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MÉMOIRE
POUR
J oseph
D A U B I N , P i e r r e M O U R G U Y E et G a b r i e l l e
B A R E Y R I E , fe m m e B A P T I S T A L , cu ltivateu rs,
habitant au village de M o n c e l, co m m u n e de SainteEulalie, appelans et défendeurs en pérem ption ;
CONTRE
L e sieur A n d r é C A B A N E , se d isa n t ancien ferm ier
de La terre de S a in t-C h a m a n t, in tim é et demandeur.
IVV%W VVW\VWVV\»WV^
L
E sieur Cabane prend le prétexte d ’une péremption
pour poursuivre l ’effet de plusieurs sentences féodales,
contre les appelans, qui cependant ont régulièrement
p a yé ce q u ’ils doivent eux-m êm es, mais que la pagésie
forcerait de p a y e r des sommes considérables p o u r les
cens de tout leur village.
i
�( o
L a révolution a éteint la pagésie et la féodalité; le
sieur Cabane l’avou e : il avou e aussi q u’ une dem ande
en pérem ption d ’appel a pour résultat d’obtenir la
confirmation de la sentence attaquée; d’où il faudrait
conclure que si le législateur a annullé la sentence et
l’a p p e l, il s’ensuit nécessairement q u’il ne reste plus
de procès en pérem ption.
Mais ce n’est pas ainsi que raisonne le sieur Cabane.
I l dit que des sentences rendues au.profit du seigneur
peuvent n’être pas féodales ; que d ’ailleurs il n’y a
procès que sur la pérem ption d ’ un a p p e l, ce qui est
un procès indépendant de l’a p p e l; d’où il conclut que
la Cour doit juger la p é re m p tio n , sans s’inquiéter de
l ’objet pour lequel on plaide.
V oilà tout le système que les appelans ont à com
battre ; mais en prouvant q u ’il n’y a ni pérem ption
de f a i t , ni procès à ju g e r , ils se préserveront d’ une
injustice criante qui aurait pour résultat de les forcer
à payer la dette d ’autrui, sans avoir aucun m o y e n de
recouvrem ent.
F A IT S .
L e s agens du sieur de L ig n era c, seigneur de SaintCham ant et Sain t-M artin , formaient presque annuel
lem ent des demandes contre plusieurs censitaires, et
obtenaient sentences sur sentences.
C ette multitude de poursuites, gardées par devers
eux , n’est certainem ent pas une preuve de n on paiement. Ori sait que le moindre retard occasionnait
�(3 )
des diligences, toujours en pagésie contre les prin
cipaux len an ciers, et toujours avec des réserves des
condamnations précédentes.
L e 6 février 1 7 6 4 , G abrielle Berghaud et L ouis
M o u rg u y e furent assignés à la requête du marquis de
L ig n e r a c , seigneur de S a in t - d ia m a n t , devant le juge
de Sain t-M artin , com m e tenanciers de tout ou partie
du village M o n c e l, pour p ayer audit seigneur trentehuit seliers seigle, trente setiers a vo in e , sept livres un
sou a r g e n t , e t c . , pour les c e n s , rentes et droits sei
gneuriaux d u s a u d it seigneurf sur ledit v illa g e, par
reconnaissances solida ires, et c e , par chacune des trois
dernières années éch u es, avec l ’intérêt : le sieur de
L ign erac termine par in d iq u e r le paiem ent à faire
entre les mains du sieur C a b a n e , son ferm ier-gén éral,
a vec réserve de tous autres dus, droits de lods, etc.
Sur cet e x p lo it, le juge du seigneur rendit une
sentence par défaut le 17 mars 1764« L e sieur Cabane
en rapporte une copie in fo rm e, et sans form e exécu
toire.
^
Aussitôt que les autres censitaires du village furent
informés de cette dem ande en pagésie qui allait re
tom ber sur e u x , ils s'en plaignirent. On vo it par une
requête du 17 mai 17 6 6 , que les nom m és L a b ru n ç,
A lzia c , L ouis Berghaud et M e y lia c articulèrent avoir
payé exactem ent leurs cens au sieur Cabane , qui
endossait leurs paiemens sur les liéves sans donner de
quittances; ils d em a n d èren t, en c o n s é q u e n ce , p e rZ
�m
mission de l’assigner po u r vérifier le fait ^et leur donner
quittance des sommes par lui reçues.
L e juge donna
une simple ordonnance portant
permis d ’assigner; et ce qui ne sera pas vu sans éton
n e m e n t, le sieur Cabane interjeta ap p el, au parlem ent,
de cette ordonnance du ju g e , qui permettait de l’as
signer pour déclarer ce q u’il avait reçu. C e ne serait
donc pas lui qui aurait obtenu les sentences qu’il s’ad
juge aujourd’h u i? car a u r a it-il osé étouffer la voix
de ceu x q u ’il poursuivait indirectem ent en la personne
de leurs co-paginaires.
L e 18 janvier 1 7 6 8 , Louis Bareyrie et Louis M ourg u y e furent assignés à la requête du seigneur, pour p aye r
solidairement les dernières années des cens du village. L e
29 février 1 7 6 8 , le juge du seigneur rendit une autre
sentence par d é fa u t, qui adjuge lesdites conclusions.
Elle est dans la m êm e form e que la précédente.
Pendant que ces poursuites étaient dirigées à la re
quête du seigneur, contre Bareyrie et M o u rg u y e , il
en existait d’autres contre François D au b in en vertu
de sentences obtenues contre lui en 176 9 et 1 7 6 1 ,
pour la m êm e pagésie. Ses meubles et ses bestiaux
furent exécutés le 14 mars 1 7 7 1 , avec dép lacem en t,
toujours cl ici requête d u seigneur.
L e 4 mars 1774, Louis M o u rg u ye et ledit Joseph
D aubin furent assignés en pagésie pour payer les trois
dernières années du t é n e m e n t, toujours à la requête
du seigneur, et ils y furent condamnés par d é fa u t, par
sentence du 27 août 1774*
�(55
Ils ont été encore assignés en 17 7 8 et 178 1
condam nés par sentences des
19
décem bre
et
17 7 8
et 17 décem bre 178 1 ; toutes ces sentences sont sans
form e e x é c u to ire ; la dernière seule est signée du
greffier, mais en seconde expédition. Il paraît que
ces mêmes sentences furent successivement attaquées
par appel porté à Salers ; aucune des parties n ’a les
procédures qui y furent faites.
• L e 2 n ovem bre 1 7 8 4 , le sieur C a b a n e , en qilalité
de ferm ier général des terres pour tors appartenantes
a u sieur de L ig n e r a c , fit signifier les sentences de
>1768, 1 7 7 4 , 1 7 7 8 et 178 1 à Louis- B a r e ÿ r ie , Louis
M o u r g u y e et Joseph D a u b i n y a v e c somïnation de. lés
e x é c u t e r , ret- assignation en liquidation des grains.
C e u x - c i notifièrent au sieur C a b a n e , par exploit du
1 7 no vem b re 1 7 8 4 , qu'ils persistaient dans l’appel déjà
interjeté des deu x premières sentences, èt q u’ils inter
jetaient appel des d eu x dern ières, corn m e nulles, in
compétentes et attentatoires à l’autorité de la sénéchaus
sée d ’A u vergn e , saisie de la contestation ; en consé
q u en ce, ils assignèrent le sieur Cabane h y p r o c é d e r ,
co m m e se d isa n t ancien ferm ier et aux droits du sieur
de L ig n e r a c , tant pour lui que pour ledit s e ig n e u r,
dont il prenait le f a i t et cause.
L e sieur Cabane se p résen ta, sur cet a p p e l, le 10
février 1 7 8 5 ; il dit que sa présentation ne fut suivie
d ’aucunes autres procédures.
L e i 3 août 1 7 8 8 , il demanda la pérem ption de
l ’a p p e l, et obtint sentence par d é fa u t, le 1 4 juillet
�•i 6 )
1 7 8 9 , qui prononça ladite p é re m p tio n ;le 4 août 1 7 8 9 ;
les Bareyrie en interjetèrent appel situ pie au parlement.
On ignore s’il fut pris des lettres de relief sur cet appel,
et si le parlement fut saisi. L a révolution a dévoré
ou paralysé tout ce qui tenait aux matières féo d ales,
et il n ’est pas su rp ren an t, ni que la trace de ce qui
a pu exister soit perdu, ni que toutes les parties aient
gardé le silence depuis. 1789.
L e s lois de 179 3 ayant condam né aux flammes les
titres et sentences qui porteraient signe de féodalité
ou qui la renseigneraient, certainem ent le s.r Cabane
a dû s’y con form er , et voilà pourquoi il n ’a plus les
•expéditions exécutoires dés sentences du sieur de L i gnerac ; .voilà pourquoi ne, réclam ant rie n , pendant
vingt an s, contre des censitaires qui avaient payé leur
¡item ré g u liè re m e n t, et qui ne devaient plus p ayer la
portion des autres, tous les d o c u m e n t,to u te s les traces
de leurs procédures se sont pierdues en presque totalité*;
et aujourd’hui on veut q u’ils en soient victimes.
.
L e sieur Cabane s’est souvenu en 1809 de l ’appel
de 1 7 8 9 , et il a pensé que s’il pouvait l’attaquer par la
pérem p tio n , il obtiendrait par cette voie indirecte une
confirmation de se n ten ce, que la C our ne pourrait .pas
prononcer directement.
En conséquence, par exploit du 22 février 18 0 9 ,
le sieur Cabane' a assigné en la C our d ’appel Joseph
D u u b in , et Louis M ou rguye ( d é c é d é ) , pour voir dé*
clarer l’appel sim ple, du 4 août 1 7 8 9 , n u l , périmé et
com m e non a v e n u , et voir ordonnev l’exécution de
la sentence attaquée.
�(7 )
P a r autre exploit du i 3 juillet 1 8 0 9 , il a assigné
M o u rg u y e fils , et G abrielle B a r e y r ie , fille de L ouis ,
po u r voir déclarer le m êm e appel de 1 7 8 9 , p éri, désert
et n u l, voir en conséquence ordonner l ’exécution de
la sentence attaquée.
L e s parties en sont venues à l ’audience de la C o u r ,
le 10 mars 1 8 1 0 ; les appelans ont soutenu qu’un
appel sim p le, et non suivi d’ajo u rn em en t, ne pouvait
pas tom ber en pérem ption , et que la désertion ne
pouvait jamais avoir lie u , sans que l ’appelant eût droit
de ren ou veler son appel.
L a C our n’a pas d ébouté expressém ent le s.r Cabane
de ses demandes en p érem ption et désertion , mais
elle a ordonné que les parties mettraient leur procé
dure en é t a t , sur l ’appel du 4 août 1 7 8 9 , et a remis
la cause d ’ un m o is, pour y statuer.
L e sieur C a b a n e , en notifiant cet arrêt, le 22 m a i,
a u x a p p e la n s, les a assignés co m m e co-débitcurs so
lidaires , pour lui voir adjuger les conclusions prises
par les deu x exploits de 1 8 0 9 ,
en tout cas, pour
procéder sur l’appel de 1 7 8 9 , et voir prononcer le
b ien -ju gé de la sentence du 14 juillet 1789.
Ces conclusions prouvent que le s.r C aban e n’aban
donne pas sa prétention de faire déclarer cet appel
péri et désert. C ep en d an t, quoique l’arrêt de la C our
ne soit pas m o tiv é , et ne statue pas e x p r e s s é m e n t sur
ses premières conclusions, il est évident que la C o u r
n ’a pas entendu les a d o p ter, ni m êm e les laisser re
�( 8 )
p ro d u ire, car elle n ’aurait pas ordonné de faire une
procédure sur un appel périm é ou désert.
'
Mais puisque le sieur Cabane ne veu t pas se croire
jugé sur ce poin t, les appelans le prendront au m ot
pour demander eux - mêmes un arrêt positif sur ses
demandes en pérem ption et d ésertio n , qui étaient la
seule chose a ju g e r, f a u f à lui à recom m en cer toute
procédure nouvelle q u’il avisera.
..
;
MOYENS.
»
I l ne peut y avoir lieu à pérem ption pour un appel
simple : car l ’ordonnance de Roussillon ne fait périm er
que les in sta n ces, et un appel simple n’en est pas
u n e , dès q u ’aucun juge n ’en est saisi. T e lle a été sur
ce point la jurisprudence constante.
Quant à la d ésertio n , elle n ’est point opposée à
D a u b in , assigné par le prem ier exploit du n
février
i 8 ° 9 , qui ne contient aucunes conclusions à cet égard.
11 suffît donc d’y répondre au nom des M o u rg u y e et
Bareyrie.
D ’abord la désertion est incompatible ave<j: la p é
rem p tion ; car si un appel pouvait périm er, il ne serait
pas désert. L e sieur Cabane devait d ’abord conclure à
la désertion, qui était la première fin de non-recevoir
ù opposer dans l’ordre de la procédure; il a dem andé
q ue l’appel fût déclaré p én et désert. A i n s i , en s’o c
cupant
�( 9 )
cupanf de la pérem ptio n , il a renoncé à la désertion;
de m êm e que s’il eût conclu au bien jugé et à la p é
remp tion, il aurait renoncé à la pérem ption : à plus
forle raison f a u t - i l lui dire qu’ ayant assigné D au b in
et M o u rg u y e p è r e , en fé vrier 1 8 0 9 , sans parler de
désertion, il n ’a pu y conclure contre M o u rg u y e fils,
par un exploit postérieur.
L a désertion, au reste, n’est plus prononcée par les
tribunaux depuis 1790 ; lorsque des tribunaux
ont
vou lu renouveler cet ancien u sa g e, la C our de cas
sation n ’a point approuvé leurs décisions, et cela par
un m o tif bien sage et bien simple.
f
!
C ’est q u ’avan t la r é v o lu t io n , la jurisprudence g é '
nérale était d’accorder trente ans pour interjeter appel,
en sorte que la désertion prononcée ne produisait que
des eifets frustratoires, puisqu’elle n’em pêchait pas
de refaire l’appel : aussi plusieurs parlemens avaient
l ’ usage de converir en anticipation les demandes en
désertion q u i , d ès-lo rs, se réduisaient à des dépens,
com m e le dit B r o d e a u , lettre P , n.° 14.
Mais depuis que les appels sont limités à un délai
plus c o u r t, c ’e st-à -d ire , à trois mois et à dix ans, la
désertion a paru un abus à r é f o r m e r , puisqu’on ne
peut pas la faire m arch er avec le droit de recommencer
un appel pendant trente ans. V o ilà pourquoi la dé
sertion est ab so lum en t to m b ée ien désuétude : on en
est convaincu p a r le grand nom bre d ’arrêts qui se
trouvent aux Bulletins de cassation.de l ’an 7 , de l ’an 9,
de l ’an 10 et de l’an 1 1 . Par-tout on voit les désertions
3
�C 10 )
proscrites ; et nulle part on ne voit q u ’il en ait été
toléré yne seule , m êm e par simple rejet.
Il y ;a donc lie u , en statuant sur les demandes du
sieur C a b a n e , de le débouter de ses conclusions en
pérem ption et désertion. O r , on le r é p è t e , c’était là
l ’objet unique de ses conclusions avant l ’arrêt du 10
mars 1 8 1 0 ; et il ne peut pas les confondre a vec le
b ien jugé de la sentence de 1 7 8 9 , puisqu’au lieu de
se départir de sa prem ière d em a n d e, qui y était en~
core plus in com p atib le, il la renouvelle et y persiste.
1.
...
•
. . .
C ep en d a n t, si la C o u r croyait devoir statuer sur les
nouvelles conclusions du sieur C aban e , il s’agira de
savoir an fond s’il a pu reprendre une procédure de
pérem ption en m atière fé o d a le , au préjudice des lois
qui ont éteint tous les procès y relatifs; et subsidiai.rem ent, s’il y a pérem ption.
¡
; .
/
; 1 *. ,.
A b o r d o n s , dès à présent , le subsidiaire, qui sera
plus brièvem ent e x p é d ié , et disons q u ’il n ’y a pas de
pérem ption.
;
I / a p p ë lp o r t é e n la sénéchaussée d’A u v e rg n e , était un
appel d'incom pétence. On soutenait que les .premiers
appels ayant saisi la sénéchaussée, le s.r Cabane n’avait
revenir devant le juge du seigneur pour dem ander une
; pagésie en vertu de reconnaissances de cens soumises
.au juge supérieur. E n effet, la sénéchaussée seule était
com péten te pour accorder ou refuser les arrérages de
ces mêmes c e n s , échus pendant le procès ; il fallait
�( n )
y conclure devant e l l e , el' non saisir un juge déjà
dépouillé, pour multiplier les sentences et les appels.
Cet appel d’in com p élen ce n’était pas susceptible de
p é re m p tio n , suivant l’opinion des auteurs, conform e
au texle m êm e de la loi.
B o u s s e a u - L a c o m b e , v .ù péremption , 'n.° 1 2 , dit
q u ’elle n’a pas lieu ès-causes ou procès du dom aine,
n i es-appels d ’incom pétencè, parcè que cela regarde' le
d r o it’public.
C ètte décision est conform e à la loi Properandum
d ’où est tirée l’ordonnance de Roussillon. Censetnus
itaque omnes lites non ultrà triennii meta s , post litem
contestatam , esse protrahendas ( except is tantum m odo
c a u s L s quœ a d /u s J is c d le p ertin en t , vel quai a d p u blicas respiciunt fun ctiones).
N ’y a u r a i t - i l pas en effet un inconvénient grave
que le silence d ’ une partie, souvent occasionné par la
difficulté dç-réunir des co-intéressés, ou par des pour
parlers d ’arrangemeris, p û t donner la force de chosejugée h des sentences rendues par des personnes sans
caractère, et peut-être quelquefois dans des matières
o ù il serait choquant que ces sentences ne fussent pas
réform ées?
C ertes, les juridictions sont de droit p u b lic, cela est
incontestable; et s’il est encore incontestable qu’une
partie ne peut déroger au droit public par une con
vention p a rticu lière, com m ent le poU rrait-elle par
son silence? C ’ést donc une monstruosité que la loi
a voulu prévoir et é v ite r, en disant que la pérem ption
4
�(
12
)
n ’aurait pas lieu pour ce qui tient au droit p u b lic, aux
fonctions publiques ; en un m o t , à l’ordre des juri
dictions.
Mais quand la pérem ption e û t pu exister ic i avant
1 7 8 9 , il est impossible d’adopter que la procédure y
relative ait seule resté d e b o u t , quand l ’appel et les
sentences sont anéantis com m e chose féodale.
A cela le sieur Cabane o b je c te , i.° q u ’il ne s’agit
pas de féodalité , parce que c ’est uu ferm ier qui est
cré a n c ie r, et que la suppression n ’atteint pas les fer
m ie rs; 2.0 que quand l’objet du procès serait féo d a l,
il n’est queslion que de juger s’il y a pérem ption ; ce
qui est une procédure indépendante.
Répondons d’abord que le sieur C aban e se dit fer
m ie r , sans l’établir par des b a u x de ferm e. I l a pris
ce lle qualité dans une signification des sen ten ces, en
1 7 8 4 , et l’appel lui en a été notifié, co m m e se d isa n t
ferm ier et a u x droits d u sieur de Lignerac.
Q uoiqu’il en s o i t , com m en t l’objet du procès ne
serait-il pas fé o d a l, lorsqu’ il s’agit de cens demandés
à trois censitaires, par le seigneur, et en cette qualité,
pour la totalité de la redevance assise sur un ténemerit.
A la v é r ité , il y a des cas où les fermiers ne sont
pas atteints par la suppression féod ale, mais c ’est quand
ils se sont procuré un titre personnel, em portant no
vation.
U ne lettre du com ité de législation, écrite au tri
bun al du district de Riorn, le 9 prairial an 2 j a décidé
qu’ une rente constituée au profit d ’ un fermier, en 173 0 ?
�( I3 )
devait être p a y é e , quoiqu’elle dérivât d ’arrérages de
cens. U n e lettre du ministre de la justice , écrite au
commissaire du d irectoire, à P a u , le 22 pluviôse an 7 , '
décide de la m êm e m an ière,
pour une obligation }
consentie à un f e r m ie r , pour cens. R ien n’ est plus
légal que ces décisions, puisque le ferm ier était censé
avoir touche ce q u i lut éta it d û , et l ’avoir échangé
contre une obligation q u i, par cette fic tio n , rentre
d a n s la classe des autres obligations. M ais cette r é
flexion du ministre prouve par e lle -m ê m e que le fer
m ier n ’aurait pas été ex e m p t de la suppression, s’il
n ’y avait pas eu engagem ent personnel à son p r o fit,
,
dônt l ’effait aVait été de dénaturer Corigine féodale
et é v i d e m m e n t le titre ne cessait d ’être féodal que
par novation.
L a n o va tio n , en e ffe t, peut seule em pêcher de re
garder c om m e féodal ce que la loi déclare tel. Novatio
est p rio n s d e b itiin alùum debitum trans/usio
p m rim a tu r.
u t p rio r
Si donc la prem ière dette est étein te , il
n ’en reste q u ’ une entre de simples particuliers, et la
féodalité est évanouie. M a is , hors ce cas d irim ant, la
règle générale reste; et il est aisé de m ontrer que les
fermiers ne sont pas à l ’abri des suppressions féodales.
L a loi du 2 5 août 1 7 9 2 , supprime tous les droits
féodaux. L ’art. 10 porte que les arrérages, m êm e ceu x
dus en vertu de ju g e m e n s , ne sont pas exigibles; l’art,
12 éteint tous tes procès relatifs aux droits féodaux.
O n a quelquefois argum enté de l ’art. i 3 , qui c o n
serve aux fermiers lès actions qui leur sont réservées
�(. *4 y
par l’art. 3 7 .d e la loi du i 5 mars 1 7 9 0 , de se faire
restituer les sommes payées aux seigneurs, pour les
droits écliu s, depuis Le,4 août 1789.
M ais en lisant cette loi de 1 7 9 0 , on rem arque q u’elle ,
est
relative aux. droits de bannulilé; et de justice, sup
prim és Le. 4 aoû,t 1 7 8 9 ; il y est dit que les b aux sont
résiliés
depuis la suppression, et que si les fermiers ont
p a y é au seigneur des pots de v in , ils les répéteront au
prorata de la non jouissanceU n e dernière loi du 28 nivôse an 2 , a déclaré ne
pas com prendre d a n s l’annullation des procès fé o d a u x ,
ce u x in ten tés, i.° par des vassaux ou censitaires, pour
restitution des droits.exigés d’e u x ; 2.0 par des ci-devant
ferm iers, pour restitution des pots de vin qu'ils ont
avancés, ou des fermages q u ’ils ont payés à raison des
droits qui leur étaient afferm és, et dont ils n’ont pu
jouir.
• . 1
1.
A in si, bien loin q u ’il résulte de l ’ensemble des lois une
exception pour les fe rm ie r s , et un droit subsistant en
leur fa v eu r, contre Les censitaires, il faut en con clure,
au contraire, que la loi ne s’est occupée d ’eux pendant
lfo is.fo is, que pour leur donner une action contre Le
seigneur seulement, et que,, par co n sé q u e n t, elle les
a laissés pour tout le reste dans la règle générale de
la suppression, a moins qu ils n’eussent, c o m m e 'o n
l a déjà d i t , un titrç. nouyel et personnel.
C ç point; dej(drpitj£g confirme’ quand ,011 suit les lois
pQ^tqrieiu’es^; Coü^ du', 1.7 juillet. ^ 7^ 3, en ordonnant
le bj-ulemqnt de, toq$. les, titres fé o d a u x , y assujétit
�( :* 5_)
tous les dépositaires desdits titres, e t 1déclare q u îe lle:y
com prend tous jug em en s et arrêts qui porteraient re
connaissance des droits féodaux , o u q u i les rensei
g nera ient. Les registres et cueilleretsisont désignés en
core pour le brûlem ent. Or, fout, Immonde se rappelle
q u e lès fermiers furent les premiers à brûler leursTre
gistres de recettes.
-
'
'
(
U n e autre p re u ve qup la loi n’excep tait personne,
c ’ est q u’il fallut une exception expresse j l e >9.frimaire
an 2,' par esprit^d’équité en
CQ^-dèbitéurs
qui avaient p ayé la part dé leurs
co - obligés en
-vertu de lâ pagésie; et e n c o r e , ce droit ne fut ouvert
‘Cju’ a itelui qui prouverait a v o ir 'p a y é par autorité de
ju s tic e . C o m m e n t d o n é :un ferm ier aurait-il un pri-vilége, sous prétexte q u ’il a payé son ferm age (m ais
^volontairement), lorsque le co-débiteur p o u r s u iv i m a is
non c o n d a m n é , n ’aurait pas d ’action en pareil c a s , et
supporterait la suppression.
■
P eu t-être bien aurait-on pu accorder ce privilège
à un ferm ier, dans un tems où la jurisprudence exa
minait la vraie qualité du d e m a n d e u r, pour savoir
•s’il était seigneur ou n o n ; car lorsqu’ on adm ettait le
propriétaire lui-mêm e à dem ander un cens sous p ré
texte que l ’abolition n ’était p ro n o n cée que
c o n tr e
les
seigneurs , il était très - conséquent que les fermiers
réussissent par le m êm e motif.
Mais aucun tribunal ne reviendrait h cette jurispru
dence, depuis l ’avis du conseil d’é t a t , du 3o pluviôse
�( 16 )
an i * , et sur-tout depuis les décrets im périaux des i 3
messidor an i 3 , et 2 5 avril 1807, portant que Lorsque
le titre ne présente aucune a m b ig u ité, celu i auquel ce
titre est opposé, ne peut pas être a d m is a soutenir q u ’il
n ’ avait pa.s de seigneurie. . ) i
-
.. ¡i. i ■ ; •■'q
l i e sieur C aban e ne. se dissimule |jas qiie cës décrets
le condam nent visiblement ; mais il croit y échapper,
en disant q u ’il y a cHose ju g é e par les sentences q u’il
produit. C ’est une double erreur,; c a r , i . ° i c ’est dé
cider la question par là question e lle rm ê m e , puisqu’il
y a appel de ces sentences , et que la pérem ption
- q u ’il dem ande est dirigée contre cet appel j 2.0 il crée
u n e autre exception im a g in a ire , puisque quatre lois
successives ont annullé ’positivem ent Les ju g em etis et
arrêts portant condam nation de droits fé o d a u x , ce qui
prouve que la chose jugée n ’est pas pour elle un titre
m eilleur.
' -'h
¡' ..
■
;/=; .
•-* 1 •
R em arquons en core, quoique ce soit sans une grande
u tilité , que ces sentences sont rendues a u p r o fit du,
sieur de L ig n èra c, seigneur, pour les cens de sa terre;
à, la v é r i t é , on voit à la fin du dispositif, que ce
seigneur indique le sieur Cabane co m m e devant re
c e v o ir le paiement des condamnations : mais quel tour
de force ne faudrait-il pas pour profiter de ce bout
d ’o reille, afin de changer le rôle des parties et effacer
les qualités du dem andeur! Cette argutie mesquine
peut-elle être proposée sérieusem ent, et ne serait-elle
pas indigne de la C our?
Il
�( *7 )
I l suffit, sans d o u te , de rem arq uer que /c seigneur
seul est en q u a lité dans les sentences. Elles em porten t
donc tout le privilège du cens.
E nfin, que le sieur Cabane réponde à cette question:
Si les censitaires avaient fait débouter le dem andeur de
sa d e m a n d e , contre qui auraient-ils eu action pour les
dépens ?
Concluons d o n c , sur cette prem ière partie des p r é
tentions du sieur C a b a n e , que l’objet des sentences
q u ’il poursuit est f é o d a l , et que rien ne peut les faire
excep ter de la suppression.
V o y o n s actuellem ent co m m e n t un e pérem ption
aurait le privilège inoui de neutraliser toutes les lois
féodales, et de ressusciter, pour le sieur C aban e seul,
un genre d ’action abandonné par tout le m onde et
par lu i- m ê m e , depuis la ré v o lu tio n , lorsqu’il s’est agi
purem ent de cens.
Retenons bien que la loi a supprimé non-seulement
les droits f é o d a u x , mais encore tous les procès y re
latifs.
A p rès les lois des 25 août 1 7 9 2 , et 1 7 juillet 1 7 9 3 ,
qui portaient expressém ent cette suppression, il paraît
q u e , sous divers prétextes, des poursuites eurent lieu
de la part de quelques ferm iers, et que des censitaires
eux-m êm es voulurent faire prononcer par les tribunaux
q u ’ils ne devaient rien. Alors une loi du 9 brum aire
an 2 , déclara de n ouveau nuls et com m e non a ven u s,
tous jugem ens sur les procès intentés à raison des droits
féodaux ou censuels, /ensemble les poursuites fa ite s en
5
�t j l * )■
exécution desdits ju g e n ie n s; ordonna qué'les frais'pos*
térieurs aux lois d ’aboliliôn seraient à la charge des
avoués qui les auraient faits
et défendit au x ju g e s ,
à: peine de forfaiture, de prononcer sur les instances
indecises.
'-S
-A |) !••••.■ ;
lit U-.-y.- *■:'.>! vi
Trës-certûinemen^‘, a|jrès 'cètte l o i , le ^sieùr'Ccibàne
n e se serait pas cru fondé à poursuivre les censitaires1
d e 'S a in t - d ia m a n t ; et il ¡a bien prouvé , par le fa it,
qWil partageait sur ce point l'opinion générale. C orn -'
m e n t d o n t'a u rait-il aujourd’hui5 un drüit Iqii’il n’ava it pas alors, et en quoi les lois'seraient-elles devenuesplus 'indulgentes sur la féodalité ? *
!i
f
fclJamîlis , au contraire^'ellës n rdht ' é t é 1 fiioiris éqirî-’"
vaq ues depuis que lés décreis' impériaux-'on't tpre’scrit1*
de ne: pas! considérer•'s i ' ( é 'vàëhictiidèur''ësè seigneur fniais 'àeulernèrit si leHttré de sa dem andé est féo d a l:
car s’il n’y a pas d’am biguïté sur le •litre ^ il ÿ :a ''s u p -:
p r io ri;* '
» * '
' ;,‘ n
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!' ; *’ r
*
1
ii;M '" H
* l
*
"E qu iv oq ii er a it -o n' en co rf e ^s iir fc'è’ff e 1rfYnbrgüi t é ë ri; dt - 1
sant q u ’un ferm ier peut po u rsu ivre? Mais a v e c ' c e
cercle vicieux où a r riv e ra it-o n
si cV '^ est^ if 1juger
dé1 la féodàlit'é'par Ld jpér50/i/ze';du??cféarifcier?'eltf c’estP
ce qùô la loi prbâcrii absolument.’ Sa s é v é r ité èitctelle y >
q u ’ il n ’y a pas seiilémènl siippression par le signe féo
dal, mais encore par le mélange de féodalité’.
Dès q u ’il y a dans les litrés oiipôsés par le sieur C à - :
b n n e , signe ou m élange 'de féodalité ,l il në reste à eri
tirer que deux conséquences'incontestables; ‘
-'i -
j.° Si les sentences sont féodales, la loi les a déclarées
�C 19 )
nulles et com m e lion aven u es, y eût-il arrêt ou 'ch oseju g ée ( L o i , 17 juillet 1 7 9 3 , art. 3 , 6 et 8 .) ;
1
.
2.0 L ’annullaiion ne se borne pas aux se n te n ce s’ et
arrêts; elle s’étend aux-'poursuitespostérieures ( L o i , 1
9 brum aire an 2 , art. i . e ,) .i!
'
.Ainsi, toute procédure tendant à rappeler ou faire
rev ivre ce que la loi a a b o li, est rép rou vée et inadmis
sible.
*>'»«;«!
; :
D ’après de telles lois, n ’ëst-cé^doné pas une p u é
rilité que de dire à une C o u r soütyëraine : V o u s 'n ’aurez
pas à juger l'appel <£une Seritencé féo d a le ■vous aurez
seulement à' juger la péremption de l\'appel d ’u'ne sen
tence f é o d a le ?
'■
1:1 ■
'
ol ?
iji A b u s des mots1 et pure cacop'hdnie. 11
i i't
Quand il existe un ap p el, l’intim é n’est pas réduit à
*r r
■
,
.
j
f
}
un seul m o yen de défense; il pdut 1 attdquer par des
vices 'dé f o r m e / ‘ des fins de nôn-receVÔir,: làn là pé^
rem ptioiî : tout cela est égal au± ÿ ë u i de la'{loi;; tout
cela rentre ddris les exceptions dür défendeur.*'5' :
;
“ L e résultat uniform e dè cès éxcèp tio n s‘est'rd 5arriver
à ia cdnformation}de La
al la q u é e 'jla f uH'&ppël ;
o t j cëTréèültat'est-l&' b u t'd u p r o c è s : Cn bm>nibuiyrk'spicë
J in e m .
• ^11slv i Y b q q r, i-. <h
■Il n ’est donc pas permis de croire que la C o u r veuille
juger un-fragm ent de procès*sans regarder iYson::ori“
gind et à èës conséquences. ^ ::J :H >
J «. ■
i* •
U n e péremption d ’ailleurs'est si peu un prdcès nou
veau, q u’elle ne s’introduit^pas par un exploit à domi
cile , et en i . M instance. L'usage a toujours été de c o n -
�( 2° )'
d u r e par r e q u ê t e , quand il n’y a pas de décès su rven u ;
et le code a c tu e l, article 4 0 0 , en fait un devoir. L e
sieur C ab an e a lui-même constaté cet usage, en signi
fiant sa demande en p é r e m p t i o n , 'par req uête signi
fiée à procureur le 12 août 1788.
I l a donc lu i-m ê m e considéré la pérem ption com m e
un m o y e n de procès.
I l l ’a proposée co m m e un e exception.
I l a con d am n é son propre système.
M ais quand on serait privé de le citer lui-m êm e pour
prou ver q u ’ une pérem ption d’appel n ’est pas un procès
nouveau, et indépendant , la raison seule dirait que
quand le fonds du procès est a b o l i, il n ’est pas plus
perm is de plaider po u r la pérem ption q u e pour la
prescription. ,
\
L a féodalité n’est pas la seule m atière abolie par la
révolution ; et il est sans exem ple que des procès re
viven t sous prétexte de savoir s’ils sont périmés. N e
trouverait - on pas rid ic u le , par e x e m p le , que par
suite d ’un procès en m atière b én é fic ia le , un d é v o lu tairç qui aurait obtenu un b énéfice con testé, vînt re
prendre devant les tribunaux actuels la pérem ption
d ’un appel y rela tif?
L a loi n’a permis q u ’en u n seul cas de plaider sur
les matières supprimées ; c ’est dans les retraits lign a g e r s , et seulem ent pour les dépens. L à on pourrait re
prendre une dem ande en pérem ption; mais l’exception
confirme la r è g l e , q u i de uno d i c i t , de aitero negat.
Au demeurant, l’idée conçue par le sieur Cabane,
�' ( 21 )
d ’isoler une pérem ption , n’est q u ’ un piège contre des
censitaires qui ne doivent r i e n , et qui seraient plus
victimes de la suppression de la féodalité, que si la fé o
dalité existait encore.
' En effet, un arrêt de pérem ption emporterait de plein
droit la confirmation de cinq sentences féodales.
L e s censitaires n’auraient aucuné voie pour en em
pêch er l’exécution. I/accès au x tribunaux leur serait
ferm é ; fous les degrés de juridiction seraient épuisés,
et le prem ier juge ne pourrait réform er une décision
ém an ée de lui. L e sieur C aban e ferait donc exécu ter
sans obstacle des sentences dont l’arrêt aurait prononcé
im plicitem ent la confirmation : car quel juge pourrait
arrêter des poursuites faites par suite d ’un arrêt de la
C our ?
Ces poursuites forceraient les appelans à p ayer la
dette d’a u t r u i, sans m oyens de répétition. O n dit la
dette d ’a u tru i, c a r , encore une fo is , les censitaires,
poursuivis par le sieur C a b a n e , ont p a yé régulièrem ent
leur portion des cens.
Ils prouven t par les quittances de cens à eux données
chaque année par les préposés du seigneur, sur un cahier
particulier, savoir,par le sieur C a b a n e , j usques et compris
1 7 8 0 ; p a r l e sieur L a d e n , depuis 1780 jusqu’à 178 6;
et enfin par le sieur Coudert , pour les années posté
rieures.
Ainsi ce n ’est que par la force de la solidarité et de
la pagésie que le sieur Cabane veut faire p a ye r a u x
D a u b in , M ou rgu ye et B areyrie ce q u ’ils 11e doivent pas»
6
�( 22 )
Mais une loi du 20 août 1792 a supprim é la soli
darité; c ’est donc pour l ’éluder qu’il veu t se prévaloir
de sentences qui com prennent le cens de tout un
ténement.
Si la solidarité existait encore , l ’action serait re
poussée par l’exception cedendarum a ction um . L e sieur
C aban e ne pourrait se faire p a y e r , q u ’en subrogeant
à ses actio n s, pour être remboursé du co - débiteur
solidaire. ( C o d e civil, art. 2037.)
O r , co m m en t pourrait - il subroger à une action
é te in te ? com m en t serait-il en état de justifier ce que
doivent les co-débiteurs ? com m ent et par quelle vo ie
les forcerait-on de p ayer une portion de cens inconnue?
Ces difficultés a ch èven t de m ontrer q u ’il est toujours
im prudent d’éluder les l o i s , m êm e les plus sévères.
Chacun en profite dans ce q u ’elles ont d ’avan tageux
pour l u i ; et souvent hors de l à , les taxe d’injustice.
A u reste, il ne s’agit pas de m ontrer que la dem ande
du sieur Cabane causerait aux appelans un tort consi
dérable : il suffit d’avoir prouvé q u ’elle tend à la v io
lation de la lo i, et ce serait s’aveugler vo lo n ta irem en t,
que d hésiter à s’en dire convaincu,
»•
M .e D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . e G A R R O N , licencié-avoué.
A RIOM , de l'imprimerie du Palais, chez J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daubin, Joseph. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
pagésie
cens
contentieux post-révolutionnaires
droits féodaux
ferme
Description
An account of the resource
Mémoire Pour Joseph Daubin, Pierre Mourguye et Gabrielle Bareyrie, femme Baptistal, cultivateurs, habitant au village de Moncel, commune de Sainte-Eulalie, appelans et défendeurs en péremption; Contre Le sieur André Cabane, se disant ancien fermier de la terre de Saint-Chamant, intimé et demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1764-Circa 1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0625
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0420
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53885/BCU_Factums_M0625.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sainet-Eulalie (15186)
Montcel (63235)
Rights
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Domaine public
cens
contentieux post-révolutionnaires
droits féodaux
ferme
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-
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x m a m i Ai9aLEMx?sjii£±t m m
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
POUR
C
a t h e r in e
M O L I N , et les S.r et dame V E N D R I E Z
et B O R N E , intimés ;
CONTRE
J e a n et autre J e a n
CH O U V E N C
, appellans.
Q U E S T I O N S .
1 .° L a procédure des app elans a -t-elle é té périm ée de p le in
droit dans le ressort du parlem ent de T o u lo u se ?
2 .° S i elle n'est p a s p érim ée, p e u v e n t-ils , com m e tiers acqué
reurs, repousser L'action des in tim és p ar la p rescrip tion de
d ix a n s , dans le m êm e parlem ent ?
3 .°
S 'il n y a p as p rescription , les app elan s so n t-ils rece
vantes en la d ite q u a lité d'acquéreurs d'un co h éritier, à form er
tierce op p osition à des ju g em en s en dernier r e s s o r t, rendus
su r a p p o in tem en t, entre leu r vendeur et ses autres co h é ritie rs,
p ou r le règlem ent de leurs droits resp ectifs à la su ccession
com m u n e ?
3
4 -° T hérèse M o lin a -t-e lle eu 10 ou o ans p o u r se pourvoir
con tre un e renoncia tion surprise en m in o r ité p a r des p rotuteurs,
dans l ' ignorance de ses droits et sans être inform ée que les testam ens de ses p ere et m ère étaien t n u ls ?
C ette question d o it-elle être décidée par une ju risp ru d e n ce
a u tre q u e ce lle du parlem ent de T o u lo u se ?
5 .°
3
C atherine M o lin a -t-elle p e r d u , p a r la p rescrip tion de o
A
�c o
a n s, le droit de dem ander le p a rta g e , pendant sa coh a b ita tio n
dans la m aison p a tern elle ?
6.° L e testam ent de Catherine F erra p ie , sans signature ,
ou déclaration nég a tiv e de la te sta tr ic e, et sans lecture à ladite
testa trice , e s t-il valable ? Q u e ré su lte -t-il p ou r ou contre sa .
v a lid ité de c e q u 'il est antérieur à la p u blica tio n de C ordon
n a n ce de 1735 ?
rj.° L a prem ière su b stitu tion q u 'il c o n t ie n t, est-elle J id é icom m issaire ou fid u c ia ir e ? L a seconde est-elle une su b stitu tion
p u p illa ire ? E st elle v a la b le? A - t- e lle transm is la succession à
M arie B iolin , dernière appelée ?
8 .° L e testam ent de P ierre M olin , q u i a sim plem ent lé g u é
u n e légitim e à ses en/ans p u in és , esi-il n u l p o u r vice de prétérition ?
F W W i 'V V % % V V W V X W W \ W % V % .‘W
I
V.
t.
W
%
r. t . fi sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé La Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle 'du testament de Catheriue
F e rra p ie , rapportée-par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. L a Cour s’est
vue forcée d ’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
a c te ; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapportée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 a n s, et s u b i , pour faire juger un simple
p a r ta g e , quatre degrés de juridiction. .
■ F: A I T S.
• r. ,
■ ...
Pierre M olin a v a it , dit-on , pour frères M a rc e lin , Biaise , et
Ig n a ce K o lin . Tous , excepté le dernier , s.*mt inutiles’ à la
cause; et pour 11e pas l’embrouiller , les intimés se contentent
d’en rappeler lts noms , pour passer'à lu descendance de Pierre,
m arié à Catherine Ferrapie. ils ont eu six enfuns.
.
■> ' 1
�C3 )
P ie r r e M o l i n , m ort en 1743.
C a t h e r in e F e r r a p i e , m orte en 1735.
2.
3.
I
4.
S.
a.e m a ri }
N ... D ejoux.
3.e m a r i ,
C laude- L a m b e rt
Lacroisière.
Jeanne Bor ne,
Louis V e n d r i e z ,
intimés.
L e 20 mars 1735 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ig n a c e
M o lin , curé de Chain bon, son beau-frère, et Pierre B o ye r, son
o n cle , « à la charged e rem ettre, quand bon leur sem blera, ladite
« hérédité à P ie r r e , fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« M olin vint à mourir sans p o u v o ir disposer, ou sans avoir
« recu eilli ladite hérédité, elle lui subslitue M arie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans d ista clio n de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com p te des fr u its de
« ladite hérédité , et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .. . . Fait et récité audit T e n c e , dans la
m a iso n
d’autre
« sieur Pierre M o lin , en présence d e ..............témoins soussignés.
« L adite testatrice ille de ce enquise et requise............. ”
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
« institue pour son héritier Pierre M o lin son fils. . . . Il donne
« et leg u e à ses cinq autres enfans leur légitime de droit} . . . .
« et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ig n a c e M o lin ,
« curé de Cham bon , son frère, et M a r ie , sa lille , de régir et
a. administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A z
�,U )
'
« de le faire..........Fait et récité à T en ce , maison du testateur ».
Pierre M olin mourut le 21 du même mois de mai 1748. A lo rs
Marie Molin , m a je u re , et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de C liam bon , Pierre B oyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
" aux deux successions, s’ engagea aussitôt qu’il en eut l’âge. Il
3
mourut à L ille le novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, 011 trouva l'occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse M olin, avec le sieur Borne , d ’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux allaites
5
de la maison , et par le contrat de mariage du
juin
, le
sieur Cham barliac lui constitua 1,900 fr. de dot, en bien expri
mant que c ’ était pour les successions du père , de la mère , de
la sœur d é cé d é e, et même 011 ajouta celle du frère , quoiqu’on
n ’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse M olin, m in eu re, re
nonça à toutes successions , et s’obligea de la confirm er et ratiJ îc r à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son m ari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur C h a m b a rlia c , n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n è r e . Quand le sieur C h a m b a rlia cd é céd a , elle passa en de secondes noces avec le sieur D ejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur L am b ?rt-L a cro isière, qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose près ,
de dissiper la succession.
Thérèse Molin , veuve, revint habiter près de sa f.¡mille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. L e 22j<mvjer 17813, elle assigna Marie M olin
et L acro isière, son troisième m a ri, en partage des successions
de ses père, m è re, irère et sœurs, pour lui être délaisse sa p o r
tion adorante.
A p rè s cette dem ande, elle fil donation de ses biens à la dame
�.( 5 ) . .
V e n d rie z , sa fille, qui intervint' L e procès fut appointé à T e n c e ,
et le 2 novembre 1 7 8 4 , il intervint sentence qui ordonna le par
tage du c h e f de Jeanne seulement : et avant faire droit sur le surplus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
mère commun?.
L e s deux parties interjetèrent appel de cette sentence ; les pro
cédures se continuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Piry fut choisi pour connaître de cet
appel.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 17 9 3 , sur pro
ductions respectives, el jugea dans ses motifs:
i.° Que le te>fanu'nt du père était nul par prétention; 2.0 que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
M o in de la -iuccess’on , et que ledit M olin élant mort après
quMorze an s, les substitutions s’étaient alors éteintes ; .° que
la renoue iulion de Thérèse Molin était n u lle , comme n’étant
dirigée au profit de personne , comme faite par une mineure ,
3
a vec convention de ratification non effectuée, et com m e dirigée
au profit d’ une protutiice , et que l’action avait duré trente ans.
E n conséquence , ce tribunal q^donna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame V e n d riez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
D e son co té, Catherine M o lin , sortie de la maison paternelle
à la mort de sa s a \ ir , en 1788 , avait assigné Lambert-X-acroisière, son héritier, le 27 novembre d e là m ême année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du c h e f de son p ère, et
seulement un douzièm e, du chef de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la croyance , que M arie M olin était héritière
par des testamens q u ’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions colhjtérciles.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m è re, un dixième des biens
du p è r e , et dans les mêmes proportions pour les successions col
latérales.
�/
(6)
^ c s ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine M olin
alors ayant eu connaissance du testament de sa m ère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du c h e f maternel.
L e F u y était aussi saisi de cet appel qui
s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci-dessus,
du 26 janvier 1793.
O n présume sans peine que Lncroisière, succombant vis-à-vis
M a r ie - T h é r è s e M o l i n , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parlies traitèrent , le
19 février 1 7 9 3 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère nu jugem ent , en
dernier resso rt, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à T hérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’ elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
Il est convenu que les experts expédieront d ’abord la miiison
q u ’ il occupe , un domaine et un ja rd in , et déduiront les créances
q u ’il a acquittées en vers Jean-Antoine M o lin , à la décharge de tous.
E t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés C h ouven c , l'r a is s e , C u o q , B o y e r ,
JDcléage , et laisse à Catherine et Thérèse M o lin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu ’elles aviseront.
Enfin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 17 9 3 , les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 ja n v ie r,
pour qu’ils l ’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v r il, ils les assignent tous en désistement et jugement
c o m m u n ; l a p l u p a r t acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvenc n’était pas alors d’attaquer le jugçinent du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�_C 7)
L e 19 prairial an 2 , un jugem ent ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, i.° les biens libres, 2 ° ceux
abandonnes par les acquéreurs , qui ont acquiescés avant d 'en
venir a u x Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulem ent depuis la demande comme acquéreurs de
^ b o n n e foi.
~
D e puis celte époque le tems d e l à péremption s’accomplit: ce
n ’ est que le 9 vendémiaire an 8 , que les C h o u v e n c signifient l’ex
ploit de l’an 4 a Cat herine Molin s e u le , pour assister en la cause.
1 L e 16 ger ninul an 9 , les intimés ont assigné les Chouvenc en
la coui-, pour se voir démettre de leur appel.
C ’ est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Cliouvencont imaginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leu.i! prétendue bonne.foi : cependant ils ont acquis d ’une cohé
ritière qui avait l'ne sœur dans la maison; ils ont f¿iit plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
' S i, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lacroisière, ils
avaient eu le moindre soupçon de la vente faite aux C h o u v e n c ,
le même procès aurait tout term iné: e f c e r t e s ,e n voyant tonte
la résistance du sieu^Lacroisièrè^'et combién le tribunal clu P u y
a approfondi les questions de ce procès , ile s t aisé de v o ir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien i hang’é à sa décision. Quand
ils 1ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’A rd é ch e , l’idée 11e leur est pais même venue d ’attaquer le j u
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger u n procès qui
lèur était étranger , et d o n t,l’issue eût indubitablement été la
rtiêtiie; mais a Riom^ une d iv e rs ité , ou plutôt une innovation
Jurisprudence a changé leur plan. L es Chouvenc veulent a u
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d ’aborder
lc>fouds , ils Sont arrêtés par des questions préalables
s’acit
:l ■
O d'examiner.”
qu’il
�C a )
P R E M I È R E
Q U E S T I O N .
L a p rocédure des a p p elo n s-est-elle p é r im é e ?
L a loi Properandum et l’ordonnance de R.oussillon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entrètenus par
des procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt dé
règlement de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrêt n’a eu d’eiïet que dans son
ressort. A u parlement de T o u lo u s e , au contraire, l’ordonnance
de Roussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de p lein droit, et le juge la suppléait
si 011 ne la demandait pas.
!
1 ' "■
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue etl
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l’ancien ressort de T o ulo use, la Cour a ju g é , notam
ment l e s 'i 8 pluviôse an 11 et 12 nivôse an 1 2 , que la pérçrnption
avait eu lieu de plein droit, m ême pendant la révolution , et la
suppression d p avoués.
......
.
On objecte que lps intimés on.t couvert la péremption eu anti
cipant le 16 germinal an 9. ,
vt, ,
, [ ¡; - . ;i| ifj . ¡,
Mais 1.0 cet exploit assigne Içs Chouvenc p0u r,?,e;voir déme^lre
de leur a p p e l, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à celte
démission d’appel ; il serait donc bizarre dç dire jqqe c e lu i- ^ a p prouve un a p p e l, qui assigne l’appelant aux.
s*en, v^irj
démettre., Il.f/JUt bien que la péremption mê ms f i i t , pr o noncçe.
en justice,
et
personne n’osera cxigçr qu e: ce ln i/p û -la prétend,
acquise, soit obligé de s ’en tenir à ce .moyen sç.gl, ;:.par en Cour
d’appel il p ’^.a,p,as d^exçeptjpns.s.ur lesquelles il.fjHM statuer.pr,\hi-\
la b iem en t, comine l’exige, en première instance, ro^dÿnnoncb:
de
�(9 )
de 1C67., On sait assez qu’il faut, en Cour so u v era in e , proposer
tons ses moyens à la fois.
2 .0
Celte question a été discutée par M . v le procureur géné
ral M e rlin , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui 11e se couvre pas. L es ordonnances, dit-il, le veulent a in s i,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m o is , l'in sta n ce sera périm ée de droit et Ûaction
étein te ; d o n c, a jo u t e - t - i l, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée 11’y conclurait pas.
M . r Merlin , en sa discussion , ne s’occupe p a s , comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre m ois, qu’il ne cite
que pour comptiraison. L ’ordonnance de lioussillon lui semble
aussi c la ire , toutes in sta n ces d isco n tin u ées pendant trois ans
so n t éteintes et péries. A va n t son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, 11e se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
v périe, ensorte que nonobstant q u o n ait repris cette insta nce],
« on peut faire juger la péremption................ L ’ordonnance de
« Iloussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C ’est un droit p u b lic auquel on ne peut déroger».
P a r une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-lout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’allaiblit singu
lièrement. D e la vient que les auteurs du 16.c siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 14 9 3 , ce que nous 11e voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
B
�( 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de T oulouse; la péremption y ¿tait jugée de p lein d r o it, et c ’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
L es C houvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est 1111 rêve de dire que Jeanne
Borne n ’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualité dans
le jugem ent de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
ven ir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption , elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
Q U E S T I O N .
L e s appelans , tiers acquéreurs , p eu v en t-ils in v oq u er, à T o u
lo u se , la prescription de d ix ans ?
L e s Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse q u i , sans exce p tio n , sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir ( pag. 9 de leur
m é m o ir e ), que M arie M olin ne p ou v a it p as vendre la p o rtio n
de ses coh éritiers, q i i i l est
t r e n t e
a n s
UTILES
c e r t a in
que ces cohéritiers avaient
p ou r réclam er contre to u le V ü N T E fa ite par
Vun d'eux.
M ais , continuent-ils, la question concerne Vacquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les v e n te s, et de ne pas les avoir
c o n t r e V acquéreur ; comme ce serait inexplicable, il vaut mieux
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-même , ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’a ve n ir, et respecter le
�C i1 )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
com m encées seront réglées conformément aux lois anciennes.
11 faut donc chercher
ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
1
drait dire avec la Cour de cassation que ''usage est V interprète
le p lu s sûr des lo is , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement o bscure,
et si 011 trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malœ
J id ei qui l’ explique et la com m ente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
J id e i possessore a lién a n te , cessât lon g i tem poris prescriptio ,
s i verus dom inus ig n oret j u s suum et alienationem fa c la m .
Si ce commentaire de la loi elle-rnême ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présum ant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce n’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i auteni ig n orâ t verus a lien a ta rum rerum dom inus, non a liter hune e x c lu d i n is i p er triennalem prescription cm : n on valente dicere eo q u i res h o c modo
p o ssid et quia ipse bond fid e p o ss id e t, quando ip se à m al à Jide
posfiidenle h o c a cccp it. Novell. 1 1 9 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de T o ulo use, tous les auteurs de sou res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
B a
�(
1 2
)
_ \
Bouiàric , page 182 , a , sur ce s u j e t , une discussion très-ap
profondie. Serres, page i 5 y annonce la seule prescription de
trente ans com m e un principe non contesté. Graverol et Laroc h e ila v in , p.
5 io;
Çatelan , p. Boy, disent « que le parlement
« de T oulouse n ’a pas reçu cette usucapion de d ix ans , que
« Justinicn m ême avait transformée en prescription de trente
« an s; q u ’ainsi le tiers acquéreur purge l ’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
F urgole , en son traité des test,-miens, loin.
3 , pag. 4 1 7 ,
s’ex
plique ainsi : « A n parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l'acquisition ou la perle des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente an s, même à celui qui possède avec
« un titre, lequel n ’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« c.mune ayant été consenti à non dom ino.
Ces principes sont élémentaires dans les pnrlemens de T o u
lo use, A ix , Bordeaux et Grenoble. O n peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.°
5
83 ;
jflontvalon , page i o ; Decormis , loin. 2., col. ÎS89 ; Brelonier ,
v.° prescription ; M . r M e r lin , v.° hypothèque , § . i
3,
et la
m axim e est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit é c rit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix a n s ,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui 11e s’y con
formait p a s; le docte Domal y avait rélléchi lu i-m ê m e, et ne
s’en étonnait pas : « L es lois, disait-il, qui marquent le teins des
« jjrescriptions ne sont que des lois arbitraires, car la nature ne
« iixe pas quel teins il faut pour prescrire----- Il se règle difle« remment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. 11 y en a où elles ont été
« réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrous sur la 4;e question, que la Cour de cassation a
�>3
(
)
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de Toulouse , et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons donc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix ans , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i , en semblable cas , l ’ait jamais admise.
D ans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne f o i,
et il est impossible q u ’ ils le fussent.
L a lo i, au reste, n ’est nullement en leur fa v e u r, et ce n’est
que surabondamment q u ’il y a lieu d ’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N .
L a tierce op p osition des appelons est-elle recevable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il ne suffit
« pas d’avoir inte'rét de l’attaquer, il faut avoir été partie n éccs« saire dans le procès jugé. »
L e s Chouvenc étaient - ils donc parties nécessaires dans le
procès d ’entre les intimés et le sieur L acro isière5 de quoi s’a
gissait-il? d’ un partage.
M ais un partage de succession ne pouvait être fait q u ’entre
cohéritiers. A .ctio fa m ilicc erciscundœ so lis hœredibus com p e lit.
'
L es questions d ’un partage sont tellement étrangères ;\ tous
autres, que quand un tiers achète la portion d ’un cohéritier ,
les autres peuvent l ’expulser en le remboursant , pour l ’einpôcher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l ’ac
tion en [partage est-elle , par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c t i o fa m iliœ e r c is c u n d œ est a ctio
c w ilis qud cohecredes
dividundâ.
1 JSTT £ R
se agunt de com m uai hœ reditate
Jusque-la un acquéreur n ’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son v e n d e u r, et quand la novelle
119 le réputé acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�*4
(
)
c e p il à tnahî J id e p o ssid en te, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullem ent et inutilement
procédé pour avoir omis d ’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
L es C houvenc n’ont pas dû être assignés nécessairem ent•
L 'ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêm es,
ou leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A i n s i ,
dit R o d i e r , un créancier , 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nous allons voir encore que le Droit romain les place sur la
m êm e ligne.
A u if. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent le droit d’interjeter a p p el, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S i em ptor de proprietate vie tus e s t , eo c e s s a n te , auctor eju s
appellare p o lerit / il cm s i auctor egerit et victu s s i t , non est
deneganda em ptori appellandi fa c u lta s . . . . I d que ità co n stitutum est in persond créd ito n s. L . 4. if- de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand celui-ci a lui-même interjeté a p p e l , la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’ intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Q uin ctiam si a u ctor a p p e lla v e r it, deindè in causa;
d ejen sio n e suspectus v is u s e s t, perindè defensio causœ em ptori
com m ittenda e s t , atque si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
s o m m é , il 11’admet les créanciers qu’à in terv en ir à leurs fr a is ,
�C 15 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice d’ une opposition par eux formée (art. 882).
Il y a plus ; car si , par l'effet du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art.
883
lui répondrait « que chaque
« cohéritier est censé avoir succédé sez// et im m édiatem ent à tous
« les effets compris en son l o f , 011 à lui échus par licitation. »
A in si Thérèse et Catherine M olin o n t , dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise e x causa an tiq u a , et qui est réputée
leur appartenir depuis l'o u vertu re des successions. Ainsi les
C h o u ve n c, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au pa rta g e, mais qui pouvaient seulement y in terven ir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju g é e , et ne peuvent
plus faire juger avec eux seu ls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
S i, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intim ées, et on n ’en citerait pas un seul qui lut favorable
aux Chouvenc.
Parm i le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous 11e puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n ’a pas bien été saisie.
i.° M . r C o c h in , en ses notes alphabétiques, tom.
dit; « jugé par arrêt du
5 , pag, 527,
3 i mai 17^6, en faveur des sieur et dame
« Miissol contre M . r le président A m elot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d ’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , 11e peut y former tiei’ce opposition, quoique so n
« a cquisition y so it antérieure. »
2.0
M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. P a r le premier, « la dame de Conllans était en procès
�(
1
6
}
« avec un seigneur voisin pour m ouvance de fief, .
'
elle vendit
« sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
« son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
«..de? droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet a rrê t. . .
« l ’acquéreur y forma tierce opposition , on lui répondit q u ’il
« devait s’imputer de n’êlre p is intervenu : par arrêt du
31
« mai 1742, il fui déclaré non i-eeovabledanssa tierce opposition.»
P a r le 2 .c arrêt, « le marquis de L usignan ve n d it, en 172 0 ,
« des terres au sieur D auriac. . . . L es héritiers de la dame de
M onriquel firent; en 17 2 7 , confirmer , sur a p p e l, une sentence
« de 1718 , contre le .marquis de L usign an seul. M . r D auriac
« soutint qu|on aurait dû l ’a p p e le r, et forma tierce o p p o sitio n ....
« O n lui répondit q u ’il devait intervenir. . . . q u ’il était censé
« avoir été partie dans l ’arrêt par son vendeur , q u ’en cette
•« partie il était l 'ayant eduse du marquis de L usignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1760 ,.il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e
B u lle tin o fficiel de cassation rapporte 1111 arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s.r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du
3 janvier 1792.
. . G o d et, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d ’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art.
5 et
11 du Litre 27 de l ’ordon-
« nance de 1667, et l’art. x.cr du titre
35 . . . . Attendu
que la
« reserve du droit des tierces p erso n n es, 11e concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessurt , était a cet égard
« son ayant cause. . . . que Lessart a élé appelé. . . . que G odet,
« en qualité de son ayant cause , 11’aurait pû être recevable à
attaquer
c e
ju g e m e n t, q u ’autant q u ’il eût été justiiié que L es
te sari aurait élé lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en adm ettant la tierce opposition du cit. G o d e t ,
« onl violé l ’art. 5 de l’ordonnance concernant P a utorité de la
« C hose j u g é e , et ont contrevenu formellement à l ’art. i . cr du
titre
�J7
C
)
* « titre 3 S , qui ne permet de rétracter, autrement que par requête
« civile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause................... Casse
« et annulle etc. »
V o ilà donc la pleine confirmation de la loi 4 CF. de a p p ella tion ib u s et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
ju g é e , par la voie de l’a p p e l, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête c i v i l e , s’il
est en dernier ressort.
T o u t cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n ’y avait eu fraude évidente. A u cu n s de ces arrêts ne sont dans
l’espèce d ’ un procès de succession. S o lis hæredibus com p elit.
D e u x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo«sition des appelans. i°. Les tierces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793 ; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. D ans les circonstances de la cause,
c ’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
L es Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine M olin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter 1111 procès, ont-ils pu
se defendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital a une
femme séparée de biens.
A u reste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
condamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
�( i8 )
encore, d’exiger en règle générs’ é , que '^ut cohéritier dût sa
voir s’il y a des a c q u ére u rs, avant d erecherch r ses iiro t ; , cYstà-dire lût tenu de connaître les forces de la succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues
% ?
;
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N .
T hérèse M o lin avait-elle d ix ans ou trente ans p ou r se p ou r
voir contre sa renonciation ?
C ette qu estion doit-elle être d écidée p ar u n e ju risp ru d en ce
autre que c e lle du p arlem en t de T o u lo u se ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne m arque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion , dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
régleiiK nt de vos droits, on a annullé deux testamens : J e m ’y
o p p o s e ; je veux faire rejuger tout c e la ; je veux scruter vos
testamens, vos contrats de m ariage, tout ce qui s’est passé dans
votre maison depuis i y
35
jusqu’en 1798. V o s cohéritiers n’y
seront pas môme a p p e lé s, car il y a chose jugée avec eux , et
c ’ est moi seul qui veux faire ré g le r, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seu le partie légitime.
Si ce système des Ch ouvenc, qui cependant est toute la base
(7u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier ap erçu ; s’il faut
trouver en eux le seul lég itim e contradicteur, voyons donc par
quelle juiisprudence la chose ju g é e et remise en litige doit être
reju g ee.
Thérèse M o lin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C
)
tion de 1 7 . E lle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de T o u lo u se, et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
55
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de
3o ans. Nous avons vu
sur la z .e question que toutes les
a ctio n s y étaient réglées à cette d urée, à la seule exception de
l ’ac
tion hypothécaire.
L es Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r , ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là , la Cour d ’appel ne s’était pas prononcée
et 011 trouverait même dans l’ un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrem ent, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’ap p el, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose jugée ,
m ême des questions nées en 1783 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement ju g é
com m e lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju g é e , mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était in con n ue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n ’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de l u i , par le pouvoir que leg e regid
il en a donné au prince. E n les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l ’usage , dit V m in u s ,
d après un auteur lalm , vaut mieux que ce qu’011 lit dans la loi
elle-même. P lu s valere leges quœ m oribus com probalce s a u t,
quant quœ scripto c o n s ta n t, vérité bien plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
G a
�( 20 )
interprète des lois. Consuetudo est legum optim a interpres.
L a jurisprudence en ellet qui n’est pas seulement un mode de
ju g e r , mais d ’après la définition de Vinnius , J u stitiœ habit us
p ra cticu s , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impérative, depuis que les anc iens ressorts des Cours sont confondus.
Quand R om e n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la m a
nière de les interpréter, et cette jurisprudence, devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lais
à la jurisprudence et de respecter les usages. Prœ ses p ro v in ciœ ,
probatis h is q u æ in o p p id o , frequenter in eodem controversice
g e n e r e , servata surit, causa cognitd statu it. L . 1. cod. quœ s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exem ple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution, plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
m elle sur la question qui nous occupe.
« Considérant (porte un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain 11e font loi dans les pays même
« q u ’elles régissent , que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la ju risp ru d en ce ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts sem blables, te parlem ent de T ou« lo u se a ju g é , etc. » ( S i r e y , page 3 0 9 ).
2.0
Dans une autre cause, du
5 'floréal
an 1 2 , la Cour de cas
sation a dit: « Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre prê
te sens, et 20 ans entre absens ; cependant, d’après la jurispru<1 dence du parlem ent de T ou lo u se constatée par divers arrêts ,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
« possession im m ém oriale, et que c ’est ainsi q u ’i l a entendu la
« l o i , etc. casse et annulle, etc. » ( L u l l t l i n , n.° 92).
�3 .°
( 21 )
Un arrêt du 2 Í du même mois a jugé de m ê m e , « que la
* jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( S i r e y , p. 2 6 7).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec L acroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 17 5 5 , cela est vrai; mais, i.° elle
était mineure , et la convention porte q u ’elle sera tenue dè con
firm er et ratifier àsa majorité. E lle n’en à rien fait.
11 n’y
a donc
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’ une mesure provisionnelle.
2.° On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplém ent.
I l est évident qu’on lui Ht entendre en minorité q u ’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. JJonc 011 la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .°
Si on suppose qu’elle a approuv é les testamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre une destination de légi
t i m e , qu i agnovit ju d ic iu m d efuncti. T els sont les principes
invariables comme la Cour l’a souvent ju g é , et notamment les
21 thermidor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4«° L e testament de 17^5 a été expedié par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’elait donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de P ierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r e c u e illi, ne l’était pas. O r , non vidèntur qui errant c o n
sentit e , et la prescription.ne court que du jo u r d e là découverte
de la vérité.
5 .°
Thérèse M o lin , née en 1733, avait deux ans au décès de sa
.
mère , et dix ans au décès de sou père en 1743 Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de février
�C 22 ) f
1718. L e père l ’avait chargée de régir et adm inistrer conjoinletement avec Ignace M o lin , curé de C ham bon; et les Ghouvenc
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus , nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de scs droits légitimâmes sur les biens de ses
père et mère , dont jo u iss a it M arie M o lin .
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins c o m p ta
ble depuis 1 7 4 3 , -enversune sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n ’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17IS0 , entre Marie
M o lin qu i, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testameiis, et Thérèse M olin qui
ignorait tout.
• O r , le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d ’admettre en
pàreil cas le réuonçant non v isis ta b u h s , a se pourvoir pen
dant trente ans. Q u ’on consulte M a y nard , liv. 2 , cliap. 99 et
100 ; D o liv e , liv. 4 , chap. ï 6; Catelan, liv. 8 ; Iiretonnier, v.°
restitution ; -ou plutôt qu ’on' parcoure tous les auteurs de ce
parlement , ou cens (pii mentionnent sa jurisprudence , 011 ne
trouvera nulle 'part que l’art. i3 4 de l ’ordonnance de i r> ait
53
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de P a r is , après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-teins , comme le parlement de T oulouse a toujours jugé
L e s ailleurs d u i e m s même de cette ordonnance , notamment;
M r D u v a l , de rebus dubiis , enseignaient q u ’il n’y a contre les
actions en nullité que l ’action trentenaire. Quaranlo ans après
le parlement de Paris changea sa jurisprudence', niais enfin il la
changea de nouveau après l’ordonnance de 1667 ; et il a inva
riablement ju g é depuis que l’art. 134 de l’ordonnance de i539
né s’appliquait q u ’aux actions rescisoires.
Cette jurisprudence constante s’est maintenue ju sq u ’au Code
civil. On a vu encore, dans les discussions sur ce Code, les clibrts
des sections réunies de la Cour d’appel de Paris, pour faire main
�C 23 )
tenir l ’action cle-trente a n s , et 011 n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d ’Orléans et de L iège.
L e tribunal civil du Puy-d é-D ôm e commença par suivre les
anciens principes.
11 jugea le
28 pluviôse an 4 , entre les
Cham pom ier et S e z e l, que l ’action en nullité avait duré trente
.ans, en floréal an
.
5,
à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait ju g é 011 thèse le
3 messidor an 4 , que
Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de m ariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
3
« Attendu que l’art. i i de l’ordonnance de i
53(),
déclare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra« teurs. etc. directement ou indirectem ent, avant le compte
« rendu , et q u ’une vente , f lile par une mineure en faveur d ’une
« personne qui administrait ses b ie n s , présente un avantage
« indirect ;
« Attendu q u ’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente an s,
« parce que suivant l’art. i . e r, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable 11e cessant de l ’être que par la reddition de son
« com pte, c ’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l ’art. 134 de l ’ordonnance de i53 9 qui restreint
« le délai a dix ans , n ’est relatif q u ’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de com m un avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n ’était pas besoin de lettres ,
« casse et annulle , etc. »
,11 est
même remarquable que le Bulletin officiel ju s q u 'à ce
j o u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de Ilio m ne s’est prononcée, pour les d ix
ans , pour la première f o is , que le 18 prairial an 11 , c ’est-àdire, depuis le Gode c i v i l , et par induction de l ’article 475. On.
verrait même , dans un arrêt du
25
nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�24
(
)
encore que l ’action n’avait couru q u ’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix
a n s , avant le Gode civil.
Com m ent donc concevoir que la Cour put infirm er le ju g e
ment du P u y qui a admis Thérèse M o lin , après d ix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-iuême.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L 'a c tio n de Catherine M o lin est-elle prescrite par trente ans ,
q u o iq u ’e lle ait co h a b ité la m aison p atern elle ?
L e s Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir celte
prescription par des citations qui n ’ont pas la moindre analogie.
i .° D argentré q u ’ils invoquent sur l ’art. 276 de Bretague , ne
s’occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire q u ’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a pëyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce ciui suit : « T a n t que les enfans sont nourris sur les biens de
«’ l ’hérédité, la prescription de la légitime ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « id e m , en matière départagé » ;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M a is , outre L a p e y rè re , on ne voit pas d ’auteurs qui aient
traité la questio n , s’être expliqués autrem ent, et si on en cite
plusieurs autres, c ’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n ’ont pas voulu chercher la question où ils l ’auraient
trouvée.
D o liv e en fait une question expresse au chap.
3i
du liv.
5,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l ’hérédité , celte prescription ne court pas contre e u x , en cette
« rencontre,
�c 25>
a rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment q u ’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d é fu n t, ils sont censés être en possession. »
63o et 26 août i 636 .
Cette opinion est encore enseignée par Y e d e l , liv. 2 , chap. 36 ;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101 ; D espeisses, t o m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b r u n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
D o liv e cite deux arrêts des 10 janvier i
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion , si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d ’appel vient très-récemment de p ro n o n c e r, dans
un arrêt du i
3 ventôse an i 3 ,
le m o tif suivant :
« A ttendu que l’habitation d ’Antoine et Pierre Vescham be ,
a dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con
te servation de leurs droits. »
A insi Catherine M olin qui a habité la maison paternelle jus
q u ’en 1788 ; qui n ’en est sortie que pour former la demande ,
n ’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
C houvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n ’avait pas
empêché de prescrire.
L es Chouvenc veulent que cette"prescription ait couru à
leur égard , quand elle n ’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est diiïicile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir h la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J e a n n e , et celles de Marguerite et de Pierre M olin ; car l’ac
tion d un cohéritier se compose de tous les droits partiels , qu i
ad hœreditatem v e n iu n t,* et comme les portions advenues à
Catherine M olin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
ja is it le v i j , Catherine M olin a é lé , dès cette é p o q u e , proV
�Ci6)
priétaire d ’une quotité plus con sid érable, et n’en a pas plu*
perdu une fraction que la totalité.
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
l e testam ent de Catherine F erra p ie e s t-il v a la b le?
« U n testam ent, dît R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa so lennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n etYet, dans cet acte si im p o rta n t, îl faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d’après les ordonnances.
L e testament de 1,735 est vîcié par deux nullîtés textuelles : i.o
il est dit f a i t et ré cité en la m aison de P ierre M o lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a d ic té , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
Il n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n’avoir su ou pu signer , car on
y■
lit seulement : « L a d ite testa trice i l l e de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de i y
35 dit
que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lecn ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’iTne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . z 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
Mais , disent les Chouvenc , le testament de Catherine
3
Ferrapie est antérieur à l ’ordonnance de i y a : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d Orléans et de Blois.
« E t en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« sig n e r, les notaires f e r o n t m entioji de la réquisition par eux»
�27
(
)
a faite aux parties ou témoins de s i g n e r , et de leu r réponse
« qu ’ils ne savent signer. » Ordonnance d ’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i
65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de 178s.
E t les auteurs qui ont écrit avant l ’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e M aitre , sur Paris , article 1 4
,
chapitre i . e r ; R a v i o t , question 164; M aillart , sur A r to is ,
art. 74 ).
On cite souvent R icard, comme ayant rapporté un arrêt de i6 6 z
validant un testament où il était dit : « L e q u e l n’a pu signer ,
« interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que R icard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et q u ’il y a
grande apparence’ que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
A ussi R i c a r d , n.° i 5 z 6 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l ’avoir in te rp e llé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n ’a pu signer , parce q u ’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... C ar le notaire, dit Ricard , au n;° i
568 , ne doit
« contribuer d ’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans D enizart un arrêt du
5 septembre
1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n 'a v a it pu sig n er à cause de sa fa ib le sse , de ce en qui s.
XiC iribunal civil du Puy-de-D ôm e a ju g é deux fois de la
meuie maniéré , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal , et
le
23 pluviôse an 7 ,
erçtre les héritiers V a c h i e r , d ’A ria n e.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur dé
fi a
�.
( 2 8 )
cla ren e savoir signer, il soit fait m ention expresse de sa d écla
ration ; ainsi la loi n ’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
L e s Chouvenc se sont imagine' cpie les ordonm nees d ’Orléans
et de Blois n ’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D o live dit que de son tems on n’était pas rigo u
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan inait pas si le testateur avait sigué ; ' mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. F urgole dit au contraire
que les fo rm a lités que les lo is prescrivent, p ou r la v a lid ité des
testam ens , sont de droit p u blic , et q u ’ un testament doit porter
la preuve avec lui-m êm e; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
D ans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas môme
11 preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. L es Chouvenc
se sont, efforcés de persuader q u 'ille veut dire illité r é , puis
cju'illité r é veut dire ne sa it écrire, puis enfin que les mots ne
sa it écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
M ais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce q u ’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
U n arrêt de règlement de i
685
défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne d ins toute espèce d ’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’a c t e , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
V in n iu s et la loi nous apprennènt que dans les testamens sur
to u t , qui sont testa tio m e n tis , il fiu t écrire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29 )
via t ion s. Ccvterum îilteris iisq u e u sita tis et leg lb ilibus scribendum esse p la ç a i t , non s ig n is , obscurisve jio tis , L G , § . u lt.
de bon. p oss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’A cad ém ie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferr iè r e , ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de T rév o u x le mot M é tr é , signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n ’y a pas dans le testament i l l i l é r é , il y a i l l e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de tro u v e r,
dans ce mot biza rre, une déclaration de la testatrice, q u ’elle n ’a
pu ou su signer. Allons plus loin même , le m ot illité r é ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I O N .
Q u elle est la nature de la substitution du testam ent de i y
a -t-elle transm is la su ccession à M arie M o lin ?
35 ?
Quand ce testament serait valable en la fo rm e , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine M olin à
une légitime de rigueur.
C ar le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ ils accréditaient encore plus
par une expression infidelle de l’expédition, q u ’ils avaient d’abord
produite, de ce testament.
Les héritiers institués, disaient i l s , étaient Ignace M olin et
pierre Boyer. Ils étaient çhargés de rendre la succession à Pierre
M olin quand bon leur semblerait. Pierre M olin est mort en 174^,’
et M arie M olin était appelée à la substitution , dans le cas où
ledit Pierre M olin décéderait sans avoir rem is la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , d o n c , en vertu de la m axim e
su b slitu tu s substituto est su b stilu lu s in stitu to , Marie M olin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
- D ’abord il est prouvé par l ’extrait vidim é du testament de
�c 30 )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , q u ’au lieu dit
m ot remis il y a recu eilli. Gela p o s é , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d'une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu ’un dépôt à titre de confiance,
et le grève d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus , qui a fait un traité sur les fidéicommis , le définit
ainsi. F id u cia riu s est hœres q u i, non su î con lem p la tio n e sed
alterins g r a liâ 'in s tilu tu s , eidem restituere hereditatem ,p o s t
diem certain v el in ce rta in , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent Henrys et Bretonier, sont com
te munes dans les pays de droit é c r i t , sur-tout en faveur du sur« vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l’obéissance h o c co n silio ut parenti obsequerentur..........
« Q uoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pas
« m arqué dans le testam ent, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
0 lib e rté , et n’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« O n doit penser, dit ailleurs le même a u te u r, q u ’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; q u ’il vise plulôt à leur
« utilité., et ne l’avantage q u ’ù leur considération ; qu'ainsi il ne
« l ’a instituée que par la nécessité de leur bas âge , non ut j i l i i s
m inoribus o b e s s e t, sed p o tiu s ut eis con su leret• » ( henr. t.
3
1 ,e r , p. 7 3 6 , t. , p» 69 )•
T o u s les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du iid u ce , q u ’011 retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C
30
' i.° Catherine Ferrapie avait un fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2-° Ferx-apie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédité à son
fil s, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d’aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grévé de fidéicommis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( l. i . er § . 5 , ad treb. ) ;
3 °. E n
remettant l’ hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les Fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chosè , sans
aucune stipulation ;
4.0
Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , u t p a ren tibu s
obsequerefitur. A cela prè-8, elle exigeait les mêmes soins pour
eu x, que si elle eut été v iv in te , sed p o tiu s ut eis con suleret.
A in s i disparaissent Pierre B oyer et Ignace M olin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre M olin , impubère , vé ri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre M olin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était a la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u i l vint à m ourir sans
p o u v o ir d isp o se r, ou sans a v o ir r e c u e illi la d ite hérédité.
O n voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non e x tite r it hceresJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre M olin n’est pas mort sans p o u v o ir disposer ,* car
en pays de dro.t érr.t le m ineur avait testam enti fa c tio n e m
aussitôt q u ’ il avait atteint sa puberté. O r , Pierre M olin , né
en 1781 , était puioère en 1746 , et il n ’est décédé q u ’en 1748.
Si ce in o je n n ’était pas péreinptoire , on opposerait aux
�I
(3 0
Chouvenc que la mère ne pouvait pas Faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o te st h beris
im puberibus
q u o s
in
p o t e s t a t e
h a b e t
,
cùm e ju s œ tatis sin t
in quâ ip si testam.en.luni fa c e r e non p o ssu n l.
Il
ne reste donc que l’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloigne'e
encore par le principe-enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règle su b stitu lu s substituto n’a pas lieu en la subs
titution p u p illa ir e , et le substitué au pupille n ’est pas censé
1
l ’héritier du testateur. ( C u j a s , ad . 4 1. de vul. et pup. s u b .)
A in si le testament de 1735 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab in testa t : donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e testam ent de 1743 e s t- il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité ne change rien à
l ’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugem ent de 1793.
Pierre M o lin père a institué son iils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses eufans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hœredem in s titu â t, aut exhceredem nom inatini fa c ia t , a lioquin inuti/itcr testabitur.
Celte disposition a été répétée dans l’art.
5o de
l ’ordonnance
de 1 7 3 5 , qui dit q u e , dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
v droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M ais l'héritier, institué par le testament de 1748, étant décédé.
ab in te s ta t, il importe peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
�33
(
)
ou ju r e suo , à la succession de leur p è r e , il n’est pas moins vrai
de dire q u ’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
L es Chouvenc terminent leur mémoire par d em an der, i.®
q u ’on estime les biens de la succession M o lin ; 2.0 q u ’on accorde
à Marie M olin leur venderesse , les prélèvemens qu ’elle aurait à
faire, notamment trois q u ’ils indiquent; 3.° q u ’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances , s’il en existe.
A l’égard des .deux premiers articles, le jugem ent dont est
a p p e l, y a fait d r o i t , en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intim és, avant d’en venir aux
Chouvenc.
'
A insi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intéi’êts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et p o u v a i e n t f a i r e , pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugem ent dont est appel.
A l o r s , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d ’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sex-a pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n ’est q u ’ une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu ’ils n ’ont pas le droit de soupçonner sans m otif; car
la fraude ne se présume pas.
T o ut prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souffle
encore un tioisicme procès , après en avoir perdu deux , et les
exclamations des C h o u ven c, pour crier à la collusion , ne, sont
qu'une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audiencc avec une
loule de papiers de la famille M olin , q u ’ ils n e'po uvaien t tenir
que de lui. T out ce cpi’ils <>nt; expliquai siit cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de ieur science personnelle, et il
st rem arquable q u ’ils n ’o n t ■jan^Ai d e n iitn d éW com m u n ich t'io n
E
\
�( 34)
les pièces du procès par écrit ju g é en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés q u ’ils elevent.
M ais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont q u ’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour v e u t statuer
sur les questions d ’ un partage, avec l ’acquéreur d’ un cohéritier ;
si elle veut examiner le bien jugé du jugem ent en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce ju g e
ment étaient sages et lé g a le s , et n ’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M . e D A U D E } avoué.
A
R I O M ,
D e l ’im prim erie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I ) .
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0624
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_M0729
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Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
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jurisprudence
prescription
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Successions
testaments
tutelle
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MÉMOIRE
POUR G uillaum e
Bost
M o n tb ru n ,
laboureur,
habitant du village de Pigerol en A u v e rg n e , appellant-&
demandeur ;
C O N T R E
B en o it Rou ger , & P e tr o n ille
B â tisse
fa femme ; G u i l l a u m e B â t i s s e & conforts, couteliers &
laboureurs au même lieu de P ig ero l, intimés & défendeurs.
D
eux
titres pofi t ifs., qui ne peuvent ê tre affaiblis,
aff urent expreff ement à Boft M ontbrun , le droit de partage
dans une terre appartenante aux intimés, appellée le champ
de la Cartade. Le premier eft un acte de. 1692 , paff é entre les
auteurs des parties
le fécond eft fa poff effion immémoriale
de paff er avec le public fur ce chemin. C e tte poff effion a
d’autant plus de poids , que
dans la Coutume d’A u v e rg n e ,
tous droits & acti o n s , même les fervitudes, fe prefcrivent &
acquièrent par trente années.
C ’eft conformément à cette difpofition de la C o u t u m e ,
que la poff effion du public fur l e fentier litigieux a été
prouvée. Les R ouger & Batiff e prêts à fuccomber, fe font
empreff é s d’arrêter le Jugement qui alloit être p ron on cé,
�en interj.ettant appel de la Sentence qui avoit admis la preu ve
de la publicité de ce chemin.
Boft Montbrun avoit fuivi a vec fuccès l’inftruftion préfentée au premier Juge ; mais en caufe d’a p p e l , une trop
grande fécurité lui a fait négliger fa défenfe. Il faut bien que
les erreurs femées dans les écrits de fes adveriaires, aient fait
impreilion aux Officiers de la Sénéchauflee de Riom , puifqu’au mépris du titre , & d’une poiTeilion certaine , fa de
m ande, quelque légitime qu’elle fût, a été rejettée. C ’eft
contre ce Jugement que Boft Montbrun réclame.
11 va
être
facile de démontrer, qu’il eft aufïi injufte que contraire au
texte précis de la Coutume.
F A I T .
Par contrat du 14 ofrobre 1692 , Antoine BatiiTe, auteur
des intim és, a vendu à Claude Rapin , marchand en la ville
de Thiers en Auvergne , une terre de dix fepterées , & un
pré joignant lé'firanichemin qui conduit à Thiers. Pour é v iter,
en allant de Pigerôl aux immeubles acquis, le circuit de ce
grand, chemin qni_fmvprfp une montagne très-élevée , A n
toine BatiiTe, propriétaire du champ qui y eft contigu , a
accordé qu’Antoine Rapin & les jiens y auroient leur pajjage.
« Lefdits héritages vendus , porte ce con trat, avec leurs plus
» amples confins, p a s s a g e s , prinfe d’e a u , droits d’aifances
» & appartenances quelconques , anciens & accoutumés ,
» auquel & aux Jiens , icelui en a promis le garentage envers &
» contre tous ».
Claude Rapin a toujours joui de ce paflage fans trouble.
Boft M ontbrun, acquéreur des terres du iie^ir R a p in , n’a pas
eu non plus d’autre iflue pour y aller. C ette traverfe par le
�3
champ de la Cartade étoit d’ailleurs publique. Les habitants
de Pigerol & des environs y avoient toujours paffé, & ils y
païToient librement.
Cependant Benoit R o u g e r , fa femme & fes freres , fe font
imaginés qu’il dépendoit d’eux de fupprimer ce paflage.
Après des m en aces, ils en font venus aux voies de fait :
ayant rencontré les enfans de Bofl Montbrun dans le cham p,
ils les ont tous maltraités. Leur pere en a rendu plainte ; elle
a été fuivie d’une information, d’après laquelle le Juge de
Thiers a décerné des decrets contr’eux j ils ont obtenu des
défenfes du lieutenant criminel de Riom : Boft Montbrun en
ayant interjette a p p e l, par Arrêt contradictoire rendu en la
Chambre des vacations le 16 o&obre 1776 , en évoquant le
principal, défenfes ont été faites aux accufés, du nombre
d e fq u els é to ie n t les R o u g e r & B a t i f f e , de récidiver fous telle
peine qu’il appartiendroit -, ils ont été condamnés folidairement en dix livres de dommages & intérêts, & en tous
les dépens.
L’autorité de cet Arrêt n’a pu cependant les contenir. Ils
ont continué à priver B o iï Montbrun d’un paffage qu’euxmêmes font tenus, fuivant le contrat de 1
2 , de lui garantir.
Chacun ayant intérêt de conferver fes d ro its, le 27 mars
1777 , Boit Montbrun les a fait afligner pardevers le Juge
châtelain de la baronnie de T h i e r s , pour voir dire « que le
» droit de fervitude de (entier à pied fur la terre des aifignés,
» appellée la Cartade, lequel fervoit de tout temps & ancien» neté au public, tant aux habitants du village de P ig e r o l,
» & en particulier au demandeur, & c e au vu & fçu des af» fignés & de leurs auteurs , feroit déclaré lui appartenir » :
en conféquence qu’il feroit autorifé à continuer fan paflage
à pied fur le même fentier comme par le paffé ; que défenfes
A i]
‘
�4
leuir fe’r oiént 'faites de l’y troubler , ainii que ceux qui lèv
rèpréfentent ,
d’intercepter le même paffage , aux peines
de dro it, & c .
Dans un écrit du 1 3 mai 1 7 7 7 , les parties adverfes ne>fe
font défendues ,fde cette dem ande, que fur des faits entiè
rem ent fuppofésv'Ils ont d’abord fou ten u , contre la vérité
clairement prouvée , qu’i / ri avoit jamais exijlè aucun fentier
public dans la terre appellée la Cartade; que iî Claude Rapin,
faiiiflant le domaine de Pigerol , y avoit autrefois compris
un p a ila g e , une Sentence du 5 feptembre 1691 avoit fait
diftra&ion du fentier en queftion ; que Boft M ontbrun, qui
connoifloit cette S en ten ce, s’appercevant qu’elle renverferoit fa demande , s’étoit imaginé qu’en plaçant ce même
fentier fur la terre de la C a r t a d e , il parviendroit à effacer
l ’application qui réfultoit de ce Jugement ; qu’il ne falloit pas
oublier que le fieur Rapin faifirtant, repréfenté par l ’adverfaire , avoit prêté fon confentement à cette diftra&ion : c’eit
ce qui fe lit au fol. 10 v ° . des mêmes écritures.
Q u e d’ailleurs, il ne pouvoit afTujettir l’héritage par lequel
il vouloit pafler, à une iervitude, qu’autant qu’il n’y auroit
pas un autre chemin pour l’exploitation de fes terre s ; &
qu’à raifon de ce partage, il feroit obligé de les indemnifer,
fuivant un Arrêt de la Cour du 26 février 1 7 5 8 , rapporté par
D en ifa rt, & qui a été rendu pour la Coutume d’A uvergne.
Sur cet e x p o fé , Benoit R o u g e r , fa femme & conforts ont
foutenu que Boft Montbrun devoit être déclaré non-recevable dans fa dem ande, avec défenfes de pafler & repafler,
en quelque temps que ce pût être , dans le champ dont il
s’agit.
Pour détruire ces allégations, Boft Montbrun a o bfervé,
* R eq u ête du * q u e
juin 1 7 7 7 .
la fervitude qu’il réclam o it, n etoit pas ainfi qu’on le
�5
ftrppofoit , une fervitude privée & qui fut reftreinte à lui
ieul; que cette fervitude étoit publique ; qu’elle appartenoit
non-feulement aux habitants des deux villages de Pigerol &
de Montbrun , mais encore aux autres villages yoijîns & à tous
les étrangers indéfiniment ; que le fentier étant dans le champ
des défendeurs, formoit le chemin de communication de ces
deux v illag es, ainfi que lepajfage ordinaire des meuniers & de
tous ceux qui alloient & venoient de Memtbrun.à Pigerol;
qu’il leur avoit fervi de tout tems y de toute ancienneté, au vu &
au fç u des adyerfaires , fans trouble' pi.¡oppoiition de leur
part; qu’il étoit le feul à qui ils euflent voulu l’em pêcher;
que Fufage de ce chemin aufli ancien que les deux villa g es,
étoit d ’une Jî grande néccjjité, que fi on venoit à en être
p r iv é , il faudroit faire un circuit & un contour conjidérable
par le chemin le plus difficultueux ; que fon utilité Sc la néceflité où l’on étoit d’y paiTer, l ’avoit fait établir dès /’ori
gine des temps; qu’il s’étoit toujours maintenu fans inter
ru p tio n , & fans que qui que ce fût y eût trouvé d’obftacle.
■ 1
Q u e les adverfaires obligés de convenir de l’exiftence de
ce fentier, qu’ils foutiennent mal-à-propos n’avoir été prati
qué que pour eux & pour leur com m odité, venoient d’en
treprendre dans leur dernier é c r i t , d’en.changer rem pla
cement & de le tranfporter fur une autre ¿terre fituée à plus
d’un quart de lieue de celle de la Cartade : Boit Montbrun a fait
connoître que ces deux champs étoient absolument diffé
rents ; cette explication a produit fur ce point l ’effet qu’il
devoit en attendre , ainlï qu’on le verra dans un moment.
Revenant au terrein de la C artad e, il a ajouté qu’indé
pendamment du droit perfonnel qui lui étoit affuré par le
contrat du i4 o f t o b r e 1 6 9 2 , la fervitude dont cette terre
�6
ï é trouVoit chargée de tem s immémorial, étoit fondée fur
les difpofitions de la Coutume d’Auvergne , qui aux articles
2 & 4 du titre 17 , veut que la feule pofleffion trentenaire
é q u iv a l le au titre & a un droit conftitué; que la fervitude
y ‘eft nommément comprife ; & qu’elle peut être acquife
(ans titre par une pofleffion de trente ans. Enfin, il s’eft dé
fendu de l’Arrêt cité par D e n ifa rt, fur ce que l’eipece qu’il
préfente, n’avoit aucun rapport à la conteftation.
O n ne s’ occupera de la réponfe dés parties ad verfes, que
pour y expofer leur rétractation au fujèt du chemin qu’ils
affeftoient de confondre avec le fentier en litige. N ous
avions penfé, porte leur écrit du 16 août fol. 5 & fuivants,
que le chemin o u 11fentier fur lequel l’adverfaire prétend
avoir droit de paflage , étoit celui diftrait par la Sentence
de 1 6 9 1 , & cette cohfufibn a pu nous induire en erreur ; mais
dès que Boft Montbrun nous aiTure que le fentier qui donné
lieu à la conteftation , n’eft point celui dont la Sentence a
ordonné la diftra&ion , nous voulons bien l ’en croire¡ ainjl,
nous n aurons plus de dificulté à cet égard.
C ’ eft fur cette difcuflion, que le Juge châtelain de Thiers
a rendu le 6 .juin 1778 , la Sentence dont le difpofitif va
être cxpofé , il porte : « N o u s , les fins & les moyens des
» parties réfervés , ordonnons avant faire d roit, que ledit
» Boft Montbrun fera preuve devant nous dans trois jours ,
» tant par titres que par témoins, que de temps immémorial,
» & notamment trente ans avant le premier mars 2 jy y ; le fen» tier défigné au plan fignifié le 21 mars dernier, par les
» lettres A &
B
a exifté dâns la
terre defdits Batijfe &
» Rouger appellée^LA C à r t a d e , foit à l’endroit indiqué ,
» foit plus haut OÙ plus bas \ mais toujours dans ladite terre &
» aux mêmes fins ; comme a u iïi, que les propriétaires du
�7
» villag e de P i g e r o l, & autres , ont pajfé & repajfé par ledit
» fetitier, au vu & au fç u defdits Batijje & R ouger, f)our
» aller & pour venir audit village de P i g e r o l , Toit que ladite
» terre des Cartades fû t enfemencée, foit qu’elle ne le fût pas
» indiftin&emenr ; comme auffi enfin , qu’il eft d’ufage dans
» le pays & dans les pays voifins, qu’on laboure & enfe» mence les (entiers & chemins , à la charge d’en fournir
» d’autres à c ô t é , fans que le public fe plaigne ; & lefdits
» BatiiTe & R o u g e r, la preuve contraire dans le même délai
» fi bon leur femble ».
En exécution de ce Jugem ent, quinze témoins ont dépofé
les 1 1 & 1 3 du même m o is, fur les faits qui avoient été admis ; une Sentence de défenfe de la fénéchauiTée de R i o m ,
*1
'» '1 '
> t 4' ■
"furprife fur l’appel qui avoit été interjette par les Rouger &
BatiiTe, a empêché le Juge de recevoir les dépofitions de
ceux qui reftoient à entendre j on verra dans la fuite , que
les témoins attellent ,Mque de temps immémorial, le public
a-pafîe en toute fa ifo n , fur le fçntier du champ de la
Cartade.
O n ne croit pas devoir s’occuper .des illufions dont les
adverfaires ont fait ufage fur leur appel j ce qu’on peut re
procher à Boit M ontbrun, eft de ne les avoir pas combattues
a vec l’avantage que la juftice de fa caufe lui préfentoit ; mais
ce qui ne peut fè concevoir , eft que ceux qui étoient char
gés de fa défenfe, ne lui ont pas fait produire fon enquête
qui n’a pas même été en v o yé e à Riom -, ce ne peut être que
ce défaut d’inftru&ion de fa p a r t , qui a procuré aux R o u g e r
& BatiiTe la Sentence que les Officiers de la fé n é ch a u ifé e de
Riom ont rendue le a o août 1779 > & par l a q u e l l e , e n pro
nonçant des difpoiuions contraires à celle de la châtellenie
de T h i e r s , ils ont débouté Boft Montbrun de fa demande à
�n8
fin départagé fur le fentierdont il s’agit , & l’ont condamne
en tftus les dépens.
Il n’a pas héfité à fe pourvoir contre une décifion aùffi
irréguliere qu’elle eft injufte ; il demande qu ’en infirmant
cette fecônde Sen ten ce, il foit ordonné que les parties con
tinueront de procéder en la Châtellenie de T h iers, en exé
cution de celle qui y a été rendue le 6 juin 1778 ; que les
intimés fôient condamnés eh tous les dépèns qui ont été- faiti
en la fénéchauiTée dé Riom & en la C o u r , depuis ce Juge.:l.u
ment.
A van t de pafler aux preuves qui le foutiennent, il eft
néceflaire de rendre compte d’un incident qui s’eft élevé au
procès l’année dernière. Il étoit revenu à Boft Monbrun ,
qu’un a£1e ancien énonçoit le partage en litige comme exiftant en 1 6 4 2 ne fachant ni lire ni écrire, il s’en eft rap
porté fur ce point à ce qui lui en a été dit ; il a requis un no
taire de la ville de Thiers d’en lever une expédition qui lui a
été délivrée le 20 mars 1 7 8 2 , & qu’il a produite le 30 dé
cembre fuivant.
Les intimés ont prétendu que la minute de l’a ilé n’étoit
pas conforme à cette expédition ; comme elle fait foi jufqu’à
l’infcription de faux, ils étoient néceflairement obligés de la
former ; mais craignant les obftacles qu’ils auroient rencon
trés , quoique chacune des parties fût repréfentée au procès
par fon procureur, par l’abus le plus étrange des O rdon
nances de 1667 & de 16 7 0 , ils ont furpris le 10 mars 1783 ,
fu r requête noti communiquée, un Arrêt de la Cour qui a or
donné que les deux plus anciens notaires de la ville de Thiers
fe tranfporteroient chez le fieur C u ffon , chanoine , dépofitaire de la minute de l’a&e du 20 février 16 4 2 , à l’effet de fe
la faire repréfenter, pour être dreffé procès-verbal de l’état
a&uel
�9
a£hiel de cette minute ; c’eft ce procès-verbal des deux no
taires de Thiers , que les intimés ont produit le 4 juin 1763.
L ’appellant demande à être reçu oppofant à cet Arrêt furpris contre toutes les r é g lé s, fur une requête non communi
quée, & que la procédure fur laquelle il eft intervenu foit
déclarée nulle ; pour démontrer la juftice de fa réclamation ,
il va établir i ° . que le paffage dans-le champ de la Cartade,
lui eil dû par la claufe contenue au contrat de 1692 j 20. que
ce paiTage, eft acquis au public par une poiîeiîion immé
moriale ; que l’enquête qui conftate cette publicité , n’a été
faite que conformément au texte de la Coutume d’Auvergne.
Il expofera enfuite les contredits les pluspéremptoires, contre
la production nouvelle des intimés.
I.
L e contrat du 14 février iG g z , ajjure à B o ß Montbrun, le droit
de paffer par le champ de la Cartade.
C e t a& e p o r t e , ainfî qu’on l’a v u , qu’Antoine Batifle a
vendu à Claude Rapin, une terre de dix fepterées & un pré ,
joignant le grand chemin qui conduit à Thiers ; il lui a vendu
ces immeubles avec leurs paffages & autres droits exprimés
anciens & accoutumés ; ces héritages vendus, font marqués fur
le plan produit au p r o c è s , par les lettres C & D. Ces paffages ont été acordés à Claude R apin , pour lui éviter le con
tour pénible du grand chemin qui eft pratiqué en cet e n d ro it,
fur une montagne élevée d’environ cent toifes : on voit au
p la n , qu on ne pouvoit arriver aux im m eubles acquis, qu’m
pajfant par le champ d'Antoine B atiffe, qui eft la terre de la
Cartade marquée A & B } c’eft donc Je paflage dans le champ
B
�IO
de la Cartade, qu Antoine Batiffe a vendu à Claude Rapin j il
ne pouvoit pas lui en vendre un autre, parce qu’il n'y avoit
que celui-ci, par lequel on pût fe rendre aux terres joignant le
grand chemin.
C e tte vente du paffage, a de plus été faite par Antoine
B a tiffe , à Claude Rapin & aux Jiens ; le vendeur leur en a
même promis le garentage envers & contre tous. Les intimés
font convenus fol. 10 de leur requête du 13 mai 1 7 7 7 , que
le iieur Rapin eit repréfenté par tadversaire ; c’eit encore ce
qu’ils reconnoiffent dans leurs falvations ; par c o n féq u en t,
comme le fieur Rapin pour aller à fon pré & à fa terre , avoit '
droit de paffer par le champ de la Cartade, le même droit de
paffage a été inconteitablement tranfmis à Boit Montbrun.
Q ue les intimés ceffent d’alléguer que les termes du con
trat de 1692, ne fuffifent pas pour conitituer une fervitude ;
que l’héritage par qui elle ieroit d u e , n’y eit pas même
énoncé, & qu’une fervitude doit être défignée d’une maniéré
„
plus particulière.
C ’ejl en vain qu’ils fup pofent, que les termes du contrat de
1 6 9 1 font obfcurs, & qu’ils ne peuvent établir une fervitude;
quand quelqu’un vend , au-delà de fon cham p, des im
meubles avec leurs pajfages ; ces termes obligent le vendeur
à fournir à l’acquéreur , ces paffages fur fon terrein ; il ne
pourroit s’en défendre fur ce que la claufe n’a pas été affez
expliquée , parce qu’il n’y a pas d’expreifion qui foit plus
c la ir e , & que quand elle comprendroit plus de m ots, elle
n’ajouteroit rien à l’obligation qu’elle impofe.
20. Il s’agit moins ici d’une fervitu d e, que d’une conven
tion ilipulée librement par Antoine Batiffe en faveur de fon
a cq u éreu r} c ’eit fur la foi de cet engagem en t, que la vente
portée au contrat de 16 9 1 a été faite j les Rouger & Batiffe
�II
ne peuvent s’y fouftraire, parCe que les conventions tiennent
lieu de loix : contraclus legem ex conventions accipiunt, porte
le § 6 , au digefte du titre depojîd» C e t a£le fuffit donc feul
pour fe con v a in cre, que l ’appellant ne peut être privé de ce
pairage ; s’agiroit-il même d’une fervitude qui eût été conilituée dans la Coutume de P a ris , où elles ne s’acquierent pas
fans t it r e , les intimés ne pourroient en empêcher la jouifTance, puifque le titre émané du pere de fam ille, eft repréfenté ; qu’il eil cla ir, précis & fans équivoque.
C ’eft parce qu’ils ne peuvent s’en défendre, qu’ils ne
s’occupent qu’à l ’obfcurcir; ils oppofent d’abord, que le 8
janvier 177 5 , les parties ont tranfigé fur un chemin qui étoit
en litige entr’ellesj qu’il n’a pas été queilion du fentier que
B oil Montbrun réclame aujourd’hui, d’où il fuppofent qu’il
•r.y p r é te n d o it pas alors.
C ette conféquence eil erronée en .tour point. Dès qu’il
ne s’eil point agi dans la tranfaâlion de 1775 , du fentier de
la C a rta d e , elle ne peut donc pas y être appliquée, parce
qu’une trania£lion eil toujours reilreinte aux objets qui y
font compris. Tranfaclio qucecumque f î t , de his T A N T U M de
quibus inter convenientes p la ç a it, interpojita creditur, dit la
loi 9 , au digefte de tranfaclionibus. Les intimés, en haiardant
ce p ro p o s, ne font point attention que la demande introduélive de Boft M ontbrun, qui eft du z y mars i j j j \ n’étoit
pas form ée, lorfque les parties ont tranfigé le S janvier
:
il s agiffoit d’ailleurs dans cette tranfaélion, d’un partage pour
aller à un rouket, c ’eft-à-dire, à un petit moulin qui fait
tourner une r o u e , pour aiguifer des lames de coutellerie.
Boft Montbrun n e to it point dans le cas de tranfiger par
rapport au chemin de la C a r ta d e , dont il ne s’agiffoit p a s,
& fur lequel il avoit toujours paile librem ent, ai'nfi que le
B ij
�public. La tranfaâion de 1 7 7 5 , qui ne fe rapporte en rien
au procès, n’y a donc été produite de la part des adverfaires,
que pour y répandre de l’obfcurité.
Ils a ffe & e n t encore de confondre lepaiTage vendu à Claude
Rapin par le contrat de 1 6 9 2 , avec un pajfage à char, dont
c e t a£te fait enfuite mention ; parce que ce pajfage à char eft
a b fo lu m e n t différent du paflage délaifle à Claude R a p in ,
pour aller aux terres que Boft Montbrun poflede 5 il fuffit,
pour en être perfuadé, de rapporter cette fécondé claufe du
contrat de 1 6 9 1 -, on y lit : « En faveur de ladite v e n t e , a été
» c o n v e n u , que ledit vendeur plantera une borne à l'entrée
» & pajfage à char, que ledit iïeur acquéreur a fait entre la
» terre par lui acquife d’Antoine Chapel Garro , & celle dudit
» B a tijje, vendeur, appellée la Marette... duquel paiTage ledit
» iieur acquéreur demeurera à perpétuité feigneur & maître ».
C e qui prouve que Je paflage inféré dans cette claufe, eft
entièrement différent du (entier contentieux, eft d’abord,
qu’elle énonce un pajfage à char que le fleur acquéreur a f a i t ,
lorfqu’il s’agit au procès d'un fentier à pied : tel eft celui qui
eft contenu en la demande introduiHve de Boft Montbrun ,
du 27 Août 1 7 7 7 ; 2°. parce que ce paflage à char que l’ac
quéreur a f a i t , eft e n t r e la terre par lui acquife d'Antoine
Chapel Garro, & celle dudit Batijfë^vendeur ,lorfque le paflage
réclamé traverfe entièrement le champ de la Cartade j
5 0. parce que cette terre appartenante à Antoine Batifle ,
contre laquelle Claude Rapin a fa it faire un paffage à ckart
s’appelle
la M arette, qui eft fituée d’un autre
côté }
4 0. parce qu’ on ne va pas de Pigerol aux héritages vendus
par le contrat de 169** Par ta terre appellée la Marette ; au
lieu qu’on y v a dire&ement par le fentier du champ de la
Cartade. Toutes les faufles aliénions des intimés fur c e
�13
premier o b jet, font donc renverfées. L ’appellant n’auroit-il
que le contrat du 14 o&obre 1692 , il lui préfente un m oyen
certain, un moyen déciiif & même infaillible, pour faire
anéantir la Sentence de la fénéchauiTée de Riom^ Mais
indépendamment de fon droit perfonnel fur ce ch em in , il
v a être démontré, que s’étant formé de temps immémorial,
il n’eft pas au pouvoir des intimés de le fupprimer.
I I.
L e droit de pajfage dans le champ de la Cartade , ejl acquis au
public, par une poffejjion immémoriale.
O n fçait que le D roit écrit admet la prefcription a ftiv e
des fervitudes ; c ’eft ce qui fe lit en la loi premiere du titre'
24 au code , de fervitutibus & aquâ. Plufieurs de nos Coutumës ’
ont retenu ce prin'cipe, entre autres celles de Laon , de Châlons, d’Amiens & d’A rto is, & de Boulogne : dans ces terri
toires , les fervitudes font confondues a vec les autres droits.
C ette prefcription des fervitudes, eft établie le plus expreffément par la Coutume d’Auvergne , qui régit la châtelleniede Thiers ^l’article 2 du titre 17 porte :» Tous droits & actions,
» cens, ren tes, s e r v i t u d e s & autres droits quelconques
» prefcriptibles, foit corporels ou incorporels, feprefcrivent,
*> a c q u i è r e n t ou perdent , par le laps & efpace; de trente
»> ans continuels & accomplis *\
T e lle eft la L o i à laquelle doivent fe conformer les Juge
ments qui font rendus dans cette Coutume fur le fait des fer
vitudes ; comme elles fe forment fans titre fur le fonds d’au
trui , il ne s’agit que de fçavoir fi celui qui foutient que
l’héritage d’un autre y eft fournis * a ufé de la fervitude
�14
pendant trente ans ; fi ce fait eft prouvé , la fervitude eft acquife.
C e n’eft feulement point des fervitudes rurales & de la
ca m p a g n e, qu’un héritage peut être c h a rg é , après une poffeffion de trente ans ; la difpofition de la Coutume s’étend
également fur les fervitudes des villes -, c’eft ce qui eft obfervé
par Prohet,ancien avocat en la Cour,dans fon commentaire fur
la même Coutume , article z du titre ci-deflus e x p o fé , où il
dit :
Même les fervitudes & urbaines , contre l’ancien ufage
» qui avoit interprêté la Coutume des fervitudes rufliques\
» cela a été ainii jugé par ArrêtxQnàw au rapport de M . Fou» c a u t , au procès de Sablon contre Bouriin, pour fervitudes
» de maifons iïtuées en cette ville de Riom.
Boft Montbrun ayant avancé dans fa demande in tro d u ftiv e,
d ’après le texte & l’efprit de la Coutume , que le fentier
de la Cartade étoit un paflage public , il devenoit indifpenfable que ce fait fût conftaté -, c ’eft pour y parvenir , que le
Juge de Thiers a ordo n n é, par fa Sentence du 6 Juin 1778 ,
que Boft Montbrun en ferait preuve ; c ’eft ce que les Intimés
ont voulu arrêter, par un a£fce d’appel de ce Jugement ; mais
comme il n’empêchoit pas fon exécution , l ’enquête a été
faite ; on ne rapporter^ que quelques - unes des dépofitions
qu’elle contient, la C our pourra s’afîurer que toutes les autres
y font conformes.
^ Suivant le premier témoin , » indiflinclement t o u t e s les
» perfonnes qui alloient & venoient du village de P ig e r o l,
» pajfoientpar ce fen tier, fans aucune diflinclion ni réferve, au
h vu & a u fçu des propriétaires & jouiflants de la terre de la,
» Cartade ».
L e fécond témoin déclare , » que toutes les fois qu’il a ét<?
î> au village d e 'P ig e jo l , &. qu’il en eft revenu , il a paffè.
�*J
i> par ledit /entier, & a v u que t o u t e s les autres perfonnes en
» ont agi aitifi; q u i l a v u pajfer, par ce [entier, des meuniers
» rapportant de la farine avec des ânes ».
La dépofition du quatrième tém o in , porte de même , qu’à
l’égard du fentier de la terre de la Cartade, » il y a toujours
» paffêf & vu pajfer t o u t l e m o n d e qui alloit ouvenoit audit
» village de P ig ero l, en allant ou venant du côté de celui de
» Montbrun ¡fans que nul s ’y fo it oppofé».
O n lit auffi dans celle du cinquième témoin , que >> les
» a l l a n t s e t v e n a n t s de Pigerol à M em tlrun, & lieux
» y aboutiiTants , ont toujours pajfé & repajfé par ledit fentier ;
» qu’il y a même paflé des meuniers avec des ânes , en toute
» faifon de Vannée , au vu & au fç u des défendeurs , fans que
{
» périôiine s'y fo it oppofé. Les huit autres témoins fe font
.....
expliqués dé la m ê m e Tnaniere.
L e premier témoin de l’addition dê’l ’ènquête'a de plus dé*
c la ré , qu’avant le procès, "un dès vicaires de Ta" parôiiïe- de
\
Saint-Geneft, » après avoir dit la mefle dans la paroiife de
î
» P ig e r o l, fut porter le viatique à un particulier de Londée j
» que pour s ’y rendre, il paffa par le fentier dont il s'a g it, ainjî
» que t o u t e s a s u i t e ».
. Le pairage du champ de la C a r t a d e , a donc toujours été
le chemin le plus p u b lic, & fur lequel les gens du pays &
tous autres ont pafle dans tous les temps, au vu & au fç u des
parties adverfes qui ne s’y font pas oppofèes. C e tte publicité
leur étant auiïi parfaitement connue , comment ont-elles ofé
avancer au procès , * q u i l n a jam ais exijlé de fentier ni pour * Ecritures du
Guillaume B o fl Montbrun, ni pour le public j c ’eit ce qui eft
û fau x, que malgré la Sentence dont eil appel , le public
continue toujours à y paiTerj c ’eft ce que Boft Montbrun a
fubiidiairement articulé il y a quelques jours. Concluons
�16
d o n c , que le fentier du champ de la Cartade étant publie de
tout tem ps, quand l’appellant n’y auroi: pas le droit perfonnel
qui lui eft affuré par le contrat de 1692 , il a acquis irrévo
cablement d'après la Coutume d’A uvergne , l’ufage & l’exer
cice de ce p acage , qu’ainft il ne peut jamais en être
évincé.
Les intimés , hors d’état de contefter les preuves de D ro it
& de fait qui s’élevent contre leur réiiftance, n’ont de reffource que dans des propos fans application; ils fe trans
portent dans une Coutume étrangère, pour faire perdre de
vue celle d’A uvergne. Il a été ju g é , difent-ils, par plufieurs
A r r ê ts rendus dans la Coutume d’A n jo u , oîi les fervitudes
s’acquierent aufli par la prefeription, que la fervirude de
fentier ne peut être admife , ¡orfque celui qui la reclam e,
peut aller à ion champ par un autre chem in; & com me il
en exifte un le long de la terre de la C a rta d e , ce qui a été
décîH<F pour rA n jo u , doit être étendu à la province d’A u
vergne.
C ’eft aflurément ce qui n’arrivera pas, les raifons en font
fenfibles.
i ° . Les pairages que les Arrêts ont fupprimés dans la
Coutume d’Anjou , n’étoient dans l’origine que de tolé
ran ce, ainil qu’on l’a établi au procès. O n vouloit mal à
propos en abufer ; i c i , le fentier de la Cartade a toujours
été un chemin public. Pour l’interdire à tous ceux qui en
u f e n t ,il faudroit renverfer le texte formel de la C o u tu m e,
l’ufage certain du p a y s , impoferaux habitants de l ’A u v e rg n e ,
des entraves qu’ils n’ont jamais connues.
20. La différence du fol de la province d’Anjou & de celle
d’A u v e rg n e , rend déplus ces Arrêts fans application. L ’Anjou
cil un pays plat; tous les chemins en font faciles : au con
traire.
�17
traire, la haute Auvergne eft le canton de la France le plus
rempli de montagnes, auxquelles on ne peut aborder qu’avec
de grandes difficultés j tel eft le chemin qui domine fur le
champ de la Cartade, dont l’élévation peut être de cent
toifes ; on a de tout temps abrégé ces trajets longs & péni
bles , par de petits fentiers que la néceffité a fait pratiquer
dans les champs au-deifous, il peut s’en trouver plus de
mille dans le reifort de la châtellenie de Thiers : entre
prendre de les fupprimer, ce feroit porter la défolation dans
tout ce can ton , rendre le pays impraticable , s’il falloit
chaque fois traverfer ces hautes montagnes qui font cou
vertes de neiges une grande partie de l’année, lorfque ces
petits fentiers que chacun eft obligé de fouffrir furfon terrein , ne caufent a ucun p ré ju d ic e .
Il
en eft de même d’un Arrêt rendu en la premiere Cham
bre de la Cour le 26 février 1 7 5 8 , rapporté par Denifart
fur le mot Servitude, qui n’a permis de palfer dans un ch a m p ,
qu’en indemnifant le propriétaire: il s’agiffoit, dit l’arrétifte,
d’héritages fitués dans la paroifle d’id e , refort de Salers en
A u ve rg n ej o r , la Juftice de Salers eft inconnue dans la
haute A uvergne i elle peut en être éloignée de quarante
lieues; le chemin qui a fait naître cette conteftation, n’avoit
de plus été à l’ufage que d’une feule fam ille, il n’étoit pas
public comme celui de la Cartade, fur lequel tout le pays &
peux d’alentour , n’ont jamais ceiTé de paifer.
O n ne s’arrêtera pas à une autre obje& ion d’après la
quelle les intim és ont fuppofé, que des m inorités de leur
part avoient arrêté la jouiffance de trente ans qui a ete
prouvée par 1 en q u ête, parce q u ’ind ép end am m ent du droit
que le contrat de 1692 a tranfmis à Boft Montbrun, les trente
années étoient révolues lorfqu’Etienne BatiiTe leur auteur eft
C
�iS
décédé ; c ’eil ce que l’appellant a établi dans íes griefs fur
des preuves qui n’ont pu être détruites. V enons à d’autres
difficultés que la production nouyelle des intimés du 4 no
vembre 1783 a fait naître.
O n avoit dit à B oíl Montbrun, qu’un a£tedu 16 février
1 6 4 1 , énonçoit le paffage en litige , comme formant en ce
temps-là , un fentier dans le champ de la Cartade j quoique
c e fait fût indifférent après les preuves ci-deflus rapportées,
il s’en eil fait délivrer une expédition que fon procureur a
produite; comme il ne fçait ni lire ni écrire, il ignore abfolument ce qu’elle contient.
L es Intimés ont prétendu que la minute de l’a ile produit
préfentoit des ratures & des iurcharges; c’eil encore ce que
B o íl Montbrun ne peut fçavoir ; s’il s’y trouve des altéra
tions, le feul parti qu’ils euffent à prendre, devoit être, &
c e conformément à l’article 6 du titre 9 de l’Ordonnance
de 1 6 7 0 , & aux articles i er & fuivants de celle du mois de
juillet 1 7 3 7 , de faire faire à B oíl Montbrun une fommation
de déclarer s’il entendoit fe fervir de fon expédition du 20
m a rs 1 7 6 2 ; & au cas d’une réponfe affirmative de fa p a r t ,
de s’infcrire en faux contre cet a¿le ; mais au lieu de fe con
former à cette reg le , le 10 mars 1 7 8 3 , les Intimés fur une
requête non communiquée, ont furpris un Arrêt de la C o u r
qui a ordonné que les deux plus anciens notaires de la ville
de Thiers fe tranfporteroient chez le iieur Cuffon chanoine
de la ville de T h ie r s , dépofitaire de la minute de l’a£te du
20 février i ¿ 4 2 » à l’effet d’en drefler proçès-verbalj çe qui
a été fait le 24 du même mois.
�*9
C O N T R E D I T S .
\
L a procédure fu r laquelle CArrêt fu r requête du to mars ij$ 3 *
¿té obtenu, efi nulle.
Lorfque dans un p ro c è s, une piece füfpe&e de faux a été
p ro d u ite, l’Ordonnance du mois d’août 1670 porte articlé
6 , que le demandeur préfentera requête , aux fin s de faire
déclarer par le défendeur , s*il veut f e fervir de la piece
maintenue faujje.
Article 7 , le Juge ordonnera au pied de la requête , q u i
Vinfcription fera faite au greffe, & le défendeur tenu de décla
rer s’il veut fe fervir de la piece infcrite de faux ; ces difpciîtions ont été rappellées par les articles 3 8c 8 de l’Ordonnance
du mois de juillet 1737. Ces deux L o ix n’ayant indiqué que
cette p rocédu re, il n’eil pas permis de s’en créer une autre ;
celle que les intimés fe font formée , leur demande à fin de
vérification d’une piece qui n’efl: pas même arguée de faux ,
efl: nulle, parce qu’en cette matiere q u ie it de rigueur, l’Ordonnance ne permet l’examen de la minute d’un a é t e , qu’a
près que le demandeur a fourni fes moyens de faux.
D ’autres nullités infeétent la procédure antérieure & poitérieure à l’Arrêt fur requête du 10 mars 1783 j Boit Montbrun
ayant conftitué procureur fur fon a p p e l, les intimés en ayant
fait autant de leur p a r t , & leurs procédures ayant toujours
été çontradi&oires , ils ne‘ pûuvoient obtenir aucun Arrêt
que fur une demande fignifiéé de Boit Montbrun , parce qu’a
près la conftitution des procureurs, toutes les procédures qui
fe font dans les caufes , initances & p ro c è s, doivent leur'
C ij
�20
être refpeftivem ent Jîgnifiées, c ’eft ce qui fe lit aux articles
2 , 4 , 8 , du titre 11 de l’Ordonnance de 16675 cet article 8
porte q u ’après les défenfes fournies , la caufe fera pourfuivie
à l’audience fur un fimple afte figné du procureur & Jignifié\
c ’eft fur cette diipofition que devoit être réglée la procédure
abufive dont la nullité eft demandée j les intimés ayant conçu
le projet de faire vérifier la minute de l’a& e de 1 6 4 2 , la
demande devoit en être fignifiée à Boft Montbrun, puis por
tée à l’audience, pour qu’il y fût ftatué contradi&oirement ;
ils n’avoient pas le droit de furprendre de la religion de la
C o u r , un Arrêt qui n’a été rendu ni à l’audience, ni contra
dictoirement , ni par défaut j leur demande clandeftine , n’eft
donc qu’un abus intolérable & repréhenfible.
L ’article 28 du même t it r e , eft encore plus précis que les
précédens. Défendons, porte-t-il, d'avoir égard aux réponfes
à griefs & réponfes aux caufes d’a p p e l, J l elles ri ont étéjîgni-
fiées. C e t article s’applique à tous les c a s , à toutes les procé
dures auxquelles les Cours ne peuvent avoir égard, fi la ligni
fication n’en a pas été faite. L ’Arrêt à intervenir profcrira
par conféquent la requête fur laquelle l’Arrêt du 10 mars
1 7 8 3 a été furpris. La procédure antérieure à cet Arrêt eft
donc nulle, on va vo ir que celle qui y eft poftérieure l’eft
également.
L e 24 mars 1783 , les intimés ont fait fignifier à Boft
Montbrun , à fon domicile en parlant à fa perfonne , le même
Arrêt fur requête. Pour prouver que cette fignification eft
encore nulle, il iuffit de jetter les ye u x fur l’article 2 du titre
27 de la même Ordonnance : il déclare que « les Arrêts ou
» Sentences n e p o u r r o n t être fignifiés à la partie, s’ils riont
�21
» été préalablement Jîgnifiés à leur procureur, au' cas qu’il y eût
» procureur conilitué ».
C ette procédure des intimés ne préfente donc par-tout
que de continuelles tranfgreiRons de l’Ordonnance.^ Quand
cet article porte que les Arrêts ne pourront être iignifiés à
la partie , s ’ils nont été préalablement Jîgnifiés à fon procureur,
il veut par conféqu en t, que les Arrêts foient Jîgnifiés au pro
cureur; avant de l’être à la partie , ce qui n’a pas été fait de
l ’Arrêt furpris fur requête , qui n’a jamais été fignifié au pro
cureur de B oit Montbrun ; ainiî , nouvelle contravention ,
& par conféquent nouvelle nullité.
2°. Dès que l’Ordonnance établit que les Arrêts ne pour
ront être fignifiés à la partie , s'ils n'ont été préalablement
JigniJiés au procureur, elle annulle par conféquent la lignifi
cation faite à Boit Montbrun de l’Arrêt fur requête par le
défaut de JîgniJication antérieure à fon procureur j cet article
profcrit donc la fignification du même A r r ê t , ainfi que le
procès-verbal que les deux notaires de Thiers ont fait de
la minute qu’ils ont compulfée.
Vainement les intimés allégueroient-ils qu’aucun des arti
cles ci-deflus c i t é s , ne prononce la peine de nullité ; mais
fans établir ici que toute infraction à l’Ordonnance annulle
tout ce qui y eft contraire, cette nullité eit expreflement
prononcée par l’article
8 du titre premier: « D éclarons,
» porte-t-il, tous Arrêts & Jugemens qui feront donnés contre
» la difpojîtion de nos Ordonnances, Edits & Déclarations,
» nuls , & de nul effet & valeur ». Boit Montbrun en deman
dant la nullité de la procédure des intimés , reclame par
conféquent l’exécution de cette difpofition de l’Ordonnance $
c ’eit ce qui fera infailliblement prononcé, puifqu’il a en fa
�faveur le t e x t e précis des L o ix , auxquelles il n’e ft jamais
permis de porter atteinte.
Monf i eur G U E R R I E R D E R O M A G N A T , Rapporteur
M e D E C A L O N N E , A v o c a t.
M o l l i e n , Procureur.
A P A R I S , chez P. G . S i m o n , & N . H. N y o n , ,
Imprimeurs du Parlem ent, rue M ig n on , 1784.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bostmontbrun, Guillaume. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Guerrier de Romagnat
de Calonne
Mollien
Subject
The topic of the resource
servitude de passage
coutume d'Auvergne
prescription acquisitive
Description
An account of the resource
Mémoire pour Guillaume Bost Montbrun, laboureur, habitant du village de Pigerol en Auvergne, appelant et demandeur ; contre Benoit Rouger, et Pétronille Batisse, sa femme ; Guillaume Batisse et consorts, couteliers et laboureurs au même lieu de Pigerol, intimés et défendeurs.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez P. G. Simon et N. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1692-1784
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0623
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0622
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53883/BCU_Factums_M0623.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Glaine-Montaigut (63168)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume d'Auvergne
prescription acquisitive
servitude de passage
-
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b3585c29f275ff21eda84af175293141
PDF Text
Text
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P A R T A G E ,
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P O U R G u i l l a u m e B o s t m o n t b r u n , laboureur, habitant
du village de Pigerol en Auvergne , appellant & deman
deur
C O N T R E B e n o it R o u g e r & P e t r o n ille B â tis s e ,
fa femme i G u i l l a u m e B â t i s s e & confors , couteliers
& laboureurs au même lieu de P ig ero l, intimés & défendeurs.
D E temps immémor ia l , les habitans de P igero l, ainfi que
ceux des villages v o if i n s ont paff e par un fentier qui eft
dans le champ de la Cartade appartenant aux Intimés ce
ce paffage leur fait éviter le circuit pénible d’une montagne
tres-elevee qui domine fur ce champ cette traverfe fert à
Boftmontbrun pour aller à fes terres qui en font très v oifines.
Q uoique ce fentier foi t public , & que trente années fuffifent dans la Coutume d’A u vergn e, pour acquérir les fe rv i tudes, cependant les R ouger & Batiff e ont voulu em pêcher
A
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A f) .
A
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�Bûilmontbrun d’ufer dé ce paiTage , jüfqu’au point de mal
traiter Tes enfaris ; mais par Arrêt contradi&oire rendu en la
Chambre des Vacations le 1 6 oftobre 1776 , défenfes ont
été faites aux accufés du nombre defquels étoient les Rouger
& Batiffe , de récidiver ; ils ont été condamnés folidai'rement
en dix livres de dommages & intérêts, & aux dépens.
Irrités d’avoir fubi une peine qu’ils méritoient, ils. ont
continué à priver Boftmontbrun de ce paflage , ce qui l’a
obligé de les traduire le 27 mars 17 7 7 en la Châtellenie de
>Thiers , où il a demandé à être autorifé de continuer à paiTer
u , à p ie d , comme tout le public , fur ce fentier ; que défenfes
leur^fuffent faites de l’y troubler, & d’intercepter le même
pacage aux peines de droit.
Sur cette demande que les adverfaires de Boftmontbnm
ont vivement combattue, Sentence eftintervenue en la Châ
tellenie de Thiers le 6 juin 1 7 7 8 , elle porte : « Nous, les fins
» & moyens des parties refervés, ordonnons avant faire droit,
» que ledit Boftmontbrun fera preuve devant nous dans'trois
» jours , tant par titres que par témoins, que de temps imnii» morial, & notamment trente ans avant le premier mars i j j j ,
» le fentier défigné au plan fignifié.le 1 1 mars dernier, par
» les lettres A & B , à exiflé dans la terre dpfdi.ts ïiatiffe &
» Rçuger appellée la Ca r t a d e , foit à l’endroit indiqué , foit
» plus haut ou plus bas, mais toujours dans ladite terre. , &
» aux mêmes fins. Comme auffi, que les propriétaires du village
» de Pige roi & autres, ont pajfé & rfpaffé par ledit fentier au
„ vu & au feu deJdits~Bati(Je;_& Rouge r , pour aller & pôur
>» venir audit village 1 de- R igw T ^ . foit que ladites terre dçs
>♦ Cartades/i^ enfemencée>fdit qû’ellü ne le fût pas indiftinc» tement; commeiaufli qu’il eft d'ufage dans les pays vQifins,
» quon laboure & enjemcnce Us fentier* & chcmins 9 à la fhargç
�A 3
» d’en fournir d’autres à côté, fans que le public feplaigne ; 5c
» lefdits Batifle & Rouger la preuve contraire dans le même
» délai, fi bon leur femble ».
’ Cette Sentence étant exécutoire par provifion, l’enquête
a été faite; quinze témoins qui y ont été entendus, ont dépoté
unanimement, que les allans & venans de Pigerol à Meriibruü
& autres, avoient paffé en tout temps par le fentier de lâ
Cartade au vu & au feu des Rouger & BatiiTe, fans qu’aucüh.
d'eux s3y fû t oppofé
Les parties adverfes fe voyant fur le point d’être condam
nées, ont interjetté appel de la Sentence ci-deffus tranferite}
Je procès a été porté en la SénéchauiTée de Riom; la décifion
du premier Juge étant direftement fondée fur le tette de la
Coutume , il ne parbiffoit pas qu’on pût y porter atteinte ;
cependant p#ar un’ revers dont le motif eft inconcevable , le
20 août 1 7 7 9 , les officiers de la Sénéchauflee de Riom / en
infirmant la Sentence de la Châtellenie de Thiers, ont débouté
Bjjftmontbrun- de fa demande afin de paiTage fur le fentier
dont il s’ag it, & l’ont condamné en tous les dépens.
Il n’a pas héfité à interjetter appel de cette Sentence j il
demande qu’en l’infirmant, il foit ordonné que les parties
continueront de procéder en la Châtellenie do Thiers, en
exécution de celle qui y a été rendue le 6 Juin 1 7 7 8 , Sc que
les R o u g e r, BatiiTe & confôrts foient Condamnés aux dé
pens. Le procès ayant été mis fur le bureau le y juillet,
fur le rapport qui en a été f a i t l e s opinions des Magiftrats
ont été partagées.
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Lorfqu’un droit eft fondé fur la Coutume, il eft indifpenfable d’y déférer j^elle eft la loi qui nous dirige -, on^ne peu t ,
dit du Moulin page 5 5, y rien ajouter ; quod verbis confuetudinis nih.il (it addendum. I l n ejl pas permisr dit Brodeau en fa
préface fur celle de Paris, d’éluder Ces difpo fitions ni d'y
contrevenir. Les Coutumes , obfervent les annotateurs de DupTeiîis^ page ^çz , font de droit étroit ,* enfin Dehieu', fur l’ar
ticle 256 de celle d’Amiens ,^ttefte^jue ce qui ejlprefcritpar
la Coutume doit être gardé ponBuellement.
'■
j
De-là il devient évident, qu’il eft auffi jufte que néceffaire
de fe conformer à la Coutume d’Auvergne fur le point controverfé : elle porte en l’article 2 du titre 1 7 , que tous droits
& actions, cens, rentes, s e r v i t u d e s s e p r e s c r i v e n t
e t a c q u i e r e n t par le laps & efpace de trente ans. On fait
que les Parlements régis par le Droit écrit
admettent
^ auffi les fervitudes fans titre j beaucoup de* nos Coutumes,
entr’autres celles de Laon, de Châlons, d’Amiens, de Bou
logne , d’Artois, & toutes les Coutumes de la Flandre, ont
retenu ce principe j les fervitudes y font confondues avec
les autres droits.
La Coutume d’Auvergne établiffant que les fervitudess’acquierent par trente ans, Boftmonbrun ayant foutenu dans f3
demande introdu&ive, que de tout tems & ancienneté y le fentier du champ de la Cartade fervoit au public, aux habitans
du village de Pigerol, & en particulier à lui-même. li a donc
été indifpenfable au Juge de la châtellenie de T hiers, d’ad
mettre Boftmonbrun à la preuve de ces faits j fa Sentence du
6 juin 17 7 8 , eft en tout point conforme à la Coutume., jm if-
,
�f
que fi l’enquête établit que le fentier du champ de la Carrade a été public pendant trente ans, il eil par conféquent
aiTujetti au fervice de tous ceux qui voudront y paffer * à
l’ufage de Boilmontbrun , comme à celui de tous les habitans de la contrée. C ’eil ce qu’établiront les dépofitions des
témoins entendus.dans l’enquête, quand les parties auront
été renvoyées devant le premier Juge.
Avoir entrepris, comme les intimés l’ont fait par un appel irîterjetté fans motif, d’arrêter la décifion que le Juge châtelain de
Thiers devoît rendre, c’eil avoir empêché par une voie inufitée, toujours dangereufe, & par conféquent repréhenfible,
que la juilice ne fut rendue ; le miniilere d’un premier Juge
ne peut ceiTer, qu’après une Sentence définitive j fi une pro
cédure irréguliere de la part de celui qui craint de fuccomb e r, l’empêche de la rendre, le Juge fupérieur doit lui ren
voyer la connoilïance de l’inilance ; cette réglé eil toujours
obfervée dans les tribunaux} la loi 3 0 , au digeile de judiciis ,
l’ordonne en ces termes : ubi cœptum ejl judicium : ibi finetn
accipere debet ; l’appellant doit donc avoir l’efpérance la
mieux fondée, que la Cour en infirmant la Sentence de la
fénéchauflee de R iom , renverra les parties en la Châtellenie
de Thiers , où la conteilation eil reilée indécife, & où le
titre au digeile de judiciis veut qu’elle foit jugée définiti
vement.
Il feroit par conféquent inutile de s’occuper des foibles
moyens qui font la reflource des intimés ; ce fera à eux à les
propofèr devant le Juge de T hiers, qui eil feul compétent
pour y ilatuer.
G ’eft une illufion de prétendre que le fentier du champ
de la Cartade étant public,.il ne pourroit pas être prefcriti
d’abord; parce que la difpofition des Coutumes étant géné-
�raie, le droit qu’elles attribuent de pouvoir prefcrire , s’ap
plique au public comme aux particuliers ; dès que le public
n’en eft pas excepté., comme le font certaines perfonnes , il
jouit donc du droit de. prefcrire ; fi. le public n’eil pas au
jourd’hui éri caufe, c’eft parce qu'il n’y eft pas intéreffé ,
puifque nonobftant la Sentence de la Sénéchauffée de R io m ,
il continue, comme avant, de pafler dans le champ de la
Cariade j Boftmontbrun a articulé ce fait en la Cour j comme
il eft v r a i , les intimés n’ont pas ofé le contredire. . >l "
Une autre objefoion des intimés .fur laquelle ils ont beau
coup iniifté , eft tirée de quelques Arrêts qui fuivant euît ont
limité le .texte des C outumes qui admettent la prefcription
des fervitudes, au feïïTcas de la néceflité abfôhie - iis ont oppofé- quatre Arrêts dont trois, rendus dans la Coutume d’An
jo u ; de ces trois Arrêts un feul feroit dans l’éfpece , d au
tant qu’à l’égard,des deux autres, il ne s’agiiToit pas d’un
paflage reclamé comme chemin puEÏÏc ; que d’ailleurs fui
vant les auteurs qui les rapportent, il n’étoit pas contefté
que cette poileiîion particulière, ne fût l’effet de la tolérance
Z o jt m d
& de la familiarité des propriétaires ; quant au troifieme de
ces Arrêts retidu aufïi dans la Coutume d’Anjou, dans l’efpece
UAlM^ '‘f o j duquel on fuppofe qu’il s’agiffoit d’un paffage reclamé à titre
i
de chemin public, cet Arrêt n’exifte pas, il a été impoffible
de le trouver dans le dépôt de la Cour où les minutes des
(
/¿¿w d
Arrêts fe confervent. Par rapport au quatrième Arrêt rendu
l'FU*AjÙufaj'cul CrW)J
dans la Coutume d-Auvergne , qui eft cité par Denifart ;
cette citation réunit les deux v ices des trois précédentes ,
c ’eft^H ire , qiie l’Arrêt-tel qu’il eft annoncé, n’eft pas clans
l’efoece, & que la minute ne s’en trouve pas.
Mais ürT7frrêt très-récent rendu pour la même Coutume ,
& dont l’appellant vient d’être informé , va faire connoître
�7
que fa difpoiîtion eit exactement fuivie fur la prefeription ac
tive des fervitudes ; dans cette efpece de laquelle le temps ne
permet de rapporter que les faits les plus eiîentiels, Français
Bonnet, feigneur de Charmenfac en Auvergne, reclamoit un
paffage avec chevaux & voitures par un champ devenu depuis
une cour, appartenant à Louis Bonnet, marchand à Allanchç,
il invoquoit une poiTeiïïon immémoriale qui fuivant l,e textç
de la Coutume ci-deiTus cité , lui acqueroitune ferviti}de dè
paiTage fur ce champ %après une. enquête qui prmivoitîde.fâ
part une pofTeiîion fuffifante, Sentence eii intervenue au bail
liage d’Allanche le 30 août 1775?, elle eft conçue eil ces
termes.
« Ayant égard’h ce qui réfulre des enquêtes.faites, en .exé» cution de notre Sentence interlocutoire du 22 feptembre
» 17 7 7 ,avôn? gardé & maintenu ledit François Bonner dans
» le droit & pojfejjion de pciffer & repaffer avec chars & bœufs
» poufHefervïcà 'de ^exploitation de 1fon champ de quinze fepte» rèes , dans la cour du bâtiment du domaine de Louis Bonnet &
» P atu raiy contigu, faifons défenfes audit Louis Bonnet de
» le troubler à iavenir dans Vexercice dudit droit de paffage,
» aux peines de droit, à la charge néanmoins par ledit Fran» çois Bonnet, de ne point pratiquer difterens chemins dans
» ladite cour & patural, & de prendre fon paffage par le
» même endroit, & c. »
Louis Bonnet ayant interjetté appel de cette Sentence en
la SénéchauiTée de Riom , elle y a été confirmée fur produc
tions refpeftives le 4 juillet 1780 -, le fieur Bonnet s’étant
encore pourvu en la Cour fur fon appel de ce fécond juge
ment , François Bonner y a obtenu un A rcir confirmatii^iiîà
trôifieme chambre de la Cour au rapport'de M .'Clém ènt dè
G ivry le 9 août Ji 7 8 j. ... j.. , . . . w <
^ l
�Si donc cet Arrêt rendu pour la Coutume d’Auvergne vient
de juger qu’une poffeffion de trente ans y acquiert avec c h a rs
&boeufs un droit de paffa g e dans le champ d’autrui,
confirmé une Sentence de la Sénéchauffée de Riom du 4 juillet
17 80 ; cette jurifdic ion a donc reconnu le mal jugé de celle
q u ’elle avoit rendue contre Boftmontbrun le 2 0 A0ut 1779 «
par laquelle elle l’avoit débouté de l’ufage du fentier fur le
champ de la Cartade , nouveau motif pour infirmer un Juge
ment qu’elle regrette fans doute d'avoir prononcé , & qui ne
doit pas fubfifter, dès qu’il eft auffi contraire au v oeu à l'efprit
& au texte de la coutume.
Monfieur LAMBERT D U FRESN E, Rapporteur
.
Monfieur DE BRETIGN ERES, Compartiteur,
M e DE CALO N N E, Avocat.
t
\
•
M ol l ie n , Procureur,
---------
11
1
1
A P A R I S , chez P. G. S i m o n & N. H. N y o n,
Imprimeurs du Parlement, rue Mignon, 1784.
�
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Factums Marie
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A related resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bostmontbrun, Guillaume. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lambert du Fresne
de Brétignères
de Calonne
Mollien
Subject
The topic of the resource
servitude de passage
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Précis sur partage, pour Guillaume Bostmontbrun, laboureur, habitant du village de Pigerol en Auvergne, appelant et demandeur ; contre Benoît Rouger et Pétronille Batisse, sa femme ; Guillaume Batisse et consors, couteliers et laboureurs au même lieu de Pigerol, intimés et défendeurs.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez P. G. Simon et N. Nyon (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1776-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0622
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A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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A language of the resource
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Relation
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BCU_Factums_M0623
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Glaine-Montaigut (63168)
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Domaine public
coutume d'Auvergne
servitude de passage
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f3fae10ace8509a08abb35cf917b14b5
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Text
MEMOIRE
AU C O N S E I L DE P R É F E C T U R E ,
POUR
Me.
P ie r r e
PAGES-MEIMAC, avocat en la
cour d’appel de Riom ;
CONTRE
Sieur E t i e n n e - A n d r é S A R R E T - SAINTC E R N IN , propriétaire, habitant de la ville
d'Aurillac.
I Ls’agit de défendre à la nouvelle pétition que le sieur
Sarret-Saint-Cernin vient de présenter ; pétition qui tendroit à enlever aux créanciers leur dernier gage, à ôter
particulièrement à l’exposant tout espoir d’être payé de
la créance la plus légitim e, puisqu’elle dérive de vente
de fonds.
—
|
1
�Les faits sont simples.
Défunt Joseph Sarret - Fabrègues , de la succession
duquel l’exposant est créancier, comme représentant
Marguerite Cambefort, veuve Pissis, avoit contracté
mariage en 174^5 avec Geneviève de Brossinhac. Le
contrat de mariage contient donation de la moitié de
leurs biens présens et à venir à celui des enfans à naître
qu’ils choisiroient.
D e ce mariage sont issus cinq enfans, Sarret-Nozières,
François-X avier Sarret-Saint-M amet , Etienne-André
Sarret-Saint-Cernin, Marianne et Geneviève.
Les quatre derniers seulement ont survécu.
En 17 7 7 , Joseph Sarret-Fabrègues se rendit adjudi
cataire des biens saisis réellement sur dame Marguerite
Cambefort, veuve Pissis, moyennant la somme de 34900 f.
Il paya partie de cette somme aux créanciers opposans,
sans la participation môme de la dame Cambefort.
En 1782, la dame Cambefort le fit assigner au ci-devant bailliage d’A u rilla c, à ce qu’il eût à rendre compte
en deniers , ou quittances valables, du prix de l’adju
dication.
L e sieur de Fabrègues présenta un com pte, d’après
lequel, déduction faite des payemens par lui faits, il se
reconnut débiteur d’une somme de 8379 francs , dont
8020 francs en capital, et le surplus pour intérêts.
Il poursuivit l’homologation de ce compte. Il obtint, la
m ê m e année 1782, une sentence par défaut, qui lui donna
acte des offres qu’il faisoit de payer la somme de 8379 fi\,
avec les intérêts qui auroient cours jusqu’au payement; et
�( 3 )
au moyen desdites offres, le congédie de la demande contre
lui formée.
La dame de Cambefort interjeta appel au parlement de
cette sentence , soutint que le sieur de Fabrègues étoit
débiteur de beaucoup p lu s, et qu’il étoit débiteur au
moins de iôooo fr. en capital; ce qui auroit aujourd’hui
doublé par le cours des intérêts.
L ’appel est demeuré indécis au parlement.
Par acte du 14 avril 17 9 1, les sieur et dame de Fabrè
gues choisirent F ran çois-X avier Sarret-Saint - M am et,
devenu l’aîné par le prédécès de Sarret - Nozières, pour
recueillir- l’effet de la donation de moitié biens présens
et_àvenir portée par leur contrat de mariage. Ils lui firent
en même temps donationdel’autre moitié de biens présens;
ils ne purent lui donner l’autre m oitié de biens à venir,
pai'ce que ce n’étoit point par contrat de mariage ;
i° . Sous la réserve de disposer, par le prémourant
d’entre e u x , d’une somme de 20000 fr. ;
20. A la charge de payer à Etienne-André Sarret-SaintGernin, p our sa légitim e, la somme de 35ooo fr. du chef
paternel, et 10000 fr. du chef maternel;
30. A la charge de payer 200000 fr. de dettes, tant
chi r ogra ph aires qu’hy po th éca i rés.
L e père commun est décédé avant la m ère, le 31 août
I792,
'
François-X avier Sarret -S ain t-M am et, donataire, a
émigré. La nation a mis le séquestre sur ses biens.
Bientôt est intervenu e la lo i du 17 nivôse an 2 , qu i
annulloit toutes les dispositions faites p ar personnes décé
dées depuis le 14 ju illet 1789. É tien n e -A n d ré Sarret , et
A 2
�(4)
ses deux sœurs, ont provoqué contre la nation le partage
par é
L ’effet rétroactif de la loi ayant été rapporté, ce par
tage a c te gnnullé par jugement du tribunal civil du
Cantal, du z 5 ventôse an 6 , à la diligence du commis
saire du pouvoir exécutif près le département du Cantal.
L e même jugement autorise ledit Sarret , confor
mément à sa demande , et conformément à la l o i , à se
retenir sur les fonds qui lui étoient échus par le partage
annullé, des fonds en payement de la légitim e, et en paye
ment de la réserve , laquelle lui a été adjugée en entier,
à l’exclusion de ses sœurs, comme celles-ci ayant renoncé,
par le contrat dé mai'iage, à la succession future du père
et de la mère.
.
En exécution de ce jugem ent, il a été procédé à un
nouveau partage; et par ce partage il lui a été expédié
en payement de la somme de 35ooo fr. , d’une part, mon
tant de la destination , et de 20000 fr. T d’autre T montant
de la ^céseuve . et des intérêts de ces sommes dûs jus
qu’alors, des fonds estimés au plus bas prix. On sait com
ment s’opéroient les partages avec la nation. On regardoit comme d’hum anité, et presque comme de justice,
d’adoucir la rigueur de la loi.
Ce partage a été homologué par arrêté de l’adminis
tration, du 21 fructidor an 6.
Étienne-André Sarret avoit en même temps soumissionné le surplus des biens_qui étoient échus à son lot
par le premier partage.
lie même arrêté du département lui eo fait vente au
p rix porté par Vestimation.
~
~ ‘
�( 5)
L e 2 thermidoran 8, arrêté qui déclare que les créances
dont les titres étaient déposés au secrétariat de l’admi
nistration du Cantal, sur l’émigré Sarret-Saint-Mamet,
sont reconnues et déclarées être en totalité àj a charge de
la nation ; qu’en~cÔnséquence $arret-Sain£Cernin ne peut
être tenu au payement de ces créances.
Cet arrêté ne pouvoit concerner que l’action person
nelle, et non l’action hypothécaire.
On connoît la loi du 9 floréal an 3 , qui a ordonné
le partage par anticipation des biens des père et mère
vivans d’émigrés.
La mère étoit vivante. Il a é té , en vertu de cette lo i,
procédé au partage de sa succession.
D u patrimoine de la mère faisoient partie les reprises
qu’elle avoit à exercer sur les Liens cle son mari. Ces re
prises ont été liquidées par un premier arrêté du 19 ger
minal an 5 , et par un second du 21 brumaire an 10 ,
modificatif du prem ier, à 33523 fr.
On n’en parle que parce que le sieur’ Sarret-SaintCernin, dans sa pétition, en fait un objet de demande
pour le tiers , comme héritier pou r un tiers de la mère;
L ’émigré Sarret est depuis rentré, et a été amnistié.
Pendant ce temps, la dame Oambefort n’a point donné
suite à sa demande; elle n’a même point déposé ses titres.
E lle est décédée en l’an 1 2 , après avoir institué l’ex
posant pour son héritier, et fait quelques legs. L ’exposant
a accepté la succession sous bénéfice d’inventaire.
C ’est ainsi que l’exposant représente la dame Cam befort.
Etant ainsi à ses droits , il a fait une insci’iptio11 au
bureau des hypothéqués sur tous les biens adjugés audit
�Etienne-André Sarret, tant pour le payement de la légi
time que pour le payement de la réserve, et générale
ment sur tous les biens dépendans de la succession dudit
Sarret père , autres que ceux vendus par la nation par
Soumission ou autrement.
tçant lu i d’autres créanciers avoient également fait
insci’ire, notamment le tuteur du mineur Roquemaurel.
Il a ensuite fait assigner ledit Sarret - Saint - Cer’nin
au tribunal d’A urillac, pour voir déclarer les héritages
par lui jouis , provenans de la succession dudit Joseph
Sarret-Fabrègues , autres que ceux par lui acquis de la
nation , affectés et hypothéqués à sa créance.
En même temps l’exposant a repris contre FrançoisX avier Sarret-Saint-Mamet, rentré dans ses droits civils,
par acte au greffe de la cour d’appel de R io m , où l’appel
étoit d évo lu , l’instance pendante au parlement.
< A rrêté de M . le préfet, du 20 fructidor an 1 3 , qui,
sur la demande hypothécaire formée contre Sarret-SaintCern in , élève* le conflit.
•
Il a été fait droit sur ce conflit par décret im périal, du
iç) octobre je.8o6 .'Ce décret statuant en même temps au
fond , déclare les héritages donnés par la nation à Sarret*
Saint-Cernin, en payement delà légitim e, francs et exempts
d’hypothèques ; mais il est décidé qu’il n’en est pas de même
de ceux pris en payement de la réserve que Sarret-SaintCei’nin ne pouvoit évidemment s’attribuer au préjudice
des créanciers.
V oici littéralement le décret.
Considérant, i°. que le conflit èst fondé, parce que, bien
qu’il s’agisse d’une action hypothécaire dont la connoissance
�C7 )
appartient de droit commun aux tribunaux, celle-ci est dirigée
sur des biens délivrés par l’arrété de l’autorité administrative, du
21 fructidor an 6 , et fondée sur une créance à raison de laquelle
il faut expliquer le sens d’un second arrêté du 21 thermidor an 8 ;
2°. Que les biens délivrés au sieur Sarret, par l’arrété du «\
21 fructidor an 6, pour sa légitime, lui ont été délivrés comme
la nation délivre les biens d’ém igrés, francs d’hypothèques ;
qt?un légitimaire pavé par elle est à l’instar de tout autre tiers
ou créancier; mais qu’il n’en est pas~ainsi^es Biens qu’elle res- )
titue aux copropriétaires et aux héritiers, qui les reprennent /
avec leurs charges, et sont tenus de les acquitter :
" J
5°. Que l’arrété du 21 thermidor an 8 a justement prononcé
que la nation, jouissant de la donation, en devoit les charges;
Notre conseil d’état entendu ,
Nous avons décrété et décrétons ce qui suit :
A r t. Ier. L’arrété du conflit, pris le 20 fructidor an i 3 , par
le préfet du département du Cantal, est confirmé.
A r t . II. T,e sieur ja rr e t-S a in t-C e rn in ne peut être tenu au \
payement d’aucune créance sur l'émigré Sarret-Saint-Mam et,
ou sur ses auteurs, si ce n’est sur les 20000 liv. de biens qui_
lui ont été délivrés en payement de la réserve contenue dansi
l’acte de donation, du 14 avril 1791, sauf auxdits créanciers à se
pourvoir vers l’autorité administrative , pour être liquidés de
leurs créances.
. Il 11e s’agissoit plus que de suivre l’eiTet de l’action hypo
thécaire sur les biens déclarés soumis à l’hypothèque. Mais
auparavant il falloit faire régler le montant de la créance,,
et faire ju g e r, avec le principal débiteur , FrançoisXavier Sarret-Saint-M amet, l’appel interjeté par la dame
Cambefoit.
Par acte du 18 févi’ier dernier, l’exposant a fait assigner
ledit Sarret-Saint-Mamet pour reprendre l’intauco de sa
p art, et voir adjuger les conclusions prjses.
�(8)
Eu cet état, Sarret-Saint-Cernin a présenté une nou
velle pétition à l’administration.
Par cette pétition , il a conclu à ce qu’il vous plaise
oi’donner qu’en exécution du décret im périal, du 19
octobre 1806, il sera procédé devant vous à la liquidation
des dettes laissées par Joseph Sarret;ce faisant, il lui soit
donné acte des offres qu’il fait de payer, à qui par vous
sera dit et ordonné, la somme de 20000 f r ., montant de
la réserve dont s’agit, avec les intérêts depuis la demande,
sous la déduction de celle de 11174 fr. 35 c ., dont il se pré
tend créancier de la succession dudit Joseph Sarret, pour le
tiers à lui revenant dans les reprises que la dame de Brossinhac, sa m ère, avoit sur les biens dudit Joseph Sarret,
liquidées par arrêté du 19 germinal an 5 , et pour raison
de quoi compensation et confusion se sont opérées de plein
droit.
C’est à cette pétition qu’on va répondre. Il ne faudra
sans doute pas de grands efforts.
D éjà, quant à la partie des conclusions , par laquelle il
demande à être autorisé à rapporter la somme de 20000 fr.
en argent, et à n’être point tenu de rapporter les fonds
même qui lui ont été donnés en payem ent, tout est ter
miné par le décret impérial.
Les termes du décret impérial ne sont point équivoques.
L e sieur Sarret-Saint-Cernin ne peut être tenu au paye
ment cf aucune créance sur Témigré Sarret-Saint-Mamet
ou sur ses auteurs, si ce n'est les 20000 liç. de biens.
Il n’est pas dit sur la somme de 20000 liv.; mais sur les
20000 liv. de biensj et comme si ce mot de biens n’étoit
pas assez clair, il est ajouté, qui lu i ont été délivrés en
�(9 )
payement de la réserve contenue dans Vacte de dona
tio n , du 14 avril 1791.
Ce sont donc les biens même qu’il doit rendre.
Il fait un singulier raisonnement. Lorsque le décret
im périal, dit-il, donne action aux créanciers de l’émigré
sur les 20000 fr. de biens délivrés en payement de la
réserve , c’est-à-dire , qu’il a entendu assujétir seulement
les biens délaissés pour les 20000 fr. au payement de cette
somme de 20000 fr. L e décret n’a pas entendu donner
aux créanciers les biens même délaissés pour le payement
des 20000 fr. de la réserve, mais seulement leur conserver
hypothèque sur ces biens, pour être payés de cette somme
de 20000'fr. ; en sorte qu’en payant la somme l’hypothèque
doit cesser; et qu’alors il se trouvera, continue-t-il, avoir
rempli le v œ u , soit de la d o n a tio n , soit du décret im
périal , q u i n’a pas voulu aggraver son sort.
Son sort est-il donc aggravé, parce que le décret im
périal l’a assujéti à rendre les fonds qu’il avoit pris en
payement de la réserve? Ne l’a-t-il pas assez favorisé, en
déclarant francs et exempts d’hypothèque les fonds à lui
délaissés en payement de la légitime ?
L e sieur Sarret n’est pas content; et parce que les fonds
qui lui ont été délivrés lui ont été délaissés au plus bas
p rix , il veut retenir cet excédant, ce bénéfice, et s’enri
chir encore aux dépens des créanciers.
C’est ainsi qu’il n’offre également les intérêts que depuis
la demande, comme si, en matière de succession, on n’étoit
pas tenu de rendre compte de tous les fruits perçus depuis
qu’on a été en jouissance; comme s’il y avoit même à cet
égai’d.à distinguer entx*e le possesseur de bonne et de mauB
�( 10 )
vaise foi; distinction qui n’a lieu que pour le possesseur
à titre particulier, et non en matière de succession, qui
est un titre universel ; comme si enfin le sieur SarretSaint-Cernin pouvoit retenir la moindre chose, profiter
en rien de la réserve, sans faire acte d’héritier ; ce qui
rendroit sa condition bien autrement désavantageuse.
C ’est ainsi qu’il demande à faire compensation de la
somme de 11174 fr* pour Ie tiers à lui revenant dans les
reprises de la mère; en sorte qu’il rendroit presque illu
soire la décision du conseil d’état.
T e l est l’effet de l’ambition qui ne connoît point de
bornes.
L e système du sieur Sarret-Saint-Cernin entraîneroit
une autre différence. La somme de 20000 fr. étant mobiliaire, se distribueroit entre tous les créanciers, même
chirographaires, au marc la livre; tandis que sur les fonds
les créanciers seront colloqués par ordre d’hypothèque et
d’ inscription; ce qui écarte encore, sans autre examen, la
prétention relativement à la somme de 11174 fr. pour
le tiers des reprises de la mère, pour laquelle créance il n’a
point inscrit.
Mais les termes du décret sont trop précis.
Ce n’est point l’hypothèque des 20000 fr. et pour par
venir au payement des 20000 f r ., que le décret a entendu
délaisser aux créanciers, ce sont les fonds même. Ce n’est
point l’hypothèque des 20000 f r ., c’est l’hypothèque de
leurs créances qu’il a entendu conserver aux créanciers,
en condamnant le sieur Sarret à restituer les fonds par
lui pris en payement.
11 s’agissoit de l’action hypothécaire formée par l’expo-
�( 11 )
sant. Si le conseil d’état avoit pensé que Sarret - SaintCernin devoit être tenu à rapporter seulement la somme de
20000 francs, il auroit débouté l’exposant de sa demande
hypothécaire, une somme mobiliaire n’étant pas suscep
tible d’hypothèque.
Il est reconnu que Sarret-Saint-Cernin s’est fait adjuger
mal à propos la réserve. En effet, la réserve , aux termes
de la loi du 18 pluviôse an 5 , fait partie de la succession;
et conçoit-on une succession, si ce n’est dettes payées ? S’il
ne s’étoit point fait adjuger la réserve, les fonds qu’il a
pris en payement seroient dans la succession ; les créan
ciers se veDgeroient sur ces fonds. Il faut donc au moins
qu’il rende les fonds, qu’il remette les choses au même
état ; heui’eux encore d’en être quitte à ce prix.
E n fin , s’il pou vo it y a v o ir du d o u te , ce seroitau conseil
d’état seul qu’il appartiendroit d ’exp liq u er sa décision.
C’est aussi inconsidérément que le sieur Sarret a conclut
à ce qu’il vous plaise ordonner qu’en exécution dudit
d écret, il sera procédé devant vous à la liquidation de
dettes laissées par défunt Joseph Sarret-Fabrègues,et qu’il
a demandé acte des offres qu’il fait de payer à qui par vous
sera dit et ordonné.
Qu’il soit permis d’observer que l’administration est
encore incompétente à cet égard, le séquestre national
ayant cessé par le retour et l’amnistie de l’émigré SarretSaint-Mamet.
A u m oyen de cette am nistie, la nation n’a directem ent
ni indirectem ent aucun droit au x biens que le sieur SarretSaint-Cernin a été condam né h restituer aux créanciers.
La nation est aussi étrangère à ccs biens qu ’à tous autres
B 2
�( ** )
biens non vendus ni aliénés, qui', aux termes du;sénatus^
consulte, doivent être rendus à l’émigré. Ce n’est point
à la nation que le sieur Etienne-André Sarret est: con
damné à rendre les fonds qu’il a pris en payement de la
réserve, c’est aux créanciers ; et c’est ce qui résulte encore
des termes du second considérant, où après avoir déclaré
francs et exempts d’hypothèque les fonds délivrés p a rla
nation en payement de la légitim e, il est dit qu’il n’en
est'pas de même des biens
restitue aux coproprié
taires et auxhéritiers qui les représentent, avec leur charge.
Ces m ots, que la nation restitue, prouvent bien qu’ellq
n’y a aucun droit.
L e décret déclare francs et exempts de toute hypothèque
les biens délivrés en payement de la légitime. Il est ajouté
qu’ il n’en doit pas être de même de ceux donnés en paye
ment de la réserve ; ceux-ci demeurent assujétis à l’hy
pothèque. Les créanciers doivent donc être colloqués par
ordre d’hypothèque. O r , est-il un exemple d’un ordre
poursuivi administrativement.
Il suiïit encore de se fixer sur les termes du premier
considérant.
« Considérant, est-il d it, que le conflit est fondé, parce’
que bien qu’il s’agisse d’une action hypothécaire, dont
la connoissance appartient de droit commun aux tribu
n a u x , celle-ci est dirigée sur des biens délivrés par l’ar
rêté de l’autorité administrative, du 2 fructidor an-6, et.
fo n d é e sur une créance, à raison de laquelle il faut expli
quer le sens d’un second arrêté du 21 thermidor an 8. »
Il est donc consacré en principe que l’action hypothé
caire , et les suites de cette action, appartiennent de droit
�C *3 )
aux tribunaux. Mais le conseil dTétat a' pensé que dans
l’espèce, à liaison des arrêtés pris par l’administration, il
y avoit une démarcation. Cette distinction a été faite: on
a affranchi de l’hypothèque, et de toute recherche de la
part des créanciers, les fonds donnés en payement de la
légitim e, et l’on a laissé assujétis à l’hypothèque les fonds
donnés en payement de la réserve.
La démarcation faite, tout rentre dans le di’oit commun.
Il y a une autre raison. L ’exposant a attaqué SaintCernin hypothécairement ; il l’a attaqué comme détenteur
de fonds affectés à sa créance. L e débiteur principal est
X avier Sarret-Saint-Mamet, donataire : c’est sans doute
avec le débiteur principal que la créance doit être li
quidée. Sarret-Saint-Mamet ayant été amnistié, dira-t-on
que c’est avec la nation que la créance doit être liq uidée ?
N o n , sans d o u te ; la nation ne le représente plus : c’est
avec l’émigi'é q u i, au moyen de l’amnistie, doit être con
sidéré comme non émigré ; et on ne prétendra sans doute
pas que l’émigré doive être cité devant l’autorité admi
nistrative. L ’émigré rentré; dans la classe des autres ci
toyens doit être c ité , comme les autres citoyens, devant
les tribunaux, et il l’a été en effet.
L ’exposant a cité Saint-Mamet en la cour d’appel de
R iom , où l’instance est encore pendante.
Il y auroit donc conilit de juridiction.
On se fondera sans doute sur ce qu’après ces mots, si ce
i f est sur les 20000 liv. de biens q u i ont été délivrés en>
payement de la réserve, il est ajouté, s a u f aux créanciers■
à se pourvoir vers Vautorité administrative pour être
liquidés de leurs créances. Mais cela ne peut s’entendre
�( T4 )
évidemment que s a u f en cas à'insuffisance des biens
restitués à la masse des créanciers ; ce qui s’accorde
avec le troisième considérant, portant que Varrêté du
21 thermidor an 8 a justement prononcé que la nation
jouissant de la donation, en déçoit les charges. Ce n’est
que de cette manière que le décret peut être entendu, et
qu’on peut en concilier les dispositions avec les principes
qu’il consacre.
L e mot s a u f n’est point un terme d’injonction ; c’est
comme s’il étoit d it , sous réserve , sans préjudice aux
créanciers de se pourvoir vers l’autorité administrative.
Si on l’avoit entendu différemment ; si l’on avoit entendu
que la liquidation dût être poursuivie absolument h l’ad
ministration, le décret seroit conçu en termes impératifs.
Il auroit été dit : E n conséquence, ordonne, etc.
Il n’est pas dit pour faire liquider leurs créances, mais
pour être liquidés de leurs créances ,• c’est-à-dire, payés
par la nation ; ce qui est une suite du troisième consi
dérant, qui porte que l’arrêté du 21 thermidor an 8 a
justement pi’ononcé que la nation jouissant de la donation
en de voit les charges.
L ’action du créancier contre la nation n’est pas un obs
tacle y ce qu’il agisse d’ailleurs contre tous ceux qui sont
tenus, ou hypothécairement, ou solidairement de la dette.
C ’est ce qui résulte de l’article 11 de l’arrêté du gouver
nement , du 3 floréal an 11 , qui a été om is, on ne sait
com ment, dans le bulletin des lo is, mais qui se trouve,
avec l’instruction du ministre des finances, dans les ins
tructions générales sur l’enregistrement, an 1 1 , n°. 146,
page 122, tome 2.
�( 15 )
Cet article porte : a T out créancier d’émigré rayé , éli
te miné ou amnistié, qui voudra exercer ses droits contre
« son débiteur, pourra, réclamer ses titres s’il les avoit
« déposés ; ils lui seront rendus , à moins qu’il n’ait donné
« quittance, et reçu son titre de liquidation définitive. »
C ’est ce qui résulte encore des arrêts de la cour de cas
sation, l’un du 14 nivôse an 10 , rapporté au journal de
Sirey, et l’autre du 5 nivôse an 1 3 , rapporté au journal
de Denevers.
Et en effet le créancier, en déposant ses titres, n’a pas
entendu se nuire et se p river, soit de l’action hypothé
caire contre les détenteurs de biens affectés à sa créance,
soit de l’action solidaire, s’il y a plusieurs débiteurs. Et
en même tem ps, en poursuivant ceux-ci, il ne renonce
point à l’action qu’il peut a v o ir contre la nation, s’il a
déposé ses titres.
Et voilà pourquoi le décret ajoute, sauf aux créanciers
à se pouvoir vers l’autorité administrative pour être li
quidés de leurs créances, c’est-à-dire, en cas d’insuffisance
des biens que le sieur Sarret est condamné à restituer, si
d’ailleurs ils se sont conformés aux lois pour avoir recours
contre la nation, s’ils ont déposé leurs titres.
Et comment concilier ¡’interprétation qu’on voudroit
donner à cette dernière partie du décret, avec le principe
consacré par le second considérant, et parles arrêtés du
gouvernement, que la nation est étrangère aux biens que
Sarret est condamné à restituer aux créanciers, et que
la nation elle-même restitue ? Si elle y est étrangère, elle
n’a point a s’occuper de ce qu’ils deviennent, ni à s’oc
cuper des actions qu’on exerce sur ces biens.
�Ci 6 )
A u surplus, l’exposant a cru devoir prendre des con
clusions à toutes fins.
C O N C L U S IO N S .
A ce qu’il vous plaise, attendu que litige sur le conflit,
par rapport à l’autorité administrative, a été terminé par
le décret impérial du 19 octobre 1806;
Attendu que l’émisrré Sarret-Saint-Mameta été amnistié ;
Attendu qu’au moyen de ladite amnistie la nation n’a
aucun droit directement ni indirectement aux biens que
ledit Sarret-Saint-Cernin a été condamné à restituer ;
Attendu que l’exposant ne demande et ne peut rien de
mander à la nation ;
Attendu d’ailleurs qu’il s’agit d’action hypothécaire,
q u i, de droit com mun, appartient aux tribunaux;
Attendu qu’il ne peut même résulter aucune garantie
contre la nation , pour raison des biens que le sieur Sarret
s’étoit fait adjuger indûment et qu’il a été condamné à
restituer et rapporter aux créanciers ;
Attendu que les termes du décret, sauf aux créanciers
à se pourvoir vers l’autorité administrative pour être
liquidés de leurs créances, ne peut s’entendre qu’en cas
d’insuffisance des biens à restituer par ledit Sarret-SaintCernin ;
Attendu que l’interprétation qu’on voudroit donner à
cette partie du décret implique avec les principes même
consacrés par les considérans du décret;
Attendu que l’exposant n’a assigné Sarret-Saint-Cernin
qu’hypothécairement, comme détenteur de fonds-aifectés
à sa créance ;
�( *7 )
Que la liquidation de la créance de l’exposant doit se
faire avec le débiteur principal ;
Attendu que l’exposant est en instance en la cour d’appel
de R io m , avec Sarret-Saint-M am et, débiteur principal,
rentré par l’amnistie dans tous ses droits civils;
Que l’exposant n’a pu agir que devant les tribunaux
contre ledit Sarret-Saint-Mamet ;
Renvoyer les parties devant les tribunaux.
E t où vous croiriez devoir faire droit sur la pétition
dudit Sarret-Saint-Gernin , en ce cas, mais très-subsidiairement seulement, ordonner q u e , conformément au
décret im périal, ledit Etienne-André Sarret sera tenu de
rapporter les fonds qui lui ont été délivrés en payemen
de la réserve, soit en payement du capital, soit en paye
ment des intérêts d’icelle ayant eu cours jusqu’a lo r s , et
non pas seulem ent la som m e de 20000 fr. , pour lesdits
héritages être vendus , et le prix distribué aux créanciers
légalement inscrits, suivant l’ordre de leur inscription ; le
condamner à rapporter également les jouissances d’iceux,
à compter du jour qu’il en a été envoyé en possession,
même en vertu du premier partage fait en exécution de
la loi du 17 nivôse, ledit Sarret-Saint-Gernin ne pouvant
retenir ces fruits, même en vertu du premier partage,
sans faire acte d’h éritier, auquel cas il seroit tenu per
sonnellement de toutes les dettes ; ce qui rendroit sa posi
tion encore plus désavantageuse ;
Débouter ledit Sarret de sa demande tendante à re
tenir sur ladite somme de 20000 fr. celle de 11174 &*•
dont il se prétend créancier delà succession dudit Joseph
Sarret-Fabrègues, pour le tiers à lui revenant dans les
G
�(i8)
reprises de la dame Brossinhac , sa m ère, sur les biens
de son m ari, comme la compensation s’en étant, suivant
lui, opérée de plein d ro it, i° . parce qu’étant débiteur
de fonds, il ne peut être question de compensation , la
compensation ne pouvant s’opéi*er qu’entre dettes demême
nature; 2°. parce qu’étant débiteur de fonds, la collocation
doit se faire entre les créanciers hypothécaires légalement
inscrits , et suivant l’ordre de leur inscription, et que ledit
Sarret-Saint-Cei’nin n’a point fait d’inscription pour cette
créance.
En ce qui concerne la liquidation de la créance de l’ex
posant , attendu que ses titres sont encore engagés au con
seil d’état ;
A tten d u , si on objectoit que l’exposant a encouru la
déchéance faute d’avoir déposé dans le temps ses titres à
l’administration, qu’il est reconnu que la déchéance n’a
lieu que dans l’intérêt de la nation ;
Que c’est ce qui a été jugé par plusieurs arrêts et déci
sions de la cour de cassation et du conseil d’état, notam
ment dans l’affaire de Brodelet, acquéreur de l’ex-prince
de Conti, attaqué aussi hypothécairement;
Que le conseil d’état l’a préjugé dans la cause même ;
qu’Etienne-André Sarret-Saint-Cernin n’avoit pas manqué
d’opposer ce moyen ; que l’exposant, dans son mémoire,
page 16 , avoit été lui-même au-devant de l’objection j
Que si le conseil d’état avoit pensé que la déchéance
étoit encourue, il auroit débouté purement et simplement
l’exposant de sa demande hypothécaire ;
Qu’au lieu de rela, il a déclaré sujets à hypothèque des
créanciers indistinctement, et sans en exclure l’exposant,
les fonds pris en payement de la réserve j
�( 19 )
Que l’exposant n’est point en discussion avec la nation;
Qu’il se venge sur des biens sur lesquels la nation n’a
aucun droit, qu'elle restitue au x copropriétaires ou aux
héritiers, avec leurs charges. ( Termes du décret. )
Attendu cependant que l’exposant n’a point en ce mo
ment ses papiers en son pouvoir ; que l’exposant ne vient
que d’être instruit de la pétition présentée par ledit SarretSaint-Cernin
Accorder à l’exposant un délai suffisant pour faire venir
ses titres.
P A G È S - M E I M A C , avocat.
A R IO M , de l' imprimerie de L andrio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1807.
�
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[Factum. Pagès-Meimac, Pierre. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Subject
The topic of the resource
émigrés
hypothèques
créanciers
successions
créances
Description
An account of the resource
Mémoire au Conseil de préfecture pour maître Pierre Pagès-Meimac, avocat en la cour d'appel de Riom ; contre sieur Etienne-André Sarret-Saint-Cernin, propriétaire, habitant de la ville de d'Aurillac.
Annotations manuscrites.
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De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1777-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0621
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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A language of the resource
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BCU_Factums_M0733
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créanciers
émigrés
hypothèques
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-
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8dbc85d56fa91aa40156f0e9a50b9bb7
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Text
M É M O IR E
DE RIOM.
POUR
M. J e a n - C h a r l e s N O Y E R D U S A U V A G E ,
propriétaire-, habitant de la ville du Monastier,
département de la H a u te - L o i r e , intimé;
CONTRE
A
n n e -F ran çoi se ,
se
disant
N OYER
D U
S A U V A G E , mineure M .e G A R R O N , a voué
en la C o u r , son curateur ad hoc , appelans d'un
jugem ent du tribunal civil du P u y , du 3 o août 18 1 o ;
E t l e sieur
Honoré
D E B R U S , notaire im périal,
habitant du lieu d 'A lla ir a t, commune de Sallette,
défendeur en assistance de cause.
Q U E S T I O N D ’ E T A T.
DÉSAVEU d e
p a t e r n i t é
.
U n époux infortuné, blessé dans ce qu’il a de plus
cher, se voit obligé de faire au public le récit de ses
malheurs.
�Dans quelle position cruelle, dans quel embarras se
trouve le sieur Noyer du Sauvage? Comment pourrat-il s’exprimer avec décence sur un sujet aussi vil ?
Il voudrait conserver celle dignité qui convient ;'i la
C o u r ; il craint tout à la fois de parler et de se taire;
mais le silence serait trop dangereux : il lui importe de
dévoiler un mystère d'iniquité, qui a mis le comble
a
à ses maux.
A b s e n t , proscrit, dépouillé de ses biens, au moment
où. il retrouve une patrie, il apprend que son épouse
s’est livrée, pendant son absence, aux désordres les
plus criminels, l\ tout ce que la débauche et la crapule
peuvent présenter de plus honteux et de plus avilissant.
Cette femme adultère, en proie aux passions les plus
e f f r é n é e s , ignoble dans ses caprices, dépravée dans ses
gouls, a lié son sort à celui d’un vil scélérat qui a
trouvé sur l’éc hafaud la peine de ses crimes.
Elle est devenue mère : quatre enfans sont nés pen
dant l’émigration du mari, et ces naissances lui ont été
cachées avec soin.
On lui avait annoncé que celte femme criminelle et
déboutée avait fait prononcer son divorce ; cette
démarche tendait à diminuer ses peines : au moins
n ’avait-il plus rien de commun avec cet être dégradé
et corrompu.
Mais quel a été son désespoir, lorsque plus éclairé
sur ses malheurs, il a été convaincu q u ’il n’existait
aucune trace de ce divorce sur les registres publics!
Bientôt il est instruit que quatre enlans, nés d ’un com
�( 3 )
merce scandaleux, prétendaient s’élever jusqu’à lui t
et se faire reconnaître comme nés de son mariage.
Saisi d’horreur et d’effroi à cette nouvelle, il s’informe
avec soin, dans la ville qu ’il habite, aux enviions, s’il
existe des traces de ces différentes naissances. A force
de recherches, il découvre que cette femme a accou
ché d’un premier enlant à Clermont, et de trois en
la ville de Tournai.
Il obtient les extraits de naissance , et s’empresse
d’user du moyen que lui donne la loi : il désavoue la
paternité.
Il réussit au tribunal du P u y ; le désaveu est accueilli ;
ces enfans de ténèbres, fruits de l’incontinence et du
c r i m e ,■rentrent d an s le néant : il leur est fait défense
de porter un nom auquel ils ne doivent pas prétendre.
Trois d V n lr ’eux ont eu assez de pudeur pour res
pecter cet te décision. L e jugement est aujourd’hui inat
taquable. Une seule, Anne-FrançoLse, a eu l’audace
d’interjeter appel en la Cou r, ou plutôt on l a fait en
son n o m , sans respect pour la morale publique.
L a mère, au moins, n’a pas élevé la voix; accablée
de tous les maux qui sont la suite de la débauche , elle
a fait offrir, sur son lit de douleur, une déclaration qui
pût venir au secours d’un époux offensé. L e sieur du
Sauvage a refusé tout ce qui pouvait Je rapprocher
de celle sentine dégoûtante; il est assez fort de ses
moyens. On n’a jamais prétendu qu'Anne-Françoisc
lui appartînt, on ne se défend que par des fins de nonrecevoir; on soutient que son désaveu n’a pas ¿lé fait
�( 4 )
dans le délai prescrit. On a offert de prouver qu'il con
naissait l’existence de cet enfant; qu’il était instruit
qu’elle portait son nom depuis long-tems.
C e s assertions a u d a c i e u s e s ont d o n n é lieu à u n a rr êt
i n t e r l o c u t o i r e 5 des e n q u ê t e s r e s p e c t i v e s o nt é l é fa i te s;
o n en e x a m i n e r a le m é r i t e , l o r s q u ’ o n a u ra fuil c o n
n a î t r e les faits et les ci rc o n st a n c e s p a rt ic u li èr e s d e la
cause.
F A I T S .
t
L e sieur N oy e r du Sauvage eut le malheur d ’é
pouser la demoiselle Anne-Franc.oise de V é n y , le 9 jan
vier 1782. Les conventions matrimoniales sont fort
indifférentes dans la cause; cependant il n’esl pas inu
tile d’observer que le mari reçut le pouvoir de vendre
et aliéner les biens de sa femme à la charge du rem
ploi en fonds certains.
La révolution arriva. L e sieur du Sauvage n’avait
rien à regretter dans son intérieur; il part en 1791.
L e 9 thermidor an 2 , son nom est inscrit sur la
liste des émigrés; mais déjà sa femme n’avait pas
laissé ignorer l’absence de son mari; car on voit que
dès i 7 9 2 > et ensuite, le 4 mai 1793, elle a présenté
u n e pétition au directoire du département de la HauleLoire , pour obtenir une pension , en sa qualité de
femme du sieur du Sauvage réputc émigré.
C ’est dans le m o m e n t le plus orageux, où le gou
vernement d ’alors prenait les mesures les plus san
glantes contre ceux qui avaient quitté le sol français,
�( 5 )
que la dame du Sauvage vient elle-même publier
¡’émigration de son mari!
Elle avait cependant sous les yeux de grands exem
ples! hommage et respect c'i ces épouses vertueuses
dont le dévouement généreux, le courage éclatant a
sauvé l'honneur, la fortune et la vie de leurs époux!
qui de nous n’a pas été témoin de ces actes d ’hé
roïsme, dans un sexe faible et timide, qui bravait
la misère, les supplices et la m o r t , par un attache
ment sans bornes à ses devoirs.
Mais pourquoi rappeler des souvenirs affligeans ,
qui feraient verser des larmes sur le sort de ces tendres
victimes! L e sieur du Sauvage n’a-t-il pas assez de
ses p e i n e s , et doit-il les aggraver par un contraste aussi
choquant ?
Il lui reste encore trop de choses à exprimer; il doit
dite, en reprenant sa narration, qu ’en l’ an 3 ; ses co
héritiers se virent obligés de faire le partage de leurs
biens indivis avec la nation; et que la portion qui lui
revenait fut vendue nationalement.
Dans le mois de messidor de la même année 3
la dame de V é n y , prenant la qualité de femme de
L’émigré du Sauvage, attaqua en désistement des tiers
détenteurs qui avaient acquis de son maii des ïiriiiieiT1'bles propres à la fe m m e , en vertu du p o u v o i r qu’elle
lut avait donné par son contrat de mariage.
Celte demande donna lieu ;'i une discussion sérieuse,
qui fut terminée par un jugement du tiibunal civil
de R io m , du 24 messidor an 4 ; on lit dans les faits
�( 6 )
insérés au j u g e m e n t , que Jean - Charles du Sau
vage était émigré , et que dès le 17 novembre 17 9 2,
la dame de V e n y avait présenté une pétition aux
a u t o r i t é s administratives de la Haute-Ivoire, et obtenu
une provision de 2,000 francs.
!
Il est souvent question duns ce jugementi'du' sieur
du Sauvage, et toujours avec la qualification cTémi
gré ou réputé émigré.
t
On doit donc tenir pour constant querle sieur du
Sauvage était absent depuis 1791 ; qu ’en 1 7 9 2 , il est
dénoncé comme émigré par sa femme elle-même,
d’après son indiscrète pétition ; et que le sieur du Sau
vage était encore émigré en l’an 4 , le 24 messidor.
Cette observation ne laisse pas dfêire importante
pour les faits qui vont suivre ; car c’est le 19 fructidor
qu’est née A n n e-F ra n ço ise ; >et il est curieux de
connaître son acte de naissance ; 011 va le rapporter
fidèlement.
« Aujourd’h u i, 4.“ jour complémentaire an 4 , a
« comparu en la maison co m m u n e , et par-devant
« m o i , olïicier public soussigné, Charles Blancheton,
a officier de santé, habitant de cette commune de
« Clermont-Ferrand , qui m’a déclaré, en présence de
« Benoite Guittard,
femrne d’Augüstin R a y m o n d ,
« instituteur, et de Magdeleine Jouberton, fille de
« L auren t, cultivateur, toutes deux majeures, non
te parentes de l’enfant, qu’il a accouché dans la maison
« de lui B la n ch eto n , déclarant, le 19 fructidor der« tuer, à trois heures après midi, A n n e V én y, épouse
�( 7 )
« de Charles-Àugustin Sauvage, propriétaire , habitant
« o r d i n a i r e m e n t de la commune de Monaslier , dépar
te tement de la Haute-Loire, a c t u e l l e m e n t a b s e n t ,
r d’une
1111e
qui m ’a élé représenlée, et à laquelle
« il a été donné le prénom d’Anne-Françoise, de tout
te quoi j’ai dressé, etc. 35
Voilà donc cetle femme V é n y obligée de cacher sa
honte dans une maison de santé destinée à recevoir ces
viles créatures, pour y déposer les fruits de leur incon
tinence.
La femme V é n y est abandonnée, séquestrée de toute
sa iamille, et n’a d’autre ressource que d’aller accou
cher chez un chirurgien ; elle a encore assez de pudeur
pour n e pas p r é s e n l e r sa fille c o m m e l’e n f a n t de son
é p o u x ; on se g a r d e e n c o r e b ie n de la q u a li fi e r de fille
légitime; l ’acte de naissance prouve, constate même
q u e le m a r i était absent. Ainsi il ne peut résulter de
cet acte aucune possession d’état en faveur à 'A n n eFrançoise.
La femme V é n y ne quille la maison de sanlé que
pour se livrer à de nouveaux désordres; elle fait i onnaissance avec un aventurier, connu sous le nom de
Gmne%, et bientôt elle devient féconde; trois actes de
naissance ont élé délivrés au sieur du Sauvage; il est
encore important de les faite connaître.
T/e p r e m i e r esl du 2 g e r m i n a l an 6 , d e v a n t un sie ur
B o n n e t , m e m b r e de l' a d m i n i s t r a t i o n m u n i c i p a l e d e la
ville de J ourn ai. C e m ê m e j o u r , c o m p a r a i t J e a n - B a p liste B a i g n e l , a c c o u c h e u r , d o m i c i l i é e n la m ê m e v i l l e ,
�( 8 )
seclion Egalité, « le que l, assislé de L ou is Guine%, apok lliicaire, et de Pierre François, officier de santé,
« a déclaré en Cabsence de Charles-Joseph Guirie%,"
« absent pour ses affa ires, qu A n n e T^ény, son épouse ,*
« en légitime m ariage, est accouchée aujourd’hui à
« trois heures du malin , en son domicile , rue du
« C yg n e , d’un enfant femelle, que lui, Jean-Baptiste
« Baigne! m ’a présenté, et auquel il a donné les pré« noms de Louise-Anfoinetle-Joseph ».
L e second est du 23 germinal an 7 , devant Mazure,
officier de l’état civil de la même ville de Tournai. C ’est
G a i n e z lui-même q u i , assislé de deux témoins, « a
« déclaré qu’Anne-Françoise V é n y est a c c o u c h é e h i e r ,
« à onze heures du soir, d ’un enfant mâle, qu’il m’a
« présenté, et auquel il a donné les prénoms de C ha rl es
te Isidore, le
père
et les témoins ont signé, etc. »
L e troisième acte de naissance est ainsi concu : « D u
« 6 pluviôse an 1 1 , acte de naissance de Ju lie Guine%,
« née le 24 brumaire dernier, vers onze heures du
« soir, fUle de Charles-Joseph, rentier, domicilié rue
« du C h â t e a u , et d’ A n n e V e n j , non m ariés, ainsi que
« l a décla ré, en l ’a b s e n c e du père, Jean - Baptiste
« B a ig n e l, autre Jean-Baptiste Baignet, accoucheur;
« le sexe de l’enfant a été reconnu être féminin, etc. »
L e sieur du Sauvage, comme on peut le penser,
n’avait aucune connaissance de ces faits; il obtient une
surveillance sur la fin de l ’an 9, et revient au lieu do
sa naissance; mais il ne fui amnistié,en vertu du sénalusconsulte du 6 floréal an 10, que le 8 pluviôse an 11. On
se
�( 9 )
se d o u t e b i e n q u ’ u n e f e m m e c o u p a b l e n ’a pas osé se
p r é s e n t e r à son é p o u x ; ses p a r e n s o u ses a m is i g n o
r a ie n t m ê m e le lieu d e sa r é s i d e n c e ; mais o n le ras
sure : o n lui a tt es te q u ’elle a fait p r o n o n c e r son d i v o r c e
p e n d a n t l ’é m i g r a l i o n , et q u e c e d i v o r c e a é t é trans cr it
suk
les registres publics.
Il reste dans la plus profonde sécurité, voulant sur
tout oublier qu’il fut é poux, dès qu’il n'avait plus le
bonheur d’êlre père : il avait en effet perdu, depuis
long-t ems, les deux eufans provenus de son mariage.
Plusieurs années se passent dans cet état de calme,
si nécessaire à un infortuné, qui avait traversé avec
tant de sollicitude et de crainte le tems orageux de la
révolution.
M a i s b ie n t ô t sa tra nq u ill ité est t r o u b l é e ; il n ’ e n t e n d
d ’a b o r d q u e des p r o p o s v a g u e s , q u i s e m b l a i e n t le c o n
c e r n e r , mais q u i ne lui é ta ie n t pas adressés d i r e c t e m e n t .
Son i n q u i é t u d e a u g m e n t e ; il a p p r e n d e n fi n q u ’ il n ’ exis te
pas sur les registres d e trac es d u d i v o r c e d e sa f e m m e ;
q u ’ elle a v é c u dans le l i b e r t i n a g e le plus c r a p u l e u x ,
et q u ’elle a d o n n é le j o u r à plusie urs enfa ns . 11 s en t
c o m b i e n il est i m p o r t a n t p o u r lui d e d é c o u v r i r c e m y s
t è r e d ’i n i q u i t é ; il v e u t s u i v r e les tr ac es de la f e m m e
V é n y ; toutes r e c h e r c h e s sont i n f r u c t u e u s e s dans le li eu
d e son d o m i c i l e , c o m m e dans les villes v o i s in e s ; le
ha s a rd lui f a i l d é c o u v r i r q u e la f e m m e V é n y a fait u n
l o n g s é j o u r dans la ville d e T o u r n a i ; il écrit a u x a u t o
rités d e c e l t e v i l l e ; et le i 3 m a i 1 8 0 9 , il re ço it d e l ’a d
j o i n t d e la m a ir i e d e T o u r n a i les trois a ct es d e n a is -
3
�( 1° )
sance cîuement en f o r m e , et légalisés, dont on vient
de rendre compte.
Ce n’est pas tout : il est aussi informé qu’il existe
à Clermont un premier enfant, dont on lui a caché la
naissance; il se fait délivrer l’acte de naissance $ A n n eF ran çoise, qu’on a rapporté en première ligne.
Il prend sur-le-champ son parti. L e i 5 juin 1809,
il fait notifier un acte extrajudiciaire aux quatre enfans
mineurs, et ¿1 la femme Vény. Il y expose qu ’il a nou
vellement découvert que les liens qui l’avaient uni
avec cette dernière n’avaient pas été légalement rom
pus, ainsi qu’il aurait dû le croire d’après la publicité
et la nature des liaisons q u ’elle avait eues pendant
¡’émigration de son mari; il se réserve de se pourvoir
contr’elle par les voies de droit.
Il ajoute que ne voulant pas laisser dans sa famille
des enfans étrangers, il entend former l’action en dé
saveu de paternité contre ces quatre enfans; il expose
qu’il lui sera facile de prouver que non-seulement il
était, pour cause d’éloignement, dans l’impossibilité
physique de cohabiter avec sa iemme pendant le teins
déterminé par l'article 3 i z du Code Napoléon, mais
encore pendant plusieurs années avant ; enfin , parce
qu’à l’époque de la naissance de ces enfans, et a v a n t , la
femme Vény vivait publiquement avec tout autre, ce
qui est établi par les actes de naissance, et ce qui le
serait au'besoin par d’autres preuves non équivoques.
Il duclaro que pour défendre à celle demande en
‘
désaveu de paternité, il se propose'de faire nommer
�( II )
un tuteur aux enfans, en présence de leur m ère, et
qu’il va se relirer-par-devant le juge de paix de son
domicile, qui doit être, aux fermes de l ’article 108 du
Code Napo léon, celui de la mère et des enfans.
4 juillet 1809, cédule du juge de paix, pour con
voquer le conseil de famille. L e sieur du Sauvage a
soin d’observer que ses parens ne doivent pas être con
voqués à raison de la nature de sa demande , et il
indique huit pîtrens maternels, habitant tous le dépar
tement du Pu y-d e-D ôm e.
Alors le juge de p aix , attendu l ’éloignement, et que
le cas requiert célérité, ordonne que huit personnes
par lui indiquées comme voisins o u c o n n u s pour avoir
eu des liaisons d ’a m i t i é a v e c la f e m m e V é n y , seront
appelées pour comparaître le lendemain devant l u i,
à l’effet de délibérer sur le choix et nomination d’un
tuteur ad hoc aux quatre enfans mineurs.
L e lendemain, les personnes indiquées par le juge
de paix comparaissent devant l u i , en vertu de sa
cédule et de l’assignation de la veille; le sieur Debrus,
notaire, est nommé tuteur ad hoc aux enfans, et en
accepte la charge.
L e 7 juillet , demande en désaveu do p a t e r n i t é
des quatre enfans, devant le tribunal civil du P u y ,
contre le sieur Debrus, en sa q u a l i t é de tuteur. lie
sieur Noyer du Sauvage conclut à ce qu’il soit fait
defense a ces quatre individus de se dire et de prendre
la qualité de ses enfans, aux peines de droit.
4
�( 12 )
Le
ii
juillet, même assignation, et demande ré
pétée contre la femme Vény.
La femme V é n y ne comparut pas: le tuteur seul
constitua avoué , ce qui donna lieu à uu jugement
de jonction contre la femme V é n y , en date du 10
avril 1810.
Il s’éleva quelques discussions sur l ’irrégularité de
la procédure; mais le 3 o avril 1 8 1 0 , il fut rendu
un jugement, par lequel le tribunal « Considérant
qu’il résulte des actes de naissance d’ Anne-Françoise
Sauvage, Louise-Antoinette, Joseph Guinez, CharlesIsidore G u i n e z , et Julie G u i n e z , qu’ils sont nés dans
des communes éloignées du d o m i c i l e du sieur du
Sauvage, en l’absence du sieur du Sauvage , et pen
dant son émigration ;
« Que depuis son retour, An ne V é n y et ses enfans
n ’ont pas cohabité avec lui ;
« Q u ’il paraît que le sieur Noyer du Sauvage n’a eu
légalement connaissance de l’existence des enfans de
son épouse que par l’extrait des actes de naissance qui
lui ont été délivrés à Tournai et ¿i Clermont, aux mois
de mai et de juin 1809; que sa demande en désaveu
a été formée dans les délais et en observant les formes
prescrites par les articles 3 16 et 3 i 8 du Code Napoléon;
. « Considérant, au fond, qu’il n’est pas disconvenu
que le d e m a n d e u r fût absent du domicile conjugal, et
n’eût aucun rapport avec sa femme plusieurs années
avant la naissance de ces enfans; qu’il est même de no
toriété publique que, vers la fin de l’année 17 9 3 , la
�( i3 )
femme V é n y avait f a i t , à raison de Cémigration de
son m ari, une déclaration de divorce en la maison com
mune du P uy •
« Q u’on lui a donné, dans le premier des actes
de naissance, le iilre de femme légitime de CharlesAuguslin Sauvage, ce qui n’est pas le nom du deman
deur; que dans les autres, on lui a donné le nom de
iemme légitime de Charles-Joseph Guinez; qu ’aucun
de ces enfans ne peut réclamer ainsi ni son acte de
naissance, ni la possession d’état pour se dire enfant
de Jean-Charles du N oy er du Sauvage ;
« Considérant qu ’à défaut d’acte de
naissance ,
pour prouver leur filiation avec le demandeur, on
n’établit pas la possession c o n s t a n t e d e l'état d ’e n f a n t
légitime; qu ’on n’offre pas même de prouver que le
demandeur ait reconnu ces enfans; qu’il lésait jamais
traités comme les siens; qu’il eût pourvu en celle qualité
à leur éducation, entretien ou établissement; ni même
qu’ils aient jamais été reconnus dans la société ou dans
sa famille pour ses enfans;
,
« Considérant qu’il ne peut y avoir lieu à faire
transcrire le jugement qui prononce sur le désaveu
des enfans, en marge des registres de l’élat civil,
que lorsqu’ils sont inscrits sous le nom du péri* qui
les désavoue; que leur acte d e naissa nce les affilie a.
une famille qui n’est pas la leur; et q11 a u c u n des enfans ne sont inscrits sur les registres, comme enfans
de Jean-Charles du N o y e r ;
« Par ces motifs, statuant sur la demande en désa
�( i4 )
veu de Jean-Charles du N oyer du Sauvage, donne
défaut contre la dame V é n y comparante, et demeu
rant le défaut joint îi la demande principale , par
le j u g e m e n t d u 10 avril i 3 i o , signifié par l ’huissier
com m is
le 10 m a i suivant; sans s’arrêter à choses
déduites par le tuteur des enfans désavoués , déclare
la demande régulière en la forme et bien poursuivie;
et y faisant droit, prononce qu’Anne-Fruncoise Sau
vage , Louise-Antoinette, Joseph G u in e z , ChailesIsidore
G u in e z ,
et Julie
Guinez ne sont pas les
enfans de Jean-Charles du Noyer du Sauvage; leur
fait défenses, en conséquence, de prendre son nom
à l’avenir, et de se dire nés de son m a r i a g e avec
Anne-Françoise V é n y , sous les peines de droit; pro
nonce n’y avoir lieu d ’ordonner la mention du présent
jugement en marge des registres de l’état civil des
villes de Clermont et de Tournai, attendu que les e n
fans n’y
sont pas inscrits comme enfans de Jean-
C h a r l e s du Noyer du Sauvage; déclare le jugement
commun avec la dame V é n y de Villemonl et la con
damne aux dépens, etc. »
Ce jugement a été signifié au tuteur et à la femme
Vény. Cette dernière ainsi que les enfans Guinez ont
gardé le silence. A nne-Françoise seule a d ’abord in
terjeté appel j mais ensuite elle a pretendu que sa
défense avait été absolument négligée par celui qui
avait été nommé son tuteur; elle a cru devoir pré
senter une requête en la Cour , pour demander la
nomination d ’un nouveau curateur, à l’eilet de pou
�( i5 )
voir, sous son autorisation, faire appel du jugement
rendu par le tribunal du P u y , le 10 avril 1810.
Sur cette requête non communiquée, il a été rendu
un arrêt, le 11 mai 1 8 1 1 , portant nomination de
M . e Garron, avoué en la Cou r, pour curateur à’A n n eFrançoise; et M.e Garron, tant en son nom de curateur
qu'en celui d’Anne-Françoise, a interjeté un nouvel
appel le 14 du même mois de mai.
Cette nomination de curateur sur simple requête
est elle régulière? Cette forme paraît inusitée, et n ’est
autorisée par aucune loi. L e Code Napoléon n’indique
qu’un seul mode pour la nomination des tuteurs ou
curateurs, et c ’est par la voie d’un conseil de famille.
L e sie u r d u S a u v a g e q u i ne m e t pas a u t r e m e n t d’im
portance aux discussions de forme, a cependant cru
devoir insister sur la nullité de celle nomination.
D ’ un autre côté, Arm e Françoise a aussi prétendit
que les procès verbaux du conseil de famille, des 4
et 5 juillet 1809, étaient irréguliers. Suivant elle, le
conseil de famille devait être composé de païens pa
ternels et maternels et elle n’a pas voulu faire a tien lion
qu il élait déplacé de faire comparaîlre des parons du
sieur du Sauvage, d’après la nature de sa demande;
que c ’élail dans l’intérêt même de l’a p p e l a n t e que
1 observation avait été faile; et que les païens mater
nels élant à mie plus grande dislance que celle déter
minée par la loi, devait être remplacés par des amis
ou voisins.
A u surplus, ces questions de forme sont encore
�( i6 )
intactes; elles sont soumises h la Cour qui les appréciera
dans sa sagesse, et elles ne doivent pas relarder la dis
cussion du fond.
l ie sieur du Sauvage a désavoué ces quatre enfans,
en se fondant sur l’arlicle 3 ï 6 du Code Napoléon,
dernier §. Les naissances lui avaient élé cachées ;
les enfans avaient élé conçus et nés pendant son émi
gration, lorsqu’il y avait impossibilité physique de c o
habitation entre les époux. Rien de mieux prouvé
que son absence, par une série d’actes qui émanent
tous de la femme V é n y , en 1 7 9 2 , 179^, an 3 , an
4 et an 5 . Et la cause portée en l’audience solennelle
de la Cou r, le 5 août dernier, l’évidence de sa de
mande fut portée à un si haut d e gré , que l'ap
pelante ne parvint à en arrêter la manifestation qu’en
offrant des preuves qui tendaient à établir, i.° que
le sieur du Sauvage, après sa rentrée dans son domi
cile, et notamment en l’an 10, était venu chez la dame
Demariolles, où il avait vu l’appelante, lavait reconnue
et considérée comme fille de son épouse ; 2 ° que l’ap
pelante était connue sous le nom d 'A n n e du Sauvage ;
3.° qu’elle était ainsi n o m m é e dans la pension où elle
était envoyée par la dame Demariolles, et dans laquelle
pension le sieur du Sauvage avait vu et reconnu r a p
pelante comme il l’avait fait dans la maison de la dame
Demariolles; 4.0 enfin, que le sieur du Sauvage avait
dit plusieurs fois que l’appelante ressemblait à la femme
V é n y , sa mère.
La Cour qui met toujours la plus grande nnituiilé
dans
�( i7 )
dans ses décisions, rendit, le même jour 5 août 1 8 1 2 ,
un arrêt interlocutoire, par lequel, en réservant res
pectivement les lias, elle ordonna, avant faire droit,
que l’appelante ferait preuve par témoins : que plus
de deux ans avant la demande en désaveu de paternité,
formée par le sieur du Sauvage, il était venu après sa
rentrée en son domicile, et notamment en l’an 10,
chez la dame Demariolles ; qu’il y avait vu A n n e ' F rançoise, et l’avait reconnue pour être la fille de sa
f e m m e ; 2.0 qu’elle était connue de lui sous le nom
d ’A nna-Françoise du Sauvage - 3.° qu’en sa présence
de lui du Sauvage, et dans la pension où était élevée
l ’appelante, elle a été ainsi appelée et dén om m ée, et
q u ’il l'y a r e c o n n u e c o m m e tille de sa f e m m e , s a u f
au sieur du Sauvage la preuve contraire dans le
m êm e délai.
En exécution de cet arrêt, les parties ont respec
tivement enquêté. Il est indispensable de faire con
naître ces enquêtes à la Cour.
Le
premier témoin de l’enquête directe est M.
Gauthier, juge au tribunal civil de Clermont. Il ne
sait rien des faits consignés dans l’interlocutoire; il
se rappelle néanmoins avoir entendu dire chez la dame
Lacaussade, que M. Noyer du Sauvage était dans l’in
tention de se pourvoir en désaveu de p a t e r n i t é des
en fans que sa femme avait pu a v o i r pendant le teins
de son émigration : il ne peut préciser 1 epoque on ce
propos a été tenu , ni par qui il l’a été.
L e second témoin est la dame Lucaussade, femme
�( i8 )
François; elle ne sait absolument rien des faits in
terloqués.
L e troisième, Victoire V i g n a u , femme de Pierre
Vignau , limonadier à Clermont , dépose qu’il y a
environ sept ans, autant qu’elle peut s’en rappeler,
ayant à dîner chez elle le sieur du Sauvage, le sieur
Cellier et le sieur G e rv is , dans le cours de ce d î n e r ,
le sieur du S a u v a g e , parlant de son épouse, dit qu’il
lui serait facile de rentrer dans ses biens, mais pour
ses enfans qu'il ne les reconnaîtrait jamais, et que
c’était ce qui l’empêchait de poursuivre la rentrée
de ses biens.
L e quatrième témoin, Viclor Cellier, u n des con
vives dont parle la femme Vignau , dépose ne rien
savoir des faits interloqués, si ce n’est qu ’il y a environ
sept ans, étant à dîner chez la dame Vignau avec le
sieur du Sauvage el le sieur Gervis, le sieur du Sauvage ,
parlant de sa malheureuse situation à l’égard de son
épouse, dit qu’ils avaient eu deux enfans qui n’exis
taient plus, mais que depuis son émigration, il en
était survenu d’autres, qui n’étaient pas de lu i;
que le déclarant a y a n t cherché à le réconcilier avec
sa f e m m e , par des voies de douceur, il n’avait pu y
parvenir; qu'au contraire, le sieur du Sauvage avait
formellement déc laré qu il ne reconnaîtrait jamais ces
enfans, et q u ’il ne venait pas sa femme; qu ’il savait
qu'il y avait un de ces enfans chez la dame Demariolles, sa belle sœur, mais qu’il ne le reconnaissait
pas pour le sien.
�(<ï9 )
L e cinquième témoin, Jean-Baptiste Giron , dépose
qu’il connaît depuis long-lems le sieur du Sauvage ;
qu’il a tenu sur les fonds baptismaux un enfant à lui
déposant avec la dame Demariolles, sa belle sœur;
qu ’en l’an 12, étant allé voir cet enfant, qui était
à l’école secondaire de Ponlgibaud, à l’époque de la
distribution des prix do cette année 12 , il y rencontra
le sieur du Sauvage, qu’il n’avait pas vu depuis longtems : il lui témoigna son étonnement de le trouver
en cet endroit. L e sieur du Sauvage lui dit qu’il y était
venu exprès pour voir son filleul, fils du déclarant, qu’il
lui était fort attaché,.et qu’il voulait même le faire son
héritier, ¿1 quoi le témoin répondit que cela ne se pouvait
p a s , p u i s q u ’il a v a i t des enfans. L e sie ur d u S a u v a g e r é
pliqua qu’il n’en avait p a s , et qu’il n’en connaissait
point. Lors de cette conversation, intervint le sieur
Gauthier de B io sat, ce qui fil que le déclarant ne
poursuivit pas plus loin la conversation.
Ajoute le déposant, qu’à une époque postérieure
à celle qu’il vient de désigner, sans pouvoir la pré
ciser , il lui fut présenté, ou par le sieur du Sauvage, ou
par le sieur D e te ix , .sans pouvoir assurer par lequel
des deux, trois extraits de naissance de trois en fa n s
de l’épouse du sieur du Sauvage ; dans l’un de ces
extraits était le n o m du sieur du S a u v a g e , c o m m e père
de 1 enfant 5 dans le second, la p a t e r n i t é était attribuée
au nommé Guinez; dans le t r o i s i è m e , le père é ta it
déclaré inconnu. Cette époque r e m o n t e à-peu-près à
celle où la lille A n n e du Sauvage fut relirée des mains
6
�de-Guinez, en vertu d’un jugemeut de police correclionnelle.
L e témoin interpellé, à la réquisition du sieur du
Sauvage, s’il savait le nom que portait cette fille, lors
qu’elle était chez la dame Demariolles, a répondu qu’il
ne lui connaissait pas d’autre nom que celui A’A n n a .
L e sixième témoin est le sieur Bernard Vincent. Il
dépose qu ’en qualité d’ami, soit du sieur du Sauvage,
soit de la dame Demariolles, il s’est trouvé souvent avec
l’ un et avec l’autre, et même avec tous les deux en
semble ; que la dame Demariolles prenait soin, et tenait
auprès d’elle un enfant nommé A n n a ; que quelquefois
les personnes de la maison l’appelaient sous le nom de
du Sauvage, mais que la dame Demariolles, publique
m e n t , ne lui donnait d’autre nom que celui d’A n n a ;
quelquefois, et par inadvertance, elle la nommait par
celui de du Sauvage; néanmoins, lorsque le sieur du
Sauvage allait chez sa b elle-sœ u r, elle avait le plus
grand soin de faire disparaître cet enfant ; et cet enfant
l u i- m e m e , sans se le faire dire, avait soin de ne pas
se montrer. L e déclarant y ayant fait attention, avait
témoigné son étonnement à la dame Demariolles, qui
lui avait dit qu’elle estimait trop le sieur du Sauvage,
son beau-frère, pour lui montrer cet enfunl ; que d ’ail
leurs il n’élail pas dans ses principes de lui faire voir
un enfant q u ’ e l l e savait n’être pas à lui, quoique pro
venu de sa femme.
L e témoin ajoute h ce sujet, qu’ayant eu plusieurs
conversations avec le sieur du Sauvage, qui n'igno
�/
( 21 )
rait pas l’existence de cet enfant, qu’on lui avait dit
appartenir à sa fe m m e , et être chez la dame D e m a riolles, il lui avait témoigné avoir remarqué cet enfant,
et l’ailectation de se cacher lorsqu’il se montrait. Il le
pria de savoir où la dame du Sauvage s’était accouchée,
et où l’extrait de naissance pourrait se trouver, et s’il
avait été fait sous son nom : il voulait même que le
déclarant s'adressât pour cela à la dame Demariolles,
sans le nom mer; celui-ci montra de la répugnance sur
ce point, mais il lui offrit de s’acquitter de la commis
sion, s’il voulait trouver bon qu’il le demandât en son
nom à la clame Demariolles. L e sieur du Sauvage ne
Voulut point que la commission fût faite ainsi, en con
s é q u e n c e le d é c l a r a n t n ’e n pa rla p oi nt à la d a m e D e m a
riolles. ,■
Interpellé sur l'époque de cette conversation, le té
moin n’a su la préciser, néanmoins il a dit qu’elle se
rapportait à l’époque d’un procès que le sieur du Sau
vage oncle avait alors pendant à la Cour.
L e septième témoin est un sieur Esmelin, d’ Aigueperse. Il était fermier de la dame Demariolles; mais
il dit avoir cessé de l’être depuis cinq ans. Il dépose
qu’il y a environ dix ans, il a connu à Aigueperse,
une fille à qui on donnait le nom de du Sauvage.
Elle etail sous la direction d’un nommé Guinée, alors
logé dans l’auberge de la veuve T u p o n , aujourd’hui
occupée par le nommé Claustre son gendre. Elle y a
ainsi demeuré sous la même direction pendant quatre
à cinq mois. Guinez, qui était un liès-inauuais sujet,
�( «
)
usant de mauvais procédés envers cet enfant , on fut
obligé de se pourvoir à la police correctionnelle, où
il intervint un jugement à la requête de la dame de
Mariolles, qui remit l’enfant à cette dernière, et con
damna Guinez à un emprisonnement. L e témoin,
ayant eu plusieurs fois l’occasion de voir M. du Sau
vage , et lui ayant parlé de cette fille qu’il croyait
être vraiment la sienne, il lui rappela les mauvais
traitemens exercés sur elle par G u in e z , et la punition
qui avait été infligée à ce dernier par le jugement de
police correctionnelle; à quoi le sieur du Sauvage ne
répondit rien. Suivant le témoin, l’époque de celte
conversation peut remonter à entour huit ¿1 neuf ans,
autant qu’il puisse s’en souvenir. Il ajoute avoir vu la
petite fille en question dans la maison de la dame de
Mariolles. On l’appelait alors la petite du Sauvage.
Ce n’est que depuis cinq ans qu’il Ta connue sous le
nom d'A n n a . Enfin les conversations que le témoin
a eues avec le sieur du Sauvage, au sujet de cet enfant,
ont été tenues à l’auberge de Boyer , et point chez
la dame de Mariolles.
L e huitième témoin est M. Cliassaing, juge au
tribunal de Clermont. On a observé à ce lémoin qu ’il
avait la confiance générale de la maison Villemont ;
qu’il a été chargé de plusieurs comptes et liquidations
pour cette maison; que même il a contracté plusieurs
engngemens de garantie envers les acquéreurs de la
dame de Villemont.
Lorsque le sieur du Sauvage s’est permis de faire
L
�( 23 )
celte observation à M. Chassaing, il n’avait nullement
Fintenlion de le blesser. Mais il est du plus grand in
térêt pour lui d’écarter tous ceux qui pourraient avoir
quelques liaisons avec la seule personne qui ait préparé
celle intrigue, et qui lui a suscité cet incident dans les
intentions les plus hostiles : elle ne les a pas même dis
simulées, et les a présentées à ses créanciers comme
une ressource. Dans ses indiscrètes confidences, et à
raison de la pénurie de ses mo yens, elle croit que si
elle parvenait à faire déclarer cet enfant fille du sieuv
du Sauvage, elle aurait à répéter contre lui des pen
sions considérables, qu’elle promet à ses créanciers.
11 est
assez n a t u r e l dès-lors q u e le s ie u r du S a u v a g e
s u sp e ct e c e u x qui on t c o n l r a c l é des e n g a g e m e n s , ou se
sont r e n d u s c a u t i o n s d e la d a m e D e m a r i o l l e s .
M. Chassaing, il faut en convenir, a répondu avec
franchise : il a dit que cela était v r a i, dans le iems
qu'il élail a v o u é , mais que tous ces faits n’existent plus
depuis qu’ il est dans la magistrature; que la liquidation
de la dame Demariolles, dont il était chargé comme
avoué, se poursuit aujourd’hui judiciairement, et que
bientôt les engagemens par lui contractés ne subsiste
ront plus ; donc ils existaient au moment de la dépo
sition. La Cour appréc iera ces observations.
A u surplus, ce témoin dépose qu’à une époque
dont il n’est pus parfaitement m é n i o r a l i f , le sieur du
Sauvage vint le trouver dans l’ancienne maison qu’il
occupai! alors; il élail accompagné du s.r Levet ; il était
porteur d un eilet de 1,600 fr. tiré ou endossé par la
�( M )
dame Demariolles; il le pria de le faire négocier p arles.'
D u m a y , son gendre. C e lle négociation ayant été ef
fe c tué e , occasionna plusieurs visites chez le déposant,
de la part du sieur du Sauvage. Dans une de ces visites,
le déclarant lui demanda s’il élait ici avec la dame son
épouse; sur quoi, le sieur du Sauvage se récria, en
disant qu’il était impossible d’ habiter avec une femme
aussi immorale, aussi déréglée qu’elle; qu’il n’ignorait
pas que pendant son émigration, elle avait eu deux
ou trois enfans, dont, notamment une fille demeu
rant chez la dame Demariolles, mais qu’il désavouait
•tous ces enfans ; qu’il se proposait même de se
pourvoir en divorce contre sa fe m m e , et en désaveu
de paternité contre chacun desdits enfans; q u ’ alors
le déclarant lui dit : vous ne voyez donc pas madame
Demariolles votre belle sœur? que le sieur du Sauvage
lui répondit : je la vois quelquefois; je la vois même avec
plaisir; je fais cas de la bonté de son caractère, mais,
par égard pour moi, elle a soin de faire disparaître
l'enfant lorsque j ’entre dans la maison.
Interpellé, à la requête du curateur, sur l’époque de
ces diverses visites et conversations, le témoin déclare
n e pas se rappeler de l’épo que, que néanmoins c ’était
plusieurs mois avant l’acquisition desa nouvelle maison,
ce qui remonte à plus de cinq ans au moins; n’ayant
point a c t u e l l e m e n t sous les ye ux son contrat d’acqui
sition.
L e neuvicSme témoin est Gabriel Gervis. Il dépose
qu’il no sait rien des faits interloqués. Depuis très longtems
�( 25 )
tems et antérieurement à rémigration du sieur du Sau
vage
, il ya, eu l’honneur de sa connaissance. To ut ce dont
O
il se rappelle, ayant rencontré ledit sieur du Sauvage
dans la ville de Clerm ont, il l’engagea à dîner, ce que
le sieur du Sauvage accepta. Il y eut à ce dîner d’autres
convives, notamment lesieurCellier et la dame Vignau;
mais il ne se rappelle nullement qu’il eût été question
de rien sur celte affaire.
L e dixième et dernier témoin est le sieur Claude
Tapon. Ce témoin a été entendu au tribunal de Tliiers;
et par une singularité dont on ne peut rendre compte,
le sieur du Sauvage fut assigné pour être présent à
l ’audition de ce tém oin , le même jour qu’il assistait
à la C o u r à l ’ e n q u ê f e fa it e à la r e q u ê t e d ’ A n n a . Son
avoué de Thiers a cru devoir protester de nullité, et
se réserver tous moyens de récusation.
Quoi qu’il en soit, ce témoin a déposé qu’il a fré
quenté la maison de la dame Demariolles, depuis l’an
7 ou environ jusqu’en 1806, momentanément et par
intervalles; que dans le courant de l’an 10 et années
suivantes, il a eu occasion d y voir, à différentes fois, le
sieur Noyer du Sauvage; que même le sieur du Sau
vage lui a dit souvent, dans la conversation, q u e si la
dame de V é n y , son épouse, ne s’était pas p r o s l i l u é e
ou nommé Guinez, qui a été guillotiné, il se serait
peut-être décidé à faire du bien h A n n a , . qu il a eu
pareillement occasion de voir A n n a dans la maison
de madame Demariolles, et c e , depuis enlour 1 4 ans,
qu ’ il Ty a toujours vue depuis cet le époque jusqu’au 1110-
7
�( 26 )
menl où elle fui mise en pension, et l ’a constamment en
tendu nommer A n n a , sans autre dénomination. A n n a
appelait madame Demariolles sa tante, et la dame
de V é n y sa mère : à l’égard du sieur du Sauvage, il
ne lui a jamais dit qu'‘ A n n a fut la fille de sa fe mme;
quant à lui déposant, il est bien persuadé qu’A n n a
est fille de la dame du Sauvage, et il était d’autant
plus fondé à le croire, que c ’était là l’opinion publique,
et qa’A n n a ressemble singulièrement à la femme Vény.
L e témoin observe que lorsque le sieur du Sauvage
venait chez la dame Demariolles, sa belle sœur, A n n a
ne venait pas à table lant que le sieur du Sauvage
séjournait chez celte d am e, et elle y reparaissait lors
q u ’il était parti; il semblait qu ’on voulût faire en sorte
que le sieur du Sauvage ne la vît pas.
On demande au témoin s’il est de sa connaissance
que le sieur du Sauvage .sût qu 'A n n a était l’enfant de
Ja dame V é n y son épouse. Il répond que le sieur du
Sauvage ne lui a pasdit précisément qu’il le savait, parcequ e, malgré les soins qu’on prenait pour empêcher
A n n a de se rencontrer avec le sieur du Sauvage, il
n ’avait pas laissé de la voir quelquefois, et n’avait pu
faire autrement que de lui. trouver une parfaite res-*semblance avec la dame Vény.
Telle est l ’enquête directe faite à la requêt d 'A n n e Françoise. On sera sans doute étonné qu’elle n’ait
fait as^'gner aucun témoin qui pût déposer sur le
troisième fait dont l’arrêt de la Cour ordonne la preuve,
fait très-important puisqu’il tendait à établir q u ’en la
�( 27 )
présence du sieur du Sauvage, et dans la pension.
à.’ A n n a , elle avait été appelée et dénommée A n n a
d u Sauvage, et qu’il l’y avait reconnue comme fille
de sa femme.
L e sieur du Sauvage a remarqué cette lacune; et s’est
déterminé, à raison de ce, à faire une enquête contraire;
mais il s’est contenté de faire assigner deux seuls té
moins, la dame de Rigaud qui tenait la maison d’é
ducation où a été élevée A n n e-F ran çoise, et la dame
D echamp sa coadjutrice. Cette dernière n’a pu com
paraître; mais la dame de Rigaud a été entendue.
Elle dépose que tenant une maison d’éducation de
jeunes demoiselles, conjointement avec la dame'D ec h a m p , il lui fut a m e n é pur la d a m e D u m o n t e l d ’ A r d e s ,
actuellement décédée, u n e jeune fille, âgée d’environ
sept à huit ans, que la dame Dumontel lui dit être
la nièce de la dame Demariolles , et lui être amenée
de sa part ; qu’en effet depuis cette époque, et pendant
environ deux ans et demi, que cette nièce avait de
meuré comme externe dans sa maison, sa pension a
été payée par la dame Demariolles; mais elle n’était
connue dans la maison que sous le nom à "A n n a , nièce
de lu dame Demariolles. Pendant l’intervalle de ces
deux ans et demi, elle se rappelle que le sie u r du
Sauvage est venu une ou deux fois dans la maison,
mais que ce n’était que pour voir u n e jeune veuve
du P u y , qui y habitait ; il était chargé , do lu part de
la famille de cette ve u ve, de lu voir, et de lui porter de.
l ’argent. 11 lui en porta en effet, et il n’a jamais été ques-
8
�/
( *8 )
tion , de la pari du sieur du Sauvage, de demander des
nouvelles de la fille A n n a , qui même ne lui a jamais
été présentée.
L e sieur du Sauvage a cru devoir rapporter fidè
lement et matériellement la déposition des témoins,
avant de se permettre aucunes réflexions; il a pensé
q u e , p a r c e m o y e n , on en saisirait mieux l’ensemble,
pour comparer ensuite les faits dont il a été déposé,
avec ceux gisant en preuves.
Dans cetle matière, il n’y a rien d’indifférent; ce
n ’est qu’après la plus mure délibération que la Cour
a resserré les faits dans, un cadre étroit, a pesé ceux
qui étaient susceptibles de faire impression ou de
porter la conviction dans les esprits; elle se rappellera
su r-tou t qu ’ Anna-Françoise , ou ceux qui la font
agir, voulait prendre une plus grande latitude, et ne
mettait en avant que des laits*vagues et insignifians;
q u e , malgré ses observations, la Cour maintint son
arrêt, sans vouloir rien ajouter ni retrancher.
Ainsi A n n a avait h prouver trois faits : i°. que plus
de deux ans avant la demande en désaveu de pater
nité, et notamment, en l’an 10 , le sieur du Sauvage
est
venu chez la dame Demariolles, qu’il y a vu
A n n a , et l’a reconnue pour être la fille de sa femme.
11 convient de s’arrêter d abord sur le premier Jait.
L e désaveu de paternité est du i 5 juin 1809, et
remonte à trois ans et demi.
L e premier témoin a entendu dire, sans se rappeler
1*
�( 29 )
l ’époque , que le sieur du Sauvage voulait se pourvoir
en désaveu de paternité.
L e second ne sait absolument rien.
L e troisième a ouï dire, il y a environ sept ans, que
le sieur du Sauvage déclara qu’il ne reconnaîtrait ja
mais ces enfans.
L e quatrième tient le même langage : le sieur du
Sauvage savait qu ’il y avait un enfant chez la dame
de Mariolles, mais qu’il ne le reconnaîtrait jamais pour
le sien.
L e cinquième a voulu observer au sieur du Sau
vage qu’il avait des enfans ; celui ci lui a répondu
q u ’il n 'e n a v a i t pas. il a v u e n t r e les m a in s d u sie ur
du S a u v a g e ou du sieur D e l e i x trois e x tr a it s d e nais
sance; il ne sait pas dire lequel des deux, ni préciser
l’époque.
On* sait que ces exlrails de naissance n’ont élé con-t
nus et retirés qu ’en juin 1809 , el que le désaveu de
paternité a eu lieu dans le mois de lu découverte.
Ce même témoin n’a connu l’appelante que sous le
nom d ’ A nna.
L a déposition du sixième témoin est plus étendue;
mais il
riolles
nom d
les fois
déclare bien positivement que la dame D e m a ne d o n n a i t publiquement à cet enfan t que le
A n n a • elle faisail disparaître c e l l e fille, toutes
que le sieur du Sauvage e nl ra it chez elle; elle
estimait trop son beau-ftère pour lui montrer cet en
fant. Il n’était pas dans ses principes de lui iaire voir
�( 3o )
un enfant qu'elle savait n’être pas à lu i, quoique pro
venu de sa femme.
L e septième témoin a voulu entretenir le sieur du
Sauvage des mauvais traitemens que G ainez faisait
éprouver à cette fille ; le sieur du Sauvage ne lui a
lien répondu.
L e huitième dépose que le sieur du Sauvage lui a dit
ne pas ignorer que sa femme avait eu deux ou trois
enfans pendant son émigration, notamment un chez
la dame Demariolles, mais qu ’il désavouait tous ces
enfans, et se proposait de former la demande e n ’dé
saveu de paternité ; il ajoute aus^i que le sieur du Sau
vage lui avait déclaré, que lorsqu’ il se présentait chez
la dame Demariolles, elle avait soin de faire retirer
cet enfant.
C e témoin fait remonter cette conversation à cinq
ans ; au moment où il déposait, la demande en dé
saveu était formée depuis trois ans et quatre mois.
L e neuvième n’a aucune connaissance des faits.
. L e dixième a entendu constamment appeler cette
fille A n n a , sans autre dénomination. Lorsque le s.r
du Sauvage arrivait chez la dame Demariolles, on
faisait relirer l’enfant; elle ne se mettait pas à table.
L e sieur du Sauvage ne lui a jamais dit qu ’il connût
l ’enfant pour être celui de sa femme, mais il présume
que le sieur du Sauvage le savait.
L e dernier, la dame de R ig a u d , maîtresse de pen
sion, atteste que le sieur du Sauvage n ’a* jamais vu
A n n a chez elle; qu’ellé ne lui a jamais été présentée.
�( 3i )
Il n’est donc aucunement prouvé qu’en l ’an 10 le
sieur du Sauvage a vu A n n a chez la dame D e m a
riolles, et qu’il l’a reconnue pour être la fille de sa
f e m m e ; puisqu’au contraire il est établi que toutes
les fois que le sieur du Sauvage est arrivé chez la
dame Demariolles , on a fait disparaître l’enfant.
Second fait : E lle était connue de lu i sous le nom
d Anna-Françoise du Sauvage. Pour le coup , il n’y,
a pas un seul témoin qui ait déposé de cette circons
tance ; personne ne s’est avisé de dire que le sieur du
Sauvage ait connu ou souffert que cette fille portât son
nom; et la maîtresse* de pension apprend même qu’elle
n ’a é t é p r é s e n t é e c h e z e ll e q u e sous l e n o m d ' A n n a ,
n i è c e d e m a d a m e d e M a ri ol ie s .
L e dixième témoin, celui qui a été entendu à T h ie r s ,
hors la présence dti sieur du Sauvage, n’a jamais en
tendu appeler cet enfant que sous le nom d 'A n n a ,
sans autre dénomination , et ne fait que présumer que
le sieur du Sauvage savait qu’elle était fille de sa
fem m e; mais loin de convenir qu ’elle portât le nom
de du Sauvage, le témoin lui-même le désavoue for*
mellement.
-Ainsi, ce second fait a donc été faussement allégué.
Troisième fait : « Elle a été ainsi appelée et d é « nommée dans la pension où elle était élevée, en
« présence du sieur du Sauvage, qui l ’y a reconnue
« comme fille de sa femme. »
Celte assertion a été complettement désavouée par
la maîtresse de pension qui a élevé A n n a ; le sieur
�( 32 )
du Sauvage ne Ty a jamais vue; elle ne lui a jamais
été présentée; le sieur du Sauvage n’est venu à la
pension que pour porter de l’argent à une jeune veuve
du P u y ; aucun des autres témoins n’a déposé sur ce
fait si important : cependant la fille A n n a , lors de l’arrêt
de la Cour, s’appesantit sur celle circonslance dansses
conclusions, d’ une manière tellement précise , qu ’elle
délermina peut-être l’inlerloculoire.
Quel peut êlre l’espoir de cetle fille audacieuse?
A - t-e lle satisfait à l’arrêt de la C o u r ? Osera-I elle
espérer de porter un nom qui ne lui apparlienl pas?
Sans doute elle voudra entreprendre de discuter le
fo n d , en s’appuyaut sur une disposition d’usage , con
signée dans l’arrêt de la C o u r , « Sans préjudice des
€c fins qui demeurent respectivement réservées ». Il
faut donc la suivre dans ce dernier retranchement.
On ne croit cependant pas devoir s’occuper des
moyens qu’elle a proposés en la forme ; et ce n’est
pas sérieusement qu ’elle a prétendu que le conseil
de famille devait êlre composé de parens du sieur
du Sauvage et de ses parens d’elle A n n a . Malgré
leur éloignement, « la femme mariée n’a point d’autre
« domicile que celui de son mari ; le mineur émancipé
a a son domicile chez ses père et mère (art. 108, Code
« Nupoléon). »
« Lorsque les parens ou alliés se trouvent à la dis—
« tance de plus de deux myriamètres, le juge de paix
« peut appeler, pour composer le conseil de famille,
« dans la commune ou. la tutelle est ouverte, des citoyens
* connus
�C 33 )
« connus pour avoir eu des relations habituelles d’a« mi lió avec, le père ou la mère du mineur ( art. 409,
« Code Napoléon ). »
Il répugnerait au bon sens et à la raison, que celui
qui désavoue la paternité, fît appeler ses parens au
conseil; ce serait une contradiction évidente avec la
•demande; en soutenant qu ’il n’est pas le père, il sou
tient aussi que les enfans désavoués n’ont aucun lien
avec sa famille.
Mais si ces moyens sont ridicules, en est-il de mêm e
de la procédure singulière, inusitée, qu’a tenue la fille
A n n a ? Pouvail-elle se débarrasser à sou gré du tuteur
qui lui avait élé nominé? P o u v a it - e lle , par un arrêt
Sur r e q u ê t e , n o n c o m m u n i q u é , s u bs tit u e r un curateur
de son choix à ce tuteur légal?
To ute tutelle doit être déférée par un conseil de
famille , lorsque le père et la mère sont dans l ’in
capacité de l’être ( Art. 4o5 C. N. ). C ’est encore un
conseil de famille qui doit nommer un curateur au
mineur émancipé ( Art. 478 C. N. ). L a loi n’admet
aucune nomination sur requête. Elle a dérogé à cet
usage de l’ancienne procédure; et il ne paraît pas
douteux que M . e Garrón a été irrégulièrement n o m m é
curateur ; que l ’appel est nul et irrégulier. L a Cour
appréciera ce m o ye n , sur lequel le sieur du Sauvage
insiste pour l’honneur des règles; mais il n ’y donnera
pas d autres développemens.
Il serait encore assez inutile d’examiner la question
d ’état en elle-même; mais le sieur N oyer du Sauvage
9
�( 34 )
ne doit rien négliger dans une cause d’un aussi grand
intérê t, quelque humiliation qu’il éprouve. Combien il
est cruel de se voir forcé de dévoiler la honte d’une
femm e immorale, qui lui a porté un coup si funeste!
Son ame est liéIrie, il ne peut plus espérer de bonheur ;
des souvenirs déchirans fatiguent sans cesse son esprit
et son cœur.
Eh quoi! il était né bon, généreux et sensible; il
adorait son épouse, elle fut infidèle et perfide! Il désirait
d’être père! Ces liens touchans qui semblent perpétuer
notre existence; ces rapports aimables, d’où naissent
les charmes les plus d ou x, ne sont pas faits pour lui ! Il
fut père un instant, il est vrai! mais ses e n fa n s ont
vécu ! et lorsqu’il revient dans son domicile, lorsqu’il
a recouvré une patrie, que va-t-il apprendre— ? Mais
jetons un voile sur un tableau aussi dégoûtant, où le
vice est toujours en aclion sous les traits les plus hideux.
L e désaveu delà paternité est sans doute une demande
pénible, elle excite la curiosité publique, elle met en
évidence celui qui est forcé d’en intenter l’action. C e
pendant c’est un remède salutaire, et la loi, dans tous
les tems, a ofïert ce motif de consolation à un époux
outragé.
I,a célèbre maxime décrétée depuis plus de deux
mille an s } pater est ¿s quem demonstrant nuptice, rece
vait aussi ses exceptions dans le droit romain. Plusieurs
docteurs avaient déjà remarqué que cette règle n’était
point placée parmi les textes du droit, qui parlent de
l ’état des hommes, puisqu’elle est tiiée de la loi 5 , (1. de
�( 35 )
'la ju s voccindo; mais on trouve une exception dans la '
loi filL u m , fï‘. lus qui su i vel alieni ju r is surit : cette loi
dit expressément que le mari n ’est point tenu de recon
naître un enfant dont sa femme accoucherait pendant
une longue absence du mari d’avec sa femme : Jiliu m
eum de/in un u s , qui ex viro et u xoreeju s nascitur. Sed
si Jing am us ab/uisse m aritum , verbi gratiâ per decenm um teversian anm cuium invenisse in dom osua, pLacet
nobis JuLiani sententia hune non esse m a ritijiliiim . L a
loi prend pour exemple un enfant d’un a n , anniculum ,
après dix ans d’absence, mais elle n’en est pas moins
générale et absolue, toutes les fois qu’il y a eu impos
sibilité physique de cohabitation : tous les docteurs,
dans
c e e u s , s ’a c c o r d e n t h d é c i d e r q u e l ’e n f a n t n ’a p
partient pas au mari. C ’est la doctrine de l’avocat
général T a lo n , lors d’un arrêt du 16 janvier 16 64,
rapporté au Journal des Audiences, tom. 2 ; de Cochin ,
dans la cause de la demoiselle Ferrand , quoiqu’il
plaidât dans un intérêt opposé; de M M . Daguesseau,
Séguier, et de tous les jurisconsultes.
L ’absence du sieur du Sauvage a duré dix ans. Il
est parti en janvier 1 7 9 1 , il n’est rentré q u ’à la fin de
1801.11 n’y a pas de doute sur celle absence, le tableau
de proscription, celle liste falale est là pour l’élablir.
L a peine de mort prononcée contre les émigrés qui
rentraient ; les perquisitions cruelles et si s o u v e n t renou
velées contre le petit nombre de ceux qui ont essayé
de franchir les barrières, et qui onl élé victimes de leur
témérité, prouvent encore l’impossibilité du retour du
10
�( 36 )
sieur du Sauvage, jusqu’à la restauration du gouver
nement; une série d’acles continuels et indiscrets de la
femm e V é n y , en 1 7 9 2 , en 1793, en l ’an 3 , où elle
a toujours pris la qualité de femme de l’émigré du
Sauvage; son autorisation en justice pour poursuivre
les acquéreurs de son mari; une procédure qui a duré
contre eux jusqu'en messidor an 4; le traité qui l’a
suivie; le partage de la successien de sa mère, fait en
l ’an 4 , toujours en l’absence de son mari, sont des
preuves irrésistibles de l’impossibilité de la cohabita
tion; et lorsqu’il est notoire q u e , pendant tout cet in
tervalle , la femme V é n y vivait publiquement avec tout
autre; qu’elle s’est dite femme Guine^- a fait baptiser
un de ses enfans comme enfant légitime de ce misé
rable, ne trouve-t-on pas, dans cette horrible dépra
vation, de quoi convaincre les plus incrédules? On ne
peut pas résister à l’évidence.
Ainsi, dans l’ancien ordre, la sévérité des lois^ la
rigueur des magistrats n’eussent pas été un obstacle à
la réclamation du sieurdu Sauvage : il eût repoussé avec
succès ces enfans de ténèbres. N ’a-t-il pas encore plus
d ’avantage dans la nouvelle législation?
L e Code Napoléon, art. 3 1 2 , a admis, comme dans
l’ancien droit, la maxime pater est, e t c .« I/enfant
« conçu pendant le mariage a pour père le mari ; néan*f moins celui-ci pourra désavouer l’enfa nt, s’il prouve
« que pendant le tems qui a couru, depuis le trois cen« tième jusqu’au cent quatre-vingtième jour avant la
« naissance de cet en fant, il était, soit pour cause
�C 37 )
« d’éloignement, soit par l’effet de quelqu’accident,
« dans l'impossibilité physique de cohabiter avec sa
« femme ».
Voilà déjà une grande modification à la rigueur des
anciens principes : il ne faut plus une absence aussi
longue que celle prise pour exemple dans la loi JiUum.
L e législateur, en admetlant la présomption du ma
riage pour fixer la paternité, a vu qu’il se mettrait en
opposition avec les premiers élémens du droit et de
le raison, s'il faisait prévaloir une présomption à une
preuve positive, ou à une présomption plus forte. A u
lieu de soutenir la dignité du mariage, on l'avilirait,
on le rendrait odieux, s’il servait de prétexte à légi
t i m e r u n e n f a n t q u i , a u x y e u x du public c o n v a i n c u
par des circonstances décisives, n’appartiendrait point
au mariage.
C'est ainsi que s’exprimait l’orateur du gouverne
m en t, lorsque la loi fut présentée.
L e mari qui se voit obligé de désavouer un enfant,
n ’esl-il pas déjà trop malheureux ? Comment penser
qu’il se porle à une démarche aussi scandaleuse, s'il
était
véritablement père? L?v nature a marqué en.
caractères ineffaçables les traits de la paternité; elle a
rempli le cœur des pères et mères et celui des en/ans
des seniimens de tendresse les plus profonds ei ¡¿s plus
eclalans. Et'commenl croire qu ’ un père éloufle tous
lessenlimensde la nature! C o m m e n t croire qu’il allume
dans sa main les torches de la discorde, et qu ’au dehors
il se dévoue à l’humiliation, s’il n’est pas dans la con-
�( 38 )
viction intime que l’enfant n’est point né de son ma
riage. Ce sont encore les termes dont se servait l'orateur
du gouvernement.
L e sieur du Sauvage a le droit de se placer dans
l ’espèce prévue par le législateur; il n’est que trop
certain pour lui, que la dignité du mariage est avilie:
il en appelle au public, à tous ceux qui ont eu des rela
tions avec sa famille; à fous ceux qui connaissent la
femm e Vény. Ne sont ils pas convaincus, par les cir
constances les plus décisives, que l’enfant désavoué
n ’appartient pas au ’mariage?
Mais il ne s’agit pas ici d’une naissance tardive ou
prématurée, prévue par l’article 3 ia du C o d e . A u x
termes de l’article suivant, le désaveu est admis lorsque
la naissance de l’enfant a été cachée au mari; et suivant
l ’article 3 i 6 , le désaveu doit avoir lieu dans le mois,
si le mari se trouve sur les lieux de la naissance de
l ’enfant; dans les deux mois après son retour, si, à la
même époque, il est absent; dans les deux mois après
la découverte de la fr a u d e , si on lui avait caché la
naissance de l’enfant.
L a naissance d’^énne-Francoise a-t-elle été cachée
au sieur du Sauvage ?
A quelle époque a-t-il découvert la fraude?
A - t - i l formé sa demande en désaveu dans le délai
prescrit par la loi ?
Si le sieur du Sauvage établit ces trois propositions,
il aura rempli sa tache. Anne-Françoise sera repoussée
avec indignation.
�C 39 )
I/acte de naissance d’ Anne-Françoise établit sans
réplique que la naissance a été cachée au mari. Il
était alors absent. La femme V é n y le disait elle-même
lors du jugement du 24 messidor an 4.
C ’est le 19 fructidor an 4 , qu’Anne-Françoise a
vu le jour. Ce n’est que le 4 complémentaire de
la même année, quinze jours après la naissance, que
cette fille a été présentée à l’officier public. Ce retard
annonce déjà le mystère; et sans doute qu’alors la
femme V é n y avait déjà disparu de la maison secrète
où elle avait déposé ce fardeau d’iniquité. Que dit
l ’accoucheur chargé de présenter l’enfant ? Q u ’il a
accou ch é, dans sa maison de lu i déclaran t, le 19
fr u c tid o r
d e r n ie r , A n n e
Vény,
épouse de Charles-
Augustin Sauvage, actuellement absent. Les premiers
juges ont remarqué que ce n’étaient ni les prénoms
ni le nom du mari, qui s’appelle Jean-Cliarles N oy e r
du Sauvage, et non Charles-Augustin Sauvage ; mais
le chirurgien 11’en savait sans doute pas davantage.
Ce qu’il y a de moins douteux, c ’est que le sieur
du Sauvage ignorait tout. S’il avait été instruit, sa
femme n’aurait pas accouché à C l e r m o u t , dans une
maison de santé destinée à recevoir des femmes de
mauvaise vie. Ce n’est pas ijinsi qu’il aurait avili, dés
honoré son épouse.
Si la femme V é n y n’avait pas m e n é une conduite
scandaleuse ; si elle n’avait pas eu besoin de cacher
son crime et sa honte, elle était à C le rm o n t ,a u mi
lieu de sa famille qui n’aurait pas souffert qu’elle se
�( 4o )
fût cachée dans une maison d’a ccou ch e ur, pour se
dérober à tous les regards.
L ’accoucheur lui-même ne prend pas sur son compte
de présenter cet enfant comme appartenant au mari;
il ne la qualifie pas de fille légitime; il dit seulement
qu’il a accouché Anne V é n y iemme de S a u v a g e ,
actuellement absent. Personne de la famille n ’assiste
à
cet
acte. L e chirurgien «n’est
de deux femmes du
accompagné
peuple. Ainsi
c ’est un
que
acte
occulte, ignoré de tous ceux qui pouvaient y prendre
intérêt. A n n a -F ra n ço ise ne peut s’en prévaloir, ni
r é c l a m e r une possession d’état. Elle n’a pas même
osé s’en servir. Il est donc certain quo sa naissance a
été cachée au mari de sa mère. Il n ’est donc plus
douteux qu’elle n’appartient pas au mariage.
,
L a fraude a-t-elle été découverte bientôt après ?
Cela esI impossible. L e sieur du Sauvage n’est rentré
que sur la fin de l’an 9 ; il n ’a élé amnistié qu’en
l ’an i r . Sa femme n’était pas à son domicile, puisq u ’en l’an 11 elle vivait avec Guine%, à Tournai. L e
troisième ac le de naissance n ’est inscrit sur les regis
tres de celle ville de T o u r n a i, que le 6 pluviôse an
11. L e sieur du Sauvage ne pouvait savoir, au M o naslier, que sa femme élijjt en Flandre, et avait suivi
un vil scélérai. On ne s’empresse pas de raconter à un
mari des événemens aussi désagréables; on s’était con
tenté de lui dire que sa femme avait fait divorce. L e
jugement dont est appel constate que ce divorce était
notoire. L e sieur du Sauvage devait être dans celle con
fiance
�( 4* )
fiance que tousses liens étaient rompus avec la femme
V é n y ; qu ’il n’avait plus rien de commun avec e lle ;
et c ’était la plus consolante de ses idées. Mais enfin
il esl averti qu'on ne trouve pas l'acte de divorce ;
que les registres civils n’en font pas mention. Il prend
alors des informations, fait des recherches, et découvre
enfin les quatre actes de naissance, qu’il se fait dé
livrer.
Ce n’est qu'au mois de juin 1809 , que ces actes lui
sont remis. O11 sent combien il a fallu de soins et de
peines pour les découvrir; mais ce n’est qu’au moment
où il les a reçus, que la fraude a été découverte, et
q u ’il a eu la faculté d’agir pour désavouer la pater
nité.
Comment en effet aurait-il pu se pourvoir contre
des individus qui se cachaient dans l’om bre, qui n’agis
saient e n ‘aucune manière? L ’enfant même qui était
chez la dame Demariolles disparaissait toutes les fois
qu’il arrivait chez sa belle-sœur. La dame Demariolles
avait alors pour principe de ne pas montrer à un beaufrère qu ’elle estimait, un enfant qu’elle savait ne pas
lui appartenir.
Il fallait donc être certain que ces enfans existaient,
qu ils étaient n<5s de la femm e V é n y , pour pouvoir
les attaquer en d é s a v e u ; il n ’a pu le faire qu ’avec
leurs actes de naissance, qu i, par l e u r contenu, lui
sont étrangers; ce n’est donc que du jour qu ’il les a
eus en son pouvoir, qu ’il a découvert la fraude ; il
semble qu’on ne peut pas être divisé sur ce point de fait.
�( 42 )
Q u’importe que des témoins de l’enquête aient dit
que le sieur du Sauvage savait qu’il y avait un en
fant chez la dame Demariolles, qu’on faisait dispa
raître tonies les fois qu’il arrivait ? 11 ne résulte de celte
circonstance autre chose, si non qu ’on voulait lui ca
cher la naissance de cet e n f a n t , et qu’on reconnaissait
qu’il ne lui appartenait pas ; c’était précisément la
fraude dont il n'a pu avoir la certitude que lorsqu’il
a connu l’extrait de naissance , qui ne lui a été dé
livré que le 24 juin 1809; ainsi, ce n’est qu ’à ce mo
ment q u ’il a pu concevoir des craintes, et qu’il a pu
faire des démarches légales.
11
forme son désaveu sans perdre un instant. L e
i 5 juin 1806, acte extrajudiciaire aux enfans mineurs
et à la m è r e ; 4 juillet suivant, nomination de tuteur;
7 juillet , demande au tribunal du P u y : tout a été
fait dans moins d’un mois, à die delectœ fra u d is.
A tin a -F ra n çoise voudra-t-elle enfin objecter que
sa mère n’est point condamnée comme adultère; et
qu’il répugne dès - lors qu ’elle soit fille adultérine?
cette objection a déjà été proscrite par un arrêt so
lennel , du 24 août 1811 , dans la cause du sieur B011garei , contre l’enfanl de son épouse, qu’il avait dé
s a v o u é , et dans des circonstances bien plus forles,
puisqu’il avait été prononcé un divorce entre les époux,
par consentement mutuel, pendant la grossesse de la
femme. L ’enfant n’en a pas moins été déclaré adul
térin ; et la Cour de cassation a confirmé cet arrêt.
Ainsi tout se réunit en faveur du sieur du Sauvage.
�( 43 )
Quiconque voudrait soutenir que cet enfant doit être
à sa charge, blesserait également la justice et l’équité
ce serait une atroce barbarie que d’obliger un époux
malh eu reux, de donner son nom à un être ignoble,
fruit de l’inceste et de l’adultère. Si la loi naturelle
et la loi divine nous imposent le droit d’aimer, de
secourir nos enfans;si la nature a imprimé dans notre
â me en traits brûlans, une tendresse profonde pour
ceux qui nous doivent le j o u r , quel doit être le dé
sespoir d’un é p o u x , de tro uver, dans son intérieur,
une femme infidèle et perfide ; de voir croître à ses
côtés des êtres qui lui sont étrangers? Quel doit être
son s o r t , lorsqu’il n ’a pas mêm e la consolation de
douter; l o r s q u e le cri p u b li c l ’a v e r t i t sans cesse de s o n
malheur ; lorsque des circonstances décisives entraînent
de toutes parts la plus intime conviction? Non! il n’est
point d ’état plus déchirant, plus digne de pitié ! et la
loi doit venir au secours d’ un époux aussi cruellement
offensé.
Signé N O Y E R D U S A U V A G E .
M .e P A G E S ,
M. e
ancien Avocat.
D E V È Z E , Avoué-Licencié.
i ................................
■
, ,,
J.-C. S A L L E S , lmp. de la Cour impériale et du Barreau.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer du Sauvage, Jean-Charles. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Devèze
Subject
The topic of the resource
reconnaissance de paternité
émigrés
divorces
témoins
Description
An account of the resource
Mémoire pour M. Jean-Charles Noyer du Sauvage, propriétaire ; habitant de la ville du Monastier, département de la Haute-Loire ; contre Anne-Françoise, se disant Noyer du Sauvage, mineure, maître Garron, avoué en la Cour, son curateur ad hoc, appelans d'un jugement du tribunal civil du Puy, du 30 août 1810 ; Et le sieur Honoré Debrus, notaire impérial, habitant du lieu d'Allairat, commune de Sallette, défendeur en assistance de cause.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1782-Circa 1810
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0617
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2215
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Tournai (Belgique)
Le Monastier-sur-Gazeille (43135)
Sallette (43231)
Salette-Falavaux (38469)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
divorces
émigrés
reconnaissance de paternité
témoins
-
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80f74aac8e33f365bde6e7f0470877c1
PDF Text
Text
■V K T C Z T v 12 M 7 " a t B t f *
M
E
M
O
I
R
E
P O U R
M a r g u e r i t e C O U G U E T - F L O R A T , veuve du sieur
de
R e y r o l l e s , intimée;
COUR
C O N T R E
D ’A P P E L
M A IG N E , se disant aussi veuve, dudit
sieur d e R e y r o l l e s , appelante.
C a th erin e
L a demoiselle Maigne n ’est pas satisfaite d'avoir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une formule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa haine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas craint, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
Une première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sûr des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le mieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudrait pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel des lois de l’empire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sacré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
La dame de Reyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d’abord adopté par la demoiselle M aigne, et son premier
A
_
D E RI OM.
s e c tio n
.
�mouvement avoit été d ’user d’une représaille Lien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position , de rendre compte
des faits et gestes de sa rivale, elle n ’avoit rien tu de ce qui la tourînentoit depuis tant d’années , et il lui paroissoit consolant de la
poursuivre encore, comme un remords vengeur, de la forcer à
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une haine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que celte jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour; on consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d ’écarter de son récit
tou^Wles épisodes é tra n g è r^ à ses moyens. L a réclamation d ’un
état civil présente d ’ailleurs trop d’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
L e mariage est-il un contrat d’ordre public; c’est-à-dire, une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , a près un divorce
nul, traiter irrévocablement avec son mari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé?
T elle est la principale question de cette cause; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver difficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
en jour ces antiques maximes, dont nous n ’avons éprouvé l’ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
Aujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la magistrature, a reconquis "Sa dignité primitive;
et tout ce qui tend à la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
F A I T
S.
L a dame C o u g u e t-F lo ra t contracta mariage avec le sieur de
Reyrolles, médecin, le 7 novembre 1774, et se constitua en dot
ses biens échus et à échoir, c ’est-à-dire, qu elle donna plein pou-
�( 3 }
-voir à son cpoux de rechercher et régir une fortune inconnue à
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation d ’un douaire, et
autres avantages matrimoniaux.
L es premières années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m è re , et possédant toute l’affection de son époux , la dame de
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroil détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullement à craindre, et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur.
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrement, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne se règlent
pas toujours par leur estime. Dans sa fierté , elle abandonna un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, et se retira chez la dame
de F lo ra t, sa grand’mère.
Cet éclat, imprudent peut-être, tourna tout entier au profit de
sa rivale; la dame de Reyrolles fut privée de tout secours, de ses
bijoux; et poussce d'infortunes en infortunes, pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu'elle les reçàt de la demoiselle
Maigne. T e l étoit, après dix ans de mariage, l’humiliation à laquelle
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer.
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise., la dame de Reyrolles se trou voit
encore heureuse des égards de son époux; mais l’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se fa ire , céda à l’évidence : l’indignation
étouffa tous les calculs d’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Les sieur et dame Cald.iguès, parens de la dame de R eyrolles,
alloient s’établir à Limoges. Affligés de sa position, ils lui propo
sèrent un asile ; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d ’être délivrée d ’une surveillante incommode,
l£ pressa de consentir ù cette séparation.
Combien étoit déjà cliangé le sort tic la dame de Reyrolles! elle
avoit un époux; une étrangère lui faisoit oublier ses serrnens et
ses devoirs : elle avoit eu un enfant; la mort, moins cruelle, le lui
A 2
�...................................... ( 4 )
avoit ravi à l’âge où il étoit incapable de tendresse. C ’est ainsi
qu’épouse sans époux, mère de famille sans enfans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
consolations de l’amitié et aux fantômes de l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de Reyrolles , par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement de la révolution
elle ne reçut plus rien , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints. 11 est certain qu’il eût fait
son bonheur de rompre ses chaînes, et de mériter l’affection de
son épouse, si la prévoyance allarmée de la demoiselle Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d ’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
voyoit, e t i l n ’osoitvoir; il vouloit, et ne pouvoit s’enhardir à vouloir:
l'homme le plus impérieux n ’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. Le premier acte de foiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, est l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes;
il reste désormais sans d é len se, et se dévoue ù l’esclavage.
L a demoiselle M aigne triompha , et le premier usage de sa
■victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors exisloit une loi récente , que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la monarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours «l’intervalle, et avant d’atlaquer la
religion dans ses solennités, il n’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire à prononcer; et le lien du mariage, malgré son antique
inviolabilité, lut dissolublc indistinctement par le divorce.
Celte innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s’ernpress.Yt pas de la saisir. En conséquence , le
3/j mai 1797, il fut signifié à la dame de Heyrolles, de la part de sou
f
�C 5 )
mari , un acte par lequel il déclaroit qu’il entendoit divorcer pour
cause d’absence, et pour incompatibilité d’humeur et de caractère;
en conséquence de quoi il nommoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa part trois parens ou amis.
Dans cette conjoncture que pouvoit l'aire une épouse? plaider?
les tribunaux n’étoient pas compétens ; résister? la loi ne le lui permettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, e t j e divorce n ’en alloit pas moins à sa fin.
Quoi qu’il en so it, le 27 mai il fut déclaré, à la requête de
la dame de Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 24
elle nommoit trois parens, ajoutant que le sieur de Reyrolles, en
provoquant son divorce, n ’avoit fait que prévenir ses intentions.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de fam ille, tou
jours motivée pour absence et incompatibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : Sur quoi ladite Couguet- 1' lorat leur a répondu
qu'elle étoit disposée h suivre en tout point la 'volonté de son
mari ; mais que si son dit mari persiste à requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
Cette réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-mêine insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de l’incompatibilité s’accordoient mal avec l'im
patience de la demoiselle Maigne. On crut donc découvrir dans
les dires de la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m utuel, pour lequel il n ’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1780, un mois après la seule
assemblée de famille, on fit rédiger un acte de divorce , dans lequel
on suppose qu’il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fu i porté à la dame de R e y r o l l e s par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en dise , après la date qui
lui a été donnée : elle signa, il n ’y avoit pas à hésiter; d ’ailleurs
son re fu s, en l’exposant, n ’eût fait que rendre cette pièce inu-
�( 6 )
l i l e , et forcer à reprendre la suite du premier mode de divorce.
Ainsi s’accomplit cette œuvre d ’iniquité , et la demoiselle Maigne
eut enfin levé le plus grand des obstacles : mais comme si le ciel
se fut joué de ses. plus chères espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoit tant liatée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que lë sieur de Reyrolles,
pénétré de la perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à ses pre
miers engagemens.
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d’un esclave. Enfin , une
grossesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
Mais les assiduités du sieur de Reyrolles n ’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse. T r o p adroits pour faire un éclat, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébranler l’imagination foible d’un homme que le premier mouve
ment faisoit agir, et q u i, dans ce qui concernoit scs passions, ne
sa voit jamais penser par lui-même. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la dame de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa perte : Inquirebant niala s ib i, et dolos
totd die meditabantiir.
La grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
ii leur malignité; l’époux lui-même fut entraîné à douter contre sa
conviction intime ; et ce que la darne de Reyrolles avoit cru être le
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
T o u t d’un coup la scène change : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son ma
riage avec la demoiselle Maigne est consommé le 11 messidor
an a , douze jours avant que la dame de Reyrolles , sur son lit
do douleur , donnât le jour à une malheureuse créature sous d ’aussi
Ministres auspices.
�(7 )
N o n , le ciel ne l’a point béni, ce fatal mariage ! Il a entendu Panathème prononcé par une épouse dans sa désolation ; et plie n'a
pas eu la douleur de savoir plus heureuse qu’elle celle qui l’avoit
chassée du lit conjugal. En portant un nom usurpé , la demoi
selle Maigne ne trouva plus dans le sieur de Reyrolles cet être
soumis sur lequel elle avoit exercé tant de fois une capricieuse
puissance.
L a demoiselle Maigne avoit calculé cet effet habituel du mariage ;
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’une époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitue de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an 5 . Quelque temps après, une séparation
volontaire les a éloignés jusqu’il la mort.
Cependant la dame de Reyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupée
des soins maternels que deniandoit le premier âge de sa fille , elle
attendoit a v e c r é s i g n a t i o n q u e le sie u r de R e y r o l l e s , rendu de nou
veau à ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d ’un retour à la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l ’abus de son administration.
Il avoit recueilli la succession considérable de l’aïeule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’étoit emparé des effets mobiliers, sans compte
ni mesure.
Néanmoins, demeurant libre d ’en fixer la consistance , et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 > un acte d’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le m o n ta n t, d it-il, de ce qu’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours éludé de
déclarer ce qui pouvoit lui être dû ; qu’ elle ne c h e r c h a i t qu’ a re
tarder la libération dudit Iieyrolles , qu’il etoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame de Reyrolles répondit qu’elle étoit surprise et lassée
�( 8 )
des procédés iniques de son m ari , et refusa les offres. Il y eut
procès verbal de non conciliation , après lequel elle fut assignée
le 21 messidor suivan t, devanT le tribunal du P u y , en réalisation
et validité desdites offres.
^
C e s diligences avoientlieu à la dernière heure du papier-monnoie;
le numéraire reparut au commencement de l’an 5 ; et, dans ce pre
mier instant où l ’opinion en augmentoit la valeur, le sieur de R e y rolles se hâta de faire proposer à sa femme une modique somme de
6ooo francs pour tout term iner; ajoutant, pour l ’intimider, que
si elle ne l’acceptoit pas , les offres de Fan 4 seroient jugées vala
bles , parce qu’elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la dame de Reyrolles demanda-t-elle à être éclairée sur
la valeur réelle de sa propre fortune ; il fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n’avoir que les mandats offerts
au lieu du numéraire promis, si elle s’exposoit à aller plaider dans
un tribunal presque inconnu , à douze iieues de son domicile.
L a dame de Reyrolles signa donc un traité le 16 frimaire an 5 ,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avec son
mari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un partage de 1785, il lui revenoit 5i2G liv. 10 sous ; à quoi
ajoutant d ’autres articles touchés par son m a r i, quoique non com
pris dans l’inventaire, en valeur de 873 liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des 6000 fr. qu’il vouloit
payer, et dont l’acte porte quittance.
A compter de celte époque les époux furent séparés, et la dame
de Reyrolles n ’eut plus qu’à s’étourdir sur le passé et à supporter
son sort avec courage : elle se consoloil avec sa fille, et cette con
solation même lui fut enviée. Après le 18 fructidor, on lui donna
l ’alarme sur le sort de cette enfant , qui n ’avoit pas encore d’état
civil. On lui persuada que les peines de la loi pourroient l’attein
d r e , cl elle se décida a iaire une déclaration à l’olficier public. On
n ’eut garde de transcrire la qualité qu'elle vouloit se donner, pnr
la raison qu’il eût été incivique de mépriser un divorce, cl que
Je sieur de Reyrolles, redevenu puissant, n ’auroit pas trouvé bon
qu ’ il
..
�( 9 )
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Comme ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 m es
sidor an 5. Cette erreur a été reconnue par la demoiselle Maigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d ’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de Reyrolles, nommé receveur du
département de la H a u te-L o ire, alla s’établir au Puy. Là , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle Maigne,
qui babitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui l’a conduit
au tombeau.
A celte époque terrible, où l’homme, ne trouvant plus d’asile
dans les illusions du monde, voudroit réparer dans un instant les
fautes de sa vie toute entière, l’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d ’altester qu’il n’avoit rien plus à cœur que de
se réconcilier avec sa fem m e, et de lui en donner, par un testament
honorable, la s e u le p r e u v e qui fût désormais en son pouvoir.
En e f f e t , il est de notoriété au P u y que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par lequel , cassant celui qu’il regardoit
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 40000 f.
à la dame de Reyrolles personnellement, et faisoit en faveur du
sieur Vauzelles , ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de ne pas se hâter assez,
elle envoya au Puy le sieur Granchier le m ercredi, et arriva ellememe le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
aieur de Reyrolles, q u i, à ce qu ’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tète avec un mouvement con
vulsif. Quoi qu’il en soit, il expira" le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle Maigne que
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
sieur de Reyrolles, et en attendant les scellés qui ne dévoient être
poses que le lendemain , au lieu de verser des larmes stériles qu’il
B
�( 10 )
valoit mieux réserver pour la pantomime des audiences, la de
moiselle Maigne étoit libre de tout parcourir. Un certain porte
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n ’a
plus paru ; et le public qui se trompe rarement en conjectures dé
sintéressées, paroit avoir été imbu de l’idée que dans ce porte-feuille
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier tes
tament. Et qu’on ne dise pas que c’est là une fable de pure ima
gination ; ce bruit avoit pris une telle consistance, que le sieur
Vauzelles, légataire, a rendu sur ce m otif une plainte en suppres
sion de ce testament.
L a dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’un fait
qu’elle n ’a appris que par la notoriété publique. C e n’est point la
fortune du sieur de Reyrolles qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut son état civil, sa d ot, et ne
dispute point à la demoiselle Maigne une o p u le n c e chèrement
achetée, et dont la source équivoque n ’est de nature à donner du
crédit que vis-à-vis quelques collatéraux.
Apres la mort du sieur de Reyrolles, ce n ’étoit plus que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence,
le 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses dot, trousseau et gains matrimoniaux, e t, en tant que de
besoin , en nullité du divorce et actes postérieurs.
L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cette tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d ’enrichir sa fidèle moitié, ne s’allioit guère avec un domicile
c o n s t a m m e n t séparé, et
douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle Maigne, qui avoit toujours habité Brioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de Reyrolles, proposa un déclinatoire, soit qu’elle crût qu’il n’avoit pas transféré au Puy son do
micile de droit, soit qu’elle fut entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n ’avoit pas le même domicile de lait que celui qu’elle disoit
son époux; elle ignoroil que le sieur de Reyrolles avoit acquis une
maison au P u y , s’en Uéclaroit habitant dans les actes publics, et
�( rO
avoit même fait rayer sa cote mobilière à Brioude. En conséquence, '
et par ces m o tifs, elle fut déboutée de son déclinatoire par juge
ment du 23 frimaire an i 3.
A u fond la demoiselle Maigne répondit que la dame de Reyrolles
n ’étoit pas recevable dans sa demande, soit à cause de la loi du
26 germinal an 1 1 , soit parce que la demande n ’avoit été formée1
%
qu’après la mort du sieur de Reyrolles, soit parce que la dame de
Reyrolles étoit divorcée par un acte requis et signé par elle-même;
qu’elle avoit traité avec son mari en qualité de femme divorcée,
et avoit pris la même qualité dans plusieurs autres actes-, no
tamment dans la déclaration de naissance d’un enfant né un àn
après le divorce; qu’à l’égard d’elle-même Catherine M aigne, elle
n ’avoit point à craindre le sort de ce divorce, parce qu’elle étoitl
mariée légitimement, héritière universelle, et que le sieur de
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette volonté pendant sept
ans, qu’à sa mort o n a v o i t trouvé le testament de la demoiselle
Maigne parmi ses papiers les plus précieux.
11 est inutile de rappeler les moyens opposés par la dame de
Reyrolles à cette défense'de la demoiselle M a ig n e, les faits cidevant narrés les indiquent; et il suffit de dire qu’en déclarant le
divorce nul, les premiers juges ne virent plus dans la dame de
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance maritale, n ’ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , ni prendre
une qualité qu’elle n’avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an i 3 , le tribunal du P u y, sans s’arrêler aux fins de
non-recevoir proposées par Catherine M a ig n e , déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 1793, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du 3 frimaire an 5 ; remit la dame de Reyrolles au
même état où elle étoit avant lesdits actes ; condamna Catherine
Maigne, en qualité d ’héritière du sieur de R e y r o l l e s , à lui payer,
x • 3oo fr. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 177 4 ; a*« 1200 fr. pour scs bagues et1
joyaux; 3 . 400 fr. pour sa pension viduelle;
• à lui fournir un
logement garni et meublé, suivant son état et sa fortune, dans'Ic
li 2
�(
)
dernier domicile du défunt, à la charge par ladite dame de Reyrolles
de constater l ’état dudit mobilier qui lui sera remis, pour être rendu
à qui et dans le temps de droit; 5°. à payer à ladite dame de Rey
rolles i5oo fr. pour son deuil et celui de sa domestique; et à l’égard
du payement de la d o t, le tribunal ordonna que led parties contesteroient plus amplement, et à cet effet fourniroient leurs états res
pectifs, Sauf débats. Les inscriptions de la dame de Reyrolles furent
maintenues jusqu’à parfait payement, et il fut ordonné que ledit
jugement seroit CfxéCuté en la forme de l’ordonnance nonobstant
l’appel.
Cette dernière disposition donna lieu à la demoiselle Maigne de
hâter singulièrement son appel et ses poursuites. Impatiente de
jouir sans entraves, elle remontra à la cour que la douairière d’un
receveur général ne pouvoit vivre avec des saisies qui arrêtoient des
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressait pour les rendre. L a co u r, par son arrêt provisoire du
24 floréal an i 3 , a fait défense d ’exécuter le jugement jusqu’à son
arrêt définitif.
L es parties sont aujourd’hui sur le point de faire juger le fond
de! la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude
une décision qui ne peut être que conforme à la morale et à la
justice.
M O Y E N S .
T o u te la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce
paradoxe : L e mariage est une simple convention prhée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui supplée les formes
de la l o i , ou qui en dispense.
L a défense de la dame de Reyrolles est de dire, au contraire,
que le mariage est 1111 lien destiné à l’union de deux familles,
intéressant la société entière, et ne pouvant être dissous que dans
la rigueur des formes légales.
Sans doute la solution de ces deux systèmes est écrite dans le
�( '3 )
coeur de tous ceux qui n ’auront pas oublié ces principes immuables
qui résistent au fracas des révolutions et à l’éblouissement des
systèmes.
Ici il est constant qu’en 1774 la dame de Reyrolles a été mariée
avec toutes les solennités civiles et religieuses, et que son époux
n'est mort qu’en l'an 12. II s’agit donc d ’examiner si le mariage
a été légalement dissous par un divorce. Mais la 4 iiiiiiJLi,lhr,R li.jr
waïUiii» oppose des fins de non-recevoir, qu’il faut examiner; et ses
prétentions donnent lieu aux questions suivantes : i°. L a dame
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son divorce
après la mort de son m ari, et malgré la loi du 26 germinal an
onze ? 2*. A u f o n d , le divorce opposé est-il valable ? 5*. Si ce
divorce n’ a pas été valable , a-t-il pu néanmoins être validé par
la convention particulière de la dame de Reyrolles?
P n E M i È n E
Q
u e s t i o n
.
L a dame de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité
de son divorce après la mort de son m ari, et malgré la loi
du 26 germinal an 11 ?
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?
sur une loi romaine? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
drfunctorum post quinquennium queratur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’e6t pas même écoulé six mois de son
décès à la demande.
C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la d e m o i s e ll e
Maigne. L ’article 188 porte que « l’époux au préjudice d u q u e l a
» été contracté un second mariage, peut en demander la nullité ,
» du vivant même de l’époux qui étoit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir avant la mort de 1époux,
qu’à titre de g r ic e ; et il semble, par ses expressions, que c’est a
regret qu’elle y a consenti : elle laisse entrevoir le conseil de ne pas
user de cc consentement ; et ce mot mdme, q u i‘semble pour ainsi
�(
dire échappé à la plume du législateur, est cependant de la plus
grande moralité.
Q u’est-ce en effet qu’une demande de ce genre, formée par l’é*
poux abandonné contre l’époux coupable, si ce n'est une espèce de
dénonciation ouvrant le champ le plus vaste à la discorde, et ren
dant désormais toute réconciliation impossible?
Est^ejum^foible épouse qui, du vivant de son mari, osera l’ap
peler devant les tribunaux pour lui dire : Je veux qu’on vous oblige
à me rester fidèle? Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti
quité, la sensible Hypparette a reconquis par un appel en justice,
1
4
)
la tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigneroient d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient
leur amour propre par un abandon plus éternel! Car les hommes,
qui font les institutions, n’ont créé que la puissance maritale; et
quels que soient les dons que le sexe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foiblesse, ce pouvoir d’équilibre n'est plus
qu’une divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige, Malheur donc à l’épouse inconsidérée qui tenteroit do
proclamer son qbandon et de chercher son époux jusque dans les
bras d ’une rivale!
Il est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
conjugal peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
mariage est comme l ’amour de la patrie. Cunctos ducit, et im-
memores non sinit esse sui.
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyrolles que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur ha
bitation séparée , une haine qu’ils ne dissirnuloient plus, annoncoient une rupture prochaine; et sans les difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroit vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit à personne qu’il n ’étoit retenu que par cette considéra
tion. (^uoi rju’il en soit, la dame de Reyrolles a fajt ce qu’elle
�( i5 )
devoit faire; tant qu’elle a eu de l’espoir, elle a gardé le silence;
et quand la mort ne lui a plus présenté qu’une étrangère à pour
suivre, elle a réclamé ses droits.
r
L a demoiselle Maigne n’est pas le premier héritier qui ait op
posé que la nullité d’un divorce ne pouvoit pas être demandée contre
lui. Mais la cour de cassation a décidé le contraire par arrêt du
14 vendémiaire an 10.
L a deuxième fin de non-recevoir n ’a pas même le mérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : Tous divorces
prononcés, etc., auront leurs effets, on en a conclu qu’à compter
de cette loi il n ’étoit plus possible d ’attaquer les précédens divorces.
C ’est-à-dire que si la veille de la loi nouvelle un divorce avoit
été prononcé sans aucunes épreuves, les époux n ’en seroient pas
moins séparés à jamais; et c ’est ainsi qu'on fait l'injure au légis-'
Iateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses.
M ais la demoiselle M aigne n ’a réussi à se faire un moyen de la
loi du 26 germinal q u ’en tronquant entièrem ent l’ article invoqué.
« T o u s divorces prononcés par des officiers de l’état c iv il, ou
» autorisés par jugement, avant la publication du titre du Code
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
» lois qui existoient avant cette publication . »
Ainsi le législateur n’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, nisi tota
lege perspectd, judicare. Maintenant que l’article entier est rétabli,
l’objection de la demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
.
L e divorce du 28 ju illet 1793 e s t - i l valable l
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�( i 6 )
de procédures. L e sieur de R eyrolles, plus pressé qu’il ne devoit
l ’être, amalgama t o u t , et interrompit au milieu de son cours une
première procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductivo. Le sieur de Reyrolles K par son exploit ori
ginaire du 24 niai 1793, avoit formé demande en divorce, soit
pour absence depuis neuf ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoil être demandé, comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2'. loi du 20 septembre 1793, § . 1 , art. 4* )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen«
dant cinq ans sans nouvelles, il lui falloit pour première pièce
un acte de notoriété constatant cette longue absence ( § . 2, art. 17):
mais sa femme étoit près de lui le 24 mai 1793.
S ’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon com por toit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dame de Reyrolles n ’étoit allée à
Limoges qu’avec l’agrément de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : l'exploit n’en dit rien.
. Pour incompatibilité d’hum eur, le sieur de Reyrolles avoit aa
marche tracée d’une manière positive.
« 11 çonvoquera une première assemblée de parens, ou d’amis à
» défaut de parens , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
» la convocation. ( § » 2 , art. 8. )
» La convocation sera faite par l’un des officiers municipaux....
« L ’acte en sera signifié à l’époux défendeur. ( A rt. 9. )
» Si la conciliation n ’a pas lieu ,
1assemblée se prorogera à deux
» mois , et les époux, y seront ajournés. A l’expiration des deux
» m o is.-., si les représentations 11c peuvent encore concilier les
époux,
�( 17 )
» époux ,* l'assemblée sc prorogera à trois mois. ( A rt. 10 et i i . )
» Si à la troisième séance le provoquant persiste, acte en sera
». dressé. 11 lui en sera délivré expédition , qu’il fera signifier à
» l’époux défendeur. ».( A rt. 12. )
L e sieur de Reyrolles provoqua un divorce le 24 m ai, sans acte
de convocation d ’un officier municipal.
11 ne nomma point de parens; il indiqua seulement des a m is,
sans même exprimer que ce fût à défaut de parens.
L a première assemblée eut lieu le 27 juin 1793* H en fut dressé
acte; mais aucune signification n ’a été faite à la dame de R e y ro lles, parce que les moteurs craignoient que dans l’intervalle les
choses fussent pacifiées.
' '
Il n ’y a ainsi pas eu de divorce pour incompatibilité d’humeur,
pas plus que pour absence.
* C e serôit donc un divorce par consentement mutuel qu’il faudroit valider.
M ais l’actc p rim itif y est un obstacle perpétuel ; on veut cepen
dant que les actes qui suivent aient c o r r e e cette première procédure.
L a loi en exigeoit une absolument différente.
« Le mari et la femme qui demanderont conjointement le di» vorce, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins
» des plus proches parens, ou d’amis à défaut de parens. ( §• 2 ,
art. I er. )
» L ’assemblée sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec
h
les parens ou a m is .. . • L acte de convocation sera signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( A r t . 2 .)
» Les deux époux sc présenteront en personne à l’assemblée; ils
» y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( Art. 4. )
Le but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires.
L incompatibilité pouvoit n ’avoir lieu que de la part d un époux;»
la procédure devoit donc avoir des formes liosliles ¡ c est pourquoi
la convocation devoit être réglée par un olficicr municipal , et un
C
�}
huissier clevoit sommer l’époux défendeur de concourir à la forma
tion de l’assemblée , et d ’y comparoitre.
Mais le divorce par consentement mutuel supposoit de la part
des époux un accord préalable né d’une égale satiété de vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation insupportable;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches.
A in si, bien loin de se signifier par huissier une nomination de
parens , et par actes séparés , ce qui marqueroit une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensemble les
(
1
8
parens, en les choisissant par moitié; ellea voulu qu’ilsdemandassent
le divorce conjointement : ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et que l’autre y a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquée.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l’un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i , provoqué par une demande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n’étoit pas dans son cœur ; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord même, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n ’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
Non omnium quœ à majoribus constituía sunt ratio reddi potes t.
Il est encore un principe bien constant en fait de lois rigoureuses,
c ’est que toutes les formalités doivent être suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du l\ germinal an 2 a étendu cette peine
à l'inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 1789.
�( 19 )
,
• C e serolt donc s’abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a précédé le divorce prononcé le 28 juillet 1793, les actes
préliminaires d ’un divorce par consentement mutuel.
Non-seulement cette procédure n ’est pas conforme à la lo i,
mais le sieur de Reyrolles a donné un autre nom au divorce par
lui demandé. Il a requis seul le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’il n’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une demande, tellement
indélébile qu’elle ne comportoit ni opposition , ni d ébats, ni ju
gement.
Lors de l’assemblée, la dame de Reyrolles ne parolt encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas lo divorce, elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, ¿¿son m a r i y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veut le divorce ,
c ’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
V o ilà cependant ce que l’officier, public , dans l’oubli de ses
devoirs , a reçu com m e les épreuves suffisantes d ’ün divorce.
Un divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeoit
une foule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenté
d ’un seul acte et de trente-trois jours de délai.
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice, pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa iorme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa famille, car il n ’a appelé aucun'de ses parens ù
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les deux procédures 'une dif
férence notable, l'our l’incompatibilité d ’humeur , il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m utuel, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
S i , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eut été égal
d avoir des amis , c’étoit inutilement que la loi étoit plus exigeante
C a
�pour le consentement mutuel. Mais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffit de remarquer que la loi
ne vouloit des amis q u ’à défaut de parens.
Oscroit-on supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n ’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai, il falloit au moins l’exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que cette formalité a été remplie. Déjà
la cour d’appel, dans une cause sem blable, a annullé un divorce
entre des liabitans deRiorn , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n ’exprimoient pas que des amis n ’eussent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité, qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguet et Hêraud ,
notaires , le 7 novembre 1774* Mais jamais on n ’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. A vant 1792, l’église donnoit tout à la fois l’état
civil et le sacrement ; le mariage ne tenoit son essence que de la
célébration. Or , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 novembre
qui a été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d ’intérêt, et totalement incapable d ’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d’enregistrement et de publi» cation que Pétoient les jugemens de séparation » ( §. 5 , art. 1 1 . )
Or , le divorce opposé ne paroit pas même avoir été enregistré.
On a voit objecté à la dame de Reyrolles qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n’en a jamais donné l’ordre ; niais, quand on supposeroitlc contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer a son tour un divorce par con
sentement mutuel ?
U n exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’humeur , et cet exploit même
seroit une nullité de plus.
�( 21 )
T
r o i s i è m e
Q
u e s t i o n
.
S i le divorce n’a pas été valable, a-t-il pu néanmoins être validé
par une convention particulière de la dame de Reyrolles ?
Un contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut sans doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôt quelles
en ont exprimé la volonté.
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les formes
rigoureusement exigées. Cette différence est sensible, et tient à la
nature du contrat de mariage.
Oser dire qu’il est un simple contrat privé n ’est qu’une hérésie
insoutenable; èlle est condamnée par toutes nos lois; et les R o
mains eux-mêmes, qui cependant admetloient la répudiation et le
divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu’ils avoient
sur l ’ i m p o r t a n c e du m a r i a g e .
« Parmi toutes les institutions humaines, a dit Justinien , rien
» n ’est si sacré et si important que le mariage, car c’est par lui que
w se forme la suite des générations; c’est par lui que se peuplent
» les régions et que les cités fleurissent : il est le conservateur de
» la république et la source de sa prospérité. »
N ih il in rebus mortalibus perindè venerandum est atque matrimonium : quippeex quo liberi, omnisquedeinceps sobolis sériés
ex istâ t, quod regiones atque chutâtes frequenter reddat, undè
denique reipublicœ coaugmentatio fia t. ( N ovell . i/fo. )
T o u t ce qui tenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoient aussi considérées comme objet
d ’intérêt public : Reipublicœ interest dotes mulierurn salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’attention du législateur; il en
déterminent les formes, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nombre, leur influence et leurs re
présentations fussent un frein à la rupture du mariage. (Jf. D e
tüvorli'us et répudias. )
�(
2
2
)
Et si les formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nullurn divortium ratum est. ( L . g. eod. )
Quand cette nullité n ’auroit pas été textuelle, elle eût été pro
noncée par la loi qui portoit que toutes les conventions faites contre
le droit civ il, contra juris civilis régulas, étoient nulles de plein
droit, et ne produisoient aucune action. (/ ,. 28, f f . D e pactis.)
O r, il n ’étoit pas douteux que la forme de dissolution du mariage
ne fut réglée par le droit civil : Jure civili dissolvere solet rnatrimonium. ( L . n , ff. D e divort. et rep. )
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l’état
des hommes n ’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hominis v el conditio personarum mutari non potes t. ( L . libéras , c. D e lib. c , )
Sans doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n ’est pas susceptible d’être validé par des conventions particulières;
et il résisteroit d’ailleurs au bon sens que la loi eut exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
' dispenser indirectement.
Mais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
pour le divorce, avolt aussi prévu que des époux trop peu attachés
à son observation pourrolentse permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
Pactiones sanè si quee adversus prœsentia scita nostree majestatis fierin t attentatœ , tanquam legibus contrarias nullani habere 'volumus Jirmitatem. ( L . 8 , code D e repudiis. )
Ainsi la question est diserlement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n ’a pas été légalement fa it, les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi française. On demande,
«lit Vinnlus, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
oui, répond-il, s’il s’agit de valider le mariage : Ut sponsa rnaneal sponsa, placeù tratisciclionem valcre; mais la transaction est
�C 23 )
absolument nulle, s’il s’agit de relâcher le lien du mariage. ( Vînn,
D e trons. )
L a demoiselle Maigne opposera-t-elle la loi du 20 septembre
1792. Mais quelle que fut l’opinion du temps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilité spontanée du
» mariage, disoit le rapporteur de celte l o i , la liberté d’en con» tracter un second , après 1111 premier qui ne seroit pas légalement
» rompu , seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d ’une manière trèsconforme aux principes enseignés par les lois romaines.
« L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
» Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’après
» que le premier aura été dissous conformément aux lois. »
Que la demoiselle Maigne ne se dissimule pas toute la force de
l’expression ne peuvent. Toutes les fois, dit Dumoulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de droit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
11 en résulte donc que la demoiselle Maigne n ’a jamais pu être
l’épouse du sieur de R e y ro lle s, dès que son divorce n ’a pas été
fait conformément aux lois.
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n’est plus cla ir, et il est difficile d ’y voir que si le divorce
n ’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le mariage par
des conventions particulières.
D ’ailleurs, suivant le Code c iv il, il faut pour la validité d ’une
convention , .i*. la capacité de contracter, 2“. une cause licite dans
l ’obligation. ( Art. 1108. ) O r , suivant l’art. 1124, la femme mariée
est incapable de contracter elle-même ; e t , d ’après l'art. 1 153, la
cause est illicite quand elle est prohibée par la l o i , ou contraire u
l’ordre public.
Se départir de son état civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une iemine mariée puisse faire; et cependant elle n’a
pas la capacité de faire des dispositions bien moindres. Comment
�( H )
\
traiteroit-elle librement avec son m a r i , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré
sider ? ( A rt. 2 i 5 et 214* )
L e mari lui-même , clief de la puissance maritale , ne peut y
déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i 388. ) Com
ment donc concevoir que le mariage soit dépendant d ’une transac
tion , quand la puissance maritale n ’en seroit pas susceptible, elle
qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du mariage?
Jusqu’ici la dame de Rej'rolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce; e t , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
traité seroit nul : mais il n ’en existe d ’aucune espèce ; et ce que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an 5 et de quelques^,
exploits.
L a dame de Reyrollcs, objecte la demoiselle M a ign e, s’est donnée
plusieurs fois la qualité de femme divorcée: donc elle a approuvé,
elle a ratifié, elle a validé son acte de divorce.
C e qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince intérêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de mariage.
Mais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s , et perdre
par un seul mot son état civil ? U n mineur cesse-t-il de l’être en
se disant majeur? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d ’être
engagé dans les liens du mariage?
L ’exécution d ’un acte n u l , dit M . Cochin dans son 37*. plai
doyer , n ’en a jamais opéré la ratification ; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclamer , si chaque acte d ’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu’il ne faut considérer que
l ’acte n u l , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrollcs ayant coopéré par sa signature
à un premier acte n u l, c ’est-à-dire , à son divorce, tout ce qu’elle
a fait ensuite n’en a été que 1 exécution.
11 falloit qu’elle réclamât ou exécutât. M ais, étant en puissance
maritale ,
�( *5 )
m aritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamer à compter du
dccès de son mari : jusque-là elle étoit donc forcée d’exécuter un
divorce nul , car son intérêt n’étoit pas de réclamer, de peur que
son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première exécution
du divorce ; et on a \u comment elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e compte d’ins
truction qu’il lui devoit comme mandataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoit d’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand cette partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance maritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
L a dame de Reyrolles n’a point traité sur son divorce : elle n ’a
fait que l'exécuter par contrainte. Pour exister , elle fut obligée de
former quelques demandes ; et sans doute pour la régularité des
exploits , ne pouvant se dire autorisée du sieur de Reyrolles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle deinandoit.
Mais toutes les fois que cette qualité n’étoit pas de forme néces
saire, la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée;
elle a même prouvé, par les registres de son m a r i , qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de Florat-Reyrolles après le
prétendu divorce.
L ’exécution d ’un acte n u l, on le répète , n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dumoulin sur cette matière. « L a ratification d ’une
« obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en
» rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
» cette obligation , la mention du m otif de l’action en rescision,
» et l’intention de réparer le vice sur lequel celte action est fondée. »
( Art. i 558. )
Une donation nulle ne peut même être ratifiée : il faut la refaire
çn forme légale, ( A r t . 1559. ) Un divorce auroil-il moins intéressé
D
�( 26 )
le législateur? et pensera-t-on qu'il fut plutôt susceptible d’une
simple ratification ?
La jurisprudence ne s’est jamais écartée de ces principes. Un
jugement a été cassé le 25 messidor an 4> parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d ’une vente de
bien dotal en coutume d ’Auvergne, « attendu que les formalités
» n’ ont pas été remplies, et que Vexécution pendant plusieurs
» années du traité du ...... n’a pu valider un acte nul dans son
» principe. »
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renverses par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en thèse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d ’ordre public,
et qu’on est non recevable à demander la nullité d’un divorce quand
on l’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n ’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d ’un
tel paradoxe. Il n’étoit question devant tille que d ’un divorce va
lable, d è s-lo rs la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une arme trop puissante
pour qu’il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec celte seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aisé de voir que la demoiselle Maigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d'un arrêt de
circonstance.
« L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» Celle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d ’ailleurs et pé» rcmptoireinent que son ci-devant mari étoit non recevable,
» attendu qu’il avoit reconnu la validité du divorce.
» Arrêt de la cour d ’appel séante ù I rêves, qui admet la fin de
» non-recevoir ; attendu que les moyens de nullité étoient sans
» fondement ; et encore, attendü que le mari a pu et voulu renoncer
�C 2 7 )*
» au droit q u ’il avoit de contester les effets civils du divorce de son
» épouse.
:» Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article G du Code
» civil.
» L e demandeur soutenoit qu’une convention tendante à faire
» valoir un acte de divorce n u l , seroit contraire à l’ordre public
» et aux bonnes mœurs ; qu’ainsi, en supposant le fait de recon» noissance ou consentement par le m ari, la cour d’appel n’auroit
» pu conclure, en point de d ro it, que par la force de celte con» vention le divorce fût devenu inattaquable.
» A h k ê t . — A ttendu q u ’en ajoutant à la considération de la non
» application des lois invoquées par le demandeur aux actes par
» lui attaqués, celle de l’ approbation par lui donnée à la régularité
» de ces actes, et mêm e celle de la reconnoissance par lui faite dans
» d ’autres actes publics de sa qualité Ac fem m e divorcée, à celle
»
»
»
»
qui a fait prononcer le divorce
pas viole l ’art. G du C ode civil,
des conventions particulières à
m œ urs, et bornant sa défense à
d ’avec l u i , la cour d ’appel n ’a
q u i , défendant de déroger par
Vordre public et auoc bonnçs
ce qui concerne ces objets d ’in-
» térêt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissances et celui
» des transactions sur F intérêt civ il et privé; ce qu’ il a formelle» ment exprimé dans Fart. 2046, et ce que la loi transitoire de
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i 3. — Section des requêtes. >/
( S ir e r , an i 3 , pag. 2 2 3 . )
Combien de différences notables entre cet arrêt et la cause!
Apres un divorce demandé et oblenu par une fem m e, c’est le
mari qui, n’élant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
11 traite librement; il n’est pas incapable.
11 traite sur les intérêts civils du divorce.
11 ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il recou*
nott par plusieurs actes la v a lid ité du divorce.
D 2
�( 28 >
En plaidant, il ne peut pas même prouver que le divorce ait été
nul d ’aucune nullité.
L a cour d ’appel en effet ne se décide que par ce motif.
En cassation, l’époux n’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l , et il se borne à une dissertation polémique
sur l’effet de la ratification qu’il a donnée.
Ainsi la position de la question n’étoit pas de savoir s’il avoit
pu transiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décidé la cour de cassation ; et
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n’en résulte qu’une
plus grantîe conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tenoit
â l’ ordre public et à Uintérdt civil et privé, et qu’elle ne s’est dé
cidée à juger aussi le sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
L e m o tif pris de l’art. 2046 du Code le prouve. 11 porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d ’un délit. On n ’est donc
pas libre de traiter aussi pour l'intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, et divorcée pour sa famille et pour elle-même,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ irite'rét; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc birn loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle M a ig n e , en citant cet a rrê t, a prétendu, avec
le rédacteur, que l’article G du titre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure et incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces ne sont pas d’ordre
public.
11 est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�( 29 )
comme un doute; mais il termine de manière à prouver qu’il ne
s’est pas décidé comme la demoiselle Maigne l’entend.
Cependant sa première application semble fautive; car en rédui
sant la définition d’ordre public à ce qui concerne l’état de la
république, quodadstatum reipublicœ pertinet, il n’a pas remar
qué que l’expression jus publicum étoit alternativement employée
par les lois romaines pour le droit public et pour l’ ordre public;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, comme
on peut le prouver par des exemples.
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire la falcidie
' n ’étoit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction , à peine par son héritier de payer une somme aux léga
taires, celte disposition étoit déclarée nulle, comme contraire au
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires (i)***
Cependant une telle nullité n’intéressoit aucunement l’ état de la
république.
S i en d o n n a n t la d o t au mari o n a v o i t s t i p u lé q u ’il ne c o n t r i bueroit pas aux frais d’inhumalion que la loi mettoit à la charge
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins une
action en répétition contre le mari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation , parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire au
droit public (2)... Cependant encore l'état de la république ctoit
fort étranger à cette convention.
( 1 ) Fratercum haredem sororem scriberet, et alinm ab e à , cu i dona lum v o le b a t , stipulari curavit ne fa lc id ia uteretur , et ut certain pecun ia m , si con tri J e c is s e l , p restare , privatorum cautione h'gibus non esse
refragandimi con stilit : et ideo sororem j u r e l ' U i u . i c o retenlione/n habi turam , et actionem e x stipulatit denegandam. ( L . i 5 ,/ f. A d leg. fa te . )
(2) N rra tiu s quecrit s i is fju i dole/n d ed era t prò m uliere , stip u la tu s
est.... iVe q u id m aritus in fttnus c o n ferr et, an Ju neriim i m aritus teneaiur?
e t a it... S i a lia s fu n era v it, posse e uni m aritum convenire, quia p a cto h oc
/us i*u b licu m in ftin g i non p o ssit. ( L . 20 ,/ / . D o relig. et sum pt. )
�( 30 )
Ces dispositions n ’étoient donc que d ’ordre public, et la loi no
vouloit pas qu’elles pussent être éludées par des conventions par
ticulières. Comment donc seroit-il proposable de supposer à -la
prohibition de dissoudre le mariage, un moindre intérêt d ’ordre
public? et au lieu de se jeter dans l'application vague de la loi 6 ,
cod. D e pa rtis, et de l’art. 6 du C o d e, comment ne pas trouver
une nullité radicale aux divorces faits sans toutes les formalités,
quand la loi a dit : Nullum ratum est divortium, nisi , etc.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : Pactiones nullam habere 'volumus
Jirmitatem, lanquani legibus contrarias? enfin, comment ne pas
voir une disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tembre, quand elle dit qu’un second mariage ne peut être contracté
qu’après un divorce légal ?
Quand les lois sont si claires, comment seroit-il possible de
penser qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité de femme mariée, ait pu s’en priver elle-mêm e en se disant
divorcee, et en 11e transigeant pas même sur la validité du divorce
qu’on lui oppose?
Que reste-t-il donc à la demoiselle M aigne, si ce n ’est de faire
diversion h la cause par la naissance d’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre
une épouse et sa rivale, déterminé h fixer son irrésolution par un
retour à scs devoirs , en est tout h coup détourné par une séduc
tion toujours active ; habitare fa cit sterilem in domo , et la mère
d e s e s e n fans, repoussée comme une vile esclave, est obligée de céder
à une étrangère led honneurs du lit conjugal.
E li! qu’imporle à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle â scruter la conduite d ’une épouse ? Si cette conduite
étoit blimiable , cet adultère qu’elle proclame ne seroit-il pas
/
�( 3* )
son propre ouvrage? n’en porteroit - elle pas le poids éternel ?
Mais il ne s’agit point ici de la naissance d’un enfant ; il suffit
à la dame de Pieyrolles de déclarer qu’elle n’a point à en rougir,
et qu’elle est à même de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n’est ici employé
que comme moyen de la cau se, et parce que la qualité de femme
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. Mais ne seroil-il
pas bizarre q u e , dans la commune où un divorce a été prononcé,
l ’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objeclion est donc absolument nulle , et rentre d ’ailleurs dans la
discussion précédente , où elle trouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle M aigne,
et se justifie la décision des premiers juges.
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui est ô t é , mais il lui
en reste la fortune. L a dame de Reyrolles se borne à vouloir ce
qui lui appartient , d’après son contrat de mariage. N ’est-ce pas
assez q u ’elle s o i t r é d u i t e h le d e m a n d e r à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
e n vier, et que le sort de l’une et de l’autre soit aujourd’hui si
différent ?
Une règle de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e ,et le vœu
du législateur n ’a pas balancé: M elius est favere repetitioni quam
adventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans celte loi
seule , s’il n’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion, l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de Reyrolles; elle le sera de même aux yeux de la
c o u r , puisque les lois ne répulent pas son mariage dissous. La
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. Ainsi, les principes demeurent dans toute leur lorce , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-recevoir. Mais que signifient de misérables
�( 3 2)
subterfuges dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront qu’un mariage ou un divorce, c ’e s t - à - d i r e , un objet
majeur et d ’ordre public. Alors disparoitront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T , veuve D E R E Y R O L L E S .
M°. D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licencié avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Frimaire an 1 4
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 14?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
Description
An account of the resource
Mémoire pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles, appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 14
1774-Circa An 14
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0615
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0706
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Le Puy-en-Velay (43157)
Limoges (87085)
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nullité du mariage
remariage hâtif
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RÉPONSE
D E M. D E
FR O N D EV ILLE,
AU P R É C I S
DE
M. D E
B A T Z . (1)
M.
de Batz me provoque par un mémoire imprimé ; il a mon
argent, et il me dit des injures; M. de Batz prend à la fin trop
de libertés avec moi ; il faut l’arrêter.
J ’ai reçu , de la façon de M. de Batz, trente-neuf pages d’im
pression , dans lesquelles il parle beaucoup d’une affaire qui a
été jugée entre nous, et point du tout de celle qui est à juger.
Voici le fait.
N ous avions un procès au sujet d’un billet, dont je demandois
le paiement à M. de B a tz , qui me le refusoit.
( 1 ). Sans égard pour ce m ém oire, j ’avois é té à l'audience pour me faire
juger le lendemain du jour où je l’ai reçu ; mais les affaires qui précèdent
la m ienne, l'ayant fait renvoyer à quinze jours, je ne crois pas devoir
laisser le mémoire d e M. de Batz si long-tems sans répouse.
I
�Ce procès alloit être jugé par la Cour d’A p p e l, lorsque M. de
Bat/ me proposa des arbitres : j’aeceplai et nous signAmes un
compromis , qui donnoit pouvoir au tribunal arbitral «le nous
juger souverainement et sans recours possible à aucune au
torité (i).
Les arbitres ont jugé : le jugement porte que M. de Batz est
actuellement condamné à *ie payer cap ital, intérêts et frais ,
si , dans l’espace d’un m ois, il n'a pas fourni des bordereaux de
l’agent de change employé dans la spéculation que M. de Batz
prétend avoir absorbé le montant de sou billet.
Dans l’espace du mois , M. de Batz m’a signifié une pièce
qu’il prétend être un bordereau , et par conséquent l’exécution
du jugement.
J e prétends que la pièce de M. de Batz n’est point un bor
dereau.
Est-ce un bordereau ? n’est-ce pas un bordereau? Voilà ce
qui est à juger.
M. de Batz imprime trente-neuf pages , pour parler de toute
autre chose ; et au lieu de s’occuper du procès à juger , il dis
cute en totalité l’instruction du procès jugé : soit; je vais la
discuter aussi , non pour la soumettre h la Cour d’Appcl qui
ne peut plus s’en occuper , mais pour obliger M. de Batz qui
se c o m p l a î t dans le souvenir de cette instruction , au point de
lui faire un article nécrologique de trente-neuf pages, deux
m o i s après qu’il n’est plus question d’elle.
J ’ai au reste grand tort de me récrier sur les 59 pages , moi qui
( 1 ) Les arbitres sont M M . de la Croix F rainvillc et Bcllard j M . Dcsèze
a clé nomme ticrs-arbilre.
�vais peut-être en imprimer 60 sur le même sujet ; mais je suis
attaqué , et l’on sait qu’en pareil cas il faut souvent une page pour
répondre à une ligne , et un chapitre pour répondre à une page.
Cependant, commençons.
Voici le billet de M. de Batz , dont je lui ai demandé le paie
ment en vain , depuis 1790 jusqu’à présent.
« J e reconnois avoir reçu de M. de Frundeville , la somme de
» 1 5,ooo liv. , pour former un dépôt que je m’engage à lui reprér
» senter à sa réquisition et à toutes heures, et je lui réponds de
» ladite somme. P a ris, 3 i décembre 1789.
» S ig n é , le baron de
B atz. »
M . de Batz a pi-étendu acquitter ce billet de la manière sui
vante :
y o u s m’avez , m’ a-t-il d it , f o r c é , contre mon avis , de
diriger pour cous une opération de bourse qui a. absorbe le
montant de ce billet.
M. de Batz a appuyé ce dire d’une bonne quantité de preuves ,
dont voici rémunération et le texte : il a produit } i°. un acte de
dépôt d’un agent de change appelé C habaucl, qui dit avoir reçu
mon argent pour une spéculation ;
2°. Une lettre de moi qui prouve que j’ai eu le désir de
spéculer ;
3 \ Une lettre de l’agent de change, qui dit avoir terminé
mon opération , par ordre de M. de Batz , et que tout mon
argent est perdu ;
4°. Une convention faite par M. de Batz avec l’agent de change,
pour l’achat d’effets publics pour mon compte.
Les arbitres ont déclaré tontes ces preuves insuffisantes , ce qui
veut dire «pie les preuves de M. de Batz ont beioiu de preuves.
�On voit que toutes ces choses sont jugées; pourquoi rç.lonc y
revenir 7 c’est que M. de Batz espère y trouver son compte. N’y
trouverois-je pas aussi le mien ?
'
J e vais discuter les pièces de M. de Batz dkns leur ordre , et
pour n'épargner aucuns soins , je vais remonter , autant que
possible, à l’origine des choses : je commence par le billet.
J 'a i connu M. de Bal/, aux états-généraux, devenus l’assemblée
constituante, dont nous étions membres l’un et l’autre : des cir
constances politiques et particulières nous lièrent ( je c.royois
alors ) intimement ; j’ai changé d’avis.
M. de B atz, dont la fortune étoit engagée dans les affaires du
gouvernement , souffroit beaucoup de l’influence des premiers
mouvemens de la révolution sur le crédit public (r); il s’en plaiguoit souvent à moi , et u’avoit pas de peine à me persuader ; mais
il m’eu persuada plus encore , lorsque, comptant sur quelque
crédit qu’il crut que j’avois alors , il m’engagea à une démarche
assez délicate pour moi , laquelle a voit pour objet de le faire
payer d’une somme de 700,000 liv. environ, qu’il me dit lui être
due par le gouvernement (a).
J e fis celte déman he : son défaut de succès donna lieu à de
nouvelles plaintes sur la gêne qu’il éprouvoit.
Comme il m'entretenoit souvent à ce su je t, l’idée me vint qu’il
souhaitoit que je lui offrisse de l'argent : le 5 1 septembre 178g
je lui offris 1 5 ,ooo liv. ; il les pritet me fit le billet dont est question,
que je 11e lui demandois pas; ce billet n’est point dans le style
(1) Il en convient dans son interrogatoire et dans son mémoire.
( j ) M . de Dutz est convenu de cela devaul les arbitres.
�prdinàire ; la suite développera les raisons de M. de Batz pour !e
faire ainsi.
M. de Batz oppose h ce récit un rapport ofGciel fait par lui
à M. de Cazalès ( i ) , qui l’a émargé , dil-il , de plusieurs notes.
Paix soit aux morts qui ne peuvent être ici pour se défendre ;
je n’ai jamais discuté et ne discuterai point cette pièce qui e s t,
d’aJleurs , sans caractère et sans validité, puisqu’elle n’est signée
de personne.
J ’observerai seulement que nous avons été entendus une seule
fois et très-imparfaitement devant ces premiers arbitres , puisque
dès le début, M. de Batz annonça des lettres de m oi, et des pièces
de l’agent de change , qu’il dit devoir faire venir pour me les op
poser , et que je proposai d’attendre leur arrivée , ce qui fut convenu (a). Or, comment avons-nous pu être entendus assez pour
déterminer le jugement d’un homme sans prévention , dans une
conférence où l’on convient d’attendre des pièces pour juger ?
Cependant, dans les émargemens de M, de Cazalès (si toutefois
ils sont sou ouvrage ) , il tranche d’aulorité et décide , en quatre
lignes , que j’ai to rt, sans s’embarrasser des pièces qu’il vient de
convenir d’attendre pour juger : M. de Cazalès qui m’a d it, et à r
q u ia voulu l’entendre, sur le compte de M. de Batz, ce qu’on
peut dire de plus dur et de plus fâcheux sur le compte d’un
homme , éloil redevenu, Dieu sait comment et pourquoi, son
aveugle ami : cela est facile à voir.
(i)
M . de Cazalès et M. de lJelbeuf nie furent proposés pour arbitres , il y a
quatre ans , par M. de Batz ; je les acceptai ; il y eut une conférence devant
eux ; c’est cette conférence qui est l’objet du rapport singulier de M. de Batz
cl des ém arj'emens, plus singuliers encore , de INI. de Cazalès.
(a) M . de Batz convient de ces faits dans son m ém oire, page 12 .
�G
J'observerai encore que de deux arbitres qui nous ont entendus,
un seul a aidé M. de Batz de ses émargemens , ce qui prouveroit
que la mémoire de l’un n’a pas été conforme h la mémoire de
l'au tre, car M. de Batz a , sans doute, présenté son rapport à
M de Belbeuf avec lequel il est tout aussi lié que je le suis , et s’il
en avoit obtenu quelque chose , il ne me le cacheroit p as(i).
Mais puisque M. de Batz m’oppose des souvenirs de cette con
férence , je vais lui opposer à ce sujet quelque chose de plus
certain et de plus concluant que des souvenirs.
Comme on vient de le voir, M. de Batz allégua devant les pre
miers arbitres, qu’il avoit des papiers à H am bourg, qu’il alloit
faire venir pour me confondre ; il dit que ces papiers étoient ceux
qu’il avoit conservés de l’agent de change Chabanel, qu’il avait
employé dans la spéculation (2).
11 est donc bien établi que M. de Batz voüloit faire venir les pa
piers de Chabanel , pour suppléer à l’absence de Chabanel.
>
(1) M. de Batz glisse négligemment dans son mémoire , que M. île Cazalès
fut nommé pour lu i, et M. de Belbeuf pour moi : ctla n’est pas e x a c t; ce
fut M. de Batz qui me proposa deux de nos anciens collègues, et nie nomma
ces deux messieurs que j ’acceptai; mais pourquoi cette petite erreur? C’est que
M . do Batz n’ayant rien à montrer do M. «le B elbeu f, en fait tout de suite mon
a rb itre, pour donner uuc raison de son silence : chez M . de Batz 011 verra
que la ruse montre toujours le petit bout de l’oreille, quand elle no montre
pas toute la tête.
(2) M. de Batz a Iui-iricmc exposé ce fait devant MM. de la Croix I’ rainvüle et Beltord , lorsque je lui reprochois ses lenteurs à faire juger ce procès,
et scs réticences dans la production de scs pièces ; il m’a répondu que la
célérité de l'instruction 11c dépendoit pas de lui , parce que le» pièces de
Chabanel étoient à Hambourg , et qu’il avoit eu beaucoup de peine à les faire
venir.
�7
Qui le croiroit ? Chabanel étoit à P a ris, à coté Je M. de
Batz.
Si cet état choses n’avoit dure qu’un m om ent, on pourroit
croire qu’ il y a distraction cle la part de M. de Batz, niais j’ai per
siste, pendant neuf mois, à rester devant les arbitres choisis ( i ) ,
et pendmt ce long teins, j’ai écrit et récrit à M. de Batz,
pour le presser de faire arriver ses papiers , n’imaginant pas
qu'il y eût un autre moyen d ’éclaircir les faits entre nous.
Ce moyen pourtant exisloit dans la rue du M ail, où demeuroit Chabauel lui-même , qui valoit encore mieux que ses écrits,
et (jui étoit beaucoup plus près de nous que Hambourg.
M. de Batz paroît s’attacher à un principe q u i, au fond , {est
fortbun : le teins bonifie toujours les affaires de certaines gens ;
car , comme dil le fabuliste, dans dix ans d’i c i, le r o i, l’âne ou
moi , nous serons morts ; en efFet, en usant le tems , un té
moins m eurt, un papier se perd , c’est autant de gagné : C habanel est mort un an après , alors M. de Batz a produit les
écrits de Chabanel.
M aintenant, voyons les pièces de M. de Batz: si on ne
peut plus les confronter avec celui qui les a écrites , peut-être
parleront-elles d’elles-tnêmes.
(i) M. de Batz a imprimé que je m’étois ergpressé de récuser M M . de Belbeuf
et de Cazalès (vo y ez son mémoire page i 3 . ) On ne ment pas m ieux que
cela : j’appris , neuf mois après le commencement de l’arbitrage, qui d ’ailleurs
n’éloit point convenu par éc rit, que M . de Belbeuf partoit pour la Norm an
d ie , M . de Cazalès pour le Languedoc, et M . de Batz pour la Gascogne j
voyant mon arbitrage arrangé de la sorte, je compris «juc M. de Batz aimoit
m ieux n’en pas finir; je remerciai les a rb itres, et j’écrivis h M . de B atz , que
puisqu’il ne vouloit pas terminer devant des arbitres , j allois l’attaquer ju d i
ciairem ent.
�8
Les arbitres les onl déclarées insuffisantes; cepourroit bien être
une flatterie. Voici l’acte de dépôt de Chabanel.
»
»
»
»
« J ’ai reçu de M. le président de Frondeville , sur autre reçu
de M . le baron de Batz , G?.5 louis en o r, pour garantie de
négociations dont me suis chargé pour le compte du déposant,
dont 10,000 liv. en ia 5 millions} et 5 ,ooo liv, en actions des
Indes ou d’ assurance.
» Nous sommes convenus que j’r.ltendrois de nouveaux ordres
» de M. le baron de Batz, et que si M. de Frondeville chnngeoit
» d’avis, je rendrois aussitôt le kinême dépôt eu mêmes espèces.
» Ce 3 i décembre 1789.
Signé , C habanf.l .
Cet acte est la première pièce qu’a produit M. de Batz ; il
est aussi le sujet de sa première erreur un peu grossière ; il
lui a fourni l’occasion de nier sa propre écriture , il 11e l’a pas
mauquée*: cette erreur est constatée par sou interrogatoire,
ainsi qu’il suit :
Interrogé « pourquoi , s’il est vrai , comme le dit le répon» d a n t, qu’il ait indiqué le citoyen Chabanel au citoyen de
« Frondeville , il u’a pas parlé de cet agent de change dans sa rc» comioissance ?
A répondu « que par l’cifet de sa délicatesse , il s’étoit
» rendu personnel le dépôt de i 5 ,ooo liv. ; mais que M .
» de Frondeville sait bien (pie ce fut à l’agent de change même ,
» et non pas à lu i,s ie u r de B atz,q u e lui sieur de Frondeville,
)> remit la som m e, et que d éfait elle n’a jumais passé dans
» les mains de lui répondant..............
On 11c peut pas nier pbis pertinemment sa signature ; -voici
les icrnici du billet de RI. de Batz.
�9
J e reconnois avoir reçu de M . de F ro n deville , la somme
de 15^000 liv.
C’est avec un tel billet signé J e sa m ain , que M. de Batz,
nie avoir reçu mon argent! (i)
Cependant voyons la manière dont il explique le fait clans
son mémoire : elle est piquante.
» Au lieu donc de remettre au sieur Chabanel , un simple
» mandai sur M. de Frondeville, je lui remis le billet.
» A vue du billet, M. de Frondeville remit i 5 ,ooo liv. à
» M. de Chabanel qui en donna sa reconnoissance particu» lière dans les termes suivans. »
Suit la copie de l’acte de dépôt que M. de Batz appelle ici
la reconnoissance particulière de Chabanel.
acte de de'pôt.
J ’ai reçu en dépôt de M. le président de Frondeville, sur autre
reçu de M. lè baron de Batz, six cent vingt-cinq louis en or , pour
garantie de négociations dont je me suis chargé pour le compte du
déposant, dont 10,000 liv. en ia 5 millions et 5 ooo liv. en actions
des Indes ou d’assurances ; nous sommes convenus que j’attendrai
de nouveaux ordres de M. de Batz , et si M. de Frondeville
changeoit d ’a v is , je rendrai aussitôt le même dépôt en mêmes
espèces. Paris, 5 i décembre 1787.
Signe’ ü . ClUBANF.L.
J e voudrais bien que M. de Batz m’explique à qui Chabanel
remit sa reconnoissance particulière : ce n’est pas à moi qui
(1) J ’ai du moins eu le plaisir d’entendre M . B e lla rd , arbitre nomme par
M . de IJalz qu’il ti’a pas cessé de de’ lendre avec la chaleur et le talent dont
il est capable , lui dire à une de nos conférences : « Tour celui-là , M . de
» lîatz , je ne le crois pas ; le coutrairc est évident. »
�lO
recevois de lui celle de M. Batz ; ce n’est pas à M. de B atz,
puisque je p aye, dit-il, à vue de son billet, ce qui prouve
qu’ il étoit absent. A qui donc ? je ne sais , car je ne vois
plus personne pour la recevoir : cependant elle est entre les
mains de M, de Batz; comment y est-elle venue ?
Voici une autre dilliculté : la reconnoissance de Chabanel
porte ces mots : «' Nous sommes convenus que j’attendrois de
» nouveaux ordres de M. le baron de Batz , et que si M. de
» Frondeville cbangeoit d’avis, je rendrais aussitôt le même
» dépôt en mêmes espèces. »
Quoi ! jetois là , en présence de Chabanel, et j’ai laissé
Cbabanel écrire qu’il attendrait les ordres de M. de Batz, et
non pas les m iens, lorsqu’il ne s’ agissoit de rien de plus que
de retirer mon argent, si je cbangeois d’avis!
Mais passons : la ruse a niai fait ici son service; aussi c’étoit
-trop exiger d’elle que de vouloir lui faire prouver que j’ai
remis mon argent à un tiers , en face de la signature de M.
de Batz , qui atteste que je le lui ai remis à lui-même.
Mais quel intérêt avoit M. de Batz , pour se charger de
l'ignominie de ce mensonge ? Le voici.
M. de Batz a voulu , à quelque prix que ce so it, établir un
point de contact direct entre moi et l’agent de change; et
comme il n’a trouvé nulle part la plus petite occasion de me
placer en rapport personnel avec Chabanel que je n’ai connu
de ma v ie ; il a saisi celle-ci qui est mauvaise à la v é rité ,
mais qui est l'unique , et qui résulte de ces mots de l’acte de
dépôt , f o i reçu de M . de Frondevillc , sur autre reçu de
1\I.
de Batz. J e ne me charge point d’expliquer ce français ;
l’acte qui le contient se trouve entre les mains de M. de Batz;
il l’a fait faire par un tiers que je n’ai jamais vu ; c’est à lui de le
faire comprendre s’il le peut.
�11
L ’intérôt de M. de Batz à accréditer son mensonge , se déve
loppera à mesure de la discussion des pièces.
On. verra par.elles que M. de Batz s’est entièrement et exclu
sivement investi de ma propriété ; que c’est lui qui dépose ,
fait acheter, fait vendre , se fait rendre compte ; à la vérité on
verra mon nom partout , mais on ne me verra nulle part et
pas une seule fois agissant activement et en personne. Envoyant
tous ces actes, on jureroit que j’étois à ceut lieues de P aris;
cependant j’étois à côté de M . Batz; je le voyois tous les jours
tleux et trois fois , et pendant qu’il faisoit aiusi mes affaires ,
il ne me parloit que des affaires des autres ; il m’avoit donné ,
dit-il, un agent de change; mais il n’a pas plus existé pour
moi que s’il fut resté dans les espaces , car je n’ai jamais vu
son visage , et n’ai jamais connu son écriture. M. de Batz a
fait une spéculation pour moi , qui a duré depuis le 5 lévrier,
dit-il , jusqu’au 27 m ars; mon argent s’est écoulé goutte à goutte
pendant ces cinquante-deux jours , et M. (le Batz n'a pas imaginé
de me demander si je ne serais pas hieu aise d’arrêter ma perte,
ou de (aire quelque revirement pour la diminuer.
J e sais bien que M. de Batz me répond en peu de mots,
que tout étoit convenu avec m oi; mais je lui réponds par ses
propres pièces, qui prouvent que je n’ai jamais été qu’en nom , et
que partout il a été en personne. J e fais plus , je défie deM . Batz de
prouver, par le plus léger indice , que j aie jamais connu Chabanel
qu’ il appelle mon agent de change, et la spéculation qu’il appelle la
mienne.
M. de Balz a senti la force de ces circonstances , et dans le
danger, il a invoqué le mensonge.
lin effet, le sien remédioit à tout ; car si M. de Batz prouve que
j’ai vu l’age tilde change un moment., mes rapports avec lui sont
établis , et touL est expliqué.
�Mais je défie là-dessus M. de Batz , et il reste clans la positron
embarrassante de faire trouver légitime qu’il ait perdu 111011 argent
par le ministère d’un Innume (¡ne je n’ai jamais vu , et dans une
spéculation que je n’ai jamais connue.
M. de Ba.z n’ayant à me donner pour l’acquit de son billet que
le triste récit d’ une plus triste spéculation , a fait avec m o i , comme
font les gens q u i, de peur d'étre grondés , commencent par gronder
eux-mêmes ; il m’a dit que j’étois un obstiné ; que malgré lui j’avois
persisté dans le mauvais sens ; qu’enfin je l’avois forcé de me
rendre le service de perdre mon argent ; je crois même qu’il m’a
dit quelque part que je n'avois que ce que je meritois ( i ).
N ’es t-il pas drôle qu’en me mettant de mon plein gré sous la
direction de M. de Batz, j’aye débuté par diriger mon directeur ;
mais ce qui est plus drôle encore , c'est la bonhomie avec laquelle
il s’est laissé faire, et l’obligeance avec laquelle il a pris mou
argent ; cela sans doute annonce une grande facilité dans le com
merce de la vie j mais cependant M. de Batz ne pouvoit-il pas
imaginer quelque chose de mieux encore à faire là-dessus ? par
exemple , de ne pas prendre mes i 5 ,ooo liv. 7 il me semble que
c'est ce que j’aurois fait à sa place , si j’avois été persuadé comme
lui du mauvais sens de mon ami.
M. de Batz en a pensé autrement, il a vu de l’argent à prendre
et il l’a pris ; il a lait plus , du moins il le dit ;
11 prétend l’avoir été déposer le même jour chez l’agent de
change Chabauel.
(i) Voici les paroles de M. de Batz , page première et deuxième de son mé
moire : J ’avois tout fa it pour le détourner de cette dernière spéculation , et la
perte qu'il fît fu t le résultat, dç sa persévérance à rejeter mes conseils
M . B atz , dit page 3 : Lorsque M . de Frondeyille s’obtinoit à spéculer dans le
mauvais sens.
�J e me perds et ne vois plus que confusion : ici je vois M. de
Batz qui fait tous ses efforts pour nie détourner de mon projet
de spéculation , et qui m’assiste de ses conseils à ce sujet ; là je vois
M. de Batz qui , non content de prendre l’argent que je destinois ,
d it-il, à cette spéculation , s’empresse d’aller , le jour même où il
le re ç o it, le déposer chez un agent de change , et lui faire faire
ainsi le premier pas dans la route des spéculations. Tour ne
pas avoir trop d’idées à analyser à la fois , je m’arrête en ce
moment à celles-ci.
Pour agir aussi directement dans le même jour contre son
coeur, qui lui faisoit prendre en pitié mon obstination à ma
ruine , et contre sa pensée qui la lui faisoit v o ir , il a fallu à
M. de Batz de puissans motifs.
J e l’entends attester son b ille t, invoquer la religion de la fui
prom ise, et me demander si sa conscienee pouvoit différer le
dépôt au lendemain.
A cela je réponds oui : le billet a bien été fait pour lier au
besoin mon argent dans les liens d’une spéculation ; mais il
n’a voit pas tout prévu; et par exemple , il ne dit pas que le
dépôt auroit pour objet une opération de bourse; il ne dit pas
que le dépôt seroit fait entre les mains de Chabanel ni d’aucun
agent de change; ma lettre* qu’on verra bientôt, et que j’enlends
"M. de Batz appeler à grands cris à son secours, ne le dit pas
d’avantage.
Elle ne dit, pas plus que le b ille t, à quelle époque le dépôt
doit être fait ; en lin , le billet ne dit pas plus qu’elle, que le dépôt
doive être fait plu tôt dans les mains d’un tiers que dans celles
de M. de Bafz : au contraire, l’obligation exprimée dans le b ille t,
de nie représenter le dépôt; à ma .réquisition et à toutes heures ,
et celle de me répondre de la somme, annoncent que le dépôt
�¿levoit plutôt rester dans les mains de M. de Batz que passer dans
celles d'un tiers.
O u i, M. de Batz , avec un tel billet , cl votre conviction que j e
'volois à ma ruine , votre conscience pouvoit attendre au len
demain.
Mais , j’en conviens , votre intérêt ne le pouvoit pas aussi bien;
dès que vous m’avez vu vous demander mon argent , il vous a fallu
un plan de défense ; et pour établir une spéculation , il vous falloit
un acte de dépôt. Vous l’avez fuit faire ( i) , niais vous l’avez mal
adroitement fait dater du même jour où vous m’avez remis votre
billet, et c’est cette ponctualité m<Ve qui vous accuse. Mais pour
suivons.
M. de Batz après avoir pris mon argent le 3o décembre , à son
corps défendant , après l’avoir remis le mômç jo u r, contre son
opinion , à un agent de change, M. de Batz ce même jour encore,
fait les dispositions de son emploi; il désigne les offets publics sur
lesquels il doit être employé , et détermine la somme qu’il destine
6ur chacun d’eux ; à dire v r a i, je ne vois pas pourquoi cet em
pressement à disposer ainsi de mes fonds , car pour le coup le
billet ne parle pas de cela.
Voilà encore un excès de zèle à engager mes fonds dans les
griffes de l’agiotage , qui se trouve bien peu en harmonie avec
la répugnance que son amitié et sa prévoyance lui faisoient éprou
ver contre mon entêtement à spéculer (i).
( i ) Je déclare que je n'entends point inculper l'agent de change, qui ( si
les actes sont de l u i ) , a pu les faire tics-iiinocennncnt, comme je pou» rois
l'expliquer s'il cil étoit besoin.
( i j J/acte de dépôt porte ces mots : îS.ooo /jV. pour garantie de négntia-
fianç dont je me iu .s chargé pour le compte du déposant, dont «0,000 /jV.
�L ’amitié tic M. Batz a dû bien souffrir le 01 décembre 1780.
Que de sacrifices elle a vu faire ce jo u r - là à mon obstination!
D’abord elle a vu M. de Batz prendre mon argent ; ensuite elle l’a
vu le déposer chez Chnbanel, et , pour qu’il n'y manque rien ,
elle a vu M. de Batz déterminer exactement , et mot à m ot,
commeut mes i 5 ,000liv. seraient perclus trois mois après ; ca r,
et c’est ce qui a dû lui faire plus de mal, M. de Batz savoit que mon
argent serait perdu. J ’avois tout fa it pour l ’en détourner , et la
perte qu’ il fit fu t le résultat unique de sa persévérance à re
je te r tues conseils. Ces paroles sont de M. de Batz ( pages i ere. et
2 e. de sou mémoire ).
A la vérité, si l’amitié de M. de Batz avoit refusé mon argent,
plus de tribulations : cette idée me revient toujours ; mais vous
verrez que RI. de Batz la trouvera absurde.
J e vais examiner l’acte de dépôt sous un dernier point de vue :
est-il vraisemblable qu’il ait été fait pour garantie d’une mince
spéculation de i 5 ,ooo liv. ? Etoil-il nécessaire qu'il fût fait?.
Il faut se reporter aux tems où nous étions alors, lié avec
M. de Batz par des rapports politiques q u i, en tems de révolu
tion , doublent l’inlifailc des liaisons ; lié encore avec lui par
les rapports de société , est—il croyable que RI. de Batz eût exigé
«le moi le dépôt d’une somme aussi modique que celle de
1 5,ooo liv ,, en comparaison de mes moyens d’alors, pour ga
rantie d’ une spéculation que je l’aurois prié de diriger pour
en iî! j millions et 5ooo liv. en actions des Indes ou d ’assurances. Dans
la copie imprimée que M . de Batz donne de l’aclc du d é p ô t, il a supprimé
ce que je viens de copier , encore bien que cela se trouve au milieu de l’acte*
l ’ our tronquer ainsi pateinmcnt scs propres p ièces, il faut avoir de bonne»
raisons. Jo découvre bien encore dans ce procédé une ruse de M . de B a tz ;
mais je u’ai pus le tenu de les dire toutes.
�moi ? les procédés usités parmi les gens du monde , repoussent
l’idée de celle injurieuse précaution.
Mais en supposant à M. de Batz une aussi chétive manière
d’a g ir , et à moi la sottise de la souffrir ; M. de Batz avoit
toutes scs sûretés, puisqu’il avoit mon argent dans les mains ;
il n’avoit donc pas besoin de le déposer dans celles d’un agent
de change; car il 11e prétendra pas sans doute que lu i, M. de
Batz , un des plus renommés spéculateurs de P a ris, lui qui nous
annonce que l’agent de change Chabanel étoit un de ceux qu’il
honoroit de sa confiance dans les négociations qu’il faisoit pour
le trésor royal ( 1 ) , il ne prétendra p as, dis-je, que cet agent
de change a exigé de lui la mince somme de i5,ooo liv. pour
garantie d’une spéculation que M. de Batz lui faisoit l’honneur
de lui commander.
Le moyen donc d’expliquer pourquoi il se trouve un acte de
dépôt, pour garantie, fait par C habanel, dans une aussi médiocre
affaire ordonnée par M. de B a tz , dont la pratique seule auroit
suffi pour accréditer un agenl\le change. Qu’on juge si Chabanel,
employé habituellement par lui dans des reviremens de millions ,
en a exigé un dépôt de 1 5 ,000 liv. pour garantie.
L ’acte de dépôt est , sous quelque point de vue qu’on l’euvi-,
sage, invraisemblable à la date qu’il porte.
A une date plus reculée , c’est-à-dire , après que j’ai eu demandé
mon argent, il se conçoit; il est vraisemblable; il est môme
nécessaire : car sans lui les autres pièces qui prouvent une spé
culation , perdroient beaucoup de leur prix.
J ’ai encore une idée sur cet acte de dépôt , qui me tour
mente : comment se fait-il qu’il se trouve entre les mains de
(1) Mémoire de M . de Batz , ( page 5 . )
�l7
M. de Batz? La spéculation est finie; la somme est absorbée, et.
pourtant M. de Balz conserve le titre qui rend Chabanel comp
table de l.i somme. M. de Batz est-il resté , pour cet objet qui
n’étoit pas liquidé avec m oi, en compte courant avec lui ? Non ,
car M. de Batz m’a fait signifier q u e , le 5 juiu 1790 , il
avoit arrêté tous ses comptes avec C habanel, et il est dit dans
ce com pte,'que Chabanel a remisses pièces de comptabilité à
M. de Batz. Comment se fait-il que Chabanel remette ses pièces
<le comptabilité à M. de Batz, et qu’en meme-tems M. de Balz
conserve des pièces qui rendent Chabanel comptable envers lui i
Pour voir clair dans ces obscurités, il faudroit la lorgnette de
M , de Batz.
Pour me résumer sur l’acte de dépôt ; le projet mal déguisé
de M. de B alz, d’établir un point de contact direct entre moi
et l'agent de change que je n’ai jamais connu ; sa dénégation
d’avoir reçu mon argent , hasardée afin d’atteindre ce but; son
affectation de plaindre mon obstination à mal spéculer, et son
empressement à m’enchaîner dans une spéculation ; l’invraisem
blance, je pourrois dire l’impossibilité d’un dépôt pour garan
tie , de la part de M. de Batz, vis-à-vis de son propre agent de
change; enfin, l’existence singulière de l’acte de dépôt dans
ses m ains, après la clôture de scs comptes avec l’agent de
change; ces faits et ces circonstances forment un corps de
preuves qui portent jusqu’à l’évidence, (¡ne l’acte de dépôt a été
fait pour la circonstance, et pour faire croire à l’existence d’une
Spéculation qui n’a jamais eu de réalité pour mon compte.
Cependant, j'arrive à ma lettre du 5 février 17 9 0 , et à mon
interrogatoire. Voici ma lettre :
« V oire billet m’arrive , mou cher baron , dans le moment
» où je sors pour affaires; je ne puis aller chez vous et n’y
» suis pas nécessaire , puisque vous voulez bien vous charger de
�ï8
»
»
»
»
»
tout diriger; je suis plus décidé que jamais et je ne rois
plus que vous d’hcsitant sur le sort des effets de la bourse.
J ’espérois que votre homme aurait commencé hier ; il y a
plus d’un mois que le dépôt n’est absolument bon à rien. Ne
différez donc plus d'agir , mon cher ami. »
Ce 5 février.
Voici mon interrogatoire , ou du moins la portion de mon
interrogatoire, qui est en contradiction avec ma lettre.
»
»
»
»
« Interrogé s’il n’est pas vrai qu’à la lin de la même année
( 178g ) , lui répondant eut le désir de spéculer de nouveau sur
les fonds publics ; d’employer à cette spéculation une somme
de 1 5,ooo liv. ; si à cette occasion il u’a point consulté le sieur
de Balz et ne lui a point écrit ;
» A répondu qu’il affirme positivement que le sieur de Batz n’a
» jamais fait une spéculation pour lui répondant; il l’affirm e,
» parce qu’il ne peut pas craindre que sa mémoire le serve mal
» après seize ans sur cet objet ( 1 ) , puisque le titre fait et souscrit
n par M. de Iîatz, sa conduite , ses allégués et ses écrits au procès,
w portenteette vérité jusqu’à l ’évidence; le titre porte qu’il répond
» de la somme , sans réserve et sans exception d’aucun cas.
» 11 est évident que dans le cas de la soi-disante spéculation
n alléguée parM . de Balz, tous les profits auraient été pour lui ; car
» dès qu’il a répondu de la somme, il aurait dit à lui répondant;
»> vous n’avez aucune part dans les profits , puisque vous n’avez
3) coUru aucuns risques ; comment se fait-il donc que le sieur de
(1) Dan» la .copie de mon interrogatoire imprimée par M . de Batz , il arrête
ici ma réponse; ce qui fail qu il en dissimule la portion qui explique le
m otif de mon affirmation. M . de B alz est fidèle & ses habitudes; l a r u ie ;
toujours la xusc.
�19 •
» Batz prétende aujourd’hui que IuLrépondant a donné son argent
» pour courir risque de le perdre , sans avoir la chance de
» gagner ? »
Le raisonnement puisé dans le billet même de M, de Batz , et
que je donne pour motif de mon affirmation, est d’une justesse
palpable; mais j e ne m’y arrête poin t, e t je. conviens qu’il y a
contradiction réelle entre ma lettre du 5 février 1790 , et mou
interrogatoire du 3o novembre i 8o 5.
Cette contradiction est-elle volontaire? c’est sur quoi je demande
qu’on me juge avec rigueur.
II existe deux faits que M. de Batz lui-même ne contestera pas.
Yoici le premier :
,
Devant MM. de Bclbenf et de Cazalès, nos premiers arbitres ,
M. de Batz m’annonça qu’il a voit des lettres de m o i, qui fa ¡soient
partie de ses papiers qu’ il avoit envoyés à H am bourg, dans le
tems de la terreur, lesquelles lui fourniroient des preuves de ce
que je lui coritestois ; et je lui contcstois ce que je lui ai toujours
contesté , savoir t qu’il ait fait nne spéculation pour moi ; et malgré
ma lettre, j’afiirmerois encore , sans craindre de me d am u er,
qu’il 11’en a jamais fait. Il y en a> bien une écrite qu’il a mise
sous mon nom, ce qui lui donne un prétexte pour retenir mon
argent ; mais je soutiens qu’il a opéré pour lui , et que mon argent
n’est jamais sorti de ses mains ; j’espère le lui démoutrer bientôt,
à-peu-près mathématiquement.
M. de Batz demanda du tems pour faire venir ces lettres ; je lu i
proposai trois mois ; il consentit. J e sus donc à cette époque, c’est- ,
à-dire trois ans avant mon interrogatoire , que M. de Batz annon
çait des lettres de moi ( 1 ) ; et si je l’avois oublié, mon iuterroga(1) Voici ce que dit M. de Batz dans son mémoire "• « M . de Frondevillc
�*
30
toire me l'auroit rappelé , car M. de Balz m’a fait faire l’intorrogat
suivant : « Si à l’occasion (le la spéculation de i 5 ,ooo liv ., le
» sieur de Frondeville u a pas consulté le sieur de Batz, et ne lui a
» pas écrit ? »
Voici le second fait. A la fin de niai i 8 o5 , le procès actuel,
jugé en dernier ressort par les arbitres , fut plaidé et jugé
en première instance au tribunal civil : M. Tripier plaidant
pour M. de Batz , donna lecture à l’audience, de l’acte de
dépôt et de la lctlre de Chabanel ; il me les communiqua; je les-lus et en pris note r j’avois donc pleine connoissance de ces pièces
quand j’ai été interrogé.
J e viens d’établir par deux faits positifs , qu’avant d’être inter
rogé , je savois tout ce qu’il falloit pour ne pas répondre comme
je l’ai la it , si je n’avois pas cru dire la vérité : je savois que M. de
Batz faisoit venir de Hambourg des lettres de moi pour me les
opposer , et j’avois lu les pièces de l’agent de change , qui disent
que M. de Batz a dirigé une spéculation pour moi.
M aintenant, je me renferme dans ce dilème : ou j’ai voulu
en imposer pour m’exposer volontairement à la mésestime et à la
ccnsure publique, ou j’ai dit ce que je croyois fermement être
la vérité.
J e dis que le positif de mes réponses annonce leur since-
» me demanda avec une inquiétude mal de'guise'e, ce que c’étoit que des pas piers et des lettres de lui sur cette même a ffa ire , et qu’on diîoit que
» j ’avois dans mes mains.
» Ce que vous me demandez n’est pas dans mes mains , lui ripondis-je ;
» mais dans un dépôt de mes papiers actuellement entre les mains de M . de
» J . , îi H am b o u rg, et je vais les faire ven ir» . C etoit donc d e là bouch«
même de M . de Batz que je savois qu’il avoit des lettres de moi.
�rite , car elles pouvoicnt être évasives , elles dévoient même
l’ê tre , vu la connoissance que j’avois des pièces annoncées et
des pièces connues; mais ma conviction éloit si entière, que
j’ai méprisé le secours de l’évasion. Nier un fait qui existe , quand
on croit sincèrement qu’il n’existe p a s , c'est dire le contraire
de ce qui est, mais c’est dire la vérité par rapport à soi.
Mon interrogatoire contredit ma lettre, mais il n'a pas con
tredit ma pensée, et à présent même que je lis cette lettre , je ne
me souviens ni du m otif, ni de la circonstance qui me l’a
fait écrire : au reste , je ne m’en étonne p o in t, car il me semble
très-aisé de concevoir que j’aye entièrement oublié , le 5 o
novembre i 8o5 , ce qui s’est passé dans mon e sp rit, le 5 février
17 9 0 , au sujet d’une spéculation de bourse que je n’ai n’y com
binée ni su iv ie , dans la confidence de laquelle on ne m’a
jamais m is, quoique je fusse chaque jour à côté de M. de Batz,
qui prétend Tavoir dirigée , dont l’agent ne m’a jamais él6
connu, quoiqu’on me dise aujourd’hui qu’il étoit le mien j
d'une spéculation enfin qui a duré depuis le 5 février jusqu’au
27 mars , dans laquelle mon argent s’est écoulé chaque jour
goutte à goutte sans qu’on m’ait consulté, sans qu’on m’en ait
dit un m o t, sans que je m’en sois douté.
J e mets mon honneur , ma réputation , enfin tout ce qu’il y a
de plus cher au monde à un galant homme , à la discrétion de
M. de Batz, et l’on voit par son mémoire que c’est proposer de
les mettre en mauvaise mains , s’il peut fournir une adminiculc
de preuve que j’aye eu la moindre connoissance de la spéculation
qu’il dit avoir faite en conséquence de ma lettre , et si j'ai jamais
connu directement ou indirectement ragent dé change qu’il dit
aujourd’hui avoir été le mien.
Cependant, si ces faits sont v ra is,s’étonnera-t-on qu’ une opéra
�tion qui n’a jamais existé pour moi , n’ait laissé , après seize a n s ,
aucunes traces dans mon esprit ?
J e «rois bien que ma lettre en annonce le désir ; mais les désirs
sonl l’opération la plus transitoire de l’ame, et pour qu’ils prennent
place dans la mémoire , il faut du moins qu’ ils soient suivis de
de quelqu’accomplissement, et jamais celui-là u’a été accompli
pour moi.
Mais on me dira que si je n’ai pas connu l’opération qui a
eu lieu depuis le 5 février jusqu’au 27 mars ( 1 ) , la correspon
dance de ma lettre et du billet, qui parlent l’un ét l’autre d’un
dépôt, annonce que j’étois convenu précédemment de quelque
chose avec M. de Batz : la conséquence est juste ; ét quoique
je sois convaincu de n’avoir jamais (ait avec lui aucune conven
tion qui l’autorisât à spéculer pour m oi, je conviendrais que ma
lettre condamne 111011 souvenir ; mais il m’est impossible de faire
aucune concession sur cet objet, parce qu’il est démontré pour
moi qu'il y a eu machination dans l’acte de dépôt;
Or, dès qu’il est prouvé qu’il y a eu machination dans cet
acte , dont l’ unique objet est de donner de la réalité au projet de
spéculation , par cela môme il est prouvé que ce projet n’exisloit pas; c a r , pourquoi M. de B;itz auroit-i! eu besoin de cons
tater à mon insu un fait dont j’aurois été d’accord V J e ne puis
concevoir cela ; il m’est impossible de mettre ces deux idées en
harm onie, que réellement je voulois spéculer le 5 i décem
bre , et que M. de Batz ait été obligé de machiner un acte dató
de ce jo u r, pour constater que j’avois voulu spéculer et enta
it) On verra bientôt par la discusión d'nnc pièce produite par M . de I3a tz,
q u ’ il prétend avoir comnirucé le 5 février , la soi - disante opération 'en con
séquence de nia lettre , cl qu’il prétend l’avoir finie
le 37 m ars, en consé
quence de la fin de l’argent qui fut perdu en entier à cette époque.
�«
23
mer une spéculation, que'j’aurois été en effet impatient d'en
tamer.
La machination établie, et je crois qu’elle ne sera douteuse
pour personne : je ne puis plus comprendre ma lettre ; elle ne
prouve plus rien pour moi.
J ’ajoute à cela que l’examen des autres pièces et leur dis
cussion vient corroborer ces pensées ; c a r , elles établissent si
clairement le plan d’une spoliation m éditée , qu’il faudroit être
aveugle pour ne pas le voir.
J e ne pousserai pas plus loin l’examen des expressions de
ma lettre; je me borne à dire que la fraude étant certaine.
D’après les circonstances de l’acte de d épôt, ma lettre reste sans
objet et sans signification.
Pour terminer sur mon interrogatoire , je dirai qu’il est évi
dent que tous les actes produits par M. de Batz , sont disposés
de manière à faire croire à une spéculation ; mais la plupart
de ces actes dépendoient de lu i, puisqu’ils sont faits entre
lui et uu tiers que je n’ai jamais connu ; mon billet même a
dépendu de lui seul ; car n’ayant aucune intention de prendre
des sûretés , j’aurois pris sans les lire tous les billets qu’il
m’auroit donnés.
Aussi a-t-il usé de cette liberté ; car à voir l’entortillement du
sien , on juge tout de suite de l’intention de M. de Bat/. : il a
•voulu n’en pas trop d ire , de peur que si la fantaisie me prenoit
d’exominer , je ne visse qu’il s’agissoit d’une spéculation , et
pourtant en dire assez , pour qu’il la signifie au besoin.
Ma lettre seule a
voit, fort à la hâte :
M . de Batz m’avoit
quelques expressions
dépendu de moi ; je l’ai écrite , comme on
étoit-elle le résultat d’une disposition que
inspirée la veille i étoit-elle la répétition de
de sa lettre à laquelle je répondois ?
�C’est souvent ce qui arrive quand on est pressé. Pour avoir
plutôt fa it , pour avoir l’air de répondre pertinem m ent, on se
sert de l’expression qu’on voit dans la lettre qu'ou a sous les
y e u x ; mais au fa it, je n’en sais rien; ce que l’on voit claire
m ent, c’est que ma lettre a été provoquée par une lettre de
M. de Batz ; ce qui est certain aussi , c’cst que pendant trois
mois qu’a duré cette affaire , M. de Batz a été en correspon
dance avec l’agent de change et avec m oi, puisqu’il produit des
lettres de chacun de nous; et pourtant il ne peut justifier par
quoi que ce soit, au-delà de ma lettre, que j’aye eu la moindre
connoissance de cette spéculation que j’ai faite cependant, ditil , avec une ardeur et un intérêt remarquables , puisque je
me suis obstiné jusqu’au bout, à vouloir ce qu’il ne vouloit
p as, et que j’ai donné un exemple d'entêtement qui n’est pas
commun , celui de choisir un guide et de vouloir le guider.
Cependant, s’il est très-vraisemblable que le 5 février est le
seul jour où j’ai parlé et entendu parler de ma spéculation,
et s’il est constant que je n’ai jamais su qu’elle avoit lieu , on
ne peut s’étonner qu’après seize ans un désir aussi éphémère
ait été effacé de mon esprit.
A u reste, je me réfère à ce raisonnement qui me paroît
porter la conviction avec lui : mes lettres m’étoient annoncées
par M. de B alz; je connoissois les pièces de C habauel, qui
constatent une spéculation; il m’étoit donc bien facile de mo
difier mes réponses et de les rendre propres à tout événement ;
je ne l’ai pas fait. L’hommç qui néglige son bouclier en pré
sence de l’ennemi , ne passera jamais pour un lâche..
Ici , l’affaire a changé de face; M. de Batz ayant produit ma
lettre , et m’ayant mis par-là en contradiction avec mon interroçatoire, il a cru que je me retircrois heureux qu’il ne publiât pas
�55
ma honte ; il me l’a écrit en toutes lettres : il s'est trompé ; cette
circonstance a doublé mon ardeur à le poursuivre ; mais au lieu de
lui demander mes i 5 ,ooo I. , en conséquence de son billet, je lui ai
demandé compte de la spéculation dans laquelle il prétend m’avoir
rendu le service de perdre à bon droit mon argent.
I c i , ma lettre va jouer un rôle tout différent; M. de Batz me l’a
opposée ; je vais l’opposer à M. de Balz.
M. de Batz dit (page 6 de son mémoire ) , qu’en conséquence de
ma lettre , il donna des ordres à Chabanel : c’est donc dans ma
lettre que I\I. de Batz a trouvé mes intentions et la raison des
ordres qu’il a donnés à l’agent de change.
Voyons comment M. de Batz a exécuté mes intentions. 11 a donné
ordre d’acheter des effets publics pour mon compte ; par consé
quent , M. de Batz m’a fait spéculer à la hausse des effets.
J ’avoue que cel te manière de me diriger m’a confondu ; car en
me rappelant ma situation politique dans l’assemblée , mes opinions
que je retrouve dans les gazettes, enfin toute la composition de
mes idées de 179 0 , il m’est impossible de me reconnoltre spéculant
sur la prospérité des effets publics; et pourtant M. de Batz me
condamne impérieusement à cette dure obligation , car il m’assure
que j’étois , dans ce sens , d’une obstinai ion qui le désoloit.
Cependant , recourons à quelques indices ; voyons ce que
dit ma lettre , et ce qu’indique le cours des effets publics.
Le cours des effets publics coté dans les journaux , atteste
qu’ils n’ont pas cessé de baisser depuis le commencement de
l’assemblée, jusqu’au 27 m ars, époque à laquelle M. de Balz a
terminé mon opération , et (pie depuis cette époque ils o»t égale
ment baissé.
Maintenant , voyons ma lettre ; elle dit : I l y a plus d’ un mois
4
�que le dépôt n'est bon à rien. Si ma lettre signifie quelque chose ,
et si je parle ici du dépôt de mon argent, il est clair que ma volonté
étoit de jouera la baisse; car pendant ce mois d’inutilité dont je
me plains , les eflels avoient tellement baissé , que le dépôt
employé comme M. de Batz l’a fait le jour même de ma lettre ,
c’est-à-dire à la hausse , auroit été entièrement perdu et fort audelà. A moins que M. de Batz ne prétende que je me plaignois
de ne pas avoir déjà perdu mon argent, il (luit qu’il convienne que
nia lettre dit clairement que je voulois jouer à la baisse.
Cependant c’est dans ces circonstances , et autorisé , d it-il, par
cette lettre, que M. de Batz m’a fait spéculateur à la hausse : c’est
ainsi que mon ami a dirigé mon agent de change dans ma spé
culation.
B.
Frondcville.
5 février.
Nous allons voir à présent la plus curieuse des pièces de M. de
Batz : en voici la copie figurée :
B» Note générale (1).
I.
C.
Achats et
marchés (troncs
payables fin mais
prochain Gie.
» 11 est convenu avec M. Chabauel qu’aujourd’hui 5 février
» 1 790 , il achètera.
B.
« i°. Les 2/jo billets de m 5 millions , qui lui sont offerts à 10
» pour cent perte lin de mars ; 20. les 5 o actions des Indes , qu’il
j) croit avoir pour la môme époque, à io 3oliv.
I.
» Que le tout demeurera entre nous; qucM .de Frondcville sera
(1) Comme ccttc pièce est composée de trois ccritu rcs, savoir : d’ une
periture inconnue,
de l’écriture de M . de B a tz , et de celle de d ia b a tic i,
j ’ indiquerai par la lettre I , l’écriture inconnue, par la lettre B , récriture de
M. de B a tz , et par la lettre C , l ’écriture de Chabauel.
�27
» connu (le nom seulem ent, et que M. Chabancl sera seul en
» nom vu la garantie.
I.
» En cas de bénéfice , Chabanel ne revendra pas sans ordre ;
» en cas de perte approchant de i 5 ,ooo liv. il pourra vendre sans
» ordre , à moins de surcroît de garantie.
J e n’ai jamais pu obtenir de M . de Batz la communication de
cette pièce par la voiedu greffe, quoique jel’enaye sommé plusieurs
fois : il ne m’a permis de la voir que devant les arbitres où. il me
l’a mise sous la gorge ; ne l’ayant jamais vue , il m’a pris au
dépourvu , et je n’ai à peu - près su qu’y répondre ; au reste
M. de Batz avoit traité sou défenseur et son avoué avec la môme
réserve , car les arbitres ont pris la peine de constater que
M. Tripier et M. Elouiu n’avoient jamais vu la pièce à cette
époque ;
M. de Batz a produit cette pièce pour prouver qu’en consé
quence de ma lettre du 5 février , il avoit donné des ordres à
Chabancl , et qu’en conséquence des conventions faites dans
cette pièce avec Chabanel , il avoit donné ordre de terminer
l’opération le 27 mars , parce qu’à cette époque les i 5 }ooo liv.
étaient perdues ; M. de Batz ajoutait à cela une lettre de Chabanel ,
du 27 mars (1 ) , qui d it , en effet, que mon opération est terminée
(1) Voici cette lettre adressée à M. de Batz : # M . j ’ai fini d’après vos
» ordres et heureusement avant la bourse ; votre ami n’a au-delà des if»,ooo
» liv. rpie 47 liv. eu tout de perte , cpic je remets volontiers sur mon droit ;
» je regrette seulement qu’il se soit obstiné dans le mauvais sens.
» Tous les jo u rs, comme vous le désirez } je serai à ses ordres pour tous
» détails qu’il souhaitera.
» J ’ai l ' ho n n e u r , etc.
S ign e,
C ha b an e l .
» P a r is , 37 mars 1790.
» lin me donnant son jour et h eu re, M . de l'rondcville voudra bien nie
« prévenir la veille. »
C.
convenu D. C.
�I
38
et mon argent perdu ; il me renvoyoit , d’ailleurs , aux papiers
publics du teins , pour vérifier le cours des effets , et m’assurer de
l’exactitude de ses calculs , si j’en ëtois curieux ; c’est ainsi que
M. de Batz me donnoit mou compte.
Mais je ne l’acceptai point , et devant les arbitres , j’attaquai la
p ièce; je soutins qu’elle portoit les caractères d’une machination
préparée pour la circonstance.
J e soutins d’abord que le second émargement qui s’exprime au
pluriel en ces termes : achats et marchés ferm es, et la signature
abrégée de l’agent de change , et apposée eh marge de l’acte , fai
saient voir que c’étoient des papiers préparés d’avance par C habancl pour la plus prompte expédition des affaires de bourse ; qu’il
les donnoit en cet état à ses cliens pour les remplir des ordres
qu’ils vouloient lui donner; que M. de Batz, en sa qualité de
client de C habanel, en avoit à sa disposition, et qu’il avoit rempli
et fait remplir un de ces papiers de ce qu’il avoit' cru propre à me
convaincre d’une opération pour mon compte :
La différence des encres (i) étant visib le, elle ne fut point
contestée , et me fournit le raisonnement qui va suivre.
demandai à M. de Batz si la pièce composée de l’écriture de
trois personnes, avoit été écrite par chacune d’elles dans le même
lieu ou séparément ?
Je
M. de Batz répondit qu’il ne s’en souvenoit pas :
Je soutins alors que la pièce n’avoit pas été signée dans le même
lie il , parce qu’à moins de supposer deux sortes d’encres dans le
même bureau , et deux personnes trempant leur plume dans
( i) L Y crilu rc de l'inconnu qui a écrit le corps de l’acte est d’ une encic pâle
et vieillie ; l’écrilure de M . de Batz est d’une cncrc vive comme si elle sortoit
du coruct.
�29
deux cornets différons pour écrire un même acte , il falloit
tenir pour certain que l’acte avoit été é c rit, M. de Batz dans une
maison et Chabanel dans une autre.
Ce fait étant posé , et je puis dire convenu , j’en tirai la consé
quence que l’acte n’a pas pu être fait le 5 février, et qu'il porte
certainement une date fausse. J e le p rouvai, ainsi qu’il suit.
M. de Batz dit que c’est en conséquence de ma lettre du 5 fé
vrier , qu’il a donné ordre à Chabanel d’acheter le même jour des
effets pour moi.
Cet ordre écrit dans la pièce que je discute , contient plusieurs
conditions dont il a fallu convenir.
Etant demeuré constant que l’acte n’a pu avoir lieu qu’entre
M. de Batz et Chabanel séparés, il a fallu que les conditions ayent
été proposées et convenues par la voie de la correspondance ; par
exem ple, l’acte porte que les 240 billets des 1 25 militons sont'
offerts à 10 pour 100 perte ; pour que M. de Batz l’ait su, il a fallu
que Chabanel le lui écrive ; il en est de môme des autres conditions.
Maintenant, pour savoir si l’acte a pu ctre fait le 5 février, il
faut savoir tout ce qu’il y a eu h faire pour cela avant midi , car la
bourse commençoit à cette heure avant la révolution.
11 a fallu d’abord que M . de Batz m’écrivit, et que je lui
répondisse ; M. de Batz et m oi, nous étions gens du monde , et la
correspondance entre nous ne pouvoit guères être matinale ;
d’ailleurs , ina lettre porte que j e sortois déjà pour affaires :
j ’étois habillé , l’heure étoit donc avancée; il a fallu qu’après la
lecture de ma lettre , M. de Batz écrivît à Chabanel ; il a fallu
que Chabanel répondit et mandât à M. de Batz qu’on lui offrait
240 billets des 125 millions à 1 o pour 100 , perte, et qu 'il croyoit
pouvoir acheter 5 o actions des Indes à 1020 liv. 11 a fallu que
M. de Batz répondit que cela lui couvenoit, et qù’il ordonnât
�3o
d’écrire la convention , et de la lui envoyer pour la remplir de la
portion de son écriture qu’elle contient; il a fallu que M. de Batz ,
après avoir fait sa portion d’écrilure, renvoyât l’acte à Chabanel
pour le signer; il a fallu enfin que Chabanel renvoyât l’acte à
M. de Batz pour qu’il le garde.
11 y a sept courses à faire et sept fois à écrire dans cette négo
ciation pour la supposer ainsi ; les distances à Paris sont longues ;
M. de Batz deineuroit dans la rue de Ménars . et moi dans la rue
du Bacq ; la convention se faisoit entre RI. de Batz et un agent de
change qui sûrement avoit plus d’une affaire, et d’une autre
importance que celle-là; ce qui fait qu’il est diflicile de supposer
qu’il soit resté tout exprès chez lui pour recevoir les lettres de
M. de Batz et y répondre. Cependant il a fallu que tout cela ait
lieu avant midi : cela 11e sera cru par personne ; l’acte est faux dans
sa date. M. de Batz a fait pour celui-ci ce qu’il a fait pour l’acte de
dépôt ; il a voulu que toutes mes commissions fussent faites le jour
même où je les lui ai données. Que de religion !
L ’acte du 5 février , porte encore cette autre condition : M . de
Frondeville sera connu de nous seulement. Cela 11’est-il pas
visible 7 E t depuis quand met-on eu convention une loi expresse?
T,a loi de l’incognito des spéculateurs , est une loi nécessaire de
la bourse; car autrement, les trois-quarts du teins , il n’y auroit
qu’un avis sur la place, et les agens de change n’auroient pas
line opération à faire ; par exemple , qu’on se ligure le cas où
un agent de change diroit qu’il demande à acheter des effets ,
pour en qu’on appelle un liomine bien instruit ; aussitôt il
ij’y iuiroit plus que des acheteurs sur la place.
Cependant M. de Batz n’est pas absurde; ce n’est pas là sondéfaut,
et s’il a mis là celle cheville , c’est qu’il avoit un trou ¿1 boucher.
Une chose me frap pe; la convention du 5 février, dit bien
�3t
que Cliabanel achelera des effets; mais elle ne dit point pour
le compte de q u i, et cependant si ce devoit être pour le mien ,
il me semble que le bon sens v e u t, qu’à la suite de ces mots , il
est convenu que Cliabanel achètera, on ajoutât ceux-ci — pour
le compte de M. de Frondeville— mais on ne l’a pas fait, et il
est dit simplement : il est convenu que Cliabanel achètera .-en
suite vient l’écriture de M. de Batz , qui désigne les effets à
acheter; de sorte que , jusqu’à la curieuse convention de mon
incognito , mon nom n’a point encore paru dans l'acte , et il est
pour tout autre que pour moi. Ne semble-t-il pas que cette con
vention ridicule n’a été imaginée et placée là , que pour avoir
un prétexte de me nommer et m’approprier après coup ce qui
ne m’appartenoit pas d’abord ?
En examinant l’acte , il parolt visible qu’on avoil laissé en
l’écrivant, un intervalle en b la n c , où M. de Batz a mis la
portion d’écriture qui lui appartient dans le corps de l’acte.
C’est précisément à la suite de cette portion d’écriture de
M . de Batz, que vient la convention de mon incognito ; mais
pour peu qu’on eût laissé l’intervalle en blanc un peu large, il
s’y trouve tout de suite de la place pour bien des choses , et
avec un peu d’imagination on a bientôt fait tout ce qu’on veut
d’un acte , où on a fait laisser pour sa commodité un intervalle
en blanc.
Au reste, je suis dans cette affaire comme au spectacle
d’O livier; je sais bien que ce sont des tours, mais je ne les de
vine pas tous.
Cependant, je crois que ce que je viens de dire, fuit assez com
prendre la difficulté qui m’embarasse : je la propose à M, de
Batz.
�3a
La dernière convention de l’acte du 5 février , est celle qui
fait mieux valoir tout l’éclat dont il brille.
Mais de cette fois, je ne proposerai point la difficulté à ré
soudre à M. de Batz; je vais m’en charger moi-même.
Pour bien comprendre, il faut se rappeler qu’il est dit que
les 240 billets des 125 millions et les 5 o actions des Indes, se
ront achetés le 5 février, payables fin m a is , ce qui donne à
ma spéculation , une durée de deux mois.
M aintenant, voici la dernière
parler.
convention dont je
veux
E n cas de bénéfice, Chabanel ne vendra pas sans ordre;
en cas de p erte, approchant de i 5 ,ooo liv. , il pourra vendre
sans ordre, à moins d’un surcroit de garantie
J e dis qu’en supposant l’acte v r a i, en se persuadant qu’il a
été (ait le 5 février 17 9 0 , je dis qu’avec les conventions que
M . de Batz y a faites pour moi, pour son a m i , il y avoit au
moins mille à parier contre un , que mon argent scroit perdu.
S i cela est , dans quelle poche est mon argent? J e le demande;
mais cela s’apptlle-t-il de l’argent gagné ?
Chabanel est autorisé à revendre mes effets , dès que la perte
approchera de mes i 5 ,ooo liv.! Ainsi, pourvu que dans les cin
quante-six jours pendant lesquels ma spéculation devoit cou
rir ( 1) ; pourvu qu’un seul jour ( fùl-ce le lendemain de l'ouver
ture , c’est-à-dire le 6 février) mes effets obtinssent une perle
(1) Depuis le 5 février jusqu’à la fin de m a rs, car M . de Datz me donne
ainsi les époques de l’ouverture cl de la clôture.
�d’à-peu-près i 5 ,ooo 1Σ ., c’en étoit fait de mon argent, il étoit
perdu sans retour:
'
J e dis sans retour, et je le dis sans possibilité de contradic
tion , car mes effets ayant une seule fois perdu à-peu-près
i 5 ,ooo liv ., 011 auroit arrêté mou compte du jour où cette perle
auroit eu lieu ; et ils auroient eu beau regagner cent mille écus
jusqu’à la lin de m ars, ce n’étoit plus pour moi : et pourquoi?
C ’est que l’agent de change avoit , par les conventions faites , la
faculté de revendre dès que la perte approcheroit de i 5 ,ooo liv. ;
et si j’avois voulu nie plaindre, l’agent de change(3), couvert de sa
convention , m’auroit dit : J ’élois autorisé à revendre , si la perte
approchoit de i 5 ,ooo liv. ; le cas a eu lie u , voyez le cours des
effets dans les journaux : je suis en règle, et je ue vous dois rien.
Ainsi la longue durée donnée à la spéculation , qui est toujours
tin grand avantage pour les autres , ici étoit funeste pour m oi,
puisque plus on la prolongeoit et plus on avoit de chances pour ob
tenir le jour de la perte: enfin, sur les cinquante-six jours que
devoit durer mas peculation ^ il pouvoit arriver que je gagnasse
cinquante-cinq , et pourtant que je perdisse tout mon argent ; c a r,
qu’on place le jour qui reste , n’importe eu quel ordre , dans les
cinquante-cinq, et qu’on suppose que ce jour, la perte à appro
ché de i 5 ,ooo liv., j’avois p erdu, puisque , d’après la conven
tion, mon compte pouvoit toujours être arrêté et daté du
jour de li perte. Il résulte de ceci, que mon directeur, M. de
Batz , me faisoit parier cinquante-cinq contre un.
Mais la proportion étoit bien pire ; pour comprendre à quel
(a) Pour me p l a i n d r e , il a u r o i l fa llu s a v o i r quelque c h o s e ; et c o m m e je
n’ ai ja m a is stf un m o t <lc to u t C e la, ori v o it q a e M . de B a t z a v o it v o u l u s’ e v it c c
m ê m e ce tte i n c o m i n o J i l c.
�34
point ce jeu étoit sur pour M. de B atz, il faut savoir d’abord,
que le prix des effets qu’il avoit fait acheter, dit-il, pour moi ,
le 5 février, éloit de 267,000 liv. ; or en cinquante-six jours il
est assez commun , que 267000 liv. d’effets de bourse, subissent
une perte de i 5 ,ooo liv. Dans les terns ordinaires, M. de Batz
avoit déjà une belle chance.
Mais nous n’étions pas dans des tems ordinaires ; depuis le com
mencement de la révolution les effets se déprécioient sans in
t e r r u p t i o n et sans espoir de m ieux; c a r , les circonstances qui
influoient sur eux s’aggravoient au lieu de diminuer.
M. de Batz , en commençant ma spéculation le 5 février ,
avuit donc bien beau je u , et c’eût été bien le diable, si en se
donnant deux mois de marge , il n’eût pas trouvé un jour de
perte , approchant de 1 5 ,000 liv ., sur des effets qui se déprécioient
constamment, depuis neuf ou dix mois, par des motifs qui ne
faisoient que s’aggraver.
J ’ai montré (pie M. de Batz m’a voit fait jouer cinquante-cinq
contre un , d’après le calcul mathématique ; maintenant qu’on
multiplie ce calcul par les preuves morales de la dégradation iné
v i t a b l e des effets publics, et l'on verra que je n’ai pas eu tort de
dire qu’il 111’avoit fait jouer mille contre un.
Mais qu’elles éloient mes chances pour gagner ? J e dis un
conlre m ille, et je me trompe encore; car, si par un pro
dige, nies (jjets avoient gagné au lieu de perdre; comment et
à qui aurois-je demandé mon gain? J e n’avois ni l’acte de dé
pôt , ni la convention du 5 février; toutes ces pièces sont et ont
toujours été entre les mains de M. de Batz ; je lui ai demaudé
itérativement 111011 argent depuis J790 jusqu’à présent, et jamais
il ne m’a seulement laissé soupçonner l'existence de ces pièces,
dont il avoit les poches pleines.
�35
A présent je propose une question. M. de Batz a soutenu
dans sou interrogatoire, que tout étoil convenu avec moi j
Croit-on" que je sois convenu de spéculer ainsi ?
J ’ai dit partout que je n’avois rien su :
Croit-on que j’aye su que M. de Batz faisoit ainsi mes affaires?.
La convention du 5 février, m’a appris que M. de Batz avoit
fait acheter, dit-il , pour mon compte, des effets publics, pour
la somme de 267,000 liv.
J e voudrois bien savoir qui a autorisé M. de Batz à em
ployer pour moi cette somme : la phrase commune , tout a été
convenu avec M . de F ron deville, ne suffit pas ici ; il y a des
actes ; j’invoque à mon to u r, ceux de M. de Batz; tant pis pour
lui s’il les a mal faits.
L ’acte de dépôt de Chabanel, au moyen duquel M. de Batz a
construit sou ingénieux système de spécula loin , porte cette
clause.
Pour garantie de négociations dont je me suis chargé pour
/e compte du déposant, dont.................................. 10,000 liv. eu
125 millions,
E t................................................................................. 5 ,ooo liv. en
actions des Indes ou d’assurances.
16,000 liv.
Si j’entends bien le français , cela veut dire que Cliabanel
devoit acheter ou vendre pour m o i, des billets de l'emprunt de
125 millions, et des actions des Indes , jusqu’à la concurrence de
i 5, 000 liv. Cela , me semble , est clair pour tout le monde.
De quelle autorité M. de Batz a-t-il fait monter 1achat fait pour
mon compte , à 267,000 liv. Où est mon mandat ? où est lactc
�5G
de ma volonté qui détruit cette condition passée entre moi , ( je
■veux dire mon Sosie) , et mon agent de change.
Ce n’est pas ma lettre du 5 février ; M. de Batz y trouve to u t,
excepté cela.
J e cçuseille à RI. de Batz de rctournerses poches ; peut-être y
trouvera t-il quelque vieux papier bien loyal , comme les autres ,
qui levera cette difficulté; elle en vaut la p ein e, car lorsqu’on
perd largent des gens , il 11e faut pas grossir le mémoire , autre
ment cela 11e s’appelle plus de l’argent perdu (1) :
La différence eu vaut la peine aussi ; car si mon conseil avoit
fait ç-xécuter fidellement mon acte de dép ôt, par mon agent de
change , je n’aurais perdu à peu-prés que le dix-huitième de mes
1 5,000 liv.
On vient d’entendre les réflexions que chacune des pièces de
M. de Batz m’a fournies dans l’instruction de ce procès ; je vais eu
faire une dernière sur l’ensemble de ces pièces ; elle est frappante ,
et seule elle feroit tomber le masque de M. de Batz.
M. de RaU a fait , ¿1 P aris, avec un tiers, divers actes concernant
ma propriété ,au point qu’une perte totale s’en est suivie ; j’étois à
l ’aiis , vivant la moitié du jour sous le même toit que M. de Batz ,
'et l’on ne me voit pas une fois présent à ces actes ; 011 m’y nomme,
mais je suis absent ; 011 fait des couvenvçm tons pour.m oi, et je ne
les ratifie pas ; pourtant j’é.tois-là , je n’étois infirme ni de corps ,
ni d’esprit ; si j’avais besoin d’un directeur , je n’avais pas besoin
d’un curateur ; je ne vois pour M. de Batz qu’un bon moyen d’ex-
( 1 ) Cette objection n’a point etc proposée devant M M . les arbitres ; j ’avoue
que je ne m’élois jamais apperçu de cette licence de M . de Ilalz ; c’est en
rclléchissant sur le m otif qu’il avoit pu avoir de tronquer l’actc de dépôt i
l’en droit où. il porte cette clau se, que cela m’a sauté aux yeu x.
�plicjuer.ma nnlliité, c’est que sachant que l’opérération seroit dure
pour moi , il a voulu m’opérer sans mal ni douleur.
Pour compléter la mistifieation , M. de Batz s’est laisse' demander
par moi mon argent à différentes reprises , sans jamais tirer de
sa poche, et même sans me les faire soupçonner par un seul m o t,
toutes ces pièces précieuses (t).
Tout cela prouve que M. de Batz est un homme qui agit beau
coup et parle p eu , mais je défie que cela prouve qu’il garde à
bon droit mon argent.
Pour terminer sur le procès jugé par les arbitres ; il me reste à
( i ) M . de Batz d i t , dans son m ém oire, que je suis reste avec lui pendant
deux ans a l’assemblée constituante, sans lui demander mon argent; et il conclut»
d’après l’adage , qui ne dit mot consent, que j ’ai ratifié tout ce qu’il a fait ;
mais M . de Batz commet encore une faute d’attention ; d’a b o rd , depuis la
dernière demande que je lui ai faite de mon a rg e n t, en 1 79 0, je ne suis resté à
l ’assemblée avec l u i , qu’ un an à-peu-près et non deux. ; de plus , M . de Batz
i îe dit pas qu’il est convenu , devant les arbitres-, que je luiavois demandé mon
argent plusieurs fois en 1790 , que je lui ai écrit en l’an G , par M . D etreuil;
pour le lui faire dem ander, et qu’ il répondit ( m’a rapporte M. Detreuil ) que
s’ il ine devoit , c’étoit à la nation qu’ il devoit payer ; enfin , M . de Batz dis
simule , qu’à peine revenu îi P a r is , je lui ai demandé mon arg e n t , et me suis
occupé de me le faire restituer :
11 est vrai que je n’ai point attaqué M . de Batz pendant le tems de l’asscmb’ée
qtli s’est écoulé depuis la dernière demande, que je lui ai faite de mon argent ;
mais l’assembléee ût elle duré dix ans , je ne l’aurois point attaqué pendant sa
durée ; je pouvois alors faire le sacrifice de i 5,ooo liv. à ma situation politique,
et aimer m ieux les attendre que de donner le scandale d’une telle discussion
entre deux gens que les circonstances de la révolution avoient montres jusqucs-là étroitement unis ;
Mais j’ai conservé le billet de M . de Batz , et je ne connois ni lo i, ni principe
d ’ où il résulte que le créancier infirme son titre , parce qu’il diffère d ’attaquer
Bon débiteur.
�38
dire un mot des clameurs de M. de Batz à l’occasion de la ma
nière dont je l’ai traduit devant les tribunaux.
J e l’ai assigné à son dernier domicile connu ; c’est là ce qui le
fâche ; et il a raison de ne pas aimer qu’on aille-là savoir de ses
nouvelles , car on y parle de lui en fort mauvais termes.
J e l ai assigné là , parce qu’à cette époque , il avoit à ses ordres
une phantasmagorie de domiciles dont il jouoit à faire le plus
grand plaisir à ceux qui aiment les déceptions (i).
11 faut considérer deux hommes dans M. de Batz ; un homme
qui a de très belles propriétés au soleil, et un pauvre diable qui n’a
rien à lui sous le soleil ; un homme qui donne de très-bons dinés
à ses amis dans une très-bonne maison où il réside ,et un homme
qui n’est domicilié nulle part ; enfin M. de Batz a des résidences et
point de domicile , et M. de Batz a de très - belles terres qui sont
sous des prête-noms.
Un tel homme n’est pas du tout commode pour ses créanciers j
je l’éprouvai lorsque je voulus le traduire en justice : je l’ai éprouvé
même depuis ; car lui ayant fait signifier à personne la sentence
dont il se plaint si h a u t, mon huissier le trouva rue de Buffaut où
il résidoit alors ; et l’ayant sommé de déclarer son domicile , il
déclara qu’il étoit rue des Noyers ; d’où je conclus que si je Pavois
fait assigner rue des Noyers , il auroit répondu qu’il avoit sou
domicile rue de Buffaut.
( i ) Je crois que c’est moi qui ai eu l’Iionncur de fixer le premier un domicile
ù M. de Hatz ; je m’en flatte , parce que souvent on vient à moi pour savoir,
non son adresse, connue de tout le monde , niais son domicile ; car il y a bien
quelques gens
par
le monde à qui M. de Batz fait des comptes comme à moi»
mais q u i , comme m o i , ne s’gn contcuteut pas.
�5g
A u reste, mon défenseur fera voir à M. de Batz , que ce n’est
point pour le surprendre que je l’ai assigné rue des Filles SaintThomas ; je suis même persuadé qu’ il finira par me savoir gré de
lui avoir fixé un domicile , parce qu’enfin j’en ai fait un homme
comme tout le monde.
M. de Batz a voulu que je lui parle en détail de l’instruction
du procès jugé ; je viens de le satisfaire ;
J e vais à présent parler du procès à juger : voici la sentence
arbitrale ;
« Considérant premièrement, que le billet du sienr de Batz,
» dont le sieur de Frondeville est porteur, constitue ledit sieur
» de Batz responsable et comptable envers le sieur de Fronde» ville , de la somme de i 5 ,ooo liv. ;
»
»>
«
»
» Secondem ent, que les renseiguemens et documens , fournis
par le sieur de Batz , n’établissent pas suffisamment le compte
de cet em ploi, lequel ne peut résulter que des comptes d’achat et de revente de l’agent de change chargé de la négociation qui devoit faire l’objet de cet emploi ;
»
.
»
>■
»
» Nous disons que le sieur de Batz sera tenu , dans le délai
d’ un mois , de rapporter la preuve pa r bordereaux et comptes
de l ’agent de change, ou résultant des livres et registres
de Vagent de change qui a été chargé de la négociation, que
par le résultat de ladite négociation, ladite somme de i5,ooo
u liv. a été absorbée ; sinon etfa u te de ce Ja ir e dans ledit d élai,
» en vertu du présent jugement } et sans qu’ il en soit besoin
» d’ autre ,
» D ison s, dès-à-présent, que ledit s ie u r de Batz sera tenu
» de payer audit sieur de Frondeville , lad. somme de i 5 ,ooo liv.
» et les intérêts , à compter du jo u r de la dem ande, et qu’ à cet
�h effe t, le jugement dont est appel sera exécu té selon sa form e
» et teneur ; au premier c a s , dépens réservés ; au second cas ,
» le sieur de Batz condamné envers le sieur de Frondeville en
» tous les dépéris de la cause d ’appel et coût du présent
» jugement. »
Voilà ie jugement que M. de Batz qualifie de vicieux , en puni
tion de quoi , dans la signification qu’il m’a faite , il révoque les
arbitres et leur retire sa confiauce.
J e pense, au contraire, que le jugement est d’une grande
indulgence, car leplan de spoliation méditée est si bien établi par
les pièces même de M. de Batz, qu’il pou voit être condamné sans
scrupule et sans délai.
Ce n’est qu’à l’extrême délicatesse des arbitres , qu’il doit
d’avoir obtenu un ré p it, et la faculté de se défendre encore par des
pièces authentiques et légales.
. Les arbitres ont vu que toutes les pièces de M. de Batz témoignent
qu’il y a eu une spéculation sous mon nom ; mais ou examine
deux choses dans un témoin , ce qu’il dit et ce qu’il est; et lorsque
les arbitres ont examiné les témoins de M. de Batz, sous ces deux
rapports , ils n’ont pas trouvé tout à fait autant de perfection
dans leur moralité que dans leurs dépositions.
C’est vraisemblablement ce qui les a déterminés à condamner
M. de Batz à eu fournir de meilleur a lo i, s’il en a.
Les arbitres ont donc fait tout ce qu’on pouvoit attendre de la
plus saine équité , et tout ce que M. de Batz pouvoit espérer de leur
indulgence.
La stricte justice auroit peut être voulu que M. de Bat?., faute
de présenter les pièces de comptabité indispensables en matière
de spéculation , fût condamne sur-le-champ.
�4i
M. de Batz forcé <le sesonmetlre au jugem ent, m’a signifié une
pièce qu’il prétend satisfaire à la sentence arbitrale ;
Cette pièce est'intitulée comme il suit :
» B ref état des comptes du sieur Chabanel soussigné , re« connus par le sieur Devaux , pour M. le baron de Batz, avec
» les pièces justificatives remises sous la récépissé du sieur
» Devaux. »
Tiennent ensuite cinq diiférens articles de compte. Le sixième
est celui que M. de Batz me donne pour un bordereau de
l ’opération soi - disant faite pour moi j il est conçu comme il
suit :
G°. « Remis pareillement c i- jo in t , les achats faits le 5 fé» vrier dernier, de deux cent quarante billets de l’emprunt de
»3 cent vingt-cinq millions à dix pour cent perte et de cinquante
» actions des Indes à 1020 liv ., pour compte de M. de Fronde» ville, ordre de M . de B a tz , le tout payable fin mars dernier,
» liquidé ordre idem le 27 , savoir : les deux cent quarante
» billets à un quart un huitième p erte, et les cinquante idem
» à g 3 o liv . sans autre droit qu’un huitième sur ces 517,600 liv .,
» ce qui donne en sus des i 5 ,ooo l i v ., reçues par le soussigné,
» une perte de 47 liv. par lui remise sur son droit. "»
Pour qu’on puisse comparer la pièce que produit M. de Batz
avec celles qu’il est condamné à produire , je vais copier tout
de suite la partie du jugement qui désigne les pièces à la pro
duction desquelles il condamne M. de Batz : la voici :
« Que le sieur de Batz sera tenu de rapporter la preuve par
>1 bordereaux et comptes de l’agent de change, ou résultant des
» livres et registres dudit agent de change qui a été chargé de la
» négociation ».
G
/
�42
M. de Balz donne aussi copie de ce dispositif, mais il le déguise
et l’allère pour sa plus grande commodité. Dame nature est trèsopiniâtre chez M . de Batz.
Ceci va ressembler un peu à la dispute de Figaro. M. de Batz
copie — P a r bordereaux pu comptes,— E tle jugement dit — P ar
bordereaux et comptes. M. de Batz copie — Bordereaux et
comptes tout c o u rt, et le jugement dit — Bordereaux et comptes
de l ’agent de change ou résultant des livres et registres dudit
agent de change.
M. de Batz n’a point de Bordereaux , et il croit avoir des comp
tes ; il n’est pas étonnant qu’il copie de manière à laisser croire
que le jugement lui a laissé le choix.
A vant d’entrer dans la courte discussion qu’exige la question
simple et claire qui est soumise à la Cour d’app el, il faut que je
donne encore la copie d’un acte que les arbitres avoient sous les
yeux lorsqu’ils ont prononcé : c’est le certificat des sindics des
agens du change de Paris ; le voici :
<( Déclarons que notre avis est que Pierre ne peut exiger de
» Paul le paiement d’une perte sur les effets publics , sans justifier
« au moins des bordereaux d'achat et de 'vente de l’agent de
» change qui a opéré ».
M. de Batz m’a fait signifier, encore par surabondance , d it-il,
ie ne sais trop q u o i, car il est impossible de donner un nom à ce
qu’on n’a vu ni en original, ni en copie.
11 dit que c’cst un compte général qui paroil être signé de lui
et de Clmbanel ; je ne sais s’il y a quelque finesse la dessous ; je
n’en parlerai point p arla raison qu’on ne peut parler de ce qu’on
ne conuolt pas , et M. de Batz voudra bien n’en pas parler davan
tage , jusqu’à ce qu’il m’ait appris convenablement ce que c’est.
�43
J e n’ai donc à examiner que le compte s o i - disant rendu par
Chabancl à Devaux : je dis soi-disant , car je n’ai jamais plus
connu rccriturc que le visage de ces gens là ; ce que j’en sais , et ^
ce n’est pas rassurant, c’est que ce compte est de la même écriture
que l’aimable convention du 5 février , et ni la convention , ni le
compte ne sont de l’écriture que M. de Batz attribue à Chabanel : ils sont de la main d’un inconnu.
Maintenant posons la question.
M, de Bat* produit-il des bordereaux et comptes de l’ agent de
change , ou résultant des livres et registres de l’ agent de
change ?
Que produit M. de Batz? Un compte qu’il dit avoir été remis
par Chabanel à un sieur D evaux, qu’il dit avoir été son secrétaire.
Ce que M. de Batz appelle un com pte, n’en est pas même un ; ce
n’est qu’un projet de compte proposé par Chabanel j il n’est
arrêté ni par M. de Batz , ni par Devaux , et dans l’état où il e st,
il laisse à M. de Batz l’intégrité de ses actions contre Chabanel
pour chaque article qu’il renferme.
M . de Batz veut donc que j’accepte de lui en paiement un
compte qu’il n’a pas accepté lui-même ; cela est absurde.
Mais le compte seroit accepté par M. de Batz , qu’il ne seroit
pas acceptable pour moi.
M. de Batz, dans ce procès, a toujours voulu me faire dépendre
de scs actes privés avec un tiers , auxquels il ne m’a jamais appçlé
quoiqu’il y disposât de ma propriété ; il persiste dans ce systèm e,
mais il oublie que ce système est jugé et proscrit.
M. de Batz n’entend pas du tout sa position par rapport à m o i,
il faut la lui faire comprendre.
M. de Batz a fa it , dit-il , opérer Chabancl pour mon compte
�44
Jan s une opération déboursé ; Chabanel a donc opéi-é pour moi
en qualité d’homme public ; eu ce cas M. de Batz ne peut pas me
rendre un compte avec des actes privés ; il me faut les pièces de
comptabilité usitées en pareil cas ; l’avis des sindics des agens de
change de Paris , a décidé de quelle nature sont ces pièces : ce
sont des borderaux de vente et d’achat; c’est aussi ce que le juge
ment a littéralement prononcé.
M. de Batz traite avec uu satyrique mépris ces malheureux
bordereaux : le renard trouvoit aussi le raisin trop vert.
Le mépris de M. de Batz est injuste ; les bordereaux sont
très-utiles au public; et pourquoi? C’est que ce sont les seules
pièces de comptabilité susceptibles d’une vérification satisfai
s a n t e pour celui qui négocie sur la bourse, tandis qu’un compte
privé ne l’est pas.
Qu’on retranche des obligations des agens de chan ge, celle
de donner à leurs cliens des borderaux copiés de leurs registres,
c l qu’on suppose qu’ils seront crus sur un dire tiré d’une lettre
ou d’un espèce de compte particulier ; il en résultera que le
commerce sera à la merci de ces officiers publics ;
Mais il n’ en est pas ainsi avec des bordereaux : car, le bor
dereau est toujous énonciatif d’un fait qui exclut la fraude.
Le bordereau doit être énonciatif ; d’abord du prix , de la
q u a n t i t é de la somme employée et du terme du m arché; mais
cela ne suffit pas ; car à ces conditions seulem ent, la fraude
seroit encore très-facile ; en e ffe t, il y a quelquefois dix cours
dans uuc bourse , ce qui fait que l’agent de change, après avoir
acheté à un prix un effet, pourroit choisir un autre prix
pour le porter en compte à son client ; et dire à ce dernier cc
tjue me dit aujourd’hui M. de Batz : — Voilà le prix auquel j’ai
�45
*•
»
•
acheté et le prix auquel j’ai vendu ; allez voir les gazettes ott
les cours sont cotés , et si ceux-là n’y sont pas , c’est moi qui
ai tort.
Cette manière de compter est commode , mais la bourse seroit
un bois , si elle étoit admise.
11 n’en est pas ainsi avec des bordereaux. Les bordereaux portent
toujours le nom de l’agent de change avec lequel le marché a été
passé, ce qui fait qu’un client pdurroit , au besoin , non-seulement
vérifier les registres de son agent de change , mais aussi ceux de
l’agent de change avec lequel le bordereau énonce que le marché
a été fait.
Les bordereaux ont encore ce caractère qui leur est propre ;
qu’ils fixent tout ce qui s’est passé au moment de l’opération , parce
qu’ils sont le relevé du carnet ( i ) , qui est lui-même la base de la
composition des livres et registres de l’agent de change.
Les bordereaux sont donc la pièce de sûreté publique , et conséquemment la seule avec laquelle un agent de change doit et peut
compter avec son client.
Dès que les arbitres ont eu reconnu M . de Batz responsable et
comptable envers m o i, d’après son billet qui le constitue t e l, ils
se sont imposés a eux-mêmes l’obligation de le condamner à payer
ou à compter régulièrement avec moi j or , qu’est-ce que c’est que
de compter régulièrement d’une somme que l’on dit avoir employée
et perdue dans une opération de bourse pour le compte d’un tiers ?
C’est de fournir à ce tiers les pièces de comptabilité de cette opéra
tion. Ces pièces ne pouvant être que des bordereaux authentiques ,
(1) Carnet est le nom d’un petit journal sur lequel les agens de cliange'ecriYcnt leurs opérations sur le parquet de la bourse à l ’instaut qu’elles «ont faites.
�40
les arbitres ont condamné M. de Batz à représenter des bordereaux.
M. de Batz ne peut suppléer à ces pièces que le jugement exige ,
par des pièces privées.
L e compte de Devaux qu’il présente , est beaucoup moins que
ce que les arbitres avoient sous les yeux , lorsqu’ils ont prononcé ,
car ils avoient la lettre de Chabanel , adressée directement à M.
de Batz , le jour même ou ce dernier dit avoir terminé l’opération;
ils avoient sous les yeux ces mots écrits par l’agent de change luimême : J ’ ai fin i d’ après vos ordres et heureusement avant la
bourse , votre ami ría au-delà de ses i 5,ooo liv ., que 47 liv. en
tout de perle.
Malgré ce témoignage , les arbitres fidèles aux principes , et
a u ssi, peut-être , inquiets sur la moralité*des pièces de M. Batz »
l’ont condamné à compter avec les pièces de comptabilité admises
en matière de spéculation de bourse.
M. de Batz infatué de son compte de Devaux , comme il l’étoit
de ses autres pièces avant le jugem ent, croit pouvoir mettre ce
compte en place des bordereaux ; mais ce compte est remis à un
inconnu ; il n’est arrêté par personne , et c’est un misérable
chiffon en comparaison de la lettre de Chabanel qui n’a cepen
dant pu sauver M. de Batz d’une condamnation.
J ’ai enfin terminé ; il me reste à faire excuse à M. de B atz,
du désordre et de l’incorrection de ce mémoire ( 1 ) ; cependant
je vois que le fonds des choses y est.
J e suis empressé de faire au sien l’honneur qu’il mérite ; et j’ai
(1) É tan t oblige de donner à imprimer à mesure que j ’écrivois, j ’ai été privé
de revoir ce que j ’avois é c r it, ce qui est cause que j ’ai répété des choses , et
que j ’en ai oblié et transposé d’autres,
�47
pressé ma.réponse afin d’avoir pour lui le procédé qu’il n’a pas
en moi ; il m 'a signifié son mémoire vingt-quatre heures avant
l’audience , que malgré cela j’ai pourtant acceptée ; je veux qu’il
ait le mien plusieurs jours avant celle où nous serons jugés;
J ’espère qu’à force d’égards je déterminerai M. de Batz à me
rendre mon argent.
FR O N D EV 1L L E .
J e reçois à l’in slan t, enfin , la communication des pièces de
M. de Batz , moins ma lettre que je voudrois cependant .revoir ,
car elle est pour moi un objet de curiosité toujours nouveau. Cette
communication m’oblige à ajouter quelque chose à mon mémoire.
D ’abord elle m’oblige à placer encore ici la copie figurée de
la convention du 5 fé v rie r, que j’ai donnée très - imparfaite**
ment ; la voici :
�Frondeville, 5 février.
2"* R»
NOTE
GÉNÉRALE.
est convenu avec M. Chabanel qu’au
jourd’h u i, 5 février 1 7 9 0, il ach e te ra :
I
l
1 °. L e s 240 billets de 12 5 millions
qui lui sont offerts à 10 pour 100 de
perte, fin de m ars; — 2 °. les 5o ac
tions des Indes , qu il croit avoir pour
la même époque , a 1020 liv.
