyons donc ce qui y est; car, c’est aux expressions
d’un acte, coordonnées avec la pensée des parties ; c’est
à son ensemble, à ses caractères, au genre d’effet et
d’exécution qui lui est propre, qu’il faut juger de ce qu’il
est, de ce qu’il peut valoir.
Voyons d’abord le motif de la dame Jalinques de qui
émane la disposition. Elle est veu ve, sans enfans ; la
future épouse est «a sœur.
O r, elle donne pour motif Vamitié particulière qitelle
a pour la future épouse, sa sœur. Cela seul suffit pour
ne pas se méprendre sur son intention, pour juger quelle
personne a été l’objet direct de sa disposition. Voyons
si la disposition y est conforme.
E ll e donne à sadite sœur, fu tu re épouse, ce accep
tante : ju sq u e-là tout est clair, positif, parfait ; elle donne
et sa sœur accepte; elle ne donne qu’à elle et elle seule
accepte. Pas de difficulté; voilà un*; disposition complète.
Elle ne s’en tient pas là ; voulant prévoir un événe
ment qui est incertain, elle fait une disposition secon
daire.
D ans le cas où la demoiselle fu tu re épouse vienne à
décéder sans enfans, les b ie n s ............................. seront
remis et appartiendront au futur époux.
Y a-t-il possibilité de voir là une donation conjointe;
l’un
�57
(
)
’un est donataire direct et accepte; l’autre le sera dans
un cas, si telle chose arrive; aussi n’accepte-t-il rien,
parce que la donatrice ne lui fait aucun don direct et
actuel. A la vérité, si l’événement arrive, les biens lui
appartiendront, mais il ne les prendra pas directement
de la dame Jalinques; car, dans l’intervalle, un autre
les aura possédés comme propriétaire ; seulement ils lui
seront remis. O r, ils ne pourront l'être que par celui
qui les aura déjà recueillis, et, en effet, le donataire
q u i accepte les aura recueillis, possédés, parce que
du jour même de la donation ils lui appartiennent,
Il aura eu le droit de les conserver ju squ à son décès;
il ne sera tenu qu’alors de les remettre, et encore s’il
n’y a pas d’enfans du mariage. Ainsi, il y a deux dis
positions distinctes et successives \Vxme actuelle, parfaite,
l’autre incertaine et sans effet actuel ; l’une et l’autre
marquée par les term es qui leur conviennent et le genre
d’effet qui leur est propre.
S’il n’y a pas de donation fa ite conjointement, il
r iy a pas non plus de vocation simultanée. Il n’y a
pas à s’y méprendre, lorsque les parties ont employé
des termes si clairs, si précis et si conformes avec l’in
tention exprimée. Nous pouvons d’autant moins en
douter, quaprès avoir fait cette disposition oblique,
la donatrice, voulant couronner ses volontés par la
clause finale ordinaire, après l’une et l’autre disposition,
ajoute qu’elle s’est dessaisie et dévêtue des biens donnés,
et en a vêtu et saisi, tant en propriété qu’en usufruit,
LA D IT E DEM OISELLE FU TU RE ÉrO ÜSE. On ne peut
8
�58
(
)
donc pas douter que malgré ce qu'elle vient de dire de
sa volonté ù l’égard du futur et de s;:s héritiers, t-iln’ait donné et voulu donner qu’à la future; que la
future, seule donataire, seule acceptante, ne le soit
tant en propriété qu’en usufruit ? cela étant, quelle
autre personne quelle eût pu remettre? à qui le sieur
Capclle eût-il pu demander la remise, si ce n’est à ses
héritiers? Or, comme cette remise ne devoit être effectuée
que dans un cas prévu, il est d’autant plus indispensable
d’y voir un fidéicommis, que, sans cela, la disposition
secondaire ne seroit susceptible d’aucun effet, et ne
pourroit être éxécutée d’aucune manière; car, remar
quons bien que dans les espèces où des dispositions
faites à plusieurs ont été maintenues, on a considéré
que celui qui étoit dépouillé par l’événement, par
l’accomplissement de la condition, n’étoit, dans la pensée
du donateur, qu’un simple usufruitier, et que la pro
priété étoit censée avoir résidé, ah initio, sur la tête
de celui qui y étoit appelé à défaut de l’autre ; mais
ici le don est transm is tant en propriété qu’en usufruit,
et c’est en ces termes qu’il est accepté; la charge de
re m e ttre pesoit donc sur la dame Capelle, propriétaire
et usufruitière tout ensemble, et cette charge constituoit
évidemment un fidéicommis.
Mais ce fidéicommis étoit-il pur ou conditionnel?
Le fidéicommis pur ne peut exister, nous l’avons v u ,
que lorsque le légataire direct est chargé de remettre
à l’instant même, et que le testateur n’a eu en vue que
le fidéicommissaire seul et non l'intérêt du grevé, en
�( 59 )
quoi il est peu compatible avec la donation entre-vifs.
Alors le légataire direct n’est qu’une personne interposée
pour faire valoir une disposition qui autrement pourroit
ne pas valoir, ou pour satisfaire des vues particulières
du testateur ; il est ce qu’on appelle un simple ministre, et
ici il est évidemment impossible de trouver un fidéicommis de ce genre. La dame Capelle, donataire directe,
ne doit-elle pas garder les biens jusqu’à son décès ? ne
peut-elle pas les conserver jusque-là, tant en propriété
qu’en usufruit? la remise quelle doit faire et qu’elle
seule peut faire, puisqu’elle est saisie de la propriété,
n’est-elle pas suspendue par un événement qui est
incertain jusque dans;son existence à venir? n’y a-t-il
pas, de toute nécessité, ordre successif, puisque le sieur
Capelle ne doit recueillir qu’après elle et trait de temps,
puisqu'elle doit posséder avant lu i, posséder seule et
comme propriétaire? peut-on douter que l’intérêt de
la demoiselle de M ontlogis, Vamitié particulière que
luiportoit la donatrice, ne fût la cause finale de la dis^position? oseroit-on dire que la dame Jalinques avoit en
vue seulement, ou même principalement, l’intérêt du
sieur Capelle et non celui de sa sœur ? en vérité, lorsque
sur une telle clause, on met en doute ces conséquences
inévitables , ne ferme^t-on pas les yeux à la lumière ?
ne s’efforce-t-on pas de prouver l’existence de ce qui
u’existe nulle part, et de nier ce qui est partout?
N ’en disons pas davantage ; tenons-nous en à ces idées
simples, claires, évidentes. Eli ! pourquoi disserter lon
guement? L ’application des principes se fait d’elle-même;
8 *
�( 6o )
les conséquences viennent naturellement et sans effort.
Restons dans cette simplicité ; elle est, nous l’avons déjà
dit, compagne ordinaire de la vérité.
Concluons de là , que quand bien même la disposition
seroit modifiée par quelques termes particuliers, elle resteroit toujom*s ce qu’elle est. Ne pouvant être exécutée
que comme substitution fideicomrnissaire, elle ne sauroit
perdre cette qualité qui la constitue, qui est de son es
sence , et sans laquelle elle n’existeroit pas ; car, on le
demande, si les substitutions fidéicommissiares avoient été
inconnues ou n’avoient jamais été admises dans notre
droit ; par quel mode, par quelle fiction auroit-on pu
prétendre à la validité de cette clause et à la possibilité
de son exécution? Arrêtons-nous sur ce point ; plus on
avance et plus on est convaincu.
Passons aux objections des appelans ; ils nous reste
à y répondre, à les réfuter. Nous ne croyons pas que
cette tâche soit difficile ; c’est encore avec les principes
que nous allons le faire. Malgré le désir d’être concis,
nous serons en core o b ligés à q u elq u es développemens T
à des citations ; tou t cela est inévitable.
Deux propositions sont établies par les appelans.
i° . Il n’y a pas de substitution fidéicommissaire.
2°. Dans le doute, la disposition devroit être main
tenue.
Pour prouver la première proposition, ils en établis
sent deux autres.
i ° . Il n’y a pas charge de conserver;
29. Il n’y a pas charge de rendre.
Nous allons les examiner successivement.
;
�9,o*
( 6i )
r
•
*...•*
f
P r e m iè r e O b je c t io n . •
\
• 5t
Les motifs qui ont dicté Vabolition des substitutions
/?e se rencontrent pas dans Vespèce j la crainte des
fra u d es envers les créanciers] le but defa ir e ientrer
les biens dans le commerce.1 ' ^
°
Cet argument est bien peu de chose. Fut-il rigou
reusement vrai, que signifieroit-il ? Ces motifs principaux
peuvent avoir dicté une disposition générale; or, comme
il n’est pas de règle générale sans inconvéniens, quelque
bon ne qu’elle soit , il pourroit se faire que certaines
dispositions particulières se trouvassent comprises dans
sa prohibition, quoique leur esprit ne fût pas celui qui
a été le motif de la loi. Ainsi, quoiqu’un individu n’eût
que des idées très-légitimes, très-naturelles, en substi
tuant un de ses enfans à l’autre, sa disposition ne scroit
pas m oins nulle, p a r cela seul q u ’elle co m p ren d ro it u n e
substitution. D ’ailleurs, si le législateur a pensé que ce
mode de disposition prêtoit à la fraude et faisoit sortir
les biens du commerce, c’est parce que le grevé ni le
substitué ne peuvent en disposer librement l’un sans
l’autre, et ici cette condition se rencontre; car, et pour
qu’on n’en doute pas, elle est positivement écrite dans le
contrat; or, toutes les fois qu’une substitution fidéicommissaire étoit réduite au premier degré, et qu’après son
ouverture, les biens devoient appartenir au substitué,
dune manière absolue, et sans condition, il semble que
rien nempêchoit le grevé et le substitué de disposer
des biens, pur une volonté commune, avant l’ouverture
�S ô2)
de la substitution; ainsi, en le disant dans le contrat,
011 donnoit moins une faculté aux futurs époux, qu’on
ne leur imposoit textuellement une condition qui, d’ail
leurs, étoit propre à la substitution, et qui semble la
prouver davantage, bien loin d’en repousser l’idée.
Cette réponse fort simple a une double application ;
car elle repousse cette autre objection tirée du pouvoir
de vendre; mais n’anticipons pas, puisqu’on la repro-r
duit ailleurs. Les appelans continuent :
D e u x iè m e O b je c t io n .
