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CON SU LTA TI ON S.
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a pris lecture, 1°. du.
contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
avec Marie-Léonarde Cornudet, du 14 mai 1778 2° du
contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte
Ducourthial, du 2 avril 178 3 30. d’un mémoire à con
sulter
E st d ’ a v i s q u e , d'après les anciennes et les nouvelles
lo is, le prem ier enfant mâle , issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec Marie-Léonarde Cornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son p è re , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
n oces, il avoit épousé Marie - Gabrielle de Villette. D e
ce premier mariage issut Gilberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen Maignol.
A
�CM
E n 1 7 7 8 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
n o c e s , M arie-Léonarde Cornudet.
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert D ucourthial, futur époux, instituehéritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un
des enfans qui naîtra du présent m ariage, et ce par préciput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que les futurs choisiront conjointement,,
par quelques actes que ce soit, ou qui sera choisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit;
et en cas que le choix rien ait pas été ¿fait, ladite ins
titution sera au projit de Vaine des m âles, s'il y a des
m â les, et s'il riy a point de m âles, au profit de îa în ée
des Jilies.
D e ce mariage sont issus trois enfans maies. Gilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793.
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant \ ni l’un ni l’autre n’ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, lie fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés,
par le contrat dé mariage de ses père et mère.
L ’édit des secondes noces, de i 56o, qui ne permet pas
à ceux qui sé remarient, et qui ont des enfans d’un premier
lit, de se donner réciproquement au delà de la portion de
l’enfant le moins prenant, avoit lait naître des doutes à cet
égard: on craignoit sur-tout en droit écrit, qu’en faisant
de pareilles institutions, ce ne fût un moyen de frauder la
loi ; mais la dernière jurisprudence, fixée par difl'érens ar
rêts, dontl’un du 29 avril 1719 , et l’autre du 11 août 1 7 4 ^
�(
3
)
.............................................................
rapportes par Lacombe, est que de pareilles dispositions
sont valables. C’étoit aussi la jurisprudence de la ci-devant
sénéchaussée d’Auvergne. L e dernier commentateur de la
coutume, tome II, titre X I V , art. X X V I , page 3^4 >raP" *
porte une sentence du mois de juin 1773 , qui confirme uni?
institution d’héritier, en faveur des eufans à naître d’un
second mariage. A in si, en ne consultant que l’ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput, le tiers des biens qui lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est de principe qu’un don fait de cette riianière,
n’est pas sujet à rapport, même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à la récla«
snation des exposans: on peut même dire qu’elles décident
la question en sa faveur.
,
Il est vrai que d’après les dispositions des art. X X III et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 ventôse de l’an 2, l’élection
laissée au choix de l’un des époux étoit nulle, si elle n’avoit
été faite que le 14 juillet 1789 et depuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité ù la succession
de ci/jus.
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du 5 b ru m a ire précédent, puisqu’elles ont été
annullées, quant à leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4 , soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourthial, à l’effet de savoir si h cette époque, il existoit
quelque loi qui put empêcher l’effet de la disposition faite
en faveuj* de l’exposant, par le contrat de m ¡r age de scs
père et mère : or, il n y avoit pas alors de loi qui eût prosA 2
�(
4
)
erit de semblables dispositions, et annuité des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d'avoir exercé
la facu lté d'élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
n’y en a pas depuis, attendu l’abolition de FeiFet rétroactif
L a loi du 7 mars 1793, antérieure au décès de Gilbert
Ducourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n’est relative qu’aux dispositions futures, n’a
néantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, etn ’o bligeoit point les père et mère à les révoquer : o r , ce n’est
point en vertu d’une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793, que l’exposant réclame le tiers des
biens dé son père, comme un don qui lui a été fait en préciput; il le réclame en vertu d’une disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu drune disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
E n e ffe t, l’article p re m ie r de la lo i du 18 p lu viô se d e r
n ie r , p o r te : « L e s a va n ta g e s, p ré lè v e m e n s , p ré c ip u ts, d o -
* nations entre-vifs, institutions contractuelles, et autres:
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
* stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du
« 7 mars 1793 ? et en ligne collatérale ou entre individus
« non parenS', antérieurement à la publication de la loi du
* 5 brumaire a'n 2, auront leur plein et entier effet, con
ic formément aux anciennes lo is, tant sur les successions
* ouvertes jusqruà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans un contrat de mariage, passé antérieurement à la loi
�du 7 mars 1793 ; à défaut d’élection de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroitdu mariage : il n’y a pas eu d’élection*, les père et
mère sont décédés avant les lois des 5 brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle; il doit par
conséquent en profiter.
Le père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature, ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée, si Ton fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l’avenir ; qu’elle n’anéantit pas
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. ( A rt. X X V I de la loi du 22 ventôse ).
O r,l’avantage dont il s’agit, est assuré à l’exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation de la loi du
7 mars 1793; mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni parla lo i, doit donc
avoir son effet, puisqu’elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mère avant la promulgation des lois des
5 brumaire et 17 nivôse de l’an 2.
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté , qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la m êm e loi du 18 pluviôse dernier.
Cetarticle est ainsi conçu :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
�(
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)
« fonds perdu, qui ont été annullées par les art. XXlI et
« X X V d e la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet 1789,
« sont rétablies dans leur effet p rim itif, si elles ont été
« faites par acte ayant date certaine avant la publication de
« ladite loi du £7 nivôse ».
Des termes de cette lo i, il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à celle du 7 mars 17 9 3 , doivent être
maintenues: ainsi, l’exposant étant saisi de l'effet de l’insti
tution par le décès de son p è re , arrivé avant la publication
de la loi du 17 nivôse, on ne sauroit lui contester légitime
ment l’avantage qu’il réclame.
D é l i b é r é à R iom le 14 germinal an
française une et indivisible.
5 de la république
T O U T T É E , T O U T T É E , GASCHON.
f
LE SOUSSIGNE qui a yu la consultation ci-dessus et
des autres parts ;
, que s’il n’est pas impossible de tirer des lois nou
velles , quelques inductions favorables aux enfans du pre
m ier lit de G ilbert D ucourthial, les raisons déduites dans la
E stim e
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup à faire incliner en faveur de l’exposant. On pput même
ajouter aux raisonnemens delà consultation. En effet, en
supposant que par 1<; défaut d’élection, fait antérieurement
�(
7
)
à la loi du 7 mars 1793, la disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable; c’est que le
contrat de 1778 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit. Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’e u x , emporteroient dans sa succession un
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C est sous la foi de cette promesse irrévocable
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; par
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
enfans du même p è re , en se référant à celle du 7 mars
1793 j Que ce dont le- père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n'ont pas même entendu faire ,
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de même que
Ducourtliial père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second l it , de même les
lois nouvelles ne sauraient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
D é l i b é r é ùR îom , le 14 germ inal an
française, une et indivisible.
5 de la république-
DE VAL.
�m ém o ir e a c o n su l t e r
ET C O N S U L T A T I O N .