Que le tout demeurera entre nous; que
Achats et marchés fer- M . le président de Frondeville sera connu de
mes payables fin mars n o u s seulement, et que M . Chabanel sera seul
prochain fixe,
r
,
en nom , vu la garantie.
En cas de bénéfice, Chabanel ne revendra
pas sans ordre.
Term iné le 27 mars
perte au delà des 1 5, 000
En cas de perte approchant de 1 5 ,ooo 1.,
liv., est de 4
9 liv. et non i l pourra vendre sans ordre, à moins de surde 47 liv. comme le dit c r o i t d e g a r a n t i e
Chabanel qui en fa it
remise sur son droit.
Convenu D. C,
F in de tous comptes avec Frondeville.
1 . A lui r e m is » présence de Foucault,
.
.
. 2,600 liv.
2". Chez V e llo n i, 2 5 louis.............................................600
3 ”. S u r sa dem ande, 3 o louis........................................
7 20
4°. Id . à lui porté à l’assemblée solde de 2 5o louis. 6,000
9, 720
5"» P ayé pour lui à Dijoine , pour sa cotisation a
des frais à l’hôtel de Ju ig n es«
�
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Factums Marie
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[Factum. Frondeville, de. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Frondeville
Subject
The topic of the resource
créances
Constituants
arbitrages
spéculation
diffusion du factum
Description
An account of the resource
Réponse de M. de Frondeville au précis de M. de Batz.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
Circa 1789-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0602
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Rouen (76540)
Chadieu (château de)
Rights
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Domaine public
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arbitrages
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PDF Text
Text
*•
P R É C I S
POUR
S ie u r
Jean G E R L E , avocat, et juge de paix
du canton de Sauxillanges, intimé ;
CONTRE
F r a n ç o is
r i n e et
GERLE , p r ê t r e , P i e r r e , C
M a r i e G E R LE , f r è r e s et
a th e
sœ u r s,
appelans.
U n e a c q u i s i t i o n d’immeuble particulier, faite par un
p è r e , en qualité de légitime administrateur d’ un de ses
enfans en bas â g e , le prix payé des deniers du père ,
auquel des deux doit - elle profiter ? La translation de
propriété qui s’est opérée par l’effet de l’acte de v e n te ,
n’a-t-elle pas résidé, ab in itio , sur la tete de l’enfant,
au nom duquel l’acquisition a été faite? ou l’objet ainsi
A
�acquis f a it - il partie des biens et de la succession du
père ?
L ’enfant doit-il être tenu de rapporter l’objet en na
ture , à la succession de son père ? ou n’est-il tenu qu’au
rappôrt des deniers employés par le père au payement
du prix de cette acquisition, des frais et loyaux coûts,
et aux améliorations du fait de ce dernier?
T elle est la principale contestation sur neuf cliefs de
demande, qui seront développés lors de la plaidoirie.
F A I T
S.
E n 1 7 5 9 , Pierre G e rle , père commun des parties,
e n q u a l i t é Ue l é g i t i m e administrateur du sieur G erle, in
tim é, donna sa procuration pour acheter six journaux
d’un pré appelé la Périchon n e, situé à Sauxillanges.
L ’acquisition fut faite par le fondé de pouvoir du sieur
Gerle pè re, en cette qualité, pour et au nom du sieur
Gerle fils.
E11 1 7 8 6 ,1 e sieur Gerle fils contracta mariage. Son
père l’institua son héritier, et le chargea de payer, à
chacun de ses autres enfans , une légitime déterminée.
A l’époque d u c o n t r a t de mariage du sieur Gerle fils
(sa mère étoit décédée ab intestat) , Pierre G erle, son
père, jouissoit alors des biens de ses enfans, provenons
du chef de leur m ère, en vertu de l’usufruit légal, effet
de la puissance paternelle alors en vigueur. Les parties
vivoient sous l’empire des lois des pays du droit écrit.
A p rès le mariage du sieur G e rle , intimé, son père a
également continué de jouir de ses biens, par suite du
�C3 )
même usufruit, jusqu’au 19 août 1804, époque de son
décès.
A l’ouverture de la succession du sieur Gerle p è r e ,
le sieur Gerle aîné, son héritier contractuel, a réclamé
les six journaux:'de pré comme à lui appartennns, ayant
été acquis pour lui et en sou nom par son p è re; il a
offert de rapporter à la succession paternelle les deniers
fournis et avancés par son père, et employés au payement
du prix de cette acquisition , les frais et loyaux coûts
d’icelle, et le montant des améliorations du fait de ce
dernier, s’il en existe, qui aient rendu l’objet acquis de
p lu s grande valeur.
m
o
y e n
s.
C’est un principe généralement reconnu et avoué dans
le d r o i t , qu’un père peut.acquérir pour un de ses enfans;
et que l’objet acquis par le père, comme administrateur
légitime d’un d’eux, appartient irrévocablement à l’enfant
sous le nom duquel l’acquisition est faite, exclusivement
au père. C’est ce qui nous est enseigné par tous les ju
risc on sul tes qui ont écrit sur cette matière.
Ils ont assimilé le cas de l’acquisition faite par tle père,
agissant en qualité d’administrateur -ou de curateur d’un
de ses enfans , au cas d’ un retrait lignager exercé par
l’ascendant, agissant en ¡la même q u alité, sous de nom
d’ un d?eux. Ils enseignent q u e les effets ■et les-consé
quences-sont les mémos dans l’un comme dans l’autre
cas, et décident que de même que le -père, ou un cdes
ascendans , ne peut «disposer ide ^héritage ainsi referait ,
A 2
�( 4 }
.
de même il ne peut aliéner l’héritage par lui acquis sous
le nom d’un de ses enfans.
Gi'imaudet, en ses œuvres, liv. 2, ch. 1 2, agite d’abord
la question de savoir si un père peut valablement retraire
sous le nom d’un de ses enfans , n’ayant aucun bien ,
l ’objet par lui vendu : après avoir décidé pour l’ailirm ative, il ajoute que lors du partage des biens du père,
l’objet acquis appartient et reste h l’enfant comme propre;
qu’il en est l’incommutable propriétaire; et que, quoique
le père ait payé le prix de ses deniers, il ne sauroit pré
tendre à la propriété de la chose ainsi acquise. V o ici
comment s’exprime Grimaudet :
« L a conséquence suit de ce que l’enfant de famille,,
« ou son p è re , comme curateur, peut retirer ce qui a
« été vendu par son père; lequel acquêt demeure propre
« à l’enfant, et le père, après, né le pourra retenir, par la
a liaison commune que ce qui est acquis de mes deniers
« n’est pas fait mien, mais à celui qui a fait l’acquisition.»»
Cet auteur fonde son opinion sur la loi S i e x eâ
p ecu n iâ , au cod. de re venditâ ,* et les raisons qu’il cn>
donne sont, ainsi qu’il les rapporte, fondées sur l’autorité
de Godefroy. Q uia emptum pecitniâ a lic u ju s , ejus
non f i t , sed ejus cnjus nornine emplio facta est ; et
quando pater donat fd io y velut pecuniam in retracta,
ilia donatio non reddit ad commodum pntris.
L e môme auteur ajoute ensuite :
« Entre les enfans ès lieux où les père et mère ne
« peuvent pas avantager les uns plus que les'autres, celui
« sous le nom duquel l’acquêt est f a it, doit rapporter
t< les deniers de Vacquét avec le s fr a is , si mieux il u’aiine
�(5)
« la chose retirée, demeurer en l’hérédité, pour les doc< niers en cire partagés; et pour L’acquêt être f a i t par
« le p ère, comme curateur de son enfant , il ne fa u t
« dire q u il fa s s e sa condition meilleure que îitn de
« ses autres e ifa n s : car il ne lu i donne rien de son
« bien , et tout ce qui part du père ( qui sont les de« niei's') , il fa u t que Venfant les rapporte:; le nom du
a curateur ne doit fa ir e que la chose appartienne au
« père et aux autres enfans.
« Ce que nous disons que le père ne peut avantager
« l’un de ses cnfans plus que l’autre, se doit entendre,
« comme n o u s di so n s e n droit, que l’homme et femme
« ne se peuvent faire don l’un h l’autre, dont l’un soit
a plus pauvre, et l’autre enrichi : o r , au cas présent,
« par Vacquêt le père n'est a p p a u v r i c a r il ne perd
« rien du sien , et débourse seulement des d e n i e r s p o u r
a lesquels il se peut p o u rvoir; et jquant à Ia c q u ê t, le
« fils ne lef a i t de son père, mais de Vétranger; partant
« les autres cnfans ne peuvent prétendre part\ audit
« a cq u êt, ou dire que par icelui le père ait, avantagé
« leur frère. »
Brodeau, sur l’article 139 de la coutume de Paris, qui
étoit une coutume qui astreiguoit à une parfaite égalité,
a consacré les mêmes principes que Grimaudet ; il en
seigne que « les autres enfaus, après le décès du père,
« ne peuvent rien prétendre à l’héritage retiré ou acquis
« par le père, sous le nom de l’un d’e u x ; que le fils
« n’est tenu qu’au remboursement des deniers avancés
« par le père; que dès-lors n ih il abest à f a m iliâ , et
.« qu’on ne peut pas dire que la gratification et le ch oix
�( 6 )
« que le père a j'a it de la personne d'un de ses eirfans
« soit un avantage indirect et réprouvé. »
L eb ru n , en son Traité des successions, liv. 3 , chap. 6 ,
sect. 3 , traite la question de l’acquisition faite par un
père au nom d’un de ses enfans,et celle du retrait exercé
par le père sous le nom de l’un d’eux ; et dans l’un
comme dans l’autre cas, il enseigne et décide que le fils ne
doit rapporter què le prix de l’acquisition ou du retrait,
et non l’héritage acquis ou retrait.
A u nombre i 5 , il dit :
« S i lè père a acheté au nom de son fils, l e p r i x
êc"DË L’ ÀCQUÎSITI Ot t E S T S UJ E T A RAPPORT. »
A i l nômbre i'6, il ajoute :
« I l eti est de même quand un père a exercé e te x é « cuté un retrait lignager au nom de son fils; car le
« fils rapporte lè prix du retrait à. la succession de son
« p è re , É T frOtt l ’ h é r i t a g è S i ê m e , q u i n ’ a j a m a i s
* A P P A R T E N U A U PÈ RE, et qui ne l’auroit pu prétendre
«c en la succession de son fils, ni comme acquêt, ni à
s titre de réversion ; en sorte q u e , quoique le retrait
« lignager soit très-avantageux, c’est un cas où le père
te 1peut avantagét soh fils d’un projit q u i 71 est point
« 1sujet à ràpport. » Î/J'aut dire de même dans le cas
~dü ftombre précédent , et « si "le p è r e a f a i t p o u r
xt ‘s'dN W L S ÙN 'AiCHAT A V A N T A G E U X . »
^Bou^jon,“e n ‘sbhTraité du droit commun delà France,
tihap. 7,l$ect. i 1^ . , irititulée : D u ‘rapport de ce que le
“pèrb irchètb lpôur soh fils, png. 7 2 9 , s’exprime ainsi.
A ii nortibre '1^ . , il dit :
T o ü t aviinta^e d’ascendarrs'à descendons fonde’lerap-
�(7 )
«
«
«
«
port. Si les père et mère ont exercé un retrait lignager
sous le nom de leur lils , il doit les deniers employés
pour l’exécution d’un tel retrait , m ais Théritage
retiré lu i appartient. »
A u nombre 2, il ajoute:
« D e m êm e, s'ils ont acheté et payé pour lu i un
« im m euble, ce q u i résulte évidemment de la proposi« tion précédente. »
A u nombre 3, le même auteur ajoute encore:
« D a n s Tun et Vautre ca s. c'estr-à-dire, du retrait, et
« de Vachat d'un immeuble de la part d'un père pour
« son f i l s , ce dernier ne doit pas le rapport de la
« c h o s e , qui ne vient pas de la substance du p è r e ,•
« mais L E R A P P O R T d e s d e n i e r s p a y e s par Vascen« dant à ce sujet. Mais il ne doit plus les deniers en aban« donnant la chose , s’il se trouvoit lésé par le retrait
« ou l’acquisition, et qu’il eût été restitué contre l’effet
« d’iceux. »
Enfin, au nombre 4 , Bourjon s’exprime ainsi :
a Soit dans le cas du retrait exercé par le père pour
« son lils, soit dans le cas de Vacquisition f a i t e par le
« père sous le nom du même j i l s , c e s S O R T E S d ’ a c t e s
ce S O N T
DES
ACTES
DE
COMMERCE
ET
N O N ' DE L I B É -
« R A I jI T É . »
d errière , sur l’article 3 0 4 'de la -coutume de Paris,
glose 2 ,ii°. i£r., tom. 3, enseigne une semblable dqctrine.
« Ce.qui est a cq u is, d it-il,
pèrç, de ses deniçrs,
« au nom de sop fils, est'suj.et à rapport,1 suivant le
ik sentiment de Charondas, ce quùest>sans dpute',‘ et en
« ce cas, c ’ e s t l a s o m m e q u i e s t - s u j e t t e à ’R a p p o r t ,
�Ce )
x ET NON L’HÉRITAGE
ACQUIS , D’ A U T A N T QU’l L N’A
« J A M A I S ÉTÉ DANS LES BIENS DU PERE. »
B oucheul, en son T raité des conventions de succéder,
chap. 6 , n°. 21 et suivant, pag. 66 et suivantes, traite,
e x p ro fesso , la même question que la cour a à juger.
A p rès avoir fait l’énumération des coutum es, telles que
celles de N orm andie, Bretagne et T ou rain e, dont les
dispositions sont contraires aux principes gén érau x,
Boucheul ajoute aussitôt:
« Mais l’on renferme ces coutumes dans leur détroit;
« et où la coutume n’en parle p a s, la jurisprudence y
« est certaine que l’héritage ainsi retiré et acquis p a rle
« p è r e , sous le nom d’ un de ses enfans , q u o i q u e
« M I N E U R , EN BAS A G E , ET MEME SANS AUCUN BIEN,
« APPARTIENT,
NON AU
« DENIERS , m a is
à
PERE
l'e n fa n t
QUI
sous
A FOURNI LES
le
n om
du q u el
sont faits. »
Cet auteur a fondé son opinion sur les dispositions
de ld loi 8 , au cod. S i quis alteri vcl sib i emerit.
A u nombre 26 , Boucheul ajoute :
« Q uand le père ou la mère a c q u i è r e n t un heri« tage sous le nom de l’un de leurs enfans, ce n’est pas
«
L’ ACQUÊT
k
UN
«
ont pour l u i
ou
le retra it
AVANTAGE
que
c e tte
q u ’i l s
p ré d ilectio n
, et en rem boursant le p r ix ,
l ’h e r i -
« t a g e EST AU F I L S , sans qu’il soit besoin d’en f a ir e
a rapport à ses co h éritiers, parce que c e s t un bien
« qu i ne vient pas dm su b s t a n t i a p a t r i s. »
D en izart, au mot R apport, n°. 49, dit:
« S i le père achète , au nom de son J i l s , ou exerce
« uji retrait lignager, LE p r i x d e l ’a c q u i s i t i o n ou du
«
retrait
�(9)
« 7'etrait est sujet à rapport ; MAIS
non
pas
l ’h é -
« R I T A G E , QUI N’ A J A M A I S APPARTENU AU PE RE ; en.
« so r t e q u e , supposé que Vachat ou le retrait soit
« avantageux au j ï l s , LE PROFIT QUE F A IT LE FILS
« N’EST PAS SUJET A RAPPORT. »
Pothier, e n s o n T i’aité des successions, cliap. 4 , §. 2,
page 180, édit. in -40. , enseigne la môme doctrine.
« LorsqiCun père ( d i t - i l ) a acheté , au nom et
« pour le compte de s o n j i l s , un héritage, et en a payé
« le p rix de ses deniers , CE n ’ e s t p a s l ’ h é r i t a g e
« qui est s u j e t A r a p p o r t ; I L N’ A J A M A I S
« P A S S É DU" P È R E a u F I L S , P U I S Q U ’I L N ’A
« JA M A IS A P P A R T E N U AU PÈ R E , A Y A N T
« É T É ACH ETÉ AU NOM DU F IL S ; L E F IL S
« sera donc seulement ten u, en ce c a s , a u r a p p o r t
k d u p r i x que le père a jv u r n i pour Vacquisition. »
O a trouve la môme décision dans le répertoire de
jurisprudence, par Guyot. Les articles que nous allons
rapporter sont d’un célèbre magistrat, vivant au temps
actuel, collaborateur de ce répertoire ( 1 ).
A u mot légitim e, tom. 10, pag. 386 , 011 lit :
« L e PRIX d ’ u n e a c q u i s i t i o n que le père fait au
« nom de son fils, et qu’il paye de ses propres deniers,
« est, sans contredit, sujet à l’imputation : on a déjà
« vu que le parlement de Flandres l’a ainsi jugé, par
a arrêt du 14 février 1775. »
Mais il est essentiel de remarquer ici que c’est du
p r ix , et non de l ’héritage acquis, dont il est fait men~
( 1 ) M. Merl... procureur général à la cou r de cassation,
B
�( 10 )
tion , lorsqu’il s’agit de l’imputation de légitime. On va
voir qu’il n’est également question que du p r ix , et non
de l’h éritage, lorsqu’il s’agit du rapport.
ü n lit encore, dans le même répertoire de jurispru
dence de G u y o t, page 413 , au mot rapport, nomb. 7 :
« Nous avons établi, à l’article légitim e, qu’on doit
« imputer, dans la portion légitimaire, l e p r i x d e l ’ a C« QUISITION QUE LE PERE A FA IT E DE SES PROPRES
« DENIERS , AU NOM DE SON FILS ; la même raison
« veut que LE PRIX SOIT S UJ ET A RAPPORT. »
E n fin , h la même page il est ajouté :
« Nous ne parlons ici que DU RAPPORT DU T R i x ,
« parce qu’en effet il rfy a que l e p r i x q u i y p a a ROISSE SUJET ,
« FA IT E
DANS
P AR LE PERE ,
IÆ CAS D’ UNE ACQUISITION
AU NOM D’UN DE SES EN-
« F A N S , L’HÉRITAGE MEME SEMBLE NE DEVOIR PAS
« Y ÊTRE SOUMIS : J A M A I S IL N’A APPARTENU A U
« P È R E ; IL N’A POINT PASSÉ DU PERE AU FILS , et
« CONSÉQUEMMENT
a LE METTRE
«
APRÈS
LE FILS N’EST
POINT
TENU DE
DANS L A MASSE DES BIENS DU PERE
SA MORT. >3
Telle est la doctrine universqllement enseignée par les
j u r i s c o n s u l t e s q u i ont écrit sur la question élevée au
jourd’hui dans la famille G e r l e : t o u s o n t décidé q u e le
fils, au nom duquel l’acquisition ou un reirait sont fails
par le père, ou autre ascendant, est propriétaire seul et
incommutable de l’immeuble acquis 011 retrait ; que le
fils est seulement tenu au rapport des deniers déboursés
par le pè re, et non au rapport de l’héritage acquis,
sur lequel le père n’a jamais eu aucun droit de propriété.
�( 11 )
D e ces principes, il résulte que les six journaux de
p r é , que le sieur Gerle père a acquis au nom de son
fils a în é, en 1769, ont appartenu à ce dernier , dès l’ins
tant même que la translation s’en est opérée par l’effet
de l’acte de vente qui a eu lieu ; il résulte enfin , et il
est démontré, que cette propriété a résidé sans cesse sur
la tête du sieur Gerle, intim é, à l’exclusion de son père,
et q u e , soit le sieur Gerle p è r e , soit sa succession ou
ses héritiers, n’ont à réclamer que le p r i x , les frais et
loyaux coûts, et les améliorations du fait du p è r e , s’il
eu existe du fait du père.
Q u o i q u e le père ait fourni les deniers pour le paye
ment de cette acquisition , cette circonstance ne sauroit
donner aux enfans légitimaires du sieur G e r l e , aucun
droit de propriété sur le pré dont il s’agit. C ’est ce qui
nous est enseigné par Godefroy, en ses notes s u r la loi i rc.
au cod. S i quis alteri vel s ib i, sitb alterius no m iné vel
aliénât pecunià em erit, tit. 5o , liv. 4. Il décide que la
chose aCquise n’appartient pas h celui qui en a payé le
prix de ses deniers, mais à. celui au nom duquel la chose
est achetée.
R e s , dit-il, ejus esse'mm videtur, non eu ju s p ecu n ia ,
sed eu ju s nomine empta est.
Et sur la loi 8 , du même t i t ., le môme annotateur
ajoute : A lié n a pecuniâ , quod compara lu r ,J it compa
ra Jïtis , non ejus eu ju s f u it pecunia.
L a circonstance de l’existence de l’institution contrac
tuelle faite en 178 6 , en faveur de l ’intim é, de la part
de son père, ne sauroit changer son état, ni porter at
teinte à son droit exclusif de propriété sur le pré* dèJ là^
B 2
�Périchonue ; droit dont il a etc irrévocablement investi
dès le 7 avril 176 9, c’est-à-dire, dès le moment même
de la perfection de l’acte d’acquisition faite pour lui et en
son nom par son père.
En devenant l’unique propriétaire de ce pré, au même
instant il est devenu débiteur envers son père des deniers
par lui avancés et fournis pour parvenir à celte acqui
sition. O r , par cet état de chose, il est démontré que
jamais le père n’a pu être considéré comme propriétaire
du pré en question, et que cette propriété a nécessai
rement résidé dans la personne du fils.
L e père, en instituant son fils aîné héritier universel,
ne l’a institué que dans l’action qu’il avoit pour répéter
les deniers par lui d é b o u r s é s , et non dans la propriété
du pré acquis pour son fils. Car, encore une fois, le père
n’en a jamais été ni pu devenir propriétaire, tant que
le fils n’a pas manifesté l’intention de renoncer à la
propriété de cet objet»
Ce scroit renouveller une absurdité qu’on a mise au
jo u r, en cause principale, si les appelans prétendoient
que l’a c q u i s i t i o n faite au nom du fils , par le p è r e , est
un avantage indirect; que joiq^ à l’institution contrac
tuelle, le père nuroit alors excédé la quotité disponible;
que leur légitime de rigueur s c r o i t b l e s s é e ; le pré dont
il s’agit ayant, depuis 1769, considérablement accru de
valeur.
Toutes ces idées systématiques se trouvent détruites
d’avance par les autorités ci-dessus rapportées. Grimaudet,
Erodeau, Lebrun et Boucheul enseignent que la prédi
lection que donne un père à un de scs enfans, en achetant
�( i3 )
sous son nom un immeuble , n’est point un avantage
indirect fait à cet enfant. B o u rjo n , au n°. 4 déjà l’a p
porté, dit que ces sortes d’acquisitions sont des actes de
commerce et non de libéralité.
Il est impossible de concevoir que de telles acquisitions
présentent l’ombre la plus légère d’un avantage indirect,
lorsque le fils l’apporte les deniers fournis par le père;
par ce rapport,-le fils réintègre dans la fortune du père
tout ce qui en est sorti : et tous les auteurs ci-dessus
cités enseignent que le fils n’est tenu qu’au Rapport de
ces mêmes deniers, qui ont constitué la substance sortie
do la fortune du père, et qu’il n ’est point tenu au rapport
de l’immeuble acquis, lequel, ab in itio , a appartenu au
fils exclusivement au père : c’est ce rapport du *prix
qui a fait dire à ces jurisconsultes que la -prédilection ,
ou le ch oix d’un des en fa n s, f a it par le père , rfétoit
point un avantage indirect.
1 ■
^
L e p è r e , en achetant pour son fils , n’a sorti de la
substance de ses biens et de sa fortune, que des deniers;
le fils ne doit remettre à la succession du père que les
mêmes objets qui en ont été distraits ; c’est-à-dire, qu’il
ne doit remettre que des deniers. Cette vérité nous est
encore enseignée par Pothier, en son Traité des succes
sions, t o m e 6 , cliap. 4 , § . 2 , page 177? édition in -40.
Voici comme il s’exprime :
« Tous les actes d’ un père ou d’une mère , dont
« quelqu’ un de leurs enfans ressent quelqii avantage ,
« ne sont pas des avantages indirects sujets à rapport j
« il n’y a que .ceux par lesquels les père et mère font
« passer quelque chose de leurs biens à quelqu’un de
�( *4 )
« leurs enfans, par une voie couverte et indirecte; c’est
« ce qui résulte de l’idée que renferme le ternie rapport;
« car rapporter signifie remettre à la masse des biens du
« donateur, quelque chose q u i en est sorti. On ne peut
« pas y remettre , y rapporter ce qui n’en est pas sorti:
« donc il ne peut y avoir lieu au rapport, que lorsqu’un
« père ou une mère ont fait sortir quelque chose de
« leurs biens, qu’ils ont fait passera quelqu’un de leurs
«: enfans. »■
En faisant Papplication de ce principe lumineux en
seigné par Pothier, il est donc c la ii 'e m e n t d é m o n t r é que
les légitimaires G e r l e ne sont fondés à réclamer que le
rapport des< deniers employés par le père com m un , à
p a y e r l ’a c q u i s i t i o n f a it e pour son fils aîné , parce qu’il
n’est sorti du patrimoine du père que des deniers. L eu r
système de rapport de l’objet acquit est une erreur : cet
objet n’a jamais fait partie des biens du p è r e , puisque
tous le/*» jurisconsultes décident qu’il appartient au fils
et non au père. L e pré de la Périchonne n’a donc pas
pu sortir de la, fortune du p è re , n’y étant jamais entré,
C ’est v o u l o i r se révolter contre les principes du droit,
que de soutenir le rapport, en nature, du pré dont il
s’agit.
L a propriété- du pré de la Périchonne ayant résidé
ab in it io , c’e s t - à - d i r e , dès le moment même de la
confection de l’acte de vente par l’effet duquel la trans
lation de propriété a passé de la personne des vendeurs
en celle dû sieur Gerle fils, acquéreur, il est ridicule de
prétendre que lés appelant aient jamais pu concevoir
l’ospoir d’un droit de légitime sur ce pré. O n ne cessera
�(
)
de le l’épéter, ce pré n’a jamais fait partie du patrimoine
du sieur Gerle père ; il n’a eu sur cet objet qu’un droit
d’hypotlièque pour sûreté des deniers par lui avancés
pour son fils. L e sieur Gerle fils a în é , débiteur envers
la succession de son père de ces deniers, ne profitera
d’aucun de ceux que le père a sortis de son patrimoine,
en l’apportant le pi*ix de l’acquisition dont il s’a g it, les
frais et loyaux coûts d’icelle, et la valeur des amélio
rations du fait de son p è r e , s’il en existe. C ’est sur ces
deniers, que n’a cessé d’offrir l’intimé dès le moment de
l’ouverture de la succession de son père, que doit frapper
en partie la lé g itim e des nppclaiis, et non sur le pré de
la Périchonne qui n’est jamais entré dans le patrimoine
du père, et n’en a jamais fait partie.
Par le rapport offert par l’intimé, la succession du
père ne reçoit aucune atteinte, et l’intimé lui-même ne
reçoit aucun avantage. Cette succession recouvre tout ce
qui a été distrait par le père, de la substance de sa for
tune et de ses biens.
Lesappelans nesauroient être fondés à réclamer aucune
espèce de droit de légitime sur l’accroissement de valeur
qu’a pu acquérir le pré de la Périchonne, depuis 1769,
étant démontré qu’il n’a jamais fait partie des biens du
père commun. Cet accroissement de valeur n’a rien coûté
au père ; sa fortune 11’en a souffert aucune espèce de
distraction-, c’est une augmentation inopinée, qui est un
accessoire du p r é , produite par la chance des temps, et
indépendante du fait de l’homme. O r , dès -qu’il est dé
montré que le père commun n’a jamais eu ün tfeutifisA
t
";o
�(. 16)
tant aucun droit de propriété sur cet héritage} c’est une
absurdité de prétendre que les appelans ont des droits
à ses accessoires.
P o u r -pouvoir, G E R L E.
A R I O M , de l’imprimerie de T h i b a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mai 1808.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gerle, Jean. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gerle
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
fils avantagé
Description
An account of the resource
Précis pour sieur Jean Gerle, avocat et juge de paix du canton de Sauxillanges, intimé ; contre François Gerle, prêtre, Pierre, Catherine et Marie Gerle, frères et sœurs, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0549
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauxillanges (63415)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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acquisitions
fils avantagé
Successions
-
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83e34a8932286775b518ac1012ffe2bd
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Text
MÉMOIRE A CONSULTER,
P O U R
A n t o i n e , J e a n et L o u i s - X a v i e r - S i l v a i n
GOMICHON, appelans, et demandeurs en garantie;
C O N T R E
F r a n ç o is e
GOMICHON, veuvede P i e r r e D e p e y r e
intimée
ET ENCORE
et J
DEPEYRE, N..,.. DEPEYRE,
et Guillaume ARMET, son mari défendeurs
en garantie«
C O N T R E
J e a n
o s e p h
T A B L E A U GÉNÉALOGIQUE.
G régoire G om i chon,
mort en 1720
Catherine Augier.
S ii v a in ,
né en 1699,
m ort en 1748:
ne en 1697,
mort en 1727
A ntoine
néen1702
Françoise B ontem s,
morte en 1733
Jean,
F rançoise,
à
Intimée,
Marie Lafont.
née en 173 7,
m ariée en 1753,
Pierre Depeyre.
r
AutoiflC.
Jean.
L o uis-X avicr-S ilvain ,
Appelans
Catherine.
Jean.
Joseph,
N
<i
G uillaum e A rm et.
A
�C 2 )
F A I T S .
.
J e a n G o m i c h o n , prem ier du n o m , est décédé en 17 2 7 ;
laissant en minorité un fils appelé Jean , com m e son père.
Silvain G om iclion, son oncle paternel, fut nommé son tuteur.Jean G o m ich o n , deuxièm e du nom , étant parvenu à sa ma
jorité, forma demande contre ledit S ilvain , son o n c le , en red
dition de com pte.de tu telle, par exploit du 23 janvier 174$.
'
C e tte dem ande fut portée devant le châtelain de Montluçon.
L e 24 mars suivant, Jean G om ich on obtint une sentence par
d é f a u t , qui condamna Silvain G om ich on à rendre le c o m p te
d em a n d é; et à défaut de c e faire, le condamna à payer la somme
de 3ooo fra n c s , intérêts et dépens.
Silvain ou m iciion uecéda le 10 juin 1748 , laissant une fille
m in eure, appelée Françoise G om ichon.
L e 2 i du m êm e m ois, Jean Gom ichon fut nommé son tuteur.i
Il n’avoit que vingt-deux ans.
Il o b tin t, le 11 ju illet 1749 » des lettres ro y a u x , pour être
relevé de différens actes qu’il avoit faits en m in o rité, et entre
autres de l’acceptation de cette tutelle.
Il ne paroit pas que Jean Gom ichon ait donné suite à ces
lettres : il parolt m êm e, au contraire, que Françoise Gom ichon
ayant contracté mariage avec Pierre D<?peyre, le 21 novem bre
17 5 5 , Jean Gom ichon a paru au contrat par fondé de pouvoir,
en qualité de tuteur de l a d i t e F r a n ç o i s e G o m i c l i o n .
Q u o iq u ’il en soit, le 8 juin 1768, D ep eyre a donné assignation
à Jean Gom ichon devant le châtelain de T re ig n a t, pour rendre
com pte de la gestion qu’il avt>it eue dea biens de Françoise G o
m ichon , sa fem m e.
^ ^ e a n G o m ich o n , de son c tjté , à qui il étoit dû un semblable
T ^ fcp to par la succession de Silvain G o m ich o n , se pourvut de
nouveau par exploit des 24 et 3o ju ille t 1768, et conclut contre
Françoise G om ich on, et P ierre D e p e y re , son m a ri, ù ce que la
�( 3 )
«sentence du 24 mars 174$, qui ordonnoît la reddition de c e
com pte de tu te lle , et à défaut de c e , condam noit S i l v a i n Gom ichon au payem ent de la somme de 5ooo fra n c s, pour tenir
lieu de reliquat, avec intérêts et dépens, fût déclarée exécutoire
contre la fem m e D epeyre , com m e elle l’étoit contre Silvain
G ô m ich o n , son père ; qu’en conséquence elle fut condam née à
payer la somme de 5ooo fra n c s , avec intérêts et dépens.
En niëm e temps Jean G om iclion se m it en règle sur la de
mande en reddition de com pte de tutelle de Françoise Gom ichon
et de son mari.
C e com pte fut rendu juridiquem ent le x3 août 1759; et Jean
Gom ichon établit qu’au lieu d’étre débiteur de sa pupile, il étoit
son créancier : w il etoit difficîia que cela fût autrem ent, Silvain
G om iclion ayant fait de très-mauvaises affaires , au point qu’il
avoit été emprisonné pour d ettes, qu’il étoit mort peu de temps
après s’être évadé des prisons, et que Jean Gom ichon avoit été
obligé de liquider sa succession.
Françoise Gom ichon et son mari fournirent des d é b a t s sur c e
c o m p te , le
2.3 d u m êm e mois d’aoû t, et les choses sont restées
dans ce t état jusqu’au mois de juin
1763.
A cette époque , Jean D e p e y r e , qui liabitoit dans la haute
Auvergne , près de S t.-F lo u r, vint en Bourbonnais ; des amis
et parens communs cherchèren t à concilier les parties ; et par
le résultat de leur m éd iatio n , il fut passé une transaction sur
p ro cè s, le 22 juin J763.
f ; D epeyre y stipule ta n t en son nom qu’en qualité de mari et
maître des droits et biens dotaux de Marie-Françoise Gom ichon y
sa fe m m e , absente.
O n y rend com pte de la tutelle qu’avoit eue Silvain Gomichon
de lajpersonne de Jean G om ich on , son n eveu, et du jugem ent
de 1745, qui condam noit ledit Silvain à rendre com pte de ladite
tutelle ; à défaut de c e , le condamnoit à payer 3ooo f r . , a v e c
intérêts et dépens,.
A %
�( 4 )
O n y rend aussi com pte de la tutelle quravoit eue Jean Go*
m ic lio n , de Françoise G o m ich o n , fille à Silvain ;
D e la reddition juridique de ce dernier com pte , par lequel
Jean G om ichon s’étoit prétendu créancier au l i e u d ’ é t r e débiteur,
et des débats fournis sur ce compte.
« T o u tes lesquelles demandes et poursuites, e st-il a jo u té ,
« m ettoient les parties dans le cas d’avoir plusieurs sentences et
« arrêts de la Cour de parlem ent, qui auroient pu occasionner
« la perte totale de leurs b ie n s, pour à quoi obvier, et é viter
cc les inconvéniens fâcheux qui auroient pu en résulter, et main
te tenir la paix et l’ un io n , elles ont été conseillées de traiter1et
« transiger sur le to u t, ainsi et de la m anière qui suit. »
P ierre D e p e y re , stipulant comme il a été dit en téte de l’acte r
subroge Jean Gom ichon à tous les droits revenans à sa fem m e,
sans ra c« r t : . n , m oyennant la somme de 600 francs , stipulée
payable en quatre term es, sans intérêts pendant les termes.
Au m oyen de quoi les parties se tiennent m utuellem ent quittes,
et tous procès dem eurent éteints et assoupis ;
« E t les p a rtie s, à l'ex écu tio n e t entretènem ent de tout ce
« que dessu s. ont respectivem ent obligé , ajfecté et hypothéqué
xc tous leurs biens présens et à venir. »
<
J'>0
L e s choses sont restées dans cet état jusqu’au 16 avril 1787.
A cette é p o q u e , Jean Gom ichon étoit d é cé d é , laissant ses
enfans en m inorité sous la tutelle de Marie L a fo n t, leu r mère.
P ie rre D epcyre., e t M a nc-F rançoise G o m ich o n , sa fe m m e ,
firent signifier la transaction du 22 j u i n 17G3 à Marie L a fo n t,
«en cette qualité de tutrice de ses enfans m ineurs, e t ils l’assi
gnèrent en m êm e temps pour voir d é clare r-cette transaction
e xécu to ire contre e l l e , audit n o m , com m e elle l’étuit .contre
ledit défunt Jean G om ich on; en conséquence, se voir condam ner
h leu r payer la somme de 600 fr. portée par ledit a c t e , avec lea
•intérêts et fràis.
’
1
‘ 1
E t l’année su ivan te, le 19 avril 17 8 8 , Antoine Gom ichon *
�C5 )
l’un des appeTans , sé transporta à M urât ; il fit com pte avec
Françoise Gom ichon de tous les intérêts du capital de 600 f r . ,
dûs et échus jusqu’au jo u r, qui se 'trouvèrent monter à une
somme pareille de 600 f r . , et Françoise Gom ichon lui en donna
quittance tant en son nom propre et p riv é , que com m e fondée
de procuration de son mari.
. v:
< D eu x ans après cette quittance, et le 3 o juillet 1790, Pierro
D ep eyre est décédé à Bayonne.
En 1793, et le 9 m ars, Françoise G om ichon a , pour la pre
m ière f o is , conçu l’idée de rechercher sa fam ille du .Bour
bonnais.
i
Elle a pris pour prétexte une prétendue succession d un Antoine
G om icJi'in, oncle et gran d -o n cle co m m u n , qu’elle supposoit
décédé à Passy près Paris;
:'i< t
>
- Elle a fait citer en conciliation M arie LaTont, veuve de Jean
G o m ich o n , sur les différentes demandes qu’e lle ‘se propo'soit
de form er, soit en partage de cette succession,
r
Soit en nullité de la transaction du 22 juin 17G3,
Soit en reddition et règlem ent du com pte de tutelle qu’elle
préte'ndoit lui être dû par Jean Gom ichon , e t de c elu i q u 'elle
■
pouvoib devoir du c h e f de f e u Silvaiu Gom ichon ,
Soit en désistement des biens provenus dè ses père et m ère,
avec restitution de» jouissances, avec intérêts et dépens.
Cette citation a été suivie de procès verbal de n o n -c o n c i
liation , et d’ assignation au tribunal de Montluçon , 'en date
du 3 septembre suivant.'
-:
" ir/!
,!
v>
C ette action ne fut poursuivie1 par la veuve D ep ey re ’, que
jusqu’au mois m essidor an 2.
'
Silence absolu depuis cette époque jusqu’au mois de frim aire
an 9.
1 '
1
i:lElle fit alors une première tentative en r e p ris e ,'q u i’ fut annullée par jugem ent' du tribunal deL M onthiçon $°et elle fu t
Condam née;aux dépens.,
t>i;‘
: c. ' ; 1 .nu
�( 6 )
' Elle form a une nouvelle action en re p rise , au mois messidor
an 11.
?!
'
; Les parties s’occupèrent alors principalem ent de la« succession
d ’Antoine Gom ichon , oncle et grand-oncle com m u n , qu’elle
prétendoit être décédé à Passy près P aris, dont la veuve De^
peyre dem andoit le partage.
>
O n lui opposa que pour dem ander le partage d’une succession,
il falloit établir, i°. le décès de l’individu de c u ju s;
..j2 0. Q u ’il n’avoit pas laissé des héritiers plus p ro ch e s;
-,
5 °.
Q u ’il avoit laissé une fortune quelconque.
O n ajouta qu’il étoit de notoriété qu’Antoine Gom ichon avoit
jadis entrepris un co m m e rc e de bœufs , qu il y avoit fait de
¿nauvaises affaires, et que se voyant accablé de d ettes, il s étoit
expatrié pour se soustraire aux poursuites de ses créanciers.
L a Vcuvu D cj ,oyrc , convaincue par ces raisons , se rendit
justice : elle se départit de son action ; et un jugem ent contra
dictoire , du 5 ventôse an 12 , donna acte de c e départem ent,
et ordonna que les héritiers Gom ichon défendroient au fo n d ,
dépens réservés.
;
C ette réserve des dépens est un peu étonnante, d’après le dé
partem ent prononcé juridiquem ent de l’action principale q u i,
jusqu’a lo rs, avoit occupé les parties ; mais ce qui est encore
plus éto n n a n t, c ’est que les héritiers Gom ichon ont été con
damnés depuis à ces mômes dépens , com m e on le verra par
la suite.
'
<n
Q u o iq u ’il en soit, les parties ont ensuite procédé sur l’objet
de la contestation rela tif à la transaction du 22 juin 1763,, dpnt
la veu ve D ep ey re dem andoit la nullité.
>,.
?
Les héritiers G om ichon l’ont soutenue non recevable dans
cette demande en nullité , attendu qu’elle avoit ratifié cette
transaction , soit par la dem ande.qu’elle avoit fon n ée conjoin
tem ent avec sorç^nari.^le 1.6 avril 17 87 , jten da nte, à fu i>e déclarer
pette transaction exécutoire contre les enip.n$ G o m ic h o n c o m m e
�'e lle l’étoit contre le u r p è r e , soit par la quittance notariée du ig
avril 1788, de tous les intérêts du prix de la transaction, échus
jusqu’alors.
'Nonobstant ces moyens qui sembloient d écisifs, il est inter
venu un second jugem ent contradictoire, le i 3 fructidor an 12,
q u i, sur le m otif que la ratification de la veuve D epeyre n’étoit
pas form elle, « sans avoir égard à la fin de non-recevoir pro« posée par les héritiers G o m ich o n , déclare nul l’acte du 22 juin
« 1763 , qu’on date mal h propos du’- 22 juillet. »
C e m êm e jugement joint au fond une demande en provision
qui avoit été formée par la veuve D epeyre.
E t pour être lait droit sur les fins et conclusions de la de
manderesse , ordonne tjuc
parties en viendront à l audience,
tous dépens réservés.
Ce jugem ent a éîé signifié à avoué le 26 floréal an i 3 ; et les
choses sont restées dans cet état j u s q u ’a u 2 juillet 1 8 0 7 , que la
cause portée de nouveau, à l’audience, il est intervenu un troi^
sièmè jugem ent conçu en ces termes :
j : ’ « L e tribunal donne acte de la déclaration faite par M e. M eu« nier, qu’il n’ a plus charge d’occuper pour les défendeurs;
« donne défaut contre eux ; pour le profit, tient l’instance pour
l €( reprise ; les condam ne à rendre com pte de la gestion qu’il
« a eue dé la personne et biens de Françoise Gom ichon ; à le
« présenter et affirm er dans le m ois, p ar-d evan t le président
cc du tribunal ;
« Les condam ne à se désister des biens immeubles revenans
« à l a d i t e G o m i c h o n d a n s les s u c c e s s i o n s de ses père et m ère,
« avec restitution dus jouissances, telles qu’elles seront fixées
« par experts ;
cc Condam ne lesdits défendeurs a u x dépens liquidés à 435 f .
cc 5?. c. , au c o û t, levée et signification du présent jugem ent, nCe jugem ent a été signifié à avoué le 8 juillet dernier, e t i
dom icile le 21 du m êm e mois.
�'> L es héritiers G om ichon ont interjeté un premier appel au domi
c ile élu par la veuve D e p e y re , le 5 août dernier: ^ tant de c e
dernier jugem ent que du précéd ent, du i 3 fructidor an 12 , et
-ils ont réitéré ce t appel à son d o m icile, a ve c assignation èn là
C our d’appel à R io m , par exploit du 26 septem bre dernier. ..
Ils ont, par un autre exploit du m êm e jo u r, dénoncé à Jean
et Joseph D e p e y re , et à la femme Arm et et à son m ari, lesdits
D ep eyre enfans et héritiers de Pierre D e p e y re , les poursuites
exercées contre eux par Françoise G om ich on, leur m ère et bellem ère , avec sommation de les faire cesser, sinon, et à défaut de
c e f a ir e , ils ont protesté de les rendre garans et responsables
de tous les évènem ens et de toutes pertes, frais, dépens, domjn ages-intérêts.
D ans cet état de choses, les appelans dem andent au co n se il,
i°. Si leur appel du premier ju g em en t, du i 3 fructid or an 2,
Cst recevable et fondé?
20. Si leur appel du second ju g e m e n t, du 2 ju illet 1807, est
¿gaiem ent recevable et fondé?
-
3 °.
Et subsidiairem ent, dans le cas où le prem ier jugem ent
seroit confirm é, si le second pourroit l’ê tr e , soit dans la dispo6ition relative au com pte de tu telle,
Soit dans celle relative au désistement prononcé contre les
appelant ,
Soit dans ce lle relative à la restitution des jouissances,
Soit enfin dans celle relative aux dépens?
4 °* E n fin , si les héritiers Gom ichon sont en droit d’exercer
une action en garantie contre les héritiers D ep ey re, et jusqu’où
doit s’étendre cette garantie?
�( 9 )
L e SOUSSIGNÉ , qui a vu et examiné le mémoire i con
sulter ci-dessus et des autres p a rts, ensemble toutes les pièces
du procès, e s t d ’ a v i s , sur les différentes questions proposées,
des résolutions qui suivent.
' Sur la prem ière question, qui consiste à savoir si l’appel des
héritiers G om ichon, du jugem ent .du i 3 fructidor an 12 , est
recevable et fondé , le soussigné estime qu’il y a lieu de se dér
cider pour l ’affirmative.
D ’abord il ne peut pas y avoir de fin de n o n -recevo ir à
opposer aux héritiers G om ichon contre ce t appel.
L e jugem ent est a la vérité d u x3 fructidor an. 1 2 ; mais il
n’a été signifié qu’à avoué le ’20 floréal an i 3 , et il ne l’a été
dans aucun tem p s'à dom icile. O r , il n’ y a que la signification
à dom icile qui fasse courir le délai de tro is mois , accordé pour
interjeter appel d’un jugem ent contradictoire.
O’est ce q u i est textuellem ent décidé par l’ article 14 <je Ja
loi du 16 août. 1790 , dont là disposition a été expressém ent
renouvelée par l’ article 443 Jdu Code de procédure actu elle
m ent en vigueur.
C et appel est égalem ent fondé.
C e jugem ent, sans avoir égard aux différentes approbations
faites par la veuve D ep ey re, de la transaction du 22 juin 176 3 ,
a déclaré cet acte n u l, sur le fondement que ces approbations
n étoient pas une ratification assez form elle.
■ L e s p r e m i e r s j i i g e s ont p en sé, et avec raison, que le traité
du 22 juin 1763 étoit nul dans son principe , respectivem ent
à Françoise G om ichon, parce qu’il ¿toit fait par le mari seul, et
q u il comprenoit des droits immobiliers appartenans à la fem m e.
Si ces droits immobiliers eussent été situés en coutum e d 'A u
v e rg n e , ils auroient encore eu raison de regarder com m e sans con
séquence les différentes approbations que Françoise G om ichon
B
�(
IO )
auroit pu faire du traité de 176 3 , parce que ces droits immo
biliers étoient d o tau x, que la loi les auroit rendus inaliénables,
et que dans c e cas elle n’auroit pu approuver c e traité et le
ratifier valablein nt qu’après le décès de son mari”.
M ais les biens im m eubles dont il est question dans ce tra ité ,
étoient situés sous l’empire de la coutum e de Bombonnais >
et cette coutum e les rendoit aliénables , avec le consentem ent
de la fe m m e , d’après ces expressions de l’article 225 de cette
coutum e : « Mais il ne peut ( le mari ) vendre ni aliéner les
«.t héritagesd e sadite fem m e, sans son -vouloir et consentem ent.»
D ’où il résulte qu’il ne faut dans cette co u tu m e, de la part
de la fe m m e , p o u r . rendre l'aliénation valable, que la preuve
de son vou lo ir e t consentem ent.
E t cette disposition est la m êm e, soit que la fem m e soit
m a r i é e e n coutum e u ' A uvergne , ou qu’elle le soit en coutum e
de B ourbon nais, com m e l’attestent un acte de notoriété de la
sénéchaussée de Bourbonnais, du 6 juillet 170 6, rapporté par
A u r o u x , sur l’article 238 de cette co u tu m e , et le dernier co m
m entateur de la Coutum e d’A u v erg n e , sur l’article 3 du titre
14 , tome 2 , page 225.
Ces premiers principes une fois posés, il ne s’agit que de
savoir si le vouloir e t consentem ent de Françoise Gom ichon sont
suffisam ment établis par les actes que les appelans rapportent.
L e premier est la signification juridique, faite par le mari et
la fe m m e , de ce t r a it é du 2 2 juin 176 3, à Marie L afon t, en
qualité de tutrice de ses enfans, héritiers de Jean G om ich on,
leur p è r e , avec assignation devant le juge des lie u x , pour voir
déclarer ce traité exécutoire contre e u x , com m e il l’étoit contre
leur p è re ; en conséquence, se voir condam ner
leur pa_yer la
somme de Goo francs portée par ledit acte , avec intérêts et
dépens.
C et acte n’a pas besolndc com m entaire : Françoise Gom ichon
ne pouyoit pas m ieux exprim er son vouloir e t conscntemene
�(
II )
à tout le contenu au traité du 22 juin 176 3, qu’en en deman
dant elle-m êm e l’exécution en justice, conjointem ent avec son
m ari, contre la veuve et les héritiers de celu i qui l’avoit souscrit.
Mais cette prem ière preuve du vouloir e t consentem ent de
la fem m e D ep eyre a bientôt été suivie .d’une seconde preuve
encore plus énergique.
,
L e 19 avril 178 8, Françoise G om ich on , tant en son nom
propre et privé , que com m e fondée de procuration de son m ari,
a réglé compte avec Antoine G om ichon, l’un des appelans, de
tous les intérêts qui étoient échus jusqu’au jo u r , du capital
de 600 francs, porté par le traité du 22 juin 1763.
. Ces intérêts se trquvèrept m onter, les retenues .légales dé
duites, a la somme de 600 Tranca, qui fut com ptée à Françoise
G om ichon , qui en consentit quittance devant G a n ilh , notaire
a u , bourg de Çhajinargue, « sans préjudice à elle des 600 fr.
« jde capital ,^et des intérêts qui pourvoient en échoir à l’avenir,
ce jusqu’à parfait p a y e m e n t, et de son hypothèque. »
r ¡Q,n,a yu ,q u ’jl ne; falloit;.,Men.coutum e de Bourbonnais ..pour
Valider :l’aliénation faite par le mari des biens de sa fe m m e ,
que son 'vouloir e t consentem ent.
¿O r, ici. ce vouloir e tl consentem ent sont exprim és de la m a
nière la plus absolue, et dès-lors l’acte de 1763 doit être consi
déré com m e aussi ; parfaitem ent régulier que si Françoise
Gom ichon y avoit paru, puisque tout c e qu’elle auroit pu faire
auroit été d’y donner son vouloir e t consentem ent, com m e
elle l’a fait par la demande en déclaration de titre exécutoire
du 1G avril 1787, et par la quittance notariée du 19 avril 1788.
C e seroit vainem ent que la ve u ve D ep eyre croiro it, pour
justifier les premiers ju g e s, pouvoir tirer parti de la disposition
de l’article i 338 du C o d e , sur les ratifications, car c e t article
prononce encore form ellem ent sa condamnation.
I Après avoir d it, en e ffe t, dans quelle form e et dans quels
termes ¡doit être, conçue la ratification d’une obligation, pour
<kre v a la b le, la loi. ajoute ;..rn
■„¡j
B z
�( 12 )
« A défaut d’acte de confirm ation ou ratification, i l suffit
« que l'obligation soit exécutée volontairem ent, après l’époque
'« à laquelle l’obligation pouvoit être valablem ent confirm ée ou
’« ratifiée; »
Ici les parties étant régies par la coutum e de Bourbonnais,
l’acte du 22 juin 1763 pouvoit être valablem ent confirmé et
ratifié dans tous les tem ps, à la d ifférence de la coutum e d ’Àu.vergnè , qui n’auroit permis de le confirm er et de le ratifier
q u ’après le décès du mari.
1
'D è s -lo ts f, à défaut d ’acte de confirmation ou ratification, il
suffisoit que l’acte lu t ex écu té 'volontairement.
1
" O r, on ne peut pas nier que le traité'de 1763 n’ait été e x é
cu té volontairem ent par Françoise G o m ich o n , soit par la de
m andé du t6 avril 178 7, soit p a rla quittance du 19 avril 1788.’ E t co m m e aux term es de c e mente article « la confirm ation,
«¡■
‘ratification ou exécu tion v o lo n ta ire, ‘dans les form es et à
« l’époque déterm inée par la lo i; emporte la rénonfcihtîon' a u x
I . J.
,
.■ 1 ■
V
•>
« m oyens et'excep tio n s qu on pouvoit opposer c ô iitrë c fe tà c te ,
te sans préjudice néanmoins aux droits des tiers,
il en résulté
que Françoise Gom ichon est absolum ent non récevable à revenir
contre ce traité du 22 juin 1763, e t’ q u e 'le jugem ent1 qui l ’a
déclaré nul ne’ peut subsister.
: ,•
E t c ’est ùn grand’ borilieùr qüé: cela"soit ’ainsi. O n verra par
la suite.com bien ce traité étoit p ré cie u x pour1toutes les parties*,
et avec quelle vérité les- rédacteurs de cet acte ont dit dans le
préam bule, « q u e toutes leurs demandes et p o u r s u i t e s mettroibnt
«
«
«
«
les parties'dans le cas d avoir plusieurs sentences et arrêts de
l'a! Cour de p a rle m e n t, qui aiiroient pu occasionner la pt^rte
totale dé leurs biens : . ‘
. pour à q u o i'o b vier, elles
o nt'traité et transigé , etc. »
• • "
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1 ï •i lj. : ■
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0
Sur la seconde question, q u i a pour objet tle savo ir si l’appel
du jugem ent d ira ju illet i8Ô7Jest égalèiiïént rèdCviiblë ët fondé»
il y a aussi lieu de décider affirmatiVententi0^ i:^
1 '■ ’
�.
. .
( 13 )
D ’abord, il ne peut pas y avoir de fin de non-recevoîr à
opposer aux appelans ,
Soit parce que ce jugem ent, à la rigueur-, dévroit être ré
puté com m e non avenu, aux term és'cle Paiticle i 5 6 du Code
de procédure , "attendu qu’il est rendu par défaut / et qu’il V a
pas été mis à exécutidii ‘dans" le s 1 six mois’ de son obtention’,
n ’ayant été signifié qu’au 'm o is de juillet "i8oç);;
Soit parce que les appelans ont interjeté leur appel presque
immédiateriïënt a p r è s la signification qui1 leur en1 a été faite.
J A u fond ; l’appel est fondé.
^
11<J.'
‘
'[
r C ’es'f une Conséquence fok^ée dé c e 'q u i à été dit précédem
m ent sur l’iippcl du jugem ent du i 3* fructidor an 12.
12
Si en e fle t il est démontré q ù e c e prem ier jugem ent a mal
à propos annullé le traité du 2.2 juin 1763, et que c e t'a c te doit
conserver toute sa force et vërtu ,ntb u ïné^ti;térmihÔcBritro- les
partiesî "¿¿“ toutes le s 1 condàmtliiàtionâ‘ •prononcées rcbntre'''les
appelant par le" second j u g e m e n t 1/ t o m b e n t ;d’ëites-mémefe ;et
.
*
; r:'' '•■)!/
, ! ;\
. ...
disparoisaent.
.
.
. \
Mais coinmev e n ‘Cour souveraine i r faut1 d é fe n d re ^ toutes
fins, il nous reste à ex’a ttiiner subsidiairemenli quèï s e rb it'le
sort dés1^£imès:'dans‘ léfrcas ôîfi,1 ¿ïm'tr&Mtbût£{m èt/ië1? lé ju g e
ment d ü ;i S fructiidoi;>a ri',i2 ,:i^u:i d éciarë’ Ie''tfaîtë nUI:,:!Wroic
confirm é. ..
f t n o ^ n io O Ooicntîjvrl 1; i:o;U;.<0: >
f Les psarti'è4uréntr,é rôient RâIors *'dâns°l& d^düle'dês3discuksiôns
qu’elles ont'voulu éfeiridrè par cè traité."0
«
...
_ *
■
-I' .J--' 1. »t
r. .................
'.
. ,. -* • : : * . • - . J
titres et les procédures qui auroient ' pu Jdil moins 'répandre
quelques't’i 'âits'de lum ière ddnii
chàbs? ! n
01 t' i,v{
Q uoi qu'il 'en3soit,*si*lé^ partWô^sônt'jà^Uis;forcëesr d1én ré&
�C
1.4 0
venir à ces anciennes contestations, il faudra du moins com
m encer par infirm er toutes les dispositions de ce dernier jugem ent
jdu 2 juillet 1807.
■ ,r ...
/
L a prejnière est conçue en ce s,te rm e s:
. ( ce. Les condam ne à rendre com pte dp la gestion que leur père
« a eue de la personne et biens d e F ra n ço ise G om ichon ; à le
« présenter et affirm er dans le mois , par-deyant le président
a du tribunal. »
.
O n a vu dansées fV ts que si Jean Gom ichon avoit été tuteur
de Françoise G om ich on , sa co u sin e, Silvain G om ich on, père do
ladite F ran çoise, a vo i^ lu i-p iém e été tuteur de Jean Gom ichon,
son neveu ;
"r . '
«
!
• ;
Q ue Jean G o m ich o n avoit form é dem ande à Silvain G om ichon,
en reddition de ce com pte(de tu te lle , le 23 janvier 1745;
Q u e par. une s e n t e n c e du çbÛtelaill de ^Ontll^ÇOn , du 2.4 matS
de,la mjâmp année, Silyain G om ichon avoit été condam né à rendre
çp -compte , sipon ,à payer à son neveu .3ooo fr. ppur( re liq u a t,
avec intérêts et dépens ;
■
1
Q ue ee com ptô n’a jamais été rendu ; que dès-lors cette somme
de 3 ooo francs étoit censée acquise à Jean G om ich on , ^ v e c les
intérêts depuis 1 7 4 ^ jusqu’en 1763, que les pprtie^pi^t transigé
tant sur
compte- de ^tutelle que sur celuij <jue dçvpit Jean
G om ichon à Françoise G o m ich o n , sa cousine.
D ’après ces faits* ile s tc la ir que les juges de prem ière instance
n’ont pu a n n u l l e r ce traité de 176 5, sans l’annuller pour toutes
les parties 5rique çhacun a dû rentrer dans
droits ^ que. d^siors ils n’ont pu. ordonner que les héntipr^rendroient le çomptQ
de tutelle dem andé,pfir Françoise Ç om ichon , et qu’ils le préçenteroient et affirm erpient d 4Ils.(le mois,, par-devant le président
du tribunal, sans ordonner en m êm e'tem ps que Françoise G o*
I ' 1 •
'
. . • t>1 •I' :•1 .
r. , '., u ^ ‘
inlchon ren d rp lt, com m e héritière de Silvain Gom ichon . son
p è r e , le compte de tutell^ (I14 à Jean g o m ic h o n , dqnt il avoit
.1
. .
,
étfi fMt^ü^ftntérieiir.çment,
'
«
i
i
»
.
'
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,
*
- *»1
,
7
d ^ a u t d^. ce ^ le jugem ent
�( i5 ï
1 ;.-'ïr» r-o r;oiii.
. o/'V) ?riri v..-;.
i
du 24 mars i y 4 5 , qui condamnoit ledit Silvain ÇJomîchon à
5ooo francs pour reliquat, avec intérêts et fra is, seroit exécuté
selon sa form e etrteneyr,
^ ;.... .
,(f .
Indépendamment que ce mode,de prononcer sur ce c h e f entre
les parties, étoit de d ro it, puisque les. parties se devoient res
pectivem ent un jotiÇfipîerdpjtute^le^ ç^îj.uç Je-traité annpllé avoit
également, ç.e compte -respectif pour objet, François,ç Gomichon.
y avoit elle-même doni?^ les m a in s , en ç e quç par sa cédule en,
conciliation / du 9 mars. ijq 5 \ elle avoit c o n d u jc au règle,meiit
« et reddition du com pte de tutelle que leu Jean G om ichon, son
« cousin , a eue de sa personne et b ien s, çt de. celui que ladite
cc r e q u é r a n te p *” * ■
‘ i*’ *'***''
t h i j île Jeu Silv&in l Gçtnic/10/i. »
Ce prem ier c h e f du jugem ent du 3 juillet, 1,807^ contient, ençpre
un autre m al-jugé m anifeste, en ce qu’ihest établi .par le,traité,
du 22 juin 176 3 , que Jean G om ichon qyoit fourn^spn com pte,
à Françoise Gom ichon le i 3 août 1769, et que celle-ci et son
mari y avoient fourni des débats le- 23 du m êm e mois
D ès qu’il existoit un compte de tutelle re n d ^ e t débattu, les*
premiers juges ne devoient pas condam ner les appelans à . rendre
ce même com pte r et à le présenter et affirm er dans, le mois ,
devant le président du tribunal; ils devoient seulem ent ordonner
que les parties procéderoient en la forme ordinaire à l’apurement
du com pte rendu et débattu en 1769.
C e premier c h e f du jugem ent du 2 juillet 1807, n e^ o u rro it
donc manquer d’être infirmé sous un double point de vue, quand,
par im possible, le premier jugement du i3 iïuctid or an 12 , q u i(
annulle le traité du 22 juin 176 3 , seroit confirmé.
:r.
"i
Il en seroit nécessairement de m êm e de la seconde disposition
de ce jugem ent, ainsi c o n ç u e :
« Les condam ne à se désister des biens im m eubles revenans
« à ladite G om ichon, dans les successions de ses père et m è re,
« avec restitution des jouissances telles q u e lle s seront fixées
<< par experts. »
�C 16 )
Il faut distinguer dans çettec’(iispo3Îtion ce qui est relatif ali
‘ cle’â1i'rhm'eüiîlèâ, V i'c e 'q u i ’ë st relatif1a la 'restitution ’
E t d’abord, en ce qui est du désistement de^ im m éübles,T a'
disposition de ce jugéfrlënt ne peut se soutenir [‘ par plusieurs
faisons égalem ent décisives. f'
; ‘
'
1
lia prem ière âë tire dê 'ce’ que ¿éttè'^dëmande 'éii désistem ent
¿ ‘'été' fórfnée’'Và(;uèmeAt Yn 'gïobo , J« dés biens’im m eubles pro
ci ventié d e s 's u c c e s s io n s 'd e ’- ¿ es’ pèrè ê t ' i i i è r e » ; 1 tandis que
r ô r‘d orinaiicéRde *'16677 ¿oils l’empire ^de laiqùelle Ta' dem ande a
¿té fo rm éel’ pbrtfÿit éxpressém ent'1, article 5 'du titr e 'g , que dans
toute dëm ànde en m atière réelle ou désistement d’ im meublës,
l’ exploit de dem andé devoit co n ten ir, à peine de n u llité , le
ïVcJttf,rTa3situdtiônyià1 Contenue, les teriâns et aboutissans, et la
lia ture aVi J m om en t/le l'exploit dé chaque héritage dont le f
dësïstëmêtit"'étbit demiittdé ;
'3
*■
Disposition qui'a été im périeusem ent renouvelée sous la même
peinéf‘1dë n u llité , par l’art. 64 du nouveau Code de procédure.
?/En sdcond liéü , leâbiëns d e là maison Gom ichon étoiènt restés
indiVik!;JSilVain Gomichori1^' péré de la veuvé D ep eyre , les a.jOiiisTqng-tëmps bn'tôtalité pendant sa tutelle de Jean Gom ichon,
i Ji. i ; •
ii,r
'i.
son neveu.
I l a m ô m e continué d’en jouir après l’ém ancipation de son
n e v e u , jusqu’à sa mort arrivée en 1748.
‘
11
■ J e a n , »de son c ô t é , devenu tuteur de là fille de S ilv a in , en
ar joui à son tour, t o u j o u r s p ar i n d i v i s ; e t le s c h o s e s étoient en
c e t état nu m om ent du traité du an juin 1763.
D ans cet état de choses , en supposant le traité de 17G3 anm illé , Françoise G om ichon ne pouvoit pas form er contre les
représentais de Jean G om ichon une demande en désistem ent,
mais une action en partage dés biens indivis, qui est la seule
je ç u e entre cohéritiers. 1
f
£,a-jurisprudence dò l i C òiir óst constante à cet ég ard ; elio
•
ttnnulle
�( *7 )
emnulle journellem ent de pareilles dem andes en désistem ent, e î
renvoie les parties à se pourvoir par l’action en partage.
C om m ent, d’ a illeu rs, les appelans pourroient-ils aujourd’hui
exécuter c e jugement? D e quels objets pourroient-ils se désister,
lorsque tous les biens de la fam ille n ’ont jamais cessé d’étre
divisés ?
Sur quelle base pourroit se faire ce désistement? Q u elle est
la portion que Françoise G om ichon prétend lui appartenir dan9
ce s biens? E st-ce le tiers , le quart, la m oitié?
A u ra -t-elle le choix de la maison, du jard in, de telle ou
zelle nature de biens?
O n sent que tout ce la seroit absurde, et qu’en pareille ma
tière il n 'y a de ju ste, de raisonnable, de possible dans l’exér
c u tio n , que l’action en partage.
C e c h e f du jugem ent relatif au désistem ent des im m eubles
ne peut donc encore m anquer d ’étre infirmé.
Il ne. peut pas m ieux se soutenir dans la partie de cette dis-,
p o s itio n qui est relative à la restitution des jouissances.
E n e f f e t , cette disposition est encore v a g u e , indéfinie ; on
ne voit pas quand cette restitution doit co m m en cer, et quand
elle doit finir.
Cependant cette explication n’est pas indifférente.
.O n ne peut disconvenir que le traité du 22 juin 176 3, quand
il seroit annullé pour Françoise G o m ich o n , ne doive avoir sa
pleine et entière exécution pour Pierre D ep ey re, qui a vo it,
com m e m ari, l’usufruit des biens de sa f e m m e , et qui a pu
valablement traiter de ce t usufruit.
Il n’y auroit donc, m êm e dans la supposition de l’annullation de c e traité , aucune restitution de jouissances à prétendre
d e la part de Françoise G o m ich o n , depuis 176 3, époque du
tra ité , jusqu’en 1790 qu’il est décédé ; ce qui dim inue.de vingtsept ans la restitution vague et générale prononcée par le juge*
ment dont il s’agit.
G
�- On pourroit ajouter que dans tous les cas il n ’y auroit encore
pas lieu à cette restitution de jouissances y depuis, le décès dé
P ierre D e p ey re, jusqu’au mois de septembre 1793, que Fran
çoise Gom ichon a formé sa demande én ar.nullation du traité
de 1763, avec d’autant plus de raison, que les biens dont* il
étoit question dans c e traité étoient situés en Bourbonnais , 'où
l ’aliénation en étoit p e rm ise , et que le traité de 1763 étoit par
faitem ent connu de Françoise G o m ich o n , puisqu’elle l’avoit app ro m é en 1787 et 1788.
:
f
Il ne reste qu’à dire un m ot sur l’article des dépéns.:Ili'
L es appelans y ont été condam nés indéfinim ent et une
grande partie de ces dépens avoit eu pour objet la demande en
p aitage de la succession d'Antoine G o m ich o n , dont elle avoit
été obligée de se d épartir, et dont le départem ent avoit été h o
m o l o g u é par un jugem ent contradictoire du 3 ventôse an 12.•
C est donc dans tous les points que ce jugem ent ne peut
m anquer d ’étre infirm é ; il faut m êm e convenir que la rédac
tion en seroit inexcusable, si on ne considéroit qu’il a été rendu
par défaut contre les appelans ; c e qui doit aussi faire disparoltre toute espèce de préjugé que pourroit faire naître ce tte
prem ière décision.
»
'‘
tf
S u r la dernière question du m ém oire, relative à l’action en
garantie contre les héritiers D e p e y r e , et sur l’étendue de ce tte
garantie , le soussigné estime que cette action est fo n d é e , et
que l’étendue de cette garantie n ’a d ’autres bornes que le quan
tum interest des héritiers Gonichon.
II
ne faut pas perdre de vue qu’on raisonne toujours dans
la supposition invraisem blable que le jugem ent du 1 3 fructidor
an 12 , qui annulle le traité du 12 septem bre 176 3 , soit
confirm é.
P ierre D epeyre a stipulé dans ce t a c t e , ta n t en son nom
qu’en q u alité de m ari et maître des droits et biens dotaux de
�(
*9
)
Marie - Françoise G om îch on, son ép ou se; e t à Vexécution et
e n t r e tellem ent
de tout le contenu en cet a c t e , i l a obligé
tous ses biens présens e t à venir.
,
;uEn contractant ce t en gagem en t, il s’est soumis à toutes les
conséquences qui en pourroient résulter; il a promis de faire
valoir cet acte dans tout son contenu ; dès - lors il est devenu
garant de tous les effets de son inexécution, j
O r , quels seroient les effets de cette inexécution , dans le
plan ■
de la veuve D ep eyre? D e nouveaux comptes de tu te lle ,
l’éviction des biens alién és, des restitutionssd e jouissances qui ;
suivant ses prétentions,, monteroient à ¡plus d’ un d em i-siècle,
et d’énormes dépens. :..Mj '
r-'
T ous ces effets devroient être supportés par les héritiers
D ep eyre.
.; J
< .
;
.
:î •
• j tÇ ’ e s t 'ainsi
que le t décident; Jes anciennes, et les nouvelles
lois. Evicta res e x empto actionem a d pretium d u n ta xa t recipiendum , sed a d id (¡uod in terest, cornp etit. L oi 70, au dig.
d e 'e v iè tiw '
m
i
Rousseau de la Com be, au m ot éviction, n°. 6, explique c e
ç u o d interest en ces termes :;;
„ /'.« En cas d’éviction , l’acquéreur peut dem ander au ven d eur,
« non-seulem ent la restitution du p rix , mais aussi ses domcc mages - in té rê ts..........................tout le profit que l ’acquéreur
cc eût reçu de la ch o se, si elle ne lu i avoit pas été évincée.
:E t le nouveau Code en^ donne une définition encore plus
e x a c te , article i 65o , qui est conçu en ces termes : x
r: cc Lorsque la-igarantie'à été prom ise, ou q u ’il n’a rien été
cc stipulé à c e s u j e t , si l’acquéreur est é v in c é , il a droit dû
« demander contre le v e n d e u r,
1
~
<c 1®. L a restitution du p rix;
;;•« 2°^ Celle des fru its, lorsqu’il est obligé de les rendre au
<1 propriétaire qui l ’évince ; .
1
cc .3 °«!:Lés frais faits sur l a ;demande en garantie de Tacher
çc te u r , et ceu x faits par le demandeur originaire ;
C 4
�C‘ 2 ° X
« 4°. Énfin les dommages «intérêts, ainsi qué les frais, e f
« loyaux coûts du contrat. »
V/\v
C e seroit vainem ent que les héritiers D ep eyre voudraient
exciper de c e que la cession faite par Pierre D ep eyre à Jean
Gom ichon-, de tous les droits m obiliers et im m obiliers de sa
fem m e , l’a été aux risques, périls et fortunes de ce dernier.,*
sans autre garantie de la part de Pierre D ep eyre que celle, d e
ses faits et promesses.
>
- >
>
i .
■
: >, >
- Il est évident que ce qui est aux risques , périls et fortunés
de Jean G o m ich o n , c ’est île plus ou,m oins de valeur des objets
cédés ; c e sont les dettes des père et m ère de Françoise G o
m ichon , qui dem eurent aux risques et périls de Jean G om ichon
sans répétition contre D ep eyre et sa fem m e, iM ais au m o y e n de la garantie de ses faits et prom esses, g a
rantie qui étoit d’ailleurs de d ro it, et au m oyen de Rengage
m ent <1« foire exécu ter e t entretenir ce t acte dans tout son
co n te n u , il s’est incontestablem ent soum is à le m ain ten ir, à
le faire valoir envers et contre tous, et par conséquent àto u té»
les suites que pourrait entraîner son inexécution.
C e seroit e n co re en vain que les héritiers D epeyre préten
draient qu?il n’y a lieu , dans l’espèce , pour toute garan tie, qu’à
la restitution des deniers , parce que Jean G om ichon connoisso itle v ice du traité, en ce qu’il traitoit des droits de la fem m e
D ep ey re avec son m ari, en l’absence de cette d ern ière, et qu’ic i
Le prix du traité de 1763 n’ayant pas en core été payé , cette
garantie devient illusoire.
'1
: ‘ Ce m oyen seroit p eu t-être proposable, s’il s’agissoit d’un bien
d o tal, situé sous l’empire de la 'coutum e, d’A u v e rg n e ,'à raison
de l’inaliénabilité rigoureuse des biens dotaux, fondée sur un
statut négatif prohibitif.
" *’ T •' »
. E ncore les opinions étoiont-elles d iv in e s su r'ce lte question;
et la plupart des jurisconsultes regardbient, dans c e c a s , le
m ari com m e passible des dom m ages-intérêts<de l’a ch e te u r,
'n;J
•>:!.'1 z j ; j : . , nr- »
v
�( ar )
parce qu’il- rï’étoîf* p a s'e x c u sa b le Jd’avoir‘contracté d e se n g a g e mens^qu’il'n ’ëfoit 'pas çn ^ tat'd éfin ir-,^ eti'q u è ces1eirigâgemens
ne pouvoient pas: étré ;lb jouet des verïts.°J an ni) f ni! 1, . iio:
M a is'ïci'lès-b ie n s1 qui drit-'dortrië !liç.u a u tra ité tdë iy 03 , sOM
situés sous l’em pire de la coutum e de Bourbonnais*1 Lès-bien»
dotaux, dans cette co u tu m e, sont soumis au droit co m m u n ;
ils sont aliénable^ com m e ides^bieiis "'de-toute a'ùtrë n a t u r e l
O r , dans le droit com m un , une vente q u e lc o n q u e , m êm e
«T-J \
<r
du bien d’au tftii{ld6nriOTt lieu à des dom m ages-intéréts, lorsque
l ’acquéreur se trouvoit évincé par le véritable propriétaire.
R em cilienam distraliere quem p o sse, nulla d ub italia est t
nam em ptio est, e t v en d itio ; sed res ernpton a u fen potest.
Loi 28, au dig. D e eontralunda cmplione.
f^endita re aliéna , disent les interprètes, tenct contractus
in prejudicium v en d ito ris, non dom ini.
en dit or de evictione tenetur.
« La chose d’autrui peut être v e n d u e , et la vente en est
« v a l a b l e , dit D espeisses, tom. i er.,p a g e 1 4 , n°. 7> à Ce que
« le vendeur soit tenu d ’cviction. »
Rousseau de la Com be nous dit a u s s i, dans son R ecueil de
jurisprudence, au mot Vente , section i re. , n°. 2 , que « q u o i« que la vente du bien d’autrui soit valable , à Veffet de la ga« rantie de Vacquéreur contre son v en d eu r, l’acquéreur peut
« être évincé par le propriétaire. »
C ’étoit donc un point constant et de droit com m un dans
notre ancienne ju risp ru den ce, que le ven d eu r, même du bien
d’a u tru i, ne pouvoit être à l’abri de l’action en éviction , et
des dom m ages-intéréts dûs à l’acquéreur.
Au surplus, les héritiers D ep eyre peuvent ici d’autant moins
échapper à cette a ctio n , que Pierre D ep eyre n’a rien fait que
du/vouloir et consentem ent de^sa fem m e , com me.lü: p ro u v e ^
]a .dem andec:dur,i;6 a v r i l s 787.,;e t lia «jujftançç
que s’il y avoit, com m e-oadeisuppose.^ ¿atia.'l'ecjügement du i3
�V
( 2 2 )
fructidor. an 12 , insuffisance ,dans c e s :deux, ratifications cette
insuffisance seront du; fait ¡de ;Pier r e D e peyre a t t e n d u qu’il ne
tenoit qu’à l u i , dans tous les tem ps, de l a rend re.plus fo rm e lle ,
plus parfaite , et telle que c e. traité, de 1763 f u t à l ’abri de
toute atteinte.
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C le rm o n t:F e rra n d ,.le 2 octobre 1809,--,;
D É L IBERE
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A R iom de l'imprimerie T H I B À U D ,
imprimeur de la Cour d’appel,e t libraire^'
rue des T aules;m aiso n L A N D R IO T Janvier 1810.. '
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�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gomichon, Antoine. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Subject
The topic of the resource
successions
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter, pour Antoine, jean et Louis-Xavier-Silvain Gomichon, appelans, et demandeurs en garantie ; contre Françoise Gomichon, veuve de Pierre Depeyre, intimée ; et encore contre Jean et Joseph Depeyre, N….. Depeyre, et Guillaume Armet, son mari, défendeurs en garantie.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1745-1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0548
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montluçon (03185)
Treignat (03288)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53858/BCU_Factums_M0547.pdf
18589e41d14826e5024e95c3829eda6a
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OBSERVATIONS SOMMAIRES
P O U R
Sieur
A
n t o in e
GARDET
a în é
, propriétaire, habitant de V e y re ,
défendeur et demandeur
C O N T R E
Jacques
GARDET
JEUNE
, médecin
, habitant du lieu de Beau-
veseix près Randan , arrondissement de Riom , demandeur
et défendeur.
u
N ju gem en t, rendu par le tribunal le
1 5 frimaire
an 12 ; confirm e sur l’appel par arrêt du 13 frim aire an.
1 3 , a o rd o n n é, entr’autres choses, une estimation par
experts, 1.° des biens meubles et immeubles de Jacques
G ard et, père com m un des parties , d'après leur valeur à
son d écès, arrivé le 1 5 juin 1 7 9 2 ; 2.0 des biens meubles
et immeubles donnés en l’an 4 à Gardet jeune , en paie
m ent de sa légitim e conventionnelle , d'après leur valeur
à la même époque ; 3. enfin , des biens de M arie
B arbarin, mère commune.
�—
----------- ----------- —
r m --------------;
;
Il a ordonné aussi q u e , dans le cas où il résulterait de
l’évaluation des biens paternels, que la valeur des objets
donnés en paiement de
Jacques Ga/det
la légitim e conventionnelle de
jeune ( distraction faite de la portion
de ces biens qui est applicable à ses droits maternels ) ,
ne le rem plît pas de sa légitim e de d ro it, et qu’il lu i est
dû un supplém ent, les experts désigneront un ou plusieurs
im m eubles, pour lu i être attribués jusqua concurrence de
ce supplément.
Les experts M azin et P a llet, chargés de ces opérations,
n’étant point d’accord sur le taux des évaluations , ont
fait des rapports séparés , fort difïérens ; car l’expert
M azin , choisi
la masse
des biens
celle des biens
1expert
par le Sieur Gardet jeune , a évalué
paternels
maternels à
à
123,900
9 ,5 1 7
francs ,
et
fran cs, tandis que
Pallet n’a évalué les biens paternels qu’à 70,482
f r ., et les biens maternels qu’à
5, 534-
fr.
A la vue de deux x-apports si discordans , le Sieur Gardet
jeune
a cru
qu’il y avait lieu à nom m er un tiers-ex
pert : il en a provoqué la nomination d’o lfice , et il l’a
fait prononcer par jugem ent rendu par défaut à
une
audience extraordinaire non indiquée du 5 i août : le Sieur
Gardet aîné y a form é opposition par des m oyens de
form e inutiles à ra p p eler, parce que son adm ission n’est
pas contestée, et par un m oyen tiré du fo n d , qu’il croit
décisif, et qu’il s’agit d’apprécier. C e m oyen consiste à
dire en point de f a i t , qu’une tierce expérience serait une
dépense frustratoirc et sans utilité , parce q u e , tout dis
cordans que sont les deux rapports , il résulte également
de
l’un
et de l’autre , que
Jacques Gardet
jeune est
rem pli , et beaucoup au-delà , de sa légitim e paternelle
�et maternelle par les objets qu i lui ont été donnés en
paiement de sa légitim e conventionnelle, et conséquem meut qu'il n’a point de supplément h prétendre , ce qui
était à vérifier;
E n point de d r o it, que la discordance des deux experts
M azin et Pallet sur le taux des estimations , n’est pas une
raison suffisante pour faire ordonner une tierce expertisse ,
dès q u elle est sans conséquence pour la décision de la
contestation, et que les rapports des deux experts portent
l’un com m e l’a u tre , au plus liaut degré d’év id en ce, par
leurs résultats, la démonstration de la vérité qui était à
vérifier; savo ir, que la demande de Gardet jeune en sup
plém ent de lég itim e, est dénuée de raison et de fondement.
O n ne saurait etre divisé sur ce point de droit. L a mission
des experts est de fournir des lumières aux juges sur les
appréciations et les faits , et de préparer la décision des
tribunaux par les éclaircissemens qu’ils leur fournissent :
mais leur autorité ne va pas jusqu’à la forcer. L ’article 223
du code de procédure ne perm et point de doute à ce sujet :
L es ju g es ne sont point astreints à suivre l'avis des experts,
si leur conviction s’y oppose, y est-il dit. Il suit nécessaiinent d e -là , que toutes les fois que les tribunaux trouvent
dans des rapports , quoique discordans, des éclaircissemens
suffisans pour décider avec certitude la question de fait dont
la vérification est ordonnée ; ils peuvent et doivent pronon
cer , sans pousser plus loin une instruction qui ne tendrait
qu’à des rccherclies superflues.
V oyon s donc s’il est vrai en fait , que les rapports des
Sieurs M azin et P a llet, m algré leur discordance, ont l’un
et l’autre pour résu lta t, que la valeur des biens donnés à
Jacques Gardet jeune en paiement de sa légitime conven-
�T T T
tionnelle , rem plit sa légitim e de d r o it, c’est-à-dire , le
dixièm e des biens paternels, et le douzièm e des biens ma
ternels qui lui revien n en t, et ne lui laissent point de supplé
m ent à esp érer, ce qui est le seul point 11 décider. U ne
courte analyse des deux rapports va dissiper tous les doutes
tvfAiJi-f-
sur ce fait.
'*//*!V ty s / h v r
A n alyse du rapport de l’expert M azin.
, / '¿for'yt/faJis
„ ^—
'VtùMt ¿wnuwL
,
Get ex p ert, s’abandonnant à des exagérations sans mesure,
a évalué la masse des biens paternels à cent vingt-trois mille
x
c
1°
neu f cents fran cs, dont le dixiem e formant la légitimé de
t-lroit de Q ardet jeune supputée sur le nombre de cinq
7 lù /ii r U d w r "
enfans qui survéquirent au p è r e , m ort en
) ’ ''h ü fcU (P -
de i 23go f r . , c i ...........................................
1 7 9 2 , est
l23f)o fr.
* ,/ & * * . .• ____ L cs hIens maternels ont été évalués par
'fïT Ü Z u c—
1 ^°° '/
m ^me expert à 9 5 1 7 francs : la légitim e
jJ
c\n ) de Gardet jeune sur ces biens n’est crue le
q i a - — ■i y ' \ 1
..
•,
1
î
> i • .
' /
*
__— J d o u zièm e, attendu que la m ère n a laissé
4^ ^ /
1
fIue quatre enfans survivans ; ce douzièm e
—
1 ü uù iw A —
,
m onte à sept cent quatre-vin gt-treize fr., ci
fa ** *
79D
L cs tleux légitimes de Gardet je u n e ,
d après les estimations de cet expert , ne~~— 1— ■■
m ontent donc ensemble qu’à .......................
i 3 i 83
V o yo n s maintenant quelle est, d’après l'estimation du
m em e e x p e rt, la valeur des biens meubles et immeubles que
1
G ardet jeune a reçus en paiement de sa légitim e conven
tionnelle, et qu’il est tenu de précompter sur sa légitim e
^1
Jl
de d ro it, d après les jugeinens rendus entre les parties. Nous
trouyerous qu’il a r e ç u ,
�( 5)
i.° T rois mille quatre cents fr. ecu s, ci
2.0 U u e vigne , appelée la Candie ,
estimée t\ l’article 8 du rap port, î\ .........
3400 fr.
"jZo
3 .° U n cham p, terroir de la Narse,estimé
à l’article 24 du même rapport, à . . . .
1600
4.0 U ne autre vigne à P o n tary, formant
l’article 22 du rapport, estimée à ............
5g 3
5.°
U n e troisième vigne à Soûlasse, en
deux pièces, formant l’article 5 du rapport,
estimée à ................. ........................................
i 63a
6 ° Six cents toises d’un pré-verger ,
appelé le C reu x C lievry , contenant en
totalité 225o toises, estimé h l’article 16
du rap p o rt, à raison de 6 francs la toise,
taux sur lequel les six cents toises attri
buées au Sieur Gardet, m édecin, montent à
rj° U n e maison à V eyre , appelée la
36oo
23
maison ancienne , estimée à l’article
du rap po rt, à ............................... ...
5400
8.° Enfin , la somme de quatre cent
quarante francs , reçue en m o b ilie r, sui
vant l’article 4 ° du mêm e rapport , ci
M o n ta n t
to ta l.
.
. .
440
i 7 39 5
11
ne lui re v ie n t, d’après le même ex
pert , pour légitim e paternelle et mater
n elle, que..........................................................
D onc il a reçu en excédant . . . . . .
i 3 i 83
4 212
�(6 )
A nalyse du rapport de l’expert P a l l e t .
C et exp ert, plus m odéré que son co n frère, n’a évalué
la masse des biens paternels qu’à 70482 f r . , dont le dixièm e
revenant à Gardet j.e , est de 7048 fr. ci
E t les biens m aternels, qu’à
7048 fr.
5234
fr. , dont le douzièm e form ant
la
légitim e de Gardet je u n e , est de . .
436
Les deux ensemble m ontent à .
7484
L e même expert a estimé les biens
donnés à Gardet jeune en paie
m ent de sa légitime
nelle , à
On
convention
....................... ......
a vu
qu’au lieu
.
.
.
10,000 fr.
de cette
valeur reçue , il ne lui était dû pour
ses deux légitim es paternelle et
m aternelle, q u e ...................................
D onc il a reçu en excédant . .
7>434
2,566
Objection et réponse.
L ’expert M azin term ine ainsi son rapport :
« Il est bon de rappeler que l’évaluation de
» succession paternelle est de . . 123,900
»> ce qui porte le dixièm e pour la
» légitim e du Sieur Gardet je u n e ,
>> à .............................................................. ......... 2, 3 cjo
>> A
com pte de laquelle
il
a
>> reçu pour légitim e convention
nelle
............................. 10,000 fr.
toute la
�( 7 )
D e Vautre p a r t.............v ï
Report. . . . .
10,000 fr.
>> P lu s, en m ob ilier,
>>ainsi qu’il est e x p liq u é ,
i> article 4
12390 fr.
du prem ier
» chapitre...........................4 4 °
Total
. . . .
10,44°
>> Il convient de distraire de cette
som m e, com m e il est expliqué à
» la fin du chapitre p récéd en t, 667
» francs ( imputables sur les droits
maternels ) , ci. . .
6 6 7 fr.
>> Partant le Sieur Gardet jeune
» n’a réellement reçu pour ce qui
»>lui revient de la succession patertj nelle , que . . . .
9,783
9,783
>»11 doit donc recevoir pour sup>>p lém en t, des immeubles jusqu’à
I
*
» concurrence de la valeur de . .
2,617.
Q u e répondrez-vous à ce calcul ?
Nous répondrons qu’il est une bévue
pitoj7abIe. Par
quelle étrange distraction l’expert M azin a-t-il pu supposer
dans son calcul, que Gardet jeune n’a reçu que dix mille fî\
de légitime conventionnelle, et lui attribuer un supplément.
Lorsque la ju stice, la raison , le
jugem ent du tri
bunal et l’arrêt confirm atif de la cour d’appel, en exécu
tion desquels il opérait, lui com m andaient, i.° d’estimer
les biens donnés à Gardet
jeune
çn paiem ent de sa
�(
légitim e conventionnelle,
autres biens dont
8
sur
)
le même
pied
se composait la masse
que
les
sur laquelle
devait sc supputer la légitim e de droit ; 2. de n’accorder
de supplém ent h ce légitim aire, que dans le cas où il
résulterait de l’évaluation des biens paternels , que la
yy valeur des objets donnés en paiement de la légitim e
yy conventionnelle, ne le remplit pas de sa légitim e de
yy droit ? yy
.
Lorsqu’il venait d’évalu er, d’un c ô té , la légitim e de
droit à 12,3go francs, et de l’a u tre , les biens reçus en
paiement par Gardet je u n e , à 17 , 3g 5 francs (a)?
Com m ent a-t-il osé d'office , et au mépris de ce que lui
prescrivait littéralement l'a rrê t, admettre deux estimations
différentes ; l’une pour supputer la légitim e , et l’autre
pour la payer ?
Com m ent a -t-il osé proférer cette absurdité choquante
L es biens reçus par Gardet jeune
en paiement
de sa
légitim e conventionnelle, valent plus de 17,000 fra n cs,
quand il s’agit de supputer sa légitim e , qui est du dixièm e
de la masse; et
quand il s’agit de la fournir en biens
h éréditaires, ils
ne valent plus que dix m ille francs ?
E nfin , comment s’est-il brouillé la tête, au point de ne
pas s’appercevoir
que la légitim e de
droit
de Gardet
jeune n’étant qu’un dixièm e de la masse générale des biens
paternels qu’il a évalués h i 23,goo francs,
et la valeur
pour laquelle les biens reçus par ce légitimaire sont entrés
dans la composition de cette même masse, étant de plus
de dix-sept mille f r . , il est non seulement rem pli de son
d ix iè m e , mais qu’il a reçu plus de 4,000 francs au -d e-
(a) V oir le tableau do ces evaluations , pages 4 et 5 ci-dessus.
�(9 )
là , et conséquemment que c’est offenser (out-à-la-fo's la
justice , le bon sens , la l o i , et l’arret rendu entre les
p arties, que de lui accorder encore un supplément ?
Seconde objection.
Vf*
H é bien ! soit : je, n’ai point de supplément de légi
time à prétendre sur les biens paternels , mais l’arrêt rendu
entre nous m’adjuge le partage des biens maternels pour
en prendre le douzièm e, à la charge de moins prendre jus
qu’à concurrence de la valeur d e là portion des biens pater
nels par moi reçus pour légitim e conventionnelle, qui est
imputable sur mes droits maternels. Exécutant cette dis
position de l’arrêt, l’expert M azin m’a attribué une petite
parcelle de vigne en valeur de 126 fran cs, pour com plé
ter m on douzième ; peut-on me la refuser?
O u i , on le p e u t, parce que l’expert M azin a fait une
erreur grossière de calcul dans son opération. Il a établi
en fait, que la proportion entre la masse des biens mater
nels et la masse des biens paternels est comme
un à
quinze. D ’où il a conclu que la légitim e conventionnelle
constituée pour biens paternels et maternels , devant se
l’épartir au marc le franc sur les deux m asses, aux termes
de l’arrêt, il y avait lieu d’appliquer le quinzième de
cette légitim e conventionnelle sur les droits maternels. Jusques-là point d erreur : mais il y en a une bien frappante
dans la supputation de ce quinzième. L ’expert M azin ne
l’a calculé qu a 66 7 fran cs; or il est évident q u e, sur une
masse de 1 7^9 ^ francs, qui est la valeur des biens reçus
par Jacques Gardet jeune pour légitime conventionnelle, le
quinzième est de 1,
fran cs, somme supérieure de J&2
francs à celle de 6 6 7 , seulement jusqu’à concurrence de
�( 10 )
laquelle l’ex p ert M azin a fait moins prendre Gardet jeune.
Il faudrait donc que pour prendre un
vigne évalué à
aîné 4
2
1 26 fra n c s ,
petit morceau de
il re n d it.a u Sieur Gardet
francs. C e rte s , il est trop près de ses intérêts
pour faire une pareille sottise.
Résumons.
Il
résulte également des deux rapports, que les biens
donnés à Gardet jeune en paiem ent de sa légitim e conven
tionnelle , excèdent de beaucoup en v a le u r, le dixièm e des
biens paternels, et le douzièm e des biens maternels qui lui
reviennent pour ses légitim es paternelle et maternelle :
donc il n’a point de supplément à prétendre, et il doit être
débouté de la demande qu’il en a inconsidérément et ambi
tieusement form ée, sans chercher dans une tierce expérience
de nouveaux éclaircissem ens, absolument superflus.
G A R D E T
aîné.
M .e B E R G I E R , Jurisconsulte ancien.
M O N E S T I E R , A vo u é.
*.
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A
c l e r m o n t
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Chez J. V E Y S S E T -D E L C R O S , l mprimeur-Libraire 3 rue de
l a T reille. 1807.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gardet, Antoine. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Monestier
Subject
The topic of the resource
successions
légitime
experts
médecins
Description
An account of the resource
Observations sommaires pour sieur Antoine Gardet aîné, propriétaire de Veyre, défendeur et demandeur ; contre Jacques Gardet jeune, médecin habitant du lieu de Beauveseix près Randan, arrondissement de Riom, demandeur et défendeur.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
chez J. Veysset-Delcros (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1785-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0547
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0546
BCU_Factums_M0319
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53858/BCU_Factums_M0547.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Randan (63295)
Riom (63300)
Veyre-Monton (63455)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
experts
légitime
médecins
Successions
-
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3a385abf4862d1a67c6f7aa1b379957a
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Text
OBSERVATIONS.
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OBSERVATIONS
■*( ■'*
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É
P
O
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S
E
,
r
POUR
Sieur
J a c q u e s
G A R D E T
jeune, docteur
il,*
en m éd ecin e, appelant de jugement rendu
au tribunal de C lerm ont, le 26 novembre
18 0 7 ;
C O N T R E
Sieur A n t o i n e G A R D E T aîné , propriétaire ,
intimé.
'
L E sieur Gardet a în é , est héritier universel de ses
père et m ère, et comme tel chargé de payer des légi
times conventionnelles à ses frères et sœurs.
u «
(
i » «
>
A ,
�fLoirvr w
r
>
( 2 ) ■
légitim e de Jacques p u în é, est fixée à io o o o fr .
t iv
~£l —
W cVoc¿66*.
!
^
pour les deux successions.
n’est Pas seu^ avantage qu’ait obtenu Gavdet aîné.
P ar son*contrat de mariage du 21 avril 1785, il est associé
lw t pour moitié à tous les acquêts qui auront lieu pendant
6 t« n 4 i.rti;o )W.eut/ls;i cohabitation avec le père com m un: les acquêts sont
j
‘
j
a>eu*t«Y Socc^«^’ 1100 valeur à peu près égale au patrimoine du père. it~
'•y -.
, ^
. L ’association a été déclarée valable. L e sieur Gardet aîné
K
r est opulent : ses cohéritiers n’ont qu’une très-foible portion
H CC&l
rïeg ]-)Jeus
1 /o d/Vvruxx^ e><-»
sieu if Gardet jeu{iè,, Iss de .toutes les discussions qui
s’étoient élevées sur le règlement des*droits des légiti»’ s
m aires, préféra d’accepter sa légitim e conventionnelle.
L e frère lui a payé cette légitime partie en argent, et
j K u J a u f partie, an vente„ d ’immeubles, t r r ^
'
■
’ ' *r ; ' ^ f Vi 1
•
7
Jacques Gardé t s’^st bientôt aperçu qu’il n’avoit pas
cca w
reçu l*éqtliValent de Sa légitim e de droit.. A p rès la m ort
__ de sa mère ¡, il a demandé sa portion héréditaire dans cette
ü (A u t
, Y^ '
succession , et un supplément dans celle du père. 5
cci.>tu
j iCS eXperts chargés de procéder à l’estim ation, sont
+>l>( iLSumturux. discordans sur les vaÎeilré. 11 résulte de l’avis de l’un ,
"•
ftx w i-
^ue *^.aciIucs Gardet a droit à un supplém ent; d’après
'les calculs de l ’au tre, Jacques Gardet seroit rempli de ¿a
portion.
Q u e falloit-il ordonner dans ce cas? une tierce exper-
| » w / m .u .r f
Il
|
l i i
: >tt ,ttC,
„„er!
jp r “v
a
- tise ne devenoit-elle pas- indispensable? Les premiers
,
iuses ont pris un autre parti. Se fondant sur la disposition d uu jugement précédent, qui ordonnoit que les
^ tv ’
vendus và rappelant isqroient ,estimés suivant leur
l
e
u
r!
U if
r
ù l’o.uyeyture de 1,1 suec<fri}io:û,idu p ère, ils ont vu
,
.
•4» ‘ CIttUlUtL |ü
^trûU i,
J-,
;
r,
f „ u,
n ii.V iu f.t ü K u iw u c u i
a
1 ,1 1
^ ^»yîCï’.H.
f„ ,
n „ t,
; ......... ..
«
tJ
'
. .. vr, u ^ ^ , . ^
�que l ’cstimnticm cxcédoit le p rix de la vente ; ils pnt <
. v
Jj\
pensé que le sieur Gardet étoit rem pli par cet excédent
eiltl
Ji
de v a leu r,' et l’ont débouté de sa dem ande.Tirr-p %
ii
c m i w i i K i t n V i f c|l
L e sieur Jacques Gardet réclame contre cette décision,
,
\
.
r
,,
,
- SCC „CUey
| «<*■«>
aussi siDguliere qu musitee : il lu i. sera iacile a en obtenu*
<
la réformation ; mais il est utile de présenter q ue lq u es
^ c>00
détails sur les faits avaut d’en v e n i r à la discussion des
’* Y * *kV'
I
moyens.
Cinq enfans sont provenus du mariage de Jacques y
■
_____ ;
Gardet et M arie Barbarin. Antoine , l’un d’eux , a été
institué héritier universel du ses père et m ère, par contrat .
.
1
j
*■
)<■
cU.Lt f J
du 21 avril 1783.
^
,
i*'t \
Il est chargé de payer h ses frères et sœurs-des légitimes
conventionnelles diversement réglées : on ne s’occupera H “-1
que de Jacques G ardet, appelant, à qui l’intimé devoit U* &..«*
payer une légitime conventionnelle de 10000 francs en
¿< /ujj
deniers, fonds ou contrats de rente,
t-^j
Les instituans s’étoient fait une réserve de 4000 francs
|
tout est réglé sur cet objet. L ’héritier institué est associé
t
p o u r -moitié à tous les acquêts et çonquêts qui auront
lieu pendant sa cohabitation avec ses père et mère : ces
j
acquêts excèdent la valeur des propres ç mais l’association
’
‘
|
a été jugée valable.
».c
'
|
L e père instituant mourut le 14 juillet 1792. La loi
|
du 17 nivôse an 2 , annulla l’institution; un partage eut
lieu par égalité entre les frères et sœurs.
,
t Cette loi ayant été rapportée dans ses eilets rétroactifs ,
\
Antoine Gardet reprit le bénéfice de sonynstitution.
j
Les parties furent réglées par un jugement arbitral du 5
brumaire an 4. r ( iS± '
■
\ 1.
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A 2
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t t i T ' t, . chicli .c h ic li
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�•j c i u j i u t , y c i U i î t f "
(
4
)
Ce iu ïc m e n t, eu ce qui concerne Jacques G a rd et,
^ ...... îui clonne acte de la déclaration par lui fa ite , qu’il s’en
Ve4 u , , ^ ù t o
lient à sa légitim e conventionnelle de io ooo francs, et-'
*< «i i
^ "«tri-don ne que Gardet aîné sera tenu de lui payer cette
'ïï'iicKCto, t
som m ée« deniers , fo n d s ou effets de la succession , bien
^
1 1 <u,i^ et dûment garantis.
j
*CcLo , «je
s*eur Gardet puîné faisoit, en ce p o in t, un grand
.
• ' sacrifice en faveur de son frère; la loi du 3 vendémiaire
c< îv n u ise , Hilrï an ^ l’autorisoit à conserver les immeubles qu’il avoit
), u
î <r reçUS j ors ¿ u partage par égalité, jusqu’à concurrence
■if’ ^ i»uoiiuiu«)t>t'[e sa légitime
conventionnelle.
1
O
s-‘«o la Vi'ijiujuLVT.
Mais ces mêmes immeubles étoient a la convenance
(tu'. d° son frère; ^ ne voulut le gener en aucune manière :
f
- 1
on ne lui a pas su gré de ce bon procédé. ~y ----,
t D euX mois après, le 14 nivôse an 4 , traité entre
•
1 fiatt» uitcàcs deux frères sur l’acquittement de la légitim e conven,
t»«_ fiu t H ; tionnelle de Jacques. Antoine Gardet paye à son frère
11 t'c'/tiA-î
une somme de 3400 francs en effets ou b ille ts, et lui
!*
vend ensuite diiïerens immeubles ; l’acte est conçu
■
U W 'U lu i*. c.iu>u
3 dans
✓ i Lixi
ces termes : Ledit A ntoine Gardet délaisse, cède et
.
,
r
.
transporte , avec promesse de garantir , Jourm r e t
• - ' t t i L i i s c i i i C v a l o i r des immeubles détaillés et confinés, en
-'•v- «»ife u
valeur de la somme de 6600 francs, pour se libérer de
/
. r
. la totalité de la légitim e, pour desdits objets iouir
<
■
C $ f l i c l C(IU>(
1
,
et disposer , dès ce moment , comme bon lui semblera ;
it
Antoine Gardet se dessaisissant et transférant la
j
u.t cjil, propriété, possession et jouissance à Jacques G a rd et,
~.;nf U
s011 fvi.re. g o
I l n’est pas inutile de remarquer que cette somme de
10000 francs ne s’appliquoit qu’à la swpccssion paternelle.
)
—
6 1 »I l
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j , , f ¿1 )«l»tc-t-'-'* /
<u -) o r *>i t 0 0 ^
�f g ^
Cin.it ( c i,nj.tLC?( ftc-ij
11 ne s’agissoit que de cette succession lors du jugement
arbitral, puisque la mère étoit encore vivan te, et n’est
morte que le 4 fructidor an 10.
ti>c“ i*
**<Cafr
L ’ouverture de cette succession donna lieu à diflférens
L* t
débats, dont il est inutile de rendre compte. O n ne doit >.«i
t « sw *
s’occuper que de la demande en partage de la succession
i < C L i.
maternelle, et en supplément de la légitim e paternelle,
formée par
Jacaues
Gardet le z 5 floréal an 11. ^ —
i
1
)***/ client
Un jugement
du
i
5
frimaire
an
1
2
,
ordonne
à
cet
> o
t>t»K
J C t t i l ( U ( / 1 L it*
égard que Gardet aîné viendra à partage des biens
<<
D
^
fi-UCca ifm aternels, pour en être délaissé à Gardet jeune, jusqu’à
concurrence de sa légitime, auquel partage les parties
ferontlesrapportsetprélèvem ens de droit, et Gardet jeune
" 'i W
notamment rapportera en nature ou fictivem ent l’équivalent de ce qu’il a reçu en l’an 4 , pour droits maternels, <■
£■ Jtt»Cl / I f^'r, ,
lequel sera déterminé sur les 10000 fr. de la constitution,
»,►
<*<j i .
à raison de la valeur respective des deux successions. Les
experts chargés de procéder à ces opérations doivent,
indépendamment du partage ordonné, estimer les biens
meubles et immeubles du p ère, d’après leur valeur à son
décès ; ils doivent aussi estimer d'après leur valeur à la
même époque les biens meubles et immeubles donnés en
l’an 4 , à Gardet jeune, évaluer également les biens mater
nels; et d’après l’évaluation de l’une et l’autre héréd ité,
déterminer proportionnellement ce qui appartient au
père et à la mère dans la réserve de 4000 francs, exclusi
vement attribuée aux légitim ants.
E t dans le cas où il résulteroit de l’évaluation, des biens
paternels, que les 4000 francs, ou la valeur des objets
^
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donnés eh payement, distraction faite de ce qu’il doit en
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^ ucX *‘^apporter à la succession m aternelle,ne le remplissent pas
•u" y ct^ i(~jiiL,,c4de sa légitim e, et qu’il lui est dû un supplém ent, les
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experts désigneront un ou plusieurs immeubles jusqu’à
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concurrence de ce supplém ent
f
^
(
Ce jugement fut attaqué par la voie de l’appel, de la
)
cAo part d’Antoine Gardet. Il fut confirmé par un arrêt de
fa t
la C o u r, du ï 3 frimaire an 13.
'
Les sieurs M azin et Pallet ont été nommés experts:
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M azin a évalué la masse des biens paternels à 123900 fr.,
1
ce qui porte le dixièm e revenant au sieur Gardet jeune ,
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•
• •
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pour sa légitim é, à 12390 francs.
(\
Les biens de la succession maternelle ont été évalués
!
par M azin à 9617 francs; il ne revenoit au sieur Gardet
•'
'
jeune, dans cette succession, qu’un douzièm e, à raison de
ce que quatre enfans seulement ont survécu à 'la m ère'
,
et ce douzième est de 793 fr. Maintenant voici comment
1- ^
Mazin a opéré. It a dit : Il revient au sieur Gardet jeune
■;
12390 franès pour son dixièm e dans les biens du père;
‘
il a reçu 10000 francs de légitim e conventionnelle,
—
'
Il doit également rapporter un m obilier qui ne devoit
î:
pas s’imputer sur cette légitim e, d’après la convention des
parties, mais dont l’expert lui fait tenir com pte; et ce
* i
m obilier est évalué 440 francs.
Il faut ensuite distraire d elà somme de 10440 francs',
celle de667francs, prise sur les 10000 francs de la légitim e
conventionnelle, pour rapporter à la succession de la m ère
'!■
'?
dans la proportion établie par le jugeaient du 14 frimaire
an 12. E tile n résulte quele sieur Gardet u’a réellement reçu
’7
�( 7 ) ï ^
pour cc qui lui revient dans la succesâiQnpaternelle, qu’une
somme de 9773 fr. : il lui revient®Üonc, pour être rem pli
de ses droits paternels, la somme de 2617 francs.
E t comme son douzième dans la succession maternelle
étoit de 793 francs, qu’il n’a reçu que;’667 francs pour
cet objet, il lui revient encore 126 francs/
L ’expert M azin , par suite et pour se conform er au
jugement, évalue les jouissances de ce supplément depuis
1792. Ces jouissances se portent à une somme de 1281 francs
72 centimes ; ce qui constitue Jacques Gardet créancier
d’une somme de 4024 francs 72 centimes, pour le payement
de laquelle somme l’exp ert, en conformité du jugement,
désigne certains immeubles.
. L ’expert Pullet n’a évalué les biens paternels qu’à la
somme de 70482 francs, et les biens maternels à. 5534 fr.;
•de sorte qu’ il y a discordance de près de moitié. 12 ---- •
O u conçoit que d’après les calculs de P a lle t, Jacques
Gardet seroit plus que l’empli de sa légitim e de d ro it;
et on n’a pas manqué de dire pour Antoine G ardet, que
Pallet étoit un expert judicieux et intelligent, tandis qu’il
y avoit exagération outrée dans les évaluations de Mazin.
Cependant on voit que M azin a pris toutes les précautions
qui sont au pouvoir des liom m es, pour connoître la vé
ritable valeur des biens sujets à son estimation ; il a
sagement observé ( et c’est une vérité reconnue ), que
dans cc départem ent,.depuis 1789,- la hausse et la baisse
des denrées ont singulièrement influé sur la valeur des
biens ruraux.
Il
s’est déterminé d’après les contrats contemporains
et les mercuriales du temps. Il a pris en considération la
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situation des b ie n s, tant pour l’utilité et l’agrément du
site, que pour la facilité de la concurrence. C ’est en combinant la-valeur intrinsèque avec la valeur relative , qu’il
s’est déterminé dans son estimation.
Il a dit que d’après l’usage ancien et constant, la valeur
intrinsèque se composoit de vingt fois le produit net, et
que la valeur relative consistoit dans le droit de propriété,
qui est ordinairement le dixièm e en sus de la valeur
intrinsèque, sauf les variations qui pouvoient résulter
de la situation, et qui s’élèvent ou diminuent en p roportion de l’avantage de la position; de sorte qu’un imm euble placé dans un pays riche et industrieux, commér
cant et p e u p l é , l’emportera toujours de beaucoup en
valeur sur celui qui ne réunira que partie de ces avantages.
C ’est en partant de ces bases, que l’expert M azin a fait
son opération ; et quand on le suit dans ses détails, on
est convaincu que loin d’être exagéré dans l’appréciation
des immeubles situés à V y e re , canton le plus fertile de
la L im agn e, il les a souvent portés au-dessous de leur
valeur intrinsèque.
P allet, au contraire, est d’une partialité dégoûtante.
C ’est contre sa propre conscience, contre sa connoissance
personnelle de la localité, qu’il a fait ses estimations. Il
semble qu’il a opéré pour obtenir des dirrtinutions d’im
pôts, plutôt que pour connoître la valeur des biens.
Q uoi qu’il en so it, à la vue de deux rapports si différens, il étoit de toute nécessité de nommer un tiers expert : c’est la marche ordinaire ; c’est une nécessité, et
jamais on ne s’est écarté de cette règle.
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nommé le sieur Caillie. Antoine G ardet forma opposi- “
lio n à ce jugem en t, et soutint qu’une tierce expertise ,Ll
seroit une dépense frustratoire et inutile.
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Suivant Antoine G ardet, il résulte des deux rapports,
tout discordans qu’ils sont, que Jacques, son frère, est
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rem pli de sa légitime,
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Jacques Gardet, d it-il, a reçu en argent 3400 francs j
» . * .
le surplus a été payé en immeubles. O r , ces immeubles
m
donnés en payement à Jacques Gardet(pour 6600 francs,
«.rc/îoti«
sont évalués par l’expert Mazin 13 5 5 5 ; en y ajoutant
440 francs de m obilier, il a reçu en tout 17395 francs.
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Il ne lui revien t, d’après le mê me expert, pour légitim e yulxutjii^ ^
paternelle et m aternelle, que 1318*3 francs. D onc il a reçu
en excedant 4212 lrancs.
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Cette première objection péchoit par sa base. Quelle que
^
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1
soit l’évaluation des héritages vendus en l’an 4 , Jacques
<>
Gardet n’a jamais reçu que 6600 francs pour ces objets. c ,t t.». 1
,,
Il 11e les a pas reçus à titre d’h éritier, puisqu’il n’étoit
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q u e créancier de la succession-, il les a acquis moyennant
la somme de 6600 francs. On ne doit lui précompter que
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cette somme pour cet objet : on le devoit d’autant m ieux,
^
dans l’espèce particulière, que Jacques Gardet n’a point
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conservé ces immeubles; il les a rétrocédés à son frère, cc
qui ¿1 son tour a gagné 3000 francs sur Jacques G ardet,
en les r
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Jacques Gardet ne les avoit pas acquis valeur de 179 2;
*
il les a achetés valeur de l’an 4 , dans un temps où le
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numéraire étoit rai’e , et où les biens étoient de moindre
valeur. En un m o t, sa légitim e ne devoit pas être calculée sur le prix de la vente qui lui avoit été faite, mais
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�sur la V aleur‘de'la-masse de la succèssion. Ge 'n’étoit'pais
îü i •qùi '-’é toit'ten ü 'd é rapporter 3 puisqu’il n’étoit pas Co
héritier. Son frèrèJJaii contraire, étoit obligé de faire'le
ra p p ô rtïiét’if ou réël^de tout ce qui comjjosoit la masse
de la succession paternelle.
A n toin e Gardet a senti la force de cette objection ; il
a0voulu l ’éluder :e h I;soùtëhant' que d’après* le jugement
du 1 4 frimaire- an- r 2 y lés biens fdonnes’ a Gardet jeune
en payement de ¿a légitim e, devoient être évalués sur le
même pied quelles autres biens, et que ce n’étoit qu’aittant qu’il^réfculteroit Jde l’évaluation des biens paternels
qtie la valeùr des objets donnes en payement de la légi
time conventionnelle ne le remplît pas de sa'légitim e de
d ro it, q u ’alors il falloit lui accorder un supplément.
V o ilà sans doute une étrange manière d’interpréter le
jugement du 14 frim aire an 1 2 , qui n’a été rendu que
dans l’intérêt du sieur Gardet jeune ; et dont Antoine
Gardet s’étoit rendu lui-m êm e appelant.
N ’est-il pas évid en t, au contraire, que le jugement
n’a pas voulu prendre en considération, pour la suppu
tation de la légitim e, le p rix de la vente consentie à
Jacques G ardet; que le jugement au contraire a voulu
que la supputation se fit sur la valeur de la masse totale
de la succession’à l’époque de son ouverture? Il en est
de la, vente faite à Jacques Gardet'* 4ômme il en sei’oit
d’ une vente faite à un tiers par l’héritier institué : suns
contredit ce ne seroit pas le prix de cette vente qui feroit
la règle pour supputer la légitim e ; 'e t , quoi qu’on en
dise ,' l’éxpert M azin '‘ne s’étoit' pas brouillé la téte , ni
n’a pas proféré d'absurdités } lorsqu’il a fait son opéra-
�(II
)
tion. Cependant lés premiers juges ont adopté le système
d’Antoine G a rd et; et par leur, jugement du • 26 • no
vem bre 1807, ils ont déclaré le lé g itim a is non recevable
dans sa demande,, qt l’ont condamné aux dépens,\ppr ce
seul m otif qu’en prenant ,1a plus haute, estimation .faite
par l’expert M a z in , il en résulte que Jacques G ardet,
en rapportant fictivement les immeubles qui lui .ont été
délaissés par Pacte du 14 nivôse an 4 , est rem pl^et au-r
delà-, de sa légitime de rigueur.
• n
Jacques Gardet a interjeté appel de ce jugem ent, et
c’est sur cet appel que la Cour doit statuer. L a question
se réduit à des termes bien simples. Quelle est la nature
de l’acte..du 1 4 .ventôse an 4 ?
Jacques Gardet a - t - i l été tenu i\ .aiicun rapport réel
ou fictif dans ^ su ccession d u .p è re ?
. ..
■ Il est un principe reconnu en droit, c’est que la dation
en payement est. une véritable vente, qu’elle en a le
caractère'comme les effqts. L a lo i 4;, au cod. f)e ,e ç ic t.,
porte : St prœdiurn tihipro soht^Q\datiun est hujusmodi
contractas vicem vendiiionù obtinet. V othier, dans son
.Contrat de ven te, tome 2 , ¡part i re.., chpp. 4 , enseigne
que la'dation en payemept est un acte éq.uipolent à vente ;
dam in solutum Ast 'Vçnder6:; et un tel, ¡contrat donnoit
lieu an -reti^it, suivant la dispositjLçn jdç i’^rt. .397 de la
cutitumeid’Oiléans.. !.
,
y . - n
.
estî'menfe constant parmi, nous que; lorsqu’il a ét;<5
constitué une dot en deniers,,l’immeuble, qui ,est donné
en. payement..de cette-dotne. devient pas dqtal à la(femrrç.Q£
c’est une acquisition .pour iP»ari, qwi;pijoiite ile;laî?plu9jvàlue de riinmeuble., et in.etdoit jamais, .qpp dçs, deniers. 1 i f
B 2
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)
La loi 9, au ff. D efiin à o dotali , s’exprim e ainsi : Fundus
œstimatus non est dotalis sed marito proprius emptionis
ju r e .' O r , si l’estimation de l ’objet donné en dot est
regardé comme une vente faite du même objet au m ari,
qui en devient véritable acquéreur, à plus forte raison
l ’immeuble donné en payement de la dot d o it - il être
regardé commp une véritable vente. Aussi tous les auteurs
qui ont écrit sur cette matière disent-ils que le fonds qui
est donné au mari en payement de la d o t, ou qu’il
acquiert des deniers d o ta u x , n’est pas d otal, mais est
propre au mari. C ’est ainsi que s’exprim ent D om at, Lois
civiles, liv. i er-? sect. i rc. ; Despeisses, tome I er. , édit.
in- 40. , p- 5 oo. L e Code Napoléon en a fait une règle
de d ro it, art. i 553 .
Si l’héritage donné' au mari en payement de la dot
est considéré comme une ven te, comment en seroit-il
autrement lorsque l’héritier institué vend à un légitimaire conventionnel, des immeubles en payement de sa
légitim e? L e légitim aire conventionnel n’est pas héritier,
c’est un simple créancier de la succession ; la C our a
même jugé en thèse, dans la cause des héritiers Périssel,
que le légitimaire conventionnel n’étoit pas tenu de con
tribuer aux dettes de la succession. Inacceptation de la
légitim e conventionnelle est équipolente à une cession
de droits successifs ; c’est un acte dénégatif de la qualité
d'héritier. L e légitimdire conventionnel n’est plus recevnble à demander le partage. Comment donc concevoir
qu’ il puisse être sujet à aucun rapport fictif ou ré e l,
lorsqu’ il vient par action en Supplément?
"w , Q u’est-cequ’üne action en'supplém ent? Ce n’est point
■V f i ' i
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i.ff? I
�( 13 )
une demande en partage , puisque les deux actions sont
contradictoires, et ne peuvent subsister l ’une avec l’autre.
L a loi réserve à l’enfant une légitim e de rigu eu r, à la
quelle le père n’a pas le droit de porter atteinte. Si la
légitim e réglée par le père n’équivaut pas à celle de
d ro it, quelle que soit l’approbation du légitim aire, il
peut toujours exiger jusqu’à concurrence de sa légitim e de
rigueur-, mais ce supplément ne l’oblige à aucun rapport ;
il doit seulement imputer ce qu’il a reçu jusqu’à due con
currence.
O r , qu’a reçu le sieur Jacques G ardet? 10000 f r . ,
et rien que ioooo francs ; savoir, 34°° ^iancs ^cus •> e^
6600 francs en immeubles. Q u’il ait bien ou mal acheté ,
à vil prix ou au clier d enier, c e n ’ e s t p a s ce qu’on doit
considérer ; il faut estimer la masse des biens suivant leur
valeur à l’ouverture de la succession , et c’est sur cette
valeur que se calcule sa légitime de droit.
Dans l’espèce, les parties ont longuement discuté sur
ce point. Jacques G a rd e t, dans son éctiture du 6 fri—
¡maire an 12 , a soutenu avec fondement qu’il ne falloit
pas considérer le pi*ix de la vente qui lui avoit été con
sentie, pour calculer ce qui devoit lui revenir, mais bien
la valeur des immeubles lors de la mort du père. S’il
avoit acheté à bon marché , il devoit en profiter; comme
s’ il avoit acquis au cher denier, il ne pouvoit revenir
contre sa vente ; mais dans tous 1rs cas il n’avoit reçu que
10000 francs, et rien que 10000 francs.
C ’est dans son intérêt que le jugement de l’an 12 a
ordonné une estimation des biens à l’époque de la m ort du
père. Antoine. Gardet étoit tenu de rapporter fictivement
�(H )
'
ou réellement tout ce qui composoit alors la succession
paternelle. Comment auroit-on voulu dans la suite faire
changer de rôle aux parties , faire rapporter à Jacques
Gardet Îes objets qui lui avoient été donnés en payement?
N ’e s t- c e pas là une absurdité choquante, une contra
diction manifeste avec tous les principes reçus? C ’est ce
pendant le seul m otif du jugement dont est appel. Il est
jugé que le sieur Jacques G ard et, e« rapportant fic tif
tivementles immeubles qui-lui ont été délaissés par l’acte
du 14 nivôse an 4 , est rem pli au-delà de sa légitime de
rigueur.
Les p r e m i e r s juges auroient-ils été séduits p a rle système
d’ A n toine G ardet, qui n’est qu’un paradoxe ? En effet,
lorsqu’il accuse l ’expert- M âzin d’avoir admis deux’ esti
mations différentes, l’une pour supputer la légitim e, et
l ’autre pour la p ayer, il est tombé dans une ierreur qui
ne peut être que volontaire. 'L’expert M azin n’a fait
qu’ une seule estimation. H a dit: L a masse des biens pa
ternels se porte à 123900 francs, le dixièm e revenant
au légitimaire est de 12390 francs : le légitim aire n ’a
reçu sur cette succession que la somineide 9773 francs;
il lui revient donc un supplément..
L ’expert pouvoit-il dire autrem ent, lorsqu’en effet
Jacques Gardet n’avoit reçu1et n’avoit donné de quittance
que de la somme de 10000 francs? n’étoit-il pas dans
la même position que s’ il avoit reçu 10000 francs écus,
au lieu de prendre une portion en immeubles ?
A n toine G ard et, qui avoit vendu pour 6600 francs
d’immeubles à son frère, n’étoit-il pas dans la même
position que s’il avoit vendu à un tiers? et dans ce cas
�5 )
n’auroit-il T?as dû rapporter fictivement 'les ’objets vendus,
suivant la valeur à l’époque de »l’ouverture de la^succession? ne falloit-il pus dans tous les;cas le même mode
d’estimation ; tant pour les ^objets aliénés que pour ceux
qui restoient entré les mains de l’héritier?
L a conséquence qu’on voudroit faire résulter du juge
m ent’ de l’an 1 2 , qui ordonné .l’éstim ation'sur le même
pied des biens restuns et des biens délaissés, est donc
faussement appliquée : elle est toute idans l’intérêt du
légitim aire, et se rétorque avec avantage contre l'héritier
( i
institué.
En effet,'qu’on lise ce jugement avec attention, on y
verra que Jacques Gardet n?èst tenu à un rapport fictif
que relativement à la succession maternelle dont le partage
est ^ordonné.
D èsque Jacques Gardet étoit cohéritier en cette partie,
il devoit le rapport de ce qu’ il avoit reçu pour cette
succession.
Comment connoître la quotité de ce rapport? On ne
le pouvoit qu’en évaluant les biens à l’époque'de l’ou
verture de la succession.
C ’étoit cette même époque quïïl falloit considérer pour
fixer le supplément , parce jque c’est de ce jour que le
droit est acquis au légitimaire.
!
T o u t est a son avantage dans cette partie.
' ’
Jacques Gardet a bien également à se plaindre du juge
ment ;-relativement à la succession maternelle. Comment
a-t-il été déclaré non recevable, même pour cette succes
sion? Il nes’agissoit pas ici d’une demande en'supplément,
m aisbien d’ une demande en partage il neipouvoit point
�.( i 6 )
y avoir acceptation préjudiciable de la légitim e conven
tionnelle , puisque la m ère étoit encore vivante lors du
traité de nivôse an 4.
'
* . ¡.
<
Jacques Gardet avoit le droit de réclamer une portion
héréditaire, sauf à rapporter ce qu’il étoit présumé avoir
reçu pour cette succession, dans les 10000 francs qui
lui «voient été comptés. L ’expert M azin, au lieu de lui
délivrer une portion comme héritier, se contente de lui
donner un modique supplément de 126 francs.
A ntoine Gardet veut encore lui contester ce foible
avantage; et comme si son frère étoit réduit à ce mince
subsidiaire, il soutient que son frère ne doit pas même
obtenir cette petite parcelle de vigne de 126 francs, sur
la succession maternelle.
Gomment concilier cette dernière prétention avec le
jugement de l’an 12 , qu’on a si souvent in voq u é?
Ce jugement n’accordoit pas un simple supplément sur
la succession m aternelle, mais en ordonnoit le partage.
C ’étoit à cette succession, et pour cette succession seule
ment , que Jacques Gardet devoit rapporter ce qu’il
pouvoit avoir reçu lors du payement de sa légitim e con
ventionnelle, et dans la proportion des deux successions.
La somme reçue est évaluée à 667 francs; donc le sieur
Gardet puîné, en rapportant 667 f r ., devoit prendre en
biens héréditaires le douzième de la succession maternelle.
L ’expert M a zin , au lieu de lui faire rapporter, lui
fait moins prendre, et lui adjuge pour complément un
immeuble de 126 francs.
Jacques Gardet seul auroit pu réclamer contre cette
opération, parce que s’il y a e rre u r, elle est toute au
préjudice
�( 17 )
préjudice du lé g itim a is. Il ne s’en est pas plaint ; mais
Antoine G ardet, qui n’épargne pas les épitliètes à l’expert
M azin , prétend qu’il a commis une erreur grossière. P o u r
le p ro u ver, il a dit que l’expert avoit établi en fait que
la proportion entre les biens paternels et maternels est
comme un est à quinze. La légitim e conventionnelle
devant se répartir au marc le franc sur les deux masses,
il y avoit lieu d’appliquer le quinzième de la légitim e
sur les droits maternels. Ces idées sont simples et justes,
et on veut bien convenir qu’il ne s’est pas trompé jusquelà ; mais son calcul est e rro n é , parce qu’il n’a porté ce
quinzième q u ’à 667 francs. Mais sur une masse de 17395 f r .,
qui est la valeur des biens reçus par Gardet jeune , le
quinzième etoit de n 5 c) francs; ce qui excède de 492 fr.
celle de 667 francs.
O n voit qu’Antoine Gardet s’abuse toujoui’s-p ar le
même système, et ne fait que tourner autour d’un cerclo
vicieux; Il veut que son frère ait reçu 17395 francs, tandis
q u ’ i l n’a reçu que 10000 fr. ; c’est juger la question par la
question; et encore n’a - t- o n point abordé la véritable
dans cette p artie, puisqu’il s’agissoit dans ce cas d’un
partage , et non d’un supplément.
E n un m o t, en partant du principe que datio ïn
solutum est venditio, principe consacré par les anciennes
et les nouVelles'loîs'/Jacquès Gardef ne peut être comptable
que de la somme de 10000 francs; il n’est tenu d’aucun
rapport fictif ou réel à la succession patei’nelle. Les deux
experts ont été discordans sur la valeur de cette succession ;
il étoit tout simple de nommer un tiers expert pour les
départager : c’eût étd rendre justice à tous. S’il y avoit
C
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1
8
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eu du d o u te, la faveur étoit pour le légitim aire, et la
rigueur pour celui qui a le titre universel. L a justice
n’é toit pas suffisamment éclairée , puisqu’il y avoit une
si grande différence dans les estimations. L e tribunal
dont est appel devoit donc adopter le seul moyen
connu pour com pléter l’opération ordonnée par le juge
ment de l’an 1 2 , et l’arrêt c o n firmat if de l’an 13.
E t qu’on ne dise pas que d’après l’art. 323 du Code de
procédure, les juges ne sont point astreints à suivre l’avis
des experts, si leur conviction s’y oppose. Cet article est
une suite du précédent, qui autorise les juges à ordonner
d’office une n o u v e l l e expertise; et quoiqu’en général les
juges puissent s’écarter de leur interlocutoire, ce ne peut
être au moins lorsqu’il s’agit d’un partage ou d’un supplé
ment de légitim e, puisqu’alors tout gît dans une estimation
que les juges ne peuvent pas faire eux-m êm es, qu’ils sont
renvoyer à des experts, et qui ne peut servir de
base à leur jugement tant qu’elle est incomplète.
E n fin , si on considère que le jugement dont est appel
porte sur un m otif erroné, qu’il suppose la nécessité d’un
rapport fictif de la part d’un légitim aire conventionnel
qui n’est pas h éritie r, on demeurera convaincu que ce
jugement ne peut se soutenir.
Signé G A R D E T jeune.
«
M e. P A G E S (d e R io m ) , ancien avocat.
M c. V A Z E I L L E ,
avoué licencié.
A R IO M , do l ’imprim erie de THIBAUD- L a n D r i o t • imprimeur de la C our d'appe l.
�
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Factums Marie
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gardet, Jacques. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
légitime
experts
médecins
Description
An account of the resource
Observations en réponse, pour sieur Jacques Gardet jeune, docteur en médecine, appelant de jugement rendu au tribunal de Clermont, le 26 novembre 1807 ; contre sieur Antoine Gardet aîné, propriétaire, intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1785-Circa 1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0546
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0547
BCU_Factums_M0319
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53857/BCU_Factums_M0546.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Veyre-Monton (63455)
Rights
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experts
légitime
médecins
Successions
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1e2c02c93c3ca0bf2f2262d4f4e10181
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EPLIQUE
P O U R
M e.
A ndré.
F a u g i e r
de l’ enfant pupille du feu Sieur C
B o u rg eo is ;
le
Sieur
J
l a u d e
a c q u e s
& D e m o i f e lle F r a n ç o i s e
Prêtre
M
T u teu r
F a u g i e r ,
a s s a r d i e r
F a u g i e r ,
mariés
;
9
In tim és;
C O N T R E
lés Sieurs B
a r t h e l e m i
R
o b i n
,
Appellant ;
Et
J
e a n
- B
a r t h e l e m i
R
,
obin
auffi
Intimé
L
O R SQ U ’U N teftam ent, arraché à la Foibleffe par l'obfeffion bleffe
également la nature & la loi
{
la juftice, en le profcriv a n t, venge avec
'plaifir le mépris de la l o i , & l’injure faite à la nature.
parvienne à fe faire inftituer héritière par fon époux ,
judice des fucceff eurs légitimes de ce dernier •,
le
.
y
Qu’une f e m m e rufée employé toute forte da manœuvres &
au
commun
A
pré
des
?
(/
c r f ù ' *.
�z
hommes qui n’y regarde pas de fi p rès, fur les moyens de s’enrichir, ne
la blâmera pas peut-être \ mais fera-t-elle applaudis par les perfonnes
honnêtes qui fa piquent d’une certaine délicateffe ?...... C e n’eft pas des
adverfaires que nous attendons la réponfe.
Que cette femme diflîmulée , violant fes promettes les plus folemnelles 8c les plus foutenues , trompant l’intention bien connue du
teftateur, dépouille les héritiers, du fang pour enrichir des étrangers 5
qui approuvera cette trahifon, cette perfidie ? Perfonne , fi ce n’eft
ceux qui en recueillent le fruit.
L ’avidité , impatiente de tenir fa proie , ne prend pas toujours
toutes les précautions pour fe l’affurer : le teftament furpris eft nul ;
les héritiers du fa n g , conduits par la l o i , viennent réclamer aux
pieds de la jufticc l’héritage de leurs peres envahi' par des étrangers :
qui pourra le trouver mauvais Si fe plaindre ? Perfonne ; fi ce n’eft
les étrangers , intérefies à fe maintenir dans leur ufurpation.
T e l e f t , en racourci, le tableau fidèle de la conduite de la D llc,
Robin
des adverfaires. T elle eft la pofition refpeclive des parties.
C ’eft bien vraiment aux freres Robin qu’il appartient de qualifier
les expofans de collatéraux avides.
Quoi donc ! les adverfaires, abfo~
lument étrangers au nom , au fang, à la famille du fieur Dancette , ces
étrangers injuftement revêtus des dépouilles des enfans de la m aifon, les
traiteront d'avides collatéraux ! . . . Lcîdefir de nuire porta-t-il jamais
à 1111 excès plus révoltant l’abus des termes
5c des qualifications !
Ces adverfaires croient fuppléer à ce qui manque du côté de la
jufticc S i des moyens à leur prétention, par le ton avantageux 8ç
confiant avec lequel ils la foutiennent ^ mais les juges que nous avons
Je bonheur d’a v o ir, font trop fa g e s, trop éclairés, pour prendre
le change.
A entendre les fieurs Robin ( 1 ) , les expofans font d ingrats calonu
_ ............................
......... ........ > ■
( 1) P a g . 1 , 1 £c 3 du m é m o i r e des adverfaire».
�ï
niateurs", qui déchirent impitoyablement celle .q u ia verfé fu r eux des
bienfaits à pleines mains.
A entendre ces adverfaires, c e f i à la D lle.
Robin que Me. Faugier , prêtre , ' doit fon éducation & fort état*
C'eft elle q u i, pour favorifer l'établiffement du pere du pupille Faugier ’
lui donna , dans fon contrat de mariage , des biens confidérables qui
embrajfent tout l'ancien patrimoine du teflateur.
C ’eft ainfi que , pour tâcher de jetter un vernis de défaveur fur les
expofans, pour avoir le plaifir de les taxer d’ingrats, de calomnia
teurs , les adverfaires fuppofent des bienfaits verfés à pleines main
fu r eux par la D lle. Robin , tandis qu’ils favent bien que cette femme
a fait aux expofans tout le mal qu’il etoit en fon pouvoir de leur faire :
quelle imprudence de la part des adverfaires 1 ils n’ont pas fenti qu’ils
mettoient les expofans dans la néceiTité de relever des faits qu’ils
avoient bien voulu taire jufqu’ic i, par égard pour la mémoire de la
Dlle. R o b in , 8t par ménagement pour les adverfaires'eux-mêmes.
L a calomnie cft l’arme ordinaire des lâches j l’ingratitude eft le
vice malheureufement trop commun des cœurs plus vils, plus lâches
encore. Ces traits odieux n’ont jamais caraûérifé les expofans } ils
ne font point de vils ingrats , de lâches détracteurs ; leur conduite,
leurs fentimens leur ont toujours mérité l’affe&ion & l’efHme de leurs
compatriotes : ils tiennent plus à leur réputation qu'à leur fortune ;
& s’ils défendent avec chaleur celle-ci contre les efforts de l’ufurpatio n , ils ne fouffriront pas fans doute que l’autre foit impunément
en butte aux atteintes de la calomnie.
Pour repoufler les traits envenimés des adverfaires, il faut d o n c,
puifqu’ils l’exigen t, faire connoître la conduite de la Dlle. RoTiin à
1égard des expofans,
Sc les prétendus bienfaits quelle a yerféfur eux j
ils fon: vraiment d’une efpece iinguliere.
L e premier coniifte à avoir fait perdre aux expofans, Sc à Anne
Dancettc leur m ere, fes droits légitimâmes en capital Si intérêts,
fe portant à plus de 40,000 liv.
A i
�4
Anne Dancettc étoit la feeur unique du Heur André Dancette , du
teftament duquel il s’agit.
Ce frere étoit le feul garçon , & l'héritier
de la maifon , beaucoup plus pgé que fa feeur 6c Ton parrein. Après
le décès des parens communs, Anne Dancette fut fous la tutelle 6i
la dépendance de fon frere 6c de la Dlle. Robin fon époufe.
Devenue
nubile , ils lai marièrent comme ils voulurent , 6c ne lui conftituerent
qu’une chétive dot de 4000 liv. ,
cela , parce qu’il ne plut pas à
la Dlle. Robin de lui donner davantage , quoique le fieur André
Dancette eût hérité des pere 6c mere communs de plus de cent
mille livres.
Cette circonitance n’eft pas indiff-rente pour les expofan& j il ei^
réfulte que l’héritage qu’ils réclament n’eil pas le fruit <^es fueurs ,
des travaux 6c de l’induitrie du fieur André Dancette } il n’exerçoit
aucune profeflion ; la fortune dont il jouiffoit, 8c qui ne fut pas
certainement augmentée par fon mariage avec la Dlle. R o b in , qui
ne lui porta qu’une miférablç dot de 40Ç0 liv. : cette fortune é to it ,
pour ainfi dire , un dépôt que fes peres lui avoient tranfinis, pour
qu’il le re m ît, à fon to u r, aux héritiers du môme fang. ‘ En récla
mant la fucceffion du fieur André D an cettc, que la loi leur aflure ,
ce 11’eft donc que le patrimoine de leur grand - pere maternel que
les expofans revendiquent contre
des étrangers qui le détiennent
injuftement.
Mais revenons à la Dlle. Robin.
-
La mere des expofans eut le malheur de perdre trop tôt le (leur
Faugier fon époux, qui la laifla elle -mêm e infirme 6c chargée dç
trois enfans en bas âge.
L a Dlle. Robin , qui étoit fort prévoyante,
fentit qu e, tôt ou ta rd , Anne Dancette ou fes enfans réelameroient
les droits légitimaircs qui lui étoient dus.
Pour éviter toute difcuiïion
à cet égard , la Dlle. Robin S i le fieur Dancette fon é p o u x , qu’elle
fnifoit mouvoir à fon gré , abufant de la trifte fituation de leur fœur ^
¿S". on la berçant de la fau'iTc promefie de fe charger de l’éducatlofl
�^
Y
¿Mi/
& de rétabliflement de Tes enf;
une renonciation gratuite à tous
rent , par a£te pu b lic,
egitimaires
ou iupplcmcnt
de légitimé , moyennant la chétive Tomme d g -4 000 liv. reçues lors
de ion mariage, St c e , tant pour le capital que pour les intérêts
1—
depuis près de trente ans , ce qui faifoi: un objet de plus de 40,000 1. ,
v u , comme nous l’avons dit ci-deffus, que le patrimoine délaillé par
les pere & mere communs étoit de plus de 100,000 liv.
Les adverfa'res ne contefteront pas vraifemblablement ces faits ;
ils ne font que trop notoires ; les expofans peuvent d’ailleurs produire
le contrat de mariage de leur mere , 6c. 1 a£le à elle extorque de
renonciation gratuite.
Il eft vrai qu’Anne D an cette, trop confiante , envoya, chez ion
frerc , fon fils cadet ( c’eft M e. F augier, prêtre ) , qui y refta deux
ou trois ans.
»
Mais comment la Dlle. Robin rempliffoit - elle fa promefie , &
foignoit - elle l’éducation de cet enfant ? En l’envoyant travailler aux
champs avec les journaliers , ou garder les beftiaux avec les domçiliques ?
L e jeune Faugier fe plaignoit amèrement } pour le rendre plus
docile , la Dlle Robin le maltraitoit de la maniéré la plus cruelle,
Nous voulons bien épargner à fa mémoire le détail affligeant de ces
mauvais traitemens, qui auroient mêtpe excédé les bornes de la
corre&ion paternelle \ les adverfoires les connoilTent, &L tout le
monde s’en rappelle avec horreur dans le pays.
Voilà des traits ’
d’humanité S i de bienfaifance de la par de la Dlle. Robin a l’égard
des expofans.
L e jeune Faugier, très-dégoûté de l’éducation que luidonnoit la Dlle.
Robin , revint auprès de fa mere.
C e lle-ci, convaincue par une trifte
expérience, combien perfides étoient les promettes qu il’avoicnt féduite,
réfolut d’impétrer contre l’afte de renonciation qu’on lui avoit extor~
gué.
Avant d’ufer des voies de rigueur; elle employa la médiation
tUCUJ il A
�6
du paftcur refpcclable qui fait encore le honneur 8c l’édification de
la ville de Beauzac.
L e fieur Dancette 8c la Dlle. Robin prièrent ^
Me. Proriol de repréfenter à leur fœur , que deux de leurs enfans
ayant fait profeiîion dans l’état monaftique , & le troifieme n’ayant
point de lignée , leur intention étoit d’ailurer tous leurs biens par
une fubilitution aux enfans de leur fœur :> que fi elle fe permettoit
la moindre démarche , elle feroit avorter ce defiein. Cette affurance
mille fois donnée, fit perdre, à la mere fe s expefans, toute idée de
réclamation.
L e iieur André Dancette étoit de bonne foi dans fes promefies ;
6c ce qui le prouve , c’eft le tellamcnt qu il fit en 176 0 , par lequel,
au cas du décès de M e. Claude Dancette y -a v o c a t, fon fils , fans
enfans, il fubftitue tous fes biens à Claude Faugier pere du pupille,
dont Me. Faugicr , prêtre , cil tuteur.
Mais la Dlle. Robin étoit-elle
auilî lincere que fon époux ? Le -procès actuel prouve fuilifammenr
le contraire.
Les adverfaires font fonner fort haut la donation faite par leur tante
dans le contrat de mariage de Claude Faugier.
Mais on eft forcé de rabattre beaucoup de cette prétendue libé
ralité , quand on fait qu’elle avoir pour objet de doter une fille de
la fœur à la Dlle. R o b in , quelle voulut unir à Claude F augier, en
dépit, de l’avcrfion que ces jeunes perfonnes avoient l’une pour l’autre.
Les chagrins que ce ménage mai aiTorti a procurés à Claude Faugier ,
& qui ont abrégé fes jo u rs, n’ont que trop juftifié fa répugnance.
O n eft encore forcé de rabattre beaucoup de la prétendue libéralité,
quand on voit dans l'aéte même , qu’elle n’a été faite qu’à condition
1
que la future renonceroit à fes droits légitimaires, tant paternels que
maternels ) quand on voit que les biens donnés, qui ne font évalués,
qu’à 8000 l i v ., ce qui ne fait pas la vingtième partie du patrimoine
du fieur D an cette, font chargés , indépendamment d’une
infinité
d’autres réferves, d’une penfion de 400 liv. en faveur de dom Jacques
Dancette benédi&in.
�?
• Enfin, les biens donnés, eflimés 8000 liv.
en valulTent-ils 30 , 8c
fuflent-ils donnés en feule confidération de Claude Faugier , ce qui
n’eft pas , ce
/croit jamais qu’un foible dédommagement de partie
des droits légitimâmes que la Dlle. Robin a fait perdre aux expofans
6c à leur mere.
On n’a pas calomnié la Dlle. R o b in , quand on a dit qu’elle avoit
forcé fes enfans_à faire profeffion dans l’état monailique.
Comment
les adverfaires peuvent-ils foutenir le contraire, eux qui ont été témoins,
ainfi que tous les habitans de la ville de Beauzac 8c des environs,
des plaintes am ères, des reproches que le religieux D ancette a fait à
la Dlle. R obin, d’avoir violenté fes goûts 8t fon inclination décidée
pour le commerceT
Les tentatives inutiles de ce religieux, fa con
duite , fa fuite 8c fa poiition a & u e lle , ne prouvent que trop l’averilon qu’il a toujours eue pour un ctat que fa mere lui fit embrafler
malgré lui.
Les fieurs Robin n’ont pas meilleure grâce à faire valoir le pré
tendu teilament du 7 avril 1733 , pour prouver l’afFedlion confiante
&. les diipofitions inébranlables qu’ils prêtent au fieur Dancette en
faveur de fon époufe.
Sans regarder de bien près ce prétendu teilam ent, on voit que
ce n’eft qu’un p ro je t, un chiffon, une minutte informe d’un teila
ment dont la Dlle. Robin n’auroit jamais pu prendre avantage ÿ au
<lemeurant, tout s’y réduit pour elle à un iimplc legs de jouiifance.
Mais ce teilament fût - il aufn férieux qu’il efl illufoire, 8c les
adverfaires puflent-ils en invoquer cent pour un , plus ils en produiro ie n t, plus ils fourniroient des preuves de l’importunité de cette
femme , de l’obfeiTion Sc de l’efclavagc dans lefquels elle tenoit fon
époux.
T out cela ne fait pas que , lorfquc le fieur André Dancette a pu
échapper à fon argu s, ôc fuivre les mouvemens de fon afïe&ion 6c
&c fa volonté, il n’ait difpofé en faveur des expofans j témoin le
�3
teftament de 1 7 6 0 , en faveur de Claude F aü gier, pere du pupille,'
don: Me. Faugier eft tuteur.
Après c e la , comment les adverfaires
ofent-ils dire qiie toutes lés fo is que le fieur^ EiMyùfc a teflé , fort
époufe a été l'objet invariable dé fa prédilection ?
Ne croyons donc pas , ajoutent les adverfaires , qilt ddns le tef i ar
ment du i ç décembre 17¿>8 , le fieur Dancette lia it été que l'écho de
ta volonté de Marie Robin. (1)
Pardonnez-moi, rien que l’é ch o , Sc moins encore : lé fieur Dancette
n’a jamais été que l’inilrumerit très-paflîf de la volonté trcs-abfolue
de Marie Robin.
Les adverfaires fe prévalent iinguliéremënt de la diftance des lieux ;
ils nont pas dfc fe permettre ce tas de menfonges devant le Sénéchal
du Puy
ils n’auroient pas fait fortune auprès de ces juges , qui j
pius rapproches des parties & dii lieu de la feene, étoient plus par
ticulièrement inftruits de toutes les circoniïances.
Les iîeurs Robin imaginent - iis que les expofans aient oublié c e
dont tout le monde fe fouvient encore avec indignation dans le pays j
toutes les manœuvres que leur tante employa pour fe procurer le
teftament du 29 décembre 1768 ?
L e fieur Dancette ne penfoit à rien moins qu’à faire teftament ce
jour-la •, mais la Dlle. Robin y penfoit fans relâche depuis le décès
de fon fils aîné.
Pour cet e ffe t, elle invita à dîner cô joür-là n iêm é, 2.9 décembre
1768 , le notaire Duplain 8c les deux témoins iignataires.
Après le
dîner , elle dit au fieur Dancette , qu’il falloit qu’il fît teftament eh
fa faveur.
Ce pauvre m a ri, qui n’a jamais ofé dire non en face dé
fa chere moitié , quand elle avoit di: o u i, ne fit aucune réfiftance •
en conféqucnce on fabriqua le teftament foi» la cheminée de la cuifine.
( 1)
P a g e 3 du m ém o ire des adverfaires*
Quand
�Quand
¡1 fut
clôture 8c
Robin , pour compléter le
nombre des témoins num érfeis^hijirChercher elle-même le grangier
ou jardinier de la D o rliere, qui travailloit dans l’enclos avec fes trois
fils -, elle leur dit de venir tous les quatre à la cuifine boire une
bouteille de vin : ils entrent:, on prend leur nom de baptême 3 ils
boiven t, ils fe retirent fans qu’ils aient même entendu lire le teftam en t, fans favoir même qu’ils eufTent été appelés à raifon d’un teftament.
Ce font des faits que ces quatre témoins ont raconté , 8t qu’ils
atteftent chaque jour à qui veut l’entendre.
T ou t le monde a vu la garde févère que la Dile. Robin faifoit au
tour de fon mûri ; elle ne le quittoit pas plus que fon om bre, depuis '
qu’elle l’avoit fait difpofer en fa faveur.
T out le monde a vu com
bien elle éroit ardente St foigneufe d’empêcher toute communication
contraire à fes intérêts, fur-tout de la part des expofans ou de leur
m ere, à l’époque de la dernière maladie, qui enleva prefque fubiteinent le iieur Dancette , qui demandoit inflamment 5z à hauts cris ,
mais en vain, un notaire pour refaire-fon teftament.
T out le monde à Beauzac 8c à Confolent a connu les promeiles
perfides, à l’aide defquelles la Dlle. Robin a arrêté Sc fufpendu les
juftes réclamations des expofans du vivant de cette derniere , contre
le teftament furpris à fon époux.
Les expofans peuvent invoquer le témoignage non ful^e# de la
dame Dancette , religieufe à Moniftrol.
Cette dame ayant obtenu la
permifiîon d’aller voir fa mere dangereufement malade, lui repréfenta,
■qu’en fe conformant à l’intention de.fon époux , elle ne pouvoit s’em
pêcher de rendre aux expofans les biens de leurs aïeux.
L a Dl!c.
Robin aflura fa fille que tel avoir cté toujours fon deflein , qu’elle y
avoit pourvu, Si que les expofans auroient lieu d’être fatisfaits} St
cependant elle avoit déjà difpofé, en faveur des étrangers, de cette
‘fucceiïion ufurpée fur les héritiers du fang.
J1 n’en coûte rien aux adverfaires de fe permettre les impoftures
�10
les plus patentes : n’ont - ils pas ofé dire que les diipoiltions de la.
1311e.
Robin ont été généralement applaudies 8c refpe&ée's dans le
p a y s , tandis qu’au contraire elles exciterent 6c excitent encore aujour
d’hui l’indignation univcrfellc ! Il ri’eit perfonne dans le pays , non'il
n’eiï perfonne , iî l’on excepte la famille Robin , qui n-5 rafle les vœux
les plus ardens pour voir rentrer les expofans dans l’héritage de leurs
p ere s, qui leur a été enlevé par la perfidie la plus ivoire.
E t les fieUrs Robin eux-mêmes , quoiqu’ils fulTent bien à quoi s’en
tenir fur les intentions fecrettes de leur tante : quelles tram es, quelles
manœuvres ces deux freres rivaux n’ont-ils pas em ployé, foit auprès
des dom eiliques, foit auprès du religieux Dancette , pouf s’arracher
l’un à l’autre la proie qu’ils s’envioient mutuellement ! Peuvent - ils
penfer que les expofans les ignorent, lorfque tout le pays en eft
plein ? Cette coniidération, &C bien d'autres, auroient dû les rendre
plus diferets 6c moins avantageux.
Loin de provoquer les expofans
auiïi hardiment qu’ils l’ont f a it , leur propre intérêt auroit dû les
engager à favorifer le filence des expofans fur des circonftances fi peu
flnttcufes pour eux 6c pour leur tante , £c fur lcfquclles les expofans
auroient volontiers continué de fe taire 3 parce que qu an don eft aufiî
puilfamment défendu qu’ils le font par la l o i , on peut fans crainte
négliger de limples coniidérations.
Mais les adverfaires , par leurs
imputations odieufes , ont fait violence à la modération, à l’indulgencc
des expofans ; ÔC il ctoit trop de leur intérêt de convaincre la Coup
6c le public qu’ils ne fo n t, ni de vils ingrats, ni de lâches calonir
niateurs.
D ’après ces faits, quç les adverfaires nous ont forcés de dévoiler j
d’après ces faits généralement connus, que tout le monde attefteroiç
dans le p ays, ÔC qui prcfquc tous font établis par des a£tes publics,
de quel»front les adverfaires ofent-ils dire (1) , que f i cette caufe dévoie
( 1 ) P a g e 16 du m ém o ire des adverfaires,
\
�ïî
êtte jugée fur des conji¿¿rations , perfonne ti'ejl plus favorable qu'eux.
On ne fait comment cara&érifer tant d’audace !
Ces confidérations, que les adverfaires invoquent fi mal adroite
ment , font toutes pour les expofans j mais quelques décifives, quel
ques favorables quelles foient pour e u x , l’équitc , la nature 8c la
loi leur font encore plus favorables.
§.
P R E M I E R .
L A ientcnce dont eft appel a caiTé
déclaré nul le teftament du
lieur André Dancette , du 2,9 décembre (^1768, par contravention à
l’ordonnance de 1735 , en ce que ce teftament, ayant été fait dans une
maifon du fauxbourg de la ville de Beauzac , ne fe trouve figné que
par deux témoins.
Les adverfaires font forcés de convenir (t) , qUC fi Beauzac eft
une ville , le teftament du fieur Dancette retenu dans le fauxbourg
de cette ville , eft néceffairemcnt nul 8c caflable.
Cela pofé , l’ordre progreflif 8C naturel des idées exige que , pour
juftificr la fentence attaquée, on prouve d’abord que Beauzac eft
réellement une ville ayant des fauxbourgs* i° . Que la maifon où a été
retenu le teftament dont s a g it , fait une dépendance de ces fauxbourgs.
Et d abord Beauzac eft une ville murée ayant des fauxbourgs.
Nous avons déjà rapporté la preuve la plus vi&orieufé de ce fait ;
8c pour éviter des répétitions inutiles , nous fuppiions la Cour de fe
fixer fur le précédent écrit des expofans, depuis la page 9 , jufqu’ù
la page 18.
Nous nous contenterons de rappeller en pafiant, que la nature du
Jieu , fa conftruftion , fa population, l’ufage confiant du pays , la
notoriété publique, les a&es anciens Sc modernes les plus authentiques,
( 0 P a g . 19 du m ém o ire des adverfaires.
�IZ
les cadaftres, livres terriers, les rôles des im p ortion s, les procé
dures , les aeïes des notaires, les cartes géographiques levées par
ordre du Gouvernement, tout ce qu’il cil paiïible d’invoquer pour
établir la nature 6c la maniéré d’être d’un lie u , tout fe réunit pour
conitater que Bcauzac jouit £c a joui de tous les temps du privilego
& de la qualification de ville ayant des fauxbourgs.
Grandement intçreiTés à anéantir B cau zac, il n’eft pas de menfonge
ÔC de faits concrouvés à loifir que les adverfaires ne fe permettent;
peur déprécier cette ville 6c fes habitans.
A entendre ces adverfaires , les murs , les p ortes, les tours qui
forment St défendent l’enceinte de la ville de B eauzac, ne font autre
chofe que les murs , les porces, les tours du ch âteau, ce fon t des
débris. , des Jignes antiques du gouvernement féodal.
T ou t cela eft fa u x j les tours Si autres fortifications , les mu
railles , les portes de la ville, ne font pas celles du château \ chacun
a les iîennes très-diftin&es} il iufïît de jetter un coup d’œil fur le
procès-verbal de vérification , Sc fur le plan figuratif pour s’en con
vaincre. , Il en eft de cette allégation, comme des places publiques
que l’on voit à Beauzac.
Les adverfaires difent que nous en comptons
quatre, en y comprenant le cimetiere Sc la cour du château ; fi celq
eût été -, nous en aurions compté lix \ l’ancien cimetierc Sc la cour
du château exiften: indépendamment des quatre places publiques} on
le voit par le plan.
L a citadelle, ruinée , n’eft point les débris d’une tour du château j
il fuilit encore de jetter un coup d’œil fur le p la n , pour s’appercevoic
que la citadelle étant beaucoup plus coniidérable que le château
celui-ci feroit plutôt une tour de la citadelle , que la citadelle ung
ipur du château.
C ’eft bien m a l-à-p ro p o s que les
adverfaires veulent comparer
£v confondre la ville de Beauzac avcc Blagnac ,
Maubourguct %
�Sc Beauzac , lu mémo
différence, qu’entre la ville de
*i>; "ccelle du P n y , entre celle
du Puy 8c Touloufe.
D ’ailleurs , peu nous importe que Çampan , Blagnac , Pompignan,
M aubourguet, foient des villes' ou des villages ; il ne s’agit pas de
ces licux-là , niais bien de Beauzac
£t dès que nous prouvons que
c’eit une ville ayant des fauxbourgs, nous n’avons que faire de ht
maniéré d’être des autres lieux.
Nous avons dit aux adverfaires, qu’un caractcre conilitutif de la
qualité
de ville , en faveur de Beauzac , c’elt que fa cure a été
poifédée de tous les temps par des gradués,
Nous en avons rapporté
la preuve au procès , depuis 17 17 , jufqu’ à ce jour
nous avons
défié les adverfaires de prouver le contraire : ils n’ont pas rempli ,
ni ne rempliront jamais ce défi : ils exeufent leur détreffe, en diiant
que nous leur avons impofé la preuve d’un fait négatif, en les défiant
de rapporter ancun arrêt qui ait décidé que la cure de Beauzac pouvoit
ctre poifédée par un iïmple prêtre non gradué } 8c ils nous renvoient
fort adroitement ce défi , fans s’appercevoir combien il cil: illufoire
de leur part.
En e ffet, la euro de Beauzac ayant été occupée de tous
les temps par des gradués, comment les adverfaires veulent-ils qu’il
y ait des arrêts fur une queftion qui n’a jamais eu lieu ? Un arrêt
de la Cour fût-il même favorable , annonceroit toujours que l’état
de Beauzac auroit été douteux, puifqu’il aurait été contelté ; au lieu
.que la poilefllon confiante 2t immémoriale de cette cure par des
gradués, prouve que Beauzac c i l , 6c a toujours été une ville murée
puifque perfonne n’a jamais ofc poiTédcr cette cure fans être gradué.
Cela efi il vrai, que Me. P ro rio l, curé aftu el, qui n’étoit pas gradué
avant d’être pourvu de cette cure , n’eut rien de ii prelTé que de
prendre fes grades avant de s’en mettre en poirefilon.
C ’eft un fait;
connu 5 8c ce digne pafteur ne contredira pas les expofans.
Il ne s’agit pas dans ce procès d’examiner cruels font les attributs,
�14
les qualités qu’une paroifle doit réunir poür avoir un paiîeur gradué
mais d’examiner fi Beauzac cft un lieu tel , que l’on ne puifle y
retenir de teftament qui ne foit figné par fept tém oins, y compris
le notaire , conformément à la difpofition des art. 5 8t 45 de l’ordon
nance des teftamens.
Cela étan t, rien de plus inutile , de plus déplacé que les diflertations canoniques des adverfaires, en deux ou trois endroits de leur .
-mémoire , pour tâcher de perfuader qu’on ne doit avoir égard qu’à
la qualité des habitans , pour favoir il un lieu eft ville ou plate
campagne.
Certainement c’eft bien a nous a dire aux adverfaires ,
non erat his locus.
A leur avis , une v ille , qiiels que foient fes attributs, fa popula*
tien , ne pourra ctre regardée comme ville , ii elle n’elt habitée par
des nobles , dés gradués, des avocat?. Propofer de telles erreurs ,
c'efl les combattre.
Au demeurant, quoique les expoians ne puilient fe ranger à l’avis
des adverfaires , ce n’eft pas qu’ils fe méfient de la qualité des habi*
tans de Beauzac.
Que
nos adverfaires fe donnent la peine de parcourir les a£tei
nombreux que nous avons remis ,
ceux qu’ils ont produit eux-*
mêmes (r) ? ëc ils verront parmi les parties contrattantes ou les
témoins , des nobles , des gradués , des avocats, des bourgeois , des
négocians, K c . , tous habitans de la ville de Beauzac au de fes '
fauxbourgs.
Pourquoi donc fe permettre des allégations aufli faufies,
quand les aftes qu’on produit foi - même les démentent aufiî for
mellement ?
Autre menfonge de la part des adverfaires : ils difent que la ville
( 1 ) Fid. l a q u i t t a n c e du 16 avril 1 6 4 4 ; I’ a p p o i i n c m c n t du 16 j a n v i e r 176$,
p r o du i t s p a r les a - J v c r i j i r c » , Tous entes 1 4 & 16 , Imainid .
�r5
SC les fauxbourgs de Beauzac ne contiennent, dans la plus grande
vérité, que deux, cents ou deux cents cinquante habitans.
L a ville 8c les fauxbourgs de Beauzac comprennent cent huit
maifons * il n’y a pas de maifon qui ne foit habitée par une fam ille,
la plupart par deux* il n’y a pas de famille qui ne foit compofée de
cinq ou iix individus* il y en a grand nombre qqi font couipofces
de h u it, dix perfonnes , quelquefois davantage,
Il ne faut prendre le procès-verbal de vérification po\ir tarif de la
population, parce que les experts fe font contentés de déiigner le
propriétaire , ou le chef de famille de chaque maifon.
Ainfi , en
prenant une moyenne proportionnelle , 011 peut aiTurçr que la ville
8c les fauxbourgs comprennent au moins de fix à fept cents habitans *
on pourroit môme aller plus loin , fans craindre d’outrer la vérité,
A quoi bon ce ton injurieux 8c mcprifant qui regne dans les écrits
des adverfaires pour la ville 8c les habitans de Beauzac 1 Ces habi
tans font très-honnêtes, très-bien éduqués ; ils connoiflent
très-bien la langue francaife.
parlent
Il y a à Beauzac des maifons très-riches
relativement au pays,
A entendre les adverfairçs, tout fe réduit, à Beauzac , à un chirur
gien , q u i, nayant pas ajfe\ cToccupation dans fon é ta t, eft devenu
marchand de dentelles communes , & ù quelques très-petits marchands
de doux & d'allumettes, ( i)
C ’eft infulter bien gratuitement des citoyens cftimables : le iieur
Deman , chirurgien à B ea u za c, eft très-riche * il n’a pas befo:n de
fa profeffion pour vivre * il l’exerce noblem ent, pour le feul plaifir
d’être utile à fes compatriotes * fon époufe 8ç fes enfans, pour vivifier
le pays , commercent fur les dentelles qu’ils font fabriquer : ils occu
pent un grand nombre d’ouvriers, en c e la , ils n’en font que plus
rc.commandables 8c plus chers à la patrie.
( 0 P a g e 9 du m ém o ire des adycrfaircs.
�i 6
Les adverfaires croient avilir Beauzac , en difant qu’il y a de mar-*
chands d’allumettes Sc de d ou x. Grand merci de l’obfcrvation , nous
n’y aurions pas penfé fans eux
ce font précifément des marchands
de cette efpece qui caracfcérifent une ville
ce n’eft pas en plate
campagne ni dans les villages qu’on trouve des marchands de cette
efpece : les payfans ne s’amufent pas à aller chercher des allumettes ;
cette marchandée n’étant pas bien chere , il faut que le marchand
qui en fait commerce y trouve tout au moins de quoi vivre par le
débit coalklérable , &: ce débit fuppofe une confommation, une popu
lation notables dans le lieu où il eli établi.
» Mais , quoi ! nous difent les adverfaircs, uns ville fans foires,
» fans marché , fans hôpital , fans maire , dont les confuls font fans
» chaperon?
V oilà une plaifante v ille !»
Il eit raux q a i l n y ait point de marché à Beauzac
il y en a tous
les jours de dimanche &. fê te s, où les habitans vendent le fuperflu
de leurs denrées.
Il cft vrai qu’il n’y a point de foires à Beauzac ; màis les foires
font-elles un attribut conftitutif des villes ? Si cela é i o i t , il faudroit
regaider comme autant de villes, une infinité de villages &i de hameaux
dans nos provinces , parce qu’il y a de foires établies
tandis qu’il y
a de vihes . ôc de villes notables qui n’en ont point : la b res > dans le
Kouergue ? na ni fuiras ni marches $ cependant c’eft: une ville , £c
une ville épiicopalc*
Saint-P.vtL de C.idajo:ix , clans le diocèfe de
Lnvaur > n a ni foires 7 ni marenes ) clic n a ni p o ïtc s5 ni murailles?
ni m aire, ni hôpital $ une trentaine de maiibns compofent tout fon
cnfemble j cependant c’cit la feconde ville du diocèfe de Lavaur
■qui entre , en cette qualité , aux états de la province.
On fait que le privilège des foires s’acquicren: à prix d’argent r
la ville de Beau/ac ne s'cil point fondée d’en avoir , parce qu’elle
n’eft.qu’à quelques quarts d'heure de diitancc de M oniitrol, Diiïinjeaux
ce autres lieux où il y a des foires.
Bcau/ac
�Beauzac n’a point d’h ôp ital, St fe^âK/gloire de ne point en avoir :
heureufes les villes 6c les contrées qui peuvent fe paffer de ces établiflemens, ii louables d’ailleurs, fi précieux à l’humanité.
Les bonnes mœurs, la fobriété, l’induftrie, l’application au travail,
mettent les habitans de Beauzac 6c des environs à l’abri du befoin
6c des maladies que produifent l’intempérence, l’oifiveté 6c la débauche :
dans tout le diftriâ ou juridi&ion de Beauzac il n’y a pas un feul
pauvre , un feul mendiant
que feroient-ils d’un hôpital ?
Il feroit extraordinaire que les confuls de Beauzac fuflent fans
chaperon.
Au demeurant, comme le chaperon ne fait pas toujours
le co n fu l, que chaque pays a fa mode Sc fes u fages, 6c qu’on n’eit
pas bien fixé fur ce fa it , nous ne conviendrons ni ne contefterons à
cet égard, c’cft d’ailleurs affez indifférent.
Comment ofer dire qu’il n’y a pas une cour de juftîce dans la ville
de Beauzac , tandis que les adverfaires eux-mêmes nous fournillent
la preuve du contraire dans l’appointement du z6 janvier 176 8 , qu’ils
produifent ? Cet appointement prouve qu’il y a à Beauzac une cour
de juftice, compofée d’un juge 6c de plufieurs affeffeurs.
- L e cadaftxe de 1 $43 , les rôles des im portions, 8c plufieurs a&es
remis par les expofans , prouvent que noble Louis de Navette 8c
plufieurs de fes defeendans ont été fucceffivement juges châtelains de
Beauzac j aux juges châtelains fuccéderent les maires ; mais les mairies
ayant été ilipprimées , celle de Beauzac fubit le fort commun.
Les adverfaires ne veulent pas que les géographes 6c ingénieurs de
ki province foient compétens pour connoîtrc Sc diftinguer Jes villes
d’avec les iimples ham eaux, les villages : il y a cependant tout lieu
de croire que lorfque les ingénieurs-géographes ont, par ordre du
Gouvernement , levé la carte géographique de la province 6c des
divers diocèfes en particulier-, fous les yeux des commiffaires des
É ta ts, il y a tout lieu de croire, difons-n ous, qu’ils favoient ce
Qu’ ils -faifoient, £c qü’ils n’ont- défigné comme ville, que ce qui cil
C
�réellement ville*, d’autant mieux qu’on ne voit pas. des. erreurs, des
équivoques de cette efpece dans les cartes géographiques.
O r , Beaurac étant d écrit, défignc.dans la cartp générale de la
province , Ôc dans. celle du diocèfe du Puy ,. avec. la. même marque
carailériilique 8C Taillante qui dé(Igne les autres villes, il eil évident
■que, les géographes ne. l’ont déiigné a in ii, que parce q ^ la nature du
lieu , l’ufage , la notoriété publique, leur ont annoncé Beauzac comme
une ville.
A quel propos d’ailleurs les géographes ..auraient-ils pré-
variqué , trompé la France.Sc l’univers en tieren .an n o n çan t comme
ville ce qui ne le feroit pas ?
,
Mais non, l’almanach cil le çode des adverfaires j ils propofent 4
la Cour de m e ttre de côte tous les a ile s , tous les monumens qui
an n o n cen t 8c défignent Beauzac
comme ville , pour s’en tenir à la
déciiïon du livre-, qnnuel & périodique fa it pour le, V elay.
U eft
vrai que dans le catalogue porté par l’almanach des foires 5c des
lieux où elles fe tiennent, on ne. voit pas Beauzac ,. par la raifon
qu’il n’y a pas de foires à B e a u za c} mais s’en fuit-il d e - là que
Beauzac n’eft qu’un hameau , une plate campagne ? Pas plus que i l
l’on vouloit conclure que tous les villages,, où il y a des foires Sç
marchés , fo n t, de cela, fe u l, des villes.
Indépendamment des ailes 8c des preuves inombrables qui impri
ment à Beauzac le cara£lere de v ille , la mauvaiib foi des adverfaires
nous a procuré un a£le d’autant plus péremptoire contre eux , que c’e il
leur propre ouvrage, le procès-v.erbal de vérification de B eau zac, qu’ils
ont folücité, qu’ils ont rendu néceflaire par leurs mauvaifes conteilations.
L ’interlocutoire ayant cté ordonné contradiiloirement avec toutes
parties, toutes parties y ayant acquiefcé \ la vérification faite contradiéloircment avec elles, Sc en leur préfence, fourniiTant la preuve
invincible que Beauzac cil une ville ayant des fauxbourgs j que la
maifon de la Dorliere fait une dépendance de ces fauxbourgs} cette
vérification fournit autïï aux expofans, contre les adverfaires, imçi
�t
19
1
fin de non-receroir iniurmantable , qui leur interdit toute conteftation fur l’état de Beauzac ,
5c
fur la fituation de la maifon
de
la D orliere, par rapport à Beauzac.
On ne conçoit pas comment Barthelemi Robin a le courage de
dire que l’interlocutoire n’a pas -été ordonné avec lu i , qu’il n’ y
a
pas acquiefce , qu’ il lui eft totalement étranger, que c’cft par rapport
à lui , tout comme s’il n’exiftoit pas.
Que la cour daigne lire la fentence interlocutoire du 31 mai 1783 ,
&. elle y verra qu’elle a été rendue très - contradi&oirement avec
Barthelemi Robin.
C et adverfaire a laifle procéder à l'exécution de l’interlocutoire
ordonné fans s’y oppofer.
Quand il n'y auroit que c e la , ce feul
défaut de réclamation , ce ieul lilence, fer o ien t, de fa p art, l’acquiefcement le plus formel.
, Nous trouvons dans le journal du palais, tome 5 , page z i , un
arrêt du5i3 avril 17 3 0 , rendu c-ntre Me. Boutonnet, curé de Centrés,
fiC les nommés Camboulibes , qui a jugé que c’eft acquiefcer for
mellement à une fentence interlocutoire, que de laifer procéder à
fon exécution fans en réclamer.
O n peut encore voir le tome 4
,
page 45 , 6c tome i , page 388
du même journal, où l’on trouve des arrêts Si de 'dédiions con
formes } il eft donc certain que par fon feul défaut de réclamation
Barthelemi 1Robin auroit formellement acquiefcé à l’interlocutoire.
■Mais il y a plus.
Barthelemi Robin etoit préfent :’i la vérification,
non-feulement lu i, mais fes deux fils , mais encore deux avocats &C
un feüdifte , qu’ils avoient pris 8c amené pour leur co n fe ïl, Me.
De ' Lafayette de Saint-Didier, Mo. Soulié ,
4 ûux
le fieur Soulié , ces
derniers , beâu-freres de Jean-Barthelemi Rabin cadet -, les uns
St les .autres firent leurs obfervations, dires , 'comparans ik. proteftalionSi
T o u t cela eft prouvé par le procès-verbal de vérification qui
tft au ■
procès.
Comment donc Barthelemi Robin ofe-t-il dire que
C i
�■" 2 . 0
l’interlocutoire lui eft totalement étranger , qu’il' n’ÿ a pas acquie’fcé 7
tandis que le procès-verbal prouve le contraire ?
Cela pofé , il eft inconteftable en point de droit, que lorfqu’un inter
locutoire ordonné a été acquiefcé par toutes parties, on ne s’occupe plus
que du fa it, favoir iï l’interlocutoire a été rempli par le rapport de
Ja preuve ordonnée : nihiL amplius quœritur, nifi an probatum f i t
nec n e , par la raifon toute fimple , que fi la preuve eft rapportée telle
quelle étoit exigée , on ne peut plus s’en écarter, chacune des parties
ayant reconnu par fon adhéilon à l’interlocutoire, que tout confiftoit
uniquement entr’elles dans la certitude des faits dont FéclairciiTement
avoit été reipe&ivement convenu } c’eft donc un quaii - contrat formé
entr’elles qui les. altrcint à fe foum ettre, Si le juge à prononcer rela
tivement aux preuves réfultantes de l’interlocutoire.
V id. Leprêtre »
Corbin , dans fes plaidoyers j F aber, dans fon code \ Rebuffè , de
fententiis executoriis, art. xo , glojf. n ° . j , f i judex , dit cet auteur,
pronunciet tejîes ejfe admittendos , vel n o n , dicitur gravamen irrevocabile.
Or , la vérification contradi&oircment ordonnée avec toutes parties,'
faite en leur préfence, 8t acquiefcée par toutes, fournit la preuve
la plus irrcfirtiblc des faits dont l’éclairciirement avoit été rcfpe&ivement convenu
favoir , que Beauzac eft une ville ayant des faux-
bourgs , 8C que la maifon où le teftament dont s’agit a été retenu ,
fait une dépendace de ces fauxbourgs.
On net peut donc plus s’écarter
de cette preuve rapportée, nihil amplius quœrendutn j &. la queftion
eft décidée en faveur des expofans.
On ne s’arrêtera pas aux prétendues atteftations d’un notaire 8c
d’un commis au cçntrôle , que les adverfaires allèguent même fans
les produire , 80 defquqlles ils veulent, induire , qu’en' fuppofant qu’ilfoit prouvé que Beauzac eft réellement v ille , tandis: que les attoftations alléguées prouvent, fuivant e u x , qu’il a toujours été regade'
comme une plate cam pagne, cc fcrojc là une erreur commune, qui
�doit couvrir de fon ombre pfôtciftw $ 4 a nullité patente du tcilament
dont s’a g it, 8t à l’appui de cette belle découverte ils invoquent la
célèbre loi barbarius Philippus.
. Il eil malheureux pour les adverfaires que cette fuppofition ingénieufe manque par le fa it} l’ufage confiant de tous les fiecles , les
monumens, les aéles de toute efp ece, la notoriété publique , prou
vent au contraire que Beauzac a toujours été généralement traité 5C
regardé comme ville •, il ne peut donc pas y avoir d’erreur commune
à le regarder comme plate campagne, lorfqu’il n’a jamais été regarde
comme t e l} ainii les adverfaires peuvent garder la célèbre loi barbarius
Philippus pour une meilleure occafion.
Au demeurant, quand bien même les adverfaires produiroient le
prétendu certificat du com m is. au contrôle ,
la preuve par a&es
du prétendu fait attefté, ce qu’ils ne font p a s , nous avons prouvé,
Si le Sénéchal a juilifié , en le rejettant, le peu de cas qu’il mérite.
Il en eft de même des prétendues recherches légales faites dans
les regiftres des notaires de Beauzac j les adverfaires n’en confiaient
d’aucune maniéré \ ils allèguent cependant qu’il réfulte de ces recher
ches , que les notaires ont toujours regardé Beauzac comme une
plate cam pagne, puifque, difent-ils , on n’a trouvé depuis 1751 que
deux teilamens en ligne collatérale , où il y ait fix" témoins fignataircs,
5c
que tous les autres ne font lignés que par deux témoins.
Les expofans fouticnnent Sc prouvent le contraire j ils remettent
au procès huit expéditions de divers teilamens faits en ligne colla
térale», depuis 1751 , jufqu’en 178 0 , retenus dans la ville de Beauzac
ou dans fes fauxbourgs, tous revêtus de la iïgnature de fept témoins,
y compris le notaire \ on pourroit en produire cent 8t davantage con
formes à ceux-là } mais ce ne feroit que des frais inutiles 8c des aéles
furabondans au procès.
On
faits
défie les
en
ligne
adverfaires
collatérale ,
de produire
depuis
1752 ,
autant
de
jufqu’à
teilamens
ce
jour >
�retenus dans Beauzac ou dans fes fauxbourgs ,
iignés que par deux témoins.
&
qui ne foient
Les expofans on: fait auiïï des recher
ches de leur côté , S i ils n’en ont trouvé aucun en cette forme.
Il
eft donc faux que les notaires aient regardé Beauzac comme une
campagne, en n’appellant que deux témoins fignataires aux teftamens
en' ligne collatérale , retends dans l’enceinte de cette ville ou dans
fes fauxbourgs.
C ’eft à pure perte que les fieurs Robin veulent prendre avantage
du teftament du 6 avril 17 59 : qu’ils l’examinent plus attentivement,
2>C ils y verront la fignature de fix témoins , y compris le notaire:
ce teftament n’entre pas dans le nombre des huit dont nous venons
de parler, 6t les expofans m l’ont produit qu’à raifon des énonciatives du lieu de la rétention , des qualités Sc du domicile de la
teftatrice 6c des témoins.
Au demeurant , loin de favorifer la pré
tention des adverfaires , il la contrarie formellement.
On ne voit
donc pas qu’ils aient tant à remercier les expofans de l’avoir produit.
Il n’eft pas indifférent d’obïerver que les huit extraits, de teftamens
produits par les expofans, dans chacun defquels on voit fix témoins
fignataires , ont été callationnés 6c expédiés par Me. C h om eton ,
notaire de Moniftrol , fur les cèdes de feu Me. Duplain.
Cela pofé , il n’eft pas poifible que Me. Chometon ait attefté que >
parmi tous les teftamens en ligne collatérale , retenus à Beauzac ou
dans fes fauxbourgs, depuis 175Z jufqu’à ce jour , il n’en exifte que
deux revêtus de la fignature de fix témoins.
En nous réfuinant fur cc ch ef, il eft démontré que la nature du
lie u , fa population, l’ufage confiant de tous les fie cle s, les monuinens les a&es authentiques de touto efpece, que tout fe réunit pour
imprimer à Beauzac le cara&ere de ville ayant des fauxbourgs, Sc
que la vaine critique des adverfaires, loin d’alîoiblir ce cara&ere j
n’a fervi qu’à le faire reflbrtir avec plus d’avantage.
Voyons main
tenant s’ils feront plus heureux dans les tentatives qu’ils font pour
�tâcher de perfuader que- la maifon de. la Dorliere eft indépendante
de Beauzaç . 6c- de fes faubourgs.
$ . 1 1 .
L a maifon de la Dorliere , où a été retenu le tçftament du fieuf
Dancette , fait une dépendance des fauxbourgs de la ville de Beauzac.
Pour ne pas ufer de répétition , nous nous référons encore fur
ce c h e f, aux fa its '& aux a£bs ramenés dans notre précédent é crir,
depuis la pag» iS jufqu?à la page i z , &C qui reftent dans toute leur
force 6c intégrité, malgré les vaines obje&ions des adverfaires.
L a fentence interlocutoire du 31 mai 17^3 •> en ordonnant qu’il
feroit procédé par experts à la vérification de la fituation ÔC diihincG
de la maifon de là Dorliere des fauxbourgs de B eauzac, pour favoir
fi cette maifon eft ou n’eft pas dans l’enclave de ces fauxbourgs ,
n’a pas ordonné en cela une preuve contre fit o u tr e le contenu au
teftam ent, puifque le teftament' ne dit nulle part , que la maifon de
la Dorliere foit un ch ef lie u , diftinft
5c indépendant
des fauxbourgs
de Beauzac 5 &C l’eût-il d it , çe ne feroit qu’une énonciativç erronée
de la part du notaire , qui ne pourrait pas changer la nature, la
fituation 6c le rapport de la Dorliere avec les fauxbourgs de Beauzac,
moins encore cette faulle énonciative pourrait - elle prévaloir- fur le
cadaftre Sc fur la foule des autres aftes authentiques, qui attellent
jque la maifon da la Dorliere fait une dépendance des fauxbourgs de
Beauzac , 6c eft enclavée dans leur diftrift.
C ’cft tout comme il le tfcftament ayant été fait à Beauzaç , le
notaire eût dit : f a i t & pajféâ Beauzac-, ville capitale de la province
de Languedoc.
qualification.
On n’auroit certainement aucun 'égard à cette fauife
Il en eft de même pour ce qui concerne le prétendu
château de la D o rliere, avec d’autant plus de raifon , que le teftament ne dit pas que cette maifon foit diftin&e 6c indépendante dé
Beauzac ôt de fes fauxbourgs, 6c que ce n’eft qu’une faulle conicqueuce
�14
que les adverfaires veulent induire de la maniéré obfcure dont le
notaire a alle&é de déiigner le lieu où le teftament a été retenu.
Ainfi , ce n’eft pas ici le cas de la maxime , adverfus fcriptum
teftimonium , non fcriptum , non adm ittitur, ni des ordonnances
citée s} les adverfaires peuvent les garder pour en faire une plus
heureufe application.
.
Ils ne veulent pas que les rôles des impofitions, les livres terriers,
les cadaitres foient des titres fuffifans pour conftater l’em placem ent,
ies bornes 8c les rapports qui diftinguent un héritage , un territoire
d’un autre.
Cependant nos loix , nos auteurs 8c tous les tribunaux du royaume y
pour décider les conteftations qui s’élèvent fur la nature, la firuation,
l’étendue Sc les rapports des lieux contentieux , ne reconnoiilent point
d’a&es plus authentiques , de guides plus sûrs que les livres terriers ,
les cadaitres. On eit certainement aux derniers abois , 8c pour ainfi ,
dans le délire du défefpoir, quand on contefte des vérités aufii tri
viales , auflî inconteftables.
» M a is , nous difent les adverfaires, les cadaitres, les rôles des
» impofitions que vous produifez ne méritent aucune foi , parce qu’ils
» ont cté fabriqués par des cabaretiers.
Et qui a dit aux adverfaires que le cadaftre de 1 543 , que les rôles
des impofitions ; depuis 1690 , juiqu’a ce jour , ont été rédigés par
des cabaretiers ? Si où eft la preuve qu’ils rapportent de cette iïnguliere allégation ?
Nous lifons au contraire dans le procès-vcrbal de vérification de
Bcauzac , que les rôles des impofitions que les adverfaires produiiirent
eux-mêmes fous les yeux du commiifaire , ont été rédigés par ordre
des commifiaires du diocèfe 8c des états , qu’ils ont été par eux vifés
&. paraphés \ les adverfaires diront-ils que ce font auifi des caba
retiers ?
Les cadaftres font des moiiumcns p u b lics, autorifés par la loi ,
pour
�pour fixer les limites des provinces, des villes & des bourgs ; ce font
les cadaftrcs qui fixent le territoire de chaque ville , de chaque terre $
c’eft par le fecours de ces titres qu’on connoît le territoire , banlieue
ou diftriâ: de chaque ville , où ils commencent, où ils finiiTent. In
finalibus quœjlionibus , vetera monumenta , cenfus autoritas , antè
litem incohatam , ordinati , fequenda efi , leg. 11 , Jf. finium regund.
L a loi 4 , jf . de cenfib. , dit encore : forma cenfuali cavetur, ut
agri fie in cenfum referantur
nomen fundi cujufque 5 & in qua civi-
tate , ù quo pago f i t , & quos vicinos proximos habeat, &c.
Sur quoi Godefroi ajoute , ad fitum fundi , ifta pertinent, civitas , pagus -, confinium.
Enfin , la loi 10 , ff. de probat. & prœfump. ? dit que le tém oi
gnage du cadaftre ou compoix doit l’emporter fur toute preuve vocale
contraire , cenfus & mçnumenta publica potiora ejfe tejlibus , fenatus
cenfuit. D ’après ces loix , il n’eft pas permis de révoquer en doute
la foi pleine &t entiere que méritent 6c obtiennent en juftice , les
cadaftres St autres aftes de cette nature , pour décider de la iituation
des confins des lieux contentieux.
L e cadaftre du mandement de Beauzac de l’année 1 543 , place dans
l’enclave 6t diftriâ du fauxbourg de Beauzac , fous le tenet de Louis
de N avette, châtelain de ladite ville , les bâtimens , jardins, ôte.
connus aujourd’hui fous le nom de la Dorlicre ; les adverfaires font
forcés d’en convenir.
L a iituation , la dépendance de la Dorliere des fauxbourgs de
Beauzac , eft encore conftatée par les rôles des impofitions , depuis
169° , jufqu’en 1764 , 6c jufqu’à ce jour , par les a&es des notaires ,
par 1 ufage des habitans $ &. bien mieux encore par le procès-verbal de
vérification , où l’on voit qu’indépendamment des faits concluans qui
y font ramenés , les adverfaires ayant forcé le commiffaire de vérifier
les rôles des vingtièmes du mandement de Beauzac pour l’année 178 4 ,
efpérant y trouver quelque chofe de favorable ù leur prétention, ils
D
�v
i6
virent au contraire avec douleur qu’ils avoient produit eux-mêmes
leur propre condamnation, puisqu'on lut dans ce rôle que les fer
miers eu grar.gers de la Dorliere étoieat impofés dans le chapitre
des habitans des fauxbourgs de Beauzac j
8c tout le monde fait
combien les a& es qui trahifient l’attente de ceux qui les invoquent ,
font accablans contra producentes -, d’après des preuves fi authentiques',
fi gém inées, les adverfaires ne peuvent plus concerter avec quelque
pudeur que la Dorliere ne foit iituéc 8c ne faife une dépendance des
fauxbourgs de Beauzac.
Cependant ils s’obilinent à vouloir perfuader le contraire j 8c pour
c e la , ils produifent quatre ou cinq prétendus aûes-, qui tous iùfpeéh
qu’ils fo n t, ne prouvent rien ,. ou ne prouvent que contre eux.
E t d’abord , aucun de ces a¿les ne dit que la maiibxr de la D or
liere foit un chef-lieu , diilinil Sc indépendant de Beauzac 8c de1 fes
fauxbourgs : dans les deux premiers du premier novembre' 1642; 8ï
2.6 avril 1644 , qui font en faveur de noble Louis de la D orliere,
On voit que ce gentilhomme s’y qualifie de ieigneur de ta Dorlierele-^Beauyic. E t c’eft cette unique qualification qui foit tout l’eipoir
des adverfaires \ .mais cette qualification défigne-t-elle la Dorliere
comme indépendante de Beauzac ? bien loin de-lù y puifqu’au- con
traire , elle confond 8c identifie l’un-avec l’autre.
Au demeurant, que
1amour-propre
de ce gentilhomme T qui avoit
quelque fief dans le territoire de Beauzjic , ait voulu faire" regarder
fon domaine comme un feigneurie , c’efi: alfez ordinaire Sc alfez indif
férent \ quelle qualité que ce foit donnée , le fieur de la1 Dorliere ,
dans des aû cs pollérieurs au cadaftre , elle ne fauroit changer ni
altérer la nature , la iituation di les rapports d’une maifon , d’un héri»
tage , irrévocablement fixés par le compoix 8c les livras terriers."
L e troiiicme a£le invoque , eft un appointement de la Cour Je
Beauzac , rendu le 16 janvier 176& , en faveur de Me. Dancetrcr,
¿avocat; cet appointement prouve contre les adverfaires, qu’il y
>
�I ...
2.7
Beauzac une Cour de juiHce , compofée d’un juge Sc de plufienrs
aiTcfieurs : il cil vrai que l’exploit eft fait à la requête de Me. Daucette, habitant du lieu de la D orliere, mais cette énonciative ne ligni
fie rien * d’ailleurs, une défignation erronée , échappée par inadver
tance à un baile exploitant, ne doit pas fans doute prévaloir fur le
témoignage des a&es authentiques.
Les trois derniers prétendus a il e s , en date des 2.3 o & o b re , 27
décembre 1773 , Si 30 décembre 1777 , font une aiVignation à la
requête de la demoifellc Robin , une quittance en fa faveur, un bail
à locatairie par elle conferçti : tous ces a âes font fu fp e & s, ils font
non-feulement poil ¿rieurs au cadaftre, mais même au teftament du fieur
Dancette -, la demoifelle Robin les a faits exprès pour fe procurer une
cfpcce d’appui dans des a£tes qui continrent une énonciative aulïï
équivoque, aulTi erronee que celle d u .teftam ent, par rapport à la
rnaifon de la Dorliere * mais ce n’eft là que propria annotatio de la
main intérelTée de la demoifelle Robin , 8c c’eft ici que s’applique
très:à-propos la décifion de la loi 7 , cod. de probat. exemplo perniciofum eft ut ei fcripturcs credatur qua quis annotatione propria, &c.
En nous réfumant fur cette colle&ion des adverfaires, ces actes ne
prouvent rien, aucun ne défigne la Dorliere comme un lieu diftinct
ôc indépendant de Beauzac * 8c le difient-ils, ils ne mériteroient aucune
fo i, foit parce qu’ils font pofterieurs au cadaftre, dont le témoignage
contraire doit prévaloir * foit parce qu’ils partent d’une main fufpe&e
&. intéreflee à faire envifager la Dorliere comme 1111 lieu particulier.
Enfin, ces a&cs , loin des favorifer la prétention des adverfaires ,
la condamnent formellement* ils prouvent contre l’aiTertion des fieurs
Robin qu’il y a ordinairement à Beauzac des Nobles , des gradués y
des avocats , une Cour de Jufticc * ils prouvent que Beauzac eft une
ville ayant des fauxbourgs, puifqu’ils parlent de la Cour de Ju fticc,
des places publiques, des fauxbourgs de la ville de Beauzac. A inii,
ce n’étoit pas la peins de les produire * suffi les adverfaires fe fontils contentés de les indiquer fans ofer en faire l’analyfe.
D x
�Autre erreu r, autre bévue de la part des adverfaires : ils difent à
la pag. i z de leur mém oire, qu’il fufiît de jetter un coup-d’œil rapida
fur la carte du pays pour fe convaincre que la Dorliere eft un lieu
à part & absolument ifolé de Beauzac.
Les iieurs Robin ont vu fans doute dans la carte du diocefe du P u y ,
-au-deiîus de B eauzac, du côté du nord , une maifon déiignée fous le
nom de la Borilene , qu’ils veulent faire prendre pour la Dorliere :
on ne peut pas fe prêter à cette erreur , elle eft trop grofllere ; la
Borilene n’eft point la Dorliere : cette maifon , dite Borilene, n’exiftoit pas à l’époque du teftament du fieur André Dancettc -, elle a été
conftruite, après le décès de ce dernier, par dom Jacques D ancette,
bénédiélin : la Borilene eft au bord d’un bois appellé de Montortier 5
la Dorliere n’eft auprès d aucun b o is , mais fur la promenade publi
que appellée le Choffat. La Borilene eft à un quart de lieue de la
ville , au-delà de la Varenne, 8c tout-à-fait au nord de Beauzac \ la
Dorliere n’eft qu’à cent pas environ des murs de Beauzac , 8t toutà-fait à fon levant; ainiî, plus de mauvaife équivoque à ce fujet.
Nous avons enfin parcouru, ôc pleinement réfuté les faux faits,'
les frivoles objections que les adverfaires ont aventuré à l’appui de
leur prétention \ que la Cour juge maintenant fi elles peuvent balan
cer un feul inftant ce corps accablant de preuves 8c d’aétes authen
tiques de toute eipece, qui etabliflent de la manière la plus irréfiftib le , que Beauzac eft une ville ayant des fauxbourgs, 8c que la maifon
de la Dorliere fait une dépendance de ces fauxbourgs.
Cela p o fé , la loi qui prononce la nullité du teftament du fieur
Dancettc, qui n’oftre que la fignature de deux tém oins, quoiqu’il ait
été retenu dans une ville , ou ce qui cil la même chofe , dans un
de fes fauxbourgs ; cette loi eft ii abfolue , fi claire , fi p rccife, qu’il
n eft pas pofiible d’en éluder la diij^oiition fous aucun prétexte. L e
fenechal du Puy n a fait que fe conformer à la l o i , en proferivant
le teftament du fieur Dancettc; la juftice de la Cour ne peut quo
�de la nature Si de l’équitc.
Malgré le ton d’aiTurance qu’ ils affc& enf , les adverfaires s’y atten
dent eux-mêmes, puifqu’ils fe retranchent à dire ( i ) , que dans le
cas de doute fur la validité du teftament, la reflitution des fruits n’auroit dû être prononcée par la fentence attaquée, qu'à compter du jour
de l'interpellation judiciaire , &C qu’ils rclevent de toutes leurs forces
ce prétendu g r ie f ,
en
alléguant qu'ils font desfucceffeurs de la meilleure
f o i poffible , dès qu'ils o n t , difent-ils, en leur faveur l'opinion com
mune de tout le monde , qui erige en vérité ce qui auroit pu être
erreur \ 8c ils invoquent la maxime : error commums fa cit jus.
Malheureufement pour les adverfaires, cette erreur commune qu’ils
font confifter dans le fait fup pofé, que Beauzac, quoique démontré
ville, a toujours été traité 6c regardé par tout le monde comme une
platte campagne, cette erreur commune manque par le fa it, nous
l’avons fuffifamment établi ci-deiTus par les a&es du procès. Ainfi c’eit
à pure perte que les adverfaires , dans l’extrême défeipoir de leur
caufe, s’accrochent fans cefle à cette prétendue erreur com m une,
qui n’a jamais exifté.
1
D ’ailleurs ne s’apperçoivent-ils qu’ils tombent dans une contradi&ion
faillante ? C a r ,
en fuppofant que cette prétendue erreur commune
exiftât, 8c qu’elle pût couvrir la nullité du teftam ent, les adverfaires
n’auroient pas befoin de l’invoquer pour fauver la reftitution des fruits,
6c ii n’e x ifta n t p a s , elle ne peut pas fauver le teftam ent, elle ne pourra
pas non plus fauver la reftitution des fruits.
Il
cft vrai qu’il y a eu pendant long-temps un grand conflit d’opinions
ôc d’arrêts fur la queftion, favoir, de quel jour eft duc la reftitution
des fruits, d’une hérédité par la caiTation d’un teftament.
Ceux qui étoient fournis à cette reftitution difoient, comme nos
adverfaires, que ces fruits ne font dus que depuis l’inftance en caila-
( i ) M é m o ire des a d v e r fa ir e s , p a g e :
, z$ ^ *6 .
�3°
rion, parcs qu’il falloit iuppofer indéfiniment que l’héritier a toujours
poiïédé dans la bonne f o i , à moins qu’il n’y eût des preuves du
contraire 5 &C ils citoient divers arrêts rendus par les différentes cham
bres de la Cour , qui avoient adopté ce fyflême.
Les fuccefïeurs légitimes qui demandaient la reilitution, foutenoient,
au contraire, que dans le cas d’une nullité patente , ces fruits étoient
dus depuis le décès du teilateur , que fur cette qu eilion, la Cour jugea
d’abord que l’héritier qui avoit joui en vertu d’un teilament nul devoit
rendre les fruits , à dire d’experts, depuis lo décès du teilateur ; ils
citoient Furgole , q u i, au tom. premier , chap. 7 , ie£t. 2 , n°. 290 ,
ramené un arrêt du 16 feptenibre. 1736 > qui le jugea ainii. Un autre
feinblable du 23 avril 1747 » au rapport de Mr. de R aym ond} un'
troiiieme le 16 mars 1748 , au rapport de M r. de Baflard.
Mais depuis, pour metttre fui à ce conflit d’arrêts & d’opinions *
toutes les chambres du palais fe ionç réunies à adopter une diilinûion
di&ée par la fageiTe Si par l’équité même.
L a jurifprudence de la Cour eil fixée aujourd’h u i , à diflinguer dans
les teilamens dont la callation cil prononcée , le vice occulte du vico
patant.
Lorfque le vice eil caché comme lorfque le teilament a été écrit
par le clerc du notaire , ou lorfque le teilament fait mention de ld
le£lurc quoiquelle ait cté omiic •, dans ces circonflances l’héritier?
comme ayant joui en vertu d’un teilament qui ne préientoit au dehors
aucun vice , eil réputé poiToHeur de bonne f o i , Si confequamment
relaxé de la reilitution des fruits perçus avant l’inilance $ c’eil ainii
que la Cour le juge conilamment \ on peut citer quatre arrêts con
form es, des 17 avril 174 9 ? 7 a°ût 1761 ,
20 juillet 6c 12 août
1776.
Mais quand le vice eil patant, tel qu’efl le défaut d’un nombre iliflîfant de témoins, le défaut d’exprefïïon de la le£lurc, la prétériti^n Sic.
Dans tous ces ca s, la Cour ordonne conilamment la reilitution des
fruits par état depuis le décès du teilateur j 8c à dire d’experts , depuis
�l’interpellation judiciaire } c’eft ainil qirj lit rprefilott a etc jugé'c tour
tes les fois qu’elle s’eft préfentéç; on petit citer pour garants un nom
bre infini cP'arréts , notamment un- du,Z3 avril 1757 , rendu â fa'.pre
mière chambie des enquêtes", aü rapport de Mr. de Baftard \ ùrî feccnd
du 6 feptembre 1764 , au rapport de Mr. d‘e Poulharle? 3 un troiYîeme
du 31 mai 17703 un quatrième d\j 2.1 avril- 1774 5 im cinquième du
2,5 juin 1775 3 enfin-, un fixienve du 13 fepteinbre ï7S l4 , au rapport
de Mr. de Lab roue , entre íes fieurs' D eím as, Fournôls'
Fabrc.
O r , le vice qui opère la nullité du teftament du ficur Aridfé Dau-
.
cette , eft ue" vice p atent, l'es- adverfaires ne peuvent donc invoquer
pour eux ni pour leur tante ; c’eft le défaut d’un nombre fuffifant
de
témoins. Une
prétendue
bonne foi d'ans laquelle
jamais é t é , ni les uns- ni les- autres r il's font donc
ils
n’ont
dans le cas
des derniers- arrêts' que nous venoits de c ite r , ôc lefénéchal'du Puÿ
en les condamnant à la reftitution des fruits par é ta t, depuis le décès
du fieur André Dancette , Si à dire d’experts depuis l’introduttion de
l’inftance , a tres-bren íaifi l’efprit de la C o u r, St n’a fait que fe con
former à fa jurifprudence aufli fàge qu’éclairée.
Nous finirons en diiïïpant une fauffe alarme que les adverfaires vou
draient donner à la C o u r,
2>C à
l’ombre de -laquelle ils cherchent à fe
fouftraire'à la loi qui .les pouriliit ôC les condamne.
Combien de fam illes réduites a la 'mendicité, s’écrient-ils , com
bien de particuliers ruinés , <•) caufe du grand nombre de teflaments qui
fe trouveraient nuls , s'il étoit vrai que Beauzac fû t une ville !
Ce n’eft là qu’une fauffe 6c très-fauifc alarme-, Beauzac eft inconteftablement une v ille , & dans celle-là comme dans toutes les autres du
royaume , la loi des teftamens y reçoit fon exécution, nous en avons
affez produit pour le juftifierj nous avons défié ôc nous défiogs avec
la plus grande confiance les adverfaires, de produire Un feul teftartient
*W
en ligne collatérale, retenu dans la ville ou les fauxbourgs de B eauzac,
depuis trente ans, à compter de ce jo u r, qui ne fo ir iigné que par
deux feuls tém oins; iis aflurent qu’il y en a un notfere infini, ï l î '
�¡/jrz& <U*JTjLJJL*r- y.
/L r& v rO
■
3Z
pourroient bien en produire quelques uns, & il y a tout ‘à croire, qu’ils
n’auroient pas tant tardé s’il en exiftoit.
/¿
M
Mais quand il feroit auff i vrai qu’il eft fa u x , qu’il y eut un grand '
nombre de teftamens nuls à Beauzac , par le défaut d’un nombre fuffifant de témoins , cette confidération devroit-elle engager la Cour à
commettre l’injuftice la plus criante, en maintenant contre
ca, yi ~
toutes
les lois des étrangers ufurpateurs dans un héritage qui ne leur appar
tient pas ? ......... Loin de nous ce blafphême , s’arrêter un feul inftant à
cette idée , eft un crime.
L a juftice ne connoît ni le refpect humain ni les confidérations ;
^
/x
,
-elle rend à un chacun ce qui lui ef t d û , fans égard pour les perC ¡S¿¿¿¿Cl- ¿CfUjUL.
fonnes , pour les temps e t pour les lieux. Reddere fuum cuique. Voilà
jj*njjj/r
fon eff e n c e , &
c’eft fous ce rapport inaltérable que fes auguftes
miniftres nous la font connoître chaque jour par leurs oracles.
perfiftent.
Monfieur L ' A B B É
D E C A M B O N , Rapporteur
Me. D E S C O M P S ,
Avocat.
B A R A D A P ro cu reu r
¡p if-v r o j ¿ , 1
�
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Factums Marie
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Description
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Faugier, André. 1789?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cambon, de
Descomps
Barada
Subject
The topic of the resource
successions
captation d'héritage
opinion publique
coutume du Velay
distinction entre villes et campagnes
témoins
Description
An account of the resource
Réplique pour Me. André Faugier, prêtre, tuteur de l'enfant pupille du feu sieur Claude Faugier, bourgeois ; le sieur Jacques Massardier ; et demoiselle Françoise Faugier, mariés, intimés ; contre les sieurs Barthélémi Robin, appelant ; et Jean-Barthélémy Robin, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1789
1760-Circa 1789
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0545
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0223
BCU_Factums_M0726
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Beauzac (43025)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
captation d'héritage
coutume du Velay
distinction entre villes et campagnes
opinion publique
Successions
témoins
-
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1ffa9edff0a6e1950bbd015a085b9680
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Text
MÉ MO I R E
P our R e n é E S M E L I N ,
G ilb e rt E S M E L I N - D E U X -
A I G U E S , C l a u d e - A m a b l e L A P E L I N , et M a r i e - M a g d e le in e
E S M E L I N , son épouse , J e a n - F r a n ç o is L A -
G A R D E - D E L A V I L E N N E , et T h é r è s e E S M E L I N ,
son épouse ; M a r i e - A d é l a ï d e E S M E L I N , veuve D e b a rd , intimés
Contre G
e n e v iè v e
E S M E L I N , veuve d'A m a b l e D
e c ham ps,
ex-religieuse, appelante ;
E n présence de P rocu le E S M E L I N , ex-religieuse ;
E t encore en présence de J ac q u e s - M
ar ie - P ierre
L O IS E L -
G U I L L O I S , tuteur de ses enf ans , héritiers d ’Agnès
E
sm e lin ,
leur aïeule m aternelle, aussi intimés.
LA. dame D echamps dénonce aux tribunaux un traité de fa
mille , rédigé sous ses yeux par d’anciens jurisconsultes de son
choix ( * ) , qu’elle a signé, exécuté, qu’elle approuve et exécute
journellement.
(*) MM. Bergier et Boirot.
A
�( » )
Ce traité de famille a été dicté par la nécessité.
Il a été dicté par la sagesse.
En ce qui la concerne, il a été dicté par la générosité.
11 lui assure un patrimoine d’environ 3oooo f r . , dettes payées.
Elle se dit lésée.
E t il ne lui revenoit pas une obole.
Etienne Esmelin a contracté mariage avec Marie-Anne-Barthélemy G ibon , le 29 février 1756.
Ils se sont unis sous le régime de la communauté, avec clause
expresse que « pour y acquérir d ro it, chacune des parties y con» fondroit Coo fr.; et le surplus de leurs biens, avec ce qui leur
» écherroit par succession, donation , sortiroit nature de propre» fonds. »
Ils n ’avoient qu’une fortune médiocre; elle s'est grossie par de’
nombreuses successions qui se sont accumulées sur leurs têtes,
spécialement du chef de la dame Esmelin.
L a première qui est échue de cet estoc, a été celle du sieur
Jean-Baptiste de Lachaussée, son oncle, décédé à Moulins en 1764.
L a seconde, celle de Gilbert de Lachaussée, aussi son oncle,
négociant à M oulins, décédé en 1766.
L a troisième, celle de Jacques de Lacha*ussée, frère des précé
dons, administrateur de PHôtel-Dieu de Paris, décédé en 1787.
Il a voit fait un testament suivi de codicille , par lequel il avoit
nommé pour ses légataires universels, Marie Farjonnel, sa mère;
Antoinette de Lachaussée , veuve Lafeuillant ; Elisabeth de
Lachaussée , femme Laplanche; Catherine de Lachaussée, fille
majeure ;
Et les en fans et desccndans de Marie de Lachaussée, décédée
femme Gibon.
L ’inventaire de cette succession en portoit l’actif à deux millions
soixante mille livres.
Il fut fait un premier partage provisionnel d ’une somme de
�(3 )
1179^00 fr. d ’effels ro y a u x , devant L aroche, notaire au chàtelet
de Paris, le 29 avril 1788, qui constate que le sieur Esmelin
toucha pour sa femme un premier à-compte sur cette succession ,
de i 685oo fr.
Marie Farjonnel, aïeule de la dame Esmelin , qui avoit touché
un pareil à-compte de i 685oo fr. par ce partage provisionnel,
mourut peu de temps après.
L a dame Esmelin mourut ensuite aum oisde novembre 1789.
L e sieur Gibon , son frère , directeur des aides à ChàteauT hierry , mourut au mois de juillet 1790.
Il laissa encore une succession très-opulente, qui étoit divisible
en trois portions égales, entre les enians Esmelin, le sieur G ibon ,
de Moulins, leur oncle, et le sieur Gibon-Montgon , leur cousin
germain.
L e sieur Gilbert G ibon, père de la dame Esmelin, mourut en 1792.
Enfin Elisabeth Esmelin-Duclusor, l’une des filles des sieur et
dame Esm elin, mourut aussi sans postérité dans le courant de la
même année.
Etienne Esmelin père resta en possession de toutes ces successions.
II avoit marié quelques-uns de ses enfans avant la mort de
Marie-Anne-Barthélemy Gibon , son épouse.
Il en a marié d’autres depuis, et il avoit fait aux uns et aux
autres des avancemens d’hoirie.
Deux de ses filles , Procule et Geneviève Esmelin, avoient pris
le parti du cloître, et avoient fait profession avant la mort de leur
mère.
Mais les lois des 5 brumaire et 17 nivôse an 2 ayant aboli leurs
vœ ux, elles furent rappelées à toutes ces successions.
Bientôt le refus de Procule Esmelin de prêter serm ent, attira
sur elle des persécutions que chaque jour pouvoit rendre plus graves.
L e sieur Esmelin crut devoir prendre la précaution de se faire
céder ses droits, dans toutes ces successions , pour se m e ttre , à
toutes fins, ainsi que ses enfans, à l’abri des recherches nationales.
Geneviève Esmelin avoit pris un parti tout opposé ; non-seule-
Aa
�( 4 )
ment elle avoit prêle serment, mais elle ne dissimulent pas l'in
tention où elle éloit de se marier; et le sieur Esmelin crut encore
prudent de se faire céder ses droits maternels, pour garantit sa
famille des recherches futures de ce gendre inconnu dont il étoit
menacé.
L e rapport de l’effet rétroactif des lois des 5 brumaire et 17
nivôse ne tarda pas à rendre ces précautions inutiles.
Mais , dans le même tem ps, le sieur Esmelin père éloit forcé
d ’en prendre de semblables avec d’autres de ses ercfans.
L e sieur Debard éloit inscrit sur la liste des émigrés, et Adé
laïde Esmelin, son épouse, étoil en réclusion; elle étoit menacée
du séquestre sur tous ses biens. 11 fallut encore avoir recours à la
cession de ses droits maternels. Elle consentit cette cession à son
père, le 1" germinal an 2. Mais comme elle n’étoit que simulée,
il lui en donna une contre-lettre.
L ’inscriplion du sieur Esmelin-Deux-Aîgues, sur la liste fatale,
força encore le sieur Esmelin père de faire avec lui des actes simulés,
pour se soustraire, comme ascendant d ’émigré, aux persécutions
des agens du fisc.
T o u s ces actes ont disparu avec les causes qui les avoient fait
naître; et la dame Dechamps, qui en abuse aujourd’hui, sait mieux
que personne qu’ils n’ont jamais eu de réalité.
Les orages révolutionnaires s’élant calmés, plusieurs des enfans
Esmelin, la dame Lapelin , le sieur Esmelin-Deux-Aigues, et les
mineurs Loisel, ont cru devoir rechercher leurs droits maternels.
L e sieur Esmelin a terminé avec la dame Lapelin, en lui donnant
un à-compte sur la succession de René Gibon;
Avec le sieur Esmelin-Deux-Aigues , en s’en référant à l'arbi
trage de M. Lucas, président du tribunal de Gannat, leur parent,
qui a dicté la transaction passée enlr'eux au mois de germinal an i 3.
Quant aux mineurs Loisel, la contestation est restée indécise.
Ces actions éloienl justes en elles-mêmes; et le sieur Esmelin se
seroit sans doute empressé de les prévenir , s’il n’avoil pas été
arrêté par les difficultés insurmontables qu’il trouvoit à distinguer
sa fortune personnelle de celle de scs enfans.
�( 5 )
Mais la dame Dechamps , subjuguée par un conseil pervers, qui
avoit voué au sieur Esmelin une haine implacable en échange des
services signalés qu’il en avoit reçus, a dirigé contre lui des actions
d ’un autre genre, qui tendoient à compromettre sa délicatesse, et
qui l’ont abreuvé d’amerlume.
Bientôt la perspective effrayante du mauvais état de ses affaires
est venue mettre le comble aux chagrins dont il étoit dévoré.
11 avoit fait imprudemment une affaire de finance avec la dame
L eblon d, Américaine, qui , privée de ses revenus des îles, dont
la rentrée étoit suspendue par la guerre maritime avec l’Angle
terre, avoit obtenu de sa facilité des avances énormes , au point
qu’il se trouvoit son créancier de plus de 160000 fr. sans la plus
légère sûreté, et à peu près sans espoir de les recouvrer.
L e sieur Esmelin n’avoit pu faire d ’aussi grosses avances qu’en
puisant dans les caisses des banquiers de Moulins et de Clermont.
Chaque jour ses dettes alloient en croissant, par le taux élevé
des intérêts qui s’accumuloient.
Déjà son crédit étoit épuisé chez les banquiers de Clermont, qui
ne consentoient à renouveler ses effets qu’avec l’endossement du
sieur René Esmelin, son fils aîné (*), et il ne pouvoit se dissimuler
qu'il couroit à grands pas à sa ruine.
L ’âme flétrie par les outrages de la dame Dechamps , et ne pou
vant supporter l’idée du renversement de sa fortune, il est tombé
malade dans les premiers jours de décembre i8 o 5 , et il est mort
le ig du même mois.
Les scellés ont été apposés de suite par le juge de paix des lieux.
Quelque temps après, il a été procédé à un inventaire en forme,
en présence de tous les intéressés, et spécialement de la dame
Dechamps, qui a assisté à toutes les séances.
Indépendamment de l’actif bon qui fut porté dans cet invenf (*) Le sieur Esmelin aîné avoit déjà cautionné pour 60000 fr. d’eftets de son
père à son décès; il est porteur do scs lettres , pur lesquelles il le prioit do lui
donner sa signature.
�\
( 6 )
ta ire , il fut fait un état particulier des créances mauvaises ou dou
teuses , montant à 267330 f r . , qui fut signé par tous les héritiers,
et spécialement par la dame Dechamps.
L a dame Dechamps dit dans son mémoire , page 4 » que pen
dant cet inventaire ses frères furent p o lis , caressans. Ces expres
sions sont trop foibles ; elle auroit dû dire qu’ils la comblèrent de
témoignages de tendresse, qu’ils ne négligèrent rien pour gagner
sa confiance, et pour la soustraire à la maligne influence du per
fide conseil qui l’éloignoit de sa famille, et la conduisoit à sa perte;
Que leur ayant paru avoir des besoins, ils lui remirent la somme
de 1000 fr. qui étoit provenue des premières ventes des denrées
de la succession ;
Q u’elle prit différens effets mobiliers qui étoient à sa conve
n a n c e , sur la prisée de l’inventaire ;
Que dans le partage qui fut fait en nature d ’une partie du mo
bilier , ils l’admirent pour un huitième, quoiqu’il ne lui en revînt
qu’un seizième ;
Qu'enfin ils ne cessèrent de lui prodiguer les égards et les bons
procédés.
Instruite par elle-même de l ’état des affaires de son père ; de
plus de iSoooo fr. de dettes de banque sur lettres de change qui
venoient chaque jour à échéance, dont plusieurs étoient déjà pro
testées, et dont les porteurs pouvoient consommer en frais tous les
biens de la succession ;
D e plus de 60,000 liv. d’autres dettes par billets, obligations,
rentes viagères ou constituées ;
T ém oin de l ’état de dégradation et de désordre absolu, dans
lequel se trouvoient tous les biens communs, au point que sur 24
ou 25 domaines, il n’y en avoit pas un seul dont les bàtirnens ne
fussent en ruine, les granges écroulées , et hors d ’état de contenir
la récolte prochaine.
Plus pressée d’aillours de jouir de son lot qu’aucun de s?s co
héritiers, à raison de sa position, elle a été la première à désirer
le partage.
�(7 )
On est convenu de faire estimer préalablement tous les biens
qui devoient en être l’objet.
On a nommé pour exporta les sieurs Renaudet et Ferrier, connus
trop avantageusement dans l’opinion publique pour ne pas réunir
les suffrages de tous les cohéritiers; et ils ont été si agréables à la
dame Dechamps , qu'ils ont vécu et logé chez elle pendant tout le
temps qu'ils ont travaillé à l’estimation de la terre du Bouis, qui
joint son habitation.
Cette opération terminée , tous les copartageans sont unanime
ment convenus de s ’ e n référer, sur le règlement de leurs droits res
pectifs, à la décision de deux anciens jurisconsultes de C lerm ont,
dont l ’un éloit grand oncle maternel à la mode de Bretagne des
mineurs Loisel.
Ils se sont tous rendus à Clermont avec les deux experts, R e
naudet et Ferrier, dans les derniers jours de mars 1806, et tous
y ont séjourné sans interruption jusqu’au 21 avril suivant.
Chaque jour ils se sont réunis chez les arbitres.
L à , chacun des intéressés a fait valoir ses droits ou ses préten
tions.
T o u t a été v u , examiné, discuté en leur présence par les arbi-»
1res.
Mais comme de tous les frères et sœurs Esmclin , six seulement
avoient des droits dans les biens m aternels, à raison de la mort
civile de Procule et de Geneviève; que tous au contraire étoient
copartageans dans les biens paternels; le premier pas à faire éloit,
de distinguer les biens paternels et maternels, pour en former deux
masses séparées.
Les arbitres ont tenté ce travail; mais ils n ’ont pu y réussir.
11 éloit impossible de retrouver les élémens de la plupart des
successions échues aux sieur et darne Estnelin, à défaut d ’inven
taires et de partages.
11 existoit à la vérité des inventaires dos deux principales, celles
de Jacques de Lachaussée et de René-Barthélem y G ib o n ;m a is
les héritiers Esmclin ne les avoient pas en leur possession ; et ils
n ’eloieul pas en état de les représenter.
�( 8 )
Ils n’avoîent pas des notions exactes de la nature et de la consis
tance des effets dont ces successions étoient composées.
Ils ignoroient ce qui en avoit été touché par leur p è re , en nu
méraire ou en papier-monnoie , et les différentes époques aux
quelles ces sommes avoient été versées dans ses mains.
Les arbitres avoient d’ailleurs sous les yeux une expédition fa u
tive du contrat de mariage des sieur et dame Esmelin , qui contenoit la stipulation pure et simple de la communauté , sans la
clause subséquente qui portoit que «pour y acquérir droit, chacune
» des parties y confondrait 600 fr. ; et le surplus de leurs biens,
» avec ce qui leur écherroit par succession, donation, sortiroit
» nature de propre-fonds (*)• »
D e sorte que les sieur et dame Esmelin paroissoient n ’avoir con
tracté qu ’une communauté légale et conforme à l’article 276 de
la coutume de Bourbonnais; d ’où il sembloit résulter que tout
ce qui étoit de nature mobilière dans les successions échues aux
deux époux , avoit été confondu dans la communauté, et appartenoit par moitié à chacun d’eux; ce qui frappoit spécialement sur la
succession de Jacques de Lachaussée, presque toute composée d ’ac
tions de la compagnie des Indes, ou autres effets royaux payables
au porteur.
Les arbitres, au milieu de celle obscurité, crurent apercevoir
une lueur de justice dans le plan simple de diviser la masse entière
des biens et des dettes en deux portions égales, dont l’une seroit
censée maternelle, et l’autre censée paternelle; ce qui donnoit aux
deux religieuses un seizième chacune de la masse réelle des biens,
et les chargeoit d’un seizième des dettes (**).
(*) Cette expédition inexacte a été représentée par Procule Esmelin , qui
l ’avoit trouvée dans les papiers de la succession.
Elle paroissoit mériter d’autant plus de confiance, qu’elle étoit écrite en entier
do la main de Barthélémy , notaire , dépositaire do la minute.
(**) I«a masse totale de l’a ctif lion étoit de 5<j85 <j 5 fr.
Les créances actives mauvaises ou douteuses, de 267330 fr.
Los dettes passives connues lors du partage, étoient de 205yS6 fr.
Colles découvertes depuis s’élèvent à environ 20000 fr,
�(. 9 )
Les arbitres ne se dissimulèrent pas, et ne dissimulèrent pas à
tous les cohéritiers que ce plan étoit trop favorable à Procule et
Geneviève Esmelin , même sous le point de vue de la communauté
légale des père et mère communs, comme elle paroissoit l’être
d’après l’expédition fautive de leur contrat de mariage.
M a is, d’une p a rt, il étoit urgent de prendre un parti pour satis
faire les créanciers, dont les poursuites pouvoient à chaque ins
tant porter partout l’incendie et la dévastation.
D ’autre part, il falloit par-dessus tout éviter , pour l’intérêt de
tous, d’en venir à des discussions juridiques, qui présentoient un
abîme sans fond et sans rives, prêt à engloutir toute la fortune
des copartageans.
On ne considéroit d’ailleurs la portion que devoit recueillir Pro
cule Esmelin, que comme un dépôt confié à la vertu, qui devoit un
jour revenir à la famille.
Et à l’égard de la dame Dechamps , tous ses cohéritiers regardoient l’avantage qu’elle pouvoit retirer de ce mode de-partage,
comme un sacrifice fait à sa position et à sa qualité de mère de
famille.
Quant aux mineurs Loisel , indépendamment que l’acquiesce
ment de leur père à cette mesure étoit suffisamment justifié par
l ’exemple de tous ses copartageans majeurs , grands oncles et
grand’tantes de ses mineurs , qui avoient le même intérêt qu'eux ,
on eut soin de les dédommager amplement de la perte que ce plan
pouvoit leur occasionner, comme on le verra dans la suite.
C e mode de partage une fois adopté par tous les cohéritiers, on
vit bientôt disparoitre la majeure partie des difficultés qui divisoient
la famille Esmelin.
Il en restoit cependant encore, qui donnèrent lieu à quelques
débats entre les cohéritiers.
L a principale étoit relative au sieur Esmelin-Deux-Aigues.
Après sa radiation de la liste des émigrés , il avoit traduit son
père en justice, pour obtenir de lui le règlement de ses droits ma
ternels.
B
�( IO )
L e sieur Esmclin, qui connoissoit mieux que personne les inconvéniens et les dangers de soumettre celte discussion aux tribunaux,
consentit de s’en référer à l’arbitrage de M . Lucas, président du
tribunal de G a n n a t, leur parent.
M . Lucas, après avoir entendu les sieurs Esmelin, père et fils,
pendant plusieurs séances, et avoir examiné leurs mémoires res
pectifs, crut devoir fixer le débet du père envers son fils, pour tous
ses droits maternels directs et collatéraux, à 57760 francs, dont
42760 francs pour les capitaux, et i 5ooo francs pour les intérêts
ou jouissances; et ce fut d’après cet aperçu que les parties traitè
re n t, sous sa dictée, devant H u e , notaire ù Gannat, le 17 ger
minal an i 3 (*).
T o u s l e s cohéritiers du sieur Esmelin-Deux-Aigues connoissoient
parfaitem ent la sincérité de ce traité; et la médiation d e M . Lucas,
prouvée par sa signature, ne permettoit pas d ’élever le plus léger
doute à cet égard. Mais comme il sembloit en résulter quelque
avantage en sa faveur, ils prétendoient qu’il devoit s’en départir
pour se mettre à leur niveau.
L e sieur Esmelin-Deux-Aigues insisloit sur l’exécution de cet
acte, comme étant un traité à forfait, convenu de bonne foi, slfr
des droits successifs dont la quotité étoit absolument incertaine.
Il ajoutoit que l’avantage qu’on prétendoit résulter de ce traité ,
n ’étoit rien moins que réel; qu’il étoit plus que compensé, par la
circonstance que, dans le plan du partage proposé, il n’avoit à pré
tendre qu’un seizième dans les créances actives paternelles, dont il
lui seroit revenu un huitième, si on n ’en avoit pas confondu la
moitié dans la masse maternelle, dont il étoit exclu au moyen de
l’exécution de ce traité.
Il ajoutoit encore qu’en supposant que ce traité produisît quelqu’avantage en sa faveur, cet avantage ne pouvoit être critiqué,
parce qu’il étoit bien loin d’absorber les réserves disponibles que
(*) l a transaction fait mention expresso qu’elle a été passée en présence et
par la médiation do M. L u ca s, qui l ’a signée.
�( 11 )
s ’étoit faites le père commun par les différons Contrats de ma
riage de ses enfans (*).
D ’après ces considérations, il fut arrêté que le sieur EsmelinI)eux-Aiguësprélèveroit, avant tout partage,le montant dece traité.
Mais le mode de ce prélèvement n ’étoil pas sans difficultés.
D ’une part, le capital des droits successifs du sieur EsmelmDeux-Aigues devoit être prélevé sur la masse maternelle.
D ’autre p a r t, les jouissances , et le prétendu avantage qui pouvoit résulter de ce traité en sa faveur, devoient être prélevés sur la
masse paternelle.
On prit le parti d’en faire le prélèvement sur la masse entière,
et ce parti étoit d’autant plus raisonnable , que la masse paternelle
étant avantagée par le plan du partage, en faisant frapper ce pré
lèvement par égalité sur les deux masses , on se rapproclioit de
plus.en plus du point de justice auquel les arbitres et les parties
se proposoient de parvenir.
Cet obstacle applani, il en restoit encore quelques autres, mais
qui éprouvèrent moins de difficultés.
L e sieur René Esmelin aîné avoit des prétentions de plus d ’un
genre contre la succession de son père.
L a principale résultoit delà donation que lui avoit faite son père
de la terre de Bouis, par acte du 2 mars 1793, immédiatement
avant les lois de l’égalité; donation qui prenoit sa source dans la
réserve que s’éloit faite le sieur Esmelin, par les différens contrats
de mariage de ses enfans, de disposer de cette terre au profit de tel
d’entr’eux qu’il jugeroit à propos.
Cette circonstance formoit exception aux dispositions prohibi
tives de la Coutume de Bourbonnais, qui iaterdisoit les avantages
entre enfans, autrement que par contrat de mariage.
(*) Les parties raisonnoient d’après l ’expédition inexacte du contrat de ma
riage de 17 5 6 , qui rendoit communes aux deux époux toutes les successions
mobilières.
En raisonnant d’après la clause insérée dans ce contrat de mariage, qui les rendoit propres à chaque estoc, le sieur Esmelin-Deux-Aigues étoit évidemment lésé.
Ba
�( ^ )
"Le sieur Esmelin père n ’étant d’ailleurs décédé que sous l’empire
du nouveau C o d e , tous les avantages antérieurs pouvoient être
considérés comme légitimes , jusqu’à concurrence de la portion
disponible.
Mais le sieur René Esmelin n’attendit pas qu’on lui en demandât
le sacrifice; il fut le premier à l’offrir à ses frères et sœurs; il n’y
mit qu’une seule condition, celle de l’union et de la concorde, et
que tout se terminât à l’amiable.
L a dame Debard , de son côté, élevoit des réclamations d ’urr
intérêt m ajeur, qui prenoient leur source dans une donation entre
vifs qui lui avoit été faite par les dames Delagoutte et Gudevert,
le 3 mai 1 7 7 5 , de certains biens dont le sieur Esmelin étoit mort
en possession , qu’elle prétendoit avoir droit de prélever en nature
soir sa succession, indépendamment d ’un grand nombre d’années
de jouissances de ces mêmes biens, qu’elle réclamoit à titre de
créancière.
L a dame Debard en fit généreusement le sacrifice , sans autre
indemnité qu’une somme de 1200 francs à prendre sur les créance»
douteuses, et sans y mettre d’autres conditions que celles qu’y
avoit mises son frère, l’union et la concorde, et que tout se ter
minât à l’amiable.
Enfin, le sieur Delavilenne, stipulant pour sa fem m e, dont ¡F
étoit fondé de pouvoir, fît aussi le sacrifice d’une somme de 1000 fr.
qui formoit l’objet d ’une donation qu’il prétendoit avoir été mal à
propos confondue dans la dot qui lui avoit été constituée par son
contrat de mariage.
T o u s ces obstacles applanis , il fut question de procéder au
partage.
On fit un premier traité pour en fixer les bases.
C ’est dans ce premier traité que se trouvent tout le moral de l’opéralion,les motifs qui l’ont déterminée, les circonstances impérieuses
qui la rendoient nécessaire, les sacrifices généreux faits par plu
sieurs des cohéritiers pour assurer la paix et l’union dans la famille.
On en fit un second pour y traiter quelques objets particuliers,
�( >3 )
que tous les cohéritiers croyoient devoir être renfermés dans le sein
de la famille.
Et enfin un troisième, qui contenoit le partage.
Il étoit impossible d’employer dans ce partage la voie du sort.
Les rapports étoient tous inégaux, et varioient depuis 5oo fr.
jusqu’à 33ooo fr.
L e tirage au sort n’eût pu se faire sans être répété jusqu’à sept
à huit fois.
Les morcellemens qui en seroient résulté eussent été tels, que
chaque domaine, chaque arpent de terre eût été divisé en plus de
cent portions , contre le texte de la loi et le vœu de la raison.
On prit donc le seul parti proposable, celui de faire des lots de
convenance.
Mais les frères et sœurs de la dame Dechamps, toujours fidèles
à leur plan de la combler d ’égards et de bons procédés, eurent l’at
tention de lui laisser le choix de celui qui lui seroit le plus agréable.
Elle choisit des biens de la terre du Bouis , qui étoient situés
dans la même commune que ceux de ses mineurs, qui les joignoicnt
de toutes parts, et dont l’estimation lui étoit d’autant moins sus
pecte, qu’elle avoit été faite sous ses yeux, et pardesexperts logés
et nourris chez elle pendant tout le temps de leur opération.
On usa avec elle des mêmes procédés pour le seizième des dettes
dont son lot devoit être chargé; 011 lui laissa le choix de celles
dont les intérêts étoient le moins onéreux, et des créanciers sur la
complaisance desquels on pou voit le plus compter.
Ces différentes opérations terminées, tous les héritiers Esmelin
retournèrent dans leurs foyers, en bénissant leurs arbitres, et en.
se félicitant de l’union et de la concorde qu'ils regardoient comme
rétablies entr’eux d’une manière inaltérable.
Mais le bonheur de la famille Esmelin ne fut pas de longue durée.
L a dame D echam ps, rentrée dans ses foyers , y retrouva le
«dém.on de la discorde, le misérable qui avoit conduit son père au
tombeau, et qui médiloit la ruine de sa famille.
Dès ce premier m om ent, il fut arrêté entr’eux de tenter, paç
�(
>4 )
toutes sortes de voies, l’anéantissement de tous les arrangemens
faits à Clermont.
Avant de rien entreprendre, elle eut soin de s'installer dans
son lo t, de l’affermer pour plusieurs années, de se faire payer
d ’avance du prix du bail, et surtout de laisser à ses frères et soeurs
toutes les charges de la succession dont jusqu’ici elle n’a pas payé
une obole, et qu’ils acquittent journellement pour elle.
Après avoir ainsi pris scs précautions, et le 18 juin 1806, là
dame Dechamps a fait citer tous ses cohéritiers en conciliation ,
pour venir à division et partage de tous les biens meubles et im
meubles délaissés par le père com m un, sans avoir égard à tous
projets de partage , qui seroient regaidés cômme non avenus.
Cette citation a été suivie d’un procès verbal de non concilia
tion , en date du g juillet.
L e 25 du même m ois, la dame Dechamps a présenté requête au
tribunal d arrondissement de G annat, tendante au fond à ce qu’il
lui fût permis d ’assigner ses cohéritiers , sur la demande en par
tage, dans les délais ordinaires, et à la première audience, sur sa
demande provisoire, tendante à ce qu’il fût sursis à la coupe et
exploitation des différais bois de haute futaie, et tous autres dépendans de la succession du père commun.
Elle demandoit en même temps qu’il lui fût permis de faire pro
céder à la visite et état de tous ces bois par experts , à l’effet de
constater tous ceux qui avoient été coupés et tous ceux qui étoient
sur pied, et d’en fixer le nombre et la valeur , pour, après ce rap
port, être pris par elle telles conclusions qu'elle aviscroit.
Cette demande provisoire cachoit une insigne perfidie. La dame
Dechamps savoit qu’il existoit, au décèsdu père commun , plus de
i 5oooo fr. de lettres de change, toutes échues, protestées ou re
nouvelées par ses frères et sœurs, non compris plus de 60000 fr.
de dettes ordinaires, dont les créanciers n’étoient pas moins im
patiens.
Elle savoit que chacun de ses cohéritiers n ’avoit d ’autres res•ources, pour faire honneur aux engagemena les plus urgens, que
�( i5 )
dans le prix de ces b o is, qu’ils se hâtaient de vendre et d’exploiter.
Son projet étoit de rendre leur libération impossible, de voir leur
liberté compromise, et tous les biens livrés à l’expropriation forcée.
C e projet, dira-t-on, étoit insensé ; elle ne pouvoit elle-même
manquer d’en devenir victime : cela est vrai ; mais faut-il nier
l ’évidence, parce qu’elle passe les bornes ordinaires de la vraisem
blance et de la perversité humaine ? A-t-on oublié le vœu de
Cornélie dans les Horaces ?
Quoi qu’il en soit, le tribunal de Gannat a repoussé, avec indi
gnation, cette action provisoire , par son jugement du i 5 décembre
1806, rendu d'après les conclusions motivées de M . le commissaire
impérial.
Pendant que la dame D e c h a m p s v e x o i t ainsi ses freres et sœurs,
et tentait d ’arrêter par toutes sortes de moyens l’exécution des
arrangemens faits entr’eux, ses cohéritiers cherchoient à les conso
lider et à les régulariser à l’égard des mineurs Loisel.
L e sieur Loisel avoit été assigné depuis le 5 juin , en sa qualité
de père, tuteur et légitime administrateur de ses enfans, pour en
voir ordonner l’exécution ; mais il avoit cru devoir suspendre toutes
espèces de démarches jusqu’à la décision de l’incident élevé par
la darrje Dechamps.
C et incident terminé, le sieur Loisel a convoqué un conseil de
famille le 24 décembre 1806.
Ce conseil, composé du grand-père maternel des mineurs, de
plusieurs de leurs oncles et de leurs plus proches parens, après
avoir pris communication de la transaction du i 5 a v ril, l’a ap
prouvée dans tout son contenu , et a autorisé le sieur Loisel à so
retirer auprès de M. le commissaire impérial, qui seroit invité a
désigner trois jurisconsultes pour examiner ce traité et en dire
leur avis, conformément à l’article 467 du Code civil.
L e 3 i décembre, sur la requête qui lui a été présentée par le
sieur Loisel, M . le commissaire impérial a désigné trois anciens
jurisconsultes près la cour d ’appel, également recommandables par
leur expérience et leurs lumières, M M . Andraud, Borye et PagèaYerny.
�( .6 )
Sur l’avis de ces trois jurisconsultes, les héritiers Esmelin , à l’ex
ception de la dame Dechamps, ont demandé l’homologation de la
transaction du i 5 avril.
La dame D echam ps, fidèle à son plan de contradiction, n ’a pas
manqué de s’y opposer.
Mais sans avoir égard à son opposition, dont elle a été déboutée
avec dépens, la transaction a été homologuée, sur les conclusions
de M . le commissaire impérial, par jugement du 21 février 1806.
L e 21 mars, nouvelle assemblée du conseil de famille des mineurs
Loisel ;
Approbation du partage fait sur les bases de la transaction ho
mologuée ;
Requête du sieur Loisel à M . le commissaire impérial, pour l’in
viter à désigner trois jurisconsultes auxquels seroit soumis l’examen,
du partage ;
Désignation de M M . Andraud , Borye et Pagès-Verny;
A vis de ces trois jurisconsultes pour l’approbation et la pleine
et entière exécution du partage.
*
L a dame Dechamps en a au contraire demandé la nullité, fon
dée sur le [défaut d’observation des formes voulues par la lo i , et
subsidiairement la réformation pour cause de lésion;
Et par jugement contradictoire du 2 mai dernier, rendu sur les
conclusions de M . le commissaire impérial, elle a été déboutée de
toutes ses demandes , et le tribunal a ordonné que le partage seroit
exécuté selon sa forme et teneur.
Appel de la dame Dechamps des trois jugemens des i3 décembre
1806, ai février et 2 mai 1807.
Ses moyens en cause d’appel sont les mêmes qu^en cause prin
cipale ; nullité de la transaction et du partage, lésion résultante de
l’une et de l ’autre.
L a réponse des intimés se divise en trois paragraphes.
Ils établiront, dans le premier, que la dame Dechamps n’est ni
recevable, ni fondée à opposer les prétendues nullités dont elle
excipe.
Dans
�Dans le second, que loin d’être lésée par les bases adoptées dans
la transaction du i 5 avril, et par le partage fait d’après ces bases,
elle y est avantagée du tout au tout.
Dans le troisième, que si les intérêts des mineurs Loisel paroissent avoir été lésés par le traité du i 5 avril, en ce qu’on y a gra
tifié la dame Dechamps et Procule Esmelin au préjudice de la suc
cession maternelle, ils en ont été amplement dédommagés.
§ I"
L a dame D echam ps n’ est ni recevable, ni fon d ée a opposer les
prétendues nullités dont elle excipe.
Toutes les nullités qu’invoque la dame Decliamps , contre le
traité et le partage des x5 et 20 avril, ont leur source dans de pré
tendus vices de formes.
O r la loi ne connoit point de vices de forme pour les majeurs ,
ils peuvent traiter de leurs intérêts à leur g ré, et leur signature
suffit pour rendre leurs engagemens irréfragables.
Ici, la dame Decliamps a signé les actes des i 5 et 20 avril.
A la vérité elle dit les avoir signés aveuglément, page 4 de son
mémoire, sans en avoir entendu la lecture, page 14.
Mais elle a signé si peu aveuglément, et elle en a si bien entendu
la lecture, qu’elle nous dit elle-même, page i 3 , que de retour dans
ses foyers elle a voulu se mettre en possession des articles attri
bués à son lot.
E t de f a it , elle s’en est de suite mise en possession, en les affer
mant par un bail qui est enregistré.
Elle n'a cessé d ’en jouir depuis, sans avoir été troublée par per
sonne ; et dans ce moment elle vient de quitter son ancienne habi
tation , qui appartenoit à ses mineurs, pour venir habiter dans sa
propre maison, qui fait partie de son lot.
A in si, non seulement la dame Dechamps a approuvé ce partage
dans les premiers instans; mais elle n’a cessé de l’approuver de
puis, et de l’exécuter pendant le procès.
C
�( *8 )
Et le fait d ’approbation le plus caractérisé, c’est ce changement
d ’habitation, cette translation dans sa propre maison, dans le
moment où elle remplit l’air de ses cris contre ce partage , qu’elle
dit avoir signé aveuglément, et sans en prendre lecture.
L a circonstance qu’il y a des mineurs intéressés dans ce par
tage, ne change rien à cette première fin de non-recevoir.
L a loi a prescrit des formes pour garantir les mineurs de la
fraude, d e là facilité ou de l’insouciance de leurs tuteurs, et de
leur propre inexpérience lorsqu’ils sont émancipés.
Mais ils ont seuls le droif de se plaindre de la violation de ces
formes, et il n’est pas permis aux majeurs d ’en excipcr.
C ’est ainsi que le décide l’article 1 125 du Code civil, qui porte
que « les personnes capables de s ’engager, ne peuvent opposer
Vi n c a p a c i t é du mineur , de l’interdit ou de la femme mariée, avec
lesquelles elles ont contracté.
Cette loi doit s’appliquer avec d’autant plus de rigueur à l’espèce,
que les parties ont prévu le cas , et en ont fait une clause expresse
de leurs conventions, en stipulant que le partage sera irrévocable
en ce qui concerne chacun des majeurs.
La loi seroit muette, que la convention seroit une loi écrite dont
il ne seroit pas permis de s’écarter.
C ’est en vain que la dame Dechamps prétend excepter de cette
règle générale les partages faits avec des mineurs.
Quand il seroit dans le texte ou dans l’esprit de la loi d’excepter
du principe général les partages faits avec des mineurs, la conven
tion particulière, que le partage dont il s’agit seroit irrévocable,
en ce qui concerne chacun des majeurs, feroit cesser cette excep
tion , parce que la disposition de Pliouime fait cesser celle de la
loi, et que celte convention n’a rien d ’illicite et de contraire aux
bonnes mœurs.
Mais, d’une psr', ce lexte est clair, précis, d ’un négatif absolu, ne
peuvent, ce qui écarte toute espèce d ’interprétation et d ’exception.
D ’autre part, cette loi n ’a fait que consacrer les anciens princi
pes, qui nous sont attestés par Lebrun, dans son T raité des Suc
�( *9 )
cessions, liv. 4, chap. i " , n ° 2 i où, parlant du partage provisionnel,
il dit que le mineur a le droit de s’y tenir s’il lui est avantageux,
ou d ’y renoncer s’il n’y trouve pas son compte; et que pour rendre
cette faculté réciproque, il faut qualifier le partage de simple pro
visionnel , et stipuler, par une clause précise , qu’il sera permis, tant
aux majeurs qu’aux mineurs, de demander un partage définitif ;
« autrement, le mineur pourra se tenir au partage , si le bien qui
» lui a été donné est plus commode , et la faculté ne sera pas re» ciproque pour les majeurs.
L e même principe est rappelé par Rousseau de Lacom be, au
mot P a r t a g e , sect. 5 , n 9.
Q u ’auroient donc dit ces auteurs, si,comme dans l’espèce, il a voit
été question d ’un partage, non pas simplement provisionnel, mais
définitif; et si , au lieu du silence sur la réciprocité de la facilité
de revenir contre ce partage, il y eût été formellement expliqué
qu’il seroit irrévocable en ce qu i concerne chacun des majeurs ?
Mais dans tout ce qu’on vient de dire, on a supposé, avec la
dame Dechamps, que les actes qu’elle attaque sont infectés de tous
les vices qu’elle leur suppose, résultans de la violation de toutes
les formes voulues par la l o i , pour les transactions et les partages
dans lesquels des mineurs sont intéressés ; et on a vu que dans c( tte
hypothèse elle 11’a pr.s le droit de les censurer, soit parce que la loi
lui en interdit la faculté, soit parce qu’elle se l’est interdite ellemême, par une convention formelle faite entr’elle et tous ses co
héritiers majeurs.
Mais celte hypothèse est purement gratuite, et toutes les for
mes prescriles par les lois pour la garantie des mineurs, ont été
scrupuleusement observées dans l’espèce.
On ne [»eut nier que l’acte du i 5 avril ne fut une transaction
telle que la définit l’article 2044 du Code civil , « un contrat par
» lequel les parties terminent une contestation née, ou prévien» nent une contestation à naître. »
Il s’agissoit dérégler les droits l e s plus compliqués, entre une mul
titude d'héritiers ; sur quatorze successions, qui présentoienl des
C 2
�( 2 0 }
questions sans nom bre, qui pouvoient donner lièu à des discussions
interminables.
Q u’exigeoit la loi pour rendre valable un pareil acte ? L'autori
sation du conseil de famille, l’avis de trois jurisconsultes désignés
par le commissaire du Gouvernement, et l’homologation du tri
bunal, après avoir entendu le commissaire impérial.
O r, on a vu dans le récit des faits, que toutes ces formalités ont
été exactement observées.
A la vérité, la transaction étoit rédigée avant l’autorisation du
conseil de famille, et la dame Dechamps croit pouvoir y trouver
un prétexte de chicane.
Mais ce traité, qui pour les majeurs étoit irrévocable en ce
qui concernoit chacun d’eux, n'étoit qu’un projet pour les mi
neurs , jusqu’à ce qu’il eût été autorisé par le conseil de famille,
et par l’avis des trois jurisconsultes, désignés par le commissaire
du Gouvernement; ce qui étoit prévu par l’acte même’, dans le
quel on lit qu’il ne sera passé en forme authentique, que lorsque
le sieur Loisel aura rempli pour ses mineurs les formalités pres
crites par la l o i , pour en assurer la validité.
IN’est-il pas évident, d ’ailleurs, que le meilleur moyen d’éclairer
le conseil de famille et les jurisconsultes qui dévoient donner leur
avis, étoit de leur présenter le traité tel qu*il avoit été convenu,
et qu’il devoit être exécuté entre toutes les parties, s’il leur paroissoit dans l’intérêt des mineurs ?
Vainement le tuteur auroit rendu compte à la famille assemblée
des projets d ’arrangemens qui étoient proposés entre tous les cohé
ritiers Esmelin; vainement on auroit fait part de ces mêmes projets
aux trois jurisconsultes désignés par le commissaire du Gouverne
ment pour donner leur avis; rien n’étoit plus propre à diriger
leur opinion que le traité même, qui n’étoit pas encore obligatoire
pour les mineurs, et qui nepouvoit le devenir que par l’assentiment
de la famille assemblée , et l’avis des jurisconsultes désignés.
Celte circonstance de la préexistence du traité du i 5 avril, à
l’assemblée du conseil de famille et à l’avis des jurisconsultes.
�( 21 )
n’est donc qu’un moyen de plus en faveur de ce traité, parce
qu’ il en résulte que, soit l’approbation de la famille, soit celle des
jurisconsultes, ont été données en bien plus grande connoissance
de cause que si elles avoient précédé la rédaction de ce traité.
C ’est encore une pointillerie bien misérable, que la critique que
fait la dame Dechamps des qualités de ce traité, dans lesquelles on
suppose les formalités remplies par le tuteur avec les dates en blanc.
On l’a déjà d i t , pour les mineurs ce traité n ’étoit qu’un pro
jet, qui ne devoit être passé en forme authentique et avoir d’exé
cution qu'autant que le tuteur auroit rempli les formalités néces
saires pour le rendre valable.
Il étoit donc tout simple que les dates des actes qui devoient
constater l’observation des formes prescrites par la loi fussent en
blanc ; les qualités étoient telles qu’elles devoient être dans l’acte
authentique; et en passant cet acte authentique, on devoit remplir
les dates du conseil de famille et de l’avis des jurisconsultes.
Quant au traité secondaire du même jour i 5 avril, il étoit en
tièrement dans l’intérêt des mineurs Loisel, puisque c’est ce traité
qui leur assure la succession de René Gibon, dont ils étoient exclus
par la loi.
11 ne peut donc y avoir ni motifs, ni prétexte de le censurer.
L e partage du 20 avril, qui n’étoit que la conséquence et l’exécu
tion de la transaction, n ’étoit encore qu’un projet pour les mineurs,
jusqu’à ce qu’il devînt obligatoire à leur égard, comme à l’égard
des majeurs, par l’observation des formes.
Elles ont été observées comme pour la transaction: le conseil de
famille, assemblé pour la seconde fois, l’a autorisé; les trois ju
risconsultes désignés par le commissaire impérial , consultés de
rechef, l’ont approuvé; le tribunal l’a homologué.
Ainsi, indépendamment que la dame Dechamps n ’est pas recevable à critiquer sous le point de vue de l’inobservation des for
mes, soit ce partage, soit le traité qui l’a précédé, on voit que
sa critique seroit sans fondement, et que le sieur Loisel n’a man
qué pour ses mineurs à aucune des précautions qu’exigeoit la loi
r
�( 23 )
pour les garantir de toute surprise , et s’assurer que leurs intérêts
étoient ménagés jusqu’au scrupule.
§ II.
L a dame D echam ps , loin d'être lése'e par les bases adoptées
dans la transaction du 1 5 a v ril, et par le partage fa it d’ aprèï
ces bases, y est avantagée du tout au tout.
Celte proposition pouvoit paroître incertaine à l’époque du traité
du i5 avril; aujourd’hui, elle est démontrée mathématiquement.
On éloit alors dans la confiance que toutes les successions échues
de l’estoc maternel avant le décès de la dame Esinelin étoient con
fondues dans la communauté.
Cette confiance étoit fondée sur l’expédition du contrat de ma
riage de 1756, dans laquelle on avoit omis d’insérer la clause que
chacun des futurs confondroit la somme de 600 liv. pour avoir
droit dans la communauté , et que le surplus des biens des futurs,
ainsi que ceux qui leur écherroient par succession ou donation,
leur sortiroient nature de propre.
Cette erreur se trouvant rectifiée par une expédition plus exacte,
il est évident que toutes ces successions doivent être prélevées au
profil des héritiers maternels.
Il faut cependant distinguer dans ces successions celles qui sont
échues avant le décès de la dame Esmelin , de celles qui sont échues
depuis.
T o u t ce qui a été touché sur les premières de ces successions par
le sieur Esmelin , doit elre prélevé sur la communauté, qu’il faut
considérer comme interrompue au décès de la dame Esmelin, ar
rivé au mois de novembre 178 9 , d'après la-faculté qu’en ont les
intimés et les mineurs Loisel par l’article 270 de la Coutume de
Bourbonnais.
Les successions échues depuis le décès de la dame Esmelin \ et
tout ce qui a été louché par le sieur Esmelin sur les successions
�( -3 )
antérieures depuis la même époque, doivent être prélevés sur sa
succession et sur ses biens personnels.
Ainsi, on doit prélever sur la communauté, i° ce que le sieur
Esmelin a touché sur la succession de Jean-Baptiste de Lachaussée,
décédé à Moulins en 1764;
20 Ce qu’il a louché de la succession de Gilbert de Lachaussce,
aussi décédé à Moulins en 1766;
5° La somme de i 68, 5ooliv. qu’il a touchée à compte sur la suc
cession de Jacques de Lachaussée, par le partage provisionnel passé
devant Laroche, notaire à Paris, le 29 avril 1788;
4° Ce qu’il a dû toucher de la succession de Marie Farjonnel,
bisaïeule des en fans Esmelin , décédée en 1788, l’une des léga
taires universelles de Jacques de Lachaussée, qui avoit aussi touché
16 8 , 5oo liv. par le parlage provisionnel de 1788.
Et on doit prélever sur la masse de sa succession , composée
soit de sa portion de la communauté, déduction fuite des prélèvemens, soit de ses biens personnels,
i° La somme de 188, 55o liv. 16 s. qu’il a reçue d e là succes
sion du sieur René-Barthélemy Gibon , soit en 1790, soit pendant
les premières années des assignats , ce qui est étubli par un état
écrit de sa main , que les intimés rapportent.
2°. Ce qu’il a dù loucher, pour le compte de scs enfans, de la
somme d’environ 900,000 livres, restée indivise , de la succession
de Jacques de Lachaussée, après ce partage provisionnel ;
.
5°. Ce qu’il a dû loucher de celle même somme, soit comme
représentant Elizabelh de Lachaussée , femme Laplanche , soit
comme représentant Catherine de Lachaussée, dont il avoit acquis
les droits, qui étoient d ’un cinquième chacune de cette somme
de 900,000 liv.; ce qu’il n’avoit pu faire que pour le compte de
ses enfans , à raison de l ’in d iv is io n de ces droits avec eux ;
4". Ce qu’il a dû toucher de la succession de Gilberl-Barlhéleniy
G ib o n , aïeul de ses enfans, soit directement, soit par l’effet des
cessions de droits de leurs cohéritiers dans celte succession.
On trouvera déjà une masse énorme qui suffiroit pour absorber
la succession du sieur Esmelin.
�(
4
)
. Mais que sera-ce, si on y joint les jouissances Ou les intérêts
des capitaux, à compter du moment du déccs de la dame Esmelin,
attendu qu’aux termes de l’article 174 de la Coutume de Bour
bonnais, l'usufruit des pères cesse de plein drojt, à 14 ans pour
les filles, et à 18 ans pour les mâles?
, Si on y joint pour 5o mille francs de ventes de bois de la com
munauté, faites par le sieur Esmelin, après le décès de sa fem m e,
toutes établies par preuves écrites ?
Pour pareille somme, au moins, de dégradations commises dans
les biens de la communauté, depuis la même époque?
Que sera-ce enfin, si on y joint plus de 225,000 liv.d e dettes,
connues lors du partage, ou découvertes depuis, que les intimés
ont payées , ou payent journellement pour leur compte et pour
celui de la dame Decliamps?
Non compris les prétentions de la dame de B a rd , qui-ont été
éteintes par le traité du i 5 avril.
Non compris encore les réclamations qui s’élèvent de toutes
paris contre cette succession, qui sont connues de la dame Dechamps , et qu’on se dispensera de relever, dans la crainte de les
accréditer.
Il résulte évidemment de ce tableau, q u e , la succession du sieur
Esmelin fût-elle d ’un million ( et elle est à peine du tiers) , elle
seroit insuffisante pour faire face au passif dont elle est grevée.
Et il ne faut pas perdre de vue, d ’une part, que la presque uni
versalité des acquisitions est antérieure au décos de la dame
Esmelin ; ce qui donne aux héritiers maternels droit h la moitié
de tous ces biens acquis, sans aulres charges que celle de la moitié
des reprises qui existoient alors.
D ’autre p^rt, que sur les 225,000 livres de dettes passives, il y
en a pour environ 200,000 livres , qui sont du fait seul du sieur
Esmelin, et n’ont été contraclées que depuis le décès de la dame
Esmelin; ce qui les fait uniquement frapper sur sa succession.
D ’autre part enfin, que les 2G7,55o livres de dettes actives dou
teuses, qui forment un des principaux objets de cetlte succession,
no
�(
*5)
ne doivent être comptées que pour le cinquième, au plus, de leur
valeur numérique ; les intimés en offrant l’abandon à 80 pour
100 de perte.
C ’est vainement que la dame Dechamps croit pouvoir affoiblir ce tableau, en cherchant à tirer avantage du testament de la
dame Esmelin , qui contient, dit-elle, legs du quart de tous ses
biens, au profit de son mari.
C e testament n’est pas rapporté, et il y a lieu de croire qu’il ne
le sera jamais ;
Il est olographe , et il n ’est pas écrit en entier de la main de la
dame Esmelin ;
C e n’est pas sans de bonnes raisons qu’on n’en a parlé que vague
ment dans le traité du i 5 avril;
Ce testament n’est pas d’ailleurs tel que le suppose la dame
Dechamps ;
Il porte legs de l'u su fru it, ou du quart en propriété, au choix
du sieur Esmelin;
E t le sieur Esmelin seroit censé, par le fa it, avoir opté l’usu
fruit , puisqu’il n’a cessé de jouir des biens de ses en fans, jusqu'à
sa mort. Encore faudroit-il distraire de cette jouissance la succes
sion de René Gibon , qui n’est échue à ses en fans qu'après le décès
de leur mère, et à laquelle , par conséquent, ce testament ne peut
avoir d’application.
Il est évident, d’après ce qu’on vient de dire, que si par l’effet
de l’anéantissement d e l à transaction du 1 5 avril, que la dame
Dechamps a l’imprudence de solliciter, chacun des cohéritiers
rentre dans son premier état , l’actif de la succession du sieur
Esmelin étant plus qu’absorbé par le passif, la dame Dechamps
ne peut, en sa qualité d’héritière, espérer d ’en retirer une obole?
Il importe peu, d ’après cela, d ’examiner s’il y a, ou non , lésion
dans l’estimation proportionnelle des biens dont le partage est
composé, comme le prétend la dame Dechamps.
T o u te fo is , pour ne rien laisser à désirer sur cette prétendue
lésion secondaire, les intimés rappelleront à la dame Dechamps,
D
�( 2 6 }
'
que les tien s-fo n d s qui composent son lot ont été choisis par
elle ;
Q u ’ils sont pour la plupart mêlés avec ceux de ses mineurs, et
par conséquent parfaitement à sa convenance;
Q u ’ils ont été estimés par des experts nommés par elle, logés
et nourris chez elle pendant tout le temps de leur opération.
Ils lui diront enfin que, malgré la baisse des biens-fonds, sur
venue depuis le partage, ils offrent de prendre pour leur compte
tous ceux qui se trouvent dans son lot, pour le sixième en sus de
l'estimation et du prix pour lequel ils sont entrés dans ce partage.
C ’en est assez, ou plutôt c'en est trop, sur cette prétendue lésion;
car les intimés n ’ont que trop bien prouvé que, loin que la dame
Dechamps soit lésée et dans les bases et dans les résultats du par
tage du 20 a v ril, elle a été traitée par ses cohéritiers avec une gé
nérosité sans exemple ; que tout ce qu’elle tient , tout ce qu’elle
possède de la succession de son père, elle ne le tient que de leur
libéralité, elle ne le possède que par leurs bienfaits.
On dit que ce fait est trop bien prouvé, parce que celte géné
rosité excessive semble nuire aux intérêts des mineurs Loisel.
Cependant on verra bientôt qu’on leur a rendu toute la justice
qu’ils pouvoient désirer.
§ III,
R e la tif a u x mineurs L o isel.
On ne peut se dissimuler que plus on a gratifié la dame Dechamps
et Procule Esmelin, plus les héritiers maternels ont dû faire de
sacrifices.
Ces sacrifices scroient faciles à justifier pour les mineurs Loisel.
On pourroit dire que des mineurs ne sont jamais lésés quand ils
marchent sur les traces de leurs cohéritiers majeurs, qui ont le
même intérêt qu’e u x , surtout quand de six cohéritiers cinq sont
majeurs, et reconnus pour être parfaitement capables de stipuler
leurs droits et de veiller à leurs intérêts.
On pourroit dire encore, comme l’ont fait les trois anciens juris-
�( ‘
27 )
consultes désignés par M . le commissaire impérial, pour donner
leur avis, que « tous les héritiers avoient le plus grand intérêt
» à ce que le partage n’éprouvât pas de retard. T o u s les bâtimens
» des domaines étoient en ruine. 11 éloit dû des sommes considé» rables, qui exposoient les cohéritiers à des poursuites ruineuses,
« et qui pouvoient absorber une grande partie des biens.
» La minorité des enfans Loisel rendoit ces poursuites pres» qu'inévitables, et chacun des cohéritiers pouvoit se voir expro» prier de ses biens propres, par la circonstance qu’il se trouvoit
» des mineurs parmi les cohéritiers.
» 11 s’élevoit des contestations sur la composition des masses, et
» la division entre les lignes paternelle et maternelle.......................
» sur les réclamations de plusieurs des héritiers , et il étoit impos» sible de prévoir la fin de ces discussions, et les suites funestes
» qu’elles pourroient avoir.
» La transaction qui termine toutes ces contestations sans frais,
» et dans l’espace de quelques jours qui avoient été employés à la
» préparer, offroit à toutes les parties des avantages qu’on ne sau» roit trop apprécier. »
Mais ce qui tranche toute difficulté, c’est l’indemnité que tous
les cohéritiers majeurs ont assurée aux mineurs L o isel, pour les
désintéresser et consolider leur ouvrage.
Il existoit dans la famille une succession dont les religieuses
étoient exclues par leurs vœ ux, et la mère des mineurs Loisel,
parce qu’elle éloit hors des termes de représentation.
C ’étoit celle de René G ib o n , décédé au mois de juillet 179°*
Il a été convenu par les art. 8 et g du traité particulier , du i 5
avril 1806 , que les mineurs Loisel seroient associés pour un sixième
dans cette succession, et qu’ils coinmenceroient par prélever 5280 fr.
Ilsontà partager, entr’autres objets, près de 3ooo francs de rentes
inscrites sur legrand livre, connues sous le nom de tiers consolidé ,
dont la liquidation est terminée depuis le mois de décembre der
nier, et dont la valeur, au cours, approche dans ce moment du ni
veau de leur capital.
Da
�( =8 )
Ils ont, par suite de cette association, une portion dans le domaine
de L a ro c h e , provenu de cette même succession.
Il a été en outre arrêté que le sieur Loisel préleveroit sur les pre
miers recouvremens 2000 f’r . , pour les frais de l’instance intentée
au nom de ses mineurs au sieur Esmelin ; frais qui eussent été
compensés et perdus pour ses mineurs, sans cette convention par
ticulière.
D e sorte que l’indemnité accordée aux mineurs Loisel, par leurs
cohéritiers majeurs , pour les dédommager des sacrifices qu’ils pouvoient faire au bien de la paix, par leur acquiescement au traité
du i 5 avril, peut être évaluée à environ 14 à i 5o o o lr .; tandis
que, dans le calcul le plus rigoureux, et en regardant comme un
bienfait absolu de la part des héritiers maternels les deux lots de
Procule et de Geneviève Esmelin , ce sacrifice ne pouvoit jamais
excéder 10000 I r . , formant le sixième de 60000 fr.
Quant à la prétendue lésion résultante du défaut de proportion
dans l’estimation des biens qui composent leur lo t, comparée aux
lots de leurs cohéritiers, c’est une inculpation gratuite faite aux
experts, dénuée de vérité comme de vraisemblance , et qui ne
prouve autre chose, si ce n’est l’habitude où est la dame Dechamps
de Lotit hasarder.
Ce seroit une tâche trop pénible et trop dégoûtante, que celle de
relever tous les faits faux et cnlomnieuxdont le mémoire de la dame
Dechamps est rempli; il faudroit écrire dos volumes, et surcharger
une contestation qui l’est déjà trop par elle-même.
Il suffira de rappeler quelques-uns de ceux qui ont une liaison
immédiate avec les objets en litige, pour se faire une idée de sa
véracité , de sa bonne foi sur tous.
Par exemple, on lit, page i 3, que lorsqu’elle a voulu se mettre
en possession des objets attribués à son lot, « à peine le foin du pré
» du domaine de Chirat a-t-il été coupé , que René Esmelin l’aîné
» et Deux-Aiguës sont venus avec une troupe de bouviers s’en ein)i parer à force ouverte, en l’accablant d’injures et de menaces. «
�( ^9 )
Oublions cette prétendue force ouverte employée contre une
fem m e , ces injures, ces menaces dont elle orne sa narration, pour
en venir au fait.
L e pré dont il s’agit faisoit partie de la réserve de Bouis, qui est
entrée dans le lot du sieur René Esrnelin.
Ce pré est nommément compris dans ce lot, q u i, comme to u s les autres, a été formé par les experts.
C ’est un fait prouvé par leur rapport, qui sera mis sous les yeux
de la cour , et qui est de la parfaite connoissance de la dame
Dechamps :
A b uno disce omnes.
« Scs cohéritiers se sont emparés du bois C h a b ro l, qu’ils font
» exploiter journellement par le sieur Gillot. »
C e bois Chabrol fait partie du lot de la dame Dechamps ; il y
est porté pour i 320 fr.
Mais c’est uniquement le fonds qui lui appartient.
Les arbres en étoient vendus au sieur Gillot, par le sieur Esmelin,
depuis plus de trois ans avant sa m o r t , à raison de 7 fr. le pied;
ce qui portoit la vente de ce bois Chabrol à 16000 fr.
Pourra-t-on se persuader que ce soit sérieusement que la dame
Dechamps, à qui on a donné le bois Chabrol pour i 320 fr. , en
réclame tout à la fois le fo n d s, qui vaut au moins 2/|00 f r ., et le
branlant, qui avoit été vendu 16000 f r . , et dont la majeure partie
étoit déjà exploitée lors du partage.
A b uno disce omnes.
(c Ils ont poussé l’injustice jusqu’à usurper un autre bois contigu,
» qui appartient particulièrement à ses mineurs, du chef de M . De» cham ps, leur père, et que le sieur Gillot exploite aussi. » Même
pa^e i 3.
Mais la dame Dechamps nous apprend e lle -m ê m e qu’il y a
procès pour les limites de ce bois : il n ’y a d o n c , jusqu’à la dé
cision , ni injustice, ni usurpation. Sub ju d ice lis est.
u 9°. Il y a lésion , en ce que René Esmelin, fils aîn é, n ’a point
�(
3o )
» rapporté à la masse les terres du B eyrat, de la Presle, la Sou» braut, Laroclie, le L ogis, etc. valant plus de 200000 francs, et
» qui ont été achetés et payés sous le nom de ce fils, indûment
» avantagé par le sieur Esmelin père. » Page 62.
L e sieur Esmelin a acheté par acte authentique, le 12 février
1792 , étant encore avec son père, un domaine appelé la Soubraut,
une maison , des vignes, pour la som m e, réduite à l’échelle, de
i 25oo fr.
La vérité est que celte somme a été payée par le sieur Esmelin
père. L e sieur René Esmelin en a fait le rapport à la masse lors
du partage.
Si le père avoit voulu avantager son fils, d une maniéré indirecte,
de cette acquisition, rien n eut été plus facile; il suffisoit de lui
donner quittance de ces i 25oo ir. qu’il avoit payés pour lui.
Ces fraudes ne sont pas rares, et les tribunaux peuvent diffici
lement les atteindre.
L e sieur René Esmelin s’est marié, et a quitté la maison pater
nelle le 8 frimaire an 5.
Sa femme lui a porté le revenu d’une dot de 4^000 f r . , dont il
a conservé l’usufruit après son décès.
Il a acquis en l’an g le bien de la Presle, par acte authentique,
au prix de 2^000 fr. dont 10000 fr. exigibles, et 14000 fr. en rente
viagère, à raison de 1400 fr. par a n ; il n’a déboursé pour cet
objet que 10000 f r . , c i ......................................................... 10000 fr.
Il a acquis, le 2 germinal an 1 1 , toujours par acte
authentique, le bien du Beyrat, 60000 f r . , dont 3oooofr.
en délégations de contrats, et
5oooo fr. en délégations
exigibles, c i ..............................................................................
Le 28 prairial an 12, il a acquis encore, par acte
authentique , la locaterie du Lut ou des Chaises Gooo fr.
3oooo
c i ...................................................................................................
Gooo
T
otal
46000 fr*
�(
3i )
Il a revendu , par acte authentique, une portion de la locaterie
2900 fr.
du Lut au sieur Louis Lurzat 2900 f r . , c i .......................
Par acte du 21 messidor an i 3 , il a vendu au sieur
Claude Esmelin la maison et le logis situés à Bellenave,
10000 f r . , c i .................. ........................................................ 10000
11 a revendu en détail le Lien de la Presle, par diffé
rons actes authentiques, 24000 f r . , c i .............................. 24000
Il a vendu au sieur Gillot le bois delà Soubraut 3ooofr.,
c i .................................................................................................
5ooo
Il a reçu de son père, à compte sur la succession du
sieur René G ib o n , 2600 f r . , dont il lui a fourni quit
tance, c i ................................................................ ....................
T
o t a l
.....................................................
2600
4 25oo fr.
Ainsi la différence est de 55oo fr.
Ce n ’est pas qu’il ne reste au sieur René Esmelin quelque for
tune personnelle ; mais, outre que cette fortune est grevée de
rentes viagères ou constituées , il la doit à l’heureuse circonstance
d’avoir acheté bon marché, et d’avoir revendu cher;
A l’extinction de quelques viagers;
A une bonne administration ; à de grandes améliorations ; à son
industrie.
Loin qu’il ait puisé pour ces acquisitions dans la bourse de son
père, qui étoit, comme on l’a v u , dans un tel état de gêne que
sa liberté étoit compromise à chaque instant par l ’échéance des
lettres de changes, le sieur Esmelin père, dans un pressant be
so in , avoit touché, peu de temps avant sa m ort, 6553 liv. prix
d ’une vente de bois qui appartenoit à son fils.
Comme ce fait étoit notoire dans la famille, il n’est venu en
idée à aucun de ses cohéritiers de lui contester cette somme de
6555 liv. qui fait partie des dettes passives de la succession.
Il n’y a pas un fait avancé par la dame Dechamps, auquel il ne
fût facile de faire une réponse aussi satisfaisante, si le temps et
la patience permettoient de les relever tous.
�( 32 )
Il reste à dire un mot de deux objets dont se plaint la dame
Dechamps, et sur lesquels les intimés sont prêts à lui rendre justice.
L'un est relatif à ses créances contre la succession du père com
mun , qui dérivent de sa dot moniale et d ’arrérages de pension
qu’elle prétend ne pas avoir été liquidées exactement.
Les intimés rapportent cette liquidation faite par M . Bergier,
et écrite de sa main; ils sont convaincus que cette liquidation est
exacte. A u surplus, ils offrent de revenir à compte avec elle sur
cet objet, ou devant tel commissaire qu’il plaira à la Cour de nom
mer, ou devant les premiers juges.
L e second est relatif à la somme de 4 n 5 liv. de mobilier porté
dans son lot..
Elle prétend que son lot est trop chargé de cette nature de
biens, et en cela, ses plaintes sont évidemment indiscrètes; car il
y a , y compris les rapports, au moins i5o,ooo liv. de mobilier
dans la succession , et sa quotité proportionnelle seroit d ’environ
ioooo liv.
Elle se plaint aussi de n ’avoir pas reçu cette somme ;
Elle n’en”a reçu en effet qu’une partie.
Une autre partie a été payée en son acquit pour dépenses com
munes.
Une autre partie est encore en nature, notamment les bois de
sciage.
Enfin, il y a un déficit dans le mobilier, à raison des distrac
tions qui en ont été laites en nature ou en deniers, auquel il
doit être pourvu de la manière convenue pur le traité particulier
du i5 avril.
T o u t cela exigeoit des rapprocliemens entre la dame Dechamps
et le sieur René Esmelin aîné, que les contestations pendantes
ontr’eux ont rendus impraticables.
Mais le sieur René Esmelin est toujours prêt h lui rendre justice
sur ce p o in t, qui dépend d'un compte qu’il offre encore de faire
devant tel commissaire qu’il plaira à la cour de nom m er, ou de
vant les premiers juges.
Encore
�( 33 )
Encore un mot :
L e sort de la dame Dechamps est dans les mains des intimés.
S ’ils acquiescent à ses demandes, elle est perdue.
S’ils lui résistent, c ’est par pitié pour elle , c’est pour l’arrêter,
la malheureuse, au bord du précipice qu’elle creuse sous ses pas.
Quant aux mineurs L o is e l, leurs intérêts sont à couvert.
Ils sont amplement dédommagés dans la succession de René
G ib on , des sacrifices qu’ ils font au bien de la paix.
D ’ailleurs, les traités et le partage des 1 5 et 20 avril ont eu
l’assentiment de leur père, de leur aïeul maternel, leur subrogé
tuteur, de leur famille deux fois assemblée pour en prendre connoissance, des anciens jurisconsultes deux fois désignés par le com
missaire impérial, du commissaire impérial lui-même, enfin des
juges du tribunal de G a n n a t, q u i , parfaitement instruits des faits ,
des circonstances et des localités ,_se sont empressés de les homo
loguer et d’en ordonner l’exécution.
T a n t d ’autorités réunies ne permettent pas de douter de l’uti
lité, de la sagesse, de la nécessité de ces traités pour les mineurs
comme pour les majeurs , et les intimés espèrent que la Cour voudra
bien , en les consacrant par son a rrê t, mettra la dame Dechamps
dans l’impuissance de se nuire à elle-même , et de nuire désormais
à sa famille.
S ig n e ' R e n é E s m e l i n ,
G ilbert
Esmel i n - D e u x - A i g u es ,
C l a u d e - A m a b l e L a p e l in , M a r i e - M a g d e l e i n e Esme l i n - L a p e l i n , J e a n - F r a n ç o i s L a g a u d e - D e l a v i l en ne , T h é r è s e Esmel in -L a v ile n n e , M a r ie-A d elaïd e Esm elin,
/
ve u v e D ebart
B O I R O T , a n c ie n ju r is c o n s u lt e .
H U G U E T , avoué.
A C L E RM O N T , de l'imprimerie de L andriot, imprimeur de la Prélecture.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esmelin, René. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Huguet
Subject
The topic of the resource
traités de familles
successions
émigrés
inventaires
arbitrages
coutume du Bourbonnais
conseils de famille
partage
experts
Description
An account of the resource
Mémoire pour René Esmelin, Gilbert Esmelin-Deuxaigues, Claude-Amable Lapelin, et Marie-Magdeleine Esmelin, son épouse ; Jean-François Lagarde-Delavilenne, et Thérèse Esmelin, son épouse ; Marie-Adélaïde Esmelin, veuve Debard, intimés ; contre Geneviève Esmelin, veuve d'Amable Dechamps, ex-religieuse, appelante ; en présence de Procule Esmelin, ex-religieuse ; et encore en présence de Jacques-Marie-Pierre Loisel-Guillois, tuteur de ses enfans, héritiers d'Agnès Esmelin, leur aïeule maternelle, aussi intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1756-Circa 1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
33 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0544
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Moulins (03190)
Paris (75056)
Château-Thierry (02168)
Rights
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Domaine public
Relation
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arbitrages
conseils de famille
coutume du Bourbonnais
émigrés
experts
inventaires
partage
Successions
traités de familles
-
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Text
C O Ü R D’A P P E t
PRÉCIS
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POUR
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v—
Les
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E S G O T , ;appelans ;
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CONTRE
R a i m o n d D E M O L E N et M a r g u e r it e R O Q U E LAURE
,
son épouse y intimés.
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:
' *
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‘ •
, sie u r de G o u rd o n , président e n t
l’élection d’Issoire, est mort dans son château à Cheynat,
le 29 janvier 1767, laissant de son mariage avec Jeanne
Concheton, deux filles, Marguerite Garnaud, pour lors
veuve de Martin Chassaing décédée sans postérité le
EAN G
R IOM .
arnaud
6 février 1790, et autre Marguerite G arn aud , épouse
de Louis R oqu elaure, décédée elle-m êm e le 28 sep-
n
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A
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u
e
a o û t
18 0 9
�( 4 \ .
lémbre 1 7 9 2 , laissant pour héritiers les dames D em o len et de Lassale, ses deux filles.
Par actes des
3q.juin 1 7 1 3 , ¿0 décembre 1780, et
16 mars 17 3 3 , Jean Garnaud avait vendu h Barthé
lém y et Antoine Mathias de S a in t-À m a n d -R o c h e Savine, divers immeubles provenant de Jeanne Conchelon sa fem m e, et situés à Saint-Amand-RocjbeSavine.
*
Jean Garnaud a y a n t convolé en 1780 à de secondes
noces, avec A nne C u rie r, ses deux filles le firent priver
de l’usufruit des biens de Jeanne Concheton leur mère}
et cette privation d’ usufruit fut prononcée par sen
tence du 14 juillet 1750.
En cet état de choses, et du vivant de Jean Gar
naud, ven d eu r, Marguerite et autre Marguerite G ar
naud ses filles , héritières de Jeanne Concheton leur
m ère, fo rm e n t, par exploit du 28 juillet 17 5 7, contre
Joseph et Barthélémy Escot, représentant Barthélémy
et Antoine Mathias, acquéreurs, la demande en désis
tement des immeubles aliénés en 1 7 1 3 , 1780 et 1733.
Les sieurs E sco t, du vivant de Jean Garnaud leur
vendeur, ont un recours assuré contre lu i3 mais ils ont
aussMa faculté d’exercer sesMpCfits, conséquemmerit de
faire valoir ses reprises contre la succession de Jeanne
Concheton; et c ’est ce dernier parti qu’ils prennent par
u n e requête signifiée le 28 mars 1762.
'
Un acte notarié , du 3 mars 17^8, dont il n’a été
donné copie qu’en 1809, nous apprend que pendant
que Marguerite G arnaud, veuve Chassaing, poursui
�(5)
vait l’éviction des immeubles vendus par son père, elle
s'était fait souscrire par lui une vente de tous ses meu
bles meublans. Ils sont détaillés dans l’acte. L e père s&
réserve la jouissance de ces meubles; il déclare que la
majeure partie en est rompue et pourrie, et qu'ils ont
presque tous besoin de raccommoder. L e prix de la vente
est de la somme de 390 fr. dont l ’acte porte quittance.
Il paraît encore que par autre acte notarié, du i 5
mai 1 7 5 8 , signifié aussi en 1809, Jean Garnaud s’était
départi de l’usufruit réservé moyennant 190 francs,
dont L’acte porte également quittance.
Jean. Garnaud avait survécu près dè 9 ans à la date
de ces actes, puisqu’il n’est mort que le 29 janvier 1767;
et à son décès les dames Chassaing et Roquelaure, ses
deux filles, se mirent en possession de tout ce qu'il
avait laissé en biens meubles et immeubles.
Cependant la’ dame Chassaing fait au greffé>d e .la
châtellenie d ’O loy , le 9 février 1 7 6 7 , une déclaration
précieuse pour la cause. Elle déclare qu’elle répudie
la succession de Jean Garnaud son père; que si elle ne
fait pas d’inventaire , c’test que ce mobilier lui a été)
vendu par acte du 3, mars 176 8 , et que si elle con
tinue la jouissance des immeubles, ce sera uniquement
comme créancière.
Voilà donc la dame Chassaing e n possession de tout
ce que son père a laissé; possession antérieure h la ré
pudiation; possession continuée après la répudiation ;
possession qui continue encore dans les mains; d e! là
dame Demolen son héritière. •
�(6 )
Quant à autre Marguerite G arn au d , femm e Roquelaure;ielle répudie purement et simplement la succes
sion de Jean Garnaud son p è re , par autre acte du
mêm e jour 9 février 1767 ; mais elle n’en est pas moins,
com me la dame Chassaing sa sœur, en possession des
biens, avant^ lors et depuis sa répudiation. ’
Ces deux dames abusent de leurs répudiations, et
d ’une qualité de créancière de leur père qu'elles pren
nent et qu’elles n ’o nt jamais justifiée; elles en abusent
pour tourmenter ceux même qui ont acquis de Jean
Garnaud leur p è r e , des biens à lui propres; et diffé*rens actes rapportés établissent qu’elles sont parvenues
à évincer quelques acquéreurs.
Quoi qu’il en s o it, une sentence rendue le 26 no
vem bre 17.71, prononce contre la famille Escot le dé
sistement demandé en 17^ 7; la famille Escot interjette
appel de cette sentence par exploit du 4 mars 1 7 7 2 ;
et par requête signifiée le 3 i d écem b re, elle oppose
que les dames Chassaing et Roquelaure se sont empa
rées de tous les biens meubles et immeubles de leur
p è r e ; qu’elles en sont e n c o re ^ n possession; qu’elles
sont donc héritières dè leur père, vendeur, et qu’elles
sont dès-lors garantes de leur propre demande.
Les dames Chassaing et Roquelaure rapportent leurs
répudiations ; les répudiations sont contredites par
écriture signifiée le a mai 1 7 7 9 , et la copie de cette
écriturd* n’est pas dans la production de la dame D e m o le n , quoiqu’elle y ait répondu par autre écriture
du
3 août même année. -
'
�(7 )
L e procès demeure impoursuivi jusqu’en l ’an u ,
et pour l’honneur des sieur et dame D em o len , il eût
dû à jamais rester dans l’oubli. C ’est donc en l’an n ,
que la dame Demolen reprend, en qualité d’héritière
de la dame Roquelaure sa m ère, le procès commencé
en 1 7 ^ 7 , contre la famille Escot, et par acte du 22
mars 1809 3 elle le reprend comme héritière de la
dame Chassaing sa tante. ; • ■
•
L a famille Escot est sans pièces; elles se sont per
dues dans la succession du jurisconsulte L a p e y r e , e t i i
a fallu recourir à la com munication.de celles de la
dame Demolen. lia famille Escot a eu des inquiétudes
pendant quelque tem s, mais elle est aujourd’hui plei
nement rassurée, et elle se plaît à croire que tout son
malheur se bornera à la difficulté du recouvrement des
frais d’une procédure égarée.
La réclamation de la dame Demolen n’annonce rien
de noble, rien de délicat; elle est m êm e, on peut le
d ir e , révoltante.
Cette dame possède, ou a disposé des biens de Jean
Garnaud son a ïe u l, et elle ne veut pas en être héri
tière, afin de dépouiller des liers détenteurs qui ont
acquis sous la foi de la garantie promise par Jean
Garnaud.
E t d’abord elle s’est emparée de son m obilier; des
réflexions bien simples vont en convaincre. '
L a vente de 1758 est évidemment simulée; fût-elle
sérieuse? elle, ne comprend aux termes de l’acte quedes meubles meublans, rompus et pourris, au moment
de la convention. '
�(8 )
Mais Jean G arnauda survécu n eu f ans à celte vente.
Pendant:le long espace (assez long) de n euf années,
Jean Garnaud a dû nécessairement faire et a fait d’autres
meubles en remplacement des meubles rompus et pour
ris , à une époque remontant à plus de n e u f ans; et ces
nouveaux m e u b les, à son décès , ont été confondus.;
dans les mains de la dame Chassaing, sans inventaire.
Mais cette vente ne compr.end encore que des meu
bles meublans, et Jean Garnaud a laissé, en mourant,
du mobilier vif, des bestiaux dans son bien de Clreynat ;
il a laissé des papiers; mourant au mois de janvier, il
a laissé récolte ou grains, et la dame Chassaing s’est
emparée.de tout-; elle-a tout pris, sans, compte et sans,
mesure y elle a tout gardé. Il serait donc difficile de
concevoir, n’en déplaise à la répudiation, que la daine
Chassaing, et après elle la dame Demolen sa nièce, ne
soit pas héritière de Jean Garnaud son père et aïeul.
La dame Demolen , ou quoique ce soit la 'dame
Lassale sa sœur (elles ont fait partage des biens de leurs,
père et m ère), possède tous les immeubles laissés par
Jean Garnaud; elle en possédé même que Jean Gar
naud avait aliénés , et dont relie n ’a pas rougi d’évin
cer ses acquéreurs, par ¿îbus dç répudiation et d’une
qualité.de créancier, ou usurpée, ou insignifiante pour
effacer celle d’héritier.
Il faut croire que la dame Demolen persistera dans
cet le qualité de créancier, qui est le seul mo)?en d e cause
qu’elle puisse opposer à la famille Escot; niais le tenvs
dp l’illusion est passé.
�(
9
}
Et d’abord comment la dame Demolen justifie-t-elle
qu’elle est créancière de la succession de Jean Garnaud
son aïeul, soit du chef de la dame Roquelaure sa m ère,
soit du c h ef de la’ dame Chasssaing sa tante? Où sont
ses titres de créance? on n ’en voit nulle part dans sa
production; la sentence de 1760 ne porte autre chose
qu'une privation d ’usufruit ; il n’existe pas de sentence
de liquidation ; il ne fut même jamais nommé de cu
rateur à la succession de Jean Garnaud, et cela parc^
que dans aucun tems, cette succession n’a été vacante.
E n second lieu, la dame D em olen supposée créan
cière, n ’a d û , n’a p u , en cette qualité, s’emparer des
biens de Jean'G arnaud son prétendu d é b ite u r, sans
en ayoir obtenu la permission de la justice. L ’omission
de ce préalable, impérieusement exigé par la -lo i, a
rendu la qualité d’héritier inséparable de la main mise
sur les biens.
;
î •
I,a dame Demolen devait faire inventaire dû m o
bilier, n’e u t - c e été même qu’un simple récolement
pour justifier (chose impossible), que le mobilier mort
et v if de toute espèce, laissé par Jean Garnaud en 1 767,
ne se composait^que des meubles meublans, rompus et
pourris, qu’il possédait en 17 5 8 , et qu’il avait vendus
én 1768. '
Si la dame Demolen ne figurait au procès que comme
héritière de la dame Roquelaure sa; mère, et si elle se*
permettait de désavouer la mise en possession de tous
les biens de Jean Garnaud , dès le jour mêm e de son
décès, la famille Escot serait réduite à la nécessité de
�C 10 )
faire une preuve qui ne serait pas difficile, car le fait
est notoire dans le pays.
Mais la dame Demolen figure encore comme héri
tière de la dame Chassaing sa tan le; sous Ce rapport,
la famille Escot; a preuve écrite de la main mise, et
cette preuve écrite émane de la dame Chassaing ellem êm e.
i
Les termes de la répudiation du 9 février 1767 sont
e.ncore présens. « Je répudie la succession de Jean
« Garriaud'mon père ; je ne fais pas d’inventaire du
« mobilier qu’il m ’a laissé le 29 janvier 1 7 6 7 , date
« de son décès, parce qu’en 1768 il in’avait vendu
« les meubles meublans qu’il possédait en 1768. Je
a continuerai la jouissance de ses immeubles parce
« que je suis créancière de sa succession. » '
L es conséquences à tirer d’une déclaration si extra
ordinaire, sont faciles à saisir; et ce serait faire injure
aux magistrats qui la liro n t, que de les faire mieux
sentir.
E n troisième lieu , la dame Demolen toujours sup
posée créancière, on va plus loin , supposée non-hé
ritière, il faudrait, encôre connaître la date et l’objet
de ses hypothèques, par la raison’bien simple, que la
famille Escot a une hypothèque aussi; que les biens
Garnaud en sont le gage. Si donc cette hypothèque
de la famille Escot primait celles de la dame Demolen,
évidemment sa menace d’éviction serait ridicule et sans
intérêt, puisque la dame Demolen aurait dans les maius
le gage entier de la garantie de cette éviction.
�( 1 1 )
Si l’hypothèque, au contraire, de la dame D em olen
avait la priorité, il faudrait toujours en reconnaître et
fixer le quantum , pour s’assurer si le gage de cette h ypo
thèque en excède ou non la valeur, et laisser au moins
à la famille Escot la faculté de s’emparer de tout son
gage (car c ’est le sien aussi), en remboursant à la dame
Demolen toute créance antérieure en hypothèque; et
toujours serait-il vrai de dire que la dame Demolen
serait, quant à présent, non-recevable dans sa demande.
Si la Cour n’était pas frappée des moyens de la
famille E sco t, pour faire proscrire la réclamation in
décente de la dame D e m o le n , moyens que l’on croit
sans réponse, il faudrait, dans ce cas, se livrer à l’examen
des reprises de la succession de Jean Garnaud, contre
la succession de Jeanne Concheton, dont le rembour
sement ne pourrait être qu’une charge de l’obtention
du désistement. Mais à cet égard, l’état de ces reprises
est détaillé par la requête du 28 mars 17 6 2 , et il n’a
souffert qu’une contradiction vraiment p ito y a b le ;l’état
lui-même est appuyé de pièces justificatives dont copie
est dans la production de la dame Demolen , et dont
la critique ne saurait dans tous les cas fixer l’attention
de la Cour.
M .r M A N D E T , Rapporteur.
M .e M A R I E , Licencié-Avoué.
À RIOM, DE L ’IMP. DU PALAIS, CHEZ J. C. SALLES.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Héritiers Escot. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandet
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
répudiations de successions
Description
An account of the resource
Précis pour les héritiers Escot, appelans ; contre Raimond Demolen et Marguerite Roquelaure, son épouse, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
1713-Circa 1809
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0543
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ludesse (63199)
Saint-Amant-Roche-Savine (63314)
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Domaine public
Relation
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répudiations de successions
Successions
-
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fa97c1369cecc5f6c26bb5a57d0b17f4
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DEMALET-LAVEDRINE ,
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De
M ich elle
S O U L A G E S , veuveQ
uayronet
aujourd'hui femme M O S N I E R , défenderesse.
,i
A
veuve
L
Q u ayron se m i t en possession, sans aucune formalité,
de tous les biens de son m a r i, meubles et immeubles. Elle avoit alors
à son service, m ’a-t-on d it, une nièce de Quayron ; et bientôt un
autre frère dudit Quayron se joignant à cette nièce, ils demandèrent
tous deux à la veuve de leur faire quelque part de l’héritage de leur
parent , dont ils avoient un extrême besoin , et dont il étoit
impossible qu il ne leur revint pas quelque chose. Mais elle, d ’une
main fermée et d ’un cœur plus resser é e n c o r e , les repoussa en
leur disant : V o tre p a r t, r ie n ; j’absorbe tout avec mes d ro ils; je
auis seule héritière; vous n ’aurez rien. E h c e rte s ,, elle les eût
A
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r;
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( * )
satisfaits à bon marché. C e n t lo u is , ou moins encore , distri
bués dans une pauvre f a m i lle , eussent été pour elle une rosée
fé co n d a n te , et eussent laissé la riche veuve maîtresse incommutable
de tout. Elle ne devoit rien actu , d i r a - t - o n , à ces héritiers ;
soit : nous verrons si la veuve a satisfait à tout ce qu ’elle devoit.
Elle jouit donc sans trouble de sa possession , c ’est-à-dire ,
q u ’elle fut peu troublée par des plaintes vaines et d ’impuissantes
douleurs, et qu ’elle n ’éprouva aucun trouble judiciaire, parce que
la pauvre famille n^avoit pas de quoi entamer un procès. C*est
ainsi q u ’avant la régénération de la justice , le fort opprimoit le
foible ; c ’est ainsi que le riche pouvoit im punément s’enrichir
encore aux dépens du p a u v r e , parce qu on donne ci celui cjui et
déjà
, et à ce lu i qu i n’ a pas , on lui ôte même ce qu'il a. Q u ’on
t e n t e , tant qu'on v o u d r a , de rendre favorable la cause d ’une
veuve inquiétée , d ’une fem m e foible et sans défense ; qu’on
dissimule adroitement tous ses torts ; il éloit dur , il faut en
convenir , pour de pauvres héritiers , de voir un riche héritage
leur être soufflé en entier ; et si à cette dureté de fait ne s’étoit
jointe quelque dureté de procédés , pourquoi aurois-je vu ces
héritiers si fort animés contre la veuve q u ’ils ne demandoient pas
m ieux que de voir évincer ?
C epend an t étoit-il vrai que les héritiers du sang n ’eussent aucun
d r o it ? M . Bergicr leur donna une consultation : il parut évident
q u ’ils avoient des droits successifs tros-réels , dont ils pouvoient
tirer quelque parti. L a dureté de la veuve les leur fit vendre m a l,
c ’e st-à -d ir e , q u ’ils furent contraints d ’en partager le prix avec
des étrangers plus en état de faire des avances, des vo y â g e s, de
débrouiller pour eux ce cahos. V oilà donc les droits'des héritiers,
vendus. Croira-t-on ce qu’avance le mémoire de la veuve Q u a y ro n ,
que les acquéreurs n ’avoient pour but que de spéculer sur l ’épou
vante de l'usufruitière , ou sur un bénéfice éventuel à faire avec
un nouveau cessionnflirdj^ Croira-t-on que des hommes d ’affaires
s’amusent à donner 7000 ir . sans recevoir une valeur positive,
et dans l ’espérancc vague d ’un bénéfice incertain? Quoi qu’il en
�(
3 )
s o it , il ne faut pais perdre de vue, que le nouveau cessionnaire
étant absolument à la place des héritiers du s a n g , ce sont eux
q u ’il faut considérer eh sa personne : ainsi on va toujours parler
des héritiers com m e s'ils éloient en cause.
r
L a .veuve a des droits et des créances, sur la succession. L a
succession lui doit ; mais elle en amende une .partie : elle doit donc
confondre une partie de ses propres créances, en proportion de
ce qu'elle amende. 11 y a un mobilier : ce m o bilier, à qui est-il?
'fû t-il à la v e u v e , ne faùt-il pas le co nstater, puisqu’il doit con-trib uer, selon sa valeur, à payer la veuve de ses propres créances?
'G e la est du plus simple bon sens. Coinrnenl donc un avocat aussi
'judicieux que M . Boirot a-t-il pu se méprendre au point de dire
que les héritiers n ’ont aucun intérêt à faire constater ce m obilier?
Croit-il avoir réussi à pallier l’extrême imprudence de la veuve à
occuper tout ce mobilier sans inventaire! C e r te s , ce fut à elle une
grande f a u t e , lata culpa , de ne pas com m encer par faire un
bon et fidèle inventaire, un inventaire ju ridiqu e, dont toutes les
formes bien observées garantissent la sincérité. Etoit-elle de bonne
f o i , cette v e u v e , quand ne pouvant ignorer que les héritiers du
sang avoientilâ propriété nue d ’ppe. part d'immeubles , et étoient
tenus envers elle d ’une part de cré a n ce s, et q u ’il faudroit qu’ils
■
comptassent un jour d ’après ce rpobilier, à qui que ce fû t q u ’il
app artint, elle s’en e m p a r e , elle en dispose sans le constater?
Elle leur arrache pourtant un gage par lequel ils devront être en
partie acquittés. Elle ne ppuvoit l’ignorer, parce q u ’elle avoit reçu
leurs réclamations privées» et domestiques ; elle ne pojjvoit 1 ignorer,
parce qu ’on ne présume pas l ’ignorance du droit et de la loi. Est
elle de bonne f o i , quand dans un inventaire tardif et provoqué par
ses adversaires, elle s ’obstine ù n ie r, à céler des valeurs; quand elle
n ’accuse aucune denrée , aucun n u m é ra ire , ou tout cela dans
une petitesse invraisem blable? Quoi ! il n ’y avoit aucune provision
notable de denrées? E t qu'étoit donc devenue la récolte des vignes,
Quayron étant m ort à une époque 0iji la vendange est encore
dans les cu ves? Q u o i! Quayron est mort sans laisser un argent
A 2
�( ¡4 )
comptant pour les-Réponses c o u r a n te s ^ O n 'n ’accuse qu’une miser
rable somme qu ’on d ït; même être un dépôt. Q u a y r o n , qui exerça
presque pisqu’à' la iîri dé ses jours sa^rofesiiort; de- tailleur , aStoit dos
m ém oires sur nom bre de bohnes -maisons. Que sont donc devenus
tous ces m ém oirés? Q uoi! la véuve n ’en a rien fait rentrer ? E t les
autres créances de Quayron ? Quoi ! *il n ’en avoit aucune? Personne
ne lui d e v o it , ni ferm iers, ni acheteurs de denrées, ni acquéreurs
de fonds? L a 'v e u v e n’a tôuché pour lui aucuns deniers ? T o u t cela
,cst dans le possible; mais i l f a l l o i l u n ! inventaire pour le rendre
croyable. Un* inventaire étoit vàtre seule é g id e , ô veuve im p ru
dente ! un inventaire pouvoit seul vous constituer dans la bonne
f o i. N o n , on ne peut argumenter de la bonne f o i , pour qui rie
fait aucune démarche qui éclaire sa c o n d u ite , pour qui agit seule,
p r iv é m e n t , ob scu ré m o n t, pour qui étouffe d’ avance' les lumières
qui pourroiént ja îllir 'û n jour. A h ! sa mauvaise foi a toujours
été la m ê m e, , envers les héritiers lors de leurs'premières réclama
tions , lors de la confection du tard if in ven ta ire, et dans tout le
cours de nos pontesiations.
L e bruit public est que 'Quayron; avoit un riche mobilier.) l’ oint
d ’inventaire auquel on p u is se 'a v o ir confiance : , i l 'i e i t nécessaire
d ’avoir recours à une enquête par com m une renom mée. C e lte en
quête fera ressortir des’meublcs', de l ’argenterie , dos d e n ie rs, des
créances, dés capitaux perçus. Q uayron a vendu les biens dotaux
de la veuve. Eli bien !‘ qui a reçu les payemens ? que sont devenus
les d e n ie r s .? quel emplcn'oril-ils e u ? - L ’enquête pourra donner ces
1
l u m i è r e . T est impossible d e 1rèfusci aux béri(.iers cette enquête',
puisqu’elle est a u j o u r d 'h u i Îù sôlile Toie; possible , et c e la , par la
faute de la veuve', de constater le mobilier, lls y oiit. in té r ê t, et un
intérêt u rg en t,
q u a n d
en ce c a s ,
le .liendroit (le son mari.
elle
ce'm obilier appartiendroit
Il
à ,
la v e u v e ; c a r ,
fan l bien convenir que
ce m o b ilie r , quel qù’il-scii t’,.'f^ît partie de la li a s s e . C a r la veuve
ne sauroit le répéter en nature comme lui étant propre ,'>cl le porter
d ’ailleurs pour ?ooo fr. dans le chapitre de sés'reprisés r ce seroit
un grossier douljle emploi. C e mobilier doit donc compenser une
�(
5 )
partie des créances de la veuve, dans la proportion de sa valeur.
M ais cette valeur, quelle est-elle? Plus on larde à l'apprécicr, plus
les témoignages sont difficiles à obtenir. L es témoins disparoiss e n t , les souvenirs s’e f fa c e n t, et la commune renommée sera
moins approximative du vrai. V o ilà pourquoi les héritiers se pres
sent , et que la veuve recule: voilà pourquoi elle a employé toutes
les ressources de la chicane à éloigner le jugement ; ce qui se voit
par la procédure : voilà com m ent les poursuites des héritiers ne
sont pas sans intérêt et sans objet.
Mais ce mobilier appartient-il à la veuve? Il suit le domicile,
et Q u ay ro n a été long-temps domicilié en droit écrit. Cela est
v r a i , il l ’a été long-temps : l ’a-t-il été jusqu’à sa m ort? Q u ay ron
s'étoit créé une propriété charm ante à deux pas de la ville , y avoit
mis toutes ses a ffection s, y recevoit ses amis , n ’avoit plus qu’un
pied à terre à C lerm o nt pour les jours d ’orage, vivoit à sa cam
pagne toute l ’année dans un repos plein de douceur et de jouis
sances.
V oilà bien son domicile de fait : mais ce n ’est pas celui dont
il s'agit. O n réclame le domicile de dro it; on réclame l 'intention.
Eh b i e n , m essieurs, voici quelle fu t Yintention de Q uayron. Il
eut l ’intention d ’avoir une plus grande part dans les droits politi
ques ouverts par la révolution. 11 eut Vintention de primer dans
un villag e, au lieu d ’être effacé et noyé dans Clermont. Pour
c e la , il alla à la municipalité de C lerm ont déclarer qu’il entendoit transporter son domicile à Chamallièrcs , où il avoit déjà
son habitation. C e lt e déclaration , il ne seroit pas impossible de
la trouver sur les registres de la municipalité. Mais qu en e st-il
besoin ? Q u ayron avoit payé à Clerm ont la cote mobilière tant
qu’il y avoit été dom icilié; il cesse de la payer : donc il a quitté
ce domicile. Q u ayron a payé en 1789 ou 1790 : il ne paye plus en
1791. C om m e n t le fisc a-t-il perdu cette cote? Est-ce que Yavare
Achéron peut lâcher sa proie?
11 paye
à Chamallières. Est-ce
6ans l'avoir voulu et provoqué? L e rôle matrice de 1791 à C h a mallicrcs articule une cote mobilière : ce lle cote a existé. L e rôle
A
3
�(
6 )
exécutoire de 1 7 9 T , conform e en tout au rôle matrice nom pour
n o m , page pour p a g e , n y m éro pour n u m é r o , porte aussi en son
lieu le nom de Q uayron : mais la feuille est arrachée. L a con
cordance des numéros et des nQms , au-dessus et au-dessous de
la feuille, concordance avec le rôle matrice dont la feuille no narracliée porte un nom précieux , prouve que la feuille arrachée
portoit aussi une inscription précieuse. V o u s voulez que ce soit
nous qui ayons arraché cette feuille : ah ! M . B o ir o t , autor sce -
le ris , cui scelus prodest.
M ais q u ’ importe le rôle exécutoire : le rôle matrice nous suffit.
M ais peut-être que Q u ayron a eu deux cotes mobilières , une à
Clerm ont et une à C h a m a l l i è r e s . Point du to u t; le rôle de Chamallières p a r le , et celui de Clerm ont se tait. Pesez bien ces deux
circonstances , messieurs. Quayron n ’avoit point eu de cote à
Chamallières avant 1791 : il en a une en 1791. Q u ayron n ’a point
de cote à Clerm ont en
1791 ; il en avoit une les années précé
dentes: donc il a cessé de payer. Cette cessation 11’a pu avoir lieu
qu ’en-vertu d ’une déclaration form elle: donc il l’a laite , cette
déclaration ( 1 ) ; donc il a choisi un autre dom icile; donc il est
m ort à Chamallières , domicilié de fait et de droit; donc les trois
25
quarts de ce m obilier, que la voix publique porte à 20 ,
ooo i r . ,
appartiennent aux héritiers ; donc il est urgent pour eux d ’invo
quer la com m une renom m ée; donc la veuve n’inspire ni pitié , ni
in t é r ê t , quand elle se trouveroit punie de sa faute , de sa lourde
f a u t e , Iota culpn , de son omission d ’inventaire, de ses dénéga
tions , de sa mauvaise fo i; donc elle a tort de crier à la vexation,
à la persécution, de supposer gratuitement l'intention de la chasser
( 1 ) O n p o u r r o i t p e u t - ê t r e i n d u i r e d u t e x t e d e l ’a r t . 1 0 4 d u C o d e c i v i l c i t é
p a r le
inéfnoire , qu e l'e xhibiti on
d'un e déclaration
d e d o m i c i l t ; est a u
j o u r d ’ h u i n é c e s s a i r e p o u r o p é r e r l.i p r e u v e d ’u n c h a n g e m e n t . M a i s l a l oi d e
1 7 ^ 1 q u i u ' g i t 1rs p a r t i e s , t o u t e n v o u l a n t q u e l ' i n t e n t i o n s o i t b i e n c o n n u e ,
bien
déclarée,
l a l a i s s e d é c l a r e r p a r les f a i t s , p a r d e s t é m o i g n a g e s , p a r
d e s c i r c o n s t a n c e s p r o b a n t e s , p a r u n e . c o n v i c t i o n i n o r a l e . L ’e x l i i b i i i o n f o r
melle
d ' u n e d é c l a r a t i o n expresse n' ts t pas te xtu ellement v o u lu e p a r la loi.
�(7 )
de son u su fru it, quand on ne -veut que compter avec e l l e , pour
savoir ce qui doit revenir un jour à elle ou aux siens.
• >
L ’héritier peut protester, sur son h o n n eu r, que telle1 a été son
intention. Si la veuve avoit voulu traiter , elle auroit gardé son
usufruit ; mais on auroit éclairci tout ce qui est vague ou douteux
dans ses prétentions. Si elle ne s’étoit point entêtée sur le point
du d o m ic ile , on auroit arbitré amiablemcnt la valeur du m obi
lier ; on auroit réglé ses autres répétitions, et résolu toutes les
difficultés; on auroit évalué ce qu’elle a m e n d e , et ce qui revient
à l héritier ; enfin on auroit fixé un quantum à payer à scs ayanscause.ou à elle-même. L a veuve n ’ayant voulu entendre à aucune
exp licatio n , on a été forcé d ’en venir aux voies judiciaires. Q u e
l ’héritier ait pu être séduittpar la perspective d ’avoir un jour une
habitation agréable, qui n ’étoit abordable pour lui que par ce
seul chemin , il la paye cher , cette perspective. Mais enfin ,
il falloit qu ’il pourvût à ce que sa condition ne devint pas pire ;
et voilà son intérêt, son objet. Il se croit investi des trois quarts
d ’ un mobilier vague et indéfini : il lui importoit de fixer le plus tôt
possible la valeur de cc mobilier , dont les tra ces s ’évanouissent
par le laps du temps. Il a fallu forcer la veuve à s’expliquer de
vant les trib unaux, et à éclaircir tous les points douteux. Q u ’un
homm e de loi ait dit à l ’héritier que les dénégations de la veuve,
et ses soustractions jointes au défaut d ’inventaire , étoient une
spoliation; q u ’une veuve spoliatrice étoit indigne; que l ’indignité
ernporloit privation des libéralités , etc. ; on sent bien que ce lan
g a g e , emprunté du dro it, n ’est pas la propre pensée d ’un ancien
militaire. Sans donc insister sur cette indignité et sur ses suites ,
m o ye n q u ’il laisse à débattre aux jurisconsultes, l ’héritier se
confie pleinement aux autres moyens de sa cause.
M ais il supplie ses juges de ne pas glisser légèrement sur un
point délicat et difficile , la démarcation du pays de coutume et
de celui de droit écrit. C e point est plutôt préjugé que jugé. L a
veuve s'adjuge libéralement l’héritage séparé des Roches par le cl:o—
Xïiin, Cet héritage est-il bien sûrement à elle ! U n arrondissement
�C8 3
pour la collecte n ’est qu’une démarcation fiscale : c ’est la démar
cation féodale q u ’il faut. E n c o r e , S a in t -A ly r c , faubourg de C le r m o n l , collecte de C le r m o n t , étoit pays de coutume. L a justice
seule de l’évêque compose le territoire de droit écrit de Clerm o n t.
Si des témoignages dignes de f o i , si des traces authentiques attcstoient que des cens ont été payés au chapitre de Chamallières
dans le ténement mêm e qu’on répute de la mouvance de l’évêque?
L e droit romain est-il , était—il propre aux F ran ça is? nullement.
L e droit français consisloit dans les ordonnances de nos rois et
dans le recueil de nos coutumes. L e droit romain étoit un droit
étranger admis com m e supplément du noire. C étoit une raison
écrite qui parloit dans les cas où se taisoit le droit coutumier. U n
droit é tra n g e r , un droit d ’exception , un droit odieux ne doit
point être étendu ; odia restringenda. E n cas de d o u t e , il fa u t
suivre le droit commun. C ’est à la veuve à prouver form ellem ent
que son verger est en droit écrit. Onus probandi incumbit cui
prodest. Sans ce la , le droit d ’héritier est un droit universel qui
couvre tout. Je soumets ces réflexions à la prudence du tribunal.
11 seroit indigne do jogoc impartiaux et soigneusement attentifs
au droit entier des p artie s, de prendre légèrement parli dans une
question de celte importance.
Les dépens sont nécessités par la position des choses , m êm e par
les faits et les iaulcs de la veuve. C e qui peut lui arriver de plus
a va n tag e u x, est donc qu’ils soient pris sur la masse de la succes
sion. C e sera donc à elle à les avancer, puisqu’elle a en m ain toutes
les valeurs mobilières et immobilières.
Q u an t à la caution à fournir par la veuve, ce point est hors de
d o u te , la loi est expresse; et le tribunal d ’appel a récemment
consacré ce principe (i). U n usufruitier est investi d ’une belle
propriété foncière ; il l'offre en hypothèque com m e garant des
dégradations que pourroit recevoir l’objet joui. Q ue dis-je ! moins
que cela : il n ’y a pas d'objet de jouissance. L ’usufruit est celui
( i ) D an s la cau se de M . T e i l l a r d e t de m a d e m o i s e l l e
Chapaveyrc.
�(9 )
d ’ une somme d ’argent : la propriété foncière vaut quatre fois colle
pomme. Eh bien, l'usufruitier n ’a pu èlresa caution à lui-même; il lui
a fallu uno personne étrangère. Sansm odification, sans distinction,
la loi veut être obéie. L a loi veut accorder au propriétaire une
sûreté hors de la personne de l ’usufruitier. Elle pense que les for
tunes quiparoissent les m ieux é tablies, peuvent s’évanouir, com m e
nous en avons tant d ’exemples, et que le propriétaire pourroit se
trouver sans gage que la chose jouie lui sera transmise sans dé
gradation.
Vpettfe caulian ne scfci neut-ôlre ^as de la valeur çnticre de l’objet
jouï ; mais^ife^sera^fèn'ce'rta^&ment'^îiles,îi ld*4lii'ftVSû>ce entre
l’objet garni- de vieux et beaux arbres , foisonnant à arbré^ frui
tiers du plus
^cs bàtimeiîsSvLe fbelîesf
,
dés conduites d’ea)|xy jjitts»(]|e|clôture, des vignes en bon rap
port et ce même objet délaissé tout nu, sans arbres, $ins vignes,
sans eaux~, sans piurs , àvee deiyljStimens joj^ ruÿiç£,,des\:onduitcs
d ’eaux rompues , des eaux perdues ? etc. On sent'nue cette dissem
blance de l’objet it lui-m êm e équivaut presque a %on\cxist<ncè
entière , surtout quand il s’agit d’une très-petite étendue de terrein.
T e lle s sont les réponses que j ’ai cru devoir faire à l ’éloquent
mémoire de M . Boirot. Je n ’aurois p a s , sans sa provocation , ap
pelé le public à entrer en connoissance de celte c a u s e , dont je
laissois avec confiance le jugement au tribunal qui en devoit seul
connoître. M ais je devois à mon caractère, de repousser des impu
tations odieuses , de réfuter quelques raisonnemens faux qui leu*
doient à m ’imprimer un ridicule. Il eût été iastidieux de suivre le
m ém oire pied à pied , pour renvoyer tous les traits q u ’il contient:
il m ’a suffi de présenter un aspect des faits plus entier , plus con
form e à la vérité qui résulte toujours d e l’ensemble, elnon d ’une vue
partielle. Ç ’a été avec regret que je m e suis vu amené à articuler des
inculpations dures. M ais, com m e le ditle mémoire auquel je reponds,
la nécessité d ’appuyer les moyens de la cause m ’en faisoit une obli
gation pénible. D a n s une cause où on se fera un argument de la
bonne foi 'p r é su m é e , il falloit bien exposer tout ce qui détruit
�(1 0 )
l ’a r g u m e n t, on détruisant cette favorable présomption. A u reste,
je n ’ai point supposé d ’intention secrète ni d’arrière pensée. J’ ai
fait parler les faits ; et je ne les aurois fait parler qu’à l’audience,
sans l ’in utile mais insidieux imprim é de m a partie adverse,
d e m a l e t
-l a v e d r in e .
1
;
;i< ' ' ! I
A R I O M , de l ’imprimerie d e L a n d r i o t , seul imprimeur de
la C ou r d ’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Demalet-Lavédrine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
captation d'héritage
coutume d'Auvergne
droit écrit
Description
An account of the resource
Réponse de Joseph-Marie Demalet-Lavédrine, demandeur, au précis de Michelle Soulages, veuve Quayron, et aujourd'hui femme Mosnier, défenderesse.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
Circa 1789-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0541
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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captation d'héritage
coutume d'Auvergne
droit écrit
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MEMOIRE
P o u r A n n e DELAIRE,
veuve de
M ichel V irotte , et les s i x (Enfans
nés de leur mariage, appelans
C
L
les quatre Enfans du premier lit du
dit sieur V irolle, intimes.
o n t r e
’a p p e l, est, sur le fo n d , d ’un jugement par défaut du tribunal
de la Palisse.
L a dame V irotte e t ses enfans ont eu leurs raisons pour venir
directement aux pieds de la Cour.
Il a été répandu un mémoire im prim é, au nom des enfans du
premier lit du sieur V irolte.
' <
On y peint le sieur Virotte comme un père injuste, q u i , voulant
passer à de secondes n o ces, a pris des mesures qui tendaient ouver
tement à spolier les quatre orphelins laisses par sa première fem m e ;
A
�( 2)
E t la dame V iro tte com m e une fem m e am bitieuse, qui a obsédé
son m ari, pendant quarante-quatre ans qu’a duré leur union, pour
l ’empêcher de réparer ses torts par un acte de justice éclatant.
On n’opposera à ces injures que de la modération; on ne répondra
aux calomnies que par des faits.
L e sieur V iro tte , domicilié en Bourbonnais, a contracté un pre
mier mariage avec A n n e Brirot, le G août 1752.
Il fut constitué à A n ne B r i r o t , par ses père et m è r e , une dot de
2000 livres en deniers, et 4 ° ° livres de meubles.
O n voit dans le dernier feuillet du livre-journal du sieur V ir o tte ,
qu'il n ’a reçu de son beau-p ère, sur cette dot , ' que quelques
à-comptes, et de loin en loin.
Il eut quatre enians de ce m a ria g e , et il perdit sa fem m e au mois
de novembre 1766.
Il resta dans cet état de viduité jusqu’au mois de février 1 7 6 2 ,
q u ’il épousa A n n e Delaire.
11 prit la précaution, avant de contracter ce second m ariage, de
faire faire un inventaire dissolutif de la communauté qui avoit sub
sisté entre lui et A n n e B riro t, et qui avoit continué avec les quatre
enians qu ’il avoit eus de ce mariage.
C e t inventaire fut fait dans les formes usitées dans la Coutume
de Bourbonnais.
Cette première communauté n ’avoit pas élû irès-ajantageusc.
L e sieur Virotte et sa première femme étoienl entrés en ménage
sans avances , sans moyens pécuniaires.
Il s’éloit rendu fermier de quelques biens; mais les denrées
cloient au plus vil prix, com m e on peut le voir dans les pancartes
du t*mps. Une guerre désastreuse avoit tari toutes les sources de
la prospérité publique; et par surcroît d ’infortune, une grêle aff’r use avoit, en 1761 , dévasté toutes ses récoltes , et altéré la qua-
1 le
du
fieu
de grains qui avoient échappé à ce fléau.
O n ne doit donc pas être étonné que l ’inventaire dissolutif de la
irc.iiière communauté n ’ait donné q u ’un résultat do trois mille et
quelques cents livres.
�(
3
)
A près son second m ariage, les affaires du sieur V irotle commen
cèrent à s'améliorer.
L a paix de 1762 ranima l’industrie et le commerce. L e sieur
V ir o tte , secondé par une fem m e économe, active et laborieuse,
augmenta scs fe r m e s , se livra à l ’engrais des bestiaux pour la pro
vision de P a ris, fit de vastes entreprises sur les bois, et embrassa
tous les genres de spéculation dont les circonstances et les localités
pouvoient lui présenter les moyens. Sa fortune s’est accrue insensi
blem en t, et la seconde communauté a été portée ;'t un degré de pros
périté qui a excité l’envie des enfans du premier lit.
D e là , tous leurs efforts pour tenter de faire annuller l ’inventaire
destiné à dissoudre la première communauté contractée entre le sieur
V iro tte et leur m è re , et continuée avec eux jusqu’au second ma
riage du sieur V ir o tle avec la dame Delaire.
Pour parvenir a ce b u t, il a paru tout simple de calomnier les in
tentions du sieur V ir o t le , de le représenter, au moment de con
tracter une seconde union, méditant dans le silence et préparant
avec art des mesures propres à spolier les quatre orphelins laissés
par sa première femme.
On ne voit pas, à la vérité, ce dont il pouvoit spolier ces quatre
orphelins , car il étoit alors à peine au niveau de ses affaires. Mais
qu ’importe! a dit l ’auteur du m ém oire, calomnions, calomnions,
il en reste toujours quelque chose.
Cependant, ce père injuste, dénaturé, ne s’occupe, en contrac
tant un second m ariage, que de l’intérêt de ses enfans du pre
mier lit.
L a loi le rendoit commun avec sa seconde fem m e; il déroge a
cette loi j il stipule expressément, dans ce second contrat, que la
communauté n ’aura lieu e n lr ’e u x q u e dans le cas seulement que,
lors du décès de l yun ou de l’ autre des futurs, il y aura des en
fan s vivans du présent mariage, avec convention qu’ elle n’aura
pas lieu au cas contraire.
D e sorte que si la dame Delaire n’avoit pas eu d ’e n f a n t , elle étoit
condamnée à travailler gratuitement, pendant toute sa vie, pour
les enfans du premier lit, sans autre espérance qu ’un douaire préiix
de i/|0 f r ., stipulé par ce contrat.
�(
4)
On peut juger par là si lé cœur du sieur V irotte , préoccupé
d'une nouvelle passion , s’ étoit entièrement ferm é sur les intérêts
des demandeurs; si la fam ille étrangère, a laquelle il alloit
s'a llier , lui avoit imposé des lois contraires à ses sentimens.
M é m o ir e , page i .
L e sieur V iro lte ne se contentoit pas de s’occuper de la fortune de
ses enfans du premier lit, il ne négligeoit rien pour leur éducation.
D an s le premier â g e, il les a fait élever chez lui par des précep
teurs; de là il les a envoyés dans des collèges. Leurs études finies,
il les a tenus chez des procureurs; et enfin parvenus à 1 âge de de
venir eux—mêmes peres de fam ille, il leur a procure a tous des
établissemens avantageux.
Q u ’on lise leurs contrats de m a riag e, on les trouvera tous ins
titués par égalité avec les enfans du second lit.
Les filles elles-mêmes, condamnées par la Coutum e à une forclu
sion rigoureuse, ont été instituées héritières par égalité avec leurs
frères des deux lits.
Enfin le sieur V iro tte n ’a fait qu ’un seul avantage dans sa famille,
et cet avantage est en faveur du fils aîné du prertiier lit.
Q uan t à la dame V ir o tt e , elle en appelle à la conscience de ses
adversaires ; c’est à eux-mêmes , et non pas à l’auteur du M é m o ir e ,
qu ’elle demande s’ils n’ont pas trouvé en elle une seconde mère ;
si elle ne les a pas traités, dans tous les instans, avec les mêmes
soins, avec la même tendresse que ses propres enfans.
E t en faudroit-il d ’autre preuve que l’union qu ’elle a su m ain
tenir pendant quarante-quatre a n s , entre ses enfanç et ceux du
premier lit, sans q u e , jusqu’au décès du sieur V ir o tte , cette union
ait été troublée par le plus léger n u ag e?
Q uan t au caractère d ’ ambilion qu’on lui reproche , ce n’est
encore qu’à l ’auteur du Mémoire qu’elle l ’im p u te , et non aux
enfans du premier lit.
A u surp'us, un mot suffit pour la justifier sur ce point.
A u moment de la mort de Son m a r i, les greniers étoient pleins
de g rain s, les caves pleines de v i n , et elle a remis près «le 24,000 fr.
en num éraire, sans qu'elle s'en soit réservé une obole.
�C ’en est assez sur le chapitre des calomnies ; il est temps de
revenir à la cause. . .
•
85
L e sieur V iro tte est décédé au mois de novembre i o .
U n inventaire , fait en présence de tous les intéressés, a constaté
l ’état de sa succession.
:
Mais les parties ont été divisées sur le mode du partage.
Les enfans du premier lit ont cru pouvoir critiquer l’inventaire
fait par le sieur V ir o tt e , au mois de janvier 17G2, destiné à dis
soudre la première communauté contractée avec leur mere. Ils
ont prétendu que cet inventaire étoit défectueux ; que la première
communauté n ’avoit pas été interrompue; que dès-lors la seconde
communauté devoit être partagée en trois portions égales entre eux,
la dame Virotte et.la succession du sieur V iro tte ; et c ’est dans ce
sens qu ’ils ont form é , au tribunal de la P alisse, leur demande en
partage, qui a été accueillie par le jugement par défaut dont la
dame Virotte et ses enfans sont appelans.
Les enfans du premier lit opposent deux sortes de m oyens contre
cet inventaire.
Les uns sont relatifs à la form e, les autres à de prétendues frau
des, erreurs ou omissions.
A v a n t d ’entrer dans la discussion de ces m o y e n s , il n ’est pas
hors de propos de la préparer par quelques réflexions préliminaires.
L a continuation de co m m u n a u té, contraire aux lois romaines
et en général à tous les principes reçus eu matière de société, etoit
autrefois inconnue en Bourbonnais.
On lit dans l ’ancienne Coutum e de cette province , rédigée en
ï
493 , ce
qui s u it , article 6 du titre des C om m u n a u tés :
K Item , l’on tient par ladite C o u tu m e , que les enfans étant en
» puissance de père, n'acquièrent point de communauté avec leur» dit pere ni ses personniers , supposé qu ils soient seigneurs do
» leurs biens, à cause et com m e héritiers de leur feue mère ou autre. »
Cette continuation de communauté a été introduite dans nos
usages par l’article u 8 de l ’ancienne Coutum e de Paris.
�( G )
Elle a depuis été étendue à beaucoup d ’autres C o u tu m e s , et
spécialement à celle de B o urbo nnais, rédigée en i
.
520
On lit dans l'article 2 7 o d e cc tte nouvelle C o u tu m e , que « si l’un
« des conjoints par mariage , ou autres communs personniers, vont
» de vie à trép as, et laissent enfans ou autres qui soient leurs lie—
» ritiers, et le survivant desdils conjoints ne fa it aucun inven~
» taire, partage ou autre convention éqwpollant à partage, dedans
» 4'o jo u rs, à compter du jour du trépas du prémourant, la com « munauté de biens se continue et conserve entre ledit survivant et
» lesdits enfans, pour la portion du d é fu n t, si bon leur sem ble; et
» néanmoins sont saisis et en possession de la succession de leurs
» père et mère trépassés, ou autres , desquels ils sont héritiers. »
Mais cette continuation de communauté a toujours répugné à
tous les bous esprits, comme n ’étant propre qu’à faire naître des
procès interminables dans les fam illes, et ù orner les tribunaux.
Aussi les célèbres jurisconsultes qui ont rédigé le nouveau C o d e ,
en épurant nos anciennes lois , se sont-ils empressés d ’abroger cet
usa g e , parce qu’ il e'toit la source de procès innombrables , a dit
T ro n c h e t, dans sa discussion au conseil d ’état, sur l’article 1442
du Code.
Berber a dit après l u i , que« T ro n cb e t a très-justement objecté
» les embarras de cette continuation de communauté ; mais ,
» ajoute-t-il, ils deviendroienl plus grands encore si le survivant
» des époux se rernarioit, car le nouvel époux entreroit aussi dans
» la société J c est ce qui avoit lieu dans le ressort de la Coutum e
» de P a ris, et de celles qui avoient admis la continuation d eco m )> munauté ; o r , ¡’on conçoit qu’une telle institution est essentiel» lement mauvaise. »
« Q u an ta la continuât ion de com m u nauté, dit encore T re illia r d ,
» après T ro n cb e t et B c rlier, on a toujours réclamé contre cette
» institution ; la section saisira avec avidité les moyens qui pour« ront être proposés pour suppléer à ce remède dangereux. »
Quoi qu’il en soit, celte institution de la continuation de com
m u n a u té, essentiellement mauvaise, et contre laquelle on a tou
jours réclamé, étoit en vigueur au moment où le sieur V irotte a
�(
7)
passé à de secondes noces. Il a donc dû faire, pour l’in terrom p re ,
ce que lui prescrivoit la Cou tu m e sous l’empire de laquelle il vivoit.
C e lte C ou tu m e exigeoit aucun inventaire , partage, ou autre
convention équipollant a partage.
E n remontant à ce qui se pratiquoit dans les temps anciens, nous
voyons que la jurisprudence étoit singulièrement favorable à cette
interruption de communauté.
N ous lisons dans le Prêtre , 2' cent. ch. 22 , « qu ’anciennem ent,
» suïficiebat de fa cto factum fu isse inventarium, licet minus so» lernne , et que par quelque acte, le père ou la mère survivant
» eussent témoigné qu ’ils n ’avoient plus do volonté de continuer
» ladite communauté. »
D u m ou lin avoit dit égalem ent, sur l'article i
de la Coutum e
de Blois, s a tis e s t co n sta re description ern honâ. f i t l f a c t a n i .
L a plupart des commentateurs de la C ou tu m e de Bourbonnais
ont adopté cette opinion, entr’autres, Jean D écidant, Louis Semin,
et François Déculant.
A-uroux rapporte les expressions de ce dernier co m m en tateu r,
sur le mot I n v e n t a i r e : « Etiani minus soient n e, dit-il, quia hoc
83
j) nostrum statutum hoc paragrapho tantiun requirit ad interrupn tionem societatis. I n v e n t a i h e , p a r t a g e , d i v i s i o n ou a u t r e
» CONVENTION ÊQUIPOLLENTE. Undb S u ffltit , ajoute-t-il, simpleX
» declaratio contrarice 'voluntatis , aut actus societatis derogato» nus. Ita semper v id i observari: ita asserit ). Joannes D écid a n tf
» cujus opimonis erat ) . Ludovicus Sem in. »
1
7
O n trouve une multitude d ’arrêls dans Brodeau sur L o u e t ,
let. C . som. o , et dans tous nos autres arrêtâtes, qui ont décidé,
conformém ent à c es principes, qu ’un inventaire, quoique défec
tueux, étoit suffisant pour interrompre la communauté.
O n voit dans l’ un de ces arrêts, du 20 février 1610, rapporté
par Pelens, dans ses Actions foreuses, liv. , act. o, que le prin
cipal m o tif qui détermina la C our à rejeter les moyens opposés
contre l’inventaire qui avoit été fait pour dissoudre la première
com m unauté, fut q U’il ne pnroissoit pas raisonnable d ’appeler les
3
5
3
enfuns du premier lit au partage de la seconde communauté, puis-
�( 8 } .
que le premier mariage navoit dure que trois ans , et le second
quarante a n s, pendant lesquels s’ e toit accrue la communauté
par Vindustrie de celte seconde femme.
L ’auteur nous dit que « la C o u r a.déclaré l’inventaire avoir eu
» assez de force pour dissoudre la communauté; ce sont, ajoute-t-il,
» les mêmes mots desquels a usé M . de Harlay . »
D e nos jours , M . Cocliin a rappelé ces principes, et les a fait
valoir comme étant dans toute leur vigueur, dans la cause de Pierre
T lié ro u e n n e , et Marie A n n e Pingard , sa fe m m e , contre M arie
Blan chard, et Christophe B l a n c h a r d , enlans du premier mariage
1
4
de ladite Pingard. T o m . * > Pag ‘ ^ *
Il s’agissoit, c o m m e dans l ’espèce, d ’une question de continuation
de c o m m u n a u t é , dans la Cou tu m e de Senlis, fondée sur les pré
tendues défectuosités de l’inventaire fait par M arie P ingard, avant
de passer en secondes noces avec le sieur Tliérouenne.
L a Coutum e de Senlis exigeoit, comme celle de Bourbonnais ,
un inventaire et rien de plus, et elle n ’admettoit même pas d ’acte
équipollent, com m e celle de Bourbonnais.
M . Cocliin observe que nous avons en France deux sortes de
C outum es, qui règlent de quelle manière la communauté peut être
dissoute ou continuée.
« L a première de ces C ou tu m e s, dit-il, est de celles qui deman» dent, pour dissoudre la com m unauté, un inventaire fait et parfait
» avec un contradicteur légitime, et qui soit clos; ce que l’on cotn» prend SOUS l’idée générale d ’inventaire solennel : telle est la C ou j> tume de P aris, dans les articles 2/,o et 241.
» L a seconde espèce de Coutumes est de celles qui demandent
» simplement qu ’il soit fait un inventaire, sans ajouter qu ’il soit
)> solennel, o u , ce qui est la même chose, fait et parfait.
» D ans ces C ou tu m e s, le moindre acle dérogeant à la com m u» n a u t é , suffit pour en empêcher la continuation , et un inventaire,
» destitué même des formes ordinaires, en opère toujours la disso» lu lion.
» C ’est ce que décident unanimement tous les auteurs qui ont
» traité la matière , ajoute M . Cocliin , et en particulier Lebrun ,
�C9 )
» dans son T r a ité de la co m m u n auté, liv.
3,
cliap.
3,
sf.ct. i " ,
v n 10 et suivans. »
11 cite
aussi les différens arrêts rapportés par Brodeau sur L o u e t ,
qui ont jugé q u ’un inventaire, quoique d é lic tu e u x , n'en étoit pas
moins suffisant pour interrompre la communauté.
L a dam e V irotte pourroit sans doute invoquer toutes ces auto
rités avec confiance ; et faisant surtout 1 application à 1 espèce de
Parrèt de 1 6 1 0 , elle pourroit d ir e , comme on le disoit lors de cet
arrêt, et avec bien plus de vérité, que le premier mariage du sieur
V i r o t t e , avec A n n e B r i r o t , n ’avoit duré que quatre ans; que la
première communauté étoit nulle ou presque nulle lorsqu elle est
entrée dans la maison du sieur V iro tte ; que le second mariage a
duré pendant quarante-quatre ans, pendant lesquels S est accrue
la communauté par son industrie , et par les fruits d ’un patri
m oine précieux, qui ont été versés annuellement dans celte com
munauté , qui ont singulièrement contribué à en accroître les bé
néfices; qu’il y auroit donc lieu de dire, avec M . le président de
Iia r la y , que l ’inventaire, quand on le supposeroit minus s o le m n e ,
auroit eu assez de force pour dissoudre la communauté.
L a dame V iro tte pourroit soutenir cette thèse avec d ’autant
plus d ’avantage, que le sieur V iro tte , non content d ’avoir fait faire
un inventaire pour dissoudre la communauté d ’entre lui et ses
enfans du premier l i t , avant de passer à de secondes n o ce s, a
en outre consigné dans son contrat de mariage avec elle,
u n e
décla
ration qui prouvoit de plus en plus son intention bien prononcée c e
dissoudre cette première com m unaulé.ElIeest conçue en ces termes.
» Déclarant avoir fait faire inventaire dissolutif de la co m m u » nautéqui étoit entre lui et ladite défunte demoiselle A n n e Brirot,
m devant L o u h e r , n o ta ir e , le
»> la Coutum e. »
25 janvier •1762,
conformém ent à
Mais tout ce qu ’on a dit jusqu’ici, est moins pour le besoin de
la cause que pour fixer les principes de la maliere.
L a dame V iro tte et ses enfans peuvent aborder avec sécurité
l ’examen des moyens que leur opposent les enfans du premier l i t ,
B
�( 10 )
contre la validité de l ’inventaire sur lequel est fondée l’interrup
tion de la première communauté.
En e f fe t , cet inventaire a été fait dans la form e la plus rigou
reuse et la plus solennelle.
L e sieur Virotte a commencé par faire assembler, devant le
juge des lie u x , le conseil de f a m ille , pour nom m er un subrogé
tuteur à ses en fans mineurs.
C elte assemblée a été composée de parens et amis des m ineurs,
tous gons recom mandables, et tenant le premier rang dans le pays.
Si l'on en croit l ’auteur du M é m o ir e , on a écarté, à dessein, de
cette assem blée, le sieur A ntoine Brirot , aïeul des m ineurs, qui
étoit le défenseur ne de leurs intérêts, et qui pouvoit, mieux que
personne, les garantir de la spoliation dont leur père cherchoit à
les rendre victimes.
M ais on voit un Antoine Brirot parmi les parens assignés, et
cet Antoine Brirot ne peut êlre que l’aïeul des mineurs.
C e n ’est donc pas la faute du sieur V ir o tte , si le sieur Brirot
n ’a pas assisté à celte assemblée.
Il est d ’ailleurs de notoriété, que le sieur Brirot éloit alors accablé
d ’infirmités , et bors d ’état de sortir de chez lui.
C 'est un ja it fauac , dit l ’auteur du M ém oire, page i .
E h bien! si la C o u r croit ce fait de quelque im portance, la dame
V ir o tle et ses en fans déclarent q u ’ils l’articulent d ’une manière
expresse, et qu ’ils offrent d ’en faire la preuve par toutes les voies
5
de droit.
Q uan t au subrogé tuteur ou curateur avec lequel devoit être
fait l’inventaire, il n ’a pas été du choix du sieur V i r o t l e , mais
de la famille assemblée, qui a jeté les yeux sur le sieur de Finance,
châtelain de Chavroche, proche parent des m ineurs, qui avoit
tellement la confiance de la famille B r ir o t, qu’il fut de rechef
n o m m é , en 1764» subrogé tuteur des en fans d ’Antoine Brirot.
C e t inventaire a donc été fait avec légitime contradicteur. C ’étoit la première et la plus importante formalité exigée par la C o u
tume de Paris et par les lois les plus rigoureuses sur la matière.
T o n s les autres moyens de forme, q u ’on oppose contre cet In
ventaire, ne sont que de pitoyables chicanes.
�1
( 11 )
T e l est le m oyen tiré de ’assignalion donnée le m êm e jour aux
sept parens ou amis qui se sont réunis pour le conseil de fam ille,
com m e si l ’on ne savoit p as, d ’une p a r t, que cette assignation étoit
superflue, puisqu’ils pouvoient se réunir volontairement chez le
j u8e > pour délibérer, sans assignation préalable, et d ’autre p a r t ,
q u ’il est tout simple que s’étant tous trouvés dans le même lie u ,
on leur ait donné en même temps l’assignation pour assister au
conseil de famille.
T e l est encore le moyen tiré de la circonstance que c'est le
sieur Loulier , qui après avoir tenu l’assemblée comme b a i ll i , a
l'ait l’inventaire com m e notaire. (*)
C o m m e si l’on ignoroit que presque tous les baillis des justices
seigneuriales étoient en mêm e temps notaires ; que ces fonctions
n ’avoient n e n d ’incompatible; que lorsque le sieur Louher travailloit à 1 inventaire com m e notaire, il avoit épuisé ses fonctions
de juge ; et qu enfin , tel étoit l’usage universel dans les campagnes,
usage tellement consacre, q u e, lut-il abusif, il iaudroit le m ain
tenir pour la tranquillité p u bliq u e, d ’après la m axim e tirée d e l à
loi Barbarius P hilip p us : Error communis f a c it fu s.
Il faut placer dans la m êm e classe des chicanes vraiment pi
toyables , le m oyen que l’on prélend tirer de la circonstance que
celui qui a fait les fonctions de substitut du procureur fiscal à
l’ assemblée de fa m ille , étoit cousin de la dame Dclaire.
Indépendamment q u ’on n'établit pas cette p are n té , qu’on en
établit encore moins le degré, où a-t-on pris qu’avant le mariage
du sieur V ir o tte avec la demoiselle D e l a i r e , ce prétendu cousin
d û t se récuser dans une assemblée de famille des mineurs V irotte
dans laquelle il n ’étoit pas question, et il nepouvoit pas être ques
tion de cette prétendue cousine ?
O n prétend encore que ce prétendu cousin n ’étoit ni gradué, ni
cu rial, dans la justice de M ontaigut-le-Blanc; mais il est permis,
après un demi-siècle, de tout hasarder sur des faits de ce genre.
(*) M. L o u h er étoit un notaire distinguo par *?s t.ileas, ses lum ières et ses v e rtu s ; il a
é té envoyé au tribunal révolutionnaire, avec M. et M m e. D avaux et 13......par G.....M. Louher
y a péri avec M . et Mme. U n a u * , lo 2 ; floréal an 2.
Lettres imprimen« de G ..... à Fouquier-T.tinville , des 1 6 ventoso et 14 cerminal an s- cer
tifiées pour copie conforme, par Paris , greffier du tribunal révolutionnaire.
�( l2 )
Sa présence au procès-verbal n’ est pas du fait du sieur V ir o lt e ; ce
n ’est pas lui qui l’y a appelé; et par cela seul q u ’il y a fait telle ou
telle fonction, il est présumé en avoir eu le droit, jusqu’à preuve
contraire.
C e n ’est pas une chicane moins pitoyable que le moyen q u ’on
prétend faire résulter de ce que le sieur Feyard a f a i t , dil-on , les
fonctions d ’expert dans l’inventaire, après avoir assisté au conseil
de famille.
L ’objet du conseil de fam ille étoit uniquement de no m m er un
subrogé tuteur qui eût qualité pour assister à l’ inventaire, com m e
légitime contradicteur; cette mission rem p lie, le sieur Feyard
pouvoit se livrer à toute autre fonction.
A u surplus, on ignore s i , com m e le prétend l’auteur du mé
m o ir e , le sieur F eyard a bu et mangé avec le sieur V ir o tte , pen
dant la durée de l’inventaire; c ’est un fait qu’il n’est pas facile
d ’éclaircir après
ans: mais ce qu ’il y a de ce rtain , c ’est que
c ’est abuser d ’une manière étrange de la disposition de l’ordon
45
nance de 1 6 6 7 , que de l’appliquer à ce cas, et q u ’il faut être ré
duit à une grande disette de m o yens pour en employer de pareils.
Après avoir ainsi épuisé sa critique sur la forme de l ’inventaire,
l ’auteur du Mémoire en vient aux erreurs, aux om issions, aux
prétendues infidélités de cet inventaire , au moyen desquelles le
sieur V irotte est parvenu a spolier les (¡uatre orphelins laissés
par sa première femme.
11 est encore b o n , sur ce point , de commencer par fixer les
principes de la matière. O n ne peut les puiser dans une source plus
pure que dans P o llu e r,
1 auteur le plus
accrédité du clroît coutu-
mier. Il s’exprime ainsi, dans son traité de la C om m u n au té, n° 79^:
« Q u oiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire , si elles ne
» sont pas malicieuses , les effets omis ayant pu échapper à la
» mémoire du survivan t, l ’inventaire ne laisse pas d ’être valable,
» et d'empêcher la continuation de communauté.
» L ’omission est présumée malicieuse, dit-il ailleurs, n° G88,
.» lorsque la m nltiludedes choses omises et la qualité de ces choses
)i qui éloient en évidence et d ’un usage journalier, ne permet pas de
�( i3 )
» penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du s u r v iv a n t,
» qui ne les a pas comprises dans son inventaire.
» L ’omission doil surtout êlre jugée m alicieuse, lorsque les effets
» om isdans l’inventaire ont été, par le survivant, depuis la m ort ou
w pendant la dernière maladie du prédécédé, détournés du lieu où ils
» étaient, el portés hors la m aison, ou cachés dans quelque recoin. »
Si après avoir ainsi posé les principes de la matière, on passe aux
erreurs ou omissions qu’on reproche à cet inventaire, que voit-on?
U n e prétendue modicité dans l’estimation de quelques effets
mobiliers qui sont inventoriés.
Mais , d ’abord , nous répondrons ce que disoit M . Cochin à une
semblable objection , dans l’affaire de Marie P in g a rd , fem m e
T herou en ne :
« L a critique que l’on fait sur le prix des estimations , ne regarde
» point M arie Pingard; c ’est le fait des experts, qui se sont sans doute
» conduits suivant ce que leur conscience leur a dicté. »
2ent. t Ces sortes d ’estimations étant soum ises, en C ou tu m e de
Bourbonnais, au droit de crue ou parisis du cinquième en sus de
l’estimation des experts, elles ne dévoient pas être portées à une
valeur rigoureuse.
3 nt-,
en prenant pour exemple le lit qui faisoit partie du trous
seau d ’A n n e B rlro t, cette estimation est facile à justifier.
O n se plaint que ce lit n ’a été porté qu’à 100 francs dans l ’in
ventaire, tandis qu’il avoit été porté à 200 francs par son contrat
de mariage.
M ais qu ’on ouvre le livre-journal du sieur V ir o tte , dans lequel
il écrivoit jusqu’à scs plus secrètes pensées , et on y verra , au
dernier fe u ille t, qu’en se rendant compte de ce qu'il avoit reçu de
son beau-père, sur ce qui lui avoit été promis, il d i t , en parlant
de ce lit, estim é 200 francs par M . Drirot, mais c e s t trop cher.
On avoit promis au sieur Virotte pour 200 francs de m e u b le s;
mais on lui donnoit le moins q u ’on p o u v o it,e t il recevoit ce qu'on
vouloit lui d o n n e r, plutôt que de se brouiller ou d ’avoir dos con
testations.
11 avoit reçu ce lit pour 200 f r . , parce que son beau-père, qui
en avoit été lui-même l’appréciateur ; l ’avoit exigé ; mais ¡1 a voulu
�( H )
consigner cette injustice dans son registre, en faisant mention que
ce lit étoit porté à un prix excessif.
Est-il donc bien étonnant que ce même l i t , après avoir servi
d ix ans , n ’ait été estimé que xoo 1., et cela dans un inventaire qui
étoit soumis à la c r u e , ou au droit de parisis du cinquième en sus,
ce qui le portoit à
liv.
C e qu’on vient de dire s’applique également à l'estimation dulinge.
125
D ’une p a r t , cette estimation n’est pas du iait du sieur V ir o tte ,
et ne pourroit avoir aucune influence sur le sort de l’inventaire.
D ’autre p art, il ne faut pas perdre de vue que le sieur Virotte
n'avoit alors q u ’un très-petit m é n a g e , que son linge étoit form é
de la toile la plus grossière, qu ’il avo'it dû dépérir depuis le décès
de la dame B r i r o t , que sa maison avoit été abandonnée à des do
mestiques ; qu’enfin la crue ou le droit de parisis faisoit un de
voir aux experts de baisser le prix des objets in ven toriés, puisque
celui qui en demeuroit ch a rg é , étoit tenu d ’un cinquième en sus.
L ’auteur du M ém o ire passe ensuite aux infidélités.
« L ’article 20 porte, d it-il, q u ’il n ’éloit d û , suivant le dépouille» m ent du livre-journal du sieur V ir o lt e , par le colon du domaine
» C ro le t, et par les métayers ou locataires des biens de la dame
>> P r é v e r a n d , de la terre du P o n ç u t, et de celle du M é a g e , dont
» il etoit f e r m ie r , que la somme de 253 liv.
n Si l’on prend le livre-journal m êm e, d ’après lequel l’inventaire
» fait c e t t e indication, on trouve ses folios
,
, 71 , n o , i i 3
» et 123 , la preuve q u ’il étoit dû 816 livres 10 sous. »
5
45 58
L ’objection reçoit plusieurs réponses également décisives.
L a première est que l’inventaire constate que le sieur Virotte
a livré son journal au notaire qui procédoit à cet inventaire, pour
en faire le dépouillement.
C e qui établit,
d ’u n e
p art, que cette erreur, s’il y en avoit, ne
scroit pas son ouvrage;
D ’autre p art, q u ’il y mettoit toute la bonne foi, toute la loyauté
et tout l’abandon qui étoient dans son caractère.
2*'nt- , que ce qui exclut toule idée d ’infidélité, c ’est qu'après
avoir livré son journal pour en faire le dépouillem ent, il exige
�( i5 )
q u ’il soit inventorié, pour servir de m onum ent éternel de la droi
ture et de la loyauté de sa conduite.
C e n ’est pas tout; il continue de se servir du mêm e livre-journal,
d ’y écrire toutes ses affaires, et il a eu soin de le conserver jusqu’à
sa mort.
On ne craint pas de faire, à la mémoire du sieur V i r o t t e , l ’in
jure de dire que s’il a conservé si précieusement ce livre-journal,
c ’etoit pour assurer à ses enfans du premier lit les moyens d ’atta
quer un jour cet inventaire, et q u ’il les déposoit dans l ’acte mêm e
qu ’on le forçoit de faire pour dépouiller scs e n fa n s , afin que leur
découverte devînt moins difficile. M ê m ., page 17.
Malheur à l’homm e qui a pu concevoir une pareille pensée! Q uoi!
on pourra croire que le sieur V ir o tte , le plus respectable dos pères,
aura conservé avec so in , dans ses archives, son livre-journal pen
dant un dem i-siecle, dans 1 espérance q u ’après sa mort d deviendra
un brandon de discorde entre sa veuve et ses enfans des deux lits,
et qu'en descendant dans la tom b e, son ombre aura souri au plaisir
amer de les voir s’entredéchirer, et dévorer, en dissensions juridi
ques, la fortune q u ’il a pris tant de peine à leur amasser?
Revenons à des idées plus ju stes, plus naturelles et plus satis
faisantes pour le cœur humain.
L e fait seul que le sieur V iro tte a voulu que ce livre-journal
fu t inventorié, prouve invinciblement l’impossibilité qu ’il voulût
être in fid èle, et qu ’il voulût spolier les quatre orphelins laissés
par sa première fem m e.
C e fait seul prouve encore invinciblement l’impossibilité qu il f û t
infidèle, p u isq u e , dès q u ’il existoit une preuve écrite de cette
créance vraie ou prétendue, dans le livre-journal, et que ce livrejournal étoit inventorié, cette prétendue infidélité se réduisoit tout
au plus à une erreur de calcul, toujours sans conséquence, et qui
d ’iiilleurs n ’éloit pas du fait du sieur Virotte, mais de ceux à qui ce
journal avoil été livré pour en faire le dépouillem ent, com m e le
constate l’inventaire.
A u surplus, nous sommes bien éloignés de convenir de cette
erreur, même sous le point de vue d ’erreur de calcul. N ous n’avons
�( 16 )
pas dans ce m oment ce livre-journal sous les y e u x ; m a i s , d ’après
l ’habitude qu’ a l’auteur du M ém oire de tout hasarder, il est trèspermis de croire qu'avec un examen plus approfondi et fait sans
p ré v en tio n , on trouveroit un résultat bien différent de celui que
ce M ém oire nous présente.
A cette prétendue infidélité succèdent les fausses déclarations sur
le produit des gerbes de blé qui étoient alors engrangées. O r, ce pro
duit est fixé par approximation par les experts; il n ’est donc pas du
fa it du sieur V irotte. A in s i, nul reproche à lui faire, quand il y
auroit une erreur quelconque sur ce produit probable des gerbes de
b l é , qui n ’étoient pas encore battues.
M ais cette erreur n ’est encore que dans l'imagination de l ’auteur
du M ém oire.
L e produit des gerbes qui se Irouvoit écrit dans le livre-journal
au m om ent de l’inventaire, ne pouvoit pas être celui des gerbes
qui étoient engrangées, et qui étoient encore à battre.
Les inductions que l’on veut tirer de ce registre, qui porte,
d i t - o n , que le cent de gerbes produisoit douze coupes, tandis
q u ’il n ’est porté qu ’à dix dans l’inventaire, ne sont donc q u ’une
absurdité.
E t quand on voit que la discussion sur le produit présumé de
ces gerbes de blé se termine par cette exclam ation, « Quelle sous» traction ! . . . . . i l n’y a pas une seule raison à fa ire valoir pour
}) l ’effacer. », on croit voir la montagne en travail.
« V ienn ent maintenant les omissions, dit l’auleur du M ém oire;
» elles ont un caractère de gravité révoltant. »
Encore la montagne en travail.
5
L a première a pour objet une obligation de 5 1 9 liv. 1 s o u s , du
10 juin 1 7 6 0 , due par les nommés Baiier, métayers du domaine
Barnier.
C e tte omission est facile à justifier.
D ’abord, il n 'y a pas eu de soustraction , c ’est-à-dire d ’omission
volontaire et faite m alicieusem ent , puisque la pièce existe, et
�( 1
7
)
qu ’elle a été conservée par le sieur V ir o lte , pendant quarante-quatre
a n s, depuis cet inventaire.
2 ment. f cette obligation étoit rappelée sur le liv r e -jo u r n a l ,
44
au compte de ces m étayers, folio
* et
sieur V iro tte n ’a pu
avoir ni la volonté de la soustraire, ni la possibilité de la soustraire,
puisqu'il a livré lui-même son registre pour en faire le dépouille
m ent , q u ’il a ensuite exigé qu’il fût inventorié, et qu’il s’est sou
mis par là à le représenter dans tous les instans.
A u surplus, il est facile d’expliquer comment cette obligation a
pu échapper à ceux qui ont fait le dépouillement du livre-journal du
sieur Virotte.
, Il est probable que cette obligation est restée chez le notaire
qui l ’avoit reçue, et qu’on ne l ’aura pas trouvée parmi les papiers
du sieur V iro lte au m om ent de l ’inventaire.
E t il n ’est pas étonnant d ’ailleurs qu’on ait fait cet oubli, quoi
q u ’elle fût rappelée dans le livre-journal, la page 4 4 , où cette obli
gation étoit rappelée dans le compte des B a fïe r, se trouvant bâtonnée par e r r e u r , comme on le lit à la quatorzième ligne de ce
com pte, écrit de la main du sieur V iro tte :
« L e compte du & février 1761 est bon, quoiqu’ il soit barré;
)> c’ est une erreur. Signé Virotte.»
On conçoit q u ’en faisant le relevé de ce livre -jou rn a l, on n'a
pas dû porter son attention sur les endroits M to n n é s ; de sorte
que la mention de celte obligation a dû naturellement échapper
à celui qui faisoit le dépouillement du registre.
, C V st ainsi que s’explique cetle omission , la seule réelle, mais
faite si innocem m en t, que le sieur Virotte n ’a mis à l’éca rt, ni
l'obligation , ni le livre -jou rn a l où elle étoit relatée, et qu ’il a
au contraire voulu que ce livre-journal fût inventorié, com m e une
preuve irrécusable de sa bonne foi.
L e second article d ’omissions qu'on reproche à cet inventaire,
est d'une somme de
livres au total 011 de 18 livres pour la m o itié,
dont on suppose que le sieur V irotte a voulu spolier les quatre
56
orphelins de sa première fem m e.
G
�36
( »8 )
O r , ces
liv. avoient etc payées au sieur de Douzon par le sieur
V ir o tte , à la St. M artin 1761.
C 'étoit une dette de la co m m u n auté, qu’avoit payée le sieur V ir o tte , et qui ne devoit pas être portée en a ctif dans l’inventaire.
L e troisième a pour objet le bail de la terre du M é a g e , dont le
sieur Virotte étoit fe rm ie r , et une somme de 464 livres 6 sous 7
den iers, dont il é to it, d it-o n , en avance sur sa l e r m e , suivant
une quittance du 14 mars 1762.
O n n'a sous les y e u x , ni le l i v r e -jo u r n a l, ni cette quittance;
mais sa date seule, du 14 mars 17 6 2 , prouve le contraire de cette
avance prétendue, puisqu’elle est postérieure de près de deux mois
à l'inventaire, et plus d ’un mois au second mariage du sieur Virotte.
L e q u a t r i è m e e s t relatif, dit-on, aux foins de réserve produits
par cinq prés, avec lesquels il engraissoit des bœufs et nourrissoit
deux chevaux.
N ous dirons ici avec M . Cocliin , dans la cause de M arie P in gard, « que pour établir une pareille omission, il faudroit établir
» q u ’il y avoit réellement des foins.
» Mais il d e v o it, dit-on, y en avoir, continue M . C och in .
« E t sur quoi, dit-il, est fondée cette nécessité ? D ’ailleurs, on
>”> inventorie ce qui est , et non pas ce qui doit être. »
A u surplus , il n’est pas même vrai de dire q u ’il dût y en avoir.
D ’a b o rd , il n ’est pas exact de dire que le sieur V iro tte eût des
bœ ufs gras dans ses écuries; on voit dans le livre-journal, page
3 i 4 , qu’il n ’a commencé ce commerce qu ’en 1771.
D ’ailleurs, le foin de réserve que l’on suppose avoir dû se trouver
chez le sieur V ir o t t e , au moment de l’inventaire, avoit dû être
cueilli au mois de juin 17G1. O r , il est naturel de croire que ce
foin avoit été vendu par le sieur V ir o tte , depuis le mois de juin
jusqu’à la fin de janvier su iva n t, époque de cet inventaire; sur
tout dans une année aussi désastreuse que l’année 17G1 , où le
sieur Virotte avoit perdu la presque universalité de ses récoltes
par la g r ê le , ce qui avoit dû le forcer d ’user de toutes scs autres
ressources pour payer le prix do ses fermes.
A quoi ou peut ajouter que le sieur V iro tte ayant pris de cep-
�C 19 )
taines quantités de foin en entrant dans ses fe rm e s, il devoil en
rendre pareille quantité à sa sortie; et sous ce point de vu e, ce fo in ,
s ’il s’en étoit t r o u v é , n ’auroit fait que représenter celui qu ’il auroit pris en entrant en fe rm e , et n ’auroit pas dû être in ve n to rié ,
comme ne formant pas un a ctif réel de la communauté.
L e cinquième est relatif à l ’omission des pailles des dîmes du
-Ménge, qui faisoient, d it-o n , un objet de réserve.
O n sait qu’en Bourbonnais, à mesure que les blés sont écossés,
on livre les pailles aux colons, pour la nourriture des bestiaux ou
pour faire des engrais; ni le propriétaire, ni le fermier, ne sont en
usage de se les approprier.
E t à raison de la grêle de 1761 , il y a tout lieu de croire q u elle s
furent bien loin d ’être suffisantes en
colons.
17G2 , pour les besoins des
E n fin , le sixieme article d ’omission est re la tif aux prebats ,
q u i , dit-on, suivant le 11»
du livre-journal , faisoient un objet
im p o rta n t, à raison de l ’importance des fermes.
Cet objet important est affermé 12 boisseaux au ferm ier des
Maillards.
3
C es 12 boisseaux, qui étoient sans doute du seigle, pouvoient
alors valoir 6 liv. à raison de la vilité du prix des denrées.
A i n s i , c'est un écu de
3
livres dont ce père injuste a voulu
spolier les quatre orphelins de sa première fem m e , lui qui en
passant son contrat de m ariage, quelques jours après, a la précau
tio n , pour ménager leurs intérêts, de stipuler qu ’il n ’y auroit
pas de communauté entre lui et la seconde f e m m e , s’il n ’y avoit
pas d ’enfcins de leur mariage.
A u surplus , pour entendre cet article, il faut savoir que les pré
bats sont des gerbes qu ’on est en usage, dans quelques domaines, de
battre une première fois légèrem ent, pour en extraire un premier
grain destiné aux semences, et que l ’on finit de baltre en hiver pour
achever d ’en tirer les grains qui y sont restés.
Il paroît qu ’il y avoit eu des prébats dans le domaine des M a il
lards, et que le sieur Virotte avoit affermé au métayer de ce do
maine le grain que ces prébals pouvoient produire, moyennant i a
boisseaux.
�( 20 )
C e t objet n ’a pas été omis dans l’inventaire ; il a été compris
dans le dépouillement général qui a été fait du livre-journal, pour
faire le relevé des dettes de ces métayers.
A in s i, cette prétendue omission n ’est pas seulement ridicule et pi
toyable en elle-même, elleestencore absolument contraire à la vérité.
L ’auteur du M é m o ire , après avoir épuisé le chapitre des omis
sions , ajoute que l’inventaire présente encore à la critique une
infinité d ’articles :
T e l s que la déclaration de oo livres en numéraire ou arrérages
de ce n s;
i
E t celle faite p a r le s i e u r Virotte*, portant que les habits, linges
et hardes d ’A n n e Brirot, sa première fem m e, avoient été vendus,
échangés ou employés à l’usage des mineurs.
5
Est-il étonnant, sur le premier article, que le sieur V iro tte n ’eût
pas une plus grosse somme en numéraire , après une grêle comme
celle qu ’il venoit d ’essuyer, et après avoir payé le prix de scs fermes,
dont les échéances étoient sans doute à N o ë l?
E t quant aux linge et hardes de la dame B r ir o t, estimés par
son contrat de mariage à 200 livres, le sieur V iro tte pouvoit-il en
faire un meilleur usage, que d ’employer pour ses enfans tout ce qui
en étoit susceptible? et ne devoit—il pas, en bon père de fa m ille ,
vendre et échanger le surp lus, com m e il l ’a fa it, pour en éviter
le dépérissement?
L a critique sur l ’article des bestiaux n ’est pas plus raisonnable;
tout étoit constaté par des baux à ch e te l, et tout consistait ü cet
égard dans quelque légère différence dans la perte ou le croit.
L ’auteur du Mém oire termine sa discussion sur cet inventaire,
par rappeler les expressions de P ollu er, et nous nous plaisons à les
rappeler com m e lui :
« Q u oiqu’il y ait des omissions dans l’inventaire, si elles ne sont
» pas malicieuses, les eilels omis ayant pu échapper à la mémoire
» du survivan t, l'inventaire ne laisse pas d'être valable, et d ’em » pêcher la continuation d(T communauté. »
Nous répéterons avec lui que l’omission est présumée malicieuse,
�( 21 )
lorsque la multitude des choses omises et la qualité de ces choses
qui étoient en évidence et d ’un usage journalier , ne permettent pas
de penser qu’elles aient pu échapper à la connoissance du survivan t,
qui ne les a pas comprises dans son inventaire;
Que « l’omissiondoitsurtout être jugée m alicieuse, lorsque les ef» fets omisdans l ’inventaire ontété, par le survivant, depuis la m o rt
» ou pendant la dernière maladie, détournés du lieu où ilsé to ie n t,
« et portés hors de la maison ou cachés dans quelque recoin. »
Ici on ne voit rien de soustrait, rien deilû tou rn é, rien de caché.
T o u s les objets matériels sont représentés ; tout ce qui tient au
calcul est mis en évidence par l'exhibition du livre-journal, par
le dépouillement qui en est fait. S ’il se trouvoit que sur quelque
article ce dépouillement n ’eût pas été fait avec une exactitude assez
scrupuleuse, il ne faudrait pas l’imputer au sieur V iro tte , qui a
livré ce registre à honnête, au probe L oulier, notaire, chargé de la
confection de cet inventaire, et qui y mettoit tant de loyauté et de
bonne foi , q u ’il a exigé expressément qu’ il fû t inventorié, pour
être représenté dans tous les instans.
U n seul article peut laisser, au premierabord, quelque léger pré
texte à la critique; c ’est l ’obligation de ig francs.
1
3
Mais quand on voit que cette obligation avoit pu rester chez
le notaire qui l’avoit r e ç u e , et ne pas se trouver parmi les papiers
du sieur V ir o tt e , au moment de l’inventaire;
Q u ’il n ’avoit ni la volonté ni la possibilité de la soustraire, puis
q u ’elle étoit couchée sur son livre-journal inventorié, à l’article du
44
compte de ses métayers des Barniers, folio
»
Q ue ce compte avoit été rayé par erreur , comme on le lit dans la
note du sieur V iro tte , écrite et signée de lui au même folio, ce qui
avoit dû naturellement détourner l’attention de ceux qui faisoient
le dépouillement de ce journal;
Quand on considère, enfin , que le sieur V irotte a conservé pré
cieusement cette obligation jusqu’à sa m o rt; celle omission, qui
cesse d ’en être une, dès que l’existence du titre est constatée par le
journal inventorié, dépose hautement en faveur d e là bonne foi du
6ieur V iroU e ; et d e là loyauté de l’inventaire.
�( 22 )
A joutons q u e , s’il en étoit besoin pour la c a u s e , on pourroît
rappeler ce que dit le Prêtre : Sufficiebat de facto factum fu isse
inventariutn, licet minus solemne;
C e que dit Dum oulin , sur la Coutum e de Blois : Satis estcons-
tare descriptionem bond fid e factam ;
C e que disent François D é c id a n t, Jean Déculant et Louis Sem i n , commentateurs de la C ou tu m e de Bourbonnais, sur le m ot
I n v e n t a i r e : Eliani minus solem ne. . • sufficit simplex declaratio
contrariée 'voluntatis , aut actus societahs derogatorius : itasem per aiidi obserrari.
On pourroit dire que les nom breux arrêts cites par Brodeau sur
L o u e t , ont jugé que des inventaires , quoique d é fe ctu e u x , suffi
s s e n t pour interrompre la co m m u n auté, surtout dans les C o u
tum es qu i, com m e celle de Bourbonnais, n ’exigent q u ’aucun in
ventaire ( talis q u a h s) , partage ou autre acte équipollent;
Que dans la plupart de ces arrêts il étoit question d ’om issions,
çt m êm e de soustractions ;
Q u e dans celui de 1610, cité p ar P e le n s, « la
5e nullité
é to it,
)> dit l’a uteu r, qu’il y avoit eu plusieurs omissions j »
Q u e dans la cause plaidée par M . Cocliin , il étoit au$si ques
tion d ’omissions considérables.
O n pourroit enfin citer l’opinion de Renusson, dans son traité de
la C om m u n au té, part. , cliap. 2, n*
, et ce que dit son anno
ta te u r , page 284, qu’ un inventaire infidcle n’empêche pas Vinter
3
35
ruption de la communauté’.
A u surplus, on ne peut assez admirer la sagesse de ces décisions,
qui ten doientà faciliter par toutes sortes de moyens l’interruption
d e l à continuation de co m m u n a u té , lorsqu’on voit nos législateurs
reconnoltre que c’étoit une institution essentiellement mauvaise,
une source intarissable de questions épineuses, de difficultés inex
tricables, propres à mettre en défaut toute la sagacité des plus pro
fonds jurisconsultes, qui avoient donné lieu à des milliers de vo
lum es in-folio, dont les bibliothèques étoient encombrées; et que
le résultat le plus ordinaire de ces continuations de communautés
étoit la ruine assurée des enfans d ’un i°r , 2’ ,
3*,
et quelquefois
�♦
(
)
d ’un 4*lit, lorsqueles survivans des père et mère avoient successive
ment contracté plusieurs mariages.
Il est d ’ailleurs peu de cas où l’injustice de cette continuation de
communauté fût plus frappante que dans l’espèce.
Lorsque la dame V irotte est entrée dans la maison de son m a r i,
la fortune des quatre enfans du premier lit consistait dans la moitié
du montant de l’inventaire, qui étoit, au total, de io fr.
Ils ont donc été nourris, entretenus , élevés aux dépens de la se
3 6
conde com m u nauté; c’est cette seconde communauté qui a payé
et nourri les précepteurs; p ay é , pour les mâles, les pensions dans
les collèges, chez les procureurs; pour les filles, les pensions dans
les couvons; c ’est la seconde communauté qui a fait les irais de
leur établissement; c ’est encore en partie aux dépens de cette se
conde com m unauté, q u ’ils ont été dotés et constitués.
A in s i, non-seulement ils n ’ont pas contribué un seul instant au
b ie n , à l’avantage de cette seconde com m unauté, ni par leurs tra
v a u x , ni par leurs revenus; mais ils n ’ont cessé de l’épuiser par des
dépenses excessives au-dessus de leur état et de ce q u ’étoit alors la
fortune du sieur Virotte.
L a dame V iro tte ne rappelle pas ces dépenses pour en faire des
reproches aux enfans du premier lit; non-seulement son mari les
a faites de son consentement, mais elle y a contribué de tout son
pouvoir; elle mettoit sa gloire à les voir bien élevés; elle partageoit
leurs succès; elle sembloit enfin dans tous les instans se livrer à la
douce erreur de se croire leur propre m ère, et elle doit leur rendre
la justice de d ire , que jusqu’à l ’instant fatal qui lui a ravi le sieur
V ir o lt c , ils n ’ont cessé de lui témoigner de l’attachement, et les
égards que inériloient ses procédés généreux.
L a circonstance dont on vient de parler de l’établissement des
quatre enfans du premier lit, fait naître un nouveau moyen d ’in
terruption de la première communauté, que la dame V irotte et ses
enfans ne croient pas devoir négliger, quoiqu’il soit superflu, d ’a
près tous les autres m oyens qui s’élèvent en leur faveur dans cette
cause.
�(
^4 )
■ L a C outum e du Bourbonnais n ’e x ig e a n t, pour l’interruption de
la com m unauté, qu’aucun inventaire, partage, division, ou autre
convention équipollenle, on a toujours pensé dans cette C ou tu m e ,
que le mariage des enfans hors de la maison paternelle , produisoit
l ’effet d ’interrompre la co m m u n a u té, lors même qu’il n ’avoit pas
été fait d ’inventaire, surtout s’ils avoient été dotés et constitués à
une somme équivalente ou approximative des biens qu’ils étoient
en droit de prétendre du ch ef du conjoint prédécédé.
C ’est ainsi que l’a pensé D u m o u lin , le flambeau du droit cout u m ie r , dans ses notes sur cette C o u tu m e , que l’on doit regarder
com m e d'autant plus précieuses qu elles sont plus rapprochées du
temps de sa rédaction.
Coquille se propose cette question sur l ’art.
C ou tu m e du Nivernois :
4 du tit.
2 de la
« L a question est, dit cet auteur : L e père survivant n ’a point fait
» d ’inventaire, mais il a marié ses filles , et leur a baillé dot com » pétente; ou b ie n , a marié ses fils et leur a acheté office, ou leur a
» donné autre m oyen de vivre. Savoir si les enfans susdits auront
»
»
»
»
»
»
continué la communauté. Sur quoi j ’estime que p a r le mariage la
communauté a été suffisamment contredite, jaçoit que les enfans
n 'y aient expressément renoncé, suivant ce que dit D u m o u lin , en
l’ annotation sur la Coutum e de Bourbonnais, article 27 0 , et dit
avoir été jugé entre la veuve et les enfans de Denis G r o n , qui étoit
procureur en parlement. »
C e t a u teu r, qualifié de ju d ic ie u x , donne ensuite les raisons sur
lesquelles son avis est m o tivé, en ces termes :
« L a raison, selon mon a v is , est que les enfans ne peuvent et ne
» doivent avoir communauté universelle en deux lieux, quand en
» l’un des deux la personne n ’y est pas et n’y fait rien,"et il fait mé» nage et négocie à part où le père ne prend rien.
» E t encore pour ce que, ajoute-t-il, la dot de la fille ou le m oyen
» que le père a donné à son fils , tient lieu , et est comme sa part
» du droit qu ’il avoit en la masse de la communauté. »
T e l le est aussi l’opinion d ’Auroux-Dcsporumiers, sur la Coutum e
de Bourbonnais.
�(
25 )
h Après avoir cité un arrêt contraire, de 16 10 , et une sentence de
1 6 1 1, qu’il dit avoir trouvés dans un manuscrit d ’un certain M . Rougnon, il rapporte l’opinion du président D u re t, qui s’explique ainsi,
sur ces mots, E q u i p o l l a n t a p a r t a g e : V e lu tis i filia a superstite
nuptui tradita s i t , ejus respecta , actus est sufficiens ut societas
dissolvatur , quamvis expresse huic non renunciaverit; quo jure
utirnur.
Il
ajoute que Jean Déculant atteste dans ses notes sur cet article,
q u ’il l ’a toujours vu ainsi pratiq uer, qu’on ne consultoit p a s, et
q u ’on ne jugeoit pas autrement de son temps : Ita vid i sm iper ob-
servari in judicando et consulendo; et que la note de D u m ou lin
s ’applique aux mâles comme aux filles : Q uœ M o lin œ i nolula
non habet soliirn locurn in f ilia nupta et dotata, sed etiam in f ilio
cu i in matrimonium quid certuin fiie rit assignalum.
' « C 'e st aussi, dit A u r o u x , le sentiment de Jean F a u lc o n n ie r,
w dans ses observations sur le présent article. »
A u ro u x émet ensuite son opinion personnelle sur cette question,
en ces termes :
c
« C e dernier sentiment me paroît le plus conforme à l ’esprit de
» la C o u tu m e , et il me paroît qu ’en s'attachant aux ternies>de
» notre article, on ne peut point s’empêcher de d ire, que le père
» survivant et mariant ses onfans hors de chez lu i, et leur donnant
» une somme pour leur part dans les droits qui leur appartiennent
» par le décès de leur m ère, fait cesser à leur égard la contînua» tion d e là com m u nauté; car il ne peut pas, à ce qu il me paroît,
» mieux marquer la volonté q u ’il a de ne plus demeurer en co m » munauté avec son enfant, q u ’en le mariant hors de chez l u i , lui
» donnant ce q u ’il prétend lui appartenir, et souffrant qu ’il fasse
» un commerce et une communauté à part.
« Notre Coutum e, au présent article, ajoute Auroux, n edem an d e
m autre chose pour arrêter la c o n t i n u a t i o n de communauté , q u ’un
» inventaire ou partage , division ou autre convention equipollant
» à partage; o r , comment p e u t - o n qualifier le mariage d ’un e n f a n t ,
» sa séparation d ’avec son père, la dot q u ’on lui constitue pour ses
» droits acquis par le décès dosa xnère, autrement que de partage,
D
�(
26
)
» ou tout au m o in s , com m e parle la C o u tu m e , de convention équi-
» pollanl à partage ? »
* C e t auteur, dans sa cen t-tro isièm e addition, rappelle que l’art.
118 de l’ancienne C ou tu m e de Paris portoit, comme la Coutum e
de Bourbonnais, qu’il n ’y avoit point de continuation de com m u
n a u té , si le survivant des conjoints avoit fait faire inventaire, ou
autre acte dérogeant à la co m m u n a u té; que par suite de ces ex
pressions ^ on décidoit alors que les enfans dotés par le survivant
ne pouvoient plus demander la continuation de communauté, parce
que le contrat de mariage étoit une espèce de partage , et acte dé
rogeant à la communauté; que les réformateurs de la Coutum e ayant
supprimé ces term es , e t autres actes équipollens, l’inventaire fait
en bonne form e peut s e u l, dans cette C o u t u m e , dissoudre la
communauté.
« M ais, ajoute-t-il, com m e la disposition de notre C ou tu m e , au
» présent article 2 7 0 , n ’a pas été ré fo rm é e , il est vrai de dire
» que suivant cet a r tic le , et eu égard aux termes dans lesquels il
» est c o n ç u , le mariage de l’e n f a n t, hors de la maison du p è r e ,
» suffit pour dissoudre la com m unauté. »
Enfin , il rapporte une sentence de la sénéchaussée de M o u lin s,
rendue le 14 mars 1 7 2 7 , lui A u r o u x étant du nombre des juges,
par laquelle il fut jugé que « le mariage de M arie R a v e l, sa cons» titution de d o t , la nouvelle communauté contractée avec F ran » cois Boucaud , sa séparation et sortie de l ’ancienne com m u» n a u t é , son défaut de collaboration en icelle, devoient être re» gardés comme un partage ou actes équipollens à partage , dis» solutifs p a r conséquent de co m m u n a u té, aux termes de l’article
» 270 de notre Coutum e. »
Ici les quatre enfans du premier lit sont m ariés, plusieurs de
puis trente et quelques années.
T o u s ont été dotés, non-seulement de l’universalité de leurs
biens propres, mais encore en partie aux dépens de la seconde
communauté.
A u cun d ’eux 11’a mis sa collaboration dans cette seconde com-*
munauté.
�(
7)
2
"
T o u s sont sortis de la maison paternelle.
T o u s ont contracté une nouvelle communauté.
Dès-lors l'application de ce préjugé se fait de lui-même a l ’espèce.
M ais les parties se trouvent ici dans de Lien plus forts termes.
D u m o u lin , Coquille, D u r e t , D é c u la n t, Faulconnier, A u r o u x ,
supposent une communauté continuée entre un père et ses en fan s,
qui n ’a pas fait d ’inventaire qui ne s’est pas rem arié, qui n ’a pas
contracté une nouvelle communauté avec une seconde fem m e ,
et ils n ’hésitent pas à décider que la communauté est interrompue,
lorsque les enfans sont dotés et mariés hors de la maison paternelle.
1
A combien plus forte raison faut-il le décider ainsi, dans espèce
où il existe un inventaire fait dans le dessein de dissoudre la com
munauté ;
U n e déclaration formelle de celte dissolution, insérée dans le
second contrat de mariage du sieur V iro tte ;
U n e nouvelle communauté contractée avec une seconde femme ;
Quatre enfans dotés et mariés hors de la maison paternelle, et
qui tous ont contracté une communauté particulière, Jonc m é n a g é
et négocient autre p art, où le père ne prend rien , com m e le dit
Coquille.
A combien plus forte raison encore, doit-on le décider ainsi,
dans l’espèce où ces quatre enfans du premier lit n'ont contribué
eu rien à l ’avantage de cette seconde co m m u nauté, ni par leur
collaboration , ni par leurs revenus, où ils l’ont au contraire épuisee
dans tous les sens par leurs dépenses, et où cette s e c o n d e com m u
nauté n'a subsisté, n ’a prospéré que par 44 ans d ’économie, de
soins, de travaux de la dame V ir o tte , et par les revenus annuels
d ’un riche patrimoine, qui se sont confondus dans cette com m u
nauté ?
Q u ’oppose-t-on contre tant de moyens ? L ’ arrêt des V id a lin ,
3
58
rendu, d it-o n , le mai i y
, cité par Ducher.
C e t arrêt ne peut être mis en balance avec toutes les autorités
nous venons de citer.
O n sait d ’ailleurs que les arrêts dépendent le plus souvent des
que
circonstances , ou d ’une défense négligée.
�( 28 )
E t si on s’en rapporte à l ’auteur qui cite cet arrêt, on y remar
que que le père avoit institué ses enfans ses héritiers par égalité,
avec la condition ridicule de s’en tenir à une somme quelconque
pour leurs droits m aternels, sous peine d ’apanage, pour les filles,
et pour les m ales, d 'êt r e réduits à leur légitime.
.
O n ne voit pas q u ’il y eût eu un inventaire destiné à dissoudre
la co m m u nauté; une seconde communauté contractée par le sur
viva n t; une dot constituée aux enfans m ariés, bien supérieure à
leurs droits m aternels, et toutes les circonstances qui se trouvent
dans cette a ffa ire, et qui la rendent la plus fa vo ra b le , pour l ’in
terruption de la c o m m u n a u t é , qui ait jamais paru dans les tri
bunaux.
A jou tons que le sieur V iro tte a fait un traité avec ses enfans
du premier l i t , en 1 7 8 4 , qui forme encore une preuve nouvelle
de celle dissolution-de co m m u n auté, en ce qu e, par ce traité, le
sieur V iro tte a restitué à ses enfans les jouissances de certains
biens qui leur étoient propres, q u ’il avoit aliénés, tandis que ces
jouissances seroient entrées dans la c o m m u n a u té , si elle n ’avoit
pas été dissoute.
Mais tout ce qu’on vient de dire dans cette dernière partie de
la discussion, n ’est que par surabondance de droit.
L inventaire du mois de janvier 176 2 a été fait avec légitime
contradicteur ; il est lo y a l, il est de bonne foi. Il n'en eût pas
fallu davantage pour interrompre la communauté dans la Cou tu m e
la plus sévère; et ce n’est pas aujourd’hui qu ’il faut ajouter à la
rigueur des lois sur cette m a t iè r e , lorsqu il est réconnu que cette
institution étoit essentiellement mauvaise, et que les sages réfor
mateurs de nos usages gothiques, les rédacteurs du Code civ il, se
sont empressés de l ’abolir.
Signé V I R O T T E - D U C H A R M E , tant pour lui
que pour sa mère et ses frères et sœurs du second lit.
B O I R O T , ancien jurisconsulte.
D E V È Z E , avoué.
A C L E R M O N T , d e l ’im p r im e r ie d e L AN D RIO , im p r im e u r du la P r é f e c t u r e .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delaire, Anne. An 3?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Devèze
Subject
The topic of the resource
secondes noces
coutume du Bourbonnais
domaines agricoles
inventaires
communautés familiales
parsonniers
partage
livres-journaux
élevage
Description
An account of the resource
Mémoire pour Anne Delaire, veuve de Michel Virotte, et les six enfans nés de leur mariage, appelans ; contre les quatre enfans du premier lit dudit sieur Virotte, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 3
1752-Circa An 3
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0539
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montaigu-le-Blin (03179)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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communautés familiales
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secondes noces
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M E M O IR E
i
EN
R É P O N S E
Pour Ja c q u e s -Pier re -Mar ie -An n e
ancien Magistrat ;
t
En présence de
.
d ’ALBIAT,
.
C l a i r e - J o s ê p h i n e d 'A
L B I A T safille.
�A V E R T I S S E M E N T.
U n homme bien connu à R iom , a secrètement favorisé le
rapt. Mais il l’a h a u te m e n t improuvé , e n disant que c'était
une révolte contre l'autorité paternelle , une révolte contre
l’autorité maritale. C e t h o m m e m'a pressé de former oppo
sition au mariage de m a fille } . en me disant qu 'on trouverait
bien des m o y e n s de l 'empêclier ; que les actes de respect
p o u rra ie n t p ré se n te r quelques nullités et que dans tous les
cas on retard era it pour long-temps ce mariage , en ordonnant
une a ssem b lée de parens. Eh bien ce même homme qui
m’avait abusé d’une futile espérance., a sollicité contre moi
au moment du jugement. Quel machiavélisme ! quelle noire
perfidie ! Il ne me trompait que pour accabler une famille
entière avec plus d’éclat.
�M É M O I R E
E N
l a i r e - J o s é p h i n e d ’A
P eb
au mariage dosai-
au
d’A L B IA T ,
ancien Magistrat \
En présence de C
» ’ un
P O U R V (j(
R E P O N S E
Pour J a c q u e s - P i e r r e - M a r i e -A n n e
OPPOSITI/
L B I A T safille.
L ’art des ambitieux est de se rendre utiles ,
D e feindre des vertus jusqu’au fatal moment
O ù le projet du crim e éclate impunément.
Tragédie des Templiers.
U n Mémoire imprimé sous le nom de demoiselle Julie d’A lb iat, contre
son père , a été répandu à Riom sur l’appel , et distribué avec pro
fusion par un ancien facteur aux lettres , même à Clermont où l’affaire
n’était plus pendante.
*
L a D .IIe d’Albiat vient donc porter une main parricide sur le cœur
de son père ; elle vient l’affliger ; elle veut l’accabler. E lle renonce aux
égards qu’elle doit à toute une famille ; elle renonce à la tendresse
d ’un frère , âgé de 28 ans , qui s’est trouvé au poste d’honneur dans
les plaines d’Austerlitz ; elle lui adresse , pour prix de ses travaux
militaires , un Mémoire contre son père. L e premier jour de sa majorité
a été marqué par un acte de violence; elle réduit actuellement son
père à la dure nécessité de publier les motifs de l ’arrêt que l’opinion
publique a prononcé contre un mariage qui fera , tant quelle vivra, sa
honte et son désespoir.
Quelle est donc la fureur qui entraîne M . Dufreisse de Fontsalive, pour
porter la désolation dans une fam ille qu’il fréquente depuis trois an s,
contre la volonté d ’un père , d ’un ép o u x , contre la décence publique ?
A 2
T e n u
n
|1
de Cassation’]
�( 4 )
Il veut encore , suivant le Mémoire im prim é, qu'on lu i sache quelque
gré de chercher a s'allier à une fam ille• malheureuse ; et c’est M . de
Fontsalive qui y a porté le poison de la discorde, en fixant, après la mort
de sa mère , son domicile à la suite de l’appartement de la D.n,e et
de la D .lle d’Albiat , et en excitant une demande en séparation de
corps contre un époux dont il ravissait la fille.
Q u ’apporte-t-il donc de si précieux à ma famille ? la misère , les
infirmités , et un esprit de discorde.
Puis-je être flatté d’un mariage qui est contre nature , d’un mariage
que la conscience publique réprouve , d’un mariage qui est l'effet
d’un rapt , d’un mariage contraire aux maximes de l’Eglise qui
étaient scrupuleusement observées avant la révolution?.... M a fille a été
enlevée à ma surveillance sans aucun mofif quelconque , contre la dis
position précise de l ’art. 5o 3 du Code civil.
Ces mana°es n’ont jamais prospéré dans la ville de Clermont j un
des Conseils de cette affaire en fait la triste expenence.
O n prétend , dans le Memoire imprimé , que toute la fam ille de la
D.lle d'Albiat approuvait et encourageait les recherches de M . D ufreisse de Fontsalive ^ C ’est une insigne fausseté : toute la famille a
unanimement improuvé ce projet de mariage , et moi-même j’ai per
sévéré dans mon refus. L a D .,Ie d’Albiat a fait l’aveu, dans le premier
acte dit respectueux , que ce mariage était approuvé par une partie de
sa famille seulement ; parce qu’elle espérait alors que la famille de sa
mère approuverait ce mariage. Je consens que M . de M arlillac ( i ) ,
qu’on n’aurait pas dû citer , s’explique dans une assemblée de famille
ou d’amis : sa conscience pourra révéler toutes les causes qui peuvent
s’opposer a ce mariage.
O n me représente comme ne croyant pas qu’z7 fû t convenable de
donner ma j i lle à un émigré. Je ne me suis jamais arrêté à une
pareille absurdité , qui serait contraire ’à l'union qui doit exister entre
des hommes destinés à vivre en société. Je croyais qu’il n’y avait plus
d’émigrés en France. M . de Fontsalive veut encore paraître émigré , pour
renouveler sans doute des qualifications inverses. 11 m’apprend bien qu’il
est toujours émigré , puisqu’il m’a séparé de mon épouse. S’il veut rap
peler qu’il est toujours émigré, pourquoi se perm et-il de transgresser
des lois qu’il prétendait défendre ; ces lois qui fixaient la majorité à
2 5 ans ; ces lois qui défendaient le rapt ; ces lois d’honneur qui ne
( i ) M. «le M.n tillac est un ancien
p:ir les Suvuron.
de mu famille ; il descend d’une d’AIWat
�( 5)
permettaient pas à un homme délicat de porter le trouble dans une
fam ille, et de se placer entre deux époux ? Si je n’ai pas émigré , ma
position a été plus périlleuse que celle de M. de Fontsalive. J’ai été enve
loppé pendant quinze mois. Déjà plusieurs de mes co-dénoncés avaient
péri ; j’allais.ûtre mis hors de la loi : je cède aux instances de la
D .m"- d'Albiat qui m’engageait de me rendre à L}'on ; je sors de ma
retraite cachée , mais je sms arrêté à Thiers , et conduit dans les prisons
de Clermont. J’ai supporté les angoisses de la mort dans ma transla
tion de Clermont à Lyon-, et j ’y ai conservé mon courage. L a D .mü d’Albiat
le sait bien, puisqu’elle m’avait fait prévenir, mais trop tard , par deux
lettres, de ne pas m’exposer à venir à Lyon , parce que les Juges
disaient qu’ils me feraient guillotiner. Triste souvenir pour m oi, d’avoir
exposé ma vie pour conserver la fortune de la D .me d’A lb ia t , qui ne
retrouverait sa dot que sur le Grand-livre , et d ’être poursuivi par la
plus noire ingratitude ! C ’est M . de Fontsalive et ses associés qui pro
fitent du fruit de mes dangers.
L a D .1,e d’Albiat a l’inconvenance de publier que la dot de sa mère
est la seule ressource de ses frères et la sienne. Dieu le veuille !
La dame d’Albiat est entourée depuis long-temps de gens qui lui sou
tirent les capitaux de sa d o t , dont elle reço it, malgré nos conventions ,
le remboursement.
L a D .1!e d’A lb iat, qui mesure ses soins et ses égards* par la, fortune
de son père , sait bien que son père contribue annuellement pour une
somme de 200 fr. à la pension de son fils cadet, qui cependant n’est
plus à la charge de la D .me d’Albiat , et qui est placé au Lycée
de Moulins.
L a D .lle d’Albiat sait bien que son père vit de ses revenus, et
qu’il possède des capitaux.
L a D .1!c d ’A lbiat sait bien que son père a- été dépouillé de ses
meubles sans indemnité ; que son père s’est libéré envers son cpouse
aussitôt qu’elle l’a voulu, parce qu’il 11’y avait dans ses affaires aucun
désordre , qu’il n’existait aucune inscription , que la dot n’était pas
en danger , que son père avait toujours satisfait aux charges du ménage,
suivant les registres de dépense tenus par sa mère.
L a D .llc d’Albiat sait bien que son père a perdu 4°jQoo fr. sur le
remboursement de sa charge dont le prix avait été porté à 5 1,200 fr.
L a D.lle d’Albiat sait bien que son père a reçu , en
1795 , de
3Y1. Daubusson , premier marguillier de la cathédrale , acquéreur d’un
bien dont il est toujours possesseur , un remboursement de .20,000 ir,
en assignats sans valeur.
’
�( 6)
L a D .lle d’Albiat sait bien que son père a perdu 20,000 fr. sur la
vente de sa maison de la rue de la' T reille , par la baisse subite
des assignats.
La D .lle d’Albiat sait bien que son père a perdu plus de 20,000 ir.
par le séquestre de ses revenus , par les dépensai ..iaû|lculables du
voyage de Lyon , qui ont servi à sauver sa tete.
La D .Ue d’A lbiat sait bien que son père a perdu plus de 12,000 fr.
pour procès sacrifices et transactions avec sa mère.
L a D .lie d’Albiat sait bien que son père n’a cessé de payer pendant
le cours du mariage , aux dépens de ses capitaux , les cleLtes con
tractées par sa mère , dont la continuité lui apprendra un jour que la
présence d’un père est plus utile aux enfans que celle des étrangers.