On reconnaît une substitution à ses expressions et ci
ses caractères. Quoiqu’il ne soit nécessaire d’aucun
terme m arqué, dans le cas actuel, auctaie expression,
ne Yindique. On donne dans un cas à la fu tu re ,
et dans un autre cas au fu t u r ; les biens lui appar
tiendront ', est-il dit.
•*
r
Un moment: recueillons d’abord cet aveu des héri
tiers Capelle, qu’il n’est nécessaire d’aucuns termes mar
qués , et d em an d on s-leu r s’il ctoit nécessaire de s’expri
mer autrement qu’on ne l’a fait pour créer une substition. On donne à la fu tu re épouse qui accepte ; on le
fait A cause de l’amitié particulière qu'on a pour elle ;
mais si elle décède sans enfans, cette amitié n’aura plus
d’objet plus rapproché de la future que son mari; alors,
et seulement en ce cas, on dit que les biens lui appartiendront ; mais pourquoi lui appartiendront-ils ? com
ment lui parviendront-ils ? Parce quV/i lui seront remis;
et pour qu’on ne doute pas de la personne qui les lui
�I
( 63 )
remettra, on ajoute, après avoir dit cela, qu’en consé
quence on a saisi et vêtu , tant en propriété qu'en
usufruit , la demoisellefuture-épouse. Si on ne reconnoit
pas à ces expressions deux personnes qui recueillent
successivement la propriété par la remise que l’une lait
à l’autre, autant vaut dire que dans l’ancien droit aucun
terme ne peut remplacer ceux-ci: J e substitue; et alors
il ne faudroit pas convenir qu’il n’y avoit pas de ternies
marqués.
O n con tin u e en ;irefusant de v o ir dans la clause les
caractères de la su b stitu tio n , et ici l’objection se sub
divise.
T r o is iè m e O b je c t io n .
I l ri y a pas charge de conserver,
z°. Parce q u i l y a pouvoir indéfini d'aliéner;
2.°. P a rc e qu’on ne chargeoit de remettre que les biens
QUI r e s t e r o n t d e c e u x
c i-d e ssu s d o n n é s
.
Nous allons répondre, après avoir observé, cependant,
qu’il seroit difficile en général de refuser les caractères
de la substitution à une clause qui la marque évidem
ment par ses expressions. A u reste, parcourons les détails
de cette objection.
La permission de vendre étoit nécessaire ici ; elle étoit
au moins utile. Elle étoit doublement stipulée au contrat ;
d abord, pour les biens dotaux en général ; 20. pour
les biens donnés et substitués par la dame Jalinques en
particulier. Or f cette faculté n’empêchoit pas plus les
biens donnés par la dame Jalinques d’être substitués
�A C6 4
)
qu’elle rn’empêchoit d’être dotaux les autres biens de la
dame Capelle. L'exception admise par suite des circons
tances, et de la position des parties, ne changeoit, ni les
caractères de la constitution de l’épouse, ni ceux de la
donation de sa sœur. Les conditions, les règles attachées
à la dotalité et à la substitution, suivoient l’effet de cette
exception et en étoient inséparables, et la permission
d’aliéner des biens substitués ne change pas plus leur
caractère que celle d’aliéner les biens dotaux n’empêche
les deniers d’être dotaux comme l’immeuble lui-même.
Les inconvéniens qui peuvent en résulter par événe
ment ne changent rien au principe des choses. Quelquefois,
pour les biens dotaux, le pouvoir est donné indéfini
ment, et alors il y a danger pour la femme; quelque
fois il y a charge d’emploi ,%et le danger est bien moins
grand ; quelquefois le pouvoir n’est réseryé qu’avec Je
consentement de la femme et à la charge de reconnoîlre ;
et, dans tous les cas, les biens acquis en remploi, ou
les deniers eux-mêmes, çonsei’v e n t le caractère de l’iin*
m eu b le. Il fau d ro it en dii*e autant des biens substitués,
lorsque surtout la permission d’aliéner n’est donnée au
mari substitué qu’avec le consentement de Vépouse, do
nataire grevée, et à la charge de reconnoître.
Mais réduisons-nous à une observation très-simple;
elle résulte du, fait...La dame JalinqUes imposant des
charges à sa libéralité , et le sieur Capelle ne voulant
exposer, ni ses propres biens, ni son aisance personnelle
pour payer les dettes d’autrui, la donataire devoit donner
la liberté de vendre pour payer et les dettes et sa ré
serve ;
�C (Ï5 -0
serve; elle le fait, et aussi, voulant substituer le sieur
Capelle, elle charge seulement de lui remettre les biens
qui resteront de ceux ci-dessus donnés. Il sembleroit
assez évident que la dame Jalinques neut d’autre but
que celui d’autoriser la vente pour satisfaire aux charges,
et de laisser tout le l'este dans la donation grevée de subs
titution; car elle n’autorise la dame Jalinques à disposer
que de 3,000 livres seulement, preuve qu’elle la lioit
pour tout le reste ; mais nous donnerons à choisir aux
héritiers Capelle de l’une des deux interprétations qu’on
peut donner à cette clause; où la faculté d’aliéner, c’està-dire, de disposer, étoit indéfinie et n’obligeoit à resti
tuer au sieur Capelle que ce qu’il plairoit à la dona
trice de conserver, et alors n’étant gênée par rien,
elle a pu librement disposer au profit de son second
m ari, comme au bénéfice de tout autre ; ou cette faculté
rentroit dans la classe de ce qu’on appeloit autrefois fidéicom m is de eo quod supererit, et il y avoit substitution.
Ce doit être une chose ou l’autre.
Tout doux, disent les héritiers Capelle, page 28; la
première partie de l’objection n’est qu’une équivoque;
la dame Capelle 11 étoit pas propriétaire absolue ; elle
n’avoit qu'un droit subordonné à un événement, et
cet événement étoit Vexistence d'enfans nés de son
premier mariage. Propriétaire dans un cas , elle pour
voit disposer à son g ré; non propriétaire dans le cas
contraire, elle navoit pas qualité pour en gratifier
qui que ce soit.
A notre tour, nous ferons remarquer que c’est là que
se trouve 1 équivoque; nous le prouverons sans réplique,
9
�( 6 6 ) .
,
lorsque nous examinerons la différence qui existe entre
les substitutions et les simples conditions qui ne vicient
pas une donation; mais, en attendant, nous devons ré
péter que la dame Capelle étoit donataire de la propriété
comme de l’usufruit, et que cet événement qui paroît
si peu intéressant aux sieurs Capelle, étoit celui de sa
mort et de sa mort sans enfa n s , cas seulement auquel
elle devoit remettre, après avoir néanmoins possédé jus
que-là en propriété.
Pour ne rien laisser à désirer sur ce point de ce
qu'il est nécessaire de dire en ce lieu, nous reviendrons
sur ce que nous avons indiqué ci-dessus, page 47, d’après
IVI. Toullier, sur la substitution conditionnelle.
Il faut bien distinguer, en effet, la condition mise
à la donation de celle qui est mise seulement à la
substitution.
Si la dame Jalinques après avoir simplement donné
à la dame Capelle , eût dit : à sa mort les biens se
ront remis au futur époux, personne n'élèveroit de
doute sur la substitution 5 car il y iiuroit évidemment
don de propriété, charge de conserver jusqu’à la mort
et de remettre à la m ort; mais la substitution seroit
pure et simple.
T^a condition apposée : s 'il n existe pas d’enfan s ,
change-t-elle quelque chose aux caractères de la donation?
Non certes. La charge de remettre et de remettre à la mort
est 11 seule chose qui modifie la donation; mais ensuite cette
stipulation est, elle-même , modifiée par une condition :
la charge de remettre la subsitutioxi ne sera pas indé-
�7
(¿ )
finie; elle ne sera pas pure et simple, mais conditionnelle.
A in si, que cette substitution ait ou non son effet,
la future sera propriétaire; elle le sera jusqu’à sa mort;
car , nonobstant la condition déjà apposée de cette re
mise, on l’a vêtue et saisie, tant en propriété qu’en usu
fruit. S’il y a des enfans à sa mort, la propriété lui.
restera d’une manière absolue. Si elle n’en a pas, cette
propriété passera, sera remise, au. futur époux; c’està - dire, que le sieur Capelle sera substitué dans un
cas; qu’il ne le sera pas dans l’autre; mais toujours
la donation directe restera parfaite en propriété, sauf la
remise en cas d’événement.
Cette explication nous paroît un peu plus juste, un
peu plus conforme à l’acte, que celle des héritiers Capelle.
E h ! comment, d’ailleurs, pourroient-ils s’accorder avec
eux-mêmes ; ils veulent que la charge de rem ettre ne
çoit ici q u ’une condition sim ple ; o r , comment une
simple condition pourroit-elle devenir elle-même con
ditionnelle; être elle-même chargée d’une autre condition?
Ne jouons pas sur les termes, et reconnoissons que ce mot
qu’on neveut pas dire, cette chose qu’on ne veut pas v o ir,
c’estune substitution qui aura lieu dans un cas, n’aura pas
lieu dans un autre , qui sera conditionnelle, et q u i,
sauf l’événement de la condition, grevera, dans tous
les cas, la propriété dans les mains du donataire.
En sorte que s’il y a des enfans, rien ne gênera le
libre exercice de la propriété dans les mains de la dame
Capelle, et la donation faite au sieur Nouveau sera
valable ; s’il n’y en a pas, l’obligatiou de remettre,
9 *
�( 68 )
........................................
lui arrachera à sa mort la propriété qui aura jusque-là
résidé sur sa tête. Voilà le résultat primitif; niais par
l’effet de l’abolition des substitutions, la donation faite au
sieur Nouveau sera valable dans les deux cas.
Les héritiers Capelle se défendent plus mal encore
sur la seconde hypothèse de la substitution de eo quod
si/pererit ■ suivant eux , elle r?étoit considérée comme
fideicommissaire , qu’autant que le pouvoir d'aliéner
étoit restreint.
E t d’ailleurs, il faut appliquer ici la législation nou
velle qui n’abolit pas cette espèce de substitution ; les
auteurs et la jurisprudence sont d’accord là-dessus, et on
cite M. Toullier, M. Grenier.
Une erreur de droit et une mauvaise application des
plus saines autorités composent tout cet argument.