J_ E citoyen Titus s'est marié deux fois ; il a eu de son
premier m ariage, avec dame Marie Laurette , une fille
nommée G ilberte, et de son second, avec Suzanne D ailly,
trois en fan s, Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de mariage , Titus a institué pour son
héritier du tiers de tous ses biens présens et à v e n ir, l’un
des enfans qui naîtroit dudit mariage , et ce, en préciput
et avantage ; laquelle institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce lu t, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fû t; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fait, ladite
institution profiterait à Tainê des mâles ; et s’il n y a pas
de maies , à l’aînée des filles. Telle est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur à la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de 1 5,000 liv- 3payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
ons , sans intérêts qu’à défaut de payement terme par
terme î
�( 9 -V
.
^epne i;-et moyennant cette ¿constitution, il fut stipulé
q u ’elle demeureraitforclose dè.;lôütes succcssionsidirectes
et collatérales de l’estoc paternel, sous la réserve quil fit
de la rappeler <auxdites successions par quelquacte que ce
fû t : cet acte est de 1.783................. , a
.
;p
t - T itu s, père com m ua, est mort le 27. juillet 17 9 3 , l*
mère e$t morte avant, sans avoir fait de cliqix de l’un, des
eniàns, Il s’agit maintenant de'savoir , i° . :si -cette'Jinsti*
tuti( -, contractuelle.est valable en faveur des enfansldii
second lit,
ir î,> t *1_
• î\ j
-, •.juuiü .j.. i.j
a 0.' Si yen le supposant,n’y ayant paseu d’élection delà
part des père et m ère, 1c’est 1l’aîné mâle qui doit en pro
fiter; .
.. i •
• •;
. ... l'j'-- c . . [
30. Quels sont les droits delà fille du premier lit dans
la succession du père commun ? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle avoir son effet ?
... Enfin , y ayant des enfanfc mineurs, quelle doit être la
forme du partage ? -.¿j
•;
• • > Jnu ù
.
.
CO N SULTATION.
L e C O N S E I L S OU S SI G NÉ',’qui a lu les deux
contrats de mariage dont il s’a g it,
E
stim e
1
, sur les questions proposées,
1°. Que l’inst;itution contractuelle, faite par un père dans
son second contrat de mariage au profit des enians à naître
d’icelui, est valable et doit avoir sou exécution.
B
�( IO }
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs,
>et il paro ît qu’elle a été diversement jugée par les tribu
naux. ' '
r
"
*
v C e u x qui ont soutenu qu’elle étoit nulle, se sont fondés
sur ce que les enfans du second ,lit,, n’étaut encore Sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
jiî de haine’, les dispositions que l’un des conjoints fait
«n leur)faveur., ne sont censées faites qu’en contemplation
de l’autrejcorijoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d’une portion d’enfant, l’on a voulu
éluderda loi par une disposition'indirecte, èt que d'après
l ’/*dit'Adüscáecorides, inoces ,'Ujon me p ou voit donner aux
pères, mères et enfans du second mari ou autres personnes
•parod0l etj fraude .'intérpaiés. :J‘ •»
i„„» •’
Une femme, dit Chabrol, qui ne peut pas profiter de
ces libéralités pour elle-même, n’a pas moins d’empressexnentûài’les procurer, à ¿es; enfans à naître; s’ils lui survi
ven t, ils ont ce que leur mère n’auroit désiré avoir que
p o u r e u x j et s’ils lui pr<5décèdent, elle peut retrouver
souvent', dans leur succession, les biens qu’elle leur a
-r
-- s
r ««
» f - **
procure?.^
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i 588 ,
rapporté par Mo^tluolon., ,,
*
L e sècoàd qu’on trouve dans Soefve, du 18 juillet 1.645.
Un troisième recueilli par Brodeau sur L o u e t, L. Nsomm. 3 , du .3 août 1647.
.
1
quatrième ,!;qu’on ¡trouve au journal 'du .Balais ,
du 7 spptombre a 673.
1
Enfin ,1 cèlui connu saus :1e nom de Laparra, du 18
�mai 1736.,j rapporta .par l’Epine de GrainV[ille. Tous ,•
dit- on , ont an nulle des dispositions faites^en faveui- des
enfans à naître d’un second mariage.>
Mais si l’on se donne la peine d’entrer ten connaissance,
de cause de ces jugemens:, on s’aperçoit bientôt qu’iisi
sont rendus sur des circonstances particulières, et n’ont
aucune application à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de Montholon , d’après. Rousseau de
la C om be, n’a pas jugé la' question. « Il s’est trouve ,>
« dit-il, verbo Noces, qu’il,s’agissoit d?une donation faite.
« non à des enfans? d?un. second l i t , mais à des colla-?
ce .téraux. »
Celui de 1645 paroît avoir jugé qu’une mère remariée,
n’avoitpu donner aux enfans du second mariage ses meubles
et acquêts, et le quint de ses propres, au préjudice des enfans
du premier lit, dont la légitime n’avoji; cependant pasiété
blessée; mais indépendamment de l’injustice évidente qui,
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume diffé
rente de celle-ci, où les pères et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs enfans.
Celui de 1647 se trouve dans-tous les recueils^ il fut rendu
consulhs classibus ,• il annulla une donation contractuelle,
faite au profit d’enfans à naître , par une femme qui se
remarioit \ m a is B ro d e a u , qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation étoit tout-à-fait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite à l’exclusion perpétuelle des enfans
du premier lit , au point qu’à défaut denians du second
lit, les collatéraux étoient appelés.
Il n’est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
«mnuUée ; i° . elle, étoit faite ab irato> et 20. comme l’obB 2
�serve Chabrol > il est évident que le lllari aVoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
c o n tra ctu e lle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it, suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
d e son gendre, « et au cas qu’il riy ait pas d’enfans y lesdits
* biens appartiendront audit sieur de Saint-M artin seul r
* qui étoit le futur époux , et au x sien s, sans que les enfans
« du premier m ariage, n i les héritiers de ladite fu tu r e y
a puissent rien prétendre n i demander, sinon que ladite
« G uilbou, si elle survit, auquel cas elle jouira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour« neront aux héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrêt de 1673, a bien aussi annulléune donation faite
aux enfans à naître d'un second mariage; mais elle avoit
pour principal objet la fèmme ; c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit: « au f a i t particulier y
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
« du palais , il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère ; c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la passion extrême qu’avoit
te pour elle le sieur de Tersam , a été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
* qu’il ne pouvoit encore aimer. »
Cela est si vrai que Rousseau de la Com be, qui rapporte
aussi cet arrêt, verbo Noces, s’en fait un moyen pour prou
ver que les enfans communs, nés ou à naître, ne sont point
compris dans la prohibition, pourvu qii ils n aient servi
de prétexte pour donner au second conjoint.
E nfin, l’arrêt do 1738 de Laparra, a été rendu en pays
�..........................
( *3 )
cle droit écrit, où la mère succède à son enfant*, en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition ¿toit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; les
pai'ties et leurs biens étoient régis par une coutume qui
exclut les ascendans de la succession des descendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle.rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
declarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second mariage, entre le pays de
droit é crit, et celui de coutume.