L a D."e d’Albiat sait bien que son père a été plus d’une fois entraîné
à venir au secours de ses plus proches parons , pour des sommes con
sidérables.
Ta n lie rl’Albiat sait bien que son père a trop souvent é té forcé
de fuir tes da n gers q u i le menaçaient.
L a D .lle d’Albiat sait bien que son père ne voulait pas mobiliser
sa fortune ; qu’il a long-temps et inutilement fait proposer à sa mère
de prendre la maison de l’Eclache.
L a D.'ie d’Albiat dit que.«/ tnère a dirige son éducation. Est-ce à cette
éducation qu’il faut attribuer la publicité de son Mémoire contre son père ,
où elle rend compte au pu blic, par un imprimé , des événemens de sa
famille? Elle est dominée par M . Dufreisse de Fontsalive, qui, étranger à
ma famille et à mon nom , ne l’entraîne que pour l’accomplissement de
ses desseins-criminels.
U n sentiment de modération m’empêche de relever la lettre menson
gère , placée au bas du Mémoire imprimé et signé de la D.Ue d’Albiat.
L a D.ll° d’A lbiat prétend qu’o/z n'a jam ais dit pour elle à l'audience
de C lerm on t, que son mariage fu t projeté il y a trois a n s, entre e lle ,
sa mère, M . D ufreisse, de l'agrément de 3J r Dufreisse de F ern iu es{i)
mère et à l ’insu du sieur d'A lbiat ; et elle a la témérité de reprocher
aux J u pc s de Clermont d'avoir motivé leur jugem ent sur un fait faux.
E lle enveloppe par conséquent son père dans une pareille inculpation.
Je réponds que la déclaration en a été faite à l’audience de Clermont
par le défenseur de la D .1,e d’A lb ia t, en présence de plus de trois
cents personnes ; c ’est sur ma demande formée à l’audience , qu’il en
( 1 ) L a D.11« il’Alhiat <|iii , dans le premier acte dit respoctueux , a l’incon
venance d’appcier sa mèro la dame Dupuy, 11e se permet pus d’appeler madame
de Y c rn in cs du nom de la dame ¡loyer.
�C7 )
a été fait mention dans le jugement. L ’avoué de la D .lle Albiat n ’a
fait aucune réclamation contre cette insertion pendant les quatre audiences
données à cette affaire. L a foi doit donc être ajoutée à un jugement
aussi authentique ; c’est donc une injure atroce qui méritait toute la
répré]^y^ y ^JBfl^Justice , lorsque j’ai demandé en la Cour d’appel la
suppression curM em oire.
On dit que la naissance et les conditions ètaient a-peu-près les mêmes.
E h ! qu’imporle que la naissance et les conditions soient à-peu-près les
mêmes, lorsqu’on veut en détruire la filiation dans ma personne ? M es
titres sont les vertus domestiques et civiles qui se sont perpétuées dans
ma famille d âge en âge , et que mon fils , officier d’artillerie au ser
vice de l’Empereur , observe à l’exemple de son père. Une honnête
médiocrité a soutenu depuis un temps immémorial ma famille ; la
probité a toujours été son plus bel héritage : des coteries ne proté
geaient pas alors les tiers qui s’introduisent dans les familles pour les
dévaster.
L ’antiquité de mon nom est attestée dans les Voyages d’Anacharsis en
Grèce.
Guillaume d’Albiat présidait en l ’an 1 100 le Conseil des habitans de la
ville de M ontferrant, lorsque les religieux de la Chaise - Dieu et de
Souseillange vinrent y fonder le prieuré de St-Robert (i). Je nie per
mettrai d ’ajouter que l’Auvergne compte parmi ses hommes célèbres
un Laurent d’A lb ia t, évêque de T u lle en 1060 (2) , un Acart d’A lbiat,
conseiller au parlement en 1 4 8 7 ( 3 ) ; que mes armes étaient peintes ,
dans l ’Eglise principale de M ontferrant, sur les vitres de la chapelle dite
de toute ancienneté des d’A lb ia t ( 4 ) . M ichel Albiat , député en
i 5 io aux Etats de la Prqvince , fut un des commissaires choisis pour
la rédaction de la Coutume d’Auvergne. U n de mes pères était pro
cureur-général en la Cour des Aides en i 585.
J'ai la douce satisfaction de penser que le sang des Marillac n’a
pas dédaigné de se mêler avec celui de mes ancêtres ; que mon père
a été l ’heritier des Pascal, et que je suis d’une famille q u i a donné
une mère au célèbre Savaron, député de la Province aux Etats-généraux
tenus en 1614.
Je pourrais encore rappeler les longs services rendus dans la magis
trature par M M . Barbat-Duclozel père et fils , mon ^rand-père et mon
oncle maternels. O11 conservera long-temps la mémoire des travaux
de M M . Chabrol, l ’un mon bisaïeul, et l’autre mon grand-oncle ma( 0 V o y e z Baluzc.
(2) V o y e z le Commentaire de la Coutume d ’Auvergne , à l ’article Monlferrant.
( ) V o y e z ï f l i s t o i r e d ’A u v e r ç n c , par M. Audigier.
5
(/1) Expressions des anciens litres de cette Eglise , datés de i
56o.
�(8)
ternels , magistrats célèbres ; du savant Basmaison , qui est de la
me famille , et de M . Prohet, mon arrière-grand-oncle , jurisconsulte
d i i gué par ses ouvrages.
J’ai été chargé en l’an 4 , conjointement avec M . de Biauzat , par
la commune de Clermont (1) , de l ’honorable, W JSk& iÉ ÍSíÉ ** com
mission de solliciter auprès du Corps législatif, en i a v e iir d e la ville de
Clerm ont, contre la ville de Riom , pour le placement du Tribunal de
département. Il n’en fallait pas tant pour attirer sur moi le mécontentement
d’une ville que l’esprit de parti a excité. L a défaveur inspire la pré
vention ; et lorsqu’il y a préveution , l’opprimé reste sans protection,
l ’oppresseur seul triomphe. O n ne sera plus étonné si la justice de la
Cour d’appel de Riom a été surprise et trompée.
J’ai gagné tous mes procès à Clerm ont, j ai perdu tous mes procès
à Riom. ° O n est bien excusable de laisser échapper quelques plaintes
sur les erreurs de la Justice , lorsquon se croit victime.
( 1 ) Administration municipale de Clermont-Ferrant , chef-lieu du département
<Ju P u y-d e-D ô m e .
,
_
Séance du
nivôse , an 4 de la république irançaise une et indivisible.
V u le r a p p o r t du Commissaire du D irectoire cxécutil,sur la nécessité de présenter
au Corps législatif des observations essentielles sur le placement du T r ib u n a l
civil du D ép a r tem e n t;
L es Administrateurs m u n ic ip a u x , considérant que le placement de ce T r ib u n a l
dans la commune de Uioin , est un des principaux objets qui doivent fixer leur
atten tio n , en ce que cet établissement nuit considérablement aux intérêts des
administrés , qui se voient forcés d ’aller chercher au loin et à grands frais , la justice
q u ’ils sont dans le cas de réclamer ;
Considérant qu’il est dans l'esprit de la Constitution de rapprocher les justi
ciables de leurs juges , et que le placement du T r ib u n a l à liiom opère tout le
contraire ;
Considérant que l'intérêt général du D épartem ent demande ce changement ;
que non-seulement les Communes de ce D é p a r te m e n t, mais encore celles des D ép aiv
temens voisins ont manifesté leurs vœ ux à cet égard , sous le rapport bien vrai que
la commune de Clermont est le point central de toutes les relations ;
?.5
C o n s id é r a n t que la s u p p ressio n des n o m b r e u x éla b lissem ens q m s 'y t r o u v a i e n t ,
r i les trénéreux sacrifices q u ’o nt faits les habitan s de ce tte c o m m u n e , les o nt p r iv é s
de leurs ressources ;
C o n s id é r a n t enfin , que le Corps législatif va s occuper définitivement du placement
des T r i b u n a u x c ivils; q u ’il est important d’a v o ir a u p rè s du Gouvernement, des Com jnissaires qui p u i s s e n t faire valoir les différons niclifs qui sont en faveur de la comjnunc de Clermont ;
.
O n t nommé le citoyen Al]jiat commissaire pour se rendre à Paris dans le plus
court délai , afin de solliciter auprès du Corps législatif l’établissement du T r ib u n a l
civ il dans cette CammiNie ; invitent par ces présentes le cit. Biauzat , commissaire
près du T rib u n al de police correctionnelle a Paris , à se joindre au citoyen Albiat
pour agir conjointement avec lui par tous les moyens que pourront leur suggérer
leurs lumières, pour parvenir à obtenir ce changement; les autorisent a se présenter
par-tout ou ils jugeront convenable pour remplir ayee succès lu commission dont ils
ïo n t chargés. Fait et arrêté lesdits jour et an.
Demando
�( 9 )
Demande en séparation de biens.
Jugement de Clerm ont-Ferrant,
au 37 nivôse an 1 o. Présidence
de M . Domat.
Attendu le rapport fait par le cit.
d ’A lbiat de la radiation des ins
criptions faites sur lui par Pierre
Iliberolle et Françoise Carriat son
épouse , le 19 germinal an 7 ; par
Marie Grillon , le i 5 du même
mois ; Gervais Démanèches, le 28
dudit mois; par Joseph Daubusson,
le i . er floréal même année; par le
cit. Tabarrier , receveur du do
maine national, au nom de la Répu
blique , le 8 dudit mois de floréal
et 19 floréal an 7 ; par Antoine
C h alteix,le 27 floréal même année;
par M ichel Barbat-Duclozel, le 21
prairial suivant ; par Herbuer-Laroclie , le 1 3 nivôse an 8 ; et par
JeanDufournel, le 9 nivôse dernier:
Attendu qu’il résulte de l’acte du
1 ,er nivôse dernier, reçu D artois,
notaire , que les inscriptions faites
par Antoine G ay , Jérôme Astier
et Etienne Langlois, les 7 ventôse,
16 germinal an 7 , 5 et 22 floréal
an 8, pour la somme de 57,096 fr.,
n’ont eu réellement et uniquement
pour objet que la créance de 12,000
francs en capital , porté par traité
du 2 x ventôse an 7 ; qu’il résulte
au ssi, tant de l’acte dudit jour
1 .er nivôse, que des autres pièces
produites par le cit. d’A lbiat, qu’il
ne reste d é b ite u r à cet égard que
de la somme de 770 francs ( 1 ) ,
payables dans un au :
( r ) Celfe créance est sold ée, et ¡’ins
cription csL actuellement rayée.
D eu x jugem ens du Tribunal d'ap
p el de Pùom , des 22 pluviôse
et 2 floréal an 1 1. P résidence
de M . Piedon.
Prem ier Jugement par défaut, du
22 pluviôse an 11.
Attendu ce qui résulte de l’en
quête , et particulièrement des
preuves littérales , et notamment
des lettres écrites par le cit. d’Albiat
à sa fem m e, et des aveux qu’il y
fait du dérangement total de ses
affaires et de l’état de détresse où
il est; le T ribunal, par jugement
en dernier ressort , donne défaut
faute de plaider , contre l ’intim é,
ni avoué pour lui; et pour le profit,
dit qu’il a été mal jugé par le ju
gement dont est appel, bien appelé ;
emendant, et faisant ce que les pre
miers juges auraient dû faire, or
donne que l’appelante demeurera
séparée, quant aux biens , d’avec
l’intimé son mari , pour par elle
jouir à part et séparément desdits
biens, à la charge néanmoins de
nourrir et entretenir son mari et
leurs enfans, suivant ses facu ltés ;
condamne en conséquence l ’intime
à rendre et restituer à l’appelante
la somme de 67,000 fr. à elle cons
tituée en dot par son contrat de
mariage du 5i décembre 1776, en
semble les intérêts de ladite somme,
à compter du jugement du 26 plu
viôse an 9 ; et sans s’arrêter à ^a
demande judiciaire formée par l ’ap
pelante , pour laquelle elle se pour
voira ainsi qu’elle avisera, l ’autorise
à retirer ses nippes, linges et bardes >
B
�( io )
S u ite du Jugement de Clerm ont,
S u ite du Jugement de Ilioni.
Attendu que l ’inscription faite
ainsi que ses dorures, dans l’état où
par Jeanne Poisson, le i 5 ventôse
tout se trouvera actuellement, aux
an 7 , n’a eu lieu que pour sûreté
termes de son contrat de mariage
d’une pension viagère de 2 5 francs
dudit jour 81 décembre 17 7 6 ; lui
qui se trouve éteinte par son décès:
réserve son action pour ses droits
Attendu que par l’e ffe t, soit des
éventuels, pour l’exercer le cas arri
radiations d’inscriptions et actes
vant ; et condamne l ’intimé aux
ci-dessus énonces , soit de l ’ins
dépens tant des causes principale
cription faite par la cit. d ’Albiat le
que d’appel. Fait et prononcé, etc.
27 prairial an 7 , soit de la stipu
le 22 pluviôse an 11.
lation d ’emploi du prix de la vente
qu’a faite le cit. d’Albiat de ses biens
M o tifs et d isp o sitif du second
de Cornon, la dot de la cit. d’Albiat
Jugement contradictoire du T ri
se
trouve pleinement assurée :
bunal d'appel séant a Riom , le
Attendu que la cit. d’A lb ia t, en
2 jlo rèa l an 11.
restreignant son inscription du 27
L e T r i b u n a l , par jugement en
prairial an 7 , sur les biens de son
dernier ressort, persistant dans le
mari situés à Cornon et à R o y a t,
m otif exprimé au jugement par
quoiqu’il fut propriétaire de maison,
défaut, dudit jour 22 pluviôse an
enclos et jardin sis à Clerm ont,
11 , et qui est ainsi conçu: Attendu
a , par cela , reconnu que lesdits
ce qui résulte de l ’enquête, et par
biens de Cornon et de Royat étaient
ticulièrement des preuves littérales,
suffisans pour répondre tant de sa
et notamment des lettres écrites par
dot que de ses reprises éventuelles :
le cit. d’Albiat à sa femme , et des
Attendu qu’il est établi que le
aveux qu’il y fait du dérangement
cit. d’Albiat 11'a cessé de fournir
total de ses affaires et de l’état de
convenablement au besoin de son
détresse où il est, déboute la partie
épouse et de leurs enfans , et que
de T a rd if de son opposition audit
l ’état de ses affaires lui assure
jugement j ordonne en conséquence
des ressources suffisantes pour porter
qu’il sera exécuté suivant sa forme
les charges du mariage
et teneur, et condamne ladite partie
L cT rib u n al, après en avoir déli
deT ardif aux dépens faits sur ladite
béré , faisant droit aux parties , et
opposition. Fait et pronpncé, elc.
sans s’arrêter à l’enquêle du 26
pluviôse an g , reçoit le cit.d’Albiat
opposant au jugement dudit jour
2G pluviôse an y , remet en consé
quence les parties au même et sem
blable état où elles étaient avant
ledit jugement ; ce faisant, déboute
la cil. d’Albiat de sa demande en
séparation de biens. Sur le surplus,
�( II )
Suite du Jugement de Clermont.
des demandes, fins et conclusions,
met les parties hors de procè3 ;
condamne la citoyenne d’Albiat aux
dépens. Prononcé à l’ai}dience, etc.
le 27 nivôse an 10.
Le Jugement de Riom reconnaît tacitement que la dot n’était pas
en danger; que le sieur d’Albiat avait fourni convenablement aux charges
du ménage : ce Jugement est seulement motivé sur un prétendu désordre.
L e contraire est prouvé d’après les motifs exprimés au jugement de
Clermont ; le contraire est prouvé d’après les actes d’offres que j’ai
fait faire à la dame d’Albiat le 16 fructidor an 11 ; et enfin, d’après
la délivrance que j’ai faite à la dame d’A lb ia t, pour l ’entier payement
de sa d o t, de créances privilégiées, suivant la transaction du 1 o nivôse
an 12. Quant à la détresse, on ne pouvait me l’imputer , puisque la
dame d ’Albiat m’avait ôté tous les moyens de vivre et de me défendre,
en faisant saisir tous mes revenus échus.
L e contraire est encore prouvé , puisque je contribue, suivant la
transaction du 10 nivôse an 12, pour une somme de 200 francs par
a n , à l’entretien de mon fils cadet placé au L ycée de Moulins.
L’usage que la dame d’Albiat a fait de ce jugem ent, a été de quitter
la maison de son mari et d’aller habiter dans la maison Fougliasse.
Demande en séparation de corps, au nom de la dame d’A lb ia t,
dgée de 5o ans.
Demande provisoire du sieur d’A lb ia t, pour que les enfans soient
mis en dépôt dans des maisons d’éducation, attendu que la
maison qu’occupait la dame d’A lbiat était habitée par des
célibataires.
Jlt gement
de Clermont-Ferrant
du 5 thermidor an 12. Présidence
de M . Uomat.
Arrêt de la Cour d'appel de Riom ,
du 12 fructidor an 12. P rési
dence de 31- Redon.
Attendu que d’après l’art. 267
du nouveau Code , l’administration
provisoire des enfans reste au mari
pendant la poursuite de la demande
en divorce, et que la disposition
Attendu que Claire - Joséphine
d’Albiat est âgée de près de vingt
ans, étant née le 22 décembre 1784;
A ttendu , quant au fils , les té
moignages des soins et de la bonne
B 2
�( I
Suite de VArrêt de la Cour de Riom.
éducation qu’il a reçus depuis qu’il
est sous la direction de sa mère;
Attendu aussi qu’il est de l’intérêt
et des époux et de leurs enfans,
que ceux-ci continuent de résider
à la compagnie de leur mère jusqu’à
la définition de l’instance en sépa
ration pendante entre les époux ,
et que les raisons de sage économie,
comme de saine morale,se réunissent
pour la continuité de cette résidence;
Attendu que l ’ouverture des va
cances, et les raisons de croire que
la cause en séparation sera promp
tement terminée par voie de juge
ment , ou d ’esp érer qu’elle le sera
par voie de conciliation, seraient
un nouvel et légitime obstacle a ce
que l’état des choses fût provisoi
rement changé ;
Attendu enfin ce qui résulte de
l ’art. 14 du traité passé entre les
parties le 1o floréal an 1o :
L a Cour dit qu’il a été mal jug^
par le Jugement rendu au Tribunal
civil de Clermont, le 5 thermidor
dernier , en ce qu’il a été ordonné
que les deux enfans des parties seront
p la cés dans des maisons d’éducation;
bien appelé : ordonne qu'à cet égard
ledit Ju«einent demeurera sans effet;
émendant , que Claire - Joséphine
d’Albiat et Pierre-Hubert d’Albiat
continueront de résider à la com
pagnie d’Antoinette Dupuy leur
mère , jusqu’à la définition de 1ins
tance en séparation de corps qui est
pendante entre les parties devant
les juges dont est appel, et d y re
cevoir l’éducation que leur mer«
leur a fournie jusqu’à présent ; à la
)
Suite du Jugement de Clermont.
de cet article est applicable à la
demande en séparation de corps ;
Attendu que le sieur d’Albiat 11e
renonce au droit que lui confère
cet article, que sous la condition
que ses enfans seront placés dans
des maison d’éducation ;
Attendu qu’il peut être avan
tageux aux enfans d’être placés dan3
des maisons d’éducation , et que
d’ailleurs ce moyen assure à 1 une
et à l’autre des parties la surveil
lance de l’entretien et de l’éducation
de leurs enfans ;
Attendu que d’après l’art. 3o 3 du
même C o d e, les père et mère doi
vent contribuer à la dépense de
leurs enfans dans la proportion de
leurs facultés ;
Attendu que par le jugement qui
a prononcé la séparation de biens
d’entre les parties, la dame d’Albiat
a été chargée de la nourriture, en
tretien et éducation des enfans, et
que néanmoins , par un traité pos
térieur , le sieur d’Â lbiat s’est engagé
à contribuer à la dépense des enfans
pour une somme de 200 fr. chaque
année :
Le Tribunal autorise la dame
d’Albiat à continuer à faire sa de
meure dans la maison de la dame
veuve Foughasse où elle s’est retirée
et réside actuellement, avec dé
fense: au sieur d’Albiat de l’y trou
bler , aux peines de droit
Ordonne que Claire d'Albiat et
Pierre-Hubert d A l b i a t , enfans des
parties , seront placés, dans la hui
taine de la signification du présent
Jugement à personne ou domicile,,
�( 13 )
Suite du Jugement de Clennont.
savoir , Claire d’Albiat dans la
maison d’éducation de la «Jame
Gastau, institutrice à Clermont; et
Pierre-Hubert d ’Albiat en l’école
secondaire de la ville de lliom. Or
donne que le sieur d A lb iat contri
buera aiu frais des pensions desdits
deux eufans , à raison de 200 francs
par a n , et que ladite dame d A lb iat
contribuera pour l’excédant desdites
dépenses. Joint le surplus des de
mandes des parties au fonds , sur
lequel les parties1procéderont en la
manière ordinaire : dépens réservés.
Sut te de l'A rrêt d elà Cour de Riom.
charge par ladite D u p u y, suivant
ses offres, d envoyer, à toutes réqui
sitions de d A lb ia t son mari, leurs
enfans dans la maison de la dame
Chabrol- 1 ronet , cjue la Cour in
dique pour les visites que les enfans
devront'à leur père , toutes les fois
qu’il l’exigera. Réserve les dépens,
même Je coiit du présent A rrêt, sur
tout quoi il sera statué en définitif;
et ordonne que l ’amende sera ren
due.
C ’est sous l’enveloppe de cet arrêt,-que la Dlle. d’A lbiat, encore mi
neure , a resté sous l’influence de M . Dufreisse de Fontsalive, malgré
l ’assentiment des premiers juges ,* malgré l’opposition du père de famille.
C ’est avec cette batterie menaçante qu'un j ère a été dépouillé du droit
de, surveiller l’éducation de ses enfans. Cet arrêt est contraire à l’art. 5o 3
du Code civil. L e sieur d A lb ia t 11e pourrait pas contraindre son fils
cadet, âgé de douze ans, de venir lui relidre visite chez lui. Les événcmens "11’ont que trop justifié la sage prévoyance du sieur d ’Albiat à
l'égard de sa fille.
.td.
L a Dlle. d A lb ia t a fait à_son père,Tfaimoinent de sa m ajorité, trois
actes dits respectueux, les 26. ..décembre i8 o 5 , 2y janvier et 4 ’ mars
1806.
O p p osition
à* '
sieur cFÜ lbial au ,m ariage de sa fille .
D em a n d e en m ain-lei’ée d'opposition d e'la p a rt de la D lle . d’A lb ia t.
Conclusions écrites, du sieur d ’A lZ ia t, devant les premiers Juges.
« ,Mes conclusions so n t, à ce qu’il vous plaise recevoir ledit sieur
d A lb ia t, en sa qualité de père, opposant au mariage de Claire-Joséplnne
d’Albiat sa fille/avec le;sieur Joseph-Guillaume Dufreisse de Fontsalive :
faisant droit sur ladite opposition et y ayant égard;
» Attendu que les actes des 5 nivôse, an 14» 5 janvier et 4 mars
derniers , 11 ont aucuns qaractères d’autlienticité , comme ayant été eu
partie rédigés d’avance et par une écriture 'étrangère à celle du notaire,
�( i4 )
'et qu’ils 110 peuvent en conséquence attester la volonté libre de la
Dlle. d'Albiat : Attendu que les actes des 5 nivôse et 29 janvier
derniers ne font aucune mention de la demande que devait faire la
Dlle. d’Albiat du conseil de son père, et que ladite Dlle. d’Albiat a
contrevenu à l ’art. i 5 i du Code civilj et à votre ordonnance du 3 nivôse
dernier :
» A ttendu que les actes des 5 nivôse, 29 janvier et 4 mars derniers,
ne sont pas respectueux, et qu’ils ne contiennent que des protestations
ou renonciations de la Dlle. d’Albiat aux conseils de son père, pour
s’en tenir aux conseils de sa m ère, qu’elle appelle seulement du nom
derla dame Dupuy sa mère :
'¡f^dtteiulu que ces actes prouvent que la Dlle. d A lbiat est subjuguée
et quelle n’a pas une volonté libre ;
» Ordonner que lesdits actes seront déclarés nuls et de nul e ffet, et
comme tels re je té s ; et cependant que l’opposition sera maintenue.
» Et
et
dans
le cas où vous ne prononceriez pas la nullité desdits actes,,
préjudices quelconques •
sans aucuns
» Attendu que, suivant l’intention du Législateur exprimée dans le rapport
fait au nom du Gouvernement par M . Portalis, les pères ont le droit
de veiller'Sur l’intérêt de leurs enfans , même majeurs , pour les empêcher
de se précipiter dans des en^igemens honteux ou inconsidérés ; et que
l ’opposition d’un père doit eqpÔrc .être adm ise, suivant la pensée de M .
Portalis, pour ne pas favojiïér le jeu des passions et la licence des
mœurs :
» Attendu que l’arrêt du 11 fructidor an u . , motivé sur des raisons
de sage économie et de saine m orale, a ordonriJlque la Dlle. d’Albiat
co n tin u era it de résider à la compagnie de sa m è ra k o u r y recevoir l’édu
cation qu’elle lui avait fournie jusqu’à p r é s e n t .
» Attendu que le sieurJosepTï-Guillaume Dufreisse deFontsalive, malgré
la modicité de ses fa c u lt é s , a conservé pour lui seul , depuis le mois
de prairial an 12 , l’appartement que la dame Dufreisse de Vernines sa*
mère occupait avan t sa mort dans la maison Foughasse avec ses autres
enfans ; qu’il en a éloigné ses frères : Attendu qu’il habite sous le même
toit et à la suite de l’appartement qu’occupe la Dlle. d’Albiat avec sa
mère : Attendu que par ses intrigues il a entretenu la division entre
les sieur et dame d’A lb ia t, pour rester seul dans ladite maison , se dé
barrasser de la surveillance du père de familla , se rendre maître de la
famille > et tromper ladite Dlle. d Albiat ;
�( i5 )
» Attendu que la décence et l’honnêteté publique ne^lui permettaient
pas de fréquenter l’habitation où la Dlle. d’Albiat avait été mise en
dépôt par autorité de justice ; suivant la disposition des arrêts, et les
maximes établies par M . l’avocat-général Gilbert de Voisins, portant la
parole lors d’un arrêt du 8 mai 1742 :
» Attendu que ledit sieur Dufreisse n’a pas respecté l’asile de la famille,
contre la volonté du père exprimée publiquement à votre audience du
5 thermidor an 12 ; et que par une violation manifeste audit arrêt du
11 fructidor an 12 , il a interrompu l ’éducation que la dame d'Albiat
devait donner à sa fille :
» A ttendu que ledit sieur Dufreisse de Fontsalive a quarante-trois
ans dix mois et vingt-un jours , et qu’il est notoirement valétudinaire,,
et sujet à des maladies d’étisie et d’humeurs de poitrine : Attendu qu’il
n’a ni bien, ni fortune certaine, ni état, ni talent, ni force pour s’en
procurer , ni aucuns moyens d’existence ; et attendu que ladite D lle.
d’Albiat est âgée de vingt-un ans quatre mois.et neuf jours, et qu’il y a .
une différence d’âge de vingt-deux ans et six mois ; et que la D lle.
d ’Albiat a l’assurance d’une portion héréditaire avec ses deux frères ,
dans une fortune réelle de 162,000 fr. Attendu que ledit sieur Dufreisse
de Fontsalive exerce un empire absolu sur l ’esprit de la Dlle. d’A lbiat
qui ne peut avoir une volonté libre : Attendu que depuis 1 âge de la
minorité de la Dlle. d’A lb ia t, il a abusé de son inexpérience, et qu’il
exprimée du Législateur n’a pas. été de favoriser le jeu des passions et
la licence des mœurs ; faire défenses de passer outre audit mariage. »
Jugement de Clerm ont-Fcrrant,
du i.er mai 1806. F résidence
de M . Domal.
Ouï M . Cotlion, juge suppléant,
en ses conclusions. En ce qui touche
la validité des actes de la fille
d ’Albiat à son père ;
Attendu qut^ conseil et consen
tement ont une acception diffé
rente ; que d’après l’article i5 i du
Code civil, la fille d'Albiat devait
demander par un acte respectueux
Arrêt de la Cour d'appel de R ion i,
du 1 1 juin 1806. Présidence de
- M . Redon.
T a rd if, avoué de l'intimé ( le
sieur d'Albiat ) , conclut à ce qu’il
plût à la Cour, par les mêmes motifs
exprimés au Jugement dont est ap
pel , dire qu’il a été bien jugé par
ledit Jugement, mal et sans.cause
appelle ; ordonner que ce dont est
appel sortira son plein et entier effet,
sans dépens.
�(
16
S u ite de UArrêt delà Cour de Riom.
‘H conclut en outre à la suppres
sion du Mémoire distribué de la
part de l’appelante.
L e sieur d'Albiat père plaida
ensuite lui - même ses différens
moyens de défense.
L a Cour continua la cause à cette
audience pour entendre M . le Sub
stitut du Procureur-général.
L a cause de nouveau appelée à
cette audience , M . le Substitut du
Procureur-général a pris la parole,
et après avoir rappelé les moyens
respectifs des parties, il a conclu a
ce qu’il fût dit qu’il a été mal juge
par le jugement dont est appel, bien
appelé ; ém endant, qu’il fut fait
main-levée de l’opposition formée
par l’intimé , et qu’il fût ordonné
qu’il serait passé outre à la célé
bration du mariage dont il s’agit.
Attendu que la partie de Ji^ie
a satisfait à ce qu’exige la Iquipar
les trois actes respectueux dcsjÿ ni
v ô s e an 1 4 , 29 janvier et 4, mars
derniers , et que ces actes sont ré
gulièrement et légalement faits ;
A tten d u l’insuffisance destînotifs
de l ’opposition du père :
La Cour met l’appellation et ce
dont est appel au néant ; émendant,
sans s’arrêter à la demande en nul
lité , formée par d’Albiat p è re , des
actes respectueux de sa fille , ni a
l’opposition qu’il a formée à son
mariage, dont il est fait main-levee ;
ordonne qu’il pourra être passé^outre
à la célébration d u mariage dedaireJoséphine d’Albiat avec JosephGuillaume Dufreisse l'ontsalive. Sur
)
Suite du Jugement de Clermont.
et formel, le conseil de son père;
que dans des actes de cette nature
tout doit s’observer à la lettre ;
Q ue la volonté du Législateur ne
peut se trouver que dans la loi
même, et non dans les discussions
qui l’ont préparée ;
Q ue les termes employés par le
Législateur pour exprimer sa vo
lonté , sont sacramentels, et ne"
peuvent être^prisque dans leur sens
et leur acception véritable :
Attendu que dans les actes des
5 nivôse an 14 et 29 janvier 1806,
la fille d’Albiat a requis le consen
tement et non le conseil de son
père ; que dans l’acte du 4 mars
liîoG, elle a elle-même reconnu
qu’elle n’avait pas rempli le vœu
de la loi dans les deux précédons,
et que pour la première fois elle
a demandé le conseil de son père ;
mais que par ce dernier elle n’a pu
effacer le vice des deux premiers ;
Attendu que toutes les nations
ont révéré la puissance paternelle ,
et qu’elle s’étend à tous les âges ;
Que ce serait faire injure au
Législateur,que de penser qu’il n’a
voulu imposer à l’enfant qui veut
contracter un mariage désagréable
à l ’auteur de ses jours , d’autro
condition que celle d’une vaine
formalité, sans exprimer le respect
et les sentimens de piété filiale qu’il
doit à son père , pour obtenir un
conseil sur lequel l’enfant ne doit
avoir pris de détermination qu’après
que le temps des épreuves est ex
piré ;
A tten d e
�( *7 )
Suite du Jugement de Clermont.
Alteudu que les trois actes de la
fille d’A lbiat ne sont de sa part
qu’une déclaration de la ferme ré
solution qu’elle a prise et dans
laquelle elle persévère , et qu’elle y
annonce à son père que la loi l’oblige
de recourir à son consentement,
mais qu’elle s’inquiète peu de sa
volonté et de son avis, et que sa
démarche n’a d’autre but que de
remplir la formalité que la loi lui
commande ;
Q ue les actes de la Dlle. d’A lb ia t,
qui ne doivent être que l ’image de
la soumission et de la déférence que
l ’enfant doit à son père, n'ont mar
qué au père que la volonté d’un tiers
dans une rédaction anticipée et faite
hors la présence du père;
Que ces actes sont donc, sous tous
les rapports , irrévéfentiels et non
respectueux.
En ce qui touche l’opposition de
d’Albiat père :
Attendu que l’essence du mariage
consiste dans le consentement mu
tuel des époux ;
Q ue le mineur ne peut avoir un
consentement libre et éclairé ;
Q u ’il résulte de kvdéclaration
faite à l’audience parMcNdéfenscur
de la fille d’A lb ia t, et dont le T r i
bunal a donné acte par jugement
du jour d’hier, que son mariage avec
Duireisse-Fontsalive avait été pro
jeté il y a trois ans entre sa mère ,
ledit Dufreisse et e lle , de l’agrément
de la mère Dufreisse alors vivante ,
à l’insu et sans aucune communi
cation à d ’Albiat père ;
Suite de Varrêt de la CourdeRiom.
le surplus des demandes , met les
parties hors de Cour , sans dépens ;
et ordonne que l ’amende, si elle a
été consignée, sera rendue.
C
�18 )
Q ue la fille d’Albiat était alors
mineure , qu’elle n’avait point de
volonté libre et éclairée;
Que son consentement ne pouvait
être que l’effet de la captation;
Q ue cette captation s’est dévoilée
à la première heure de la majorité
de la fille d’Albiat , par les actes
qu’elle a fait faire à son père :
L e T rib u n al, après en avoir déli
béré en la chambre du Conseil ,
et avoir repris sa séance , déclare
les trois actes des 5 nivôse an 14 ,
29 janvier et 4 mars 1806, nuls et
irrespectueux; maintient l’opposition
faite par d’Albiat au mariage de sa
fille avec Dufreisse-Fontsahve ; dé
boute la fille d’Albiat de sa demande
en main-levée de ladite opposition:
sans dépens.
Cet arrêt est contraire aux articles 1 51 et 1 52 du Code c iv il, qui
exigent que, si le père refuse son consentement * l’enfant demande.le
conseil de son père , et qui veut que l’acte soit respectueux. Cet arrêt
est contraire à l’art. 154, qui porte qu’il sera dressé procès-verbal; tandis
que la ; rédaction de partie desdits acte 3 étant faite d’avance par-'une
écriture étrangère à celle du notaire , et hors la présence du père, n’a
exprimé que la volonté d’un tiers et non celle de la Dlle. d’Albiat. L a
Cour fie Bordeaux m’eût fait gagner mon procès ; la Cour de Riom me
1, ç-y nprdre dans des circonstances bien plus graves. ( Voyez l’arrêt de
Bordeaux du
fructidor an i 3 , cité page
•)
Cet arrêt est encore contraire" b. la loi du 24 août 1790.
Les Juges de la Cour d’appel ne devaient prononcer que sur le
bien ou le mal jugé des premiers Juges. O r , les premiers Juges n’avaient
prononcé que sur la nullité des actes prétendus respectueux ; ils n’avaient
pas statué sur les motifs d’empêchement au mariage, parce que le sieur
d’Albiat avait formé son opposition au mariage de sa fille , d’abord sur
la nullité des actes, et il avait demande par des conclusions précises
ci-dessus rapportées, q u il ne lût statué sur la défense de passer outre
au mariage, que dans le cas où les Juges ne prononceraient pas la nullité
des actes. Les causes d’opposition du sieur d'Albiat étaient bien distinctes.
�La Cour d’appel de Riom devait se borner à prononcer sur la nullité
des actes , et elle devait renvoyer devant les premiers Juges pour statuer
sur les causes d’opposition concernant l’empêchement au mariage, attendu
que les premiers Juges n’y avaient pas statué. L a Cour d’appel de
Riom s’est donc transformée en Tribunal de première instance.
Les conclusions prises parle sieurd’A lbiaten la Cour d’appel, tendaient
seulement à ordonner la confirmation du Jugement dont était appel.
J ’ai formé le ?.5 juin une nouvelle opposition au mariage de ma fille,
notifiée à la M airie et à ma fille , attendu que la loi me défère le droit
de me pourvoir au Tribunal de cassation. La Cour d’appel de Riom en
a ordonné la main-levée par arrêt du 27 juin 1806 , rendu à l’audience
sur requête qui ne m’a pas été signifiée. La Cour d’appel de Riom
n’était pas compétente pour statuer sur cette nouvelle opposition ; ses
pouvoirs étaient finis. E lle m’a privé du droit de recourir en la Cour
de cassation; elle ne pouvait m’en priver sans m’entendre ; elle aurait
dù au moins en référer à la. Cour de cassation.
sieur d’Albiat a fait prononcer par le Tribunal le Clermontférrant sur la demande en séparation de corps.
Jugement de Clerm ont-Ferrant, du 1 7 fév rier 1806. Présidence de
B'L Domal.
« La cause en cet état a été appelée à l’audience de ce jour.
» L ’avoué de la demanderesse , présent, 11’a pris aucunes conclusions,
et aucun avocat ne s’est présenté pour plaider. Alors M..e V id a l, avoué
du défendeur, a conclu au débouté de la demande.
» Y a-t-il lieu à accueillir ces conclusions l
» Attendu le principe, que tout demandeur doit établir sa demande;
» Attendu que JjMfemanderesse , loin de justifier la sienne , de se
présenter pour faire admettre en tout ou en partie les faits qu’elle a
articulés, et de se soumettre à faire la preuve de ceux qui le seraient;
» Attendu que de son silence il en résulte la présomption qu’elle est
dans l’impuissance où de les faire admettre ou de les établir:
» L e T rib u n al, oui M . Cotlion, suppléant, faisant les fonctions de
Procureur impérial , sur la récusation de IYÏ. Picot-Lacombe , donne
C 2
�( flo )
congé défaut contre la demanderesse, et pour le profit la déboute de
sa dem ande; ordonne en conséquence quelle sera tenue de se réunir
à son mari pour y vivre en bonne union 5 et la condamne aux dépens.
D u 27 février 1806. »
A ppel de la dame d'Albiat en la Cour d appel de Riom.
Il est temps que le sieur d'Albiat sorte de cet état d’oppression
scandaleuse qui accable sa famille entière. Il n’y a que 1autorité supreme
qui puisse Yen délivrer ; il n’y a que l’autorite supreme qui puisse
rétablir l ’ordre dans sa famille. 11 l’invoque , il la sollicite autant pour
lui-même que pour ses enfans ; p o u r son fils ame qm en sortant de
l ’éducation paternelle , s’est dévoué à la défense de la atne , au service
de l’Em pereur; qui donne l’exemple des vertus domestiques, des vertus
civiles , des vertus militaires.
•/
�PLAIDOYER
P r o n o n c é e n l a C o u r d 'a p p e l d e T iio m , le r) j u i n 1 8 0 6 .
M
essieur
s,
Il faut qu’un père de famille ait des motifs bien graves pour refuser
son consentement au mariage de sa fille ; il faut qu’il soit retenu par
des considérations bien majeures pour persister dans son refus. Il faut
qu’il soit vivement pénétré du danger qui menace sa fille, pour se déter
miner à former opposition à son mariage. Je ne viendrais point vous
demander, Messieurs , l’abolition de ces actes dits respectueux , si l’acte
le plus saint, le plus solennel , le plus essentiel au |)^ilïeûr des époux ,
devait reposer 'su r l’honnêteté publique ; je ne vie'ifâV-ais point vous
demander la réparation de l’outrage fait à un père de famille , si la
nature ne devait pas être outragée par une union aussi disparate. Je
ne relèverais point l’oubli de quelques formalités ; je dissimulerais éga
lement l’irrévérence qui me serait faite : le cœur d’un bon père est
toujours disposé à pardonner. Je ne demande rien pour moi. Je ne
viendrais point à cette audience me surcharger du poids de nouveaux
malheurs , si je ne voulais dégager ma fille de tous les malheurs qui
sont prêts à l’envelopper. Ce n’est point un père irrité qui vous parle ;
ce n’est point une partie adverse qui vous sollicite; c’est un père qui
vient une seconde fois devant vous réclam er les secours de la Justice,
pour sauver sa fille du naufrage prêt à l’engloutir.
Ce n ’est point ma cause que je viens défendre , c’est la cause de
ma fille. Sa carrière commence lorsque la mienne finit. C ’est son sort que
je considère ; c ’est son sort que je vous prie de considérer. M a fille a
été ravie pendant sa minorité à ma surveillance ; ma fille a resté jusqu’à
présent sous l'influence de celui qui la trompe. Elle est subjuguée ,
elle n’a aucune volonté. O n éloigne d’elle les conseils de son père , les
conseils de tous mes parens ; elle est livrée aux illusions d’une jeunesse
sans expérience ; elle est retenue en chartre privée ; elle est trompée.
Que l’esprit de parti se taise ? N on ! je ne puis croire que l’esprit
de parti puisse rallier autour de lui assez d’individus qui veulent se
déclarer hautement les partisans de ceux qui jettent le désordre dans
les familles et les bouleversent.
�( 22 )
C ’est la cause des pères : ils sont intéressés au bonheur de leurs
enfans ; ils doivent craindre pour eux-mêmes que l’impunité de pareils
exemples ne vienne un jour porter le trouble dans leurs familles.
C ’est la cause des enfans, qui doivent retrouver le bonheur d’une vie
entière , dans les difficultés mômes que la sagesse de leurs parens met à
leur établissement.
C ’est la cause de la société entière , intéressée à proscrire ces alliances
bizarres qui portent la division dans les familles , et qui font le malheur ■
des générations futures.
C ’est la cause des mœurs. Les bonnes mœurs ne peuvent long-temps
se maintenir pures entre deux époux dont l’union est un assemblage mons
trueux de jeunesse et de vieillesse , de santé et dmürmite , de fraîcheur
et d’épuisement , de besoin et de misèie.
(
C ’e s t la cause des Magistrats : ils sont les tuteurs nés des enfans ;
ils sont sur la r é c la m a t io n des peres , les régulateurs des mariages ; ils
sont les’ conservateurs des bonnes mœurs ; ils sont les protecteurs des
familles Les lois veillent a la conservation de 1honneur des familles.
Eh ! qu'importe le croassement de ces gens isolés et sans famille ,
qui n’ont d’importance que dans les troubles civils , et d’existence que
dans les ménages qu’ils ont divisés l
N e recherchez pas en moi les charmes de celte éloquence qui a fixé
votre attention sur le jeune orateur que vous avez entendu avec intérêt ;
ne recherchez pas la profondeur de cette érudition que vous admirez
chaque jour parmi les magistrats , et les défenseurs qui soutiennent la
gloire de ce Barreau célèbre depuis un temps immémorial. C est un père
qui ne peut que vous parler des malheurs de sa fille , qui^ a ete ravie a sa
surveillance avec une audace sans exemple, pour reste!' livrée à celui qui lui
■prépare une destinée plus malheureuse que sa situation présente. C ’est un
père qu’on représente comme_inflexible, et à qui on a tout caché, à qui on
n’a rien communiqué pendant trop long-temps. C ’est un époux poursuivi
avec acharnement par des vampires , et des gens qui ne dissimulent pas
leur im m o ra lité au milieu des sociétés qui ^ reçoivent II n’y a eu d'in
flexible dans cette malheureuse affaire, que la I ) . ,ne d A lb ial, qui a résiste
avec obstination aux instances de ma famille et de la sienne , de ses anus ,
et de plusieurs de ses conseils ; aux représentations de ceux qui donnent
l’exemple de la morale et des vertus religieuses, ( i ) Elle a résisté au . pres
s a n t e s sollicitations d’un fils chéri et honoré , q u i, du sein des armées,
la prie les mains jointes , et la presse de renoncer a une demande qui
répand l’affliction sur toute une iannlle.
C i ) M. Mercier , gvaud-Yicairc
la Cathédrale,
et C u ré du P o r t , M . M o r i n , C uré -V icaire de
�L e jugement tient est appel, est attaqué sur deux motifs. On prétend D m ,« ma; ,S(J
que les premiers juges ont cumulé la forme et le fonds ; qu’ils devaient
préalablement juger sur la nullité des actes de respect, et qu’ils ont prononcé
sur le fonds même du mariage. 11 est nécessaire de vous retracer quelle
a été la marche de la procédure , et sur quoi les premiers juges ont
statué.
J’ai formé opposition au mariage de ma fille ; j’ai fondé mon oppo- Lecture du ju
sition et sur la nullité des actes dits respectueux , et sur les inconvcniens Se,yicnt du i.<
graves de ce mariage , que j’ai regardé comme inconsidéré , comme con- mjl
traire à la nature et à l’honnêteté publique. L a Dlle. d’Albiat a demandé
la main-levée de cette opposition.
Sur quoi les premiers juges ont-ils statué ? Ils ont statué sur la nullité
des actes dits respectueux , et sur la demande en main-levée de mon
opposition ; ils ont déclaré lesdits actes nuls , et ils ont débouté la
D lle. d’Albiat de sa demande en main-levée d’opposition : ils n’ont pas
prononcé autres choses.
Je vois que tout est régulier dans la forme. Les premiers juges se sont
renfermés dans la question relative aux actes dits respectueux ; ils n’ont
pas été au-delà. Ils ont statué sur la demande en main-lavée de l’oppo
sition au mariage : et par une conséquence forcée , ils ont débouté la
Dlle. d’Albiat de sa demande en main-levée d’opposition.
Les premiers juges n’ont absolument rien prononcé sur la question
relative au mariage , puisqu’ils ont maintenu mon opposition ; ils ont
seulement statué et sur la nullité des actes dits respectueux , et sur
la demande en main-levée de mon opposition.
Il est vrai
ai qu’un des motifs de leur jugement est l ’état de captation
où se trouve la Dlle. d’Albiat. Ce ne serait pas encore une irrégularité,parce que les juges sont les maîtres de donner à leur jugement les
motifs qui leur conviennent.
L a captation est un fait ; ce fait a paru prouvé aux yeux des pre
miers juges; ce fait a été un des motifs qui ont déterminé à prononcer la
nullité des actes dits respectueux. Les premiers juges n’ont pas outre-passés
leurs pouvoirs.
J’ai demandé la nullité desdits actes sur le même molit ; je me suis
exprime en ces termes : attendu que la D lle. d'Albiat a été subjuguée,
et qu’elle n a pas une volonté libre.
M ais on pretend que le fait de captation étant reconnu par un juge
ment , peut être un obstacle au mariage : j’en conviens. M ais la cap
tation est par elle-meme un obstacle à la validité des actes quelconques
\
/
�qui en sont l’effet. O r , s'il est démontré que 1g3 actes dits respectueux
sont l’effet de la captation , qu’ils portent même avec eux tous les caraclères de la captation , peut-on refuser d'en prononcer, sur ce m o tif, la
nullité , sous le prétexte que ce serait préjuger la question d„u mariage?
L ’acte respectueux, comme je le démontrerai, n’est plus une vaine for
malité , comme au temps de M . Pigeaut. L ’enfant doit réfléchir , doit
délibérer sur le3 conseils de son père. Il faut donc qu’il soit libre ; il
faut qu’il ne soit pas dans un état de captation lorsqu’il fait des actes
aussi importons à son bonheur,Et précisément je vous fournirai des preuves
trop concluantes de cette captation,
11 me paraît inutile de s’a p p esan tir, davantage sur la régularité du
jugement dont est appel. Je dois me renfermer a vous démontrer que
le jugement dont est a p p e l, est conforme aux règles de la justice.
Vous vous rappellerez, Messieurs , avec, quelle pressante sollicitude
je vous ai demandé que ma fille alors âgee de
ans , et mon fils âgé
de 11 ans , fussent éloignés de la maison Foughasse , attendu que
cette maison a v a it été une source de désunion, une continuité de désu
n io n , un obstacle à \me réunion; e t'q u e mes enfans fussent mis en
dépôt dans des maisons d’éducation, pour y être élevés dans les devoirs
de la religion, dans la pratique de la vertu , dans l ’amour du travail.
Vous avez rendu, le 11 fructidor an 12 , un arrêt ainsi conçu.
(hi
L a lo i , art. 5o 3 du Code civil , conserve respectivement aux père
l2' et mère le droit de surveiller L’éducation et: l ’entretien de leurs enfans,
quelle que soit la personne « laquelle les enfans seront confiés.
U n père de famille , un homme qui fut toujours probe et d élicat,
un homme d ’honneur a été dépouillé du droit de surveiller ses enfans.
Vous avez entendu vous-mêmes , Messieurs , à votre audience du
11 fructidor an 12 , cjue le voisinage des célibataires qui habitaient
la maison Foughasse n’etait point dangereux , à raison de leur hon
nêteté et de leur âge avancé; que je noircissais les intentions les plus
pures. O n allait jusqu’à me représenter sous les traits les plus inju
rieux, Les événemens qui se sont passés diront mieux que moi de quel
côté -était la prévoyance et la saine morale.
C ’est l’immoralité qni a triomphé ; c’est l’immoralité qui a abusé ;
c’est l’immoralité qui traduit devant vous un père do famille.
M . Dufreisse de Fontsalive est celui que j’ai désigné il y a deux anâ
comme dangereux à ma famille , et que je désigne encore aujourd’hui
comme l’auteur des troubles actuels de nui famille , de l ’égarement et
de
�T A B L E
DES MATIERES.
I n t r o d u c t i o n et motifs sur la publicité du Mémoire.
pages 3 et 4
L e ravisseur considéré comme émigré.
4
Les malheurs du père pendant la révolution.
5
Etat de ses pertes faites pendant la révolution.
5 et 6
Notes sur la famille d’Albiat.
7
Causes de la prévention contre le père dans la ville de Riom.
8
T ableau de comparaison des jugemens de Clermont et de R iom ,
page 9 ju sq u ’à la page 20.
Réflexions sur l’arrêt du 11 fructidor an 12.
i3
M oyens de cassation. L a Cour d’appel ne pouvait prononcer que sur la
validité des actes, et non sur les empêchemens au mariage. 18 et 19
A utre arrêt du 27 juin 1806, incompétemment rendu sur requête non
communiquée.
19
Exorde du Plaidoyer, ou Tableau de l’affaire.
21 et 22
Fille mineure ravie à la surveillance de son père.
4 } 13 et 24
Fille mineure laissée sous l'influence de son ravisseur.
1 3 et 2 5
Menace de poursuivre le père comme rebellionnaire à Justice.
25
Situation pénible d’un père, forcé de résister à la nature qui lui commande
ce qu’un arrêt lui défend.
25
Intrigues du ravisseur.
2 5 , 26, 3 6 , 37. et 40
Situation des autres enfans.
ao
Moyens employés par le ravisseur. Sa constitution physique. 26,27,28,29,
3 i, 35 et 40.
L e ravisseur est éloigné pendant un temps par la mère. Résultat avanta
geux pour le père et la fille.
29 et 5o
L e ravisseur fait demander la fille en mariage. Improbation de toute la
famille.
3o
L e ravisseur criminel aux yeux de la Justice, pour avoir ravi la fille à la
Justice même.
3r
De la preuve par présomption.
3 i et 3a
Maximes de M . le Chancelier d’Aguesse&u sut, la séduction.
33 et 34
Appliçahon de ces principes à la caus-mé la deml’ôge; infirmités.
55
Inégalité de biens. Point d’état.
^ n é par ses intrifo3g
Indignité dans la conduite.
^aix comme
3g ej, 5y
Nécessité du consentement des époux.
37 et 40
�TABLE
DES MATI ERES.
L a séduction ôte la liberté du consentement.
54, 37, 5 8 , 09 et 40
L a séduction s’applique aux majeurs , lorsqu’elle a commencé en
minorité.
S9 et 40
Les circonstances aggravantes, encore plus fortes que la séduction, ôtent
la liberté du consentement.
56 et 40
Parallèle entre les lois anciennes et les lois nouvelles sur le
mariage.
4 1 et 4 2
Maximes de M . Portalis, Rapporteur, au nom du Gouvernement, de la
loi sur le mariage.
_
3 5 , 4 1 , 4 3 , 45, 4 4 j 4 0 et 46
D u droit d ’un père de former opposition au mariage de son enfant, et de
l ’autorité illimitée des juges.
48 et 44
Principes sur les causes d’opposition.
^
45 et 46
L e père peut s’opposer à un mariage honteux ou inconsidéré.
46 et 47
Causes qui rendraient un mariage honteux.^ ^
47
Causes qui rendraient un mariage inconsidéré.
47 et 48
Premier acte irrespectueux.
(
48 et 49
L a fille ne demande pas le conseil de son pere.
41 , 42 et 49
Conseil et co n s en tem en t ne sont pas synonymes.
18 et 5o
Irrévérence, protestations, violence et captation.
5o et 5 i
Analyse du second acte.
5 i et 5a
Analyse du troisième acte.
5z
L ’acte respectueux ne doit pas être une vaine form alité, comme dans
l’ancien régime.
24 et 53
A rrêt de la Cour de Bordeaux, du i 3 fructidor an i 3 , favorable
au pè^e.
18 et 53
Preuve de captation, d’après les actes.
¿4 et 55
L es actes sont nuls, comme étant écrits d ’avance, et par une écriture
étrangère à celle du notaire.
18 , 55 , 56 07 et 58
Danger des conseils.
'
by
Résumé des motifs d’opposition au mariage.
1 5 , i/j et 1 5
Résumé des faits qui établissent la captation.
58 , 69 et 60
Réflexions sur la mère.
60, 61 et 63
Invocation faite à la mère.
62
Invocation, faite aux Juges.
62 et 6 s
1
Fin de la Table.
1
nt,"
A LYO N / il
,<jntsalive este____ _.
. a ï à ma famille ,
-les trouble* »10 B a l i .a n c h e père et fils, aux halle»
ue la Grenelle. 1806.
�( 25 )
de l’obstination de mon épouse , du malheur de ma fille , et de l’op
pression qui m’accable.
M . Dufreisse de Fontsalive n’a point cessé d’habiter la maison Foughasse ; il a conservé pour lui seul le même logement que la dame
de Vernines sa mère occupait avec ses autres enfans ; il eu a éloigné
ses frères. Son appartement est à la suite de celui de la dame et de la
Dlle. d’A lb ia t , et il n’en est séparé que par une cloison en planches.
Il paye depuis deux ans, époque de la mort de sa mère , 400 fr. de
lo ye r, malgré la modicité de ses facultés. U n homme d’honneur , un
homme délicat , ne jette pas le trouble dans une famille pour s’y
établir , ne se rend pas maître des destinées d’une famille. M . de
Fontsalive 11e peut , sous aucun rapport, donner aucune excuse à sa
conduite.
J’ai apporté devant vous le dalme d’une conscience pure. Vous n’avez
vu alors que moi : l ’homme honnête n’intrigue pas. Vous avez été trompé
par des insinuations perfides ; vous avez cru mieux faire parce que vous
en aviez la volonté. L ’Empereur a eu raison de dire à une députation
du Tribunal d’appel de Paris , que le mieux était l ’ennemi du bien.
Je ne pouvais plus exercer de surveillance envers mes enfans ; je
ne pouvais plus m’entretenir avec mes enfans ; je ne pouvais recevoir
que de simples visites dans une maison tierce.
J’étais menacé par les conclusions précises de la dame d’A lb ia t, d’être
poursuivi comme rébellionnaire à la Justice.
Vertueux aux yeux de la nature si j ’avais osé arracher ma fille de
la maison Foughasse , j’aurais été traité en criminel si j’avais contre
venu à l’arrêt au 11 fructidor an 12.
Place entre ma conscience et cet a rrêt, je ne pouvais plus agir. Dévoré
par le chagrin , isolé de ma famille , je me suis éloigné de mes foyers
arroses de mes larmes ; j’ai fui dans cette circonstance comme dans
beaucoup d’autres, une terre témoin depuis $5 de mes longs malheurs.
M ais tout s’éclaircit à la longue. O n a fait l’aveu , consigné dans le
jugement dont est ap p el, que le mariage de ma fille avec M . Dufreisse
de Fontsalive était arrêté depuis trois a n s, c’est-à-dire depuis le mois
de floréal au 1 1 ; que M .me de Vernines la mère l ’avait approuvé long
temps ayant son décès. Cependant j ’ai resté un an dans la même maison ,
et je la i absolument ignoré. C ’est donc pour faire réussir ce mariage,
qu on m a tourmenté , qu’on a formé la demande en séparation de
corps , que M. de Fontsalive m’a éloigné par ses intrigues de ma famille,
qu’il m’a fait dénoncer chez le Juge-de-paix comme portant le trouble
D
�( *6 )
clans la maison Foughasse , qu’il a répandu conlrc moi une horrible
diffamation; et M . de Fontsalive voulait devenir mon gendre dans le
moment qu’il organisait la persécution qui me poursuit.
Celui de mes enfans qui devait recevoir une éducation négligée et
efféminée , a été nommé au L ycée de Moulins. L e Gouvernement seul
avait la force de le soustraire à la fatalité de son éducation dont
les. fruits devaient appartenir' à la patrie. M on fils aîné a obtenu cette
faveur de S. M . l ’Empereur. 11 a fait valoir mes services rendus dans
la magistrature pendant 20 ans d’exercice , et ceux qu’il rendait dans
les années en qualité d’officier d’artillerie. Sous un Gouvernement
reconnaissant et bienfaisant, les bonnes actions protègent les familles.
M a fille seule a resté sous la direction de sa mère ; vous reconnaîtrez
par sa conduite les principes qu’elle a puisés.
Cette affaire est te lle m e n t identifiée avec la demande en séparation
de corps formée par la dame d’Albiat , que les moyens employés
par la dame d ’Albiat pour le succès de l ’une , l ’ont été pour le succès
de l ’autre.
L a diffamation répandue contre moi pour favoriser la demande en
de corps , a été recueillie pour surprendre un arrêt qui ravit
ma fille à ma surveillance. L ’imposture et la fraude sont aujourd’hui
découvertes. O n n’a écarté le père que pour tromper la fille. C ’est pour
dépouiller la mère que des conseils perfides la flattent d ’une indépen
dance utile à leurs projets ; c’est pour séduire la fille qu’ils la flattent
d’illusions chimériques ; c’est pour écarter un père devenu incommode
à l ’e x é c u t io n de leurs projets criminels , qu’ils s’agitent, qu’ils inventent,
qu’ils osent tout , pour attaquer ma réputation, m’envelopper et me
détruire.
s é p a r a t io n
Ces hommes qui n’ont ni corps ni biens , ces perturbateurs du repos
des ménages , ces dévastateurs de la fortune des époux et des enfans,
ces corrupteurs déboutés des bonnes mœurs , ont répandu contre moi
la c a lo m n ié la plus noire et la plus atroce. L a perversité bien connue
de ces hommes desséchés, suffirait pour l'aire regarder comme invraisem
blable tout ce que pourrait distdler leur langue envenim ée', tout ce
que pourrait rendre leur bouche empestée.
O ui dois-je rechercher dans ce dédale affreux d’intrigues et d’im-.
postures qui arment l’épouse contre l’époux, la fille contre le père ? :
ceux qui avaient intérêt à la diffamation.
Celui qui profite d ’un vol est présumé voleur ; celui qui profite de la
diffamation est présumé auteur de la diffamation. Oui prodest scclus
is fe c it.
�( 27 )
M . Dufrcisse de Fontsalive a répandu contre moi la diffamation la
plus atroce. Je ne crois pas que la méchanceté humaine puisse rien
imaginer de plus fourbe , de plus noir , de plus affreux, pour ravir
mes enfans à ma surveillance.
Ce n’est pas le simple effet d’un caractère violent et .emporté; c’est
la réflexion que M . de Fontsalive a apportée , c’est la combinaison
qu’il a faite , c’est la persévérance qu’il a mise dans l’exécution de
ses projets.
M . Dufreisse de Fontsalive a voulu s’assurer d’avance des moyens
d ’existence. A -t-il été enivré par l’illusion d ’une imagination ardente?
A -t-il été entraîné par la violence d’une passion qu’il ne pouvait éteindre ?
N on , il n’y a rien de tout cela. Les feux de son imagination sont
de courte d u rée, ils s’évanouissent aussitôt, et toute passion est
chez lui absolument nulle. L e mal moral est grand ; c’est le mal de
la privation, il ne laisse appercevoir à l’imagination que des fantômes.
L e mal physique est plus r é e l, c’est l ’absence de toute faculté.
Celui qui peut séduire par le mouvement d’une passion ardente, est
capable de grands traits, d’un dévouement généreux, d’actions sublimes ,
pour plaire à l’objet aimé qu’il recherche, pour le m ériter, pour le
posséder : le feu de lam e est un présent du ciel , une émanation
de la Divinité , qui donne à l’homme un caractère de grandeur et
de loyauté , et lui laisse ignorer jusqu’aux idées de bassesse et
d'imposture.
M ais que dirai-je de celui q u i, parvenu à un âge avancé , et
dépourvu de fortune et de talens , veut séduire lorsque les feux de
la jeunesse sont éteints, lorsque tout son corps est desséché, lorsque
ses forces l’ont abandonné, lorsque son épuisement est com plet,
lorsque toute sa constitution est attaquée; lorsque des vices internes
rassemblent abondamment des humeurs contagieuses ; lorsqu e des
maladies réitérées lui laissent à peine l ’espoir d’une vie languissante ;
lorsque son sang appauvri commence à se dissoudre ; lo rsq u ’un teint
périodiquement pâle et cadavereux , présente les signes certains d ’une
mort prochaine ?
Q ue dirai-je de M . Dufreisse de Fontsalive, dont je viens de
vous peindre la situation trop certaine et assez connue où il se
trouve !
Il
a voulu séduire ; il n’a pu
riques. Sa marche ne pouvait plus
nature, cette marche sentimentale,
il est vrai, embraser les cœurs, mais
donner que des espérances chimé
être cette marche simple de la
cette marche de feu, qui peut,
qui ne trompe jamais.
D a
�_< 28 )
M . de Fontsalive ne pouvait réussir que par un langage factice ;
il ne pouvait réussir que par des prom esses trompeuses : il n’a que
trop réussi pour le malheur de ma famille. Il a subjugué la mère;
il a séparé l’épouse de l’époux. Il a excité , il a entretenu les germes
de division qui arment encore h présent la fille contre sou p è re ,
et la femme contre son mari. Il a paralysé la surveillance de la mère
envers la fille ; il a éloigné du sein de la famille le surveillant
naturel, le surveillant nécessaire , le surveillant légal , que la nature,
que la loi donnent aux enfans , il a éloigné le père de famille.
Q u ’a fait M . de Fontsalive pour me séparer de ma famille ? Il a
répandu la diffamation la plus noire , la ^plus invraisemblable. Il
a voulu m’éloigner pour toujours comme époux , en ^cherchant à
donner de l’importance aux termes injurieux de la requete en sépa
ration de corps ; il a été le précurseur d une seconde requete.
Il
exerce une influence qui peut être un jour funeste à mes autres
enfans ; et déjà la dame d’Albiat s’est procuré à mon insu des
rem b o u rsem en s sur sa d o t , contre les dispositions formelles du traité
que j’ai passé avec elle. 11 a voulu m’éloigner comme p è re , en se
débarrassant de ma surveillance sur ma fille ; surveillance qui lui
devenait incommode.
L a Dlle. d’Albiat ma fille s’est trouvée dès ce moment privée
de l’appui, du secours, des conseils que l’expérience d'un père aurait
pu lui donner. Elle est restée absolument abandonnée aux insinuations
d’un homme qui ne voulait la tromper que pour trouver un asile
certain dans sa détresse , et obtenir un soulagement forcé dans ses
infirmités habituelles.
Pour plaire à la dame d’Albiat et se rendre nécessaire, M . de
Fontsalive l ’a flattée qu’il pouvait par ses intrigues lui assurer, son
indépendance , et empêcher pour toujours le retour de son mari.
L a daine d’A lb ia t, trop faible et trop crédide, n’a plus balancé de
se réunir à M . de Fontsalive, et de se concerter avec lui, pour mieux
s’assurer une indépendance qui entraîne toutes les femmes a leur
ruine.
O u i, M . de Fontsalive est depuis long-temps mon persécuteur; il
a été dam toutes ses démarches un imposteur adroit et effronté.
L a dame de Vernines sa mère est morte le 17 prairial an 1 2 ;
elle a été enterrée le 18. L a dojne d’Albiat a cessé do manger avec
moi le ly prairial.
�( 29 ) '
C ’est M . de Fontsalive qui a favorisé , le 2 1 prairial, trois jours
après la mort de sa mère , l’évasion de la dame d’A lbiat et de sa
fille. C ’est lui qui a reçu chez lu i , à neuf heures du so ir, ceux qui
ont enlevé la dame d’Albiat et sa fille. C ’est lui qui, le lendemain, a
eu l’impudeur de se rendre chez le Juge-de-paix avec la dame Fonghasse
qu’il y avait entraînée , pour m’y dénoncer, sans me prévenir, du pré
tendu trouble qu’il disait que j’avais apporté à son sommeil ; et ce
trouble n’était autre chose que d’avoir exprimé dans l’intérieur de
mon appartement, avec l’expression d’une douloureuse sensibilité, ma
trop juste indignation au moment de la fuite nocturne de mon épouse
et de ma fille. J’avais, disait-il, troublé son sommeil : et il avait eu
la constance de m’écouter tranquillement derrière les planches qui
séparent son appartement de celui de la dame d’Albiat. Cependant
ma douleur était son ouvrage, ma douleur était son triom phe, ma
douleur était sa jouissance.
C ’est alors que M . de Fontsalive a répandu contre moi des
calomnies aussi atroces qu’incroyables. Il a calculé que la calomnie lui
était nécessaire pour me perdre dans l’opinion publique et dans l’opinion
des Juges ; il a calculé que la calomnie lui était nécessaire pour
s’établir en mon absence au milieu de ma famille ; il a calculé que
la calomnie lui était nécessaire pour me détruire; il a calculé que la
calomnie lui était nécessaire pour subjuguer à son aise l’esprit de la
dame d’Albiat ; il a calculé que la calomnie lui était nécessaire pour
compromettre le p ère, la mère et la fille , et les forcer par un lan^a^e
imposteur et fallacieux, à consentir à un mariage désastreux.
° °
L a dame d’Albiat avait réussi au-delà de ses espérances. Elle avait
à sa disposition ses enfans qu’il m ’était impossible de surveiller.
E lle fait enfin un retour sur elle-même. Elle songe sérieusement à
éloigner M . de Fontsalive , et elle refuse de le recevoir. Alors la dame
d’Albiat se trouve affranchie de l’influence qu’exerçait M . de Font«alive. Elle se rappelle qu’elle est m ère, que sa fille a des devoirs
à rem plir, et elle me fait proposer par mon fils cad et, à la fin de
novembre 1804, deux mois et demi après 1 arrêt de la C o u r, si je
voulais recevoir chez moi ma fille. Les sentimens paternels calmèrent
l’agitation d'un cœur aigri. Je désirais revoir ma fille , mais avec la
dignité qui convient à 1111 père qui a constamment professé les prin
cipes de l’honneur. Je l’ai reçue avec empressement, et je n’ai eu
besoin que de me rappeler que j ’étais père, pour lui exprimer toute
ma tendresse.
�( 3° )
Je dois celte démarche, qui s’est continuée jusqu’au i . er décembre
d e r n ie r , à la volonté libre de la dame d’Albiat.
L a dame d’Albiat s’est jugée elle-même par cette dém arche, puis
qu’elle a cessé d’exécuter à l’égard de mes enfans, les dispositions d’un
arrêt provisoire surpris à la justice de la Cour.
La dame d’Albiat a jugé , par cette démarche , M. de Fontsalive ,
lorsqu’après l’avoir expulsé, elle a rétabli les relations entre le père
et les enfans , que les intrigues et l’influence de M . de Fontsalive avaient
interrompues.
L a dame d’A lbiat me juge enfin, lorsque , dégagée de cet entourage
trompeur, elle écoute la.voix de la nature , elle cède sans hésiter
aux cris de sa conscience ; qu’elle se montre juste envers son époux,
qu’elle rappelle à ses enfans qu ils ont des devoirs a remplir envers
leur p e re , ot qu’elle les restitue a ma tendresse paternelle.
Heureuse la dame d’A lb ia t, plus heureuse encore sa fille , si elle
eût p e r s é v é r é dans sa résolution de ne point recevoir M . de
Fontsalive !
C ’est le 6 octobre dernier, quinze jours après mon retour de Paris,
que j ’ai la douleur d’apprendre que le mariage de ma fille , encore
m ineure, est irrévocablement arrêté avec M . Dufreisse de Fontsalive ,
du consentement de la dame d’Albiat sa mère ; et que M . Dufreisse
de Fontsalive me fait demander mon consentement avec une forfanterie
incroyable, et des réflexions trop pénibles à révéler. Sur mon refus,
il répond qu’on saura se passer de mon consentement, que le
mariage se fera cinq mois plus tard et à la majorité de ma fille ;
tant il comptait sur le dévouement de celle qui est désignée pour
être sa victime.
U n événement aussi extraordinaire a saisi d ’indignation tous mes
parens ; ils ont vu avec frémissement les tristes apprêts d’un mariage
qui doit être funeste à ma fille; et j’ai déclaré, d ’après leur avis unanime,
que je ne pouvais , ne devais ni ne voulais donner mon consentement
à ce mariage.
Vous voyez que la calomnie et la diffamation n’ont été employées
contre m o i, que pour paralyser, pour enchaîner la puissance paternelle ,
pour ravir ma fille à ma surveillance, pour la retenir en chartre privée
dans une maison que j’avais désignée comme dangereuse.
Je ne cesserai de répéter , que c’est par la calomnie et la diffa
mation que M . de Fontsalivo est parvenu à écarter le père de
�( Si )
famille du sein de 6a fam ille, pour cohabiter dans la maison où se
trouvaient la dame et la D lle . d'Albiat.
M . de Fontsalive est criminel envers un père de famille qu’il accable,
envers la société qu’il scandalise , envers une fille qu’il trom pe, une
fille de fam ille, une fille sans expérience, une fille qui était dans
les liens de la m inorité, et qui n’avait que dix-huit ans. 11 est criminel
envers la Justice, qu’il a trompée pour ravir ma fille à la puissance
paternelle ; il est une seconde fois criminel envers la Justice, pour
avoir ravi ma fille à la Justice m êm e, qui l’avait mise en dépôt chez
sa mère.
Pourrais-je pardonner à M . de Fontsalive , l ’ivresse, l ’égarement de
l’amour l Mais l’amour ne peut exister dans un corps épuisé. Pourraisje le remercier de ses sentimens de bienfaisance ! Mais la bienfaisance
est absolument stérile pour un homme sans b ien , et pressé lui-même
par le besoin. M . de Fontsalive ne pouvait donc réussir, qu’en exci
tant , en alimentant la division ; et cet hymen ne sera éclairé que par
les sombres torches de la discorde.
O n me reprochera peut - être de faire un tableau exagéré de la
situation de ma famille ; de ne parler qu’à l’imagination pour sur
prendre les cœurs et les intéresser. M ais , Messieurs , c’est à vos
yeux , c’est à vous-mêmes que je veux produire des preuves certaines;
c ’est au calcul de la réflexion , c’est au creuset de l’expérience , c’est
à l’inflexible raison que je veux soumettre des témoignages incor
ruptibles.
Je ne crois pas qu’on puisse dire sérieusement, que les lois nou
velles ont bouleversé la morale. L es principes de la morale ont été
et seront de tous les temps. O n a pu radoucir les peines ; mais
on n’a pas violé les principes de la morale. O n a pu donner, pour
contracter un mariage honnête et raisonnable , une grande faveur à
la volonté libre des personnes devenues majeures ; mais on n’a pas
voulu favoriser la licence et le crime envers les mineurs , pour les
surprendre et les accaparrer au moment de leur m a jorité. On a voulu
reconnaître les droits de la nature ; mais 011 n’a pas voulu l’outrager
par des réunions disparates, hideuses et dégoûtantes.
L a séduction s’exerce plus facilement sur une personne mineure ; la
séduction est prouvée toutes les fois qu’il y a inégalité d ’â g e , inégalité
de fortune. Je sais bien que cette preuve de séduction dérivé seulement
d ’une présomption ; mais cette présomption est suffisante lorsqu’elle
�( 32 )
derive de faits reconnus certains aux yeux de la Justice. O r , l’inégalité
d a g e , l’inégalité de fortune étant bien constantes, il y a présomption de
séduction; et je le répète , cette présomption est suffisante aux yeux de
la loi pour prouver la séduction. Ces maximes ont été adoptées dans
tous les temps, et doivent l’être de nos jours.
L e s présom ptions, dit M . Domat , sont des conséquences qu’on
tire d ’un fa it connu , pour servir à faire connaître la vérité d ’un f a it
incertain dont on cherche la preuve.... L e s présomptions sont de
d eu x espèces : quelques-unes sont s i f o r t e s , q u elle s vont à la certi
tude et tiennent lieu de preuves même dans les crimes ; et d'autres
ne sont que des conjectures qui laissent dans le doute..... A in s i
on tire des conséquences des causes ¿1 leurs effets , ou des effets
à leurs causes ; ainsi on conclut la venté d u n e chose par sa liaison
à une autre qui lu i est conjointe.
L e Code civil est absolument conforme à ces principes ; il a adopté
cette disposition de l’ancien Droit , art. 1349 » en ces termes : L e s
présomptions sont des conséquences que la loi ou le M agistrat tire
d ’un fa it connu ci un fa it inconnu.
I/art. 1 553 est conçu en ces termes : L e s présomptions qui ne sont
point établies par la •loi , sont abandonnées a ux lumières et a la
prudence du M agistrat, qui ne doit admettre que des présomptions
graves, précises et concordantes, et dans le cas seulement où la
lo i admet les preuves testimoniales.
L a loi étant précise et générale , je puis en faire l ’application au
fait particulier de la séduction , et tirer la conséquence que du fait
certain d’inégalité d’âge et de fortune, il y a présomption de séduction.
Cette présomption est reconnue si fo rte, qu’elle va jusqu’à la certitude
et a toujours tenu lieu de preuves. L a jurisprudence des anciens arrêts
doit donc servir de fanal dans cette matière.
M . le Chancelier d ’Aguesseau est un guide sûr. Il a développé avec
clarté et précision les causes qui démontrent la séduction ; il a déter
miné les circonstances aggravantes qui peuvent la rendre plus criminelle ;
il a posé des principéis fondés sur la nature, sur la loi et la religion.
Plusieurs moyens pouvaient empêcher un mariage et même l’annuller,
lorsqu’il n’y avait pas de fins de non-recevoir ; les uns fondés sur la
nature , tels que la séduction qui ne laisse aucune volonté libre ; les
autres fondés sur la l o i , lorsqu’elle n’a pas été observée , ou qu’elle a
été violée. Chacun de ces moyens pouvait être seul un obstacle à
un mariage. M ais écoutons M . le Chancelier d’Aguesseau dans la cause
dq
�( 33 )
de René et Charles Bellet contre Marguerite Bernier, plaidoyer 19.
« II n'y eut jam ais de cause à laquelle on pût appliquer avec tant
» de ju stic e toute la sévérité de la lo i ; jam ais un plus grand nombre
» de circonstances pour prouver le rapt de séduction : minorité ,
» inégalité d'dge , de biens , de condition ; indignité de la personne ;
» déf<iut de consentement de la mère ( elle était veuve ). A rrêt du
» 4 ju ille t 1 Gy5 , qui déclare le mariage nul. »
Dans la cause de Louis et Nicolas Forbi contre Barbe B riet, plaidoyer
36..... « Exam inons donc les présomptions de fait par lesquelles on
» prétend établir la séduction. Inégalité d'dge , Barbe B riet dgéc
» de trente-deux ans et N icolas Forbi de vingt-six ; inégalité de
» biens ; nul patrimoine , nul établissement dè la part de Barbe
» Briet.... D ans toutes ces circonstances, ne peut-011 pas dire qu’en
» réunissant ces trois inégalités d ’d g e , de b ie n s, de conduite , les
» présomptions de séduction sont toutes contre e lle 1 » Arrêt du 3
mai 1697, qui a déclaré le mariage nul.
Dans ia cause de la dame de C h abert, Nicolas Chabert et Marguerite
V in o t, plaidoyer 45..... « I l est plus d ifficile d'y choisir que d'y
» trouver des défauts qui rendent une semblable union nulle et illé» gitim e. P o in t de consentement du père et d e là mère; ce m oyen,
» jo in t à la m inorité, fa it une forte présomption de rapt. C e rapt
» est p rouvé, non seulement par ce lle présoniplion de la l o i , mais
» encore par plusieurs présomptions de fa it..... Prem ière présomption :
» inégalité d ’dge. C ’est une maxim e importante, qu'avant la majorité
t) la présomption est toujours favorable pour celu i qui a été surpris ;
» la lo i plaint la faiblesse , l'aveugle fa c ilité , la légèreté naturelle,
» le défaut d'expérience qui l'ont rendu victim e de ¿’artifice et de
» la séduction. Inégalité de condition , de biens et de fortune : quelle
» présomption plus forte et plus sensible de rapt et de séduction /
» Q u’on ne dise point qu'il n'y a pas d'enlèvement n i de violence.
» L a subornation est beaucoup plus dangereuse ; elle ravit le cœur:
*> L’autre ne ravit que le corps. » A rrêt du 2 5 mai 1697 , qui déclare
le mariage nul.
Dans la cause du sieur de St-Gober t , son fils, sa fille, et de Henry
Desmarets , ravisseur de sa fille , plaidoyer 56 ; M . dAguesseau établit
les moines présomptions de fait, a II est nécessaire , d it- il, de vous
ÿ rappeler la mémoire de ces grandes circonstances qui rerjerment
» des présomptions plus fortes , dans des questions de rapt et de
t> mariage , que toutes les dépositions des témoins. jVoiis voulons
»> parler de l o g e , de la naissance, de la fortune des parties. Un
» majeur de trente-six ans ; une mineure dgée de dix-huit ans.....
E
�( 34 )
>> L'un riche seulement en pensions et en espérances ; l'autre en état
» d 'a v o i r 20,000 liv. de biens.... Prem ière observation : inégalité en
» tout > ce qui ne se rencontre pets toujours dans les affaires de
r> cette nature ; inégalité d'âge , Desmarets avait le double d'années ;
» inégalité de biens , Desm arets n'avait rien de solide. S i 011 entre
» dans le détail de ce qu'il a , ce sont de sim ples pensions incer» laines. L a D lle . de St-G obert aura au moins 20,000 liv. Seconde
» observation : cui prodest scelus is fe c it, reçoit toute son application
» i c i , attendu l'entière inégalité. »
Messieurs , il était question dans la cause du sieur de St-Gobert et
de sa fille , d’un enlèvement avec séduction : la mère paraissait complice ;
elle plaidait en séparation de corps contre son mari. M . d’Aguesseau
ne put s’empêcher de re m a rq u e r combien la mere et la fille étaient
réunies contre l’honneur d e leur famille. L e pere et le fils etaient
accusés par Henry D esm a rets d’un assassinat imaginaire , et c’était pour
faire diversion. A rrêt du 5 août 1699 , qui renvoie le sieur de St-Gobert
et son fils de l’accusation d’assassinat; décrète de prise de corps Desmarets,
ravisseur, et ordonne que son procès lui sera fait et parfait par le Bailli
du Palais.
M . dAguesseau faisait la distinction des présomptions de fait et des
présomptions de droit. Les présomptions de fait établissent cette convic
tion morale , cette conviction de l’homme qui est indépendante de là
l o i , et qui n ’appartient pas au domaine de la loi. C u i prodest scelus
is fe c it .
Il
établissait pour maximes constantes , fondées sur la jurisprudence
des arrêts , que l’inégalité d’âge et l ’inégalité de fortune étaient des
présomptions assez fortes pour prouver la séduction.
»
»
»
»
»
Lorsque la séduction est prouvée, il n’y a pas de volonté libre. « L e
mariage , dit M . dAguesseau , plaidoyer 7 , doit son institution à
la nature, s a perfection a la lo i, sa sainteté à la R eligion. Comme
union instituée par la nature , il consiste dans la f o i m u tu elle,
dans le consentement libre et volontaire que les parties se donnent
mutuellement. »
« La nature, dit encore M . d’Aguesseau .n ’établit que deux conditions;
» elle ne demande que la capacité personnelle des contractons, et la
» liberté de leur c o n s e n te m e n t : m a is ces deux conditions sont telle*> ment essen tielles, que le défaut ne peut j a m a i s en être suppléé. »
L a législation a changé à l’égard des mariages qui sont contractés
dans les formes exigées. Les époux, art. 180 du Code c iv il, ont seuls
le droit d’attaquer leur mariage lorsque le consentement n’a pas été libre.
�( 35 )
Avant la célébration du m a ria g e la loi donne une plus grande lati
tude. Les motifs d’opposition doivent être exprimés par les collatéraux ,
et les causes en sont limitées. Mais à l ’égard des ascendans, la loi ne
limite point les causes, la loi n’oblige point d’exprimer les motifs ; la
loi laisse aux juges une grande latitude pour prononcer. La loi nou
velle a seulement voulu détruire ces entraves , écarter, comme l’observe
M . Portalis , ces oppositions faites à un mariage honnête et raison
nable , sous prétexte de la plus légère inégalité dans la fortune ou
la condition. E lte a voulu , continue M . Portalis, que deux époux
pussent céder aux douces inspirations de la nature.
M a is le souvenir de l'abus, dit encore M . Portalis , que l'on fa isa it
des oppositions au mariage des f ils de fa m ille ou des citoyens, n'a
pas du nous déterminer à proscrire toute opposition. N ous eussions
favorisé le je u des passions et la licence des m œ urs, en ne croyant
que protéger la liberté du mariage.
L a séduction est prouvée , et les circonstances sont des plus aggra
vantes. La séduction a commencé pendant la minorité; il n’y a eu aucun
intervalle de la minorité à la majorité ; il n’a été laissé aucun instant à
à la méditation , à la réflexion, sur une démarche réglée et arrêtée
pendant la minorité. L a séduction a donc continué en majorité, ou
plutôt à cet âge qui laisse encore, une fille dans une espèce de mino
rité relativement au mariage , comme l'observe M . d’Aguesseau, plai
doyers 53 et 36 ; et Potliier, sur la séduction, N .° 5o.
Faisons l ’application de ces principes à l’état de la cause. H y a
inégalité en tout, ce qui est très-rare, et peut paraître incroyable ; iné
galité d’âge , épuisement, infirmités habituelles.
M . Dufreisse de Fontsalive est né le 25 juin 1762; la Dlle. ClaireJoséphine d’Albiat ma fille, est née le 21 décembre 1784 : la différence
d’âge est de vingt-deux ans et six mois. Circonstances particulières.
M . de Fontsalive est dans un état d’épuisement; il a des maladies
réitérées, de fausses fluxions de poitrine , une étisie réelle qui lui laisse
ou un appétit dévorant, ou un dégoût qui est l’effet d’un engorgement
d’humeurs catarreuses qui l’étouffent : il en est de son appétit comme
de sa figure, qui est alternativement empreinte par la pâleur de la m ort,
ou ondulée par des rougeurs. A u lieu de trouver un lit nuptial, ma fille
ne trouvera qu’un lit de mort après quelques années d’une vie languis
sante. O ù est donc, dans M . de Fontsalive, cette capacité personnelle
que la nature demande pour contracter m ariage, comme l’observe
M* d’Aguesseau ? 11 lui est donc impossible de remplir cette condition
tellem ent essentielle , que le défaut ne peut jam ais en être suppléé,
«uivant l’expression de M . d’Aguesseau.
Ea
�( 36 )
• Inégalité de bien?, inégalité de fortune ; point d’é ta t, pauvreté. M a
fille peut bien espérer d’avoir 55,ooo f r ., attendu qu’il y a dans la
maison 162,000 fr. et que mes deux fils sont placés,
M . de Fontsalive n’a aucune fortune certaine et connue ; on peut
lui présumer 6 à 7,000 fr. L ’actif de la succession de Mme. de Vernines
sa mère se portait à 72,000 fr. ; sur quoi il a fallu distraire les dettes
courantes, dettes contractées envers sa belle-fille, legs , frais de maladie,
frais mortuaires , droits de succession, de partage et quittances, et enfin 'f
le quart réservé à l’aîné ; ce qui a pu laisser 48,000 fr. à partarger entre
quatre, ce qui fait 12,000 fr. poursaportion.M .de Fontsalive avait,à l’époque
de la mort de sa m ère, au moins 2,000 fr. de dettes; reste à 10,000fr.
Ses fonds qui sont entre les mains de M . de Lavigne, lui produisent le sou
pour livre , et ce faible reven u lui a été nécessaire pour payer à lui
seul la totalité du loyer de son logement qui était occupe par sa mere '
et ses frères.
Il a fallu vivre depuis deux ans que sa mère est morte. Je porte à
3,ooo fr. pour ces deux ans la dépense de sa table , de son fe u , de sa
lumière , de son entretien , et de sa gouvernante ; reste 7,000 fr.
;
Il faut encore présumer que ses emprunts pour vivre ont été à urr
intérêt modéré. On prétend encore qu’il a perdu 5,000 fr. chez Louche.
M . de Fontsalive 11’a point d’état ; il n’a aucun talent pour s’en
procurer , nj vigueur pour s’y maintenir. S’il était jeune ou en bonne
santé , il y aurait lieu d ’eopérer qu’il pourrait en obtenir un. M ais à son
âge et avec une santé délabrée , il ne tdoit rien espérer ; tout doit être
fini pour lui en ce monde. Ses moyens d’existence sont donc presque
nuls. M a fille est donc trompée ; elle, est donc séduite par les intrigues
de M . de Fontsalive ; elle n’a donc pas une volonté libre.
Indignité dans la conduite.
Les circonstances aggravantes sont encore prouvées. M a fille est sous
l ’influence de M . de Fontsalive qui habile depuis trois ans la même
maison , la suite du même appartement ; ma fille est en chartre privée ,
hors de la surveillance de son père ; nia fille a été ravie à ma surveil
lance par M . de Fontsalive. C ’est lui qui a favorisé l ’évasion de la dame
d ’Albiat et de sa fille , à l’époque de k demande en séparation de corps :
cui prodest scelus is fe c it ; celui-là a commis le crime à qui le crime
a profité. C ’est lui qui le lendemain a entraîné M .n,e Fonghasse chez
le Juge-de-paix pour me dénoncer : cui prodest scelus is fe c it. C est
lui qui arme la fille contre son père , la femme contre son mari :
cui prodest scelus is fccit. Une diffamation atroce a ele répandue
contre m o i, il en. est l ’auteur, et les témoignages que je pourrais avoir
�( 37 )
vous paraîtraient moins certains que les preuves qui résultent de sa con
duite criminelle : cui prodesl scelus is fecit. L a diffamation a produit
son effet ; il y a eu arrêt au provisoire ; ma fille a été ravie à ma sur
veillance ; et c’est lui qui est coupable de ce ravissement crim inel,
puisque ma fille a resté sous son influence, dans la même maison où
il a continué d’occuper , malgré la modicité de ses revenus , la totalité
de l’appartement qu’avaient sa mère et ses frères : cui prodest scelus is
fec it. Il ne s’est rendu coupable de tous ces crimes envers moi et ma
famille , que pour chercher à commettre un crime plus grand , mais que
je veux l ’empêcher de consommer. ( i )
Nouvel Appius , qui, entouré de l’autorité, voulait dépouiller Virginius
de son titre de pere , pour ravir impunément et sans obstacle sa fille
Virginie ; il supposait un crime imaginaire pour commettre un crime
trop réel. M . de Fontsalive ressemble à Appius par son crime, et non
par ses richesses et ses dignités.
Chacun peut éprouver un sentiment pénible sur la position d’un père ,
sur la position de sa fille, par la difficulté d’empêclier que sa fille ne soit
sacrifiée contre le voeu de la nature , contre le sentiment de l’honneur
et de l’honnêteté publique. M ais c’est en s’attachant aux principes im
muables, en reconnaissant que la loi nouvelle n’a pas voulu favoriser
le je u des passions et la licence des mœurs , comme l’observe M .
Portalis , qu’on sera convaincu que les circonstances aggravantes qui
ont amené ces événemens , sont suffisantes pour fonder les motifs d’une
opposition et empêcher ce mariage.
Il n’y a pas de mariage lorsqu’il n’y a pas de consentement, dit
l ’art. 146 du Code civil. Le consentement est l’effet de la volonté ; il
n’y a pas de volonté, s’il n’y a pas de liberté ; il faut donc que la volonté
soit libre. Mais comment reconnaîtra-t-on si la volonté n’est pas libre ?
C ’est une question purement de fait, dont la décision dépend de la preuve;
et on sait que le Code civil n’a rien réglé sur les questions de fait,
qui sont toutes laissées à la sagesse des juges.
L a Dlle. d’Albiat a-t-elle une volonté libre ? la Dlle. d’Albiat peutelle donner un consentement ? Q uelle est sa position ? quelles peuvent
être les suites de ce mariage ?
L ’usage, l ’opinion des Jurisconsultes, la jurisprudence des arrêts, ont
établi des règles fixes pour reconnaître si la v o lo n té n ’est pas libre.
L a Dlle. d’Albiat n’a pas une volonté libre ; cette preuve résulte de
la séduction , elle résulte des circonstances aggravantes, elle résulte de
sa position.
( 1 ) Les preuves sont aussi rapportées dans le résumé sur la captation, p»g.
et elles sont encore établies dans le troisième Acte.
�( 3S )
J’aurai encore recours à l’autorité de M . d’Aguesseau , et je vais vous*
rapporter ses propres expressions.
#
»
n
»
Plaidoyer 19 , tome 2 , page 487.
ii Jamais un plus grand nombre de circonstances pour prouver le
rapt de séduction : minorité , inégalité d’dge , de biens , de conduite ; indignité dans la personne ; une déclaration fa ite par un
mineur aveuglé par sa passion, soumis à la domination de celle
qui l'avait séduit. »
Plaidoyer 7 , tome 2 , page 166.
« S i Vinégalité des conditions ne peut donner atteinte a l'essence
» du mariage , elle sert toujours ¿1 fa ire présumer quun homme
» qui contracte un engagement indigne de sa naissance , n’a pas
» été libre , et que son consentement n a pas été volontaire. »
»
»
»
»
»
Plaidoyer 3o , tome 5 , page 9 °•
« Ic i, qualité de fam ille certain e, minorité constante, inutilité que
F leuri était proche de la majorité ; jusqu’il ce qu’il ait atteint le
dernier m o m e n t de cet âge fa ta l, la Loi présume toujours qu’il a
été séduit : exem ple du sieur B r io n , qui s’était marié majeur ,
et dont la séduction n’avait commencé que deux mois avant la
majorité. »
M êm e plaidoyer , page 92.
« Quoique la séduction soit réciproque , elle n’est pas moins con*
» traire à la liberté du consentement. »
a
V
»
»
»
»
»
»
Plaidoyer 55 , tome 4 , page 691. Dans la cause du sieur de St-Gobert.
« L e seul nom de rapt -su ffi....... il attaque la nature , la lo i , la
religion : la nature, en ôtant cette liberté si précieuse dans tous
les moinens de la v ie ; la lo i , soit qu’il attaque l ’autorité des
pères que la loi a revêtus de toute sa puissance, soit qu’il déshonore des fa m illes par des alliances honteuses , soit parce qu’il
trouble la tranquillité de l ’état par des divisions funestes qui se
perpétuent souvent dans le cours de plusieurs générations ; la religion enfin , puisque la violence ou la séduction n'a pour objet que
la profanation d'un des plus augustes Sa.cremens. »
»
»
»
n
M êm e plaidoyer , page 6^ 5.
a i.° L e rapt de séduction doit etre puni encore plus sévèrement
que celui de v io le n c e , parce qu’on peut résister h la force ; mais
qui peut être assuré de se défendre contre les enchantemens de la
séduction ! Dans le rapt de violence , la personne qui en est
l'objet n'a que le ravisseur a craindre; mais dans le rapt de séduc-
�( 39 )
» tion , elle trouve dans elle-même son plus dangereux et son plus
» redoutable ennemi.
»
»
»
»
»
» 2.0 I l n’est pas même vrai de dire que dans le rapt de séduction
l'on trouve la volonté et le consentement de la personne ravie.
C elte volonté n’est point la sienne , c ’est celle du ravisseur que la
fo r c e de la passion lu i fait suivre. C'est la passion qui v e u t , et
non la raison. L a mesure de la volonté , du consentem ent, de la
passion de la personne ravie, est la mesure du crime du ravisseur.
»
»
»
»
»
» M a is le moyen de se mettre a couvert des artifices subtils , des
insinuations se crète s, des voies sourdes et obliques d'un séducle u r , qui trouve souvent même dans la maison p a tern elle, et
dans les asiles les plus sa crés, des ministres dévoués à sa passion , et prêts à lu i sacrifier ces victim es malheureuses qu’un
père trompé confie à leurs soins ! »
M
e s s i e u r s
,
Ces mêmes règles s’appliquent aux majeurs, lorsque la séduction a
commencé en minorité. Je m’appuie toujours de l ’autorité de M . le
chancelier d’Aguesseau.
Plaidoyer 55 , tome 5 , page i 55.
« S i on lu i avait opposé la majorité , elle aurait trouvé sa réponse
» dans vos arrêts , qui ont ju g é que les règles observées pour les
» mineurs , doivent être suivies quand la séduction a commencé en
n minorité. »
Plaidoyer 36 , tome 5 , page 253.
« M a is si au contraire ce m ariage, quoique contracté par un
» majeur ^ paraissait l effet de la surprise , un ouvrage de ténèbres ,
t> un mystere d’iniquité ; s'il s'était plaint aussitôt après ; s i on ne
» pouvait lu i opposer aucune ratification publique ou particulière-,
» nous croyons alors que sa qualité de majeur ne devrait pas empê» cher de l'écouter. »
M êm e plaidoyer , page 25/f.
« M a is s i les présomptions de la lo i cessen t, celles qu'on tire des
« fa its sont encore recevables ; et comme les majeurs peuvent être
» restitués contre toutes sortes d'actes sur le fondem ent du dol per» sonnel , de même dans les mariages , ils peuvent proposer des
« moyens tirés du dol et de l'artifice, f it encore h plus fo rte raison
}) pour un majeur qui n'a pas 5o ans ; parce que la nécessité de
�( 4° )
» requérir le consentement jusqu'à cet dge , fa it présumer une espèce
» de faiblesse et de minorité ju sq u ’à cet dge. V os arrêts ont jo in t
» une seconde considération à celle que nous venons de vous faire ;
c ’est lorsque la séduction a commencé en minorité.» Arrêt de Brion.
Pothier , tome 3 , page 23 1 , N .° 2 5o , observe que la séduction n'est
pas présumée à l'égard des majeurs , à moins que la séduction n’ait
commencé dans le temps de leur m inorité, de manière que le mariage
contracté en majorité puisse être une suite de la séduction.
L e Concile de T rente ne permet pas le mariage entre la personne
ravie et le ravisseur , tant qu’elle est en sa puissance , quelque con
sentement qu’elle y donne.
L ’ordonnance de i 65g a une pareille disposition. Elle rejette le con
sentement des personnes ravies , veuves ou filles, de quelquage qu’elles
soient , tandis que les personnes ravies sont en la puissance du
ravisseur.
«
L e défaut de liberté de la Dlle. d ’Albiat résulte des circonstances
a g g ra v a n te s , qui sont encore des présomptions plus fortes et plus réelles ,
que celles tirées de la séduction.
L a Dlle. d’Albiat est retenue, depuis l’âge de 18 a n s, en chartre
privée dans la maison Foughasse , par une œuvre d ’iniquité utile à
l ’immoralité , funeste à ma fille. L a Dlle. d’Albiat habite la même
maison que M . de Fontsalive ; la D lle. d’Albiat est sous l’influence de
M . de Fontsalive. Les artifices les plus honteux sont employés pour la
captiver. M . de Fontsalive éloigne la fille de son père , et des parens
de son père. Il profite de son influence sur la mère pour l’entraîner à
rendre une plainte qui peut blesser mes fils , qu’il a intérêt de tenir
éloignés de la ville de Clermont.
Quand des tiers s’introduisent dans des ménages par des intrigues et
contre la volonté du père de famille , on peut dire qu’une famille
honnête est bien à plaindre. Vous retrouverez , Messieurs , de nouvelles
preuves de suggestion dans les actes dits respectueux.
Il résulte de ces faits bien certains, et de la position de la D lle.
d ’Albiat , une preuve que la D lle. d’A lbiat n’a pas une volonté libre ,
et qu’elle n’est pas en état de donner un consentement à son mariage.
J’ai appris , Messieurs , que M.™e d’Albiat avait quitté depuis une
quinzaine de jours l’appartement qu’elle occupait depuis trois ans dans
la maison Foughasse , et qu’elle logeait actuellement avec sa fille dans
.les bâtimens de l’hôpital de St-Joseph ; et j ’ai la certitude que M .mt:
'
d’Albiat
�(40
d’Albiat souffre que M . de Fontsalive fréquente journellement son
habitation.
L es habitudes sont toujours les mêmes. M . de Fontsalive exerce la
même influence ; il ne s’en cachë pas, par les voyages q u 'il‘fait à Riom :
il intercepte toute communication entre ma1 fille 'etfm oi : la situation'
de ma fille n ’a pas changé , et la captation dure toujours.
Je ne vous ai entretenus , Messieurs , jusqu’à ce moment que'de ques
tions de fait , tant sur la volonté libre que sur la validité du consen
tement d’une personne subjuguée en minorité, et dont la séduction a
continué en majorité. .On prétend que ces questions ne sont plus ad
mises depuis le nouveau Code , et que le Législateur a voulu protéger
la liberté du mariage.
Je rapprocherai succinctement les lois anciennes des lois nouvelles ,
sur le m ariage, et j’analyserai leur esprit. J’espère , M essieurs, vous
démontrer que la nouvelle législation est également favorable à l’op
position d’un père dans les circonstances de cette affaire.
Dans l’ancienne législation, une fille ne pouvait se marier avant 25
an s, et un garçon avant 5o ans , sans le consentement de ses père
et mère. L a loi nouvelle restreint cette défense jusqu’à 21 ans pour
les filles, et 25 ans pour les garçons; il n ’y a de différence que dans
un rapprochement d’âge.
.
, .
La loi ancienne enjoignait aux fils ayant atteint l ’âge de 3o ans,
et aux filles l’âge de 25 a n s, de requérir par écrit l’avis et le conseil
de| leurs^ père et m ère, pour contracter mariage , sous peine d’être
exhérédés par eux.
L a loi nouvelle exig e , pour la validité du mariage , que les enfans
de famille demandent le conseil de leurs père .et mère par trois actes
formels et respectueux jusqu’à 25 et 3o a n s, et par un seul acte
depuis a 5 et 5o a n s, pour les filles et fils de fam ille, à peine de
nullité, du m ariage, qui peut être demandée ipar le père, suivant l ’ar
ticle 182 du Code civil , èt de 3oo fr. d’amende et un mois d’em
prisonnement contre l’officier civil qui aurait célébré le m ariage,
suivant l’article iSy du Code civil.
(
« I l nous a paru utile aux m œurs, dit M . Portails , de fa ire
i> revivre cette espèce de culte rendu par la piété f i l i a l e , au carac~
» tère'\de) dignité , et j'o se dire de m ajesté, continue M . Portalis,
» que la nature elle-même semble avoir imprimé sur ceux qui
F
�( 4 * ')
» sont pour n o u s, sur la te r r e , l'im age et même les m inistres dit
7> Créateur. »
L a loi nouvelle est plus favorable à l’autorité des pères j à la
solennité du m ariage, à l’observation rigoureuse .des formes ; elle
n’a retranché que la peine d ’exljérédation, comme contraire à la
nature.
L a loi ancienne ne prononçait pas la nullité du
l’omission de cette formalité.'
mariage pour
L a loi nouvelle regarde , au contraire, la formalité de l ’acte respec
tueux pour demander' le conseil des père et m ere, comme nécessaire
à la validité du. mariaige.
L a loi ancienne exigeait que le consentement fut lib re ; elle déter
minait plusieurs cas où le .consentement ne pouvait pas elre libre.
C ’était une loi im m u a b le ., . commune à tous les contrats, et plus
particulièrement au contrat de, mariage j qui est le premier et le plus
essentiel des contrats. . > b
.i
L a loi n o u v e lle
co n sen tem en t. L a
prononce qu’il ne peut pas y avoir de mariage sans
liberté du consentement est également nécessaire
sous la nouvelle.'législation.
'
,..
, .
Ce principe si11naturel est exprimé d’une manière précise par M .
Portalis. « L e mariage-, dit-il , quels que soient les contractons ,
» mineurs ou m ajeurs, suppose leur consentement ; o r , point de
» consentement proprepiçrit d i t , sans liberté : requise dans tous les
»' contrats , elle doit être sur-tout parfaite et entière dans le
ty mariage. L e cœur doit pour ainsi dire respirer sans g ê n e , dons
» une action ci laquelle il a tant de part : ainsi l'acte le plus
» doux doit être encore l ’acte le plus libre. »
L a loi nouvelle est claire dans ses principes, mais elle es,t toujours
laconique et elle ne précise aucuns faits.
L a liberté du consentement est une question de fa it; la détermi
nation des faits , depuis le Code c iv il, est laissée , dans toutes le s.1
affaires, avec une grande latitude à la sagesse des Juges. Le Codé
civil ne détermine rien en général sur les questions de fait. C ’efct donc "
aux Juges à prononcer s i , d’après la gravité des faits constans de
su^estion en minorité , çt continuée en majorité , le consentefuent
peut être libre.
'
’\
L a liberté du consentement est donc , dans la loi nouvelle,, ce. qu’elle
a été dans la loi ancienne. .
'
�( 43 )
Il résulte du parallèle que je viens de tracer entre la législation
ancienne et les dispositions du Code c iv il, qui même laisse plus do
latitude aux Juges sur les questions de fait t que la liberté du con
sentement est une condition nécessaire et morale dans le nouveau
Code comme dans celui qui l’a précédé ; la seule différence est dana
le rapprochement de l’âge ; et j’en tire la conséquence que , dans lea
questions do fa it, la jurisprudence ancienne doit avoir de l ’influence
sur la décision des tribunaux.
L e nouveau Code n’a pu être assez médité sur lès questions de
mariage. O n a répandu une espèce de croyance, qu’un majeur étant
maître de sa destinée, pouvait contracter mariage malgré l’opposition
du père ; que cette opposition pouvait bien le retarder, mais ne pouvait
en aucun cas l’einpêcher. E t c’est cette assertion fausse et erronée ,
qui. a sans doute entraîné M . de Fontsalive à tout oser, à tout entre
prendre, dans la persuasion où il est et qu’il a manifestée, que l’op
position d’un père ne peut produire, dans aucun cas, aucun efiet pour
empêcher le mariage d’un en fan t, aussitôt qu’il est parvenu à l ’âge
de majorité.
L ’autorité des pères est absolue pendant la minorité des enfans ;
mais , à la majorité d’un en fan t, leur autorité est remplacée par l'au
torité des juges. L ’enfant reste toujours sous la surveillance de son
père par rapport aux mariages. L e père a le droit de stipuler l’in
térêt de son enfant devenu majeur. Il peut invoquer le secours do
la Justice et son appui tutélaire , pour empêcher un en fan t, comme
l’observe M . Portalis, de se précipiter dans des engagemens honteux
ou inconsidérés. Son espoir ne peut être trompé dans le temple des
mœurs.
L e père exerce devant les tribunaux une fonction de magistrature,
semblable à celle qu’exercent les procureurs impériaux dans les affaires
qui intéressent leur ministère. Le père n’a plus le droit de prononcer
lorsque son enfant est devenu majeur; ce droit appartien t aux Juges,
qui deviennent les arbitres souverains du mariage des enfans. Ces
principes ont été adoptés par le Code civil.
L e père est autorisé par la l o i , de former opposition au mariage
de ses enfans; c ’est la disposition précise de l’article 173 du Code
civil. L e père n’est dans le cas d’exercer ce droit , qu’à la majorité
de ses enfans. Ce droit n’est pas accordé à la puissance paternelle ,
à 1autorité paternelle; il est accordé à la tendresse paternelle, à la
sollicitude paternelle. L e père n’a plus d’autorité à exercer sur ses
enfans à leur majorité ; sa puissance est alors finie : M a is leur amour
F
2
�( 44)
et leur sollicitude ne finissent, p a s , dit M . Portalis. Pourrai t-on raisonnoblem ent, dit aussi M . Portalis, refuser aux pères et aux m ères,
a u x aïeuls et. a ïe u le s, le droit de veiller sur l'intérêt de leurs
enfans même m ajeurs, lorsque la crainte de les voir se préci
piter dans des engagemens honteux ou inconsidérés , donne l'éveil
il leur sollicitude 7
' L e droit du père est fondé sur l’intérêt des..enfans. L ’opposition du
père ou autres ascendans, n’est pas limitée à certains cas, comme l’op
position des collatéraux; elle n’est pas limitée à la simple observation
des formes. Les vues du Législateur sont plus ^étendues : le père est le
seul qui puisse faire valoir en son nom l’intérêt de ses enfans devenus
m ajeurs, pour empêcher un mariage honteux ou inconsidéré.
Les lois anciennes au torisaien t les oppositions des pères au mariage
de leurs enfans, mais elles exprimaient les cas qui pouvaient motiver
leur opposition.
L a loi nouvelle autorise également l ’opposition des pères, art.
mais elle n’exprime à leur égard seulement, aucun des cas qui peuvent
motiver leur opposition.
O n prétend tirer du silence de la lo i, là conséquence que l ’oppo
sition d’un père ne peut dans aucun cas empêcher le mariage de
son enfant devenu majeur. Le silence de la loi ne peut pas rendre
sans effet le droit qui est conféré au père , de former opposition au
mariage de son enfant. Ce droit donne nécessairement lieu à former
une action en justice contre le père. O r , si le droit accordé au père
de former opposition à un mariage honteux ou inconsidéré , ne
devait produire aucun e ffe t, ce droit serait alors un présent bien:
funeste ; il ne pourrait qu’indiquer le m a l, sans pouvoir jamais en
obtenir le remède.
Ce droit reste dans toute sa force. L’enfant même majeur est dans
une espèce de tutelle , par rapport au m ariage, tant qu'il a son père
ou autre ascendant; mais il est entièrement maître de sa destinée
lorsqu’il n’a ni père ni ascendant. L e père fait un acte de magis
trature , lorsqu’il stipule les intérêts de son enfant. Le3 Juges sont
investis par la loi du droit de prononcer dans toutes les aflaires sur
les questions de fait. La loi s’en rapporte à leur sagesse; leur pouvoir
n'est pas limité ; et ils sont absolument les maîtres de rejeter ou
d'admettre les oppositions . comme ne pouvant être fondées (pie sur
des faitr. Cependant nous
rechercher dans la pensée
Légis
lateur, ].C3 motifs de la loi.
devons
du
�( 45 )
M on opinion se trouve conforme au rapport fait le 22 mars
dernier , au Corps législatif, par M . N ogarède, d’un ouvrage intitulé,
l’Esprit du Code Napoléon , par M . Locrée , secrétaire général du
Conseil d’Etat.
L ’objet de cet ouvrage, dit M . N ogarède, rapporteur, est d ’ex,
pliquer le sens des nouvelles lois c iv ile s, non par des commen
taires dont on a trop abusé pour soutenir des sy stèm es, mais par
le sim ple développement des intentions du Législateur. L e rapporteur
ajoute : L e nouveau Code c iv il sera compté parmi les causes les
plus puissantes de la gloire et de la prospérité de la France.
T ous les développernens et toutes les applications des lois qu'il
renferm e, se trouvent réunis dans les nombreux élémens qui ont
servi à le fo rm er, et sur-tout dans les discussions dont il a été
l'objet....
C ’est la pensée du Législateur qui doit éclairer la conscience des
Magistrats. La pensée du Législateur est dans le rapport fait de la l o i ,
au nom du Gouvernement, par M . Portalis.
L e s pères et les a ïe u ls, dit M . Portalis, sont toujours magistrats
dans leurs fam illes , lors même que , vis-h-vis de leurs enfans , ils
paraissent ne se montrer que comme parties dans les tribunaux.
Leur tendresse présumée écarte d ’eu x tout soupçon de mauvaise
f u i , et elle fait excuser leur erreur.
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
v
»
»
« Il a ex isté un tem p s, dit encore M . Portalis, et ce temps
n’est pas loin de n ous, où, sous le prétexte de la plus légère
inégalité dans la fortune ou la condition, on osait form er opposition à un mariage honnête et raisonnable. M a is aujourd'hui où
l'égalité est établie par nos lo i s , deux époux pourront céder aux
douces inspirai ions de la nature, et n’auront plus h lutter contre
les préjugés de l'o r g u e il, contre toutes ces vanités sociales qui
mettaient dans les mariages la gêne , la nécessité, e t, nous osons
le dire , la fa ta lité du destin même. On a moins à craindre ces
oppositions bizarres qui étaient inspirées par l ’ambition , ou commandées par l'avarice. On ne craint plus ces spéculations combinées avec tant d 'a rt, dans lesq u elles, en fa it de m ariage, on
s’occupait de to u t, excepté du bonheur. Toutes les classes de la
société étaient plus ou moins dominées par les mêmes préjugés.
L e s vanités étaient graduées, comme les conditions : un carac/ère s u r , dos vertus éprouvées ,J les grâces de la jeunesse , les
charmes de la beauté , tout était sacrifié a des idées ridicules et
m isérables, qui faisaient le malheur des générations présentes ,
et qui étouffaient d'avance les générations il venir, »
�( 40
Vous voyez , Messieurs , que la pensée du Législateur est de repousser
ces oppositions bizarres qui étaient inspirées par l ’ambition ou commandées
par l’avarice ; ces oppositions à un mariage honnête et raisonnable sous
prétexte de la plus légère inégalité dans la fortune ; ces oppositions
où l’on sacrifiait un caractère sûr, des vertus éprouvées , les grâces de
la jeunesse , les charmes mêmes de la beauté, à des idées ridicules qui
étoüffaient d’avance les générations à venir ; ces oppositions où l’on
s’occupait de tout, excepté du bonheur. Deux époux pourront céder
aux douces inspirations de la nature. Voilà les oppositions que le L égis
lateur a voulu rejeter.
Mais suivons M . Portalis ; vous allez connaître la pensée du L égis
lateur toute entière.
D ans le système de notre législation , dit M . Portalis , nous ne
sommes plus exposés aux m ê m e s dangers ; chacun est devenu plus
maître de sa destinée : mais il ne jo u i pas tomber dans l extrém ité
contraire. L e s o u v e n ir de l ’abus que l ’on fa isa it des oppositions aux
mariages des f ils de fa m ille ou des citoj/ ens , n a pas du nous déter
miner à proscrire toute opposition ; nous eussions favorisé le je u
des passions et la licence des moeurs, en croyant ne protéger que
la liberté des mariages.
L e Législateur autorise l’opposition des pères, pour ne pas favoriser
le je u des passions et la licence des mœurs ; pour que les enfans,
comme l’a observé M . Portalis , ne soient pas précipités dans des
engagemens honteux ou inconsidérés. Voilà l’objet que le Législateur
s’est proposé. L e magistrat doit donc recevoir l ’opposition d’un père ,
toutes les fois que les bonnes mœurs sont blessées , toutes les fois qu’un
enfant peut être, victime du jeu des passions, toutes les fois qu’un
mariage est honteux ou inconsidéré.
L es lois reposent sur les mœurs. P lu s boni mores qucim bonce leges.
L e dépôt des lois est confié aux magistrats. L e cœur des magistrats est
le sanctuaire des bonnes mœurs ; le magistrat doit suivre le mouvement
de sa conscience.
Vous ne recevriez pas l’opposition d’un père k un mariage honnête
et raisonnable, sous le prétexte de la plus légère inégalité. Si un père
n'avait aucune raison décisive, vous ne recevriez pas son opposition,
même pour empêcher u n mauvais m ariage, c’est-à-dire, un mariage
où se trouverait la jeunesse sans la fortune, ou la fortune sans la jeu
nesse.
Mais le magistrat recevrait l’opposition d’un père à un mariage
honteux. O r , un mariage serait honteux, si un enfant voulait épouser
�r
( 47 )
quelqu'un qui aurait été flétri ; un mariage serait honteux, si un enfant
voulait épouser celui qui aurait attenté aux jours de son père; un mariage
serait honteux, si un enfant voulait épouser celui qui aurait dénoncé son
père, ou attenté à son honneur par quelqu’injure atroce.
L a novelle 1 1 5 , rapportée par Rousseau-Lacombe et par M . D om al,
autorisait l’exhérédation d’un enfant , si l ’enfant avait attenté à la vie
de ses parens ; s’il avait battu ses parens ; s’il leur avait dit quelque
injure atroce ; s’il leur avait fait quelque outrage ou quelque griève
offense ; s’il les avait accusés crim inellement, et qu’il leur eût occasionné
de grosses dépenses par sa dénonciation ; s’il ne les avait pas secourus,
et notamment en maladie ; s’il ne les avait pas délivrés de prison ; s’il
avait habité avec sa belle-mère.
R suffisait au .père qui avait exprimé plusieurs causes, d’en prouver
une , suivant la même novelle , chapitre 3.
Ce que la loi ancienne permettait au père contre des enfans rebelles
ou ingrats, balanceriez-vous de l’appliquer à un étranger! ne le repous
seriez-vous p a s, sur la demande du père , du sein d’une famille où il ne
s'efforcerait d’entrer que par des moyens aussi criminels? Vous ne voudriez
pas favoriser le je u des passions et la licence des mœurs ; vous ne
laisseriez pas un enfant se précipiter dans des engagernens qui seraient
honteux.
Ces principes trouvent leur application dans la conduite de M . de
Fontsalive, dont je vous ai fait le tableau.
L e magistrat recevrait encore l’opposition d’un père à un mariage
inconsidéré.
L e Législateur donne au père le droit d’empêcher un enfant de se
précipiter dans des engagernens inconsidérés : o r , peut-il y avoir un
engagement plus inconsidéré que celui où la jeunesse d’un enfant serait,
à-la fois sacrifiée à un homme âgé, valétudinaire, sans état et sans fortune ?.
L e Législateur vous dit que ce serait favoriser le jeu des passions et
la licence des m œurs, en croj ant ne protéger que la liberté du mariage.
U n jeune homme dépourvu de fortune, laisse au moins l’espoir
se procurer de l’aisance par un travail assidu ; mais au déclin de la
et avec des infirmités, on ne commence pas un apprentissage,
ii’acquiert pas des ta le n s ;o n reste ce qu’on est; toute espérance
perdue : cest le temps de jouir des tiavaux de sa jeunesse; c’est
temps de se réunir au conseil des sages.
de
vie
on
est
le
Ce mariage est inconsidéré , parce qu’il intervertit les lois de la
�( 48 )
nature ; ce mariage est inconsidéré, parce qu’il est contre nature ; ce
mariage est inconsidéré, parce qu’il répugne à la conscience du père de
fam ille; et j’ose dire que ce mariage est inconsidéré, parce qu’il répugne
à la conscience publique.
L ’opposition du père est recevable non seulement sous le rapport
de la loi ; mais encore elle est nécessaire, dans la pensée du Législateur,
sous le rapport des moeurs, sous le rapport de la société.
T o u t me paraît développé dans les principes de la législation nouvelle
sur les mariages des enfans de famille. Il ne^ peut plus exister de doute
que les pères n’aient le droit de veiller à l’intérêt de leurs enfans
même majeurs , pour les empêcher , suivant les expressions de M . Portalis, de se précipiter dans des engagemens honleuoc ou inconsidérés.
L e Législateur s’est prononcé ; il ne
passions et la licence des mœurs. Les
se rassurer ; ils auront moins à craindre
de leurs conseils et méconnaître l ’utilité
veut pas favoriser le je u des
pères de famille peuvent donc
de voir leurs enfans s’éloigner
de leurs avis.
L a Dlle. d’Albiat ma fille , naturellement timide et réservée, sans
désir comme sans expérience, a resté dans la maison Fonghasse à la
disposition de sa mère. Elle n’a eu d’autre volonté que la volonté de sa •
m ère, d’autres-sociétés que les sociétés de sa m ère, d’autres conseils que
les conseils de sa mère; elle n’a rien calculé, elle était à son âge hors
d’état de calculer ; c’est sa mère qui a tout calculé pendant sa minorité ;
c’est sa mère qui lui a donné les principes qui doivent la diriger; c’est
sa mère qui a conduit ses pas.
M a fille , sans visite préalable, et sans me faire prévenir, se rend
chez m oi, le lundi a 3 décembre, premier jour de sa majorité, à sept
heures et demie du matin, avec un notaire et deux témoins : il faisait
un froid rigoureux ; le soleil n’était pas encore levé ; le temps était'
obscur.
Ce jour mémorable pour elle , et qui lui sera toujours fa ta l, fut flétri
par un acte de violence et d’irrévérence. Il sem ble, par les coups re
doublés qu’on donnait à la porte de mon appartement, qu’elle venait
insulter, le premier jour de sa majorité, à la douleur d’un père.' Elle ne
put entrer chez moi à une heuré aussi indue. Elle revint, le 5 nivôse
ou le 26 décembre dernier, à onze heures du matin, avec M . Chevalier,
notaire, M M . Besseire de Dianne du P uget, et Boubon comme témoins.
M.
�( 49 )
M . Chevalier me remit l ’expédition d’une requête et d’une ordonnance
du Tribunal, du 24 décembre, dont je vais vous faire lecture.....
M . Chevalier, notaire 3 me présenta, au nom de ma fille , un prétendu
acte de respect tout rédigé et écrit par une main étrangère , que je n’ai
point signé, et contre lequel j’ai protesté : je vais vous en faire lecture......
J’ai fait signifier, lçr lendemain 27 décembre , à M . Chevalier, un
acte de protestation contre les deux témoins : je vais aussi vous en faire
lecture..... (1)
Les démarches de la Dlle. d’Albiat ont un caractère d’irrévérence ,
d'égarement, de faiblesse, d’abnégation d’elle-même; elle est absolu
ment subjuguée, elle n’a plus de volonté.
O n a tracé, dans la requête présentée au nom de ma fille, un men
songe avéré. Si ma fille avait cette indépendance que la majorité devrait
donner , aurait-elle signé que je ne donne aucune raison de mon refus
à son mariage ? Q uel que soit le rédacteur de cette requête , elle n ’en
contient pas moins une fausseté, de dire que je ne donne aucune raison
de mon refus. Je 11’ai cessé de donner à ma fille des raisons pour la
détourner de ce mariage, depuis que j’en suis instruit; j’en avais de
trop bonnes pour vouloir les dissimuler, et je n’avais pas intérêt de les
cacher à ma fille. M ais c’est une mauvaise ruse pour chercher à me
donner de la défaveur. Je ne puis que plaindre ma fille d’être trompée
par un entourage aussi perfide.
L e Dlle. d’Albiat se borne à me demander mon consentement, qui
lui devenait nécessaire pour abréger les délais; mais elle ne me demande
aucun conseil ; elle ne se conforme même pas à la requête et à l’ordondance des premiers juges, qui lui prescrivait, suivant ses conclusions, de
me demander conseil. Elle a contrevenu à l ’article 1 5 1 du Code civil.
Cet article s’explique ainsi : « L e s en/ans de fam ille ayant atteint la
» majorité fix é e par l ’art. 148 , sont ten u s, avant de contracter 111a» riage , de demander par un acte respectueujc et form el, le conseil
» de leur père et de leur mère , ou celu i de leurs aïeuls et aïeules,
» lorsque leur père ou leur mère sont d écéd és, ou dans l'impossi» b ilité de manifester leur volonté. »
La loi est précise , elle n’admet aucune équivoque ; le conseil doit
être demandé par un acte, et cet acte doit être formel; il doit en être dressé
procès-verbal, suivant l’article 154, ainsi conçu : « L ’acte respectueux
» sera notifié à celu i ou ceu x des ascendans désignés en l'article 1 5 1,
» par deux notaires, ou par un notaire et deux témoins; et dans le
( 1 ) Les Pièces sont imprimées à la fin.
G
�( 5o )
)) procès-verbal qui doit en être d ressé, il sera fait mention de la
» réponse. »
C ’est le conseil de leur père et de leur mère que les enfans doivent
demander, et non un simple consentement ; ils ont besoin d’élre éclairés,
et ils ne peuvent être éclairés que par le conseil de leur père et de leur
mère.
L a demande d’un conseil tient à l’essence de l’acte; les autres ex
pressions tiennent seulement à la forme de l’acte. La demande du conseil
est commandée p a rla loi; cette demande est de rigueur; cette omission
ne peut pas être réparée.
O n ne peut pas assimiler la demande d un consentement avec c
demande d’un conseil. Les expressions et les eiïets de l ’une ne sont
pas les expressions et les effets de 1 autre. L a demande d’un conseil
tend à éclairer pour parvenir
une détermination ; la demande d’un
consentement suppose au contraire une resolution déjà prise«
L ’une est un acte d’honnêtete , de déférence et d’égards ; l’autre est
un acte de grossièreté, de manquement et d’irrévérence.
Il n’est pas permis de juger la loi ; on doit se renfermer dans ses
propres expressions. Je m’appuie de l’autorité d’un arrêt de la Cour de
cassation, section des requêtes, du 19 frimaire an 14, à l’occasion d ’un
testament déclaré nul. Attendu , dit cet arrêt, que la lo i et la raison
ji admettent d’expressions équivalentes que celles qui sont synonymes
et identiques avec celles ex ig ées par la lo i , qu’ainsi la Cour de
Br(xxellt'sa p u , dans l'espèce, appliquer rigoureusement les dispositions
de l'article 10001 du Code civ il ; re jette, etc.
Je ferai une dernière réflexion. L e conseil ne doit être demandé que
sur le refus de donner un consentement ; et en effet
sur le refus
de donner ce consentement qu’il faut demander ce consèil, qu’il faut
renouveler cette dem ande, est-il dit formellement par l’article i5 a :
donc conseil et consentement n’ont pas la même signification.
Est-ce inadvertance, est-ce oubli de la part de la Dlle. d’Albiat ? Je
vois au contraire qu’elle ne perd pas de vue qu’elle a besoin de conseils,
et qu’elle doit en demander. Elle proteste au sieur d’Albiat son père,
qu’elle se pourvoira par les voies et moyens de droit pour parvenir à
son mariage, d ’après les conseils de la dame Dupuy sa mère et du
surplus de sa fam ille.
L a Dlle. d’Albiat proteste donc à son père qu’elle veut se diriger
d’après les conseils de sa mère , quelle appelle jusqu’à deux fois la dame
Dupuy y et les conseils du surplus de sa famille.
�( 5i )
T oute protestation est une irrévérence de la part d’un enfant qui
doit se borner à demander le conseil de son père, qui doit le méditer,
et attendre le délai de trois mois pour manifester sa résolution. Mais
la Dlle. d’Albiat renonce aux conseils de son p è re , aux conseils des
parens de son père qui n’ont pas voulu donner leur approbation à ce
mariage. Sa résolution est prise ; sa démarche n’est qu’une communication
irrévérencielle de mariage ; elle ne veut se décider que d’après les conseils
de la dame Dupuy sa mère , et du surplus de sa famille : aucun de
ses parens n’approuve ce mariage. Elle n’appelle plus sa mère par le
nom de son père ; elle préjuge d’avance la séparation de corps, qui est
une ouverture au divorce.
Ce n’est pas ici une simple irrévérence ; c’est une révolte audacieuse ,
conseillée par l’immoralité la plus profonde , par ces dévastateurs de
la fortune des familles , par ces amphibies domestiques , ascendans et
descendans , pères et époux, et tout cela à-la-fois.
L a Dlle. d’A lbiat fait l’aveu qu’elle est subjuguée , lorsqu’elle dit
qu’elle se trouve forcée de faire cette démarche ; mais que les avan
tages bien calculés et appréciés par la darne Dupuy sa mère et le
surplus de sa fam ille, sont impérieux dans cette circonstance , et ne lui
permettent point d’abandonner un projet mûri et approuvé par toutes
les personnes qui prennent intérêt à son mariage.
L a Dlle. d’Albiat s’est présentée chez son p è re , le 29 janvier dernier ,
avec M. Chevalier , notaire , Joseph M albet , menuisier , et Etienne
Bezombre , cabaretier , tous les deux comme tém oins, pour faire pro
céder à un second acte de respect dont il m’a été remis un double du
procès-verbal que je n’ai pas signé. Ce procès-verbal était encore en
partie tout rédigé d’avance , et il est en partie écrit par une main
étrangère : en voici la lecture . . . .
L a Dlle. d’Albiat suit dans ce second acte la même marche que dan3
le premier. Elle adhère aux mêmes raisons et motifs exprimés au pre
mier acte du 5 nivôse précédent. Elle ne demande point le conseil
de son p è re , comme la loi l’y oblige ; sa démarche 11’a d’autre objet
que de notifier à son père qu’elle est dans la ferme résolution de
ne point abandonner son projet de mariage.
Ce second acte n’est point conforme à l’art. i 5 i du Code civil. L a
D lle. d’Albiat devait encore se borner à demander le conseil de son
père. Il est irrévérenciel qu’une fille ne se présente devant son père
que pour lui notifier qu’elle est dans la ferm e résolution de 11e point
abandonner son projet de mariage , sur-tout d’après les raisons et motifs
G a
�( 5 2 }
exprimés au premier acte , et de dire encore qu’elle ne veut autrement
se soustraire à l'autorité paternelle, que dans le cas où il apporterait un
plus long refus de se rendre à ses instances ; et enfin , elle déclare
11’elle persiste dans les mêmes intentions. Cet acte est plutôt rédigé
ans la forme d’une lutte d’un enfant avec son père , que dans la
forme respectueuse d’un enfant qui doit demander le conseil de son
p ère, et ne se décider qu’après l’expiration des délais exigés par la
loi.
3
L a D lle. d’Albiat donne encore une nouvelle preuve quelle est subjugée , lorsqu’elle fait l ’aveu qu’il n’est point en sa puissance de renoncer
à cette union.
L a D lle. d’Albiat est revenue le 4 mars dernier chez son père , avec
M M . Chevalier et Chassaigne , notaires. Il m’a également été remis
un double du procès-verbal dressé par les notaires ; je l’ai signé, mais
avec protestation. Ce procès-verbal était en partie rédige d avance , et
il est écrit d’une main étrangère : en voici la lecture.....
L a Dlle. d’Albiat a fini par où elle aurait dû commencer. L e temps
ramène le calme , la réflexion donne un esprit de modération ; et la
D lle. d’Albiat aurait mieux connu ses intérêts, si elle n’avait pas été
retenue dans une maison sous l’influence de M . Fontsalive, et de ses
amis envoyés chez moi avec le notaire pour gêner la liberté réciproque
des communications entre ma fille et moi.
Ce troisième acte est rédigé dans des termes modérés. L a Dlle.
d’Albiat demande les conseils de son père; elle s’est conformée à l’art.
i 5i
du Code civil , elle en reconnaît la nécessité ; mais cet acte est
frappé d’un vice qui doit le rendre nul. L a Dlle. d’Albiat aurait dû
rétracter les deux actes des 2 nivôse et 29 janvier dernier , comme
n ’étant pas respectueux : elle n’en fait rien ; elle déclare au contraire ,
que par les mêmes motifs exprimés aux actes des 5 nivôse an 14 et
2Q janvier dernier , elle persiste à réaliser son projet de mariage avec
ledit sieur Dufreisse de Fontsalive. L ’acte n’est donc pas respectueux ,
puisque la Dlle. d'Albiat adopte les motifs des actes précedens qui
ne sont pas respectueux, et auxquels elle devait renoncer. Sa réponse
à mes observations 11 est pas îespectueuse , lorsque la Dlle. d A lb ia t dit
qu’elle prendra les moyens que kla loi lui indique pour parvenir à son
mariage : c’est vouloir anticiper le temps des épreuves , et annoncer
d’avance qu’on n’aura aucun égard au conseil qui doit être mûrement
médité par un enfant , et la loi prescrit le délai d’un mois. Ce troi
sième acte doit donc subir le sort des deux premiers.
Il semble qu’on cherche à étouffer dès sa naissance les sages dispo
�( 53 )
mettre
sitions d’une loi consacrée à la piété et au respect filial. O n veut
en parallèle avec la loi , des formules praticiennes rédigées depuis
plus de 3o ans.
Les lois de 3o ans ne sont pas les lois d’aujourd’hui. Les somma
tions respectueuses n’étaient pas nécessaires pour la validité des mariages;
elles n’élaient nécessaires que pour garantir les enfans de l’exhérédation.
Elles n’étaient devenues qu’une simple formalité , et un acte pour
ainsi dire conservatoire. Les juges évitaient d’ailleurs de prononcer
l ’exhérédation , comme contraire à la nature. Les pères n’avaient pas
intérêt de contester contre ces sommations.
M ais aujourd’hui l’acte respectueux a un but plus m oral, plus direct
au père , plus essentiel au mariage. L ’acte respectueux a un but d’utilité
pour l’enfant, qui doit demander le conseil de son père. L ’acte respec
tueux ne peut plus être éludé ; il ne doit donc pas être assimilé aux
sommations respectueuses prescrites par les anciennes lois. N e cherchons
donc pas à ternir la moralité conservée dans nos lois nouvelles, par des
formes usées sous les lois anciennes. Il faut savoir marcher en juris
consulte , c’est-à-dire en homme éclairé , et non en simple praticien
ou en homme qui ne connaît que la routine des formes.
Il a été rendu par la Cour de Bordeaux , le i 3 frnctidor
an i 5 , un arrêt rapporté dans le Journal de Sirey ( i ) , au sujet
d’un acte irrévérenciel ; je vais vous donner lecture de l’extrait
que j’en ai fa it ............. L ’acte fait par la fille à ses père et mère
est ainsi conçu : Laquelle adressant le présent acte à sesdits père et
m ère, leur a dit qu'étant dans la ferme résolution de devenir l'épouse
du sieur l Jierre-3ia rc B ....... et ne pouvant y parvenir sans au préa
lable leur fa ir e des actes respectueux , conformément à ce qui est
prescrit par le nouveau Code , lu i ayant constamment refusé leur
consentement ; elle les prie , les requiert avec tout le respect qui leur
est du , et les somme en tant que de besoin, de vouloir bien consentir
qu'elle s'unisse avec led it sieur B . . . . . , leur déclarant que dans le
cas où ils persisteraient dans leur refus , elle agira de même et
comme s’ils lu i avaient donné leur consentement ; pour quoi elle pro
teste de tout ce q u e lle peut et doit protester de ja it et de droit.
Réponse du p è re , qui ne veut pas de ce mariage déshonorant, avec
un homme qui a abusé d’un caractère sacré pour séduire sa fille.
Dires du défenseur d es’ père et mère : E lle les a sommés de con-
5
(i) An i , tome
4 > décisions diverses ,
page i
85.
�( 54 )
sentir a son mariage ; elle leur a annoncé qu'elle, était résolue a
le contracter , et qu'elle passerait outre nonobstant leur refus;
e lle s'est permis de faire contre eu x des protestations ; loin d ’avoir
demandé des conseils , elle leur a implicitement déclaré qu’elle saurait
§’en passer, ou quelle était résolue à n ’y avoir aucun égard. Ainsi la
puissance paternelle , les égards que la nature et la loi commandaient,
ont été méconnus.... L ’arrêt rendu , considérant que l’art. 1 5 1 n’autorise
pas les enfans à dresser des sommations........ déclare les actes dits
respectueux , nuls.
U n arrêt rendu par la Cour d’appel de Rouen, du G mars 1806, déclare
des actes de respect suffisans et respectueux,. quoique le mot sommé se
trouvât dans les actes ; mais M . Bnère , s u b s titu t du procureur-général,
qui a pris des conclusions conformes à l’arrêt,.a observe que dans l’espèce
de l’arrêt de Bordeaux, on voit une filie rebelle aux douces insinua
tions de l’amitié paternelle, qui refuse de voir son père avant les actes
respectueux, quoiqu’il l’en ait tendrement soilicitee. D ailleurs, les actes
de cette fille n ’é t a i e n t rien moins que respectueux ; ils contenaient des
expressions a n n o n ç a n t du dédain pour son père , et de l ’affectation
à le braver.
Vous devez vpir , M essieurs, par l’ensemble de ces actes , combien
ma fille est subjuguée, combien elle est trompée.
L e langage , le style des conseils de la Dlle. d’A lb ia t, prouve qu’on
veut exercer la persécution sur ma fille comme sur m o i, et qu’on veut
la sacrifier. Il semble même qu’on ne la dirige que pour la précipiter dans
un abyme de maux.
O n a la noirceur de lui faire déclarer dans un acte public , qu’elle se
trouve forcée de faire cette démarche ; que les avantages sont impérieux
dans cette circonstance , et ne lui permettent pas d’abandonner ce
projet. O n lui fait encore répéter , dans le second acte, qu’il n’est point
en sa puissunce de renoncer à celte union.
M a fille est donc forcée , elle est subjuguée , puisqu’il n’est pas en
sa puissance de renoncer à cette union. Sa volonté 11’est donc pas libre.
Il est vrai qu’elle est retenue en chartre privée depuis trois ans ; qu’on
l ’a éloignée de mes conseils et de ceux de mes parens. Cette décla
ration commandée est d’une impudeur réfléchie et atiectée. Les perfides
conseils de ma fille sont moins occupés de ménager son honneur, que
d ’assurer à M . de Fontsalive une possession qui ne puisse pas lui
échapper.
Je trouve encore dans ces actes prétendus respectueux , une preuve
que M . de Fontsalive a fréquenté la société de la dame d’A lbiat et
�( 55 )
de sa fille. O n Fait déclarer à m t file , dans le premier acte , que les
rapports du caractère de M . de Fontsalive avec le sien, et sa délica
tesse et honnêteté , qui lui sont bien connus, ne peuvent que la fortifier
dans ses premières intentions ; dans le second acte , qu’elle croyait
trouver dans cette union son bonheur, par une sympathie d’humeur et
de caractère. L a Dlle. d’Albiat n’a pu acquérir cette connaissance de
caraclère et de sympathie, que par une fréquentation ancienne et habi
tuelle. T o u te preuve testimoniale me devient inutile.
Je vois encore la preuve que cet arrangement s’est depuis long-temps
concerté avec la mère , puisqu’on fait dire à ma fille que les avantages
im périeux, dans cette circonstance, ont été calcules par la dame D u p u j
sa m ère, et qu’elle se pourvoira par les voies et moyens de droit, d’apres
les conseils de sa mère. E t en effet, M . Dufreisse l’aîné avait été chargé
en mon absence , il y a un a n , ma fille étant encore mineure, de parler
à M . Chabrol de Iliom , de ce projet de mariage , pour en obtenir son
approbation.
Vous voyez actuellement, M essieurs, que M . de Fontsalive n’a
répandu contre moi la diffamation , que pour me repousser de la
maison Fonghasse, moi qui suis le père de famille ; pour ravir ma fille
à ma surveillance qui lui était incommode , pour la fréquenter contre
mon gré , contre ma volonté expresse , pour la tromper , la réduire à
un état de langueur , de misère , et en faire sa garde-malade. Une
mort prochaine sera la plus belle perspective qu’elle puisse attendre.
Fille malheureuse et trompée , ô ma fille ! j’ai voulu garantir ta jeu
nesse des écueils qui te menaçaient. J’ai réclamé la sûreté de ta
personne ; pouvais-je développer un caractère plus honnête ? pouvais-je
taire un acte plus moral ? Je remplissais un devoir religieux ; j’en ai
été puni. J. u as ete livrée contre ma volonté paternelle ; tu as été
laissée a la disposition de celui qui subjugue ton esprit, tu es menacée
de devenir sa victime; et pour que tu n ’échappes pas à ses intrigues ,
des conseils perfides et complices veulent te iaire dire qu’il n’est pas
en ta puissance d ’y renoncer.
L a conduite de la Dlle. d’Albiat deit vous paraître bien répréhen
sible , d’après les actes que je viens de vous analyser ; rassurez-vous ,
Messieurs; rassurez-vous, pères de fam ille; la Dlle. d’Albiat s’est bornée
me demander mon consentement
son mariage , mais pour le sur
p lu s, elle ne m’a rien dit de tout ce qu’on lui fait dire, elle n’a rien
observe de tout^ ce qu’on lui fait observer. C ’est une énonciation con
traire à la vérité. L a preuve de ce que j’avance est consignée dans ces
M.
a
actes mêmes.
à
Chevalier , notaire ? s’est présenté chez moi avec des
�( 56 )
actes écrits , et ces actes ne sont pas même écrits par M . Chevalier ;
il est donc prouvé qu’il n’est point le rédacteur des observations que l’on
prétend que la Dlle. d’Albiat m’a faites. Ces actes ne sont pas de simples
actes recordés ; c’est un procès-verbal que le notaire doit rédiger , suivant
l ’article i /j . du Code civil.
5
Q u ’est-ce qu’un procès-verbal ? U n procès - verbal est un écrit qui
contient l’exposé fidelle de tout ce qu’un fonctionnaire public a vu ou
entendu. U n procès-verbiil devient alors le miroir de la vérité, qui doit
réfléchir sur tous ceux qui veulent s’en servir , de la même manière
que sur l'officier public qui a tout vu ou tout entendu. Ce ne sont pas là des
idées métaphysiques , ce sont des idées simples et claires. O r, un juge
ne dresse procès-verbal d’un corps de d é lit, que parce qu’il l’a vu ;
un iu^e ne dresse procès-verbal de la déposition des témoins, que parce
qu’il a entendu la déposition des témoins : il no dresse procès-verbal
que de ce qu’il a vu ou entendu. Q uelle confiance auriez-vous à un
fonctionnaire public qui doit vous attester par son écrit ce qu’il a vu ou
entendu, et q u i c ep en d a n t n’a rien écrit ni rien fait ecrire en sa présence
au m o m e n t de ce qu’il a pu avoir vu ou entendu ? L a signature du témoin
sera it insuffisante , puisque le fonctionnaire public doit transmettre par
son procès-verbal la vérité comme il l ’a vu ou entendu.
O n ne doit pas confondre, dans un procès-verbal , ce qui tient à la
forme avec ce qui tient à l’essence de l’acte. Ce qui tient à la forme
est du fait du notaire ; ce qui tient à l’essence de l ’acte est du fait
des parties. O r , il est indiffèrent d’écrire d’avance et hors de la présence
des parties, tout ce qui tient à la forme ou au préambule de l ’acte. J’ajou
terai encore que tout ce qui est du fait d’une des parties seulement, pourrait
encore être écrit d’avance ; cela pourrait être une irrégularité , cela
pourrait être une preuve de suggestion, mais ne serait pas un faux.
A u m o m e n t où les deux parties sont en présence; au moment où un
enfant fait à son père ou un exposé ou des observations , pour me
servir des termes mêmes de ces actes ; au moment où commence la
conférence entre le père et l’enfant, le fonctionnaire public écoute ,
le fonctionnaire public constate par son écrit ce qu’il a entendu, ou
plutôt il en dresse procès-verbal , et son procès-verbal doit faire foi :
il ne peut pas lui être permis d’écrire au - delà de ce qui a été dit.
JVL. Chevalier , notaire , a
écouté , a-t-il entendu , a-t-il écrit ou fait
écrire en ma présence le procès-verbal qu’il devait dresser? M . Chevalier »
notaire , n’a point écoute , puisque ma fille n’a rien dit ; M . Chevalier
n’a rien entendu, puisque ma fille a gardé le silence ; M . Chevalier n’a
rien écrit ni fait écrire eu ma présence , puisque son procès - verbal était
écrit par une main étrangère , et avant d’arriver chez moi.
M.
�( 57 )
M . Chevalier n’a rien entendu, M . Chevalier n’a rien écrit; et il est
absurde qu’il veuille attester par sa signature que le procès-verbal des
actes dits respectueux est son ouvrage , qu’il a entendu, qu’il a dressé
procès-verbal, ou écrit avoir entendu. 11 ne peut pas y avoir procèsverbal de la main d’un notaire qui n’a pas écrit. 3YI. Chevalier a donc
faussement certifié avoir dressé procès-verbal, puisqu’il n’a pas écrit la
partie du procès-verbal que j’atlaque comme contraire à la vérité.
On a dicté et écrit d’avance ce que la Dlle. d ’Albiat devait dire à son
père; et ma fille n’a pas eu l’impudeur de me le dire; M. Chevalier n’a
pas eu la peine de l’écrire : ce n’est donc qu’un procès-verbal fait sous la
cheminée.
U n pareil procès-verbal ne pèut pas être considéré comme un procèsverbal de forme, qui reçoit une authenticité suffisante par la signature
de la partie requérante et du notaire.
U n pareil procès-verbal est de rigueur. Il doit recueillir scrupuleux
sement les paroles d’un enfant , afin que la Justice puisse avoir la
certitude que la démarche de l'enfant a été respectueuse.
U n conseil peut bien sans doute régler d’avance ce qu’un enfant doit
dire à son père ; mais il est dangereux d’en préparer d’avance l’acte ,
dans l’incertitude si l ’enfant osera s’exprimer de la même manière ; parce
que l’acte devenant l ’ouvrage du notaire, ne doit attester que la vérité de
ce qui se dit et nondeeequi doit se dire. Mais ne serait-il pas plus simple
de laisser à un enfant la liberté de s’exprimer naturellement ? Son cœur,
son éducation son habitude le porteront toujours à parler avec respect;
et il écoutera avec plus de confiance les conseils de son père. U n
conseil étranger gale tout ; un conseil inspire quelquefois à un enfant
la révolté , flatte ses passions , entretient ses erreurs, et ne conserve la
confiance que par la défiance qu’il donne.Quoique cet inconvénient n’existe
pas toujours , il s’est réalisé dans cette circonstance. M a fille dirigée
par elle-même a été réservée et décente ; ma fille dirigée par ces actes
qui étaient l’ouvrage de ses mauvais conseils , a été irrespectueuse.
U n énoncé faux n’est pas toujours criminel.. Il n’est pas criminel
lorsqu’il est matériel ; il est simplement matériel lorsqu’il ne peut pas
nuire à un tiers. Cette fausse énonciation est nuisible. lille prépare ma
fille a commettre une action mal-honnête et irrévérencielle envers son
père ; elle est donc nuisible. Cette fausse énonciation prouve la sug
gestion ; M . Chevalier s’en rend complice ; elle est donc nuisible. Cette
Fausse énonciation suppose l’irrévérence commise par un enfant envers
son père ; l’irrévérence d'un enfant envers son père est contraire à la
nature t est contraire a l lionnetete publique ; cette fausse énonciation est
H
�< 58 > _
donc nuisible. Celte fausse énonciation arrête 1élan du sentiment ,
étouffe la pensée , gêne la liberté de s’exprimer naturellement , détruit
les heureux effets d’une communication entre le père et l ’enfant ; cette
fausse énonciation est une fraude aux dispositions de la loi; elle est
donc nuisible. T o u t ce qui est nuisible doit être réparé : ces actes
doivent donc être rejetés.
Ces actes sont nuls dans la forme ; ils n’ont point ce caractère suffisant
d’authenticité, comme ayant été rédigés d’avance , et par une écriture
étrangère à celle du notaire.
L es actes des 5 nivôse et 29 janvier derniers sont nuls au fonds ; ils
ne font aucune mention de la demande que devait faire la Dlle. d’Albiat
du conseil de son père , conformément au texte formel de l’art. i 5 i du
Code civil.
Les actes des 5 nivôse , 29 janvier et 4 mars derniers sont encore
nuls au fonds, comme n ’étant pas respectueux , et ne contenant que
des protestations ou renonciations de la Dlle. d’Albiat aux conseils de
son père , pour s’en tenir à ceux de sa mère, qu’elle appelle la dame
D upuy. Ces actes n ont d’autre effet que de prouver que la Dlle. d’Albiat
est subjuguée, et qu’elle n’a pas une volonté libre.
Les moyens de captation ont été préparés d’avance, et sont prouvés
par les actes mêmes.
L e projet de mariage était arrêté depuis trois ans , et lorsque ma
fille n’avait que dix-huit ans ; ce fait est constaté par le jugement dont
est appel. Je n’en ai été instruit que deux ans après , et postérieu
rement a l’arrêt du 11 fructidor an 12. Le père a été éloigné ; la fille
a été laissée a la disposition de sa mère dans la même maison où M.
de Fontsalive avait fixé sonlogement. Si vous aviez pu connaître cet état de
choses qui est aujourd’hui avoué , vous 11'eussiez pas rendu l’arrêt du
11 fructidor, surpris à votre justice par une mère qui vous laissait ignorer
ses secrètes intentions.
Ce mystère ténébreux a fait le malheur d’un père qui doit actuellement
vous être mieux connu. C elle intrigue sourde prouve jusqu'à quel point
la captation a été préméditée.
Cette captation résulte de la précipitation qui a été mise à faire ces
actes , sans en prévenir le père , sans prendre l’avis d’une famille, sans
mettre aucun intervalle entre la minorité et le temps de la majorité , sans
laisser quelques inslans à la méditation , sur-tout dans un moment
où la dame d ’Albiat djvait recueillir une succesiion de plus de soixante
mille francs.
�( 59 )
L a captation est prouvée par la précautiori qu’on a prit d’envoyer
pour témoins M M . de Dianne du ro u g e t, et Bouben , intimes amis
de M . de Fontsalive, et qui paraissent n’avoir été choisis que pour
circonvenir la Dlle. d’Albiat et violenter son père , dans le moment
même où il devait exister une grande indépendance. Cependant la
D lle. d’Albiat aurait dû çtre éloignée de l’influence de M . de Font
salive, au moment d’un acte qui devait être libre et respectueux*
L a captation résulte de l’acte que j’ai fait signifier à M . Chevalier,
notaire, le lendemain 6 nivôse , contenant mes protestations contre le
choix de ces deux témoins, comme intimes amis de M . de Fontsalive,
et notamment contre M . de Dianne du Pouget, un des habitués de la
maison F on g ha sse, pour avoir fait des interruptions désagréables audit
d ’A lb ia t, et avoir manifesté une contradiction sur des ïaits positifs ,
avancés par ledit d’Albiat à sa fille; attendu qu’il ne pouvait exister
de communication libre entre ledit d’Albiat et sa fille , en présence
de témoins intimes amis de M . de Fontsalive.
L a captation est prouvée par la précaution qu’on a prit d’écrire
d ’avance ce qu’on voulait faire dire à ma fille.
L a captation est prouvée par. le silence de la D lle. d’Albiat en pré
sence de son père.
L a captation est prouvée par les actes mêmes , où il est dit que
la Dlle. d’Albiat est forcée de [faire une démarche qui porte avec
elle le caractère d ’une désobéissance, mais que les avantages bien
calculés et appréciés par sa mère , et qui sont impérieux dans cette
circonstance, ne lui permettent pas d’abandonner ce projet ; qu’elle
regrettait de ne pouvoir se rendre aux vœux de son p e re , mais qu’il
n’etait pas en sa puissance de renoncer à cette union.
L a captation est prouvée, lorsqu’on fait dire dans ces actes, contre
les règles immuables de la nature, que la Dlle. d’Albiat croit trouver
dans cette union son bonheur, par une sympathie d ’humeur et de
caractère, malgré que les goûts et les jouissances des jeunes per
sonnes sympathisent peu avec ceux des gens âgés et valétudinaires.
L a captation est prouvée par la continuité de co-habitation de M . de
Fontsalive dans la même maison , par la fréquentation habituelle de
M . de Fontsalive avec la D lle. d’Albiat.
Cette captation est attentatoire à l’arrêt du n fructidor an 12,'
puisque M . de Fontsalive n’a pas respecté l’asile de la fam ille, contre
la volonté du père de fam ille, exprimée publiquement à votre audience
comme devant les premiers Juges.
H a
�( 6o )
Cette captation est encore une violation manifeste à l’arrêt du n
fructidor an 12 , puisque M . de Fontsalive a interrompu l’éducation
que la Cour avait commandé à la dame d’A lbiat de donner à sa
fille.
Cette captation n’a laissé à la Dlle. d’Albiat aucune faculté à la
réflexion , aucune liberté pour faire des actes respectueux. Cette cap
tation serait seule un m otif suffisant pour annuller les actes qui m’ont
été faits.
O n a employé des moyens violens pour parvenir à la captation.
a bravé la puissance paternelle en tr o m p a n t votre justice. O n a
bravé la Justice en abusant de votre arrêt. M . de Fontsalive a bravé
l ’honnêteté publique en se fixant dans la même maison , sous le meme
to it, et à la suite de l ’a p p a r t e m e n t quoccupait la Dlle. d’Albiat. L a
décence et l’honnêteté publique ne lui permettaient pas de fréquenter
l ’habitation où la Dlle. d’Albiat avait été mise en dépôt par autorité
de justice, s u iv a n t la disposition des arrêts , et les maximes établies
par M . l’Avocat-général Gilbert de V oisins, portant la parole lors
d ’un arrêt du 8 mai 1 7 4 1 , cité par D en isart, au mot m a ria g e,
N .a 190. Ce Magistrat requit d'office la défense aux parties de se
fréquenler , malgré que le mariage déclaré nul par défaut de form e,
parût sortable.
On
L a pensée se reporte naturellement sur la dame d’Albiat. Je voudrais,
M essieurs, pouvoir vous dissimuler , je voudrais me dissimuler à moimême les reproches bien plus réels que j’ai le droit de lui faire ,
que la Justice doit lui faire. Sa fille était confiée à sa garde ; elle
l ’ava it obtenue contre la volonté du père de famille , contre la décision
des premiers Juges. Seule et unique régulatrice des pensées, des
v o lo n té s de sa fille qui lui était soumise , dévouée et assujettie par
la nature de son caractère et de sa position, elle d evait, suivant les.
expressions de l’Edit de 1 56o , lui rendre le double office de père et
de mère ; et cependant elle l’abandonne , elle néglige de la surveiller ,
elle souffre des assiduités, des fréquentations continuelles. ÜYlais }
Messieurs , ce qui vous paraîtra incroyable et ce qui est peut-être
sans exemple , 011 ne cherche pas même à recouvrir la dame d A lb ia t
du voile du mystère, à la soustraire aux soupçons qui peuvent s’élever
contre e lle , à l’excuser sur les présomptions et les probabilités qui
sont constantes ; on l ’associe , contre l ’usage reçu , à ce projet de
mariage et aux moyens d’exécution. On a fait enfin l’aveu à l’audience
du Tribunal de' Clerm ont, que ce projet de mariage était arrêté
par la 'dame d’AIbiat depuis trois ans , et avant la moit de M me.
�( 61 ? ,
de Vernines la m ère, qui en avait été instruite et avait donné son
consentement.
Q uelle étrange révélation ! Je l ’ai appris pour la première fois à
l ’audience du Tribunal de Clermont. Q uel mystère ténébreux ! J'ai
vécu dans la maison Fonghasse plus d’un a n , et la dame d’Albiat
ne m’en a jamais rien dit. Q uel concert affreux ! M . de Fontsalive
qui déjà était adopté par la dame d’A lbiat, méditait ma ruine. Q uel
aveuglement ! La dame d’Albiat demandait à la Justice que sa fille
lui lut confiée , et elle ne voulait que préparer les liens d’un mariage
déjà arrêté. Q uel égarement ! L a dame d’Albiat éloigne la défiance
que j’élevais contre M . de Fontsalive , en le désignant en la Cour
sous un âge avancé : elle ne voulait que ravir sa fille à la surveillance
de son m ari, la laisser sans conseil comme sans appui, sous l’influence
d ’un homme qui doit faire son malheur.
Les droits d ’un père ont été méconnus ; un enfant est clandestine
ment sacrifié ; la Justice est trompée. Je ne vois pas , M essieurs, qu’il
soit possible d’imaginer une combinaison plus outrageante pour un
p ère, plus désastreuse pour un enfant ; et on ose venir à une audience"
en faire l’aveu. Q ue de réflexions ne pourrais-je pas faire ! mais j’ai
le cœur trop serré.
C ’est la mère qui a m édité, réfléchi et calculé, pendant la mino
rité de sa fille , les avantages impérieux de cette union. C'est la mère’
qui a donné des conseils ; c’est la mère qui , pendant la minorité a
donné son consentement, malgré le refus du père de donner le sien.
L a dame d’Albiat devait préalablement en délibérer avec moi, puisque"
j ’habitais alors avec elle. L a loi lui imposait l’obligation de concerter
avec son mari le consentement qu’elle voulait donner à ce mariage,
et qui aurait dû être produit avant les actes de respect ; c ’est ce qui
résulte de l’article 148 du C o d e, qui porte qu’en cas de dissentiment,
le consentement du père suffit.
Si la dame d’Albiat avait eu les ménagemens que sa position et la
mienne semblaient commander ; si elle avait voulu connaître l’opinion
du père de famille , et de la famille entière, avant de se d écid er,
elle aurait mieux calculé, et elle ne se croirait pas forcée de conduire
sa fille , comme une victim e, à l’autel.
C ’est daiis l’âge de la faiblesse, c’est dans lage de l ’inexpérience,
c’est pendant sa minorité que ma fille a été égarée par les faux
calculs de sa mère; c’est pendant sa minorité et depuis l ’âge de dixliuit a n s, qu’elle est trompée par les conseils de sa mère ; et on ose
en faire l’aveu.
U ne mère révoltée contre la puissance m aritale, même dans le
moment le plus important de la v ie , ne peut que faire de mauvais
calculs, et ne donner que des conseils irréfléchis à ses enfans.
�( 62 )
T o u t est donc éclairci dans cette cause , sans avoir recours à des
témoignages timides ou suspects. On n’a donné l’épouvantail de crimes
im aginaires, invraisemblables , que pour exécuter des crimes trop
réels , des crimes prouvés. Je me plais à répéter , que Dieu ne
permet pas toujours que le crime puisse long-temps triompher. L e
complot est à la fin découvert , même lorsqu’on peut encore le
réparer.
Dans quelle situation ne me jettent pas les agens de la dame d’A lbiat,
lorsqu’ils réduisent un père malheureux à la cruelle nécessité de
confier au public l’histoire des malheurs de sa famille , pour sauver
sa fille de malheurs qui seraient irréparables ! La dame d’Albiat est
dans leurs mains un instrument^ qu’ils tournent à leur fantaisie ,
suivant leurs caprices, leur in teiêt, leurs passions. L a conduite de
toute ma vie est le reproche de la leur. Ils veulent envelopper et
anéantir une famille qui a une antique possession d é ta t, une antique
possession d’honneur et de probité qui ne se sont jamais altérés.
Epouse faible et trompee , mère credule et im prudente, dis donc
où t’ont c o n d u it jusqua présent les conseils, tes agens, ton entourage
et tes éclats. Vois la position où tu places ton mari, vois celle que tu
destines à ta fille, vois ta position même. Q ue penses-tu? quel est ton
bu t ? C ’est en t’éloignant de ton m ari, c’est en te privant de ses conseils
que tu as ouvert cet abyme de maux. 11 en est temps encore , reprends
le rang qui convient à ton époux, à ta famille , à tes enfans, au nom
que tu portes. Songe que la qualité d ’épouse est s i honorable, dit
M . Fortalis, q u e , suivant l'expression des anciens , ce n'est point la
volupté , mais la verlu , l'honneur même qui la fo n t appeler de ce
nom. .
i
JJxorem digm talis nomen e s s e , non voluptatis.
Messieurs , la loi vous a revêtus d’un grand pouvoir ; vous allez
donner un exemple mémorable qui va influer sur la morale publique.
Chaque père de famille attend avec une inquiète sollicitude votre dé
cision. Vous ne favoriserez point le je u des passions et la licen ce
des mœurs; vous ne souffrirez pas que des hommes sans fortune s’in
troduisent impunément dans les ménagés pour y porter le trouble et la
désolation; vous resserrerez davantage le lien des familles; vous proté
gerez l'esprit de fam ille contre l'esprit de so ciété, contre les calculs
de la séduction, contre les intrigues ourdies dans l’ombre d’une société
mal assortie. L/outrage préparé avec art sera vengé ; vous maintiendrez
les bonnes m œurs, et l ’autorite paternelle qui les défend.
S ig n é
d’
A l b ia t .
�( 63 )
COPIES
DES
ACTES.
Aujourd’hui cinq nivôse an quatorze , vingt-six décembre dix huit cent
cinq , heure de onze du matin ; en conséquence de l’ordonnance de
M . le Président du Tribunal civil de Clermont-Ferrant, du trois du
présent, étant au bas de la requête à lui présentée le môme jo u r,
et annexée à la minute des présentes, en la présence et assisté de
M .e C hevalier, notaire en ladite v ille , commis par ladite ordonnance,
et des témoins ci-après nommés, soussignés, la Dlle. Claire-Joséphine
d ’A lb ia t, fille m ajeure, habitante de ladite ville de Clermont, s’est
transportée en la demeure de M . Jacques-Pierre-Marie-Anne d ’A lbiat
son père , ancien Procureur du Roi en la ci-devant sénéchaussée de
ladite ville , y habitant; où étant, et parlant à sa personne,
Ladite Dlle. d’Albiat a exposé qu’elle se propose de contracter ma
riage avec M . Joseph-Guillaume Dufreissede Vernines-Fontsalive, majeur,
habitant de la même ville; que le refus de son père d’y ‘consentir lui
devient d’autant plus pénible, qu’elle se trouve forcée de faire une dé
marche qui porte aven elle le caractère d’une désobéissance; qu’elle eût
bien désiré tenir de lui la faveur que lui accorde la loi du a 6 ventôse
au i i , articles i 5 r et 1 5a ; il lui eût épargné le désagrément d ’un acte
qu’elle craint autant cpi’il répugne à son cœur ; mais que les avantages
bien calculés et appréciés par la dame D u p u j sa mère et le surplus
de sa famille , sont impérieux dans cette circonstance , et ne lui per
mettent point d abandonner un projet'm ûri et approuvé par toutes les
personnes qui prennent interet à son mariage : en conséquence, qu’elle
priait et suppliait respectueusement sondit père de se rendre à ses ins
tances , et de joindre son consentement à celui dp ladite dame Dupuy
sa m ère, nécessaires à son mariage avec ledit sieur Dufreisse de Vernines.
( ci-dessus écrit d'avance et non par le notaire) (i). Ladite Dlle. d ’Albiat
a signé, avec les sieurs Jean-Baptiste de Dianne du P ouget, et Antoine
Bonbon, tous propriétaires liabitans de cette ville, témoins présens au
présent acte ; avec nous Chevalier , notaire, qui avons donné lecture
d ’icelui.
d ’A l b i a t , d e
D ia n n e
du
P o u g e t , B oubon.
C H E V A L IE R .
(i)'Voyez, pages 55 et suivantes.
�( 64 )
L e sieur d’Albiat a observé que l’acte est incom plet, puisqu’on no
lui donne pas l’âge précis de M . Dufreisse-Fontsalive, qu’il lui est essentiel de connaître ; et au surplus, sous toutes réserves quelconques,
il a répondu qu’ayant consulté sa fam ille, et conformément à sou avis
unanime, il ne p e u t, ne d o it, ni ne veut donner son consentement à
ce mariage : d’ailleurs il observe qu’il ne peut y avoir de mariage lorsqu’il
n’y a pas de consentéftient; qu’il ne peut y avoir de consentement libre
lorsqu’il y a séduction ; qu’on ne peut pas vouloir ce qui est essentiel
lement nuisible.
« E t attendu que ladite Claire-Joséphine d’Albiat sa fille, est depuis long
temps subjuguée par des péfrsonnes qui ont abusé de sa faiblesse pour prendra
et'exercer sur elle un ascendant et une domination qui l'empêchent
d ’avoir d ’autre volonté que la l e u r , ledit sieur d’Albiat se réserve de
former opposition audit m a r i a g e , et de fahe valoir ses causes et m oyens,
ûvec protestation contre ca qui peut et doit être protesté. Et a déclaré
ne vouloir signer sa réponse, de ce enquis et interpelle.
Ladite D lle. d’Albiat proteste audit sieur d’Albiat son p ère, que sans
avoir dessein de manquer au profond respect et à la reconnaissance
qu’elle lui d oit, elle se pourvoira par les voies et moyens de druit pour
parvenir à son mariage , d'après les conseils de sa mère et du surplus
de sa famille; attendu qu’elle n’ignore pas que M . Duireisse-Fontsalivo
est plus âgé qu’elle , mais que les rapports de son caractère avec le
sien, et sa délicatesse et honnêteté, qui lui sont bien connus, ne peuvent
que la fortifier dans ses premières intentions. Desquelles sommations ,
réponses , déclarations et protestations, elle nous a requis a cte , que lui
avons octroyé lesdits jour et an. E t a été laissé audit sieur d A lbiat
copie çollationnée de la requête et ordonnance sus-énoncées, et des
présentes signées de nous et des témoins. Fait et clos et passé en la
maison dudit sieur d ’A lb ia t, à l’heure dç m id i, après avoir donnô
lecture des présentes.
d ’A l b ia t
,
de
D ia n n e
du
P o u g e t , B oubon.
CHEVALIER.
L ’AN quatorze, et le six nivose, à la requête de M . Jacques-PierreM arie-Anne d’A lb ia t, habitant de cette ville de Clermont-Ferrant, dé
partement du Puy-de-D ôm e, rue de l’Eclache, où il fait élection de
domicile ; je , Claude Vidalein, huissier patenté N .° 6 1 , reçu au Tribunal
civil de l’arrondissement de Clermont-Ferrant, résidant à Clerm ont,
soussigné, me suis transporté au domicile de M . Chevalier , notaire
en
�( 65 )
en cettedite v ille , rue des Carm es, où étant, et en parlant à sa do
mestique, je lui ai audit nom déclaré, que le jour d’h ie r, heure do
onze du m atin, lui Chevalier s’est transporté subitement chez moridit
sieur d’Albiat avec la Dlle. d’Albiat sa fille , assisté de M M . de Dianne
et Boubon comme témoins choisis par lui Chevalier, pour être présens
à la rédaction d’un acte fait au nom de ladite Dlle. d’A lb ia t. relative
ment à un projet de mariage entre ladite Dlle. d’Albiat et M . Dufreisse
de Fontsalive ; et comme lesdits deux témoins se sont déclarés être amis
particuliers de M . Dufreisse de Fontsalive, et qu’ils le sont en e ffe t, et
que mondil sieur de Dianne a fait plusieurs interruptions désagréables
audit d’A lbiat, et même manifesté une contradiction sur des laits positifs
avancés par ledit d’Albiat à sa fille , et qu’il ne peut exister de commu
nication libre entre ledit d’Albiat et sa fille en présence de témoins
intimes amis de M . Dufreisse de Fontsalive ; ledit sieur d 'A lb ia t, sans
aucune approbation dudit acte du jour d’hier, somme M .e Chevalier de
faire choix d’autres témoins qui ne soient point de la connaissance
intime de M . Dufreisse de Fontsalive, sinon il le rendra personnellement
garant et responsable de la violation qui serait faite de son domicile et
du trouble qui serait apporté à sa tranquillité ; sous toutes réserves et
protestations quelconques.Et a ledit d’Albiat signé avec nous huissier,
tant sur l’original que sur la co pie, lesdits jour et an.
d ’A lb ia t.
V i d a l e in.
Enregistré à Clerm ont, le i o nivôse an 14 , fol. 134 ; reçu un franc
dix cent, dixième compris.
n-,
L
T R U N E L.
Aujourd’hui vingt-neuf janvier dix huit cent s ix , heure de onze du
matin ; en conséquence de l’ordonnance de M . le Président du Tribunal
civil de Clermont-Ferrant , du trois nivôse an quatorze , étant au bas
de la requête <1 lui présentée le même jo u r, et annexée à la minute
du premier acte de respect fait le cinq dudit mois de nivôse, en la
présence et assistée de M .e Chevalier, notaire en ladite ville, commis
par ladite ordonnance , et des témoins ci-après nommés , soussignés,
ladite Dlle. Claire-Joséphine d’A lb ia t, fille majeure, habitante de la
même ville , s’est derechef transportée en la demeure de M . JacquesPierre-Marie-Anne d’Albiat son père, ancien Procureur du Roi en la
sénéchaussée de ladite ville, y habitant; où étant , et parlant à sa
personne, ladite Dlle. d’Albiat a réitéré l’intention où elle était de
contracter mariage avec M . Joseph - Guillaume Dufreisse de VerninesFontsalive, majeur, habitant de la même ville, et lui a observé que par
les memes raisons et motifs exprimés au premier acte dudit jour cinq
nivôse an quatorze, elle était dans la ferme résolution de ne point
/
I
�( 66 )
qu’elle
abandonner son projet de mariage, avec ledit sieur Fontsalive ;
re g re tta it infiniment de ne pouvoir se rendre aux vœux de son père ,
mais qu’il n’était point en sa puissance de renoncer à une union dans
laquelle elle croyait trouver son bonheur, par une sympathie d’humeur
et de caractère ; qu’elle espérait que l’avenir justifierait aux yeux de son
père toutes les considérations qu’elle a pu faire valoir pour se refuser à
ses désirs; et qu’elle lui renouvelait en conséquence sa prière de lui
donner son consentement, avec toute la soumission et tout le respect dû
à l’autorité paternelle , à laquelle elle ne voulait autrement se soustraire
que dans le cas où il apporterait un plus long refus à se rendre à ses
instances.
( Ci-dessus écrit d ’avance, et non par le notaire. )
( i)
Ledit sieur d'Albiat déclare qu’il persiste dans son refus, et par les
mêmes motifs , attendu qu il voit avec peine que sa fille est subjuguée
par un homme sans fortune , ayant près de quarante-quatre ans , étant
accablé d’infirmités, étant dans un état d’épuisement, ayant des maladies,
réitérées et continuelles, de catarres, d’humeurs, qui lui donnent une
figure blanche et alternativement rouge ; ce qui annonce l’humeur,
l ’épuisement, et une tendance à la dissolution prochaine du sang. Le
sieur d’Albiat persiste d’ailleurs à protester tant contre les actes précédens
que contre le présent acte; et déclare au surplus qu’il ne peut reconnaître
dans sa fille une volonté libre, lorsqu’elle manifeste en apparence le
désir d’épouser un homme aussi âgé , un homme valétudinaire , un
homme sans fortune pour exister. E t il déclare, en outre , qu’il ne
cessera de lui témoigner, tant qu’il pourra, des marques de son attache
ment et de sa tendresse paternelle, en lui accordant son assistance et
sa protection pour l’empêcher d’être une victime malheureuse dans un
mariage qui ne peut que lui être funeste. E t a déclaré ne vouloir signer,
de ce°enquis et interpellé.
Ladite D lle. d’A lb ia t, toujours avec la soumission et le respect
qu’elle porte à M . son père, persiste dans les mêmes intentions de s’unir
avcc M . Dufreisse-Fontsalive , espérant que M . d’Albiat se rendra à se3
prières et sollicitations.
D e tout quoi nous avoirs dressé le présent a cte, pour valoir et servir
ce que de raison, en présence de Joseph M albel, menuisier , et d’Etienne
(i) Voyez pages 55 et suivantes.
�( 6/ )
BesonVbe, cabaretier, tous deux habilans de cette v ille , soussignés avec
la Dlle. d’Albiat et Nous notaire, après lecture faite, tant à l’original
qu’à la copie laissée audit sieur d’Albiat: lesdits jour et an.
°
d 'A l b ia t .
M
albet,
B eso m b e . C h e v a l ie r .
Aujourd’hui quatre de mars mil huit cent six, heure de quatre trois quarts
du soir; en conséquence de l’ordonnance de M . le Président du Tribunal
civil de Clermont-Ferrant, du trois nivôse an quatorze, étant au bas de la
requête à lui présentée le même jour, et annexée à la minute du
premier acte de soumission et respect fait le cinq du même mois de
nivôse, en la présence et assistée de M .e Chevalier, notaire en ladite
v ille , commis par ladite ordonnance , et de son confrère Chassaigne ,
soussignés, la Dlle. Claire-Joséphine d’A lbiat, fille majeure, habitante
de la même ville , s’est derechef, et pour la troisième fois, transportée
en la demeure de M . Jacques-Pierre-Marie-Anne d’Albiat son père ,
ancien Procureur du Roi en la sénéchaussée de ladite v ille , y habitant;
où éta n t, et parlant à sa personne , la Dlle. d’Albiat s’est de nouveau
prononcée pour l’exécution de son mariage avec M . Joseph-Guillaume
Dufreisse de Vernines-Fontsalive , majeur, habitant de la même ville; en
observant à M . son père , que bien loin que le temps ait pu apporter
du changement à sa volonté première , il n’a fait que l’affermir dans sa
résolution, et que par les mêmes motifs exprimés aux actes des cinq
nivôse an quatorze et vingt - neuf janvier dernier, elle persiste à
réaliser son projet de mariage avec ledit sieur Dufreisse-Fontsalive ; que
si dans toutes ses démarches quelque chose peut lui donner des regrets,
c’est la dure nécessité où elle se trouve de lutter contre les ordres°et la
volonté de son père ; qu’elle espère néanmoins qu’il voudra bien se
rendre sur ses nouvelles instances. Elle lui a en conséquence renouvelé
sa prière, et l’a supplié, avec toute la soumission et le respect dus à
l ’autorité paternelle , de ne plus mettre d’obstacle à l’exécution de son
m ariage, de lui donner ses conseils et son consentement, pour lequel
sa reconnaissance sera d’autant plus grande , que cet acte lui donnera
de' nouvelles preuves de toute sa bonté. E t a signé. d ’A l b ia t .
( Ci-dessus écrit d'avance, et non par le notaire.)
(i)
Ledit sieur d ’Albiat a dit : M a fille , vous êtes trompée ; ce mariage
vous sera funeste. Vous avez vingt-un an s, et M . de Fontsalive après de
quarante-quatre ans ; il y a vingt-deux ans et six mois de différence.
( 0 Voyez pages 55 et suivantes.
�( 68 )
M . de Fontsalive a une vieillesse anticipée ; son sang est appauvri, son
sang est. vicié; il est dans un état d’épuisement complet; il a des infirmités
habituelles; il a des maladies périodiques d ’étisie et d’humeurs conta
gieuses; elles'se sont renouvelées trois fois depuis l’automne, et il a été à
chaque fois en danger; son teint est périodiquement pâle et cadavéreux,
ou ondulé par des rougeurs : toute sa constitution est attaquée. Ce
mariage répugne à la nature ; M . de Fontsalive n’a pas la capacité qu’exige
la nature pour contracter mariage. T o u t est fini pour lui , et rien ne
pourra jamais y suppléer. — Ce mariage vous menace d’une mort
prochaine , ou vous réduira à traîner une vie languissante et misérable.
Votre lit nuptial où vous entrerez toute vivante , deviendra votre
tombeau. Pourquoi vous obstinez-vous , maigre les conseils de votre
père? F u ye z, il en est temps encore, fuyez une union qui ferait votre
désespoir. — IVI. de Fontsalive est dans la pauvreté ; je doute qu’il puisse
avoir conservé la modique somme de six a sept mille francs qui pouvait
lui rester à la mort de sa mène, puisqu’il avait des dettes, attendu l’intérêt
excessif de l’argent. M . de Fontsalive n’a aucun état; il n’a aucun talent
pour s’en procurer. M. Dufreisse de Fontsalive ne peut pas même espérer
d ’obtenir une ambulance dans les Octrois ou dans les Droits réunis ; il
n’aurait pas assez de vigueur pour en soutenir la fatigue. Q uel est donc
votre aveuglement, ma fille, pour vous obstiner à votre perte? T o u t prouve,
ma fille, que vous êtes trompée; tout prouve que vous êtes subjuguée depuis
le temps de votre minorité ; tout prouve que vous ne pouvez pas
avoir une volonté libre. T o u s mes parens ont frémi à la nouvelle de
ce mariage ; tous mes parens ont refusé de donner leur approbation ;
ils n’o n t, comme moi , d’autre intérêt que de vous sauver du malheur
qui vous menace. Vous me laissez depuis long-temps dans l'affliction;
depuis long-temps le chagrin me dévore. Je 11e m’occupe pas de moi;
c ’est vous, c’est votre sort qui excite toute ma sollicitude. Vous le
savez, mon langage a toujours été franc et droit. J’ai voulu mettre
votre jeunesse à l’abri; j’ai voulu vous éloigner de la maison Fonghasse
où je voyais des dangers pour vous, où je voyais que la discorde était
excitée contre moi. J’ai fait des dépenses inévitables, mais nécessaires;
je remplissais les devoirs de père : je ne m’en répens pas. Je n’ai
pas réussi. E t j’en ai été puni, puisqu’il m’a été impossible de vous
surveiller ; le coup m’a accablé : vous en serez bien plus punie , si
je ne puis vous soustraire à votre malheureuse destinée. Les circons
tances qui ont amené ces événemens, sont bien aggravantes. M .
Dufreisse de Fontsalive rie pouvait vous captiver que par des chimères ;
il avait besoin d’écarter les surveillans qui lui étaient incommodes. 11
a écarté de vous le surveillant naturel, le surveillant légal, le surveillant
nécessaire ; il a éloigné le père de famille ; il a éloigné votre père.
C ’est lui qui a préparé la discorde dans mon m énage, c’est lui qui a
�.
.
C 69 )
excité la discorde , c’est lui qui a été l’agent de la discorde, c’est lui qui
dans ce moment même sollicite contre moi dans le procès en séparation
de corps c’est lui qui attendait le moment de la mort de sa m ère, pour
séparer l’épouse de l’époux, et se rendre par son influence maître de
ma famille. M .ma Dufreisse de Vernines sa mère est morte le dix-sept
prairial; elle a été enterrée le dix-huit. Votre mère a cessé de manger
avec moi le dix-neuf. Votre mère s’est évadée avec vous le vingt-un
prairial , après neuf heures du s o ir , lorsque j’étais couché. C ’est
M . Dufreisse de Fontsalive qui a favorisé cette évasion. C ’est M . Dufreisse
de Fontsalive qui a reçu chez lui, à neuf heures du soir, ceux qui vinrent
secrètement vous chercher avec votre mère. C ’est M . Dufreisse de Font
salive q u i, le lendemain vingt-deux prairial, a entraîné M .ra®Fonghasse
chez le Juge-de-paix, pour me dénoncer, sans me prévenir, parce qu(^
j ’avais exprimé trop vivement, dans l’intérieur de mon habitation, ma juste
douleur au moment de votre fuite nocturne avec votre mère. M . de
Fontsalive se plaignait de ce que j’avais troublé son sommeil, tandis qu’il
m ’écoutait avec tranquillité derrière les planches qui séparent son appar
tement de l’appartement de votre mère. Il dénonçait votre père, le père
de celle qu’il voulait tromper; et cependant ma douleur était son ouvrage,
ma douleur était son triom phe, ma douleur était sa jouissance. Il répand
et fait répandre les calomnies les plus atroces contre moi, pour surprendre
et tromper les Juges de la Cour d’appel. Il est crim inel, pour vous avoir
ravi à ma surveillance, en trompant la Justice. 11 est une seconde fois
crim inel, en vous ravissant à la Justice même , qui vous avait mise en
dépôt chez votre mère. Vous a vez, il est vrai, continué de me rendre
visite chez m oi, depuis le mois de frimaire an treize. Je ne dois ce retour
vers moi qu’à la division qui a existé à cette époque entre M . de Font
salive et votre mère. M ais je restais dans l’impossibilité de vous éloigner
de la maison Fonghasse. M . de Fontsalive a resté seul, après la mort de
sa mère , dans l’appartement qu’elle occupait avec ses enfans. 11 en a
éloigné ses frères. 11 continue depuis celte époque de pi>yer à lui seul
quatre cents francs de loyer, malgré la modicité de ses facultés. C ’est par
l ’influence d eM .d e Fontsalive que vous êtes venue, sans me faire prévenir,
le premier jour de votre majorité, lundi vingt-trois décembre dernier, à
sept heures et demie du m alin, frapper à coups redoublés à ma porte,
que je ne pus vous ouvrir. Vous étiez accompagnée des intimes amis de
M . de Fontsalive , qui assistaient votre notaire. Si vous n’étiez pas
subjuguée, vous seriez incapable de venir insulter à la douleur de votre
père. Je ne vous donnerai pas ici le détail de toutes les forfanteries
impudentes de M . de Fontsalive , lorsqu’il m’a fait demander mon
consentement à votre mariage. Mais je vous observe que plus je m’oppose
à votre mariage, plus la vengeance me poursuit. M a réponse au second
acte de respect, a excité contre moi de nouvelles fureurs, dont votre
�( 70 )
mère serait incapable , si M . de Fontsalive n’habitait pas la même
maison. — On a l’horreur de me déchirer jusque dans la personne de mes
enfans qui sont innocens , qui devraient être étrangers à ces débats
domestiques, et que l’honnêteté publique demandait de recouvrir d’un
voile. Ma fille , je ne puis vous dissimuler tout l ’excès de ma douleur.
C'est lorsque je veux m’opposer à votre malheur, c’est lorsque je combats
pour l’honneur et la dignité du mariage , que l’on veut accabler votre
p ère qui fut toujours probe. — M . Dutreisse de Fontsalive, entraîné par
la perspective d’une misère inévitable, s’est rendu criminel envers toute
ma famille qu’il enveloppe; il s’est rendu indigne d'y entrer. Je persiste à
refuser mon consentement; et je réitère mes protestations tant contre le
présent acte que contre les deux actes qui ont précédé, me réservant
de me pourvoir pour en faire p ro n o n c e r la nullité, et de m’opposer à ce
mariage. E t a signé , d’après lecture faite.
d
’A
lbiat
. •
L a D lle. d’Albiat voit avec douleur que M . son père est sans doute
induit en erreur sur le compte de M . de Fontsalive ; qu’elle le supplie de
nouveau de donner son consentement à son mariage avec ledit de Font
salive, dont les mœurs et la probité lui sont connues ; et que ce n’est qu’à
son grand regret qu’elle prendra les moyens que la loi lui indique pour
parvenir à son mariage, toujours en conservant le respect filial.
D e tout quoi avons donné acte , pour valoir et servir ce que de raison ;
et icelui fait sceller. A Clermont-Ferrant, dans la maison dudit sieur
d’A lb ia t, lesdits jour et a n , heure de six du soir. E t avons signé avec la
D lle. d’A lb ia t, après lecture faite, tant à la minute du présent qu'à la
copie laissée audit sieur d 'A lbiat, icelle sur trois rôles, le présent compris.
d ’A l b ia t .
C h a s s a ig n e , C h e v a l ie r .
F I N.
�
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Factums Marie
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Albiat, Jacques-Pierre-Marie-Anne. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Albiat
Subject
The topic of the resource
rapt de séduction
mariage
émigrés
actes respectueux
abus de faiblesse
bonnes mœurs
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Jacques-Pierre-Marie-Anne d'Albiat, ancien magistrat ; en présence de Claire-Joséphine d'Albiat sa fille.
Table des matières
copie des actes.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
Circa 1776-Circa 1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
70 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0534
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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abus de faiblesse
actes respectueux
bonnes mœurs
émigrés
mariage
Rapt de séduction
-
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ec6f1aa7926bcbab06fb5460a68d1030
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Text
CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu l’acte de déclaratio
n
de mariage, fait en exécution d e l’é d it du mois d e novem bre 17 8 7 ,
par A m a b le -G ilb e rt D u fra isse et F élic ité -A n to in e tte -M a g d e leine Guyot de Saint-Armand, devant le juge de paix de la section
de la Place-Royale, à Paris, le 3 mai 1 7 9 1 ; et sur ce qui lui a été
verbalement exposé;
que le cit. Dufraisse est aussi bien fondé à soutenir
la validité de l'inscription qu’il a faite sur les biens de la défunte
dame Guyot de Sain t-A mand, son é p o u s e , pour la sûreté des
gains et avantages matrimoniaux à lui acquis par son prédécès,
et à attaquer, pour cela, de nullité le divorce que ladite dame
Guyot avoit fait prononcer contre lui; que le cit. G eorges-Fran çois D u pleix, avec lequel ladite dame de Saint-Amand a convolé
à de troisièmes noces à la suite d ’un second mariage contracté
E
st im e
A
�( 2 ) .
en conséquence de ce divorce, scroit peu recevable et fonde a
attaquer de nullité le mariage dudit cit. Dufraisse avcc la demoi
selle Guyot de Saint-Amand.
E n effet, s’il est vrai que le divorce que la demoiselle Guyot
de Saint-Amand avoit fait prononcer contre le cit. Dufraisse soit
nul et irrégu lier, il en résulte, par une conséquence nécessaire,
tirée de l’art. X du tit. I V de la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , quelle
n’a pu contracter de nouveaux liens, d’abord avec le cit. de Bèze,
e t, après le décès de celui-ci, avec le cit. Dupleix. Il en résulte
également qu’elle n’a pas cessé, jusqu a 1 époque de son décès,
d’être femme du cil. D uf r a is se je t , pai une dei nieie conséquence,
que les gains et avantages matrimoniaux , stipulés par le contrat
de mariage en faveur du survivant des deux époux , ont été
acquis au citoyen Dufraisse par le prédécès de ladite demoiselle
G uyot de Saint-Am and.
O r , il ne peut s’élever un doute sérieux sur la nullité du
divorce obtenu par la demoiselle Guyot de Saint-A m and contre
le cit. Dufraisse. Ce divorce étoit fondé sur l’inscription du cit.
Dufraisse sur la liste des ém igrés, qui est l’un des sept motifs
déterminés dans l’art. I V du paragraphe premier de la loi du 20
septembre 179 2. Il ne pouvoit donc, aux termes des art. X V I
et X I X du paragraphe II de la même l o i , être prononcé que
par l’officier civil du domicile du cit. Dufraisse, c’est-à-dire, par
celui de la ville de Lliom , dont le cit. Dufraisse a toujours été
habitant, et où la dame Dufraisse habitoit elle-même peu de
temps avant son divorce.
D e ce que la demoiselle Guyot de S a in t-A m a n d , au lieu de
se pourvoir devant la municipalité de R io m , pour oMeuir ce
divorce, comme le lui prescrivoient ces articles, l’a au contraire
demandé à la mun icipa lité de Sam t-A m an d, à laquelle son mari
étoit absolument étranger, il s’ensuit que ce divorce est absolu
ment nul et irrégulier, et que, pur cette raison, il n’a pu avoir
�( 3 ).
l’effet de dissoudre les liens qui unissoient la demoiselle Guyot
de Saint-Amand au cit. D ufraisse, ni de l'autoriser à en contrac
ter de nouveaux.
Cette loi n’excepte qu’ un seul cas où le d ivorce, pour cause
déterm inée, puisse être demandé ailleurs que devant l'officier
public du domicile du mari ; c’est celui de l’absence d'un des
époux depuis cinq ans, sans nouvelles : dans ce cas, elle autorise
l’époux demandeur en divorce à se p ou rvoir devant l’officier
public de son domicile. Mais la dame Dufraisse ne se trouvoit
pas dans ce cas, puisque la cause du divorce étoit, suivant elle,
l’émigration de son mari ; et q u e , dans ce cas, l’article X I X cidessus cité la renvoyoit expressément au domicile du m ari, et
devant l’officier public de ce domicile.
E u vain, pour échapper à la nullité évidente de ce divorce,
nullité qui entraîne celle du mariage que la demoiselle Guyot
a contracté depuis avec le cit. D u p le ix c e lu i-c i entreprendroit-il
de contester lui-même les qualités du cit. D ufraisse, et d’atta
quer ;\ cet effet la validité du mariage de ce dernier avec la
demoiselle G uyot de Saint-Amand : le cit. D upleix seroit tout
à la fois non recevable et mal fondé à faire usage d’un moyen
aussi odieux.
I
Non recevable, d’abord, parce qu’ il ne peut avoir plus de
droits que la demoiselle Guyot de Sa in t-A m an d , à laquelle il
a su ex to rq u er, en l’épousant, la donation de ses biens; et que
celle-ci a recon n u, de la manière la plus formelle, la validité
de son mariage avec le citoyen Dufraisse, en recourant à la voie
honteuse du d iv o rc e , comme au seul moyen de rom pre des
nœuds indissolubles.
Cette reconnoissance de la validité du mariage du citoyen
D ufraisse, quoiqu’elle fut seule suffisante pour opérer une fin
de non recevoir insurmontable contre l’objection du citoyen
D u p le ix , n’est pas au surplus la seule dont le cit. D u fra ’s e
A a
�(4),
puisse cxciper. L a demande en séparation de biens contre lui
formée par la demoiselle G uyot de Sain t-A m an d, le jugement
par lequel elle l’avoit fait p ro n o n ce r, l’acte de naissance et l’acte
mortuaire d’un enfant né de son mariage avec le cit. Dufraisse,
la qualité d’enfant légitime qui lui a été donnée, la possession
publique qu’elle a eue de l’ état de femme du cit. Dufraisse, la
qualité qu’elle en a prise dans tous ses actes, la reclusion qu’ elle
a éprouvée en cette qualité par suite de 1 inscription de son
mari sur la liste des é m ig ré s, sont autant de îeconnoissances
non équivoques, de sa p a r t , de la validité de son mariage avec
le cit. Dufraisse, et par conséquent autant de fins de non rece
voir qui s’éleveroient contr’e lle, si elle ,venoit, après c o u p ,
révo qu er en doute la validité de ce même mariage.
Si donc il est v r a i, comme on ne sauroit en douter, qu’à
supposer la demoiselle G uyot de Saint-Amand encore vivante,
elle ne pourroit être admise à attaquer un mariage qu’elle a
tant de fois reconnu valable, et plus formellement encore par
sa demande en d iv o rc e , à combien plus forte raison le citoyen
D u pleix ne peut-il y être re ç u , lui q u i, au moyen de la nul
lité du divorce, nullité qui entraîne avec elle celle de son ma
ria g e , devient aussi étranger à la famille Guyot de Saint-Amand
qu’ à celle du cit. Dufiaisse.
M a is, quelque victorieuse que soit cette fin de non recevoir
contre le cit. D u p le ix , le cit. Dufraisse pourroit sans danger lui
en faire le s a c r i f i c e , parce que les m o yen s, au fo n d , ne sont pas
moins t r a n c h a n s pour établn la régulaiîte de son mariage avec
la demoiselle Guyot de S a in t - A m a n d , et pour repousser la
critique que le cit. D upleix pourroit se permettre à cet égard.
A vant d’entrer en matière sur ce p o in t, il n’est pas inutile
de commencer par observer qu’à l’assemblée constituante , le
cit. Dufraisse avoit été l’un des principaux opposons à la loi
qui fut qualifiée de constitution civile du clergé; qu ’après même
�(5)
que cette loi eût été ad op tée, il alla jusqu’à protester contre.
D e là il est aisé de juger que le cit. D u fraisse,. dans son
opinion religieuse, ne rêgardoit pas comme catholique la nou
velle église qui fut établie en vertu de cette constitution3 qu’il
regardoit, au contraire, comme seuls et véritables pasteurs, les
ministres, q u i, faute de prestation de.serm en t, avoient.été dé
pouillés de leurs bénéfices >, et m,êin,e déportés ou reclus.
* Cependant, cette église constitutionnelle étoit la seule qui fût
réputée catholique aux yeu x de la l o i , la seule devant laquelle
des catholiques pussent contracter mariage. L e cit. Dufraisse
s’en regardant. comme sép&ré , •et* ne.voulant pas reconnoitre
ses ministres, voulant cependant donner une iorine légale au
mariage qui avoit été arrêté entre lui et la demoiselle Guyot
de S:iint-Arnaud , il eut recours au je /‘o rmes qui ayp.ient été
introduites par. l’édit du mois .de novem bre 1 7 8 7 ? alors en
pleine vigu eu r, pour assurer .l’état civil xk; ceux qui ne faisoient
pas profession de la religion alors, doniûfante en France.
Il fit en conséquence publier ses )}ùns-(Jan.s la. forme prescrite
par cet édit, tant dans la paroisse du ..domicile qu’iLa voit a lo rs,
comme représentant de la nation', que dans.çelle, où habitpit la
demoiselle Guyot de Saint-Aiuand , et même dans -celle^de sçs
tuteurs. A la suite de ces publications', et d’ une dispense par jui
obtenue dans la forme de cel édit, il se transporta le 3 mai J.791 >
avec la demoiselle Guyot de SaintrAmand, et ses tuteurs, assisté
de quatre témoins, devant le juge de pqix de la section de la
P la ce -R o y a le , pour y déclarer leur mariage , conformément à
Particle X V I de cet édit.
Ce juge reçut leur déclaration *i e t , sur le vu des publica
tions et dispenses de bans, du consentement de la mere du cit.
Dufraisse , et de celui des tuteurs de la demoiselle G uyot de
Saint-Amand , il déclara aux parties jr.aù nom de la lo i, co-n-
A3
�(6)
form ém ent à l’art. X V I I I du même é d it, quelles étoient unies
en légitime et indissoluble mariage ; inscrivit cette déclaration
jsur deux feuilles de papier destinées à servir de registre , les
signa, et les fit signer par les parties et par les témoins.
Toutes les formes, prescrites par l’édit de novembre 1 7 8 7 ,
ayant été scrupuleusement observées , voilà donc un mariage
légalement c o n t r a c t é , un mariage qui ne peut etre raisonna
blement critiqué par ceux même qui aui oient qualité sullisante pour cela.
Vainement v o u d r o i t - on se faire un m o y e n , de ce qu’aux
termes de l’ ar tic le I er- de cet é d i t , la naissance , le mariage et
la mort de c e u x des Français qui faisoient profession de la reli
gion c a t h o l i q u e , ne pouvoient être constatés que suivant les
rites et les usages de ladite religion, autorisés par les ordonnances,
p ou r en conclure que le cit. Dufraisse et sa fem m e, qui faisoient
profession de cette religion , ne pouvoient emprunter pour leur
mariage les formes de Tédit de 1 7 8 7 , et voudroit-on opposer
au cit. Dufraisse, et la déclaration de catholicité, laite par sa
femme et l u i par devant notaire , le même jour 3 mai 1 7 9 1 ,
et la bénédiction nuptiale q u ’ils se firent donner le même jo u r ,
par un pretre.
Oui le cit. Dufraisse étoit catholique. O u i , la demoiselle
G ivot d e S a i n t - A m a n d l’étoit au ssi, du moins à cette époque.
Mais il faut le dire , ils ne l’étoient pas dan» le sens que les
lois at t a c h o ie n t alors à ce mot. Ils ne regardoient pas comme
catholiques les ministres de l’église constitutionnelle; ils les
regardoient , au c o n t r a i r e , comme séparés de l’église; ils ne'
pouvoient donc être obligés de recevoir de leurs mains le sacre
ment de mariage. Ils étoient donc obligés de recourir aux formes
introduites par l’edit de 17 8 7 : et ils le pouvoient d’autant mieux,
qu’ils étoient ou croyoient etre d une religion différente de celle
�t7)
qui jouîssoît du culte public en F ra n c e ; et que cet éclit embras
sent évidemment dans ses dispositions tous ceux q u i professeroient une l’eligion autre que la religion nationale.
Peu importe donc qu’à la suite de leur mariage , le cit.
Dufraisse et sa femme aient fait, par devant notaire, une décla
ration de catholicité : cette déclaration n’avoit pour objet que
de prévenir le do u te, que la forme de leur mariage auroit pii
faire naître dans la suite sur leur orthodoxie ; mais elle ne peut
porter la plus légère atteinte à la validité de leur mariage, quant
au c iv il, dès que toutes les formes prescrites par l’édit de 17 8 7
y ont été observées ; de là surtout qu’il est manifeste que la
religion catholique, dont les époux déclaroient faire profession ,
n’étoit pas la même que celle à laquelle la loi donnoit cette
qualification en France.
L a bénédiction nuptiale, que se firent donner le cit. Dufraisse
et sa fem m e, par un p rê tre , est encore plus indifférente. E lle
ne prouve pas davantage qu ’ils fussent de la religion nationale,
elle prouve même le contraire, puisque ce p rê tre , le célèbre
abbé M aury , aujourd’hui cardinal , n’a fait ce mariage qu’en
vertu de la permission du cit. V e y t a r d , curé de St. G e r v a is ,
qui étoit alors devenu victime de son refus de prestation de
serment.
Il est vi’ai que de là même que ce mariage a été fait eri vertu
de la permission du cit. V e y t a r d , q u i, suivant l u i , avoit perdu
la qualité de curé de St. G e r v a is , le cit. D upleix pouri-oit e n
faire résulter une autre nullité du m ariage, c o m m e non fait
coram proprio parocho; mais cette nullité, à la supposer aussi
réelle qu’ elle est chimérique et même dérisoire, ne frapperoit
que sur le sacrem ent, tandis qu’il ne s'agit, dans l’espèce, de les
envisager que du côté c iv il; et qu e, sous ce point de v u e , l a
parfaite observation des formes prescrites par fé d it de 17 8 7 ,
le rend à l'abri de toute atteinte.
�C8) .
Aussi la dernière ressource du cil. D upleix-paroit être de
soutenir, qu’à supposer même que le mariage du cit. Duiraisse
eût été légitimement contracté, il auroit perdu son effet, faute
par le cit. Duiraisse de s’être conformé à Tari. I X de la sec
tion I V de la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , sur le mode de cons
tater l’état civil des citoyens; article qui vouloit que si anté
rieurement à la publication de cette loi quelques personnes
s'étoient mariées devant des officiers civils, elles fussent tenues
d’en faire la déclaration , dans la huitaine , devant 1 olficier civil
de la municipalité de leur domicile, qui en dresseroit acte sur
les registres , dans les formes prescrites par celte loi.
' Mais, q u a n d cette loi pourvoit s’appliquer au cit. Dufraisse,
au moins est-il v r a i que le délai de îiuitaine, qu’elle accordoit
pour faire c e ll e déclaration, n’étoit pas fatal, et que cette loi
ne p r o n o n ç o i t pas la peine de nullité.
M a is, d’un autre côté, ce qui est plus tranchant et plus décisif,
c’est que cet article ne pouvoit avoir en vue que les mariages qui
avoient pu se faire devant des officiers civils, sans avoir préa
lablement observé les formes légales, les mariages qui n’étoient
pas déjà consignés dans les registres destinés à constater l’ élat
ci vil des citoyens.
O r , le mariage du cit. Dufraisse n’ étoit pas dans ce cas, puis
qu e, d’ une p art, il avoit été fait avec toutes les formes légales
prescrites par l’édit de novembre 1 7 8 7 , puisque, d ’un autre
c ô lé , le registre sur lequel il avoit été inscrit, avoit déjà été
ou dû être r a p p o r t é dans le dépôt public destiné à recevoir les
registres de l’état civil- A quoi bon auroit-il donc été nécessaire
de réitérer la déclaration d’un mariage déjà consigné dans ces
registres, d’un mariage d’ailleurs précédé de publications et de
toutes les formes requises par la loi ?
On ne se permettra à cet égard qu’une seule observation qui
paroît décisive; c’esl que de même que le cit. Dufraissè et sa
�(9)
femme n'auroient pas élé obligés de réitérer la déclaration de
leur m ariage, en vertu d e là loi du 20 septembre 1 7 9 2 , s'ils
l’eussent fait devant le curé ou le vicaire de la paroisse, quoi
qu’ en exécution de l’ édit de 1 7 8 7 , de même aussi n’ont^ils pu
y être obligés pour s’ être adressés au juge, parce que cette loi
leur laissoit l’option ou de s’adresser au juge ou aux curés et
vicaires, et donnoit le même effet aux déclarations de mariage
reçues par les uns et par les autres, relativement à l’état civil des
citoyens.
On croit donc avoir établi jusqu’à la démonstration les propo*
sitions qui ont été annoncées en commençant, et par cette raison
on passera sous silence les moyens de défaveur qui s élèvent en
foule contre le cit. D upleix. Ce n’ étoit pas assez pour lui d avo ir
épousé la femme du cit. Dufraisse, sans que le premier mariage
fût valablement dissout. Il lui restoit encore à dénoncer le cit.
Dufraisse pour l’empêcher de recouvrer son état c iv il; et il n’a
pas resté en arrière d’ un si beau rôle. L ’odieux d’une pareille
conduite, développé lors de la plaidoierie, doit ajouter le plus
grand poids aux moyens de droit dans lesquels 011 a cru devoir
se renfermer.
D é l i b é r é à Hiom par l’ancien jurisconsulte soussigné, le
28 ventôse an 1 1 de la république.
TO UTTÉE.
L e c o n s e i l SOUSSIGNÉ, qui a vu la consultation ci-dessus
et des autres parts, les actes sur lesquels cette consultation est
fondée, et qui s’est assuré que la contestation à laquelle donnent
lieu les questions résolues par ladite consultation, est pendante
dans les tribunaux du département de la N iè v re ;
E st
e n t iè r e m e n t de
l ’a v i s énoncé en lad. consultation,
�C10 )
et par les mêmes raisons. L ’in térêt, qui ose to ut, a pu faire
élever les questions que D upleix paroît vouloir agiter. Mais la
raison , la loi et la justice concourent pour les décider contre lui.
D é l i b é r é à Riom. le 29 ventôse an 1 1 .
REDON.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture de la consultation
ci-dessus, de tous les actes qui lui servent de base, du mémoire
à consulter, et qui s’est" procuré la certitude que la cause étoit
de la compétence des tribunaux de la N ievre et du C h er,
' A d o t t e absolument les moyens développés par cette consul
tation, en faveur du cit. Dufraisse. Ils démontrent que le divorce
q u ’a fait prononcer la dame Duiraisse, née Guyot Saint-Am and,
est n u l, et que le mariage par elle contracté précédemment est
valable; quainsi le cit. Dufraisse doit obtenir la maintenue de
son inscription au bureau dos hypothèques, et le payement de
tous les gains et avantages stipulés par son contrat de mariage.
Indépendamment des moyens de droit sur la validité du ma
riage, et sur la pleine conservation des gains assurés au citoyen
Duiraisse , les fins de non recevoir à proposer contre son adver
saire sont déterminantes, et 11e permettent pas à D u pleix d’élever
mêm e des doutes sur la validité du mariage de la dame Guyot
Saint-Amand avec le cit. Dufraisse.
D é l i b é r é à R io m , le 29 ventôse an u .
.
VE11NY.
L e C o n s e i l , (pii a vu tous les actes énoncés dans les con
sultations ci-dessus, et pris une lecture attentive de ces consul
tations,
�C 11 )
de toutes les résolutions qui y sont
prises, et en adopte tous les principes et lqs moyens. Il croit
seulement devoir ajouter une observation sur une objection qui
ne paroît pas avoir été prévue.
On opposera p e u t - ê t r e , pour écarter la nullité du divorce
fondée sur ce qu’ il n’a voit pas été prononcé par l’officier public
du domicile du ma r i , mais seulement pour ém igration, l’un
des motifs déterminés par la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , que
l’on doit juger de ce cas déterminé comme de celui où le divorce
est demandé pour cause d’absence depuis cinq ans sans nou
velles; cas auquel le divorce peut être prononcé par l’officier
public du domicile actuel de l’époux qui le demande.
Mais, i ° . il y a une exception particulière dans l’article X V I I
du paragraphe II de la loi du 20 septembre. 17 9 2 , qui, dans
le cas de l'absence, attribue la prononciation du divorce à l’of
ficier public du domicile de l’époux qui le demande; au lieu
qu e , pour toutes les autres causes déterminées du d iv o rc e , la
loi exige généralement le ministère de l’officier public du do
micile du mari ; et l’exception ne peut pas être étendue d'un
cas à l’autre.
E
st
FERM EM ENT
d ’a v i s
20. P û t - o n même étendre l’exception d’ un cas à l’autre, il
iaudroit au moins que Témigralion se trouvât dans les mêmes
circonstances où la loi admet Je divorce pour cause d’absence.
O r , en ce dernier cas, le divorce ne peut pas être demandé
simplement pour l’absence de cinq ans; il faut encore que ces
cinq ans d’absence aient duré sans qu’on ait reçu des nouvelles
de l’absent. M a is, dans le fait particulier, le cit. Dufraissc se
dit êLre en état de rapporter des lettres de sa fem m e, qu’il en
«voit reçues en réponse à celles qu’il lui avoit écrites , mais
dont les dates ne remontent pas à cinq ans avant le d iv o rc e ;
par conséquent il n’y avoit pas eu ouverture au divorce pour
cause d’absence. A in s i, de toute manière, le divorce dont il s’agit
�( 12 )
est nul , pour n’avoir pas été prononcé par l'officier public du
domicile du mari.
D ÉLIBÉRÉ par le jurisconsulte soussigné, doyen des avocats.
A R i o m , le premier germinal an 1 1 .
’
1
Le
c o n se il
A N D R A U D.
SO U SSIG N É , q u i a v u de nouveau les pièces
énoncées en la prem ière consultation ci-co n tre ,
P
er sist e
dans la r é s o l u t i o n q u ’ il avoit déj à p ris e , et adopte
entièrement l'o pinio n des jurisconsultes qui ont délibéré p ré—
cédem m ent.
N u l d o u t e que le divorce est nul et irrégulier ; il ne pou-
vo it être prononcé que devant l'officier public du domicile du
m ari. L ’ état des hommes est sacré aux y eu x de la loi; e t, dans
cette matière où tout est de rig u eu r, on ne peut raisonner d’un
cas à un autre.
2°, L e mariage du cit. Dufraisse est valable ; il s’est conformé
en tous points à l’édit de 17 8 7 . D upleix n’a pas de qualité pour
le contester , e t , s’il n’y avoit pas eu de m a riag e, il eût été
inutile de recourir au divorce.
par l’ancien jurisconsulte soussigné. A Riom ,
le 3 germinal an 1 1 .
PAGES.
D ÉL IB ÉR É
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu la consultation délibérée
le 28 ventôse dernier, en adoptant les moyens qui y sont discutés,,
E S T A BSO LUM EN T DU MEME A V IS ,
D
é l ib é r é
à R i o m , ce 4 ventôse an 1 1 ,
C A T H O L.
l
1■
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�
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An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dufraisse, Amable-Gilbert. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Toutée
Redon
Verny
Andraud
Pagès
Cathol
Subject
The topic of the resource
divorces
nullité
nullité du mariage
constitution civile du clergé
émigrés
Description
An account of the resource
Consultation [Dufraisse, Amable-Gilbert]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1787-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0533
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Saint-Ammand
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53844/BCU_Factums_M0533.jpg
constitution civile du Clergé
divorces
émigrés
nullité
nullité du mariage
-
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c7e3a251e4012a24d08c3ca083bcd33e
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Text
MEMO
•H*-
POUR
f
/
E lé a z a r d - R o s ta n g - E t ie n n e
D A U D IN ,
propriétaire ;
CONTRE
,
C A P E L L E ci-devant conseiller au
bailliage et siège présidial d’Aurillac ;
F r a n ç o is
EN
D ’A n t o i n e
P R É S E N C E
D ESPRATS
,
E t de dame M a r g u e r i t e SO B R IE R , veuve
de. Jean D a u b i n ,
EU à I38cses méritent autant l’attention de la
cour
Quels que soient les faits qui y ont donné lie u
A
m m
••
s, -— -h»
ÿ-j-
\j
fir.
Mi
�( 2)
le sieur Daudin ne se permettra aucun écart ; il n’aura
garde d’oublier qu’il plaide contre un ancien magis
trat ; il respectera, dans son adversaire, et la charge
dont il a été revêtu , et le tribunal dont il a été membre.
F A I T S .
: , dont il s’a g it , a appartenu
L e domaine de
Descaffres.
originairement à 3
L e 3 avi’il 1773 > Etienne Descaffres fit son testament,
par leq u el, après différens legs
différens n eveux, il
légua à la dame Sobrier, veuve D audin, sa nièce, tout
son mobilier , et l’usufruit de tous ses immeubles, jus
qu’à la majorité de Daudin son fils, et institua ce der
nier pour son héritier général et universel ; et attendu,
est-il dit, que l’héritier ne peut actuellement recueillir
l’hérédité , le testateur nomme pour exécutrice testa
mentaire la dame Sobrier, à laquelle, est-il ajouté, il
donne plein et entier pouvoir de vendre ou délaisser
des biens immeubles de son hérédité pour le payement
des legs et des dettes passives.
L e premier mars 1782 , la dame Sobrier, veuve D audin , simple usufruitière, a vendu au sieur Capelle le
domaine de V e r n e t, dépendant de la succession. C’est
ce domaine que fait l’objet de la contestation.
Rien de plus simple que les termes de la vente. La
dame veuve Daudin vend purement et simplement, en
son nom et comme chose à elle appartei
vec toute
garantie, ce domaine, moyennant la somme
j. i 600 fr .,
dont le contrat porte quittance.
�(3)
Mais comment cette vente a - t - e l l e étc consentie?
C ’est ce qui reste à développer; ce qu’il a fallu enfia
dévoiler, puisque Capolle en a imposé la nécessité. , , ■
L e jeune D au d in , héritier institu é , âgé alors seule- *
ment de 19 ans, avoit conçu__la^passion la plus violente j
pour celle qui est aujourd’hui son épouse.» Cette p a s - •
sion fut encore irritée par l’opposition d’une mère ,
qui ne désiroit pas voir sitôt l’établissement de son,
fils. Il résolut de vaincre tous lqft..obstacles , et de con
tracter, en pays étranger, un mariage auquel il ne
voyoit point de possibilité en France. Pour exécuter
ce projet, il falloit des ressources pécuniaires : il s’adressa __
au sieur Capelle.
'Xe hasard lVvoit mieux servi qu’il ne pouvoit espérer.
L a dame veuve D aud in , dans un moment où ses infir
mités ne lui permettoient pas d’a g ir, pleine de con
fiance dans un fils unique qu’elle aimoit aveuglém ent,
lui avoit confié des signatures en blanc. M uni de ces
signatures, ïl en fit confidence au sieur Capelle , et lui
proposa en môme temps de lui vendre le domaine de
V e rn e t, domaine contigu à une autre de ses propriétés,
et par conséquent singulièrement à sa bienséance.
Capelle n’eut garde de laisser échapper une si belle
occasion.
Il fut d’abord incertain s’il prendroit un acte de locaterie perpétuelle pour éviter le droit de lods , ou s’il
prendroit un acte de vente : il s’arrêta à ce dernier parti.
O n fut bientôt d’accord sur le prix ; C apelle le fixa
lui-meme à* 13800 f i\ , cheptel et grains tout com pris.
A a
�C'4 )
' Mais commènt; rédiger l’acte- de vente ?
j II ne pouvoit acheter du fils, parce qu’il étoit mineur.
L a mère avo it, à la v é r ité , pouvoir par le testament
de vendre ; mais le pouvoir n’étoit donné qu’à la charge
de l’emploi.
Î
/’ Capelle ne trouva d’autre expédient, que de faire
/ consentir la vente purement et simplement par la m ère,
et en son nom.
Ce point arrêté, il ¿élibéra s’il prendroit une vente
sous seing p r iv é , à l’aîde d’une des signatures en blanc.
Il y trouva trop d’inconvéniens ; la vente sous seing privé
.ne lui donnoit ni hypothèque ni date contre des tiers.
Il pensa qu’il ne pouvoit contracter avec sûreté que
par acte devant notaire.
Mais ici même les obstacles augmentoient. Comment
parvenir à une vente pardevant notaire ? Il falloit que
1a mère comparût elle-même. On ne pouvoit la sup
pléer par l’inteçposjtion^d’une autre personne : les suites
en auroient été trop dangereuses. On n e'p ouvoit la
suppléer non plus par les signatures en blanc ; le notaire
ne s’y seroit pas prêté. Il falloit donc que la mère se
présentât. Maisïcomment l’y déterminer ? Comment la
déterminer à vendre ce qu’elle savoit ne pas lui appar
tenir? à vendre 13800 fr. , cheptel et grains, un domaine
qui valoit près du double ?
D ’un autre c ô té , la vente, même consentie p a rla
mère en son n o m , pouvoit assurer les deniers, mais
n^ssuroijL Jp^s la propriété : nonobstant cette vente ,
Capelle n’étoit pas moins exposé à j t r c évincé un jour
par le fils. -
�( 5 )
Toutes ces difficultés furent aplanies.
Il fut convenu qu’on feindroit de porter le prix à
une somme beaucoup, plus considérable-, dont le contrat
porteroit quittance ; que Capelle 1er oit des billets ou
lettres de ch ange, pour Pentier montant de la somme
qui seroit énoncée en l’acte de vente : mais qu’en même
temps , et à l’instant de l’açteTle sieur ijaudin remettroit
secrètement une quittance de l’excédant, et qu’il rempliroit à cet eifet une des signatures en blanc étant en
ses mains. A u moyen de cette quittance, Capelle ne demeuroit effectivement oblige que pour 1,3800 fr.
La quittance délivrée , les billets représentatifs de
l’entier prix devoient être remis à la mère , des mains
de laquelle le fils se promettoit bien de les enlever ; ce
qui étoit facile par la confiance sans bornes de la dame*
Daudin , qui n’avoit ricô_dé* reSCT^e ni de secret pour
lui. Les billets enlevés , Capelle devoit les acquitter ju s - ^
qu’à concurrence du prix convenu.
j
Il restoit une dernière précaution. Capelle n’enten- \
doit avancer les deniers qu’autant qu’il auroit la pro
priété incommutable du domaine. Pour se mettre à
l’abri de toutes recherches de la part du fils , il falloit
imaginer encore un moyen.
Ce moyen fut de faire, remettre , avant tout , par
le sieur Daudin ,_une ratilication , avec la date en blan c ,
qu’il rempliroit comme bon lui sembleroit, à l’époque
de la majorité : et comme il étoit encore indécis s’il
prendroit une vente pour un prix fixe et déterminé ,
ou une lôcaterie perpétuelle , il ' la fit générale. Elle est
conçue
» en ces termes ;
•**
�( M
k .Te soussigné approuve et ratifie les actes que ma
« mère a consentis en faveur de M . Capelle , con« seiller , du domaine du Vernct et tout ce qui £n
« dépend , et promet le faire jouir en vrai propriétaire.
« Fait le
Signé Daudin d e là
cc Fabrie. » Il n’est pas indifférent d’observer qu’il n’est
.pas dit , F a it doubla ____
L a date a été.depuis remplie. X>a ratification est rap
portée aujourd’hui , à la date du 21 mars 1788. Il paroît
encore qu’il a été fait des altérations et des surcharges
sur plusieurs lettres du' corps de l’acte.
/ • j L e plan ainsi concerté et préparé , la mère se rendit
/ h Aurillac , et là elle consentit la vente dont il s’agit.
V
Par cette vente , elle vend en son nom , arec pro
messe de garantir , fo u r n ir et f a ir e v a lo ir, au sieur
Capelle , acceptant, J e Jdomajiie de V e r n e t, tel q iiil
se poursuit et com porte, arec les bestiaux et outils
d’agriculture , ensemble , sur la récolte pendante par
racines , la quantité de 5o setiers de blé seigle , et le
quart de ce que la récolte pourra produire en sus des 5o
setiers , moyennantla somme de 21600 f r . , dont le con
tr a t porte quittance. En représentation du pi’ix , Capelle
délivra des billets ou lettres de change fe t'D aü d in , de son
côté , lui remit, en particulier, et à l’insu de la mère, la
quittance conven ue, dont il avoit rempli une des signa
Y
^
tures en blanc.
Il ne s’asîissoit plus que d’enlever les billets ou lettres
de change. DaudîïTn'eut pas de peine i y parvenir ;
e t , au moyen de co , il eüectua le~projet qù’il avoit
�( 7 )
conçu d’aller en Italie contracter l’union dont il faisoît
dépendre son bonheur.
11 partit effectivement le n mai 1782.
L a mère s’aperçut bientôt de l’enlèvement dis effets.
E lle rendit plainte devant le sieur Sistrières , lieute
nant général civil et criminel au ci-devant bailliage
de V ie. Il y eut des témoins entendus. L e fils ayant
ensuite fait la paix avec sa mère . cette procédure n’eut
pas d’autres suites.
E lle fit naîtx*e cependant un autre procès.
L e sieur Sistrières , seigneur ou se prétendant seigneur
du domaine de Y e r n e t, éclairé par l’information sur
le véritable prix de la vente , voulut exercer le retirait
féodal. Capelle craignant que Daudin ne fît une décla
ration contraire à ses intérêts , lui fit parler par un de
ses parens ; et ce fut à cette occasion que celui-ci lui
écrivit la lettre du 10 août 1783 , lettre dont Capelle a
cru pouvoir faire usage , et qu’on transcrira plus bas.
Cette instance a été pareillement terminée à l’amiable
p arun acte du 5 mai 1789 , passé entre le sieur Sistrières
et Capelle. Il paroît que par cet acte Sistrières s’est
départi de sa demande.
Daudin , à l’époque de la vente , étoit, comme on l’a
déjà dit , âgé seulement de 19 ans.
L e temps a amené la réflexion. Il n’a pas tardé à
reconnoitre combien il avoit été lésé , combien on avoit
abusé de son inexpérience.
Après avoir cherché inutilement à terminer a l’amia
ble avec le sieur Capelle, il a pris le parti de céder au
�( 8 )'
sieur Desprats, par acte du 2 vendémiaire an 8 , tous
les droits qu’il pouvoit avoir résultuns du testament
d’Etienne DescaiFres , même les actions rescindantes et
rescisoires, m©yennant le prix convenu entre eux , porté
dans l’acte à la somme de\6ooo fr. seulement , et sous
la condition d’acquitter toutes les dettes et charges de
la succession. Par -une clause particulière , il est dit qu’il
demeure convenu que Desprats pourra agir et exercer
les droits et actions cédés, au nom du cédant;.à l’effet de
quoi le présent acte lui tiendra lieu de procuration pour
intenter audit nom toutes demandes , sans que ladite
procuration puisse être révoquée par le vendeur, comme
faisant partie de l’acte.
Cette vente et cession a été enregistrée le même jour,
2 vendémiaire , et transcrite au bureau des hypothèques
le i 5 du même mois,
En cédant ses droits , le sieur Daudin croyoit se
rédimer de tout procès : on va voir le contraire,
Desprats ne tarda point à agir.
E e 4 du même mois de vendémiaire , et avant la
transcription, il fit citer Capelle, sous le nom de Daudin ,
comme il en avoit le pouvoir par l’acte , en conciliation
sur la demande qu’il se proposoit de former en désis
tement dudit domaine dont il jouissoit, est-il dit , eu
vertu d’une vente surprise à la dame veuve Daudin,
Capelle comparut sur cette citation, par son fils , qui
répondit qu’il étoit d’autant plus étonnant que Daudin
l’accusât d’avoir usé de surprise, qu’il avoit lui-rinême
approuvé et ratifié la vente,
�( 9 )
L a conciliation n’ayant pas eu lieu , Capelle crut
devoir agir de vitesse. Il actionna, le prem ier, Daudin ,
sous le nom duquel il avoit été cité au bureau de paix ,
devant les juges du tribunal de Saint-Flour, par exploit
du 8 brumaire suivant, pour voir dire qu’il seroit gardé
et maintenu dans la propriété et possession dudit do
maine , se voir faire défenses de l’y tro u b ler, et se voir
condamner aux dépens.
X/e 9 du même m ois, Desprats obtint une nouvelle
cédule du juge de paix. Dans cette cédule , après avoir
rappelé la cession qui lui avoit été consentie par Daudin ,
il exposa qu’il avoit été convenu par ledit acte qu’il
pourroit agir au nom de son cédant, à l’effet de quoi
l’acte lui tiendroit lieu de procuration ; qu’il avoit en
conséquence c ité , sous le nom dudit D aud in , Capelle ;
mais que celui-ci ayant excipé d’une prétendue ratifica
tion , qui pouvoit faire naître des discussions entre e u x ,
il entendoit agir en son n om , et se subroger aux pour
suites encommencées.
La conciliation ne réussit pas plus cette seconde fois
que la première.
L e procès verbal de non-conciliation est du 16 bru
maire. Dès le lendemain .17 , Desprats fit assigner Capelle
au tribunal civil de Saint-Flour, et conclut par l’assigna
tion au désistement du domaine, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis l’indue détention.
L e i 5 floréal, jugement contradictoire intervint, qui,
sans préjudice du droit et des moyens r e s p e c tifs des par
ties , ordonna , avant faire d r o it, que dans la décade
Capelle seroit tenu do déposer au greffe du tribunal civil
B
�( 10 )
Ja ratification du contrat de vente consentie'par D audin,
dont il avoit excipé à l’audience , sinon qu’il seroit fait
droit.
Capelle ne se pressa pas d’exécuter le jugement.
Les tribunaux civils ayant bientôt après cessé d’être
en activité, Daudin le fit assigner, par exploit du 23
thermidor an 8 , au tribunal d’arrondissement d’A u rillac , p o u r, faute par lui d’avoir déposé la ratification
soit au greffe du tribunal civil de S ain t-F lo u r, soit à
celui du tribunal d’Aui'illae, conformément au jugement
rendu entre les parties, se voir condamner à se désister
du domaine, avec restitution des jouissances et des dé
gradations, à compter de l’indue détention ; sauf, est-il
d i t , audit D au d in , à s’arranger avec celui auquel il
avoit vendu ses droits, c’est-à-dire, avec Desprats.
Par le môme ex p lo it, il fit citer Desprats pour assister
en la cause , et prendre telles conclusions qu’il aviseroit.
L e 7 fructidor, Capclle prit enfin le parti de dépo
ser l’acte ; il fut dressé procès verbal du dépôt , lors ■
duquel procès verbal, le greffier, qui avoit le plus grand
intérêt, pour ne pas s’exposera être compromis lui-mêm e,
de constater l’état de la pièce, telle qu’elle lui étoit re
m ise, vérifia et constata que dans le corps de l’acte, et
sur plusieurs lettres, il paroissoit qu’on avoit passé la
plume avec nne encre plus noire.
L e 9 vendémiaire an 9, nouvelle citation, aux mêmes .
fins, par Daudin, tant i\ Capelle qu’à Desprats; citation
nécessitée par le rétablissement des avoués.
L e 9 frimaire, demande en recours de Capelle contre
la veuve D audin, demande qui a ensuite été renouve-
�(
II
)
lée par autre citation du 29 messidor an 9 , après avoir
essayé la voie de conciliation ; formalité qui avoit été
omsse lors de la prem ière citation.
L e 25 ventôse an 9 , Capelle a présenté requête à
l ’effet de faire interroger sur faits et articles, et D audin,
et D esprats, et la dame veuve Daudin.
Gomme il a cherché à tirer avantage de ces interro
gatoires , il est nécessaire de les mettre en partie sous
les yeu x du tribunal.
I
n t e r r o g a t o i r e
de
D
a u d i n
.
S’il connoît des dettes actuellement existantes de la
f
succession d’Etienne Descaffres ?
. A répondu en con n oître, sans pou voir dire à quelle
somme elles peuvent se monter.
D ’où provient sa créance sur sa m ère , à raison de
laquelle il lui a fait souscrire des engagemens pour
une somme considérable , par actes des 7 octobre 1790
et 28 novem bre 1792 ?
A répondu que les différens actes souscrits par sa
•mère, en sa faveu r, jusqu’à concurrence de 47 à 48000 fr.,
eurent pour motifs des arrangemens de fam ille, étrangers
au sieur Capcllo.
Pourquoi il n’a vendu que 6000 fr. l’entière succession
de Dosçaiïres ?
A répondu que l ’événem ent de l ’acquisition dont se
chargeoit Desprats étant très-incertain , il n’en voulu t
pas donner une plus forto somme ; que le répondant fut
E 2
�( 12 )
obligé d’accepter à cause des besoins où il étoit en ce
moment, et qu’il seroit inutile de détailler ici.
P ou rqu oi, malgré les ventes consenties par sa m ère,
il n’a pas été payé des sommes qu’elle lui doit?
A répondu que ces ventes n’avoient pour objet que
des arrangemens de fam ille, et que ces ventes n’avoient
pas été faites dans l’intention de les opposer au sieur
Capelle.
Pourquoi il a vendu à Chaunac pour iooo fr. ses
créances m obilières, dont celles sur sa mère montent à
48000 fr. ?
A répondu que c’étoit pour des motifs d’arrangemens de famille, étrangers au sieur Capelle, et au procès
dont il s’agit.
S’il a payé les frais des ventes consenties à Desprats
et à Chaunac ?
. .
A répondu que oui-, mais qu’il avoit fait ces avances
pour leur compte.
Si le 2 vendémiaire an 2 il n’étoit pas créancier
du sieur Desprats d’une somme considérable ?
A répondu que depuis plus de 10 ans il a fait des
affaires avec le sieur Desprats; qu’ils ont été débi
teurs et créanciers mutuels ; mais qu’il ne se rappelle
pas si à cette époque il étoit créancier ou débiteur.
I
n t e r r o g a t o i r e
de
D
e s p r a t s
.
Si h l’époque de la vente qui lui fut consentie par
Daudin , il n’avoit pas connoissance que Capelle avoit
acheté depuis long-temps le domaine de Vernet ?
�C *3 3
À répondu avoir ouï dire que Capelle jouissoit de
ce bien en vertu d’un acte n u l, comme ne l’ayant pas
(acquis du véritable propriétaire.
S’il connoissoit quelques dettes passives de la succes
sion d’Étienne Descaffres ?
A répondu avoir ouï dii-e qu’il y avoit des dettes
passives -, mais qu’il n’en avoit point de connoissance
parfaite.
S’il avoit payé les frais de vente?
A répondu que Daudin en avoit fait les avances, et
qu’il les lui avoit remboursées.
Si ci cette époque il ne devoitpas à Daudin une somme
considérable ?
A répondu qu’il ne lui devoit pas grand’chose ;
qu’ayant des comptes courans avec lui depuis longues
années , et se trouvant tantôt débiteur , tantôt créancier ,
il ne pouvoit fixer de combien il étoit débiteur.
Pourquoi il avoit tardé jusqu’au i 5 vendémiaire à'
faire transcrire la cession ?
A répondu qu’il est libre à tout acquéreur de faire
transcrire quand il le juge à propos.
In t e r r o g a t o ir e
de
la
dame
veuve
D
a u d in
.
P o u rq u o i, à différentes ép oqu es, elle a souscrit des
actes qui la constituent débitrice de son fils de sommes
considérables?
A repondu que c’est pour certains arrangemens et
conventions de famille y dont elle ne doit compte & per
sonne.
�( *4 )
Si elle sait que son fils a vendu à Desprats la suc
cession dont dépend le domaine de Vernet qu’elle vendit
au sieur Capelle le i«1-. mars 1782?
A répondu qu’elle n’a aucune connoissance des affaires
que fait son fils.
Si elle sait qu’il a vendu ses créances mobilières à
Cliaunac ?
A répondu de môme.
Si elle a payé des legs portés au testament d’Ëtienne
Descaifres? si elle a payé des dettes pour la succession de
son mari ?
A répondu que oui,
A quelles sommes peuvent se monter les différens
payemens?
’
' ■
A répondu que les ayant faits à différens termes et
époques, elle n’en a pas conservé la mémoire.
Si Cliaunac lui a fait notifier la vente que son fils lui
a faite de ses créances mobilières?
A répondu que oui,
Pourquoi, après avoir vendu ses biens, elle doit encoro
des sommes considérables à son fils et à d’autres personnes ?
A répondu que les circonstances de la révolution lui
ayant occasioné des dépenses et des sacrifices considé
rables , elles ont absorbé les fon d s, et l’on]; mise dans
l ’ i m p o s s i b i l i t é d’acquitter sa dette,
A la suite de ces interrogatoires, et le 8 floréal an 9 ,
Capell e a présenté une requête contenant ses premières
défenses. Dans cette requête- il commence par rendre
poinpte du testament d étien n e Descaifres. Il rappelle
�( i 5 )
le pouvoir donné par ce testament à la mère de vendre.
11 explique après comment la vente a eu lieu.
« Les le g s , dit-il , ou les dettes reconnues par le
« testament , montant à i 58oo f r . , en ce non compris
« les autres dettes et charges de la succession , tout le
« mobilier étant légué à la veuve >il étoit indispensable
« de vendre des immeubles pour liquider l’hérédité ;
« c’est sans doute ce qui détermina celle-ci à vendre.
« Daudin devoit connoître la destination nécessaire de
« cette vente dont il f u t un des négociateurs. Devenu
« majeur il ratifia volontairement la ven te, par acte du
« 21 mars 1788 ; d’autre part, la veuve Daudin paya
« les legs et dettes d’Etienne Descaffres.
« A u ssi, ajoute-t-il, rassuré par le pouvoir que le
« testament, dont il avoit la connoissance, donnoit à
« la veuve Daudin , par l’emploi utile du prix de la
« vente , et par une ratification que rien ne rendait
« nécessaire, il se croyoit propriétaire irrévocable du
« dom aine, lorsqu’il s’est vu citer en désistement. »
Il expose ¡ensuite que Daudin , Desprats et la veuve
Daudin ont concerté ensemble le projet de lui enlever
une propriété qu’il avoit payée le double de sa valeur;
qu’ ils ont concerté le projet de lui enlever môme tout
espoir et toute ressource de garantie sur les biens de la
dame Daudin , en simulant une infinité d’actes pour
faire disparoître sa fortune.
D e là il passe au récit de la procédure.
Venant aux m oyens, il a soutenu d ’a b o rd que la m ère
avoit pouvoir de vendre , que le testateur avoit pu va
lablement donner ce pouvoir.
�( 16 )
V oîci comment il s’exprime :
a II est constant aujourd’h u i, par le rapport du tes
te tament d’Etienne D escaflïcs, du 3 avril 1773 , que
« le sieur Daudin est son h éritier} et conséquemment
« que le domaine de Vernet lui a appartenu. Mais le
cc même testament ne lui a fait passer la succession que
« sous la condition expresse portant plein et entier pou« voir à la veuve de vendre pour le payement des dettes
« et legs : la clause est conçue uno contextu avec cello
« qui renferme l’institution ; elles sont indivisibles. Ce
« pouvoir , ordinaire dans les testamens, n’a rien de
« contraire ni aux bonnes mœurs, ni aux bonnes lois.
« Les lois i re. et 3e. au Code, Quando decreto opus non
« e s t, le consacrent d’une manière expresse.
« La mère Daudin n’a pas mésusé de ce pouvoir : elle
« vendit 21000 fr. un domaine qui ne valoit que les
« deux tiers; elle fit payer la convenance et la fantai-*
« sie : elle a employé le prix à l’acquit des dettes et
« des legs. »
Il ajoute qu’on le dispensera, sans doute, de rapporter
les quittances des créanciers et légataires : la collusion
de toute la famille Daudin étant trop évidente, pour ne
pas croire qu’on a cherché, par toutes les précautions
imaginables, à lui en derober la connoissance ; que dans
le fait on ne connoît aucun créancier; que le conserva
teur des hypothèques a constaté, par son certificat du
1 1 pluviôse an 9 , qu’il n’y avoit aucune inscription sur
les biens d’Etienne Dcscaifres ; qu’il y en a uno, à la v é rité ,
de 10000 francs sur les biens do la dame Daudin par
Gabriel Chaunac, eu vertu du testament du 3 avril 17 7 3 ,
qui
�( 17 )
qui paroîtêtre celui d’Etienne Descaffres ;, mais qu'indé
pendamment qu’on ne voit pas qu’il soit rappelé dans le
testament, on voit encore moins ce qu’il auroit à de
mander à la veuve Daudin , q u i ri étoit pas héritière
d1Etienne Descaffres.
-• Il a soutenu que la vente étoit encore irrévocable
comme ayant été ratifiée par le fils.
. } Défendant particulièrement à la demande de Desprats,
il a dit que la cession à lui consentie , datée du 2
vendémiaire an 8 , étoit nulle , comme frauduleuse et
simulée ; qu’au surplus cette cession n’avoit pu lui trans
mettre plus de droits que n’en avoit son cédant.
Il ne s’est pas borné là : il a soutenu que la ratification
faite par Daudin , en majorité , ne le rendoit pas seule
ment personnellement non-recevable à provoquer le dé
sistement , mais le rendoit encore garant de la demande
de Despi’ats ; qu’il n’avoit p u , au mépris de cette rati
fication , vendre le môme objet à un autre , et qu’il
devoit être condamné , même par corps , comme stellionataire , à faire cesser la demande de Desprats , ou en
ses dommages-intérêts.
Il a insisté sur la demande en recours par lui formée
contre la veuve Daudin , qu’il a dit dans tous les cas ne
pouvoir être contestée.
Il a soutenu enfin que tous les actes passés , soit par
D audin , soit par la dame veuve D audin, et par eux si
mules , en fraude de la garantie, actes dont il a fait
l’énumération , étoient nuls.
Il a conclu , en conséquence, à ce que , joignant tou-«
tes les demandes , faisant droit sur le tout par même
G
�,( i8 )
jugement : en ce qui touchoit Daudin , il fût déclaré
purementetsimplementnon-recevabledanssa demande*, en
ce qui touche Desprats , que la vente du 2 vendémiaire an
8 fût déclarée nulle , frauduleuse et simulée ; subsidiairement que Desprats fût déclaré purement et simplement
non*recevable dans sa demande ; et où , soit Daudin , soit
Desprats parviendroient à leurs fins , faisant droit sur la
demande en garantie formée contre la dame S obrier, et
sur celle qu’il formoit présentement contre Daudin ,
ils fussent condamnés , et Daudin par corps , comme
stellionataire , à le faire jouir du dom aine, sinon à. lui
en payer la valeur , ainsi que le montant des construc
tions et améliorations qu’il y avoit faites , à dire d’ex
perts , à lui rembourser les irais et loyaux coûts de la
vente , et aux dommages-intérêts résultans de l’éviction ,
suivant l’estimation qui en seroit faite par les mêmes
experts , et en tous les dépens.
Desprats , Daudin et la dame veuve Daudin ont ré
pondu chacun à cette écriture.
Desprats a soutenu ïa sincérité de la cession. Il a d i t ,
au surplus, que Capelle la contestoit sans objet ; qu’en
effet , ou la vente consentie à Capelle étoit valable ,
ou elle ne l’étoit pas. Que si elle étoit valable , peu
importoit que Daudin eût revendu ou n o n , et que la
seconde vente eut été transcrite ou non ; que Capelle
n’en conserveroit pas moins la propriété , en vertu de
la pi’emière vente q u i, étant antérieure à la loi de bru
maire an 7 , n’étoit point sujette îi la transcription pour
la transmission de la propriété : que si , au contraire ,
la vente faite ù Capèlle n’étoit point valable , peu lui
�( i9 )
importoit d’être obligé de se désister envers Daudin ,
ou envers celui à qui Daudin avoit vendu.
Daudin a répondu qu’on ne pouvoit lui opposer la
vente consentie par sa mère ; que cet acte lui étoit étran
ger : qu’à la vérité elle avoit , par le testament , pou
voir de vendre ; mais que , d’une p a rt, le testateur n’avoit
pu donner ce pouvoir ; e t , d’autre p a rt, que le pouvoir
avoit été donné à la charge de l’em p loi, et que Capelle
étoit loin d’établir, ou de pouvoir établir que le prix
eût été employé conformément à1la volonté du testateur:
Qu’on ne pouvoit lui opposer davantage la ratification :
qu’à la vérité elle paroissoit aujourd’hui- à la date du 2
mars 1788 , époque à laquelle il avoit atteint la majo
rité ; mais qu’il avoit été facile à Capelle de remplir
comme il avoit voulu la date qu’il avoit eu soin de
laisser en blanc ; date si visiblement remplie après coup ,
que les chiffres et m o t, 21 mars 1788 , étaient écrits
d’une plume , d’une encre et d’une main différentes ;
que pour affoiblir le contraste on avoit eu la précaution
de repasser la plume sur les lettres du corps de l’acte ,
et de leur donner la teinte de l’encre de la date ; mais
que malheureusement la plume de la date s’étant trouvée
plus fine que celle qui avoit servi à écrire le corps de l’acte,
avoit laissé à découvert une partie de l’ancienne écriture,
en sorte que sur la même lettre il paroissoit deux encres :
Que cette ratification étoit nulle à tous égards ;
Comme donné« en minorité ;
Comme vague te gén érale, s’étendant indistinctement
à tous actes quelconques que la dame Daudin auroit pu
souscrire ; tandis qu’il est de principe que toute approC 2
�( 20 )
foation, pour être valable, doit être faite en connoissance
de cause , avec la connoissance du contenu en l’acte que
l’on entend approuver et confirmer ;
Comme n’ayant pas été faitç double.,
Quant ù la demande en reqours et dommages-intérêts
que Capelle avoit imaginé de former contre lu i, il a dit
qu’il n’y -e n avoit jamais eu de plus ridicule ; qu’il n’y
avoit de sa part ni stellionàt, ni fraude; que c’étoit lui
au contraire qui réclamoit contre la fraude. Il a au sur
plus offert, comme ilT a v o it toujours fait, de faire rai
son de la somme de 13800 f r . , payée effectivement par
le sieur Capelle, ou de la compenser, ensemble les in
térêts , avec la restitution des fruits ou dégradations.
• L a veuve Daudin a défendu aussi de son côté à la de
mande en garantie dirigée[contre: elle. Sa défense a été
sim ple;'elle a soutçnu Capelle non - recevable, comme
ayant eu connoissance du vice de l’acte, et non-seule
ment comme eu ayant eu connoissance , mais comme
ayant coopéré à la fraude.
- Le' y ventôse an 10 , nouvelle écriture de Capelle^
' Dans cette écriture, il a commencé, comme de rai
son , par son apologie ; il s’est efforcé d’écarter les faits
de dol et de surprise qu’on lui imputoit.
S’il faut l’en croire , il ignoroit par quel motif la
dame Daudin s etoit déterminée a lui vendre le domaine *
dont il s’agit. 11 n assure qu’il avoit acquis, parce que
cette acquisition lui convenoit; qu’il s’étoitpou inquiété
de savoir quels étôient les titres de propriété de celle
qui lui vendoit, parce qu’elle avoit une fortune suffi
sante pour le garantir \ que le prix avoit été fixé à
�( 21 )
21600 fr. , et payé comptant. Il a dit qu’il falloit toute
l’imagination do JDaudin pour jeter de l’odieux sur une
négociation aussi simple ; que Daudin avoit cru se ren
dre intéressant en s’accusant d’avoir surpris à sa mère
des blancs seings, pour donner le moyen de réduire la
vente au prix seulement convenu, mais que le fait est
invraisemblable ; que s’ il avoit eu des blancs seings, il
11’auroit pas eu besoin de combiner une intrigue aussi
compliquée ; qu’il auroit eu sur les billets de la mère
tout l’argent nécessaire à son projet de voyage; que
d’ailleurs, dès que le prix de la vente étoit payé comp
tant , que le contrat même portoit quittance, une quit
tance séparée, adaptée à l’ un des blancs seings , n’auroit pu avoir aucun effet ; que pour parer à cette ob
jection, Daudin avoit supposé que le prix avoit été
payé en billets , mais que pour éviter une invraisem
blance il étoit tombé dans une autre ; que cette quit
tance,auroit été datée et donnée avant ou après la vente ;
qiie.jçffflpnée avant, elle n’auroit été d’aucune valeur,
puisque les billets auroient été postérieurs; que si elle
eût été post-datée, l’acquéreur ne se seroit pas mis à la
merci du vendeur q u i, après s’être emparé du billet,
auroit pu protester contre la quittance, et la faire annuller ; que l’on ne pouvoit pas supposer une pareille
imprudence; que l’embarras ,de Daudin pour donner uu,
emploi à ces blancs seings, étoit tel, qu’il ne savoit pas
dire s’il en avoit fait un billet, une quittance ou une
•contre-lettre ; que le seul lait qui p a r o is s o it être vrai y
étoit celui de l’enlèvement commis par Daudin de l’ar
gent que sa mère avoit reçu du prix de la v e n t e ;
�( 2i. /
que la mère avoit aussitôt porté plainte qui n’avoit
pas eu de suites, Daudin ayant su à son retour dés
armer sa m ère; mais que la plainte et la réconciliation
étoient étrangères à celui qui avoit acquis de bonne foi et
payé comptant le domaine ; qu’il étoit vrai encore que
le sieur Sistrières, lieutenant généi*al civil et crim inel,
devant qui la plainte avoit été portée, et les témoins
entendus , avoit pris occasion de là pour former une
demande en retrait, mais qu’il s’étoit désisté par traité
du 5 mai 1789; qu’il étoit étonnant que Daudin cher
chât à l’inculper, après avoir été le premier à lui ren
dre , à l’occasion de ce même p rocès, toute la justice
q u i lu i étoit due. Ce sont ses expressions.
A l’appui de cette dernière assertion, il a produit et
fait signifier trois lettres.
Une première du 28 mars 1782, une seconde du 10
août 1783, dont on a parlé plus haut, sans songer aux
inductions qui en résulteroient contre lui-même. *
T>
• •
«H»*»-''
.hn voici les termes : « M onsieur, le curé de £ya<»>m’a
« marqué que je ne m’étois pas assez expliqué au sujet
« des affaires : voici plus clairement ce qui en est. Lors« que je fus arrive, je subis interrogatoire pou?'savoir
« ce que f a i reçu de vous. Sistrières croyoit et ci’oit
« encore que vous n’aviez fait de billets que pour
« 14000 fr. J ’ai repondu que vous en aviez fait pour
« le contenu au contrat, ce qui l’interloqua fort dans
« ce temps. Quoi qu’il en soit, je ne vous nuirai jamais,
« parce que vous rn’avez payé ce que vous m’avez promis,
« Si Sistrières fait travailler à Riom celte affaire au nom
« de ma m ère, elle l’ignore. Je vous prie de me mar-
�( 23 )
« quer ce qu’il faut que je lui fasse faire pour ne pas
t< être compromis dans les discussions que Sistrières
« a avec v o u s , et que je crois très-mauvaises. A u prê
te m ier jo u r, j’aurai l’honneur de vous voir y et nous con« férerons plus librement. »
Et une troisième, du 26 mars 1785, à l’occasion d’une'
censive que le seigneur de Yaladi réclamoit sur partie
du même domaine de V e rn e t, ainsi conçue :
« M onsieur, je n’ai reçu votre lettre que ces jours
« derniers. Je me hâte de vous marquer que j’ai demandé
« à ma mère si elle a jamais payé de la rente à M . de
« Yaladi. Elle m’a dit qu’elle avoit entendu dire que
« M . Descaffres lui en donnoit ; mais qu’elle ne sait
« pas si c’est du domaine de Vernet ou de R aulhac,
« car on nous en demande aussi pour Raulhac. Nous
« n’avons jamais vu de reçu dans les papiers de mon
« oncle pour l’objet dont il s’agit. Tâchez de terminer
« cela à votre profit : je serai dispensé par là de payer
« une vingtaine d’ écus d’arrérages. Je n’ai pas trouvé
« l’échange des héritages appartenans à mon oncle et
« à M . de Sistrieres. Vous ne devez pas douter que
« je ne voulusse vous obliger ; mais ce papier - là
« s’est sans doute perdu à la mort de mon oncle.
« L ’oncle Sobrier doit arriver dans peu du Querci;
« peut-être me donnera-t-il des renseiguemens : je vous
r en ferai part. »
Il a prétendu qu’il résultoit de ces lettres , et une
nouvelle approbation de la vente, et la preuve que
Daudin n’avoit imaginé qu’après coup, et pour le besoin
de la cause, toutes les imputations qu’il s’est permises.
�CM )
D e là passant à la discussion, il a développé, et les
moyens qu’il avoit déjà fait v a lo ir , et ceux que son
imagination lui avoit suggérés depuis.
Après a vo ir, dans sa requête du 8 floréal an 9 , prin
cipalement insisté sur le lesta m en t, il a imaginé tout à
coup de prétendre qu’il étoit nul.
Il a inféré de cette nullité que la propriété du
domaine avoit passé , après la mort de Descaffres, non
sur "la tête de D audin , mais sur celle de la m ère, plus
proche d’un degré ; que celle-ci avoit vendu sa propre
chose *, qu’elle seule pourroit réclam er, et qu’elle 11e
réclamoit pas ; que Daudin et Desprats étoient sans
qualité.
Il a fondé la nullité sur ce que de dix témoins , y
compris le notaire, qui yavoient assisté, il falloit retran
cher les deux derniers surnuméraires, ces deux témoins
n’ayant assisté qu’à la lectu re, et non à la rédaction ;
qu’il falloit encore retrancher Etienne Terissc , comme
n’ayant signé ni été requis do ce faire : ce' qui réduisoit le nombre à sept, y compris le notaire, tandis
qu’il en falloit un de p lu s, le testateur étant privé de
la vue.
Il a insisté avec complaisance sur cette nullité.
Revenant ensuite subsidiairement à ses premières
défenses, il a dit ; Qu’en supposant même la validité
du testament, la vente ne seroit pas moins inattaquable
d’après le pouvoir donné à la mère de vendre : qu’à
ja vérité il 11e • rapportait pas les quittances des créan
ciers et des légataires constatant l’em ploi, conformément
au vœu du testateur ; mais qu’il étoit d’abord trop év i
dent
�( *5 )
dent qu’on avoit pris dans la famille Daudin toutes
les précautions imaginables pour lui en dérober la connoissance, et q u e , d’un autre côté, il étoit hors de doute,
et prouvé par les réponses mêmes consignées dans les
interrogatoires, que les dettes et les legs avoient été acquit
tés ; que l’emploi étoit ainsi justifié par le fait.
Il a dit que dans tous les cas la ratification auroit cou
vert le vice de l’acte ; que cette ratification opéroit
seule une fin de n on -recevoir invincible contre la 'r é
clamation de Daudin ; qu’en vain on cherclioit à en
faier rapporter la date à la date même de la vente,
c’est-à-dire du I er. mars 178 2, pour en induire qu’elle
avoit été souscrite en minorité ; que quand cela seroit,
il n’en seroit pas plus avancé } qu’il auroit dû toujours
se faire relever dans les dix ans de la majorité ; qu’en
vain on objectoit encore qu’elle étoit conçue en termes
généraux ; qu’aucune loi n’exigeoit qu’elle fût spéciale ;
qu’il suifisoit qu’il lût constant que celui qui ratifioit
avoit eu connoissance de l’acte ; qu’aucune loi n’exi
geo it, non plus, que la ratification fût faite double ; que
Daudin n’avoit pas fait un nouveau contrat, qu’il avoit
consenti simplement que le premier eût son effet; qu’une
pareille approbation pouvoit être faite de toutes sortes
de manières , même par une simple lettre ou une
quittance.
A ces deux moyens résultans, et du pouvoir donne
par le testament , et de la ratification , il en a ajoute un
troisième : la prescription. Il a dit qu’en pays de droit
écrit il étoit constant qu’on prescrivoit avec titre , par
dix ans entre présens , et vingt ans entre absens ; qu’ici
D
�( 2 6 )
•
il avoit titre et possession de plus de dix ans , déduction
faite même du temps de l’absence de Daudin ; qu’ainsi
sous cet autre rapport Daudin étoit encore non-recevable.
Relativement à Desprats , il a soutenu que toutes les
cii’constances concouroient. à prouver la simulation de
la cession du 2 vendémiaire an 8.
i°. L ’antidate évidente. Com ment, a-t-il d it , si la cession.avoit été véritablement à la date du 2 vendémiaire,
le premier acte hostile , la citation devant le juge de p aix,
qui est du 6 vendém iaire, postérieure de 4 ¡ours, au1-oit-elle été au nom de Daudin ? Comment cette cession ,
qu’on a été si pressé de faire enregistrer , puisqu’elle
est enregistrée du même jour , n’a-t-elle été transcrite
que le 1 5 ? N ’est-il pas évident qu’on a profité de la
communication donnée au bureau de paix de la ratifi
cation , de la remarque qu’on a faite qu’elle n’étoit point
enregistrée , pour aviser au moyen de la rendre sans
effet ; qu’on a alors imaginé la cession ; qu’on a profité
du délai que la loi donne pour l’enregistrement des actes,
pour en faire remonter la date au 2 vendémiaire ,
et qu’en même temps, pour obvier à l’objection résultante
de la citation donnée, postérieurement à la cession , au
nom de Daudin , on a inséré dans l’acte la clause que le
cessionnaire pourroit agir au nom du cédant?
2°. lia qualité des parties. Daudin créancier de
Desprats , et par là ayant un empire absolu pour le faire
condescendre à cc qu’il désireroit.
30. La succession entière vendue 6000 fr. , tandis que
le domaine de Vernet avoit été vendu, seul, 21600 fr. ,
et de l’aveu même de Daudin , au moins 13800 fr. ,
�( 27 )
e lle domaine de Raulliac, vendu auparavant, 10177 fr*
40. La multiplicité des actes passés par la mère , par
le fils, pour dérober le gage de la garantie ;
5°. L ’impossibilité d’alléguer la moindre cause de celte
vente précipitée , autre que celle de rendre sans eifet
la ratification ;
6°. L ’avance faite par le vendeur des frais de cette
cession, ainsi que d’autre vente , consentie à Chaunac
à la date du même jour 2 vendémiaire.
Il a conclu de la réunion de toutes ces circonstances ,
qu’il ne pouvoit y avoir de doute sur le concert de
fraude.
Il a observé , au surplus , que les mêmes moyens qui
militoient contre la réclamation de Daudin , militoient
contre celle de Desprats.
Quant à la demande en gai’antie , par lui formée ,
contre Daudin comme stellionataire , et encore quant
à la demande en garantie solidaire formée , tant contre
la dame Daudin , que contre Daudin lui-même , et sur
la nullité des actes par eux passés en fraude de cette
même garantie , il s’est borné à persister dans ce qu’il
avoit précédemment dit.
Tels sont en analise les moyens que Capelle a fait
valoir dans sa requête du 7 ventôse an 10 , et auxquels
il a donné le plus grand développement.
Daudin et Desprats y ont répondu. Ils ont établi
quant au testament, d’une p art, qu’il étoit valable, et
de l’autre , que Capelle n’étoit pas r e c e v a b le à l’attaquer ;
qu’il ne pouvoit l’attaquer, ni comme exerçant les droits
de la veuve Daudin sa venderesse , puisque celle - ci
D 2
�(2S)
l’avoit approuvé et exécuté , ni de son propre ch e f,
puisqu’il l’avoit approuvé lui-même.
Quant à la prescription de dix ans, qu’il ne suflisoit
pas d’avoir titre; qu’il falloit encore titre et bonne foi ;
que de plus, si l’on déduisoit, et le temps de l’absence ,
et le temps pendant lequel la prescription avoit été
suspendue par les nouvelles lois , il ne s’étoit pas écoulé
le temps requis pour cette espèce de prescription ; qu’enfin
l’usure ne se p r C s c r iv o it pas.
La cause en cet état portée à l’audience du 25 thermi
dor an 10 , est intervenu, sür les plaidoiries respectives
des parties, un jugement qui a ordonné qu’il en seroit
délibéré.
A vant le jugement sur délibéré , et le z 5 brumaire
an i i , Daudin présenta requête par laquelle il de-4
inanda , sous réserve de ses moyens de nullité contre la
ratification , et subsidiairement seulem ent, qu’il lui fût
donné acte de ce qu’il reconnoissoit l’écriture du corps
de la pièce , ainsi que la signature , pour être de sa
m ain, et désavouoit avoir écrit le mot et les chiffres 21
mars 1788; qu’en conséquence il fût procédé à la véri
fication de la date de l’acte.
* L e 4 pluviôse, autre requête aux mêmes fins.
Daudin conclut de nouveau à ce qu’il soit ordonné
que par experts convenus ou nommés d’office il soit
procédé à ladite vérification ; lors de laquelle opération
ils vérifieront et constateront,
i°. Si le caractère de l’écrilurc du corps de la pièce
et de la signature D a u d in , étoit conforme à la manière
dont il écrivoit en 1788 , ou si au contraire il étoit plus
�( 29 )
analogue a la manière dont étoit formé le caractère de
son écriture vers 1782 , et à laquelle de ces deux épo
ques paroissoit se référer davantage l’écriture du corps
de la pièce et de la signature ;
20. Si lors de la confection et rédaction de la ratifi
cation , la place destinée à recevoir la date ne paroissoit
pas avoir été laissée en blan c, et si ce blanc 11’avoit pas
été rempli après coup des mot et chiffres 21 mars 1788,
et si ces mot et chiffres n’avoient pas été tracé^avec
Une plume , iule encre et une main différentes ;
30. Si pour faire illusion à la vue on n’avoit pas
fessayé de repeindre les lettres du corps de la pièce et de
la signature Daudin , avec la même encre dont on
s’ étoit servi pour tracer les mot et chiffres 21 /»an? 1788,
et si cette encre n’étoit pas plus noire , et ne tranchoit
pas sur celle plus terne et plus ancienne du Corps de la
pièce et de la signature.
Capelle ne manqua pas de combattre cette demande.
Xl soutint qu’elle étoit nulle et contraire aux règles de
l’ordre judiciaire; d’une part, les juges ne pouvant sta
tuer que sur les fins et conclusions qui avoient été prises
lors du jugement qui avoit ordonné le délibéré ; e t ,
d’autre part, parce que Daudin reconnoissant la signature,
prétendant seulement que la date avoit été remplie après
cou p , et d’une autre m ain, il n’avoit que la ressource
de l’inscription de faux.
Il a ajouté que de plus elle étoit frustratoire ; que le
premier fait tenoit à une infinité de causes et de nuances
trop impossibles à vérifier , et ne pouvoit présenter un
motif assez certain de décision ; que le second et troi
sième fuit étoient également inutiles à vérifier.
�( 3° )
Il importe de mettre sous les yeux du tribunal cette
dernière^ partie de la requête en date du u pluviôse:
voici.com m e il s’exprim e, ou son défenseur pour lui :
« Il est fort inutile de faire vérifier si la date 21 mars
*■
« 1788 est de la main de Daudin , si elle est écrite de
« la même main et encre que le corps de la pièce. L e
« contraire a été constamment avoué. Daudin n’avoit qu’à
k en demander acte.
c«iiPuisqu’il est constant qu’elle n’a pas été écrite par
cc Daudin , mais par une autre main , avec une encre
« et une plume différentes , il est bien constant aussi
« que la date ne fut pas mise au même instant que
« Daudin écrivoit la pièce : deux mains_ ne pouvoient
« écrire à la fois sur le même papier. Il est donc encore
« fort inutile de faire vérifier un fait reconnu et physi« quement constaté. Mais de tout cela il ne résulte aucun
« moyen de faux. Il n’y a que Daudin qui puisse expli« quer comment cette pièce a été écrite, puisqu’elle est
« de son fait. Il suffit à Capelle do dire qu’elle lui a été
« remise telle qu’elle est : il faudroit que Daudin prouvât
« que l’acte a été romis, ou v u , sans date, ou qu’il l’a signé
« en 1782.
« L e troisième fait est encore inutile à vérifier , et le
« résultat en est indifférent, puisqu’il est impossible de
« dire par qui, et quand, ces prétendues surcharges ont
« été fa ites. La pièce étant du fait de Daudin , il est
« présumé l’avoir remise telle qu’elle est présentée, tant
« qu’il ne prouvera pas le contraire. Cette pièce lui a
« été communiquée à Saint-Flour du temps que la cause
« étoit pendante au tribunal civil. Le procès verbal du
« greffier à qui elle a été déposée , dit bien que dans le
�(3 0
« corps de l’acte, et sur certaines'lettres il parbît que
« l’on a repassé la plume d’une encre plus noire. Mais
« ce procès verbal ne constate pas le nombre de ces
« prétendues surcharges , ni l’identité de cette encre
« avec celle de sa date, ni môme qu’il y en eût sur la
« signature Daudin. C’est cependant alors que cela auroit
« dû être constaté , puisque la pièce cessoit d’être au
« pouvoir du sieur Cnpelle. »
• A la suite de cette requête il a conclu à ce que Daudin
fût déclaré non-recevable dans sa demande en vérification;
et, faisant droit sur les nouvelles demandes qu’il formoit
par la présente requête , dans le cas où les conclusions
précédemment prises contre Daudin ne lui seroient point
adjugées , attendu que par l’effet des fraudes par lui pra
tiquées et par la dame Daudin sa mère , il étoit nanti
de tous les biens affectés à sa garantie, sans s’arrêter ù ses
offres, lesquelles seroient déclarées courtes et insuilisantes,
il fû t condamné solidairement avec la dame Daudin à lui
de 21600 fr . , prix principal ,
^ensemble les frais et loyaux coûts; 20. p ré p a ra tio n s et
améliorations; 3°. les dommages résultans dft fa vente
par lui faite de la maison de son ancien domaine de
V e rn ct, ceux qui pourroient être dûs au fe r m ie r pour
la résiliation du bail , et ceux résultans de l’éviction.
Sur cet incident les parties furent renvoyées à l’au
dience ; et le i 5 du même mois de pluviôse, jugement
contradictoire in tervin t, q u i joignit au délibéré.
IjC délibéré a ensuite été prononcé le i 5 germinal.
V oici les dispositions du jugement :
L e tribunal, jugeant ù la charge de l’appel, sans s’ar-
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( 32 )'
rêter ni avoir égard a la demande fotmée par Capelle en
nullité de la procédure faite- postérieurement au jugement de délibéré du 25 termidor an 1 0 , non plus
qu’à la demande de Daudin en vérification de la ratifi
cation dont il s’agit, déboute les parties de leurs demandes î, dépens entre elles compensés à cet égai’d. Sans
s’arrêter pareillement aux demandes de Capelle en nul
lité du testament d’Etienne Descaffres , et de la vente
du 2 vendémiaire an 8 , consentie par Daudin à Despi-ats, dont il est débouté , non plus qu’à la vente du
ier. mars 178 2 , et à la ratification du 21 mars 1788 ,
lesquels deux actes sont déclarés nuls et de nul effet,
oi’donne que le testament dudit Etienne Descaffres , ainsi
que la vente faite à Desprats le 2 vendémiaire an 8 ,
seront exécutés suivant leur forme et teneur en consé
quence condamne le sieur Capelle à se désister, en faveur
dudit Desprats, du domaine du V ern et, dont il s’agit,
comme faisant partie de la succession dudit Descaffres,
dont ledit Daudin est héritier , avec restitution des fruits
,ei intérêts d’iceux , ù compter du jour de la demande ju-^
diciaire ,î^rinsi que des dégradations , s’il y en a , et condamne" le sieur Capelle aux dépens envers les sieurs
Daudin et Desprats.
e
même jugement, faisant droit sur les demandes en
recours et garantie formées de la part de Capelle, tant
contre la daine Daudin que contre son fils : en ce qui
touche la dame D au d in , la condamne à relever et ga
ra n tir ledit Capelle des condamnations contre lui prononcées , avec intérêts et dépens; en conséquence, à
rendre et rembourser audit Capelle la somme de 2 i6 o o f,,
prix
�( 33 ) '
prix principal de ladite vente par elle consentie, fraiset\
loyaux coûts d’icelle, av^c intérêts- du tout à compter
^u jo u r de la demande f ia conclamne , en outre: ,' au£
dommages-mtérêts résultans de l’éviction, et à ceux ré- i
sultans aussi de la vente faite par Capelle de la maison qu’il avoit ù son domaine de V ern et, comme aussi à
ceux qui seront dûs au fermier pour la résiliation de son
^............
b a il, le tout „avec intérêts légitimement dûs; et ce suivant l’estimation qui en sera faite par experts pris ou
nommés d’oilice, lesquels experts estimeront en même'
temps les dégradations, réparations et améliorations qui
peuvent avoir été faites par Capelle dans ledit domaine,
p ou r, après leur rapport fait et rapporté, être ordonné
ce qu’il appartiendra ; dépens , quant à ce, réservés.
En ce qui touche ledit Daudin ; le même jugement le
Gondamne , suivant ses offres, à rendre et rembourser
au sieur Capelle , sur et eji^gnt_moins du prix de la.
ven te, la somme de i38oôlTrancs, ainsi que les ré -. M
parafions et améliorations suivant l’estimation qui en
sera faite par lesdits experts, avec les intérêts du tout
légitimement dûs sauf à lui à se régler avec Desprats,
h qui il a ven d u , pour la valeur des améliorations dont
ce dernier doit profiter. Il ordonne ensuite q u e , sur
la demande en garantie solidaire parformée Capelle
contre la dame Daudin et. son fils , les parties con
testeront plus amplement pour leur être fait droit ,
ainsi qu’il appartiendra ; dépens, q u a n t i ce, réserves:
déclare l’assignation donnée par Capelle à là dame Daudin,
^
le 9 frimaire an 9, ensemble la procédure qui en a été
¿4_
la suite , nulle et de nul effet ; en conséquence , con-
éyJitcfUA
cjZi crtan.ci.fi.
�>. *
( 34 )
damne Capelle aux dépens faits à cet égard, et condamne
la dame veu ve D audin aux dépens envers toutes les
•
î:
\ y fÿ à r * '
«--- .................. ..... .
;•
:- . v ^ )art,es,
. ■. .
.............
\ ¡ v * l D audin a interjete appel le p re m ie r, par acte du i 5
messidor , en ce q u e , sur la demande en garantie soli
daire , il a été ox-donné une plus ample contestation.
Capelle a interjeté appel indéfiniment aux chefs qui
>*** lui étoient g r é v e u x , par acte du 27 messidor.
Q uoique cet appel soit postérieur , et que sous ce
rapport il puisse être c o n s id é r é comme appel in ciden t,
x
néanmoins Capelle doit être regardé comme principal
appelant, puisqu’il a succombé sur tous les points d elà
contestation, à l’exception de celui h l’égard duquel il
a été ordonné que les parties contesteroient plus am
plement.
*
T
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v > . •*YvV..*'*
.
^ y ' k >’•
*\
\
^
-
„•
\ \
a
L a dame Daudin et Desprats se sont aussi rendus ap.jpelans.
Desprats, en^ce que Capelle, condamné envers lui au
désistement, n’a été condamné à la restitution des jouis£anç£s et des dégradations, qu’à compter du jour de la
demande, et non depuis'l’entrée en pggseçsÀon*.. ^
Et la dame D audin , en ce qu’elle a été condamnée
à relever et garantir Capelle de toutes les condamnations
contre lui prononcées envers Daudin et Desprats , et en
tous les dommages et intérêts résultans de l’éviction.
' C’est sur ces appels que la contestation a été portée
en la cour.
j| s’agit maintenant de développer les moyens, et
d’abord de justifier le jugement en ce qu’il a condamné
le sieur Capelle à se désister du domaine qui fuit l’objet
V%
�( 35)
du litige, Il ne sera pas difficile, malgré tous ses efforts,
d’y parvenir,
M O Y E N S .
Il ne peut déjà exister de doute sur les faits : le sieuu
Capelle a pris soin de se condamner lui-même.
Il a désavoué d’avoir traité avec le fils, d’avoir acheté
du fils,
>
Il a désavoué que le fils lui ait fait confidence des blancs
seings, et encore plus qu’il lui ait donné, à l’instant de
la vente, quittance d’une partie du prix , à l’aide de l’un
de ces blancs seings,
Il a désavoué que le prix ait été payé en billets, et
que ces billets , après l’enlèvement, aient été acquittés
au fils jusqu’à concurrence de la somme de 13800 fr.,
montant du prix convenu.
V oici comme il s’exprime , o u , si l’on v e u t, son dé
fenseur , bien avoué par lu i, dans sa requête du 7 ven
tôse an 10.
a L e sieur Capelle ignore pour quels motifs la dame
« Daudin se résolut à lui proposer la vente du domaine
« de Vernet. Cette acquisition lui convenoit, parce qu’il
« avoit un autre domaine dans ce village. 11 s’inquiéta
« peu de savoir quels étoient ses titres de propriété;
« elle avoit une fortune capable de garantir et de rassu« rer l’acquéreur. L e prix fut convenuet arrêté à 21600 ftJ
« et payé comptant. Il étoit exorbitant, mais il étoit
« celui de la convenance.
Plus bas : « Pour se prêter aux arrangemens de D au« d i n , il faut supposer que le prix fût payé en billets, et
E a
�•f qu’avant la vente Daudin avoit donné quittance de
«( partie au moyen d’un des blancs seings....... Sur ce
« premier poin t, il; faut se référer à la vente authenti« que du I er. mars 1782, d’après laquelle les 21600 fr.
'« ont été payés comptant à la dame Daudin. Rien ne
« peut détruire cette clause de la vente.
' Quelques lignes plus bas : « Daudin poursuit son
« con te, et dit qu’il enleva les billets. Il est en con« tradiction avec la vente, qui fait foi que les 21600 f.
« ont été' payés c o m p ta n t ; ce qui exclut toute idée de
soustraction d’effets. »
Et il a l’imprudence de produire lui-même parmi les
lettres du sieur D audin , une du 10 août 178 3, qui le
confond.
• Que dit cette lettre?
« Sistrières croyoit et croit encore que vous n’aviez
« fait de billets que pour 14000 fr. J ’ai répondu que vous
« en aviez fait pour le contenu du contrat. »
Donc il avoit fait des billets ! donc il n’avoit pas payé
comptant en numéraire ! donc il en a déjà imposé sur ce
premier point !
Suivons toujours la lettre.
* cc Je ne vous nuirai jamais. »
Donc il craignoit que Daudin ne lui nuisît ! et celuici ne pouvoit lui nuire qu’en déclarant la vérité. S’il
avoit fait des billets pour l’entière somme de 21600 fr .,
ou qu’il eût véritablement payé celte somme, auroit-il
eu cette crainte ?
« Je ne vous nuirai jamais, parce que vous m’avez
« payé ce que vous m’avez promis. »
�( 37 )
Donc c’est au fils que les deniers ont été comptés
après l’enlèvement des billets!
« Vous m’avez payé ce que vous m’avez promis. »
Donc il n’a pas payé l’entier prix porté au contrat!
donc il y a eu concert de fraude entre lui et le fils,
pour tromper la mère !
Comment échappera-t-il à ces conséquences ?
Comment n’a-t-il pas réfléchi qu’il produisoit contre
lui-même l’arme la plus victorieuse?
Se retranchera-t-il dans la vente? D ira-t-il que contre
un acte authentique on n’admet point de preuve testi
moniale , encore moins de simples allégations, qu’il
n’y a que l’inscription de fau x?
Il ne s’agit point ici d’allégations ; il ne s’agit point
ici de preuve testimoniale.
Il y a preuve écrite , et preuve du fait même de l’ad
versaire , puisqu’elle émane d’une pièce par lui produite.
La ratilication n’est-elle pas une nouvelle preuve, et
qu’il a traité avec le fils, et qu’il connoissoit le vice de
la vente?
Il a désavoué , et il le falloit bien pour la cause,
qu’elle lui ait été remise à l’époque de la ven te, et que
la date ait été laissée en blanc. Il a soutenu que c’est en
m ajorité, et à l’époque du 21 mars 1788, que Daudin
a lib rem en t, et en pleine connoissance de cause, ratifie
la vente.
Et sur la vérification demandée , il a été oblige d’a
vouer que la d ate, les mot et c h iff r e s 2 1 Jiu irs 1788,
étoient écrits d’une autre main , d’une autre plume et
d’une autre encre.
�13- ,
Il a été obligé d’avouer que ces mot et chiffres n’avoient pas été écrits au même instant que le corps de
la pièce.
( Il a été obligé d’avouer plus ; que les lettres du corps
de l’apte avaient été surchargées.
Ces aveux ont été acceptés. .
D e ces aveux ne ré s u lte -t-il pas la preuve la plus
évidente des faits avancés p{ir le sieur D audin, du fait
principal, que la date a été laissée en blanc ?
Indépendamment de ces aveu x, l’inspection seule de
la pièce su ffis a it pour le prouver.
Une remarque essentielle , c’est que l’écriture et l’encre
de la signature , en même temps qu’elles diffèrent de
1’écriture et de J’encre de la date, concordent parfaite
ment avec celles du corps de l’acte.
La concordance avec le corps de l’acte prouve que
le corps de l’acte a été écrit et qu’il a été signé uno
çontextu.
L a différence avec la date prouve qu’elle a été mise
ex intervallo , et lorsque l’acte étoit déjà signé.
O n d i t , lorsque l’acte étoit déjà signé : e t , en effet,
si la signature qvoit été mise après l’insertion de la date,
de deux choses l’une -, ou elle auroit été mise au môme
moment que la d a te, et alors l’encre de la signature
auroit concordé avec celle de la d ate, ce qui n’est pas;
ou quelque temps après, et alors on conçoit qup l’encre
de la signature auroit pu être différente de celle de la
date , mais elle auroit été plus différente encore de çelle
du corps de l’acte, avec laquelle cependant elle cpncorde.
�( 39)
Î1 est donc évident, par riiispection de la pièce, indé
pendamment des aveux arrachés au sieur Capelle par la
crainte de la vérification , que la date a été mise après
coup ; que lorsque l’acte a été sign é, il n’étoit point
revêtu de sa date ; que par conséquent la date a été
laissée en blanc.
Ce fait une fois constant, il doit demeurer également
pour constant, que la ratification a été consentie, non
en majorité , mais en minorité.
Que Capelle explique autrement à quelles fins la date
auroit été ainsi laissée en blanc ! qu’il explique com
ment D audin, après avoir écrit le corps de l’acte , n’aul'oit pas écrit en même temps la date! n’avoit-il pas
la force d’écrire quelques caractères de plus ?
Dira-t-on qu’après avoir écrit l’acte , et avant de lui
donner son complément par la d a te , il a voulu prendre
encore le temps de réfléchir; q u’en conséquence l’acte
a demeuré en simple projet ; que s’étant ensuite déter
miné , on a mis la date ?
Mais alors auroit-il signé ? Signe-t-on iîn acte avant
qu’il soit parfait? N*au roi t-il pas remis à signer, comme
il remettoità écrire la date? o u , s’il vouloit tant signer,
ne pouvoit-il pas écrire , dater et signer, sauf à remettre
l’acte quand bon lui sembleroit?
Comment ensuite la date se rencontrei'oit-elle, nonseulement d’une autre plume et d’une autre en cre,
x mais encore d’une autre main ?
Capelle n’a garde de dire que la ratification lui a été
remise sans date : il comprend qu’il se condamneroit
trop lu i-m êm e. Son système est, au contraire, de dire
�îa o y
'
que la ratification lui a été remise avec la date. Mais
alors comment cette date seroit-elle d’une autre m ain?.
Daudin ayant écrit le corps de l’acte, n’auroit^pas écrit
aussi la date ! Gomment concevoir qu’il eût présenté au
sieur Capelle un acte é c rit, partie de sa m ain, partie
d’une main étrangère? et Capelle l’auroit-il accepté?
.. Comment encore expliquer les surcharges?
Vaines difficultés ! Capelle écarte toutes ces objec
tions d’un mot.
Rien de plus simple que sa réponse.
Est-ce à m o i, d it-il, qu’il faut demander pourquoi,
comment? C’est Daudin seul qui peut le savoir; c’est
lui seul qui peut l’expliquer; c’est lui qui m’a remis
la pièce telle qu’elle est : je n’en sais pas davantage.'
Que Daudin prouve qu’il me l’a remise autrement : s’il
ne le prouve pas } s’il ne prouve pas qu’il me l’a remise
avec la date en blan c, l’acte doit faire foi.
Et vite il a recours à ce brocard de d r o it, que l’acte
fait foi jusqu’à inscription de faux.
Il est bien ici effectivement question de preuve et
d’inscription de faux , lorsque le fait est avoué , lorsque
l’adversaire est obligé de reconnoîlre que la date est
d’une auti’e p lu m e, d’une autre encre et d’une autre
main!
Cette réponse ne satisfaisoit cependant pas à tout; il
restoit encore les surcharges. Capelle ne pouvoit pas
dire qu’il avoit reçu l’acte ainsi surchargé ; ilauroit donné
une trop singulière opinion de sa dextérité et de son
intelligence en alïaires : il falloit imaginer une autre
raison. Convenir que les surcharges ayoient été coinr
�. ( 4M)
mises depuis ? Mais comment faire cet aveu ? Il ne pouvoit dire qu’elles avoient été commises depuis le dépôt
au greffe. L e greffier avoit eu la précaution de constater
l ’état de loLpièce, et elles existaient déjà. A vant le dépôt?
A utre embarras : il falloit supposer que l’acte étoit revenu
au pouvoir de Daudin ; autrement c’étoit se reconnoître
soi-même l’auteur des altérations, c’étoit s’avouer c o u
pable. Et comment mettre en avant une pareille pro
position ? comment lui donner une couleur ?
Capelle n’a point été en peine : il a dit que la piece
avoit été communiquée à Daudin , à Saint-Flour , dans
•le temps que la cause étoit pendante au tribunal civil.
C’est dans la même requête du n pluviôse : on en a
transcrit plus haut les termes ; et alors tout s’explique.
On pourroit cependant demander au sieur Capelle
comment il ne s’est pas plaint, à l’instant ? comment il a
r eu cette pièce ainsi surchargée, sans réclamation ? com
ment , en remettant la pièce au greffier, il n’a pas pro
testé contre les surcharges, surtout dès que le greffier
les constatoit ?
Est-ce devant des juges éclairés , devant un tribunal
renommé par ses lum ières, qu’on propose de pareils
moyens !
Il importoït de commencer par fixer l’opinion du
tribunal sur les faits : l’honneur, l’intérêt de la cause
en faisoient un devoir au sieur Daudin. Il s’agit main
tenant dentrer dans la discussion des moyens-de droit:
nous suivrons le sieur Capelle dans les diverses objec
tions qu’il a faites.
_*
F
�•y,-.-- - . .
1
i■
.•
,•
( 4* )
p r e m i è r e
' •
•
■
o b j e c t i o n
.
-
'Nullité du testament d’Etienne Descaff'res ^qu&Ut est
cetio 'nullité ?‘ '
!
f
pelle a prétendu qu’il falloit retrancher du nombre
'des témoins instrumentaires les deux témoins surnu
méraires , comme n ’a y a n t assisté qu’à la lecture, et
Etienne Térisse , comme n’ayant ni signé , ni été requis
de signer; que, ces témoins retranchés, il n’en restoit
que sept , y compris le notaire, et que le testateur
étant privé de la v u e , il en falloit h uit, aux termes de
l’article 7 de l’ordonnance de 1735.
On a vu quelle est la conséquence qu’il a tirée ensuite
de cette nullité.
f
>
Sans le suivre dans la discussion à laquelle il s’est
'liv r é , il en resteroit toujours, de son propre aveu, sept,
y compris le notaire ; ce qui suiïiroit pour la validité
du testament.
A la vérité , l’article 7 de l’ordonnance des testnmens,
'porte que si le testateur est aveugle , ou si , dans le
temps du testament , il n’a pas l’usage de la vue , il sera
appelé un tém oin , outre le nombre porté par l’article
5. Mais le testateur étoit-il aveugle ? savoit-il perdu
‘ l ’u sa g e d e là v u e ? Il est dit : A cause de laJoiblcsse
’ de sa vue. A v o ir la vue foib le, est-ce être aveugle ? est-*
ce être privé de l’usage de la vue ? A v o ir la vue foible ,
r’est y voir foiblement ; c’est ne pas avoir la vue excel
lente ; mais c’est y voir.
�( 43)
L ’adversaire a donc fait une fausse application de cet
article. L ’intérêt l’a aveuglé.
? •
Il auroit encore moins fait cette objection , s’il avoit
réiléclii sur la disposition de l’art. 45 de la même ordon
nance. Cet article, en exigeant qu’i l ’ne puisse être admis
que des témoins signataires , 'fait exception à l’égard des
testamens passés ailleurs que dans les villes ou bourgs
fermés. Il suffit pour ceux-ci qu’il y ait deux témoins
signataires. Peu importe donc que Terisse ait signé ou
non , puisque , indépendamment de Terisse ,• il y a tou
jours le nombre de témoins signataires suffisant.
J >
En supposant le testament nul*^ poul’roit-il s’en pré
valoir ? Il ne pourront, sans doute , avoir plus ‘ de droits
que la dame Daudin, sa venderesse; ét celle-ci seroitelle recevable à attaquer le testament, après l’avoir ap
prouvé et exécuté?
' - i :s ■.
n
Elle l’a approuve et exécuté , eh s’emparant , aussi-*
tôt après le décès' } de tous les meubles , en vertu du
legs à elle fait, en propriété,' du mobilier.
Elle l’a approuvé et exécuté , en se mettant en pos
session de tous les immeubles , en vertu *du legs d’u
sufruit,
’
'■
>- . . .
' Elle l’a approuvé* et' exécuté *yv eü’Vacquittant partie
des legs.
'■
’
Dans un acte du 20 janvier 1774 , on voit qu’elle a
pris expressément la qualité d’exécutrice testamentaire.
Par cet acte , un>nommé* Etienne Rame laboureur j
en qualité d’héritier de Catherine Dèscnffres , sa m ère,
transige avec là daine veuve D a u d in , en qualité , est-il
d it, (Cexécutrice testamentaire $ E tienne D escajjres
�Ç44)
et comme mère et- tutrice d E tien n e D audin , -son
fils , ce dernier héritier dudit Descaffres ¡ sur la de
mande en entérinement des lettres de rescision prises par
Catherine Descaffres , contre la renonciation faite aux
successions échues et à échoir de,Pierre Descaffres et
Marguerite Déconquans , et sur la demande en payement de la somme de 800 fr. , pour legs à lu i f a i t par
E tienn e D esca ffres, par son testament du 3 avril 17 7 3 ,
desquelles demandes il se départ , moyennant la somme
de 1620 fr. , en sus de celle de 300 fr. , qu’il devoit au
dit Descaffres, et q u i lui a é t é , est-il,ajouté , pareillement léguée par ce dernier.
......
C a p e lle lui-méme en a excipé et argumenté dans sa
requête du 8 floréal an 9 contenant ses premières dé
fenses ; il s’en est fait un principal moyen , il en a ré
clamé l’exécution. Il û insisté sur le pouvoir donné , par
ce testament, à la mère de vendre.; il va même jusques à dire qu’il n’a acheté qu’en conséquence de c©
pouvoir. I l emploie plusieurs pages à prouver la légiti
mité d’une pareille clause. Dans un endroit il s’exprime
ainsi : R assuré par, le pouvoir que le testam ent, dont
il avoit connoissance , donnoit à la veuve IDaudin........
il s e proyoit propriétaire irrévocable. Dans un autre
endroit , il dit : I l est constant aujourd’h u i , par le
rapport du testament £ Etienne Descaffres „ d u 3 avril
1773 j que le sieur ¡Daudin. est son héritier , .et que la
propriété du domaine{ lui appartenQit^ mais le testa
teur' .ne lu i a \fa it passer sa succession que sofif, lat
condit on expresse de plein et entier pouvoir à la mère
ede r e n d r e lus bas \Oti(ne vu itp a s ce que C/iaunac,
�C 45 )
mtroil pu demander à la veuve. D audin , q u i n étoit
pas héritière d? Etienne Descaffres.
C ’est après s’être exprimé ainsi , et dans la requête
du 7 ventôse an 10 , qu’il a changé tout d’un coup de
langage , et qu’il a imaginé cette prétendue nullité.
Il ne peut pas dire qu’il ne connoissoit pas le testa
ment. Il dit lui-m êm e, dans sa requête du 8 floréal, qu'il
en avoit la connoissance ; et on voit qu’il lui en avoit
été de nouveau justifié, puisqu’il dit : I l est constant
par le rapport du testam ent, etc.
Il excipe de la nullité ; et il.fait , d’un autre côté ,
tous scs efforts pour prouver que les legs ont été payés.
Il assure, que le prix de la vente a été employé à l’acquit
tement des legs. Il a fait interroger , principalement sur
ce fa it, et le sieur Daudin , et la dame Daudin. Com
ment n’a-t-il pas vu qu’il étoit en opposition avec luimême : qu’il impliquoit de soutenir le testament n u l,
et d’argumenter en même temps de son exécution ?
Il faut donc écarter ce moyen , fruit tardif de son
imagination.
Passons aux antres objections qu’il ne propose, dans son
nouveau système, quesubsidiairement.
SECONDE
-, - *
'
OBJECTION.
1 / j
■■<!
Pouvoir donné à la mère par le, testament.
Déjà elle n’a point fait usage de ce pouvoir. Ce n’est
point en vertu de ço pouvoir q u ’e lle a vendu. Elle a
vendu en son .propre et privé nom ; et c’est, sur ce qu’elle
�(
46
\
a vendu en son propre et prive nom , que le sieur
Capelle fonde la demande en garantie , qui ne pouvoit
avoir lie u , si elle avoit vendu en vertu du pouvoir.
L e testateur a donné pouvoir à la mère de vendre ;
mais ce pouvoir n’a pas été donné indéfiniment; il a été
grevé de la condition , de la clïarge de l’emploi en
acquittement des dettes et des legs.
Capelle se donne beaucoup de tourment pour prouver
que les dettes et les legs ont été acquittés. On l’accor
dera, s’il veut : mais Font-ils été des deniers de la vente?
C ’est ce qu’il est loin d’établir. '
'J
Q u’il n’attribue pas l’impuissance où il est de rapporter
cette preuve au peu de bonne foi de Daudin et de la
dame sa m ère, qui retiennent les quittances. On pourroit d’abord lui dire qu’il dévoit veiller lui-même à
l’emploi , et se munir des actes qui poiivoient servir à
le constater. Mais ici non-seulement il'n e prouve _pas
l’em ploi, mais il a fourni lui-même la1preuve de noneinploi. La lettre du 10 août 1783 , qu’il a prod uite,
prouve que le prix a été payé en billets , 'lesquels ont
été ensuite enlevés par le fils , et par uüé suite nécessairepayés au fils.
■
■
11:1 • '
J
r
L e testateur a donné pouvoir de vendre ; mais ce
pouvoir doit s’entendre civilement dans le cas o ù ily auroit
nécessité, dans le cas où les créanciers et les légataires
feroient des poursuites.1Il y avoit si peu nécessité , que
le prix , comme on vient de le voir , a été payé en
biHets.
‘
: ! :
'
IiC testateur a donné pouvoir de vendre ; mais pour
l'acquit(ement'dcâ déttes'ét1dûs leg*s‘; et',°par 'conséquent'
�'(
47 5
%/
jusqu’à la concurrence seulement de ce qui étoit néces
saire pour les acquitter. L a mère ne pouvoit pas vendre
au delà. Elle avoit précédemment vendu le domaine de
Raulhac et autres héritages" dont le prix avoit été em
ployé. Il faudroit donc prouver que ces premiers deniers
ont été insuffisans. IL faudroit prouver qu’il restoil encore
des dettes et des legs assez pour absorber l’entier prix
du domaine de Vernet , c’est-à-dire , que la succession
étoit plus onéreuse que profitable , puisqu’il n’y avoit
point d’autres immeubles.
L e testateur avoit donné pouvoir de vendre ; mais
avoit-il dispensé, avoit-il pu dispenser des formalités
nécessaires pour l’aliénation des biens des mineurs ? S’il
s’agissoit d’entrer dans cette question , il ne seroit pas
‘difficile d’établir que les biens des mineurs sont sous
la surveillance des lois , et que nul ne peut déroger à
ce qu’elles prescrivent , suivant cette maxime : Nerno
potest cavere testamento ne leges valeant.
On ne inanqueroit pas d’autorités à l’appui de ce
sentiment.
L ou et, dans son Recueil d’arrêts, au mot A liénation ,
tome i , page 19 , sommaire 5 , rapporte un ari’êt qui
l’a jugé ainsi :
« L e bien , dit-il , que le père avoit ordonné de
« vendre par son testament, est aliéné par le fils même
« sans solennité. On a demandé si cette aliénation
« pouvoit subsister. Jugé au. contraire; et que la volonté
« du testateur dispense seulement de discussion et de la
« vente du mobilier. V oluntas testatoris excusât à
« discussione mobilium.
�U 8 )
« Mais pour faire vendre l’héritage , il faut que ce
« soit au plus offrant et dernier, enchérisseur, ut justo
« pretio alienetur. Et le père ou a u tre, par son testa« ment, ne peut dispenser de cette solennité, ut illœsum
a minorum servetur patrirnonium , qui ne peut se
« vendre , spretâ juris solennitate.
Brodeau , son commentateur , ajoute : « C’est une
« règle et maxime certaine, que l’immeuble du m ineur,
« qui est sous la protection de la loi et de la justice,
« ne peut être v e n d u , soit en pays coutum ier, soit en
« pays de droit é c r it, que sous les formes et formalités
« publiques; et la disposition d’un particulier, par tes« tam ent, qui ordonne la vente et l’aliénation , ne peut
« déroger au droit p u b lic, et empêcher que les lois et
« ordonnances aient lie u , ce qui a été souvent jugé par
« les arrêts. On ne suit point les lois contraires au Code:
« Quandô decreto opus non sit. »
Meslé , Traité des minorités , chapitre 8 , pose éga
lement pour principe que le fonds que le testateur a
ordonné être vendu , ne peut l’être sans affiche, estima
tion , publication et enchère,
From ental, la Peyrère , page 5 i 8 , enseignent la même
doctrine. Ils disent qi^e le bien du mineur ne peut être
vendu sans formalités , lesquelles, ce sont les expressions
du premier , doivent être observées , dans le cas même
oit le testateur, qui a institué héritier un m in eu r,
auroit ordonné la vente pour le payement de ses dettes,
et quoique le p rix eût été employé au payement de ces
mêmes dettes, u ivant l'intention du testateur.
Mais cette question est njiôinc indiiTérente. Quel que
fû t
�( 49 )
fût le p o u vo ir, il ne pouvoit être séparé de la condition
de l’emploi qui y étoit attachée , et il 11’a pas été satis
fait à cette condition ; quel que fût le p o u vo ir, le testa
teur a entendu autoriser une vente dont le prix seroit
sincère, et non une vente dont le prix seroit simulé ,
une vente qui ne seroit que l’eiTet de la circonventioa
et du dol.
T R O I S I È M E
O B J E C T I O N .
R atification du 21 mars 1788.
L e sieur Capelle a-t-il osé produire cette ratification ?
o s e -t-il encore y insister? a - t - i l pensé qu’il pouvoit
se faire un titre à lui-même en remplissant à son gré
la date ?
La ratification auroit-elle été consentie en m ajorité,
elle ne seroit pas moins sans effet.
Elle est triplement nulle : et comme n’ayant point
été faite double ; et comme ne contenant point de prix ;
et comme vague et générale, ne s’appliquant pas plus à
la vente dont il s’agit qu’a tout autre acte.
C ’est î\ la discussion de ces trois propositions qu’on
va se livrer. Ces trois propositions établies, il ne res
tera sans doute à l’adversaire aucune espérance.
Et d’abord , la ratification n’a pas été faite double.
Ici le sieur Capelle a crié à l’erreur. Ou a-t-on v u ,
a-t-il d it , qu’il soit nécessaire qu’une ratification doive
être faite double? est-il une loi qui l’exige?
G
�( 5o )
C’est dan» sa requête du 7 ventôse an 10 , qu’il s’est
attaché à combattre cette proposition. Il n’est pas indif
férent de mettre sous les yeux du tribunal une partie
de ses raisonnemens.
« La première id é e , d it-il, qui se présente naturel« lem ent, est que la ratification n’est que l’approba« tion de ce qui a été fait ; o r , l’approbation peut être
« faite de,toutes sortes de m anières, même par une
« simple lettre, par une quittance.........Celui qui ratifie,
« qui consent que tel acte soit exécuté , ne consent
« pas cet acte déjà subsistant, il n’en change ni n’en
« altère les clauses......... On ne peut appliquer ici les
« principes concernant les actes synallagmatiques. Il est
« évident qu’en ce cas il faut une preuve réciproque
« de ces obligations. Mais ici il y a un acte préexistant y
« une convention réd igée, qui contient les obligations
« du vendeur et de l’acquéreur. Si l’on vouloit y déroger,
« faire un nouvel acte, il est clair qu’il faudroit lui
« donner la forme du contrat de vente , et par consé« quent la fa ire double. Mais on n’a pas voulu cela;
« on a voulu seulement que le premier conti’at fût
« exécuté : celui qui ratifioit n’a eu besoin que de
f< renoncer au droit qu’il avoit d’attaquer l’acte, et
cc l’autre, dont le droit et les obligations restoient les
« m êm es, a dû par conséquent ne rien faire, si ce
« n’est recevoir la ratification............. On ne peut pas
« dire non plus que dans cet état de choses une partie
« ne puisse fo r c e r l’autre à exécuter l ’acte........... Elle
« est liée par le précédent contrat.........On défie Daudin
« de r a p p o r te r un seul préjugé qui ait la moindre ana-
�( 5i )
« logie avec l’espèce dans laquelle il se tro u v a Daus
« toutes celles-là il n'y avoit pas de co n tra t, et ces
« actes informes ont dû être annullés. » Il faut d o n c, suivant le sieur Capelle lui-m êm e, que
la ratification soit faite d ou b le, lorsqu'il n y a pas de
contrat préexistant, parce qu’alors la ratification est
moins une ratification qu’une vente.
En avouant ces principes, enseignés d’ailleurs par
tous les auteurs, il s’est jugé lui-même.
Qu’entendons-nous, en disant, lorsqu'il n'y a pas de
contrat préexistant ? Toute ratification suppose néces
sairement un contrat antécédent.
Nous entendons un contrat qui ait pu produire quelque
engagement.
,
Nous entendons un contrat fait par celui même qui
ratifie , ou au moins au nom de celui qui ratifie.
Si le contrat est absolument n u l, s’il n’a pu produire
aucun engagem ent, s’il est nul dans le principe, et ab
initio , pour se servir de l’expression des auteurs, l’acte
par lequel on ratifie n’est point une ratification ; c’est
un nouveau contrat : il n’y a point deux contrats, il
•n’y en a qu’un. Tune e s t , pour se servir des expres
sions énergiques de Dumoulin , nova et principalis
dispositio.
Si l’acte est étranger, à celui qui ratifie, s’il n’a été
fait ni par l u i , ni en son n o m , c’est encore impro
prement une ratification.
, 11 faut éclaircir ceci par des exemples, r
Un mineur devenu majeur ratifie l’acte qu’il a sous
crit en minorité. Il y a un contrat préexistant. A vant
G '2
�(5 0
la ratification , le mineur étoit déjà lié. On sait que
l’engagement du mineur subsiste tant qu’il ne sc fait pas
restituer. L ’acte n’est pas n u l, il est seulement sujet à
être rescindé ; venit annullandus. Il n’est pas nul de nul
lité absolue, il n’est nul que d’une nullité relative. Il
n’est pas même besoin d’une ratification expresse, la
ratification tacite par le laps de dix an s, sans réclama
tion , suffit: et la ratification , soit expresse, soit tacite,
remonte pour l’hypothèque, et a un effet rétroactif au
premier contrat.
Une femme en puissance de mari contracte une obli
gation sans le consentement de son m a ri, ou vend
■sans son autorisation, ou , si l’on veut, avec son autori
sation, une partie de ses biens dotaux. L ’obligation et la
Tente sont absolument nulles , elles n’ont produit aucun
engagement. Si la femme, après la dissolution du mariage,
ratifie, c’est un contrat entièrement indépendant. C ’est
un nouveau contrat dont l’effet ne remonte point au
premier contrat.
Exemple du second cas. Un m ineur, parvenu à la
majorité , ratifie un contrat qu’il a souscrit en mino
rité. Il ratifie un acte de son fait. Un commettant ratifie
ce qui a été fait par son mandataire , quoique hors des
bornes de son contrat. Un particulier dont on a fait l’affaire
à son insu , se portant fort pour lui , ratifie ce qui a été
-fait pour lui. L ’un et l’autre ratifient un acte fait en
leur nom. Dans tous ces cas, même dans les deux der
n iers, il y a un contrat préexistant. Le commettant,
le particulier dont on a fait l’affaire à son insu , en rati
fian t, sont censés avoir contracté.eux-mêmes les enga-
�( 53 )
gcmens qui ont été contractés en leur nom. C’est le cas
de la maxime , R atihabitio mandato comparalur. La
ratification a alors un effet rétroactif, parcequ’elle n’est que
l’accessoire et le complément des actes qui ont été ratifiés.
Mais un tiers vend la propriété d’un particulier. 11
la vend non au nom de ce particulier, mais en son propre et
privé nom ; le particulier ratifie ensuite : la ratification
n ’aura effet que du jour même , et non du jour de la
vente faite par ce tiers. Il n’y a point dans cette espèce
de contrat préexistant. O n ne peut pas appliquer la
maxime , R atihabitio mandata comparatur. On ne
peut pas feindre un m andat, là où le mandataire a
contracté, non au nom de celui q u i ratifie , comme dans
l’espèce précédente , mais en son nom propre et privé ;
non pour l’affaire de celui qui ratifie, mais pour sa
propre affaire : le contrat résiste dans ce cas à la fiction.
Ce que l’on vient de dire est la doctrine de tous les
auteurs.
C ’est principalement à l’occasion du retrait féodal et
d u retrait lignager, qu’ils ont traité la question de savoir
de quel jour la ratification devoit avoir effet pour faire
courir l’an du retrait; et ils la décident par les distinctions
q u ’on vient d’exposer.
Qu’on lise tous ceux qui ont écrit sur cette matière,
ils sont unanimes.
Pour ne pas s’étendre, on se bornera à citer Pothier,
traité des Retraits.
« Lorsqu’un m in eu r, dît - il , part. i erc. ch ap. 4 ,
« n. 124 , a vendu son héritage propre, et que devenu
* majeur il ratifie, c’est du jour du contrat do vente
« que le retrait lignagel* est 'ouvert ; ,caiv>la nullité de
�( 54)
l'aliénation des mineurs n’est pas une nullité absolue,
mais relative , et en faveur du mineur seulement.
L ’acte n’est nul que dans le cas auquel le m ineur, ou
ceux qui succèdent à ses droits , jugeroient à propos
de s’en plaindre. L ’acte par lequel il ratifie en majori té , est un acte par lequel il renonce à s’en plaindre; mais ce n’est pas par cet acte, c’est par la vente
qu’il a faite de son héritage, qu’il l’a mis hors de
sa famille , et c’est cette vente qui donne ouverture
au retrait, et non sa ratification.
et 11 semble , ajou te-t-il, nombre 12 , qu’il en doit
« être autrement d’une vente qu’une femme sous puis« sance de mari auroit faite sans être autorisée , et
« qu’elle auroit ratifiée en viduité. L ’acte qu’elle a fait
« en la puissance du mari est absolument nul. La rati« fication qu’elle a faite en viduité n’est pas proprement
« une ratification , ce q u i est nul ne pouvant être con« Jîrmé. C’est un vrai contrat de vente qu’elle a fait de
« nouveau, par lequel elle a mis son héritage propre
« hors de sa famille. La vente qu’elle en avoit faite
« sous la puissance du m a ri, ne l’en a pas fait sortir
« puisque cette vente étant un acte absolument n u l, ne
« pouvoit avoir aucun effet. 3)
V oilà pour la première distinction entre le cas où l’acte
est nul par lui-meme , et le cas où il est simplement
sujet à être rescindé ; ce que les auteurs expriment par
nullité absolue , et par nullité relative.
V oici pour la seconde distinction entre le cas où celui
qui ratifie , confirme un acte fait par lui , ou par un
tiers pour lui et eu son nom , et le cas où au contraire il
ratifié un acte qui lui est totalement étranger.
o
«
«
«
«
«
«
«
«
«
�( 55 )
« Lorsque la ven te, dit le même auteur au même
« endroit, nombre 1 23, a été faite par un autre que
« par le propriétaire, quoique la tradition soit inter« venue ; ce n’est que du jour du consentement donné
« a la vente par ce propriétaire , qu’il y a ouverture
« au retrait ; car ce n’est que par ce consentement qu’il est
« censé vendre. »
C’est l’espèce dans laquelle se rencontre le sieur Daudin.
La vente a été consentie par la m ère, non comme
tu trice, non en qualité d’exécutrice testamentaire, non
pour les affaires du mineur , puisque l’acte ne constate
aucun emploi ; mais en son nom propre et privé , comme
de chose à elle appartenante. La ratification que le sieur
Daudin en a faite, n’est point une ratification : il n’y a
point de contrat préexistant, e t , de l’aveu même du
sieur Capelle, elle devoit alors être conçue en forme
de vente et être faite double.
Pour prouver qu’il n’y avoit pas de contrat préexis
tant, que la vente faite par la m ère, non en sa qualité,
de tutrice, mais en son nom propre et privé , étoit
entièrement étrangère au m ineur, on ne fera qu'une
question au sieur Cnpelle. La ratification tacite par le
laps.de dix ans, sans réclamation, auroit-elle dépouillé
le sieur D audin? N o n , sans doute..
Il y a p lu s, il n’y a de contrat préexistant, ni de la
part du fils, ni même de la part de la mère.
Il n’y en a pas de la part du f i l s , p u is q u ’ il n’existe
aucun acte de sa p a r t , et que le sieur Capelle n’a pas
môme voulu qu’il entrât dans la vente, pour qu’on ne
pût lui dire qu’il avoit eu connoissance du vice de l’acte.
�( 56 )
Et il n’y en a pas non plus de la part de la mère.
Ceci, sieur Capelle, va vous surprendre ; mais écoutez :
Vous sa v e z qu’il faut trois choses pour constituer la
vente ; la chose, le prix et le consentement : res , pre
tium et consensus. Il faut que le consentement porte
sur la chose et sur le p r ix , sans quoi il n’y a point de
vente. C’est la disposition de plusieurs lois.
Si je compte vendre une chose, et que vous comp
tiez en acheter une autre ; il n’y a point de vente.
Si je compte vendre pour un p rix , et vous acheter
pour un autre moindre; il n y a pas de vente.
Pour quel prix la mère a-t-elle entendu vendre? Pour
la somme de 21600 f r . , puisque c’est le prix porté au
contrat. Pour quel prix Capelle a-t-il entendu acheter?
Pour la somme de ig S o o fr. ; et il n’a effectivement payé
que ce prix. La lettre fatale du 10 août 1783 le prouve.
S istrières, dit Daudin dans.cette lettre, croit encore que
vous n a v e z f a i t de billets que pour 14000 f r . Q uoi
qu'il en s o i t , je ne vous n uirai jamais. V ou s rtCavez
payé ce que vous in a vez promis,
Si la dame Daudin a entendu vendre pour 21600 f r . ,
s’il est constant que Capelle n’a payé et n’a voulu payer
que 13800 f r . , il n’y a donc pas eu de vente. La vente
pèche par une de ses qualités constitutives, par le con
sentement.
Il n’y a donc pas de contrat préexistant, même d elà
part de la mère. C ’est donc mal. à propos qu’on veut
qualifier l’acte du 21 mars 1788 de ratification. On ne
peut confirmer ce qui est n u l, et non-seulement ce qui
edt n u l,• mais ce qui u’existe pas, puisque, par défaut de
consentement,
�C 57 )
consentement, il n’y a pas de vente, même de la part de
la mère.
Ce seroit donc une vente, et non une ratification que
le sieur Daudin auroit souscrite , et elle devoit être faite
double.
L e sieur Capelle veut faire regarder la vente consen
tie par la mère comme un contrat préexistant. Ce contrat
'porte i i 600 f r . , et il n’a payé que 13800 fr. ; il devroit
donc t)ifrir les 7800 fr. restans, puisqu’il demande l’exé
cution de ce contrat. M ais, n o n , il veut retenir, et cet
excédent de prix et le domaine.
L a ratification est nulle en second lieu comme ne con
tenant pas de prix.
L e p rix, dira l’adversaire , n’est-il pas dans le contrat?
O u i, s’il étoit sincère ; mais on a v u , et il est prouvé
qu’il étoit simulé.
M aintenant, quelle est la convention que le sieur
Daudin a ratifiée ? Il a consenti, si l’on v e u t, que le
sieur Capelle demeurât propriétaire; mais est-ce moyen
nant le prix réel qu’il a donné, ou moyennant le prix
simulé? E st-ce moyennant la somme de 13800fr ., ou
moyennant celle de 21600 fr. ? C’est ce que la ratification
11e dit pas , et ce qu’elle devoit dire. Il y avoit d’autant
moins d’inconvénient, que la ratification ne devoit pas
paroître aux yeux de la m ère, qu’elle devoit demeurer
entre les mains de Capelle.
- Enfin la ratification est n u lle, comme étant vague et
générale. Il faut encore développer les principes à cet
II
�, ( 58 3
égard. Ils sont consacrés dans la loi m êm e, dans la loi
nu Gode, S i m ajorjfactus alienationem Jactam ratam
h a b u erit, livre 5 , titre 74 : voici les termes de cette
loi.
S i sine decreto prœsidis prœdia tua à tutore tuo
alienata s w i t , nec speciali conjirmatione, vel ( si bonâ
Jîde p ossessorfuisset) statuti temporis excursu id quod
perperàm est actum , fu era t stabilitum , prœses provinciœ possessionem in ju s tuum retrahet.
La ratification doit donc être spéciale. Une ratifica
tion en termes vagues et généraux, qui ne désigne pas
même l’acte qu’on ratifie, ne suffit pas.
L a ratification doit être expresse et faite nom matïm ,
dit Pérésius, sur le titre 46 , au Code, livre 2 : S i major
jfactus ratum habuerit. Car si l’on confirme un acta
ou des actes en gén éral, sans exprim er, ni leur objet,
ni leurs clauses principales, ni le temps où ils ont été
passés, la convention est radicalement nulle par la seule
indétermination des choses qui en font la matière , et
par l’impossibilité d’assigner, d’une manière fixe et cer
taine , l’objet sur lequel a porté le consentement des par
ties contractantes.
L ’adversaire ne peut se dissimuler les termes de la loi ;
il cherche à les interpréter. Suivant l u i , si la loi exige
que la ratification soit spéciale, c’est en ce sens, qu’il faut
qu’il paroisse que celui qui a ratifié a eu connoissance
de l’acte ; mais en induire qu’il faut spécifier la nature,
les clauses, la date, le nom du notaire qui l’a reçu, c’est
une puérilité qui n’a été ni pu être dans l’esprit du
législateur,
�( % )
O r , ajoute-t-il, le sieur Daudin peut-il dire qu’i l n ’a
pas eu connoissance de l’acte, tandis que d’un autre côté
il soutient que c’est lui qui a traité, que c’est lui qui
a reçu le p rix?
D ’abord , on pourroit répondre, en admettant la res
triction que l’adversaire veut donner aux termes de la '
loi , qu’il ne suffirait pas qu’il fût constant d’ailleürs
que celui qui ratifie a eu connoissance de l’acte ; qu’il
faut que l’acte en renferme lui-même la preuve, probationem probatam ; qu’un acte doit contenir par lui-même
tout ce qui sert à en constituer la valid ité, toutes les
formes essentielles.
Mais l’adversaire interprète encore mal la loi. Lors
que la loi exige que la ratification soit spéciale , ce n’est
pas seulement afin qu’il soit établi que celui qui ratifie
a eu connoissance de l’acte ; il faut non-seulement qu’il
soit établi qu’il a eu cette connoissance, mais encore qu’il
a eu intention de réparer le vice de l’acte. C’«st prin
cipalement celte intention , et la manifestation de cette
intention , que la loi requiert.
Les interprètes ne l’ont jamais entendu différemment.
On a déjà cité Pérésius ; on pourroit citer Dum oulin,
l’Epine de G rainville; mais une autorité plus remarqua
ble, est ce qu’on lit dans le Projet du Code civil, art.
229 du livre 2, qui n’est que la transcription de ce que
Dumoulin avoit enseigné. « L ’acte confii’matif, dit cet
« article, suppose un contrat antérieur, et un contrat
« valable. Si l’acte confirmé est radicalement nul, il n’est
« point validé par la simple confirmation, à moins qu’elle
« n’éaonce la connoissance de la nullité du prem ier, avec''
II 2
�('6°)
« rintention de la réparer, qu’il n’en rapporte la sub
it stance, et ne contienne la déclaration de la volonté de
« lui donner l’exécution. »
L e sieur Daudin ne désavoue pas avoir eu connoissance de la vente ; mais il faut que l’acte porte la ma
nifestation de l’intention de lui donner l’exécution.
E t comment supposer cette intention, si le vice n’est
pas énoncé, si l’acte n’est pas même rappelé? C’est pour
que cette intention ne pût être équivoque , que la loi
a voulu que la x'atification fût spéciale.
On ne peut pas môme dire quel est l’acte que le sieur
Daudin a voulu ratifier. La ratification, pour s’étendre
à to u t, né s’applique à rien ; pour trop signifier, elle
est insignifiante.
On a vu comment elle est conçue : Je soussigné , est« il d it, approuve et ratifie les actes que ma mère a
« consentis en faveur de M . Capelle, conseiller, du do« maine de Yernet et tout ce qui en dépend, et pro« mets de l’en faire jouir en vrai propriétaire. »
Quels sont ces actes qu’il approuve et ratifie? Sont-ce
des contrats de vente , des baux emphytéotiques , des
échanges, des donations même ?
O n a cru écarter cette objection en disant que le sieur
Daudin Fa suffisamment expliqué en ajoutant, promets
Ten fa ire jo u ir en vrai propriétaire. Mais c’est rentrer
dans la difficulté ; car tous les actes qu’on vient d’énon
cer sont translatifs de propriété.
11 n’est pas dit Tacte, il est dit les actes ; ce qui em
brasse, par la généralité de l’expression, les actes au
thentiques, les actes sous signature p riv ée, les contre-
�( <5i ).
lettres, les quittances, les décharges et toutes les con
ventions quelconques qui pourroient être intervenues
entre la dame Daudin et le sieur Capelle.
Il est dit,.Zw actes, et cependant il n’en paroît qu’un.
L e sieur Daudin convient bien avoir eu connoissance
de la vente •, mais il ne convient pas avoir eu connois
sance d’autres actes, et on ne prouvera pas qu’il en a eu
connoissance. La ratification s’étend à tous ; elle est donc
n u lle, de l’aveu même du sieur Capelle, et d’après l’in
terprétation qu’il donne lui-même aux termes de la l o i ,
relativement à ces actes dont il n’a pas eu connoissance.
Si elle est nulle pour les un s, elle est nulle pour l’autre.
Il n’y a pas deux ratifications, il n’y en a qu’une: on ne
peut pas la diviser : on ne peut pas la déchii'er en partie.
Mais toute ratification doit au moins être postérieure
à l’acte qui est ratifié. O r, qui ne voit qu’elle a précédé,
qu'elle a été remise à l’avance ?
Capelle, ainsi que nous l’avons d it, étoit incertain s’il
prendroit un bail à locaterie perpétuelle pour éviter le
droit de lo d s, ou s’il prendroit une vente. Dans cette in
certitude, il se fit remettre une ratification en termes gé
néraux et à toutes fins.
T e l est l’acte qu’il oppose. T e l est l ’a cte qu’il produit
avec confiance, dont il fait le principal moyen de sa
défense.
*
Il argumente des lettres ù lui écrites par Daudin. Dans
l’uue, ce sont des renscignemens sur la forme-: dans
�^ (62)
l’autre, celle du 10 août 1783, Daudin dit qu’il ne lui
nuira jamais auprès de Sistrières: dans une autre, il parle
d’une rente réclamée par le seigneur de Valadi ; il ter
mine par lui faire des complixnens -, car l’adversaire a été
jusqu’à relever cette circonstance.
Que signifient ces lettres, écrites toutes en m inorité,
puisque Daudin n’a été majeur que le 2 septembre 1787?
Ces lettres seraient tout au plus une suite de la vente.
Mais qui sait mieux que le sieur Capelle que ce qui n’est
que la suite, l’exécution d’un acte, n’en est pas la ra
tification ?
Il fa u d r o it un engagement form el, une intention bien
manifeste de ratifier; et quand les lettres contiendroientcet
engagement, il resteroit à opposer ce qu’on a opposé
contre la ratification du i ei\. mars 1788, que l’acte devoit être fait double.
Q U A T R I È M E
O B J E C T I O N .
Prescription de 10 a n s , avec titre.
On sait qu’en pays de' droit écrit on prescrit nonseulemcnt l’hypothèque, mais encore, si l’on veu t, la
propriété , avec titre et bonne foi, par dix ans entre pré
sens , et vingt ans entre absens. L e sieur Capelle a cru
pouvoir invoquer cette espèce de prescription, admise
en pays de droit écrit, et rejetée par plusieurs Coutumes,
notamment par celle d’Auvergne. Il a soutenu que si la
vente consentie par la m ère, en son propre et privé nom,
ne lui avoit pas transféré la propriété, elle étoit au moins
�( 63 )
un titre apparent, suffisant pour prescrire; qu’au titre
il joignoit la possession pendant le temps requis par la
loi ; qu’ainsi, dans tous les cas, la réclamation du sieur
Daudin seroit tardive.
On prescrit par dix ans, avec titre; il faut ajouter,
et avec bonne f o i . Il ne suffit pas d’un titre apparent,
il faut encore la bonne foi. Qu’entend-on par bonne
foi? L ’opinion d’avoir acheté du véritable propriétaire,
opinio quœ siti dominii.
L e sieur Capelle avoit-il cette opinion? A - t - il cru
avoir acheté du véritable propi*iétaire ? Il a pris soin
encore de fournir des armes contre lui. Qu’on lise sa
requête du 6 floréal an 9 , il y fait lui-même l’aveu du
contraire. On n’en rappellera que ces expressions qu’on
a déjà citées : « Rassuré , est-il d it, p arle pouvoir que le
« testament, dont il avoit connoissance , avoit donné à
« la veuve D audin, par l’emploi utile du p rix , il se
« croyoit propriétaire irrévocable. »
A v o it-il la bonne foi lorsqu’il a pris la ratification ?
Est-ce pour prouver qu’il avoit acquis de bonne foi ,
qu’il a produit la lettre du 10 août 178 3 ?
A u titre et à la bonne foi il faut joindre la posses
sion de dix ans utiles ; e t , d’après le calcul même de
l ’ adversaire, il ne s’est point écoulé ce temps.
Il convient qu’il ne faut compter que pour moitié le
temps de l’absence de Daudin ; et par absens on sait qu’il
faut entendre, en cette m atière, n o n -seulement ceux
qui sont véritablement absens, qui sont hors du terri
toire français , mais même ceux qui sont domiciliés dans
des ressorts différens ; non-seulement ceux qui étoient
�...
(64)
alors domiciliés dans des parlemens , mais même dans
des bailliages diiFérens. Il ne faut donc compter que pour
moitié le temps qui s^est écoulé depuis le 2 septembre
1787 , date de la majorité de Daudin , jusqu’au 11 dé
cembre 1790., date de la suppression du bailliage de
V ie , lieu du domicile de Daudin , et de l’installation
du tribunal de district d’Aurillac , au ressort duquel il
a été réuni ; ce qui présente 1 an 7 mois et 24 jours
seulement de temps utile; à quoi ajoutant 8 ans îô
mois et 24 jours écoulés depuis , jusqu’au 4 vendémiaire
an 8 , date de la réclamation de Daudin , correspondant
au 26 septembre 1799 , il s’est écoulé 10 ans 6 mois et
18 jours : mais on connoît la disposition de la loi du i5
germinal an 3 , qui a relevé de la prescription et de
tout autre délai emportant j i n de non-recevoir tous les
détenus à l’occasion de la révolution , pendant le temps
de leur détention, et même j u s q u à la publication du
décret. Le sieur Daudin.a été reclus le 24 messidor an 2.
L ’arrêté du comité de sûreté générale qui l’a rendu h
la liberté , est du 17 pluviôse an 3. Si on déduit ce
temps de sa réclusion on. verra qu’il ne s’est pas écoulé les
dix ans utiles. Ainsi disparoît cette quatrième objection.
Tels sont les moyens que le sieur Capelle a fait valoir
pour, se maintenir dans son injuste possession. On croit
les a v o i r suffisamment combattus. O n croit avoir démontré
le bien jugé, du jugem ent, en ce qu’il l’a condamné à
se désister d’un domaine aussi illégalement acquis.
L ’ a p p e l qu’il a interjeté ne porte pas seulement sur
cette disposition.
il est appelant , en second lieu , en ce que le sieur
Daudin
�( 65)
Daudin n’a pas été condam né, comme stellionataire, ^
le faire jouir , sinon à lui rembourser l’entier prix porté
au contrat de vente , frais et loyaux coûts, et dommogesintérôts ; qu’il n’a été condamné qu’à lui payer la somme
de 1 3800 f r . , pour le prix de la vente. Cette seconde
disposition n’est qu’une suite de la précédente. Le bienjugé de l’une entraîne nécessairement le bien-jugé de
l’autre. Il est inutile de s’arrêter davantage sur ce se
cond clief.
O n ne dira qu’un mot sur la qualification de stellio
nataire. Qu’est-ce que le stellionat ? c’est le délit de celui
qui vend la même chose à deux , qui , après avoir vendu
à un , vend à un autre. Pour qu’il y eût stellionat ,
il faudroit qu’il y eût une première vente consentie à
Capelle par Daudin ; il faudroit que Capelle eût acheté
valablement , ou de la m ère, ou du fils. E s t - il dans
cette position ? On a vu comment il a surpris le consen
tement de l’une , comment il a abusé du délire de l’autre.
Est - ce le sieur Capelle qui inculpe Daudin de fraude ?
Q u is tulerit Gracchos de seditione querentes!
Il est appelant , en troisième lieu , en ce que sur la
demande en garantie solidaire il a été ordonné une plus
ample contestation.
Ici le sieur Daudin est loin de s’opposer à l’infirmation
de celte partie du jugement. Il est lui-inême appelant en
cc chef. Il a le même intérêt que le sieur Capelle, celui
d’éviter, et les frais, et les longueurs d’un nouveau procès.
lie tribunal n’hésitera sans doute point a accueillir leur
appel, à les sortir d’affaire par un seul et même jugement.
�(66)
La loi qui veut que dans toute cause il y ait deux
degrés de juridiction , ne s’y oppose point. On connoît
le jugement du tribunal de cassation, d u ...........................
qui a jugé que lorsque le tribunal de première instance
a jjrononcé sur certains chefs et ordonné une plus
ample contestation à l’égard des autres , le tribunal
supérieur , saisi par appel de la connoissance de ceux
sur lesquels il a été fait droit définitivement, peut statuer
sur le tout ; que ce n’est point là 1 évocation défendue
par les nouvelles lois ; et cela, pour que les parties ne
soient pas exposées à subir autant d’appels qu’il y a de
chefs de demande.
Ceci n é cessite d’entrer dans le mérite de la demande
même. Il sera facile d’établir qu’elle ne peut épouvanter
le sieur Daudin.
Garantie solidaire.
L ’adversaire commence par faire rémunération des
actes préparés, médités, concertés entre le fils et la mère
et Desprats, pour lui enlever tout à la fo is, et sa pro
priété et le gage dé sa garantie.
7 octobre 1790 , et 28 novembre 1792 , actes par
lesquels la dame Daudin se reconnoît débitrice envers
son fils de 47660 f r . , inscrits le 3 messidor an 7.
7,8,9
11 nivôse an 6 , ventes par la dame
D audin, à différens particuliers , pour plus de 40000 fr .,
toutes tra n sc rite s le 4 vendémiaire an 8.
6
c o m p lé m e n ta ir e an 7 , inscription par Louise et
Elizabetli Sobrier , sœurs do la dame D audin, pour
�( 67 )
1200 fr. , en vertu d’un testament du 30 septembre 1778.
D u même jour , inscription de 3000 fr. dûs à AnneRose A b eil, belle-sœur de Daudin, sur la dame sa m ère,
en vertu d’un acte du 2 complémentaire an 7.
7
brumaire an 8 , inscription de i 5ooo fr. par Gabriel
Cliaunac, beau-frère de D au d in , sur la dame Daudin ,
sa belle-mère, en vertu de deux testamens du i 5 février
1766, et 3 avril 1773.
2 vendémiaire an 8 , vente par Daudin audit Gabriel
Cliaunac, de ses créances mobilières, moyennant 10000 fr.
i 5 vendémiaire an 8 , transcription de la vente passée
entre Daudin etDesprats , sous la date du 2 vendémiaire,
même jour de la vente consentie à Chaunac.
Ne voit-on p a s, s’écrie le sieur Capelle , le concert
de fraude ? Ne voit - on pas que l’on a cherché par
tous ces actes à mettre à couvert la fortune de la mère ;
qu’on a voulu la constituer en faillite frauduleuse ?
O r , a jo u t e - t - il, ceux qui coopèrent à la fraude ,
ceux qui sont complices d’une faillite frauduleuse , sont
personnellement responsables , et responsables par corps.
Ce n’est pas dans l’espoir du succès, c’est dans l’intention
de jeter de la défaveur sur le sieur D audin , qu’on a élevéune prétention aussi chimérique.
Il n’y a point de com plicité, là où il u’y a point de
fraude. Il n’y a point de fraude : on n’a pas cherché y
comme il s’en plaint, à lui enlever le gage de la garantie,
s’il n’y a point de garantie, s’il n’a aucune action en ga
rantie à exercer, 011 ne dit pas contre le fils , mais meme
contre la mère.
Il 11’y a point de garantie , là où il n’existe point d’engaI 2
�C68)
gement : or il n’en existe point. On a prouvé plus haut
que le contrat de vente ne peut produire aucun enga
gement , même de la part de la mère. E t , en effe t,
moyennant quel prix a-t-elle entendu vendre ? Elle a
entendu vendre moyennant la somme de 21600 francs.
Capelle n’a entendu acheter et n’a acheté que 13800 fr.
Les parties ont donc été divisées sur le prix. Il n’y a
donc point eu de consentement. S’il n’y a point eu de
consentement, il n’y a point de vente. Il ne s’agit pas
ici de restitution , il ne s’ a g it pas de nullité : c’est plus.
I/acte n’est pas seulement n u l, il n’a pas existé; il n’y a
point de vente. L e prix est de l’essence de la vente : il
n’y a point de ven te, si les parties ne sont pas d’accord
du prix.
. Secondement, il n’y a pas lieu ù garantie, c’est-à-dire ,
à dommnges-intérêts , lorsque l’acquéreur a connu le
vice de la vente *, l’acquéreur ne peut en ce cas prétendre
que la restitution du prix. La loi dernière, C. Em ptor
conimunia de h g a tis, en a une disposition précise.
E m ptor sciens rei graçam en, adçersus venditorem
actianern habeat tantùni ad restitutionem p r e tii, nec
ex duplœ stipulatione locum haheat, cùm sufficiat ei
yro preiio quod sciens dédit pro re aliéna satisjieri.
. 'O n sait que ceux qui sont d’une opinion contraire,
qui pensent que la pleine garantie est due lorsqu’elle a
été stipulée , soit que l’acquéreur ait connu ou non le
yice de la ven te, prétendent que cette loi Ernptor est
-uue loi particulière pour les choses comprises au legs
et lidéicominis, par la grande faveur que les legs et les
üdéicommis, et généralement les dispositions des mou-
�( 6 9 }
rans, avoient chez les.Romains. M ais, en admettant cette
interprétation., le sieur Capelle se rencontreroit précisé
ment dans l’espèce de cette loi. Le fils avoit été institué
h éritier, la mère avoit été nommée exécutrice testamen
taire. Elle devoit en conséquence veiller davantage à la
conservation de l’h éréd ité, à la conservation des biens
compris dans l’institution , au lieu de les aliéner*. D ’un
autre côté, l’adversaire n’a point dissimulé avoir connu
le testament ; il auroit donc sciemment concouru avec ln
mère à l’inexécution de la volonté du testateur -, il seroit
donc dans le cas de la loi j e t, aux-termes de cette l o i ,
quelque cia use, qu’il ait stipulée, nec ex duplüü stipulatio n e , il ne peut exiger que la restitution du pri*.
Il
ne peut donc prétendre qu’on a cherché à frauder
la garantie quant aux dommages-intérêts, et il ne peut
dire que les actes dont il a fait l’énumération ont été
consentis en fraude de la garantie , quant au p r i x , puis
que le sieur Daudin a toujours offert, et par conclusions
précises, de lui faire raison de la somme de 13800 f r . ,
prix réel de la vente.
; Ces offres prouvent sa franchise et sa loyauté.
lie sieur Capelle, qui a exercé pendant plusieurs années
les fonctions honorables de la magistrature, n’ignore pas
que le mineur n’est tenu de rendre les deniers qu’il a
perçus, qu’autant qu’il en a profité par un emploi utile
et avoué par les lois : Qttatenùs in rem vers uni.
Daudin pouvoit donc se dispenser-de faire ces offreè;
il les a faites : il n’a donc point colludé pour faire perdre
le sieur Capelle ï
Et le sieur Capelle, qui l’accuse de fraude , réclame ce
�/
(
)
qu’il n’a même pas payé. Il réclame la somme de 21600 fr.
indépendamment de ses dommages-intérèts, tandis qu’il
est prouvé qu’il n’a payé que 13800 fr.
Et quels sont les actes sur lesquels il fonde la preuve
de collusion et de fraude ?
L a vente consentie à Desprats ! Mais cette vente doit
lui être indifférente ; il doit lui être indifférent d’être
condamné à se désister d’un domaine envers l’un ou
envers l’autre.
Les deux actes par lesquels la mère s’est reconnue
débitrice envers lui d’environ 48000 fr. ! Mais le sieur
Daudin lui a d it, dans son interrogatoire, que ces actes
avoient.eu pour motif des arrangemens de fam ille; que
loi’squ’ils avoient été souscrits , ils ne l’avoient point été
en vue de les lui opposer,
Les inscriptions faites par les créanciers, parens, si
l’on veu t, ou alliés de Daudin ! Mais elles ont été faites
en vertu de titres anciens qui ne sont du fait, ni de la
dame D audin, ni de son fils.
L a vente faite par Daudin à Clxaunac de ses créances
mobilières ! Mais Daudin n’a-t-il pas pu disposer de sa
chose propre? Est^il, a-t-il jamais été le débiteur du
sieur Capelle ? Quel titre le sieur Capelle a-t-il pour
être le scrutateur des spéculations qu’il a pu faire ?
Enfin on va plus loin. Auroit-il colludé ; il auroit
colludé , non pour commettre une fraude , mais pour
s’en rédimer, Seroit-il repréhensible?
Que voit-on dans cette cause ? D ’une p a r t, tin jeune
homme sans expérience, livré ù la fougue de l’â g e , et
�(
71
)
emporté par une passion ardente ; de l’autre, un ju g e ,
un ancien magistrat , faisant céder ses devoirs à son
ambition.
C’est entre eux que la cour a à prononcer. Est-ce le
sieur Daudin qui doit redouter le jugement?
P A G È S - M E I M A C j jurisconsulte.
M A L L E T , avoué.
A R I O M , de l'im prim erie de L a n d r i o t ,
la C o u r d ’appel. — A n 12.
seul im prim eur de
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daudin, Eléazard-Rostang-Etienne. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mallet
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
Description
An account of the resource
Mémoire pour Eléazard-Rostang-Etienne Daudin, propriétaire ; contre François Capelle, ci-devant conseiller au bailliage et siège présidial d'Aurillac ; en présence d'Antoine Desprats, et de dame Marguerite Sobrier, veuve de Jean Daudin.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1773-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
71 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0532
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Vernet (domaine du)
Rights
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Domaine public
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Text
M EM OIRE
P OUR
Sieurs Jean-François D E L S O L aîné, habitant
de la ville d' Aurillac, et Gabriel-Barthélemy
D E L S O L - V O L P IL H A C
habitant de la
ville de Paris.
C O N T R E
Dame Jeanne - Marie D E L S O L ,
Vigier-D orcet.
veuve
En présence du sieur D E S P R A T S ., habitant
de la ville d’Aurillac.
L
A
dam e V i g i e r - D o r c e t ,
propriétaire sous une condition
résolutoire, d 'u ne fortune très-considérable, traduit aujourd’hui
ses freres devan t les T r ib u n a u x , et les oblige à p r o u v e r , a v a n t
l’événement de la condition; qu’ils ont un droit incontestable,
A
�si cette condition se purifie, aux Liens que le sieur Delsol,'
leur p è r e , lui a donné par le contrat de son mariage , avec
stipulation de retour, en cas qn'elle mourût sans enfans, ou_ses
eiifans sans descendans.
Cette dem ande prém aturée, dont les annales de la juris
prudence n’offrent aucun exemple , a sa source dans l’éloignement où l’on a toujours tenu la dame Dorcet de sa famille , et
dans l’impatience où sont les personnes qui l’entourent, de s’as
surer , par des voies indirectes , avant son décès , un patrimoine
que les liens du sang , l’ordre établi par les lois et le vœu de
la nature lui prescrivaient de conserver intact a ses proches.
Les premières règles-du d ro it, les maximes de la jurispru
dence , sur la stabilité de laquelle portent l’ordre public et la
tranquillité des citoyens, les décisions de tous les auteurs , ré
sistent avec tant de force et de clarté aux volontés de la dame
D o rce t, que tout esprit raisonnable n’hésitera pas à prononcer
en faveur des sieurs Delsol.
Cette manière d’envisager une cau se, cette précision qui en
écarte tout ce qui y est étranger, l’babitude de ne voir qu’avec
les yeu x de la l o i , de ne parler et de ne juger que comme
elle , sont ordinairement le partage des Magistrats et des Juris
consultes. Le Public, aussi juste sans doute, mais nécessairement
moins éclairé , a souvent des opinions qui l’entraînent, des
préjugés qui le subjuguent ; les égards qui lui sont dûs exigent,
dans des affaires d’une importance aussi majeure que celle qu’on
v a faire connaître , une discussion détaillée , sans laquelle la
vérité ne pourrait percer jusqu’à lui.
Les sieurs Delsol n’ont besoin, pour dissiper toutes les illusions,
que de rendre compte des dispositions du père com m un, et
d’observer que , dans tous les actes* l’intention où il était de
conserver à sa famille une fortune qu’il avait acquise en grande
p a rtie , se manifeste ouvertem ent, et perce même dans une
foule de circonstances dont il est inutile de rendre compte
pour le moment.
�m
■’
'FAIT.
•■
Des deux mariages du sieur Delsol étaient issus plusieurs
enfans.
/
La demoiselle Marie D elso l, aujourd’hui veuve D orcet, fut
l’unique fruit de son premier mariage avec la demoiselle Thomas.
■ Le 2 Juin 1760 , la demoiselle Delsol contracta mariage avec
le sieur V ig ie r-D o rce t, receveur des tailles de l’élection de
Mauriac.
L e sieur V ig ie r épousait la iille d’un homme qui avait acquis
ùne fortune immense ; aussi les libéralités qu’il lit en sa faveur
répondirent-elles à la réputation dont il jouissait.
Il lui donna d’abord, par donation entre-vif, en propriété
et jouissance, la terre du Claux et une somme de 10,000liv.
et par une seconde disposition, il s’engageait de 11e point ins
tituer d’autre lieritière qu’elle.
Mais il porta en même tems ses vues sur sa postérité ; il
prévit le cas où sa lille n’aurait pas d’enfans , et celui où ses
enfans mourraient sans descendans, et dans ces deux hypo
thèses , il apposa à ses libéralités une clause de retour qu’il est
essentiel de mettre sous les yeu x des M agistrats, avec l’ensemble
de la clause qui renferme toutes ses dispositions.
» Ledit S .r Delsol ayant le mariage pour a g réab le, et ayant for>» mé la demande en délaissement, aux requêtes du palais à Paris,'
» de la terre et seigneurie du Claux et autres biens situés en
« cette province d’A u v e rg n e , dépendans de la succession de
» défunt sieur de Fortisson , et par lui abandonnés à ses créan» cie rs, faute de paiement des sommes dues au sieur D elsol,
» comme subrogé au lieu et place du marquis de Montlezun et
» de la dame de Fortisson, son épouse ; et cette demande en
» délaissement venant à lui être a d ju g ée, donne, audit c a s ,
» par donation entre-vif pure et simple , à la demoiselle Delsol,
» sa fille , ci-présente et acceptante , et autorisée, en tant que
» de besoin, par ledit sieur de Y i g ie r , son futur ép o u x, par
A 2i
�( 4 )
» avancem ent d’iioirie , le domaine , terre et seigneurie du
» C la u x , paroisse de Naucelles , en quoi que ladite terre et
j> domaine du Claux puissent consister, aux mêmes charges et
» conditions que le délaissement lui en sera fait et adju gé,
» conformément à la demande qu’il a formée aux requêtes du
» p a la is, sous la réserve des autrçs biens dont la demande a
» été formée par la même requête ; et au cas où ladite demande
» en délaissement desdits Liens ne lui serait pas ad ju gée, ledit
» sieur Delsol, pour dédommager sadite fille dudit domaine et terre
» du C la u x , lui donne et délaisse toutes les créances qui lui
» sont dues sur lesdits biens . en capital et accessoires, avec
» pouvoir audit sieur futur époux d’en exiger le paiem ent, et
» d’en fournir toutes quittances et décharges valables, à la charge
» par lai de le reconnaître, comme il s’y o b lig e, sur tous et
» clia cu n s ses biens présens et à v e n ir , pour rendre et restituer
» le tout à qui de di’oit appartiendra, le cas de restitution arrivant.
» Ledit sieur Delsol a aussi donné, par même donation entre» v i f , à ladite demoiselle D elsol, sa fille, acceptante et auto» risée comme dessus , la somme de 10,000 liv . , qu’il a tout
» présentement comptée et délivrée audit sieur de V ig ier ,
» futur époux , lequel comme content, en a quitté et quitte
» ledit sieur D elsol, et a reconnu ladite somme sur tous ses
y biens et ceux de la dame de Moissier sa mère , présens et à
» v e n ir , pour la rendre et restituer, le cas de restitution arri» v a n t, à qui il appartiendra.
» Et à l’égard du surplus des autres biens qui se trouve* ront rester audit sieur Delsol lors de son décès , icelui a
» promis de n'instituer d'autre héritière que ladite demoiselle
» D elsol, sa f i l l e , sous la. réserve de l’usufruit de tous lesdits
1» biens institués , et de pouvoir vendre et engager lesdits
>» b ien s, ainsi qu’il trouvera à propos , tant à la vie qu’à la
» mort, et encore de pouvoir disposer d’une somme de 10,0001.,
» et n’en d isp o san t p a s , ladite réserve tournera au proiit d<? '
» sadite fille,
�( 5 )
» Et enfin, à la charge de payer à la demoiselle L a g a rd e ,
» sa belle-m ère , au cas où elle survive audit sieur B e ls o l, une
» pension annuelle et viagère de 600 l i v . , payable de six en
» six m ois, et d’avance ; et au cas ou ladite demoiselle D e lso l,
» future épouse, viendrait à décé.der sans enfa n s, ou ses enfans
» sans descendons, ou sans disposer valablement, ledit sieur
d Delsol se réserve expressément le droit de réversion et de retour,
» tant des biens donnés que réservés, sans qu’il puisse êtva
» dérogé, par sa dite fille , future épouse , audit droit dô
» réversion, par aucune disposition ni autres actes à ce contraires*
L e sieur D elso l, donateur, qui avait passé à de secondes
noces avec la demoiselle Dubois de Fontenilles , est décédé en
1780, laissant plusieurs enfans de ce mariage.
Peu de jours avant son décès , il avait fait un testament dans
lequel il instituait son fils aîné , et successivement ses autres
enfans , par ordre de primogéniture , ses héritiers universels ,
voulant expressément q u e, dans le cas où la dame Jeanne-Maria
D e lso l, épouse du sieur de V ig ier , viendrait à décéder sans enfa n s ou descendons , son héritier recueille et profite du droit de
réversion stipulé par le testateur dans le contrat de mariage da
sa fille avec le dit sieur de Vigier, etc.
Ce testam ent, qui fut déclaré nul pour vice de forme seu
lem ent , expliquerait suffisamment, s’il en était besoin , les
intentions du sieur Delsol; il y manifeste formellement la volonté
de transmettre à ses enfans , en vertu de la clause du retour
qu’il s’était réservé , la condition a rriv a n t, les biens qu’il avait
donnés à sa fille du premier lit. Cette réflexion , qu’on pou rrait
regarder peut-être comme indifférente , est c e p e n d a n t trèsim p o rta n te , ainsi que les sieurs Delsol le dém ontreront dans
le cours de leurs moyens.
Q uoiquil en soit, après le décès du père commun , la dame
D o rcet, en sa qualité de donataire un iverselle, s est mise en
possession d’une fortune qu’on peut évalu er, sans exagération,
�( 6 )
à, tin million , 'valeur de ce tems ; ( l ’actif mobilier'montait- à
plus de 709200 liv. )
.
• *.-c
. La majeure partie de cette fortune a été engloutie en peu
d’années. L a dame D o rcet, après avoir épuisé les créances
mobilières, a vendu tôus les immeubles qu’elle a trouvés à vendre*
et cependant elle n’ignorait pas que son père l’avait grevée d’un
droit de retour transmissible à ses héritiers : elle n’ignorait pas que
le donataire, possédant à charge d’un retour conventionnel, ne
pouvait disposer des biens donnés, au préjudice du droit de
retour; m ais, quoique devenue veu ve depuis 1785, quoiqu’elle
soit dans un âge très-avance , au lieu de jouir tranquillement
des débris d’un patrimoine im m ense, pour cette p ro v in ce,
elle a manifesté ouvertement la volonté de faire passer dans
des mains étrangères, des biens que les lois lui commandaient
de co n s e r v e r dans sa famille. E lle 'a vendu au sieur Desprats,
par acte du i 5 A v ril 1806, un pré appelé de Concourt, situé
dans les environs d A u rillac, moyennant le prix et sommé de
¡quarante et quelques mille francs.
L e sieur Desprats n’a pas été aussi confiant que les autres
¡acquéreurs de la dame Dorcet; il paraît, qu’ayant eu connaissance
du contrat de mariage du 2 Juin 1760, et de la clause particulière
du retour que le sieur Delsol père s’était réservé, il a refusé de
payer le prix de l’acquisition qu’il avait faite, à moins que la
dame Dorcet ne lui fournît caution, et il a , en effet, m otivé
son refus , sur ce que la dame Dorcet ne possédait le pré d<3
Cancourt, qu’en vertu des dispositions que le sieur Delsol avait
faites, dans son contrat de m ariage, avecjle sieur D orcet; que
d’après ces dispositions, elle n’avait pas une pleine et entière
p rop riété, mais seulement une propriété conditionnelle et réso
luble , la condition arrivant, parce que feu sieur Delsol s’était
réservé le droit de retour, dans le cas ou elle mourrait sans
enfans, ou scs enfans sans descendans, en lui interdisant toutes
dispositions ; que ce droit subsistait malgré son prédécès , en
faveur de ses autres enfans, d’où il suivait que le sieur Desprats
�était en danger cTéviction, et partant fondé à faire résoudre la
v e n te , ou à ne payer que sous caution.
T el fut le langage que tint le sieur Desprats à la dame D orcet,’
lorqu’elle voulut obtenir le paiement du prix d e là vente.
L a dame D o rcet, offensée d ’un refus aussi extraordinaire,
a voulu en rendre les sieurs Delsol , ses frères, responsables :
et comme ils sont appelés par les liens du sang à recueillir les
biens sujets au droit de retour, après son d écès, elle les a
traduits devant vous, en même tenis que le sieur Desprats; ce
d ern ier, pour voir ordonner l’exécution de l’acte de vente du
pré de C an court ;
Et les sieurs D elso l, pour voir dire que la clause de son
contrat de mariage avec le sieur Dorcet, en date du 2 Juin
1760, relative au droit de retour qui y est stipulé, est éteinte
par le prédécès du sieur Delsol p è r e , ou que ce droit a été
recueilli par elle , en sa qualité d’héritière instituée, et, dans
aucun cas, ne pouvait l'empêcher de disposer; que d’ailleurs ce
droit de retour était une substitution fidci-commissaire, abolie
par les lois des 25 Octobre et 14 Novembre 1792; qu’ain si,
sous tous les rapports, la clause était caduque et nulle.
Les sieurs Delsol, voulant rester étrangers aux démêlés survenus
entre Desprats et leur sœur, avaient d’abord formé la résolution
de ne pas discuter, du vivan t de la dame D orcet, un droit qui
n’est pas encore ouvert; aussi opposèrent-ils, contre leur mise
en cause, une exception aussi simple que péremptoire ; ils dirent
que la stipulation dont il s’agit, n’ était qu’une clause condition
nelle , dans le cas où leur sœur viendrait à décéder sans enfans,
et que, jusqu’à ce que cette condition fût accom plie, ils ne
pouvaient avoir qu’une simple espérance, mais non pas UT1
droit ouvert,* qu’ils ne pouvaient exercer aucune action, puis
que leur droit n’était pas ouvert ; qu’ils ne pouvaient non plus
renoncer a ce droit , puisque toutes les lois défendent de
renoncer, ou se départir des espérances acquises, lorsque les
droits ne.sont pas encore ouverts; qu’au surplus, la renonciation
�.
( 8 )
serait encore illusoire , puisque , dans le cas ou ils viendraient
à prédécéder leur sœur, cette espérance serait transmise à leurs
enlans , indépendamment de leur volonté et de tout acte qu’ils
pourraient consentir ; qu’en conséquence , ils ne pouvaient
<]¿fendre à l’action qu’on[intentait contr’eux, et qui était prématurée,
mais qu’ils se réservaient de poursuivre tous les elîèts de là
stipulation qui pourraient tourner en leur la veu r, lorsque les
conventions insérées dans ladite stipulation seraient accomplies )
et que leurs droits seraient ouverts.
Il était donc Lien évident qu’aucun Tribunal, où la cause eût
été discutée, ne pouvait forcer les sieurs Delsol à s’expliquer
sur les prétentions qu’on leur supposait, comme héritiers naturels de leur p è r e , à un droit non encore ouvert.
Mais ils n’opposaient cette exception que pour l'honneur des
r è g le s ,
pour ne pas plaider avec leur sœ ur, et pour son seul
in térêt, car ils ne peuvent être effrayés sur l’événement d’une
cause, jugée d’avance en leur faveur, par les lois les plus
Tonnelles, par les décisions les plus respectables. A u ssi, vont*ls proposer avec la plus aveugle confiance, les moyens qui
doivent faire proscrire une prétention qui choque ouvertement
les principes généraux sur la transmission de toutes les stipula
tions conditionnelles en gén éral, les lois et les opinions des
auteurs, la jurisprudence unanime sur la transmission du droit
de retour conventionnel, en particulier; qui dénature cette espèce
de stipulation , jusqu’à lui supposer des effets diamétralement
opposés à ceux qu’elle produit dans son exécution.
MOYENS.
Les sieurs Delsol vont donc établir, en suivant le plan que
paraît avoir adopté la dame D o rce t, i.° qu’en p rin cipe, la
stipulation du droit de retour, faite par le donateur, au cas où
le donataire décéderait sans enfans, ou ses enfans sans descen
d a is , est, de sa nature, transmissible aux héritiers du stipulant,
nonobstant
�( 9 )
>
nonobstant le décès du donateur avant le donataire; qu'ainsi/
dans l’espèce particulière de la cause , la dame Dorcet n’ayant
pas d’en fans, les sieurs D elsol, héritiers naturels du donateur,
ont été subrogés en son lieu et p la c e , et ont continué en leur
personne, la saisine dont il était revêtu ;
2.° Que les lois nouvelles abolitives des substitutions, n’ont
pas atteint le droit de retour t qui n’a aucune ressemblance avec
une substitution , soit dans sa nature , soit dans son caractère,
soit dans ses effets-
3 .° Que la qualité (l’héritière instituée de son p è r e , n’a pas
donné à la dame Dorcet le droit de recueillir , à ce titre , l’efièt
d’une stipulation faite contr’elle.
4 .0 Et enfin, qu’en aucun c a s, elle n’a pas le droit de dis
poser des objets soumis au droit de retour.
I.re
L a première proposition ne présente , les sieurs Delsol ne
craignent pas de le dire , aucune difficulté.
Il n’en est pas de la réversion conventionnelle comme de la
réversion légale ; dans celle-ci, c’est la loi qui vient au secours
d’un père qui a négligé de stipuler le retour de ce qu'il a donné ;
elle ne veut pas qu’il souffre à-la-fois une double p e rte , celle
de sa fille et celle du bien qu’il lui avait donné : Ne et Jilicc
annssœ et dotis damnum seniiret. Tout est personnel dans le
m otif de la loi ; elle n’a que le père seul en vue. A in s i, lorsque
1 ordre de la nature n’a point été troublé, que le père est mort
avant la fille, quand, par la suite, celle-ci mourrait sans enfans , la réversion légale ne s’étend pas aux héritiers du père.
Mais lorsqu’il s’agit d’une stipulation de réversion, on doit,
se decider par d autres règles. Il est de principe, que le droit
de retour stipulé par le donateur, même pour lui seul, se transïUCt
ses iieiit,içrs ; Içs héritiers n’ont pas besoin de la vocation
P roposition
�( 10 )
de l’homme pour profiter des droits dont leur auteur est décédé
saisi ; ils n’ont besoin que de celle de la loi qui les saisit de tous
les droits du défunt, qui les subroge à sa saisine , en la conti
nuant en leur personne.
Il leur suffit donc que celui auquel ils sont appelés à succéder
ait été vraim ent saisi du droit qu’ils réclam ent, et que ce droit
ait fait partie de ses biens.
O r, Jes contrats, même conditionnels, saisissent toujours à
l’instant m êm e, sans attendre l’événement de la condition; les
actions qui en résultent, quoique non encoi’e ouvertes , sont in
bonis du stipulant. Contractus et si concütionalis , tamen ex prœr
senti vires accipit, dit Vinnius. In contraclibus , id tempus spectatur quo contrahimus, dit la loi 18, dig. de verb. oblig.
De l à , cette règle générale qu’on trouve écrite dans tous les
livres élémentaires , et notamment dans les Instituts : que les
stipulations conditionnellès se transmettent aux héritiers, quoique
le stipulant soit décédé avant l’événement de la condition, quoi
que l’expression n’en soit pas dans l’a c te , par la raison qu’on
11’est jamais censé stipuler pour soi uniquement, mais aussi pour
ses successeurs. E x stipulatione conditionali tantum spes est debiturn ir i, camque ipsam spem in hœredem transmittimus, si priùs
cjuàni conditio extet , mors nobis contingat. L iv . 3 , tit 16 ,
p. 4. Cum qui sub aliquâ conditione stipulatus fu e rit, posteà,
existente conditione, hœres ejus agerepotest: même liv, tit. 20, § 24.
Qui paciscitur sibi hccredi que suo pacisci intelligitur, dit aussi
une règle de droit bien connue.
Et cette rè g le , qui est posée aussi par le Gode N ap o léo n ,’
s’ applique aux stipulations conditionnelles , comme à toutes le§
autres : les lois sont expresses. Envain voudrait-on apporter
quelque e x c e p tio n à cette règle ; elles décident qu’on doit n’en
admettre aucune , et par conséquent que les stipulations condi
tionnelles se transmettent, soit qu’011 ait fait mention des héri
tiers, soit qu’on n’en ait pas fait mention : generaliter sancinuis
omnem s tip u la tioncm, sWc in dando, sivc infacicndo, stvc mixte.\
�( 11 }
ex dànda et faclcndo viveniatur, et ad liŒTedes et contrh hceredes
transmit t i , sive specialis liæredum liât mentio, sive non : 1. i3,
cod. de contract et comm. stipul.
On ne peut donc* pas prétendre, d’ après un texte aussi général,
aussi absolu, que le stipulant, qui n’a voulu parler que de luimême , qui n’a pas nommé ses héritiers , ait entendu restreindre
la stipulation à sa personne ; car la loi Utrum , dig. de pactis ,
répond que la stipulation n’en est pas moins réelle. Plerumque
enim , ut Pedins a ït , persona pacto inseritur, non est personale
p actu m fiat, sed ut démonstretur cum quo pactum factum est.
Charondas , dans ses pandectes , nous donne ce principe
comme une véritable règle du droit français , q u il a placé
_ parmi les autres règles, en ces ternies :
» A u x contrats, on regarde le tems qu’on contracte ».
» Cette rè g le , dit Charondas , appartient principalement aux
contrats conditionnels, car de ceux qui sont purement faits,
» n’y a doute ».
» Tout contrat conditionnel, si au tems que nous contrac» tons, il est valable , a effet et exécution quand la condition
» est ad ven u e, encore que celui qui a promis soit mort............
» Aussi /’héritier du stipulâteur décédé auparavant l’événem ent
» de la condition, peut agir incontinent ex conditionali, parce
» que pendant la condition , celui qui a stipulé est réputé avoir
y> été créancier ».
Il n’y a donc pas la moindre difficulté sur ce p rin cip e, qui_
ne s’applique pas seulement aux conditions stipulées dans les
contrats intéressés , mais aussi à celles qui sont renfermées dans
les contrats bienfaisans ; et pour l’établir, il s u f f i r a i t d ’observer
que llicard et une foule d’autres auteurs le d é cid e n t très-posi
tivem ent ; mais cette question est traitée par un des plus profonds
Jurisconsultes de nos jours , avec une profondeur remarquable.
)» I l est fau x, cli 1- i l, que les contrats intéresses soient les
seuls dans lesquels le stipulant est censé avoir parlé pour ses
héritiers la règle est générale pour toute espèce de contrais,
B3
�( "
5
puisque les lois n’ont fait aucune exception puis qu’au contraire
elles ont exclu toute exception par la généralité et l’universalité
absolue de leurs expressions : generalifer sancimus omnent
stipulationem................. iransmitti, sive specialis hœredum liât
inentio, sive non ».
» L e sens de la règle n’est pas précisément que nous sommes
présumés avoir pensé à nos héritiers et ayant-cause , et avoir
positivement voulu stipuler pour e u x , car il est Lien rare que
les contractans y pensent positivem ent, et on ne présume pas
ce qui arrive rarement. L e vrai sens de la réglé est seulement
que le stipulant qui n’a pas formellement restreint la stipulation a sa
personne , ne peut pas etre suppose avoir voulu exclure ses
héritiers. Or , cette présom ption, nécessairement applicable
ii toute espèce de stipulation, suffit toute seu le, non pour en
opérer la transmission, car c’ est la saisine seule qui l’opère ,
mais pour écarter les obstacles qui pouiTaient l’arrêter ou la
rendre inefficace ».
« Que le contrat soit intéressé ou bienfaisant, il n’im porte,
puisque dans l’un et dans l’autre, la saisine y a lieu de plein
droit; il faut bien qu’elle soit continuée dans la personne des
transmissionnaires. On ne peut pas les supposer exclus par le
stipulant, lorsque celui-ci n’a pas prononcé leur exclusion ; o r ,
s’ils ne sont pas exclu s, il est dans l’ordre des choses que,
comme successeurs universels ou singuliers du transmettant, ils
succedent a la saisine commencée en sa personne, comme à
tous ses autres droits, quand même il n’aurait point du tout
pensé à eux ».
« En d e u x mots , toute stipulation conditionnelle est nécessai
rement transmissible à 1 héritier du stipulant, si la condition peut
encore recevoir son accomplissement, parce qu’au m oyen de
la saisine attachée aux actes entre-vifs , le droit qui en résulte
a fait partie des biens du transm ettant, dès le tems même de
l’acle. 11 n’est pas nécessaire, pour cela , de donner à la clause
aucune extension, parce que c’est la loi seule, la force de la saisine,
�( >3 )
et non pas l’intention positive de transmettre, qui opère la
transmission. Il est vrai que la saisine elle-même dépend, en
quelque sorte , de l’intention du stipulant ; mais c’est seulement
en ce sens qu’elle ne s’applique qu’aux droits que les parties
ont eu en v u e , et pour les cas qu’elles ont exprimés ; du
reste, une fois que la condition prévue par les parties, est
a rriv é e , il devient constant que la saisine a eu lieu ab in itio,
et que la transmission s’en est su ivie, sans que les stipulans y
aient seulement pensé ».
Ainsi s’exprimait M. L ’-esparat, lors de l’arrêt célèbre de 1767,’
et l’on verra bientôt que sa doctrine prévalut sans aucune
difficulté.
Il ne peut donc pas s’élever aujourd’hui la moindre controverse
raisonnable sur ces principes appliqués, soit aux contrats inté
ressés , soit aux contrats bienfaisans.
Mais appliqués au droit de retour conventionnel, en particulier,
il y a , s’il est possible, bien moins de difficulté encore.
Deux fameuses lois romaines décident très-formellement la
question, en faveur des héritiers du stipulant, c’est la loi Caius
et la loi Avia.
L a loi Caius avait pour objet une dot donnée au mari par
l’aïeul maternel de la fem m e, et réversible à cette femme
en cas de divorce, intervenu sans sa faute; le divorce arriva.'
mais le donateur, qui s’était réservé le retour, était prédécédé:
nonobstant ce prédécès, le Jurisconsulte décide que les héritiers
du donateur doivent proiiter du reto u r, en qualité de transmissionnaires, comme aurait fait le donateur lui-même.
Respondi in persond quidem neptis videri inutiliter stipuhitioncm
esse conceptam , quoniàm açus malernus ci stipulalus proponitur;
quod cùm ùa est, hœredi stipulatoris, quandocumque divcrtcnt
niulicr, cictio compctcrc vidcluv.
L a loi ydvia n est pas moins expresse. L a question était de
savoir si le retour de la dot, n’ayant été r é se rv é que par un
simple p acte, et non par une stipulation en forme , il était
�( *4 )
transmissible aux héritiers du donateur ? La loi la résout en ces
termes :
A sia tua earinn qucc profil'nî tua in dotcm dédit, et si verborum
obligatio non intercessit, actionem ex Jide convention is ad te , si
hœres ex titisti, transmittere potuit. Voilà donc deux textes Lien*
précis , qui décident q u e l e retour conventionnel est transmissible
aux héritiers du donateur, quoique celui-ci soit décédé avant
l ’événement de la condition, sous laquelle il avait stipulé' le
retour à son profit.
Et ces décisions des lois romaines , sont devenues aussi celles
de tous les arrêts et de tous les auteurs, depuis les plus anciens
jusqu’aux plus modernes.
Papon, dans son recueil d’arrêts notables, au titre des dona
tions, art. 38 , dit qu’il a été jugé que « la retention faite par
un donateur, si le donataire meurt sans enfans, la chose
» donnée retournera au donateur, sans faire mention des siens,
» est réelle et non personnelle, par ainsi transmissible à l’héritier
» du donateur, s’il se trouve m ort, lorsque la condition d’icelle
» retention advient »;
M. M ayn ard , L iv . 8, Chap. 3 3 , dit que , par sentence de
la sénéchaussée de L au zerte, le retour stipulé par un oncle
donateur, au pays de Querci, pour le cas du décès de son neveu
donataire, sans enfans, ledit cas étant a rriv é , quoique après
le décès du donateur , fut jugé transmissible aux héritiers du
donateur, nonobstant le défaut de ce mot sien, ou autre équipollent.
M . M aynard ajoute que, sur l’appel de cette sentence, par arrêt
rendu à son rapport, au mois de Janvier 1674, conlirmatif de
la sentence, le retour fut adjugé aux héritiers du donateur.
Cette jurisprudence a été lixee irrévocablem ent par un arrêt
récent, qui a jugé en faveur des héritiers du donateur, contre
l’héritier de la donataire, par contrat de mariage.
Eu voici l’espèce , telle qu’elle est rapportée dans la dernière
collection de jurisprudence. V . Retour.
« L e sieur L h é ritier, par le contrat d.ç m ariage de demoiselle
�( '5 )
Marie Albertine-Racine , sa belle-nièce, avec le marquis de
R a v ig n a n , du 18 Mars 17 12 , lui avait donné 3o,ooo//, avec
la clause que ladite somme retournerait audit sieur Lheritier, au
cas de décès de la demoiselle future épouse, sans enfan s , et encore
qu'il y eût d&s enfans, et qu'ils vinssent à décéder avant leur majorité.
L e donateur est décédé en iy 3o ; le 20 Novembre 1764, la
demoiselle Racine , donataire , est décédée sans avoir laissé
d’cnfans, ni de son premier mariage avec le marquis de R avign an ,
* ni de son second mariage avec le comte de Dampus.
Après son décès, les enfans du donateur demandèrent au
marquis de Mesmes, donataire universel de la demoiselle Racine,
veu ve Dampus, la restitution des 3o, 000//, données p arleu r père,
conformément à la réserve stipulée p a rle contrat de 1712.
La cause portée au châtelet de Paris, il y intervint, le 29
Juillet 1766, sur les plaidoiries respectives des parties, pendant
cinq audiences, sentence par laquelle, attendu le décès de la demoi
selle Racine, veuve Dampus, sans enfans, le marquis de Mesmes
est condamné à restituer aux enfans du sieur Lhéritier, les 3o, 000,7
dont il avait stipulé la réversion. L e marquis de Mesmes interjeta
appel de la sentence du châtelet; mais par arrêt du mardi 17 Février
1767, rendu en la grand-chambre, conformément aux conclusions
de M. l’avocat-général, Barentin, la sentence fut unanimement
confirm ée, après des plaidoieries très-solennelles ».
« L ’appelant, dit l’additionnaire de Lebrun, invoquait en sa
faveur plusieurs lois m alentendues, un arrêt du 6 Mai 1614
rapporté par M ornac, ( où il s’agissait d’un retour stipulé par un
pere naturel, dotant sa fille qui laissa des enfans, au cas que celle-ci
décédât sans enfans); l’avis de Boucheul, de Bretonier sur Henrys,
et de Larouvière, en son traité du retour ;| mais M. L’esparrat,’
avocat des intimés héritiers du donateur, dans un mémoire où
il a traite a fond la matière , développa les lois , invoqua les
suffrages des plus savans auteurs et de la jurisprudence , et
éta b lit, sans réplique , que le droit de retour, ainsi que les
stipulations conditionnelles, se transmettent à l’héritier du stipu,-
�( 16 )
lant , nonobstant le prédécès de celui-ci ; que les actes entrevifs , même conditionnels, opèrent la saisine in instanti ; que
les conditions y ont un efïèt rétroactif; que , suivant la règle, le
mort saisit le vif, les héritiers succèdent à tous les droits dont
leur auteur est décédé saisi ; qu’ils n’en pourraient être p riv és,
que par une volonté expresse du stipulant, qui aurait fôrmellement
restreint la stipulation à sa personne; que c’est à celui qui les
prétend exclus, à p r o u v e r leur exclusion; que les conventions
sont toujours censées réelles ; que la personnalité ne s’y suppose
jamais,* q u elle doit être prouvée par des expressions qui la '
nécessitent ».
Cependant, comme le dit M . L ’esparat en rendant compte de
cet arrêt, la cause avait ete plaidée tant au châtelet qu’au
- parlem ent, par M. T ro n cliet, et c’était bien le cas de lui
appliquer ce que V irgile avait dit d’Hector: Si Pergama dextra
defendí potuissent, etiàm hác defensa fuissent ; mais malgré les
grands talens et les prodigieux efforts du défenseur, qui passait,
d ès-lors , à bien juste titre, pour un des plus profonds Juris
consultes de ce tem s, tous les Magistrats , ainsi -que l’avocatgénéral, Barentin, qui portait la parole, reconnurent facilem ent,
comme avaient fait les premiers Juges , que pour cette fo is,
M . Tronchet s’était trom pé; qu’en effet, la prétention de son
client qu’il avait défendu avec tant de z è le , était évidemment
subversive des principes gén éraux, sur la transmisión de toutes
stipulations conditionnelles ; qu’elle était contraire à toutes les
décisions des docteurs et des lo is, sur la transmission du retour
conventionnel en particu lier, et qu’eniin elle était également
contraire à-la jurisprudence établie par tous les jugemens rendus
sur cette question.
Si des arrêts on passe au suffrage des auteurs, on verra que
la question y est toujours décidée uniformément, en faveur des
transmissionriaircs , notamment lorsque le donateur, étant plus
âgé que le donataire, a cependant p réyu ? non-seulement le
décès
�( ' 7 ') '
décès du donateur sans enfans, mais encore le ‘décès de ses
enfans sans descendans.
» La réversion conventionnelle, Mit Lebrun, traité des succès» sions, L iv. i.,C h a p . 5 , Sect. 2, passe à nos héritiers, si nous ne
» l’avons limitée , ce qui se iait quelquefois , en 11e la stipulant (
qu’au cas du prédécès du donataire ; mais quand nous l’avons
» stipulée simplement, au cas du décès du donataire sans enfans,
» alors nous avons parlé pour nos héritiers ou ayant-cause ».
« Quant à la réversion conventionnelle, dit Lacombe , au mot» réversion, elle ne concerne pas moins les héritiers du donateur.
» qui l’a stipulée, que sa personne même. JSam plerumque tain
» Jiœredibus nostris quàm nobismetipsis caçemus. Loi 9, dig. deprob.
» A in s i, si un ascendant fait donation à son fils ou à sa lille ,
» à condition de réversion , si le donateur meurt sans enfans,
» les choses données passent aux héritiers du donateur prédécedé,
» si elle n’a été limitée ».
Suivant M. Henrys, quoiqu’en général l’ascendant donateur
qui se réserve le retour, soit censé le faire tant pour lui que
pour ses héritiers, cette présomption légale devient bien plus
forte encore , lorsque j e donateur a p r é v u , non-seulement le
décès du donataire sans enfans , mais encore le décès de ses
enfans sans descendans : « En e ife t, d it-il, quoique le père
» survivant , l’ordre de la nature en soit troublé, c’est pourtant
» chose assez commune; mais qu’un père pense survivre à sa
» iille et aux enfans quelle peut laisser; qu’il étende si loin
» sa pensée , c’est ce qu’on ne peut pas présumer. Donc, a jo u te * t-il, quand le père a stipulé que la dot serait r é v e r s ib le , si
* la lille décédait sans enfans , ou ses enfans sans enfans, il
» ne s’est pas persuadé que tout cela pût a rriv e r, lui v iv a n t,
» et par conséquent il a bien entendu que cette stipulation fût
» aussi bien profitable à ses héritiers qu’à lui-même ; autrement
» il n aurait pas eu une visée si longue; et s’il n’avait cru stipuler
» le retour que pour lu i, il en aurait restreint la condition
i et les termes ; il se serait contenté de parler du prédécès
�( .1 8 ,3
» de sa fille sans enfans, et il n’aurait pas ajouté : et de ses
» enfans sans enfans.
L ’opinion de cet auteur , qui marche toujours dans ses
décisions, à la lumière des vrais principes , mérite ici d’autant
plus de considération, qu’independamment de son mérite per
sonnel , il nous apprend lu i-m e m e qu il a d’abord balancé sur
la question ; mais c’est ce qui donne un plus grand poids à
sa décision. Un avis qui est le fruit d’une longue et mûre
réflexion, est bien plus respectable qu’un jugement précipité,
donné sur la première idée dont on est saisi.
A la vérité , B o u ch e u il dans son traité des conventions de
succéder, Bretonnier sur H enrys, et M.e L arouvière, avocat
au p a r le m e n t de Provence , paraissent etre d’un sentiment
co n tra ire ,' mais Boucheuil ne se décide" que d’après l’arrêt de
M o rn ac, qui n’a pas de rapport à l’espèce. Bretonuier a fondé
pareillement son sentiment sur l’arrêt de Mornac et sur celui
rapporté au journal du p alais, sous la date du 26 août 1682.
M a is, outre que Bretonnior n’a pas bien connu l’espèce et les
circonstances de cet a rrê t, puisqu’il dit que les Juges de Riom
avaient jugé contre la réversion, et que l’arrêt confirma leur
sentence, tandis que c’est précisément tout le contraire , les
Juges de Riom ayant ordonné la restitution en faveur du frère
donateur, cet arrêt n’a pas jugé la question agitée et résolue
par M. Ilenrys,
M. Henrys donnait son avis sur une question pareille à cello
qui nous occupe en ce moment : il se demandait si la stipulation
de réversion, en cas du décès du donataire sans enfans, ou
de ses enfans sans descendans, était transmissible aux héritiers
du donateur, au cas que celui-ci vint a prédécéder ses enfans,
et l’on vient de voir que sa décision ne laisse rien à désirer*
L ’arrêt de 1682 a jugé , mais n’a ]?as jugé antre chose, qu’un
frère ayant doté sa sœur, avec stipulation de retour, au cas
qu’elle mourût avant lu i, sans enfans, ne pouvait pas J'airo
uçage de cette clause , pour répéter la dot dans la succession
�( >9 )
du fils de la donataire, qui avait vécu six ans après elle /
parce que la condition sous laquelle le retour était stip u lé,
n’était pas a rriv é e , et que la donataire avait laissé un enfant
qui avait recueilli.
Ainsi donc , il faut écarter de la cause l’opinion de Bretonnier :
soit parce que c’est une opinion solitaii’e , qui a été proscrite par
tout ce qu’il y a de plus respectable en autorités , soit parce qu’elle
n’avait pas en vue la question de cette cause , et qu’en l’examinaut
de près , on voit qu’il a voulu dire uniquement qu’il ne faut
pas trop étendre les stipulations de retour, et qu’ainsi le retour
étant stipulé pour le décès du donataire sans enfans, il ne faut
pas l’étendrc au cas du décès de ses enfans sans enfans.
Par rapport à M .' Larouviere, on n’en parle i c i , que parce
que probablement la dame Dorcet voudra s’aider de son opinion;
mais il suffit, pour donner une idée du poids qu’elle m érite, de
dire, qu’il fut prouvé lors de l’arrêt de 1767; que les Jurisconsultes
même les plus m édiocres, ont reconnu très-facilement depuis
que cet auteur n’avait pas connu les premiers principes de la
matière , et qu’il n’avait pas entendu les auteurs par lui cités.
A in s i, il n’y a pas une seule l o i , pas un seul auteur, pas
un arrêt qui favorise la prétention de la dame Dorcet ; tout
co n co u rt pour établir la proposition des sieurs D elsol, que le
droit de retour, stipulé par leur père lors du mariage de la '
dame D o rcet, e s t, de sa nature , transmissible , le cas prévu
arrivant ,■il n’y a peut-être pas un seul point de droit sur lequel
les lois soient plus précises, les suffrages des auteurs plus unanimes,
et la jurisprudence plus ancienne, plus uniforme et plus con stan te.
L ’espèce particulière de cette cause facilite l’ap p lica tio n de
ces principes ; le sieur Delsol père a stipulé, lors du contrat
de mariage de sa fille avec le sieur D o rce t, le droit de retour
de tous les biens dont il la gratifiait, dans le cas où elle décé
derait sans enfans , ou ses enfans sans descendons. La dame
Dorcet n’a pas eu d’enfans de son mariage ; son âge la met
dans l'impuissance d’en avoir aujourd’h u i, quand elle passerait à
G 'Z
�( 20 )
de secondes noces ; ses frc re s, héritiers naturels du donateur?
doivent donc profiter, après son décès, des biens grevés du
droit de retou r, c ’est-à -d ire , de l’universalité des biens laissés
par le sieur Delsol à sa fille aînée.
L e sieur Delsol n’avait pas besoin, pour leur transmettre ce
droit , de stipuler expressément pour lui et pour les siens ,
puisqu’en p rin cip e, le droit de retour stipulé par le donateu^
se transmet toujours à ses héritiers.
L e redoublement seul de la clause , qui. est un m otif détermi
nant pour tous les auteurs, et notamment pour M. H en rys,
établirait clairement l ’intention du donateur, quand elle ne
serait pas m an ifeste d après les en constances de cette cause ;
d ’ a p r è s
c e l l e
surtout que , par son testament de l’année 1 7 8 0 ,
annullé pour vice de forme , cette clause de retour est renou
velée , le cas prévu par la stipulation arrivant.
I l n’y a donc plus de doute sur le m otif, sur l’objet de cette
stipulation ; c’était pour ses héritiers, et non pour l u i , que le
sieur D elsol, père commun, se réservait le droit de retour';
cette convention eût été fort inutile pour lu i, puisqu’il aurait
eu le droit de retour sans stipulation, en vertu des lois romaines I
qui régissaient notre p rovin ce, et par exprès , en vertu de lq.
loi Jure siiccursum.
C’est donc aux sieurs D elsol, transmissionnaires et ayant-cause
de leur p è re , que les biens sujets au droit de retour doivent
appartenir après le décès de la dame Dorcet.
Dira-t-on, comme on l’a annoncé, qu’en supposant, en thèse
gén érale, qu’un droit de retour conventionnel, soit de sa nature
transmissible , il faudrait, dans l’espèce particulière de cette
cause, restreindre l’application de ce principe aux objets com
posant la donation entrcrvifs, faite par contrat’ de mariage ;
mais qu’en ce qui concerne lp$ biens dont le sieur Delsol
gratifiait la dame D orcet, sa fille, a titre d’institution contrac
tuelle, cette institution n’ayant, de sa nature, effet qu’après le
décès de l’instituant, elle n’est pas susceptible de réversion à
son profit, et ù plus forte raison, au profit de scs héritiers.
�C elle objection peul paraître spécieuse au premier coup-d’œil ;
mais un moment d’attention suffit pour se convaincre qu’elle
n’est pas Solide.
I l est essentiel d’abord d’observer, d’après tous les auteurs, et
particulièrement d’après R icard , Furgole et Potliiér, que l’on
peut apposer un droit de retour à toute espèce de libéralités, et
par exprès, qu’on peut l’apposer à une institution contractuelle.
Ce principe ne peut éprouver aucune difficulté. Mais le droit
de retour, apposé à une institution, est-il de sa nature transmis
sible aux héritiers de l’instituant ?
L'affirmative de cet te question est également incontestable.
L ’institution contractuelle, est comme la donation entre-vifs, un
contrat, une obligation que contracte l’inlituant envers l’institué,
de lui laisser tous ses biens; elle ne diffère de la donation entre-vifs,
qu’en ce qu’elle est faite sous la condition particulière d elà survie
du donataire. Mais cette condition particulière n’empêche, pas
que l’instituant contractuel ne puisse faire résilier ou révoquer
la libéralité , si telle ou telle condition a r r iv e , n’importe en
quel tems , et que cependant elle puisse avoir jusques-hi tout
son e/Ièt,* en ce cas , les biens qui en sont l’objet, comme étant
retournés à la masse de l’hérédité et réunis au patrimoine du
donateur, appartiennent à ceux q u i, lors de l’arrivée de la
condition résolutoire , se trouvent représenter le donateur ou
instituant ; ces représentons ne reprennent pas les biens eu
question , en qualité de substitués au donataire ; c’est le donateur
lui-même, toujours existant dans leur personne, qui reprend sa
chose, comme ayant cessé d’appartenir à l’institué, au moyeu
de la résolution de l’institution qui a eu lieu par 1 événem ent,
comme le donateur ou ses représentons reprennent la choçe
donnée, lorsqu’il y a survenance d’enfant, même posthume,,
quoique le posthume ne soit né que depuis son décès.
Ainsi donc, que le sieur Delsol donateur fût ou non desaisi,
an moyen de l’institution contractuelle qu’il f a i s a i t en faveur
tle sa ¿Ile, sous une condition résolutoire, cela serait fort iudij>
�( 22 )
ïl.e
J 'K O P O S IT IO :*.
férent, et la résolution de cette convention serait évidemment
opérée , le cas arrivant.
En un m ot, le retour qui s’est fait ex causa antiquâ et inherenle
contractui donationis, doit avoir son eïïèt, tant pour l’institution
que pour la donation; la condition, lorsqu’elle est accom plie,
a un effet rétroactif au jour auquel l’engagement a été contracté ;
les effets de la stipulation, le cas arrivant, sont donc transmissibles,
soit que la condition soit apposée a une institution, soit qu’il
s’agisse d ’une donation entre-vifs, pure et simple.
Mais le droit de retour n’a-t-il pas éle aboli par les lois de
la révolution, et notamment par les lois des 25 Octobre et 14
Novem bre 1792 ?
C ’est la seco n d e question que présente cette cause, question,
qui véritablement 11’en est pas une.
Et d’ab o rd , deux lois de la révolution se sont occupées du
droit de retour; la prem ière, c’est la loi du 17 Nivôse an 2}
la deuxièm e, c’est la loi du 22 Ventôse suivant.
Mais que portent ces lois ?
L a loi du 17 Nivôse an 2 , a posé dans le titre intitulé de
la succession des ascendans , des règles pour établir q u e,
dans tous les cas , les ascendans étaient toujours exclus par
les héritiers collatéraux qui descendaient d’éux ou d’autres
ascendans au même degré ; et c’est après avoir développé
ces règles dans quelques articles , que la loi dit à l’article 74 :
» Les biens donnés par les ascendans à leurs descendans avec
» stipulation de retour, ne sont pas compris dans les règles ci5) dessus , ils ne font pas partie de la succession des descendans
» tant qu’il y a b RU au droit de retour ».
Cet article n introduit donc aucun changement dans l’ancienne
législation, relative au droit de retour ; il déclare même que
cette législation doit toujours être suivie, pour tout ce qui s’était
fait sous son empire , car c’est le déclarer positivem ent, que
¿ ’affranchir le droit de retour des règles nouvelles que la loi
établissait, et de décider que tant qu’il y a y ait lieu à ce droit,
�(» 3 )
les Liens donnés ne faisaient pas partie de la succesion des
descendans.
»
»
»
»
»
»
A l’égard de la loi du 23 Ventôse , l’article 5 porte « qu’il
n’est rien innové par l’art. 74 du décret du 17 Nivôse , à
l’égard des donations antérieures, au 5 Rrumaire, aux effets
du droit de retour lég a l, dans les pays et pour les cas où ce
droit avait lieu ; que néanmoins il 11e pourrait être exercé
sur les Liens du donataire acquis à la République, par droit
de confiscation, ou autrement ».
Cet article conserve les effets du retour lé g a l, pour tous les
pays où il avait lieu , relativement aux donations antérieures
au 5 Brum aire, comme l’article 74 de la loi du 17 Nivose ,
conserve l'effet du droit de retour conventionnel, relative
ment aux mêmes actes.
On ne peut donc pas dire que l’une ou l’autre des lois qui
viennent d ’être citées , ait apporté le moindre changement au
droit de retour, consacré jusqu’alors par l’ancienne législation,
ni qu’elle lui ait porté la moindre atteinte. Il ne faut donc
pas parler de ces deux lois, qu’on invoqua sans aucun succès,
lors de l’arrêt célèbre rendu dans l’affaire de la dame de
N availles, ,dont on parlera tout à l’heure.
Mais peut-on opposer avec plus de succès les lois de 1792
qui ont aboli les substitutions ?
Remarquons d’abord , que les lois du 17 Nivôse et du 23
Ventôse an 2 , postérieures aux lois de 1792, abolitives des
substitutions, ont con servé, comme nous, venons de l’établir,
les effets des stipulations de retour, et ceux du retour lé g a l,
dans les pays et pour les cas où ce droit avait lieu , à 1 égard
des donations antérieures au 5 Brumaire an 2 , et c’est deju
une preuve positive que. les lois,- qui ont aboli les substitutions,
n’avaient pas eu en vue les stipulations de reLour.
Mais peut-on même trouver quelque ressemblance entre uno
�( 24 )
stipulation, de retour et une substitution, soit dans la nature, soit
dans le caractère'et les effets de ces deux espèces d’actes ?
Quest - c e , d’abord, qu’ une substitution?
« C’est une disposition par laquelle le donataire, l’iiéritier
» institué ou le légataire , est chargé de. conserver et de
rendre à un tiers ».
Telle est la définition qu’en donne le code c iv il, à l’art. 896,
et c ’est aussi celle des anciennes lois et des auteurs qui ont
traité de cette matière.
« Il y a substitution , dit M. Merlin , toutes les fois que
dans un acte de libéralité, la personne gratifiée est chargée de
rendre à une personne gratifiée en second ordre, la chose qui
lui a été donnée ; il y a substitution, toutes les fois qu’il y a
deux donataires ou légataires apelés successivem ent, l’un qui
reçoit directement de la main du donateur, l’autre qui ne reçoit
de la main du donateur, que par le canal du premier donataire;
il y a substitution, toutes les fois que le donataire direct sert en
quelque sorte d’entrepôt, pour faire arriver l’objet de la donation
-au donataire substitué; en un m o t, il y a substitutions toutes
les fois que le donateur a voulu que le second donataire n’ari’ivât
à la chose donnée, qu’après qu’elle aurait été possédée , pendant
1111 teins quelconque, par le prem ier; dès que ce vœu p araît, il
y a charge de rendre , et. par conséquent substitution Jidei
commissaire ».
Ainsi , d’après cette doctrine , dans une substitution Jidei
commissaire, il entre nécessairement trois personnes; celle qui
donne, celle qui est gratifiés à la charge de rendre, et celle
à qui l’on doit rendre.
L a substitution fidei commissaire renferme donc, à proprement
parler, deux donations; lu n e au profit de celui qui doit rendre,
l ’autre au profit de celui à qui doit être rendu l’objet donné.
Mais le second donataire 11e devant recueillir qu’après le
prem ier, ces donations doivent être successives. « Il fau t, dit
l'eregrinus ( de Jidei commissionis, art. 17 , n,° x. ) que les deux
gratifiés
�( 25 )
gratifiés soient appelés à recueillir successivement et non pas
concurremment, ordi-nesuccess'wo et non conjunclivo seusimultaneo».
Dans le droit de retour, au contraire, au lieu que le donateur
soit chargé de rendre à des tiers, c’est, le donateur lui-même qui,
en supposant la condition apposée par le contrat, intervenue,
reprend lui-même la chose qu’il avait donnée, et en redevient
le propriétaire , comme il l’était avant la donation, et avec
les mêmes droits qu’il avait avant.
A u ssi, M. Merlin prévoit-il cette question dans le répertoire
de jurisprudence ,
Substitution, et il la résout en peu de mots.
« La clause de retour au profit du donateur, constitue-t-elle
un fidci commis ? N on, parce q u ’ on n ’y trouve point une cliai’ge
de rendre à un tiers, gratifié en second ordre; on ne peut donc
la considérer que comme une donation à tem s, et c’est ainsi
que les lois la caractérisent.
A la vérité, le donateur meurt quelquefois avant l’événement
de la condition , et ce sont ses héritiers q u i, une fois que la
condition est arrivée, prennent sa place, et se saisissent des choses
qui étaient l’objet de sa donation; mais les héritiers du donateur
ne sont pas des tiers , ils ne sont pas gratifiés en second ordre ; ce
sont des représentons du donateur, qui continuent, pour ainsi
dire, sa personne, deviennent les maîtres de toutes les propriétés
qui lui appartenaient, exercent tous les droits qui étaient en sa
puissance, sont soumis aux mêmes charges auxquelles il était
o b lig é, en un m ot, sont absolument à sa p la c e , et sont, en
quelque sorte , ce qu’il était lui-même.
C ’est là la décision des lois, et c’était même une règle de droit.
Jlœredcm ejusdem potestatis jurisque esse cujus Jiat defunctus
constat, dit la loi 69, dig. de regulis juris.
L a loi 12, Cod. de acquir. velamitt. hcered. dit aussi: hœrcsin oninc
jus mortui non tantum in singularum rerum dominium succedit.
Ce principe est écrit aussi dans tous les auteurs.
« L ’héritier succédant aux biens et aux c h a r g e s , dit Dom at,
se met en la place du défunt, et sa condition est
raême »,
�. {aG 5
Les héritiers diffèrent même si peu du défunt, en matière de
stipulations , et sont, au contraire , tellement identifiés avec lu i,
qu’ils entrent par la force de la loi dans ces stipulations, pour
ainsi d ire , malgré lui ; qu’ils y entrent sans qu’il les nom m e,
sans qu’il s’occupe de leur intérêt, sans qu’il le prévoie , et qu’il
suffit qu’il ait stipulé pour lu i, et qu’il n’ait pas formellement
déclaré qu’il n’entendait stipuler, que pour lui-m êm e, pour qu’il
ait dans le même tein s, et par cela seu l, stipulé pour eux.
Les héritiers ne sont donc pas des tiers à l’égard du défunt ; ils
sont le défunt lui-m êm e, et dès - lors la stipulation de retour
dont ils sont dans le cas de jirofiter, n’a rien de commun avec
les substitutions qui ne regardaient jamais que des tiers.
C e p e n d a n t , ce sont les substitutions ét uniquement les substi
tutions, que les lois de 1792 ont entendu abolir, c’ est-à-dire, les
actes connus pour te ls , les dispositions qui portent ce titre , et
non pas des actes o ù , par des interprétations subtiles , on
prétendrait trouver un caractère ou un résultat analogue à celui
des substitutions , ce qui n’a pas été l’intention de ces lois.
Deux espèces de motifs ont déterminé les Législateurs à abolir
les substitutions.
D’abord, le m otif politique, qui a été de détruire le préjugé,
d’après lequel les biens n’étaient conservés dans une famille ,
qu’en sacrifiant tous ses membres , pour réserver à un seul l’éclat
de la fortune, ce qui était inalliable avec les principes que la
révolution avait introduits.
Et ensuite, le motif de l’égalité, qu’011 avait commencé à
établir entre les enfans, pour les successions , et qu’on avait lo
projet de rendre absolue, comme otil’a exécuté, en effet, depuis.
O r, aucun de ces deux motifs n’existait pour le droit de retour,
et au contraire, le droit de retour, envisagé sous le rapport des
enfans, héritiers de leur père donateur, rentrait même parfai
tement dans les vues des Législateurs d’alor6 ; car il avait pour
çflèt de faire revenir dans les mains de tous les enfans, ce qui
�t 27 )
était sorti de celles du père , pour appartenir à un seul ; ce'qui
était précisément l’opposé des substitutions, qui attribuaient à
lin seu l, ce qui naturellement aurait dû appartenir à tous.
Mais indépendamment de ces puissantes considérations , il est
impossible même de tro u ver, entre le droit de retour et une
substitution, la plus légére ressemblance.
Tout le monde sait que les substitutions étaient des disposi
tions émanées uniquement de la volonté d’un seu l, et qui se
passaient dans l’absence et sans le concours de ceux qui
pouvaient en être l’o b jet, comme dans les testamens ou même
dans les contrats de m ariage, où les substitués n’intervenaient
pas ; ( e t on sait qu’il était bien rare qu’ils y intervinssent ,
puisque la plupart du tems même ils n’étaient pas nés).
A u lieu que le droit de retour n’était pas une disposition,
un acte émané de la pure volonté du donateur ; c’était une
convention, un p a c te , un contrat qui était fait entre le do
nateur et le donataire, et qui supposait nécessairement le concours
et la réunion des deux volontés.
Les principes à cet égard sont connus , et les effets d’une
disposition conditionnelle sont bien difïérens de ceux d’ une
stipulation.
Les dispositions conditionnelles de l’iiomme ou de la loi ne
se transmettent pas à l’héritier de l’appelé décédé avant l’évé
nement de la condition. ( Et voilà pourquoi le retour lé g a l,
les jid ei commis ne sont pas transmissibles). Mais, c’est parce que
les héritiers ne recueillent du chef de leur auteur que le droit
dont il est décédé saisi. Or , les dispositions -conditionnelles ne
saisissent qu’au moment de leur ouverture ; jusques-là, elles ne
sont point in bonis de l’appelé. Si donc , à la différence des stipu
lations conditionnelles, et notamment des stipulations de retour,
qui, comme on l’a établi , sont transmissibles, et ont un effet
rétroactif au jour auquel la convention a été contractée, les dis*
D a
�( »8 )
positions conditionnelles ne saisissent qu’au moment, de leur ou
verture, les substitutions qui ne sont évidemment que de pures
dispositions, ne peuvent être régies par les mêmes règles que
les stipulations conditionnelles , et par exprès , que les règles
applicables au droit de retour conventionnel.
Sous aucun rapport d o n c, la stipulation de retour n’a rien de
commun avec les substitutions , qui ne regardaient jamais que
des tiers, tandis qu’encore une fois, les héritiers du donateur ne
sont pas des tiers, puisqu’ils ne sont pas gratifiés en second ordre.