Qu’on ouvre tous les auteurs sur ce genre de substi
tution : Thévenot d'Essaules , ch. 22; M. Merlin , sec. io r
§. 9 ; M. Roland de Villargues, ch. 14 ; M. Toullierr
M. Grenier lui - même qui n’en dit qu’un mot, et on
c o n v ie n d ra
que cette disposition étoit to u jo u rs, de sa na~
tare, considérée comme restreinte; qu’au moins le grevé
devoit conserver la quarte ; que si quelquefois on lui permettoit de l'entamer, c’étoit par des considérations par
ticulières, mais que cela n’empêchoit pas qu’il y eût
substitution. Ce n’étoit donc pas, lorsque le pouvoir
d'aliéner étoit restreint par l’acte même qu’on refusoit
d’y reconnoitre la substitution, mais c’étoit, au contraire,
par la nature de l’acte et la nécessité d’y voir une subs
titution qu’on regardoit de droit la faculté comme res
treinte , et qu’on exigeoit du grevé qu’il conservât quel
que chose.
�f
6
9
E t, encore une fois, si, dans l’espèce, la faculté avoit été
tellement illimitée, que la dame Capelle ny eût pas
éprouvé la moindre gêne, sa disposition envers le sieur
Nouveau seroit bonne et valable.
Quant à l’application qu’on veut faire du Code civil,
des auteurs et d’un arrêt de Bruxelles ( pag. 30 ), qui au
jourd’hui ne regardent pas cette clause comme line subs
titution réelle, que les héritiers Capelle lisent'encore,
et ils y verront ce motif que le Code ayant pro
hibé les substitutions, il ne faut en voir que la où on
y sera forcé par les termes ou les caractères de la dis
position, et qu’on ne doit pas voir Vobligation de con
server dans une disposition de ce genre ; mais tous reconnoissent que sous les anciens principes cela opéroit substitution. M. Grenier, en le disant sur l’arrêt de
1809, ajoute : « c e q u i p e u t s e u l j u s t i f i e r l ’a r r ê t ,
« c est que sous une législation telle que celle qu i ré«usiilte de Varticle 896 du Code
on doit se tenir
« à cette législation, sans avoir égard, au moins sur
« ce point, aux lois romaines dont le génie étoit de
« favoriser et détendre les substitutions.» Voilà ce que
dit ce profond jurisconsulte , en approuvant l'arrét.
Cette autorité en vaut bien une autre, et nous n’avons
pas besoin de nous'étayer des opinions contraires, dont
on convient ( page 31 ), même sous l’empire du Code
civil, car nous ne sommes pas sous le'Code pour la ques
tion qui nous divise.
Enfin, on se résume sur ce point ( page 34 ) , en
disant qu’il ne ^peut y avoir substitution là où celui
�\ r\
«/>
( 7° )
qu’on indique comme substitué a pu être, privé de tous
les biens.
E t ici nous répétons deux choses :
i°. De tout ce qu’on vient de dire, il résulte que
le substitué n’a pas pu être privé par la seule volonté
du g revé, puisque le consentement, le concours du subs
titué étoit nécessaire pour vendre ; donc il ne pouvoit
être privé des biens que par sa volonté propre; donc le
donataire étoit chargé de conserver,
2°. Cela est tellement vrai que cette obligation de
conserver est le seul titre des héritiers Gapelle ; car
de quoi se plaignent-ils? De ce que la dame Nouveau
n’a pas c o n s e rv é , de ce qu’elle a disposé à leur préjudice;
la faculté d’aliéner étoit donc limitée, suivant eux-mêmes,
ou bien, si elle étoit illimitée, ils' n’ont plus de titre pour
se plaindre. Les appelans ont beau se débattre, appeler
à leur secours toute leur logique et celle de la famille de
Montlogis; elle ne sauvera pas leur argument des con-r
séquences de ce dilemme.
Qu atrièm e Objectio n ,
I l rfy a pas charge de rendre à un tiers.
Nous devrions avoir peu de chose à répondre ici, car
nous ne pouvons pas avoir prouvé qu’il y avoit charge
de conserver et de conserver jusqu’à la iiiort, sans qu’il
en résulte la charge de rendre. Onne peut conserver
que pour l’intérêt d’un autre , et cet intérêt ne peut
consister que dans la remise des biens; si autrefois la
�( I1 )
Charge de rendre supposoit celle de conserver, l’obligation de conserver1emportoit à plus forte raison celle
de rendre, surtout lorsqu’une autre personne étoit nom
mée pour recevoir à l’époque de la remise.
Les appelans ne se sont pas dissimulés la force de
cette Conséquence ; aussi ont - ils tâché de prouver qu’il
n’y avoit pas charge de conserver, et prétendant l’avoir
fait, ils disent, page 34 , qu’en Vabsence de ce carac
tère principal, il importerait peu que des caractères
1noms importans fussent reconnus dans la clause dont
il s’agit. A notre tour nous dirons, avec bien plus d’avantaSej qu’après avoir aussi clairement prouvé que la charge
de conserver se trouve dans la donation, il seroit fort
indifférent qu’on n’y eût pas écrit des conditions moins
importantes, parce que ce caractère principal q u i,
d’après eux, constitue l’essence des substitutions, suffit
et en traîn e tous les autres
Mais cela ne suffit pas aux appelans; abondans en idées
plus ou moins subtiles, ils nous forcent encore à discuter.
La charge de rendre, disent-ils, doit exister au profit d’un
tiers ; or, ce tiers doit être une personne non présente
à Vacte de libéralité. X-e sieur Capelle n’étoit pas un
tiers ; c’étoit une partie contractante.
Cette proposition tendrait à établir qu’on ne pouvoit
jamais, dans un contrat de mariage, faire une donation
directe à l’un des époux et substituer l'autre, et qu’on
ne peut davantage user d’un semblable mode dans aucun
ac te entre-vifs. Cela seul sullit pour démontrer q u ’elle
repose sur une erreur.
Un tiers, une tierce personne, est celle qui est étran-
�( 72 )
gère à la chose dont on s’occupe, ù la disposition qu'on
fait, qu’elle y soit ou non présente. Ainsi, un individu
qui est institué ou légataire par un testament, n’est pas
un tiers, parce que la disposition l'intéresse quoiqu’il
n’y soit point partie. Si une autre personne lui est subs
tituée, cette personne devient un tiers, non par cette
raison qu’elle n’est pas partie dans l’acte, mais parce
qu’clle est étrangère à la disposition principale, parce
qu’elle est tiers , respectivement à l’institué.
De même , si un seul contrat renferme plusieurs
dispositions en faveur de diverses personnes, chacune
d’elles, quoique partie dans l’acte, est un tiers respec
tivement à la disposition qui n’est pas faite à son profit.
Ainsi, on peut n’être pas partie dans un acte, et
cependant n’être pas étranger à ses dispositions; on peut
y être partie et demeurer étranger à quelque disposition,
être tiers respectivement à cette disposition et à ceux
qu’elle concerne.
C’est ce qui arrive dans le cas présent, et ce qui se
prouve par les principes m êm es q u e nous avons établis.
Si la donation est conjointe, simultanée, elle concerné
directement le sieur Capelle, et alors, pas de difficultés.
Si elle n’a pas ce caractère ; qu’il y ait deux dispositions
successives, et que le sieur Capelle ne soit appelé que
par la seconde , il est étranger à la donation directe;
il est un tiers respectivement au donataire, et cette
conséquence nous donne la satisfaction que toujours,
et dans tous les cas, nous revenons au même principe.
Que voulez-vous dire, s’écrient les appelans? ne
scmblç-t-il pas que le sieur Capelle n’est dans cet acte
qu’une
�73
C )
qu’une partie accidentelle? qu’il s’y trouve comme par
hasard? Cependant il en est la partie principale. C’est
le futur époux ; c’est en faveur du mariage que sont
faites toutes les libéralités qu'on lit dans le contrat; c’est
en cette qualité qu’on lui attribue la propriété des biens
donnés, s’il n’y a pas d’enfans; cela n’est-il pas irréfragable?
( page 37 )
Il n’est encore pas difficile de répondre.
Certes oui, le sieur Capelle est partie principale dans
le contrat de mariage; car tout le monde sait que pour
se marier il faut'être deux, et qu’au contrat de mariage
les deux futurs époux sont les deux personnes dont on
peut se passer le moins. Ainsi, dans l’espèce, on ne
pouvoit, ni passer le contrat, ni stipuler les conditions
qui étoient de son essence, sans la présence du sieur
Capelle; mais, on le demande, tout cela ne pouvoit-il pas
être sans que la dame Jalinques intervînt pour faire
une donation?
Elle est intervenue, dit-on, et cette circonstance,
comme les autres, a été une condition du mariage.
Très-bien: nous ne contesterons pas non plus que
tout ce qui est écrit au contrat ne soit fait en contem
plation du mariage; mais n’oublions pas que nous no
sommes encore occupés qu’à rechercher si le sieur Capelle
eut ou non partie directe dans la donation. O r, la
demoiselle de Montlogis, en intervenant pour donner
son bien, étoit maîtresse, sans doute, de le donner à
qui elle voudroit, et seulement à qui il lui plairoit; elle
pouvoit imposer des conditions, et en les acceptant, on
étoit obligé de s’y soumettre. Vous conviendrez bien dq
ïQ
�ilA)
cela, héritiers Capelle! il faut le penser pour votre
honneur.
Si cçla est, vous conviendrez bien nuçsi que dans un
contrat de mariage où votre père étoit une forte inté
ressante partie, la dame Jalinques pouvoit ne pas du
tout s’occuper de lui, donner à sa sœur pour' Vamitié
particulière qu'elle lu i portoit, et vouloir donner à
elle seule; qu’elle pouvoit stipuler que les biens donnés
seroient dotaux, ou les laisser tomber dans la stipulation
générale de dotalité, mais sans donner pouvoir au futur
de les aliéner, ni s’occuper de lui pas plus que s’il
n'eût pas existé. Auriez-vous osé dire, en ce cas, que
votre père avoit sur ses biens des droits de propriété ?
qu’il étoit donataire direct? qu’en un mot, parce qu’il
étoit le futur époux, il étoit partie essentielle dans la
donation, où on n’avoit pas le moindre besoin de lui pas
même pour autoriser l’acceptation? Il faut croire que vous
n'irez pas jusque-là ; vous auriez dit que comme mari,
il avoit droit de jouir des biens donnés comme des autres
biens dotaux, mais vous auriez a v o u e , sans d o u te , qu’il
n’étoit pas partie dans la donation, quoique partie au
con trat. Très-bien: avançons un peu plus.