Dans le prem ier, la seconde femme peut être l’objet de
la lib éralité d’un mari ; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eu x, à moins qu’il n’y
ait aucun parent de la ligne ; et dès lors la p ro h ib itio n ne
peut plus exister , puisqu’il n’y 'a plus d’intéressd.
M ais ce n’est pas seulem ent avec des raisonn em en s tranchans qu’ on v e u t écarter les p ré ju g és que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement form ée, soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in termini's, soit
par les nouveaux; et la presqu’universalité des auteurs,
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bien pro
noncée.
�c h .y
L e premier-arrêt qui ait admis l’institution d’héritier en
faveur des.en-fans a naître d un second mariage, est rapporté,
par C h opin , liv. 3., ehap. i ei‘. lit. 1er. sur ja coutume d'An
jou , en date du 7 septembre 1675.
L e second, du 19 juillet i 65g.} rapporté par Ricard
T r a it é des Donations, partie.3 , n°. 1243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite,
à des enfans à naître, par un troisième contrat de mariage:
c’est l’arrêt des Lagrange. On demandoit la réduction da
la donation, conformément à l'édit des secondes noces. La.
disposision fut confirmée pour le tout.
L e troisième,j ..se trouve au Journal des audiences,y sous
la date du 29 avril 1719 ; il fut imprimé-dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en fa
veur des enfans à naître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
L e quatrième est intervenu le 11 août 1740, au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Com be,
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrèt, Jacques de Gagnou
de. Vilène , lieutenant général des armées , âgé de soixantequinze ans , qui avoit un fils du premier litco n v o la n t en
secondes noces avec daine Claude-Antoinette Dassé, avoit
donné aux enfans de ce futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui pennettoit de donner à ses enfans- puînés. L a
donation a été confirmée eu faveur des enfans du second
mariage , quoique la dame Dassé eût la gajxle-/toble de
jîes cîïfans.
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui sq remarie, peut donner à ses en fans du second lit;
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans communs,
�( * 5' )
nés ou à naître, ne sont p a s compris dans la prohibition
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
sè remarie en pays de droit écrit ,1a donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
laveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas ù un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
■une exception au droit commun. T o u t le monde eonnoît
•les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C’étoit une dame d’Âlègre , qui avoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire la condition d’un enfarft
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par dès
considérations d'honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du J o u r n a l dù palais,
daus la cause jugée par l’arrêt de 1673, «que les législa'« teurs q u i se sont p a rticu lièrem en t attachés à former des
« obstacles au x secondes noces , n’eussent point parlé des
•«enfans, s’ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition ; mais ils n’avoient garde de penser à eux ; il
« y en a deux raisons sans répliqué. »
«La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autorisant les secondes noces,
« elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
.
�( i6 )
« en naissent, clans la possession du droit commun ; c'est-àa d ire , q u e comme ces enfans né sont pas encore au monde,
« et n éanm oin s-y doivent venir par une voie légitime > la
« loi ne peut pas avoir pour eux de l’indignation, qu’elle ne
r fonde jamais que sur un démérite naturel ou moral.
« La seconde raison est, que l’ordonnance ne peut com
te prendre les enfans communs dans la .prohibition, que par
ce les mêmes motifs quiy ont donné lieu, savoir, en faveur
« de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
et mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
a innocente des enfans, et sur-tout dans des enfans à naître,
* qui n’ont que le suffrage de la nature qui parle pour eux.
« Il ajoute que presque tous les docteurs avoient décidé,
« que la loi hcic ed icta ti , et l’édit des secondes noces, ne
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
« excité la libéralité des pères et mères, par leur mérite, par
* leur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
« que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
ce que leurs pères et mères pensent ¿\ eux avant leur nais« sance , et qu’ils se les représentent, comme s’ils étoient
« effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
ce contrats de m ariage, les enfans ù naître ont ordinaire"
et ment la meilleure part, »
Brodcau sur L ouet, lettre N , somm. 3 , n°. 12 , a traité
également cette question: et Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l’édit des
« seconds noces a lieu , non seulement ù l’égard des con« joints, mari ou femme , mais encore des enfans du
« prem ier ou du second m ariage........Mais néanmoins il
« est
�« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu a Tegard
¡k des enfa n s du prem ier lit de l’un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et m ê m e personne avec
« leurs père et mère , el qui est dans la prohibition de l'edit
« et non des enfans communs issus de leur m ariage, qui
« sont capables de recevoir toutes sortes à!avantages,
« s a lifia légitime aux enfans An premier l i t , si la coû
te tnme ne dispose du contraire; la présomption naturelle
« étant que la m ère faisant la donation , est plutôt portée
« par l’affection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
« le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. de secundis
jiuptiis, q u e B ro d e a u r a p p o r te , d écid e cette q u estion dans
les term es les plus form els : «
■potest vidua dare, non p?'o« vigno sedfdio cornmujii, nato ex secundis nuptiis : licet
« sit eadem ratio , non tamen idem ju s , q u ia jilio com« muni ut donet mater naturalis affectio f a c i t provigno
« ut donet noverca, maritalis ajfectus f a c i t , non certè
« novercalis,* provignum non semper accipiam pro percc sona supposita, sed excogitatamfraudent edicto inspi« cabor in provigno , non in f li o communi. »
B ro d e au cite les d eu x arrêts de i 5ç)5 et de 1 6 2 6 , q u i
o n t co n firm é de pareilles donations.
L e b r u n , traité des successions , liv. 2 , ch ap . 6 , sect.
distinction 2, est du même avis: « L e second conjoint, dit« i l , est la première personne prohibée , et nulle autre ne
« fest qu’à cause de lu i......... O n demande si les enfans du
« second mariage sont compris dans cette prohibition et il
« semble qu’ils n’y sont pas compris: car, si d'un côté on les
« considère comme les enfans du second con join t, de l’au»
G
�C 18 )
« tre, on les peut regarder comme leS enfans de celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
« de ses libéralités ».
« Si les enfans decelui à quiil est défendu de donner, sont
« dans la prohibition ; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner h ses propres enfans......... Il faut prendre en
« toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation;
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
cc que ces donations se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions.. . . Aussi nos
cf docteurs, entr’autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
« cod.deseciind. nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n'étoit pas compris dans l’édit ; ce que j’estime
« devoir avoir lieu, pourvu que les enfans n’aient pas
« servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color non jfuerit quœ situs, comme dit la loi item s i y r
uff. de sénat. Mace.d. et particulièrement pour l’espèce
• la loi suspitius 4 9 , j f . de donat. item s i color v eî
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœsitus , n ih il
« valebit traditio ,* id e s t, si hoc exigit uxor, ut aliquid
« ex ea re intérim commodisentiret m antus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu’en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari, à cause de la puissance pater
nelle; mais que hors ce cas particulier, les donations
fa ite s aux enfans com m uns, ne sont pas réputées com
prises dans fédit.
E nfin, le dernier commentateur de la coutume d’A u ver
gn e, traite aussi cette question dans le plus grand détail,,
�( 19 )
et après avoir rapporté les arrêts pour et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière jurisprudence -parait
décisive pour la validité de ces dispositions.
« Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740 j on*:
jUl^s*
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruitpas,
» puisqu’il est dû à la circonstance particulière du choix
« laissé à la seconde femme ; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
« pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
« venu des successions et donations en ligne directe, et
« oùles dispositions en faveur d’enfans à naître sont assez
« fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en« fanspersonnes prohibées, ne s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints , avec qui le mariage se contracte , et il
« suffit que la disposition puisse s'appliquer à d’autres causes
« que riinpression du conjoint, pour qu’elle doive avoir
« tout son effet. On doit plutôt rapporter la disposition à
« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
« combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, com« ment un second mari pouvant profiter directement au
«moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
«a naître seroient dans une plus grande prohibition que
« lui. Il nous semble donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition , saiif les exceptions légitimes
« dans des cas où il est visible que le donateur n’a eu d’autre
« motif que l'impression et la suggestion du nouveau con
te joint ou la volonté de l’avantager lui-même.»
Ainsi donc , il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune, faite par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
C 2
�(20)
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement delà disposition, puisqu’en cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoîent succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien, puisque la femme n’avoit pas d’autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice. Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps 5
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas, ni l’un ni
l ’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d’une disposition universelle; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au profit des mâles , à l’exclusion des
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
mariées par père et mère»
T o u t concourt d o n c , on le répète, à rendre cette dispo
sition inattaquable. Le droit d’é lire, accordé au survivant,
dans le cas où il n'auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne changcrien a cette décision, parce qu’il n’en résultoit au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première, ce qui est réellement
arrivé , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mari.
I» y a même plus, c’est que , sans les nouvelles lois, le
consultant n’eri auroit pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle éloit forclose, moyennant la dot à elle
�( M \
constituée, et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de
son père sans y être rappelée \ et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
ment qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis a l’aîné mâle du second l it , une
Buccession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
S e c o n d e
Q u e s t i o n .
N y ayant pas eu d!élection, tous les enfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition f
ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question peut avoir été controversée dans les temps
voisins de la loi du 17 nivôse an 2 , dont l’effet rétroactif
avoit tourné les têtes ; mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , (f avant ou depuis le 14 juillet 1 7 8 9 , auroit conféré
»au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« h éritiers dans ses b ie n s , l’ é le c tio n , si elle n’a eu lieu que
« le 14 ju ille t 178 9 o u d e p u is , d em eu re n u lle et de nul
« effet; et tous les h éritiers p ré so m p tifs, au préjudice dés
ir quels elle auroit été faite,sont, nonobstant toute exclu« sion, appelés à partager la succession de la même manière
* et par les mêmes règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. » .
L ’article suivant,porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier, néanmoins subordonnéaau cas
�« où un tiers ne disposeroit pas autrement des biens com
te pris en la même institution , sont nuls et de nul e iïe t, à
«dater du 14 jui^ct *789, si à cette époque le droit dé
« l'institué n étoit pas devenu irrevocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée avec lui. »
Mais, i° . cette loi ne peut avoir d’effet rétroactif; les
lois des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an 5 , ont confirmé toutes les dispositions irrévocables
de leur nature, faites avant la publication de la loi du 7 mars
*793>^u^a défendu toute espèce d’avantage en ligne directe,
ainsi que les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse an 2.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse an 5 , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
« an 2 , à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
« date certaine avant la publication de ladite loi du
« 17 nivôse, »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dernière loi.
Dans l’espèce particulière, la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est morte avant la r é v o lu tio n ,
.et le père, le 27 juillet 1793 * la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession ; il
faut juger l’institution dont il s’agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L ’on n’a pas oublié qu’à défaut d’élection , c’étoit lui
qui étoit appelé à la recueillir; et la mort du père, sans
l’avoir faite, équivaut ù un acte qui la coiitiendroit.
�( 23 )
• Ces principes anciens n’ont point été altères par les
nouvelles lois, parce que la succession s est ouverte avant
et dans un temps utile ; et on peut d’autant moins les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs,
et sur-tout par Ricard, traité des donations , partie i re*>
chap. 3 , section 12, n°. 672 et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers,comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’électiorr.
c< qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu u n , mais seulement le ch o ix de la personne
« entre un certain nom bre, ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui rogatus e s t, positum est om n ino, an velit
« restituere , sed qui potiùs restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé à l’au
dience de la grand’chambre , par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’a u tru i , quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterminé y
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au marnent où il écrivoit, particulièrement dans le-
�( h )
pays de droit écrit, où les maris et femmes ont coutunie de se déférer entreux cet honneur, de laisser
au survwant la liberté} de choisir un héritier universel entre leurs enfans j ce qu'ils pratiquent par le
principe d'une sage p olitiqu e, cl afin de transmettre
toute la puissance entre les mains de celui q u i survit,
tt lu i conserver, par ce m oyen, le respect de ses
enfans. »
L on volt donc que les principes anciens valident l’instilution dont il s’agit.
Les mêmes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas où le tiers, chargé d’élire,
ne feroit pas de ch o ix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement un des éligibles pour recueillir sa dis
position , i\ défaut d'autre ch o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par l’ex
tinction du droit d'élire, ou par la mort du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite. .
>
E nfin, les nouvelles lo is, au lieu de contrarier les1
anciennes sur ce point , ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l’on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an 5 , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la publication de la loi du T7 nivôse : ainsi l’élection
auroit pu valablement être faite ju sq u e -là , et par la
même raison, l’aîné maie avant été désigné pour la
recueillir, à défaut d'élection d’un autre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
Nous trouvons encore cette question décidée dans un
rapport
«
«
«
«
ce
«
»
»
�f 25 5 . .
- ,
■
■'nppott fait au nom d'une commission, pat* le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
•résolution par lui présenté, porte.que si-l’auteur de la
•disposition avoit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en avoit chargé, et s’il avoit nommé un
héritier ou légataire pour recueillir à défaut d'autre choix,
sa nomination , conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’élire ,
et l’ héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p ré v u , a recueilli seul h bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection le lui auroit
enlevé, ce qui n'est pas même proposable, elle n’en seroit
pas plus avancée, parce quelle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second l i t , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe.
ST r o i s i è m e
III.
Q u e s t i o n .
Quels sont les droits de la jille du premier lit ?
Cette fille a été forclose par son contrat de mariage*
mais la loi l’a relevée de cette forclusion. Le père n'est
mort qu'en juillet 1793; à cette époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793, avoient frappé,
«t elle est appelée à recueillir, en rapportant ce qu’elle
D
�à reçu , sa portion des deux tiers de la succession ah
‘in testa t, qui seront divisés entre tous les enfans par
égale portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau ; mais ce qu’elle
prendra dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira' sera dotal j si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra m oins, et lès autres héritiers feront
les prélèvemens de d ro it, de manière que l’aîné maie ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l'autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera, au prorata de son1émolument , lés autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de -230,000
y compris le rapport des i 5,ooo
la portion de l’aîné maie sera de 1 1 5,000
parce que
le tiers de 230,000 & est de 76,666 ^ 13 ^ 4
et que
le quart, dans le surplus, est de 38,333 ^*6^8
en sortô
que la fille du premier lit, conservant les i 5 ,ooo
argent,
n’aura plu s, en b ien s-fon d s, que 22,333
8
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineurs,,
le partage doit être fait en justice, et provoqué par un
majeur ; il ne pourrait avoir lieu sans cela.