On ne peut donc pas pretendre, de bonne fo i, que les lois
abolitives des substitutions ,•aient atteint les stipulations de retour.
Cette question n'est cependant pas nouvelle,* elle a été jugée
en Thèse par la Cour de Cassation dans l’affaire de N availles,
où le sieur Larregoyen, qui s’opposait au droit de retour, argu
mentait aussi des lois de 1792, qui abolissent toutes les substi
tutions non ouvertes de l’art. 896 du Code N a p o l é o n qui les
prohibe pour l’a v en ir, et de l’art. g 5 i du même Code qui prohibe
toute stipulationconditionnelle de retour des choses données,au pro
fit d’autres que le donateur personnellement, et survivant à l’événe
ment de la condition qui doit donner ouverture au droit de retour.
En effet , a-t-on dit , nul doute que l’on doit regarder
comme une véritable substitution la stipulation expresse ou tacite
du droit de retour au profit d’autres que le donateur vivan t, lors
de son ouverture : o r , les substitutions non encore ouvertes lors
de la publication des lois des 25 Octobre et 14 Novembre 1792,
sont abolies par ces lois ; d o n c, toutes les stipulations de retour
au profit d’autres que le donateur , qui n’étaient pas encore
ouvertes à cette époque, sont pareillement abolies; et c’est p a r T
cette raison, a-t-on ajouté, que l’art. y 5 i du Code civil défend
de stipuler le retour au profit d’autres que le donateur survivant
à son ouverture.
^
O11 faisait aussi beaucoup va lo ir, pour le sieur Larregoyen,
ja circonstance particulière qu e, dans le fait, il s’était éçoul^
�(» 0 )
plus d’un siècle d’in tervalle, entre la stipulation de retour et
l’ouverture de ce droit au profit de la dame de N a va illes, re
présentant ceux qui avaient constitué la dot ; que pendant ce
tems , la dot donnée à la charge de retou r, avait passé succes
sivement dans sa descendance , par plusieurs inains , sans pou
voir être aliénée au préjudice du droit de retour qui pourrait
s’ ouvrir un jour, ce qui, suivant le défenseur de M. Larregoyen,
présentait tous les caractères d’une véritable substitution graduelle
dans la descendance de la donataire, et ensuite , en cas d’ex
tinction de celte descendance , en faveur de ceux q u i, pour
lors, représenteraient les donateurs.
M ais, M. D aniels, substitut de M. le Procureur - g én é ra l,
portant la p aro le, combattit fortement ce système ; il professa
le principe que le caractère du droit de retou r, qu’il considéra
sans aucune difficulté comme trausmissible aux héritiers du
donateur, était absolument étranger à celui des substitutions,
et que les stipulations qui le renfermaient n’avaient pas été
abolies par les lois de 1792.
» De ce que les substitutions testamentaires, et même celles
» abolies par contrat de mariage , disait ce M agistrat,' ont été
v abolies, il ne faut pas conclure qu’il en est la même chose du
» droit de retour. La disposition textuelle des lois ( celles du 17
» Nivôse an 2, art. 74, et du 23Ventôse suivant, art. 5 ) s’éléve» raient contre cette conséquence , puisqu’elles conservent le droit
» de retour ( en faveur d’autres que le donateur ) , lorsque les
» substitutions étaient déjà abolies.
*
>?
»
»
» D ’ailleurs, ajoutait-il, le droit de retour ne peut être assim ilé
à une substitution, lorsque le donateur exerce lu i-m êm e ce
droit; ce n'est donc pas non plus une substitution, quand ¡1
est exercéspar ses héritiers, qui ne représentent avec lui que
la même personne ».
Cette doctrine fut consacrée par la cour de cassation, par
i*rrût du 11 Frimaire an 14 , rendu en la section des requêtes,
�(30)
rapport de M. B o rel, sous la présidence de M. Muraire , eî
qui est rapporté au Journal des audiences d elà cour de cassation,
pour l’année 1 4 — 1806. La cour rejeta le pourvoi du sieur
Larregoye’n contre l’arrêt de la cour d’appel de P a u , qui avait
accordé le droit de retour.
« A ttendu, portent les motifs des Juges suprêmes, que les
lois du 17 Nivôse an 2 , art. 7 4 , et 23 Yentôse suivant,
art. 5 , ont conservé les effets des stipulations de retour, et
3> ceux du retour légal dans les pays et pour les cas où ce
a> droit avait lie u , à l’égard des donations antérieures au 5
» Brumaire an 2, et que, d’après les lois et d’après les différences
» qui ex isten t entre les droits de réversibilité conventionnels
3> et légau x, et les substitutions , on ne peut appliquer au droit
d> de retour, l’abolition prononcée par les lois des 25 Octobre
» et 14 Novembre 1792 ».
Cet arrêt qui a retenti dans toute la France pour avertir
les personnes q u i, comme la dame Dorcet, auraient pu croire
<[ue les lois de la révolution avaient assimilé les stipulations
■de retour aux substitutions, et les avaient abolies comme
e lle s , ne permet plus aujourd’hui d’établir une controverse
raisonnable sur ce point de droit , et de le faire revivre
«ivec le plus léger espoir de succès.
Aussi les sieurs Delsol ne pousseront-ils pas plus loin leurs
réflexions sur une question aussi solennellement a g ité e, et qui
a été jugée., après que tous les m oyens, pour ceux qui s’oppo
saient à la réversion , ont été discutés , avec une méthode ,
une profondeur et une sagacité remarquables.
Et envain la dame Dorcet dirait-elle , que dans cette espèce,'
il ne s’agissait que dune donation entre-vifs ,• mais que s’il
s’ était agi d’un di'oit de retour apposé à une institution contrac
tuelle , on aurait jugé qu’une telle stipulation était une véritable
substitution, abolie par les lois nouvelles.
Cette objection ne peut pas résister aux principes qu’on a
�(3 0
développés sur la différence qui existe entre la nature , le
caractère et les effets d’un droit de retour , et ceux d’une
substitution.
Qu’importe, en effet, que le 'd ro it de retour soit apposé à
une donation ou à une institution,' ce droit n’est toujours qu’une
condition casuelle , résolutoire ; il n’est toujours qu’une c o n v e n
tion ' entre le donateur et le donataire, qu’un droit que se
réserve le donateur de résoudre la donation ou institution, si
la condition arrive ; niais dans ce cas-la même , les héritiers du
donateur ne recueillent pas comme appelés en deuxième ordre ;
ils ne so n t, comme on l ’a v u , que les représentais du donateur ;
ils sont le donateur lui-m êm e, selon la belle fiction de la loi.
Dès-lors , toute idée de substitution s'efface d’elle-même, et
le donateur, en stipulant pour lui et non pour les tiers, n’a
pu faire une substitution.
Encore une fo is, il n’existe pas , il ne peut pas exister
de substitution dans une stipulation de droit de retour, quelle
que soit la nature de l’acte qui renferme cette stipulation; et
par une conséquence nécessaire, il ne peut pas en exister daus
l’espèce particulière de cette cause, où l’on a apposé un droit
de retour à des contrats , à des pactes qui saisissent les héritiers
du stipulant de tous ses droits, et qui les continuent en leur
personne.
M ais, dit la dam eD orcet, et c ’est là la troisième proposition
n exam iner, quand le droit de retour serait transmissible aux
héritiers du donateur, je ne serais pas moins propriétaire des
biens qui eu sont grévés, puisque je suis appelée comme héritière
de mon p ère, à recueillir sa succession, et qu’à ce titre, les
éflèts du droit de retour doivent me revenir.
Cette objection, dont il est impossible de pénétrer le sens, a moins
qu’on suppose qu’elle est d’une absurdité difficile à q u a lifie r , ne
repose, dans l'interprétation la plus favorable qu’on veuille lui
donner, que sur une confusion d’idées.
rri.e
P R O P O S IT IO N
�( 3a )
En eïïet, pour que la dame Dorcet piit s’accorder avec ellemême , il faudrait le concours de plusieurs choses. Il faudrait
d’abord, commencer par effacer du contrat de mariage de 1760,
la clause du retour que se réserva le sieur D elsol, donateur ; il
faudrait ensuite que le sieur Delsol fût mort sans représentans
au degré successible, autres que la dame Dorcet; il faudrait
enfin supposer que la stipulation de retour est, de sa nature,
personnelle, et par conséquent incommunicable aux héritiers
du donateur, nonobstant son prédécès.
O r , aucune de ces circonstances ne sé rencontre ic.û
I l existe dans le contrat de mariage de la dame D orcet, une
stipulation de retour, de la part du sieur D elsol, donateur, qui
ju i interdisait la disposition des biens dont il la gratifiait, qui les
réservait pour lu i, si elle n’avait pas d’enfans de son m ariage;
et ce droit de retour existe encore incertain, puisque la condition
n ’est pas purifiée par le décès de la dame Dorcet ; il existe,
•puisque l ’effet de la stipulation ne doit s’ouvrir qu’après le
décès de la ' donataire, cette stipulation étant, de sa nature',
transmissible aux héritiers du stipulant.
Mais , par cela seul que le droit de retour existe encore, et
qu’il n est pas ouvert, qu’il ne peut l’être même qu'au décès
de la dame D o rcet, il est évident, il est plus clair que le jo u r,
qu’elle n’a pas recueilli avant l’événement de la condition, un
droit qui ne doit s’ouvrir qu’après que cette condition se sera
purifiée , et qu’ainsi sa qualité d’héritière universelle , à la charge
du droit de retour, ne lui a pas conféré celui de profiter d’une
convention dirigée expressément contre elle.
Autrem ent, il faudrait dire qu’un droit stipulé contre la dame
D orcet, par son contrat de m ariage, avait été stipulé en sa
faveur ; il faudrait dire que la dame Dorcet s’est succédée à ellemême , de son v iv a n t, ou en d’autres term es, qu’elle doit
aujourd’hui recueillir comme héritière universelle de son père,
par son, contrat de m ariage, ù la charge d’une stipulation de
retour,
�( 33 )
t e t o u r e n cas de décès sans enfans, les Mens sujets à ce droit
d e retour, avant le terme apposé à la stipulation.
I l est facife de voir que cela ne peut pas être ainsi.
En deux m ots, le contrat de mariage donnait tout à la dame
Dorcet, excepté le droit de retour ; sa qualité de donataire et
d’héritière universelle, ne lui a donc assuré l’espoir de recueillir
les biens de son père , qu’à la charge du droit de retour ; mais
encore une fo is, elle n’a pas recueilli dans la succcession de
son p è re , les biens dégagés de la condition de retour , ( et cela
est impossible, puisque cette condition est subordonnée à son
décès, qui n’est pas encore arrivé ). Sa prétention manque
donc de toute justesse ; elle ne serait tout au plus qu’une pure
pétition de principes ; ce qui nous ramène nécessairement et
dans tous les cas, à la question de savoir si la clause de
retour était réelle ou personnelle, et si par conséquent, elle
est devenue caduque par le prédécès du sieur Delsol père, ou si
l'elfet en a été transmis à ses héritiers, autres que la dame Dorcet.
Or , les sieurs Delsol- ont établi qjLie la clause était réelle et
transmissible aux héritiers du donateur.
Ils sont donc, comme héritiers naturels de leur p ère, appelés
à recueillir l'elfet de la stipulation de retour, à l’exclusion de la
dame Dorcet contre laquelle a.été dirigée cette stipulation.
lleste à savoir maintenant, si elle a pu disposer des objets soumis
au droit de retour.
L a discussion sur cette question ne peut être ni longue ni
difficile.
C’est un principe certain, et qui n ’a même jamais été le sujet
d’aucune controverse, que le donataire ne peut rien faire qui
puisse anéantir ou dim inuer, de quelque m a n i è r e q u e ce soit,
le droit de retour, car autrement il serait bien inutile de le
stipuler, si le donataire pouvait y porter atteinte.
A u ssi, tous les auteurs, et notamment M. D o live, en ses ques
tions de droit, Ily. 4? cliap, 8 , nous apprennent-ils que
fàyeur
E
�(34 y
du di’oit de retour a été poussée si loin , que les choses données-,
retournent e x e m p t e s de toutes charges et hypothèques qui yv
avaient.été imposées p a r le donataire, et même que les aliéna
tions qu’il en avait faites sont cassées en faveur du donateur au
quel ce di’oit de retour est adjugé ; il n’y. a : d’exception à ’ cette
règle , dit D olive , que pour les biens donnés par les père et mère,
à leurs fils :en faveur du mariage , lesquels,. nonobstant le droit
de retour , sont hypothéqués subsidiairement à la restitution)
de la dot.
M. M erlin, dans le répertoire de jurisprudence, V . Réversion,'
se demande si le donataire peut aliener et disposer au préjudice
du droit de retour, et il s’explique en ces termes.
« Il n’y a aucune difficulté sur la n ég a tive, par rapport au
» r e t o u r conventionnel; comme il affecte les biens donnés par.
une clause expresse qui. fait ^partie de la donation m êm e, il
» est clair qu’il doit avoir son effet contre tous ceux qui les
» possèdent, n’importe à quel titre ; et c’est ainsi'qu’on le juge
x dans tous les Pplem ens. ».
Ces principes ont été consacrés par le Code N a p o l é o n . L ’art, 953 porfe : « L ’effet du droit de retour sera de résoudre
3> toutes les aliénations des biens donnés, et de faire reyenir ces
3> biens au donateur, francs et quittes de toutes charges et hypo3? thèques , sauf néanmoins l’hypothèque de la dot et des conven3» tions matrimoniales, si les autres biens de l’époux donataire ne
» suffisent p a s, et dans le cas seulement où la donation lui aura
3) été faite par le mémo contrat de mariage duquel résultent ces
» droits et hypothèques. »
C ’est donc une vérité incontestable , que la stipulation du droit
de retour lie les mains au donataire, et que celui-ci ne peut dis
poser à titre onéreux ou gratuit des biens qui y sont sujets ; o u ,
ce qui est la même chose, que les dispositions qu’il peut en avoir
faites ne préjudicient pas à ceux qui doivent profiter de.cette
stipulation , lorsque l'événement qui y a donné lieu est arrivé.
Mais- indépendamment du poiut de. d ro it, il existe-dans lo
�( 35 )
contrat de mariage de la dame D o r c e t une prohibition for
melle de la part du donateur, de porter atteinte, en aucune
manière , au droit de retour qu’il stipulait.
» Sans qu’il puisse être dérogé, par sadite fille , future épouse,
» audit droit de réversion , par aucune disposition ni autres
» actes à ce contraires. »
V o ilà une clause p roh ibitive, s’il en fut jam ais; elle interdit
à la dame D orcet, donataire , toutes dispositions des biens dont
la réversion est réservée. C’est là une des conditions de la
donation ; elle en fait p a rtie, et dès-lors point de doute qu’elle
ne doive avoir l'effet le plus rigoureux, puisqu’elle ajoute
encore, s’il est possible, à la sévérité des lois et des auteurs
qui mettent les personnes grévées du droit de retour, dans
une interdiction absolue de disposer.
Que reste-t-il maintenant à la dame Dorcet pour appuyer
sa demande ? Rien , absolument rien. Les dispositions des lois,
la jurisprudence , le sentiment de tous les auteurs , l’intention
manifeste du donateur, concourent unanimement pour écarter
dans tous les sens , l’idée même qu’elle puisse porter la plus
légère atteinte au droit que doivent recueillir les sieurs Delsol,
comme héritiers de leur p è r e , la condition prévue par le
contrat de mariage de leur sœur arrivant.
Les Magistrats, chargés par les lo is, de veiller à la conser
vation des patrimoines dans les familles , s’empresseront donc
de proscrire une démarche dont le but ( avoué publiquement)
est de dépouiller les héritiers naturels, malgré la volonté form elle de l’auteur com m un, pour enrichir des étrangers.
M . e B A S T I D , Avocat.
Me R A M P O N Avoué licencié.
1
M.e B O N N E F O N S , Avoué.
de
A
l ’imp r i m e r i e
A U R I L L A C ,
C A L D A G U É S et
PELLISSON,
IMPRIM EURS DE L A PRÉFECTURE DU CAN TA L.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Delsol, Jean-François. 1806?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bastid
Rampon
Bonnefons
Subject
The topic of the resource
successions
nullité du testament
fideicommis
avancement d'hoirie
contrats de mariage
substitution
droit de retour
Description
An account of the resource
Mémoire pour Sieurs Jean-François Delsol aîné, habitant de la ville d'Aurillac, et Gabriel-Bartélémy Delsol-Volpilhac, habitant de la ville de Paris. Contre Dame Jeanne-Marie Delsol, veuve Vigier-Dorcet. En présence du sieur Desprats, habitant de la ville d'Aurillac.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Caldagués et Pellisson (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1806
1760-Circa 1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0531
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0629
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53842/BCU_Factums_M0531.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Paris (75056)
Claud (seigneurie du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
contrats de mariage
droit de retour
fideicommis
nullité du testament
substitution
Successions
-
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27c592197791afe49eb2971ab19c8065
PDF Text
Text
; -ï
MÉMOIRE
POUR
Sieur J o s e p h D E G R E IL S D E M ISSILIA C,
appelant d’un jugement rendu par défaut, au
tribunal civil de Saint-Flour, le 22 ventôse
an 7;
CONTRE
La dame M a r i e D E G R E I L S , sa tante,
intimée.
1
D a n s ces temps m alheureux de troubles et d ’orages
qui fuient déjà, loin de nous , les lois révolutionnaires
ont décidé du sort et de la fortune d ’une foule d’indi
vidus.
Ces lois étoient diversement jugées, exécutées dans
A
•
�( 2 )
toute leur rigueu r, ou quelquefois modifiées, suivant
le caractère ou l’opinion de ceux qui dorainoient alors :
mais on a observé qu’en général les personnes-les plus
opposées à ce système destructeur , sont précisément
celles qui ont voulu tirer le meilleur parti de ces lois
oppressives, et qui en ont en effet profité dans tout ce
qu’elles présentoient d’avantageux à leurs intérêts.
Cette cause en est un nouvel exemple. Un arrangement
avoit eu lieu, depuis loggxjes années, dans une famille
honorable : des filles âgées et célibataires avoient traité
avec leur frère ; elles avoient cédé leurs droits successifs
m o y e n n a n t une somme certaine qui les mettoit à l’abri
de toute inquiétude, et au-dessus des besoins de la vie.
Contentes de leur sort, elles n’eussent jamais osé se
plaindre dans l’ancien ordre de choses, et toute récla
mation eût été vaine.
/
On sent que parmi des gens bien nés on ne prend pas
toutes les précautions légales : les cessions étoient sous
seing privé. La l’évolution arrive; les enfans du cédataire
émigrent ; les Hiens du père sont séquestrés. Quel avan
tage pour lui de n’avoir traité que sous seing privé avec
ses cohéx-itiers !
On peut dissimuler ces actes, demander un partage à
la nation, soustraire une portion des biens. On use de
ce moyen , qui paroît infaillible : les sœurs cédantes
0 obtiennent leur part héréditaire. La mort a frappé plu
sieurs d’èntr’elles*, une seule survit, elle est nonagénaire :
l’exploitation des biens est au-dessus de ses forces; elle
n’a jamais usé du droit ou de la faculté qu’elle avoit
obtenue de l’administration. Mais aujourd’hui elle a
�( 3 )
d’autres idées, d’anciens souvenirs, ou plutôt e’ Ie est
dm gée et séduite par un ambitieux. B ref, elle a pris
goût à la propriété; elle veut que le délaissement qui
lui a été fait soit sérieux ; elle ne craint pas d’accabler
un neveu, un père de famille dont les pertes sont im
menses , et que cette nouvelle prétention réduiroit à la
misère.
La demoiselle de Greils p e u t-e lle espérer quelque
succès d’une démarche aussi téméraire? L ’appelant ne
fait pas cette injure aux magistrats qui doivent prononcer
sur son sort.
F A I T S .
r i anço is de la Volpilière et Marie Vedelène, auteurs
communs des parties, eurent cinq enfans; savoir, Fran
çois, Guillaume, Claude, Honoré et Marguerite.
François, l’aîné, marié à Louise Brugier, a donné le
jour à trois enfans, Gaspard, Madeleine, et Claude, se
cond du nom.
D u mariage de Gaspard de la Volpilière avec demoi
selle Marguerite Cat de Rastinliac, sont issus q u a t r e
enfans; Bertrand, père de l’appelant, M arie, q u i est
l’intimée, Magdeleine et Anne : les trois filles n ’o n t pas
été mariées; l’une d’elles, M agdeleine, est décédée en
l’an 2 ; Anne est morte en l’an 10.
Bertrand de la V olpilière, marié à Jeanne Rastinhac,
a donné le jour à trois enfans; Joseph, a p p e l a n t , marié
a Louise-Rose de P estel, François et Anne : les deux
puînés ne figurent pas dans la cause, ou du moins François
A 2
�( 4 )
ne se montre que sous le nom de sa vieille tante, à qui
la nature a départi un grand brevet de. longévité.
Suivant les énonciations qui se trouvent dans le juge
ment dont est appel, François de la Y olp ilière, second
du nom , aïeul et bisaïeul des parties, étoit donataire de
ses père et m ère, à la charge de payer une légitime
conventionnelle à ses frères et sœ ur, légitime fort audessus des forces réelles des successions.
Un traité du 24 septembre 1694, énoncé dans le môme
jugement, porte délaissement de la part du donataire aux
puînés, d’un d o m a i n e appelé du Bousquet, pour les l’emplir
de leur a m e n d e m e n t .
L e 1 3 juillet 1698, Claude, premier du nom , l’un de
ces puînés, fit donation entre-vifs à François, son frère,
de tous ses biens présens, qui consistoient principalement
dans le quart du domaine du Bousquet, délaissé par l’acte
précédent.
( Mais le donateur grève cette disposition d’une substi
tution en faveur de l’aîné des enfans mâles de son frère;
à son défaut, à la fille aînée, ou tel autre enfant, de
degré en degré, qui seroit encore vivant.
François, donataire, fit son testament en 1716; légua
pour légitime, une somme de 1200 francs à Magdeleine ,
sa fille; celle de 600 francs à Claude, deuxième du nom,
son fils puîn é; institua la dame Brugierj son épouse,
h é r i t i è r e . universelle, à la charge de remettre son hérédité
h Gaspard, son fils aîné.
Gaspard de la Volpilière, après le décès de son père,
devoit être appelé à l’ecueillir la succession de Claude,
premier du nom , son oncle, qui lui étoit substituée.
�( 5 ),
Mais il prédécéda
son
oncle,
et alors * O
A
7 donateur;
i
deleine, sa sœur, en vertu de la clause de la donation
qui appeloit la fille aînée à défaut de l’aîné des mâles,
recueillit le bénéfice de la donation du 13 juillet 1698.
L e 2Ô avril 1747, Bertrand de la Volpilière, frère de
l’intimée, et père de l’appelant, contracta mariage avec
Jeanne Rastinhac : la dame de Brugier, son aïeule, lui
fit donation de tous ses biens, sans autres charges que de
payer à ses sœurs une somme de i 5o francs chacune;
Magdeleine de la V olpilière, tante de Bertrand, lui fait
donation de tous ses biens et droits, et par exprès de la
portion qu’elle amendoit dans le bien du Bousquet, pour
avoir recueilli l’effet de la substitution portée en la do
nation de Claude, premier du nom.
V oilà donc Bertrand de la Volpilière propriétaire de
tous les biens et droits de son aïeule, du quart du do
maine du Bousquet, en vertu de la donation de sa tqnte;
ce qui lui donnoit des prélèvemens considérables sur la
succession de son p è re , dont il amendoit également sa
p ortion, et qui n’étoit rien moins qu’opulente.
C ’est en cet état que le 20 avril l'jBg, il fut passé un
traité sous seing p rivé, entre le sieur Bertrand la V o l
pilière et les dames ses sœurs-, traité qu’il est i m p o r t a n t
d’analiser, pour en faire connoître toute la force, et l’in
fluence qu’il doit avoir dans la contestation s o u m is e a u
jugement de la Cour.
Par cet acte, les trois filles majeures f a i s a n t des vœux
pour la conservation des biens dans leur famille , et
voulant éviter toutes discussions, r e n o n c e n t ail partage
quelles avoient droit de prétendre sur Jcs successions des
�(
6
)
père et m ère, et s’en démettent au profit d e ‘Bertrand la
V o lp iliè re , leur frère.
Cette renonciation est faite moyennant la somme de
35 oo francs, que le frère s’oblige de payer à chacune
d’elles, en sept termes égaux de 5oo francs chacun, avec
les intérêts à compter du jour du traité.
L e premier terme échoira à la volonté des renonçantes,
lorsqu’elles en feront la demande, ou lorsque le cédataire voudra se libérer; mais comme 1 interet est cependant
fixé à i 5o fr. par année, ce qui 11e fait pas précisément
le revenu de la totalité du principal, cet intérêt sera
payé sans retenue.
Il est ajouté : « Afin que mesdites sœurs puissent
« vivre de leurs revenus, et ne touchent point à leurs
« capitaux, je promets payer la somme de ^5o francs en
« trois termes ég a u x , de quatre en quatre m ois, dont
« le premier doit échoir au I er. mai lors prochain, sans
« imputation sur le capital. »
D e plus, le sieur de la Volpilière du Bousquet, cède
et abandonne à ses sœurs, pendant leur v i e , l’entière
jouissance de la maison de Vi'gouroux, de l’écurie, bassecour et jardin potager : les grosses réparations restent à
la charge du cédataire ; tous les meubles doivent aussi
rester aux renonçantes, sauf l’inventaire, mais sans qu’elles
soient tenues à aucune indemnité pour cause de dépé
rissement.
L e frère leur cède encore, pendant leur v ie , vingtcinq à trente charretées de bois que les fermiers de
Roupon et du Bousquet sont tenus de porter, chaquo
année, dans la maison de Vigouroux : il promet de
�( 7 )
faire obliger et contraindre à l’avenir, à cette conduite,
tous métayers ou fermiers.
A u moyen de ces conventions, les demoiselles de la
V olpilièrc tiennent leur frère quitte de tous droits légitim aires, tant paternels que maternels, de ceux échus
des oncles, tantes, aïeuls et aïeules; le sieur Bertrand de
la Volpilièrc devient responsable de toutes les dettes
contractées jusque hui, de même que de toutes créances
légitimes, pour dépenses, réparations, nourriture de ses
sœurs, et généralement pour quelque cause que ce soit.
Cet acte est fait en présence de la famille, et revêtu
de la signature des parties comme des parens, tels que
M M . Lastic de la Vergnette, Lastic de l’Escures , la
T e r risse, etc.
L e 3 mai 1769 , le sieur Joscpli Cat de Rastinliac
fuit son testament olographe, par lequel il institue pour
son héritier universel le sieur Bertrand de la V olpilière,
son neveu.
La cession de droits dont il vient d’être parlé a eu
sa pleine et entière exécution du jour de sa date. Il est
même fait mention dans l’acte que ces arrangemens de
famille avoient eu lieu depuis plus d’un an avant leur
rédaction.
Les demoiselles de la Volpilière firent un inventaire
des meubles, aussi sous seing privé; elles ont r e ç u leurs
intéi’êts, ainsi qu’il résulte d’une foule de quittances,
également sous seing p riv é , dont l’appelant est porteur.
Le i 5 janvier 17775 Joseph de la V o lp iliè re , appelant,
épousa dem oiselle Louise-Rose de Pestel ; son p ere lui
fit donation de la m oitié de ses biens , et promit de
�(8)
n’instituer d’autre héritier que lui dans le surplus, sous
la reserve de ses effets actifs, et d’une somme de 14000 fr.
La dame de Rastinhac , sa mère , fait une semblable
disposition en sa faveur, sous la réserve d’une somme
de 6000 fr. Le contrat contient encore une donation de
la terre de Roupon au profit de l’appelant. '
Tels sont les règlemens de famille : l’union y avoit
toujours régné. Lorsque la révolution arrive, l’appelant
et son frère émigrent : tous les biens du père sont sé
questrés en vertu des lois du temps. Il étoit alors septuagénaire, et se voyoit sans ressource.
Les p a r e n s et les amis conseillent au sieur Bertrand
de G r e i l s de mettre de côté les actes souscrits par ses
s œ u r s , et de leur faire demander le partage des biens
des auteurs communs , pour sauver du naufrage cette
partie, avec d’autant plus de raison qu’on craignoit qu’il
ne fût procédé à la vente des objets donnés au fils aîné,
qui est l’appelant.
On présente une pétition sous le nom de deux sœurs
du sieur Berterand de Greils, qui étoient alors vivantes
(M agdeleine, l’une d’elles, étoit m orte), à l’adminis
tration centrale du département. Cette pétition reste
quelque temps dans l’oubli ; mais enfin après la loi qui
obligeoit les ascendans- d’émigrés de faire le partage avec
la nation, il devint pressant de faire statuer sur la de
mande des sœurs. L ’administration prit un arrêté, le 29
o-erminal an 4 5 Par lequel il est dit que la demande en
partage formée p;ir les demoiselles de Greils ne concerne
pas les corps administratifs : c’est une discussion qui est
toute entière du ressort des tribunaux ; en conséquence
les
�(9)
les demoiselles de Greils sont renvoyées devant les tribu
naux compétens , pour se pourvoir contre leur frère;
et à cet effet sont autorisées à citer le commissaire près
l’administration ; mais en même temps l’arrêté autorise
les Fermiers du domaine de Roupon et de la montagne
de Trilissons , à faire compte provisoirement aux péti
tionnaires, de la moitié des fermages de ces biens.
L e 20 messidor an 4, les demoiselles de Greils citent
leur frère devant le tribunal civil de Saint -F lo u r;
elles assignent pareillement le commissaire du gouver
nement.
Elles concluent à ce que leur frère soit tenu de venir
h division et partage des biens meubles et immeubles
dépendans des successions de Gaspard Greils et Margue
rite Rastinhac, pour leur en être expédié à chacune un
quart, et un tiers du quart revenant à M agdeleine, dé
cédée ab intestat.
Elles demandent la nullité de la substitution prétendue
faite par Claude, leur grand-oncle, le 13 juillet 1698;
elles prétendent que cette substitution n’a pu profiter à
Magdeleine Greils, tante des parties, mais qu’elle a dû
revenir à Gaspard G reils, fils à François, et à ses descendans.
Elles soutiennent n’avoir reçu aucun mobilier ; que
tout celui qu’elles possèdent est le fruit de leur économie.
Cependant l’inventaire qui fut fait, à la suite de leur
cession est entre les mains de l’appelant.
Elles demandent en conséquence le rapport du mobiliei suivant l’inventaire ou suivant la commune renomïn ee, la institution des jouissances, le payem ent des
B,
�( 1° )
dégradations; elles concluent
ce que ces jouissances
leur soient payées en biens-fonds , attendu la maxime :
F ructus augent hozreditatâtn.
Elles demandent aussi, i° . le payement d’une somme
de i5o francs pour chacune d’elles, montant du legs de
Louise Brugier, leur aïeule, et énoncé au conti’at de
mariage de le ur frère; 2°; celle de 100 francs pour les
deux tiers de pareille somme de i 5o francs donnée à
M agdeleine, leur sœur; 3 °* une sotnme de 1000 francs
léguée à chacune d’elles par Joseph Cat de Rastinhac,
dans son t e s t a m e n t du 3 mai 1769 ; 40. les deux tiers
de pareille somme de 1000 francs, du chef de Magde
leine. Toutes ces sommes doivent leur être payées en
biens-fonds.
Elles offrent de tenir en compte la somme de i 5o fr.
qui leur a été payée chaque année par leur frère , de
déduire sur les jouissances celles qu’elles ont faites de la
maison de V igou ro u x, du jardin, et d’un pacage y at
tenant.
On sent que Bertrand de Rastinhac se garde bien de
contester : il ne comparoît pas sur cette demande; la lutte
ne s’établit qu’avec le commissaire du gouvernement.
Celui-ci demande acte de ce que, tant sur la demande
en payement du legs de Joseph Rastinhac, que sur celle
en partage de la succession de Gaspard G reils, il s’en
rapporte à la prudence du tribunal; mais il soutient
qu’avant tout partage il doit être prélevé au profit de
Bertrand G r e i l s , comme donataire de Magdeleine Greils,
sa tante, et de Louise Brugier, son aïeule, i° . le quart
des héritages dépeudaus du domaine du Bousquet, énoncés
�en la donation et substitution de 1694, parce que le
commissaire trouve cette substitution très-valable.
20. Il consent qu’il soit procédé à ce partage des biens
dépendans de la succession de François Greils, aïeul des
parties, consistansdans le surplus du domaine du Bousquet,
celui deR oupon, la maison des Vigouroux et ses dépen
dances, ensemble du mobilier énoncé en l’inventaire
porté au testament de François G reils, pour en être
délaissé un neuvième du chef de Magdeleine Greils,
tante, deux tiers de neuvième revenans à Claude Greils,
dans la môme succession, lesquelles portions revenoient
à Bertrand G reils, comme donataire de sa tante.
30. Que Bertrand Greils sera également autorisé à
p rélever, avant tout partage, les reprises matrimoniales
de Louise Brugier, son aïeule, à la charge néanmoins
de payer à chacune de ses sœurs la somme de iô o fr .
à elles donnée par leur aïeule.
L e commissaire du gouvernement consent que le sur
plus de la succession de Gaspard soit partagé en trois
portions égales, pour en être attribué aux deux deman
deresses chacune un tiers , h la charge de rapporter les
meubles et immeubles dont elles sont en possession,
et de contribuer, dans la proportion de leur amende
ment , aux dettes de la succession.
Mais il s’élève fortement contre la prétention des
deinanderesseâ, qui vouloient qu’il leur fût expédié des
biens-fonds pour le montant de leurs legs, ou pour la
restitution des jouissances ; elles sont simplement créan
cières de deniers pour tous ces objets.
. On ne doit pas dissimuler qu’on trouve dans les faits
B a
�( 12 )
énoncés nu jugement, la mention d’ un exploit sous la
date du 14 juin 1786, et qu’il y est dit que par cet
exploit M arie, Anne et Magdeleine de Greils avoient
formé contre B e r t r a n d , leur frère, au ci-devant bail
liage de V ie , la demande en partage des successions des
père et mère communs , pour leur en être délaissé à
chacune un quart, avec offres de se restreindre à un
supplément de légitime, s’il étoit justifie de dispositions
valables de la part de Gaspard Greils et Marguerite
Rastinhac, père et mere communs.
Cette c i r c o n s t a n c e est assez indifférente, et n’auroit
pas eu b e s o i n d’être relevée, si o n n’étoit prévenu que
l’iutiinée entend s’en faire un moyen.
Quoi qu’il en soit, le 22 ventôse an 7 , fut rendu le
jugement qui est aujourd’hui soumis à l’examen de la
Cour, et dont suivent les motifs et le dispositif.
« Attendu que d’après la clause insérée dans l’acte
« de 1698, Gaspard la V o lp ilière, fils aîné de François,
« devoit recueillir l’eiîet de la substitution, et après
« son décès, Magdeleine la V o lp ilière, fille aînée dudit
et François;
« Attendu que François et Gaspard la Volpilière ont
« prédécédé Claude, donateur; quelesenfans de Gaspard
« ne se trouvent ni dans la condition ni dans la disposi« tiou ; d’où il suit que Magdeleine la Volpilière a
« recueilli l’effet de la substitiou, surtout Agissant d’une
« donation en collatéral, et hors contrat de mariage;
oc Attendu que Magdeleine la Volpilière et Louise
« Brugier ont valablement disposé de leurs biens au
<r profit de Bertrand Greils, par son contrat de mariage
�( i3 )
« de 1747 5 qu’ainsi il doit être fait distraction , avant
« partage, sur les Liens dont il s’agit, des portions
« revenantes à Magdcleinela Volpilièreet Louise Brugîer;
■« Attendu que d’après tous les principes du droit, Je
« montant des legs est payable en deniers et non en,
« fonds, que d’ailleurs Louise Brugier n’avoit qu’une
« dot mobiliaire ;
« Attendu que les fruits augmentent l’hérédité et en
« font partie , d’où il suit que le légitiinaire a le droit
« de les demander en biens-fonds ;
« Attendu les offres faites par les demanderesses de
« rapporter ce qu’elles ont re çu , et les jouissances par
« elles perçues ;
« Attendu qu’il n’est pas établi que les demanderesses
« aient .fa it aucune cojivention avec Bertrand Greils,
« pour raison des restitutions de jouissances, ni qu’elles
« aient profité d'aucune espèce de mobilier ;
« Le tribunal donne défaut, faute de com paroir,
« contre Bertrand Greils ; et pour le profit, sans s’arrêter
« ni avoir égard à la demande en nullité de la substi« tution portée en l’acte de 1698, dont les demanderesses
« sont déboutées , condamne Bertrand Greils à venir à
ci division et partage avec ses sœurs, des biens meubles
« et immeubles dépendans des successions de Gaspard
« Greils et Marguerite Rastinliac, auteurs communs, pour
« en être expédié à chacune des demanderesses un tiers,
« tant de leur chef que de celui de Magdeleine, leur sœur;
« Ordonne qu’avant partage distraction sera faite au
« profit de Bertrand G reils, i ° . du q u a r t des butimens
« et héritages dépendons du domaine du Bousquet ?
�C 14 )
« délaissés par l’acte de 1694-, 20. du neuvième, et d’un
« autre tiers de neuvième revenant à Bertrand Greils
« dans la même succession, du chef de Louise Brugier,
k comme ayant succédé pour un tiers à Claude la V ol« pilière, son fils; ordonne que les parties conviendront
k d’experts, etc. » Le rapport du mobilier est ordonné
suivant l’inventaire , ou suivant la preuve par commune
renommée, avec l’intérêt de ce mobilier depuis l’ouver
ture des successions.
Bertrand Greils est c o n d a m n é à restituer les jouissances
depuis la m ê m e époque, avec les întcrets de ces jouissances
depuis la d e m a n d e d e 1786.
Les demanderesses sont tenues de rapporter , i° . la
somme de 1 5o francs qu’elles ont touchée chacune depuis
vingt-neuf ans avant la demande de 1786; 20. les deux
tiers de la" même somme touchée par Magdeleine, leur
sœur ; 30. la valeur de dix chars de bois par elles perçus
depuis la même époque; 40. les loyers et restitutions de
jouissances de la maison, jardin et pré situés à V igouroux.
Ces jouissances doivent être compensées jusqu’à due con
currence avec le montant de la restitution qui leur est
allouée ; l’excédent doit leur être ï>ayé en biens-Jbnds
de la succession.
B e r t r a n d Greils est condamné à payer à ses sœurs,
1°. à chacune d’elles i 5o francs, légués par Louise Bruo-ier ; 20. celle de 100 francs pour les deux tiers revenans
à M agdeleine, leur sœur , avec intérêt du tout depuis la
demande ; 30. la somme de 1000 francs ù chacune d’elles,
montant du legs du sieur Cat de Rastinhac ; 40. les deux
�(i5)
tiers de cette somme du chef de Magdeleine, avec intérêt
depuis l’échéance des termes.
Les demanderesses sont condamnées à payer à leur
frère les deux tiers des reprises matrimoniales de Louise
Brugier, les dettes par lui acquittées sur les successions,
avec intérêt depuis la même époque que les restitutions
de jouissances : les sœurs doivent contribuer dans la pro
portion de leur amendement aux dettes non encore ac
quittées.
Sur le surplus des demandes, les parties sont mises hors
d’instance ; les dépens sont compensés, pour être em
ployés en frais de partage et supportés par les parties au
prorata de leur émolument: le jugement est déclaré com
mun avec le commissaire du pouvoir exécutif près l’ad
ministration centrale du département.
Cette opération term inée, le sieur Bertrand de Greils
p ère, crut devoir se rassurer sur les événemens : les lois
devinrent moins rigoureuses-, l’année qui suivit ce juge
ment fut une époque heureuse pour la France. L e héros
magnanime qui nous gouverne parut dans toute sa gloire;
les proscrits furent rappelés, et retrouvèrent une patrie;
enfin le sénatus-consulte de floréal an 10, ordonna la res
titution de tous les biens des émigrés qui n’avoient pas
encore été vendus.
Les sœurs de Greils se félicitèrent elles-mêmes de ces
cliangemens avantageux : leur frère conservoit sa fortune;
elles laissèrent dans l’oubli ce jugement que les circons
tances leur avoient fait solliciter.
Elles n’ont rien réclamé ; l’une d’elles est décédee avant
�C 16 )
s011 frère , qui a vécu jusqu’au 14 avril 1806, et a poussé
sa carrière jusqu'il l’âge de quatre-vingt-cinq ans.
Pendant toute sa vie , le jugement de l’an 7 a resté sans
exécution. Le sieur Bertrand deGreils jouit comme de cou
tum e, donna, à titre de ferm e, pour sept ans, les biens
que convoite l’intimée : ce bail est du 2 nivôse an 9, et
a eu sou exécution. Mais un an après le décès de Bertrand,
et le I er. décembre 1807, M a r i e de Greils a imaginé de
faire signifier ce jugement au sieur Joseph de Greils,
son neveu , trouvé et compris dans une auberge de
Pierrefort.
On lui notifie en même temps le testament d’Anne de
G reils, sa tante , en date du 8 ventôse an 10, par lequel,
usant du bénéfice de la loi du 4 germinal an 8 , elle lègue
en préciput à M arie, sa sœur, la moitié de tous ses biens,
et fait quelques autres legs particuliers fort insignifians ,
puisqu’ayant un frère, elle ne p o u vo it, aux termes de la
même lo i, donner que la moitié de ses biens.
La demoiselle Marie de Greils , par cette signification,
fait commandement à son neveu de satisfaire à ce juge
ment , et de lui payer toutes les condamnations qu’il
prononce en principal, intérêts et frais, tant de son chef
que comme héritière de sa sœur Anne.
L e sieur Joseph de G reils, étonné de cette démarche,
qui est une perfidie , et qu’on a arrachée à la foiblesse
d’une fille nonagénaire , prend le parti d’interjeter appel
de ce jugement par exploit du 12 février 1808.
L ’appelant, par cet acte, rend un compte exact des »
arrangeinens de fam ille, rappelle l’exécution constante
do
�( i7 )
de ces actes, observe que le partage n’a été demande
par ses tantes, que de concert avec leur frère; qu’elles y
avoient été admises contradictoirement avec le commis
saire du gouverment, mais par défaut contre le frè re,
qui étoit alors obligé, pour son propre intérêt, de dis
simuler la cession de 1759.
Mais il a ajouté que jamais ses tantes n’ont réclamé
l ’exécution du jugem ent, qu’elles n’ont fait aucun acte
de propriété sur la portion qui leur avoit été destinée
par le partage national ; que le tout a resté dans les mains
de son p ère, et après sa mort entre celles du fils, son
donataire.
Qu’il est bien fondé à se plaindre de cette démarche
hostile; qu’il entend faire valoir la cession de 17^9,
qu’il a soumise à la formalité de l’enregistrement ; faire
réformer un jugement qui n’a plus d’objet, et qui n’existeroit pas si son père avoit fait connoître la cession de
droits successifs qu’il avoit dans les mains.
La demoiselle de Greils n’a pas moins insisté dans ses
prétentions, ou plutôt celui qui la dirige a fourni des
moyens que la moralité repousse, que l’équité proscrit,
et que la justice ne peut accueillir.
E t d’abord, que toute idée d’opulence et de grandeur
disparoisse au plus léger examen de la valeur des biens
de cette famille.
L e traité de 1694 prouve que François de la Volpilière se plaignoit de ce que les légitimes convention
nelles excédoient la disposition qui avoit été. faite a son
profit; les cohéritiers en conviennent e t acceptent le de-
�( 18 )
laissement du domaine du Bousquet pour les remplir de
tous leui’S droits.
Bertrand de la V olpilière, son petit-fils, n’étoit pas
plus opulent : les dettes étoient considérables, et le bien
m odique; la valeur ne s’élevoit pas à 30000 fr. T out
étoit dans un état de délabrement et de ruine ; les ré
parations nécessaires étoient au-dessus de ses forces. Ces
trois sœurs expriment leux* intention de conserver les
biens h leur frère ; elles prennent des arrangemens en
pleine m a j o r i t é , en présence de leurs parens et d’un
conseil éclairé.
'
Elles c è d e n t tous leurs droits successifs, jus et nomen
Jicercdis ; elles se dégagent de toute inquiétude, des
embaiTas d’une liquidation, du payement des dettes dont
le frère devient seul responsable.
Une convention de cette nature est nécessairement irré
vocable, et ne peut être sujette à restitution ; c’est un
acte aléatoire, incertain dans ses effets, et l’incertitude
de l’événement rend nécessaix’ement le marché égal.
Comment apprécier le gain ou la perte, lorsque l’évé
nement le plus commun peut réduire le cédatairp à un
état fâcheux ? Il ne faut qu’une promesse, un billet ignoré
du d éfun t, pour absorber la fortune qui paroît le plus
s o l i d e m e n t établie. Les créanciers ont trente ans pour
former leur demande, l’action en restitution ne dure que
dix ans; il est donc impossible de vérifier la lésion: une
s e m b l a b l e p r o p o s i t i o n n’a pas, besoin d’un grand déve
loppement. Dans tous les cas, on peut invoquer sur ce
point la doctrine des auteurs, de Legrand sur Troies,
�( i9 )
de Lebrun dans son Traité des successions, au titre des
renonciations, de M . Daguesseau dans son onzième
plaidoyer. Ce magistrat immortel compare le cédataire
de droits successifs à un homme qui marche sur un
feu caché sous la cendre, incedit super ignés suppositos cmere doloso ; il pense qu’on ne peut jamais consi
dérer une cession de droits comme un partage sujet à
restitution, parce que la cession est précisément déné
gative de tout partage, et que celui qui vend ju s et
nomen hœ redis, déclare qu’il ne veut pas être héritier.
Cette doctrine admise dans l’ancienne jurisprudence,
est devenue une règle de droit d’après l’article 889 du
Code N apoléon, qui porte que l’action en restitution
n’est pas admise contre une vente de droits, successifs
faite sans fraude à l’un des cohéritiers, à ses risques,
périls et fox*tunes , par ses auti-es cohéritiers ou l’un
d’eux.
Dans l’espèce, la cession est faite par tous les cohé
ritiers ; elle est aux risques, périls et fortunes du sieur
de Greils. Ses sœurs abandonnent la qualité d’héritières,
elles le chargent de toutes les dettes de la succession ,•
il est donc impossible de revenir contre un acte qui les
met à l’abri de toute incertitude et de toutes recherches.
L a demoiselle de Greils sera forcée de rendre hom
mage à ces principes , puisqu’elle renferme sa défense
dans des moyens de forme et des fins de non-recevoir.
Suivant elle, cette cession de 1769 est nulle; c’est un
acte synallagmatique ; il y avoit quatre parties contrac
tantes , les trois sœurs cédantes , et le frère cédataire.
Cependant il est seulement exprimé que l’acte a été fait
�C 2° )
double, tandis qu’il devoit être quadruple; dès-lors il n’y
a point d’engagement valable.
Ce moyen poarroit-il être sérieusement proposé ? En
général, avant la promulgation du Gode, on tenoit pour
c o n s t a n t , dans l’usage, qu’il suflisoit pour la validité d’un
actesynallagmatique qu’il contînt la mention f a i t double;
011 11’avoit aucun égard, on ne considéroit pas môme
le nombre des parties c o n t r a c t a n t e s ; on n’exigeoit pas
qu’il fût expressément dit qu’il avoit été fait triple., qua
druple , quintuple ou s e x t u p l e : des qu il étoit mentionné
f a i t double, on devoit l’exécuter, parce qu’on supposoit que chacune des parties le connoissoit suffisamment.
Mais pour exiger un double pour chacun, faudroit-il
que chacune des parties eût un intérêt distinct? O r ,
ici il n’y avoit véritablement que deux parties : les sœurs
cohabitoient ensemble, et devoient continuer cette vie
commune; c’étoit le même intérêt, la même habitation,
les mêmes clauses, les mêmes sommes étoient stipulées
pour chacune d’elles ; les trois filles réunies traitoient
avec leur frère dans les mômes intentions, pour la même
chose, pour le môme intérêt; il n’y avoit donc besoin
quô de deux doubles , l’un pour les trois sœurs, afin
qu’elles eussent les moyens d’obliger leur frère à remplir
scs engagerons, et l’autre pour le frère , afin de repousser
toute demande en p a r t a g e de la p a r t de ses sœurs. Dèslors avec deux doubles le but de la loi étoit rem pli,
et l’intérêt des parties contractantes étoit à couvert.
Mais on va plus lo in , on supposera même qu’il n’y
eût dans l’acte aucune mention qu’il a été f a i t double,
Marie de Greils n’en seroit pas mieux fondée dans sa
;
�(21
)
prétention. En effet, le Gode Napoléon, qui a réduit
toutes ces réclamations à leur juste valeur, contient en
l’article 1325, §. dernier, ces expressions remarquables:
« Néanmoins' le défaut de mention que les originaux
« ont été faits doubles, triples , etc. , ne peut être
« opposé par celui qui a exécuté de sa part la conven« tion portée dans l’acte. »
O r , Marie de Greils est bien forcée de convenir que
cet acte de 1 7 % a eu sa pleine exécution : son aveu est
consigné partout, dans l’inventaire, dans les quittances
qu’elle a fournies, dans le jugement même dont est appel,
où elle offre de tenir à compte les i 5o francs qu’elle a
reçus par année , les jouissances de la maison de V igouroux, jardin, écurie, et le bois qui lui a été livré;
de manière qu’il n’y a aucune incertitude sur ce point
de fait.
Eli ! qu’elle ne dise pas que le Code Napoléon fait en
ce point un droit nouveau ; qu’il ne peut avoir d’eflet
rétroactif sur une convention qui remonte à cinquante
ans! D ’abord ce seroit une erreur, parce que le Code doit
régler le sort des actes ordinaires sur lesquels il ne s’élève
des discussions que depuis sa promulgation : et il y a
bien moins de doute, lorsque le Gode ne fait que se ré
férer aux anciennes lois ; il en est alors la meilleure in
terprétation : et dans l’espèce particulière, sa disposition
est tellement raisonnable, qu’il semble qu’on a toujours
dû penser et juger de m êm e, parce que l’exécution des
actes est le guide le plus certain, l’interprétation la plus
sûre qu’on puisse leur donner. D ’ailleurs, dans l’ancien
ordre, il suflisoit de la mention du double, en quelque
�( 22 )
nombre que fussent les contractons, parce que cette men
tion supposoit que chacun avoit dans les mains tous les
moyens d’exécution.
Ainsi disparoît ce premier m oyen , qui ne fait point
honneur à la loyauté et à la bonne foi de l’intimée.
Elle oppose ensuite que le jugement dont est appel
a aujourd’hui passé en force de chose jugée-, elle sou
tient, i° . que l’appel est non recevable, parce qu’il a
été rendu contradictoirement avec le commissaire du
pouvoir exécutif; a°. que le sieur Bertrand Greils l’a
ex’écuté : et on veut faire résulter' un acquiescement, de
ce que le sieur Bertrand Greils a fait le partage avec la
nation , qu’il a pris l’expédition du jugement qu’avoient
retirée ses sœurs, et enfin que par une lettre du 8 vendé
miaire an 8 , il a écrit qu’il ne contestoit pas à ses sœürs
la portion qui leur avoit été attribuée. Il faut examiner
séparément chacune de ces objections.
En premier lieu , comment l’appel du sieur Joseph
de Greils seroit-il non recevable? le jugement est rendu
par défaut, faute de comparoir, contre son père; il n’a
jamais été signifié au sieur Bertrand de Greils.
A la vérité , et quoique l’intimée ne rapporte aucun
exploit de signification , elle veut y suppléer par une
prétendue saisie qu’elle dit avoir faite entre les mains
d’ un débiteur de son frère.
Mais d’abord, dans tout ce qui est rigoureux, rien ne
peut suppléer à une signification ; z°. rien n’empêclie
de faire une saisie-arrêt entre les mains d’un tiers, en
vertu d’un jugem ent, avant qu’il ait été signifié î\ la
partie, parce qu’une saisie-arrêt n’est qu’un acte con
servatoire,
�( 23 )
On va plus loin , on supposera même qu’il ait été
signifié, celte précaution n’en seroit pas plus importante
clans la cause. En effet, la loi du 16 août 1790 dit que
l’appel d’un jugement contradictoire ne sera pas reçu ,
s’il n’a été interjeté dans les trois mois à compter de sa
signification à personne ou domicile.
Il ne s’a g it, dans la lo i, que d’un jugement contra
dictoire , et on ne peut raisonner d’un cas à un autre.
Ij’appel d’un jugement par défaut n’est donc nullement
lim ité; il seroit recevable après les trois m ois, même
dans les dix ans, à compter de sa signification, aux termes
de l’ordonnance de 1667.
Cela est si vrai, que la question s’est élevée, non sur
un premier jugement par défaut, mais sur un second,
également par défaut, qui déboutoit de l’opposition au
premier. On vouloit considérer ce second jugement
comme contradictoire et définitif, dès qu’on ne pouvoit
l’attaquer que par la voie de l’appel; cependant le direc
toire exécutif, par un arrêté très-précis, décida que la
rigueur de la loi ne pouvoit s’appliquer à un jugement
de ce genre, et la jurisprudence des temps se conforma
à cet arrêté, même après la suppression du directoire,
et jusqu’à la promulgation du Code de procédure, qui
établit de nouvelles règles pour l’appel des jugemens
par défaut. La Cour l’a ainsi jugé par p lu s i e u r s arrêts,
notamment dans la cause du sieur Mazeyrut contre les
héritiers Barba t.
Ainsi quand bien même on rapporteroit aujourd’hui
la signification de ce jugement au sieur Roupon luimême , l’appel seroit toujours recevable, car il ne s’est
�(H )
pas écoulé dix a n s ’ depuis l’obtention du jugement jus
qu’à l’appel ; et si on vouloit user des nouvelles dispo
sitions du Gode de procédure, l’appel de Joseph de
Greils est venu dans les trois mois de la signification :
il n’y a donc pas de fin de non-recevoir.
M ais, d it-o n , ce jugement est contradictoire avec la
partie publique, qui représentoit alors le sieur deRoupon.
O ù l’intimée a-t-elle trouvé que le commissaire du gou
v e r n e m e n t représentât lë sieur Bertrand de Greils? Si le
sieur Bertrand de Greils eût été émigré lu i-m ê m e , si
s e s
b i e n s eussent été confisqués au profit de la nation,
on p o u r r o i t rigoureusement dire que; l’émigré a é t é re
présenté par la partie publique.
• Ici le sieur de Roupon étoit seulement ascendant d’é
migré ; ses biens n’étdient nullement confisqüés. Une
loi dé l’an 3 vouloit què les ascendans fissent le partage
de leurs biens, âpres un prélèvement de 20000 francs,
parce que la nation pren oît, à titre de présuccession ,
la portion revenante auxjémigrés. Dans ce cas, la pré
sence du commissaire étort essentielle ou nécessaire, non
pour représenter l’ascendant contre lequel il étoit partie,
mais pour veiller à l’intérêt du gouvernement et pour
empêcher les fraudes.
L e sieur Roupon, au lieu d’être représenté par le com
missaire , avoit au contraire à le combattre ; c’étoit sa
partie adverse, et la plus redoutable, parce que les armes
n’étoient pas égales; et ce combat, cette discussion qui
s’élevoit entre l’ascendant d’émigré et la partie publique,
répugne à toute idée de représentation, puisque les in
térêts étoient si fort opposés.
Le
�(
)
L e jugement dont est appel, est donc purement et sim
plement un jugement par défaut, faute de comparoir,
contre le sieur Roupon -, par conséquent il a pu l’attaquer
par la voie de l’appel ; et son fils, qui le représente, a
eu le même droit que lui.
L ’intimée ose ensuite prétendre que le sieur Bertrand
de Greils, son frère, a acquiescé à ce jugement, et l’a
pleinement exécuté ; elle a conservé fidèlement deux
lettres, dont elle ne rougit pas de faire usage.
Dans l’une, sans date, son frère lui demande l’expé
dition de ce jugement, pour l’envoyer au département,
afin que le partage se fasse avant la fa ta le loi qu'on
nous annonce.
Eli quoi ! ce père infortuné craint qu’on ne le dé
pouille entièrement ; il veut conserver quelques débris
de sa fortune; il presse l’exécution d’un partage qui lui
présente au moins une planche dans le naufrage : il l’é
crit ainsi A ses sœurs ; il leur recommande même de plier
cette pièce devenue si précieuse, pour qiùelle ne se gâte
p a s , et c’est là ce qu’on veut faire regarder comme un
acquiescement! mais n’est-ce pas au contraire la preuve
la plus certaine de la simulation de cet acte : quelle étoit
l’intention du sieur Bertrand de Greils ? de perdre le
moins possible; de damno vitando. Il a assez de confiance
en ses sœurs pour se servir de leur nom , afin^d’arcacher
à la nation une partie de sa fortune; et ses sœurs veulent
en profiter! elles viennent dire â leur frère : vous nous
avez crues sensibles et probes; les plus douces affections,
la confiance la; plus, entière dans les liens du sang vous
ont fait penser que nous compatirions à vos peines, que
ü
�( 2 6 )
nous chercherions à vous soulager; vous vous êtes trom
pé : en vous livrant sans réserve à notre fo i, vous avez
trouvé de nouveaux ennemis, pins dangereux encore que
la nation elle-même : elle vous auroit laissé des alimens;
vous auriez conservé un prélèvement de 20000 francs:
mais nous, nous voulons consommer votre ruine, vous
accabler, réduire un père octogénaire à la misère, ses
enfans au désespoir, et se.s petits-enfans à la charité pu
blique. Voilà ce que veut prétendre l’intimée, et tel est
son langage, en o p p o s a n t un prétendu acquiescement,
N on , la p e r v e r s i t é des hommes ne peut aller jusque là;
ou si la dépravation est portée à ce point, ceux à qui
il r e s te quelques idées de vertu doivent frémir d’indigna
tion et d’horreur............
La seconde lettre, du 8 vendémiaire an 8 , seroit-elle
plus déterminante? Qu’on écoute le langage d’un père
suppliant, qui veut ménager de vieilles filles célibataires,
chez qui le sentiment est au moins émoussé. Il ne se
plaint qu’en tremblant de la saisie - arrêt faite par ses
sœurs sur un bien qui lui appartient. Il ne veut pas
leur disputer les deux tiers que la nation leur a accordés,
il réclame un certain nombre de vaches qui sont à lu i;
et si ses sœurs prennent sur elles de faire saisir son
revenu, il charge son p e tit-fils , porteur de sa lettre,
de passer h Roupon , de dire au métayer de lui apporter
tout de suite cette saisie pour y répondre : ses sœurs dé
duiront leurs moyens, et lui les siens ; mais cela ne l’em
pêchera pas de vivre en bon frère.
Il ajoute avec sensibilité que ses sœurs lui marquent
que leur âge et leurs infirmités ne leur permettent pas
�C 2i )
cles sacrifices. Il leur observe, à son tour, que son âge,
ses infirmités, et la façon avec laquelle la nation l’a
traité, ne lui permettent pas aussi d’en faire. Il veut ce
pendant leur faire voir qu’il est prêt à en faire; il leur
ofFre 600 francs de pension, une charretée de b lé , une
pièce de beurre de cinquante livres, le bois qu’elles de
mandent, et le voyage au vin ,* le tout pendant leur vie
et la sienne.
- S’adressant ensuite à la sœur récalcitrante, « Et vous,
« ma chère sœur de R oupon , calculez bien h combien
« cela va ; plus , 200 francs de taille, la grange que
« je suis obligé de construire, etc. : vous verrez que
« mon tiers se réduit à rien. » Il offre de leur rembour
ser les frais faits à Saint-Flour, etc.
Une lettre confidentielle, écrite dans un moment de
douleur et de chagrin , avec les plus gi’ands ménagem ens, pour n e pas blesser leur a m o u r - p r o p r e ou leur
insensibilité , seroit opposée comme une fin de nonrecevoir ! Mais il n’est pas dessaisi ; il leur offre seule
ment une pension, parce qu’il craint de ne pas pouvoir
lutter avec avantage, dans un temps où les lois existoient
encore dans toute leur rigueur.
Il étoit forcé de respecter, ou au moins de feindre
d’adopter tout ce qui étoit fait, jusqu’à un temps plus
heureux : et on a l’impudence de dire qu’il est non
recevable ! N on , il n’y a pas d’acquiescement, loi’squ’il
n’y a pas de liberté ; il n’y a pas de consentement, lorsqu’il
y a contrainte : et tout ce qu’a pu dire ou écrire le sieur
Bertrand de Greils ne peut lui nuire, parce qu’il n’y a
�( 28 )
pas d’engagement, toutes les fois qu’il n’y a pas l’exer
cice de la volonté.
C’est le texte de toutes les lois, et la doctrine de tous
les auteurs. Et que Pintimée ne dise pas qu’elle ne s’est
prêtée h aucune simulation; qu’elle étoit dans l’intention
de réclamer contre l’acte dé 1769 ; que la preuve en résulte
de l’assignation donnée le 14 avril 1786.
C ’est le comble de la démence : il faut pardonner cette
assertion à sa vieillesse ou à sa nullité; car elle 11’agit pas
par elle-même.
En effet, sa demande de 1786^ puisqu’on en parle,
étoit un acte extravagant : 011 a dém ontré, d’après les
principes, que 'l’acte de^ 1769 n’étoit pas sujet à resti
tution pour cause de lésion.
On prouveroit par lé fait que la lésion même n’existoit pas, d’après la modicité des biens, et les charges dont
ils étoient grevés.
Mais la lésion fû t- elle admissible, l’exploit de 1786
n’est venu que vingt-huit ans après l’acte, et la demande
en institution ne peut avoir lieu que dans les dix ans
k compter de la majorité. Telle est la disposition de
l’ordonnance de 1649, renouvelée p31’ le Code Napoléon,
qui veut même que les actions en nullité soient réduites
à ce ternie, sans préjudiciel’ ni déroger aux statuts qui
auroient abrégé la durée de l’action.
Que signifie donc un exploit fugitif sans aucune suite,
qui n’est pas même précédé de lettres de rescision, qui
étoient alors indispensables; dont la copie a été souillée
dans le tem ps, ainsi qu’on le trouve énoncé dans un
�( «9 )
écrit de défunt Bertrand de G reils, et que se,s sœurs
ont laissé absolument dans l’oubli?
Il faut être bien ingénieux., pour troiiyer dans cet
exploit un moyen d’excuser la conduite du moment,
et prouver qu’il n’y a pas eu de simulation dans le
partage fait avec la nation, en vertu d’une loi promul
guée contre les émigrés et leurs ascendans, et qu’on a
prévue en 17186,.
Honneur au génie de la vieille tante, dont la pré
voyance ou l’esprit prophétique a deviné la révolution,
et qui pourroit obtenir une place à côté de Nostradamus!
La tante dira-t-elle qu’elle veut profiter de l’avantage
d’une loi l'évolutionnaire, pour dispenser ses bienfaits
avec justice , dépouiller l’un pour enrichir l’autre ,
pour marier des nièces, etc.
On la dispense de ce soin obligeant; et l’appelant aussi
a des enfans ! des filles à marier ! il avoit des moyens
honorables d’exister : il les a perdus. Il est époux et père;
ses ressources diminuent, lorsque les besoins augmentent.
Il ne veut être à charge à personne; mais il a droit de
conserver ce qui lui appartient légitimement.
Lorsqu’il réclame ce qui doit lui revenir , ce qui n’est
jamais sorti de ses mains, il n’a jamais élevé de prétentions
déraisonnables. Le legs fait par l’oncle commun, le sieur
Cat de Rastinhac , est échu après la cession ; il n’a pas été
compris dans cet acte ; l’appelant 11e l’a jamais refusé à ses
tantes; mais c’est à quoi doit se borner la demande de
J’intiiW'e ; e t , mieux conseillée, elle in’auroit jamais fait
usage d’un jugemeai de circonstances, dont l’effet est
�( 30 )
f
détruit par le rapport des lois qui l'avoient nécessite , qui
ne fut jamais qu’un remède à un grand m al, et qui ne
doit plus avoir d’effet lorsque la cause n’existe plus.
-,
Signé D E G R E I L S D E M I S S I L I A C .
M e. P A G E S (de R io m ), ancien avocat
G A R R O N
jeune, avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de Thibaud-Landrio t , imprimeur
de la C ou r d’appel. — Décem bre 1808.,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Greils de Missiliac, Joseph de. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Garron
Subject
The topic of the resource
émigrés
séquestre
renonciation à succession
successions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Sieur Joseph de Greils de Missiliac, appelant d'un jugement rendu par défaut, au tribunal civil de Saint-Flour, le 22 ventôse an 7 ; contre la dame Marie de Greils, sa tante, intimée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1694-1808
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0528
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Bousquet (domaine du)
Roupon (domaine du)
Montagne de Trilissons (domaine de la)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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émigrés
renonciation à succession
séquestre
Successions
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p a w ta n iiiw gi
3
MEMOIRE
EN R É P O N S E ,
P o u r dame G i l b e r t e D U C O U R T I A L , v eu ve
de Joseph M a i g n o l , tutrice de leurs enfans
mineurs; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
v e u v e de M ichel d e P a n n e v e r t ; dame M a r i e
M A I G N O L , et sieur A n t o i n e B O U Y O N ,
son mari ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
et le sieur P i e r r e L E G A Y , son é p o u x, et sieur
A n t o i n e M A I G N O L , tous intimés ;
C o n tre
sieur
G u illa u m e
G u illa u m e
M A I G N O L y autre
M A I G N O L , son f i l s , appelans
d’un jugement rendu au tribunal d'arrondisse
ment de Riom , le 18 floréal an 1 ;
3
E t
encore en présence
d' A
n to in e
G U IL
L A U M E , maréchal, habitant de la commune
de Pontaumur, aussi intimé.
l
E sieur G uillau m e M a ignol
fils demande le désisteD
m eut d ’ un p ré vendu p ar P ierre M a ig n o l, d e L a n d o g n e ,
A
�'( 2 )
ii Antoine G uillaum e: il a osé revenir contre des engagemens contractés par Guillaume M a ig n o l, son père ; il
veut etre tout à la ibis créancier et débiteur de lui-même ;
et c’est après vingt-cinq ans d’exécution, après que Pierre
M a ign o l, et son fils, héritier institué, sont décédés , que
Guillaume M aignol fils a cru trouver les circonstances
favorables, pour arracher à la famille M a ig n o l, de L an d o g n e ,u n héritage dont leur père avoitpaye le prix.
Cette tentative qui blesse l a délicatesse et les conve
nances, a été rejetée par le tribunal d’arrondissement; et
la cour s ’ e m p r e s s e r a de confiimci un jugement conforme
en tous points aux lois et a. 1 équité,
F A I T S .
L e 16 mai 1 7 6 5 , un sieur M ichel Lenoble , habitant
du lieu de V a u r y , concéda aux dames Gliefdeville, à titre
de rente foncière et non l’achetable , un pré appelé
P ré-G rand , d elà contenue d’entour sept journaux, situé
dans les appartenances de Vaury.
Cette concession fut faite moyennant la rente annuelle
de 90 francs.
P a r une transaction du même jour, le sieur Lenoble
se r e c o n n u t débiteur d’une somme d e 1800 francs envers
le sieur Guillaume IMaignol, du Cheval - B lan c, père
d’autre Guillaume M aign ol, qui est aujourd’hui la partie
principale.
P o u r le payement de cette somme de 1800 francs,
Lenoble délégua à M aignol, du Cheval-Blanc, la rente
qui avoit été créée le nierne jour par les dames Chefdeville.
«
�( 3 )
Maignol, du Cheval-Blanc, a joui de cette rente jusqu’au
6 juin 1777 , qu’il se lit subroger par Annet Chefdeville,
héritier des preneuses, en 176 , à la propriété du pré
co n céd é, à la charge par lui d’acquitter la rente de 90 fr.
A u moyen de cet arrangement, M aignol, du ChevalBlanc , devenoit tout à la fois créancier et débiteur de
la rente de 90 fr. ; de manière que cette rente s’éleignit
par la confusion.
O n sait que l’eiFet de la confusion est d’anéantir les
deux qualités incompatibles qui se trouvent réunies dans
une môme personne; ce qui est fondé sur ce qu’il est
impossible d’être à la fois créancier et débiteur de soiîneme.
L e pré dont il s’agit n’étoit point à la convenance du
sieur M aign ol, du Clieval-Blanc; il étoit peut-être plus
rapproché du sieur M aign o l, de Landogne; mais point
assez à sa portée, pour qu’il désirât de l’acquérir.
M a ig n o l, du Cheval - B la n c , avoit d’autres vu es; il
5
convoitoit depuis long-temps un domaine qui joignoit
ses propriétés , et qui avoit été vendu par un sieur
de Larfeuil au nommé Jean Gastier.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, savoit que M aign o l, de
L an d ogn e, étoit créancier du sieur de L a r f e u i l , d’une
l’ente foncière au principal de 1400 francs, de plusieurs
années d’arrérages, et qu’il avoit fait d é c l a r e r le domaine
vendu à Gastier, affecté et hypothéqué au payement de
sa créance.
M aign o l, du Cheval-Blanc, n’ignoroit pas que le paye
ment de cette créance étoit au-dessus des forces du ven
deur comme de l’acquéreur; et il lui sembloit facile de
A 2
�(4)
devenir propriétaire du domaine, s’il étoit acquéreur de
la créance.
Il va solliciter Pierre M aign ol, de Landogne, de lui
céder l ’effet de cette créance, offrant de lui donner en
échange ce P ré -G ra n d , dont le sieur M aignol, de L an
dogne , n’avoit nullement besoin, qu’il n’a pas même
conservé.
M a ig n o l, de L a n d o g n e , par obligeance pour son
parent, accepta la proposition; mais il ne vouloit pas
payer de droits de lods : il falloit prendre une tournure
pour ]çg éviter ; et en conséquence, le meme jour 2 oc
tobre 1779? il fut Pass^ ^eux actes entre les parties, l’un
par-devant n o ta ire, et l’autre sous seing privé. Comme
ces deux actes font la matière du procès, il est impor
tant de les analiser.
P a r le premier acte notarié, Pierre M aign o l, de L a n
dogne , cède et transporte à Guillaume M a ig n o l, du
Cheval-Blanc, un contrat de rente de la somme de 28 fr.
par an , au principal de 1400 francs, faisant moitié de
2800 francs, consentie par dame Marie L aco u r, veuve
de Henri de Larfeuil, au profit de dame Gaum et, grandtante du cédant, le 23 octobre 1720,
Il cède pareillement les arrérages de cette rente de
puis l’année 1 7 ^ ? jusques et compris 1779*
Il cède encore l’effet de la sentence qu’il avoit ob
tenue en la sénéchaussée d A u v e rg n e , le 14 août 1 7
,
56
contre Jean Gastier, acquéreur de L arfeuil, d’un do
maine situé au Cheval-Blanc, et sur lequel il avoit exercé
une action eu matière hypotliecaire.
M aign o l, du Cheval-JBlanc, est subrogé à l’exécution
�( 5 )
de cette sentence, et aux procès verbaux de nomina
tion d’experts, sans néanmoins aucune garantie, ni res
titution de deniers pour cet objet.
L e prix de cette cession est fixé à la somme de 2000 f r . ,
pour payement de partie de laquelle M a ig n o l, du ChevalB la n c, cède et transporte, avec toute promesse de ga
rantir , un contrat de rente de la somme de 90 f r . , au
principal de 1800 f r . , à lui due par les héritiers de Pierre
Lenoble , suivant le traité du 16 mai i y
; laquelle
ren te, est-il d it, est -payable p a r les jou is s ans du pré
appelé P r é ” G r a n d , su r lequel elle est spécialement
ajfectée.
55
A u moyen de cette cession , M a ig n o l, du ChevalBlan c, demeure quitte de la somme de 1800 francs, en
déduction de celle de 2000 francs , prix du transport
consenti par M a ig n o l, de* Landogne.
A l’égard de la somme de 200 francs restante, Pierre
M aign o l, de Landogne, reconnoît l’avoir reçue de G u il
laume M aign o l, du Cheval-Blanc, en délivrance de pro
messe de pareille som m e, dont quittance.
A la suite de cet acte, M a ign o l, du C h e v a l - Blanc,
donne la déclaration suivanle, écrite en entier de sa main :
« Je soussigné, subroge M e. Pierre M aignol, bailli de
« Landogne, ci Peffet de la vente du bail emphytéotique
« du p ré appelé P r é - G r a n d , que sieur A n n et C hef« deçille m’ a consentie devant M a ig n o l, n o t a ir e , le 6
« ju in 1777 > pour par lui jouir dudit pré ainsi qu’il
« avisera bon être, moyennant la somme de 280 livres,
« dont 200 livres demeurent compensées avec pareille
« somme de 200 l i v . , comprise en la cession que ledit
�«
«
«
te
( 6 }
sieur Maignol m’a faite devant A lle y r a t, cejourd’liui,
d’un contrat de rente sur les sieurs de Larfeuil, et les
80 livres restantes me seront déduites sur les arrê
rages réservés par l’acte ci-dessus daté. Fait ce 2 oc-
« tobre 1779- »
P ou r entendre cette dernière clause, relativement à la
somme de 80 francs, il est bon d’observer que par l’acte
notarié, et par une c l a u s e finale, Pierre M a ig n o l, de
L a n d o g n e , s’étoit réservé les arréragés dus antérieure
ment à 1 7 5 8 , dont il devoit être fait compte entre le
cédataire et le c é d a n t , sans que M aignol, de Landogne,
pût e x e r c e r aucune action contre Larfeuil de Lacour;
« attendu, est-il d i t , que Guillaume M aign ol, du Clieval« Blanc, s’est obligé de rapporter quittance au sieur de
« Larfeuil de ces mêmes arrérages de rente. »
Cette dernière énonciation démontre assez que M a i
gn o l, du Cheval-Blanc, a voit déjà pris des arrangemens
avec le sieur de Larfeuil, et que tout étoit d’accord pour
que Guillaume M aignol devînt propriétaire du domaine
vendu à Gastier.
Q u o i q u ’ o n ait voulu à dessein répandre de l’obscurité
dans ces conventions, l’intention des parties n’en est pas
moins clairement manifestée. Il est évident que M aignol,
31
du Cheval-J ‘u:iC ? . îl voulu transmettre la propriété du
pré dont il s’agit à M aignol, de Landogne. Il ne pouvoit
pas vendre une rente qui n’existoit plus, qui s’étoit éteinte
par lfi confusion : il vouloit vendre le pré ; et l’acte sons
seing p r iv é , qui a suivi l’acte public, 11’étoit autre chose
que la p r o fe sse de 200 francs enoncee dans la cession
du même jour; promesse qui développoit les intentions
�(7 )
des parties, mais qui n’avoit pas besoin d’être faite double,
puisqu’elle ne contenoit point d’engagemens synallagm.-itiques, qu’ il n’y avoit d’obligation que de la part de
M a ign o l, du C h e va l-B lan c, attendu que le prix de la
vente étoit payé jusqu’à concurrence de 200 irancs, au
moyen de la cession consentie le meme jour. '
»
Aussi n’y a-t-il pas eu de difficulté entre les parties
pendant tout le temps qu’a vécu Pierre M a ig n o l, ainsi
que Joseph M aiguol, son fils et son héritier. Tous deux
ont joui du pré vendu en 1779 : mais l’exploitation étoit
pénible pour eux^ et Pierre M a ig u o l, de Landogne, sc
détermina à le v en d re , par contrat du 29 ventôse au 6 ,
à Antoine Guillaum e, maréchal, du lieu de Pontaumur.
Les M a ig n o l, du Cheval-Blanc, ont souffert, sans se
plaindre, et les jouissances de M a ig n o l, et la vente qu’il
a consentie.
Ce n’est que six ans après, et le 29 vendémairc an 1 2 ,
que Guillaume M aignol iils , se disant donataire de son
p e r e , a fait assigner Antoine G uillaum e, acquéreur, de
M a i g n o l, de L a n d o g n e , en désistement du pré dont il
s’agit, avec restitution de jouissances.
A ntoine Guillaum e, à son to u r, a fait dénoncer cette
demande aux héritiers de son vendeur, et a pris contre
eux des conclusions en garantie et dommagcs-intérêls.
Un premier jugement du tribunal de Riom , en date
du 6 thermidor an 1 2 , a ordonné la mise en cause de
Guillaume Maignol père , à la requête des intimés; ceuxci ont pris contre M aignol père des conclusions en contre
recours, à ce qu’il fût tenu de faire valoir la vente par
lui consentie h Pierre M a ig n o l, de Landogne.
\
�C 8 )
Un second jugement, du 23 venlose an 1 3 , a ordonné
la comparution des parties en personne ; elles ont satisfait
à ce jugement, et ont été interrogées le 6 floréal an 13.
Les interrogatoires respectifs sont transcrits dans le
mémoire de l’appelant, pages 10 et suivantes, aux notes.
Il résulte de l'interrogatoire de Maignol père , d u
C h eval-B lan c, i°. que le même jo u r de ta cte n ota rié,
du 2 octobre 1 7 7 9 , ^
a etl un acfe sous seing privé
entre les mômes parties ; 20. que cet acte sou§ seing privé
a été écrit en entier de la matn de M aignol père , du
C heval-B lan c ; 3°* cIuG M aign ol, de Landogne, a dicté
les conditions; °* q u’il n y a Pas ^ll d’autre double sous
seing privé que celui qui lui est représenté; °. que cet
acte a eu pour but de céder à Pierre Maignol la jouis
4
5
sance du pré dont est question , jusqu’à de nouveaux
arrangemens entr’eu x ; 6°. que l ’acte notarié ne lui délaissoit pas cette jouissance, qu’elle ne lui est délaissée que
par l’actesousseing privé; 7 0. que le m otif d’éviter les droits
de lods n’est pas entré dans sa pensée; 8°, qu’il n’a pas
été question de la propriété du p r é ; que ce n’étoit ni
son intention, ni celle de M a ig n o l, de Landogne. Si
l’acte ne fait aucune mention de la jouissance , il a écrit
sous la dictée de Pierre Maignol.
L e fils M a ig n o l, du Cheval-Blanc, n’étoit pas présent
à cet acte. Il en a eu connoissance bientôt après, et a osé
en témoigner son mécontentement a son père : le fils
avoit alors seize ans.
M aignol père convient que M a ig n o l, de Landogne ,
a bien pu avoir l ’intention de se soustraire aux droits de
lods, de devenir propriétaire du p r é ; mais il n’a pas été
question de la propriété entr’eux.
�( 9 )
A u surplus M a îg n o l, du Cheval-Blanc , ne jouîssoit
pas de ce pré lorsqu’il a fait une donation à son lils ; il
ne lui a pas donné nominativement le pré , innis il lui a
donné en général tous ses biens. Il a eu connoissance do
la vente consentie par M a ig n o l, d eL an d o gn e, à Antoine
Guillaum e; il l’a sue quatre à cinq mois après, et ne s’en
est pas mis en peine : cependant il a voulu , après cette
vente , se procurer l’acte de vente de 1777 ; mais comme
la minute se trouvoit. cliez M a ig n o l, de Landogne, il n’a
pu se la procurer d’abord : enfin il désavoue que le sieur
Lc'gay ait écrit un autre double de l’aclc sous seing privé.
Il est important de s’arrêter sur ce premier interro
gatoire. Ou voit que quelque soin qu’ait mis Maignol
père , du Cheval - Blanc , à s’envelopper d’ une certaine
obscurité, et d’être très-réservé sur ses confidences, il n’en
est pas moins constant que l’acte sous seing privé est du
même jo u r que l’acte notarié ; qu’il est écrit en entier de
la main de M a ign o l, du Cheval-Blanc ; que son fils a eu
connoissance de cet acte dans le même temps, lorsqu’il
11’avoit que seize ans ; qu’ainsi la date de l’acte est cer
taine , et que Maignol fils en imposoit à la justice, lors
qu’il disoit qu’il n’avoit connu cet acte qu’après sa do
nation.
M aignol fils, dans son interrogatoire, prétend n’avoir
eu connoissance de cet acte que depuis qii’ü es^ (l
de la m aison. A v a n t , son père lui a voit parlé des arrangemens faits avec M aign o l, de Landogue , mais lui disoit
qu il esperoit rentrer dans le pré ; il a la maladresse de
dire que son père a voit consulté trois jurisconsultes qu’il
nom m e, sur l’acte sous seing p r iv é , et on lui avoit dit
�( 1° )
que cet acte ¿toit nul pour n’avoir pas ¿té fait double ;
mais s’il a consulté sur cet a c te , il l’avoit donc dans les
mains : il répond que n o n , mais il en savoit le contenu.
L e père, interpellé sur ce f a it, répond affirmativement
que sur ce qu’il avoit rapporté de cet acte, M e. Andraud
lui avoit assuré qu’il étoit nul.
M aign ol fils n’a vu dans aucun temps un écrit sous
seing privé entre les mains de son père; ce dernier lui
a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu de double ; son père
ne lui a pas donné nominativement le pre, mais lui disoit
toujours qu’il avoit le droit de s’en mettre en possession,
et lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre qui
établissoit la propriété de ce p r é , la minute de ce titre
étant entre les mains de Pierre Maignol.
Mais si son père prenoit un prétexte pour se dispenser
de lui donner ce p r é , M aignol fils ne peut donc pas s’en
dire donataire, et seroit sans qualité pour en demander
le désistement : lorsqu’on est de mauvaise f o i , on n’est
pas toujours conséquent.
Enfin Maignol fils a ouï dire que le sieur L e g a y ,
gendre de M a ig n o l, de L a n d o g n e, avoit été le scribe de
l ’acte n o ta rié, et non du sous-seing privé.
L e sieur Bouyon , l’un des gendres de Pierre M aignol,
de L a n d o g n e, a déclaré qu’il n’avoit eu connoissance, et
n’avoit entendu parler de cet acte ? que depuis l’affaire
dont il s’agit.
L e sienr L e g a y , autre gendre, se trouvoit à Landogne;
le sieur M aignol l’appela dans son cabinet, où il étoit
avec M aignol p è re , du Clieval-Blanc; il l’ invita à écrire
un double sous seing privé ? contenant subrogation de
�( 11 )
rente , et notamment contenant aussi cession d’ un pré de
la part de M a ig n o l, du Cheval - B lan c, au profit de
M a ig n o l, de Landogne ; il ne se rappelle pas sur quel
papier il écrivoit ; il croit, sans pouvoir le certifier , que.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, écrivoit avec l u i , et que
M a ig n o l, de L a n d o g n e, leur dictoit ; il n’a écrit qu’ un
acte, ne se rappelle pas qui signa ; M aignol père n’écrivit
p o in t , c’étoit lui qui dictoit.
Après ces interrogatoires, il a été rendu, le 18 floréal
an 1 3 , un jugement qui déclare Maiguol père et fils non
recevables dans la demande en désistement du pré dont
il s’a g it , met les parties hors de cause sur les demandes
en recours et contre reco urs, compense les dépens entre
A ntoine Guillaume et les M a ig n o l, de L an d o gn e; con
damne les M a ig n o l, du Cheval-Blanc , eu tous les dépens,
ineme en ceux compensés , et aux c o û t , expédition et
signification du jugement.
Les premiers juges remarquent avec sagacité que G u il
laume Maignol père ayant réuni dans sa main la rente,
et le pré qui y étoit asservi, cette confusion de la qualié
de débiteur et de créancier a opéré nécessairement l ’ex
tinction de la rente.
Dès-lors le contrat de 1779 n’a pu avoir pour objet
la cession d’une rente qui n’existoit plus , et ne peut se
référer qu’à la propriété du pré.
Les premiers juges ont aussi très-bien observé que
par l’acte sous seing privé , M a ig n o l, du Cheval-Blanc ,
subrogeoit Pierre M aignol à la vente qui lui a voit ete
consentie le 6 juin 1777 >
que cette subrogation ne
pou voit s’entendre que de la propriété , puisque l’acte
B 2
�( 12 )
do 1777 étoit exclusivement translatif de la propriété
du pré.
L e tribunal dont est appel , répondant à l’objection
résultante du défaut de mention que l’acte a été fait
double, décide que les M aign o l, du Cheval-Blanc, dans
les circonstances où se trouvent les parties, ne peuvent
exciper de celte omission ; car il résulte des interroga
toires de M aignol père et fils, qu’ils ont connu la pos
session publique de M aign ol, de Landogne, et après lui
d’A ntoine Guillaume, tiers détenteur. Ils ne se sont pas
mis en devoir de réclamer contie cette possession; ils
n’ont pas é g a l e m e n t réclamé contre l’acte sous seing
p r i v é du 2 octobre 1779, quoique cet acte f û t présent
à leur esprit, quoiqu’il soit du f a i t personnel de Maignol
p è r e , qui l’avoit écrit en entier.
L e tribunal en tire la juste conséquence que l’exécu
tion donnée î\ cet acte sous seing p r i v é , du 2 octobre
I 779? forme une fin de non-recevoir contre Guillaume
M a ig n o l, d’après l’article 1325 du Code c iv il; et c’est
sans contredit rendre bonne justice.
Guillaume Maignol père a été convaincu que ce ju
gement étoit le résultat d’une discussion éclairée; il a
gardé le silence, et ne s’est point rendu appelant. Son
iils a été plus courageux; il n’a pas même craint de rendre
sa défense publique, comme si sa prétention pouvoit
faire honneur ù sa délicatesse.
O n se flatte d’écarter péremptoirement toutes les ob
jections qu’il a proposées : on établira, i ° . que Guillaume
M aignol père 11’a voulu et pu vendre que la propriété
du p r é , attendu que la rente étoit éteinte par l’acqui
sition du 6 juin 17775
�03
)
2.°. Que l ’acte sous seing p r iv é , du 2 octobre 17795
11’avoit pas besoin d’être fait double;
3°* Que cette omission, dans tous les cas, seroit ré
parée par l’exécution de l’acte pendant vingt-cinq années.
§. 1« .
L a rente de 90 fra n cs était anéantie p a r l'acte de
vente du 6 ju in 1777.
L a confusion, disent les auteurs, est l’union et le m é
lange de plusieurs choses ou de plusieurs droits, qui en
opèrent le changement ou l’anéantissement. Cette con
fusion s’opère principalement par la réunion de la pro
priété directe et de la propriété utile.
L ’effet de cette confusion est d’anéantir les deux qua
lités incompatibles qui se trouvent réunies dans une
même personne; ce qui est fondé sur ce qu’il est im
possible d’être à la fois créancier et débiteur de soi-même.
Voici comment s’exprime à cet égard Boutaric, Des iiefs,
pag. 92.
« Je suis seigneur direct d’un fonds assujéti par le
« bail à une rente annuelle d’un setier de blé ; ce
« fonds revient en ma main par d é g u e r p i s s e m e n t , préK
«
«
«
«
«
lation, ou autrement; je l’aliène ensuite sans réserver la rente : ce défaut de réserve r e n d r a - t - i l l e fonds
allodial? O u i, sans doute; car, quoi qu’en dise B rodcau sur L o u e t, tel est l'effet de la confusion ou de
la reunion du domaine utile au domaine direct, d'éteindre absolument la rente, »
�C 14 )
Il cite la loi dernière, S i q u is , ff. D e serv. urb. P r œ àia œde.s quœ suis œdibtts servirent, cum e/msset, traditas sib i acceperity coirfusa sublata que servitus e s t ,
et s i rursiis vendere v u lt, imponenda servitus est alioquin libéré veneunt.
L e même auteur ajoute que les deux qualités de sei
gneur et d’empliytéote ne peuvent subsister sur la même
tête , qui ne peut servir à soi-m êm e, et être soi-même
son emphytéote et son seigneur; que cette réunion s’o
père incontinent et sans délai, quand bien même la vente
ne seroit faite qu’à faculté de rachat.
Brillon , dans ses arrêts, enseigne que l’obligation est
absolument éteinte, toutes les fois qu’il y a concours de
la dette et de la créance dans la même personne; il cite
la loi 7 5 , ff. D e solut.
Despeisses, tom. ie r .5 pag. 803, édit. in -40., dit que
toutes obligations prennent fin par confusion ; qu ia nem opotest apudeundem pro ipso obligatus esse. L . Heures,
21 j §■ Q uod s i , 3 , fi'. F ide jussoribus.
On ne voudra pas sans doute établir une différence
entre le seigneur et le bailleur à titre de rente foncière.
Personne n’ignore que la rente foncière étoit considérée
comme un immeuble réel : le propriétaire de la rente
conserve la propriété directe; il a l’espérance de rentrer
dans le fonds, faute de payement, et la rente représente
le fonds.
D ’après ces principes fondés sur les assertions les plus
positives des docteurs du d ro it, comment seroit-il pos
sible de penser que Guillaume M aign o l, par l’acte no»
tarié du 2 septembre 1779 > a voulu ou pu vendre sirn-r
�C
15)
plement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , la rente de 90 fr.
dont il étoit acquéreur en i j 5 5 ?
Cette rente n’existoit plus ; elle étoit éteinte par la
réunion du domaine u tile , lorsque Guillaume M aignol
eut acquis le pré asservi. Il ne pouvoit donc pas vendre
une cliim è re , une cliose anéantie : il a donc entendu
vendre la propriété du pré. Cela est d’autant plus évi
d en t, qu’il énonce dans cet acte notarié que la rente
dont il s’agit éloit due par les jou isso n s du pré. O r ,
c’étoit lui qui jouissoit du p r é , qui l’avoit acquis ; il ne
pouvoit pas vendre une rente sur lu i-m em e, puisqu’il
ne pouvoit être débiteur et créancier, puisqu’enfin la
rente étoit éteinte absolument dès le moment de la réu
n io n , et sans pouvoir revivre.
Il est donc démontré que la convention arrêtée entre
les parties étoit de vendre la propriété du p r é ; que la
rédaction de l’acte notarié n’a eu d’autre objet que d’éviter
des droits de lods ; et quoiqu’on dise que ces lods eussent
été peu considérables ; que M a ig n o l, acquéreur, étant
b a illi, auroit obtenu des remises, etc. etc.
Il ne s’agit pas d’examiner ou de savoir à quoi se portoient ces lods ; on sait qu'en général ce droit paroissoit
odieux autant qu’onéreux aux acquéreurs : il y avoit un
certain amour-propre à les éluder. Combien n’y a-t-il pas
d’exemples que des droits de lods très-modiques ont empeclié des ventes, soit parce qu’on ne vouloit pas solli
citer des grâces, ni payer rigoureusement le droit ! Enfin
les lods étoient en pure perte pour l’acquereur ; ils
l’étoient d’autant mieux dans l ’espèce, que l’objet cédé
�( i6 )
u Maignol , du C h e v a l-B la n c, n’en devoit p r s , tandis
que M a ig n o l, de L an dogn e, auroit dû le tiers denier
en ascendant sur le prix du pré dont il s’agit; et dans
ce cas la chance n’étoit pas égale.
Si l’acte notarié a q u e l q u ’ y b s c u r i t é dans sa rédaction,
toute équivoque est levée par la déclaration sous seing
privée du même jour : il n’y a plus de doute sur la pro
p rié té , puisque M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c, subroge
M a ig u o l, de L an do gn e, à l’acte du 6 juin 1777.
Si” t
que ce dernier acte_est celui qui transféré la propi’iété
du pré à Guillaume Maignol.
Dans tous les cas, toute clause obscure s’interpréteroit
contre M a ig n o l, vendeur, qui pouvoit dicter la loi, et
qui le pouvoit d’autant m ieux, qu’il 11e cesse de. répéter
que M a ig n o l, de Landogn e, convoitoit, désiroit le pré
dont il s’agit. S’il avoit un désir si violent de cet objet,
il se seroit rendu moins difficile sur les conditions, et
auroit subi la loi de son vendeur.
Ainsi le pré en question est nécessairement vendu par
l ’acte notarié, du 2 octobre 1779 : M aign o l, du ChevalBlanc, ne pouvoit vendre autre chose-, et, sous ce rapport,
son fils seroit non recevable dans sa prétention.
§• 1 1 .
L 'a cte sous senig p r iVe > du 2 octobre 1 7 7 9 , r i o i t pas
besoin d'étre fa it double.
Guillaume M aignol fils, qui sent toute la force de cet
acte,
�17
(
)
a cte , réunit tous ses moyens pour l ’écarter : en conve
nant qu’ il contient la vente du p r é , il soutient qu’il est
n u l, faute d’avoir été fait double, ou du moins faute
d ’en contenir la mention.
Pour apprécier le xxiérite de cette objection principale,
il est bon d’examiner la nature de cet acte.
Eu matière d’actes sous seing p r iv é , on distingue les
contrats bilatéraux ou synallagmatiques, d’avec les con
trats unilatéraux-, les premiers sont ceux dans lesquels
chacun des contraetans s’oblige envers l’autre; les seconds
sont ceux où il n’y a qu’une seule partie obligée.
On convient que les premiers doivent être faits doubles,
sauf l’exception dont il sera bientôt parlé, parce qu’il faut
bien que chaque partie ait son acte dans les mains pour
forcer l’autre à l’exécuter.
A 1 égard des seconds, on n’a jamais prétendu qu’ un
contrat unilatéral, comme une déclaration, une promesse
ou un b illet, dussent être faits doubles.
L e sieur M a ign o l, appelant, à moins de s’aveugler,
ne peut placer l’acte sous seing p riv é, du 2 octobre 1779,
parmi les contrats bilatéraux: la contexture de l’acte s’ÿ
oppose absolument. Guillaume Maignol père y parle tout
seul : J e soussigné 7 déclare , etc.,' lui seul c o n tra c te des
engagemens ; il a reçu le prix de la vente par le contrat
notarié. C ’est au contraire lui qui s e t r o u v e débiteur
d une somme do 200 francs ; il en c o n se n t une promesse
au profit du sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e : -cette promesse
est même énoncée, son existence est e x p r i m é e , par l’acte
devant notaire, du même jour; lui seul s’oblige. M a igu o l,
c
�( i8 )
de Landogne, 11e contracte aucuns engagemens envers
son parent; il ne dit mot : c’est toujours Guillaume Maignol qui parle exclusivement, qui se reconnoît débiteur.
Il n’y a rien de réciproque, tout est du fait de M aignol,
du Cheval-Blanc. Ce n’est donc là qu’un contrat unila
téra l, une simple déclaration, une simple promesse; et
comment pourroit-il y avoir n é c e s s i t é , dans ce cas, de
faire un acte double ?
M ais, d i t - o n , cet acte est une veDte, et toute vente
doit être faite double.
D ’abord, c ’ e s t mettre en fait ce qui est en question:
la vente s e trouve dans acte notai ie. Il finit bien donner
im sens quelconque à ce premier acte; et on a vu q u ’ i l
seroit absurde que M aignol, du Cheval-Blanc, n’eût voulu
vendre qu’ une rente anéantie.
1
Mais est-il bien vrai, dans tous les cas, qu’une vente
doit être faite double? On le conçoit, lorsque l’acqué
reur ne paye pas le prix , parce qu’ il faut bien qu’il s’oblige
à le payer , et que le vendeur ait des moyens pour l’y
contraindre ; mais lorsque l’acquéreur paye entièrement
le prix , qu’il ne contracte aucune obligation , comment
seroit-il essentiel que l’acte fût double? il devient alors
unilatéral ; il ne reste que Fobligation du vendeur de faire
jouir de la chose vendue, de garantir de l’éviction, etc.;
et dans ce cas, certes, il snflit que l’acquéreur soit nanti
de l’acte qui lui transmet la propriété. C ’est la distinc
tion qu’on a toujours faite en jurisprudence; et la cour
l ’a consacrée par plusieurs arrêts, notamment par un
rendu sur la plaidoirie de M e. P ag ès, dans la cause de
�T9
(
)
M e. Bertier, avocat à Brioude. La co u r, par cet arrêt,
ordonna l'exécution d’une vente sous seing privé non
faite double, par cela seul que l’acquéreur avoit payé
rentier p rix , que l’acte en portoit quittance, et que l’i.cquéreur n’avoit contracté aucun engagement.
O p p o s e r a -t-o n que l’acte sous seing p r i v é n’est pas
unilatéral, parce que M a ig n o l, du Cheval-Blanc, devoit
déduire une somme de 80 francs sur les arrérages
réservés ?
. Ce seroit une erreur ; le contrat ne change point de
nature par cette circonstance. 11 en est de cette mention,
comme si un débiteur, en souscrivant la promesse d’une
somme, y mettoit pour condition de déduire tous acquits
bons et valables qu’il pourroil avoir faits antérieurement:
la promesse pourcela 11’iiuroit pasbesoin d’être faite double,
parce que le créancier ne pourroit se f;iire payer sans re
présenter la promesse, et sans souscrire à la condition.
D e même ic i, M a ig n o l, de Landogne, n’auroit pu
exiger de M a ig n o l, du Cheval-Blanc, la somme de 280 fr.
sans représenter la promesse ; et alors il auroit bien
fallu déduire sur les arrérages la somme de 80 francs,
avec d’autant plus de raison, que l’acte n o t a r i é u’énonçoit qu’une promesse de 200 francs.
, Ainsi diparoît le moyen principal de Guillaume Mai
gnol. L ’acle sous seing privé est unilatéral; il ne con
tient pas d’engagemens réciproques; dès-lors il est fort
indiüérent qu’il ait été ou non fait double.
C2
�C 20 )
§. I I I .
D a n s tous les c a s , cette om ission serait réparée par
ïe x é cu tio n de l'acte.
Il est constaté par l ’interrogatoire des deux M aign ol,
du Cheval-Blanc, que cet acte sous seing privé est du
même jour que l’acte notarié-, il est écrit par le père;
il a été connu par g fils des le moment meine , et lors
qu’il n’avoit que seize ans : le père comme le fils ont
connu et souffert la possession publique de l’acquéreur;
ils n’ont réclam é, ni conlre M aignol, de Landogne ,
ni contre Antoine Guillaum e, tiers détenteur, quoiqu’ils
1
aient été instruits de la vente consentie par Maignol à
Guillaume.
«
«
cc
«
L ’article 1325 du Code civil porte : « Les actes sous
seing p riv é, q u i contiennent des conventions synallagmatiques , ne sont valables qu’autant qu’ils ont été
laits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant
un intérêt distinct.
« Il suffit d’ un original pour toutes les personnes ayant
« le même intérêt.
« Chaque original doit contenir la mention du nombre
« des originaux qui en ont etc faits.
« N é a n m o in s, Ie défaut de mention que les origi« 7iaux ont été f a i t s doubles, triples , etc. , ne peut être
« opposé par celu i qui a exécuté de sa part la co n
te çention portée dans Vacte. »
�( 21 )
M . Malleville , sur cet article, s’exprime ainsi : « S i
« l’une des parties avoit déjà exécuté l’acte , elle ne
« doit pas être reçue à opposer qu’il n’a pas été fait
« double; mais il y aura souvent de l’embarras à prouver
« cette exécution.» ( Il n’y en a pas dans l'espèce parti
culière, puisque les deux M aiguols, père et iils, en con
viennent dans leur interrogatoire. ) « Ün admettoit une
« autre exception à la règle posée dans l’article, c’est
« lorsque l’ une des parties n’a voit pas d’intérêt à avoir
« un double : par e x e m p le , je f a i s une vente sous
« seing p rivé, et j'e n reçois le p rix ; on jugeoit que/«
« vente étoit vala ble, quoiqu'elle ne f û t pas fa ite dou« ble ,• mais on l’auroit jugée nulle s’il étoit resté quelque
« partie du prix à payer. «
Cette doctrine d’un magistrat éclairé, l’un des rédac
teurs du Code c i v i l , confirme ce que l’on a déjà dit dans
le §. précéden t, et prouve que l’exception admise par
l ’article cité , n’est pas nouvelle, comme a voulu le pré
tendre l’appelant. E n effet, la rigueur du droit, le sum
m um ju s , ne peut être invoqué avec succès qu’autant
q u’il paroîtroit qu’on a pu ignorer l’existence de l ’acte
qui vous est opposé ; mais lorsque tout annonce que cet
acte a été connu, qu’on en a souffert l ’e x é c u tio n sans se
plaindre, aujourd’hui surtout que la justice se rappro
che de l’équité, qu’on a senti la nécessité d’ccarter toutes
les subtilités du d ro it, Guillaume Maignol ne peut espé
rer aucun succès.
Il aura beau se battre les flancs, reproduire une ob
jection mille fois détruite, que le Code civil n’a pas
�( 22 )
d’effet rétroactif, qu’ il ne peut régler une convention
antérieure à sa publication.
Foible et petite ressource! L e Code civil est aujour
d’hui la loi de l'empire , et doit régler tout ce qui est
encore indécis.
D e même qu’on juge que la subrogation d’action peut
être admise pour une cession de droits successifs anté
rieure à la publication du Code , lorsqu’il y a encore
indécision, de même on doit décider que l’omission que
l ’acte a été fait double n’est d aucune conséquence, lors
que cet acte a été long-temps et pleinement executé,
avec d’autant plus de raison q u e , d’après l’opinion de
M . Malle v ille , cette exception n’est pas nouvelle, et a été
admise dans l’ancien droit.
E t s’il en étoit autrement, si le Code civil pouvoit êlre
mis de côté pour tous les actes antérieurs sur lesquels il
n’a pas été prononcé, il vaudroit autant décider que ce
Code si long-temps attendu, que cette loi uniforme pour
tout l’em pire, si souvent désirée, que l’ immortel D«iguesseau trouvoit si nécessaire, ne pourroitôtre exécutée
que dans trente ans, ou n’auroit été promulguée que
pour la génération future -, ce qui est une absurdité.
X^e Code des Français est aujourd’hui leur unique loi.
S i , comme tout ce qui sort de la main des hommes, il a
quelque im perfection, on est au moins obligé de convenir
qu’on y retrouve toute la purete du droit romain , tout
ce que l’expérience et la raison avoient remarqué de plus
sage dans le droit coutumier; qu’il n’a nullement besoin
de commentaire pour le jurisconsulte; que les pandectes
r
�23
(
)
• ne servent qu’à l'obscurcir; qu’enfin il a paru sous l’in
fluence d’un héros législateur, et qu’il suilit. d’un rayon
de sa gloire pour que ce Code devienne bientôt la loi
de l’Europe entière.
Guillaume Maignol fils ne se tirera jamais de J’ar
ticle 1325; l’exécution de l’acte est pour lui la pierre
d’achoppement : sa mauvaise foi est à découvert; la loi
et l’équité repoussent une prétention ambitieuse et tardive,
qui 11’uuroit pas vu le jour si Pierre Maignol existoit
encore.
Il ne s’agit plus que de parcourir rapidement quel
ques misérables objections proposées en désespoir de
cause.
L ’appelant reproche aux premiers juges de s’être
occupé de l’acte sous seing p r iv é , comme si cet acte
étoit souscrit par lui-même. On a confondu , dit-il , les
moyens du iils avec ceux du père ; cependant un iils
donataire 11e pouvoit être tenu de l’effet d’un acte sous
seing privé, n’ayant de date certaine qu’après sa donation.
Ce paquet ne peut aller à aucune adresse, et ne séduiroit pas même le praticien le plus formaliste.
11 est constant, d’après le père et le fils, que l’acte sous
seing privé est du même jour que l’acte n o t a r i é . 11 est
constant que l’acte a été connu du fils et du père, et que
ce fils rebelle s’avisoit à seize ans d’en témoigner son
v
m êcontentement au père.
Ce fils précoce n’a rien ignoré ; il a rneme voulu se
faire donner ce pré ; mais le père a pris pour prétexte
qu’il n’a voit pas l’acte de 1 7 7 9 , et que la minute avoit
resté entre les mains de M a ig n o l, de Landogne.
�24
(
)
D ’après ces a v e u x , il est assez maladroit d’équivoquer
sur les dates. Il est vrai qu'en général les actes sous seing
privé n’ont de date certaine qu’avec la formalité de l'en
registrement , ou par le décès de l’un des signataires ; mais
pourquoi ? c’est qu’il seroit facile de dater un acte sous
seing privé du temps que l’on v o u d ra it, et que par ce
moyen on anéantirait des conventions postérieures.
Mais lorsque la date est. avouée et reconnue ; lorsque
ce iils , qui parle si souvent de sa donation , a connu
auparavant un acte qui transmettoit a un tiers la pro
priété d’un immeuble particulier ; lorsque surtout cet
immeuble n’est pas nominativement compris dans la dis
position q u ’ i l in vo q u e , il n’a pas dû y compter; il n’a
pas dû calculer la valeur de cet objet dans la donation
qui lui a été faite; il aurait même trompé la famille avec
laquelle il contractait, s’il leur «voit fait entendre que
cet héritage faisoit partie de sa donation : dans tous les
cas, il n’auroit pu nuire au tiers détenteur.
On ne voit pas quelle analogie il peut y avoir entre
cet acte et une contre-lettre à 1111 contrat de mariage.
lies lois ne proscrivent les contre-lettres aux contrats
de mariage qu’autant qu’elles seraient isolées, qu’elles
é m a n e r a i e n t d e l’époux sans les avoir communiquées à
la famille avec laquelle il contracte.
Mais si les contre-lettres étoient signées par toutes les
parties qui ont assiste au contrat, elles seraient très-vala
bles, et auraient tout leur effet. Il n’y a d’ailleurs aucune
comparaison à faire entre cet acte et une contre-lettre :
M a i g n o l , de L a n d o g n e , serait propriétaire en vertu de
l ’acte notarié. L ’acte subséquent n’est qu’un acte iso lé ,
explicatif,
�*5
(
)
explicatif, interprétatif, si l’on v e u t, du précédent, mais
qui n’ajoute rien au droit des parties.
Q u ’on ne dise pas que cet acte sous seing privé est
obscur et équivoque ; l’appelant doit se rappeler qiûd
subroge M aign o l, de Landogne, a u x effets de Pacte du
6 ju in 1 7 7 7 , et que ce contrat transmet la propriété du
pré i\ M a ig n o l, du Cheval-Blanc.
M aignol iils tourne toujours autour de ce cercle vicieux;
il en revient à dire qu’un acte sous seing privé, qui con
tient des engagemens synallagmatiques,doit être fait double;
il a recueilli quelques arrêts rapportés dans la dernière
collection de jurisprudence, en faveur de l’archevêque
de R e im s, contre le prince de Conti ; entre le sieur Forget
et le duc de G ram m on t, etc. On ne lui conteste pas le
principe : on n’est divisé que sur l’application.
Il prétend prouver la nécessité que cet acte fût fait
doub le, dans le cas où le sieur Maignol auroit été évincé
de son p r é , ou qu’il l’eut perdu par force majeure.
Mais si M a ig n o l, de L an dogn e,eût été évincé , il avoit
son acte pour demander une garantie ; il n’auroit pas pu
le supprimer pour s’en tenir ù l’acte notarié, et demander
la rente, parce qu’on lui auroit répondu que la rente éfoit
anéantie, et qu’il n’avoit acheté que le pré dont il jouissoit publiquement; il n’auroit jamais été assez malavisé
pour se contenter d’une rente, lorsqu’il pou voit obtenir
une indemnité suivant la valeur actuelle du pré.
E t s’il l’avoit perdu par une force majeure, si la riViere le lui eut en levé} comme ou l’a dit plaisamment
en première instance, le pré.auroit été perdu pour lui :
res périt domino.
D
�(26)
Mais pour cela il faut supposer des accidens bien graves;
une révolution clans le globe, le contact d’une comète, etc.
C ’est prévoir les choses de loin : la pauvre humanité ne
va pas jusque-là.
»
Antoine Guillaume attendra d’ailleurs l ’événement; et
il est à croire que sa postérité la plus reculée jouira •pai
siblement du pré dont est question, malgré Maignol fils,
et malgré la rivière de Sioulet qui le fertilise et ne peut
lui nuire.
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
M e. M A N D E T , avoué licencié.
A R I O M , de l'im prim erie de L
andriot,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — Juillet 1806.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
créances
cautions
compétence de juridiction
tribunal de commerce
cylindre à indiennes
teinturier
serrurier machiniste
moulins
fabriques
textile
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour dame Gilberte Ducourtial, veuve de Joseph Maignol, tutrice de leurs enfans mineurs ; dame Marie-Gilberte Maignol, veuve de Michel de Pannevert ; dame Marie Maignol, et sieur Antoine Bouyon, son mari ; dame Marie-Gilberte Maignol, et le sieur Pierre Legay, son époux, et sieur Antoine Maignol, tous intimés ; contre sieur Guillaume Maignol, autre Guillaume Maignol, son fils, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Riom, le 18 floréal an 13 ; et encore en présence d'Antoine Guillaume, maréchal, habitant de la commune de Pontaumur, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0527
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0127
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_G1606
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cautions
compétence de juridiction
Créances
cylindre à indiennes
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moulins
serrurier machiniste
teinturier
textile
tribunal de commerce
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MÉMOIRE
ET
I
CONSULTATION,
P o u r M . C H A B R O L , ancien colonel;
E n r é p o n s e à l'’imprimé de M. N E I R O N D E S A U L N A T S , ancien magistrat, intitulé
Précis, et à sa consultation signée M e i m a c .
L
E ruisseau des Gros - f o u i l l o n s , ou G a r g o u illo u x ,
com m ence aux c n v ir o n s d u village de S a in t-G e n e s t-
l’E nfant , situé à une lieue de la ville de R iom . Plus
de trente sources form ent son origine; un large et grand
aqueduc à ciel o u v e r t , revêtu en pierres de taille ? et
dont la largeur varie depuis six pieds jusqu’à d o u z e , sur
une lo n gu eu r de quarante-deux toises, reçoit et contient
A
�( O
ces trente sources dès leur naissance môme. Cet aqueduc
existe de toute ancienneté; il a été construit par les pré
décesseurs de M M . Chabrol : son objet est de favoriser
l'arrosement des nombreuses prairies du cantoh, dont
une grande partie leur appartient. Cet aquéduc et le9
trente sources du ruisseau des Gros-Bouillons ont été
renfermés dans l’enceinte de l’enclos de M . îseiron h
Saint-Genest, en 1683, par Jean et Antoine de Brion,
créateurs du bien actuel de Saint-Genest, que représente
àùjourd’hui M . Neiron-Desaulnats.
Il fut laissé à cette époque, au propriétaire du Chancet,
une petite porte d’entrée dans 1’intérieur de l’enclos de
S a in t-G e n e st; elle étoit placée à son extrémité nordouest : on en voit encore la trace, et nombre de témoins
pourroient déposer de son ancienne existence. Mais
Imbert R e b o u l, propriétaire alors du Chancet, consentit,
en 1735 , qu’elle restât murée, à condition qu’il auroit
son droit d’entrée et de passage par les portes charre
tières , qui sont h soixante toises plus à l’ouest : c’est par
là que M M . Chabrol, et autres co-usagers, exercent leur
droit de prise d’eau et de surveillance sur les sources du
ruisseau des Gros-Bouillons.
L ’état habituel de ce ruisseau est de servir au jeu des
jnoulins inférieurs situés sur son cours ; mais les meuniers
sont obligés de suspendre leur action tous les jours de
marché, et toutes les nuits des six mois d’été : ces temps-là
sont destinés à l’arrosement des prairies.
Indépendam m ent du droit de diriger en entier le ruis
seau dey G ro s-B o u illo n s dans leurs nombreuses prairies
1«j jours et les nuits q u i leu r sont d évo lu s, d’après le règle-
�(3)
ment local relatif aux arrosemens , MM. Chabrol ont
encore celui de conduire journellement à la maison et. aux
jardins du Cliancet une prise des mômes eau x, par un
aqueduc d’abord couvert, puis souterrain. A la vérité y
depuis long-temps l’eau n’y parvenoit plus par suite du
défaut d’entretien de la conduite; mais nombre de témoins
peuvent déposer avoir vu les fontaines, et jets d’eau du
Chancet en activité.
L e grand aquéduc à ciel ouvert étoit dans un état de
ruine qui exigeoit impérieusement sa restauration ; une
grande partie des eaux échappoient à leur destination ; les
prairies arrosoient médiocrement, et les propriétés infé
rieures en étoient submergées ou endommagées. M . Cha
brol résolut de faire travailler à ces réparations. M . Neiron
lui-même l’en avoit sollicité, d’abord de vive v o i x , puis
par une lettre du 21 janvier i 8 o 5 ; et enfin trouvant de
l’inconvénient à ce que les matériaux que faisoit conduire
M . Chabrol entrassent par ses portes charretières, il lui
fit proposer de vive voix de les introduire par une brèche,
et l’autorisa à la pratiquer près du grand aquéduc , par
une seconde lettre du 2.5 février i 8 o 5. M . Neiron lui
demande, par cette missive, cty mettre une claie de parc
ou bouchon m obile, contre Vinvasion des bestiaux pen
dant ¿a durée du tra vail, et de la ja ir e murer aprèsles travaux terminés.
Dans les derniers jours de fructidor de l’an 13* époque
ou les canaux d’arrosage se ferment, M. Chabiol com
mença ses travaux ; la brèche fut ouverte à l’endroit
indiqué : on y plaça temporairement des jambages eh
pierres de taille, et cela pour plus de précaution. U u g
A 2
�(4)
porte en planches, mais mobile, et non scellée, ne tour
nant pas sur des gonds, mais se plaçant et se déplaçant à
volonté, y servoit de fermeture ; on l’assujétissoit avec des,
pierres et des bois lors de l’interruption des travaux les
jours de fêtes et dimanches, ainsi que pendant les nuits.
L e mur de cet enclos n’étant bâti qu’avec de la terre, la
brèche se fût nécessairement agrandie, et son entrée de
venue facile aux malveillans et aux bestiaux ; cela auroit
donné lieu à des plaintes, et sans doute a des actions juri
diques de la part de M. Neiron : c’eût donc été un piège
contre M . Chabrol, s’il n’avoit pas eu la faculté de donner
une certaine solidité à cette porte-brèche. Si on s’est
permis ces détails, qui sont en quelque sorte étrangers
à l’affaire, c’est afin de prouver la mauvaise foi de M . Nei
ron, d’avoir converti en reproche grave, en inculpation
majeure, contre M. C h abro l, ce qui n’étoit qu’une sage
précaution de sa part. Cette solidité étoit donc passagère;
elle étoit tout en faveur et pour l’avantage de l’enclos
de Saint-Genest.
Mais ce qui prouve sans réplique que c’est une calom
nie de supposer a M. Cliabrol le projet d’usurper une
porte d’entrée dans cet enclos,c’est le droit de passage et
d’entrée qu’il exerce, lui, ses domestiques et ses fermiers,
par l’une des portes charretières , et cela concurrem
ment avec les autres usagers des eaux des Gros-Bouillons;
qu’enfin M . Neiron lu i-m cm e, page 2 , dernier alinéa
de son imprimé intitulé Précis, convient que l’ordon
nance du tribunal civil, du 2 complémentaire an 13, dissipoil ses soupçons sur Vérection d'une brèche éphémère,
porte permanente. Si ces soupçons injurieux étoicnt
�( 5)
calmés le 2 complémentaire de l’an 1 3 , comment M. Neiron peut-il en faire l’objet d’une inculpation g r a v e , après
dix mois écoulés depuis cette ordonnance, et au moins
quinze jours après la fermeture et la maçonnerie de cette
porte-brèche ?
M . Neiron a donné par ses écrits, même au public et à
ses juges, la preuve de sa mauvaise fo i, et la mesure de
son caractère ; il s’est donc démasqué lui-meme : a b u h q
dice omnes.
Dès que M . Chabrol eut fait renverser de fond en comble
les anciens travaux relatifs à ses aquéducs et prises d’eau,
préalable indispensable à leur réédification, M.Neiron, qui
avoit feint de s’éloigner, mais qui avoit établi un surveillant
pour observer et l’instruire, arrive de sa montagne; il
envoie M. son fils faire une scène à M . Chabrol, le 17 de
septembre i 8o 5 , le sommer de cesser tous ses travaux, de
sortir sur le champ de son enclos, lui el ses ouvriers, et
de lui justifier des titres en vertu desquels il faisoit ces
entreprises. M . Chabrol répondit qu’il continueroit ses
travaux , et ne lui justifieroit d’aucun titre. L e 19 de sep
tembre, M . Neiron fils, profitant de l’absence momen
tanée de M . C h abro l, chassa violemment ses ouvriers,
et fit murer la porte-brèche.
Comment concilier la scène scandaleuse et la violence
de M . Neiron ¡fils, avec les lettres de M. Neiron père? Il
provoque les réparations des prises d’eau ; il demande
1 apport des matériaux par une porte-brèche ; il en auto
rise l’ouverture; et quand tous les anciens travaux de
l’art sont renversés, il veut s’opposer h leur réédification,
M . Chabrol vit toute l’étendue du danger où vouloit le
�(6)
mettre M . N eiron, et du piège qu’il lui avoit tendu. Il
connut alors qu’il n’avoit feint de désirer ces, restaurations
que pour lui intenter un procès, et l’entraîner dans les
longueurs et les dépenses d’une action pétitoire.Les digues
renversées, les aquéducs disparoissoient, les prises d’eau
devenoient impossibles ; les prairies de M. Chabrol, le
principal objet de ses revenus , étoient frappées de stéri- ^
lité ; ses fermiers obtenoient de grandes indemnités, et
les co-usagers de ces eaux d’enormes dommages-intérêts:
car enfin vâloit mieux pour eux des aquéducs en mau
vais état qu’entièrement renversés , puisqu’à chaque prin
temps on les raccommodoit passagèrement à force de
gazons, de pierres et de pieux.
Les conseils de M. Chabrol lui recommandèrent la plus
grande célérité dans le remède qu’ils lui indiquèrent,
comme le seul qui pût prévenir un péril aussi éminent,
contre un adversaire vrai prodige en chicane, et qui
connoît si bien l’art d’éterniser les procès.
11 se pourvut devant le tribunal c iv il, en requête de
plainte du trouble qu’il essuyoit dans l’exercice de ses
droits à réparer ses aquéducs, digues, et prises d’eau.
11 exposa « qu’il avoit droit à des prises d’eau aux sources
« mêmes du ruisseau des Gros-Bouillons ; que la digue
« pratiquée pour la direction de ces eaux étant en état
« de ruine......... e*c*
« Qu’il eu avoit commencé les réparations à l’instiga« tion môme de M. Neiron p è re , ainsi qu’il étoit prouvé
« par ses deux lettres, et que cependant ilavoit été troublé
« dans ses’ travaux par les voies de fait et les violences dé
«• M, Neiron fils, qui avoit expulsé ses ouvriers." »
�(7)
t D ’après cet expose, M . Chabrol demande à être auto
risé à continuer ses réparations. Sur cette requête , il iui:
tervint une ordonnance du 2e. jour complémentaire de
l’an 13 ; elle est ainsi conçue :
'
« Nous autorisons provisoirement le remontrant à faire
« continuer sans délai.............................les réparations et
« ouvrages en maçonnen’e nécessaires pour la conserva« tion et entretien de la digue dont il s’agit......... .......... ..
« Faisons défenses audit sieur Neiron-Desaulnats, ou tous
« autres, de troubler les ouvriers du pétitionnaire dans
« leur travail et réparation à ladite digue........................a
Muni de cette ordonnance, M . Chabrol rétablit ses
ouvriers sur les travaux. En réédifiant le grand aquéduc,
il a aussi voulu restaurer la portion de l’aquéduc couvert
qui gît au fond et dans le lit même du grand aquéduc,
afin de rendre au Chancet l’agrément dont il étoit privé
depuis long-temps. A mesure qu’on nettoyoit le grand
aquéduc , on déposoit les débris de l’aquéduc couvert sut
les bords ; il en fit conserver les dernières toises, sans les
déraciner, pour témoignage de l’ancienne existence de ce
commencement d’aquéduc. Mais les gelées du mois d'oc*tobre i 8o 5 l’ayant forcé d’interrompre ses restaurations -7
lorsqu’il les a reprises au printemps de l’an 1806, ils ne
s’ÿ sont plus trouvés.
M . Chabrol mettoit enfin la dernière main à ces répa*
rations ; il venoit de remplacer en canaux de pierres de
taille les trente premières toises de son aquéduc couvert,
lorsque le 14 rnai dernier il s’est vu actionne par M. ]Seirôn-Desaulnats devant le juge de paix de l’Ouett , canton
de Riom.
�,e 8 ) .
.Les parties sont venues à l’audience du tribunal de paix,
le 19 mai 1806.
]\1. Neiron , alors pour la première fois, a précisé ses
conclusions qui tendent « à ce qu’il soit dit en dernier res« sort, que M. Chabrol a eu tort d’ usurper, dans l’enclos de
« Saint-Genest, le terrain sur lequel il a placé les tuyaux
« ci-dessus énoncés; que M . Neù’on-Dosaulnatsestauto« risé à reprendre la libre jouissance audit terrain...... et
« que pour l'éparation du dommage, M. Chabrol soit
« condamné en 4° f ^ 1103 de dommages-interets , et aux
a dépens. »
M . Chabrol a répondu que « M . Desaulnats ne pouvoit
« pas ignorer que pour l’irrigation de ses prairies il exis« to it, de temps immémorial, un aquéduc qu’il avoit été
« autorisé à faire rétablir; qu’il avoit même le droit par
« lui ou ses auteurs, depuis longues années, de pi’endre
« les eaux des sources des Gros-Bouillons ; que détoit un
« droit de pure fa c u lté dont il a pu user ¿1 volonté ; que
« la conduite de ces eaux est dans le lit même de Vaqué« duc q ii ainsi les constructions par lu i fa ite s ne sont
a point une nouvelle œ uvre, mais bien une réédÿica« tion , une réparation de ce qui lui a appartenu et lui
« appartient encore. »
M . Chabrol a ajouté que « d’ailleurs, en agissant ainsi,
c< il n’avoit fait qu’exécuter ce que l’ordonnance de M. le
« président du tribunal civil, en date du 2e. jour complè
te mentaire de l’an 13 > ^ permettait de faire. »
L e genre de défense de M. Chabrol annonçoit assez
à M . le juge de paix de l’Ouest que la contestation n’étoit
pas de sa compétence; cependant il ordonna son transport
sur
�( 9 Ï
sur les lieu x , pour connoître l’objet de la demande eu
complainte possessoire et réintégrande de M. NeironDesaulnats.
On lit dans le procès verbal de ce transport, qui a eu
lieu le 19 mai 1806, que « M . Neiron a fait remarquer
« à M. le juge de paix de.l’Ouest, auprès des rochers,
« une élévation faite en pierres et gàzorinées, qui cachoit,
« a-t-il dit, une conduite d’eau nouvellement pratiquée
« par M . Chabrol, à côté de la rase d’irrigation, ainsi
« qu’une ouverture faite à son mur de clôture, pour la
« sortie de l’eau venant de cette conduite. »
Il ajoute que « M. Desaulnats l’ayant mené en cet
« endroit, il lui a été facile de reconnoit’re qu’il a été
« fait récemment dans cette partie une nouvelle cons« traction ou une réparation. »
Il rapporte ensuite que « M. Chabrol est convenu de
« l’existence de la rase qui n’est pas apparente, puis« qu’elle est couverte en gazonnées; mais que M . Cha« brol a dit que ce n’étoit pas de sa part une nouvelle
« œuvre ; qu’il n’avoit fait que rétablir une ancienne
« conduite, pour faire arriver l’eau, au Chancet, où il
« existoit dans ses jardins des bassins en pierres de taille;
« que l’on” voyoit’ .encore des'Vestiges de cette ancienne
« conduite, tels que des morceaux do tuyaux en pierres
« de taille auprès des rochers ; qu’i\ l’endroit du mur
« ou sortoit sa conduite d’eau , il existoit une ancienne
« ouverture qu’il n’avoit fait que réparer pour lui ser« vir, a l’exemple de ses prédécesseurs.
»
« M. Neiron alors a nié l’existence de cette ancienne
« conduite d’eau ; il a prétendu que rien 11e prouvoit
B
�( 10 )
« que les m orceaux en pierres de taille et en b r iq u e ,
« que M . Chabrol présentait comme des marques d’an« ciens vestiges, eussent été trouvés dans la partie où
« est actuellement sa nouvelle conduite; que tous ces
« objets avoient pu être apportés avec les pierres dont
« on s’étoit servi pour la construction de la digue ;
« qu’au surplus il lui seroit facile d’en faire voir dans
« d’autres parties de son enclos, où il y avoit ancienne
té ment des machines hydrauliques. »
oc Effectivement, dit M . le juge de paix de l’O u est, à
« quelque distance au-dessus de la digue nous avons trouvé
« des morceaux de tuyaux de brique qui nous ont paru
« semblables à ceux que M. Chabrol nous avoit montrés. »
M . Neiron suppose ici que M . Chabrol, voulant usurper une conduite d’eau, a fait apporter sur le local des
débris de vie^x tuyaux, pour les présenter à M . le juge
de paix comme débris d’un ancien canal dégradé; et,
pour preuve de cette assertion , il montre à M. le juge
de paix de l’Ouest des morceaux de tuyaux absolument
semblables, dans une autre partie de son enclos.
Nous pouvons dire avec l’Ecriture : M entita est iniquita.s sibi.
Comment expliquer cette parfaite similitude entre les
débris que M . Neiron suppose apportés frauduleusement
par ordre de iVJ. Chabrol, et ceux qu’il montre a 1V1. le
juge de paix à d’autres endroits de son enclos? Comment
l’expliquer! rien de plus simple : les mêmes mains qui
ont été e m p l o y é e s pendant l’hiver, que les travaux étoient
interrompus, ù déplacer une partie des débris laissés par
M . Chabrol sur le bord de son nquéduc, à mesure qu’ou.
�C 11 )
les déracinoit, ont dû nécessairement les déposer à d’autres
endroits de l’enclos. M . Neiron les y ayant rencontrés,
n’aura pu s’empêcher de les prendre pour des vestiges
de ses machines hydrauliques, qui se seroient déracinés
d’eux-m êm es ; et les montrant à M . le juge de paix,
celui-ci n’a pu s’empêcher de leur trouver une parfaite
similitude avec ceux que lui avoit montrés M. Chabrol
au bord de son aquéduc restauré. ( V o y e z son procès
verbal du 19 mai 1806.)
A u reste M. Chabrol prouvera par témoins, et l’an
cienne existence de l’aquéduc dégradé, et qu’il en avoit
laissé sans déraciner une portion qui a disparu pendant
l’hiver dernier, et ne s’est plus trouvée au printemps;
ce qui détruira cette calomnie.
Quant au prétendu mystère supposé par M. Neiron
avoir été mis à la restauration de l’acquéduc couvert, la
sommation qu’il fit faire à M. Chabrol par son affidé
M ich el, assisté de quatre témoins, le 13 mai, et qu’il
relate dans sa requête au tribunal de p a ix , prouve sa
mauvaise foi.
j
On passera légèrement sur une seconde supposition,
que les gazons placés par M . Chabrol sur son aquéduc
couvert, étoient pour en dérober la vue; car si le fidèle
Michel et ses quatre témoins avoient vu ces travaux le
.13 m ai, comment les auroit-on pu dérober aux yeux
le 19 mai, six jours après.
On ne relevra point l’accusation chimérique de l’ins
cription lapidaire dont M. Neiron a fait tant de plaintes
et tant de bruit dans le monde; comme si d’inscrire son
nom sur un immeuble donnoit droit à en dépouiller
B 2
�( 12 )
le propriétaire légitime. Pareille inculpation est trop
puérile; car M . Chabrol a pu faire légitimement tout
ce qui tendoit à la conservation de ses droits : et si les
tribunaux jugeoient qu’il les a perdus, toute inscription
deviendroit inutile.
Nous nous arrêterons sur une autre calomnie présentée
par M. Neiron avec autant d’art que de perfidie ( page 4
du Précis pour Joseph Neiron ).
« A u jour indiqué pour la visite des lieux, étant près
« d’arriver à Saint-Genest, j aperçois M. Chabrol précédé
« d’une charrette chargée de vieux tuyaux de fontaine.
« Bientôt, vers un pont joignant la face extérieure démon
« enclos, cette voiture est arrêtée...... Je fais arrêter la
« mienne, et je vois qu’en faisant semblant de s’amuse?
« auprès du pont, on y cache dessous les tuyaux voitu(c 1-és......etc. Je ne pus me défendre du soupçon que si
« j’ctois arrivé quelques momens plus tard, j’aurois trouvé
« ces tuyaux placés a côté de ceux qu’on avoit mis en évi« dence dans inon enclos...... J ’invite M. le juge de paix
« a ne tei miner son opération que lorsqu’il aura visité le
te pont sus-enonce....... Mon fils1passant la main sous le
« pont, en retire deux tuyaux; il en auroit pu tirer davan« tage si cet échantillon 11’eût été suffisant. »
A p r è s avoir érigé en accusation aussi grave, le simple
soupçon dont M. Neiron nous assure qu’il ne put se dé^
fendre, il laisse avec perfidie sous silence les dires de
JNI. le juge de paix et de M. Chabrol, sur la visite qu’il de
mande du ponl. Il f‘,ut donc les relater ; les voici. Que
fait M. le juge de paix a la vue des deux tuyaux sortis de
dessous le,pont? il interroge M. Chabrol: « Ces tuyaux
�*( 13 )
« proviennent-ils de l’ancienne conduite restaurée dans
« l’intérieur de l’enclos ? »
M. Chabrol lui répond, « Non , Monsieur, on vient de
« les apporter ici un instant avant votre arrivée; ils ont
« bien déjà s e rv i, mais ailleurs, » ■
M . le juge de paix fut si peu frappé de cette prétendue
découverte de M . Neiron, qu’il n’a pas même cru devoir
en faire mention dans son procès verbal.
Analisons maintenant cette prétendue, cette importante
découverte de M . Neiron.
t D e sa voiture il voit cheminer une charrette chargée
de vieux tuyaux.
Eh bien! il y a voit six tuyaux sur cette charrette : elle
n’en étoit donc pas chargée'; car six tuyaux en brique ne
sont pas une charge de charrette..
I l voit cacher les tuyaux sous .un pont.
On plaça sous le.pont ces six tuyaux, pour les mettre
à l’abri d’etre brisés par étourderie ou malveillance; en
les cachant aux regards des passans, il n’y avoit rien qui ne
fût bien légitime.
Jl ne peut se défendre du soupçon que s ’il étoit arrivé
un moment plus tard, il aurait trouvé ces, tuyaux pla
cés à côté de ceux qii’un avoit mis en évidence dans son
enclos.
' ■'
Si M. Chabrol eût pu concevoir un pareil dessein, sans
doute il n’eût pas pris l’heure et le jour auxquels le juge
de paix lui avoit donné rendez-vous pour voii les lieux.
Mais à quoi étoient donc destinés ces six tuyaux?
A s’emparer des e a u x , à les dévier pour opérer les
vides nécessaires à l’entière confection du grand aquéduc
�( *4 )
dont il ne restoit plus à bâtir que les deux dégorgeoirs. Ces
deux dégorgeoirs sont ce qui présentoit le plus de difficulté;
celui surtout des sources près les rochers a coûté des peines
infinies. Les domestiques de M . Neiron, et le fidèle Michel
dont la surveillance n’a pas cessé un instant, ont bien vu
qu’on n’a réussi à dévier les eaux qu’à l’aide de tuyaux de
brique; les ouvriers, les passans peuvent le témoigner.
Que M . Neiron imagine une pareille supercherie, c’est
sans doute dans l’ordre des choses; mais qu il ose en accuser
M . Chabrol au milieu de ses concitoyens, qui tous connoissent ses principes, ses idées libérales, sa générosité,
sa m o r a l i t é enfin, c’est ce qui ne peut se concevoir.
Après avoir démontré jusqu’à la dernière évidence la
fausseté des calomnies avancées contre M. Chabrol, nous
allons passer à la cause pour ne plus nous en écarter.
Les parties en sont venues contradictoirement à l’au
dience du juge de p a ix , du 14 juin.
M, Chabrol a conclu à ce que, d’après la vérification
des lieu?/ contentieux, M. le juge de paix se déclarât in
compétent , ou qu’il déclarât M . Neiron-Desaulnats nonrecevable dans sa demande en complainte possessoire, et
le c o n d a m n â t en 1 0 0 francs de dommages-intérêts.
A la suite de vingt et un attendus, M . le juge de paix
de l’Ouest a prononcé son jugement en ces termes : >
« L e tribunal, faisant droit sur la demande en com« plainte f o r m é e contre M . Chabrol, garde et maintient
« M . Desaulnats en la possession et jouissance du terrain
« dont il s’agit ; fait défenses à M. Chabrol de l’y troubler,
K aux peines de droit; le condamne à remettre les choses
“ •dans leur ancien état, dans huitaine à compter de la signi-
�( i5 )
«
«
«
«
«
«
«
fication du jugement faite à personne ou à domicile;
faute de c e , permet à M. Desaulnats de le faire faire aux
dépens de M. Chabrol, du montant desquels il sera remboursé suivant l’état qu’il en donnera , ou suivant le
règlement qui en sera fait en la manière ordinaire ; et
pour dommages-intérêts, condamne M . Chabrol à tous
les dépens. »
M . Chabrol est appelant de ce jugement.
O n lui oppose qu’il n’est pas recevable dans cet appel,
et cela , parce q u e , dit-on, le jugement est en dernier
ressort.
■
Sans doute l’appel ne seroit pas recevable, si le juge
ment étoit en dernier ressort : mais M . Neiron part d’une
fausse supposition ; il n’est pas vrai que ce jugement soit
en dernier ressort, ni dans le fa it, ni dans le droit , et
il ne peut pas l’être.
M . Chabrol avoit opposé l’incompétence du juge de
paix, en disant à la première audience qu’ il n’arvoit fait
qu’user d’un droit de pure faculté, lorsqu’il avoit subs
titué des tuyaux neufs à des tuyaux dégradés, pour res
taurer un canal destiné de toute ancienneté à c o n d u i r e
une prise d’eau du ruisseau des Gros-Bouillons au Chancet;
qu’en agissant ainsi, il n’avoit fait q u ’e x é c u t e r ce que 1 or
donnance de M. le président du tribunal civil? du 2 com
plémentaire, lui permettoit de faire.
Il avoit conclu d’une manière p l u s expresse, h la seconde
audience du juge de paix de l’O u est, dii 14 ju,n > & ce
qu’il se déclarât incompétent, ou déclarât M. Neiron non
recevable dans sa demande en complainte possessoire,
appuyée sur les mêmes motifs déjà exprimés duos le juge
ment préparatoire»
�( i6 )
#
Voilà doiïc un conflit de juridiction élevé , puisqu’il y
avoit un différent porté en deux tribunaux à ht fois , de
vant la justice de paix et au tribunal d’arrondissement.
Cela donne donc matière à un règlement de juges. Ce
conflit a été vidé de fait par le juge de paix de l’Ouest.
En prononçant sur le fond sans statuer sur le déclinatoire, pouvoit-il lui-même trancher ainsi ce conflit inci
dent , et le décider en dernier ressort eu faveur de sa juri
diction? N on , sans doute -, s’il l’eût fait il eut commis un excès
de pouvoirs. C’est une consequence de 1article
du Code
de la procédure, conforme en cela à l’ancienne jurispru
dence, qui, en parlant des tribunaux de commerce, porte
que les dispositions sur la compétence pourront toujours
être attaquées par la voie de l’appel.
Les tribunaux de commerce jugent en dernier ressort
jusqu’à iooo francs , les juges de paix jusqii’à 5o francs.
11 y a bien moins de raisons pour exempter de l’appel
les dispositions des jugemens de paix sur la compétence,
que celles des tribunaux de commerce.
Ce qui est fonde sur les mêmes principes doit donner
lieu aux mêmes résultats.
L e jugement dont est appel n’a donc pu être rendu en
dernier ressort, par cela seul que la compétence étoit
contestée.
Il n’a pu être rendu en dernier ressort sous un autre point
de vue ; celui de la demande reconventionnelle de M. Cha
brol eu ioo francs de dommages-intérêts, occasionnés par
la suspension de scs travaux, par la perte de temps de ses
ouvriers , par les vols et les avaries survenus à ses maté
riaux; abandonnés sur un chemin au premier occupant.
ün
�'
.
(
17 ^
O n n’examinera pas jusqu’à quel point il faut considérer,
comme constante et solidement établie, la prétendue juris
prudence de la cour de cassation, q u i, selon M'. Neiron ,
attribue aux juges de paix la faculté de statuer en dernier
ressort sur les demandes possessoires, quelle que soit la
valeur de l’objet contesté , pourvu que le demandeur ait
restreint ses dommages-intérèts à 5 o francs et au-dessous.
Si cette jurisprudence est telle qu’on la suppose, le temps
eu fera justice ; mais elle n’est pas applicable à l’etipèce dans
laquelle se trouvent les parties.
„ L e m axim um de la compétence des juges de paix est
fixé à 5o francs par les articles 9 et 10 de la loi du mois
(l’août 1790.
O r , il s’agit, dans l’espèce, d’une valeur bien supérieure
à cette somme de 5o francs , puisque M. Chabrol avoit
forxné une action reconventionnelle de 100 fr. de dom
mages-intérèts.
Vainement M . Neiron prétend-il que la compétencq
devoit se régler par sa demande seule, et sans avoir égarcl
à la demande reconventionnelle de M. Chabrol.
La loi du mois d’août 1790 porte que les juges de paix
connoîtront en dernier ressort jusqu’à la valeur de 5o fr.
Les législateurs n’ont pas dit que les juges de paix con
noîtront en dernier ressort des demandes formées par le
demandeur seulement, jusqu’à concurrence de 5 o fr. C est
donc de la valeur de l’objet en litige dont la loi a voulu
parler, et non de la demande formée par celui qui intente
l’aqtion. C’esti une jurisprudence adoptée par l’universa-r
lité des tribunaux de l'empire , que la compétence du
premier ou dernier ressort ue doit pas s’établir se
C
�( ,8 )
sur la demande , mais se composer encore de la défense,
quand elle est accompagnée de conclusions reconvention
nelles; qu’il faut réunir les deux demandes, et non pas
se fixer sur une seule.
C’est ainsi que la cour de cassation l’a jugé par nombre
d’arrêts relatés dans les collections et les journaux de juris
prudence , et entr’autres par arrêts des 23 floréal an 8 ,
13 vendémiaire an 9 , 16 thermidor an 10, 18 vendémiaire
et 26 nivôse an 12. ]VI. IVTerlin, dans ses Questions de
droit, tome 3, p aS- 37^ et su*vantesj enseigne la même
doctrine, comme conforme aux vrais principes et à l’an
cienne jurisprudence.
Aussi l’auteur de la Jurisprudence de la cour de cassa
tion , au supplément de l’an 13 , page 116, n’hésite point
à dire, en parlant de la complainte possessoire dans la
quelle le demandeur s’est restreint à moins de 5o fr. pour
tous dommages-intérêts, que « si à cetle première demande
a vcnoit se joindre une demande incidente ou reconven
ce tionnelle, q u i , réunie à la première, excéderoit la
« somme de 5o francs, la décision de la cour ne seroit
« plus applicable, et il laudroit se guider par les règles
« ordinaires. »
M . Neiron prétend que cette demande reconvention
nelle de M. Chabrol, n’etoit qu’une tournure évasive,
imaginée lors du jugement définitil pour éluder le dernier
ressort.
Ma is on a vu que cette demande avoit un objet aussi
sérieux cjue légitime, puisque M. Chabrol a soulîert et
souffre encore un lort rcel par l’interruption de ses tra
vaux; et qu’elle a été formée ù temps, dès qu’elle l’a été
�( T9 )
avant le jugement définitif dans une justice de paix ,
•puisqu’il est défendu d’écrire.
I-cs conclusions reconventionnelles de M . Chabrol
naissent d’ailleurs naturellement de l’objet de la demande
de M. Neiron. Il se prétend troublé dans sa possession
•par les travaux de M . Chabrol ; il demande contre lui
40 fr. de dommages-intérêts pour le prétendu tort qu’il
lui avoit occasionné; et M. Chabrol, qui en avoit éprouvé
•un bien plus grand par l’action de M. Neiron, à raison
•de la suspension de ses travaux, du dégât et de la perle
de ses matériaux, avoit conclu contre lui en 100 francs
%
de dommages-intérêts.
>
Il n’y eut donc jamais reconvention plus régulière en
elle -même, qui eût plus de relation avec l’action princi
pale , et qui dût moins en être séparée.
L ’objet du litige, composé de ces deux actions réunies,
excédoit donc évidemment le pouvoir attribué au juge
de paix, pour prononcer en dernier ressort.
M . Neiron a demandé dans son premier exploit, d’une
manière expresse, que le juge de paix de l’Ouest jugeât
en dernier l’essort; mais en prenant de nouvelles conclu•sions, à l’audience du 14 juin, il a cessé de conclure à
ce dernier ressort; et M . le juge de paix de l’Ouest, dont
M. Chabrol a attaqué la compétence, a tellement senti
qu’il ne pouyoit ni ne devoit prononcer en dernier îessort,
qu’ il n’a pas fait usage de cette formule, ce qui prouve
qu il 11 a entendu juger qu’à la charge de 1 appel.
M . Neiron oppose que si le juge paix n a pas usé de
. cette formulle, cette ommission ne sauroit nuire à son jugement. Autrefois cependant les présidiaux éloient rigoiv»
C 2
�( 20 )
j’eusqment'àstreint à déclarer s’ils jugeoient en premier où
dernier ressort ; et toutes les fois que leurs jugemens nié
faïsoient pas mention du dernier Ressort , ils n’étoient
censés rendus qu’à la charge de l'appel. Pourquoi donc
les juges de paix seroient-ils affranchis de cette règle?
Enfin, quand cette ommission seroit indifférente en thèse
générale, elle n’a pu l’être dans l’espèce particulière, où
il s’agit d’incompétence, d’action reconventionnelle qui
excède le dernier ressort, et où M. INeiron, après avoir
conclu dans le principe à ce qu’il fût statué en dernier
ressort, a cessé d’y conclure depuis que M. Chabrol a
opposé cette incompétence, et formé sa demande x’econve'ntionnelle qui portoit à 100 fr. l’objet du litige.
A u reste, s’il y avoit du doute sur la question de savoir
si le juge de paix de POuest a entendu juger en dernier
. fressort, ou à la charge de l’appel, il faudroit se décider
pour l’appel comme lé plus favorable, la règle générale
étant que toute contestation doit subir deux degrés de
juridiction ; et la faculté de juger en dernier ressort n’étant
qu’une exception, elle doit etre rigoureusement restreinte
aux cas clairement prévus par la loi.
Il faut donc regarder ce point comme démontré, que
l ’ûppel de M. Cabrol est recevable.
Il reste à examiner s’il est fondé.
Cet appel doit être examiné d’abord sous le point de
vue de l’incompétence, et subsidiairement sous celui dti
mal jugé.
L ’incompétence du juge de paix de l’Ouest résulte de
l’ordonnance du président du tribunal c iv i l, du 2 conlt>U‘mentaire de l’an 13 , et du conflit de juridiction qu’elle
�J
(2 0
établit, en la rapprochant de la citation donnée devant
le juge de paix.
M . Neiron père s’étoit permis des voies de fait contre
M. Chabrol, ayant fait interrompre ses travaux et chasser
violemment ses ouvriers par le ministère de M . son fils.
M . Chabrol obtient l’ordonnance du 2 complémentaire,
qui l’autorise dans l’accomplissement de ses restaurations,
et cela provisoirement, contre les agressions de MM»
Neiron-Desaulnats père et fils.
Mais M. Neiron prétend que cette ordonnance ne con
cerne que la digue, et que tout ce qui n’étoit pas digue
demeuroit prohibé à M. Chabrol. Cependant M Chabrol,
par sa l'equôte, avoit exposé « qu’il avoit droit à des prisés
« d’eau aux sources mêmes du ruisseau des Gros-Bouil« Ions. » Sa pétition avoit donc pour objet tout ce qui
est relatif à ces prises d’eau. D ’ailleurs , les aqueducs, lesprises d’eau et la digue sont un ensemble de construction
qu’on ne peut séparer, et qui ne seraient rien les uns
sans les autres. Son aquéduc couvert gît au fond et dans
le lit même du grand aquéduc; il y est immergé : il falloit
donc profiter de l’absence momentanée des eaux qu’il
avoit déviées, pour compléter son entière r e s t a u r a t i o n ; e t
ce n’est qu’après l’avoir terminée, qu’il a été possible de
mettre la dernière main à la digue.
Si M. Chabrol eût négligé cette partie de sa restaura
tion, il eût commencé dès ce moment une espece d ab
dication de ses droits, dont M. N eiron n’eût pas manqué
de se prévaloir un jour. Si cette ordonnance, du 2e. jour
com plém entaire de l’an 1 3 , avoit mis des restrictions à la
faculté qu’elle accordoit à M . C h a b r o l, au liou d ’une jus
�tice, c’eut été un malheur pour lu i; c’eût été l’exposer à
de grandes dépenses sans espoir d’aucun fruit ; ce qu’on
ne peut présumer de la sagesse et de la justice de M . le
président du tribunal civil.
M . Chabrol n’auroiteu besoin de l’intervention d’aucun
tribunal pour être autorisé à la restauration de ses prises
d’eau, si MM. Neiron père et fils ne 1 eussent troublé dans
l ’exercice de ses droits. L ’article 697 du Code civil veut
que « celui auquel il est dû une servitude ait droit de faire
« tous les ouvrages nécessaires pour en user et la con« server. »
C’est donc contre les agressions et les obstacles de
M M . Neiron père et fils, qu’il a invoqué l’autorité du
tribunal civil. L ’ordonnance du 2e. jour complémentaire
a donc saisi la juridiction de ce tribunal.
M . Chabrol supposera pour un moment que l’ordon
nance de M. le président du tribunal civil peut donner lieu
à interprétation, et présenter de l’incertitude sur le fait
de savoir s’il n’a pas entendu restreindre tous les travaux:
à la digue seulement ; en ce cas à qui peut-il appartenir de
l’interpréter ou de la modifier? Ce ne peut jamais être à
lin juge inférieur. Il n’appartient qu’à la cour d’appel de
l’infirmer, comme au tribunal civil de l’expliquer. Que
celte ordonnance présentât ou non des équivoques, elle
n’en est pas moins un exercice de la juridiction du tribunal
civil: à lui seul appartenoit d’interpréter sa volonté.
L e jugement dont est appel doit donc être annullé
comme incompétemment rendu, subsidiairement il ne peut
manquer d’être infirme <1 îaison du mal juge.
]fiu rcn.Q.liant à la de m a u dç originaire de M, Neiron-
�)
( 23 )
Desaulnats, on voit qu’il a conclu à ce qu’il fût dit « que
« M . Chabrol a eu tort d’usurper, dans l’enclos de Saint« Genest, le terrain sur lequel il a placé les tuyaux c i-« dessus énoncés ; que M . Desaulnats soit autorisé à re« prendre la libre jouissance dudit terrain ; que défenses
« soient faites audit sieur Chabrol de l’y troubler à l’ave« nir...... et qu’il soit condamné envers lui à 40 francs de
« dommages-intérêts. »
Remarquons d’abord que ces conclusions en complainte
possessoire de M. Neiron, et le jugement en maintenue
du juge de paix , ne portent pas sur les eaux des sources
des Gros-Bouillons. M . Neiron ne demande pas à être
maintenu dans la possession de toutes, ou partie de ces eaux;
il ne se plaint pas de ce que M. Chabrol en absorbe dans
ses aquéducs : et poui’quoi ne s’en plaint-il pas? parce que
ni lui ni ses prédécesseurs n’en ont jamais usé ; que l’état
naturel des lieux s’y opposoit, et qu’elles ont coulé de tout
temps en totalité et en toutes saisons hors des héritages de
l ’enclos de Saint-Genest sans leur être d’aucune utilité, si
ce n’est depuis quelques m o is, que M . Neiron a pu en
diriger dans son pré-verger la portion méridionale , en
profitant des travaux de M. Chabrol; entreprise et nova
tion contre laquelle M. Chabrol fait toutes réserves, tant
pour lui que pour ses co-intéressés.
routes les prétentions possessoires de M. Neiron se ré
duisent donc à être maintenu dans la possession du terrain
sur lequel sont gissans les canaux de M. Crabrol, terrain ,
dit M. Neiron, qu'ila eu tort d'usurper; et le juge de paix,
par son jugement, maintient uniquement M . NeironPesaulnats dans la possession et jouissance du terrain
�C 34 )
dont il s'agit, et fait défense à M. Chabrol de Pjr
troubler.
- O r , ce terrain prétendu usurpé est lel't même du grand
•aquéduc de M. Chabrol; il est et a toujours été submergé
par les eaux. Ou ne voit p a s comment JVl.Ncii-on auroit pu
en jouir, comment il auroit pu en avoir la possession
annale avant sa demande, lui qui convient n’avo.ir jamais
eu la propriété de cet aqueduc-digue ou agoge , puisqu’il
invite M. C h ab ro l, par ses lettres, à le réparer.
C ’en seroit assez pour faire sentir le ridicule d’une pa
reille demande , ayant pour objet la maintenue dans la
jouissance d’un terrain qui est sous les eaux , sans qu’ il soit
jamais dans l’ordre des choses possibles que ce terrain sub
mergé, puisse servira autre chose qu’à soutenir les eaux.
Mais ce qui écarte toute idée de complainte possessoire dans l’espèce, c’est qu’il n’y a pas de nouvelle œuvre
jde la part de M. Chabrol ; il n’a fait que réparer un
Ancien canal existant de toute ancienneté , et destiné à
conduire une prise d’eau du ruisseau des Gros-Bouillons
à sa maison du Chancet. M . Neiron à la vérité conteste
ce fait; il uie qu’il ait jamais existé de conduite d’eau
au Chancet. « Si cet aquéduc couvert eût existé, dit-il,
« M. Chabrol n’eût pas manqué d’en faire dresser procès
« verbal contradictoirement avec m o i, avant de le res« taurer. » Mais M . Chabrol est aussi étranger aux af
faires contentieuses que son adversaire y est familier;
pouvoit-il se douter qu’un pareil fait pût être contesté,
que les débris des canaux et des tuyaux gissant sur le
lieu même ne sufliroient pas en cas d’opposition? Peuvoitr-il penser que partie de ces débris dJsparoîtroit île
ce
�ce local, que ceux qui n’avoient pas été déracinés à
l’extrémité septentrionale seroient enlevés? Si M . Cha"brol a commis une négligeance, en ne demandant pas
à être autorisé à faire dresser procès verbal, il lui reste
la ressource de la preuve testimoniale. Quoique M . le
juge de paix de l’Ouest, dans son dix-septième attendu,
dise qu’il ne l’ait point offerte, il n’est pas moins vrai
que, d’après l’avis de ses conseils, il recueillit les noms
des témoins , lui en proposa l’audition, et que M. le
juge de paix la jugea inutile; ce qui persuada à M. Cha
brol qu’il étoit décidé à se déclarer incompétent. Si la
- mémoire de M . le juge de paix l’a mal servi, Mr Cha■■brol y a rémédié depuis ; ce qu’il ne crut pas devoir
faire alors, d’une manière expresse et juridique, en* vers M . le juge de paix, il le fait aujourd’hui; il a
<pris des conclusions formelles tendantes à être admis
t à faire preuve par témoins, qu’il existait dans le lit même
de l’aquéduc destiné à conduire les eaux du ruisseau des
Gros-Bouillons, une ancienne conduite, partie en car naux de pierres, partie construite en maçonnerie, et
«partie en tuyaux de brique ; et cela jusqu’à l’extrémité
septentrionale de l’enclos de Saint-Genest.
Ce fait une fois p ro u vé, il sera démontré que M. Cha
brol n’a point fait une nouvelle œuvre; qu’il a seulement
restauré son ancienne conduite, en substituant des canaux:
neufs aux anciens, obstrués ou dégradés par le temps et
le défaut d’entretien.
I<a réparation de cette
conduite n <i pu donner
• lieu ù une action possessoire de la part-de M . Neiron,
parce q u e , comme ou l’a déjà dit, aux termes de l’art. 697
du Code civil:
a n c i e n n e
D
�( 26)
Celui à q u i il est dû une servitude a droit dé fa ir e
tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la
conserver. Cette disposition est tirée de la loi 1 1 , au di
geste, livre 8, titre 4.
I l résulte (Vun droit de prise d’eau lafa cu lté tacite de
la restaurer, lïen approcher en conséquence le plus près
p ossible, so i et ses ouvriers.
S i ju s est m ihi aquam rivo ducere tacita hœc ju ra
sequuntur , ut reficere r/n/ii nvum licea t, ut adiré
quàrn proxim è p ossun , ad reficiendum eum , ego f a
brique mei. ( Loi 1 1 ,
i , titre 4, au digeste. )
Si l’usage de cette conduite a été suspendu pendant
nombre d’années par suite de la non habitation des pro
priétaires du Chancet, ou par leur impossibilité de sub
venir aux depenses de sa restauration 7 cette suspension
11’a pu nuire aux droits de M. Chabrol, qui ont toujours
été conservés par les vestiges et les restes de cet aqueduc ;
c’est un droit de pure faculté imprescriptible de sa na
ture , jusqu’à contradiction.
C ’est ce qui résulte également et des anciens principes
et des nouvelles lois. ( Voyez l’article 2232 du Code civil,
sur les droits de pure faculté, et l’article 688, sur la pres
cription des servitudes. )
D ’A rgen tré, cpii a traité la question dans son Commen
taire sur l’article 266 de la Coutume de Bretagne, prend
pour exemple des moulins et des colombiers dont il ne
resteroit que des vestiges.
11
dit, à l’égard des moulins , qu’il est toujours permis
de les rétablir, pourvu qu’il eu subsiste quelque portion.
Quandiii quœdarn de prtore ma ten œ supersunt p a li,
cubiccc trabes} parietinev quœ symbolo et notcc esse
�, •
. . .
( 27^
'possilnt prioris constructionis : hœc enim signa cum
suit ternporis successivi, et permanentis signa tutn retinent in possessione juris.
Ista itiquam et superstantia fundamcnta ( dit-il plus
bas ) possessionis interruptionem impediunt. Il en est de
m êm e, d it-il, des colombiers détruits ou dégradés par le
temps; quand il n’y auroit pas eu de pigeons depuis un
siècle, il est permis de les rétablir.
Quandiùparietinœ et vestigia restabunt, etiam si antè
centum annos in eo nulla colurnba résid en t, eoque
jure ntimur ,• quod nemo rectè prohibere possit, quia
vestigia possessionem retinent.
On trouve les mêmes principes dans Mornac sur la
loi 34 au digeste De servitutibus rusticorum prœdiorium.
Si columbarii , vel tnolindini fla lilis , vel stagni ves
tigia restant, etiarn post centum annos, possessio in
ipsis vestigiis retineri semper censeatur, ita ut restitui
instaurai'!que possint à domino.
C’est toujours en raisonnant d’après ces principes, que
Papon dans son Commentaire sur l’article 29 de la Cou
tume de Bourbonnois , dit que « ces sortes de droits
« que les docteurs appellent de pure faculté , sont con« servés parla simple possession civile, et ne se perdent
« point par le non usage. »
• *
llo ru m enim jnrittm quœ f a c u l t a t i s doclores vacant,
sol a possessio civil ¿s prescriptionem irnpcdit, neque non
utendo percunt.
« D ’où il suit (dit A u ro u x des Pommiers) qu’il ne
a peut se rencontrer de possession formée de liberté de
« tels droits, que par un fait contraire. »
A u surplus, ces principes viennent d’être consacrés par
�( 28 )
le Code civil de manière à ne pas même laisser de prise
à la contradiction.
On lit dans l’article 688, que les servitudes continues
sont celles dont l'usage est ou peut etre continuel sans
a voir besoin du f a i t actuel de l'homme telles sont les
conduites d ’e a u , les égouts, les rues, et autres de cette
espèce.
On voit dans l’article 707, que, lorsqu'il s'agit de servi
tudes continues, les trente ans pour acquérir l’extinction
de la servitude ne commencent à courrir que du jo u r
où il a été fa it un acte contraire à la servitude.
D ’où il résulte que jusqu’à cet acte contraire M. Chabrol
a conservé la possession de la conduite d’eau dont il s’agit;
qu’il a été en droit de la faire réparer quand il l’a jugé à
propos, sans que cette restauration ait pu être prise pour
nouvelle œ uvre, ni donner lieu à une action en complainte
possessoire de la part de M . Neiron, surtout dans la cir
constance où il n’a jamais eu ni pu avoir la possession du
terrain sur lequel est le grand aqueduc, lequel forme son
lit , qui est immergé par les eau x, et dont il lui est im
possible de faire aucun usage.
La prétention de M . N eiron-Desaulnats est donc sans
intérêt comme sans fondement; elle doit être proscrite,
et le jugement dont est appel par M . Chabrol doit être
infirmé , si le tribunal civil ne croit pas devoir se décider
pour l’incompétence qui résulte de l’ordonnance du 20.
jour complémentaire de l a
' n 13.
P a r con seil, B E R G I E R,
A R ! O M , de l'imprim erie de L
B O IR O T.
andriot,
seul imprimeur d e la
C o u r d'appel — A o û t 1806 .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrol. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
Description
An account of the resource
Mémoire et consultation, pour M. Chabrol, ancien colonel ; en réponse à l'imprimé de M. Neiron-Desaulnats, ancien magistrat, intitulé Précis, et à sa consultation signée Meimac.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1683-1806
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0525
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0529
BCU_Factums_M0530
BCU_Factums_M0540
BCU_Factums_M0713
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aqueducs
destruction de canalisations souterraines
Jouissance des eaux
-
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CONSULTATIONS
SUR M É M O I R E I MP R I MÉ ,
POUR
M a r g u e r ite C O U G U E T -F L O R A T , veuve du sieur
de Reyrolles, intimée ; .
C O N T R E
C
a t h e r i n e
M A I G N E } appelante de
ju g e m e n t
tribunal de première instance séant au Puy
le 24 floréal an 13.
du
rendu
T
T
L e C O N S E I L S O U S S I G N É n’hésite pas à penser, avec
'el stimable auteur du mémoire im prim é pour la dame CouguetA
�co
ï l o r a t , que le jugem ent du tribunal du P u y , q u i, sans s’arrêter
au fantôm e de divorce opposé à cette v e u v e , a décidé que le
sieur de R eyrolles est mort s o n , ép o u x , rend un hommage trop
pur aux mœurs , à la justice et au x lois , pour que l’appel porté
devant la sage cour de Riom doive lu i inspirer des craintes.
L a dem oiselle Maigne se pare de la qualité de seconde fem m e
et de veuve du divorcé de R e yro lles; mais elle sait bien que c e
sont là des titres usurpés; que son m ariage essentiellem ent n u l,
pour avoir été p récip ité, quand il auroit été précédé d’un divorce
r é e l, ne l’arracha point à la honte du co n cu bin age, et ne couvrit
m êm e pas' ses désordres de l’excu se et du manteau de la bonne
foi ; car elle ne pouvoit pas ign orer, lorsqu’elle engagea sa fo i
au sieur de R eyro lles, divorcé depuis dix mois seulem ent, elle
ne pouvoit pas ignorer , disons-nous , la loi qui interdisoit à
l'époux divorcé de contracter un nouveau m ariage dans l’année
du divorce (1) : ce m ariage en outre présente d’autres vices
in u tiles, quant à présent, à rapporter.
D un autre c ô t é , jamais elle n’a , pendant ce prétendu m a
riage , goûté les douceurs de la maternité.
C e n’est donc ni pour couvrir son h o n n eu r, ni pour conser
ver un état à ses e n fa n s, qu’elle s’acharne à dégrader cette
épouse infortunée; c ’est uniquem ent pour reten ir, sans retran
ch em en t.et sans partage , la riche dépouille du d é fu n t, devenue
sa proie par un testament surpris à la crainte et à la foiblesse ;
uniquem ent pour nager dans un superflu plus abon d an t, et le
réserver à des collatéraux avides.
A h ! si la balance de la loi pouvoit être un instant flottante ou
incertaine dans cette lutte affligeante pour les mœurs , l ’im
pulsion du sentim ent et 1 humanité la feroient pencher bien vite
ch faveur de l’épouse légitim e , à qui la cupidité ose disputer les
«— pjv-H—
oq ■
»>
. « î*
---- ----- 1-------- — — —
....................... i——----- -—
' fif Art. 2, §/s delà loi du ao septembre 1792,
�C 3)
avantages m atrim oniaux que le plus solennel et le plus saint
des contrats lu i avoit assu rés, et qu une courtisanne voudroit
réduire au plus extrêm e dénûment.
Mais la dame Florat de Reyrolles n’a pas besoin d ém ouvoir
le sen tim en t, pour réunir les suffrages à la cour d’appel com m e
elle les a réunis en prem ière instance : il lui suffit de faire pat 1er
la loi.
'
,
L e sieur de Reyrolles lu i engagea sa foi aux pieds des a u te ls ,
le 8 novem bre i 774 , avec toutes les formalités légales que la
loi du temps exigeoit pour form er un mariage in isso u e
m a ria g e , légalem ent co n tracté, ne devoit ê tie c issous que p^
la mort de l’un des époux. U ne loi postérieure en
ispo.a c
n ie n t, et voulut que c e lien sacré put etre ro m p u , entr^
d eux époux , par le divorce , dans les formes qu e le < ter
mina. L e sieur de R eyrolles , dans le délire de la passion qui
l ’é g a ro it, voulut tenter de rom pre par cette nouvelle voie les
sermens qui l’ unissoient h son épouse ; mais conduisit-il 1 en
treprise au term e marqué par la loi? il s’en faut bien. U n acte
de divorce précipité , arbitraire , et m onstrueux dans sa contexture , la fit avorter au tiers de la route ; car le divorce provoqué
par lui seul le 24 mai 179 5, sur la sim ple allégation de l ’in com
patibilité d’hum eur et de caractère , devoit être précédé de trois
assemblées de parens dans un intervalle de six mois de délai au
moins , afin de préparer par de sages conseils , et de mûrir pai
la réfle xio n , un rapprochem ent entre les époux , qui est le pre^
m ier et le principal vœu de la loi (1). Eli bien ! il f " 1
^
le 2 8 juillet m êm e an n ée, à la suite d’une s e u l e a s s c m j ^e ^
parens ou d’amis conciliateurs , par une com plaisance
cier de l’état c i v i l , qui eût été coupable , si sa pievar
n étoit pas excu sée par l’ineptie dont il a cons’pn a I
dans l’exercice de cet acte de l ’a u t o r i t é publique, en pronon
çant non la dissolution du mariage civil et r e l i g i e u x tout a a o is ,
(1) A rticles 8 , 9 , 10 et s u iv a n s , §. a de la loi du 20 septembre I 7 9 2.
A
2
�( 4)
que les époux avoîent contracté devant le ministre du c u lt e , sui
vant les lois du tem ps, le 8 novem bre 1774, mais seulem ent la
dissolution des conventions civiles du m ariage, contractées la
veille devant Couguet jeune et H é ra u d , notaires.
U ne prononciation si p r é m a t u r é e , quand on veut y trouver
la dissolution du m ariage par divorce fondé sur l’incom patibi
lité d’hum eur qui n’y est p a s, et si b iz a r r e , quand on se borne
à y voir la dissolution des conventions matrimoniales qui y est
se u le , peut-elle être présentée de bonne fo iau x tribunaux com m e
un acte de divorce sérieux? L e bon sens , la raison et la loi y
verront-ils jamais autre chose qu une monstruosité , ou un jeu
du délire et de l ’ e s p r i t de vertige ?
V ain em en t on m ultipliera les efforts pour y trouver un acte
de divorce légalem ent prononcé par le consentem ent m utuel des
époux : jam ais on ne parviendra à faire illusion.
x°. L e consentem ent m utuel des époux n’avoit été mis par la
loi au rang des causes légitim es de d iv o rc e , qu’avec des cond i
tions propres à en assurer la spontanéité , la réflexion et la per
sévérance. Ces conditions n ’étoient pas livrées à l’arbitraire des
époux ; elles avoient été tracées avec soin par le lég islateu r, et im
périeusem ent commandées. Ce genre de divorce devoit être provo
qué par le mari et par la fem m e réunis, et agissant conjointem ent,
par un acte de convocation de six au moins de leurs p lus proches
p a re n s, signifié par un huissier, non de la part de la fem m e au
m a ri, ou de la part du mari à la fem m e , mais par un acte de
convocation signifié aux parens de la part du mari et de la fem m e
conjointem ent (1) ( celle-ci autorisée expressém ent ii ce t effet
par le mari ) (2) ; L’assemblée des parens devoit se form er par un
(t) A r tic le s 1 et 2 île la loi (lu 20 septembre 1 7 9 2 , §. 2.
(2)
L'autorisation de la fem m e par le mari n'est pas littéralement exigée
p .r la loi du 20 septembre 1792 > iaais elle est prescrite par les lois générales
pour tous les actes q u i c o n c e r n e n t la personne de la feinuie en puissance d u
n u ti.
�( 5)
concert unanime des époux ; en un m o t, à j o u r f i x e , e t a u l i e u
c o n v e n u a v e c le s parais o u a m is . U n o liicier m unicipal d evoit
être requis de s'y rendre , à l’effet de dresser u n a c e c o n t e n a n t
s i m p le m e n t n u e le s p a r e n s o u a m is a v a i e n t e n t e n d u le s c-pouoo
en
a s s e m b lé e
d û m en t con voq u ée ,
e t q u 'i l s n a v a ie n t p u
es
concilier (1).
‘
,
n .
U n mois au moins après la date de cet. acte , les époux persé
vérant dans leur dessein , avoient la faculté de se présenter tou
jours conjointem ent et de c o n c e rt, devant 1 officier public charge
de recevoir les actes de m ariage; e t , sur eur c „m an
,
-
officier public ¿ to it tenu de prononcer leur ( H orce
naissance de cause (2).
,,
E st-ce avec un pareil co n cert que les époux de R eyro es p
cédèrent pour faire prononcer la dissolution de leur m anag ^
non. Les vit-on se réunir pour convoquer conjointement et
co n cert l’assemblée de leurs parens et amis à un jour convenu
entr’eux? non. Point d’acte fait de concert par les époux réunis ,
mais seulem ent des actes isolés et hostiles de chaque cûté ; point
de convocation notifiée conjointem ent aux parens , mais seule
ment des réquisitions réciproques et successives du mari à la
fe m m e , et de la fem m e au mari : partout la m arche et les ca
ractères du divorce par incom patibilité d’hum eur ; nulle part la
m arche et les caractères du divorce par consentem ent mutuel
et spontané.
a0. Les époux se présentent le 27 juin devant les parens
sera-ce pour leur exposer qu’il leur est i m p o s s i b l e de s u p p o r
1 1
1
i l
r m ’ ils d e m a n d e n t
plus long-temps le tourm ent de leur union , et 4 11
^ pacte
conjointem ent le divorce? nullem ent. L e m au
^
signifié de sa part à son épouse , le 2.4 n ia i, à l et f c t ( P
voquer le divorce p ar incom patibilité d'hum ew , a e
»
son c û té , rend com pte de l’acte de r e p r e s a i l l e s que am our
(l) Article 4 ,
(a) A r tic le
5 Je la même loi , m êm e
§. a.
�(
6
)
propre irrité lui avoit fait notifier à son m a ri, le 27 du même m o is,
pour lui déclarer qu’il n ’avoit fait que prévenir scs intentions,
qui étoient les mêm es que celles de son mari; ce qui veut dire
qu’elle désiroit com m e lui un divorce pour incom patibilité d 'h u
m eur , Si les tentatives trois fois réitérées cle conciliation voulues
par la l o i , étoient infructueuses. Les arbitres firent aux deux
époux les représentations qu’ils jugèrent propres à les rappro
cher. L a dame de R e y ro lles, loin de se refuser à une con cilia
tion qu’elle désiroit , leur répondit qu clic ¿to it disposée ci
suivre en tous points la 'v o lo n t é de son mari ; et par consé
quent de se réunir à lu i , s il v o u l o i t se desister de son projet
de divorce. L e m a r i, au contraire , déclara qu’il persistoit au
divorce j mais il est c la ir qu il persista seul , et que tout se
r é d u is it, de la part de la fe m m e , à une résignation passive à
la volonté de son époux.
Q ue voit-on dans tout cela qui ressemble au concert unanime ,
au consentem ent ré cip ro q u e , persévérant et égalem ent spon
tané des deux c ô té s , que la loi demande pour autoriser le di
vorce par consentem ent m utuel? rien assurément. O n n’ y voit
donc pas les préliminaires im périeusem ent exigés pour ce genre
de divorce.
5°. Enfin on ne trouve pas non plus , dans l’acte de divorce
du 28 ju ille t, la preuve de l’accom plissem ent de cette im por
tante condition exigée par l’article 5 de la l o i , que le divorce
fût prononcé par 1 officier p u b lic, sur la dem ande des ép ou x ;
car il ne fu t demandé ni par le m a r i, ni par la fem m e. L e
récita tif de l’acte prouve en effet qu’ils se bornèrent à r e q u é r ir
cet officier de prononcer la dissolution de leur contrat de m a
riage passé devant Couguet je u n e et I ié r a u d , notaires : ce
n ’étoit pas là l’objet du d ivorce, ni de la mission que l’officier
public avoit reçue de la loi. L e divorce 11e détruit pas les co n
ventions matrimoniales , il ne détruit que le m ariage lui-m éine,
par rapport à la personne des époux ; c ’est-à-dire , l’engagement
de rester unis jusqu’à la m o r t, et soumis aux devoirs qu’en
�( 7)
traîne la société conjugale contractée devant les ministres de
la loi. Ce fut bien là le prononcé de l’officier public , puisqu’il
déclara cjue leu r m cinoge étoit dissous , c l (ju ils cto ieu t libres
jtle leurs personnes ; mais ce n étoit pas ce que les époux lui
avoient demandé. Encore une f o is , ce n’étoit pas du mariage
contracté entr’eux le 8 novem bre a 7 7 4 , devant le ministre de
la loi et du c u lte , qu’ils avoient requis l’officier public de pro
noncer la dissolution , mais uniquem ent du contrat de m aiiage
passé la veille devant Couguet jeune et H éraud , notaires. L eu r
réquisition étoit dérisoire , elle étoit un jau ; 1 officier public
eut l’ineptie de ne pas s en apercevoir , et de piononcer giavem ent un divorce qu’on ne lui demandoit pas. Q ue conclure
de là ? que cette prononciation arbitraire et d o f f i c e , d un di
vorce qui n’étoit pas dem andé, n’est qu’ une m onstruosité, une
illusion , un vain form ulaire de paroles vides de sens , que le
poids de la loi fit rentrer dans le néant au m êm e instant ou
elles sortirent de la bouche de la sottise affublée du costum e
de 1 autorité publique. S u n t v e rb a , cl -v o ce s, p r œ t e r e à q u e n i h i l.
Les époux restèrent donc époux après avoir joué cette espèce
de com édie ridicule.
Aussi l ’épouse a trouvé protection et a ccu e il dans les organes
de la l o i , en prem ière instance : p o u rro it-elle craindre d’étre
repoussée dans une c o u r, appui de l’infortune et gardienne de
l’ordre public?
O u i, vous serez repou ssée, nous dira avec une insultante
arrogance l’opulente dem oiselle M aigne , parce que vous avez
élevé contre vous des fins de non-recevoir insurm ontables, soit
par la constante adhésion que vous avez donnée au divorce pen
dant onze années co n sé cu tiv es, vous, dame F lo ra t-R ejro lle s,
qui venez aujourd’hui faire entendre pour la prem ière fois es
plaintes; soit par votre silence jusqu’après la mort du sieur de
I\eyrolles.
D es fins de non - recevoir contre l’ordre public et dans des
questions d’état! La dem oiselle Maigne se fla tte - t- e lle donc
�« ( 8)
que la cour d'appel oubliera cette m axim e aussi ancienne que
la société , et, qui vient d’étre renouvelée par l’article 6 du
Code civil : ce O n ne p e u t déroger p a r des conventions par
ti ticuli'eres a u x lois q u i intéressent l ordre p u blic e t les
« bonnes mœurs ? » II faudroit cependant l’oublier , et ad
m ettre en principe qu’il est perm is de déroger par des con
ventions p rivé es, aux lois qui intéressent 1 ordre public et les
m œ u rs, pour valider par une a d h é sio n , soit e x p re sse , soit
ta c ite , un divorce dans lequel les form es légales ont toutes été
méprisées , et pour donner de la consistance à ce fantùme.
L oin de nous un si étrange abus , qui frapperoit d’impuissance
les lois régulatrices de 1 ordre s o c ia l, et ne laisseroit que le
caprice pour d irecteur de 1 ordre public et des mœurs ! Sans
doute il est perm is de transiger sur les intérêts civils qu’un di
vorce valablem ent prononcé laisse à régler entre les époux ; ce
ne sont là que des points secondaires et de droit purem ent
privé : mais transiger sur la v a lid ité du divorce en lu i-m êm e,
et rendre valid e, par une approbation form elle ou ta c ite , celu i
qui seroit nul par la violation des formes lég a les, c ’est là un
objet qui intéresse l’ordre public et les bonnes tnocurs , un
objet par conséquent qui ne sauroit être du domaine de la
volonté arbitraire des parties.
L a ir é t de la cour de cassation , du p.j pluviùse an i 5 , que la
dem oiselle IMaigne appelle à son se c o u rs, n’a rien de contraire
à CCS règles. O n 1 a dém ontré dans le m ém oire, pag. aG et 27 ; et
la seule lecture des motifs de l’arrêt de la cour d’appel de T r ê v e s ,
qui étoitattaqué , et qui fut m aintenu , sulfit pour cette dém ons
tration. L e sieur Jîoebler, après avoir reconnu dans plusieurs
contrats la validité du divorce obtenu par sa fe m m e , avoit cep en
dant tenté de le faire annuller par justice. Son é pouse repoussoit
les n u llité s, et d ’ailleurs elle se prévaloit de ce que son mari avoit
reconnu la validité du divorce. L arrêt avoit déclaré le mari
11011 recevable dans sa dem ande en nullité ; mais pourquoi P non
parce que le mari avoit reconnu la validité du divorce , mais parce
�( 9)
que cette validité étoit réelle. A tte n d u que les moyens de n u l
lité sont sa n sjo n d em en t, étoit-il dit dansl’arrét : ce m o tif tranche
tout.
Enfin répétons ce qu’on a dit dans le m ém oire , qu’il n’y a pas
eu un seul acte d’approbation d ir e c te , expresse et fo r m e lle de la
validité du divorce , en ce qu’il avoit dissous ce m a ria g e , et
déclaré les époux libres de leurs personnes; pas un seul acte d’exé
cution du divorce , sous ce point de vue , de la part de la dam e
Florat de R eyrolles.
Pourquoi donc n’avez-vous pas formé opposition au second ma
riage de votre époux, si vous ne regardiez pas le prem ier com m e
dissous, lu i dira-t-on encore? E lle répondra : Pourquoi mon époux
a t-il trompé ma vig ila n ce , en anticipant de deux mois le terme
d’ une a n n é e , pendant lequel il lui étoit interdit de form er de
n ouveaux liens, dans le cas m êm e où son prem ier m ariage eût été
légalem ent dissous (i)?
Mais encore , pourquoi différer jusqu’après la m ort du sieur de
R eyrolles pour réclam er le titre d ’ép ou se, si vous n’en étiez pas
déchue? continuera-t-on. Pourquoi? parce qu’il auroit fallu se
m ettre aux prises avec l’im placable Maigne, qui auroit fait réparer,
par un second d ivorce , les vices du prem ier. Mais , après to u t,
la fin de non-recevoir qu’on voudroit induire du silence gardé pen
dant toute la vie du sieur de R eyrolles , n ’nuroit eu de poids ,
m êm e sous le régim e des lois romaines , que dans le cas où l’acte
de divorce n ’auroit été attaqué que plus de cinq ans après le décès
du sieur de R eyrolles. Ici la nullité a été dem andée, non-seule
m ent dans les cinq ans , mais m êm e dans les six mois du décès. La
fin de non-recevoir dont il s’agit n’est donc qu’une illusion. C est
c e que la cour de cassation a form ellem ent décidé par arrêt rendu
en 1an 10 , entre la dem oiselle Preaudeaù et 1 héritier de D avignon , son m ari divorcé (2).
(ij Article 2 , §. 3 de la loi ilu
20
septembre 179 2 » Precitep.
(2) C et arrêt e n rap porté dans le r e c u e il de S ire y , an 10 , page
G5.
�( 10 )
Il ne nous reste plus qu’à parler d ’une dernière Fin de non-recevoir que l’on prétend puiser dans la loi transitoire du 26 germ inal
an 1 1 , d’après laquelle on raisonne a in s i, com m e dans l’affaire
M ac-M alion. « L e texte de l’article i cr. de la loi est ainsi conçu :
« T ous divorces prononcés par des officiers de l’état c i v i l , ou au« torisés par jugem ent , avant la publication du titre du Code
« c iv il re la tif au d ivo rce, auront leurs effets confoim ém ent au x
cc lois qui existaient avant cette publication.
« L e term e générique tous , embrasse indistinctem ent la génécc ralité des actes qualifiés d iv o r c e s , afin (pi ils aient leur effet.
« L e législateur ne demande q u ’une chose ; c ’est q u ’ils soient
« prononcés par un officier de l’état c i v i l , quelle que puisse être
cc l ’ i r r é g u l a r i t é de leurs formes. 35
N otre réponse est prompte , et nous la tirons de l’arrét m êm e
qui intervint dans cette affaire c é lè b r e , dont le détail se trouve
dans tous les recueils , et où on rem arque que la loi transitoire
du 26 germ inal fut spécialem ent discutée. L ’ém igré rentré M acliialion ne fut pas déclaré par la cour de cassation, non recevable à dem ander la nullité du divorce prononcé contre lui
pour la cause d’absence , par le m o tif que la loi transitoire
du c.G germinal an 11 , interdisoit toute réclam ation contre les
divo rces prononcés avant la publication du C ode civ il , quel
ques nullités de form e qu’on pût leur reprocher : la cour de
cassation repoussa , au co n tra ire, absolum ent ce m o y en , nous
dit l’arrétiste (i)> L e sieur Mac ÎMahon fut se\ilement déclaré
non r e c e v a b l e , à cause de sa qualité d’ém igré rentré ; et
cc
attendu qu’il résulte des dispositions de la loi du 20 sep-
cc
teinbre 179 2 ,
e x p liq u é e s
par l’avis du conseil d ’é ta t, du 11
cc prairial an 12 , approuvé par 1 em pereur le 18 du m êm e m ois,
cc
(pie les absens de F ia n ce rentrés ne peuvent point attaquer
cc
les actes de d ivorce faits pour cause d’absence , dans ce sens
(1) IU-çeuil Je Sirey, an i 5 , page 2I^
�C Tr )
« qu’ils puissent rem ettre en question l’a ffa ir e , et discuter la
« cause de divorce. »
• T o u s les cloutes sont dissipés , ce semble.
L a nullité absolue de l’acte de d ivorce prononcé entre les époux
de Royrolles , le 28 juillet i 7 g3 , ne peut pas être mise en pro
blèm e ; elle n’est c o u v e rte , et elle ne pouvoit 1 être , par aucune
fin de non-recevoir. L e jugem ent du tribunal du P u y , q u i , en
l ’a c c u e illa n t, a déclaré le m ariage des époux Couguet-Florat et
Claude de R eyrolles subsistant jusqu’au décès de ce dernier , et
q u i a m a in ten u , en con séquen ce, la dame de F lorat dans les
titres et les droits de veuve du sieur de R eyrolles , ne pourra donc
trouver que des approbateurs parmi tous les amis de 1 ordre et
des mœurs.
D
îlibéré
à C lerm o n t-F erran d , le 8 janvier 1806.
BERGIER,
L
BEIL LE-BERGIER.
E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a v u la présente co n
sultation , est entièrem ent du m êm e avis et par les m êmes
raisons. L e divorce étant n u l, dans une m atière d’ordre p u b lic ,
les fins de non-recevoir ne peuvent pas couvrir la nullité. On
ne cro it pas pouvoir rien a jo u te r , ni a u x m oyens établis dans
la consultation pour prouver la nullité du d iv o rce , ni au x ré
ponses qui y sont faites a u x fins de n o n - r e c e v o i r proposées.
On n’a rien trouvé dans le m ém oire de la demoiselle M a ig n e ,
qui a paru après cette consultation , qui n'ait été p ié v u , et
11e reste dans c e m ém oire que l’apologie du tlh orce.
Dinnim*
Hiom , le 19 janvier 180G.
ANDllAUD,
g a s c h o n
,
b o r y e
.
�-1—iE C O N S E IL S O U S S IG N É , q u ia vu le m ém oire en réponse
de la dem oiselle M a ig n e , la consultation de MM. Andraud ,
C asch on et Borye , du 19 janvier 1806, et revu sa consulta
tion prem ière du 8 janvier, q u i, quoiqu'antérieure au m ém oire
de la dem oiselle M a ig n e , en a prévenu les m o y e n s, e t y a
répondu d ’a van ce,
P e rs is te , avec un nouveau degré de confiance , à penser
que le divorce prononcé entre le sieur de Pieyrolles et la dam e
C o u g u e t- F lo r a t, le 28 ju illet 1 7 9 3 , est nul de toute n u llité ,
et que les fins de n o n - recevoir par lesquelles on prétend en
écarter l’exainen , ne sont que de pures i l l u s i o n s ,
Si la dem oiselle M aigne a c r u , dans son m ém oire , ou plutôt
dans son lib elle, prouver que la modération n ’est pas son carac
tère , et que son ton n est pas celu i de la d é c e n c e , elle a par
faitem ent réussi : si elle a prétendu persuader que le tribunal
du P u y a mal ju g é , en décidant que le sieur R eyrolles est m ort
1 époux légitim e de la dame Couguet-F lorat, elle a manqué son
but.
Rien de nouveau dans c e m ém oire, qui n’ait sa réponse dans
celu i de la dame Couguet Florat et dans les consultations im
prim ées qui 1 accom pagnent. Un seul fait m érite d’être relevé:
bn veut pailer de 1 exploit d’assignation d on n ée, d it-o n , à la
requête de la dame Couguet F lo r a t, au sieur de R eyro lles, \
com paroltre et se trouver le 28 ju ille t, p a r-d ev a n t l'officier
public , pour voir prononcer le divorce d’entre les parties, lui
cU'rlarant que com parant on n o n , i l y sera procède ta n t en
absence qu’en presence (1). L a dem oiselle Maigne a-t-elle pesé
cette dernière phrase , lorsqu’elle a produit l’exploit dans le-
(1 ) V o i r les pages
3S et
uiém oire de la d em oiselle M a ign e,
�( i3 )
quel on la tro u ve, com m e une p ièce tranchante et d écisive,
pour caractériser le divorce p a r consentem ent m u tu e l? Si elle
l ’a pesée , com m ent n’a-t elle pas aperçu que cette p ièce est
au contraire une démonstration que le divorce provoqué n’étoit
qu’un divorce p our incom patibilité d ’hum eur e t de caractère?
En e f f e t , le divorce pour incom patibilité d’hum eur et de
ca ra ctè re, est le seul qui puisse être prononcé sur l’assignation
donnée par un seul des époux à l’au tre, et en l’absence com m e
en présence de l’époux appelé , d après les articles 5 et 6 , se c
tion 5 de la loi du 2.0 septem bre 17 9 2 , relative a u x actes de
l’état civil. Q uant au divorce par consentem ent m u tu e l, c e
n ’est pas sur l’assignation donnée par l’un des époux s e u l, au
jour qu’il lui plaît de fix e r, que la loi veut qu’il soit p ro n o n cé,
c ’est sur la dem ande qu’en font con jo in tem en t\es deux ép o u x,
q u i se présentent spontaném ent et d ’un com m un a c c o r d , à cet
e f f e t , devant l’officier public , en la m aison co m m u n e , a u x
fo u r e t heure q u ’ i l aura indiqués. ( Art. 5 de la loi citée. )
Ic i la p ièce produite par la dem oiselle M aigne prouve irré
sistiblem ent que les d eux époux ne se présentèrent pas sponta n em ent et sans assignation devant l’officier p u b lic , au x jour
et heure qu’il leur avoit in d iq u é s, pour requérir conjointem ent
le d iv o rce ; qu’ils ne com parurent l’ un et l’a u tre , au co n tra ire,
que sur Yassignation donnée par un s e u l, et au x jour et heure
que le provocant avoit lui-m ém e indiqués : donc elle prouve
irrésistiblem ent qu’ils ne com parurent pas pour r e q u é r i r un d i
vorce p a r consentem ent m u tu e l, mais uniquem ent pour requéiir
nn divorce pour incom p a tibilité d 'h u m eu r e t de caractère, d où
il suit que c e n’est qu’ un divorce pour in com p ^ 1!” ^ d hum eur
qui fut p ro n o n cé, et par conséquent un d h o rc e dont il est
impossible do se dissim uler la n u llité , puisqu’il fut prononcé
prém aturém ent, et sans observer les délais et les trois tpreuves
successives qu’exigeoit la loi pour ce genre de divorce. Ainsi
la p iece que la dem oiselle M aigne a produite en triomphe se
�( 14 )
retourne contre e lle -m ê m e , et ne servira qu’à m ieux assurer
sa défaite.
D
é l i b é r é
à C lerm ont-F erran d, le 21 janvier 1806.
B E R GIER,
»
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C our d'appel. — Janvier 1806
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Gaschon
Borye
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité
Description
An account of the resource
Consultations sur mémoire imprimé, pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, appelante de jugement du tribunal de première instance séant au Puy, rendu le 24 floréal an 13.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1774-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0524
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0615
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Le Puy-en-Velay (43157)
Limoges (87085)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
divorces
nullité
remariage hâtif
-
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3550d0b34a7669e7a08022e01fbe0f1b
PDF Text
Text
COUR
- i • r i'
P
R
E
D ’A P P E L
C
I
S
DE RIOM.
C
P OU R
h a m b r e s
assemblées.
BENOIT
N
o
l’aîné, B E N O I T le jeune, et
e
-,
C l a u d e ,
l
M
a
r
c
o
u
x
..
C O N T R E
et F r a n ç o i s
G u i l l a u m e
M A R C O U X ,
héritiers de: Jean - Baptiste
M A R C O U X , leur p ère , qui étoit donataire
•I
contractuel de Cl au de M A R C O U X
commun ; ledit F r a n ç o i s
père
M A R C O U X
représenté par demoiselle' G O N I N
M A R C O U X , leur mère.
. >• i *
l
F
A
I
T
.
veuve
in :
S
:i! na.
Je
a n - B a p t i s t e M a r c o u x c o n t r a c t a . m a r i a g e a v e c la dem oisele
l
Gonin ; Claude Marcoux lui; fi t donation de tous ses .biens
présens et à v e n ir, à la charge des légitimes q ui furent fixées
à 12000 francs chacune ; celle de Benoit Maxcoux , l ainé de
A
�( 3 )
.
•
tous, fut fixée à 14000 francs ', compris son titre clérical. Le
donateur'se résgrtfa la jouissance tle tons ¿¿s biens, et la somme
de 12000 francs pour en disposer a solrgré ; et en cas de non
disposition, il voulut que cette somme fût partagée entre le
donataire, Noël, Benoit le jeune, Claudine et Agathe Marcoux.
Benoit M a r co u x l'alné étoit pretre des
1 année 17 7 6 ; il vicaria
plus de d e u x ans ; et le 22 ju ille t 1779» il lut agrégé à la s o
ciété de N o t r e - D a m e : de S ain t-E tie n n e : il étoit alors âgé de
plus de v in g t-six ans.
Cette société étoit riche ; son revenu consistoit dans des rentes
provenantes de fondations , et des immeubles considérables :
chaque sociétaire se faigoit unTrevenu d’au moins i 5oo francs.
Benoit M a r c o u x , dés son. en trée, fut nommé s y n d i c , sa
cristain et vica ire : la place dé syndic lu i rendoit 5oo f r a n c s ,
ce lle de sacristain 200 fr, ,
celle de vicaire 800 francs ; ce
y,
qu i portoit son re ve n u à. 0000 f i à n c s , sur lequel il ne dépensoit
p resq ue rien , étant nourri gratuitem ent chez le sieur Georges
Thiyel', son oncle.
L'on ne peut pas constater ces faits, parce que dans les temps
anarchique? de la terreu r, ~les titres et papiers de la société
furent enlevés, des archives , et brûlés; au moins ils n’y existent
plus : c ’est ce qui résulte de la déclaration de M. le curé actuel
de cette paroisse. Mais ils ne doivent pas étonner, puisqu’il est
de nptoriété publique que lç sieur C u n it, collègue du sieur
Marcoux dans la société, y a fait des éconc^nes qui excèdent
)( 100000 francs.
''
.
. .
:
Le 29 mai 1780, Claude Marcoux père acheta une maison
sise rue Val-Benolte, à Saint-Etienne , au prix de 55 oo francs,
sur lequel il ne paya que 5 oo francs.
Cette maison étoit en mauvais état ; elle avoit un besoin
’répaVatfons 'V if ' én Tut1dressé procès verbal de somm M prisée', le >f libvèm Uk ^ 86} *
L t ^ s t e -Btinolr Mhrcôtix- i\it ch aîn é; par son 'p ère , et de
FaircM’ilïie' cè a° réparaftorrs-, Ct d’etv payer le prix , ainsi que
�( 3.;.
celui de la m aison, ’de ses deniers. Il fut émancipé le 28 mai
1781.
i' • ■' , ■
1
’ ■
L e sieur M arcoux, prêtre \ misihorâj déblai puissance pater
n e lle ’, employa .ses.économies ,,yrecoufut à la bourse de ses
amis, et paya le prix de l’acquisition i îles lods et réparations:
c’est ce iqui résulte des quittantes.)' n-,
1
L e 29 mars 1783, le sieur Claude Marcoux père approu\a
tous ces payemens, et en fit à son fils Benoît une obligation.
11 paroit que dans cet acte l’on a fait une erreur de date dans
la quittance du sieur Cizeron, que l’on a mise du i 5 janvier 1781,
tandis que réellement elle e s t d u n 5 janvier ,1782 ( 1 )• Mais
cela est assez indifférent, parce q u au i 5 janvier ;i7 8 i Benoit
Marcoux avoit bien*pu. faire des 1économies pour payer cette
somme de 2730 francs, puisqu’il étoit hors de la maison depuis
plus de quatre an s, et jouissoit depuis deux ans d’un revenu de
3 ooo francs : il avoit dès-lors un pécule^i/Æj/ cnstrense.
Le 11 janvier 1792, C laude, et Jean-Baptiste M arcoux, son
donataire, vendirent à Benoit M arcoux, prêtre, la maison dont
on vient de parler, et le.domaine de P arade, acquis par ledit
Claude Marcoux du sieur D e ve au x , le 8 mars 1768. Le prix
fut de i 65 oo francs , qui furent compensés avec 14000 francs
pour la légitime paternelle, et le surplus dévoit être imputé sur
les droits maternels.
i
1.:
Dans le même moment les parties firent un sous-seing privé,
par lequel il fut dit qu’en considération de ce que les immeubles
relâchés valoient p lu s, Benoît M arcoux cédoit et passoit quit
tance de l'obligation du 29 mars 1783, ainsi que de tout sup
plément.
)
1 »•.
ri
.
D e cet acte il résulté que Jean-Baptistè M arcoux, ainsi que
son père, reconnoissent et approuvent, et l’obb'gatidn de 1783,
et les quittances qui y sont rappelées et qui en. sont les causes.
Si elles sont un don déguisé , il est donc fait par le donateur
(1) Le sieur C izeron est m ort depuis en tou r quatorze ans.
A
2
�---------------,
( 4 ")
et lë donataire.* Quellef'absurdité ! et quelle inconséquence de
la part des héritiers de ce dernier , de vouloir critiquer et )se
plaindre du faitflniéme de'leur auteur !iq v i n ni; I
o.'
Benoit Marti o üx j- prêtre , vivoit dans >l’aisancef; ce qui luit
attira la persécution qu’il essuya<en 1 an. 2 , pendant la terreur. .
Le 5 o brumaire il fut arrêté c h e z 'lui , par ordre de l’infâme
Javogue; on lui prit io’Sjo francs et deux montres en or, ainsi
que plusieurs papiers, dans lesquels se trouvèrent ses lettres de
prêtrise : c ’est ce qui est cause q u il ne peut les représenter.
Jean-Baptiste Marcoux est décédé. Claude, son père, a survécu
à son donataire, et est ensuite mort en 1 an i o '( i ) 5 sous, le
régime des nouvelles lois.
i:
' [
Les légitimaires se sont pourvus au tribunal de Montbrison,
contre les représentans du donataire, les uns ont demandé leur
légitime fixée, une autre, ex-religieuse, sa légitime de droit,
et to u s leur portion dans la xéserve de 12000 fr. , à l’exclusion
de l’héritier.
T.
Il s’est engagé une instance dans laquelle les représentans de
l’héritier ont soutenu, i°. que la réserve devoit faire face à la
légitime de l’ex-religieuse, dont ils ne se trouvoient pas chargés;
20. qu’Agathe Marcoux, qui, dans son contrat de m ariage, s’étoit
constitué de son ch ef une somme'de 6000 francs , devoit en tenir
compte sur sa légitime , attendu que c ’étoit un don déguisé : ils*
ont succombé. S’étant rendus appelans , ils ont répudié la
donation des biens à venir , et ont soutenu que la réserve en
faisoit partie, qu’elle devoit conséquemment servir à payer les
légitimes. Leur nouveau système ayant été accueill i , à l’ex
ception d’Agathe M arcoux, qui obtint l’intégralité de sa légi
time et portion de réserve , trois des légitimaires y acquies
cèren t, et trois autres se pourvurent en cassation.
A la Cour de cassation, les représentans de Jean-Baptiste.
Marcoux ont fait valoir les mêmes moyens qu’en cause d’appel;
(1) L e 28 frim aire.
�( 5 )
ils ont été rejetés: laX ou r. a cassé 1arrêt de L yo n , et a ren
voyé les parties devant la Cour ¡d’appel de Riom.
,fi
Là on a changé de m arche, et l’on a prétendu que la réserve
étoit épu isée, i°. par le don déguisé fait à Agathe M arcou x,,
dans son contrat de mariage avec Matthieu F^rotton; 20. par un
autre don déguisé qu’ils ont cru trouver dâns l’obligation de 3780,
faite à Benoit Marcoux l’aîné par son père, et d an sja vilité du
prix du relâche du 11 janvier 1792; vilité, disent-ils, dont ce
dernier convient dans la contre-lettre du même jour, puisqu’il
y dit que les immeubles valant beaucoup plus , il cède l’obli
gation et en passe quittance; que la preuve que cette obliga
tion est un don , c ’est qu’elle rappelle des payemens faits par
Benoit M arcoux, dans un temps où il n’ayoit pas pu gagner pour
le faire.
r
L ’on est étonné d’un raisonnement aussi absurde. La Cour a
ordonné le rapport des quittances rappelées dans l’obligation,
et la preuve de l’instant où Benoit Marcoux aîné est devenu
sociétaire de Notre-Dame de Saint-Étienne.
Pour réfuter le nouveau système des appelans, il suffit de
dire, i°. à 1 égard d’Agathe M a r c o u x , femme Frotton, que tout
est d écid é, soit par 1 arrêt de la Cour d’appel de L y o n , qui a
été acquiescé dans cette partie, et qui a décidé que les 6ooo'fr.
qu’elle s’étoit constitués de son ch ef n’étoient pas un don pa
ternel ; arrêt qui a condamné les représentans du donataire à
lui payer l’intégralité de sa constitution dotale, sur laquelle le
père avoit payé une somme de 6000 fr. , et le donataire celle
de 4000 fr. ; soit par la transaction passée ensuite de cet arrêt,
le 3 i août 1807, par laquelle ils lui payent n o n - s e u l e m e n t le
restant de sa constitution, mais encore sa portion dans la réserve,
et même un supplément de légitime ;
20.. A 1 égard de Benoit Marcoux l’alné, que les payemens
rju ^ n *aUs pour son père sont sincères, et justifiés par le rapport
('s quittances; qu’ils ont été reconnus et approuvés parle père
com m un, par l’obligation de 1780 ; qu’ils l’ont été ensuite par
�(< n
ie donataire lui-m ém e, lors de la contre-lettre de 1792, puis
qu’il lui en tient compte sur le prix du relâche du môme jour :
d’où il suit une fin dé non-recevoir insurmontable, contre toute
critique.
Et peut-on être étonné qu’un prêtre qui a vicarié deux a n s,
qui ensuite, pendantdeux autres années, a joui d’un revenu
de 3ooo fran cs, par son agrégation à une riche société, ait pu
gagner 2750 francs? A l’égard des autres payemens faits posté
rieurement à son émancipation, personne n a rien à y voir; il
n’étoit plus sous la puissance paternelle ; il pouvoit emprunter
et faire tout ce qui lui plaisoit.
Pour ce qui concerne la vilité du prix du relâche, rien n’est
plus aisé que d’y répondre.
i°. D e p u is 1792 ju squ’à présent il s’est écoulé dix-sept ans,
et l’on n e s’en est pas plaint : première fin de non-recevoir.
20. L e s a ctes de re lâ ch e pour droits légitimaires ne sont pas
susceptib les d ’étre rescindés p our cause de vilité de prix.
3°. Cette action étrangère à la question soumise à la décision
de la Cour de R iom , n’est pas de sa compétence ; c’est une
action principale qui doit suivre la hiérarchie des tribunaux.
4°. Le prix est au-dessus de la valeur réelle des immeubles
relâchés ; un simple calcul suffira pour l’établir.
La maison a été achetée en 1780, 55 oo francs; il faut y
ajouter 2873 liv. 10 s . , montant des réparations , ce qui en a
porté la valeur à 8773 liv. 10 s. ; elle valoit tout au plus réel
lement , au moment du relâch e, 9000 francs.
Le domaine de Parade a c o û té , en 1768, 7800 fr. ; il étoit
affermé le 24 juin 1790 ( pour six ans) , 35 o f r . , vingt livres
de beurre, deux cents oeufs et une livre de laine; ce qui portoit
la ferme à 365 fr. n e t , et qui fait présumer une valeur réelle
de 7 ii 8000 francs. En la portant à 10000, c ’e s t , ce rtes, faire
reste de droit. Cette som m e, réunie aux 9000 f r . , valeur de la
maison f ne produit qu un total de 19000 fr. ; et le prix réel du
rtldche se porte à plus de 24 °a ° francs, comprise l’obligation
�de 178 3 , et sans y comprendre le supplément dont la renon
ciation est d’une valeur inconnue.
Le domaine de Parade a été revendu le 4 nivôse an 7 , au
moment où les immeubles avoient considérablement augmenté
de valeur, au prix de 15000 francs.
L ’on excipe de ce que Benoît Marcoux l’aîné, dans la contrelettre, a dit que les immeubles qu’on lui avoit relâchés valoient
beaucoup plus. Mais cette stipulation ne se rapporte qu’à la
valeur des immeubles relativement aux assignats qui étoient la
monnoie de ces tem ps, et non à leur valeur réelle qui est la
seule à consulter : or, il est établi qu’elle n’excédoit pas 19000f.
L é prix porté par l’acte est de 165 oo fr. ; la renonciation au
supplément valoit bien sans doute le surplus , et la cession de
l'obligation de 17 83 est véritablement une grâce de la part de
Benoît Marcoux.
Le donataire a gagné, puisqu’il a payé 19000 francs avec un
domaine qui ne produisoit que 565 fr. ; il n’a rien fourni dans
le prix ni dans les réparations de la maison achetée postérieu
rement à sa donation : il a au surplus approuvé tout ce qui
s est passé ; et n est-il pas ridicule de lui entendre opposer ses
propres faits à Noël et Benoît M arcoux le jeune, qui n’ont entré
dans aucun des actes faits avec Benoit l 'a îné? Peut-il leur op
poser quelque compensation? Il ne pourrait leur opposer qu’une
disposition formelle de la part du pére , de sa réserve, et il
n en existe point.
Signé
B enoit
M A R C O U X jeune.
A R IO M , de l’imprimerie de T HIBAUD - L andriot , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mars 1809.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Benoît, l'aîné. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcoux jeune
Subject
The topic of the resource
charges ecclésiastiques
dons déguisés
ventes
avancement d'hoirie
assignats
Description
An account of the resource
Précis pour Benoît l'aîné, Benoît le jeune, et Noël Marcoux ; contre Claude Guillaume et François Marcoux, héritiers de Jean-Baptiste Marcoux, leur père, qui était donataire contractuel de Claude Marcoux, pére commun : ledit François Marcoux représenté par demoiselle Gonin, veuve Marcoux, leur mère.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1780-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0511
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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Saint-Etienne (42218)
Parade (domaine de)
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Domaine public
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Text
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MÉMOIRE
DE
Jean
Jo seph
B égon
DE
LAR O U ZIÈRE,
Régisseur
d u haras Impérial de D e u x -P o n t s , agissant en qua
lité de fondé de
A nne
B égon
Procuration
de
F r a n ç o is
L o u is
D E L A R O U Z I È R E son père, deman
deur au principal, appelant du jugement rendu par
le Tribunal de
première
instance
séant
à Gannat,
Département d’Allier, le 25 A o û t 1809 ;
CONTRE
Les héritiers de J e a n
B a p t is t e
L u c a s , en son vivant
a v o c a t , habitant la ville de Gannat ; lesdits héritiers
défendeurs au principal, intimés.
L
E ju gem ent dont est appel est tellem ent opposé à tout principe
de droit et d’éq u ité , que son existence me paroit un
à reso u d re
il n’est pas m oins p é n ib le ,
en
p ro b lè m e
difficile
voyant au nombre
de mes parties adverses le Président du T ribu n al qui vient de me
condamner.
Après ce léger tribut payé aux sentimens q u ’inspire inévitablem ent
une injustice criante, je vais m ’occuper de l’exposé des faits. Ils sont
de nature à ne pas laisser long tems l ’opinion en suspens sur la droi
ture et la délicatesse de mes parties adverses.
A
�( 2 )*
Je suis forcé de donner une plus grande latitude au dit e xp o sé,
et de rendre com pte p our ainsi dire
de mes procédés envers mes
adversaires; vu qu’on a rép an d u , m em e accrédité, dans m on propre
pays, avant et pendant le p ro cè s, m êm e depuis le ju g em en t,
j ’étois dirigé par de perfides conseils;
que
que le silence de m on père
est une preuve convaincante qu ’il désapprouve ma conduite, et ne
peut vo ir de bon œil une telle demande de ma p art, sachant bien
q u ’il a été pleinem ent
satisfait.
Je suis curieux de savoir d ’àprès
quelle jurisprudence un père et commettant doit compte au p u b lic
des in s tr u c tio n s qu ’il donne à son fils et fondé de procuration, et
celui ci, com ptable outre l’exhibition de ses pouvoirs, des instructions
q u ’il reçoit. Com m e une telle prétention n est que rid icu le, 011 peut
se contenter d ’en rire ;
a sse rtio n
mais
il n e n est pas
ainsi de la dernière
tendante à m e faire passer pour un malhonnête h o m m e ,
capable de dem ander ce que je sais ne pas être
dû.
Je ne puis
m éconnoitre les auteurs d ’une calom nie aussi noire, puis
qu ’ils ont
excipé authentiquem ent de ce m oyen odieux en pleine
audience.
Q u ’ils apprennent d o n c,
p uisqu’ils paraissent l’ig n o re r, que si une
force majeure a fait disparoitre la fortune à laquelle je pouvois pré
tendre, rien n’est capable m êm e d ’altérer les sentimens d ’honneur qui
nés avec m oi ne peuvent s’éteindre qu ’avec m oi : p uisqu’ils veulent
qu e le p u b lic soit ju g e de ma conduite, je ne crains pas de la faire
connoitre,
F A I T S .
M .r L u ca s, avocat habitant en son vivan t la ville de Gannat', mari,père et b e a u -p è re des intim és, avoit acheté de M .r de Larouzière la
terre de la Jonch ère, il en fit le dernier payem ent en 1786. ( A ce
qu e je «rois, je ne m e rappele pas 1 époque d’une m anière p ositive,
n ’ayant vu q u ’une seule fois en passant la date de sa dernière qu it
tance. ) Q u o iq u ’il en so it, il fut ob lig é, pour effectuer le dit paye
m e n t, d ’em prunter huit m ille Livres de M ,r B onnet, chirurgien de
�(
3
)
l’h o te l-d ie u de C lerm o n t, lequel exigea une lettre de change de la
dite som m e, ayant p our échéance le
V ers la fini du mois de M ai
24 Juin 1787.
1787
M .r Lucas se transporta c h e z '
M .r de Larouzière à St. Pont distant de deux lieues et demie de Gannat, et le sollicita de lui rendre
cette somme de 8000
faire face à la lettre de change de M .r Bonnet.
L iv .
pour
M .r de Larouzière
qui avoit alors des engagemens pris pour des constructions considé
rables déjà com m encées, se trouva dans l’im possibilité de se dessaisir
de l ’argent com ptant qu ’il pouvoit avo ir, et fut forcé de répondre à
M .r Lucas par un refus;
mais ce dernier, connoissant par
expé
rience le naturel obligeant de M .r de Larouzière qui avoit contracté
depuis long tems
l’habitude de lu i rendre des services essentiels,
dépeignit avec tant d ’am ertum e sa pénible situation et les dangers
auxquels l’exposeroit le protêt de la lettre de change qu 'il avoit sous
crite uniquem ent p our le payer, q u ’il finit par obtenir du dit M .r de
Larouzière une autorisation de toucher en son nom la dite somme de
8000 L iv , des mains de M .r de S a lv e rt; mais sous la condition qu ’il
serviroit sans retenue les intérêts de la dite somme du jo u r où M .r
de Salvert cesseroit d’en être le débiteur. (C e tte somme faisoit partie
d ’une plus forte due par M .r D u to u r de Salvert qui avoit depuis pcy
acheté la terre de M ontchoisy de M .r de Larouzière. ) M .r de Larouziere xendit ainsi, à M .r Lucas le dernier terme de payem ent de la
terre de la Jo n ch ère, en rem boursant à M .r Bonnet la somme qui
avoit servi
au dit payem ent.
L e 3 Juin 1 7 8 7 , M .r Lucas écrivit à M .r de Larouzière la lettre
suivante :
« M onsieur!
m A u lieu des 8000 L iv . que vous avez bien
>» prendre
de
M .r de Salvert pour
voulu m autoriser a
acquitter la lettre de change
« de M . B o n n et, vous verrez par la lettre c i-jo in te
de M . de Sal
ir vert qu il pourra disposer de 5 oo Louis vers le 9 du co u ran t,
A a
�(
'4
)
ce qu i me fait présum er qu e vous êtes convenu , M onsieu r, avec
„ lu i de toucher 4000 L iv . Com m ent vo u lez-vou s que cette somme
vous
parvienne ; si
vous d ésirez, M o n sieu r, que je les reçoive
„ avec les 8000 L iv res, il seroit peut - etre nécessaire de me donner
„ une quittance
plaisir
de douze m ille Francs ; alors je me chargerai avec
des 4000 L iv r e s , pour vous les apporter à St. P on t. Je
„ joins encore ici m on billet tant des 8000 L iv. dont je ferai tout
,, de suite l’em ploi que des intérêts ju squau jour de St. Jean 1788»
„ en prenant à cet égard sur m on
de Salvert à partir du 26 M ai.
com pte celui que retranche M .r
“ etc.
S ig n é , Lucas.
( Cette lettre est dans les pièces au procès ainsi que deux autres,
com m e elles
entièrem ent de la main de M .r L ucas, )»il falloit que
M .r Lucas connut bien la parfaite intégrité de M .r de Larouzière
p ou r lui envoyer un billet de la somme q u ’il d ésiroit, et des intérêts
de la dite somme sans retenue pour un a n , sans avoir rien touché.
P e u t - être craignoit il que des circonstances im prévues ou des réfléxions ultérieures ne le fissent changer d’intention à son égard, vu
le refus q u ’il avoit éprouvé de prim e a b o rd ,
et crut il le lier par
cet excès de confiance, auquel il avoit cependant la certitude morale
de ne courir aucun risque ; mais q u oiq u ’il en s o it, ce billet ri (toit
nullement obligatoire, ne liait encore en rien Mr. Lucas envers M r.
de Larouzière, puisqu'il n'avait pas encore une obole en main.
L e 8 Juin 1787 , M .r Lucas reçut de M .r de Salvert la som m e de
8000 Livres au nom de M .r de Larouzière et lui donna la reconnoissance suivante :
„ Je s o u s s ig n é , ayant pouvoir de M .r de Larouzière reconnois que
•
„ M .r de Salvert m ’a payé la somme de h uit m ille L iv r e s , de la„ quelle il lu i sera tenu com pte sut ce qu il reste à payer du p rix
„ de M ouchoisy. L e présent reçu
,, de Larouzière ne serviront qu à
„ somme de h u it m ille Francs. “
et ma promesse ou billet à M .*
établir que j ’ai touché la
Signé , Lucas,
>
dite
�(
5
)
( O n voit par ce reçn i° ) que M .r L ucas, ainsi qu ’il y étoit auto
risé, prend la qualité de mandataire de M .r de L arouzière,
touche
en son nom 8000 L iv . et garantit à M .r de Salvert q u ’il lu i en sera
tenu com pte sur le p rix de son acquisition,
2 ) Il y déclare lui
m em e que ce reçu servira à établir q u ’il a touché la somme de 8000
L ivres* en
effet,
c’est alors seulement q u ’il a com m encé à etre lié
envers M .r de L arouzière,
qualité de mandataire ;
deniers,
et à devenir com ptable envers lu i, en
auparavant il ne lui devoit ni com pte ni
malgré sa promesse antérieure, dont l’existence étoit aussi
singulière q u ’inusitée. .S’il en a fa it mention dans son r e ç u , la raison
en est
bien
sim ple;
il étoit facile de prévoir que lors du com pte
final entre M. M. de Larouzière et de S a lv e r t, ce dernier exigeroit
une quittance générale par devant N otaire et que M.r de Larouziere
étant en droit de retirer
ses quittances partielles
entre les mains le dit reçu et la prom esse;
auroit à l’avenir
dès lors il étoit indis
pensable de faire connoitre que ces deux pièces n’avoient qu’un seul
e t m ê m e o b je t,
e t n ’é ta b lis so ie n t d ’engagem ent, à la charge de celui
q u i les avoit souscrites, que p our
h u it, et n o n
pour
seize m ille
quatre cent F ran cs, com m e cela auroit eu lieu sans cette précaution
que la prudence exig eo it; ainsi ce tître , tant
q u ’il a été entre les
mains de M.r de Salvert, a été dans ses intérêts et a rem p li ainsi son
objet en lui assurant son recours c o n tr e ,Mr. Lucas dans le cas où
il ne serviroit pas à sa libération envers M.r de Larouzière; mais il
a cessé entièrem ent
son effet
à l ’égard de M.r de S alvert, à dater
d e l’époque postérieure, où M.r de Larouzière le prenant pour quit
tance a consenti
existe au pied
au
dit M.r de Salvert la
quittance générale qui
de son contrat d ’acquisition; . dès lo rs il n a
conservé d ’effet que dans l’intérêt de M.r de Larouzière;
il est la seule
plus
bien p lu s,
et unique preuve que M'»* L u c a s a touché des fonds
appartenants à M.r de L arouziere; sans lu i, il seroit im possible au
com m ettant de fa ire . rendre com pte à s.on mandataire ; et tant qu il
�( 6 )
«c
entre les mains de M.r
L u cas; -il ne p e u t-ê tre
de, L aro u ziere, il a force contre M.r
annullé que par une qu ittan ce, par une
preuve authentique du payem ent to ta l.)
Passant de cette ' lo n g u e , mais indispensable digression à la co n ti
nuation de l’exposé des faits, je vais faire mention d ’une autre lettra
de M.r Lucas,
à M.r de L arouzière,
■voici la teneur :
.
en date du 6 Mai 1788 , dont
„ M onsieur !
„ Retenu ici par 1 état triste de ma fille , j ’envoie à St. Pont m on
„ fils cadet q u i vous rem ettra i ) une lettre de change sur le Sieur
C um et négociant c o m m is s io n n a ire à Auvaise; il faudra avoir atten
tion de mettre votre signature deux doigts au dessous de m on ordre.
2)
400 L iv. argent,
montant de l’année d ’intérêts
que je
vous
d ois, à écheoir le jo u r de St. Jean baptiste prochain. 3) U n billet
de 63 oo L iv. payable une année après pour le capital que je vous
reste et l ’intérêt; au m oyen de quoi vous voudrez b ien , M onsieur,
„ donner au porteur le billet de 8400 L iv. que vous) avez de m oi;
,, je ma félicite d ’avoir pu répondre à votre désir, en obtenant une
„ lettre de change; elle doit être acquittée sans faute le dernier de
ce m o is, parce qu’à L y o n , on n’admet point le délai de faveur de
,, d ix jo u rs, etc. “ Signé , Lucas.
f
C ette lettre ne prouve autre chose que l’envoi de la prem iere année
d ’intérêts
«ans retenue , de la somme principale de 8000 Livres
et
d ’un p ayem ent, à com pte de qooo Livres par une lettre de change
q u i
réduit le principal resté dû à 6000 L iv . et les intérêts à 3 oo L iv .
1 L e 22 A v ril 1 7 8 9 , ainsi que la veuve de M.r Lucas-Téiablit dans
sa défense
ce q u i ne pouvoit lüi être contesté, Madamé dë Larou
ziere demanda à M.r Lucas
échues pour
3 00 L iv. q u ’elle a reçues qu oique non
une année ¿'in térêts, depuis le 24 Juin
1 7 8 8 'jusqu’à
pareil jo u r de l’année 17^ 9;
^
f
- A u mois de Septem bre*!* m ê m e 1'a n n é e 1789V la révolution com -
�' -
• .
(
7
}
mençant à éclater, la fam ille de Larouziere p rit le parti de s’expatrier
et à été contrainte de rester nom bre d ’années dans les pays étrangers.
L e 26 Mars, sans autre date (mais on voit que c’est forcém ent le
56 Mars 1 7 9 0 )
M .r Lucas écrivit à Mr. de Bonneval beau frère de
Mr. de Larouziere et chargé de ses intérêts en France la lettre suivante.
M onsieur!
„ Je ne demande pas m ieux que
Paris le 26 Marsde m e libérer des 63 oo Livres
» restées dues à Mr. de Larouziere sur le p rix
il venant ici au mois de Décembre 1789 j ’y
de la
Jonchére. E n
apportai cette
tom m e
» dans l’intention de m e concerter avec Mr. de B o n a l, pour la faire
,, p arven ir, à sa destination par la voie d ’un banquier de P arisj je
» pris en
conséquence des mesures relatives avec Mr. Cou teux de
9« C anteleux ; mais deux lettres écrites à Mr. de Larouziere sont de-,
„ meurées sans réponse. E lle contenoient invitation d'envoyer à une
„ personne de confiance 1) m on b ille t, s) une procuration de lui et
,, de M adam e ;sa m ère, à l’efFet de m e
passer .quittance finale par
„ devan t N o ta ire ; n’en ayant qu'une sous signature privée. M'a tran^
„ quillité est attachée à cette dernière précaution, M r. de Bonal itteste-
„ roit au besoin tout ce que j ’avance. “
„ V o u s demandez aujourd’h u i, M onsieur la délivrance des 63 oo
,, L ivres qu oique vous ne soyez point saisi de tna promesse. Mr. de
v Larouziere auroit d û au m oins la jo in d re à la procuration qu ’il
m vous a laissée ou envoyée; cependant, com m e je ne ve u x p as avoir
»> l’air de d élayer, que d ’ailleurs les circonstances
peuvent rendre
» nécessaires cette somme à Mr. de L arouziere, j'offre de la com pter
« à la personne que vous chargerez de la recevoir i c i, en vertu de
” ^ procuration de M r. de Larouzihe et de la vôtre ; à condition ,
” sous votre bon p la isir, que vous vous obligerez à rapporter sous
« àeux mois tant mon billet qui dès à présent sera annuité, qu'une
v procuration de M r. et de Madame de Larcuzihe la mire pour
îj pflsstr la quittance finale que j e désire voir au pitd dt mon contrat
�(
8
V
„ d'acquisition.I Encore une f o i, ma tranquillité, celle de m a famille
„ exigent cette mesure qu'elle sollicite de moi avec raison ; ( * ) car il,
„
est
t o u j o u r s
d an gereu x-d e laisser en blanc un contrat d# prés de
„ quatre vingt m ille L iv r e s , j ’espère , M onsieur, que vous ne ver„ rez rien autre chose, dans ma conduite qu ’une envie de me mettre;
„ en règle; èn tous cas, je serais bien fâché que l’o n ^ e n sâ t autre„ m ent; n ’ayarit rien tant à cœur que de donner à Mr. de Larouziere
„ les preuves d ’un vrai a tta c h e m e n t et à vous M o n sieu r, les m ar„ ques
d ’une entière confiance.
J’ai l ’honneur
„ L ucas, rue de Bussy , hôtel de g
; (C e tte
lettre
faisant m ention
r
e
n
d ’être etc.
a
d
e
Signé
.
du m ois^de D écem bre 1789
é v id e m m e n t postérieure, et ne parlant que d es
^
est
intérêts d’une anneér
en spécifiant la somme de 63 00 L iv. resté due paroit
être forcé
m ent du 26 Mars i 79 °> e^e prouve d’une manière indubitable que
Mr. Lucas n ’avoit rien changé dans ses rapports d ’intérêts avec
M r.
de L arouziere, lors de sa sprtie de France et. com m e il étoit décédé
à l’époque de la rentrée en France de la fam ille de L aro u zie re , il
n ’auroit pu se libérer que par m ain tierce;
dans ce cas, il devrait
exister des preuves de sa libération accompagnées de toutes les p ro
curations et engagement q u ’il demande si positivem ent dans sa lettre;
d ’ailleurs, com m e dans la dite lettre il e x ig e , à plusieurs reprises et
de r ig u e u r , pour condition de sa libération une quittance finale au
pied
('•>) C ’ est cette même fam ille, aujourd’hui si ignorante, sur la ma
nière dont il a opere sa pretendue lib éra tio n , contre laquelle je plaide.
11 paroit que c ’est elle qui a empeche' Mr. Lucas de se libérer dans le
tems. Ce n’est donc pas un mal qu’elle so it punie par 011 elle a peche',
et qu’elle paye aujourd’hui les intérêts de ses conseils; car on v o it que
Mr. Lucas livre' à son propre mouvement a toujours été
rendre au de'sirs de Mr. de Larouzière.
dispose
à se
�(
)
9
pied de son contrat d’acquisition, passée en vertu d ’une procuration
de Mr. et de Madame de Lorouziere la m ère. Il est aisé de vo ir si
la dite quittance finale par devant N otaire, autre que celle sous sig-
nature privée mentionnée dans la
dite lettre se trouve au pied du
co n trat, ou m êm e séparément. Si elle a eu
présom ption
lie u , c’est une
forte
en faveur de la libération; dans le cas contraire, elle
€st plus que douteuse. )
C e qu ’il y a de certain est que la promesse de Mr. Lucas a été
adressée des pays étrangers à Mr. de Bonal évêque de Clerm ont habi
tant alors Paris ainsi
effectuât,
soit
que Mr. L u c a s , pour que le payement s’en
par l’effet d’un besoin de fon d ,
soit d’après invita
tion de Mr. Lucas, com m e il le dit dans sa lettre où il annonce que
deux écrites à cet égard sont restées sans réponse. Le seul résultat
de cet envoi a été la perte de la promesse.
M r. de B onal, qu i a écrit à Mr. de Larouziere dans l ’intervalle de
sa sortie de France à son décés à M u n ic h , ne lui a parlé ni du paye
m en t, ni m em e de la promesse. N e T a v o it-il pas re çu e ? le peu de
sûreté des correspondances dans ces tems orageux rend la chose facile
à croire. J’ai fait à plusieurs reprises
des tentatives p our savoir si
elle n’étoit pa» restée dans les papiers de ce respectable prélat. J’ai
m êm e depuis fait prendre des inform ations à M unich. Toutes me3
recherches ont été vaines.
A u retour de toute la fam ille en France,
m on père me ch argea
com m e l’aîné des ses enfans d ’exam iner si parm i les ruines de notre
ancienne fo rtu n e,
il ne seroit pas possible d ’en rencorítrer
quelques
débris susceptibles d e tre utilisés; une telle occupation eut été par
frop déchirante pour
cet infortuné pere de d ix enfans.
R evêtu de sa procuration, mon prem ier soin a été de me mettre
en mesure de retirer ses papiers du lieu où il me dit les avoir pla
cés^ en dépôt. J en ai reçu l’envoi à deux reprises différentes m em e
éloignées lu n e de 1 a u tre , ainsi que je pourrois
le p ro u ver, si be-*
li
�( 10 )
soin étoit, ,par les lettres de voiture que j'ai conservées.* ils étoient
en outre dans le plus grand désordre.
D ans le prem ier e n v o i, je trouvai la troisième lettre de Mr. L a
cas du q 6 mars présum é 179 °* commençant ainsi : „ je ne dem ande
„ pas m ieu x que de m e libérer des 63 oo liv. resté dues à Mr. de
Larouzière
m uni de cette pièce je me rendis chez M. L u c a s,
président du T rib u n al de prem ière instance séant à G annat, gendre
et l ’un des héritiers du ch ef de
sa fem m e, de Mr. L ucas d éb iteu r;
Mr. le président après en av*oir pris
lecture s’absenta un instant et
m ’apporta en r e v e n a n t le contrat d’acquisition de la terre de la Jonchère revêtu au bas
de la quittance
finale sous signature privée
de Mr. de Larouziere m on pere.
Après des r é fle x io n s de part et d’autre, il finit par m e dire que
sans doute cette lettre contenoit une erreur de la part de son beau
p ère ; que la quittance qu’il me présentoit prouvoit indubitablem ent
qu ’il n’étoit plus rien dû
enfin
que cette somme de
à m on père sur la terre de la Jonchère;
63 oo liv . resté due provenoit nécessai
rem ent d ’un autre titre , et q u ’aussitôt que je le lui présenterois, i l
s’ empresseroit d ’y contribuer pour la quottepart de sa fem m e. R ien
de m ieux.
L e second envoi des papiers m ’apporta les d eu x
autres lettres,
mais point de titre. M r. Lucas exigea la présentation de celui dont
elles font m ention. D es circonstances fâcheuses et bien connues -m’ont
mis dans le cas d etre plusieurs années sans avoir de com m unication
avec m on père. N om m é régisseur du haras im périal de D eu x-P o n ts,
je le v is,
p our la prém ière fois depuis cette époque, en m e ren
dant à m on poste ; et il m e transmit sur cette affaire tous les renseignemens que sa m ém oire p u t lui fournir.
Vers le mois d’Août 1808, un
procès m ajeur,
qu i nécessitoit
p résence, m ’appela dans m on Départem ent. Je profitai de cette
occasion poor v©ir ’si je ne trouverai! pas, chez M. M.
4e
Salvert
�(
n
)
fils, des renseignemens sur la créance de Mrv Lccas. Q u e lle fut mà
surprise en découvrant qu e m on p ere, lors de la quittance général«
que je vis dans le contrat d ’acquisition de la terre de M o n tch o isy,
n ’avoit pas retiré ses quittances partielles parm i lesquelles se tro u vo it
le
tître
originaire
de
la créance,
savoir la reconnoissance de M r.
Lucas. Ces Messieurs ne firent aucune difficulté de m e remettre cette
pièce
q u i depuis long tems n’étoit plus
dans leurs intérêts et qui
n ’avoit plus d ’effet que dans celui de m on pere à qui appartenoient
les fonds versés entre les mains de M r. Lucas.
Je m e rendis alors accompagné d'un têftioill auprès de M r. Lucas
le président avec le tître
et les lettres,
ne doutant nullem ent qu il
ne fût frappé com m e m oi du rapport parfait qui existe entre tou
tes ces pièces;
mais je fus prom ptem ent déçu de m on espoir par
une réception peu honnête. Il m e déclara q u ’il ne vo u lo it rien vo ir
ni lire ,
que ces lettres n’étoient q u ’une
présom ption sans avantage
p ou r m o i, qu e le tître dont je lu i parlais n’étoit que dans l’intérêt
de M r. de S a lv e r t , et n u lle m e n t d an s celui de m on p è r e ; que tant
que je ne rapporterais
pas celui
m entionné dans les
lettres,
je
n’avois rien à espérer; enfin, qu ’il m e prévenoit une fois p our toutes
q u a moins d’y être contraint par les voies de d r o it, il ne payeroit
pas sa portion d ’héritier.
Il
est facile de concevoir com bien je fus m écontent du peu de dé
licatesse de ce prém ier magistat du trib u n a l, et surtout de m e voir
un procès à soutenir sur son P alier; néanm oins il fallut b ia n y sous
crire, et après m ’être assuré que je ne tirerais pas un m e ille u r parti
de ses cohénfiers dont il
en conciliation
au bureau
I M r. L u ca s, héritière
est le
de
co n seil, *je c o m m e n ç a i p ar
paix
p our m o itié ,
la
veuve
et
de la su ccession
com m une
de »
de son mari,
ï e n étois pas assujetti de rigueur à cette fo r m a lit é , vu que 1 article'
49 du code de procédure en dispense „ lorsque les demandes sont>» formées contre plus de deux parties eijcore qu elles ayent le lUeme
B 3
�(
12
)
intérêt. “ Maïs il étoit à croire que
Madame Lucas respeCteroiî
les intentions de son mari en reconnoissant son écritu re,
poseroit à, un p rocès si peu
sa fam ille.
A u jo u r f ix é ,
et s’op -
dans le cas de faire honneur à toute-
,
.
,
M adame L u cas, soit qu ’elle fût m alade, comme-
elle le fit d ire, soit
qu ’on l’ait em pêché de com paroitre, fut rem
placée par sa ' f i l l e , femme de M r. Lucas le président, la m êm e q u i
étoit malade lors de la seconde lettre de son père : je savois qu ’elle
jo u it de la réputation d’être habile en affaire, et je m e tins sur mes
gardes.
Après
u n assaut de politesse de part et d ’autre,
elle m it
tout en œ u v re , p ou r m e faire croire à la libération de son p ere ,
sans c e p e n d a n t m ’en donner
la plus légère preuve. V oyan t en Ma
dam e Lucas tout l’extérieur de la bonne fo i, je regardai com m e utile
' de chercher à lui faire connoitre la vérité , croyant à la possibilité
q u ’elle l ’ig n o râ t, et je lui com m uniquai, à l ’appui du titre de 8000ü v . sur lequel étoit fondée ma dem ande, les deux prém ières lettres
de son p e re , dont elle me dit reconnoitre l ’écriture; mais je trouvai
prudent de garder par devers m oi la troisième p our porter le coup
d écisif aux derniers instants, dans le cas où l’on parviendroit a don
n er un certain degré de vraisem blance à une lib ératio n , en déterm i
nant une époque. Bien p lu s, je mis sous ses y eu x un petit registre de
m on pere sur papier ord in aire, dans lequel est ouvert chaque article
de
ses
affaires actives et passives,
et je lui fis lir e , à l’article de
M r Lucas r e la t i f à la Jonchère, la phrase suivaute, à peu près dansce» termes :
Mr. Lucas redoit un principal de six mille livres , les
intérêts sont payés jusque s et compris la S t-J ea n 1789 ; je la p ria i
d ’observer
que cette, phrase est écrite en entier de la main de ma
f mire décédée 'le cinq Juillet 17 9 2 hors de France .
Elle m e dit alors-
(ju’d lc reconnoissoitbien 1 ecnture j rn«us c^uc néanmoins clic persistoiç.
à m’assurer que son pere ne devoit plus rien. Je la priai de m’en don
ner le moindre indice, soit par une lettre, soit par un registre, en,.
�(-.3
)
un m ot par la m oindre écriture de la main d* son pere. E lle me
répondit q u ’il n’existoit rien qui put en ju stifier; mais que néanmoins
cela étoit ainsi.
V oyan t alors com bien je m ’étois abusé, après avoir porté encore
la complaisance et les égards au point de lui donner une copie , de
ma m a in , de la reconnoissance sous seing privée de son p ere,
je
rom pis la séance, que je terminai par la signature du procès verbal
de non conciliation.
Les pièces furent remises à un avo u é, et je repartis ensuite p our
rejoindre m on poste à D e u x - ponts.
E n passant par P aris, je voulus encore me rendre chez M r. Lucas
m édecin des eaux minérales de' V ic h i, fils et le troisième des héritiers
de
M r. Lucas d éb iteu r, p our voir s’il seroit plus raisonnable que
les autres, et lu i exposai le bu t de ma visite. 11 me répondit que je
le remettais sur la v o ie , en lui disant que la promesse avoit été en
voyée à M r. l’évêque de C lerm o n t; q u ’il étoit alqrs avec son p ere ,
et qu ’il se r a p p e lo it fo r t bien que la s o m m e avoit été rem ise à un
grand vicaire de ce prélat ; Je lui en dem andai le nom q ü ’il devoit
savo ir, étant du mêm e diocéce. Il m e répondit que n o n ; mais q u ’il
étoit certain que ce grand vicaire avoit reçu la som m e et l ’avoit fait
passer à ma grand m ere en Suisse ; puis se reprenant il m e dit ; je
m e trom p e, c’est à Constance: com m e ma grand m ere n ’a jamai*
v u ni la Suisse ni Constance, et q u ’elle n ’a pas quitté la famille hors
de F ran ce, tant qu ’elle a v é cu , il m ’étoit difficile d’ajouter foi à de
pareilles co n tes, auxquels il avoit eu le tem& d ’être préparé par son
beau frère,
en venant au x eaux de V ic h i les années précédentes;
d ailleurs démentis- par le défaut de présentation de toutes les pro
curations, engagem ens, et quittances exigées dans la troisième lettre
de M r. L ucas, son pere. V o y an t que je ne m ’étois pas m ieux adressé
à Paris qu ’à G annat, j e
Ççurs au procès, commencé.
m e retirai bien décidé à laisser un libre
�(
14
)
M aintenant j’apprends que le *5 A oût 1809 la cause a été plaidée,
v
et que mes parties adverses auxquelles on avait notifié avant l’au
dience la troisièm e lettre de M r. L u cas, loin d’en paroitre surp ris,
n ’en ont tenu aucun com pte, n ’ont pas même cherché à établir la
m oindre q u ittan ce,
ni preuve réelle de libération; je vois que Mr.
le président du trib u n a l, qui de toutes manières se trouvoit dans
son centre et ne peut ignorer que trop souvent par un abus de lois
faites pour réprim er par fois le d o l, mais toujours pour protéger les
créances légitim es, la form e em porte le fo n d , à fait prendre
avoué une to u r n u r e
par son
de chicane dont la mauvaise foi fait rougir en
m êm e tems que son peu de solidité fait p itié , en avançant par son
organe que le second billet de 63 oo livres de Mr. Lucas substitué à
celu i de 8400 livres opère une novation qui établit suffisamment la
libération des défendeurs;
néanmoins un m o y e n , aussi contraire à
tout principe dans l ’espèce présente, qu ’il est o d ie u x , à p ré v a lu , et
le tribunal a ren d u , à la satisfaction de son p résiden t, le jugem ent
su ivan t, qu ’il faut avoir sous les y e u x p ou r y croire. L e voici tel
q u ’il vient dej: m ’être transmis par m on a vo u é, en me faisant dire
q u ’il lui a été signifié le q3 O ctobre.
Attendu qu ’il est prouvé au procès que Mr. de Larouzière pere
,
a consenti que Mr. de Salvert son débiteur com pte au Sieur feu
L u cas, m a ri, père et beau père des défendeurs une somme de
8000 livres tou rn o is, à com pte de ce qu’il lu i devoit.
A tte n d u
qu ’il
est également prouvé que le Sieur feu Lucas a
touché cette somme du Sieur de Salvert auquel il en a d o m ié 'u n e l
„ reconnoissance.
Attendu que cette reconnoissance donnée par le Sieur feu Lucas
à M r. de Salvert ne l’a été que dans l’intérêt du dit Sr. Salvert
„ envers M r. de Larouziere.
„ Attendu q u ’il est également prouvé ’que précédem m ent à cette
reconnoissance le dit Sieur feu Lucas |avoit consenti un billet à
�( i5 )
*, Mr. de Larouzière père de 8000 livres tournois ensem ble les inté„ rets ;
que dès lo r s , ce b illet dans l’intérêt du Sr. de Larouzière
père et ( il m anque un m ot c’est sans doute celu i: antérieur) à la
„ reconnoissance dans l’intérêt du Sieur de S alvert, avoit
un seul
m et m êm e objet.
v Attendu m êm e
q u ’il est établi au procès que le payem ent de
»» ce m êm e billet a été Fait par le Sieur feu Lucas en consentant une
» lettre de change de 2000 livres qu ’il lui a cedée sur un négoeiant
m de L y o n , et un billet
q u ’il lui souscrivit de 63 oo livres tournois,
*» y com pris les in térêts, et que par la novation qu i s’est opérée
«> les défendeurs ont suffisamment établi leur libération.
»> Le tribunal par jugem ent
en 1 ,er ressort déclare le dem andeur
%, mal fondé dans sa demande et le condam ne aux dépens taxés et
h liquidés à la somme de soixante quatre Francs
„ times envers
la partie
vingt trois Cen-
de M .e M an cel, à celle de quatre vingt
s* d ix huit Francs envers les parties de Farradèche V ia le tte , en ce
,,
n o n com pi-is le Coust et sig n ific a tio n du présent jugem ent auquel
„ il est pareillem ent condamné. “ Fait etc.
A in si, sans avoir exa m in é, à ce q u ’il p aro it, si la base sur laquelle
est fondée cette prétendue novation est solidem ent établie, ni si cette
base m êm e solide peut opérer n o va tio n , des magistrats ont déclaré
les défendeurs valablem ent libérés sans faire preuve de payem ent et
m a demande m al fon d ée, ne craignant pas d ’augm entsr encore la
perte de m on
père par sa condamnation aux dépens. En vérité les
bras en tom bent; mais m e tournant aussitôt du coté de la cour d ’apP el de R io m , dont l’intégrité a toujours été à l’abri m êm e de toute
suspicion,
je vais passer, sans autre réflexion à cet égard, à mes
moyens de défense, sachant bien que justice sera rendue à qui elle
appartient.
t Mais auparavant, pour dévoiler entièrem ent l’infam ie des auteurs de
1 atteinte grave portée à m a répu tation , je vais term iner 1 exposé des
�(
16
)
faits par la Copie de la lettre que j ’ai reçu de m on p e re ,
depuis h
perte de son procès.
„ Je reçois, m on cher am i, la lettre par laquelle tu m ’annonces la
„ perte de notre procès contre les héritiers Lucas ; j ’en suis peu surZ p ris , d ’après la teneur de celle que tu me transmets, et qui prouve
” q u e c ’é to it un parti pris d ’avance; mais ce qui m ’étonne de la part
” de nos adversaires, c’est q u ’ils n’y aient pas mis plus d ’adresse,
” car c’est une insigne gaucherie d ’avoir excipé de
”
une cause ou l’on
m on silence dans
n’agissait q u ’en vertu de ma procuration. Ils
”, ont ergotté sur ce q u ’elle n’est pas ad boc, comme s’ils avaient pu
” îrrnnrpr
cuie la position dans laquelle je me trouvais quand cett*
affaire c o m m e n ç a exigeoit que je te confiasse la totalité de nos in
térêts, et que ma
situation actuelle n ’étant rien moins qu ’une li
berté entière, j’ai dû te laisser le soin de term iner des affaires que
tu avais commencées. Com m e j ’im agine que tu appeleras sans délai
„ de ce jugem ent non moins ridicule
qu ’in iq u e , je ne doute
pas
„ que le tribunal de R io m , en me réintégrant dans mes d ro its, n©
„ répare aux dépens des héritiers L ucas, l’injur» q u ’ils ¿ont si gra„ tuitem ent et si gauchement faite.
„ A u x termes ou j ’en étais avec L u ca s, et d’après la m anière dont
M j’en agis lorsqu’un pressant besoin le fit recourir à ma bourse,
je
„ devais croire qu’il suffirait à ses enfans et particulièrem ent à leur
m è re , qui connoissait toutes les affaires de son m ari, que j’énon
çasse ma créance pour q u ’ils s’empressassent d’y faire honneur; mais
„
p u i s q u ’il
en est tout autrem ent, il est bien force de recourir à des
„ m oyens rigoureux.
Je n’ai plus le billet que Lucas m e laissa en échange de la lettre
que je lui rem is, et en vertu de laquelle il alla toucher les 8000
livres dont il avait besoin chez Mr. D u tour dépositaire
de mes
„ fonds : ces Messieurs n’ont snrement pas besoin que je leur dise
„ .comment et pourquoi je n'ai plus es p ap ier, de mêm e que je lea
dispense
�( *7 )
„ dispense de m ’apprencire com m ent et pourquoi Mr. Lucas n’a du
•» perdre aucun
des siens; mais ayant eu le bonheur de recouvrer
>, ma lettre à Mr.
,, re m it,
D u tour ainsi
que le billet que Mr. Lucas lu i
en recevant la som m e, et ayant produit l’un et l’a u tre ,
55 je crois avoir établi suffisament ma créance pour qu’elle ne puisse
>j être éteinte que par la restitution de la dite somme ou par une
s> quittance; il n’y a pas de qu ittance, donc il faut de l’argent.
„ Ces Messieurs disent, sans en fournir de preuve ni m êm e aucun
», docum ent, que leur père m ’a payé, assertion non recevable contre
» un titre constitutif d'une créance; d ’ailleurs, je
leur oppose par
« surabondance une réponse de Mr. Lucas, à q u i, pendant que j ’étois
î* loin de ma p atrie, on demanda la som m e, et qui écrivit ne vou« loir payer q u ’autant que l’on rem pliroit
une condition qu ’il in-
n diquait; cette condition
étrangère à l’affaire en
est entièrem ent
» question; mais n’ayant pas été rem p lie, elle devient une preuve de
» plus que la somme est encore due. E n fin , et dans la supposition
,, que Mr. Lucas m ’ayant payé aurait égaré la quittance q u ’il n ’eut
,, pas m anqué d ’ex ig er, à qui ses héritiers persuaderont ils q u ’il fût
„ hom m e à laisser entre les mains de M r. D u to u r et ma lettre et le
„
billet de sa main
titres vraim ent constitutif de sa dette envers
» m oi; je suis indigné de la mauvaise foi de ces Messieurs.
„
Q u an t à 'la prétendue délégation qui selon eux opère novation
}> du titre, c’est une astutieuse subtilité dont j ’abandonne la discussi sion,
à M n D ’apchier,
q u i,
j ’espère, voudra bien se ch a rg e r
s? de cette nouvelle affaire ; du m oin s, je
le désire, ayant la plus
j) grande confiance en son honnêteté et en ses lum ières, vois d o n c,
» mon bon a m i, à m ettre au plutôt cette affaire en règle, afin que
5> nous obtenions prom pte justice. A d ie u , embrasses ton (rare pour
55 m o i, et q u ’il te le rende. Je vous renouvelle l’assurance de ma
» tendresse. “
O n voit qu il existe dans la lettre de m on pere une application
C
�(
iS
)
de la novation qu i n’est p a s ju ste. Cela tient à une erreur que j ’ai
com m ise, en lu i rendant com pte de la perte du procès avant d ’avoir
le jugem ent. Cette erreur est d ’aulant plus pardonnable que le prem ier
attendu du jugem ent tend à faire porter la novation sur ia déléga
tion • A u reste, elle n’est pas plus excusable, moins absurde d’une
m a n iè r e q u e d e l’autre.
Com m e
on seroit peut être encore capable de supposer la dite
lettre controuvée, j ’enverrai l’original en même tems que ce m ém oire,
afin q u ’il soit jo in t au x p ièces,
et qu’on ait la facilité de vérifier
l’écriture et la signature.
m
o
y
e
n
s
.
Cette cause est très simple. La présentation des pièces est tin m o
yen ir r é s is tib le ; mais puisque j ’ai affaire à des adversaires de mauvaise
f o i , j e vais lu i donner un
plus grand développem ent, que je divi
serai en quatre questions à résoudre; suivant le rang des objections
q u ’ils m ’ont faites, lesquelles sont faciles à réfuter.
1) Les trois lettres d e M .r Lucas ne fourn issen t-t-elles qu’une pré
som ption vaine?
2) L e titre présenté n’eat-il que dans l’intérêt de M .r de S alvert,
et nullem ent dans celui de M .r de L arouzière?
3) L a base sur laquelle est fondée la prétendue novation est-elle
»olidement établie?
4) E n fin , dans le cas où elle seroit suffisamment appuyée et passeroit p our constante; opère - 1’ - elle novation ?
P R E M I È R E
q
u
e
s
t
i
o
n
.
Les trois lettres de M .r Lucas ne fournissent elles q u ’une présom p
tion vaine ?
Je prétends que ces lettres fussent - elles seules et non accompagnéesdu tître constitutif p résen té, suffiraient p our prQCurer à M .r de La-
�(
roüzière le payem ent de ce
19
)
qui est resté dû sur sa créance, et je
fonde1 mon_opinion sur les lo ix.
En effet,
le Code N ap oléon ,
1
après nous avoir d it , article 134g ,■
que ,, les présomptions sont des conséquences que la loi ou le m a,, gistrat tire d'un
fait connu à un fait inconnu “ , nous apprend
art. 1 353 que „ les présomptions qui ne sont point établies par les
1, lo ix sont abandonnées aux lum ières et à la prudence du m agistrat
„ qui ne doit admettre que des présomptions graves, précises, et con„ cordantes, et dans le cas seulement où la loi admet les preuves
5, testim oniales,
„
à moins que l’acte ne soit attaqué pour cause de
fraude ou de dol. “
A van t l ’application de cet article, nous voyons, art. 33 47 , que
,, les preuves testimoniales sont admissibles lorsqu’il existe u n com„
m encem ent de preu ve
par écrit “ et q u ’on appêle
„
acte par écrit qui est émané de c e lu i,
ainsi’,,
tout
contre lequel la dem ande
,, est formée ou de celui q u ’il représente, et qui read vraisem blable
,, le fait allégué “ et art. 134 8 , qu ’elles sont encore adm issibles ,, au
,, cas où
le créancier a perdu
„ littérale, par suite d’un
le
tître qui lui servoit de preu ve
cas fortuit, im p ré v u , et résultant d ’une
,, force majeure. “
Faisons maintenant l’analyse des lettres : on v o it, 1) q u ’elles sont enentièrem ent de la main du feu débiteur ; Elles sont reconnues pour
telles par ses
Héritiers ; donc il ne peut exister ni fraude ni dol.
2) que la prem ière déterm ine l’origine de la créance, sa q u o tité , et
fait m ention form elle
de l’existence d ’un b ille t, co n te n a n t le prin
cipal et les intérêts pour un a n , eu un m o t, elle est pour ainsi dire
elle mêm e un billet sous signature privée. 3) que la seconde, suite
de la prem ière, fuit m ention du payem ent sans retenue de cette pre
m ière année d’intérêts et d’un à com pte sur le p rincipal,
et que
faisant elle m êm e le décom pte du principal restant avec 1 année fu
ture d intérêts, elle déterm ine la s o m m e exacte. 4) Q u e la troisièm e
C 2
�(
20
)
exige pour le payem ent de la somme q u e lle déterm ine com m e resté
due
et la m êm e que celle portée dans la lettre précédente, une
condition à rem plir. Certainem ent je défie de
plus précise,
trouver
de preuve
plus concordante, et moins suspecte, puis q u e lle est
fournie par le débiteur défunt.
Enfin le billet m entionné a été perdu par l’envoi qu ’en a fait celui
q u ’u n e 'fo rce bien
m ajeure assurément, la révolution, em pêchoit de
se présenter sous peine de la vie; je demande à tout hom m e intégre
et droit s’il peut exister jun cas plus susceptible de l ’application des
articles précités du co d e, et si tout magistrat peut raisonnablement
tirer de ces lettres d ’autre co n s é q u e n c e que la vérité pleine et entière.
Savoir q u ’il a été dû par M .r Lucas â M .r de Larouzière ,
un prin
cipal de 8000 livres, q u i l ’année d ’après a été réduit à 6000 livres
par le payem ent de 2000 liv re s, m oyennant une lettre de change
sur L yo n ; que les intérêts des deux premieres années ont été acquit
tés sans retenue ; enfin que le dit principal çt les intérêts sans retenue
depuis le 24 Juin 1789 restent à payer en deniers ou quittance.
C om m ent, d ’après ce, peut on traiter de vaines des présomptions
si graves qu ’elles sont admises par les lo ix , et font d ailleurs par elles
m êm e preuve irrésistible?
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
L e tître présenté n’e st-il que dans l ’intérêt de M .r de S a lv e r t, et
n u lle m e n t dans celui de M .r de Larouzière ?
C o m m e n t p e u t- il se
ses
mais encore un
faire que non seulement mes parties adver
tribunal
se perm ettent
d’avancer que la dite
reconnoissance n’a été donnée que dans l’intérêt de M .r de Salvert?
Sans d o u te , c o m m e je l’ai déjà d it, elle étoit dans son intérêt pour
lui procurer son r e c o u rs contre qui de droit en cas de contestation ;
mais
elle n ’y étoit q u ’accidentellem ent. Je demande quelles sont les
personnes ;qui y figurent? M .r de Salvert payant , M ,r Lucas recevant
�(
au nom
de M r. de Larouzière
21
)
et prenant la
qualité de fondé de
p o u v o ir, et M .r de Larouzière à qui les fonds appartiennent. N ’estil pas inconcevable que ce soit précisément celui à qui appartiennent
les fonds qui soit déclaré ne pas être partie intéressée dans cet acte,
et ne pas être en droit de s’en servir pour se faire rendre com pte
de ses deniers par celui qui les a touchés en son nom ?
U ne telle assertion est aussi fausse que ridicule; car c’est précisé
m ent l’inverse; et il seroit plus vrai de dire, que ce tître ne regarde
qu e M .r de Larouzière; car M .r de Salvert, nullem ent tenu d ’entrer
dans les conventions du mandat en vertu du quel il a p a y é , étoit à
coup sur bien e n d r o it, aussitôt après avoir satisfait M .r de Larouzière
dans la personne de son fondé de p o u v o ir,
de lu i dire; je
n’a i, ni
i*e veux rien avoir à dém êler avec M .r Lucas; je ne connois que
vous m on ven d eu r; veuillez me donner une quittance de 8000 l i v r . ,
€t voici l’exécution de votre m andat, faites en tel usage q u ’il vous
plaira contre votre mandataire? Certes on ne peut contester ce droit.
Si
M .r de Salvert connoissant parfaitem ent M .r de Larouzière, et
sachant bien q u e , sans recourir à des voies de rigu eu r, cette pièce
seroit sans difficulté reçue p our quittance à l’aven ir, s’en est contenté
par honn êteté, s’e n su it-il delà que cette délicatesse em pêche ce tître
de valoir dans les interets de M .r de Larouzière ? Q u e lle est la per
sonne intègre à qui on le persuadera ? Q u i pourra croire en o u tre
de bonne f o i, que M .r L u ca s, avocat, prenant toutes les p ré ca u tio n s
relatées dans sa troisièm e lettre, après avoir statué dans sa reco n n o issance q u ’elle servira, ainsi q u ’une autre pièce qui lu i est c o m m u n e ,
a établir qu ’il a touché 8000 liv r e s , ait été hom m e à laisser un tître
qui le rend com ptable, entre les mains de M .r de S a lv e r t, qui avoit
depuis long-tems une quittance générale, s’il se fû t entièrement libéré.
Quant à celui q u ’on ne redemande com m e le véritable que parce
qu on sait qu il n ’y est plus, p e u t-o n contester la vraisemblance si
non la certitude m o ra le , que cette promesse antérieure consentie
�(
22
)
avant de recevoir les fonds à renvoyé à la reconnoissance qui devait
forcém ent exister à l’avenir, lors du tersem ent des fonds. D ès lors,
ce tte
reconnoissance constituant seule la créance,
et faisant m ention
de la promesse antérieure com m e lu i étant commune, e n a éteint l’effet.
E t si cette promesse antérieure est restée néanmoins entre les mains
de M .r de L arouzière, c’ert sans doute par mesure de sûreté, en cas
que son titre sous signature privée qui se trouvoit en m ain tierce,
vin t à s’égarer. Je
suis fâché de ne pouvoir citer aucun article du
Code N apoléon à l’appui de ce que j ’avance ; mais j’avoue que je
suis forcé de r e c o n n o itr e l’im possibilité où
a été tout législateur de
prévoir un cas pareil. Il est m êm e vraisem blable que ce phénom ène
ne reparaîtra plus d ’ici à la fin du m onde ; ainsi la présentation de
m on titre à la cour d ’appel est sous tous les rapports
le m eilleur
m oyen que je puisse em ployer p our réfuter cette objection.
T R O I S I È M E
O
"V U E . S T I O N .
L a base sur laquelle est fondée la prétendue novation est-elle soli
dem ent établie?
Cette prétendue novation est fondée sur la seconde lettre de M.T
L u c a s, qui fait m ention de l’envoi d’un b illet de 63 oo livres, titre
fatal; mais qui n’établit nullem ent
L a r o u z iè r e ;
qu ’il ait été accepté par M .r de
car le dit billet n’étoit pas dans la lettre,
com m e
le
prem ier que l’on redem ande, mais entre les mains du fils cadet qui
d evo it le rem ettre; ainsi ce billet si fort contre les intérêts de M .r
' de L a r o u z iè r e , dès q u ’il auroit eu pour destination d’opérer une nova tio n 'et de com prom ettre sa créance, a bien pu être refusé par lu i;
I l a bien eu la faculté de garder le p rem ier,
les cas répondre a M»
e t, devant dans tous
Lucas, de lui accuser rcception, ou de lu i
envoyer quittance, de la prem ière année d’intérêts, et de <2000 liv .,
à com pte, sur le capital; or, à cet égard, les héritiers Lucas ne peuvent
fcire présum er de l ’acceptation de ce second billet que par la présen«;
�(
23
)
tation du p rem ier; d ’autant que la troisième lettre contient une par
ticularité
frappante;
„ jo u rd ’h u i,
savoir dans cette phrase „ vous demandez au-
M on sieu r, la délivrance des 63 oo livres, quoique vous
„ ne soyez pas saisi de ma promesse “ on voit que cette lettre posté
rieure aux autres est la seule, ou l’on retrouve l ’expression de pro-
Viesse, la m êm e que celle consignée dans la reconnoissance à M .r de
Salvert;
ce qui prouve id en tité,
et que c’est la promesse de 8400
livres qui a été p e r d u e , et non le billet de b 3 oo liv re s, dont l’exi
stence entre les mains de M .r de' Larouzière n’est pas prouvée. C e
pendant c’est sur une telle base que le tribunal de Gannat a établi
une novation. Je demande d ’après quel principe de d ro it,
d ’après
quelle loi ? C ar le tribunal n’en cite aucune dans son jugem ent.
J■
£ ne puis donc m ’em pêcher de trouver aussi extraordinaire qu ’ini
que que M .r le président L ucas, le m êm e qui m ’a déclaré en pré
sence d ’un tém oin que les lettres de son beau père n’offroient q u ’une
vaine présom ption fasse aujourd’hui prévaloir dans son propre tribu
n a l, non une p r e u v e , c o m m e je v ie n s de le dém ontrer, mais une
simple présom ption tirée de la seconde de ces mêm es lettres. Je n ’au
rais jam ais
im aginé q u ’elles ne pûssent avoir de valeu r que contre
m on p ère; cependant, par un renversem ent de tout ordre social et
ju d icia ire , cela existe ainsi.
M aintenaut il m e reste à fixer l ’attention sur un autre point non
moins im p ortant; savoir: que ce billet fatal de 63 oo liv re s,
dont
on veut à tout p rix la représentation, qui opère, dit-on, une n o v a tio n ,
ne peut plus être entre les mains de m on p è r e , quand bien m êm e,
il y aurait été. — V o ici com m ent.
Les héritiers, qu i ne p eu v e n t, d ise n t-ils, produire aucune qu it
tance ni preuve de payem ent, ont bien fait présenter par la veuve
Lucas dans ses défenses, outre plusieurs lettres de m on pere et de
ma m ere inutiles à g a rd er, une de cette dernière qui prouve que le
S2 A v ril 1789 elle a dem andé 3 00 livres provenant de 1 année d in -
�(
24
)
térêts du 24 Juin 1788 à pareil jo u r 178 g: autant que je puis me
rappeler, n’ayant plus ces défenses sous les y e u x , M. Lucas doit même
avoir écrit sur cette lettre que cette somme de 3 oo livres a été en-r
voyée par lui. Q u elle p récau tion , de sa part de la v o ir fait, et de la
part de ses héritiers d ’avoir conservé la lettre ! S ils en avaient eu
d ’a u tres, à coup sur elles ne seroient pas plus égarées que celle ci.
C om m e la chose est parfaitement conform e au régistre dont j ’avais’
précédem m ent donné connoissance, au bureau de paix, à Madame L u
cas, femme de M .r le président, dans lequel est écrit de la main de:
feu ma mère que les intérêts du principal de 6000 livres resté dû sont
payés jusques et com pris le jour de St. Jean 178 9 ,
la chose n’a pas
été susceptible de la m oindre difficulté.
Mais a lo rs, d ’après la m arche suivie pour le prem ier billet de 8400
liv r e s , supposé que mon père eut accepté le second, ce dit second
b illet
de 63 00 livres a dû nécessairement être retiré par M .r L u ca s,
lors du payem ent postérieur de 3 oo liv re s, à cause de sa date; vu
q u i l com prenoit des intérêts acquittés, et rien ne nous apprend par
quoi il a été rem placé; Je demande alors aux héritiers eux mêmes de
m instruire sur ce fa it, et de me dire ce que je*dots leur représenter,
a u jo u rd h u i; il est bien a présumer qu ’il a dû s’opérer une troisième
n o vation , suivant la jurisprudence du tribunal de G annat, et qu’el
les devaient se succéder les unes autres,
à tous les à com ptes, ju s
qu ’au payem ent définitif ; Mais il ne reste aucune trace de ce qui a
eu lieu à cet ég ard ; D ’après c e , si l’on refuse le tître constitutif
qui établit le m o d e , la date, et la quotité
prim itive de la dette,
quel tîfre r e s t e - t - il donc à M .r de Larouzière? car ce second billet
après avoir éteint le p rem ier,
à ce que l’on d it, semble avoir lui
m êm e subi un sort pareil. Il paroit donc constant que la prem ière
promesse est celle restée entre les mains de mon
p ère, et que c’est
celle qui s’est perdue. O r , s il s est opéré une novation à son égard,
elle ne peut avoir eu lieu que par la reconnoissance postérieure don-
n
�(
»5
)
née a M .r de Salvert laquelle en faisant mention d’une promesse an
térieure com m e lui étant com m u ne,
l’auroit éteinte. Et c’est préci
sément cette reconnoissance qui est présentée aujourd’hui
Q U A T R I È M E
' . Q U E S T I O N .
Maintenant supposons l’existence ^du second
billet de 63 oo livr,
bien dém ontrée, bien reconnue. Je pi’étends qu ’il ne pourroit opérer
novation;
m on assertion, est fondée sur l’article 1273 du Code N a
poléon, dont voici la te n e u r: „ la novation ne se présume p o in t, il
„ faut que la volonté de l’opérer résulte clairem ent de 1acte “ or
n ’ayant pas l’acte, com m ent sait-on si cette volonté y est énoncée?
N éanm oins on a passé outre.
L ’intention du législateur est tellem ent de mettre une barrière in
surm ontable à toute subtilité de l’espèce présente, que l’art. 1275 du
d it/ C o d e porte que . „ la-délégation par laquelle un débiteur donn^
„ au créancier un autre débiteur qu i s’oblige envers le créancier,
,, n’opére point n o vatio n si le créancier n ’a expressément déclaré
„ q u ’il entend décharger son débiteur qui a fait la délégation. “ C om
m ent d ’après cela,
p e u t-o n
prétendre q u ’un débiteur puisse opérer
novation sur lu i m êm e, sans le concours de son créancier, et quelle
preuve a t’on donné que m on père ait consenti que le second billet
annullât les antérieurs? O n vo it m êm e que l’intention
du débiteur
étoit bien éloignée d ’entendre opérer la m oindre novation ; car il dé
bute dans sa troisième lettre par d ire: je 11e demande pas m ieu x
que de me libérer des 63 00 livres resté dues à M r. de Larouziere
sur le prix fo ¡a Joucbère; e t, en bon fran çais, r e s t é dû veut dire
reste d ’une plus forte"’*’ qui a été due. S’il eut t’té assez de m auvaise
foi pour vouloir user de la n ovation , il eut^au moins écrit: les 63 oo
livres que je dois à M .r de Larouzière.
.
Q uan d à cette phrase, sur le prix de la J o n c h è r e , q u ia beaucoup
effarouché M .r le président, com m e il est d it p o s itiv e m e n t dans le cou-
~h tSotuhfS'
^
�•rant de sa lettre, qu ’il n ’en n ’a q u ’une sous signature p riv é e , cela
•prouve évidem m ent q u ’il se rappeloit
parfaitement l’existence, au
pied du contrat, de la dite quittance, que m a montrée le dit M .r L u
cas président; et il est vraisem blable, vu ce que j’ai dit dans l’exposé
des faits, que mon père lui ayant rendu par la suite toute ou partie
de la som m e, en vertu de laquelle il avoit obtenu la dite quittance
fin a le , il ne se regardait pas com m e libéré à cet égard : par la même
raison, ma m è r e , en m ettant sur le régistre à l’article de la Jonchère
que 6000 livres restent d u s, ou sont redus par M .r L ucas, a pu re
garder cette somme com m e en provenant encore. Cela ne signifie rien •
c'est une erreur de bonne foi de part et d autre; d ’ailleurs, aujourd’hui
on ne dem ande rien à
ses héritiers sur le p rix de la Jonchère.
M a is il est inutile de m etendre davantage sur un jugem ent aussi
c o n tr a ir e aux lois qu'à la saine morale. Rien ne peut excuser le tribunal
de Gannat d’avoir prononcé une novation évidem m ent controuvée
de
plus interdite expressément par l ’article 1 q 7 3 du Code N apoléon, et
d ’avoir ainsi oommis envers M .r de L a ro u zie re , qui ne réclam e que
ce qu’il prouve authentiquem ent lui être d û ,
une injustice criante
qui semble avoir pour but de sauver au président de ce tribunal et
à ses cohéritiers, o u tre .la perte du p rocès, la lio n té d e n e pouvoir
établir la libération d ’une créance q u ’ils se sont prononcés rie pas vou
lo ir acquitter. Si un tel écart n’est pas le résultat d ’un fait exprès
si le ju gem ent n’a pas été.redigé d ’avance, il ne peut être l'effet que
d ’un défaut d examen de la cause, ou d une grande ignorance
de la
p art de Magistrats qui cependant ont la fortune p ublique entre les
m ains; quelque puisse en etre la cause, je ne saurais m ’em pêcher de
gém ir tant p our mes concitoyens que p our moi ,
en vo yan t des
poids aussi faux mis dans la balance de la justice.
Com m e rien ne peut éteindre en m oi
pays qui m ’a vu naitre, je regarde
l’intérêt toujours dû au
com m e un devoir que le pré
sent m ém oire soit adressé à son Excellence
le gran d j u g e ,
M
in istre
�( 27 )
PE
la
Ju s t ic e ;
mais com m e, en m êm e tem s, il est indigne de m a
loyauté d agir à cet é g a rd , à l’insçu de tous mes adversaires, je les
en préviens authentiquem ent ici.
Je crois avoir établi d ’une m anière incontestable que le
principal
de booo livres resté dû à M .r de Larouzière ne 'p eu t être annullé
que par des quittances ; je demande encore aujourd’hui aux héritiers
Lucas de fournir à cet égard une preuve de p ayem en t,
s’ils en ont,
en leur déclarant que je n ’en connois aucune; et je ne cesserai de
leur répéter q u ’il est plus q u ’absurde de leur p art, sur la présenta
tion d ’un titre contre e u x , de prétendre qu'on veut leur faire payer
deux fois la mêm e créance, tandis q u ’ils ne peuvent établir une pre
m ière libération; car il faut prouver
un prém ier
payem ent,
pour
être en droit de se défendre d ’un second.
Mais
il me reste encore à traiter par précaution
le chapitre des
intérêts dus depuis le 24 Juin 1 7 S 9 ; attendu qu 'il m ’est revenu que
nies parties adverses s’étoient p roposé, dans tous les cas de les con
tester, disant que les lois cl alors les p rohiboien t; j ’ignore ce qu'ils
peuvent avoir à dire à c e t égard; mais ils me persuaderont difficile
m ent que les lois ayent jamais pu prohiber l’exécution d ’une conven
tion
formelle et précise entre deux
contractans,
ainsi q u ’elle
est
consignée par écrit dans la prem ière lettre de M .r Lucas ; surtout
lorsque le dit M . Lucas pressant m on père de déplacer des fonds
provenant de la vente d ’un im m euble d ’une main
où
ils lui rap
portaient intérêts de plein d r o it, et de' laquelle il n’avoit aucune
intention de les retirer a lo rs, stipule q u ’il prend à cet égard le lieu
et place de son acquéreur: cette convention de toute ju stice, je dis
p lu s, sans laquelle m on père ii’eut
c e r t a i n e m e n t
pas "consenti au dé
placement d ’une somme aussi forte que celle de 8000 livres, doit^être
rem plie tant par M. Lucas que par ses héritiers,
vu qu il a stipulé
pour eux comme pour lu i, d ’après l’article 1122 du Code N apoléon.
Mais ce qui me
paroit hors de tout doute et incontestable est
V
2
�(
que
cette
28
)
M .r L ucas, mandataire de M .r de Larouziere ayant touché en
qualité
une somme appartenante à son commettant le 8 Juin
1 7 8 7 , et l’ayant em ployé à son usage le 24 Juin même an n ée,
acquitter une lettre
pour
de change q u ’il avoit souscrite à M .r Bonnet à
C lerm o n t, est tenu d'en payer les intérêts a son com m ettant, à dater
du dit 24 Juin
1 787; ainsi que le prescrit l’article ig g 6 du Code
N apoléon, qui s’exprim e ainsi:
„ sommes q u ’il a em ployées
M .r Lucas l ’a exécuté,
,, le mandataire
à son usage,
doit l’intérêt des
à dater de cet em ploi. “
en les payant ju squ au 24 Juin 1 789,
ainsi
que cela est prouvé de sa m ain; rien ne peut donc en empêcher la
continuation ju sq u ’à rentière libération de la somme principale.
Bien p lu s , les héritiers Lucas sont dans le cas d ’être condamnés à
des d o m m a g e s et intérêts, en vertu de l’article 1147 du Code N a
poléon qui porte : „ le débiteur est condam né,
»
s’il y a lieu
au
„ payem ent de dommages et in térêts, soit à raison de l'inexécution
„ de l'obligation , soite à raison du retard dans l'exécution , toutes les
/^vfois q u ’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étran„ gère qui ne peut lui être im p utée,
encore q u ’il n ’y ait aucune
„ mauvaise foi de sa part. “ O r , non seulem ent leur père lui m êm e
ne pourroit se prévaloir d’aucune force m ajeure, vu q u ’il est prouvé
de sa main q u ’il a refusé de satisfaire à la demande de sa créance
en im posant une condition entièrem ent étrangère à la dite créance •
mais encore je
les défie eu x-m êm es de prouver que le retard dans
l’exécution de la demande que je leur en ai faite depuis sa m ort
d ’autre cause que leur mauvaise foi.
ait
En c o n s é q u e n c e , attendu q u ’il est prouvé par les pièces au p ro
cès que M .r Lucas a touché le 8 Juin 1 7 8 7 , en qualité de fondé
de pouvoir de M .r de Larouzière une somme de huit m ille-livres
appartenante à son commettant.
A ttendu q u ’il est également prouvé que le 24 Juin 1 787 , ce manw
dataire a em ployé la somme entiere à son usage»
�29
(
)
Attendu que la libération est prouvée n ’avoir eu lien que pour
deux m ille livres sur le p rin cip a l, e t, quant aux intérêts, qu e pour
ceu x de deux années, payés sans retentie} depuis le 124 Juin 1 7 8 7 ,
ju sq u ’au 24 Juin 1789.
Attendu
que les héritiers du dit mandataire ont refusé de faire
honneur au reste d e l à créance qu oique saisis de la succession, et
prouvé leur refus par un procès dans
lequel ils ont fait prévaloir
des m oyens aussi contraires aux lois qu ’odieux.
Attendu enfin, que leur mauvaise
foi dém ontrée est la cause
u n iq u e de frais énormes de correspondance à une distance de près
de deux cent lie u e s,
ponses à
tant p our l ’instruction de la cause et les ré
leurs écritures
que pour l’impression e t,l’envoi d ’un mé
m oire en cour d ’appel, de la part du fondé de p ou voir du créancier,
( v u que le dit fondé de pouvoir occupe un em ploi du gouvernem ent
qu ’il n ’a pu quitter ) ;
et que des
dommages
et intérêts doivent
1 indemniser de ces frais injustes.
Je conclus à ce q u ’il plaise à la co u r, en déclarant que le trib u
nal de prem ière instance de G annat à m al ju g é , de condam ner les
héritiers de M .r Jean Baptiste Lucas à payer à M .r François Louis
A nne Bégon de L arouzière, ou à son fondé de p rocuration.
3)
due
les intérêts sans retenue de la somme de six m ille livres resté
en p rin cip al, depuis le 24 Juin 178g ju sq u ’au jo u r de la de
mande , présumée être du 24 D écem bre m ille huit cent h uit ( va que
je n ’en connois pas la d a te ,
mais d ’après le procès verbal de non
conciliation ) ; savoir dix n e u f ans et d e m i, à trois cent Francs. . • .
faisant
..................................................................................... 5 850 livres
2) le principal de six m ille livres ci
T otal
.
.
•
.
.
•
6000
•
11850 liv r-
3} les- intérêts de la dite somme de onze m ille h uit cent cinquante
�(
livre s, sauf e rre u r,
3o
)
depuis le jo u r de la demande ju sq u ’au parfait
payem ent, dont la cour est prié de déterm iner l’époque fixe.
4) tels dommages et intérêts q u ’il plaira à la cour de taxer.
5) e n fin , tous les frais et dépens tant de cause principale que
d ’appel.
Je suis bien aise de tém oigner ici ma reconnoissauce à M .r d e
L ’a p c hi e r , tant en m on n o m , q u a celui de ma fam ille, de ce q u ’il
veu t bien se charger de faire triom pher p ou r la seconde fois nos in
térêts à la cour d ’appel de R iom . L a réputation d ’honnêteté et de
talens dont il jouit à la dite cour est trop bien acquise, pour qu ’il
soit besoin de faire ici son éloge. J'abandonne donc entièrem ent le
soin de la cause à ses lum ières, en le priant d ’exam iner si d'appel
contient assignation à com paroitre dans les délais de la l o i , s’il est
signifié, à dom icile, â tous les h é r i t i e r s en un mot, s’il renferm e tou
tes les formalités présentes par les lo ix à peine de n u llité , et de veil
ler à ce qu e l ’avoué, dont je lui laisse le ch o ix , se conform e aux
conclusions énoncées dans le présent mém oire.
Je le préviens q u ’en ma qualité de fondé de procuration de m on
père seul agissant en son n o m , je n ’ai pas encore reçu signification,
à d o m icile, du jugem ent dont est ap p el, et q u e j ’ai seulement en
avis qu ’il a été signifié, à avo u é, le 2 3 O ctobre dernier.
A D e u x -P ô n ts , le 8 D écem bre 1809.
Je a n
J o sep h
B É G O N d e L A R O U Z IÈ R E .
�
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Factums Marie
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An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bégon de Larouzière, Jean-Joseph. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Larouzière
Subject
The topic of the resource
créances
Description
An account of the resource
Mémoire de Jean Joseph Bégon de Larouzière, régisseur du haras Impérial de Deux-Ponts, agissant en qualité de fondé de procuration de François Louis Anne Bégon de Larouzière son père, demandeur au principal, appelant du jugement rendu par le Tribunal de première instance séant à Gannat, Département d'Allier, le 25 août 1809 ; contre les héritiers de Jean Baptiste Lucas, en son vivant avocat, habitant de la ville de Gannat ; lesdits héritiers défendeurs au principal, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1786-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
30 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0508
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Saint-Pont (03252)
La Jonchère (terre de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Créances
-
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5fee17be7f0064cbb3460e8a5199fe32
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Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
Dame M a r i e - U r s u l e S A L V A I N G D E
B O I S S I E U , et sieur J e a n - P i e r r e
S A U Z E T DE S A I N T - C L E M E N T ,
son m ari, appelans d’un jugement rendu au
tribunal du P u y, le 9 mai 1807;
c o n t r e
J e a n -A n d r é - G u illa u m e
SOUTEY-
R A N , ancien avocat, intimé;
e t
e n c o r e
c o n t r e
L e c u r a t e u r a la succession vacante du sieur
Pierre-Antoine
aussi intimé.
B r u n e l de S a i n t - M a r c e l,
L A dame de Saint-Clément devoit avoir une fortune
considérable; elle s’en voit tout à coup dépouillée par
trente-trois ventes qu’on a arrachées à la foiblesse d’un
vieillard nonagénaire. Toutes ces aliénations ont eu lieu
A
�( 2 )
sans nécessite et sans cause légitim e; un moment de ca
price ou de contrariété les a déterminées : il y avoit
même une certaine combinaison dans le choix des acqué
reurs. Il est pénible pour la dame de Saint-Clément de
se voir obligée de dire que son aïeul, sans autre motif,,
se félicitoit d’avoir trouvé des moyens plus sûrs de dé
pouiller sa petite-fille, parce qu’il avoit vendu à des
hommes de loi qui saui'oient bien se défendre. E t ces
hommes de loi devraient être bien humiliés de se voir
signaler comme des gens redoutables; ils devroient se
reprocher d’avoir accepté une vente faite dans un moment
d’humeur et de colèi’e , par un vieillard dont ils étoient
les conseils, qu’ils dirigeoient dans toutes ses démarches,
et dont les manœuvres étoient tellement connues, que
déjà ils avoient dans leurs mains une opposition qui -les
avertissoit de l’incapacité ou de l ’impuissance du vendeur.
lies sieurs Souteyran, père et fils, ont négligé ces
avertissemens ; ils ont méprisé les avis d’une mère alar
mée; ils ont voulu courir les risques de ce qu’ils appeloient une bonne affaire , et ne rougissent pas d’avoir
dans les mains un bien aussi mal acquis.
Les premiers juges leur ont été favorables : mais ce
succès ne sera qu’éphémère ; et la cour proscrira avec
indignation un contrat frauduleux et nul.
F A I T S .
Thomas-François Arcis,'et Marîe-Thérèse Bossolade,
ont eu de leur mariage M ane-Claire A rcis, qui épousa
le sieur Antoine Brunei de Saint-Marcel.
�( 3 }
Son contrat
m ariage, du 13 juin 1735, contient les
conventions suivantes :
Marie Bossolade, veuve A r c i s , donne à sa fille la
maison et jardin qui lui appartiennent en la ville du Puy,
au-dessous de la porte de Vienne.
Elle se départ en faveur de sa fille, et du sieur SainlM a rcel, son ép ou x, de l’habitation à elle léguée par le
sieur A r c i s , son m ari, dans la maison située rue de la
Courrerie.
Elle se démet en faveur de sa fille, et du sieur SaintM a rc e l, son é p o u x , de l’hérédité du sieur A rcis, dont
elle étoit chargée par son testament, sans se rien ré
server ni retenir.
Ee sieur Saint-Marcel décharge sa belle-mère de lu
somme de 18000 francs portée en l’inventaire du sieur
A r c is , au moyen de la remise et délivi’ance que lui fait
la dame A r c is , des meubles, argent, argenterie, pro~
messes, obligations, contrats de vente qui provenoient
du défunt.
L e sieur Saint-Marcel, pour augment de dot et gain
de survie, donne à son épouse une somme de 4000fr.,
payable en cas de prédécès.
D u mariage du sieur Brunei de Saint-Marcel, et de
la dame A r c is , sont provenues deux filles; l’une ClaireT h é r è s e , qui a épousé le sieur Surel de S a i n t - J u li e n ;
la seconde, M arie-Françoise-Eouise, qui s’est niariee
avec le sieur Salvaing de Boissieu. C ’est de ce dernier
mariage qu’est née Marie-Ursule, épouse du sieur S a u zet
de Saint-Clément.
Par le contrat de mariage de Claire-Thérèse, femme
A 2
�( 4 )
Saint-Julien, en date du 17 février 17^ 9, ses père et
mère la légitimèrent à une somme de 40000 francs pour
ses droits paternels et maternels. L e contrat de mariage
porte quittance d’ une somme de iôooo francs ; et le
surplus de sa constitution dotale, qui est de z 5ooo f r .,
est stipulé payable , savoir : 10000 francs dans Vannée
du décès du prem ier m ourant des père et mère , et
i5ooo fr. dans Tan révolu après le décès du survivan t,
sans in térêt, qu’à compter de l’échéance des termes.
Par le contrat de mariage de la dame de Boissieu ,
du 8 juin 176 2 , ses père et mère lui font donation
entre-vifs , irrévocable, contractuelle et dotale, de tous
et chacun leurs biens meubles et immeubles présens
et à venir, sous la réserve expresse que se font les do
nateurs de la jouissance des biens donnés pendant leur
vie; laquelle jouissance sera réversible de l’un à l’autre.
Ils se réservent un capital de 12000 fr. pour pouvoir
s’en servir dans leurs besoins , et en disposer tant à la
vie qu’à la m ort, en faveur de qui ils jugeront à propos.
[I est dit que cette somme de 12000 francs, également
réversible de l’un à l’autre , sera prise sur les biens à
■venir, s’ il leur en échoit, et subsidiairement, sur leurs
biens actuels.
Les sieur et dame Saint-Marcel se réservent aussi tout
ce qui peut leur être du provenant d’arrérages de fermes,
censives, obligations, comptes de leurs journaux, et gé
néralement toutes les dettes actives.
En attendant que l’usufruit soit consolidé h la pro
priété des biens donnés , ils donnent et constituent en
d o t, à leur fille, en avancement d’hoirie, et pour sup
�( 5 )
porter les charges du mariage, la somme de 20000 f r . ',
plus , d ix- neuf marcs et deux onces d’ai'genterie : ils
payent 11000 fr. à compte, et s’obligent d’acquitter dans
un an la somme de 9000 fr. pour parfaire l’avancement.
« Mais comme ils n’ont deniers en mains pour le
« payement de la somme de 9000 francs, non plus que
« pour acquitter la constitution de la dame Saint-Julien,
« dont il reste dû 12600 francs, nonobstant la quittance
« insérée dans son contrat de mariage, du 17 février
« 1 7 5 9 , insi que les termes qui écherront à l’a v e n ir,
K et pour acquitter leurs autres dettes passives, il a été
« convenu et accordé qu’il sera libre aux sieur et dame
« Saint-Marcel, de vendre et aliéner les domaines de
« Rocharnaud, Mons et Orzillac, champs et vignes de
« Couchât, au terroir de Chadrac; les fonds dépendans
« du domaine de Pouzarol , situés ès-mandemens de
« cette v i ll e , consistans en m a is o n , prés , vergers , et
« champs-, les prés situés au terroir de Ceissac ; et fin a
ls. lem ent\e domaine de Chaspuzac, à leur juste valeur,
« et su r le pied de l estim a tion , p o u rservir au payement
« desdites créances , c o n c u r r e m m e n t aux susdites
« constitutions , et autres dettes connues des parties
« intéressées ; ensemble, pour remplir la réserve du
cc capital de 12000 francs , s i les donateurs sont dans
K le cas de s'en servir ,* le tout suivant le payement,
« et délégation q u i en sera J a ite . »
O n s’oblige de fournir au sieur de Boissieu , futur
époux, un double de la quittance du produit des ventes.
L excédant du produit des ventes au-delà des créances
et reserve ? doit être placé, du consentement du sieur de
�( 6 )
Boissieu et de sa femme, cliez des personnes solvables.
L e revenu en sera payé aux donateurs pendant leur vie,
sans que les acquéreurs puissent être recherchés , en
rapportant néanm oins un légitime emploi de conform ité
à l'état connu des parties.
Si l’intérêt des futurs époux peut exiger l’aliénation
des biens qui l’esteront à la future, il est convenu que
le sieur de Boissieu pourra les vendre à leur juste valeur,
après le décès des donateurs, sans que les acquéreurs
puissent être recherchés par la demoiselle de St.-Marcel,
ou les siens, qui ne pourront répéter dans les biens du
vendeur que le juste prix des fonds par lui aliénés.
O n e x c e p t e des ventes permises à l’époux , le moulin
appelé de Saint-M arcel, et la maison du Puy. Ces objets
ne pourront être vendus que dans le cas où on en
trouveroit un prix avantageux.
En ce qui concerne le mobilier ou meubles meublans,
il est convenu, sans en faire un inventaire plus détaillé,
qu’ils seront remis à la dame de Boissieu dans l’état où
ils se trouveront au décès du dernier mourant de scs
père et mère ; ils sont cependant évalués, dans l’élat
actuel, à la somme de 6000 francs.
I,e même jour 8 juin 1762,. il fut fait un état double
entre les. sieur et dame de Saint-M arcel, et le sieur
Sàlvaing de Boissieu, leur gendre, des dettes qu’avoient
alors les père et mère : cet état se porte à la somme
de 49600 francs, sans y comprendre les 9000 fr. faisant
partie de l’avancement d’hoirie de la dame de Boissieu’*
et qui dévoient être payés dans l’année du contrat 4$
maïiage. Mais, on porte dans cet état une somme q u i
�n’étoit pas exigible ; on veut parler de celle de 2.5ooo f.
due sur la dot de la dame de Saint-Julien, dont io o o o f.
étoient payables après l’an révolu du décès du premiei
mourant des père et m ère, et i 5ooo francs n étoient
exigibles qu’après l’an révolu du décès du sui vivant.
On ne parle pas dans cet état de la somme de 1 2000 f . ,
montant de la réserve, parce qu’on se rappelle que cette
réserve ne devoit être prise que sur les biens a t enir Les sieur et dame de Saint-Marcel se dépouilloient
donc irrévocablement de leurs propriétés, au profit de
leur fille, par ce contrat de mariage. S ils se îeservoient
la faculté de vendre une portion des biens donnés, ils
ne pouvoient le faire q u ’ e n acquittement de leuis dettes.
L e s biens dévoient être vendus à leur juste valeur ■
, et
sur le pied de Vestimation. Ils .étoient obliges d?en dé
léguer le prix aux créanciers; ils étoient tenuside fournir
à leur gendre un double du produit des ventes; .enfin,
-ils devoient rapporter la preuve d ’un légitime em ploi
des deniers de ces mômes ventes.
? . ;i: ••■iG
Les père et m è re , au moyen".de ces conventions,
n’étoient plus que de simples mandataires, qui devoient
à leur fille un compte rigoureux de leur mandat; encore
cette faculté de vendre, réservée par le contrat,• étoitelle exorbitante et contraire au droit jcommun. iCétoit
donner et retenir : o r , ¡en g é n é r a l, donner ¿ t retenu
ne vaut. Si on excepte les contrats <ie mariage de cette
prohibition , c’est qu’ils sont susceptîblos'ide toutes des
conventions qui ne blessent pas le«'
-mœurs.-Mais
■toujours on doit restreindre ce quUedt exo.rbit«in t , et
b o n n e s -
lorsqu’ une faculté de ce genre est subordonnée à de cei>
�( 8 )
tain es conditions , on doit les remplir avec exactitude.
La dame A rcis, femme Saint-Marcel, est morte le 16
juin 1784. L e sieur Saint-Marcel a parcouru une très1on°1ue carrière; il a survécu vingt-un ans à sa femme;
il est décédé le 24 octobre i 8o 5 , âgé de quatre-vingtdix-sept ans.
Il semble qu’aussitôt après le mariage de la dame de
Boissieu, les père et mère ont aiï'ecté de se jouer de leurs
engagemens. Les ventes se sont multipliées : depuis le 27
juin 1762, jusqu’au 18 novembre 1782, les sieur et dame
Saint-M arcel ont vendu successivement des immeubles
donnés, pour la somme de 47^®9 f^ncs.
L e sieur de Boissieu voyoit avec regret toutes ces
aliénations ; il se permettoit à cet égard quelques obser
vations respectueuses : elles étoient mal accueillies.
Plusieurs lettres du sièur Saint-Marcel annoncent de
sa part un changement d’affection, des regrets amers et
peu flatteurs pour sa fille, d’avoir légitimé la dame SaintJulien , et institué la dame de Boissieu.
Ce fut bien pis encore après la mort de la dame son
épouse. Il se mit dans la tête de payer par anticipation,
à la dame Saint-Julien, la somme qui n’étoit exigible
q u ’ u n , an après ;sa mort. Il écrivoit à la dame de Bois
sieu qu’elle seroit encore la mieux partagée; qu’il auroit
dû laisser ses deux filles égales. Cependant la foi des
contrats de mariage doit être gardée : sans la donation
faite à la dame de Boissieu, son mariage n’eût pas eu
lieu;.ses enfans n’auroient pas vu le jour.
jjj Ce fut avec desi-peines infinies) que le sieur de Bois
sieu obtint de son beau-père la préférence pour un jardin
appelé
�( 9 )
appelé de V ien n e, que son b e a u - p e r e lui délaissa avec
hum eur, pour une somme de 3500 francs, a condition
que son gendre seroit tenu de p r é c o m p t e r j o o fumes
sur celle de 12000 francs, montant de sa reseive. L af
fection qu’avoient montrée le sieur de Boissieu e t la dame
son épouse pour ce jardin déplut au sieur de SaintMarcel : il ne destinoit point cet objet à son gendre*, il
se crut humilié en a c c é d a n t à ses d é s i r s .
L e contrat de mariage de la dame de Boissieu contient
l’énumération des biens qui poui'roient etie aliènes pour
cause légitime. A la suite de tous les immeubles désignés,
on lit ces mots : H t fin a lem en t le domaine de Chaspuzac.
Il n’y a rien d’inutile dans un contrat. Ces expressions
limitative^ mettoient le domaine de Chaspuzac au der
nier l’ang; il ne pouvoit être vendu qu’après que tous
les autres objets désignés auroient été épuisés : il y avoit
même de gi’ands motifs p o u r conserver cette propriété',
elle étoit à la bienséance du sieur de Boissieu , près de
ses autres possessions, et en augmentoit la valeur. L e
domaine d’Orzillac étoit un des premiers destinés à la
vente ; il restoit dans les mains du sieur de Saint-Marcel :
par contrariété, le sieur Saint-M arcel veut vendre le
domaine de Chaspuzac. Déjà le nombre des ventes pai
lui consenties se portoit à trente-deux, toutes sans esti
m a tio n : plusieurs avec cession de plus-value; toutes sans
épingles-, la plupart sans cause, sans n é c e s s i t é , « créa it,
au comptant, sans jamais justifier de l’emploi ; toutes sans
aiïiches, sans formalités quelconques, et à vil prix.
Les sieur et dame de Boissieu apprirent avec eflioi que
Je domaine de Chaspuzac alloit encore leur échapper, ils
�( 1° )
furent instruits que les sieurs Soutcyran , père et fils, l’un
procureur, l’autre avocat, se présentaient pour acquérir..
L e 31 mars 1791? les sieur et dame de Boissieu prirent
le parti de faire notifier un acte extrajudiciaire aux sieurs
Souteyran, par lequel ils déclarent « qu’étant venu à
cc leur connoissance que les sieurs Souteyran étoient sur
« le point d’aclaetcr le domaine de Chaspuzac, ils leur
« dénoncent que la propriété leur appartient; qu’il ne
« dépend pas du sieur S a i n t - M a r c e l de les en dépouiller;
cc que par les ventes qu’il a déjà faites, il a plus qu’abcc sorbé les réserves contenues dans leur contrat de ma« riage ; que par ce moyen , et autres à d éd u ire, ils
cc entendent se conserver ce domaine ; qu’ils n’auront
cc aucun égard à toutes les sûretés que les d«mes Soucc teyran pourroient prendre, et terminent par leur laisser
« copie du contrat de mariage de la dame Boissieu. »
Cette déclaration d’une mère de famille qui voit dis
siper sans nécessité le bien de ses enfans, auroit dû
arrêter des personnes délicates, surtout des hommes
d’affaires. Mais les sieurs Souteyran bravèrent l’opposition
des sieur et dame de Boissieu, et ils n’en furent que plus
empressés de terminer. U occa sio ii cVim bon m a r c h é ,
et la facilité que donnoient alors les assignais pour les
payemens, les déterminèrent.
L e 25 octobre 179 1, le sieur Brunei de Saint-Marcel,
excipant des clauses du contrat de mariage de sa fille,
qui lui permettent de vendre le domaine de Chaspuzac,
dépendant de son patrimoine, et autres immeubles y
désignés, pour payer ses dettes, acquitter 12000 francs
qui restent dûs de la dot faite à son autre fille Saint-
�( 11 )
J u lie n , et se retenir et disposer de 12000 francs par lui
réservés , vend au sieur Souteyran , ci-d eva n t procu
reur, et à la dame O b rier, son épouse, l’entière pro
priété de son domaine de Chaspuzac, deux petites rentes
en dépendantes. Cette vente est faite par le sieur SaintMarcel, comme seigueur haut-justicier, avec les charges,
pour l’a v e n ir, de la taille et des dîmes ( supprimées
par la loi du 14 avril 179°)*
Cette vente est faite moyennant 2o5oo f r . , et 600 fi.
pour épingles ; sur lequel prix la dame S a i n t - Julien
reçoit la somme de 12000 francs sans aucune garantie^
et les 9100 francs restans, le vendeur déclaré les avoir
reçus à compte de sa réserve , ou autres hypothéqués
par lui acquises sur les biens des sieur et dame de Boissieu, suivant l’état par lui tenu, subrogeant les acquéreurs
à tous ses droits.
L e sieur Saint-Marcel se félicite d’avoir si bien choisi
ses acquéreurs; ce sont, écrit-il à sa fille, des hommes
de loi, qui sauront bien se défendre, q u i vous mèneront
dur. Il mêle l’ironie à ses menaces; il trouve plaisant que
son gendre, qui est attaqué de cécité, et ne peut avoir
aucune jouissance, soit encore assez téméraire pour se
plaindre des ventes que fait son beau-père.
Ces hommes de l o i , si fort vantés par le sieur SaintM arcel, ne voulurent pas lui donner le démenti. L e sur
lendemain de la vente, c’est-à-dire, le 27 octobre 1 7 9 1 1
ils firent citer le sieur de Saint-M arcel, pour qu il fût
tenu de faix*e valoir la vente qu’il leur avoit consentie,
et de faire donner main-levée de l’opposition iormee par
les sieur et dame de Boissieu.
V> z
�( 12 )
Les sieurs Souteyran étoient assez maladroits dans cette
démarche précipitée. C ’étoit reconnoitre qu’ils avoieiït
acquis des droits litigieux , ce qui est vigoureusement
prohibé aux gens de loi. Mais tout se faisoit concurrem
ment avec le sieur S a in t - Marcel. L e gendre du sieur
Souie37ran devient l’avoué du vendeur ; 0n assigne les
sieur et dame de Boissieu en main-levée de leur oppo
sition; on fait joindre les d e u x . demandes; et le jugement
de jonction est notifié aux sieur et dame de Boissieu le
30 janvier 1792.
L e 3 février suivant, on leur fait notifier 1°. l’état des
ventes consenties tant par la dame Saint-Marcel que par
son m ari, conjointement ou séparément, depuis le con
trat de mariage des sieur et dame de Boissieu , du 8
juin 1762.
2°. L ’état général des payemens faits par le sieur de
Sa in t-M a rce l, depuis le mariage du sieur de Boissieu,
pour fo rm er Pemploi des sommes provenantes des ventes
faites depuis la môme époque.
L e 5 mai 1792, les sieur et dame de Boissieu signifient
aux sieurs Souteyran le contrat de mariage de la demoi
selle de Boissieu, leur fille, avec le sieur Sauzet de SaintClément, en date du 8 janvier 1792; et comme ce contrat
de m a r i a g e contient une donation universelle au profit
de la dame de Saint-Clément, les sieur et dame de Bois
sieu d é c l a r e n t qu’ils n’ont plus d’ intérêt dans la cause,
qu’ ils doivent être mis hors d’instance, et que les sieurs
Souteyran peuvent, s’ils le jugent à propos, diriger leurs
poursuites contre les sieur et dame de Saint-Clément.
O u profite bien vite de cet avis. L e 9 du même mois
�( 13 \
,
i>.
de m ai, les sieur et dame de Saint-Clement sont appelcS
en cause. On obtient contre e u x , par défaut, un juge
ment de jonction, le 30; il leur est notitié sous le nom
de leur aïeul, le 9 juin suivant, avec un memoiie expli
catif vraiment in ju rieux, et qu’on pourvoit qualifie! de
libelle, si on ne s’étoit servi du nom du grand-pere.
En tête de cette signification se trouvent deux pieces
bien essentielles au procès.
La première est un acte notarié, du 20 avril 1792,
par lequel les acquéreurs et le vendeur reconnoisjent ne
s’être pas conform és a u x clauses du contiat de maiiage
des sieur et dame de Boissieu, lors de la vente du domaine
de Chaspuzac. Ils dérogent au prix exprime dans cette
vente ; ils conviennent mutuellement que la vente du
domaine de Chaspuzac sortira son plein et entier effet,
pour son prix et valeur , siiivant l’estimation qui en
sera faite par le sieur R eco u les, expert, habitant de la
ville du P u y , qu’ils ont amiablement nommé pour leur
expert commun. Ils le dispensent de toute formalité ,
de toute prestation de serment; ils s’obligent d’acquiescer
à l’estimation qui sera faite à frais communs. Si elle
excède la somme de 21100 francs, portée par le contrat,
les acquéreurs rembourseront sans délai l’excédant au
sieur S a in t-M a rce l, qui promet à son tour de rendre
2e m o in s , s’il y a lieu.
L a deuxième pièce est le procès verbal d ’ e s t i m a t i o n du
sieur R eco u les, du 14 mai 1792. On v o i t par ce procès
verbal que le domaine de Chaspuzac se c o m p o s e de
quatre-vin gt-sep t pièces d’immeubles : son estimation
est portée à la somme de 21427 fr. ; de sorte q u il y «
�( l4 )
un accroissement de prix de 327 fr. Mais 011 remarque
que l’expert a négligé d’estimer les bois pins, les arbres
enradiqués autour des héritages, les meubles, la maison
de lu ferme, etc. On voit au bas de ce rapport que les
acquéreurs et les vendeurs l’approuvent et le confirment
dans tout son contenu, et veulent qu’il sorte son plein
et entier effet; et cette approbation, en date du 16 mai
1 79 2 , n’a j)as même étéJ a itc double.
O n élague les incidens de procédure qui eurent lieu
depuis cette signification ; on se contentera d’observer
que le 18 mai 179 3, intervint jugement qui appointe les
parties en droit : le procès fut distribué le 17. Là se ra
lentit l’ardeur des sieurs Souteyran. L e sieur de Boissieu
mourut le 6 ventôse an 5 : bientôt les sieur et dame de
Saint-Clém ent apprennent que leur aïeul étoit circon
venu , et qu’on vouloit encore arracher à sa foiblesse les
derniers immeubles qui lui restoient. Ils prirent le parti
de le faire citer de nouveau, ainsi que les sieurs Sou
teyran , devant le tribunal civil du P u y , le 28 messidor
an 6 , pour voir prononcer sur les conclusions déjà prises
ou à prendre , avec déclaration expresse faite au sieur
Saint-Marcel, que les sieur et dame Saint-Clément s’op
posent formellement à ce qu’aucune nouvelle vente soit
par lui consentie , et avec protestation de se> pourvoir
par les voies de droit contre toutes les ventes qui avoient
été faites par
passé, ou qui pourroient l’être à l’avenir.
L e sieur Souteyran père est décédé le 10 nivôse an 1 3 ;
le sieur de ‘S a i n t - M a r c e l , âgé-de quatre-vingt-dix-sept
ans, est m ort le 2 brum aire an 14.
L e lendemain de son décès, les scellés furent apposés
�C 15)
sur ses meubles; il fut procédé à la rém otion, eL à l’in
ventaire du mobilier , le 6 du même m o is , et jours
suivans»
Cet inventaire prouve que le mobilier est réduit à un
état pitoyable ; que tout étoit à l’abandon , et dans un
état de dégradation absolue.
La dame de Saint-Clément , sous l’autorité de son
m ari, en sa qualité de donataii’e contractuelle de tous les
biens présens et à venir de la dame Françoise-Louise
Brunel-Saint-Marcel, sa mère, mit un acte au greffe du
tribunal civil du Puy , par lequel elle déclare qu’elle
s en tenoit à la donation de biens présens faite à sa mère
par feu Sain t-M arcel, son a ïe u l, dans son contrat de
mariage du 8 juin 1 762 ; qu'elle renonce à tous biens
« v e n ir , et répudie la succession du sieur Saint-Marcel,
son aïeul.
Cette répudiation a été réitérée le 20 février 1806 ;
et le 25 mars suivant la dame de Saint-Clément et son
mari ont fait citer le sieur Souteyran, avocat, au bureau
de p a ix , pour se concilier sur la demande tendante à
reprise et continuation de l’instance pendante entre
les parties, et à ce q u e , ayant égard à ce qui résulte des
actes y énoncés, et à la répudiation par elle faite des
biens à venir de son aïeul, p o u r s ’eu tenir à la donation
dotale faite à sa mère le 8 juin 176 2 , la vente du do
maine de Chaspuzac, consentie par feu sieur Saint-Marcel
au s^eui'Souteyran , le 20 octobre 1791» solt déclarée
nulle , comme faite à non domino , pro non debito ,
par contravention formelle au contrat de mariage de la
dame de Boissieu, sa m è r e , et au mépris de l’acte d’op
�( i6 )
position du 31 mars 1791 ; qu’en conséquence le sieur
Souteyran soit condamné ù se désister du domaine de
CJiasuuzac, à en restituer les jouissances ainsi que de
X
’
*
d ro it, etc. L e sieur Souteyran comparoît au bureau de
paix; il s’étonne que la dame Saint-Clément veuille at
taquer la vente du domaine dont il s’agit ; il argue la
procédure de nullité; il prétend cjue la dame SaintClément n’avoit rien à faire dans toutes ces demandes ;
qu’en vertu de l’art. 1649 du Code Napoléon, le mari
seul avoit le droit de poursuivre les détenteurs des biens
dotaux de sa femme ; que celle-ci ne pouvoit figurer
au pi’ocès. Ce moyen étoit assez mal imaginé pour un
avocat, parce que le Code s’applique principalement à
l’administration, et que la présence de la femme ne
vicioit pas la procédure , dès que le mari étoit en qua
lité. Cependant le sieur de Saint-Clément, effrayé de cette
demande en nullité, peut-être parce qu’il plaidoit contre
un avocat, a cru devoir renouveler la citation, inter
venir dans l’instance; ce qui a donné lieu à un nouveau
procès verbal du bureau de paix, où le sieur Souteyran
a répété ce qu’il avoit déjà dit. Il y a eu ensuite assi
gnation aux fins de la cédule; jugement qui,donne acte
de l’intervention, et ordonne la reprise ; et enfin autre
jugement du 13 août 1806, qui a nommé pour cura
teur à la succession vacante du sieur Saint-Marcel, la
personne du sieur Belledent, avoué. Bientôt il s’est ouvert
une longue discussion sur les prétentions respectives des
parties.
L es sieur et dame Saint-Clément ont soutenu que la
vente du domaine de Chaspuzac, consentie au sieur
Souteyran,
�( 17 )
Souteyran, étoit nulle ; que l’aliénation avoit été faite
au préjudice des véritables propriétaires-, qu’elle avoit
eu lieu sans cause comme sans nécessité, en contraven
tion formelle aux clauses du contrat de m ariage, du 8
juin 1762; qu’elle avoit été l’eiï'et du repentir, d’ une
humeur injuste, de la haine, de l’intrigue et de la col
lusion.
L e sieur de Saint-Marcel avoit fait une donation uni
verselle en faveur de sa fille, sous la réserve de l’usu
fruit : s i, en attendant que cet usufruit f û t consolidé
à la propriété, les donateurs s’étoient reservé la faculté
de vendre certaine partie de leurs biens, ce ne pou voit
être que pour acquitter des dettes exigibles, après une
estimation préalable , et à la charge d’un emploi dont
il seroit justifié.
Il falloit suivre dans les ventes l’ordre établi par le
contrat.
L e domaine de Cliaspuzac étoit le dernier objet qui
de voit être atteint : tout le reste devoit être épuisé avant
qu’on pût songer à l’aliénation de cette propriété.
Cependant la vente est faite pour payer à la dame S a in tJulien une somme qui ne concernoit pas le sieur de
Saint-Marcel : c’étoit la dame de Boissieu qui en étoit
tenue; sa sœur ne pouvoit l’exiger qu’un an après le
décès du sieur Sain t-M arcel ; cette s o m m e ne devoit
pioduiie d interet qu’à défaut de p a y e m e n t à 1 époque
de l’exigibilité.
D ’un autre c ô t é , le surplus du prix de cette vente est
employé à payer une réserve qui, aux termes du contrat
de mariage, ne devoit être prise que sur les biens à venir.
G
�( *8 )
X/es ventes ne contenoient aucune délégation au profil:
des créanciers ; la délégation étoit une des conditions
essentielles de la vente.
Les acquéreurs a voient donc interverti l ’ordre prescrit
par le contrat de 1762. Ils avoient acquis sans estima
tion , et à vil prix ; ils avoient reconnu le vice de leur
contrat, puisque , par un acte postérieur , ils avoient
dérogé à toutes les clauses de la vente, et s’en étoient rap
portés à l’estimation d’un tiers. Cette estimation , faite
sans formalité, erronée et partiale, auroit dû au moins
être contradictoire avec les donataires , et n’a été approuvée entre les acquéreurs et le vendeur que par un
acte sous seing privé non fait double.
Les acquéreurs ont eu sous les yeux le contrat de ma
riage de 1762; ils ont connu la nécessité et le mode de
l ’emploi ; ils s’en sont écartés en connoissance de cause.
Les acquéreurs ont su que le sieur de Saint-Marcel
avoit plus qu’absorbe, par ses aliénations, le montant
des dettes connues et énoncées dans l’état joint au contrat
de 1762.
En effet, suivant cet état, il étoit d û, i ° . au sieur de
Saint-Julien, pour reste de la dot promise par son con
trat, la somme de douze mille six cents fr., nonobstant
la quittance insérée au même acte, ci. . . .
12600
2°. A Messieurs du chapitre de la cathé
drale du P u y , pur billet du 28 décembre
2000
174 6, deux mille francs, ç i .........................
30. A u x darnes religieuses de Vais, par
14600 fr.
�( i9 )
C i-co n tre..................
14600 fr.
contrat du 10 avril 1737 , pareille somme
de deux mille francs , c i ................................
2000
4 °* A u sieur Farense, prêtre, de Cliarantus, par contrat du 14 octobre 1733, deux
mille francs, c i ........................... ......................
2000
5 °. A u même sieur Saint-Julien, la somme '
de vingt-cinq mille fr. énoncée payable aux
termes portés par son contrat de mariage, ci. . 2Ô000
6°. A u sieur de St.-M arcel, prêtre, frère
du donateur, par billet sous seing p r iv é ,
du 24 janvier 1738 , pour ses droits suc
cessifs paternels et maternels, la somme de .•
t <_
six mille francs, c i .................................. .
6000
T o ta l
.....................................
49600 fr.
T e l est l’etat annexé au contrat. A u bas sont ajoutés
ces mots ;
« Nous soussignés , certifions que l’état ci-dessus est
,« celui dont il a ete fait mention dans le contrat de
« mariage de cejourd’l i u i , auquel nous offrons respec« tivemûnt de nous conformer. Fait d o u b le , ce 8 juin
« 1762. » Suivent les signatures.
Il est dém ontré, d’après cet acte fait double, que les
donateurs ne pouvoient vendre aux conditions exprimées
au contrat, que jusqu’à concurrence i° . de la somme de
neuf mille francs payable au sieur Boissieu dans un an,
c i . . . . ....................... ............... .......................... ..
9000 fr.
2°. A u sieur Saint - Julien > douze m ille_________
9000 fr.
G 2
�( 20 )
D e Vautre p a r t . . . .
9000 fr,
six cents francs, c i ...........................................
3°. Que le sieur S a in t-J u lien n’a pu
exiger qu’une somme de dix mille francs
sur les 2Ôooo francs promis l’année d’après
la mort de la dame Saint-Marcel; c’est-àdire, le 16 juin 178 5, attendu que la dame
Saint-Marcel est décédée le 16 juin 1784,
12600
ci............................................................................
40. A u x chapitre et «l’cligieuses, quatre
10000
mille francs, c i ..................................................
5 °. A u sieur Farense, ou au sieur SaintM arcel, prêtres, huit mille francs, c i . . . .
6°. Enfin, si l’on veut, pour remplir la
réserve de 12000 francs que s’étoit faite les
donateurs, la somme de neuf mille francs,
4000
ci.......................................................................... ..
O n ne trouvera que la somme de cin
quante-deux mille six cents francs, c i . . . .
8000
9000
62600 fr.
Jusqu’à concurrence de laquelle les donateui's avoient
la faculté de vendre, à la charge de l’estimation et de
l’emploi.
On a restreint ci - dessus la réserve de la somme de
12000 francs, a celle de 9000 francs; et il faut expliquer
la cause de celte réduction.
On n’a pos oublié que cette réserve de 12000 francs
ne de voit être prise que sur les biens à v en ir, et subsidiairernent seulement, sur les biens actuels, en cas de
besoin. O r , le 17 septembre 1 7 7 3 , la dame Arcis a re-
�(2 1 )
cueilli un legs de 3000 francs, de la part de la dame
P eyret, veuve C alm ard, par son testament mystique,
du 5 février 1 7 7 3 , ce qui réduit bien évidemment la
réserve à 9000 francs ; de sorte que les donateurs ne
pouvoient donc rigoureusement aliéner que jusqu’à con
currence de 52600 francs.
Qu’on compare maintenant l ’état des ventes qui ont
été faites depuis 176 2 , par les sieur et dame de SaintMarcel, conjointement ou sépai'ément, et antérieurement
à la vente du domaine de Chaspuzac, on voit par l’état
des ventes, signifié le 3 fé v r ie r 179 2, état infidèle dont
on a relevé les omissions avec exactitude,
i° . Une vente par la dame Saint-Marcel,
d’un cliamp compris dans la donation , au
prix de sept cents francs, en faveur de Jean
Arnaud, le 27 juin 176 2 , ci.........................
700 fr.
20. A u t r e v e n t e d e la m ê m e a u m ê m e ,
^ le 29 août 1762, au prix de cinq cent qua
rante francs, c i ..................................................
30. A u tre vente sous seing p rivé, par la
dite dame, en faveur de M . Raymont, prêtre,
le 16 octobre 176 2, au prix de huit mille
francs, c i ..............................................................
540
8000
Nuta. P l u s , une somme de deux cent
cinquante fr. pour épingles, ainsi qu’il est
prouvé au procès, ci........................................
4°. Autre vente de deux prés, par la dame
Saint-Marcel, en faveur de Marie Enjolras,
949° fr.
�C 22 )
D e Vautre y a r t....................
949 ° fr-
veuve Gallien, le 7 décembre 1762, au prix
de deux mille francs ( P ic lio t , notaire ) ,
ci............................................................................
5°. A u tre vente par la même, à Claude
Bernard , le 2 5 avril 1763 , au prix de
six cents francs, c i ......... .................................
6°. V ente par M . Saint-Marcel, au sieur
B r u n e i, le 5 septembre 17 6 3 , au prix de
2000
six cents francs, c i ...........................................
7 0. A u tre vente par le sieur Saint-Marcel,
à un sieur V incent, le 4 novembre 1763 ,
au prix de trois mille deux cents francs, ci.
8°. A u tre vente par M . Saint-Marcel, à
Jean V ianis, de plusieurs fonds à Farreivoles, le 11 décembre 1762 (V a le tte , no
t a i r e ) , au prix de quatre-vingt-dix-neuf
600
francs, c i .............................................................
90. A u tre , par*lc même au m ême, d’ un
c h e z a l, le 1 5 mars 1763 (m êm e notaire ) ,
au prix de neuf francs, ci.............................
io °. A u tre, par le même au même, d’une
maison et grange à Fa rreivoles (même no
taire ) , au prix de cent francs, c i ........... .. .
110. A u t r e vente par M . de Saint-Marcel,
à V idal Masson , le 6 avril 1 7 6 4 , pour
seize cents francs, c i .........................................
12°. A u tre vente par le même, à J.-Pierre
600
3200
99
p
100
1600
17698 fr.
�C 23 )
C i-con tre. . ................
17698 fi<
B u rre l, le 28 août 1 7 6 4 , avec cession de
toute plus-value, au prix de trois cents f i . ?
C i ............................................................................................ ...
130. Autre vente à Jean-Pierre Sicard,
le i i mars 1765, pour trois cents francs, ci.
140. A u tre vente p ar le même, a Matthieu
R o u x , le 30 janvier 1770 ? pour six cent
•«
cinquante francs , c i .
...........................
i 5°. A u tre vente par les sieur et dame
Saint-Marcel, au sieur B ru n ei, le 21 avril
1765, pour sept cent cinquante francs, c i . .
160. A u tre , par le sieur Saint-Marcel, à
Pierre R o c h e , le 10 décembre 176 6, pour
trois cent quatre-vingt-quatorze francs, ci.
17 0. A u tr e , par le m êm e, à Hyacinthe et
Marie Rotidil, le 7 mars 1767 , pour quatre
cent quatre-vingts francs , c i .........................
180. A u tr e , par le sieur Saint-Marcel, au
sieur B runei, le 18 mars 1767, au prix de
sept cents francs, c i ............................................
190. A u tre vente -privée, par le m êm e,
le 23 mars 1768, à Jean-Pierre Pages, pour
quatorze cents francs, ci..................................
200. A u tre, à A ndré R o u x , du 13 novem
bre 1769, avec cession de plus-value, pour
cinq cent cinquante francs, ci.........................
2 i° . A u tr e , en faveur de la dame veuve
300
3° °
- 7 ^°
394
480
700
1400
55o
___
23222 fr.
�( M )
JDe Vautre p a r t....................
B o u lh io l, le 23 décembre 1 7 7 0 , au prix
de trois mille huit cents francs, c i ................
220. A u t r e , à Matthieu A l y r o l , le 21
janvier 1772 , pour quatre cent cinquante
francs, avec cession de plus-value, ci........
23'’. Autre, au sieur Flori, du 30 septembre
1771 , au prix de trois mille francs, c i . . ,
2 4 ° . A u t r e , au profit du sieur SaintM arcel, curé de l’Hôtel-Dieu, le 4 décembre
1 7 7 2 , pour sept mille huit cents francs, ci.
25°. A u tr e , au sieur Chaumel, le 21 mars
1 7 7 3 , pour neuf cent cinquante francs, ci.
26°. A u t r e , à Louis B le u , le 1er. décernbre 1 7 7 6 , pour quatre-vingt-seize f r . ,
ci...................................................... ......................
27 0. A u tre vente privée, au sieur F lo ri,
23222 fr.
3800
4^0
3000
7800
960
96
le i er. décembre 1 7 8 1, pour quatorze cents
francs, c i ........................................................... ..
1400
28°. A utre, du 8 novembre 1782, au prix
de cinq mille six cents francs , c i ................ 56 oo
290. A u tre , du 19 avril 1786, pour quatre
400
cents fran cs, c i ......... ........................................
30°. Expédition du jardin d eV ien n e, par
le sieur Saint-Marcel, au sieur de Boissieu,
son gendre , le 28 mai 1788 , pour trois
t
mille cinq cents francs, c i .............................
3600
31°. Délaissement de fonds par le sieur
50218 fr.
�( 25 )
C i-con tre.......................
St.-Marcel, en faveur du syndic de l’hôpital
du P u y , le 6 novembre 1782, au prix de
trois cents fr., avec promesse que les pauvres
assisteront i\ son décès, ainsi qu’est d usage
d’y assister lors du décès d’ un bienfaiteur,
ci.............................................................................
5 o 2 i 8 fr.
300
320. Autre délaissement de fonds, par le
même , en faveur du directeur de 1 HotelD ieu , le 9 février 1783, au prix de quatorze
cents francs, c i ..................................................
1400
T o t a l .............................................
5 i9 i 8
fr.
À
Qu’ on ajoute les 3000 f r . , montant du legs fait a la
dame Saint-M arcel, le 5 février 1 7 7 3 » e*- recueilli Ie 170 t«. 1 3 - n i 7 /_ —
décembre suivant, l’on verra qu’il y avoit entre les mains
J2.
du sieur de Saint-Marcel, -5^yt 8 -fr. pour f<nre face aux
dettes exigibles de son vivant^
Par quel inconcevable caprice le sieur Saint-Marcel
a-t-il donc vendu le domaine de Chaspuzac ? L e sieur
Souteyran , sous le nom du sieur Saint-M arcel, voulut
justifier cette vente, en donnant un état des prétendus
payemens faits par le sieur S a in t-M a rc e l, et qu’il fait
porter à la somme de 76619 fr. •, de sorte que m ê m e en
«joutant le prix de la vente de Chaspuzac, le sieur SaintMarcel se trouveroit encore en avance.
, ,
M a i s de quel droit le sieur S a i n t - M a r c e l se seroit il
permis de payer des prétendues dettes non c o m p i is e s e n
l’état fait double entre son gendre et lu i ? d un a u t ie côte,
comment ces payemens sont-ils justifies? la ph*Pa it p^ï1
�(
)
des quittances sous seing p r i v é , qui n’annoncent que des
dettes fictives ou des dettes postérieures au contrat ; par
des remboursemens de capitaux aliénés à titre de rentes
constituées avec toutes retenues ; dettes qui ne pouvoient
exiger l’aliénation des immeubles. Ce seroit de la part
du sieur de Saint-Marcel la plus mauvaise administra
tion , s’il eût été propriétaire : c’est un mandataire infi
dèle , qui a excédé ou abusé de son mandat, dès qu’il
n’avoit qu’un titre précaire.
D e v o it- il encore aliéner des immeubles pour remLoui’scr à la dame Saint—J uIicj , sa fille , un capital qui
ne produisoit aucun in té rê t, qui n’étoit exigible qu’un
an après son décès, qui par conséquent n’étoit pas sa
dette personnelle? C ’est à sa iille de Boissieu qu’il devoit
laisser ce soin ; c’est elle seule qui étoit chargée de cc
remboursement.
L e sieur de Saint-Marceljétoit d’autant moins excusable,
qu’indépenàamnient des sommes provenues des ventes
multipliées qu’il a faites, il avoit encore tous les effets,
meubles et bijoux de la dame Arcis , son épouse, qui
avoit joui de ses biens aventifs considérables, puisqu’elle
avoit recueilli la succession de la dame Bossolade, sa
m ère, et de deux oncles. L e sieur de S a in t-M a rce l ne
s’ é t o i t - i l pas réservé encore ses contrats, les arrérages
des rentes, des baux de ferme, toutes ses dettes actives?
N ’étoit-il pas plus naturel d’utiliser ces objets , de les
vendre, et eu employer le prix à l’acquittement des dettes?
Toutes ces circonstances établissoient que la vente du
d o m a i n e de Chaspuzac avoit été faite sans nécessité comme
sans cause; qu’elle étoit le fruit de l’intrigue, de la pré-
�( 27 )
vcntion et de l’artifice; qu’elle avoit été Consentie par
une personne incapable ; que dès-lors elle devoit être
déclarée nulle.
Les sieur et dame Saint-Clément donnoient une nou
velle force à ces moyens, en argumentant de la vilité du
prix de cette vente. Cette vilité est démontrée par les
baux de ferme. O n voit en effet que ce domaine étoit
affermé sous la réserve du bâtiment du m aître, de tous
les bois pins, de toutes les plantations qui sont autour
¿es propriétés, et du verger qui environne les bâtimens,
moyennant 5oo francs argent, vingt-deux setiers seigle,
de seize cartons le setier ; quatre setiers o r g e , même
mesure; huit cartons de pois blancs, cinquante livres
beurre, et cinquante livres de fromage, quatre paires de
chapons, dix-huit livres chanvre, deux charges de raves,
d une charge pommes de terre, le tout portable au P u y ;
dix journés de bœufs , la moitié de la tonte des arbres ,
tous les plançons à planter par le ferm ier, le chauffage
a la ville et à la campagne.
Si on ajoute qu’à l’époque de la vente la dîme étoit
suppi im ee, on verra qu’un domaine qui rapporte plus
de 2000 francs de revenus n’a été vendu, le 21 octobre
I 79 I j que 21100 fr. assignats, n’a été estimé, le 14 mai
I 79 2 ? qu’ une somme de 21427 fr, assignats, q u i , d’après
1 échelle du tem ps, donne la somme de 14784 liv. 12 sous
en numéraire.
après ces détails , ilsembloit que la n u l l i t é delà vente
ne pouvoit faire la matière d’un doute : cependant la
cause portee à l’audience du tribunal du P u y , le 12
m;u i 8o7 , les siçur et dame S a i n t -Clément ont sncD 2
D
�(
2
8
)
combé. l î est indispensable de connoître les motifs et
le dispositif de ce jugement. Les premiers juges posent
trois questions.
i° . L e sieur de Saint-Marcel a-t-il été autorisé, en exé
cution des clauses insérées au contrat de mariage des sieur
et dame de Boissieu, à vendre le domaine de Chaspuzac?
2 °. L ’opposition faite de la part des mariés de Boissieu
et Saint-Marcel peut-elle être considérée comme un moyen
suffisant pour opérer l’annullation de la vente?
3°. Cette vente peut-elle êti’e considérée comme faite
à v il p r i x , en ce qu’elle n’a pas été précédée d’ une
estimation contradictoire avec les parties intéressées; et,
sous ce rap port, doit-elle être déclarée n u lle ?
« Attendu qu’il résulte des clauses insérées au contrat
« de mariage du sieur Salvaing de Boissieu , et de dame
« Marie-Françoise-Louise de Saint-Marcel, qu’il fut con« venu entre les parties contractantes, que le sieur de
«
«
«
<f
«
«
«
«
«
«
«
Saint-Marcel et son épouse, donateurs, aïeuls des demandeurs , auroient la faculté de vendre les domaines,
champs et vignes spécifiés au contrat de mariage,
parmi lesquels se trouve compris le domaine de Cliaspuznc , vendu au sieur Souteyran ,
o
i n. Pour le payement de la somme de 9000 francs,
restée due au sieux- de Boissieu, pour la constitution
de dot de son épouse; 20. pour la somme de 12600 fr.
du premier payement de la dot de la dame SaintJu lien , outre ceux qui écherront à l’avenir; 3°. pour
les autres dettes passives des donateurs; 40. pour la
réserve de 12000 francs faite par les donateurs, à
« la charge que les ventes seroient faites à leur juste
�« valeur et sur le pied de l’estimation ; à la chaige encore
« d’en rapporter un légitime em ploi, de conformité à
«l’état connu des parties;
.
« Attendu qu’il est indifférent que le domaine de
« Chaspuzac ait été rappelé le dernier des ° je s
« vendre, puisqu’on n’avoit pas obligé les donateurs
« l’aliéner qu’après avoir épuisé les autres héritages rap« pelés en ordre a n t é r ie u r e m e n t ; q u ’il étoit par conse« quent libre à ces derniers de vendie le domaine contei
« tieux avant les autres objets dont l’aliénation etoit
« autorisée ;
« Attendu qu’il résulte de la combinaison des clauses
« insérées au contrat de m ariage, avec 1 état connu es
« parties dont il y est fait mention , que les donateurs
« pouvoient aliéner des biens dependans de leur patii
« m o in e , jusqu’à concui'rence, i° . d’une somme de
« 4960 0 fr. ; 2°. (le celle de 9000 francs , pour reste de la
« dot d e là dame de Boissieu; 3°. de celle de 1200 fr.
« pour la réserve stipulée par les donateurs; 40. enfin
« pour la somme de 4000 francs additionnée à l’effet
« connu des parties, ain si que les demandeurs en
« conviennent ;
« Que ces diverses sommes s’élèvent à celle de 74 6 0 0 fi.
« Attendu que d’après les états produits des ventes,
0 le prix total d’icelles ne s’élevoit p as, lors de la vente
« de Chaspuzac, à beaucoup pi’ès, à la s u s d i t e somme
« de 74600 francs; que dès-lors , en exécution du conlia
« de mariage, l e s . donateurs ou l’un deux étoient auto« risés à vendre le domaine contentieux , poui p u venir
« au payement des dettes dont étoient g r e v é s les biens par
« eux donnés ; qu’en supposant qu’après les dettes payées,
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( 30 )
il se fût trouvé de l’excédant, la vente du domaine
n’en seroit pas moins v a la b le , puisque les vendeurs
n’auroient été obligés que d’en faire un e m p lo i, ou
de placer cet excédant en mains sûres, du consentement des donataires ;
« Attendu qu’on ne peut pas soutenir raisonnablement
que les sieur et dame S a i n t -M arcel ne fussent autorisés à anticiper les termes de la dot de la dame de
Saint-Julien , puisqu’il résulte tant du contrat de mariage que de l ’état y m en tion n e, qu’il etoit libi'e aux
donateurs de vendre j u s q u ’ à concurrence de 20ooo fr.
qu’ils restoient devoir pour cet objet, et qu’on ne
les avoit restreints par aucune clause prohibitive dans
ce même contrat, à attendre l’échéance de tous les
termes de la constitution
de dot y;
«
« Attendu qu’il seroit également injuste de prétendre
« qu’il devoit se faire une compensation du produit des
«
«
«
le
«
«
«
ventes des biens de la dame de Saint-M arccl, faites
par son mari antérieurement au contrat de mariage
des sieur et dame de Boissieu, avec la réserve stipu
lee au contrat d’une somme de 12000 francs , puisqu’il
résulte de l’esprit et de la lettre de ce dernier contrat
que les donateurs avoient entendu n’être pas recherchés
à raison desdites ventes par les donataires.
« En ce qui touche l’opposition faite par les mariés
« de Boissieu et Saint-Marcel, envers la vente du domaine
a de Chaspuzac ;
« Attendu qu’étant établi que le sieur de Saint-Marcel
« étoit suffisamment autorisé à vendre le domaine con« tentieux, et qu’à l’époque de la vente les dettes dé« clarces tarit dans le contrat de mariage que dans l’état
/
/
�( 31 )
« y énoncé, n’étant pas entièrement payées, on doit né
cessairement convenir que l’opposition dont il s’agit
ne devoit pas arrêter la vente du domaine, et qu’ainsi
cette opposition ne sauroit être un motif suffisant pour
constituer l’acquéreur en mauvaise fo i, et opérer la
nullité de la vente.
« En ce qui touche le moyen de nullité proposé sur
la vilité du prix de la vente, et du défaut de l’esti
mation préalable faite contradictoirement de l’objet
dont il s’agit;
« Attendu qu’en supposant qu’il y eût de l’irrégula
rité quant au défaut d’estimation, et que la vente eût
ete faite à vil prix,.ces deux circonstances ne sauroient
en faire prononcer la nullité ; que les demandeurs ne
pourroient tout au plus qu’être reçus à faire procéder
à une nouvelle estimation , eu égard à la valeur de
l’objet vendu à l’époque du-contrat de ven te, pour
en réclamer l’excédant, si toutefois il étoit établi qu’il
n’a pas été vendu à sa juste valeur.
« D ’après ces motifs , le tribun al, faisant droit aux
conclusions prises par M e. Souteyran, sans avoir égard
à celles prises par les demandeurs, non plus qu’à l’op
position faite par les sieur et dame de Boissieu, à la
vente du domaine de Chaspuzac, les a démis de leur
demande en nullité de la vente par fin de non-valoir;
ce faisant, a maintenu M«. Souteyran dans la propriété
et jouissance du susdit domaine; demeurant néanmoins
lé se rjé aux sieur et dame de Saint-Clément de faire
procéder, si bon leur semble, à leurs frais avancés,
1 estimation du susdit domaine, eu égard à sa valeur
�( 32 )
« à 1 époque du contrat de vente, et ce par experts con« venus ou pris d’office : les condamne en tons les dépens
« tant envers le sieur Souteyran qu’envers le curateur à
« l’hoirie vacante. »
Cette rédaction n’est pas un effort de génie; elle est
un tissu d’erreurs et d’absurdités. Les sieur et dame de
Saint-Clément n’ont pas hésité à en interjeter appel. Ils
vont démontrer que ce jugement a tout à la fois consacré
l’injustice, et violé les principes les plus connus.
C ’est dans le contrat du 8 juin 1762 qu’il faut chercher
la solution des questions à juger. Les premiers juges disent
qu’ils en ont combiné les clauses , qu’ils ont apprécié
Tesprit et la lettre de ce contrat, et que le résultat est
tout en faveur du sieur Souteyran. Il s’agit donc d’analiser
cet acte, qui ne laisse point de louche dans son interpré
tation.
Il contient d’abord une donation entre-vifs, irrévocable
et dotale, au profit de la dame de Boissieu, de tous les
biens meubles et immeubles, présens et à v en ir, des sieur
et dame Saint-Marcel, donateurs.
Cette donation emporte dessaisissement actuel de tous
les biens présens, puisqu’elle est accompagnée de la tra
dition la plus ordinaire, la réserve de Cusufruit au profit
des donateurs.
A la vérité , elle est tout à la fois de biens présens
et à ven ir, ce qui nécessite la survie du donataire pour
en calculer les effets, mais n’emporte pas moins la tra
dition de tous les biens présens ; puisque le donataire,
comme on le sait, a le droit d’abdiquer à la mort du
donateur les biens à v e n ir, pour s’en tenir aux biens
présens.
Au
�( 33 )
A u moyen de cette abdication, le donataire a le droit
de conserver la propriété de tous les biens qui existoient
lors de la donation, sans autre charge que de payer les
dettes antérieures à cette môme donation.
Tels sont les principes certains en cette matiere, con
sacrés par l’ordonnance de 1731.
Les sieur et darne de Saint-Clém ent, par représen
tation de la dame de Boissieu , leur m ère, o n t déclare ,
au moment de l’ouverture de la succession du sieur Saint"M a rc e l, qu’ ils abdiquoient les biens à v e n ir , pour s’en
tenir aux biens présens : les voilà donc irrévocablement
propriétaires de tous les biens qui existoient le 8 juin 1762.
11 est vi'ai que lors de ce contrat de mariage les dona
teurs se sont réservé,7*nonobstant la donation ,* la faculté
de vendre certains biens qui en faisoient partie.
Mais cette faculté exorbitante est subordonnée à des
conditions et à des causes disertement exprimées , et dont
il etoit impossible de s’écarter : dicta lex est contractui.
Dans un contrat de m ariage, tout est à l’avantage des
époux ; tout doit être largement et libéralement inter
prété pour eux : le père lui-même est présumé s’être
conduit avec des intentions libérales pour l’avantage de
ses enfans ; et tout ce qu’il a fait ou voulu faire est
toujours censé en leur faveur.
Les conditions apposées à la vente ne sont pas des
conditions potestatw es, elles sont irritantes. On ne peut
séparer la faculté de la condition; l’une ne peut subsister
sans l’autre. Tels sont encore les principes généraux.
O r , peut-on dire que la fa c u lté de vendre, réservee
dans le contrat de mai’iage de la dame de Boissieu, soit
E
�( 34 )
une faculté absolue et illimitée ? N ’est-il pas évident,
au contraire , qu’elle est restreinte à un objet prévu ,
passé ou présent, c’est-ù-dire, le payement des dettes
contractées antérieurement à la donation, et qui existoient
alors ? Dans ce cas, l’événement ou la cause étant déter
miné , la condition en est inséparable ; elle anéantit ou
fait subsister la faculté , sans qu’elle puisse être étendue
d’un cas à un autre. Conditio in prœteritum non tantum
in prœsens tempus rela ta , statim a ut peremit obligatio n em , ant omnino non diff'ert. L . 100, ff. Ü ü verb.
obligat.
En effet, les sieur et dame de Saint-Marcel ne se ré
servent la faculté de vendre que pour certains objets :
i°. pour le payement de la somme de gooo francs, qui
faisoit le complément de l’avancement d’hoirie de la
dame de Boissieu ; 2°. pour la somme de 12600 f'r. due
à la dame de Saint-Julien, et pour acquitter les autres
dettes passives des donateurs.
Si le montant de ces dettes passives n’est pas exprimé
au contrat, c’est parce qu’il est dit et répété que cet état
est connu des parties. On voit en effet que le même
jour cet état a été donné au sieur de Boissieu, et que
les père et mère ont certifié qu’il étoit le même que celui
dont il a été fait mention dans le contrat de mariage,
et auquel on s'oblige de se conformer.
Si les père et mère, en se réservant la faculté de vendre
pour acquitter le premier terme de la dot de la dame
Saint-Julien, ont ajouté ces mots : Outre ceux q u i écher
ront à l'a v en ir, ils n’ont pu nécessairement entendre
que le premier terme qui devoit échoir un an après la
�( 35 )
mort du premier d’entr’e u x , c’est-à-dire, ioooo francs :
il est impossible qu’ils aient eu en vue celui qui ne devoit
être payé qu’après le décès du survivant. Cependant on
v o it, dans l’état annexé au contrat, qu’ils y ont compris
ces deux termes; e t, malgré cette cumulation, l’état des
dettes ne se porte qu’à 49600 francs.
Ce seroit donc donner une grande latitude à la faculté
reservée, que d’autoriser les ventes jusqu’à concurrence
de 49600 francs, en les employant à l’acquittement de
ces dettes connues.
Mais encore à quelle condition devoient être faites ces
ventes ? Suivant le co n tra t, on ne pouvoit les faire
qu’avec délégation aux créanciers; ët la plupart des ventes
ne contiennent aucune délégation.
Les sieur et dame de Saint-Marcel ne pouvoient vendre
les immeubles qu’à leur juste valeur, et sur le pied de
I estimation : partout il y a vilité de p r i x , et jamais on
n’a pris la précaution de faire estimer.
Les donateurs devoient rapporter un légitime em p lo i,
de conformité à l’état connu des parties, et aucun acqué
reur n’a veillé à cet emploi.
La première somme qui devoit être acquittée étoit
celle de 9000 francs, servant à compléter l ’a v a n c e m e n t
d hoirie de 20000 francs, constitué à la dame de Bois
sieu; et le sieur de Boissieu n’a jamais reçu cette somme;
II n’a touché sur celle de 20000 francs', c o n s t i t u é e en
avancement d’h oirie, qu’une somme de 12000 francs,
en payemens m orcelés, o u , comme il le dit, et comme
e Pkre en convient dans ses lettres, à parties brisées.
yns le contrat on désigne par ordre les immeubles
E 2
�( 36 )
qui doivent être vendus. L e domaine de Chaspuzac est
le dernier qui peut l’être : il faut épuiser tous les autres
avant d’en venir à celui-ci; et cependant il a été vendu,
tandis que les autres, notamment O rzü la c, un des pre
miers désignés, est encore existant dans la succession.
Les premiers juges, à la vérité, sont peu touchés de
cette circonstance. Peu im p orte, disent-ils, que Chasp uzac soit le premier ou le dernier; il auvoit fallu une
prohibition expresse d’aliéner celui-lu avant les autres;
et comme il n’existe pas de clause de ce genre, le sieur
de Saint-Marcel a pu faire comme il lui a plu.
C ’est étrangement raisonner. Il n’y a rien d’inutile dans
un contrat de mariage. N ’est-il pas raisonnable de penser
que lorsque les donateurs se sont réservé la faculté de
v en d re, ils ont dû d’abord penser aux objets les moins
importans et les moins précieux? Et ils ont bien claire
ment stipulé que le domaine de Chaspuzac ne pourroit
être vendu que le dernier, par ces expressions limita
tives, et finalem ent : ce qui veut dire, en bon français,
qu’une'chose doit être fajte avant l’autre; c’est-à -d ire,
que les premiers immeubles désignés doivent être épuisés
avant d’en venir au dernier. .
En un m o t, les pèi’e et mère donateurs n’avoient plus
sur les biens donnés qu’un titre précaire : s’ils en conservoient l’administration par leur réserve d’usufruit, ils
ne pouvoient plus en disposer à titre gratuit.
S’ils se sont reserve la f a c u l t é de vendre une portion
de ces biens donnés, ils se sont imposé des conditions
dont ils n’ont pu s’écarter. Ils ne pouvoient aggraver la
condition des donataires, sans manquer à la foi promise.
�C 37 )
Ils sont devenus de simples mandataires, les procureuis
constitués de leur fille, et ont dû se renfermer dans leur
mandat. Personne n’ignore que le mandataire qui a ex
cédé ses pouvoirs, ne peut engager le mandant : la loi 10,
au cod. D e p ro cu r, en a une disposition expresse. ^
Quelle étoit la charge des mandataires ? Us devoient
vendre pour cause légitime ; ils devoient déléguei le p iix
des ventes aux c ré a n c ie rs connus •, ils devoient iaiie un
emploi des deniers -, ils devoient vendre les immeubles
à leur juste valeur, et sur le prix de l’estimation. Toutes
les ventes sont faites sans délégation, sans em ploi, sans
estimation ; donc toutes les ventes sont nulles.
Celle consentie au sieur Souteyran a des ciiconstances
particulières auxquelles l’acquéreur ne peut échapper.
Il a connu le vice de son acquisition; il a été aveiti de
l ’incapacité du vendeur; il a acheté sciemment un procès j
comment p o u rro it-il donc résister à la demande en
nullité ?
Il faut se rappeler que les sieur et dame de Boissieu
avoient été prévenus des manœuvres pratiquées auprès
du sieur de Saint-Marcel par le sieur Souteyran père,
pour se faire vendre le domaine de Chaspuzac.
Les sieur et dame de Boissieu, pour l’é v ite r , firent
notifier une opposition au sieur Souteyran , le 3 1 mars
1 7 9 1, et lui donnèrent copie du contrat de mariage , du
8 juin 1762 , qui étoit le pacte de famille.
Par cette notification , les sieur et dame de Boissieu
apprenoient au sieur Souteyran que le sieur Saint i
étoit dans l’incapacité d’aliéner ; qu’il »voit épuisé la
�( 38 )
quotité permise ou réservée, et que désormais toute vente
par lui consentie seroit absolument nulle.
La première idée que devoit faire naître cette décla
ration , surtout à un homme d’affaires, étoit d’abandonner
tout projet d’acquisition.
En effet, c’étoit acquérir un procès; c’étoit entrer en
litige sur le fo n d du d ro it, puisqu’on contestoit la capa
cité du vendeur.
A u m oins, si on ne v o u l o i t pas acheter de procès,
devoit-on, avant tout, faire statuer sur l’opposition qui
avoit été formée par le sieur de Boissicu : les tribunaux
en a u r o i e n t apprécié le mérite. C ’étoit un procès de fa
mille une discussion qui nécessiloit l’examen des droits
du s i e u r de S ain t-M arcel, de l’état des ventes par lui
faites, des dettes par lui payées; en un m o t, des affaires""
les plus secrètes de l’intérieur de cette fam ille, dans les
quelles le sieur Souteyran ne devoit pas pénétrer.
Mais celu i-ci croit pouvoir tout braver. Un procu
reur qui a de l’empire sur son c lie n t, le détermine à lui
v e n d r e , pour avoir le droit de plaider le surlendemain, ,
e t d’entamer un procès qui dure depuis cette vente. Aussi
voit-on le plaisir qu’avoit le sieur Saint-Marcel d’avoir
si bien choisi son acquéreur. Par une première lettre
du 27 octobre 1 7 9 1 , le père écrit à sa fille qu’ il a dé
pouillée deux jours auparavant, q u 'il lu i sera f o r t a isé
de fa ir e valoir cette vente.
Plusieurs lettres ensuite, des 5 , 9 , 1 9 , et jours snivans
dii mois de
novem bre,
portent « q u ’il a fait cette vente
« pour se libérer envers sa fille d’une somme de 12000 f . ,
�( 39 )
quoique non payable q ua p rès l u i , qu’il a bien voulu
gi'atuitement lui payer, parce q u i l lu i a plu a in si ;
que sa fille et son gendre se souviennent qu’ils auront
affaire cï un hom m e de loi entendu, q u i saura bien
donner au contrat de vente toute l ’authenticité et
valeur qu’il mérite. »
Dans une autre il écrit que « les sieur et dame de
« Boissieu auront affaire à un homme de loi q u i les
« mènera dur • que de son côté il a tant de moyens
« de faire repentir M. de Boissieu de tout ce qu’il a osé
« entreprendre, qu’il en sera toujours la d up e, et en
« payera la façon. »
L e sieur Souteyran donne bientôt cette satisfaction à
son vendeur, puisque le surlendemain il assigne le sieur
de Saint-Marcel pour faire valoir la vente , donne son
gendre pour avoué au sieur de Saint-Marcel, et fait mettre
en cause les sieur et dame Boissieu.
Mais cet hom m e de l o i , q u i d e v o i t si b i e n s a v o i r son
métier, qui devoit donner à cette vente une s i grande
«
«
«
«
«
«
authenticité et v a leu r, qui avoit sous les y e u x le contrat
de mariage de 1 7 6 2 , s’aperçoit cependant qu’il ne s’est
pas conformé aux clauses du contrat, et que la vente est
nulle.
Il croit réparer sa faute en dérogeant à cette vente
par un acte postérieur, et en faisant estimer pour la forme
le domaine qu’il venoit d’acquérir. Mais s’il s a v o i t si
bien son m étier, comment n’a-t-il pas vu que cette esti
mation devoit être contradictoire avec les sieur et dame
Boissieu ; qu’elle ne pouvoit etre faite amiablement, sans
form alité, et par un seul expert. O n ne voit là que ma-
�( 4° )
la dresse , embarras d’ un liomme incertain , comme on
l ’est toujours quand 011 achète un procès ; et le sieur
Souteyran a évidemment trompé le sieur de Sainl-Marccl
dans son attente.
Cet homme de loi si instruit croit justifier d’un em ploi,
en payant à la dame de Saint-Julien une somme qui ne
lui étoit pas due; en faisant porter le surplus du prix
sur une réserve qui ne devoit être prise que sur les
biens à v en iri et il étoit échu des biens depuis la do
nation , notamment le legs de 3000 fr. de la dame veuve
Calmar.
Cet hom m e de lo i ne s’est pas dissimulé le vice de
son acquisition, puisqu’il a essayé de le réparer : il
s’est jugé lui-même; comment donc pourroit-il échapper
ù la nullité ?
Il
étoit homme de lo i; le sieur de Saint-Marcel étoit
son client ; il a acquis un procès : il y avoit contestation
sur le f o n d du d r o it, puisqu’on attaquoit la capacité
du vendeur. La chose étoit donc litigieuse, d’après l’art.
1-700 du Code N ap oléon , qui ne fuit, en ce p o in t,
que rappeler les anciens principes. L e sieur Souteyran
n’a donc pu acquérir ; sa vente est réprouvée par les
lois anciennes et nouvelles. Les lois P e r d ¡versos mettent
au dernier rang de la société ceux qui achètent des procès;
l ’article 54 de l’ordonnance de i 56o défend à tous juges,
avocats, procureurs, d’en acquérir. Colle prohibition est
renouvelée par l’article 1697 du Code Napoléon. Et
ce n’est point ici le cas d’une subrogation; c’est un vice
radical, qui entraîne la nullité de la vcnle : il y a iucapacité absolue de la part de l’acquéreur.
Le
�( 41 )
L e sieur Souteyran ne justifiera jamais cette acquisition.
Quels sont en effet les moyens qu’il a proposés pour
sa défense ? O n les trouve répétés dans les inotifs du
jugem ent, qui les a adoptés dans leur entier.
Il
prétend, i ° . que les père et m ère, lors du contrat
de mariage de 1762 , stipulèrent la faculté de vendre et
aliéner les immeubles y désignés, parmi lesquels on trouve
le domaine de C haspuzac ,• il en tire la conséquence
que la propriété de cet immeuble ne quitta jamais le
donateur; et si le sieur de S a in t-M a rce l a voit ju s in
7'c , pourquoi le sieur Souteyran père n’auroit-il pas
acquis?
L e sieur Souteyran, en proposant ce moyen , ne s’aper
çoit pas qu’il commet une erreur évidente. La donation
portée au contrat de mariage de 1762 est universelle; les
donateurs ne se réservent que l’usufruit, ce qui est une
tradition feinte qui emporte le dessaisissement de la pro
priété : et si les donateurs conservent.la faculté d’aliéner
certains im meubles, ce n’est que comme mandataires de
leur f ille , et en remplissant toutes les conditions qu’ils
se sont imposées.
L e sieur Souteyran rit de l’opposition qui a précédé
la vente ; il trouve plaisant que les appelans aient la
prétention de penser qu’avant d’acquérir le domaine de
Chaspuzac il auroit fallu faire statuer sur l ’o p p o s itio n :
le sieur Souteyran ne trouve aucune loi qui l’y ait oblige.
Il semble cependant que la loi se trouvoit dons le contrat
môme qu’il avoit sous les yeu x; qu’ un donataire universel
a lè droit de s’opposer à ce qu’on vende les objets qui
font partie de la donation. L e contrat fait la loi des parties :
F
�( 42 )
dicta lex est contractai. S’il restoit des dettes à acquitter,
le sieur de Boissieu n’avoit-il pas le droit d’arrêter les
ven tes, en offrant de payer les dettes ? Son opposition
avoit pour objet de prouver qu’il n’existoit pas de dettes,
et que la faculté de ven d re, réservée par le contrat, étoit
absorbée.
L e sieur Souteyran répond à cet argument, en disant
que M . de Boissieu s’appeloit Monsieur court d’argent;
qu’il avoit été obligé de stipuler dans son contrat la
permission honteuse d’aliéner des immeubles de son
épouse ; que lui Souteyran avoit prêté 3000 francs au
sieur de Boissieu, en 1780, et avoit été obligé de lui
envoyer les huissiers.
Ce n’est là qu’une grossièreté qui ne répond ni au
point de fa it, ni au point de droit. Tous les jours on
voit dans les contrats de semblables permissions d’aliénei*,
sans qu’on ait jamais regardé des clauses de ce genre
comme honteuses. Elles sont plutôt des clauses de con
venance , pour faciliter des reviremens de fortune , et
annoncent au contraii'e une grande confiance dans la
solvabilité du m ari.
L e sieur Souteyran veut prouver la légitimité de cette
vente, par l’état des ventes précédentes, et des payemens
qui o u i été faits par le sieur de Saint-Marcel. Mais on
a vu au contraire, par ces états, que le sieur de SaintMarcel avoit abusé de la permission , et excédé son
mandat, p u i s q u ’ il avoit vendu au-delà des sommes portées
en l’état donné au sieur de Boissieu, le jour du mariage;
état qui se réfère sut contrat , et ne fait qu un seul et
même acte.
�( 43 )
L e sieur Souteyran approuve le sieur de Saint-Marcel
d’avoir anticipé le payement de la dame de Saint-Julien,
comme d’avoir pris les 12000 francs de sa réserve. L e
contrat lui en donnoit le droit; et s’il avoit pris un terme
avec la dame de Saint-Julien , c’étoit un avantage qui
lui étoit personnel ; il étoit le maître d’en user sans que
la dame de Boissieu pût s’en plaindre. Mais comment
accorder cette proposition avec ce qui est exprimé dans
l ’état, que la somme de 25 ooo francs due à la dame de
Saint-Julien , est payable a u x termes portés p a r son
contrat de mariage. Telle est la loi des parties. 11 ne
pouvoit y avoir qu’un seul terme exigible, c’étoit celui
payable un an après le décès du premier mourant. Ce
terme étoit échu depuis le 16 juin 178 5; il étoit payé
depuis le mois de novembre 1784, ainsi que la quittance
en fait foi : le payement du surplus, fait à la dame de
Saint-Julien, n’a donc pas été une cause légitime de
vente , ni un légitime emploi ?
L a réserve ne devoit être prise que sur les biens à
venir, et il en étoit échu de cette nature : on ne pouvoit
donc vendre pour cet o b je t, sans avoir épuisé les pre
miers. D ’ un autre cô té, le sieur de Saint-Marcel avoit
déjà employé sur cette réserve, partie du p rix du jardin
de V ie n n e , qu’il avoit délaissé à son gendre : il l’avoit
ainsi exigé. Coinmentdonc a-t-il pu vendre ainsi p o u r cet
objet ? E n vain le sieur Souteyran diroit-il que le sieur
Saint-Marcel s’étoit réservé la faculté de disposer de cette
somme, tant à la vie qu’à la mort : en vain accuseroit-il
les appelans d ’a v o i r tronqué cette clause du co n tra t,
quoiqu ils aient fait imprimer le contrat en entier. Une
�( 44 )
disposition gratuite ne s’en lend ordinairement que pour
avoir effet après la mort. Auroit-elle dû avoir effet pendant
la v i e , que le sieur de Saint-Marcel devoit, dans tous
les cas, épuiser les biens a venir échus avant la dona
tion ; et c’est ce qu’il n’a pas fait.
L e sieur Souteyran prétend que les appelans usent dé
la chicane la plus rafinée, en soutenant que le domaine
de Chaspuzac ne pou voit être vendu que le dernier. L ’or
dre énoncé au contrat lui paroît la chose la plus indif
férente. L e sieur de Saint-Marcel a bien fait de garder
O rzilla c, qui est plus avantageusement situé que Chas
p u za c : d’ailleurs Chaspuzac a été vendu à son p r i x , et
le sieur Souteyran consentiroit même à une nouvelle esti
mation. Il se fait ensuite des complimens sur sa proposi
tion honnete et lo y a le, et termine par se répandre en
injures contre les sieur et dame de Boissieu, qui ont fait
mourir leur père insolvable. Comme il faut être consé
quent, il vante ensuite la fortune qu’il leur a laissée, en
faisant avec emphase l’énumération des immeubles qui
leur restent.
Cette diatribe ne vaut pas la peine d’une réponse. On
croit d’ailleurs' avoir prouvé , par ce qui précède, qu’en
effet le domaine de Chaspuzac étoit le dernier en ordre,
et ne pouvoit être vendu qu’après que les autres auroient
été épuisés.
Q u ’importe que ce domaine de Chaspuzac fût un patri
moine du sieur Saint-Maicel, des qu il 1 avoit déjà d on n é,
ou qu’il ne p o u v o i t vendre qu’à des conditions qu’il n’a
pas remplies? Si la dame Saint-Clément a déjà échoué
dans une demande en nullité de vente d’un bien dotal de
�( 45 )
la dame Saint-Marcel, le sieur Souteyran ne peut in vo
quer ce préjugé, puisqu’il y a appel en la cour de ce juge
ment qui choque ouvertement les principes, et qu’il y sera
nécessairement réformé.
O n ne doit pas passer sous silence l’énonciation qui se
trouve dans un des motifs du jugement. Il y est dit qu’il
avoit été additionné à l’état connu des parties une somme
de 4000 francs, et que les demandeurs en conviennent.
C ’est une fausse énonciation, qui ne peut être que le
fruit de l’erreur ou de la surprise. V oilà l’inconvénient
de laisser rédiger les jugemens par les parties intéressées.
Il n’y a aucune trace de cet aveu dans toute la procé
dure. Ce seroit d’ailleurs contre toute vérité, parce qu’il
n’y eut jamais d’addition à l’état annexé au contrat, et
remis au sieur de Boissieu. C ’est une allégation controuvée
du sieur Souteyran, et qui doit être effacée du jugement.
En résumant : les circonstances, les motifs de considé
ration , ainsi que les moyens de droit, tout se réunit en
faveur des sieur et dame de Saint-Clément. Ils réclament
le patrimoine de leur mère : ils n’en ont été privés que
par caprice ; et la cupidité des acquéreurs ne doit pas leur
profiter.
Signé S A U Z E T D E S A I N T - C L É M E N T .
M e. P A G E S ( d e Riom ) , ancien
a v o c a t.
M e. G A R R O N jeu n e, avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de
T h ib à u d - L a n d r io t , im p r im e u r
de la Cour d ’appel. — Avril 1808.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Salvaing de Boissieu, Marie-Ursule. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Garron
Subject
The topic of the resource
abus de faiblesse
successions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Dame Marie-Ursule Salvaing de Boissieu, et sieur Jean-Pierre Sauzet de Saint-Clément, son mari, appelans d'un jugement rendu au tribunal du Puy, le 9 mai 1807 ; contre Jean-André-Guillaume Souteyran, ancien avocat, intimé ; et encore contre le curateur à la succession vacante du sieur Pierre-Antoine Brunel de Saint-Marcel, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1735-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0507
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
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Domaine public
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abus de faiblesse
Successions
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MEMOIRE
EN R É P O N S E ,
sieur A n t o i n e BR E C H E T ancien chef
d’escadron habitant de la ville de Clermont,
.
J..
;
■ <
...t:
intime;
P our
C ontre
•
1
E
dame
J e ANNE-Fr a n çoise
DE
V E N Y , veuve dw sieur S i c a u d - DE M a r i o l ,
habitante de la même ville, appelante à un. juge
ment rendu au tribunal d’arrondissement de
Clermont, le 1 5 août 1 8 0 7 ;
n p r é s e n c e
de dame M A R I E A V E L I N
veuve du sieur V È N Y d e T h e i x , tutrice légale
de demoiselle A n n e - F r a n ç o is e - J e a n n e d e V é n y ,
sa fille;
E t de dame F r a n ç o i s e V E T H I Z O N -V E N Y ,
fille adoptive du sieur V e n y d e T h e i x , et du
sieur J e a n - B a p t i s t e D E V È Z E } son mari:
tous intimés.
L A dame veuve de M ariol a présenté comme tresurgente une cause fort com pliquée. Pour prouver cette
A
�( a )
urgen ce, elle a fait publier sur l’appel un mémoire im
p rim é , de quarante-sept pages petit caractère, dans le
quel on est obligé de chercher péniblement les questions
qu’elle fait naîtrep
r \
On a cru d’aborcl qu’elle a voit voulu donner une
édition /nouvelle.du M ém orial de la.cou r.d e cassation'
et sans doute le soin qu’elle a eu de faire réimprim er
cette collection d’arrêts, avoit pour objét de donner des
leçons à ses juges.
•‘
' i
E lle ajoute , d it - o n , qu’elle a des protections puis
santes : c’est vraisemblablement pour intimider le sieur
Brecliet; Insenkéb! la daine de M ariol ne peut pas ignorer
qu’en la cou'r1les .protections et les manœuvres sont plus
dangereuses qu^ tiles ; que les magistrats savent tenir
d’une main ferme la balance de T h ém is, et que les per
sonnes n’y sont d’aucune considération.
\ X>avdame veuve de M ariol pourroit-elle être protégée
lorsqu’elle ose attaquer des règlemens de famille qu’elle
doit respecter , r é c l a m e r c o n t r e sa p r o p r e conscience
l ’exécution des titres dont la fraude et la simulation sont
évidentes, et qu’elle n’a pas osé mettre au jour quand
elle étoit en présence de ses cohéritiers; lorsqu’elle vient
s’en prendre à un ancien m ilitaire, créancier originaire
de sa fam ille, et qui n’a cessé de donner des preuves de
sa franchise et de sa loyauté ?
Il est rare, au surplus, de voir figurer la dame M ariol
comme créancière ; il n’en sera que plus facile de prouver
qu’elle est tout à la fois défavorable et mal fondée dans
ses prétentions.
�( 3 )
F A I T
S.
»
L e 3 brumaire an 7 , le sieur B recliet, ancien chef
d’escadron, couvert de blessures, ayant obtenu une re
traite honorable, a épousé la demoiselle A n n e G iron.
Les père et mère de son épouse lui constituèrent en
avancement d’hoirie une somme de 12000 fr ., à prendre
sur celle de 15466 liv . 13 s. 4 d. qui leur étoit due par
les héritiers de défunte M arguerite Dauphin , veuve
V é n y de V illem ont.
Comme il étoit notoire que les
créances sur
cette maison
n’étoient pas de l’argent com ptant, on a soin d’annoncer
que cette créance étoit due par acte sous seing p r iv é , du
25 mars 1788; que cet acte est reconnu, vérifié, et déposé
chez Chastelut, notaire; qu’il est suivi de sentence obtenue
contre la clam e D a u p h i n ; p l u s , d’un jugement arbitral;
p lu s , d’ un jugement du tribunal civil du Puy-de-D ôm e,
du 23 floréal an 5 , qui déclare le tout exécutoire contre
les héritiers de la veuve Villem ont.
Ces jugem ens, ces titres ne rendoient pas les payemens
plus faciles; il auroit fallu user de voies rigoureuses,
d’expropriation, par exemple. Une occasion se présente,
et le sieur Brechet la saisit, quelques sacrifices qu’on exige.
L e 30 germinal an 9 , il achète de la dame V é n y ,
épouse séparée , quant aux biens , de J e a n - Charles
D unoyer du Sauvage, ou plutôt d’un sieur G uinez, son
fopdé de p o u v o ir, la portion qui étoit avenue à la^dame
du Sauvage dans le domaine | de. ,The;ix, par le partage
de fam ille, du 18 pluviôse an 7.
.
A 2
�( 4 )
Cette vente est faite, i ° . sons la réserve des arbres qui
avoient été jDrécédemment vendus , et dont l’acquéreur
est tenu de souffrir l’exploitation, dégradation immense,
très-ordinaire dans cette fam ille, qui a toujours com
mencé par là avant d’aliener le fonds.
2°. L ’acquéreur ne peut entrer en jouissance qu’après
la levée de la récolte de l’année, qui est expressément
réservée dans son entier.
•
- 3 ° . 'L e p rix1 est fixé à la somme de 29300 francs
en déduction dé laquelle le sieur Brecliet paye celle
de 2100 francs.
Quant à la somme de 27200 fr. parfaisant le prix
racqüéreîir rest tenu de la payer en l’acquit de la dame
du Sauvage, aux créanciers de feue M arguerite DauphinM onti’odès, sa mère. Il est dit que ces créanciers sont
dénommés en l’acte passé entre la dame D a u p h in ,'le
sieur V é n y de T h e ix , et la dame M a rio l, devant Coste
notaire à Beaumont le 20 mars 17 9 3 , notam m ent à
J . B . G iron , ou ¿1 l'a cq u éreu r, en qualité de m ari
de dame A n n e G ir o n , à Julien P eyren d, etc.
A l’égard du surplus, l’acquéreur sera tenu de le
payer aux autres créanciers de la dame D aup hin, jusqu’à
concurrence de la portion pour laquelle la dame du
Sauvage doit contribuer dans le payement des dettes de
la dame sa mère'.
c
Il n’est pas inutile d’observer que la dame du Sauvage
affecte et hypothèque spécialement à la garantie de cette
v e n te , le qu art à 'e lle appartenant du domairie>de : St.Genesl-Ciiiimpanelle^ dont la totalité a été depuis vendue
nu sieur Dalnias 7 et qui etoit alors:indivis,
9.;
�( 5 )
L e sieur Brechet ¿toit bien éloigné de penser alors
à cette acquisition ; il en eut l’obligation à la dame
M a r io l, qui le sollicita et le détermina par ces manières
engageantes, ces formes aimables qu’on lui connoit ; et
bientôt la dame M ariol a affecté de publier que le
sieur Brechet avoit fait une grande affaire, quand il. a
acquis cette portion du bien de T h e ix : cependant une
portion égale a été vendue au sieur L e v e t , moyennant
une somme de 26000 francs; la portion du sieur de
T h e ix , plus considérable, et en fort bon état, rit» été
vendue que 36000 francs : cependant la portion acquise
n’étoit affermée que 800 fran cs, par bail du 20 vendé
miaire an 9 , pour neuf ans, sur quoi 200 francs d im
position. Les arbres vendus valoient plus de 2000 fr. •
la réserve de la récolte de l’année étoit encore une di
m inution ; et le sieur Brechet a été obligé de faire
pour 7854 fr. de réparations. Enfin , pour sauver des
débris les arbres qui restoient h couper, il lui en a coûté
1800 francs. V o ilà le grand m arché qu’a fait le sieur
Brechet.
Il d e v o ir, sans d ifficu lté, se mettre en r è g le , faire
transcrire et notifier son contrat; il cède aux sollicitations
de la dame M a rio l, qui le conjure de 11e pas faire des
frais inutiles : il paye les créanciers délégués ; il en
rapporte les quittances; il se contente ensuite de prendre
une inscription sur les biens hypothéqués ù la sûreté de
la ven te, une à R io m , l’autre à Clermont. Elles sont
sous la date des 7 et 8 floréal an 9.
L e sieur Brechet reste trois ans dans la p laS cntiere
sécurité : bientôt on lui fait parvenir des propos ou des
�( 6 )
menaces de la dame M ariol -, il se détermine à faire
transcrire son contrat. Cette transci’iption est du 27 ven
démiaire an 12.
L e 13 brum aire su iv a n t, la dame veuve M ariol lui
fait notifier une mise aux enchères. Il est à propos d ’anaUser cet acte fort important au procès.
L a dame veuve M ariol fait cette enchère comme
créancière de la dame V é n y
du Sauvage ,
tant en
vertu de son contrat de îtia n a g e , en date du ç> février
1771 ? que d?obligation du 7 piairial an 11 • elle ne
dit mot sur une certaine obligation de 10000.fr. qu’elle
a fait éclore depuis, et dont elle n’a pas sans doute osé
parler dans son acte d’enchère.
E lle s’exprim e au surplus assez disertement sur la
portion des biens vendue au sieur Breclict. E lle y dé
clare que ces immeubles appartenoient à la dame sa
sœ ur, et lui étoient avenus pa r Je partage qu'elle a
passé avec ses cohéritiers , devant Coste , n o ta ire,
le 18 p l u v i ô s e nn 7 : e l l e n ’a v o i t p a s i m a g i n é a lo r s que
ce partage n’étoit que provisionnel, comme elle menace
de le dire aujourd’h u i, quoiqu’elle n’en ait pas même
parlé dans son mémoire.
E lle n’enchérit d’ailleurs que d’un vingtièm e ; il est
vrai que sa réquisition est antérieure à la promulgation
du Code Napoléon en cette partie, qui exige que l’en
chère soit d’un dixième. Elle ne l’auroit peut-être pas
fait trois mois plus ta rd , même trois mois plutôt : mais
elle savoit que ce bien avoit passe en d’autres mains \
que le sieur Brecliet l’avoit échangé avec un individu
q u ’a u tr e fo is la daine de M ariol n’auroit pas voulu
.
�blesser : elle a cru< pouvoir mettre le sieur Brechet ou
son acquéreur à contribution ; et si elle en a été quitte
a .meilleur marché pour son enchère , elle n’en sera
pas plus heureuse.
L e sieur Brechet ne fut pas fort effrayé de cette dé
m arche, qui tendoit tout au plus à la ruine de la dame
du Sauvage; ce qui n’étoit pas infiniment délicat de la
part de sa sœur, évidemment alors sa débitrice.
L e 6 frimaire an 1 2 , le sieur Brechet commença par
faire une saisie-arrêt entre les mains de la dame M ariol
et du sieur V é n y de T h e i x , de tout ce qu’ ils devoient
à la dame du Sauvage , notamment la restitution des
jouissances de la succession du sieur V é n y d’A r b o u z c ,
frère com m un, et la somme de 10000 francs provenante
d e là vente de Saint-Genest-Cham panelle; cette somme
faisant le quart revenant h la dame du Sauvage dans
cette vente.
Celte saisie-arrêt est faite pour la garantie du p rix
porté au contrat de vente du 30 germinal an 9.
L e même jo u r , cette saisie-arrêt, ainsi que la mise
aux enchèi'es de la dame M a r io l, sont dénoncées à la
dame du Sauvage.
L e 14 nivôse an 1 2 , le sieur Brechet prend le parti
de faire signifier à la dame M ariol un acte extraju
diciaire , par lequel il lui déclare que pour la mettre
hors d’in té rê t, il lui offre de lui payer la totalité de
ses créances contre la dame V é n y , femme séparée,
quant aux b ien s, du sieur du Sauvage, tant en p ^ n~
c ip a l, intérêts que f r a i s : il lui fait en conscqucnce
sommation de déclarer, dans vingt-quatre heures, le
�C 8 )
m ontant de ses créances , afin que le payement en puisse
être fait de suite. 11 offre de plus de lui éviter et la ga
rantir de toutes poursuites de la part des autres créan
ciers , relativement à cette en clitic 5 a la . cliarge aussi,
par la dame M a rio l, de le subroger à son lieu et place,
avec toute g a ra n tie , protestant de nullité et de tous
dépens, dommages-intérêts, etc.
L a dame M ariol s’empresse de répondre ; et le môme
jour elle fait notifier au sieur Brechet qu’elle accepte
ses offres, pour quelles ne puissent plus être révoquées
à l ’a ven ir; en conséquence, et donnant pour le moment
le d éta il, autant que possible, de ses créances, elle dé
clare qu’il lui est dû la somme de 30000 fr a n c s pour
la dot en préciput et avantage à elle faits par la dame
D aup h in , sa m ère, suivant son contrat de mariage du 9
février 1771 ; les intérêts de cette som m e, depuis le
décès de la dame Dauphin ; plus, la somme de 6000 fr.
montant d’une obligation consentie par la dame V é n y
du Sauvage , à son proiit , le 7 prairial an 1 i • p lus
les frais de mise à exécution, dans lesquels doivent né
cessairement entrer l’acte de mise aux enchères les
poursuites ultérieures; et là-dessus une longue histoire
sur les affiches qu’elle avoit déjà fait im prim er, dont
quelques-unes sont timbrées, d’autres 11e le sont pas etc
Pas encore un mot de cette obligation de 10000 fr*
de la dame D aup h in , faite en 1793, moment sans doute
fort opportun. Il est cependant extraordinaire que la
dame M ario l, si fertile en détails, qui u’oublie pas inôme
la façon et l’impression de ses affiches, g 0rde le silence
sur un objet aussi im portan t, et qu’elle ne devoit pas
ignorer.
La
�(9 )
La dame Ma v io l, bien contente d’e lle -m ê m e après
cette notification , appelle cela un contrat ju d icia ire ;
et voilà que les contrats judiciaires sont des actes irré
vocables; et voilà que la cour de cassation l’a jugé ainsi
par une foule d’arrêts. Sirey et Denevers , qui se dis
putent sur tant de choses, sont d’accord sur ce p oin t;
chacun cite les siens, etc.
( U n contrat judiciaire ! lorsqu’on n’a aucune connoissance de ce qui est dem andé, lorsque la dame M ariol
elle - même , en notifiant son enchere, ne donne copie
d’aucun titre, n’ énonce aucune som m e; mais si au lieu
de demander 36000 francs en p rin cip al, et le payement
de l’im prim eur des affiches, elle eût demandé cent mille
écus, un m illion, par exem ple, il auroit donc fallu que
le sieur Brechet payât tout sans réflexion , sans exam en,
par la force du contrat ju d icia ire ?
L e sieur Brecliet n’a pas été de cet avis ; il a raison
nablement pensé qu’avant de p ayer, il falloil savoir
ce qui étoit légitimement d û ; en conséquence, il a cru
devoir consulter les cohéritiers de la dame M ariol, pour
savoir leur opinion sur ce point. L e 18 nivôse an 1 2 ,
il a fait citer devant le bureau de paix , la dame du
Sauvage et son m ari; les sieurs R ib eyre, le sieur V én y
de T l i e i x , et la dame veuve M ariol.
Il a exposé qu’il avoit fait transcrire son contrat de
Vente d’une partie du domaine de T lie ix ; qu’il l’a fait
n otifier; que la dame M ariol a fait une enchère; q 116
pour la faire cesser, il a offert de lui payer le montant
de ses créances ; que la dame M ariol a bien vite acCepté : mais le sieur Brechet croit qu’a va it
Payer
�( 10 )
il faut que les créances de la dame M ariol soient liquidées
tant en présence de la dame du Sauvage, qu’en celle des
autres cohéritiers, afin de fixer la portion que chacun
doit p a y e r , parce qu’entre cohéritiers , la dame de
M ariol ne peut prétendre à une action solidaire, mais
seulement h zinc action personnelle pour la portion de
chacun ; que la dame veuve M ariol doit même faire
confusion de ses créances , dans la proportion de son
amendement : en conséquence, le sieur Brechet demande
que tous les cohéritiers s’accordent entr’eux pour fixer
liquider ou compenser les créances prétendues par la
dame de M ariol.
I æs gens éclairés que le sieur Brechet a instruits de
ses 'dém arches, ont pensé qu’il agissoit sagem ent, qu’il
ne ptoposoit que des choses justes, et que la dame M ariol
ne pouvoit exiger que des créances légitimement établies
dans la proportion et d’après les hases expliquées par le
sieur Brechet.
M ais il est si 'diilicile d’accorder tout le monde ! Les
parties se présentent au bureau de paix ; ]e sieur du
Sauvage se fâche de ce qu’on a dit qu’il étoit habitant de
Clentoont; il veut être habitant du M onastier, et ne veut
plus parler.
L a dame du S au vage, maîtresse de scs biens aventifs
approuve les réclamations de sa sœ ur, mais jusqu’à eon*
currence de yôoo fr. seulement, pour sa portion con
tributive Ylims le préciput de 30000 francs.
E lle recortnoît d evo iï la -somme de '6000 fr. portée par
son obligation du 16 prairial an 11 ; et loin'd’être créan
cière de sa sœui’ pour restitution 'de '/oitissarices de la ‘suc-
�(II )
cession tl’A r b o u z e , elle est au contraire débitrice de d iiférentes sommes payées par la dame de M ariol à la dame
D au p h in , m ère commune. E n dernier résultat, elle n en
tend prendre aucune part aux contestations, qui s élevent.
L e sieur Balthazard de T h e ix n’est pas si complaisant;
il déclare avec assez de rudesse qu il entend contester
les prétentions de la dame M a rio l; il obseive q u elle a
laissé écouler hu it ans sans réclam er ses prétendus droits;
qu'elle a laissé consomm er les partages , a signé les
com prom is, nom ination $ exp erts, et a accepté son lot
sans se rien réserver j qu’elfe a laissé vendre Icl tota ite
des. biens de la succession de la mere commune , et a
souffert les partages du m obilier sans encore aucune
réclam ation.
O n craindroit d’affoiblir les observations du sieur e
T h e ix si on ne les transcri voit littéralement.
Il a j o u t e q u e « la d e m a n d e q u e fait la dame de M ariol
« à ses c o h é r i t i e r s , par l’incident qu’elle fait au sieur
«
«
«
«
«
B reclie t, est plutôt une vexation qu’une justice ; que
cette demande est inconsidérée, d’apres les actes qui
se sont passés dans la fam ille, et dont elle a parfaite
connoissance ; que sa demande est absorbée par les lois
anciennes; que c’est un avantage prohibé par les lois
« existantes lors du décès de la mère. »
Il observe en outre « que la dame D auphin fit, dans
« l’intervalle du 28 brumaire à son d écès, deux testa« mens, codiciles, fidéicommis, etc. Il requiert la maia« lçvée de toutes inscriptions faites par la dame JVlauo ,
« et finit par toutes protestations et r é s e r v e s . »
^
Survient la dame M a r io l , qui ne sait pas ce que c est
B 2
�( 12 )
que confusion, com pensation, fins de non-recevoir, etc.;
ces mots barbares n’ont jamais retenti à son oreille; elle
suppose que c’est pour faire diversion à sa demande : elle
veut de l’argent, rien que de l ’argent; le sieur Brechet
a prom is, s’est engagé; elle veut qu’il paye, et le somme
de se concilier sur sa dem ande, dont elle n’entend point
rabatti'e une obole.
A l’égard de son frère , il ne sait ce qu’ ü ¿[¡t . e]je
n’a renoncé à rien : quand il fera apparoir de ses pré
tentions, on saura bien lui répondre; et s’il veut exciper
des testamens de sa m ère, c’est à lui à les produire, etc
L e 10 pluviôse an 1 2 , requête du sieur Brechet. 11
demande permission de faire assigner la dame de M ariol
pour lui voir donner acte de la réitération des offres
qu’il fait de lui payer ce qui lui sera d û , après qu’elle
aura fait liquider ses créances ; il demande qu’elle soit
tenue de justifier de ses titres, tant en présence de la
dame du Sauvage que de ses autres cohéritiers.
C est a l o r s q u e la d a m e M a r i o l , p a r u n e requête du
13 thermidor an 1 2 , fait éclore une obligation de la
somme de 10000 f r . , en date du 25 février i 793? soul
erite à son profit par la dame sa m è re , et payable dcifis
d ix ans. Elle n’a voit point assez demandé au sieur Brechet
par légèreté ou par oubli : elle forme la demande inci
dente de celte somme ; et comme le sieur Brechet avoit
offert de tout p a y e r, il payera bien encore cette somme
de 10000 francs.
Bientôt après elle donne copie de cette obligation, de
celle qui lui a été consentie par la dame du Sauvage
le 7 prairial an^i 1 , et pour la sûreté de laquelle elle'est
�( ï3 )
déléguée par sa sœ ur, à prendre sur une rente et les
arrérages échus ; le tout dû par la dame Dalagnat et la
dame C orm eret, sa sœur. E t ce que la dame M a iio l ne
dit pas , c’est qu’elle a été remboursée par les dames
Dalagnat et Cormeret. O n la croit trop délicate et tiop
honnête pour ne pas convenir de ce remboursement
dans tous les cas, on lui en administreroit la pieuve.
U ne grande discussion s’élève entre les parties, sur la
,
créances r é c l a m é e s .
,
L a dame M ariol entend repéter a ses oiei es q u e e
n’a ni disposition ni préciput qu’elle n etoit pas sais e
irrévocablement des 30000 fr. portés en son c o n t i a t c e
lé g itim ité des
mariage ; qu’elle n’a pas ignoré qu’en ligne diiecte 1
falloit l’apporter ce qu’on avoit reçu , lorsqu on venoit
à partage. Aussi s’étoit-elle rendu justice*, elle a paitagc
avec ses cohéritiers le seul immeuble ( la terre de T h e ix )
qui p r o v e n o i t d e la s u c c e s s i o n d e sa m è r e ; e l l e n a de
mandé ni préciput ni obligation : tout s’est bien passé.
A l’égard de l ’obligation de la dame du S au vage, on
lui a représenté qu’elle avoit oublié la précaution la plus
essentielle; qu’elle n’avoit pas demandé l’autorisation du
m a r i, si évidemment nécessaire. O n ajoute aujourd liui
qu’elle en est même payée.
On a fini par lui dire qu’elle n’avoit pas d’hypotlieque
pour cette prétendue obligation : à la vérité elle avoit
bien fait h yp o th éq u er, par une clause générale , tou*
les biens que sa sœur pouvoit avoir dans 1 arrondissement
du bureau de C lerm o n t, et dans celui de R iom ; inaIS nn
n supposé qu’une hypothèque de ce genre (.'toit u ° P va&ue
pour qu’elle fut v a l a b l e , 1d’après la loi du n brum aire
�( i4 )
an 7 , et le Code Napoléon, qui exigent une désignation
plus précise.
O n a rem ontré qu’il étoit assez difficile de penser que
la dame du Sauvage, pour la sûreté d’une obligation en
date du 7 prairial an u , eût eu l’intention d’bypothéquer des biens vendus, depuis le 30 germinal an 9, plus
de deux ans auparavant : on a dû croire que la vente
a v o it opéré mie tradition en fa,veur de son acquéreur,
et que la dame du S a u v a g e tfa vo it pas voulu commettre
un délit grave ( un-stellionat ) ; que sa sœur même ne
l’auroit pas exigé.
L es premiers juges ont été de cet avis; ils ont pensé,
« i° . que la dame de V illem on t étant morte en l ’an 4 ,
k sous l’em pire de la loi du 17 nivôse an 2 , cette loi
« ne lui perniettoit de faire aucun avantage en faveur
« de ses successibles;
« 2°. Q ue la loi du 18, pluviôse an 5 n’avoit confirmé
« que les avantages faits irrévocablem ent avant la publi« cation d e la p r e m i è r e *,
« 3°- Que la dot de 30000 f r ., stipulée par le contrat
a de mariage de la dame M ariol, étoit plutôt une expec« tative qu’un avantage irrévocable , puisque la dame
« V illem on t s’étoit réservée la faculté d’appeler sa iille
« à sa succession, en rapportant les 30000 ir. ; ce qui
« fait disparoître toute idée d’irrévocabilité. »
L es premiers juges ont d it, en quatrième lie u , que
cr d’après l’allégation des parties, la dame de V illem ont
« a fait un testament explicatif de ses volontés (1 ); que
(1) Ce testament est du 25 brumaire an 4. La dame de Vil-
�( i5 )
« la clame de M ariol est venue au partage de la sftcces« sion de sa m ère avec ses autres frères et sœ urs, en 1 an 7,
« et rta point réclam é en préciput la dot de 30000J r .
5o. Quant à l’obligation de 10000 fr. souscrite par la
m ère, les premiers juges ont encore décidé que, « d apies
« les présom ptions, cet acte étoit un avantage in d iiect,
« que ces présomptions se cliaugeoient en certitude ,
« quand on voit la dame M ariol v e n ir , en 1 an 7 > au
« partage de la succession de sa m b te, avec ses frères et
« sœurs, sans réclamer le p rélèvem en rd u montant de
« cette obligation. » N ’auroient - ils pas pu ajoutei que
la dame M ariol avoit au moins 'manqué de m ém one ,
lorsque demandant au sieur Bréchet tout ce qui lui etoit
d u , même les frais d’impression de ses affiches, elle ne
parloit pas de son obligation de ïo o o o f r . , et qu elle la
passée sous silence au bureau de p a ix , etc. ?
Quoi qu’il e n s o i t , le t r i b u n a l d o n t est appel est assez
malavisé pour décider que n i la s o m m e de 3 0 0 0 0 f r . ,
ni l’obligation de 10000 f r . , ne peuvent être regardées
comme dettes de la succession de la dame de V illem on t;
qu’ainsi le sieur B ro ch et, acquéreur d’ une portion du
bien de T h e i x , ne peut être chargé de les acquitter.
Quant à l’obligation'de la dame du Sauvage , elle n est
lem ont , par cet acte qui n’a pas été enregistré , mais que -la
dame Mariol ne désavouera ,pas, institue sa fille son héritière»
conjointement avec le sieur de Theix , son frère, et la daine
du Sauvage, sa sœur. La testatrice explique que les droits e
son fils aîné sont fixés sur la terre de Montrodès et
e e
,
entepd qu’ils ne s’étendent pas au ttélà.
�(
ï6
)
p o i n t autorisée ni par son m ari, ni par la justice; et cette
obligation est consentie sous l’em pire du Code Napoléon :
elle est donc n u lle, d’après l’article 217 de ce Code.
E t si cette nullité peut être opposee par la femme ,
d’après l’article 225 du même C o d e, il est assez raison
nable d’en conclure qu’elle peut l ’être aussi par ceux
que la fem m e, en pareil cas, seroit tenue de garantir :
c’est être assez' conséquent.
L e tribunal ajoute que cette obligation est postérieure
de deux ans h la vente consentie par la dame du Sau
vage au sieur Brecliet. Les biens vendus au sieur Brechet
ctoient entre ses mains lors de cette obligation. L a stiulation d’hypotlièque n’a pu comprendre que les biens
•ippartenans à la dame du Sauvage lors de l’obligation.
La dame de M ariol n’ignoroit pas la vente con
sentie par sa sœur; il n’a pu être dans son intention de
\ui faire commettre un stellionat ; de même qu’il n’a
pu être dans l’intention de la dame du Sauvage de s’en
rendre coupable.
O n s’étonne pour la dame de M ariol, et, par égard,
on ne fera aucune autre réflexion, qu’elle ait osé cri
tiquer de pareils motifs.
XI est dit encore que cette obligation ne contient aucune
■iffectation spéciale de la portion de la terre de T h e ix ,
acquise par le sieur Brechet; qu’il n’y a qu’une affectation
générale des biens à elle appartenans dans les arrondissemens de R ioin et de Clermont ; de semblables e x ressions ne peuvent se rapporter en aucun cas aux biens
qui ne lui appartenoient plus à cette époque.
O n remar<!ue aussi q u’aux tenues du môme article 4
de
�C 17 )
de la loi du 11 brum aire an 7 , il auroit fa llu , pour
une hypothèque spéciale, indiquer la nature, la situation
des immeubles, et préciser la commune où ils sont situés.
(L a cour d’appel l’a jugé in term in is , par arrêt du 17
mars 1808.)
On observe également que le sieur V é n y de Theix.
oppose à la dame M ariol une fin de non-recevoir résul
tante de ce qu’au partage de la succession de la mère
com m une, en l ’an 7 , la dame M ariol s’est fait justice
à elle-m êm e, en ne demandant pas à prélever sa dot
de 30000 fra n cs, et a préféré de venir au partage avec
ses frères et sœurs.
Quant aux autres créances réclamées par la dame M ar io l, on ne peut y statuer qu’après un compte préalable.
11 en résulte que la dame M ariol est déclarée non
recevable dans sa demande en payem ent, tant de la somme
de 3 0 0 0 0 f r . , que de celle de 1 0 0 0 0 fr. ; elle n’est pas
plus heureuse pour le montant de l'obligation de sa
sœur , sauf à elle à se p o u rvo ir contre la dame du
Sauvage.
Il est ordonné que les sieurs de V é n y et la dame de
M a rio l, sa sœur, viendront à compte devant Chassaigne,
notaire com m is, sur le payement des dettes qu’ils pré
tendent avoir respectivement fait à la décharge de la
succession de la m ère commune.
Il est fait, dès à présent, main-levée au sieur de Vény?
de l’inscription de la dame M ariol , ayant pour objet
les 30000 iran cs, ainsi que l’obligation des 10000
L e sieur Bréchet obtient également la m ain'ievée des
iftscriptions de lu dame de M ariol.
C
�(
1 8
\
L e tribunal maintient les inscriptions de la dame
M a rio l, sur le sieur V é n y de T lie ix , ayant tout autre
objet que les deux premiers ; il est ordonné que les
parties contesteront plus amplement sur le mérite de ces
inscriptions conservées. L a dame de M ariol est con
damnée aux dépens envers le sieur Brechet ; les autres
sont réservés.
C ’est de ce jugement que la dame M ariol a eu le
courage d’interjeter appel; e t, si on veut l’en cro ire ,
il est très-urgent de la faire payer de toutes ces sommes,
car elle a grand besoin d’argent.
C ’est elle qui fait expédier et signifier le jugem ent,
à là vérité sous toutes réserves : sa signification est
du 29 janvier 1808 , près de six mois après sa date.
E lle a eu le temps de mettre au jour un long mémoire
qui a accompagné sa requête d’urgence et son appel, en
date des 11 et 17 février d ern ier; et comme elle Cst
préparée dans sa défense, elle entend que tout le monde
le so it; elle demande jx être jugée sans délai.