Vous conviendrez bien encore que la dame Jalinques
pouvoit stipuler que les biens donnés seroient parapliernaux; que la future en jouiroit exclusivement à son
mari, et sans s’inquiéter de sa puissance ni de son
autorité. Si cela étoit écrit dans le contrat, diriez-vous
que le sieur Capelle, partie contractante, futur époux
9*ns la présence duquel la future épouse auroit été fort
�c ? 5 )
embarrassée de stipuler un. contrat de mariage, étoit.
néamoins partie directe et nécessaire dans la donation?
Quelle chimère, dites-vous ; le mariage ne se seroit
pas fait, car la double donation en étoit une des con
ditions.
?
Un instant, sieur Capelle! ce n’est pas là la question
qu’on vous fait. Mariage ou non , condition acceptée
ou non, dites-nous ce que vous auriez à répondre, si
cette clause étoit écrite dans le contrat, et qu’alors votre
père qui y contractait l’eût trouvée bonne. Vous
avoueriez, n’est-ce pas, que votre père, quoique partie
au contrat, étoit fort étranger à la donation; qu’elle
ne le regardoit pas du tout, et qu’il étoit bien certaine
ment une tierce personne respectivement à la dame
Jalinques et aux biens qu’elle donnoit à un autre, à
son épouse , si vous le voulez, mais en lui défendant d’y
toucher, môme pour en jouir. Il faut bien avouer cela
ou se taire. Très-bien encore ; faisons un pas de plus et
raprochons-nous du fait réel de la cause.
Si la dame Jalinques, adoucissant un peu sa sévérité >
eût jeté un coup d’œil secondaire sur le futur époux,
votre père, et, sans se départir dz l ’amitié particulière
qu'elle portoit à sa sœur, eût dit formellement : « Je
« veux qu’en cas de décès sans enfans ( ou même à son
* décès), ses héritiers soient chargés de rendre les biens
« ci-dessus dojmés au sieur Capelle, futur époux, ou à
« ses héritiers en cas de prédécès, lesquels je substitue »
( ou même sans ajouter ces derniers mots ) ; diriez vous
que, parce que le sieur Capelle étoit partie contractante,
qud étoit iutur époux, il n’y avoit pas charge de con*
io *
�. c7 6 }
server, et qu’il n’y avoit pas charge de conserver, parce
que la charge de rendre n’étoit pas stipulée pour un tiers,
attendu que le futur époux ne sauroit être tiers dans
un acte si intéressant pour lui ? ne penseriez - vous
pas plutôt que cela démontre que votre interprétation
du mot tiers est déplorable ? qu’on doit prendre les li
béralités pour ce qu’elles sont, et qu’il faut être fou pour
vouloir être donataire direct lorsqu’on est si évidem
ment et si clairement substitué? et cela ne vous conduiroit-il pas par hasard à penser, et ne vous obligeroit-il
pas à reconnoître que si les expressions pouvoient être
moins claires, l’intention moins positive, ce ne seroit
pas parce que le substitué ou prétendu tel seroit partie
au contrat comme fu tu r époux qu’il faudroit refuser de
voir une substitution là où elle se trouve réellement ?
faire une donation directe, principale, d’un fidéicommis
conditionnel ? mettre un individu dans la vocation au
premier dégré, lorsqu’il n’est appelé qu’en second ordre ?
enfin, dénaturer une libéralité, parce qu’elle est écrite
dans un con trat de m a ria g e , et que le futur époux veut
qu’elle soit autre qu’elle n’est? ne penseriez-vous pas,
d’ailleurs, au moins à part vous, si vous ne vouliez pas
en convenir, qu’on a formellement imprimé au sieur
Capelle la qualité de tiers, d’étranger à la donation et
à la propriété actuelle des biens, en disant que les
biens lu i seront remis si la future décède sans enfans,
et en ajoutant immédiatement, qu'en conséquence on
investit et saisit, tant en propriété qu’en usufruit, la
demoiselle fu tu re épouse. Dites-nous, s’il vous plaît,
ce que c’est que cette conséquence..........de saisir. . • »
�( 77 )
de la propriété........... la fu tu re épouse, si c’est à son
futur époux qu’on vient de donner directement, et ac
tuellement, sauf l’événement d’une condition ? E t vous
qui prétendez que votre père avoit dicté la condition
dans son intérêt, ce qui suppose qu’il avoit médité ses
stipulations, dites-nous comment il avoit trouvé que l’un
étoit la conséquence de l’autre ; nous aurions grand
besoin que votre logique où celle des héritiers de Montlogis nous forçât de voir dans un acte le contraire de
ce qui y est écrit, lorsque tout nous ramène sans cesse
à reconnoître que, tiers ou non, c’est l’esprit et les termes
de la clause qu’il faut considérer.........Répondez donc.
Quelle perfidie ! semblent dire les héritiers Capelle ;
depuis quand^ est-il permis de mettre ainsi les gens à
la question? et pourquoi, sieur Valentin, ne voulezvous pas voir que cette libéralité conditionnelle n'étoit
pas fa ite à titra gratuit ; quelle étoit le prix des sa
crifices considérables qu'on imposoit au sieur Capelle
et auxquels il s'oblige oit..............enfin, qu'en se sou
mettant à ces obligations y il stipuloit par réciprocité
ses propres intérêts, car dans tout acte synallagmatique, et surtout dans un contrat de m ariage, toutes
les clauses sont réputées corrélatives et être la condition .
les unes des autres ( page 38 )?
Un moment : nous répondrons à votre réciprocité ;
mais nous ne sommes pas obligés de satisfaire votre
impatience , et il faut bien vous observer , en pas
sant , que tout cela est inutile pour savoir ce que c’est
quun tiers respectivement ù un donateur et à une
donation; que cela ne change rien à la question, sous
�.
(
7
8
\
ce rapport, et ne sauroit aiToiblir les argumens que nous
venons de vous faire ; mais si vous croyez avoir un besoin
indispensable de cette nouvelle tirade pour fortifier l’ar
gument, nous allons vous répondre encore. Déjà tout
ce que nous venons de dire y suifiroit. N’en résulte-t-il
pas, en effet, que quelles que soient les circonstances
qui entourent l’acte, c’est la clause qu’il faut voir?
jfitout cela étoit écrit dans le contrat, à côté de la sti
pulation de substitution, telle que nous venons de la
supposer en termes exprès, y seroit-elle moins écrite?
en seroit-elle moins supprimée par la loi? et ne nous
est-il pas permis de dire encore que si on trouvoit les
termes moins positifs (et certes ils le sont assez ), il n’en
faudroit pas moins voir la clause telle qu’elle est, parce
que tout cela n’est pas exclusif de substitution? ne sommes
nous pas autorisés à dire que si la stipulation appartenoit
au sieur Capelle, si elle avoit été dictée p a r lu i, comme
maître de ses conditions, à titre de réciprocité, elle
n’en devient alors que plus claire, puisque c’est lui qui
n’a pas dem andé q u ’on le saisit de la propriété, et qui
n’a pas voulu qu’on apportât la moindre modification
à cette transmission de propriété, à la saisine de la
fu tu re jusqu’au moment de sa mort ? et si cette clause
étoit aussi obscure qu’elle est claire, ne seroit-ce pas
contre lui qui prétend l'avoir stipulée, l’avoir dictée,
que se feroit l’interprétation ?
Au reste, nous avons déjà répondu en fait à ces pré
tendus sacrifices, à ces obligations si considérables; ils
ont disparu comme une fumée ; il fie nous reste qu’à
ajouter un mot.
�79
C
)
Les obligations du sieur Capelle se rattachent bien
plutôt, nous l’avons dit, à sa qualité de mari, à la cir
constance qu’on lui livroit des biens considérables, no
tamment des effets mobiliers dont lui seul avoit la libre
disposition, non comme donataire, mais par la seule
qualité de mari.
Mais la meilleure preuve qu'on ne lui imposoit aucun
sacrifice personnel, qu’il ne contractoit aucune obligation
sur ses biens propres, résulte de cette permission de
vendre, que sans doute il avoit exigée pour ne pas
compromettre ses propres biens ; faculté qui le mettoit
(.VrtYftant plus à l’abri, qu’elle étoit plus illimitée, puis
qu’il pouvoit en user sans mesure. Voilà la clause réelle
qu’il avoit stipulée comme condition de son engagement
personnel, mais non une donation personnelle , qu’en ce
cas il n’auroit pas oublié de faire écrire. Ainsi, il est évident
qu’il ne contractoit aucune obligation qui mît en danger
ses propres biens et lui imposât des sacrifices personnels.
Au reste, l’événement l’a justifié, puisqu’il n’a rien
vendu pour payer, pas même partie des biens donnés.
Il est vrai qu’il n’avoit pas acquitté les charges, si ce
n’est une modique somme en assignats, ne valant pas ce
qu’il avoit touché ; le sieur Nouveau lui-même n’a rien
vendu des biens compris en la donation, et il a tout payé
en numéraire. Où étoit donc ce chimérique danger, puis
qu’on n’a pas même eu besoin de la ressource qu’on s’étoit
réservée?
Enfin, la sentence de 1790 vient mettre le comble
à ces preuves. Le sieur Capelle répudioit pour son
compte; son épouse ne répudioit pas. La sentence le
�( 80 )
condamne à exécuter les charges de la donation, faute
de quoi la déclare révoquée. Certes, si elle étoit si
onéreuse pour lui, il avoit un fort bon moyen de mettre
ses biens à l’abri. Jusque-là il ne lui en avoit pas
coûté une obole, puisqu’ayant joui des biens et tou
ché 4,000 livres des créances, il étoit encore en arrière
de 9,600 livres sur les intérêts, lors du traité qui
suivit cette sentence. Il savoit pour combien il pouvoit en
être quitte. Il n’avoit qu’à laisser écouler trois mois, et la
donation étoit révoquée de droit, sans même qu’il y
eût de dommages-intérêts contre lui; certes, la chance
n’étoitpas périlleuse. Que fit-il? Ne pouvant pas ret 1« »
les biens sans être personnellement obligé à remplir
les chai*ges, il p ré fé ra garder les biens et s’exposer à
payer; preuve évidente qu’il y voyoit du bénéfice et
non de la perte; des bénéfices actuels pour son épouse,
et pour lui comme mari, et des bénéfices possibles dans
l’avenir, pour lui -personnellement; preuve encore, et
preuve sans réplique, que s’il se fût cru donataire
direct, il n’eût pas fait ce procès; car il auroit eu
p erso n n ellem en t le bénéfice qui appartenoit à son épouse,
et s’il crut, après la sentence, que la considération de
ce bénéfice devoit le décider à garder la donation,
quoiqu’elle n’appartînt qu'à son épouse, il se fût bien
gardé auparavant de répudier lui-même, s’il eût pensé
être donataire direct.