DÉLIBÉRÉ à Clermont-Ferrand , le 19 nivôse an 9.
;
B O Y R O T , D A R T I S - M A R C IL L A T ■Je suis du même avis, et-par les mêmes raisonsP I C O T -L A C O M R K
�( v j.y L e soussigné, qui a lu la consultation cl "dessus, est
du même avis *, les motifs qui lui servent de fondement
sont trop anvpleroent discutés dans oetteconsultation, pour
qu’il soit nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
en faveur du consultant, c’est que sa mère avoit prédécéde
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793>
et qu’ainsi son droit à l’ institution étoit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2,(
D é l i b é r é à R io m , le 12 pluviôse, an 9 de la ré -i
publique.
TO U TTÉE.
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
D é l i b é r é à R io m , ,1e 2 ventôse, an 9 de la répu
blique.
PAGÈS.
L e soussigné est du même avis, par les mêmes m otifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de l’ancienne législation , encore ca
vigueur à l’époque de l’ouverture de la succession.
L e zz ventôse an 9 .
M A U GUE.
�Q U E S T I O N S PROPOSÉES.
G i l b e r t D U C O U R T H IA L , veufde Marie de Vîllette,.
contracta un second mariage le 14 mai 1778; il avoit'
une fille unique d’un premier mariage.
T ro is enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthial est décédé le 27 juillet 1793 ; sa
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
Il s'agit de régler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père commun.
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial de Lassuchette, fils
aîné du second l i t , croit avoir droit de prendre, dans
cette succession, un fiers en préciput et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, son
p è re , du 14 mai 17 78 , dont la teneur suit :
<r Ledit............futur ép o u x , en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à ven ir, Tun des enj'ans qui naîtra
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage *
« laquelle institution est faite en faveur de celui ou celle
k que les futurs époux choisiront conjointement, par
�2
9
)
« quelques actes que ce so it, ou qui sera choisi par ie
« survivant des deux futurs, auquel le droit en appar«• tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
k que ce soit ; et en cas que le choix rüen ait pas étéf a i t ,
« ladite institution sera au profit de Vainé des m âles,
« s’il y a des mâles , et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. »
Gilbert D ucourthial et sa seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre, sans avoir fait d’autre choix entre leurs
enfans com m uns, pour recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de Vainé des m âles, en cas qu’il
n’en fut pas fait d'autres.
En cet état, le citoyen Lassuchette, fils aîn é, e st-il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son p è re , a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vini des enfans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
2°. Que Xindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
la disposition ?
3°. Qu’elle n’ëtoit pas viciée non plus par la circonstance
que la seconde fem m e devoit concourir au choix de cet
héritier, dans le cas où il seroit fait du vivant des deus
époux, et même de l’élire seule, si elle avoit survécu ?
40. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans le cas, qui est arrivé, où il n y auroit
pas d’autre choix , étoit également une disposition valable
�( 3° )
dans le p r in c ip e , ci; quelle aoit produire son plein et
entier effet, nonobstant la révocation des dispositions de
ce g e n r e , prononcée par les articles X X III et X X I V
de la loi du 17 nivose an 2 , postérieure de cinq mois
au décès de Gilbert Ducourthial ?
5°. E n fin , que le décret du 7 mars 1793 , qui avoit
interdit tous avantages en ligne directe, quelques mois
avant le décès de Gilbert Ducourthial, n’est pas un obs
tacle non plus à ce que le citoyen Ducourthial fils aîné
profite d une disposition en préciput, qui a sa source dan9
un contrat de mariage antérieur de plus de quatorze ans
à ce décret.
Opi?iions du Conseil sur les questions proposées.
L a première observation à fa ir e , pour résoudre les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d'une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2 ; mais d’une
succession ouverte près de six mois avant cette loi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut rapportée par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
celte époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisième observation. Le sort de l'élection faile par
�( 3 0 #
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourr
thial - Lassuchette, fils aîn é, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas ou
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
m ère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé ayant la loi du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ,* car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils avoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
De ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées ; mais
■uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i ° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
valid ité, sous le régim e ancien, des donations de biens
présens et à v e n ir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de m ariage, en fa v e u r des erfans à naître du mariage y
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 1 7 31 , art. X V I I et X V I I I , et de 174 7, art. X II.
On ne sauroit non plus m é c o n n o ître la cap acité des
enfans d’ un second m a r ia g e , p o u r r e c e v o ir de pûreillcs
dispositions et en p r o fit e r , en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut permettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de ses
enfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
Auvei’gne, où étoient situés les biens de G ilb e rt Ducourth ial,)et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage,, sur ceux du second.
�. ( 3a' ) .
La seconde fem m e, il est v r a i, n’auroit pu être vala
blem ent instituée par son m ari, que pour succéder à une
' p a r t (Tarifant \ mais son incapacité,relative et limitée ne se
communiquoit point à ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en gén éral, ne fut jamais mise eu
question; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naîtroient du m ariage, étolent
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits h la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
1719 et i l août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage eu secondes noces,
aux enfans à naître du mariage, que çe qui y est véri
tablement; je veux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, qui, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir le sort
des enfans à naître du mariage, s’occupent de l'assurer A
l’avance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contracleut,
pt sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrêts notables do
la C o m b e .
donc
�donc pas surpris si tous les suffrages ?e sont reunis, depuis
soixante an s, pour en proclamer la validité.
D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec laquelle Gilbert Ducour thial use de la
faculté d'avantager l’un de ses enfans à naître du second
lit ; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; c’est-à-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gratifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauraient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes généraux, pour ne laisser voir
dans l’institution faite par Gilbert Ducourlhial en faveur
d un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
motif pour les tribunaux d'en ordonner l’exécution sans
hésiter.
a°. Mais on semble prétendre que l’institution dont il
s agit étoit vicieuse dans sa forme , en ce que rinstitué
etoit indéterminé , et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourrait être de quelque considération, s’il
s’agissoit d’une disposition postérieure à la loi du 17 nivôse
an 2, qui a aboli pour l’ avenir les dispositions dont l’ap
plication seroit laissée au choix d’un tiers.— Mais il s’agit
ici d’une disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que, loin que les donations et institutions électives fussent
E
�( 34 )
•prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X I I , L X III, I jX IV , L X V e tL X V I de l’or
donnance de 1735, sur les testamens, et par celle du mois
d’aout 1747 sur les substitutions, art. XII.