L e sieur Brecliet se prête volontiers à ce caprice ; il
vient soutenir,
i<\ Q u’il n’y a point de contrat judiciaire entre les
parties ;
20. Q ue la dame M aritil n’a aucun préciput sur là
succession maternelle ;
3^ Q ue les créances prétendues de la dame Mario]
sont frauduleuses et simulées;
4 0 . Que l’obligation de la dame du Sauvage esc nulle;
5°. Q u’en la supposant valable, elle n’a aucune hy
pothèque sur ls sieur Biechet pour le montant de celte
obligation.
�(
)
On va essayer de prouver ces cinq propositions : on
présentera ensuite quelques moyens de considération en
faveur du sieur Brechet; il promet d’avance de ne pas
abuser de ses avantages, par ménagement pour la dame
de M ariol.
§•
I er-
I l n’y a point de contrat ju d icia ire entre les parties.
Q u’est-ce qu’ un contrat judiciaire? Suivant la définition
que nous en donnent les auteurs élémentaires, cest celui
par lequel le dem andeur, après avoir forme une d e
mande , s’en départ en justice c’est celui par lequel le
défendeur, après avoir contesté la prétention, y acquiesce
et l’approuve en jugement.
Ces contrats ont une grande force , parce qu’ ils ont
une grande solennité ; ils sont au-dessus des contrats
ordinaires : c ’est en f a c e m ê m e de la ju s t i c e , q u e cette
espèce de contrat reçoit sa perfection ; de ses juges on
en fait ses témoins. D e sorte que ces engageinens qui ont
été ordinairement préparés par de mûres réflexions, par
l ’avis de ses con seils, sont bien supérieurs aux transac
tions qui se font hors la présence de la justice.
D e tels contrats ne sont pas susceptibles d’examen ; les
jugemens qui interviennent ne peuvent être attaqués par
aucune voie : tout est irrévocablem ent consommé.
O r , pourroit-on reconnoître à cette définition l e s actes
qui ont eu lieu entre les parties; et où a-t-on trouve
qu’il y avoit entr’elles un contrat judiciaire? Ia justice
a~t-elle sanctionné des actes e x t r a judiciaires et fu g itifs?
C 2
�C 20 )
L a dame de M ariol fait une enchère ; elle en a le
droit dès qu’elle se suppose créancière : mais cette dé
marche entraîne des conséquences bien graves; elle tend
à la ruine du vendeur, qui doit une garantie pleine et
entière à l’acquéreur.
Une expropriation auroit encore des suites plus fu
nestes. Que fait le sieur Brechet? il offre de désintéresser
la dame M ariol; de lui payer le montant de ses créances
' lorsqu’elle les aura fait connoître : mais le sieur Brechet
ne doit pas les payer à l’aveugle ; il ne peut contracter
hors la présence de son vendeur, à qui il a déjà dénoncé
cette enchère un mois auparavant.
Il faut que la dame de M ariol justifie de scs titres- il
le demande; il l’exige : il faut qu’elle établisse la légi
timité de ses créances ; rien de plus juste.
Q u ’im porte, si l’on veu t, que la dame M ariol ait pris
une inscription; qu’elle ait énoncé dans cet acte purement
conservatoire, des créances réelles ou imaginaires! elle
a été maîtresse de sa cause, de la f i x a t i o n : i l n’y a rien
de contradictoire avec les parties intéressées; et ce seroit
se compromettre bien gauchem ent, que d’aller payer
sans aucune discussion, tout ce qu’il plairoit à la dame
de M ariol de demander.
II est extraordinaire d’entendre dire à la dame de
M a r io l, que le sieur Brechet avoit connoissance du re
le v é des inscriptions de la dame de M a rio l, contre la
dame du Sauvage , et que ce relevé se portoit à une
somme de 160407 francs.
O11 ne voit pas trop où elle veut en ven ir, lorsqu’elle
énonce celte proposition; voudrai t-elle prétendre que lp>
�( 21 )
sieur B rechet, d’après cette connoissance, a dû complet
bien vite cette somme de 160407 francs? Cependant elle
ne lui demande que 30000 fr. d’ une p a rt, et 6000 fx.
de l’autre; p lu s, les frais d’impression de ses affiches.
Ce n’est que long-temps après, que par une demande
incidente, et par un agréable sou ven ir, elle réclamé
encore une somme de 10000 fr ., montant de 1 obligation
souscrite par sa mère.
C om m ent, avec de semblables variantes, pourroit-elle
supposer qu’il y a un contrat judiciaire? Il faut lui rendie
justice : quoique la dame M ariol ait fait un paiabiap
p a rticu lier sur ce contrat, elle n’insiste que foiblem ent,
il lu i -paraît seulem ent que le contrat^ jüdiciahe etoit
form é ; et un arrêt de la cour su p rêm e, du 23 avr^
1807, l’a , suivant e lle , formellement décidé. Cependant
quand on examine bien cet arrêt, on voit qu’il a jugé
tout autre chose : d’abord , c’est un arrêt dé rejet, qui
dès-lors ne juge rien ; mais il confirme un arrêt de la
cour de T o u lo u se , qui a décidé que la dame G a y ra l,
créancière inscrite, pouvoit aller en avant sur son en
chère, m algré les offres postérieures de d’ A u b ern ad , de
payer les créances inscrites, s a u f discussion.
O r , ce n’est pas là du tout la question qui nous oc
cupe. E n effet, si la dame M a rio l, nonobstant les offres
du sieur B re clie t, avoit refusé de se départir de son
en ch è re , qu’elle eût demandé la continuation de ses
poursuites, et qu’il fût procédé à l’exp rop riatio n , elle
auroit eu un prétexte pour soutenir qu’ayànt reçu une
Notification comme créan cière, elle avoit le d r o i t d en
cliürir ? et ne vouloitp as nuire aux autres cicanciers;
�qu’on exam ineroit h l’ordre si ses créances étoient légi
tim es, etc.
,■
. V o ilà peut-être ce qu’elle auroit pu d ire; c’est alors
qu’elle auroit argumenté de l’arrêt du 2 3 avril 1807
non pour prouver que la : cour de Toulouse avoit bien
ju g é , mais pour établir qu’elle n’avoit violé aucunes lois.
M ais f4 ' présent que la -dame M ariol s’est départie de
son enchè re ; qu’il ne s’agit plus que de discuter sur le
jn é rite de ses créances, ou sur leur légitimité l’arrêt
de T o u lo u se, comme l’arrêt de cassation, deviennent
absolument étrangers à l’espèce.
E n un m o t, le sieur B recliet, qui a Une garant;e à
exercer contre sa venderesse, n’a. pu ni dû payer sans
ex a m en , sans le faire dire contradictoirement avec les
parties intéressées; s’il l’avoit fait sans aucune précaution
on lui répondroit avec raison qu’il a pris sur son compte
de payer ce qui n’étoit pas dû , et qu’il n’a dès-lors
aucun recours.
Cette proposition est d’une telle évidence, qu’il semble
.que toute la question se réduit à examiner le mérite des
créances réclamées par la dame. M ariol.
:
§.
11.
L a dame de M a rio l ne peut prétendre à aucun précipite
su r la succession maternelle.
P a r son contrat du 9 février 1.771, la dame de V illem ont^sa m ère, lui constitue une somme de 30000fr
Cette somme n’est payable qu’après le décès de la cons
tituante, et, suas, intérêts jusqu’à ce.
�( 23 )
Cette constitution n’emporte ni forclusion, ni renon
ciation. Si la mère vient à m ourir sans avoir fait d’autres
dispositions, la dame M ariol viendra à partage de sa
succession, sans même être obligée de rapporter la somme
de 30000 francs; m ais il sera libre à la dame de V illemont de faire telles dispositions que bon lui semblera,
même par testam ent, et de réduire la demoiselle future
à la dot de 30000 francs ci-dessus constituée , ou de
l ’instituer héritière , à la charge du rapport de cette
dot.
L a succession de la dame de "V illemont est ouverte
en l’an 4 , sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2.
L ’article 8 de cette loi veut que les eüfans, descendans
fet co llatérau x, ne puissent prendre part aux successions
de leurs pères et m ères, ascendans ou attires parens, sans
rapporter les donations qui leur ont été faites antérieu
rem ent, sans préjudice de l’exécution des coutumes qui
assujétissent les donations à ra p p o rt, même dans le cas
où les donataires renoncent à la succession du donateur ;
et la loi ajoute que cet article sera ob servé, nonobstant
toute dispense de rapport.
L a disposition de cette loi n’a pas été mécônr^ue de
la dame de M ariol. Elle sait aussi qu’en principe gé
néral toutes donations en ligne directe'sont sujeft.es à
rapport, à moins qu’elles-n’aient été faites eiï'précipiU.
M ais la dame de M ariol prétend que la disposition
rigoureuse de cette loi a été modifiée ou rétractée par
l ’article I er. de la loi du 18 pluviôse an 5 et que
d’ailleurs sa donation de 30000 fr. est faitë en précîput.1
Q ue porte cet article i 0r. de la loi du1 18 pluviôse
�( 24 )
an 5? il maintient tous prélèvem ens, préciputs, et autres
dispositions ir r é v o c a b le s de le u r n a t u r e , stipulées en ligne
directe avant La publication de la loi du 7 mars 1793.
O r c o m m e n t la dame M ariol prouvera-t-elle qu’il
ex iste* d an s so 11 c o n tr at un ,prélèvem ent de 30000 francs
ir r é v o c a b le de sa nature ? Il n’y a pas une expression
qui ne p r o u v e au contraire la révocabilité. La dame de
Villem ont ne manifeste aucune volonté certaine; tout
dépend de sa fantaisie, de son caprice ou de son affection:
elle peut laisser sa fille avec cette som m e, sans qu’elle
prétendre autre chose; elle se réserve le droit de
lu i donner cette somme en préciput, si bon lui semble,
de l’instituer h éritière, s’il lui plaît, avec ou sans rapport
de sa dot. C ’est bien l à , sans contredit, l’analise exacte
de cette stipulation, aussi mobile que le papillon diurne.
L a dame M ariol espère, et ne tient rien ; on peut tout
p
u
i s s e
lui ôter, comme on peut tout lui laisser; et elle vient
dire qu’elle-est irrévocablement saisie, lorsque son sort
dépend d’ un seul m o t; lorsque sa ;mère seréserve une
pleine et entière liberté dé faire tout lè contraire de ce
q u ’elle laisse espérer.
•; •
î i ’est-il pas au contraire évident que; jamais clause ne
fut plus incertaine; que tout dépendait, non pas d’un évé
n e m en t ,.n o n pas.d ’une simple condition, mais du plus
léger chiingement de volo'nté.
E lle prétend qu’il s’est élevé une très-grande contro
verse sur ce point : mais c’est une bien grande erreur.
L a seule question qui ait divisé les jurisconsultes, étoit
celle de savoir s i, lorsqu’une disposition universelle étoit
faite à la charge d’associer un tiers, la portion revenante
�'
(
2
5
)
à ce tiers devoit faire partie de la succession ah intestat;
on soutenoit d ’un côté qu’elle tom boit dans la succession
ah intestat, parce que la charge d’associer étoit i*évocable
à volon té; d’autres, avec plus de raison, pensoient que
la révocabilité de l’association né’-pouvoit avoir lieu
qu’au profit du donataire déjà saisi du bien universel;
que cette charge d’associer étoit une simple condition, et
non une disposition; que dès-lors l’associé étoit saisi; et
ce dernier système a prévalu. L a cour d’appel l’a ainsi
décidé par ses arrêts.
M ais autrem ent, toutes les fois que le disposant ne
s’est pas dépouillé ; toutes les fois qu’il a pu donner ù
un autre ce qu’il prom ettoit au prem ier conditionnel
lement , on a décidé avec raison qu’il n’y avoit aucune
disposition irrévocable.
L a dame M ariol n’est pas heureuse dans l’application
de ses arrêts de la cour de cassation ; les trois arrêts
qu’elle rappelle n’ont pas em pêché que la cour n’ait
jugé tout le contraire dans la cause du sieur Gardet de
V a yre.
Mais l ’appelante ne veut pas faire attention , ou se
dissimule à elle-m êm e, que dans l ’espèce de ces trois
arrêts, il s’agissoit seulement d’un droit d’élection confié
à un tiers; et q u e , dans ces trois cas, la succession du
disposant étoit ouverte antérieurement à la loi du 17
nivôse, et même à la loi du 7 mars 1 7 9 3 , qui défendoit
toute disposition en ligne directe.
A lo rs on a dû dire que la loi du 17 nivôse ne pouvoit
àvoir d’effet qu’à compter de sa publication ; q ue tout
ce qui étoit antérieur étoit hors de son domaine ; qu’elle
D
�(26)
ne pouvoit régler les successions ouvertes avant qu’elle
fût prom ulguée; et voilà le principe consacré par la loi
du 18 pluviôse an 5. '
• Aussi ou pourroit écouter la dame M ariol, si la dame
sa m ère étoit morte avant le 7 mars 1793 ; il seroit
raisonnable alors de soutenir que la dame V illem on t
étant décédée sans faire d’autres dispositions, la dame sa
fille peut user de la disposition contenue en son contrat
de mariage.
r , (j .
Mais vouloir le soutenir ainsi, pour une-succession
ouverte en l’an 4 , soùs l’empire d’une loi prohibitive
et x*igoureuse, il faut absolument effacer l’article 8 de la
lo i du 17 nivôse an 2 ; il faut vouloir contester l’évi
dence , et aller jusqu’à prétendre que cette loi n’a aucun
e ffe t, pas môme à com pter de sa publication.
Il faudroit encore effacer la loi du 9 fructidor an 3 ,
celle du 3 vendémiaire an 4 , et morne celle du 18 plu
viôse an 5 , art. 9 , 10 et 1 1 , qui veulent impérativement
que la loi du 8 avril 17 9 1, celles des 4 janvier et 7 mars
17 9 3 , celles des 5 brum aire et 17 nivôse an 2 , soient
exécutées à com pter de leur publication.
. E t ne peut-on pas observer encore à la dame M ariol
qu’elle passe bien légèrem ent sur l’article,2 de la loi du 18
pluviôse? Il est singulier qu’elle n’ait parlé que de l ’article
I er. ; le ac. est cependant assez essentiel : il vcut que jcs
réserves dont il n’a pas été irrévocablement disposé
fassent partie de la succession ab in testa t, et appar
tiennent aux h éritiers, autres que les .donataires ou hé
ritiers institues.
O r , on ne contestera pas sans doute qu’il u»y ait c|ims
�(
27 )
le contrat de 1771 une réserve de la dame d e \ illemont,
de disposer de tout le surplus de sa succession ; et dans
ce cas, la dame M ariol est bien au moins donataire de
la somme de 30000 francs. Q u’elle nous explique main
tenant, com m ent, avec cette qualité de donataire, elle
pourroit prendre part à la ré se rv e , sans rapporter sa
donation !
Ce n’est pas avec plus d’adresse que la dame de M ario
veut argumenter de l’arrêt rendu en faveur des enfans
de sa sœur : elle feint d’ignorer la différence qui se tiouve
entre sa sœur et elle. L a dame R ibeyre n étoit pas ie
CUî** au
A
ritière; elle ne venoit pas à la succession de sa m c ie ,
elle réclamoit un supplément de dot éventuel, et il a 01^
bien le lui donner : mais si elle fût venue à la succession
de la dame de V ille m o n t, point de doute q u elle auioit
rapporté sÔooo francs , et qu’elle n’auroit pas eu les
10000 francs de supplément j il n’y a donc aucune parité
entre les deux causes.
Si on considère enfin que la dame M ariol s’est jugée
elle-m êm e*, qu’elle a resté liuit ans sans reclamer ce
prétendu prélèvem ent; qu’elle est venue à partage de la
succession de sa m ère, sans rien demander et sans se faire
aucune ré se rv e , il demeurera pour constant qu elle est-
absolument non recevable.
O s e r a -t-e lle dire que ce partage n’est p a s définitif?
t. -Ota*
n.»*
elle ne le montre pas; elle n’en a qu’ un extrait dans ses
&-Vfu}waê—jK. .Asie/
pièces. M ais peut-on concevoir un partage provision»^
»
jf&zï ctr* l*4
entre majeurs ? Il peut y avoir quelques objets om|S 5 ce
crt*<&tUL>
qui ne donnerait pas lieu à un nouveau partage .
... 1
quand il ne serait que p ro visio n n el, la dame
ario )__ . _ /!$*&//
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rti.vvil. i/ucr (t‘ ■Ÿî.itirr&t
/fTjtr/
�( *8 )
peut-elle se flatter dû faire croire que lorsqu’elle partage
l’objet le plus im p o rtan t, le seul immeuble de la suc
cession, elle auroit négligé de faire connoître ses pré
tentions ou ses droits à un prélèvem ent considérable V
Non • on doit même penser que la dame de M ariol a
trop ’de délicatesse pour insister davantage sur une de
mande exagérée : elle se lassera de courir après une ombre
ne p o u r r o i t jamais saisir.
O n terminera par rappeler à 1« dame de M ariol qu’il
existe un testament et un codicile de la dame de V illemont reçu C oste, notaire à Besum ont; que dans ces
actes la dame Villem ont a manifeste ses volontés; qu’elle
a o r d o n n é que ses enfaus fussent héritiers par égalité ; et
si ces actes, 'qui contiennent d’autres le g s , ne sont pas
légalem ent obligatoires, ils le sont au moins dans le foiintérieur : la dame de M ariol ne devroit-elle pas surtout
q u ’e l l e
respecter les dernières volontés de sa. m ère?
-§• I 11Jjds créances réclamées -parla dame M a riol'son t f r a u
duleuses ei nulles. :
i
r
^ , ^ 0 T o c t ;,r e s de la dame M ariol consistent,
Qe A*
-LiCS IHl^
r. (
'
)
,o F n une obligation de la somme de 10000 Irancs,
r
U i . -i. .fin. «y«./' W r i t e par la dame sa m ere le 23 février «793 ;
ÿr'&.*.-Y*o/0-2°. En unc obligation de 6000 fr-., en date du 7 praitiÛ tûu A A an t t , souscrite par la dame V é n y ' femme séparée,
W
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»“ * W e n 8 > d u s!eur d u S a u v a g c ‘ ,
O n va discuter le m ente de chacune dans son ordre.
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l our 1 obligation de la m ere, on suspecte aisément des
titres de ce g en re , et de simples présomptions suffisentu
pour les anéantir. Il en coûte si peu d’arracher à la facilité
ou à la foiblesse une obligation payable dans d ix aj?s :
le terme est un peu lo n g , et le bon Lafontaine l’avoit
remarqué dans une ingénieuse allégorie. Mais la justice
doit empêcher les fraudes et les donations déguisées; parce
que, comme le dit judicieusement L eb ru n , il faut défendre
le plus ce qui arriverait le plus souvent.
O r , quand on considère que cette obligation est causée
pour prêts fa its en divers temps par la dame de M a rio l,
sans autre explication , sans préciser en aucune manière
ni les époques, ni les sommes, il est difficile de se per
suader qu’on ait fait un compte bien e x a c t, et que la
dame de M ariol ait prêté jusqu’à concurrence de 8ooo fr.
sans b ille ts, sans notes et sans précaution.
O n doit s’étonner davantage que par traité du 20 mars
1793 5 dame M ariol et son frère se reconnoissent dé
biteurs d’une somme de 62000 francs envers la dame de
V illem ont ; qu’en payement de cette somme le frère et
la sœur se chargent de 56ooo francs de dettes envers les
créanciers de la m ère, s’obligent de lui payer le surplus;
et que la dame de M ariol n’ait proposé aucune déduction
du montant de l’obligation, qui étoit cependant de fraîche
date.
t a*«*?
'Z'
Ce n’est pas tout encore; la dame de M ariol traite avec 'X edvw ¿ 6 ^ Æ
ses cohéritiers, fait avec eux le partage des biens : c’étoit
$.e.-¿â
encore le moment de parler de cette obligation; elJtf n’en
dit rien ; elle ne parle pas même de la somme de 2,000 fr.
promise par la dame de M ontrodès.
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( 3° )
td buul S A * J
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L orsqu’elle veut form er un contrat judiciaire avec le
un J* <«.c - b t r Ç d j sieur Brechet, qu’elle lui donne le montant de ses créances
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ïliw int*1 / avec tant de d(:’tailsi elle Sarde encore ce titre pour une
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[ m eilleure occasion.
cr o*t trouver Ie moment opportun; elle forme
W * * / ?
mie demande incidente pour cet objet, dont elle n’avoit
rien dit au bureau de paix en présence de son frère, de
sa sœ ur, de ses neveux.
L a dame de M ariol p eu t-elle espérer quelque succès
dans cette démarche tardive? On a releve toutes ces cir
constances sans vouloir la blesser : mais le sieur Brechet
n’a pas besoin de s’appesantir davantage sur ce point. Les
héritiers du sieur V é n y de T h e i x , neveux de la dame
M a r io l, sont en cause; ils viennent demander justice :
ils diront ;\ leur tante que sans doute elle n’auroit pas
la cruauté d’arracher à des orphelins le dernier morceau
de pain qui leur reste ; qu’ils lui appartiennent d’assez
•
..
près pour qu’elle dût avoir quelques ménagemens ; et
la discussion de cette partie de la cause leur est exclu
sivement attribuée. Ce qui reste à dire au sieur Brechet,
c’est que la dame du Sauvage, dont il est acquéreur, ne
devroit elle-m ôm e qu’ une très-p etite partie de cette
s o m m e , en supposant l’obligation sincère ; elle n’en seroit tenue que dans la proportion de son amendement,
et entre cohéritiers ils ne sont tenus que personnelle• m ent, pour leur part : l’action hypothécaire n’appartient
qu’aux créanciers , non aux cohéritiers.
O n en vient à l’obligation de 6000 francs, consentie
par la dame de V é n y , femme séparée, quant aux biens,
de J e a n -C h a rle s D unpyer du Sauvage, et sans autori
sation de son mari»
�( 31 )
Pleuvent tout à coup les arrêts de la cour de cassation.
i° . Les obligations consenties parles femmes d’émigrés,
sans autorisation, sont valables. Il n’y a ici ci11 une diffi- <
culte qu’il sera impossible de vain cre, c’est que 1 obli
gation est de l’an n ; que le sieur du Sauvage, rentré (
depuis l’an 8 , a été réintégré dans tous ses droits par
le sénatus-consulte de l ’an io ; que dès-lors il n’y a plus
d’émigrés.
L ’article 217 du Code prononce la nullité des obliga
tions souscrites par les femmes sans autorisation de leius
maris.
L ’article 225 dit que celte nullité peut etre relevee
par la fem m e; mais il n’y a que la femme seule, et ex
clusivement , qui ait le droit de relever cette nullité ,
dit la dame de M ariol. Les créanciers de la fem m e, qui
ont une garantie à exercer contr’elle, qui par conséquent
peuvent exercer tous les droits de leur débitrice, n’ont
pas le droit d’exciper de cette nullité : donc la femme
sans autorisation, peut avec im punité, et en fraude de
ses créanciers, consentir des obligations de toutes parts,
conférer des hypothèques au préjudice de ceux qui àuroient des droits antérieurs, ruiner des pères de fam ille,
se jouer de leurs engagemens, etc. V o ilà les conséquences
qui résultent de ce système ; et ce n’est pas sérieusement
sans doute que la dame de M ariol l’a proposé. Les lois
Quœ in fraudent creditorur/i, dont les dispositions sont
répétées dans le Code N apoléon, seroient donc vaines
et illusoires.
M ais lors de cette obligation, la l o i , ou la pa l^e
Code relative aux hypothèques, n’étoit pas prom ulguée;
�(3 0
o r , d’après la loi du n brum aire an 7 , on ne connoissoit point de vente sans transcription; la transmission
de la propriété ne s’opéroit que par la transcription ;
elle étoit le com plém ent de la vente qui jusque-là ne
pouvoit être opposée à des tiers : plusieurs arrêts de
la cour de cassation l’ont ainsi juge.
O n en con vien t; on ne trouvoit peut-être pas dans la
lo i, que la transmission de la propriété ne s’opéroit que
par la transcription ; il étoit peut-etre raisonnable de
penser que la transcription n’avoit d’autre objet que de
purger les hypothèques; la loi n’entendoit vraisembla
blement par les tie r s , que les créanciers qui venoient
par ordre d’hypothèque. L e Code-Napoléon l’a dit bientôt
après : cependant on jugeoit tout autrement. E t qu’im
porte le défaut de transcription , si l’obligation est nulle.
La dame M a r io l, en proposant cette objection , auroit
peut-être bien quelques petits reproches à se faire ; car
si le sieur Brechet a acquis, c’est elle qui l’a sollicité ;
s’il n’a pas transcrit, c’est encore pour l’obliger, et éviter
des frais de notification qui auroient réveillé bien du
monde : mais enfin, qu’a de commun le défaut de trans
cription avec la nullité de l’obligation ? c’est ce qu’on
cherche à deviner.
O n demandera encore à la dame de M ariol pourquoi,
dans son m ém o ire, elle glisse si légèrement sur la dé
légation contenue en cette obligation , et ne dénom m e
pas les débiteurs délégués; ils sont cependant bien connus:
c’étoit la dame D alagnat, et la dame de C o rm eret, sa
sœur. O r , 1g sieur Brechet a la certitude que ces dames
ont fait acquitter toutes les dettes de la dame deFreydefon,
leur
�( 33 )
leur mère : la dame de M ariol a donc été payée de s i
créance; et que signifierait alors le défaut de transcription?
E t quand le sieur Brechet n’auroit pas transcrit , la
dame M ariol persuadera-t-elle à qui que ce soit, qu une
obligation de l’an 11 lui donne des droits sur une vente
faite en l’an 9 ; que sa sœur a voulu hypothéquer un bien
qui ne lui appartenoit plu s, et dont elle avoit reçu le
prix ? L a dame du Sauvage n’a pas fait mention de cette
propriété; elle ne l’a point affectée à la sûreté du payement
de l ’obligation; si elle l’eût fait, elle eût commis un stellionat : la dame M ariol, sa sœur, qui connoissoit la vente,
ne l’auroit pas exigé. Et quelle est donc aujourd hui son
inconséquence ( l’expression est modeste ) , d’oser venu
demander au sieur B re ch e t, acquéreur de la n 9 > le
payement d’une obligation souscrite par sa venderesse en
l’an 1 1 , parce que le sieur Brechet n’a pas fait transcrire
son contrat ?
L a dame M ariol n’a pas senti l’inconvenance de sa
demande; un seul instant de réflexion l’en fera départir;
et ses amis doivent lui en donner le conseil.
§•
IV .
L a dame M a r io l, dans tous les ca s, ri à point d'hypo
thèque sur le bien vendu en Van 9 au sieur Brechet.
P o u r démontrer cette proposition , il est essentiel de
rappeler la clause qui termine l’obligation de la dame
du Sauvage.
a A u payement du prêt ci-dessus, la daine du Sau\ agi,
E
�«
«
«
«
«
«
a obligé et affecté la portion qui peut lui revenir des
biens des successions de la dame de M ontrodes, et du
sieur V é n y de V ille m o n t, son m ari, situés tant dans
l’arrondissement du bureau des hypothéqués de cette
ville (C le rm o n t), que dans celui de Riom , consistans
en bfitimens , prés , terres et vignes, »
A r t. 4 de la loi du n brumaire an y. « T ou te sti—
« pulation volontaire d’hypotlvcque doit indiquer la
« nature et la situation des immeubles hypothéqués-,
c< elle ne peut comprendre que des biens appartenons
« au débiteur lors de la stipulation. »
A r t. 2129 du Code Napoléon. « Il n’y a d’hypothèque
« conventionnelle valable que celle q u i, soit dans le titre
« authentique constitutif de la créance, soit dans un acte
« authentique postérieur, déclare spécialement la nature
« et la situation de chacun des immeubles actuellement
« appartenons au débiteur, sur lesquels il consent l ’h y« polhèque de la créance. »
A v ec deux lois aussi précises, on ne trouvera point
dans l’obligation d’hypothèque valable : une désignation
va «me et générale ne remplit pas le but de la loi. Comment
le créancier pourroit-il connoître les immeubles qui lui
sont affectés, lorsqu’on se contente de lui donner des
biens situés dans les arrondissemens de Clermont et de
R io m ? n’est-ce pas un inconnu qu’il faut chercher dans
un espace indéfini?
L a loi ne rcconnoît plus d’hypothèque générale ,
q u ’a u t a n t qu’elle résulte d’un jugement; et lorsqu’ il s’agit
d’une liyPolll£iCi lie conventionnelle, il faut qu’elle soit
spéciale, c’est-à-dire, circonscrite, déterm inée, avec la
�( 35)
désignation de chaque o b jet, de sa nature et de sa si
tuation.
Il faut que l’objet hypothéqué appartienne actuellement
au débiteur : o r, la dame du Sauvage étoit dépouillée
depuis deux ans de l’immeuble vendu par elle au sieur
Brechet.
La transcription n’étoit pas nécessaire relativement a
la veuderesse; il y a voit de sa part tradition réelle; elle
ne pouvoit donc plus H yp o th éq u er sans se rendre cou
pable d’un délit grave, sans s’exposer a la contrainte par
corps.
E t croira-t-on jamais qu’ une loi- ait v o u lu ,'o n ne
dit pas to lérer, mais organiser, créer, autoriser un stellion at? Comment vou d roit-on abuser d’une affectation
générale, lorsque la loi exige une désignation plus ex
presse ?
La co u r, par un arrêt récen t, du 17 mars 1808, a
jugé en thèse qu’il n’y avoit d’hypothèque spéciale qu’au
tant cju’on avoit désigné d’une manière précise les im
meubles , leur n atu re, et le lieu de leur situation. Cet
arrêt, rendu en très-grande connoissance de cause, est
d’autant plus remarquable q u e , dans l’espèce de la cause,
on avoit alfecté les immeubles appartenans au débiteur
dans une commune dénommée ; ce qui faisoit incliner à
penser que l ’hypothèque étoit spéciale, parce que le dé
biteur pouvoit avoir des propriétés dans toute autre com
mune.
Mais la loi est tellement expresse, tellement limitat*v e >
que les magistrats ne crurent pas devoir s’en écarter.
�( 36 )
m algré les circonstances qui se présento ient en faveur
du créancier.
Ici rien de favorable à la dame de M ariol : elle connoissoit la vente faite au sieur Brechet; elle savoit que
sa sœur s’étoit dépouillée de cette propriété ; elle n’a
donc pas entendu la comprendre dans la stipulation d 'h y
pothèque insérée en son obligation.
E h ! on ne doit pas le dissimuler, la dame de M ariol
est aveuglée dans sa propre cause ; ce ne peut pas être
une ressource pour elle : ses démarches sont in c o n s i
dérées , ses prétentions téméraires ; son insistance ne
feroit point honneur à sa délicatesse; et l’opinion publique
qui dans son pays proscrivoit, condamnoit sa prétention
a dû influer sur ses juges naturels, et la suivra jusqu’en
la cour.
M e, P A G E S (de R io m ), ancien avocat.
-
M e. T A R D 1 F , avoué licencié.
A R I O M de l’imprimerie de Thidaud-Landriot , imprimeur
. d e l a c o u r d’appel. —Avril 1808. ‘
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bréchet, Antoine. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Tardif
Subject
The topic of the resource
successions
avancement d'hoirie
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Antoine Bréchet ancien chef d'escadron, habitant de la ville de Clermont, intimé ; Contre dame Jeanne-Françoise de Vény, veuve du sieur Sicaud de Mariol, habitante de la même ville, appelante d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Clermont, le 15 août 1807 ; en présence de dame Marie Avelin, veuve du sieur Vény de Theix, tutrice légale de demoiselle Anne-Françoise-Jeanne de Vény, sa fille ; et de dame Françoise Véthizon-Vény, fille adoptive du sieur Veny de Theix, et du sieur Jean-Baptiste Devèze, son mari : tous intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1788-1808
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0504
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Theix (village de)
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avancement d'hoirie
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MÉMOIRES
A
C O N S U L T E R ,
ET CONSULTATIONS.
PA R
.
des reconnoissances très-anciennes, et nouvelle
ment ratifiées, le s habitans d’un village avoient reconnu
des cens sur des héritages par eux possédés, en expri
mant la contenance et les confins de chacun de ces hé
ritages ; et en même temps ils avoient reconnu que tous
les autres héritages non sujets à cens, situés dans les ap
partenances du villa g e, appartenoient au seigneur, en
toute propriété , et que quand ils les cultivoient, ils
etoient obligés d’en délivrer au seigneur la percière au
quart des fruits.
E n conséquence, et dans tous les temps ? le seigneur
A
�( O
avoit perçu le quart des fruits de tous les héritages cul
tivés et non sujets à des cens.
Mais depuis la révolution, le ci-devant seigneur a été
privé de ses droits de percière, qui lui ont été x’efusés,
et il a d’ailleurs conservé les reconnoissances qui les lui
atti'ibuent, et qu’il a soustraites au brûlement ordonné
par l’article 6 de la loi du 17 juillet 1793 et il demande
si aujourd’hui il peut faire usage en justice des reconnois
sances qui lui donnent le droit de perciere, des que les
mêmes reconnoissances établissent en meme temps des
droits féodaux de censive sur d’autres héritages.
l e
c o n s e il
s o u s s ig n é
, qui a vu le pré
sent m ém oire,
E s t i m e que le ci-devant seigneur peut, sans danger,
produire en justice les titres qui établissent ses droits de
propriété sur des héritages soumis à la percière au quart
des fruits , quoique les mômes titres lui attribuent des
droits féodaux sur d’autres héritages, et qu’il n’a pas à
craindre que par le mélange de divers droits, dans les
mêmes titres , les tribunaux ordonnent le brûlement de
ces titres.
La disposition de la loi du 17 juillet 1793 , dans l’ar
ticle 6 , relatif au brûlement des titres féodaux, n’est plus
aujourd’hui susceptible d’exécution. Celte disposition pro
duite par l’effervescence du temps, au milieu des maux
incalculables de 1793 , disposition odieuse en elle-même,
et dangereuse daDS ses effets, a dû nécessairement disparoître -, elle n’a pu vivre davantage que les circonstances
�(
3
)
qui l’a voient vu naître, et les désordres qui l’avoient
produite.
L e Lrulement des titres même uniquement féodaux
étoit dangereux , pour beaucoup de propriétaires non
seigneurs , qui pouvoient s’en servir pour établir leurs
propriétés; car on suppose que les concessions, à la
charge de droits féodaux, eussent été faites à des parti
culiers qui n’en auroient pas joui pendant le temps né
cessaire pour en acquérir la prescription , dès que les
titres de concession auroient été brûlés, comment auroientils pu se défendre des demandes en éviction qui auroient
été formées contre eux? Ces titres leur étoient donc né
cessaires pour conserver leur patrimoine ; et cependant,
parce qu’il y auroit été question de droits féodaux, il
auroit fallu les brûler! Quels désastres ! Quel bouleverse
ment dans les fortunes! Quels maux n’auroient pas pro
duits l’article 6 d e la lo i d u 1 7 ju ille t 1 7 9 3 , si son exécu
tion avoit été maintenue!
E lle étoit donc odieuse cette disposition; mais elle étoit
de plus sans objet : car la suppression des droits féodaux
garantissoit suffisamment les redevables contre les auteurs
des titres; et sous ce rapport on reconnoît toute la vigueur
de la loi du 17 juillet 1793. Mais il en est autrement de
la disposition de son article 6 ; il n’a pu ni dû être exé
cuté lorsque l’effervescence révolutionnaire a c o m m e n c é
à s’appaiser.
Aussi ces vérités furent-elles senties bientôt après la
loi de 1793 : l’article 6 de cette loi avoit ordonne que
les titres féodaux seroient remis aux municipalités pour
y être brûlés; mais l’article 3 de celle du 8 pluviôse an 3 ,
A 2
�C4 )
ordonna, au contraire, « que tous les titres remis aux mu« nicipalités, en exécution de la loi du 17 juillet 1793,
« y resteroient en d épô t , jusqu'à ce qu'il en aurait été
« autrement ordonné. »
Qu’on trouve si l’on peut la levée de cette suspension?
Jusque-là il faut reconnoître que l’abrogation de l’art. 6
de la loi du 17 juillet 1793, n’est pas seulement impli
cite , mais qu’elle est expresse; car la suspension, en pareil
cas , vaut une abrogation parfaite.
M ais il y a plus ; l’article 4 de la même lo i défend
aux notaires et autres officiers publics et privés de déli
vrer des extra its ou expéditions desdits actes, sans les
avoir purgés de tout ce qu i est proscrit par la pré
senta loi.
'Donc la loi permet de délivrer des expéditions en pur
geant les actes des qualifications proscrites; donc l’inten
tion du législateur étoit de conserver ces actes.
XI y a plus encore; car, sur la représentation du comité
de législation et du ministre de la justice , qu’en certain
cas il étoit essentiel d’avoir ces actes dans leur intégralité,
la loi du 11 messidor an 4 « perm it, dans les cas prévus,
aux notaires et autres officiers publics et privés, de
« délivrer des copies ou expéditions des actes désignés
dans la loi du 18 pluviôse, sans lespurger, aux termes
« de l’article 4 de ladite loi. »
Il est donc évident que le législateur a voulu que l’on
c o n s e r v â t les titres, puisqu’il
a senti le besoin que l’on
voit avo ir, pour l’utilité publique, non-seulement
des titres en eux-memes, mais encore de toutes les qua
lifications proscrites qu’ils pouvoient contenir.
s
�(
5
)
Qu’on vienne après cela s’appuyer de ce que la loi du
17 juillet 1793, et le brûleraient, sont rappelés dans plu
sieurs lois postérieures, puisque ces lois ne rappellent le
brûleraient que pour l’abroger.
Dira-t-on encore que l’avis du conseil d’état, du 30
pluviôse an 1 1 , rappelle ce brûleraient? Mais c’est vrai
ment une dérision que de vouloir sans cesse, et dans
toute sorte de cas, appliquer cet avis. 11 a pour objet,
non pas des titres, mais les réclamations fondées sur des
titres mixtes, qu’il déclare compris dans l’abolition : mais
il ne statue rien sur le brûleraient ; il n’en parle que par
occasion , et'comme ayant dans le temps frappé sans dis
tinction les titres mixtes comme les autres , et seulement
pour en tirer la conséquence que les droits fondés sur
des titres m ixtes, sont rangés sur la même ligne que les
droits purement féodaux.
Ce seroit bien plus faussement encore q u ’on prétendroit
tirer un moyen de la jurisprudence de la cour de cassation,
qui ne fait, dit-on, aucune distinction entre les différentes
dispositions de la loi du 17 juillet 1793.
Il est vrai que la cour de cassation n’a pas dit expres
sément qu’il étoit défendu de brûler les titres, mais elle l’a
dit par sa conduite; car elle fait une distinction bien sen
sible entre les diverses dispositions de la loi du 17 juillet
I 793* O n lui a souvent présenté des titres qu’elle a 'rejetés
comme féodaux, et elle a déclaré, dans ces cas, les rede
vances abolies. Mais a-t-elle jamais retenu ces titres pour
les faire bi’ûler? Ne les a-t-elle pas , au contraire , laissés
entre les mains de ceux qui les avoient présentes ?
Ainsi tout doit rassurer le consultant sur la crainte
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qu’il auroit de vo ir livrer aux flammes les reconnoissances
qu’il pourroit produire pour établir sa propriété sur les
héritages sujets à des droits de percière, et au quart des
fruits; droits qui n’ont en eux-mêmes absolument rien
de féo d a l, et que par conséquent on croit qu’il peut
réclamer justement.
85
D é l i b é r é à R iom , le 27 septembre i o .
ANDRAUD.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis, par
les mêmes considérations, sur tous les points qui sont
traités dans la consultation ci-dessus.
D é l ib é r é à Clermont-Ferrand, le 9 frimaire an 14.
B E R G 1ER.
D a n s les mêmes actes, les habitans du village du M ontel ont passé reconnoissance en faveur de leur seigneur,
i<\ chacun pour ce qui le concernoit, de divers articles
de cens; 2°. de la propriété des héritages non censuels
du pays > et de la redevance dont ils étoient tenus envers
lu i, sous le nom de percière, lorsqu’ils les cultivoient.
On demande si ces actes peuvent être produits en justice,
pour établir a u jo u rd ’h u i les demandes en prestation de
la percière.
�7
(
)
V u quelques notes et une consultation,
L e C o n se il répond, comme l’auteur de la consulta
tion visée, que la percière est due par les tenanciers des
héritages qui y sont sujets, n’ayant point été atteinte par
l ’abolition des redevances féodales ; et qu’il n’y a ni obs
tacle ni inconvénient à ce que les reconnoissances rela
tives soient employées dans la poursuite dont elle sera
l’objet.
On est dispensé de toute discussion sur la nature non
féodale du droit de percière, après celle dont il a été la
matière, et devant la cour d’appel de R io in , et devant
la cour de cassation, dans l’affaire d’entre le sieur Lassalle
et quelques habitans de la commune de Blanzat.
Dans le cas présent, la demande de la percière sera
établie, comme dans celui du sieur Lassalle, sur de sim
ples reconnoissances. Il a été jugé, et il le sera encore,
que la percière est de nature purement foncière, et n’a
point été comprise dans la suppression des droits féodaux.
Aussi n’est-ce pas le fond du droit de percière qui est
la matière des difficultés dont on cherche la solution ;
mais les reconnoissances, qui en sont les titres uniques,
sont en même tem ps, relativement à d’autres héritages,
ceux de la directe du seigneur, et des cens dont elle étoit
le principe ; et l’on craint que les redevables n’objectent,
i° . que de tels titres ne peuvent être produits, parce que
la loi en avoit ordonné le brulement; 2°. que les mêmes
actes étant relatifs à des droits féodaux, en même temps
qu’au droit foncier de la percière, il y a au moins un
�(
8
)
mélange de féodalité, d’après lequel il faut résoudre que
tout a été supprimé.
Il est vrai que la loi du 17 juillet 1793, après avoir
aboli sans indemnité toutes les redevances seigneuriales
et féodales (art. i er.)> ordonna le brûlement de tous les
titres constitutifs ou récognitifs de ces redevances (art. 6
et suiv.); mais comme elle réserva expressément les rentes
et prestations purement foncièi’eset non féodales (art. 2),
011 voit bien que les titres de ces prestations durent etre
exceptés de l ’incendie.
Ce fut l’esprit révolutionnaire qui dicta cet étrange
c o m m a n d e m e n t , et qui voulut que l’infraction en fût
punie par la peine des fers ; mais l’esprit révolutionnaire
ne réflécliissoit pas.
O n ne vit pns que les titres établissant, en faveur des
s e ig n e u r s , des droits féodaux, pou voient être ceux et les
seuls de la propriété des censitaires;
Que des droits féodaux pouvoient avoir été constitués
ou reconnus accidentellement dans des actes d’ailleurs de
la plus grande im portance, et jusque dans des contrats
de mariage;
E t qu’après to u t, ce seroit souvent une question à ré
soudre, avant l’incendie, si les droits créés ou énoncés
dans les actes, étoient ou n’étoient pas féodaux.
Ces considérations et d’autres se présentèrent quand le
premier mouvement fut appaisé; et ce précepte, qui avoit
de si graves inconvéniens, fut oublié même par ses mo
teurs.
On l’a fort bien remarqué dans la consultation visée ;
�9
(
).
des actes postérieurs, et de législation, et de gouverne
ment, font comprendi’e que la mesure indiscrète du brûlement a été abandonnée : ces textes de la loi de juillet
1793 y restent pour être pris en argumentation de la vo'lo n té formelle d’abolir tous les droits féodaux, et non
pour provoquer des poursuites de nouveaux incendies, et
des peines.
Ce qui est constant, c’est que depuis quelques années
les tribunaux retentissent des débats d’entre les ci-devant
seigneui’s et leurs censitaires ; que les juges ont examiné
les titres, proscrit les droits reconnus féodaux, et rendu
toute leur consistance à ceux qui n’avoient pas ce carac
tère, ou qui n’en avoient que l’apparence, sans qu’il
soit venu à la pensée de personne, que des brulemens
dussent encore être ordonnés, et qu’il y eût des peines à
infliger à ceux qui succomboient dans leurs demandes en
payement de redevances.
Un assentiment général a donc mis hors d’usage le pré
cepte du brûlement : l’on sait bien que la d é s u é tu d e abroge
les lois, et qu’elles tombent devant la réprobation com
mune, comme devant des lois postérieures et contraires,
non solùm suffrogio legislatoris, sed etiam tacito con
sensu omnium per desuetüdinem abrogari. L . 32, ff. D e
legib. ’ et cela, on doit en convenir, s’opère bien plus
facilement, lorsqu’il s’agit d’une erreur évidente, et, pour
ainsi d ire , d’une fièvre de la législation.
Rien donc ne s’oppose à ce que, pour établir la demande
du droit de percière, on produise les reconnoissances qui
en ont été passées, bien que ces actes contiennent en
meme temps des reconnoissances de cens.
�( ID )
D e cet assemblage de reconnoissances diverses dans les
mêmes actes, conclura-t-on que celles qui ont rapport
aux cens abolis, communiquent par leur réunion le vice
qui leur est propre, à celles qui regardent la redevance
non féodale de la percière ? C’est la difficulté véritable
de l’affaire.
Comme la loi de juillet 1793 avoit excepté de la sup
pression les rentes et prestations purement foncières et
non féodales, on fut embarrassé dans le cas ou dans le
même titre et la même concession se trouvoient établis
des droits féodaux et des droits purement fonciers, et
qu’il fallo it, ce sembloit, b rû lera cause de ceux-là, et
c o n s e r v e r à cause de ceux-ci.
U n membre de la convention nationale proposa, le
2 octobre, de séparer dans les actes ce qui étoit pure
ment foncier; mais la convention passa à l’ordre du jour,
et par conséquent refusa d’ordonner la séparation.
Elle s’expliqua même en termes très-précis à ce sujet,
l o r sq u e, le 7 ventôse an 2 , interrogée sur le point de
savoir si l’administration du domaine national devoit re
cevoir le rachat qui lui étoit offert d’une rente foncière
à laquelle un cens étoit ajouté, elle répondit que les rentes
foncières, créées avec mélange de cens ou autres signes
de féodalité, avoient été supprimées.
C ’est de là que partiront les redevables de la percière,
pour soutenir que les mêmes actes contenant les recon
n o i s s a n c e s de ce droit, et des reconnoissances de cens,
l’abolition totale est la conséquence du mélange.
On 11e sauroit même le dissimuler; si, dans le temps de
la loi de juillet 1793? lorsque l’effervescence qui l’avoit
�(
1 1
)
amenée présidoit encore à son exécution, ces reconnois
sances avoient paru , brûlées sans m erci, elles n’auroient
pas laissé plus de traces de la percière que du cens; mais
il ne faut pas argumenter de l’extension dont la pensée du
législateur pou voit être alors susceptible. Puisque la me
sure du brûlement a été abandonnée, elle ne doit, comme
on l’a d it, être tirée à conséquence qu’en ce sens qu’elle
confirma la suppression de toutes prestations féodales, ou
mélangées de féodalité.
E t puisque les actes restent, ce qu’il y a à vérifier, c’est
si la percière, d’après les reconnoissances, est mélangée de
féodalité : le résultat est évidemment négatif.
Comment supposeroit-on le mélange? Il est dit que les
héritages sur lesquels cette redevance se perçoit, sont la
propriété du seigneur, et que, pour raison de cette pro
priété , il perçoit une certaine quotité des fruits qui en
proviennent. II n ’y a là a u c u n e sé p ara tio n du domaine
direct et du domaine utile, et ainsi aucun caractère de
féodalité ; et rien n’est ajouté qui soit entaché de ce vice.
Il n’importe que, dans les mêmes actes, on rencontre
des reconnoissances de cens ; aucune confusion n’en est
la conséquence. Si l’on discute l’un de ces actes, on devra
dire qu’il renferme deux titres; que l’un relatif aux cens
est supprimé, et l’autre regardant la percière est main
tenu; que la cause, la nature, les obligations et les héri
tages sont divers; qu’après avoir reconnu les cens, le re
devable a pu aliéner les héritages censuels et être quitte,
et pourtant continuer d’être obligé sous le rapport de la
percière; et que là où tout est si nettement distinct, il n’y
a réellement point de mélange.
�( Ï2 )
En un m o t, il y a mélange de féodalité, lorsque le
même héritage, d’après le même titre constitutif, sup
porte avec la rente un droit féodal quelconque envers
le même seigneur; et l’idée n’en peut être conçue, lors
qu’il faut passer d’une redevance à une autre, d’une cause
à une autre, d’un héritage à un autre, etc. L e même écrit
contient deux ou plusieurs transactions, sans les confon
dre; elles y sont accolées et non mélangées.
A in si, les reconnoissances que le précepte oublié du
brûlemeut n’empêche pas d’employer, établiront la de
mande de la percière ; et le prétexte du mélange de féo
dalité ne fournira aux redevables qu’une exception faci
lement repoussée.
D é l ib é r é a Paris, le i er. brumaire an 14.
CHABROUD.
D u même avis, par les mêmes motifs.
DÉLIBÉRÉ à Clermout-Ferrand, le 9 frimaire an 14.
BERGI ER.
L
e
CONSEIL SOUSSIGNÉ, qui a vu la reconnois-
sance consentie au seigneur de Chalusset, par les habitans
du village du M ontel, et la présente consultation,
E s t d u même AVIS, et par les mêmes raisons auxquelles
�( ï3 )
il ajoutera un moyen qui trancheroit tous les doutes, s’il
pou voit encore en subsister.
Ce moyen se puise dans les dispositions d’an décret
impérial qui se trouve rappelé dans le tome 4, an 13,
du Recueil de jurisprudence de la cour de cassation, par
S ire y , à la pag. 29 du supplément, èt qui se trouve en
core sous la date du 29 vendémiaire an 1 3 , à la suite
du n°. 213 des Instructions décadaires sur l’enregistre
m en t, tom. 1 2 , pag. 238.
Après que dans l’article 5 de ce décret, il est d i t ,
« on doit considérer comme preuve de l’abolition d’une
« redevance, le titre constitutif, par lequel le même im« meuble se trouve gi’e v é , au profit du même seigneur,
« de redevances foncières et de redevances reconnues féo« dales’, » il est ajouté dans l’article 6 : « N e sera point
« admissible comme -preuve de mélange deféodalité, un
« titre récognitif \ dans lequel les redeva?ices fon cières
«r et les redevances féodales se trouveront énoncées dis« tinctement et séparément, sans q u i l y ait de liaison
« entre Vune et l'autre énonciation. »
O r , dans la reconnoissance du ténement du M ontel,
chacun des habitans et détenteurs a reconnu individuel
lement tenir, savoir, tel particulier, tels et tels héritages,
chacun par sa contenance et ses confins, et sous tel cens
pour chaque héritage ; et ce n’est qu’après toutes ces rcconnoissances, qu’alors tous les détenteurs se réunissent
pour reconnoître que tous lesau très héritages du même téne
ment, qui ne sont point asservis à des cens, appartiennent
en toute propriété audit seigneur j et q üC lorsqu’ils les
cultivent, ils sont tenus de lui en délivrer le quart des
�*4
(
)
fruits : prestation connue en Auvergne sous le nom de
percière, et ailleurs sous ceux de champart, agrier
terrage, etc. ; mais qui est une prestation purement fon
cière, surtout dans une coutume allodiale, comme celle
d’Auvergne.
L ’application des dispositions du décret impérial se
fait donc bien sensiblement à l’espèce du titre récognitif
des habitans du Montel. La percière est une redevance
purement foncière, qui ne frappe pas sur les mêmes i?nm eubles, et qui se trouve énoncée distinctement et sé
parément , et sans aucune liaison antr’elle et les cens
établis par la même reconnoissance sur des héritages toutà-fait differens.
D é l ib é r é a R io m , le 14 mars 1807,
a n d r a u d
.
de la reconnoissance consentie au terrier
de la terre de Chalusset, par les habitans du
village du M ontel> devant Bouyon et Mornac
notaires, le 24 février 1788.
E xtrait
Par-devant les notaires royaux soussignés, et témoins
ci-après nommés, ont comparu Sébastien Faure, Amable
Audanson , Pierre Breschard ( et plusieurs autres dé
nommés ) , tous laboureurs, habitans du village du M on
tel; lesquels, de gré et bonne volonté, après avoir pris
communication d’une reconnoissance reçue de la Farge
notaire ro y a l, le £2 juin 15 7 7 , consentie au profit de'
�( i5 )
Gilbert Daubusson, seigneur de Banson , insérée dans
une expédition du terrier de la (cire de Banson , signée
Rochette, notaire, et du plan figuré du M ontel, qui leur
a été représenté par M . de Sarrazin, et qu’ils ont trouvé
sincère et véritable, de tout quoi ils ont dit être certains
et bien instruits, ont reconnu et confessé ten ir, porter et
posséder, avoir tenu et possédé de tout temps et ancien
neté, du sieur de Sarrazin , a c c e p ta n t, etc. i° . de ladite
reconnoissance, art. i 55y dudit terrier, tiennent, Louis
Beaumont, une maison , grange et étable, et un jardin ;
M ichel M om et, un jardin, etc. M ichel Chom ot, une
maison , etc. Louis G o u rd y, quatre clienevières , etc. ( et
ainsi de plusieurs autres, tous dénommés particulière
ment ) , au cens annuel et perpétuel, solidaire et uni
forme d’argent, 21 s. 2 d . , seigle, etc. avoine, etc. avec
tous droits de directe seigneurie. ( Viennent ensuite d’autres
particu liers q u i reconnoissent c h a c u n les h é ritag e s qu’ils
possèdent sous un cens solidaire en directe seigneurie. )
Tous les cens des susdites pagésies, compris en la présente
reconnoissance, en tout droit de directe seigneurie, tiers
denier de lods et ventes, usage de chevalier, taillables
aux quatre cas en toute justice, haute, moyenne et basse,
payables et portables à la fête de Saint-Julien , 28 août
de chaque année, au château de Banson, pagésie par pagésie, comme dit est.
C’est à la suite de cette clause que se trouve im m é d ia
tement celle ci-après transcrite.
- Reconnoissent de plus tous lesdits confessans , que
toutes les autres terres , héritages et propriétés non in
vestis , situés dans ladite justice dudit seigneur, sont
�( 16 )
et appartiennent en fo n d s et propriété audit sieur de
S a rra zin , dont ils ont promis et se sont obligés de lui
payer la percière de tous les f r u i ts y croissant, qu’ ils
seront tenus de porter à ses granges , et qu ils ne pour
ront partager n i déplacer , sans appeler ledit seigneur
ou ses préposés, etc. Fait et passé , etc. le 24 fevrier
1 7 8 8 en présence de et d e , etc. soussignés, . avec ledit
seigneur et les sieurs H ugon , le R o y , C lo z e l, Tailhard ie r , Sanitas, V id o u z e , G rangh on et Dezrim ard ; les
autres confessans ont déclaré ne savoir signer ; de ce enquis. L ’expédition signée par M ornac, notaire.
,
A. R IO M
de l’imprimerie de
L andriot
, seul imprimeur de
la Cour d’appel. — 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Les habitants de Montel. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Bergier
Chabroud
Subject
The topic of the resource
percière
droits féodaux
contentieux post-révolutionnaires
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultations.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1793-1807
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montel-de-Gelat (63237)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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contentieux post-révolutionnaires
droits féodaux
Percière
-
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1849534be32dd4563e6ccf69c6cb3ae4
PDF Text
Text
MÉMOIRE
P O U R
L E S H A B I T A N S D' A U B i È R E ,
E N
R É P O N S E
au mémoire et à la dernière requête
M o n s ie u r
de
D e stra d a t.
■
M o n s i e u r D e s t r a d a t a mal p ris son texte dans le m ém oire im
p rim é qu’il a répandu,lorsqu’il a crié à l’usurpation contre les habitans
d ’A u b iè re , tout exprès p our essayer d’ajouter leu r Com m unal à la
vaste et rich e propriété de Sarliève , par droit de voisinage. S ’il
suffisait de déclam er avec ch a leu r, pour ravir à ce tte commune le
marais
communal de soixante-treize
septérées
d’étendue , dont
elle jo u it depuis des siècles , et qui a été partagé par tê tes d 'h abitan s
saign é, défriché , et mis dans le m eilleur état de culture et
d e production depuis d ix ans , en vertu de la loi du 10 juin
il aurait abondam m ent justifié son attaque, quand il s’en serait tenu
au seul préam bule de son m ém oire. M ais le souvenir des usurpa
tions de tout genre que les Seigneurs
s’étaient perm ises sur les
communes pendant le régim e oppresseur de la féod alité, n ’est pas
encore assez é lo ig n é , p our que les reproches adressés aux com
munes d’avoir usurpé elles-mêmes sur les Seigneurs
lorsqu’ils
�ét lient tout-puissans ,le s terrains com m unaux dont elles jouissent
«,o toute ancienneté , puissent faire quelque fortune. Aussi M .*
D estra d a t , ram ené à la réflexion , a t-il com pris que ses bruyantes
n’étaient que ridicules.
clameurs
C e n ’est plus
maintenant
la
réunion du com m unal d’ A ubière à son domaine de Sarlieve comme
sa
s o u r c e
p rim itiv e , qu’ il dem ande; il veut seulement que l ’agri
culture perde cette précieuse conquête faite par les sueurs , les
fu i"u e s et les avances de fonds de plus de 2,ooo dcfncheurs. 11
veut nue ce marais redevienne ce qu’ il était avant le partage ;
en,’il soit rem is en paturage com m u n , et condamné de nouveau à
ne produire que des joncs et quelques lierbes marécageuses. L ’on
lr o m p erait, au r e s te , si l’on croyait que sa réclamation
b u t de
a pour
lui faire partager avec les liabitans d’A ubière l ’avantage
«l’ en v o y e r ses bestiaux pacager avec les leurs dans ce communal :
il sait bien qu’il n ’aurait pas ce d r o it , lui qui ne possède plus
•ien
dans le
territoire de la commune d ’ A ubière ;
car il
n V n o r e pas que les paturages dans le bas pays d’Auvergne se lim i
t e n t
encore par les bornes des anciennes justices (a). Quel est donc
lo mobile qui le fait a g ir , lorsqu’il veut dicter des lois aux h a b itans d ’ A u b i è r e , sur la manière de jouir d e leur com m unal, et les
êclier de le tenir en culture ? l’inquiétude et l ’esprit de con
t r a r ié t é :
m u le r .
anima nocendi. C ’est ce qu’il n’est pas possible de se dissi
A v ec de pareilles v u e s , il n’espère pas sans doute d’inspi
rer un v if intérêt en sa faveur.
Il disait dans son mémoire ( b ) :
» D eux objets très-distincts doivent fixer l’attention du tribunal.
» L e prem ier consiste à reconnaître le citoyen Destradat pour
» seul
légitime
propriétaire
du
tenem ent appelle
le Marais
)j d ’A ubière.
)> L e second consiste à savoir s’il a droit de racheter à dire
» d’ experts la faculté qu’ont les Jiabitans d’Aubière de jouir de
- î
(a) Art. I ." et 111 , tit. des pacages, de la Coutume d’Auvergne.
(b) P a g e
5.
�(3)
» la vaine pâture sur ce tenem ent ( a ), et de le m ettre en culture
à son
profit , après l’a vo ir
affranchi. A lors lin intérêt sérieux
m otivait son entreprise. Il visait à
conquérir une p r o p r i é t é de
soixante-dix ou quatre-vingt m ille francs de
v a le u r , m oyennant
une faible in d em n ité, et de faire son profit des avances du défri
chement.
M aintenant cet intérêt a disparu par les conclusions nouvelles
que vient de prendre M .r D estradat. C e n Jest plus un simple droit
de vaine pâture rachetable à volonté, qu’il accorde aux habitans
d’A ubière sur le tenem ent de la R o n z iè re ; c’ est le droit perpétuel
et irrachetabl-e d ’en jo u ir en nature de paturage communalK
Il persiste bien à se prétendre unique propriétaire de ce marais :
mais ce n ’est plus qu’une propriété stérile , purem ent nominale et
sans produit, qu’il revendique ; car il la fait consister uniquement
dans la triste et déplorable
faculté de
contrarier
les habitans
d’A ubière sur la m anière d ’adm inistrer leur communal ; d’en faire
annuller le partage qui l’a converti en plus de deux m ille lots de
petites propriétés privées j de faire p erdre aux
défricheurs les
dépenses du défrichem ent et les am éliorations j de n u ire, en un'
m ot , et d e n u i r e s a n s a u c u n e s o r t e d ’i n t é r ê t p e r s o n n e l .
P rouvons-lui que cette p ro p riété m alfaisan te , dont l’exercice
s ’accorde si mal avec
ses moeurs douces et ses sentim ens h on
nêtes j prouvons-lui qu’elle n ’est qu’une chim ère dont on le berce $
et qu’une propriété séparée pour toujours du droit de jo u ir , n ’e it
qu’un
mot vuide de s e n s , un être de raison.
A llons plus lo in , et p rouvon s-lui encore que ses ancêtres n ’ont
jam ais eu , qu’ils ne lui ont jam ais transmis aucun droit légitim e
de propriété sur le marais défriché de la R onziôre ; que la stip u
lation portee dans quelques titres
qui donnait aux Seigneurs
de Sarliève la faculté d’em pêcher les habitans d ’A u bière de jouir
(« ) O n v o it à la p age 23 de son m é m o ire , qu e ce tte p ré te n tio n é ta it a p p u
yée sur
uno
fau sse a p p lic a tio n d e
r u r a l d é cré té le
l ’a rt. V I I I , sect. I V ,
t iu I .tr d u code
28 sep tem b re 1 7 9 1 , san ctio n n é le G o cto b re , q u i a u to rise
le 1 a ch a t entreparticuliers seulement d u d r o it
de v a in c p â tu r e é ta b li par titres.
�,1c
le u r
-communal
( 4)
autrem ent q u 'en pâturage
c o m m u n ,n . v a t
„ o u r but que la conservation <lu droit do pacage pour les bes¡ a u x que les propriétaire» de Sarliève
liendrmtnt dan, la , m t Ke
d 'A u b ilr, ; que cette faculté prohibitive est devenue aujourd’hui
.«us o b jet, et conséque,m uent sans effet ; que toute antre interpré
tation donnée à cette stipulation , n’y laisserait voir qu un abus
de la dominalion féodale réprouvé p ar la législation actuelle , et
dont la com m une d’A u biére aurait été affranchie par le nouveau
réa iuic.
M
o y e n s
.
C ’est un point (le fait c o n s t a n t et dont on est d’a cco rd , que le
communal d e là R o n z iè r e , situé dans l’étendue
justice d’A ubière , était originairem ent un
de la ci-devant
terrain marécageux ,
une lande inculte , attenant à l’ ancien lac de Sarliève , qui fut
d e s s é c h é par Octavio Destradat et ses associés , au commencement
de l ’ a v a n t - d e r n ie r siècle ,
" la c
d esséch é.
s u ffir a it,
mais qu’il n ’a
jamais fait partie du
Si l ’on pouvait élever des doutes sur ce fait , il
p o u r les dissiper, de jetter les y eu x sur la transaction passée
entre Octavio Destradat et le s
consuls et habitans d’A ubière le
i 3 juillet 16.37, où il est consigné et répété à chaque page (a ).
U ne p r é c é d e n t e t r a n s a c t io n s u r p r o c è s , p a s s é e \e 1 1 m a r s i 5 G i ,
plus de s o i x a n t e ans avant le défrichem ent du lac , entre le Seineur
de
et
168 7
les habitans d’Aubière , laquelle est visée dans celle
, justifie la m êm e vérité.
Le
lac
de Sarliève
et le
marais de la Ronzière étaient des objets totalem ent distincts.
Le
terrain occupé par le lac était un b a s-fo n d , un terrain creux ,
h a b i t u e lle m e n t
couvert par les eaux des sources abondantes qui
y n a i s s e n t , et qui n ’avaient d’écoulem ent que lorsqu'elles s’étaient
élevées au niveau des bordures : le marais de la R onzière,au co n traire,
était h a b i t u e l le m e n t hors des eaux. U n piquettem enl fait en l’année
g 25
avait fixé les bornes du lac par le niveau de la décharge
a n c ie n n e des eau x, avant d’ouvrir les tranchées de dessèchement.
O n avait attribué aux entrepreneurs du dessèchem ent, tout le ter(o) rages 1 , 2 , 3, 4 , 5 et autres de la transaction ;voir les fragmen» (jui
en sont rapportés à la page suivante,
�(i5)
rain que les eaux couvraient dans les temps ordinaires (a) : le marais
de la R onzière restait hors de l ’enceinte du piqucttem ent , et il
avait etc pratiqué par O ctavio Destradat un large fossu pour fixer
la ligne de séparation (b).
( a ) E
xtrait
de la transaction du i 3 ju illet \ GZj .
( P r e m iè r e p ag e ) C o m m e a in s i so it qu e s u r le p ro cè s e t d ifféren d tn u au
C o n s e il d u R o i , e n tre
e n tre p re n e u rs et associés
O c ta v io D e s tr a d a t , g e n tilh o m m e a lle m a n d , l ’u n
des
a il dessèch em en t d u la c e t m a ra is d e S a r liè v e , en
A u v e r g n e , ta n t p o u r lu i , q u e p o u r ses associés d ’u n e p a r t , e t les con su ls et
lia b ita 11s d u lie u d ’A tib iè r e e t a u tre s l i e u x , desqu els les ju s tic e s s’é te n d en t dans
le s a p p a rten a n ces d u d it la c , d ’a u tre s p a r tie s , so it in te r v e n u a r r ê t d u 3 o .mc jo u r
de d é cem b re i 634 , p a r le q u e l sa M a je s té a u r a it m a in te n u e t gard e le d itE s t r a d a t
e t scs associés dans la p ro p r ié té , possession e t jo u issa n ce d u d it la c e t m a ra is
de S a r liè v e , é ta n t dans le te r r a in ju s q u ’a u piquettement fa it
en
i G25 , sans qu e lesd its co n su ls e t h a b ita n s d esd its l i e u x circ o n v o is in s
y p u issen t à l ’a v e n ir fa ir e p a ît r e le u r b é t a i l ,
l ’année
e t autre»
en a u cu n e saison , à p ein e d*
co n fisca tio n ..........................
( E t à la p a g e 3 ) L e s d its co n su ls p ré te n d e n t q u e la p a r t e t p o rtio n q u i d o it
r e v e n ir au p r o p r i é t a i r e d u fonds sem é en e lia n v r c dans l ’<5lc n d u c d u d it m arais
de la R o n zih e , le u r d o it a p p a rte n ir , e t e n te n d a ie n t le r é p é te r p r iv a t iv e m e n t
a u d it s ie u r d’J ïs tr a d iil, q u i d o it se r e s tre in d r e dans l ’é te n d u e d u la c q u i é ta it
en e a u , lo rs d u d it p iiju e tte m e n t
d e l ’a n n ée 1625, s u iv a n t q u ’il est p o rté p ar
le d it a r r ê t de l ’a n n ée i 6 3 4 .
( P lu s bas e t à la m ém o p ag e ) L e s h a b ita n s d’ A u b i è r c , ré p o n d a n t à la p ré
te n tio n d ’O c t a v io d ’.Estradat q u i le u r d e m a n d a it u n e c o n tr ib u tio n a u x d épen
ses d u dessèchem en t , à ra iso n de l ’a m é lio ra tio n qu e le m a ra is de la Ttonzifcreen
a v a it r e ç u e ,ils d isa ie n t q u ’i l n ’é ta it d û de c o n tr ib u tio n a u x fra is de d essèchem en t >
q u e p a r les m a ra is vo isin s, lesq u e ls é ta ie n t in fr u c t u e u x e t lo u t-à -fa it in c u lte s e t
in o n d é s , a v a n t le d it d essèch em en t............ m ais n o n des m ara is , le sq u e ls , a v a n t
l ’e n tre p rise d u d it la c v o is in , é ta ie n t en p acage co m m u n , co m m e c e lu i
de la
R o n z iè re , le q u e l o n p e u t d ir e a v o ir é té a u ta n t o u p lu s fe r t ile e n herbages p r o
p res à la n o u r r itu r e d u b é ta il................. q u ’i l n ’est à p ré se n t , après le
dessèche
m e n t d u d it la c.
(b )
la
é té
O c ta v io D e s tr a d a t e x p o s a it q u e la tra n c h é e q u ’il
sép a ra tio n
d u d it la c
d é fr ic h é ,
a v a it f a i t
fa ir e p o u r
e t d u d it m a r a i s de la R o n z iè r e , l ’a v a it
fa v o ra b le m e n t p o u r les h a b ita n s d’A u b iè r c ...... en ta n t q u ’il s’é ta it
b e a u co u p
r e tir e .
Après ces exposés divers, les parties traitèrent ainsi , à savoir ;
B
de
�(6)
C es faits une fois étab lis, il en résulte la conséquence évidente
mie le p o m p e u x étalage que fait M / D estrad at , clans son m ém oire,
des Liti e* de c o n c e s s i o n fct d’acquisition q u i transmirent a ses auteurs
la nronriété du ci-devant lac de Surliève , est une peine perdue.
H „ e ' s W t p a s de prononcer sur la p r o p r i é t é du lac desséché,
il
s ’a
>t
« in iq u e m e n t
de prononcer sur la propriété du nuirais de
la ü on ziïre , tout-à-lait distinct du lac
L e s titres invoqués pur M .'D e stra d a t s’ appliquent uniquem ent
et lim itativem ent au lac. A ucun ne
s’étend sur le m w .vs contigu
,m -elé
K ° " zière- NüUS " ' excePtonS paS ,uêin,e, l’“ !6 d’aiCq,;i51,i0U
61 O o ta vio D estradat <le G ilb e r t ftu ro a .1 A u b tcre , «le 1. p .,1
1 • • dans le lac de Sarliève , dont on nous a donne 1 extrait
1
to s ïe m é m o ir e
im p rim é (a). C a r M / D estrad at n e » ap prend que
S • neur d ’ A ubière lui vendit uniquem ent sa part du lac de
6 iièpe jusqu à Tancienne river et limite dudit l a c ; il ne vendit
d o n c aucun droit quelconque sur le marais de la lionziàre , qui
1
i nui ours avait été hors des limites du lac.
Mais ce n ’est pas assez d’avoir prouvé que M .r Destradat est
titre pour revendiquer la propriété du marais de la Ronzière ,
pTouvons-lui encore que les liabitans en ont d’incontestab les pour
la défendre.
L e prem ier et le plus puissant de tous , resuite de la nature
prim itive du terrain contentieux.
^
O
a vu qu’ il était un marais , un pacage com m un , situe dans la
iu J c e
d - A u b i é r e p l n 'e n fau t pas savoir davantage p o u r ran ger
Jc e t e r r a i•n p a r-.r,;
nronriétés
communales des_ liabitans d Aubiere.
m i îc s p
i
rp . ie c0(ie de la nouvelle législation : nous verrons
Ouvrons , en cucl ,
la d ite t r a n c h é e de d iv isio n e t sép a ra tio n d u d itla c d e ssé clié , a p p a rU
Vt«
« ten a n t a u x u u s
associés
, e t d u d it m ara is de la R onzifcrc , dans le q u e l lcs-
dils liabitans d’Aubifcre ont d ro it de pacage pour leu r b é t a il, serait refaite
‘
„
, •.
« a u morne e n d r o it
ei i c a v a it été
„ C„,,tina<, .ir ,„ t ver. 1. m i* W
(a) T a g e 1 1 .
fa ite p a r le d it sieu r
i
o
1 1 * >“ U“
J°
D e stra d a t , et
�. • -r
( 7 )
le colosse do la féodalité renversé' le 4 août 17 8 9 , dès l'au ro re de
la révolution , et toutes ses ramifications tom ber successivement avec
lui.
A insi l’article V i l de la loi décrétée le i 5 avril 1791 , sanc
tionnée p a r le roi le 20 , déclara que le droit « de s’approprier
)) les terres vaines* et vagues , ou gastes , lande» , biens hernies .
» et vacans , garrigues , ilégartls ou varcscheix , n ’aurait plus lien
» en faveur des ci-devant S eig n eu rs, à com pter de la publication
» des décrets du 4 août 1789 ».
C ette prem ière loi ne s ’était occupée que d’arrêter le cours des
usurpations de la puissance féodale: elle fut bientôt suivie de celle
du 28 août 1792 , qui prononça le rétablissem ent des communes dans
les propriétés communales que la féodalité
sur elles.
avait déjà usurpées
' r
L ’ article V III porte : « L es communes qui justifieront avoir ancien« nement possédé des biens ou droits d’usages quelconques , dont
» elles auront été dépouillées
en totalité ou
en partie par des
w ci-devant S eig n eu rs, pourront se faire réintégrer dans la pr»)) p r i é t é e t p o s s e s s io n d e s d ils b ie n s ou d r o it s d ’usage, non obstant
)) tous é d i t s , déclarations, arrêts du c o n se il, lettres patentes , juge» mens , transactions , et possessions contraires , à moins que les
» c i-d ev an t Seigneurs ne représentent un
acte authentique qui
» constate qu’ils ont légitim em ent acheté lesdits biens.
L ’article IX ajoute: « L e s terres vaines et vagues , ou g a ste s,
» landes , biens hernies ou vacan s, dont les communautés ne pour« ron t pas justifier avoir été
anciennem ent en possession , sont
» censés leur a p p a rten ir } et leur seront adjugés p a rle s tribunaux,
» à moins que les ci-devant Seigneurs ne prouvent par titres ou
» p ar possession exclu sive, continuée paisiblem ent et sans liou ble
» pendant quarante ans , qu’üs en ont la p ropriété ».
L a propriété prim itive et originelle de cet 10 classe de terrain
fut continuée de nouveau aux communes par l’article I . " } sect. IV
de la loi du
io juin
i7 q 3 : il p o rte : « T ous les biens connnu-
t> naux en g é n é ra l. connus dans toute la R épublique sous les divers
r> noms de terres vaines et vagues j gastes , g a rrig u e s, landes ,
�( 8 )
» pacages , patis , ajons , bruyères , bois communs , ïierm es ,
» v a c a n s , palus j marais , marécages , montagnes , et sous toute
» autre dénomination quelconque , appartiennent de leur nature à
» la généralité des liabitans ou mem bres des communes , ou des
» sections d c o m m u n e s , dans le territoire desquelles ces com» munaux font situés ; et comme tels, lesdites communes ou sections
» de communes sont fondées et autorisées à les revendiquer.
Enfin , l’article V III de cette loi ne se contente même pas de la
sim ple possession de quarante ans pour justifier la propriété d’un
ci-devant Seigneur sur les terres
vaines et vagues , landes ,
m arais, etc. jil exige im périeusem ent un titre, et que ce titre ne
soit point émané de la puissance féodale ( a ).
A p p u yés sur des lois si positives et si précises , les liabitans
d ’A ubière auraient été indubitablem ent fondés à revendiquer lo
marais
de la R onzière contre M .r D eslradat , sJil s’était trouvé
en ses mains au commencement de larévo lu tio n , par acquisition des
droits à titre universel du ci-devant Seigneur d’Aubière , et. cela en
vertu de ce simple argum ent: « L e terrain que nous revendiquons
est un marais , une lan de , un vacant inculte , par conséqu en t,
un terrain com m u n al d e su nature : il est situé dans notre ter
ritoire ; donc il nous appartient : ainsi l’ont décidé les lois du
nouveau ré g im e » . A combien plus forte raison sont-ils fondés à
résister à l’attaque inconsidérée de M .r Destradat , lorsqu’il v ie n t,
quinze ans après l’abolition du régim e féodal , leur disputer la pro
priété de ce com m unal, sans avoir en sa faveur un seul jo u r de pos
session ,n i lin seul titre.
(«) ( A r t . V I I I de la
par
la lo i «lu a S
S e ig n e u r
su r les
lo i c ité c )
« L a possession de q u a ra n te ans , e x ig é e
aoû t 1 7 9 a , p o u r
te rre s v a in e s
ju s tifie r la p ro p rié té d’un
et vagu es
, gastes ,
g a rrig u e s
c i-d e v a n t
, landes
,
m arais , e tc. , n e p o u rra , en a u c u n cas , s u p p lé er le titr e lé g itim e : et le
tit r e lé g itim e 11c p o u rr a ê tre
c e lu i q u i émanerait de la puissance féodale ,
m ais seu lem en t u n a cte a u th e n tiq u e
q u i co n statât q u ’il# o n t lé g itim e m e n t
a ch e té lesd its L ie n s , c o n fo rm é m e n t à l ’a r t ic le V I I I de la lo i
17 9 2 .
d u 28 aoû t
�(9)
V™ O
b j e c t i o n
.
C e n Jest pas sans titre que je revendique la p ropriété reelle
du marais de la R o n z iè re , nous répondra M .r D e strad at, ce n ’est
pas sans litre que je veux restreindre les habitans d’A ubiere à
un
simple droit d’ usage sur ce marais , pour le paturage de leurs
bestiaux en toutes saisons ; car j ’ai produit une délibération de
la communauté d’A ubière en date du 29 septem bre »797 .»qui
reconnut la p ropriété de mes an cêtres, puisqu’elle reconnut le droit
qu’ils avaient d ’ interdire aux habitans de défricher leurs commu
naux , de les afferm er } d’en jo u ir
paturage.
J’invoque aussi la transaction de
autrem ent qu’en nature de
1 6 0 7
, que
les
habitans viennent
de produire. L o in de com battre mes prétentions , elle en justifie
la légitimité ; car on y voit i.° , la relation d ’une transaction anté
rieure passée entre le Seigneur et les habitans d’ Aubière le 11
mars i 5 6 i , par laquelle ce Seigneur leur fit une concession , non
de la propriété , mais du droit de pacager dans le marais de la
R o n ziè re , A la c h a r g e d ’ u n e r e d e v a n c e de 15 f r a n c s ;
a .0 L a relation aussi d’un contrat de l’année 1 6 1 2 , par lequel
le Seigneur d’A ubière vendit à O ctavio D e str a d a t, tous les droits
qu’il avait sur ce lac et les marais attenans , sans réserve , et conséquem ment la nue propriété du marais de la R onzière et la rente
de i 5 francs due par les habitans d’A ubière en vertu de la tran
saction de i 56 i j
3 .° Q u ’il fut convenu par la médiation d’arbitres amiables com
positeurs :
•
Q u e le marais de la Ronzière serait jo u i p a r les habitans ,
» pour y fa ir e pa ca ger leurs bestiaux en toutes
saisons de
)) Vannée , tout ainsi (jil’il était p orté en la transaction de i 5fïi;
Mais que M.r Destradat se réserva aussi la faculté de pouvoir
y faire pacager les bestiaux que ses associés , ou lui et leurs ayant
droit tiendraient à Vavenir dans la ju stice d'Aubière ;
4 .° Enfin , qu’il fut arrêté « que les consuls
et habitans ne
« p o u rra ie n t J'aire labourer , cultiver et ensem encer ce m arais,
�( <o)
„ n i faucher , c o u p e r , ou aosensor l ’herbe ¿ ’ ¡ce lu i, et qu'ils seraient
» t e n u » de le laisser en pacage , suivant la transaction de i 5 0 i .
Q u e fuiit-il (le plus pour
caractériser un droit reel de pro
p rié té ?
R É P O N S E .
Il
la
de plus que la prop riété de ce marais eût reposé sur
fa u d ra it
tête du Seigneur d’A u b iè r e , avant la transaction de i56x ; qu’il
n e l’ eût pas aliénée par cette transaction , et qu’il l ’eût transmise
aux auteurs de M / Destradat. O r rien de tout cela n ’ existe
o L e Seigneur d'A ubièro n’aurait pas pu se reserver vulable1 t la nue p r °P riété du marais ds la R o n z iè re I)ar la transac“
men de 1^61 , quand il l ’aurait voulu ; car , pour se réserver utilem Tnt une^ p r o p r ié té , il faut l ’avoir , et nous avons déjà prouvé qu’il
ne
l ’a v a it
pas ; que ce marais appartenait de sa nature aux habitans
d 'A u b iè r e ; que les actes de propriété qu’aurait exercés le Seigneur
lieu auraient été des actes d’usurpation de la puissance féodale ;
que la com m une, en cédant à ses volontés arbitraires , n ’aurait pas
L i t i m é ses en trep rises, et que les lois de 1791 , de 1792 , et de
, 795 ,
l 'a u r a i e n t
relevée de son adhésion , fruit d e là contrainte et
d eV abu s d’ autorité (a).
_
Mais il n ’ en est pas ainsi :1atransaction de i5 6 t , qui n est connue
nue par quelques fragm ens rapportés dans celle de
i6 3 7 , n’a
ien qui puisse faire supposer au Seigneur d’A ubière l ’intention
n ' ‘ nale de retenir la vaine prop riété d’ un marais dont il aliénait
k rw»rnétuité pou r le paturage des bestiaux en toutes saisons,
1 US£l£lG
■
I
I.
j
Ct “ “ . « „ n , la faculté
au x nauluino
marais
n
î
f* i *
•
.
«• •
lant une redevance annuelle de 10 livres, b il interdisit
de
défricher , de faucher , d’alfermer
ce fut pour conserver le
droit de paturage pronnscu
T . ” es bestiaux avec ceux du village , ainsi qu’il est exprim é dans
S' saction de 16 3 7 , et uniquement dans cette vue. Donner un
la traiisa
stipulation , ce serait tom ber dans le rid icu le,
autre sens a CLLLl'
1
)■
£ a ) V o i r ci-dessu s , pages 6 > 7
�( II)
et il serait bien superflu d’in v o q u e r, pour fixer le vrai sens de la
convention , la règle qui veut que dans le doute
la
convention
s ’interprète contre celui qui a stipulé (a ), car ici il n ’y a pas de
doute.
E n fin , quelle que fû t la nature des droits retenus par le Seigneur
d ’Aubière sur le marais de la R onzière en i 5 6 i , il estt constant
qu’il n ’en céda aucun à O ctavio D estradat en 1612 sur ce marais :
on l’a déjà prouvé , en observant (b ), d’apres M .r Destradat lu im êm e, que tout ce que lui vendit à celte époque le Seigneur d’A u b iè r e , se borna à sa p a rt « du lac de Sarliève , consistant en
» m a ra is, eaux , poissons , cannes , roseaux et terres délaissées
)) jusqu’à l ’ancienne rive et limite dudit lac (c). R ien , absolum ent
rien ne fut cédé hors de l ’enceinte du lac par la vente de 1612 ;
c’est ce que les habitans
ne cesseront de dire et de répéter ,
la transaction de 1657 à la main (d). Que conclure de tout ceci ?
que la propriété du marais défriché de la R on zière , dont M 'r
Destradat se gratifie , n 'e st qu’une illusion et un rêve.
I I .C O
b j e c t i o n
.
H é bien ! vous conviendrez du moins , continuera M .r D estradat,
que c ’est une réalité que la stipulation insérée dans la transaction
de 1637 , par laquelle il fut dit : Quant au marais de la R on zière,
qu’il serait jo u i par les consuls et habitans , pour y faire pacager
leurs bestiaux en toutes sa iso n s, tout ainsi qu’il était porté en la
tx’ansaction de i 5 6 i , mais qu’ils ne pourraient fa ir e labourer ,
cu ltiver , et ensem encer ledit marais de la R onzière , ni fau ch er,
couper et assenser le fo in et Pherbe d'icelu i , laquelle ils seraient
tenus de laisser en pacage , suivant la transaction de i 5 G i .
Com m ent justifierez-voU |S votre contravention à une convention pro
h ibitive si absolue?
(«) D e b u it
le g e m
a p e rliù s
d icerc ..... a r tic le 1 1 6 2 d u code
c iv il-
i h) Page 6.
(e) Page u
d u m ém oire de M .r D estradat.
( d ) ° U lcs d l'0*ts d u S e ig n e u r d’A u b ic r c su r
ré servé s.
nommément
le terrain contentieux
wnt
;
�'
(l*î
R É P O N S E .
L ’ objeclion est écartée d’avance par ce que nous avons déjà dit
du défaut d’intérêt de M /D estra d a t à susciter une pareille querelle
aux habitons : cette stipulation du traité de i 657 , qui prenait sa
source dans la transaction de i 56 i , n’avait eu pour unique but
e de conserver l ’exercice sur le marais d’Aubière du paturage
ou’Octavio Destradat réservait pour les bestiaux que ses associes
1
lui tiendraient dans la justice d'A u bièro (sans préjudice des
droits et prétentions contraires du Seigneur d’Aubière J ■ et cet
intérêt a c e s s é par l ’aliénation qu’a faite M .r D estradat de tout
'
„ u ’il possédait dans la ci-devant justice d’Aubière.
C V ou d ra it-on
le
donner un autre m o tif à la clause, et prétendre
droit p ro h ib itif des défricliem ens et de toute autre con
version du marais de la Ronzière , p rop re à en am éliorer !e p r o
duit que
s ’ é t a i t
Destradat
réservé le Seigneur d’A ubière en i 5 6 i ,e t qu’Octavio
réserva
à son tour en ,6 3 7 , com m e ayant
aux droits du Seigneur d ’ A ubière , était un
succédé
retranchem ent à la
p rop riété de ce m arais, que le Seigneur d ’ Aubière avait fait en la
concédant aux h a b ita i« , afin de les retenir sous sa dépendance
t son servage ? N ous répéterons ce que nous avons également
à 't
1
que la clause , envisagée sous ce point de vue , serait une usur■
anifeste du régim e dom inateur de la féodalité , réprouvée
Patl° b lé g isla tio n n o u v e lle ; que le marais de la Ronzière é t a i t *
Par
,
* le patrim oine de la com m une et non la prop riété du
c/7. Ticttur^ ^ i
i
a
i m.
r • que les assujettissernens et les genes que le Seigneur
SC' f ? ï 0ur ;ouissancc , ain si que la ren te de quinze livres q u 'il se fit
■
consentir , c a
de p ou voir, uuu
!«■icnt des em piélations sur leurs propriétés , des abus
l>abolition de la féodalité les a affranchis (a).
d i f f é r e n t e s lo is d o n t n ous avon s ra p p o rté lo te x te a u x pages
(a) A h *
1 L
^
c c tte v é r it é , n o u s a jo u tero n s les a rticles
7 et 8 c i - d e s s u s , P _
l 3 a V ril 1 7 9 1 , san ctio n n é le uo , ain si
X I V et X V I d u d tc ic t
conçus :
«
demnitè , les redevances connues sous le nom de
toutes celles que les ci-d evan t Seigneurs hauts
�( i5 )
IIIe ET
D E R N I ÈRE
OBJECTION
.
E t la clause de la même transaction de 1657, par laquelle Octavio
D estradat fut autorisé » à faire planter des arbres le long de
)> la tranchée de séparation [ d u marais de la: Ronzière d’avec
» le lac desséché J , sur les deux bords et rives , à quatre pieds de
» ladite
tranchée , lesquels arbres et le retail d'iceux lui app ar
ia tiendront privativem ent à tous autres » ,
L ’appellerez-vous de même une usurpation de la féodalité ?
R
é p o n s e
.
O ui , certainem ent , c ’est égalem ent là une autre
de la féodalité abolie par les nouvelles
lois. Nous
usurpation
citerons
en
preuve les articles X V et X V I de la loi du 28 août 1792 > qui
p ortent :
)) T ous les arbres actuellem ent existans sur les places des villes.,
« bourgs et villages , ou dans les marais , prés> et autres biens
» dont les communes ont , ou recouvreront la p ro p rié té , sont censés
« a p p a rte n ir aux communautés , sans préjudice des droits que des
» particuliers lio n S e i g n e u r s pourraient y avoir acquis par titro
)) ou par possession (art.XV).
» Dans le même cas où les arbres m entionnés dans les deux
» articles précédens , ainsi que ceux qui existent sur
les fonds
)) même riverains , auraient été plantés par les ci-devant Seigneurs,
» les communes et les riverains ne seront tenus à aucune in d em n ité,
)) ni à aucun rem boursem ent pour les frais de plantation ou autres.
C
o n c l u s i o n s
.
Nous croyons avoir porté la conviction dans tous les esj> rits f
sur le défaut d’intérêt et l ’illusion des prétentions de M .r D es» ju s tic ie r s , se fa is a ie n t p a y e r p o u r ra iso n
» S o n t aussi
de
la v a in c p âtu re (a rt. I V ) .
ab o lis sans in d e m n ité le s ' d ro its de coursa su r les b e s t ia u x ,
» de terres vagues, e tc. a in si qu e toutes redevances et servitude»q u i en seraie n t
» îe p r e s e n ta tiv c s , e t g é n é ra le m e n t tou« les d roits m êm e
» d e y a n t d ep cjid a n s de la ju s tic e seig n eu ria le.
m a ritim e s ; c i-
�( 14 )
tradat. E lles sont si dépourvues de fondem ent y qu’il est à croire
q u 'il les abandonnera , sans attendre qu’elles soient proscrites par
le tribunal.
M . P IC O T - L A C O M B E , procureur impérial.
A . B E R G IE R avocat ancien.
V E R D I E R , avoué.
N . B. Au m om ent où l ’impression de ce m ém oire se term in ait, M . D estradat
faisait signifier des conclusions q u i son t, sans-doute, son d ernier mot. C ’est
tr ès-sérieusem ent qu’il a conclu à ce qu’à défaut par les habitons d’A u b ière
de
réta b lir le com m unal do la R onzière en p a ca g e, dans le délai de d eu x m
ois
en é x é c u tion de la transaction de 1637 c e tte belle propriété soit confisquée à
son p ro fit, et qu'il lu i soit perm is de s 'e n mettre, en possession, et d’en disposer
comme de sa chose propre. P o u r nous, nous ne ferons que r ir e de c et te m anière
ex p éd itive et toutt-à'fait neuve de s’approprier les biens des communes.
Q u a n t a u x a rb res abattu s o u arra ch és su r les b o rd u res , o n n e sait tro p p ar
q u i, p o u r lesq u els i l dem an de des dom m ages in té r ê t s , et à la re n te de
15 fr
d o n t il dem an d e in cid e m m e n t les a rré ra g e s , sans p r o u v e r q u ’i l so it a u x droi t s
d u c i-d e v a n t s eig n e u r d’A u b iè r e ; à c e t é gard , n ous le re n v e rro n s a u x a r tic le s
X V e t X V I de la lo i d u 28 aoû t 1 7 9 2 , et a u x a rticle s X IV e t X V de c e lle d u
20 a v r il 1 7 9 1 , q u i sont ra p p o rtés a u x pages 12 et 1 3 de ce m é m o ire .
A
DE
C L E R M O N T -F E R R A N D
L’ I M P R I M E R I E
DE
J.
VE YSSE T
Im p rim e u r-L ib ra ire , rue de la T reille.
’
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Les habitants d'Aubière. 1793?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Picot-Lacombe
Bergier
Verdier
Subject
The topic of the resource
communaux
vaine pâture
pacage
Description
An account of the resource
Mémoire pour les habitants d'Aubière, en réponse au mémoire et à la dernière requête de monsieur Destradat.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1793
1637-Circa 1793
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0501
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aubière (63014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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communaux
pacage
vaine pâture
-
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9a0fe3789cc639dcc2cd7b4ae17a0263
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CONSULTATION
Pour
l e
sie u r
PINTHON.
L ES A V O C A T S SO U SSIG N ÉS,• qui ont lu , 1 °. les
titres et pièces d’un procès entre les sieurs Cibot et Pin-"
thon ; 2°. une consultation donnée par l’un d’eux au
sieur Pinthon, en 1 8 1 1 ; 30. le jugement rendu au tri
bunal civil d’Aubusson, le 20 novembre 1 8 1 1 , en faveur
du sieur Pinthon; 40. un imprimé publié par le sieur
Cibot, contenant ses griefs d’appel contre ledit jugementsuivi de trois consultations délibérées à Riom , à Clermont
et à Limoges, par M es. Yissac Bergier et Dumas
que la redevance de deux setiers de grains,
due à M. le duc d’Orléans, et non au sieur Cibot, a
été abolie, comme féodale, au profit du sieur Pinthon;
que le tribunal d’Aubusson s’est parfaitement conformé
aux principes en le jugeant ainsi ; et que tout ce qui
a été écrit en faveur du sieur Cibot se réduit à des
maximes inapplicables, qui ne peuvent pas empêcher la
confirmation de ce jugement.
On a comparé une charge foncière, assise sur un im
meuble vendu, à une simple créance que le vendeur
pouvoit Réclamer après l’avoir déléguée. Et c’est ainsi
qu’après avoir dénaturé la question, on a appelé au
secours du sieur Cibot tous les lieux communs du droit ?
A
E stim en t
�( 3 )
en matière de délégation, pour en conclure que cette
charge foncière, féodale d’après lui-même, étoit rentrée
dans ses mains, comme roturière, après la suppression
de la féodalité. On a prétendu qu’il pouvoit la récla
mer à son profit, comme n’étant éteinte qu’au préju
dice de M. le duc d’Orléans.
Ce système est si faux, si contraire aux lois, que le
premier mouvement est de s’étonner que de simples so
phismes, sans application et sans liaisons, aient pu séduire
trois jurisconsultes. Mais il paroît que le sieur Gibot s’est
’attaché principalement à leur persuader qu’il avoit fait
de grandes réparations dans ce qu’il a cédé au sieur
Pinthon, et qu’il seroit injuste de faire gagner au sieur
Pinthon une redevance supprimée, plutôt qu’à lui. On
remarque, en effet, que les opinions de ses conseils
paroissent plutôt lui être favorables par équité que par
principes; mais il ne sera pas difficile de prouver que,
ni l’équité, ni les principes, ne sont en faveur du sieur
Cibot.
f a it s
.
En 1784, les agéns de M. le duc d’Orléans concédè
rent au sieur Cibot , à titre d’emphytéose perpétuelle, deux
étangs, l’un appelé du Périchon, et l’autre de la Rivière,
dépendans de sa seigneurie d’Evaux, moyennant neuf
setiers de grains, de cens'annuels et "perpétuels, por
tant droit de directe seigneurie, lods et vente, à raison
du tiers denier, payable et portable chacun an par ledit
Gibot au fermier de son altesse, à chaque fête de SaintJulien. Il est dit que le preneur jouira desdits étangs,
conformément au titre do propriété de M. le duc, et
�(3 )
qu’il lui sera libre de les convertir en telle nature de
production que bon lui semblera, en les améliorant,
et entretenant les chaussées. Il est ajouté que le preneur
oblige spécialement par privilège lesdits étangs, dans
quelque état de produit qu’ils puissent ôtreMnis, ainsi
que le revenu d’iceux.
\
•
A l’époque de cette concession, Arnaud-Pintlion étoit
fermier de la terre d’Evaux, par bail du 9 mars 17 8 1,
qui s’est prolongé jusqu’après 1792 •, et cette observation
n’est pas sans utilité.
•
.
} ;* . >*
Par acte du 20 mars 1786*, le sieur Cibot délaissa âudifc
Arnaud-Pinthon, au même titre,d’êmphytéose perpé
tuelle, avec garantie, la queue de l’étang Périclion ( que
l’on dit équivaloir à un huitième de l’étang ), avec condi
tion ( comme dans l’acte de 1784) que le sieur Pintlïon
pourroit convertir ladite queue d’étang en telle nature de
production que bon lui sembleroit; et après avoir réglé
le mode des jouissances respectives, il fut ajouté que le
sieur Pinthon se conformeroit au surplus, pour ladite
jouissance, aux clauses insérées en Vacte d'emphytéose
consenti par le duc d’ Orléans au sieur, Cibot, le 24
juillet 1784*
Voici maintenant la clause que s’approprie le sieur
Cibot pour réclamer une redevance non féodale, comme
constituée uniquement à son profit. « Le présent délais« sement ainsi fait entre les parties, moyennant la rente
« annuelle, perpétuelle et non rachetable, de deux
« setiers blé-seigle, mesure d’E v a u x , que ledit sieur
« Pitithon sera tenu de payer à son altesse, ses rece« vèurs ou ferm iers? en décharge dudit Cibot, en cette
A z
�(
4
)
« ville d’Evaux, et à chaque fête de Saint-Julien, et de
« laquelle redevance il remettra la quittance qu’il en
« retirera audit M. Gibot.
« Reconnoît ledit sieur Cibot avoir reçu avant ces pré« sentes, dudit sieur Pinthon, la somme de 60 francs,
« pour épingles, dont quittance. »
Toutes les conditions de cet acte se sont accomplies.
L e sieur Armand - Pinthon s’est payé par ses mains,
comme fermier d’E v a u x , des deux setiers de ble dont
il étoit chargé; et cela a eu lieu ainsi jusqu’à la fin de
son bail, résilié de droit, comme tous les baux de cette
nature, par les lois féodales.
C’est en cet état, et après cette exécution constante
de l’emphytéose de 178 6, que la redevance de neuf
setiers de grains, due à M. le duc d’Orléans, a été sup
primée par ces mêmes lois. Le résultat de cette suppres
sion a été que le sieur Gibot a été affranchi d’une re
devance de sept setiers, et le sieur Pinthon a été af~
franchi d’une redevance de deux setiers.
C ’est ainsi que toutes les parties l’ont entend« ; et le
sieur Cibot ne peut pas s’en défendre, puisque, depuis
1792 jusqu’en 18 10 , il ne lui est pas même venu à la
pensée de réclamer pou? le payement de cette redevance
éteinte.
- Mais en 18 10 , il s’est ravisé, et ses conseils ont cru
apercevoir quelque différence entre la redevance de 1784,
parce qu’elle étoit appelée cen.9 , et la redevance de 1786,
parce qu’elle étoit appelée rente , quoiqu’elles fussent
toutes deux payables ou duc d’Orléans.
E a conséquence, le sieur Cibot a notifié au sieur
�-
.
( 5 )
Pintlion qu’il révoquoit l’indication de payement par
lui faite en 1786, et il lui a fait sommation de payer les
arrérages de la redevance de deux setiers, échus depuis
la suppression, de même que de continuer à l’avenir
le service de ladite redevance à son profit.
Le sieur Pinthon a répondu qu’il avoit été débiteur
du duc d’Orléans, et qu’il avoit servi la redevance jus
qu’en 1792; qu’ensuite les lois ayant aboli la féodalité,
son héritage avoit été affranchi de la redevance de deux
setiers, comme les héritages du sieur Cibot l’avoient
été pour le surplus de la redevance demeurée à sa
charge.
Cette défense du sieur Pinthon a été adoptée par le
tribunal d’Aubusson.
Il a donné pour motifs à sa décision, i° . que l’objet
emphytéosé par Cibot à Pinthon étoit une portion de
ce que Cibot avoit acquis lui-m êm e du duc d’Orléans,
moyennant une redevance féodale; 20. que le sieur Cibot
exigea du sieur Pinthon l’obligation de payer sa rente
de deux setiers au même terme, au même lieu, à la
même mesure, et au même ^seigneur, à la décharge de
lui Cibot, et en diminution des neuf setiers compris
dans le premier bail ; 30. que cette redevance de deux
setiers n’est qu’une fraction de la rente féodale de neuf
setiers; ce qui s’indmt de l’obligation ci-dessus, et delà
charge imposée à Pinthon de jouir conformément au
premier bail; 40, que Cibot n’auroit pas pu exiger ponc
lui le payement de la redevance, sans contrevenir à la
convention de la payer au seigneur, et parce que ce
seigneur aurait, pu l’exiger solidairement de Pinthon
�( 6 )
lui-même, comme détenteur d’une portion de son eraphytéose ; 5°. que les redevances abolies l’ont été au
profit du détenteur du fonds qui en étoit grevé, et non
au profit de Cibot.
Ces motifs sont d’une grande solidité; et lorsqu’après
s’en être pénétré on cherche à approfondir les raisonnemens du sieur Cibot pour les bien entendre, on les
trouve d’une foiblesse telle, qu’ils ne peuvent soutenir
aucune comparaison*
Moyens du
sieur Cibot»
Le système du sieur Cibot se réduit à deux propo
sitions principales. La première consiste à dire qu’il n’a
stipulé une rente de deux setiers que pour lui, et non
pour le duc d’Orléans ; que si à la vérité il a indiqué
le duc d’Orléans pour recevoir, ce n’est point une dé
légation parfaite, mais une simple indication de paye
ment, qui n’opère pas novation, suivant l’article 1277
du Code civil. Il en conclut que lui seul étoit resté dé
biteur du duc d’Orléans, et que Pinthon n’auroit pas
pu rembourser la rente au duc d’ Orléans, môme avec
son acceptation, sans la participation de lui Cibot ; il en
conclut encore qu’il a pu révoquer son indication de
payement, et redemander pour lui une rente dont la
délégation n’avoit pas été consommée»
La deuxième proposition du sieur Cibot est puisée dans
quelques arrêts sur les arroturemens de rentes féodales,
parce qu’ il est de principe que les redevances détachées
du fief avant la suppression ne sont plus féodales; et le
sieur Cibot en conclut que la redevance créée par lui
n’étoit plus seigneuriale, étant stipulée payable à lui, et
nou en faveur du iief.
�- ( 7 )
- Voilà le résumé des moyens qu’il s’agit de discuter,
pour justifier l’opinion déjà émise en faveur du juge
ment d’Aubusson.
- Avant de s’occuper du fond de cette affaire, le sîeur
Pinthon pourra proposer la fin de non-recevoir de l’ap
pel , parce que l’objet de la demande sur laquelle le
tribunal d’Aubusson a statué, n’excédoit pas 1,000 fr.
Cette fin de non-recevoir peut être proposée d’après
l’article 453 du Gode de procédure , quoique le juge
ment ne soit pas qualifié en dernier ressort.
Par sa sommation d u ji4 août Ï8 10 , le sieur Cibot
avoit demandé tous les arrérages de la redevance de deux
setiers, échus depuis 178 6 , outre le service à venir de
ladite rente ; mais lors du jugement dont est appel, il
avoit restreint ses conclusions aux arrérages échus de
1786 à 1792 , et aux arrérages de cinq ans antérieurs au
commandement; ce qui fait dix ans d’arrérages. O r, sui
vant la jurisprudence, la compétence se règle par les
dernières conclusions prises au procès, surtout lors
qu’elles réduisent les prétentions du demandeur. ( Voir
Sirey , suppl. de l’an 1 2 , page 1 9 1 ; Denevers, 1 8 11 ,
page 465, et 18 12 , page 475. )
Suivant la loi du 18 décembre 1790 , qui permettoit
le rachat des rentes, il étoit dit que lorsqu’elles auroient
été créées sans évaluation de capital, ce capital seroit
fixé , savoir, au denier vingt à l’égard des rentes créées
en argent, et au denier vingt-cinq du produit annuel à
l’égard des rentes payables en grains, récoltes, sçrvice
d’homme, etc., en ajoutant un dixième auxdits capitaux,
Fin de nonrecevoir de
l’appel.
�( 6 )
si les rentes avoient été créées sous la condition de non re
tenue des impositions ( titre 3 , article 4 ) ; et pour avoir
une règle générale de fixation, quant aux redevances en
grains, il doit être fait sur la pancarte du marché le plus
prochain, une année commune des quatorze années an
térieures en retranchant les deux plus foibles, et prenant
le dixième du surplus ( article 7 ).
D ’après ce procédé, le sieur Pinthon s’étant procuré
la pancarte du marché de la ville d’ E v a u x , il en résulte
que le terme moyen de chaque année se porte à 26 fr,
30 c., ce qui, au denier vingt-cinq, forme un capital de
657 fr. 5o c ., à quoi il faut ajouter 216 fr. 80 c ., pour
les années d’arrérages , déduction faite du cinquième ;
ce qui fait un total de 874 fr. 30 centimes. Il est donc
prouvé que le montant total de la demande, y compris
les arrérages échus, qui doivent être portés en compte,
suivant la jurisprudence, ne s’élèvent pas à la somme
de 1,000 francs.
La loi du 24 août 1790, qui détermine le taux de
la compétence judiciaire, dit au titre 4 , article 5 : « Les
« juges de district connoîtront en premier et dernier res« sort de toutes affaires personnelles et mobilières, jus« qu’à la valeur de 1,000 fr. de principal, et des affaires
« réelles dont l’objet principal sera de 5o fr. de revenu
« déterminé, soit en rentes, soit par prix de bail. »
On pourra objecter que la redevance de deux setiers
de grains dont il s’agit, n’est pas expressément déter
minée à 5o francs de revenu. A cela il sufliroit peut-,
être de répondre que la loi postérieure, du 18 décembre
179 0 , est venue faire le complément de cet article, en
fixant
�(
9
)
fixant légalèment le capital des redevances qui jüsques
alors n’en avoit aucun, parce qu’elles.étoient créées irrachetables.
'
Mais il ne faut pas traiter aussi légèrement une ques
tion, qui n’étoitpas alors sans difficulté par d’autres motifs.
La loi du 18 décembre 1790 portoit que la faculté
de racheter les rentes ne changeoit rien à leur nature
immobilière, ni aux droits que les créanciers des bailleurs
pouvoient exercer sur lesdites rentes. D ’après cela on
pouvoit considérer une rente où redevance, comme
inhérente à l’immeuble, à tel point que les procès qui
pouvoient s’élever sur la propriété des rentes, fussent ré
putés avoir pour objet l’immeuble lui-même sur lequel
elle étoit assise.
Ceci néanmoins n’étoit pas sans réponse, puisque l’ar
ticle cité de la loi du 24 août 1790 comprenoit dans la
compétence de dernier ressort les affaires réelles qui
n’excédoient pas 5o francs de rente.
: Mais une observation plus satisfaisante, c’est que la
nature des redevances foncières est absolument changée
depuis le Code civil, : en 17 9 0 elles étoient immeuble,
et le Code civil les a classées parmi les choses mobi
lières (art. 529 et 630 ). Ce point de droit est aujourd’hui
reconnu comme une vérité incontestable.
Ce changement de législation répond à toutes les
difficultés qu’on auroit pu se faire sur la possibilité de
juger en dernier ressort la propriété d’une redevance dont
le capital, réglé parla loi elle-même et sans arbitraire , ne
s’élève pas à 1,000 francs. Dès qu’une semblable rente n’est
plus un immeuble, dès que le propriétaire n’a sur l’héritage
B
�C
)
asservi à la rente, qu’une simple créance privilégiée de
bailleur de fonds, il n’y a pas plus de raison de disputer
sur la compétence en pareil cas , qu’il n’y en auroit de
prétendre que le prix d’une vente, ou d’une ferme payable
en denrées au taux de la mercuriale, ne peut pas être jugé
en dernier ressort, même au-dessous de 1,000 francs (i).
Il ne faut pas s’appesantir davantage sur cette iin denon-recevoir, dont le sieur Pinthon n’a véritablement
pas besoin ; car les objections qu’on lui propose n’ont
rien de redoutable y ni même de spécieux..
Réponse
au premier
moyen du
sieur Cibot.
La première proposition du sieur Pinthon n’est fondée*
que sür une confusion de principes du droit.
Sans contredit il n’est douteux pour personne que la
simple indication de payement n’opère pas de novation,
et que souvent on peut la rétracter. Mais qu’est-ce que
tout cela siguifie à la cause actuelle ?
Le sieur Pinthon ne veut pas prétendre qu’il y ait
de novation dans son emphytéose de 1786, puisqu’il
soutient au contraire ne devoir qu’ une portion de la re^
devance établie en 1784, et puisqu’en effet il a été astreint,
en 1786 , à se conformer aux clauses de Pacte de 1784Le sieur Ci bot s’embarrasse donc lui - même dans ses
propres citations, puisque c’est le sieur Pinthon qui est
intéressé à ce qu’il n’y ait pas de novation.
L ’indication de payement peut être révoquée : cela
est vrai, mais non pas dans tous les-cas. Aussi la loi est
( 0 La Cour d’appel de Riom a prononcé une lin de non-recevoir d’appel,
s’ngissant d’une rente en blé, parce que, d’après Ja pancarte, le p r i n c i p a l et les
arrérages nc se portèrent pas ù 1,000 ir, ( Journal des audiences, n». 27. )
�( II )
muette à cet égard, pour ne pas établir mal à propos
une règle générale.
Dans une obligation mobilière, et même dans la vente
à prix fixe d’un immeuble qui n’est sujet à aucunes
charges foncières ou hypothécaires, il est sans difficulté
que le prêteur et le vendeur peuvent donner à ce prix
toutes les destinations qui sont à leur convenance; ils peu
vent charger leur débiteur de payer une portion de ce prix
à un créancier; et si ce créancier n’accepte point cette
indication de payement, il est sans difficulté encore que
le créancier est le maître de la révoquer : cela ne blesse
l’intérêt de personne, car il est indifférent au débiteur
de se libérer envers l’un ou l’autre , pourvu qu’on lui
donne une quittance solide.
Mais cette hypothèse n’a rien de commun à une charge
réelle et foncière assise sur l’héritage vendu ; elle en
est inséparable sans le concours de volonté des parties
intéressées ; elle suit l’immeuble en quelques mains qu’il
passe; et par conséquent le vendeur ne peut pas détruire
l’indication qu’il a faite, pour exiger qu’on paye à luimême cette charge foncière, s’il ne rapporte le coiisen*tement exprès du bailleur de fonds.
Avant la révolution, dans la plupart des mutations des
biens en roture, la première condition de la vente étoit
de payer au seigneur telle quotité de redevance à laquelle
l'héritage vendu étoit asservi; et il étoit peut-être sans
exemple que de semblables indications de payemens fus
sent acceptées par les seigneurs, au profit de qui elles
étoient laites. Croit-on cependant que le vendeur, dans
cette espèce, pût notifier à son acquéreur, comme le sieur
B 2
�( ra )
Cibot, qu’il révoquoit l’iadicatioii de payement' par lut
faite, et le sommer de payer la redevance à lui-même?
Un semblable système auroit eu des suites bien ex
traordinaires après la suppression de la féodalité. Chaque
vendeur auroit pu, avec cette formalité, tourner à son
profit la suppression des redevances, qui n’auroient fait
que changer de possesseur. Heureusement personne ne
s’est avisé de cette tournure, et les redevances féodales
sont restées abolies au profit des derniers propriétaires.
Le sieur Cibot n’auroit pas même pu révoquer son
indication de payement, s’il se fût agi d’une créance sim
plement hypothécaire^
Car alors l’acquéreur n’étoit plus sans intérêt à voir
détruire sa convention, et le vendeur n’étoit plus au
torisé à dire qu’elle étoit stipulée pour lui seul. En effet,
celui qui en achetant convient de payer à un créancier
hypothécaire, a fait cette convention pour sa propre
sûreté, et pour ne pas demeurer exposé à des poursuites.
Il n’est donc pas au pouvoir du vendeur de détruire
cette convention , quoiqu’elle ne soit pas acceptée par
le créancier; car elle fait partie intégrante de Pacte; et
suivant l’article 113 4 du Code civil, les conventions
tiennent lieu de lois à ceux qui les ont faites.
Il n’y auroit qu’un moyen pour le vendeur de révo
quer son indication de payement malgré l'acquéreur, ce
seroit de payer lui-même la créance déléguée. Mais alorsr
prcnons-y bien garde, cela ne lui donneroit pas le droit
d’agir en révoquant la stipulation; ce scrôit au contraire
l’avoir exécutée, car il agiroit comme subrogé au créan
cier, conformément ¿\ l’article 126 1 du Code civil-
�(
!3
)
- O r, si le sieur Gibot étoit allé rembourser la rede
vance du duc d’Orléans avant la suppression, il est évi
dent que son action se seroit éteinte comme celle du duc
d’Orléans, dont il auroit pris la place par subrogation;
car subrogatum capit naturam subrogat?,
La rigueur des lois féodales est bien précise à cet
égard. On sait que tous les tenanciers d’une même reconnoissance étoient débiteurs solidaires envers le sei
gneur ; cependant s’ils avoient payé volontairement la
dette de leur codébiteur solidaire, ils n’avoient pas d’ac
tion en répétition contre lui après la suppression. La loi
du 9 brumaire an 2 ne donne cette action qu’à ceux qui
ont payé comme contraints , et par autorité de justice<
Mais il paroît que le système du sieur Cibot étoit
fondé sur une règle générale qui n’admet aucune excep
tion ; il a même poussé l’exagération jusqu’à mettre en
principe ( pages 9 et 10 ) que le sieur Pinthon n’auroit
pas pu'rembourser la rente au duc d’Orléans sans la
participation de lui Cibot, qui seul avoit capacité pour
faire ce remboursement.
Il est vraisemblable,que le sieur Gibot, en écrivant
une erreur de droit aussi intolérable, a oublié que dans
son emphytéose de 1786 il avoit chargé spécialement le
sieur Pintlion de payer au duc d'O rléans, et de lui
rapporter quittance. Il n’étoit pas question du rembour
sement du capital, parce que la redevance alors n’étoit
pas remboursable; mais lorsqu’elle l’est devenue, il est
évident que le sieur Pintlion pou voit libérer le sieur
Cibot et lui-m êm e, puisque c’éloit tout à la fois son
obligation et son intérêt personnel. ,L ’article 1236 du
Code dit qu’uue obligation peut être acquittée par toute
✓
�Ch )
personne intéressée, telle qu’un coobligé.’L ’article I 25r
ajoute que la subrogation a lieu de plein droit, i ° . au
profit de Yacquéreur d’un immeuble, qui emploie le
prix de son acquisition au payement des créanciers ayant
hypothèque sur Vhéritage ; 2°. au profit de celui qui,
étant tenu ayec d’autres ou pour d'autres au payement
de la dette, avoit intérêt de Tacquitter,
Ce n’étoit pas sans réflexion que le sieur Cibot écrivoit
un paradoxe aussi choquant, c’étoit pour en tirer une
conséquence en faveur de son système ; car immédiate
ment après ( pâge 10 ) il observe que le remboursement
s’est opéré par la suppression féodale, et que la créance
n'a pu s*éteindre qu'au profit de celui qui la déçoit ,*
d’où il conclut que le duc d’Orléans étant censé avoir
été remboursé par la suppression, l’indication de paye
ment s’est évanouie, et Cibot est redevenu créancier.
Cette conclusion n’étant que la suite d’un principe
faux, est par cela même nécessairement fausse. Mais ce
u’est pas tout; car il est facile de rétorquer contre le sieur
Cibot son propre raisonnement. En eiTet, si déjà il a
été prouvé, la loi h la main, que le sieur Pinthon étoit
débiteur du duc d’Orléans, et pouvoit le rembourser,
c’est lui qui dira maintenant, avec plus de raison : L a
créance n'a pu s'éteiiulre qiiau profit de celui qui la
devoit. O r, c’est moi Pinthon qui devois cette créance,
d’après mon titre; donc elle s’est éteinte à mon profit.
Rien n’est plus concluant et plus décisif’ que ce rai
sonnement puisé dans le propre écrit du sieur Cibot :
«joutons, pour abonder dans son sens, et ne pas même
lui laisser ln ressource de forcer l'application de ses prin
cipes en matière de délégation, qu’il y a eu, de la part
�c i5 y
du duc d’Orléans, acceptation de fait de la délégation
portée en l’acte de 1786.
En effet, il ne faut pas oublier qu’Arnaud-Pinthon
étoit fermier de la terre d’E v a u x , et même il est dé
nommé ainsi dans l’acte de 1786 : il avoit donc qualité
pour stipuler les intérêts du duc d’Orléans, dont il étoit
naturellement le negotiornm gestor, A in si, quand il a
stipulé l’obligation de payer au duc d’Orléans deux setiers de grains en décharge du sieuu Cibot, sa stipulation
a valu acceptation de la part du duc d’Orléans ; et cette
acceptation s’est réitérée à chaque payement qui a été fait
en décharge du sieur Cibot, c’est-à-d ire, pendant les
années 178 6 , 178 7, 178 8 , 1789, 1790, 17 9 1 et 1792.
Mais le duc d’Orléans n’avoit pas besoin de cette ac
ceptation de délégation par son fermier; car, i ° . suivant
Lathaumassière, en son Traité du franc-alleu, et Bacquet,
au Traité des francs-fiefs , la déclaration d’un vendeur,
que son héritage doit une redevance, fait titre au sei
gneur ; il est réputé l’avoir acceptée, quoiqu’il n’y ait
pas de sa part d’approbation formelle; 20. le duc d’Or
léans ayant concédé deux étangs en 1 7 8 4 , moyennant
neuf setiers de redevance , avec retenue du domaine
direct, avoit sous-entendu que les aliénations qui se-*
roient faites par son censitaire, de tout ou partie de ce
terrain, porteroient la condition de les assujétir à la re
devance qui en étoit inséparable , et par là même il
acceptait les délégations qui pou voient être faites à per
pétuité sur tous les propriétaires successifs de l’immeuble.
Celte délégation étoit tellement forcée, que le sieur
Cibot n’auroit pas même p u , comme on l’a déjà d itr
�( 16 )
notifier au sieur Pintîion , qu’il s’opposoit à ce que le
payement fût fait à M. le duc d’Orléans ; car le sieur
Pinthon devoit cette rente, non-seulement comme acqué
reur du sieur Cibot, mais encore comme détenteur d’un
héritage asservi au domaine direct du duc d’Orléans.
Il tenoit au duc d’Orléans par un l(en féodal dont
celui-ci pouvoit seul le détacher. Il n’étoit donc pas au
pouvoir du sieur Cibot de s’adjuger personnellement le
profit d’une redevance inséparable de l’immeuble. Il veut
se faire un moyen de ce qu’il étoit le débiteur de cette
redevance; par conséquent il n’en étoit pas le créancier.
L e sieur Cibot répond à cela (page 17 ) d’une ma
nière assez singulière. Pour imaginer un raisonnement,
il suppose un terrain allodial, pour en conclure qu’on
peut poursuivre solidairement une rente foncière comme
une rente féodale. Un peu plus bas il suppose qu’il a
payé le seigneur, pour en conclure que , s'il Vavoit
payé il auroit pu agir contre le sieur Pinthon.
Il est difficile de pénétrer le sens de ces deux sup
positions, et de deviner comment le sieur Cibot peut ar
gumenter d’ une situation imaginaire, pour en tirer une
conséquence en faveur d’une situation diamétralement
contraire. Car enfin les étangs n’étoient pas allodiaux;
cela est convenu. Le sieur Cibot n’a pas pnyé le seigneur;
il n’a pas môme notifié, avant la suppression , qu’il ré-^
voquoit son indication de payement; par conséquent la
redevance étoit encore attachée à la ¿féodalité au mo~
ment de la suppression, ce qui est le signe principal
de l’abolition , d’après les propres termes des arrêts de
passation que le sieur Cibot a cités.
Toute
y
�( *7 )
Toute l’illusion du sieur Cibot est renfermée dans
l’idée qu’il existe deux redevances distinctes dans les
deux setiers que doit payer le sieur Pinthon. Les mots
en sa décharge sont commentés par lu i, pour signifier
tout à la fois une rente féodale due par lu i, et une
rente roturière due à lui» Mais ce n’est pas avec un
jeu de mots qu’on interprète les actes. Il est de prin
cipe qu'on ne juge les actes que par l’intention des parties/
et non par l’examen scrupuleux de chaque expression.
Il est encore de principe que toute condition doit être
accomplie de la manière que les parties ont vraisem
blablement voulu et entendu qu’elle le fût. ( Gode civil,
articles n 56 , 1 1 6 2 , 1 1 7 1 ).
Or , comme l’a très-bien remarqué le tribunal d’Aubusson, il n’est pas possible de voir deux natures de
redevance dans les actes de 1784 et 1786. Les deux setiers
étoient payables au duc d’Orléans, comme seigneur
d’E vaux, à la même mesure et au même terme : ajou
tons que la redevance étoit assise sur le même immeuble
vendu en 1784, et que toute redevance payable au sei
gneur, sur un immeuble provenu de son fief, est néces
sairement féodale.
Dumoulin, l’oracle du droit sur les matières féodales,
nous enseigne à quel signe 011 peut reconnoître qu’une
seconde redevance est un sur-cens, distinct du cens prin
cipal ; et il décide que même quand une seconde re
devance seroit établie en augmentation de la première,
elle n’en est pas moins censuelle, lorsqu’elle n’est pas
expressément séparée du chef-cens. (Rousseaud-Lacombe,
v °. cens)...........
G
�( 18 )
O r, le sieur Cibot ne trouvera pas deux redevances,
dont l’une soit étrangère au seigneur, et en augmenta
tion de celle créée en 1784. Lorsqu’il a chargé de payer
deux setiers pour lu i, et d’exécuter cet acte de 1784,,
il lui étoit impossible de mieux exprimer la désignation
d’une partie de la redevance de( 1784. En effet, il n’en
a plus payé que sept setiers^ et le sieur Pinthon a payé
les deux autres.
Après que le sieur Cibot a tiré des inductions de
toutes les règles de droit, en matière de délégation , il
se retranche dans des moyens d’équité qui lui semblent
plus persuasifs, et il se prévaut de la garantie qu’il a
promise, comme si cette garantie pouvoit ôter quelquechose au caractère féodal d’une redevance.
Mais cette garantie n’étoit pas purement gratuite.
i ° . Il chargeoit le sieur Pinthon d’une redevance plus
considérable que n’auroit dû le comporter une petite
portion d’étang qu’il falloit mettre en culture; 2°. il
l’obligeoit de faire une haie de séparation d’avec le sur
plus de l’étang; 30. il rcccvoit 60 francs d’épingles.
Le sieur Cibot fait valoir comme une grande charge
l’obligation qu’il s’étoit imposée d’empecher l’eau de relluer sur la queue de l’étang. Mais il s’arrête là, et n’ajoute
pas qu’il obligeoit Pinthon de faciliter l’écoulcment de
ladite eau. La.plusgrande charge étoit,donc pour Pinthon ;
et Cibot ne faisoit qu’une chose fort naturelle, puisque
personne n’auroit voulu acheter un terrain submergé.
M ais, dès que Pinthon étoit tenu de faciliter l’écoulement
de l’eau, l’engagement de Cibot se réduisoit à rien.
Il fuit valoir encore qu’il avoitmis l’étang en valeur ; et
�( *9 )
l’avoit fait entourer de fossés et de plant v if, ce dont il
accuse le sieur Pinthon d’avoir profite. Mais l’acte de 1786
dément cette supposition , car il y est dit que le sieur
Pinthon pourra convertir la queue de Tétang en telle
natiwe de production que bon lui semblera ; ce qui
prouve clairement que cette partie n’avoit pas été déjà
mise en valeur.
Au reste, encore une fois, ce ne seroit là que des
moyens de considération, étrangers à la question de
féodalité. lie sieur Cibot n’a rien risqué en promettant
de garantir un .objet solidement acquis, et lui-même
ayant gagné sept setiers de redevance, n’est pas trèsfavorable à trouver injuste que son copropriétaire ait
gagné les' deux setiers qui étoient mis à sa'charge.
r. ■\
La seconde proposition'du sieur .Cibot seroit la plus Réponse
propice à son système, à cause de son obscurité, s’il^ a~la scconile
, .
. f , .
.
.
proposition
n’étoit pas très-aisé d’éclaircir ce qu’il a voulu dire, et du sieur,
de démontrer qu’il s’est placé dans une situation qui nd
Cibot.,
lui appartient pas.
Tous les arrêts de cassation, invoqués par le sieur Cibot,
sur l’arro turement des redevances, sont dans l’espèce que
voici. Une concession est faite par un seigneur de fief;
moyennant une redevance, et jusque-là cette redevance
est féodale. Ensuite le seigneur vend cette redevance à
un roturier, avec réserve de la directe. C’est après’ cela
que surviennent les lois suppressives de la féodalité. Le
roturier, acquéreur de cette redevance, dit avec raison
qu’elle n’est pns supprimée, parce qu’elle n’étoit plus
féodale au'moment de la suppression , i°. parce qu’elle
C 2
�(
)
n’étoit pas due à un possesseur de fief; 2°. parce que le
vendeur s’étant réservé la directe, et l’ayant séparée de
la redevance, il ne subsistoit plus aucun lien féodal qui
la mît dans la classe des redevances supprimées.
Ces moyens ont été adoptés par la Cour de cassation,
dans les arrêts que cite le sieur Cibot, des 10 nivôse
an 14 , 7 juillet 18 0 7, et 21 juillet 18 11 . Il n’est pas be
soin de commentaire pour voir tout d’un coup que cette
jurisprudence n’a rien de commun h l’espèce actuelle,
car le duc 4’Orléans n’a pas vendu sa redevance.
Pour se trouver dans l’espèce de ces arrêts, le sieur
Cibot fait un amphigouri fort bizarre. Il y remarque
qu’il n’a constitué aucune directe à son profit, que la
directe n’est jamais sortie des mains du duc d’Orléans,
que lui Cibot n’y a jamais eu ni droit ni prétention ;
d’où il conclut qu’il y a arroturement de fait, même quand
il auroit dit, en 178 0 , que sa redevance étoit féodale(pages 12 et 1 3 )r
Avec une telle manière de raisonner on peut s’appli
quer au hasard, tous les arrêts possibles, pourvu qu’il
y ait quelques mots d’une physionomie semblable. M. le
duc d’Orléans, qui a établi une redevance sur deux étangs,
en 1784, a-t-il vendu cette redevance au sieur Cibot?
celui-ci l’a - t - i l perçue jusqu’à la suppression? Pas un
mot de tout cela : la redevance et la directe sont restées
dans les mains du duc d’Orléans. Où donc y a-t-il la
moindre application aux arrêts cités ? Si le sieur Cibot
eût voulu être plus exact dans ses citations d’arrêts sur
rarroturement, il en auroit cité un quatrième, du 29 avril
1 8 1 1 , qui se trouve au verso du dernier arrêt par lui
�( ai )
cité. U's’agissoit d’iine redevance vendue a un roturier,
sans retenue de la directe. La Cour de cassation juge
qu’ il n’y a pas arroturement, et que la redevance est
abolie, attendu......... que bien qu'elle eût été déclarée
f o n c i è r e y elle n'avoit pas cessé pour cela d e conserver
sa qualité originelle de rente féo da le, parce que la
qualification de rente fo n cière, qui lui avoit été donnée
par ladite vente, rüétoit pas incompatible avec sa Ha
bilité originaire, '( Denevers, 1 8 1 1 , p. 497. ) On com
prend, parla conformité de ces motifs avec l’induction que
tiroit le sieur Cibot de ce que l’acte de 1786 parle de
rente fo n cière, pourquoi il n’a pas jugé à propos de citer
cet arrêt.
L e principal motif de décision, dans cette affaire, est
de considérer les droits du duc d’Orléans sur la queue
d’étang vendue au sieur Pinthon ; car pour déclarer fon
cière la redevance de deux setiers i assise sur cet héritage,
il faudroit pouvoir dire que le duc d’Orléans n’avoit rien
à voir dans cette redevance, ni dans le fait, ni dans le droit.
O r, le duc d’Orléans étoit propriétaire de cette rede
vance dans le fait comme dans le droit/
J
io. U l’étoit dans le fait, parce que le sieur Cibot l’avoit
indiqué pour la recevoir; ce qui n’étoit qu’une exécu
tion de l’emphytéose de 1784, Cibot étoit le maître ,
comme acquéreur des deux étangs, de distribuer la re
devance de neuf setiers sur toute la surface des étangs,
^ et dans la proportion qui lui plaisoit, puisque cela ne
nuisoit pas à la solidarité ; mais il n’étoit pas le maître
de priver le seigneur de percevoir sa redevance sur toutes
�( 22 )
les portions de ces étangs. Aussi avoit-il assujétî le sieur
Pinthon à se conformer pour sa jouissance à l’acte de 1784.
2°. Il l’étoit dans le droit; car le lien féodal qui s’étoit
formé en 1784, loin de s’être dissous en 1786, n’avoit
fait que se consolider, en y rattachant le sieur Pinthon,
qui prenoit la place du sieur Cibot pour une portion;
à la vérité, sans en détacher le sieur Cibot, qui restoit
copropriétaire et codébiteur en pagésie.
Les principes élémentaires en matière de féodalité ne
permettent pas de penser que le lien féodal ne continue
pas d’exister au profit du second acquéreur, à l’égird
d’une redevance qu’il doit payer au seigneur; il n’y a
de différence que lorsque le môme acte porte deux re
devances distinctes, l’une au profit du seigneur, et l’autre
au profit du vendeur, laquelle est en sus de la première
et n’y déroge pas.
On a déjà invoqué la doctrine de Dumoulin, pour
prouver qu’une redevance est toujours réputée féodale,
lorsqu’elle se rattache au fief et n’en est pas expressé
ment séparée. O r , jusqu’à la suppression des cens, il n’est
pas possible de voir un autre créancier que le duc d’ Or
léans. Sa directe couvroit tout; la redevance qui lui
étoit payée emportoit directe et droits seigneuriaux,
contra le sieur Pinthon : elle étoit donc nécessairement
féodale à son égard.
Quelle étoit donc celle de? parties qui devoit profiter
de la suppression? Cela ne peut plus faire un doute sé~
riuux. O11 avoit regardé comme un principe, dans une
précédente consultation, que la suppression 11e doit pnv
�, ( 23 )
fíter qii au propriétaire, d’après l’esprit de la loi et de
la jurisprudence. Mais le sieur Cibot s’élève avec vigueur
contre ce principe (page 1 9 ) , et il' veut que la loi n’ait
entendu que punir les seigneurs, sans s’inquiéter'de celui
qui profîteroit de la suppression,
r
La loi du 20 août 17 9 2 , qui s’est occupée la pre
mière de cette suppression, suffira seule.pour désabuser’
le sieur Cibot ; elle dit mot pour m ot, dans son préam
bule, que son but est Vaffranchissement des propriétés,
commandé par Vintérêt précieux de Vagriculture : et
ensuite les premiers mots du texte de la loi sont, i ° . de
permettre au propriétaire le rachat des redevances justi
fiées par titre primitif; 2°. de permettre à tout acquéreur
d’exiger la représentation de ce titre primitif.
Evidemment donc, si cette loi n’eût pas été suivie d’une
suppression absolue et sans conditionaucun autre que
le sieur Pinthon n’étoit désigné pour faire le rachat;
aucun autre m êm en’avoit intérêt de le faire.
Le sieur Cibot, qui se trouve à son aise depuis la sup
pression, pour dire qu’il auroit pu rembourser la re
devance au seigneur, et pour en conclure que cette fa
culté équivaut à un remboursement effectif, n’auroit eu
aucun intérêt à ce pnyememt ; car s’il eût remboursé leseigneur, on pouvoit le rembourser lui-même. Mais il
suffit d’avoir prouvé que le sieur Pinthon avoit droit
et qualité pour faire le rachat permis par la loi du 2o>
août 1792. La conséquence forcée de cette preuve, est
que la suppression absolue, prononcée par les lois posté
rieures , n’a profité qu’à lui,-
�C 24 )
Depuis la consultation donnée au sieur Pinthon en
1 8 1 1 , le journal de Denevers a rapporté un arrêt du
2 septembre 1 8 11 , qui ne permet plus de douter que la
suppression d'une redevance profite à l’acquéreur et non
au vendeur, lorsque l’acquéreur étoit chargé de l’acquitter
au seigneur, Yoici l’espèce de cet arrêt, si conforme à
l’espèce actuelle.
L e comte d’Issuile, seigneur féodal de la forêt de
Beaufort, en concéda, le 2.6 février 1 7 7 8 , quatre-vingthuit arpens au sieur Teissier-Lamothe, moyennant 40 fr.
de redevance féodale.
En 17 8 1, le sieur Teissier-Lamothe donna à titre de
bail à rente, à Jean Loiseau et sa femme, cinq arpens
de cette forêt, à la charge par eux de servir deux par
ties de rente, l’une de 40 fr. due au comte d’Issuile,
et l’autre de 29 fr, au profit du bailleur; ce à la charge
cc en outre de se conformer aux autres conditions dé« taillées dans le sumptum, et à l’esprit tant des arrêts du
« conseil de 17 7 1 et 17 7 5 , qu’au bail à cens de 1718 . »
L a veuve Loiseau déguerpit cet héritage ; et lorsque
ses enfans ont été majeurs, ils ont demandé le désiste
ment pour une moitié : le sieur Teissier l’a offert, à la
charge d’être payé de la redevance de 69 fr. par ar
pent.
Le sieur Teissier distinguoit avec raison la rente de
29 fr. de celle de 40 fr. La première étoit foncière, comme
séparée du chef-cens, et comme créée ¿\ son profit per
sonnel ; mais en reconnoissant que la rente de 40 fr*
avoit été originairement féodale, il soutenoit qu’il devoit
seul profiter de l’abolition, parce que ceLte redevance
avoit
�( 25 )
avoit été arroiurée à l’égard des mariés Loîseau, par
l’eftet du bail à rente qu’il leur avoit consenti.
' La Gour d’appel d’Angers a déclaré abolie-la rente
de 40 f r ., et n’a ordonné le payement que de celle dè
29 fr. Le sieur Teissier s’étant pourvu en cassation, faisoit valoir les mêmes moyens que le sieur Gibot. Il di
soit être resté débiteur direct de la .redevance de 40 fr.
envers le comte d’Issuile, et avoir été seul autorisé à
? amortir. 11 prétendoit que le bail à rente de 1781 n’avoit
porté aucune atteinte à ses obligations 'personnelles envers
le seigneur direct ; d’ou il concluoit qu’il avoit dû pro
fiter de la suppression plutôt que les Loiseaü, parce que
ceux-ci n'avoient pas contracté avec le seigneur, et que
n’ayant jamáis été en contact avec lui, il ne s’étoit établi
aucun lien féodal en tr’eux.'
' Les Loiseau répondoient que la redevance de 40 fr.
due au seigneur étoit inhérente au fonds; que l’abolition
des redevances devoit profiter au fonds qui en étoit
grevé, et par conséquent au propriétaire de ces fonds.
’L a section civile de la Cour de cassation a rejeté lé
pourvoi, par des motifs aussi simples que clairs : attendu
que la rente dont il s agit étoit féodale de sa nature ,
qu'elle étoit due p a r l e f o n d s , et que les défendeurs
s*étoient chargés d'en payer le montant. — Rejette, etc.
Penevers, 1 8 1 1 , pag. 498.
•
* Cet arrêta été discuté dans la consultation de M e. Vissao,
qui y trouve défaut d’application , parce que Loisenu
avoit souffert la clause de se conformer à des arrêts du
conseil, et à un bail à cens, qui emportaient condition
D
�(a6)
de faire au seigneur les obéissances de fiefs, et de relever
de la seigneurie de Beaufort.
Mais est-il possible de trouver dans l’emphytéose de
1786, que le sieur Pintlion ait été dispensé de tout cela?
Cet acte de 1786 porte, i°. que Pintlion sera tenu de
se conformer, pour sa jouissance, a u x c l a u s e s i n s é
r é e s e n l ’ a c t e d ’e m p h y t é o s e , c o n s e n t i p a r l e d u c
24 j u i l l e t 17 8 4 ;
20. que ledit Piuthon sera tenu et obligé de payer à son
altesse , ses receveurs ou fermiers , deux setiers de seigle
en décharge dudit M. Cibot.
O r, les clauses de l’acte de 1784 portent expressément
que les étangs sont tenus en directe de M. le duc d’Or
léans , qu’ils sont dans la mouvance de sa seigneurie
d’Evaux , et que la redevance de neuf setiers est féodale.
Tout cela n’est-il pas mot à mot la copie de la clause
insérée au bail desLoiseau?
Où donc est la différence, pour trouver une autre
nature de redevance dans celle de deux setiers, que le
sieur Pintlion est tenu et obligé de payer au duc d’Or
léans en décharge de Cibot, c’est-à-dire, en diminution
des neuf setiers créés par le bail de 17 8 4 , déclaré com
mun au sieur Pintlion ?
d ’O r l é a n s a u s i e u r C i b o t , l e
Le sieur Cibot, voulant éluder la corrélation de l’acte
de 1786 avec celui de 178 4 , joue avec les mots, et ob
serve que le sieur Pintlion n’a été chargé de se confor
mer aux clauses de l’acte de 1784, que pour sa jouis
sance. Mais on lui demanderait comment ce premier acte
peut lui être commun en cette partie, sans l’être encore
�( 27 )
dans l’obligation de relever du seigneur féodal, et d’être
soumis à tous les privilèges de la concession primitive.
t
.V
Il est vraisemblable que cette clause de l’acte de 1786
avoit échappé à M e. Dumas; car il n’auroit pas d it, dans
sa consultation, que le bail de 1784 étoit, à l’égard
du sieur Pinthon, res inter alios acta ,* qu’ainsi il ne
pouvoit en tirer aucune induction. Ce jurisconsulte, en
se laissant séduire par les principes sur les délégations
de payement, ne paroît néanmoins convaincu de leur
application, que parce que le sieur Cibot l’a trompé,
en lui disant que l’indication de payement n’avoit point
été exécutée par le sieur Pinthon. Il regarde en effet
comme constant que le sieur Pinthon n’a rien payé
pendant toutes les années postérieures à son acquisition.
Mais on a déjà prouvé que cette: supposition du sieur
Cibot étoit fausse ; que le sieur Pinthon, fermier d’Evaux,
s’étoit payé à lui-même la redevance due au seigneur;
que le sieur Cibot.en avoit été pleinement déchargé,
et n’avoit rien payé lui-même. Ainsi la délégation a été
parfaitement exécutée de la manière que l’exigeoit l’acte
de 1786.
Ce n’est que par la nécessité de ne laisser aucune objec
tion sans réponse, qu’on s’est cru obligé de discuter avec
autant de détail une question fort simple par elle-même,
sur laquelle on avoit le secours de plusieurs lois précises,
et d’un arrêt plus précis encore. En deux mots, le sieur
Pinthon n’a jamais été un seul instant débiteur du sieur
Cibot ; il 11e l’a été que du duc d’Orléans, La redevance
�qu'il payoit au seigneur étoit assise sur un immeuble
détaché d’un fief, avec retenue de la directe, et c’est en
cet état que la loi de 1793 l’a ôtée au duc d’Orléans,
pour en affranchir l’héritage. Croira-t-on qu’après une
abolition qui a duré dix-huit ans, cette redevance soit
ressuscitée tout à coup, comme'roturière, au profit du
sieur Cibot, qui n’en a jamais été ni voulu être le créancier
avant la suppression ? Non sans doute, cette redevance
n’a jamais changé de nature; elle étoit féodale en 178 4 ,
elle l’étoit encore en 1 7 8 6 } elle rétoit en 1 7 9 2 lorsque
la loi l’a frappée. La propriété concédée en 1784 étoit
alors divisée en deux parts , comme la redevance, et
chacune de ces parts a été affranchie de ce qui pesoit
sur elle. Il seroit donc illégal de prononcer que les deux
fractions du même héritage n’ont pas participé également
au bénéfice de la loi ; et il seroit injuste de penser que
le sieur Cibot, gagnant une redevance contre le duc
d’Orléans, se mette aussitôt à sa place pour en gagner
une autre, provenue de la même origine.
D é lib é r é à Riom, le 28 octobre 1812.
L . F. D E L A P C HIE R , P A G E S , A L L E M A N D ,
A RIOM, de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et librairet
rue des Taules , maison L a n d r io t . — Novembre 1 8 1 3 .
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Pinthon. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Pagès
Allemand
Subject
The topic of the resource
abolition des privilèges
droits féodaux
bail emphytéotique
bail
Description
An account of the resource
Consultation pour le sieur Pinthon
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1784-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0426
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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Évaux-les-Bains (23076 )
Périchon (Étang du)
La Rivière (Étang de)
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bail
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MÉMOIRE
A LA COUR I M P E R I A L E
DE RI OM,
P O U R les M a i r e et H a b i t a n s de V ic-le-C om te ,
intimés ;
CONTRE
E
t ie n n e
N A T E Y , habitant
à
N yon en,
H e lv é lie, appelant.
D a n s
un mémoire publié en janvier 1809 ,l e s
h a b it a n s d e Vic-le-C ompte crurent avoir présenté leur
cause avec un ensemble de faits et de moyens qui
épargnat des discussions nouvelles
mais par quatre
réponses imprimées coup sur c o u p ,
le sieur N atey
-
9
�( 2 )
leur prouva que la latte n ’était pas finie , et qu'il
fallait se préparer à discuter encore.
lies trois premières réponses n'étaient qu’ une r é
pétition de ses moyens et des injures éternelles dont
le maire de Vie a été forcé de se faire une do ulou
reuse habitude depuis le co m m en cem en t de la con
testation. Ces diatribes nouvelles n ’engagèrenl pas la
com m un e de Vie à répondre , persuadée que le sieur
N a t e y n’ayant plus à qui parler, se lasserait d’écrire;
elle se trompait, car bientôt un quatrième écrit parut,
contenant des fragmens iijiprimés de quatorze pièces
inédites ; alors la com m un e de Vie fut
forcée
de
rompre le silence pour discuter ce q u ’on jugeait à
propos de lui produire.
Cependant le sieur N a t e y en imprimant des ti tre s,
ne les communiquait pas , et cela se remarque au style
des discussions auxquelles ils ont donné lieu. Enfin
sur l’a p p e l, on est parvenu h voir cette production
nouve ll e, dont le sieur N a t e y se prévaut com m e d ’ un
faisceau de titres favorables à sa cause : un procèsverbal fait au greffe de la C o u r , paraît assurer q u ’il
ne lui reste plus rien à produire.
Ainsi la co m m un e de Vi e est m a i n te n a n t en pré
sence de toutes les forces du sieur N a t e y ; elle peut
donc espérer que l’exam en auquel elle va se l iv r e r ,
achèvera d’éclaircir une cause déjà jugé é p a u l a n t et
aussi solennellement
qu’ elle pouvait l’être^cw
mais que m alh eu reu s em en t, l’obstination des pr o-
�( 3 )
priétaires de Chadieo J a remis en litige à tontes les
époques q u ’ils ont cru favorables à leur prétention.
Cet
exa m en eût pu se réduire aux titres princi
p a u x , et ne partir que des conventions laites il y a
trois siècles, ce qui était une époque assez r e c u l é e ;
mais le sieur N a t e y remonte à deux siècles a u - d e l à ,
et tire des inductions des moindres mots : on sera donc
forcé de reprendre la série de tous les titres co nnus,
pour que le sieur N a t e y ne répète pas toujours que
les habilans de V ie ont aiïeclé de ne pas v o i r , quand
ils avaient seulement cru inutile de répondre.
O B JET
DU
PROCÈS.
Il consiste en une grande étendue de terrain, appelée
Les Gachiers et La Vergiere. Quoique l 5Allier les sé
pare de V i c - l e - C o m t e , il est p r o u v é , par tous les titres
produits et par l ’aveu du sieur N a t e y , qu’ils sont situés
dans l’ancienne justice de Vi c-le-Com te .
Il est p r o u v é encor e que ce terrain n’a jamais cessé
d’être destiné au pâturage
des bestiaux arans
des
habilans de V ic-le-C o m t e. Ils le tenaient en défense
contre l’entrée de tous autres bestiaux. En usant de
ce terrain pour le pâturage, et en le tenant en défense,
les habilans de Vie exerçaient tout le droit de pro
priété que la Coutume d A u verg n e a entendu donner
aux communautés d’habitans, et que les lois nouvelles
leur ont confirmé par des expressions explicatives et
positives.
z
�( 4 )
,
c
Placés entre Chadieu et l’ 41 Her, les Gâchîers ont
tour-à-tour excité la convoitise des seigneurs voisins.
L e s justices d ’A u t e z a t , de M o n f o n , de Chalus aboulissaient h cette partie ; et de-là sont nées de loin en
loin des prétentions que les habitans de V ic- le- C om te
ont toujours repoussées. Ces luttes n ’ont fait au con
traire que confirmer leur droit ; car ils sont restés en
possession du pâturage et du droit exclusif de tenir les
Gâchiers en défense.
Ce n ’est point encore le momen t d’ examiner quels
titres s’appliquent à ce local, et marquent l ’ancien état
des choses. Les procès qui ont eu lieu entre les par
ties, dans des tems très-loin de nous, doivent plutôt
nous apprendre quels furent les titres que les parties
jugèrent propres à fortifier leurs prétentions.
Cette observation n ’a pas pour but d’éluder l’ex am en
de tout ce qu’a produit le sieur N a t e y ; on ne veut rien
en omettre. Mais il est d ’abord essentiel de parler du plus
ancien procès qui paraisse avoir été soutenu entre les
parties, il en résultera de grands éclaircissemens pour
l ’intelligence des titres actuellement produits. P eu t- être
sera-t-il plus aisé ensuite d’en déterminer l’application
a c t u e l l e , par comparaison a vec ce qui était dit à des
époques contemporaines.
Prem ier procès terminé par transaction de i
5ii.
i
Il ne reste d’autres traces de cet ancien”procès q u ’une
longue écriture ploy ée en rou leau, suivant l ’usage du
�.(
5
)
fems, et où se trouve la date d ’une sentence de 1458 ;
dont l’appel était pendant.
On y voit que les habitans troublés dans leur pos
session par une sentence de séquestre , dont ils étaient
appelans, argumentaient de leur possession i m m é m o
riale de pâturage pour leurs bestiaux arans, et de tenir
les Gâchiers en défense.
Leur s adversaires, propriétaires de Chadieu ( l e sieur
Morinot- D e b o r , et le sieur D u b r e u il , gendre de F ra n co n in -D e b o r ) prétendaient avoir bail à cens par m a
dame de B e r r y , comtesse d ’A u verg n e , m o y e n n a n t
3 fr. d’o r , au m o y e n duquel ils disaient avoir droit
au pacage des G âc h ie rs , à la coupe des arbres
et
m ê m e au labourage qui lui donnait droil de les tenir
en défense pendant trois mois de l’année. Par ce m o t i f ,
ils avaient mis en cause le sieur D e l m a s , procureur
fiscal du comté d’A u v e r g n e , qui s’ était adjoint à eux.
L e s consuls de V ie niaient ce bail h cens^ qui n ’était
pas produit, et disaient que le sieur Franconin-D ebor,
pour avoir la permission de faire passer ses bestiaux
à travers les G âc h ie r s , pour les mener à la rivière ,
sans encourir l ’amende ( d e 60 s. ) , et pour avoir du
bois à sa proximité , avait obtenu cette permission
pour le terns de la vie de madame la comtesse de
33e r r y , m o y e n n a n t la redevance de 3 fr. d or ( o u 60s.
valeur de la clame ).
.V o i c i , au reste, les propres dires des consuls de V i e ,
dans leurs m oyens d’appel contre l ’objection des pro
�( 6 )
prié!aires de Chadieu de ce que leur prédécesseur, feu
Franconin avait droit aux Gâcliiers , m oye nnan t un
cens de trois francs d'or.
« R ép o n d en t lesdits consuls q ue de ladite adsance ils ne
savent
rien , et le nient expressément , et le posent par fait
contraire , en tems que. besoin
serait....... Item , et si aucune
adsance fut f a it e , audit cens de trois francs d’o r , audit f eu
F ra nc on i n . si ne fut-elle faite seulem ent au regard et tant
que lo u ch e la couspe des leignes des arbres lors y étant audit
g â c h i e r , et des fruits des autres arbres francs qui pour lors
y étaient et sont e n c o r e , p our ce
et C h a r n a y sont lointains de b o i s ,
que les lirj ux de
C h ad i eu
p our a voir le .chauffage
dudit Fr an con in et de ses successeurs....... I t e m , et c o mbi en
que ladite adsance eut élé faite___ si ne l’avait é t é ,
sinon
au regard des leignes et fruits , et de donner et permettre audit
feu F ranconin fa c u lté et perm ission de p ou v oir traverser ledit
g â ch ier , ensem ble son b é ta il , s'en aller en A lli e r , pour Vy
abreuver , et p uis s ’en retourner adraye par ledit g â c h ie r ,
afin de le garder d'am ende envers ju s tic e , p our ce que
les lie u x de Chadieu et de Charnay ne sont pas de la j u s
tic e de V ie , en la q u elle ledit territoire des G âcliiers est
s i s } com m e dit est : laquelle chose serait et est bel et g r an d
a v a nt a g e audit Bort ; et il en devrait être c o nt en t , veu que
tous les jo u rs il et ses bêtes et dudit D u b reu il pourraient
être prinses par ju s t ic e .......... Item , ne pouvait donner p e r
missi on
audit
F r a n c o n i n de pâturer sans le
desdits consuls. O r es!-il
prédécesseurs ne
ainsi
consentem ent
que lesdils consuls ni leurs
consentirent j a m ai s ........
Jtern , et ne v a u
drait rien la prétendue adsance perpétuelle dudit Gâ chi er ; car
sera p ro u vé que ce fut durant la vie de feue bonne m ém oi re
M a d a m e cje Be rr y , de laquelle un n o m m é Bernard C h a l m e
était officier en ladite C o m t é ; et o m br é de son of ï ic e , il était
tellement craint que nul
des ma na ns de la ville n ’osait re-
�( 7 )
v a nc h er son cas contre lui. E t p o u r ce que ledit C h a l m e , au
i ems de lors ma ri a un e sienne fille a ve c nn fils dudit F r a n conin , et pour l’alliance d’entre ledit Chai me et F r a n co n i n ,
i celui C h a l m e fit passer à ladite da me ladite adsance perpétuelle
( s’aucune en fut oncques passëe ) , sans y entrevoir le co n sen
tem ent et v o lo n té desdits con su ls ce que serait ne'cessaire p o ur
que ladite adsance perpétuelle dut ou put sortir effet.... h e m . . . ,
q u ’ ils sont en possession de faire p ât ur er l eur bétail en tout
temps et saison de l’a n , et aussi qu’ils ont le droit de p r o h i
b e r a u xd its M o rin o-D eb ort et D u b reu il , et à tous autres
q u 'ils ne clôturent n i labourent n i m ettent en défense led it
circu it de G âchier, ledit tems défensable on antres quel conques,
et aussi q u ’ils ne fassent pâturer leur bétail en quelque tem ps
et saisons de Pan que ce s o i t , etc. ».
On ignore les attires débats de ce procès et d’ un,
autre procès pendant dans le même te m s, tant sur le
p é ti toir e qu e sur le possessoire, ce qui, jusqu'en 1667,
n ’était pas incompatible. On trouve seulement des let très
de relief d’appel de 1 4 5 3 , qui prouvent qu’il devait
être porté aux grands jours généraux d ’A u v e r g n e , où
furent ajournés Pierre .Delmas, procureur fiscal, et
Morinot-Debort.
Il est vraisemblable qu'il n’y avilit pas encore de
jugeynent définitif lors de la rédaction de la Coutume',
5 i o ; et'cela est prouvé par la transaction de i 5 i i .
Celte transaction du 2 juillet i 5 i i , passée entre
en i
Anto ine D e b o r , curé de S a i n t - P i e r r e , seigneur de
Chadieu, et les consuls et habilans de V i e , rappelle le
procès existant au sujet des deux Gûchiers, dont les
confins sont exactement donnés.
�('
8
)
Il y est exposé que les consuls de Vie prétendaient
avoir tout droit de propriété et possession à sesdits
Gâcliiers, sis en la justice et châtellenie de Vic-le-,
C o m t e , desquels ils ont joui de toute ancienneté; et
q u ’il n’était pas permis audit D e b o r d ’y faire pâturer,
vu q u ’il est en autrui justice.
L e seigneur de Chadieu répondait que les Gâchiers
lai appartenaient en pr opriété, par veslison de mes
sieurs les comtes de Boulogne et dM u ve rg ne.
On y rappelle ensuite les deu x procès existans pour
raison des droits de propriété et de pâturage.
Viennent ensuite les conventions de la transaction
bien définitives, bien claires, bien parfaitement e x é
cutées, par Les propriétaires de C h a d ie u , et qui l’eussent
toujours été si Chadieu n’eût été par la suité réuni
dans la m ê m e main que la haute justice de Monton.
I l est convenu par cette transaction, i.° que le
grand Gâchier sera joui en c o m m u n ;
j2.° Qu e les liabitans de Vie auront droit de le tenir
en défense depuis N o t r e - D a m e de mars jusqu'au 16
m a i , ou autre tems plus ou moins long q u ’il sera
avisé par la c om m u n e de Vie ;
3.® Qu e lesdits liabitans de Vie désigneront la qua
lité du bétail admis au pâturage ;
4 -° Que le petit G âch ie r sera joui en com m un en
toute saison de l ’a n , sans être mis en défense;
5 .° Qu e les seigneurs de Chadieu ne pourront y
faire.
�^9 )
faire pâturer d’autre bétail que le leur ou celui de leurs
m é ta y e r s , tenu à cheptel d’e u x , et dans la ju sti ce ,
sans fraude;
r
6.° Que le bétail et arbres sur pied èsdits Gâchiers,
appartiendra en propriété aux seigneurs de Chadieu,
qui paieront la censive due , à raison de c e , à madame
la comtesse d’A u v e r g n e ;
7°. Que les seigneurs de Chadieu ne pourront planter
aucun nouvel arb re , mais remplacer ce ux qui périront
ou seront arrachés ( i ) .
Cette transaction pr o d u it e en une expédition collationée sur /’o rig in a l, a donné lieu à des exclamations
du sieur N a t e y > d ’autant plus grandes que la pièce
est plus précieuse et décisive. 11 y a découvert que
l ’original est représenté par une demoiselle Pelissier,
épouse d’un sieur B o n n et, procureur fiscal ; et co m m e
le notaire s’appelle Pelissier, le sieur N a tey a trouvé
très-plaisant d ’opposer que le maire de Vi e produisait
un acte faux , signé par une demoiselle.
11 n 'y a q u ’ une petite cfifficulté , c'est que cette
demoiselle Pelissier n’est pas m êm e dite avoir signé,
et au contraire, il est dit, collationê sur son o r ig in a l,
par
m oi
N O T A IR E
ROYAL
so u s sig n é
est en efîet le seul qui ait signé
,
etc.; et ce m oi
p e l issie r
, signature
d’h om m e indubitablement , et de la m ê m e main que
le collatroné.
( i ) L é texte littéral de ces conventions est dans le mémoire des habitai»»
ipjprimé en 1807, page G,
3
�( IO )
Cette'transaction de
i
5 i i a été produite dans tous
les procès postérieurs.
I l faut remarquer co m m e chose
essentielle pour
l ’aven ir, qu’elle n’a eu lieu q u ’avec le propriétaire de
C h ad ie u , et non avec le seigneur de Monlon.
Titres produits par Le sieur Natey
procès de 164 1.
antérieurs au,
i°. D e u x lettres patentes de 1344 et 1 3 7 4 pr ouvent
que Chadieu était un fief séparé de M onto n ^ appelé
Le clos de C h a d ie u , tenu en arrière-fief du sieur de
B e a u f o rt, seigneur de Monton.
Cet arrière-fief avait 76 septerées, et n’avait aucune
directe.
2.0
Un»acte du 9 /février 1 43 7 pr ouve q u ’ un sieur
de Gons , propriétaire de Chadieu , fit h om m a ge à
M . de Beaufort de ce clos de Chadieu , et d'une
vergière confinée par autre vergière dudit seigneur,
plus du droit dê pacage dans les G â c h i e r s , que le
seigneur dominant dit être à lui.
L e sieur N a t e y tire des inductions de ce titre pour
dire les Gâchiers appartiennent k C h ad ie u; et le titre
dit au contraire que les Gâchiers sont hors C h ad ie u ,
étant confinés par Chadieu , s a u f le droit de pacage.
•A la vérité les Gâchiers sont dits appartenir au
seigneur de M o n t o n; mais attendons d ’autres ti tr es,
et ce seigneur dira l u i- m ê m e que les Gâchiers ne sont
pas à lui. Jusqu’ici il suffit de bien observer que le
�( II )
propriétaire de C ha d ieu n ’a , d ’après son propre litre,
q u ’un droit de pacage.
; Il est encore à observer que dans le procès terminé
en 1 5 i i , le propriétaire de Chadieu ne parla pas de
cet acte, et sur-tout n'appela pas en cause le sieur de
Beaufort co m m e tenant le pacage de lui.
A u contraire ? il ne prit droit que sur un bail h
cens de Jeanne de B e rry ( morte en 1 4 2 8 ) , et mit en
cause son procureur fiscal.
3 .° L e sieur N a t e y a imprimé un titre q u ’il date de
i 53 o , pour prouver que le propriétaire de Chadieu
a acheté les Gâchiers en . i 53 o.
L e maire de Vi e avait opposé les lois de 1 7 9 3 , qui
obligent les ci-devant seigneurs de fiefs à restituer les
co m m unaux a u x e o m m u n e s , à moins que les seigneurs
ne produisent un titre légitime d ’ acquisition. Aussitôt
le sieur N a t e y a trouvé un titre d’acquisition, ( c ’est
ainsi au moins q u ’il le d é n o m m e ) .
A la v é r ité , il n’a pas le titre q u ’il a imprimé sous
cette daie de i 53 o ( 1 ), mais c ’est un fragment q u Jil a
trouvé dans un autre acte de i 665 q u ’il produit. Il en
résulterait q ue le sieur de Beaufort ¡seigneur de Monton>
(déjà censé propriétaire des Gâchiers, au dire d e T a t i e
de 1437) traitait pour ces Gâchiers en i 53 o. A v e c qui?....
A v e c les habilansd’Au tezat,do ril ilétail encore seigneur,
et dont aucun acte ni procéduie n ’explique ni n’indique
m ê m e les moindres prélentions a ces Gâchiers.
/
( 1) V . Mémoire Eatey, intitulé : Observations d éfin itiv es, etc., pag«5.
4
�( *2 )
Cet acte de i 5 3 o , qui n’existe pas, et qui ne peuf
pas être suppléé parla relation fautive et obscure qu’on
en trouve dans un acte de i 665 , n ’a d’ailleurs aucune
analogie à la cause act ue lle, et'vn’apprend pas m êm e
s’il y a identité de local. A u reste , q u ’importe aux
habilans de Vi e un acte passé entre un seigneur et
ses vassaux seuls, pour les faire désister de prétentions
imaginaires , en l’absence et à l’insu de la seule partie
intéressée, qui n’en dem eur e pas moins en possession.
D e tels fragmens d’a c t e s , fussent-ils à l’abri de toute
su spicio n, ne sont ni des titre s, ni des pièces pro
b ante s, et ne méritent pas d ’être honorés de ce nom.
4 ‘ ° L e sieur N a t e y a produit un acte du . . . . . .
i
53 i , sur lequel il fonde év id em m en t tout son es
p o i r ; aussi était-il le seul qu'il eût d’abord jugé digne
d ’être produit à l’appui de .sa demande.
Cet acte signé en expédition par un notaire ( dont
il serait peut-etre plus difficile de vérifier la signature
que celle de ce PeU ssier, que le sieur N a t e y a si fort
à cœur de récuser), est dans la forme d’une transac
tion qui serait censée avoir eu lieu entre les habilans
de V i e et le seigneur de Monto n ( q u i n’était pas alors
propriétaire de C li a d ie u ), au sujet des Gâchiers, sans
parler le moins du monde du long procès de 1 4^ 8, ni
m êm e d'aucuns des actes déjà connus.
A la vérité, et ce qui aide à comprendre toutes ces
omissions, les habilans de Vie présens audit acte ne sont
pas du tout les consuls qui jusqu’alors avaient plaidé,
gouverné les Gâchiers et représenté leur ville, et que
�( i3 )
rien n’aurait empêchés de transiger eux-mêmes à une
aussi grande proximité.
C e sont les sieurs L . D e v a l , J. M arg er ide, F. L a ch al, M. A r n a u d , P. Bresson, tous, est-il dit , de La
ju r id ic tio n de V i c - l e - C o m t e , faisant pour les habitans.
L e sieur de Beaufort est l u i- m êm e présent de son côté.
•Les choses se passent dans une salle du château de
Chalus, appartenant au sieur de Beaufort.
Il leur expose qu'il tient à cause de son m ande~
ment de M o u to n , la justice h a u t e , m o y e n n e et basse
du canton de Chadieu ès appartenances duquel est sise
une verg ière , pré ou pâturai joignant l’Allie r, et que
les habitans de Vie ne peuvent y faire pâturer parce
que c ’est en a utrui ju stice.
Puis on fait répondre à ces habitans que Le cas de
ju s tic e ne<Les regarde pas ( i ) ; mais q u ’ils réclament
le pacage en vertu d’une concession dudit seigneur
de M o n t o n , pour service par eux rendus en 1425.
Après ce la, M. de Beaufort leur permet par recon
naissance, de faire pâturer leurs bestiaux à ladite ve r
gière appelée les Gâcliiers, tant au canton de C had ie u,
q u ’au terroir de C h a l u s , sans y porter dommage.
Puis il se réserve le droit de clorre et semer ce qu’il v o u d r a ; et cependant il veut bien permettre aux ha(1)
A quoi leur eût donc servi de plaider cent a n s , pour ce cas de
justice ?
L e sieur N atey veut cependant qu’ils aient plaidé deux cents autres
années depuis , pour n’avoir qu’un droit de justice , et qu’ils
obtenu que cela en 1641.
n ’a ien t
�( i ‘4 )
bifans de V ie le pacage après la Levée de La récolte>
s’ils font les clôtures e t ' n o n autrement.
Et enfin co m m e M. de Beaufort savait bien que cet
acte occulte n'empêcherait pas les consuls de Vi e d'user
de leurs droits, il termine par la plus contradictoire
des clauses.
I l stipule que les habitans de V i e demeureront g ar
diens en d éfen se, et que le seigneur de Mon ton n ’en
verra au pacage que les bestiaux du clos de Chadieu
( d o n t il n’était pas propriétaire ) , et de ses métairies.
Il est de la plus grande év id en ce que les consuls
de V i e ignorèrent absolument un acte aussi suspect ,
pour ne rien dire de plus.
Cet acte qui parle d'un, procès sans en dire les d é
bats , contre la forme du tems ; qui parle d#
'une pro
cure donnée a u x 5 habitans de V i e , sans en dire la
date ni la teneur; qui fait dire aux habitans de Vie,
le contraire de tout ce q u ’ils avaient soutenu av ec tant
de force , était-il fait dans la pr évo yan ce que le sieur
de Beaufort serait un jour acquéreur de C h ad ie u? D u
moins les choses étaient arrangées de manière à cadrer
av ec le passé et l’avenir. Quoi qu’il en soit de cet acte
b iz a r r e ,l ’ordre accoutumé ne fut pas changé :les mêmes
bestiaux furent menés au pacage ; et celui q u i , dans
cet a c t e , semblait parler en m a î t r e , consentit à rece
voir désordres de ce ux à qui il venait de donner une
simple permission.
Jusque-là nous avons vu les habitans de V i e repré-
�(
.i 5 )
'
sentes par des consuls. Ici ou n’eit veut pas : on n’a
appelé que cinq individus sans caractère.
S’ils ont eu une pr ocure , de qui Favaient-ils ? L e
notaire peut bien ne pas l ’avoir transcrite, mais si elle
était émanée d’ un délibéraloire des habitans, ilTau rait
dit.
C et acte sincère ou faux resta dans un oubli absolu.
L e s consuls de V i e ont continué de faire valoir leurs
droits et leur transaction.
L e seigneur de Beaufort en fît-il usage l u i - m ê m e ?
Nous allons le savoir dans Finstant m ê m e , dans u n
cinquième titre produit au procès.
En i
536 , le sieur de Beaufort fut assigné par le
seigneur de Vic-le-C om te, pour avoir retiré des épaves
de la rivière d’Allier. I l se défendit en soutenant que
les justices s’ étendaient jusqu’à la rivière d'Allier.
C'était le m êm e Jacques Beaufort qui a v a it , dit-on ,
acheté les Gàchiers en i 53 o des habitans d ’Autezat.
C ’était le m êm e qui venait de faire déclarer dans
sa salle basse de C h a l u s , que La ju s tic e comprenait
les Gâchie rs, et que les habitans de V ie n ’y avaient
pas droit, étant en autre ju s tice , mais par sa permis
sion et concession.
Cependant il transigea le 8 décem bre 1 6 4 2 , et il
reconnut que la justice du comté d’A uvergn e ( dont
�C i6')
V i c - l e - C o m t e est c h e f lieu ) , comprenait la rivière
d’Allier d 'u n côté et d ’autre (i).
U n dernier titre, produit aujourd’hui au procès par
le sieur N a t e y , est plus précieux e n c o r e ; c ’est le titre
d'acquisition m êm e de C h a d ie u , du i
3 décembre 1627.
Il en avait très-bien jugé l’importance , car lorsqu’on
le lui opposa pour la première f o i s , il fit signifier
un réquisitoire à ce que le maire fût tenu de lui en
donner copie. Idée bizarre , car c ’est lui-même qui
en a l’expédition. C ’est son propre titre.
Ce titre dit donc que le sieur Laguesle vendit au
sieur de Beaufort, i.° Chadieu co n ten ant, etc. confiné
PAR
le
p a c a g e
d e
V
ic
-
le
-C
o m t e
,
appelé la
gière ; 2.0 trois prés confinés par les Gâchiers ,*
d r o it
d e
p a c a g e
V er-
3 .°
LE
dans lesdits Gâchiers et vergières;
4.0 les arbres plantés le long de la rivière.
- I^e sieur N a l e y jo ue a v e c les mois , pacages de V ic le -C o m te , p o u r dire que cela ne suppose au x habitons
que Je pacage q u ’il .leur accorde.
Mais il est muet sur l ’explication qui vient après,
et qui ne restreint au simple droit de pacage que le
seul propriétaire de Chadieu.
(1)
L e sieur N atey a menacé d'attaquer cet acte de fa u x , d’abord in
définiment si on continuait d ’en faire usage.
On a continué d’en faire usage, et le sieur N a t e y , baissant d’un ton,
9 dit qu’ il s’inscrirait en faux si l’acte parlait des Gâchiers. Il ne ris
quait rien a v ec ce conditionnel ,
car le mémoire des habitans de V i e ,
(p a g e 6 ) , ne rapportait de cet acte que ce qu’on vient de. répéter.
En
�( *7 )
E n ne scindant pas le sens de l’a cte, il est d ’une
clarté incontestable que le sieur de Beaufort a acheté
Le droit de pacage dans les Gâchiers et vergières qui
font deux pacages de Vic-le-Com te.
Un autre acquéreur pourrait é q u i v o q u e r , en disant
qu’il a mal entendu ce qu'il exprimait ; mais il est
incompatible que le sieur de Beaufort, se prétendant
propriétaire des Gâchiers , en vertu des actes de i 53 o
et 1 5 3 1 , consentît cependant à reconnaître que ces
Gâchiers étaient les pacages de V i c - l e - C o m t e , et sur
tout à acheter un droit de pacage dans sa propre
chose.
L e sieur Laguesle, qui vendait Chadieu, était le suc
cesseur d’Antoine D ebord qui avait passé la transaction
de 1 5 l i.
Aussi il l’exécutait pleinement dans sa vente.
Il suivait de point en point les clauses de cette
transaction de i
5 11.
Elle ne lui donnait dans les Gachiers que le droit
de pacage, et il n’a vendu au sieur de Beaufort que
le droit de pacage.
Elle lui donnait les arbres, et il a vendu les arbres.
Elle reconnaissait les Gâchiers com m e pacages de
Vic-le-Comte, et il les a reconnus com m e pacages de
Vie le-Comte.
Il les a exceplés de sa v e n t e , en les donnant pour
contin de Chadieu.
• .
L e sieur de Beaufort ? a c q u é r e u r , a accepté toutes
ces clauses.
5
�c î8 )
Il n’a m ê m e fait aucune réserve contraire.
Il a donc f o u r n i , l u i - m ê m e , une première preuve
qn’il ne regardai! pas com m e un titre sa prétendue .
transaction de i 5 3 i .
Procès ju g é en 1 6 4 1 ,
Francois de B e au fo rt ayant ainsi acheté Chadieu
avec des clauses récognitives du droit d ’autrui, voulut
a rra c h er, par la force et par son crédit ; ce q u ’il n’avait
pu obtenir par d ’autres voies.
En i 632 il suscita une querelle entre ses domesti
ques et les pâtres de Vie.
Les consuls prenant cette querelle c o m m e un trouble
à leurs droits, en rendirent plainte; leur démarche
prouva q u ’ils méconnaissaient et l’acte de i 5 3 t , et
la soi-disant procure qui eût dû être ém anée d’eux.
Il
reste
une information
de
cette époq ue ,
et
Ton rem a rq u e, dans les dépositions, que tous les té
moins, tout désintéressés q u ’ils étaient, ne parlent ja
mais des Gâchiers, q u ’en ajoutant uniformément et
n aïv e m en t : les Gâchiers appartenant a u x kabitans
de Vie-Le-Com te,
François de B e a u f o r t , co nv aincu , ne pouvait plus
lutter ave c des derni-mesures. 11 e n v o y a tenir des as
sises sur les Gâchiers par ses officiers. Puis il y fît saisir
des bestiaux, prétendant cette fois que les Gâchiers
étaient dans sa ju s tic e de C hains. Les habitans de V ie
1
�( *9 )
répondirent que les Gâchiers étaient dans leur jus
tice ( i ) , en vertu de La transaction de i 5 i i .
L e procureur du ro i, au comté d ’A u v e r g n e , inlerv i n t , disant que les Gâchiers étaient propriété du roi,
co m m e sis en la justice de Vic-le-Comle. IL se pLaignit
de ce que Le sieur de B ea u fo rt n avait f a i t apparoir
d ’aucun titr e , (2) quoique sommé de le faire.
U n e sentence du 7 février 1 6 2 6 , ordonna que le
sieur de Beaufort serait tenu de répondre dans quin
zaine.
Il répondit, ( 3) mais quels titres produisit-il? un seul
a c t e , celui du 20 octobre i 53 o (q u ' o n ne montre
plus), par lequel la propriété des Gâchiers lui aurait
été transmise par transaction et échange avec les h a
bita ns d ’Autezat.
M üls U ne produisit pas La prétendue transaction
de i
5 3 i , qui eût été plus applicable.
A u contraire , il argumenla de La redevance de
3 /r.
pour en conclure q u ’il résultait de cette rede
vance p o u r Lesdits Lieuoc, q u ’ils élaient à lui, sur-tout
d ’or,
depuis
q u ’il
était
encore aux droits des
habitans
d'Autezat (4).
( 1) Donc les consuls de V i e n’avaient pas fait d ir e , en i 5 3 i3 que la justice
ne les regardait pas.
(2) Ces mots soulignés avaient été retranchés par.le sieur Natey.
Pièce imprimée
a u x
observations définitives du sieur N a t e y , pag. io.* k
(3) Pièce imprimée i b i d ., pag. n. ,'12 et i3.
(4) Tout cet article est retranché dans la pièce imprimée.
6
�( 20 )
*■ Il combat lit La transaction de t 5 i t , en disant, non
^ pas co m m e le'traduit aujourd’hui le sieur N a t e y , que
c ’était une pièce fausse ; il disait seulement que les
consuls ne justifiaient pas de la ratification pr om is e;
q il ainsi ledit acle était nul et de nul effet..., faux...;
q u ’on devait le mettre au néant.
C ’était une conclusion tirée de la non exhibition,
mais ce n’élait pas une déclaration expresse qui arguât
l ’acte de faux.
On
voit
tout d’ un coup
que c’était le mom ent
d ’objecter aux consuls de Vi e la transaction de i
53 i,
si elle n ’était pas el le-m ême un acle faux.
Cette transaction eût répondu à tout ; à la ques
tion de justice, à la proprié té, etc.; le procès eût été
fini.
11 y avait eu une enquêle sur la possession ; le sieur
de Beaufort l’avait laissé faire : il discuta pied-à-pied
les dépositions avec beaucoup d ’injures contre les té
moins.
E n un seul m o t , l ’acte de
i
53 i eût fait to m b e r,
l ’enq uê te , si les habilans de Vie eussent été réduits
à une concession remunératoire de pacage hors leur
justice.
•Cependant François de Beaüfort ne fit aucun usage
d ’un acte passé dans son propre château. S’il existait
alors, au moins il n'osa pas en révéler l'existence.
L e procès fut ju g é, par sentence du
5 juin 1637 , en
�( 2ï )
faveur de François de Beaufort. L e siêùr N a tey rie la
produit pas (i).
Il a dii qu’elle donnait au sieur de
Beaufort la saisine des G âch ie rs , à cause de la justice.
Les consuls de Vie interjetèrent appel au par le men t,
com m e de juge inc ompétent, suspect et récusé.
L e sieur de la R o c h e - B r i a n t , seigneur de L a c h a u x ,
( f i e f sur le territoire de V i e ) , intervint pour demander
le pacage aux G â c h i e r s , et la propriété des arbres.
L e procès, d’abord appointé, en 1 6 4 0 , fut jugé sur
productions respectives, par arrêt d é fin it if du 17 mai
1641.
Cet arrêt , toujours considéré h Vi e com m e le seul
titre désormais nécessaire pour la propriété des G â
chiers, et conservé, en cette qualité, aux archives de
la c o m m u n e , est produit au procès actuel en deu x
expéditions originales, l’ u n e , en parchemin , avec la
signification, l ’autre, en imprimé , collationnée, signé
H en ry, avec un fa c tu m , imprimé dans le m êm e tems.
L e vu de pièces de l ’arrêt ne mentionne que la
production faite au parlement.
I
fa ctu m prouve que les liabilansdeVic avaient pro
duit plusieurs titres, et notamment ta transaction d e i b n .
Il prouve qu’on reprochait à la dame de Beaufort
de n ’avoir produit aucun titre ou acte de justice an
térieur au procès.
( 1 ) Sans doute à cause du vu de pièces qui aurait prouvé les titres
que chacun avait produits.
�( 22 )
Il pr ou ve aussi que. les consuls avaient dé couvert
la vente de 1 6 2 7 , et l’opposaient com m e preuve ém a
n é e du sieur de Beaufort lu i- m êm e , que les Gâchiers
étaient propriété de V i c - I e - C o m l e , et que la maison
de Beaufort n’y avait que le droit de pacage et les
arbres.
L e vu de pièces prouve que ce f a c t u m fit prendre
à m a d a m e de B e a u fo r t des Lettres de rescision , p ou r
être relevée des cla uses
apposées en son propre contrat
d ’acquisition , de 1627.
L ’arrêt avait à statuer sur deux chefs bien distincts
q u ’il faut remarquer dès à présent, parce que le iieur
N a t e y s’étudie à les confondre; l’un était la question
pétitoire du pâturage : elle était pendante entre toutes les
parties; l ’autre était relative aux arbres, et elle n’était
pendante qu’entre la dame de Beaufort et le sieur de
la R oche -Brian t.
O r , i.° « L e procès du pâturage est jugé définitive
ment. L a C o u r , sans s'arrêter a u x lettres de rescision
obtenues les 11
août 1640 et 21 avril dernier ( 1 ) ,
maintient et garde les habitans de V i e * et le sieur de
la R o c h e - B r i a n t, en la possession, sasine et jouissance
des Gâchiers 3 tant pour le droit de ju s t ic e que de
pacage (2);
« Ordonne que les consuls p ourro nt tenir lesdits
( 0 Cette p a r tie e s s e n t ie lle <le l’ arrêt a é té r e t r a n c h é e da ns l ’ i m p r i m é
d é f . , p. ïi>.
du sieu r N a t e y . — O b s e r v a t i o n s
(2)
Ici il n’ est parlé que de pacage, s’agissant d’ uu droit commua au
fiicjiu’ de Lachaux.
�(
23 )
Gâchiers en défense ( i ) , depuis le zb mars jusqu’au
i
5 m a i , ou autre tems plus ou moins (2);
«• Que la dame de Chadieu 9 et Chalus et ses m é
t a y e r s , sans f r a u d e , pourront y en vo ye r plTurer leurs
bestiaux ( 3) ;
«• Co nda mne la dame de Beaufort aux dépens, etc.»
2.0
L e procès des arbres reste seul en suspens, et les
habitans de V ie ne doivent pas m ê m e y être appelés.
* « Sur Le surplus de l’intervention dudit la R o c h e Briant , concernant Le retail et coupe des arbres au
grand Gâchier , les parties articuleront plus am p le
m e n t par-devant le juge de R i o m , autre que celui
dont est a p p el, etc.»
Voilà l ’arrêt que le sieur N a t e y atteste n ’avoir été
que provisoire sur les Gâchiers , vis-à-vis les habitans
11 ordonne de point én po in t'l'e xé cut ion de
la transaction de i 5 i i .
de Vie.
Séquestre des G â ch iers, et Procès crim inels.
L e comté d’A u v e r g n e passa dans la maison de Bouil
l o n , par échange avec Sedan.
C e changement inspira au sieur de Beaufort un
nouv eau désir de disputer les, Gâchiers aux habitans
de Vic -l e- Com te .
(1) lo i il est parlé des consuls seuls , et le signe de la
accordé à eux.
propriété
(2) Expressions prises, mot pour m o t, dans la transaction de
est
i5 ir.
(S) Autres expressions de iSi I. — Quelle est celle des parties que l’ar
rêt réduit au simple pacage ?
�C> 4 )
Il co mmença par faire défricher une partie des Gâchiers. Les consuls s’en plaignirent à leur nouveau
seigneur; et co m m e ses agens n ’étaient encore au fait
de rien , la récolte fut seulement séquestrée par or
donnance de M. P e g e y r e , commissaire de la chambre
des c o m p t e s , du 6 mars 1662; elle ordonna que le
sieur de Beaufort p ro d u ira it ses prétendus titres.' El c o m m e les consuls de Vie avaient le droit appa
rent
jusqu'à cette production, il fut ordonné que le
produit de la récolle serait versé en leurs mains, avec
défense au sieur de Beaufort de les troubler.
Les consuls donnent ces récolles à ferme au sieur
Cliamboissier, notaire de la ville , par acte du
5 juillet
166 5.
C e Chamboissierpa}^ sa ferme aux consuls le 12 mars
1666.
4
I.,es lems étaient propices. lies vexations qui pesaient
stirles campagnes n'avaienlpas encore mérité correction
royale. L e sieur de Be aufort, em ploya la force pour
chasser les bestiaux de Vie: on se bal til ;desarbres furent
coupés , le cuisinier de Chadieu fut lué par un n om m é
Eaure , cultivateur , de Vie. On informa de pari et
d ’aulie , et on en était lù lorsque les grands jours furent
convoqués à Clermont pour réprimer Les violences et les
oppressions des puis sans , et protéger La fa ib lesse des
officiers de ju stice (1).
(1) Préainbulg de l ’arrêt de convocation ,
.
août 1 665. )
Les
�( ^5 )
L e s sieur, et dame de Beaufort , décrétés de prisede-corps, par arrêt des grands jours, ré c rim in è ren t, dé
noncèrent les habilans de V i e , pour assemblées illicites,
et tâchèrent d ’intéresser à leur cause le nouveau sei
gneur de Vi c-le -C omte , M. le duc de Bouillon.
On représente aujourd’hui une pièce assez singulière,
quoique sans influence dans la contestation. C ’est une
espèce d’accord entre M. de Beaufort et M . le duc de
Bo u il l o n , daté du 6 janvier 1688 (1).
On fait déclarer à M. le duc de Bouillon q u ’il s’est
intéressé ¿1 obtenir l'abandon de tous procès civils et
criminels contre les officiers, consuls et autres habilans
de V i e , à leur p r iè r e , à condition de l ’indemniser
des dommages fa its, ventes, séquestres, coupes d ’ar
bres, etc.
Ensuite, M . de B o u il l o n , parlant pour lui s e u l , dit
q u ’ayant pris connaissance du légitime droit de M. de
Beaufort ès Gâchier et V e r g iè r e , il réitère définitive
ment son désistement de rien prétendre ès-dils l i e u x ,
comme domaines dépendans du comté d \Auvergne (2),
AUTREM ENT
que
po u r
l a
j u s t ic e
,
promettant ne
p o r t e r , ni faire’ porter par les c o u r s , ni cour de sa
M a j e s t é , aucun trouble à la possession desdits l i e u x ,
par M. de Beaufort : l’acte termine par une promesse
faite par M. de Bouillon au nom de ses vassaux , q u ’ils
(1) Im prim é aux observations définitives, page 22.
(2) Ces mots en italique ont été retranchés dans l’imprimé des observa
tions définitives.
7
�(26)
vivront à l ’avenir en bons voisins avec M . de Beau fort,
et renoncent à tous procès contre M . et m adam e de
B ea u fo r t (i).
'P uis l ’acte est dit f a i t triple , l ’ un pour M. de Bouil
lon , l’autre pour M. de B e au fo rt, le
3.e pour les offi
ciers et habitans de V ie.
\ M a i s , il n ’y a que de u x signatures.
Celle des consuls n’y est pas.
L e nouveau seigneur de Vi e avait eu sans doute
de bonnes inten ti ons, si tant est que la pièce soit de
lui : mais ses agens mettaient ses propres intérêts à
couvert en lui faisant réserver la ju s tic e sur les Gâcliiers , ce qui était la seule chose à laquelle il pût pré
tend re; ils compromettaient fort les intérêts des h ab itans d e ' V i e , par des expressions équivoques dont le
sieur de B e aufo rt se serait prévalu un jour.
A la vé rit é , les mots d q légitim e droit et d e possession,
pouvaient bien ne s’entendre que des arbres et du droit
de pacage promiscu, q u ’on ne contestait pas à M . de
Beaufort. L a clause de vivre en bons v o isin s, prouvait
q u ’on n’avait pas entendu disposer de la propriété :
car si la rivière d ’ Allier eût dû être la limite des parties,
la clause eût été bien inutile.
E n f i n ,
l ’abandon des pr o
cès contre M . et m adam e la com tesse, ne pourrait pas
s'entendre des procès sur la
p r o p r ié t é .
.Car il n 'y avait
pas alors de procès sur la propriété.
( i ) Cette clause est aussi retranchée dans l’imprimé.
�( 27 )
Q uoi qu’il en s o it, les consuls de Vie se défièrent;
ils ne signèrent pas , ils n’approuvèrent pas; et ce qui
va le prouver dans l ’instant m ê m e , c ’est q u ’il y eut
reprise des mêmes procès.
Cependant , ces procès eussent été éteints par cet
acte de 1668 , proclamé avec complaisance par le sieur
N a l e y , com m e une reconnaissance expresse, faite par
les ha bilans de V i e , que la propriété des Gâchiers appar
tenait uniquem ent à M. de Beaufort!
L e s poursuites furent reprises par requête du
3 1 juin
1 6 7 4 , donnée par M . de B r o g l i e , second mari de la
v e u v e de M . de Beaufort.
L es consuls de V ie y répondirent par requête du i . er
juillet 1 6 7 4 , et demandèrent leur renvoi.
.
Ces deux pièces détruisant absolument la prétendue
transaction de 1 6 6 8 , sont assez précieuses pour devoir
être analysées
•
M . de Broglie expose dans sa requête qu’il a existé
un procès e n tre Marie P e l o u x , v e u v e Beaufort , les
habilans de Vie , et le seigneur de L a c h a u x , «pour la
maintenue respective des droits de pour justice , et
p a c a g e
dans les Gâchiers.
Q ue ce procès f u t ju g é par arrêt du 26 mars 1 6 4 1 ,
qui porte , etc.
Que cet arrêt a ete execute.
M a i s , qu’à, l’égard de la coupe et retail des arbres,
le sieur de L a c h a u x , a abandonné sa dem a nde, en sorte
que les seigneurs de Chqdieu,, ont avant comme depuis
8
�(
ledit arrêt j o u i
dv
28
r e t a il e t
)
coupe
d es
ar bres
, sis
es G âchiers.
Il parle des plaintes de 1 6 6 6 , pour assemblées illicites
et coupes d’arbres; ail sujet de tout q u o i , M. le duc
de Bouillon écrivit à M. de Beaufort', le 24 avril 1669 ,
pour surseoir. Et il ajo ute, que depuis ce temps il ri en»
a p lus été parlé.
Il se plaint ensuite de nouvelles coupes d’arbres 9 et
demande permission d’informer.
A cela les consuls de Vie répondirent que l ’arrêt de
16 4 1 ayant réglé Les parties , et réduit le seigneur
de Chadieu au simple droit de pacage saris f r a u d e ,
après le terns dé/ensable e x p ir é , ne lui donnait pas le
retail des arbres, mais le soumetlait à une décision
entre lui et le S.r de Lach aux : q u ’il y avait eu en 1666
des informations respectives, décrets , arrêts des grands
jours , etc. Q u au mépris des d its arrêts des g ra n d s
jo u r s 7 le sieur de B ea ufort , a y a n t c o ntin u é ses vi o
lences par le retail des m êmes arbres, les habitans en
auraient fait couper la majeure pa rtie, et vendu iceu x:
q u ’y ayant eu informations et décrets, il était intervenu
de u x arrêts du parlement , par lesquels les habitans
ont été reçus ap p e l a n s , et le sieur de Beaufort aurait
été condamné à se représenter pour être procédé a u
ju g em en t du procès
intenté pendant la tenue des
grands j o u r s , pour raison d u d it trouble, retail et coupe,
d ’arbres. En conséquence , et à cause de ce procès
pendant , ils requièrent être délaissés au p ar le m en t3
sa isi d u différent des parties en état d'être ju g é .
�'
( *9 ) '
Il paraît qu’il ne fut donné aucune suite à cette p ro
cé dure, qui prouve p a r f a i t e m e n t , i.° que les habitans
de V i e ne croyaient pas a v o i r , par l ’entrem ise, aban
donné les Gâchiers de M. de Bouillon ; 2.°. que le
seigneur de Chadieu ne le croyait pas lui-même.
,
A v e u x et dénombremens.
Mais si le seigneur de Chadiéu n’ osa plus plaider
au p a r le m e n t , il n’en essayait pas moins des actes
furtifs d ’usurpation, si on croit les aveu x et dé nom
bremens que produit le sieur N atey, quoiqu’il ne faille
pas du tout prendre à la lettre les inductions qu’il en
t i r e , ni m ê m e les preuves q u ’il y a vues,
L e i . er septembre 1 6 6 9 ,
( 0 François de Beaufort
fit un d é n o m b r e m e n t , i.° pour Chadieu , 2.0 pour
Chalus et pour À u te zat.
C hadieu, très-distinctement reconnu , /y comprend
une vergière cl ose, de 3 o journaux.
Ensuite vient Ch alus, plus un château appelé de
Chalus-les-Bussieres et Les Gâchiers 3 avec une autre
métairie appelée Le R u d e t , p lu s , etc.
L e sieur N a t e y a mis Chadieu et Chalus dans uu
m ê m e contexte , pour faire sortir en lettres majuscules
(1) C ’est Pacte d a té, par erreur, du 18 août 1670, aux Observations
définitives, pag. * 3 .
^
�(
3o )
la vergïere et puis les G â ch iers, ( i ) com m e dépendances
de Chadieu.
Mais il est visible que les Gâchiers placés là incognito
après Chalus, auraient dépaysé tous les observateurs;
ce n’était pas la peine, car les consuls de V ie n’étaient
point appelés à cet a c t e , qui ne les empêchait pas
d ’user de leurs droits, et de tenir les Gâchiers en dé
fense.
Le i
5 mai 1684 , le sieur Parades agissant pour
Jeanne de Beau/ort, fille de François, fit un d é n o m
brement où il comprit plus clairement les G âch ie rs ,
mais d ’une manière entortillée , qui en apparence ne
disait rien, mais qui n'en eût pas moins appelé l ’a l i e n tion et la vigilance des habitans de V i e , s’ils eussent
été informés de ce dénombrement.
C e déno m brem en t comprend C h a d i e u , les Ma rt re s,
M o n t o n ; il y est reconnu la vergière et le grand
G âch ier, co m m e pacages actuels entre l’Allier et les
terres de C h a d ieu .
O n n ’avait donc pas osé les donner c o m m e pro-'
p r i é t é , çt si V ie s’en fût p l a i n t , le sieur de Parade
aurait r é p o n d u , i.° que l ’arrêt de 1641 donne au
seigneur de Ch adieu le droit de p a ca g e, et q u ’il y
avait lieu de mentionner ce pa c a ge, parce qu’ un dé
nombrement ne doit rien o m e t t r e ; 2.0 q u ’en confi( 1 ) L ’ imprimé du sieur TNatey p la c e , entre le mot Chalus-les-Bussières et le mot les Gâchiers, up poiqt et v ir g u le , qui paraît les séparer
eu deux articles reconnus. Cette ponctuation 11’est pas dans l’original.
�( 3 l )
nant les Gâchiers par les terres de G hadieiL, ^c’était
avoir dit assez q u ’ils ne faisaient pas partie des terres
de Chadieu.
U n e plus grande exp lic a tio n! vient, ensuite ; car
Jeanne de Beaufort reconnaît la justice haute, m o y e n n e
et basse sur le t o u t , s a u f les, G â c h ie r s, en sorte que
d’après la C o u tu m e d’A u v e r g n e c ’ était reconnaître le
droit des habitans de V i e , tout aussi bien que ceux
de leur seigneur.
L e sieur N a t e y qui a cru voir de plus grands ré
sultats dans cette pièce, l ’a intitulée fastueus eme nt,
dénombrement j u g é contradictoirem ent le 20 novembre
16 8 6 ; et il y a ajouté les certificats de publication.
Qui ne croirait d ’après cela que l’acte est publié à
V i e , et q u ’ une opposition de Vie a été jugée en fa
veu r du sieur de Be aufort, contre V ic ^
B i e n de tout cela. L e dénom bre m en t a été publié
à M onton et aux Martres; l’opposition fut form ée par
un sieur Barberin , prêtre de Monton,
v
««*,
Si le sieur de Parades avait cru devoir faire un
d é n o m b re m e n t, dans les termes ci-dessus, pour l ’a
vantage de Jeanne de B e a u f o rt, m in eu r e; elle-même
n'osa pas le réitérer dans les mêmes termes.
O n lit dans un aveu et dé nombrement du 9 juillet
1 7 2 3 , (1) que Jeanne de B e a u f o r t, v e u v e de T a n e ,
(1) L e sieur N atey n’a pas jugé à propos de produire c e l u i - c i , et le
m otif se devine aisément, L e maire de V i e en a une expédition
archives impériales.
p rise
aux
�C
32 ,
reconnaît six articles distincts, Lihadieu, C h a l u s , vun
m o u l i n , les Martres, les cens et directe de Monïon >
C o r e n t, et c., et enfin un moulin Bannel à P l a u z a t ,
sans y comprendre le moins du monde Les G â ck iers,
ni dans le détail des articles de Cbadieu , ni dans
ceux de Chalus-les-Bussières.
P o u r ne plus revenir sur les d é n o m b r e m e n s , il faut
dire un mot de celui du sieur de la R o c h e - B r i a n t , du
28 février 1 6 8 4 , que le sieur N a t e y argue de f a u x ;
car c ’est son m oy en favori contre tous Les actes qui lui
ont déplu dans cette cause, L e sieur N a t e y ne doute
pas de ce faux , parce qu’il a un certificat du d é p o
sitaire des archives impériales , que cet acte n ’existe
pas dans les archives : (1) et parce que dans six m é
moires successifs i l a menacé le maire de V ie de ce
f a u x , s’il redisait un mot de cette p i è c e , il croit fer
m em e n t qu’il n ’en sera plus parlé.
r L'e xp éd ition de cet aveu et dénom b re m ent, confiée
ail maire .de V i e , par le propriétaire de Lachau x (qui
pour ce m o t i f a aussi sa part d ’injures) (2) est originale
et en parchemin. Il y est reconnu un droit de pacage
d a n s Le G â ch ier, et à celte clause est ajouté ce qui suit :
« C o m m e aussi M M . de V ille-C o m te, à q u i i'L appar
tie n t, avaient donné , de leur libérale volonté , en
(1) Ce n’est malheureusement pas la seule piece qui manque aux archives
impériales. L e maire de V ie y a fait aussi, pour d’autres titres, des re
cherches infructueuses.
(a) V o y e z le mémoire N a tey , intitulé : R é s u m é , pag. 26 et 27.
paiement
�( 33 )
paiement des services qu'il leur avait rendus an par
lem en t, contre la dame de Be aufort, q ui prétendait
que Ledit G â c h ie r fu t à eLLe, en considération que feu
son père fit juger le procès, lesdils habitans lui don
nèrent quatre-vingts pieds d ’arbres en l ’étendue dudit
lieu de Gâchier
Ce titre^ toujours joint au dossier des habitans de
V i e , ne leur avait pas semblé assez important pour en
tirer de grandes ind uctions, parce q u ’il n’ajoute rien
à l'arrêt de 1641'. Mais le sieur N atey , croyant se faire
un m o yen de ses inculpations, a demandé le dépôt de
cet acte au greffe; et là il a tout de suite tr o u vé, en
présentant Le parchem in à La transparence, que l'acte
a été gratté , altéré , falsifié > etc.
Cela est vrai, le parchemin paraît gratté en un en
droit ; mais en quel endroit?.... Précisément ce n’est
en aucune des lignes q u ’on vient de transcrire! (1).
(1) Cette perspicacité du sieur N a ley a fait naître la pensée au maire
de Vie de regarder d e ‘plus près les litres du sieur N atey , et i.° dans un
3 o octobre 166 5 , uù le sieur Natey a copié la relation d’un acte
du 2.0 octobre i 53o (im prim é aux observations définitives , page 5 , et
acte du
dans tous ses autres m é m o i r e s ) , il a vu que les m ots, appartenans au x
habitans d’Aute&at, et le m ot, acquis-, sout visiblement refaits et sur
chargés. ,
.
•
2.° Dans l’ écrit informe de 1668 , où on fait dire à M . de B e a u fo r t ,
q u ’ il se désistera de ses procès,, sous condition d ’être indemnisé , ces
mots sont aussi refaits et surchargés.
3 .° Dans l’ordonnance P egeyre, de i 6 6 3 , q u i, iante par Le sieur de
Beaufort d'avoir justifié de ses prétendus titres s le déclare déchu,
¿ i l ne tes produic dans l'an. Ces derniers m uts, s’U ne les produit
9
�C 34 )
. Laissons donc toute cet te petite guerre de 'm oi s, cette
diversion ét udiée, qui appelle Inattention sur de légers
accessoires , et reprenons la série de faits qui prouvent
que les consuls de Vie n'ont jamais abandonné leurs
droits sur les G âch ie rs, et que les prétendues pièces
d e i 5 3 i et de 1668 ont été pour eu x des actes ignorés
qui ne les ont pas empêchés un seul instant de jouir
et de tenir en dé fe nse5 c ’ e s t - à - d i r e , d’agir en proprié
taires , en réduisant le seigneur de Chadieu au simple
pâturage sans fraude.
¿1aires P ièces prouvant* Cexécution de la Transaction
de i 5 i i .
Il paraît q u ’en 1 7 1 5 certains voisins des Gâchiers,
suscilés ou non par le propriétaire de Cliadieu,, y
faisaient des entreprises, plus faites pour appeler l’at
tention des habitans de V i e , que des dénombremens 5
les consuls convoquèrent une assemblée générale le
21 juin 1 7 1 5 .
On y expose les troubles et usurpations de ces voisins
« qui se prévalant de l ’absence des habitans de Vic
i e - C o m t e , ont la précaution de tems en tems , et
dans l ’aria qui portent un changement absolu dans cette ordonnance,
sont une addition visible.
ï a u t i l , pour c e la , accuser l e s i e u r N a le y de ces altérations d’actes?
Non ; car on ne doit paa être injuste ou passionné par récrimination. P lu
sieurs de ces surcharges sont insignifiantes. Quant aux autres, les habitans
de V i e ne veulent pas perdre de tems à en scruter le résultat. L eu r cause
»’ en a pas besoin.
�( 35 )
sur-tout en hiver , de faire changer de lit au ruisseau
appelé de C h a r le t, qui confine d ’une part ledit grand
G â c h ie r, en quoi ifs réussissent avec d’autant plus
de facilité, que l ’eau dudit ruisseau étant une eau
do rm ante, et dont ler cours se comble de limon tous
les hivers, ils font de nouvelles rases en dedans ledit
G â c h i e r , gagnent terrain , et l ’agrandissent à grands
p a s , aux dépens du bien de la commune toujours mal
d é f e n d u e ; en sorte qu’ils ont déjà usurpé de c e ll e
manière un grand canton de la meilleure partie dudit
G â c h i e r , ainsi q u ’il est aisé à juger par l ’inspection
des lieux et outre ce , prétendent d?usurper certain,
terrain ou gravier que la rivière d ’ A ilie r a laissé p u is
quelques années , q u o iq u il a p p a r t i e n n e par bons
titres, tant pour le droit de ju stic e que de pa ca g e, à la
commune d u d it V ie. En conséquence de q u o i , tous les,
habitans ont délibéré unanimement que lesdils sieurs
consuls sont advoués de soutenir en justice les,droils
de la c o m m u n e , en ce que regarde la propriété, pos
session, saisine et jou issa n ce desdits G â chiers, qui leur
a été adjugée , tarit pour le su sd it droit de ju stice que
de p a ca g e, par l’arrêt contradictoire, rendu par nos
seigneurs de la Cour de parlement, le 17 mai 1 6 4 1 ,
et pour cet ef fet , se régir par conseil, elc. ».
Les
habitans de Vie avaient parlé de l'enterre
ment fait en 1 7 9 0 , d ’ une fem me de Chalus , prise par
le curé de V i e , au ruisseau de Charlet , com m e lim ite
de la paroisse, >et le sieur N a t e y , s’égaye de la circons
tance. (1) Elle n’a pas un grand poids , en effet, pour
la proprié lé des Gâchiers, mais elle se trouve là fort
à-propos pour expliquer comm ent le ruisseau de Char (1) Mémoire intitulé ; Réplique 3 imprimé en 1810, page 29.
10
�1 3 6 }
let peut se trouver une limite des Gâchiers , sans la
subversion de topographie que le sieur N a l e y se plaisait
à reprocher au maire de V ie (i).
Ils avaient parlé encore a^une requête du i . er mai
174 6 * donnée par les régisseurs m êm e
de C h a d i e u ,
pour demander à titre d’excuse et de dénégaiion une
m ain -le v é e de best iaux, saisis p a r l e s consuls de Vie,
Cette pièce était importante pour prouver la vigi
lance des consuls à tenir en défense les Gâchiers, et
le langage modéré des régisseurs de C h a d i e u , très-au
fait des usages. I l s se soum irent par leurs conclusions
a payer le dommage et la clame. L e sieur N a t e y , n ’a
rien répondu h un fait aussi p r é c i s , émané des agens
de ses prédécesseurs.
U ne autre procédure dont on n ’avait plus p a r l é ,
et qui n ’a été retrouvée à Clermont , que depuis le
précédent m é m o i r e , date de 1762. Le s consuls firent
encore saisir des moutons de M. de T a n e , pacageant
en fraude dans les G â c h ie r s , Leur appartenant, est-il
(1) A u t r e mémoire intitulé : R ép liq u e, imprimé en 1807, page 4 ; et
sur-tout le mémoire intitulé : R ésu m é, page 3 o , où le sieur Na t ey atteste
l’ impossibililé que« le merveilleux ruisseau de C h a r l e t , vainqueur des flots
« rapides de l’A l l i e r , ait pu fournir un passage pour aller servir de limite
« à l’autre rive...... Eu s’ étayant difficilement de faits f a u x , il prouve ( le
« maire ) qu’ il connaît l’iniquité de sa ca u se, et ne répugne à aucuns moyens
« pour tromper les tribunaux et le public ».
Cette vespérie n’a besoin d’autre réponse que des deux pièces de 1715
et 1720 et des tiues même de Chadieu, où le ruisseau Charlet est confin.
�? 37 )
d i t , de tems immémorial. Car leur langage n ’a jamais
varié.
M . de T a n e présenta requête au sénéchal de Clerm o n t , le 4 septembre 1762 , pour demander des d é
fenses, et la m ain -levé e de cette saisie : et pour obtenir
cette main-levée sur r e q u ê te , il exposa en fait que
c ’était hors les pacages des habitans de V i e , que les
moutons avaient été saisis, et dans l ’étendue de la
justice.
Cependant , il paraît que le sieur de T a n e voulu t
soutenir avoir droit de faire pacager ses bestiaux avant
La S t.- M a r lin , c ’e s t - à - d i r e , pendant le tems que les
consuls de Vi e réservaient le pacage au gros bétail,
et tenaient les Gâchiers en défenses des autres bestiaux,
en exécution de la transaction de i
5 i i , et de l ’arrêt
de 1641.
C e projet d’innovation donna lieu à une assemblée
générale des habitans, le 28 juillet 1764. On y expose
l ’usage immémorial de publier C ouverture d u pacage
annuellement à la p e nt ecôte, pour réserver le pacage
au gros bétail jusqu'à la S t .- M a r t i n , et on autorise les
consuls à s’opposer à toute innovation , plaider, etc.
Il ne reste d’autres pièces de ce procès qu'une requête
du 1.” juillet 1 7 5 5 , rédigée et signée par M .e T i x i e r ,
avocat. On y voit que M. de T a n e , dans des causes d ’a p
pel du 29 janvier,avait conclu à l'exécution de l'arrêt de
1 6 4 1 , et q u ’en conséquence, lui et ses métayers fussent
maintenus dans le droit et possession d’envoyer pâturer.
�C
38 )
Leurs bestia ux dans Le com m unal d u g ra n d et petit
G â ch ie r , en tout tems.
L e s consuls de V i e répondaient que ce communal
était Leur propriété , que l’arrêt de 1641 l ’avait jugé
ainsi, que c ’élait à eux à le tenir en déf en se, etc.
E n 1 7 6 5 , une autre saisie de moutons fut faite par
les habilans de Vie , par des habilans de C o r e n t ,
(vas saux du sieur de T a n e ). Ils ne s’en défendirent
aussi que par des excuse s, en reconnaissant dans leur
propre requête le droit de propriété des Iiabitans deVic.
■ E n 1 7 6 6 , un délibératoire autorisa le-maire à d e m a n
der une plantation de bornes.
Cette
fermeté soutenue des habilans de Vi e , fit
comprendre au sieur de T a n e , q u ’il avait commis une
imp ru de nce , en concluant lu i- m ê m e à l’exécution de
l ’arrêt de 1641. I l vit que pour tenter un succès * il
fallait revenir sur ses p as , c'e£i ce q u ’il fit en 1768.
Procès actuel y commencé en 1768.
L e sieur de
T a n e exposa dans une
commission
obtenue au p a r l e m e n t , que les Gâchiers et V er giè re,
dépendaient de ses domaines de Chadieu et Chalus ;
qu ’ils étaient ja d is asservis à une redevance de
3 fr.
d’or, envers le seigneur d e V i c - l e - C o m t e , pour laquelle
il y a procès en la sénéchaussée; que les consuls de
VicLOrit'tenié plusieurs fois d ’oblenir le droit de pa cage,
tant que le terrain serait eri vaine p â tu re, ou sans d é -
�( 39 )
fense : qu’ il y eut procès au .parlement avec M ar ie
P e l o u x , et que les consuls de V ie soutenaient q u elle
était reduite a L unique propriété, (r) Ç Vi en t ensuite la
teneur de la sentence de 1637 , et de l ’arrêt de 1 6 4 1 .)
L e sieur de T a n e continue, et dit : «• néanmoins afin
que le juge actuel de L a c h a u x , ne puisse lui objecter
l ’ancienne prétention de ses prédécesseurs sur Le retaiL
et coupe des arbres du grand Gâchier , laissé indécis ,
il est bien fondé à faire prononcer sur ce chef.
Après cela le sieur de T a n e demanda permission
d ’assigner, et.il assigna le sieur Vassadel, seigneur,de
la Chau x , pour voir statuer sur Le c h e f d u procès resté
indécis : en con séq uen ce , ajoute - t - i l , pour se voir
défendre de couper et le troubler dans Le droit d e pro
priété des Gâchiers , sauf audit sieur de L a c h a u x
et
a u x habilans de V ie le pacage pendant la vaine pâture.
Il assigna en m êm e -te m s les habitans de .Vie en arrêt
comm un.
Dans les formes ordinaires de la procédure , une
demande ainsi formée contre deux personnes, ne p o u
vait être séparée; et si les habitans de Vi e ne com pa
raissaient pas. il fallait un arrêt de jo nc tion; ce n ’ est
pas ce que fit le sieur de Tane.
Il prit, le i 5 mai 1 7 6 8 , contre le Sr.Vassadel se u l3 un
arrêt par défaut, sur Lechefdeprocès resté in d écis, c o m m e
le porte l ’a r r ê t , et il obtint-toutes ses conclusions.
(1) II faut convenir que tout cet exposé était d’ une grande exactitude,
d ’après ce qu’on a lu.
�( 4° ) _
' Ensuite il transigea avec le sieur Vas sadel, toujours
seul ^ pour le faire départir de la coupe des arbres;
mais le sieur Vassadel exprima des réserves de tous
les droits des habitans de Vie.
C e u x - c i se défendirent vigoureusement , com m e
troublés dans leur propriété par cette demande ; ils
répétèrent que les Gâchiers étaient leur c o m m u n a l ,
leur propri été , sauf la servitude de p a c a g e , due au
sieur de T a n e ; ils conclurent à ÿ être maintenu s; le
procès fut appointé avec eux.
T o u t procès a été abandonné par le sieur de T a n e ,
depuis cette époq ue, la saisine des Gâchiers est restée
aux habitans de Vie.
E n l’an 1 0 , le sieur N a t e y rec om m enç a les hos
tilités, en signifiant l’acte de i
5 3 i , qui voyait le jour
pour la première fois; il déclara q u ’il voulait clorre;
le maire lui répondit qu’il formait opposition à toute
clôture.
.A l o r s , et par exploit du 21 ventôse an 10, le sieur
N a t e y assigna le maire de V ie au pélitoire dans la
fo rm e suivante.
Il
mit en tête de son exploit les arrêts de 1768 et
1 7 6 9 , où le sieur de T a n e était en qualité com m e
dem a nd eu r, et les officiers municipaux de Vie com m e
défendeurs ,* il déclara reprendre cette instance devant
la ( »our d’app el , com m e représentant le P a r l e m e n t ,
et assigna le maire de V i e ,
pour voir d ir e , q u ’ayant
égard à ce qui résulte de l’acte de i
53 i , de l’arrêt
de
�( 4 0
de 164.1 ( i ) , et des arrêts de 1768 et
1769, et,
sans s’arrêter a la demande des habitans de Vie (2),
N a tey fut maintenu dans la propriété et jouissance des
Gâchiers et Ver gièr e, avec défenses de l’y troubler., etc.
C'est après cette demande pétitoire que le sieur
N a t e y ayant fait des plantations et des fossés3 le maire
de V i e se pourvut en complainte possessoire contre les
ouvr iers, dont le sieur N a t e y prit le fait et cause. Ce
possessoire fut jugé le 2 3 messidor an 10 ; et il y eut
appel.
•
Dans le m ê m e te m s , le sieur N a t e y revint en la
C our poursuivre sa demande du 21 ventôse an 10.
L e s habitans de Vie dirent en défenses que le procès
repris par N a t e y , étant une demande principale portée
de piano au parlement , suivant l ’usage
abusif de
•> cette é p o q u e , devait d’après les lois actuelles subir
les deux degrés de juridiction ; ils conclurent au renvoi
par deux requêtes des 23 fructidor et i
1
a n ; 11,
3 thermidor
:
L a c o u r j par arrêt du 18 tliermidor an i r , au
rapport de monsieur C o i n c h o n - L a f o n t , jugea que la
v c o n t e s t a t i o n ayant été portée de piano au parlement
de Paris en première instance , il y avait lieu h subir
(1) Regardant l’arrêt de
1641 comme définitif, il n’ en reprenait pas
les poursuites, au contraire, il en argumentait comme d’ un titre..... .
(a) Le*sieur Nat ey explique, qu’il a entendu parler des conclusions en
maintenue, prises par les habitans3 en défenses à la demande de 1768. *
11
�( 4 0
les deux degrés de juridiction , possession néanmoins
tenante en faveur de Natey.
L e sieur N a t e y usa largement de sa v i c t o i r e , et
réduisit les habilans de Vi e à un dénuement de pacages,
dont la tradition la plus reculée ne leur donnait aucun
exemple.
Ils se pourvurent en cassation et co m m e ils ne p o u
vaient em pêcher l ’exécution de l’arrêt , le maire de
V i e assigna N a t e y au tribunal de C l e r m o n t , le 8 fruc
tidor an i i , pour procéder sur La dem ande form ée
par N a te ij; en co nséquence , et y statuant, pour voir
maintenir les habilans de Vie dans la propriété et pos
session , avec défenses de changer l’état des lieux.
U n jugement du 9 nivôse an 12 fit défenses pro
visoires à Natey de défricher. Il fut infirmé par arrêt du
12 prairial an 12. Mais cet arrêt et celui du i 3 ther
midor an 1 1 , furent cassés.
Il est cependant essentiel de remarquer que ce dernier
arrêt ne fut cassé qu’en ce qu'il accordait la posses
sion au sieur N a t e y ; mais, q u ’il fut maintenu en ce
q u ’il renvoyait La demande du sieur N a t e y , à subir les
deux degrés de juridiction.
L e possessoire fut jugé le 29 août 1807 , par juge
ment en dernier ressort du tribunal civil de Riom ,
délégué par la Cour de cassation, et les habilans de
Vie maintenus en la possession du pacage, des Gâchiers
et v e r g i è r e , açec restitution de jo u is s a n c e s , à dires
d ’experts.
�U 3 )
Ge jugem ent en dernier ressort réduisait nécessaire
ment le sieur N a t e y à poursuivre sa demande au péliloire ; aussi se hâta-t-il de revenir à C l e r m o n t , où
il surprit un jugement par d é f a u t , qui remettait la
cause de quinzaine.
Mais il n'avait pas parfourni le possessoire, et il
ne l ’a pas m êm e parfourni encore!
U n second jugement du 9 avril 1808 reçut l ’op p o
sition des habitans de V i e , sursit de
3 m o is , pendant
lequel tems les condamnations possessoires seraient
liquidées.
Elles l’ont été dans ce d é l a i , et un jugement du
tribunal civil de R i o m , du 18 mai 1808 , a homologué
le rapport des experts, par défaut contre N a t e y ; i l a
été confirmé par autre jugement du 26 mai 1809, qui
le déboute de son opposition.
T o u t cela n’a pas produit le parfournissement du
possessoire, au contraire le sieur N a t e y , pour neutra
liser les conditions possessoires, avait interjeté appel
en la C o u r , du jugement du 7 avril 1808, qui avait
prononcé un simple sursis; il demandait ¿1 la Cour l ’é
vocation du principal, et le jugement du pétiloire.
C'est alors que le sieur N atey imagina, pour la pre
mière fois, de prétendre que malgré ses demandes il
n'était pas demandeur ; et co m m e le jugeme nt de
Clermont lui en avait nécessairement et par habitude
donné la qualité , il en fit un gr ief d ’appel.
L a C o u r, par arrêt du 29 juin 1809, s‘m s s’arrêter
h cette demande e n é v o c a l io n du principal, se déclara
�( 44 ;
i n c o m p é t e n t e , et renv oy a le sieur N a f e y à faire statuer
sur le fon d , à Cle rmont, dans le plus b r e f délai.
«
Cependant il fallait exécuter le jugement possessoire, et la com m un e de V i e , après d’aussi incroyables
chicanes, devait compter que le cours de la justice ne
serait pas interrompu en faveur du sieur N a t e y ; mais
à son grand étonnement , le maire de Vie £eçut la
notification d’un arrêté administratif, qui l’empêchait
de mettre à exécution le jugem ent en dernier ressort
de Riom.
Il se vit obligé d’attaquer cet abus de pou voir , et
de porter ses plaintes aux pieds de Sa Majesté I m p é
riale. Il y trouva la ju sti ce , et par décret impérial
du
28
décembre
1810,
l’arrêté ci-dessus fut
avec ordre d’exécuter le jugement du
20
ca ssé,
août
1807,
en réintégrant la co m m une dans la possession des
Gâchiers.
« N A P O L E O N , Empereur des Français.,.., vu la requête.,.. ;
un arrêt du parlement de Par i s, du
1 7 mai
1641 ........;
un
j ugement du tribunal civil cle R i o m , rendu en dernier r e ssort ,
le 29 août
1807,
session....... ; un
qui maintient la commune de V i e en pos
procès-verbal d u ......... ; l’arrêté
de préfecture , remplaçant
quatre août mil
le préfet du
du conseiller
Puy-de-Dôme ,
du
huit cent n e u f, qui , sur le prétexte de m é
nager les intérêts
de la commune , et dans des vues d’ordre
p u b l i c , ordonne que le sieur
ment la jouissance des
Nat ey
terrains
conservera provisoire
litigieux ; que le
droit de
p a c a g e sera estimé par des e x pe r ts , et le p ri x en sera versé
dans la
caisse de la c o mm u n e ..... ......... j enfin la requête du
�.(
-45 )
maire de V i e i la réponse du sieur Natéy , la répliqué du
maire , et autres pièces à l ’appui ;
Considérant qu 'un jugem ent en dernier ressort ayant main -
tenu la commune de T^ic dans la possession du terrain liti
g ieu x , et fait défenses au
sieur N a t ey de l ’y t r o ub l e r , rien
préfecture , re m p la ça n t
ne pouvait autoriser le conseiller de
le préfet
du
P u y - d e - D ô m e , à légitimer
les
entreprises
du
sieur N a t e y , contraires auxdites défenses ;
Sur
l ’avis de notre commission du contentieux;
Notre
Conseil d ’Etat entendu ,
Nous avons
Art.
^
décrété et décrétons
ce qui suit :
i . er L ’arrêté du conseiller de p réf ec tur e, remplaçant
le préfet
du P u y - d e - D ô m e , du
quatre
août mil
huit cent
n e u f , est annullé.
2. L ’état des lieux sera rétabli tel qu’il était avant ledit
arrêté , aux frais du sieur N a t e y , et le jugem ent du tribunal
civil de R i o m , du vingt août m il huit cent s e p t , sortira
son
S.
plein
et entier effet.
Notre ministre de l ’intérieur est chargé de l ’exécution
].
du présent décret.
A p p r o u v é , etc.
Signé N A P O L E O N .
Quelque précis que fût ce décret im p é r ia l , le sieur
N a t e y ne s’ est pas tenu pour b a t t u , et il a prouvé
que ses ressources étaient aussi inépuisables que son
génie était fécond à en découvrir d'inattendues. Mais
il faut oublier cette inégalité de forces pour ne pa s
être découragé par les comparaisons.
Reprenons la série des faits judiciaires , pour suivre le
sieur N atey dans cette autre a r è n e 3 où il n’est pas moins*
inventif. E n voici une preuve :
�(.46 )
Plaidant enfin sa cause au fond, le sieur N a t e y s’est
efforcé principalement à prouver qu’il n’était pas de
m an de ur au pétitoire , mais bien d é f e n d e u r , d’où il
a conclu comme il fallait s’y attendre , que la c o m
mun e de Vie demanderesse avait tout à prouver.
l i e tribunal dè Clermont a décidé que c’était le sieur
Natey” qui était d e m a n d e u r , et au surplus a accordé
que les limites des justices de Vi e et Mo uton seraient
fixées par experts.
Alors qu’a fait le sieur N a t e y ?
Il s’est hâlé de signifier les qualités de ce j u g e m e n t ,
pour arranger les choses à son contentement ; et il a com
m encé ainsi : entre Les habitans de
par
req u ête
V
ic ,
dem andeurs
des 6 et 7 ju ille t 1 7 6 8 , et le sieur N a t e y
défendeur.
• Ensuite se mettant à l ’aise dans les faits , il n'est r e
m o nt é q u ’à i 63 o , pour esquiver les acles de i 5 i i ,
15 4 2 et 1 6 2 7 , et sans même supposer que les habitans
de Vi e en eussent parlé.
E n f in , à l’article de sa propre p r o c é d u r e , le sieur
N a t e y , passant de 17 6 9 à l ’an 1 0 , S'est bien gardé
d ’averlir que c ’est lui q u i, le premier, avait attaqué. l i a
dit que le maire de Vi e s’était fait autoriser à reprendre
l ’instance de 1768 ; après quoi il a bien voulu avouer
que de son côté, il l’avait aussi reprise ; en sorte q u e , p a r
cet arrangement chronologique, tout le monde pouvait
croire que les habitans de Vie étaient demandeurs à
toutes les époques.
�( 47 )
Ces qualités furent arrêtées par une opposition ten
dante à faire rectifier tous les faits , ou la vérité était
altérée.
«
M. le président a fait droit sur cette opposition , en
rétablissant les qualités qui déjà l’étaient suffisamment
par le ju g em e nt, dont la teneur suit:
« At tendu (sur lé règlement des qualités) que depuis
l ’époque de l’arrêt d e l à ci-devant Cour du parlement
de Paris, du 17 mai 1641 , qui régla la contestation,
alors pendante en la dile C o u r , entre les consuls de
V i e , les héritiers Beaufort-Canillac , propriétaires du
clos de Ch ad ieu , et le sieur la Roche-Briant ci-devant
seigneur de L a c h a u x , il ne s’est élevé entre les parties
que des plaintes relativement à l’inexécution de cet
arrêt, et que le tout a été terminé ou abandonné dans
les temps les plus reculés ;
« Attendu que l ’arrêt précité a été exécuté jusqu’ en
1 7 6 6 , époque où le sieur de T a n e voulut faire juger
la branche du procès qui était restée indécise d ’après
cet arrêt entre la famille Beaufort qu’il représentait,
et sieur Vassadel - Lach aux représentant le sieur la
Roche-Briant ;
« Attendu qu’en 1 7 6 6 , le sieur de T a n e assigna en
la ci-devant Cour du parlement de P a ri s , non-seu
lement
le sieur Vas sadel-Lachaux pour faire pro
noncer sur ce que l’arrêt dont il s'agit avait laissé
indécis, mais qu'il appela encore les habitans de Vie
pour voir déclarer communes avec eux les condam
nations à intervenir;
�( 48 )
te A t ie n d a que le procès actuel n’est que la suite de
cette dem ande
q u ’il a plu au sieur N a t e y de re
prendre contre le maire de V i e ; que par conséquent,
pe dernier doit toujours être considéré com m e le d e
m an de ur principal, ainsi que l’était le sieur de T a n e ,
quelques demandes incidentes que les h ab il a n s d e Vie
aient pu f o r m e r , par requête ou a u t r e m e n t , depuis
I j6 6 jusqu’à ce m o m e n t ; p u i s q u e tout ce q u ’ils ont
fait jusqu’à ce jour ne l’a été q u ’en défendant à la
demande formée contre e u x , pour y parer et pour
la conservation de leurs prétendus droits 5
En ce qui touche le fon d ,
«• Attendu que les parties sont contraires en faits
sur les limites des justices et autres terres d e l à maison
Canillac-Beaufort , qui toutes joignent e n se m b le , et
celle du comté d ’A u v e r g n e , d ’autre p a r t ;
«■Attendu que le sieur Natey, prétend que la rivière
d ’Allier sert de bornes à la justice de V ie sur Allier;
«■At tendu
que les habilans et corps co m m un de
cette co m m une
présentent des titres qui semblent
contrarier cette assertion;
« At tendu que les juges ne peuvent* pas eux -mêmes
éclaircir tous ces points; de f a i t , à délaut d ’instruc
tions suffisantes ¿1 cet égard;
« L e tribunal faisant d r o i t , i.° sur le règlement
des qualités, ordonne que le sieur N a t e y étant au
lieu et droits du sieur de T a n e , dem andeur originaire,
procédera en la ca use , en qu¿ilité de d e m a n d e u r , et
�' ( 49 )
'le maire de là c o m m u n e de V i e sur Allier , en qualité
de défendeur ( i ) ;
« 2.0 A v a n t faire droit au fond , sans préjudicier ni
nuire aux droits respectifs des parties, ordonne q u ’elles
conviendront d’experts, à l ’efîet de vérifier les lieux con
tentieux , en lever un plan géométrique , et désigner les
anciennes limites de la justice de V i e , clief-lieu du cidevant comté d’A u v e r g n e , e t 'd e s autres justices qui
la joignent; et déclarer si les pâturages, dits Les g ra n d
"et petit G âchæ r et La V ergière, sont enclavés dans la
ci-devant justice du comté d’A u v e r g n e , ou dans quelle
justice ils sont situés, etc., tous moye ns de fait et de
dro it, ainsi que les dépens, réservés ».
L e Sieur N a t e y a interjeté appel de ce
ju g e
ment.
Il poursuivait cet a p p e l , faisait des réquisitions, et
se plaisait déjà à accuser la lenteur du maire de V i e ,
long-tems avant d ’avoir m êm e fait expédier et signi
fier le jugement de Clermont.
Par deux actes successifs, l ’ un du 22 août 1 8 1 1 ,
l ’autre sans date, tous deux signés Jea n de B a t%, le
sieur N atey a fait sommation au maire de Vie de d é
clarer s’il entendait se servir des actes de i
5 i i , 1642
et 1 6 8 4 , et du pouvoir donné au maire de V ie par
(1) S’il n’y avait pas en d’opposition aux qualités de ce j ugement,
on voit combien le sieur Natey l’aurait rendu ridicule
5 puisque
ceux qui
seraient restés e n ' qualité, comme demandeurs, étaient jugés n’être quo
défendeurs.
x3
�(
5o )
les habitans, le 9 messieor an i o } se réservant, audit
cas, d ’attaquer lesdits acles par inscription de f a u x :
•il en a demandé la communication par la voie du
greffe.
L e maire a répondu q u ’il entendait se servir de tout&s
les pièces produites au procès; qu'il en a vail donné maintes
fois co m m unic a ti on, et qu'il l'offrait encore aux d é f e n
seurs du sieur de Batz.
P a r arrêt préparatoire, du
25 novembre 1 8 1 1 , la
C o u r a ordonné le dépôt respectif au greffe de tous
les titres du procès.
Ce dépôt a eu lieu; le sieur de Batz a verbalisé sur
chaque pièce produite. Cependant il s’est fort appaisé
sur l’inscription de faux. Il a .r é f l é c h i, et il dit que les
pièces menacées n'en valent pas la peine.
♦
A u jo u r d ’hui le sieur de Batz a donné son ultim atum
dans des conclusions où , reprenant tous ses m o y e n s , il
dit que ses prédécesseurs n'ont jamais pu être dem an
deurs, parce q u ’ils ont toujours possédé les G a c h ie r s , et
que les habitans furent demandeurs en pr opriété, en
1768 ; que le 8 fructidor an 11 , ils portèrent à C le r
mont leur dem ande en propriété, et mirent la* cause au
tôle le i .er vendémiaire an 1 2 , c o m m e demandeurs ;
qu'ensuite ils formèrent une demande au possessoire,
quoique la loi leur interdît cette double action ; q u ’ un
jugement du 9 nivôse an 12 les dén o m m e demandeurs ;
que si, en 176 8, le sieur de T a n e assigna les habitans le
p r e m i e r , il abandonna celte demande dont il n’est pas
fait mention en l ’arrêt du i 5 mars 1768 ; que si N a t e y l ’a
�(
)
-reprise le 24 germinal an i o , il n’a pas assigné en décla
ration d ’arrêt com mun. Enfin le sieur N atey prétend
que l’arret de 1641 ne peut avoir donné la propriété
aux habitans de Vic^ parce q u ’ils n’étaient demandeurs
q u ’en simple servitude de pacage , tandis que la pro
priété des Gâchieis n’était en litige qu'entre les sieurs
de Beaufort et de la Roche-Briant. Après tout c e la , le
sieur N a t e y a conclu au mal j u g é , à ré voca tion du prin
cipal et à être gardé et maintenu en la propriété des
Gâchiers et vergières.
L e s habitans de Vie ont interjeté appel incident du
m ê m e ju g em e nt , en ce q u ’il ordonnait une expertise
inutile, puisque le sieur N atey avait toujours reconnu
que les Gâchiers étaient dans la justice de Vic-le-Comte.
Voilà donc enfin où en est ce procès suscité par le
sieur N a t e y , quoiqu’il en dise ; et déjà le maire de Vie
croit avoir rendu compte du passé de manière à passer
rapidement sur les questions que font naître les co n
clusions ci-dessus.
§
I.er
Q uel était le d em a n d eu r?
i.° Dans le f a i t , c ’est celui qui a voulu l ’être.
2.0 Dans le droit , c ’est celui qui a succombé au
\
possessoire.
Puisqu’il est convenu par le S.r Natey, que le procès
actuel a co m m en cé en 1768 , rien n ’est'plus aisé que
d ’y retrouver le demandeur.
41
�i 52 )
Depuis q u ’ on a inventé les procès, on ne connaît
sous le nom de demandeur., que celui qui ajourne d e
vant un tribunal pour se faire adjuger des conclusions
quelconques.'Celui qui est ajourné s’appelle le d éfen
deur; et si celui-ci, en répondant à ce qu’on lui dit, prend
des conclusions incidentes, il en résulte seulement qu’il
est demandeur en celte partie : reus excipiendo f i t actor.
Mais il n ’ôte pas à son adversaire la qualité de deman
deur originaire.
O r , c’est le sieur de T a n e q u i , le 14 août 1 7 6 6 ,
a assigné le sieur de L a c h a u x , pour se voir garder au,
droit de propriété des G â c h i e r s , et des arbres. Il a en
m ê m e tems assigné les habitans de V i e en arrêt comm u n , ce qui, en style de palais, leur rend communes
les conclusions prises en maintenue de propriété.
Si en défenses à cette demande , les consuls de Vie
ont pris des conclusions incidentes en maintenue do
propriété, par requête du 6 juillet 1 7 6 8 , c’est parce que
c ’çst la défense naturelle et habituelle de tout proprié
taire , troublé par une demande péliloire.
M a i s , dit le sieur N a t e y , la demande originaire du
sieur do T a n e , était abandonnée.
11 n ’en a plus été
question dans les arrêts postérieurs. C ’est vous qui êtes
restés demandeurs originaires.
L a sincérité du sieur N a t e y , va se lire dans l ’arrêt
m êm e d^appointement, du 8 mars 1769.
« E n t r e Antoine de T a n e , d e m a n d e u r , suivant
sa commission et exploit,, du 9 juillet et 14 août 1766
�(53)
« El: le
maire et
DE F EN DE UR S
échevins de Vie - l e - C o m i e ,
» ;
» Et lesdits maire et échevins dem andeurs , en deux
requê tes, des 6 et 7 juillet 1768. j>
C el arrêt est la dernière procédure de 1769.
Quan d le sieur N a t e y Ta reprise , en Fan 10 , c’ est
encore lui qui a assigné ie i . er , et qui a pris des co n
clusions pétiloires.
C ’ est lui qui dans sa propre demande a expliqué que
les conclusions prises en 1768 , par les habitans, en
maintenue de propriété étaient en défenses à la de
m an de du sieur de T a n e .
C ’est lui qui a signifié l’arrêt du 18 thermidor an 1 1 ,
où il dit que c ’est Antoine de T a n e , qui assigna les
habitans de Vie en 1768 ; et que ce ux -ci formèrent
une demande incidente 3 pour être déclarés proprié
taires ;
C ’est lui q u i, dans l ’arrêt du i
5 prairial au 12., a
dit que les habitans n'avaient formé qu'une dem ande
incidente , que le sieur de T a n e était premier d e m a n
deur; q u e l u i N a t e y , était encore d e m a n d e u r e n l ’an 10 ,
et que les habitans de Vie lui avaient opposé que ces
deux
demandes , étant
des
dem andes p rin cip a le s,
avaient dû subir les deux degrés de juridiction.
A tout cela le sieur N a t e y r é p o n d , en montrant
un extrait de mise au rôle, qui qualifie les habitans
de V i e , demandeurs par exploit du 8 fructidor an n ;
�(_ 54 )
2.ù le jugement du 9 nivôse an 1 2 , qui les qualifie
demandeurs.
Il est vrai que tout ajournement constitue un de
mande ur : et le m a i r e , qui assignait pour procéder
sur l'instance intentée par Le sueur N a tey , et pour con
clure à ce q u ’il lût fait défenses au sieur N a l e y de
déf richer, était lout à la fois, demandeur en reprise,
et deman deur incident. Mais n ’est-ce pas abuser des
m o t s , que de chercher là le dem a n d eu r, quand déjà
il y a instance pendante.
A u reste, q u ’on parcoure toutes les pièces étran
gères à cette demande incidente , depuis 1766 jusqu’à
1 8 1 0 , par-tout on verra les habifans de Vi e qualifiés
défendeurs, par le sieur N a t e y l u i - m ê m e , jusqu'à ce
que condamné au possessoire, il ait compris toute l’i m
portance qu’il y avait pour lui , de n’être plus de
mandeur au pétitoire.
E n vérité , ce serait une étrange subversion des
principes et des usages, que de transfigurer ainsi le
sieur N a t e y , en ce qu'il lui plaît de devenir suivant
les circonstances.
C onda m né au possessoire, et par conséquent obligé
de demander ce qu’ il ne possède pas , il réduirait les
habitans de Vie à réclamer eux -m ê m e s -ce qu’ils pos
sèdent, ce qu'ils tiennent d ’un jugement en dernier
ressort..
U n piège était caché sous une prétention aussi peu
intéressée en apparence. L e sieur N a t e y voulait arriver;
�(
55)
par une manœuvre habile , à faire infirmer par la
C ou r ce jugement possessoire.
•
§. I I /
Y avait-il heu d ’ ordonner une exp ertise, pour savoir
su les G âchiers et vergieres sont dans là ju s tic e de
V ic -le -Ç o m te ?
Ici l’appelant et les intimés sont d ’acccord , ce qui
n ’ est pas fréquent entre plaideurs.
U n e expertise était inutile pour constater ce qui
était con v en u par toutes les parties.
En effet , les habilans de Vi e ont toujours argu
men té de la transaction de i
5 i i , de l’arrêt de 1 6 4 1 ,
qui disent les Gâchiers situés dans la justice de V i e le-Comte.
L e sieur N a t e y , dans tons ses écrits, s’est préci
sément fait un m o y e n de cette énonciation; car p r e
nant le mot h la lettre pour faire un argument a
contrario sen su , il a dit que l’arrêt de 1641 ? donnant
les Gâchiers aux habitans de Vi e l e -C o m t e à titre de
ju s tic e , il fallait en conclure q u ’ils ne l ’avaient pas
â titre de propriété.
Ainsi une expertise, outre sa difficulté actuelle, et
sa longueur nécessaire, était un m o y e n d'instruction
absolument fruslratoire, puisqu’il -n'y a aucun fait à
éclaircir.
�(
56
)
§• III.
.
'
%
>
Y a-t-il lúea à évocation du p rin cip a l?
L a C o u r , par arrêt du 29 juin 1 8 0 9 , a statué sur
¡’évocation alors dem andée ’ elle a prononcé qu’elle
ne devait pas avoir lieu , et a r en v oy é les parties
devant le tribunal de Clermont.
'
C e tribunal a-t-il rempli le premier degré de j u
ridiction, en statuant sur le règlement des qualités,
et ordonnant une expertise ? Voilà ce que le maire de
Vie ne croit pas m êm e devoir discuter.
L e s juridictions sont de droit public.
U n maire n’a aucun caractère pour aquiescer a une
év oc a ti on, ni pour la contester.
L a Cour prononcera donc dans sa sagesse , si les
habitans de V i e d o i v e n t toujours av o ir les deux degrés
de juridiction
§ IV.
t
•
L e s habitans de T^ic n ont-ils sur les G âchiers qu’ un
simple droit de pacage?
C'est ce que le sieur N a t e y induit de sa prétendue
transaction de 1 5 3 1 , de la foi et- h om m age de 14 8 7 ,
du sous seing privó, de M. de B o u il l o n , de. 1668, et
m ê m e de l ’arrêt de 1641.
L a transaction de i 5 3 i , outre tous les indires de
fcilsiflcation qui s’élèvent contre elle, ne serait ¡pas .un
titre
�.
(
57 3
titre pour le propriétaire de Chadieu, car alors le sîeur
de Beaufort ne Tétait pas.
Elle n ’a jamais été produite par lui dans les procès
postérieurs; donc, si jamais elle a eu vigueur de titre,
elle l’aurait perdu par abandon et inexécution de deux
siècles.
Les habitans de Vie , n'étaient pas légitimement r e
présentés. Y e û t - i l eu une p r o c u r a t i o n ,
elle n’ é
manait pas d ’un délibératoire du corps c o m m u n , et
ne pouvait m êm e valoir sans homologation.
L e prétexte pris dans cette transaction , pour traiter
avec quatre individus sans caractère, est une concession
de 1 4 2 5 , qui aurait réduit les habitans à une simple
servitude dans la moitié. Cette concession n'a jamais
été représentée , pas m ê m e dans les anciens procès.
A u contraire, le propriétaire de Cliadieu argumentait
d ’ une concession faite à Lui par le seigneur d e V i c - l e C o m l e , m o ye nnant
3 francs d’or.
Les titres postérieurs détruisent cette transaction.
L a foi et h om m age de 1437 est encore moins un
titre pour le propriétaire de Chadieu.
II y est réduit à une simple fa c u ité de pacage dans
les Gâchiers.
Il n’a jamais entendu lu i- m êm e excéder cette faculté ,
puisqu’il n’a vendu que cela en 1627.
L a mention de propriété favorable au seigneur do
M o n t o n , dans cet acte de 1437, est inutile au proprié
taire de Chadieu. D ’ailleurs, le seigneur de M o n t o n a
x5
�(
58
)
reconnu pos térieurement, en 1 6 2 7 , que ces anciennes
énonciations étaient fausses.
»
1
l/ a rrê t de 1641 a réglé le droit des parties, sur le
v u de tous les titres produits.
Les habitans de Vi e produisaient la transaction de
l 5 n , et l ’arrêt en ordonne mot pour mot l ’exécution.
L e sieur de B e a u f o r t , q u i a u r a i t n e u t r a l i s é cette
t r a n s a c t i o n , s’il en a v a i t eu une autre de i 5 3 i , ne pro
duisit rien de p a r e i l , et ne se défendit pas mêm e avec
des moyens q u i y eussent de l ’a n a l o g i e .
Il sentit le besoin de rétracter les a v e u x émanés de
lui dans son propre titre de 1627. L'arrêt l’en débout a,
' en sorte que le titre et les ave u x sont demeurés c o m
muns aux habitans de Vie.
Il voulait faire sanctionner les actes de propriétaire
q u ’il avait faits par des tenues d ’assises ; il en fut débouté.
Il voulait réduire les habitans de Vi e à un simple pa
cage, et avoir lui-même la haute main; il en fut débouté.
Et leshabitansde Vi e furent maintenus en l a s a i s i n e
et possession des Gâchiers , et au droit de les tenir en
défenses de tout retail , en tems et saison q u ’il leur
p la ira it fixer.
L e propriétaire de Chadieu fut réduit à la simple
faculté de pacage sans f r a u d e , pour lui et ses métayers,
dans le tems seulement où les habitans de Vie ne m et
traient pas les Gâchiers en défense.
Si l’arrêt donne la saisine
et possession , tant pour
le droit de ju s tic e que de p a ca g e, c'est tout ce q u ’a v a it
�( 59 )
obtenu le sieur de Beaufort dans les mêmes termes
par la sentence du
5 juin 1637. L e sieur de Beaufort
n ’avait conclu qu’à être maintenu en La possession ,
saisine et pacage des Gâchiers , tant pour Le droit de
ju s t ic e que de pacage. C e p e n d a n t , le sieur N a l e v se
fait un moyen de ce que le sieur de Beaufort plaidait
pour La propriété des Gâchiers.
C ’ était au reste ce qui, dans le style du tems, dé
signait le droit d’une com m un auté d’habitans à un
pacage ou communal.
L a C outu m e d’A u vergne ne s’exprimait pas autre
ment pour indiquer le droit des communautés d ’ha
bitans aux com m un aux de leur enclave.
Quant aux liabitans d’ une m ê m e justice , il leur
est leu et permis faire pâturer leur b é t a i l , pâturages
co m m u n s, terres hermes et vacans, situés en ladite
justice, en tout tems et saison de l’a n , (art. 3 , tit. 28)
L ’art. 4 donne ensuite une faculté générale de pâtu
rage , en tous héritages portant fruits , après les fruits
levés.
Il a plu au sieur N a t e y de confondre ces deux ar
ticles pour ne voir que le dernier, afin d'arranger à sa
guise l’arrêt de 1 6 4 1 , de manière à ce qu'il ne signi
fiât rien du tout.
A l’entendre, cet a r r ê t , parlant de droit de ju s tic e
■
j*
.
n ’a rien donné que La vaine pâture.
^
Bie n ne serait plus exact si l’arrêt n’avait parlé que
dans le sens de l’article 4 , en permettant le pâturage
après Les fr u its Levés.
16
�( 6o )
Mais il a parlé dans le sens de l’article
3 , en don
nant le droit de pâturage en tout tenis et saison de
i ’a n , et m ê m e le droit de tenir en défenses.
O r ce droit ne peut donc s’entendre des pâturages
co m m u n s, terres hermes et vaca n s, sis en la justice;
et tout cela était la propriété du corps c o m m u n des
liabitans.
'
«•Quant a u x c o m m u n a u x , terres hermes et vacans,
« dit Basmaison , les seigneurs justiciers prétendent
« q u ’ils leur appartiennent à cause de leurs justices;
« mais la C o u t u m e , conform e au droit c o m m u n , les
cc attribue à l ’université des corps des liabitans qui ré « sident en m êm e justice au bas pa ys, ou en m êm e
«• village au haut pays , sans que le seigneur ait aucun
« avantage ni préférence à ses sujets, que d ’en jouir
«• com m e l'un d ’eux».
C e vieux principe, corroboré par les lois nouvelles,
était le droit com mun de la France dans les pays m ê m e
où le texte de la loi donnait formellement les terres
lie rmes au seigneur justicier.
A u r o u x , sur l'article
3 3 1 de la C o u tu m e du Bour
bonnais, dit : ffLes terres hermes et vacantes appar«■tiennent au seigneur, suivant notre article; mais il ne
«■faut pas confondre sous ce nom les comm unes ou
v com m un aux qui appartiennent aux liabitans d’un vil« lage ou d ’une paroisse, com m e il est dit dans l ’an« cienne C ou lum e( titr e 8, art. i . er : — Et n e s o n t r é p u « tés, dit cet art ic le, terres hermes Les p â tu ra u x dont
tr aucunes villes > villages ou comtés Jo u issen t et ont
�( 6i )
* j o u i pour leur aisance ou de leur bétail, tant et si
r longuement qu il nest mémoire du contraire , sans pré« judioe des droits seigneuriaux ou autres)».
«Ces c o m m u n a u x , continue A u r o u x , ou pâturages
« com m uns , sont pâturages ou terres non cultivés,
« charmes 5 etc.1, appartenant en commun auxl iab it ans
» d ’ un bourg ou village dans lesquels les habitans des
« lieux peuvent indifféremment, en tout tem s } m ener
« paître leurs bestiaux, com m e il est porté en l'article
5 du titre 10 d e l à C o u tu m e du B e r r y , et en Carticle 3 du titre 28 de la Coutume d ’Auvergne».
« i
L a m êm e chose était enseignée par le président
D u r e t sur cet article
3 3 1 ; A liter quandb habitantes
communiter u tu n tu r .,. JSihil enim impedit quominus
municipes fu n d u m communem possideant.
Cette définition dés pâturages com m uns , que la
jouissance immémoriale des habitaos répute commu
n a u x y est ici d’autant plus pr éc ie us e, q u ’elle vient
d ’ une C ou tu m e ayant des principes plus féodaux que
les nôtres : les deux s a v a n s magistrats, qui ont écrit
sur cette Coutu m e voisine, viennent donc à l’appui
de ce q u ’a dit Basmaison sur la nôtre.
Q u ’importe après cela si le texte de ces deu x Cou
tumes n’est pas aussi clair qu’il pouvait l ’être. L a féo
dalité avait aussi ses prétentions; et si elle ne maîtri
sait pas la l o i , peut-être en avait-elle dirigé la rédaction.
On voit q u ’en Bourbonnais , l’article le plus clair et
le plus décisif avait été oublié lors de la inform ati on,
'q u oiq u’aucun autre article ne l ’abrogeat ; et d ’ailleurs
�(
6
2
)
rien ne pouvait être abrogé dans la rédaction d'une
Coutume.
I/arrêt de 16 41 , rédigé dans les mêmes termes que
la Coutu m e d ’A u v e r g n e , doit donc avoir le m êm e
sens; et certes il est bien plus clair lorsqu’il donne La
saisine aux habilans de V i e , et réduit le propriétaire
de Chadieu au pacage, sans fraude.
Si le mot de propriété n ’ e s t pas dans cet arrêt, c ’est
parce qu’ il n’était pas dans la loi, parce que les pré
tentions des seigneurs y étaient 1111 obstacle : le droit
de triage semblait exiger des précautions; on y aurait
dérogé si la propriété eût été nominativement déférée
aux com m un es, sans ménagement ou modification.
Mais ce ménagement n ’était relatif qu’à l’intérêt
d’entre les vassaux et leur seigneur; aucun autre ne
peut venir se placer entre eux pour en profiler. Ici
le droit du sieur N atey est m a r q u é , c ’est lé simple
pacage. Hors de-là , il n’a p l u s r i e n d a n s l ’arrêt , que
Je relail des a r b r e s , qui lui restait encore à disputer
au seigneur de Lac baux.
Cependant , le sieur N a t e y assure que
cet arrêt
ne juge rien sur le fond du droit ; il atteste m êm e
que les liabilans de Vie ne réclamaient q u ’au pacage
une servitude, q u ’ils reconnaissaient le sieur de Beaufort co m m e propriétaire. Il est é v i d e n t qu'il a rêvé
tout cela , puisqu’il n ’y a pas un seul mol , un seul
mol de celle objection qui 11e soit une fausse allégation
de sa part.
L e s habilans de Vie plaidaient si bien en 1 6 ^ 1 ,
�( 63 )
pour avoir Les G â ch iers, qu'ils étaient appelans d’une
sentence qui les attribuait au sieur de Beaufort dans
les mêmes termes em ploy és par les habitans, pour les
avoir au m ê m e titre, saisine et possession.
Si donc ces mots voulaient dire la propriété, quand
le sieur de Beaufort les employait , ils voulaient dire
aussi la propriété vis-à-vis les habitans.
C ette dissection de mots a pu paraître importante
au sieur N a t e y , parce que c'élait sa seule ressource,
mais aucune personne de bonne foi ne s’y trompera :
le sieur de T a n e ne s y trompa pas , lorsque n’ayant
pu surprendre un arrêt contre les habitans de Vie., en
1 7 6 8 , et arrêté par leur rigoureuse défense , il se borna
à solliciter le duc de Bouillon d'intervenir pour r é
clamer lu i- m ê m e les G âch ie rs , à cause de sa haute
justice. (1)
(1) L e sieur Natey s’est plaint de ce que ce fait avait éié cité par le
maire de V i e , sans être justifié. Certes, le rapport fait au conseil d’ un
grand seigneur n’est pas une pièce de procès. L e sieur Natey est libre de
croire ou de douter, ou au moins d’attester qu’il ne croit pas. Ce rapport
n’ est pas donné comme un titre; il est .seulement un exposé de l’ état de
l’afFdiie, en 1774» et de l’opinion du rapporteur. L e maire de V i e , qui
l ’a trouvé dans les archives de sa co mmu n e, y a puisé les principaux
renseiguemens de cette longue affaire, où la mobilité des hommes et des
évéuemens a fait perdre tant de titres essentiels. Cette pièce est donc pré
cieuse pour lui ; car le sieur Natey 11e dit pas un mot auquel elle ne ré
ponde. On en jugera par les réflexions du rapporteur sur le résultat des
titres respectifs, et notamment de l’arrêt de 1641....... On va les transcrire.
« Quel intérêt, Messieurs, croyez-vous que S. A . puisse avoir dans une
contestation où il s’agit de la propriété de pacages, q u i , d ’ a p r è s la tran
saction de i 5 i i , passée entre les habitans de Vic-le-Comte et le seigneur
�\
( 64 )
M a i s , dit le sieur N a t e y , il restait encore une pro
priété ¿1 juger en 1641. L ’arrêt n ’y statue pas.
C e l t e propriété était celle des arbres et de leur retail,
et rien n ’explique mieux la concession faite par la
comtesse d’A u v e r g n e , m oyen n an t
3 fr. d ’or : elle
avait cédé , c o m m e seigneur justicier', tout ce qui p o u
vait être à elle dans les G â c h i e r s , i.° lés arbres , car les
4_____ jt.---- —— ------------------------ --------------------- — ___
de Chadieu , et tin contrat de vente de la terre de C h a d i e u , de 1 627 ,
paraît avoir été j u g é e , en faveur des habitaiis de V i c - l e * C o m t e , par l’arrêt
de 1641............
a II était question , lors de cet arrêt, de l’appel de la sénéchaussée de
Ri om , qui avait déclaré la dame ve uv e de Be a u f o rt , dame de Chadieu
et, de Chalus, propriétaire des grand et petit Gâchiers...............
« L a dame veuve de Beaufort avait pris des lettres de rescision contre
les clauses apposées dans le contrat de 1627, mais l’arrêt de 1641 , saris
s'arrêter à, ces lettres de rescision , a infirmé la sentence de la s é n é
chaussée de R i o m , et les tenues d’assises faites par les officiers............
« V o u s v o y e z , Mes si eur s, que cet arrêt
clauses de la transaction de
i
5i
i
est absolument conf orme aux
, et qu’il en est mê me la confirmation.
« Si la dame veuve Beaufort eût été propriétaire des grand et petit
Gâchiers , l’arrêt n’eût pas infirmé les sentences de tenues d’assises faites
par ses officiers, et il n’aurait pas prononcé, comme il l’a Fait
la confir
mation de celles du bailli de Vic-l e-Comte.
« S i , au contrai re, les habitans de Vic-le-Comte n’ en eussent pas été
propriétaires, cet arrêt 11e les aurait pas maintenus dans le droit de jus
tice sur les grand et petit Gâ ch i e r s; en leur donnant la justice, il les a
jugés propriétaires, puisqu’aux termes de la Coutume d’ Au ver gne , les par
cages appartiennent aux justices dai.s lesquelles ils sont situés.
« Ant ér i eure me nt , et en 1750, M. de Ta ne était dans l’intime persua
sion qu’il
n’avait rien à prétendre dans les grand et petit Gâchieis. E n
effet, je vois par une correspondance
suivie
entre lui et les gens d’affaiie
de M. le duc de Boui l lon, qui s’est trouvée aux archives de S. A . , qu’ il
sollicitait ses gens d’a(faire pour s’e m p i r e r , au nom de feu M. le duc do
Bouillon , du Gâchiet et de la vergière que la commune de Vic-lt-C.oii»,c
détail appropriés comme communal.
seigneurs
�(
65
)
seigneurs se sont arrogé le droi t de se dire proprié
taires y j u s q a à la révolution , dès arbres plantés dans les
co m m u n au x et places publiques de.leur ju slice , 2.0 le
droit de pacage, car elle Pavait c o m m e tout autre de ses
sujets, ainsi que le dit Basmaison. A la vérité ce droit
n ’était pas cessible, mais madame de B e r r y , qui n’ usait
pas de ce pacage , crut pouvoir le vendre.
*
« J e vois aussi par des écritures signifiées le 14 mars 1753, que feu M .
le duc de Bouillon a formé contre les hafcitans de Vic-le-Comte , aux re
quêtes du palais en la seconde c h a m b r e , par commission et exploit des 29
j an vi e r , i 3 septembre 1 7 5 2 , et par une requête du 10 janvier 1753, une
demande à ce qu’ ils fusseut condamnés à venir à partage et division , avec
M. le duc de Bouillon , des communaux de Vi c- le- Co mt e , appelés les grand
et petit Gâcliîers, pour en être délaissé un tiers à M. le duc de Bouillon ,
à son c h o i x , séparé des deux autres tiers.
« Cette demande formée par feu M. le duc de Bouil l on, en 175 2, contre
les habitans de Vi c- le- Co mt e, prouve évidemment que M. de Ta ne ne
jouissait alors jd’aucun droit sur les grand et petit G â c h i e r s , et que les ha
bitans de Vic-le-Comte en étaient seuls propriétaires ; il y a même lieu
de cr oi re , d’après les lettres de M. de T a n e , que ce n’a été quo sur ses
représentations, et à sa sollicitation, que le conseil du feu prince s’est dé
terminé à la former.
« Ce
qui peut avoir donné quelques années après à M. de Tdne des
idées de propriété sur les Gâchiers dont il s’agit, c’est sans doute la dé
couverte qu’il a faite d’un extrait du reçu des cens dus à la seigneurie de
V i c- le - Co ml e , des années 1644, 1645, jusques çt compris 1649, affirmé
le
5 mai i 651.
*
' Cet extrait porte :
« Madame de Beaufort, à cause de sa terre, fol.
565 , art. 2 , poUr ]e
« Gâ cl uer, 2 fr. d’or.
« Plus
565 , art. i . e r , à cause de C h a lu s , et pour le Gâcl ii er, 20 s. d’or.
En maige de cet a r t . , il y a : le fermier a refusé f ep y a procès à
Hiorn, etc ».
17
�y 66)
L e s habîfans de Vie , accoutumés par les usages f é o
daux à ne rien prétendre aux arbres, furent exclus de
cette contestation qui resta indécise entre le sieur de
Beaufort et le sieur de Châteaubriant. Quant à e u x ,
leur procès fut fini, la saisine des Gâchiers, accordée par
les premiers juges au sieur de B e a u f o r t , fut donnée
à eux ; tous les actes d ’usurpation de propriété du sieur
de B eau fort fu ren t annuités, les habitans de V i e obtin
rent leurs dépens. Ainsi il ne resta rien à juger à leur
égard.
Voilà donc un titre f o r m e l , un arrêt de cour sou
veraine , qui fait à jamais la loi des p a r t i e s , et qui ne
permet pas de revenir aux débats qui y furent agités,
sans un renversement dangereux de tout ce qui doit
tranquil i«er la société.
Il n’est plus temsde montrer des actes antérieurs à 164 1 ,
et de s’efforcer à en tirer des inductions fausses ou hasardées. Si ces actes ont été produits, ils sont jugés; s’ils ne
l o n i pas é l é , ils n’existaient pas alors, ou ils élaient sans
application. Ce qui pouvait êlre censuré et vérifié à
c e tte .é p o q u e ne peut plus l’être aujourd’h u i ; et une
croyance aveu gle ne
doit pas naître de la difficulté
d'asseoir ses doutes.
Allons m êm e plusmloin , et disons que si l’arrêt de
164 1 n ’avait pas tout j u g é , c o m m e il est au moins
certain que les parties avaient produit to.us leurs titres
en 1641 i co m m e aucun autre titre n’a été produit dans
le procès de 1 7 6 8 , la cause devrait être jugée avec
les m e mes titres; parce q u ’il n ’est pas naturel de m o n-
�( 67 )
trer pour la première fois au bout de
3 oo ans des actes
que Ton dit êlre sincères et aut he nti q ues, quand il
n’est plus possible de les vérifier , et quand ceux de
qui ils émanèrent n'en ont fait aucun usage.A u reste, et on doit le dire ave c instance, le seul
tifrede i 6 2 7 e x p l i q u e tout, rend tout autre titre inutile;
et c o m m e cet acte.reste en vigueu r par le rejet des
lettres de rescision, le procès ne pourrait être jugé
aujourd’hui que dans le sens de ce titre. L e proprié
taire de Cliadieu
serait toujours
réduit
au
simple
pacage.
• Après cela , faut-il venir aux prétendus titres du
sieur Nate}r, postérieurs à 1641 ? D e bonne foi, la pro
cédure en séquestre faite contre lui, se tournera-t-elle
en sa faveur pour lui faire un titre? U n écrit de M. de
Bouill on, destiné à être triple, et ne l ’étant pas, m an
quant de la signature des consuls de Vie., peut-il êlre
obligatoire contr’e u x ? M. de Bouillon qui 11e s’occupait
que du procès alors existant, et non de la propriété des
G û c h i e r s , qui avait quant à lui le soin de réserver la
justice,
la seule chose qui l’intéressiit , a - t - i l . p u ,
a-t-il même entendu faire départir les habilans de Vie
d ’ une propriété dont il ne s’agissait pas ?
Il y aurait de la honte à le croire , et h supposer
cela pût êlre cru ; ainsi il serait oiseux d ’ajouter
que
d’au 1res
réllexions à ce qui est si évident.
* Le s a veu x et dénombrernens de Cli adieu , au milieu
du vague qui se Trouve dans to u s, et des insidieuses
expressions qui 01H été placées dans quelques u n s ,
18
�( 68 )
ne méritent pas une grande attention. Ignorés des ha-'
bilans
de V i e , publiés dans des paroisses étrangères
à e u x , ces actes leur ont été égalem en t é t ra n g e rs, et
ce serait .choquer les moindres principes que de les re
garder c o m m e le simulacre m ê m e d ’un titre à l'égard
des habilans de Vi e. O n ne perd point une propriété
sans son c o n s e n t e m e n t ,o u sans une décision judiciaire.
M a i s , ce qui écarte toutes ces nouvelles découvertes
du sieur N a t e y c ’est la possession constante des habitans de Vie. C a r , que leur importait toutes ces petites
hostilités craintives et tortueuses, tant qu'ils n’ étaient
pas troublés dans la saisine qui leur était donnée par
leur litres, et confirmée par un arrêt souverain.
Ils furent troublés, dit le sieur N a t e y , par des défricliemens, à deux époques. Cela est v r a i , mais on a
v u ce qui en arriva; des coupes d ’arbres, des rixes, des
procès c r i m i n e l s . Quand leur seigneur change a, leurs
forces ne furent plus é g a l e s , ils souffrirent , mais ils
parvinrent à faire ôter au sieur de B eau fo rt, par un
séquestre, ce q u ’ils n ’étaient pas assez forts pour ôter
eux -m êm es . Bientôt les choses furent rétablies au point
où elles en étaient avant ce trouble, les habilans de
V ie furent remis en possession et saisine ; ils conti
nuèrent de tenir les Gâchiers en défenses , et le sieur
de Beaufort ne s’avisa plus de défricher.
Si les siens le tentèrent quelq uefois , une multitude
de pièces prouvent q u ’ ils furent réprimés; et il résulte
de celte longue possession que TantÎl de 1641 a to u
jours été exécuté. 11 résulte m ê m e des lenlatives des
�( 69 )
sienrs de Beaufort et de' T a n e , un droit plus fort et
m ie u x établi, en faveur des Yi&biians', possessio post contradictionem .
C ’est dans cet état de possession que la révolution
les a trouvés, et les lois de cette époq ue ont si bien
expliqué la C o u tu m e d ’A ü v e r g n e dans le sens de Basmaison j q u ’il n ’est plus possible de se faire un doute
raisonnable s u r la propriété des habitans ’de Vie.
L ’art. 2,, section 4 , de la loi du 10 juin 179 3 porte
que les biens c o m m u n a u x connus sous Le nom de terres
v a in es, vagues, p a ca g es, etc., app artiennent, de Leur
n a tu re, a u x habitans des comm unes dans le terriloire
desquels ils sont situés. C el te loi est toujours en vigueur,
c o m m e le prouvent plusieurs décrets impériaux.
L e sieur N a t e y , qui trouve des moyens contre les
arrêts et contre les lois, en trouve deux contre l ’appli
cation de cet article. Il dit que les Gâchiers ne sont pas
dans la co m m u n e de V i e , et que les liabilans de V ie
n ’ ont jamais dit que les Gâchiers fussent leurs c o m m u
n a u x , q u ’ainsi il faut q u ’ils prouvent par titres que ce
sont‘des com m un au x. On ne prend pas m ieux une loi'
a la lettre.
A v a n t 1 7 9 0 , les territoires se distinguaient par jus
tice en L i m a g n e , el co m m e il n’y a plus eu de jus
tice en 1 7 9 1 , il ne fallait pas espérer de trouver dans
une loi de 1 79 3 l’ancienne circonspection établie par
la Coutu me d ’ Auvergne. Mais la loi nouvelle n ’avait pas
d ’ellet rétroactif pour changer l’ordre établi jusqu’alors.
l i e commentaire naturel de cet art. 4 , se trouve
dans les art. 8 et 9 de la loi du 28 août 1792.
�( 7° )
«■Art. 8. Le s communes qui justifieront avoirancien-,
nement possédé des biens dont elles auraient été d é
possédées en tout ou partie par des ci-deva n tseign eu rs,
pourront se faire réintégrer dans la propriété et pos
session...., nonobstant tous arrêts, jugemens et pos
sessions contraires, à moins que les seigneurs ne re
présentent un acte authentique, qui constate q u ’ils ont
l é g iti m em e n t acheté lesdits biens.
Art. g. L es terres vaines et va gu es, landes, dont
les communes ne pourraient pas justifier avoir été en
possession, sont censés Leur appartenir, et Leur seront
adjugées ? si elles forment leur action dans le délai de
5 ans, à moins que les seigneurs ne prouvent par
titres ou par possession ex clu siv e, continuée paisible
ment et sans trouble pour 40 ans, qu’ils en ont la
\
propriété
'
Cette dernière disposition a été réformée par la loi
de 1 7 9 2 , qui veut un titre d’acquisition , et proscrit
toute possession5 mais les habitans de Vie n’ont pas
besoin de s’en prévaloir.
Ils n’ont, pas eu besoin non plus de former une
demande en réintégration de p ropri été , car ils étaient
en possession ; ils le sont encore. Ils payent seuls la con
tribution foncière, depuis 1 7 9 0 ; et s’ils ne l’ont pas
p a y é e plutôt , pour prévenir les sarcasmes du sieur
N a t e y , qui joue sur cette d a te , c ’est par une raison
q u ’on le prie de trouver
bonne : ces terrains
ne
payaient pas de contribution foncière avant 1790.
A u c u n e c o m m u n e voisine 11e dispute ce c o m m u n a l
aux habitans de Vie 3 c’ est le sieur JNaley seul "qui ne
�( 71 )
peut défendre pour autrui,, et qui défendrait tout aussi
infructueusement autrui que l u i- m ê m e ; car la loi ac
tuelle ne donne pas les c o m m u n a u x , elle les conserve
aux communes quand elles possèdent, ou leur rend
ceux q u ’elles ont possédés anciennement.
Si les habitans de Vi e n ’ont pas donné le nom de
com m unal aux Gâchiers * dans les anciens procès, ils
ont parlé le langage du te ms , celui de la loi; et ce qu’ils
disaient et voulaient, signifiait la m ê m e chose. On a
déjà donné cette explication.
. Vouloir des titres pour assurer des com m un aux à
une commune , c’est se mettre en opposition avec la
Coutu me d ' A u v e r g n e , avec les auteurs cités, et avec
les lois anciennes et nouvelles.
D o m in iu m cœpit à possessions, et il le faut b i e n ,
quand la propriété est im m é m o r ia l e , ou de droit public;
L a présomption seule suffit pour indiquer le m a î t r e ,
quand il s'agit de pâturages sur lesquels aucun indi
vidu n ’a un titre de propriété , pascua prœ sum untur
esse universitatis. T o u t cela est mot pour mot ce qu'ont
dit en d’autres t e r m e s , Basmaison, A u r o u x , etc. ; c’est
ce que supposent l’ordonnance de Blois , l’édit des
c o m m u n e s, les lois de 1792 et 1793. Les pâturages
c o m m u n s , les terres h e r m e s , appartiennent de Leur
nature aux hab itans, et sont présumés de droit être
des communaux.
On ne se rappelle aucune autre objection du sieur
N atey , et c ’est déjà lui avoir répondu trop longue
ment. Ma is, comment s’en dispenser , lorsque dans tous
�( 72 )
ses écrits il chante victoire à la moindre argutie restée
sans réponse. C ’était à lui à tout p r o u v e r , et il veut
que les habitans de Vie prouvent tout. L e seul m o y e n
dont ils eusent besoin é t a i t , possideo quia possideo , ils
y ajoutent des titres, un arrêt souverain et des actes
multipliés de prohibition.
Ordinairement pour gagner les causes il faut b e a u
coup moins de titres et de moyens. Mais les habitans
de V i c sont accoutumés depuis deux siècles à ne vaincre
que pour replaider encore. En 1 5 1 1 tout était fini ;
on recommença en 1637. T o u t fut terminé encore
v.
en 1641 , et cependant le procès a été renouvelé en
1768. E n f in , un jugement de 1807 a statué sur le
possessoire en dernier ressort , et
le sieur N a t e y la
renouvelle indirectement par des incidens de qualités.
I l a mêm e trouvé le secret d’en paralyser l ’exécution.
l es habitans de V i c ont eu jusqu’ici la patience du plus
faible : mais ils oseront se flatter que les lois seront e x é
cutées pour e u x ; et qu’ave c des transactions, des arrêts
et des lois positives, ils verront la fin d'une tracasserie
dont le but le plus réel, et le mieux étudié , a été de les
forcer, par dégoût ou lassitude, h sacrifier le droit le
le plus évident.
M . e D E L A P C H I E R , avocat.
M . e D E V E Z E , avoué-Licencié.
A
R I O M , de l ’im p rim e rie de la C o u r im périale et du B a rrea u ,
ch ez J . - C . S A L L E S .
�
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Title
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Le maire et les Habitants de Vic-le-Comte. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
rivières
Description
An account of the resource
Mémoire pour le maire et les Habitants de Vic-le-Comte, intimés ; contre Etienne Natey, habitant à Nyon en Helvétie, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1511-Circa An 12
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
72 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0424
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53808/BCU_Factums_M0424.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-le-Comte (63457)
Authezat (63021)
Nyon (Suisse)
Les Gachiers (terrain de)
La Vergière (terrain de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communaux
pacage
rivières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53807/BCU_Factums_M0423.pdf
7887ef65a97d1c066524297e3798aa67
PDF Text
Text
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41
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j r .
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�COUR
r
MEMOIRE
EN
IMPÉRIALE
RÉPONSE?
POUR
Sieur J oseph DE L A ROCH E-LAM BERT,
habitant à Issoire, intimé et appelant ;
C O N T R E
Dame F r a n c o i s e - A g l a é - G A b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G O U R D O N , son m ari; dame
A n g é liq u e - A r m a n d e - C a m ille D E LA
L U Z E R N E et sieur A n a t h o c l e - M a x i m ilien H U RAU LT D E
V I B R A Y E , son
mari, habitans de la ville de P a r is , héritiers
bénéficiaires de madame d e M o w t m o r i n , laquelle
étoit héritière bénéficiaire du sieur EmmanuëlFrédéric de T a n e , son frère, appelans ;
CONT RE
Sieur HENRI D U V E R G I E R , habitant a P a ris;
S i m o n T E R O U L D E yhabitant à Daudeville;
P i e r r e - L o u is L A I S N E , ancien sellier à
Paris habitant à Sens; A n t o i n e - L o u is
A
DE RIOM.
CH A M BR Ï.
�( a )
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; etJEÀN
C H A R D O N y chapelier y habitant a P a ris,
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,,
aussi appelans,
C ON TR E
Sieur
A
D E TANE - SA N T E N A S,
habitant à Paris y intimé ;
m é d é e
ET
C O N T R E
Sieur L o u i s N A T T H E Y , habitant de Nyon en
Suisse y aussi intimé.
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la p lu s grande s im p lic ité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’une te r r e , chargé d’en payer
S a n s
le p rix à un notaire choisi par une direction de créan
c ie r s , lui en paye près de m oitié; ensuite il revend la
te rre, et laisse dans les mains du second acquéreur une
somme égale à ce q u 'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second acquéreur , p o u r s u iv i par les opposans, produit des quittances de consignation, assigne
les créanciers en m ainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces c r é a n c ie i’s attaquent le prem ier acqué
r e u r, qui met en cause son garant : c e lu i-c i emploie
�C3 )
pour libération le jugement qui a validé sa consignation.
A lo rs l’acquéreur observe aux créanciers qui le pou r
suivent , que leurs oppositions à des lettres de ratification
^ ont lie leurs interets à ceux du second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés , ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
V o ilà à quoi se réduit la question p rin cip ale, et il
est évident que jusqu’ici elle ne présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse : mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du vendeur
origin aire, qui com prennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers elle seroit pour euxmêmes , font cause commune avec e u x , pour que tout
retom be sur le prem ier acquéreur.
A lo rs tout s’exagère et se com plique. L ’émigration de
l ’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout : d'autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à m ille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas, et le
tribunal même où il a trouvé justice. E n fin , après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la m ultitude, mais plus
étrangers en core, on vient crier à l ’injustice et à l’indé
licatesse , en disant froidement : « Q ue m’im porte si vous
« devez recouvrer ou non
5ooooo francs que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas la vôtre ! Que
A 2
�(4 )
«
«
«
«
m’im porte encore si vous êtes ruiné par ce payem ent,,
et si votre famille est respectable. Je veux de l’argent,
et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose
moins en mesure de me résister; d’ailleurs votre émi-
« gration se prête à tous mes sophismes : il y a tant de
« lois, sur cette m atière,, qu’ il est im possible.de ne pas
« y voir que tout doit retomber sur vous. D ’ailleurs ,
« quand je me suis donné la licence d’im prim er qu’une
«• décision contraire à mon intérêt étoit un, jugement de
« f a v e u r , j’ai calculé l’effet de cette injure sur l’esprit
« des magistrats auxquels j’en demande la réform e. Si
« je ne puis les forcer à croire qu’il faut sacrifier un
ém igré par préférence, m on adroite censure sera tou«■jours d’un poids quelconque dans la balance ; elle
« achèvera probablem ent de-me conquérir le suffrage de
« ceux, dont l’opinion auroit été incertaine. »
A in si eût parlé M achiavel ; ainsi parlent les syndicsdes créanciers, de T an e , qui v e u le n t, p e r jh s et n e fa s ,
intéresser en se présentant comme des victimes.
Q u ’ils tâchent de prouver à la Cour, que m algré leursoppositions à des lettres, m algré un jugement qui pro
nonce contre eu x la validité du payement que le sieur
Natthey a été chargé-de leur faire, il leur reste encore une
action : voilà leur cause..
Mais que dans leur colère et dans leurs' calculs ils fassent
semblant de supposer de l’adresse, des insinuations et de
la faveur; que tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent à insinuer que cette ém igration deviendra aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des»créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s*être f a i t de ses propres J'a i! tes un m oyen
d?acquérir : voilà ce qui n’est ni la cause ni la. vérité r
mais une insigne et brutale calomnie;
Car personne ne sait m ieux que les adversaires qu’il
n?y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la R o ch e-L am b ert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en>
écus sur une terre qu7ils n’ont pas : et on ose encore leu r
demander plus de ôooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce:
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
f a i t s
;
A p rès la m ort du sieur Em m anuël-Frédéric de Tane>,
sa succession fut acceptée sous bénéfice d’inventaire par
Françoise-G -abrièlle de T a n e , épouse de M . de M o n tm orin , ministre des affaires étrangères.
Madame de M ontm orin ne pou voit vendre en cette
qualité les biens de la succession sans y appeler- les
créanciers ; elle fit apposer des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyi’e , Chadieu, la ChauxM ongros et le m obilier de la succession. Il y a eu pour
777400 francs de ventes avant 1790.
L a terre de Ghadieu fut vendue par madame de
M ontm orin aux sieur et dame de la R oche-Lam bert, par
acte du 17 juin 178 8 , moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a i s évalués à 5 deniers par liv re , produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000 fr. seroient
payés solidairement par les sieur et dame de la R ocheLam bert eiitre les m ains de Trutat¿ notaire-séquestre,
�(6)
ou a u x créanciers q u i auront été délégués; savoir, un
quart au i 5 septem bre, et le surplus dans le courant
des deux années, en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et q u e , s’il se trouve des oppositions du ch ef
de madame de M on tm orin , elle les fera lever dans les
six semaines ; mais hors ce c a s, elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de T an e de Santenas, T ero u ld e, commissaire à terrier;
C hardon, chapelier; L ouis L a isn é , sellier, et T o u ta in ,
tailleur d’h ab its, tous syndics des créanciers de T a n e ,
lesq u els, après avoir pris lecture de la ven te, la con
firm ent et ratifient a u x conditions y exprim ées. Ils font
élection de dom icile chez M- P ern ot-D u plessis, procu^
reur au parlement.
L e jour même de la’ v en te, M . de la R oche-Lam bert
paya la somme particulière de 7812 liv. 10 s ., à T ru ta t,
n otaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
E n 1 7 9 1 , les sieur et dame de la R o ch e -L a m b e rt,
voyageant en A lle m a g n e , envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur b e a u -frè r e , deux procurations; celle du
sieur de la R oche-L am bert porte pou voir d'em prunter
les sommes nécessaires à ses a ffa ires, g érer, liq u id er,
vendre : elle est passée devant H eidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 1791.
• L a procuration de la dame de la R oche-Lam bert porte
pou voir & em prunter 60000f t \ pour placer sur C ha d ieu ,
�(7 )
régler compte açec M . T r u t a t , notaire j recevoir ,
donner q u itta n ce, fa ire tous emprunts qiùil jugera bon
être, pour Varrangement des affaires de son m a ri. Cette
seconde procuration est passée devant L u tn e r, notaire à
W o r m s , le 20 octobre 1 7 9 1 ( 1 ) .
E n vertu de ces actes, le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
L e 27 novem bre 1791 , par acte reçu C a b a l, notaire
à-Paris , le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la R o c h e -L a m b e rt, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n ’avoit pas de pou voir de la dame de la R oche-Lam bert ) ,
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
P a ris, moyennant ôooooo f r . , dont il reçut i2Ôooo fiv
en assignats, et quant aux 376000 fr. r le sieur Sauzay
prom it les payer dans un an a u x sieur et dame de la
R oche-Lam be? t , o u y si bon lu i sem blait, a u x créanciers
desdits sieur et dame de la R o c h e - L a m b e r t , et spé
cialem ent a u x créanciers privilégiés sur ladite terre..
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la R o ch e-L am b ert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux im putations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dam e de la Roche-Lam bert quittoient la F rance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur prem ière pensée a été de s’o ccu p er
de leurs c ré a n c ie rs, et que tel a été l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�s’ oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
E n fin , pour l ’exécution de ladite clause, le sieur de SaintP on ey fait une élection de dom icile à Paris.
L e 4 janvier 17 9 2 , il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellem ent ; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics.
L e 22 avril 179 2 , le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’u n e , du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
•Tane.
Dans la même année 17 9 2 , le sieur de la R oche-L am bert fut porté sur la liste des émigrés.
L a dame de la R oche-Lam bert n’a jamais été portée
sur aucune liste.
Sous prétexte d’une loi du 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens des absens du te rrito ire, sans les
désigner encore comme émigrés , le sieur Sauzay fit
déclarer par le curé d’A u tezat, à la m unicipalité du lieu ,
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la R oche - Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il a voit pris des lettres de ratification, et que
les créanciers opposans aux lettres absorberont le p r ix
et au delà : d’où il conclut qu’il a intérêt de conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre -est h y po t h é q u é e . « E n sorte q u e , dit le sieur
a Sauzay, s 'il[fa itfa ir e ladite déclaration, c’est m oins
« à
�(9 )
«
«
«
«
«
«
«
à cause des sommes dont il peut paroître débiteur, et
dont la république ne pourra ja m a is profiter, puisq u elles doivent être absorbées pa r les dits créanciers
hypothécaires opposans a u x lettres de ra tifica tio n ,
que pour donner des preuves de son civ ism e, et empêcher qiüon ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence. »
Par acte du 25 juillet 17 9 3 , le sieur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux M artres, les m ou
lins et fours banaux des M artres, dépendans de la terre
de Chadieu , moyennant la somme de 61100 francs,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
L e 7 nivôse an 2, par acte reçu Gabal, notaire à P aris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Chadieu
au sieur W a llie r , Suisse, pour lui ou la personne que
W a llie r se réserva de déclarer dans les six m ois, m oyen
nant 530000 fr. dont W a llie r paya comptant 40000 f r . ,
s’obligea de payer 135000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des
355ooo fr. restans, W a llie r
fut délégué à les payer, so it a u x créanciers de T a n e ,
précédent propriétaire, q u i se sont trouvés o p p o s a n s
A U X L E T T R E S D E R A T I F I C A T I O N PR ISES P A R S A U Z A Y ,
soit afin d'en f a i r e le dépôt et la consignation partout
où besoin se ra , aussitôt après le sceau sans opposition
su r le sieur S a u za y des lettres de ratification à prendre
sur la présente vente.
L e sieur Na tthey dit avoir été subrogé par le sieur W a llie r
à ladite vente, par acte sous seing p rivé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-D ôm e
fit décerner, le 24 ventôse au 2 , une contrainte contre
B
�( ï° )
le sieur S a u za y > pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche - Lambert eu vertu du contrat de
vente de 179 1, sous prétexta que le vendeur étoit ém igré.
E nsuite, et à la date du 26 floréal un 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
3
cc Je soussigné, receveu r de l’enregistrem ent et des domaines
« au bureau 'de S ain t-A m a n t-T a llen d e, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G . E tienne-Jean-Louis N a t t h e y , de N y o n ,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
,
te suivant la déclaration de com m and en sa faveur par le
■« C. W a llie r , du 7 nivôse d e r n ie r ) , la somme de trois cen t
ce cinquante - cinq m ille livres,, pour servir itant au .nom des
a cit. N atth ey et S a u z a y , qu’en ce lu i du C. Jean-JBaptiste
cc W a llie r , à la libération de Chadieu.
cc D e quoi m ’a été dem andée la présente déclaration , à l’e ffet
cc d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale sur ledit
cc Chadieu.
ce Saint-A m ant, le 26 floréal an 2. Sig n é M a u g u è . »
Il
p a v o ît q u ’ un a r r ê té du d é p a r t e m e n t , e n l’an 3 ,
annülla la ^vente fa ite au sieur Sauzay, et mit la terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et W a llie r, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay , et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que le sieur W a llie r avoit voulu 3e
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�( 11 )
il fit des offres à W a llie r , et même une consignation en
mandats. Mais les lois sur la réduction du papier-monnoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de la Seine sus
pendit le p ro cè s, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de T an e produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frim aire an
4j
reçu du C . J e a n -M a r ie T 'V a llier,
cc des deniers empruntés de J a q u e ro t, par acte d u ............. la
« somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix .du domaine
« acquis par S a u za y , des sieur et dame de la R oche-Lam bert,
ce ém igrés , suivant le contrat du 27 novem bre 1791 ; ladite
« somme de 355ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
cc nationale sur le receveur du district de C lerm o n t, n°. 424, en
ce date du i 5 brum aire dernier ; dont quittance. S ig n é M a u g u e . «
/
Les créanciers ont retiré du même registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an
a de 32851 francs
25
4 »reçu
de Jean-Louis N atbhey la somme
centim es pour les intérêts restans du prix
cc
principal du domaine de C h ad ieu , acquis de la R o ch e L a m -
cc
b e rt, sa fem m e et Saint-Poney, ém igrés, par le sieur Antoine
S au zay, lequel en a fait vente au C. W a llie r , par acte reçu
C a b a l, notaire à P a ris, le 7 nivôse an 2 , lequel W a llie r a
passé déclaration au profit dudit N a tth e y , par acte sous seing
p r iv é , du 7 nivôse an 2 , enregistré à Paris le 17 messidor
cc
cc
cc
ce
an 3 , par P in au lt; ledit payem ent fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lia s , directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrem ent à Paris , le
cc 12 frim aire présent m ois; et ledit payem ent effectu é en une
cc rescription de la trésorerie nationale sur les domaines d’ém i« g rés, n°. 493 ? e t sous la date dudit jour 12 du présent mois.
cc
« Certifié c o n fo rm e , le 8 vendém iaire an 11. Sig n é
M
B 2
augue
.
»
�( 12 )
L e iei\ nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de T a n e , aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite qualité de
créanciers opposans a u x lettres de ratification prises
par Sauzay, de se trouver le i 5 pluviôse suivant .chez
le receveur de Saint-Am ant, pour y recevoir le p rix de
C hadieu. Il est constaté par cet exploit (resté au pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que Natthey y procède
c o m m e obligé d?a c q u it t e r 376000 fra n cs en ca p ita ly et
3 2 8 5 2 / h en intérêts , tant pour se libérer lui-m êm e 9
que pour libérer le sieur S a u z a y , a in si que les sieur et
dame de la R o ch e -L a m b e rt? premiers acquéreurs j et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers ne se présentèrent p a s; et le sieur
Natthey fit dresser, le i5 pluviôse an 4 , par le receveur
de S ain t-A m an t, la pièce suivante produite par lui.
«
cc
«
cc
« Je soussigné, receveur de l’enregistrem ent et des domaines
au bureau de Saint-Am ant-Tallende, d éclare, d’après le débat
des com ptes qui a eu lieu cejourd’hui entre moi et le cit.
Parades, des Martres , fondé de p o u v o ir d u C. E tie n n e -J e a n L o u is N a tth e y , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc
tc
cc
cc
cc
te
«
cc
cc
nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Chad ieu , la somme de s ix cent d ix - n e u f m ille s ix cent quatre c
là >res quinze sous en l ’acquit d u d it d o m a in e, 'dont quittance
et d éch arge, sauf audit Parades, qui en fait expresse réserve
pour ledit C. N atth ey , de plus ample e x a m e n et apuratiou
desdits com ptes , et de se pourvoir d e v a n t q u i il appartiendra ,
pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
sus des sommes dues p ar led it C. N a tth ey pour la libération
dudit dom aine de Chadieu.
cc Saiut-Am ant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4«Signé M a u g u e . »
�'
( I3 )
En marge est écrit :
« Sur 1 invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. nivôse der« n ier, n a com paru cejourd ’hui en m on bureau.
« L e i 5 pluviôse an 4 * Sign é M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers de Tane n’ont form é aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la Roche-Lam bert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulte, du 3 floréal an 10 , et
c’est le moment d’être attentif sur leur prem ière d é
m arche, pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 179.1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
S a u z a y , sur sa vente du 27 novem bre 179 1.
P ar exploit du 11 brumaire an 11 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauza y au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la vente de 1788 ; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente ci lu i consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit p a ye m e n t. (C ette pièce est produite par le
sieur Natthey. )
L e 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
h Natthey.
A lors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal d e Clerm ont, pour voir dire qn’ il est valablement libère au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés ù lui
donner m ainlevée de leurs oppositions.
�C »4 )
le
«
«
«
«
«
«
«
L e 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clerm ont rend
jugement suivant :
« L e tribunal déclare le demandeur (N atthey) bien et
valablement libéré du p rix de la terre de Chadieu l
en conséquence , fait m ainlevée de l’opposition faite
par les défendeurs (les syndics) au bureau des h yp othèques de C lerm ont, le 2 décem bre; ordonne qu’elle
sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
présent jugem ent; condamné les créanciers aux dom mages-intérêts de N atthey, à donner par déclaration. »
E li vertu de ce jugem ent, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu. Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
T o u t d’un co u p , en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire , A m bert et C ler
m ont, sur tous les biens appartenans ou ayan t appar
tenu a u x sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la R och e-L am b ert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur N atthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de p ro p o s, jusqu’à p résen t, de dire
que pour verser 170644 francs en 1791 , il avoit été
emprunté pour les sieur et dame de la R oche-Lam bert,
savoir, 44000 francs à la dame de B ourneville, m ère de
madame de la R o ch e-L am b ert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de T a n e - S a n t e n a s , représenté par Am édée.
�( x5 )
On a vu que le sieur de S t.-P on cy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T.ane, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
E t comme les syndics n’a voient inscrit que pour leur
in térêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la R och e-L am bert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
L e sieur N atthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
assigner les sieur et dame de la R oche-Lam bert en main
levée de ladite inscription.
L e lendem ain, Am édée de Tane (très-d’accord, comme
on le voit déjà., avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert de payer les arré
rages de l’em prunt ci-dessus de 30000 francs.
L e 23 du même m ois, il a été présenté requête au
tribunal de C lerm ont, sous le nom des sieur et dame de
la R o c h e - L a m b e r t ; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de T a n e , et à ce que le sieur Natthey, se disant
lib é r é , fût tenu de fa ir e valoir envers eux ladite libé
ration , sinon .de garantir les sieur et dame de la RocheLam bert. Ils ont co n clu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 9* ^ suivantes, et au désistement de
Chadieu. Enfin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à :1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
A m édée de Tane à la mainlevée du commandement de
�(
i6
)
payer par lu i fait, attendu que N atthey, chargé de payer
tout le m onde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a .eu lieu , les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce ju g em en t, le tribunal de Clerm ont distingue
les intérêts des créanciers de T a n e , d’avec ceux d’A m édée
de Tane. A l’égard des prem iers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
R och e-L am bert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur A m édée de T a n e , il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire T ru ta t,
comme obligation directe et indépendante de l’acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de la Roche-Lam bert de leur opposition au commande
ment de p a y e r (1).
I l y a appel de ce ju g e m e n t , tant p a r les héritiers et
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheL am bert, que par les sieur et dame de la Roche-Lam bert
contre Natthey et contre le sieur A m édée de Tane. O n a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert;
(1) C e jugem ent est transcrit en son en tie r, avec les m otifs,
à la fm du m ém oire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( *7 )
<l’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , q u i, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lam bert.
M O Y E N S .
P o u r suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour être
clair, autant que possible, dans une discussion dénaturée
et obscurcie par de fausses applications de prin cipes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
T a n e d’avec ceux des héritiers de M on tm orin , quoiqu’ils
aient réuni leurs intérêts, sérieusement ou non. O n exa
m inera, en prem ier lieu , s’il est vrai que les créanciers de
T a n e aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la R o ch e-L am b ert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la R o ch e-L am b ert.
20. Sur l’appel des héritiers de M ontm orin il s’agira
de savoir s i , au cas où le versement du p rix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation n ationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de T a n e , la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
M on tm orin , comme condamnée à m o r t, ou pour le
sieur de la R oche-Lam bert, comme ém igré.
30. Quant à l’appel du sieur de la R o c h e -L a m b e rt
contre le sieur Am édée de T a n e , il y aura lieu d’exam iner
si le sieur Natthey, charge de faire face à. tout, a également
lib éré le sieur de la R oche-Lam bert de cette dette.
C
�( .18)
E n fin , l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir s i, dans le cas où le sieur de la Roche*
Lam bert seroit condamné à payer des sommes quelconques
aux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A
p p e l
d e s
c r é a n c i e r s
de
T
a n e
.
La prétendue ém igration du sieur de la Roche-Lam bert
est le prem ier texte de la proposition des créanciers d e
T a n e ; ils l’appuyent sur un arrêté du conseil d’état, du
3 floréal an 1 1 , portant que tout créancier d'émigré
non liq u id é, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre l’ém igré : ils en concluent qu^
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
R ien de plus incontestable que ce point de d roit; mais
aussi rien de moins applicable à la cause.
L ’arrêté de l’an n seroit applicable, si Ghadieu.ayant
été vendu nationalement,, le sieur de la R oche-Lam bert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au gran d
liv r e , pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement..
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence.
i° . La terre de C h ad ieu , qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lam bert a
été débiteur, com me détenteur y n’a point été vendue;
�( r9 )
la nation ne s’en est point emparée : un séquestre aussitôt.,
m is que l e v é , n’a pas em pêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée , sortie des mains du
sieur de la R o ch e-L a m b ert, au 27 novem bre 1 7 9 1 , et
le sieur de la R o ch e-L a m b ert n’a été mis sur la liste
des ém igrés qu’en 1792. L a vente ayant une date au
thentique avant le 9 février 179 2, devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Chadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des évén em en s, lors
q u ’à vant leur départ ils ont mis hors leurs mains l ’im
m euble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le 'gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxièm e vente ; lo rsq u e ,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 1791 , et n’a voient rien
de commun avec l’ém igration?
30. 11 ne s’agit pas de créanciers d’ém ig ré, q u i, après
avoir eu la nation pour seul o b lig é, parce qu’elle s’étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposansqui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur interm édiaire.
Les créanciers de Tan e ont bien senti qu’il falloit
C 2
�C 20 )
prouver , avant t o u t , comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lam bert.
Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, i° . les héritiers
de M ontm orin ou d e T a n e , comme obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification
ou C h a d ie u , à cause de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la R oche-Lam bert, comme délégué envers eux par l’acte
de 1788..
P o u r amener à eux le sieur de la R o ch e-L am b ert,
#
il y a une seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite sans novation,
c’est-à-dire, sans l’extinction de la dette du prem ier obligé;
et de même il n’y a pas de novation sans l’intention
form elle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r , qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788,
on n’y verra pas même Papparence d’une novation ; au
\
contraire,, madame de M ontm orin reste débitrice des
créanciers de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 376000 fr. que payeront les acquéreurs de
C h ad ieu; ils conservent sans le moindre- doute-le droit
de s’adresser à. madame de M ontm orin ; et cela est si
bien p ro u v é , que nous voyons dans l’inscription du 11
janvier i8 o8 ‘, et en la C o u r, les dames de la L u zern e ,
héritières de M ontm orin , se r é u n ir aux créanciers de
Tane pour attaquer le sieur la R oche-Lam bert, à cause
de Tintérêt qu’i l a ù ne pas payer lui-mêm e.
�( 21 )
Si les dames de la- Luzerne n’étoient pas restées débi
trices envers les créanciers de T an e , elles ne seraient
pas là pour fa ir e valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs ; car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette som m e, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la R oche-Lam bert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers*
M a is, d it-o n , les créanciers sont parties en Facte
1788. D on c il y a délégation et obligation directe
personnelle des sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
l ’ont même exécutée en partie par leurs payemeus
de
et
ils
do
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de Facte de 178 8 , pour ratifier et
c o n fir m e r la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
d e cette in terven tion , commandée par d’autres circons
tances.
Madame de M oütm orin étoit héritière1 bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
L a c o u tu m e de P a r is ne permet à l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles; mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus n o u v e lle m e n t réfo rm ée, en est le supplém ent; et
s u iv a n t la ju ris p ru d e n c e constante à P a iis5 aucun héritier
bénéficiaire ne peut vendre les immeubles sans appeler
les créanciers.
�22)
A in s i, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
re u r, pour éviter des enchères et d’autres contestations',
q u i , bonnes ou m auvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il étoit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation , lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in fo r m a com m uni d’un
acte qui ne contenoit qu’une indication de payem ent,
11e disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l ’engagement des sieur et dame la R oche-Lam bert , et
qu’ils éteignoient celui de madame de M ontm orin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la ven te, que les créanciers intervenoient";
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu’on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Q uœ dubitationis tollendœ causâ
in contractibus inseruntur, ju s com m une non lœdunt.
(
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la R oche-Lam bert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
« P ou r qu’il y ait délégation (dit M . Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du c r é a n c ie r de décharger le
« premier d éb iteur, et de se contenter de Vobligation
« de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�< *3 )
« place du p rem ier, soit bien m arquée. C ’est pourquoi
« si P ierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers m o i, a , par un partage, chargé Jacques,
c< son cohéritier, de me la payer à sa décharge , il. riy aura
« pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m o i, si je ri*a i par q uel qu'acte déclaré fo rm ellem en t
« que je déchargeois P ierre : sans c e la , quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rien pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ie r r e 9
« et que j'a ie déchargé P ie r r e . L . 40, g. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
4 e la R oche-Lam bert ont contracté une obligation pertonnelle envers les créanciers de Tan e , sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas, et substituons-y qu’ils
ont contracté , com m e acquéreurs E T d é t e n t e u r s ,
l ’obligation de payer 375000 fr. pour le p rix de la terre
de Chadieu.
Q ue va -t-il en résulter ? R ien que de fort ordinaire ;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellem ent.
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel*
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure \ c^r les conventions particulières de la vente-
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi d ic te , et dont elle ordonne l’exécution.
L e résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la R o ch e-L a m b ert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ ordre entre les soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de T a n e ; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
personnels du sieur de la Roche-Lam bert.
S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
R oche-Lam bert, e ’est qu’en effet ils ne le pouvoient pas;
car, i° . les syndics n’ont pas form é opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la R och eLam bert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au-sieur Sauzay le 27 novem bre 1791.
A in si ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur S au zay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaquer les sieur
et dame de la R oche-Lam bert.
Ils së sont jugés eux-m êm es sur ce p o in t, par leur
exploit donné à Sauzay en l’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur Immi
gration , prouvent qu’il 11’y avoit plus lieu à un ord re,
si un ém igré étoit débiteur, parce que le gouvernem ent,
dans ce c a s , forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
3°. Les créanciers pouvoient encore moins ou vrir un
ordre contre le sieur do la R o c h e -L a m b e rt, après le
jugement
�(
25
)
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. N atthey, son garant,
a répondu à leur demande ^n faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tarie se croient dispensés de tou t,
quand ils disent que cette chose jugée est un p iè g e , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils en sont les maîtres:
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
'
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à dém êler au sieur de la R och e-L am b ert,
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réform er,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler les créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est pour un ém igré,
et nullement pour libération envers eux.
Si les sieur et dame de la R oche-Lam bert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement.que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveraient aisém ent, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose.
Il s’agit en ce point d’ une vérité de ré v o lu tio n , où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. P ou r être m ieux é co u té, en cherchant le sens
de quelques lois de circonstance que le législateur ne
nous a pas données comme ratio scr ip ta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d une autorité
prépondérante.
D
�c 76 )
L es créanciers de T a n e , en citant beaucoup d’arrêts/
ont prévu qu’on pourroit leur opposer celui rendu en
la C o u r de cassation entre les héritiers Lecom te et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvem ent réfu té} en disant que
l ’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison ; car quoique dans
cet arrêt il fût question d’une somme versée à la régie
par l ’acquéreur d’un bien de condam né, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé ; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour m ot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens j c’est dans le plaidoyer de
M . M e rlin , qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des ém igrés à verser les sommes par eux
dues, à la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion , ce. magistrat n ’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Veffet de ce versem ent, et pour q u i il est présumé
être fait. V o ici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M . d’O rm esson , vendeur d’une ferme moyennant
425ooo fr. ? avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m o rt, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
p rix de la vente.
A p rès la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame B élan ger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers L ecom te, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix, L a dame Bélanger se pré-
�( >7 )
iendit libérée m algré l’opp osition , et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente, comme y étant
obligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit pour le
compte des a yan t d r o it, et par conséquent des créan
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
C ’est pour examiner cette prétention que M . M erlin
discute; et nous allons voir qu’il l’adopte entièrement.
« Si au lieu de payer aux héritiers Lecom te (créanciers)
« le moatant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir p ou r eu x ( i ), leur
•« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eu x-m êm es... . . .
c< Q u e re ste -t-il à exam iner? Un seul point, celui de
-« s a v o ir si en effet les héritiers Lecom te o n t , par les
« m ains $ un tie r s , touché après la m ort du citoyen
cc d’Orm esson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
cc (A rtic le 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débicc teurs des ém igrés, à quelque titre que ce soit, ne
cc pourront se libérer valablement qu’en payant h 1$
,c< caisse du séquestre. )
« C ’est donc par forme de séquestre, que la nation
cc va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nation
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
,« personnel,* elle les recevra pour le compte de ceux q u it
(i) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. M e rlin ; ils sont conform es à la r t. 1 ^ 9 du Code c iv il/
D 2
�'
( 28)
«
«
«
«
pourront y avoir droit ; elles les recevra par conséquent pour les remettre a u x créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en F ran ce, sauf à en retenir le
restant à son p ro fit, s’il y a lieu..,. . . .
« (A rtic le 17. Les sommes déclarées en vertu des
c< articles précéd en s.. . . seront versées.. . , dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrem ent, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« é m ig ré , et sans y préjudiciel'. )
« V o ilà qui confirme , qui développe bien clairement
' « les conséquences que nous tirions tout à l ’heure de l ’ar« ticle 14 de la loi du 8 ‘.avril 1792. L e s oppositions des
« créanciers d’un émigré ne peuvent ni em pêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il d o it,
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la som m e que le receveur de Ven« registrement aura touchée. P reuve évidente et sans
„« réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; p r e u v e évi
te dente et sans réplique que les créanciers opposajis
« sont censés recevoir par les m ains du receveur de
« Tenregistrement j preuve évidente et sans rép liq u e,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé p a y e r , non
« pas seulement à la république, m ais encore a u x créan« ciers même opposans. » Questions de d ro it, tome 5 ,
y 0. Lettres de ratification.
Il faut rem arquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’O r-
�^
( 29 )
messon n’avoiënt été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d?insuffisance des deniers versés, et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d!Ormesson qu’au même cas
d’insufiisance. L e pourvoi des créanciers fut rejeté.
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lam bert ; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits,' et en jouant sur les mots.
' Quand ils ont poursuivi Sauzaÿ pour les payer comme
leur d ébiteur, N atthey, son garan t, a fait juger contre
e u x qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un p ayem ent, mais plutôt d’un versement
pour un ém igré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l ’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’ém igré qui n’ont pas provoqué leur liquidation , et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payem ent. ?
Disons donc avec M . M erlin que si Natthey a payé
•le prix de C h ad ieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n ’est
pas pour le sieur de la Roche-Lam bert qui n’avoit aucun
drçit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
- A in si, quand les créanciers de Tane pourraient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien', puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eu x : par conséquent
ils sont payés; e t, ne craignons pas de ré p é te r, 1’arrçté
�( 3° )
du 3 floréal an n , . l a seule loi de leur système, ne-se
rapporte nullement à eux.
D e là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,,
et bien se garder de'com m encer rune attaque d irecte,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras. ,
’
*
Mais qui a autorisé', on le ré p è te , les créanciers de
T an e à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
in dividu, pour ¡^rendre inscription sur ses biens. E t certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 1791 contre le
sieur de la R o c h e -L a m b e rt, en avoient encore moins
en 1808.
: t
A
ppel
des
h é r i t i e r s
de
M
o n t m o r i n
.
leur égard , il n’est pas.douteux qu’une obligation
personnelle de la part: des sieur et dame de lu R ocheLam bert a existé.
'
-
i
A
M ais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C ’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
-'iL e s héritiers de M ontm orin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent c o n c o u r ir .
L e p rem ier, en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
L e sbçond,' en prouvant que les acquéreurs postérieurs,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur delà Roche-Lam bert,
n ’ont pas payé.
L e troisièm e, en prouvant encore que la perte des
versemeus faits p our la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la R oche-L am bert, à cause de son
ém igration, que pour les héritiers de madame de M ontr
m o rin , à cause de sa condamnation révolutionnaire.
V o ilà ce que devoient justifier, les héritiers de Mônt>
m orin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres ^
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Xrutat que les deniers de
voient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir.
4
;
/
C e p e n d a n t les héritiers de M ontm orin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la R ocheLam bert. En avoient-ils le d ro it?
•
v
• D ’abord ils’ ne rapportent ni m ain levée, : ni consen
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
de prem ière n é c e s s ité , quand il n ÿ auroit pas .d’autre
o b sta cle .
::
:
:
En second lieu , comment prouvent-ils que les acqué*
reurs postérieurs n’ont pas p a y é ? ,
,
T o u t ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la R oche-Lam bert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le p r ix , soit à T ru ta t,
�(
3*
)
soîï aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à S au zay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement a u x créanciers p ri
vilégiés sur la terre.
•
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la R oclie-L am bert n’a rien touché de ces 376000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout ; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des h ypoth èques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créa n ciers, de payer les 376000 francs.
• Ce contrat judiciaire résultant des le tt r e s e ffa c e l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. a u x créanciers
privilégiés seulem ent.
A son to u r, le sieur Sauzay vend au sieur W a llie r ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers d e T a n e , l’ont obligé
de ne payer qu’à eux , qu’il délègue W a llie r ou Natthey
à paj^er 355ooo fr. a u x créanciers de T a n e , opposans
a u x lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer.en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposans aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qiCau nom des prem iers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’ il verse le prix de sa vente.
; Ensuite il les assigne, et fait juger contre e u x y en qua
lité de créanciers de Tane> c£tv il est libéré.
Et
�( 33 )
E t on appelle ce jugement res inter alios acta. On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’ intérêt d’un é m ig ré , parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Nattliey. M ais, i° . il est
aussi question des héritiers de M ontm orin et de la 'con
fiscation de leurs biens ; car Nattliey’, qui clierchoit à
consolider sa lib ératio n , ne manquoit pas de justifier dé
son m ieux son versem en t, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’ém igré plutôt que contre un autre, c’est que cet ém igré
n’est ni p a rtie , ni appelé à ce jugement dont on veut
lui appliquer tout l’effet.
O r , vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose ju g é e , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un cô té, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de com m un, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au prem ier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eu x la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payem ent.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur q u i,
après une libération jugée v a la b le, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire , pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
la jugement.
E
�( 34, )
N ’est-ce pas un abus du raisonnement que de soutenir *
de tels paradoxes? Si mon acquéreur-chargé de vous
p n y e r a fait juger contre vous qu’ i l avoit valablement
p a yé y qui pourra d ire , sans choquer le bon sens, que
•je n’aiipas payé m oi-m êm e, et que je reste débiteur?
A II devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse ou il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re - judicata pro veritate habetur,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression, seroit certainement réputé être en trèsbonne m onnoie, si un jugement l’avoit'dit : n u l n ’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libéi’ation , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué.
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a p r é te n d u si constante sur la défense des lois de
c o n s ig n e r sans o ffres p ré a la b le s , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des c ita tio n s n o m
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions fo rcé es, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles , puisque les créanciers et les héritiers de Tane
ne veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à, leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validité
de son payement.
E t ; chose étoïlnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de Pan 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de' la Roche-,
L am b ert, après avoir, laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion eçtre les, héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de M ontm orin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l ’exception cedendarum actionum , et ne leur diroient
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perd u , et s’ils’ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
N atthey, qu’ils expliquent donc pou rquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par'ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi iis paroissent regarder
ses versemens de Tan 2 et de l’an 4 comme un chiffon
inform e, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers d e T a n e , le sieur de la R oche-Lam bert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugem ent, ils ont perdu tout- recours contre
lu i; car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E a
�C 36 ) •
lu i'd ire : « V ou s avez acheté Chadieu , et vous l ’avez
»■
‘ revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu ,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
* être-payé par v o u s, qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le sou ten ir, 011 le trouve au contraire fort équitable;
on se passionne même au point de dire que M i de la
Roche-Lam bert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce -n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnem ent; c’est seulement dans
les lois sur les ém igrés, qu’on a prétendu trouver la preuve
que res périt domino signifie, en langage de révo lu tio n ,
que le prix d’un immeuble dû à'des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute émigration , a péri
p ou r Témigré,
.
Pourquoi ajouter,à la dureté des lois jrévolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cettei subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des ém igrés, et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent a u x débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais - qu’y a-t-il de c o m m u n entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte n otarié, en 1 7 9 1 , et un bien d'ém igré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré^
'
�( 37 )
qui par des lettres de ratification a form é un contrat ju
diciaire avec des opposans non ém ig rés, et des débiteurs
d’émigrés ?
Mais admettons en toute hum ilité qu’ un républicole n’a
dû souffrir de rien,* et que tout le sacrifice doit tom ber
sur le proscrit, n’y a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de M ontm orin soient ici à l’unisson avec les
créanciers de Tan e , pour dire que rémigré seul doit
perdre le versement ?
■Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
N atthey,. quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche - Lam bert , seconds débiteurs, il
faudra b ien , pour être conséquent, arriver jusqu’aux
héritiers de M on tm orin , premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M . de la Roche-Lam bert a été sur la liste des
émigrés , madame de M ontm orin a été condamnée révolutionnairement : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article I er. de la loi du 26 frim aire an 2 , dit que les
biens des condamnés devoient être régis et liq u id és, et
vendus comme les biens des émigrés.
L a seule réponse qu’on ait pu faire à cette observa
tio n , a été de dire que madame de M ontm orin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu
�( 3 8 }
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
A u verg n e consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état 011 il la tro u ve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le N atth ey, de N y o n ;
qui a consigné à Sain t-A m an t?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
N atth ey, sur la vraisemblance de ses versem ens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lam bert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur q u e lq u ’ u n la perte de ses versem ens, il
est évident que ce ne peut êtrer sur celui à q u i il aurait
p ro fité, c’e s t - à - d i r e , aux héritiers de Tane , comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du p r ix , puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de p r é f é r e r pour la
perte, les sieur et dame de la R o c h e -L a m b e r t, et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W a llie r ; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur oli l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur'personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
domino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à e u x , la somme consignée
�( 39 )
n’etoit pas pour eux. Q u’elle ait été versée pour-les'hé
ritiers de M ontm orin ou pour les créanciers de Tane,.
c est toujours aux héritiers de M^ontmonn que lu somme
devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
Comment donc a-t-on pu espérer de prouver qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la R ocheL a m b e r t, qui n’étoient propriétaires ' de cette somme
à aucun titre et en aucune q u alité, pas plus qu’ils ne
l ’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si la libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national, c’est le vendeur séquestré qui se retrouve
passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur, et qui a donné pouvoir à un tiers
de verser pour lui.
Cum jussu meo id quod m ih i debes sohns creditori
m e o , et tu à me et ego à creditore meo liberoi\ L . 6 4 ,
ff. D e solutionibus.
S o u v e n o n s -n o u s e n c o r e q u e M . M e r lin a p r o u v é q u ’ u n
v e r s e m e n t fa it à la caisse d u s é q u e s tr e , é to it ce n sé ê tre
fa it a u x créa n ciers , et q u e c ’est a b s o lu m e n t c o m m e si
ces c ré a n c ie rs a v o ie n t e u x -m ê m e s re ç u et d o n n é q u itta n c e .
T o u t ce qu’il a dit se rapporte parfaitement aux hé
ritiers de M ontm orin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils assurent
que la somme étoit versée.
U n autre moyen s’applique1 encore aux héritiers de-
�C 4®)
M ontm orin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un ém igré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
O r, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il y a extinction de la dette par con
fusion. (C o d e c iv il, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 1 0 , art 17. )
A in s i, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
M ontm orin sont payés par N a tth e y , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Ils ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 11 , pour revenir de la nation à
l’ém ig ré, puisque la nation les a traités de m êm e, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V o ilà , n’en dou
tons pas , ce qui est dém ontré jusqu’à l’évidence.
A
ppel
contre
le
sieur
A
m édée
de
T
an e
.
L e jugement de Clerm ont n’est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W a llie r ; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roclie-Lam bert à payer la créance du sieur
A m édée de T a n e , qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa v e n te , il est constant que le sieur Santenas
n’a plus d’action ; car le sieur de la R oche-Lam bert a
laissé
�(4 0
laissé entre les mains de Sauzay une somme suffisante
pour payer tout le p rix par eux d û , c’e s t - à - d i r e ,
375000 fr. , quoiqu ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
A u reste, il suffit de renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà d it, et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clerm ont n’a pas voulu pro
n o n cer, par une,autre inconséquence.
A
ppel
contre
le
sie u r
N
a t t h e y
.
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la R oche-Lam bert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la R oche-Lam bert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooo francs a u x créanciers de
Tane , opposans a u x lettres de ratification prises par
S a u za y , ou à consigner après le sceau de ses lettres,
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable açec les créanciers,* qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu il d ise , j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�( 4» )
.
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le p rix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances* il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en -présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lu i, de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement d élégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-m onnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réd u ction , et ont rigoureusement
exigé qiüils rapportassent les quittances des créanciers
délégués par la v en te, même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel n’ayant rien payé lui-m êm e, seroit privé
de tous moyens de défense.
E s t - il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
R o ch e-L a m b e rt à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payem ent, et q u i, m algré un jugem ent,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o c h e -L a m b e rt sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de T an e sur
leurs doutes, et de leu r apprendre si le prem ier verse
m ent de 3 55 ooo fr . 7 que N atthey dit avo ir fait à Saint-
�( 43 )
A m ant le 26 floréal an 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i5 pluviôse an 4 ,
en appelant les créanciers opposans ?
A u cun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du 1 5 pluviôse an 4 est un versement ou
un co m p te, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit m o is, lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits *, et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour savoir ce que Natthey a payé réellement.
L e sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la r é g ie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à ren dre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui com pter 355ooo francs , il faut au
moins convenir qu’une contrainte 11’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin s e r a ,
après le sceau des lettres de ratification ,* mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme m andataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son »payement; et il
ne s’en dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son m andant, car il est obligé sans
exception , ou de faire va lo ir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclam ation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lam bert de l’effet de leurs
recherches.
' Que si le sieur Natthey p réten d o it, ainsi qu’il en a
menacé , s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i° . Parce que lu i-m êm e a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen pérem ptoire sur la cause
actuelle.
2°. Parce que la demande en garantie a été jo in te ,
et que loin d^attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. Parce que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche*-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’ il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont toujours statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (i) ; l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la R oche--Lam bert dans ses
21 juin 1808.
(1) « J’ai reçu votre le ttre , M onsieur, et je ne veux pas un
cc seul instant vous faire attendre ma réponse.
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc
cc
« J’ai d’abord été fort surpris des inscriptions que les créan
ciers de T a n e ont prises sur vos biens ; j ’ai dû ensuite me
souvenir qu’ils avoient précédem m ent regretté de n’avoir pas
pris cette voie d’abord , et de s’ètre engagés dans une autre
voie qui ne leur a pas plus réussi que c e lle -c i ne peut leur
prom ettre du succès. V ous croyez d’a v a n c e , je l’espère, que
toutes choses sont parfaitem ent en règle vis-à-vis d ’eux...........
ce V o u s avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai propriétaire de Ghadieu. D ’un mot je vous tirerai de toute inquiétude. I l n e t i e n d r a q u ’ a vous q u e N a t t i i e y o u m o i , a v o t r e
te C H O I X ,
OU T O U S D E U X R E U N I S , N E V O U S O F F R I O N S D E NO US SU RS-
cc
a
titu e r
vous
dans
cette
a ffa ir e
: je vous en passerai acte
cc public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is , toutes Choses sont parfaitem ent en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc
cc V oilà u n prem ier problèm e réso lu , à votre satisfaction sans
doute. V ous v o y e z q u e N a t t i i e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
te Q U E M E M E NO US VOUS' O F F R O N S , SOUS N O T R E G A R A N T I E E T C E L L E
CC D E
C H A D I E U , D E N O U S SU B S TI T U E R
A VOUS. . .......................
cc V ous êtes encore dans l’e r r e u r , quand vous supposez que
cc les créanciers de T an e avoient fait opposition aux lettres de
cc ratification obtenues par M. votre, père sur MM. de T ane.
cc Fayon s’in scrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ce ciers non u n is, et ne fit point inscrire l’union...............I I n ’y
<c eut aucun acte conservatoire de la part de l’union;
�( 4 <S )
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M . de
Batz, représentant JNultliey , et M . de la R o ch e-L am b ert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre'
« votre p è r e , l’union fit o p position , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4 > il y eut des lettres de ratification
cc prises sur S a u za y, et l’union eut le tort extrêm e de ne pas
cc prendre d’in scrip tio n , ni faire d’opposition.
cc Ils n’ont donc que celle du 2 2 décem bre 1 7 9 1 ; mais il y a
cc. condam nation contr’eux sur c e p o in t, à l’occasion de l’inscc
tance très-âpre et très-vive qu’ils avoient com m encée à Paris
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils atta-
ct
quoient, dans S a u za y, W a llie r et N a tth e y , et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de n’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre fam ille, au lieu de se
faire condam ner sur leu r inscription de 1 7 9 1 . M a is , à dire
v r a i , je n’aurois pas im aginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient im aginé de finir par où. ils
auroient voulu com m encer. Mais les actes su bséqu en s , leur
liquidation, l e u r payem en t, sont tels qu’ils ne peuvent cherc h e r qu’à effrayer et à a r r a c h e r q u e l q u ’a r g e n t , du moins de
Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
cc
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos b ie n s , ils en
ce
ont égalem ent pris sur Chadieu.................... Instruisez-m oi de
ce tout ce qui s’est passé d eux à vous dans cette insurgence, et
ce vous aurez de ma part, ou par m oi, instructions parfaites. Je
ce vous répète que m ’identifiant à N a tth e y , je me mettrai avec
cc plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment à m e
ce faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s’il y a
ce quelque demande form ée. V oilà de ma part, j ’esp ère, fran« ch ise, loyauté autant que vous pouvez d ésirer, et plus que
« vous ne pourriez exiger.
cc Recevez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�.
(
47)
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
form e; ca r, d’après les principes, on contracte valable
ment per epistolam a ut per n un tium .
ce attach em en t, et veuillez le faire agréer à M. votre père,
te S ig n é D e B atz.
« D ès que j ’aurai votre ré p o n se , je partirai ou vous écrirai
cc sur-le-cham p. Je ne suis nullem ent in q u ie t, parce que je
ce connois les faits, et qu’ils sont réguliers. »
Paris, g juillet 1S08.
,
v*
te
te
«
ce
« Je n'ai pas perdu de tem ps, M onsieur, à prendre tous les
re.nseignemens et toutes les instructions utiles contre les créan
ciers de Tane. J’aurai une consultation dés plus habiles gens,
L ’a f f a i r e paroit inattaquable par les créanciers de T an e. Il est
heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
u t ile , surabondance de p récau tio n , pour acquitter à la fois
ce
vous et m o i, et pour m ettre dans tous les sens les créanciers
c< en dem eure. V ous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces.....................M. votre père n’auroit pas dû prendre inscc cription sur C h a d ie u , surtout sans m ’en prévenir : il n’auroit
et pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
cc créanciers. Son intérêt est de faire cause com m une a v e c
cc Chadieu : quiconque lu i dira le contraire se tro m p era , rin
ce duira en erreur. A u reste , je lui dem ande, et j ’espère qu’il
ce ne m e le refusera pas , de vouloir bien faire rayer son inscc cription au bureau de Clerm ont. J’ai b e so in , pour ma seule
« délicatesse v is-à -v is de deux personnes à qui j’ai fait deux
« em prunts, d’avoir leur certificat d’inscription avant le vôtre,
« parce qu’agissant de bonne foi et d entière confiance en m o ir
et ils ont reçu dans leu r acte ma parole d’honneur qu’il n ’existoit
�( 4 8 }
M . de Batz, représentant N atthey, a toujours continué
d’agir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de L aroch e-L am b ert la consultation
très-détaillée de M M . P oirier et Bellard (annoncée dans
Ici dernière le ttre ), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
11 y a donc impossibilité de délier le sieur Natthey de
son nouvel engagem ent, qui lève tous les scrupules des
lois de rém ig ratio n , lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
te
a
pas d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
donner en toute vé rité, et il se trouve que la vôtre existoit
le jour m êm e où j’affirmois q u il n’en existoit p a s, ou du
moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de f a it , et
celle de deux pauvres petits créanciers que j’ai fait condam ner
à Riom , et que j’espère faire rayer à tous momens. M. votre
p è r e , a p r è s a v o ir fait r a y e r celle q u ’il a déjà faite , pourra
au m êm e instant , s’il le j u g e à p r o p o s , la fa ir e r é ta b lir . Je
n’y suis que pour ma délicatesse seu lem en t, et j ’espère qu’il
cc
ne me refusera pas cette satisfaction lé g ère, q u i, dans aucun
cc
cc
«
«
cc
«
c<
cc cas , ne peut lui être dom m ageable , et qui a été pour moi
ce le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc
parlant.
A u su rp lu s, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M. V a u trin , et je m’en rapporte à ce qu’il vous conseillera
cc
cc à ce t égard.
Je vous re n o u ve lle , M onsieur, l’assurance de mon dévoue« m ent à vos in térêts, et de mon bien sincère attachem ent.
cc
«
S ig n é D e B a tz . »
II
�( 49 )
_
?f II,n e reste plus gu-un mütr àcdire sur l’elTet 'de cette
garantie, s’il tfaflloit eii’ Veriir à elle'; il est réglé par le
Code civil ^ iquiis’exprim e ainsi : ;
,* A rticle i ? 42 ^ c< T ou te ¡obligation de falrejse résout en
« dommages-intérêts, en cag de ;non-exécution.de:larpàr£
« du débiteur. »
A rticle 1184.
L a condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à »
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été e x é c u te ra le c h o ix , ou de forcer l ’autre à l’exé« cution de la convention lorsqu’elle est possible, o ird ’cn
« demander la résolution avec, dommage^ et intérêts.
« L a résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
L e sieur de la Roche-Lam bert a conclu à la résolution
de la vente de 1791 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui dem ande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
qlie lç sieur de la R.oche ~Lam bei t dut etie oblige de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a. point /«levé une
prétention aussi im m orale; il est vraisemblable qu’il s’en
G
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitim e : ainsi , à son
égard , il ^suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payem ens, puisqu’il s’y est én gagé, ou -qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendéur soit
à. l ’abri de toutes recherches;1
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
n
jY
À o'
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A-RIOM, de l’imp. de T H I B A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1810,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53807/BCU_Factums_M0423.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53805/BCU_Factums_M0421.pdf
ddd83e4afb2b609bf321d83220c3e666
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MÉMOIRE
EN R E PON S E
POUR
D am e J à c q u e t t e - G i l b e r t e B O N I OL et le sieur,
J e a n B O U R D I L L O N - D U G R A V I E R ? son m a r i
dame M a r g u e r i t e B O N IO L et le sieur C h a r l e s
A R R A G O N È S D E L A V A L 9 son mari;'et demoiselle
M
arie
B O N I O L , tous propriétaires,, habitans de
la villet,de Clermont-Ferrand,, intimés.
contre
D am e M a r i e B O N I O L et Le sieur G i l b e r t S E R S I R O N , son m ari, propriétaires habitàns du lieu
de Roure paroisse de S a in t- Pierre -Le Chastel
appelans.
L
a
'
i
,
dame Sersiron demande à ses nièces le partage
de deux successions ouvertes il y a plus de 40 ans.
�■
( ^
Il y aurait lieu de s’étonner de sa p a tien ce, sî ,
depuis cette époque , elle attendait encore ce qui lui
revient; mais en i7 7 7 > clle fornpa la mêm e.dem ande
contre sa mère- et sou frère : et aprèsi un procès trèscourt, elle vitit à partage avec son frère et sa sœur.
Chacun prit la portion qui lui rev en a it, et le lot de
la dame Sersiron fut de trois domaines.
Elle s’en mit s u r - le - c h a m p en possession, et le
procès cessa. Elle a joui , depuis cette é p o q u e , sans
rien réclamer : elle a disposé de son lot en maître
absolu , coupant tous les bois , vendant tantôt des
parcelles de cham ps, tantôt un domaine entier : nul
n’avait le droit de l’en empêcher, puisqu’elle disposait
de sa propriété.
Pendant que la 'd a m e Sersiron dissipait son patri
moine par des dégradations, son frère améliorait le
s ie n , et payait de grosses dettes laissées à sa charge.
Alors l ’envie faisait des comparaisons; cepen d an t,
comme tout était term iné, on était forcé de s’en tenir
à de la convoitise.
Mais la mère est m orte, le frère est m o rt, les trois
nièces en bas-âge ont été mises en tutelle. Des liaisons
de famille ont amené une confiance sans bornes ; et
lorsque la tante en a tiré tout le parti que l’expérience
de son âge fait supposer, alors levant le masque, elle
a dit ¿1 ses nièces : vous n’avez plus à votre pouvoir
le partage qui fixe mon lot ; je prétends qu ’il n ’y en
a jamais e u , et je veux reprendre la. demande que je*
formai en 1777 ; car je soutiens ne posséder trois do-’
�.
'
(
3
. }
mainesiqu’cV-tiire de provision
j ’élevërai même bien
d'autres prétentions:que tous les changemens survenus
depuisïcette époque favoriseront.
Voilà l’origine et le plan du procès. L a mauvaise
foi :1 a fait: n aître, la mauvaise foi l ’a entretenu par
des variations continuelles de prétentions ; toujours
croissantes. Mais ce qui a échappé aux accidens et à
l’im p révo yan ce, a suffi pour convaincre les premiers
juges que là dame Sersiron cherche des dupes, et ne
demande rien dedégilime. L a Cour en sera convaincue
aussi, et ne sera pas plus-disposée certainement à ac
corder à la mauvaise foi un triomphe qu’elle ne mérite
jamais.
. .
F A IT S .'
W<î !Îî.v;î.îC-:L e sieur A nnet Boniol, substitut de M. le procureurgénéral à la Cour des aides de C le rm o n t, laissa1,
de son mariage avec M arie -G ilb e rte D argn at, trois
enfans, savoir, Marie-Françoise, Marguerite et Antoine
Boniol.
Il mourut le 4 avril 1766 , laissant un testament
olographe, daté du 21 mars 17^4, par lequel il léguait
tous ses revenus à sa fem m e, sans reddition de com pte;
et léguait un quart en préciput à son fils, s’il en sur
venait un.
L a dame veuve Boniol, dépositaire de ce testament,
le remit en 1767 au sieur A lley ra t, notaire h Giat.
Elle fit faire un inventaire, et se mit en possession des
biens.
�4
Si on en croit les sieur et dame Sersîrorï* qui blâment
tout, ce dépôt chez un notaire, qui n’était pas le plus
voisin, ce testament fait 12 ans avant de mourir, sont
des choses fort extraordinaires. Mais il n’était pas pos
sible de le déposer chez iin notaire du lieu : car il n’y
en avait* pas. '
Et lorsque la date’ du testament leur fait soupçonner
qu’il a pu^y en avoir un autre, ils sont inconséquens
lorsqu’ils remarquent eux-m êm es que le sieur Boniol
était 'dans la force de l'âge en 17*54 ; et qu'en léguant'
un quart à son fils à naître, il ajoutait que si ce fils
décédait, le legs vaudrait pour tout autre enfant mâle
qu il a u ra it, ne f u t - i l que Le vingtième, ce qui nJan-rN
nonçait pas l'idée d’une mort très-prochaine.
Une sœur du sieur Boniol père, qui avait toujours
habité la m aison, mourut en‘ 1 7 6 8 , et légua par
testam ent, au même Antoine B o n io l, f son neveu,,
un quart de ses biens-, dont la presque totalité venait
du sieur M ugnol, son m ari, qui lui en avait fait don.
Elle avait institué le sieur Annet B on iol, son- fr è r e ,
son héritier, en partie, par son contrat de mariage du
20 novembre 1747 : mais la majeure partie de sa suc
cession était encore disponible à son décès.
Marguerite Boniol, l’aînée des enfans d’A n n e t, con
tracta m ariage, le 6 juillet 1772 , avec le s.r Sersiron.
Elle se constitua en dot la portion à elle échue par le
décès de son père ; et la dame D argnat, sa mère, lui
constitua de son chef une somme de 6,000 fr.? payable
après la majorité du 111s, à condition qu’elle ne sera
�(
5.}
point inquiétée dans sa gestion, et que son fils ne le
sera pas dans le quart à lui légué par son père, sinon
la dame Dargnat réduit sa constitution à 2,000 fr.
X<a dame Sersiron dit qu’elle n’a renoncé qu’à con
dition des 6,000 francs : mais qu'elle a gardé un silence
respectueux sur la constitution des 2,000 francs. Si elle
avait bien lu l’acte, elle aurait vu qu’elle a réitéré sa
renonciation, après cette restriction à 2,000 francs.
Cependant la dame Dargnat ne voulant pas profiter
du legs général des revenus que lui avait fait son mari,
se montra généreuse envers sa fille, et elle crut devoir
annoncer ses intentions aux familles réunies ; elle
déclara donc que son intention était de se départir de la
jouissance des biens de son mari, aussitôt que son fils
serait m ajeur; et elle renvoya le partage des biens à
faire à cette époque, jusqu’à laquelle elle s'engagea
à payer 5 00 francs par an à sa fille.
Malgré cette convention, les sieur et dame Sersiron,
commençant à être tracassiers, avant d’y être autorisés,
firent assigner la dame Dargnat en qualité de tutrice
de son fils, pour venir à partage de la succession de
leur père, et de celle de la dame M agnol, sans pré
jud ice, disent-ils , à toute demande en reddition de
compte de tutelle.
L a dame Boniol répondit à cette demande par des
défenses, du 14 juillet 1 7 7 7 , i.° qu’elle était préma
turée quant au partage des biens patrimoniaux, d’après
les conventions du contrat de mariage de 1 7 7 2 , jus
qu’à la majorité de son fils; 2.0 que le mobilier de la
�(
6
)
tante avait été partagé après son décès, et que la dame
Sersiron a eu sa portion
consistant en un quart ;
3.° qu’elle offrait le partage des immeubles de cette
dernière succession.
Ces défenses arrêtèrent l’empressement de la dame
Sersiron ; elle vit qu’il fallait attendre la majorité de
son frè r e , et en effet elle cessa jusqu’alors ses pour
suites.
de 17 77 n ’ avait pas été faite seulement
au nom des sieur et dame Sersiron ; ils l ’avaient in
L a demande
tentée aussi au nom de Marie-Françoise B o n io l, qui
avait épousé le sieur Peyronet. Mais soit que ce fut
à rinsu de la,dame P ey ro n et, soit q u e lle se reprochât
cette hostilité envers sa m ère, elle ne voulut pas prêter
son nom à une nouvelle demande.
r lies sieur et dame Sersiron assignèrent donc seuls
le sieur Antoine B on io l, par exploit du 26 août 1 7 8 3 ,
pour venir à partage de la succession du père com m un,
et de celle de la dame M ag n ol leur lante. L e sieur
Boniol donna de simples défenses de style, auxquelles
on répondit par de longues répliques, qui n’éclaircissaienl rien ; le sieur Sersiron, pour abréger, forma une
demande additionnelle, pour obtenir une provision de
3ooo fr. , quoiqu’il fût régulièrement payé de 5 oo fr.
On y défendit comme à une chicane , en disant qu'une
provision n’est due qu’à celui qui ne touche rien ;
au surplus il ne paraît pas qu'il y eût de difïicullés éle
vées sur le fonds du partage.
La dame veuve Boniol décéda le 21 septembre 1784.
�(
7
)
Il n’y avait pins de prétextes de retarder le partage;
en conséquence, les trois co-héritiers se rapprochèrent
pour convenir de leurs droits respectifs.
Apres avoir vérifié la valeur des biens, chacun sut
bientôt à quoi s’en tenir; mais là comme par-tout les
sieur et dame Sersiron furent les plus difficiles; les con
seils de leur pays ne leur parurent pas suffisans; ils v o u
lurent en référer à M .e L a p e y re , et le sieur Boniol se
fit un devoir d’adopter le choix de ce jurisconsulte.
On se rendit donc à R io m , où les traités furent rédigés.
L ’acte qui concerne la dame P eyron et contenait
une cession de droits, m oyennant 45,000 fr. ; et pour
la valeur de cette somme il lui fut délivré un domaine
évalué à 3 i,ooo fr. ; le surplus fut payable à termes
convenus. Cette cession fut faite sous seing privé le
9 octobre 1784.
Quant à la dame Sersiron , qui était encore en puis
sance maritale, et
h
qui le sieur Boniol était bien aise
de ne pas donner sa portion en a r g e n t , il lui fut d é
laissé trois domaines pour sa portion des biens pater
nels , et 6000 fr. pour sa dot maternelle. C ’est cet
acte que les sieur et dame Sersiron savent perdu, et
dont la perte est le seul m otif du procès actuel.
Tant que le sieur Boniol a vécu , les sieur et dame
Sersiron n’ont pas m êm e conçu l ’idée de prétendre
que le procès n’élait pas entièrement terminé. On
s’élait quitté avec un acte : la dame Sersiron qui n'avait
porté à Riom que son exploit de 1 7 7 7 , parce qu’il
réglait ses demandes, en avait fait remise au sieur
�C8 )
Boniol com me pièce désormais inutile. Elle avait été
mise en possession des trois domaines à l’instant m êm e;
il lui restait à recevoir 6000 francs.
t Jusqu’alors les quittances données parle sieur Sersiron
n ’avaient aucune im p u tatio n /p arce qu’elles se rap
portaient au seul revenu de 5 oo fr. promis p a r le c o n 7
trat de mariage de 1 7 7 2 ; mais après
changent, et le slyle de ces quittances
dont on veut se prévaloir.; ; > .
Dans l ’intervalle de 1784 à 1788
fit en deux fo is , au sieur. Sersiron ,
1784 les sommes
éclaircit le doute
, le sieur Boniol
un paiement de
1200 fr. 3 mais par une confiance fort mal avisée, il
n'en prit point de quittance.
Lorsqu’il demanda cette quittance à son beau-frère,
il paraît que celui-ci disputa sur l’imputation d’une
somme de 436 francs, q u i, sans doute, était un reste
de la dernière année du revenu de 5 oo francs* On
n ’avait pas dans ce moment là le traité sous les y e u x ,
pour vé ri lier si celte somme de 436 francs y était
portée comme quittancée , par le moyen des autres
arrangemens, ou si elle y était portée comme restée
en débet. On imagine bien que le sieur Sersiron ne
manqua, pas de vouloir faire toutes ses protestations
sur cet article ; et comme il est écrit que les êtres les
plus disposés à la mauvaise f o i , s’y laissent souvent
prendre par les précautions même q u 'i ls ont cherché à
accumuler, il est résulté de cette première quittance la
révélation de ce que les sieur et dame Sersiron osent
nier aujourd’hui.
Je,
�G9 )
« J e , soussigné, reconnais avoir reçu dç M . Boniôl , mon
beau-irère, la somme de douze cents f r . , en, ¡deux p a iem e n s,
suivant les arrangemens p r i s entre nous^ ‘l ’un de 436 francs,
en 178 7, dont il "n’a pas de quittance, e t 'q u i doit être porté
sur le traité de A/.e L apey re; et l’autre paiement de 764 fr. ;
lesquelles deux somoles/font celle .de *1,200 fiv, dont quittance j
et dans le cas que la susdite somme de 436 fivsoit portée dans
le traité de
L a p ey re, sans .quittance, la présente quittance
ne vaudra que pour la somme de 76^ î r . , dont .quittance ».
« Fait ce 22 mai 1788. Signé Sersiron ».
«V
.*!•, . .
iv
'
-r-.-. ■ !
,
.
T
i':; À :. : ,r . ’ ■J'
■ •'
r X<e ;2.8 juin* de 1$ m ê m e gnn^e 1788,,. le sieur Ser
siron donna une autre quittance de 612 fr. Alors il
n ’y avait plu? de reserves a. faire 7 e;L le sieur Sersiron
$e: cfl^enta. .de dire ; ; % c u 6r2.fr; de mon,beau-frère,
à compte de ce q u il me doit pour^la Légitime de ma
fem m e
ir , -J
. Il a été donné quatre autres quittances au sieur B o .
*
../*
.j
n
&
Y
’
} f r
:f!
,
*
niol, l’une de 720 fr., le 24„octobrer 1788; la secotide
de 1,100 fr., le* 1-5 juillet; 1789; la troisième.de 760 f r . ,
le 29 septembre, 178 9; et la quatrième de 400 f r . , le
2 5 mai 179 1. Toutes sont dans les mêmes termes :
q u i l me d o it pour La Légitime de ma fem m ei ,
rOn a /trouvé par hasardjune lettre isolée de la dame
Sersiron, écrite en/l’an 2 a son^rère'; elle lui demande
.60 fr. ,tr em prunter, >ce q u ivne laisse pas douter que
toutes leurs araires d’intérêt ne fussent alors terminées.
. , L e sieur, Antoine Boniol est0 mort en l’an 8 , lais
sant deu* filles mi nègres qui furent mises sous la tutelle
d’ un étranger. Ce tuteur i i t émanciper, ses pupilles aus
sitôt qu’il le put.
?
3
�( IO )
Ces cliangemens donnèrent au sienr Sersiron quelque
espoir d’en tirer parti. D e fréquentes visites faites chez
ses nièces laissent beaucoup de soupçons.surleur motif,,
mais de ces soupçons qu’il faut taire quand on e n ,e s t
réduit,¡.à ne pas. pou voir!prouver ce qu’o n avancer*
Quoiqu’il en- 'soft du résultat de ces visiles*, le sieur
Sersiron les interrompit to u t-à -x ;o u p pour menacer
d ’une demande en partage. . . f ■
■ •
;
•l.es demoiselles Boniol semblaient avoir plus à craindre
u n e -recherche
de la part*de la famille Peyronet : car
F ran çoise’Boniol, qui avait traité avec A n toin e, était
décédée, laissant trois enfans; et ceux-ci auraient p u ,’
peut êtïè sans mauvaise foi, nier l’existence d’ un traité
qui n’était pas de leur fait. ' •
’
Ils furent les premiers auxquels on s’adressa : mais
les demoiselles Boniol ne trouvèrent avec eux que de
la loyauté et de la bonne foi.
Les enfans Peyronet avouèrent avoir t r o u v é , dans
les> papiers de leur m è r e , le traité sous seing p riv é ,
écrit sur un quarré de papier en 17 8 6 , et ils se firent
un devoir d’en offrir la ratification.
E n conséquence, et pour y donner une forme plus
régulière, il fut fait un nouvel acte le 6 germinal an 12,
par - devant notaire, contenant les conventions déjà
faites ; c'est-à-dire que le domaine donné à la veu ve
Peyronet pour 3 1,000 francs, fut mis à son lot ; on
vint à compte des paiemens fa its , dont deux étaient
de 1793 : les héritiers Boniol se reconnurent débiteurs
de 7>9°8 francs.
�( II
)
Les sieur et dame, Sersiron qui ont eu connaissance
de cet a c t e , disent, pour se soulager la conscience,
que les héritiers Peyronet n'ont traité qu’avec un sup
plément de lot , parce que c’est. en efFet le terme em
ployé par le notaire. Mais s’ils ne se plaisaient ■
pas à
tout dénaturer, ils verraient que le domaine seul étant,
considéré comme un lot, il était bien juste que ce lot
d'immeubles eût un supplément de 7,908 francs en
l ’an i 3 , puisqu’il en avait eu un de 14,000 fr. en 1784.
Quoiqu’il en soit, cette leçon de bonne'foi fut en
pure perte pour les sieur et dame Sersiron ; et tout fâchés
qu’ils étaient de perdre un auxiliaire qui aurait rendu
plus probable le défaut de partage, ils formèrent de
mande par citation du 10 vendémiaire an 1 4 , en reprise
dé l’exploit de 17 77 (quoiqu’ils en eussent remis l’ori
ginal depuis le traité); et ils.conclurent au partage des
deux successions d'Annet Boniol et de la veuve Magnoî ,
ppur être délaissé à la dame Sersiron uui tiers de. cha
cune dans les immeubles, et un quart dans le mobilier,
avec restitution de jouissances^/>wi\y Le m ariage de la
dame Sersiron, et intérêts depuis la demande de 1 7 7 7 .
f Le s premières, défenses données à cette demande
ne furent qu’une ébauche des.moyèns à faire valoir,
et dont on se lit réserve pour, l'a plaidoierie (a fin sans
doute d’attendre que le sieur Sersiron eût donné quel
ques explications de plus ) ; on se contenta de dire que
la demande
e n
partage était non recevable
,
qu’elle
était encore prescrile, puisqu’on la fondait sur un ex
ploit de 1777, qui n’existait pas, et que le sieur Ser~
4
�(12
)
siron ne représentait pas ; qu’elle était encore sans
intérêt, parce que la dame Sersiron avait reçu un do~
mairie de 1 5^ooo f r . , ce qui excédait de beaucoup le
quart
qui lui rev en a it, d’après le testament de 1754.
On voif que l’avoué chargé de rédiger ces défenses
ignorait la réception de deux autres domaines , et don
nait du large aux sieur et dame Sersiron , toujours prêts
à profiter des circonstances.
A u lieu de répondre par une écriture, ils se content
tèrent de signifier des conclusions,, où , n'avouant tout
juste que ce que les défenses les empêchaient de nier,
ils offrent de rapporter Le petit domaine dont iis sont a i
possession, ainsi que tout ce qu’ils peuvent avoir touché.
Ils ajoutèrent que°, d’après les termes du testament olo-<
graphe, il n’y avait eu legs, au profit d’Antoine Boniol,
que du quart des m e u b le s en sorte que les immeubles
devaient être partagés par égalité.
On voit déjà la perfidie de cette offre de rapporter Le
petit dom aine, puisqu’ils en ont eu trois 5 mais elle estbien plus grande encore dans ces mots dont Us sont
en possesion, lorsqu’on saura qu’ils avaient-déjà vendu1
un des trois domaines, en sorte que croyant tout cela
ignoré de leurs nièces , ils ne craignaient pas d’offrir
le petit domaine dont ils étaient en possession, parce
qu’ils avaient lu dans les défenses que l’avoué ne con
naissait qu’un petit domaine évalué par lurà i 5,ooofr.
A l’égard du testament, et pour comprendre la res
triction que les sieur et dame Sersiron voulaient y
fa ir e ; il faut savoir que ce testament portait legs, par
�( ï3 )
Annet Boniol à son fils à naître, du quart de ses biens;
'meubles et effets, le tout par préciput. Les sieur et dame
Sersiron jouant misérablement sur la virgule cjui vient
après le mot biens, et qu’ils supprimaient, prétendirent
que le testateur n’avait entendu léguer que ses biens
meubles.
Les héritiers Boniol répondirent que cette honteuse
équivoque s’évanouissait à la lecture du testament en
tier, parce que le testateur, revenant sur son inten
tio n , disait ailleurs léguer le quart en préciput à son
enfant mâle ; qu’en lin autre endroit , léguant à sa
femm e , dans les mêmes term es, la jouissance de ses
bien s, meubles et effets, il ajoutait à Pirislant le-m otif
qui l ’avait engagé à laisser à sa femme le revenu de
tous ses biens] et enfin les sieurs Boniol ajoutaient-que?
ces m o ts, le tout par préciput, montraient assez que
le mot biens avait un sens séparé du mot meubles, et
s’entendait de toute l'acception que la loi et les usages
donnent au mot biens.
Lorsque les héritiers Boniol virent que les sieur et
dame Sersiron affectaient d’éviter les explications sur
le passé, ils pensèrent qu’en les obligeant par les voies
légales, ils parviendraient h la découverte de la v é rité 5
ils demandèrent d o n c ‘ un interrogatoire sur faits et
articles, et 1’obtinrent.
Mais il fallait, suivant la l o i , signifier les questions
sur lesquelles les sieur et dame Sersiron devaient
être interrogés, et quoiqu’on ne doive pas douter de
la perfection des lois, il sera bien permis de penser
�( H )
au moins que deux personnes devant être interrogées
sur les mêmes faits , sont à-peu-près certaines d’être,
unif orm es, lorsqu’elles sont à portée de concerter leurs
réponses.
*
C ep en d a n t, et malgré la préparation qu’il est im
possible de ne pas supposer dans les réponses des sieur
et dame Sersiron, on va voir que le sieur Sersiron fut
au moment de révéler ce q u ’il avait pris tant de peine
à cacher.
Après que le sieur Sersiron eut fièrement répondu
à la première question qu'il n’y avait ja m a is eu de traité
contenant partage de la succession Boniol^ le magistrat
lui demanda si M .e L ap eyre n ’en avait pas été chargé.
Il répondit que M .6 Lapeyre n’avait été employé dans
cette a ffa ire, n i pour rédaction de tra ité, Ni AUTRE
MENT.
Viennent quelques autres questions auxquelles il n’y
avait qu’à répondre non pour être conséquent. Mais
ensuite le .magistrat représenta au sieur Sersiron la
quittance de 17 8 8 , dans laquelle il était question de
M .e Lapeyre, et il lui demanda comment ilse faisait qu’il
y eût parlé lui-mêm e d’un jurisconsulte absolument
étranger à cette affa ire, com m e il venait de le dire.
L e pas était glissant, et tout exercé qu’était le sieur
Sersiron, il fallait absolument cju’il revînt sur ses pas.
11 répondit donc qu’à la rcrité, M .e Lapeyre avait
été chargé de fa ir e un tra ité, mais que cet arrange
ment. n ’eut pas lieu ; que s’il avait mentionné ce traité
dans une quittan ce, c’était dans la supposition qu’il
aurait lieu.
�( i5 )
Quant à la délivrance des trois dom aines, et aux
sommes payées, le sieur Sersiron dit que le sieur Boniol.
ne lui avait donne ces domaines que comme provision,
et que les sommes reçues'concernaient la succession
maternelle.
,
L a dame Sersiron répondit comme son mari * mais
pour ne pas faillir, elle se fit la violence de parler
moins, et s’expliqua sur chaque article avec une briè
veté surprenante , toujours pour nier ; sauf qu’elle
ré p é ta , mot à m o t, que les trois domaines étaient
Une provision sur la succession paternelle, et les sommes
reçues en paiement de ses droits maternels.
• A u lieu de s’avouer vaincus par leurs contradic
tions et l’invraisemblance de leurs allégations, les sieur
et dame Sersiron crurent qu’il fallait faire bonne con
tenance, et être plus exigeans que jamais. En consé
quence , n’osant plus faire réduire le teslament au
quart des m eubles, ils n’abandonnèrent cette p r ê t e r
tion que pour en mettre au jour une n o u v e lle , plus
absurde encore.
. ,
Quoique le testament de 1754 eût éfé lu et coni^
menté par eu x, comme on vient de le vo ir, ils im a
ginèrent de dire brusquement que ce testament avait
été irrégulièrement déposé en 1767, et qu’ils n ’en re
connaissaient pas l'existence.
.
En conséquence, par de nouvelles conclusions du 2
août 1 8 1 0 , ils déclarèrent rétracter ce qu’ils avaient
'd é jà dit, et rectifier leurs demandes! Ils révoquèrent
donc l’ofire par eux faite d’allouer m ê m e -le quart
�c i 6 )
des ' meubles ; ils sommèrent les héritiers Boniol de
s’exp liqu er, e t ‘ déclarer positivemènt si ce testament
existe en original et en minute cke% le notaire, p o u r ,
en 'cas.de non - existence,»être redemandé le^part^ge.
de toute la succession par égalité. Ils demandèrent
enfin un compulsoire contre le notaire.
* ,
Les héritiers Boniol'qui avaient dans leurs mains ,
non-seulement une expéditiqn,, ayant ¡plus de 40 an£
de date, délivrée à leur grand’vmè;re ^jiiais encore une
autre: expédition que la 'dame P eyron el( leur,, avait
délivrée lors du partage de 1784, trouvèrent si bizarre
q u’on leur demandât sérieusement une explication sur
Inexistence ou non-existencô de la miniTte cl’un notaire,
q u ’ils ne crurent pas-nécessaire de répondre à, cette
chicane nouvelle;; ils sollicitèrent l’audience , ou la
cause fut soutenue avec chaleur par,les sieur et dame
Sersiron pendant plusieurs,séances.
août 1810/ifut rendu le jugement dé
finitif que les sieur et dame Sersiron se sont contenté
E n fi n, le 14
d en on cer comme proscrivant leurs demandes
mais
dont les héritiers Boniol ont le plus grand intérêt de
mettre les motifs sages et précis sous les y e u x ,de ,1a
Cour.
,
J
u g e m e n t
'
dont
j. ' *
est
a t t e l
.
- ^
« Attendu qu’il résulte, i-° de 1 énonciation ¡d’un
traité rédigé par M .c L a p e y r e , contenue dans la quit
tance du 22 mars 17883
« 2 ,®
�( *7 )
« 2.® D u délaissement de trois domaines, dépendant
de la succession à partager, fait aux sieur et dame
Sersiron ;
« 3.° D e 1 aliénation qu’ils ont faite d’un de ces trois
domaines ;
« Qu’il y eut en 1784 un premier partage, et que tout
porte à croire que ledit règlement était définitif« Attendu que les partages sont du nombre des
contrats qui se^ forment par le simple consentement
verb al, sans qu’il soit besoin pour leur validité qu’ils
soient revêtus de la solennité de l ’écriture;
« Attendu que les sieur et dame Sersiron étaient
majeurs en 178 4, lors du partage;
« Attendu que d’après l'art. 13 4 .d e l’ordonnance
de i 539, les majeurs n’ont que 10 ans pour se pour
voir contre les actes passés durant leur minorité;
. * Attendu que c'est en 1784 que les sieur et dame.
Sersiron ont fait ce règlement portant partage, et que
n’ayant formé leur demande en reprise d’instance pour
en venir à un nouveau partage, qu’en l ’an 14 , il s’est
écoulé un laps de tems de plus de 2 4 années;
c<Mais attendu que les parties se doivent un com pte,
tant sur le paiement des arrérages d’un revenu de
5oo francs promis à la dame Sersiron par son contrat
de mariage, jusqua l’évenement du partage, que sur
les paiemens faits sur la dot de 6,000francs, constituée
à ladite Sersiron, par la-dame Dargnat, sa m ère;
« L e tribunal déclare les sieur et dame Sersiron non
recevables dans
le u r
demande en reprise d’instance,
�( IB )
ainsi que dans celle qu’ils ont formée pour en venir à
un nouveau partage; ordonne que les parties se reti
reront par-devant M .c Chassagne, doyen des notaires
de cette com m une, que le tribunal nomme d’office
pour recevoir le compte que les parties se doivent,
tant sur les arrérages d’ un revenu de 5 oo francs porté
au contrat de mariage de la dame Sersiron, que sur
le paiement de la dot de 6,000 francs, qui lui a été
donnée par la dame D a r g n a t , sa m è r e 5
« Condamne les héritiers Boniol au quart des dé
pens; réserve un autre quart des dépens jusqu’après
la reddition de compte; et condamne les sieur et dame
Sersiron, en l’autre m oitié, ainsi qu’au coût, expédition
et signification du présent jugement».
T e l est le jugement que les sieur et dame Sersiron
n’ont pas craint d’attaquer comme injuste ; et persé
vérant dans leur esprit de ch ica n e, ils ont renouvelé
en la Cour la demande en compulsoire du testament
de 17^4, qu'ils avaient formée en désespoir de cause ;
comme s i, après 44 ans de délai, après la mort du
notaire, et peut-être de son successeur, le soin qu’on
avait eu de ses minutes pouvait être de quelque in
fluence dans cette cause, lorsque ce testament avait
été connu et discuté par ceux-la mêm e qui feignent
aujourd’hui de le méconnaître.
Non contens d'avoir m a n i f e s t é leur mauvaise foi
dans une série de conclusions toujours variables et con
tradictoires, les sieur el dame Sersiron ont cru devoir
�( i9 )
la rendre publique par la voie de l ’impression. Ils obli
gent donc leurs neveux à révéler par la même voie
des faits qu’ils eussent préféré ensevelir dans le secret
d’une plaidoirie. Mais puisque le gant en est jeté, les
héritiers Boniol ont dû se tenir en défense, et exposer
à la Cour tous les faits qui ont précédé le procès actuel,
pour ne lui laisser ignoreraucune des demandes et des
prétentions toujours croissantes de leurs adversaires :
car leur nombre et leur changement rapide n’est pas
du tout inutile à la conviction de leur mauvaise foi.
Suivant les sieuç et dame Sersiron dans leur mémoire,
rien ne prouve l'existence d’un partage, et ils s’opposent
absolument à ce que la preuve testimoniale en soit
ordonnée, d’ou ils concluent que leur action est fondée
malgré leur mise en possession séparée de trois do
maines, depuis 178 4, et l’abandon absolu du procès.
Après cela, et croyant avoir assez prouvé lè besoin
d’un nouveau partage, les sieur et dame Sersiron exa
minent quelles doivent en être les bases; ils attestent
que le notaire n’a pas trouvé la minuté du testament,
ni du dépôt, d ’où ils concluent qu’il faut tout par
tager par égalité. A l’égard de la succession de la
dame M agnol, dont le testament n ’e s t pas p e rd u ,
ils font une autre découverte : elle avait institué son
frère en 1747 >
en concluent qu’elle n'a pu
léguer un quart a son neveu.
'
Voilà en quoi consistent les moyens auxquels les
héritiers Boniol ont à répondre. Ils suivront pour cela
l ’ordre des questions présentées par leurs adversaires.
6
�(
2°
)
MOYENS.
§. I er
L a demande en partage est-elle recevable?
Il ne s’est pas écoulé 3 o ans, disent les sieur et dame
Sersiron 3 depuis le décès du sieur Annet Boniol, jus
qu'à la demande de 1777 et * 7 ^ 3 ; donc ^ y a lieu à
partage, parce que celle action dure 3 o ans.
Rien n’est plus incontestable que ce principe de
droit; chaque c o - h é r itie r a 3o ans pour demander
un partage,' c’est-à-dire, pour forcer ses co-hériliers
à lui abandonner sa portion des biens communs; et il
n ’est pas moins incontestable que de 1767 à 17 77 ou
178 3 , il n’y a pas 3 o ans.
Mais qu’ est-ce que cela p ro u ve , sinon qu’en 17 77
et 1783 la demande était recevable? S’ensuit-il néces
sairement qu'elle le soit encore aujourd’hui?
O u i, si les choses étaient en 18 11 au mêm e état
qu’en 1777. N o n , si le défendeur en partage a donné
ce qu'on lui demandait.
L a loi donne aussi 3 o ans à un associé pour ré
clamer sa portion de la société ; mais si, après l’avoir
dem andée, on prouve qu’il a été mis en possession de
sa part, si vingt-quatre ans de silence ont succédé à
cette mise en possession, cet associé sera-t-il admis à
recommencer contre la seconde génération le procès
�( 2 1 .)
qu’il a terminé avec la première? Il est impossible cle
le penser.
■ Quel- est le but d'une demande en partage , si ce
n ’est d’oblenir la mise en possession d’ un lot ou le dé
sistement d'une portion de la succession? Or, supposons
qu'un demandeur en désistement, qui était privé d e là
chose demandée, lorsqu’il a agi en justice pour obliger
son adversaire à;la lui livrer, se trouve ensuite nanti
.de ce qui était l’objet de,sa.réclamation ; pourra-t-il,
.après un long délai, reprendre un procès qu’il n’avait
intenté que pour obtenir, et qu'il a abandonné après
avoir obtenu?
•
i . ' •
'
- ,Cette prétention serait repoussée sans d o u te , parce
q u’elle serait de mauvaise: f o i , et parce que l ’action
serait éteinte par le paiement ou la délivrance de la
chose demandée. •
.\
\
•
Toutes les obligations/produisent une action.-Mais
avant de dire qu'elles sont éteintes p a rla prescription,
la lo L d it qu’elles’s'éteignent par le paiement.
~ L e co-héritier eh 'possession de toute la succession
commune contracte sans difficulté l’obligalion de rendre
la portion des autres. Sa gestion opère un quasi-con
t r a t , q u i, d'après la lo i„ a les mêmes effets qu'un en
gagement
qu il aurait signé ; mais si on l’attaque pour
se désister, et si, après avoir disputé quelque te m s ,
il se désiste, il est évident, que son obligation ne sub
siste plus; elle est éteinte par la remise ou paiement de
la chose demandée.
i
�( 22 )
Ainsi, bien loin que les exploits de 17 7 7 et de 1783
servent aux sieur et dame Sersiron, comme une dili
gence.interruptive de prescription, ils ne sont là que
.pour attester leur mauvaise foi , sans aucune autre
utilité pour eux.
■ Car, par cela seul qu’ils poursuivaient avec vigueur
en 1783 , par cela seul qu’ils montraient, par des con
clusions réitérées, leur empressement à finir ce procès^
ils ont prouvé par leur silence , survenu brusquement
et non interrom pu, depuis 1 7 8 4 , que le procès était
fini, et par conséquent que la demande a cessé d’exister.
M a is , disent-ils, j ’ai pu l ’interrompre sans l’aban
donner; à la vérité', ma demande n ra valu trois do
maines et 6000 fr. N ’importe, je suis le maître de don
ner à ce désistement une autre cause; et je dis que les
domaines ne sont qu’ une provision; en sorte qu’il faut
achever le partage, que cette-jouissance provisoire n ’a
fait que suspendre.
" S
'
L e sieur Boniol, il faut en convenir,, était un héritier
d ’une générosité bien rare. On lui demande, par une
requête du 26 août 178 3, une provision de trois mille
fra n cs seulement ; et après avoir mêm e disputé ces
3 ooo fr. en offrant le partage, il donne volontairement
trois dom aines, c ’est-à-dire plus de 40,000 fr. qu'on ne
lui demande pas. Cela serait admirable; mais l’habitude
du palais n ’accoutume pas à' voir les défendeurs offrir
douze fois ce qu'on leur a demandé.
11 faut cependant attacher une idée quelconque à
�c
2
3
}
cet abandon de trois demaines et à ce paiement d’ un
grand nombre de sommes, après la cessation absolue
du procès. O r, quelle autre idée y ajouter, si ce n’est
que le procès a été terminé , que l’obligation a été
éteinte par le paiement. Voilà une demande tendante
à obtenir des immeubles et de l’argent. L e défendeur
y adhère, et donne des immeubles et de l'argent; il
n 'y a donc plus d’action, et la meilleure preuve que le
demandeur se désiste de sa dem ande, c'est qu’il aban
donne pendant vingt-quatre ans un procès qu'il pour
suivait avec chaleur , c ’est qu’il remet l’original du
seul exploit qui lui fût utile, celui de 1 7 7 7 , qui con
tenait le règlement des conclusions, et l e - s e u l, par
conséquent , qu'il ait été nécessaire de porter à Riom
chez M .e L a p e y re , avec les deux testamens et l’in
ventaire. Cet exploit n ’a pas été perdu , comme on
voudrait le faire croire; il a dû être remis par les Ser
siron, comme la veuve Peyronel remit l’expédition du
testament de 1 7 5 4 , délivrée à elle, par cela seul qu’après
avoir traité elle1n’en avait plus besoin.
~ Que les sieur et dame Sersiron ne s'ingénient donc
plus à chercher des possibilités , et à dire qu’on a peutêtre retenu cet exploit dans les fréquentes com muni
cations de pièces, et qu’ils prennent garde au contraire
r
à ce que Ici Cour ne pense pas d’elle-m êm e, que par
un hasard dont ils ont p rofité, lorsque chacun reprit
ses papiers après le procès fin i, le sieur Boniol crut
etnporter-son double du traité , e t se trouva n’avoir
pris qu’ un exploit inutile. Ce n ’est encore là qu’une
�( 24 )
Vraisemblance ( i ) ; mais dé tous les soupçons que tai
sent les héritiers B ô n io l, celui-là leur serait le moins
pénible , parce que la perte de ce traité ne serait née
que du hasard.
< Quoi qu’il en soit de toutes ces conjectures, elles
n’ôtent rien ni n'ajoutent rien à la principale vérité
de cette cause, et au point capital duquel il ne faut
point s’écarter , c ’est q u ’il y a eu un procès pour ob
tenir un lot de succession, et que ce procès a été fini
aussitôt que le demandeur a obtenu’ ce lot. -j
Il y a donc;eu désistement de fait et’ de droit de la.
demande, puisqu’elle était âcquiescée, et l ’acquiescer
ment suivi d’exécution. Et qu’on ne dise pas qu’il faut
un jugem ent pour terminer un procès : la loi n’est pas
aussi exigeante ; elle se contente d’ un simple acte
d’avoué à a vo u é, même pour së désister de la demande
sans rien obtenir; cependant‘on sait combien un acte
pareil est sujet à s’égarer. L a loi ne parle pas de désiste-,
me nt ', pour le cas où le défendeur a adhéré à la demande ::
car le législateur ne voulant pas prescrire des.•.formes*
inutiles, n'a pas cru devoir s’occuper d’une espèce sem
blable , parce qu’elle se réduisait à un point de fait
^
I
:
.
- I
• ' *
( i ) Si cette vraisemblance où ces soupçons choquent la dame
Sersiron, q u ’elle explique comment elle se trouve nantie de
l'expédition du testament rdu s.r M n g n o l, du 10 décembre i y 35 ,
poiiqnt legs du quart à s a , f ç m m e lo r s q u ’à aucun titre , et dans
aucune circonstance la dame S e r s h o n n a dû avoir les papiers
de la dame M o g u o l, si le procès n était pas fini.
' qui
�( *5 )
qui rentrait dans.le domaine du juge, et dans Içs pré
somptions que la: loi lui abandonne absolument.
Nous voici arrivés a l’arlicle le plus incommode pour
les sieur,et; dame; Sersiroii. «Oppressés ¡sous le poids de
tant de circonstançes;;accumulées sachant bien que
c’est-là de Vévidence pour «tout ;lej m o n d e , mais que le
magistuatneipeut donner, à ce [qui n’esUpas écrit, que
le nom dejpïésprhpjions^ilpjspiix fort prononcés pour
em pêcher, autant qu’ils le pourront, l’examen de ces
ci ipo ns ta nces>) A u§si s]en tç>urç n t-ils,de tous 1es articles de
la loi qui pourraient donner à la Cour la tentation de
ne. pas trop réfléchir sur la réunion des présomptions,
qui, suivant;eux, n e rdoiyjent pas,dispenser d’ un écrit
formel; n Ii\,p
'V. ^ i r A'i
c I - r ; <\
îLa Cour, disent-ils , <n’a pas leîdrôit de se servir^ de
présomptions eh cette matière : car la loi ne les aban
d o n n e à ’sa ipriidencè qué dans'les;cas ou elle admet
les preuves testimoniales (Code civil, i 353 ). O r, con-ù n u eh t-ils} illn’ÿ a’pasliëu'à preuve* testimoniale dans
tout ce qui excède i 5 o francs : la loi a voulu en ce
.cas qu’il fût passé. u!n écrit ( 1 3 4 1 ) .
•
Voilà donc le palladium derrière lequel les sieur et
darnesSersirônYse ^ont retranchés, • le vïnciilum ju r is
'présentent à lia Cou^ ipour, qu'elle, se refuse à
l ’éviderjce par respect pour la loi.
•
;jMais|CQ9Cplosse 3) des pieds d’argile ; il est appuyé
q u ’i l s
sur une base qui n'est qu# s p é c ie u s e , i et-'que* la loi
•ëlle-mêmè'va détruireo u- ïiiinorr.i«-* >{ ,
' . 'Ii’ait. r
*.du Code(¡défend d’admettre la preuve
7
�(*6 )
des conventions excédant i 5o francs : mais Part. i 347
dit aussi que cette règle reçoit exception lorsqu’il y a
commencement de preuve par écrit.
E t qu’ést-cë qu’un commencement de> preuve par
écrit
? Lia
loi le définit elle-même.'*
ft
; ■
r
•
«■On appelle- ainsi tout ¡acte pàr ^crit>,i *émahé'de
c< celui contre iequel la demande est fo r m é e , ou de
« celui qu5il( représente > et qui rei^d vraisemblable lé
« fait'àirégüè. « '
. < . ; ç'i;. • >\,ç n t
INTy: a -t-il donc -pas’ commencement de preuve par
écrit, 'd’un partage,
* *«i’ ^ ’
.. ‘ ?? i
!
i.0
Dans l ’aveu du siëur Sersiron, qu’il a reçu trois
domaines e n ’ abandonnaht sa demande en 1784.;
■
2.° Dans les quittances réitérées , qu’il a données
11 compte de lai-légitime de sa-femme , lorsqu’à uparavant il les donnait sur le revenu .provisoire d e ‘5o o fr .;
*3 .0v Dans la quittaiice oii ilpaule du traité de. M.® L a "peÿré;
1 ** • >*
”
> •
=
■
■
v
i :. \ ■
4.° Dans feon interrogatoire, où il dit' que M .e L a
peyre-n'a jamais été’ chargé de cette affaire ? et où
il dit ensuite qu’il en à -été chargé pou r-faire un
traité.
• P " '*• ;
•»-
ci on 1;
•
Cliàcli il' dé ces *f a i t s 1émanés de celui iontre qui le
' f a it est àrlicuié, -nAèSt^il'pas seul suffi&antpour rendre
vraisemblable le fait*alléglté ’qu'il y'a'<eu un partage
après la deinande feii partage, et que^c^est'pour cela
Qu’e l l e ' p l u s été suivies’p * ^ fl * î;
«>n •.<.
L a preuve testimoniale est doncradmis‘s ibley‘et;mâiniènant Îoüiè-Pdbj^ctiOri loitabe-pc&ifî sijlai preuve est
�o; 27 j
admissible■,les-préjonïptijons restent abandonnées
h
la
prudence de là Cour ,<id’après l’art. 1 353 . ; r
O r, qui pourrait nier qu’il n’y ait ¡ci un tel concours
de présomptions que" la vérité peçce de. toutes parts?
Et véritablement ce serait douter de la justice que de
ne pas leur donner le caractère d ’une preuve matérielle.
Sôus F ordonnance de M o u l i n s q u i avait la mêm e
disposition que l’art. 1341 du C o d e, mais qui ne donf.
riait pas. la latitude de Tartv 1:347 , l e s auteurs sentaient;
la nécessité de. s'écarter de la; rigueur de cette loi,'dans
les. cas d'évidence où:il serait plus nuisible qu’utile de
l ’appliquer sans, discernement.
:.
Omrùif'. aLid probando genere ( dit ;Bjoic’eau ) fratldes
detegù dehere eocisUtno y ne lew ista 'quœ crimèn intendit
everbere,, 'permittere vidùatur j et itaeos su/rimo ju r e et
stricto. ejus obsèrvaiïotie major injuria, nascatun
- -.Aussi la j u ris p ru de nç a s’accor d a - t- elle uniformément
u.regarder lés préàomptions comme'des preuves, lors-!
qu'elles étaient assez fortes pour en tenir, lieu.
L a présomption de »droit, dit Dahiiy, chap. 7 , est
« u n e conjecture clans un,é affaire douteuse, qui résulte
dr des argument :dt des indices qu’on 'liré de certaines
«• icirconstanées.du faitiqui'^accompagnent pour l’ordi-*
cc naire
Naseeksc 'ex\ eb quod plerumque iia s oiea t ac
te ciderc, et ram contrà ».
, ’O r v on le.demande aux.sieur et dame Sersiron, n ’estil pas d’usage le plus fréquent qu’un défendeur ne dé
livre ce •q,u'6n lut a'demandé, que lorsqu’il e s td ’acôrd,
et que le réclamant consent â se désister de sa demande?
8
�(
2
8
X
......................................................................................
Voilà bien qaod plerumque accidit. Qu’ils disent encore'
s’ils ont vu souvent donnér trois domaines en provi-'
sion , et 6000 fr. d’argent , lorsque’ le demandeur se
contentait de 3 ooo fr. ; il faudra bien qu’ils reconnais
sent qu’un défendeur ne donne ce prodigieux excédant
c]ue p'our être quitte entièrement ; et làrdessusr il ne:
faut pas seulement dire raro contra, car on les défie
de citer un seul exem ple où. un défendeur ait donné
tout cela pour qu’onr continuât dé plaider1contre lui.*
« 'jJj'sl loi, continue D an ty , ’regarde les présomptions
« comme des té m o in s lo rs q u e la preuve'par témoins"
« ou celle par écrit viennent à manquer
>
• On peut suivre encore toutes les conditions que cet
auteur exige pour la concordance ‘des présomptions,
et leiir liaison entr’elles p t o u t cela est.^répété dans
l'art. 1 353 du C od e, et plus on réfléchira sur la liaison
des faits eritr’eux>depuis 1784,' jusqu’à la itiortM 'Antoine Boniol,; plus on sera pénétré de ^leur »parfaite
concordancè. ; ;oî :: : nrt : '¡'.-a!)
!i,oi
j Un autre fait étranger a u x ’ Sersiron s’y:<lie pour
achever de dissiper tous les* doutes. C ’est’dans le même
tems et poiir les^mêmes intérêts que lia veuve1Peyronet
traita. Elle avait même pluspa? demander : car elle
n ’avait reçu aucuns revenus depuis la 'mort, de son
p è re , jusqu’à 1784, tandis que la femme Sersiron avait
reçu 5 oo francs par an. L a veuve Peyronet r e ç o it ,
non par provision, mais par tous ses droits paternels,
maternels, et ceux de la tante, en capital et intérêts^
45,000 fr. L a dame Sersiron a reçu trois domaines
�( 29 )
qui valent plus de 40,000 francs, et 6,000 francs en
argent (n o n compris les 4 3 6 ) , et elle ose d ire , elle ^
ose faire plaider sans honte, qu’elle n’a reçu tout cela
que provisoirement, et sans entendre renoncer à son
action en partagé. L ’esprit se soulève d’indignation à
cette persévérance de mauvaise foi.
L e signe le plus infaillible que puissent en donner
les sieur et dame Sersiron, c’est l’effort qu’ils font pour
éviter tous les' éclàircissemens que la Cour voudrait
prendre.
■
'
\,
N ’ordonnez pas de preuve testimoniale, disent-ils,
la loi le défend.
N e jugez pas la cause par les présomptions, ajou
tent-ils, la loi le défend encore.
N ’ajoutez aucune foi à l’énonciation d’ un traité qui
se trouve dans la quittance de 1788 : car la loi ne
l ’admettrait, que si les termes du traité y étaient écrits:
non créditer referenti nisi constet de reiato.
Il n’ÿ avait plus qu’ un mot à ajouter, et ils lelaissent
entendre : n’ajoutez foi qu’à ce que nous disons, c ’est
le seul m oyen de nous rassurer; car si nous ne sommes
pas nos propres juges, toute recherche de la vérité
nous épouvanté.
11 est vraisemblable que la Cour ne. se laissera pas
toucher par des terreurs aussi intéressées. L e plus beau
ministère du juge est de démasquer la mauvaise fo i,
et de proscrire les procès qui lui doivent le jour; voilà
pourquoi la loi abandonne les présomptions à sa con
science et à son discernement.
.
�(
30)
Ici il n’y a pas seulement une présomption non éta
blie par la loi, comme celle indiquée en l ’art. i 353 du
Code , il y a présomption légale, J u r is et de ju re.
L'art. 888, conforme à l’opinion de M ornac, réputé
partage” tout acte qui a eu pour objet de fa ir e cesser,
C indivision entre co-héritiers.
.
Si de-là nous venons au Code , de J id e instrum ent
nous y lirons qu’un partage est un fait qui peut être
constaté sans écritures. Itzstrum entis etiam non interve*
n ien tib u s , semeL divisio recte fa c ta non habetur irrita .
( L . 9 .)
Il en est de m ê m e , à plus forte raison, si Pacte à
été dressé, et ne se trouve plus. A m is sis etiam ( instrumentis ) quœ intercesserant, non tolli substantiam
çeritatis'placuit. ( L. 10. ) I
- On ne manquera pas de répondre à ces textes que la
loi française ne les admet pas, puisqu’elle veut un écriit
pour les conventions excédant i 5 o fr.
Sans doute unei conventions à fu tu r a besoin d’être
écrite pour faire fo i, mais une convention exécutée en
a-t-elle eu besoin? Ce serait méconnaître la loi que
d’exagérer
ainsi.
O
v
Si j ’assigne quelqu’un pour me délaisser son c h am p ,
'que je dirai avoir a c h e té , je serai éconduit sans diffi
culté , parce que je devais prévoir qu’on pourrait re4 user la tradition. Mais si déjà j ’ai la maison, et que
l ’acquéreur ait reçu mon a r g e n t* et ne le désavoue
pas, alors le contrat do ut des est parfait ^ et la néces
sité d ’un acte s’évanouit.
�(
3
1
)
Mais si la Cour jugeait dans sa sagesse qu'il n’y a
pas ici de présomption légale> il y a au moins un con
cours de présomptions ordinaires, capable de prouver
l ’existence d un partage ; leur liaison et leur gravité
sont entraînantes.
.
, Un partage est demandé; on le refuse d ’abord jus
qu’à la majorité du fils; il y a reprise alors, et après
un court procès., il y a délaissement au x deux sœurs
d ’un lot égal.
Toutes deux accepten t, et le procès,s’arrête ; toutes
-deux sont en possession pendant vingt - quatre ans,,
sans rien demander au-delà ; l'une des sœurs avoue
le partage , l’autre le nie ; et précisément celle qui le
nie a vendu une portion de son lot.
Plusieurs sommes sont payées; les imputations chan
gent; on y relate un iraité ^ on y dit le nom du ré
dacteur de ce traité. Quand toutes les sommes sont
payées, l e sieur Sersiron écrit pour emprunter de L'ar
gent au sieur Boniol.
•,
L e sieur Boniol meurt sans qu’on songe à reprendre
un procès éteint j on va chez ses enfans, on vit f a - ♦
rnili.èrement avec e u x , on ne leur parle d ’aucun pro
cès à avoir,;, mais on s'instruit peu à peu de l ’état de
leurs..affaires ; on s'assure de leur ignorance absolue
du passé; alors on leur intente un procès; et combien
d ’asluce et de variation on met dans sa poursuite!
On dit d’abord qu’on n’a reçu qu’un domaine, jus- qu ’à c e 'q u e 'les mineurs^sachent^queJeur père en a
• ’ donné trois. On n ’avoue pas les sommes iç ç u e s , jus-
�(3 0
qu’à ce qu’ils aient retrouvé leurs quiltances. Quand
on est interrogé , on dit sur le même fait le blanc
et le noir. On bat encore la campagne sur le testament
de 1 7 5 4 ; et après l ’avoir discuté dans ses term es, on
en nie l ’existence; 011 ose encore-imprimer contre
une mère le soupçon d ’avoir fabriqué ce testament.
Ce n’est donc pas assez que les circonstances prouvent
le fait d’ un partage. L a mauvaise foi des adversaires
vient fortifier cette preuve : car si la Cour se décidait
à condamner des mineurs qui viennent franchement
exposer leur situation, ce ne serait qu’avec la convic
tion de la sincérité des demandeurs. Mais quelle con
fiance méritent ceux qui mentent ainsi sur plusieurs
articles. N e faut-il pas croire qu'ils mentent également
sur le point capital : semel m en d a x, semper m en d a x/
ce proverbe est rarement sans exactitude.
Cependant les sieur et dame Sersiron veulent se
donner un simulacre de sincérité. Si la quittance de
17 8 8 , disent-ils, parle du traité de M.* Lapeyre c’est
tom m e d’ un acte à f a ir e } et dans l ’incertitude s3il le
sera,
L a plus simple lecture d e ,c e tte pièce donne un
nouveau démenti à cette version : ( les'arrangemens
p r i s entre nous.......et dans le- ca s, y est-U d u , que
ladite
somme
de 436 fr. soit portée
d a n s le
tra ité
de M .e Lapeyre, sans quittance, la présente ne vaudra
que pout 7 6 4 fr a n c s ). Ces termes prouvent bien qu’on
parlait d’un traité déjà existant; car si alors il n ’eût pas
été
fait, comme on le dit dans l’interrogatoire; on avait
eu
�('3 3 ),
eu simplement le :p ro je t de jçharger :MV\ L a p e y r e d e -,
rédiger un traité; et si, par le fa it, on ne rav.ai^jjraii^is^
chargé de cette a f f a i r e , ril était inutile7 de! prévoir ce
qui serait ou neuserait pas dans<un aptp:¡noiljexistapt ;
il suffisait du siojple re^ù de i^^ppjfpy stfnsimpiitatipn ,
sauf à le rappeler,dañóle projetnd’jaçtei lorsqu’il s’agirait
de le signer. . . • •.•Ynu;',; oor^/ inoj ; [
M .e ;Lapeyre .est mort*? et les adversaires, ne crai
gnant . plus ses ^révélations Qse,fyt jinvoquer; le. té.moi>
i
gnàge de M;.ej Beaulaton ,- p/ir.ç^ ?que çla jquiUance i ne’
parlé ipáSe.dfc lux-i oi*ps'i<:í, oiíivíIücd n L /m'; ;-í: .tjsÍ oh
¿ 7 Mais; .qu’ils, prennent;’ garde. ! G e : respectable ; juris
consulte a su [aussi ceqili^s’estjpassç 5 ej|: quoique .Jetéms éfface, en général,ler;Sp,U;Veflir;.^
rentes , çm nei dput^ ,pas; qu’il
jsejjrappglle» très-bien
qu’il y a eu un traité. Lui-piême vint à Tracros^en 17 8 4 ,
¿ivec le sieur .Çhassaingj .çuré de-ServagnaL; Qeli^i-ci se
ï e t irá,}parce:q;uç;lp &fo§çr$iron, rp&rçti$ij: ,a^ejd^fenrce
•injiqrièiise icQntre îqu$ (j^ux^quii dÍRÍ$SLti$n;írijo^ pour
Tabréviation des dií&eulíé&w¿nais ;lev^ipiriç,' $ieur ç,uré
.' '
.
.
' 'c: ' '
de Servagnat,
vint
féliciter
O
* ensuite
—
\ la famille
' ' » ■' * sur ' Taccommodement dopt il,fu,t instruit.Xes dames P^yronet
et Sersiron se plaignaient(de,la/modicité ^e.lpujs lois;
et le sieur Peyronet, notaire à^Herment^leur répondit
qu’elles n’en auraient pas;eu autant en justice, et quo
.tout le bien n e rapportant pas 3,000 fr. de rente, on
leur avait beaucoup,trop donné.
...
. ,
v
Voilà ce que des renseignemens précis ont appris
aux héritiers Boniol; ils les prouveront si la Cour croit
5
�G 3 4 -))
cet fe^reurv^ nécessaire : ’et rie a ne p eu t em pêcher de
n j . l i n î f.-t'i; r t *, , > • i. j r 1:-Â ^ •*;
Jüéqti’ ifci tes héritiers»-Bbniolf n’ont pas même parlé
dii:;poiiit dé idftjit combattu ppr les adversaires, qui
prétëridènT 'qué leUr ^osseSsiori séparée de trois domaines
déplii> i ^8:4!]2riè! f^oiivte’ pais uiilpariageJ ,
Sans doute, la jouissance séparée pendant 10 ans n é
p rd u v ë ff>as dépLeiti d ro it iin* partage : cela est vrai.
- i {M àïâ Gèlë ne peut s’entendre ‘que de ceux - qui ont
jro üi 's’é|b'àréWërii? sütis ^pTbcèstét cdiiïme pari sufccessiort
de leur auteur. A u contraire, lorsque l ’un dès héritiers
é ta it d ’abord'én possession de; tout ^et qu’ ensuite après
tind^ dèm'aiïd&il àbândonrfe-à^on c o ^ h é iilie r un rlot
é g a l a i ;bë qü$ lui9éèrait-révénü^ !ilJÿ à rpréscmiptionide
partagé1/ ét lü jiï^tifee 3iè dôit' plus ordonner fce qué les
pattiés^elléé-rilênles !ô ïif ïé g ïé i l!V^
1 i: ’ r >n ' i; ;
«• Partage-pdiï 7Rou'sÎeâU“ Lacom be 3 doit êtref fait ÿ
ir- bien-rqii-oŸi ¿vt>*jélii; ¿épdré'meirt ^efa'dàtït fort iorigir1iéjufei' Sfeûfemèftff^éëir'énlongüô jduîssarice induit ;pârXiQèi^ f t i d ê è * é \ i ü k r ' é s > < p à r e x e m p l e , s ï
n’ c h a c u n 'a 'pà’s séd é séparém ent 'éga le*portion ,
’ou que^
t< n’ÿ ^jfehtfipi3à^gràndë •inégàlité;? : Pun - ait ¡fait la foi >,
« où rériciii^-déteiaratibn^é^km lot.
Partage; .sect.
« l ; ïeV n.'° :4 y èt ¿ect. llt ^ rii0 4 ».
Dèspéissës ét-Boeriufe insistent plus fortement encore
sur lës conséquences de cette jouissance séparée. Lebrun
donne pour exemple le cas où il y ju r a it eu iin »projet
de partage écrit ; après lequel chacun S& serait mis en
pos^ësfcîon. * ^
0
�<
35)
* Ainsiile? principe général :n"a» lieu, q u e , dans les cas
ordinaires d’ une¡po^se^siqn séparée, sans apparence de
partage y e.t5$v.fcCou-iaqri^égalij jê q^i i|iit ¡présumer^au
contraire
& p^s ;^ q ,[
VJOn \u .
• 'I c i; il .est) notoire-que res t^Qi^j dona.aiji^s val^i^nt plus
que ¡la portion spaternelle d e }a dàfine ;Sersir.on,;.§fi 1784;
et on voit que,la quiMange,,âé,i)7$8; ^quiya^Là la m en
tion postérieure ,/üd.i»i^?.paij‘k&ii$luiepj& chaîne:.une
ratificationoécrite .du ! p^iHflge, 0b luod n "inoy % °
L e point 1derdroit discuté pa;r les £iet}rfjet,daüie, Ser
si ron 7 loiriide le u rê tre favo rable, npifait donc qu’ajou*er<a.ux auires[pr.ésomptiops ac.çumu 1é es :; .qui ne lais^
sent raucuii doute 'sur la fin de, j&oh-rèeeYoirj de-leur
demande en noiivea à partage^ rrin -^j r y i W : 3 0 it*-:,- r\
Cii
:• *!>: . i[) r>ï .
i
:b
i
ci l:/j N? .§. ' . L L - i
K 'u V I r '
*;,
•v-c. 7 :
.. iic. , ./:r' -r
r n v'\X2ommentïie fe fa it. Le partagé?. ; ;i
"VI
11c~*
o i .'i ; t -
uir. ?.-M
h. 3- c
- Il est ¡visible que cette (qàestion nîest traitée par les
héritiers B o n io l, que pour ne pas laisseroç.roir;e ;iaux
,rê vèriesodtes ;sieur e t , dam e sSersiron, ’ iqAii' &<pjit.der jtt a u'vaise*formai\tousries'.points, avi*-,« *\uA ? ,»v\; Ç|U
Car^Vdès.queU’èxîstencertrun Cpactage .'est-(prouvée,
jîli efltiin-U'tilè deVsavpir; jcom.ment ah faut en «faire .un
‘auilte.’ALà cloi ne' xlo'nnai’tVqu^VidîXbaris p,our-,revenir:,
s'il y savait.'lésion'*/ icinilTiniyi a: eubaucunej 4 ésjpn:; et
¿tflieu’idd dix ians'v o h ren a laissé Jécoùler ¡Yingt-quatre.
A u reste, et comme les s.r et dame Sersiron veulent
�-
, ( .'3 6 }
apitoyer sur leur' sort * ils disent qu’il! leur revenait
plus qu’on ne leur a donné. Cette chicane a un autre
motif'^lus astucieux!; ils veulent grossir leur amende-r
ment pour éloigner la principale présomption d'ün par
tage ^parcé que si” le 'lo t qu’ils possèdent était’ Beau
coup !m 5 ins considérable que leur amendement réel}
la Cour-rie Croirait-pas qu’ils ont entendu partager définitivenfièàt ;; ët voilà leur espérance.t i -ji- ;
Pour venir à .bout de cette* démonstration, ’ils atta
quent *lés deux îéStamens de 175 4 et de! 1768;:
Quant auMéstament ide 1768 , ib.est.’d’un' même
itttéirêt pour Jâ^ntestationi; car »outre que les biens de
lâ’ tantene consistaient q u a u :quart de ceux de son marr,
la dameSersiron n’y amenderait d'après elle-même que
le tiers des sept huitièmes de ce quart : ainsi il suffit de
s’occuper de l’objet m ajeur/.qui est le testament du
père, fait en 1764.
Y
Après avôir nié ;sans pudeur l ’existence d’un partage
exécuté 24 ans, les sieur et dame Sersiron nient l'exis
tence d’uh'U‘e stament!?q u ^ otit connu et* .approuvé
pè&datit 4'oians;i
on
^
c
l.
Y* 'i ^ oi '• ,.t
-1 'Onodit^qu’ilspl’ont conriu- et,approuvé ; et en effet y
on lit, clans leur propre coritratcde m a ria g e., que la
,dame B on io l, m è r e , y énonce Le testam entilolographe
-d^Aiinet B o n io l\ d u 2.i:m ars 1 7 6 4 9,déposé a u x m in u tes
A ley ra ti n o ta ire cu G ia ty su iv a n t llàcte d u
3roj ù ï n . 17.64 ;
'donc' les^siôur et^dame*» Sersirlôni savaient en: 177 2 <Jue
•ce'testam'ênt existait et on ne leur^en cachait pas le
-lieu de dépôt.-^ tinn-b io *.? i-'A
�( 3? )
A la v é r ité , commetils le disent i r e s - b i e n , on ne
leur montra pas la minute de ce testament, parce que
sans doute l'usage n’était pas alors de montrer les mi
nutes, plutôt que les expéditions aux demoiselles qui
se mariaient : mais ce qui était d’ usage alors, c’est qu'il
fallait attaquer dans les 10 ans les approbations qu’on
avait données. Or, 40 ans(se sont passés sans attaquer
ce testament ainsi approuvé.