Les héritiers Capelle ne s’arrêtent pas là ; prenez
donc garde , nous disent-ils encore ( page 38 ) ,
qu'il est de l’essence même de la subtitution , qu'elle
g’éteigne par le prédéçès du substitué, et qu’il n'en
transmet
�(Sx ) _
transmet pas le droit à ses héritiers; or, ici le sieur
Capelle stipule non-seulement pour lu i, mais encore
pour' ses héritiers ; cette circonstance, comme les deux
précédentes, n’écarte-t-elle pas toute idée de substitution.
E t nous aussi, nous le dirons: faites attention; voyez
que vous intervertissez le principe.
Il est très-certain qu’il est dans la nature de la substi
tution qu’elle ne passe pas aux héritiers du substitué
lorsqu’il prédécède.
E t nous ne craignons pas de dire que si on ne trouvoit
pas dans le contrat de 1786 ces expressions formelles,
en cas de prédécès , à ses héritiers ou à celui d’entr’eux
q u 'il aura choisi, les héritiers du sieur Capelle n’auroient
eu aucun droit à la disposition; parce que, de sa nature,
elle ne leur étoit pas transmissible; parce que la condition
de remettre, qui ne prenoit eiFet qu’à l’époque fixée,
étoit purement personnelle à l’appelé.
A la vérité,les héritiers Capelle auroient pu parvenir
à se faire adjuger les biens, s’ils eussent pu d’abord faire
juger que leur père étoit donataire direct; mais leur
saisine auroit été seulement la conséquence de cette
décision, bien loin d’en être l’antécédant; évidemment
les appelans prennent ici la conséquence pour le principe.
Nous pouvons supposer en passant que l’événement
prévu ( de la mort sans enfans) fût arrivé avant l’abolition
des substitutions, et que les enfans Capelle eussent, de
leur chef, demandé la délivrance des biens comme dona-”
taires directs, et quoique cela ne change pas la question,
nous demanderons si cette1 prétention, à cette époque,
eut paru autre chose qu’une absurdité ; il faut cependant
11
�C 8 â )
la voir sous ce point de vue pour la bien apprécier;
car on n’auroit pas pu dire alors que Féxistence de
la substitution tendant à détruire l’acte, il falloit tout
voir favorablement pour le sieur Capelle.
Au reste, nous irons plus loin, et de cela seul que
la dame Jalinques s’est vue obligée d’appeler les héritiers
du sieur Capelle, en cas de prédécès, nous concluons
qu’elle n’a fait qu’une véritable substitution; car, sans
cela, il eût été inutile de les appeler.
Or donc, s’ils ont eu quelques droits, ils résultent
non de la loi ni de la nature de la stipulation, mais
de la vocation expresse de leur personne. La dame
Jalinques n’a pas voulu faire plusieurs d egrés de substi
tution , mais elle a voulu que si le père ne recueilloit .
pas le bénéfice de la substitution, il appartînt à ses
enfans; on pourrait dire que c’est une espèce de substitu
tion vulgaire ajoutée à une substitution fidéicommissaire;,
stipulation qui, pas plus que la faculté d’élire, n’étoit pas
insolite dans les substitutions ; car, encore une fois, une
substitution p o u v o it être c o n d itio n n e lle ; elle pouvoit
être modifiée par toutes conditions licites, qui seulement
ne prenoient effet que par l’ouverture de la substitution,
elle-même.
Nous nous arrêterions ici ; nous croirions pouvoir et
devoir le faire, si les appelans ne revenoient, en cet
endroit, à leur moyen principal tiré de la différence
qui existe entre une donation purement conditionnelle
et une substitution, et si nous n’avions pris l’engage
ment de détruire de fond en comble le système qu’il»
te sont créé sur ce point. L ’examen plus particulier de
�( 83 )
de cette difficulté qu’en effet nous n’avons qu’efileurée,
allongera nécessairement une discussion déjà fort éten
due ; mais nous ne devons rien négliger sur la partie
essentielle d’une cause d’un aussi grand intérêt ; car la
fortune des intimés y est attachée toute entière. Au
reste, nous laisserons parler les auteurs, et nous ne dis
cuterons que pour soutenir l’attention et lier entr’elles
les diverses citations qui nous seront nécessaires.
Nous pourrions, sans aucun danger, nous placer dans
l’espèce d’une simple disposition conditionnelle, et ne
pas chercher, dans les principes des substitutions, des rè
gles qu’on soutient à tort n’être pas applicables ; la cause
des appelans n’en seroit pas meilleure.
Ce n’est pas tout, en effet, que de placer en avant
le mot condition , pour le mettre en opposition avec celui
substitution , et de partir de là pour en faire toujours,
et dans tous les cas , des choses différentes dans leur prin
cipe et dans leurs effets. La première de toutes les
conditions, pour raisonner juste en cette matière, est
de commencer par bien définir ce que c’est qu’une con
dition , et de savoir si, parmi les diverses espèces qu’il
en faut reconnoître, celle qui est apposée à la donation
faite'à la dame Capelle ne dégénère pas en substitution.
Consultons Furgole(des testamens, ch. 7,sect. 2 ,n ° . 12);
il fait une grande différence eptre les conditions sus
pensives et résolutoires.
« La condition suspensive, dit-il, est celle qui fait dé« pendre l’effet et la validité de la disposition d’un évé« nement à venir ; c'est ce que les lois appellent prov prement condition, et la résolutive est celle qui ne
M *
�« suspend et n’empêche point l’effet et l’exécution de la
« disposition, mais qui la résout et l’anéantit diins le cas
a de quelqu’événement à venir. La condition négative,
« la charge et le mode, quand il est fondé sur une cause
« finale, produisent l'effet de résoudre et d’anéantir les
« dispositions auxquelles ils sont attachés;»
Cette distinction est certaine, et il est fort important
de ne pas s’en écarter.
E n effet, si en faisant une libéralité à un individu,
on y met cette condition négative qu’il ne fera pas telle
chose, le donataire accomplit la condition tant qu'il ne
la viole pas ; il est, dès lo rs, investi du legs dès le moment
où l’acte commence d’avoir son effet, et si, par la suite,,
il viole la condition, cette circonstance résout dans ses
mains la donation, et il doit rendre et la chose et les
fruits.
S i, au contraire, la condition est affirmative, je lui
donne , s’il fa it telle chose , ou si telle chose a rriv e ,,
il faut accomplir la charge pour pouvoir demander la
délivrance; alors la donation est suspensive, et il ne faut
pas oublier ce mot de Furgole, que c’est ce que les lois
appellent proprement condition.
Or,, si nous examinons la condition dont il s’agit, en
supposant deux donations directes faites à la dame Capello et à son m ari, nous ne pouvons douter qu’elle
réunit ces deux qualités, suivant la personne à laquelle
on veut l’appliquer..
I,a considère-t-on respectivement à la dame Capelle,
donataire en premier ordre? Elle est évidemment né
gative: si elle ne meut tpas sans errfans. La donataire, saisie
�C 85 3
à l’instant même, est propriétaire jusqu’au moment ou
elle m ou rra sans enfans du inarige ; mais, si ce cas aï-rive,
la donation est résolue.
S i, au contraire, on la considère respectivement à la
donation supposée faite au sieur Cappelle, elle est évi
demment affirmative : si la fu tu re meurt sans enfans
du m ariage, alors, comme la donation faite au mari ne
doit avoir lieu qu’au seul cas où l’événement arrivera,
la condition est suspensive, non-seulement de l’exécu-^
tion, mais encore de l’effet de la disposition.
Notre supposition de deux donations directes est
assurément bien gratuite ; car la preuve que nous ne
sommes pas ici dans le même cas, se tire tout à la fois
des termes de la clause et de la nature de la disposition
qui est successive ; d’ailleurs , si ce cas existait , la
donation faite à la dame Capelle, et simplement sus
ceptible de résolution, n’auroit pu a vo ir son effet qu’à
la charge de donner la caution que le droit romain appeloit mucienne ; et la résolution venant, elle auroit été
obligée de rendre la chose et les fr u it s , parce que, dans
ce ca sce lles des deux donations qui doit subsister dé
finitivement, a son effet ab initio , comme donation
directe et actuelle. Mais ici ce mode d’exécution étolt
impossible , parce que la dame Capelle n'avoit été
chargée de remettre qità sa mort ; aussi n’a - 1 - on
jamais osé lui demander la restitution des fruits ; preuve
évidente qu’il ne s’agit pas de deux donations di—
lectes, prcmnt effet en même, temps, quoique sous
une condition résolutoire ou suspensive , mais biendune substitution qui n’oblige de rendre qu’à Tévé-
�8 5 }
nement du décès , sans (restitution
de fruits et voilà
que tout en consentant à chercher dans l’acte deux dona
tions conditionnelles, nous nous retrouvons toujours sur
le terrain des substitutions.
A u reste, Roland de Yillargues va nous l’expliquer
clairement, n°. 49, bis.
« La substitution prohibée suppose essentiellement le
« concours ou l’existence de deux donations ou deux
« libéralités, dont l’une, qu’on peut appeler principale,
« faite pour avoir lieu jusqu’à un certain temps ( la
« mort du prem ier donataire avant celle du second ), est
« résoluble dans le cas où la condition sous laquelle la
« seconde donation est faite vient à échoir; dont l’autre,
« la seconde, faite sous la forme d'une disposition mo« d a le , et pour n’avoir son effet qu’après un certain
« temps ( le prédécès du premier donataire ) , est su«' bordonnée à une condition suspensive, dont le résultat
« est de laisser reposer la propriété sur la téte du pre«. mier donataire, et de la p la c er, en-cas de prédécès
« de ce dernier, sur la tête du second donataire > td’où
« naît l'ordre successif. »
Cela est fort clair, et il importe fort peu que le cas
prévu soit celui du prédécès du second donataire, et
qu’on ne parle pas de ses héritiers; cette nuance dans
notre espèce naît d’une stipulation particulière qui ne
change rien à la nature de la disposition ; nous l’avons
prouvé.