Enfin, les articles X X IIIe t X X I V de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 5 , lèvent tous les doutes; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r, l’institution dont le citoyen D ucourthial-Lassuchette réclame l'exécution, est dans ce casr
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur fils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’e u x , et
choisir un autre de leurs enfans pour recueillir à sa placer
ctoient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,,
dont le citoyen Ducourtliial-Lassuchette veut tirer avan
tage, n’étoit pas vicieuse dans son essence ; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conféré à sa
seconde épouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueille! oit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit d’élire lui offroit une perspective éventuelle, qui
pouvoit lui ouvrir des chances pour faire tourner le-don
à son p ro fit, quoique personne prohibée; et Ton cite en
faveur de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
�(35)
■
r-
r
fut jugé par l’ arrêt rendu entre la veuve et les enlans
Laparra, le 18 mai 173^*
La réponse est facile et tranchante. L ’arret de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L ’institution élective q u iï
annulla , étoit universelle , et réduisoit les enfans du pre
mier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mòre succédoit à Ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœurs consanguins.
Cette mère qui avoit survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession, consistant principalement
en mobilier; et elle avoit d’ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant de son mari, pour réduire à peu
près à rien les légitimes des enfans du premier lit. L ’in
dignation plaidoit la cause de ces victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence appeler l’arrêt qui an n u lla
1 institution contractuelle faite à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
O r , qu’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont il s’agit ici?
L institution de L a p a r ra é to it u n iverselle ; cellc-ci n'est
q u e d u tiers.
La seconde femme de Laparfa avoit survécu à son m a ri,
ets’étoit emparée de toute la succession , pour en détourner
la meilleure part à son profit. Ici la seconde femme de
Gilbert Ducourthial est mortelong-temps avant son mari,
et n’a profité, ni pu profiter de rien dans sa succession.
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
scs enfans, et elle pouvoit abuser du droit d’élire qui lui
avoit été confié, soit pour jou ir, eu retardant son ch o ix ,
E a
�( 36)
soit pour y mettre un prix et des conditions à son avantage.
La secon d e femme de Gilbert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à son
mari ; la coutume qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, l’auroit exclue de l’espoir d’y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’en
fant , dont il lui étoit permis de la gratifier ostensible
ment *, la médiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée, y auroit mis un obstacle invincibleIl n y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. Tout étoit fraude dans l’affaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci j la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
Voilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial a în é , qui s’évanouit.
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement, pour recueillir à défaut d’autre ch o ix , et
l'héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice delà disposition, toutes les fois qu’il
n’en étoit pas déchu, par un choix contraire.
L ’article X X I V de la loi du 17 nivôse, abrogea ces
règles pour Tavenir ; mais il en consacra les effets pour
le passé y en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
seroit devenu irrévocable par le décès de la personne
ayant droit de révoquer. ,
�C 37 )
.
.
, . ..
L ’article vouloit que le décès qui avoit rendu la dis
position irrévocable, fût antérieur au 14 juillet 1789mais cette rétroactivité est rapportée. Il suffit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
révoquer , soit antérieur à la publication de la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourthial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est conifirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
5°. Il reste la principale difficulté à éclaircir; elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en principe, que « la faculté de disposer de ses
« biens, soit à cause de m ort, soit entre-vifs, soit par do« nation contractuelle, en ligne directe, était abolie, et
« qu en conséquence, tous les descendans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
, Appuyés sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette , lui diront sans doute, « si vous
«échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
« parce que le décès de n o tre père est antérieur, au
«moins n’échapperez - vous pas au décret du 7 mars1
«17935 car notre P^re n’est m ort qu’après ce décret1,
« et conséquemment dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de sa succes« sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. » *.
L a réponse est dans les articles I et V II de la loi du
�( 38 )
18 pluviôse an 5 , qui détei-minent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
L793 , en ces termes:
t
çt Les avantages , prélèvemens , précïputs , donations
«entre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi« tions irrévocables de leur nature, légitimement stipuo lées en ligne directe avant la publication du décret du
« 7 mars 1793 ,,auront leur plein et entier effet, confor« mément aux anciennes lois , tant sur les successions
« ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur celles qui s’ouvriront
« à l’avenir. » ( Article I.er )
« Les élections d’héritiers ou de légataires.... qui ont
« été annullées par les articles........ de la loi du 17 nivôse,
«à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant, date
«certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. *
( Article V il. )
L e contrat de mariage du 1 4 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-di$tincles ; sa vo ir , une disposition princi-»
pale, qui étoit une institution du tiers des biens de Gilbert
Ducourthial en faveur de l’un des enfans à naître de son
second mariage, par préciput et avantage, et une disposi
tion secondaire, qui étoit la désignation particulière de
l’aîné des mâles pour recueillit’ ce tiers de.biens , dans lc>
cas où il ne seroit pas fait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition principale étoit pure , sans c o n d i t i o n ,
et irrévocable de, sa nature ,• eUe a,uro.it profité à tous les:
enfans du second l i t collectivem ent, à défaut de- choixvalable d’un seul d’entre eux,, pour recueillir exclusive-
�Trient ; la disposition secondaire , qui appliquent l a vantage du tiers à l’aîné des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et pou voit être ré v o q u ée , par 1 élection. d’un autre enfant.
' Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an 5 , qui viennent
d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
p ale; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
coivformément aux anciennes lois , puisqu'elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
, Quant à la disposition secondaire , elle est maintenue
par l’article Y I I ; car cet article rétablit dans leur effet
prim itif, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 1793, mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la loi du ijn iç ô s e
o-n 2. ; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse, seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée parle décret du 7 mars 179 3 , n’enïportoit pas la prohibition de choisir un d’entre plusieurs
éligiblds, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle , irrévocable de sa nature , qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans Tèspèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîn é, étoit
�. C 4° ) . A
antérieure, soit À la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 1793 ? puisqu’elle étoit contenue dans le contrat
même de 17 7 8 . Mais elle étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant l^;loi du ly nivôse , par le
décès de celui qui seul auroit pu la révoquer par un choix
contraire.
Ainsi la validité, sous tous les rapports, se trouve proüoiiçée sans équiyoque, par les deux textes précités.
O
b
j
e
c
t
i
o
n
.
L a validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
pu problème, à la bonne heure; mais la validité de l’élection.
conditionnelle deil’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
k l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine. Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur;, qui pouvoit jüsqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîn é, par le
choix d'un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
jl est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès, doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eut été
faite le 27 juillet 1793 seulement , jour du décès de Gilbert
Pucourthial père, il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée alors depuis plusieurs mois, en
ligne
�ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
*
•
non avenue.
’
R é p o n s e .
Ce raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i°. C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 , jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778, sous le
prétexte que le décret du 7 mars 17935 lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II d elà loi du 18 pluviôse an 5 ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l'intervalle de la loi du 7 mars 1793, à celle du 17
nivôse an 2 ; il maintient l’effet primitif de toutes celles
qui avoient précédé la publication de la loi du 17 nivôse,
indéfiniment sans exception, sans distinction entre celles
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793, et celles
qui etoient antérieures. Cette décision positive de la lo i,
au surplus , n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les tem p s; car dans tous les te m p s , on a v o it pensé
que celui qui clvoisissoit tin de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition p r é e x ista n te , ne faisoit point une
disposition nouvelle ; et conséquemment qu’il ne contrevenoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
Après cela , qu’importeroit donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîn é, en 1778 , dût
n’être considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne seroit
F
�( 4 0
pas moins vrai de dire qu’elle est‘textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, qui
e n co re une fois maintient indistinctem ent , toutes les
élections antérieures a la loi du 17 nivôse..