;
1,
L e notaire Alleyrat était vivant en 1 7 7 2 ; ils pou
vaient demander à voir sa minute ; ils le pouvaient
-encore en 1777? lorsqu’ils formèrent leur d em an d e,
lorsqu’ils élevèrent des doutes sur la ¡validité des leo-s.
et que M. Chabrol fut consulté sur Le vu du testament,
le 6 mars 1777.
'
-,
. Il y a 25 ou 3 o ans que le notaire Alleyrat est mort,
après avoir délivré une première expédition à la dame
B o n io l, une seconde à la dame P e y r o n e t , et • sans
•doute line troisième à la dame Sersiron qui n’en con
viendra pas, parce qu’elle nie tout,* mais qui ne fera
croire à personne qu’elle seule n’ait pas voulu en avoir
u n e, lorsque précisément elle seule a élevé des con.r
testations sur ce testament.
!
Nous avons déjà dit, que d’abord la dame Sersiion
avait conclu à ce que le teslament de 1754 ne valût
que pour le quart du mobilier , parce que cela résultait
.des ternies ds cc testament.
Après cet aveu formel de la par finie connaissance
d’ un acte déjà médité pour son intérêt , la dame Sersii’on revient sur ses pets au mois d ’août 18 10 , pour dire
�( 38 )
à ses neveux : «M ontrez moi ce testament : je soutiens
« qu'il n’existe pas ».
' Cependant il existe deux expéditions fort anciennes
de ce -testament ;le*iotaire qui les a délivrées est mort
il y a plus de 2 5 ans, et il est visible ^qu’elles sont an
térieures à 1777.
; .
C ’est un testament olographe, d i t - o n ; il ne vaut
que quand il est signé, et comment vo u le z-v o u s que
-la signature soit reconnue par nous, si nous neila voyons
pas.
Où est donc le besoin de «ce tte reconnaissance d'écri,ture pour un testament<dôntrl'auteur est mort il y a
f45 ans? ‘ '
' Ji
••’ ’ .
11 ne s’agit pas ici de l’adtigé non creditur referen ti 7
ni m êm e’ de celui In antiquis enunciatura probant.
;Car l’expédition originale existe; elle est prise sur l'acte
[m êm e; en conséquene elle fait pleine foi en justice.
I/a rl. i3 3 4 du Code civil porte : <r Les copies, lors« que le titre original subsiste , ne font foi que de ce
« qui est contenu au titre, dont-la représentation peut
* toujours être demandée
~
^ Lorsque le titre original n existe p lu s , les copies
a* font foi d’après les distinctions suivantes:
« i.° Les grosses ou premières expéditions fo n t la
« même f o i que Coriginal, etc. »
Ainsi la loi a prévu la perte des titres ; elle n’a pas
exigé qu'on prouverait com me nt il s'est perdu, ainsi
que le disent les adversaires ; lorsqu’il en existe des
expéditions originales , il suffit de les représenter.
�( 39 )
Outre celte preuve Légale, les héritiers Boniol rap
portent , i.° l’extrait du répertoire du notaire chargé
de ce testament; 2.0 le certificat du contrôleur qui en
a enregistré la minute; 3.° les quittances des legs par
ticuliers qui y sont contenus.
S’il faut, de la part d e la dame Sersiron, une recon
naissance de l’écriture de son père , elle la trouvera
dans son contrat de mariage et dans les actes de pro
cédure où elle a commenté et chicané tout à son aise
sur les expressions de ce testament.
L a dame Sersiron devait réfléchir à tout cela avant
d’insulter aux mânes de sa m è r e , jusqu’à l’accuser
d’avoir fabriqué un testament, et avant d’attaquer la
probité d’un notaire qu’elle flétrit aussi d ’un soupçon
de complicité. Mais plus une cause est déplorable ,
plus l ’intérêt suggère des moyens honteux aux plai
deurs qui, per f a s et n e fa s , voudraient réussir.
M ,e D E L A P C H I E R
ancien avocat.
M . e D E V È Z E , avoué- Licenc ié.
J
■
♦
A R I O M , de l’imprimerie du Palais, chez J.-C . S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boniol, Jacquette-Gilberte. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
successions
partage
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Dame Jacquette-Gilberte Boniol et le sieur Jean Bourdillon-Dugravier, son mari ; dame Marguerite Boniol et le sieur Charles Arragonès de Laval, son mari ; et demoiselle Marie Boniol, tous propriétaires, habitans de la ville de Clermont-Ferrand, intimés. Contre Dame Marie Boniol et le sieur Gilbert Sersiron, son mari, propriétaires habitans du lieu de Roure, paroisse de Saint-Pierre-le-Chastel, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1754-Circa 1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0421
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Pierre-le-Chastel (63385)
Rights
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Successions
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�MEMOIRE
POUR
Joseph
A
D U B I N , P i e r r e M O U R G U Y E et G
a b rie lle
B A R E Y R I E , fem m e B A P T I S T A L , cu ltiv ateu rs,
habitant au village de M o n c e l, com m un e de SainteEulalie, appelans et défendeurs en p é rem p tio n ;
CONTRE
L e sieur A n d r é C A B A N E , se d isa n t ancien ferm ier
de La terre de S a in t-C h a m a n t, in tim é et dem andeur.
;
‘
7
'
L e sieur Cabane prend le prétexte d’ une pérem ption
pour poursuivre l’effet de plusieurs sentences féodales,
contre les appelans, qui cependant ont régulièrem ent
payé ce q u ’ils doivent eux-m êm es, mais que la pagésie
forcerait de p a ye r des sommes considérables p ou r les
cens de tout leur village.
i
�Ca )
L a révolution a éteint la pagésie et la féodalité; le
sieur Cabane l’avo u e : il avou e aussi qu’ une dem ande
en pérem ption d’appel a pour résultat d’obtenir la
confirmation de la sentence attaquée; d ’où il faudrait
conclure que si le législateur a annullé la sentence et
l ’appel , il s’ensuit nécessairement qu'il ne reste plus
de procès en pérem ption.
Mais ce n’est pas ainsi que raisonne le sieur Cabane.
Il dit que des sentences rendues au profit du seigneur
p e uven t n’être pas féodales ; que d’ailleurs il n’y a
procès que sur la pérem ption d ’ un a p p e l, ce qui est
un procès indépendant de l’appel ; d ’où il conclut que
la Cour doit juger la p é rem p tio n , sans s’inquiéter de
l’objet pour lequel on plaide.
V o ilà tout le systèm e que les appelans ont à co m
battre ; mais en prouvant q u ’il n ’y a ni pérem ption
de f a it , ni procès à ju g e r , ils se préserveront d’une
injustice criante qui aurait pour résultat de les forcer
à payer la dette d’a utrui, sans avoir aucun m o yen de
recouvrem ent.
FAITS.
L es agens du sieur de L ig n e ra c, seigneur de SaintCham ant et S a in t-M a rtin , formaient presque annuel
lem ent des demandes contre plusieurs censitaires, et
obtenaient sentences sur sentences.
Cette multitude de poursuites , gardées par devers
eux , n’est certainement pas une preuve de n on paiement. On sait que le moindre retard occasionnait
�(3)
des diligences, toujours en pagésie contre les prin
cipaux tenanciers, et toujours avec des réserves des
condamnalions précédentes.
L e 6 fevrier 1 7 6 4 , Gabriélle Berghaud et Louis
M o u rg u y e furent assignés à la requête du marquis de
L ig n e ra c, seigneur de S a in t-C h a m a n t, devant le juge
de Sain t-M artin , com m e tenanciers de tout ou partie
du village M o n c e l, pour payer audit seigneur trentehuit setiers seigle, trente setiers a vo in e , sept livres un
sou a r g e n t , e tc ., pour les cen s, rentes et droits sei
gneuriaux d u s a u d it seigneur, sur ledit v illa g e , par
reconnaissances solidaires, et c e , par chacune des trois
dernières années échu es, avec l ’intérêt : le sieur de
L ign erac termine par indiquer le paiem ent à faire
entre les mains du sieur C a b a n e, son ferm ier-g én éra l,
a vec réserve de tous autres dus, droits de lods, etc.
Sur cet ex p lo it, le juge du seigneur rendit une
sentence par défaut le 17 mars 1764. L e sieur Cabane
en rapporte une copie in fo rm e , et sans form e exécu
toire.
Aussitôt que les autres censitaires du village furent
informés de cette demande en pagésie qui allait re
tom ber sur e u x , ils s'en plaiguirent. O n voit par une
requête du 17 mai 1 7 6 6 , que les nom m és L a b ru n e ,
A lz ia c , Louis Berghaud et M e y lia c articulèrent avoir
p ayé exactement leurs cens au sieur Cabane , qui
endossait leurs paiemens sur les liéves sans donner de
quittances; ils dem an dèren t, en c o n s é q u e n c e , p e r-
�( 4 )
mission de l ’assigner pour vérifier le fait; et leur donner
quittance des sommes par lui reçues.
Le
juge donna
une simple ordonnance portant
permis d ’assigner; et ce qui ne sera pas vu sans éton
nem ent , le sieur Cabane interjeta ap p el, au parlem ent,
de cette ordonnance d u 'j u g e , qui permettait de l’as
signer pour déclarer ce q u ’il avait reçu. C e ne serait
donc pas lui qui aurait obtenu les sentences qu’il s’ad
juge aujourd’h ui? car a u r a it- il; osé étouffer la voix
de ceux q u ’il poursuivait indirectement en la personne
de leurs co-paginaires.
>
L e 18 janvier 1 7 6 8 , Louis Bareyrie et Louis M ôurg u y e furent assignés à la requête du seigneur, pour p a ye r
solidairement les dernières années des cens du village. L e
29-février 1 7 6 8 , le juge du seigneur rendit une autre
sentence par d é fa u t, q u i'a d ju g e lesdites conclusions.
Elle est dans la m êm e form e que la précédente.
Pendant que ces poursuites étaient dirigées à la re
quête du seigneur, contre B areyrie et M o u rg u y e , il
en existait d ’autres contre François
D aub in en vertu
j
de sentences obtenues contre lui en 17 5 9 et 1 7 6 1 ,
pour la m êm e pagésie. Ses meubles et ses bestiaux
furent exécutés le 14 mars 1 7 7 1 , avec dép lacem en t,
toujours à la requête du seigneur.
L e 4 mars 1 7 7 4 , Louis M o u rg u ye et ledit Joseph
Daubin furent assignés en pagésie pour payer les trois
dernières années du ténem eut , toujours à la requête
du seigneur, et ils y furent condam nés par d é fa u t, par
sentence du 27 août 1774»
�l 5)
Ils ont été encore assignés en 177 8 e t 1 178 1 , et
condam nés par sentences des
19
décem bre
177 8
et 17 décem bre 178 1 5 toutes ces sentences sont sans
form e e x éc u to ire; la dernière seu le-est signée du
-greffier, maïs en seconde expédition. Il paraît que
ces mêmes sentences furent successivement attaquées
par appel porté à Salers ; aucune des parties n ’a les
procédures qui y furent faites.
L e 2 n ovem bre 1 7 8 4 ,
'
,
4e sieur C a b a n e , en qualité
de ferm ier générai des terres- pour lors appartenantes
a u sieur de L ig n e r a c , fit • signifier les sentences de
1 7 6 8 , 1 7 7 4 , 1 7 7 8 et 1 7 8 1 ’ à L ouis B a r e y r ie , Louis
M o u rg u y e et Joseph D a u b in , a vec som m ation de les
e x é c u te r, et assignation en liquidation des grains.
'
C e u x -c i1notifièrent au sieur C a b a n e , par exploit du
1 7 novem bre 1 7 8 4 , qu'ils persistaient dans l’appel déjà
interjeté des deux premières sentences, et q u ’ils inter
jetaient appel des d eu x d ern ières, co m m e n u lle s, in
compétentes et attentatoires à l’autorité de la sénéchaus
sée d ’A u vergn e , saisie de la contestation ; en consé
q u en ce, ils assignèrent le sieur Cabane à y p r o c é d e r ,
com m e se d isa n t ancien ferm ier et aux droits du sieur
de L ig n e r a c , tant pour lui que pour ledit s e ig n e u r ,
dont il prenait le f a i t et cause.
L e sieur Cabane se présenta, sur cet a p p e l, le 10
février 1 7 8 6 ; il dit que sa présentation ne fut suivie
d’aucunes autres procédures.
L e 1 3 août 1 7 8 8 , il demanda la pérem ption de
T a p p e l, et obtint sentence par d é fa u t, le 14 juillet
�(,6)
1 7 8 9 , qui prononça ladite pérem ption; le 4 août 17 8 9 ;
les B areyrie en interjetèrent appel simple au parlement.
O n ignore s’il fut pris des lettres de re lief sur cet appel,
et si le parlement fut saisi. L a révolution a d évoré
ou paralysé tout ce .q u i tenait aux matières féodales,
et il n'est pas surprenant , ni que la trace de ce qui
a pu exister soit ¿perdu, ni que toutes les parties aient
gardé le silence depuis 1 7 8 9 .
... :
..
L es lois de.r.793 ayant ;cc>ndamné aux flammes les
titres et sentences qui porteraient signe de féodalité
ou qui la renseigneraient, certainem ent le s.r Cabane
a dû s’y - c o n fo r m e r , ely.vpilà pourquoi il n ’a plus les
expéditions exécutoires des sentences du sieur de L i gnerac ; voilà ,pourquoi ne . réclam ant r ie n , pendant
vingt an s, contre des censitaires-qui avaient payé leur
item ré g u liè re m e n t, et qui ne devaient plus payer la
portion des autres, tous les d ocum ens, toutes les traces
de leurs procédures se sont perdues en presque totalité;
et aujourd’hui on veut qu’ils en soient victimes.
L e sieur Cabane s’est souvenu en 1809 de l ’appel
de 1 7 8 9 , et il a pensé que s'il pouvait l ’attaquer par la
pérem ption , il obtiendrait par cette voie indirecte une
confirmation de se n te n c e / q u e la C our ne pourrait pas
prononcer directement.
En con séquen ce, par exploit du 22 février 1 8 0 9 ,
le sieur C abane a assigné en la C our d’appel Joseph
D a u b in , et Louis M o u rgu ye ( d é c é d é p o u r voir dé
clarer l’appel simple-, du 4 !aout 1 7 8 9 , n u i, périmé et
com m e non a v e n u , et voir ordonney l ’exécution de
la sentence attaquée.
�(7 )
P ar autre exploit du 1 3 juillet 1 8 0 9 , il a'assign é
M o u rg u y e fils , et Gabriellë B a r e y r ie , fille de L o u i s ,
pour voir déclarer.le m êm e appel de 1 7 8 9 , pêri> désert
et n u l y v oir en conséquence ordonner ¡’exécution de
la sentence attaquée.
1: L es parties en sont venues à l ’audience de la C o u r ,
le 10 mars 18 10 ; .les appelans ont soutenu q u ’ un
appel sim p le, et non suivi d'ajo urn em en t, ne pouvait
pas tom ber en pérem ption , et que la désertion ne
pouvait jamais avoir lie u , sans que l'appelant eût droit
de ren o u veler son appel.
; L a Cour n ’a pas débouté expressém ent le s.r Cabane
de ses demandes en pérem ption et désertion , mais
elle a ordonné que les parties mettraient leur procé
dure en état* sur l ’appel du 4 août 1 7 8 9 , et a remis
la cause d'un m o is , pour y . statuer.
L e sieur C a b a n e , en notifiant cet arrêt, le 22 m a i,
a u x appelans ¡( les a assignés co m m e cor-debiteurs so
lid a ir e s , pour .lui voiii a d ju g e r 'le s conclusions prises
par lesi deux exploits,de 18 0 9 , ¡et ew tout cas, pour
procéder sur 1’appel >de 1789 7 et vo ir prononcer le
bien -ju gé de la senlence du 14 juillet 1789.
..
Ces
conclusions prouvent que. le s,r C aban e n ’ab an
donne pas sa prétention de faire, déclarer cet appel
péri et désert. C epen dan t, quoique, l ’arrêt de la C ou r
jie soit,pas m o tiv é , et ne statue pas expressément sur
ses premières conclusions, il est évident que la C o u r
n'a pas entendu
les
adopter,; ni m êm e les laisser re*
�(8 )
p ro d u ire; eau elle n ’aurait pas ordonné, de «faire une
procédure sur un appel périm é ou désert.
\ Mais puisque le sieur Cabane ne veu t pas se,croire
ju g é sur ce point, les appelans le prendront au.m ot*
pou r dem ander eux - m êm es un 'arrêt»¡positif sur sesf
dem andés.ën pérem ption et désertion y qui étaient la
seule chose à ju g e r , f a u f à lui à recom m encer toute
procédure nouvelle qu’il avisera.
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M O Y E N S .'. •
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Il né p e u t y . avoir lieu à pérem ption pour un appel
simple : car l ’ordonnance de Roussillon ne fait périm er
que yles \ in sta n ces} et un appel 'simple n ’en est- p a s'
une , dès; q u ’aucun juge n ’e n est saisie T e lle a été sud
ce point la jurisprudence constante.*
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. "il. !
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Quant à.'la désertion , elle n'est point opposée à.
D a u b in y assigné par le premier, exploit du n février
18 0 9 , qui rie contient aucunes conclusions à cet égard;
I l suffit donc d ’y répondre au nom des M o u rg u y e et
B areyrie.
11
■
> ; {-W
'
- D ’abord la désertion est incom patible a vec la p é
rem p tion ; car si un appel pouvait périmer^ il ne serait
pas désert. L e sieur C abane devait d ’abord conclure à
la désertion, qui était la prem ière fin de non-recevoir
à opposer dans Tordre de la procédure; il a dem andé
que Fappel fû t déclaré péri et désert. A i n s i , en s’oc
cupant
�( 9 )
■
cnpant de la p é rem p tio n , il a renoncé à la désertion;
de m em e que s il eût conclu au bien jugé et à la p é
rem p tio n , il aurait renoncé à la pérem ption : à plus
forte îaison faut —il lui dire qu ayan t assigné D aubin
et M o u r g a y e p è r e , en février 1 8 0 9 , sans parler de
désertion, il n ’a pu y conclure contre M o u r g u y e fils
par un exploit postérieur.
L a désertion, au reste, n’est plus prononcée par les
tribunaux depuis 1790 ; lorsque des tribunaux
ont
vo u lu renouveler cet ancien u sag e, la C our de cas
sation n ’a point approuvé leurs décisions, et cela par
un m o tif bien sage et bien simple.
C ’est q u ’avant la révolu tio n , la jurisprudence gé nérale était d’accorder trente ans pour interjeter appel,
en sorte que la désertion prononcée ne produisait que
des effets frustratoires , puisqu’elle n’ em pêchait pas
de refaire l ’appel : aussi plusieurs parlemens avaien t
l ’ usage de converir en anticipation les demandes en
désertion q u i , dès-lors, se réduisaient à des dép en s,
com m e le dit B r o d e a u , lettre P , n.° 14.
Mais depuis que les appels sont limités à un délai
plus c o u r t , c ’e st-à -d ire , à trois mois et à dix ans, la
désertion a paru un abus à r é f o r m e r , puisqu’on ne
peut pas la faire m arch er avec le droit de recom m en cer
un appel pendant trente ans. V o ilà pourquoi la dé
sertion est absolum ent to m b ée en désuétude : on en
est convaincu par le grand nom bre d arrêts qui se
trouvent aux Bulletins de cassation de Fan 7 , de l ’an 9,
de l’an 10 et de l ’an 11. Par-tout on voit les désertions
3
�( IO )
proscrites; et nulle part on ne voit q u ’il en ait été
toléré une s e u l e , m êm e par simple rejet.
Il y a donc lieu , en statuant sur les demandes du
sieur C a b a n e , de le 'd é b o u te r de ses conclusions en
pérem ption et désertion. O r , on le répète , c’était là
l ’objet unique de ses conclusions avant l’arrêt du. 10
mars 1 8 1 0 ; et il ne peut pas les confondre avec le
bien jugé de la sentence de 1 7 8 9 , puisqu’au lieu de
se départir de sa’ prem ière d em a n d e, qui y était en
core plus in com p atib le, il la renouvelle et y persiste.
«
C ep en d an t, si la C o u r croyait devoir statuer sur.les
nouvelles conclusions du si’e ur C abane , il s’agira de
savoir au fo n d ;s’il ,a p u reprendre une procédure de
pérem ption en m atière fé o d a le , au préjudice des lois
qui ont éteint'tous les ptocès y relatifs; et subsictfairement,- s’il y a pérem ption.
.
, . . ?.
- A bordons , ^dès à’ présent , le subsidiaire, qui sera
plus briévem ’eiU e x p é d ié , et disons qu'il n ’y a pas de
pérem ption.
’
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»I
,
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r
*
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*
L îappielportéén la séfléchauss<$6 d ’A u v e rg n ç , était un
•appel'¡d'incompétence. On soutenait que l$s premiers
appels ay a ni saisi la séuéchapsséë', le ç.r Cabane n ’avait
revenir devant le juge du seigneur poui* dem ander une
-pagésie;en vertu de reconnaissances de cens soumises
ou juge supérieur.' En effet, la sénéchaussée seule é tci.it
'Compétente p o u r accorder ou refuser les arrérages de
ces mêmes c e n s , échus pendant le p ro cès; il fallait
�(II )'
y conclure devant e l l e , et. non saisir un juge déjà
dépouillé, pour multiplier les sentences et les appels.
Cet appel d incom pétence n’était pas susceptible de
péremption , 'suivant l’opinion »des auteurs, conform e
au texte m êm e de la loi.
Rousseau -X a c o m b e ., ; v.° péremption , n.°* 1 2 , dit
q u ’ elle n’a pas lieu è's-causes o u :procès du d o m ain e,
n i ès-appeLs ci’incom pétence, parce que cela regarde; Le
droit pubLic. n ,
'
■
’
“ C ette décision est'co n fo rm e à la loi Prpperandum
d’où est tirée l’ordonnance de Roussillon. Censemus
itaque omnes Lites non ultra triennii meta s , post Litem
contestatam , esse protrahendas. {ecccëptis tantum modor
causis quœ a d \ ju s JiscàLe pertin en t, v'eL quœ a d p u bLicas respiciunt fun ctiones).
r
• , - j :;
N ’y a u r a i t - i l pas en effet un in con vénient graye .
que le silence d ’ une p artie, souvent occasionné par la
difficulté de réunir des co-intéressés, ou par des .pour
parlers d ’arrangem ens, pû t donner la force de choseju gée à des sentences rendues par des personnes sans
ca ractère, et peut-être quelquefois dans dés matières
où il serait choquant que ces sentences ne fussent pas
réform ées?
^
!
C ertes, les juridictions sont de droit p u b lic, cela est
incontestable ; et s il est encore incontestable q u ’ une
partie ne peut déroger au droit public par une co n
vention
particulière, com m ent le p o u rra it-e lle par
son silence ? - C ’est donc une monstruosité que la loi
a voulu prévoir et éviter, en disant que la pérem ption
4
�( 12)
n ’ aurait pas lieu pour ce qui tient au droit p u b lic, aux
fonctions p u b liq u e s; en un m o t , à l’ordre des juri
dictions.
Mais quand la pérem ption eû t pu exister ic i avant
1 7 8 9 , il est impossible d ’adopter que la procédure y
relative ait seule resté debout , quand l ’appel et les
sentences sont anéantis co m m e chose féodale.
A cela le sieur Cabane, objecte, i.° q u ’il ne s^agit
pas de féodalité , parce quë c ’est uu ferm ier qui est
créancier, et que la suppression n ’atteint pas les fer
miers 5 2.0 que quand l ’objet du procès serait féod al, )
il n’est question que de juger s’il y a pérem ption ; ce
qui est une procédure indépendante.
R épondons d’abord que le sieur C abane se dit fer- >
m ie r, sans l’établir par des b a u x de ferm e. Il a pris,
celte qualité dans une signification .des senten ces, en
1 7 8 4 , et l’appel lui en a é té : notifié, co m m e se disant*
ferm ier et aucc droits du sieur de Lig n erac,
>
Q uo iq u’il en ' s o i t , com m ent l’objet du procès ne
serait-ii pas fé o d a l, lorsqu’il s'agit de cens demandés
à trois censitaires, par le seigneur, et en celte qualité,^
pour la totalité de la redevance assise sur un iénem ent.
A la v é r i t é , il y a des cas où les fermiers ne sont*
pas atteints par la suppression féo d a le, mais c ’est quand
ils se sont procuré un titre personnel, em portant no
vation.
-i
•Une lettre du com ité de législation, écrite au tri-,
bun al du district de R io m , le 9 prairial an
a décidé
q u ’ une rente constituée au profit d ’un fermier,, en 1 7 3 0 ,
�(.
13
)
devait être p a y é e , quoiqu’elle dérivât d’arrérages de
cens. U n e lettre du ministre de la ju s tic e , écrite au
commissaire du d irectoire, à P a u , le 22 pluviôse an 7 ÿ
décide de la m êm e m an ière,
pour une obligation /
consentie à un f e r m ie r , pour cens. R ien n ’est plus
légal que ces décisions, puisque Le ferm ier était censé
avoir touché ce q ui lu i était d u , et l ’avoir échangé
contre une obligation q u i, par cette fic tio n , rentre'
d a n s la classe des autres obligations, 'M ais cette r é
flexion du ministre prouve par e lle -m ê m e que le fer
m ier n’aurait pas été exem p t de la suppression, s’il
n ’y avait pas eu engagem ent personnel h son p r o fit,
dont refiait 'avait été de dénaturer Corigine fé o d a le ,
e t évid em m en t le titre ne cessait d’être féodal que
par novation.
L a n ovatio n , en effet, peut seule em pêch er de re
garder com m e féodal ce que la loi déclare tel. N ovatio
est p rio n s d e b itiin aluum debitum tra n sf usio
p erim a tv r.
ut prior
Si donc la prem ière dette est étein te , il
n ’en reste q u ’ une entré de simples particuliers, et la
féodalité est évanouie. M a i s , hors ce cas dirim ant, la
règle générale reste; et il est aisé de m ontrer que les
fermiérs ne sont pas à l’abri des suppressions féodales.
L a loi du 2 5 août 1792 , supprim e tous les droits
féodaux. L ’art. 10 porte que les arrérages; m êm e ce u x
dus en vertu de ju g e m e n s , ne sont pas exigibles; l’art.
12 éteint tous les procès relatifs aux droits féodaux.
On a quelquefois argumenté de Fart. i 3 , qui c o n
serve au x fermiers les« actions qui leur sont réservées
�( H )
par Fart. 3 j de la loi du i 5 mars 1 7 9 0 , de se faire
restituer, les sommes payées aux seigneurs, pour les
droits é c h u s , depuis Le 4 août 1789.
f M ais en lisant cette loi de 1 7 9 0 , on rem arque qu’ elle
est relative aux droits de bannalité et de justice, sup
primés le 4 août 178 9 ; fil y est dit que les b au x sont
résiliés depuis la suppréssion > et que si les fermiers ont
p a y é au seigneur.des pots de v i n , ils les répéteront au’
prorata de la non jouissance.
,
, , '
?
U n e dernière loi du 28 nivôse an 2 , a déclaré ne
pas com prendre dans l ’annullation des procès féo d a u x ,
ceux intentés, i.° p ar:des vassaux ou censitaires, pour
restitution des droits exigés'd’e u x ; 2.0 par des ci^deyant
ferm iers, pour, restitution des pots dé vin qu'ils .ont
avan cés, ou des fermages qu’ils ont payés .à raison des
droits qui leur étaient afferm és, et dont ils n’o n t pu
jo u ir...
' ;< 'j fu!-;- b u>* p,i -■
■
; (!
;.r . h -h w )' 1 .•*> .
A in s i, bien loin q u ’il résulte de ¡’ensemble des lois une
exception pour les fermiers 9 et un droit subsistant en
leur fa v e u r, contre Les censitaires, il faut en conclure,
au contraire^ que la loi ne s’est occupée d ’eux pendant
trois.fois>, que. rpour leur donner une action contre L&
seigneur, seulement y--et■
■
que , par conséquent , elle les
a laissés pour tout; le reste dans la règle générale de
la suppression,
à
moins? q u ’ils
n ’e u s s e n t,
com m e on
l'a diéjà dit ,. un titre nouvel et. personnel: . \ t
1 .>
C.e,'»point de droit se co n firm e quand* oit suit les lois
postérieure^ C elle !du 1.7rjuillet 179.3, en ordonnant
le brûlem ent de tous les titres i é o d a u x , y assujétit
�( ,i 5 )
tous les dépositaires defcdits titres f et:déclare qu3e.lle;y
com prend t o u s ju g em en s 'et a r r ê ts,qui porteraient re
connaissance des d ro its. féodaux , pu qui les rensei
gneraient. Ixes registres et cueillerets*sont désignés en
core pour le brûlement. Or, tout le. m o n d e se rappelle
que les ^fermiers furent les 'prem iersià brûler leurs re
gistres ' de recettes,
‘
•; :
\] •. î :
...s.
U n e autre p reu ve que la lo i r i exceptait personne,
•c ’ est qu’il fallut une exception -expresse^le <9 .frimair.e
an 2 y par esprit d ’équité en Sayem idhsoco-déàitéùns
jqui avaient p a yé la part de leurs- co>-.obligés: en
v e r tu d e1 la pagésie; et e n c o r e , ce- droit ne fut ouvert
q u ’ à celui qui p rouverait a vo ir.payé par autorité de,
\ ju s tic e . e i i t
: donc iin ferm ier ¿,aurait.-iL iun'>pri
v i l è g e , --sous p rétex te q u ’i l a '-payé son- ferm age (m ais
volon tairem en t), lorsque le co-débiteur poursuivi ^ mais
non c o n d a m n é , n ’aurait pas d’action en pareil cas, et
■¿supporterait la suppression.rx
;
P eu t-être bie h. élira it-o n ;pu^ accorder ce,, privilège
;à un fe rm ier, dans un tems où la jurisprudence exa
minait la vraie quaLité du: d e m a n d e u r , “ pour savoir
•s’il était seigneur ou non ; ca r'lo rsq u 'o n adm ettait le
-propriétaire lu i-m êm e à dem ander un cens sous p r é
t e x t e que l-abolition: n ’était p ro n o n c é e que contre Les
seigneurs , il était très-co n séq u en t que les ferm iers
réussissent par le m êm e motif.
Mais aucun; tribunal ne reviendrait à cette jurispru
dence, depuis l ’avis du conseil d ’é t a t , du
3 o pluviôse
�(
)
an i- r , et sur-tout depuis les décrets im périaux des i 3
messidor an i
3 , et 2 5 avril 1807, portant que Lorsque
Le titre ne présente aucune a m big u ité, ceLui auquel ce
titre est opposé, ne peut pas être a dm is a soutenir q u i l
n avait pas de seigneurie.
r
'
L e sieur C abane ne se dissimule pas que ces décrets
le condam nent visiblement ; mais il croit y échapper,
en disant qu'il y a chose jugée par les sentences qu’il
produit. C'est une double e r r e u r; car, i.° c'est dé
cider la question par la question e lle - m ê m e , puisqu’il
-y a appel de ces sentences , et que la pérem ption
q u ’il demande est* dirigée contre cet appel; 2.0 il crée
' une autre exception im a g in a ire , puisque quatre lois
successives ont annulié positivem ent le s ju g e m e n s et
arrêts portant condam nation de droits fé o d a u x , ce qui
p r o u v e que la chose jugée n ’est pas pour elle un titre
meilleur.
:
’
t
R em arquons encore , quoique ce soit sans une grande
u t ilit é , que ces 'sentences sont rendues au p r o fit d u
sieur de L ig n e r a c , seigneur, pour les cens de sa terre;
à la vérité , on voit à la fin du dispositif, que ce
seigneur indique le sieur Cabane com m e devant r e
cevo ir le paiem ent des condamnations : mais quel tour
de force ne faudrait-il pas pour profiter de ce bout
d’oreille, afin de changer le rôle des parties et effacer
les qualités du dem an deur! Cette argutie mesquine
peut-elle être proposée sérieusem ent, et ne serait-elle
pas indigne de la C o u r?
Il
�( i 7 J
I l suffit , sans d o u t e , de rem arq uer que it seigneur
seul est en qualité dans les sentences. Elles em portent
donc tout le privilège du cens.
Enfin, que le sieur Cabane réponde h cette question:
Si les censitaires avaient fait débouter Le dem andeur de
sa d e m a n d e, contre qui auraient-ils eu action pour les
dépens ?
Concluons d o n c, sur cette prem ière partie d e s .p r é
tentions du sieur C a b a n e , que l’objet des sentences
q u ’il poursuit est f é o d a l , et que rien ne peut les faire
excep ter de la suppression.
V o y o n s actuellem ent co m m en t une pérem ption
aurait le privilège inoui de neutraliser toutes, les lois
féodales, et de ressusciter, pour le sieur C aban e seul,
un genre d’action abandonné par tout le m onde et
par lu i- m ê m e , depuis la ré v o lu tio n , lorsqu’il s’est agi
purem ent de cens.
,
Retenons bien que la loi a supprimé non-seulement
les droits f é o d a u x , mais encore tous Les procès y r e
latifs.
A p rès les lois des 2.5 août 1 7 9 2 , et 17 juillet 1 7 9 3 ,
qui portaient expressément cette suppression, il paraît
q u e , sous divers prétextes, des poursuites eurent lieu
de la part de quelques ferm iers, et que des censitaires
eux-m êm es voulurent faire prononcer par les tribunaux
q u ’ils ne devaient rien. Alors une loi du 9 brum aire
an 2, déclara de nouveau nuls et com m e non aven u s,
tous jugernens sur les procès intentés a raison des droits
féodaux ou censuels, ensemble les poursuites fa ite s en
5.
�( i8 )
exécution desdits ju g e m e n s , ordonna que les frais pos
térieurs aux lois d'abolition seraient à la charge des
avoués qui les auraient fa ils , et défendit au x ju g e s ,
à peine de fo rfa itu re , de prononcer sur les instances
indécises.
T rès-c erta in em en t, après cette lo i, le sieur C abane
ne se serait pas cru fondé à poursuivre les censitaires
de Sain t-C h am ant ; et il a bien prouvé ^ par le f a it,
q u ’il partageait sur ce point l'opinion générale. C o m
m en t donc aurait-il aujourd’hui un droit qu’il n’avait
pas alors, et en quoi les lois seraient-elles devenues
plus indulgentes sur la féodalité ?
J a m a is , au co n tra ire , elles n ’ont été moins équi
voques depuis que les décrets im périaux ont prescrit
de ne pas considérer si te dem andeur est seig n eu r,
mais seulement si Le titre de sa dem ande est féodal :
car s’il n ’y a pas d’am biguité sur le t i t r e , il y a sup
pression.
E q u ivo q u eraît-o n encore sur cette ambiguïté , en di
sant q u ’un ferm ier peut poursuivre ? M ais a vec ce
cercle vicieux où a r r iv e r a it-o n , si ce n ’est à jugèr
de la féodalité par La personne du créancier? et c ’est
ce que la loi proscrit absolument. Sa sévérité est te lle ,
q u ’il n ’y a pas seulement suppression par le signe féo
dal, mais encore par le mélange de féodalité.
D ès q u ’il y a dans les titres opposés par le sieur C a
b a n e , signe ou m élange de
féodalité,
il ne reste à e n 1
tirer que deux conséquences incontestables;
i.° Si les sentences sont féodales, la loi les a déclarées
�( 19 )
nulles et co m m e non a ven u e s, y eût-il arrêt ou choseju g é e ( L o i , 17 juillet 1 7 9 3 , art.
3 , 6 et 8 .) ;
2,° L annullation ne se borne pas au x sentences et
arrêts ; elle s étend aux poursuites postérieures ( L o i*
9 brum aire an 2 , art. i . er).
A in si, toute procédure tendant à rappeler ou faire
rev iv re ce que la loi a a b o li, est rép rou vée et inadmis
sible.
D ’après de telles lo is, u’ est-ce donc pas une p u é
rilité que de dire à une C ou r souveraine : Vou s n ’aurez
pas à juger l ’appel cPune sentence féo d a le • vous aurez
seulement à juger la péremption de l ’ appel d ’une sen
tence f é o d a le ?
A b u s des mots et pure cacophonie.
Quand il existe un ap p el, l ’intim é n'est pas réduit à
tin seul m o y e n de défense; il peut l’ attaquer par des
vices de f o r m e , des fins de n o n - r e c e v o ir , ou la p é
rem ption : tout cela est égal aux y e u x de la lo i; tout
cela rentre dans les exceptions du défendeur.
L e résultat uniform e de ces exceptions est d ’a rriver
a la confirm ation de la sentence attaquée par un appel j
o r , ce résultat est le but du procès : in oninibus respice
J în e m .
I l n’est donc pas permis de croire que la C o u r veuille
ju ger un fragment de procès sans regarder à son ori
gine et à ses conséquences.
U n e pérem ption d ’ailleurs est si peu un procès nou
veau, q u ’elle ne s’introduit pas par un exploit à domi
cile, et en i . re instance. L'usage a toujours été d e c o n -
�( 20 )
d u r e par r e q u ê t e , quand il n ’y a pas de décès survenu ;
et le code a c tu e l, article 4 0 0 , en fait un devoir. L e
sieur C ab a n e a lui-mêm e constaté cet usage, en signi
fiant sa dem ande en p é re m p tio n , par requête signi
fiée à procureur le 12 août 1788.
Il a don c/lui-m êm e considéré la pérem ption com m e
un m o yen de procès.
11 l’a proposée co m m e un e exception.
I l a condamné son propre système.
M ais quand on serait privé de le citer lui-m êm e pour
pro u ver qu’ une pérem ption d ’appel n'est pas un procès
nouveau et indépendant , la raison seule dirait que
quand le fonds du procès est a b o l i , il n'est pas plus
perm is de plaider pour la pérem ption que pour la
prescription.
,
f>
L a féodalité n ’est pas la seule matière abolie par la
révolution ; et il est sans exem ple que des procès re
v iven t sous prétexte de savoir s’ils sont périmés. N e
trouverait - 011 pas ridicule , par e x e m p le , que par
suite d’ un procès en m atière b én éficiale, un d é v o lu taire qui aurait obtenu un bénéfice co n teslé, vînt re
prendre d evant les tribunaux actuels la pérem ption
d ’ un appel y rela tif?
L a loi n’a permis q u ’en un seul cas de plaider sur
les matières supprimées 5 c ’est dans les retraits lignagers , et seulem ent pour les dépens. L à on pourrait re
prendre une dem ande en péremption ; mais l'exception
confirme la règle , q u i de uno d i c i t , de altero negat.
,Au d em eu ra n t, l ’idée conçue par le sieur C a b a n e,
�( 21 )
cPisoler une pérem p tio n , n ’est q u ’ un piège contre des
censitaires qui ne doivent r i e n , et qui seraient plus
victimes de la suppression de la féod a lité, que si la fé o
dalité existait encore.
E n effet, un arrêt de pérem ption emporterait de plein
droit la confirmation de cinq sentences féodales.
L es censitaires n ’auraient aucune voie pour en em
p êch er l ’exécution. L ’accès aux tribunaux leur serait
ferm é ; tous les degrés de juridiction seraient épuisés,
et le prem ier juge ne pourrait réform er une décision
ém anée de lui. L e sieur C abane ferait donc ex écu te r
sans obstacle des sentences dont l’arrêt aurait prononcé
im plicitem ent la confirmation : car quel juge pourrait
arrêter des poursuites faites par suite d ’un arrêt de la
C o u r?
Ces poursuites forceraient les appelans à payer la
dette d 'a u tr u i, sans m oyen s de répétition. O n dit la
dette d ’a u tru i, c a r , encore une fois., les censitaires,
poursuivis par le sieur C a b a n e , ont p a y é régulièrem ent
leu r portion des cens.
Ils prouvent par les quittances de cens à eux données
chaque année par les préposés du seigneur, sur un cahier
particulier, savoir 7par le sieur C a b a n e , j usques et compris
1 7 8 ° ; p a r le sieur L a d e n , depuis 1780 jusqu’à 1 7 8 6 ;
et enfin par le sieur C o u d e r t , pour les années posté
rieures.
Ainsi ce n’est que par la force de la solidarité et de
la pagésie que le sieur Cabane veut faire p ayer aux
D a u b in , M o u rgu ye et B are yrie ce q u ’ils 11e doivent pas»
4,
6
�( 22 )
Mais une loi du 20 août 1792 a supprim é la soli
darité; c’ est donc pour l ’éluder qu’il veu t se prévaloir
de sentences qui com prenn en t le cens de tou t un
ténemerit.
Si la solidarité existait encore . l'action serait re
poussée par l’exception cedendarum a ction u m .L e sieur
C aban e ne pourrait se faire: p a y e r , qu'en subrogeant
à ses action s, pour être t rem boursé du c o - d é b i t e u r
solidaire. ( C o d e civil, art. 20 37.)
O r , co m m en t pourrait - il subroger à une action
é te in te ? com m en t serait-il en état de justifier ce q ue
doivent les Ço-débiteurs? co m m en t et par quelle v o ie
les forcerait-on de p ayer une portion de cens in con n u e?
Ces difficultés ach èven t de m ontrer q u ’il est toujours
im prudent d'éluder les l o is , m êm e les plus sévères.
C hacun en profite dans ce q u ’elles ont d ’a van tageu x
pour lui ; et souvent hors de là , les taxe d ’injustice.
A u reste, il ne s'agit pas de montrer que la dem ande
du sieur Cabane causerait aux appelans un tort consi
dérable : il suffit d ’avoir prouvé q u ’elle tend à la v io
lation de la lo i, et ce serait s'aveugler v o lo n ta irem en t,
que d’hésiter à s’en dire convaincu.
M . e D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . e G A R R O N , Licencié-avoué.
A RIO M , de l'Imprimerie du Palais, chez J.-C. SA LLE S.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daubin, Joseph. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
cens
contentieux post-révolutionnaires
Description
An account of the resource
Mémoire Pour Joseph Daubin, Pierre Mourguye et Gabrielle Bareyrie, femme Baptistal, cultivateurs, habitant au village de Moncel, commune de Sainte-Eulalie, appelans et défendeurs en péremption; Contre Le sieur André Cabane, se disant ancien fermier de la terre de Saint-Chamant, intimé et demandeur.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1764-Circa 1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0420
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0625
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53804/BCU_Factums_M0420.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sainet-Eulalie (15186)
Saint-Chamant (15176)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cens
contentieux post-révolutionnaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53803/BCU_Factums_M0419.pdf
96ad767d43a4f4ec02b0e429940109ba
PDF Text
Text
\
/
MÉMOIRE
EN RÉPO N SE .
�COUR
I M PÉ R I AL E
MÉ MOI R E
D E RIOM.
EN R É P O N S E ,
POUR
-
...
I re. CHAMBRE.
Audience
.
2- juillet
D am e J e a n n e -M a rie D E C H A M P F L O U R ,
v e u v e d u sieur
de ontr o z i e r sieur J e a n - B â p t i s t e D E C H A M P F L O U R ; dam e M a r i è A n n e- F é l i c i t é D E
F R E D E F O N T , et sieur J e a n J a c q u e s D E
R O C H E T T E , son m a r i ; d e m o ise lle G a Br i e l l e D U R A N D D E P E R I G N A T , et dame
M a r ie D U R A N D , religieuse; tous habitans
P a u l-F ra nçois
M
de la ville de Glermont Ferrand, intimés
'
.
CONTRE
Dame A n n e - E m il ie . D E F E L I X veuve de
sieur C l a u d e - F r a n ç o i s - L é o n
propriétaire à Collongues, arrondissement d’Aix,
département des Bouches-du-Rhône, appelante ;
y
d e
en
PRE
S im ia n e
i
s e n c e
De dame MARGUERITE D E C H A R D O N , veuve
du sieur J a c q u e s - F r a n ç o is de M o n t a n i e r ;
C l a u d e - A n t o in e - J oseph D E C H A R
D O N ; demoiselle A nne D E C H A R D O N
18 io.
�(4)
dame P e k r e t t e D E C H A R D O N , veuve du
sieur V a l l e t t e d e R o c h e v e r t ; tous proprié~
taires7 habitans de la ville de Riom, intimés;
ET
EN
PRÉSENCE
De J ac ques - M a r ie L A V I G N E , et J e a n
P I R E L , habitans de la ville d’Ambert, aussi
intimés.
Q U E S T IO N S .
i°. L es religieux q u i, -par Veffet rétroactif de la loi
du
brumaire an 2 , ont obtenu un droit successif de
la nation représentant un émigré, ont-ils été soumis ci
rendre cette succession après le rapport de cet effet
rétroactif, lorsque les héritiers rétablis se sont trouvés
représentés par la république, comme émigrés ?
2.0. L a nation 7 dans ce cas particulier, ri1est-elle pas
censée avoir renoncé à toute recherche, et rCavoir point
voulu user du bénéfice des lois des 9fru ctid o r an 3 r et
3 vendémiaire an 4?
3°. L e sénatus-consulte du 6 flo r éa l an 10 r ia - t - il
rendu aux émigrés am nistiésy ou à leurs héritiers3 que
les biens qui se trouvoient dans les mains de la nation7
p a r la voie du séquestre y au moment de Pamnistie?
5
E s questions sont exactement les m em es q u e celles
1
p i’éseutécs p a r 'la dam e clc Sijuiauc» Il faut, y ajouter
�( 5 )
qu’elle se dit créancière du sieur Hector de SimiaiieJ
mort émigré , et que c’est en cette qualité qu’exerçant
les droits de la république, elle veut faire aujourd’hui
ce qu’elle prétend que la république auroit d û ju ire après
le 9 fructidor an 3 , c’est-à-dire, ôter aux héritiers d’une
religieuse ce qui lüi a été abandonné nationalement, dont
elle a joui dix ans et jusqu’à sa mort. Cette prétention
est si bizarre, qu’il faut être surpris de la voir élever
sérieusement, après tant de lois faites pour-rassurer les
possesseurs des biens transmis y à quelque titre que ce
soit, par la république.
-
• H' J >!) *111:
F A I T S .
:
,
ci
i.:
:
•
La dame Anne D elaire, épouse de M. de Clary , est
décédée le 27 octobre 1791.
Elle avoit institué pour .héritiers, par un testament de
17 8 7 , M . Hector de Simiane, son cousin paternel, et
M . de Chardon, son cousin maternél, à la charge,d’ac
quitter pour 240000 francs de legs.
Hector de Simiane, domicilié à A vign on , étoit sorti
de France à l’époque des troubles du Comtpt. Mais n’y
a y a n t
encore aucunes lois contre les ém igrés, il paroîfc
que M . de Simiane se présenta pour recueillir la suc
cession de Clary; mais en 1792 il fut inscrit sur la liste des
émigrés, et le séquestre fut mis sur ses biens.
Jusqu’au 28 mars 1793? ce séquestre n’étoit qu’une
occupation des biens. Mais la loi du^8 juillet 1793 bannit
à perpétuité les émigrés, et les déclara morts civilement,
Madame de Clary ayoit une sœur religieuse (Jeanne
�5
(-6 )
) : la loi du brumaire an 2 Tappela à succéder,'
puisque madame de Clary étoit morte après le 14 juillet
1789.^11 conséquence j Jeanne de Clary obtint à son profit
la mainlevée du séquestre, fut-déclarée héritière de sa'
sœur, et envoyée ëii possession de tous les biens, par un
arrêté du S nivôfce an 2.
= >* •
c
La loi du 9 fructidor an 3 abolit l’effet rétroactif de
la loi du 17 nivôse. E n vertu de ce changement de légis
lation, on dit que M . de Chardon reprit les biens maternels
de madame de Glary, qui~lui étoient légués par le tes
tament de 1787.
Si le sieur de Simiane eût été régnicole à cette époque,
il n’est pas douteux qu’il n’eût eu aussi le droit de re
prendre les biens paternels dans les mains de Jeanne
Delaire.
• Mais il étoit toujours suu la liste des émigrés *,
' Il étoit mort sans postérité avant la loi du 9 fructidor,
à A sti, et en état d’émigration;
■ Pur conséquent il ne luissoit à ses héritiers que les
biens dont il étoit propriétaire à l’époque de son ’décès.,
c’est-à-dire, le 12 prairial an 3.
C ’est ainsi que la famille elle-même l’entendît'‘à’ cette
époque-, et une circonstance assez singulière va le prouver.
* M . de Simiane mouroit sans enfans : il laissoit deux
héritiers ab intestat ,* l’un étoit le sieur Vidaud de la
T o u r , et l’autre étoit Jeanne D eîaire elle-même.
L e sieur Vidaud de la T o u r avoit seul qualité pour
disputer à la religieuse Delaire la propriété des biens
Glary, et pour prétendre qu ils etoient dans la mnssc de
la succession de Simiane.
Delaîre
�x i y
Bien loin dfen/agiu aipsi, M . Vidaud de la T o u rse
réunit à Jcanne Delaiye pour demander au directoire
executif la. radiation de M . de Simiane , et l’envoi en
possession de ses biens propres situés à: Avignon.
En effet;,/ils obtinrent; une radiation le 28 nivôse an 5.
. Alors, ils prirent la* qualité d’héritiers bénéficiaires de
M. de Simiane; et. en vertu d’un jugement du tribunal
de Vaucluse, du 24 thermidor an , ils firent commettre
•le» sieur Ghambaud, notaire à Avignon^, pour faire l’in
ventaire du mobilier de, la succession.
Il ne vint pas, même à' la pensée du sieur Vidéïud de
la T o u r (seul intéressé, on le rép ète,) de faire com
prendre dans ce mobilier de la succession Simiane
aucuue portion de la succession de madame de Glarjr,
L ’arrêté de radiation n’avoit été qu’une indulgence
éphémère due aux circonstances. Les lois de l’an 3 sur
les émigrés avoient fait des exceptions pour les émigrés
d’A vign o n , et la journée du 18 fructidor an
ramena
les mesures générales de 1793. En conséquence, une loi
du 22 nivôse, an 6 ordonna que les émigrés avignonnais
qui auroient obtenu des radiations par suite de la loi
du 9 fructidor an 3 , seroient réintégrés sur la liste.
L e séquestre fut donc remis sur les biens du sieur dq
Simiane, mais seulement à V aucluse, et il ne fut levé
qu’après l’amnistie générale, du 6 floréal* an 10.
A lors Jeanne Delaire se réunit encore au sieur Vidaud
de. la Tour;, son cohéritier.; ils obtinrent 1a. radiation du
défunt, le 26 frimaire an II*
Ils sollicitèrent l’envoi en possession des biens; et c’est
ici le cas de remarquer encore que M. Vidaud de la T our
5
5
�(8)
n’eut pas plus qu’en l’an n la pensée de se mettre en
possession des biens d’A u vergn e, qu’il ne fît de diligences
qu’à Vaucluse, et laissa la religieuse Delaire en pleine
possession des biens de sa sœur.
Il y a plus : car la religieuse Delaire vendit seule
tous les biens de sa sœur en l’àn 10 , après le sénatusconsulte , et le sieur Vidaud de la T o u r ne s’y opposa
'pas.
- Dans le même temps on cherchoit à empêcher la des
tination que M . le Préfet de Vaucluse vouloit faire d’un
domaine du sieur de Simiane pour une pépinière : le
sieur Vidaud de la T o u r réclamoit contre cette occupa
tion, conjointement avec Jeanne Delaire; et même après
la-mort de Jeanne Delaire il ne crut pas pouvoir vendre
ce domaine sans y appeler ses héritiers.
La dame Delaire, religieuse, est décédée le n messidor
an i i . Les familles de Chardon et Champflour se sont
partagé la succession comme héritières des deux lignes :
elles ont eu à défendre cette qualité dans deux procès ;
mais elles ont fait juger qu’elles étoient héritières, et
elles sont toujours restées en' possession.
La daine Félix de Simiane s’est elle-même adressée à
elles en cette qualité, le 8 février 1808, non pas pour
leur disputer les biens, ni former des demandes hypo
thécaires , mais seulement pour faire liquider à Avignon
ses reprises contre elles, comme héritières du sieur de
Simiane, par représentation de la religieuse Delaire.
Ce seroit peut-être une triche fort difficile pour la dame
Simiane de justifier ces reprises, ¡orsqu’ayant vécu à.
Asti- jusqu’à la mort de> son parent, elle s’est emparée de
tout
�(9)
tout son mobilier, de toutes les ressources qui les faisoient
exister l’un et l’autre hors de France. Et elle vient aujour
d’h u i, comme héritière de sa fille par les lois actuelles >
reclamer la succession de son fils et l’éffet d’un testament
qui a rendu ce dernier créancier, du chef de son père,
du sieur de Simiane, mort à Asti.
Quoi qu'il en soit de ce circuit de qualités, madame
de Simiane procédant comme héritière de sa fille, qui
l ’étoit de son frè re, s’est fait adjuger 296000 fr. pour des
terres vendues de l’estoc de la dame de Seveyrac, aïeule,
p o u r’ des pensions et des ferm ages, sans expliquer le
moins du monde comment tout cela lui est rigoureuse
ment dû.
Les héritiers Chatnpflour, par acte du 18 février 1809, >
répudièrent au greffe d’A vignon la succession du sieur
de Simiane.
Jusque-là on prévoit difficilement comment la dame
veuve de Simiane pourra enfin renverser tout cet ordre
de choses , et s’en prendre aux biens de la religieuse
Delaire. Il paroît qu’elle-même n’auroit pas commencé
cette attaque; mais elle y fut menée par circonstance, et
elle a cru peut-être de bon augure d’être appelée à un
procès par des débiteurs de 92000 fr., qui ne vouloient
se libérer qu’en sa présence. V oici comment la dame de
Simiane a été appelee à ce procès, et quelle est l’origine
de sa réclamation actuelle.
Il paroît qu’en prairial an 10, la dame de Sim iane,
h peine rayée elle-même de la liste des émigrés, s’occupa
B
�( 10 )
d ’a c t e s
conservatoires pour la sûreté de ses prétendues'
reprises : ses/agens'firent en son nom des inscriptions à
A vign on , à Glermont et à A m bert, et même une saisiearrêt entre lés mains des sieurs Lavigne et P ire l, qui.
avoient acheté des immeubles de la religieuse Delaire.
Ces mesures n’avoient rien que de n aturel, puisque,
Jeanne Delairë étoit héritière du sieur de Simiane , et
par conséquent débitrice personnelle de l’adversaire tant
qu’e l l e n e répudieroit pas: Ainsi il ne faut pas regarder,
ces actes de l’an i o comme une prétention semblable à
celle que manifeste aujourd’hui la dame de Sim iane,;
après une répudiation.
En 1809 , les héritiers Delaire assignèrent les sieurs
Lavigne et Pirel en payement de la;somme de 92160 fr .;
prix de la vente à eux consentie par Jeanne D elaire,
en l’an 10 , et des intérêts depuis cette vente.
Les sieurs Lavigne et Pirel ayant en mains une saisiearrêt, en exeipèrent, et demandèrent la mise en cause
de^la >damé de Simiane : elle fut ordonnée ; et la dame
de'Simiane fut'assignée en mainlevée de sa saisie et de
ses inscriptions.
Ses droits n’étoient pas encore liquidés, et elle se hâta
d’obtenir à A vignon un jugement par défaut , le 16
mars 1809.
A lors madame de Simiane se disant créancière se
présenta au tribunal de Glermont pour demander la con^'
iirmation de sa saisie-arrêt; et alors elle éleva , pour la
premièi’e fo is , la prétention que les biens de madame
de Clary appartenoient à Hector de Simiane pour moitié,
qu’ainsi ces biens étoient le gage de scs reprises.
�( II )
Le* tribunal de Clermont n’a point accueilli cette der
mande ; il a annullé la saisie-arrêt et les inscriptions de
la dame de Simiane : son jugement du 9 août 1809 est
fondé sur des motifs très-solides et très-lumineux.
Ils se réduisent à dire que M . de Simiane ayant perdu
les biens Clary par son émigration, et étant mort émi
gré , ses héritiers n’auroient pu les réclamer que si ces
biens s’étoient trouvés dans les mains de la nation lors
de l’amnistie ; mais que la nation ayant été désistée de
ces biens par la religieuse D elaire, et n’ayant pas eu le
droit de les lui redemander, les héritiers de l’amnistié
n’ont dû prendre ses biens dans les mains du gouverne
ment qu’en l’état où la révolution les avoit laissés (i)La dame de Simiane prétend n’avoir pas perdu l’es
pérance de faire réformer cette décision qu’elle trouve
cependant légale dans ses bases mais trop sévère i et
fausse dans ses conséquences.
Il semble cependant difficile que la Cour pût être
plus indulgente, sans blesser les droits des héritiers de
la dame D elaire, et sans porter atteinte aux lois qui les
ont investis de cette succession.
MOYENS.
Les lois qui vont etre citées rappelleront des souvenirs
pénibles, et ramèneront peut-être à des idées de pros
cription et d’injustice, Mais sans s’occuper d’une justifia
(1) Le jugement est transcrit littéralement dans le mémoire
de madame de Simiane,
‘ ■ 1.
B *
�( lï )
cation qui seroit aussi déplacée qu’une critique, il sera
bien permis du moins de demander à la dame de Simiaûè
si elle croit avoir eu un titre plus sacré que Jeanne Delaire, pour lui disputer la succession de sa sœur, et si
les lois de 1793 ont été véritablement une spoliation
dans cette circonstance.
v Madame de Clary n’avoit qu’une sœur; elle n’avoit
pas pu en mourant lui laisser sa fortune, puisque les
religieuses étoient incapables de succéder. Elle pensa alors
à des parens éloignés , et sa mort précéda l’époque de
l’abolition absolue de la vie monastique.
En août 1792 les religieuses furent expulsées de leurs
asiles , et les biens qu’elles possédoient en échange de
■ceux qu’elles avoient abandonnés en renonçant au siècle,
leur furent enlevés avant qu’il fût question de dépouiller
les émigrés de leurs fortunes.
Peu de temps après , les lois qui avoient rendu les
religieuses aü monde leur permirent d’être successibles ;
et alors, il ne faut pas en douter, si madame de Clary
eût vécu , ses intentions eussent été d’accord avec la na
ture et la lo i; sa sœur eût été son héritière.
E h bien ! ce que madame de Clary au tombeau ne pouvoit pas réparer, l’a été par le hasard d’une révolution;
le bannissement de M . de Simiane lui a ôté ce que les
jnânes de sa bienfaitrice lui regrettaient indubitablement ;
et cette sœùr jadis bannie elle-même et morte au m onde,
a retrouvé une fortune à laquelle d’autres événemens
l ’avoient rendue étrangère.
Qui donc osera dire qtie Jeanne Delaire usurpoit,
lorsqu’ une loi lui a donné la fortune de ça sœur ? Madame
�j
.
de Simiane le d it, sinon à elle, au moins à ses héritiers.
Elle va plus loin dans son injustice, car c’est contre eux
qu’elle veut rejeter tout l’effet de l’émigration , tandis
qu’elle veut, elle-même émigrée, avoir été invulnérable.
Elle vient dire aux héritiers de Clary : « Je vous sais
« bon gré de la peine que vous avez prise d’obtenir des
« radiations ; mais sic vos non vobis, je m’en adjugerai
« tout le profit, si vous le trouvez bon. Jeanne Delaire
« a empêché la nation de vendre les biens Clary, vous
« avez empêché l'a vente des biens Simiane; tout cela
« sera mon bénéfice. Je reviens de l’émigration non
ce seulement avec la dépouille du défunt, mais encore
« avec des titres qui absorbent tout le reste, et je pourc< suis des’reprises que la nation française a eu la bonté
« de me réserver intactes. T out ce qui a été vendu est
« perdu pour les héritiers républicoles ; et tout ce qui
« reste est conservé pour moi. »
1 13
Mais ce n’est pas par des réflexions morales qu’il faut
repousser l’attaque de la dame de Simiane ; ce sont les
lois elles-mêmes qui sauront y répondre victorieusement.
La loi du 28 mars 1793 a déclaré morts civilement
tous ceux qui , alors inscrits sur des listes d’émigrés 7
n’étoient point rentrés en France dans les délais accordés
par les lois précédentes.
Il ne s’agit pas de vérifier quelle étoit l’époque de l’ins
cription du sieur de Simiane, et si les émigrés d’A vignon
devoient être exceptés : car le Comtat fut réuni à la France
en 1 7 9 1 3 et par conséquent les lois de 1792 et 1793 les
atteignirent comme les autres Français.
�*4
C;
)
Tout ce qu’il faut savoir, c’est que M . de Simiane
n’étoit pas rentré en France avant le 28 mars 1793. A in si,
aux yeux de.la lo i, M. de Simiane est mort depuis cette
époque.
'
N ’est-ce pas- assez de sa mort civile ? eh bien ! s’il
faut^ y ajouter l’époque de sa mort naturelle, M . de
Simiane est ynort à Asti le 12 prairial an 3.
A lors il étoit encore sur la; liste des émigrés : ainsi
ses biens n’ont pas pu être transmis par lui à ses héri
tiers ■•■naturels>• puisque la loi les avoit déclarés acquis
irrévocablement 'à la nation.
Peut-être bien que si rien n’eût dérangé cet ordre, et
-si la nation eût conservé jusqu’à l’an 11 les immeubles
du sieur de Simiane, ses héritiers en auroient obtenu la
, N
remise lorsqu'ils sont parvenus à le faire rayer de la liste
des émigrés après sa mort : cette mesure étoit une consé
quence de l’amnistie. Le gouvernement n’a voulu retenir
que les bois7 et les perceptions déjà faites : mais aussi ne
voulant être généreux ou juste que dans son intérêt, il
a marqué fortement l’intention que nul possesseur tenant
son titre de l’autorité publique, ne fût inquiété pour
aucune cause.
Voilà ce que la dame de Simiane paroît ne pas vouloir
com prendre; les articles de la loi lui. semblent équi
voques; elle n’y a vu que l’ordre donné aux émigrés de
-maintenir les partages faits avec la république ; et se
mettant ainsi à l’aise , elle a cru s u f f i s a n t de dire que la
religieuse Delaire n’avoit fait a u c u n partage avec la répu
blique ; d’où, elle a conclu que les héritiers de Simiane
ont tuès-bien eu le droit de disputer à cette religieuse
�5
( f )
les biens qu?elle avoit obtenus par un arrêté authentique
du 8 nivôse an 2.
C’est là la "seule ¡prétention sur laquelle la dame de
Simiane insiste ; car elle reconnoît que Mv Hector de
Simiane étant mort en état d’émigration et de mort
civile, n’étoit pas alors propriétaire des biens qu’elle ré
clame : mais elle soutient que si ses héritiers n’étoient
pas successibles à l'heurè de sa m ort, ils le sont devenus
huit ans après, c’est-à-dire, lors du certificat d’amnistie
délivré en l’an 11.
^
'
i
rv
•
,
■
î‘■
. '
. I
; Ce point capital de la contestation reçoit deux réponses,
l’une, générale et relative aux effets de l’amnistie d’émi-*
gration ; l’autre, particulière, résultante de la qualité
de religieuse qu’avoit Jeanne de Clary.
Pour être plus clair dans la première réponse, il faut
la faire précéder de la loi elle-mêmé, dont il’ sera facile
ensuite de tirer des conséquences.
L e sénatus-consulte, du 6 floréal an 10 , porte, ar
ticle 16 : « Les individus amnistiés ne pourront, sous
« aucun prétexte, attaquer les partages de présuccession,
cc succession, ou autres actes et arrangem ensfaits entre
c< la république et les particuliers, avant la présente
cc am nistie. »
A rt. 17. « Ceux de leurs biens qui sont encore dans
« les mains de la nation (autres que les bois et forêts,..,.
« les créances qui pouvoient leur appartenir sur le trésor
« public, et dont l’extinction s’est opérée par confusion
« au moment ou la république a été saisie de leurs
�( i<> )
« biens, droits et dettes actives ) ,' leur seront rendus
« sans restitution de fruits. »
rX ?arrêté des consuls, du'9 thermidor an 10, dit c< qu’il
« est conforme à l’esprit du sénatus- consulte d’étendre
« la grâce aux héritiers, quand la mort a mis le prévenu
« lui-m êm e h o rs ,d’état d’en profiter. S’il eût vécu , il
« seroit rentré dans les biens dont l’art. 17 du sénatus« consulte fait remise aux amnistiés; comment refuser
cc là memejgmce à ses enfans républicoles, et nés ayant
« l’émigration ? »
Si ce que la loi accorde aux enfans de l’émigré doit
s’étendre aussi aux collatéraux, croira-t-on, d’après ce
qu’on vient;de lire, que les héritiers de M . de Simiane
eussent pu demander ses biens à tout autre possesseur
qu’au gouvernement?
Les héritiers Simiane ne l’ont pas cru possible ; ils ont
vu vendre par la religieuse Delaire tous les biens qu’elle
tenoit de la république , et il n’est venu à la pensée de
personne qu’ils fussent fondés à attaquer son titre, en lui
objectant qu’après le 9 fructidor an 3 elle auroit dû rendre
à la république ce que la république lui avoit donné.
A supposer qu’on tienne pour réponse suffisante à ce
fa it, le droit qu’ils auroient eu de s’y opposer ( ce qui
nous ramène à la question), il faudra bien qu’on indique
comment et par quelle voie on auroit pu soi-m êm e
attaquer un actef a i t entre la république et la religieuse
D elaire.
Sera-ce soiis prétexte du rapport de l’effet rétroactif
de*la loi du 17 nivôse ? mais la loi dit que l’amnistié
pourra attaquer l’acte sous aucun prétexte.
]Madame
�( 17 )
Madame deSimiane aura encore quelques efforts de plus
à faire pour prouver que les héritiers de l’amnistié pouvoient rechercher des biens q u i riétoient plus dans les
mains de la natioîi depuis l’an 2. Ce n’est pas qu’elle
n’ait bien prévu cette difficulté, dont elle fait une question
principale en tête de son mémoire ; mais elle l’a éludée,
et l’a laissée à peu près sans réponse.
Répétera-t-elle que la religieuse Delaire a dû rendre
à la nation les biens Clary aussitôt après la loi du 9 fruc
tidor an 3 ? Mais comment une aussi bonne pensée n’estelle venue qu’à madame de Simiane? et comment le fisc,
toujours si en éveil, ne s’en est-il point avisé? Quantum
mutatus ab illo l faudroit-il s’écrier; ou plutôt il faudroit
se croire fort convaincu par cette seule réflexion, que
le fisc n’étoit point autorisé à ôter à Jeanne Delaire les
biens dont elle étoit en possession, puisqu’il ne les de
manda pas.
Ce que la nation n’a pas fait en l’an 3 , la dame de
Simiane voudroit que les héritiers de son mari l’eussent
fait en vertu de l’amnistie, q u i, suivant elle, auroit un
effet rétroactif au temps de la mort et même de l’émi*gration.
Mais aucun effet rétroactif n’est donné à l’amnistie; et
c’est pour cela que le sénatus-consulte veut que l’émigré
vienne prendre dans les mains de la nation seulement,
ce qui y reste.
On a vu à Besançon un sieur Masson, ém igré, dont
les biens avoient été vendus à sa femme pendant même
qu’ il étoit en réclamation, venir après l’amnistie de^
ttiander à sa femme, non pas l’éviction du bien national,
G
�( iS )
mais l l’administration de la communauté. La Cour de
Besançon avoit jugé que l’amnistie avoit rétabli la puis
sance maritale, et par conséquent la communauté comme
si elle n’eût jamais été interrompue rmais cet arrêt a été
cassé le/io juin 1806, par lé motif principal que le sieur
Masson avoit été en état de mort civile jusqu’à sa, radia
tion , et que Vamnistie ri avoit pas eu d'effet rétroactifs
1 -Sans doute'il y a quelque répugnance à penser que
malgré la règle le mort saisit le v if , M. de Simiane',
mort en l’an 3 , n’a eu d’héritiers qu’en-Tan m i . Mais
on conçoit que pendant cette lacune c’est la république
q u ia été héritière intermédiaire; et remarquons qu’elle
n’a pas voulu l’être à titre d’usufruit ou de iidéicommis;
elle n’a pas même voulu qu’on lui succédât par repré
sentation ^ de peur qu’on usât de ses droits ou de ses
omissions pour faire des procès ; elle a déclaré avoir
rempli le degré comme propriétaire, et avec le droit
utendi et abutendi, elle n’a rappelé l’émigré que pour
reprendre rebus integris ce qui restoit dans ses mains ;
et sans lui donner le droit de porter ses regards en arrière
pour rechercher quel étoit le titre de possession de ceux
qui occupoient ses biens, la loi a placé pour lui un mu y
d’airain entre le passé et l’avenir.
' .■V o ilà , ce semble, l’idée la plus juste qu’on puisse se
former de cette législation, et c’en seroit assez peut-être
pour prouver qu’en thèse générale les héritiers Simiane
:in’ont- pas dû contester à Jeanne Delaire le droit de dis
poser des biens de sa soeur. Voyons cependant ce que la
circonstance que’Jeanne Delaire etoit religieuse, ajoutera
àe force à la précédente démonstration.
�*9
(
)
Lorsque l’assemblée constituante, voulant favoriser la
sortie des cloîtres, eut rendu la loi-du 19 février 1*790,
qui permettoit aux religieux des deux sexes de rentrer
dans le monde, il fut nécessaire d’expliquer s’ils deviendroient capables de successions .: alors fut rendue une
seconde l o i, du 26 mars 1790, ainsi conçue":
i A rt. i er. « Les religieux qui sortiront de leurs maisons
« demeureront incapables de successions, et ne pourront
« recevoir par donations entrevifs et testamens. que ’des
« pensions ou rentes viagères.’ »
\ :
* \ ,j[
A rt. 2. « Néanmoins lorsqu’ils ne se trouveront en
« concours qu’avec le fisc, ils hériteront dans cp cas pré*
« J'érablement à lui. »
.o . /j
L a loi du
brumaire an 2 , :art. 4 , dit que rc< les re« ligieux et religieuses sont appelés à Recueillir les s u o
te cessions qui leur sont échues à compter du 14 juillet
« 1789. »
C;.
L ’art. 7 dit qu’audit cas de successions ils rapporteront
les dots constituées par leur profession monastique, et
que leurs rentes et pensions seront éteintes^
.
C ’est en vertu de cette loi que Jeanne Delaire a ré-»
clamé la succession de madame de Clary, sa sœur, dont
elle étoit seule héritière al? intestat. E l l e ew a obtenu
la propriété par arrêté du 8 nivôse ail 2.
•. *
i Lorsque la loi du brumaire an 2 fut rapportée dans
Bon effet rétroactif, le 9 fructidor an 3 , Jeanne Delaire
auroit pu être obligée par M. de Simiane de rendre la
moitié des biens de sa sœ ur, si M . de Simiane eût élé
vivant-, mais il étoit frappé de mort civile : et de morne
5
5
G
3
�( 2° )
que les émigrés ne peuvent pas recueillir les successions
ouvertes pendant leur mort civile, de même ils n’ont pas
d’action pour réclamer le bénéfice d’une lo i; car, suivant
la loi du 12 ventôse an 8, les émigrés ne peuvent mçç-*
quer le droit civil des fra n ça is.
Jeanne Delaire n’avoit donc pas M . de Simiane pour
concurrent , mais seulement le fisc en sa place pour la
moitié paternelle, et M . de Chardon pour les Liens
maternels.
Celui-ci a pris sa portion, parce qu’il étoit républicole; mais le fisc n’a pas pris la sienne, car il en étoit
empêché par l’art, 2 de la loi du 26 mars 1790, ci-dessus
citée.
Il est bien incontestable en effet que si M . de Simiane
ou le fisc étoient mis de côté, Jeanne Delaire se trouvoit héritière de sa sœur : ainsi elle étoit parfaitement
dans l’application de la loi qui l’appeloit à succéder.
A in s i, sans aller plus loin , voilà déjà la religieuse
Delaire avec un titre légal. Elle 11’est pas seulement habile
à succéder, elle n’est pas détenteur provisoire et précaire ;
elle est héritière ; elle occupe les biens pro suo. Car .il
n’y a pas encore d’amnistie , il n’y en aura que dans
huit ans; et le fisc lui a cédé sa place, non pas pour jouir,
mais pour succéder directement et personnellement.
La loi du 9 fructidor an 3 n’a donc rien dérangé au
titre de propriété donné par la nation à Jeanne Delaire.
Cette loi a été expliquée par celle du 3 vendémiaire an 4;
et en même temps que le législateur rend à tous les héri
tiers déchus le droit d’ôter aux personnes rappelées ce
�(
21
)
qu’elles tenoient de l’effet rétroactif, il déclare formel
lement que le fisc n’aura pas le même droit contre les
religieuses.
En effet, l’art.
s’exprime ainsi : « Les partages faits
« entre la république et les personnes déchues , qui
« étoient ci-devant religieux ou religieuses ......... sont
« maintenus, sauf l’exécution de l’art. 7 de la loi du 17
« nivôse (relatif à la confusion des pensions). »
Rien n’étoit plus clair que cette intention de la loi (1).
Cependant madame de Simiane ne veut pas y voir ce
qui est évident : elle se contente de dire que la reli
gieuse Delà ire n’a pas fait de partage avec la république,
d’où il suit que l’article ne la regarde pas.^
Il
suffiroit de répondre que la loi ne peut pas tout
dire, et exprimer tous les cas, et que scire leges non est
earum verba tenere, sed vint ac potestatem. Mais ce
n’est pas même le cas de chercher un sens , car il est
parfaitement rendu.
La loi qui doit être b riè v e , et qui doit prendre pour
exemple ce qui arrive le plus souvent, n’a pas pu sup
poser de prime abord qu’une religieuse se trouveroit
unique héritière. Il n’étoit que trop d’usage que ce
5
(1) Comme cet article prouve qu’en laissant les successions
aux religieuses, et en retenant leurs pensions, la république a
aussi songé à son intérêt, madame de Simiane se récrie, en
disant qu’on ne donne pas une grosse succession pour 5oo fr,
de rente. Elle oublie que dans les loteries on donne 10000 fr.'
pour un écu ; ce qui ne prouve pas pour cela une fausse spécu-.
lation, parce qu’un gros lot n’est pas pour tout le inonde.
�4
22
■
)
fussent les familles nombreuses qui peuplassent les monastères, pour le plus grand avantage d’un héritier prin
cipal. Le plus souvent aussi c’est cet héritier que la
nation a représenté par confiscation , et alors elle a eu
un partage à faire avec les religieux rappelés par l’effet
rétroactif de la loi du 5 brumaire.
Si dans le cas de ce partage la nation s’est interdit
le droit d’ôter au religieux la portion qu’il n’avoit eue
que temporairement, qu’en résulte-t-il autre chose, si
ce n’est que tous /es droits de la nation ont été aban
donnés aux religieux, comme l’avoit déjà dit la loi du
26 mars 1790?
Et comment peut - on demander à son imagination
qu’elle invente une différence entre le cas d’un abandon
par la voie d’un partage, ou d’un abandon par la voie
du délaissement total? N ’est-ce pas toujours la république
qui cède son droit tel quel? et qu’importe de recher
cher s’il étoit universel ou de quotité, lorsqu’il ne s’agit
ici que de savoir si on peut exciper du droit de la ré
publique ?
En un m ot, si M . de Simiane eût v é c u , il est indu
bitable qu’il ne pouvoit troubler Jeanne D elaire, parce
qu’elle étoit héritière avant son amnistie, parce que le
sénatus-consulte ne lui donnoit droit de rechercher des
immeubles que dans les mains de la n a tion , parce que
la remise des biens Clary, faite à Jeanne Delaire en l’an 2,
étoit consolidée par l’art.
de la loi du 3 vendémiaire
au 4 , et enfin parce que les émigrés n’ont pas le droit
de rechercher si la république a eu tort de donner à
quelqu’un ia propriété de ce qui étoit à eux,
5
�( 3 )
Ce que ne pouvoit pas faire M . de Simiane, ses héri
tiers Font pu encore moins quand cette propriété a été
consolidée par une longue possession. Mais madame de
Simiane, qu’est-elle pour vouloir bouleverser tout ce qui
a été iait, et respecté même par le fisc? Elle est un simple
créancier réduit à exercer les droits de son débiteur.
Mais qu’elle explique comment elle veut exercer les droits
d’un émigré mort avant sa radiation, et par conséquent
exercer, du chef de cet ém igré, les droits de la répu
blique qui ne le lui permet pas.
E n fin , et pour comble d’incohérences, madame de
Simiane a débuté par une saisie-arrêt du prix des ventes
faites par Jeanne Delaire après l'amnistie , ce qui est
une reconnoissance évidente du droit de propriété de la
venderesse, et par conséquent une preuve de plus que
toutes les parties intéressées croyoient également à cette
propriété, comme à la chose du monde la moins suscep
tible de contestation.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. D E V E Z E ,
licencié avoué.
A R IO M , de l’imp. de T H tB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire
rue des Taules, maison L a n d r i o t , — Juin 1 8 1 0 ,
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Champflour, Jeanne-Marie. 1810]
Creator
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Delapchier
Devèze
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The topic of the resource
créances
émigrés
séquestre
successions
rétroactivité de la loi
Description
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Mémoire en réponse pour Dame Jeanne-Marie de Champflour, veuve du sieur Paul-François de Montrozier ; sieur Jean-Baptiste de Champflour ; dame Marie-Anne-Félicité de Fredefont, et sieur Jean-Jacques de Rochette, son mari ; demoiselle Gabrielle Durant de Pérignat, et dame Marie Durand, religieuse ; tous habitans de la ville de Clermont-Ferrand, intimé ; contre Dame Anne-Emilie de Félix, veuve de Claude-François-Léon de Simiane, propriétaire à Collongues, arrondissement d'Aix, département des Bouches-du-Rhône, appelante ; en présente de dame Marguerite de Chardon, veuve du sieur Jacques-François de Montanier ; Claude-Antoine-Joseph de Chardon ; demoiselle Anne de Chardon, dame Perette de Chardon, veuve du sieur Vallette de Rochevert ; tous propriétaires, habitans de la ville de Riom, intimés ; et en présence de Jacques-Marie Lavigne, et Jean Pirel, habitans de la ville d'Ambert, aussi intimés. Questions . 1°. Les religieux qui, par effet rétroactif de la loi du 5 brumaire an 2, ont obtenu un droit successif de la nation représentant un émigré, ont-ils été soumis à rendre cette succession après le rapport de cet effet rétroactif, lorsque les héritiers rétablis se sont trouvés représentés par la république, comme émigrés ? 2°. La nation, dans ce cas particulier, n'est-elle pas censée avoir renoncé à toute recherche, et n'avoir point voulu user du bénéfice des lois des 9 fructidor an 3, et 3 vendémiaire an 4 ? 3°. Le sénatus-consulte du 6 floréal an 10 n'a-t-il rendu aux émigrés amnistiés, ou à leurs héritiers, que les biens qui se trouvaient dans les mains de la nation par la voie du séquestre au moment de l'amnistie ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1787-1810
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0419
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Clermont-Ferrand (63113)
Collongues (06045)
Riom (63300)
Comtat vénaissin
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Domaine public
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Créances
émigrés
rétroactivité de la loi
séquestre
Successions
-
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b85c185120574c7eaf8c751cda3edb8f
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Text
PRÉCIS
POUR
J o s e p h V E Y S S I E R E , marchand, habitant de
la ville de Pleaux, intimé;
CONTRE
A n to in e F IL IO L et Marie C H A V IG N A C ,
sa femme
appelans.
habitans de la même v ille,
f •
f
L e sieur Veyssière a voulu faire une construction sur
un terrain qui lui appartient, et il en a été empêché par
le sieur F ilio l, partie adverse qui a prétendu que ce
local étoit une place publique.
L e bailliage d’A urillac, jugeant d’après les titres pro
duits, a décidé que ce local étoit la propriété du sieur
Veyssière. Cependant; à cause d’un acte qui sembloit
i
•s
�( 2 )
concéder aux adversaires un droit de servitude, il n’a
permis au sieur Veyssière de bâtir que jusqu’à trois pieds
de distance du mur latéral de la maison Filiol. Il a
ordonné encore que le sieur Veyssière n’obstrueroit point
la vue d’une fenêtre placée à cet aspect.
Cette décision privoit le sieur Veyssière d’une portion
de son terrain, et cependant il étoit prêt à s’y soumettre;
mais les Filiol ont cru l!affaire assez importante pour se
pourvoir par appel au parlement.
T ou t le local contentieux n’a que onze toises et quatre
pieds de surface. Les F ilio l, qui n’osent pas le réclamer
comme propriété, arrêtent depuis vingt^-huit ans une^
construction pour un aussi mince intérêt : on ne com
prend pas même qu’il y ait aucun autre intérêt que celui
d’être mauvais voisin.
Il est temps qu’une aussi longue obstination ait une
fin. Les Filiol ont cru embrouiller ce procès par la
production de plusieurs titres \ et il importe au sieur
Veyssière de simplifier ce qu’on a voulu-rendre difficile,
en se servant des actes même des Filiol pour y trouver
leur condamnation. Il a dans cette affaire un intérêt plus
considérable que l’étendue du terrain ne paroît le com
porter. Ce local, qui n’est pour son adversaire qu’une
place publique, est pour lui' une propriété précieuse f .
incorporée à sa maison y destinée de tout temps à aug- menter une boutique qui fait sa ressource principale,;
�( 3 )
f a i t s
.
Les deux maisons des parties sont situées dans la ville
de Pleaux, à l’extremité de deux rues qui se x’éunissent
à angle droit.
Cependant ces dçux maisons ne sont pas contiguës ;
elles sont séparées par un espace triangulaire qui fait le
sujet de la contestation. La base de ce triangle s’arrondit
pour faire le tournant des deux rues; et un rang bien
marqué de fortes pierres prouve au simple aspect que
la ville n’a fait paver que ce qui étoit au public, et n’a
jamais eu de prétention sur cette propriété particulière.
La maison Veyssière provient du sieur F u m e l,‘ qui
l’avoit achetée de sieur Cueilhe, en 1721. A lors elle étoit
en ruine absolue , car le contrat ne comprend qu''un
airialde m aison, à présent en ja rd in , eîpatüs au-devant,
avec les matériaux qu i y sont. On lui donna pour confin
im médiat, la maison R ix a in , de m idi. La même chose
est’ répétée dans la vente du sieur Fumel au sieur
Veyssière, en 1746; ce qui prouve que les lieux étoient
encore au même état après cette époque.
C ’est aujourd’hui Filiol qui jouit de la maison R ixain ,
du chef de. M arie Chavignac, sa femme, fille de Jean
Chavignac, boucher, qui l’avoit achetée en i 75o . L e
pignon ou mur latéral de cette maison borde le triangle
qui fait l’objet du procès ' toute, sa façade est sur la rue.
Il paroît qu’il y avoit un jardin derrière la maison
Veyssière, acheté par lui, en 1 7 3 7 * ^es Rixain a voient
aussi 1111 jardin derrière leur maison. En lisant les confins
2
�des anciens titres, il est vraisemblable qu’il y a eu des
échanges et sans doute-des conventions de voisinage sur
le local contentieux. On ne voit aucunes traces de ces
conventions, mais tout prouve qu’il a du en exister.
. L e sieur Veyssière n’ayant aclieté que pour bâtir,
n’occupa pas tout son terrain par une maison; il laissa un
espace vide au tournant de la rue, afin d’avoir deux
façades pour sa boutique, qui étoit l’objet le plus essen
tiel pour lui.
. ?:
v Cet espace vide (que le même motif empêchoit de
clore) étoit trop à la proximité de Ghavignac, boucher,
pour qu’à la longue lui ou les siens n’en abusassent pas.
A la vérité il respecta lui-même les droits de son voin ;
mais après sa mort la veuve Ghavignac se permit de
placer sur ce local des fumiers et immondices en assez
grande quantité pour incommoder le sieur Veyssière-,
qui s’en plaignit. Cette première hostilité, qui remonte
a. quarante-deux ans, est assez importante pour être
indiquée avec un peu plus de détail.
C’est par une requête du 4 ju in 17 7 2 , que le sieur
Veyssière exposa aux juges de Pleaux qu’il étoit pro
priétaire d’un espace triangulaire placé entre sa maison
et celle de Chavignac; que la veuve Ghavignac y mettoit
du fumier et immondices que la pluie condu isoit
la porte de la boutique de lui Veyssière, ce qui nuisoit
aux étoffes, et surtout aux galons, etc.
, . Sur cela intervint sentence*de police, qui défend à la
;veuve Ghavignac de répandre dès fumiers sur ledit terrain
appartenant ti V eyssière, et la condamne à 5 francs
d’amende. .
�.
;c 5 5
Cette sentence fut signifiée à la veuve Chav’gnac.
Elle fut encore affichée à P leau x, à la diligence du
procureur d’office.
Cette sentence ne fut pas attaquée; au contraire, elle
fut pleinement exécutée, et les Chavignac cessèrent de
mettre des fumiers sur ce local.
; Ce respect pour la propriété du sieur Y e y ssière dura
vingt ans, et dureroit sans doute encore, si le sieur Filiol
ne fut entré gendre dans la maison Chavignac.
En 1782 le sieur Veyssière annonça le projet de pro
longer sa maison sur une partie de son triangle vacant,
et il assembla même des matériaux pour cette construction.
A ussitôt, et pour l’en empêcher, le sieur F iliol ouvrit
une porte qui avoit^autrefois existé sur ce lo cal, mais
qui avoit été murée depuis très-long-temps ,sans doute ,
en vertu des conventions que la série des actes fait pré
sumer avoir eu lieu.
L e sieur Veyssièrefoi'ma opposition à ce nouvel œ uvre,
et offrit même de payer la moitié du pignon de la maison
C havignac, pour le rendre mitoyen ; en conséquence il
donna une assignation auxdites fins, aux mariés F ilio l,
le 8 juillet 1783.
Les Filiol répondirent en défenses, que cette porte
n’avoit été fermée par eux que depuis environ dix-liuit
an s, pour Vutilité de leur commerce ; que si la vente
consentie à Veyssière en 1746 lui donne pour confin la»
maison R ix a in , c’étoit une subtilité de l’acquéreur ;
mais que le local contentieux étoit une place publique.
L e procès ainsi commence donna lieu à d’assez longs
débatsj qui ne prpduisirent pas de tres-grands éclaircis-
3
�c ‘9
..
semens ; 'chacune des parties assigna son vendeur en re
cours. L e vendeur des Filiol répondit avec raison1qu’il
ne leur devoit aucune garantie , d’après leurs propres
'défenses, puisqu’ils n’indiquoierit le local en question que
'comme une place publique. '
"
Les Filiol découvrirent une transaction du 24 mai 1529,
passée entre Pierre Estève et Pierre R ix a in , dans laquelle
ion voit qu’il s’agissoit d’une cour sise au-devant de la
maison Estève. R ixain , qui bâtissoit alors, y ouvroit une
porte, et prétendoit avoir le droit d’y placer des fumiers
et de les y recueillir. Sur quoi les parties réglèrent entre
■
elles, i° . que Rixain pourroit édifier ladite porte à l’étage
soutrane devers ladite cour et la rue d’Empëssine, mais
q iù iljie "pourroitfaire aucune autre porte, ni escalier,
ni latrines, n i autres servitudes, si ce n’est tant seule
ment une fenêtre à l’étage seconde dudit chapial; 2°. que
Pierre Estève pourroit colliger les fiens provenant de
ladite cou r, savoir de l’arrête de ladite porte devers le
prosial dudit E stève, et qu’il pourroit mettre des pailles
en ladite cour devers ledit prosial, pour congregnier en
fumier ; 30. que Rixain pourroit colliger le fient de l’autre
côté, savoir de l’arrête soutrane de la'porte^, à l’arrête
•soutrane delà boutique Cheminât, mais qu'il ne -pourroit
mettre dans la cour n i fu m ie r , ni poules.
Il fut encore produit de part et d’autre un grand nombre
de pièces qui ne semblent pas mériter un examen parti
culier; seulement il est nécessaire de dire que Veyssière
•ayant produit la sentence de 1773? c*ont ^ a été parlé
plus haut, le sieur Filiol en interjeta appel en 1784?
•c’est-à-dire, yingt-un ans api’es sa signification»
�( 7 )
G*est en cet état que les juges d’Aurillac prononcèrent
par sentence du 8 juillet 1784.
* Cette sentence maintient le sieur Veyssière en la.pro
priété et possession de l’airial et patus. en. contestation ;
et dans le cas où il voudroit y bâtir, elle ordonne qu’il
laissera trois pieds de distance vers la maison F ilio l, à
partir du coin de ladite maison, du côté de la rue Pessin e, jusqu’à un- demi-pied au delà de l’angle supérieur
de la porte de ladite maison donnant sur ledit terrain,
t II est ajouté en ladite sentence que Veyssière sera tenu
de ne point ôter et borner le jour de la fenêtre de ladite
maison donnant sur ledit terrain, pratiquée jusqu’à l’autre
eoin.de ladite maison.
.. . .
, ,
Enfin Veyssière est débouté de ses demandes en fer
meture de porte et de fenêtre, et de mitoyenneté de
mur. Les parties sont mises hors de cour sur leurs autres
conclusions, et sur les demandes en recours.
L ;Quoique cette sentence fût plus véritablement nuisible
au sieur Veyssière qu’aux F ilio l, ce sont eux cependant
qui en interjetèrent appel.
Leurs moyens , quoique plus diffus qu’à A u rilla c ,
étoient les mêmes ; seulement on remarque au folio 74
de leurs griefs, qu’ils prétendent avoir droit à la propriété,,
même du terrain, s’ils vouloient le soutenir; mais ils
ajoutent .à l’instant que pour être de meilleure foi que
Veyssière, ils conviennent que ce terrain fait partie d’unev
place appartenant à la commune de Pleaux.
. ..Cet appel, suspendu depuis la révolution, a été repris
en la Cour.
, .
4
�(S )
M O Y E N S .
Il ne s’agît pas de savoir laquelle des deux parties est
propriétaire du local contentieux , puisque les adver
saires n’ont aucune prétention à cette propriété, et veu-*
lent seulement l’attribuer à la commune de P leau x, qui
ne la réclame pas.
’
L e sieur Veyssière se seroit cru fondé à soutenir qu’iB
étoit propriétaire de la totalité , avant la sentence5d’A u rillac ; mais cette sentence laisse aux Filiol un droit de
passage et un droit de vue. Il s’agit donc de savoir si*
ceux-ci sont fondés à réclamer davantage.
Il est visible que les premiers juges se sont fondés- su-i?
le traité de 1629, quoique la porte permise par cet acte
eût été bouchée depuis. Mais en fin , puisque le sieutf
Veyssière n’est pas appelant, il faut admettre que* les
Filiol doivent conserver cette porte. Voyons seulement
si cette porte suppose une place p ub lique, comme ils
le prétendent.
,
Remarquons que cet acte de 1529 est: produit par euxmêmès.
r
, L e locaiLy est désigné comme cour en avais t de la>
maison d’Estëve ( représenté par Veyssière
Dans: toutes les. parties die l’acte'il n’y* est pas-don^é:
d’autre nom. Les Filiol sont donc bien lbin: d’avoir prouvé*
par: cet acte que' ce fût une place publique.
Tous les autres actes qu’ils o n t produits, et'ceux qu’on;
a produits contre eux,, donnent à. la; maison Veyssière,
pour confin immédiat, celle des Filiol. Donc il n’y a
pas entre ces deux maisons de place publique.
i
�'C 9 )
Ce confín donne même lieu à une autre conséquence;
e’est que le locai en contestation doit nécessairement ap
partenir au sieur Veyssiërë.
’
‘
L ’acte de 1629, quoiqu’il ait laissé une porte et Une
fenêtre aux auteuTS des Filio! , ne contrarié pas du tout
cette preuve de propriété; au contraire, 011 est convaincu
par sa lecture que la concession faite aux auteurs de
Filiol n’est qu’une servitude ; ce qui consolidé l’idée de
propriété sur la tête des auteurs d’Estève.
N'
Toutes les expressions de cet acte conduisent à cette
démonstration : « Il est accordé que Rixain
édifiei?
« ladite porte devers ladite co û t, etc. ; il ne pourra faire
c< aucun autre escalier, latrines, n i autres servitudes,
« si ce n’est tant seulement, etc. »
! ?.
La cour n’étoit donc ni à R ixain, ni au public, puis
qu’il reconnoissoit à Estèvë le droit de lui accorder la
permission d’ouvrir une porte et une fenêtre, de limiter
cette permission à- un& s e u l e et enfin dé'donner len o m
de servitude' à cette concession.
,(
’• 1 .
L ’acte va plus loin encore, s’il est possible / pour
prouver quëi:cé n?est pour Rixain qu’une servitude.
Comme il va ouvrir une porte, et quenaturellem ent
il faut qu’il ait' le' droit de ñét/tóyer son passage, Estéve'
détermine^néanmoins jusqu’où il pourra nettoyer e't colliger ‘le fient. Il est borné ¡1 l’arrête* des portes; et quoi-'
qu’Estève garde le droit de mettre du fumier dans la cour,
il est néanmoins expliqué que Rixain ne pourra y mettra
ni fum ier, ni poules *. le devant et les cotés de sa porte
ne Sont pas même exceptés' de colte^ dbfense).
Certes il n’est pas possible de V'oir lUie distiiVction plus
�( 10 )
marquée entre les droits reconnus à ces deux parties. L ’un
accorde, perm et, défend ;* l’autre accepte ce qui lui est
concédé, et se soumet à ne pas faire ce qui lui est dé
fendu. L ’un estjdonc*le propriétaire; l’autre.tient.de lui
une simple servitude, et ne,peut ni l’étendre, ni encore
moins disputer le droit de propriété sur tout ce qui n?est
pas compris dans la servitude. .
^*
r Que-doivent donc avoir les »Filiol,, d?après -cer titre
émane d’e u x , e t , synallagmatique avec leurs .auteurs ?
"Rien autre chose qu’une porte, une fenêtre seulement,
et le droit de passage ppur arriver à »cette porte.
^ ..P 9883^ ^8t assez expliqué en l’acte paç
la limitation dQ'Coïliger lesjiens. ïlixain ne peut aller que
jusqu’à l’arrête de la porte, et JCstève a tout }e surplus
depuis la mêipe limite. 7 ; r /. ] £.
r
.
0 ;
, j Là dimension de la; porte prouve assez d’ailleurs quelles
furent les véritables intentions( des parties en 1629. Une
porte.latéralejne^pouvojt pas avoir pour objet’un passage,
de chevaux ou voitures, mais un passage à pied pour
cette,. sorjtie^jcie dégagement. Les premiers juges ont
donc -p^laiiement entendu ,1e sens de l’acte et .la loça^
litp, en (^opnant trois pieds de passage, aux adversaires;
etI .encore
excédé
la convention
l
ç . ontrils
:
T•' 1
7: en donnant un
demir-pied jdej plu?r;au delà^de la porte, puisque l’acte
disoit jusqu'à^ Varrête de la porte. Mai$ cette dilférence
est. trop minutieuse :pour que le sieur, Veyssière s’en,
' v u
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* ■ J f I
:
'
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•
:
|
acte d e 1629 . s u f f i t donc seul pour justifier le
jugement dpnt est appel. Mais il ne faut pas-laisser crojre
C et
�Î-I Ï )
Iqne les autres actes-<produits de ¿part* et d’autre' pour:roient cbntrarier;cette'démonstration.1 A ü >contraireÿ ils
viennent à son appui, et prouvent eux*mêmes que^dans
ttous ' les temps les i successeurs d*Estève- se ¡sont toüjôurs
►regardes comme5propnétaiTes du local «qui'“séparoi^sa
maison d e là maison Rixain.
..
'iî. Eu- Ï704,' 'François Cueilhe acheta la r h ai son Es tè v e ,
îquiî avoit alors;1changé
face ; et çfacte jporté^ «; Un
-« petit ’jardin , 'autrefois airial de mà:îson{;, confiné, de
r« jour, par la rue d’Empéssine;< de midi ét nuit, parla
~cc maison et jardin d e , Françoise' R ixa in ^ etc.' »
"î ; En 17 2 1, ce Cueilhe donna le même objet* en côntrëtébhange au sieur Fumel : « Un airiül de maison, à présent
;« en jardin, et -patus ( où cour) a u -d em n t^ m ec les iiiac< tériaux qui y sont ;-confiné.par la rue de* jour; la mai-ce son R ix a in , de midi y le jardin Rixain', de nuity etc. »
t‘ On voit encore , par ’im^acte de 1722, que le sieur
'Fum el, payant le droit'de l’ods au seign eu rd éclara dans
l’acte les mêmes confins de l’àirial e t le patus à lui vendus.
.Si c’eût été une place vague ou publique, on sait assez
¿que le seigneur àuroit réclamé’ contré cette mutation, au
:lieu de l’approuver.
\
-I ;
En 1746,' le sieur- Fumel vendit -cet airial au sieur
Veyssière; il y comprit de même 'le patus (o;u-cour },
•et donna toujours pour confin la maison KR ixain\ V oilà donc -une série d’actes-qui ont tous'le-m êm e
confin. 11 est donc prouvé/autant qu’ il'pèuV l’être , que
le sieur Veyssière est propriétaire jusqu’à la ^iHaisbn
R ixain, puisque lui et tous ses prédécesseurs ont acheté
cette propriété.
�I 12 5
Ils en ont joui sans trouble, non-seulement quand il
y avoit maison et cô u r, mais encore quand la maison
.étoit en. ruine et en jardin.
• Les matériaux de l’airiaL étoient sur place, .comme le
disent les actes, et il est de principe que vestigia posscssionern retinent.
La .procédure de 1773 prouve que quand le sieur
Veyssière eut b£tir, il s’opposa aux petites usurpations
dont ses voisins avoient pris rhabitude pendant que les
lie.ux ayoient été inhabités. Il prit naturellement, et sans
se douter qu’on pût le lui disputer, la qualité de pro
priétaire de' ce local; il’ fit juger .et afficher .cette qua
lité.; Mais quand- il n’y auroit eu que- sa requête, elle
suffiroit., .puisqu’il y a possession ,après' contradiction;
ce qui .est le plus puissant des titres.
/Toutes ces preuves accumulées sont tellement palpa
bles à la simple lecture des actes,,que la Goui* ne croira
certainement pas avoir besoin d’interlocutoire, dans une
.matière bailleurs d’un aussi mince intérêt.
La Cour ne peut pas être embarrassée par un conflit
-d’actes,qui.contrariex-.oient ceux qu!on vient de rapporter;
car les adversaires ont pris soin de n’en produire que
-.de,’semblables en tout point, pour les confins, aux actes
.(Je 17.04, 172X et 174$.
Ils ont signifié la vente consentie à Chavignac, leur
père et beau-père, en 1750. Elle c o m p r e n d la maison
•provenue des R ix a in , en Vétdt quelle est à présent
( ce qui prouve déjà que les étoupemens qui gvoient
eu lieu étoient l’objet d ’ une convention ). Cette maison
vendue est confinée par Vairial de la maison T^eyssière,
�r3 )
' Ce confia donné par le vendeur est donc une reconnoissance expresse du confin indiqué à Veyssière dans
sa vente de 1746. Et quand les adversaires ont dit devant
les premiers juges que Veyssière s’étoit fait donner ce
confia par subtilité, ils n’ont dit qu’une sottise, puis
que leur père achetait, quatre ans après, avec le même
c onf i ne t approuvoit mot pour mot ce qui étoit exprimé
dans la vente consentie au'sieur Veyssière.
- Maintenant il faut ajouter à ce titre si précis, et pro
duit par les adversaires eux-mêmes , la transaction de
IÔ29, encore produite par e u x , et il faudra reconnoi
tre que ces pièces émanées d’eux sont encore plus pro
bantes qu’aucune autre, pour démontrer que le sieur
Veyssière est propriétaire de tout le terrain qui est situé
entre la maison des adversaires et la rué d’Empessine.
......................
(
A vant de terminer, il ne faut pas négliger de répondre
a ce que les Filiol ont proposé encore comme des griefs
d’appel.
•
1
‘ i°. Ils disent que la sentence d’ Aurillac n’a pas pro
noncé sur l’appel incident par eux interjeté de la sen
tence de 1772.
Cette sentence regardoit Veyssière comme proprié
taire du local contentieux, et défendoit aux Chavignac
d’y placer des fumiers. La sentence d’Aurillac prononce
dans le même sens, en maintenant le sieur Veyssière en
cette propriété. C’étoit donc statuer sur deux appels qui
avoiçnt le même objet. D ’ailleurs'l’appel de la sentence
de 1773 n’étoit pas recevuble onze ans après la signi
fication.
�(
1
4
5
2°. Les Filîol objectent que la sentence d’Aurillac a
maintenu Veyssière en proprié lé, sans qu’il l’eût demandé.
Gela est d’une grande mauvaise fo i, si ce n’est pas
plutôt une chicane ; car en vérité il n’est pas possible
de supposer que le sieur Veyssière eût un autre but que
celui de conserver sa propriété. Dans tous ses écrits il
a dit qu’il étoit propriétaire ; partout il a conclu à ce
ce qu’il fût fait défenses aux adversaires de passer et
d’ouvrir des fenêtres; il est même allé jusqu’à conclure
à la mitoyenneté du mur des Filiol. Ainsi ses conclusions
étoient non-seulement' assez étendues, mais elles l’étoient
trop sans doute, puisqu’il a été débouté de sa demande
en mitoyenneté.
30. Les F iliol se plaignent d’avoir été condamnés
en la moitié des dépens.
Il est visible que ce grief n’est ajouté que pour faire
nombre ; car si les Filiol avoient raison, il leur étoit
inutile de faire un grief des dépens, puisqu’ils suivent
toujours la condamnation ; si au contraire ils ont to rt, ce
seroit plutôt le sieur Veyssière qui auroit à se plaindre de
perdre la moitié de ses dépens, à cause d’un chef de
conclusion qui n’occupoit qu’une bien petite place dans
tous les frais occasionnés par les adversaires,
Cette division de griefs, au reste, ne doit pas faire
perdre de vue l’unique question de cette afia ire. Les
Filiol n’ont pas prouvé que le local en contestation fût
une place publique : la commune n’y a jamais eu de
prétention; leurs propres titres les condamnent, et attri
buent la propriété au sieur Veyssière.
�( 1 5 )
Ainsi les premiers juges n’ont fait qu’ordonner l’exé
cution de tous les titres des parties , en lui conservant
cette propriete; et s’ils ont accordé un droit de passage
une porte et une fenêtre aux adversaires, c’étoit évi
demment le pis aller de ce que le sieur Veyssière avoit
à craindre.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
Me. TARDIF, licencié avoué.
A I U O M , de l’im p. d e T H I B A U D , hnprim . de la C o u r im périale, e tlib ra ire ;;
ru e des T a u le s , maison LahdMOT». — N ovem bre x 8 n»,
�
Dublin Core
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Veyssière, Joseph. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
limites de propriétés
conflit de voisinage
Description
An account of the resource
Précis pour Joseph Veyssière, marchand, habitant de la ville de Pleaux, intimé ; contre Antoine Filiol et Marie Chavignac, sa femme, habitans de la même ville, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
1721-1811
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0418
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pleaux (15153)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53802/BCU_Factums_M0418.jpg
Conflit de voisinage
limites de propriétés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53800/BCU_Factums_M0416.pdf
21cef8c74614dfdb8e594b983983a918
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Text
P R E C IS
POUR
Jean-P
ie r r e
^ ^ l}buy
U t o 'C i - u w ù J .
/tyu<+rfc4li_ /[iiH f^ ,
■
‘ '
' ■IMcu/ulJ
A S S E Z A T , de la ville du P u y ,
! a p p e lan t ;
\
CONTRE
Matthieu
J E A N , de la même Ville, intimé.
LE sieur Assezat est propriétaire d’une tannerie pour
l’usage de laquelle il a une prise d’eau qui ne lui est
pas contestée , mais que le sieur Jean veut partager
avec lui.
Le seul motif du sieur Jean , pour prétendre à ce
partage; est de dire, 1.° que sa maison provient originairement du même propriétaire, et.qu'elle était aussi
une tannerie, il y a 2 5o ans; 2.0 que le même proprié-
�( O
_
faire l’a ensuite réduite en boutique à teinture , et
qu’en pratiquant, il y- a seize ans, un aqueduc,
autre que celui cju7ilfi;éclame ,'il a repris et conservé
le droit dey redemander^ l’ancienne.* p r is e d ’eau telle
qu’il la suppose,_l
A cela le sieur Assezat répond, i.° que de tems
immémorial il a joui seul de la prise d’eau, et que si
l’ancien propriétaire des deux maisons a aliéné celle de
Jean, sans prise d’eau, la retenue qu’il a faite de cette
eau pour' lui-même ne peut être disputée aujourd’hui à
ceux qui le représentent ; 2.0 que c’est lui qui a permis
au précédent propriétaire de la maison Jean, d’établir
un aqueduc fort différent de celui qu’on voudrait au
jourd'hui, puisque n’étant accordé que pour une simple
teinture, et pour le trop plein de l’eau, Assezat n’était
privé de rien.
Telles sont en abrégé les prétentions des parties qui
_
p la id e n t; il fallait les a n n o n c e r p o u r ren d re intelligible
la localité qui va être indiquée, et appeler rattention
de-la Cour sur les circonstances qui s'appliqueront
aux difficultés de la cause.
Les deux maisons d’Assezat et Jean, sont situées
en la ville du P u y , faubourg de St. Barlhélemi. Elles sont
séparées par une branche de ruisseau appelée le Béaidu-Breuil ; il passe sous une voûte qui lie les deux
maisons.
Ce n’est pas ce ruisseau qui fournit à la prise d'eau
en conteslation ; elle vien t au contraire le couper en
ligne droite par des aqueducs en maçonnerie , qui dis-
�( 3 )
iribuent ensuite les eaux, par des gargouilles en pierre y
dans les tanneries voisines qui 'sont en possession immé
moriale d’en user ainsi.
L e dernier embranchement de cette distribution est
celui qui nous occupe. Ayant à traverser un chemin
public, l'eau passait dans un aqueduc , couvert d’une
voûte assez é le v é e , de laquelle sortait une autre gar
gouille qui menait l’eau h la tannerie d’Assezat.
On a fait assez récémment une grand’route sur
l ’emplacement de ce chemin, et les ingénieurs y fai
sant un pont et une chaussée, ont néanmoins respecté
cette ancienne vo û te, qui est restée sous l’arche du
pont, telle qu’elle était; ensorte que cette réparation
publique n’a rien dérangé à l’ancien cours des eaux.
La tannerie d’Assezat, achetée par son aïeul, n’a
jamais cessé de jouir de cette prise d’eau. Encore une
fois on ne le nie pas, mais voyons ce qu’il en a été
de la maison voisine, pour laquelle le s.* Jean reven
dique une portion de l’eau.
L e sieur Jean nous apprend que sa maison et celle
du sieur Assezat appartenaient en 1544 au même pro
priétaire, Michel Pendraud qui était coLratiery ou tan
neur, et qui dans un cadastre se reconnut possesseur
d’un oubradoar en deux parties.
Si cela est exact, il paraît que ce Pendraud vendit
ensuite la portion de bâtiment située sur la rive gauche du Béai, et qu’il garda toute la prise d’eau pour lui • car
le sieur Jean nous prouve par un autre cadastre de
16 78 , que François Entier, possesseur de la même'
�{4 )
maison à cette époque , en fit réduire l’impôt de
moitié, attendu (porte le cadastre ) quelle riest plus
un ouvroir,
Cependant, il.paraît que depuis cette date on avait
voulu’rendre quelque activité à cette maison (Jean);
on y établit une teinture, et'personne n’ignore que
cet établissement, dans l’usage à-.peu-près général,
n’a besoin que d’avoir un ruisseau à sa proximité : or
p r é c i s é m e n t , le Béal-du-Breuil en baignait les murs.
. On voit dans un 3 .« cadastre de 1730 , que Jacques,
Soulier ( propriétaire’ de la maison. Jean ) avait alors
y ne maison et boutique à teinture, tandis que François
Balme (propriétaire de la maison Assezat ) avait tou
jours une' tannerie, et par conséquent la prise d’eau
nécessaire.
■
1
. Aussi remarque-t-on , que ce François Balme ven
dant à Pierre Assezat sa maison et tannerie, le 6 avril
1-739, comprit dans’ la vente la prise d ’ea u , comme
une chose sans laquelle Assezat n’aurait pas voulu
acquérir.
On voit encore dans un acte de 1747 que le seigneur
du lieu, en donnant ¿1 Assezat l’investiture, y dit que
le béai est pour le service des tanneries.
Il paraît que le sieur' Ameline acheta de Jacques
Soulier sa maison et teinture ; il n’en acheta d’abord
que la moitié et un huitième, par ac^ du 11 janvier
17 9 3 , et quoiqu’il fût très-important de désigner la
prise d’ea u , non - s e u l e me nt comme acquise, mais
e-ocore par lu quotité et le mode de cette prise d’eau>
�(5 )
■puisqu’ elle.aurait dû se diviser à raison de chaque part,
si elle était inhérente à la maison.
Les autres portions de ladite maison furent achetées
par Âméline des autres héritiers Soulier , savoir, un
seizièm e,île 4 ventôse an 2’, et trois seizièmes, le 4
complémentaire an 1 1 ; ensorte que ce n’est que le
dernier jour de Tan 1 1 , qu’Ameline à été propriétaire
de toute la maison. Quoiqu’il en soit, c’est le s.r Ameline qui, après 179 3, fit un nouvel œuvre, dont il est
nécessaire de bien entendre le placement et le motif.
La maison Jean, baignée à l’orient par le Béal-duBreuil, a deux entrées,l’une au midi, qui se rapproche
beaucoup de l’aqueduc voûté auquel il veut participer ÿ
l ’autre au nord, et c’est là que s’exploitait la teinture.
A côté de la porte du midi était un ancien puisard,
bâti dans le m ur, ■saillant en dehors, et exhaussé par
une mardelle couverte tantôt par des dalles de pierres ?
tantôt par des planches.
Si ce puisard avait eu une destination dans le tems
que la maison était oubradour , en 1544, au moins
est il constant qu’il devint inutile lorsque le tanneur
Pendraud ou ses successeurs la vendirent. En e ffe t,
de quelque loin que les voisins se souviennent ce
puisard n’a toujours servi qu’à tenir du fumier.
Soulier et Ameline ne purent pas même Futiliser
pour leur teinture, car il demeura fosse à fu m ier, et
aujourd’hui même il ne sert à rien.
Le voisinage de l’aqueduc donna une idée à Ameline;
�c 6 }
il la communiqua à Assezaf, qui n’y voyant aucun'dé
triment réel pour lui, s’empressa d ’y souscrire.
Il s’agissait d’établir un tuyau en bois, non pas vers
la voûte même’ de l’aqueduc, ce qu’Assezàt n’aurait
pas souffert ,' mais dans un angle par lequèl une gar
gouille , portant les eaux chez Assezàt, en laissait
aller Ië trop plein dans le ruisseau, par une autre gar
gouille inférieure.
’
'
Ce tuyau de bois devait fournir à la teinture une
eau plus claire ; son nivellement le portait au-dessus
du puisard qu il n’était pas possible d'utilisèr, et ce
tuyau traversant le mur de la- maison Jean , se pro
longeait hors de la maison , jusques à la boutique à
teinture, qui*était comme on l’a déjà dit , à l’autre
extrémité vers la porte du' nord. Là le tuyau rentrait
par le m ur, dans l'intérieur de cette boutique, où il
venait verser l’eau dans un nouveau puisard. '
V o i l à ce q u ’ A ssezal perm it à A m e l i n e / l l le d e v a it
en b o n voisin, p u isqu ’il n ’ e»ût pu refu ser que par mé
chanceté ce qui ne lui nuisait pas. Assezàt restait le
maître de l ’eau, et lorsqu'il la voulait toute entière,
il lui suffisait de faire mettre un bouchon au tuyau
de bois.
!
r '
C ’est ainsi que la chose's’est pratiquée amiabl'ement
pendant toute la durée de la possession d’A m elin e,
et si le sieur Jean ne lui eût pas s u c c é d é , il n ’y aurait
pas de procès.
Le'sieur Jean, acquéreur d’Ameline, a débuté par
�(7 )
un coup d’autorité, ou plutôt par un tour d’adresse
qui aurait dénaturé les lieux de manière à ne plus
reconnaître le droit de chacun , si Assezat ne s’y fût
pris à tem s, pour arrêter cette voie de fait.
Il ne s’agissait plus de prendre l’eau dans un tuyau
de bois , ni même de la mener à l’ancien puisard,
auquel Jean veut se borner aujourd’hui. Pour établir
une tannerie et conduire l’eau dans le derrière de la.
maison, il y avait bien des obstacles à vaincre; car
l’ancien puisard est beaucoup plus bas que -le sol de la
maison Jean ; alors, au lieu de conduire l’eau par là ,
le sieur Jean conçut l’idée de la faire dévier par un
autre angle de sa maison; mais pour cela,-au lieu de
la prendre dans la gargouille d’Assezat, il fallait aller
yusques sous la voûte du grand chemin , enlever les
pierres trop larges de l’aqueduc d’Assezat, et partager
l ’emplacement , de manière à faire deux aqueducs,
dont l’un aboutirait chez Jean.
Telle était la conception de ce s.r Jean, et déjà il avait
débâti l'aqueduc d’Assezat, lorsque celui-ci le cita au
possessoire le 6 juin 1809; et comme il y avait grande
urgence , le juge de paix cita Jean à comparaître
sur les lieux dans la même journée; il y dressa un
procès-verbal, et néanmoins Jean continua son nouvel
oeuvre, malgré le juge de paix; il fut cependant arrêté
par un jugement possessoire, qui ordonna la remise
des lieux au même état.
Alors Jean se pourvut au pétitoire; il conclut à
être autorisé à prendre les eaux au même point où
�(3 )
Assezat les prenait, sous l’arcade du pont’ : subsidiai—
rement il conclut au partage des eaux.
L e 2,6 juillet intervint un jugement interlocutoire
dans un sens qu’il était difficile de prévoir. En effet,
le sieur Jean étant demandeur avait tout à prouver,
et en efïet il offrait la preuve directe, i.° que depuis/?/^
de trente ans il y avait dans sa maison une fabrique
a tannerie , et des fosses de tanne rte dont Les- traces
subsistent encore ,* q u ’ elle était alimentée p a r l’aqueduc
dont partie subsiste encore, et qui fournit l ’eati aux
deux maisons; 2.0 que ce n’est que depuis vingt-quatre
ans qu’Ameline changea le mode de prise d'eau j qu’il
bâtit et ferma dans son mur un ancien aqueduc en
pierre, et qu’en place dudit aqueduc, il plaça l’arbre
percé; 3.° que l’arbre percé prenait Feau dans le même
aqueduc principal et au même point où Assezat la
pren d , et où l’aqueduc la conduisait précédemment
dans la m aison de Jean,* 4.0 qu’Ameline et ses pré
décesseurs ont de tems im m é m o ria l c o n t r ib u é , h raison
de ladite prise d’eau, à l’entretien de l ’aqueduc du pont.
Assezat n’étant que défendeur soutenait que la de
mande n’était pas établie, et au surplus offrait la preuve
contraire desdits faits, et notamment qu’il a toujours
joui de l’eau ; que ce n’est que depuis dix- huit ans
qu’il donna La permission à Ameline d’établir un cor
en bois, et qu’il en fermait l’orifice toute les fois.qu’il
avait besoin de la totalité de l’eau.
Par un renversement dont 011 ne peut pas trop se
rendre raison, le tribunal du Puy chargea Assezat de
la
�( 9 )
la preuve directe, qu’il avait toujours joui de l’eau, et
donné à Ameline la permission d’établir le cor en bois.
Et ce qui est peut-être plus inexplicable encore, Jean,
dans son enquête contraire, fut dispensé de l’art: i .er ,*le
plus important de sa preuve , c’est-à-dire qu'il ne fut
pas astreint à prouver que depuis plus de trente ans il
y avait dans sa maison une fabrique à tannerie. Ce
pendant il était demandeur au pétitoire, il devait éta
blir sa demande par titre ou possession de trente ans, et
il avait bien compris qu’en l’absence d’ un titre yil devait
en première ligne offrir la preuve de celte possession.
J L a preu ve, exigée du sieur Jean , se borna aux
trois autres articles par lui articulés ; mais la diffé
rence était essentielle; car prouver l’usage d’une prise
d'eau, ou ses vestiges, n’était pas lever.la difficulté de
savoir s’il fallait de l’eau pour une teinture ou pour
une tannerie, ce qu’il était de la plus grande impor
tance de distinguer.- :
Ainsi, la première impression que laisse ce jugement
interlocutoire, c’est de s’étonner que Jean ait à prou
ver moins qu’il ne le devait, c’est de s'étonner encore
qu’Assezat soit astreint a prouver sa possession, quoique
défendeur, et malgré un jugement possessoire qui l’avait
déclaré maintenu.
v
Il faut ajouter que le même jugement interlocu
toire ordonne que M. le commissaire - enquêteur sera
assisté du sieur Gendriac, architecte, lequel lèvera un
plan, et fera la description des lieux à M. le commis
saire, qui en dressera procès-verbal.
3
�( IO )
Celte mesure était absolument nécessaire pour l’in
telligence et même la rédaction des dépositions; car,
les témoins ayant à parler d'aqueducs, de vestiges et
de nivellemens, il était difficile de tout comprendre ,
sans cette opération préalable, ou sans s’interrompre
à chaque instant pour aller voir les divers points dé
crits par les dépositions. Il était plus difficile encore
de rédiger ces dépositions d’une manière intelligible
pour ceux Fqui auraient , à les lire , si le local décrit
n’était à l’instant désigné par les signes d'un plan.
Voilà ce que le sieur Assezat désirait , ce qu'il de
manda, et ce qu'il n’obtint pas, malgré son insistance
pour ne rien laisser d’équivoque dans toutes les expli
cations qui devaient être données.
Quoi qu’il en soit,-voyons ce qui est résulté de cet
interlocutoire, et sachons si c’est le demandeur au
■
.
.
pétitoire qui approuvé sa possession, aaimo çLomini,
ou si c’est au contraire Assezat qui a prouvé que cette
possession n’a eu lieu que par sa permission et tolé
rance.
On voit dans l'enquête ¿ ’Assezat , les i.er, 2 e, 3 .%
5 «, 7.%8.®, 12.*, i 3.c, i 5 .e et 17.* témoins déposer una
nimement avoir toujours vu Assezat jouir des eaux
en maître, ouvrir et fermer le canal quand il le vou
lait , placèr des moites pour e m p ê c h e r qu’il ne s’en
échappât dans le ruisseau, et les ôter quand il n’en
avait plus besoin; que les lieux étaient toujours comme
a u jo u rd ’h u i , et qu’ils n’ ont changé que depuis le iems
qu'Ameline plaça un tuyau de bois.
�( 11 )
L e 9.% le io,e et le i y . e témoins parlent de la per
mission donnée par Assezat à Ameline d’établir un
tuyau de bois pour prendre l’eau ( ils étaient ap
prentis d’A m e lin e ); le g.e dit qu’avant cet établisse
m e n t , Ameline avait une pompe pour entretenir sa
chaudière; qu’ensuite en ayant monté une seconde,
il envoyait ses ouvriers chercher l ’eau au ruisseau, et
que ce ne fut qu’après ladite permission qu’Ameli.ne
prit l’eau à l'aqueduc; que lorsque Assezat avait be
soin de l'eau, il venait boucher le tu}^au; que cepen
dant, lui déposant allait quelquefois la reprendre fur
tivement, mais qu’alors Assezat s’en plaignait. L e 10.%
qui n’a quitté Ameline que. lorsqu’il vendit sa maison
à Jean., ajoute qu’Ameline disait quelquefois, qu'Assezat était un bon voisin de lui avoir donné la facu lté
d’établir ce tuyau de bois;-il ajoute que lorsqu’Assezat le bouchait, Ameline ne s’en.plaignait pas.
L e 17.' dit qu’Ameline prenait l’eau avec ïagrément
d'Assenât y lorsque celui-ci n'en avait pas besoin.
Les 7-e et 8.® témoins disent que lorsqu'Ameline
acheta la maison Jean, il n ’y avait de fabrique d’au
cune espèce.
Le 1 i.e et le i 3.e ont vu deux puits dans la maison
Ameline (ce qui eût été assez superflu, si l ’eau y fût
venue par des aqueducs); ce n . e témoin est l’ouvrier
qui a placé le tuyau de bois; il dit avoir vu dans le
même alignement une gargouille en pierre de taille
qui traversait le mur, et le dépassait de quatre pouces.
E n fin , le 3 .®et le i6.e témoins déposent un fait assez
4
�( 12 )
essentiel, et qui prouve que tous les moyens sont bons
à Jean pour en venir à ses fins; il avait prétendu que le
déversoir d’Assezat menait jadis les eaux chez lui 3 mais
une des pierres était coudée, ce qui était l’idée qu’il
•veut donner; or, ces deux témoins disent que pendant
le procès Jean a enlevé cette pierre coudée.
Voyons maintenant si l’enquête;de Jean détruira les
faits de tolérance ci-dessus établis. Tout ce qu’il paraît
avoir prouvé c’est la coopération d'Ameline aux frais
de nettoiement du canal, ce qui était fort naturel,
puisque l’eau lui était utile, mais ce qui n’a rien de
commun avec le mode de jouissance.
Les 3 .e , 9-e et io.e de lia .première enquête, les s.e
et 5.e de la seconde disent bien qu’Ameline et Assezat
jouissaient de Téau concurremment, mais il n^y a rien
là qui caractérise une possession de propriétaire plutôt
qu une possession de tolérance, en sorte que l’enquête
directe reste dans toute sa force sur ce point principal.
Les 3.e, 4.% 7.® et n . e témoins de la première en
quête de J e a n , les
4.% 5.e et 6.e de la seconde font
la description'des lieux, et ne sont rien moins que d’ac
cord dans leur obligeance; les uns disent que le cpnal
en pierre, qui fait le déversoir d ’Âssezat pour jeter le
trop plein dans le béai, se pro lo nge ai t autrefois jusqu’au
puisard ancien de la maison Jean , H y en a même qui
disent avoir vu tomber l’eau dans le puisard (chose phy
siquement impossible, mais d’ailleurs inutile au procès) 3
�( i3 )
d ’autres n’ont toujours vu ce puisard que plein de terre
et de fumier. Il n’y a pas jusqu'à la veuve Ameline qu'on
n ’ait fait entendre, et qui, sansdoule, pour se préserver
d'une menace de garantie, arrange les lieux d’une ma
nière toute particulière. Ce puisard, toujours à sec et plein
de fumier, était, suivant elle, un bon aqueduc il y a
vingt-quatre ans, et l’eau parcourait l’intérieur par des
conduits en pierre. Malheureusement le sol de la mai
son est plus élevé que le puisard ; mais elle y a réfléchi,
et elle nous apprend que c’est elle qui a fait élever le pavé
il y a quatorze an s, et qu’ensuite on remplaça ces
aqueducs de pierre par des tuyaux de bois qui eurent
une autre direction5 puis, elle nous révèle aussi qu’elle
a vu sous la terre des débris de fossés à tanneurs. E n fin ,
perdant un peu de vue tout le bouleversement qu’elle
vient de faire, elle termine par dire qu’elle a toujours
vu les lieux au même état, excepté le placement du
tuyau de bois qui a remplacé la prise d’eau ; du reste,
elle déclare que son mari et Assezat vivaient en trèsr
grande intimité.
L e témoin qui vient après veut bien un peu s’ac
corder avec elle pour trouver des conduits au-delà du
puisard, mais ce qui ne va pas avec les vingt-quatre
ans, c’est que ce témoin dit avoir été localaire de la
maison Jean , il y a vingt-deux ans, (ce qui prouve
qu’Ameline.n’ y était pas encore alors), et après avoir
parlé d’un conduit de pierre dans 1 intérieur, il dit que
ne se faisant aucune fabrique dans celle maison, le pui
sard était plein d’ordures. Quand 011 l’interroge ensuite
�( i4 )
sur Assezat, il avoue qu’Assezat plaçait des mottes
quand il voulait pour ôter l’eau au voisin, et que
Bartliélemi (ouvrier d’Assezat), donnait des coups de
poings à ceux qui venaient la lui couper. Ce dernier
fait est encore attesté par d’autres témoins.
L e procès-verbal de description des lieux, et le
plan qui auraient dû précéder les enquêtes ne furent
dressés que le 21 novembre 1809, et la Cour pourra
y voir si les descriptions de la veuve Ameline ont quel
que réalité.
L ’expert, après avoir parlé de l’état actuel des lieux
et du déversoir en pierre , qu’on disait mener au pui
sard, et de là dans la maison Jean, fait creuser la terre
dans cet alignement ; au lieu de trouver un canal en
pierre, il ne voit sous le pavé qu’une pièce de bois de
sapin de trente-sept pouces, pourrie et informe, tiab ou tissa n t p o in t a u p u isa rd .
Il constate que la gargouille dont on voulait faire
l ’ancien aqueduc de Jean est plus basse que celle qui
conduit l’eau chez Assezat.
11 fait creuser derrière la porte de la maison Jean, il
trouve un pavé en pierre de taille; il trouve aussi un
canal en pierre, mais il vériiie le le n d e m a in qu’il ne
dépasse pas Fépaisseur du mur (ainsi ce ne peut pas
être un aqueduc de tannerie). Au-dessus de ce canal
il voit encore une gargouille, q iJi a la vérité traverse
le mur , mais qui n’a de saillie dans la maison que de
quelques pouces.
�( i5 )
Il a cherché dans toutes les tanneries voisines quelle
est la position des conduits dans l'intérieur , et il a vu
que 1 eau rentre par un coin de la porte; ensuite il vient
faire fouiller chez Jean , le long du m u r , et n’y trouve
aucune gargouille.
Il remarque que Faire de la boutique du côté de
midi a été déblayée de la hauteur de huit décimètres.
Il trouve cinq fosses en pierre de taille, mais elles
sont neuves, et Jean est obligé de convenir que c’est
lui qui les a fait b âtir, sans articuler même que c’est
sur d’anciens vestiges.
Enfin il nivelle le terrain pour savoir si l’eau récla
mée peut aller jusques dans Fintérieur de la maison ,
et il trouve que Faire de la première boulique est plus
élevée que la gargouille où Jean veut trouver l’origine
de son ancienne prise d’eau. L ’expert fait même un
nivellement plus essentiel qui prouve que la partie du
pavé près le puisard (celui découvert plus haut) est
encore plus élevé que Faire de ladite boutique ( ce
qui prouve forcément que l’eau n’a jamais pu monter
ni à la boutique qu’on sou lient avoir été une tannerie,
ni même au pavé ancien qui la précède >puisqu’il est
encore plus élevé que la boutique.
Aussi quand il serait vrai que la veuve Ameline
aurait fait élever Faire de la maison , quand le nou
veau déblaiement vu par 1 expert n aurait pas rebaissé
le sol , le pavé découvert est toujours la pour atlester
Fancien état des lieux ; et prouver évidemment que
�( 16 )
l ’eau n’a pas pu remonter du puisard jusques aux
boutiques de ¡’intérieur.
Quoi qu’il en soit , le tribunal du Puy n’a pas jugé
à propos de faire toutes ces remarques, il a cru voir
au contraire dans ces éclaircissemens une preuve complette que Jean et ses prédécesseurs avaient joui cons
tamment de l’eau , et c o n c u r r e m m e n t à titre de pro
priétaires. Il a cru v o ir e n c o re q u e le tuyau de bois
n’a été que le remplacement d’un ancien aqueduc ;
en conséquence il a ordonné le partage de l’eau dont
il a néanmoins proportionné le volume à la dimension
comparative de la gargouille d’Assezat y avec le pré
tendu conduit de Jean , d'où il suit que Jean est auto
risé à avoir le tiers de l’eau , et ce qui est plus extraordinairë, à la prendre à l’embouchure de l’aqueduc (in
novation qui suffit seule à prouver que ce n’est point
un ancien aqueduc qu'on veut conserver à Jean / mais
u n e n o u v e lle concession q u e la m u n ific en c e du tri
bunal du Puy lui octroie ).
Cette décision est-elle tolérable lorsqu’elle n’est ap
puyée ni sur les faits, ni sur les actes, ni sur des prin
cipes ?
•
Des faits? La Cour verra par la lecture des enquêtes
comparées à la description des lie u x , s’il est possible
de penser qu’avant rétablissement d Ameline , tein
turier, il pût y avoir une prise d eau dont le tuyau en
bois n’ait été qu’un remplacement. Elle verra s'il n’est
pas
�( 17 )
pas clairement prouvé que jusqu’alors rien n’avait l’ap
parence d une tannerie, ni même d’une teinture ; que
le puisard même était encombré ^ que loin de cher
cher des vestiges d aqueducs dans l’intérieur, Ameline
fût forcé de conduire par des tuyaux en bois, et par un
nivellement cherché hors de sa maison, l’eau qu’Assezat lui permettait de prendre.
Tout les faits constans sont en faveur du s.r Assezat ;
il n’a pas seulement contrarié la preuve de son adversairepar une preuve de permission qui s’attache à la
possession de Jean et lui donne un caractère de tolé
rance, mais il a lui-même prouvé sa. possession et son
dioit. Cependant il n’avait rien h prouver, car il était
défendeur. Son adversaire avait à établir sa demande,
et sans discuter les enquêtes dont on vient de donner
le précis, il suffit de dire comme chose constante, que
le droit de Jean à réclamer une prise d’eau pour une
tannerie, n’est pas prouvé.
Des actes? Mais Jean n’en a d’ aucunes espèce, et
tous ceux qui sont produits en la cause détruisent son
système de fond en comble.
Car si Michel Pendraud a eu les deux maisons Asse
zat et Jean en i 544 >il n’est pas prouvé d’abord que
ces deux maisons fussent tanneries; et il n’est pas prouvé
qu’un ouvroir veuille dire uue tannerie : mais quand ce
serait prouvé, il en résulte quelque chose de plus fâcheux
encore pour Jean, c’est qu’il est constant que l’une des
deux a été tannerie,au moins depuis 1678, et c’est celle
5
�( 18 )
d’Assezat, tandis que l’autre est prouvée ne Tavoir
été ni en 1678, où elle était en ru in e, ni en 1730,
où elle était teinture, ni avant A m e lin e , où elle n'é
tait rien du tout.
A moins de contester tous les usages en fait de titres,
il est bien évident que lorsqu’il s’agit d’une prise d’eaù,
divisible entre plusieurs , et conduite par des embranchemens de canaux, la première règle pour un acqué
reur est de faire exprimer qu’il en achette une part.
Et c’est ici où les comparaisons deviennent essentielles.
Assezat, plus ancien acquéreur, prouve par les titres
qu’il rapporte qu’on n’a jamais parlé de sa maison , sans
parler de la prise d’eau comme partie intégrante.
A u contraire, Jean a une multitude de titres frap
pant sur sa maison, et la prise d’eau n’y est mentionnée
nulle p art, pas même lorsqu’il achetait des quarts et
seizièmes de maison , et lorsqu’il avait intérêt de faire
expliquer le mode de prise d’eau et son volume.
Dirait-il que l’usage dans les actes est de parler va
guement de servitudes sans s’inquiéter de leur détail,
et que les précautions prises dans les titres dAssezat
sont insolites. On lui répondra à l’instant par le relevé
qui a été fait de tous les actes relatifs à l’aqueduc qui
distribue ses eaux aux tanneries du faubourg St.-Bartliélem i, et il y verra que nulle part il n’est parlé de
ventes de maisons, sans ajouter en meme tems que la
prise d'eau en faisait partie.
Ainsi les actes produits condamnent le sieur Jean,
et ce qui en résulte de plus clair, c’est que l’une des
�( 19 )
.
parties veut conserver ce qu’elle a , tandis que l’autre
ne veut pas s’y ten ir, et bouleverse tout, pour aug
menter sa propriété aux dépens d'un voisin.
Ceci nous mène à Fexamen des principes, et c’est
là ce qui a donné le moins d’inquiétude aux i . ers juges
ou peut être le plus d’embarras; car, sans cela, com
ment concevoir qu’ils fussent allés chercher dans une
enquête contraire ce qui était démenti en fait par
l ’enquête directe, et ce qui était démontré impossible
par un nivellement. Gomment adopter sur-tout qu’ils'
aient pu donner à Jean une prise d’eau tout autre
que celle dont ils s’attribuaient la possession.
l a aquœductu nihiL est Lnnovandum contcà veterem
formam. Voilà un principe élémentaire enseigné par
un grand m a ître , il renferme toute la doctrine des
prises d’eau, et déjà nous y voyons que Dum oulin,
s’il eût été le juge de cette cause, n’aurait pas consenti
yolontiers à ôter à Assezat un tiers de l’eau nécessaire
à une tannerie de trois siècles, pour donner à Jean le
droit nouveau de faire un établissement qu’il n’a jamais
eu, et de (métamorphoser une teinture en tannerie.
Si le sieur Jean voulait persister à soutenir qu’il ne
réclame qu'une ancienne possession d'aqueduc , et qu’il
en a fait la preuve , il est inutile de revenir à une
démonstration contraire, puisqu elle ne serait prise que
dans ce qui vient d'être lu, et que ce serait se répéter;
mais quand on lui ferait grâce de la vérité pour sup
poser qu’il a eu une ancienne possession d'aqueduc,
6
�( 2° )
que pourrait-il en résulter, si ce nJest qu’il doit con
server , par la prescription, ce que la possession lui a
donné. Tantum prœscriptum quantïnm possessum.
Or, quelque étendue qu’on puisse donner à la pos
session du sieur Jean , quelque disposé qu’on soit à
fermer les yeux sur la tolérance qui la dénature, le
maximum pour lui serait d’ajouter aux quinze 'ans de
prise d’eau, p a r u n tu yau de bois, autres quinze ou
vingt ans d’ une prise d’eau précédente, dont il a pré
tendu que le tuyau n’était que le remplacement, il est
visible qu’il ne naîtrait pas de cette possession trentenaire le droit de prendre l’eau nécessaire à une tan
nerie, et sur-tout de la prendre en un autre lieu, par
un aqueduc nouveau, et en remontant jusqu’à la voûte
du pont.
Il ne peut pas en résulter non plus la privation au
sieur Assezat de prendre toute l’eau quand elle lui sera
nécessaire, puisqué la possession du sieur Jean, en la
supposant trentenaire, a toujours été conditionnée de
cette charge.
Si le sieur Jean, remontant à des époques plus loin
taines, voulait s’emparer des rêveries de l’un de ses té
moins, pour dire que sa maison avait jadis des canaux,
et même des fosses, dont les débris ont été vus sous
la terre, et pour en conclure, que, par la destination
du père de famille, ces vesliges o n t conservé sa posses
sion, le système du sieur Jean n en serait pas meilleur.
Faisons lui g r a c e e n c o r e sur ces débris de fosses et
de canaux, invisibles pour l expert qui les a cherchés,
�( 21 )
et pour Jean lui-même qui n’a su montrer que des
fosses nouvelles, supposons qu’il a fait réellement l’heu
reuse découverte de vestiges bien apparens, que fau
dra-t-il en conclure?
• T^estigia possessîonem réitnent, cela est* vrai.^Mais,
qu’on lise Dargëntré, [ auteur d’une dissertation sur
cette matière, et on y sera convaincu que la possession
•*
1
•
.
.
n’est conservée par des’ vestiges que lorsque l’état des
lieux reste v a c a n t, lorsqu’il n’y a aucun changement
qui les dénature, lorsque sur-tout le rétablissement des
choses ne nuirait pas à l’occupation d'un tiers.
%
I
r
L e tems qui dénature tout/ ne veut point être in
terrogé sur ‘cè qu’il n’a- pas jugé* ;V propos de nous
révéler par, des signes cértains. Celui qui prétend
lire dans le passé, avec des conjectures, est aussi in
sensé que celui qui veut lire dans l ’avenir; tious avons
assez de'sujets d’erreur dans le présent/sans" en cher'icher de plus grands hors la sphère de notre intelli'i
,
gence.
'■
! ::Que le propriétaire d ’un bâtiment en ruine , em
pêche un usurpateur de s’en approprier le sol, sans
doute nous comprendrons qu’il est resté le maître de
rebâtir, parce que cette idée juste1 et naturelle n’est
contrariée par aucune autre.
' Mais, si un sentier, un pont, un aqueduc, marquent
un droit pour vous, même à titre de servitude sur mon
fonds, de simples vestiges en ruine ne vous donneront
pas le droit de rétablir les lieux comme ces vestiges
l ’indiqueraient, parce que cette idée est contrariée par
�(
)
la présomption, que la servitude n’a été détruite qu’à
titre de convention, ou comme usurpation empêchée.
C ’est par ce motif que les servitudes sont censées
éteintes, non utendo; et ce que disait, à cet égard, le
droit romain, est ratifié .par l’art. 706 du Code civil.
Remarquons à cet égard combien ce principe est fa
vorable, puisque la coutume d e P a r is ,, qui n’admet
tait pas les servitu d es sans titre , voulait cependant
qu’elles pussent être perdues par la prescription. Autre
preuve convaincante que le législateur ne veut pas
qu’on porte ses regards trop en arrière, pour que nous
„soyons forcés de prendre les choses en l’état où nous
les vo yo n s, sans déranger l’ordre établi.
Ou parle de destination du père de famille ; mais
.si Michel Pendraud a été le propriétaire des deux inaions, est-il prouvé d’abord qu’elles furent toutes lesdeux
tanneries? ne faut-il pas plutôt présumer le contraire?
J)ans tous les cas il n’a voulu conserver qu’ une tan
nerie, et, à cet égard ,sa volonté est écrite sur la pierre,
de manière à ce que la postérité ne s’y trompe pas. S’il
faut remonter jusqu’à lui, et croire qu’il a mis les choses
jen l’état où nous les voyons, il sera évident qu’il a fait
une tannerie pour la maison Assezat, et qu’il n’en a
pas fait une pour la maison Jean. Si nous supposons
que c’est après lui que les prétendus aqueducs de Jean
ont été détruits (s’i l ,y en avait eu à sa maison) „ i l
faudra nécessairement croire que cette destruction a
été exigée par le père de famille lui-même, quand il
a mis hors sa main la maison qui n’a plus d’aqueducs.
�( 23 )
.Toutes ces présomptions sont légales ? car le Code
civil les adopte, même en fait de servitudes; il dit que
la destination du père de famille conservera les servi
tudes continues et apparentes, ce qui prouve, qu’à
défaut de titre, celui qui voudrait en exciper ne doit
pas laisser détruire la servitude , sans quoi la loi la
supposerait éteinte par convention.
Concluons de toutes ces hypothèses que le sieur Jean
n’est pas plus fondé à vouloir une prise d’eau , en disant
qu’il veut la faire revivre, qu’il ne l’est en demandant
franchement à la créer. Concluons encore que s’il est
possible de se tromper sur le droit des parties, il ne
peut y avoir qu’une très - grande injustice d’ôter h
Assezat ce qu’il avait, s’il n’est pas évidemment cer
tain qu’il doit le perdre ; tandis qu’en laissant à Jean
ce qu’il a v a it, et sans aucune innovation , il n’y a
violation d'aucun titre, d’aucun droit r é e l , d’aucune
possession, et que c ’ est véritablement, d’après D u
moulin , laisser les choses en l ’état où les parties les
avaient mises. D e telles vérités n’ont pas besoin d ’exem
ples , mais s’il était permis de détourner un peu
l ’app^cation d’un grand principe, Domat nous prê
terait sa première pensée et la citation par laquelle "
îl a jugé à propos de commencer son immortel ou
vrage. Q u i d em im tà m congruum est fid e i hum anw ,
quàm servare €d
cjucb
inter eos pLacuerunt.
M. D E L A P C H I E R , A vocat
M .é G A R R O N , Licencié- Avoué.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Assezat, Jean-Pierre. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
tannerie
témoins
jouissance des eaux
Description
An account of the resource
Précis pour Jean-Pierre Assezat, de la ville du Puy, appelant ; contre Matthieu Jean, de la même ville, intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1689-Circa 1810
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
23 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0416
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
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Domaine public
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tannerie
témoins
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Text
POUR
S.r
Josep h
B U R E L L E r N otaire
i m p é r i a l , -habitant
de
la. ville de Varennes-sur-A l l ie r, appelant.
CONTRE.
L es sieurs G u i l l a u m e D E L A I R E ,B
J
D ELA~
' G E N E S T E , et F r a n ç . - B l a i s é B A R D O N N E T D E - L Á - T Ó U L E ' , intimés.
'
'
L e propriétaire d’ une m aison ayant dés vues et égouts sur
le terrain, d ’un voisin , a-t-il le droit de r é c la m e r une portion
de ce te r r a in , à titre de tou r d ’é chelle , en co u tu m e de B o u r
b o n n a is , et sans ft itre ?
,• . »
.
" L é voisin qu i n'a jam ais ce ssé !de* jouir de son terrain e x clu sivem ent , peut-il être contraint d’en ab a n d o n n e r une partie ,
et de batir à une distance q u i ne nuise pas a u x vues d é jà 'é ta b lie s?
C '
est
à cela que se réduit toute la difficulté actuelle.
Elle était d'abord bien plus considérable : car les
�.........
( o
sieurs D elaire et Bardonnet réclamaient co m m e pro
priété le terrain q u ’ils ne dem andent aujou rd ’hui que
co m m e servitude de convenance.
Ils com prenaient q u ’il leur fallait des litres
et ils
disaient en avoir*; mais pour les appliquer il fallait dé
naturer la lo ca lité , et il s la dénaturaient.
I l n ’a pas tenu à eux que la C our ne crût sur leur
attestation qu'il régnait le long de leur maison une ai
sance en d é p e n d a n t , bien distincte, sur laquelle d on
naient des fenêtres ouvrant et ferm a n t ; une ancienne
porte à d e u x battans , ouvrant en d e h o rs, a vec ses
g o n d s, et encore un évier égoutant. L e tribunal de L a palisse a cru tout cela , et a condam né le sieur Burelle. "
L a C o u r a vo u lu éclaircir la v é r ité , et a ordonné une
expertise.
Alors tout ce q u ’avaient attesté les sieurs D ela ire et
Bardonnet n ’a plus été qu'un rêve. L ’aisance s’est trouvée
du côté opposé à celui où ils la plaçaient. L es experts
n'ont vu ni cet évier ég o u ta n t, ni ce lle porte à d e u x
ba tta n s, q u i (suivant eu x ) était encore en place.
Us n ’ont v u , au lieu de celte p o rte , q u ’ un trou irré
gulier, rebâti com m e une usurpation e m p ê c h é e , et mas
qué par des planches; un évier égalem ent condam né en
m açon n erie ; une seule fenêtre au rez-de-chaussée agran
die après c o u p , et b arrée; deux autres fenêtres sous
le toit : le tout sans contrevents au dehors, et un sou
pirail.
L ’expertise condam ne donc tout ce qu’ a v a ie n t mis
en % il les sieurs Delaire et Bard onn et, et l’applica-
�( 3 )
.tion qu’ils faisaient de leurs titres. Mais les experts ter
m inent par ém ettre leur opinion sur la question de
droit qui devait résulter de leur vérification , et ils
opinent pour que les sieurs D elaire et Bardonnet o b
tiennent de la Cour La concession d ’un tour d’échelle ,
V oilà en som m e le résultat de la cause 7 dont les faits
vo n t être rappelés à la C our ; ils dispenseront le sieur
J 3urelle de revenir sur les rapprochem ens de titres et
les raisonneméns q u ’il avait présentés d’abord pour
p ro u ver que lui seul était sincère sur la localité ; il ne
lui restera q u ’à prouver que tout le terrain jusqu'au
m u r du sieur D e la ir e , est sa p ro p riété, et que sans un
“titre contraire, on ne peut pas plus lu.i en disputer; trois
pieds que là totalité parce q u e , dans aucun p a ys,
on ne peut pas ôter du terrain à un voisin, lorsqu’ on
n ’a à lui opposer ni titre, ni possession.
w
;
: 1;., l . :
—; î r' i
r :.
• ’F A I T S . . . ‘ j
‘
..
: - : ï r '!
.
'
I^e sieur Burelle est adjudicataire d ’ un enclos trèsp r é c ie u x , situé au faubourg de la ville de V a re n n e s,
- v e n u des sœurs de la. Charité , e t , avant elles, de la
cure de Varennes.
'
;
f
Ji n i > -A
Cet, enclos.est co n fin é , de bise, par la grande ro u te ;
et d’ occident ^ pctr
baicmciis et jQif.çfoti ¡dit steitr
■D elaire,
. * r
' Ces bûtimens çt jardin du sieur D e la ire , portan t,
jadis, le : nom du logis du; Cheval-Blanc , proviennent
d’ un Gilbert S e n a u d , qui le vendit à Gilbert M o n e r a t,
�( 4 )
le i .cr juin 1689. L ’acte contient un détail de chambres,
■grenier, c a v e , écurie et aisances pour aller à ladite
écurie ; cour et jardin par derrière , le tout ayan t
deux coupées, et se confinant par La terre d u curé de
, T^areiraes ; ! d ’orient et m id i; par la maison, cour et
•jardin de la v e u v e M o in a r d , de n u it, et par le grand
c h e m in , de bise.
;Gilberi D u ch é n e acheta cette maison de M o n é ra t,
¡le 2 8 'mai; 1700.;.O n 'y voit, le m êm e détail des objets
vendus,?at toujours p o u r c o n fin im m édiat La terre du
a ir e dé Varetities\ '
:
n. L e 6 décem bre 1792 ^Philippe D e le v a u x et sa fem m e
^vendirent les ;tniemes 'bâtinifens ei jardin» au sieur B a rdonnet - l a - î T o u l e e n c o r e ; c o n f i n é s r par Le\ jardirù des
D arnes 'de la charité ( l e m ê m e que celui du curé de
V a r e n n e s )« <
: , .>•
-■
jc . ;
-, :
L e sieur B a rd o n n e t-la -T o u le avait réuni a la m aison
, du C h eval-Blanc, le biiïiiiumt M o in a r d , -qui la joignait
¿1 l’occident. Il vendit le tout au sieur L a g en este, le
24 novem bre 1 7 8 3 ) &V n o y a n t pour voisin que des
.religieuses , a V u e crui:>pas -devoir s’assenvir. ail^‘ c o n ^iins de 5e& propres ¡titres."H vendit donc <r une’ m aison
rr com posée de c h a m b r e s , cabinets./'grenier-,
cave,,
; « c our , - c u is jn e , ;les tx)‘urs d ’. é c h e l l e , autres issues,
Les
’ * joups^du côté du clos dés Sœurs g rises,, lajil dajis }e
« haut q u e dans le b a s , dont partie ont é té polontcki«
ùtr\e(it, b o u c h a s par le sieur v e n d e u r ,,ou ses auteu rs,
« et q u ’il sera l i b r e au .sieur accpiéreur de l'aire ouvrir
*
h sa v o l o n t é j p l u s , u n jardin .et m o r c e a u de t e r r e *
�r«
«
.e?
«;
<C‘-5P
avec un p u ils ^circonstances et dépendances, e.n fun
seul té n e m e n t, d’entour trois coupées,, y compris
le sqJ des-.büjtir^ens e t ç o u r ^ j^igpant le grand cliemin fdç sP Wis a .¡Lyon
'4e, ¿4 ch a-
f rt i * > S c%}A'k\ pis 1 ri(>•t c ' ^rcrb j,l il
:.y •<*
-jG - *r *
L• - ’année
suivante,
le s*r
tagen.este
vendit
les
-mêmes
c. . . 7
.J J ..O :
' a. u R
r ;i_ .xi
■
* ' ! I‘
:•
objets -•au sieur
;Drelaire, ?en suivant
m ot
pour mot
le
c i . “ l ' . ' . M J. i i J
) 1.1J : ii
i l . J>. , j , . i
; '.‘ i . .) i
o . . . r.,-
^ é f a il0e t , l e ? q o R t o 4 h A ? 4M * i i . i u>oi> t f
oi; Î ' f
ai,
ê F ^ M .Ç ^ e^ ; ! î ç n^ i l ps;Ç®iFir^e
,1a charit,é..^çoptjg^.^Faiçe. ^nfj^ab^t.ion.j.Il ne pouv a i t la p l a ce r q u e d u côt^, du „grand f b e m i n * et sur
ra^gnemgn.t
-È i^ia î p } eji?
g litres p^aisp^Si Jl^batit , d o p e ;d 'a b o r d
t ì of gw é de ,|fi cj^ i^ p ;n .P ,$ l^ r e y J ’espace
,-cour * tçi^ fatten d ant^qu'il
.pût com pléter -ses c,onstrucUo,ns, p a r -une écurie et
^t I^a ^l^^ernjat.ur^lle de^ceye.rem ise. rélait Vis-à-vis sa
jg h isp n * c ^ t - à j ^ i r ç ^ Jp ltp-ng ;% qcelle <Jii sieur P e la ire ;
v et c ’ est ici le lieu de dire quel est l ’étai de^la maison
D elaire à ce,t aspqçt.
, X g f a ç a d e de c e l l e maison est sur la g ra n de
tou
le:
. . 7i .5 ? r. cifl,:,, > . •.. . n
\ : «. •
V
•' .•
y
,.çlle avait,-jadis., des fenêtres e i portes ii l ’occident ;
inais quand le s.r ,B ard onnet eut acheté deu£ maisons ,
il les réunit par des constructions. E q fin , du côté de
rencÎps des Soeurs grises, il y a deux fenêtres sous ,1e
t o i t , une fenêU’e plus .basse-* ca rré e , et un soupirail
de cave. L e sieur Delaire y a ajouté un petit tr o u ,
pour éclairer un escalier, eti.il l a icii^ fort irrégulier.,
p eu t-êire pour que çette. innovation ne fut pas ap-
�w
perçu e dans le tems." E n f i n , le toit a une saillie de
..............................., .............., . . .
v in g t pouces.
'
R ie n de tout 'cela S a u r a it pu em p êch er le sieur
Burelle d’adosâër sa'n ouvelle construction au m u r du
sieur D elaire , à la c h a r g e , tout au p lu s; de p a ye r
la m oitié d e 'c e m ur , cpbur le rendre m ito y e n , s'il ne
l ’était pas. Mais afin 'd’é v îté r le s discussions et les pertes
de t e m s , le sieur Burelfé2'pifêféra faire qiiatre murs
neufs , et laisserLénlrfe?ih îi; e ty î e 'sieur D elaire', une
r r .
. . ’ Í . ' * -î , T
'
• •*
r
f
petite r u e lle , Jqui d ’aiiréuts rbcevrâit lesr eaux de son
toit ; c’est ainsi q u ’il a bâti.'
'
" '
!
:! *
L e sieur DelkireV.s’ittiaginant que lé 'Côde civil p ré
vaudrait sur'la toutttriib rdu ‘BourboHiiaiis j, fît signifier
"au sieur B ú r e l l e ü û é ! dënoftcÎàii'drt3 dë^oiivél-cfeiu^ifèr,
disant que lui e t 'seá áüteuts dVáíiefitrtoujours 'joui1des
vues et é gou ts, que le C od e maintenait les servitudes
continues et'd p párente s J
vqti‘ë / siiiVatit 4 *àrti&lé ¿ 7 8 ,
le sieur B u reííé né' pôùvâït!1 Bâtir^ '^ u^ ^ ïx píéd¿ntíe
! 'V 1*> ?p c î ' r' eh u: il cl n i l,//o 1}
. .........; t !'
distance de son mur.
L
A la suite de cette d énon ciatïôn, le ‘siètir D ëlaire
assigna le sieur B u re lle , pour dém olir’, ckinâ deux jo b r s ,
le m ur q u ’il faisait bâtir ci d ix -h u it póu¿es de La m aison
d u d it D elaire y ainsi que lé m ur, aspect de rtiidi, faisant
liaison a vec ladite maison ÎDélairë , e t pour etre tenu
de laisser s i x pieds de d is ta n c e , entre ladite maison
et la propriété dudit Burelle* non compris le
tour
d'échelle.
,
On plaida au trib u n a l'd é la Palissé'sur cette p r é
tention du sieur D e la ir e , qui mit en cause le sieur
�(7 )
Lageneste, lequel a ap p elé en garantie le s,r *BardonnetL a to u le 3 ces trois j adversaires firent, yaloir. les ventes
de 1782 et 178 4 ( ém anées d ’e u x , et qui sont leur
ouvrage ), r pourp-en;'conclure , q ^ ils ont ces vues et^
égouts par une possession im niéiuoriale qui leur vaut^
titre.
:
. .
• ¡:
V r
. .
L e sieur Burelle d éco u vrit les ventes de 1689 e t
de 1700, qui condam naient celle de 1 7 8 s. M ais les sieurs
Bardonnet et D elaire ne perdirent pas courage jl-éçurie
et aisances comprises dans^ lesdites. ventes., leur four
nirent un m o y e n de p lu s, dont ils ,se saisirent, en
disant que l ’.écurie était au bout de la m aison, et les
aisances ..en . dehors. Ils e n 0jncliquaient les- vestiges
com m ec très-rvisibles, h des juges qpi ne les rvoyaien t
p a s , en ajoutant qu'il n’y av^itpas de façade du côté de.
la grande (route ; q u ’elle „était toute entière du côté
des Speurs, grises, et g u ü j i i j qvaip aucun autre moyen}
popùr parvenir
Cécurie , q u ’en, longeant la. façade de,
ladite ,piaisop.J(5 n fip ^ marchant, de. p reuves en preuves
ils ne se. con testèren t plus ;d ^ vo ir des fenêtres
trouvèrent des portes à deux..bat tans.
, :
t
ils
.En.vain.le
sieur Burelle se■■'récriait
contre ce,boule............
...........................
I•
' • - : J -. - ■.
} ..
versem ent absolu de.la l o c a l i t é , e n vain prouvait*-il
que Técurie et ses aisançes ne pouvaient êlre qu(’enIre
la m a i s o n M o n e r a t, et celle du Cheval-Piano, puisque
les ventes postérieures à la réunion de.ces deux maisons
ne ^mentionnaient plus: ces. aisances, et -qvi’en les pla
çant à l’o rié n t, elles|n’auraient eu ,n i en trée, ni issue,
puisque le m ur de Fenclos joignait la maison D ela ire,
�à anglé droil ; en vain* pYoüvàit^iFp&f tin devis n otarié,
de 1 7 9 3 , que lë siëur 'Delaire avait bât!i sur r e m p la
cem en t de c e lte 'a r ic ie n n é é b ü r iè ^ c è 'q iii com prenait
un lodai tout autre que ’ctelüi1 q û ’iÎ î riHiqxi a il a u fo ur—
d*iiu'i contre sa^ propre convictìon". Tout" Cela n ’a pas
persuadé aux premiers juges q u ’il fallait au moins v é
rifier laquelle des deu x pai!tie^rendait un com pte inexact
de la localité. '*
’
‘
U n jugemerit du t 'j octobre r8o8 , statua sur un
incident é le v é 'a u sujet d ’ü'n prôjet d ’arrangem ent ; ce'
jugem ent donne acte ad âieur! Buréllë- d ë ce q u ’il a1
sur ce point déféré le serm ent à ses adversaires y e t
de ce q ü ’iïs ont rëfci'sé' de lé ■p^êtér; ;1It ;-ordÔnfre'
fbnds ^ q u ’ôti prdfliiirâ '¿ ii greffe ^ÜTïcteté*',?-èâiisfïda,f ë )?
érioncë d&iis;la‘ U h i é W } ï 6 ^ >
o t fcr.q.
!tL ë jugement définitif, du 2i ‘ décembre1'1808, règle*
d’abord là"suite dit mérite- i’htìd&hi: y et yc stà!tuéJ èri1
faveni'"dii1 siiiir1
'est intitilé* dò ìVans^rÌré'Tés'.
m'plifs>qiii*'é*ÿ5rk^pèfVérit’riP sliffit dfe itieÌtrd;'sélusilÌesl
y e u x ^ é la C out^ eux ^iti còiicèrrie^t'l^^ohd’s. 'M1
-i
« Considérant que les parties n’ayant fias satisfait
« aii ju|emènt( prépdPâtbirè‘^dÎ!‘ i y ’ acfòb'rd ’d erider,
cc!il *ÿ a
'cjub *l^aishridé"'p'ò ' dller1à•
cT*l’éc'urîè méntioiinéë(dahy l'acte die vdnte du 'i *r juin
«•''1(589, dariâ celili du 20 mai 1700 ? et dans celui
« reçu Chartieir, notaire à Charroux, le 19 novembre
« 1*752 ', ’signifié paiv à'cle'' de ' Decimi p ^ dii 'i^ juin
« 1764, n V pÿs* été changée posléribhrèïhént par 'le'
p’èrè de fa initie , môme'quand il a pii donner aux
'de présdthê’r
üV
«
« Sœurs
�( 9 )
« sœurs de la Charité de V a re n n e s, le surplus du terrain
« qui fait aujourd’hui le sujet de la contestation dont
oc il s agit, p u isq u ’ il n avait pour lors d ’autres moyens
« pour parvenir a son é c u r ie , d ’autres jo u r s ou vues
« pour sa m aison ou auberge
f' Considérant que-, de son aveu , le sieur Burelle
« est tenu: de souffrir les droits de jouissances qui
« pouvaient se, trouver légalement établis lorsqu’il est
« d eve n u 'p ro p riétaire du terrain litigieux 5
« Considérant que l ’acte de vente de la maison de
« la partie de D e r e n n e s, rapporté par la partie de
« B e li in , porte que cette maison a été ven d u e en
« 1 6 8 9 , a v e c ses aisances pour aller à écurie, le tout
« co n fo rm ém en t à un décret de M . le ju g e d e . V a « rre n n e s, et rappelé dans ledit acte-de^ 1689 ; et que
« ces aisances ne pouvaient être moindres, de d ix -n e u f
« d écim ètres, o u ,s ix pieds de la rg eu r, ladite maison
« form ant alors u n e auberge ; que cet acte [qui a cent
? Idixrneuf ansi de d a te , doit.faiçe p reu ve de.sor» énon» ciatiori, qüoi'que le décret y rappelé et non daté ,
« suivant' lequel la maison, et ses aisances étaient
cc vend u es, ne soit pas rap porté; que par con séq u en t,
« les vues droites, égouts saillans et to u r s 'd ’échelle de
'« cette
m a is o n ,
vendus a v e c icelle par les actes des
« 25 octobre 1 7 8 4 , et 24 n o vem b re 1 7 8 3 , seraient
« même moins une servitude qu’un, droit de propriété
;
« que la partie de D erennes et ses auteurs ont con stamment 'conservé, par une possession im mém oriale
3
�C IO )
« non déniée , desdits égouts , vues droites , tours
« d ’échelle et porte à d e u x batlans
« Condam ne le sieur Burelle à dém olir le mur qu il
« a fait construire en midi de la maison du sieur D e « Jaire, à l'indue distance de cirïq déèimètres^ où d ix « huit pouces environ , et c e , dans le mois de la si« gnification , à personne ou domicile , dü présent
« jugem ent ; passé l e q u e l d é la i, autorise ladite partie
« de D erenn es à le faire dém olir aux frais dudit B u
te relie, qui sera contraint a u -re m b o u rse m e n t, sur les
« quitlances authentiques des ouvriers qui y auront
c< travaillé ; fait défenses à Burelle de faire à l’aven ir
« aucunes constructions sur ledit terrain , qu’ à- la dis« 'tanCe de^dix-tîeuf décim ètres , àu ‘s ix pbeds, confor« 'rn ém en t à l’article '678 idu Code N apoléon^ de la
« maisôri de ladite partie de D erennes : co n dam n e
« Burelle aux dépens à cet é g a rd , tant des dem andes
« p r i n c i p a l e s , tqu’ é n g a r a n t i e , etc. »
< •
L e sieur DelàtÎfd ■
rr en cfvait 'pas dem andé autant \
Car il rie voulait pas être propriétaire du local en con
testation : cependant i l poursuivait l’e xécu lio n de ce
j u g e m e n t , lorsque le sieur Burelle en a porté l ’appel
devant l a 'C o u r , ou il a été obligé de lutter encore
contré
les exagérations de ses adversaires q u i, toujours
peu sincères sur la localités, ne m anquaient pas de se
^prévaloir ¡de ce q u ’ ils a p pe la i en t la conviction person
nelle des premiers juges.
M ais il est inutile de reven ir sur leurs dires; la Cour
�C
)
se les rappellera par la lecture de son arrêt interlo
cu toire, du 21 m ai 1 8 1 0 , dont on va préciser les dis
positions.
P ar cet a r r ê t , la Cour a commis les sieurs L e g a y ,
Gailhe et Savarin , experts, pour v é rifier, i.° quel est
Remplacement de ré c u rie et des aisances énoncées a u x
actes de 1689 et 1700*, s’ils pensent que ces aisances
s’appliquent, au terrain ou le ,sie u r Burelle a fait un
m u r ; 2.0maudit cas, quelle était l ’issue desdites aisances
pour a rriv e r’ à ladite é c u r i e , et au m ê m e c a s , si le
n o u ve au m ur de Burelle est à une distance suffisante
dé la maison de D elaire.; 3 .° quelle est tl a saillie du
ioit!; si la ch u te des eaux .est lib re , ou si elles tom b en t
sur le m û r 'd e Burellé^-.et sont,,repoussées icontre le
m u r de D elaire ; 4.0 le.s dimensions de sou p ira il, et
si en. b âtissan t, B u re lle a éd ifié sur tou t ou partie
d u d ft soupirail ? ou su r ses fondem ens ;
5 .° l 'é v i e r }re
j e t a i Les ea u x de [La cu isin e <dè D ela ire 'sur'le .terrain
en q u estion ,* 6.-° l’ouvertu re pratiquée dans le m u r , et
que D elaire prétend avoir été une porte à deuoc venta use
ouvrant extérieurement sur Les aisances ou terrain dont
il s 'a g it, et .s’iL est vrai q u ’à l ’extérieur on voie.encore
les gonds de cette porte; 7 .0 si cette p o rte , ce soupirail,
*cet évier et les fenêtres de la façade de la maison de
^Delaire, qu'on d it avoir été anciennem ent d u x ô té d u d it
terrain^ sont d’ancienne construction ; si ces o u v ia g es
et tous autres indices leur paraissent sufJTisan3 pour
attester l’ usage dudit terrain à titre• d 'aisan ces de La
m aison D ela ire ; faire toutes autres observations, etc.
4
�( 12 )
L e s experts ont déposé leur rapport le 1 6 août
1810. Ils ont vérifié sur le i . er article que , d’après
les litres et la localité , l ’écurie et les aisances pour y
parvenir étaient à l’aspect opposé du locaLen contes
tation ; que le sieur Delaire - avait rebâti l u i - m ê m e
sur les fondem ens de ladite écurie ; que les aisances*
étaient entre les deux m aisons, réunies avant 1 7 6 2 ,
et ne pouvaient être du côté des Sœurs grises ,>!ou il
n ’y avait m êm e jamais eii d ’issue du côté du chem in.
* Ils ont dit que le toit du sieur D elaire étant en
saillie horizontale de vingt p o u c e s , portaient les eatix
sur le nouveau m ur du sieur B u re lle , au point de le
dégrader en peu d ’années ; et delà les eaux refluaient
par incidence contre le m ur du sieur Delaire.
Ils ont constaté l’ex iste n ce , i.° de deux croisées au
grenier et sous le toit, ferm ant par simple v o le t, ddnt
l ’ un est c l o u é ; 2.0 d ’ u n e o u v e r t u r e p r a t i q u é e depuis
peu par le sieur D elaire pour éclairer un escalier ; 3 :®
d ’ une croisée à quatre pieds du sol, ouvrant et ferm ant
a vec v it r a g e , barrée de trois b a rre s , n’ayant pas sa
fo rm e prim itive, ayant été a g ra n d ie, mais depuis longtertis; 3.® d’ un évier qui ne sert p l u s , et qui est bâti
dans le mur.
Ils ont donné les dimensions d ’ un soupirail b â t i'e n
p ie r r e , sans s a illie , b a r r é , et a v e c araignée. On a
mis en dehors trois pierres, non pas incorporées dans
le m ur (c o m m e on le disait), mais posées sur ch a m p ,
pou r éviter le reflux des eaux. L a nouvelle construction
y a fait am onceler du terrain : mais il est constaté-que
�,( i 3 )
le sieur Burelle n’a pas bâti sur ces pierres com m e on
le soutenait aussi.
A u lieu de la porte à deux battans et de ses gonds
existans en co re, les experts n’ont v u q u ’ une ancienne
ouverture q u ’on avait voulu p r a tiq u e r , mais qu'on
avait rebâtie ; elle avait eu trois pieds de haut sur deux;
pieds de large ; elle était plus haute que le s o l , de
deux pieds : ils ignorent si le projet avait été d ’y faire
un placard ou une fe n ê tr e , et ils ont p ré su m é , h son
ir r é g u la r ité , que les religieuses
ne laissèrent point
a ch ev er l’ouverture. En effet, une dam e v e u v e J o ig n y
ileur a déclaré que ce projet avait occasionné de la
discu ssion entre les religieuses et le s.r la T o u le ; mais
q u ’ensuite ce jour avait été bouché : les experts pensent
q ue ce furent les religieuses qui appliquèrent desplanches
en dehors pour leur sû reté, et parce que cet étoupem en t
avait été fait en m açonnerie grossière.
L e s experts term inent leurs réponses aux questions
faites par la C o u r, en disant que là'J a çade et l ’entrée
de la maison Delaire ont toujours été du côté du grand
chem in , et qu il n y a ja m a is eu de porte donnant
sur le terrain litig ie u x . Ils rem arquent seulement que
sur la façade du côté de B u relie, co m m e sur celle du
côté opposé, il y avait eu des assises de pierres figurées
au pinceau 5 que les deux fenêtres du toit , et le sou
p ira il, leur ont paru de première construction, et que
1 avancem ent du toit prouve que la maison avait été
isolée de tout autre à cet aspect ; d’où ils concluent
q u ’elle n’a aucun caractère de mitoyenneté.
�( H )
C e lte dernière réflexion en fournit à l ’instant un e
autre
aux experts, lorsqu’ils semblaient avoir tout dit.
Ils croient q u ’une maison est présum ée de droit avoir
un tour d ’é c h e ll e , par cela seul qu'elle a des jours et
un égout du côté du voisin; la plantation de la char
mille à une petite distance du m u r , leur paraît une
chose d é c is iv e , et ils rec ue il l ent a vec soin la relation
des indicateurs, dont l ’ un désigne cette distance co m m e
suffisante pour le passage d ’un h um m e chargé d ’un
faix de bois; l ’a u tre , pour laisser passer les rayons du
soleil : un autre a vu cinq à six pieux de bois pourris,
sans dire à quelle é p o q u e , ni à quelle distance, ni à
quel u sa ge; un autre a vu dans un vieu x m ur u n e
vieille porte qui ne s’ouvrait pas ; e n f in , un Charles
G irau d , qui était e n c o re , en .1 7 9 1 , ferm ier de l ’enclos
des Sœurs de la C h a r it é , a dit q u ’il cultivait ju s q u ’ au
m u r dê La m a iso n JDeLaire, ruais q u e des fenêt res on
jelait des ordures sur ses sem is.Tels sont les dires qui ont
ach evé la conviction des experts sur le tour d ’é c h e lle;
laquelle conviction ils ne m anquent pas de fortifier
par la réflexion d ’usage , que le voisin n’aurait pas
souffert
chez lui des servitudes, telles que des égouts
et des jours , s’il 11’y avait été obligé.
T e l est le rapport des experts
com m is
par la C o u r:
et on peut dire a vec confiance que si les sieurs D e
laire
et Bardonnet fussent c o n v e n u s des points de fait
et de localité q u i y sont fixés , ce rapport eût été
pa r f a i t e m e n t
in u lile; car la question du tour d ’échelle
( ¿ipparlenait tout entière au point de droit, sur lequel
la Cour n’avait pas besoin d’éclaircissemens.
�( i
5 )
L e sieur Burelle n ’aura donc rien à critiquer de ce
qui lient à l ’expertise e lle - m ê m e ; au con tra ire, il se
prévaudra de ce que la localité était telle q u ’il l ’avait
décrite a v e c ex a ctitu d e , et de ce que ses adversaires
ont été constitués en mauvaise foi sur tous les points:
toute sa tâche consistera donc à prouver q u ’ un tour
d ’échelle ne se donne pas sans t i t r e , et que les cir
constances qui ont déterm iné les experts ne p e u v en t
jpas suppléer au titre que la loi exige im périeusem ent.
M OYENS.
L e s auteurs enseignent que le tour d ’échelle s’entend
<Je deu x m a n i è r e s ; l’ u n e , de la faculté de poser des
échelles sur le fonds voisin,, quand on veut réparer
^sa m a iso n ; l’autre., du ¡terrain abandonné par le pro
priétaire , pour avoir droit d ’y faire des jours.
L e prem ier a lieu sans titre , parce qu’il est sim
p lem en t précaire, e-1 n ’ôle rien à la propriété du voisin.
Presque tout le pays coutum ier avait adopté à-cel égard
la disposilion de l ’article 5 i o de la coutum e de B o u rx bonnais. « Quand aucun fait édifice et répare son lié« rita g e , son voisin lui est tenu de donner et prêter
« patience à ce faire, en réparant et amendant dili—
« gem m ent,
par celui qui édifie, ce qu'il aura ro m p u ,
« démoli et gâté à sondit voisin ; et ne peut pour c e ,
« le réédifieur, acquérir nul droit de possession co n tre,
« ni au préjudice de celui qui a souffert ladite rép a« ration o u édifice ».
�( *6 )
Cet article était nécessaire en Bourbonnais o ù , d’après
l ’article 6 1 9 , aucune servitude n'a lieu sans titre.
L e second tour d ’éch elle, im proprem ent appelé de
ce n o m , tient à la p r o p rié té , et ne peut se prouver
que com m e la propriété elle-m e me.
C e lu i-c i est parfaitem ent inutile en Bourbonnais 5
puisque la loi y donne le tour d’échelle à titre de fa
culté. I l n’y a donc aucune probabilité que le pro
priétaire d’une maison pouvant à son aise faire une
façade sur la ru e , et m êm e une autre du côté de sa
cour, ait abandonné une portion de son terrain sur cette
m ê m e ru e , pour s’isoler de son voisin , et avoir q uel
qu es
feuêti es de plus.
M a is, d it - o n , voilà des vues et un égout qui font
présum er cet abandon : car co m m en t supposer que le
voisin eût souffert une servitude aussi dangereuse, s’il
n ’y eût été fo rc é ?
C ette réflexion est toute d’A u vergn e., et au moins
elle y convient parfaitem ent; car les servitudes y sont
prescriptibles par la co u tu m e , en sorte q u ’il faut y être
sur ses gardes pour veiller aux entreprises d’ un voisin
q u i, en bâtissant, ferait des fenêtres ou des toits en
saillie ; tout cela d evan t avoir vigueur de titre au bout
de trente a n s , suivant le texte de la coutum e.
Mais on n’a pas besoin des m ê m e s précautions en
Bourbonnais; car tant qu'on laisse son terrain en place
vid e, sans y bâtir, on n ’a pas besoin de s’inquiéter de
ce q u e son voisin fera sur sa limite ; et si on n'en
ép rouve aucune incom m odité ré e lle, rien n ’em p êch e
de
�( *7 )
de le to lérer,'puisq ue la loi donne le droit èxprès de
tout faire détruire.
L ’article 5 19 de la cou tum e prohibe tout- droit de
servitu d e, possession et sa is in e , en place vide , par
quelque laps de tems que ce soit.
L eq u e l des usages vaut le m ieux ? C e n ’est point
ici le lieu de l’exam iner : tout ce qu'on peut en d ire ,
c ’est q u ’on est moins gêné sur les procédés de voisi
nage
lorsqu’on ne court pas le risque de perdre ses
droits. Alors les vu es, les égouts et autres com m odités
que se donne le propriétaire v o is in , d evien n ent sans
co n sé q u en ce , et restent co m m e tolérés, tant q u ’il n ’y
a pas de motifs essentiels pour y m ettre em pêch em en t.
C e q ui a embar ras sé les e x p e r t s n ’ est pas u n e n o u
v e a u t é p o u r tout le p a y s c o u t u m i e r , o ù les s er vitudes
*
'
»
t
n ’avaient pas lieu sans titre. I l était inévitable que'
cette législation produirait une
indulgence
dont le
possesseur voudrait' souvènt se prévaloir à la lon gu e:
mais la loi ést ven u e tnèttre, uhe barrière à son usur
p a t io n , et lui a p p ren d re'q u e s’ il a pii faire dès jours
et des égouts dans des contrées de toléran ce, aucun laps
de tems ne peut c on v e r t i r sa possession en une propriété.
T o u t é s ’lës coutum es ¡qui-ont prévti la q u e s tio n , l a 1
décident de là m êm e m’anière. ' '
’’
■
O rléa n s, 2^5. K V u es ^ égouts et autres droits de
« se rvitu d e, ne portent saisine à celui qui les a , s’ il
« n a titre valable \ et sans titre v a la b le , fne lès peut
« prescrire par quelque terris que ce soit n. ( L a côutùni0
de Blois, en l'art. a 3 o , a les m êm es dispositions).
�( i8 )
Sens, i o 5. « Celui qui a égout sur PKérifage d’a u t r u i,
* est tenu de le retirer, lorsque le voisin veut bâtir ». 1
M e l u n 3 1 9 1 . « C h acun peul lever son b â t im e n t ,
« tout d r o it , aplom b et à ligne , si haut que bon lui.
« sem ble, et contraindre son voisin de retirer'chevrons
« et toutes autres choses qu’il trouvera sur ladite place,
« em pêchant le bâtim ent qu'on y peut faire ? nonobstant
« quelque laps de tems que ce soit, f û t - il de cent a n s ,
« et p lus Jt>.
.t -
.
B o u rb o n n a is, 519. « A ü c u n , en place v id e , n ’ac-*
« quiert droit de se rvitu d e, possession et saisine, par
« quelque laps de tems que ce s o i t , et j a ç a i t , q ue
« Yégoufi qu évier, d ’une maison descende en ladite
« place,,, ou que l ’on ait pues sur ic e lle , ou que Ton
« ait passé et repassé, allé et ven u par aucun te m sj
« pourtant*n’est acquis en ladite place ou cham p v id e,
« aucun dr^oit de servitude, par quelque laps dei tems
« .que, ce soit,, tyntfn%
qu 9¡¿¿y;
titre du, contraire, ou
« q u ’ès-çhoses. si^dites y çûl eu contradiction’, et après« icelle joui^ a^ c^ .de trentej ans ».
f K ;
•
,
;
A i n s i, tou ¡es. ces 1cpuf u mes ;ont. pré vu tout ce qui
devait résulter, des vues , égouts , éviers , chevrons et
autres choses anciennem ent étabjiesjsuit,un tçrrain non
b â t i, lorsque le possesseur voudrait s’en prévaloir; 011
plutôt ces co u tu m es, qui sont le résultat de l ’exp é
rien ce, ont condam né des prétentions q u i, en les ac
cu eillan t, juraien t
la lopgue détruit, le,, principe de
riinprpscript¡¡bililè des servitude®* \e \ em pêché ;to u te >.
espèce de tolérance.
. ■.
�( *9 )
L e s sieurs D elaire et B ard onnet argum entent du
Code c i v i l , en distinguant les servitudes continues et
apparentes qui peuvent prescrire par trente ans. Mais
le Code civil n ’est pas la loi des parties : il le sera à
com pter de r 8 o 3 . Et c ’est depuis cette époque seule
m ent que les habitans du Bourbonnais auront à veiller
sur les fenêtres et égouts des maisons voisines : jusquelà , la loi du territoire veillait pour e u x , et les pré
servait de toute prescription. ;
C ette l o i , cependant, ne semble pas aussi claire aux
^sieurs Bardonnet et D e l a i r e , q u ’elle l ’était pour A u roux-des-Pom m iers, et ils trouven t que' le m ot place
vide n’a aucun rapport aux en clo s, jardins et terres
cultivées ; sur tout quoi ils pensent q u ’on peut établir
une servitude autrem ent que par titre.
Supposons pour un instant, qu’A u ro u x ait eu tort
de ne pas être de cette o p in io n , et demandons a u x
sieurs Bardonnet et D e l a i r e , com m ent et par quoi ils
ont grevé de servitude l’enclos et terrain cultivé des
Sœurs grises, quant aux six pieds qu'ils récla m en t, ou
à tout autre espace m oin dre?
Ils reconnaissent ne l ’avoir jamais p ossédé, et sup
posent que le sieur Burelle a pu l ’acquérir par Icl
prescription : d’après cela ils n ’ont ni titre ni possession.
E st-ce par la saillie du toit de vingt pouces ? mais
ce serait décider la question par la q u e s tio n , et e u x
seuls seraient de leur avis.
A u r o u x , en pensant que l ’article 5 19 s’étend 11 toute
espèce de servitudes, en donne une b on n e raison; c ’est
6
�( 20 )
« d i t - i l , qu’il faut en attribuer l ’origine au p r é c a ir e ,
« à l ’a m itié , à la toléran ce, et qu’il ne serait pas juste
a d ’établir une servitude sur ce fondem ent ».
.D e c u lla n t, sur le m ot ég o u t, donne la note suivante :
H o c sequitur quod ¿¿cet per tr¿g¿nta a n tios, vel aLcud
tempus ¿ongius et immemor¿a¿e, stitlLCidlum e x tecto
dom us vicirtœ
in
aream meam
cec¿der¿ty non tamen
acqu¿r¿tur servitus > et possum cogéré vLcinum ut aquam
pLui>¿am d¿l>ertat, et rec¿p¿at m fu n d u m suum .
A i n s i , D ecullan t ne suppose pas que la place soit
vacante et non cultivée \ il la désigne par l ’expression
générale du sol ou terrain appartenant au vo isin , ¿n,
aream meam ,* et en cela il pense co m m e  u r o u x *
co m m e le$ r éd a ct eu rs des coutum es ci-dessus citées’*
et co m m e tous les com m entateurs de la cou tum e de
Paris.
O ù en s e r a it - o n , en e f ï e t , si après avo ir souffert
en b o n voisin ce q u ’on n ’avait pas un grand i n t é r ê t
d’e m p ê c h e r , il fallait s’attendre à la singulière apos
trophe des sieurs D elaire et B ard o nn et? « C ’est à vous
« de reculer de six p ie d s , disent-ils au sieur Burelle ;
« Ca
r
,
suivant la lo i, nul ne peut faire des fenêtres
« en son m u r, si ce n ’est à six pieds de distance du
« voisin ».
Ils 11e se sont pas aperçus que cette loi les condam ne
eux-m êm es, puisque ce sont eux qui
o nt
fait des fenêtres,
et cependant leur héritage n’était pas à six pieds du
champ voisin. Ils ne
devaient
donc pas les ouvrir 5 et
en Bourbonnais cette ouverture est réputée tolérance.
�( 21 )
C ’est une bien bizarre idée que celle de re n v o y e r à
six pieds de soi celui qui nous a laissé m ettre à notre
aise ; si celui qui a des vues avait conservé le droit
de les garder, au moins n e faudrait-il pas le chasser
à la plus grande distance connue.
E n effet, la distance, à R e im s , n ’ est que de d eu x
pieds et dem i (art.
35 y ) . E n L o rra in e , de ce q u ’e m
porte le tour d’ un contrevent (titre 4). E n A n jo u et
M a in e , d ’ un dem i-p ied ( 4-55 et 4 6 3 ).
Ces deux dernières coutum es donnent lieu à un raison
nem ent qui n ’est pas sans analogie à l ’espèce. D 'ab ord
elles n’adm ettent pas les servitudes sans titre; mais en
s u ite , elles adm ettent la possession lorsqu'elle est ac
com pagnée d ’un ouvrage e x té rie u r5, e nf i n , elles per
m ettent de faire vues sur s o i, n 'y eût- il qu’ un dem ipied d’y voir. L e rapprochem ent de ces principes prouve com b ien
la loi est en garde sur les conséquences à tirer des ou
vrages extérieurs; com m ent donc faudrait-il présumer
q u ’on a laissé plus de vingt pouces de distance, en
B o u rb o n n a is, où la cou tum e parle d ’imprescriptibilité
ab so lu e, et sans m odification?
Mais avan t que les experts se crussent autorisés à
présumer que le propriétaire de la maison Delaire avait
dû se retirer sur soi pour avoir des vues et égo u ts, il
fallait q u ’ils tirassent plutôt des présom ptions, soit de
leur plan, soit des titres, soit des principes. Il est dom
m age q u ’ils aient aussi mal fini un excellent rapport :
on ne peut cependant s’em pêcher de dire ; que leur
�( 22 )
digression sur le tour d’échelle, détruit par de fausses
idées les observations lumineuses q u ’ils avaient faites
sur tout ce qui tenait aux titres et au local.
D e sin it in piscem muUer fortnosa superne.
Mais si les dernières raisons du rapport ne sont pas
concluantes, il est facile d 'y su p p lée r, sans s’en écarter
le moins du monde. E n e f f e t , le plan des experts
donne l ’alignem ent de la mai so n D e la ire , de son jardin
et de son cham p qui viennent à la suite. Ces trois
objets sont sur la m êm e ligne ; et la m aison , au lieu
d ’abandonner cette ligne en arrière de six p ie d s, se
prolonge sans la quitter, et se courbe m êm e en dehors
sur son extrém ité : donc s’il y a quelque chose à -pré
sum er ^ c'est que loin de laisser du terrain, le proprié
taire de la maison n ’a pas m êm e voulu abandonner
une c o u r b e , afin de profiter de toute sa ligne.
Si du plan nous venons aux titres m êm e de la maison
des adversaires, e n 1 6 8 9 , 1 7 0 0 et 1 7 5 2 , no us v er r ons
que la terre du C u r é ou des Sœurs grises est donnée
pour confia im m édiat de la maison D e la ire , par ceu xlà m êm e qui vendaient et achetaient ladite maison.
Q ue si le sieur Bardonnet revenait à l'acte de 1 7 8 2 ,
ém ané de lu i- m ê m e , on lui répondrait que Les tours
d ’échelLe, par lui ven d u s, n ’ayant rien de spécifié pour
l ’aspect ni l ’étendue , ne sont q u ’ une superfétation de
s ty le , com m e les entrées et issues q u ’il vendait aussi;
en sorle q u ’il n ’ajoulait rien de spécial à ce qui était
aussi une cession de la loi. M ais loin d’indiquer une
distance quelconque du côté de l’enclos des Sœurs grises,
�( 2 3 }
il n ’a pas m anqué l u i - m ê m e de le donner aussi pour
con fin , sans parler de ruelle ni d ’interm édiaire; ce qui
n est pas une m édiocre circonstance.
E n fin , les experts auraient bien d û , en décidant un
point de droit, s’occuper un peu des principes, et hésiter
à prononcer que celui qui prétend s’être retiré sur son
terrain, pour b âtir, n’a besoin, pour le faire juger a in si,
que d ’une simple conjecture ; ils auraient vu que cette
retraite doit être p ro uvée par éc rit, ou par des bornes.
Ils l’auraient v u dans Desgodets, qui est le guide le
plus usuel des exp erts, et dans A u r o u x , qui est le guide
le plus sûr pour les lois de sa province. Desgodets, sur
l ’art. 210 de la coutum e de P a ris, indique l ’alignem ent
que doit prendre le second propriétaire qui bâtit , et
il le borne à la limite laissée par l ’autre propriétaire,
si c e l u i - c i a laissé l ’espace du tour d ’échelle hors de
ses m u rs , et qu’ il y a it acte valable q u i le prouve.
« Quand on s’est retiré de trois p ie d s , dit A u ro u x
« sur l ’article
5 i o , il faut planter bornes au-delà , et
« dresser proces-verbal double avec le v oisin , ou laisser
« un bout de m ur ou de p ig n o n , pour m arquer que
« le terrain est encore à s o i , sans quoi il faut pré«' sum er le contraire. D e là est ven u e la m axim e q u ’en
« pignon ou m ur à pied droit
n’y a pas de tour
« d'échelle ».
» >
C ette autorité si précieuse n’est, com m e on le v o it,
q u ’ un plus grand développem ent du p rin cip e, q u ’en
Bourbonnais il n ÿ a pas de servitude sans titre. Si on
en était quitte pour dire com m e le tribunal dev la
�( 24 )
Palisse, q ue c’est à titre de propriété q u ’on donne u n
tour d ’é c h e ll e , plutôt q u ’à titre de servitude , il ne
serait pas difficile d ’éluder la loi à son loisir, et l ’usur
p a te u r aurait tout à gagner, puisqu’au lieu d ’une simple
servitude q u ’il aurait cru co n q u érir, on lui donnerait
une propriété pour se m ettre d ’accord a vec la loi.
Quel a été le m o tif des experts, lorsqu’ils ont voulu
constater q u ’il y avait eu une charm ille parallèle à la
maison D elaire , et qu’on pou vait passer entre cette
charmille et le m u r ?
’
Ont-ils pris garde q u e , non-seulem ent à cause de
la végétation des arbres, mais encore par l’obligation
de la lo i, ces charmilles ne pouvaient pas être adossées
contre le m u r ? 11 fallait absolument laisser une dis
tance telle, que les vents ne pussent pas y pousser les'
branches. Mais , encore une fo is , quand la distance
aurait été à vingt pied s, cet adm inicule v a u t - i l un'
titne pour donner le terrain in term éd ia ire? si une
charmille é t a i t u n e l i m i t e , où s’a r r ê t e r a i t - ô n , car celleci ne longeait qu’ une partie de la maison voisine ?
T a n t que les experts n’ont raisonné que par h y p o
th èse, ils ne sont pas fort à crain dre, puisqu’ils pensent
autrem ent que la loi. Mais il y a lieu de s’é to n n e r,
q u e , dans leur résu m é, ils aient paru regarder com m e
co n sta n t, q u ’une porte avait existé jadis dans le m ur
des bâtimens du sieur Delaire.
Qui le leur a dit ? un seul indicateur, dont ils ne
disent ni le n o m , ni l ’a g e , tandis que d’autres indi-r
* cateurs désignés, et d ’ un âge a van cé, font la description
de
�.
. ( 25 }
de Fétat ancien des lie u x , et ne disent rien de pareil.
C et inconnu méritait^il donc assez de confiance pour
qu un fait aussi invraisemblable fût regardé com m e
Constant ? 1
C e qui devait prouver cette invraisem blance a u x
exp erts, était’ l ’ép iso d e , noté par e u x -m ê m e s y de la
porte ou fenêtre que le sieur Bardonnet avait vo u lu
f a ir e , et dont les religieuses em pêch èren t Touverture :
s’il avait eu une ruelle laissée p a r '‘l u i , hors de sa
m a is o n , elles n ’auraient pas pu s’y o p p o ser, m êm e
quand cette ruelle n’aurait été que pour le tour d’é
c h e l l e , ainsi que l’enseigne C œ pola, en son traité de
'servitut. urb. prœd. , ch. 1 1 , n.° 6. :
* C ette résistance des religieuses ’ devait paraître un
m o y e n ¡décisif a u x experts : car en l ’absence d’un titre ,
le sieur Bardonnet aurait dû avoir possession après
contradiction ; et au c o n tr a ir e , la contradiction avait
eu pour résultat d’em pêch er dè posséder. '
C ette réflexion si naturelle se fortifiait par la décla
ration de l ’in d icateu r, qui / pendant sa ferm e , avait
cultivé le terrain ju sq u 'a u , mu r ) fait d’autant plus in
con testable, que les sieurs D elaire et B a rd o n n e t, loin
d e - le n ie r , ont regardé le terrain en litige co m m e
acquis a u sieur Burelle par la prèscription.
C om m en t donc des expertsaussi judicieux et instruits,
ont-ils négligé des conséquences aussi frappantes, nées
de leurs propres rem arques, pour s arrêter à ce q u ’ils
ne voyaient ni par leurs y e u x , ni par les y e u x d ’autrui ;
en un m o t, pour courir après un fantôme. N ’en soyons
7
�( s6 )
pas surpris; car que le-plus sage a d o p te’ un systèm e
q u e lco n q u e , il veut le fortifier de tout ce q u ’il croit
propre à le faire valoir, et il ne se hâte pas de noter
ce qui le contrarie. C e r te s , la question était délicate
pour des experts nourris des usages d’A u vergn e. Il y
avait)Un rebord de bois a une fen être, et^ sans d o u te,
les experts se sont s o u v e n u s aussitôt de la cou tu m e
locale de C l e r m o n t . L es principes auxquels on est fa
miliarisé dès son e n fa n c e , reviennent toujours à la
m ém oire com m e un e-règle dominante et sure. D é là
vient q u ’ici les experts ont parfaitem ent raisonné dans
tout ce qui ne tenait pas spécialement aux usages
d ’A u v e r g n e ; mais une fpi$;yenus à cet a rticle, le na
turel lfa em po rté; et rejetant toute réflexion 'co n traire,
ils ont p r o n o n c é ren point de jdroit co m m e ils l ’eussent
fait pour un procès d 'A u ve rg n e. N aiurarn expellas
f u r c â j tameiz, usqub 'reciirret»
-, .
;
P e u t-ê tre leur opinion?}) assez brièvem en t énoncée
sur le>tour d ’échelle,jest-ellë donnéé-com m e un m o yen
term e entre la demande]du s ie u r D e la ir e , qui, co m m e
on l’a dit, veut avoir six pieds.de distance, non compris
le todr d'échelle , e tile * ju g e m e n t de< la Palisse , qui
accorde six. pieds. ¡Mais un procès n ’est pas jugé; par
a m e n d e m e n t, quand la loi ne compose pas.
t
Elle compose s i ’p e u , que m ê m e en coutum e d ’A u
v e r g n e , des vues et é gouts n’em p êc h en tcpas le voisin
d'acheter>la m i t o y e n n e t é du m ur pour y bâtir, et de
supprimer les
jours.
L a C our l ’a ainsi jugé dans la
causé des sieurs C hevalier et C h a p a v e y r e , en l ’an i 3 j
�( %1 }
et cependant il y avait aussi une façade à vues droites
qui n était point mise à la hauteur de coutum e : la
C ou r jugea seulement que le stillicide était acquis par
la prescription, et ordonna qu'il serait conservé en b â
tissant contre le m ur : mais les vues ont été bouchées.
L e sieur C hevalier citait deux arrêts, l’ un du parlem ent
de P aris, par A u g e a rd ; l’autre , de-la C ou r de cassation:
ces arrêts ordonnaient aussi la suppression des jours
pratiqués sur l ’héritage voisin , malgré leur n écessité,
et m algré toutes prescriptions et présomptions.
C ’est p eu t-être un in con vénient que d ’ôter des fe
nêtres h celui qui en a usé lon g-tem s : mais il a dû
s’y atten dre; et l'inconvénient serait bien plus grand
de dépouiller le voisin d ’ une portipn de sa p ro p riété,
de le forcer m êm e h dém olir un bâtim ent. L e sieur
Burelle avait sacrifié une partie de son droit pour vivre
en bon voisin ; il avait abandonné une partie de son
terrain ( 1 8 , 20 et 22 pouces, suivant le r a p p o r t ) , et
s’ était retiré de près de deux pied s, sans y être o b lig é ,
et lorsqu’il aurait pu faire supprim er l ’égout et les jours
du sieur Delaire.
C elui-ci trouve que l ’eau de son toit lui revient par
incidence, après être tom bée sur le m ur du s.r Bu relle;
mais le plus grand dom m age en ce cas serait bien pour
ce dernier; au resle, il y a un m o yen peu dispendieux
d ’éviter ce dom m age resp ectif, c ’est de cou per la
m oilié de saillie du toit, ou d y placer un chenal qui
conduira les égouts dans la rue.
.Si le sieur Burelle eût cru ne pas éviter uft procès,
�(28)
r
.
'
il a u r a it " agi différem m ent, et il aurait usé de tout 'son7
droit.; Mais quand il a sacrifié quelque chose à la p a ix /
on ne peut pas en tirer avan tage; et encore une fois,
si les lois ne sont pas un vain m o t, le sieur Burelle ne
peut pas être contraint d’aban donner son terrain à celui
qui n ’a nul tître pour s'en dire propriétaire : il a pour
lui la lo c a lité , les titres , l’expertise , la c o u t u m e , e t
l ’opinion uniform e de tous les com m entateurs.
M . e D E L A P C H I E R , ancien avocat,
j
M . G O U R B E Y R E p è r e , avoué.
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A RIO M , de l'imprimerie du Palais, chez J.-C, SALLES.
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Title
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Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Burelle, Joseph. 1810?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Gourbeyre, père
Subject
The topic of the resource
coutume du Bourbonnais
droit de voisinage
nuisances
Description
An account of the resource
Mémoire pour Sieur Joseph Burelle, Notaire impérial, habitant de la ville de Varennes-sur-Allier, appelant ; Contre les sieurs Guillaume Delaire, J.-B de la Geneste, et Franç.-Blaise Bardonnet-de-la-Toule, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1810
1689-Circa 1810
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0415
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Varennes-sur-Allier (03298)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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droit de voisinage
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Text
MÉMOIRE
EN RÉPONSE,
POUR
Louis D E F A U R E DE C H A Z O U R S ,
ancien capitaine d’infanterie, Habitant au lieu
'de la Com be, commune de Saint-Quentin
demandeur en exécution de jugement;
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M
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a ir e
'
C O N T R E
■*r
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:
de la ville de Gannat,
défendeurs.
a b it a n s
L e sieur de Chazours se vît enlever, en 1790, une
récolte de vingt septerées, à main armée, par une foule
d’individus se disant envoyés par une autorité adminis
trative. A la suite de cette voie de fait il fut obligé, par
A
�(a-)
la force des circonstances, d’abandonner environ qua
rante septerées, de terre : mais lorsque des temps plus
heureux lui ont permis d’élever la v o ix , il a réclamé
contre une violence que les tribunaux ne pouvoient que
blâmer et proscrire.
Après une révolution , le temps présent n’est point
comptable des erreurs du passé, et il est rare que celui
à qui elles furent étrangères veuille se charger de leur
justification. Aussi pendant toute la durée du litige sur
la nullité de l’abandon forcé dont on vient de parler,
M . le maire de Gannat avoit défendu les intérêts de sa
commune avec le ton de: décence et de modération qui
convenoit à la dignité de sa place et à la nature du procès.
Pourquoi faut-il; que changeant tout à coup le genre
de sa défense, M. le maire de Gannat ne veuille plus
répondre qu’avec emportement à un demandeur qui avoit
soumis ses prétentions à la justice ? quel a pu être son
motif, de ne donner de la publicité à sa défense que pour
la noyer dans un amas d’injures calomnieuses et incon
venantes ?
Et certes le moment étoit bien choisi, pour s’irriter
ainsi brusquement et comme par réminiscence. On conçoit
que dans le commencement de ce procès, et lorsque M. de
Chazours se plaignoit d’un acte de violence, sans autre
preuve que son allégation , il eût pu y avoir quelque
chose d’excusable, que le maire de 1811 mît une certaine
véhémence à venger ses prédécesseurs d’une inculpation
dont il pouvoit douter.
Mais c’est après un jugement non attaqué, pronon
çant la nullité de l’acte illégal qui fait toute la matière
�( 3 )
du procès; c’est en produisant lui-m ôm e des pièces
officielles qui constatent la voie de fait articulée par
M. de Chazours ; c’est enfin lorsqu’il ne s’agit plus, de
la part de M. le maire de Gannat, que de produire des
titres, comme il l’avoit promis ; c’est alors, disons-nous,
que M. le maire de G-annat, ne pouvant tenir sa promesse,
perd toute mesure et s’en prend à tout le monde, accuse
le sieur de Chazours pour avoir réussi, accuse le juge
ment pour avoir annuité ce qui étoit nul, et s’accuse
lui -môme d’indolence et d’insouciance pour l’avoir laissé
rendre.
De quel profit pour la cause peut donc être cette colère
posthume, lorsque l’acte qui en étoit le seul objet est
déjà déclaré nul, et que, par une conséquence forcée,
il faut remettre les parties au même' état qii’elles étoient
en 1791 ?
M. de GHàzours a été d’abord plus sensible qu’il n’étoit
nécessaire à ce ton d’irascibilité et d’aigreur qui règne
dans tout le mémoire de M. le maire de Gannat. Les
épithètes d>usurpateur habituel et de spoliateur ne pouvoient paroîtré que fort dures pour un homriae élevé à
l’école de l’honneur, et qui croit avoir fourni une longue
carrière de délicatesse ; il s’est demandé à quels signes
un homme peut être déclaré usurpateur habituel, lorsqu’ayant h la main le titre de propriété de ses ancêtres,
il n’a pas dépassé d’une ligne lesÎ)ornJes qui y sont écrites,
et lorsqu’il rie se défend que poiir conserver ce qu’ils
lui ont transmis. Alors il’ ne lui a plus semblé que l’opi
nion publique dût être fort touchée d’une récrimination
injurieuse, qtii n’est que trop habituelle à ceux qui se
A 2
�C4 )
voient vaincus, quoique peut-être il n’y eût pas lieu de
s’attendre qu’un magistrat se livreroit à ce genre de
défense.
Quoi qu’il en soit, voyons ce qui résultera des faits
de cette cause, et si déjà il n’est pas éclairci que la com
mune deGannat est seule convaincue d’usurpation.
F A I T S .
La ville de Gannat est propriétaire d’un grand com
munal appelé de Chantoirat, borné au nord-ouest par
lin ruisseau appelé de Sigilon.
Ce ru isseau, coulant dans une gorge, sépare ce com
munal d’un ténement appelé des TSruyères, et de toutes
les autres propriétés du sieur de Chazours.
Il est difficile qu’une limite soit mieux marquée par
la nature. Cependant les habitans de Gannat voyant au
revers de leurs communaux un terrain souvent inculte,
y laissoient aller leurs bestiaux, ce q u i, en terre v a in e ,
étoit sans conséquence; mais le propriétaire de Chazours
n’en faisoit pas moins des défrichemens partiels et suc
cessifs sur tout son ténement : il en percevoit sans obs
tacle les récoltes, et alors les bestiaux voisins étoient
soigneusement chassés.
Comme quelquefois cette expulsion avoit pu être
faite par les colons h force ouverte, l’esprit de résistance
portoit les expulsés à aller se plaindre à la mairie ,dç
Gannat, en alléguant que leurs auteurs ayant joui du
pacage sans trouble, le local étoit présumé faire partie
des communaux. La m airie, pour ne pas paroître né-
�( 5 )
gliger les intérêts de sa' v ille , avoit cru par deux fois
devoir verbaliser, et menacer de procès. Mais le sieur
de Chazours n’en étoit que plus attentif à défricher pour
faire des actes publics cie propriétaire, et cependant la
mairie de Gannat n’a jamais osé l’attaquer pour empêcher
ces défrichemens.
Ses successeurs appellent cela de l’insouciance et de
l’oubli, lorsqu’au contraire des procès verbaux de dires
et menaces constatent que tout étoit mis en œuvre pour
épouvanter le propriétaire , mais que sa bonne conte
nance tint en respect la commune qui n’avoit de droits
d’aucune espèce. En sorte que toute cette verbalisation
ne reste là que comme un monument, pour attester que
le sieur de Chazours est resté en possession malgré la
contradiction ; ce qui de toutes les preuves de propriété
est certainement la plus publique et la plus incontestable.
Comment, en effet, une commune voisine auroit-elle
cru possible, sans titre, de franchir les limites naturelles
de ses communaux, pour s’arroger une propriété nonseulement d’un nom étranger, mais encore faisant suite
et corps avec toutes les propriétés de Chazours, sans le
moindre signe de séparation, sans bornes, sans fossés,
sans titres? En sorte que- par un arbitraire dont l’idée ne
peut pas se soutenir, la commune de Gannat, une fois
entrée dans ce territoire, sans savoir elle-même jusqu’où
elle vouloit aller, auroit été aussi fondée à le réclamer
tout entier qu’à en vouloir une petite portion.
Et véritablement si la commune de Gannat avoit con
servé un droit quelconque sur un espace inconnu, le
sieur de Chazours eût été absolument à la merci de
�. m
l’étendue qu’elle auroit jugé à propos de se donner,
comme il ne l’a que trop été dans les circonstances dif
ficiles où il a été forcé de subir la loi du plus fort.
Mais avant de parler de cette époque, il faut dire un
mot des actes que M . le maire de Gannat n’ose pas appeler
des titres, mais qui prouvent, suivant lui, que le ténement des Bruyères a été pour ses prédécesseurs un sujet
d?inquiétude et de discussion.
Le premier acte d’inquiétude date de l’année 1680 ;
mais comme cet acte est tout en faveur du sieur de
Chazours, M . le maire ne juge pas à propos de s’en
prévaloir.
L e conseil du roi avoit ordonné une confection de
rôles pour les terrains que les privilégiés possédoient
hors de leurs privilèges ; et un sieur Desessart fut en
voyé en Bourbonnais pour vérifier les possessions qui
pouvoient être sujettes à cet impôt. L ’occasion étoit belle
pour eeux des habitans de Gannat q u i , à cause de la
proximité du ténement des Bruyères, auroient voulu le
faire ajouter aux communaux, et en arrêter les défrichemens ; en conséquence, ils indiquèrent le sieur de
Chazours, comme ayant usurpé cent sesterces de terre
sur les habitans de Gannat, sans autre explication.
Sur cette dénonciation occulte, le sieur de Chazours
fut taxé à 1,000 fr., le 28 janvier 1680; mais aussitôt il
se pourvut, en déclarant qu’il se soumettoit au* payement
du quadruple, et à l’abandonnement des héritages taxés,
si on pou voit prouver qu’ils fussent usurpés.
Comme personne n’osa entreprendre de faire cette
�' ( 7 )preuve, il intervint une ordonnance de l’intendant, du
18 mars 1680, qui déchargea le sieur de Cliazours de
cette taxe 5 sauf audit Desessart à justifier de Vusurpation
-par lui prétendue.
Ce sieur Desessart ne la justifia pas ; ses souffleurs ne
lui donnèrent ni titres , ni renseignemens. En consé
quence , le sieur de Chazours continua de défricher, et
resta paisible propriétaire de ces cent sepierées comme
de sa chose propre.
Quatre-vingt-cinq ans de tranquillité suivirent cette
première tentative de trouble* L e sieur de Chazours
avoit même consolidé sa propriété dans cet intervalle,
en achetant de la maison de Fontanges le droit de jus
tice sur tout ce qui lüi appartenait déjà et Chazours.
On voit par une prise de possession publique , faite
en présence de deux habitans de Gannat, qu’il fit l’en
ceinte de toutes ses possessions de la même manière que
son acte de vente les déterminoit ; et précisément on y
remarque, du côté de Gannat, le confin immuable du
ruisseau de Sigilon.
En-1765,.les-métayers!de Chazours chassèrent les ber
gers de Gannat, qui s e - plaignirent à leur mairie d’avoir
été maltraités.
On conçoit aisément que ces plaintes aigrirent les.
parties, et que les maîtres des troupeaux ne manquèrent
pas de murmurer que la ville négligeoit de vérifier si
elle étoit propriétaire.
Il falloit bien ne pas se montrer insouciant ; et la
mairie se mit ù l’abri de tout reproche, en envoyant sur
�(
8 )
les lieux l’arpenteur de la mairie, avec un notaire, deux
procureurs du roi et un médecin.
Cet arpenteur, allant chercher des confins, sans titres
et sans bornes, avoit à faire une assez bizarre opération.
Mais on ne se douteroit jamais comment la ville de Gannat imagina de suppléer aux titres qu’elle n’avoit pas.
E lle arrêta, par un délibératoire, que Vétendue du ter
rain appelé des Bruyères seroit constatée sur le rapport
des labou reurs , vignerons et journaliers DE G a n n â T !!
Enfin voici le notaire, l’arpenteur et les commissaires,
arrivés sur le local où ils sont conduits par ces indicateurs
désintéressés, qui disent qu'entre le ruisseau de Sigilon
et une autre partie de terrain mise en valeur par M. de
Chazours, il y a trente-une septerée'b, moins cinq septerées’
défrichées à l’aspect de nuit, tant antérieurement que
postérieurement à une année, sans avoir pu distinguer
les anciennes d'avec les nouvelles entreprises.
Ensuite les commissaires font leurs plaintes sur un
inaltraitem ent exercé de la part du sieur de Chazours,
sur les bergers de Gannat, en différentes reprises, après *
avoir chassé les bestiaux, notamment mercredi dernier.
A cela M. Chazours répond qu’il n’a maltraité personne,
qu’il n’a pas même chassé des bestiaux : « qu'au surplus
« il est surpris des mouvemens que se donnent les
« liabitans de Gannat pour la propriété et l’usage dudit
« terrain, puisqu’ils n’ont aucun droit certain sur icelui,
« parce que ce terrain, dans toute son étendue, lui ap-
« par tient. »
Alors il produit l’acte de 1680 , pour prouver que
les habitans de Gannat n’ont jamais tenté de justifier
qu’il
�.
. ( 9 )
qu’il eut rien usurpé ; enfin il dit que c’est par tolé
rance de sa part, si les bestiaux de différens' particuliers
ont pacagé , mais qu’on ne peut en induire une ‘pos
session qu’il sera toùjours en* droit dé contrarier.1 1 * '3
A cela les commissaires l’épondent « que saris s’arrêter
« maintenant à la question-de savoir à qui des'habitans
« ‘de Gannat ou'dé M . Defaure appartient lé ’terrain
« des Bruyères, question qui ne doit être agitée que
« dans Vinstance qui suivra sans doute /’opération d’au« jourd’h u i, et pour laquelle instance lesdits sieurs comCf missaires font toutes protestations contraires à celles
« dudit sieur de ' Chazours , ils se bornent à dire que
« outre la possession immémoriale et notamment d'an et
« jo u r, dans laquelle sont les habitans de Gannat d’en-'
« vôyer pacager leurs bestiaux sur le terrain contentieux j
« seules circonstances pour autoriser leurs démarches ,
« ils ont encore l’avantage de réunir en leur faveur dif« férens aveux dudit sieur de Chazours, qui sont acceptés.
« A u moyen de tout quoi ’ ils persisteront dans cette
« possession, et dans Vusage non interrompu où ils sont
« de faire pacager leurs bestiaux dans lesdits commu« naux, par une suite de cette possession. * J
*
cc Et en faisant les réserves nécessaires et capables de
« les maintenir dans généralement tous leurs droits, tant
« sur le terrain renfermé dans les confins ci-dessus iri« diqués, que sur celui qui leur sert de confin à l’aspect
« d’occident, et autres qui seront reconnus faire partie de'
« leurs communaux, ils dht signé sans aücîune approba« tion préjudiciable; observant au surplus Jque la fixation’
« de la commune, relativement auxdrts^confîrisViiiation
B
�( 10 )
faite sur le rapport des anciens habitans déjà nommés,
est demeurée sans réplique, ce qui est accepté,* re
quérant lesditg' sieurs commissaires M . de Chazours
de leur, indiquer laa partie,.dudit terrain défrichée antérieurement à une année, d’avec celle défrichée pos
térieuremenj: ^à une année. »
M . de^Chazours leur répond que tout ce qui est la
bouré a été défriché de temps immémorial.
Les commissaires ne veulent pas y croire, et font en
core des protestations, en disant que la ville assemblée!
saura relever et détruire les prétentions du sieur de
Clïazours. Puis ils signent encore pour la dernière fois,
en ajoutant que les droits des habitans se trouvent con
servés par.leurs réserves et protestations, qu’ils réitèrent
encore pour la plus grande satisfaction de leurs commettans.
Enfin, voilà ce procès verbal fini, et il en étoit bien
temps. Ou a cru devoir le faire connoître dans tous ses
détails , parce que M . le maire de Gannat le produit
comme une pièce importante pour sa commune; et certes
il l’est bien davantage pour le sieur de Chazours.
Où est en effet cette instance qui devoit suivre Vopé
ration d'aujourd'hui ?
Qu’a fait la ville assemblée, pour éteindre les préten
tions du sieur de Chazours?
Si la ville de Gannat s’est assemblée , c’est pour se
«
«
if
«
k
te
tair.ç ;
C’est pour reconnoître qu’on lui avoit fait faire une
fausse démarche; .
!
C’est pour laisser M . de Chazours défricher tout à son
�( « ) '
aise, sans oser lui intenter ce procès si solennellement et
si indiscrètement annoncé.
Si on doutoit de cette suite de défrichemens, on en
trouveroit la preuve dans un autre procès verbal, du 23
juin 1768, que M . le maire de Gannat a eu la bonté
de conserver, pour attester ce fait.
Ce défrichement de 1768 étoit considérable, et c’étoit
bien encore le cas que la ville s’assemblât pour éteindre
ce qui étoit un peu plus que des prétentions *, mais on
voit seulement que, dans une tournée générale ordonnée
par la commune pour constater les usurpations des voi
sins, et parmi trente-sept anticipations constatées (car
la ville de Gannat ne se mettoit pas en recherches pour
peu de chose ), les indicateurs firent écrire au procès
verbal que M. de Chazours avoit anticipé cent quatrevingts pas de plus cette année, dans le ténement des
Bruyères.
Cet acte demeura inconnu à M . de Chazours, qui
continua de faire des actes de propriété jusques à la
révolution.
En 1789 , plusieurs individus allèrent à la mairie de
mander qu’on verbalisât encore pour des usurpations at
tribuées non-seulement à M. de Chazours, au delà du
ruisseau de Sigilon , mais encore à M . de Fontanges,
dont les propriétés joignent les véritables communaux
de Gannat, en deçà du ruisseau de Sigilon.
En conséquence, on dit par un procès verbal du 17
août 1789, que des commissaires se sont transportés sur
les lieux , « avec les indicateurs pris dans la classe
« des paysans cultivateurs ; et suivant leur déclaration,
B a
�«
«
«
«
«
«
«
»
«
( 12 )
il paroît qu’en entrant par le cliemin de Gannat allant
à Chazours, au delà du r i f de Sigïlon ,;M . de Chazours
a annexé A u n e t e r r e q u i l u i a p p a r t i e n t , 'APp e l é e d e s B r u y è r e s , la quantité de quarante septerées de terre, ou environ, anciennement défrichées,
prises dans cette partie du communal ; et autant que
peuvent se rappeler les indicateurs, ils ont fait remarquer 4qu’il y a environ trois septerées nouvellement
défrichées, et le tout en guérêt, etc. »
En ce temps-là y . l’assemblée constituante rendit un
décret, le 18 décembre 1789 , portant défenses aux mu
nicipalités et communautés d’habitans, sous prétexte
dÜusurpations, droit de propriété, ou tout autre pré
texte, d’agir par voies de fait, etc.
Cependant les soi-disant indicateurs ne se bornoient
pas, comme autrefois, à faire verbaliser à Chazours : les
temps étoient changés; et des menaces très-vives épouvantoient les colons pour la sûreté de leurs récoltes. Le
sieur de Chazours fit enceindre les ensemencemens de
l’année suivante de larges fossés, et ne douta pas que la
municipalité e lle-m êm e, conformément au décret cidessus, ne les prît sous sa protection.
Il se trompoit. M. le procureur de la commune donna
le 20 juin 1790 un réquisitoire ainsi conçu :
« i°. A ce que, pour les terres dont M. Defaure est
« en possession avant le 4 août 1789, il soit dit et or« donné que l’on se pourvoira par les voies de droit
« devant les juges qui en doivent connoître; que les six
* quartelées nouvellement ensemencées et défrichées par
�( ?3 )
«
le sieur Defaure,
s o i e n t , r é c o l t é e s e t ENGRANGÉES
« PAR DES GENS QUE VOUS COMMETTREZ A CET EFFET-',
«
«
«
«
«
et qu’il sera fait défenses au sieur Defaure dé n’y rien
recueillir. Requiert aussi q u ’i l s o i t e n v o y é d e s g e n s
pour combler les fossés faits tant dans le communal
que dans le chemin qui conduit à Begues et aux
Viviers. »
»
Y eut-il une délibération prise sur ce réquisitoire? on
l’ignore. Le- sieur de Chazours ne fut informé de ces
mesures que par l’apparition inopinée d’un officier mu
nicipal suivi d’une foule d’hommes venant en tumulte
dans ses propriétés, pour couper et enlever la récolte
ensemencée dans vingt septerées ou environ du ténement
des Bruyères. Le sieur de Chazours, informé de cette
irruption par le bruit considérable qui l’accompagnoit,
s’enferma dans sa maison, avec toute la terreur et l’in
quiétude qu’on peut aisément supposer. Il défendit même
aux gens de sa maison d’aller en apprendre la cause, de
peur d’irriter la multitude.
Toute la récolte du maître et du colon fut enlevée,
chargée, conduite et engrangée à Gannat. L ’attroupement
n’étant irrité par aucun obstacle, se borna à des cris et
des menaces, et se retira, escortant cette récolte comme
une conquête.
Voilà ce qui s’est passé en 1790, dans cette année
que M. le maire de Gannat, dans sa satisfaction, appelle
« Vépoque du véritable esprit public, dirigé par Vamour
« du bien général, et par une opinion réfléchie ? dégagée
« de toute prévention. »
�.
(*4 )
Quoi qu’il en soit, et quelle que fût la direction de
cet esprit public, il falloit louvoyer, et se garantir, s’il
se pou v o it, de toutes incursions nouvelles. JLe sieur de
Chazours exposa sa situation à la municipalité assemblée,
qui blâmant, il faut le croire, ce mouvement révolu
tionnaire, mais forcée peut-être par la difficulté des
temps de ne pas rendre une sévère justice, proposa un
arbitrage au sieur de Chazours , pour régler les limites
des communaux.
Un arbitrage en cette matière, étoit une chose fort
bizarre ; mais il n’y avoit pas à hésiter. Le sieur de
Chazours se trouva trop heureux d’accepter ce qui avoit
un simulacre de justice, et ce qui donnoit du temps;
en conséquence , par délibération du 20 mars 1791 ,
M M . Legay père, et Becquemi, experts, furent choisis
pour prendre connoissance des titres, s’aider du témoi
gnage des anciens hahitans et gens connoissant l’état
des lieux, et faire leur rapport devant trois hommes de
lois, chargés de prononcer définitivement sur la contes
tation.
Cet accord fut homologué par le département, et les
experts se réunirent. M. de Chazours, ne se rappelle
pas s’il donna à déjeûner aux officiers municipaux qui
les accompagnèrent : l’état de gêne où le tenoit cette
affaire, et les menaces violentes des parties intéressées,
ne lui ont pas permis de garder une telle niaiserie dans
sa mémoire.
Il sait seulement qu’il alla sur les lieux, et que fidèle
au compromis, il donna des titres aux experts, mais que
la municipalité ne leur en donna pas.
�( i5 )
Elle n’en a jamais eu.
Mais elle leur envoya ces anciens habitans, ces éter
nels indicateurs, obstinés à appeler communal tout ce
qui avoit été parcouru par leur vaine pâture hors les
temps des défrichemens.
On voit tout de suite comment les choses dûrent se
passer, quelle aigreur s’en mêla , quelles menaces en
furent l’accompagnement.
Aussi ne fut-il plus question de permettre aux experts
de faire leur rapport à des hommes de lois, pour avoir
une décision définitive.
Les experts eux-mêmes, intimidés, et pressés d’émettre
une opinion, conseillèrent au sieur de Chazours d’adopter
les limites qu’on voudroit prescrire. Mandés à la mairie
avec le sieur de Chazours, il s y rendirent avec la cohorte
des indicateurs, et là fut rédigée, le 30 avril 179 1, une
prétendue transaction , par laquelle rejetant dès la pre
mière ligne la distinction adoptée jusqu’alors entre les
communaux de Chantoirat et le ténement des Bruyères,
tout est confondu sous le nom des communaux de Chan
toirat. On y dit que les titi'es et documens respectivement
produits, n’ont pas procuré des éclaircissemens sufïisans
sur les vraies limites : en conséquence de quoi on fixe
les lieux où seront plantées deux bornes aux angles, et
des bornes intermédiaires. Il est dit que Laplanche ,
expert, placera ces bornes en présence du sieur de
Chazours, qui a promis de s'y rendre.
Cette transaction n’a pas été homologuée, comme on
pourroit le croire, d’après cette pièce retrouvée, que
�( 16 )
M. le maire annonce dans son mémoire ( page i 5 ).
On avoit bien fait homologuer le compromis, qui pré
cisément n’a pas été exécuté ; mais on n’a pas osé pré
senter à l’homologation la pièce qu’on juge à propos d’ap
peler une transaction.
Elle a cependant été exécutée, et on peut dire même
largement exécutée ; car on a pris ce qu’on a voulu ;
et si l’abrégé de plan, qui est dans les pièces de la mairie,
est fidèle, évidemment la commune a pris beaucoup plus
que d’abord elle ne .vouloit prendre.
Mais aucune borne n’a été plantée. Le sieur de Cha
zours , une fois sorti de la municipalité, n’a eu garde d’en
requérir la plantation ; et les habitans eux-mêmes, plus
pressés de s’emparer que d’exécuter leur acte, ont’ oublié
que cette plantation en étoit'partie intégrante et nécessaire;
. On sait que de jour en ijour les tëmps devinrent plus
orageux ; il falloit de la patience .pour de plus grandes
choses, et M . de Chazours rongea son frein. En 179 3,
il fut incarcéré à Moulins, comme suspect; ses biens
furent mis en séquestre, et un maréchal de Gannat en
ut le fermier national.
>
Les communaux furent partagés ; ils devoient l’être par
tête , et on fut forcé d’en donner un lot au sieur de
Chazours. M. le maire de Gannat paroît extrêmement
satisfait que M. de Chazours ait eu ce lot, et il en tire
les plus grandes conséquences. Mais un maire sait bien
que ce n’est pas l’habitant qui se fait son lot. L e sieur
de Chazours n’en a pas dem andé, il 11’a pas même assisté
aux délibérations; il en étoit empêché. On l’a compris,
comme
�( *7 )
comme tout le m onde, dans un partage municipal *, il
n’eut pas été prudent de refuser un lot, et le sieur de
Chazours a laissé jouir le sien par un vieux domestique,
comme s’il avoit prévu que la mairie, se prévalant de
son propre fait , lui feroit un jour une aussi singulière
objection.
En l’an 13 , les habitans de Gannat ont fait un nou
veau partage, et M . le maire n’a pas manqué de re
chercher si ce lot ne se trouvoit pas placé dans le terrain
contentieux. On voit, à la page 14 de son mémoire, qu’il
s’efforce de le faire entendre ainsi, en disant qu’il est
dans ce même ténernent des Bruyères, mais dans une
partie séparée par le ruisseau Sigilon.
Ce n’est là qu’une équivoque, mais elle n’y est pas
placée sans cause. Pourquoi dire que ce lot est dans le
ténement des B ruyères, lorsqu’il est dans le vrai com
munal de Gannat, dans le local appelé Chantoirat, qui
n’a jamais eu d’autre nom ? Pourquoi dire que M . de
Chazours a -participé au second partage , et ratijié par
là ce qu’il attaque, lorsqu’au contraire M. de Chazours
a formé opposition à ce partage, par exploit de l’huis
sier Labalme ? Il n’a pas plus voulu jouir de ce lot que
du premier; et certes il ne pou voit pas empêcher qu’on ne
lui donnât encore un lot malgré lui : il avoit fait tout
ce qu’il pouvoit faire, en protestant par écrit, et en assi
gnant en désistement.
C’est en effet en l’an 13, et précisément avant ce partage , que le sieur de Chazours a commencé sa récla
mation. Jusqu’alors, se reposant sur l’inexécution de cet
acte de 1791, quant aux bornes, et sur les lois qui prosG
�( i8 )
cri vent les actes de violence, il avoit attendu avec pa
tience l’instant favorable de rentrer dans ses droits. Les
anarchies et les factions qui s’étoient succédées depuis
1793 jusqu’au consulat, ne lui avoient présenté aucune
occurrence favorable. Enfin, voyant l’ordre affermi, et
les lois en vigueur, il présenta une pétition à la préfec
ture, pour parvenir à l’annullation de l’acte de 1791.
Un conseiller de préfecture répondit, par un arrêté du
12 frimaire an 13 , qu’il autorisoit le sieur de Chazours
à plaider devant les tribunaux, néanmoins en ajoutant
son avis dans des motifs contraires au sieur de Chazours,
et en disant qu’il y avoit un acte solennel et authentique,
et qu’il faut faire respecter les conventions écrites.
Quoi qu’il en soit de cet avis, M. de Chazours a fait
assigner les habitans de Gannat en la personne de M. le
maire, par exploit du 21 prairial an 13 , pour voir
annuller l’acte du 30 avril 1791, et se désister du terrain
placé entre le ruisseau de Sigilon et les autres propriétés
du sieur de Chazours.
Cette demande n’étoit pas de nature à éprouver de
sérieuses contradictions : aussi, par jugement du 4 août
1809, la nullité de la transaction a été prononcée.
11 est vrai que cette nullité n’a pas été fondée sur la
violence, parce que les habitans de Gannat n’avoient
encore jugé à propos de produire le réquisitoire de 1790,
et qu’ils soutenoient n’avoir usé d’aucunes voies de fait.
L e défaut d’autorisation pour transiger étoit un motif
suffisant, et le tribunal s’est borné à celui-là, en élaguant
toutes les fins de non-recevoir opposées par la commune.
Cette nullité devoit naturellement amener le désiste-
�( i9 )
ment; mais en désespoir de cause, M .le maire de Gannat
a trouvé le moyen de le retarder encore : n’ayant plaidé
que sur la nullité, il a dit qu’il avoit des titres, et il
a demandé un délai pour les produire. Le tribunal s’est
laissé toucher par l’idée que ces titres à produire seroient
peut - être d’une grande importance ; en conséquence ,
après avoir prononcé la nullité, il a dit : « Attendu que
« la commune de Gannat n’a pas suffisamment déduit
« ses moyens pour établir son droit à l’objet litigieux ;
« que son importance nécessite d’accorder un délai à
« la commune pour déveloper ses prétentions et faire
« la recherche de ses titres, si aucuns y a;
« Le tribunal déclare nulle la transaction du 30 avril
« 1791 ; et pour être fait droit sur la demande en dé« sisteinent, remet la cause d’un mois, etc. »
A u lieu d’un mois, la commune en a d’abord pris
huit, et s’est laissé condamner par défaut, le 12 avril
1810 : son opposition lui a donné un délai de dix autres
mois. Et c’est ainsi que se jouant de la justice et de sa
promesse de rapporter des titres qu’elle n’a pas, la com
mune de Gannat, contre toutes les règles , s’est main
tenue en possession.
Maintenant que M. le maire de Gannat est forcé d’a
vouer qu’il n’a aucune espèce de titres, il n’en est pas
plus déconcerté; et pour se tirer d’embarras il dénature
le genre de la cause, et feint de se regarder comme un
simple défendeur qui attend paisiblement les preuves de
propriété que la loi exige de tout demandeur.
Il dit au sieur de Chazours *.
i°* C’est vous qui êtes demandeur en désistement ;
C 2
�( 2° )
c’est à vous à justifier votre demande par des titres,
et vous seul devez en produire; 2°. vous m’avez mal
assigné, puisque ce sont des individus qui jouissent,
et non le corps commun; 30. vous êtes non recevable,
pour avoir participé deux fois au partage des commu
naux ; 40. enfin , comme seigneur de Chqzours, vous
n’avez possédé qu’à titre féodal, ce qui est proscrit par
les lois de 1792 et 1793.
Voilà la somme des eiiorts de M . le maire de Gannat,
et à quoi se réduisent toutes les objections qu’il met à
la pince de ses titres. Il s’agit d’y répondre, et la tâche
ne sera pas bien difficile.
M O Y E N S .
Il ne faut plus parler, comme le dit très-bien M. le
- maire de Gannat, de l’acte de 1791, puisqu’il est déclaré
nul par un jugement non attaqué; mais il ne faut pas
gémir avec lui sur ce premier acte de justice, ni l’appeler
un mal , car il n’est encore qu’un demi-mal; et il est indu
bitable que si ce jugement n’étoit pas rendu, et si le
tribunal eût pu soupçonner qu’on l’induisoit en erreur
sur des titres qu’on étoit hors d’état de produire, M. de
Chazours ne seroit pas obligé de lutter encore pour ob
tenir le complément de la justice qui lui a été rendue.
Oublions cependant que M . le maire de Gannat a
pi’omis de fournir des titres, et ne nous souvenons que
de ses quatre objections.
La première est proposée comme la plus embarrassante;
�( 21 )
c’est par elle que M. le maire commence ses moyens, et
c’est par elle qu’il les termine en la développant ; c’est
l ’alpha et l’omega de ses pensées. Il est visible que c’est
là qu’il a placé toute sa confiance; et en vérité voilà une
confiance solidement établie.
Rien n’est plus incontestable que la maxime invoquée
par M. le maire de Gannat, que tout demandeur doit
justifier sa demande, et que le défendeur n’a rien à prouver.
Sans difficulté , lorsque les choses se sont passées régu
lièrement, il n’y a pas même lieu de mettre cette vérité
en problème; elle se réduit à dire que celui qui,possède
n’a rien à prouver \possideo quia possideo, Si on l’assigne
il n’a que cela à répondre.
G’étoit aûssi tout ce qu’avoit à répondre M . de Cha
zours, lorsqu’on le menaçoit, en 1765, d’un procès qui,
disoit-on, alloit commencer tout de suite. 11 ne commença
pas; et M. de Chazours étoit encore en état, en 1790,
de répondre à la commune de Gannat : C’est à vous à
tout prouver, car je suis possesseur.
Cependant il se trouve un procureur de la commune
qui tranche la difficulté, et qui abrège singulièrement le
procès. En vingt-quatre heures la règle possideo a changé
de citateur; et par suite de cette admirable prévoyance,
M . le maire de Gannat dit aujourd’hui froidement à
M . de Chazours, après l’avoir chassé de chez lui : C’est
à vous qui vous plaignez, à tout prouver, car aujour
d'hui vous ne possédez plus.
Ainsi on pourroit donc renverser les maximes fon
damentales de la propriété, et changer les qualités des
�^ ( 22 )
parties, en réduisant à être demandeur celui qui n’avoit
rien à prouver.
-Aucune loi n’a laissé échapper une telle monstruosité;
et au contraire, en remontant à cette législation vaste
qui prévoyoit tout, nous trouvons un livre entier du
digeste consacré à nous donner des idées plus saines, et
à nous enseigner comment il faut entendre les règles
générales de cette matière.
Le législateur avoit fait, sur les contestations élevées
en matière de désistement et de possession ( interdicto
ati possidetis ), plusieurs lois explicatives, afin que le
juge s’occupât, non pas de celui qui étoit le demandeur
de fa it, mais de celui qui devoit l’être, ut nimiriim
sciatur quis actoris, qui s rei partibus fungi debeat, et
cui incumbet onus probandi.
Ces sortes d’actions étoient, par cette raison, appelées
extrordinaires, parce que la règle que le demandeur doit
tout prouver cessoit. Quand le possesseur ancien avoit été
troublé , le juge ne recherchoit autre chose , si ce n’est le
fait de cette possession, et, sans autre examen , il remet
tait le possesseur en l’état ou il étoit d’abord ; c’étoit
alors à l’autre partie à se constituer demandeur.
Rien de tout cela n’est étranger au droit français. La
maxime spoliatus antè omnia restituendus, est le som
maire de tout le livre 43 du digeste ; elle est le fon
dement de toutes les actions en complainte et réintégrande, qui sont singulièrement protégées par nos lois.
.. Celui qui est troublé a le choix de plusieurs actions.
Peut-il élever sa voix dans l’année, alors un juge de
�( *3 )
paix le rétablit promptement dans ses droits; et celui
qui l’a troublé ne peut, même avec les meilleurs titres,
être admis à prouver qu’il est propriétaire, qu’après avoir
rétabli le demandeur dans sa possession, rendu compte
des fruits, et.tout payé, même les dépens.
Veut-il prendre la voie criminelle si le trouble a eu
lieu de voie de fait, l’action lui est encore ouverte, et
il faut encore que tout soit rétabli et soldé avant qu’on
puisse l’attaquer au pétitoire.
Enfin, si l’action n’a pas pu être intentée dans l’année,
ou si, comme dans l’espèce , le trouble a été suivi d’un
simulacre d’acte qui colore la possession de l'usurpateur,
alors il faut bien que le troublé s’adresse aux tribunaux
civils pour faire tomber l’acte qu’on lui oppose; mais
cet obstacle étant vaincu, chacun rentre dans ses droits,
en vertu de la maxime spoliatus antè ornnia restituendus.
Les parties reprennent alors les qualités de demandeur
et défendeur, comme elles eussent dû le faire avant
Yacte et le trouble; et certes ce seroit donner une prime
à l’usurpation, si l’ancien possesseur paisible étoit réduit
à prouver sa propriété, avant d’être rétabli dans sa
possession.
Tel est l’objet de« la cause actuelle , et c’est en vain
que M. le maire de Gannat feint de s’y méprendre. M. de
Chazours n’est pas demandeur au pétitoire, pour réclamer
ce qui est paisiblement possédé par un autre; il est sim
plement demandeur en nullité d’un acte de violence qui
l’a dépossédé lui-même, et il a conclu au désistement
de l’objet usurpé , toujours d’après lu règle spoliatus
�( 24 )
ante omnia restituendus, Lorsqu’il a prouvé la nullité
de cet acte, il a fait tout ce qu’exigeoit sa qualité de de
mandeur.
' Le procès actuel est donc fini ; et quand il plaira à
M . le maire de Gannat d’en commencer un autre, comme
demandeur au pétitoire,, M. de Chazours sera prêt à
le soutenir.
Mais M . le maire de Gannat se fait quelque part un
moyen de ce qu’il n’existe pas de bornes d’entre les com
munaux et les champs de Chazours. Veut-il en conclure
qu’en attendant sa dépossession il faut vérifier actuelle
ment les limites? Mais cette objection ne seroit qu’un
prétexte de violation des principes; le savant Domat va
y répondre.
- « Si des parties qui sont en procès pour des confins,
« se contestent aussi la possession des lieux qu’il faut
« borner, il faudra premièrement juger la possession ;
« car la question des confins regarde la propriété , qui
« ne doit être jugée qu’après la possession. ( Liv. 2 ,
« tit. 6 , sect i re. , n°. 8.) »
Le motif de ce principe vient toujours à l’appui de
la situation du sieur de Chazours, ut hoc online f a c t o ,
de dominii disceptatione probationes , ab eo qui de
possessione victus e s t, exigantur. ( L . 35 , 1T. de acq.
rel am. poss. L. 3 , C. de in terdie t. )
Il faut donc regarder comme un point certain et in
dubitable, que ce n’est pas à la commune de Gannat à
faire les conditions au sieur de Chazours ; que c’est à
elle-même à montrer des titres de propriété si elle en
�(*5 )
com m e elle l’a avan cé; et q u e, dans l ’état actuel, n’y <
ayant eu de procès que pour une rescisiQn qui remet les
parties au même é ta t, la rescision prononcée ne laisse
plus qu’à prononcer le désistem ent, pou r que M . de
Chazours soit remis en possession.
Ces principes invoqués par M. de Chazours ne pourroient céder qu’à la démonstration évidente que feroit
la commune de Gannat, de titres précis et non sujets à
litige. Peut-être bien que par esprit d’équité le tribunal
ne se décideroit pas facilement à expulser celui qui ,
malgré un titre vicieux, viendroit en exhiber un sans
reproche, qui auroit été méconnu : c’est ce qu’a dû
supposer le tribunal, lorsque M . le maire de Gannat a
promis d’en produire ; et pour ne rien précipiter , le
tribunal a suspendu le complément de sa décision.
Maintenant il est éclairci que la commune de Gannat
n’a de titres d’aucune espèce. Un confin vague et incer
tain , énoncé dans deux ventes, contemporaines de la
tracasserie de 1680 , et du fait de deux habitans de
Gannat, ne peut pas être honoré sérieusement du nom
de titre. 11 est donc impossible que la commune de Gannat
tarde plus long-temps à se désister ; et tout délai par elle
obtenu depuis la rescision du titre vicieux de son usur
pation , n’est qu’une prolongation de durée de la loi du
plus fort.
La deuxième objection de M. le maire de Gannat n’est
qu’un faux-fuyant sans intérêt et sans but. O11 n’a jamais
pu assigner que le maire pour réclamer ce qu’il prétend
être un communal; si on eût assigné les individus, la
D
�6 )
procédure eût été nulles( a comme
l’a jugé maintes fois
'la Cour de cassation.
■M. le maire de Gannat cite un arrêt de la Cour d’appel,
concernant les héritiers Dufraisse ,' pour un marais du
Cheix. Ce marais avoit été partagé avant la révolution,
en vertu d’un arrêt du conseil; il ne pouvoit donc plus
être revendiqué comme communal, lorsqu’on plaida en
1806 , pour attaquer une sentence arbitrale qui avoit
eu lieu pendant l’émigration de M. Dufraisse.
Mais sans perdre du temps à discuter sérieusement,
et par l’application des lois, une difficulté imaginaire,
il suffit au sieur de Chazours de s’autoriser d’un juge
ment rendu par le tribunal, entre la ville de Riom et
la commune d’Ennezat, confirmé par la Cour d’appel.
’ M . le maire d’Ennezat opposoit aussi qu’y ayant eu
un partage des communaux, fait en exécution de la loi
du 10 juin 1793* et la loi du 9 ventôse an 12 déclarant
-propriétaires ceux qui ont partagé les communaux, eux
seuls avoient dû être assignés.
• Cependant le jugement et l’arrêt ont proscrit cette
prétention, et la procédure faite contre le maire a été
déclarée valable.
Remarquons encore combien M. le maire de Gannat
est favorable à proposer ce mauvais moyen d éform é,
après avoir plaidé au fond , et après avoir succombé
sur l’objet principal3 qui ne laisse plus qu’a prononcer
une exécution de fait d’un désistement déjà réellement
obtenu*
La troisième objection est plus misérable encore ; et
�( 27 )
on ne sait comment qualifier la prétendue" fui de nonrecevoir tirée de deux partages des communaux auxquels
on prétend^que M. de Ghazours a participé.
Il a déjà dit que si le premier partage, fait en exécu
tion de la loi du 10 juin 1793 , a compris le terrain
qui lui avoit été enlevé en 1790, c’est par suite de la
voie de fait qu’il n’avoit pas pu empêcher. Ce partage
se faisoit en 1794, à une époque où le sieur de Ghazours
n’avoit ni la possibilité ni la liberté d’y coopérer. Le
comité de surveillance de Gannat y avoit mis bon ordre,
en ordonnant, par un arrêté du 5 juin 1793, que le sieur
de Chazours seroit tenu d’habiter la ville de Gannat,
sans pouvoir en sortir sous quelque prétexte que ce soit.
Ensuite il fut envoyé en,détention à M oulins, où il est
resté jusqu’au 19 brum aire an 3.
N’est-ce donc pas, de la part de M. le maire de Gannat,
une ironie cruelle, de supposer, aux pages 14 et 19 de
son mémoire, que le sieur de Chazours a participé volontairement au partage des communaux par deux fois,
et que par avidité il a même abdiqué le domicile qu’il
se donnoit à la Combe ppour profiter du domicile réel
qu’il a à Chazours, afin d’avoir sa part des communaux?
Cet arrêté de surveillance, du 5 juin 1793 ( joint aux
pièces ) , prouve combien le choix d’un domicile étoit
volontaire au sieur de Chazours. Une participation au
partage de 1793? n’étoit pas plus volontaire de la part
d’un proscrit, et d’ailleurs on ne Yy appela pas. Enfin,
quant au partage de l’an 13, commencé après la demande
de M. de Chazours contre la commune, qu’a-t-il pu faire
de plus que de protester par écrit contre ce partage, et
Ü2
�(zS)
de former opposition par un huissier, à ce qu’il comprît
la portion de terrain pour laquelle il étoit en procès.
Comment après cette opération M . le maire de Gan-^
nat a-t-il pu imprimer sérieusement qu’il y avoit par
ticipation volontaire, acquiescement et fin de non-recevoir contre la demande ?
Venons h la dernière objection de M . le maire de
Gannat; il s’est plu à la développer comme un point
de droit très-ardu. M. de Chazours, dit-il, étoit sei
gneur; or un seigneur ne pouvoit pas avoir des terres
vagues ou pacages, qui de leur nature appartiennent aux
communes. D onc la commune de Gannat aura l’objet
contentieux à titre de terres vagues.
A la vérité, avant d’en venir à cette solide conclu
sion, M7 le maire de Gannat a préparé sa matière, en
disant que M. de Chazours n’ayant pas de titre, et ob
ligé de l’avouer, y supplée en trouvant dans la loi de
1793 que ses titres o n t été brûlés ; et sur ce supplém ent,
en effet très - ridicule, M. le maire de Gannat s’égaye
pendant une page entière (3 0 ) aux dépens de celui
qu’il signale comme raisonnant tout de travers.
M . de Chazours ( d’ailleurs fort enchanté d’avoir pu
fournir l’occasion de cette gaieté à M. le maire de Gan
n at), peut bien avoir dit que tous ses papiers avoient
été brûlés, parce que c’est la vérité , sans qu’il y ait
rien de plaisant dans cet événement. Il peut bien re
gretter la perte d’une transaction du i 5 avril 1698, qui,
faite à une époque non suspecte , et pour l’assiette des
cens dûs par le domaine de Chazours, devoit être pré-
�( 29 )
cieuse pour la cause. Mais ce n’est pas dans la loi qu’il
a trouvé ce brûlement, pas plus qu’il n’a trouvé dans ce
brûlement une preuve de propriété.
C’est un malheur, sans doute, pour le sieur de Cha
zours d’avoir perdu des titres qui lui eussent plus d’une
fois, peut-être, épargné des procès. Mais s’il est privé
d’en justifier ici, il a du moins l’avantage de n’en avoir
nul besoin, puisqu’il étoit en possession de défricher,
de temps immémorial, le terrain en contestation, lors-*
qu’il a été expulsé par voie de fait.
• S’il lui falloit des titres à l’appui de cette longue pos
session , la mairie de Gannat a conservé l’acte de 1680,
et le procès verbal de 1765, qui constatent qu’il y a eu
possession après contradiction ; ce qui incontestablement
est le signe de propriété le plus infaillible.
Le sieilr de Chazours prouve encors, par une prise
de possession notariée, du 26 novembre 1748, que son
1 père ayant acheté du sieur de la Fauconnière le droit
de justice dans Vétendue de ses biens de C hazours,
le seigneur de la Fauconnière, qui avoit intérêt de res
treindre les limites de ce démembrement de fief, en fit
une circonscription exacte ; et on y lit que cette étendue
des biens, alors appartenons au sieur de Chazours, com
mence de la Croix de Saint-Antoine à l'étang R oup,
le long du ruisseau, et de là , en suivant le même ruis
seau , jusq 11 au pré du sieur de Chazours , confinant
ceux du domaine de la Cabome. Ensuite , et après avoir
décrit tout ceconfin, qui précisément est celui qui sépare
Chazours des communaux de Gannat, on continue l’enceinte aux autres aspects, et généralement dans tout ce
�( 30 )
qui peut appartenir audit sieur de Chazours, dépendant
dudit domaine de Chazours, suivant les termes de l’acte.
M. le maire de Gannat ne sachant comment com
battre un titre aussi précis, et n’ayant rien de pareil à
produire de son côté (quoiqu’aucune loi n’ait fait brûler
les titres de sa commune), trouve plus commode d’en
appeler à la féodalité : et avec ce cri de guerre, il croit,
comme Gédéon, que tous les remparts qui lui font obs
tacle vont tomber en ruine, pour faciliter sa victoire.
Mais ne perdons pas de temps à rechercher si les lois
féodales ont ôté aux seigneurs leurs propriétés foncières],
ou simplement les redevances féodales; demandons seu
lement à M. le maire de Gannat où il a trouvé que M. de
Chazours étoit seigneur de Gannat.
Car il faudroit qu’il fût seigneur de Gannat, et qu’il
eût dépouillé les habitans de leurs biens par sa puissance
féodale, pour donner lieu à l’application des lois des 28
août 1792, et 10 juin 1793, dans le cas ci t é, ainsi que
l’a jugé la Cour de cassation, par trois arrêts des 7 mes
sidor an 12 , 17 vendémiaire an 13 , et 19 février 1806.
En effet, où seroit la puissance féodale sur ceux qui
étoient hors le fief, et soumis à une autre féodalité?
O r, 011 a vu que Chazours n’étoit qu’un simple do
maine roturier jusqu’en 1748, et qu’il étoit dans le iief
et justice de la Fauconnière ; qu’alors le domaine direct
y fut réuni par la vente qu’en fit le seigneur de la Faucon
nière. Mais les habitans de Gannat n’étoientpas dans la
seigneurie de la Fauconnière, et par conséquent ils ne
sont pas devenus assujétis à la puissance féodale de l’ac
quéreur de 1748.
�( 31 )
Cet acquéi’eur de 1748 étoit bien moins seigneur encore
en 1680 ? lorsqu’on le taxoit comme usurpateur, et qu’il
résistoit à cette taxe, en défiant de prouver qu’il eût
rien usurpé sur Gannat.
Ce n’éloit alors aucune puissance féodale qui empêchoit
les habitans de Gannat de soutenir qu’il y avoit usurpa
tion, pour empêcher le sieur de Chazours de jouir,
comme il l’a toujours fait, jusqu'au ruisseau Sigilon,
et de défricher successivement ce dont il jouissoit comme
propriétaire.
Que deviennent après cela toutes les citations de M. le
maire de Gannat, pour prouver, i° . d’après Dumoulin 7
Basmaison, etc., que les terres incultes appartiennent
au maître du territoire, et non au seigneur de la justice;
2°. que les lois de 1629 et 1667 défendent aux seigneurs
d'usurper les communaux, et permettent aux habitans de
rentrer dans ceux qu’ils auroient vendus ou donnés*
30. que la loi du 10 juin 1793 attribue les communaux
et terres vagues aux habitans des communes dans h
territoire desquelles ils sont situés.
Aucune de ces autorités n’a d’application. Basmaison ,
sur l’article 19 du titre 27 de la Coutume d’Auvergne, dit
bien en général que les vacans sont présumés être aux ha
bitans ; mais il faut le suivre dans sa distinction. «Les terres
« hernies et vacans d é f r i c h é s , sont réputés être au
« seigneur du territoire, et non pas au public , ni aux
« villes, bourgs et bourgades. » Dumoulin dit, sterilia
et inculta ; et ici il s’agit de terres défrichées successi-
�C 32 )
vem ent, et en suivant périodiquement les surfaces qui
pouvoient donner des récoltes.
Cet auteur, en disant encore que ces terres vagues sont
au maître du territoire, ad dominum territorii, laisseroit la preuve de propriété à faire à la commune de
Gannat. C’est.donc à elle à produire des titres pour montrer
que le territoire de Gannat va au delà du ruisseau de Sigilon, et dans la partie que l’acte de 1748 dit appar
tenir au sieur de Chazours, et être une dépendance de
son domaine.
Les ordonnances de 1629 et 1667 sont étrangères à la
cause. Il n’y a ici aucun communal vendu ni donné ; aucun
titre ne constate ni aliénation, ni usurpation féodale.
La loi du 10 juin 1793 laisse encore tout à prouver
à la commune de Gannat, puisqu’il faut que le terrain
soit dans son territoire, et que ce soit des terres vagues
et abandonnées, si déjà elles ne sont pas reconnues comme
communal.
Quelque dure qu’ait été cette lo i, elle ne pousse pas
l’injustice au point de dispenser les communes de toute
preuve, lorsqu’elles voudront s’arroger des propriétés
d’autrui. Elle ne change rien aux principes enseignés
par Coquille, qui, tout en disant que les communaux
appartiennent de droit aux liabitans , ajoute que cette
présomption cesse, s'ils ne rapportent point de titres,
ou s'ils ne payent aucune redevance.
E n fin , la rigueur de la loi n’a jamais ete étendue aux
terres en culture, dans les cas même où le seigneur avoit
usé de sa puissance féodale; caries terres hermes et vacans
sont
�( 33 )
sont seulement attribués aux habitans; et on connoît sur
cette question un arrêt de cassation, du 27 avril 1808,
qui a jugé la question formellement.
M. le maire de Gannat, après avoir accumulé les plus
mauvaises citations , comprend cependant qu’elles ne suf
fisent pas s’il ne prouve rien ,* et il est allé compulser tous
les registres des notaires de sa commune, pour y découvrir
une vente de 1678, et un partage de 1683, où des vignes
de Chantoirat sont confinées par les communes, de midi.
M. de Chazours a déjà répondu à cette nouvelle produc
tion, en faisant remarquer la date de ces actes et la qualité
des parties. D ’ailleurs Chantoirat est un territoire trèsconsidérable, et s’il confine les communaux, d’une part,
ce n’est pas un signe certain que les actes, dont on produit
une simple note, joignent le local contentieux.
Aussi ce-n’est pas sur cela que M . le maire insiste,
comme preuve, c’est sur ce qu’il appelle la possession des
habitans de Gannat; car, dit-il, ils ont constamment
possédé.
Mais quelle est cette possession si vaguement énoncée ?
Les faits du mémoire de M. le maire nous apprennent
qu’elle a consisté dans plusieurs pacages de bestiaux.
Mais a-t-on jamais vu que le simple pacage attribue
une possession, et soit une preuve de propriété ?
On n’ose pas dire qu’il ait eu lieu en temps de récoltes;
on ne s’en prévaut que comme ayant eu lieu sur les
portions de terre non cultivées, ou après les récoltes
levées ; or, cette espèce de pacage ou marchage n’est attri
butive d’aucune espèce de droit.
« C’est, dit D unod, un reste de l’ancienne communion
E
�( 34 )
« des biens. Le vain pâturage est utile aux communautés,
« et ne fait aucun préjudice aux propriétaires qui ont
« cessé de cultiver leurs héritages, ou abandonné les
« fruits qui peuvent y croître. Mais ce vain pâturage
« n’acquiert point de droit et ne donne pas lieu à la près« cription, etc. Fas est, jus non est. » ( Part, i re. , ch. 12. )
« A in si, dit M. de Malle ville sur l’art. 2232 du Code
« civil, quand j’a11rois pendant cent ans fait paître mes
gc bestiaux sur les fonds en friche de mon voisin, cela
« ne l’empêchera pas de les cultiver. »
La commune de Gannat ne peut donc se prévaloir
d’aucune espèce de possession, sous prétexte d’un pacage.
On a vu que ce pacage ne s’exerçoit que sur les terrains
en friche, et que M. de Chazours et ses auteurs n’ont
jamais cessé de défricher quand ils l’ont voulu.
Les procès verbaux, rapportés par la commune, de
1765, 1768 et 1789, loin d’être favorables à cette pos
session , sont au contraire ce que M. le maire pouvoit
produire de plus formel pour se faire condamner.
En effet, il ne faut pas croire qu’il suffise à quelqu’un
d’avoir consigné dans un acte l’annonce qu’il a faite
d’une prétention; car tout le monde, p?ir ce moyen,
pourroit se faire des titres. Mais il faut persévérer dans
Fattaque ; et lorsqu’on a menacé de former unv de
mande, il faut tenir sa promesse, sinon on est présumé
avoir reconnu n’avoir aucun droit. S i cognitâ rei veritate suum negotium deseruerit , nolens m lite improbâ perseverare.
C’est par ce m otif, qu’en matière de trouble on re
garde comme plus solide le droit de celui q u i, après
�( 35 )
avoir été troublé, b’a tenu aucun compte de la résis
tance, et a continué de jouir.
Ceci s’est même étendu aux servitudes, quoiqu’odieuses
de leur nature; et l’empêchement qu’on a voulu y ap
porter , fait un titre plus fort à celui qui la réclame, lors
qu’il est prouvé qu’après l’empêchement il a continué
de jouir comme auparavant, ainsi que l’enseigne le docte
Fa ber. D ic i solet, interrumpi prœscriptionem servitutis
naturaliter, per contradictionem et prohibitionem ejus,
adversùs quern prœscribebatur,*idtamen intelîigi debet,
si prohibitio tffectum liabuerit : alioquin si prohibitus
in servitute perseveraverit, tanto fortiiis erit ju s prœscribentis.
- Après cela , et quand on relit les procès verbaux de
1765 et 1768 , on n’y voit plus qu’une vaine formalité,
qui n’a pas empêché les actes de propriété du sieur de
Chazours, et qui a seulement affoibli le prétendu droit
que vouloient s’arroger les habitans de Gannat, d’em
pêcher les défrichemens.
Le procès verbal de 1789 signifie encore moins; car
c’est un autre acte obscur, encore moins interruptif
de possession , et qui, en reconnoissant M. de Chazours
propriétaire d’une terre appelée le ténement des Bruyè
res , renverse le système actuel de la commune de Gannat,
et achève la démonstration que si aujourd’hui elle veut
se dire propriétaire d’une portion de ce ténement, c’est
à elle à exhiber des titres.
L ’acte de 1791 est inutile à la commune, puisqu’il est
annuité ; ne le fût-il pas, il seroit inutile à sa possession,
parce qu’il étoit la suite d’une expulsion de voie d e i‘a it;
�( 36 )
arrivée après des menaces d’assignation, qui n’ont jamais
été effectuées. Car, comme le dit Dom at, « celui de qui
« la possession n’est interrompue que par une voie de
« fait, sans forme de justice, ne laisse pas d’être consi« déré comme possesseur , parce qu’il a le droit de ren« trer en possession. Ainsi le temps de la possession de
« l’usurpateur n’interrompt pas la sienne. » ( Liv. 3, t. 7 y
sect. 4. )
C’est donc toujours M . de Chazours qui est réputé
possesseur, d’après les principes; il l’est encore plus
depuis le jugement qui remet les parties au même état*
et qui est passé en force de chose jugée.
O r, on le répète, le possesseur n’a rien à prouver;
et cependant M . de Chazours seul prouve qu’il est pro
priétaire. A u contraire, M. le maire de Gannat ne rap
porte aucuns titres, et ne prouve rien. Comment donc
une cause aussi simple a-t-elle pu donner lieu à une résis
tance aussi opiniâtre, et à des injures aussi réfléchies et
aussi accum ulées? Il ne faut pas s’en étonner, les injures
sont le dédommagement le plus commode de l’absence
des raisons. Elles sont douloureuses pour celui qui en a
été l’objet; mais il est dédommagé à son tour par le
succès , et il est assez vengé en obtenant justice.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M . M I O C H E , avoué licencié.
A. RIOM, de l’imp. deTHIBAUD, im prim . de la Cour impériale, et libraire,
r u e d e s t a ulcs maison L a n d r i o t »
Mars 1811
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Defaure de Chazours, Louis. 1811]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mioche
Subject
The topic of the resource
communaux
limites de communaux
pacage
vols
experts
arbitrages
troubles publics
bornage
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Louis Defaure de Chazours, ancien capitaine d'infanterie, habitant au lieu de la Combe, commune de Saint-Quentin, demandeur en exécution de jugement ; contre les maire et habitans de la ville de Gannat, défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1811
1680-1811
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0414
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Gannat (03118)
Saint-Quentin (02691)
Rights
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Domaine public
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28dce18cff8747d778589fa16f98bb5a
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CONTRE
Dame F r a n ç o i s e - A g l a é - G a b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G'OU R D O N i, son mari ; dame
A n g é l iq u e - A r m a n d e - C a m il l e D E L A
L U Z E R N E , et sieur A n a t h o c l e - M a x i ^ M IL IE N H U R A U L T D E nVI B R A Y E , son
mb éa nr i é, ,fhabitans
de la'ville de -Paris y héritiers
fic ia ir e s d e m a d a m e
M o n t m o r in la q u e lle
é toit héritiaire bénéficiaire du sieur EmmanuelFrédér ic -De Tane,s on f r èr e appel ans • ‘
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SieurHenriDuvergierhabitantàParis SimonTerouldeabitantàDauville
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P a r is -h a b it a n t à S en s
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D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; et J e AN
C H A R D O N y chapelier y habitant à P a risr
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,
aussi appelanSy
CONTRE
Sieur
D E TANE - SAN TEN AS y
habitant à P a ris , intimé ;
A m édée
\
1
E T
C
O
N
T
R
E
Sieur L o u is N A T T H E Y , habitant de, Nyort en
Suisse y austsi intimé ,
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la plus gran d e simplicité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’uné terré, chargé d’en payer
lie prix à un notaire choisi par une direction de créan
ciers, lui en paye près de moitié;, ensuite il revend la
terre, et laisse-dans les‘¡mains du second acquéreur une
somme égale à ce qu'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second aciqUéreur/poursuivi par les opposans, produit.des quittances de consignation, assigne
les créanciers en mainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces, créanciers attaquent le premier acqué
reur, qui met en causç son. ga$an& : celui -ci. emploie
UANS
�C3 )
pôur libération le jugement qui a validé sa consignation.
Alors l’acquéreur observe aux créanciers qui le pour
suivent, qjieileurs oppositions à des lettres de ratification
ont lié leurs intérêts à ceux dit second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés, ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
Voilà à quoi âe'réduit la question principale, et il
est évident que jusqu’ici elle në présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse s 'mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du v e n d e u r
originaire , qui comprennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers-elle seroit pour euxmêmes, font cause commune avec eux, pour que tout
retombe sur le premier acquéreur.
Alors tout s’exagère et se complique. L ’émigration de
l’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout;: d’autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à mille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas , et le
.tribunal même où il a trouvé justice. Enfin, après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la multitude, mais plus
étrangers encore, on~vient crier à l’injustice et à l’indé
licatesse, en disant froidement : « Que'm’importe si vous
« devez recouvrer ou non 5ooooo francs: que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas-la vôtre ! Que
A 2
�(4.)
«. m’importe en.côjrè ,si vo u â tes ruiné par ce payement
« et si votre famille est respectable*..Je veux.de>Pargent,
«• et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose;
« moins en mesMve.;de me-résister’ ; d?aille.iirs voüreiémi« gration.se ¡prête à tous mes sophismes :*'jl y^ajjt.ant de;
« lois sur cette matière, qu’il est impossible dfej ne-'pasr
« y voir que tout doit retomber sur vous..pinailleurs.,;
« quand je me suis donné la licence d’imprimer qu’une
« décision contraire à}mon intérêt étoit unjjjugcmfint de
« fa v e u r , j’ai-calculé; Peffet 'dé ,cettje»in jurp sue, liesprit,
« des magistrats auxquels j’eri idemaïnde ' la réforme.::Si
« je ne puis le s ’forcer, à- croire gqu’il feu ti sacrifier uni
« émigré par préférence, mon .adroite censure sera*tou« jours d’un poids quelcqnque' dans, la i balance;;Vielle
a achèvera probablement de me conquérir le suffrage de^
« ceux, dont l’opinion auroit; été incertaine. ! »[ , *< < .
Ainsi eût parlé Machiavel?;, ainsi panlerit vies '.syndicsdes créanciers de T an e, qui veulent, pe?;\fas et nefas ,
intéresser en se présentant comme des victimes..
Qu’ils .tâchent de-prouver à la Gour que malgré leurs
oppositions à/des lettresy; malgré un jugement qui pro
nonce contre eux la validité du payement que le-sieur.
Natthey a été chargé'de-leur faire, il leur reste encore une,
action : voilà leur cause.
t ;
Mais que dans,leur colère et dans leurs calculs- ils fassent
semblant de supposer, de l’adresse, des insinuations et-de
la faveur; quo tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent ¿\ insinuer que cette émigration deviendra aux
sieur et dame de la'Roche-Lambert, un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s'être,fait de ses propresJautes un moyen
d’acquérir voilà ce qui n’est ni la cause ni la vérité 3
mais une insigne et brutale calomnie.
•Car personne ne sait mieux que les adversaires qu'il
n’y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la Roche-Lambert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en
écus sur une terre qu’ils n’ont pas : et on ose encore leur
demander plus de 5ooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
*
... ■i
■:
:
F
A
I
T
S
.
*
- Apres la mort dû'sieur Emmanuël-Frédéric de Tane*
sa succession1 fut acceptée sou& bénéfice d’inventaire par
Françoise- Gabriëlle) de Tane, épouse de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères.
Madame-de Montmorin ne-pou voit vendre en cette
qualité les .biens, de la succession sans y appeler les
créanciers ; elle fit apposer’des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyre, Chadieu, la GhauxMongros et le* mobilier de la succession. Il y a eu pour
7 7 7 4 0 o francs de ventes avant 1790:
La terre de Chadieu fut vendue' par madame de
Montmorin aux sieur et dame de la Roche-Lambert, par
acte du 17 juin 1788, moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a is évalués à 5 deniers par livre, produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000' fr. seroient:
payés solidairement par les sieur et dame de la RocheLambert entre ¡es mains de Trutaty notaire-séquestre ?
•
�( 6 )
ou aux créanciers qui auront été délégués• savoir, un
quart au i 5 septembre , et le surplus dans le courant
des deux années , en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et que, s’il se trouve des oppositions du chef
de madame de Montmorin, elle les fera lever dans les
six semaines; mais hors, ce cas , elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de Tane de Santenas, Teroulde, commissaire à terrier;
Chardon, chapelier; Louis Laisné, sellier, et Toutain,
tailleur d’habits, tous syndics des créan ciers de Tane,
lesquels , après avoir pris lecture de la vente , la con
firment et ratifient aux conditions y exprimées. Ils font
élection de domicile chez M. Pernot-Duplessis/procu
reur au parlement.
Le jour même de la vente, M. de la Roche-Lambert
paya la somme particulière de 7812 lîv. 10 s., à Tvutaty
notaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
• En 1791 , les sieur et dame de'la Roclie-Lambert,
voyageant en Allemagne, envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur beau-frère, deux procurations; celle du
sieur de la Roche-Lambert porte pouvoir $ emprunter
les sommes nécessaires à ses affaires , gérer , liquider ,
vendre : elle est passée devant Heidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 179 1.
La procuration de la dame de la Roche-Lambert porte
pouvoir d'emprunter 60000 fr , pour placer sur Chadieu ,
�(7)
régler compte avec M\ T ru tat , notaire ; recevoir ,
donner quittance , faire tous emprunts qu'il jugera bon
être 9pour Parrangement des affaires de son mari. Cette
seconde procuration est passée devant Lutner, notaire à
Worms , le 25 octobre 1791 (1).
En vertu de ces actes,.le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
Le 27 novembre 1791 , par acte reçu Cabal, notaire
à Paris, le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la Roche - Lam bert, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n’avoit pas de pouvoir de la dame delà Roche-Lambert ),
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
Pa ris , moyennant ôooooo fr ., dont il reçut 126000 fr.
en assignats, et quant aux 376000 fr. , le sieur Sauzay
promit les payer dans un an aux sieur' et dame de la
Roche-Lambert you , si bon lui semblait, aux créanciers
desdits sieur et dame de la R och e-Lam bert , et spé
cialement aux créanciers privilégiés sur ladite terre.
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la Roche-Lambert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux imputations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dame de la Roche-Lambert quittaient la Fiance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur première pensée a été de s’occuper
de leurs créanciers, et que tel a été' l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�( 8 .)
s’oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
Enfin, pour l’exécution de ladite clause, le sieur de SaintPoney fait une élection de domicile à Paris.
'
Le 4 janvier 179 2, il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellement; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics. .
/ •' ' '
1
L e 22 avril 1792., le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’une, du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
Tane.
Jn . -j
jrj *i> r .*ii oooooct ü; .«irr. /< m r ^-n,ci
Dans la même année 1793 > ^ sieur clejla Roclie-Lam
ber t fut porté sur la 'liste des émigrés, v/rv f\ ? A
La dame de la Roche-Lambfert n’a jamais été -portée
sur aucune liste. \ , ’ 1,
Sous prétexte d’une loijdu 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens desrabsens du territoire:,jsans ]e$
désigner encore comme émigrés,--le sieuib Séjuzayi^fit
déclarer par le curé d’Autezat, à la municipalité*jdu lieu,,1
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la Roche-Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il avoit pris des lettres dti^at ificéition^èt que
les créanciers opposâns* aux: rèttres1
prix'
et au delà : d’où il conclut qû’ii a iii(-eret^e 'conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre pst hypothéquée. « E n sorte que , dit.,1e sieur
« Sauzuy, s'il fa it fa ir e ladite déclaration , c'est moins.
« à
_
�a cause des sommes dont il peut paroître débiteur ,.et
dont la république nèipourra jamais p ro f ter ^ puisqii elles doivent être absorbées par lesdits créanciers
hypothécaires opposans aux lettres de ratification ,
que pour donner des preuves de son civisme y et empêcher qu!on ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence» »jJ . j *
i ->
Par acte du 25 juillet 1793 , le sîeur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux Martres, les mou
lins et fours banaux des. Martres, dépendans de la terre
de Ghadieu yumoyennanti la somme de 6 1100 francs ,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
" Le 7' nivôse an 2, par acte reçu Cabal, notaire à Paris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Cliadieu
^au ¡sieur .W allier, Suisse, pour lui ou la ‘personne que
W allier se réserva de déclarer dans les six mois, moyen
nant 5.30009 frrj dont^Wallie^paya comptant 40000 f r .,
s’obligea de payer 136000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des 355ooo fr. restans, W allier
-fut délégué à les_payer,-: soit aux 'créanciers de T ajie ,
précédent propriétaire \ qui se sont trouvés OPPOSANS
«
«
«
'«
«
«
«
A U X L E T T R E S DE R A T I F I C A T I O N PRISES PAR S A U Z A Y ,
soit afin d’en fa ir e le dépôt et la consignation partout
où besoin sera , aussitôt après, le sceau sans opposition
sur le sieur Sauzay des lettres de ratification à prendre
sur la présente .vente. ■ • !
,
‘LesieurNattheyditavoir été subrogé par le sieur W allier
à ladite vente, par acte sous seing privé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-Dôine
fit décerner , le- 24 ventôse an 2 , une contrainte contre
B
�( 10. )
le sieur Sauzay , pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche-Lambert-en vertu du contrat de
vente de 17 9 1, sous prétexte que le vendeur étoit émigré.
Ensuite, et à la. date du 26 floréal an 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
'
■
cc Je soussigné, receveur de l'enregistrement e t des domaines
ce au bureau de Saint-Am ant-Tallende, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G. Etienne-Jean-Louis Natthey, de N yon,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
ce suivant la déclaration de command en sa faveur-par le
« C. W allie r, du 7 nivôse d e rn ie r), la somme de trois cent
cc cinquante-cinq mille livres , pour servir tant au nom des
cc cit. Natthey et Sauzay , qu’en celui du C. Jean-Baptiste
cc W a llie r, à la libération dp Chadieu.
c< D e quoi m’a été demandée la présente déclaration
cc
cc
, à l ’effet
d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale' sur ledit
1
Chadieu.
U Saint-Amant, le 26 ilotéal àn 2. Signé Mavgue. h >
.
* -
1
w.
^
.
..
’ . :,
. •
.11 pavoît qu’ un arrêté du département , en l’an 3 ,
ànnulla la vente faite au sieur Sauzay , et mit ta terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et ‘Wallier, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay, et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que lo-sieur W allier avoit voulu se
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�Ci1 )
il fit des! offres à Wallier:, et même u n e - consignation, en
mandats. Mais les* loisjsurlla réduction ,.du papier-môunoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de'la„Seine sus
pendit le procès, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de Tane produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frimaire an
4 ? reçu du C . Jean-M arie W allier ^
cc des deniers empruntés de Ja q u e ro t, par acte d u ............ la
«c somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix du domaine
cc acquis par Sa u z a y, des sieur et dame de la Roche-Lam bert,
« ém igrés, suivant le contrat du 27 novembre 17 9 1 ; ladite
«c somme de 355 ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
« nationale sur le receveur du district de Clermont, n°. 42,4, eu
ce date du i 5 brumaire dernier; dont quittance. Signé Maugue. »
L e s créan ciers o n t retiré du m êm e registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an 4 , reçu de
cc de 3 2 8 5 1 francs
Jean-Louis Natthey la somme
25 centimes pour les intérêts restans du prix
ce‘principal dii domaine vde Chadieu, acquis de la Roche-Lam-
i< b ért, ’sa femme’ et Saint-P;oncÿ, émigrés; par le sieur Antoine
« Sa’uzay,"lequel en a fait vente au C. W allie r, par acte reçu
« C ab al, notaire à Paris, le 7 nivôse an 2 , lequel W allier a
ce passé déclaration au profit dudij: Natthey, par acte sous seing
cc privé , du 7 nivôse an 2 , enregistré il Paris le 17 messidor
cc an 3 , par Pinault ; ledit payement 'fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lias, directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrement à Paris , le
cc 12 frimaire présent mois; et ledit payement effectué en une
cc rescription de -la trésorerie nationale sur les domaines d’émi-
« 'g r é s , n ° / 4 g 3 , çt souô la date dudit jour 12 du présent mois.
« Certifié conform e, le 8 vendémiaire an 1 1 . Signé Maugue. »
’ '
B 2
�( 12 )
L e i ev. nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de Tane, aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite, qualité de
créanciers opposans aux lettres de ratification prisesr
par Sauzny; de se trouver le i 5 pluviôse suivant chez
le receveur de Saint-Amant, pour y: recevoir leprioo, de>
Ch adieu. Il est constaté par cet exploit (resté au. pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que l^atthey y procède
comme obligé d’acquitter 37 5ooo frauc^e^ cjap.ital^et^
32852 fr . en intérêts , tant pour se libérer lui^niéme y
que pour libérer'le sieur Sàuzay , ainsi que les,sieur'et
daine de la Roche-Lam bert , premiers acquéreurs et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers 11e se présentèrent pas ; et le sieur
Natthey fit dresser, le i 5 pluviôse an 4 , par le receveur
de Saint-Amant, la pièce suivante produite par lui.
« Je soussigné, receveur de l’enregistrement et des domaines
« au bureau de Saint Amant-Tallende, déclare, d’après le débat
<c des co m p tes qui a eu. lieu ce jo u rd ’hui entre m oi et le .ç it»
ce Parades , des Martres , fondé de pouvoir du C. Etienne-Jean cc Louis Natthey , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Cha?
six cent dix-neu f mille six cent quatre
cc livres quinze sous en l’acquit dudit domaine., dont quittance
cc dieu, la somme de
cc et décharge, sauf audit Parades, qui en Tait expresse réserve
cc pour ledit C. Natthey , de plus ample examen et apuration
r< desdits com ptes , et de se pourvoir d ev an t qui il appartiendra ,
« pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
« sus des sommes dues,par ledit, C. Natthey pour la libération
« dudit domaine de Chadieu.
« Saint-Amant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
�En marge est écrit :
( i3 )
« Sur l’invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. niyôse der« nier, n’a comparu cejourd’hui en mon bureau.
« Le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers- de Tane n’ont formé aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la- Roche-Lambert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulter, du .3 floréal an 10 , et
^c’est le moment d’être attentif sur leur première dé
marche y pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 17 9 1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
Sauzay , sur sa vente du 27 novembre 1791Par exploit du 1 1 brumaire an 1 1 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauzay au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la* vente de 1788; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à(payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente à lui consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit payement. (Cette pièce est produite par le
sieur Natthey.)
Le 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
à Natthey..
Alors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal'de Clermontj.pour voir dire qu’il est valablement libéré au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés h lui
donner mainlevée de leurs oppositions.
�( ¿
4 )
Le 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clermont rend
le jugement suivant :
« Le tribunal déclare le demandeur (Natthey) bien et
« valablement libéré du prix de la terre de Chadieu ,*
« en conséquence, fait mainlevée de l’opposition faite
« par les défendeurs (les syndics) au bureau des hypo« thèques de Clermont, le 2 décembre ; ordonne qu’elle
« sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
« présent jugement; condamne les créanciers aux dom« mages-intérêts de Natthey, à donner par déclaration. »
En vertu de ce jugement, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu . Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
Tout d’un coup, en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire, Ambert et Cler
mont, sur tous les biens appartenans ou ayant appar
tenu aux sieur et dame de la Roche-Lambert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur Natthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de propos, jusqu’à présent, de dire
que pour verser 170644 francs en 17 9 1 ? ^ 3voit été
emprunté pour les sieur et dame de la Roche-Lambert,
savoir, 44000 francs à la dame de Bourneville, mère de
madame de la Roche-Lambert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de Tane-Santenas, représenté par Amédée.
�(
)
On a vu que le sieur de St.-Poncy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T an e, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
Et comme les syndics n ’ a voient inscrit que pour leur
intérêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre »les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la Roche-Lambert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
. .,
Le sieur Natthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
.assigner les sieur et dame de la Roche-Lambert en main
levée'd e ladite inscription.
Le lendemain, Amédée de Tane (très-d’accord, comme
. on le voit déjà, avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la Roche-Lambert de payer les arré
rages de l’emprunt ci-dessus de 30000 francs.
Le 23 du même mois, il a été présenté requête au
tribunal de Clermont, sous le nom des sieur et dame de
la Roche-Lambert; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de Tane, et à ce que le sieur Natthey, se disant
libéré,' fût tenu de faire valoir envers eux ladite libé#
ration, sinon de garantir les sieur et dame de la RocheLambert. Ils'ont conclu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 91 et suivantes, et au désistement de
Chadieu. Euiin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à:1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
Amédée de Tane à la mainlevée du. coin mandement, de
�( i6 )
payer par lui fait, attendu que Natthey, chargé de payer
tout le monde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a eu lieu, les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce jugement, le tribunal de Clermont distingue
les intérêts des créanciers de Tane, d’avec ceux d’Amédée
de Tane. A l’égard des premiers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
Roche-Lambert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur Amédée de T-ane, il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire Trutat,
comme obligation directe et indépendante de l'acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de' la Roche-Lambert de leur opposition au commande
ment de payer (1).
11 y a appel de ce jugement, tant par les héritiers et ,
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheLambert, que par les sieur et dame de la Rodhe-Lambert
contre Natthey et contre le sieur Amédée de Tane. On a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
"des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la Roche-Lam bert;
(1) Ce jugement est transcrit en son entier, avec les motifs,
à la fin du mémoire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( i7 )
d’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , qui, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lambert.
M O Y E N S .
Pour suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour etre
clair, autant que possible, dans une discussion denaturee
et obscurcie par de fausses applications de principes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
Tane d’avec ceux des héritiers de Montmorin, quoiqu’ils
^ient réuni leurs intérêts, sérieusement ou noni On exa
minera, en premier lieu, s’il est vrai que les créanciers de
Tane aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la Roche-Lambert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la Roche-Lambert.
2°. Sur l’appel des héritiers de Montmorin il s’agira
de savoir s i, au cas où le versement du prix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation nationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de Tane, la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
Montmorin, comme condamnée à m o rt, ou pour le
sieur de la Roche-Lambert, comme émigré.
30. Quant à l’appel du sieur de la Roche-Lam bert
contre le sieur Amédée de Tane ', il y aura lieu d’examiner
si le sieur Natthey, chargé de faire face à tout, a également
libéré le sieur de la Roche-Lambert de cette dette.
C
�( ï8)
Enfin, l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir si, dans le cas où le sieur de la RocheLambert seroit condamné à payer des sommes quelconquesaux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A ppel
d es
c r é a n c i e r s
de
T a ne*
La prétendue émigration du sieur de la Roche-Lambert
est le premier texte de la proposition des créanciers de
Tane ; ils l’appuyent sur un arrêté^ du conseil d’état, du
3 floréal an i l , portant que tout créancier à'émigré
non liquidé, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre rémigré : ils en concluent que
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
Rien de plus incontestable que ce point de droit; mais
aussi rien de moins applicable à la couse.
L ’arrêté de l’an 1 1 seroit applicable, si Chadieu ayant
été vendu nationalement, le sieur de la Roche-Lambert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au grand
livre, pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement.
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence;
i°. La terre de Chadieu, qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lambert a
été débiteur, comme détenteur y n’a point été vendue m
0
�C 19 )
la nation né s’en est point emparée : un séquestre aussitôtmis que le vé , n’a pas empêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée, sortie des mains du
sieur de la Roche-Lambert, au 27 novembre 1 7 9 1 , et
le sieur de la Roche-Lambert n’a été mis sur la liste
des émigrés qu’en 1792. La vente ayant une date au
thentique açant le 9 février 17 9 2 , devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Ghadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des événemens , lorsqu’avant leur départ ils ont mis hors leurs mains l’im
meuble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxième vente ; lorsque,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 17 9 1 , et n’avoient rien
de commun avec l’émigration ?'
3°. 11 ne s’agit pas de créanciers à'émigré, qui, après
avoir eu la nation pour seul obligé, ’parce qu’elle s'étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposans qui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur intermédiaire.
♦
t e s créanciers de Tane ont 'bien senti qu’il falloit
C 2
�(
20
)
p ro u v e r, avant tou t, comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la Roche-Lambert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement -personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lambert.
- Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, r°. les héritiers
de Montmorin ou de Tane,. comme« obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification,
ou Ghadieu, à cause' de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la Roche-Lambert, comme délégué envers eux par Pacte
de 1788^
Pour amener à eux le sieur de Ta Roche-Lambert,
il y a une-seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite'sans novation,
c’est-à-dire,.sans l’extinction de la dette du<premier obligé;
et de même il- n’y xa pas de novation sans, l’intention
formelle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r, qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788*
on n’y verra pas même l’apparence d’une novation ; au*
contraire-,, madame de- Montmorin reste- débitrice des
créanciers, de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 3760,00 fr. que payeront les acquéreurs deChadieu ; ils conservent sans le moindre-doute le droit
de s’adresser à madame de Montmorin et cela est si
bien prouvé, que nous.voyons dans l’inscription du 1-1
janvier 1,808, et en la Cour* les dames de la Luzerne,
héritières de Montmorin , se réunii’ aux créanciers de
Tnne pour attaquer le sieur la Roche-Lambert, à cause
de l’intérêt qu’il a à, ne pas payer lui-même..
�( 21 )
Si les daines de la Luzerne n’étoient pas restées débitrices envers les créanciers de Tane , elles ne seroient
pas là pour fa ire valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs*, car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette somme, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la Roche-Lambert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers#
'
M ais, dit-on, les créanciers sont parties en Facte de
1788. Donc il y a délégation et obligation directe et
personnelle des sieur et dame de la Roche-Lambert ; ils
l?ont même exécutée en partie par leurs payemens de
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de l’acte de 1788 , pour ratifier et
confirmer la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
de cette intervention, commandée, par d’autres circons
tances.
Madame de Montmorin étoit héritière bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
1
La coutume de Paris ne permet à1 l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles*, mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus nouvellement réformée, en est le supplément; et
suivant la jurisprudence constante à Paris, aucun héritier
bénéficiaire ne-peut vendre les immeubles sans appeler,
les créanciers.
�t A in si, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
reur , pour éviter des enchères et d’autres contestations,
q u i, bonnes ou mauvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il éloit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation, lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in form â communi d’un
acte qui ne contenoit 'qu’une indication de payement,
ne disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l’engagement des sieur et dame la Roche-Lambert i et
qu’ils éteignoient celui de madame de Montmorin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la vente, que les créanciers intervenoient;
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu'on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Quce dubitationis tollendœ causa
in contractibus inseruntur, jus cdmmune non lœdunt.
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la Roche-Lambert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
c< Pour qu’il y ait délégation (dit M. Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du créancier de décharger le
« premier débiteur, et de se contenter de Vobligation
de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�( *3 )
« place du premier, soit bien marquée. C’est pourquoi
« si Pierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers moi, a, par un partage, chargé Jacques,
« son cohéritier, de me la payer à sa décharge, il rfy aura
<< pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m oi, si je n'ai par quelqii’acte déclaré formellement
« que je déchargeois Pierre : sans cela, quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rten pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ierre9
« et que j raie déchargé pierre.. L . 40, §. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
de la Roche-Lambert ont contracté une obligation per
sonnelle envers les créanciers de Ta ne-, sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas 3 et substituons-y qu’ils
ont contracté , comme acquéreurs E T D É T E N T E U R S ,
l’obligation de payer 376000 fr. pour le prix de la terre
de Chadieu.
Que va-t-il en résulter? Rien que de fort ordinaire;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les>
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellement.*
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure ; car les conventions particulières de la vente
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi dicte, et dont elle ordonne l’exécution. '
Le résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la Roche-Lambert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ordre entre lés soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de Tane; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
■personnels du sieur de la Roche-Lambert.
^ 'S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
Roche-Lambert,'.c’est qu’en effèt ils ne le pouvoient pas^
car, 10. les syndics n’ont pas formé opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la RocheLambert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au sieur Sauzay le 27 novembre 17 9 1. ' ’
Ainsi ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur Sauzay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaqùer les sieur
et dame de la Roclie-Lambert.
Ils se sont jugés eux-mêmes sur ce point , par leur
exploit donné à Sauzay en l ’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
• 2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur l’émigration , prouvent qu’il n’y avoit plus lieu à un ordre,
si un émigré étoit.débiteur, parce que le gouvernement,
dans ce cas, forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
30. Les créanciers pouvoient encore moins ouvrir un
ordre contre le sieur do la Roche-Lam bert, après le
jugement
�( *5 )
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. Natthey, son garant,
a répondu à leur demande en faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tane se croient dispensés de tout,
quand ils disent que cette chose jugée est un piège , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils ' en’ sont les maîtres :
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
- * ■
'r
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à démêler au sieür de laf Roche-Lambert J
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réformer,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler lès créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est ¡pour un émigré,
* et nullement pour libération envers eux. 1 "
r
,\
\
Si les sieur et dame de la Roche-Lamliert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveroient aisément, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose. .
11 s’agit eu ce point d’une vérité de révolution, où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. Pour être mieux écouté, en cherchant le sèns
de quelques lois de circonstance que le* législateur ne
nous a pas données comme ratio scripta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d\me autorité
prépondérante.
D
�( »6 )
Les créanciers de Tane, en citant beaucoup d’arrêts,
ont prévu qu’on pourvoit leur opposer celui rendu en
la Cour de cassation entre les héritiers Lecomte et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvement réfuté, en disant que
l’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison; car quoique dans
cet arrêt il fut question d’une somme versée à la régie
par l’acquéreur d’un bien de condamné, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour mot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens ; c’est dans le plaidoyer de
M. M erlin, qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des émigrés à verser les sommes par eux;
dues, ¿1 la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion, ce magistrat n’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Feffet de ce versement, et pour qui il est présumé
être fait. Yoici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M. d’Ormesson, vendeur d’une ferme moyennant
425ooo f r . , avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m ort, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
prix de la vente.
Après la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame Bélanger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers Lecomte, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix. La dame Bélanger se prér
�( 27 )
{dudit libérée malgré l’opposition, ' et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente; comme y étantobligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit polir le
compte des ayant droit , et par conséquent des créant
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
'
v
C’est pour examiner cette prétention que M. Merlin
discute’; et nous ,allons, voir qu’il l’adopté entièrement.
- « Si au lieu de payer aux héritiersLecomte (créanciers)
« le montant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir pour eux ( i ), leur
« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eux-mêmes..
cc Que reste-t-il à examiner? Un seul point, celui de
« savoir si en effet les héritiers Lecomte on t, par les
c< mains d'un tiers , touché après la mort du citoyen
« d’Ormesson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
• « (Article 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débi
te tcurs des émigrés, à quelque titre que ce soit, ne
c< pourront se libérer valablement qu’en payant h la
cc caisse du séquestre.)
c< C’est donc par forme de séquestre , que la nation
ce va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nution
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
« personjiel ’ elle les recevra pour le compte de ceux qui
(1) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. Merlin ; ils sont conformes à l’art. 12 39 du Code civil,
D 2
�c
2
8
}
pourront y aÿoir droit ; elles les recevra par consé~
quent pour les remettre aux créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en France, sauf à en retenir le
restant à son profit, s’il y a lieu..........
>
« (Article 17. Les sommes déclarées en vertu des
« articles précédens.. . . seront versées.. . . dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrement, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« émigré, et sans y préjudicier. )
• « Voilà qui confirme, qui développe bien clairement
« les conséquences que nous tirions tout à l’heure de l’ar« ticle 14 de la loi du 8 avril 1792. Les oppositions des
« créanciers d'un émigré ne peuvent ni empêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il doit;
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la somme que le receveur de Ven« registrement aura touchée. Preuve évidente et sans
•c réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; preuve évi« dente et sans réplique que les créanciers opposans
« sont censés recevoir par les mains du receveur de
« Tenregistrement ,* preuve évidente et sans réplique,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé payer , non
« pas seulement à la république, mais encore aux créan~
« ciers même opposans. » Questions de droit, tome 5 ,
v°. Lettres de ratification .
Il faut remarquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’Or«
«
«
«
�( 29 )
messon n’avoient été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d'insuffisance des deniers versés , et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d?Ormesson qu’au même cas
d’insuffisance. Le pourvoi des créanciers fut rejeté.
>
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lambert; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits, et en jouant sur les mots.
Quand ils ont poursuivi Sauzay pour les payer comme
leur débiteur, Natthey, son garant, a fait juger contre
eux qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru, équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un payement , mais plutôt d’un versement
pour un émigré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’émigré qui n’ont pas provoqué leur liquidation, et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payement.
Disons donc avec M. Merlin que si Natthey a payé
le prix de Chadieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n’est
pas pour le sieur de la Roche-Lambert qui n’avoit aucun
droit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
Ainsi, quand les créanciers de Tane pourroient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien, puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eux : par conséquent
ils sont payés; et, ne craignons pas de répéter, l’arrêté
�( 3° )
du 3 floréal an n , la seule loi de leur système, ne se
rapporte nullement à eux.
De là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,
et bien se garder de commencer une attaque directe,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras.
Mais qui a autorisé, on le répète, les créanciers de
Tane à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
individu, pour prendre inscription sur ses biens. Et certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 179 1 contre le
sieur de la Hoche - Lam bert, en avoient encore moins
en 1808.
A ppel des h é r it ier s
de
M ontmorin.
A leur égard, il n’est pas douteux qu’une obligation
personnelle de la part des sieur et dame de la RocheLambert a existé.
Mais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
Les héritiers de Montinorin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent concourir.
Le premier , en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
Le second, en prouvant que les acquéreurs postérieurs ,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur de la Roche-Lambeït,
n’ont pas payé.
Le troisième, en prouvant encore que la perte des
versemens faits pour la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la Roche-Lambert, à cause de son
émigration , que pour les héritiers de madame de Montmorin'; à cause, de sa. condamnation révolutionnaire.
Voilà ce que dévoient justifier les héritiers de Montr
morin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres,
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Trutat que les deniers devoient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir. .
Cependant les héritiers de Montmorin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la RocheLambert. En avoient-ils le droit?
D ’abord ils ne rapportent ni mainlevée , ni conseil*
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
,de première nécessité, quand il n’y auroit pas d’autre
obstacle.
Eu second lieu , comment prouvent-ils que les acqué
reurs postérieurs n’ont pas payé ?
Tout ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le prix ; soit h Trutat,
�( 32 )
soit aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à Sauzay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement aux créanciers pri
vilégiés sur la terre.
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la Roclie-Lambert n’a rien touché de ces 375000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des hypothèques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créanciers , de payer les 375000 francs.
Ce contrat judiciaire résultant des lettres, efface l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. aux créanciers
privilégiés seulement.
A son tour, le sieur Sauzay vend au sieur W allier ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers de Tane, l’ont obligé
de ue payer qu’à eux, qu’il délègue W'allier ou Natthey
à payer %55ooo fr. aux créanciers de Tane , opposans
aux lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposajis aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qu'au nom des premiers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’il verse le prix de sa vente.
Ensuite il les assigne, et lait juger contre eux, en qua
lité de créanciers de Tane} qu’il est libéré.
Et
�( 33 )
Et on appelle ce jugement res inter alios acta . On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’intérêt d’un émigré, parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Natthey. Mais, i°. il est
aussi question des héritiers de Montmorin et de la con
fiscation de leurs biens; car Natthey, qui cherchoit à
consolider sa libération, ne manquoit pas de justifier de
son mieux son versement, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’émigré plutôt que contre un autre, c’est que cet émigré
n’est ni partie, ni appelé à ce jugement dont on veut
..lui appliquer tout l’effet.
O r, vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose jugée , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un côté, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de commun, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au premier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eux la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payement.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur qui,
après u n e Nlibération jugée valable, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire, pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
h jugement
E
�(34 r
N’est-ce pas un abus du raisonnement" que de soutenir
de tels paradoxes? Si mon acquéreur chnrgé de vous
payer a fait juger contre von* qu’il avoit valablement
pavé, qui pourra dire, sans choquer le bon sens, que
je n’ai pas payé moi-même, et que je reste débiteur?
Il devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse où il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re* judicata pro veritate habetur ,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression , serait certainement réputé être en trèsbonne monnoie, si un jugement l’avoit dit :■ nul n’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libération , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué..
' J
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a prétendu si constante sur la défense des lois de
consigner sans offres préalables , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des citations nom
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions forcées, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles, puisque les créanciers et les héritiers de Tanene veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validitéde son payement.
E t , chose étonnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de l’an 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de la RocheLambert, après avoir laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion entre les héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de Montmorin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l’exception cedendarum actionurn , et ne leur diroieut
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perdu, et s’ils ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
Natthey, qu’ils expliquent donc pourquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi ils paroissent regarder
ses versemens de l’an 2 et de l’an 4 comme un chiffon
informe, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers de Tane, le sieur de la Roche-Lambert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugement, ils ont perdu tout recours contre
lui *, car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E 2
�( 36 )
lui dire : « Vous avez acheté Chadieu , et vous l’avez
« revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
« être payé par vous , qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le soutenir, on le trouve au contraire fort équitable ;
on se passionne même au point de dire que M. de la
Roche-Lambert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnement; c’est seulement dans
les lois sur les émigrés, quron a prétendu trouver la preuve
q u e res périt domino signifié, en langage de révolution,
que le~prix d’un immeuble dû à des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute é m ig ra tio n a péri
pour t émigré.
Pourquoi ajouter à la dureté des lois révolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cette subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des émigrés , et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent aux débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais qu’y a-t-il de commun entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte notarié, en 179 1? et un bien d'émigré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré,
�C 37 )
qui par des lettres de ratification a formé un contrat ju
diciaire avec des opposans non émigrés , et des débiteurs
d’émigrés?
Mais admettons en toute humilité qu’un républicole n’a
dû souffrir de rien, et que tout le sacrifice doit tomber
sur le proscrit, n’ÿ a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de Montmorin' soient ici à l’unisson avec les
créanciers de. Tane 5 pour dire que Vémigre seul doit
perdre le versement ?
Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
Natthey,, quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche —Lambcrt , seconds débiteurs, il
faudra bien, pour être conséquentarriver jusqu’aux
héritiers de Montmorin, premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M. de la Roche-Lambert a été sur la liste des
émigrés, madame de Montmorin a été condamnée révolutionnairemept : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article i eiv de la loi du 26 frimaire an 2 , dit que lès
biens des condamnés devoient être régis et liquidés, et
vendus comme'les biens des émigrésLa seule réponse qu’on ait pu* faire à cette observa
tion, a été de dire que madame de Montmorin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu;
�( 38 )
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
Auvergne consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état où il la trouve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le Natthey, de Nyon,
qui a consigné à Saint-Amant?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
Natthey, sur la vraisemblance de ses versemens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lambert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur quelqu’un la perte de ses versemens, il
est évident que ce ne peut être sur celui à qui il auroit
profité ^ c’e s t-à -d ir e , aux héritiers de Tané, comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du prix, puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de préférer pour la
perte les sieur et dame de la Roche - Lambert , et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W allier; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur ou l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
dowino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à eu x, la somme consignée
�( 39 )
n’étoit pas pour eux. Qu’elle ait été versée pour les hé
ritiers de'Montmorin ou pour les créanciers de Tane,
c’est toujours aux hér'tiers de Montmorin que la somme
"devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
• :
Gomment'donc a-t-on pu. espérer de prouver, qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la Roche1Lam bert, qui n’étoient propriétaires de cette somme
à aucun titre et en aucune qualité , pas plus qu’ils ne
l’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si ta libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national,‘ c’est le vendeur séquestré1qui se retrouve
-passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur - et qui a donné pouvoir.à un tiers
de verser pour lui.
*
Y- .
Cum jussu meo id quod mihi debes sohns creditori
meo , et tu à me et ego à creditore meo liberor. L , 64,,
ff. De sohitionibus..
• .. r . ?
Souvenons-nous encore que M. Merlin a prouvé qu’un
versement fait à la caisse du séquestre, étoit censé être
fait aux créanciers , et que c’est absolument comme si
ces créanciers avoient eux-mêmes reçu et donné quittance.
Tout ce qu’il a dit se* rapporte parfaitement aux hé
ritiers de-Montmorin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils-assurent
que la somme étoit versee..
Un autre moyen s’applique' encore aux héritiers de'
�( 4° )
/
Montmorin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un émigré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
Or, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il-y a extinction de la dette par con
fusion. (Code civil, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 10 , art 17. )
Ainsi, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
Montmorin sont payés par Natthey , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Iis ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 1 1 , pour revenir de la nation à
l’émigré, puisque la nation les a traités de même, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V oilà, n’en dou
tons pas , ce qui est démontré jusqu’à l’évidence.
A
p p e l
c o n t r e
l e
sie u r
.
A iyiéd ée d e T a n e .
Le jugement de Clermont n?est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W allier; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roche-Lambert à payer la créance du sieur
Amédée de Tane, qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa vente, il est constant que le sieur Santenas
•w’a plus d’action ; car le sieur de la Roche-Lajmbert a
laissé
�( 4T )
laissé entre les mains dç Sauzay une somme suffisante
■pour payer tout le prix par eux d û , c’e s t - à - d ir e ,
3y5ooo fr. , quoiqu’ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
Au reste, il suffit dé renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà dit , et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clermont n’a pas voulu pro
noncer , par une autre inconséquence.
A ppel contre le s ie u r N a t t h e y ,
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la Roche-Lambert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la Roclie-Lambert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooq francs aux créanciers de
Tane , opposans aux lettres de ratification prises par
Sauzay , ou à consigner après le sceau de ses lettres.
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable avec les créanciers ; qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu’il dise, j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�(4 0
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le prix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances 3 il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lui , de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement délégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-monnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de.payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réduction, et ont rigoureusement
exigé qu’ils rapportassent les quittances des créanciers
délégués p a rla vente , même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel noyant rien payé lui-même, seroit privé
de tons moyens de défense.
E st-il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
Roche-Lambert à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payement, et qui, malgré un jugement,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o ch e-L am bert sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de Tane sur
leurs doutes, et de leur apprendre si le premier verse
ment de 355ooo fr., que Natthey dit avoir fait à Saint-
�C 43 )•
Amant le 26 floréal an. 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i 5 pluviôse an 4?
en appelant les créanciers opposans ?
Aucun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du i5 pluviôse an 4 est un versement ou
un compte, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit mois , lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits ; et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour sav.oir ce que Natthey a payé réellement.
Le sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la régie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à rendre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui compter 366000 francs, il faut au
moins convenir qu’ une contrainte n’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin sera ,
après le sceau des lettres de ratification ; mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme mandataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son payement; et il
ne s’cn dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son mandant, car il est obligé sans
exception, ou de faire valoir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclamation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lambert de l’effet de leurs
recherches.
Que si le sieur Natthey prétendoit, ainsi qu’il en a
menacé, s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i°. Parce que lui-môme a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen péremptoire sur la cause
actuelle.
20. Parce que lia demande en garantie a été jointe,
et que-loin d’attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. P a rc e que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel ; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont t o u j o u r s statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (r); l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la Boche-Lam bert dans ses
2 1 ju in 1 8 0 8 .
(r) « J ’ai reçu votre lettre, Monsieur, et je ne veux pas un
« seul instant vous faire attendre ma réponse.
cc J ’ai d abords été fort surpris des inscriptions que les créan
ce ciers de Tane ont prises sur vos biens ; j’ai dû ensuite me
« souvenir qu’ils avoient précédemment regretté de n’avoir pas
cc pris cette voie d’ abord, et de s’être engagés dans une autre
cc voie qui ne leur a pas plus réussi que celle-ci ne peut leur
« promettre du succès. Vous croyez d’avance, je l’espère, que
cc toutes choses sont parfaitement en règle vis-à-vis d’e u x ..........
cc Vous avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai pro« priétaire de Chadieu. D ’un mot je vous tirerai dô toute inquié<c tude. I l n e t i e n d r a , q u ’ a vous q u e N a t t h e y o u m o i , a v o t h e
<C CH OIX , OU TOUS DEUX R É U N IS , N E VOUS OFFRIONS DE NOUS SUI3S-
cc
cc
t i t u e r a vous d a n s c e t t e a f f a i r e : je vous en passerai acte
public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is, toutes choses sont parfaitement en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc Voilà un premier problème résolu, à votre satisfaction sanste doute. Vous v o y e z q u e N a t t h e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
cc QUE M EM E NOUS VOUS O FFR O N S, SOUS N OTRE GARA N TIE ET CELLE
CC DE CH AD IEU , DE NOUS SUBSTITUER A VOUS..................................
? ce
Vous êtes encore dans l’erreu r, quand vous supposez que
« les créanciers de Tane avoient fait opposition aux lettres de
te ratification obtenues par M. votre père sur MM. de Tane.
cc
ce
Fayon s’inscrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ciers non unis , et ne fit point inscrire l’union............. \\ n’y
« eut aucun acte conservatoire de la part de l’ union.
�(
4
6
}
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M. de
Batz, représentant Natthey , et M. de la Roche-Lambert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre
<c votre p è r e , l’ union fit opposition , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4, il y eut des lettres de ratification
cc prises sur Sauzay, et l’union eut le tort extrême de ne pas
cc prendre d’inscription, ni faire d opposition.
<c Us n’ont donc que celle du 2 2 décembre 17 9 1 ; mais il y a
cc
condamnation contr’eux sur ce point,
cc
tance très-âpre et trés-vive qu’ils avoient commencée
cc
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils attaquoient, dans Sauzay, W allier et N atth ey, et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de 11’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre famille, au lieu de se
cc
faire condamner sur leur inscription de
ce
v r a i, je n’aurois pas imaginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient imaginé de finir par où ils
cc
cc
cc
à
l’occasion de l’ins-
17 9 1.
M ais,
Paris
à
à
dire
auroient voulu commencer. Mais les actes subséquens, leur
<c liquidation, leur payem ent, sont tels qu’ils ne peuvent chercc cher qu’à e f f r a y e r e t à a r r a c h e r q u e l q u ’ a r g e n t , du moins de
cc Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos biens, ils en
cc ont également pris sur Chadieu...................Instruisez-moi de
cc
tout ce qui s’est passé d’eux à vous dans cette insurgence, et
cc
vous aurez de ma part, ou par moi, instructions parfaites. Je
cc
vous répète que m’identifiant à N atth ey, je me mettrai avec
cc
ce
plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment a me
faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s il y a
ce
quelque demande formée. Voilà de ma part, j espère, fran-
« chise, loyauté autant que vous pouvez désirer, et plus que
** vous ne pourriez exiger.
“ Keccvez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�( 47 )
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
forme; car, d’après les principes, 011 contracte valable
ment par epLstolam a ut per nuntium.
«attach em en t, et veuillez le faire agréer àJM . votre père.
« <Signc De Batz.
« Dès que j’aurai votre réponse, je partirai ou vous écrirai
« sur-le-champ. Je ne suis nullement in qu iet, parce que je
« connois les faits, et qu’ils sont réguliers. :»
Paris, 9 juillet 1808.
« Je n’ai pas perdu de tem ps, Monsieur, à prendre tous les
cc rëriseîgnernens et toutes les instructions utiles contre les créan-
« f.ciers de'Tane. J ’aurai une consultation des plus habiles gens.
« L/affàireparolt inattaquable par les créanciers de Tane. II est
et heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
« u tile , surabondance de précaution, pour acquitter à la fois
cc vous et moi, et pour mettre dans tous les sens les créanciers
cc en demeure. Vous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces. . . . . . . . .
ec
c<
cc
cc
«
M. votre père n’ auroit pas dû prendre ins
cription sur Chadieu, surtout sans m’en prévenir : il n’auroit
pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
créanciers. Son intérêt est de faire cause commune avec
Chadieu : quiconque lui dira le contraire se trompera , l’induira en erreur. Au reste, je lui demande, et j’espère qu’il
« ne me le refusera p as, de vouloir bien faire rayer 9on ins
ec cription au bureau de Clermont. J ’ai besoin, pour ma seule
« délicatesse vis-à-vis de deux personnes à qui j’ai fait deux
emprunts, d’avoir leur certificat d’inseription avant le vôtre,
parce qu’agissant de bonne foi et d^entu-rre confiance en m oi,
ce ils ont reçu dans leur acte ma parole d’honneur qu’il n’existoit
�-
,
(
4
8
}
M. de Batz, représentant Naüliey, a toujours continué
<T;igir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de Laroche-Lambert la consultation
très-détaillée de MM. Poirier et Bellard (annoncée dans
la dernière lettre), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
Il y a donc im p o s s ib ilit é de délier le sieur INÎatthey de
son nouvel engagement, qui lève tous les scrupules des
lois de rémigration, lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
cc j)as d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
cc donner en toute vérité , et il se trouve que la vôtre existoit
« le jour même où j’affinnois qu’il n’en existoit pas , ou du
cc moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de fa it , et
cc celle de deux pauvres petits créanciers que j ’ai fait condamner
ce à Riom , et que j ’esp ère faire ra y e r à tous momens. M. votre
cc p ère , après avo ir fait ra y e r ce lle q u ’il a déjà faite , pourra
cc au m ê m e in s ta n t , s’il le juge à p ro p o s, la faire rétablir. Je
ce n’y suis que pour ma délicatesse seulement, et j ’espère qu’il
ce 11e me refusera pas cette satisfaction légère, qui, dans aucun
cc cas , ne peut lui être dommageable, et qui a été pour moi
w le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc parlant.
ce Au surplus, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M . Vautrin, et je m’en rapporte à. c e qu’il vous conseillera
cc à cet égard.
cc Je vous renouvelle , Monsieur,
1 assurance de mon dévoue-
cc ment à vos intérêts, et de mon bien sincère attachement.
u S i g n e D e B a tz . »
II
�( 49 )
Il'n e reste plus qu’un mot à dire sur l’effet de "cette
garantie, s’il falloit en venir à elle ; il est réglé ,par le
Code civil, qui s’exprime ainsfÎ
: Article 114 2 . c< Toute obligation de faire se résout en
« dommages-intérêts, en cas'de non-exécution delà part
« du débiteur. »
Article 1184. « La condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été exécuté, a le choix, ou de forcer l’autre à l’exé« eution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en
« demander la résolution avec dommages et intérêts.
« La résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
Le sieur de la Roche-Lambert a conclu à la résolution
de la vente de 179 1 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi' ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui demande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
que le sieur de la Roche-Lambert dut être obligé de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a point élevé une
prétention aussi immorale; il est vraisemblable qu’il s’en
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitime : ainsi , à son
égard, il suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payemens, puisqu’il s’y est engagé, ou qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendeur soit
à l’abri de toutes recherches.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R I O M , de l’ imp. de T H I B A U D , imprim. de la C o u r impériale, et libraire,
rue dej T a u le s , maison
L a n d r i o t. —
Juillet 1 8 1 0 ,
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
receveurs de l'enregistrement
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0413
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
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assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
receveurs de l'enregistrement
-
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b25bc707f0b3860b76157e7217997a10
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MÉMOIRE
POUR
leM A I R E etlesH
abitansdeVic-le-Com
te
;
C O N T R E
Le Sieur N A T E Y ? de N yon , m Helvetie.
i
L e sieur Natey veut dépouiller la commune de V ic
de trois communaux , qui lui ont été dispulés jadis par
tous les Seigneurs voisins, mais qu’elle a su conserver
malgré leurs efforts, par des transactions et un arrêt
souverain.
Une possession immémoriale se réunit à d’aussi puissans titres : la commune de V ic n’a jamais plaidé qu’en
défendant.
L e sieur Natey 'commençant un nouveau procès,
n’a pas voulu en attendre le résultat: il a fait planter
et défricher une partie des communaux de V ic , par
voie de fait, et sans en demander l’autorisation à la
justice.
A
�( * )
L ’instant qu’il a choisi, pour renouveler des pré
tentions jugées et abandonnées depuis 160 ans, est
remarquable.
C ’est sous l’empire de la loi du 10 juin 1793? qui
assura et restitua même aux communes les propriétés
de celle nature ; et le sieur Natey n’est lui-même
acquéreur de Chadieu que depuis cette loi.
Cependant c’est sous de tels auspices, et contre ses
propres titres , que le sieur Natey a tenté des innova
tions brusques et attentatoires, dont ses prédécesseurs
n ’avaient même jamais marqué l’intention dans le plus
lia ut point de leur splendeur.
Les liabitans de Vie ont un intérêt majeur a repous
ser ces prétentions, et leur défense ne sera pas un
essai. Les armes qui ont fait succomber les Canillac, sont
encore dans leurs-mains; et si le sieur Naley est plus
opiniâtre qu’e u x, il est à croire qu’il ne sera pas plus
invincible.
F A I T S .
La commune de V i e - l e - C o m t e est séparée de
Chadieu, Autezat et Chalus-les-Bussière, par la rivière
d’Allier.
Entre Chadieu et la rivière est un pacage appelé
La Vergiere.
Entre Chadieu et Chalus, sur le bord de la même
rivière , est un autre pacage appelé Le grand Gachier,
aliénant, de jour, à la Vergière, séparé du territoire
de Chalus par le ruisseau appelé de Charlet. Enfin ce
�(3)
même pacage se prolonge de l'occident à l'orient ; et
la parlie orientale , séparée de la première par un
chemin, s’appelle Le petit Gcicliier, toujours resserré
en ire le terri loire de Clialus et la rivière.
L e ruisseau de Charlet a toujours été la limite de
la paroisse de Vic-le-Comte ; et s'il paraît extraordi
naire que le territoire d’une commune franchisse une
rivière, la position topographique des lieux peut en
faire soupçonner la cause. Jadis l’Allier dut avoir son
cours à l’extrémité méridionale et occidentale des Gachiers et de la Vergière. Après une inondation qui couvrit
ces pacages de grèves encore existantes, le fleuve, chan
geant son lit, laissa la majeure partie de ces pacages sur
la rive gauche, et cet atterrissement considérable ne dut
pas être abandonné par les habitans de Vic-le-Comte.
Il est aisé de concevoir cependant combien cet acci
dent pouvait leur nuire. Les Seigneurs voisins allaient
être jaloux de ne plus être limités par la rivière, et le
moindre mal devait être une promiscuité de pacage,
qu'alors il y avait peu d’intérêt d’ëmpêcher.
Une première transaction du 2 juillet i 5 i i , atteste
quelles étaient alois les prétentions du Seigneur de
Chadieu (Anioine Debord).
Il avouait bien que le grand Gachier et le petit Gachier
étaient situés l’un et l’autre en la justice et châtellenie
de Vic-le-Comte; mai; il prétendait en être investi par
M M les comtes de Boulogne et d’Auvergne, seigneurs
de Vic-le-Com te, offrant le justifier.
D e leur côté les consuls et habitans de Vic-le-Comte
A 2
�(4 )
prétendaient que lesdits Gachiers leur appartenaient en
toute propriété et seigneurie, et qu’ils en avaient: joui
de tout tenis. Ils prétendaient encore empêcher le
seigneur de Chadieu d’y faire pacager ses bestiaux ^ vu
qu’il était habitant en autrui ju stic e , c'est-à-dire, en
la justice d’Aulezat.
Sur quoi deux procès étaient nés pour raison desdits
droits de propriété et de pâturage.
L e seigneur de Chadieu * ayant déjà perdu son pro
cès devant le premier juge, et encore sur appel en la
sénéchaussée, était appelant au parlemen t lorsqu’il tran
sigea j et voici les termes de la transaction :
« C ’est à savoir que dudit grand Gachier ci-dessus confiné
lesdites parties jouiront comme on a accoutumé par com m un,
par ensemble, et y faire pâturer tout bétail, testons, pourceaux et
oyes que l’une partie ni l ’autre n’y pourront faire pâturer en
moins que ce soit et est leu et permis èsdits habitans de V ie ,
le tenir en deff'ense de tout .bétail quelconque depuis NotreDame de mars jusqu’au 16 du mois de may ou autre tems plus
ou moins lo n g q u i l sera avisé par ladite commune de V ie
sans que durant ledit tems un ni l’autre y puisse faire pâturer
chacun b é ta il, si ce n’est après ledit tems deffensable passé et
selon la délibération de ladite commune et en telle qualité que
lesdits habitans de V ie estimeront : sera permis èsdits seigneurs
de Chadieux en jouir et user comme dit est : et au regard du p etit
Gachier lesdites parties en toute saison de l’an avec leurs bes
tiaux quelconques soit bouine, chevaline et pourceaux , oyes
et autres quelconques comme pâturage commun entre les par
ties sans ce que lesdits consuls et habitans de V ie le puissent
mettre en deiïense ni limiter quant auxdites qualités de bestiaux
®i hon ne semble èsdits seigneurs de Chadieux. Toutesfois ne
�( 5 ’)
pourront lesdits Seigneurs ni leurs métayers faire palurer èsdits
Gachiers ni aucun d’eux autre bétail que ceux qui appartien
nent èsdits seigneurs de Chadieux ou que lesdits métayers
tiendront à cheptel d’eux sans aucune fraude sans que lesdits
y puissent mettre bétail c£autrui demeurant a u h e ju stice que
dudit V ie ou celui que leurs métayers tiennent à cheptel d’eux
ou à leur profit. Et au regard du tail et arbres desdits Gachicrs
qu’est du pied demeurera et appartiendra en propriété et pos
session et seigneurie èsdits seigneurs de Chadieux sans que lesdits
consuls et habitans y puissent prétendre aucune chose, et par ce
moyen seront y ceux seigneurs de Chadieux payer la censive
cleube à cause de ce chacun an à la dame comtesse de Boulogne
et d’Auvergne. Et ne pourront lesdits seigneurs de Chadieux
planter èsdits Gachiers de nouvel aucun arbre, vrai et que
aucun des arbres anciens'de pied planté ou qui ont été plantés et
ci-devant, soit morts et arrachés, pourront replanter d’autres
arbres sans y faire aucun autre plant nouvel,.etc. Fait le 2 juillet
f l 5 i 1, etc. »
Ainsi le lot de chacun est bien expliqué ; par cette
transaction, le seigneur de Chadieu a pâturage dans
les deux Gachiers, et la propriété des arbres existons,,
sans pouvoir en planler d’autres.
Tous tes actes de propriété et d’empêchement res
tent aux habitons de Vie-le-Comte (1).
En 1 536 , le sieur Jacques de Beaufort, seigneur en
partie de Chalus-les-Bussières, voulut se permettre de
retirer des épaves flottantes dans la rivière d’A llie r, de
(0
Ic i le sieur N a t e y place un acte a p o c ry p h e de i 63 i , qui étend la justice
de M o u t o n , C h ad ie u et C halu s jusqu’ à P A I l i e r , et qui réduil les habitans de
V i e , de leur consentem ent, au pacage dans leurs propres c o m m u n a u x ; cet acte
d ém e n ti par tout ce qui va suivre , sera rapporté c i - a p r è s , pages 22 et
�( 6 )
laquelle il e s t séparé parles deux Gachiers, comme nous
l ’avons dit.
L e procureur-général du comté d’Auvergne le fit
assigner , sur le m olif que M. le comte d’Auvergné
était seigneur et possesseur de toute la rivière d’Allier,
.d’un côté et d’autre, tant que dure ledit comté.
De sa part, le seigneur de Chalus prétendait que la
limite de ses justices des Martres} et en partie de Chalusles-Bussières,, s’étendait jusqu’à la rivière d’Allier qui
en était la séparation.
Sur quoi, les parties ayant compromis transigèrent
le 8 décembre 1542, et il fu t convenu q u au comte
cVAuvergne demeurerait et appartiendrait l’entière j u s
tice, haute, moyenne et basse de Ladite riçière d A llie r ,
d
’u n
côté
et
d ’a u t r e
.
Cette transaction, passée à B iom , fut honorée de
signatures bien respectables , MM. M ich el B r a n d o n ,
lieutenant-général, J ea n de Sirm ond et A n n e D u bou rg
.
Après cette transaction qui réglait tout à la fois le
territoire du seigneur de Vic-le-Comte et celui des liabitans, il ne paraît pas que pendant un siècle il y ait
eu de procès.
Mais le i 3 décembre 1 6 2 7 , François BeaufortCanillac acquit du sieur Laguele la terre de Chadieu,
et bientôt les procès recommencèrent.
Cependant son propre contrat d’acquisition était
bien limitatif et bien clair.
�(7 )
Il achète le lieu de Chadieu« consistant en nn domaine; con
te finé par le pacage de V ic -le -C o m te , appelé la Vergière ,
« de jour ;
« P lu s, un pré au terroir Darson , confrontant au G a ch ier,
de bise ;
«
«
«
«
« Plus, un autre pré jouxte audit G a ch ier, de bise;
« Plus, le droit de pacage dans les susdits Gachier et Verg iè r e , et quantité d’arbres connus sous le nom de pibles et
autres, étant le long de k fiivière d’A llier, depuis le bois de
Macliont jusqu’au bateau de B r o la t, lesquels appartiennent
audit Cliadieu ;
« Plus, un pré dessus ledit Gacîiier, jo u x t e ledit G a ch ier,
« de bise ;
' ■
,
Voila donc exactement ce que le prédécesseur du
sieur Natey acheta, et ce qu’il n’acheta pas.
En i 6 3 3 , le sieur de Canillac, plus jaloux des com
munaux depuis son acquisition de Chadieu1., voulut
faire de nouveaux efforts, en qualité de seigneur, haut
justicier de Monton; et malgré la transaction de 15 4 2 ,
il envoya ses officiers de justice tenir assises sur le com
munal des Gachier.
Les officiers de Vie ignorèrent cette hostilité furtive ;
ils tinrent aussi des assises dans le me me local, en i6327
comme ils en avaient tenu depuis et comprise l’année
I 474 *
Mais en i 6 3 6 , le sieur de Canillac fit saisir les bes
tiaux de deux habitans de Vic-le-Gom te, et un procès
s'engagea.
En 1637,
dame Peloux? veuve Beaufort, tutrice
�.
.
( 8 ')
de ses enfans, obtint une sentence en la sénéchaussée
d’Auvergne, qui lui accorda la possession et saisine dii
grand et petit Gachiers, tant pour le droit de justice,
que de pacage. 11 y eut appel de cette sentence et des
assises , au parlem ent, où le procès fut appointé au
rapport de M. de Benoise, le i 3 août 1640.
> '
L à , les habitans de Vie se plaignirent de ce que la
dame Peloux , qui intentait un procès à cause de sa
justice de Mon ton et les Martres , ressort de Riom ,
avait affecté de les assigner devant une sénéchaussée,
intéressée au procès à cause de son ressort , et avait
obtenu line sentence, au préjudice des récusations.
Les habitans de Vie soutinrent être propriétaires des
Gachiers,, d'après la transaction de
i 5 ii
’ et d’après
le titre même d’acquisition de Chadieu en 1627 , qu’ils
opposèrent à la dame de Canillac, auxquels titres ils
ajoutèrent la possession paisible qu’ils avaient des pâ
turages ¿ et le droit de les rendre déferisablès.
Enlin ils firent remarquer que les officiers de Monton n’avaient exercé aucun acte de justice sur les com
munaux, si ce n’est depuis le procès intenté ou ¿1 la veille
des’intenter ; et dirent que si quelques témoins, justicia
bles du sieur de Beaufort, avaient déposé que sa justice
s’étendait jusqu’ci la rivière'd’Allier, ces dépositions,
détruites d’ailleurs par les titres des appelans et par
leur enquête, n’étaient dues qu’à l’autorité du sieur
de Beaufort , sénéchal de la province, gouverneur de
Vic~le-Comte et de tout le comté d’Auvergne.
�( 9 >■’
Sur ces moyens., publiés dans un facium imprimé, là
dame de Beaufort ne se dissimula pas les conséquences
de sa propre acquisition de 1627.
En conséquence, elle prit le 11 août 1 6 4 0 , des lettres
de rescision contre cette vente, et en demanda l’en
térine ment.
Pour n'être pas isolés^ et sans protections, les habitans de V ic-le-C o m te intéressèrent à leur procès le
sieur de la Rochebriant, seigneur de la Chaux, à qui
ils concédèrent pour cela quatre-vingts pieds d’arbres
des Gacbiers ; le seigneur de la Chaux intervint au
procès, il réclama le droit de pacage dans les Gachiers,
comme ayant son fief dans la justice de Vic-le-Comte?
et il réclama aussi les arbres à lui concédés.
L e 17 mai 16 41, arrêt définitif ainsi conçu :
Entre les consuls et habitans de V ie - le -C o m te , appelans ,
d’ une part ;
« E t Marie de Peloux, veuve de François de Beaufort de
. « C a n illa c, seigneur de M onton, les Martres, Chalus-les-Bus« sières et Chadieu, tutrice de leurs enfans , d’autre part ;
« Et Annet de Larocliebriant, seigueur de la C hau x, dénian
te deur en intervention , à cause de sa terre de la G liaux, sise en
« la justice de Vic-le-Gomte.
« V u etc. lettres de nous obtenues par ladite P e lo u x , le i r
« août 1640, pour être relevée des clauses apposées dans le
« contrat d’acquisition fa ite par ledit Beaufort son mari , de
« ladite terre de C hadieu, le i 3 décembre 1627;
Notre dite Cour, par son jugement et arrêt, faisant droit, tant
sur le procès par écrit, intervention, q u ’appellations verbales desd.
consuls, desd. jugemens des i 5 m a i, 4 juin 1687>e* de toutce cjui
s’en est suivi, e n s e m b l e des assises tenues par lesofliciers de Mon-
B
�(. IO )
to n , des 21 mai i 63 s et 16 mars 1 638 , et dudit de Larochebrianf,
de ladite sentence du 5 juin 637 >sans $ arrêter auxdiles lettres
des i i août 640 et 20 avril dernier , a mis et met les appella
tions , sentence , et ce dont a été appelé, au néant, sans amende ;
en émendant, a maintenu et gardé, et maintient et garde ïesdits
consuls et Larocliebriant en la possession, saisine et jo u issa n ce
des grand et petit G a chier, tant pour le droit de justice, que
de pacage ; ordonne que lesdits consuls pourront tenir ledit
Gachier en défense de tout bétail depuis le 25 mars jusqu’au i 5
mai ou autre iems plus ou m o in s, sans que les uns ni les autres
en puissent jo uir, sinon après le teins défensable expiré , dans
lesquels grand et petit Gachier , ladite dame de Chadieu et de
Chalus-les-Eussières et ses métayers pourront sans fraude en
voyer pâturer leurs bestiaux ,* et sur les appellations verbales de
ladite Beauiort, a mis et met les appellations au néant ; ordonne
que ce dont a été appelé sortira effet • condamne ladite B ea ufo r t aux dépens de la cause principale , sans dépens desdites
lettres et causes d’appel, et sur le surplus de Vintervention du
dit de Larocliebriant, concernant le reta il et coupe des arbres
sis au grand Gachier , les parties articuleront plus amplement
leur demande par-devant le juge de JRiom, autre que celui dont
est a p p e l, escriront, produiront, bailleront contredits et salvation , pour le tout vu et rapporté, être ordonné ce qu’il appar
tiendra pour raison , sans dépens de ladite intervention pour
moitié le surplus réserve, la taxe des adjugés à notre dite Cour
réservée, si mandons , etc. D onné-à P a r is, en notre parlem ent ,
le 17 mai 1641, signé Guyot ; collationné h l’original, par moi
conseiller-secrétaire du roi et de ses finances, signé Henry.
Cet arrêt jugeait donc ce qui élait de l’intérêt des
habitons de V ic - le - C o m t e ; car quant au retail des
•arbres, qui n’avait élé qu’un prétexte d’intervention*
il leur importait peu qui du sieur de la Chaux, ou de la
dame de Beauiort en demeurai le maître.
�( ÏI )
Les habit-ans de V ie, restés propriétaires, payèrent
le droit d’amortissement, aussitôt après l'arrêt de 1641.
- Vingt-quatre ans de tranquillité prouvèrent que les sei
gneurs de Chadieu étaient forcés de respecter cet arrêt.
.Mais en i 665 ces vexations féodales, qui appelèrent
pour l’Auvergne l’attention du, Souverain , n/éparN gnèrent pas les habitans de Vic-le-Comte, et ce que
le sieur de Canillac n’avait pu obtenir de la justice, il
essaya l’arracher par la violence (1); il voulut chasser
(1) D écla ra tion du, R o i , d u 3 i ao û t i 665 , pour Rétablissem ent des
grands jo u r s en Auvergne» « L O U I S , etc. N o u s som m es avertis que le
« mal est plus grand dans les p r o v in c e s éloig nées de notre C our de P a r le m e n t,
« que les lois y sont m é p risé e s, les peu ple? exposés à toutes sortes de vio« lences et d ’oppression^ que lesg eutilsliom m es abusent souvent de leur c rê
te dit ; -que'la-faiblesse des officiers de justice est si g r a n d e , q ue po uvant
» résister à leurs ve?iation s, les crimes d em e u ren t i m p u n i s , etc.
R èglem ent p u b lié à C lern ion t , le i . er octobre i 665 . « L O U I S , — L e
« principal fruit que nous espérons de l’ établissement de notre C o u r des grands
« jom àest le soulagemeut-de nos sujets q u i, pendant la licence des g u e rr e s, se
« sont trouvés accablés sous l’autorité et violen ce des p lu s p u issa n s de la
« province , non-seulement p a rla n églig en ce ou la faiblesse des prem iers juges,
« mais en core par la m alice des a c c u s é s , qui se sont servis de toutes sortes
« d’artifices pour rendre les p r o c é d u r e s , faites contre eu x , im m oi telles 5 . . . .
^ détournent et égarent les p r e u v e s , etc.
A rrêt de règlement du 9 ja n v ie r 1666. « Sur ce qui a été rem on tré qu’ il
« se com m et dans la prov in ce d’ A u v e r g n e plusieurs a bus..........L e s seigneurs
v réduisent les r e d e v a b le s à l’im possibilité ; . . . . les contraignent à la banna« lité
sans forme de justice exigent des am end es ; . . . et quand il y a plainte,
« font payer l’am en d e , et f o n t cesser les poursuites . . . à tous lesquels désor« d r e s i l était nécessaire de p o u r v o i r , etc.
N o ta . Procès-verbal. . . . « M . le marquis du P on t-d u -C h â tea u de la m aison
* de C a n i l l a c , suivi d’ un gros de gentilsh om m es de m a r q u e , tous à c h e v a l , se
« présente , après avoir mis pied à te rr e , devant le carosse de m onseigneur le
« président, et lui fit c o m plim en t. ( C ’ était J a c q u e s de B e a u fo rt , (ils de la dam a
« de P e lo u x ).
B a
�( 12 )
les habitans de V ic - le - C o m t e de la rive gauche de
¡ ’Allier. ,
Ceux-ci en portèrent leurs plaintes à MM. les commis
saires des grands jours ; une des premières opérations de
cette Cour fut de décréter le s.r Beaufort de Canillac de
prise de corps, et sa femme d’ajournement personnel.
L e 3 o janvier 1666, un arrêt des grands jours les
mit en liberté provisoire 3 mais à la charge de se re
présenter à la première assignation, faute de quoi, leurs
biens seront saisis et annotés. Mais les grands jours
cessèrent deux mois après; et le sieur de Canillac, pour
se venger, accusa les habitans de Vic-le-Comte d’avoir
tenu des assemblées illicites, et d’avoir coupé les arbres
des Gachiers, seule propriété qu'il se crût en droit d'y
réclamer.
Sur cette plainte, le sieur de Canillac fit décréter
quelques habitans de Vic-le-Comte, mais ils se pour
vurent par appel au parlement.
L e 19 avril 1666, arrêt du parlement qui ordonne
que dans le mois, le s.r de Canillac et sa femme seront
tenus de se représenter a u x pieds de La Cour, pour
être procédé au jugement du procès, faute de ce faire
dans ledit délai, seront pris au corps, et conduits pri
sonniers en la conciergerie du Palais, si appréhendés
peuvent être, sinon ajournés à son de trompe, et leurs
biens saisis et annotés; et cependant a mis et met Les
habitans de V ie-L e- Comte en La protection et sauve
garde du R o i et de La Cour.
Les vexations du sieur de Canillac eurent donc leur
�( i3 )
térme ; la Volonté d'un gouvernement ferme devait
être respectée , et cent ans de repos pour les habitans de Vic-le-Comte furent l’heureux résullat de cette
sévérité.
'
Non-seulement ils ont joui cent ans sans trouble*
mais à chaque fois que l’occasion s’est présentée de
maintenir leurs droits, ils les ont fait valoir et ont su
les conserver.
En 1730 , une femme décéda à Chalus-les-Bussières,
et voulut être enterrée à Vic-le-Comte. .
Son curé porta le corps ju sq u 'a u ruisseau de Charlet
(qui borne les deux Gachiers, et qui leur est donné
pour limite dans la transaction de i 5 i 1 ); et le curé de
Vic-le-Comte vint le chercher à ce ruisseau.
L'acte mortuaire dit que le corps fut enlevé au bord
du ruisseau, voisin de ladite maison (Clialus), Limite
desdites deux paroisses.
En 1 7 3 6 , un troupeau de moutons du domaine
Darson, dépendant de Chadieu, fut saisi par des ber
gers de V ic - le - C o m t e ; les régisseurs de Chadieu en
demandèrent la m ain -levée, offrant de prouver que
ces moutons ne pacageaient pas dans les Gachiers ,
mais bien dans ta justice de Chadieu.
En 17 6 5, les bergers de Vic-le-Comte saisirent en
core des moulons appartenant à des propriétaires de
la paroisse d’Autezai (qui comprend Chadieu); ceuxci demandèrent main-levée des moutons pris, disent-ils,
�( )
I4
dans le pacage des Gachier appartenant a ladite ville,
aux offres de les représenter, et de payer les frais de
pâture.
Cependant si les habitans de Vic-le-Comte n’étaient
point inquiétés par le propriétaire de Chadieu, leur
tranquillité était mënacée par une sourde intrigue dont
ils n’ont découvert les traces que cinquante ans après.
L a maison de Tanne possédait Chadieu et Menton.
Sans doute les transactions et arrêts des siècles précédenslui ôtaient tout espoir de succès dans une attaque
directe; mais que iit-on?
M. le le duc de Bouillon avait acquis le comté d’A u
vergne par échange de sa principauté de Sedan.
L e sieur dé
de demander
Comte, et de
ensuite on lui
Tanné proposa aux agens de ce prince
le tirage des communaux de V ic-lese "faire adjuger les Gachiers, lesquels
céderait par arrangement (i).
( i ) C e r e n seign em en t résulte d ’ un rapport lait en 1774, au conseil de B o u illo n ,
dans lequel 011 rend com pte de toutes les préteutioas des seigneurs de C h a d ie u
aux c o m m u n a u x des G a c h i e r s , sur les pièces qui furent sans doute fournies
par la maison de T a n n e .
On y m en tion ne une lettre écrite le 4 octobre 1750 , par le sieur de T a n n e ,
qui disait que M . le d uc de Bouillriiv aurait ce terrain q uan d il v o u d r a it;
que rien 11e lui serait plus facile que d’ obtenir un arrêt du c o n s e il, et que
dès que son A lte sse en aurait la p r o p r i é t é , il s’en acco'mmod#rait et céderait
quatre-vin gt-dix septlers de b lé qui lui étaient dus dans la terre de V i c le-C om te ou de M irefleur. I l ajoutait « il s’en faut des d eu x tiers que le terrain
« dont est question v a ille l’offre que je fais ; mais j’aurai l’ho n n e u r de vous
« dire n a t u r e l l e m e n t , que de v o ir les bestiaux de C6 S ccinciillGS pacager à la
« porte de mon, c h â t e a u , m e d é p l i a i t infinim ent ».
D a n s une lettre du 10 d é c e m b r e s u i v a n t , le sieur de T a n n e d is a it , « c e
« qu’ il y 4 de certain , qu elqu e ch ose jqn’il puisse y a voir , la c o m m u n a u té ne
« saurait refuser le tievs de ces p a cag es, tout S eign eu r étant en droit de prendro
« son tiers des c o m m u n a u x situés dans sa justice».
�f( i5 ')
• Sans doute cette intrigue réussit Vcar le' 29*janvier
-i 7 5 2 ? il fut/obtenu? sous le nom de M. de Bouillon,
nne commission pour assigner les habitans de Vic-leC om té/ à.l’effet de-venir h partage des communaux
:et Gachiers^-pour lui en être délaissé tin tiers à son
choix, -y. '
■: - ■
» • • ‘ *• '
•
' Mais le conseil de Bouillon fut sans doute détrompé,,
et cette demande n’eut pas de suite.
î ; Quand le sieur de Tanne fut bien certain jque M.
de Bouillon ne voulait pas plaider sous sa direction
il se décida à attaquer lui-même les habitans de V icle-Comte.
1
) ,
< .
Son agrèssion à la vérité fut un peii oblique; c’est
au .Seigneur de la Chaux y qu’il s’en prit pour faire ter
miner avec lui le procès de 1641 /resté indécis, entre
e u x , à l’égard des arbres.
> II assigna au parlement, le 14 août'1766, le sieur
Vassadel, Seigneur de la Chaux , .pour voir dire q u e ,
■
faute par lui d’avoir articule plus amplement les faits
contestés-lors de l’arrêt de 1641 , il serait déclaré nonrecevable, et demeurerait déchu de tous droits et coupe
;sur lesdits 'arbres\ ensemble sur ceux qui seraient rem
placés à Tavenir , sans préjudice (et dans celte offre
généreuse et équivoque gissait Tas tu ce de Fin te ni ion),
sans préjudice audit Seigneur de la Chaux et aux habi
tans de la Chaux et Vic-le-Comte de faire pâturer leurs
bestiaux dans les grands et petits Gacliiers, hors le tems
de défense, tant qu’ils seront en vaine pâture, et dans
�•(
)
uii élât non prohibé p a rla Coutume. Par le même
exploit, il assigna les habitons de V ie -le -C o m te en
arrêt commun.
L e sieur Vassadel se laissa condamnér f>ar défaut le
5 mars 1768 ; mais les habitans de ¡Vic-lerCom te ne
furent pas dupes du rôle accessoire et désintéressé, qu’on
voulait leur faire jouer; ils donnèrent une requête le 6
juillet 1768, dans laquelle ils exposèrent qu’ils étaient
seuls et véritables propriétaires du communal dont il
s’agit. Ils conclurent à' ce que le sieur de Tanne fût
déclaré à leur égard non-recevable dans leur demande;
à ce que l'arrêt de 1641 fût exécuté suivant sa forme
et teneur, en conséquence à être gardés et maintenus
dans le droit de propriété et jouissance du grand et
petit Gachiers, et même des arbres y plantés, sans prér
ju d ice (dirent-ils à leur tour), au sieur de Tanne d’y
faire pacager les bestiaux de Chadieu et Chalus hors
Le temÈ de défense, qu il plairait auoc habitans jic c c r
tant que lesdits Gachier seraient en vaine pâture. Enfin
ils conclurent à ce qu’il fût plante des bornes entre
,
lesdits Gachier et les propriétés conliguës du sieur de
Tanne.
Déconcerté par cette résistance, le sieur de Tanne
transigea avec le sieur Vassadel seul, le 22 février 1769.
Ce dernier se désista de sa demande en coupe et retail
des arbres, et néanmoins exigea qu’il fût mentionné
dans l’acte sa réserve expresse de tous les droits des
habitans de Vic-Le-Com le, et du droit de pacage.
Quant à la demande formée contre les habitans, il
y
�( )
*7
y eut arrêt d'appointement en.droit, le 8 mars 1769*
Le procès fat porté, en 1 7 7 1 , an Conseil supérieur,
établi à Clermont.
L e sieur de Tanne crut avoir tout gagné à la réforme
du parlement , et par imitation peut-être de ce qui
s^élait tenté en i 6 6 5 , il ne garda plus de mesures.
> Il voulut ouvrir dans le grand Gachier un fossé;
mais à la première tentative les habitans de Vie le com
blèrent, et restèrent en possession. *
Alors il rendit plainte et articula’des faits de violence
faux et mensongers ; il supposa qu’un attroupement
avait brisé ses fenêtres et avait dévasté ses caves.; ’
Sur la déposition de quelques témoins gagnés^ et de
ses propres domestiques,, il fit décréter des individus de
Vic-le-Comle.
Mais les officiers municipaux de cette ville rendirent
plainte en subornation de témoins. L a vérité fut révé
lée, et le sieur de Tanne fut décrété de prise.de corps
à son tour.
Pendant ce tems-là les habitans de Vic-le-Comte
veillaient à leur propriété , et saisissaient les bestiaux
pris en délit. Les valets de Chadieu, voulant servir la
passion du maître, tirèrent un coup de fusil sur ceux
qui ramenaient les. bestiaux saisis. Un poignet fracassé
donna lieu h une autre information.
Enfin le seigneur de Chadieu sembla convaincu que
les voies de violence ne lui réussiraient pas plus que
C
�C 18 )
celles des procès r et il abandonna totalement ses pour
suites et ses prétentions.
Mais ce ne fat pas sans intriguer encore auprès de
la maison de Bouillon, que cette fois il sollicitait d’in
tervenir au procès relatif aux Gachier, sous prétexte
qu’il devait un cens à cet égard au comté d’Auvergne ,
et qu’il ne devait le payer que s'il parvenait à être pro
priétaire i mais ses tentatives furent encore une fois
rejetées par le conseil de Bouillon (i).
Voilà encore pour les habitans de Vic-le-Comte une
autre période de plus de trente ans de repos.
A u commencement de la révolution, le sieur de
Laroche-Lambert, propriétaire de Chadieu 3 proposa
un accord a la municipalité de Vic-le-Comte.
Loin de prétendre à une propriété dans les Gachier,
il offrit de se désister du pacage auquel il prétendait droit
dans les Gachier par ancienne concession, pourvu qu’on
lui délaissât la portion de la Vergière correspondante
à son jardin de Chadieu jusqu’à la rivière.
L a convention était faite, l’autorisation sollicitée, et
le jour pris pour la plantation des bornes, lorsque Fun
des officiers municipaux de Vie (Denis Dissai) préten
dit que la cession de terrain était beaucoup plus consi
dérable que le pacage abandonné ? et s’opposa à ré
change.
(*)C’est à cette occasion que fut fait le rapport ci-dessus mentionné, en 1774,
tendant à ne pas accéder à la proposiÙQn du sieur de Tanne, relativement à
l ’intervention de M. de Bouillon.
�( i9 )
-Bientôt le sieur de L a roche-Lambert émigra, et il
ne fut plus question de cet arrangement.
_ L a loi du 10 juin 1793 vint permettre aux communes
le partage de leurs com munaux'; et certes si les liabitans de Vie eussent jugé à propos d’exécuter celte loi,
ils. n’auraient pas aujourd’hui autant de chicanes a
combattre.
Mais le voisinage de la rivière empêcha de prendre
ce parti ; rassemblée générale des habitans délibéra
qu’un défrichement exposerait la terre végétale à être
entraînée à la moindre inondation; en conséquence il
fut arrêté que les Gachier ne se partageraient pas.
Les liabitans de Vie n’en ont pas moins continué
de payer seuls l ’impôt foncier des communaux qu’on
leur dispute.
En Tan 4, la terre de Chadieu fut vendue,pour quel
ques assignats consignés à la trésorerie nationale (1).
( ï ) L e sieur V a l l i e r p rem ier ou second acq u éreu r de C h a d i e u , a subrogé la
sieur N a t e y le 7 nivôse an 2, et il lui a laissé à pa y er pour tout ou partie du prix
535,12,5 francs dus à la maison de L a r o c h e - L a m b e r t.
Le
25
fr im aire an 4 , le sieur N a t e y a obtenu ju gem ent qui lui perm et de
consigner
56, 5oo
fr. en mandats représentant les
535j i a 5
fr. d ’a ssign ats, à
l ’ échelle des mandats.
L e 2.8 messidor an 4 , le sieur N a t e y a consigné les
56, 5oo
francs, avec d é-
c'araUon que la som m e était em p ru n tée des deniers du sieur R e b o u l.
L e 7 pluviôse an 6 , le sieur R e b o u l a fait assigner le sieur N a t e y pour lu i
p a y e r ladite s o m m e , c’ est-à-dire
p l o y é e à acheter les
56, 5oo
3 ,186
francs en n u m é r a i r e ,q u ’ il avait e m
francs de mandats.
L e 22 frim aire an i 3 , le sieur N a t e y a fait juger qu’ il ne d evait rien au
sieur l l e b o u l . A in si voilà une équation a lg é b r i q u e , digne de r e m a r q u e ;
S 35 i a 5 :
565oo
: : 3 i ü 6 : 0.
�( 20 )
" Que Chadieu ait été vendu au s.r Sauzai, ou au s.r
V allier, ou au s.r Natey qui ont plaidé long-tems ensem
ble, en consignan! et s’invectivant ,tout cela ne fait rien
à la cause; que le s,r de Balz en ait été le véritable ac
quéreur sous leurs trois noms, cela serait plus indiffé
rent encore s’il n’avait été lui-même l’agent direct et
visible de toutes les tracasseries et insultes dirigées
contre la commune de Vie et le maire qui la repré
sente.
L e sieur Natey se fait un titre aujourd’hui de ce
qui s’est passé jusqu’au procès; et par cette raison les
habitans de Vie sont forcés d’entrer dans quelques
détails.
En l’an 5 , apparut inopinément à la maison com
mune de Vie, un individu prenant le nom de BeLmont,
accompagné des sieurs M a z i n et M al le t, experts.
Ceux-ci exposèrent le prétexte de leur venue, par
lèrent de\Chadieu ; et quand le sieur Belmont eut longtems écouté la conversation sans y prendre part, il se
dit fondé des pouvoirs du propriétaire de Chadieu, et
marqua un grand désir de vivre en bonne intelligence
avec la commune; en cette qualité, la commune l’ac
cueillit avec intérêt. Bientôt le sieur Beünont fut ar
rêté à Riom, conduit à L yon, et p a r v in t à s’échapper
sur la route; le 18 brumaire lui re n d it la liberté.
llreparul ¿Chadieu et à Vie sous le nom du s.r Jea n ;
on accueillit encore le sieur Jean, car le nom du por
teur dune procuration importait peu; il proposa de
�( 21 )
reprendre les bases de l’arrangement commencé avec
le sieur de Laroche-Lambert.
11 fut convenu que de part et d’autre on se don
nerait communication de ses titres; la municipalité de
Vie y satisfit avec franchise, et le sieur Perrin, géo
mètre à Cornon, fut nommé expert commun ; alors
le sieur de Batz s'était fait connaître sous son nom ,
et la municipalité de Vie avoue qu’elle eut confiance
dans ses paroles.
Elle le prouva en demandant au Préfet une auto
risation pour traiter avec lui ; elle le prouva encore
plus en chargeant le sieur de Batz lui-même de cher
cher les papiers de la commune chez les procureurs
de Pa ris , qui avaient occupé pour elle au parlement
de Paris} ou au conseil supérieur. Le sieur Perrin
vint sur les lieux : pour abréger, le sieur de Batz lui
donna un plan des lieux , qu’il venait de faire lever ,
mais le sieur Perrin dit qu'il voulait en lever un .luimême.
Ce premier point sembla mettre quelque froideur
dans la négociation, et le sieur de Batz bientôt éleva
des difficultés sur ses propres offres ; le sol de la V ergière, dit-il, était dégradé par l’inondation de 1790,
qui avait enlevé la terre végétale; mais sur-le-champ
on fouilla, et il s’en trouva à une grande profondeur.
Cependant le sieur de Batz répandait que des con
sultations lui donnaient droit à la propriété de tous les
communaux ; il communiqua la consultation, deux ar
rêts et l’acte de 1627, mais n’en attesta pas moins per
sister dans les projets ouverts de conciliation.
�( 22 )
A u mois de germinal an 9 , le sieur de Bai2 fit ar
racher de son jardin cinq ou six peupliers bordant une
pièce d’eau, et les fit transplanler dans la parlie de la
Vergière qui devait lui être assignée.
L e maire de Vie ne fut que long-tems après informé
de cette plantation : il marqua son étonnement • mais le
sieur de Batz le rassura en disant que^c’était un essai
pour savoir s’il y avait de la terre végélale dans le
terrain qui lui était promis. Il laissa entrevoir aussi
qu’ayant droit de remplacer les arbres morts, il.avait
cru pouvoir user de son droit sans avertissement (1).
Enfin le maire de Vie voulant terminer, manda le sieur
Perrin ; mais celui-ci répondit que déjà le sieur de Batz
l’avait payé, avec invitation à cesser ses opérations.
Forcé alors d’expliquer sa conduite, le sieur de Batz
déclara que les mêmes bases d’arrangement ne pou
vaient plus avoir lieu , parce qu’il espérait faire changer
les choses de face, au moyen d’une transaction de x 5 3 i,
qu'il avait donnée à expédier au sieur Bonjour, notaire.
L e 6 frimaire an 10, toutes les négociations furent
rompues par la notification d’une transaction, dont
voici le précis :
Jacques Beau fort de Canillac, Seigneur du Pont-du-Château ,
de Monton , des Martres, de Clialus-les-Bussières, du canton
( l ) H paraît aujourd’ hui que cette plantation était une perfidie. Q u o iq u ’ on
fut en négociation ouverte et a v o u é e , le sieur N a t e j' avait planté fu r tiv e
m ent. L e jour choisi pour n’être pas vu , la hauteur des a rb re s, tout prou ve
qu il m éditait une hostilité ; mais à cause de la négociation , i l n ’y avait jjas
lieu de s’ en plaindre.
�. ( 23 )
de Chadieu et antres, traite avec les habitans de V i e , c’est à
savoir les soussignés en leur nom et pure procure, baillée en
bonne et due iorme(inais sans qu’on dise par q u i) , et après
un préambule qui énonce que, comme Seigneur de M onton ,
dont la ju stice s’étendait sur Chadieu , duquel dépendaient une
vergière, pré et pâturai , ledit sieur Beauiort disait avoir la pro
priété desdits fonds. A quoi les individus de Y i c se contentaient
d’opposer qu’ils avaient la possession de faire pâturer leur bétail;
on transige sur ce soi-disant procès ainsi qu il suit :
« Il est reconnu par ces soussignés que les antécesseurs dudit
« Seigneur avaient concédé, en 1425, auxdits habitans de faire
« pâturer leur bétail à la vergière, pré ou pâturai appelés les
t Gachiers , tant audit canton de Chadieu qu’au terroir de
« Chalus ; réservé audit Seigneur les arbres, fruits et bétail : à
« lui réservé aussi de clorre tout ou partie, pour planter des
« arbres ou ensemencer une moitié à la fois. Et si les habitans
« iont les clôtures , ils pourront y pâturer après la livrée des
« récoltes; demeurant lesdits habitans gardiens en défenses ».
Ensuite ces soussignés promettent audit nom de tenir à tou
jours ledit appointement ; à raison de quoi leur baille cette
présente ratification , sous condition que lesdits habitans ne re
tourneront plus à contester le droit dudit Seigneur.
F a it en présence des soussignés, en la salle basse du château
de Chalus , le 16 novembre i 53 i. Puis ont signé , e st-il dit ,
après ledit Seigneur, quatre individus de Y i c , fa isa n t pour
lesdits habitans, et trois témoins de Monton et des Martres ,
puis C. Regny, lieutenant de Mont-Ferrand , et Jussat, notaire.
Ensuite il est dit : « E xp éd ié h. Manlhot, fondé de pouvoir de
« Natey , par Manlhot et B o n jo u r , notaires, qui attestent la
« signature du notaire J u s s a t, comme expédition originale,
« représentée par M an lhot, et par lui retirée».
Cet acle qui dut * s’il exista, exciter le mépris des
contemporains , et dont il ne subsiste aucune trace
�( 24 )
d’exécutionr, ne méritait pas davantage d’inquiéter
les habitans de Vie-le-Cornte. Le Maire fut autorisé
à repousser cette hostilité, et il signifia au sieur Natey,
le 29 nivôse an xo, i.° les clauses de la vente de 1627,
qui donnait un démenti à la prétendue transaction.
2.0 L ’arrêt de 1641 , qui, sur le vu de tous les moyens
et titres du Seigneur de Chadieu, réglait les droits res
pectifs. Il protesta contre toute voie de fait.
Alors le sieur Natey imagina d’assigner le maire de
Vie en ki Cour d’appel, par exploit du 21 ventôse an 10
( et ceci est remarquable ) , en reprise du procès de
16 4 1, qu’il prétendit non jugé.
Bon ou mauvais, cet exploit annonçait du moins un
recours aux voies judiciaires; mais bientôt le S.r Natey
préféra les voies de fait.
¡En germinal an 1 0 , 4 27 arbres furent plantés à la
haie à la vergière, qui fut entourée de fossés. Des
procès-verbaux en furent dressés par les gardes-champêtres de Vie, le 26.
L e 26, le maire de Vie rendit plainte au directeur
du jury, contre les nommés Lelong et Tournemire qui
avaient dirigé ces travaux. Le 27 la plainte fut réglée
en simple police, 011 civilisée.
Le 3 iloréal, le maire de Vie assigna devant le juge
de paix lesdits Lelong et T o u r n e m i r e , en complainte
possessoire, avec défenses d’y faire des planta]ions à
1 avenir, et pour être condamnés à rétablir les lieux.
Au
�( 25 )
A u lieu de répondre à justice, les assignés allèrent,
le i o floréal, entourer le grand,Gacliier de fossés.
L e 11 floréal ils vinrent à l’audience , dire qu’ils
avaient agi comme autorisés par le sieur Natey. L 'au
dience fut remise au 2 3.
Ce qui se passa ensuite exige encore des détails que
la responsabilité du maire de Vie ne permet pas d ’o
mettre, parce que la version intéressée du sieur Natey
les dénature.
A l’audience du 2 3 , le sieur Bonjour, paraissant
pour le sieur N atey, opposa que depuis quatre siècles,
des procès existaient: qu’à la vérité il y avait eu dans
cet intervalle plusieurs jugemens; mais qu’ils n ’avaient
rien prononcé définitivement. Il produisit sa transaction
de i 5 3 i , et dit que l ’arrêt de 1641 ne pouvait lui être
opposé, parce que le procès avait été repris en la Cour
d’appel......... Il prétendit que les liabitans de Vie n’a
vaient pas pu citer au possessoire, parce qu’ils n’avaient
m la propriété ni la possession, ayant eu chaque année'
procès ou litige.
A cela les liabitans de Vie répondirent que la transac
tion Natey était une pièce controuvée, dont on n’aurait
pas manqué de faire usage en 1641. . . . Qug l'arrêt
avait réglé tous les droits des parties, et que, si le sieur
Natey avait établi la litispendance par une reprise, c'é1ail une raison de plus pour qu’il s’abstint de toute
innovation jusqu’à un jugement définitif.
Après quoi le juge de paix demanda au maire de
D
�( ¿ 6 .)
V ie, s’il était en é tat’de prouver que de tout tems^et
notamment depuis an et jour les liabitans de Vie avaient
joui du droit de pacage paisiblement et sans opposi
tion . sans interruption d’arbres et clôture pour fossé.
( Nota , pas un mot de possession exclusive).
L e maire de Vie offrit cette preuve: elle fut ordon
née avant de se retirer. L e 5 prairial fut indiqué pour
l ’enquêle, et le maire prit sur le bureau du juge de
paix une copie du dispositif.
Mais le fondé de pouvoir du s.r Natey eut des affaires
pour ce jour-là , et le juge de paix m a n d a te i . er prai
rial , au maire de Vie, qu’il n’y aurait pas d’enquête le 5 .
En réponse, le maire de Vie demanda l'expédition
du jugement et une cédule.
L e juge de paix lui marqua que ces jugemens nés©1
signifiaient pas, et qu'il porterait l ’expédition avec lui
le jour de son transport.
- Cependant il fallait assigner des témoins. On indiqua
le 7 messidor, et le greffier envoya an maire de Vie une
copie du jugement, dans laquelle il fut étonné de lire
qu'il était chargé de prouver avoir joui exclusivement
du pacage; ce qui n’était pas même énoncé dans sa
demande, ni dans les dires ci-dessus rappelés.
L e 1 6 prairial le maire de Vie écrivit au juge de paix,
pour se plaindre de cette addition , faite sans doute par
ni ¿garde après le prononcé de l’audience.
Le même jour le juge de paix lui répondit que ce
mot était une inattention, et qu’il en serait f a i t justice.
(Ces lettres sont enregistrées).
�(
)
4 messidor, le maire dé Vie
2 '7
. Les 2 et
assigna ses
témoins pour le 7. L e 7 , le juge de paix lés entendit:
le mot exclusivement fut raturé sur l’expédition, que
le juge de paix se fit remettre pour les entendre.
Les vingt-trois premiers témoins déposèrent avoir _
vu pacager les bestiaux de V ie, et n’avoir remarqué
ni arbres ni fossés. Les quatre suivans disent de même,
et parlent d’arbres qui furent plantés il y a dix ans,
mais enlevés dans la quinzaine de leur plantation.
Un autre ajoute que les trois peupliers qui font partie
de la plantation actuelle, sont âgés de deux ans, mais
qu’il ignore quand ils furent plantés.
Après ces témoins, viennent les sieurs Fayon et Bon
jour , dont les dires , beaucoup plus détaillés, remontent
à plus de vingt ans, et se réduisent h dire que les Sei
gneurs de Cliadieu et Clialus plantaient des arbres et;
saussaie près de chez eux; mais que s’ils empiétaient:
le moins du monde sur les Gacliiers, les habitans de
Vie usaient de leur droit ; que même ils allaient paca
ger jusques dans ces saussaies , et qu'il y avait des
saisies de bestiaux et des contestations. Us rappellent le
fossé fait par le sieur de Tanne, mais comblé le même
jour, et le procès criminel qui en fut la suite. Ils parlent
de deux noyers arrachés jadis par le propriétaire de
Chadieu, et d’un troisième déraciné par l'inondation,
de 1790. Enfin quant au fait positif de la complainte,
ils répètent le langage des autres témoins; sauf que
l’un d’eux, le sieur Bonjour croit que les trois peupliers
ci-dessus sont plantés depuis deux ans ? ce qu’il a jugé
sans doute à leur âge.
X) 2
�Cependant le juge de paix, par son jugement', daté
du
messidor an 10, pensa que la preuve n'était pas
suffisante, et rendit le jugement qui suit:
« Attendu qu’il résulte de l ’enquête que dans le ténement de
«
«
«
«
,«
et
la vergière il existait trois noyers, dont les fruits étaient
cueillis par les anciens propriétaires de Chadieu; que-deux de
ces noyers ont été a r r a c h é s et exploités pour leur compte , et
que le troisième, ayant été déraciné par un débordement de
la rivière, a été pris par les propriétaires de C hadieu, et ém
ployé à faire la clôture d’un héritage à eux appartenant ;
« Attendu qu’il résulte également de ladite enquête que les
« arbres pibles et peupliers d’Italie, qui existent actuellement
« dans ledit terrein, ont été plantés depuis deux ans , et par
« conséquent plus d’an et jour avant la demande;
« Attendu que les parties sont en contestation pour raison de
« la propriété des terreins contentieux, et que le droit de pacage
a n’est pas contesté aux habitans de V ie ;
« N o u s , ayant aucunement égard à ce qui résulte de l’ena quête faite par le maire de Vic-sur-Allier, d’avoir fait la preuve
« ordonnée par notre jugement interlocutoire du vingt-trois
« floréal dernier, l’avons débouté de sa demande, et le condam« nons aux dépens , même à ceux réservés par ledit ju g e m en t,
« sauf à lui à se pourvoir au pétitoire, ainsi qu’il avisera, etc.»
Les 7 et i i thermidor an 10 , appel par le maire
de V ie, desdils jugemens interlocutoire et définitif.
L e i 5 prairial an 1 1 , le tribunal civil deClerm ont,
sans vouloir statuer sur ledit appel* le déchira non receVüble , par deux motifs:
1-° En ce que l’appel du jugement interlocutoire n'a
vait pas été interjeté dans les trois mois de sa date.
�( 29 )
2.° En ce que l’autorisation donnée ait maire, n’avait
suffi que pour plaider en première instance (i).
Pendant ce premier procès, des arbres furent coupés
en délit , le i5 prairial an 10, et le sieur Natey en
rendit plainte contre trois cultivateurs du village de
Lachaux, commune de Vie.
L e 1 8 thermidor an i o, il fut débouté de sa demande,
et interjeta appel au tribunal criminel, où le maire de
Vie crut devoir intervenir par un appel incident, pour
veiller aux conclusions que prendrait le sieur Nate}'.'
Par jugement du 3 brumaire an n , le tribunal cri
minel, infirmant le jugement correctionnel, fit défenses
aux délinquans de récidiver, avec amende. Quant à
Tappel du m aire, il fut déclaré non recevable comme
non émis dans le délai (quoiqu’il n ’y eût pas de signi
fication ).
.
Nous avons dit que le 21 ventôse an 10 ; le sieur
Natey avait conclu à la reprise du procès de 1641.
L e 5 brumaire an 1 1 , il conclut aussi à la reprise du
procès de 1768; mais les liabitans objectèrent que ce
(1) L e m a ire de V i e a été autorisé plusieurs fois par ses c om m ettan s et
par M . le P réfet ; il l’a été de nouveau le 20 f é v rie r 1G06. L e s m e n a c e s et
les d em i-m ots d i r s i e u r N a t e y , dans son m é m o i r e , ex p ireron t d e v a n t les
motifs de l’arrêt de c a ss a tio n , c i - a p r è s
én on cé . Si l’autorisation de 1806
était in su flisan te, le m aire de V i e en obtiendra une
elle suffira.
autre,
s’il le f a u t , et
�( 3o )dernier procès, porte de piano au parlement, devait
subir les deux degrés de jurisdiction.
Alors le sieur Natey conclut à ce q u e , dans le cas
où les parties seraient renvoyées en première instance,
la possession provisoire lui fût accordée, sauf aux liabi1ans leur droit de pacage dans les parties iion ense
mencées.
Par arrêt du 18 thermidor an n , la Cour d’appel
renvo}:a les parties à se pourvoir en première instance,
pour faire statuer sur le droit de propriété; et néan
moins la possession tenante en faveur du sieur N a t e y ,
ainsi qu elle lui avait été attribuée par le jugement cri
minel, du 3 brumaire, et parle jugement de la justice
de p a ix , du 1 5 prairial an n .
'
I.e sieur Natey ayant ainsi obtenu en trois Tribu
naux tout ce qu’il demandait, ne fut plus empressé de
poursuivre le fond de ses demandes.
Sachant que le maire de Vie s’était pourvu en cas
sation, il se hâla d’agir dans les Gachiers comme en un
pays de conquête; il défricha, sema, et afferma même
à des étrangers le pacage de ce qu’il laissait en friche.
Pour s’opposer à cette usurpation , en exécutant
d’ailleurs des jugemens en dernier ressort , le maire
de Vie reprit, le 12 brumaire an 12, au tribunal de
Clermonl, la demande du 5 brumaire , et assigna le
sieur Natey pour voir mainlenir les babil ans de Vie
en la propriété des communaux Gachier et la Vergière,
et cependant par provision voir faire défenses de chai>
�, ( 3i y _
ger l’état des lieux ; ayec autorisation à jouir comme
par le passé.
. L e 9 nivôsë an 12 ; le Tribunal de Clermont statua
si?r ler provisoire : fetjparle ’motif principal qu’en plai
dant au possessôirei^ le s/ Naleÿ n’aîvait pas contesté le
droit de pacage aux habilans de,Vie, tandis.que ce droit
deviendrait illusoire par des défrichemens, le Tribunal
lit défenses provisôires au sieur Natey de ‘ défricher
jusgu]au jugemctU 'd é fin itif > dépens réservés,
r II interjeta appef de-ce ju gem en t, jqui fut infirme
en la Cour d'appel de.iU om , par arrêt du 1 3 . prairial
an i 2 ? toujours sur le motif du jugement de la jus
tice rde paix, et même du jugement criminel., sur le
m otif encore que tout .étaiit réparable eh définitif, parce*
que les jouissances des terrains litigieux seraient ’adju
gées à qui de droit, lorsqu’il serait,statué sur la questipn ¡de .propriété, ih
1 s. _.?«■
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L a 1 Cour de cassation*. par sescarrets du 28 brumaire
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an' 14^'a cassé loùles'cës décisions, c’est-a-dire . i.° le
jugement du tribunal de Clermont, du 1 5 prairial an 1 1,
sur appel de la justice depaix 5 2.0Tc\rrêt du 18 thermi
dor an 11 ; 3 .° l’arrêt du i 3 prairiaT an 12 (1).
T e l est le derniôr état âès contestations.
(1)
‘
D e v a n t la C o u r de cassation le sieur N a t e y avai t cru se débarrasser de
la c o m m u n e de V i e , en ne pl ai dant que contre le mai r e. Il d onna un pou
v o i r pour s’ inscrire en f aux cqntre, r a u l p r j s a t i o n q y i lui. était d o n n é e de
,}i
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pl ai der et publia par-tout q ue ce ma i r e 1né méri tait ainsi m' -conf i ance ni con
sidération.
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ti.
r’
Cett e c al omn i eus e intrigue n’ a laissé au .sieur N i l t e y . q u e la li onl e de s
,
c o n c ep t i o n ; et la C o u r s u p r e me n’en a été q u e plus emp r e s s é e à rendr
justice
q ua n d el l e a connu le pi ège
3 et
d éc ou v er t la vérité.
�( 32 )
MOYENS.
La première difficulté à faire décider doit être rap
pel du possessoire. Quand il sera jugé , les ha bilans de
Vie poursuivront les demandes pétiloires qu’il a plu
au sieur Natey d’introduire, sous prétexte qu’il n’y a
rien encore de jugé, depuis le procès de 1641 , sur
la propriété des communaux qu’il réclame.
L e but actuel de ce mémoire ne devrait être que la
discussion de l’action possessoire : mais les liabilans de
Vie l’ont déjà dit ; fatigués de procès, ils ne calculent
pas quel plus grand avantage ils pourraient avoir de
diviser leur défense. Tout dire et tout finir est pour
eux le cri de la lassitude et la volonté du décourage
ment; ainsi plus de formes , plus d’ordre de moyens >
tout sera sacrifié à l’impatience d’une décision. Les.
liabilans de Vie commenceront même par la partie la
plus éloignée de leur procès , c’esl-à dire par l ’ex am e n
de la question de proprié lé, C'est d'ailleurs l'ordre ,
sinon le plus régulier, au moins le plus nalurel, et celui
que le sie#ur N aley a suivi lui-même. Quand ils auront
prouvé leur propriété, il n ’en résultera qu'une plus
grande preuve d'injustice de ce qu’ils sont privés de la
possession.
Q u e s t i o n
t é t i t o i r e
.
On connaissait avant la révolu lion un principe de
droit, toujours invoqué avec succès dans les applica
tions de titres; c’est que le plus ancien doit être pré
féré :
�( 33 )
féré : ad prim ordium'tituli posterior refertur éventas.
C ’est parce qu’on présumait avec raison que le secondtilre n’aurait pas eu lieu., si le premier n’avait été
dissimulé ou inconnu.
Les lois nouvelles; ont enseigné un autre principe:
c’est que s’il y a concours de plusieurs titres , le plus
favorable aux communes doit être préféré, sans avoir
égard à l’ancienneté.
: Les habitans de Vie peuvent se passer de'cet! e induldulgence de la loi; car quand la transaction de i 5 3 i ne.
serait pas un acte apocryphe', et étranger au s.r N a te y ,
elle est postérieure à celle de i 5 i i qui a au moins
l.avaniage d’être mentionnée dans les actes postérieurs.
En i 5 i i , on plaidait pour la propriété des Gaehiers.
!Le seigneur de Chadieu avait déjà perdu son procès
en deux tribunaux, lorsqu’on transigea.
■ On convient, par cet acte, de jouir des Gaehiers en
pâturage commun, comme on a accoutumé; mais l ’ex
plication de cet usage arrive à l’instant.
• '
C ’est aux habitans de Vie qu’il est leu et permis de
tenir en défense lesdits communaux, du 2 5 mars au i5
m a i, ou autre tems plus ou moins long q u il sera avisé
par eu x. - .• '
r t.
Les beslianx de Chadieu ne peuvent s’y ’introduire,r
après le tems défe.nsable, qu’en telle qualité que Lesdits
habitans estimeront.
Il est défendu a u x seigneurs de Chadieu d;y intro
duire d’autres bestiaux que les leurs, ou ceux de leurs
métayers.
- ,
' '
E
�• A
quelles
( 34 )
enseignes peut-on mieux reconnaître quel
est le propriétaire parmi deux possesseurs?
L ’un d’eux a, par-dessus sa jouissance, le droit de
dire : j ’ordonne ou je défends.
L ’autre peut jouir; mais il obéit.
N ’est-il pas évident que le premier est le maître ou
le propriétaire , et que le second n’est qu’ un simple
possesseur.
« De droit com m un, a dit M. Merlin, la donation
«' du droit de jouir d'un bien emporte la propriété
même, toutes les fois qu’au droit de jouir est ajoutéy« soit une faculté qui ne peut être exercée , soit une
«. charge qui ne peut être remplie que par le propriétaire ».
« La loi Proculus u ff. de usufr; en fournit la preuve
« et l’exemple. Un testateur lègue l’usufruit d’une mai« son*; à la charge qu’il la grèvera de la servitude, altiùs
« non tollendi ».
te La loi décide que par là le testateur-est censé avoir
« légué la maison, q u ia , dit Godefroi, qualitas et
« facilitas frucluario hic conceditur quæ proprietariis
« sotis competit.
D e là venons de suite à l’acte de 16 2 7, et à l’arrêt
de 1641 ; ils ne sont plus que des ratifications de la
transaction claire et précise de
i
5ii.
Cest à ce faisceau' de titres qu'on ose opposer un
acte suspect et astucieux de x 5 3 i , honoré du nom de
transaction. D ’après la signilication qui en a été faite,
�( 3S )
son moindre défaut est dé n’être que; là copie d’une
expédition ; dès-lors elle ne mérite aucune foi d’après
l ’article i 335 du Gode civil.
Existait-elle vraiment 3 en ï 53 i,, cette transaction?
Mais comment se fait-il donc que la maison d e rCanillac,
la maison de Tanne aient été aveuglées au point de
ne pas en faire usage, pendant deux longs procès? Com
ment'un acquéreur tient-il de ses vendeurs june expé
dition originale q u e 'c e u x - c i ne connaissaient pias ?,
Est-ce'donc à Herculanum qû’il a découvert un vieux
titre , qui n’était pas dans le chartrier de ses prédé
cesseurs ?
;
.
'
, Admettons que.la copie'de cet acte soit authenti
que, tout prouve qu’il n’eut aucune exécution, et le
motif s’en-conçoit aisément; Des personnes sans carac
tère et trompées ne pouvaient pas obliger le corps
commun de V ie, par leur stipulation, quatre liabitans
de V ie, menés dans une salle basse du cliâtëau de Ghalus, où ils s’entendaient opposer des titres, sans opposer
eux-mêmes l’acte récent de i 5 i i , avouant que les Gacliierssont de Chadieu et deChalus, së réduisante un
droit précaire et de sujétion, tandis qùe vingt ans au
paravant leur commune parlait en maître ; certes ces
quatre liabitans n’étaient que des mannequins qu'on
avait appelés pour les surprendre; car jamais habitant
n’aurait plus niai servi son pays , et plus mal-adroitement soutenu ses intérêts.
On dit qu’ ils avaient une procuration* mais où este lle ? quelle en est l ’étendue? comment savoir si le
£ 2
�( 36 )
mandataire s’est renfermé dans les bornes de son man
dat, si custodkt fin es mandate dUigenter \ car ce n'est
pas dans la volonté du mandataire que git la conven
tion , mais bien dans celle du mandant.
Enfin, qu’e s t - c e qu'un acte suivi de deux cent
soixante-dix ans d’oubli, et d’oubli le plus profond?
Rien ; car une convention n'est quelque chose dans
la société que par Inexécution qu’elle a eue, si elle est
ancienne, ou bien par le droit qu’elle donne de se pro
curer celte exéculion, si elle est récente. O r, la nonexécution se prouve déjà par la transaction de 1642,
qui dément les prétentions supposées du s.r de Canillac^
et ne mentionne pas même la prétendue transaction
de
i
53i.
*
D ’autres démentis résultent encore de l’acte de 1627,
et de l’arrêt de 1641.
A quel titre encore le sieur Natey fait-il valoir à
son profit cette transaction de i 5 3 i ?
Est - il le Seigneur de Monlon ou de Chalus-les-^
Bussière?^car c’est en cette qualité seule que traitait
le sieur de Canillac.
■ Il ne pouvait pas traiter comme propriétaire et Sei
gneur de Chadieu, en i 53 i , car il n’acquit Chadieu
qu'en 1627.
S’il a réclamé un droit sur les Gachiers, comme les
disant de Chadieu, c’est qu'il disait avoir la haute et
^moyenne justice sur Chadieu y à cause de son mande
ment de Monton.
�( 37 )
Son moyen était une conséquence de cette maxime
féodale : Jurldlcus, ratio ne Imperll, vlndlcat prœdia ad
pecorum pastum commoda , Iri jurlsdlctlonls fin it us
septa.
Ainsi en donnant à la transaction de i 5 3 i , toute la
valeur d’un acte sincère et en v ig u eu r, les Gachiers
ont été réclamés pour Monton. Quand M. de Canillac,
après avoir acheté Cliadieu , l’a revendu, il n’a rien
démembré du tief dominant, et n’a vendu aucun des
droits de la haute justice.
L e sieur Natey, en voulant se prévaloir de l’acte de
i 5 3 i , excipe donc du droit d’autrui.
Car, propriétaire de Chadieu, il ne peut faire valoir
d’autres actes que ceux du fait des précédens proprié
taires de Chadieu, c’est-à-dire d’actes passés pendant
qu’ils en étaient propriétaires.
- Quand même le sieur de Canillac aurait été proprié
taire de Chadieu en 1 53 1 , le titre d’acquisition de 1627,
stipulé par lui-même, efface tout ce que des actes an
térieurs auraient pu dire. Tout Chadieu est confiné par
les Gachiers de Vic-le-Comte.
Or ce titre de 1627 se communique de plein droit
au sieur Natey.
Celui qui achète un fonds confiné par le pacage d’un
voisin est sans contredit exclu de ce pacage; car le confin ne peut jamais faire partie de la chose confinée.
Souvenons-nous de l’embarras que donnèrent ces
clauses iila dame de Canillac en 1641 ; elle essaya de
�[ 38 )
prendre des lettres de rescision, mais le parlement ne
les adopta pas.
L a dame de Canillac, en demandant des lettres,
pouvait dire que, si Chadieu avait été vendu avec excep-»
lion formelle des Gachiers, au moins ils lui apparte
naient à un autre titre, c’est-à-dire à cause de la haule
justice qu’elle avait avant 1627.
Mais ce moyen de la dame de Canillac, le sieur
Natey ne Ta pas même; car il n’a pour lui qu’une trans
mission de l’acte de 1627, sans lettres de rescision.
Par quel prestige inouï a-t-il donc pu persuader un
seul instant qu’il avait des droits de propriété , même
apparens, sur des pâturages formellement exceptés de
sa venle.
L ’arrêt de 1641 n’est d'après cela/m algré son im
portance, qu’un mo37en surabondant pour les liabilans
de Viole-Com te ; et cependant cet arrêt seul leur suf
firai 1 9 car il a jugé les procès actuels.
Il les juge d’abord, en refusant d’entériner les lettres
de rescision de la dame de Canillac ; car c ’est avoir
décidé ipso fa c to 3 et par une conséquence forcée, que
lé propriétaire de Chadieu était borné par les Gachiers
apparlenans aux liabilans de V ic-le-Com te, suivant
l’acle de 1627.
Il a jugé -encore qye le propriétaire de Chadieu n’a,
dans ces Gachiers, que le droil de pacage qui lui a été
Vendu par le même acte de 1627.
L e parlement Ta tellement jugé ainsi} qu’il ajoute
�( % , >
comme complément que les habitans pourront tenir
en défenses ledit Gachier depuis le 2 5 mars jusqu’au 2 5
m ai, ou autre tems plus au moins, et il réduit la dame
de Canillac à y envoyer pâturer ses bestiaux et ceux de
ses métayers, sans fraude.
N ’y a-t-il pas là encore la distinction visible du pro
priétaire et du possesseur ?
Ne sont-ce pas les propres expressions de la transac
tion de 1 5 1 1 , que le parlement adopte et confirme ?
Cependant le sieur Natey n ’a pas craint d’objecter,
i.° que cet arrêt de 1641 ne jugeait rien; il a même
assigné en reprise de ce procès qu’il dit encore indécis.
Evidemment il n*a pas voulu lire ; car l’arrêt n'or
donne un plus ample contesté que sur Le surplus de
Cintervention du sieur Larochebriant, concernant la
coupe et retail des arbres.
L e procès est tellement fini pour les habitans de Viele-C o m te , que la dame'de Canillac est condamnée aux
dépens de la cause principale envers eux. Les dépens
d’appel sont compensés, et il n5y a de réserve que la
moitié des dépens d'intei’vention.
i
2.0
Le sieur Natey objecte encore qriel’arrêt de 1641
ne prononce pas le mol de propriété.
Mais l’équi valent ne suffisait-’il pas dans un tems où
cette propriété était subordonnée au triage que le Sei
gneur du lieu pouvait s’arroger.
Ces précautions féodale?, qui motivèrent les expressions
�( 4° )
de l’aefe de i 5 i i , dirigèrent aussi l'arrêt de 16 41, qui
voulait s’y conformer; mais il a été prouvé plus haut 3
que la propriété résultait de ses expressions mêmes.
3 .° Le sieur Natey objecte aussi que l’arrêt de 1768
juge tout le procès , et réduit les habitans de Vie au
simple pacage des Gacliiers, tant qu’ils seront en vaine
pâture seulement.
’Rien n’est plus aisé que de faire dire ce qu’on veut
dans un arrêt rendu en l'absence de la partie intéressée.
Cet arrêt * on le répète , est pour les habitans de Vie
res inter aUos acta, l’arrêt du 8 mars 1769 éteint le
précédent à leur égard. Ainsi les habitans de Vie n’ont
pas même besoin de former tierce opposition à celui
de 1768.
Enfin que disputons-nous aujourd'hui? Ldem corpus,
eadem causa petendi, eadem conditio personarum.
Donc il y a force de chose jugée, c'est-à-dire le plus
invincible des moyens.
Ainsi la plus ancienne des transaclions,le propre titre
du sieur N atey, et un arrêt souverain , concourent à
prouver que les habitans de Vic-le-Comte sont pro
priétaires des communaux en litige, et que le sieur
Natey n’y a qu’un simple droit de pacage, subordonné
aux arrêtés de la mairie de Vie pour les tems de pro
hibition.
Quand
�(
)
Quand ces litres n'existeraient pas, la loi du 10 juin*
1793 donnerait aux «habitons de Vie la propriété des
communaux qu’ils réclament,'en prouvant seulement
par la transaction de 1642^ e t autres actes, qu’ils sont
situés dans la justice ou paroisse de Vie , et sans être
astreints à établir aucun titre de propriété qui leur fût
personnel.
« Tous les biens communaux en général, connus
sous le nom de terres vaines et vagues, gartes, gar« riquès , laudes,.'pacages, palis-, etc. sont et appau« tiennent ; de leur nature, aux liabitans des communes’
« dans le territoire desquels ils sont situés (section 4,
« article .2) ». 0
‘
A l’égard ides arbres, le sieur Natey ne les aurait
que par la transaction de i 5 i i ‘5 alors ils furent délais
sés au propriétaire de Chadieu, comme seigneur ; et en
effet c’était encore une prétention féodale.
Mais la loi du 28 'août 1792, art. 12, porte: «-Tous
« les arbres actuellement existans sur les places, marais
« et autres biens dont les communautés ont, ou recou« vreront la propriété> sont censés leur appartenir,
« sans préjudice des droits que les particuliers non Sei« gneurs peuvent avoir acquis par titre ou possession »,
*i
'
!'
Q u e s t i o n
p o s s e s s o i r e
,
Pour prouver que l’arrêt de 1641 n’adjugeait pas la
propriété aux habitans de V ie, le sieur Natey dit que
c^jt arrêt ne leur a donné qu’une possession de pacage
F
�t 4* )
dans; les G'achiers, comme situés dans la commune de
Vie. Quand cela serait, et en;adoptant même qu’il ne
résultât de cet,arrêt aucune propriété, cette possession,
et saisine attribuée aux.habùans de Vie , avec droit de
tenir en défenses, n’en serait que plus sacrée, si, comme
le prétend le sieur N a te y, le procès n’était pas fini j
car c'est un principe de jurisprudence et de raison,
que les parties doivent demeurer pendant toute la durée
du procès au même état qu’elles sont en commençant,
et qu’il n’y :a lie.u. à innovation qu’avec l’autorisation
du juge saisi. •
.
Admettons la fiction du sieur Natey que l’arrêt de
1641 n'accorde que provisoirement ', cette possession et
saisine, n’est-ce pas désobéir à la-justice que d’y porter
obstacle, sur-tout par voie de fait?
Il faut encore remarquer que le sieur Natey a fait
planter les communaux de 427 arbres j et les à entou
rés de fossés pour priver les habitans du pacage, après
qu’il les a assignés lui-même le 28 ventôse an 10, pour
reprendre le procès de 1 6 4 1 } prétendu indécis, et se
Voir faire défenses de pacager.
Il avouait donc avoir besoin et obtenir ces défenses
des tribunaux, et cependant il se rendait justice luimême.
Quand il n’y aurait que cette circonstance, elle mo
tive seule une demande eh complainte et sans qu’il fût
besoin d’interlocutoire. Car c'est un préjugé irréfléchi
que d’astreindre à prouver par des témoins ce qui est
prouvé par titres, et n’est pas même contesté.
�( 4 3 ')
- Jamais le sieur Natey n’a contesté àux liabilans de
Vie d’avoir joui un an, et même un siècle du droit de
pacage; ail contraire il les a assignés en reprise et au
pélitoire avant de leur disputer la possession.
« La complainte, dit M. Pigeau, est fondée sur le
« principe que tout possesseur étant présumé proprié* taire, jusqu’à la preuve du contraire, on ne doit pas
« lui enlever sa possession ja s q u à ce que la justice La,
ce Lui ait ôtée) qnë d’ailleurs on ne doit pas se faire « justice à soi-même, mais la réclamer» (tome 2yp. 8 ).
Quel besoin y avait-il donc d’interlocutoire pour véri
fier une possession reconnue par l’exercice de l’action
pélitoire? Et comment encore plus a-t-il pu résulter de
cet interlocutoire que les habitans de Vie n’eussent pas
de possession ? Jamais l’abus des mots a-t-il été poussé
plus loin ?
'
Sans doute'le mode d’interlocutoire que le juge de
paix sembla avoir adopté par erreur, devait conduire
au ne fausse conséquence, car il astreignait à prouver
que les liabilans de Vie avaient joui des Gachiers et
vergière exclusivement j ce qui a été corrigé avec raison_,
quoique le sieur Naley veuille en abuser.
Les liabilans de Vie ont interjeté appel de ce juge
ment, et ils y sont recevables, ainsi que l’a jugé la Cour
de cassation, en rejetant la décision du tribunal de
Clermont.
O r, le i . cr grief d’appel contre ce jugement est de
dire q u il était inulile, parce que la possession était
autorisée par un arrêt, parce qu’elle n’était pas niée,
F 2
�( 44 )
et parce que le sieur Natey ne pouvait’ changer l’état
des parties pendant la durée de sa propre demande.
t L e 2* grief consiste en ce que les habitans de
Vie ont été chargés de prouver une possession de
tout terns, au lieu de l’être d’un an seulement ; ce qui
a fait errer ensuite le ju ge, comme nous allons le re
marquer.
L e 3.* grief porte sur ce mot exclusivement ( i ),
que les habitans de Vie n’avaient pas articulé dans leur
demande, ni dans la réponse faite à l'interpellation
précise du juge de paix. 11 a donc jugé, à cet égard,
sans nécessité et ultrà petita.
. .
Quant au jugement du fond, le juge de paix n’a mal
jugé que pour avoir voulu être conséquent (2). S'il n’a
vait chargé les habitans de Vie que de prouver un
an de possession , il n'aurait examiné que les troubles
de cette dernière a n n ée , et il n’ aurait pas interrogé
les témoins sur ce qui s’était passé il y a 20 et 3 o ans.
( 1 ) Si le m ê m e mot a resté dans l’expédition du sieur N a t e y , l’honnête
ju g e de paix de V a y r e se trouve dupe de sa confiance. L e s habitans d e
V i e ne ve u len t abuser de rien ; car la v o ie de l’appel suffit pour effacer un
m ot qui n'a urait jam ais du être é c r it , et voilà pourquoi le sieur N a t e y a
fait tant d ’effo rts, à C l e r m o n t , contre l’ad m issio n .d e cet appel.
(2) L e sieur
N a t e y prétend que le jugem ent d éfinitif est l’ouvrage de
M . T o u t t é e ; mais lui a -t-on mis sons les y e u x tous les faits p r é c é d e r a ?
non ; car il est impossible que ce profond jurisconsulte ait d éc id é c o m m e on
suppose qu’il l’a fait. Si , a v e c une exp éd ition vicieuse de j u g e m e n t , on
lui a laissé croire que le m aire de V i e s’ était soumis à faire une p reuve
de possession e x c lu s iv e , il a été trompé.
�C 45 )
Mais le juge de paix avait ordonné une preuve de
possession de tout tenis ; et parce qu’il n'a pas voulu
avoir dit une chose inutile , il a recherché tout ce qu’on
a voulu déposer de plus ancien et de plus minutieux.
Trois noyers arrachés depuis vingt ans ont paru an
juge de paix un trouble de possession annale, parce
qu’ils étaient , à ce qu’on croit sans l’établir, sur le
bord de la Vergière.
Trois peupliers plantés lui ont semblé encore un
trouble de possession annale'du pacage, parce qu’ils
étaient plantés, dit-on, il y a plus de deux ans.
L e fait est qu’ils l’ont été moins d'un an avant la
demande, h l’âge de deux ans, ce qui a trompé deux
témoins. Alors cela aurait tout au plus obligé les haBitans dé Vie à faire remonter leur possession à l’an
et jour antérieur au trouble.
Au reste, cela est indifférent, veut-on croire les ha
bitons de Vie sur cette époque de plantation? ils ont eu
le droit d’assigner dans l’année du trouble, si c’en est
un ; et alors depuis les noyers jusqu’aux peupliers, il y
a plus d’un an de possession paisible.