Mais.M. Roland de Villargues s’explique plus claire
ment cpçoyc } et repousse d’avance une objection dans
la note insérée en cet endroit.
L
�W )
( 87 )
r « Ce n’est pas, à proprement p a rle r, que la pro« priété du grevé soit soumise à une condition résolu« toire, dont Vévénement effaceroit le trait de temps,
« et auroit pour effet de résoudre ries libéralités, tout
« de même que si elle n’avoit pas été faite () art. 1 1 8 3
« du Code civil ). Sans doute, le grevé cesse d'être
« propriétaire lorsque l’événement de la condition arrive;
a mais, jusque-là, sa propriété n’en a pas moins été réelle
« et pleine : non ideo minus rectè QUID n o s t r u m ESSE
c< VIND ICABIM US, QUOD ABIRE A NOBIS DOMINIUM
« s p e r a t u r , si conditio legati extiterit ( 1 . 6 6 , fF. de
« rei vind. ) ; aussi, est-il constant que la propriété du
« grevé n’est pas résolue ab initio, en telle sorte qu’il
« soit censé n’avoir point été propriétaire ; elle n’est ré « solue que ut ex nunc , et non pas ut ex tune , comme
« disent les auteurs. Aussi est-il constant que la pro
se priété du substitué ne rem o n te qu’à l’ouverture de
« la substitution ( Thévenot y chap. 36 );
E h bien! sieurs Capelle, cela est-il clair? cela est-il
applicable à une clause, où après avoir dit que les biens
vous seroient remis au décès, on a ajouté que la dame
Capelle n’en seroit pas moins propriétaire, et que jusque'
là on ne vouloit pas moins la saisir, tant en propriété
qu’en usufruit ? avez - vous donc eu tort de ne pas
demander la remise au décès du sieur Capelle > quoi
qu’alors il devînt certain qu’ il ne naîtroit pas d’enfans
du mariage ? avez-vous eu tort de ne pa9 demander les
fruits, et de reconnoître par là que vous ne pouviez
pas résoudre la donation de la dame Capelle ab initio ?
que, par conséquent, vous n’étiez pas non plus donataires
�(88)
ab initio , ce qui étoit, en un mot, reconnoître*qu’il
y avoit ordre successif\ et que vous n’étiez que subs
titués ?
N ’est-ce pas encore assez? Nous n’ajoüterons plus qu’un
mot sur ce point. L ’auteur du dernier traité des dona
tions examine la différence qui existe entre les substi
tutions et les donations purement conditionnelles, p. 1 1 3
et suivantes, et il s’exprime ainsi, pag. 1 1 .
«Les modes de vocations de plusieurs personnes sont
« étrangers au fidéicommis, et deviennent simplement
« conditionnels lorsque leur résultat est de fo rm er l’un
a ou Vautre de ces trois ordres de choses, qui sont ceux
« qui arrivent ordinairement et q u ’il faut Lien saisir. »
Il faut donc l’un de ces trois caractères pour ôter à
la disposition la qualité de fidéicommis.
5
k i ° . Ou le disposant a simplement en vue pour son
« héritier ou son légataire un particulier, mais avec la
« prévoyance que ce particulier pourra être dans l’im« possibilité ou l’incapacité de recueillir, et alors le disc< posant e n ap p ellera u n autre. »
C’est la substitution vulgaire qui n’est qu’une véritable
condition. ' « 2°. Gu le disposant a en vue deux ou plusieurs per
te sonnes, mais avec des idées qui ne tiennent point à
a un ordre successif de l’une de ces personnes aux autres,
« et de celles-ci cntr’elles, de manière que chacune
« d'elles a droit, dès Vinstant du décès du disposant,
« à une portion déterminée des biens, q u i l u i e s t
« a f f e c t é e r A R LA d i s p o s i t i o n , ou à une somme
« à prendre sur ces mûmes biens.
«3°.
�ofit
( 89 )
« 3 °. Ou le disposant entend ne donner qu’à une
k
personne, ou même à plusieurs CO NJO INTEM ENT,
« mais sous une condition éventuelle, et q u i, l’événe« ment venant à arriver, emporteroit la révocation de
« la disposition. »
Eh bien ! héritiers Capelle, dites-nous, s'il vous plaît,
lequel de ces trois cas est le votre ? votre père étoit-il
substitué vulgairement à la donation entre - v ifs ? lui
avoit-on fait une portion déterminée? lui avoit-on donné
conjointement? et si vous n’êtes dans aucun de ces trois
cas, où est donc la donation directe et conditionnelle faite
à votre père ? car, pour vous personnellement, vous
n’étiez pas donataires; vous étiez bien des tiers non
parties à l’acte : qu’en dites-vous ?
r Nous n’ajoutons aucune réflexion ; nous en avon s au
moins assez dit là-dessus ; m ais après a v o ir , quoiqu’un
peu plus légèrement, établi le principe, nous devions,
au risque de nous répéter un p e u , réserver ces auto
rités imposantes, pour montrer, dans toute sa nudité,
une objection que les appelans reproduisent sans cesse,
et sous toutes les formes possibles.
Les appelans citent des exemples pris dans la coutume
d’Auvergne ; il ne nous faut que peu de réflexions pour
en démontrer l’inapplication , et nous ne croyons pas
devoir les omettre.
E t d’abord, nous pourrions dire qu’il n’y a point d’a
nalogie, parce que là où la substitution étoit défendue,
on ne devoit pus la présumer, parce qu’on ne présume
pas la violation de la loi, et que là au contraire où elle
�C 90 )
étoit permise, la présomption étoit inverse. Au reste,
voyons ces exemples.
Le premier ( pag. 42 ) , est ce fameux exemple des deux
frères Simon et Amable, qu’on trouve partout, et où
assurément, il n’y avoit pas d’ordre succesif, car aucun
des deux frères n’étoit saisi avant l’autre, ni plus que
l'autre ; mais la saisine de tous les deux étoit subor
donnée à un événement qui devoit décider à qui la pro
priété appartiendront ab initio.
Le second est assez maladroitement choisi. « J e lègue
« 10 0 fr. à T itiu s, et où il viendroit à mourir sans en« fans ni descendans , ledit légat retournei'a à mon liéri»
« tier ab intestat. La sénéchaussée, dit-on, jugea que la
« disposition devoit avoir son effet. »
S’il ne nous étoit permis de lire cette citation que
dans le mémoire des appelans, nous avouons que la
décision nous étonneroit un peu, quoiqu’elle fût prise
dans un pays où on ne devoit pas présumer la substitu
tion j mais il est p erm is à tout le m on de d’a lle r lire la
page 128 de M. Chabrol, et c’est alors la citation qui
étonne.
M. Chabrol dit, en effet: » Ce jugement est rapporté
» SANS DATE par M e. Marie ; mais il cite en même
» temps une sentence du mercredi 11 ju in 1 6 6 1, sur
» la plaidoirie de M M . Pro/iet et F a y d it, q u i a jugé
» le contraire. » M. Chabrol rapporte l’espèce], parfaite
ment semblable * celle de Titius.
A la vérité, il trouve que la première sentence rappor
tée SANS d a t e par un seul auteur, et sans qu’il fasse
�90
C
connoitre l'espèce qui a plutôt l’air d’un exemple, étoit
beaucoup plus juridique; mais outre qu’il n’en donne
a u c u n e raison convaincante, il ajoute encore : •
Néanmoins une autre sentence du 2.4. juillet 1663
a encore jugé sur les mêmes principes que celle de
t66i. Il ajoute que les avocats de Paris n’étoicnt pas
de cette opinion.
L ’espèce de cette dernière sentence étoit simple:unmari
avoit légué à sa femme le quart de ses biens, en cas que son
fils mourût avant elle. Il étoit très-possible de juger
'qu’il n’y avoit pas substitution, car l’enfant n’étoit pas
institué; on pouvoit dire qu’il étoit dans la condition
et non dans la disposition, et peut-être pourroit-on
regarder cette sentence comme très-sévère ; mais néan
moins elle fut rendue, et elle est un peu plus authen
tique que celle rapportée sans date par M e. M arie,
sous le nom' de Titius qui assurément n’étoit pas un
auvergnat?:' '
'
Qu’il nous soit permis de dire, au surplus, que l’espèce
,de cette dernière sentence est posée comme exemple
par M. Toullier, page 69, et par M. Grenier, page
ïi8 . Le premier pense qu’il n’y auroit pas substitution
sous le Code. M. grenier décide le contraire, en ajoutant
qu’il ne peut se rendre à cette opinion, quoique M.
Chabrol atteste que c’étoit celle des avocats d’Auvergne,
«le Bourbonnois et de Paris, et M. Roland, page 95,
s’expxime ainsi :
» A ne consulter que la rigueur des principes, il est
» certain que la clause dont il s’agit ri exprime qu’un
J2 *
�C 92 )
« legs conditionnel. » Il en donne des raisons plausibles, et
qu’on peut voir, Loc. Cit.
« Mais, poursuit-il, il s’agit de savoir si un legs con« ditionnel de l’espèce de celui dont il s’agit, n’a pas,
« dans le f a i t , pour résultat, d’opérer une substi« tution, et si, dès lors, il ne doit pas être considéré
« comme une tournure prise pour éluder Ici disposition
« prohibitive des substitutions.
« O r, que le legs dont nous parlons opère en résultat
« une véritable subtitution, c’est ce qu’on ne peut ré« voquer en doute. En effet, appeler la mère après le
« décès des enfans, n’est-ce pas la réduire à un simple
« droit éventuel à la propriété des biens légués ? n’est-ce
« pas laisser reposer cette propriété su r la tête de ces
« enfans, tout aussi bien que s’ ils eussent été qualifiés
« expressément, à la charge de rendre à leur mort ?
» n’est ce pas, dès lors, établir un véritable ordre suc» cessif? » Ces principes sont ceux que M. Grenier
avoit professés, page 118 et 119 .