20. Les citoyens Ducourthial p u în é s n e se font pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à l’appui de leurs
prétentions le principe d’égalité des partages établi par
les lois de 1793 ^ et de l’an 2. Us ne veulent pas voir
que ces lois n’ont pas été faites pour régler les intérêts des
donataires entre eux, mais seulement pour régler les in—térêts des héritiers légitimes, mis en opposition avecceux des donataires. G’est cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien énergiquement exprimé dans l’articleL V II de la loi même du 17 nivôse, qui porte :
tr Le droit de réclamer le bénéfice de la lo i, quant aux
a dispositions qu’elle anmille, n’appartient qu’aux héritiers.
« naturels..»
Il est reconnu que la disposition, du tiers des biens de
G ilbert D u co u rth ial, qui est l’objet du litige , loin d’êtreannullée,. est au contraire maintenue par rapport aux
héritiers de G ilbert D u cou rth ial, en général; que le con
trat de 1778 , qui la contient , doit avoir sa pleine et en
tière exécu tio n , en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput , au préjudice de la
fille du prem ier lit, qui n’a pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens D u cour
thial p u în és, de plus grands droits qu’à leur sœur ; consé»
quennnent, dès qu’il n’attribue aucune part à cette fille
unique du premier lit, il n’en attribue aucune non plu$
à, ses frère s, sur le tiers des biens en litige.
�C 43 3
Cela posé, ce ne peut ôtre qu’en se présentant comme
^donataires concurremment avec leur frère aîné, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le tiers des biens , et en demander partage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D u«courthial en 1778, h celui des enfans à naître de son
« second mariage qu’il choisiroit, est bon en so i, et doit
* profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait en faveur d’aucun des trois.
« O r , il n y a point eu de choix valable, puisque le seul
«■qui ait été fait, celui qui étoit contenu dans le contrat
« merae de mariage , du 14 mai 1778 , a été annullé par
« le décret du 7 mars 1793. »
Hé bien! ce raisonnement, quand il ne seroit pas ren
versé par l’art. V II delà loi du 18 pluviôse, s'écarterait
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle généiale, que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
pi ohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héiitiers naturels en leur qualité d’héritiers seulem ent , et
non Par des donataires contre d’autres donataires. En
un m o t, les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu’en faveur des héritiers ; aucune n’a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen D ucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père com m un l’a avan-
'
r 2
�C4 4 )
tagé par l'acte le plus favorable de la société , par un contrat
de mariage : d’un préciput qu’il pouvoit lui ôter, mais
qu’il a voulu lui conserver. En vain ils feront des efforts,
pour se l’évolter contre la volonté paternelle , ils n’en;
feront que d’impuissans.
Paris par le jurisconsulte ancien sous-signé, le 8 germinal an g..
B E R G 1E R ,
D
é l i b é r é
à
L e C O N SE IL SOU SSIGN É qui a vu le mémoire à.
consulter et les diverses consultations au bas rapportées,
pour le fils aîné du second lit. de feu Gilbert Ducourthial.
de Lassucliette
des résolutions contenues d&ns ces consul-' tâtions. Trois questions y ont été traitées..
i° . Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens
faite en faveur des enfans du second lit, est valable?
2°. Si cette institution profite à tous les enfans} ou*
¡»u fils aîné exclusivement?
3°. Quels sont lés droits de la fille du premier lit?
L a première et la troisième question ne présentent
point de difficulté sérieuse..
Lors du contrat de m ariage, l’inégalité dé succession,
entre les enfans n’étoit pas prohibée; ils pouvoient être
" avantagés les uns sur les auti’es : on avoit éclairci et con
damné le doute , si des enfans du second lit pouvoient
être mieux traités que ceux du premier. Le contrat du,
E s t d ’a v is
�second mariage assura donc irrévocablement aux enfans*
du second lit ua avantage alors licite.
20. Par les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant, de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa ,
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avi'il 1791 rendit
ee rappel inutile; elle le fit clle-mcme en> prononçant
l'abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permet
taient d’exclure les filles. La fille du premier lit est donc
héritière comme >les autres enfans , sauf le rapport.de ce
qu’elle a reçu;
3 • Mais à qui appartiendra le tiers réservé dans' le1
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat a celui d’eux qui seroit choisi ,
et à. défaut, à lam é?, G est la seule question véritable-'
ment litigieuse..
Bans l’ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute. Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîné, que le contrat du
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit j le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna ii aucun des enfans à en. naître la.certitude de re
cueillir ce tiers. Uni seul y. étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant. Il est vrai
qu’à défaut de ch oix, l’aîné étoit appelé : il est vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an 5 , a confirmé , art. 1er. ]es
institutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de la loi du 7 mars 1793 , et que par l’ar
ticle V II, elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17
nivôse an 2 , les élections d’héritier, qui auroient été fa i-
�( 4M
tes par acte ayant diue certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse.Mais, dira-t-on, l’article V II n’est pas
a p p lic a b le , puisquil n y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et 1 article Iei*. n’est pas applicable
non plus , parce qu il n y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
■
7 mars 1793 , lui avoit ôté la faculté du ch oix, en dé
clarant que tous les descendans auraient un droit égal
sur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont e u , par la loi du
7 mars, un droit égal à ce préeiput qu’il avoit destiné
en se mariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus
été permis depuis le 7 mars 1793-, de disposer en faveur
de l’un, au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à ses parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués, et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
Mais le choix fut placé-dans l’institution même ; l’ins
tituant en se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut donc, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir,'si son père ne disposoit pas au-
�C 47 7
trement. H avoit donc sur ses frères qui n’étoient qu e ligibles, l’avantage d’être élu conditionnellement', c està-d:re, si le père ne térrioignoit pas une autre volonté.
La condition qui Tauroit dépouillé n’étant pas arri
vée , son droit remonte au titre qui lui fut donne par
le contrat, titre irrévocable de sa n a t u r e ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé a laissé subsister
^institution en faveur de l’aîné dans toute sa force-.
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com
mun des testateurs, l’aîné étoit l’objet dés choix et des
préférences; et si l’on se réservoit de p o u v o i r appeler
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans
le devoir que pour lui donner- des co-partageans. C’est
dans la même intention qu’afin que la réserve derchoisir
ne lui nuisît pas,, on déclaroit qu’à défaut d’élection il
seroit héritier.
L e défaut d’élection n’est donc que la ratification de
*|V •
linstitution de l’aîné, si un autre n’est appelé : o r, la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con-,
trat à. la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,
et nullement par la loi du 7 mars 1793^
Il
n’est pas même vi'ai que - cette loi eût ôté au père
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un
de ses enfans qu’à l’avenir , elle ne détruisoit pas
l’avantage déjà fait à celui des enfans qu’il éliroit, encore
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , en
cas de non élection.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir,
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre
.