Veut-on croire le sieur N atey, et le jugement dont
est appel? alors des peupliers, plantés plus de deux ans
auparavant, ne sont pas un trouble à la possession d'an
et jour.
Mais , dans le propre système du sieur N atey, ces
arrachement et plantation d’arbres ne seraient pas un
trouble. Car il prétend avoir le droit de couper et re-
�( 46 )
tailler les arbres èxistâns, comme aussi d’en planter de
nou ve au x en remplacement.
Ainsi cette possession articulée, qu’il ne s'agit ici d?avouerni decontester, est totalementdistincte du pacage.
Par conséquent il n’en résulte pas un trouble contre
celui qui, à ce qu’on prétend., n’avait pas le droit de
l’e mpêcher.
Le juge de paix, pour avoir été d’abord trop con
séquent , a fini par une inconséquence, car les noyers
et peupliers, qui l’ont si étrangement abusé, se rappor
taient au pacage de la Vergière, et non au grand Gachier, dans lequel les habitans de Vie avaient été encore
plus troublés ¡par un fossé de circonvallation, qui les
privait absolument du pacage.
* La prétendue interruption , arrivée h la Vergière-,
n'avait rien de commun avec le grand G achier, qui
lui-même est très-distinct de la Vergière. Ainsi le juge
de paix a rendu sans molifs la cause indivisible, dans
deux chefs séparés; ce qui est un vice subsidiaire de sa
décision.
11 serait difficile de contester sans injustice le droit
qu’ont eu les habitans de Vie de s’opposer au trouble
fait à leur possession. Toute commune a action possessoire pour ses communaux, comme la Cour de cassa
tion la jugé le i . er avril i8c6 (B ulletin, n,° 5 i ; D enevers , sup, page n 3 ).,Celle de Vie était fondée en
litres, et avait une possession avouée de deux siècles.
Ses moyens se réunissent donc à l’intérêt public pour
�( 47 )
empêcher une voie de fait repréliensible. Spolia tus
Unie oïrmia restituendus.
r é s u m é
.
Avant 1627 ,1a maison de Canillac prétendait aux
communaux Gachier et la Vergière, parce que, situés
sur la rive gauche de l’Allier, ils étaient le seul fonds
qui' empêchât la. haute justice de Monton de s'éten
dre jusqu’à la rivière.
Alors le propriétaire de Chadieu ne partageait pas
cette prétention, car il vendit Chadieu en 1627, con
finé par les Gachiers appartenant a T^ic-le-Comte, sauf
le droit de pacage, seulement., pour.lé propriétaire de
Chadieu. Si la maison de Canillac a persisté , après cette
acquisition, à vouloir ces communaux, ce n’était pas
comme dépendans de sa nouvelle propriété, mais tou
jours à cause de La haute ju stice de Monton qui avait
resté dans ses mains.
11
n’y avait que le retail des arbres qui fût réclamé
¿1 cause de Chadieu, par suite de l’acte de i 5 i i . Mais
le sieur Natey n’a acquis que .Chadieu, et jamais la
haute justice n’a été dans ses mains.
Par conséquent tous les procès de la maison de Ca
nillac, excepté le retail des arbres, sont étrangers au
sieur Naley.
Tout réside h son égard dans le contrat d’acquisi
tion de 1627 ?
Ia maison de Canillac, qui ne put
être restituée en 1641, contre les confins de cette vente,
�( 48 )
a vendu Chadieu à la maison de T anne, tel qu’il était
acquis en 1627 ; de même il a passé au sieur N atey,
avec la même consistance et limitation.
Quand le sieur de Tanne a plaidé en 1768, contre
le sieur Vassadel, il ne s’agissait que des arbres. Si le
sieur de Tanne y mêla des prétentions aux commu
naux , ces prétentions furent vigoureusement repoussées,
et c’est la seule partie de procès qui soit restée indécise.
Les habitans de Vic-le-Comte n’en tinrent pas moins
les communaux en défenses , comme ils l’avaient fait
depuis i 5 i i et 1641.
Ils n’ont jamais été troublés dans ce droit, et tout
ce qui a pu se faire, quant aux arbres, dépendrait du
mode d’explication de l ’acte de i 5 n , et ne serait pas
un trouble ; car il faut que le trouble consiste dans
l’intention formelle d’enlever la possession, pour se
l'attribuer à soi.
Au fait, les habitans de Vie ont pour eux des titres
formels, qui leur confirment h eux-mêmes la propriété
des communaux en litige.
Ils ont une seconde confirmation par arrêt souverain.
Ils ont une troisième confirmation de propriété parla
loi du 10 juin 1793, après laquelle le sieur Natey est
devenu acquéreur.
Us en ont une quatrième, préférable aux antres,
dans le titre même de propriété de Chadieu, l’acie
de 162,7,
De
�( 49 )
D esa part, qu’a le sieur Natey ? un seul acte sus
pect; acte tombé des nues ¿pour la cause actuelle, après
200 ans d’oubli et de non-exécution ; après 160 ans de
procès ; et cet acte encore lui est totalement étranger.
C ar, de bonne foi, il ne peut compter pour lui l’arrêtde 1768, qui, loin de rien juger avec les liabilans
de V ie , est au contraire suivi, à leur égard, de procé
dures appointées. Il ne peut opposer davantage la
transaction de 1769, qui réserve leurs droits.
Ainsi il n© reste au sieur Natey qu’ un seul et vrai
t itr e .... la vente de 1627, qui est le juge le plus in
faillible de toute la contestation.
Voilà donc aveu quelles armes le sieur Natey a en
trepris de dépouiller une commune paisible , d’une
propriété tant de fois disputée, et tant de fois restée à
son pouvoir.
Quand les Canillac gouvernaient le Languedoc et
l’Auvergne , leurs tentatives pour le même objet
furent toujours vaines, et leur puissance même fut, au
près des Cours, leur pierre d’achoppement. Quand ils
voulurent abuser de leur nom , ils furent punis d’un
décret de prise de corps.
Voilà quelle fut la justice de cette Cour suprême,
devant laquelle les puissans courbaient la tête, et qui
se faisait un honneur de venger les faibles de leur op
pression. Cette égalité de justice a été d’ une heureuse
influence pour les habitans de Vie ; cent quarante ans
de repos en ont été le fruit.
G
�'C: 5 o )
Comment se fait-il que le successeur inconnu des
Canillac , le propriétaire invisible de Cliadieu ait voulu
détruire en un instant une si longue paix, et troubler
une si heureuse harmonie?
Comment se fait-il que le système d’oppression des
Canillac contre les habitans de Vie , ait, après un siècle
et dem i, passé dans Famé d’an cit037en du canton de
Berne, qu’ils n’ont jamais vu.
Et cela encore après une révolution qui n’a anéanti
la féodalité que pour l'affranchissement des communes.
Quel est le but de ce sieur W atey, pour oser plus
en quelques mois, que n’ont tenté en un siècle ses
illustres prédécesseurs?
Quel est donc son talisman pour avoir tout boule
versé si rapidement, fait violence à une possession
paisible, irrité tous les esprits, heurté les intérêts d’une
multitude d’hommes qui respectaient les sipns.
Se croit-il dans celte contrée si fort au-dessus des
magistrats et des lois', qu’il se permette impunément
d accabler d’invectives et d'outrages un honnête fonc
tionnaire public, parce que, sans se cacher sous le nom
d'autrui, il a soutenu avec zèle et chaleur les intérêts
de ses concitoyens.
. v
Les liabitans de Vie furent mis en 1 666 sous la pro
tection du Monarque et de la C o u r , elle ne leur a
point été retirée, et ils sauront la faire valoir.
Ils l'invoqueront contre un nouveau genre de tyran
nie, qui, pour savoir se populariser, n'en est que plus
dangereuse et plus intolérable.
�( 5i )
Mais cet écrit n'en est point la place ; et tout ce qu’il
reste à y ajouter, c’est que le sieur Natey n'a pas plus
dans sa colère, que dans ses titres, les moyens de se
faire adjuger par les tribunaux une propriété, qu'il
n'obtiendrait qu’avec une évidente injustice.
M .e D E L A P C H IE R , A vo ca t
M .e M A Y E T , Avoué-Licencié.
A * R I O M ;
D E L ’I M P R IM E R IE D U P A L A I S ? C H E Z J.-C. SALLES»
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Le maire et les Habitans de Vic-le-Comte. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mayet
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
rivières
Description
An account of the resource
Mémoire pour le maire et les Habitans de Vic-le-Comte ; contre le sieur Natey, de Nyon, Helvétie.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1511-Circa An 12
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0412
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0413
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-le-Comte (63457)
Authezat (63021)
Nyon (Suisse)
Corent (63120)
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Domaine public
communaux
pacage
rivières
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M É M O I R E E N RÉPONSE
POUR
A
n t o i n e
VARAGNE,
et a u t r e s ;
intimés;
CONTRE
P i
erre
-I
srael
R O L A N D } Toi
n et te
-G
a b r i elle
R O L A N D , et Le sieur G R O S son m ari, appelans.
L
e
père du sieur Roland avait trompé les mineurs
Varagne et les avait dépouillés de tout leur patrimoine;
le sieur Roland et la dame Gros se plaignent aujourd'hui
de ce qu'un Varagne les a trompés à son tour pendant
qu’ils étaient mineurs, et a repris ses biens. Si cela était
vrai, il faudrait remonter à la source et ne tromper
personne ; mais ce n’est pas ainsi que les adversaires l'en
tendent; ils veulent bien rétrograder jusques avant la 2.
époque, mais non jusqu a la premiere, c est-à-dire,qu’ils
veulent retenir ce que leur père avait pris. A la vérité
ils sont obligés de convenir que son usurpation n’était
A
�( 2 )
.
pas la chose du monde la plus solide; mais au moyen
de quelques prescriptions et pérempiions ils espèrent la
légitimer, il laul croire au contraire qu’une œuvre d'iniquite et de tenèbres ne prévaudra pas contre une transac
tion sage et prudente qui en effaçait la turpitude; et la
publicité même que les héritiers Roland ont voulu
mettre à cette cause, ne prouvera que mieux à la Cour
qu’ils n’avaient pas mûrement réfléchi, quand ils ont.
voulu blâmer ce qu’avait délibéré leur famille, pour cou
vrir le passé et leur rendre justice.
F A I T S .
L e 18 septembre 1747, le sieur Pierre Roland avait
vendu à Géraud Varagne un domaine appelé de Fleu
ra c, moyennant 12,000 francs.
fut dit que Varagne
demeurait quitte du prix, au moyen de ce qu'il créait
11
et constituait au proiit du sieur Holanc! une rente de
5oo fr. par année, payable en deux termes, jusquesau
remboursement des 12,000 fr.
Géraud Varagne mourut en 1762, laissant trois enfans
mineurs, Antoine, Marianne et Sébastien.
11 avait payé
5
la rente de oo ir. avec la plus grande
exactitude, et 011 serait hors d’état d’établir qu’il eût
laissé pour un sou de deltes. Ses enfans devaient donc
être à l'abri de l’inquiétude.
Mais le sieur Roland îegrctlait singulièrement le
domaine de Fleurac q u ' i l a v a i t vendu , disait-il, ;i trop
bas prix , el que le bon étal où l'avait mis l ’acquéreur
�( 3
}
lui faisait encore envier davanlage. La mort de cet ac
quéreur lui fournit le prétexte de se reme!tre en pos
session en expulsant ses enfans. Abandonnés de tout le
✓
monde, ils ne pouvaient l’en empêclier, et d’ailleurs ils
n'ont jamais été informés des diligences qu’il pouvait
faire; c'est seulement après sa mort et par la remise
qu ’on leur a faite de ses procédures, qu’ils ont connu
celles dont ils vont rendre compte.
L e sieur Roland fit nommer un tuteur aux deux
puînés; et comme Antoine Varagne avait déjà 16 ans,
il le fit émanciper, c’est-à-dire, on présenta sous son
nom une requête au juge de Fleurac , le 20 décembre
1 7 5 2 , pour demander son émancipation (1).
Après cela, le 16 février i y
, le sieur Roland as
signa ledit A n t o in e V a r a g n e et le tuteur de ses frère et
sœur , pour lui payer s o fr ., la seule somme à lui due
pour le terme d’une demi-année de sa rente, échue
53
5
depuis La mort de Géraud Varagne.
Une sentence par défaut, obtenue le i .er mars 1753,
adjugea ces conclusions, et condamna les mineurs à dé
clarer de suite s’ils entendaient ou non être héritiers
de leur père.
Cette sentence était sans doute bien inutile pour moliver l’usurpalion du domaine, et le sieur Roland le
sentit bien. Il chercha à persuader Antoine Varagne
( 1 ) A i n s i il n’étnit pas ma ri é a va nt la mo rt de son p e r e , et
é m a nc i p é p a r le m a r i ag e > confine le disent les Adversaires ù Ici
f in de la p ag e 1 7 de leur m é m oi re .
A 2
�qu'il n’avait pas d’intérêt à conserver un bien où il pas
serait sa jeunesse pour partager ensuite son industrie
avec deux enfans en bas Age ; un jeune homme de
dix-sept ans n’est pas bien difficile à séduire. Deux cenls
francs que le sieur Roland lui promit, achevèrent de lui
tourner la tête: il promit tout ce qu’on voulut.
En conséquence le 24 mars 1753, le sieur Roland
1 assembla cinq cultivateurs sous le titre d’une assemblée
de parens, auxquels le jeune Varagne représenta, à ce
qui y est dit, que le domaine de Fleurac lui serait plus
onéreux que profitable, que son père Favait acheté
1rop cher, n’avait pas même pu payer les droits de lods,
qu’à la vérité il avait acquitté la renie, mais que c’était
en contractant plusieurs dettes passives, et que son père
en avait conçu un v if chagrin, qu’il croyait avoir été
cause cle sa mort, que même , en m ourant, il lu i avait
conseillé de supplier le sieur lio la n d de reprendre son
domaine ; d'après quoi il voulait suivre ce conseil, et
renoncer à la succession de sondit père.
Après cet acte de piété liliale, dans lequel le souf
fleur se fait assez remarquer, il était question de pren
dre l’avis de trois parens paternels et trois maternels
qui avaient été a s s i g n é s la veille ; leur délibération 11e
doit pas être passée sous silence.
lies trois parens maternels votent pour tout ce qui
est demandé, c’est-à-dire, 1 abandon et la répudiation,
quoique l’un lut l’opposé de l’autre 3 mais le sieur
lioland ava il voulu tout prévoir.
Des trois parens paternels,, l’un ne vint pas; parce
�( 5 )
que, clit-on , il était malade ; les autres deux, indignés
de ce qui se passait , et ne voulant pas participer à
l ’expoliation de leur neveu , déclarèrent qu’ ils n'en
tendaient pas qu’ il abandonnât Le domaine , ni qu il
répudiât. Celle réponse est consignée en Fade.
Cependant le juge, considérant que les parens ma
ternels étaient en plus grand nombre, homologua la
délibéra lion desdits trois parens maternels, et homo
logua même celle du curateur qui n avait rien dit.
Comme Antoine Varagne avait bien rempli son
r ô le , le sieur Roland lui donna le lendemain, non
pas précisément la somme promise, mais un billet de
200 francs, payable dans huit ans seulement, c’està-dire , à sa majorité , afin que si alors il voulait
se pourvoir, le sieur Roland pût au moins sauver
l ’argent.
Muni de cette homologation, le sieur Roland crut
en avoir assez fait pour mettre son usurpation en évi
53
dence , et par acte du 27 avril 1 7 , il donna à ferme
à un étranger le domaine de Fleurac ; et, s’il faut en
croire les adversaires, il poussa le nimia precautio jus
qu’à fiiire signer comme témoins , le curateur et le
mineur de dix-sept ans.
'
Cependant le sieur Roland ne pouvait se dissimu
ler qu'il avait fait une mauvaise procédure, et que
les pupilles Varagne, n'étant pas même nommés dans
l’avis des trois parens , auraient 1111 jour h réclamer
contre lui des restitutions de jouissances; il s’agissait
donc de porter remède ¿1 ce danger. Depuis plus de
�(
6
)
trois ans il était en possession du domaine, et avait
trouvé lout en bon état ; mais une vieille grange
lui sembla un prétexte suffisant pour ce qu’il avait a
faire.
L e tuteur étant mort, le sieur Roland en fît nom
mer un second le 24 mars i j d , et présenta une re
quête dans laquelle il exposa que les enfans Varagne,
ayant déserté le domaine , avaient laissé le tout en
très-mauvais état ; qu'il avait été forcé de préposer
des gens pour la culture, afin d’éviter le dépérisse
ment , que Le nouveau, tuteur ne prenait non plus aucun
soin pour jouir du domaine.
En conséquence il demanda permission d’assigner
Antoine Varagne et le tuteur, savoir au provisoire
pour faire constater Yétat de la grange, procéder au
6
bail a rabais des réparations, et au fonds , pour voir
dire que la vente de 1747 serait résiliée, et q u il serait
autorisé à reprendre la propriété dudit domaine , et
aussi pour être condamnés à payer ta rente de oo f ,
jusqu'à, ce q u il sera rentré en ladite propriété.
5
Le
5
mai il obtint une sentence provisoire qui lui
permit de faire constater les réparations; et aussi pro
digue de formalités pour celte inutile précaution, qu’il
en avait été avare en s’emparant de tout, 011 compte
dix-neuf pièces de procédure, affiches ou exploits entre
sa requête, et une sentence du i .cr juin qui adjugea
le rabais h 1,246 fr.
Ces réparations, comme on le vo it, n’avaient été
nécessaires que pour 1111 seul des batimens, et il était
�(
7 )
singulier qu’après trois ans d’usurpation, le sieur Roland
s'avisât de s’en prendre aux Yaragne qui n’avaient joui
que de 1747 à 1752.
Quoiqu’il en soit, après celle sentence provisoire,
le sieur Roland en oblint une seconde le 29 septem
bre 1756^ qui, adjugeant les singulières conclusions
de sa requête * déclara La vente de 1747 résolue, lui
permit de rentrer dans la propriété, et condamna les
Yaragne au paiement des arrérages ju sq u a sa rentree.
Cependant les collecteurs, plus justes que l u i , s’obs
tinaient à ne pas vouloir changer la cote d’impositions,
malgré son bail à ferme et sa nouvelle procédure ; en
conséquence, avant de laisser terminer le répartement
de 1 7 5 7 , le sieur Roland présenta une requête 11 l’i n
tendance pour se plaindre de celle insubordination 5
et comme il avait une charge à privilèges, il demanda
une cote d’oflice, modérée suivant le produit du bien,
qui à peine s’élevait, disait-il, d’après son bail, h cinq
cent cinquante francs : aveu, qui, en matière de sur
taux, où on n’exagère pas, fait assez voir combien
peu Varagne, cultivant par ses mains, avait dû être
grévé en payant 5 00 fr.
Sans doute, Antoine Yaragne , devenu majeur, 110
voulut pas accéder aux propositions qui lui furent
faites; car le 23 décembre de la même année, le
sieur Roland le lit assigner, ainsi que le tuteur, pour
voir déclarer lc?s sentences du i . er mars 1763 çt 29
septembre 1766 rendues contre eux-mêmes , en con
séquence , e s t - i l dit, se voir condamner à payer.,
�5
(
8
)
33
i.° 2 o fr. portés parla première, et
fr. de dixième;
2.0 1,246 fr. pour le montant du bail à rabais. Le 20
février 1768 , il surprit une sentence adjudicative.
Varagne en interjeta appel.
Cet acte imprévu dut déconcerter le sieur Roland,
qui sans doute chercha à renouer raccommodement,
et à gagner du tems. Ce qui le prouve, c’est que na
turellement le plus pressé, parce qu’il était créancier
et demandeur, il se contenta de se présenter le 19
avril 1768, et garda le silence pendant trois ans.
Après cette époque, il dressa le 18 juin 1771 un
exploit de demande en péremption , et il est démontré
par écrit qu’il n’y eut pas de copie remise, ou si on
Veut que l’huissier ne la donna pas. Aussi ne fut-il
pas difficile au sieur Roland , de surprendre , le 28
août 1 7 7 2 , une sentence par défaut qui déclara l’ap
pel périmé. Mais cette péremption, comme on voit,
était pe u i m p o r t a n t e , puisque la sentence de 1768
ne portait que des condamnations pécuniaires , et
ne disait rien de la résolution, déjà prononcée en
1756.
A peine Marguerite Varagne fut-elle majeure, que
le sieur Roland , toujours inquiet sur sa procédure,
chercha à obtenir d’elle un acquiescement aux sen
tences, et par acte du 16 février 1773, il paraît qu’il
lui extorqua cet acquiescement, sans prix.
Iiü sieur Roland mourut le i juillet de la mémo
a n n e e , et toute la peine qu’il avait prise pour êiro
rie I10
3
�'(
9
)
riclie ne l'empêcha p a s , ¿1 ce que disent les adver
saires, de laisser des dettes. Il avait fait un testament
par lequel il instituait celui de ses en fa l i s qui serait
élu par un conseil de famille.
Antoine Varagne ne redoutant plus le sieur Roland
mort, avait déjà annoncé qu’il allait interjeter appel
de la’ sentence de 17 ^ 6 , s’inscrire en faux contre
l’exploit de 1771 , et réclamer les restitutions de jouis
sances de vingt-un ans, tant de son chef que comme
cédataire de Sébastien son frère, et même du chef
de Marianne sa sœur , en se faisant subroger.
Cette réclamation était si peu difficultueuse , que
le conseil de famille, composé des hommes les plus
éclairés, ne trouva rien plus expédient que de rendre
le domaine , et de tâcher d’obtenir la remise des
jouissances.
En conséquence, Antoine Varagne traita le o oc
3
tobre 1773 avec le tuteur des enfans Roland, auto^
risé du conseil de famille. Après l’exposé de ses pré
tentions , l’acte porte qu’il reprendra le domaine,
vendu en 17 4 7 , et que le prix principal delà vente ( 1)
demeure fixé comme alors à 12,000’ francs et 72 fr.
d ’étrennes. Varagne paya de suite 2,472 fr. , et le
surplus fut dit payable à termes annuels de 1,600 fr.1
et de 1,000 fr. sauf l’intérêt jusqu’au paiement. A n
moyen de quoi le tuteur remit a Varagne les pro-
( 1) Les appelans avaient dit r e n ie , pag. 8 de leur mémoire:
erreur qui influerait sur les moyens de résolution. '
B
�( 10 )
cédnres et sentences , et le subrogea à l’acte passé le
16 février précédent avec Marianne Varagne, à ses
risques et périls. Et com me le sieur Roland pouvait
avoir déjà démembré le domaine, le conseil de famille,
toujours prévoyant, fit stipuler, pour éviter les recours,
que s'il y avait des ventes au-dessous de oo francs,
Varagne n’aurait rien à demander; mais que si elles
excédaient cette somme , il répéterait le surplus du.
prix seulement.
3
En vertu de cet acte, Antoine Varagne se mit in
continent en possession de son domaine , et paya ré
gulièrement deux à-comptes au tuteur ,■dès la pre
mière quittance, on vérifia quelles ventes le sieur
Roland avaient passées, et elles se trouvèrent d’un
pré de trois journaux, et de partie d'un autre pré.
Comme les deux actes ne portaient de prix que 778 f.
Antoine Varagne, suivant sa convention, n’eut qne
478 fr. à déduire.
Bientôt le sieur Pierre-Israël Roland devint ma
jeur, et (ce qu’il ne disait pas jusqu'à ce que les V a
ragne l’aient découvert) le même conseil de famille
s’assembla le 4 décembre 1777 pour l’élire héritier
universel de son père, à la charge de payer les légi
times portées par son testament.
Ledit sieur Roland prit des arrangemens avec ses
frères et sœurs, en se mettant en possession de toute
la succession ; il s’obligea vraisemblablement à payer
leur légitime qui était assez considérable, el il avoue
aujourd lmi qu’il les représente tous à. l ’exception de
la dame Gros.
x
�( II )
En 1 7 7 7 , ü éfaîl: échu un terme de 1,000 fr. sur
le traité de 1773; et le sieur Roland, aussitôt qu'il fut
héritier, n'avait pas manqué, à ce qu’il paraît, de
prendre connaissance de cet acte. Car non-seulement
il demanda à Varagne le terme échu , mais il l’en
gagea même à avancer le terme suivant , pressé sans
doute d’acquitter les légitimes.
En effet on voit par quittance du 27 juillet 17 7 8 ,
que le sieur Pierre-Israël Roland , avocat en parle
ment, reçut d’Antoine Varagne 2,000 francs, savoir
1,000 fr. pour le terme échu h la Toussaint de 1777?
et 1,000 fr . par anticipation pour Le terme a échoir
à La Toussaint de 1788, porté au traité passé devant
Le notaire soussigné, entre son tuteur, les conseillers ci
la tutelle et ledit V^aragne.
Dira-t-on que c’était Varagne qui s’empressait d’avoir une ratification d’un majeur; mais elle n’est pas
la seule ?
Quatre ans après, et lorsque le sieur Roland eut eu
le loisir de méditer l’actif et le passif de la succession
de son père, le surplus des 12,000 fr. était é c h u , et
Varagne paya par quittance du 11 juin 1782, audit
sieur R o la n d , avocat, la somme de 4,000 francs pour
tout reste et fin a l paiement du prix de la vente et
délaissement du domaine de Fleurac ayant appartenu
au x auteurs dudit sieur R o la n d , et délaissé audit
Varagne par traité reçu par le notaire soussigné, de
laquelle dite somme de 4,000 fr. ensemble du prix
entier de Ladite vente, Ledit sieur R oland c l promis le
faire tenir quitte envers et contre tous.
�( I2 )
Antoine Varagne mourut, après avoir ainsi liquidé
sa fortune; il laissait sa veuve tutrice; et l’un de ses
fils, ayant été m arié, laissait aussi une veuve tutrice,
le sieur Roland trouvait là une bien belle occasion
pour marcher sur les traces de son père, et repren
dre ce qui 11e lui appartenait plus. La crainte de trouver
de 1*obstacle en son nom seul lui fît emprunter le
nom de ses frères et sœurs pour former sa demande,
et cacher soigneusement la qualité d’héritier universel,
dont il avait cependant usé en prenant tout le prix
de la vente.
En conséquence, par requête du
février 1788,
il fut formé demande devant le juge de Salers, en
25
nullité du traité de 1 7 7 3 , et désistement, ¿1 la requête
des sieurs Pierre-Israël R o la n d , avocat, Jean-Marie
Roland curé de Salers , G u y Roland , prêtre corrimunaliste, Louis-Israël Roland, prêtre, et ToinetteGabrielle Rol an d , contre Catherine Lape }Tre , en
qualité de tutrice des enfans d’Antoine Varagne père
son mari, Marguerite Chaumeil, aussi tutrice des en-
3
fans d’Antoine Varagne fils son mari, et Jean V a
ragne fils.
Les Varagne qui ne voulaient pas plaidera Salers,
se laissèrent condamner par défaut le 10 juin 1788,
et interjetèrent appel en la sénéchaussée d Auvergne.
La cause fut appointée au conseil, et le sieur Ro
land comprenant tissez que sou systeme d envahisse
ment n’y ferait pas fortune , v o u l u t se rendre un
peu moins défavorable. 11 reconnut qu’il avait mal
�13
(
)
à propos demandé le désistement lot al , et que Sé
bastien Varagne aurait eu droit de rentrer dans le
domaine; en conséquence il se départit de sa demande
pour un tiers. A l’égard des deux autres , il soutint
que son tuteur avait été trompé, et qu’après le traité
de février 1 7 7 3 , et les sentences de 1768 et 1 7 7 2 ,
Marianne et Antoine Varagne avaient perdu toute
propriété, de sorte que le traité de-novembre 1773
contenait une aliénation de biens de mineurs contre
laquelle ses frères et lui pouvaient réclamër pendant
trente ans.
Mais les tutrices Varagne, pour repousser ces moyens,
firent des recherches dans les études de notaires, et
trouvèrent les quittances de 1778 et 1782 , le testa
ment du sieur Roland père, et l ’élection de 1777.
Ces pièces, jointes aux circonstances de l’acte de
1773 , .étaient si décisives que la sénéchaussée d 'A u
vergne, par sentence rendue au rapport de M :r Bidon,
le
3 septembre
1790 , n’hésita pas à infirmer celle par
défaut de Salers , et à débouler les sieurs Roland do
leur demande.
A leur tour les sieurs Roland ont interjeté appel
de celle sentence au parlement de Paris; ce n’est
qu’en l’an 10 qu’ils en ont repris les poursuites de
vant la Cour.
ne reste plus qu’à rendre compte
des moyens respectifs et à répondre à ceux proposés
par les appelans dans leurs écritures et leur mémoire.
]1
�(
)
M O Y E N S .
système des appelans est, comme on le prévoit
sans peine , fondé tout entier sur l’état des choses
subsistant avant la transaction de 1 7 7 3 ; alors disentils aux Varagne , votre expropriation était légalement
consommée, vous deviez une rente foncière que vous
ne payez pas, ainsi il y avait heu à résolution ; vous
avez déguerpi les biens, et vous le pouviez, quoique
mineurs, avec le décret du juge. Ainsi rien n’était
plus légitime que les sentences de 1753 , 1756 ,'et
1768; d’ailleurs c'était chose jugée à cause de la pé
remption prononcée en 1772 contre Antoine Varagne,
et quant à Marianne elle avait tout approuvé par un
L
e
traité contre lequel il n’y avait pas lieu h retrait, dès
qu'il ne s’agissait que de résolution; ni à subrogation
légale, puisque ce traité acquérait au sieur Roland
rem sib'i necessariam.
Si donc, disent les adversaires, nous étions proprié
taires incommutables en 1 7 7 3 , notre luleur n’a pu
aliéner notre propriété sans formes et sans nécessité.
Nous nous sommes pourvus dans le tems, et les quit
tances du prix ne sont pas une approbation.
Quoique cet ordre de moyens soit une inversion de
questions, et que naturellement la première chose ¿1
examiner dût être la fin de non recevoir , cependant
les intimés suivront cette série des rno}rens présentés
parles adversaires, puisque leur but est d y répondre.
Ils examineront donc i.° si le sieur Roland avait re-
J
�5
( i )
couvré la propriété du domaine de Fleurac, lorsqu’il
s’en empara en 1753 ; 2.0 si au cas qu’il ne fut pas alors
propriétaire, il Test devenu par les sentences de 1 7 , ;
1 7 5 6 , 1768 et 1772 , et si elles étaient chose jugée
en 1773, tant contre Antoine que contre Marie V a
ragne; .° si la transaction du o octobre 1773 était
nue aliénation des biens des mineurs Roland; 4.0 si,
en ce cas, les adversaires se sont pourvus en tems utile;
53
3
5.°; enfin
3
si les quittances de 1778 et 1782 produisent
une fin de non recevoir.
P
r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L e sieur R oland pere avait-il recouvré la propriété
du domaine de Fleurac, lorsqu’il s’en empara en 1753
L e sieur Roland avait vendu ce domaine en 1747 ;
ainsi sans difficulté Geraud Varagne en était proprié
taire ¿1 son décès en 1752.
Mais quelle était la nature de cet acte de 1747 ? car
de cet examen préalable dépend la discussion relative
aux moyens proposés de déguerpissement et de réso
lution.
Souvenons-nous qu’en 17 4 7 .le sieur Roland avait
vendu un domaine moyennant 12,000 fr. ,pourlaquelle
somme l’acquéreur avait constitué une rente de oo fr.
Ainsi d ’après les principes celle renie 11’élait paspuremem foncière ; c’était une simple renie constituée,
assise sur un immeuble avec privilège spécial.
5
�( x6 )
Par conséquent le bailleur n'avait pas retenu le do
maine direct ;dèslors c’était une aliénation pure et simple
de sa part , ce qui changeait totalement le droit qu’il
s’est arrogé de s'emparer du fonds, comme s’il 11’eût
délaissé que la propriété utile.
Cette différence à faire entre les ventes h charge do
rente constituée, ouïes baux à rente foncière, nous
est enseignée par les auteurs du nouveau Denizart au
mot arrérages : «-Unhéritage, disent-ils, peut être vendu.
« moyennant une rente de telle somme, ou bien le prix
« de l’héritage peut être fixé d’abord ¿1 telle somme,
c< et ensuite les parties convenir par le même acte que
rr la somme formera le capital d’une rente constituée
«
«
«
«
entre les mains de ¡’acquéreur. Dans le premier cas
nul doute que la rente ne soit foncière ; mais au second,
la rente renferme une véritable constitution de rente
à prix d’argent >3.
Sans doute cette opinion ne sera pas taxée d'innova-»
lion; car on la retrouve dans Loyseau en son traité du
déguerpissement. «Toutefois, dit-il, en toutes ces renies
« foncières, il y a une signalée précaution, et unere'«■marque de grande importance , c’est quesi le contrat
« est fait en forme de vente , auquel le prix soit parti« culaiisé et spécifié, pour lequel prix soit constitué
* rente à la suite du même contrat, alors, à bien en« tendre , telle rente ne doit pas être estimée foncière,
c< mais simple rente constituée, (f. 1 • ch. . n.° 14e! 17).
L e même principe est enseigné par Bas 11âge sur l’aiv
ticle
de Normandie, par Pothier au traité du con
trat
5
5^5
�( 17 )
'
trat de constitution de re n te , n.° 1 3 3 , par divers arrêts
de cassation de Tan 9 et Tan 1 1 , et par un arrêt de
la Cour de l’an i 3.
Cela posé, on ne voit plus où s’appuient les deux
moyens des adversaires, fondés sur ce que les enfans
Varagne avaient pu déguerpir le domaine, pour ne pas
payer la rente, et sur ce que, ne payant pas la rente,
la résolution était de plein droit après trois ans.
L e premier moyen ne semblait pas trop raisonnable,
parce que dans les faits ci-dessus rapportés, on ne voit
rien qui ait beaucoup d analogie avec un déguerpisse
ment. Mais les adversaires prétendent que le simple
fait d’abandon du domaine équivaut dans l’espèce à
un déguerpissement, par la raison, disent-ils, que d'a
près L o y se a u , les mineurs peuvent aussi déguerpir
pourvu qu’il intervienne décret du juge pour le leur
permettre, après un avis de parens. Or, ajoutent-ils,
cette autorisation judiciaire se trouve dans la délibé
ration des parens qui avaient autorisé les mineurs à
abandonner le domaine et même à répudier la suc
cession.
‘Erreur dans le fait et dans le droit.
Dans le fait ; car celte délibération n’autorisait pas
les mineurs, mais l’émancipé seul; et loin d’être com
plet te, on voit que les parens paternels eurent l’énergie
de s’indigner bâillement de ce qu'on méditait contre
un enfant, et que les parens maternels accédèrent seuls
à ce qui était demandé.
Dans le droit ; car ce n'est pas cette délibération
C
�( i8 )• •
qui aurait produit un déguerpissement, elle y auto
risait seulement Fémancipé, et cependant il s'en est
tenu à cette démarche, déjà même le sieur Roland
s^était emparé du domaine; et quand il sollicitait une
répudia lion, il est clair qu’il exigeait deux choses con
tradictoires , parce qu’un déguerpissement était une
adition d’hérédité.
Un déguerpissement n’est pas un acte tellement sans
conséquence qu’il puisse avoir lieu par accord verbal,
car il est une aliénation, et non midis pactis dominicu
transferuntar.
D ’abord il n’est pas très-certain qu’un tel acte soit
permis a des tuteurs, même avec le décret du juge;
la loi s’y oppose formellement ; prœdia vendi, v e l
7
i p s j s c a r e r e permitti non debet, et si permis sam s it
nulla est venditio, rmllumque decretam. (L. si æs. ff.
de reb. eor. etc.)
Cependant admettons qu’ un tuteur puisse déguerpir
avec le décret du juge; au moins faut-il, quand le
décret est intervenu ; qu’il y ait un déguerpissement
formel.
Loyseau , invoqué par les adversaires, dit
déguerpissement doit être fait en jugem ent,
qu’on ne confonde pas celle expression, il
c’est-à-dire en L'audience de ju stice, les plaids
*
«
«
«
*
que le
et pour
ajoute,
tenant-
car, continue cet auteur, le respect ,1a majesté du
lieu où la justice est exercée, la présence des magistrais, la fréquence des assislans donne a cet acle
plus d’autoriié , parce que le déguerpissement est
un acte d’importance. (Liv. .)
5
�9
( i )
Si donc il y avait eu lieu à déguerpissement, les
adversaires ne pourraient en invoquer aucun , car il
n'y en a d’aucune espèce. Mais ce n ’était pas le cas
dès que la rente n’était pas foncière. Car, cdmmë dit
Chopin sur l ’art. 109 de la coutume de Paris, « en
« rente rachetable sous un principal exprim é, n’y a
« lieu à déguerpissement, cum sit ootiàs emptor, quàm
« conductor pretii vectigalis ».
Opposera-t-on qne ces principes sont en faveur du
bailleur et non contre lui : mais dès que le déguer
pissement est une aliénation , il faut que le contrat
soit bilatéral ou synallagmatique, et jamais il ne sera
possible de penser que des mineurs sur-tout aient fait
un déguerpissement valable, sans aucun acte, même
hors jugement et par le seul fait de leur dépossession.
Quant à la résolution, faute de paiement par trois
ans, elle n'avait pas lieu en rente constituée; mais
3
ce serait devancer les adversaires que d’examiner
ici cette question, .car ils ont été forcés de recon
naître q u e , d’après leur propre syslê'me, il n’y avait
pas lieu à résolution quand leur père s’empara du
'domaine en iy’ ; parce que la sentence du r.er mars
de ladite année ne portait condamnation que d’ un
demi-terme de la rente de oo francs, échu encore
depuis la mort de Géraud Varagne.
Ainsi, sur celte première question, il est constant
que sous aucun point de vue , le sieur Roland n’é
tait propriétaire du domaine de Flenrac lorsqu’il s'en
empara, et le donna h ferme le
avril 1753.
53
5
^5
C 2
�( 20
DEUXIÈME
)
QUESTION.
L e sieur R oland est-il devenu propriétaire du do
maine de Fleurac par les sentences de 1 7 5 3 , 17^6,
1768 et 1772 ?
Ces sentences étaient-elles passées en force de chose
jugée en 1773 , tant contre Antoine V^aragne que
contre Marianne sa sœur ?
L a sentence de 1753 ne signifie rien pour la pro
priété, cela est convenu; elle n’était qu’un achemi
nement aux autres, et eût été elle-même irrégulière,
puisque le sieur Roland a dit Géraud Varagne mort
en novembre 17 52 , et que depuis cette époque jus
qu’après les trois mois et quarante jours il n ’avait pas
d’action, d'après l’ordonnance de 1667 , renouvelée
par le Code civil.
En 1756, il y eut deux sentences, mais la première
11e parle que de bail à rabais et non de propriété ;
c'est la seconde seulement, du 29 sepiembre, qui pro
nonce la résolution de l ’acte de 1747*
On ne peul pas douter que le juge n’ait été sur
pris lors de cette sentence , puisque l ’exposé de la
requête, sur laquelle elle est rendue, suppose que le
sieur Roland n’était pas encore en possession du do
maine de Fleurac. Il demandait j u s q u e s - l à les arré
rages de la renie de oo f r . ,, et cerles c’était abuser
étrangement du silence forcé des mineurs Varagne;
car s'il eût conlessé au juge, que depuis plus de trois
5
�(
)
ans il percevait les fruits du domaine, sur lequel la
dite renie était assise, le juge au lieu de lui adjuger
sa demande, l'aurait éconduit, quoique par défaut.
Cette sentence, il est vrai, quelque mauvaise qu’elle
fût, disposait de la propriété du domaine; mais elle
était susceptible d’appel pendant trente ans d’après la'
jurisprudence; et dès-lors en 1 7 7 3 , elle pouvait être
attaquée.
Ce n’est pas ainsi, à la vérité, que les adversaires le
supposent. Ils soutiennent, au contraire, qu’il y avait
chose jugée en 17 7 3, et que tout espoir de retour était
ôté contre la procédure précédente, sauf néanmoins
les droits de Sébastien Varagne qu’ils reconnaissent
entiers. A l’égard des deux autres, ils séparent Antoine
Varagne de Marianne sa sœur.
Antoine Varagne, d ire n t-ils, avait bien interjeté
appel de la sentence<de 1768; mais cet appel avait
été déclaré péri, et la péremption emportait le bien
jugé de cette sentence, et dès-lors de celle du 29
septembre 1766.
Mais les sieurs Roland confondent aujourd’hui ces
sentences, qui avaient un objet très-distinct en 1772.
L a sentence de 1768 n'avait pas pour objet de
faire déclarer les précédentes exécutoires contre les
Varagne , puisqu’elles étaient rendues contre eu x mêmes:; si le mot y fut employé ce n’était que par un
vice de style; car le but très-clair de la demande était
d’obtenir le paiement de 1,246 fr. prix apparent du
�( 2* )
bail à rabais, dont le S.rRoland n'avait pas encore obtenu
de condamnations. On voit en effet parla lecture de la
sentence de 1768, qu’elle ne porte que des condamna
tions pécuniaires, et ne dit pas un mot de la résolutiou.
La sentence de 1772 prononce la péremption de
l ’appel de celle de 1768, et est encore plus étrangère que
toutes les autres à la propriété du domaine de Fleurac;
car, quand la péremption serait irrévocable, l’effet de
la sentence de 1768 ne s’étendrait pas au -d elà des
condamnations qu’elle prononce.
A in si, quand les sentences de 1768 et 1772 auraient
passé en force de chose jugée en 17 7 3 , au moins la
sentence du 29 septembre 1706, la seule qui pronon
çât la résolution de la vente de 1747, était-elle évidem
ment susceptible d’appel en 1773.
Mais si, par impossible, la Cour pouvait considérer
dans la sentence de 1768, une résolution que celte sen
tence ne prononce pas , comme alors celle de 1772 au
rait une plus grande influence, c’est alors le cas d’exa
miner la validité de l'exploit de 1 7 7 1 , sur lequel cette
sentence a été surprise.
Il est démontré que la copie de cet exploit a été souf
flée. La lecture de l’original le prouve. Et en vain les
adversaires ont-ils ouvert une longue discussion surdes
mots écrits 011 ajoutés , on voit clairement que leur
père , ou le rédacteur de l'exploit a eu deux pensées
l ’une après l'autre, et que la deuxième a corrigé la
première ; mais ce n'est là disputer que sur le genre
d’inlidélité ; car l e s adversaires sont obligés d’avouer qu’il
�(
2 3 }
y en a une. L ’huissier au moins n’a pas porté la copie;
l'assigné, qui ne i’a pas reçue, soutient l'exploit nul, et il
l ’est sans difficulté. Si donc il n’y avait pas de demande
en péremption, il n’y avait pas de péremption; alors
l’appel était recevable en 1773. Toute la faveur eut été
pour cet appel, et toute la défaveur pour une péremp
tion extorquée par un faux évident.
Du chef deMarianne Varagne, Antoine eût été, disentils, moins reccvable encore, puisqu’elle avait tout ap
prouvé par le traité du 16 février 1773 , ainsi personne
ne pouvait réclamer pour elle.
Pourquoi donc ses frères n’auraient-ils pas eu d’action
en subrogation légale , si M ari anne avait cédé un droit
litigieux et universel ? Ce tte prétention paraît choquer
les adversaires; mais c’est qu’ils partent toujours de cet te
idée fausse, que leur père avait conservé la propriété
directe du domaine, et alors ils se croient dans l ’ex
ception de la loi exceptis cessionibus quas ¿s qui possidet pro tuiliorie sucî accipit.
Cela est très-bien quand, avec un titre légitime pour
une partie , on possède tout, et que, pour confirmer sa
possession , 011 achette rem necessariam.
Mais quand on n’a que la portion d’un cohéritier par
usurpation, il est clair qu’on ne cherche pas à y rester
pour éviter un procès; mais qu’on se prépare à en sou
tenir un contre les cohéritiers.
Suivant le système des adversaires, et en interprétant
juduïquemenl l’excepliou de la loi, rien ne serait plus
�24
(
)
facile que de l’éluder. L ’acquéreur d’un droit de copro
priété ou d’ ùn droit successif se mettrait d’avance en
possession d’uri objet, et ensuite il en serait quitte pour
dire qu’il est dans l ’exception de la loi, parce que
possidetis, pro tuitione accepct.
Pourquoi encore les frères de Marianne Varagne
Sauraient-ils pas eu une action en retrait; car s’il est
certain que le domaine de Fleurac a resté dans la famille
Varagne, il est clair que Marianne Varagne était pro
priétaire d’une portion , par la règle Le mort saisit le vif.
Mais, disent-ils, un retrait n’a lieu qu’en matière de
vente ou d’acte équipolent à vente.
L ’objection même les condamne; car dès que l’acte
de 1 747 était une vente, Marianne Varagne, propriétaire,
n ’a pu s’en départir que par unacteéquipolent à vente.
En vain oppose-t-on qu’elle a cédé son droit par une
transaction. Une transaction n’est qu’ un acte indéfini
qui admet toutes les espèces de conventions, et qui
dèslors retient elle-même le nom le plus analogue à
son objet principal. Ainsi quand , par l’effet d’une
transaction, l’immeuble d’un contractant passe h un
autre, l ’acte est toujours une vente, puisqu’il en a les
caractères; car la qualité des actes ne doit pas se juger
par les noms qu’on leur donne, mais parleur substance.
Si Marianne Varagne n’avait eu que ju s ad rem> il
est possible que la transaction ne lïit pas considérée
comme une vente, dès qu’elle n’aurait cédé qu’une
simple prétention litigieuse ; mais il est clair qu'elle
avait ju s iti rcy et qu’étaul propriétaire au décès de
son
�25
(
)
son père, aucun acle ne lui avait ôté celle propriété.
Son abandon était donc une vente pure et simple.
Or, sans se jeter dans un long examen sur les cas
où le retrait était admissible, les adversaires ne nie
ront pas qu’en vente d’immeubles il ne fût admissible
au profit d'un frère.
Ils ne nieront pas encore qu’il n’eût été même ad
missible quand Marianne n’aurait abandonné que j u s
ad rem; car il est de principe enseigné par Polluer
d’après Dumoulin, Duplessis et autres auteurs, que la
vente d'un droit réputé pour héritage suffit pour
donner ouverture au retrait.
L e même auteur dit plus clairement à la page pré
cédente, que la créance qu’on a pour se faire livrer
un héritage, est sujette à r e t r a i t si elle est cédée: et
cette doctrine n’est qu’une conséquence du principe
que actio ) qtiœ tendit ad aliquid immobile ; est im
mobiles .
Dans la circonstance sur-tout, et après la conduite
du sieur Roland père , lorsqu’il venait d’y mettre la
de rnière main en ôlanl le patrimoine d’une jeune fille
sous prétexte des dangers d'un procès, il n’est pas
de tribunal qui eût refusé d'admettre un retrait qu’au
rait exercé Antoine ou Sébastien Varagne ; parce que
c’était la voie la plus légitime pour tout rétablir en
son premier état, et qu’il ne s’agissait que d’arrêter
une usurpation.
Mais, objectent encore les adversaires, qu’aurait pu
fane Antoine Varagnep tant pour lui que pour sa,
D
�( 26 )
sœur, quand il aurait pu exercer les droits de l ’un
et de l'autre, et interjeter appel de la sentence de
1*756? cet appel aurait été non recevable au fonds,
parce qu’une résolution prononcée est inattaquable.
Sans doute, une résolution Légale est inattaquable,
et il était inutile de rappeler tout ce que dit sur cette
question M.r Chabrol : car ce n’est pas le principe que
contesteront les V a ra g n e , mais bien l’application, qui
est véritablement choquante sous toutes les faces.
D ’abord M.r Chabrol parle des rentes foncières , et
ici il ne s’agit que de rente constituée.
Il aurait fallu cinq ans d’arrérages dans ce dernier
cas; il eût fallu trois ans, si c’eût été une rente fon
cière. Or , ici il n’y avait que six mois d’arrérages.
Pour que la résolution soit légale , il faut que la
sentence, qui condamne au paiement, porte un délai,
sinon la demeure peut toujours être purgée. L a sen
tence de 1 7
56
n ’en portait aucun.
Ce n’dst qu’après la sentence et le délai que le
bailleur peut se mettre en possession; ici, le vendeur
usurpait depuis trois ans. L e motif de résolution em
ployé par le sieur Holand était même mal-honnete:
loin d’y parler d’un abandon inutile fait par des pu
pilles chassés du domaine, il prenait pour prétexte le
défaut de paiement des arrérages. Il trompait donc
la justice, car il demandait ces arrérages, et cepen
dant il jouissait : il avait ôté par son propre fait aux
mineurs Varague toute possibilité de les payer.
�(
’
r
«
-1
TROISIÈME
L a transaction du
i
3o
)
*
—•
/.
QUESTION.
octobre 1773 éta it-elle une
aliénation des biens des mineurs R oland ?
r
•
,
r
citations des adversaires, pour,montrer qu’on
ne peut vendre sans formalités le bien des mineurs,
ne sont pas plus applicables, que n’est fondé le re
L
es
proche fait à la sénéchaussée d’Auvergne de les avoir
méconnues.
. .1
Il est très-vrai que le tuteur ne peut de gré h gré
et sans nécessité vendre les immeubles de ses mineurs.
Mais ici, c e 'qué cédait le tuteur 11’était pas un im
meuble de ses mineursj et il y avait nécessité.
Ce n’était pas un im m e u b l e des mineurs Roland,
puisque leur père l’avait vendu ; que l’acte de 1747
n’étant pas un bail à rente, il s’était départi, de la
propriété ,utile et directë , puisqu’eùfin il n’ÿ avait
eu ni pu y avoir de résolution valable.
;
Il y avait nécessité, puisque les parties allaient enIrer en procès, et que ce procès ne pouvait pas être
d’une solution difficile.
• -f
Ccir des mineurs dont un seul avait trente-cinq ans,
se plaignant d’un mode d ’usurpation qui eût crié ven
geance, n'avaient pas à craindre une résistance bien
sérieuse.
Quand le faux de l’exploit de 1771 n’eût pas fait
tomber la péreinplion, elle ne sc fûl ra p p o rte qu’à
la sentence de 1768, et le pis-aller eût été de payer
D 2
�( 28} ,..
mal à propos 1,246 fr., si les héritiers Roland avaient
établi avoir employé celle somme. Mais de sa part,
Antoine Varagne aurait eu à répéter les jouissances
de vingt-un ans à dire d’experts.
O r , les adversaires ont prétendu que le domaine
valait o,ooo fr. • et en né fixant les fruits qu’à 1,000 fr.
par an, ils eussent été débiteurs de 21,000 fr.
A la vérité il eût fallu déduire moitié pour la
rente de oo fr. plus les 283 fr. de la sentence de
1 7 5 3 , et si on veut les 1,246 francs; mais, comme
on v o i t , les mineurs Roland auraient toujours été re
liquat aires de 9,000 fr.
3
5
Ils avaient doncplus d’intérêt à traiter que Varagne,
puisqu’ils obtenaient le sacrifice de cette somme, au
lieu de faire'eux-mêmes celui des réparations, comme
ils essayent de le persuader. .
Leur tuteur avait sans difficulté le droit de transiger,
puisqu’il né s’agissait que de terminer un procès. En
vain dirait-011 que ce procès n'était pas commencé 5
car il est de principe que transactco f i t de Lite rnotâ,
aut movendâ.
L ’exposé de la transaction prouve les difficultés qui
allaient naître : au lieu d’assigner et de plaider, on
transigea. .
Si quelque chose devait ajouter à la faveur due à
un acte aussi respectable qu’une transaction, ce serait
de connaître les personnes qui composaient le conseil
do famille, et qui en ont été les auteurs. Car que
Maigne, tuteur, fui ou non un chapelier el un homme
�(
2
9
3
peu intelligent, l’acte n’était pas purement de son fait,
il était le résultat des réflexions d’une famille distin
guée, ¿1 laquelle les adversaires devaient plutôt d e là
reconnaissance que des reproches ; reproches d'ailleurs
d’autant plus aisés à multiplier, que les intimés n’ont
aucun intérêt d'en vérifier la sincérité.
QUATRIÈME
QUESTION.
Les appeians se sont-ils pourvus en tenis utile contre
La transaction ¿/e 1773?
O u i, disent-ils, par deux motifs ; le premier c’est
qu’elle n’a été passée que par notre tuteur; le second
c’est que vous avez retenu les pièces, et que le délai
pour nous pourvoir ne court que de leur remise.
La réponse ¿1 ce premier motif pourrait être ren
voyée h la question suivante, parce qu’au moins les
quittances de 1778 et 1782 ne sont pas du fait du
tuteur; mais pour suivre exactement les moyens des
adversaires, il suffit quanta présent de leur rappeler
ces quittances.
Il est aisé de voir le but de la distinction à faire entre
les actes des mineurs, et ceux de leur tuteur.
Souvent il serait injuste de les déclarer non recevables
après 10 ans, à l’égard de ces derniers actes, parce que
peut-être ils en auraient ignoré l’existence; et la pres
cription n’est qu'une peine imposée par la loi ¿1 celui
qui néglige d’agir.
Mais toutes les fois qu il est certain que le mineur a
�( 30 )
connu l'acte , toutes les lois sur-tout rqu'il l’a adôplé ,
c ’est alors que le fait du tuteur étant le sien, le mi
neur a à s’imputer de ne pas se pourvoir.
- Or, par cela seul que le sieur Israël Roland, hériiier deTson père, a connu et adopté en 1778 l ’acte de
1 7 7 3 , et sans examiner reflet de son approbation, il
a dû se pourvoir.
Comme, dès 1778, il connaissait la date de ce traité
de 1773, il devait savoir qu'à supposer qu’il eût droit
de l’attaquer, il ne le pouvait que jusqu’en 1783, parce
qu’il se l ’était approprié; cependant il n’a formé de
mande qu'en 1788.
Alors non-seulement il y avait plus de dix ans de*
puis le traité de 1773, mais le sieur Israël Roland avait
plus de trente-cinq ans.
L e deuxième moyen des adversaires sur cette ques
tion annonce l'embarras d’en proposer de meilleurs;
C a r , contre^quel acte devaient-ils se po u rv o ir ?
Est-ce contre la transaction? Est-ce contre les pièces
y visées ?
Sans doute ce n’est pas contre les sentences y énon*
cées, puisqu'ilsenexcipent. C ’est donccontrela transac
tion; mais ils n'articulent pas sans doute que Varagne
l'ait retenue.
A vec un système comme celui qu’ils hasardent, il
faudrait dire que tout traité d’après lequel on aura
remis des pièces à une partie (ce qui arrive tous les
jours) sera attaquable à perpét uité; et, comme dit Du^
moulin pour les choses précaires, eUa-niper mille antios,
�(
3 1 7
D ’abord les adversaires pouvaient très-bien voir dans
la transaction , que leur père avait vendu un domaine,
et l’avait ôté ensuite à des mineurs par abus de leur
faiblesse, mais que ces mineurs l'avaient repris ; c'était
là tout le secret des pièces remises à Varagne.
Or, comme la transaction n’était pas retenue, si
les adversaires voulaient se pourvoir, rien ne les en
empêchait; et alors, comme aujourd’hui, ils auraient
redemandé toutes ces pièces., qu’on ne leur cache pas.
Outre la faiblesse de ce moyen, il n’a de prétexte
que la mauvaise foi; car les adversaires ont prétendu
que les sentences de novembre 1756 et de 1772 n’é
taient pas énoncées dans le traité, de 1773, de même
que le traité du 16 février, pour leur en- cacher l’exis
tence. Cette allégation leur a même paru si impor
tante qu'ils y ont employé les pages 7 , 8 , 49, 5o, 53
et 54 de leur mémoire.
L ’omission supposée de la sentence de novembre
1756 n'est qu'une misérable équivoque. La sentence
de novembre 1756 était au moins visée et énoncée
dans celle de 1768 , puisque les adversaires préten
dent que celle dernière renouvelait en entier celle
de 1756.
En second lieu , on voit à la fin des dires de V a
ragne au traité, que parmi ses moyens contre la pro
cédure il disait qu’il était recevable à lenir les encragemens de son père
que l a
sentence
dans
La c i r c o n s t a n c e s u r - t o u t
qui or d o nn e
la
Ré s o l u t i o n
jde
�3
( a )
LA v e n t e n’enlève cette faculté qu’après o ans, etc.
Or , où est donc cet le sentence, si ce n’est celle
du 29 novembre i y
?
^
3
56
On n’a donc pas caché aux mineurs qu’il existait
une sentence prononçant une résolution.
Quant à la sentence de 1772 , l’équivoque est en
core plus sensible ; on nous a c a ch é , disent les adver
saires, qu’il y eût une sentence prononçant la péremp
tion (pag. 8 et 9).
Mais , en parlant de la sentence.de 1768 , on ajoute
que Varagne s3était rendu appelant, mais que la sen
tence avait passé en force de chose jugée comme n ayant
pas fa it diligence sur son appel pendant trois ans con
sécutifs.
N ’est-ce donc pas se faire des moyens de tout que
de ne pas voir là le synonime d’une péremption ; et
que les expressions ci-dessus expliquaient môme mieux
le droit des mineurs: dès-lors on ne voulail pas écarter
ce qui leur aurait donné trop de lumières.
Enfin à l’égard du traité avec Marianne Varagne,
comment les adversaires ont-ils encore osé dire qu’on
le leur avait caché.
L a transaction porte que le sieur R o la n d , par acte
!»
(
#
reçu V alette, notaire, Le 16 février dernier, contrôlé
le 2 , a réglé avec Marianne Varagne, sœur dudit
jinloine.
Plus loin, Antoine dit qu’à l’égard de Facto passé
avec
5
1
�33
(
)
Marianne Varagne, il était dans le cas de demander
La subrogation.
L ’acte est donc énoncé, visé et daté. L e règlement
avec la sœur ne*peut supposer qu’une cession de sa
part, puisque le frère veut s’y faire subroger.
Ainsi les adversaires sont obligés d’en imposer à la
Cour pour se rendre favorables, et il est de la plus
grande évidence que rien ne s’opposait à ce qu’ils ré
clamassent dans les dix ans contre le traité-de 1 7 7 3 ,
s’ils cro}raient y être recevables, ce qui va être enfin
examiné.
C I N Q TJIEJVEE
QUESTION.
L es quittances de 1778 et 1782 produisent-eLLes une
J in de non recevoir contre La demande?
P
ie r r e -Isra el
R
oland
venait d’être élu héritier
universel de son père en 1777 ^lorsqu’il reçut le prix de
la vente de 1747, en vertu de la transaction de 1773.
Si l’ouverture de la succession 11’était pas en droit
écrit, au moins le domaine de F le uracy était-il situé5
Israël Roland était donc seul maître du procès y re
latif. D ’ailleurs , en coutume comme en droit écrit,
les légataires sont les maîtres d’accepter le legs porté
parle testament; or, le sieur Roland ne s’est pas mis
en peine d’établir que ses frères et sœurs aient répudié
leur legs pour réclamer leur légitime, quoiqu’on lui
ait fait souvent cette interpellation.
•Antoine Vuragnc ne pouvait donc s’adresser qu’à
E
�3
( 4 )
lui seul pour p a y e r , et la Cour a bien remarqué que
le sieur Israël Roland agissait aussi comme seul héritier
puisqu’il reçut la première fois tout le terme échu, et
la seconde fois la totalité aussi des quatre termes restans.
Mais , dit le sieur Roland, forcé par la conséquence
de son propre f a i t , l'approbation d’un acte nul ne le
valide pas, parce que qui cotifirmat nihil dat d’après
Dumoulin , en second lieu je serais relevé comme
mineur initio inspecte, puisque^ l’acte étant commencé
pendant ma minorité; ce que j ’ai fait en majorité n'en
est qu’ une suite.
La première objection n?est fondée que sur des prin
cipes absolument inapplicables. L e passage de Dumou
lin ne s'applique qu’aux actes radicalement nuls, et
lion à ceux simplement sujets à restitution.
Or, ce serait pour la première fois qu’on soutien
drait que la transaction faite par un tuteur, m ê m e a v e c
aliénation, fût nulle d'une nullité radicale, et ne fût
pas susceptible d’une simple ratification de la part du
mineur devenu majeur.
Au lieu de citer la loi si sine decreto qui ne peut
s’appliquer que par argument à contrario, les adver
saires eussent dû voir la loi 10 au if. de rebus eoru/n
qui sub lu tela sunt sone decreto non aUenandts , dont
la disposition expresse décide î:i difficulté dans les plus
fort.s termes. Car après avoir prohibé les ventes’du bien
des pupilles, (ailes sans décret du juge, cette loi dit
que si néanmoins le tuteur en a employé le prix dans.
�(
3 5 }
son com pte,et que le mineur l’ait reçu en majorité, il
ne peut plus revendiquer l ’héritage vendu. Prœdio pupiU illicite venundato , œstimatione solutâi vindicatio
prœdii ex œquitate inkibctur. A quoi la glose ajoute non
tam aspere tractanclum est ju s prokibitœ alienationis
prœdiorum pupilariorum , ut et solutâ œstimatione ci
tu tore in eniptorem pupilus summo jure experiatur.
• A plus forte raison quand le mineur reçoit directe
ment le prix du débiteur lui-même , e t , comme le dit
le profond Voétius sur la même loi , ’le paiement, même
la demande, même encore la simple approbation du
prix après la majorité empêchent la réclamation. Si
sine decreto alienata ponerentur tninoris bona , tune
¿mm subsecuta post majorennitatem impletarri solutio,
çeL exa ctio, vel petitio , veL acceptatio œstim ationis,
necessariam tacitœ ratihabiùonis inducit conjecturant.
Userait difficile de rien ajouter à des autorités aussi
claires, et c’est d’ailleurs un principe universellement
reconnu que l’on approuve une vente quand on en
reçoit le prix.
D ’après cela il est inutile de peser les expressions
employées dans les quittances de 1778 et 1782, puis
qu’il ne s’agissait pas de confirmer un acte radicale
ment nul. D ’ailleurs, en lisant les quittances, on ne
peut pas douter que le sieur Roland ne connût la
transaction aussi bien que Varagne, puisqu’il savait le
«montant de chaque terme, leur échéance, et ce qui
restait à payer. Il Scivait que c était pour le domaine
•d,e Fleurac, et il savait encore que ce domaine prove-
�36
(
)
nait de ses auteurs. Son consentement à recevoir le
prix d’un domaine transmis par ses auteurs à Varagne
aurait donc valu seul une vente nouvelle, car on y
trouve res, consensus et pretium. Ajoutons que c’était
un avocat qui traitait avec un cultivateur.
L e second moyen des adversaires est tiré du para
graphe scio qui , comme le dit Lebrun , a fait errer
plus de jurisconsultes que la mer n’a égaré de pilotes.
Mais cette loi a aujourd’hui un sens bien déterminé,
et n'égare que ceux qui veulent lutter contre la ju
risprudence.
L e mineur, qui a imprudemment accepté une suc
cession à la veille de sa majorité,, ne renonce pas tou
jours aussitôt qu’il est majeur; et comme chaque jour en
ce cas il continue de faire acte d’héritier , la loi examine
si ces actes ne sont qu'une suite de ce qu’il a com
mencé en minorité , et alors elle l ’en relève.
La difficulté de distinguer la nature de ces actes
donne lieu à tous les majeurs, qui se trouvent dans
ce cas, de prétendre que ce qu’ils ont fait est une
suite de la première immixtion. Maison examine tou
jours si le mineur était obligé de faire l’acte nouveau,
ou s’il pouvait s'en empêcher.
« Car, si le mineur, dit Lebrun, pouvait
» de mettre la dernière main à l’afíaire ;
« après favoir achevée en m a j o r i t é , il ne
(f cire relevé. »
Les adversaires s’emparent d’une partie
s'exempter
en ce cas,
pourra pas
de ce pas-
�. (
37
)
sage, et disent aussitôt que la transaction était com
plète pendant leur minorité, et que Lebrun à été mal
appliqué.
: ;
Mais un peu plus loin ils eussent trouvé que L e
brun lai-même enseigne que le cas seul où le nouvel
acle ne produit pas une fin de non recevoir, est seu
lement quand ce nouvel acle a une conséquence né
cessaire avec ce qui s’est fait en minorité , et préci
sément Lebrun prend pour exemple quand L’affaire
ayant été a c c o m p l i e en minorité
jorité par quelque nouvel acte.
se
confirme en ma
Remarquons que pour employer ce m o y e n , les
adversaires s’approprieni la transaction de 1773, comme
étant de leur fait par le moyen de leur tuteur, el c’est
de leur part une inconséquence qui marque assez leur
embarras.
D ’ailleurs, en quelque'position qu’ils se placent, ils
ne peuvent invoquer Yinitio inspecto, puisque les quit
tances ne sont certes pas une suite nécessaire d’un acte
qu'ils disent nul, et sur-tout d’un acte qui n’était pas
de leur propre fait.
JSec silentio prœtermittendum, dit encore Voetius sur
le même titre (tu digeste, alietiatiqnes illas, quce i n i t i o
inspecto
nullœ erant, tanquam .contra senatusconsultum factce, subindè est post/ado confirmari posse
prœsertlm si minor j a m major fa ctu s alienationem
ratam lia buer it , sive expresse s i p ^e t a c i t e .
La question de Yinitio' inspecto s’est présentée de
�(
38
)
vant la Cour dans une espèce biçn plus favorable pour
le réclamant. Un mineur ayant fait acte d'héritier
était poursuivi pour une rente ; à peine majeur ( de
21 ans seulement) le créancier lui fit faire une rati
fication. II se pourvut presqu'aussilôt après, et fit va
loir son ignorance absolue des forces de la succession,
ayant eu un tuteur encore comptable, et il exposa que
l ’adition d’hérédité emportait nécessairement le devoir
de payer les rentes; mais par arrêt du 4 floréal an 10,
la Cour proscrivit sa prétention, attendu que sa rati
fication n’était pas une suite nécessaire de l’aditioft
d’hérédité.
Les adversaires ne se dissimulent pas la faiblesse de
leurs moyens contre la fin de non recevoir , et en
désespoir de cause ils observent que la dame Gros ne
peut en être victime, n’ayant pas donné ces quit tances,
D é j à les V ara gne ont répondu à ce m o y e n par le
défi d’établir qu’aucun des puînés Roland ait répudié
le legs du .testament de leur père pour demander leur
légitime. Une autre réponse va se trouver dans un
arrêt de la Cour de cassation.
En 1791 , Marie Eordenave fille aînée, avait été
instituée héritière par le testament de sa mère.
Elle vendit un domaine en minorité en 179 3, en
Vertu d’autorisation; et après des oilres réelles, elle
reçut partie du prix en majorité.
Elle demanda la nullité en l’an 4 > e l ses sœurs so
�9
‘( 3 >)
.
joignirent à elle. L e tribunal de 'Pau avait adjugé la
demande; mais, sur l’appel, celui des Hautes-Pyrénées
avait déclaré Marie Bordenave non recevable'à cause
de sa quittance, et ses sœurs aussi non recevablesparce
qu’elles pouvaient réclamer leurs droits sur1 lei' Autres
biens.
*
.r
:
Ai *’
Sur le pourvoi des trois sœursj la Cour de cassation
a rejeté la demande par arrêt du 4 thermidor an 9,
par ce' seul motif qui embrasse tout : « Attendu que
« Marie Bordenave , héritière( universelle , a ratifié la« dite vente par la quittance qu’elléla donnée en ma" jorité, de la portion qui restait à payer à l’époque à
, « laquelle elle est devenue majeure.«
Il
semble que ce motif soit fait exprès pour la cause ;
la fin de non recevoir des deux adversaires y est écrite,
sans qu’il soit besoin d’y changer un seul mot.
Les fins de non recevoir sont souvent odieuses parce
qu’elles tendent h priver une partie d’user de son droit.
Mais ici, il est difficile d’en proposer une plus favorable ;
car elle n’a pas pour but de priver le sieur Roland de
ses moyens au fonds, mais bien de l’empêcher lui-même
.d^opposer d’autres lins de non recevoir plus odieuses.
Ce 11 est pas que tous ses arrière-moyens fussent très
¿1 craindre, parce que son père , trop pressé d’usurper
n ’a rien fait de bon; mais il est toujours agréable de
vaincre un adversaire avec ses propres armes, et de
neutraliser une injuste attaque. A u reste le’moyen pria-
�4
( ° )
cipal de la cause n’est pas une simple fin de non re
cevoir et n’en a que le nom. Car le procès a été éteint
par une transaction ; le sieur Roland en l'adoptant a
voulu aussi éteindre le procès, et a véritablement fait
une transaction nouvelle, contre laquelle il ne doit pas
être admis à se pourvoir.
M .r T I O L I E R , Rapporteur.
M .e D E L A P C H I E R , Avocat.
M .e T A R D I F , Licencié-Avoué.
A
RIOM,
P e rimprimerie du Palais , chez J. - C. S
a l l e s
#
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Varagne, Antoine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
abus de tutelle
conseils de famille
fraudes
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Antoine Varagne, et autres ; intimés ; contre Pierre-Israël Roland, Toinette-Gabrielle Roland, et le sieur Gros son mari, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1747-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
40 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0409
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0741
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MEMOIRE
EN
RÉPONSE,
POUR
Le sieur S O U T E Y R A N , ancien avocat au
P u y, intimé ;
CONTRE
Le sieur S A U Z E T -S A IN T -C L É M E N T et
la dame S A L V A IN G D E B O IS S IE U ,
son épouse, appelans.
L E père du sieur Souteyran acheta en 1791 un domaine
du sieur Saint- M a rce l , aïeul de la dame Sauzet. Il le
paya; il s’en mit en possession. Son fils en jouit encore.
A
�( 2 3
L e sieur Sauzet a prétendu faire résulter du contrat
de mariage de son beau-père que cette vente est nulle,
parce que le sieur Saint-M arcel ayant tout donné à sa
iille (sauf réserve de vendre ce domaine et plusieurs
autres, jusqu’à concurrence de ses dettes, à juste prix
et sur le pied de l’estimation), ne devoit rien en 1 7 9 1;
qu’ainsi il n’avoit pas dû vendre, et qu’il y avoit d’ailleurs
vilité de prix.
Rien n’étoit plus simple que cette discussion; elle dépendoit des clauses d’un contrat de mariage, et du fait
de savoir si le sieur Saint-Marcel avoit épuisé le droit
de vendre en 1791.
Les premiers juges ont pensé que non : mais quoiqu’il
V eût une estimation , ils en ont ordonné une seconde,
%
>
/
contradictoire avec le sieur Sauzet, pour vérifier s’il y
avoit vilité dé p r ix , comme il l’a prétendu.
L e sieur Souteyran ne s’en est pas plaint : le sieur
Sauzet avoit bien moins s’en plaindre, puisque c’étoit
lui donner le moyen de prouver qu’il n’avoit pas menti.
C e p e n d a n t il a interjeté a p p e l , et il en étoit fort le
maître, puisqu’il avoit à parcourir deux degrés de ju
ridiction.
Mais a-t-il cru suppléer à de bonnes raisons, par un
torrent d’injures, prodiguées sans ménagement à un
homme mort? à un homme dont la probité n’eut .point
été aussi indiscrètement attaquée devant les premiers
juges, parce qu’ il avoit emporté leur estime au tombeau.
C’est pour la cour que le sieur Sauzet avoit réservé
des diatribes mensongères , une accusation directe de
rapine et d’ infidélité , qu’ il a cru luire résulter de la
�(3 )
seule circonstance que le sieur Souteyran père étoit
'procureur.
O u i, il étoit procureur : il en remplissoit les devoirs
pénibles avec zèle et délicatesse. Son fils s’honore de lui
appartenir , et se fait un devoir sacré de venger sa
mémoire.
Que quelques classes de la société saisissent les occa
sions d’attaquer les individus attachés au palais, ce bour
donnement de frelons ne peut incommoder que ceux
qui ont des reproches à se faire. Dans le temps de
M olière ? il étoit du bon ton d’attaquer les médecins.
A près eux on s’empara des procureurs ; et dans la mo
notonie des cercles, le plus insipide conteur est encore
sûr de suspendre les bâillemens de la multitude, s’il a
quelques sarcasmes à renouveler sur ce chapitre. On se
croit vraiment du mérite ? q u a n d on a dit son mot sur
cette classe laborieuse; et il n’est pas d’oisif qui n’ait
là-dessus sa provision de rebus dans la mémoire. C ’est
à la vérité une excuse pour son inutilité ; l’amourpropre la lui suggère : et il faut bien laisser quelque
chose h dire a ces oisifs-là, puisqu’ils n’ont rien retenu
de plus essentiel.
Mais quand devant une cour supérieure, un juge de
p a ix (i) attaque directement un procureur d’avoir abusé
de son ministère envers son c lie n t, pour envahir une
propriété par un acte f r a u d u l e u x quand il veut faire
rougir son fils d’avoir dans les mains un bien mal ac(i) L e sieur S a u z e t-S a in t-C lé m e n t a toujours pris au procès la
qualité de propriétaire ; mais il est juge de pai x c l at/oemr
A 2
�.(4 )
quis ( i ) , ce juge de paix doit savoir que les magistrats
auxquels on soumet cette grave accusation , ne la re
garderont point comme un quolibet de société, et qu’il
s’engage à avoir à la main la preuve de ce qu’il avance.
O r le sieur Souteyran nie formellement que son père
ait été le conseil du sieur Saint-Marcel, et que celui-ci lut
son client. Quand il l’auroit été, il eût pu acquérir un
immeuble de gré à g r é , sans sortir de la ligne de ses
devoirs.
L a famille de Boissieu a-t-elle resté dans la ligne des
siens, quand elle a abreuvé d’amertume toute la vieillesse
d’un père, d’un bienfaiteur?
L e sieur de S a in t-M a rc e l avoit réduit l’une de ses
filles à une légitime , pour enrichir l’autre. En se dé
pouillant pour elle, il s’étoit réservé la faculté de vendre
cinq domaines; il n’en a pas vendu la m oitié, et encore
n’a - t - i l pas fait une seule vente sans être inquiété y
tourmenté, réduit à se voler pour ainsi dire lui-même,,
afin de vivre dans l’aisance. Et ainsi quarante ans. de sa
vie se sont passés à lutter contre une interdiction de
fait, à laquelle on vouloit le réduire.
Maintenant qu’on est enrichi de sa dépouille, on le
peint comme un être foible et inutile, qui n’a vendu que
par caprice ou co n tra riété, qui a dépouillé son h é ri
tière d’une fortune considérable par trente-trois ventes
arrachées à la fa ib lesse de ce vieillard nonagénaire.
(i) Toutes cos injures sont du fait p erso n n e l du sieur SauzetSaint-Clémont : le jurisconsulte auteur de son mémoire a exigé
sa signiHim;*
.
�(S )
Et trente-deux de ces ventes étoient faites avant 1788.
La trente-troisième l’a été en 1791.
Et le sieur Saint-Marcel a survécu quinze ans à cette
dernière vente.
Et il n’a été nonagénaire qu’à l’heure de sa mort.
V oilà cependant avec quelle exactitude le sieur Sauzet
appelle l’aniraadversion de la cour sur le sieur Souteyran
dès les premières lignes de son mémoire.
L e sieur Souteyran dédaigneroit ces injures pour luimême ; mais il y est justement sensible , puisqu’elles
attaquent un père dont il respecte avec raison la mémoire.
Si les sieur et dame Sauzet l ’eussent imité , il n’y
auroit pas de procès.
F A I T S .
L e sieur Brunei de Saint-Marcel, etla dame A rcis, son
épouse, ont laissé deux filles : Claire-Thérèse qui épousa
le sieur de Saint-Julien, et Marie-Louise qui épousa le
sieur Salvaing de Boissieu, père de la dame de SaintClément.
Par le contrat de la dame de Saint-Julien, du 17 fé
vrier 1 7 5 9 , ses père et mère lui constituèrent une dot
de 40000 francs ; le contrat porte quittance de i 5ooo fr.,
et il est stipulé que 10000 francs sont payables dans
l ’année du premier décès des père et m ère, et i 5o o o fr.
dans l’année du dernier décès.
L e contrat de mariage de la dame de Boissieu est
du 8 juin 1762 ; et comme c’est dans les clauses de cet
acte que le sieur Saint-Clément veut puiser Ieskmoyens
�C6 )
de nullité de la vente consentie an sieur Soufeyran, il
importe d’en analiser les clauses avec ordre et exactitude.
i ° . lies père et mère de la dame de Boissieu lui font
donation de tous leurs biens présens et à venir , s a u f
les réserves ci-ciprès.
2°. Ils se réservent la jouissance des Liens donnés ,
pendant leur v i e , réversible de l’un à l’autre , et un
capital de 12000 fr. pour s’en servir dans leurs besoins,
et en disposer tant à la vie qifci la mort , à leur
p laisir et volonté , en fa v e u r de qui ils jugeraient à
propos ; réversible également de l’un a l’autre, a prendre
sur les biens à venir s’il en échoit, et subsidiairement,
sur leurs biens actuels.
30. Les père et mère de la future lui constituent en
avancement d’hoirie, une somme de 20000 fr. et 19 marcs
2 onces argenterie : l’acte porte quittance de 11000 f r . ,
et de l ’argenterie.
4 0. Les sieur et dame Marcel déclarent n’avoir aucuns
deniers en mains pour le payement de la somme restante
de 9000 f r a n c s , ni pour acquitter la dot de la dame
Saint-Julien, dont il reste dû 12600 f r a n c s , nonobstant
la quittance insérée dans son contrat de mariage de 1769,
a in si que les ternies ci éch o ir , et pour acquitter leurs
autres dettes passives ; en conséquence il est convenu
et accordé qu’il sera libre aux sieur et dame SaintMarcel de vendre et aliéner les domaines de R o ch a rn a u d , M ons et O r z illa c , les champs et vignes de
C o u ch â t, les fonds dépendans du domaine de P o u za ro l,
les prés situés au terroir de C e y ssa c, et finalement le
domaiuc de C h a sp u za c, à leur juste valeur, et sur le
�:
(7 ^.
pîccl de l’estimation, pour servir au 'payement àesdites
créances, concurrem m ent a u x susdites constitution s, et
autres dettes connues des parties intéressées, ensemble
p our remplir la réserve de 12000 / r ., si les donateurs
sont dans le cas de s’en servir; le tout suivant le payement,
et délégation qui en sera faite : à l’effet de quoi il sera
fourni au sieur de Boissieu un double de la quittance
du produit desdites ventes.
5°. Il est ajouté que Vexcédant du susdit p r ix de vente
au-delà desdites créances et réserves , sera placé , du
consentement du sieur Boissieu et son épouse, chez des
personnes solvables, pour le revenu en être payé aux
donateurs pendant leur vie, sans les acquéreurs pouvoir
être recherchés sous quelques façons et manières que ce
puisse être, en rapportant néanmoins un légitime emploi
de conformité à l’état connu des parties.
6°. Il est dit enfin que le sieur de Boissieu lui-même
pourra vendre aussi les autres biens après le décès des
donateurs, à leur juste v a le u r, excepté un moulin et une
maison , sauf encore le cas ou il en trouveroit un prix
avantageux.
L e même jour dudit contrat, du 8 juin 176 2 , il fut
fait entre les sieur et dame S a i n t -M arcel un état double
des dettes dont il est parlé dans le contrat, lesquelles se
portent à 49600 francs, ¿1 quoi il est ajouté une somme
de 4000 francs; ce qui porta le montant desdites dettes
î\ 63600 francs.
Il paroît que les sieur et darne Saint-M arccl ne tav-
�(8 )
dèrent pas à commencer les ventes de quelques-uns des
objets ci-dessus réservés: il y en eut trois dans Humée 1762,
et environ v i n g t - c i n q dans les années 1 7 6 3 , 176 4,
1765 1766 1767 1768 1769 1770 1 77 2 1773
177 6 , 1781 , 1782 et 1788.
D ’après l’état notifié par le défunt, le total desdites
ventes se portoit, en 1788, à 49440 francs.
Suivant le même état , il avoit payé à ladite époque
de 1788, pour 53246 francs de dettes, et il avoit besoin
de vendre encore , i°. pour une somme de 3806 francs, '
pour être au pair de ses payemens; 20. pour iôooo francs
encore dûs à la dame de Saint-Julien ; 30. pour 12000 fr.
dont il s’étoit réservé la faculté de disposer.
T elle étoit la position du sieur de S a i n t - M a r c e l , lorsque
la création des assignats vint lui inspirer des craintes pour
,
,
,
,
,
,
,
,
l ’avenir; soit qu’il ne voulût que se reposer sur lui-même
du soin d’assurer à la dame de Saint-Julien, sa fille aînée,
la somme intégrale qu’il lui avoit promise; soit que dès
que la défiance p o u r le sieur de B o i s s i e u , son g e n d r e ,
ne lui fît craindre q u ’il s’a c qui tte r oi t envers elle avec
une monnoie dont il avoit vu jadis une épreuve désastrueuse, le sieur de Saint-Marcel publia le projet qu’ il
avoit de vendre ce qu’il s’étoit réservé par le contrat de
mariage de 1762.
Il proposa le domaine de Chaspuzac au sieur de Sou
teyran, qui lui en offrit le prix le plus avantageux. Si l’un
avoit besoin de v e n d r e , l’autre avoit besoin d’acheter. Car
la dame Souteyran venoit de recevoir 16000 francs d’ une
succession du sieur O b r ie r , son oncle, et vouloit les
placer. X,c sieur Saint-Marcel crut faire un acte de bon
père
�(9)
père de famille, en vendant ce domaine de Chaspuzac ,
situé dans un pays montagneux et aride, plutôt que le
domaine d’Orzillac, bien plus considérable, et situé dans
un pays de vignoble.
L a convention avec le sieur Souteyran étoit terminée
lorsque le sieur de Boissieu , qui , à ce que disent les
sieur et dame Sauzet, étoit en correspondance avec son
b eau-p ère, sur plusieurs difficultés d’in té rê t, se mit en
tête d’empêclier les ventes que le sieur de Saint-Marcel
avoit droit de consentir. Il fit savoir hautement qu’il entendoit s’y opposer, et menaça même de son courroux
ceux qui oseroient acquérir.
Il poussa plus loin ses projets d’opposition ; car le 31
mars 1791 , il fit signifier au sieur Souteyran qu’il avoit
appris sa négociation avec le sieur de Saint - Marcel :
mais que la propriété du domaine de Chaspuzac appartenoit à sa femme et à lu i, et non au sieur de SaintM a rc el, et qu’en conséquence ils étoient opposans à la
vente que ledit sieur de Saint-Marcel étoit sur le point
de consentir.
Il faut avouer que cette notification ne donna pas du
goût au sieur Souteyran, et que ne voulant rien avoir à
démêler avec le sieur de Boissieu, il rompit les conventions
qu’ il avoit faites.
Plusieurs mois se passèrent, et le sieur de Saint-Marcel
les employa à persuader au sieur Souteyran qu’il ne devoit
pas plier sous la tyrannie du sieur de Boissieu, honnne
connu pour être aux expédions, et qui n’avoit fait une
hostilité que dans l’espoir de laire acheter son conseuB
�C 10 )
tement : il alla même jusqu’à faire un point d’honneur
au sieur Souteyran de l’obligation où il étoit de ne pas
rompre un engagement sur lequel lui , Saint - M a rc e l,
avoit com pté; et il ne lui dissimula pas qu’ il ne regarderoit que comme une rupture fort volontaire le pré
texte que prendroit le sieur Souteyran de l’opposition
du sieur de Boissieu , puisqu’il etoit bien évident qu’il
avoit le droit de vendre.
L e sieur Souteyran ne voulut pas sedédire, et consentit
d’acquérir ; mais il y mit pour condition que le sieur
S a in t-M a rc e l feroit cesser l’opposition de son gendre.
En conséquence, par acte du 25 octobre 1 7 9 1, les sieur
et dame Souteyran achetèrent du sieur Saint - Marcel le
domaine de Chaspuzac, moyennant 21100 francs, dont
16000 francs furent payés par la dame Souteyran , et
5 io o francs par le sieur Souteyran, son mari.
L e contrat porte que la vente est faite en exécution
des clauses du contrat de mariage delà dame de Boissieu ,
du 8 juin 1762, pou?' p a y e r se s d ette s p a s s iv e s , acquitter
la somme de 1200 o fr a n cs q u i reste due de la dot fa ite
à son autre fille Claire-Thérèse S a in t-M a rce l, veuve
du sieur Suret - S a in t- Ju lien , et se retenir et disposer
de 1200o fra n cs par lu i réservés dans ledit contrat de
mariage.
L a dame de Suint-Julien intervient au contrat pour
recevoir ladite somme de 12000 francs pour le resle de
sa dot, et subroger l’acquéreur à scs privilèges et h ypo
thèques.
Quant aux 9100 francs reslans , le sieur de Saint-
�C 11 )
Marcel déclara les avoir reçus à compte de sa dite réserve
de 1 2000 francs, ou autres hypothèques par lui acquises3
suivant l’état par lui tenu.
Cette vente étant consommée, le sieur Souteyran n’eut
rien de plus pressé que d’engager le sieur S ain t-M arcel
de tenir à son tour sa parole.
Il lui signifia en conséquence l’opposition du sieur de
Boissieu, et lui donna assignation le 19 décembre 1791.
L e sieur Saint-Marcel, de sa part, la dénonça à son gendre
par exploit du 13 décem bre, avec assignation en main
levée.
Pendant qu’on plaidoit sur cette opposition , le sieur
de Boissieu continuoit ses menaces , et ne dissimuloit
pas que son'moyen unique de faire tomber la vente du
25 octobre , étoit le défaut d ’estimati on stipulée en son
contrat de mariage.
Comme le sieur de Souteyran n’avoit point à redouter
cette estimation, il la réclama lui-même du sieur de SaintMarcel ; en conséquence, par acte notarié du 25 avril
1792 , les parties convinrent que pour ôter tous pré
textes au sieur de Boissieu , elles dérogeoient au prix dé
terminé par l’acte du 2 5 octobre 1 7 9 1; elles stipulèrent
que ladite vente du domaine de Chaspuzac sorti roi t son
plein et entier effet pour le prix et valeur qui en seroit
fait par le sieur R e co u l, expert-féodiste au P u y , et que
les parties seroient tenues d’acquiescer à ladite estimation
sans pouvoir revenir contre. Ce fut une faute peut-être
de ne point appeler le sieur de Boissieu à cette estimation ;
mais le contrat de mariage ne le disoit pas.
En exécution dudit a cte , le sieur Recoul fit son estiB 2
�__
( 12 )
-mation le 14 mai 1792. On y remarque tous les immeubles
estimés en détail à la somme de 2142-7 francs.
Cette estimation fut approuvée par le sieur SaintMàrcel et par les sieur et dame Souteyran; ce qui étoit
assez inutile, au moyen de l ’acte précédent; et le sieur
Souteyran paya l’excédant de 427 francs, outre les frais
de l’acte du 23 a v r i l , et moitié des huit journées em
ployées par l’expert pour ladite estimation.
A p rès ces formalités les procédures furent reprises*
lies sieur et dame de Boissieu, dégoûtés sans doute de
leur opposition inconsidérée , signifièrent que par le
contrat de mariage de leur fille avec le sieur Sauzet-SaintClément, ils lui avoient fait une donation universelle, et
q u ’en conséquence le procès la regardoit seule à l’avenir.
Un jugement de jonction étant intervenu le 22 ju in ,
le sieur de Boissieu, plus accoutumé aux procès que tous
les procureurs dont son gendre le suppose intim idé, in
terjeta appel dudit jugem ent, et fit une exclusion de tri
b u n a u x . Cet a p p e l fut porté à I s s e n g e a u x , et p a r jugement
du 28 octobre le sieur de Boissieu fut déclaré non recevable.
L a cause étant revenue au Puy 7 fut appointée en
droit par jugement du 30 avril 1793; et depuis cette
époque le sieur de Boissieu et sa femme, les sieur et dame
Sauzet-Saint-Clément, déjà mis en cause, avoient abso
lument abandonné cette affaire par un silence de plus de
dix ans.
Ils n’avoient cependant pas
employé
cet intervalle sans
Ils attaquèrent, en l’an 1 0 , un autre acquéreur
du sieur S a in t- M a r c e l , et conclurent au désistement et
plaider.
�( 13 )
à la nullité de la v e n t e , comme faite à non domino :
mais par un jugement de l’an 13 il fut juge « que le
« sieur de Saint-Marcel s’étant réservé de vendre pour
ce faire face à 74600 fv. de dettes, y compris 12000 fr.
« qui éloient pour le donntaiveœs a lien u m , on ne pou« voit reprocher audit sieur Saint-Marcel d’avoir vendu
« sans cause ». D ’après q u o i, et par lesdits motifs, les
sieur et dame de Saint-Clément furent déboutés de leur
demande en désistem ent,
L e sieur de Sain t-M arcel est mort en l’an 1 4 , et les
adversaires ont répudié à sa succession, de même qu’aux
biens à venir de la dame A r c i s , s’en tenant aux biens
présens qui existoient en 1762 ; ils ont cru par là se
donner un titre positif de donataires universels, môme
des biens réservés.
L e 26 juillet 1806, les sieur et dame Sauzet-SaintClément ont repris leurs poursuites contre le sieur Souteyuan iils.
Leurs moyens étant les mêmes que ceux du sieur de
Boissieu, il est inutile de les rappeler; et il suffit de dire
que par jugement du 12 mai 1807, les sieur et dame de
Saint-Clément ont été déboutés de leur dem ande, en
obtenant néanmoins l’avantage de faire procéder à une
nouvelle estimation du domaine , s’ils le prétendoient
vendu au-dessous de sa valeur.
Les motifs de ce jugement s e réduisent à d ire, i ° . que
d’après le contrat de m ariage, et l’état du même jo u r,
il y «voit de la part des donateurs, reserve de vendre
pour la somme de S4600 francs ; 2Q. que d’après les
�( 14 )
états pro luits , le p rix total des ventes ne s’élevoit pas
à beaucoup près à cette som m e, lors de la vente de
Chaspuzac ; qu’ainsi le sieur de Saint-Marcel étoit au
torisé à vendre ce domaine; 30. que quand il se seroit
trouvé de l’excédant sur le prix de ladite vente , elle
n’en seroit pas moins valable , puisque le vendeur
n’auroit été obligé qu’à faire un e m p lo i, ou à placer
cet excédant en des mains sûres, du consentement des
donataires; 40. que rien n’empêchoit d’anticiper les termes
de la dot de la dame Saint-Julien, puisque les donateurs
s’étoient réservé de vendre jusqu’à concurrence de
ces 2Ôooo francs; 5°. que l’opposition du sieur deBoissieu
n’avoit pu annuller une vente que le sieur de SaintM arcel étoit suffisamment autorisé à faire , sauf à re
quérir une nouvelle estimation.
Cette faculté d’estimation n’a point satisfait les sieur
et dame de Saint-Clément : ils se sont pourvus en la
cour ; et ce n’est v é r i t a b l e m e n t q u ’e n d é na t ur a nt le
contrat de 176 2, et en changeant leur position, qu’ils
ont pu dire quelque chose de spécieux, pour soutenir
que lé sieur de Saint-M arcel, leur aïeul, n’avoit aucun
droit de vendre.
A les en croire, ils ont une donation entre-vifs, irré
vocable et dotale de tous les biens meubles et im
meubles, présens et à v e n ir, des sieur et dame SaintMarcel , ce qui emporte dessaisissement actuel de tous
les biens présens.
Il faut bien en venir cependant à la réserve de vendre,
stipulée au contrat de 1762 j ruais cela n’embarrasse pas
�( i5 )
les sieur et dame de Saint-Clém ent; c’est, disent-ils,
une faculté exorbitante qui doit être largement inter
prétée* pour e u x , parce qu’elle est dans leur contrat de
mariage. Cette faculté de vendre est d’ailleurs limitée
à des objets spécialement désignés, et à des dettes an
térieures ou présentes.
O r , d isen t-ils, si on pouvoit entendre qu’il y eût
faculté de payer le premier terme de la dot de la dame
de Saint-Julien , au moins ce ne pouvoit pas être le
terme payable au décès du survivant.
Il falloit délégation, et il n’y en a point; juste valeur,
et il y a vilité de p r ix ; légitime em p loi, et aucun ac
quéreur n’y a veillé.
lia première dette à payer étoit 9000 francs au sieur
de Boissieu ; ils ne le sont pas. L e domaine d’Orzillac ,
devoit être vendu le premier, il n’est pas vendu encore;
Chaspuzac devoit être vendu le dernier, et il a été
vendu plutôt.
L ’état des ventes et payemens n’est pas e x a c t, conti
nuent les appelans; il faut en distraire 4000 francs qui
ont été mal à propos ajoutés dans le jugement, par l’état
double.
Enfin la vente ne pouvoit avoir lieu au profit du sieur
Souteyran, parce qu’il étoit un p ro cu reu r, et m ê m e ,
ajoute-t-on , le conseil du sieur de S ain t-M arcel ; elle
étoit litigieuse, parce qu’il y avoit opposition de la part
du sieur de Boissieu.
Telles sont en résumé toutes les objections proposées
par les sieur et dame de Saint-Clément. V oyon s si elles
�(i 6)
suffiront pour déposséder un acquéreur après seize ans
de possession.
M O Y E N S .
C ’est une erreur de la part des sieur et dame SauzetSaint-Clém ent, de supposer que le contrat de mariage
de 17 62 p o rte, de la part du sieur de Saint-Marcel, une
donation entre-vifs de tous ses biens présens et à v e n ir ,
avec dessaisissement actuel de tous les biens présens. Il
est aisé de concevoir qu’en se mettant si fort à l’aise sur
l’éteudue d’une clause principale, ils aient pu tirer des
conséquences fort à leur avantage.
Mais le père de famille qui fait une donation de tout
son bien, sous réserve de cin q d o m a in es, ne fait point
une donation de tous ses biens présens • car ce qui est
réservé n’est pas donné.
Il faut donc commencer par supprimer tout d’ un coup
des m o y e n s des sieur et d a m e Sauzet la q u a l it é de dona
taires universels qu’ils se sont donnée de leur chef si
gratuitement.
Il 11e faut pas plus s’attacher A la proposition des sieur
et dame Sauzet d’interpréter largement cette réserve en
leur faveu r, sous prétexte qu’elle est par contrat de ma
riage : car c’est encore pour se donner la licence d’en induire
de larges conséquences. 11 est au moins bien étrange que
des héritiers institués appellent la réserve de Pinstiliiant
une (acuité exorbitante , comme si tous les biens n’étoient
pas à lui , et comme s’il n’étoit pas plus vrai de dire que
tout
�( J7 )
tout doit être entendu, dans le d o u te, en faveur de celui
qui a fait la libéralité.
C ’est en effet un principe enseigné par R ica rd , que s’il
y a quelque chose d’ambigu dans une donation, il est
permis au donateur d’expliquer lui-même les bornes qu’il
a entendu mettre à sa libéralité, sans quoi il faudroitdire
qu’il est donateur malgré lu i; ce qui résiste à la plus
simple définition de ce genre de contrat : D o n a tio est
liberalitas quœ dam quœ nullo ju re cogenle conceditur.
Ici le sieur de Saint-Marcel a non-seulement expliqué
lui-même l’étendue de sa réserve, mais encore cette étendue
est tellement claire et précise, qu’il faut seulement lire
avec attention l ’acte lui-m êm e, pour être certain qu’il ne
faut aucune interprétation.
L e sieur Saint - M a r c e l s’est r é s er vé de v e n d r e cinq
domaines, et en o u t r e des cham ps, vignes et prés ; et
déjà il a annoncé, par l’étendue de cette réserve, que son
héritière n’auroit pas le droit de le tracasser tant qu’il
n’auroit point vendu tous ces objets. 11 lui a annoncé
encore que tous ces objets n’étoient point nominative
ment compris dans la donation et dans la tradition effec
tive qui en étoil la suite.
A la vérité le sieur Saint - Marcel exprime pourquoi
il a intention de vendre; mais à supposer que cela veuille
dire qu’il s’impose des conditions à lui-même pour ne
vendre q u ’ u n e portion des objets réservés, il est au moins
certain que tout ce qu’il a destiné à être rempli par cette
réserve , doit être épuisé sur la réserve elle - m ê m e , et
q u e , jusqu’à cet épuisement, l’héritière n’a nulle espèce
de droits sur aucune portion de ladite réserve.
Il s’agit donc d’examiner si le sieur Saint-Marcel avoit
C
�( 18 )
éteint en 1791 les objets qu’il avoit retenus dans ses
propres biens, et toutes ses dettes passives; à tout quoi
les biens à vendre devoient faire face : car voilà toute
la cause.
O r , il résulte de l ’état double fait entre le sieur St.M arcel et son gendre , le même jour du contrat de
mariage, que ces dettes se portoient à 49600 f r . , à quoi
le sieur de Boissieu ajouta 2000 fr. dûs à lu i-m êm e, et
2000 fr. dûs à un sieur IDadiac, ce qui lit ¿3600 francs.
20. L e sieur Saint-Marcel s’étoit réservé 12000 francs
pour en disposer ainsi qu’il aviseroit, et cette somme
ajoutée à la précédente, porte la réserve à 656oo francs.
30. L e sieur de Saint-M arcel déclara dans le temps
avoir oublié quatre sommes par lui dues; savoir, 400 fr.
au sieur Ladevèze , p r ê tr e ,.p o u r un billet de 17 5 7 ;
957 francs, pour arrérages de cens dûs au sieur Gaillard;
800 francs pour les intérêts de la légitime du sieur SaintM arcel, cu ré ; et 562 francs dûs au sieur Im bert, son
p r o c u r e u r ; tout q u o i avoit été p a y é lors des diverses
ventes consenties par ledit sieur S a in t-M a rce l, suivant
plusieurs quittances bien antérieures à 1790.
40. Il restoit dû au sieur de Boissieu lui-m êm e plu
sieurs sommes non payées de l ’avancement d’hoirie cons
titué à la dame Saint-M arcel, son épouse; et il résulte
des diverses quittances par lui données audit sieur St.M a rc el, qu’ il a reçu après 1762 une somme de 11000 fr.
provenante de diverses ventes.
Ainsi en récapitulant les dettes acquittées par le sieur
Saint-M arcel, de 1762 à 1788 , époque de la dernière
vente antérieure à celle faite au sieur Souteyran , 011
trouve que le sieur Saint-Marcel a payé, d’après son état,
�( *9 )
i°. A u sieur D adiac.................. . . . . . . . . . .
2000 fr.
2°. A u sieur Gaillard, pour censives, suivant
sa quittance de 1766..............................................
967
3 °- A u x religieuses de V a is .........................
2000
4 °* A la ca th éd ra le .........................................
2000
5°. A u sieur Farenge, prêtre.......................
1800
6°. A u sieur Sain t-M arcel, curé, pour sa
légitim e, suivant quittance du 4 décembre
1 7 7 2 ...........................................................................
6800
' 7°. A u sieur Lad evèze, suivant quittance
du 30 juin 1 7 7 1 .....................................................
400
80. A u .sieur Imbert, suivant quittance du
8 octobre 1 7 8 4 .......................................................
562
9°. A u x sieur et dame Saint - Julien , en
onze quittances....................................................... 26600
io°. A u sieur de Boissieu, en cinq quittan
ces . . . . ....................................................................
11000
53119 fr.
Il lui restoit à payer 12000 francs à
la dame Saint-Julien, et il avoit encore
sa réserve personnelle de 12000 francs,
}
s
j
24000
77*19 fr.
Venons maintenant aux ventes consenties par le sieur
de Saint-Marcel.
L e sieur Saint-Clément, à la page 21 de son m ém oire,
les porte ¿1 trente-deux, montant à 51918 francs.
D ’abord les articles 3 et 4 font double em ploi, parce
que le domaine entier de Mons fut vendu au sieur R e ym on d , p rê tre , qui ensuite en aliéna deux héritages à la
C 2
�( 20 )
veuve Galien ; et comme la vente du sieur Reymond
n’étoit que sous seing p r iv é , il pria la dame Arcis de
vendre en son nom à ladite veuve Galien. L e prix de
cette dernière vente fut de 2000 francs, et 25o francs
d’épingles, que le sieur Reymond reçut en déduction des
8000 francs par lui dûs.
A cela près nous supposerons que toutes les autres
ventes sont exactes, quoiqu’elles ne soient pas toutes jus
tifiées; nous admettrons même les deux dernières, que
le sieur Sauzet-Saint-Clément n’auroit peut-être pas dû
oser porter en compte ? car elles font partie des honneurs
funèbres du sieur Saint-Marcel, qui avoit trouvé prudent
d ’y pourvoir par lui-même.
Nous ne porterons donc en déduction des 51918 francs
ci-d essu s, que 2260 francs pou r’ le double em ploi; ce
qui réduit les ventes à 49668 francs.
lie sieur Saint-Marcel étoit donc en avance, avant 1791,
de la somme de 34Ôi francs , outre les 12000 francs dûs
à la dame de Saint-Julien, et sa réserve personnelle de
12000 francs.
Il avoit donc le droit de vendre encore jusqu’à con
currence de 27451 francs.
Cependant il n’a vendu que jusqu’à concurrence de
21427 francs.
A in s i, quand il faudroit s’en tenir même à l’état des
trente-deux ventes désignées par le sieur Sauzet-SaintC lém ent, il resteroit toujours une somme excédante; et
le sieur Saint-Marcel, en vendant en 1 7 9 1 , n’auroit pas
même rempli toute la somme qu’ il avoit droit d’atteindre.
Cette démonstration est si claire, qu’elle rend à peu
près inutile de répondre à la plupart des objections du
�( 21 )
sieur Saint-Clém ent contre la vente faite au sieur Souteyran.
L e défaut de délégation et d’emploi étoit déjà démenti
par la vente elle-même.
L a négation du sieur Saint - C lém en t, d’avoir reçu
9000 francs qui restoient dûs de l’avancement d’hoirie du
sieur de Boissieu, est encore démentie par l’état ci-dessus,
et par les quittances données au sieur Saint-Marcel. L e
sieur de Boissieu a même reçu 11000 francs; ce qui
complète les 9000 francs ci-dessus, et les 2000 francs du
b ille t, qu’ il fit ajouter à l’état des dettes.
L e sieur Saint-Clément ne peut pas pardonner à son
aïeul d’avoir payé la dame de S ain t-Ju lien de toute sa
dot ; ce qu’il appelle avoir payé par anticipation , et
contre la convention de 1 7 62., au moins pour une moitié
qui n’étoit payable qu'après soji décès.
Mais cette objection même porte avec elle sa réponse :
car qui devoit payer?
A la vérité , lors du mariage de la dame de SaintJulien , il fut pris des termes éloignés , qui alloient
jusqu’au décès des sieur et dame Saint-Marcel.
11 en résultoit que le dernier terme n’étoit payable que
p ar les héritiers desdits sieur et dame Saint-Marcel.
Mais lorsque ces derniers, en mariant leur fille cadette,
en 1762, se réservèrent cinq domaines pour payer leurs
dettes, parmi lesquelles fut comprise la dot de la dame
de Saint-Julien, cette clause précédente fut dénaturée.
Car on ne peut pas entendre sans doute que les sieur
et dame Suiut-Marcel payeroient les 2Ôooo francs de dot
après leur d écès, puisqu’ils avoient stipulé qu’ils vendroient pour payer eux-m êm es.
�( 22 )
Il suffit donc de remarquer que la dot de 25 ooo fr. est
comprise dans les dettes pour lesquelles le sieur SaintÏVIarcel s’étoit réservé de vendre. Cela seul justifie la vente
qu’il a consentie pour achever le payement de cette dot.
D ’ailleurs les assignats, le danger de laisser ce payement
à demander au sieur de Boissieu, justifient encore mieux
le sieur Saint-M arcel, qui avoit bien eu assez des tra
casseries personnelles qu’on lui avoit fait éprouver, sans
en léguer d’autres à la dame de Saint-Julien.
Faut-il parler du moyen du sieur Sauzet, fondé sur
le mot fin a lem en t? Il prétend que Chaspuzac étant le
dernier nommé des cinq domaines, il auroit fallu vendre
les autres auparavant.
O n n’a pas vendu Orzillac qui étoit le premier in
diqué, et le meilleur : il s’en plaint.
Ainsi il tire parti de tout. Vendre lui fournit un
moyen ; ne pas vendre lui en fournit un autre.
Une des objections du sieur Sauzet ( page 45 ) , est
dirigée c ont re les pr em ie r s juges e u x - m ô m e s . 11 les ac
cuse d’avoir laissé insérer dans le jugement Vaveu des
-parties, qu’il y eut 4000 francs ajoutés à l’état des dettes
de 49600 francs. C ’est, d it- il, une erreur ou une sur
prise, parce que ces 4000 francs n’étoient pas dûs ; et
il faut effacer cela du jugement.
Eh bien ! le sieur Sauzet l’a très-hautement avoué à
l ’audience, et il ne pouvoit pas le nier.
Car l’addition fut faite et signée par le sieur de Bois
sieu, pour son propre intérêt. En effet, sur 4000 francs il
y avoit 2000 francs dûs à lui-même : et il n’a pas manqué
de les toucher, comme on le voit en l’état du sieur SaintMarccl.
�( 23 )
Il reste à dire un mot , un seul mot du reproche
fondé sur ce qu’un procureur ne peut pas acheter des
droits litigieux.
Cela est très-exact en principe. Mais où le sieur Sauzet
a-t-il puisé qu’un immeuble, un d o m a in e, fût un droit
litigieux ?
La loi P e r diversas, qu’il invoque, dit q ui redim nnt
libídine v ili actiones litigiosas.
Mais à supposer qu’un exploit insensé pût produire un
litige, le sieur Souteyran n’aclietoit pas une simple action;
il n’aclietoit pas le droit de poursuivre une liquidation
inconnue. Il achetoit une propriété certaine, et il en
obtenoit la tradition dans l’instant même.
L ’objet de l’acte étoit donc déterminé et connu. Il n’y
avoit rien d’inconnu au vendeur, et dès-lors tout le motif
de la loi^cesse, parce qu’elle n’a voulu prévenir que l’abus
de confiance qui résulteroit du cas où un procureur, plus
au fait que son client de la valeur d’ une action litigieuse,
l’achèteroit à vil p r i x , en le trompant.
Cette méchanceté du sieur Sauzet-Saint-Clément est donc
sans application ; et elle étoit d’autant plus de mauvaise
foi , qu’ il sait bien que le sieur Souteyran père n’étoil
point le procureur du sieur Saint-Marcel.
F a u t - i l ne pas omettre encore la correspondance du
sieur Saint-Marcel aux sieur et dame de Boissieu, qu’il
menaçoit d'un hom me de loi q u i les m eneroit dur ?
Ce n’est pas cette correspondance qui fera le plus d’honneur
à ceux à qui elle est adressée : car ce qu’on voit de plus
clair dans le peu que le sieur Sauzet a jugé à propos d’en
extraire dans une écriture, c’est que le sieur Saint-Marcel
avoit de grands reproches à faire à son gendre et à sa iille.
�( 24 )
Ce respectable vieillard avoit de grands regrets d’avoir
réduit la dame de Saint-Julien, sa fille, à 40000francs ; les
procédés de son héritière le navroient de douleur , et
il s’en plaignoit amèrement. Q u’il menaçât son gendre
de s’adresser à des hommes de loi pour cesser d’être
opprimé par lui , cela étoit fort naturel dans la position
du sieur de Saint-Marcel. Il a plu au sieur Sauzet d’ad
juger cette menace au profit du sieur Souteyran p è r e ,
quoiqu’il sache fort bien que ce procureur-là étoit moins
à craindre que le sieur de Boissieu. Mais tout cela n’est pas la cause. L e sieur Souteyran a
acheté un domaine du sieur Saint - Marcel : il en a eu le
droit. Il pouvoit payer en assignats, il a payé en argent;
ceux qui l’ont vu existent.
Il exigea une estimation plutôt par délicatesse que par
nécessité ; et il paya à dire d’experts. A u jou rd ’hui une
seconde estimation est ordonnée : le sieur Souteyran eût
p u s’en plaindre ; mais il n’y a vu que le moyen de jus
tifier son p è r e , en p r o u v a n t qu’il n ’a p o i n t acheté à vil
prix. L e sieur Sauzet au contraire attaque un jugement
qui lui permet d’établir qu’il a dit la vérité ; mais il trouve
plus commode d’insulter le sieur Souteyran, que de laisser
éclaircir s’il n’en impose pas.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e . B E A U D E L O U X , avoué.
A R IO M , do l’imprimerie de T h ib a u d - L ANDRIOT, imprimeur de la Cour d’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Souteyran. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Beaudeloux
Subject
The topic of the resource
contrats de mariage
réserve héréditaire
donations
abus d'autorité
créances
assignats
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour le sieur Souteyran, ancien avocat au Puy, intimé ; contre le sieur Sauzet-Saint-Clément et la dame Salvaing de Boissieu, son épouse, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1759-Circa 1807
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0408
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rocharnaud (domaine de)
Mons (domaine de)
Orzillac (domaine d’)
Couchat (vignes de)
Pouzarol (domaine de)
Chaspuzac (domaine de)
Ceyssac (43045)
Rights
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Domaine public
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810cbd07c98a0078fd86b0cb3c26ca6c
PDF Text
Text
SUR
UNE
CONTESTATION
RELATIVE
A LA
P O S S E S S IO N
ET
P R O P R IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
A RI OM,
de
l ’im prim erie
IMPRIMEUR
de
de
l a
L A N D R IO T ,
cour
A oût 1804
d ’a p p e l .
se u l
�MEMOIRE
COUR
D ’ AP P E L
EN R É P ONS E ,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P
ierre
- J
ean
- B
aptiste
T R E IC H
LA
P L E N E , a p p e la n t;
CONTRE
.
,
T R E I C H - D E S F A R G E S veuve
Lachaud 9 Jean
COUDER , et L é o
n a r d CHA DE N I E R , intimés
M a r ie
A v e c des titres de propriété , et la garantie des lois,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
‘le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�(2)
à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i-c i trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après un cahos d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
gran d e, que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la difficulté , ou fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui doit le plus éto n n er, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent, non pas quant au jugement delà propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar
rêtés ne peut, plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une inine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer uue c o p ro p riété contre un tiers déten-
�( 3
)
teur ; si encore il le* p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui' estj détruit par plusieurs
autres actes et circonstances ; l’appelant est obligé de pré
senter ces mêmes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
*
'
•J ‘
'
■■• F AI T S .
*: )
■
„
A u village de là P le a u ’, dans le département de la>
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Je a n T re ic h ,
père de l’appelant, en étoit le p rin cip al propriétaire.
En 1747 , il'acquit de Pierre Beynes sa portion dans,
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires. '
L e 25 mars i j 5 5 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,,
est-il dit j tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon ? que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , moyennant 3000^; Il fut1dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du,
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-même sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
A 2
�(4)
Cette terré de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , ayoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier*
sa vo ir, deux septerées avant 1736 ? par un acte que
l’on ne connoît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du I er. décembre 1736; et cette
septerée vendue y est confinée de jou r avec autre partie,
de la même terre , ci-deçant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen
ti tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le char« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« Charoulière, une des deux ci-dessus vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais to u t p ro u v e que cette charge fut rédim ée b ien tô t
a p rè s , in dépendam m ent encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de i j 55.
Antoine Beynes, fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme cédataire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la P lè n e , veuve dudit Jean Treich (mère de
l ’appelant ), par acte du 29 août 1768, un terrein appelé
Cliazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lles, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et terrein de ladite de« moiselle la P lè n e , etc. ,* ensemble les carrières A cliar« bon de pierre, pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein} etc. \ comme aussi a vendu à ladite*
�m
derpoisdle-la rP5lène.jla pai:tf.et-portion .appartenante
« -audit vendeur^,çsdiiesrqualités ^$ur,les*camères. situées
« dans* le;,communal, jdç.Plpau ?re t c . fsans par. Je yendeun
- « se faire, aucune réserve de.sa portionjdans leditçom « munal ;jetc. ; derneure chargée ladite ac.quéreu^e.d’exé« guter.les ^conventions portées au contrat dA29„septem« bre 1766 , )etc. ^ de jn êm e aussi sera obligée ladite ac« rquéreu?e:>de délivrer, au vendeur et^auxf siens-la quan« tité de soixante quartes de charbon annuellement,
« tant et si longuement qu’il se recueillera du charbon
« dans lesdites «carrières ci-dessus vendues , à* la charge
que le vendeur}ou
les siens
seront-tenus
de
les creuser ,
•‘
S
-'
.) \
A V« eux-mêmes; ou faire\ creuser à leurs dépens, etc. ,»r
Cet, acte de 1766 { lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler’) étoit ,un traité p a r lui fait avec B ern ard ü o d e t
pour;extraire le|charbon de ladite terre, Chazalas, con
frontant-, disoit-il lui-.m êm e haudit,acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière,
des héritiers• du J'en ysieur Treich le cadet. - •
• Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente 4e soixante 7quar tes de cjiarbon , qu’il fit. valoir,
quelque, temps ,Lsans ayoir g^rde de réclamer aucun autre
droit en yerÇu.de l’act^ de^S^.'jIlla.,vendit le 6 janvier
1771 , et Marianne la Plène latremboi^rsa par actç du 27'
du même mois.
.T o u t se..rgiinissoit donc à séparer, entièrement les in
térêts de .JViarianne la Plène d’avec ,çeux dudit Beynes,
lorsque Marie Treiçh-D ersfarges.? par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière duicommunal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps ,• après avoir
�n, ........ .,.C6)
essayé de faire à Marianne ld Plène-/en 1 7 7 5 , un pro
cès ériminel qu’elle fut forcée ¿ ’abandonner , découvrit
i’acte dé 1736, et, ne pouvant en user ellè-m êm e, elle
eut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en' 1777 /avec J e a n C ouder, à la ¿faculté de creuser
dans là t e r r e d e la Charoulière eh entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
co?nmu?iah
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
riavoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha
roulière/la société ( évaluée à 4 **“) n’auroit aucun effet.
Les trois associés se mirent en œuvre âu mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
M arie la Plène aussitôt présenta une requête, de
m anda le transport du juge de S ain t-A n gel, lequel fit sur
les lieu x, le 8 août 178 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’iguorer comment le
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne semb lo ien t se défendre qu’en soutenant que leur fouille
n’avoii pas pénétré sous la C h aro u lière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et d éclarèren t audit procès verbal
qu’ils pm ioient les démarches de la veuve la Plène pour
�(7)
un trouble*à leur-propriété ; que les .causes., dont se ser,voit et «y'etoit ci-devant-servie ladite demoiselle la Plène,,
pour tirer du charbon d e l à .terre de la Charonliere,
portaient.un préjudice notable audit Be'^rieç et autres^ au
droit de retirer du*charbon-de ladite terre, et que ladite
i .
'
\\ ' •> ■'
7 ‘ .1
j : , ou
demoiselle la Plène ne pou voit ^empêcher de leur faire
compte de la m oitié de.ce charbon depuis le temps qu'elle
m o ü acquis.
ui., - , I10(i,
Ils ajoutèrent la demande .qu’il leur,.fut donné-acte de
leurs .réquisitions, et réclamations , f sous, réserve. de la
restitution de la m oitié.du charbon çi-devaiit retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Vlene depuis so?i
acquisition , et autres que de d r o i t •
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
,qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
peinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,* mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application, et que, d’ailleurs il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première'diligence les intimés ne se-, liâtoient pas moins de fouiller le charbon , ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se doimoi.ent pas .la, peine de mettre des
étais. La veuve Desfarges crut faire ,une heureuse diver
sion en rendant plainte., . . # .
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit ouï, et interrogés; mais la veuve Desfarges en fut
.pour su tentative, et la procédure fut civilisée.
On continua le, procès.civil; et les intimés prirent, le
�( 8 ).
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoiént annon^
cées lors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu’à Vavenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qtfelle a retiré et f a i t ' creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance] 40. en
¿000
de dommages-intérêts.
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre dé la Charou
lière , et de moitié de celles du communal de la Pleau
(qui n’étoient pas en litige) ; mais, attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la Plène , \publiquement et ouvertement, en
v e rtu de son contrat de i j 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations, la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, 'Sic vos non nobrs, un nommé 'Saint-Victour
profita do ces querelles pour persuader que l’explôitation
de
�;(• 9 ).
de ces mines étoit en mauvaises mains ; il en obtint
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
«un an; puis il fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration, son utilité, etc. Il-obtint en 1783 une
concession de quinze ans..
;
i La loi du 28 juillet 1791 expulsa xe .Saint-Victour,
qui néanmoins ne fut pas décourage, et qui, dans toutes
les phases d e 'la révolution, se tint aux avenues des
administrations et des ministères, pour solliciter quelquesr
uns des arrêtés ci-après, et en venir de .longue, main à
réussir.
r
•'
‘
Les mines étant seulement sous la surveillance admi~
nistrative , les propriétaires .de Pleau obtinrent , le
6 novembre 17.91, un arrêté du département de la Goi>
rèze, q u i les remettoit en possession de leurs carrières.
Saint-Victour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit il fallut des enquêtes
pour le vaincre. E n fin, en 179 3, il parut céder, et fit
faire par Bettinger, son associé, un traité avec Pierre-;
Jean Treich appelant, lequel 'concédoit, h prix fixe,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce traité le 19 juin, 1793.
D ’autres cliangemcns.amenèrent d’autres intrigues. On
fit écrire au ministre de l’intérieur «par le ministre,de la
m arin e, pour les mines de Pleau; on eut des ¿ivis de,.la
commission des mines, d’autres de celle des travaux pu
blics. On fit ordonner quelles propriétaires exploiteroient en commun.
L e département de la Corrèze p rit, les 5 et i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il crut etre en c.onforinité
.
!
\ B
�(io)
de ces règlemens ; mais ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an , pour organiser une exploitation en com mun, sous
la direction de Mazaud. On pressent que Treich appe
lant, et principal p ro p rié ta ire , ne pouvoit y participer à
cause du traité qu’il avoit fait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
6
des 6 novembre - 1791 et I 9 j11*11 I 793 subsistoient
en core, et étoient exécutés.
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’ad
ministration de la Corrèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des considérations
particulières. L e plus difficile ne fut donc pas de vaincre
ce léger empêchement :
JDiruit, cedificat, mutât quadrata rotandis.
lie département de l’an 6 cassa , le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut hom ologuée, et il fut enjoint à Treich de déclarer
sous quinzaine s’il entendoit s’y réunir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures ; il
osa même élever sa voix jusqu’au chef de l’état; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ic h , fils et héritier
de Marie la Plène , fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu à la cour
d’appfel de Limoges.
�( ÏI )
■
Les a d v e rsa ire sfo rts d e là décision administrative,
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté auroit - il pu suspendre un appel
pendant ? .D ’ailleurs l’arrêté ne régloit rien sur la pro
priété des parties : la cour de Limoges retint donc la
contestation.
•
i Les parties plaidèrent : au fond ; et le 28 -germinal
an 9 intervint l’arrêt suivant :
■
. « Considérant qu’il résulte du contrat du i^\ dccein« bre 1736 -une vente pure , simple •et parfaite de
« l’entier fonds.de la portion de la terre la ¡Charoulière,
« qui fut vendue par cet acte ; que la réserve énoncée
« à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su p p lé
ée ment du prix déjà stipulé ; q u ’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au vendeur la »propriété de la
« moitié de la mine de charbon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur,
« qu’une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années;
« que les intimés ont avoué et soutenu, au procès , que
« n i François Beynes , auteur à!Antoine , n i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , ju sq iien
0 1780 ; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
« ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« C onsidérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treicb, père de l’appelant; et l’appelant lui-même,
B 2
�( 12 )
«- ont possédé ladite moitié de m ine, avec titre suffisant
« pour en acquérir la propriété avec bonne foi et sans
te interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription se trouve acquise en faveur de l’acqué« reur ; que dès-lors l’exâmen et la solution des autres
« questions agitées au procès deviennent inutiles, etc.
« L e tribunal dit qu’il a été mal ju g é ;.... garde et
« maintient l’appelant au droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe* de l’accusation et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre ,... depuis le trouble jus« qu’au jou r.... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et'
« 100
de dommages-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y éch et, du charbon
cc perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
Les intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité*'
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrement ,
fit réussir l’admission. La section civile rejeta à son
tour ce moyen , et s’attacha à l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas
sés le 14 nivôse an 1 1, pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la propriété, parce q u e, dit
l’arrêt, la possession dérivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6
et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�( 13 ) '
. _,
renvoyées à faire statuer sur leur appel én cette cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit '
un triomphe définitif, et ils allèrent.de suite se mettre en
possession des mines de Charoulière : ils y disposentJ
aujourd’hui en maîtres.
•
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donne
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven- ’
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 flo ré a lJ
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa p ropriété, à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction u "
venir.
N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens adm inistratifs ,
l’appel a été suivi en la cour. Les intimés ne voudroient ‘
y plaider que sur la propriété ; ils prétendent que leur *
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de ‘
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’ une cour d’ap p el, reconnue compétente pour le fo n d
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fon d , soit
suspect d’aucun vice.
�( M )
A u reste, le sieur Treich se consolera aisément de
celte vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables \
car si son arrêt de Limoges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques^
tions de la propriété, et même de la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na**
turelle : car ils sont fondés, non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie Mazaud à la possession, mais sur la pos
sibilité qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6,
- O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , nô
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste.
On répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se demanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins h être persuadés que ç’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
. D ’Argentrédéploroitla misère des plaideurs et l’éternité
des procès : M iseri litigantes ! de quitus m liil certi est
cotislitutmn , et qitôd ab arbitrio cujttsqiie et opincttione
potiàs pend e t, quàrn àcertis regulis, Mais qu’a uroit-il dit
�( i 5 .)
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir un cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le, et sans que ces administrations le-fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’hui, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroît bien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
>
Mais , dans tous les sens possibles, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; les jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel, et par
l’appel de la veuve Treich.
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p el, et on ne peut pas invoquer l’art. i cr. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
session , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution , et ce
dernier arrêté ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour, en statuant de m êm e, s’y conforineroit encore.
�( 'i 6 )
Mais elle n’a pas même l?empêcliement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui, à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul ch ef,
comme ils le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste ? il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirement\
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
compagnie Mazaud , qui n’existoit p as, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 5
car la com pagnie Mazaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle
y avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté de
l’an 6 n’est plus. La compagnie Mazaud r d’après même
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus de
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation ? le sieur Treich l’a encore
obtenue. Ainsi reflet le plus immédiat de cotte. obtenT
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte.
A u reste , il s’agit ici de com pétence, et par consé
quent
�C *7 )
quent d’ordre public : la cour y statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses propriétés *, et:
il n’y voit d’autre ' obstacle que l’obstination de ses1
adversaires:
* ' /
• . t. '
■ * "i
* Soit que la cour juge toute la possession, ou seule
ment une partie de la possession , il est au moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.*
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour’
ce qu’il avoit compétemmènt jugé , le sieur Treich ne
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom- qu’à
Limoges qu’il est seul propriétaire* de la Charoulièreet des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
’ i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
.
f •
2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de m in es, ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
*
3°. Il a joui plus de io ans avec titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. Cette jouissance est constante au procès.
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen -, aussi' ils s'efforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que M arie la P lèn c,
C
�( i8 )
veuve T reich , ait jo u i, et ils ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contraire , a toujours d it,
suivant eu x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charou
lière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Pans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it, ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
voulu parler ? est-ce de celui de 1775? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
moitié du communal, et autres carrières ; ..... s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les liabitans du village; ...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de moitié du communal,
et de plusieui's autres carrières particulières ; ... qu’elle
n’empêche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne joirssoit pas, on y voit au contraire qu’elle eu (.en
duit très-bien jouir seule doses carrières, envers et contre
tous ; elle ne s'en défendoit pas.
�C *9')
* Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? Cai* il'est parlé
de dix-huit mois dans rinterrogatôire de Martin Bêynës
et dans celui de sa fem m e, qui ont rendu compte de la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plaintè; Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’est qu’une continua
tion de creusement ; et plus loin! elle parle encore de
ce nouveau creusement.
Comment la veuve la Plène auroit-elle , én effèt, menti
à' la" vérité contre elle-même ,- lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de' 1781 , qu’elle a toujours1
joui. « Les contrats de ven te, dit-elle ( dans là requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces« des intimés ) , ont toujours été suivis d?exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que là stip« pliante a eue seule des fonds ÿ mentionnés, notam« ment de la terre de1 la Charoulière , à l’exclusion dé;
« tous autres, et sans opposition. »
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en première instance. Leurs* réquisitions au procèî
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la-requête’
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,*
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que“la coïir a dû së convaincre, par^
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
* Q u ’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
G a
�( 2° )
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence ; donc le
débouté, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su 7
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter de la possession constante
de T reicli, après avoir vu les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt?
Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se tx*ouve au contrat de 1736. O r, avec ces
points de fait, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescription, indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 1771.
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r , cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de Lim oges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
11’éloit pas seul héritier du vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire (pag» 11 )? veulent trouver neui ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas rintervaile de 1736
à 1755.
�( 2Í )
Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
1755 seulement que la cause de la possession a été changée. '
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que là possession à
titre de propriétaire; neque bona fides requiritur, sed sola
possessio per tricennium. Le Gode civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1^5 5 ; et, sous
ce point de vue, il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de Bordeaux, d’où il paroît que ressortissoit l’ancien Limousin , admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n°. 83.
A la vérité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n’admet que la prescription de (rente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré, nu
cas qu’il y eût lieu d'aborder cette question secondaire.
Lapeyrère «avoit d it, au n°. 60, que la prescription
s’ilcqnéroit par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
• Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
'
'
- i Q. Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique M alœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présume pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis preescriptio, si verus do m inu s ignoret ju s suum et aliénationem facta?n, Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’ Antoine Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de i j 55 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A u th e n tiq u e Ma?ce fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que D unodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans.
O r , la réserve dé partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736? qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires ?
E t 11’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimés,
même Couder et la veuve D esfarges, étoientpropriétaires
�< * 3 '?
pour, m o itié, comme si après une vente le vendeur demeuroit propriétaire ;, et comme si dans un fonds il y avoit
deux propriétés, l’une du tréfonds et l’autre de la super
ficie.
.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
cette réserve de 1736, parce que Jean Treich ayant acquis
en 1755 , sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
f o i, au vu et su du vendeur, qui connoissoit son droit ;
ainsi l’appelant a prescription suffisante.
. Les intimés répondent que la .prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce quç
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinité.
. Autant vaudroit avoir dit etia?n per jnille aniios ,
comme le dit Dumoulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en convenir, il seroit un peu dur de songer quq
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à 'aucun trouble.,
L ’espèce de Cancérius,rapportée par D unod, parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’un des faits principaux de la cause; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est parce qu’il
ne l’a pas réparé sans eu x; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la c¿mse d’une
manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�( H )
' « 11 faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
c< à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune préexistence ou mélange de titre, de
« convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qu i tire son origine d'un co n tra t, qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju
te gement.
« La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres
et cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres
et criptibles et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir être prescrites. » (D unod , pag. 90.)
' Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’enlredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement d’attendre qu’on creusât
pour partager , mais de creuser lui-même.
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-même, et plaidé pour soutenir
qu’on en avoit le droit.
La preuve enlin , c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�( *5
) ) ...............................................................
en droit; c'est qu’elle déclare les intimes propriétaires de
la moitié de la mine.
*
Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
concoit-on un propriétaire qui conserve son droit sans
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement?
.
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V
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Mais cette jouissance, dit-on, a été clandestine.
A cela il n’y auroit qu’un jnot à répondre ; c’est
que la; sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
<
D ’ailleurs, il est de principe que les, aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annullation , comme
l’enseigne Cochin , tome 5 , page 274, et comme l’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de Lim oges,
qui mentionne l’aveu de la possession.
Mais rappelant 11e veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit.
Dans le fait, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Beynes tous les tours et détours des.charbonnières ;
et quand il se fait un moyen de ce que la Charoulière
n’a pas eu d’excavation verticale, il sait bien qu’à la Pleau
D
*
�àn n’a'jamais.--comme en Flandre / exploité ces mines
par des puits.
X^a montagne ou est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creuser par une tranchée1 horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m oyen, qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dii’ige la fou ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure1prouve d’ailleurs que c’est dans un 'tertre
de la Charoulièrd quéi se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres*- sont au com m unal, mais au pied de la Charouliêre y et' en direction~de cette mine.
!
/ .i i
•
.
A u x termes du d ro it, une possession clandestine sup
pose le dol ; c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt'de le saVoir. Il n’est pas besoin,
pour l’étirblir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au m ém o ire des intim és :
Clàtii possidere eum die ¿m us , qui f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o queni sibi controversiam facturum s u s p ic a b a t u r j et ne facerct t im e . jja t . L. 6 , fï‘. D e acq, P o s s .
V oilà donc trois choses qu’il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Piène ait \ox\\fu rtivem en t,
2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
Bcyncs; 30. qu’Antoine Beynes ait ignoré la possession.
La sentence de 1782 répond 'à tous ces faits, en disant
que Marie la Plèrie a joui publiquevidnt. La plainte de
177^ prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�C 27 ?
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur moyen.
• Mais quand tout cela n’existeroit p a s, vit-on jamais
Appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
La clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par 4e seul secours de la possession , et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas,
de possession.
'
" Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il joùit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lui est point appli
cable.
•
i !
Dunod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en vertu
<< d’un titre ne p e u t être regardé com m e possesseur clan« destin , son titre le faisant supposer de bonne; foi dans
« le commencement; ce qui suifit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
*. '
L e Code civil répète que la bonne f o i , quand il .y a
un titre , est toujours présumée , et que c'est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( Art. 2268. ) .•
Les intimés disent qu’on devoit avertir Bcynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’usage n’étoit pas de le fa ire 'par écrit : et d’ailleurs, on
le rép ète, ils se sont dits copropriétaires.
‘ Il n’y a donc aucun obstacle à ce que la prescription
ait eu son cours; et Treich ayant un titre e t’ bonne foi
depuis 1755 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777*
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�( 28
}
cessaire ; c a r, indépendamment de la présomption Lien
fondée , que la reserve de 1736 a du être rachetée comme
l ’a été celle de 1768 , par un acte que Treicli avoit dés
espéré de trouver; il doit demeurer, ce semble , pour
chose absolument évidente, quAntoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qni a toujours
habité le village de la P leau , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
Antoine Beynes , qui en 1766 faisoit un traité pour ex
trade du charbon dans ses propriétés, auroit-il manqué
d’y comprendre la Charoulière, s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
scs droits aux mines, en se réservant du charbon, 11’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T out prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Limoges ,
et il étoit fondé; c’est q ue, dans tous les cas , n’y ayant
qu'une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors vendue, ci non sur celle
qui l’avoit été depuis long-temps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il 11’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se feroit contre
le vendeur, in euju s potestate f u it Jegeni apertiùs diccre. La sentence de Saint-Angcl étoit donc encoye vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La propriété
�( 29 )
de la Charoulière est sans difficulté à Jean Treich. Les
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T reich
et M arie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a -perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Cha
roulière, par la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur ; et même surabondamment, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire, il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem ment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une-tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0407
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0249
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53791/BCU_Factums_M0407.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
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Domaine public
Mines
-
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0918f67b4aa2f6f0d33f538ebcdaefc3
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MEMOIRE
TRIBUNAL
d ' A
p p e l
Séant à Riom.
P O U R
P ie r r e
T O Ù Z E T ,
T O U Z E T , R é g is
P ie r r e
B U IS S O N -
et L o u is C E L E Y R O N ,
C O N T R E
J e a n - J o s e p h C H O U S S Y - D U P I N , homme
de loi , habitant ci - devant à St. - GermainL h erm, maintenant, au P u y , appelant.
Q u a n d on est convenu qu’une chose étoit vendue
a u p r i x qui Seroit fixé,par un tiers, si ce tiers l'a fix é,
« la loi v eu t, quel qu’il soit, que l’acquéreur paye ce prix
« tel qu’il a été déterminé, et que la vente soit consommée...
Si le tiers n’a voulu, ou n’a pu faire le p rix, alors
l a loi ne veut pas qu’on conjecture si les contractans
o
tentendu s’en référer à une personne certaine, ou
n
A
�.
.
( 2
}
.
.
.
« à l’arbitrage indéfini ; elle croit impossible, et prohibe
« d’ajouter à la convention des contractans ». Loi dernière
au code de contrahenda emptione.
L e citoyen Choussy a vendu une propriété à dire d’ex
perts ; il en a choisi deux et dirigé le choix d’un troi
sième : ces experts ont fait leurs opérations en sa présence;
il les a sommés de déposer leurs rapports; ils lui ont obéi :
maintenant il prétend qu’il y a lésion dans le prix; il
demande une nouvelle expertise', ou une résiliation ,• voilà
la cause.
Jugée par le droit , elle eut été trop simple. L e citoyen.
Choussy a voulu l’enchevêtrer de faits et de circonstances.
Noircissant d’un trait de plume acquéreurs , experts et
juges ; Vojtafefc te 'pcvhifté ******* t\v* i
, il
s’est persuadé que ses calomnies aborderoient plus ai
sément à un second tribunal j éloigné de la localité et
des personnes.
Mais c’est déjà p ou r l u i u n assez gran d succès d’avoir
obtenu la plum e d’un jurlsconsulte' célèbre, pour accré
diter ses prétentions captieuses,; et aviver par le prestige de
l’éloquence ses diatribes mensongères. Il pouvoit tromper
son conseil sans obstacle : ici il trouvera l’obstacle de la
vérité, celui du droit sainement appliqué à la cause ; l'un
et l’autre se réuniront pour le contraindre â exécuter une
convention lib re , consommée, et que la justice ne peut
sans violence modifier ni dissoudre.
‘
F A I T S.
■
'Féolgaux, qui est l’objet de la contestation, est une
propriété Voisine dela'G haise-D ieu, composée ¿’un petit
�•
.
(3 )
■. .
.
'domaine de montagne, semant env.iron 14 sçtiprs de
7séiglej et d’un bois de sapins d’environ 100 septerées,
partie en rapport, partie en landes. Situés au milieu de
hautes montagnes, dévastés par les moindres ouragans,
éloignés de toutes communications commerciales, ces bois
ne deviendront une propriété productive , que si le gou
vernement se charge à grands frais d’ouvrir des routes
aboutissantes; sans cela les ventes seront toujours rares
et difficultueuses. L a cause même en fournit un exemple.
L e citoyen Ghoussy avoit à vendre des chablis gissans
'depuis l’an cin q , et il dit que plus de 1 5o pieds de ces
arbres sont encore dans le bois.
L e cit. Dulac étoit précédent propriétaire de Féolgoux
' qu’il habitok, et dont il portoit le nom ; il -le „vendit au
citoyen Choussy, moyennant 49,000 livres, par acte du
19 novembre 1785. L e c i t o y e n Ghoussy y a joint un étang
national , qui lui a coûté 4,063 livres. F é o lg o u x étoit im
posé en l’an sept, à 593 ^ i 5 ^ de contribution foncière.
L e citoyen Choussy s’est pourvu en sur-taxe; e t, par arrête
du i 5 ventôse an h u it, après une expertise, il a obtenu
que la contribution pour l’avenir, ne seroit portée qu’à
-336"* 8 J.
* Les bois de F éolgou x, après avoir souffert quelques
dégradations pendant les premières années de la révo
lu tio n , furent horriblement dévastés par un ouragan en
la n cinq. Le citoyen Ghoussy nous apprend lui-même (1)
qu’il fut légalement vérifié qu’il y avoit 5,723 pieds d’arbres
déracinés ou rompus.
C1) Page 38 de son mémoire.
�.
(
4
)
C’est depuis cet accident que le citoyen Choussy, dé
goûté de sa propriété, a cherché des acquéreurs : une lu
crative expérience ne lui laissoit pas même supposer qu’il
dût vendre Féolgoux à sa valeur réelle. Préparant des
calculs, mais certain qu’on ne les croiroit pas, il voulut
les fortifier par le travail d’un expert à sa main. Le cit.
Dupré fit donc par ses ordres le toisé et le plan deFéolgoux,
en y ajoutant une estimation portant sur tous les objets de
détail, et exagérée en toutes choses.
Alors le citoyen Choussy, ayant jeté les yeux sur les
citoyens Touzet et Buisson, fit plusieurs voyages à Ambert,
pour louanger devant eux, comme par hasard, tous les
avantages qui résulteroient de cette acquisition ; n’omit
rien pour leur persuader que cette propriété alloit les
enrichir excessivement, et finit par leur proposer ses
conditions. Le prix fut fixé par le citoyen C h o u ssy, à
i i 5,ooo livres. Les citoyens Touzet et Buisson n'y accédoient que sous beaucoup de clauses , sur lesquelles on n’a
jamais été d’accord. L e citoyen Choussy envoya cependant
un projet de vente sous seing p riv é , à sa manière; le
citoyen *1 ouzet le copia, et c est alors seulement que les
parties entrèrent en pourparler sérieux, que les acqué
reurs virent par eux - mêmes toute la dégradation de la
fo rêt, exigèrent que tous les arbres abattus par l’ouragan
fissent partie de la vente, et cela fut réellement convenu.
Mais bientôt ceux qui s’intéressoient à eux les empê
chèrent de faire une sottise. Ils déclarèrent au citoyen
Choussy que sa p rop riété étoit beaucoup trop chère, et
qu’ils ne vouloient plus acquérir.
Cette explication est donmfe parce que le cit. Choussy,
�dans son mém oire, a voulu tirer de grandes inductions
de cette première fixation de prix à n 5,ooo livres } mais
alors même il y avoit en sus un mobilier que le citoyen
Choussy disoit valoir 6,000 livres} alors il y avoit un pre
considérable qu’il a vendu depuis} alors; tous les arbres
déracinés par l’ouragan, faisoient partie de la vente par
la dernière convention des parties ( i) , et le cit. Choussy en
portoit la valeur dans ses lettres, à 2.6,000 livres \ alors les
propriétés foncières de ces montagnes, malgré la prétendue
influence du 18 fructidor; alors les bois, et c’est un fait
.notoire, avoient une valeur vénale infiniment supérieure
à celle du temps présent.
'
Quoi qu’il en soit, la négociation de vente de Féolgoux
fut rom pue, au grand regret du citoyen Choussy q u i,
pendant trois ans de recherches, n’a pas trouvé d’autres
acquéreurs , et qui , pai' une suite de correspondance
entretenue de loin en loin , sous les plus légers prétextes ,
n’a cessé de remontrer en cent manières au citoyen
T o u zet, qu’en refusant d’acheter F éolgou x, il perdoit
une fortune.
E nfin, dans l’été de l’année dernière, le cit. Choussy
venu à A m b ert, fit au citoyen Touzet des ouvertures
plus pressantes -, et celui - ci lui avoua, en tranchant le
m o t, qu’il se défioit de toute affaire avec lui ; qu’il craignoit dêtre dupe , et qu’il n’achèteroit qu’après avoir
bien connu ce qu il achetoit : alors le citoyen Choussy,
entre-voyant une autre voie d’en venir à ses fins, proposa
de vendre, à dire d’experts, et cela fut ainsi accordé.
( 1 ) Gela est prouvé par plusieurs lettres du cit. Choussy.
�•
.
-
( 6 )
.
■
.
O n pense bien que le citoyen Choussy voulut désigner
son expert D upréqui déjà avoit estimé Féolgoux : Touzet
l’ignoroit. L e citoyen Choussy demanda même qu’on,
adjoignit à' Düpré un autre expert des lieux même 5 il
dit beaucoup de bien du citoyen Langlade ( 1 ) , expert
et juge de paix de la Chaise-Dieu, supposant déjà qu’il
seroit entièrement dans la dépendance du citoyen D upré,
plus âgé que lui. Les choses en effet furent arrêtées ainsi.
11 fut convenu qu’il seroit déduit 10,000 *** sur le prix
de l’estimation. L e citoyen Touzet associa à son marclié
les citoyens Buisson et Celeyron frères. Le citoyen Choussy
fit lui-même le projet de vente; il fut soumis à la correc
tion d’un conseil commun ; et dès le même jour le cit.
Choussy publioit q u e, s’il avoit rabattu 10,000 livres,
ses acquéreurs payeroient ce rabais plus cher qu’ils ne
croyoient.
.
L ’acte de vente fut reçue par Pon chon , notaire, le 12
messidor an 8 ; il p orte que « le citoyen Choussy vend
« aux citoyens Touzet, Buisson et Celeyron frères , le bien
« de FéolgouXj domaines et bois en dépendans, sis en lk
« commune de M alvière, canton de la Chaise-D ieu, et
« les subroge à l’adjudication de deux étangs nationaux,
cc moyennant, savoir, pour les étangs, le prix de l’adju« dication, suivant l’échelle; et pour le domaine et bois,
te m oyennant le p rix et somme auxquels le tout sera estimé
------------------------- -
■
- -
■
-¡T—
1
( 1) Le cit. Choussy a avoué devant les premiers juges, que
c’est lui qui a désigné Langlade. Cela est prouvé encore par une
lettre antérieure au procès, dont il argumente, et où il est dit que
c’est lui qui a indiqué cet expert.
*
�(
7
)
f
*
« en numéraire par e x p e rts .. . . nom m es, savoir.........
«les citoyens D upré , expert - géom ètre, habitant de la
« Chaise-Dieu, et le citoyen Langlade, juge de paix de
« ladite commune ; et au cas que lesdits experts soient
« divisés dans ladite estimation, en ce cas les acquéreurs
« «t vendeurs veulent qu’ à leu r in su , lesd. experts puis
s e n t prendre un tiers pour les départager; lesquels
* experts seront tenus de déposer leur rapport d estimation
« ès mains de Ponchon, notaire, le plutôt possible, avec
« convention que sur le prix total de leur estimation, led.
« Choussy sera tenu de diminuer la somme de i o 3ooo
« et le surplus après lad. déduction composera le prix
• de vente dudit domaine........... lequel p r ix , ainsi que ^
•»celui de lad. subrogation, seront payés aud. Choussy,
« savoir, un quart dans deux ans, du jour du dépôt dud.
« rapport d’experts ; un autre quart dans t r o is ans, du
« m ê m e j o u r , à la charge de l'intérêt, exempt de retenue,
« à compter du dépôt dudit rapport.........l’autre moitié
« du prix formera un capital que le citoyen Choussy aliène
« en rente viagère à 10 pour 100 aussi sans retenue ; le
« tout comme condition expresse du rabais de 10,000 liv. :
« le tout payable de six en six mois , du jour du dépôt
« dudit rapport.
«• L e citoyen Choussy se réserve les arbres abattus ou
« rompus par les ouragans, desquels arbres il déclare avoir
« fait vente dans le temps, et les acquéreurs pourront les
« retirer dans les temps prescrits par lesdites ventes.
»‘I l se réserve aussi le m obilier, même les glaces;
«dépendant e s bestiaux et outils d’agriculture feront partie
�*
C8 ) :
cc de la ven te, et seront sujets à l’estimation des experts.'
, «II se réserve-la faculté de rachat, pendant trois ans,
« à com pter de la remise ou dépôt ;du rapport d’experts,
« dans le cas où il ne seroit, pas payé en numérairel ’ '
et Sous ces conditions et réserves, le citoyen Choussy'
« se départ des-à-présent et pour toujours, de la pro
p r i é t é possession et jouissance des objets ci-dessus
«vendus, avec toutes clauses translatives de propriété,
« requises et nécessaires, voulant et consentant n’en pou^*
« voir jouir à l’avenir qu’au nom et titre de précaire.
* Il est dit enfin que les acquéreurs payeront tous les
cc frais de l’estimation, fourniront au citoyen Choussy une
cc expédition de la vente et, du rapport qui contiendra
« ladite estimation ».
r
. ; - s.
..r‘>
• • •' •
Les citoyens Dupre et !Langlade s’occupèrent de' suite
de l’objet de leur nomination; ils se.transportèrent sur,
les lie u x , les parcoururent, et le citoyen Dupré produisit,
un plan par lui fait à l’avance pour -le citoyen Choussy : >
cela est constaté par les rapports.
.
5
Ce plan ainsi tombé des nues, le verbiage impératif,,
du citoyen Choussy, l’air de. déférence du cit. D u p ré ,,
donnèrent de la méfiance aux acquéreurs ; mais ennemis^
des chicanes, et liés par leurs propres conventions, ils
laissèrent opérer les experts, avec le plan du citoyen
D upré, et eurent même la patience d’entendre toutes les;>
exagérations du citoyen[Choussy, pour décupler, s’il Tavoit»
pu,' la .valeur(Cde ses immeubles.
«
¿ , 11 , . i, . -. . .• » » **•». ,t „•*
. Cependant, ne se croyant pas encore assez fort de toutes
cçs préparations, le citoyen Choussy voulut faire appeler erj,
auxiliaire
�( 9 K
. .
auxiliaire un marchand de bois de sa plus intime con
naissance ( i ) ; il les mena tous dans les parties de bois qu il
savoit les plus en valeur, se confondit eri éloges de chaque
arbre, n’oublia pas de mesurer les plus gros, voulut qu’on
appréciât le surplus par comparaison, ou qu’on comptât
tous les1arbres >et fit cè qu’il put pour intimider le citoyen
Langlade qui avoit voulu hasarder quelques réflexions
lui disant à chaque mot qu’il n’y entendoit rien. •
■
Le citoyen Langlade ne dit plus rien ; il tenoit la plumey
il écrivit tous les prix qu’on voulut, mais il mit a cote
le rabais qui lui paroissoit juste,'pour en conférer avec
son collègue. Ce fait nous est appris par le cit. Choussy
lui-même. ( 2)
Pendant toutes ces opérations, les experts furent hé
bergés chez le citoyen Choussy , qui ne manqua qpas ,
comme on le pense bien, d’exagérer encore la valeur de
tous ses arbres-, jusqu’à ce qu’ayant pris jour avec eüx
pour .déposer leurs rapports , il crut que toute sa
persuasion auroit eu son effet, et que le citoyen Langlade
seroit assez complaisant pour porter,com m e le citoyen
D u pré, à 120,000 livres en l’an h u it, un bien q u i, avant
la baisse des immeubles, n’avoit été estimé que 1 1 5,ooo liv .
ayant un mobilier considérable et 5,723 pieds d’arbres
de plus.
.•
,
( 1 ) Le citoyen Mannet, qui fut appelé sur la réquisition du
citoyen Choussy, non pas pour tiers expert comme le citoyen
Choussy l’avoit absurdement prétendu en première instance -,
*nais comme indicateur, ainsi que le disent les premiers rapports.
Êa> Ei* son exploit de demande du 8 fructidor an 8, pag. 2.
B
�( IO )
L ’em pressem ent du citoyen Ghoussy de faire aller ses
experts à Ambert pour faire courir, comme il le répète
si souvent, un intérêt de 30 livres par jo u r, ne permit
pas sans doute au citoyen Langlade de faire à son collègue
toutes les observations qui naissoient de la différence des
prix qu’il avoit mis pendant l’opération à chaque article.
Leurs évaluations, en grand et par aperçu , avoient bien
paru faites en commun sur les lieux, mais sauf les rabais
mis par le citoyen Langlade ; de sorte que le citoyen
D upré avoit fait à l’avance un rapport commun aux deux
experts, croyant n'avoir pas plus de difficultés à le faire
signer au citoyen Langlade, qu’il n’en avoit eu à faire
adopter ses plans.
Mais le citoyen Langlade trompa l’espoir des 30 liv.
par jour :• il réfléchit, avec raison , qu’on avoit voulu
estimer une foret en détail, comme on estime quelques
arbres qu’on va livrer à des acquéreurs, tandis que les
acquéreurs de dix mille arbres ne se trouvent qu’à la
longue , ou en vendant au quart de la valeur.
Il réfléchit, par comparaison, que tous les arbres abattus
par l’ouragan de l’an 5 , n’étoient pas encore vendus à
la fin de l’an 8 , et que cette lenteur forcée ne supposoit pas une facilité de vendre pour des sommes appro
chant de 30 livres par jour.
Ces motifs , et beaucoup d’autres très-judicieux, que
le citoyen Ghoussy a trouvé plus aisé de critiquer par des
sarcasmes que de com battre par de bonnes raisons, en
gagèrent le citoyen Langlade à faire un rapport séparé,
dans lequ el, disant que les premiers calculs faits sur les
lieux n'étant qu’hypothétiques et par simple aperçu, il
�èn revient à une évaluation particulière de tous les objets
soumis à son estimation ,• et appliquant alors à chaque
article tous les rabais que le citoyen Choussy déclare lui
avoir vu écrire lors de la visite des lieux , il est résulté
de son estimation , que les''objets vendus sont en valeur
de 73,001 f. 70 cent.; cë'qu i, en faisant la déduction de
10,000 livres, eût donné un prix de vente de 63,001
francs 70 cent.
L e citoyen D u p r é , de son c ô t é , fait le m êm e jo u r un
ra p p o rt, peut-être celui préparé à l’avance , dans le q u e l,
sans réflexions sur son travail i ne donnant aucunes bases,
ne calculant aucuns cas fo rtu its, qu oiqu ’ il eut v u dans
le bois m êm e les vestiges encore récens d’un ouragan
terrible , omettant m êm e , com m e il le reconnoît en
suite ( 1 ) , de déduire aucunes charges d’entretien ; il estime
F éo lgo u x à là somm e exliorbitante de 130 ,132 francs
centimes.
■
' Lé citoyen D u p ré, au reste, quoique son rapport soit
au pluriel, suivant l’habitude, entendoit si peu avoir voulu
exprimer que le citoyen Langlade étoit 'd’abord de son
• avis, que les expérts ont sur leur discordance un colloque
qui; précisément est dans le rapport de Langlade.
Là celui-ci donne les causes de sonévaluation inférieure,
et Dupré intervient à la suite;;dé ce rapport, pour dé
clarer;qu’il persiste dàns:iison opération.
.
~‘ Cette discordance, raisonhéè'entre les experts , est donc
entièrement indépendante des causes honteuses auxquelles
le citoyen Choussy a trouvé'bon de les attribuer.
‘M l
(0 t)ans lé troisième rapport. '
1
B 2
�( 12 )
La parenté du citoyen Langlade , par alliance avec la
mère des citoyens Celeyron , morte il y a douze ans,
le citoyen Ghoussy la connoissoit avant l’estimation. Il l’a
reconnu au procès.
Les repas donnés aux experts l’étoient plutôt pour le
citoyen Choussy, à qui on devoit une représaille ; les
deux.experts ne se sont pas quittés, le citoyen Choussy
ne les a pas quittés ; et d’ailleurs les négocians de cette
ville de Cadis et de Lacets étoient assez simples pour
ignor.er jusqu’à présent qu’une probité fût vénale, et que
des festins en fussent le prix.
. ,
:
Quoi qu’il eu soit, les deux rapports étant faits sépa
rément, il fut nécessaire de nommer un tiers-expert, et
il devoit l’être ¿1 F insu des parties ; car c’est ainsi qu’elles
l’ayoient youlu.
.
..
.
Mais le citoyen Choussy ne crut sans doute avoir fait
des conventions que pour en régler le mode. Ne pou
vant désigner un expert à sa fantaisie, il pensa qu’il par
viendront au m ôm e b u t, en en récusant plusieurs.
,
Il eut.m êm e l’insidieuse précaution, après avoir promis
de dîner avec toutes les-parties le dernier jour, après s’être
fait attendre très-long-temps, de signifier sa récusation
pendant ce dîner (i).
Il venoit d’apprendre que les experts avoient nqmmé
le citoyen Couchard, très-étranger à toutes les parties;
quoique cette nomination.fut cgnsée.faite a l insu des par~
.
•
.
,----------------------------------------1
- ------------------ —
r—
-------- --------------
^
(i) Le citoyen Choussy ne cite pas ce fait dans son mémoire ;
mais les intimés , qui ne craignent dans leur conduite ni les
écluircissemcns, ni l’opinion, n’ont interet de riencacber.
�( x3 )
_
v .
ties *, les experts venoient même de lai écrire, pour 1 invi
ter à accepter sa commission de tiers-expert, le, citoyen.
,Choussy se crut permis de récuser n o n -seulement cet
.expert, qui eut le désagrém ent de faire ^n voyage inu^
.tile , mais encore les citoyens F aurot,'G ctrnier , Jourde
et P ic h a t, comme ayant déjà estimé Féolgoux ; ce qui
.prouve qu’aucun d’eux ne l’avoit estimé comme le cit.
D u p ré , ou comme il convenoit au citoyen Choussy ; ce qui
prouve aussi que ce n’est pas le citoyen Couchard qui a
refusé d’accepter, comme le citoyen Choussy a cru à
propos de le dire (i).
,
Il est essentiel de remarquer que , par cette récusa
tio n , qui est du 10 therm idor, le citoyen Choussy fait
sommation aux citoyens D upré £t Langlade.de nommer
un tiers-expert, et de déposer , chacun séparément,
leurs rapports, p o u r en être d élivré des expéditions a
lu i et au tiers-expert.
L e droit d’élection d'un tiers-expert, d’abord n’excluant
personne, puis infiniment circonscrit par les cinq récu
sations du citoyen Choussy, eut enfin son eifet. Les experts
cherchant dans toute la contrée quelqu’un qui put ne pas
lui déplaire, nommèrent le citoyen T a rd it, ancien ami
du citoyen Choussy (2), et le citoyen T ard if fut assez heu
reux pour être agréé.
r
'■
>
L e citoyen Choussy fut même si satisfait de cette nomi
nation , qu’il chercha à prévenir cet expert, à lui faire des
' (1) Page i 5 du Mémoire, ligne dernière.
(a ) Cette qualité ne sera pas niée par le citoyen Choussy,,
�C X4 )
*
représen tation s, à lui écrire plusieurs lettres, comme il
le dit lui-même dans son exploit de demande.
L e tiers-expert prit jour avec ses collègues, pour se
transporter sur les lieux , débarqua à Fé'olgoux où le
'citoyen Chôu'ssy l’attendoit, y fut hébergé, et. sans doute
travaillé comme ses prédécesseurs, fut pressé de faire sori
‘ opération par le citoyen Choussy, qui vouloit lui servir
d’indicateur, sans que les acquéreurs eussent le temps de
s y rendre, termina enfin sa tierce-expertise, de concert
avec les citoyens D upré et Langlade, et se rendit avec
eux à la Chaise-Dieu, pour se concerter avec eux sur la
rédaction et le dépôt du rapport.
A peine ces trois experts furent à la Chaise-Dieu , qu’il
leur fut fait un acte instrumentaire par le citoyen Choussy.
Cette pièce est très-essentielle dans la contestation. Il est
indispensable d’en rapporter le précis.
L e citoyen Choussy signifie à T ard if :
'
« Attendu qu’il a terminé son opération de tiers-expert,
« de vouloir bien, dans le jour, ou au plus tard dans celui
« de dem ain, déposer son rapport estimatif entre les mains
« de Ponchon, notaire à Ambert ; de profiter pour cela
« de la présence des premiers experts, qui ont été divisés
(<après avoir été d’accord ; de prendre en très - grande
« considération, que s’il attend la commodité de Langlade,
a cjui1 demande un délai de dix jours, pour'faire un
««'voyage, lui Choussy q u i, depuis la ven te, ne jouit
«■
.plus, qu’au contraire les acquéreurs jouissent ( i ) , il sera
.
( i ) Il a fallu deux jugemens depuis cet exploit, pour les
mell re en possession.
.
.
�.y
. , A
^ l5 ^
.
«privé de ses intérêts, qui ne courent que du jour du
« dépôt du rap port....... C om m e c’est son rapprot de lui
« T a r d i f , qui^fixe définitivem ent le p r ix de la v en te,
« et que les deux premiers rapports des premiers experts
« sont insignifïans pour fixer le jour du cours des intérêts,
« lui Tardif n’est pas obligé d’attendre pour ledit d ép ô t,
« que les rapports des cit. Dupré et Langlade l’aient pré« cédé • toute sa commission se réduisant, après ses opéra« tions terminées, de faire clorre et déposer son rapport. »
De là l’huissier se transporte chez les citoyens Langlade
et Dupré.
« Il leur est déclaré que dans le cas où d’après la somma« tion du io thermidor, ils n’auroient pas déposé chacun
»■leur rapport estimatif du bien de Féolgoux,etoù, faute de
«lavo ir fait, il seroit apporté du retard dans la clôture
« du rapport du tiers-expert, et dépôt d’icelui.... il proteste
« contr'eux , etc. »
« A cela Dupré répond qu’il est prêt à partir, qu’il offre
« de signer le rapport du tiers et d’assister à la clôture. »
« Langlade dit qu’il a un voyage a faire à Brioude, qu’il
« demande jusqu’au 28. »
'
« Choussy lui réplique qu’il a le temps le même jour
« d’aller à A m b ert, que s’il ne l’a pas, il peut donner une
« procuration dont on. payera les frais, faire déposer son
« rapport par Dupré ou Tardif, et que rien ne l’empêche
«de signer ici le rapport de T a rd if, dont le dépôt seul
«en attendant finira l’époque du cours des intérêts. »
Enfin , l’impatience du citoyen Choussy eut son terme :
les trois rapports furent déposés le 29 thermidor.
Celui du citoyen Tardif n’a pas répondu aux vues du
�C 16 )
cîtoyeri Choussy. On pense bien que depuis cet instant,v
T ard if prévenu, Tardif en correspondance, T ard if hé
b e r g é , prôné et choyé, n’a plus été qu’un rustre incapable,
gagné aussi par des festins, suspect, et ne pouvant faire
foi en justice.......
* T.<e rapport de Tardif est disserté et signé'par les trois'
experts:' “ ^
!
' Tardif annonce d’abord qu’il s’est rendu à JFéolgoux,
sur l’invitation des citoyens Langlade et'D u p ré; que là
il s’est réuni à eux.
Ensuite il leur demande des explications sur plusieurs
points des précédens rapports. D upré, entr'autres choses,
avoue avoir omis de déduire les frais de garde.
Après ce colloque il est dit que Choussy requiert de
commencer l’opération , offrant d’y être présent, pour
faire toutes les indications nécessaires, répétant toujours
qu’un retard lui est préjudiciable, l’intérêt devant courir
du jour-dü dépôt du rapport
Il est dit que T a r d if, D u p r é , Langlad e et Choussy vont
sur les lieux. On procède à la vérification, et il est ajouté :,
« Après avoir pris les renseignemens convenables, pris
« enconsidération’les situations et localités, la stagnation
é<. du commerce des b o is, le peu de valeur 'du bois dé
« chauffage dans les environs de la Chaise-Dieu et de
« Féolgoux, et la difficulté de Texploitation des bois de
« fayard et boulaux, nous estimons ...total, 85 ooi fr. yo ci
« de quoi ôtant ioooo fr. reste à la somme de yôooi francs
« 70 c. laquelle somme form era le prix principal de la
« vente. »
1
‘
Ce rapport est- terminé ainsi : « Tout qiîoi est notre
rapport,
�.
( !7 ) '
.
«rapport, que'nous ayons clos à S ain t-A m ant, en îa
« demeure du citoyen Tardif.. Et- avons signé avec les’
a citoyens D upré et Langlade. » .
'
-Ensuite le citoyen D upré apposant sa signature , a
ajouté, pour ne pas se compromettre, les mots conmia
-présent.
. . ' ••\'r 5r.
‘
‘
Dès le même jour, le citoyen Choussy fit citer les acqué
reurs au bureau de paix ; e to u b lia n t qu’il avoit menti
en disant qu’ils jouissoient, oubliant que, par sa vente,
ils avoient droit de jo u ir, il leur fit, de son chef, défenses
de se mettre en possession.
“
1
Le 8 fructidor il les assigna devant le tribunal civil
d’Ambert ; et, après un débordement de mots , de gros
sièretés et de contradictions, noyés dans huit pages de
minute , il conclut : i°. à ce que , sans s’arrêter au rap
port sépare dé L a n g l a d e , a t t e n d u q u e M a n r i e t fut appelc
com m e indicateur et tiers-expert, et que les experts n’ont
pu en nommer un second; sans s’arrêter de même au
rapport de T a r d if, comme sans droit ni pouvoir , le rap
port de Diipré soit hom ologué, pour être exécuté suivant
sa forme et teneur , et le prix de vente fixé à 120,123 1. ;
2°. subsidiairèment à ce que , sans s’arrêter aux rapports
de Langlade et T ard if, et même à celui de M annet, il
soit ordonné un amendement de rapport, et procédé à
"une nouvelle estimation des objets vendus, par de nou
veaux experts ¡probes,{intègres et éclairés., dont les parties
conviendront, sinon pris et .nommes d office par le tri-;
bunal, même un' tiers, non par lesdits experts, mais par
le tribunal ; duquel amendement il offre les avances ?,sauf
son recours.
: .'
*
�.
( 18 )
.
.
.
Cette cause fut pïaidée très-contradictoirement au tri
bunal d’A m b ert, et on imagineroit difficilement les nom
breuses et minutieuses recherches du citoyen Choussy,
pour se faire des moyens de tout, et suppléer à la qua
lité par le nombre.
'
. .- .
Ayant fouillé les registres de l’état civil, pour découvrir
des parentés, soit aux experts , soit à ses juges, afin d’en
user au besoin, il avoit découvert que de femmes en
femmes la trisaïeule du citoyen Buisson avoit été parente
d’une bisaïeule de la femme du citoyen T a r d if, ou du
moins que des ressemblances de noms très-communs dans,
la contrée faisoiënt présumer cette antique alliance. Il
attendit le jour de l’audience pour augmenter , par de la
surprise, l’effet de cette découverte ; et elle fut réellement
une grande surprise pour le citoyen Buisson et sa fam ille,
qui ne coimoissoient pas cette parenté, même par tra
dition.
Cependant, se confiant peu dans ce moyen , le citoyen
Choussy en chercha d’autres dans les expressions du rap
port de Dupré , pour le dire d’accord avec Langlade,
dans l’indication de Mannet, dans la clôture des premiers
rapports un jour de décade j dans la loi sur les tiers-arbitres,
dans les contributions calculées à sa m anière, jusque
dans la probabilité qu il ne devoit pas vivre long-temps.
Pour faire croire qu’il n’avoit pas d’intérêt à tenir à
ses conditions, il démandoit-enfin la nullité de la ven te,'
quoiqu’il rj’y eût pas conclu.
-' •
Malgré tant d’efforts pour parvenir à ses 30 liv. par
jou r, le tribunal d’Ambert rendit, le 8 brumaire an 9 ,
le jugement dont la teneur suit :
.
••
�( x9 ^
.
.
.
.
.
'« Attendu qu’il ne s’agit point d’expertise judiciaire j
» que les parties-se sont fait la loi à elles *■inerties par
» un acte authentique, et que leurs consentions ont été
.............
*> exécutées} -, . ' . ’i .->i i ■ -, \ ..
si A ttendu ’q ü e les récusations du citoyen Ghoussy contre
» les ekperte n’ëtoiént proposables-qu’avant:le,dépôt de
h
leurs rapports , et qu’au côrittai're il a. approuvé leurs
â opérations par sa présence, et leurs rapports par ses
» réquisitions écrites de les déposer chez le notaire qui
» a reçu la vehte ;
'
• >> Attendu que cette Vente réunit le consentement, la
chose et le p r ix ; que ce prix^pst fixé par le rapport
? du citoyen T a rd if , ainsi que ,1e citoyen Ghoussy Ta
»
écrit hii-^mê me par la sommation du 19 therm idor; qu’il
» ne peut aujourd’hui revenir contre! cet écrit et contre
» sa Convention, clairem ent é n o n c é e , audit acte de vente ;
L e trib u n a l , par jugem ent^n prem ier ressort, ayant
» égard au rapport .du citoyen T a rd if,, tiers-expert, et
» icelui homologuant ,d éb o u te le citoyen Ghoussy de sa
». :derüande ^ ordonne que la vente du 4 messidor an 8
» sera exécutée suivant sa fo rp ie etr,teneur, moyennant
» le prix fixé par ledit rapport »,à 763001 francs 70 cen t.,
» d’après la déduction de, ,10^009 livres de remise accor
* dée par ledit contrat de y ente ; fait main - levée aux
» défendeurs; de la d é f e n s e de jouir ’ à eux faite par le
» citoyen Ghoussy , en sa citation du 8 fructidor an 8 ;
»' leur permet deijse mettre enjjjossessipn d.es objets ven
» d u s , avec défenses au citoyen Ghoussy de les troubler,
# aux peines de droit ; condamne le citoyen Ghoussy aux
» dépens ; et attendu que les défendeurs sont fondés en.
Ca" 1
�C 2° )
» titre , ordonne que lè présent jugement sera exécuté,
» nonobstant l’appel et sans y préjudicier ».
'
L e citoyen Choussy s’est pourvu contre ce jugement,
et sa première démarche a été de vouloir encore empêcher
les acquéreurs de se mettre en possession. L ’incident qu’il
a élevé pour obtenir des défenses d’exécution du pre
mier jugem ent, la répétition qu’il a faite à l’audience
de tous les moyens qu’il avoit présentés à Am bert, n’ont
pu 1:empêcher de succom ber encore sur ce provisoire.
L e jugement rendu le 6 pluviôse dernier est motivé encore
sur ce que les parties se* sont fait des conventions qui
doivent être exécutées.
1
‘ ' ' «;<
Ce mauvais succès du citoyen Choussy eût dû lui faire
présumer que le tribunal maintiendra un tel principe.
Mais il a fait une dernière tentative. Il a ém is, dans le
même jou r, un mémoire dfe qüarante-quatfe pages d’im
pression, et des causes d’ap]5"el signifiées",'en''dix-sept
pages de m inute, sur grand papier.
'■
1 r'
f
L es m oyens sont les m êm es; les demandes diffèrent.
Dans le m ém oire, il laisse aux acquéreurs la faculté
d’annuller la vente du 4 méssidor. • :
'
.... ■
Dans les)!causes d’ap p el¿il conclut à cette nullité ;'et,
seulement par subsidiaire-, à ùne nouvelle expertises.
Les acquéreurs discuteront ‘d’abord les moyens du
mémoire. Ils en viendront‘ensuite aux conclusions des
causés d’appel.
‘ ,j -•
^ a'} t V ,fK •• ‘
Dans son mémoire , le citoÿèri'Choussy propose trois
inoyens principaux.'1 k/ •
5 n'
1
" - ,J‘-> «
Les intimés en ont üri seul j c’est leur convention, H
doit prévaloir.
' j
;
�.
( 21 )
Les faits ont répondu d’avance aux moyens que pro
pose le citoyen Choussy. Un examen particulier sur cha
cun. achèvera de les détruire (i).
„
P R E M I È R E
QTJES
T' I 0 tf.
L e rapport du citoyen T a r d if est-il n ul pour cause de
parenté avec Vun des acquéreurs ?
,
• Cette parenté, si elle existe, est d’une assez rare espèce.
Depuis la souche qui remonte au dix-septième siècle à un
A rtaud, il y a e u , de générations en générations, jusquau citoyen T ard if, cinq changemens de noms.
Dans ces alliances successives q u i, venues d’Ambert ont
passé à Marsac , de-là à Saint-Amand, comment croire
que les enfans par alliance des cousins issus de g e r m a i n ,
alliés e u x - m ê m e s , a ie n t c o n s e r v é l ’h a b i t u d e d e la parenté ,
si dégénérée dans nos mœurs, à travers cette variation
de familles, de noms et de demeures? Dans la réalité,
les uns et les autres l’ignoroient \ ils en doutent encore.
Mais cette parenté ne mérite pas de recherches plus
profondes ; le temps est passé de les faire : le citoyen
Choussy ne peut plus s’en,faire un moyen de récusation,
parce que tout est consommé; ainsi, il seroit oiseux de
lui disputer le mérite matériel de sa découverte.
I Un juge peut être récusben tout état de cause, c’est(iV Les intimés eussent voulu dire moins de choses ; mais le
citoyen B oiro t, ordinairement si concis , en a dit beaucoup :
il y auroit de la présomption à traiter légèrement les objections
gué ce jurisconsulte a crues proposables.
, -
�C 22 )
.,
à - d i r e , avant qu*il ait prononcé ; voilà le principe, on ne
le conteste pas.
_
'
Mais doit-il se récuser lui-m em è, quatid ÎÎ ne cottnoît
pas les motifs de^ récusation ; ou sil-ne le fait pas, rendil une décision nulle ? voici en quoi les intimés combat
tront le fcitoyen Chouèsy ; ils soutiennent là négative. .
L ’article Ier. de l’ordonnance de 1667, dît: « que les
« récusations seront valables en matière civile, si le juge
« est parent de l’üne des parties , jusqu’aux degrés de cou« sins issus de germain';.... et néanmoins il pourra demeu-*
« rer juge si toutes les parties y consentent par écrit».
La récusation, est donc simplement valable ou Jucul->
tative j elle n’est donc pas de droit. Il n’y a donc plus lieu
de la proposer, quand les parties ont consenti que le juge
connût de l’affaire. ,
E n supposant, comme le citoyen Clroussy l’entend, que
le citoyen T a r d if ait êxêrfcé les fonctions d’arbitre (1) ;
non seulem ent il l’a requis de p ro c é d e r, mais après son
opération il la requis par écrit de déposer son rapport.
L ’article II dit : « que le jugç pourra être récusé en
« matière criminelle, s’il est pâvent où allié jusqu’au cin
« quième degré ; et s'il porte lè iiont, et qu’il soit dé la'
« f a m i l l e ; .. . .. il s’abstiendra en quelque degré icjue”cer
« puisse être, quand la patenté ou alliance1sera coït*
« nue par le ju g e, ou justifiée Jjar l’ une des partrês;
.
-------«nonobstant le consentement, etc. » •
?'II. est donc des cas où la parenté,peut n’être pas connue
(1). p»ge 24.
�( 23 )
.
par le ju ge, et remarquons ici qu’on ne lui ordonne de
s’abstenir, que quand il porte le n o m , sans cela la récu
sation peut seulement être proposée, et devient comme'
au civil facultative.
, L ’article X V II dit : que le juge qui saura des causes va
lables-de récusation est tenu de les proposer.
'
A in si, il faut qu’il soit constant qu’il les ait sues.
L ’article X X I d it , que celui qui voudra récuser pourra
le faire en tout état de cause, en , affirmant que les
causes de récusation sont venues depuis peu à sa connoissance.
•
L e citoyen Choussy dans son mémoire s’approprie fort
à son aise les dispositions de cçt article.
Il offre son affirmation que les causes • de récusation
ne sont venues à sa connaissance que depuis l’opération
du citoyen T a rd if: ce n^est nullem ent le cas de s’en ré
férer à cette affirmation. Les intimés s’applaudissent que
le succès de leur cause n’en dépende pas.
La récusation étant proposable en tout état de cause;
le citoyen Choussy qui voudroit affirmer, dit que ces
expressions le concernent, et qu'il est encore en causer
Mais dix lignes plus bas il prétend que T p d i f exer-r
çoit le ministère d’arbitre : o r , si cet arbitre a pro
noncé le 29 therm idor, les parties ne sont donc plus
en état de cause devant lui.
,
•
La cause actuelle est étrangère à la cause dé l’arbitre j
il étoit' inutile de chercher des autorités pour appliquer
à l'expertise de T ard if, le titre des récusations de l’o r
donnance de 1667. En expertise comme en arbitrage,
la récusation devoit être proposée pendant sa durée 3
elle n’étoit plus proposable après la décision.
�( H jr
.
Jousse sur les mots: en tout état de cause, dît ju s
qu’au jugement définitif.
t ,
Despeisse (i) explique q u ela récusation doit être pro
posée avant la contestation en cause èt que si les causes
n’en sont connues qu’après, on sera reçu à récuser, en
affirmant, jusqu’au jugement du procès ; « pourvu, ajoute« t - il, que le juge qu’on veut récuser n’ait pas opiné;
« car après avoir donné son suffrage, il ne peut pas être
«récusé, sinon qu’il l’ait'donné, après avoir lu la requête
« de récusation ». 1
'
."‘
L a loi apertissim i, au code de ju d ic iis , dit;même"
qu’on ne peut récuser le juge que dans le cours du' procès
pendant devant lu i, en lui signifiant mie récusation, et
qu'après sa décision, il ne peut être récusé. L icea t ei
q u i suspeçtum judicem p uta t, atttequam lis ihcphetu r, eum recusàre 3 ut ad'alium curratur, xhbello rëcüsationis eip o rtectd .
■
....
L e citoyen Tardif eût-il été récusable, comme on le
prétend , le citoyen Choussy devoit lu i notifier à luirnéme ses motifs de récusation. La loi précédente le dit
ainsi; l'ordonnance de 1667 plus explicative en prescrit
le mode en l ’article X X IIÏ ; elle veut en l’article X X V I ,
que la récusation soit communiquée au ju g e , qui sera
tenu de déclarer si les faits sont véritables ou non.
On n’opposera pas sans doute, que l’ordonnance en
parlant des causes'de récusations que les juges ou les parties,
sont censés ne pas connoître d’abord, ne concernent pas
la parenté ou alliance. L ’article II suppose que les juges
.
( 1 ) Titre I V , de la récusation, tome 2, page 641.
-
•
* peuvent
�V _
C ^5 )
_
peuvent l’igriorér; l'articlet X IX enjoint aux parties de
déclarer les causes de récusation i pour parenté ou
alliance, et de les proposer, lorsqu’ils les connoîtront.
Les causes de. parenté ou alliance contre le citoyen
,Tardif ont doncdvi être proposée s par le citoyen Choussy
en état de causé 'r c’est-à-dire, avant la décision de ce
tiers-expert.
'
i
,
' A u contraire, loin d’en proposer avant cette décision,
il a en' tout état de cause assisté à l’opération ; il a requis
le citoyen T ard if, par ides lettres ; et, après sa décision
m êm e, il l’a requis par sa'signification du 19 thermidor,
de déposer cette décision,. ¡j
p
u , .
. Ainsi il est dans le cas de l’art. Ier.;de l’ordonnance. Il a
donné par écrit des consentement, formels ; et n’e u t-il
qu’assisté volontairement au travail du citoyen T a r d if , il
seroit par cela seul aujourd’hui non recevable à s’ea
plaindre.
-frll ajété ju g é , dit le commetitateur de l’ordonnance,
«par un arrêt ,du 23 ievrier ,170,8, rapporté au journal
« des audiences, qu’une partie qui avoit procédé volontai«rententdevant un jugé, ne-pouvôit plus ensuite le récu
s e r , quoique-ce ju g e ;eût connoissânce de la cause qui
« .donnoit liqu)à lai contestation
• a'. ;• 1 ...
‘ Cet arrêt est^dans’.ùne especé moins favorable que celle
•de la cause. «:
jôovù •<! Ji'-';
. ; -. oCar,fcien)ine)pjroùvé que ¡Tardif, et- Buisson se crussent
pa'rens^;T,o;ut i'jjroûveiaiü.cpntraiçe:.<ï1\ l ’ignoroient. Les
plus anciens de leur farnillo frssurfcnt encore que non.
' Il r$Ste-)àr dir£ surice. moyen ,■que si la' récusation du
citoyen :Tavdif éfcpit, eiiCQre^prap’osable après sa décision,
elle ne l'annulleroit pas.
.-oi
'if.-h j'j D ’
t
�t *6 )
' L ’ordonnance dans aucun article rie parle de nullités. Or}
Jes nullités ne se suppléent pas.
T ;
L a loi du 4 germinal an a , fait la différence des lois an
ciennes et de celles postérieures à ,1789.
Elle veut qu’on n’applique la nullité aux premières’,
que dans le cas des formes prescrites y à peine de .nullité.
Mais l’ordonnance ne pouvoit pas s’occuper.de Ja nullité
■que propose le citoyen Ghoussy , sans l’établir; car elle
n’admet les récusations que jusqu’à la prononciation du
juge. Ainsi il né peut'y avoir Ü€!ti à nullité ,q u e si/lejuge
«voit passé outre , aprèsuneré^usation,
’ : 1 ,
C’est par ces motifs que le tribuhàl d’Anibert s’est décidé;
ils étoient écrits d a n sla îo î.ll a doric légalement homolo
gué le rapport. Il n y & donc pas -lieu de réformer sa
décision. * / - *“ • ■
■ 1
■
■
■ '
L
e
B E ï ï ’XlÈ' ffiE' hltr’ES'TlOTî. '
r a p p o r t
y
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d u
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c i t o y e n
q i t u t i
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r d r f e s t- il n u l , c o m
s e u l - p a r l e s ‘t r o i s
’ .r, : ¡. '/;
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e x p e r t s
/•) -
i
’
: a■
& f t é ’â è v t i n t
•r é u n i s
,i
,
■
? '
.
Q u a n D-le: citoyen Æhoussy signifioit oüxicitoyenfe'Dupré
Langlade ; de fairfe «t à é ^ m t r ^ V p / i a c u h ' ‘A é p a i c ë m e n t ,
leurs rapports; quand ilsign i’fiofct-»ai0)’c itbÿdfii'Tâi*iif que
Son rapport -devait $ & ü h ôxér Je ‘-prix:de4a v^ente), -et qu’il
étoit inutile qu’il attendît le dépôt des deux premiers:rap
p o rts, il>ne fprôvoybitipas^ ¿qu’après rex^cution de ses'ore t .
-dres*, >il trouverait phis>séwrittqu’til ;n?eût 'dû ÿ-&vo ir qu?un
ra p p o tt‘-CQinimtrnJ,'>d t e > t r o i & > J1,
ar->r,iu,
, •
A ujourd’hui., dans: [Si sagesse; il'prétend'■qu^ilfalloit
-que cela fût ainsi^ ertiijse «fonde -sur les5conventions des
parties, et sur la loi.
. ;
�...
.
(■h î
>
.
..
• L a vente du 4 messidor, dit q u e , si les experts ne sont
pas d’accord, ils: choisiront un tîers pour les départager,et parle en plusieurs endroits d’un rapport d’experts quicon tiendra ^estimation, mais non pas’ de plusieurs:
5
S’il y aVoit à cela de 1?atnph ih 01ogi e, ‘le citoyen Chouçsy
nous aex^UéJuélui-même dans ses sigftife&tionsr le sens qu’il
donrioit à sa convention. Alors il étoit sincère' ,rparce qu’il;
ne cherchoit pas un moyen.
'
'
Il nous a appris que, si les premiers experts étoient d’ac><
cord, un seul rapport fixoitlp prix,que 3’ils hè Tétoierit pas,
un seul rapport lé fixôit encore; cela est-très-vrai’. Dansr
tous les cas il n’y a donc qu’un rapport unique à considérer
Dans l’espèce, les deux premiers rapports pouvoiént
ctre ou n’être pas déposés, cela iinportoit p e u ; et comme
la signifié lie citoyen Choüàsy^ ils devenoient inutiles dès
qu’il s’en faisbit un. troisième. IVlai'S'il étoitbon de’les rédi
ger ; et tel est l’usage général des expertises ; car c’est parlà que le tiers-expert prend connoissànce des points de
division des premiers.
1
•
En quoi donc le dépôt des trois rapports est-il- répré
hensible ? Si cela ne nuit pas, si tel ‘est Tüsage, si sür-tout
les experts ont obéi aux injonctions du citoyen’ Choussy,
de quoi peut-il se plaindre ?
.
' 11 invoque encore la lo i, non pas pour dire qu’elle a
plus de poids que la convéntion des parties, mais pôùr
prétendre qu’elle avoit réglé là même chose. '
Pour citer des lois , il falioit se créer une application ; le
citoyen Choussy avoit appelé les tiers~experts, des experts^
pendant les 26 premières pages-dé son mémoire. Mais
cela le gênoit, et il en fait des arbitres.. • .
'..
D i
�c 28 )
Ce n’est pas par une expression générique de latinité
qu’il peut le prouver. Arbitrium signifie une décision quel
conque 5 et dans les mernes lois,' il est employé d’autres
expressions pour dire la même chose (1). Le nom d'expert
appartient à notre langue seule ; celui d’arbitrium bon i
viri est le seul qui y réponde, et cependant, quand le
préteur y renvoyoit une contestation, il n’entendoit pas
nommer un arbitre, et lui céder toutes les fonctions
judiciaires.
; ; vCette définition pourroit s’approfondir davantage, mais
elle est oiseuse, et ce n’est pas dans ces nuances de mots
que git.la contestation.
.. '
• ' i; •
Ce qu’avoit dit le citoyen Choussy, étoit pour en venir
à la loi du 18 thermidor an trois, qui veut: « que le tiers
« arbitre, nommé en cas de partage , ne puisse prononcer
« seul en faveur de l’un des deux- avis, mais.qu’il se
« réunisse aux arbitres pour délibérer et juger.
.
O r , le citoyen T a r d if, expert ou arbitre, a fait, quoi
qu’on en dise, tout ce que cette loi prescrit aux arbitres
de faire: ' •
■
'.
Il s’est réuni à eux; il a discuté, délibéré et prononcé
avec les citoyens D upré et Langlade ; ils ont signé son
rapport.
Q u’importe que le citoyen Dupré ait ajouté à la signa»
ture comme présent ? si cela signifioit qu’il n’approuvoit pas l’opération, ,en est-elle moins valable ? s’eston moins réuni avec lui ? mais s i , dans un tribunal, l’un
(1) Par exemple il est dit: Secundùm ejus estimationem, vendis
tionem ad ejf'ectumpervénire*
'
�.
.
.
( 2
9
.
des juges vouloit écrire au plumitif qu’il n’est pas àe l’avis
du jugement, sans doute cela ne l’annulleroit pas.
Qu’importe encore que le tribunal d’Am bert ait dit dans
Je jugement dont est appel, ayant égard au rapport du
citoyen T a rd if, et icelui homologuant : il falloit bien lui
donner un n o m , et il ne pouvoit pas d ire , le rapport
des citoyens Du p ré , Langladeet T ard if, c’eût été les ho
mologuer tous.
,
■ L e citoyen Choussy avoit voulu que les deux premiers
fussent faits séparément; il avoit donc rendu nécessaire
qu’on distinguât le dernier rapport des deux autres , et
on ne pouvoit lui donner que le nom du tiers - expert
chargé de départager les autres, en se réunissant à eux.
Un sénéchal donnoit son nom aux sentences, et cela ne
signifioit pas qu’il les eût rendues seul.
C e que le citoyen T a r d if a dit au singulier dans ce tiers
rap p o rt, bien loin de prouver contre la réunion des
experts, comme le citoyen Ghoussy veut le persuader en
scindant isolément quelques phrases, prouve tout le con
traire. En effet, dans le commencement du rapport qui
doit être un procès-verbal, T ard if partant de chez lu i,
allant à la Chaise-Dieu, et demandant à ses collègues le
sujet de sa convocation , ne peut pas parler au nom de
tous; il eût été inintelligible:il dit donc3je suis allé, etc.ja
les ai invités, etc. L e cit. D upré m'a observé, etc., parce
. qu’alors il distingue ce qu’il fait et ce qu’il dit ; mais lorsqu’ensuite il va s’occuper de l’opération, il dit: nous
sommas transportés à Féolgoux avec les citoyens D upré
et Langlade, y avons trouvé le citoyen Choussy , q u i
nous a requis, de commencer nos vérifications , offrant
�t 3d )
de nous accompagner e tfa ir e toutes les indications né
cessaires , et de terminer n o s opérations, etc. ( i ) avons
procédé , etc* estimons , etc.
Voilà dorlc T ard if ne parlant plus seul, et cette diffétenèe même de langage prouve que sans être obligé de'se
conformer à la loi du i8thei-midor, il en a suivi les dispo
sitions. Ï1 lui suffisoit de se réunir à ses collègues ; il a fait
plus , il a fait toute son opération en commun. On voit
inême parles signatures, que l’un est de son avis, et que
l’autre n’en est pas. Il y a donc m ajorité, et elle n’étoit
pûs nécessaire.
;
L e dtoyen Choussy se confie si peu en ses moyens, que
polir en augmenter la masse, il veut tirer parti de ce que
le notaire qui a reçu l’acte de dépôt des trois rapports, a
appelé le troisième celui du citoyen Tardif» Mais il suffit de
lui demander comment, en ayant exigé trois, il eût pu
l'appeler lui-m êm e?
,
• •
'
Il a vu aussi que darts la lettre des premiers experts à
Gouchard , ils le convoquent pour revoir notre estima-»
tion et rédiger tous trois notre rapport.
Mais le' citoyen Choussy ne remarque pas que si les
experts efttendoient alors n'en faire qu’un seul, c’est luiinême qui y a mis obstacle en les requérant d’en déposer
deux, chacun séparémènL II a donc voulu ce qu’il blâme^
Les intimés l’ont trouvé bon ; ainsi y ayant accord entre
les parties, quelle correction y a-t-il à y faire ?
'
L e citoyen Choussy sent si bien cette conséquence, qu’il
(t) Il eût au moins dit, notre opération, s’il eût entendu par
ler an pluriel pour lui seul.
�(
3 1
)
t
.
.
v
.
se bat les flancs pour atténuer la signification qu’il a faite
le 19 thermidor; il ne vouloit, dit-il, qu’éviter au ci
toyen T ard if, comme au citoyen Langlade, les délices
de Capoue ( i) : il étoit impatient de perdre ses intérêt?
de 30 fr. par jour. A in s i, tout çe qu’il a dit dans sa juste
impatience, ne peut pas être pris pour des règles donr
■nées aux experts, qui vajoute-t-iJ, trouvoient ç^es règles
dans la loi du 1$ th erm idor,et dans Ja convention synallagmatique du 4 messidor.
'
. C ’-est sûrement pour le citoyen Çhoussy une biep puis
sante excuse, que le chagrin de perdre un intérêt de
30 fr. par jou r: 30 fr. ! ! et pour Féolgoux , q u i, année
commune j n’a jamais rapporté net ,2-000 f r . , en y com
prenant même Jes ventes de bois .réglées >et habituelles (2).
Mais c’est un peu .tard, pour ^expliquer des arrière-penfees qui ne détruiront pas des cçritg : ü&étoijt ¡pas prohibé f
par Jæ ypnie du 4 messidor, de fair^ ¿plusieurs rapports.
¡Ainsi, en soi-même , il.n’y auroit rien (d’irrégulier ; à plus
forte raison, quand les parties y ont cons<?rçt.i .exprçsr
sèment.
On contracte en jugement .çomnje par-^ejrçaiftt notâmes;
(1) Ainsi cette obscure cité, tout à l’heure, ne florissant que
par ses cadis et ses lacets, est devenue une Capoue attractive.
Elle s’énorgueilliroit de cette prompte métamorphose , si bien
t ô t , la changeant‘en Caprée honteuçe, le citoyen Glioussy ne
•Juiumputoit une facilité de.corruption .qu^il croit,possible^ que les
acquéreurs ne .s’étonnent pas qw’il croie possible; niais,dgf»t np
tribunal.honnête doit s’indigner.
(2) Cela est prouv.é par .des expertises, jointes au procès.
�.
(3 0
.
^
et si dans'le cours d’une contestation, l’une des parties
requiert et l’autre ne conteste pas, dès-lors le contrat
judiciaire est formé. L e citoyen Choussy, qui veut si
obstinément que l’opération des experts soit et ne soit
qu'un arbitrage ordinaire, récusera-t-il ce principe et,son
application?
’
’
<£
' Quoi qu’il en dise, lié par sa convention , voulant y
chercher de l’obscurité pour la dissoudre, il a lui-même
dissipé cette obscurité par ses réquisitions; il a expliqué
aux experts ce qu’ils avoient à faire : ils s’y sont conformés.
A in si, ses moyens actuels sont des argumens contre luimême.-•
•1
■ i
•'
* Il veu t, pour soutenir ces moyens, que lés experts
aient été des arbitres, et leur estimation un arbitrage.
D ’après lui,les tribunaux ne seroient pas compétens; car
la loi du 24aoiit 1790, dit que les décisions arbitrales sont
rendues en dernier ressort. Nos constitutions veulent, de
plus , qu’on ne puisse les attaquer,' même par le recours
en cassation.
•
..
.
T R O I ‘ S I E WT E
Q U E S T I 0 N.
J
Y a - t-il lieu (Tordonner un amendement de rapport,
,
, . ou la vente est-elle consommée ?
.
f.
-i '
.!
1
. ;
L e s arbitres de la question précédente sont redeyçnus
des experts pour donner au citoyen Choussy la facilité
de*prétendre qu’il y a lieu à. un amendement > r
-;
Pour le p ro u ver, il s’entoure de moyéns de considé
rations: jls sont nuls contre une'vente j de quelques auto
rités ,
_
�(C
33
)
•rités, elles sont foibles et hors1 la cause; de quelques
fragmens de lo i, ils sont inapplicables. .
■
Des autorités, claires èfc puissantes ’, une :loi unique et
décisive seront'opposées : la >cause. y est écrite; .
Ce n’est pas nominativement une action en lésion qu’a
intentée le citoyen Choùssy, il;la savôit supprimée;:mais
il y a conclu sous une autre forme: : >; .!
!
• Prétendant que.Féolgôux vaut le doublé de l’estimation
qui fixe le prix de vente, demandant que des experts
nouveaux vérifient cette p r o p r ié té , pour savoir si elle
vaut plus ; et en ce cas, concluant à ce que le supplément
soit payé par les acquéreurs, ou que la vente soit résiliée,
voilà bien certainement toute l’essence de l’action , en
lésion ; et si l’on en croit le citoyen Choùssy, cette lésion
est énorme.
•
, • <-• * ' '
■
Ingénieux dans ses calculs, il rappelle l’estimation qui
fut faite de 5723 pieds d’arbres que l’ouragan de l’an 5
déracina , à 48,000 fr., dit-il, s'ils eussent été sur p ied ,
€t 16,000 fr. en l’état où ils étoieril. Les dégâts étoient
dans un dixième de la forêt ; ainsi, dans la même pro
portion , les neuf dixièmes auroient , selon lu i, valu
400,000 fr.
'
.
Mais qui ne sait pas’ qu’un ouragan qui déracine
5723 arbres, ne hisse pas intacts neuf dixièmes d’une
fo rê t, qu’il dévaste tout arbre qui présente une grande
surface ; et qu’ainsi n’ayant fait de dégât que dans un.
dixième de la fo rê t, cela prouve que dans le surplus il
y avoit très-peu d’arbres d’un volume à offrir de la
résistance au fléau. O r , vouloir faire estimer les parties
stériles ou dépeuplées sur lç meme pied» peut bien etre
�'(
34
)
; l’idce d’un spéculateur >qui postule 30 fr. d’intérêt' par
jo u r, mais n est aux yeux de là justice qu’une proposition
captieuse d’ùne mauvaise foi révoltante.
•
L e cit. Choussy donne une autre base d’estimation , qui
est celle faite par les citoyens Garnierët Faurot, experts (1),
nommés par l’administration de la Chaise-Dieu , sur une
demande par lui formée en l’an 8 , en réduction de ses
rimpôts ; ils o n t, dit-il,estimé Féolgôüx à 1 i 1,322 fr. 60 c.
'•au .bas p rix , ajoute-t-il, qu’on a coutume de donner à ces
sortes d’évaluations. '
c> ;
’
•
Ceci seroit mieux trouvé, si le citoyen Choussy disoit
4out; mais semblable à celui qui présenteroit pour titre
un jugement de première instance , réformé sur l’appel,
-■il montre l’opération; de deux premiers experts, mais il
ne dit pas qu’il s’est pourvu par appel devant l’adminis'tration centrale Comme d’iméestimation exhorbitante, que
'de nouveaux experts (2 ) ont estimé Féogoulx presqu’à
-moitié moins, et que lé dernier rapport de ces experts a
été séul hom ologué- p ar l ’adm inistration cen tra le , par
■arrêté du i 5 ventôse an 8 : ainsi, le citoyen Choussy pré
sentait une pièce rejetée, ce qui n’ëstpas délicat, et taisoit
une pièce admise.
La première convention' d’acheter Féogoulx, faite à
‘ il5 ,o o o f r ., est fort loin de lui être un moyen; car,
quoique les sous-seings privés lui fassent réserve des chablis,
il est de fait, et on le prouveroit s’il le n ie , qu’ils devoient
( 1 ) Deux de ceux qu’il a récusés dans son exploit du 10
thermidor.
(2) Les citoyens Jourde et Pichat qu’il a aussi récusés.
�.
.
C 35:3
faire partie de la ven telorsq u e les-acquéreurs surent qu il
y en avoit un grand nombre. Malgré delà, ils'ont résilié,
trouvant Féolgoux trop cber'!à cette somme ¿ quoiqu’il y
eût alors un. mobilier considérabley'eiü ces -chablis’ portés
par le.citoyen Choussy, dans ses-lettr'es, à 26,000 fi\‘ ’
•; A.cette>époqùe encorë les'propriétés avoient'une valeur
bien plus considérable qu'aujourd’hui ; et si leîi8 fructidor
produisit d abord quelque resserrement d’argent chez les
capitalistes, sans doute il ne fit pas un effet aussi subit dans des
pays agrestes! j dans, lesquels les révolutions n ont quune
lente influence ; peutrêtre aussi la crainte alors accréditée
d’un retour au papier monnoie donna-t-elle plus de valeur
aux propriétés foncières. Quoi qu’il en soit, nous recher
chons des effets et non des causes, et il est de notoriété que
nonobstant tous autres résultats de fructidoretde brumaire,
les biens-fonds , les bois su r-tou t,valoien t en l’an 5 et 1an 6
beaucoup plus qu’en l’an 8 , non-seulement dans le canton,
de la Chaise-Dieu, mais dans toute l’étendue des départemens du Puy-de-Dôme et de la Haute-Loire.
Les réflexions du citoyen Choussy, sur la facilité de la
vente des bois, sont de même purement systématiques,
comme la plupart des idées d’économie publique. Depuis
plusieurs siècles on se plaint de la rareté des bois , et ce
que les conseils de département ont dit 1 année dernière,
Louis X IV le disoit aussi dans le préambule de son ordon
nance de 1669. Tout cela ne prouvera pas que le bois de
Féolgoux vaille davantage; les ventes darbres n y sont
pas plus communes, pas plus que dans les nombreuses
forêts plus rapprochées encore des ports de l’Allier.
L ’aspérité des chemins de traverse, la difficulté de l’ex■
£ 2
�A
(. 36 )
p lo ita tio n , empocheront long-temps ce bois d’avoir une
valeur. L'ouvèrtute; des communications ne peut être
payée que par le gouvernement : mais espérera-t-on qu’il
s’occupe de routes nouvelles et particulières avant d’en
tretenir celles qui existent ? Si les conseils généi-aux ont dit
que les bois de la Chaise-Dieu ne suffisoient plus à construire
les bateaux, le citoyen Choussy, qui les cite, pouvoit plus
que personne les désabuser de cette grande erreur ; car
lui-m êm e, depuis l’an 5 , n’a pu vendre encore tous les
arbres que l’ouragan avoit déracinés, et qui dépérissent
nécessairement faute d’acquéreurs (1).
(1)
Ce Fait est déclaré au procès par une requête du citoyen’
Choussy, du 3 ventôse.
Le citoyen Choussy parle souvent de sa bonne foi dans cette
affaire; en voici un échantillon. L ’ouragan de l’an 6 avoit déra
ciné beaucoup d’arbres, d’autres étoient rompus à 5 ,1 0 et 12 pieds
de hauteur : c’est ce qu’on appelle piquets. Un grand nombre
d’autres arbres étoient seulement épointés très-foibleinent à perte
de v ue. S e p t jours après la v e n t e , C h o u s s y se hâta de vendre
ces derniers arbres, pensant bien que les experts n’iroient pas
croire qu’ils faisoient partie des arbres rompus que Choussy avoit
réservés comme déjàvendus. En effet, lorsque les experts vinrent,
Choussy voulut qu’on estimât tous les arbres droits en général,
( cela est prouvé par la déclaration des experts, de Dupré luimême, en un acte instrumentaire, du 14 ventôse an 9 ); Choussy
fit même comprendre dans l’estimation les piquets pour une
somme de 40 fr. (cela est prouvé par les trois rapports ). Pour
être plus libre de consommer cette petite escroquerie , il chassa
le garde de bois, qui étoit a Féolgoux lors de la vente, et qui
étoit agréé par toutes les parties. Les acquéreurs ne jouissant
pas, n’ont pu avoir l’œil sur ce qui s® paasoit dans le bois j ils
�C 37 )
Il seroit plus raisonnable, sans doute, aux intimes, de
présenter de leur p a rt, pour moyens de considération,
cfette stagnation de commerce, constatée par cet engorge
ment de bois pendant quatre ans ; ce qui ne leur promet
pas pour l’avenir des spéculations heureuses; la rareté du
numéraire telle, qu’à moins de dégrader promptement
pour ven d re, à quelque prix que ce soit, ils ne pourront
payer au citoyen Choussy des capitaux à termes rappro
chés, outre un intérêt considérable; l’accident nouveau
d’un ouragan terrible, qui vient encore de diminuer la
valeur des plus beaux arbres en dégradant ceux qui res
tent ; enfin le taux des impositions de tout Féolgoux à
336 fr. 8 s. (1) ; ce q u i, à l’égard d’un propriétaire forain
ne l’ont appris que par le procès-verbal de leur prise de pos
session; ils ont tr o u v é le bois p le in d e scieurs de long , et ont VU
q u e par un genre d e précaution fort inusitée, le bois coupé plus
récemment est hors la forêt, tandis que celui exploité avant la
vente y est encore gissant; aussi le citoyen Choussy se jacte
d’avoir au port 22,000 toises de bois, non compris ce qu’il a
vendu. On peut conjecturer combien cet entassement paralysera
pour long-temps les ventes que les acquéreurs pourroient faire.
Ce mésus a donné lieu à]un incident qui n’est pas encore jugé,
parce que le citoyen Choussy a mis au rôle la cause principale,
pour faire disparoître ce débat secondaire par de plus grands
intérêts; cependant il sera jugé en même temps que le fonds.
Les intimés pourroient donner à leur discussion, sur cet inci
dent , une plus grande latitude ; mais il est inutile de grossir ce
mémoire.
' (x) Fixation d’office, par arrêté de l’administration centrale.
En l’an 4, Féolgoux payoit en principal et sous additionnels 232 1.
2 s. 2 d. Que l’on ne dise pas que la cote des bois doit Être très-
�(38 )
sur-tout, doit donner une idée suffisante de la valeur ap proximative de cette propriété.
Mais des moyens de considérations ne doivent pas juger
la cause ; ainsi, abandonnons ce qu’a dit le citoyen Choussy,
sur ce point, et ce qui nous resteroit à dire, pour en venir
à l’examen des moyens particuliers qu’il a cherché à faire
valoir.
Il critique le rapport de T ardif et celui de Langlade,
sur ce qu’il s'est fait déduction des charges, et il s’étonne
qu’on ait entendu acheter un bien franc et quitte de
charges ; il auroitsûrement raison si c’étoitde toutes charges
foncières; car nul n’en est exempt : mais des réparations,
des frais de gardes de bois, etc., dont on n’entend pas
s’exempter non plus, n’en sont pas moins des objets à
prendre en considération par des experts qui estiment le
p rix vénal d’une propriété. Car plus il doit en coûter
de frais d’entretien , moins il y a de revenus, et c’est par
le calcul des revenus réels que s’estiment les capitaux.'
lie citoyen Choussy se plaint encore que L an glad e ait
laissé le soin à T ard if d’apprécier ces charges ; car, dit-il,
nemo unus cogendus est sententiam dicera. L ’expression
cogendus suppose de la nécessité, de la contrainte, et
non pas la simple prière de l’un des experts à un autre ,
d’expliquer luirm êm e ce qu’il n’entend pas bien. Cette
déférence n’exclut pas ensuite 1 examen de l’explication,
et rien ne prouve que Tardif ait décidé seul ce point
foible; cela étoit ainsi lors des lois de 179° : niais Part. 70 de la
loi du 3 frimaire an 7 veut que les bois soient taxés, pour touto
leur valeur, à deux et demi pour cent.
�,
.
.
( 39 )
de Texpertise, puisqu’au contraire le reste du rapport est
rédigé en commun. Déjà nous avons fait observer la diffé
ren ce *qui existe dans ce rapport, entre les colloques du
' préambule et le rapport lui-mêm e; ce n’est donc pas par
un fragment de cette conférence qu’il faut juger le rap
p o r t, c’est par le dispositif de la décision en elle-même.
O r cette décision est faite en com m un, et elle est signée
des trois experts : ainsi ce rapport n’est nullement dans
le cas de la loi citée.
<
Ce que dit Pothier d’une estimation manifestement ini
que yn’est pas un moyen pour le citoyen Choùssy, puisqu’il
pré-suppose que cette iniquité est déjà manifeste, et c’est
là la question. L ’auteur du recueil de jurisprudence donne
-l’explication de ces expressions dangereusement obscures,
. dont cet auteur ne se défend pas toujours. P a r exem ple ,
dit-iL , si un im m euble en valeu r de 1,000 livres étoit
estimé 24 livres; alors il seroit clair qu’il y auroit une
injustice évidente contre laquelle les parties seroient au
torisées à réclamer.
Sans doute c’est ainsi que l’a entendu P o th ier, qui
en cela a raisonné par ses propres idées, sur le juste et
l’injuste, ne se, basant sur aucune loi. D om at, encore
cité par le citoyen Choùssy, n’a rien dit d’assez précis
sur la contestation, pour balancer des autorités plus po
sitives , et encore moins les lois qui la jugent. L ’espèce
de faculté qu’il laisse aux contractans de revenir contre
. leurs conventions, si contradictoire aux principes que cet
auteur enseigne aux pages précédentes, suppose comme
P o th ier, que les bornes de la raison et de l’équité soient
violées, et que l’on n’ait pas nommé des personnes de
�C 40 )
-
probité et qui s’y connussent, dès qu’il ne veut annuller
que ce qui sera arbitré contre cette règle.
O ù est donc ici la violation des bornes de la raison;
où est la violation de l’équité, si ce n’est plutôt celle de
la cupidité du citoyen Choussy. A -t-il indiqué un seul
fait d’improbité contre les experts; ce nést donc que de
l’ignorance qu'il leur suppose, et c’est depuis l’expertise
seulement qu’il s’en est avisé.
O ù est encore l’application de la loi 76 du if. pro socio ?
O ù est cepravum arbitrium ? cette manifesta iniquitas
que cette loi exige pour refaire l’arbitrage de société qui
ne nous concerne pas ?
Il falloit donc expliquer par quelles règles devoit être
décidée la question préalable de ce praçwn arbitrium ;
à quels signes le tribunal dont est appel avoit dû le re
connoitre ; si l’estimation à 85 ;ooo livres d’un bien qui
paye 336 livres d’im pôts, présente au détriment du ven
deur une évidente iniquité.
Les arbitrages de société exigent une pondération d’in
térêts respectifs infiniment égale, parce qu’il répugne ù
l’essence de l’association, qu’aucun des associés ait un
bénéfice supérieur à la portion qu’il doit en avoir. Mais les
contrats de vente ne sont pas assujétis aux mêmes règles,
et l’erreur de croire que l’idée du vendeur d’être grevé
p a rle p rix , lui donne droit de s’en plaindre, est corrigée
par la loi si voluntate au code de rescindenda venditione,
qui lui reproche d’ignorer la substance du contrat d ac
quisition, qui n’adm et pas de telles plaintes.
La loi 22 au if. lo ca ti, enseigne q u ’il est de droit naturel
d’acheter au moindre p rix , et de vendre au plus haut prix
qu’on
�( 4 i.)
quon le puisses Quemadmodùnv in emendo et vendendo
naturaliter convessum est quod pluris s it , m inons
emere'f et qiaodlminoms siL, plurùs■
vendere., etinvicem se
ciicunvscrihere.\ . ,
i :
......
T e lle , en effet, doit être la--latitude des; transactions,
libres;et'du; coxnimercc des immeubles ÿ d’ailleurs: , comme
le;dit Dumoulin avec sera; énergie;ordinaire (;r) : « L ’égalité
» entre le prix et la1 valeur de; la chose vendue ne con
» siste pas en un point indivisible' y elle n est pas; une
» égalité mathématique ».
‘
. Il est bien constant que; l’acte du 4 messidor est une
vente librement consentie entre m ajeurs, et librement
exécutée en la forme convenue. T o u t y est obligatoire
et sacramente]., Féolgoux est vendu , c’est la chose ; le
citoyen Choussy- se démet de la p rop riété ; voilà le con
sentem ent et la tradition', conroborée même par le constitut de précaire qui y est exprimé. Le prix est laissé à
l’arbitrage de deux experts; q u i, en cas de discordance,
doivent s’en choisir un troisième à l’insu des parties : tout
cela s?est littéralement exécuté.
‘ Les deux experts ont été discordara (2) ; ils en ont pris
1(1) Trait, des cont. usur., quest. i 4 r n°., 171.
(2) Le citoyen Choussjr revient souvent sur cette discordance,
pour dire qu’elle n’eut lieu qu’au retour des experts de la ChaiseDieu; mais il nous prouve lui-même que Langlade n’ctoit pas,
sur les lieux, de l’avis de Dupré. i°. En disant, dans son expertise
du 8 fructidor an 8, que Langlade écrwoit toujours à côté un
prix différent ; 20. dans ses causes drappel du 23 ventôse der
nier , que Langl'ade « avoit médité (Tavance le projet de ne signer
F
�/ C 42 )
un troisième, agréé comme eux par le citoyen Choussy.
L e prix de vente a été réglé en sa présence ; le rapport
fixant le prix a été déposé : et dès-lors les trois condi
tions qui constituent le contrat de vente sont remplies.
T o u t est donc consommé. ’
- L e prix de vente fixé par les experts est précisément
la même chose que si elles en fussent convenues ellesmêmes. On ne trouvera aucun auteur qui établisse en
cela la moindre différence. Ils se réunissent, au contraire,
à dire que le prix ainsi fixé par experts est absolument
semblable au prix volontaire. Or , sans doute, si le cit.
Ghoussy fut convenu de vendre pour le prix qui a été
estime, en vain proposeroit-il ses systèmes sur les chances
politiques et sur la rareté du bois j il n’auroit aucun moyen
pour obtenir davantage.
N ’est-ce donc pas s’abuser, que de proposer à un tri
bunal de rectifier une expertise qui n’a point été judiciai
rement ordonnée , et qui n’est point du ressort judiciaire?
La nom ination des experts qui ont opéré tient essentiel
lement à la substance d’un acte volontaire, à la partie la
plus délicate du contrat de ven te, au consentement si
incompatible avec toute espèce de contrainte. Si les acqué
reurs se trouvoient lésés, que pourroient-ils dire , quelle
voie eussent-ils eue pour se délier de leur consentement ?
La loi cependant doit être égale. Autrefois, à la vérité,
l’acquéreur n’avoit pas la voie de la lésion \ elle étoit pour
« le rapport commun , que dans le cas où Dupré seroit assez
» foible pour consentir à une estimation dont le prix avoit sans
» doute été arrêté de concert avec les acquéreurs ».
�( 43 )
le vendeur seul;*mais le citoyen Choussy assure que ce
n’est pas cette action qu’il a voulu diriger.
Comment donc lui accorder un droit que les acqué
reurs n’ont pas ? S’ils ne nomment pas des experts, ce
-sera donc à la justice a'emnommer d’office ? Mais alors,
'que devient le*consentement des parties , essentiel pour
le contrat de vente ? Uri consentement forcé le suppléerat - il, quand une vente synallagmatique libre sera méta
>morphosée en une vente judiciaire ?
L e citoyen Choussy, qui a bien senti que sa prétention
appeloit ce renversement de principes, a cherché à cor
riger cette incohérence. Il offre de résilier la vente. Mais
les acquéreurs auroient-ils le droit de le lui offrir ? peutil donc dire : ou on fera ce que je v e u x , ou il n’y aura
pas de vente ? Mais il- ne dit pas qui doit payer au m oins
6,000 liv. de prem iers frais que les acquéreurs ont déjà
déboursés. . ’■
La raison dit qu’une deuxième expertise ne peut avoir
lieu ; la loi aussi le veut expressément ; elle a déjà été
rappelée, et en voici le texte :
'
S i q u is rem ita com p a ra çerit u t res vendita esset
q u a n ti T itiu s œ stim a çerit....... Sancirnus u t s i qu id em
■ipse q u i n om in a tu s est pretium d efin ierit o m n i m o d ò
secundùm ejus œ stim ationem et pretia p ersolvi et ven• àition em ad effectum pervenire..... S i h u ju sm o d i pre
tiu m cù m in scriptis f u e r i t redactum ....... P e r o m n ia
com pletum eta b so lu tu m s ii; sin autem ipse T itiu s n olu er it vel non p o tu eritp retiu m d efin ire, tune prò n ih ilo esse
ven dition em ..... N u llâ con jectu râ s e rv a n d â , utrù m in
personam ce rta in , an in b o n i v ir i a r b itr iu m , respicien-
F a
�tes conirahentes adhc&cpacta venerint, hoc impossîbile
credentes expellimus (i).
Ce respect de la loi pour le maintien d’une convention,
libre est digne de remarque ; elle ne veut pasque le juge
prenne sur lui de rien conjecturer, nullâ conjecturâ serr
V a n d â elle ne veut pas qu’il ordonne, en aucun cas,
une nouvelle expertise, in boni viri arbitrium expelli
mus ; et cela par le seul doute que les contractans aient! eu
en vue d y consentir, an respicientes contrahentes ad
hœc pacta venerint.
■ Cette loi si formelle, u'nique.sur la m atière, a été répétée
aux mstitutes,, comme contenant les principes élémen
taires du droit (.2). La .même expression omnimodô y
consacre encore que l’estimation des experts, quelle quelle
>$oit, ne doit point être réformée. ,
. ■
C e mot omnimodô., est commenté par J^innius y en ces
termes: Ergo eüam si multo pluris aut minoris rem
-estimaçerit ( Titius ) quàm valet.
JDespeisses (3) dit, que si l'expert choisi a fait le p rix,
quel qu’ il soit, la vente:est banne j et doit avoir lieu pour
Je prix fixé par cet expert; « quoique, ajoute-t-il, ce prix
c ne soit pas le juste prix, et même qu’ïly ait lésion d’outre« moitié ». Cet auteur ajoute, que la loi ci-dessus, prohi
bant toute nouvelle expertise, montre pleinement que son
•intention par le mot omnimodô, est que le prix soit défi
nitif.
(1) Loi dernière, cod. de contrahcTidcL entphone.
(2) Inst., liv. 3 , tit. 24, de emptione et venditione.
(3) Page première, scct. 3.
�I
( 4$)
.
.
’ ' Rousseau de'la Combe ( ij dit de -même, que si le prix
a été déterminé par un tiers, la vente est valable ; « soit que
le prix soit juste ou injuste ». Ce sont ses expressions.
• L a jurisprudence s’est 'conformée à -ces principes, et
nous en avons ;un exemple asseztnouveaufl ¡même .dans ce
¿département.
; *
:
L e citoyen Costilles avoit vendu un domaine au citoyen
. Coiffier, à dire d’experts; le «citoyen Coiffier le prétendit
r exhorbitant, et opposa même que l'immeuble venant delà
femme Costilles, ce qu’il disoit .avoir ignoré jen acquérant,
¿il seroit en péril d’éviction. [Plaidant emla ¡sénéchaussée
d’ Auvergne , la loi si quis lui:fut opposée : la sénéchaussée
ne crut pas pouvoir rien changer à iune- convention, et le
• citoyen Coiffier ne put obtenir ni la résiliation de la vente,
'•ni un amendement. La sentence fut rendue,1e 7 _mars 1 7 8 6 ,
-et confirm ée par arrêt de ¡la grand -,chambre, du 6 mars
1789 (2).
.
'
^
N on , il n’y a pas lieu à amendement: cette décision est
écrite tout au long par le citoyen Choùssy, et de sa propre
main, dans l’acte instrum entais , du 1 9 ■thermidor. Il y.a
d it, après avoir su que les premiers experts étaient divi
sés, et avoient fait deux rapports séparés, que le rapport
(1) N°. vente.
(2) Cette sentence est citée dans une consultation donnée pour
la cause, sur le vu de toutes pièces, par les citoyens Dartis,
Toultée, Deval, Pagès , Andraud, Prévôt et Maugue. Ces juris
consultes ne supposent pas -que le citoyen. Choùssy mérite plus
de faveur que le citoyen Coiffier, et nonobstant ses moyens, ils
'■trouvent la cause jugée par sa convention, par ses écrits et par
-les principes.
, ,
�.
.
(
4 6
>
• du citoyen T ard if devoit seul fixer le prix de la vente. II
étoit donc surabondant de rechercher d’autres autorités
que la sienne.
Tout est consommé; la vente n’est plus susceptible d’au
' cune formalité; les experts ont rempli leur tâche, et si
quelqu’un avoit à s’en plaindre, ce n’est pas le citoyen.
' Choussy qui ne les a pas quittés.
'
:
‘ >
Il ne peut critiquer leurs qualités. Us sont nommés,
- avoués et requis, soit par la ven te, soit par-tous les écrits
qu’il a répandus dans la cause;
- ' ■
N i leur droit d’opérer ; il a reconnu par les mêmes écrits,
ses lettres et ses prévenances ;
.
' •
Ni leur travail ; il étoit présent à toiit ; ni même .leurs
rapports ; il les a rendus nécessaires par ses notifications.
Telle est la conséquënce de l’assistance d'une partie au
travail d’un exp ert, quelle la rend non recevable à pro
poser les m oyens, même les plus fondés. En voici un
exem ple:
'
•
D ans un p ro cès, en exécution de la loi du 10 juin 1793,
■qui enjoint aux arbitres de nommer des experts pour faire
' les vérifications nécessaires, les arbitres nommés se trans
portèrent eux-mêmes sur les lieux, firent l’expertise, et
ensuite l’arbitrage.
Le tribunal de cassation a toujours cassé de semblables
jugemens; le norrimé Morisot se pourvut devant lui. Mais
par jugement du 18 vendemiaire an 5 , la demande en cas
sation fut rejetée, p a r le motif, que M orisot avoit assisté
les arbitres dans leurs opérations.
L e citoyen Choussy a cru qu’en offrant de payer les
frais d’un amendement, il parviendroit plus aisément .à
�.
(
47
)
.
.
'
persüader que cet amendement ne nuiroit à personne;
mais il n’a pas remarqué que ce n’est point ici un rapport
d’ instruction et du ressort judiciaire, qu’il ne s’agit pas
de vérifier une propriété contestée, mais qu’on demande
à faire augmenter un prix de vente.
O r , le citoyen Choussy qui a dit tant de choses contre
les premiers experts, q u i, après en avoir récusé cinq, se
plaint de deux autres. N ’est-il pas bien inconséquent de
vouloir recourir de nouveau à un art aussi conjectural?
Mais calculons un peu à quoi cela mèneroit les parties.
Si deux autres experts étoient encore divisés, il en faudroit
un sixième, et si celui-là se trouvoit de l’avis du citoyen
D u p ré , alors les voix seroient égales ; car chaque partie en
auroit trois en sa faveur.
, Faudrait-il donc sanctionner plutôt cette deuxièm e e x
pertise que la px-emière ? M ais ce seroit une injustice , dès
que le nombre d’opinions seroit égal pour et contre. L e
tribunal alors n’hésiteroit sûrement pas à ordonner encore
une nouvelle vérification, dont le résultat seroit peutêtre encore aussi bizarre, ou plus obscur.
Tout cela peut arriver, et la justice doit tout prévoir.
Des acquéreurs qui jouissent sous la foi de leur conven
tion , doivent compter sur un prix qui ne dépende pas
de nouveaux hasards.
Ce prix est fixé;, il l’est comme les parties l’ont voulu;
elles n’ont pas entendu laisser à aucune d’elles la faculté
d’en requérir un nouveau. A in si, n’y eût-il pas tout le
danger , tout l’inconvénient dont on vient de donner une
idée légère, la convention des parties n’en seroit pas moins
prohibitive de tout règlement nouveau ; dès lors un amen-
�(
C 48 )
dément, en les jetant dans de nouvelles incertitudes, vîole*
roit cette prohibition.
Q u a t r i è m e
Q} u e, s t i o. m.
L a vente du ^messidor est-elle n u lle?'’
’
C e t t e prétention singulière, contrastant"& tout ce'
que le citoyen Ghoussy a dit et écrit, n’a pas été jugée par
fauteur de son mémoire digne d’être émise; mais le citoyen
Choussy n’abandonne pas1 aussi aisément le faisceau des
quatre conclusions diverses qu’il1avoit prises err première ■
instance':■il;sait trop bien qu’on simplifie une bonne cause1,
mais qu’iïfaut l'embrouiller quand elle est mauvaise. Certes,
on ne peut s’empêcher de lui rendre la'justice , qu’il a1 fait
tout ce qui étoifc en lui pour ne pas s'écarter dè cette
méthode;
C ’est encore peut - être un grand sacrifice dû. citoyens
C h o u s sy , de ne plus insister à v o u lo ir faire considérer
M an n et com m e tiers--expert. Ce M an n et, appelé com m e
indicateur pour une partie seulement de l’expertise , muet
dans les rapports , n’ayant) rien signé, ne sachant peut-être
pas lire, pouvoit-il décemment être dit tiers-expert? Telle
fut cependant la première des conclusions prises par le
citoyen Choussy en son exploit de demande.
Quoi qu’il! en soit, le moyen de nullité de la vente,
jeté en désespoir de cause, ne mérite un examen que parce
qu’il est proposé ; c a ry pour qu’une vente soit nulle , il
faut qu'elle manque de Fane des trois conditions qui cons
tituent ce genre de contrat.
O r, lai chose-vendue- est bien désignée : c est Féolgoux.
Le
�( 49)
L e consentement est donné , l’acte du 4 messidor l’ex
prime ; le prix a été définitivement fixé par le rapport du
citoyen T a rd if, ainsi que le citoyen Choussy l’a décidé
par écrit dans son acte du 19 thermidor.
• Ce qui achève de constituer la vente, c’est la tradition ;
elle est effective : les acquéreurs sont en possession. Elle
étoit déjà promise et acceptée dès l’acte du 4 messidor ;
car le citoyen Choussy y déclare se départir dès à présent,
et pour toujours, de la propriété, possession et jouissance
des objets vendus, et consent n’en jouir à l’avenir qu’au
seul titre de précaire.
Cette translation stipulée et réelle, n’exige aucune dis
cussion: le fait répond à tout; il achève même de con
vaincre que les parties remettant leur sort entier à une
première expertise , ne vôuloient se réserver aucun moyen
rescisoire, puisque dès-lors elles déclaraient la vente con
sommée dans des expressions aussi sacramentelles. .
'
'
:
C O N C L U S I O N .
4
L e citoyen Choussy a vendu Féolgoux à dire d’experts
nommés par la venté ; ces experts devoient nommer un.
tiers en cas de division : ils l’ont fait; le tiers-expert a été
agréé par le citoyen Choussy.
Toutes les parties ont assisté à la première expertise : le
citoyen Choussy seul a assisté à la seconde; il l’a requise,
il l’a pressée pour y être seul ; quand elle a été terminée,
il 3 requis par écrit le tiers-expert de déposer son rapport
pour fixer seul le prix de la vente.
'
T o u t est d o n c -consommé, des récusations frivoles ne
G
�C 5o )
sont plus proposables; un amendement ne l'est pas davan
tage : la justice supplée aux conventions, et ne les détruit
pas.
Les moyens de considération sont en plus grand nombre
contre le citoyen Choussy. Une propriété qui paye 336 fr.
de contribution foncière, séparée de toutes communica
tions commerciales, est très-chèrement achetée à 65,000 fr.
non compris des frais et faux frais excessifs : les calculs
usuraires du citoyen Choussy ne détruiront ni des-faits ni
son propre ouvrage (i).
>. '
'
Des moyens de considération ne jugent pas une question
de droit ; des personnalités méprisables ne doivent pas la
juger non plus. L e citoyen' Choussy ne s’opposera pas à ce
qu’on juge plutôt la cause que les personnes.
Il
se plaint d’etre trompé ! qui persuadera-t-il ? aucun
de ceux sans douté qui jamais entendirent prononcer sonnom. Mais par qui trom pé? par quatre jeunes gens,dont
le plus âgé n’a pas trente-trois ans, et dont le plus jeune
est de l'âge de la réquisition : Choussy trompé ! ces deux
mots sont étonnés de se trouver ensemble.
- D isons m ieux, il vouloit trouver des dupes ; il est irrité
de n’avoir pas complètement réussi. Pourquoi donc la
force de l’habitude lui fait-elle croire que manquer de
(1) Le citoyen Choussy ,'qui évalue son bois seul à 400,000 fr.,
n’a pas voulu entendre une proposition qui lui fut faite, audience
tenante , à Ambert. Ses acquéreurs lui proposèrent de résilier'Ia
vente, s’il vouloit leur donner à chacun c e n t louis de bénéfice;
ils l’ont proposé encore après le-jugement et certes, celui qui
doit gagner 100,000 écus,’neles cède pas pourio,ooo fr./ Y
�dupes c’est l’être lui-même ? qu’il ait cru vendre Féolgoux
beaucoup plus , cela se présume ; mais parce qu’il
ne l’a vendu que ce qu’il vaut, il n’y a pas de quoi être
inconsolable.
En un m ot, la cause appartient à une convention; cette
convention est exécutée et légale. Les choses ne sont plus
entières, la vente est consommée ; la ressource conjecturale
d’une nouvelle expertise auroit beaucoup d’inconvéniens
et aucun avantage. Ces m otifs, concluans et précis, exprimés dans le jugement dont est appel par le tribunal
d’Ambert pour valider la vente, embrassent toute la cause,
et suffisent pour prouver la nécessité de maintenir ce
jugement.
DEM A Y ,
L . F. D E L A P C H I E R ,
A v oué.
A
R
io m
,
de
Homme de lo i
l'imprimerie de L
a n d r io t ,
Tribunal d’appel. An 9.
imprimeur du
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Touzet, Pierre. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Demay
Delapchier
Subject
The topic of the resource
experts
acquisitions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Touzet, Pierre Buisson-Touzet, Régis et Louis Celeyron, habitans de la ville d'Ambert, intimés ; contre Jean-Joseph Choussy-Dupin, homme de loi, habitant ci-devant à St-Germain-Lherm, maintenant au Puy, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1785-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0405
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0155
BCU_Factums_M0156
BCU_Factums_M0157
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Saint-Germain-l'Herm (63353)
Le Puy-en-Velay (43157)
Propriété de Féolgoux
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Domaine public
acquisitions
experts
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Text
J
M a r g u e r i t e S O B R I E R , v e u v e D a u d i n , a p p e la n te ;
C O N T R E
Sieur F r a n ç o is C A P E L L E , intimé et appelant;
EN
P R É S E N C E
D 'A n t . D E S P R A T S , et d'E l é a za r d R O S T A N G D A U D I N , appelans et intimés,
L
A dam e Daudin vouloit oublier tout ce qui tient à une vente
qu'elle a signée en 1 7 8 2 . L e sieur C ap e lle , qui l’a trompée, veut
obtenir contr’elle une garantie ; il faut lui démontrer qu’il ne lui
en est dû aucune,
.
L e sieur D escaffres, par son testament du 7 avril 1 7 7 3 , institua
Eléazard Daudin , son petit-neveu , pour son héritier ; il légua à
Marguerite Sobrier, sa mère, le mobilier et l’usufruit de ses biens ,
et la désigna exécutrice testamentaire, avec pouvoir de vendre pour
le paye ment de ses dettes,
Elle avoit vendu quelques objets avant 178 2 , et ne voyoit pas de
nécessité d’en aliéner encore, lorsque le sieur Capelle concerta avec
Daudin fils , m in eu r, le projet de se faire vendre le domaine du
Y ern et, dépendant de la succession Descaffres.
• Daudin fils, épris d'une passion violente, avoit résolu d’aller se
marier à Avignon ou en Italie ; et, pour cela, il cherchoit de l'ar
gent: un négociateur du sieur Capelle lui proposa la vente de ce
domaine.
(
A
�(
2
)
-
- ‘
M ineur, et n ’ayant pas le pouvoir de vendre, Daudin fils y
décida sa mère , qui fixa le prix à 21600 francs. En eût-elle voulu
demander le double, il n ’y a voit pas d ’obstacles, puisque le sieur
Capelle avoit déjà son plan.^
^
Il feignit d’adopter le prix de ¿16 0 0 francs , exigea que le contrat
portai quittance, au moyen des billets qu’il devoit faire ou céder.
En effe t , par acte notarié du 1 " . mars 17 8 2 , la veuve Daudin lui
vendit avec garantie , moyennant 21600 francs , le domaine du
V e rn e t, tous les bestiaux ët outils d’agriculture, ensemble cin
quante setiers de blé à prendre sur la récolte pendante, et le quart
du surplus de ladite récolte.
~
M ais ce prix , bien sérieux pour la dame Daudin , n ’étoit que
fictif pour le sieur Capelle ; déjà il avoit arrêté, avec Daudin fils,
que le prix du domaine ne seroit que de i 58oo fran cs, sur lequel il
devoit compter à peu près 4000 francs pour le voyage d’Italie, et
le surplus étoit délégué sur une maison de commerce d’Aurillac.
L a prévoyance fut portée plus loin; D audin, m ineur, pouvoit
réclamer un jo u r, et le sieur Capelle se munit d'une ratification
générale , dont la date fut laissée en blanc. 11 paroit meme qu elle
étoit fabriquée avant la vente ; c a r, dans I incertitude du mode de
mutation , le sieur Capelle y fit ratifier tous les actes passés à son
profit ( et il n’y en a qu’un seul ). Daudin fils écrivit tout cet
acte, excepté la date : le sieur Capelle avoue qu’elle est d'une autre
main.
On comprend d’avance que les articles secrets de cette capi
tulation étoient subordonnés à la reprise des billets signés le jour
de la vente. Daudin fils lés enleva, et disparut.
L a dame D a u d in , justement irritée, rendit plainte en soustrac
tion des billets de 21600 francs, et en outre, de divers blancs
seings. Sur le vu des inform ations, le bailliage de Vie rendit une
sentence, le 18 juillet 17 8 3 , qui condamna Daudin fils à restituer
à sa mère 21600 fran cs, permit de faire des saisies-arrêts , et
annulla les blancs seings q u i, en e ile t, n ont plus reparu. Ces
informations sont perdues, et on ignore qui a eu le crédit de les
/
�( 3 )
supprimer: la sentence seule existe, et le sieur Capelle d it, clans
son mémoire , qu’il en est porteur.
Il est à croire que ces informations secrètes , suivant 1 usage ,
contenoient des révélations qui seroient aujourd’hui b i e n utiles;
car le lieutenant général de V ie ( le sieur Sistrières ) , qui se trouvoit seigneur féodal d’une partie du domaine du Ver n e t, exerça
le retrait contre le sieur Capelle, et soutint que le prix réel n’étoit
pas de 21600 francs.
«.
Alors Daudin fils étoit de retour; le sieur Sistrières l’interrogea
ou le fit interroger; mais Daudin fils peu rassuré encore , et
pudori sito par cens , fut fidèle à son m entor, et répondit de ma
nière à mériter ses éloges : il se hâta de s’en glorifier par une
lettre du 10 août 17 8 5 , que le sieur Capelle a la bonté de produire.
■ « J ’ai subi interrogatoire pour savoir ce que j ’ai reçu de y o u s
» Sistrières croit que vous n’ avez fait de billets que pour quatorze
y> mille frarj.es ; j’ai dit que vous en aviez fait pour tout le con
» tenu au contrat, ce qui l’interloqua fort. Quoi qu’il en so it, je
» ne vous nuirai jamais , parce que vous nS avez paye ce que
» vous tn*aviez promis.' »
L e procès Sistrières ditfa quelques années encore, et fut terminé
par un traité du 5 mai 1789 , dans lequel les parties se contentent
.
de dire que, parfaitement instruites de leurs droits, elles se sont
respectivement départies de leurs prétentions.
T ous ces résultats mystérieux étoient ignorés de la dame Daudin,
qui se consoloit de ses chagrins précédens par le retour de son fils.
L a révolution a amené pour elle d’autres terreurs et d’autres sacri
fices : elle a été enfin obligée de faire plusieurs ventes ; et le sieur
Capelle, qui ne conçoit pas que les fortunes puissent diminuer, lui
en fait un crime. Elle a réglé ses affaires avec son fils pour la suc
cession Descaffres ; et n’ayant plus que le souvenir de son ancienne
aisance, elle étoit loin de s’attendre, sur la fin de sa carrière, à
être accusée de collusion et de complots de la part de l’homme à
qui elle pouvoit en reprocher si justement.
Daudin fils a cédé ses droits à Desprats , qui a cité le sieur
A 2
�4 )
Capelle en désistement du domaine du Vernet en l ’an 8. L e sieur
Capelle a produit la ratification, qu’il a datée de 17 8 8 ; et alors
D a u d i n ',’ mis en cause par D esprals, a commencé une procédure
en inscription de faux contre la date de cette ratification.
L e tribunal d’ Aurillac en a ordonné le dépôt au greffe; le procès
verbal mentionne que la date est d’une autre'main, et d’une encre
plus noire, qu’on a repassée sur plusieurs lettres du même acte. Le
sieur Capelle se défendoit d’abord par des nullités contre cette
procédure; mais il a fini par la rendré sans objet; en déclarantqu’il reconnoissoil la date de la ratification pour être d’une autre
main. • .1
”
'
•
...
- L e sieur Capelle, qui sentoit bien toute la difficulté qu’il avoitde faire usnge désormais de cette ratification, a cherché à élaguer'
tout à lait Daudin fils, s’il le pouvoit; d’abord il le; reconnoissoil
pour héritier Descaffres ; ensuite il a attaqué le testament de nul-,
lité , et'a prétendu que la mère étoit héritière'(*),
. ... . „
Sa défense s ’est basée principalement sur ce moyen il a , de
p lus, crié à la collusion, et s’est.tourmenté, par^un appareil d’in-r.
terrogatoires, pour se donner l’apparence d’u n e \iclirne de Ja raau-,
vaise foi. En concluant à la garantie contre la dame Daudin , il
a affecté de dire qu'il ri’ auroit pas cependant de ressources contre
elle, s’il perdoit son procès. L e sieur C ap elle, p a r . jugement du i 5,
germ inal an 1 1 , a été débouté,de sa demande en nullité du testa-j
ment de 17 7 3 ./La vente du i " , mars' 178 2 , et la ratification de
178 8 , ont été déclarées,nulles. L e sièur Capelle a été condamné
à se désister du domaine du V ern et. L a daine Daudin a été çonrfamnée à le garantir et indemniser, et à lui payer non-seulement
21600 francs , mais: encore'ses dommagc^-intérèls. Daudin fils est
condamné à rembourser 1 38oo francs', et les améliorations, U
£st ordonné que , sur une demande en garantip solidaire formée
par Capelle contre les sieur et dame Daudin , les parties contesC
(* ) A u jo u rd’hui il se juge lui-m ém c ; ca r, pendant l ’impression <Ie cc m é m o ire , il vient do
conclure contre Dcspr^ts à la m l'rog.ition légale. Jist-ce un propriétaire qui achète «a propriété I
c it-c e ua acqu éreur, prc.t à vtre c v iiic é , qui achète le fo n d i u procès i rem sibi necessariam.
�( 5 )
f
teront plus amplement. L a dame Daudin est condamnée aux dépens.
Toutes les parties ont interjeté appel de ce jugement.
M O Y E N S .
_
L a vente de 1782 est annullée; et cependant la dame Daudin
est condamnée à garantir le sieur Capelle , et même en des dommages-interèts considérables : n’y a-t-il pas à cela de l’inconséquence?
Une telle décision se conçoit, si le sieur Capelle a acquis loya
lement et de bonne foi ; car alors la garantie qu’il a fait stipuler
ne peut pas être illusoire.
Mais s’il a voulu tromper celle qui lui vendoit, il répugneroità toute justice qu’elle seule fû t grevée, et qu’il profitât au con
traire de sa propre fraude.
■
O r, il est indubitable que le sieur Capelle atrompé la dam eD auin,
et il doit en résulter non-seulement qu’il n’y a pas lieu à garantie,
mais même qu’il n’y a pas de vente.
i°. Il n’y a pas de vente ; car le consentem ent en fait le prin
cipal caractère , el il fau t qu’ il intervienne sur la chose et sur
le prix , sans cela il n ’y a pas de vente.
. Ce ne seroit qu’une subtilité de dire qu’il a dans la vente de
1782 un.prix quelconque, parce que si ce prix n’est pas réellement
celui dont les parties sont tombées d’accord , il n’y a plus véritable
consentement; surtout quand c’est l'acheteur qui veut donner une
somme moindre : tels sont les principes.
» L e consentement, dit Pothier, doit aussi intervenir sur le
prix. Ce consentement ne se trouve p oin t, si l’un compte vendre
» pour uïie sommé plus grande quecelle pourlaquelle l’autre compte
» acheter. Il n’y a donc pas de contrat de vente, faute de consen
ti tement. h ( T raité du contrat de vente.', pâg. y . i n\ 36. )
E t ce n’ est là que la copie de la loi elle-même : S i in pretio vel
in re errent, vel dissentiant, conlractus erit imperjectus. L . 9
ff- D e contr. enipt.
^ A. quoi la glose ajoute : Quod si minus emptor , majhs venditor
p u tw it, impeditur conlractus.
t a loi a donc voulu pourvoir aux surprises, et il n’importe que,
�,( 6 )
dans l'espèce , la vente ait été exécutée, parce qu’il est évident
que la même erreur , qui président au contrat, devoit en proléger
l’exécution.
. ,
L e principe est général ; et si l’acheteur a le secret de persuader
au vendeur qu’il est cl’accord sur le prix , il est certain qu’il y
aura le simulacre d’une vente, jusqu’à ce que le vendeur soit certain
qu’il a été trompé ; alors , si par les circonstances on peut juger
qu'il s ’est opéré une nouvelle convention , celle-là seule aura quel
que considération, plutôt que la première qui étoit vicieuse.
Si donc on pouvoit reprocher à la dame Daudin qu’elle n’a pas
réclamé plutôt, elle répondroit avec raison que la collusion de son
fils et du sieur Capelle contre elle-même a entretenu son erreur; ’
qu’elle a si bien cru le sieur Capelle innocéttti; qu’elle n'a accusé
que son fils, comme il’l’observe lui-même- : elle a si bien cru avoir
stipulé pour prix de vente 21600 fran cs, qu’elle a fait condamner
son fils à lui payer 21600 francs.’ <
Quel intérêt auroit-élle eu d’ailleurs-à faire un procès pour ce
dom aine? il ne lut appartenoît pas. L e principal intéressé étoit
son iils; mais il colludoit, et il étoit condamné à son égard.
Les éclaircissemens d’ ailleurs ne sont nés que du procès actuel,
des variations du sieur C apelle, et de la lellre de 1783 qu’il a
produite.
!
Ses variations ctbierit frappantes : i°. il diçoit, quant au testament
Descaffres, qu’il a voit été rassuré, en achetant, par le pouvoir que ce
testament, dont il avoit connoissance, donnoit à la dame Daudin
de vendre. Ensuite^, il a dit qu’on lui en avoit caché l’existence
il en a demandé la nullité, et il répète encore aujourd’hui qu’il l’a
méconnu.
V
>
■ :
2°. Quant au prix de la vente, le sieur Capelle disoit d’abord
que l’enlèvement des b i l l e t s étoit un conte; que la vente faisoit fo i;,
que les 21600 francs avoient été payes comptant, ce qui exclut
toute idée de soustraction d ’effets : et, aujourd’hui, il est obligé de
changer de langage , et de dire qu’il n’a'p ayé que Gooo francs
com ptant, et fait des billets pour le-surplus.
-,
L a lollrq de iy 83 a rendu'nécessaire cette esnèo.e de confes-
�.
^ 7 ^
.
.
,
sion forcée ; car , comment répéter qu’il n’y avoit pas eu d’effets ,
lorsque Daudin (ils écrivoit : J ’ai dit que vous en avçz fa it pour tout
le contenu au contrat ; et le sieur Capelle,avoit excipé de cette lettre.
Mais , c’est delà que naissoit la révélation essentielle pour la
dame Daudin : elle étoit forcée d’y lire tout à la fois la surprise
qui lui avoit été faite, et la sujétion de son fils pour la tromper
encore a p r è s son retour. Vous m ’ a v e z payé ce que vous m’avez
promis ; je ne .vous, nuirai jamais : donc il résultoit de ces deux
phrases qu’il y avoit un prix autre que les 21600 francs : donc le
sieur Capelle a voit payé directement à Daudin fils ; vous m ’ a v e z payé.
■ E t dès-lors quelle poignante réflexion pour la dame Daudin î
Jusque-là elle avoit pu croire que son fils, ayant enlevé des billets,
avoit couru chez les banquiers pour s’en faire payer avant pa fuite ;
et il a fallu voir dans cette lettre que le sieur Capelle avoit payé à
tin fils de famille rebelle, à un mineur, des billels enlevés, et après
une information d’un genre aussi peu ordinaire.
L a dame D audin avoit bien aisément été trompée. Son erreur a
duré jusqu’à ce que son fils , détrom pé lui-m im e sur le compte du
sieur C ap elle, a fait la cession qui adonné lieu au procès. A lo rs ,
attaquée elle-même, elle a eu intérêt d’examiner ce qu’elle eût mieux
aimé ignorer toujours.
11 n ’y a pas de vente, disons-nous , puisqu’il n’y a pas de consen
tement sur le p rix , dès que le sieur Capelle avoit machiné le projet
de n ’aclieler que i 38oo fr. un domainequ’il feignoit payer 21600 fr.
Mais encore moins , y a-t-il lieu à garantie , et cette proposition
est fondée sur les principes les plus constans.
' On peut vendre la chose d’autrui , dit le sieur Capelle , et par
conséquent on peut garantir une telle vente : cela est vrai ; mais
alors il y a au moins dans l’acheteur bonne foi dans la garantie qu’il
fait stipuler.
Dans l’espèce, le sieur Capelle n’étoit pas plus de bonne foi dans
cette garantie que dans la vente; caria garantie éloit une coud ilion
du prix de 21600 fran cs; si donc il savoit qu’à son égard le prix
¿toit moindre , H y avoit dol dans la garantie qu’il exigeoil.
�( S )
» L e dol, dît le Code c iv il, est une cause de nullité de la con
» vention , lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties
» sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre
» partie n’auroit pas contracté. » ( A rt. 1 1 16. )
O r , personne ne doute que la dame Daudin n’auroit pas vendu
et encore moins garanti au sieur Capelle, s’il l’avoit prévenue qu’il
iïiachinoit avec Daudin fils le projet de n’acheter que pour i 38oo f r .,
et même de fournir ce prix à un jeune homme qui fuyoit sa fam ille,
penturo.
En général, l’acheteur qui sait le vice de la chose vendue sciens
rei gravamen , ne peut pas demander de garantie; et à plus forte
raison celui qui a coopéré à ce vice, et qui plutôt l’a créé lui-même,
en sous-entendant un prix que le vendeur ignoroit et n’adoptoit pas.
E t, à cet égard, il faut remarquer un double principe; c’est que,
i°. la garantie même de tout troubles et évictions ne peut s’entendre
que d’une cause d’éviction qui existât avant la vente, et que le
vendeur pouvoit ou devoit savoir ; 2°, que si la cause d’éviction
résulle de la vente elle-même, quant à sa forme ou sa substance,
il faut que l’acheteur se fasse garantir expressément de ce vice connu.
y> L e débiteur, dit l’article u 5o du Code civil, n’est tenu que,
» dos dom mages-intérêts qui ont clé p révu s, ou qu ’on a pu prévoir
» lors du contrat ; » et cet article s’applique à la garantie d’évic
tion , d’après l’article i 63g ,
.
C ’est en vertu de ce principe que la cour d’appel de Paris, par
arrêt du 27 messidor an 1 0 , déchargeoit de la garantie un ven
deur qui s’y étoit soumis solidairement; mais à l’égard de-Pim-*
meuble d’un interdit, qui ne pouvoit êlre vendu sans form es;
» Considérant qu’on n’entend par garantie d’évictions et troubles,,
» que ceux étrangers au contrat, et dont il y a une cause e x is
tí tanle au temps du contrat....... Qu’on n’entend point par cette
>) garantie l’éviction dont les vices du contrat même sont la
» cause. » ( J. palais, n°. 1 7 1 , )
Dans l’espèce, la vente de 1782 a deux vices : l'u n , que lachóse
vendue étpit à autrui : le sieur Capelle n’ignorolt pas le testament;
�( 9 )
.
.
il l ’a avoué, et sa précaution anticipée de prendre une ratification
en blanc , le prouve d’avantage. >,
Le second.vice, radical en ce qu’il attaquela substancede 1 a c te ,1'
étoit connu de l’acheteur seul, et cette circonstance est bien plus
décisive-que celle de l ’arrêt de Paris. L e sieur Capelle savoit seul
que le prix exigé par la dame Daudin n’étoit pas le prix qu'il vouloit payer, et la dame Daudin qui garantissoit ne le savoit pas.
A-t-ellç donc donné un consentement valable à la garantie? Non*
car non videntur qui errant consentirez
» 'L é troisième ca s, dit Potliier, auquel il n ’y a pas lieu à la
» la garantie , est celui d’un acheteur q u i, ayant connoissancede.
». la cause qui donne-,lieu à l’éviction , l ’a cachée au vendeur qui
». l’ignoroit, et de qui il a stipulé la garantie : comme en ce cas
». c’est l’acheteur,qui,a induit en erreur le vendeur, en stipulant
» de lui une garantie qu’il n ’auroit pas promise ..... le vendeur
» parolt fondé à l’exclure de son action de garantie par l’excep» tion du d o l, en lui offrant seulement de lui rendre le prix
»' qu’il a reçu. »_ Contr. de vente , pag. i , n°. 191*
- : O r , la dame D audin n ’a rien-reçu , et le sieur Capelle le sait
mieux que personne. D audin fils avoue avoir reçu les i 5£oo francs J
il en a offert le remboursement, et dès-lors la veuve Daudin doit
rester au£si neutre dans cette malheureuse affaire, qu’elle l’eût
toujours été sans les manœuvres du sieur Capelle.
Répétera-t-il que tout est controuvé dans ce qu’il appelle une
perfide calomnie? la dame D audin, qui n’a eu intérêt de s’informer
de la vérité que depuis qu’on l’attaque, offre de prouver à la cour
que, par le dql du sieur Capelle, le prix exigé par elle fut fixé à une
somme beaucoup moindre entre lui et Daudin , alors âgé de
dix-neuf ans j qu il n’y eut pas, comme il le dit, pour i 56oo fr,
d’effets tirés sur la maison Lespinat et D om ergue, et que cette
maison n ’en a acquitté que pour 10000 francs au plus.
Mais qu’est-il besoin d’une preuve testimoniale, quand tout est
clair par des écrits, et qu’il y a plus de matériaux qu’il nVn est
nécessaire pour asseoir les présomptions que la. loi exi^e seules ert
matière de fraude.
.
�( 10 )
Que le sieur Capelle explique, s’il le peut, com m ent le prix réel
de sa vente étoit de 2 1 6 0 0 fra n c s , lorsque la lettre qu ’il produit
porte : V o u s
m’avez payé ce que vous m’avez promis, je ne vous
n u ir a i p a s .
Q u ’ il explique comment il a payé 6000 francs en argent, et le
surplus en effets, lorsque la lettre porte : Vous en avez fa it pour
tout le contenu au contrat ; lorsqu’après une plainte en soustrac
tion dos Billets, Daudin fils est condamné à payer à sa mère
vingt-u n mille s ix cents livres.
Qu’il explique dans quel temps il a payé ces billets, faits à divers
term es; est-ce au banquier? il avoit une saisie-arrêt; est-ce à
Daudin fils? Mais un magistrat pouvoit-il acquitter des billets
volés , à l'auteur du v o l, m ineur, après l’éclat d’une information?
Que sont devenus ces billets qu’aujourd’hui il avoue? Acquittés
par lu i, il doit les avoir.
N on, ce ne sont pas là les signes de cette loyale franchise
qu’il faut toujours retrouver dans les transactions sociales.
L e sieur Capelle a obligé la dame Daudin à s’instruire de ce
qu’elle s’efforçoit d’ignorer, et à voir ses derniers momens em
poisonnés par la conviction d'une trame qu’elle eût été plus heu
reuse de ne pas aussi pleinement acquérir.
Cette conviction même ne l’eût engagée à aucune démarche ;
car leur éclat même eût rappelé des chagrins que le cœur d’une
mère sait dissimuler. Mais le sieur Capelle lui envie cette paix
et sa neutralité j il ose demander à la dame Daudin une garantie
surprise par des manœuvres sans lesquelles il est évident qu’elle
n ’auroit pas contractée. Une telle demande n’est donc que le pro
duit de la turpitude ; elle est proscrite par les principes : car nemini
f r aus sua patrocinari debet ,
Me
D E L A P C H I E R , avocat.
M r.
FA YE,
avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r io t , seul imprimeur de la
Cour d’appel.— Therm idor an 1 3.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Sobrier, Marguerite. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
ventes
domaines agricoles
consentement
Description
An account of the resource
Mémoire pour Marguerite Sobrier, veuve Daudin, appelante ; contre Sieur François Capelle, intimé et appelant ; en présence d'Ant. Desprats, et d'Eléazard Rostang-Daudin, appelans et intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1773-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
10 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0404
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Vic-sur-Cère (15258)
Vernet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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domaines agricoles
Successions
ventes
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38ad8af82bce89f9a30818146c136184
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CONCLUSIONS
CO UR
Séant Riom
MOTIVÉES,
IIe
POUR
M .e
'
J
a c q u e s
S E R I E Y S , sous-doyen des notaires
de la ville d’ Aurillac , intimé et appelant;
CO NTRE
Sieur J e a n -B a p t is t e T E R N A T , propriétaire,
f ils à J o seph , et son héritier, appelant ,
intimé et demandeur en garantie ;
ET
EN
PRÉSENCE
DE
Dame M a r ie L A C A R R I E R E , veuve de M r
F O R T E T , conseiller, et sieur F r a n ç o i s
Jo s e p h - M a r ie F O R T E T , son f i s et son
donataire, défendeurs en recours ;
Tous habitans de ladite ville d'Aur illac.
A
ce qu’ il plaise à' la C o u r :
E n ce qui
1
touche
l’appel
7 8 6 , interjette par T e r n a t ,
à re s ti tuer la somme
A tt e n d u ,
de
de la sentence
en ce
quelle
du
3
Mars
le condamne
1 0 0 0 francs.
que l ’instruction du procès donne
D ’ APP
L
E
la
preuve
A
S E CTIO N
�f
.
. ( 2 ?
évidente que* le sieur Serieys n ' a pas
reçu cette somm e. .
Attendu , que la dame de Fortet a déclaré, par requête du
14 Avril
1785 ,
ne pas l ’a vo ir
donnée
au sieur S e r i e y s ,
maîgré rénonciation du contrat de ve nt e , ce qui se trouve
confirmé par la première contre-lettre
du même jour.
Attendu , que le sieur T er na t a dit dans sa requête du
8 Juillet 1 7 8 5 , et a déclaré dans son interrogatoire qu’il
a payé
ladite somme
à la dame
de
Fortet ;
qu ainsi
s’est mis en opposition f o r m e l l e , non-seulement
dame
de F o r t e t , mais encore a v e c
première contre-lettre.
Attendu , que
a ve c
la vente et
il
la
a ve c la
' y
l’objection
faite
par T ern at
à
Serieys,
( page 6 de son dernier mémoire ) d ’avoir avoué par deux
actes la réception de ces mille francs", n’est fondée
que
sur un jeu de mots , parce que la simple lecture de l’o b
jection elle-même prouve que Se ri eys a sommé T er na t de
p a y e r 3600 francs indépendamment des
que
1 0 0 0 f r a n c s , puis
¿a -première somme seule était payable a u x
créanciers
indiqués.
A t t e n d u , que le sieur Se rieys ne pouvait pas avo uer les
2 8 ' M a r s et premier Ma i
1786,
avoir reçu 1 0 0 0
francs,
et que T er na t ne devait pas les lui r e m b o u r s e r , puisqu’il
venait de le faire condamner à les lui restituer, par sen*te nce du 3
Mars pr é cé d e nt , et qu’il poursuivait l’exécution
de ladite sentence.
A t t e n d u , que si la
seconde
contre-lettre , du
5 Ju i n
1 7 8 2 , énonce que le sieur Se ri eys a reçu de T ern at ladite
somme de
1 0 0 0 francs, c’est par suite et complément de
l ’usure projettee par T e r n a t , qui aurait manqué son b u t ,
s’il , eût dit autrement.
/
�Attenduque
'
( 3 )
c’ est pr éci sé me nt, parce que les
contre-
lettres contiennent cette fausse mention , que le sieur S e ri e y s
a assigné T er nat en restitution et l ’a fait condamner*, qu’ ainsi
il n’y
a pas lieu de chercher une preuve dans les actes
même qui sont l’objet du ptocès.
E n vce qui touche l’appel interjette par le sieur S e r i e y s ;
de la même sentence , en ce qu’elle l’oblige à une affir
mation dont le sens est invoqué par T e r n a t , c om m e m o y e n
en sa faveur.
Attendu , que cet appel
que
de
repousser
le
surabondant n’a d’ autre intérêt
moyen
de
rectifier les expressions de ladite
ladite affirmation.
Ternat,
et
de
faire
sentence relativement à
'
Atten-du } que cet appel est re cevab le , et qu’il ne peut
résulter
de la signification de la sentence , aucune appro-
t bation , puisqu’il s’ agissait d’exécuter une disposition f a v o
rable au sieur Serieys.
A t t e n d u , que toutes les
explications
données
dans ses
requêtes précédentes, montraient le sens qu’il donnait l u i '
même a 1 acquittement de 3600 francs ; que , regardant cette
. somme c o m m e acquittée, au moyen des délégations , le sieur
Se ri eys-de vait croire que le sieur T er na t en faisait la même
interprétation , tant qu’il ne réclamait pas
contre
ce qui
avait été dit à cet égard.
Attendu , que l’affirmation offerte étant dans
s e n s , ne peut
le
même
offrir d’approbation qui soit opposée à ce
qui avai t été déjà dit
et n o n d é s a v o u é ;
que ledit sieur
Serieys n’a dû changer de l a n g a g e , et n’en a c h a n g é , en
que lorsque T e r n a t a é lev é^ pour la première f o i s ,
des doutes sur la sincérité de la seconde contre-lettre.
A z
�( 4 )
_
Attendu , que dès-lors la signification de la sentence du
3 Mars , faite par le sieur S e r i e y s , n’a pas pu être approb 3tive d ’une difficulté non encore é l e v é e , et que dès l ’instant
que T e r n a t
pius
a fait des
réclamations , le
offert son affirmation,
sieur Seriey s n’a
et a resté en cet état jusqu’à
son appel.
Attendu, que ce ne sont pas les expressions, mais le fait
de la chose jugée qu’il faut e x a m i n e r ; que tout l ’objet du
procès de 1 7 8 5 , étant de re couvrer
1 0 0 0 fr a n c s , l'affir
mation du sieur Serieys ne pouvait avoir pour objet r é e l ,
que de déclarer s’il avait ou non reçu cette somme.
.
A tt e n d u , que le premier juge n’a dû mettre
aucune im
portance dans le fait de réception des 3 6 0 0 fr an cs , puisque
aucun débat ne s’était élevé devant lui à cet é g a r d , et qu’ainsi
la sentence du 3 Mars 1 7 8 6 , ne peut fournir aucun m o y e n
à T ernat
contre
le sieur Se rieys.
Attendu au f o n d s , que les réclamations de T er na t contre
la seconde contre-lettre , quoique seulement élevées depuis
son
a p p e l , exigent
que l’affirmation
ordonnée par ladite
se nt e nc e, soient précises et réduites à l’objet unique qui était
en contestation , c ’est-à-dire au fait de la non réception de
la somme de
mettre
1 0 0 0 f r a n c s , si mieux n’aime la C o u r per
de la part du sieur S e r i e y s , de donner
affirmation
les
explications
contenues
en
en ladite
ses
écritures
précédentes.
E n ce
qui
touche l’appel interjette par le sieur Serieys
de la sentence par dctau^ du
23
Juin
1786,
qui
déclare
la seconde contre-lettre du 5 Jui n 1 7 8 Z , f a u s s e et supposée.
�( 5 )
Attendu 9 que T e r n a t n’a montré dans toute, sa
f
conduite
à cet- égard que des inconséquences et une hésitation dont
il est aisé de sentir le motif.
A tt e n d u , qu’ après
précédent, pour
av o ir
attendu le jugement du procès
demander par acte extra-judiciaire une e x
plication de ce qu’ il avait lu et relu dans toutes les requêtes,
le sieur T er na t a débuté par conclure à ce que
la seconde
Contre-lettre fût déclarée fausse et supposée, et a fait ensuite
tous ses efforts pour empêcher même une vérification.
Attendu , que le sieur S e r i e y s , à qui il reproche d’avoir
évité
ses premiers j u g e s , en
se
laissant
c on da mn er par
défaut , n’a eu évidemment d’autre but que de ne pas plaider
en deux tribunaux à la fois ( i ) ; tandis que T er na t avait affecté
d ’attendre le sort de la
première décision pour éviter la
décision des premiers ju ges , en feignant d’y recourir ensuite,
et sur-tout pour lasser et décourager le sieur Seriéy s , qu’il
savait poursuivi à outrance par ses c r é a n c i e r s , c o m m e
le dit page
21
il
de son dernier mémoire.
A t t e n d u , que la demande en déclaration de faux
de la
seconde contre-lettre, exigeait de la part de
T e r n a t , qu ’il
■sollicitât lui-même une vérification ou qu’il
passât à l’ins
cription de faux , tandisqu’ en refusant la seule v o i e légale
d’éclaircir sa prétention , il a continuellement agi et plaidé
contre sa propre demande.
A tte n du , que dans les huit ou dix écritures qu’ il a données
au parlement et même dans le procès-verbal
saire ( 2 ) nommé pour
( 1 ) A rrê t du ü
du C o m m i s
la vérification , par arrêt contra-
A v r i l 17 8 8 qui ¡o in t les d eu x a p p e l s , , ap p o in te an conseil
demandes eil j t0;t et j0 jIlti
( - ) M. Lan;bctt-Deicbam ps-de-M otel, conseiller en la Grand-chambre.
A 3
l
sur les
�.
<
6
}
d ic to ir e , sut appoîntement à mettre du 3 Mars 1 7 8 8 , T er na t
a affecté de se retrancher dans des prétendus a v e u x , ce q u ’il
n’a cessé de cop ier et recopier ju s qu a ce jour.
A t t e n d u , que si ces aveux avaient été aussi décisifs qu’il le
s u p p o s e , il n’avait
judiciaire du 27
nul besoin de notifier son acte extra
Mars 1 7 8 6 .
A t t e n d u , que si , c om m e il
le d i t , aucun créancier
de
Serieys ne s’ adressait à lui , si au contraire le sieur Seriey s
était vive men t poursuivi sans rien dénoncer, il est difficile
de comprendre à quelle intention T s r n a t a intenté un procès
tendant à ne p a y e r aucune de ces créances.
Attendu que la seconde contre-lettre a tous les caractères
de la sincérité ; qu’elle ne doit pas être plus
suspecte que
la première et que »plus l’usure de T er na t exigea d ’obscu
rité et de simulation
dans les
clauses d e . l a v e n t e , plus il
.falut d’explications et de contre-lettres
pour
ramener les
parties à leur véritable intention.
Attendu , que la dame de
mière contre-lettre
laquelle
elle
pour
semblait
se
'
Fortet ayant exigé
rendre
étrangère
participer par
nécessairement une seconde
une pre
l ’usure
la vente , il
contre-lettre entre
à
fallait-
T er na t
et
Seriey s s e u l s , d’après les circonstances.
Attendu,
que le prêt particulier et,indépendant de
500
francs fait par Ternat ( et dont il se fait un m o y e n
aux
pages 16 et 1 7
térêt qu’ il eut
de son dernier m é m o i r e ) prouve seul l’in
lui-même d ’exiger un emploi , tel qu’il est
spécifié dans la seconde contre-lettre.
A tt e n d u , que la*quittance d’And ré Serieys n’est que la
�\
( 7 ^
,
stricte exécution de ladite contre-lettre , et que cette quittanct
est du fa it même de Ternat.
s* A**' y yto A *)
Attendu e n f i n , que T er na t ne nie pas sa signat ur e, et
—
que la fable par lui imaginée pour créer une présomption*
ne peut pas détruire un acte de son fait.
Attendu,
que
s’ il
avait
eu lui-même
confiance en
sa
_
propre fable , il aurait été le premier à presser la vérifi
cation
devant
les écrivains
ex p é ri m e nt é s,
choisis
par le
P a r l e m e n t , au lieu de verbaliser pour les empêcher d’e xa
miner avec
lui les signes de faux qu’il indique.
E n ce qui touche l’objection présentée par T e r n a t ( page
^
2 de son dernier mémoire ) que Se ri eys ne justifie d ’aucune
diligence de ses créanciers énoncés dans la seconde contrelettre.
A t t e n d u , que T e r n a t se répond à lui-même ( page 9 ) ,
en disant qu’après la seconde contre-lettre les créanciers
de Serieys ccntinvièrenc leurs poursuites.
Attendu,
que dans sa
3 7 8 6 , il avait dit que
requête introductive
Seriey s était
contraintes par corps.
A t t e n d u , que
du 6 M a i
écrasé de frais et de
>
'
les poursuites et saisie-arrêt de
L ib e t et
M a n h e s , prouvent qu’ils étaient cré a nc ie rs , et que T e r n a t a
reçu une saisie-arrêt dont lui seul peut
en la produisant.
justifier
la
date
A t t e n d u , que si les dernières poursuites de ces créanciers
datent de 1 7 8 6 , ce n’est pas une
sont postérieurs à . ^ 1 7 8 2 .
E n ce qui touche
p reuve que leurs titres
l’objection ( p a g e
seconde contre-lettre est
détruite
1 0 et 1 1 )
par les
a ve ux
q Ue la
qu’a fait
Serieys au procès de 1 7 8 5 * d’avo ir reçu les 3 6 0 0 francs.
1
�.
Attendu,
que
Ç.8 >est
Serieys n’ en
con ven u
qu ’a vec
des
explications- 'et réserves que T e r n a t a toujours fait semblant
de ne pas
entendre,
et qui
sont cependant la copie de
cette seconde contre-lettre.
A t t e n d u , que si les réserves de la première requête ne
sont pas sur
la
copie,
elles sont très-nettement et
sans
renvoi à l’original signé du Rapporteur et signifié.
Attendu , qu’elles sont répétées dans les autres requêtes et
sur les copies.
A tte nd u, que la signification du premier Septembre 1 7 8 5
annonce à T ern at quau- moyen de la première contre-lettre ei
autres conventions , Serieys sera, créancier au lieu d'are débiteur.
A t t e n d u , que
dans
la requête
du
9
Déce mbre 1 7 8 5 ,
transcrite par T er nat lui-même en son mémoire ( p a g e 1 2 ,
alinéa 5 ) le sieur Serieys déclara a vo ir reçu les 3 60 0 fr an cs ,
et s il dit que c était en deniers effectifs , i l àjouta, ou par
secondes conventions par la rétention du p rix des acquisitions ,
payable aux créanciers ou légitimaires à indiquer par Serieys «
A tt e n d u , <que s’il a plu
à
T er na t
d ’imprimer le
mot
deniers effectifs s e u l , pour y trouver un a v e u , l ’explication
qui suivait immédiatement , donne à cet aveu un sens bien
c l a i r , que T ern at ne pouvait pas m éco nn aî tre , et qu'il n’a
pas pu d é s a v o u e r , puisqu’il n ’y a pas répondu.
Attendu e n f i n , que
lors de l’interrogatoire sur
faits et
a rt i c l e s , Serieys a demandé.par article non signifié,, [ar t. 9 ]
que T ernat fût interpellé de repondre, si outre la vente et
la contre-lettre , sur lesquelles il venait d’être interrogé , il
11 avait pas fait d'autres conventions particulières avec Serieys.
A t t e n d u , qu’ au lieu de s ’expliquer
franchement, T ern at
ne fit que des réponses évasives qui le convainquirent de
�.
,
( 9 -)
.
;
.
mauvaise f o i , tellement que le J u g e d’ Aurillac lui o b se r v a , ’
proprio m otu , qu’il ne disait pas la vérité.
A ttenduj que dès-lors Serieys n’a rien avoué à son p r é - ,
judice , et que , dans tous les cas > on ne détruit
pas
un
titre par des dires qui n ’ en énoncent pas même la date j
que le procès de
1785
était étranger aux 3 6 0 0 fr a n c s , et
que Ternat ne dit même rien qui tendit à accepter les a ve ux
dont il a voulu depuis se faire un m o y e n
En
principal.
ce qui touche les inductions que T e r n a t veut tirer
de la délégation du z i A v r il 1 7 8 3 ( page 1 5 et suivantes).
Atten du, que
l ’affectation qu’il
d a t e , et l’affectation plus
par deux
fois
copie ou
met
grande
à en souligner la
encore
d’en
communication par
demander
la
v o ie
du
greffe, n’ont pour but que d’appeler la défiance de la C o u r
sur une pièce pour l’étendre à une autre.
Attendu , que T ernat ne peut demander de bo nne foi
la
copie
ou
communication
d’une pièce
imprimée
lui ( page 15 ) et qui n’a été faite et signée, que
par
pour lui
être à l ’ instant remise en 1 7 8 3 .
Attend u, que
le soupçon qu’il veut élever sur la date,
seflace par les reçus postérieurs qui la mentionnent de n o u
v e a u , et qui sont d’une époque
antérieure aux procès.
Attendu , que les longs raisonnemens que fait T ern at à
1 égard du prêt de 500 francs, relatifs à la dé lég ati on , pour
tirer avantage de ce q ù il ri y a pas eu d'usure cette fo is
sa part, ( p a g e
usures
de
1 6 ) n’ont rien de c om m un avec les autres
qu’il a commises
par le résultat des deux contre-
lettres , et ne font au contraire qu’en confirmer la conviction.
En ce qui touche l’objection ( p a g e 2 3 , 24 et 25 )
que
dans la seconde contre-lettre, le papier est tourné au verso
et 1 écriture plus lâche
d’un côté.
'
�( 10 )
A t t e n d u j que quand cela serait v r a i , personne ne s’avise
en se
de
servant d’une demi
quel
côté
il
c o m m e n c e , et sur-tout
ne soupçonne pas que
des
observations
feuille pour é c r i r e , d’examiner
celui
qui écrit
celui a v e c qui il traite présentera
aussi
misérables
com m e
des
nullités
d ’or donnance.
A tte nd u, que le m o y e n de T er na t que l’ écriture est plus
serrée au recto act uel, est démenti par lui-même ( page 2 4 )
lorsqu’il dit que cette première page de la seconde contrelettre
est
remplie de
phrases
inutiles
et surabondantes}
parce qu’en les a b ré g ea nt , on aurait eu besoin de serrer moin s
Attendu , que tous les sophismes
suspecter
la
seconde
contre-lettre ,
de T er n a t pour faire
s’évanouissent
devant
cette seule considération, que si Serieys en eût été le fa-j
bri ca teu r,
il
aurait eu pleine liberté de la
manière à éviter tout procès
p ou r les
rédiger d’ une
îoco
fr an cs,
et à
éviter aussi la délégation de 1 7 8 3 .
A tte nd u en e f f e t , que le sieur S e r i e y s , n ’aurait pas man
qué de déclarer que les
1000
francs
n’étaient
pas payés
par T e r n a t , au lieu de c on ven ir de ce paye men t simulé et
u su r a i re , qu'il n’aurait pas
légitime d’André
manqué encore de
son frète à prendre sur
les 3 6 0 0 francs
au lieu de reconnaître que les 500 francs de
sont
des
un prêt
particulier fait par
déléguer la
cette légitime
T e r n a t , indépendament
3 6 0 0 francs.
Attendu enfin , qu’un
écrit signé et appprouvé n’ a pas
besoin d’être fortifié de raisonnemens.
Attendu, le principe actori onus probanJi incumhit , et que
Ternat
ayant intenté une demande pour conclure à ce que
la seconde
contre-lettre fut jugée fausse et
pas établi sa demande.
supposée, n’a
�Attendu ,
par
une
( ïO
f
que dès-lors il doit en être débouté, et que
conséquence
a vo ir son plein
forcée ,
effet.
contre-lettre
doit
.
Par ces motifs , faisant
T er na t de la
ladite
^
droit
sentence du
3
sur
l’appel
interjette par
M a rs 1 7 8 6 , dire qu’il a été
-v.
bien jugé par ladite sente nce , en ce que T e r n a t a été c o n
damné à rembourser la somme .d e 1 0 0 0 francs à S e ri ey s,
et en ce que
reçu ladite
que
ce
dernier
somme,
est
tenu
d’affirmer n’avo ir pas
mal et sans cause a p p el é , ordo nne r
ladite sentence sortira son
plein et entier effet, c o n
damner l’appelant en l’amende.
Faisant droit
sur l’appel
incident interjetté par le sieur
Se ri eys de la même s e n t e n c e , et le restituant en tant que
de besoin surabondamment contre toute approbation , dire
q u ’il a été mal jugé par ladite sentence en ce qui touche le
m od e d’affirmation ordonné par icelle , bien appelé quant à
ce émendant , ordonner que l’aifirmation prescrite par ladite
sent en ce, sera réduite à la non reception des 1 0 0 0 f r a n c s ,
'
si mieux n’aime la
C o u r ordonner que ladite affirmation
sera faite avec l’addition des réserves et explications c o m
prises dans les requêtes y v is ée s , ordonner
sera rendue.
Faisant
que l ’amende
droit sur l’appel interjetté par le sieur Se ri ey s de
la sentence du 23 Juin 1 7 8 6 , dire q u ’il a été mal jugé par
ladite s e n te n c e, bien a p p e l é ,
émen da nt, débouter T e r n a t
de sa demande en nullité de
la seconde
contre-lettre du
5 Juin 1 78 z , ordonner que ladite contre-lettre sfera exécutée
selon sa forme et ten eur , et qu’en c on séq ue nce , T e r n a t sera
tenu de rapporter dans le mois
quittance des créanciers à
lui indiqués, jusqu’à concurrence de la so mme de 36 0 0 francs,
�( 12 )
et des intérêts depuis ledit acte , sinon et faute de ce faire,'
le con damner à p a y e r et porter
ladite somme et intérêts
audit S e r i e y s , c o m m e aussi aux dommages et intérêts de ce
dernier,
suivant l ’état
qu’il en
donnera,
ordonner
que
l ’amende sera rendue.
Faisant droit sur la demande portée par requête du 20
Novembre
1 7 8 9 , ordonner
outrageans qui se
que
les
termes injurieux et
trouvent consignés
dans les requêtes et
procédures de T e r n a t , seront
su ppr im és ; faire défense à
T e r n a t de récidiver et injurier à l’avenir le sieur Seri eys ,
con da mne r T er na t en tels dommages intérêts q u ’il plaira à
la C o u r fix er, ordonner que l’ Arrêt de la C o u r sera quant
à ce affiché au
nombre de 500 exemplaires , tant dans la
ville d’Aurillac que dans les autres v illes du ressort d e la
C o u r , aux frais dudit T e r n a t ; cond amn er ledit T e r n a t aux
dépens faits tant
contre
lui que
contre la dame
Fortet
des causes principales et d’appel.
Signé
M r. C O I N C H O N L A F O N ,
S E R I E Y S.
Rapporteur.
M . D E L A P C H I E R , Avocat.
M .c DAUDE-VERNIO LES, A vo u é- Licencié.
A
Chez V
i a l l a n e s
A U R I L L A C ,
,
p è re
et Fils, Imprimeurs-Libraires,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Serieys, Jacques. 1788?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Coinchon-Lafon
Delapchier
Daude-Vernioles
Subject
The topic of the resource
contre-lettre
Description
An account of the resource
Conclusions motivées, pour Maître Jacques Serieys, sous-doyen des notaires de la ville d’Aurillac , intimé et appelant; contre Sieur Jean-Baptiste Ternat, propriétaire, fils à Joseph, et son héritier, appelant , intimé et demandeur en garantie ; et en présence de Dame Marie Lacarrière, veuve de Mr Fortet, conseiller, et sieur François-Joseph-Marie Fortet, son fils et son donataire, défendeurs en recours ; Tous habitans de ladite ville d'Aurillac.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Viallanes, père et fils (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1788
1786-Circa 1788
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0403
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Contre-lettre
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PRECIS
EN R É P O N S E
POUR
T h é o d o r e et J u l e s d e V E Y R A C , in ti m és;
CONTRE
M ar ie
G I N O U X , Veuve de J
ean
- J acques de
V E Y R A C , appelante.
E s t - c e
bien d’elle-m êm e que la veuve V e y ra c a
voulu parler, quand elle imprime qu’elle ne désire que
la paix et le repos., qu’elle a toujours voulu être juste,
et qu’usant de tous les ménagemens q u ’exigeait sa
qualité de seconde m ère, elle en a rempli les devoirs
avec bienséance?
Il faut donc que les enfans V eyrac oublient que
depuis neuf ans elle relient la fortune de leur p è re ,
z
�v.
(a )
«ans qu’ils aient pu toucher aulre chose que quelques
minces revenus, arrachés en partie parties saisies-arrêts,
qu’elle a su encore neutraliser.
•
!
Il faut donc qu’ils oublient quatorze jugemens ou
arrêts qu’il a fallu obtenir contre elle , dans lesquels
elle seule a été condamnée aux dépens, et trois fois
en son nom personnel.
Il faut donc qu’ils oublient l ’expoliation m éditée,
sous son n o m , par un certain Lam bert, que la coup
a.condamné à restitution.
'
Il faut donc qu’ils oublient les calomnies et les li
belles qu’elle a plps d’une fois répandus contre une
famille respectable, à l’égard de laquelle elle devait
effectivement user de ménagemens, parce qu'indépen
damment même de ses chicanes, elle avait beaucoup
de choses à faire pardonner.
son
v i s a g e , et étudiant un rôle nouveau, a cru se rendre
plus recommandable en la cour, les enfans V eyrac ne
M a i s si la v e u v e V e y r a c , c o m p o s a n t a u j o u r d ’ h u i
sont point dupes de cet astucieux travestissement. Sa
conduile soutenue, pendant huit a n s , leur a prouvé
qu’une belle-mère n’est , le plus souvent, qu’un être ,
incorrigible et malfaisant, dont il ne faut attendre ni
procédés ni contrilion.
Ainsi la veuve Veyrac peut cesser la contrainle qu’elle
s’est imposée, et reprendre son caractère. Ceux qu’elle
a si long-iems outragés lui pardonneraient tout, si les
larmes dont elle se dit a b reu vée, étaient celles de la
�( )
3
pénitence ; mais quand des larmes ne font qu’un moyen
de procès , elles ne séduisent p o in t, et ne sont que
ridicules.
L ’objet principal de la contestation était terminé
entre les parties, après toutes les chicanes qu’il était
judiciairement possible de susciter aux enfans Veyrac.
Il était jugé qu’ils auraient 10,000 francs de rente
perpétuelle sur la succession de leur a ïe u l, outre les
droits de leur mère, et la succession d’un oncle.
L e tribunal du P u y , la cour d’appel, la cour de
cassation avaient décidé que cela serait ainsi ; mais la
veuve V eyrac a médité un m oyen de paralyser une
décision aussi bien consolidée; et cette attaque indirecte
de la chose jugée , est aujourd’hui l’objet du procès
pendant en la cour.
C ’est dans le contrat de mariage de François-Camille
de V e y ra c , et dans la clause même jugée p a rla cour?
que la veuve V eyrac puise ses moyens d’attaque.
Par l ’article 2 de ce contrat, du 19 janvier 1 7 8 5 ,
Jean-Jacques de V e y ra c , donne et constitue à Fran
çois-Camille de Veyrac son lils (père des intimés), d ix
mULe Livres de rente annuelle et perpétuelle, avec son
hôtel au P u y , et la moitié de ses meubles.
lui assure
de plus la moitié des biens dépendans de la succession
de la dame de Maison-Seule, mère du futur, pour en
11
j°uir après son décès; et enfin il lui donne la faculté
prendre dans ses bois celui nécessaire a l’ usage de
sa maison.
2,
�3
«
«
«
«
«
«
'
.
.
(
4
}
L'article
est ainsi conçu : <rDans la donation et
constitution ci-dessus de 10,000 francs de rente est
comprise la substitution faite au profit du futur par
le sieur de V eyrac de Maison-Seule son aïeul, dans
son testament. Comme aussi le fu tu r ne pourra point
rechercher ledit, seigneur son père, relativement à
l’inventaire de M. son oncle le chevalier de Veyrac*.
A rticle 4. «rLes autres biens dudit sieur de V eyrac,
«■en quelques nalures qu’ils soient , terres , contrats
« et autres, lui demeureront réservés, ainsi que les
« fruits des autres biens propres du fu tu r , desquels
« ledit seigneur son père a droit de jouir en vertu de
« sa puissance paternelle ; lesquelles clauses ont été
« expressément requises par ledit de Veyrac père (1)».
.Après le décès de François-Camille de V e y r a c , en.
l’an 6 , la famille, présidée par l’aïe u l, lui-m êm e, crut
devoir déférer la tutelle au sieur de G laven as, le beaufrère et le meilleur ami du défunt.
( 1 ) Ce contrat de mariage a une clause dé réversion, stipulée
au cas où le futur ayant des enfans, ils décéderaient. L a veuve
V e y ra c a jugé à propos (p ag. 6 de son mém oire) d’y lire : dé
céderait ; ce qui ôlerait aux enfnns de Camille tout l’effet du
contrat de mariage de leur père : cependant elle n’y insiste pas.
Mais elle devait dire à la cour que celte découverte n’est pas
nouvelle de sa part ; q u ’elle proposa ce moyen en l’an 7 , et
rendit nécessaire un compulsoire de la minute du contrat de
mariage. Il fut reconnu qu’il y avait ils décéderaient , et alors
la clause est devenue sans effet, parce que les enfans vivent. L a
veuve s’est tue depuis cette époque. Comment donc revient-elle
sur ses pas, quand tout est ju g é ?
�( 5 >
.
.
- Ce n’est pas sans adresse et sans mauvaise foi que
la veuve V eyrac parle de manœuvres employées par
la famille pour contrarier le vieillard sur ce point ;
elle sait mieux que personne que tout se passa de son
a v e u , parce qu’il partageait sincèrement les craintes
de toute la famille sur l’avenir que préparait sa seconde
femme aux enfans de son fils. Elle sait encore que le
sieur de Glavenas n ’ a c c e p t a , pour ainsi dire que malgré
lu i, une tutelle onéreuse; et les mineurs V eyrac se
plaisent à déclarer que sans lui ils n’auraient pas eu les
moyens de vivre, malgré leurs 10,000 fr. de rente, puis
que, pendant les interminables procès, suscités par leur
marâtre, elle a trouvé le secret de retenir leur fortune.
Voilà l’explication de l’une des calomnies de la veuve
Ve37rac : revenons maintenant aux premières causes du
procès, avec la b riévelé que com porte une cause , dont
tous les détails ont été rappelés dans des imprimés précédens , et qui n’a besoin que d’être réduite au seul
point de vue sous lequel elle se présente en la cour.
Jean -Jacques V eyrac é ta it, avant sa m o rt, livré
exclusivement aux volontés de sa femme et de ses con
seils. Contrariée de ce qu’il n’avait pas voulu la tutelle,
elle l1engagea à ne rien payer de la pension des mineurs,
ou plutôt elle refusa pour lui : et le tuteur se vit obligé,
plus d’un an après son entrée en exe rcice, d’obtenir
Une sentence le 2y thermidor an 7, pour se procurer le
paiement de la rente de 10,000 f r ., et faire régler ce
�•
( 6 }
,
dont le sieur de V eyrac père ne s’était pas retenu
l ’ usufruit.
Mais il est faux de dire que les saisies-arrêts furent
accumulées sur le sieur de Veyrac pour le priver de
tous ses revenus , et qu’il passa ses dernières années
dans un dénuement absolu. Ces faits sont de la pure
invention de Marie Ginoux; aucune saisie-arrêt n’eut
lieu pendant la vie du sieur de V eyrac ; on l’a défie
d’en produire une seule.
A compter du décès du sieur de Veyrac ( i . er bru
maire an 8 ) , il a fallu se résoudre h plaider avec la
v e u v e , pour ainsi dire, jour par jour.
Verbalisations sans fin à tous les actes et inventaires;
refus de délaisser le mobilier même des mineurs ; oppo
sitions sur oppositions h toutes les procédures et à toutes
les saisies-arrêts5 offres de payer tantôt les arrérages de
la renie de 10,000 fr. , tantôt le capital, puis révoca
tion de ses offres et désaveu : opposition à des jngemens passés en chose jugée , et appel de ceux qui la
déclaraient non-recevable : voilà en bref comment
s’est passé l’an 8.
I/an 9 fut employé h des discussions plus sérieuses,
mais moins rapides. Les mineurs avaienl pris des con
clusions générales pour le règlement de leurs droits j
la v e u v e , à la vérité , contesta tout > forma des de
mandes incidentes, mais sans concevoir même l’idée
de répéter les sommes énormes qui font le sujet de
sa demande actuelle.
�.
( 7 }
.
Cependant c’était alors le m om ent; car les mineurs
avaient conclu au paiement de toutes leurs reprises dans
tous les estocs de la famille de Veyrac.
Condamnée par défaut le 21 nivôse an 9 , la veuve
V eyrac forma opposition, et fut déboutée par jugement
du 14 germinal suivant; elle en interjeta appel.
L ’an 9 fut encore consacré à l’épisode de L am b ert,
qui ne dut pas préparer la cour à être très-favorable
à la veuve Veyrac.
L e jugement du 14 germinal an 9 fut confirmé par
la cour, le 28 pluviôse an 10 ; et la veuve V eyrac fut
condamnée aux dépens de la cause d’a p p e l, en son
nom personnel, et sans répétition, comme elle l ’avait
été déjà au P u y , pour les dépens de l’opposition. Elle
s’est pourvue en cassation, où elle a encore succombé.
Les points principaux du procès étaient jugés, ce
pendant il restait sept articles non éclaircis ; mais la
veuve V eyrac n’entendait pas se contenter d ’un aussi
petit nombre de difficultés ; aussitôt après son appel,
elle présenta requête au P u y , pour plaider en même
tems sur plusieurs nouvelles prétentions de sa part.
A v e c cette découverte inopinée, la veuve V eyrac a
trouvé le secret de prolonger la contestation pendant
près de sept ans; c’était là tout son but.
Car elle a eu la satisfaction de dire qu’avec tant de
j ugeniens et d’arrêts, les mineurs V eyrac ne sont pas
plus avancés en 1808 qu’en l’an 8.
�( 8 )
^
Ceci paraîtra sûrement une fable ; cependant rien
n’est plus réel> et voici par quel secret la veuve Veyrac
est parvenue à paralyser les arrêts de la cour.
•
En faisant donation de 10,000 fr. de rente à son
fils, M. de V eyrac père dit que dans La donation,
est comprise La substitution faite au profit du futur
par son aïeul,
' C'est là où la veuve V eyrac a pris son texte; elle
a dit aux mineurs V eyrac : « A y e z votre rente, j’y
« consens, puisqu’on m’y force ; mais dans votre renie
«
«•
«
«
est une substitution. D a n s cette substitution, se trouvent des dettes; et non-seulement ces dettes se com
posent des dots et légitimes que vous d e m a n d e z,
mais vous me devez vous-m êm e une foule d’arti^
* d e s , notamment la dot de votre bisaïeule, etc.»
C ’est dans ce raisonnement que le procès actuel a
pris sa source. Il est inutile de rappeler tous les chefs
de demandes décidés p arle jugement du P u y ; il suffit
de dire que les mineurs V eyrac s’en sont tenus de leur
part aux articles restés indécis en l’an 9.
Elle a formé six nouveaux chefs de demande qui
sont de prétendues dettes dé la substitution , et qui
sont au reste énumérées dans son mémoire (page 17).
L e tribunal du P u y a statué sur le tout, le 26 prai
rial an 12; il a pensé que les mineurs devaient avoir
leur rente franche et quitte, et en outre les succes
sions dont leur père ne s’était pas départi par son con
trat de mariage.
�.
(
9
}
A vant de suivre la veuve V eyrac dans ses demandes
et moyens, il faut d’abord savoir ce qui a été demandé
et jugé entre les parties avant ce procès, pour éviter
la confusion, et mettre la cour à portée de vérifier
tout d’ un coup ce qui a été jugé ou préjugé.
En Tan 9, les mineurs Veyrac demandèrent, i.° acte
de leur option de s’en tenir aux 10,000 fr. de rente ;
2.0
j oo fr. pour la moitié de la dot et reprises de la
38 5
3 5
dame Morges leur mère ; .° ,ooo fr. pour moitié de sou
mobilier ; 4.0 la moitié du mobilier délaissé par Jac
ques-Antoine de V e y ra c , bisaïeul; .° 22,000 fr. pour la
5
légitime de Jean-Hugues de V eyrac; 6.° l’exéculorialité du jugement du 27 thermidor an 7 , pour ladite
rente de 10,000 fr., paiement des arrérages et conti
nuation du paiement à ven ir; 7.0 le partage de la suc
cession deM arie-Anne Belut de Trinlinliac leur aïeule;
8.° la moitié des sommes reçues par Jean-Jacques
V e y ra c , pour les biens aventifs de la dame de Morges,
aïeule des mineurs; 9.0 la distraction définitive du m o
bilier de leur père; io.° i o fr. montant d’un billet
fait au tuteur pour vente d’un cheval ; n . ° la faculté
de prendre du bois à perpétuité , conformément au
contrat de mariage.
5
Loin de proposer aucuns moyens de compensation
conlre ces demandes, voici les conclusions que prit la
y^uve V e yra c, telles qu’elles sont consignées dans le
jugenQent définitif du 14 germinal an
A- ce qu’il lu i
3
�( IO )
fu t donne acte de ce que sur les articles i , 4 et 10, elle
s’ en rapportait à La prudence du tribunal, ainsi que
sur le paiement de la rente de 10,000 fr. et de ce quelle
consentait leur délivrer des à présent les titres en bonne
form e d ’ une créance de 2 ,000 fr . en capital} due par
la maison V o g u ié; sur le surplus des demandes à ce
que les mineurs en fussent déboutés, attendu qu’elles
n étaient pas établies.
5
E n expliquant ces conclusions, elle fit plaider sur
l’art. 2 des demandes, que si les mineurs établissaient,
par des quittances, que le défunt eût reçu 70,000 fr.
de la dame de Morges, elle ne ferait aucune difficulté
sur ce ch ef de demande; elle dit la même chose sur
l ’article .
3
Sur l’art.
5, elle objecta qu’on
11e justifiait ni le tes
tam ent, ni la consistance des droits de Jean-Hugues ,
et que d’ailleurs François - Camille de Veyrac avait
répudié à ladite succession.
Sur l’art. 6 , qu’elle ne contestait pas le paiement
de la rente de 10,000 fr. mais que les arrérages anté
rieurs à l’an 7 étaient surpayés.
1
Sur art. 7 , elle pretendit que la succession Trin tinhac était bien assurée pour moitié au père des
mineurs , par son contrat de m ariage, mais que ce
mot n’opérait pas une donation, sur-tout en D au phiné. Cet article fut au reste discuté par elle; en
point de droit, avec une extrême longueur.
�(II )
Sur l’art.-8 , elle dit qu’il fallait prouver que Jean
Jacques V eyrac avait donné des quittances.
Sur l’art. 9 , elle soutint que le père des mineurs
s’était emparé de la maison du P u y 5 et en avait dis
sipé la majeure partie.,
Sur l’art, i i , elle prétendit que la faculté de pren
dre du bois était personnelle au père des m ineurs, et
qu’il était ridicule de vouloir qu’elle s’étendît à sa
postérité.
¥
Voilà tout ce qui fut soumis aux premiers juges, et
par suite à la cour d’appel.
.
1
Les mineurs obtinrent la rente de 10,000 francs , a
faculté de prendre du bois, le partage des immeubles
Trintinhac, et une partie du mobilier. U n e preuve
fut ordonnée à l ’égard d’une autre partie dudit m o
bilier , et sur tout le surplus, il fut ordonné plus
ample contestation.
Comment donc la dame V eyrac , après des con
clusions et une plaidoirie aussi précises, a-t-elle pu
se démentir elle-même, au point de prétendre ensuite
. que la remise de la substitution mettait, sur le compte
de François - Camille de V e y r a c , toutes les dettes de
son ^aïeul?
Si cela eût été ainsi, comment donc la veuve V eyrac
a~t-elle consenti à subordonner le paiement de plu
sieurs deües à un simple rapport de quittances; c’était
■
4
�(
12
)
îë cas au contraire de soutenir qu’ elle ne devail rie n ,
et d’opposer des compensations.
Les demandes pendantes en l’an 9 présentaient le
cadre général de toutes les prétentions respectives; les
mineurs, qui n’avaient rien, étaient demandeurs, et
avaient réuni tous leurs chefs de demande. La tutrice
était défenderesse contr’eux, et demanderesse en par
tage conlre l’interdit ; elle avait aussi présenté à la
fois toutes ses prétentions.
Ses demandes ultérieures formées après Leju g em en t'
d é fin itif, où elle emploie quarante rôles à faire valoir
ses m oyens, sont donc des prétentions de mauvaise
f o i , et non-recevables?
Elle ne les présentait, disait-elle alors, que parce que
te jugem ent était exécutoire nonobstant Cappet. Elle
n'avait donc d’autre but que de paralyser des créances
Certaines par des prétentions imaginaires : et ce qu’elle
ne mettait en a v a n t. que comme une chicane a vo u é e,
elle le soutient aujourd’hui avec obstination.
Mais qu’est-il besoin de lins de non-recevoir contre
des demandes aussi déplorables? Suivons les moj^ens
de la veuve V e y r a c , et quelques réflexions suffiront
pour montrer qu’elle ne peut pas être de bonne foi
elle-même dans sa découverte.
La principale question à traiter n’est pas de savoir
si le contrat de mariage de 1787 contient La remise de
la substitution de l’aïeul, par Jean-Jacques V e y r a c , à
�( 13 ) _
.
son f i l s , mais si au contraire il ne contient pas la
remise de cette substitution par le f ils t au-profit du
père (i).
L a clause du contrat en effet ne laisse pas d’équi
voque, comme le dit fort bien la veuve de V eyra c
(page 39 de son mémoire),' «le sieur de V eyrac ne
«• donne 10,000 fr. de rente à son fils que pour s’ ac« quitter envers lui. Nemo liberalis, n isi Liberatus ».
Il est difficile d’être plus d’accord sur les principes,
et de l’être plutôt. Car les mineurs V eyrac adoptent
parfaitement celte première et fondamentale pensée
de leur adversaire.
Que résulle-t-il en effet de la clause du contrat, qui
ne peut pas s’interpréter de deux manières? C ’est que
Jean-Jacques de V e y r a c , grevé ou débiteur d’ une subs
t i t u t i o n , s’ e n est acquitté p a r le moyen du contrat.
C ’est là le contrat do ut des ; et comment conce
voir que celui que la veuve V eyrac dit acquitté par
le moyen d’une rente, qui est le prix de sa libération,
11’ait pas retenu pour son compte la chose même qu’il
payait de son argent?
Il faut encore ajouter, avec la veuve V e y r a c , que
sans cet arrangem ent, et si François-Camille V eyrac
n’avait pas eu droit à la substitution, son père ne lu i
aurait pas fa it une constitution aussi forte.
s
(0
T_.es motifs du jugement dont est appel, sur cette ques-
tl0" , sont au mémoire de la veuve V e y r a c , page a 2 , dernier
alinéa; \Q dispositif est page 3 z.
�(
*4
)
‘
.
L e p è r e a donc bien entendu s’ acquitter tout à la
fois des droits de son fils à,1a substitution, et de sa dette
paternelle pour l’établissement de ce fils ; c’est-à-dire,
qu’il a entendu payer ces deux objets.
;
Et de quelque terme qu’on se soit servi pour expri
mer cette intention, n’est-il pas de principe qu’elle se
détermine par la nature de l’acte, plutôt que par les
expressions dont on s’est servi. Potiùs id quod actum ,
quàrn quod dictum est.
'
I c i , ce qui a été convenu n’est obscur pour personne.
L e père s’est acquitté de la substitution en la payant
par une rente. L e fils y a consenti • et par conséquent
le père n ’a plus été grevé de cette substitution.
S’il n’en a plus été g r e v é , le fils a cessé d’y avoir
des droits; et dès-lors la mutation s’est opérée par cet
échange entre une rente et les droits dont il .donnait
quittance au père.
Si donc il y a dans cette convention res, consen
sus et pretium, comment s’obstiner à vouloir que celui
qui est devenu le propriétaire libre des biens substitués,
en ait cependant laissé toutes les charges à un autre?
Il serait inutile, d’après ces observations, de suivre
la discussion à laquelle s’est livrée la veuve V eyrac
pour prouver, par des lois romaines, qu’on peut faire
une restitution anticipée de fidéicommis, et que dès
cet instant les dettes de l’hérédité ont passé sur la tête
du propriétaire des biens substitues.
Certainement tout cela est incontestable; mais ou
en est l’application?
'
�( i5 )
Toute cette discussion est fondée sur un seul mot,
restitution anticipée des biens substitués; et ce mot est
de la pure invention de la veuve V e y r a c , car il n’est
pas au contrat de mariage.
A u contraire, il en résulte que le père a retenu pour
lui les biens substitués; et la veuve V eyrac en jouit.
Il suffit donc de lui rétorquer ses propres citations,
et de dire avec elle que les dettes et charges de l’h é
rédité sont à la charge de celui qui est devenu proprié
taire des biens substitués.
Jean-Jacques V eyra c fut libéré de la condition de
rendre; dès-lors les biens substitués ne sont restés dans
ses mains que deducto œre alieno.
C ’est une idée bien étrange que celle de la veuve
V eyrac : lorsqu’elle ne peut plus résister à payer la
r e n te , elle veu t la couvrir par des dettes. Elle prétend
que le donateur de la rente a sous-entendu que le
donataire resterait son débiteur d’une somme inconnue,
et que la chose donnée en resterait grevée. Conception
véritablement sans exemple.
■
Et si les dettes des biens substitués se fussent portées
à 240,000 fr., il en résulterait que le s.r de V eyrac aurait
donné la somme de 240,000 fr., sur laquelle il aurait
retenu 240,000 fr. ; c’est-à-dire, qu’il aurait donné zéro.
Si la veuve V eyra c avait transcrit (pag. 39) la fin
de l ’article 2 du contrat de mariage, cette fin aurait
évité le sens forcé qu'elle y donne. Comme aussi le
fu tu r ne pourra rechercher Ledit seigneur son père pour
�C 16 )
C inventaire de son oncle : cela suppose nécessairement
que si quelque chose est sous-entendu, c’est la répétition
de la même convention pour ce qui précède ; c’està-dire, q u il ne pourra rechercher son pere pour les
biens de la substitution.
L a veuve V eyrac a bien copié cet article 2, en la
page 5 ; mais les mots comme aussi y ont été négligés ;
cependant ils expliquent toute r i n t e n t i o n , et ils ôtent
absolument l’équivoque qu’elle a voulu faire naître
d’une remise anticipée de la substitution.
Il y aurait encore bien des choses à dire pour for
tifier cette démonstration \ mais ce ne serait que ré
péter ce qu’ont dit les mineurs, dans leur mémoire
publié en première instance (pag. 18 et suivantes), et
ce qu’a dit le curateur de l’interdit, en son mémoire
3
(pag. i ); il suffit d’y renvoyer. L a cour y appercevra
un fait très-important, c’est que la succession du substi
tuant a été évaluée à 867,499 livres ; ce qui faisait
pour la substitution 433,749 liv. 10 sous, que le père
des mineurs a abandonnés pour une rente de 10,000 fr.
Il pouvait aussi demander les fruits faute de publica
tion ; de sorte que son père ne lui donna pas même le
produit net de ce qu’il lui devait.
La veuve Veyrac criait ¿1 la collusion contre le cura- 1
leur de l’interdit , parce qu’il ne voulait pas être de
moitié dans s e s paradoxes. Mais le curateur lui répondit
qu’avant de plaider comme elle au hasard, il avait
consulté trois anciens jurisconsultes de Toulouse (mes
sieurs
�( 17 )
/■
.
sieurs G a r y , Lespinasse et L aviguerie), qu ils avaient
décidé en faveur des mineurs , et que cela faisait loi
pour lui, parce qu e, en le nommant curateur, on lui
avait recommandé d'être circonspect , et de ne pas
élever de difficultés déplacées. (Cette recommandalion
avait été faite aussi à la veuve V e y ra c , en la condam
nant trois fois aux dépens en son nom 5 mais elle n’en
a pas été corrigée.)
Les premiers juges ont donc déclaré qu’il ne résul
tait de la donation de 10,000 fr. de rente, aucune
charge de payer les dettes de la substitution au dona
teur. En conséquence , ils ont mis hors de cour la
veuve V eyrac sur tous ses chefs de demande, qui ne
prenaient leur source que dans ladite prétention.
Ainsi les mineurs V eyrac ne s’occuperont plus de
ces chefs de d em a n d e , que la veuve Veyrac a ren
voyés à la fin de son mémoire (pag. y ) 7 et qu’elle
5
ne fonde sur aucun moyen.
\
La première conséquence que tire la veuve V eyrac
de la démonstration q u ’elle croit avoir faite de la
remise de substitution , est de dire (pag. 46) que toutes
les demandes relatives à la restitution de la dot de la
dame de Morges (première femme de Jean-Jacques
V e y ra c ), s’écroulent, d’elles-mêmes.
Ceci était en effet très-conséquent. Mais la veuve
Veyrac avait, oublié que, lors du jugement de Tan 9 ,
e^e avait soumis ces chefs au rapport des quittances.
-
5
�( i8 j
: Aujourd’hui'ces quittances sont rapportées ; donc les
mineurs ont droit de réclamer cette dot, parce que
leur père ne s’est pas départi de la succession de sa
mère.
Il importe peu que les quittances aient été données
par Jean -Jacques V eyrac ou par son p è re , puisque
c ’est là une succession dont aucune l o i , ni aucune
convention ne prive les mineurs. Mais si cela impor
tait, il faudrait rectifier la citation que fait la veuve *
V eyrac : Pater pertes quetn est adm inistrado prœsumitur totum récépissé. Dumoulin dit : V ir penès
quem , etc. A la vérité, il ajoute une comparaison re
lative au père qui s’oblige avec le fils, c’est-à-dire, le
fils sous La puissance paternelle, comme la femme sous
la puissance maritale; et ce qui le p ro u v e , c ’est que
Dumoulin ajoute qu’il parle des femmes dont les biens
sont dotaaoc, et q u’il en serait autrem ent si elles étaient
communes.
Après avoir contesté la dot de la dame de M orges,
la veuve V eyrac dispútele trousseau (pag. 47 ) , parce
q u e , d it - e ll e , le mari l ’a gagné par sa survie, à la
charge des funérailles, ce qui est, si on l’en croit, une
une règle de droit commun.
L a veuve Veyrac ne se serait-elle point accom
modée en cela de la coutume d’Auvergne? Mais cette
coutume est étrangère à la cause : c’est le droit ro
main qui régit les parties; et il ne donne pas le trous-
�19
(
)
v
seau au mari. L a novelle 1 1 7 exprime les cas ou un
mari a quelque chose à espérer sur la succession de
sa femme ; mais il n’y est question ni de trousseau, ni
d’enterrement.
L a veu ve V eyra c combat le gain de survie de 7,000 f.
stipulé au profit de ladite dame de Morges. Ici c’est
dans une loi romaine qu’elle puise le principe que les
donations entre époux, quoique faites entre-vifs, sont
révocables, et qu’il faut la survie de 1 époux.
Cela est très-vrai pour les donations faites pendant
le mariage, constante matrimonio j mais quand il s’agit
d’ un don fait par le contrat de mariage l u i - m ê m e ,
tout est perpétuel et irrévocable , sur-tout quand on
en est ainsi convenu.
O r , le contrat de m ariage porte que le sieur de
V e y ra c donne à la dame de Morges la somme de
7,000 f r ., qui Lui appartiendra, et dont elle pourra d is
poser à sa volonté,
qu ’e l l e
s u r v iv e
ou p r é d é c è d e
,
qu’ il y ait des enfans ou non.
'
L à le m otif de prohibition des lois contre les dona
tions"^ conjugales n’existe plus, rie mutuo amore sese
invicem spolientur. D ’ailleurs, ce qu’a voulu une loi
générale cède à une convention sous la foi de laquelle
un mariage a été contracté, legem contractus d ix it.
1
/
Nous ne suivrons pas la veuve V eyrac dans sa dis
cussion sur divers articles des biens aventifs de la dame
f
6
�( 20 )
.
'
de Morges (pag. 49 et o)- les premiers juges s’en sont
retenu la connaissance ( pag.
).
. Elle adopte le legs de 10,000 fr. fait à la dame de
5
35
Morges , et offre de payer sous déduction d’un neu
vième. C ’est précisément ce qu’ont décidé les premiers
juges (pag. 3 4 ).
.
Quant au ch ef relatif à la légitime du chevalier de Veyrac, l ’adversaire la contesté par deux moyens; i.° parce
que c’est une delte de la substitution ; 2.° parce qu’il est
à présumer qu’elle a été payée,, et qiCelle croit être
certaine que la quittance est dans les papiers de la suc
cession. ’
D éjà il a été prouvé que ce premier moyen était
un songe, et le second est de la même nature.
C a r ia veuve Veyrac n ’a pas encore, donné assez de
gages de sa véracité, pour qu’on doive la croire sur pa
role dans ses simples présomptions. N ’a - t - e l l e pas eu
assez de neuf ans pour chercher dans les papiers de la
succession ?
•
'
Il s’agit d’une légitime due et non prescrite : il n'y
avait donc de griefs à proposer qu’avec une quittance?
C'est bien assez que les premiers juges n’aient pas
adjugé les 6,000 fr. demandés de plus. Mais si la veuve
a osé nier l'écriture du défunt, l ’interlocutoire qu’elle
a rendu nécessaire ne lui aura valu, que le plaisir de
plaider un peu plus long-tems, sans lui épargner une
condamnation.
�( 21 )
Faut-il la remercier de ce qu’ elle ne dispute pas
53
la condamnation de 75 fr. (page
); il semble qu elle
se fait violence en ne contestant pas cet objet ; mais
il est constaté par un billet du défunt.
L a veuve Veyrac se plaint d’être condamnée aux
intérêts des intérêts (page
) ; et elle prétend que
c’est un anatocisme, à la vérité adopté par le Code civil ,
54
mais qui en cela établit un droit nouveau.
,
C’est au contraire un bien vieux principe en F ra n c e ,
l
t
que les intérêts qui courent, ex natura rei, peuvent en
produire eux-m êm es, du jour de la demande : et pré
cisément les dots et les légitimes sont de ce nombre.
En cela les intérêts qui courent sans demande, ne
sont , à proprement parler , que Les fru its dus à la
fem m e et au légitimaire, du jour de l’ouverture de leurs
droits; et il n’y a pas d’anatocisme à ce que des fruits
produisent des intérêts.
'
Ce n’est point assez à la veu ve V eyrac de gloser
contre le jugement dans ce qu’il d it, il faut encore
qu’elle le blâme dans ce qu’il ne dit pas. » Les prê
te miers juges, d it-e lle (page
), ont bien imaginé
« de condamner la veuve Ginoux solidairement et
«■hypothécairement. Entre cohéritiers, il n’y a pas
55
. ff d’action solidaire ; mais on a pris à tâche de l’accacc hier par les condamnations les plus injustes».
/ *»
v
lamentation aurait dû être réservée pour un
�(
22
)
cas plus réel. Car précisément les premiers juges n’ont
pas condamné la veuve V e yra c solidairement.
Ils l’ont condamnée pour m oitié, et hypothécairement pour le tout. Cela est ainsi répété trois fois dans
le ju g e m e n t, c’e s t - à - d i r e , à chaque condamnation
(pages
,
et 37).
34 36
Cette disposition n’est-elle pas conforme aux anciens
principes, et à l’art. 873 du Code civil? la veuve Veyrac
a moitié dans la succession; donc elle doit supporter
les dettes personnellement pour sa part et portion , et
hypothécairement pour le tout.
L a veuve V eyra c n’a point encore assez d’un adver
saire, et elle rompt encore une lance contre l ’interdit,
parce qu’il a obtenu une condamnation d’intérêts de
puis le 28 août 1792.
Mais la veuve V eyrac, qui le met en qualité dans son
m ém oire, com m e intim é, n ’a point interjeté appel
contre lui. Sans doute elle l’avait oublié, ou elle s’en
repent ; et pour se consoler, elle crie dans le désert.
Théodore
de
VEYRAC.
M. e D E L A P C H I E R , ancien A vocat.
M. e G A R R O N , L icen cié-a voué.
A R I O M , D E L ’IM P . D U P A L A I S , C H E Z J.-C. S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Veyrac, Théodore de. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Garron
Subject
The topic of the resource
successions
rentes
contrats de mariage
substitution
droit romain
anatocisme
Description
An account of the resource
Précis en réponse, pour Théodore et Jules de Veyrac, intimés ; contre Marie Ginoux, veuve de Jean-Jacques de Veyrac, appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
Circa 1785-Circa An 12
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0401
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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anatocisme
contrats de mariage
droit Romain
rentes
substitution
Successions
-
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M ÉM OIR E
-
EN R É P O N S E ,
sieur J e a n - J a c q u e s , - M a r i e R O C H E F O R T -
Pour
D A L L Y , habitant à Ar tonne, intimé ;
C on tre
sieur C l a u d e B E L A V O I N E , du lieu d’E c o le ,
mairie de B r o u t
appelant;
E n présence du sieur D E C O M B E , des Morelles ,
, ■
maire de B rou t, a u ssi intimé.
‘j :
Le sieur Belavoine a jeté un dévolu sur un b ois de
trois cents septérées, dépendant de la terre de L a ffon t.
Toutes
les années de la révolution ont été employées
à préparer celle conquête ; mais le hasard a voulu que
le sacrifice ne fût pas consommé, au moment où il a été
permis de ne plus rien céder à l’épouvante. Cependant
le sieur Belavoine n’en a pas moins cru le propriétaire
i
�( o
do L a f o n t , dans l ’impuissance absolue de se défendre.
To u s les titres de celte terre avaient été brûlés avec
scrupulej et le sieur B e la v o i n e , qui n’a pas brûlé les
siens, produit aujourd’hui une ou deux, pièces équi
voques , sur lesquelles il fonde le principal espoir d e
son usurpation.
Mais un titre essentiel s'est retrouv é, el cette appa
rition inattendue a fait un effet extraordinaire sur la
sieur BelîSBine ; sentant bien q u ’il lui faudrait des
titres contraires , et ne sachant où en p r e n d r e , il a
fait des querelles à tous ceux qui ne lui en fournis
saient pas. Il est venu aux pieds de la cour erier à la
collusion et à l ’injustice ; il a promené un notaire de
B i o m à. Brout, et de Brout à E c o l e , pour verbaliser,
instrumenter, pour fouiller toutes les paperasses par
lui indiquées , e t , au d em eu r an t, ne procurer aucun
résultat de tout cet a p p a r e i l , co m m e il Favait bien
prévu. En fin , le dénouement de cette comédie a été
plus sérieux 5 le sieur Belavoine a dénoncé à la cour
le maire de Brout co m m e prévaricateur, pour ne pas
lui avoir fourni des titres quelconques, et pour ne
pas avoir voulu plaider dans le m êm e sens que lui.
En. so m m e, que veut le sieur B e la v o i n e ? un bois
qu’il prétend être la propriété des habitans de Brout.
A-l-il un titre? aucun. Mais il combat celui du sieur
de R o c l ie f o r t , en disant que la propriété du bois ne
lui était reconnue qu’à cause de sa terre et ju s tic e de
L a fo n t ; et il croit avoir lu dan« les lois féodales de
la révolutio n, que les bois dépendans des terres seir
gneuriales ont été concédés aux communes..
�(
3
)
C e principe barbare ne se trouve nulle aut re part
- que dans l'imagination du sieur Belavoine ; et toute
la défense du sieur de Rocliefort consistera à dém on
trer que son litre lui suffit, tant q u’on ne lui opposera
pas des titres de propriété contraires.
'Si cette affaire exige d ’autres développemens , ce
"ne sera que pour redresser un peu la narration du
-sieur Belavoine , en ajoutant quelques explications à
*ce q u ’il a cru 'de son intérêt de dire trop b riè v e
m e n t ou de passer sous silence.
t
FA IT S.
- L a terre de L a fon t-d e-S t.- M ageran t, située en la
co m m u n e de Brout, fut vendu e le 21 juillet i 58 a ,
au siéur Alexandre de Caponi , l’un des ancêtres du
sieur ‘de 'Rochefort.
La
com m un e
de Brout était divisée
en
quatre
parties ou collectes, dont trois dépendaient de la terre
de Lafont ; la quatrième ([Ecole) dépendait de M. le
duc d’ Orléans.
( L e seigneur de L a f o n t avait beaucoup de bois taillis;
les un s, plus rapprochés-de son habitation, ne pouvaient
convenir q u ’à lui se ul, et il était naturel q ü ’il n ’y
souffrit l'introduction
d ’aucun pacage. L e bois des.
Brosses , 'le plus considérable de t o u s , était sur les
limites de la terre.
' C o m m e il était d’usage général, dans les tems reculés,
de faciliter aux censitaires l’éducation de leurs bestiaux,
�U
)
pour la culture de leurs héritages, le seigneur de L a f on t
avait toujours permis aux liabitans des collectes dépen
dantes de sa ju sti ce , de venir pacager.
E n indemnité de cette concession, le seigneur était
en usage de percevoir un droit de blairie , à raison
d’une coupe de blé seigle, pour chaque paire de bœufs.
Plusieurs titres des i 6 . e et 17.®siècles le réglaient ainsi;
ce n ’étaient pas seulement des terriers, mais des sen
tences et des transactions, q ui, à la vér ité, ont été la
proie des flammes , mais qui se trouvent mentionnés
a vec détails, dans une dernière transaction du 22
février i y 55 .
C elte transaction fut passée entre dame Gabrielle
de C a p o n i , et le sieur Marien Maréchal , son mari
seigneurs de L a f o n t , d’ une p a r t , et Jean Belavoine
( père de celui qui plaide aujourd’hui ) , faisant tant
pour lui , que pour Bornât , R o y et T o u z a i n , ses
métayers, An d ré Bonamour, François Bonamour,autre
François Bon am our pour lui et pour Gabriel son frère,
Gilbert Bourdier et Jacques R o u gie r , ious liabitans des
divers villages de la paroisse de B r o u t , (1) d ’autre part.
On y expose q u’il y* avait eu procès avec le père
dudit B elavo in e, depuis 1 7 2 8 , pour le droit de blairie,
et q u’il 11’y avait été condamné que pour un seul
d om aine, par sentence de 1 7 2 4 , dont il y avait eu
a p p e l ; q u ’il y avait eu une autre sentence en 1 7 4 ° .>
( 1 ) Tous voisins du bois des Brosses , et n’ayant intérêt
à traiter que pour pacager dans celui-là.
�_ ( 5 )
Contre les autres individus qui avaient été condamnés
contradictoirement, et qui avaient interjeté appel au
parlement : lequel appel avait resté indécis par la négli
gence du tuteur de la dame de Caponi.
C ’est en cet état que lesdits habitans, ayan t appris
que ladite dame avait fait la recherche de ses titres et
allait poursuivant le procès, demandèrent à prendre
connaissance desdits titres, pour transiger, si le droit
était fondé.
v .rllors l’acte constate que les sieur et dame Maréchal
communiquèrent auxdits liabitans et à leurs conseils;
i.° trois litres de i 5 i o , i 53 o, i 5 yo et 1648 5 2.0 un
échange de la terre fait en 1 5 7 2 , entre le sieur de
Beaucaire et Jeau de B a y a r d j 3 .° le conlrat de vente
de la m ê m e terre
consenti au sieur Alexandr e de
C a p o n i , le 21 juillet i 5 8 2 ; 4.0 trois ave ux et dénom breniens de 1 6 0 9 , 1664 et 172 6 ; 5 .° une sentence
du 20 mars
i
6 3 i , qui condamne tous les habituas de
. la lerre , du nombre desquels était François V i a r d , à
p aye r le droit de blairie audit sieur de Caponi ■6.° une
transaction passée entre ledit François Viard et le sieur
Gilbert de C a p o n i, portant reconaissance du droit de
blairie par ledit V i a r d , pour le droit de pacage de ses
métayers et locataires ; 7.0 un reçu affirmé du i . cr sep
tembre 1 6 7 0 , par D u m o u l i n , f erm ie r , qui déclare
avoir reçu le droit de blairie et pacage de tous les j u s t i
ciables ayant bestiaux ,* 8.° quatre sentences rendues
en 1 7 1 7 ? et nombre infini d’autres sentences, qui con
damnent les justiciables au droit de blairie, sans appel
n i opposition*
�m
E t après avoir v a ces l i t r e s , l ’acte porte que Iesdiis
Belavoine et autres les jugeant suffisans, et ne pouvant
opposer la prescription à cause des minorités arrivées
dans la famille C a p o n i , et prévoyant bien que quand
ils gagneraient leur procès, ils se trouveraient privés,
c o m m e les forains et amendables, s'ils n ’étaient afTorestés, du droit de pacager dans un téne ment de bois,
dont la propriété appartient à ladite d a m e , vulgai
rem en t appelé le bois des B rosses, qui se coniine, elc.
dans lequel bois des Brosses lesclits seigneurs de L a fo n t
:ont ¡de tout tems laissé pacager les bestiaux de leurs
justiciables, à cause de la perception faite par “lesdits
seigneurs‘ dudit idroit de blairie.
A prè s ces préliminaires , l ’acte porte que lesdits
•Belavoine et autres liabitans ont'ofiert de payer doré
navant ledit droit de b l a ir i e , mais q u ’ils ont supplié
les sieur et dame Maréchal de leur faire remise de tous
les fra is. En co n s é q u e n c e , les-parties traitent et tran
sigent par transaction sur pr oc ès , ainsi q u ’il suit:
«• Savoir est que lesdils justiciables comparans, tant
«■p o u n e u x que pour leurs successeurs à venir, se sont
a volontairement et u n a n i m e m e n t , chacun en droit
« soi, soumis et obligés de p a y e r , servir et porter, îï
<r chacun jour de saint Ju lien , au mois d ’a o û t , audit
« château et baronnie de L a f o n l , l e susdit droit de
« blairie sur le pied ci-dessus fixé d ’une-coupe de'blé
« soigle, mesure Saint-Pourcain, par chaque paire de
a bœufs ou vaches lubourant, et deux sols six deniers
« pur chaque maison.de journaliers ou locataires tenant
�(7 )
« fea et besliaux non la b oura nt, dans l ’étendue de
«• ladite justice; et ce , pour tenir lieu de la fa c u lté de
«. pacage, ci-devant expliquée : le tout ainsi accepté par
a ladite dame sous l ’autorité dudit seigneur son mari;
<r Lesquels seigneur et d a m e , en conséquence, ont con«. tinué d'accorder a u x d its Justiciables comparons ,
« pour e u x et les le u r s, ledit droit et fa c u lté de p a «. cager dans son su sd it bois des B rosses, ci-devant
« confiné, à la charge néanmoins par lesdits justi
ce ciables de se conform er à l ’ordonnance des eaux et
«. f o r ê t s , et sans pouvoir par lesdits justiciables faire'
« pacager leurs dits besliaux dans les autres bois, plants,
« terres, hernies et vacans, vu que lesdits judiciables
« n ’y ont aucuns droits ni d'usage généralement quel« conque appartenans et dépendans de ladite baronnie,
<
*■¡tout lequel surplus de bois, de quelque* espèce que
«■ce. pu isse, places et terres, hermes et vacans dé
te.meurent expressément réservés à ladite dame pour
« jouir et disposer co mme elle avisera ; et quoique
« ledit étang_de ris se trouve placé dans ledit ié ne m en t
» des Brosses, et en faire partie, ne pourront lesdits justiciables comparans y retenir leurs bestiaux de garde
« f a i t e , tel qu’il fut décidé par la susdite transac tion
k
« du i l septembre i 6 8 3 , et ainsi q u’il a toujours été
d ’ usage , et par -condescendance de la part desdits;
« seigneur et dame comparans , pour leurs sujets et
« justiciables comparans, ils leur ont accordé : Que lors« que ledit bois se trouvera en état de coupe, pour la
«• facilité desdits justiciables, el pour leur procurer .une
�(8 )
« continuité de liberté de pacage dans ledit bois, lesdils
« seigneur et dame leurs successeurs et a y a n t- c a u s e
« ne pourront en faire exploiter que la moitié à la
« fois au plus, et la coupe con li gu ë, de façon q u’en
« tout tems il ne puisse y avoir que la moitié desdits
«• bois en défense , et l ’autre moitié libre pour le pa
ir ca ge , et m ê m e veulent rien encore, qu’ après l ’exploi« tation de la première moitié, ne puisse être coupé
« et exploité que cinq ans après l’exploitation de
«r ladite première m o i l i é , pour être ainsi observé à
« jamais successivement à chaque ouverture de coupe
« desdits bois, ce qui aura lieu dès la présente année;
« que Lesdits seigneur et dame feront diviser lesdits
« bois en d e u x parties, pour demeurer La m oitié d'¿ceux
« en défense pendant cinq a n s , quoiqu’ils n’en fissent
a pas faire l ’exploitation; et l ’autre moitié demeurera
« libre pendant ledit tems, pour être ensuite en défense
r- pendant les cinq ans qui suivront ladite première dé'« fense, et ainsi successivement, co m m e dessus; font
« remise des frais q u’ils étaient en droit de répéter
« contr’eux ; se sont lesdits seigneur et dame compa<r rans réservé de poursuivre , faire reconnaître ou
« amender tous autres leurs justiciables absens et non
« comparans pour raison dudit droit de blairie, et dé« laissent le sieur Larbaud , ci-devant fermier de ladite
« baronnie,
se faire paye r des arrérages dudit droit
« de blairie co mme il avisera b on; et au m oye n de tout
« ce que dessus les parties demeurent hors de cour et
« de procès sans dépens. Fait cl passé, etc.«
Le
�(9 )
L e 6 mai 1 7 5 5 , six autres individus se préservèrent
pour adhérer a ladite transaction.
L e 20 décembre 1 7 5 7 , elle fui encore approuvée et
rendue com m un e à six habitons.
- L e 9 janvier 1 7 5 9 , il y eut encore acte de ratifica
tion par quatre autres habilans.
-Ces transactions terminèrent toutes les difficultés, et
furent pleinement e x é c u t é e s ; s’il y eut quelques vols
commis par des individus autres que ceux qui avaient
traité, ils furent réprimés par des procès-verbaux des
gardes.
- E n 1 7 7 9 , la maîtrise de Monmarault fit une dé
m a r c h e ' q u i , à supposer qu’elle ne fût pas provoquée
par le sieur Belavo in e, éveilla au moins son attention,
et lui donna l’idée de la tourner entièrement à son
profit.
L e 14 avril 1 7 7 9 , le procureur du roi de cette m aî
trise donna un réquisitoire portant qu'il avait été in
formé de beaucoup d ’abus et désordres qui avaient lieu
dans les bois de plusieurs com m unauté s, notamme nt
celles de B r o u t, Saint-Pont et T o r i g e ; que la collecte
de Brout, située en la justice de L a f o n t , était en pos
session de deux bois appelés Bois-Dieu et S e r v o i r o n ,
à l ’égard desquels aucunes règles n’étaient établies,
ni aucunes dispositions de l’ordonnance de 1 769 suivies;
que ces b o i s ‘ étaient exposés au pillage des habilans,
qui exploitaient en tout tems de l’année sans demander
aucune délivrance ni laisser aucun canton en réserve.
E n c o n s é q u e n c e , il demanda permission d ’assigner
3
�( 10 )
B o n a m o u r , sy nd ic, pou r procéder à ¡’arpentage et
bornage des bois, prés et c o m m u n a u x , pour en êlre
mis un quart en réser ve , et jusque là être défendu de
couper.
L e m êm e jour intervint une ordonnance du lieute
nant particulier qui permit d’assigner, et fit des dé
fenses aux liabitans de Brout de faire aucune coupe.
A v a n t que cette requête fût signifiée, il paraît que
le sieur Belavoine fit faire une assemblée d ’habitans,
le vingt-trois mai 1 7 7 9 , par laquelle il fut délibéré
qu’on le nommait sy nd ic, et qu’ il serait chargé de d e
mander le partage du bois des Brosses et du bois Servoiron. En eflèt , il paraît que , sous le nom desdits
liabitans, il fui présenté requête en la maîtrise de M onmarault pour demander ce partage.
Cela fut fait avec plus de précipitation que les dili
gences mêmes du procureur du roi j car ce n’est que le
dix juin 1780 qu'il donna assignation à Belavoine >
syndic, aux fins de sa requê te, et pour être condamné en
une amende de mille francs , résiliante des malversa
tions qui avaient été commises dans les bois ci-dessus.
Jusque là tout se passait à l’insçu du propriétaire de
ces bois. Mais si on en croit le sieur Belavoi ne, et des
copies d ’actes q u ’il a fait extraire, il paraîtrait que le
sieur M a r é c h a l , simple usufruitier de la terre de L a
font , com m e tuteur Légal de son fils, demanda, en la
m êm e maîtrise, le triage de trois cantons de bois énon
cés en sa requête.
L e g r a n d - m a î t r e des eaux et forêts donna, le .25
�(
):
juillet 1780 , un mandement porlant qu'il serait dressé
procès-verbal de l’état des lieux, et q u ’il serait fait rap
port des litres en vertu desquels les liabitans prélendciient des droits sur lesdits bois.
■
Ce
procès-verbal fut dressé par le lieulenant de M on -
m a r a u l t , l e 20 septembre 1780. Il vérifia, i . ° q u e S e r voiron était composé de quarante a r p e n s , et que tout
le bois était détruit; 2 ° que le Bois-Blanc était composé
de quinze arpens, et que le bois en était de m ê m e dé
truit ; 3 .° que les Brosses était composé de trois cents
arpens ; que la superficie en était bien couverte de
ch ênes, dont la moitié était en bon éla te t l’autre moitié
dévaslée , parce qu étant p lus à 'la proxim ité des d o
maines , elle était p lus exposée au pillage des d élin
quants et a u x bestiaux.
Il ne paraît pas q u e , lors de ce procès-verbal, Belav o in e , synd ic, se fut mis en devoir de rapporter au
cune espèce de titres réclamés par le mandement du
grand-maître.
L e 20 janvier 1 7 8 1 , le procureur' du roi donna assi
gnation au sieur Marien M a r é c h a l , et au syndic des
liabitans de Brout , à comparoir, le 2 mars su iv a nt,
afin de rapporler leurs litres pour en être dressé procèsverbal, ainsi que des dires des parties.
Dans cet intervalle, G il b e rl-H e n ii Maréchal devint
majeur de c o u t u m e , et eut pour curateur le sieur Gil
b e r t -Françoi s
de Caponi son oncle. Il comparut au
procès-verbal du 2 mars : il produisit les titres q u ’il
avait dans cet instant en sa possession ; et ce procès-
4
�C 12 )
ve r b a d u 2 mars 1 7 8 1 , que le sieur Belavoine a produit,
comme lui étant avanta ge ux , et dont le sieur de R o cliefort rapportera les expressions textuelles, va prouver
deux choses bien essentielles : la première, c'est que
le sieur M aré ch al fils , seule partie capable de prendre
des conclusions pour la terre de La font , y réclame
expressément la propriété exclusive des bois co nten
t i e u x , et ne dit pas un mot du tirage ; la seconde., c ’est
que le sieur B e la v o i n e , qui fait aujourd’hui une que
relle au maire de Brout , en ce qu’il ne rapporte pas
des litres de propriété relatifs au bois des Brosses, n’eu
produisit lùi-mêm'eaucun, lorsqu’il était assigné, co m m e
s y n d ic , pour en produire.
On voit dans ce procès-verbal du 2 mars 1 7 8 1 , qu e
M . Palrocle Camus , procureur du sieur Maréchal fils,
produisit plusieurs titres, sentences et b a u x à c e n s ,
dans le terroir m êm e du bois des Brosses : « de tous
«• lesquels titres produits et rapportés par ledit seigneur
« de L a f o n t , ledit M. C a m u s ,s o n procureur, a re m on
te tré pour l ui, qu'il résultait que la propriété foncière
« du bois des Brosses et B o i s - B l a n c a de tout tems
«r appartenu audit seigneur de L a f o n t - S t . - M a g e r a n d ,
« co m m e faisant partie de ladite terre, et aux droits
« inséparables de sa justice, et que les habilans domi« ciliés dans [l’étendue de la justice de ladite baron« nie de L afon t n ’y ont jamais eu d ’autres droits q u e
« la faculté de la vaine pâture pour leurs bestiaux,
« q u e leur ont accordés leur-seigneur, ainsi que dans
.« les autres places, terres, hernies ou vacans, situés
�C 1 3' )
«• dans la circonscription de la m ê m e juslice.........
Qu&
« q u a n d les seigneurs leur ont accordé cette même
«■f a c u l t é , de laquelle ils jo u isse n t encore , ils n ’ ont
« point, entendu donner atteinte à leurs droits de pro
ie priété particulière ; q u ’ils se sont au contraire touce jours conservés, ainsi que le démontrent les actes
« ci-dessus p r o d u i t s ...... Que quand les justiciables se
« sont aidés du pâturage des susdits bois, ce n ’a été
«■
’ que par le droit de pure f a c u l t é , et non par dr oi t
« de servitude ou foncier , d’où il ne peut résulter
r aucun droit réel en leur faveur.......... Q l i e > sans ces
« concessions, lesdits habitans ne pouvaient envo ye r
« pâturer leurs besliaux dans les bois et autres places,.
«• te rr es , hermes et vacan s, sans s’y exposer à une
« amende envers le seigneur propriétaire du fonds
«- desdils b o is , places, terres, hermes et vacans.........#
cc Qu e le seigneur de Lafont a l u i - m ê m e un étang
« provenant du bois des Brosses ; cet étang étant dans
« ledit b o is , et c e , de tant d’a n c i e n n e té , q u’il n’est
« mémoire du contraire.......... Si les seigneurs de L afon t
« avaient entendu concéder à leurs justiciables un droit
« de propriété exclusif sur le bois des Brosses et autres,.
« dans lesquels ils avaient bien voulu leur continuer
« seulement la faculté de la vaine pâture, auraient-ils
« pris, et auraient-ils eu le droit de
fa ir e
des conces-
«■
’ s ions de partie d u d it bois des B rosses, à cens et
«-censives emportant toute directe et seigneurie; s’ils,
« n’en avaient pas été les seuls propriétaires, leurs
« justiciables n’auraienl-ils pas formé opposition à ces,
�( I4 )
« concessions, ainsi q u ’à rétablissement dudit étang... ?
« Q u ’aiasi les seigneurs de Lafont n’ont jamais entendu
« accorder à leurs justiciables aucun droit de propriété
« dans lesdils b o i s , ni partager le droit de propriété
«r a vec e u x ........ Que la transaction de 1 7 5 5 a ach ev é
« de convaincre de la propriété exclusive des seigneurs
<r de L afon t sur le bois des Brosses et autres..... . Que
« les justiciables ne prélendaient pas alors que lesdils
« bois des Brosses fussent c o m m u n a u x , q u ’aulrement
« ils n’auraienl pas manqué de se conformer à l ’or«• donnance ; qu ’ils n ’auraienl pas m anqué non plus
et d ’en fournir la déclaration au roi, et q u ’ils seraient
ce
imposés au rôle des vingtièmes, pour raison des pro-
cc
duils et revenus desdits bois.... Q u ’ils n’avaient eu jus
te
q u ’à présent d ’autreambition que de se maintenir dans
te la faculté de la vaine p ât u re, et que ce lle intention de
leurpart est pleinement manifestée dans la transaction
te de 1 7 5 5 , où ils bornent m êm e leurs prétentions au
te seul droit de pacager dans le bois des Brosses».
Ce procès-verbal annonçait au sieur Belavoine que
le sieur Maréchal était disposé à défendre sa propriété,,
et à avoir les. y e u x ouverts pour se garantir de toute
usurpation; aussi ne p a r a î t - i l aucune pièce posté
rieure à 1 7 8 1 , et les choses restèrent co m m e elles
étaient auparavant.
'
S’il y eut des dégâts, il y eut des procès-verbaux de
gardes, autant du moins q u ’il était possible de s’appercevoir de ces dégâts qui étaient si faciles à des métayers
voisins d ’ un grand bois, et fort éloignés de toute sur-
�( 15)
veillance; mais il est ridicule de d ir e , c o m m e le sieur
B e la v o in e, que les habilans de Brout continuèrent de
jouir du bois des Brosses.
Ici le sieur Belavoine p lac e, e x abrupto, un procès
auc onse il du ro i, sans dire comment la maîtrise, inc om
pétente à la v é r i t é , mais saisie, aurait cessé d ’être
le juge des parties. Il croit m ê m e qu’il y a eu arrêt du
c o n s e i l , et, c o m m e on s’y attend b i e n , que cet arrêt
condamnait entièrement le sieur Maréchal : ce conle
n ’a pas m êm e le mérite de la vraisemblance.
On lui a assuré dans les te m s , d i t - i l , q u ’il y avait
eu arrêt au profit des habitansde Brout; puis il ajoute
q u ’on demandait une somme très-considérable pour
le lever. Il semble d’abord que le sieur Belavoine a
simplement ouï dire ce q u’il a v e n t u r e , puis il parle
c o m m e s’il était certain ; mais sans doute il devait l ’êt re ,
car il était le s y n d i c , et c ’est à lui q u ’on devait s’adresser
pour ce procès ; il ne fallait donc pas biaiser pour dire
positivement ce q u ’il a dû savoir, ni inspirer des doutes
sur un fait qui sera démenti dans un instant.
L a révolution est su rv en ue, et tout ce que le sieur
Belavoine en dit , c ’est q u ’après avoir nom m é des
arbitres, en exécution de la loi sur les c o m m u n a u x ,
le sieur Maréchal iinit par rendre ju stice aux habilans
de Brout, et renonça à ses prétentions sur le bois des
Brosses.
Mais cette époque ne doit pas être passée si rapi
dement ; et puisque le sieur Belavoine a pris la peine
de retirer de la mairie de Brout touteslespiècesrelatives.
(
�. ( i 6 )
à ce qui s’est passé depuis 1 7 9 0 , à l’occasion du bois des
Brosses, il semble qu’il faut un peu s’occuper de ce qui
a préparé ce prétendu renoncement du sieur Maréchal.
A peine les lois de 1789 eurent - elles porté la pre
mière atteinte aux droits des seigneur s,que les prin ci
p a u x habitatis de Brout s’occupèrent sérieusement de
s’approprier le bois des Brosses. O n com m en ça par le
faire cotiser c o m m e co m m un al, alin de ne plus s’e x p o
ser à l ’objection sérieuse qui avait été faite au procèsverbal de 1781. ( C e p e n d a n t il paraît que le sieur
Maréchal fut aussi cotisé pour les Brosses).
E n s u il e , com m e le village de Brout était devenu une
des 45,000 municipalités de F ra n c e , il y eut une con
vocation du c o n s e i l - g é n é r a l , le 24 octobre 179 0; le
procureur de la c o m m u n e exposa q u ’il fallait délibé
rer sur le défrichement des com m un aux dts Brosses,
Servoiron et Bois-Blanc. Mais , sur cette m o tio n , lej
maire observa que la municipalité ne pouvait y sta
t u e r , attendu q u’il y avait instance pendante en La
'c o u r de M onm araulb, avec M. Maréchal. En consé
q u e n c e , il y eut renvoi au district; le district, à son
t o u r , renvoy a à la municipalité pour donner son avis,
sous huitaine. On assembla les liabitans pour délibérer:
un maçon et un tailleur furent à peu près les seuls qui
votèrent pour un partage à faire le plutôt possible.
L e 11 décembr e 1791 , les principaux liabitans de
Brout ayant jugé le lems plus opportun, firent une
autre convocation; 011 y délibéra, i.° q u ’il fallait véri
fier les usurpations, et que le sieur Maréchal avait
usurpé
�( i7 )
usurpé deux cent cinquante boisselées; z.° que le par
tage des trois bois devait avoir lieu , parce qu'ils étaient
inutiles, et q u ’il conviendrait de les mettre en cu ltu re ,
à cause de la disette des grains,, et pour em pêc her les
liabitans de pâlir. Ce procès-verbal fut signé BeLavoine,
‘ maire.
L e 14 janvier 1 7 9 2 , il y eut une autre assemblée
pou r délibérer le partage; mais il n’y avait à cela que
deux petites difficultés auxquelles M. le maire n’avait
pas pensé ; la p r e m i è r e , c ’est que jusqu’alors aucune
loi n'avait autorisé le partage des com m u naux , à
supposer que ces bois fussent tels q u ’on les dénom
mait; la seconde , c ’est q u ’on arrangeait tout cela sans
'le sieur M a ré cha l, qui avait fait valoir des réclamations
auxquelles on n’avail encore su que répondre.
•
Bien lot arrivèrent les lois des 28 août 1792 et 10
juin 1 7 9 3 ; et alors, il faut en convenir, un seigneur
n ’aurait p e u t-ê l r e pas eu trop beau jeu de réclamer
ce que des communes lui disputaient.
Il y eut une
convocation où le citoyen Bonainour fit un discours,
po ur prouver «• que dans le partage des c o m m u n a u x ,
« il ne fallait pas que les collectes de Lafont abandon« liassent leurs frères de la collecte d’Ecole; que lds
« pauvres co m m e les riches avaient tous les mêmes
« droits, et q u’il ne fallait pas admettre l’ancien ré« g i m e , etc. En co nséq uence , l ’assemblée arrêta avec
a sagesse (,i ) q u ’on se réunirait pour le partage des
( 1) L e procès-verbal le dit ainsi.
�( i8 )
« irois bois et de ce ux d ’E c o le ; que tout serait porté
a à une m êm e masse pour être partagé par tê te , sans
« distinction de s e x e , ni âge».
Cependant tout cela ne dépossédait pas le proprié
taire, et encore fallait-il lui dire un mot de ce q u ’on
voulait faire ; enfin , pour se conformer à ce q u ’exi
geait la l o i , dans le cas où la propriété était contentieuse, l ’agent de la com m un e écrivit au sieur M a r é
chal, le 19 nivôse an 2 , la lettre dont voici l’extrait:
« Cito yen républicain............L a com m un e a n om m é
« deux arbitres et deux experts : il s’agit d’en nomm er
« deu x autres.........; il faut que les droits respectifs
« soient confirmés par un jugement définitif et sen« tence arbitrale, etc. » ( O n ne voit pas p r é c i s é m e n t,
par cette l e t t r e , ni par d ’autres p ièce s, quel était le
mandat donné par l’agent à ces arbitres et experts).
L e 24 du m êm e mois, le sieur Maréchal répondit
q u ’il n o m m a it , de sa part, les sieurs, Destermes et
Bequ emi.
C e n’était pas trop ce qu’on entendait, et quand on
vit le sieur Maréchal disposé à faire valoir ses droits,
on fit jouer les ressorts ordinaires de la te rre ur; elle
réussit, et le sieur Maréchal écrivit à la commune.
« L a loi ne défend pas de régler ses procès ¿1 l'a
rc miable : j ’offre à mes frères, de quatre-vingt-dix à
« cent arpens du bois des Brosses, en propriété ,
«■g r a tis, à prendre du côté de...... (11 indiqua le con« fin ci côté du sieur Belavoine). J ’offre tout Servoiron
« et tout B o i s - B l a n c ; plus, j ’assure à mes frères le
« pacage g r a tis , dans le surplus des Brosses».
�'( i 9 )
Quand un aristocrate avait donné un signe de p e u r ,
toute capitulation avec lui était inutile, car il n’était
plus en son pouvoir de rien refuser. U n personnage
important de cette époque , alla dire en confidence
au sieur M a r é c h a l , que deux représetitans d u peuple
’ arrivaient a Moulins, pour prononcer sur le sort des
suspects; que les anciens censitaires publiaient haute
m ent qu’il était un modéré égoïste ,■et q u e , si cette
•terrible qualification allait jusqu’aux-oreille? des repré
s e n t a i , il était perdu.
•
Aussitôt l ’épouvante s’empara de l ’a (ne du sieur
M a ré ch al : il prit la plume incontinent, et écrivit à
l ’agent de B r o u t, le 24 germinal an 2 , ce qui suit :
- a Citoyen..........J e te prie de dire à tous mes con « c ito ye ns , que je ne suis point égoïste , et q u ’ils
» peuvent prendre les Brosses ».
V oilà la pièce importante que le sieur Belavoine
appelle un abandon de propriété.
- L a terreur'sommeilla quelque tenis en l’an 3 , et
le sieur M a r é c h a l , un peu e n h a r d i , f i t , à ce q u ’il
paraît, quelques démarches pour en revenir à ses pré-y
tentions ; car on voit par 'une lettre de l’a g e n t , en
date du
22
pluviôse an 3 , qu’il écrivait au sieur
Maréchal : « N ou s sommes forcés de vous dire que les
« lois, concernant les c o m m u n a u x , seront .inévitablece mont à l ’avantage de la c o m m u n e .........Vous pour» rez apporter vos titres, le jour q u ’il vous plaira, et
» vous expliquerez vos moyens ».
Peu de tems après survint la loi de sursis au par-
6
�(
)
tage d^s co m m unaux ; l ’agent en donna la nouvelle
au sieur M a r é c h a l , le 3 o prairial an 4 , en ajoutant :
'«• Vous connaissez l ’esprit turbulent des habitans , je
« crains qu’ils ne se portent à quelque e x c è s ; il est
« inutile de vous rendre ici ■
».
Les choses en restèrent donc où elles en étaient ;
les habitans de Brout ne purent pas partager le pr é
tendu c o m m u n a l , à cause de la loi du sursis, et par
conséquent le sieur Ma ré chal n ’en fut pas dépouillé.
Personne n ’a eu idée de se prévaloir d’ un simulacre
de donation arrachée à la terreur d ’un vieillard ,
simple usufruitier, et d’ailleurs non revêtue d ’aucune
espèce de formes.
L a terre de L a f o n t , co m m e il a été déjà dit, ap
partenait au sieur G i l b e r t - H e n r i Maréchal , fils de
Marien , q u ’on tourmentait en l ’an 2 , pour lui faire
donner ce qui n ’était pas à lui. L e sieur Maréchal
fils a vendu ses droits au sieur de Rocliefort , son
bea u -f rè r e , qui est propriétaire actuel de la terre de
L a f o n t , et par conséquent des bois qui n'ont jamais
cessé d ’en faire partie.
E n l ’an 1 0 , on avertit le sieur de R oclie for t, que
les métayers du sieur Belavoine commettaient des dégâts
journaliers dans le bois des Brosses;que sous prétexte
d ’ y introduire des bestiaux, pour les y faire pacager,
ils coupaient des arbres, et en arrachaient les souches;
en con séq ue nce , le 24 nivôse an t o , il assigna le sieur
Belavoine au tribunal civil do Gannat, pour voir dire
q u’il serait maintenu au droit de propriété dudit bois
�( 21
des Brosses, avec défense audit B e l a v o i n e d ’y faire paca
ger, couper des arbres, et arracher des sou ch es , et pour
être condamné en 1,200 fr. de dommages-intérêts.
Belavoine demanda copie des titres sur lesquels était
fondée la demande ; on lui signifia la transaction de
1 7 5 5 , et il se laissa condamner par défaut , le 18
avril 1806.
Il forma opposition à ce j u g e m e n t , en disant, i.°
.en la f o r m e , que la demande était nulle, co m m e ne
contenant pas les lenans et aboutissans; 2.0 au f o n d s,
que l ’acte de 1 7 5 5 était un titre féodal; qu’il n’avait
pas été homologué au conseil.
. A v a n t le jugement par d éfau t, et le 7 f évrier 1806,
le sieur Belavoine sentant bien qu'il inspirerait plus
d ’intérêt, au nom d ’une c o m m u n e , que pour lui s e u l,
alla exposer au conseil municipal de B r o u t, que le
m oment était venu d ’obtenir enfin le bois des Brosses
si on voulait le seconder ; qu’il était muni de tout ce
q u ’il fallait pour réussir, et qu’il se chargeait de suivre
le procès, et faire toutes les ava nce s, pourvu q u’on
lui donnât l ’autorisation de plaid er, au nom de la
commune. E n conséquence de ces offres si génér eu
ses (1 ) , le conseil de la commune arrêta q u’il prenait
le fait et cause du sieur Be lavoine; nomma le sieur
B on am ou r, membre du conseil, pour agir de concert
(1) L e sieur Belavoine a aujourd’hui dix domaines ou locateries avoisinant le bois des Brosses ; aussi ce bois n’a vraiment
d ’intérêt que pour lui seul.
�( aa )
avec lui; et donna pouvoir iant audit Belavoine q u ’au
.
.
dit Bonamour de défendre à la demande du s.r R o c h e fort, former demandes incidentes , etc. L e sieur Bela
voine se chargea expressément de faire les avances.
Cet arrêté fut en effet homologué par le p r é f e t , qui
autorisa le m aire, ou Les fo n d é s de pouvoir, nommés
par le conseil, à plaider devant les tribunaux.
M u n i de cet arrêté, le sieur Belavoine commença par
signifier une écriture, le 12 mars, en son nom particu
lier; puis, au lieu d ’user l u i- m ê m e de son mandat , il
assigna le sieur D e c o m b e , m aire , devant le tribunal de
Gaunaf , pour être tenu de prendre son fait et cause;
et faute de ce f a ir e, être condamné en ses dommagesinlérêts à donner par déclaration.
L e maire répondit en défenses que cette demande
endommages-intérêlsétaitfort indiscrète;que Belavoine
attaqué n ’avait q u’à faire valoir ses moyens ; que la
co m m une n’avait pas contracté l ’engagement de faire
des frais pour l u i , et que quand on lui disputerait ses
droits à elle-même, elle saurait se défendre.
Sur toutes ces demandes, intervint jugement à G a n nat , le 21 novembre 1806, qui maintint le sieur de
Rocliefort dans la propriété du bois des Brosses, et
ordonna néanmoins , avant faire droit sur les dommages-intérêts, que le sieur de Rocliefort ferait preuve
des dégradations, par lui articulées, contre le sieur
Belavoine , en coupant des arbres ou arrachant des
souches. IiC maire de Brout fut renvoy é de la demande
formée contre l u i, avec dépens.
�(
23} ,
,
Les motifs de ce j u g e m e n t , à l ’égard du sieur de R o
chefort , sont fondés : i.° en la f o r m e , sur ce que le
sieur Belavoine n’avait proposé la nullité de l’exploit
q u ’après avoir donné des moyens au fon d, et sur ce
q u ’il n’y avait qu'un seul bois des Brosses; 2.° au fond,
sur ce que la transaction de i y 55 prouve que la pro
priété réside sur la tête du sieur de R ochef ort , puisque
ses auteurs concédaient le droit de pacage; que le père
du sieur Belavoine est partie audit act e, qui ripest q u ’un
traité sur des intérêts p r i v é s , et lion sur ceux de la
c o m m u n e ; et enfin , que cet acte de i y 55 n’est pas
entaché de féodalité.
L ’enquête ordonnée eut lieu ; elle ne parut pas con
cluante aux premiers j u g e s , qui renvoyèrent le sieur
Belavoine de la demande en do mmages -in térêfs, par
jugement du i 3 mars 1807. U n e chose essentielle à
remarquer dans ce j u g e m e n t , c ’est que le sieur Belavoine
ne voulait supporter aucuns dép en s; et pour cela, il
fit plaider qu il n avait f a i t aucune d ifficulté au sieur
da R ochefort sur La question de propriété, et que le
procès n’avait eu lieu que pour les coupes d’arbres à
lui imputées.
L e sieur Belavoine a interjeté appel de ces deux j ugemens, et a intimé aussi le sieur D e c o m b e , maire. Ii
parait m êm e que le sieur Belavoine a spéculé princi
palement sur l’acharnement q u’il mettait contre le sieur
D e c o m b e , p o u r se rendre plus intéressant, et persuader
à la cour que s’il n’a pas de titres à produire, c ’est que
le maire ne veut pas les communiquer.
�( 24 )
Dans une première plaidoirie du 23 novem bre 1807,
le sieur Belavoine s’est attaché à présenter à la cour
les défenses données par le sieur Decornbe devant les
premiers juges, et à tirer parti des expressions les plus
éq u ivo q u es, pour en induire que l ’intérêt de la com m un e
était compromis, et se montrer l u i- m êm e co m m e obligé
de disputer une propriété c o m m u n a l e , sans pouvoirs et
sans titres.
L a cour a cru devoir ordonner , par son arrêt du
23 novem bre 1 8 0 7 , que les liabilans de Brout s’assem
bleraient de nouveau pour s’expliquer sur lesdites d é
fenses et a autorisé le sieur Belavoine à faire la re
che rc he de tous titres et procédures q u ’il pourrait d é
c o u v r i r , e t notamment de ce qui pouvait être dans les
archives de Brout.
L e 22 février 1808 , le sieur Belavoine mène un no
taire de R io m chez le maire de B r o u t ; c e l u i - c i lui
présente des liasses et papiers. L e sieur Belavoine veut
autre ch os e; on verbalise, et il paraît que rien n ’est
inventorié. D e l à , on va chez un adjoint de la mairie:
il n ’y a rien. .
,
.
L e 20 mai 1808, le sieur Belavoine o b ti e n t, contre
le'.maire , un arrêt par défaut portant q u e , dans trois
jour s, il déposera au greffe une liasse cotée n.° 4 , et
une lettre du sieur de Rochefort.
L e maire y a formé opposition en se plaignant de
ce que dans le procès-verbal du notaire il y avait deux
erreurs notables; l ’ une en ce q u’ il avait dit avoir lu
sur la liasse n.° 4 '.tra n sa ctio n , piece importante ,* ce
qui
�( 25 )
q u i n’était pas ainsi ; 2.° en ce q u ’il avait dit n’avoir
trouvé
aucune
pièce dans ladite liasse, tandis q u e , de
toutes celles énoncées sur l ’enveloppe , il ne manquait
que la transaction (1).
T e l est l’état actuel de la cause. L e sieur Belavoine
la divise en deux chapitres. Il prétend, dans le pre
m ie r , que la demande est mal dirigée contre lui, parce
q u ’il s’agit d’une propriété communale , ‘appartenant
•à tous les liabitans , et que d’ailleurs il n 'y avait lieu
qu'à reprendre le procès pendant en la maîtrise de
üVlonmarault, en 1780 , et pendant devant des arbitres
en 1793. Il p r é t e n d ’, dans le deuxième chapitre, que
le’ siëur de Rocliefort ne rapporte aucun titre de pro
prié té, i.° parce que la transaction de 17 5 5 n ’est q u ’ une
(1 ) L a comtnunicaiion qui vient d ’étre prise de cette liasse
n.° 4 , porte en intitulé: P a piers rela tifs a u x com m unau x ,
dém arcation avec S a in t-P o n t ; i.° procès-verbal de dém arca
tion , h om olo g u é au. départem ent, du 26 germ inal an 4 ; 2 ° ar
r ê té de radm inistration co m m u n a le, des 26 pluviôse et 4 prai
ria l an 9 , date de la demande de cédule du ju g e de p a ix .
O n a ajo u té, d ’ une autre plume , au-dessus de cet intitulé :
Com m unaux de B r o u t , les B rosses, B o is - B la n c , S a in t-P o n t,
avec transaction
1 Au-dessous de cela, on lit: Procès-verbal de démarcation ,
p ièce importante.
r .Cette pièce importante est dans la liasse, et ne contient pas
même mention du bois des Brosses.
L a lettre du sieur de Rochefort contient une proposition de
faire des sacrifices pour vivre en bon voisin avec la com m une;
mais en déclarant qu’il a toujours élé propriétaire du fonds, et
avec réserves contre le sieur Belavoine.
7
�( ^ )
copie de copie ; 2.° parce q u ’elle n’est passée q u ’a v e c
des particuliers, et ne peut obliger les habit ans; 3 .° parce
q u’il résulte de cet acte de i y 5 5 , et de lousles titres pro
duits par le sieur B e la v o i n e , que les Brosses sont une
propriété comm unale ’*de Brout ; 4.0 que ledit acte de
1 7 5 5 n ’a été passé q u ’avec des particuliers, et ne peut
obliger des habilans ; 5 .° parce que cet acte n’attri
buait le bois des Brosses au seigneur de L a font, q u ’à
causô de sa justice, c o m m e tous autres liermes et va cans, et que les lois de 179 2 et 1793 rendent ces pro
priétés aux communes. L e surplus du mémoire du sieur
Belavoi'ne est dirigé contre le sieur Decombe.
11 s’agit de parcourir ces divers m o y e n s , et de les
discuter dans le m ê m e ordre.
M O Y E N S .
L a demande du. sieur[R ochefbrt esL-elle bien dirigée ?
Si elle ne l ’était pas, il serait un peu tard pour s’en
app er cev oir; car le sieur Belavoine a donné des dé
fenses au fond en l ’an 12 et en 1086 , sans conclure
préalablement à la fin de non-recevoir.
A la vérité , il a bien dit dans ses défenses que le
bois était c o m m u n a l , e t que d’après cela il fallait mettre
en cause le corps commun des liabitans. Mais ce n’était
là q u ’une prétention fondée sur un fait à éclaircir, et
ce n ’est pas ce que la loi exigeait de lui s’il voulait atta
quer la demande.
L'ordonnance de i 6 6 y porte que dans les excep-
�C 27 )
lions ou défenses, il faudra d’abord proposer les d é clinatoires, nullités d ’ex p l oi t, et autres fins de norirecevoir , pour y être préalablement f a i t droit,
L e sieur Belavoine n’ayant donc pas pris des c o n
clusions préalables en.fins de n o n - r e c e v o i r , el ayan t
au contraire défendu au f o n d , ne peut plus aujour
d ’hui repousser la. demande c o m m e mal dirigée.
D ’ailleurs, n ’est - ce pas un abus de raisonnement
que de vouloir q u ’ un propriétaire ne puisse pas attaquer
celui qui viole sa propriété , sous prétexte q u’ une c o m
m un e pourrait avoir des prétentions sur le.local conten
t i e u x ? E s t- c e au propriétaire à provoquer ou deviner
ces prétentions? Et quelle serait 1’élrang.e action q u ’il
aurait, dans ce cas., à intente r? Il serait difficile de
l ’indiquer.
Ev idem m ent le sieur de Rochef ort ayant à se plaindre
d’ un trouble de la part du sieur Belavoine., n ’a eu
d’action que contre l’auteur du trouble. Si c e l u i - c i ,
en une qualité que lco nq ue, prétendait avoir droit au
l o c a l , c ’était à lui à le faire valoir seul, ou à mettre
en cause ceux qu’jl aurait cru avoir un droit égal au
sien. C ’est précisément ce qu*a fait ie sieur Belavoine.
Il.es! donc bien singulier q u’il vienne aujourd'hui cri
tiquer sa propre procédure.
,
Quant ii la litispendance que le sieur Belavoine dit
(pag. 2o),exister entre le seigneur de Lafont et la c o m inuneide B r o u t , d’abord en la maîtrise de M onm arault,
avant la révolution , et puis devant des arbitres, en
8
�(
2
8
}
exécution de la loi du 10 juin 1 7 9 3 , le sieur B elavo in e,
sur ce poin t, ne s'entend pas bien avec lui-même.
Il disait d’abord que le dernier état des choses, avant
la rév o lu tio n , était un procès au conseil, ainsi q u’il
résultait d’ une consultation signée Cocliu.
A i n s i, lequel des procès faut-il reprendre ? co m m ent
le r e p r e n d r e , et à quoi conclure ? car aucune des
parties n'a de pièces , et personne ne sait quel était
le dernier er rement , ni les conclusions réglées.
Est-ce le triage q u’il faudrait demander aujourd’hui
pour obéir au sieur Belavo in e? M a i s , cette action est
éteinte par les lois, et les procédures sont déclarées
c o m m e non avenues.
Cette abolition au reste n’ôte pas les droits des pro
priétaires, seigneurs ou non. L a loi a bien considéré
que plusieurs seigneurs avaient pu être dans le cas du
sieur Maréchal , c ’est-à-dire, q u ’ennuyés
des dégâts
commis par leurs usagers, ils pouvaient avoir préféré
un triage pour s’exempter de toute servitude , et il
aurait été injuste de prendre droit du sacrifice q u ’ils
voulaient faire , pour leur' ôter m êm e leur propriété.
C ’est pourquoi la loi du 27 septembre 1790 a donné
idée a u x ' s e i g n e u r s , de remplacer l ’action en triage
par une autre demande.
« Il n’est nullement préjudicié, par l ’abolition du
« triage, aux actions en cantonnement , de la part des
« propriétaires contre les usagers de bois, prés, m a « rais et terrains vains ou vagues, lesquelles continue« ront d’être exercées co m m e c i - d e v a n t , dans les cas
�( *9 )
«r de droit, et seront portées devant les tribunaux de
« districts*. (A rti cle 5 ).
Si donc la loi, en abolissant le tr i a g e , a permis aux
propriétaires d ’agir en c a n t o n n e m e n t, par action n o u
v e l l e , elle leur a permis aussi par la m êm e raison d ’a c
tionner les prétendus usagers pour les dégâts par eux
commis , lorsque les propriétaires ne jugeraient pas à
propos de demander le cantonnement.
Ain si, quand le sieur M aré chal, simple usufruitier,
et tuteur de son fils , aurait pu compromettre ses droits,
et conclure à un triage , cette demande n’existe plus,
et ne devait pas être reprise.
, ,
Elle n’existait plus m êm e en 1 7 8 1 , puisque le procèsverbal du 2 m a r s , prouve que le sieur Maréchal fils
articulait expressément être propriétaire exclusif du
bois des Brosses, et ne consentait à laisser aux liabitans,
dénommés en la transaction de 1 7 ^ 5 , q u ’ un droit de
pa c a g e , moyennant redevance.
Il y avait , dit le sieur Belavoine , procès à M011marault, sur la propriété du bois des Brosses.
• L e fait est controuvé; ce procès n existait pas, et
ne pouvait pas exister.
• C e procès n’existait pas : car on ne voit aucunes
conclusions, ni d e l à part des liabitans contre le sieur
M aré ch al, ni d e l à part du sieur Maréchal contre les
liabitans; il n’y en avait que de la part du procureur
du roi qui était d e m a n d e u r ,
et chacune des autres
parties n’était appelée que pour répondreà sa de m a nde,
et justifier de ses titres.
�( '3 ° ) >
C e procès ne pouvait pas exister; car l ’ordonnance
des eaux et forêts, art. 10 du lit. i . er, « d é f e n d aux r
« maîtrises de connaître de la propriété des eaux et
« bois appartenant aux communautés ou particuliers,
« sinon q u ’elle sera nécessairement connexe à un fait
« de réformalion et visitation , ou incidente et propo« sée pour défense à une poursuite ».
Ainsi la niaîtrise de Monmarault aurait bien pu.
connaître de la propriété alléguée contre la demande
du procureur du ro i, mais non de la propriété entre
le sieur Maréchal et les liabitans, parce q u ’elle n’é l a i t
pas l ’objet de la dem ande; et l’article prouve -même
q u e , si le procureur du roi avait intenté son a ctio n ,
pour faire juger celt e pr opriété, la maîtrise aurait été
par cela seul incompétente.
Il n’y avait donc pas lieu à reprise du prétendu
procès de la maîtrise de Monmarault.
»
Est-ce encore le procès du conseil qu’il fallait repren
dre? Mais si la maîtrise n ’a rien j u g é , et si la contes
tation élait ven ue de piano au co n s eil , une semblable
procédure est nulle de plein droit. Car la loi du 27
septembre 1790 compte pour rien les arrête du con
seil, rendus en première instance sur des questions de
propriété entre les seigneurs et les com m unautés d 'h a b ila n s,• et veut que le procès soit rec om m en cé devant
les tribunaux de district.
C ’est donc un procès de 1793 q u ’il fallait repren-
�( 3i )
dre; mais, où sont encore les demandes et les conclu
sions prises? L e sieur B elavo in e, qui a ioul fait copier ,
n ’eu a trouvé aucune. C ep endant, pour reprendre un
procès, il faut nécessairement fonder la reprise sur les
conclusions déjà existantes; car c ’est en elles seules
que le procès consiste.
O n ne voit en 179 3 que des lettres missives, portant
nomination d’arbitres; et on n’intente pas un procès
per epistolarn, aut per nuntiuqi.
D ’ailleurs, q u’y a - t - i l de co m m un entre les arbitres
forcés de 1 7 9 3 , et la demande intentée en l ’an 10, par
le sieur de R o c h e f o rt?
C e n’est pas le sieur de Rochef ort qui est non-recevable pour avoir mal dirigé sa demande; c ’est le sieur
Belavoine qui est non-recevable à contester sur l ’appel
ce q u ’il ne contestait pas en première instance, c ’està-dire , la propriété du bois des Brosses.
C ’est lui qui signifia le jugement du 21 novem b re
1806, par lequel le sieur de Rocliefort est jugé proprié
taire exclusif du bois des Brosses.
A v an t d ’interjeter a p p e l , il p l a id a , le treize mars
1807 , q u’il ne devait a u c u n s dép ens, parce qu il a avait
f a i t aucune d ifficu lté sur
la
p r o p r ié té
d u sieur de
Rochefort. Comm ent après c e la , le sieur Belavoine a t-il pu interjeter appel du premier j u g e m e n t , pour con
tester en la Cour celle m êm e propriété?
L e contrat judiciaire est formé ave c lui sur le point
le plus essentiel; donc il ne peut être r év oq u é. En vain
�v
dirait-il que ce consentement n’a pas été accepté avant
(
3
2
}
son appel. «• L ’acquiescement, dit M. P i g e a u , n'a pas
« besoin d ’être accepté. L ’ un demande , l’autre c o n «• sent la demande. Ces deux opérations suffisent pour
» former le contrat judiciaire et lier les parties».
O a a vu des plaideurs de mauvaise foi nier leurs
dires, et prétendre qu’ils n’auraient fait f o i , com m e
contrat judiciaire, que s’ils avaient été signés. Mais la
cour de cassation a décidé que cela était i n u t i l e , et
qu'un acquiescement porté par un jugement de justice
de p a i x , était un contrat judiciaire suffisant. Pur arrêt
contradictoire, du 4 octobre 1808, elle a cassé un juge
ment du tribunal civil de C a e n , qui avait jugé le con
traire.
A in si , le sieur B e la v o in e, au lieu d’avoir à proposer
des fins de non-r ec ev oir , est lu i- m êm e non-recevable
dans son appel pour la question de propriété
et ne
peut faire valoir que l’appel du dernier ju g em e nt, m o
tivé sur une simple condamnation de dépens.
.L a transaction de 1 7 55 est-elle produite en form e
probante?
1
L e sieur Belavoine avertit q u ’il ne propose de moyens
au fond que subsidiairement , parce q u ’il compte beau
coup sur le précédent. Puisqu’il a jugé cette pr écau
tion nécessaire, elle sera com m un e au sieur Rocliefort,
%
qui a plus de raison de compter sur un acquiescement
formel. Cependant le sieur de Ilochefort 11’a nul besoin
do
�.
c
33 ?
.de fins de non-recevoir; car il ne lui sera pas difficile
.de prouver que ses lilres sont en r è g l e , el q u’ils sont
<3es tilres de propriété suffisans.
Ce que le sieur Belavoine appelle une copie de copie,
est une expédition d ’ une grosse originale, de la transac
ti o n de 1755. C elle grosse originale existe chez le no
taire H u e , qui l ’a expédiée; et le sieur Belavoine, qui a
fait vidiraer tant de choses pour le procès ac tuel , était
fort le niaîlre de faire vidimer aussi ce titre, s’il avait
quelque chose à y suspecter.
: L e sieur de Roc hefort avait cette grosse ori ginale ,
et il a dû par prudence la déposer chez un notaire,
puisque la minute en avait été b r û l é e , ainsi que les
deux premières expéditions. Son grand-père ne lui avait
pas laissé ignorer la joie q u ’eut le s.r Belavoine lors du
brûlement de ces deux premières expéditions, ne soup
çonnant pas q u ’il eu existait une troisième qui survi
vrait à la proscription, et qui se retrouverait un jour.
Si donc le sieur Belavoine a du soupçon de la fidé
lité de l ’expédition du sieur H u e , quoiqu’il ait jusqu’à
présent regardé ce titre com m e sincère, il peut d e
m an d e r, à ses frais, le rapport de la grosse originale
qui existe, el qui est un titre aussi authentique que la
minute m ê m e , d ’après l’article i 355 du Code civil.
Quand l’expédition, signée H u e , ne serait pas prise
sur la grosse, elle ferait certainement foi, aujourd’hui
que le brûlement des tilres rend impossible la produc
tion des originaux
.. D ’ailleurs, les ratifications de 1 7 6 7 , 175 8 et 1 7 6 9 ,
9
�( 3 4 .}
qui sont des expéditions originales, rappellent la tran
saction de 1 7 5 5 , et attestent la sincérité de l'exp éd i
tion Hue.
Mais encore une fois ces considérations deviennent
inutiles , puisque la troisième expédition qui existe est
prise sur la m in u t e , et fait la m êm e foi que l ’original.
E s t - i l prouvé, par les titres énumérés par le sieur B ela
voine, que le bois des Brosses est un com m unal? i
C ’est ici où l’imagination du sieur Belavoine est en
grand travail, et où sa logique a eu fort à faire; car ce
n ’était pas une mince entreprise que de vouloir prou
v e r par les titres m êm es de la terre de L a f o n t , que le
seigneur avait eu la bonté de convenir que le bois des
Brosses était un com m unal des habitons, tandis qu’il
s’occupait de se le conserver com m e propriété dépen
dante de sa terre.
L e fondement de moy en du sieur B e la v o i n e , est
pris dans la transaction m êm e de 1 7 5 5 ; et il est c u
rieux de voir d'où procède sa découverte.
«■Remarquons, dit-il, les termes dont on s’est servi
» pour parler du bois des Brosses : après avoir concédé
« le pacage dans ce b ois, il est ajouté : Sans pouvoir
« par lesdits ju sticia b les pacager dans les autres b o is,
«■plac(S, terres, hernies e t v a c a n s , appartenans et d é« pendans de ladite baronnie, tout lequel surplus de« meure réservé à ladite darne. Ces m o t s , dit le sieur
« Be lavoine, et autres bois, etc. conduisent à la pensée
�C 35 )
a que le bois des Brosses n’était pas une propriété par« ticulière à la dame Maré ch al, et q u’elle n’y avait droit
« que co m m e dame de la terre de Ijafont >?.
Et quelle différence y a-t-il, entre avoir un bois,
c om m e particulier, ou co m m e dame de Lafont ?
Est-ce que l ’acquéreur d’ une seigneurie, qui paye
ce q u’il a c h è t e , tout ainsi et de m êm e q u ’ un acquéteur d’ un fonds roturier, ne devient pas propriétaire
du terrain compris çlans son acquisilion ; est-ce qu’il
a uniquement une possession p r é c a i r e , par cela seul
q u ’il doit jouir comme seigneur.
En
v é r i t é , voilà d’étranges difficultés. Mais sans
doute quand il y a des bois dans une seigneurie, ils
sont au seigneu r, co m m e son château et son jardin ,
à moins qu’il n’y ait titre contraire qui en fasse la
propriété d’un voisin; c a r , alors ils ne dépendraient
plus de la.seigneurie ; ils dépendraient du voisin.
C om m en t le sieur Belavoine a-t-il pu donner une
interprétation aussi renversée de la clause q u’il a sou
lignée; lorsqu’il venait de transcrire ( page 22 ) la
partie de ce même acte où son père a reconnu que
La propriété du bois des Brosses appartenait à la dame
M a r é c h a l , et que son père n’y avait eu de tout tems
que la permission du pacage.
Cependant le sieur Belavoine n ’a encore q u ’ une
présomption que le bois des Brosses était co m m un al;
mais il la fortifie par d’autres circonstances, ou plutôt
par trois preuves bien comptées.
10
�(36)
L a première résulte, suivant lui, du procès-verbal
de 178 0, parce q u’il constate que le bois des Brosses
était en mauvais é ta t, ce qui dépose haute m ent, dit-il
que c’ est un communal.
Voilà ce que le sieur Belavoine appelle pr ou ve r
invinciblement ; on conviendra au moins q u’il faut peu
de chose pour le contenter.
A
supposer que la cour pût penser, com m e l u i ,
qu’ un bois
en mauvais
état v e u t
dire nécessaire
ment un bois c o m m u n a l , le sieur dp Rochefort rap
pellera que le procès-verbal de 1780 n’a dit en m au
vais état, q u ’ une moitié du bois des Brosses, c ’est-àdir e, la partie la plus exposée au pillage des voisins.
L a seconde pr euve consiste
en ce que le sieur
Belavoine a v u , page 45 du procès-verbal de 1781
que le seigneur de Laf on t parle d’ un certain c o n fia ,
sous le nom des terres et broussailles vagues dudit,
seigneur, appelées les Brosses.
C e n ’est pas qu’il ne soit parlé du bois des Brosses
en dix endroits de ce procès-verbal, et que toujours
le procureur du sieur Maréchal ne prétende en avoir
la propriété foncière et ex clu siv e, co m m e la cour a déjà
pu s’en convaincre. Mais ce n’est pas là que le sieur
Belavoine a voulu cher cher, c ’est dans un confin.
Et quand ce confin serait la seule mention , faite
en ce procès-verbal, du bois des Brosses, n’y a-t-il pas
�( 37 ')
im aveuglement sans exemple d ’y trouver, q u ’en par
lant des terres et broussailles d u seigneur, c ’est avoir
avoué que ces terres et broussiiilles sont un c o m m u
nal des habita us.
L a troisième p r e u v e , toujours invincible, ,du sieur
Belavoine, il la puise dans l ’élat actuel du bois des
Brosses qui est, dit-il, totalement à v i d e , com m e l*a
attesté un sous-inspecteur, le 4 avril dernier.
E n v é r i t é , plus nous avan çon s, plus il y a lieu de
s’émerveiller de la solidité des preuves administrées
par le sieur Belavoine. E h ! q u ’a donc de com m u n
l ’état actuel d’ un bois ave c une question de propriété ,T
disputée depuis v i n g t - c i n q ans? Et quelle influence
peut avoir un tableau statistique de 1 8 0 8 , avec un;
titre de 1 7 5 5 ? Si le bois des Brosses a été dévasté
dans les tems rév olutionnaires, entre-t-il dans l ’idée
de qui que ce soit, qu’il résulte de-là un titre de pro
priété pour les dévastateurs?
L e sieur Belavoine ne nie pas ces dévastations;
au co n trair e, il en prend droit pour conclure quV/
n y a qu’ un bois com m unal q u i ait pu* être tracté ainsi.
Quand le sieur Belavoine aurait dormi pendant
toute la révolution , il ne serait pas excusable de
vouloir persuader q u’il a une aussi bonne opinion de
ce qui se passait à cette époque. A qui v e u t - i l faire
cr oire , par ce ton de bonté , que les propriétés des
seigneurs étaient nécessairement respectées, et que
�( 38 )
leurs ci-devant censitaires ne faisaient des dégâts que
sur leurs propres com m un aux .
'
Quoique le sieur Belavoine ail appelé l’at lent ion
sur ces trois preuves, en les disant invincibles, il a
encore quelque chose de plus fort à y a j o u t e r , ce
sont ses titx'es, ljopinion des anciens tribunaux , les
démarches du sieur Maréchal en 1780 et en l’an 3 ^
la correspondance du sieur de R o c h e f o r t , et les m e
sures récentes de l’administration. V o y o n s
en quoi
consiste cette masse de preuves subsidiaires.
A l ’égard des titre s, le sieur Belavoine au moins
n ’en exagère pas le mérite. Q uant a u x titres , dit-il
je n ’en a i plus de très-précis ; mais il se dédom mage
de cette privation , , en ajoutant que qua nd it était
s y n d ic , il en avait de fort concluans.
E t D ie u sait ce que c ’était que ces titres ! Encore
un confin , où le seigneur de L a fon t disait, les bois
com m uns de ladite f o n t , appelés B o is-D ie u . M a is, si
ces bois étaient de L a fo n t , cela ne signifiait pas e n
core une fois q u’ils fussent les bois des habitans de
Brou t.
C ’est dans une copie de consultation à lui donnée
en 1 7 8 2 , que le sieur Belavoine a fait ce lle décou
verte; mais quand cette copie mériterait quelque con
fiance, on ne sait pas si d ’autres passages de ces pré
tendus titres n ’expliquaient pas le fragment isolé, que
l ’avocat au conseil avait jugé propre à sa défense..
�(
3
9
}
Serait-il au reste bien étonnant q u ’ un seigneur, en
donnant le détail de ses bois, eût voulu distinguer ceux
qui étaient assujétis à une servitude envers tous ses jus
ticiables, de ceux qui n’étaient destinés que pour lui
seul. L ’expression dont il se servait, pour en marquer
la différence, ne faisait pas un titre contre lui , puis
q u ’il avait soin d’ajouter que les uns et les autres étaient
de L a / o n t, et que d’ailleurs ce titre n’était contradic
toire avec personne. Si ces titres étaient si probans,
pourquoi donc le sieur Belavoine ne les avait-il pas pro
duits au procureur du roi de la maîtrise , qui l ’avait
assigné exprès pour en produire, au lieu de les garder
pour M e C o c h u , qui les a perdus bien à propos, puis
que le sieur Belavoine tire plus d ’inductions de cette
perte que si les titres étaient dans ses mains.
Cependant le sieur Belavoine s’est consolé de la perte
de ces deux titres à confins; il en a trouvé récemment
trois autres, qui, à la v é r i t é , ne parlent plus du bois
des Brosses. Mais quoique ces titres soient m uets, le
sieur Belavoine les trouve encore très-probans ; car il
est satisfait de tout.
L ’ un est un aveu et dénombrement de 1 60 9, qui*
ne comprend pas le bois des Brosses parmi les terres de
Lafont. Ce n’est pourtant pas que les bois n’y abondent,
car il y en a vingt-sept dénom m é s; et comment savoir
si les Brosses, qui ont encore aujourd’hui deux noms
nu moins, n ’en avaient pas alors
un autre oublié
�( 4© )
P e u t - o n croire q u ’en 1609, de m êm e qu'à l ’époque
des actes énoncés-en la copie de la consultation Cocliu,
le seigneur de l a f o n t ne se regardât pas co m m e pro
priétaire des Brosses, lorsqu'on voit par les actes pro
duits au procès - verbal de 1781 , que
dès l’année
i 52 o , ce seigneur faisait des concessions de cens dans
le territoire du bois des Brosses ?
L e deu xième litre découvert p a r l e sieur Belavoine,
est un procès-verbal de tous Les bois de la terre de Lafont en 1 7 5 3 ; et il n’y est pas parlé du bois des Brosses.
C e récit du sieur Belavoine e s t - i l bien fidèle? L e
procès-verbal fut-il dressé de tous les bois de la terre?
Il ne faut que le lire pour être convaincu du contraire.
On y voit q u ’un sieur L a r b a u d , fermier de L a f o n t ,
avait commis des dégradations dans n e u f cantons de
b ois , et autres cantons de bois épars ; c ’est peurquoi
le sieur Ma ré chal demanda qu'il fût dressé procès-verbal
du dégât commis en iceu x par ledit sieur Larbaud. En
efTet, le procès-verbal n’a lieu que sur treize bois, tan
dis que le sieur Belavoine vient de fournir la preuve
par l ’acte de 1609 , que la terre de Lafont en avait
.vingt-sept.
'
•
Il est difficile do croire en efTet que le sieur L a r b a u d ,
en coupant des arbres, eût voulu q u ’aucun des bois de
la terre, éloignés ou n o n , ne fût exempt de ses dégâts,
pas mêm e un hois soumis à un pacage journalier, où
il aurait eu cent témoins de son infidélité. Si cependant
il n’est pas allé dégrader dans celui c i , il était inutile
q u ’on allât y dresser un procès-verbal.
�( 4* )
C om m en t croire encore que le sieur M aréchal ne sa.
regardât pas com m e propriétaire du bois des Brosses,
dans le tems mêm e où il soutenait un grand nombre
de procès pour conserver cette propriété?
L e troisième titre est une transaction passée ave c
le sieur V i a r d , en i 6 8 3 , où ce sieur Viard prétendait
avoir le droit de faire pacager dans les co m m unaux
de ta ju s tic e de L a / o n t , en payant le droit de blairie.
Quelle induction le sieur Belavoine veut-il tirer de
c e dernier titre m u e t , si ce n’est une induction contre
lu i- m êm e?
L e sieur Belavoine invo que , après ses litres, l ’opi
nion des anciens tribunaux sur la nature de ce bois.
C ’est sa n s’doute de la maîtrise de Monmaraull q u ’il
veut parler, mais elle n’a manifesté aucune opinion.
Les maîtrises s’occupaient beaucoup des réserves et
aménagernens, que l ’ordonnance de 1669 prescrivait à
l ’égard des bois de communauté , et dont elle leur
donnait la surveillance. L e procureur du roi de Montm a r a u l t , qui pctil-êlie pensait, connue le s.r Belavoine,
que tout b o is , un peu pi l lé , est réputé co m m u n a l ,
voulut s’en éclaircir et demanda des titres- Mai s, au
lieu de montrer une opi nio n , ce qui aurait été fort
é t r a n g e , on voit au contraire q u ’il assigna , tant le
sieur Maréchal que le s y n d i c , pour produire leurs titres
respectifs, et justifier des droits q u ’ils prétendaient avoir
aux bois Servoiron et les Brosses.
11
�( 42 )
L e sieur Belavoine se fait un mérite des démarches
faites par le sieur M a r é c h a l , en 1780 et en 1792.
S ’il a demandé un triage en 1 7 8 0 , ce qui n’est pas
é t a b l i , il a déjà été r e m a rq u é , i.° que co m m e usu
fruitier et tuteur il ne pouvait disposer de la propriété
d ’autrui; 2.0 que les pièces antérieures à 1780 prouvent
que ces conclusions ont été réformées et abandonnées;
3 °. q u ’ une demande en triage n’est pas un aveu de la
propriété d’a utrui, mais un désir de sacrifier une por
tion de terrain à la servitude pour en affranchir l’autre;
4 0. que quand cette demande aurait seule existé , il n’a
pu être question ni de la reprendre ni de la désavouer,
puisqu’elle serait abolie depuis 1790.
Quant à ce que le sieur Ma ré chal a fait en l’an 2 ou
l ’an 3 , 1e sieur Belavoine ne veut pas en conclure sans
doute qu’ il a fait un abandon du bois des Brosses.
Car le sieur Maréchal n’a pas pu le faire, et l’agent
de la com m une n ’a p a s pu l ’a cc ep t er; l ’un parce que
la propriété n’était pas à lui ; l ’autre parce q u ’il lui
fallait une autorisation, et q u e , suivant la jurispru
dence de la cour de cassation, le défaut d ’autorisation
est d’ordre p u b l i c , de manière à produire une nullité
viscérale; et celle nullité peut être proposée dans tous
les cas et dans tous les lems (A rrê t s des i 5 prairial an
1 2 , 10 nivô>e an i 3 , et 2 mai 1808).
A u reste l’abandon de l’an 2 n’a pas m êm e été con
so m m é; il a été questi on ,e n l’an 3 , de production de
titres; et certes le sieur M a r é c h a l , en voulant céder
un bois, n’entendait pas juger la question de propriété:
�( 43 )
il cédait à la p e u r , qui était le dieu du moment.
A 1’égord de la correspondance du sieur de Roc liefort,
il fallait en dire le contenu , plutôt que d ’annoncer à la
C our que cette pièce était tenue cachée parce q u ’elle
contenait des aveux précieux et une reconnaissance des
droits de la commune.
L a Cour jugera mieux les conséquences de cette
l e t t r e , en la lisant tout entière.
• .
A rtonne,
M.
de R o c h e f o r t - D
‘ ¿4. M . Le M
aire
ally,
le 21 avril 1807.
.
.
de La Commune de Brout.
t
f
M
o n s ie u r
,
r
- « J
e
m’empresse de répondre à votre lettre du quatorze du
« co iira n t, par laquelle vous m ’annoncez l’autorisation que vous
« a déléguée votre conseil municipal pour traiter avec m oi, re« hâtivement à notre différent sur les Brosses. V o u s me laites
k
part des conditions que vous a dictées ce meine conseil m u-
« nicipal.
« J ’ai toujours témoigné le plus grand désir d ’assoupir une
« telle affaire. Il n’est point de sacrifice que je n’aie proposé, et
« il est certain que les retards que j’ai éprouvés m ’ont occasionné
«' de grandes pertes.
« J ’ a v a i s remis au sieur Morand un projet d'accommodement
« duquel je 11e m ’écarterai en aucune manière.
« Il appartiendra à la commune toute la partie des Brosses qui
« se trouve à l'aspect méridional de l’allée qui va de l’étang de
« R is au bois des Arcis; duquel tellement il en sera défalqué l’é-
12
�( 44 )
« lang des Ris tout ainsi et de même q u ’il existait anciennement.
« A cet effet il sera planté des bornes pour en fixer les limites ;
« to'us les fossés, le long de l’allée , seront récurés et entretenus
« par la commune ; et ladite a llé e , servant de limite entre la com« mune et m o i, sera réparée et rendue bien praticable aux frais
« de ladite commune. T o ute la partie des Brosses, au nord de
« ladite a llé e , m ’appartiendra en propre sans que personne
«. puisse y prétendre aucun droit quelconque. L a partie égale« ment prétendue anticipée me demeurera irrévocablement. L es
« frais de l’acte de transaction seront tous supportés par la cora«
«
o
«
m u n e , qliisera tenue de m’en fournir une expédition en forme.
Il sera fait deux plans géométriques du bois des Brosses ; la
partie de la commune y sera figurée ainsi que la mienne avec
détail de la contenue de chacune. Ces deux plans seront signés
« et approuvés par les parties ; et chacune d ’elles en retirera un.
« Il en sera dressé un troisième pareil au xd eu xa u tre se tre vê tu d e s
« mêmes formalités , qui demeurera annçxé à la minute de la
« transaction, le tout aux frais de la commune. I l y aura garantie
« réciproque entre les parties contractantes pour la sûreté de la
« propriété que chacune d’elles possédera à l’avenir; il lui sera li«
«
«
a
bre de jouir, vendre, échanger, aliéner sa portion, ainsi qu’elle
avisera. 11 me restera réservé, dans la partie delà commune, ma
part et portion, comme propriétaire, avec les autres habitans
de Brou t. D ans le cas où il serait fait un rôle ou tout autre
« taxe pour payer les frais auxquels a donné lieu la présente dis« cussion , ainsi que le traité d’arrangement, p la n , arpen tage, et
« autres, je n’y contribuerai en rien , et ce sera réparti sur la
« masse des autres propriétaires ou habitans de la commune.