Gela nous suffit pour juger de l'à-propos de la citation
que font les appelans de la sentence de Titius.
Nous ne craignons pas de dire qu’aucun des autres
exemples cités ne peut arrêter un instant l’esprit du
juge ; les principes que nous avons exposés en repoussent
l’application. Nous ne devons nous arrêter un instant
que sur celui rendu par la Cour le 28 avril 1806.
Si cet arrêt n’a été dicté par aucune circonstance
particulière, nous nous tiendrons dans les bornes du
rtspect et nous retrancherons dans deux mots :
�93
(
)
L ’un, que l'espèce de cet arrêt n’a point d’analogie
avec l i nôtre;
L ’au tre, qu’il faut juger legibus , no?i exemplis.
Nous nous arrêterions là sans faire nous-mêmes la
critique de cet arrêt, si des autorités graves ne nous y
autorisoient.
M. Grenier, page 1 1 9 , prend une espèce semblable
pour son troisième exemple, et décide qu’il y a substi
tution.
Pour assurer davantage la justesse de cette opinion,
il cite une espèce copiée mot pour mot sur celle de
l’arrêt du 28 avril 1806, et rapporte un arrêt de la
Cour de Bruxelles, du 26 avril 1806, qui jugea tout
le contraire; preuve que dans la même semaine tout le
monde ne vit pas des mêmes yeux.
Il ajoute à cela un arrêt semblable de la Cour d’A ix ,
du
juin 1809.
E t enfin, il s’exprime en ces termes :
« Mais, à ces autorités, il s’en joint une du plus grand
« poids à l’appui de cette opinion, qui même est telle
« qu’on peut dire qu’elle ne laisse plus de difficultés. »
et il rapporte le décret impérial du 31 octobre 18 10 ,
que nous avons cité plus haut, page o. Et il n’y auroit
pas de substitution! il y auroit donation directe!
Comment, disent les appelans, car ils ne se tiennent
battus sur rien, vous osez méconnoitre à notre titre le
le caractère de donation directe, lorsque la transaction
de 1791 qui vous est propre, avoue à chaque page que
le sieur Capelle est donataire? n’a-t-elle pas fixé le vrai
sens du contrat de mariage?
5
5
�( 94)
Nous ne concevons guère comment la relation d’un
acte dans un autre forceroit à juger cet acte autrement
que lui-même'ne l’indique. Nous ne concevrions guère
mieux comment les termes de relation dont on s’est
servi dans la transaction de 179 1 pourroient avoir cet
effet rigoureux et contraire à la loi, de dépouiller une
femme de ses biens dotaux pour enrichir son mari qui
contractoit avec elle et dictoit la stipulation. Mais la
transaction, en les qualifiant l’un et l’autre donataires,
a-t-elle dit qu’ils le fussent conjointement plutôt que
successivement? a-t-elle dit que le mai*i étoit donataire
direct plutôt que donataire substitué ? a-t-elle dit que la
donation directe regardât le sieur Capelle autrement
que comme mari? et n’est ce pas toujours le contrat
qu’il faut consulter pour le savoir?
En voilà sans doute assez, et plus qu’il n’en faut pour
avoir rempli notre tâche, avoir prouvé par les principes
qu’il y a substitution, avoir pulvérisé les objections de
nos adversaires. Il ne nous reste plus qu’à jeter un re^
gard sur leur dernière proposition, que dans le doute la
disposition doit être maintejiue.
N ous disons un regard; pourquoi, en effet, nous y
arrêterions-nous long-temps? n’ayons-nous pas tout exr
près tiré nos autorités, notre discussion toute entière,
des principes existans sous le Code civil ? n’avons-nous
pas démontré qu’à supposer même que l'acte dont il
s’agit eût été fait depuis le Code, on ne pourroit, d’après
les principes, y voir qu’une substitution, parce que la
disposition ne peut être exécutée par aucune autre voie?
Mais, pour ne rien laisser à désirer sur ce point, nous
�wy
c
9
5
}
répéterons qüe l’interprétation de l’ambiguïté des dis
positions faites sons le Code, doit être faite en sens inverse
de ce qu’elle est pour les dispositions anciennes. Sans
doute, aujourd’hui, la substitution étant une violation
de la loi, et son existence devant détruire l’acte entier,
il faut tout interpréter au maintien de l’acte, parce que
la disposition doit être entendue dans le sens où la loi
lui donne un effet ; mais si on vouloit appliquer ce prin
cipe dans le même sens à une disposition faite sous les
anciennes lois, ce seroit, dit M. Toullier invoquer la
lettre des lois romaines pour en détruire Veffet ; car,
sous ces lois, la substitution étoit un acte valable; elle
produisoit son effet ; tout tendoit donc à la présumer,
même la faveur que réclamoit la volonté du disposant ;
et ce n’est pas parce qu’une loi subséquente a aboli les
substitutions, qu’il faut voir différemment; car cette loi
n’a pas plus changé les actes ou dénaturé les affections,
qu’elle n’a pu rétroagir sur l’intention d’un donateur, qui
depuis long-temps avoit reçu sa perfection. C’est encore
ce qu’a reconnu, le 29 mars 1 8 1 1 , la Cour royale de
Besançon, par un arrêt que rapporte M . Toullier,
page 67.
E t, de là, il est évident que les deux arrêts de Riom
et de Limoges, cités par les appelans, ne peuvent leur
être d’aucune utilité. Qu’ont-ils jugé? Que sous le Code
une disposition qui pouvoit présenter l’idée ou d’un
fideicommis ou d’une substitution vulgaire, devoit être
considérée comme valable, parce que la substitution vul
gaire est permise. On le demande ; que peut-on en inférer
pour la cause ?
�. C 96 )
Au reste, après avoir détruit tons les moyens fie fait
que les appelans articulent pour obtenir la fa veu r, que
seroit-il besoin de dire encore ? Quoi ! ce seroit eux que
la justice devroit regarder avec bienveillance, pour qui
elle devroit se laisser fléchir! il faudroit refuser de voir
une substitution là où elle est si clairement écrite, non
pour maintenir les intentions de la dame Jalinques, mais
pour en renverser l’édifice ! il faudroit qu’une donation
directement faite par des motifs d’aifeçtion personnelle,
fut anéantie, précisément parce que, dans le doute, les
actes doivent être maintenus! que la dame Nouveau,
qu’on prétend avoir eu la faculté illimitée d’aliéner ,
pour prouver qu’elle n’étoit pas chai’gée de conserver
et de rendre, n’eût pu faire aucune disposition au profit
d’un nouvel époux! ij faudroit que cette proscription
pesât toute entière sur le sieur Nouveau et ses héritiers,
après que sur la foi de cette donation, et pour en conrserver l’objet, soit à sa femme soit à lui, il s’est étroitement
gêné ! qu’il a exactem en t p a y é en n u m é r a ir e , et de ses
propres deniers, les sommes considérables qui étoient
dues à la dame de Murât, comme une charge de cette
donation qu’on ne veut plus reconnoitre aujourd’hui !
et, dans le doute, il faudroit ruiner ses héritiei’s, leur
arracher l’espoir de leur propre contrat de mariage et
des promesses qui leur ont été faites! et pour qui? pour
les héritiers Capelle qui achètent les reprises de la dame
Nouveau , et ne craignent pas d’accabler les sieur et dame
Valentin de saisies, parce que ces reprises sont exigibles,
tandis qu’en même temps ils lui contestent la propriété
de la Rouquette, qui seule peut en être chargée dans
leurs
�97
(
)
leurs mains; tandis qu’encore que si cette propriété leur
étoit enlevée, ce seroicnt eux qu’on poursuit pour les
payer qui scroient propriétaii'es et créanciers de ces
repi’ises! Ah! sieurs et dame Capelle, quand vous parlez
de doutes, quand vous invoquez la faveur, convenez
que vous n’y pensez pas.
Mais les héritiers Capelle y pensoient-ils davantage, lors
que ne se trouvant pas assez sûr de leurs propres forcés'’,
et voulant profiter doublement de leur convention avec
les héritiers de la dame Nouveau, ils les ont fait inter
venir en la cause? lorsqu'ils ont présenté, au nom de
ces héritiers, la ridicule requête du 18 novembre 18 16 ,
qu’ensuite ils ont sonné la trompette sur cette décla
ration qu’ils attribuent à la véracité des héritiers de Montlogis et à la bonne mémoire de la dame de Murât? Ces
pauvres Capelle ! ils ont oublié la grosse de cette requête
dans leur dossier. Ils n’ont pas fait attention qu’elle étoit
écrite de la main qui a grossoyé toutes les leurs ; que
le copiste, le clerc de leur propre avoué avoit l’habitude
d’écrire en marge de chaque grosse, M e. Bastid, avocat,
■parce que M e, Bastid étoit en effet l’avocat rédacteur
de leurs mémoires signifiés ; et que croyant toujours
travailler pour le moitié maître, il écrivit encore
en tête de celle attribuée aux Montlogis, ces mêmes
mots : M e. B astid , avocat\ qu’on aperçoit encore un
peu , quoique le chef de l'étude , lorsquul s’en est
aperçu, ait effacé ou fait effacer très-soigneusement ces
mots pour y ’mettre au-dessous, M K. Grognicr, avocat.
Les héritiers Capelle n'ont pas vu tout cela! F in isso n s*3
�9
( 8 )
en ; c'est presque abuser de la permission de montrer la
pauvreté d’une cause et la petitesse de ses moyens.
Nous avons annoncé que les sieur et dame Valentin
avoient à réclamer contre deux dispositions du jugement
dont est appel ; elles concerneroient les héritiers de la
dame Nouveau, et ce n’est que par suite de la cession
qu’ils ont faite de leurs droits aux héritiers Capelle ,
qu’on doit les discuter contr’eux; l’une d’elles est assez
intéressante par son objet ; néanmoins , chacun de ces
deux griefs peut se réduire à peu de mots.
ü n sait que la dame Jalinques avoit remis au sieur
Capelle un certain nombre de titres des créances com
prises dans la donation ; il n’en avoit perçu qu’une trèsmince partie, et le surplus étoit dans ses mains lors de
son décès ; il en fut fait inventaire.