�( 43)
irrévocable, elle ne pouvoil embrasser l’hypotlièse dont
il s’agit; car, ou elle empechoit le père d'élire, ou elle
lui en laissoil la faculté. Si elle lui en laissoit la faculté, il
pouvoil donc dans cette espece particulière avantager un
de ses enians : si elle empêchoit l’élection, elle auroit donc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde; elle auroit eu eiTet ré
troactif. Le père avoit donné. (U n e institution contrac
tuelle est une donation ). Le père avoit donné à un seul
parmi les enfans qu’il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il 11 y
avoit pas d’élection-, il y en avoit une bien expresse dans
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en
substituer une autre, elle doit avoir son effet.
Trois lois sont à considérer : celle du 7 mars qui abolit
pour l’avenir la faculté de disposer en ligne directe ; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures .et irrévocables.
La loi du 17 nivôse fut plus hardie', elle annulla ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
]e f4 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l'effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2, fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi jdu 9 fructidor an 3. Le donateur ou instituant,
décédé le 27 juillet 1793 , est donc mort sous l’empire
de la loi du 7 mars précédent, qui ne touchoit pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an 5 maintient expressé
ment , par l’article I.cr. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avaut la publication do
la
�( 49)
la loi du 7 mars 1793 ; et par l'article V I I , elle maintient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi du 17 nivôse.
O r , la disposition de 1778 est antérieure au 7 mars
* 793Elle est irrévocable de sa nature ; car elle est comprise
dans un co n trat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvoit être révoquée au préjudice
de l’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du choix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’institution en soi ne soit irrévocable: elle donne droit, et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne l’est pas : tous les
appelés ont l’espérance d’être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
L article V II de la loi du 18 pluviôse est décisif j il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses •
1 °, que l’élection antérieure au 17 niyôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 20. qye la loi du
7 mars 1793 n’avoit pas prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d’actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations, ou devenus tels par les événemcns, tels
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�( 5o ')'
que les testamens après le décès de leurs auteurs ; que les
élections ne furent supprimées que par la loi du 17 nivô>e,
et que les corrections faites ù.cette loi les out rétablie^ pour
le passé.
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. '
-’ .
O r , il s’agit ici d’une donation faite un entre plusieurs:
donation irrévocable et permise en 1778.
Il
s’agit de l’élection de ce donataire , faite dans la dona
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
Avant son décès arrivé en juillet 1793 , ou il eût pu en
appeler un autre , ou il ne l'auroit pas pu. A u premier cas,
il 11e l'a pas voulu ; sa volonté , que rien, ne génoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, l’élec
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit pas, doit être exé
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit : elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le contrat de mariage. Le dépouil
ler , ce seroit rétroagir ; ce seroit tomber dans cette absur
dité de le dépouiller , parce que la condition sous laquelle
le testateur l’avoit appelé ( le défaut d’autre ch o ix ), est
arrivée.
D É L IB É R É i\
Paris, le
2
germinal an 9.
SIM É O N . P O R T A L IS . M U R A I R E , président
au tribunal de cassation. F A V A R D .
L E C O N SE IL SO U SSIGN É , qui a lu une consultation
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données ¿1 Riom et à Clermont-Ferrand \
E s t n u m ê m e AVIS sur les trois questions traitées dans
çcs co n su lta tio n s, d o n t les résolutions sont uniformes,
�( Si )
Sur ïa première question, il est sans difficulté qu en 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde femme, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
autrement, un de ses enfans plus que l’autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
La jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui contractoit un nouveau mariage, ayant des enfans du premier,
de faire des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union, après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du it août 1740 , qui
est rapporté en forme avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
79. On trouve au même en droit, à la suite de l’arrêt du 11
août 1740 , un autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L institution d’héritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , étoit donc valable dans son principe.
Sur la d eu x ièm e q u e s tio n , cette lib é ra lité du père subsistoit dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est décédé, et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales:
G 2
�.
c
S
z
5
mais cette loi ne régloit que l’avenir, et non le passé.
L ’effet rétroactif attribué depuis aux lois des 5 b ru
maire et 17 nivose an 2 , en rétrogradant jusqu’au 14
juillet 1789, a été aboli, et par conséquent l’institution
d’héritier, qui avoit été détruite, est redevenue en pleine
Vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second lit , les autres
enfans ne peuvent le lui contester.
L e contrat de mariage de X778 ,. contient deux disposi
tions :1a première est une institution d’héritier pour untiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
ou le survivant d’eux voudront choisir ; la seconde est
une vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils aîn é, au défaut de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N ’y ayant point eu de choix ni par les père et mère,
conjointement, ni par le citoyen Ducourthial qui a sur
vécu , le fils aîné s'est donc trouve seul donataire, non,
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que le contrat de mariage renferme.
La loi du 7 mars 1793 n’a point défendu les élections
d’héritier ou de donataire à faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d’héritier ou de donataire n’est
point une donation proprement dite. Ce n’est que l'exé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions
sont de. droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1793 doit donc être restreinte dans le cas des.donations
postérieures à sa publication.
* I>’aillcurs; le fils aîné n’avoit pas besoin detre élu. Il
�(
6
3
)
•
•
.
tStoit institué éventuellement par le contrat de mariage
m êm e, dans lc'Càs où üri'aüttû que lui ne seroit pas
nommé.
i
v
r k afn i Vàrticle V II de ta loi du ià pluviôse an 5 , donnée
en explication du rapport de l'cfîet rétroactif, porte : « T^S
« élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
«perdu q u io n t été annullées par les articles X X III et
« X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
« 1789 , sont rétablies dans leur effet prim itif, s i elles ont
« étéfa ites par acte ayant date certaine avant la publi« cation de ladite loi du 17 nivôse. »
D e pareilles élections pouvoient donc s’effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l’espèce proposée, le citoyen
Ducourthial étant décédé le 17 juillet 1793, quand on
considéreroit le défaut de choix de sa part comme une élec
tion du fils aîné du second l it , cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les pèi*e et m ère, ou le survivant d'eux, n’éliroient pas:
ce qui met son droit hors de tout doute.
Il est m êm e o b se rv e r, q u e l’article V I I de la loi du 18
pluviôse ne parle point du cas où le donateur prévoyant
le défaut d'élection, a désigné éventuellement, comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fut recueillie.
Sur la troisième question, la fille du premier lit étant
exclue par la coutume, sa renonciation à la succession
future de son père n*a pas plus d’effet que lu forclusion
�( 54 )
légale. A in s i, elle a le droit de succéder avec ses frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793.
D é lib é r é
à Paris i par le citoyen F e r e y ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
F E R E Y,
** I
A R io m , de l'imprimerie de L a n d r io t , imprimeur du tribunal
d ’app
e l
An 9
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Touttée
Touttée jeune
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Pagès
Maugue
Bergier
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
partage
successions
secondes noces
conflit de lois
droit d'aînesse
Description
An account of the resource
Consultations [contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette avec Marie-Léonarde Cornudet et contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte Ducourthial, du 2 avril 1783]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1778-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0710
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
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BCU_Factums_M0527
BCU_Factums_M0127
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