Lorsqu’on i i sa veuve, épouse du sieur Nouveau
décéda, il fut fait un nouvel inventaire. Le sieur Nou
veau , pour éviter une nouvelle description des papiers,
offrit de justifier de l’emploi des créances par lui perçues
et de re p ré se n te r en n atu re tous les autres titres et pa
piers énoncés au p re m ie r inventaire. Cette offre fut ac
ceptée par le sieur Capelle qui avoit requis l’inventaire
comme porteur d'une procuration de la dame Lanzac de
Montlogis, religieuse.
,
Mais dans l’intervalle du décès du sieur Capelle à
son second mariage avec le sieur Nouveau, la veuve
Capelle avoit reçu et quittancé certaines sommes.
O r, le sieur Nouveau, en s’obligeant à représenter
en nature tous les effets dont il n’avoit pas l'eeu le mon-
85
�c 99 ;
tant, s'est bien interdit de prétendre que clans l’inter
valle d’un inventaire à l’autre , les titres pouvoient avoir
été dénaturés par la dame son épouse ; mais il ne s’est
engagé qu’à justifier de l’emploi des sommes reçues, et
à représenter tous les autres titres et papiers. Il semble
évident, dès lors, qu’il satisfera à son obligation, qu’ il
prouvera Vemploi des sommes reçues, en justifiant des
quittances données par la dame Capelle pendant son
veuvage, et il ne devra représenter que les autres titres
comme il s’y est obligé.
Cependant le jugement le condamne à représenter
tous les titres compris dans l’inventaire de 179 4 , ou cl
¿faire raison de leur montant.
Les sieur et dame Valentin soutiennent que cette con
damnation excède les termes de l’offre du sieur Nouveau,
acceptée parle sieur Capelle, dans l’inventaire de i 8 i 5.
Voyons quelle étoit la position du sieur'Nouveau et ce
que cet acte y a changé.
■
[
La dame Capelle, ayant resté un certain temps dans
le veuvage, et l’état de ses créances actives n’ayant pas
été constaté lors de son convoi avec le sieur Nouveau,
celui-ci n’étoit directemnt chargé d’aucnne partie déter
minée de ces titres, et au'décos de la dame son épouse,
si on n’eût rienc trouvé , ou qu’on n’en eût trouvé
qu’une partie, on ne pouvoit pas lui demander de remplir
1 inventaire de 179 4 ; on ne pouvoit exiger de lui tout
ou partie de ces titres de créance, qu’après avoir, prouvé
qu’il les* *avoit -reçus; u*’>12 'J
*
i
E11 faisant, pour éviter la description dps effets, l’offre
13
*
�•*V
*<¿'
( 100 )
écrit« clans l’inventaire de i& i , le sieur Nouvcr.û perdit
l'avantage de sa position; il fut présumé de droit nanti
de tous les titres inventoriés en 1794; mais cette pré
somption de droit ne fut pas exclusive de la preuve
contraire.
Or, s'il prouve, par des quittances, que la dame
Nouveau avoit reçu, avant son convoi, certaines de ces
créances, il aura rempli, 011 le repète, son obligation;
il aura justifié l’em ploi, comme il s’y est soumis ; il
seroit évidemment injuste d’en exiger davantage , et de
lui faire payer ce que sa femme auroit reçu avant son
mariage, lorsqu’il le prouve par écrit.
5
I«a seconde difficulté
d évelop p em en s.
n’e x ig e
pas de plus gran ds
La dame veuve Capelle, en contractant son second
mariage avec le sieur Nouveau , lui donna les domaine et -enclos de la Rouquette et dépendances j ces
objets lui avoient été livrés tels qu’ils étoient lors du
contrat de 1 7 8 6 ; elle les livra encore au sieur Nou
veau-de la même manière en l’an 3. Un domaine com
posé de terres labourables et d’un cheptel et l’enclos de
la Rouquette faisoient tout l’objet de cette donation.
Il est quéstiûn aujourd’hui de savoir si le sieur Nou
veau , supposé qu’il les conserve, doit les garder tels
qu’ils lui ont été donnés, ou si les héritiers Capelle auroient droit d’en retirer tous les besliaux. Trois raisons
déterminantes semblent s’y opposer, quoiqu’avant le
Code on n’eût pas la règle générale des immeubles
par destination.
�C 101
)
La première , que le mot domaine , employé dans
sa signification commune, ne sauroitpermettre, même
à la pensée , de séparer les bestiaux de labour des
terres labourables ; car il ne sauroit y avoir de do-'
maine sans exploitation, ni d’exploitation sans bestiaux.
La seconde, qu’en donnant le domaine tel qu’il étoit
-composé, et en outre avec ses dépendances , le mot
dépendance ne pouvoit s’appliquer qu’aux bestiaux qui
étoient et sont encore un accessoire indispensable, une
dépendance nécessaire du domaine. • •
Le troisième enfin , que la dame Nouveau l’avoit reçu
de .sa sœur ; quelle l’a livré de même au sieur Nou
veau; et quà ces deux époques, quoiqu’on ne connût
pas les immeubles pav destination, on a livré à la
dame Capelle, et elle même a livré à son second mari,
le dom aine tel q u ’il é to it, avec les b e s tia u x , p arce q u 'il
l
îs son intention de les distraire.
pendant, le jugement, en condamnant les intimés
à rendre les meubles de la Rouquette, n’autorise pas
à retenir les bestiaux. Cela sembleroit exclure celte retenue; et, soit erreur, soit oubli, soit préméditation,
le jugement peut servir de titre pour le refuser. Les
intimés ne doivent pas laisser dans l’incertitude celte
partie de la cause, d’autant que la valeur des bestiaux
d’exploitation est considérable.
Il y auroit, sans doute, une fort grave injustice à
maintenir une telle disposition ; peut-on concevoir l’idée
qu un donataire fût tout à coup privé des bestiaux qui
�( 102 )
sont nécessaires à l’objet donné, et qu’il fut arrêté dans
la culture au moment le plus intéressant de l’exploita
tion, des semailles, de la récolte ? On ne peut concevoir
l’idée d’une donation semblable; 0n pourroit peut-être
s'en faire une question dans une vente où chacun stipule;
mais dans une donation ! Impossible.
Il ne reste plus aux intimés qu’à conclure sur ces trois
chefs; ils se réservent de développer davantage leurs con
clusions par leur inventaire de production ; il leur suffit
de les indiquer ici.
Ce considéré, il plaise à la Cour, sur l’appel principal,
mettre l’appel au néant, avec amende et dépens.
E t sur les deux chefs ci-dessus, dans le cas où la C o u r
croiroit ne pas pouvoir p ro n o n cer p a r simple interpré
tation, donner acte de l’appel incident interjeté en tant
que de besoin; ce faisant, dire mal jugé en ces deux
chefs ; ordonner que les sieur et dame Valentin ne seront- *
tenus de faire raison des créances qu’en deniers ou quit
tances , dans lesquelles celles données par la dame veuve
C a p elle seront adm ises ; o rd o n n er que les bestiaux et
cheptels du domaine de la R ouquette y demeureront
réunis comme en étant l’accessoire; condamner les appélans aux dépens, et ordonner la restitution de l’amende.
M. T A SSIN D E V IL L E P IO N , rapporteur.
M E. D E V IS S A C , avocat.
M c. V E Y S S E T , avoué-licencié.
T H I B A U D , Im primeur du R o i, de la Cour ro ya le, et libraire , à R iom.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Valentin, Pierre-Félix. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tassin de Villepion
De Vissac
Veysset
Subject
The topic of the resource
donations
contrats de mariage
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
assignats
élevage bovins
immeubles
Description
An account of the resource
Titre complet : mémoire employé pour réponse à griefs, en exécution de l'arrêt de la Cour du 18 août 1819, pour sieur Pierre-Félix Valentin et dame Marie-Sophie Nouveau, son épouse, propriétaires, habitant le lieu de la Rouquette, commune de Cassaniauze, arrondissement d'Aurillac, département du Cantal, intimés ; Contre sieur Pierre-Antoine Capelle, Puech Jean, demoiselles Marie et Sophie Capelle, frère et sœurs, propriétaires, habitant ladite ville d'Aurillac, appelans de jugement rendu par le tribunal civil d'Aurillac, le 31 décembre 1817, suivant les exploits des 12 février et 11 mars 1818 ; Et encore contre la dame Marie-Sophie Lanzac de Montlogis, religieuse, habitante de la ville d'Aurillac ; Marie-Judith Lanzac, veuve du sieur Piales, et Marie-Honorée Lanzac, toutes deux habitant le lieu et commune di Viviers ; le sieur Brassat-Murat, docteur en médecine, et la dame Judith Lanzac, son épouse, de lui autorisée, habitans de la ville d'Aubier ; autre Marie-Judith Lanzac de Montlogis-Chanat, propriétaire, habitante au lieu de la Rouquette, commune de Cassaniauze, canton de Montsalvy ; le sieur Marsillac, docteur-médecin, Olimpie-Silvie Lanzac de Montlogis, son épouse, de lui autorisée, ; Marie-Christine Lanzac de Montlogis, Marie-Anne Chaudesaigues du Turrieu, veuve de Claude Lanzac de Montlogis, tutrice de leur fils mineur ; Joséphine-Judith Lanzac de Montlogis, tous propriétaires, habitans du lieu de Dousques, commune de Vézac ; Pierre-Alexandre et Pierre-Honoré Lanzac de Montlogis, propriétaires, habitans du lieu de Montlogis, commune de Ladinhou, susdit canton de Montsalvy, aussi appelans du même jugement.
note manuscrite : « 6 avril 1821, journal des audiences, p. 197.
Table Godemel : Bestiaux : Pour l’ancien législateur, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi, ils ne faisaient point partie de la donation du domaine, s’il n’y avait clause expresse et spéciale. Instruments aratoires : sous l’ancienne législation, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi ils ne faisaient pas partie de la donation du domaine, s’il n’y avait point de clause expresse et spéciale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1786-1819
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
102 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2504
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2503
BCU_Factums_G2505
BCU_Factums_G2506
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53490/BCU_Factums_G2504.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Calvinet (15027)
Cassaniouze (15029)
La Rouquette (château de)
Agrovieille (domaine d')
Saint-Michel (domaine de)
Mallaret (domaine de)
Ladinhac (15089)
Vézac (15255)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
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élevage bovins
fideicommis
immeubles
pensions viagères
renonciation à succession