« A v a n t que de faire recevoir notre acte par-devant notaire, ,
« je crois p ru d en t, pour vous comme pour m o i , de le consulter
« à de bons avocats afin qu’il n’y ait plus aucun procès a l’avenir.
« V oilà , Monsieur, mes intentions : elles sont à peu près égales
« à ce que vous me proposez. V o u s devez voir que je ne veux
« rien à votre co m m u n e , et qu ’au contraire je lui abandonne
�(45 )
« les deux tiers environ d ’ une propriété dont le fonds m’ap« partient. C ’est pour mettre fin à toutes discussions, main« tenir la paix et l’ union , et éviter à frais, que je fais de sem« blables sacrifices. Il est impossible que l’on me dispute viclo« rieusement mon droit de seul et unique propriétaire des Brosses.
« Depuis long-tems ce procès dure. J ’ai souffert considérable« ment de sa lenteur, et de l’efTet de la révolution. Je le ferai
« terminer d’ une manière ou d’autre; et pour cela je ferai va« loir mes moyens dans le cas où nous ne traiterions pas de
« suite.
« V e u i lle z , M onsieur, me faire part de vos réflexions , afin
« que je sache à quoi m ’en tenir, pour diriger dorénavant ma
« conduite ».
* « E li attendant votre réponse, j’ai l ’honneur d’ê tre , Monsieur,
V o tr e se rv ite u r,
ROCHEFORT - D ALLY.
II sera nécessaire q u e , par l’acte , je me-réserve mes droits
« contre le sieur B e lla va in e, à cause des frais faits jusqu’à ce
k
« jo u r , pour notre procès dont il a interjeté appel ».
Quelle induction y a-t-il donc ci tirer de cette p r o
position du sieur de R oc hefort , si ce n’est q u’il v o u
lait éviter un procès, et q u e , co mme tous ceux qui
ne sont pas obstinés , il offrait des sacrifices pour nef
pas plaider. L oin de donner prise contre s o i , par une
telle proposition, on mériterait au contraire la faveur
de la justice, si elle pouvait en accorder.
l i e sieur de Rochefort , en offrant de céder une
partie du bois, avait d ’ailleurs intérêt d’aflranchir de
�.
u
6
}
toute servitude ce qui lui resterait, et c’était sa co n
dition expresse. Enfin personne ne peut tirer moins
d ’inductions de cette lettre", q u e , l e sieur B e l a v o i n e ,
puisque les droits à faire valoir contre lui sont réservés.
L e s mesures prises par l’administration forestière, et
dont le sieur Belavoine s’est fait un m o y e n , ont con
sisté, à ce qu'il dit, à nomm er un garde, et à c o m
prendre le bois des Brosses dans la statistique des bois
c o m m u n a u x de Gannat.
Mais que signifie l'administration forestière à une
question de propriété déjà pendante devant les tribu
na u x depuis l’an 1 0 ? elle fait ses opérations adminis
tr ativement, et par conséquent elle s’adresse aux co m
munes pour avoir des états et des renseignemens. Si
elle eût demandé ces renseignemens au sieur de Rocliefort , il aurait compris le bois des Brosses parmi les
siens; elle s’est adressée à la municipalité de B r o u t , qui
n ’a pas manqué de s’adjuger le m êm e bois. Sans doute
après c e l a , on lui a présenté un g a r d e , et elle l ’a
n om m é. Mais c ’est véritablement abuser du raisonne
ment que de présenter tout cela co m m e 1111 préjugé
contre les litres de propriété, que l'administration fores
tière n’a jamais vus.
L ’acte de i y 55 e st-il un titre pour Le sieur de R och efo r t et pour le sieur Belavoine, q uoiqu'il ne soit pas
f a i t avec tous les ha bita n s?
C e l le question ne peut pas être faite sérieusement
�^ ( 47 )
par le sieur B e la v o i n e , héritier de Jean B e la v o in e,
partie en la transaction de i y 55 .
C a r , quand la com m un e aurait raison, le sieur B e la
voine et tous les autres conlractans ont eu le droit de
Irailer sur leur intérêt particulier; et ne serait ce pas
une comédie ridicule que de leur accorder, sous un nom
vague et collectif, ce qu’ils sont convenus, en leur nom
’ p ropre , ne pas leur appartenir.
Si Belavoine et autres avaient dit en i y 55 : «Nous r e« connaissons que le bois des Brosses est un co m m u n a l
« de nos villages, et néanmoins nous l’abandonnons au
« sieur Maréchal » , l ’acte ne serait peut-être pas fort
régulier; mais au contraire il est reconnu par eux q u e
le bois des Brosses est une propriété fon cière et exclusive
de la dame de Caponi. Par conséquent , il y a tran
saction très-valable à l ’égard de tous ceux qui l ’ont
consentie, parce que tout prétendant droit à la co
propriété ou au pacage , était bien le maître de traiter
sur son intérêt particulier; il pouvait restreindre son droit
com m e il pouvait l’augmenter , et s’exclure m êm e en
tièrement du pacage.
L e sieur Belavoine propose donc ici un moyen a b
surde , quand il croit pouvoir se jouer d ’une transac
tion signée par son p è r e , en alléguant, plus de cin
quante ans après , q u ’il s’agissait alors d’un co m m u n al,
et que son père a eu torl de transiger.
Quand il pourrait se jouer des engagcmens de son
pè r e , sur quoi fonde-t-il sa prétention? Est-ce sur des
titres de propriété qui assurent le bois des Brosses à la
�( 48 )
c o m m u n e ? Il n’en a pas; et cependant il voudrait que
la Cour jugeât aujourd’hui le procès intenté en 1 7 2 3 ,
autrement que les parties les plus intéressées le déci
dèrent en transigeant le 22 février 1755.
Mais si dans les quatre transactions qui existent, au
cun deshabitans ne se crut en état de prouver au sieur
Ma ré ch a l que les bois des Brosses était un communal
de B rout, croira-t-on que la Cour commencera par le
décider ainsi? Il faudrait en effet com m en ce r p a r - l à
pour en venir à juger que Belavoine et autres n’ont
pas pu transiger en i y 55 .
E t sur quelle loi encore serait fondée ce lle incapa
cité , quand il s’agirait d ’ un co m m u n a l ? Les habilans
n ’y ayant droit q u’à telle ou telle condition ne sont pas
réellement propriétaires en masse, et chacun de ce ux
qui y pr élen den t, peuvent aussi bien y abandonner leur
droit particulier, q u ’ils peuvent se priver, par le fait, de
toute participation. D e m ê m e , si l ’ un d ’eux est troublé,
il peut certainement se plaindre, sans attendre l ’exer
cice de l’aclion à intenter par la communauté , qui
souvent serait fort insouciante au tort fait à un seul.
« Il y a , dit le nouveau Denisart, une distinction à
«■faire, quant aux actions des communaulés d’habitans.
« Celles qui ont pour objet des droits ou avantages
« qui ne profitent pas à c h a c u n , co m m e pour les biens
<r patrimoniaux ou oclrois, doivent être suivies par le
« corps entier des habitans.
« S’il s'agit, au contraire, d ’objets dont chaque par« ticulier profile com m e com m un aux , chemins , e l c . ,
« 1111
�(49 )
« un seul habitant peut agir ou répondre à l’action qui
« lui est intentée. Il n’a besoin pour cela d ’aucun consen«• tement de la commune. Mais alors l ’avantage q u ’il
« en r etir e ra, s’il n ’est de nature à n ’être pas néces« sairement communiqué à. d’autres, ne profilera q u ’à
« lui; co m m e aussi lui seul supportera le poids des con« damnations s’il vient à succomber ( t. 4 p. 735 ). j«
C ’est par suite des mêmes principes, que la Cour
de cassation a jugé q u ’il y avait lieu à action possessoiré, relativement à un c o m m u n a l , parce qu’ un c o m
munal étai t 3 c o m m e toute autre propriété, susceptible
de possession et de prescription. ( Bull. off. arrêt du
i . er avril 1806 ).
Embarassé dans son m o y e n , le sieur Belavoine dit,
que par la transaction de 1 7 5 5 , il n ’est pas obligé
c om m e h a b ita n t, mais q u ’à la vérité il l’est com m e
héritier de son père.
Encore une fois l ’action du sieur de Rocliefort a été
intentée contre le sieur B ela vo ine, co m m e Be la voine,
011 fils de Belavoine , et point du tout co m m e habi
tant. Celui qui plaide pour sa propriété, assigne l ’usur
p at eu r, sans s’enquérir en quelle qualité il a voulu
commettre l’usurpation.
Si la com m un e de Brout plaide collectivement pour
réclamer un c o m m u n a l , il s’agira alors d’examiner
ses titres, car elle devra en produire co mme deman
deresse. M a i s , en ce m o m e n t , il ne s’agit ici que d ’un
procès intenté contre le sieur Belavoine; il conteste la
propriété du dem andeur, et celui-ci lui oppose un titre
i3
�(
5
0
. }
de propriété , sign é Belavoine. Par conséquent il est
ridicule de dire que Belavoine h a b ita n t, et Be lavoin e,
héritier, sont deu x personnages étrangers l’un à l’autre,
quand il ne s’agit en som me que d ’un seul individu.
L a transaction de 1765 est elle annullée par les lois
de la révolution ?
L e sieur Be lavoine croit l ’avoir rem ar qué ainsi dans
les lois des 28 août 1792 et 10 août 1793. D ’abord
ce n’est pas le sieur Belavoine qui peut faire l’appli
cation de cette l o i ; il y est no n-rec ev able , soit par
la transaction de 1 7 5 5 , soit parce que c'était ¡aux
co mmun es seules à réclamer.
L'art. 8 de la loi de 1792 dit que les communes
qui ju stijie r o n t avoir anciennement possédé des biens
ou droits d 'usage quelconques , dont elles auront été
dépouillées par les seigneur s, pourront se faire réin
tégrer, à moins que les seigneurs ne représentent un
litre authentique d’acquisilion.
. Mais le sieur Belavoine n'a pas pesé les expres
sions de cet article. C a r , avant t o u t , il aurait fallu
prouver la possession ancienne de la commune.
O r , q u’e s t - i l prouvé au procè s? L es habitans de
Broul avaient-ils avant 17 5 5 la possession exclusive
d u b o is, ou seulement la possession de V usage? Sans
doute le sieur Belavoine ne croira pas avoir justifié
que la c om m u n e a it anciennem ent possédé le bois ;
passons q u ’il soit justifié q u e l l e ait anciennement pos-
�( 5i )
sédé l ’usage ou plutôt le pacage; mais les liabitans de
Brout n’ont pas été dépouillés de ce p a c a g e , par la
transaction de
i y 55 ; donc
l ’article est sans appli
cation.
Quand les communes ne justifient pas avoir ancien
nem en t possédé une propri été , même les herme s et
vacans , qu’arrive - 1 - il ? L ’article suivant va nous
l ’apprendre.
Ar ticle 9. Les terres vaines et vagues, liermes, va
cans , etc. dont les communautés ne pourraient pas
justifier avoirs été anciennement en possession, sont
censées leur app arten ir , à moins que les c i-d e v a n t
seigneurs ne p rouven t, par titres ou par possession
e x c lu s iv e , continuée paisiblement et sans trouble pen
dant quarante ans, qu'ils en ont la propriété,
i L e sieur Belavoine a souligné avec soin les mots :
Possession e x c lu siv e , pour en conclure que le sieur de
Rocliefort ne l ’avait pas. Mais c ’est une erreur, parce
que les droits de simple pacage n ’emportent nulle
m en t la possession du fonds, et sont inutiles h la pres
cription; d ’où il suit que le sieur M aréchal a eu seul la
possession exclusive du bois, car on l’a m êm e pendant
l ’ usufruit d’une tierce personne.
L e sieur Belavoine n’ajoute pas que la m êm e loi
exige que les communes exercent leur action dans te
d éla i de cinq ans.
L a loi du 10 juin 1793 d it , en l ’article premier,
que « tous les biens c o m m u n a u x en généra l, connus
« sous les noms de terres vaines et v a g u e s , etc. a p 14
�( 5* )
« partiennent de leur nature à la généralité des h a * bilans , dans le territoire desquels ces co m m una ux
« sont situés
I-e sieur Belavoine n ’a pas manqué de souligner
encore les m o t s , terres vaines et vagues} et les mots,
appartiennent de leur nature.
'
Il fallait aussi souligner le com m en ce m en t de l ’ar
ticle
j
tous les biens com m u n a u x en général. Car cette
loi n’a voulu donner aux communes que ces sortes de
bie ns, et nullement les bois des seigneurs.
I/invocülioii perpétuelle du procès-verbal de 1 7 8 1
est de si mauvaise f o i , que le sieur de Rochefort a été
obligé de l ’extraire en entier dans le narré des f a i t s ,
pou r montrer combien peu il était vrai que le sieur
M aré ch al eût regardé ce bois, tantôt co m m e un v a
c a n t , tantôt c o m m e un com m un al de B r o u t, ainsi
que le sieur Belavoine l ’atteste toujours.
C e n’est pas par quelques mots isolés q u ’il faut juger
un a c t e , mais par son ensemble, et la cour s’est co n
v a in c u e , par l’ensemble de ce procès-verbal, que le
sieur Maréchal fils se prétendait propriétaire exclusif
du bois des Brosses, loin de convenir que c ’était un
vacant ou un communal.
N ’e s t - i l pas encore plus de mauvaise foi d’appeler
ce bois un vacant en 1 7 8 1 , lorsqu’ un procès-verbal de
la maîtrise constate q u ’il était bien planté dans une
moitié à peu près , et que l ’autre moitié seulement
était pillée et dégradée à cause du voisinage des do
maines.
�( 53
L ’ art. 8 de la loi du 10 juin 179 3 porte que la
possession de quarante ans, exigée par la loi de 1792,
pour justifier la propriété des seigneurs sur les terres
vaines et vagues, etc. ne pourra suppléer le tilre l é
gitime d ’acquisition.
L e sieur Belavoine trouve encore l'application de
cet article, en soutenant toujours que le bois des Brosses
était une terre vaine et vague ; mais pour faire cesser
tout d ’un coup sa prétention à la nullité de l ’acte de
1 7 5 5 , on abondera dans son sens, en supposant avec lui
que ce bois a été autrefois une terre vaine et v a g u e , un
ancien comm unal m ê m e , si cela lui plaît mieux. M a l
gré cela la transaction de 17 5 5 doit avoir tout son effet.
/
P o u r prouver ce m oyen décisif, et qui pourtant
est superflu, il ne s’agit que «le rappeler un seul fait,
et de citer deux arrêts parfaitement conformes à l ’es
pèce , rendus par la cour de cassation en l ’an 12 et
en 1808.
D ’abord la cour n ’a pas perdu de v u e , que lors du
procès-verbal de 178 0, le bois des Brosses a été cons
taté être planté en arb re s , dont une moitié en bon
état, et l’autre moitié dégradée.
11 n’y avait d ’inculte que le bois Servoiron et le
Bois-Blanc.
D ’après cela , voyons si le titre de 1 75 5 sera suffi
sant au sieur de R o c l i e f o r t , ou si, d ’après la loi du 10
juin 1 7 9 3 , il faut nécessairement représenter un titre
d ’acquisition. C ’est la l ’objet des deux arrêts de cassa-
�( 54 )
lion. Voici l’espèce du p r e m i e r , transcrit du.bulletin
officiel,page 33 7.
« A u mois de décembre 1 7 9 2 , les liabitans de Bellenod et Dorign y avaient formé contre le sieur D a m a s ,
leur c i - d e v a n t seigneur, une demande en revendica
tion de plusieurs h éri ta ges, et notam me nt d’ u n b o i s
situé sur le territoire de cette dernière c o m m u n e , sous
le prétexte q u ’ils en avaient été dépouillés par un abus
de la puissance féodale.
« Pour établir leur ancienne possession de ces héri
tages , ils avaient produit un acte en form e, de lu tran
saction passée entr’eux et leur seigneur, le 20 ,mai
i 583 .
« Elle avait été précédée d ’un procès alors pendant
aux requêtes du palais du parlement de D i j o n , dans
lequel ledit seigneur avait conclu à reconnaître et à d é
clarer que tous Les bois et broussailles ex ista n s sur ces
d e u x territoires, Lui appartenaient en tout droit de barialité, et fa isa ie n t partie de son dom a in e, sous La seule
charge d ’un droit d ’usage,don\ il convenait q u ’ilsélaient
affectés envers ces deux communes.
« L e s liabitans prétenda ie nt, au contraire, que lesdits bois et broussailles leur appartenaient en tout droit
de com m unaut é , et q u ’en celte forme ils en avaient
gardé la possession , saisine el jouissance, non-seule
ment pour les dernières années, mais encore de teins
immémorial.
« Par ki transaction ci-dessus é n o n c é e , une po rtio n,
�( 55 )
de ces mêmes bois fut adjugée au seigneur , pour en
jouir à l’avenir j m j oute propriété ( i ) ; et il fut dit que
tout l’excédant appartiendrait aux deux communes.
« A vue de ce titre, le sieur Damas a soutenu q u ’il
ne prouvait pas l’ancienne possession antérieure, telle
que l ’exigeait la loi de 1 7 9 2 , puisqu’elle était contes
tée par l ’ancien seigneur.
« Cependant un jugement du tribunal civil de la
C ôte -d ’O r , du 19 ventôse an 4 , a fait droit à la d e
mande en revendication , formée par les deux c o m
munes ; et sur a p p e l , il a été conlirmé par arrêt du
19 messidor en 10.
« Sur le pourvoi, etc.
Ouï M . Co cb a rd , rapport eur; les observations des
avocats des parties, et les conclusions de M. le procu
reur-général impérial >
« Attendu que les habitansde Bellenod et Dori gny
n ’ ont en aucune manière ju s tifié de leur ancienne pos
session des bois situés sur leur territoire, antérieure
à la transaction passée entr’eux et leur s e ig n e u r , le
20 mars 1783 ;
« Que cette même transaction ne p e u t , sous aucun
rap port, servir à la preuve de l’établissement de cette
ancienne possession; puisque l’on y voit que ledit sei( 1 ) L e'ili’oit de pacage conservé aux. habitans sur ladite por
tion réservde nu seigneur ( C e lle clau se r i est pas transcrite au
bulletin ; m ais le titre est rapporté p lu s au lo n g dans les ques
tion s de droit de M. M e rlin , et c e lle clause s'y trouve).
�( 56 )
gn e u r , avec lequel les habitans transigèrent, loin d’en
convenir et d ’en faire l’a v e u , soutenait et maintenait,
au contraire, que la propriété exclusive des bois con
tentieux lui a v a it , ainsi q u ’à ses prédécesseurs, tou
jours app a rt enu e, sous la charge d’ un droit d ’usage,
dont il les reconnaissait affectés envers ces derniers ;
Que, pour justifier leur ancienne possession, il aurait
fa llu que lesdits habitans s’étayassent de la production
de quelques titres antérieurs à ladite transaction, q u i Les
eussent déclarés p r o p r i é t a i r e s et possesseurs paisibles
des mêmes bots, mais que n’en ayant produit aucun ,
et ladite transaction ne pouvant établir en leur faveur
une possession légale et non contestée, puisque tout au
contraire elle était réclamée par leur ancien seigneur, il
en résulte q u ’elle n’a statué que sur un fait douteux et
incertain , ce qui formait précisément l ’objet du litige
terminé par cette vo ie; cl on il suit que la cour d’appel
de Dijon, en prenant pour base de sa décision, la m êm e
transaction dont il s’a g it, e t , en supposant q u ’elle attri
buait auxdils habitans une possession antérieure à icelle,
a fait une fausse application de l’art. 8 de la loi du 28
août 1792.
« Par c e s considérations , la cour casse etc. »
;
l
Parmi la multitude d’arrêts rendus sur cette matière,
le sieur Belavoine conviendra bien q u ’on lui a choisi,
tout d’ un coup , celui qui s’appliquait le m ieux; car il
avait précisément à statuer sur un titre où abondaient
toutes les expressions féodales quo le sieur Belavoino
a
�îi
C 57 )
parsemées dans soti mémoire en lettres majuscules/
L à , le seigneur parlait aussi de broussailles ,'e t il pré
tendait, com m e le sieur M aré ch al , que tous les bois et
broussailles existant sur deux territoires dépendaient de
son d o m a i n e , en tout droit de b a n a lité, ce qui était
bien plus féodal que la transaction de 1755. Cependant
ce titre, que le sieur Belavoine jugerait fort incivique,
a trouvé grâce devant la cour de cassation.
L ’espèce du deu xième arrêt est plus favorable encore
a u sieur de Rocliefort ; car déjà les habitans s’ étaient
partagé co m m e communal le local contentieux.
L a dame Blosseville possédait la ferre de Clairfeuille.
Dans l’étendue de cette terre , se trouvaient des
côtes et pâtures, situées dans le territoire de la com m un e
de Montrosier.
, Ap rès la loi du 28 août 1792 , cette com m un e s’en
em p a ra , sous prétexte que ces terrains étaient co m m u
naux , de leur nature ; et en l ’an 2 , elle les partagea.
Ap rès la loi du 9 ventôse an 1 2 , la dame Blosse
ville se pourvut devant les tribunaux contre les divers
détenteurs, produisit des titres, etc.; plusieurs habitans
a dhérèrent à la d e m a n d e , et se désistèrent.
Mais huit habitans soutinrent que les titres produits
par la dame Blosseville ne lui donnaient pas la pro
priété des biens q u ’elle réclamait, et que d’ailleurs ces
titres étaient proscrits par les lois des 28 août 1792 et
10 juin 1 7 9 3 , co m m e étant émanés de la puissance
féodale ; ils ajoutaient que les biens en litige étaient
i5
�' C 58 )
des terres vaines et vagues, qui, de leur nature, appar
tenaient, d ’aprèskrloi de 1793, à la c om m un e de Montrosier, sur le territoire de laquelle elles étaient situées.
L e tribunal civil de Neuchatel maintint les liabitans
dans leur possession en adoptant leurs moyens. Ce juge
ment fut confirmé par la cour d ’appel de Rouen.
.
Mais l’arrêt de cette cour à été cassé , le 27 avril
1808 , par les motifs qui suivent :
«• Atte ndu que l ’art. 8 de la loi du 28 août 1 7 9 2 , ne
permet de réintégrer les communes que dans les biens
et droils q u’elles justifieraient avoir anciennement pos
sédés, et dont elles auraient été dépouillées par les
ci-devant seigneurs; que l ’art. 9 de cette loi n’adjuge
aux co m m u n e s , sans exiger la justification d ’ une an
cienne possession, que les ferres vaines et vagues, gastes,
i a n d e s , biens, liermes ou vacans et garigues : ce qui
ne peut s’appliquer qu’à des biens incultes; et encore
sous la condilion quelles en formeront la demande
devant les tr ibun aux , dans le d éla i de cinq a n s; que
la distinction faite par ces deux articles n’a pas été
annullée par la loi du 10 juin 1 7 9 8 ; attendu q u ’il est
constant au p r o c è s , et reconnu par les défendeurs,
qu’au m oins une partie des fo n d s dont il s’agit était
en culture lorsque la commune s’en est emparée, de son
autorité et sans ordonnance de justice, et q u ’elle l’était
aussi lorsque les lois de 1792 et de 179 ^ , sur les biens
c o m m u n a u x , ont été rendues; que la preuve de ces
laits résulte etc...........Et attendu que la cour d ’a p p e l ,
en adjugeant aux liabitans de Montrosier des fonds qui
�(
5
9
}
'étaient en culture, sans exiger la pr euve d’ une ancienne
‘possession de ta commune , et sans que ladite c o m
m un e eût formé aucune demande à ce sujet devant les
tribunaux, et , en appliquant à des fonds de cette na
tu re , les règles établies pour les terres vaines et vagues,
et autres biens incultes, par l’art. 9 de ladite l o i , et
par les art. 8 et 9 de la sect. 4 de la loi du 10 juin
1 7 9 3 , a fait une fausse application desdites lois, et a
violé l ’art. 3 de celle du 28 août 1792 ; casse, etc. «•
Que deviennent maintenant les preuves invincibles
‘du sieur B e la v o in e, et sa découverte de féodalité?
11 a fait remarquer a u contraire, par l’exemple de ces
arrêts, i.° que quelques habitans peuvent transiger ou
être assignés pour un terrain prétendu par eux être un
co m m u n a l , et mêm e partagé co mme tel; 2.0 q u ’une
comm une n’a pu revendiquer un terrain, c omme usurpé
par un acte féodal, q u’à la charge d ’exercer sa demande
dans les cinq ans de 1792; 3 .° que si lors d’ une tran
saction, il était contesté ou douteux que le terrain ap
partînt aux habitans, la transaction 11’a rien de féodal,
et doit être exécutée.
Concluons donc que le sieur de Rochefort n’a besoin,
en cette cause, que des actes de 1 7 5 5 , 17 5 7 et 1 7 5 9 ,
pour assurer sa propriété, et que ces actes sont un titre
irréfragable contre les successeurs de tous ceux qui y
ont été parties.
C ’est là tout ce q u ’il s’agit de savoir dans le m o
ment actuel; car il n’exisle pas de procès entre la com -
�(6 o )
m u ne de Brout et le sr. de R o c h efort , et il ne peut y en
avoir sur app el, et sans les deux degrés de jurisdiction.
N e perdons pas de vu e aussi qu'il n'est question au
procès que du bois des Brosses, qui était en produit
à l ’époque de la révolution, et nullement du bois Servoiron ni du Bois-Blanc, à l ’égard desquels on aurait
pu tout au plus élever la difficulté de l’application des
lois de 1792 et 1793.
Il
ne resterait maintenant à s’occuper que de la
partie du mémoire du sieur B ela vo ine, dirigée contre
l e sieur D e c o m b e , mais ce n’est point au sr. de Rochefort à y répondre. L a gravité des inculpations faites au
sieur D e c o m b e ne touche au procès actuel que par des
moyens si obliques, q u’il est plus court et moins oiseux
de ne pas en scruter les vrais motifs.
L a c o n testat ion a été déjà assez compliquée par la
multitude d ’actes et de mots dont le sieur Belavoine
a voulu tirer parti. Et cependant de quoi s’agissait-il ?
U n fils qui plaide contre la transaction de son p è r e ,
avait-il quelques m oy en s à chercher dans de prétendus
titres datés d ’ un siècle ou deux avant
cette tran--
saction? Voilà cependant toute la question de la cause ;
ainsi pour la discuter, il n’était besoin ni d ’injures ni
de voies extraordinaires, pas plus que la Cou r n'aura
besoin de consulter les titres de la com m une de Brout
ni les lois féodales , pour en trouver la solulion.
De
ROCHE FR O T-D A LLY.
M . e D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e T A R D I F , avoué-licencié.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Rochefort-Dally, Jean-Jacques-Marie. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Tardif
Subject
The topic of the resource
communaux
droit de blairie
droits féodaux
pacage
Caponi (Alexandre de)
triages
vaine pâture
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Jean-Jacques-Marie Rochefort-Dally, habitant à Artonne, intimé ; Contre sieur Claude Belavoine, du lieu d’École, mairie de Brout, appelant ; En présence du sieur Décombe, des Morelles, maire de Brout, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
1582-Circa 1809
Avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
60 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0335
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Artonne (63012)
Broût-Vernet (03043)
Combrode (63116)
Lafont-de-saint-Magérant (terre de)
Le bois des Brosses
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Domaine public
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Caponi (Alexandre de)
communaux
droit de blairie
droits féodaux
pacage
triages
vaine pâture
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O B SE R V A TIO N S
P O U R
Les Q U A Y R U T ,
T H O M A S
T RI B UN ,
et V I L L E M A U D ,
in t im é s ;
d
'a pp ej i
de Rion:
C O N T R E
A n t o in e
Q U A Y R U T ,
a p p e la n t
C h arles Q uay r u t a-t-il été comptable envers A ntoine, M arie et Magdeleirie
Q u ayru t, ses frère et sœ urs? ,
A n toin e, qui soutient aujourd’hui qu’il ne l’étoit pas , a dit le contraire deux
fois ; 1°. par un exploit du 2 5 nivôse an 5 ; 20. par l’exploit même de sa demande.
Aujourd’hui il objecte que Charles, n'étant pas majeur au décès de son père,
n ’a pas été protuteur ni comptable , d’après la jurisprudence d’un jugement
du 1 3 nivôse an 10 ; que ses sœurs ont reconnu en majorité avoir perçu leur por
tion de mobilier à l'échéance de chaque succession, avoir donné leur consente
ment aux actes passés par Charles, et avoir joui chaque année en commun;
q u ’ainsi elles ne peuvent s ’élever contre leur fait ; qu’enfin Charles les a ins
truites suffisamment lors de leurs cessions dé 1789 et de l’an 6.
Ce qu’il y auroit de plus fort dans ces objections seroit la jurisprudence du
tribunal, si elle étoit applicable.
.
Mais le jugement opposé étoit dans une autre espece : c étoient des frères e t
sœurs qui avoient habité ensemble, et il n ’y avoit pas d’actes faits par un seul
pour tous; il n’y avoit que la présomption de jouissance exclusive par l’a îné, à
cause de son âge plus avancé.
Aussi les motifs du tribunal sont assez précis, pour qu’on ne puisse pas abuser
d e sa jurisprudence : « A tten d u , est-il dit, qu’ il n’y a pas de preuve de gestion
exclusive. » L e dernier m otif prouve aussi qu’il ne s agissoit que de simple
jouissance.
T
L e tribunal a si peu entendu fixer pour jurisprudence qu’il falloit être indiqué
pour tuteur par la coutume , au moment du décès du p è re , pour être protuteur
et comptable, qu’il a jugé depuis, le 18 ventôse an 10 , dans la cause des Rey et
R o u gie r , qu’un b e a u -frère,. demeurant dans la maison, avoit été comptablé
envers les frères de sa femme, mineurs au décès du père, par cela se ul qu’étant
mineurs quand il étoit majeur, il étoit présumé avoir joui pour e u x .;L a cession
q u ’ils lui avoient consentie, et même une ratification, ont été déclarées nulles
comme non précédées d’un compte.
■i
Comment donc Antoine Quayrut1 a-t-il osé prétendre que , par un renversement
total.de la jurisprudence constante et des principes, le tribunal vouloit à l’avenir
I
�(
2)
adopter des actes suspects de fr a u d e , contre le texte précis des ordonnances de
j (j et de 1G 6 7 ?
il n 'y a eu diversité d ’opinions que sur la question des d ix an s, com battue
entre l’ordonnance de i ç) et les m axim es de l ’arrêt de 1 7 0 6 ; m axim es adoptées
par Je parlement tant q u ’il a régné. L a jurisprudence en est revenue aux dix
ans ; mais les principes sur l ’incapacité des comptables n ’ont reçu aucune atteinte.
Personne ne conteste que la première règle dans les ventes est de savoir ce
qu on v e n d ; que dans le cas m ême où la chose vendue étoit distincte, il y avoit
^ action rescisoire; et que dans le cas où elle n ’étoitpas distincte, com m e dans les
droits successifs, il falloit que l'acheteur et le vendeur eussent fait le jtictum retis ,
c est-à-dire, que l’un n ’eût pas su plus que l’autre ce qu’ il y avoit dans le filet.
H o r s de cela il y a fra u d e , on n ’en a jam ais d o u té ; et ja d is , dans ce c a s ,
les cessions faites étoient nulles : aujourd’hui encore le C od e civil ne valide que
celles qui sont sans fra u d e. ( L i v . III, art. C L X X I X . )
C o m m e n t donc contester de bonne foi que Charles Q u ay ru t ait été com ptable,
depuis 17 7 8 jusqu’à l’époque des cessions qu’ il s ’est fait consentir? tous les actes
écrits de la gestion des affaires sont de son fait.
C o m m e n t concevoir que 6es sœ u r s , et m êm e A n to in e , partie a d v e rse , aient
.joui et géré en c o m m u n , com m e on le leur a fait d éclarer, lorsque dans tous
.les actes, les traités, les ventes et acquisitions, on ne voit toujours que C harles
Q u ay ru t se u l?
V eu t-on dire que c ’étoit pour éviter les frais d 'u n e p ro cu ration ? mais les actes
faits dans le lieu m ême n ’en avoient pas b e so in ; il falloit appeler les sœ u rs, si
on les comptoit pour quelque chose.
Charles Q u a y r u t , allant en A n jo u acheter les droits de son onelr» contre la
succession c o m m u n e, étoit chargé de payer 200 fran cs à ses sœurs : il ne leur
en a jam ais dit un m ot. Il y a là d e u x procédés d ’infidélité et de fraude.
Il a traité en 17 8 2 sur la succession personnelle de cet o n c le ; il n ’ a jamais
dit ù ses sœurs le résultat de ce traité : cela seul annulleroit la cession faite. C a r
com m ent o n t - e l l e s pu connoltre lu chose v e n d u e , m ême par approxim ation?
S ’il y a frau d e et nullité quant à la succession de l’o n c le , il y a nullité pour le
t o u t ; car ki vente est pour un seul prix.
D an s la cession de 17 8 9 il n ’a rien dit de la créance M andon ( / p liv. 1 4 s. )•
D a n s le traité de l’an 6 il Pa réduite à 2/(o francs on principal et intérêts.
Il n ’a parlé
dans l’une ni dans l ’autre d ’ un traité fait avec
,
. les T h o m a s , en
1 7 8 8 , portant établissement d \m e servitude pour i o francs q u ’il a reçus.
55
53
5
5
1
L ’inventaire, fait après son décès, mentionne, i°. un échange qu’il a i\.it on
1 7 7 8 ; 2*. plusieurs ventes d’immeubles à son profit; f>°. une sentence consulaire
par lui obtenue en t 7 7 9 ï 4°* UT1f! procédure suivie en son nom dans le même
tem ps; f>°. une quittance par lui donnée en 1781 ;■(?. une obligation de i7^/>> rtc.
1
C es actes, connus de adversaire s e u l , qui en est dépositaire, et q ,M 8 J'st tout
ap prop rié-au décès du frère c o m m u n , achèvent de prouver tout à la lois que
Charles Q uayrut g é r o il, plaidoit et recevoit s e u l, sans que ses sœurs lussent
jam ais comptées pour r i e n , m ême dans les p r o e î s ; ils prouvent encore (juc
Charles Q u a y ru t, en faisant les affaires de la mai so n, les iaisoit au moins Ircsbien pour son c o m p te , puisqu’il achetait des im m eu b les, m ême avant sa nui-
�( 3)
jo r i t é , tandis que scs sœurs n'ont e u , en se m a r ia n t, que ce q u ’il a bien voulu
leur donner. E t qui croira que des filles, généralem ent plus économes que des
jeunes g e n s , n ’eussent fait aucune épargne, si elles eussent pris la moindre part
dans les jouissances, le m ob ilier, les ach ats, les ventes des b e s tia u x , etc .?
„ D an s tous les procès où des cessions étoient attaquées, on n ’a p e u t - ê t r e
jamais réuni autant de preuves écrites d ’une gestion exclusive.
M a is , dit l’adversaire, vous avez reconnu, en m ajorité, avoir joui en c o m m u n ,
avoir pris le mobilier à chaque ouverture de succession, avoir consenti à ces actes.
R em arquons d ’abord que si l’acte pèche en lui-même par le défaut d ’un com pte,
toutes les déclarations pèchent aussi. Elles étoient en effet une précaution néces
saire, l ’ouvrage du comptable plutôt que celui du cédant, com m e dit C h ab rol.
( T o m . i , pug. 1 * )
avant de mériter une pleine c ro y an c e, le com ptable
devoit instruire, et non exiger des déclarations tendantes à la décharge im plicite
du compte, pour nous servir des expressions littérales d ’un jugem ent du tribunal
d e cassation, rendu en semblable espèce. ( messidor an 4> l)ull. )
C om m en t ici encore, ajouter foi à ces d éclarations, lorsqu’ elles sont démenties
p a r des faits évidens , et d 'u n genre absurde?
D ém enties par les faits. D epuis 1 7 7 8 jusqu’aux cessio n s, on voit Charles dans
tous les actes c o n n u s, on ne voit pas une seule fois ses sœurs. Charles stipuloit
pour tous ses cohéritiers sans les appeler, donc il n ’y avoit pas gestion com m une.
.Ainsi la fausseté de la déclaration contraire est prouvée par écrit.
D ’un genre absurde. E n effet les deux sœurs ont dit avoir pris leur portion
de mobilier , à l’échéance de chaque succession. O r au décès du père ( 1 7 7 2 ) ,
l'une avoit trois ans et l’autre huit : au décès de la m ère ( 1 7 7 5 ) , l’une avoit
s ix ans et l ’autre onze. E lles ont dit avoir consenti à l’ acte im portant de 1 7 8 5 ,
où Charles ralifioit une cession de sa mère , après un procès gagné , après un
-jugement qui annulloit cette cession ; m ais alors elles étoient m in eures, la cadette
avoit quinze ans et demi. O r qui croira qu’on ait cherché le consentement de
d eu x filles mineures pour une vente d ’im m eu b le s? E t en quoi ce consentement
avoit-il de la v a le u r?
T o u t se réunit à vicier les deux cessions de 17 8 9 et de l’an 6 , m algré les
fausses déclarations y insérées par le notaire , ho m m e de confiance des frères
Q u ay ru t, à tel point q u ’ il s’est attaché aux.audiences du trib u n a l, sur la cause
44
3
qu'il y
com m une.
Charles Q uayrut a été évidem m ent comptable envers ses sœurs , com m e
envers son f r è r e , quoiqu’il ne le prétende plus aussi po sitivem ent; il l’a été au
titre d ’ administrateur ou p ro lu te u r, et de negotinnun gestor.
Il a été adm inistrateur, a y an t ou n ’ayant pas le consentement de ses sœ urs;
c a r , dans les àct'es-qu’il a prfâsés., .il sfcst fa it fort pour elle s; il a promis leur
faire agréer cl ratifier.
. ,.
A in si dans les actes qu’ il «‘ com m encés en m a jo r ité , il n ’ a plus d ’/’mf/o ins
pecta à in v o q u e r, ces actes 11’étoient plus une suite nécessaire de sa gestion en
m in o r ité ; il g éro it, m a j e u r , , pour des sœurs m in eures, non emancipecs.
�D é sig n é p a r la coutum e, com m e le premier dans l ’ordre des tutelles, c’est lui
q ui au ro it été nom m é s ’il eût convoqué la fam ille ; il a m ieux aimé gérer et passer
des actes im p o r ta n s , sans m êm e faire ém anciper ses sœurs ; donc l’obligation
q u ’il a contractée en se faisan t fo rt pour ses sœ urs, est une obligation de com p
tab le, de pro tuteur ( f f . qu i pro tutore gerunt ).
C e m oyen paroît pu issan t, et ne se détruit par aucun des faits de la cause.
L e premier acte des filles devenues m ajeures a été de vend re, sans q u ’elles aient
pu connoitre un seul instant ce q u ’elles vendoient.
Charles Q u ay ru t a été negotiorum gestor, puisqu’il n ’avoit pas de procuration
éc rite, et q u ’il ne pouvoit pas m êm e en avoir de ses sœurs non émancipées.
Or le negotiorum gestor est tenu de l ’action en reddition de com pte, com m e
le tuteur ; il doit, com m e le tu te u r, actus sui rationes red d ere, suivant les
expressions de la loi qui s o n t , com m e on v o i t , les m êmes que pour le tuteur.
( L . 2 , f f . N eg. gest. ) Il doit les rendre a d ex a c tissimam diligentiam. ( Inst. de
o b . q u ae ex quasi contr. nasc. )
L ’ordonnance de 1667 déclare tout adm inistrateur c o m p ta b le; l ’ordonnance
de 1 5 5 9 défend toutes dispositions au profit des tuteurs et administrateurs, avant
q u ’ils aient rendu le compte q u ’ils d oiven t; et c’est sur le m o t if de cette ordon
n a n c e , que le tribunal de cassation , se c on form an t en cela à une jurisprudence
de deux siècles, a annullé une cession faite à un com ptable, qui cependant n ’étoit
pas tuteur , par cela seul q u ’il y trouvoit la décharge im plicite a e son compte.
L ’arrêt même de 17 0 6 étoit dans les termes de la cause ; c’étoit un fondé de
p o u v o ir, étran ger, qui en co re avoit rendu un c o m p te , m ais qui n ’y avoit pas
donné assez de d étail; il fut jugé que n ’a y an t pas suffisam m ent instruit ceux à qui
il devoit ce compte , il n ’avoit pu valablem en t traiter avec eux sur ce q u 'ils ne
connoissoient pas aussi-bien que lui. A in si ubi eadem ratio , etc.
»
C e que dem andent les intimés ne tend pas à obtenir une reddition de compte
coûteuse et difficile ; c ’est au contraire pour empêcher q u ’ il n ’en soit rendu un
à l’appelant qui le d em ande, quoiqu'il se soit ingéré dans les a f f a i r e s , com m e
cela est prouvé par quelques quittances. A ntoine Q u ay ru t ne s ’est absenté que
pendant cinq à six ans , et pour quelques mois seulement. A son retour il participoit aux a ffa ir e s , qu an d s es. sœurs gardoient les troupeaux. C e q u ’il veut
obtenir laisseroit les parties dans un long prôctis, tandis nue la dem ande des
intimés ne tend q u ’a obtenir un égal d r o it, pour tout c o n fondreiet compenser
dans la succession de C h a r le s Q u a y r u t, dont chaque-partie est héritière, et à la
quelle il s ’agira seulement d ’ajouter en rapport les som m es reçues par chaque
cohéritier.
.
A in si les premiers juges ont été conduits par la loi, et par un m o y e n p u issant
de considération , à adopter un mode d e juger qui amène la fin des procès entre
les parties, et q ui tend à l’égalité, considérée de tout temps com m e l'a m e des
partages.
D E L A P C H IE R homme de
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A R I OM-, de l'imprimerie du L a n d r i o t s e u l i m p r i m e u r d u t r i b u n a l d 'a p p e l
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Quayrut. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
abus
tutelle
Description
An account of the resource
Observations pour les Quayrut, Thomas et Villemaud, intimés ; contre Antoine Quayrut, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1785-Circa An11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0333
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0735
BCU_Factums_M0241
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abus
Successions
tutelle
-
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PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
EN R É P O N S E
A CONSULTATION SIGNIFIÉE,
POUR
Antoine-Am broise,
J e a n -B a p tiste
et
F r a n ç o is PÉRISSEL, B o n n e t t e PÉRISSEL,
le cito yen M O R T I L L E T , son mari, e t M a r
g u e r i t e PERISSEL, intimés ;
/
„
Ck^'' ii ' iwi{ùJv/'tUA,( ÙI /
CONTRE
A
nnet
'
P E R I S S E L , avoué au tribunal d'appel
de Riom appelant.
L citoyen Périssel est héritier contractuel de ses père'
E
et mère. Il a joui de leurs biens depuis 17 9 1, et en a
vendu plus des deux tiers. Maintenant, pour ne pas payer
à ses frères et sœurs leurs légitimes conventionnelles, il
A
�(
2
)
veut les forcer ù venir à partage avec lui de ces mêmes
Liens , qui se composeront en ce cas, i°. du tiers qui
lui reste; 2°. d’autant de procès qu’il a fait de ventes.
Libre en 1792 de n’être pas héritier, il a traité pour
le redevenir. Libre de nouveau en l’an 2 , il a traité
encore. Quand il a pu partager, il n’a pas voulu de par
tage : le désir ne lui en est venu qu’après avoir tout
innové et dénaturé.
(
Vaincu par les circonstances, le citoyen Périssel a
voulu dissimuler ou affoiblir au moins les plus déter
minantes. Il le falloit sans doute pour obtenir un avis
favorable de jurisconsultes célèbres, (1) qui, s’ils eussent
eu tous les actes de la famille au lieu d’un mémoire
infidèle, n’eussent pas basé leur décision usurpée sur
des lois que le citoyen Périssel s’est lui-mcme rendues
étrangères.
Les légitimâmes Périssel ne s’effraieront donc pas de
cette nouvelle arme de leur frère; ils osent croire au
contraire qu’ils la neutraliseront dans ses mains, en rap
pelant les faits avec plus de détail et d’exactitude.
F A I T S .
Pierre Périssel et M iclielle Labry, père et mère des
parties, ont laissé huit enfans.
( 1 ) 11 étoit peut-être inconvenant de la part du citoyen Férissel,
de signifier au lieu de causes d ’appel, une consultation imprimée
des citoyens Bigot - Préarneneu, G renier, Favard cl Iicrgier. 11
sem ble que ce soit vouloir capter les suffrages par le poids des
signatures. Le respect du aux tribunaux ne perrnettoit pas autre
fois de signifier des consultations comme un acte de procédure.
�( 3 )
Gilberte fut mariée au citoyen Colange, en 1767 :
Marianne avec le citoyen Coudert, en 1773. Toutes deux
furent dotées effuso sermone, et forcloses, mais sous fa
culté du rappel. Les autres enfans sont les parties qui
plaident.
L e 20 septembre 1786, le citoyen Périssel père vendit
à Annet Périssel, appelant, son office de procureur en
la sénéchaussée d’A u vergn e, pour la somme modique
de 14,000 francs. L ’acte porte quittance de 6,000 francs;
et il fut dit que l’acquéreur seroit dépositaire des 8,000 fr.
restans jusqu’au décès de son p ère, pour les rapporter
à sa succession.
L e 4 mai 1789, Annet Périssel se maria avec Gilberte
Albert.
Il fut institué héritier universel de ses père et mère,
sous réserve de 2,000 francs, à la charge de payer les légi
times suivantes : i°. à chacun de ses trois frères, 12,000 fr. ;
2°. à Bonnette, sa sœur, 10,000 francs-, 30. k M arguerite,
autre sœur, 8,000 francs; 40. à la dame Colange, un sup
plément de ,ooo francs; ?. à la dame Coudert, un
supplément de 4,000 francs.
Ces sommes furent dites payables, moitié deux ans
après le décès du père, et moitié dans l’an du décès de
la mère; et si celle-ci décédoit la première, moitié après
le décès du père, et moitié un an après le premier
payement. Enfin, il fut dit que dès le moment du décès
du sieur Périssel père, le futur se mettroit en possession
de l’universalité des successions de ses père et m ère, à la
charge de payer à sa mère une pension viagère convenue.
L e sieur Périssel père est mort en 1790. A ses derA a
5
5
�(
4
)
mers momens il eut une inquiétude : son héritier-, en
achetant à très-bas prix un des meilleurs offices de pro
cureur de la sénéchaussée, avoit toujours espéré que
son pèi'c lui donneroit quittance des 8,000 francs qu’il
avoit en dépôt; et c’est alors qu’il renouvela plus sérieu
sement ses tentatives. Un de ses raisonnemens principaux
auprès du père , étoit la charge trop considérable des
légitimes, et la menace d’abandonner l’institution pater
nelle, pour faire perdre les supplémens des deux filles
fo rclo seset pour que les légitimes qui étoient faites ejfuso
sermonc 11e fussent pas imputées sur les biens de la mère.
Cette menace frappa peut-être trop le mourant, qui
voulut consolider son ouvrage. Il fit un testament le
29 septembre 1790, par lequel il légua aux dames Golange et Coudert les mêmes sommes de ,000 francs et
de 4,000 francs qu’il leur avoit promises ; et prenant tout
à fait à la lettre ce que lui avoit dit son fils, il ajouta
que s’il abdiquoit l’institution d’héritier, et si cette abdi
cation diminuoit les légitimes de ses puînés, les deux
legs qu’il venoit de faire souffriroient une diminution
proportionnelle.
L e père mourut cinq jours après ce testament. Annet
Périssel, s’abusant toujours sur l’imputation des légitimes,
voulut abdiquer l’institution paternelle. En effet, il déclara
lors d’un inventaire du 24 mai 179 1, qu’il abdiquoit reflet
de l’institution contractuelle faite à son profit par son père,
pour s’en tenir à sa portion héréditaire dans les biens pa—
lcrneïs, se réservant l’ellet de ladite institution pour lesbiens maternels : cette déclaration fut acceptée par ses frères
et sœurs, sous la réserve de leurs moyens contre la retenue
que leur frère entendoit faire des biens maternels.
5
�(
5
)
L e citoyen Périssel ne tarda pas à se désabuser du sys
tème faux qui l’avoit engagé dans une démarche dont
il se repentoit. Il proposa aux puînés de rétablir les
choses comme elles étoient avant son abdication» ; et
comme il y avoit des mineurs , comme il vouloit
redevenir héritier avec sûreté, il assembla un bureau
de famille composé de six hommes de loi et de deux
experts. Ce bureau rendit une décision arbitrale le 28
janvier 1792 : cette décision fut adoptée par les parties,
et homologuée le 7 avril.
On y voit qu’Annet Périssel ayant proposé à ses frères
et sœurs de laisser les choses dans leur premier état,
c’est-à-dire, de laisser subsister sur sa tête l’institution
faite en sa faveur par ses pèi*e et m ère, aux mêmes
clauses, charges cl conditions portées par son contrat
de mariage ,• sur cette proposition les parties nomment
un bureau de famille.
L e bureau entend le rapport des citoyens M aneville
et Savarin, et s’occupe de former la masse tant des biens
de la succession de M e. Pierre P é r is s e l, que de ceux
de dame M ichelle L abry ; après cela, pour la sureto
de l’appelant contre les mineurs, le bureau dit que, toutes
charges déduites,.il revenoità peine à l’héritier une por
tion égale h celle de ses frères et sœurs; qu’un partage
seroit long et difficile, en raison des reprises delà m ère,
compensations, et rappel des filles forcloses..
E t v u , est-il dit,, le consentement par écrit donné
par dame Michelle Lnbry, à ce que ledit Annet Périssel
exécutât, tant à son égard qu’à celui de ses frères et sœurs,
les clauses et conditions de son contrat de mariage j le
�'
.
(6 )
bureau, pour le bien général des cohéritiers, est d’avis
que les offres fa ite s par A n n et Périssel à ses fr è r e s et
sœ urs, soient par eux acceptées comme avantageuses.
Eu conséquence, leslégitimaires déclarent qu’ils accep
tent lesdites çffres ; consentent que leur frère exécute
toutes les dispositions portées par son contrat de mariage,
à condition d’être renvoyés indemnes de toutes charges
des biens des père et m ère, sans qu’en cas de recherche,
de la part de quelqu’un d’eu x, ledit Périssel puisse se
dispenser d’exécuter les engagemens portés par son con
trat de max-iage, vis-à-vis des autres.
A u moyen de qu oi, l’abdication faite par l’intimé,
et l ’acceptation d’icelle, dans l’iiiventaire, demeurent
comme non avenues.
Voik\ donc Annet Périssel en possession des biens de
ses père et m ère, aux charges de son contrat de ma
riage; et loin d’avoir du regret, comme il le dit, d’être
redevenu héritier, il se trouva fort bien de jouir de tout,
de vendre ç;\ et là des immeubles, et il craignit, au con
traire, que la révolution ne lxii ôtât la qualité dont il veut
aujourd’hui se dépouiller lui-même.
La loi du 17 nivôse ordonnoit le partage, par égalité,
de toutes les successions ouvertes depuis 1789 ; et dès - lors
venoit fort à propos le relever de ses engagemens, s’il
les eût Irouvés onéreux : deux années de jouissance lui
avoient donné le temps de s’en apercevoir.
Il fit donner une citation à ses frères et sœurs, le 7 ger
minal an 2, sous prétexte de se concilier sur le partage
par égalité voulu par la loi; mais, au fait, pour les faire
réunir et consentir de nouveau qu’il demeurât héritier.
�7
C )
Il conviendra, sans cloute, qu’il les a engages à souscrh’e à ces arrangemens , en leur dictant, lui-m êm e, des
procurations en blanc, pour consentir, soit au partage
des biens des père et mère tout à la fois, soit au main
tien des précédentes conventions.
Il fut passé un second traité, le 4 prairial an 2 , en
présence de deux hommes de lo i, pris pour tribunal de
famille.
Pour satisfaire à la loi du 17 nivôse , il falloit parler
de partage et d’égalité, avant de convenir d’autre cliose.
L ’acte contient, à cet effet, deux parties très-distinctes,
que le citoyen Périssel veut empêcher d’apercevoir.
Les arbitres reconnoissent, d’abord, qu’il paroît pres
que impossible de faire un partage égal des biens du
père , parce qu’ils sont confondus avec ceux de la mère.
Sur cela, ils pensent que les parties doivent inviter leur
mère à consentir que ses biens se partagent en même
temps. Michelle Labry intervient, et dit, que pour main
tenir l’union entre ses enfans, et leur témoigner son
attachement, elle souscrit à ses propositions, pourvu que
le partage se fasse par égalité entre ses enfans.
Après cet hommage rendu à la loi du 17 nivôse, les
arbitres se sont occupés, disent-ils, en présence de toutes
les parties, et après la fixation faite de la valeur des
biens paternels et maternels, et composer la portion
revenante à chacune.
D ’après cette opération, est-il d it, les parties s’étant
convaincues que l’institution d’héritier, faite en faveur
d’Annet Périssel, ne leur étoit point préjudiciable, clc.
les parties traitent et transigent comme il suit :
�(
8
)
Annet Périssel s'oblige de payer à ses frères et sœurs
le montant des légitimes, telles quelles s ontfix é e s par
son contrat de m ariage, dans les termes y stipulés,
sans, qu’en cas de recherche par quelqu’un d’e u x , il
puisse se dispenser d’exécuter tous les payemens portés
par son contrat, vis-à-vis les autres..L e s légitimaires
ratifient, à cet effet, Tinstitution portée par ledit con
trat de m ariage, ainsi que la sentence du tribunal de
fam ille, du 7 avril 1792; se départant, en tant que de
besoin, de toute propriété sur lesdites successions, vou
lant que leur frère en jouisse et dispose : ce q u i est
accepté par lui.
_ M ichelle L a b ry intervient encore à cette nouvelle
convention, et consent aussi qu’Annet Périssel, son fils,
jouisse et dispose, comme il Ta f a i t jusqu i c i , x'atifiant,
à cet effet, le délaissement de la propi'iété et jouissance
de ses biens, tel qi£il est porté par le contrat de ma
riage de 1789.
L e citoyen Périssel avoit bien ses raisons, lorsqu’il
étoit en l’an 2 moins difficile qu’aujoui-d’liu i, pour rester
héritier : le moment étoit opportun pour vendre et
liquider la succession.
L ’objet le plus considérable des biens de la mère, étoit
un domaine appelé de la Barge; il le vendit au citoyen
Larue, moyennant la somme de 33,000 francs, environ.
Laruc, pressé de payer, avoit consigné le prix de son
acquisition. L e danger étoit urgent; il falloit, pour écarter
l’effet de celte consignation, une tournure quelconque.
Comme la mèi'e étoit vivante, elle seule p o u v o i t arrêter
L arue, cil l’assignant, comme propriétaire du domaine,
II
�*
(
9
)
Il falloît une occasion aussi im pérative, pour l’engager
à s’y prêter : sans cela, le scrupule de sa conscience lui
eût fait rejeter toute proposition de x*evenir conlre ses
engagemens, même en apparence. A vec un peu plus de
mémoii’e , le citoyen Périssel eût dit ce qu’on vient de
dire ; avec un peu plus de bonne fo i, il eût ajouté , que
l’intervention de Miclielle L ab ry, dans cette affaire , fut
si peu sérieuse, que c’est de l’un des légitimâmes qu’il
en reçut le conseil.
Quoi qu’il en soit, M iclielle L ab ry, avant d’assigner
L a ru e , signa un acte préalable du 29 prairial an 4 ,
portant, qu’elle révoquoit le consentement par elle
donné , à ce qu’Annet Périssel jouît de ses biens.
En même temps, elle assigna Annet Périssel, pour
voir déclarer valable ladite révocation.
En même temps, elle assigna Larue en désistement du
•domaine de la Barge.
Comme la première demande n’éloit que pour la
forme, elle a demeuré impoursuivie; mais celle du citoyen
Larue a été suivie d’un jugem ent, par lequel M iclielle
Labry a été déboutée de sa demande. Annet Périssel
a payé à Larue les frais de cette procédure.
Malgré cet échec, la demande n’en avoit pas moins eu
’eiTet qu’on s’étoit promis. La chûte du papier-monnoie
a eu lieu avant la libération de Larue, et la valeur réelle
du domaine.de la Barge a été fixée par une expertise.
Annet Périssel, comme on le pense bien, n’avoit pas
cessé de jouir des biens de sa mère, malgré l’acte du 29
prairial an 4 5
continué celte jouissance sans la moindre
innovation, aux mêmes charges de la pension via°-èr<j
1
B
�( ÏO )
stipulée par son contrat de m ariage, jusqu’au décès deM iclielle L a b ry , arrivé le floréal an 8.
La succession de M ichelle Labry étoit beaucoup
moindre que celle de son.mari ; et comme Annet Périssel'
devoit payer alors l’autre moitié des légitim es, il s’est
persuadé qu’en abdiquant cette succession, il se dispen
serait de payer cette moitié. En conséquence, il a fait
cette abdication au greffe, le 14 prairial-, et a attendu
patiemment qu’on l’assignât, sans cesser de jouir.
Les légitimantes l’ont fait citer en l’an 9 , et les parties
sont d’abord convenues de s’en rapporter à des arbitres
dont le choix distingué ne devoit pas laisser croire qu’au
cune d’elles préférât un procès à leur décision : mais
précisément cette décision étant connue du citoyen P é
rissel , n’a pas eu «on approbation, et il a fallu plaider.
L e citoyen Périssel a donné aux légitimaix-es une assi
gnation , le 26 messidor an 9 , pour voir déclarer valable
son abdication, et venir à partage de la succession de la mère.
A u moment de l’audience, il a conclu par requête à la
nullité des deux traités de 1792 et de l’an 2. Il sembloit
dès lors qu’il faisoit revivre l’abdication du père, et il le
dit ainsi à présent : mais sa requête ne contient nullement
l’offre de partager lôs biens du père; au contraire, il a
conclu au partage des biens maternels seulement. Et en
plaidant, son défenseur s’est attaché à faire valoir la
nécessité d’imputer une moitié des légitimes sur les biens
maternels, persistant toujours à retenir les biens du père
pour l’autre moitié.
Par le jugement dont est appel, du 2 nivôse an 10 , le
tribunal d’arrondissement de jRioxu a pensé qu’au moyen
5
�Périssel et des ventes par lui faites, les choses n’étoient plus
entièi*es; que les conventions faites entre les parties étoient
-corrélatives et indivisibles ; qu’ainsi il n’étoit pas au pouvoir
de l’une des parties de rejeter les clauses qu’il trouvoit oné
reuses : qu’il n’y avoitdans ces actes ni traité sur la succession
d’une personne vivante, pui&qu’Annet Périssel jouissoit
de tout comme propriétaire jax\§ vœu de mort prochaine,
puisque la mère avoit donne son consentement-, et d’après
ces motifs présentés avec un développement très-clair et
une force de raisonnement qu’il a été plus aisé de critiquer
que d’affoiblir, le tribunal de première instance, sans
s’arrêter à l’abdication d’Annet Périssel , a ordonné
■
l’exécution de son contrat de m ariage , et des traités de
1792 et an 2; a ordonné qu’Ambroise Périssel, un des
légitimantes, feroit déduction sur sa légitime de la valeur
d’un immeuble par lui vendu; et à l’égard des citoyens
Colange et Coudert, le partage est ordonné avec eux ,
parce qu’ils y donnoient les mains.
Annet Périssel a interjeté appel de ce jugem ent, et
prétend toujours que les actes qu’il a passés en 1792 et
en l’an 2, sont nuls, comme traitant sur la sticcession d’une
personne vivante. En désespoir de cause, il offre maintenant le partage des deux successions de ses père et mère>,
et dit que'sH 11 faîTïïes ventes ,"~éïïes_ne changent rien
à la position des légitimaires, parce qu’on mettra iictivement les objets vendus j^son lot, suivant l’usage.
T el est le système de défensëTcle l’appelant : son seul
mérite est d’être défendu par des opinions respectables;
son moindre défaut est d’être inexécutable.
B a
�C 12 )
M O Y E N S ,
'
Les intimés n’auront de plan dans leurs m oyens, que
de suivre les objections proposées contre eux ; et en y
répondant, ils se flattent de prouver que les traités de
1792 et de l’an 2 , ne sont nullement contraires aux lois;
que les circonstances en rendent le maintien nécessaire,
et que l’ajjpelant a rendu un partage impossible..
Il est très-certain qu’on ne peut pas vendre la succession
d’une personne vivante, et que dans ce cas non seulement
il manque une des conditions nécessaires à la vente', qui
est la chose ; mais encore , qu’une telle vente est contre
les bonnes mœurs, comme injurieuse à la personne de
qui on vend la succession futureMais n’y a-t-il pas une grande différence de ce qui s’est
passé entre les parties, à la vente d’une succession future T
et ne semble-t-il pas qu’il étoit presque inutile de recher
cher si une telle vente est nulle en droit, dès que le
citoyen Périssel qui se plaint des traités, n’a pas vendu
la succession de sa mère. Si cela est évident, les lois citées,
dès-lors ne le concernent pas.
L a consultation du citoyen Périssel semble confondreen sa faveur le titre du digeste, de hœreditate vel actione
vendita, et le titre du code de pactis : c’est peut - être
une erreur*
lia dénomination de ces titres annonce une diversité
de matière; les lois qui s’y trouvent pour la cause portent,
aussi une diversité de législation.
A n if. de hœred. vel act. vend, la loi première dit eu
�3
( i )
général que la vente de la succession d’une personne
vivante est n u lle, parce que ce n’est pas une cliose vénale.
Mais la législation s’cn tenoit à la prohibition de
vendre; et il paroît que l’école césaréenne se faisoit des
doutes sur plusieurs genres de conventions qui étoient
faites sur l’espérance des successions futures : ces doutes
donnèrent lieu à une application portée par la loi der
nière au code'de pactis.
Cette explication prouve que le législateur ne con
fond oit pas les ventés et les pactes ; il ne confondoit pas
le cas où un héritier pressé de succéder, vend incognito
son espoir à la succession , avec le cas bien différent où
le pacte est un arrangement de famille fait soùs les yeux
de la personne dont la succession est l’objet du traité.
La consultation du citoyen Périssel dit en principe
général que toute espèce de conventions sur les successions
futures-, étoient odieuses et dévoient être anmillées, parce
-qiie cètteioi porte omnes hujus modipactiones odiosœ....
»s-ancimus'omni modo repelli, n is i, etc.
M ais, au milieu de cette règle générale , étoit une
explication limitative qu’il étoit peut-être essentiel de
laisser à sa place ; car le législateur ne déclare pas nulles
toutes les conventions faites sur la succession de personnes
vivantes, mais seulement les conventions faites à Finsu
de celui auquel on doit succéder.
Ce n’est donc pas une nullité générale et indéfinie ; car
il faut lire omnes hujus modipactiones odiosœ..- QUODAM
V I V E N T E E T I G N O R A N T E , DE REBUS E J U S . . . . Sancimus
om ni modo repelli.
La loi ajoute que le consentement de celui de cujus
�C 14 )
valide de telles conventions : nisi ipse de cujus hœreditate
pactumest, voluntatern suam accomodaçerit et ad cxtremuni vitœperseveraverit .Elle termine par des expressions
qui ne permettent pas d’équivoque ‘ tune enim sublatâ
acerbissimâ spe, licebit eis , illo sciente et juben te,
Jiujus modi pactiones serçare> Quod etiani anterioribus
constitutionibus non erat incognitum. Telle étoit la
position des parties : ainsi les ti’aités de 1792 et de l’an 2,
sont déclarés valables par ce texte bien clair et doublement
répété.
L a consultation du citoyen Périssel répond à cette loi,
i ° . qu’elle n’est pas admise dans le droit français, d’après
Godefroi, D o m at, Louet et Potliier; 20. que la dame
Périssel a révoqué son consentement.
Comment Godefroi auroit - il dit expressément le
contraire de la loi même qu’il commente, lorsqu’il com
mence sa note par ces expressions, eo de cujus successione
. agitur, sciente , jubente, adde et nequidem in mortis
articula reçoeante de ejus hereditate , lie et viventis,
pascisci possumus. Godefroi, dans ce qui suit, ne fait que
donner un raisonnement tendant à prouver que les contractans ne peuvent s’obliger envers lu i, parce qu’il 11e s’oblige
pas envers eux ; pasciscens non obhgatur, ergo nec
,pasciscentibus consentire. On voit donc que le raisonne
ment de Godefroi est relatif seulement à l’intérêt qu’^
au traité celui qui y donne son consentement, ci non
aux contractans entre eux; ce qui le prouve, c’cst
lin de sa note : So/çe hoc nostro casu qui consentit
hœreditatern suam , non promittit absolutè, ciim ante
.jnorteni suam voluntatern reçoeare possit. Cet auteur
�. c i5 ,}
nya donc pas commis l’inconséquence de détruire dans le
milieu de sa note, les expressions approbatives du com
mencement.
Il eût d’ailleurs été le seul commentateur de son opi
nion : Cujas , Accurse , Voetius, approuvent la loi ;
Coccéius y ajoute la réflexion que la nullité n’est pro
noncée qu’en faveur des vivans, et qu’ainsi ils peuvent y
renoncer par leur consentement : nam cùrn hoc in favorem viventium constitutum s it, Mi suo fa vo re renuntiare possunt.
Domat est cité comme disant qu’un héritier ne peut
pas renoncer à une succession, sans savoir le décès de celui
de euju s , et son aptitude à succéder. Ce n’étoit pas, ce
sem ble, le consulter dans la partie de son excellent
ouvrage , la plus applicable à l’espèce;
Dom at, après avoir dît au tit. er. sect. j y ? des conven
tions, qu’un héritier peut traiter avec ses cohéi’itiers, detous ses droits en là succession , pour préférer un parti
certain à l’attente incertaine des événemens , ajoute la
note suivante.
« Il faut prendre garde dans l’usage de cette règle,.
» de ne pas l’étendrc à des cas qui blesseroient les lois
» ou les bonnes mœurs. Com m e, par exemple, si deux
» héritiers présomptifs traitoient entre eux sur la succès-» sion future de celui à qui ils doivent succéder ; car
» cette convention scroit illicite, si ce n èst q u e lle fû t fa ite
par la volonté expresse de celui de la succession de q u i
» on traiteroit. »
A u tit. Ier. section I I I , des héritiers, Domat regarde*
comme incapable de succession celui qui auroit disposé.-
1
,
/
�(i6)
des biens d’une personne à qui il devoit succéder, avant
sa m ort, et sans son consentement. Il se fonde sur la
loi S i quis v in I G N O R A N T I S ; if. de his quœ ut ind.
Dans son Legum delectus, au titre D e pactis, Dom at,
qui réduit les lois à leur sens exact , rapporte la loi
dernière ci-dessus rappelée, en ces termes,circa jid u ra m
viçentis successionern pascisci illicitum , eo non consentiente vel ignorante. Il ajoute en n ote, quod s i consen~
se r i t , semper tamen revocare pote st. Ainsi Domat est
tout à fait contraire au citoyen Périssel qui l’a cité.
L ouet, lettre H , n°. 6 , cite un arrêt de 1630 et non de
173°? ( ce
pouvoit se confondre dès qu’il étoit d it, édi
tion de 1772 ,) qui ne semble nullement avoir jugé en
tlièse, qu’un traité quelconque fait sur une succession fu
ture, étoit nul malgré le consentement de cujus bonis.
Car d’abord il s’agissoit d’une vente d’hérédité : ce n’est
pas l’acquéreur qui se plaignoit.
En, second lie u , il paroît que celui qui.avoit donné
spn consentementl’avoit révoqué, et avoit pris des lettres
de rescision pour cela. Car Louet dit que les lettres
lurent entérinées, la révocation de la vente et du con
sentement déclarée bonne. 11 n’y a donc à cet arrêt rien
que de naturel et juste, puisque la loi cilée permet do
révoquer le consentement qui seul validoit l’acte.
. Enfin , il pouvoit y avoir une contrainte dans cette
vente d’hérédité, démontrée par le vendeur.
Louet peut d’autant moins avoir entendu fixer la règte
générale qu’on suppose, qu’il seroit en contradiction aVCC
lui-même sur ce qu’ il dit lettre R , n°. 9.
« On tient pareillement que le consentement qui sur
vient
�. ^ 17 ^
» vient après coup,' valide la convention sur le rappel ou
» autre (convention) fa ite sur fu tu r e succession. » Il cite
à cet égard Dumoulin sur Alexand. liv. 6. con. 113.
P o th ier, invoqué pour le citoyen Périssel, ne lui est
pas plus favorable ; car au lieu cité , il ne parle que de
la vente des successions, et lorsqu’il dit que sa décision
sur la vente est conforme à celle des jurisconsultes romains
qui ont condamné toutes sortes de conventions sur les
successions futures, d’après les lois 19 et ult. de partis,
cet auteur renvoie à ce qu’il a dit au n°, 132 du traité
des obligations.
O r , voici ce que dit P otliier, à ce n°. 132, en rap
pelant les mêmes lois. « Ces lois proscrivent, comme
» indécentes et contraires à l’honnêteté publique, toutes
» les conventions par rapport aux successions futures.....
» à moins que le tiers n intervînt et ne donnât son
» consentement à la convention. »
Aucun des auteurs cités en faveur de l’appelant, n’a
donc pensé que la loi citée ne fût pas admise en droit
français.
Rien ne seroit plus aisé que de citer une foule d’autres
auteurs, qui rappellent les mêmes principes. Henrys,
Ricard, Lebrun, M eynard, Rousseau la Combe, etc. ne
pensent pas, non plus, que cette loi soit abrogée ; mais il
suffit d’en trouver l’approbation dans les auteurs même
cités pour le citoyen Périssel ; et lorsque Domat a classé
cette loi dans son Legum delectus, il ne faut pas d’autres
preuves, sans doute, que le droit français ne la rejette pas.
La législation actuelle la rejette encore moins ; car l’art.
26 de la loi du 17 nivôse, porte que les donations ou
-
G
�. c 18 1
ventes h fonds perdu, faites en ligne directe ou collatérale,
a l’un des héritiers présomptifs, sont interdites, à moins
que les autres cohéritiers n'y interviennent et y con
sentent. Cet article n’e s t-il pas une imitation de la loi
dernière de p actis, et ne permet-il pas y comme elle
de traiter sur une succession future.
L e tribunal de cassation n’a pas été de l’avis de la
consultation du citoyen Périssel, dans un jugement du
premier brumaix-e an 10; car quoiqu’il ait maintenu la
nullité d’une cession de succession à échoir, ses motifs
prouvent qu’il se fût décidé par la l o i , si la loi eût été
suivie.
D eux frères Falcimaigne firent un traité, en 1790,
par la m édiationjï’tm arbitre. L e père étoit vivan t, et
les parties, à cause des reprises du p ère, vouloient pro
céder au partage, conjointement, tant des biens de la
mère m orte, que du père vivant.
L ’aîné délaissa certains objets au cadet, pour ïa valeur
d’un sixième, garanti de toutes dettes, et les parties se
tinrent quittes pour les deux successions. L e père donna
ison approbation au bas de l’acte.
L e cédant se pourvut contre cet acte , ét demanda le
partage , qui fut ordonné par jugement du tribunal civil
du Puy-de-Dôm e, du 8 frimaire an 6 , sur appel du
Cantal. L ’aîné se pourvut en cassation, et fit valoir lf?
consentement de son père. L e défenseur du cadet n’alloit
pas j u s q u ’ à prétendre que la loi ult. départis fût abi*ogéej
niais il disoit que le traité étoit contre les bonnes nicc'>u^s >
et nul, étant fait hors la présence du p ère; qu’ensuite
le consentement ultérieur du père ne yalidoit Pas 1111
acte nul.
7
�C *9 )
L e tribunal de cassation adopta ces moyens, et rejeta
le p ou rvoi, par les motifs qui suivent.
« Attendu que Falcimaigne, père, n’est pas intervenu
» dans le traité du 9 novembre 179° » attendu qu’a
» défaut de cette intervention, Tacte est n u l, aux termes
» des lois romaines , sous l’empire desquelles vivoient
» les parties : » donc, par argument a contrario , si
Falcimaigne père étoit intervenu dans l’acte, le traité
fait entre ses enfans eût été valable.
Donc la loi dernière depactis est en vigueur en France,
et les traités passés entre les frères et sœurs Périssel, en
1792 et en l’an 2, sont valables; car M iclielle L ab ry,
leur mère, est intervenue dans ces traités et y a donné
son consentement.
Mais , ajoute le citoyen Périssel, ce consentement a ét(é
révoqué par elle, par l’acte du 29 prairial an 4 ; c’est
comme s’il n’existoit pas , et la loi n’est plus applicable.
Ce moyen, d’abord, n’est pas de bonne foi ; car p e r
sonne ne sait mieux que le citoyen Périssel, que sa mère
ne se prêta que pour la form e, à l’acte du 29 prairial
on 4 , pour .le tirer d’embarras, et éviter le payement
que La rue vouloit lui faire en assignats.
Les circonstances le prouvent, puisque le même jour
elle donna une assignation, et à l’intimé pour la formç,
et à Larue pour 6C désister.
Elles le prouvent encore p lu s, puisque l’assignation
donnée au citoyen Périssel resta sans poursuites, d’après
lui - même ; et en effet il a continué de demeurer eji
possession des biens, et de payer la pension de la mère.
Qu’est-ce donc qu’une révocation d’acte, quand elle no
C 2
�( 20 )
consiste que dans les m ots, et que Pacte prétendu révoqué
continue d’avoir son exécution. On ne juge pas de l’in'tention des parties par ce qu’elles écrivent, mais parce
qu’elles font, surtout quand l’intention des parties se reconnoît ; c a r , c’est une règle de droit q u e, de contrahentium mente ubi apparet ea debetpotiüs attendvq.uàm
'verba. L . 2 19 , de verb. signif. C’en est une autre que,
' in contractibus semper id sequimitr quod actitrn est.
I<e citoyen Périssel, pour augmenter ses moyens à cet
égard, d it, que le consentement donné par sa m ère,
étoit une démission de biens qui étoit révocable ad
nutum y et que ce consentement d’ailleurs n’a pas été
exécuté, puisqu’elle ne l’avoit donné qu’à condition
d’un partage par égalité , tandis qu’on avoit fait tout le
contraire.
Quelque indifférent qu’il soit à la cause, de savoir si
les consentemens de la dame Périssel étoient une démis
sion, puisqu’elle n’a jamais été réellement révoquée,
il est difficile de trouver dans les divers actes de la famille
les caractères d’une démission de biens.
« La démission de biens, dit Lebrun ( liv. 1er. cj1> ]er )
» est un acte par lequel, par une anticipation de succession
7) on abandonne à tous ses héritiers présomptifs, la pro» priété ou l’usufrit de ses biens. »
« Je n’estime pas, continue cet auteur, qu’elle puisse
» être faite en faveur de quelques-uns des héritiers na5) turels, à l’exclusion des autres, à moins que la coutume
» n’eu dispose autrement.... Celui qui se démet en faveur
» d’un ou de deux, au préjudice des autres au meme
» degré, est réputé donner, et la démission sera sujette a
» l’insmuation. »
�( 21 )
Boulenois, question deuxième, est du même avis. « L a
» démission de biens, d it-il, doit être faite aux héritiers
» présomptifs ; mais ce n’est pas assez, elle doit etre faite
» à tous ; car sans cela elle n’imite pas la loi en la pré» venant, et ne sera pas une démission de biens. »
L a dame Périssel n’a pas fait de démission par les actes
de 179-3 et de l’an 2 , car ils se réfèrent tous deux au
contrat de mariage de 1789, dans lequel elle instituoit
l’intimé seul héritier universel, consentant qu’il jouît de
'sa succession aussitôt le décès de son p ère, à la charge
d’une pension.
Cet acte n’étoit pas une démission , d’après Lebrun ;
’ il étoit une donation h rente viagère, ainsi que l’appelant
l ’a dénommée dans le procès devant les arbitres, la disant
irrévocable pour cette cause; et en effet, elle l’est même
d’après l’article X V I de la loi du 17 nivôse, puisque les
cohéritiers du degré égal sont intervenus pour y consentir,
après que cette loi l’a permis.
Quant à l’objection, que le consentement de la dame
Périssel n’étoit donné que pour un partage par égalité ;
il est bien étonnant qu’elle soit présentée comme une
vérité, lorsque l’acte de l’an 2 la dément formellement.
Il y a dans cet acte deux consentemens de la dame
rissel; l’un, pour le partage, quand ses enfans paroissoient
d’abord vouloir partager pour satisfaire à la loi du 17
nivôse ; le deuxième ensuite , pour maintenir toutes les
clauses du contrat de mariage, et laisser ses biens à l’intimé
seul qui les avoit déjà : c’est ce dernier consentement qui
termine l’acte, et qui est exécuté; le premier étoit donc
un simple projet. Ainsi de bonne foi falloit-il en faire un
�( 22 )
moyen ? II en résultait même un moyen contraire; car si
la mère vouloit un partage par égalité , ce n’est donc pas
elle qui gênoit l’appelant. Pourquoi donc ne profitoit-il
pas de cette volonté , pour vouloir lui-m êm e ce qu’il
demande à présent ?
Mais que signifie encore cet acte de l’an 2, lorsque celui
de 1792 existoit ; les vices du second n’annulleroient pas
le premier , et il resteroit toujoui-s entre les parties le
traité de 1792, fait en grande connoissance de cause entx*o
toutes les parties, par lequel l’intimé a accepté la ratifica
tion d’abandon de la part de sa m ère, du consentement
de.ses cohéritiers, et s’est obligé dii*ectement de leur payer
leurs légitimes conventionnelles, du consentement de la
mère. Rien sans doute n’est plus irrévocable que cet acte.
Les autres objections proposées ne sont pas plus fondées
que les précédentes.
•La consultation du citoyen Périssel combat les motifs
du jugement dont est appel, et pense qu’ils sont vicieux
en ce qu’ils sont appuyés d’abord sur l’indivisibilité des
institutions, et sur ce qu’il avoit toujours exécuté les
traités, joui et vendu.
L a confusion d’idées imputée aux quatre premiers
motifs de ce jugement,est un reproche d’autant plus injuste
qu’ils sont très-clairs etméthodiques, et que les expressions
substituées pour les épurer, n’en rendent rien moins que le
sens; ou plutôt elles 11e sont que l’extrait du dernier m o t i f j
et nullement des trois autres. L ’indivisibilité des institu
tions n’est point du tout ce qui a décidé les juges dont est
appel ; mais bien l’indivisibilité des c o n v e n t i o n s libres
faites entre les parties, l’exécutioii de ces conventions
�/
2 3
)
pendant huit ans, et l’évidence que les choses ne peuvent
être remises en leur premier état.
. A lors le citoyen Périssel vouloit ne partager que la
succession de la m ère, quoique la consultation dise qu’il
offroit les deu'x partages; et c’est cette erreur, peut-être,
qui a fait trouver de la confusion où il n’y en avoit pas.
Cependant le jugement même rendoit compte des efforts
faits par l’appelant pour prouver qu’il pouvoit retenir
l ’une des deux institutions, en payant la moitié des
légitimes.
Les auteurs de la consultation ont laissé entrevoir que
ce système leur sembloit fondé en principe ; mais à la
vérité, en glissant légèrement sur cette erreur, et pour se
servir de leurs propres expressions , marchant sur des
charbons arde?is. Car sérieusement les termes de paye-*
ment des légitimes étoient pour la commodité de l ’hé
ritier , et nullement pour la division des estocs. L é
principe que partes non diçisœ censentur œquales est
pour tout autre chose que pour des dots ou légitimes
faites effuso serm one, si ce n’est dans les-pays de com
munauté ; car il répugne à la raison , comme le dit le
Commentateur de notre coutume, qu’une femme qui a sou
vent beaucoup moins de fortune que son m ari, contx-ibue
pour moitié aux légitimes. Aussi la jurisprudence veutelle qu’en ce cas, la contribution des estocs soit fixée par
une ventilation.
Aujourd’hui cette discussion devenoit oiseuse, puisque
le citoyen Périssel veut bien offrir un partage gén éral,
qui u’est pas plus acceptable ; mais en ce cas, il devenoit
également oiseux de chercher à établir que la nullité
�S 24)
des actes attaques devoit avoir lieu pouf la succession
futui’e seulement. Les deux autorités citées, Brodeau et
L ebrun , ne seroient d’ailleurs pas applicables à la cause ,
s’il étoit encore question de la division à laquelle le citoyen.
Périssel renonce.
Cet abandon que fait le citoyen Périssel de ses premiers
moyens ne le rend pas pour cela plus favorable; car il
faut toujours qu’il fasse tomber les actes de 1792 et de
l ’an 2 , et il faudroit encore qu’il remît les choses en
leur premier état, ce qui est devenu impossible par son
fait.
L a validité de ces actes a été déjà établie en elle-même,
fit le citoyen Périssel n’a pas même la ressource de dire
que son consentement ait été gêné, car toujours il a été
»le moteur des conventions qui ont eu lieu.
S’il n’existoit que son contrat de mariage , peut-être
bien argumentant de la crainte révérentielle, pourroit-il
dire que l’engagement qu’il a pris de payer les légitimes ,
étoit extorqué par ses père et m ère, ne pejus J'acerent p
.comme il l’a fait valoir en première instance, et encore
lui opposeroit-on l’édit si quis omissa causa tesiamenti,
le sentiment de L ebru n , liv, I I I , cliap. I I , n°, 40, et
celui de Dom at, liv, I I I , tit. Ier. sect. Y . n°. 17.
Mais c’est après la mort de son p è re , c’est après avoir
d’abord abdiqué , qu’il est venu ratifier ses engagemens
en toute connoissance de cause, proposer lui-même cette
ratification, et agir depuis en véritable propriétaire , par
une jouissance exclusive de huit ans , et par un grand,
nombre de ventes ; enfin traiter une seconde fois.
P eu t - il donc se dire gêné par le consentement de sa
mère
�*5
(
)
mère ? Il y auroit à cela de la mauvaise f o i , car elle n’est
venue le donner que quand il l’a appelée pour cela, et
pa rce qu’il avoit intére t de l’avoir.
La crainte révérentielle n’est pas un moyen d’annullation adopté légèrement. Lapeyrère , lettre R , n°. 4 1 ,
dit qu’on 11e l’admet pas pour le fils majeur. Il excepte le cas
où il auroit fait des protestations secrètes, pour constater
qu’il n’a pas été libre , à supposer encore qu’il y eût de la
lésion. Henrys et Bretonnier, question 175 du liv. I V ,
sont du même avis. Ricard désire aussi ces protestations.
I c i , où sont donc les pi’otestations du citoyen Périssel,
et où est la lésion ? Bien loin de protester , il a au
conti’aii-e confirmé ses premières conventions par de
nouvelles ; et la libex*té qu’il avoit de faire en l’an 2
ce qu’il demande à présent, est la meilleure preuve qu’il
n’a fait alors que sa volonté.
Q u’a donc de commun la position de l’appelant avec
les pi’incipes rigoureux q u i, dans le sens même adopté
pour lu i, annullci'oient indistinctement toutes les conven
tions relatives à des successions futures. Voit-on ici ce
que les autcui’s appellent corvina conventio, cette soif
de la succession d’un vivant que la loi appelle acerbissimani spem , ces dangei’s que comporte ce désir de
succéder trist/ssimi et pericnlosieçentûs? Tout est effacé
par le consentement que donne la dame Périssel à chaque
ratification ; et ain si, comme ledit Despeisses, ( des suc
cessions et testamens, tit. Ier. sect. I I I ) : « On ne ci’oit
5) pas que ce soit le désir de capter l’hérédité d’autrui, qui
» ait fait faire detelles conventions;et 011 présume, dans
» ce cas, que celui de l’hérédité duquel il s’agit, a bien
D
�{**)
» reconnu la prud’homie et fidélité de ceux auxquels
» il permet de pactiser de son hérédité de son vivant. »
La position du citoyen P érissel, lors des actes qu’il
attaque , n’a en effet rien qui tienne de la contrainte ,
du dol, ni’de Terreur ; les jurisconsultes qui lui ont donné
des m oyens, reconnoissent (page 2 ) que ceux-là ne
doivent pas décider la contestation. G’étoit cependant les
moyens sur lesquels en première instance il fondoit tout
son espoir; en les abandonnant, il se retranche sur ses
hésitations et variations, et sur ce qu?il traitoit sur de&
objets qu’il ne pouvoit connoître.
Mais comment ses variations peuvent-elles être un
moyen pour lu i, lorsqu’elles prouvent au contraire qu’il
a eu toute la liberté possible^ d’ètre ou de n’être pas
héritier. Après son abdication , il a proposé de redevenir
héritier : n’est - ce pas en connoissance de cause ? Après
avoir joui deux ans de to u t, il pouvoit partager par
égalité, en vertu de la loi du 17 nivôse : ses frères enétoieiit d’accord. Point du tout : il reste héritier. Mais
alors il n’y avoit plus de nécessité présumée ;,et s’il a opté
pour l’institution , à qui donc peut-il s’en prendre ?
A cette époque de l’an 2, peut-il dire de bonne foi que sa
mère n’eût pas été bien aise de jouir elle-même de ses biens
fonds, au lieu d’avoir une pension de cent pistoles en
assignats ?
Quand il dit qu’il ne connoissoit pas le testament de
s o n père, c’est un jeu sans doute;mais à quoi p e u t s e r v i r
ce testament dans la cause. Dabord i l n ’a u g m e n t e ni ne
diminue les droits des parties. I/appelant
p r é v a u t d une
supposition d’abdication, et cela est d ’ a u t a n t plus sans
5
s ’ y
�7
( f2 \
objet, que le père ne le prévoyoit que pour sa succession,
tandis que ce n’est précisément pas celle que le citoyen
Périssel a voulu abdiquer.
Les biens , d i t - i l , étoient insuffisans pour acquitter
les charges ; mais, si cela étoit, pourquoi les reprenoit-il
en 1792? Pourquoi les reprenoit-il en l’an 2 ? Comment
se fait-il qu’il ne se soit avisé de cela qu’après huit ans de
jouissance ?
Plus on lit les traités faits à ces deux époques , plus
on se pénètre que personne moins que l’appelant ne peut
les attaquer , et qu’ils sont irréfragables pour lui. Mais
suivons son système jusqu’au bout : supposons que le
partage qu’il demande soit ordonné, soit pour u n e , soit
pour deux successions ; il est clair que ce partage est
devenu impossible par son propre fait. Cette démonstra
tion prouvera ce que les intimés ont dit dabord, que les
■circonstances ont rendu le maintien des deux traités
nécessaire.
La succession de Pierre Périssel étoit composée en
•immeubles ] i° . de deux maisons ; 2°, de deux septerées
de terre à Couriat; 30. de onze œuvres de vigne à la
V aye ; 40 de sept septerées de terre à Mariolle ; °. d’un
.jardin près Mozac.
La succession de Miclielle Labry étoit composée,
i° . du domaine de la B arge; 2°. d’un p ré-verger à
Mozac ; 30. de dix-sepL œuvres de vigne au même lieu.
Annet Périssel a vendu les trois premiers objets de
la succession du p ère, moyennant 27,200 francs : il ne
lui reste que sept septerées de terre, et un jardin.
Il a vendu le domaine de la m ère, à La rue, ce qui
D a
5
�C *8 )
a donné lieu au procès dont il a été parlé ci-devant. Ce
domaine, vendu 35,000 francs d’assignats, a été estimé
•20,800, sans les bestiaux. La succession du père y avoit
'une reprise, mais qui se réduisoit en argent.
Il a encore vendu le pré-verger de la même succes
sion , pour 4,000 francs ; il ne lui reste que les dix-sept
•œuvres de vigne.
M aintenant, qu’il explique quels objets il présente à
partager? il ne lui en reste que trois, qui sont les moindres.
Sans doute , il ne veut pas prétendre que la moitié
des légitimes qu’il a payée, partie en assignats, vaille
pour la moitié de la portion héréditaire-, car, dès qu’il
offre le partage de tou t, il est de droit que les immeubles
seraient partagés par égalité, sauf le rapport, par chacun,
de ce qu’il a touch é, de même qu’il rapporteroit, de
son côté, les 8,000 francs restant du prix de l’office de
son père, le mobilier qu’il a usé, et les rentes dont il a
reçu les remboursemens.
Il y a huit enfans, il ne lui reviendroit donc qu’un
huitième, et en mettant, par aperçu, les immeubles à
80,000 francs, il ne lui en reviendroit que 10,000 francs.
Cependant il en a vendu pour plus de ,ooo francs. Sa
demande a donc pour objet de donner à ses cohéritiers,
non pas des immeubles à partager , mais des procès ; et,
ce qui est in ou i, sa demande tend à créer des procès
contre lui-m êm e, car tous les acquéreurs se pourvoiroient contre lui.
Les auteurs de sa consultation ont donc été induits en
erreur, lorsqu’ils ont cru trouver, à ces ventes, le l’emede
ordinaire de faire échoir les objets au lot du vendeur.
52
�29
(
)
Mais s’il lui revient 10,000 francs, on ne peut lui en faire
échoir
. En sachant cela ils n’eussent pas dit : « que
» les cohéritiers sont désintéressés par le rapport de
» la valeur de l’ob jet, comme par le rapport de l’objet
» môme. » C'ir alors , ce prétendu principe eut été une
.très-grande erreur ; on ne peut mobiliser la portion d’un
copartngeant, et l’empêcher d’avoir sa porlion de tous
les immeubles.
A ces moyens devoit s’en ajouter un autre plus im
portant encore ; c’est que, quand les légitimaires seroient
suffisamment indemnisés par les procès que l’appelant
leur cèderoit contre ses acquéreurs, en échange de leur
légitim e, ces acquéreurs ne manqueraient pas d’opposer
qu’ils ont traité avec le vrai propriétaire, et de pré
tendre qu’on ne peut les évincer.
En effet, Annet Périssel avoit qualité pour vendre;
il étoit héritier universel et jouissoit de tous les biens.
Les légitimaires se sont contentés de leurs légitimes con
ventionnelles ; ainsi, d’après cette option, ils n’ont plus
eu d’action pour troubler les acquéreurs des immeubles.
Comment donc le citoyen Périssel peut-il leur rendre
cette action, lui précisément qui a ven du, et qui est
obligé de garantir. Cette proposition de sa part est même
bizarre et choque le bon sens.
L ’acquéreur du domaine de la Barge, Larue, a prouvé,
même en plus forts term es, que sa vente devoit sortir
effet; car il l’a fait déclarer valable par jugement , contre
Michelle Labry elle-même, et ce jugement a été exécuté.
La conséquence de ce jugement est frappante. Si les
légitimaires étoient réduits k chercher leur légitime en
52
�3
( ° )
assignant les acquéreurs de leur frère , Larue leur opposeroit la chose jugée ; et comment pourroient-ils, eux
‘héritiers de leur m ère, faire tomber un jugement rendu
contre elle.
Ces entraves évidentes suffiroient, seules, pour pros
crire les propositions inacceptables du citoyen Périssel.
Les choses ne sont plus entières, et c’est par son fait;
c’est lui-même qui , dans une manutention de huit ans,
'a tout dénaturé, tout bouleversé; et il veut que les choses
se remettent dans leur premier état, quand il l’a rendu
impossible. Il reste quelques biens fonds qui suffiront,
à peine, pour la portion de ceux qui ont donné les mains
au partage des biens de la m ère, ou même pour la
légitime de ceux qui auraient droit de la demander en
biens fonds, d’après la loi du 18 pluviôse.
Mais il est effrayant de calculer où mènerait la néces
sité de recomposer, en entier, les deux successions ; car
les ventes, l’office, le m obilier, les rentes remboursées
et l’abolition de la forclusion , rendraient un partage la
•chose du monde la plus inextricable et la plus ruineuse;
la famille l’avoit pensé ainsi, lors des traités, et que seraitce donc maintenant que rien n’est à sa place!
Ces moyens ne sont pas simplement déconsidération,
car des cohéritiers doivent partager une succession et non
pas le simulacre d’une succession ; ils doivent trouver
des biens fonds en masse, et non des procès. Une c a u s e
de cette nature s’étoit présentée au tribunal civil de c c
département, entre le sieur de Bassiguac, d o n a t a i r e de
son père, des biens présens et à venir, et ses s œ u r s , envers
lesquelles il étoit grevé de légitimes conventionnelles. 11
�(30
avoit aussi joui de tout, du vivant de jo n p è r e , e jja it
plusieurs ventes ; cependant, après sa m o rt, il disoit dç
môme, que ce qu’il avoit fait, pendant la vie de son père,
n’avoit pu l’obliger, et il vouloit abdiquer sa donation.
M ais, par jugement du^i6 prairial an , il fut jugé
que les choses n’étant plus entières, il devoit exécuter
ses engageinens. IA u î des motifs de ce jugement mérité
d’ètre transcrit, à cause de sa grande analogie à la con
testation actuelle.
cc Attendu qu’il a aliéné une partie des biens donnés,
33 que les acquéreurs ont traité de bonne f o i, et ne peu33 vent pas être valablement dépossédés ; que respecti33 vement à eux, l’exercice de l’abdication est impraticable, _
33 et que, par conséquent, cette même abdication, qui
33 ne peut pas avoir lieu à l’égard des acquéreurs, ne
33 peut pas être admise par rapport aux citoyennes de
» Bassignac. 33
Ce jugement a été confirmé sur appel. ^
Ge n’est donc pas une chose aussi aisée que le dit la
consultation du citoyen Péi'issel, de faire rapporter au
partage tout ce qu’il a aliéné ; car les acquéreurs d iroient qu’ils ont acquis valablement, et Larue surtout,
opposeroit un jugement qui seroit une barrière insur
montable.
Ainsi les prétentions du citoyen Périssel sont contraires
tout à la fois aux principes et aux circonstances. Il étoit
tenu par son contrat de mariage de payer des légitimes
que scs père et mère n’avoient pas aggravées par inofficiosité,puisqu’ils le faisoienl héritier univei’sel. Il a prouvé
lui - même qu’il ne trouvoit pas cette charge excessive,
5
�( 32 )
puisqu’il a ratifié son contrat de mariage par deux fois ,
qu’il a joui de tout pendant huit ans sans abdiquer, et
qu’il a vendu les deux tiers des biens pour mieux montrer
qu’il n’entendoit pas revenir sur le passé. Il étoit majeur
et versé dans les affaires, il a traité et vendu en connoissance de cause. Aujourd’hui les choses ne sont plus en
tières ; au lieu des formes ordinaires d’un partage, il n’y
auroit qu’entraves, procès et difficultés. Il faut donc en
revenir aux traités faits entre les parties, dont les con
ventions devroient être validées par nécessité et par pru
dence, quand il n’auroit pas été démontré qu’elles sont
adoptées par les p rincipes, et qu’elles ont été de la part
du citoyen Périssel, le résultat de l’expérience et de la
réflexion.
L . F. D E L A P C H IE R , homme de loi.
C O L A N G E , avoué.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul Imprimeur du
T ribunal d ’appel. — A n 1 0
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Périssel, Antoine-Ambroise. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Colange
Subject
The topic of the resource
successions
bureau de famille
tribunal de familles
partage
égalité des héritiers
offices
ventes de biens successoraux
doctrine
jurisprudence
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse à consultation signifiée, pour Antoine-Ambroise, Jean-Baptiste et François Périssel, Bonnette Périssel, le citoyen Mortillet, son mari, et Marguerite Périssel, intimés ; Contre Annet Périssel, avoué au tribunal d'appel de Riom appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1767-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0332
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Mozac (63245)
La Barge (domaine de)
Rights
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Domaine public
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Bureau de Famille
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égalité des héritiers
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tribunal de familles
ventes de biens successoraux
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1bd43f3645f46a0594c332b403565beb
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Text
M ÈMOI R E
POUR
É
tie n n e
»C O N T R E
Et
TRIBU N AL
P R U G N A R D et M a r i e D E M U R A T ,
s a femme, Intimés.
J e a N B a p t i s t e G R A N E T > Appellant,
contre
A U D I G I E R y Notaire
,
.
Intervenant
L a p rin cip a le q u e s tio n , qui d ivise les parties , est c e lle de sa vo ir si le
cito y e n G ra n et , qui s ’est m is à la tête de la m aison G en d rau d e n 1 7 6 3 ,
et en
a
fait toutes les affaires com m e m ari ,
doit la co m m u n ication
à ses co h éritiers d ’une acqu isition qu’il a faite ju d icia irem en t p en dan t
l ’instance du partage , com m e pou rsuivan t p our la s u c c e s s io n , et sans
bourse délier.
L es autres questions sont relatives aux rapports et prélèvem en s à fa ire
au partage ordonné en tre les parties , et sur leq u el il n ’y a pas de con
testation.
Pour l ’in tellig en c e de la difficulté p rin cip a le , il est nécessaire de re*
m on ter à des f a it s , antérieurs à l ’o uvertu re des successions d iv isib les,
F
A
I
T
S
.
M ic h e l et autre M ic h e l M e rc ie r , fr è r e s , v iv a n s au m ilieu du d ix-sep
tièm e siècle ,
achetèrent en com m un un m o u lin app ellé B o tte,
et d eu x
jardins y attenans ; il p aro ît que l ’aîn é y am andoit deux cinquièm es , et
le cadet trois cinquièm es.
C elu i-ci se fit M e un ier ,
acte de 1659 ,
e t garda tout le m ou lin ; i l s ’o b lig e a par un
de donner à son frère pour ses deux cin q ièm es in d iv is
deux setiers de b lé et dix sous d’arg en t par année.
K
D'*ppBI
d e r io m .
�C O
M ich el M e rc ie r, aîné , avoit laissé deux fils ; L a u re n t, qui fut Curé en
Dauphiné ; et M agdelaine
qui fut m ariée à L eger G e n d ra u d ,
souche
de la famille de cu/us.
P our form er le titre c lé ric a l de L au ren t M e r c ie r , M ag d e la in e M e g e , sa
m ère , lu i constitu a ces deux cinquièm es du. m ou lin et appartenances , un
b a n c sous la h a lle de R o c h e fo r t, u ne m aison et jardin , un pré et une b u ge.
L au ren t M e r c ie r , ren o u vela lu i-m êm e en i6t)2 , a r e c Jean M e r c ie r ,
fils
de M i c h e l , je u n e , les arrangem ens pris par son père en 1659 ; e t
i l fit d on ation en 17 2 6 à la fem m e de- L e g e r G e n d ra u d , sa soeur.
de
tout ce qui lui a vo it été constitué par son titre clérica l.
Jean M ercie r, d étem pteur du m ou lin in d ivis étoit alors-décédé, laissant
deux enfans , dont A n n e C h a rd o n , sa ve u v e } ;étoit tu trice. L e g e r G e n
draud
et sa fem m e la firent assigner ,, en cette q u a lité , p o u r p a ye r lès-
arrérages de ferm e des deux cinquièm es du m o u lin , l e 26 m ars 17^ 7.
C e tte poursuite fut suspendue pendant b ien des ajinées ,. à cause d e r
ch an gem en s qui su rvin ren t dans la fam ille G en draud ,
dont il faut s ’o c
cu p er m ain tenant.
M ag d e la in e M e g e éto it m orte en 1 7 * 0 , laissan t un seul e n fa n t , L a u
ren t G endraud ,
qui fut m arié à A n to in ette M a lle t ,
et qui décéda lu i-
m ém e en 17 3 5 ; L e g e r , soir père , ne décéda qu’en 1742.
L au ren t G en draud et A n to in e tte M a lle t , eu rent trois enfàns ; sa v o ir ,
Jacq u elin e , M a rie et C atherin e ; il n e p aroît pas que cette dernière ait.
eu de la postérité;
Jacq u elin e fut m ariée à A n to in e D em u rat ; ils m oururent peu de tem*
après leu r m ariage , laissan t trois enfans ; savoir , A n to in e tte , m ariée à
A n to in e F o u r n ie r j M a r i é , fem m e P ru g n a rd , intim es > et A n t o i n e , qui
est représenté par lesdits P rugnard.
A p rè s la m ort d ’A n to in e D em u rat e t de sa fèm m e ,. A n to in e tte M a lle t ,
habitan t d am la m aison de R o ch efort a vec les enfans d e sa f i l l e , y faisoit
un p etit com m erce , et v iv o it dé ce produit , et de c e lu i des h érita ges de
la fam ille
G e n d ra u d , réunis par la d onation de 1 7 2 6 .
M a rie G e n d ra u d , sa f i l le , étoit allée en con d ition ch e z M . dé C h azerat „
et ch ez le C . D . m arquis
dè L in iè re .
E lle partit d elà en 175 8 , après*
avo ir em prunté trente lou is du C u isin ier de l'a m aison p o u r fa ire le cobxtm erce k R o c h e fo r t , où sa m ère d evo it lu i céd er son. magasin*.
�( 3)
A u ss i-tô t qu ’e lle y fût arrivée , v o y a n t dans la m aison de petite* nièce»
qui a vo ien t le m êm e
droit q u ’e lle , e lle a v is a , e n fille
qui
a v o it
vu
le m onde , aux m oyen s de tou rner les choses à son bénéfice exclu sif.
E lle présenta requête ,
pour n ’h abiter la m aison p ate rn elle ,
perm ission de la justice. E lle répudia le
q u ’a v e c la
i . er m ars 175 9 à la su ccéssion
de son père ,
et le 3 , e lle se fit consentir par sa m ère , m oyen n an t
cin q liv res u n
b a il de la m aison pour
une
déclaration qu’il n ’y a vo it pas d ’autres bien s.
ann ée ,
a v e c la
fausse
.
M a rie G ra n et > après toutes ces précautions , vo u lu t b ie n dem eurer
à R och efort deux ou trois ans ;
après cela ,
e lle a lla , o n n e sait e n
q u elle qualité , dem eurer à C lerm o n t ou à C h a m a lière ; et c ’est là , que
le 2 i m ars 17 6 3 , e lle co n tracta m ariage a v ec le cito y e n G r a n e t ,
alor*
ch iru rg ien .
Il est dit dans le co n trat que la future se con stitu e ses biens e n dot ;
i l est dit aussi qu’en cas qu’e lle p ré d é c è d e , le futur g agn era ses m e u b le s,
tels qu’ils seront désignés , par un acte qu ’ils se p rop osen t de passer e n
sem ble ; et la jouissance de scs biens présens , d ’un reven u de cinquante
liv re s , à la eharge de nourrir et entretenir sa mère ; la q u e lle , de son
côté
sera ten u de lu i d on n er ses petits travaux et soin s ; ce qui p rou ve
déjà que la m ère n e g o u vern o it pas.
E lle gou vern a b ien en core m oins , quand le cito yen G ra n et fut établi
dans la m aison. Il n ’éto it pas attiré à R o ch efort pour l ’ex ercice de son
é t a t , puisqu’i l le
a v o it
quitta bien tôt pour
en trer dans la gab elle. M a is il j
là u n e m aison , u n p etit c o m m e rce , des im m eubles et des créan ces ;
c ’ éto it de quoi com m en cer une fo rtu n e , ou trou ver du m oins so n existen ce.
Il a été dit plus h a u t , que Jean M e r c ie r , détem pteur du m oulin B o tte ,
a vo it laissé deux e n fa n s, appellés A n to in e et L ou is ; A n to in e étoit mort
lors du m ariage de G ra n e t , laissant aussi deux enfans ; savoir , A n to in e
et M agdelaine.
L e citoyen G r a n e t , e n son n om et celu i de sa fe m m e , sans s o ccu p er
des enfans D e m u r a t, fit a s s ig n e r, le 14 ju in 176 6 lesdits enfans de J e a n
M e rc ie r , en reprise de l ’ex p lo it du 26 mars 17 2 7 . Us ren o n ceren t à la
»uccession de leu r pere.
^
A u m oyen de cette rép u d ia tio n , la succession de Jean M e rc ie r n elan t
o ccu pée par aucuu
individu de la b ran ch e de M ic h e l, jeu n e , son p ère ;
�(4)
toute la lign e étant décédée , excep té les deux ren on çan s , il est clair
que les biens de cette lig n e re v e n o ie n t de d ro it à la b ran ch e de M i c h e l ,
aîné , et que la créan ce se con fon doit dans la succession. M ais ce n ’éto it
pas le co m p te1 du cito y en G ranet. Il aim a m ieu x supposer l a su ccession
vacan te ; i l y fit nom m er un curatcur.
Il co n clu t co n tre ce
curateur , à la reprise du m êm e e x p lo it de 17 2 7
co n ten an t dem ande des arrérages du blé dû pour la ferm e des deux c in
quièm es du m ou lin B o tte , et au partage dudit m ou lin et jard in . C es con
clusions furent adjugées , par sen ten ce du 3 septem bre 17 6 7 .
C ette sen ten ce ordonna le partage du m o u lin , perm it au cito y e n G ranet.
et à sa fem m e de se m ettre en possession du m o u lin et autres im m e u b le s,
jusqu ’à extin ction de leurs créanecs , ou de faire ven d re sur placard.
L o rsq u ’il fa llu t faire exécu ter cette sen ten ce , le
cito y en G ra n et s ’ap -
p erçu t que le sieur de C habanes-d e-C u rton , C . D . seig n eu r de R och efort,,
éto it en possession
de tous le s im m eubles de la bran ch e de J ea n M e r
c ie r , à titre d ’acqu isition de L o u is M e rc ie r , ou par hypothèque. Il le fit
assigner en 176 8 , toujours com m e m a r i , d ’abord en d éclaration d ’hypo
thèque ; sur ,. i . ° u n pré à faire sept chards de foin ; 2 .° un pré de trois
chards ; 3 .° u n jard in d ’une quartelée ; 4 .0 u ne terre de trois septérées.
E n su ite i l ch an g ea ses con clu sion s , et d e m a n d a , o n n e sait p o u r q u o i,
le f artage co n tre lu i e n 1769..
U n e sentence de la sén éch a u ssée, d u 6 se p te m b re , adju gea ces dernières
C o n clu sio n s, ordonna le partage des bien s de J ean M e r c ie r , pou r en être
délaissé u n sixièm e au sieu r de C u rto n , com m e acquéreur de L ou is M e r
cie r ; et cinq sixièm es au cito y en G ra n et et sa fem m e a vec restitu tion
de jouissan ces depuis
176 9.
L e sieur de C u rton in terjetta
firm ée por arrêt de
appel de cette sen ten ce ,
qui fut co n
17 7 7 . D es exp erts lu i attribuèrent l ’article quatre de
la dem ande de 1 7 6 8 ,
e t le surplus aux G ran et. II3 fixèrent la restitu
tio n des jou issan ces, depuis 175 9 jusqu’à 1 7 7 8 , à
1,4 2 5 liv .
L e cito y en G ran ot reçu t ces 1,42 5 liv re s , sur lesq u elles il d é d u isit, à
çe q u ’il d i t , 569 liv . de cens. Il reçu t aussi le m on tan t des frais de R iom
et du Parlem ent.
A p rè s a vo ir ainsi term iné a v ec le sieur de C u rto n , il rep rit ses d ili
g en ce * contr« le curateur de la successiou M e rc ie r > fit liq u id e r 1« 4 a v r il
�(i )
178 0 , les arrérages de jou issan ces du m o u lin Boite , ju squ ’à 1 7 2 7 , seu
lem en t à 408 liv . 1 3 sous
6 deniers ; e t o b tin t un exécu toire de dépens
de 246 liv . 18 s. 4 den.
L e cito yen G ran et dut se m ettre en possession en 17 7 8 . C a r on v o it
sur l ’expédition de la sen ten ce d ’h o m o logatio n du rapport ,
que M . de
C u rton n e paya les jouissan ces que ju squ ’en 1778 ; l ’év ic tio n éto it p o u r
su ivie et obtenue par G r a n e t , c ’est donc lu i qui se m it en possession alors.
C ep en d an t , le 6 ju in 178 0 ,
de sa fem m e et la s i e n n e ,
son et un jardin jo i g n a n t ,
il fit saisir sur placard ,
sur le
c u r a te u r ;
à la requête
i . ° u ne m a iu re de m ai
d ’une quartonnée j
¿ .° ,
3 .°
et 4 .0 les
deux prés et le jardin ou ch en evière , m en tion n és en l ’e x p lo it de 1 7 6 8 ,
* 5 .° une terre d’une ém in ée , sise au terro ir de la croix-p en d u e ; 6 .° u n e
terre d ’une ém in ée , sise à g rig n o l.
Le
3o août 1 7 8 0 ,
ces h éritages
fu ren t adjugea , au sieu r A c h o n »
p ro cu reu r des poursuivons , m o yen n a n t i , 2 o q liv res ,
qui d em eu rero n t,
est-il d i t , en tre les m ains de l ’a d ju d icataire, à com pte de SES créances.
L e sieu r A c h o n fit sa d éclaratio n de m ieu x , et dit que son m ieu x éto it
le cito yen G ran et
L e cito y en G ra n et prit possession le 2 7 se p te m b re , tant en son nom r
qu'en qualité de mari de A larie Gendraud , sa fem m e , de lui autorisée. Il
ré p é ta q u e le s h éritages lu i a vo ien t été adjugés pour i,2 o o liv . , à com pte
de SES créances.
O n s ’étonne , sans doute , de n e plus en tendre p arler dans cette lo n g u e
procédure des deux cinquièm es du m ou lin Botte et des deux jardin s. L e
sieur de C u rto n avoit ven d u ces o b je ts, à ce qu’il p a ro it, au nom m é L a s sa la s , et le cito y en G ra n et avo it fa it assigner ce d ern ier en d é siste m e n t,
le 14 juin 176P.
Sans doute , il éto it n atu rel de faire effectuer ce d é sistem en t, en m êm e
tem s que celu i du sieur de C u r t o n , le succès en auroit été en co re plu*
sûr. M a is les cio yen s G ra n et pen sant que leurs cohéritiers perd ro ien t la
trace
de cet o b je t , avo ien t traité pour leu r com pte avec L a s s a la s , le 16
ju in 17 7 8 ,
et lu i a vo ien t cédé leurs
droits sur le m o u lin e t jard in
attenant. D e sorte que v o ilà u n o b je t perdu p eu t-être par la p rescrip
tio n et par leu r faute , a vec les jouissances depuis
.T e lle
¿toit la
17 2 7 jusqu’à présent.
manière d’administrer, de« citoyens G ranet ,
oubliant
�(« )
toujours qu’ils a vo ien t des c o h é r itie r s , et qu 'ils éto ien t leu rs comptables^
Ils a vo ien t
encore en 1768 assigné u n nom m é A n n e t G iraud , en dé
sistem ent d ’une ch en evière , app elée ch a m p m ia le t, a v ec restitu tion de
jouissances. Ils traitèren t a v ec l u i , le m êm e jou r 16 ju in 1 7 7 8 . R en tra n t
dan3 la c h e n e v iè r e , ils reçu ren t 18 liv .p o u r f r a is , m ais firent g râ ce do
toutes les jou issan ces , pour raisons à eu x connues.
P end ant ces d iverses p r o c é d u r e s, le cito y en G r a n e t, d even u capitain e
de g a b e lle , éto it a llé a v ec sa fam ille dem eurer à E b reu il ,
m ais il y
a v o it em porté les m archandises , et sur-tout les papiers.
P ru gn ard et sa fem m e se disposoient d’assigner les citoyen s G ra n e t en
partage , lorsque ceu x-ci im aginèrent dele3 p réve n ir , po u r se rendre plu»
favorab les : ils form èrent eux-m êm es la dem ande en p artage co n tre les P ru
g n ard , en 1776.
L a fem m e G ra n et décéda en 178 0 , laissan t u n e fille unique ; alors
G ra n et reprit la d em an d e, com m e lég itim e adm inistrateur , e n la séné
chaussée , où le procès fut appointé.
L e s P rugnard d iren t po u r défenses , que b ie n lo in de con tester le p ar
tag e ,
ils y co n clu o ien t eu x-m êm es ; m ais que G ra n e t s ’étant em paré de
to u t, le u r d evo it le rapport du m o b ilie r , su ivan t l ’in v e n t a ir e , et les jou is
sances , à dire d’experts 5 q u e , s’il éto it de bo n n e foi , il n ’avoit qu ’à dé
cla re r ce qu’il avo ît p r is , et qu’i l n ’y auroit plus de procès : ils co n clu ren t
aussi à u n e p rovision .
G ra n et refusant toujours de s’exp liq u er ,
fut si lon g-tem s à produire ,
qu’il laissa rendre p ar fo r c lu s io n , le 2 ju ille t 178 3 , la sen ten ce dont est
a p p e l, qui ordonne le p artage des successions ,
de L e g e r G e n d ra u d , M a -
gd ela in e M e rc ie r et L au ren t G endraud , auquel G ran et rapportera le m o
b ilie r et jo u issa n ce s, y fera procéder dans le m o is ; s in o n , et en cas d’ap
p e l , il est fait p ro visio n aux P ru gn ard de 2oo liv .
L e cito yen G ra n et în terje tta appel au Parlem ent. D a n s ses
griefs
du
i 3 d écem bre 178 4 ? i l se défendoit de d evo ir n i m o b ilie r , n i jou issan ces ,
en disant que sa b e lle -m cre s’étoit em parée de tout ;
créa n ce M e rc ie r ,
et à l ’égard de la
i l reco n n o is3 o it, qu’ayant agi pour la su c c e ss io n , il
fero it le rapport des biens adjugés en 173 0 ; et il o ffroit ce r a p p o r t, à
la ch arge d ’ôtre indem nisé de ses frais et fau x-frais.
Il répétoit cette offre dans une requête du 2o décem bre , et co n clu o it
lu i-m êm e au partage de ces im m eu bles adjugés.
�7)
(
D ’après cula , si les choses eussent restées- en c e t é t a t , il n ’y aurait
plus de d ifficu lté entre les parties sur cet objet m ajeur dans la cause. M ais
u n e m ain infidèle et am ie des p ro c è s, a bâton né , tant dans les g riefs que
dans la r e q u ê te , tout ce qpi a vo it rapport à cette offre de partage , pour y
substituer ce lle en rapport de i,2 o o l i v . , p rix de l ’adju dication .
11 est aisé de v o ir que les co rrectio n s fu rent faites , parce que G ra n et
ch an gean t d ’avo cat en 178 5 , fut in d u it à croire q u ’il p o u vo it refuser ce
partage. O n n ’osa d’àbord in terca ler dans la co p ie prise en com m u n ica
tio n , que l ’offre du partage
du p r ix
et on fut o b lig é , par u ne requête
des b ien s , pou r n e rie n effacer ;
du 18 juin i ?85 , de rectifier ces p ré
tendues co n clu sio n s , en offrant la totalité de la créan ce M e r c ie r , au
lie u de
i,2 o o liv .
G ra n et produisit par cette m êm e requête une
tra n sa ctio n , du 9 ju in
178 2 , de laq u elle il résultoit que les F o u r n ie r , co h é ritie r! de Prugnard.
a vo ien t traités, a v e c
lu i pour
la
quitte de leu r portion, pour 600 liv . ;
le s d iies
pas
créan ce
M e rc ie r ,
P a v o ie n t
ten u
et lui a vo ien t laissé in sérer dan*,
de l ’acte tout ce qu ’il lu i a vo it plu ,
p our p rou ver qu’il n ’é to it
débiteur. Il e n in d u iso it que les P ru gn ard d evo ien t
adopter
cette
transaction..
' L es P ru gnard répon d iren t par une é c r itu r e , dit 7 septem bre 178 5 , que
cette transaction le u r étoit étrangère ; et n e co n n oissan t dans la créa n ce
M e r c ie r , que ce qu’ils en a v o ie n t lu dans l ’écritu re de G r a n e t, ils so u tin
ren t qu’ayant poursuivi une créan ce com m une ,
il d evo it le rapport en
nature des biens qu’il avo it retires.
L e p ro c è s s’est continué au P arlem en t jusqu’en 1 7 8 8 , «ans beaucoup plu»
d ’exp licatio n sur le m ode du partage. E n Pan
2 , G ra n et a vendu le v
deux pré» provenan s du placard au cito yen A u d ig ie r , m o yen n a n t 1,70 0 l i v . ,,
a y e c ch arge de payer aux P rugnard le u r portion de la créan ce M e rc ie r j;
« Et
attendu ,
a^t-il dit , qu ’il y a contestation
pour raison
de cette
» créan ce et autres prétentions i led it G ran et subroge A u d ig ie r , tant à
$ l ’effet du procès , qu ’à tous le s droits, en résultans pour lu i ; A u d ig ier. e s t
y ch argé d’en reprendre les poursuites, et de faire p ron on cer sur l e to u t» ..
P rugnard qui ig n o ro it cette cession litig ie u s e a rep ris le procès en
cqj
t r ib u n a l, le 10 floréal an 9 , con tre le cito y en G r a n e t ,, com m e u su fru i
tie r s e u l e m e n t a t t e n d u le d écèi de sa fille..
�..
.
.
\
(8 )
Audigier est intervenu le 23 pluviôse an
11 , et fidèla au plan de
v a cilla tio n qu’il a trouvé dans la procédure de P a r is , il a com m encé par
dire qu ’il d evoit le tiers de la créan ce M e rc ie r , m on tan t à
l 3 $ous y sur qu oi i l a v o it à se reten ir ;
i . Q pou r frais
1,4 6 6 liv .
et faux-frais
600 liv . ; 3.° pou r une créa n ce payée à u n nom m é E p in erd 240 liv re s ;
3.° pour réparation 1 1 6 liv . ; 4 .0 pour la p rovisio n 2oo l i v . ; total de»
retenues i , i 56 liv . ; de sorte q u ’il co n sen tait de p a ye r le
plus , a vec les
tiers du sur
intérêts.
et par une requête , du 5
M a is bien tôt il a tro u vé qu’il offroit trop ;
g erm in a l an 11 ,
il a dit qu ’au lie u de 1 ,4 5 6 liv . , il n e d evoit que le*
408 l i v . , portées par la liquid ation de 1 7 8 0 , a v e c'le 3 intérêts depuis 17805
«ubsidiairem ent en su ite i l a offert 1,200 liv . ; enfin il a dit que si cette
dim inution étoit a d o p tée, il co n sen to it de n e déduire que 2 o o liv . au lie u
de 5oo liv . sur les fau x-frais.
D ès qu’A u d ig ie r paroissoit se m êler de tout , il n e sem bloît pas que le
cito y en G ra n et eût à s ’in g érer davantage dans cé débat ; cependant il est
v e n u a son tour , dans u ne écritu re , du 4 fr u c tid o r , faire de n o u vea u x
calcu ls , qu ’on n e répétera p a s , de peur d’a ch eve r de rendre cette partie
de la cause com pliqu ée et .obsçure ; car il d im inue en core sur A u d ig ie r /
a v e c leq u el il collu d e.
’>
Il éta b lit un systèm e n ou veau pou r lui-m êm e. Q uan t
au com p te de*
jouissances , il dit , pour la prem ière fois , après 28 ans de p r o c è s , q u e '
c ’est A n to in e D em u rat qui a tout g éré dans la m aison G endraud. Il ex
p liq u e divers prélèvem en s à faire de sa part. T e l est le dernier état de la
procédure.
'
M
O
Y
E
N
S
.
Il n ’y a pas de difficulté sur le p artage en lui-m êm e ; il n ’y en a que
sur les raports à faire ,
et peu im porte qu ’ils soien t faits par le cito y en
G ra n et , ou par le cito y e n A u d ig ie r , qui n ’a vo it que faire de ven ir se
m ê le r dans u ne caus« déjà assez em barrassée, pour qu’il n e fût pas b esoin
d ’y m u ltip lier les procédures. Q u o iq u ’il en soit , les intim és s ’occu peron t
de fixer les rapports qui d oiven t être faits au partage , et après ce la ,
d ’en d éterm iner la form e. A in s i , la discussion se , réduit aux questions
suivantes. i . ° L e s citoyen s G ra n et et A u d ig ie r d oive n t-ils le rapport de*
biens
�<$ )
bien« provenan* des Mercier ? 2.° Subsidiairemept, quel rapport de?
Y ro ien feiU , rela tivem en t à cette créa n ce ? 3.° G ra n e t d o it-il le rapport
du m o b ilier et des jouissances ? 4 .0 Q u els p rélèvem en s son t dus à G ran et
et A u d ig ie r ? 5.° Q u e lle doit ê t r e , d’après les exp licatio n s c i-d e s su a , la
form e du partage ? 6 ° . Q u i doit, les dépens ?
I.°
Granet et A u d ig ier, doivent-ils le rapport des biens venus des A ltrcler ?
C ette question dépend m oins du d roit rigo u reu x , que du fa it e t de*
circon stan ces.
L a demande en partage étoit pendante depuis 4 a n s, lorsque les citoyens
G ran et firent saisir les biens sur le curateur.
A lo r s l ’effet de la sen ten ce de 1 7 6 7 , qui o r d o n n o itle p artage du m ou lin
B o tte , et perm ettoit de se m ettre en posséssion des b ien s M e r c ie r , éto it
un accessoire in séparable de la dem ande en p a rta g e . L e s condam nations
obtenues , éto ien t tout à la fois une chose h éréd itaire ,
e t sous la m ain
de la justice.
A in s i , de m ôm e que le co h éritier ne peu t ven d re u ne p o rtio n de la
su ccession in d ivise , si ce
pendente , pars rei communis ,
aussi , et
par parité
n ’est ant'e intcntatum judiciirm s
catcris invilis ,
alienari
eo enim
nequit. D e m ôm e L . z. et 3. Cor
de droit , un co h éritier ne p eu t faire sa co n d i-
tio n m eilleu re aux dépens de la chose com m une , en détournant
°m’ dlvvim
à son
profit seul , l ’effet d’une sen ten ce lu cra tiv e pour la succession.
O n n e peut pas o bjecter que les bien s M e r c ie r , autres que le m o u lin ,
n ’éto ien t q u ’ une sim p le hypothèque dans la succession G endraud ; quand
c e la seroit > l ’hypothèque n ’en tom boit pas m oins dans la m asse com m un e e t d ivisib le , suivan t le te x te de la lo i : Pignori res data in fam iliœ erciscundæ ju d iciu m venit. E n g én éra l , tout ce qui a pour o rig in e la su ccès- ^ ^
sion J en tre daus le partage. Res hcrreditaria omnes 1 sivi in ipsd hcere~
ditate inventa sint s s i r i i
e j v s occasione
acqvjsitæ
' ^erisc. ^
.
M a is que répondra le cito y e n G ra n et à la circon stan ce im portante ; .
que par la répudiation des enfans d ’A n to in e M e rc ie r , et par la d éfaillan ce
de toute la lig n e de M ic h e l M e r c i e r , je u n e , les seuls h éritiers du san g
étv ie n t
le» G e n d ra u d ,
descendant
de M ic h e l
M e rc ie r j
aîn é ,
11
in-
.1
�.
( 10 )
aiqués par la lo i , com m e successible3 par la règle de la représen tation .
C o m m en t don c adopter qu’un protuteur ait abusé
de la m ain - m ise
gén érale qu ’il a v o it faite sur la su ccession com m une , au point de faire
m ettre en ven te jud iciaire , sans nécessité , des h éritages advenus à cette
su ccession , pour les acqu érir lui-m ém e à v il prix ? 1
' ^
L a justice m ain tien d ra-t-elle cette opération frauduleuse , d ’un hom m e
qui d evo it g ére r de bonne foi pour to u s , et qui n e p ou voit rie n dénaturer ?
L e cito y en A u d ig ie r , se p révau t d ’une con su ltation de juriscon sultes
estim és , auxquels il n ’a
eu garde de soum ettre les pièces du procès ,
m a is ' seulem en t un m ém oire à
co n su lter , où il a posé-la question lu i-
m êm e : C ’étoit de savoir , si en g én éra l le m ari qui achète a v e c les de
n iers de sa fem m e , a ach eté uxoris nomine , ou pour lu i-m êm e. M a is ce
n ’e s tp a s -li la d ifficu lté , et .le cito yen A u d ig ie r n ’a pas obtenu u ne solu
tio n pour la cause.
'
x
'•
Il seroit : peut-être d ifficile de fo rcer le cito y e n G ra n e t .à donner com
m u n ication
d’une acqu isition1qu’il auroit. faite , m êm e a vec les deniers
com m uns
sij.cette ^ a cq u isitio n a vo it été faite expressém ent p our
son
com pte particu lier , et d’un objet tout-à-fait étran ger , et indépen dant de
la su ccession com m une.
. M a is , c ’est au nom de la' su ccession ,
-'- •-'qu’ il p o u rsu ivoit la
et pour une dette com m une ,
ve n te ju d iciaire ; c ’est com m e
protuteur ,
ou au
m oin s j negotiorum gestor , qu ’il a conduit la procédure ju*qu’à exp rop ria
tio n ; et qu’il a fait adju ger les im m eubles au procureur des poursuivons ,
et par suite à lu i-m êm e , en cette qualité.
C e qu !il a fait adjuger , éto ien t des im m eubles de la succession G e n d ra u d , pou r laq u elle il auroit pu s’en m ettre en p o ssession , so it à titre
d ’h éritier , soit d’après la sen ten ce de 17 6 7 ;
Il
en
étoit réellem en t en
possession lu i-m êm e , d ’après la sentence du 10 décem bre 1778 ; et la •
succession
y auroit trou vé un gage suffisant , n o n seulem en t des arré- >
rages du m ou lin , antérieurs a 1 7 2 7 , auxquels il lui a p lu de s ’en t e n ir ,
m ais en core des arrérages échus , depuis 17 2 7 , jusqu ’en 1780 , q u ’il a
m je u s aim éip a ro ître abandonner po u r son avantagé particu lier.
Cent.} •• ch.yi.
C e p e n d a n t, com m e dit L ep rêtre ,
l ’on tie n t p our m axim e au p alais ,
que ce que l ’un des co h éritiers, retire ou achète •, q u ia été dependant de la
succession c o m m u n e ,
l i e n que ce soit en son nom p articu lie r , p eu t être
�( Il )
n éanm oins réclam é par tous les autres co h éritie r# , p o u r être partagé en
co m m u n , en le rem boursant.
T e l est aussi le vœ u de la, lo i, Colurredes debent inler se^communicarç L.rg.ff./àipif.
CQmmoda et incommoda, E t c ’est l e : d evo ir du ju g e ., d it-e lle ailleu rs , de
t!
i
v e ille r à ce qu ’un co h éritier n e fasse 'pas seul sa co n d itio n m eilleu re a v e c
les
deniers com m uns ; Frcspicere debet ju d e x ut qued unus cxhœredibus ex re
httreditarià percepit , stipuïatusve est , non ad ejus solius lucrum pertineat.
Ces prin cipes n e son t n u llem en t in com patibles a vec ceu x rappélés dans
la consultation du cito y en A u d ig ier. L e tuteur peut a ch eter en ju stice le»
biens du pu pile , o u i , cela est quelquefois vra i ; m ais il ri’a 'p a s poursuivi la
v e n te pour acheter ; e lle a été au contraire p ou rsuivie contre lu i ; m a is
il
a fallu , avan t d ’exprop rier , que la nécessité de vendre fût c o n s ta té e ,
e t qu’il n ’y eût pas d ’autre v o ie
de lib éra tio n . Ici ,
G ra n e t p o u vo it se
• m ettre en p o sse ssio n , il auroit co n servé un g ag e suffisant pour répondre
d ’une créan ce qui n ’est co u verte qu ’en u ne fo ib le partie.
L e m a r i , peut ach eter pour lu i-m êm e a v e c les deniers d o ta u x , sans que
la ven te soit pour sa fem m e , cela est vrai en core en g én éra l ; m a is , c ’est
q u ’il est le seu l m aître de la d o t , a v e c laq u elle il a fait l ’a cq u isitio n , et
le citoyen G ra n et n ’étoit pas le seul m aître de la créan ce M e r c ie r , dont
i l a pris prétexte pour se fa ire -a d ju g e r.
x
'
...
Il sero it difficile , après avo ir-lu la procédure ', de phteer G ra n et dans
la classe d’un m ari qui achète a vec les deniers dotaux. D ’a b o rd , la dot de
sa fem m e consistoit dans ses droits su ccessifs‘ u n iv e r s e ls , a vec p ou voir de
‘ le s rech erch er. E n secon d lie u , le C ito y e n G ra n et a exécu té ce m an d a t,
e n faisant les poursuites , co n cu rrem m en t avec 3a fem m e ; ce qui p rou ve
qu ’il ne co n sid érait pas la dréance M e rcie r
com m e u n iqu em en t m o b i-
l ia i r e .ll a fait faire la saisie aux m êm es nom s. Il a eu so in 'd e faire in sérer
que l ’adjudicataire retien d ra it le p rix , à com pte de scs créances. E n fin ,
après la ven te , au m om ent de p arler en son nom s e u l , s ’il vo u lo it que
les
poursuivans et l ’adjudicataire n e fussent pas la m êm e c h o s e ,
- pris possession des biens , tant en son nom ,
fem m e n ’étoit don c pas étran gère à
nécessaire à la tradition.
il a
qu’e n 1 qualité de mari. Sa
la vente / puisqu’il l ’a c r u e .p a r tie
•- ï
O n pourroit don c jllr e ^ a v e c fondem ent que le cito yen G ra n e t a vou lu
a ch eter pour la succession.., ou dum oins uxqris nomine. C ar dans le cas
. m ém e.o ii la lo i dit^en g én éra l ^ que^ tv m^ri n ’acqu iert ;pae pour U fc im a e ,
e' isc:^
’1*
’V '
Ibid.
�( 12 )
L. Penuîr. C . eIIe d!t ausâi qU>11 faut que la
Com.utr. ju d jr a d ita fu erit possessio.
Cochïn
t 'd
traJitw n ait é té faite à lu i-m ê m e . S i ei
- ^ e$t G n sein blable espace , que C o ch in argu m ente de la qualité prise
nH , p f i 3 i ^ P a r^e m ir ‘ ^ans les^ p ou riu ites, à.,|U..jvérité d ’une licita tio n . M ais ce qu’il
î i 6-
à la cause , pour l ’om ettre. « S i le m ari se rend adju div ca ta ire , on n e peu t pas dire que ce soit à lu i p erso n n elle m en t que l ’adjudi» ca tio n est faite ; il ne change p as de qualité au m oment de l ’adjudication ;
» et co m m e ju sq u es-là il n ’a procédé q u ’en qualité de m ari i ot pour fa ir e
z S> valoir les droits de sa fe m m e ; de^ m ôm e ,
dans l ’adjudication , ce n ’est
» que, pai/r e/k.qu’iL se ren d adjudicataire ».
.
,
A u reste , le cito yen G ra n e t, après avo ir si b ie n ex p liq u é en q u elle qua
lité il s’é to it rendu adjudicataire , a vo it d o n n é une ex p licatio n plus positive
e n co re dans ses g r ie fs , et sa requête , des 18 et 2o décem bre 178 4 . Il ;se
. ren d o it ju stice ,
en
offrant le
p a r ta g e ,
i l y co n clu o it lui-m êm e. F au -
d ro it-il don c que des co h éritiers , qui ont eu u n protuteur dans sa per
so n n e .,. et qui n ’ont jam âis eu ni pu avo ir un seul p ap ier de
sio n , fussent victim es
d ’une infidélité , qui
la su cces
a em pêch é les parties de
s ’accorder sur le point p rin cip a l. L e s in terlig n es ajoutées n e son t pas de
la m êm e .plum e. O n lit e n co re dans
cito y en G r a n e t ,
ce
qui a été bâton né ,
l ’aveu du
q u ’il a acquis p o u r sa fem m e e t ses co h éritiers un b ien
de leu r . fa m ille , et qu’il e n id o it la com m u n ication , m oyen n an t ses
reprises. E n fin , si G ra n e t n ’avo it pas acquis pour ses co h éritiers , il au ro it au m oin s, d ’après sa prise de p o ssessio n , acquis pou r sa fem m e. A lo rs
le pis a lle r pour le s intim és sero it d’attendre son d é c è s , puisqu’il est usu. fruitier. M a is il est cla ir que le cito y e n G ra n et ,
d o it.la com m un icatiqn
de ce q u ’il a a cq u is, parce que les lo isjn e v e u le n t pas qu’il se soit e n rich i
aux d é p e n s de ses coh éritiers , a vec une créan ce com m une , dont il s ’éto it
e m p iré s e u l; il la d o it,p a r c e que c est a tort qu’il a regardé la succession
com m e vacante. ; lu i qui étant de la fa m ille , ne peut s ’autoriser du p rétexte
de sa b o n n e f o i , com m e un étran ger ;
il la d o i t , p arce qu’il n ’a
m ôm e entendu acheter en, son nom seul ;
pas
il la doit enfin , parce q u ’il
l ’a v o it offerte lu i-m êm e,
, . ,,
1 I-°
’
"
Quels rapports d evroith citoyen G ra n et, hors :les biens-fonds des M ercier ,
et pour en tenir lieu.
‘
S’il falloit décider cette question subsidiaire,
par le s propositions
�(
1 3
q u ’ont faites les adversaires , il n ’j
}
auroit •certain em en t
rie n de
plu»
difficile , car ils n e son t pas d ’accord en tr’eux à ce t égard ; b ien plu3 , ils
n e le sont p a s , chacu n a vec lui-m êm e,
r
G ra n et o ffroit le p rix de l ’adjudication en 17 8 4 ; puis la créa n ce M e r
cie r e n 1785. 11 a revu et co rrigé tout cela en l ’an 1 r.
A u d ig ie r o ffroit d’abord un tiers de 1,4 5 6 liv . ,
a v ec l ’in térêt depuis
'. 1 7 2 7 . E n su ite il offre le t ie r s d e 4 ° 8 liv . > a vec l ’in térct depuis 1 7 8 0 ..E t
le
cito y en G ra n et , charm é de cette d im inution est ven u par delà e x p li-
? quer qu’il n e fallo it payer que deux neuviem es au lie u d ’un tiers.
.
A quoi donc s’en ten ir dans cet em barras ? à rien de ce qui est prop osé,
Q u ’éto it G ra n et dans la fam ille G endraud j un p r o tu te u r , bans doute;
i l éta it
m ajeur au
décès du père de la fem m e P ru gn ard , c e lle -c i éto it
.a lo r s au berceau ; G ra n et s ’est em paré des biens. P ru gnard e t ,P e m iu a t ; ^ ^ ^
i l n ’a don c pu jouir que com m e p rotu teu r. Ç a r
pro
tiftore ■
gerit ■qui quip rotuu
muñere tuions fungitur in re impuberis , siv'e se putet tutorem , sivè non esse i
Jingil tamen esse.
.
.
, M a is si G ra n et n ’éto it pas p r o tu te u r , il n e con testera pas au m oins
q u ’il n e fût vis-à -vis de la fem m e P ru gnard , negotiqrum gestor.
,
L .9 .denegoi.
o L e s procès M e rc ie r , de C u rtoh et autres ; les traités d e ^ 7 7 8 , n e p e r -
f>est'
•.m ettent pas d ?en douter. A in s i abrégeon s la discussion . à cet; égard.
O r j le negoliorum gestor est com ptable de la faute lég è re e t d ’une exac. titude scrupuleuse. Spondet solertiam et cxactissim am diligenliam .
Voyons
s ’il a tenu cet en gagem en t.
ln st- * obllg.
1U<X tx quasi
cont. nasc.
.
L e cito yen G ra n et s ’étant em paré des poursuites de 17 2 7 ,¡a fait rendre
en 1 7 G7 une sen ten ce
qui ord on n oit un p a r ta g e , et. cond am n oit à des
arrérages de ferm e , antérieurs à
17 2 7 .
M ais pourquoi n e co n clu o it:il pas
aux arrérages échuâ jusqu’à J 7 6 7 ?
P ourquoi en 1 7 8 0 , en reprenant ses poursuites , n e c o n c lu o it-il pas aux
arrérages postérieurs ; il ne d eyo it .pas cra in d ie la prescription , i l i ’a vo it
r e le v é e en 1 7 6 7 .
!
.
A in s i j il a fait tort à .la succession, com m une de ces a rrérag es,
D ir o it-il que c ’éto it la
r
m êm e ch o ?e; de faire ordonner le p artage du
m ou lin ; m ais ici plus grande n é g lig e n c e , et m êm e in fid élité. C a r au lie u
. d ’y faire procéder depuis 1 7 6 7 , il a vendu ses droits p erso n n els ,
et a
laissé prescrire la portion de ses coh éritiers ; dem eurant néan m oin s n an ti
de tous les titres et diligence».
�•
-,
) .
P ou rqu oi encore ,
après avoir demanda un désistement au iieu r de
C u rto n , à1t - il ch a n g é ses co n clu sio n s pour aa born er à un p artage ? *11
co n sen ta it de lu i laisser la p o rtio n acquise de L o u is M e rc ie r 5 niais c ’-éto it-là cutpa lata. C ar P h ypoth cqu e des G en d rau d éto lt assise sur les b ien s
.de l'a ïe u l et du père de L o u is M e r c ie r , depuis i6 y 2 . A i n s i , lou is M e r
c ie r n ’a v o itp a s pu ven d re sa portion h éréd itaire franch e d ’h y p o th èq u e}
pas plu s que
de C u rto n ,
le surplus des bien s , dont cep en d an t o n é v in ç o it le sieur
à rcausc de la m êm e h ypoth èqu e.
■
C ette dem andé en partage , n ’é to it-e llâ pa3 e lle -m ê m e un e x e rc ic e des
droits successifs des M e rc ie r , à cause des répudiations. Q u o iq u ’il en s o i t ,
p a r l ’effet du partage demandé par G r a n e t , il a perdu doux septérées et de
m ie de
,j
terre , plus les jouissan ces
, k ..1 ’ en core u n e
•*J*
’• î
depuis
1 7 % jusqu ’à présent. V o ilà
d édu ction co n sid éra b le dans le g a g e d’une créan ce , que les
adversaires ' cfepëriâant disputent
k qui m ieux m ieu x ,
s ’ils
d o iven t la
réduire au tifcrs , ou aux deux n euvièm es de 408 liv . en p r in c ip a l,
sauf
çn co re des dim inutions exagérées et rid icu les.
'
"
Sans d o u te , le cito y en G ra n et ne p réten d p a s , de bo n n e f o i , avo ir traité
de tous ces droits ou créances à sa' guise et à sa plus gran d e u tilité , .et
cependant
d ’en être quitte aujourd’hui pou r d ir e , v o ilà les t it r e s ; vous
adopterez ce que j ’ai fait pou r v o u s , et je garderai ce que j ’ai fa it pour
m o i;
cette p réten tio n n e sero it pas so u ten ab le.
!
Il est juste que celu i qui a été nan ti pendant /¡o ans de tous les titres
d ’une
fam ille ,
qui a retardé pendant 27
dem andé lu i- m ê m e ,
ans un partage
qu’il
a vo it
qui s ’est établi au m oins le negoiiontin gestor de la
L fa m ille , rende en tières les actions héréditaires dont il s ’est e m p a ré , jus
tifie au m oins qu ’elle s
p lo y é
exactissimam
so n t dim inuées sans sa faute ,
diligenliam .
de vo u lo ir reten ir pour lui-m êm e
fa m ille Prugnard ,
S in o n ,
il
seroit
et qu’il y a em
absurde de sa part
des b ien s devenus héréditaires
ou qui é to ie n t .au m oins
le
gage
à
la
d ’une créan ce
considérable.
E n fin , pour résum er ce subsidiaire , le cito y e n G ran et doit rapporter au
p artage , s’il retien t les biens à lui adjugés ; i . ° les i,2 o o liv . > p rix de
son ad ju d icatio n , qu ’il doit aux créan ciers , a v ec l ’in térêt depuis la v e n te ;
I
2.0 la som m e qu’il a tou ch ée du sieur de C u r to n ,
a vec l ’interôt depui*
le paiem ent.
!
•
�( i5
î
Voilà, d’abord ce qu’il doit , sans d ifficu lté , parce qu ’il n e retien t cela
que pour le com pte de ses cohéritiers.
E n second lieu , il doit le rapport fictif des deux cinqMièmes du m o u lin ,
e t des jouissances depuis 17 2 7 ; faute par lu i d’a vo ir p o u rsu iv i la sen ten ce
^ d e 17 6 7 . ( E t c e l a , i l l e doit dans tous les ca s, outre les biens saisis en 178 0 ).
L a lo i y est expresse. Debet rationem reddcre de eo quod gessit et de eo quod
non g e ssit, aut ut non oportuit. . . . Qui tamen negolium aliquod suscepit non neg. geji.
IMPUNÈ negotium periturum deserit.
P ar cette sen ten ce , les M e rc ie r éto ien t condam nés au rapport des jou is
san ces depuis 17 2 7 . A in s i , leu rs biens possédés par G ra n et d evo ien t ré
p o n d re de cette condam nation. .
A lo r s , si le cito yen G ran et n ’é to it pas tenu d e1ces jou issan ces e lle s m êm es , il d oit représen ter leu r g a g e ,
acquis ,
saces ,
pour
c ’est-à-d ire , le s b ien s par lu i
être hypothéqués à ces condam nations , a v ec les jouis-
â com pter de 177 8 ; et en outre , la te rré laissée au sieu r de
C u rton ,
par le partage fait a v ec lui en 17 7 8 , a v ec les jouissances de
puis 1 7 5 9 , faute d ’avo ir aussi ex ercé les droits de la su ccession sur cette
t e r r e , parce qu’elle étoit hypothéquée aux m êm es créances.
'
■
L e cito yen G ran et doit rapporter aussi les dépens faits e n 'î 7 2 7 ,
a du faire com prendre dans son exécu to ire
Sur ces dem an les
qu’ib
du i . er m ai 1750.
en rapp ort , il faut p réve n ir deux o bjections , que
fera peut-ôtre le cito y en G ra n e t.
i° .
D ir a - t-il , j ’ai obtenu des lettres de ratification ‘sur l ’adjudicatiôrt
du 5o août 178 0 j don c j ’ài p u rgé vo tre hypothèque. Je ne dois , d ’après
l ’éd it de 17 7 r , que le rapport du p rix de l ’adjudication.
L e s lettres de ratification , il est vrai , p u rgen t les hypothèques h l ’é
gard de toutes les créances des vendeurs. Ici > le -v e n d e u r et
l ’acq u éreu r
sont la m êm e personn e. Ici , celu i qui demande?.l’ex tin ctio n .d o l ’hypothùque éto it dépositaire des titres constitutifs de cette m êm e hypothèque. N e
sero it-il don c pas m onstrueux de p rétend re qu ’il a pu l ’éteind re à son profit.
L e dépôt com m e le g a g e o b lig e celu i .qui s ’en ch arg e , de le rem ettre
e n nature et sans a lté r a tio n , au m oin s de
son fait ; sub lege ejusdem in
specie rcslitucndx. C om m en t don c co n ce v o ir que le citoyen G ranet ,, q uj
éto it nanti 011,1767 et 1780 , de tous le s titres constitutifs d ’une ç r é a n c e ,
d evan t produire ce
qui est dit c i-d e s s u s , ait le- d ro it.d ’é tein d re.p a rtie de
cette c r é a n c e , et néanm oins de reten ir les im m eu bles qui p o u vo ie n t en
i
�( i G)
répondre, C 'eet com m e i l le porteur d 'u ne procu ratio n g én éra le se falsoî»
u n e o b lig atio n à lu i-m ê m e .
L e cito y en G r a n e t , dépositaire des titre» d ’une créa n ce de ses c o h é r i
tiers , n ’a pu v a la b lem en t p ren d re pen dant son n an tissem en t des lettre»
de ratification ;
e lle s
son t n u lle s et de n u l effet à Içur égard 5 il n ’a pu.
rie n in n o v er à le u r é g a r d , en co re m oin s locupletari, eoruni detriment q. II*
d o iven t retro u ver le u r créa n ce et l ’hypothèque de cette c ré a n ce , au m ém eétat qu’avan t le n an tissem ent du cito yen G ran et.
E n fin , les b ien s M e r c ie r é ta ie n t d even u s partie de la su ccession P ru g n a r d ; o r les lettres de ratification ne p u rgeo ien t pas la prop riété.
2 .° Il objectera que Lassalas est détem pteur du m o u lin B o tte j,
le
et que
p a rta ge n e peu t en être ordonné qu’a v ec lu i.
M a is le m ou lin est h ors la fam ille M e rc ie r depuis 17 6 9 . L a se n te n c e
qui o rd o n n o it le partage
est b ie n de 17 6 7 ; m ais e lle n ’est pas rendue
a v e c Lassalas , n i le sieu r de C u rton. A in s i , L assalas p ou rroit op p oser la
prescrip tio n . L e cito y en G ra n e t savoit b ien cette o ccu p atio n de L assalas ,
p u isqu ’il l ’avo it assigné en 17 6 6 ,
et q u ’il a traité a v e c lu i e n 177 8 . Il
é t o it , lors de ce t r a it é , com m e à p ré se n t, n an ti de la sen ten ce de 1767511
a d on c laissé p érir par sa fa u te un effet de la s u c c e s sio n ; il en est com pta
b le ; d on c il
en
doit le rapport com m e s ’il e x is ta it, sauf à le faire
éch eo ir à son lo t. S ’il prétend qu’il n e l ’a pas laissé prescrire , c ’est à
lu i à en p o u rsu ivre le reco u v rem e n t ; et le s intim és
lu i o ffren t tou te
ju b re g a tio n de le u r part.
I I I.°
. Qui doit le rapport du mobilier et des jouissances ?
Si on s ’en rapportoit aussi à ce qu’a écrit le cito yen G r a n e t, et K un
dossier qu’il a in titu lé « p r e u v e de l ’in d igen ce d ’A n to in ette M a lle t » , il
n e doit rien.
Sa fem m e et sa b e lle-m ère o n t déclaré par plusieurs a c te s, copiés l ’un
sur l ’a u tre , avant son m a r ia g e , que toute la succession consistoit en u ne
m aison délabrée ; et le cito yen G ra n et rapporte dans le m ôm e dossier une
espèce d’en q u tte à fu tu r, du 3
ju ille t 1 7 8 7 ,
o ir 'd e s tém oins par lu i ‘
m e n d ié s, ee disoient cependant ferm iers de quelques parcelles d ’héritages.
11 y avoit* don c quelque chose. Q uan t au m o b ilie r , on y fait dire que le s
créancier*
�(
17 )
créan ciers l'a v o ie n t fait ven d re ; mai» pour é v iter de plus lo n g s débats , les
in tim és offrent de p rou ver qu’il y avo it notam m en t ,une ju m e n t p o il B a y ,
que le cito y en
G ra n et a vendue i 5o francs ; tre ize ou q u atorze b reb is ,
u n e petite boutique de m ercerie , en v a le u r à peu près de 800 fr a n c s, que
les citoyen s G ra n et ont em porté en a llan t d em eu rera E b r e u il; enfin q u ’a
près son départ de R o c h e fo r t, le cito yen G ran et y reven an t de tem9 à
a u tr e , a ven d u du m o b ilie r , et notam m ent une arm oire de frên e à deux
battans , au nom m é Joseph H ugon , cordonnier.
E n v o ilà a sse z, sans d o u te , pour dém entir le cito y e n G r a n e t; a lo r s ,
com m e un m en teu r ne doit jam ais être c r u , cela suffira pour faire ord on
n e r la preu ve de la consistance du m ob ilier par com m une renom m ée.
Il en est de m êm e des jouissances. L es intim és offrent aussi de prouve^
que G ra n et se m it en p o ssessio n , aussitôt après son m a r ia g e , de la m aison
de R o ch e fo rt, du jard in en d é p e n d a n t, du ban c de la h a lle et de deux te r
res , sises au lieu de Chedias. Il a jo u i du to u t, soit par lu i-m êm e à R o
c h e fo rt, soit par des colons quand il a été à Ebreuil.
L e traité de 1 7 7 8 , fait a vec G ira u d , p rou ve l ’existen ce d ’une autre t e r r e ,
et que le cito y en G r a n e t , pen dant son séjour à E b r e u il, con tin u o it de
rech erch er et jou ir ce qu ’il savoit appartenir à la succession de son b eau père. A cet égard il doit le rapport des jou issan ces, m êm e antérieures à
1 7 7 8 , puisqu’il en a fait rem ise de son a u to r ité , et.pour raisons à lui
connues.
D e sa p a rt, P rugnard rapportera les jouissances depuis l ’an 7 , de deux
terres , dont il a év in cé la com m une de R och efort qui s ’en éto it em parée ;
plus le s jouissances de la m aison depuis qu ’il, l ’a v e n d u e , car auparavant
i l ne s ’en est jam ais m is en possession.
A u reste, si G ra n et persiste à n ier cë qui est de son fa it, une p reu ve
»uppléera. aux raisonnem ens qui p o u rroien t co n vain cre le tr ib u n a l, qu ’un
gendre n ’éto it pas a llé s ’établir à R o c h e fo r t, pour laisser tout en tre le s
m ains d ’une b elle-m ere d e 61 a n » , ‘re m a r ié e , et pour ne se m ê le r lu i,
m êm e de rien.
L e cito yen G ran et a prétendu pour la prem ière fois en l ’an 1 1 , qu’Antoin e D em urat avoit été l ’adm inistrateur des biens jusqu’en 1 7 5 s ; m ais n ’y
a-t-il pas de TincoriVéqüeiïce à prétendre qu/A ntoinette. M a lle t éto it à la
tête de sa m aiso n , après 1765 , et cep end an t qu’e lle éto it en" quelque sorte
e n tutele iô ans auparavant.
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1»,
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'-l :oJ fculq ; *• v
I y .0 . i ' • V • 1 . :
}'• ; <-, »;
!...
i; i
PfctèveTïiens rcclames p a r le citoyen Gra.net ou par Àudigicr,
1 .° U s le n a n d e n t 5 >o fr. po u r le j fa u x -fra is em p loyés dans les p o u r
suites dès procèsi
1
11 e s t a s s e s bizarre- que le cito y en G ra n e t prétende être payé pour des
affaires dbtit it* ne" véut pas. com m un iquer le' bénéfice, lis offrent le tiers
ou les deu x-neuvièm es de 408 fr. et ils osent dem ander 5 o o fr. de faux•
‘ ^
s
frais-'; cela eSt rid icu le. A la vé rité ils ont eu h on te eu x-m êm es de le u r
p r o p o s itio n , et o n t réduit hypoth étiqu em ent les 5oo fr. à 2oo fr. ; m ais
dans l ’un com m e dans l ’autre cas , f et pour év ite r les discussions in u tiles ,
cet a rticle dépend dil sort d ’un autre.
Ou ilÿ seront condam nes à com m un iquer l ’adjudication , ou non .
D a n s le p rem ier c a s , ayant fait les affaires co m m u n e s, les intim és
.
.
*
‘
offrent d ’a llo u er ce qui sera rég lé p ar le trib u n a l, s ’il y a lie u .
D au s le second c a s , G ra n et n ’ayant pas l ’actio n mandati contraria, n e
peut répéter que, ce qui est p o rté 'en ta x e ,
p ayer.
et il a eu soin de s ’en faire
'
Jnsùt. ob'ig. ’ ‘ L e procureu r'fon dé a b ie n , quand il a a gi de bo n n e fo i, une action pour
quti ex quasi I,-,n Je m nité de ces faux-frais : m ais le ncgotiorum geslor n ’a actio n que p our
cvmraci.nasc.
_
.
.
.
les frais utiles qu ’il a faits. Rcpelit sumptus quos UTII.ITKR f e c i t .
2 . ° Ils dem andent 240 fr. pour u ne créan ce F.pinard : e lle n ’est pas éta
b lie ; nuand e lle le se ra , les intim és n e la con testeron t p a s , si e lle est
i, . .
' ■
:l '
»
lé g itim é .
t
•
5 .° Ils dem andent 222 fr. p o u r réparations à la m a iso n ; m ais on n e
p arle que d’un devis estim a tif, et on ne rapporte aucune quittance qui éta
blisse le paiem ent de la som m e ; .e lle n ’est donc pas due.
4 .0 Ils dem andent les 3 oo francs de p rovision s ; pas de difficulté.
6 .° G ra n et dem ande i2 o francs payés a J o sep h G iro n : on p o u rr o itle s
co n tester ; "mais les intim és s ’en rap p ortent à la prudence du tribunal.
C.° Il p arle d ’une dette payée à Battu , d ’après u ne sen ten ce co n su laire
de 1 7 6 6 ','s'ans cependant y co n clu re. Il n ’est donc pas question de la dis
cu ter ; d ’ailleu rs c ’est une créa n ce p e rso n n e lle à la fem m e G ra n et 3 U n e
peut en être question au p artage.
,
�(
»9 )
yo
Quelle
;
doit être la forme du partage f
L e s rapports et prélèvem en s étant co n n u s, cette question n ’est plus que
le co rro laire des précédentes.
.
L a masse doit être com posée de la m aison et jard in de R o c h e fo rt; 2 .°
des deux te r re s , sises au C h ed ial ; 3.° de c e lle retirée de G iraud ; 4 .0 du
b a n c de la h a lle ; 5.° des deux jardins qui ont été retirés de la com m une
de R o c h e fo r t, par les P rugnard ; 6 .° des h éritages portés p ar la sen ten ce
d ’adjudication du 3o août 1780 , et su bsidiairem en t des rapports à faire
p ar les citoyen s G ra n et et A u d ig ie r , d ’après le §. 2 ci dessus; 7 .0 du m o b i
lie r de la su ccessio n ; 8.° des jouissances à rapporter par ch acu ne des par«
ties , su ivan t qu’il a été éx p liq u é au § . 3 .
D an s le cas où les deux dern iers h é r ita g e s ,
én on cés e n la sen ten ce de
1 7 8 0 , n e fero ien tp a s double em p loi a v ec ceu x c i-d e ssu s, le cito y e n G ran et
e n devra aussi le rapport à la m a s s e , a v ec Je3 jouissan ces 5 car il a d éclaré
p ar u n e x p lo it du 16 septem bre 1 7 8 0 , qu ’ils éto ien t de la fa m ille G endraud
e t avo ien t été com pris m al à propos au placard.
’
A p rès la m asse ainsi co m p osée, le s adjudicataires p rélèv e ro n t ce qui a
été dit au §. 4 , et les P rugnard p rélèvero n t leurs créances au procès co n tre
la m u n icipalité de R o ch efort et autres 3 s ’il y a lieu .
L e surplus doit être partagé d ’abord en deux p o r tio n s , dont l ’une de
m eu rera en usufruit a u ‘cito yen G r a n e t , pour être réunie à l ’a u tr e , après
son
décès ; l ’autre form era le lo t de Jacqu elin e G e n d ra u d , et sera sou-
divisée en trois.
D e u x parts de cette so u s-d ivision seront allouées aux P ru gn ard , tan t
pour eux ,
que com m e représentans A n to in e D e m u rat ; la troisièm e sera
d é la iss é s, pou r form er le lo t de la fem m e F o u r n ie r , sauf au cito y e n G ra n et
à s ’arranger a v e c e lle , po u r ce qui co n ce rn e le résultat de sa tran saction
de 178 2.
y i.°
Qui doit les dépens ?
•' L e cito yen G ra n et y a été condam né
par la eénéchaussdç j c’étoit à
�(
20 )
juste titre. Il refusa constamment de s ’e x p liq u e r, ni communiquer acucune
pièce , quoiqu’il fût nanti de tout.
Il
a in terjette appel ,
et n ’a cessé de v a rier
dans ses m oyen s et ses
c o n c lu s io n s ; cette incertitu d e a o ccasio n n é le p lus de f r a is , il d o it,le s
supporter.
S ’il est ju g é q u ’il d oive un rapport de m o b ilie r et de. jou issan ces , i l
d o it les depens par cela seul , car c ’éto it le m o tif unique de son appel.
E n fin , il a jetté dans le procès une tie rc e partie , qui n ’a in térêt q u ’à
p laid er et à con tester sans m oyen term e ; car il lu i a v e n d u , et le d roit
de p laid er , et ce qui éto it le g a g e de la p aix. Ce n o u veau ven u a rem p li
sa
tâche ; et certes , il sero it de la d ern ière in ju stice de reje te r sur la
m asse ce su rcroît de dépens in u tiles et
em barrassans pour la cause.
A u reste , le s dépens son t la p ein e la plus juste de ceu x qui soutien
n e n t de m auvaises contestation s ; et c ’est b ie n la m oindre qu ’on p uisse
in flig e r à celu i qui résiste à un p artage ,
d epu is
dont la dem an de est form ée
2 7 ans.
C ertes ,
ce n ’est pas le cito y e n G ra n et qui m érite de la faveu r dans
cette cause , c ’est en co re m oins le
cito y e n A u d ig ie r : ca r c e lu i q u i a
vo u lu ach eter n o m in a tiv em en t un p r o c è s , ce lu i qui s ’est classé parm i ces
ergolabos , litium redemptores , que la lo i reprou ve el; d écrie , n ’est d ig n e
d ’aucun succès dans ses prétention s , pour peu qu ’e lle s soien t douteuses ;
e t s u r to u t quand e lle s sont com battues par des considérations d ’équité »
q u i , de tou te m anières ,
m ériten t la p référen ce.
M A N D E
T ,
D E L A P C H I E R ,
Rapporteur
H om m e
de lo i,
D e m a y , A voue.
• • "
A
Chez
MARTIN
R
I
O
D É G O U T T E ,
'
c
1I
4
'*
M,
Im p rim eu r-L ib raire ,
la F on tain e des L ig n e s , ( 1804 ).
vis-a v is
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Prugnard, Étienne. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandet
Delapchier
Demay
Subject
The topic of the resource
moulins
indivision
cessions litigieuses
meuniers
successions
Description
An account of the resource
Mémoire pour Étienne Prugnard et Marie Demurat, sa femme, intimés. Contre Jean-Baptiste Granet, appellant. Et contre Audigier, Notaire, Intervenant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1659-1804
Avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0331
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort
Rochefort-Montagne (63305)
Chamalières (63075)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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cessions litigieuses
indivision
meuniers
moulins
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53778/BCU_Factums_M0330.pdf
156f2fa6c9359abea9e1dcd27c9c0157
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MÉMOIRE
EN R É P O N S E ,
P our J e a n n e et M a r i e - G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et J o s e p h G R E L I C H E , leurs m aris, habitant à
M o z u n , intimés ;
Contre J o s e p h N O Y E R - D U B O U Y , habitant à
Chamaliere, appelant ; en présence d ’'A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
�M
É
M
O
I
R
E
EN R É P O N S E ,
Pour J e a n n e e t M a r i e -G a b r i e l l e N O Y E R , P ie r r e
et J oseph G R E L I C H E , leurs m aris, habitant à
M ozun , intimés ;
,
Contre J oseph N O Y E R - D U B O U Y habitant-à
Chamalière, appelant; en présence d ’A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
,
E citoyen N oyer-Dubouy crie au vo le u r, pour qu’on
ne le soupçonne pas; il se plaint de tout le monde: il
ne veut pas tout-à-fait, comme Harpagon , faire pendre
la ville et les fauxbourgs, mais après avoir mis une foule
l
de personnes à l ’index de sa colère, il va grondant
encore contre ceux qu’il ne désigne pas. Son mémoire
est un acte d’accusation contre son p è r e , ses frères,
ses sœurs , ses beau-frères, le juge de paix et assesseurs
de M o zu n , les juges, le commissaire et le greffier du
A
�( a )
tribunal civil de Clerm ont, le magistrat de sûreté, etc.
Il ne s’agil rien moins que de v o l , bris de scellés , pré
varication ; et véritablement son procès semble être la
matière d’une conspiration vaste,m éditée depuis l’an 5,
et dont les ramifications sont sans nombre.
Ces personnalités si multipliées, mêlées à des moyens
présentés cependant avec talent et adresse , doiventelles ajouter plus de persuasion en faveur de la narra
tion du citoyen N oyer-D ubouy, et convaincre davantage
de la sincérité des'faits qu’il avance? non ; la vérité
plus simple et plus naïve n’a pas pour escorte des in
jures et des accusations. Les dames Greliclie diront au
citoyen D u b o u y , avec moins d’aigreur et plus de fran
chise , qu’il a voulu les faire ses dupes ; qu'elles résistent
de tout leur pouvoir à le devenir ; et que c’est là tout
le secret de ses plaintes et de la contestation : qu’après
avoir fait régler ses droits dans les successions confon
dues des père et mère , il a voulu faire distinguer la
succession de la mère pour s’en créer de nouveaux ;
et sur une réponse équivoque au bureau de paix , il a
bâti l’édifice gigantesque de ses prétentions toujrturs
croissantes, et du procès interminable qui menace de
dévorer toute la succession.
Dans ce calios de faits, de débats minutieux et de
procédures, s’il y avait un point de départ positif, il
faudrait s’en emparer pour se rendre plus promptement
intelligible ; mais malheureusement la cause le serait
moins, si les détails en étaient omis, si rensemble en
était rompu ; car le système du citoyen N oyer-D u bou y
�C 3 )
.
est fondé principalement sur la procédure; il faudra
donc la parcourir toute entière. Il s’attache aussi à
prouver que sa mère a laissé une succession opulente;
il sera donc nécessaire d’en examiner la consistance.
' ' ii* .
F A I T S .
Jean-Baptiste-Josepli Noyer épousa, en 1760, Fran
çoise T i x i e r , fille de Marien T ixier , commis-greffier
de la cour des aides.
Marien T ixier , marié à Jeanne L e y m e r ie , qui lui
porta 5 oo livres de d o t , avait de son ch e f une petite
maison , un jardin de deux œuvres, une vigne de huit
à dix, une terre de trois quartonnées ; lout cela était
imposé , à son décès, pour un revenu présumé de 168
livres. Il avait trois enfans.
lie contrat de mariage de 1760, a des clauses pro
portionnées à cette richesse ; i.° la future porte un
trousseau estimé 35 o liv. ; 2.0 elle est instituée héritière
par égalité avec Gabrielle sa sœur, sauf un préciput
de 1000 liv. ; 3.° ses robes, ses bagues et joyaux font
un total de 120 liv.; 4 ° riche douairière, la future a
l ’expectative d’un gain de survie de 120 liv. en capital.
Marien T ixier, qui dans sa qualité était commis au
paiement des gages de la cour des aides, mit de la
négligence dans ses comptes. A sa m ort, en 1760, il
avait été condamné à plus de 80,000 liv. de contraintes
ou d’amendes. Sa succession se trouva en outre débi
trice de sommes assez considérables envers une seconde
femme.
A a
�( 4 )
L e fisc s'empara de la succession; le mobilier fut
vendu publiquement, et produisit 1269 livres; il fallut
.
en distraire 264 liv. de frais, et le surplus fut déposé
au greffe.
L a dame N oyer et sa sœur répudièrent au greffe ,
le 14 avril 1760. Jean Giraudias fut nommé curateur.
L e sieur N oyer avait acquis les créances de la veu ve;
il en donna l’é t a t , de m êm e que des siennes, par une
requête du 16 avril. L e total de ses demandes se por
tait alors à 5029 liv. 5 sous, h prélever sur la succession.
L e curateur fit faire le bail judiciaire des immeubles.
Beaucoup d’enchérisseurs se présentèrent ; des remises
furent ordonnées; l’adjudication fut faite à
livres.
Cependant le citoyen N oyer fit des démarches pour
l’honneur de son beau-père et pour sauver quelque
chose de sa succession ; il fit des voyages à Paris ,
sollicita des modérations, et enfin obtint, le 29 mai
1764 , un arrêt du conseil qui réduisit les droits du
fisc à 2000 livres, chargea le citoyen Noyer de payer
cette somme au trésor public , outre ce qui serait dû
au sieur de P ille, procureur à la chambre des comptes
(il paraît que c’était 1200 liv. ), au moyen de quoi le
citoyen N oyer fut subrogé aux droits du fisc contre la
succession.
Cette liquidation néanmoins n’engagea pas la dame
N oyer à se rendre héritière. On voit qu’ un autre cura
teur fut nommé après Giraudias , et que ce curateur
vendit h M .r Reboul la petite maison T ix ie r , moyen
nant 3 i2 o liv r e s, dont 2000 livres furent déléguées au
�( 5)
trésor, et io o o liv. à. M .r de Pille. M .r Reboul voulut
la garantie du sieur N o y e r, créancier principal, qui in
tervint pour la donner.
L e même jour le sieur N o y e r, tou jours comme person
nellement créancier, obtint la main-levée de deux saisiesarrêts, faites sur les deniers consignés au greffe, sur
le sieur Berard de Chazelle, débiteur de 1400 liv., et
sur le sieur de Vichy-VarVas , débiteur d’une rente de
2.5 livres. On ne voit pas s’il toucha ces deux sommes.
E n 1 7 6 7 , il vendit le jardin au sieur R e y m o n d ,
chirurgien , à la charge de payer une rente de 2 5 liv.
et moyennant 748 liv. (M arien Tixier l’avait a ch e té ,le
6 avril 17 4 2 , moyennant 35 liv. de rente ). Quant à la
vigne et à la terre , le citoyen D ubouy dit que son père
les a aussi vendues.
Françoise T ix ie r, femme N o y e r , n’était pas seule
hérilière de Marien , elle avait une sœur religieuse ;
l’autre était Marie-Gabrielle, vivant avec elle.
Quand la succession du père fut liquidée, celle-ci
voulut y avoir part, et demanda un com pte, non à sa
sœur, mais au cit. N o y e r, qui, comme créancier, oc
cupait la succession. Il fut, à ce sujet, fait entre eux un
traité, le 27 décembre 1767. L e citoyen Noyer y rend
compte d elà succession fixée à 11,088 liv.; sur quoi il
dit qu’y ayant pour 5,689 liv. ^ sous de dettes, ilresle
net 5 ,399 liv. 5 sous ; que Françoise Tixier ayant un
prélèvement de 1,000 liv ., il reste à Gabrielle T ixier
à prendre la moitié du surplus, c’est-à-dire 2,200 liv .,
à quoi le cit. N oyer ajoute 7 00
qu il a touchées pour
�m
sa belle-sœur sur d’autres affaires; de sorte qu’il se re
connaît son débiteur de 2,900 liv ., pour laquelle il crée
une renie raclieiable de 145 liv.; et comme Gabrielle
Tixier avait projet de rester près de sa sœur, il est dit
qu’en cas d'incompatibilité, elle pourra demander rem
boursement des 700 liv.
Y eut-il séparation? La rente fut-elle rachetée? on
l’ignore ; mais ce qu’on rem arque, c ’est qu’en 1766 et
1 7 6 7 , Gabrielle T ixier acheta une maison et des im
meubles dans le village de Provarel prèsSermentizon,
par trois ventes, moyennant 658 liv. On remarque aussique par acte du i 5 janvier 177^ , elle revendit tous ces
héritages au cit. N oyer son b e a u - fr è r e , moyennant
600 liv. dont elle lui donna quittance.
Ainsi ces immeubles s’effacent de sa succession, qui
consisterait tout au plus dans ses vêtemens et dans la
rente de 145 liv., s’il n’est pas jugé que les ventes qui Font
suivie de si près, en prouvent le remboursement.
Les sieur et dame N oyer avaient cinq enfans, trois
maies et deux filles; le tems était venu de les établir;
niais la forlune de la mère élait toujours incertaine,
ou plutôt elle était réputée entièrement nulle, puis
qu’elle 11’avait pas r é v o q u é sa répudiation.
Pour ne pas jouer un rôle tout-à-fait neutre lors de
rétablissement de ses enfans, on voit qu’elle sollicita
de son mari une reconnaissance de
lut faite le 8 novembre 17 7 6 , pour
touchés de la succession de son père,
11011 compris ce qui serait porté par
5,000 liv., qui lui
deniers, est-il dit,
et prix des ventes ;
quittance donnée
�( 7)
par Annet T ard if audit défunt T ixier<L a dame Ncryer
accepte cette reconnaissance.
Elle avait cinq enfatis; la générosité de son mari la
m e t t a i t à même de leur donner à chacun i,o c o liv. On
voit en effet par les contrats de mariage de ses enfans ,
et notamment de ses deux filles mariées aux deux ci
toyens Greliche, en 1776 et 1777 , qu'elle leur promet
de son c h e f une somme de 1,000 livres, payable après
son décès.
Gabrielle T ixier étant décédée, il paraît que la dame
N o y e r, sa sœ ur, fit assigner son mari en 17 8 3 , pour
obtenir une moitié de la succession de ses père et mère,
comme héritière de sa sœur, attendu que cette succes
sion lui était paraphernale. Elle reprit celte demande en
178 8 , et on ne remarque dans l ’un ni l’autre des ex
ploits qu’elle se plaignit de la reconnaissance de 1 7 7 5 ,
ni aucun des faits que son fils D ubouy lui fait dire six
mois après, dans un testament.
Ce testament, daté du 20 juillet 1 7 8 9 , qui n’est
revêtu d’aucunes formes, ne mériterait pas les regards
de lu justice, si le cit. D ubouy ne s’en faisait positive
ment un titre. Mais il en argumente expressément, il
en fait une pièce de sa production ; il huit donc en
rappeler le contenu.
La dame N oyer institue le cit. D u b o u y , son héritier
universel; elle prie son époux de lui reconnaître ce qui
lui est dù en conscience et probité.
Autant que je puis m ’en souvenir, dit-elle, mon mari
a reçu , i.° 7 à 8,000 liv. déposées chez M .r Reboul.
�C-8 )
2.°.Environ 2 5 o louis d’or de 24 lîv. que ]e^Tis moi-même
dans l’armoire démon père, à ¿’instant de sa mort. 3 .° Les
Jbiens qu’il a vendus...... Je n’ai de reconnu que 5,oooliv.
Je prie mon époux de reconnaître Le surplus, en con
science et probité, à Jean-Joseph Noyer-Dubouy, mon
héritier,
q u e j e p r i e d ’é v i t e r l a
r e c h e r c h e d e mes
DROITS P A R COMMUNE RENOMMÉE.
Qui ne v o i t , dans ce testam ent, une c o p ie , une
caricature du légataire universel ?
On devient certain de la captation, quand on re
marque que le citoyen N o yer-D u b ou y s’est marié un
an après, en 1790 , sans que la mère ait répété celte
institution.
Par son contrat de m ariage, on voit que son père
lui lègue les biens du B o u y , pour lui être remis après
son décès et celui de sa fem m e, la jouissance desquels
leur demeure réservée: ledit legs fait pour lui tenir lieu
de sa porlion héréditaire quand elle sera échue.
A la charge de p a yer, après le décès desdits sieur
et dame N oyer, 2,000 liv. h chacune des dames Grelic h e , pour pareille somme qui leur sera due par la
succession desdits sieur et dame Noyer, pour reste de
leurs dots, à elle faites par ledit sieur N oyer et sa femme;
plus 2,000 livres aux héritiers de droit, faisant au total
6,000 livres.
La mère ne paraît à ce contrat de mariage, que par
un fondé de pouvoir, ayant charge d ’autoriser le ma
riage; mais elle n’institue pas. L e legs est évidemment
fait pour tenir lieu des deux successions.
Le
�( 9)
L e cil. N oyer père, fut mis en réclusion h Billom ;
le n e u f iliermidor ne l’en délivra pas. U n chagrin
profond, dont il est inutile de dire les causes, fer
mentait dans son ame. 11 mourut le huit fructidor
an deux.
Quinze jours avant sa mort, il avait fait un testament
en présence des citoyens Girodias , L asteyras, M artinGibergue , B o m p a rd , Fournier et Q u esn e, détenus
comme lui ; en présence des citoyens Reynaud et
Bouchardon, commissaires du comité de surveillance,
et de Voltaire-Lausset, concierge de la maison de ré
clusion.
La loi du 19 ventôse devait lui inspirer des craintes
de confiscation. Il était encore fortement occupé du
projet de diminuer le legs, qu’il avait fait au citoyen
D u b o u y, de son principal im m euble, et la loi du 17
nivôse ne le rassurait pas assez. Dans celte double
occurence J e parti le plus prudent était de tenter une
reconnaissance au profit de sa femme; il déclara donc
luidevoir 12,000liv.pour le prix des ventes des meubles
et immeubles de son beau-père et de sa b e lle -sœ u r,
sans préjudice à d’autres reconnaissances.
A lout événem ent, il lui légua l'usufruit de ses biens,
et institua ses cinq enfans héritiers par égalité.
Cependant le district de Billom décida sagemenl et
légalement, le 11 fructidor, que les biens d’un détenu
mort et non ju g é , n’étaicnL plus susceptibles de con
fiscation ni de séquestre ; il permit aux hériliers N oyer
de faire lever par le juge de paix , les scellés niiî
B
�( 10 )
par le comité de surveillance, lors dé l’arrestation (i).
Les droits de la dame N o y e r , sur la succession de
son mari, étaient plus confondus que jamais dans la
succession du père, par le legs d’usufruit à elle fait par
le testament. A la vérité, ce legs ne devait être que de
m oitié, et il restait des difficultés pour liquider ses droits
sur l’autre moitié.
^
Ces difficultés, elle voulut les applanir toutes de son
vivant, pour ne laissera ses enfans aucune semence de
discorde. Elle les réunit tous pour leur céder ses droits
etreprises, moyennant unepension viagère de i , 5 ooliv.,
son logem ent, la jouissance d'un jardin, et moyennant
le délaissement de deux vaches, et tous les comestibles.
Cette pièce est rappelée au jugement du zb ventôse
an 5. Folio 5 , II0.
Ce traité liquidait entièrement la succession pater
nelle; les cinq héritiers en firent vendre tout le mobibilier. M ary Noyer aîn é, vendit sa portion à ses frères
et sœurs, moyennant 16,000 liv ., sous la réserve du
mobilier qui se trouverait chez sa mère, à son décès,
c ’est-à-dire, de ce que les uns et les autres entendaient
par la succession effective. A u moyen de quoi le partage
fut fait par quart ou par égalité , comme le voulait le
père par son testament.
( i ) Cette expression de scellés prouve que le comité n’avait
pas fait un inventaire général, comme le prétend le cit. P u b o u y ,
pour ajouter qu’on l’a soustrait; si quelqu’un est
su spect
de cette
soustraction , ce ne peut être ceux d ’entre les parties qui n’ont
haute les comités révolutionnaires que comme supplians.
�( lï )
Les deux dames Greliclie eurent les biens de Moznn.
Les citoyens Noyer-Lagarde et Noyer-D ubouy eurent
indivisément le domaine du B o u y , que l’intimé a au
jourd’hui seul.
L a dame N oyer ne survécut pas lo n g -te m s à ces
arrangemens de famille: elle décéda le 8 messidor an 3 ;
et comme ses héritiers supposaient toujours que sa suc
cession n ’élait que dans son mobilier, il en fut fait un
partage sans réclamation.
Mais bientôt advint le rapport de l’effet rétroactif
de la loi du 17 nivôse ; et malgré le testament de son
père, leciloyen N o y e r-D u b o ù y se crut autorisé à pour
suivre ses frères et sœurs, au moyen de son contrat de
mariage. Il 11e perdit pas un instant.
L a loi qui permettait de revenir à partage élait du
4 vendémiaire an 4. 11 commença les hostilités le 28,
par faire poser les scellés sur une armoire du père com
mun , dans laquelle restaient des papiers de sa succes
s io n , de même que d’autres objets restés indivis.
Il est à remarquer que dans le procès-verbal du juge
de paix, il signe N oijer-D uboujj, requérant seulement
Capposition des scellés , en qualité d ’acquéreur et de
légitim aire, conformément a son contrat de mariage.
C ’est qu’en effet, il ne prétendait pas alors que cette
armoire contînt des papiers si précieux pour la suc
cession maternelle; ¡1 était nanti de ces titres lui-même,
et savait que celte succession n’était rien.
On y voit que la clef de cette armoire était au pou
voir *du citoyen Noyer-Lagarde.
B 2
�( 12 )
C elle hostilité fut le signal des procédures. L e cit.
I<agarde,qui avait vendu à D ubouy sa moitié du do
maine du B o u y, et qui sans doute en était m écontent,
assigna ses cohéritiers en partage.
A u bureau de paix, le citoyen D ubouy dit qu’il s’en
tenait à la donation faite par son contrat de mariage,
et qu’il entendait seulement venir à partage des biens
de sa mère , sauf ses droits, dans le cas où il se trou
verait un titre qui le rendrait héritier.
A l’audience, il ne s’occupa plus de cette succession
maternelle, parce qu’il savait bien que tout était con
fondu dans le domaine du B ouy: et par jugement du
2 5 ventôse an 5 , les ventes faites par M ary Noyer
et par N oyer - L a g a rd e , de même que le partage du
22 fructidor an 2 , relatif aux biens paternels , lurent
nnnullés, comme prenant leur source dans l’effet ré
troactif de la loi du 17 nivôse. 2° L e domaine du Bouy
fut délaissé au citoyen N oycr-D u b ou y comme dona
taire contractuel; 3 .° le partage de la succession pa
ternelle fut ordonné entre les quatre autres enfans
N o y e r; 4.0 il fut réglé ce que chacun devait payer à
l ’autre, soit D ubou y h ses frères, pour les réserves de
la donation, notamment les 6,0001. dont il était tenu, et
pour ce qu’il avait touché en mobilier, soit les doux frères
à D u b o u y ,p o u r ce qu’ils avaient touché de leurs ventes.
Ce jugement tout avantageux qu’il était au citoyen
D u b o u y , était un règlement de famille; les quatre
cohéritiers appelés au partage nouveau, ordonné par
ledit jugem ent, s’empressèrent de l’exécuter.
�( 13 )
Ils avaient besoin pour cela des papiers de famille
et effets paternels, contenus dans l’armoire où étaient
les scellés du 28 vendémiaire an 4 ; le juge de paix
était sans doute tenu de les lever , sur la représenta
tion du jugement du ¿5 ventôse : mais avec le cit.
D u b o u y , il fallait des précautions.
, Les copartageans l ’assignèrent donc le 5 germinal
an 5, pour être présent à la rém otion, sans que cela
fût bien nécessaire ; le 6 germinal au so ir, en son
absence, il fut fait un inventaire.
L e juge de paix était à la vérité beau-frere des beaufrères des copartageans; mais quand un juge de paix a
mis des scellés sur les titres d’une succession, il n’y a
pas de p r é v a r i c a t i o n , quand un juge de paix les lève
sur la réquisition de ceux indiqués par un ju gem en t,
pour partager seuls cette succession.
L e juge de paix et ses assesseurs firent un inven
taire , contenant quatre-vingt-dix-sept cotes de titres.
Cet inventaire n'est pas une pièce occulte, le citoyen
D ubouy en a une expédition.
A la suite de l’inventaire les copartageans, voulant
éviter d’autres frais, firent un partage en deux lots d©
la succession N oyer ;N o yer-L ag ard e, pour lui et M ary
N o y e r , eut à son lot les 6000 liv- à prendre sur NoyerD u b o u y , en vertu de la donation de 179 0»
du juge
ment de l’an 5.
L e cit. D u b o u y, favorablement traité par la justice,
trouva dans cette opération les matériaux d’un procès
bien plus lucratif que le premier. Il fit citer ses colié-
�C 14 )
ritiers pour être condamnés à réintégrer le mobilier
enlevé. Il demanda en outre pour dommages-intérêts
60.000 livres écus, quoique les écus ne fussent pas alors
Irès-communs. Il prétendit qu’on avait soustrait l ’o r,
l’argent, les titres, les bordereaux des ventes , et le
testament du 20 ju ille t 1789. (M en teu r! il est dans ses
pièces, cote 14 de sa production).
On pense bien que sur une telle d em an de, la séance
du bureau de paix dut être orageuse (18 floréal an 5 ).
Com m e D ubouy voulait faire représenter les effets
d ’ u n e succession qu’il n’avait pas voulue^onlui demanda
en quelle qualité il entendait agir ; il répondit : que
c ’était comme héritier universel de sa mère, aquéreur
de ses frères, et légitimaire de son père.
Alors les citoy ensGreliclie, faisant pour leurs femmes,
lui disent qu’ils en étaient bien aises, parce qu’ayant
1.000 liv. du clief maternel par leur contrat de mariage,
et ne sachant où les prendre , puisque la mere avait
répudié à la succession de ses père et m ère, ils lui de
mandaient chacun ladite somme de 1,000 liv.
N o y e r - D u b o u y , qui en savait plus qu eux ; quoiqu’il
les accusât d’avoir pris tous les titres, répondit qu’il
acceptait la renonciation qu’ils faisaient de la succession
maternelle, et qu’il se chargeait de les p a y e r , si la somme
leur était due.
Les citoyens Greliche alors, quoiqu’ils ne
soupçon
nassent pas un piège, dirent qu ils n’avaient jam ais
renoncé h la succession maternelle, com m ele prétendait
le cit. D u b o u y, mais qu’ils acceptaient les 1,000 liv.
�( i5 )
A u surplus ils répondirent que s’ils avaient fait lever
les scellés, ils en avaient le droit, en vertu du jugement
du 16 ventôse.
Voilà le précis exact de ce procès-verbal du 1 8 floréal
an 5 , sur lequel le cit. D ubouy a basé toutes ses pré
tentions, pour ruiner la succession ab intestat de son
père, par la recherche de celle de Marien Tixier son
aïeul.
Cependant le cito}re n N o y e r-D u b o u y avait interjeté
appel du jugement du 2 5 ventôse. Il prétendait ne de
voir pas rendre compte de la majeure partie du mobilier
qu’il avait retiré de la succession paternelle, parce qu’il
l ’avait, disait-il, acheté en vente publique , et payé à
ses cohéritiers, c’e st-à -d ire, mis en dépôt dans Carmoire scellée.,
L e 11 ventôse an 6 , cet appel fut jugé au P u y , et
le jugement de Riom fut infirmé dans l’objet de la con
damnation ci-dessus rappelée.
L e cit. N o y er-L a g a rd e, qui dans tout le procès a pris
mal à propos bien des choses sur son com pte, déféra
le serinent décisoire au cit. D ubouy , qui en consé
quence fut autorisé à retenir le m obilier, à la charge
d ’affirmer.
Comme la levée des scellés lui avait fait naître l’idée
d’obtenir le partage des droits maternels , il plaida for
tement pour l'obtenir; mais il ne put obtenir que la
réserve de son action, qu’on ne pouvait lui refuser, et il
est même essentiel de remarquer qu’il no plaidait pas
pour être héritier universel ; car i.° il ne dit rien de la
�( i 6 )
prétendue répudiation du 18 floréal ; 2.0 il fait dire au
premier m otif que la succession de la mère est divi
sible en cinq.
L ’affirmation ordonnée fut un autre sujet de discorde
entre les frères Noyer. I^e citoyen D u b o u y fut accusé
d ’avoir soufflé les copies de signification du jugem ent,
pour faire son affirmation incognito. L ’huissier fut mis
en prison ; mais les choses se pacifièrent : M ary-Noyer
déclara par-devant notaires avoir reçu sa copie; l’huis
sier fut mis en liberté. Enfin lé cit. D ubouy a affirmé,
et on-ne lui dira pas par récrimination qu’il a volé ce
m obilier; car res ju d ica ta pro veritate habetur.
L e cit. D ubouy reprit sa demande relative à la suc
cession m aternelle, le 7 prairial an 6. Il cita au bureau
de paix ses frères et sœurs pour lui remettre la succes
sion , les papiers, le testam ent,-etc ., comme étant seul
héritier, à cause de l’abdication faite le 18 floréal, si
non à lui payer 60,000 liv. (1). A u bureau de paix 011
( 1 ) Il faut être bien osé pour motiver des conclusions aussi
exagérées , sur le fait présumé que les titres, relatifs à la succes
sion de la m ère, ont été enlevés , lorsqu’on les a soi-même.
L e cit. D u b o u y est porteur, 1.° de l'o rig in a l du contrat de
mariage de sa m è r e , expédié à elle-même, cote i . re de
duction ; 2.0 du traité o rig in a l de 1765, cote 4 ;
3 .° de
sa
pro
l ’expédi
tion originale de la reconnaissance de 1 7 7 6 , cote n ; 4 -° c^es
orig ina ux d ’exploits donnés à la requête de la mère contre son
m û r i, en 1787 et 1788 , et du petit d é fa u t, délivré au greffe , sur
ces exploits , cote i3 ; 5.° du testament de sa mfcre; du 20 juillet
178 9, toujours en o rig in a l, cote 14.
ne
�C 17 )
ne dit rien. L e cit. D u b o u y expliqua sa citation par son
assignation du 18 thermidor, et demanda i.° le mobilier
suivant l’inventaire; 2.0 5,ooo liv. pour la reconnaissance
de 1 7 7 3 .° 12,000 liv. pour celle de l’an 2; 4.0 43,000
cli v. pour les autres.reconnaissances énoncées dans celle
de l’an 2.
« ■ ,
Sauf à déduire 4,000 liv. dues; savoir: 1,000 livres à
-Mary N o y e r, lesquelles lui resteront,comme son aquér e u r , et 3,000 livres aux citoyens Greliche et N oyer-Lagarde.
.1
Il saisit en ses mains 4,000 liv. (il avait écrit 6 ) , par
lui dues en vertu de sa donation ; ladite somme prove
nant de La succession du père} l ’huissier lui fait défenses
de s’en désaisir.
;
j .
Cette demande' ne put être jugée ¿1 Riom • il la reprit
en l’an 8 , devant le tribunal de Clermonl ; là il pré
senta une pétition pour demander 6,000 liv. de provi
sion ; puis il augmenta même ses conclusions principales
et demanda 3,900 livres de plus, par un exploit du 9
fructidor an 8 , pour la succession de Gabrielïe T ix ier,
comme échue à sa mère en parapliernal.
L e cit. D ubouy se croyait si bien prêt, à obtenir ces
sommes imaginaires, qu’il fit des saisies arrêts, des
inscriptions au bureau dos hypothèques, etc.
t.
Q ui donc est le voleur ?
Mais il a avoué avoir eu une clef lors des scelle's', et L a garde
une autre. Peut-être voit-on là 'p o u rq u o i il veut absolument
"persuader que Lagarde collude avec tous les autres , et pour
quoi il le signale'com m e son ennemi déclare'.
C
�( 18 )
La translation du proccs de Riom à Clermont semble
peut-être une chose très-ordinaire et indifférente au
procès; elle n ’est cependant rien moins que cela; car
on pressent bien que le cit. L a g a rd e, étant avoué à
C lerm on t et partie lui-même en son nom dans la cause,
dut naturellement en suivre l’instruclion. Elle l’inté
ressait d ’ailleurs seul en quelque sorte ; car il plaidait
pour conserver les 6,000 1. échues à sou lot, par le par
tage du 6 germinal an 5.
L a copie d’exploit était posée à son domicile ; il pou
vait donc se présenter sa n s en attendre d’au 1res. Il
n ’avait nul besoin de procuration, et il n ’en demanda
'pas; ce} qu’il y a de certain, c’est qu’il a toujours agi
seul et à sa guise.
Il paraît vrai qu’il y eut sur la demande provisoire
de D ubouy une plaidoirie, non pas le i 5 fructidor, mais
le 2 vendémiaire an 9, et qu’il fut rendu un jugement qui
joignit le provisoire au fonds. Ainsi ilétait inutile de nom
mer et placer les juges et les auditeurs, de crier tollé
contre le greffier qui a dû faire son devoir. L e tribunal
sera indigné de ces injures qui n’avaient pas d’o b je t ,
et qu'il fallait au moins appuyer par un certificat. Mais
c ’était perdre l’occasion de dire que le jugement fut
inotivé sur, la répudiation • ce qui est faux.
L e cit. Lagarde étant dans la cause avoué pour luim êm e, et procurator in rem suam pour ses beau-frères,
ne s’en tint pas à l’instruction ordinaire de sa cause; il
fit donner, le 2,5 ventôse.an 9, une a s s ig n a t i o n à sa re
quête et à celle des citoyen et dame Greliclie ^pour con-
�( T9 )
d u re le citoyen D u b o u y , i.° au paiement de 1,000 liv.
pour chacun en sa qualité d’héritier dela mère ; 2.0 à la
radiation des inscriptions par lui faites; 3.° en 12,000 1.
de dommages-inlérêts.
Certes ce ne sont pas les cit. et dame Gì eliche qui
firent pour cet exploit ; i.° ils habitent M ozun , et l’huis
sier est de Clermont; 2 ° c’est le cit. Lagarde qui.s’y
constitue avoué ; 3 .° il est écrit en entier de la main du
cit. Lagarde; mais jusques-là il n’y avait pas de répu
diation, et cet exploit n’en ferait pas une. A u reste-,,
quand les citoyens D u bouy et Lagarde ont pu se par- /.
lager des titres, ils ont bien pu aussi arranger un ex
ploit entre eux.
L e 6 floréal an 9 , le cit. D ubouy se. laissa condam-,
ner par défaut, et par conséquent il se laissait, débouter.,
de ses demandes ; mais aussi il se faisait, condam nera
payer les 1,000 liv. en qualité d ’héritier. C ’était là son
but et son piège. L a collusion est-elle donc tout-à-fait
imaginaire?
■
<
D u b o u y , dans son appel, déclara expressément
acquiescer au ju g e m e n t, en ce qui concernait la répu
diation et son acceptation de la qualité d’héritier.
Beaucoup plus urgent sur l ’appel, parce qu’il croyait
avoir atteint son b u t, il donna ses causes d’appel quinze,
jours après son exploit ; c’est là que jouissant de son
adresse, il appelle le citoyen Lagarde, praticien trèss u b lil,e i le raille, en feignant le louer ou le crainduei
11 argumente du testament de sa mère pouç prouver
l’opulence de la succession T ixier; il dit que Jç; traité,
�( 2<> )
fait avec elle, est une démission de biens, révocable
et inutile , qui ne l’a pas empêché de transmettre sa
succession h ses héritiers, et par conséquent à lui seul,
puisqu’il est reconnu seul héritier maternel.
L e citoyen T a r d if, constitué avoué pour tous les
intimés, tenant sa correspondance et les pièces du ci
toyen Lagarde, y vo}7antles citoyens et dame Greliche,
en qualité, étant dès-lors suffisamment autorisé de faire
sa procédure , et n ’ayant ni ne pouvant avoir aucun
sujet de méfiance dans celte affaire, donna sa réponse
à causes d’appel , et ne put qu’écrire en faveur du
jugem ent, attaqué pour en obtenir la confirmation.
L a cause avait été au rôle de l’an 9; le cit. D ubouy
surprit un jugement par d éfa u t, sur ce même rô le ,
le 11 ventôse an 10. Il se fit adjuger les deux recon
naissances de 1775 et de l’an 2. Mais il n’osa pas sans
doute conclure aux 43,000 livres pour les reconnais
sances présumées ; le jugement ne lui adjuge ,
cet
égard, que des dom m ages-intérêts à donner par dé
claration , de même que pour le mobilier.
Il signifia sa déclaration en exécution de ce juge
m en t, et ne parla que du mobilier.
Les citoyens et dame Greliche ne se doutaient guère
qu’il se fit en leur nom une telle procédure; mais ils
avaient peine à croire que le citoyen D ubouy les eût
laissés si l o n g -teins sans procès. Dans leur m éfiance,
ils s’informèrent, et quand ils eurent appris la vérité,
ils se hâtèrent de réparer ce qui avait été fait en leur
nom ; leur seule voie légale et juste était un désaveu.
�( 21 )
Ils ne pouvaient ni ne devaient le proposer contre le
citoyen Tardif ; sa procédure était régulière et de bonne
foi. Tout partait du citoyen N o y e r-L a g a rd e ; c ’éiait
donc lui qu’il fallait désavouer.
En vertu de leur déclaration le désaveu fut mis
au
greffe de Clerm ont, l’assignation pour le voir statuer,
fut donnée non seulement au citoyen L agard e, mais
au citoyen D u b o u y , pour qu’il y veillât à ses intérêts;
et n’eût pas le prétexte de crier à la collusion. L e 20
prairial an 1 0 , le désaveu fut prononcé par défaut;
le citoyen D u bo u y a interjeté appel de ce jugement.
Dans cet intervalle encore, survint un nouveau pro
cès; le citoyen Lagarde se plaignit de ce que les 6,oool.
qui lui avaient été cédées par le parfage du 6 germinal
an 5 , ne lui étaient pas payées, et il cita les citoyens
et dame G reliclie, au bureau de p a ix , le 2b prairial
an 1 o.
C e u x - c i lui répondirent qu'ils n ’entendaient plus
rien aux chicanes qui s’élevaient journellement sur la
succession ISoyer. Qu’ un jugement de R io m , et un ju
gement du P u y y condamnaient le citoyen D u b o u y ,
et qu’il n’y avait qu’à les exécuter. Il fat donné as
signation néanmoins par le citoyen Lagarde aux cit.
Greliclie qui la dénoncèrent au citoyen Dubouy.
Ainsi se termine cette éternelle procédui-e ; l’appel
du désaveu a été instruit de part et d’au tre, et joint
à l’opposition pendante,sur la demande du cit. D ubouy
L a cause a été plaidée sur le tout, le 14 fructidor an 10
et le tribunal a prononcé un appoinlement.
�( 22 }
M O Y E N S .
L e cit. D u b o u y , dans son m ém oire, prétend que le
désaveu n’est pas recevable, parce qu’il est couvert par
désapprobations suffisantes, et que l ’opposition au ju
gement du 11 ventose an 10, n’est aussi pas recevable.
Il ne s’occupe que par subsidiaire du fonds de la con
testation. Pour suivre son plan d’a tla q u e , il faut éta
blir comme lui plusieurs questions. L a première sera
de savoir si le désaveu du cit. Noyer-Lagarde doit être
reçu; la deuxièm e, si l ’opposition au jugement du n
ventôse an 10, doit être admise, quoique la cause ait
été au rôle ; la troisième, en quoi consiste la succes
sion de Françoise T ixier ; la cinquième , quel est le
droit des parties sur ladite succession.
P R E M I È R E
QUESTION".'
L e désaveu doLtril être reçu ?
Ce désaveu a été prononcé par défaut, le 20 prairial
an 10; le citoyen D u b o u y en est appelant; ainsi il ne
devait avoir rien à combattre que la demande. Mais le
citoyen D u bouy s’attache à tout, et il trouve un vice
de forme dans lé jugement du 20 prairial, comme non
motivé. Mais il n’a pas bien lu sa propre copie, car
elle porte un m otif et la loi n’en exige pas un plus
grand nombre. D ’ailleurs attaquer le jugement dans sa
forme ne serait pas faire tomber la demande; le tri
bunal d’appel n’en jugerait pas moins le fonds, ainsi
✓
�( 2 3 }
le premier moyen est tout à la fois inexact el mutile:
passons donc au désaveu en lui-même.
Pour qu’il ait l i e u , dit le citoyen D u b o u y , il faut
que ce que l’avoué a fait, l’ait été hors de ses pouvoirs,
sans consentement et sans approbation postérieure. Or
y ayant eu instance avec les dames Greliche , le cit.
Lagarde en étant l ’avoué , y ayant eu plaidoirie et
jugement en fructidor an 8 et le 6 floréal an g , les
dames Greliche les ont approuvés, et par conséquent
l ’avoué et la procédure. Or encore le citoyen Lagarde
avait plusieurs pièces pour constater son p o u v o ir, i.° le
procès-verbal du 18 fructidor an 5 ; 2.° l’exploit du 21
ventôse ; 3 .° la signification du 21 floréal an 9. Enfin
le citoyen D ubou y oppose que le cit. T a rd if, avoué
des dames G relich e, au tribunal d’ap p el, n ’est pas
désavoué pas plus que les huissiers Chassaing et Massis
qui ont signifié des actes de la procédure.
Sans doute, s’il y avait une approbation postérieure
du citoyen Lagarde , elle équivaudrait à une procu
ration précédente,carralikabltLo mandalo comparatur:
mais peut-on raisonnablement vo ir, dans des actes faits
sous le nom des citoyens et dame Greliche, des appro
bations de la procédure du citoyen Lagarde.
Il était, dit-on, nanti de la copie d’exploit et du
procès-verbal du 18 floréal an 5. Et certainement on
ne peut pas nier qu’une copie d’exploit et procès-verbal,
contenant des dires, ne soient un pouvoir suffisant à
un avoué pour se présenter, et répéter les mêmes dires
en jugement. Mais le cit. Lagarde n ’avait pas besoin
�( 24 )
de la copie posée aux citoyens Greliche ; il avait la
sienne, car il était partie au même exp loit, et il s’est
présenlé pour tous.
Les dires du procès - verbal ne l ’autorisaient pas à
répudier , car ce procès - verbal du 1 8 flo réa l, porte
au contraire que les citoyens Greliclie n entendent pas
répudier.
D ’ailleurs, c’était une succession parapliernale ou
verte aux dames Greliclie. Les maris, exclus parla loi
de jouir même les parapliernaux , ne pouvaient pas
disposer de la propriété de ces parapliernaux. Ils ne
l ’eussent pas pu davantage, quand la succession aurait
été dotale, parce que le mari n’a que Y adm inistra
tion de la d o t , et n’a aucune qualité pour répudier
une succession ouverte au profit de sa femm e ; car ce
serait aliéner.
• L e cit. N oyer-Lagarde ne pouvait ignorer ces prin
cipes; ainsi quand même il aurait eu une procuration
pour occuper, il ne devait pas répudier en jugement ,
si la procuration n’en portait le mandat exprès, et
n’était donnée pour cela par les dames Greliche ellesmêmes.
L e jugement d j fructidor an 8 , est un être imagi
naire. Lors du jugement du 2 vendémiaire an neuf,
il paraît qu’on attaquait les reconnaissances, ce qui
est l’opposé d’une répudiation ; enfin le j u g e m e n t do
lloréal an 9, est précisément l’objet principal du désaveu.
L ’exploit du 21 ventôse fait partie de la procédure
suivie par le cit. I/ngarde. Il l’a fait donner pour fixer
les
�( *
5 .)
les conclusions prises dans l’instance, et s’y est consti
tué avou é; il paraît mêm e qu’il est écrit de sa main.
L a signification du 21 floréal ne fait qu’un avec le
jugement du 6 , qui est la principale pièce désavouée.
E t tout le monde sait bien , que quand un avoué ins
truit une procédure, dans laquelle ily a lieu de faire des
significations, c ’est lui qui charge l’huissier de les faire.
Si don c, il fallait désavouer aussi l ’huissier, ce serait
un cercle vicieux , car l’huissier dirait : je tiens mon
pouvoir du cit. Lagarde , et ce serait h celui-ci qu’il
faudrait revenir.
E n fin , et par les mêmes raisons, le citoyen D ubouy
ne peut pas argumenter de ce que les dames Greliche
n ’ont pas fait aussi un désaveu contre l’avoué qui a
occupé pour elles, au tribunal d’appel. Elles se sont
bien donné garde de faire cette injure h l’exactitude
et la délicatesse du cit. T ard if qui a été induit en erreur
par le c. Lagarde. A v e c l’expédition du 6 floréal et la copie
d’a p p e l, il était en règle et à l ’abri de tout reproche;
il aurait même eu une action en dommages-intérêts.
T oute la question du désaveu consiste donc dans les
déclarations qui ont pu être faites en ju stice, à Clermont; car dans les pièces précédentes, rien n’autori
sait le cit. Lagarde à répudier pour les dames Greliche.
L e procès-verbal du 18 floréal devait au contraire l’en
empêcher.Il s’est donc exposé à un désaveu, et comment,
sous prétexte d’une collusion qu’il plaît au cit. D u b o u y
de supposer, ce désaveu serait-il rejeté s’il est fondé.
N ’y aurait-il pas plutôt lieu de croire que cette
D
�( *6 )
collusion a eu lieu entre le citoyen Lagarde son ven
deur, et lui. Quand on mit les scellés, l ’un d’eux prit
la clef de l’armoire , et l ’autre la porte du cabinet,
cela est avoué au mémoire Dubouy. L e cit. Lagarde
a dans son dossier tous les titres de la succession du
père ; et le citoyen D ubouy a dans le sien tous les
titres originaux de la succession de la m è r e , quoiqu’il
se fasse un m oyen de n ’avoir pas assisté à l’inventaire
du 6 germinal. E n fin , le citoyen Lagarde fait des dé
clarations en jugem ent, et le citoyen D u bou y se laisse
condamner par défaut pour les accepter- incontinent.
A la v é r it é , il serait difficile de croire à ce que ces
deux frères fussent en bonne intelligence, lorsqu’on
lit tout ce que le citoyen D u bou y exprime aux pages
21 et 22 de son m é m o ire, pour insinuer fraternelle
ment que le cit. Lagarde s’est mis dans le cas d ’une
destitution. Mais qu’il ne fasse pas tomber l ’odieux de
ce danger surles cit. Greliche ; car dussent-ils encourir en
core le reproche de collusion, ils déclarent qu’ils auraient
fait les sacrifices les plus grands, si l’insidieux analhême
du cit. D ubouy eût dû être le résultat de leur demande.
Ils déclarent aussi que lorsqu’ils ont fait , amère
ment peut-être, au citoyen Lagarde le reproche d’avoir
usurpé leur confiance et d’avoir sacrifié leurs intérêls,
le citoyen Lagarde lenr dit avoir agi d’après une, con
sultation des citoyens B e rg ie r, Boirot et D a r l i s , par
laquelle ces jurisconsultes étaient d’avis que toute la
succession maternelle élait confondue dans celle du
père ; par le traité de l’an 2 j qu’elle ne consistait que
�C 27 )
dans ce que la mère a laissé en m o b ilie r, après son.
décès, et qu’ainsi il avait vil plus d ’avantage à la laisser
toute entière au citoyen D u b o u y , pour qu’il payât
les sommes promises par les contrats de mariage.
Que le cit. D u b o u y trouve inconséquent ou non de
rapporter un fait qui disculpe le citoyen Lagarde , les
dames Greliche n’en ont pas moins cru de leur devoir
de ne pas le taire. Mais tout en reconnaissant que le
citoyen Lagarde a pu agir de bonne foi et même avec
précaution , elles n'en sont pas moins fondées à dire
qu’une consultation n’est pas un m andat, et que le
cit. D u b o u y , en faisant une procédure et des décla
rations sans pouvoir, s’est mis dans le cas d’ un désaveu.
C e n’est pas que ce désaveu eût été absolument né
cessaire, puisque la succession de Françoise T ixier est
à peu près nulle, comme on l’établira sur la troisième
question. Il aurait p e u t-ê tre même été plus avanta-r
geux aux dames Greliche d’adopter ce qui a été fait
en leur nom; car une répudiation conditionelle doit être
acceplée, comme a voulu la faire le renonçant, ou toutà-fait rejetée. Mais la ténacité du cit. D u b o u y , à vou
loir ruiner la succession de son père par celle de sa mère*
a fait que les dames Greliche, venant pour la première
fois en cause, ont voulu s’y présenter sans l ’entrave
des faits d’autrui. N e pouvant préjuger l’opinion du
tribunal, elles auraient véritablement débuté avec té
mérité et en dupes, si pour ménager le cit. Lagarde ,
elles avaient ratifié sa procédure. L e désaveu a été
pour elle un acte pru d en t, nécessaire, et quoiqu'en
D a
�.
c
28
)
dise le cit. D u b o u y , il ne peut être rejeté , parce qu’il
ne s’agit pas ici d’une simple instruction de procédure,
qu’il y a répudiation en jugem ent, et que pour cela
seul il fallait un mandat spécial.
D E U X I È M E
QUESTION.
L ’opposition, au jugem ent du 11 ventôse an 10, est-elle
recevable ?
T o u t e s les prétentions du citoyen Noyer-D ubouy
sont nouvelles et singulières. Aucun autre que lui n’a
vait im agin é, depuis 1790, de rappeler un article de loi
qui ne peut plus s’adapter aux formes actuelles, et on
peut dire,presqu’avec certitude, qu’il n’est pas de journal
parmi ceux qui rapportent depuis long-tems la jurispru
dence du tribunal de cassation etdesautrestribunauxde
la république, qui contienne aucun jugem ent, ni même
aucune'tentative pareille. Mais le cit. Noyer-Dubouy
veut être m odèle, il veut faire juger la question : on n’a
pas le droit de l’en empêcher. Cependant cette oppo
sition est antérieure au désaveu; ainsi la question n’in
téresserait les dames Greliclie , que dans le cas où le
désaveu serait rejeté. Elles ne vont donc s’en occuper
que par subsidiaire, et pour répondre à tous les moyens
opposés par le citoyen Dubouy.
Il est très-vrai que l’ordonnance porte en l’art. I I I
du titre X X X V , que les parties ne peuvent se pour
voir, par opposition, contre les jugemens en dernier
ressort, quand ils ont été rendus à tour de rôle.
�( f9 )
Il est très-vrai aussi qu’une loi ne tombe en désué
tude que tacito omnium consensus et il était assez inu
tile de transcrire un plaidoyer de Merlin pour corrobo
rer ce principe, et appliquer à la cause toutes.lés au
torités qui y sont rapportées. Il ne s’agissait, dans ce
plaidoyer, que d elà fin de non recevoir de l’opposition,
après La huitaine, mais non à tour de rôle ; et le cit.
Merlin n’y a recueilli des extraits des arrétistes de plu
sieurs parlemens, que pour établir que la jurisprudence
du parlement de Paris, d’admettre les oppositions après
la huitaine, n’était pas uniforme dans le royaume.
Ces citations ne peuvent rien sur la question de
l ’opposition aux jugemens pris à tour de rôle , car il
n’y a pas parité de raison ; c’était uné jurisprudence
particulière au parlement de Paris, et dans quelques
autres, d’admettre l’opposition après la huitaine; mais
le parlement de Paris ne l’admettait pas, quand la cause
était venue à tour de rôle. Il y avait donc une dis
tinction à faire, et cette distinction même juge la ques
tion qui nous occupe.
A vant la révolution, on faisait une différence entre
les causes venant sur p lacet, et les causes appelées à
tour de rôle. Celles-ci étaient placées au rôle bien longtemsavant d’être appelées. L e rôle était public, à Riom,
deux fois dans l’a n n é e , à la St. Martin et à la St.-Jean,
et tous les mois au parlement. L a lecture publique des
causes prévenait les parties long-teins ¿1 l ’avance ; et
comme la loi était précise, et l’ usage des tribunaux
constant sur ce point, il fallait bien se tenir prêt au
�c 3 0 }
tour de rôle; ce qui, au reste, n ’était pas très-urgent ;
car la m ulliplicité des placets occupait la majeure partie
des audiences.
Aujourd’h u i, toutes les causes doivent être placéesau rôle, sans distinction, d’après la loi du 24 août 1790,
et la loi du 21 ventôse , relative aux droits de greffe.
Ainsi il est contraire aux principes reçus, qu ’une loi
rigoureuse qui ne s’étendait qu’à une partie des causes,
s’étende aujourd’hui tacilement à toutes les causes ; car
les peines ne peuvent être que restreintes, mais non
étendues au-delà de leurs strictes dispositions; et certes
la fin de non recevoir d’une opposition, est bien une
peine prononcée contre le plaideur en retard.
Si le tribunal de cassation a jugé que l ’article de l’or
donnance n’était pas tombé en désuétude pour l’op
position après la huitaine, c ’est que dans la révolution
la fin de non recevoir avait été presque généralement
prononcée par les tribunaux : mais il n’en est pas de
même de la fin de non recevoir des causes venues à
tour de rôle. Aucun jugement conforme au système du
cit. D ubouy ne peut être cité par lui depuis 1790 ;
et comme le mode d’appel des causes a changé à cette
époque, il est clair que ce changement a fait tomber
en désuétude l’article de l’ordonnance tacito omnium
consensu. L ’usage universel a expliqué la loi du 24 août
1790. En cette partie, tous les tribunaux ont admis l’op
position aux jugemens en gén éral, pourvu qu’elle fût
formée dans la huitaine. Ainsi il ne s’agit plus de re
chercher la loi ancienne qui permettait aux parties de
�( 3i )
mettre au rôle les causes qu’il leur plaisait, puisque
la loi nouvelle ôte cette liberté -, et y assujettit toutes
les causes. L e mode d’interprétation de ces lois est donc
suffisamment justifié par quatorze ans de jurisprudence;
car consuetudo optima est legum interpres (i).
Mais au reste.le cit. D ubouy est non recevable luimême à demander la fin de non re c e v o ir, par deux
motifs ;
i.° L ’opposition au jugement a été formée le 18
ventôse an 10; elle a été suivie de la procédure du
désaveu dont D u b o u y a interjeté appel.
, , ,.j ■
O r , par requête du 28 thermidor an 10, il a conclu à
ce que son appel du désaveu fût joint à La cause pen
dante sur Copposition.
Il a donc reconnu que cette opposition était rece
vable , puisqu’elle faisait une cause. Ainsi il a couvert
la fin de non recevoir qu’il oppose.
2.0
L a cause a été contradictoirement plaidée sur
le f o n d s , le 14 fructidor an 10 , quand le tribunal a
appointé. L a fin de non recevoir devait encore y être
proposée à limine litis ,* elle est donc couverte, et le
cit. D u bou y doit, malgré lu i, plaider le fonds.
( 1 ) D ep uis la rédaction de ce mémoire,, le tribunal de cassa
tion a ju g é la question en thèse. Il a casse', le
3 pluviôse
an 12,
un jugement du tribunal de Neufchâteau , qui avait déclaré une
opposition à un jugem ent en dernier ressort non recevable ,
parce qu’il était rendu à tour de rôle.
V o y . le J o u rn a l des audiences de c a s sa tio n , par D en evert,
an 1 2 , p a g e 212.
�( 3a )
T R O I S I È M E
QUESTION,
JE'n quoi consiste la succession de F r a n ç o is e T i X i e r ?
Françoise T ixier n ’a traité avec ses enfans que pour
éviter que cette question se présentât après elle.'
Toussesenfans étaient ses héritiers par égalité, même
avant le 17 nivôse, puisqu’elle n ’en avait avantagé au
cun. L a forclusion de ses filles était abolie depuis le 8
avril 1791.
A la vérité, le cit. D ubouy dit : Je suis donataire de
mon père ; et après le prélèvement de ma donation ,
mes cohéritiers ont partagé le surplus sans moi : mais
je dois prélever aussi sur le surplus ma portion, ail
moins des biens de ma m ère; ainsi il faut connaître sa
succession.
Mais le cit. D u bou y ne veut pas se rappeler que par
son contrat de mariage , son père , en lui léguant le
domaine du Bouy après son décès et après le décès de
Françoise T ix ie r , en le chargeant de payer à chacune
de ses deux sœurs 2,000 liv. qui leur resteraient dues
alors, par la succession des sieur et dame Noyer, a dou
blement marqué par ces expressions que les deux suc
cessions étaient confondues , et que les dettes de la
mère devaient se payer indifféremment par la succes
sion du père, qui les englobait toutes deux. Aussi la
m ère, qui se fait représenter à ce c o n trat, ne donne
rien.
L a mère n’a donc fait que ratifier en quelque sorte
cette
�( ( 4*33 ) )
Ycette confusión' Sos deux'snccessi'ons", en'traitant avec
^ses enfaná, tóúnís-en'Kan d èu x(i). A laivérité otupeut
¿objecter': qu’alors les circonstances n ’étaient plus les
¿mêmes, parce que <la'loi du 17 nivôse voulait un parJ tage par égalité. Maisice^ne sont Ipas les ènfans seuls
-qui ontttraitéien, vertu de çetteloi ; la mère elle-même,
que-la. loi n’obligeait pas, est <venu'e:traiter ayec'eu x
pour ses droits et reprises; et qu’a—t-elle fait autre chose
, :que de des confondre dans la succession du père j conime
odéjà ils l'étaient respectivement àiNoyer-Dubouy:i:>
o . A i n s i ¿ q u e'là loi du 17 nivôse soit ou ne soit pas;, il
( 1 ) L e cit. D u b o u y conteste , à la page 41 de son m é m o ire ,
l ’éxis^èrice de cet acte comme 11011 vérifie ni, enregistré. Il le
produisait d’abord lui-même j’-'il en arg u m en tait, ‘ét ‘il l'il saris
doute retiré de ses pièces. Mais il produit, sous la cote 18, un
acte du même jo u r, quoique aussij n<fn enregistré, et il y a
souligné lui-même ce qui suit : Convenu en outre que dans la
présenle cession sojit com pris.les droits cédés p ar notre.m ère
'c o m m u n e , par acte de céjourd*liui ^ 2.° dans ses causés d'appel,
cole 40 , 'il excipé plusieurs fo iiclu tVa'itd' lait ehtre l^ in ère et
les enfans , et il le idate* à clitiqîne lois j dil*2a fructidor a n >2;
3.°
il en assure encore l ’existence a la page 7 de son mémoire ;
,4.0 on lit dansée jugement du-aÜ ventosean
5)
folio
5
II.0, ce
qui suit : « ¿4près que tous Les 'héritiers eurent pris des arran-
o. .
Mi •/ ;
.■
¡r
gc'.mens avec I r a n ç o is e T ix ie r le u r jn e r e , relativem ent à sa
con stitu tion de d o t, gains , avantages m atrim on ia ux'et autres
créances q u e lle avait à répéter contre la succession de son
m ari , etc. » Ce traito est donc: un acte constant au procès. L e
çit. D u b o u y , qui en a toujours excipé, ne peub donc.rçfyser de
le remettre dans sa production-
* t
v.
‘*
•^ ÍV
J «': .
E
�: ( c 34 ) )
'
,
cn’en esfpasrmoins vrai que J e .ôi l. I)ubhriy nfcrjHuoa’
prendre que le'domaine du Bo'uyij) après lefdücès.£/e.jBi
père et. mère, h la charge de payer '6roooJiy.' dus. pà/iles
deux successions ;e t les a u Ires liérit ier&ont eu à prendre
, ces 6,000 livres,, et le surplusdeabienstdomme f o i r a n t
,la succession ab.itileita t, plus Jes/bestiaubc; .et comes
tibles qui furent laissés à=la mère itor# d e L'arrangement,
et pris sur la succession paternelle.:-: îo ..!*■ .!: ' i ' ;
. C ’est ainsi que toutes les partiesiToht entendu non
seulement en l’an 2 , mais lors du jugement ,de Ventôse
an 5 , puisqu’ elles laissèrent toutes ordonner lé partage
de la succession du père, sans demander celui de la
mère ; puisque le cit. D,ubouy se laissa notamment con
damner à rapporter le s^ o o q ji^ . dues par la supcpssion
du père et de la mère „ sains proposer de compensation
ide celte somme avec les prétendues reprises1qu’il de
mande aujourd’h u i, et qu’il fait frapper sur la succes
sion paternelle.
Celte intention,des parties est claire; elle était fon
dée suî ,1e?. actes . de .famille, à Inexécution desquels
chacun se rendait; aucun ne doutait alors que la suc
cession dô la mère ne fût composée seulement de son
mobilier tel qu’il était ¿péciiié par le traité de l ’an 2 ;
et si l’appelant a varié au P u y , c*èst que la levée des
* 1v
\
C
V
'
scçllés lui avait donné le prétexte de se créer une nou
velle source de réclamations et de procès. ■
,.»
Ce n ’est pas tout que les parties l’aient entendu ainsi,
car c’est aussi1de cette manière qu’elles devdieni T’en
tendre; les actes les y obligeaient.
�C
35
)
CiiFrançoise •Tifcier:ayait-elle: le droit de traiter avec
ses enfans en l ’an 2? ebpeutVon appeler J’dcte qu’elle
a fait, un partage anticipé d’une succession qui.s5ést>
ouverte de nouveau à son décès ; car voilà le s.ÿstêi’n e
actuel du citoyefm Dubouy; on oo L. :: >ç
rr n \
* L es principes; sur les; démissions rie s?appliquent;pas!
à la cause ; ce n ’estpas ici un-abandon fait parilne. m.èréde-ses.biens m eublesjetim m eubles jiévidens ^connus; 3
desquels elle se.désaisisse pour leu x/ et;quc?ils>parlagent!
ensa^présence. <&[ i-iialb Im’:1
îu ' :iil'i
Il ii’y a rdans ^espèce ni biens connus, ;ni désaisissemerii effectif, ni partage actuel.. Ge. n ’est d on c pas ce;
partage anticipé dont excipe le cit. D ubou y com m et
moyen principal j iL n’y à donc pas: de. démission.
>
C ’est un .traité sur des droits inconnus!;, litig ie u x ;,
c ’est une vente ii fonds*pèrdu de ces mêmes droits,.autorisée par ltariiclë!26 derknloi du 17 nivôse , ;qui •
était encore en Vigueur au décès-deila mère. ^ uj >•. . c
: Dans le cas même où làm ereaurail prévu ^rétablisse
ment des actes de sa famille et lé rapport-de la loi du
17 nivôse dans son effet .rétroactif , là.cession qu’elle
faisait était valable; car le citüDuboüy.devait.s’ëirtenir'
à son d om ain e , et alors s e s reprises frappaient sur la
succession ab intestat} c’est-à-dire y contre les ¡autres
héritiers.
, .
•<>' Eh b ie n , elle vend ses reprises à fonds perdmà ceux-
ci ; et comme il fallait, suivant la loi, que les autrcsq
successibles y consentissent et y intervinssent),Me cit.
D ubouy y est intervenu et ¡y a consenti. L e vœuide laloi a donc été rempli.
�( 35 )
.■vIl’.iTe^ira; pas Cfue'c’e&t-iün •à’cte,»forcérpar^la 'craîlîte
révéreniièlle; car }a loiai’admet puis ce :m o y e n <
',iloils-~.
qu’èllèi,exigé, le consentement des successibles y isans'»
distinction.' fUipv urj ¿ 'oV) :ioa i; m.vuum -S üVwtvjo
A u reste , quand ce ne seraif pas! lfV une .'vente l’à'i
fonds: perdli ,uôn demanderait) en' vertu, de)¿quçlle*loi
ib peut être défendu à 1unei mère-’4&-trailer<avec>seS*
enianspsur des droits.susceptibles) dtuplus. grande litigô-;->
les loi&’prptègept les;transactions com ibe l’a'cte le;plus'
utile à la société , puisqu’il éteint les .procès et se^
pourrait-il que les procès, entre une m^re etkles enfutis,
fussent une cliose nécessaire et, non, susceptible-d’ar-i
rangement ? ':u/7 .
m
ir '.b V.;-. ij\.i
'~çy - ’
Ce système cho'que; car si Erancôtsç ' T ixi er pouvait •
agir et plaider ; sansi contredit bll©'pouvait transige!* ;
car ila ’transaction• a lie u 'd e LLl& m o tâ .a iit movendâ.
O r qui contestera ài<ï’ranç6is(i-Tixier le droit de de
mander ses droits etoi’eprisds en l’an 2;?'Mais>parce que
rienih’était pliisicortiusietiinextricable que ses droits;
parce quTelle savait elle - même que son m a ri, en lui i
donnant l’ usufruit de; moitiés, n’avait, puîrèconnàître
12,00a liv. a u - ’delà. de la) quotité disponible
qui elle savait qu’il faudrait prouver
parce \
kabuit de .
la .première -reconnaissance., Françoise .Tixier a fait. ,
avec ses enfans, une transaction, que la nécessité et son
intérêt l’auraient obligée de,faire ayec les étranges; .les
plus divisés d ’intérut a.vec elle; cti^fesl là (Cette transac
tion qu’on veut,confondre avec-une démission, avecune simple libéralité dictée par la tendresse maternelle,
�( 37 )
spontanément-, sans nulles circonstances; et pour la? seule
utilité do'ses'en fans. ):
r
, Si la mère a traité avec tous, il.n Jy a là que de la
ressemblance avec une démission, parce que la mère
était bien:obligée de traiter avec tous ceux qui avaient,
un procès à soutenir contr’elle<> i;
Ainsi,, vouloir que cette réunion nécessaire de tous
les enfans change la nature de l ’a cte , ferait retomber
dans lecsysiême qu’on ne peut'transiger avjec.ses'enfiins.
'Lorsque le filsdiisiéür de L a n g h a c(i) a demandé par
deux fois, au tribunal de cassation, la nullité d’ un traité
fait avec son père pour ses droits m aternels, il n ’osait
pas même plaider qu’on ne peut pas traiter .avec son
père; il faisait valoir des moyens rescisoires,’et cepen
dant le traité à été maintenu..Ulne transaction peut donc
êlre à l’abri, même d e là puissance paternelle. Préten
dre que le rapport de l’effet rétroactif de la loi du 17
nivôse a annullé le ,1railé fait avec, Françoise T i x i e r ,
c’est vouloir oublier ^qu’elle n ’avait que faire de la loi*
du 17 nivôseü G a n d ’une part, elle traitait pour ses rc.r;
prises, et !de l ’autre, pour un usufruit qui n ’en a pas
été moins mainleilU'par les lois postérieures.
F ran çoiseT ixierij’aldonclaissé de succession que dans
son mobilier et non-dans ses reprises; etlen partant de ,
cette vérité la plus évidente, la plus naturelle , le liibunal clague toutes les autres questions du procès. Car
le cit.D ubôu ya pris sa portion du mobilier, il n’a pas eu
idée de prétendre,qu’on en eut volé : il a donc toul son lot.
( 1) Journal de SiREy. Jugement decassation du 25 frim.rc nn 10.
�(
38
)
¡¿Tout conduit h penser, que telle a.toujours étéT;in-.
tenlion et le but des parties, et que c’est là la plus exacte
jusliceà leur rendre. Mais pour suivre le cih D ubouy
dans ses prétentions , et s’il pouvait faire composer la:
succession de Françoise-Tixier de ses droitslet;reprises/
voyons quel en serait le résultat.) "■
>' Vr:.-?, i;
' :-'.j
Q u’aurait obtenu Françoise Tixier^ si elle eût voulu
plaider en l’an 2?
' u-:..»
• i'
- Ses droits étaient-ils fixés:pardesudeux; reconnais-)
Sances, ou par.la consistance réelle dé; la succession de
son père et de-sa» sœ ur?i‘
’
n
1: •
" ' »
Pour cette explication* il faut se;basér: s u r quelquès*
principes.
•
r
oî •
v %'i^ba*!;' <• 1
r
¡Toutes les reconnaissances.que fait le'riiari , après le^
mariage , sont réputées; des.libéralités j si la femme ne
prouve undè habuit; et alors ces libéralités n’ont d’efiet
que pour la portion dont le mariipouvait disposer. ConJessio de dot&\ recep ici-fada. 'per mdritum 3 constante
matrimonio y valet iti vim doriationis. Et il faut, comme
dit Coquille , enquérir et prouver la vérité du fait, si
on veut faire valoir la reconnaissance a u - d e l à de la
portion disponible. Ainsi l’enseignent encore Ricard et
Furgole. Ainsi l’a iju g è le tribunal, le 21 prairial an 10,
en ordonnant l ’apport d e l’inventaire d ’une succession
indiquée com m e1 Y undè h a b u it, dans une
reconnais
sance semblable.
Il est encore de principe,' qu’en pays de droit écrit,
où le sieur N oyer était domicilié, le mari et la femme
ne peuvent se faire de donations pendant le m ariage,
�v( 39 >)
et cela p^r une prévoyance de la 'lo i, /ze matuoamore
1
^•
, inler se., invicem spoUentur.
1
, A la vérité ces donations prennent leur effet par
la m o rt, si elles n’ont pas é té ( révoquées auparavant.
Mais parce iqu’ellesrne fo n t ;qu’une donation à cause
-de m ort, éllçs se règlent par la quotité disponible qui
a lieu 'àil’ouverture de la succession.
O r , au»décès du sieur N o y e r , la loi du 17 nivôse
régissait toute la république; et si elle effaçait les prohi
b itio n s du droit-écrit, en donnant toute latitude aux
.dispositions;entre ép o u x, au'moins elle les restreignait,
-quand il y avait des enfans, àT u su fruit des choses don
nées, si elles n ’excédaient pas; la moitié des biens. (Art.
. î i 3 et 14).
>
: Ainsi Françoise T ixier devait prouver en Fan 2 la
-consistance 'de la succession.liquidée de son père.
Il fallait fair,e estimer les biens vendus non par le
curateur, mais par le sieur N oyerfen son nom ; non
¡pas suivant 1^ évaluations ridicules, que le cit. D u b o u y
leur donne au taux actuel, mais à la valeur de 1760.
,11 fallait établir la .consistance du mobilier, et ensuite
i.déduire des, charges et les dettes. Ces dettes sont con
sidérables, puisque le seul article des reprises du sieur
N o y e r , justifiées par k requête du 16 avril 1 7 6 0 , se
porte à une somme de 5,029 liv. 1.6 s., outre les 2,0001.
payées au tréspr public, 1,200 liv. au sieur D epille, et
89 liv. 7 s. au sieur Dufraisse. D é jà , par la compurai-son de celte s.eule dette avec les biens, il est évident
en simple aperçu., que si le sieur N oyer fit une recon-
�/ C 4° 0
naissance de 5,o o o à sa fem m e, c ’éfait pour qu’elle no
fût pas humiliée de n’avoir rien à donnera ses ënfans,
lors de le u r ’établissement, et pour la mettre à môme
de donner à chacun 1,000 liv:.
i;
«
-- • J ■
Mais quand il ÿ aurait quelque excé d a n t, tout ce
que Françoise T ixier n'auraît pas justifié lui apparteten ir, dans les reconnaissances , devenait simple libé
ralité, et alors combien de diminution cette libéralité
" n ’éprouvait-elle pas?
«
:
' J
D ’abord le cit. D u b o u y faisait passer, avant t o u t ,
le don o u legs du d o m a i n e , puisqu’il lui était assuré
par son contrat de mariage, et puisque les reconnais
sances ne prenaient effet ¡qu’à la mort.
‘‘f
Les deux reconnaissances de 5,ooo liv. et de 12,000 I.
ne valaient eu l’an 2 que pour l’usufruit de ces deux
sommes, mais cet usufruit était confondu dans l’usu
fruit de moitié qui était aussi légué par le sieur N oyer
à sa femme ; il absorbait toute la «quotité disponible.
T^es deux reconnaissances devenaient donc nulles' et
sans effet.
'
M
Non seulement l’usufruit de moitié absorbait tout ,
mais il ne pouvait avoir lieu concurremment avec le
don du dom aine, sur lequel l’ usufruit ne frappait pas ,
q u ’a u t a n t que la légitime des puînés devait rester in
tacte, et sans charges suivant les principes, ce qui ne
se pouvait pas. Françoise T ixier n’était donc p;is fon
d é e à p l a i d e r pour obtenir les1deux reconnai ssances .
Il est inutile d’occuper le tribunal de la demande ridi
cule que le sieur N oyer avait formée de 48,000 l i v . , pour
représentation
�(
4*
)
représentation des reconnaissances supposées enlevées,
et du testament de sa mère (q u o iq u ’il en soit nanti) ;
il a abandonné cette demande qui d’ailleurs ne méri
tait pas qu’on s’occupât sérieusement de la combattre.
. Françoise T ixier était encore héritière de sa sœur,
mais les droits de celle-ci étaient liquidés par un traité
dont le cit. D u bouy n'a demandé le prix qu’en l’an 8.
O r ce traité ne donne pas une somme exig ib le , mais
une rente qu'on ne peut forcer à rembourser : et tout
prouve qu’elle avait été remboursée par le cit. N oyer
p è r e , puisque sa belle-sœur acheta des immeubles pour
à peu près ce qui lui était dû.
Ces immeubles ne font pas partie de sa succession,
puisqu’elle les a revendus au sieur N oyer père ; ainsi
quand cette succession ne serait pas confondue dans le
traité, elle n’en serait pas moins absolument nulle.
Voilà donc à quoi se réduit la prétention du citoyen
D u b o u y , si le tribunal veut faire discuter, à grands frais,
le mérite des reconnaissances; et si, en les approfondis
sant de plus en plus , il ne se trouve pas encore plus
fortement convaincu , que Françoise T ixier a fait une
transaction respectable et nécessaire, et qu’en traitant
avec ses enfans, ut a frater no certamine eos prœservarebj elle a prudemment calculé leurs intérêts et le sien.
Q u e l est le droit des parties sur la succession T i x i e r ?
L
e
citoyen D ubouy a un testament de sa mère qui
le fait héritier universel. Ce testament est olographe, et
F
�(
4
2
3
daté de 1789 : mais il n ’est pas enregistré, ainsi ce n’est
pas une pièce à produire.
Ce testament, dicté évidemment p a r le cit. D u bo u y,
semble tacitement révoqué par son contrat de mariage
qui est postérieur, et dont les clauses semblent con
traires à ce testament, au lieu d’y renouveler l’institu
tion , il serait aussi annullé de droit par le traité de
l ’an 2. Car un testament est ultimœ voluntatis testatio.
Or un acte de 1789 n’était pas la dernière volonté de
Françoise Tixier.
Mais à quoi servirait ce testament, dès que la succes
sion de la mère ne consiste que dans son mobilier ;
il est partagé ; et voilà ce qui faisait prendre au mot
le cit. D u b o u y , lorsqu’il se disait seul héritier d’une
succession nulle , parce que cette nullité m êm e rendait
illusoire la promesse de 1,000 livres, que la mère avait
faite h ses filles lors de leur mariage.
Il ne servirait à rien encore si le tribunal voulait
annuller le traité de l’an 2, et fixer la succession de la
m è re , car le pis aller serait d’adjuger la reconnaissance
de 5 ,ooo liv. la seule que son époque puisse faire res
pecter; et alors les dames Greliche y auraient 1,000 liv.
chacune, dès que cetle somme leur est promise avant
le testament. Ce serait donc à leur égard un partage
par égalité, malgré l ’institution.
Mais soit que la succession malernelle se compose de
mobilier, ou de ces 5,000 l iv ., ou de loute autre chose,
le cit. D ubouy doit toujours rendre compte des 6,000 1.
qui sont une charge de sa donation, ce qui est Iota-
�( 43 )
lement distinct du procès a c tu e l, et ce qui est jugé.
- Il a cherché jusqu’à présent à retarder le paiement
de cette somme , et il y est parvenu , en plaidant qu’il
fallait attendre la décision relative au partage de la
m ère; le moment est donc ven u, non pas d’y rapporter
ces 6,000 liv. mais de les payer, car il n’est donataire
qu’à cette condition.
j Ainsi ce procès si compliqué par les conclusions si
souvent changées du cit. D ù b o u y , se simplifie extrê
m em ent, et se réduit à des points certains.
1
L ’opposition au jugement par défaut est recevable;
ainsi le jugement surpris par le cit. D u b o u y est com me
non avenu.
L e désaveu estfondé au cas qu’il ait été nécessaire;
mais quand les sieurs Greliche auraient répudié au
bureau de p a ix , et même en jugem ent, une succession
parapliernale à leurs fem m es, celles-ci ne sont pas liées
par cette répudiation ; c’est une nullité viscérale; les
maris n’ont promis aucune garantie. S’il y avait enga
gement de leur p a r t , ce serait le sujet d’une action
particulière à diriger contre eux; mais cela ne produi
rait pas une répudiation.
r
•'
D ’après cela, le partage de la succession de Françoise
Tixier doit être ordonné entre toutes les parties ; mais
cette succession se réduit au mobilier, puisque les droits
litigieux et incorporels, dont elle pouvait se composer,
sont: vendus par transaction.
Si le tribunal annullait cette transaction, alors la suc
cession de Françoise Tixier n’en serait pas moins réduite
F a
�( 44 )
à rien, soit parce qu ’elle egt décédée sans avoir révoqué
sa,répudiation de 1760 , soit parce que les recouvreinens des biens de son père sont absorbés par les dettes ;
soit parce que sa soeur ayant acquis des biens1, pour le
p_yix de sa cession de droits, les a revendus,
r Si le tribunal donnait effet aux reconnaissances sans
les compenser avec les reprises du cit. N o y e r p è re , il
annullerait sans, doute'celle de l ’an 2 , com m e1n ’étant
qu’un avantagé in d ir e c tt e n d a n t à surpasser la quotité
disponible par la loi d u ^7 nivôse, et ne donnerait effet
qu’à, celle de 1775.
L a succession de Françoise T ixier une fois connue,
se régie aisement ; il est à. peu près égal que le citoyen
•Dubouy en soit*-héritier: ou ne' le soit pas; mais le tri
bunal ne peut avoir égajrd au testament de 1 7 8 9 ,puisque
i.° il n’est pas enregistré; 2 ° il est annullé par le con
trat de mariage de 17,90 > et le traité de l’an 2.
Il £dul donc en revenir aii point d’où on est parti,
c ’esl-ti-dire , a u jugem ent du a 5 ventôse an 5 ; tout est
réglé par l u i , et le tribunal n’a pas de guide plus sûr;
car le cit. D ubouy avait tout demandé alors, comme
011 peut le voir par le procès-verbal du i . er pluviôse
p ré cé d e n t, et ce fait n’est pas détruit par de simples
réserves qu’il a faites au P u y postérieurement et dans
d ’autres circonstances. Ces deux pièces du procès mar
quent assez que les parties entendaient faire terminer
toutes leurs contestations à cette époque, et celte in
tention fait crouler toutes les procédures, toutes les
conclusions, toutes.les injures du cit. N o y e r-D u b o u y ;
�(4 5 )
car il devait alors bien expliquer ses prétentions, et il
les avait expliquées; toutes les considérations ont été
pesées alors, et il ne p e u t , sans mauvaise foi a faire
renaître un procès d'un autre procès, et exiger que la
Justice partage avec lui ses embûches et ses cavillations.
M.r MARCHEIX , Rapporteur.
L . F. DELAPCHIER, Homme de loi.
F A Y E , Avoué.
A RIOM, DE L IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer, Jeanne. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
créances
successions
captation d'héritage
prison
contre-révolution
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Jeanne et Marie-Gabrielle Noyer, Pierre et Joseph Greliche, leurs maris, habitant à Mozun, intimés ; contre Joseph Noyer-Dubouy, habitant à Chamalière, appelant ; en présence d'Anne Noyer-Lagarde, avoué au Tribunal civil de Clermont, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1750-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0330
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53778/BCU_Factums_M0330.jpg
captation d'héritage
contre-révolution
Créances
prison
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53777/BCU_Factums_M0329.pdf
18ef49ba09fa4e45029b00f0b5f055d9
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Text
CONCLUSIONS
D u Sieur M A B I T ,
C o n t r e les Sieurs R O D D E - D E V E R N I È R E e t
PERRET:
A ce qu'il
p la is e
a
la
S É A NT E
A R I O M.
I.re Section.
Cour
E n ce qui touche la demande en homologation du
rapport du sieur Legay _
COUR
D’ A P PEL
*
J ^ . t t e n d u que cet expert a omis arbitrairement trois sep térées cent quatre-vingt-dix-huit toises de jardin ou v e rg e r .
ainsi que tous les bâtimens, m o u lin , grang es et logemens de
ses propres bestiaux, en considérant tous lesdits objets com m e
de simples accessoires du fonds;
A ttendu que sur quatre-vingt-treize Journaux et trois cent
trente-huit toises de prés portés dans l’antichrèse, il n’en a
évalué en produit que soixante-huit journaux ;
A ttendu qu'il n’a pas voulu compter- le produit des mon
tagnes et pacages co m m u n s, quoiqu’il eue servi à nourrir les
bestiaux du sieur D e v e r n iè r e , et que l’expert ait même pris
en considération , que les domaines étaient cultivés par des
bestiaux étrangers ;
A ttendu qu’il résulte du dénombrement de 1670 , qu’il y
avait des batimens au domaine de Besse, lesquels le sieur CaldaA
�( 2 )
guès a laissé tom ber, d’où il suit q u 'ila logé les b estiau x, et fait **
cn.c Jbardi<Ki.
y
toute l’exploitation aux deux domaines de Besse de l’antichrèse.
Attendu que le prix moyen des récoltes en blé étant à *
vingt sous le septifcr, lorsqu’il coûtait 8 et p livres, il esc j
ridicule de supposer que le propriétaire ait dû acheter 9 liv .'
c e qui ne devait lui rapporter que vingt sou s, d’où il suie
qu’il aurait eu >plus d’avantage de ne pas ensem encer;
Attendu que les baux de 1747 et « 7 J o , qu’on rap p orte,
étaient augmentés par des contre - lettres, ainsi que le sieur
Perret l’a établi-;
A ttendu que cet expert a doublé arbitrairement l'im pôt ,
sous p ré te x te d ’un privilège qui ne pouvait s’étendre aux immeu
bles d'autrui, et qui était compensé par d’autres charges ;
Attendu que les im m e u b le s, jouis à titre d’h y p o th è q u e , ou
en vertu de bail ju d iciaire, n*ont été imposés qu’à mi-tarif,;
que d'ailleurs les propriétaires étaient privilégiés ou forains;
Attendu qu’au lieu de doubler cet i m p ô t , L eg a y devait au
-contraire dinjinuer l ’impôt des1 bestiaux que le sieur D evernière devait supporter seul, dès qu’il profitait du produit ;
A ttendu qu’il a mal à propos déduit la fondation due aux
m
prêtres de Polm inhac, q u i t t a i t une dette personnelle du sieur,
D e v e rn iè re ;
. A ttend u qu’après avoir déduit tout ce qu’il suppose sans
re ven u , il ne devait pas déduire des cas fortuits j notamment
sur des prés et des pacages ;
« A tten d u qu’il n’a rien estimé pour les sarasins, pois., avoines,
le n tille s , c h a n v re s, etc. ;
‘
,
A tt e nd u- qu e sur deux mercuriales voisines il a affecté d’aller
prendre celle qui était plus él oig né e de trois lie u es , la q u e ll e ,
était plus avantageuse au sieur Dev ern ièr û ;
�(.3 )
Attendu qu’en prenant pour comparaison le bail de 1780 j
avec l'estimation de l’expert pour la même a n n ée, et quoique
ce bail fût fait depuis le procès, on voit que le sieur D eve rn iè re
a retiré du domaine un produit n e t, double de ce qu’il a plu au
sieur L e g a y de l ’é v a lu e r , etc. ;
Attendu que si le sieur D evernière aime mieux prendre pour
comparaison l’année \ 6 6 j , il en résultera que les experts de
1667 ont estimé à
liv. le même revenu net que L e g a y
a estimé à 762 liv. en 1780?
■ A ttendu qu’en laissant même de cô té toutes les omissions
arbitraires, le doublement de l'im p ôt de 17 7 4 jusqu’à 1 7 8 8 ,
fait seulement pour le sieur M abit une perte de 6 ,7 5 6 liv. 17 s.
L ’impôt des bestiaux qu’il ne doit pas supporter, pendant les
mêmes années, s’élève à 1,78 7 liv. les vingtièm e fixés arbi
trairement com m e la déduction de l’impôt sur Baratou ; d’où
il suit que sur l’impôt seul, le sieur M abit perdrait injustement
plus de p,o o o liv. pour les jouissances de 1774 à 1 7 8 8 , qui
lui appartiennent;
A t t e n d u que ce rapport est ainsi fautif et partial-, et par les
autres motifs déduits par le sieur Perret.
1
E n ce qui touche Vindemnlte du pre Bédissol.
A t t e n d u que le sieur de Calda guès en re çu t la plus value
en
1 6 6 7 , dans l ’ac tç m ê m e d’antichrèse ;
-
A t t e n d u que la valeur dudit pré servit à c om pos er la c réa nc e
de 26,300 liv. et que le sieur D e v e r n i è r e a volo nta ir em ent
reçu ladite somme totale de 25,3 00 liv.»
A ttendu d’ailleurs, que n’ayant.délaissé ce pré que pour tenir
lieu d’un titre c lé r i c a l, il l’a retiré .par la-suite-, et l'a revendu
le 10 juin 1 7 1 4 .
A
2
�En ce qui touche "les héritages délaissés en v6jo+.
A ttend u que l’o b ligation , de délaisser des fonds à la femme
:C a m b o n , pouvait être convertie en payem ent numéraire, de
son consentem ent; et que par le f a i t , ledit acte de 1670
„prouve que ladite fem me C a m b o n .a accepté
ce mode de
libération^
Attendu que le sieur Devcrriière ne lui a délaissé des fonds
qu’à titre d^hypothèque. et.de gage 9f pour le payement de la
somme de 2,3^7 livres;
A ttendu que ladite somme-de
liv. composait aussi les
26,300 livres, et que le sieur Dev.ernière,-en recevant cette
derniere somme j s est payé aussi de..tout ce qu’il avait donné
a la fem m e C a m b o n , d’où il suit qu’il ferait double em p loi,
¡en obtenant plusieurs capitaux pour un.
:E n ce qui touche ' les droits de lods*
Attendu qu ils fctaîent dus pour tout acte portant cession
de jouissances au-delà de n e u f ans ; qu’ainsi le sieur de C a ld a g u è s,.en les payant., ne.fit qu’acquitter sa propre dette.
*
Œ n ce qui touche les promesses de-16 4 2 et 1651+
‘ A ttend u que Iestiites promesses étalent conditionnelles, et
que le sieur D everniere doit prouver que la condition est
a rriv é e ;
A ttend u que la sentence de
ne condamnait commina-
'toirement à p a y e r, que si la veuve Laribe ne fournissait des
‘aéfenses dans la huitaines
�( r)
Attendu que sur la signification à elle faite le 4 janvier 16 j Ç ,
%elle a fourni des défenses l e p ; qu’ainsi la condamnation conv"rainatoire n’existe p ju ç;
1,. ...
'
Attendu que le sieur M abit n’est pas tenu de discuter cette
demande, puisqu’elle ne fait pas partie des créances de l ’an^tic.hrèsej étant seulement réscrvée'en *1 Gti-jj ,qu’ainsi il-a droit
vid ’user des fins ,d.e no.n-recevoir ci après.
68
..Ence qui touche le s,cens de i y , et généralement tous
les chefs auxquels Mabit nest pas obligépersonnels
lement par son acquisition de 1 7 7 4 .
Attendu que le sieur D evernière,.n’a eu a.ctipn directe q.u£
ccontre les héritiers Laribe ;
_ Attendu que le sieur Devernière a affecté de ne pas former
, demande .contre l.e sieur D e la g a r d e , seul héritier des Laribe
^quand i l ,était en cau se; et qu’.il n’a pas d’action hyp othé,..Caire contre Mabit., „îiprès. les lettres de ratification;
Attendu encore qu’il n’a pas d’action contre le sieur Mabit
*s-il n’e s t ,pas. en,.écat de le subroger , ,e t qu’il ne,peut exercer
ses demandes qu’en .première in sta n ce , pour que M abit aie
Ja faculté d’appeler le débiteur .en reçours^et^de subir les deux
• degrés de jurisdiction.;
.
Attendu que le sieur Devernière seraidui-même garant hy p o
thécaire de ses propres demandes, comme détenteur du domaine
.de Besse
demeuré en saisie réelle depuis 16 j 6 , et dont il rv’a
jpas prescrit la p ro p riété, ,parçe que cet injm.euble (ét^ic sous
la main de la justice..;
Attendu que les actes et sentences de 1' 6 7 6 , ^ 7 7
,i
58o ;
1(j ' o
i6$$ y \ m , x696 et autres pièces du dossier du sieur
�( « )
D evernière prouvent qu’il a réuni les créances des premiers
poursuivans de ladite saisie réelle , et s’y est fait subroger
pour retenir ledit domaine jusqu’au payement de ses hyp o
thèques.
-E n ce qui touche la légitime de Charles L a rib e , et
généralement les chefs de demandes ci-après.
Attendu que le sieur D evernière a reconnu n’être pas fondé
dans lesdites réclamations, puisqu’il ne les a pas portées dans
ses conclusions au parlement ;
A t t e n d u même qu’il y est non-recevable, ayant reçu 2 6 ^ 0 0 ],
sans réserver d'autres c h e f s , si ce n’est ce u x déjà pendans au
parlement c o nt r e M abit ;
Attendu dans tous les cas que le sîeur D e v e r n iè r e , rap
portant une quittance en m inute, tenue secrète pendant plus
d ’un s iè cle , qui n’a pas de so m m e, ne peut libeller une de
mande précise, et que la C o u r 11e pourrait baser une condam
nation sur une somme inconnue;
56
A ttend u que le testament de \< o ne peut venir à l’aide
de la quittance de i<?P7> où il n’est pas même é n o n c é ;
A ttendu qu’un légitimaire ne pouvait être payé qu’après
les créanciers; que la légitime de ?,ooo liv. d’Olim pe Laribe,
sœur à C h a rle s, n’a pas été p ayée; que tous les biens étaient
alors en saisie r é e lle , et que le sieur de Caldaguès ne chercha
qu’un titre c o lo r é , après le décès de Jeanne D e c o m b la t , pour
6’assurer l'invasion du domaine de Besse, en acquérant des
hypothèques multipliées sur ledit domaine.
�En
ce qui touche les améliorations.
Attendu qu’il n’y avait lieu d’y conclure qu’avant l’arrêt de
1 7 8 1 , et que le sieur D evernière n’y a' pas m êm e conclu en
i7P<3j pas même encore en présence des experts ;
Attendu que le sieur de Caldaguès .> n’ayant fait dresser
.aucun procès-verbal de réparations à faire en 1 6 6 7 , ne peut
demander celles qu’il dit avoir faites en 1684., 16S6 et 1713;
Attendu que la g ra n g e , qu’il dit avoir agrandie en 1 7 1 3 ,
a été entièrement à son u sag e , si elle l’a é t é , et qu’il y en
a une de moins qu’en
1667 ;
Attendu quB l ’antichrésiste qui construit pour soi ne" peut
réclamer que c e qui tourne au profit du propriétaire, à laJ
ün de I’antichrèse ;
Attendu qu’il doit encore moins réclamer des réparations'
dont il a usé s eul , loYsqu'il soutient qu’il ne doit pas payer
■de jouissances des Lâtimens et des grang'es.'
*
«
y
*
*
’
"
*
“
*
. iiD
• r—
E h ce qui touche les fra is fa its parte sieur de Caldaguès..
Attendu que les frais de saisie réelle et autres qu’il réclame r
l ’ont conduit à s’emparer" du domaine de B êsse, aussi-tôt qu’il '
s’est fait subroger aux poursuites., et sans autre titre que ses
prétendues hypothèques;-.,,
•
'
f
:.r
Attendu dès-lors qu’il est ridicule et inconsidéré de la part^
du sieur D evernicre de vouloir être payé des frais prélimi
naires de son usurpation ;
. .
^
,.r
^
A tt e n d u d’ailleurs que les frais d’un procès ..nc^s.e .récla
ment que quand il est te rm in é, et q u e lle sjeui; Devernière*
a ’a qu’à reprendre les procès dont il veut p a rle r, et quril* iie^
�( 8 y
spécifie p a s , afín d’ob ten ir, contre qui il appartiendra, la con
damnation des dépens qui s’y rapportent.
E n ce qui touche Vinscriptïon de 60,000 livres.
A ttend u que le sieur D e v e r n iè r e , ayant fait une opposi
tio n 'q u i a frappé sur les lettres de ratification obtenues par
le sieur M a b i t , n’a pas' eu le d r o it, après que les immeubles
ont été ainsi purgés, de les grever d’une seconde opposition’
et inscription Hypothécaire;
A tt e n d u que l’art. 7 <ie l’ddie de 1 7 7 1
de ra tification, rendent l’acquéreur
porte que les lettres
propriétaire
incommu
t a b l e , et l'affranchissent de toutes hy po thè qu es ;
Attendu que le sieur D e v e rn iè re , ayant reçu les 56,300 liv.en l ’an 7*, n’était plu» créancier personnel du sieur M a b i t ,
e t n’avait pa9 le droit de gêner ses affaires pour une ins
cription inutile et vexatoire.
Faisant droit sur les demandes des sieur et dame
Perret.
Ë n ce qui touche F appel de la sentence du 5 février
179o -
A ttend u que le sienr M abit a opté pour la condamnation
et dommages-intérêts-, à la charge de remettre les parties au
m êm e é ta t;
A tten d u que si la C o u r ne l’adopte p as, il y a nécessai
rement mal ju g é , quant à ces dommages-intérêts^ d’après le
sieur Perret lui-même.
En
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l£ íc¿j o /
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Zdi- j 1? î*?L- ii Sm-C" ijtuù
îl
n u \t'lr ' ( -tfuZTr
�19}
E n ce qui touche la condamnation au payement de la
somme de 2,40 0 liv. porte'e par ladite sentence,
pour bestiaux et outils d*agriculture.
A ttendu que le sieur M abit s’en est rapporté à ce t égard à
l ’affirmation des sieur e t dame P e rre t;
A ttendu qu a i’époque du 2 j- mars t y î ÿ , le sieur P rin ce était
débiteur du sieur M abit de plus forte somme.
E n ce qui touche la condamnation aux jouissances de
!
7 S9 .
A ttend u <jue les sieur et dame P e rre t, en reclamant la tota
lité de la récolte en grains, y ont compris la portion du c o lo n ;
Attendu que les sieur et dame Perret doivent être soumis à
l ’estimation de ladite r é c o lte , suivant ta même sentence j
A tten d u dès-lors, que les sieur et dame Perret doivent rece
voir seulement ce que le sieur Devernière sera condamné a
payer pour ladite récolte de 178^.
E n ce qui touche la condamnation non-liquidée, les
fo in s j pailles et fum iers ,
A tten d u que le sieur Perret a dû recevoir, et a reçu en e ffe t,
les deux domaines garnis desdits objets à son entrée;
A ttendu que dans tous les ca s, c ’est au sieur D evernière à
répondre à ladite demande, puisque l ’antichrèse a co m m en cé
le $ avril 1 6 6 7 , et a fini le 2 ; mars 1800; d'où il suit q u e la
culture a dû ê tre à l ’entrée de l ’antichrésiste au même état
qu’à sa sortie
�'( < iû )
E n ce '■
qiu'toiickevtes nouvëlles^dërnanies: dessietrr •c£.
■' dame- Perret- ¿"èt' à*abord''le- remboursement des
2-ÔjJOO liv. •
- A ttendu qu’ en se: faisant subrcrger’au sieur.'Derernièrerpour
ce tte c ré a n c e , ils n’o n t droit- q u'à.dem ander1 l’exécution dé:
l'arrêt dé. 1781.: c ’est-à-dire:r .les dettes e t reprises duisieur
D e ve rn iè re;
„
A tten d u d’ailleurs que le sieur Perret a touché 23,000 liv*
du sieur D a u b u ss o n , du con sen tem en t du sieur M a b ir ; q u ’il a
touché tout ou partie des sommes saisies et arrêtées montant
à plus de j’ojooo liv ., ( ce que le ¡sieur.Perrec n’a porté-qu’à
6}000 ) ; qu’il est dû encore au sieur M abit plus de 1 j, o o o liv;:
de capital sur le prix de l’acte de 1 7 83 , qu’ainsi le sieur-i Perret
est pa.y-é, etvbien au-delà d e c e . q u ’i l rréclame;
E n ce qui touche la prétendue privation de la fa cu lté
de couper du bois.
Attendu que les sieur et damexPerret n’y ont pus d’in té rê t,
puisqu’il ne s’a g it pas de fruits industriaux qui se renouvellent
. annuellement, et Qu’ils trouvent le revenu du^passü dans l ’accrois
sement du capital;
A ttend u d'ailleurs que d’après l’acte de 1 7 8 3 , la facultéréservée par le sieur Prince ne devait avoir lie u , qu'après la
décision du procès pendant avec le sieur de V e r n i è r e ;
A tten d u enfin*quarien ne constate-que- le sieur Prince ait
¿té privé de cette fa c u lté ,.e t qu’il n’a jamais mis en demeure
sieur M abit ni le sieur D evern ière.
C.
�)
E n ce qui touche les dégradations.
r ”
Attendu que le sieur Prince s’esc désisté de ce chef.
-En ce qui touché la garantie de Vinscription du sieur
de Vernière.
i
Attendu que ladite inscription ne peut frapper les deux do
maines vendus au sieur P rin c e , dès qu’il y a eu d es‘lettres de
ratification ;
A tt e n d u d è s -lors qu’il n’y a , de la part des sieur et dame
P e rre t, qu’une action directe en main-levée à exercer contre
le sieur D svernière.
E n ce qui touche'V appel de la sentence du y mars l 'j g o .
A t t e n d u qu e les juges dont est a p p e l, n'avaient pas le droit
de retenir la demande au préjudice d’un arrêt de déffense à e u x
signifié avant la -sentence#
E n ce qui touche la demande en lésion .
Attendu que le sieur M abit s’est désisté de la demande inci
dente, pendante à Figeac à cet é g a r d , et retenue par la C o u r ;
q u ’ainsi il est inutile d’y statuer ni même de donner acte du
désistement aux termes du code de procédure;
Attendu
néanmoins que la même demande a é té renou
velée en première instance, pour subie les deux degrés de
jurisdiction , et que le sort de cette demande rendra sans objet
le surplus des réclamations des sieur .et dame Perret.
E n ce qui touche les droits de lods.
va :
Attendu que les.sieur et dame Perret n 'on t pas d'action pour
�? T2
)
demander les depens d’un procès indécis et mal-à-propos in
te nt é ;
Attendu que les lois n’ont conservé cette action que pour
les retraits, parce qu’il était permis aux tribunaux d’examiner
le fond du procès pour savoir qui devait les dépens;
A ttendu au contraire que les lois abolitives des droits fé o
d a u x , défendent expressément aux tribunaux de statuer sur les
procès indécis de cette nature, même pour les dépens qui restent
compensés ;
A ttendu que le sieur Prince a contesté les cautions offertes
par M a b it, quoique très-solvables, qu'il a refusé de recevoir
des tiers saisis les sonxmes offertes par plusieurs, qu’il a fait
aine inscription de 80,700 liv. pour discréditer Mabit.
Attendu que le sieur Perret dispose de la fortune du sieur
M a b it, en recevant des uns. en accordant délai à d’autres, et
en refusant de recevoir des mains d’autres tiers saisis; sans
daigner rien communiquer au sieur M a b it, ni lui dénoncer les
saisies-arrêts qu’il multiplie et réitéré pour le vexer.
A ce q u i l plaise à la C o u r, statuant sur l’exécution de
l ’arrêt du ay mai 1 7 8 1 , et sur les demandes du sieur D e ve rn iè re, sans vous arrêter ni avoir égard auxdites dem andes,
dans lesquelles il sera déclaré non-recevable sans e x c e p t io n ,
ou en
tout cas débouté , ordonner que par de nouveaux
experts les jouissances et dégradations des domaines de Laribe
et du T e i l seront estimées conformément audit arrêt de 1 7 8 1 ,
pour les années 1774 et suivantes, jusques et compris l’an
née 17PP époque du désistem ent; lesquels experts feront la
déduction des charges réelles annuelles , dans lesquelles ne
seront compris ni la fondation due aux prêtres de P o lm in h a c,
,ni l’impôt des .bestiaux, ni aucune adition arbitraire desdites
�T
J
c la r g e s réelles; ordonner que lesdits experts feront le calcul,a n n é i par a n n ée , desdites jouissances ec de l’intérêt légal des
26,300 liv. d’abord jusqu’au 2 y mars 1785? , et ensuite jus
qu’au 7 messidor an 7 , ensemble de l’intérêt de l’excédanc
des jouissances , année par a n n ée, conformément audit arrêt.
Ordonner que l’inscription du sieur D evernière sera radiée
par le conservateur des hyp othèques, à ses frais, et condamner
ledit sieur Devernière en 1 y,ooo;liv. de dommages-intérêts; Le
condamner en tous les dépens.
Statuant sur les contestations d ’entre les sieur et dame
Perrét et le sieur M a b it, et dans le cas où la C o u r croirait
devoir y faire d ro it,-nonobstant l’instance en lésion pendante
■devant les premiers juges; faisant droit sur l’appel de la sen
tence du j février 17^0» donner acte a M abit de l ’option par
lui faite de l ’exécu ter, quant aux d o m m a g e s -in té rê ts , à la
charge d’être remis au même état qu’avant les actes de 178a
e t 1785; subsidiairement dire quJil a été mal jugé par ladite
sentence., en ce qu’elle condamne M abit à payer 27,000 liv.
de dommages-intérêts, et J74septiers de grains; ém endant,
ordonner que la restitution des jouissances sera fixée par les
mêmes experts qui y procéderont vis-à-vis le sieur D evernière;
■débouter les sieur et dame Perret de leur demande en payement
des foins, pailles et fumiers, sauf leurs réclamations contre le
sieur D e v e r n iè r e , ainsi qu’ils aviseront; subsidiairement or
donner que lesdits objets seront estimés parles mêmes experts;
dire qu il a été bien jugé par ladite sentence, en ce qu’elle
condamne Mabit a payer 2,400 liv. pour les bestiaux et outils
d agricultu re, à la charge par lesdits sieur et dame P erret ,
d ’aifirmer devant les juges des lieu x, qu’ils n’ont pas con•naisssance que.ladite convention de payement fût subordonnée
�à un*retirempnt réel desdits bestiaux de la fa r t du sieur M a b i t ,
et que réellement ils n’ont pris ni bestiaux, ni outils d ’a g ri
culture dans lesdits dom aines, sur le surplus des condamna-'t io n s , mettre les parties hors de cause.
Faisant droit sur les conclusions nouvelles des sieur et dame
P e r r e t , renvoyer les p a rties, quant au remboursement des
00 l ‘v * à se faire compte des sommes par elles reçues ,
et à re c e v o ir, si mieux n’aime la C o u r , condamner IVÎabit au
payement de ladite somme , à la charge par les sieur et dame'
-Perret de lui payer ou faire compte i.° du restant du prix
de la vente du 22 septembre 1783 ; 2.0 des sommes touchées
depuis les saisies-arrêts, et-en vertu d’icelles ; 3.0 de la somme
-tou ch ée par le sieur Perret du sieur Daubusson, avec intérêts
du tout tels que de d ro it, et sous réserve à Mabit de ses actions
résultantes desdites saisies-arrêts et répétition du montant
d’ic e ll e s , ainsi quJil avisera.
O rd o n n e r, quant aux jouissances de 178P à l’an 7 , que les
sieur et dame Perret les recevront directement du sieur D e
v e r n i è r e ; subsidiairement condamner M abit à faire compte desdites jouissances, suivant l'estimation c i-d e ssu s des mêmes
cexperts, sauf son recours contre le sieur Devernière.
Faisant droit sur l’appel de la sentence du j mars 175)0,
-dire qu’il a été mal j u g é , bien ap p elé; ém endant, déclarer
-ladite sentence nulle et sans effet»
Sur le surplus des conclusions des sieur et dame P e r r e t ,
mettre les parties hors de cause ; condamner les sieur et dame
Perret aux dépens ; ordonner que les amendes seront rendues.
Faisant droit sur les demandes en recours du sieur M abit
-contre le sieur -Devernière ;
Condamner le sieur D evernière à garantir et indemniser
�( 15 )
M abit des condamnations
qui
pourraient être prononcées
contre lu i, au profit des sieur et dame P e rret, savoir 1.° quant
à la restitution des jouissances qui ont-couru depuis le 2 5
mars 1 789; 2 ° quant à la remise des fo in s , pailles , fumiers et
récolte ensemencée à sa sortie; 5.0 quant à la demande en
ïprivation de couper du bois et de toutes dégradations; 4..0 quant
à la garantie de l’inscription qui frappe sur lesdits sieur et dame
P e rret;
Condamner le sieur Devernière en tous les dépens, même
-en ceux auxquels M abit pourrait être condamné envers les sieur
et dame Perret.
M A B I
.
T.
M e C O S T E , Avoué-Licencié
A R I O M , DE L’I M P R I M E R I E DE M.T D É G O U T T E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mabit. 1791?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mabit
Coste
Subject
The topic of the resource
experts
antichrèse
Description
An account of the resource
Conclusions du Sieur Mabit, Contre les sieurs Rodde Devernière et Perret.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de M. Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1791
1670-Circa 1791
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0329
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0325
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Vic-sur-Cère (15258)
Besse (domaine de)
Bédissol (Pré de)
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Domaine public
Antichrèse
experts
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Text
|
M
E
M
O
I
R
E
POUR
ftys
-
G
uillau m e
M A IG N O/ L f ils, habitant à Bon-
lieu, canton d’E v au x, appelant ;
c o n t r e
,
A n t o i n e G U I L L A U M E maréchal a P on
taumur, intimé ;
ET
C O N T R E
,
G ilb e r te M A IG N O L , P ie r r e L E G A Y
mari
A n to in e
-
M A IG N O L
, son
G ilb e r te
veuve Paneveyre, et autres, héri
Pierre M a i g n o l , d e Landogne, intimés;
M A IG N O L ,
tiers
EN P R É S E N C E
,
D e G u i l l a u m e M A I G N O L père habitant au
lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, ap
pelé en assistance de cause.
U
n
acte sous seing p r i v é , synallagm atique, est-il nul
s’ il n’a pas été fait double ? Peut-il être opposé à un dona
taire contractuel s’il n ’a de date certaine que postérieure
ment à sa donation ? E n fin quels caractères d ’exécution
A
’
,
�faut-il à cet acte p o u r q u ’il soit obligatoire m algré les
nullités qui le vicient ?
Telles sont les questions que présente cette cause, en
supposant qu ’ un acte sous seing p r i v é , produit par les h é
ritiers M a ig n o l, soit une vente. C a r , en p oin t de fait,
l’appelant démontrera que cet acte n’est qu’un ti^re de
possession,
*
F A I T S . '
. v
'
•
*•
P a r acte du 16 mai 1^ 5 5 , M ic h e l L en o b le donna ¿1 bail *
em pylitéotique à des nomm és C liefd eville, un p ré situé
près de L a n d o g n e , m oyennant 90 francs de rente annuelle.
C ’est ce p ré qui fait
1’objet
de la contestation.
L e m êm e j o u r , L en o b le vendit ladite rente de 90 fr.
îi G uillaum e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , p o u r le payer
de 1800 francs qu ’il lui devoit.
L e 16 juin 1 7 7 7 , C h efd eville subrogea ledit G uillaum e
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , audit bail em p yhtéo liq ue ;
de sorte q u ’il lui céda la p ro p riété du pré.
Ce pré étant situé près de L a n d o g n e , étoit désiré beau
coup par le s ie u rP ie rre M a ig n o l, notaire audit lie u ; et il
paroît q u ’il chercha les m oyens d’en devenir propriétaire.
Il étoit créancier dessieui’s L a rfe u il d’une rente de 56 f. ?
au principal de
2800 francs, créée en 1 7 2 0 , due p o u r
m oitié par les héritiers de Jean-Franeois L arfeuil.
L e s L a rfe u il ayant vendu en rente un petit domaine à
Jean Gastier, P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , avoit obtenu
contre lui une sentence hypothécaire en 1 7 6 6 , portant
permission de se mettre en possession ou faire vendre.
D e son c ô té , G uillau m e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c
,
�( .3 )
seigneur féodal dudit d o m a in e , et ayant acheté de l’ un des
L arfeu il la m oitié de la rente due par Jean G a s tie r , lA
poursuivoit p our être payé des cens , lods et arréragés de
rente, et se tro u vo it empôclié par ladite sentence de 1 7 6 6 ,
en ce que son vendeur l’avoit chargé de payer à P ie rre
M a ig n o l la p ortion de la rente de 1720.
Cette procédure fournit à ce dernier l ’occasion de faire
des
propositions à G uillau m e
M a i g n o l , du
C h e va l-
Blanc , et de profiter de son ascendant, en lui faisant
entendre que rien n’étoit plus aisé p o u r lui que de de
ve n ir p ropriétaire de ce petit domaine ven du à G a stier,
lequel étoit parfaitement à sa bienséance, puisqu’il jo i—
gnoit ses propriétés du Clieval-Blanc.
Il paroît que P ierre M aign o l proposa à G uillau m e de
faire par ce m oyen un échange de ses droits à ce d o
maine , avec le p ré venu de L e n o b le , assurant sans doute
q u ’il n’y avoit plus qu’à se mettre en possession dudit d o
maine , au m oyen de sa sentence de 1766.
Cependant le sieur M a ig n o l, du C h e v a l - B l a n c , ne
donna pas pleinement dans le piège. Il fut passé un acte
entre les parties, le 2 octobre 1779* M ais cet acte ne
contient pas de v e n t e ; sa contexture m êm e p ro u v e que
le sieur M a ig n o l, du Cheval - B la n c , entendoit stipuler
toute autre chose q u ’ une vente , et ne vo u lo it que
laisser le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , jouir du p ré
L e n o b l e , jusqu’à ce q u ’il y eût quelque chose de certain
p o u r lui-mêrne au sujet du domaine Gastier. l
E n e f f e t , on lit dans cet acte, du 2 octobre 177 9 ■
>que
P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , cède à G uillau m e M a i
g n o l la rente de 28 fran cs, au principal de 1400 francs
A
2
�( 4 )
faisant moitié de celle de 1 7 2 0 , due par les héritiers de
Jean - François
L a r f e u i l ,' ensemble les arrérages
éclms
J
O
depuis 1 7 5 8 ; p l u s , il cède audit G uillaum e M a ig n o l ,
du C h e v a l- B la n c , l ’efiet de la sentence de 1 7 6 6 , p ar lui
obtenue contre Gastier.
Le
p r ix dudit transport est fixé
entre
les parties
à 2000 fran cs, p o u r l’acquit de laquelle somme M a ig n o l,
du C h e v a l- B la n c ( propriétaire cependant du p ré L e n o b l e ) , cède seulement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , le c o n
trat de renie de 90 francs à lui dû par les héritiers de
P ierre L e n o b le , suivant l ’acte du 16 m ai 1 7 5 5 ; la quelle
rente est -payable, est-il d i t , p a r les jo u is s o n s du p ré
appelé P r é ■■Grand y s u r le q u e l elle e st sp écia lem en t
affectée.
E n co n sé q u e n c e , au m oyen de la rem ise que fera
G uillaum e M a ig n o l des titres co n stitu tifs de ladite rente
de 90 francs, ensemble des titres de créances y énoncés ,
il demeurera quitte de la somm e de 1800 francs: et quant
h la somme de 200 fra n c s, P ie rre M a ig n o l reconnoît
l ’avoir reçue en d élivran ce de promesse de ladite somme.
D e sa p a r t , P ie rre M a ig n o l remet à G uillaum e la sen-*tence de 1 7 6 6 , obtenue contre G astier; et néanmoins il
se réserve le contrat de rente de 1 7 2 0 , p ou r p ou rsu ivre
le payement de la m oitié qui lui re s te , et m ê m e , d it -il,
les arrérages de la m oitié v e n d u e , antérieurs à 17^ 8 ;
enfin les parties se cèdent respectivement les droits rescindans et rescisoires qui peu ven t résulter des contrats cidessus énoncés.
Il paroît aujourd’hui un acte sous seing p riv é , de la
m êm e date que le transport ci - dessus, assez diilicilc à
�( 5 )
accorder avec les clauses dont on vient de rendre com pte,
du moins dans le sens que les adversaires lui d o n n e n t ,
mais qui p rou veroit assez, s’ il étoit réellem ent de cette
date, que le sieur M a ig n o l, de L an d o gn e, n ’avoit cherch é
à extorquer un écrit quelconque du sieur M a i g n o l , du
C h e v a l-B la n c , que p o u r tirer parti un jour de son obscu
rité. Il est néanmoins évident q u ’il ne s’agissoit alors que
de lui laisser les jouissances du pré L e n o b le p o u r 90 fr.
par a n , afin de le payer de l ’intérêt des 1800 francs cidessus stipulés, jusqu’à ce que l’occupation réelle du do
maine Gastier perm ît de faire un échange définitif.
Q u o i q u ’il en soit, et en attendant que cet écrit jus
q u ’à présent inconnu soit mis sous les y e u x d e là c o u r , et
discuté, il s’agit de continuer l ’ordre des faits. L e sieur
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , eut bientôt à s’ap plaudir de
n ’avoir pas entièrement cédé aux assurances du sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e ; car huit jours après l’acte du 2
octobre 1779 , ayant pris possession notariée du domaine
G astier, en vertu d e l à sentence de 1 7 6 6 , qui venoit de
lui être c é d é e , ledit Gastier loin de se rendre à une
expropriation v o lo n ta ire , c o m m e l’avoit prom is le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , alla au contraire traiter avec l’ un
des L a r f e u i l , ses v e n d e u rs, qui offrit de payer le sieur
M a i g n o l , et conclut à ce qu ’il fût déchu de ses demandes.
En e f fe t , par une sentence de la sénéchaussée d ’A u
v e r g n e , au rapport de M . F a y d it , G uillaum e M a ig n o l
fut d é b o u té , à la charge d ’être payé des cens à lui dûs per
so n nellem ent, et seulement de la moitié des arrérages
de rente par lui acquise de L aurent L arfeuil.
Cette sentence ne dit rien de la m oitié de rente cédée
par P ierre M a ig n o l à G uillaum e , q u o iq u ’elle fût de
�(6 )
m a n d ée , et que la sentence de 17 66 en portât condam
nation; de sorte que par le fa it, G uillaum e M a ig n o l, du
C heval-B lanc, n’a pas t o u c h é ,à ce qu ’ il p a ro ît, un denier
de ce qui lui a été vendu par M a ig n o l , de L a n d o g n e ,
le 2 octobre 1779
tandis q u ’on élève la prétention de
s’a p p r o p r ie r , sans bourse d é lier, un p ré q u ’ il n’a pas
vendu.
Cependant P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , s’étoit mis en
possession dudit p r é , et les fruits devoient lui en rester
p o u r la rente de go francs , suivant la clause du traité, tant
que le sieur M a i g n o l , du C h e v a l - B l a n c , ne préféreroil pas
jo uir lui-m êm e en payant ladite rente.
O n pense bien que le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e ,
s’arrangea p ou r faire'durer cet état de choses encore lo n g
temps , et q u ’il ne manqua pas de rév eille r de loin en
loin l ’espoir de son cousin de devenir p ropriétaire du
petit dom aine G a s tie r , qui étoit si fort à. sa bienséance.
L e sieur M a ig n o l, du C h eval - B l a n c , éloigné du p ré
L e n o b le , ne mettoit pas un grand pi’ix à en jouir lu im êm e , et peut-être lui en exagéroit-on les inconvéniens ;
peut-être aussi le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , sayoit-il
tirer parti d’ une espèce de dépendance dans laquelle il
avoit su tenir son parent.
L es choses restèrent en cet état jusqu’en l ’an 7 , que
le sieur M a i g n o l , fils de G u illa u m e , donataire universel
de son père par son contrat de m ariage, se mit en pos
session de ses biens en cette q u a lité , et demanda à son
père des renseignemens sur le résultat de l’acle de 1 7 7 9 ,
et d e là prise de possession du dom aine G a stier, que son
père lui rernettoit avec d’autres titres. C ’est alors que le
sieur M a ig n o l père expliqua à sou fils que si, à la v é r it é }
�(7 )
il ne jouissoit pas du domaine G a s t ie r , il restoit maître
du p ré L e n o b le , q u ’il reprendrait quand il v o u d r a it , et
que lu i, M a i g n o l p è r e , n’avoit pas encore ré c la m é , parce
q u ’on l ’avoit toujours bercé d’un vain espoir , et parce
q u ’il devoit au sieur M aignol, de L a n d o g n e ,p o u r un procès
de fam ille; ce qui l ’avoit em pêché de le contrarier.
M a ig n o l fils vo u lu t avoir une explication avec le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , qui lui refusa toute com m unica
tion sur ce poin t, et ne lui répondit qu ’en pressant le paye
m ent d ’une créance étrangère au procès actuel. M a ig n o l
fils paya le 2
5 nivôse an 9 ,
et se crut dès-lors autorisé à
reco u vrer ses droits.
I/acte de 1779 qui lu i avoit été remis n’énonçoit que
l ’acte de i r/ 5 5 ) lequel ne donnoit la p rop riété du p ré q u ’à
Ch efd eville : il s’agissoit donc de rechercher la vente que
C hefd eville avoit dû faire au sieur M a ig n o l, du C h evalBlanc. Mais l ’acte en avoit été reçu par le sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , et il étoit difficile de se le p rocurer ; il l’avoit
refusé plusieurs fois. Enfin M a ig n o l fils, étant p arvenu
à trouver la date de l’enregistrem ent, étoit p rêt à p o u r
suivre le sieur M a ig n o l, de J/andogne, lorsqu’il décéda.
A lo r s il demanda une expédition au n o t a ir e , son suc
cesse u r, q u i , en cherchant avec l u i , ne trouva pas la
m inute de l’acte dans la liasse de 1777? n * au répertoire.
A l o r s , p o u r éviter toutes difficultés, M a ig n o l fils p rit le
parti d’acheter du m êm e C h efd eville, le 14 fructidor an 1 1 ,
une ratification de la vente q u ’ il avoit consentie en 1 7 7 7 .
M u n i de cette p ièce , M a ig n o l fils informé que le pos
sesseur du pré L en o h le étoit A n to in e G u illa u m e , de P o n t à u m u r , le fit citer ch désistement, par cédule du 3 ven
démiaire an 12.
�C8)
G uillau m e ne vo u lu t pas plus donner d ’explica lions que
le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , et ne com parut au bureau
de p aix que p o u r o b éir à la loi. Ensuile il se défendit
par des réquisitoires de qualités et de titres ;'et après cela,
il demanda la nullité de l ’e x p lo it , sous p rétexte que les
confins du p ré n’y étoient pas én o n cés, q u o iq u ’ils le fussent dans la cédule.
Il succomba justement sur cette ch ican e, par jugem ent
du 4 pluviôse an 12 , lequel néanmoins réserva les dépens
p o u r y'étre fait d r o it , en statuant au fond.
Enfin il plut à G u i l l a u m e de r é v é l e r q u ’ il étoit acqué
reur du sieur M aig n o l , de I,an dogn e, par acte du 29 ven
tôse an 6 , et il assigna son vendeur en garantie.
L e sieur M a ig n o l, d e L a n d o g n e , étoit décédé dans l ’in
tervalle; ses enfans in t e r v in r e n t , et en rendant com pte
des faits, ils se contentoient d ’abord de dire que leur père
étoit propriétaire en vertu d ’un acte , sans l’indiquer. Ce
pendant il falloit ne pas s’en tenir à des mots ; et les h éri
tiers M a ig n o l produisirent enfin un acte sous seing p r i v é ,
sous la date du 2 octobre 1 7 7 9 , enregistré seulement depuis
le p r o c è s , et ainsi conçu :
« J e soussign é, subroge M e. P ierre M a i g n o l , bailli
« de L a n d o g n e , ù l’effet de la vente du bail em phytéo« tique , appelé P r é - G r a n d , que M e. A n n c t C h efd eville
« m ’a consentie devant M a ig n o l, n o ta ire, le six juin m il
« sept cent so ixa n te-d ix-sep t, p o u r p a r lu i j o u ir dudit
« pré ainsi q u ’ il avisera bon ê tre , m oyennant la somme
« de deux cent quatre-vingts liv r e s , dont deux cents livres
a demeurent compensées avec pareille somme de d e u x
« centslivrescom prise en la cession que ledit sieur M a i g n o l
« m ’a faite d e v a n t A lle y r a t cejourd’h u i , d ’ un cont rat de
« rente
�(
a
cc
a
«
9)
rente sur les sieurs de L a r fe u il, et les quatre-vingts livres
restantes me seront déduites sur les arrérages réservés
par l’acte ci-dessus daté. Fait ce deux octobre m il sept
cent soixante-dix-neuf; et s 'g n é M aignoJ.
« Enregistré à R i o m , le 24 nivôse an 13 : reçu
fr.
5
c e n t ., etc. »
Les héritiers M a ig n o l com prirent bien qu ’ils ne p o u voient pas opposer cet acte à M aign o l fils , com m e ayant
cc 6 0
une date certaine antérieure au procès. E n conséquence,
pou r a vo ir plus de droits vis-à-vis M a ign o l p è r e , ils de
mandèrent sa mise en cause , qui fut ordonnée par juge
ment du 6 therm idor an 12.
XiC sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , ainsi assigné en
garantie par les adversaires, dit en défenses q u ’il reconnoissoit sa signature, mais que l’écrit q u ’on lui représentoit ne contenoit de sa part aucune convention synallagniatique qui l’eût p riv é de la prop riété de son pré.
L a cause en cet état portée à l’audience du tribunal
d ’arrondissement de R i o m , le 23-ventôse an 1 3 , les h éri
tiers M a ign o l s’efforcèrent de jeter de la défaveu r sur
G uillaum e M a ig n o l p è r e ; et le sieur L e g a y , l ’ un d ’e u x ,
qui avoit écrit com m e scribe la m inute de l’acte du 2 oc
tobre 1779 , alla jusqu’à dire, en désespoir de cause, q u ’il
avoit écrit aussi un double du sous-seing p riv é p o u r être
remis au sieur M a i g n o l , du Cheval-Blanc.
Q uelque défiance que dût inspirer au tribunal une mise
en fait de cette im p o rta n c e, venant d’une partie intéressée
à la fin d’ une seconde p la id o ir ie , elle ré u s s it, et le t r i
bunal ordonna la comparoissance-des parties en personne
ppur être questionnées sur ce fait.
B
�( IO )
A l ’audicncc du 6 floréal an 1 3 , tout le m onde com
parut ; le tribunal fit plusieurs questions h M aign ol père
et à M a ig n o l fils. L e sieur L egny lui-m em e fut admis à
rép o n dre sur le fait par lui allégué , et le tout fut consigné
dans le jugement en form e d’interrogatoires.
M . le p rocu reu r im périal fut pleinem ent d ’avis que
l ’acte sous seing p riv é 11’avoit pas eu p ou r objet une vente
qu ’il n’ énonçoit pas, et q u ’il étoit d ’ailleurs nul com m e
n ’étant pas double. Cependant le tribunal y vit une ven te,
et qui plus est, une vente va la b le; en con séq u en ce, il
déboula M a ig n o l iils de ses demandes (1).
(x)
J u g e m e n t
d o n t
e s t
a p p e l
.
Entre Guillaume Maignol fils.......... Antoine Guillaume.............
Marie-Gilberte M aignol, et sieur Pierre L e g a y , son m ari; A n
toine M aignol, Gilberte M a ig n o l, yeuve P a n e v e y re , et autres.. . .
et Guillaume Maignol père.........
Interrogatoire de G uillaum e M a ig n o l pùre.
A lui demandé si à l’époque de l’acte n otarié, du 2 octobre
1 7 7 9 , il a été fait le mémo jo u r, entre les mêmes parties , un
acte sous signature privée. — Répond qu’il y a eu en effet un acte
sous seing privé. — D cm . Par qui les doubles ont été écrits, et
s’il reconnoit le double sous seing privé qui lui est représcnlé
et rapporté par les parties de M c. Mayet. — Rép. que ledit acte
avoit été écrit de sa main. — D em . Qui est-ce qui a dicté les co n
ventions. — Rép. que c ’é lo itle sieur Pierre Maignol. — Dr/n. Si
ledit sieur Pierre Maignol avoit écrit quelque chose. — Rép. que
non , et qu’il est très-mémoralif qu ’il n’y a pas eu d’autre double
écrit du sous-seing privé, que celui qui lui est représenté
D cm . Quel a été le but de cet acte sous seing privé? — Rép.
�L e sieur M a ig n o l fils a interjeté appel de ce jugem en t,
et ses m o y en s, p ou r le faire accueillir , sont fondés sur
les principes les plus constans et sur la plus exacte justice.
que c ’étoit pour céder au sieur Pierre Maignol la jo u issa n ce du
pré dont est question , ju s q u ’il de nouveaux arrangemens entre
eu x. — D em . L e sieur Pierre Maignol ne devoit donc pas avoir
cette jouissance par l’acte notarié ? — Hép. que non ; qu’il n’y
a que l’acte sous seing privé qui la lui délaisse. — A lui demandé
s’il ne fut pas question entr’ eux de chercher à éviter les droits
de lods. — Rép. qu’il ne sait pas ce que le sieur Pierre Maignol
pensoit ; que pour lui ce m otif n’est entré pour rien dans cet
acte. — D em . S ’il a été question de la propriété du pré. — Rép.
que non , que ce n ’étoit pas son intention , et que ce ne pouvoit
être non plus celle du sieur Maignol. — D em . Pourquoi, n ’ayant
été question que de la jouissance, l’acte sous seing privé ne fait
aucune m ention de cette jouissance. — Rép. qu’il a écrit sous
la dictée de M. Maignol. — D em . Si son fils étoit présent à c e t
acte. — Rép. que non ; mais qu’en ayant eu connoissance peu
de temps après , il lui en avoit témoigné son mécontentement.
— D em . Q uel ¿Ige avoit alors votre fils? — Rép. environ seize
ans. — A lui demandé si le sieur Maignol, ayant intention de
se soustraire aux droits de lods , n avoit pas aussi l’intention de
devenir propriétaire au lieu de simple jouissant du pré. — A
répondu que M. Maignol a bien pu avoir cette intention ; mais
qu’il n’a pas été question de la propriété entre les parties. —
D em . Lorsque vous avez fait donation de tous vos biens à votre
fils , aviez-vous alors la jouissance du pré? — Rép. que M. M ai
gnol en jouissoit alors. — D em . Avez-vous donné le pré dont il
s’agit? — Rép. qu’il a donné en général tous les biens qu’il avoit.
_D em . Avez-vous eu connoissance de la vente du p r é , faite
le 29 ventôse an 6 par M. Maignol à Guillaume ? — Rép. que
cet. objet pouvant se re n d ro , il ne s’est pas mis en peine dü
B 2
�( 1* )
M O Y E N S .
L es premiers juges se sont occupés de l’acte sous seing
s’ informer de ce que le sieur Maignol feroit relativement à cette
affaire. — D em . S ’il a^su la vente. — Rep. q u ’il en a eu connoissance quelque temps après ; et ensuite a ajouté affirmati
vem ent qu'il l’avoit sue quatre à cinq mois après. — D em . S ’il
avoit d’autres éclaircissemens à donner. — Rép. qu’ayant appris
la vente du pré par P ierre M aign ol à Antoine G u i lla u m e , il a
voulu se procurer l’acte de vente de 1 7 7 7 , dont la minute étoit
chez ledit sieur Pierre Maignol ; il 11’avoit pu se le procurer
d abord. — D em . Si le sieur L c g a y , notaire, a écrit un autre
double de l’acte sous seing privé. — Rép. que non.
Interrogatoire du sieur M a ig n o l fils .
D em . S ’il avoit eu connoissance des affaires faites par son père
avec le sieur Pierre Maignol, en 1779. — Rép. qu’il n’en a eu co n
noissance que depuis qu’il a été à la tète de la maison ; qu’a
vant , son père lui avoit parlé des arrangemens faits avec le sieur
Pierre M a ig n o l, en lui disant qu’il espéroit rentrer dans le pré.
•— D em . Rappelez-vous ce que vous a dit M. votre père à l’égard
de l’acte notarié et du sous-seing privé. — Rép. qu’il lui a dit
avoir consulté MM . P a g è s , Andraud et Grenier sur l’acte sous
seing p rivé, et qu’on lui avoit dit qu’il étoit n u l , pour n ’avoir
pas été fait double. — D em . M. votre père avoit donc cet acte
alors? — Rép. qu’il ne l’avoit pas, mais qu’il se rappeloit de son
contenu ; que son père lui a toujours dit qu’il n ’ y avoit pas eu
de double de c e t acte. — M. Maignol père i n t e r p e l é s’il est
vrai q u ’ il a consulté les trois jurisconsultes s u s - n o m m é s . — Rép.
qu’o u i, qu’il n ’avoit pas l’a c te ; mais que sur c e qu il en avoit
rapporté, M. Andraud l u i ayoit assuré que la c t é étoit nul. —
�3
( i )
p riv é dont les adversaires font leur titre , com m e si cet
acte étoit souscrit par le demandeur lui-m ém e ; ils ont
D em . à M. Maignol fils, s’il a vu entre les mains de son père
un écrit sous seing privé. — Ré p. n’en avoir pas vu , et que
son père lui a toujours assuré qu’il n’avoit pas été fait de double.
— D em . Si lors de la donation à lui faite par son p ère, celuici lui avoit aussi donné le pré. — Rép. que son père disoit tou
jours qu’il avoit droit de se remettre en possession dudit pré,
mais qu’il lui donrioit pour prétexte q u ’il n’avoit pas le titre
qui établissoit la propriété de ce pré , la minute de ce titre étant
entre les mains de Pierre Maignol. — D em . Avez-vous eu connoissance que M. L e g a y , notaire, eût fait un des doubles du
sous-seing privé de 1779? — Rép. qu’il a ouï dire par son père
que le sieur L egay avoit été le scribe de l’acte notarié, et non
du sous seing privé.
Interrogatoire de M e. A n to in e Bouyon.
D em . A v e z -v o u s eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. n’avoir eui,connoissance et
n’avoir entendu parler de cet acte que depuis l’affaire dont
s’agit.
Interrogatoire de M e. P ierre L eg a y.
D em . Avez - vous eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. que se trouvant a Landogne,
M. Maignol , de L a n d o g n e , qui étoit dans son cabinet avec
M. M a ig n o l, du Cheval-Blanc , l’appela , et l’invita à écrire un
double sous seing privé , contenant subrogation de rente , et
n o t a m m e n t contenant aussi cession d'un pré de la part du sieur
M aignol, du Cheval-Blanc , .au profit du sieur Pierre M aignol,
de Landogne. — D em . Etes-vous mémoratif si l ’acte que vous
écrivîtes étoit sur papier. timbré ou sur papier libre?,«*- Ilép.
�( I 4 )
confondu les moyens de M a ig n o l fils avec ceux de M a 'g n o l
p è r e , sans donner de motifs de cette résolution princi-
qu’il ne se rappelle pas sur quel papier il écrivit. — D em . Q u e l
qu’un écrivoit il ave c v o u s ? — Rép. qu’il ne s’en rappelle pas
très - positivement ; que néanmoins, sans pouvoir bien le c e r
tifier , il croit que M. M a ig n o l, du Cheval-Blanc , écrivoit avec
l u i , et que M. M a ig n o l, de L a n d o g n e , leur dictoit. — D n n . Lors
que vous eûtes fini d’écrire , qui est ce qui signa? — Rép. qu’il
ne s’en rappelle pas. — D em . S’il n’écrivit qu’un acte , et s’il
n’en écrivit pas deux. — Ilép. qu’il est mémoratif d’en avoir
écrit un seulement. — D em . M. M aignol, de L an d o g n e , écri
vit il en même temps que vous? Rép. que non; que c ’est lui
qui dictoit.
Après ces différens interrogatoires, M. le procureur impérial
a porté la parole ; et après un résumé de l’affaire , il a été d’avis
de déclarer nul l’acte sous seing p r i v é , du 2 octobre 1779»
parce qu’il n’avoit pas £té fait double ; a conclu à ce qu ’Antoine Guillaume fut condamné à se désister du pré dont il s’a g i t ,
en faveur du sieur Guillaume Maignol père , ou quoi que ce soit
Guillaume M aignol, son fils et donataire, avec restitution de
jouissances, et aux dépens. Il a pareillement conclu à ce que
les parties de M ayet fussent tenues de garantir ledit Antoine
Guillaume des condamnations contre lui prononcées.
Les débats terminés , le tribunal a ordonné que les pièces
seroient mises sur le bu reau , pour en être délibéré en la chambre
du conseil.
1 L a cause de nouveau appelée en cette a u d ie n c e , il en est
résulté les questions suivantes à résoudre.
Q
uestions
.
Quels effets doivent avoir les actes des iG mai xjS'j , 6 juin
1)777, l’acte notarié, du ¿1 octobre *779 , et l’acte sous seing
�5
( i )
pnlc ; et cependant ce iféto it pas une m édiocre difficulté
que celle de savoir jusqu’à quel point un fils, donataire
p riv é , du même jour deux octobre 1779} intervenus dans la
famille des Maignol?
L ’acte sous seing privé, du 2 octobre 17 7 9 , n’énonçant pas
qu’il a été fait double , cette irrégularité doit-elle le faire dé
clarer n u l, lorsque cet acte a r e ç u , du consentement de celui
qui veut l’attaquer, une exécution complète pendant plus de
vingt cinq ans?
*:
’
E n ce q u i touche la demande en désistement, formée contre
le nommé Antoine Guillaume', du pré dont il s’a g it;
Attendu que cette demande est subordonnée à l'effet que
doivent avoir différens actes qui ont été consentis entre les
Maignol , relativement au pré en question.
En ce qui touche la validité de ces actes ;
Attendu qu’il est établi que par le contrat du 16 mai 17 5 5 ,
Guillaume Maignol père a acquis la propriété de la rente fon
cière de go francs , assise sur le pré dont il s’a git;
Attendu que par contrat du 6 juin 1777, le même Guillaume
Maignol père étant devenu propriétaire de ce pré , a réuni par con
séquent dans sa main la rente , et le pré qui étoit asservi à cette
rente; que dès-lors il y a eu en sa personne confusion des qua
lités de créancier et de débiteur, ce q u i a opéré nécessairement
l ’extinction de ladite rente ;
Attendu que le contrat du 2 octobre 1779? consenti par G u il
laume Maignol père à Pierre M a ig n o l, so n p arè n t, n’a pu avoir
réellement pour objet la cession de la rente qui n’existoit p l u s ,
et 11e peut se référer qu’à la cession de la propriété du pré;>
Attendu que l ’acte sous seing privé du même jour 2 octobre
jy y g , intervenu entre les mêmes Guillaume Maignol p è r e 1,
et Pierre Maignol, a subrogé ledit Pierre Maignol à la cession
consentie à Guillaume Maignol p a r l e contiat du 6 'juin 17^7;
�(i 6)
par acte authentique , p o u v o it être tenu de l ’effet d’ un
acte sous seing p r i v é , n’ayant de date certaine qu’après sa
donation.
que cette subrogation générale des effets de l’acte de 1777 ,
ne peut s’entendre que de la propriété du pré dont il s’a g i t ,
puisque cet acte de 1777 étoit uniquement translatif de la pro
priété du m êm e pré ;
Attendu que quoique cet acte sous seing privé , du 2 octobre
1779, ne fasse aucune mention qu’il a été fait double entre les
p a r t ie s , G u illa u m e M aignol p è r e , ni G u illa u m e Maignol fils,
ne p euvent, dans,les circonstances où se trouvent les parties,
e xciper de cette omission , parce qu’il résulte des réponses
faites par lesdits Maignol pére et fils, lors de leur comparution
h l ’audience, qu’ils ont connu la possession publique de Pierre
Maignol, et après lu i, du mommé Antoine G u illa u m e, tiers dé
tenteur ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir de réclam er contre
cette possession ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir non plus
de réclamer contre l’acte du 2 octobre 1779, quoique cet acte
fût présent à leu r esprit , et du fait personnel de Guillaume
JMaignol père ; .
Attendu que cette exécution donnée à cet acte sous seing
p rivé, du 2 octobre 1779» forme une fin de non-recevoir contre
G uillaum e M a ig n o l, d ’après l’article iSaü du Code civil ;
Par ces m o tifs ,
L a tr ib u n a l, p a r ju g em en t en prem ier resso rt, ayant a u
cunem ent égard à ce qui résulte des réponses faites par les
dits Maignol père et fils, lors d e leur comparution à l'audience
dudit jour 6 du présent mois de floréal, déclare G u i l l a u m e et
autre Guillnume Maignol , père et fils , non r e c e v a b l e s dans
l e u r demande en désistement du pré dont il s ’a g i t . Sur le sur
p l u s d e toutes les demandes en recours et contre recours, e t
iiutres demandes, met les parties hors de cause ; compense les
Une
�C *7 )
U ne donation contractuelle ne peut subir aucune dim i
nution ; car c’est sous la foi de cette promesse que deux
familles se sont unies. Q uand la donation contient tous les
biens p résen s, elle doit se composer de toutes les actions
qui résultent des titres remis par le donateur au dona
taire; caries actions sont aussi des meubles ou des im m eu
bles, suivant l ’objet qu ’elles tendent à recouvrer.
Gomment donc admettre que les droits assurés à des
futurs et ù leurs descendans, par leur contrat de m ariage,
puissent être diminués sous aucun prétexte par des sousseing privés , d’ une date à la v é rité a n té rie u re , mais non
constatée par l’enregistrem ent? Il en résulteroit souvent
que deux fam illes, après a vo ir com pté sur une fortune
conséquente et prop o rtio n n ée, sur le vu de plusieurs titres,
n’auroient cependant fait q u ’un calcul in u tile , et que l’ un
des ép o ux se tro u ve ro it, après ses noces, n’avo ir que la
moitié de la fo rtu n e 'q u ’il avoit établie et justifiée en se
mariant.
C ’est p our p réven ir de tels mécomptes que les lois pros
crivent les contre-lettres aux contrats de m a ria g e, et q u e ,
dépens entre ledit Antoine G u illa u m e , ledit Antoine Maignol
et consorts ; et condamne lesdits Guillaume et autre Guillaume
M a ig n o l, père et fils , en tous les dépens faits tant à l’égard
dudit Antoine Maignol et consorts és-dits noms , qu’en c e u x
qui ont été compensés entre lesdits Antoine G u illa u m e , A n
toine Maignol et consorts ; et aux c o û t, expédition et significa
tion du présent jugement.
Fait et prononcé publiquem ent, à l’audience du tribunal civil
de première instance , séant à Iliom , par M M . P a r a d e s , p rési
dent ; D a n i e l , A s t i e h et M a n d o s s e , ju g es , le 18 floréal an i 3.
C
�( 18 )
dans les donations de biens présens et à v e n i r , il est permis
aux ép o ux de s’en tenir aux biens présens, p ou r que leur
contrat ne souffre aucune dim inution dans la fortune alors
p rom ise, et qu ’ils demeurent entièrement hors de la dé
pendance du donateur.
Certes le sieur M a ig n o l fils n’entend en cette cause élever
aucune sorte de soupçon contre la sincérité de l’écrit de
son p è r e ; mais il n ’est ici que le c h e f de sa fam ille, et
il plaide p o u r le maintien d’ une donation qui a saisi aussi
ses descendans. Son contrat de m ariage a été com pté p our
r ie n , et c’étoit l ’acte qui devoit l ’em porter sur toutes les
autres considérations. D e vagues recherches sur l ’ inten
tion des parties, et sur la connoissance que M aign o l fils
avoit pu avo ir à seize ans de l ’existence d’ un sous-seing
p r i v é , ne pou vo ien t conduire les premiers juges que des
hypothèses à l’abstraction , et de l ’abstraction à l’erreur.
A quoi p ou voient tendre en effet les questions faites au
sieur M a ig n o l fils, s’il avoit eu connoissance de l’écrit sous
seing p riv é en 1779 , ù un âge où on n’a que faire de s’oc
cuper des petits détails d’une fortune dont on ne jouit pas ?
L e sieur M a ign o l père avoit dit a son fils qu il avoit signe
un acte nul et non d o u b le , p o u r ceder au sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , les jo u issa n ce s d’un pré. U ne consultation
d’avocats en porta le mêm e jugem ent; et dès-lors on pense
bien que cette décision qui sans doute tranquillisa le p è re ,
11’ occupa bientôt plus le fils. Il a fallu ensuite l’im por
tance et les débats d’un procès p ou r lui rappeler un fait
presque effacé de son souvenir.
Toutes les précautions q u ’ont prises les prem iers juges
�C r9 )
p ou r chercher la pensée des sienrs M a ig n o l père et fils dans
leurs réponses , et les mettre en défaut par des questions
inattendues, ne p ouvoient donc changer l ’état de la cause.
Il y avoit un point de vue certa in , qui conduisoit à une
simple question de d ro it, et dispensoit de se perdre dans
le vague des conjectures.
Po u v o it-o n opposer à M üignol fils, donataire contrac
tuel en l ’an 7, demandeur en désistement en l’an 11, un acte
sous seing p r iv é , enregistré en l ’an 1 3 ? C e sous-seing p riv é
étoit-il une vente et une vente valable du p ré conten
tieu x? La jouissance dudit p r é , q u ’avoit eue le sieur M a i
g n o l , de L a n d o g u e , supposoit - elle nécessairement une
vente , com m e l ’ont décidé les premiers juges ?
Q uand m êm e il auroit été possible de dim inuer par
une vente sous seing p riv é l ’e0et d ’une donation c o n
tractuelle , au moins au roit-il fallu que cette vente fût
p a rfa ite , et que l’acte duquel on ve u t la faire résulter en
eût tous les caractères et toutes les formes.
A u contraire, on ne vo it dans le sous-seing p r iv é , du 2
octobre 1 7 7 9 , et en le supposant a cette d a te , q u ’ un
acte obscur et é q u iv o q u e , dont l’intention n’a pas m êm e
pu être bien exp liqu ée par ceux qui s’en font un titre.
Si l’on se reporte aux circonstances qui ont p récédé et
accompagné cet a c t e , on est bientôt convaincu que le
sieur M aign o l, du Cheval-Blanc, n’entendoit céder son p ré
L en o b le , que dans l’expectative du domaine Gastier ; et
q u e , jusqu’à ce qu’ il pût être propriétaire lui-m êm e ,
il n’entendoit pas vendre.
Sans cela , com m ent exp liquer cet amalgame d’actes
C 2
�( 2° )
in u tile s, et en quelque sol’te inintelligibles et incompa
tibles ?
M a ig n o l père étoit propriéta ire du pré L e n o b l e , di
sent les adversaires , puisqu’il avoit acquis la rente en
l y S ô , et l ’effet du bail em phytéotique en 1 7 7 7 , par acte
passé devant M a ig n o l, de L a n d o g n e , lui-même.
Cela est certain ; et c’est précisément parce que M aignol,
de L a n d o g n e , étoit le rédacteur de l’acte de 177 7 , q u ’il
ne p ou voit pas ignorer que le sieur M a i g n o l , du ChevalBlanc , propriétaire du domaine utile et direct du pré
I,enoble , n ’avoit qu ’ un mot à dire p our le vendre , sans
u ser d’autant de détours e t de circonlocutions.
Si son intention eût été de v e n d r e V pourcfuoi donc
a uroit-il'ven du une rente de 1755 , qui n’existoit p lu s ,
et q u ’ il créoit sur lui-m êm e en d’autres te rm e s, en don-^
nant une plus ancienne hyp oth èqu e ?
P o u rq u o i auroit-il fait deu x actes au lieu d’ un seul ?
p o u rq u o i a u r o it-il pris des précautions p o u r valider un
acte absolument inutile, et n’en auroit-il pris aucune p ou r
la rédaction du seul acte qui eût un sens et un résultat ?
A qui persuadera-t-on que le sieur M a ig n o l, de L a n
dogne , bailli de sa justice, et notaire intelligent, se fût
contenté de tels actes, s’ il eût voulu devenir réellement
et solidement p rop riétaire? ou p lutôt, qui ne sera pas p er
suadé , à la lecture de ces deux actes du mêm e jour ,
que le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , a vo ulu enlacer le
sieur M a ig n o l, du C h e va l-B la n c, par des clauses e nt or
tillées et peu intelligibles , qui présentassent au besoin
un sens favorable à l’intention de ce d e rn ie r, lequel dût
en effet s'y laisser prendre.
�C ar ne percions pas de v u e que le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e, a d icté ( on l’avoue ) l’acte sous seing p riv é ,
du 2 octobre 1779. ^ étoit donc bien le maître de d icter
une vente, si telle étoit l ’intention de M aignol père. D èslors s’il n ’en a pas dicté une claire et non é q u iv o q u e , il
est clair que l ’acte doit être interprété contra eum in
cu ju s potes ta te era t legern apertiùs dicere.
O r , le sieur M a ig n o l , de L a n d o g n e, s’est fait subroger
à l’effet d’une vente de bail em phytéotique d’ un p r é , p o u r
p a r lu i jo u ir d udit p ré ainsi qu ’ il avisera bon ê t r e ,
moyennant 280 francs ; et cela ne ressemble nullem ent
à la vente franche et simple dudit pré.
11 est bien plus clair q u ’il ne s’agissoit que de jouis
sances, et l’acte notarié le p r o u v e ; car la rente de 90 fr.
créée ou renouvelée par M a ig n o l, du C h eval - Blanc ,
étoit payable par les jo u is s a n s du pré. O r , peut-on à
présent se m éprendre à l’intention des parties ? L ’acte
notarié étoit un prem ier pas vers une convention plus
importante. L es parties .prévoyoient que M a ig n o l , du
C h e v a l-B la n c , auroit le domaine Gasticr , et alors tout
auroit été consommé. Jusque-là il devoit une rente ; et
cependant il stipuloil q u ’elle seroit payée par ceux qui
jouiroient du pré.
S’il eût jo u i, il devoit payer lu i-m ê m e ; mais le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , devoit j o u i r , et alors il se payoit
par ses mains, d’après la clause, comme jo u is s a n t ; il lui
falloit donc un nouveau titre p o u r jo u ir du p ré : voilà
donc le m otif exact et visible du sous-seing p riv é.
Cette interprétation si facile n’a point échappé aux
�héritiers M a ig n o l, à qui il auroit peut-être été nécessaire
de demander aussi à quoi avoit pu être utile de faire deux
actes p ou r un. Il est vrai qu ’ ils a voient p ré v u l ’objec
tio n , et y avoient répondu d’avan ce; c’é to it, dirent-ils
d 'a b o r d , p o u r éviter les droits d’enregistrement.
M ais , d ’après le tarit'de 1722 , qui étoit suivi en 1 7 7 7 ,
une vente d’ immeubles payoit un droit de 1 fr. p our
les premiers roo f r . , et 10 sous p ou r choque 100 francs
suivans. A in s i , c’étoit 36 sous p ou r 280 francs ; et à
supposer , com m e l’entendent les adversaires , que le p rix
eût été de 2000 fran cs, c’eût été 10 liv. 10 sous; tandis
que Pacte notarié , du 2 octobre 1 7 7 9 , a Pay é un droit
de contrôle de 14 liv. 12 sous; ce qui encore ne dispensoit pas du contrôle du sous-seing p r iv é , quand il y au
roit lieu de le produire.
A u ssi n’est-ce plus là la cause q u ’ont donnée depuis
les adversaires; c’é to it, ont-ils d i t , p ou r éviter le paye
ment des droits de lods.
Sin gulière raison p o u r le bailli de la justice, qui ne
pou voit p is être traité bien rigoureusement en iiscaliLc.
A u reste, le droit le pins ordinaire étoit de 2 sous 6 de
niers p our livre. Ce q u ’il appelle son contrat de vente
portoit un p rix de 280 fr. ; c’étoit donc 35 fr.
q u ’ il
s’ agissoit d’éviter.
Dira-t-on encore que cette somme n’étoit pas le p r ix
réel ? Mais , si le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , 11e faisoit
un sous-seing p riv é que p o u r ne pas payer des lods , ce
n’étoit donc pas la crainte de ce droit qui lui faisoit dis
simuler le p rix : convenons plutôt que si au lieu du p rix
imaginaire q u ’ il a lait écrire dans ce sous-seing p riv é , il
�( *3 )
avoit inséi'é un p rix ap pro xim atif de la valeur de l ’im
m eu b le, il auroit excité la défiance du sieur M a ig n o l, du
Cheval-B lanc ; et c’est ce q u ’il vo u lo it éviter. R e m a r
quons encore q u ’avec cette version, les adversaires sont
forcés de donner p our prétexte de l’illégalité d’ un acte ,
une fraude que leur père vouloit co m m ettre , et dont
cependant ils veulent s’adjuger le profit.
Com m ent donc v o ir une vente de prop riété dans ce
sous-seing p r i v é ? Com m ent concevoir q u ’il ait une exis
tence com patible avec l’acte notarié du mêm e jo u r ? A u
contraire , en ne vo ya n t dans le sous-seing p riv é qu ’un
p o u v o ir de jo u ir du p ré p ou r la rente de 90 fra n cs, et le
lé g e r supplém ent convenu , on entend alors parfaitement
l ’existence simultanée des deux actes ; et 011 conçoit com
m ent le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , créancier d ’ une
rente payable par les jo u is s a n s du pré , eut besoin d ’un
second litre qui le rendît jo u is s a n t lu i-m ê m e ?
D e cette m a n ière, il n’ étoit plus nécessaire que l ’acte
sous seing p riv é fut double ; car si le sieur M a ig n o l, du
C heval-B lan c , avoit v o u lu demander les jouissances du
p r é , le sieur M a ig n o l, de L an dogne, lui auroit ex h ib é son
é c r it, portant qu ’il avoit eu le droit d’en jouir. Si h son
to u r ce dernier avoit demandé les arrérages de rente ,
l ’autre auroit répondu q u e , comme jo u is s a n t du p r é , il
se les de voit à lui-m êm e.
L a cause est donc claire dans ce sens; mais si on veut
v o ir une vente dans ce sous-seing p r i v é , alors non-seu
lement tout est in e xp lica b le, com m e on vien t de l’o b
s e r v e r, mais encore les_principes s’opposent absolument
à ce que cet acte puisse contenir une v en te va la b le.
�C 24 )
L es actes translatifs de p rop riété sont des actes trop im-
portans à la société, p ou r q u ’on puisse les dispenser avec
trop de légèreté de la rigueur des formes légales. Ce que
la loi a v o u lu , a dû être la règle com m une ; et si quelques
exceptions tolèrent par fois l’arbitraire, dont il faut tou
jours se tenir en défiance, ce ne peut être que p o u r venir
au secours de l ’ignorance qui a traité avec bonne fo i, et
qui ne doit pas en demeurer victime.
M ais un notaire éclairé com m e le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , pou vo it-il ig n ç rer que tous les actes synallagmatiques doivent porter m in u te, s’ ils sont notariés, et
doivent être faits do u b les, s’ ils sont faits sous seing p r iv é ?
L a raison le d i r o i t , si les premiers élémens du di’oit ne
l ’enseignoient com m e un principe.
C ’est mêm e la plus usuelle des maximes ; car tous les
jours 011 fait de pareils actes, et les moins expérim entés
n ’oublient pas de v o u lo ir en retenir une copie. Cela arrive
p o u r les actes les plus simples ; et com m ent un notaire
qui eût dicté une vente l’auroit-il oublié p o u r lui-m êm e ?
L a nécessité do rédiger en double écrit les actes synallngma tiques d érive évidem m ent de la nature mêm e de
ces actes ; car si p o u r la validité d ’ un acte de ce genre
il est requis que chacune des parties soit obligée envers
l’autre; si p ou r la validité d ’ une vente il est nécessaire que
l’un consente à ve n d re, et que l’autre consente à acheter,
il faut dès-lors, par une conséquence fo rcé e, que chacun
puisse avoir dans ses mains la p reu ve que l’autre a co n
s e n t i; sans cela , il seroit au p o u v o ir de l’une des parties
de détruire l’acte, ou de contester son existence.
T o u s les auteurs enseignent ces p rincipes, et prou ven t
par
�( 25 3 ,
par une foule d’arrêts, qu ’ils ont été consacrés p a rla juris
prudence la plus constante.
U n arrêt du 6 août 1740 déclara nul un acte par lequel
l ’archevêque de Reim s s’ étoit soumis à acheter l’ hôtel de
Conti m oyennant 450000 fr. L ’acte n ’étoit pas fait double ;
mais les héritiers du prince de Conti opposoient que l’acte
n’avoit pas dû être d o u b le , parce q u ’il n ’étoit obligatoire
que pour l’archevêque qui l ’avoit signé. L a m êm e chose
fut ju gée par arrêt du 29 n o vem bre 1781 , entre le sieur
F o rg et et le duc de G ram m o n t : il y avoit m êm e eu m en
tion de l’acte et réparations commencées ; néanmoins le
sieur F o rg et obtint que les lie u x seroient remis en leur
prem ier é ta t, ou des dom m ages-inlérêts en cas qu'ils ne
pussent se l’établir.
U n autre arrêt du 23 juin 1 7 67 a jugé la rigueur du
principe dans des termes plus lorts encore. D e u x co h é ri
tiers a voient fait un partage sous seing p r iv é , et l’ un d ’eu x
devoit payer p o u r retour de lot à l’autre 240 fr. L ’acte
fut déposé chez le curé du lie u ; chacun jouit de son l o t ;
et dans un contrat de mariage postérieur, un des copartageans se constitua, en présence des autres, le lot à lui échu.
L ’un des coh éritiers, après plusieurs ann ées, demanda
un p a rta g e , et soutint que l’acte q u ’on lui présentoit éloit
nul p ou r n’a vo ir pas été fait double. O n lui opposoit le
dépôt en main tierce , sa prop re exécution pendant six
a n s, et des coupes d ’arbres dans son l o t , sa présence m êm e
au contrat de mariage ci-dessus, et l’adhésion de tous les
autres héritiers,
Ces moyens avoient réussi en prem ière instance en 1764rnais sur l’appel à A m ien s , la force des principes p réD
�( *6 )
valut. U n e sentence de 1766 prononça la nullité de l ’acte,
et ordonna un nouveau partage. Sur appel au parle
m ent, cette sentence fut c o n firm é e, après une plaidoirie
très-d éb a ttu e, dit l’arrêtiste, et l’appel fut mis au néant.
Enfin 011 conuolt l ’arrêt cité par L é p in e de G rainville.
U ne vente avoit été faite en deux doubles; mais il n ’étoit
pas fait mention dans les deux écrits q u ’ils eussent été faits
doubles : ils étoient représentés tous d e u x , et cependant
l’acte fut déclaré nul.
C e u x qui ne veulen t v o ir dans les procès que des cir
constances to u jo u r s variables, et ces apparences fugitives
de bon ou mauvais d r o it, qui s'évanouiroient souvent le
le n d e m a in , si 011 les exam inoit sous un autre point de
v u e , c e u x -là , d iso n s-n o u s , p ou rroien t s’étonner d ’ une
telle jurisprudence, sans songer que si le sum rnum ju s a
par fois ses inconvéniens, l’arbitraire en a m ille fois davan
tage. Ils peu ven t lire dans L é p in e de G ra in ville les motifs
qui engagèrent le parlement à se décider p o u r la nullité
dans l’espèce ci-dessus, et peut-être cesseront-ils de penser
que le juge doit rester le maître de son o p in io n ,q u a n d il
en vo it le d a n g e r , et quand il peut se gu ider par les
principes.
L ’article 1325 du Code civil les rappelle , et devoit
em pêcher les premiers juges de faire autant d'efforts p ou r
rechercher s’ il avoit été fait un double du sous-seing p rivé
du 2 octobre 1779? (l lli ? par son style et son c o n t e x t e ,
p ro u vo it cependant assez par lui-m êm e q u ’il n’avoit pas
dû être fait double.
« L es actes sous seing p r i v é , dit le C o d e ,q u i contien« lient des conventions syuallagmatiques, ne son t valables
�C 27 )
« q u ’autant q u ’ils ont été faits en autant d’originaux qu’il
« y a de parties ayant un intérêt distinct.
« C h a q u e originalàa\\. contenir la m en tion du nom bre
a des originaux qui en ont été faits.
« Néanm oins le défaut de m ention que les o rig in au x
« ont été faits doubles, ne peut être opposé par celui qui
« a exécuté de sa part la convention portée en l ’acte. »
A i n s i , quand il eut été vi*ai que le sieur I-egay eû t
écrit un double sous la dictée du sieur M a i g n o l , de L a n
dogne -, quand il seroit aisé de con cevoir que celui-ci eut
de sa part signé un écrit par lequel il auvoit dit ; J e s o u s
s ig n é
, subroge M e. P ie r r e M a ig n o l ( c’est-à-dire, lui-
même ) , à F e ffe t, ctc. ; quand celte rédaction insensée
sei’oit vraisem blable, un tel acte n’en vaudroit pas m ie u x ,
parce que ch a q u e orig in a l ne contiendroit pas la m en
tion q u ’ il a été fait double.
M a is , s’écrient les héritiers M a ig n o l , au moins êtesvousdans l’exception du Gode que vous citez vous-m êm e;
car vous avez la issé jo u ir le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e :
donc vous avez e x é c u té la vente.
O n pou rro it d ’abord répondre que le Code civil peut
être in v o q u é p ou r le passé , quand il est conform e aux
anciens p rin c ip e s , si Jiempè déclarét jus avtiquum nova
constitutio , mais q u ’il ne faut pns le suivre lorsqu’il s’en
écarte ; que d ’après cela il y avoit lieu de le citer p o u r
le déiaut de mention du m ot fa it double , parce que les
arrêts y étoient conformes ; mais que les arrêts n’atlachoient. aucune im portance à l ’exécution d’ un acte nu]
dans son p rin cip e , com m e on le vo it notamment par l’arrêt
D
21
�(
2
8
)
de 176 7 ; car ce seroit donner un effet rétroactif à la l o i ,
ce qui n’est pas dans l ’intention du Code.
M ais passons encore légèrem ent sur ce moyen, et voyons
s’il y a réellem ent une e xécu tio n de l’acte sous seing p riv é
dans le sens de l’art. 1 3 2 5 , c’est-à-dire, si le sieur M a ig n o l,
du C heval-B lan c , en la issa n t jo u ir le sieur M a ig n o l, de
L a n d o g n e , a nécessairement entendu ex é cu te r un acte
de vente.
Sans doute , si j’achète un p ré et que je paye le p r ix
c o n v e n u , j’exécute la convention ; de m ê m e , si je vends
un p ré dont j’étois en possession h ier , et qu ’après en
avo ir touché le p rix je le liv re dem ain, sans autre cause
de tradition , et sans é q u i v o q u e , j’exécute encore le
m arché. V o ilà bien ce q u ’a vo u lu dire le Code : pas de
difficulté sur ce point.
M a i s , si l’acheteur s’empare de l’objet vendu , ou s’ il
a un autre titre de possession que la v e n t e , alors l’équ i
v o q u e du m ode de possession p roduit l ’éq u iv o q u e du titre,
et le vice du titre renaît dès l’instant q u ’il n’est plus pos
sible d’être convaincu que l'occupation de la chose vendue
soit l’effet n écessa ire de l’acte de v e n te , com m e la preuve
certaine de son exécution.
O r , revenons à la position des parties en 1779. Sans
d o u t e , s’ il n’existoit d’autre acte que le sous-seing p r i v é ,
et si le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , n’étoit en posses
sion qu'en vertu de cet a c t e , il seroit difficile de p ré
tendre q u ’il n’a eu aucune exécution.
M a is , i° . q u ’on supprime tout à fa ille sous-seing p r iv é ,
et on concevra encore d ’après l’acte notarié du 2 octobre
1779 ,q u e le sieur M a ig n o l; de L a n d o g n e , a eu qualité
p o u r jouir.
�( z9 )
E n e ffe t , com m e le disent les adversaires , il fit créer
en sa faveur une rente qui n ’existoit plus. L e sieur M a ig n o l , du Cheval-Blanc , ne stipuloit pas q u ’il la payeroit,
mais il disoit qu’elle seroit payée p a r les jo u is s a n s du
pré. D o n c le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , ch erchoit un
titre de jouissance, p o u r em pêcher de transporter cette
jouissance à d’autres : donc s’il a joui ensuite, c’est d’après
sa prop re convention p o u r le pa yem en t de sa rente. Sa
jouissance n’est donc pas la p reu ve certaine de V exécu tion
d’ un contrat de vente.
2°. Cette prétendue vente est encore si obscure, que ce
n’est en vérité pas la peine de vio le r une loi p o u r elle.
U n notaire qui veut acheter p o u r être p r o p r ié ta ire , ne
se fait pas subroger à un bail em phytéotique p o u r jo u ir .
U n notaire qui dicte une vente p o u r lui-m êm e, la dicte
com m e celles q u ’il rédige p o u r les a u tre s , et ne fait pas
écrire un b arbo u illage, ou astucieux, ou vide de sens.
M ais enfin les adversaires qui ne veulent v o ir que l ’e x
ception du Code c i v i l , parce qu ’elle leur est fav o ra b le,
et que rien n’a plus de latitude au gré des plaideurs que
les exceptions des lo is ; les adversaires, disons-nous, ne
rem arquent pas qu’ il faut cependant entendre la loi dans
un sens raisonnable ; car c’est bien là au moins l ’inten
tion du législateur.
L a nullité ne peut pas êlre opposée par celui q u i u
e x é c u té de sa p a rt la convention : voilà l’exception du
Code.
P o u r appliquer cette e xce p tio n , fa u t -il une exécution
a c t iv e ? faut-il une exécution en tière ?
J e vends aujourd’hui un im m euble par acte non don-
�( 33 )
Lie , et je le livre. Si au terme on ne me paye p a s , je
ne puis me servir de ma vente , cnr je n’en ai pas. J'aurai
bien une action en désistement qui forcera l ’acheteur à
s’exp liq u e r : mais si la vente lui est onéreuse , il se
désistera ; s’ il la trouve avantageuse, il la produira ; et
je ne pourrai l’em pêcher d’être maître de sa c a u s e , parce
que j’aurai e x é c u té de m a p a ît la convention. A in s i
une convention syn a lla g m a tiq u e m'aura obligé s e u l:
voilà l’abus des interprétations forcées d’ une loi qui n’a
rien voulu de pareil.
L es di fie rentes parties de l’article 1 3 2 6 , doivent s’e x
p liq u er l ’une par l’autre , de manière ù être entendues
e n se m b le , et sans s’entredétruire. L e Code a vo ulu que
V exécu tion fût un m oyen contre le d éfa u t de m en tion
que l ’acte ait été fait double : mais si chacune des parties
est obligée envers l ’a u tr e , il est bien toujours néces
saire que celle qui a encore un in térêt distinct à l'e x é
cu tio n de l’a c te , ait pardevers elle le double qui force
l ’autre à T exécuter de sa part.
Sans d o u te , quand le Code civil ôte toute action à
celui qui a e x é c u té de sa p a r t , c’est lorsque par cette
pleine exécution il n ’a plus un intérêt à l’exécution qui
reste à faire de la part des autres : voilà sans contredit
l ’ unique sens que la loi puisse présenter, en l’expliquant
par scs propres expressions.
A c c i a les adversaires répondent que le sieur M a i g n o l ,
du C h e va l- B la n c , étoit payé , et 11’avoit plus d ’intérêt à
a voir un double.
D ’abord c’esL une erreur de fait. L e sous-seing privtî
�C 31 )
p ro u ve lu i-m êm e le contraire; car si le p r ix supposé à la
vente est de 280 francs , il en resterait dû plus du tiers, dès
que 80 francs dem euraient à im puter sur des arrérages de
rente , dont le prétendu vendeur ne p o u vo it pas de
m ander la compensation sans un double.
20. Les adversaires supposent que le vrai p r ix de la
cession étoit les 2000 francs cédés par la rente des L arfeuil ; mais le sieur A îaignol père , qui a remis les titres
de cette rente à son donataire , lui a attesté n’en a vo ir
jamais touché un denier ; celui-ci n’eu a rien reçu non
plus : il falloit donc un double p o u r réclam er en rem
placem ent un p r ix de v e n t e , ou p our en demander la
résolution.
3 0. Une circonstance non moins sensible p ro u v e encore
la nécessité d’avo ir un double de vente, si c’en étoit une.
L e sieur M a i g n o l , de L a n d o g n c , p ou vo it être é v i n c é , ou
perdre son pré par force m ajeure; alors en supprimant
son double il retrou voit l’acte notarié du m êm e jo u r , et
demandoit au sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , le paye
ment d’ une rente de 90 francs.
V o ilà quelle étoit la position du prétendu v e n d eu r;
et voilà précisément les motifs de cette jurisprudence sé
v è re q u i , en sacrifiant quelques intérêts particuliers , faisoit la leçon aux citoyens, et les préservoit de l’abus de
ces actes p rivés q u i , à l’économ ie p r è s , sont le plus sou
vent une occasion de surprises et une source de procès.
L a cou r doit juger ici la valeur d’un acte équ ivoqu e et
suspect. Si donc la rigueur de la loi fut jamais ap pli
cable , c’est sans doute dans une circonstance où il s’agit
�( 32 )
d’une prétendue v e n te , q u i , qu oique dictée par un no
taire, ne contient aucune des clauses d ’usage, aucune des
formes extrinsèques les plus c o m m u n e s, et à l’égard de
laquelle on ne donne aucune de ces excuses que la bonne
foi fait adm ettre, ou que l’ ignorance fait tolérer.
M e. D E L A P C H I E R ,
avocat.
M e. V E R N I È R E , avoué,
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Juin 1806.
�
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Factums Marie
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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A name given to the resource
[Factum. Maignol, Guillaume. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernières
Subject
The topic of the resource
rentes
ventes
bail emphytéotique
interrogatoires
donations contractuelles
conflit de lois
donations
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Guillaume Maignol fils, habitant à Bonlieu, canton d'Évaux, appelant ; contre Antoine Guillaume, maréchal à Pontaumur, intimé ; et contre Gilberte Maignol, Pierre Legay, son mari, Antoine Maignol, Gilberte Maignol, veuve Paneveyre, et autres héritiers de Pierre Maignol, de Landogne, intimés ; en présence de Guillaume Maignol père, habitant au lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, appelé, en assistance de cause.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0328
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G1605
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Condat (15054)
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Bail emphytéotique
conflit de lois
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interrogatoires
rentes
ventes
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PRECIS
COUR
D ’A PPEL
P O U R
DE RIOM.
L a dame D E M A R I O L , et les sieurs D E
V É N Y et D E R I B E Y R E , enfans et
héritiers de la dame D E V
il l e m o n t
appelans;
,
C O N T R E
L e sieur R I X A I N , intimé.
L e sieur R ixain , fermier de la dame de V illem ont, lui avoit
fait souscrire, en l’an 2 , une obligation de 26000 fr. Légitime
ou n o n , cet engagement auroit été respecté par les appelan s ,
si le sieur Rixain se fût borné à suivre le sort de son propre
titre : mais l’obligation étant en assignats, le sieur Rixain a pré
tendu qu’elle avoit une cause antérieure à leur émission ; e t ,
pour le prouver, il a fallu qu'il reproduisit tous ses payemens
A
�r
2
)
et objets de répétition. Ce nouveau compte établit clairement
aujourd’hui que le sieur Rixain n’a payé que quatre années de
ferme au lieu de six ; et les héritiers de Villemont réclament les
deux années qu’il-doit. Voilà ce qui semble au sieur Rixain ex
trêmement injuste. Il ne prouve pas cependant q u ’il ait payé; m ais,
il se retranche sur l’acte de l ’an 2 , qui n’expliquoit rien , et q u i,
expliqué et dénaturé par son fait, n’est plus un titre pour lui-méme.
FA IT S .
Le 26 mai 1787, la dame de Villem ont donna à ferme an
sieur R ixain, pour n euf ans à compter du i cr. mars 1788,
les trois terres de V illem ont, T eix et M ontrodès, moyennant
17600 francs.
L e même jour il fut d it, par une contre-lettre , que la dame
de Villem ont résilieroit le bail de la terre de Villemont si ses
enfans lui payoient ses reprises, et que l’indemnité seroit de
1200 fr. par chaque année à courir.
Le i avril 1789, le bail fut résilié pour la terre de T e ix , et
il fut dit que Villem ont resteroit affermé 8000 fr. et Montrodès
pour 4000 francs.
Le 26 février 1793»
dame de Villem ont, remboursée par
ses enfans, signifia un congé au sieur Rixain , et lui offrit
4800 fr. pour l’indemnité de quatre ans.
Les parties com prom irent; et par jugement du 7 juin
les arbitres , jugeant le congé venu à tard, déclarèrent le bail
résilié au i cr. mars 1794 5 et condamnèrent la dame de V ille
mont à payer
oo fr. pour trois années de non-jouissance ; ils
ordonnèrent une plus ample contestation sur des demandes contre
le sieur R ixain , pour dim es, dégradations, e t c . , dues à la dame
de Mariol et au sieur de Teix.
Ce jugement fut signifié au sieur Rixain , avec commande
ment de payer à la dame de Mariol et au sieu r de Ih e ix .
Le a ventôse an 2 , le sieur Rixain iit à la dame veuve de
5
36
3
�C 3 ).
somme
5
36oo
et
Villem ont sommation de payer la
¡de
fr. ,
ré
clama de plus 28632 liv. 2 sous den. par lui surpayés, dit-il,
après avoir payé les six années de sa ferme ; to ta l, 32262 liv.
2 sous
deniers.
Le 4 messidor an 2, il fut fait arrêté de compte dans lequel
on fait dire à la .dame de Villemont qu’après avoir examiné le
dit compte , et discuté tant à raison du dédommagement par
elle dù des objets supprimés par les décrets qu’autrem ent, elle
a trouvé un excédant de 6262 liv. 2 sous
deniers.
En conséquence de quoi la dame de Villem ont se reconnut
.débitrice de 2G000 fr. pour solde de tout compte.
Il fut ajouté qu’elle avoit fait compte à Rixain de la nonjouissance de Montrodés pour trois ans , et q u e , comme ses
sous-fermiers refusoient, dit-il, de payer, à cause des suppres
sions féodales, il étoit autorisé à faire avec eux des ventilations,
après quoi il se payeroit par ses mains de sa créance, en receyant de ces sous-fermiers ce qu’ils devroient.
Cette dernière clause annonçoit assez combien la dame de
Villem ont se méloit peu elle-même des comptes du sieur R ixain,
et le laissoit maître de tout régler lui-méme. Quoi qu’il en soit,
le sieur Rixain dit ayoir traité avec ces sous-ferm iers, et reçu
5
5
^972 francs..
La dame de Villemont étant décédée en l’an 4 j le sieur Rixain
assigna, en l’an 6, ses héritiers en payement des 26000 francs,
montant de l’obligation , et des arbitres furent nommés. Ils ren
dirent un jugement arbitral le 21 pluviôse an G. Comme il est
la base du procès actuel , il est important d’en connoitre les
détails et les dispositions.
Les héritiers de Villem ont, voyant un règlement fait par leur
jnère, contenant obligation, à la date de l’an 2 , en demandoient
la réduction.
Le sieur Rixain répondit que tout ce qu’il avoit payé étoit
antérieur aux assignats, et qu’il étoit prêt à l’établir par les
ancien? comptes et pièces qui étoient en son pouvoir.
A
jL
.
2,
�En conséquence,
( 4sa3 réclamation, les arbitres re
et d’après
viennent à un compte général sur le vu de trois comptes des
i er. juillet, 20 décembre 1790, et 2 janvier 1791; et le nouveau
compte donna le résultat suivant :
i°. Le sieur Rixain a payé, d’après ces trois états, 62263 f. 46 c,
Sur quoi il d evo it, pour quatre ans de ferm e
alors échus..........................................
48000
d>
Donc il étoit alors créancier de. . . . . . . . .
14265
20. Il a payé, depuis ladite époque de janvier 1791
jusques au mois de mai 1793 , 804$ fr.
Ces 8045 fr. sont réductibles, et valent............... £¡982
5°. Il reste,
36
pour atteindre l’obligation,
y i fr.
Cette somme est rédu ctib le, et vaut.....................
T o t a l de
1110
ce qui est dû au sieur Rixain.............. 2 1 355
46
>v
35
81
497
Sur quoi il a reçu des fermiers
2 fr. ? et il a payé 268 fr,
au notaire, pour frais de l’obligation de l’an 2.
Et d’aprés ce compte nouveau, les arbitres, n’ayant à juger
que l’obligation , condamnent les héritiers Villem ont à payer
cette somme de 2i355 fr. 81 cent. , et néanmoins à déduire
4972 fr. imputables sur les intérêts et sur les 268 fr. payés au
notaire.
Le sieur Rixain interjeta appel de ce jugement ; mais , sur
l ’a p p e l, le jugement arbitral fut confirmé le i pluviôse an 8.
Le 29 ventôse su iva n t, les héritiers de Villem ont firent si
gnifier ces jugemens , et , en se reconnoissant débiteurs de
21
f r . , ils d ir e n t que cette somme étoit compensée et au
delà, i°. avec les
2 fr- re Çus par Rixain; 20. avec 24000 ir.
par lui dûs pour deux années de sa ferme , non c o m p r is e s au
compte ; et lui firent sommation de payer l’excédant.
Néanmoins le sieur Rixain jugea à propos, le 6 n iv ô se an 10 r
de faire aux héritiers Villem ont un c o m m a n d e m e n t d expro
priation. Il* en demandèrent la n u llité, de même que la main
5
355
497
�(5)
levée d’une inscription par lui faite en l’an 7 , de 54200 francs.
Par jugement du tribunal de Riom , du 6 floréal an 13, con
tradictoire seulement avec deux d’entr’e u x , ils furent déboutés
de leur demande.
'
M O Y E N S .
L e sieur Rixain n’en a qu’un s e u l, et il le reproduit sous
toutes les faces possibles : c ’est aussi sa réponse à toutes les
objections.
J’a i, d it-il, une quittance finale du 4 messidor an 2.
Cela est v ra i, ou plutôt cela étoit vrai. Mais il l’a lui-même
annullée en exigeant un nouveau compte.
Sans doute il pouvoit s’en prévaloir ; et quoique ce fût un
acte d’aveuglem ent, né de l'aspérité des temps , il auroit eu
le droit de se prévaloir de son obscurité m êm e, et de réclamer
eCooo fr. , s’il se fût borné à les vouloir à l’échelle.
Mais le désir d’avoir davantage l’a forcé à représenter toutes
ses pièces comptables pour vérifier les époques de tous ses payemens et objets de répétition quelconques : et alors les arbitres,
mentionnant ce qu’ils ont v u , transcrivant le résultat de ses
propres com ptes, ont écrit qu’il 11’avoit payé en total que 62263 fr.
dans tout le temps de sa ferme.
D ’après cela il est aisé^le savoir si les six années de cette ferme
ont été payées. Les arbitres ont très-clairement porté en conqjte
quatre années, et s’ils en avoient porté deux autres, on les trou•yeroit également.
Il faudroit sans difficulté que ces deux années fussent com
prises dans les 8045 francs ou dans les 3691 francs ; mais cela
est impossible. Dans la première somme sont les
oo francs
portés par le jugement arbitral du 7 janvier 179^ : le sieur Rixain
l ’avoue ; il dit avoir payé le surplus.
Quand il l’auroit p a y é , ce ne pouvoit être qu’à compte des
deux années de sa ferme. C a r , quoi qu’il puisse d ire , il faut
36
�(
...
.
,
bien , dans un compte où il porte tout ce qu’il a p a y é , tout
ce qu’il a à répéter , ¿quelque titre que ce soit, qu’on trouve
tout ce qu’il devoit.
O r, on voit que la masse de ses payemens et autres objets,
est composée de trois articles ; et on ne voit sur le total qu’une
seule déduction de 48000 francs pour quatre années de ferm e:
donc deux années sont oubliées.
M ais, dit le sieur R ixain , si les arbitres n’ont pas dit que ces
deux ans sont payés , ils n’ont pas dit non plus qu’ils ne sont
pas payés.
Ce n’est là q u ’ u n jeu de mots ; car un fermier qui devoit six
ans de ferme , et qui porte en compte t o u t ce qu’il a payé en
six ans, tout ce qu’il prétendoit réclam er d’ailleurs, devoit dé
duire les six ans de sa ferme avant de se dire créancier. S ’il
n’en a déduit que quatre, il n’en a payé que quatre ; et par con
séquent c ’est avoir dit suffisamment qu’il en doit deux.
A cette démonstration le sieur Rixain objecte que les arbitres J’
en déduisant les 48000 fra n cs, n’ont parlé que des quatre ans
échus en 1791.
Mais qu’importe l’écliéance, lorsque les deux années suivantes
ne se trouvent pas mentionnées. C a r , encore une fo is , si elles
ne sont pas comprises au com p te, le sieur Rixain les doit.
Le sieur Rixain , qui ne s’est pas dissimulé la nécessité de
retrouver ces deux années, veut les laisser apercevoir 'dans une
prétendue indemnité dont le compte des arbitres 11e parle pas;
et avec raison.
J’a i , d it-il, açquité ces deux années par compensation aveo
les indemnités qui m’étoient dues pour 1791, 1792 et 1793. E t,
pour établir quelques données sur ce moyen , le sieur Rixain
calcule quelques produits des terres de Villem ont et Montrodés.
En un seul mot l’obscurité qu’il a voulu jeter sur cette partie
se dissipe : il devoit iîîooo fr. par an ; qu’il suive son propro
calcul, et il verra qu’il est encore loin d’avoir payé deux an$
par compensation.
�/
7}
Au fait, cette Indemnité n’étoit presque rien. Villemont devoit
beaucoup de c e n s , et le sieur Rixain les a gagnés. En 1791 il
n’a perdu que les banalités s’il y en a v o it, car les autres droits
féodaux n’ont été supprimés qu’en 1792. Il avoit même été
formé contre lu i, en 1793, une demande en indemnité de la
dlrne, fondée sur la loi du 14 avril 1791.
En l’an 2 il a déciaré avoir été payé^de_ l’indemnité pour
Montrodès ; et il est de principe que les déclarations contenues
en un acte annullé subsistent.
A u lieu de prendre tant de peine pour persuader que les
deux années omises sont dans le compte arbitral, sans qu’on
les y ap erçoive, le sieur Rixain n’avoit qu’ une chose à faire ,
c’étoit de reproduire ses acquits de 1791 à 1795. Car il a tout
exhibé aux arbitres , et il est encore nanti de ce qui peut
prouver qu’il a payé. Un galant homme doit toujours être prêt
à revenir à compte.
Forcé d’avouer que le jugement arbitral de l’an 6 est a u
jo u r d ’h u i le seul titre de la ca u se , le sieur Rixain y cherche
encore une objection; il dit aux héritiers de Villemont : Si vous
étiez créanciers, pourquoi vous borniez-vous à demander une
réduction à l’échelle?
Mais ce n’est-là q u u n cercle vicieux pour remonter à l'acte
de l ’an 2. O r, on le répète au sieur Rixain , c ’étoit à lui k
adopter cette restriction ; et s’il a couru le hasard de vouloir
un nouveau compte , il ne peut s’emparer de deux chances ,
et revenir à ce qu’il a détruit.
Quand les arbitres ont lu ses pièces et refait un compte ,
les sieurs de Villem ont ne pouvoient qu’en attendre le résultat,
et n’avoient pas le droit de se mêler à la délibération des ar
bitres, pour prendre des conclusions sur le résultat même de
leur jugement.
Mais aussitôt qu’ils ont vu , par ce jugem ent, que le compte
nouveau ne portoit en compte que quatre ans de ferm e, ils
�C8 )
ont réclamé les deux ans restans, par la signification même du
jugement confirmatif.
Rien n’est donc m ieux établi que leur droit de s’opposer à
une expropriation commencée pro non debito. Il est de prin
cipe qu’après un compte les omissions donnent droit à une ré
clamation postérieure, sans qu’il soit besoin d’attaquer le pre
mier compte qui contient l'omission. ( V . la loi 1re. ff. quæ
sent, sine appell. , et l’article 21 du titre 29 de l’ordonnance
de 1667. )
La compensation s’est opérée de plein droit avec la créance
du sieur Rixain. Son bail est exécutoire contre lu i, et il n’a pas
f a llu f o r m e r u n e d e m a n d e ju diciaire.
Quant au com m andem ent, il est nul en la forme contre la
dame de M ariol, qui n’avoit de domicile de droit que celui de
son m ari, à M ariol, et q u i, assignée à C lerm on t, ne l’a été
à personne ou domicile.
L ’arrêt de cassation invoqué pour éluder cette nullité , ne s’y
applique pas. Un cohéritier, poursuivi seul, ne pouvoit exciper
du droit d’autrui ; et c ’est pour cela que l’expropriation faite
contre lui fut jugée valable. Mais ici on a mis en cause la
dame de Mariol ; et dès-lors elle a droit de se prévaloir des
nullités qui la concernent.
M e. D E L A P C H I E R ,
M°.
G O U R BEYRE,
avocat.
avoué,
<
il'
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul i m p r i m e u r de la
Cour d’appel. — Janvier 1806
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mariol. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail
contre-lettre
indemnité pour congés
ferme
assignats
Description
An account of the resource
Précis pour la dame de Mariol, et les sieurs de Vény et de Ribeyre, enfans et héritiers de la dame de Villemont, appelans ; contre le sieur Rixain, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1787-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0327
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0742
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Villemont (terre de)
Teix (terre de)
Montrodeix (terre de)
Clermont-Ferrand (63113)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Orcines (63263)
Rights
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Domaine public
assignats
bail
Contre-lettre
ferme
indemnité pour congés
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M E M O I R E EN RÉPO N SE ,
POUR
i
C a t h e r i n e M O L I N , et les S .r et d a m e V E N D R I E Z
et B O R N E , i n t i m é s
1
CONTRE
J e a n et. autre J e a n
CIIOUVENC ,
appelans.
Q U E S T I O N S .
i.° L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2.0
S i elle n'est pas périm ée, peu ven t-ils, comme tiers acqué
reurs., repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix ans , dans le même parlement ?
3.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils recevables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier ressort, rendus
sur appointem ent, entre leur vendeur et ses autres cohéritiers,
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4.° Thérèse M ol in a-t-elle eu 10 ou 3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l ’ignorance de ses droits et sans être informée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
5 .° Catherine Mol in a-t-elle p erd u , p a r la prescription de 30
A
�c o
ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine Ferrapie , sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de l'ordon
nance de 1735 ?
7.0
L a première substitution q u il c o n tie n t, est-elle Jidéicommissaire ou jid u cia ire ? L a seconde e st-e lle u n e substitution
pupillaire ? Est elle valable? A -t-elle transmis la succession à
Marie Mo lin , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo/in , qui a simplement légu é
une légitime à ses enfatis puinés , est-il nul pour vice de prétérition ?
T P e l l e S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé la Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catherine
Ferrapie, rapporfée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapporiée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, et subi, pour faire juger un simple
partage, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Tierre TWoîin avait, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise , et
Ignace Molin. Toi,is , excepté le dernier , s**>nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l’embrouiller, les intimés se c o n t e n t e n t
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié a Catherine Ferrapie. Ils ont eu six enfans.
�C3 )
Pierre Molin , mort en 174)5.
Catherine Ferrapie, morle en 1735.
2.
3.
I
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Chambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
i ? 3r ;
2.c marij
4.
<
^
;
*>
JL
Catherine , J ea n n e ,
intimée.
m. s. p.
Thérèse.
Louis Borne.
I
en I770.
N ... C cjoux.
mort s. p.
Jeanne B o rn e ,
3 .e mari ,
le 3 novemb.
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L ouis Vendviez >
1748.
intim és.
L e 20 mars 17 3 5 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine FeiTapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la chargede remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
«
«
«
«
«
«
«
«
a
«
«
recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testatrice fait ladite institution sans distaclion de quarte et sans
qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des fr u its de
ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
enfans__ Fait et récité audit T e n ce , dans la maison d’autre
sieur Pierre Molin, en présence d e .............témoins soussignés.
Ladite testatrice ille de ce enquise et requise............ »
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
institue pour son héritier Pierre Molin son fils. . . . Il donne
et lègue à ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ign ace M olin,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa fille , de régir et
« administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A 2
�U )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur»;
Pierre Molin mourut le 21 du même mois de mai 1748. Alors
Ma rie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de Cham
bón , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux successions, s’engagea aussitôt qu’il en eut l ’âge. Il
mourut à Lille le 3 novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, on trouva l’occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux aiïaires
de la maison , et par le contrat de maringe du 5 juin 1755 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 IV. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du père, de la mère, de
la sœur décédée, et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions, et s’obligra de la confirmer et raliJier à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n ère. Çi-nnd le sieur Chambar
liac décéda, elle passa ende secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui a ch e va , a peu de chose p rès,
de dissiper la succession.
Thérèse M olin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. Le 22 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son iroisième m a r i , en partage des successions
de sus père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion aderante.
Après cette demande, elle fit donation de scs biens à la dame
�( 5 )
Vendriez, sa fille , qui intervint. L e procès fut appointé à T en te ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du chef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le sur
plus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
inère communs.
L es deux parlies interjetèrent appel de celte sentence ; les pro
cédures se conîinuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Pay fut choisi pour connaître de cet
appe!.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 1793, sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
i.° Que le testament du père était nul par prétention; z.° que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
Moün de la succe-s'on , et que ledit Molin étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes.; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était n u lle, comme n’étant
dirigée ru profit de personne , comme faite par une mineure ,
ave-, ronvtut on de ratification non effectuée, et comme dirigée
au pi 'fil d’une piolut'ice , et que l’action avait duré trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
]>(■son còlè, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lambert-Lacroisière, son héritier, le 27 novembre delà même année pour venir
à partage, • t lui expédier un cinquième clu chef de son père, et
seulement un douzième, du chef’ de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans !,i croyance , que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père, et dans les mêmes propulsions pour les successions col
latérales.
�,
( 6 )
ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molía
alcirs ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du ch ef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
On présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 fév rier 1793 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 ja n v ie r, et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine M o lin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
qu’il occupe , un domaine et un jardin, et déduiront les créances
qu’ila’acquittées envers Jean-Antoine M olin, à la décharge de tous.
É t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouuenc , Graisse, C u o q , B o y e r ,
B eléa g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
E n fin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 179^, les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seuleinent ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 avril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvcncn’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�^( 7 )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, 1 les biens libres, 2.°ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demandé comme acquéreurs do
bonne foi.
Depuis cette époque le tems de la pérémption s’accomplit : ce
n’est que le 9 vendémiaire an 8, que les Chouvenc
l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine IVlolin seule, pour assister en la cause.
L;; 16 g e n r r n a l an 9 , les i nt i mé s ont a ss i g n é les C h o u v e n c en
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e d e l e u r a p p e l .
1 ..
C ’est en la cour , seuhment pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer lejugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Lt ui^ résistance soutenue est fondée sur
l e u r prétendue bonne foi : cependant il s ont acquis d’une’. cohé
ritière qui a v a i t une sœur dans la m a i s o n ; ils ont fait plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lar'roisière, ils
avaient'éu le moindre'soupçon de la Vente laileaux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certts, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce proc<'-, ¡1 est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa décision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Hante-Loire et de
L ’Ardêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le ju
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger un procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eût indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le fonds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
»’agit d’examiner.
�T
P R E M I È R E
Q UE S T I O N.
P--
i'VV. '■ L a procédure des appelons est-elle périm ée?
-?ï. ;
v.
.
„
Jp.i 'P.i;opcrandurn et l'ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès'soient promptement jugés ou entretenus par
des:procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
u
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement! de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après; une ¡demande ; mais cet arrêt n’a eu d’efïet que daîîs son
ressort. Au parlement de Toulouse, au contraire, i’ordonnance
de.Iloussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontimmtion , était môme
devenue, un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien resâôrt de Toulouse, la Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an.t i,et 12 nivps.e an 12, que-la péremption
avait eu lieu de plein droit, même pendant la révolution , et la
suppression des avoues.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
. Mais i.° cet exploit assigne les.Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette e x p r e s s i o n générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à cette
démission d’appel ; il serait donc bizarre de dire que celuMà ap
prouve un a p p el, qui assigne l’appelant aux fins de s’en voir
démettre. Il faut bijen que la péremption même soit'prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit obligé de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablement , comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
�(9)
de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral Merlin, en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc, a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r M erlin, en sa discussion, ne s’occupe pas, comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre mois, qu’il ne cite'
que pour compai'aison. L ’ordonnance de Houssillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
« péiie, ensorte que nonobstant qiton ait repris celte instance].,
« on peut faire juger la péremption...............L ’ordonnance de
« Houssillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C est un droit public auquel on ne peut deroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’aflaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du i6 .e siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 149^, ce que nous ne voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la môme chose.
�C 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein droit t et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qüalilé dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
QUES TI ON.
L e s appelons , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix a n s?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers , qu’ il est c e r t a i n que ces cohéritiers avaient
TRENTE ANS UTlEES pour réclamer contre toute v e n t e f a it e par
l'u n d'eux.
M a is , continuent-ils, la question concerne l acquéreur ; on
leur demandera d’abord c o m m e n t il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ventes, et de 11e pas les avoir
contre Vacquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux:
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, car dans une grande
paille de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain, et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�C I* )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que Yusage est l ’interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malce
fid e i qui l’ explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu, que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
ji d e i possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem factam .
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienatarum rerum dom inus , non aliter hune excludi nisi per triennalem prescriptionem : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fid e p ossid et , quandb ipse à mald jid e
possidente hoc accepit. Novell. 119, ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugciit pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
�( 12\
Eoutaric , page 182 , a , sur ce su jet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page
annonce la seule prescription de
trenfe ans comme un principe n'on contesté. Graverol et Larocheflavin, p. 5 io; Catelan , p. 5oy, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usucapion de dix ans , que
« Juslinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
Furgole , en son traité des testamens , tom. 3 , pag- 4*7? s’explique ainsi : « Au parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« uii titre, lequel 11’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.° 83 ;
Montvalon , page i o 5 ; Decormis , tom. 2 , col. 589 ; Bretonier ,
v.° prescription ; M .p M erlin, v.° hypothèque, §. i 3 , et la
ïnaximfe est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix ans,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles ».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Domat y avait réfléchi lui-même , et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le terus des
« prescriptions ne sont (pie des lois arbitraires, car la nature ne
«
«
«
«
k
fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle dilféremment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
t e m s de prescription du droit romain. Il y en a ou elles ont été
réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.« question , que la Cour de cassation a
�( i 3 )
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T ou lou se, et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons dnnc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i, en semblable Ctis , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a loi, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
QUESTION.
L a tierce opposition des appelans est-elle receuable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il nesuiTit
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie
«
saire dans le
néces-
j rocès jugé. »
Les Chouvenc étaient-ils donc parties nécessaires dans le
procès d’en Ire les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’agissnit-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers, A c tio ■familiœ erciscundæ salis hœredibus com -
p etit.
Les questions d’un partage sont tellement élrangères à tous
autres, que quand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en partage 681-0116”, par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c tio fa m iliœ erciscundæ est actio
civilis quâ cohœredes
dividundâ.
in te r s£
ag a n t de commun i hœreditate
Jusque-là un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�C «4 )
cepit à viald Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
ou leurs ayant-cause.
Or comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. Ainsi,
dit R o dier, un créancier, 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u 1F. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent ledroitd’interjeteri/^tf/, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
Si emptor de proprietate victus e s t , eo cessan te, auctor ejus
appellare polerit ,• item si auctor egeiit et victus s i t , non est
deneganda emptori appellandi facultas. . . . I d q u e ità constitulinn est in persond creditoris. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand c e l u i - c i a lui-meme interjeté a p p el, la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Quin e lia m si auctor ap pellaverit, deindè in causcv
dejensione suspectus visu sest, penndè de/ensio causæ ctnylori
comniittcnda est, atijue si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
sommé , il n’admet les créanciers qu’à intervenirà leurs frais ,
�( i5 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudic e d’une opposition par eux formée (art. 08a).
31 y 3 plus ; car si , par l’eil'et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art 883 lui répondrait « que chaque
u cohéritier est censé avoir succédés«// et immédiatement à tous
« les effets compris en son lo t , ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin o n t, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et ne peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et on n’en citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous ne puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien été saisie.
i.° M .r Cochi» , en ses notes alphabétiques, tom. 5, pag,
dit ; « jugé par anêt du 3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
z.° M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Couilans était en procès
�( 16 )!
avec un seigneur voisin pour mouvance de fief. . elle vendit
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y foîrna tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pris intervenu : par arrêt du 3 i
mai 1742, il fut déclaré non recevable dans sa tierceopposition.»
Par le 2.° arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720 ,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur a p p el, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l’arrêt par son vendeur , qu’en cette
«
«
«
«
«
«
«
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1750 , il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s .r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du 3 janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art. 5 et 11 du titre 27 de l’ordon« nance de 1667, et l’art. i . er du titre 35. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessart , était à cet égard.
« son ayant cause. . . . que Lessart a été a p p elé ., . . que Godet,
« en qualité de son ayant cause , n’aurait pu être r e c e v a b l e à
« attaquer ce jugement, qu’autant qu’il eût été justifié que Les
te §art a u r a i t été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en admettant la tierce opposition du cit. G odet,
« ont violé l ’art. 5 de l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chosç ju g é e , et ont contrevenu formellement à l’art. i . er du
titre
�(
«7
)
<< titre 35 , qui ne permet de rétracter, autrement quepar requête
« c iv ile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
Voilà donc la pleine confirmation de la loi 4 fï. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête civile , s’il
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts 11e sont dans
l’espèce d’ un procès de succession. S olis hæredibus competit.
D eu x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tiei'ces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste, s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
cqjndamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
\
�( 18}
encore, d’exiger en règle génén e , que 'ont cohéritier dût sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derechercli r ses dro‘ts, c’està-dire lut tenu de connaître les forces ue iu succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
*ous lés actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
Jes notions reçues ?
»
!
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M ulin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion, dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on. a ajinullé deux testamens: J e m ’y
o p p ose; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos
testamens, vos.contrats de mariage, tout ce qui s est passe dans
votre maison depuis i y 35 jusqu’en 179^' ^ os cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugee avec eux , et
c’ est rr.oi seul qui veux faire régler, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce s y s t è m e des Chouvenc, qui cependant est toute la base
c’u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ee et remise en litige doit être
rejugee .
Thérèse Molin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C T9 )
tion de 1755. Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles , on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de 3o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à celte durée, à la seule exception de
l’açtion hypothécaire.
Les Chouvenc ayant leur pi’ocès en cette C o u r, ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là, la Cour d’appel ne s’était pas prononcée^
et on trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrement,. 11’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence, même la.chose ju g é e,
même des questions nées en iy 83 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui. *
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de lu i, par le pouvoir que lege regid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d’après un auteur latin, vaut mieux que ce qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valcre leges quœ moribus comprobalce su tit,
qïiam quœ scripto con stan t, vérité biçn plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�I
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est pas seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , JustitL v habitus
praclicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impcrative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciœ ,
probalis bis (/i/æ in oppido, frequenter in eodem controversice
gen ere, servata s u n t, causé cognild statuit. L . 1. cod. quce s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for*
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant ( por-îe un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
«< été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts semblables, le parlement de Tou« louse a jugé., etc.» ( S ir e y , page 809).
' 2.0 Dans une autre cause, du 5 floréal an 12 , la Cour de cas«
saiion a dit: « Considérant que quoique en générai on puisse par
v
«
*
«
•
«
le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre présens, et 20 ans enlre absens ; cependant, d'après la jurisprudence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêls,
les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
possession immémoriale , et que c'est ainsi q u 'il a entendu la
lo i t etc. casse et aimulle, etc. *~^Lullctin, u.° 52).
�(
21
)
3.° Un arrêt du 2.1 du même mois a jugé de même, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( Sirey, p. 267).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.« elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait. Il n’y a doue
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
Il est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .° Si on suppose qu’elle a approuvé lestestamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre u n e destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m defuncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a
souvent
jugé, et notamment les
21 thermidor an 8, et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1705 a été e x p é d i é par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’était donc induire en
erreur les parties intéressées. T h é r è s e Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis q u e celle de son décès, sans
avoir re cu e illiy ne l’était pas. O r, non videnlur qui errant consentire , et la prescription ne court que du jour de la découverte
de la vérité.
5 .° Thérèse Molin i née en 1733, avait deux ans au décès de sa
mère , et dix ans au décès de son père en 1748. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de lévrier
�c 22} .
1718. L e père l ’avait chargée de régir et administrer conjoinletement avec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc
qui connaissent plus d'actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et m ère, dont jo u issa it Marie M olin,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta
ble depuis 1743, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n’avait
que douze ans, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
lç succession et le vice des testarnens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.
. O r, le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d’admettre en
pareil cas le renonçant non visis tahu lis, à se pourvoir pen
dant trente ansl Q u ’on consulte May'nard , liv. 2 , chap. 99 et
100 ; D olive, liv. 4, chàp. 16; Càtelan, liv. 8 ; Brefonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les. auteurs de ce
parlement, ou ceux qui mentionnent su jurisprudence , on ne
trouvera nulle part que l’art. 134 de l’ordonnance de 1639 ait
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Paris, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-tcms , comme le p a r l e m e n t de .Toulouse a toujours ]uge
Les auteurs du tems môme de cette ordonnance , notamment
M .f D u v a l, de rebus dubiis , enseignaient qu’il n’y a contre les
actions on nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
lo parlement de Paris changea sa jurisprudence', mais enfin il la
c h a n g e a do nouveau après l ’ordonnance dé 1667; et il a inva
riablement jugé depuis que l’art. 184 de l’ordonnance de i5o9
ne s ’ a p p l i q u a i t qu’aux actions rescisoircs.
Cette j u r i s p r u d e n c e c o n s t a n t e s ’est m a i n t e n u e j u s q u au Code
civil. O n a v u e n c o r e , dans les di s cus s ion s s u r c e C o d e , les efforts
des sections r é un i ç s de la Cour d ’a p p e l de P a r i s , p o u r faire m a i n -
�C *3 )
tenir l ’action de trente ans, et on n’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entre les
Cliatnpomier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en. floréal an 5 , à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
«
«
«
«c
« Attendu que l ’art. i 3 i de l’ordonnance de i 53c), déclare
nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administrateurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
rendu , et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
personne qui administrait ses b iens, présente un avantage
« indirect ;
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l’art. i 34 de l’ordonnance de 1539 fIu^restreint
« le délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres f
« casse et annulle , etc. »
II est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d’appel de Hiom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c’est-àdire, depuis le Code civil, et p ir induction de l’article 475. On
verrait m êm e , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�C*4 )
encore que l'action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix;
a n s, avant le Gode civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-même.
!
)
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N , .
Inaction de Catherine M olin est-elle prescrite par trente ans t
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
Les Cliouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D om at, au tir. 7 du liv. 3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a peyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfans sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitimé ne court point contre
« eux». Son annotateur ajoute « idem , en matière départagé»;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs autres, c’est seulement pour convaincre les Cliouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l’auraient
trouvée.
Dolive en fait une question expresse au chap. 3 i du liv. 5 ,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l’hérédité , cette prescription ne court pas contre eux , en cette
« rencontre,
�C r f)
«
«
«
«
rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seulement qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
défunt, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i 63o et 26 août i 636.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap. 36;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, to m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b ru n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion, si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d’appel vient très-réceminent de prononcer, dans
un arrêt du i 3 ventôse an i 3 , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Vescham be,
« dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière,'
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce 11e
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels, q u i
ad hœreditalem ven iun t; et comme les portions advenues à
Catherine Molin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
9aisit le v i j , Catherine Molin a été, dès ceLle époque, proD
�C
26
)
priétaire d’une quotité plus co n sid éra b le, et n’en a pas plus
perdu une fraction que la totalitéT
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
I .e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testam ent, dit R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n effet , dans cet acte si im p o rta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.0
il est dit f a i t et récité en la maison de Pierre Mo lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable qu'un
testament soit lu à celui qui l’a d i c t é , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
11 n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de 11’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice ILLE de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 178b dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en leront ensuite lec« ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... A près
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 )• »
M u s , disent les Chouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l'ordonnance de 1735 : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« Et on cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t m ention de la réquisition par eux
�( 27 )
« faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i 65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de xy 35.
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14,.
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur Artois t
art. 74 ).
On cite souvent Ricard, comme ayant rapporté un arrêt de i 65z
validant un testament où il était dit : « Lequel n’a pu signer t
a interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence'que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
Aussi Ricard , n.° i 526 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaire, dit Ricard , au n.° i 568 , ne doit
<c contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
t- L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n’avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce enquis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal et
le 23 pluviôse an 7 , entre les héritiers V a ch ier, d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art.. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur ddD 2
�. ( 2 8 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce j:oint la jurisprudence.
Les Cliouvenc se sont imaginé cpie les ordonnances d'Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T ou
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D >!ive dit que de son teins on n’était p is rigou
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan iuait pas si le testateur avait signé; mais Serres, Boutaric
et F u r g o l e ne disent rien de p a r e i l . Furgole dit au contraire'
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit public , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
1 1 j reuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Cliouvenc
se sont efforcés de persuader qu’///<? veut dire il/itéré , puis
i[u illile r é veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i 685 défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’acte, elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
T
Vinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, cpii sont testatio mentis , il faut éc.rire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29^
viations. Ccvterum Htteris iisque usitatis et legibilîbus scribenduin esse p la c u it , non sig n is, obscurisve n o u s , l. G , § . ult.
de bon. p o ss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le dictiounaire de l’Acadéinie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; 011 n ou veau diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , if n’y a pas dans le testament illité r é , il y a ille , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot biznrre , une déclaration de la testatrice, qu elle n a
pu ou su signer. Allons plus loin nieine , le mot illitcre ne lu
remplacei’ait pas.
SEPTIÈME
QUESTION.
Q u elle est la nature de la substitution du testament de 1735 ?
a-t elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par iine expression infidelle de l’expédition, qu’ils avaient d’abord
produite, de ce testâmes.
Les héritiers inslitués, disaient ils , etaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de r e n d r e la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution, dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
substitutus substituto est substituías instituto , Marie Molin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l’extrait vidimé du testament de
�( 3° )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p o sé , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inoflicieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Péi’égrinus, qui a fait un traité sur les fidéicommis, le définit
ainsi. F iduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
alterius gratiâ institutus , eidem reslituere hereditatem ,p o st
diem certam vel incertam , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent ïïenrys et Bretonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é crit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
«c et l’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerenlur.........
« Quoique le tems de la restitution, contiuuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ierait bon usage de cette
« liberté , et n’attendrait pas jusqu’a sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« On doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et n e l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
« l’a instituée que parla nécessité de leur bas â g e , non ut /¿lus
minoribus obesset , sed potius ut eis consu/eret. » ( henr. t.
i . c r , p. 736, t. 3 , p. 69 ).
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du fiduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C 3f )
i .° Catherine Ferrapie avait un ills et des filles ; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2*0 Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l'hérédité à son
fils, sans distraction de cpiarte. Ces prétendus héritiersn’avaient
donc l’espoir d'aucun droit , de leur c h e f, à la succession ; car
tout héritier grevé de fidéicornmis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( 1. i . cr §. 5 , ad treb. ) ;
3 °. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut parentibus
obsequerentur. A cela près, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eût été vivante , sed potius ut eis consuleret.
Ainsi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin } mais seulement au cas q u 'il vint à mourir sans
pouvoir d isposer, ou sans avoir recueilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , si non extiterit hœ resJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pas mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de droit écrit le mineur avait testamenti fa ctio n em
aussitôt qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , né
en 1731 , était pubère en 1746 , et il n ’est décédé qu’en 1748.
Si ce moyen 11’était pas péremptoire , on opposerait aux
�C 30
Chouvenc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o iesi liberis
inipuberibus q u o s IN p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus œtatis sint
in quâ ip si lestamentum fa cere non possunt.
, Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
«ncore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règlesu b stitu tu s subslilulo n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad j. 41. de vul. et pnp. su b.)
A insi le testament de
, valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q UE S TI ON.
L e testament de 1743 e st-il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité 11e change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin,père a institue son (ils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses enfans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hæredem in s titu a i, aut exhœTedem nomi/iatim f a c ia t , ahocjum inutilitcr testabitur.
Cette disposition a etc répétée dans l’art. 5o de l'ordonnance
de 1735, qui dit que, dons les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M us l'héritier, institué par le testament de 174^ >étant décédé
ab in testa t, il importe.peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
/
�( 33 )
ou ju r e suo , à la succession de leur p ère, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité'.
Les Chouvenc terminent leur mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession Molin ; 2.° qu’on accorde
«à Marie Molin leur venderesse , les prélèvemens qu’elle aurait à
l'aire, notamment trois qu’ils indiquent ; 3.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s’il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait d r o it, en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l’exécution du jugement dont est appel.
A lors, seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible..
Quant au eornpulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
foule de papiers de la famille Molin , qu’ils ne pouvaient tenir
que de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
s-t remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en communication
E
�(
3 4
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d ’un partage, avec l ’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M.* D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E , avoué.
A
R I O M ,
D e l ’imprimerie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I )•
�
Dublin Core
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
prétérition
prescription
testaments
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0326
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53774/BCU_Factums_M0326.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53773/BCU_Factums_M0325.pdf
ba4b734a4b8c97b8e87724050ed5c875
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Text
MÉMOIRE
Pour le sieur M A B I T ,
défendeur et appelant;
C0UR
d
’ A
p p e l
Contre le sieur R O D D E de Vernière 9 demandeur;
R I O M.
E t Contre le sieur P E R R E T \ et la dame P R I N C E
son épouse, intim és .
II—
L
en
e
Sectlon*
B—
sieur M a b i t , en faisant infirmer au parl em en t de P a r i s ,
1781 , la plus mauvaise des sentences que la sénéchaussée
de C l e r m o n t ait jamais p u r e n d r e , c r o ya it a vo ir t r i o m p h é
de toutes les difficultés que le sieur de V e r n i è r e po uv a it lui
susciter.
Mais le vaincu v e u t e nc ore dicter les co nditions :
e t le sieur M a b i t pour joui r de sa v i c t o i r e , est o b l i g é de
lu tt e r encor e c o nt r e dix ou o n z e p ro cè s no u v e a u x q u ’il plaît
au sieur de V e r n i è r e de lui susciter.
A
�U )
A v a n t ce tt e entra ve in a tt en d u e , le sieur M a b i t avait prii
des en gage ments a v e c le sieur P r i n c e ; et le retard q u ’il a
é t é forcé
de m e tt re à leur e x é c u t i o n
a fait naître e nc ore
des contestations e n t r 'e u x . T o u t cela s’est m ê l é , discuté et
emb ro uillé
au p a r le m e n t ;
les parties en sont aujourdJhui
plus loin que jamai s, de ce qui les divisait d ’abo rd; de telle
s o r t e , q u ’à ne prendre que le résultat de ce qui s'est passé,
on peut dire à la lettre que jamais h o m m e ne fut plus mal
he u re u x que le sieur M a b i t d ’avoir g a g n é un bon procès.
C e p e n d a n t il faut sortir enfin de ce dédale et mettre un
terme aux prétentions toujours croissantes
des
adverfaires :
ils o n t eu le loisir de les méditer et accu m ule r depuis 17.90.
M a i s leur no mb re ne do it
pas effrayer la
C o u r ; tou te la
cause réside à l ’égard du sieur de V e r n i è r e , dans un acte de
1 6 6 7 , et dans l 'e x a m e n d ’un rapport fait en e x éc u t i o n de
l ’arrêt de 1 7 8 t . Q u a n t au sieur P e r r e t , il y a instance pen
dante sur la lésion de l ’acte qui lui do nne une act ion : mais
puisq u’il est
partie i n t e r v e n a n t e , il n’en faudra
dire un m o t de ses ré c l a m a ti o n s , devenues
pas moins
inséparables du
p r o c è s ; c e sera d’ailleurs un ensemble à présenter à la C o u r
po u r ne pas y revenir.
F A I T S , .
En
i£tfo,
un sieur Jean L a r i b e ,
bailliage de V i e
lieutenant criminel au
en C a r l a d è s , fie un testament par
le q u el
il institua J ea n n e D e c o m b l a t sa v e u v e , heritière fiduciaire:
il lég ua 2,000 liv. à ch a c u n de ses d eu x fils J ean et C h a r l e s ,
et 3,000 liv. à sa fille.
11 laissait entr’autres propriétés, trois domaines appelés
�( 3 ]
L a r i b e , le T e i l , et Besse ( ou Baratou ) ; mais il avait des
d e t t e s , et le principal créan ci er était le sieur de C a l d a g u é s ;
outre ses créances personnelles il e n acquit pour 8,822 l i v . ,
et alors il se tr o uv a créancier de 2-2,212 l i v . ; alors il p r o
posa à la v e u v e L a r i b e , de lui cé de r à antichrèse les fiefs
de L ar ib e et du T e i l , imaginant qu ’elle ne serait jamais e n
état de les racheter.
E n co ns é q u e nc e j l'ac te suivant fut passé entre les parties,
le
f
avril
1667;
il
c la u s e s , parce quelles
est essentiel
d’en
rappeler toutes
les
donnent lieu aux difficultés actuelles»
« L a dem oiselle D ecom blat tant en qualité d’héritière bénéficiaire de
» son m ari, que comme tutrice de ses enfans, confesse devoir au sieur
» de Caldagués la somme de 2 2 ,2 12 liv . ( pour les causes y détail:> lées ).
» Plus 1,600 liv . pour le titre clérical du sieur Laribe p rê tre , à la » quelle les héritages affectés pour raison d’icelui ont été estimés par
» e x p erts, et lequel titre clérical ledit sieur de Caldagués a pris sur soi
» en l ’assignant sur d’autres fonds à lui appartenant; et i 3o liv . d’autre,
» pour deux fondations faites aux prêtres de Polm inh ac; dont aussi ledit
» sieur Caldagués
s’est ch arg é , revenant lesdites
sommes en bloc à
» .¿3,942 liv.
» Pour le paiem ent de laquelle ladite dem oiselle D ecom b lat, a b aillé
» et délaissé audit sieur C aldagués, pour jouir par form e et m anière d’hy» pothèque tant et si longuem ent qu’elle sera en demeure de payer ladite
» somme p rin cip ale: savoir les héritages suivants, sis et situés aux v il» lages de L aribe et du T e il qui consistent, etc.
» Lesquels héritages ont été estimés
26 , 3oo l i v . , par François C am -
» befort et A n toin e Senezergués exp erts, suivant leur rapport de m ain
» privée du 17 m ars, et parce que l ’estimation desdits héritages excède
» la
somme de
22,942 liv.
due audit sieur de C aldagués, pour les
» causes ci-dessus; de la somme de 2 , 35 y l i v ., laquelle somme ledit
» lieu r Caldagués à promis et s’est obligé payer à Jeanne de L a r ib e ,
A 2
�’(
)
4
» femme à Jean Cam bon, pour ses droits légitim aircsj et autres à elle
y dû s, en fonds au regard d’exp erts, là. où ledit sieur Caldagués trouvera
» à propos de lui
en assign er, en faisant laquelle assignation, ladite
» Laribe présente et acceptante, autorisée dudit Cambon ci présent, elle
» sera tenue de subroger ledit sieur Caldagués et s’obliger en toute action
» de ses droits jusqu’à concurrence de ladite somme de 2,357 l i v . , à ce
» m oyen ledit sieur Caldagués jouira de tous les susdits h éritages, suivant
» l ’estimation desdits exp erts, les fruits desquels héritages pendant ladite
» jouissance, demeureront par ce m oyen compensés avec lesdits intérêts
» desdites som m es, comme ayant été estimés que la valeur d’iceux ne
» pouvait excéder le légitim e intérêt; avec p a c te , que tandis que ladite
» D ecom blat souffrira ladite jouissance, ledit sieur Caldagués ne pourra
>> la contraindre au paiem ent du p rin cip a l, car sans ce p acte, elle n ’eut
» consenti aux p résen tes.............a été convenu entre lesdites p arties, que
» si ledit sieur Caldagués trouve être pour son m ieux de stipuler vente
» pure et perpétuelle desdits h éritages, ou qu’il trouve acquéreur duquel
» il puisse retirer paiem ent de sa d ette, qu’il veuille stipuler ladite vente
» en l ’an et en l ’autre desdits c a s , ladite dem oiselle D ecom blat sera
» tenue de faire et consentir ladite vente en paiem ent dedites som m es,
» sous la réservation de tous droits d’hypothèque.
» S’est réservé ledit sieur C aldagués, le contenu en deux promesses
» consenties par ledit feu sieur de L aribe p ère, l ’une au pied de l ’autre,
» en faveur dudit feu sieur Caldagués père, des 6 octobre 1642 et 10 juin
» i 65 i , et de pouvoir reprendre la poursuite desdits criées qu’il avait faites
» audit Clerm ont sur les biens dudit sieur de L a rib e , en cas qu’il vie n » drait à être troublé en la jouissance desdits héritages: et d’autant que
» dans lesdits héritages ci-dessus baillés et délaissés audit sieur Caldagués
» se trouvent compris les héritages qui sont assignés audit sieur de L aribe
» prêtre , pour son titre p resb ytéral, ledit sieur de Caldagués lui a baillé
» et délaissé par forme d’éch an g e , pour tenir lieu du même titre presby» té r a l, un pré appelé de Bedissol par lui acquis de Jean D elcam p et
» Isabelle Cam pinhol m ariés, sis et appartenances du village de Besse,
» contenant environ six œuvres.
* Et parce que ledit pré est de plus grande v a leu r, ledit sieur de
�( ? )
» Laribe p rêtre, pour tout supplém ent, a promis et s ’est obligé de payer
» audit sieur Caldagués la somme de 600 liv . dans six a n s, et cependant
s> le revenu annu ellem ent, à raison d’un sol pour liv re à chacun joui
» et fête de Saint M ic h e l, et de plus ledit sieur Caldagués demeure quitte
» envers ledit sieur L aribe p rê tre , de la somme de 400 l i v . , procédant
» de ladite cession par lui faite cfjo u rd ’hui de pareille somme à prendre
» sur ladite
dem oiselle D ecom b lat, pour les causes d’ic e lle : et encore
» ledit sieur de Laribe prêtre, a promis d’acquitter ledit sieur Caldagués
» envers ladite communauté et prêtres de Polm inhac de ladite somme de
» i 3o l i v . , pour lesdites fondations de laquelle il s ’est ch argé, et d’en
» payer le revenu a ladite com m unauté, à laquelle promet faire a g r é e r ,
» et icelle demeure affecté et hypothéqué par exprès ledit pré de Bedissol:
» et partant lesdits héritages baillés audit sieur de Caldagués déchargés
» de ladite somme de 1 3o liv.
>> Ladite dem oiselle de Com blât pour plus grande assurance dudit sieur
» de Caldagués, tant de ladite jouissance qu’autres pactes et conventions
» ci-dessus, a consenti et consent que tous ses autres b ien s, dépendant
» des hérédités desdits feu
sieurs de L aribe lui dem eurent affectés •
» comme aussi les bestiaux qui sont à présent au domaine de B esse'
» consistant en dix vaches pleines ou g a rn ie s, et une paire de tauraux *
» pour être lesdits bestiaux provenus desdits chetels mentionnés aux» dites obligations. »
P o u r paye r Jeann e L a r i b e f e mm e C a m b o n , de la somme
de 2 , 5 J7 liv. promise par l ’acte ci-dessus, le sieur de C a l - ’
dagués lui délaissa le 11
mai 1670 par for me d ’h y p o t h è q u e
huit h é r i t a g e s , pour par elle en jouir jusqu’à l ’entier pai em e nt
de ladite somme.
B i e n t ô t un sieur P a g é s - D e s u t t e s , fermier et créan ci er d e
c e n s , fit des poursuites et m ê m e une saisie réelle contre la
v e u v e L aribe. L e
sieur C al d ag u és en prit occasion de re
prendre la sienne en
1672 pour avoir la p r é f é r e n c e , et un
sieur de Boissieux, cr éa nc ie r d ’environ 40 0 liv,., fit une
sième saisie réelle en 1678,
tr01'
�< o
C e s pr o c é du re s n’o nt pas e m p ê c h é le sieur de C a l d a g u é s , de
rester en possession de to ut le d om ain e de L a r i b e et du T e i l .
Il a m êm e j u g é à propos de s’emparer depuis du domaine de
Besse d ont il jouic e n c o r e , ou q u ’il a r é ce m m e n t vendu.
En
1 7 7 4 le sîeur M a b i t , créan ci er du sieur Jean-Joseph
de L a g a r d e de 12,000 liv. descendant et héritier des L a r i b e ,
n’ eut de ressource pour être payé , que d’ac cepter ce
que
son dé biteur était en état de lui vendre.
En
ledit sieur de L a g a r d e , par acte du 9 aoû t
1 7 7 4 , vend it au
sieur M a b i t
consé qu en ce
pour lui ou son mieux a é i i r e , ave c promesse
de garantir le fi ef et domaines de Lari be
et du
T e i l , et
autres héritages à lui appartenants, c o m m e représentant Jean
L a r i b e et Jeann e de C o m b l â t , tels q u ’ils furent délaissés à
titre
d ’h y p o t h è q u e à Jean de C a ld ag ué s par le con tra t du
y avril
\66~i.
L a d i t e v e n te
fut
faite quitte
de
toutes dettes
th èq u e s, à l’e x c e p t i o n des obits et f o n d a t i o n s ,
et hyp o
moyennant
18,000 livres.
E t e n c o r e à la ch a r g e par ledit a c q u é r e u r , de payer aux
héritie rs
Caldagués
en
principal
et
acce ss oir e,
toutes les
somm es qui leur seront dues en vertu dudit a cte d ’hypothèque
du $ a v ril
1 C6~j, après avoir préalablement
déduit et p r é
c o m p t é le m o nt a nt des jouissances des objets vendus.
A p r è s c e tt e acq uis iti on , le sieur M a b i t
demande
en
désistement
formée par
se subrogea à la
son v e nd e ur
c o n tr e
la dame de Ca ld a g ué s et le sieur de V e r n i è r e son m a r i , qui
prétendirent
faire résulter
de
l’intention
des parties, que
l a c t é de 1 6 6 7 e t ait une ve nte pu re et simple. C e système fut
�( 7 )
adopté par la sénéchaussé de C l e r m o n t q u i , par sentence du
3 septembre 1 7 7 7 , débouta le sieur M a b i t de sa demande.
M a is sur l’a pp e l, le parlement rendit h o m m a g e aux prin
c ip e s , et cond amn a le sieur de V e r n i è r e à se désister, sans
néanmoins d ’autres
restitutions de jo u i s s a n c e s , qu e celles
échues depuis la dem an de; les dispositions de c e t arrêt sont
en c or e essentielles à répéter textu el le me nt .
« Notredites Cour.... ém endant.... condamne M arie-hypolite Caldagués,
»
femme autorisée par justice de M athieu R o d e, à se désister au profit
»
de M a b it, des héritages baillés et délaissés par ledit acte à Jean de
» C aldagués, pour jouir par forme et m anière d’hypoth èque, tant et si
»
longuem ent, que Jeanne D ecom blat veu ve L a rib e , serait en demeure
» de payer les sommes principales par elle dues audit C aldagués, en
» payant par ledit M ab it, à ladite femme Rode ou à son m ari, le m ontant
» des créances dudit Jean C aldagués, liquidées par ledit acte du
5 a vril
» 1 6 6 7 , sauf h. ladite femme R o d e, à faire valoir les droits qui peuvent
»
résulter en sa faveur pour indem nités, tant des héritages donnés par
» ledit Caldagués à Jean de Laribe en échange de son titre c lé r ic a l, et
»
en l ’acquit des fondations, qui étaient assignées sur les héritages dé-
»
laissés par ladite veuve L arib e; que du paiem ent des droits légitim aires
»
de Jeanne de Laribe femme C am b on ; et encore pour paiem ent fait
»
par Jean François Caldagués, de cens et rentes, pour années antérieures,
» à l ’époque du 5 avril 1667 et des lods et ven tes, pour raison dudit.
»
acte de délaissem ent, en exécution de la sentence des requêtes du
»
palais du 27 juin 1678; défenses desdits M abit et de Lagarde réservces
»
au contraire : com m e aussi condamne ladite M arie Seneze veuve A n n e t
y> C aldagués, K se désister au profit dudit M a b it, de la jouissance des»
dits héritages énoncés audit acte de 16G7, et à lui rendre et restituer
» les fruits d'iceux à compter du 2 o juillet 177/1 >j our
demande, jus-
»
qu’au jour du désistem ent, suivant l ’estimation qui en sera faite par
»
exp erts, qui seront con ven us, ou nommés d’office devant le lieutenant
» général de la sénéchaussée de V ie en C arlad és, que notredite Cour a
» commis à cet effet; que le montant desdits fruits et ie\eaus sera com«
�( 8 )
» pensd jusqu'à due concurrence, avec les intérêt« des créances de ladite
» femme R y d e , échus depuis ledit jour 2 juillet 1 7 7 4 ; et qul
échéron^
» jusqu’au jour du p aiem en t, à faire par ledit M abit audit Rode et sa
» fem m e, en vertu du présent arrêt; condamne ladite veuve Caldagués a
» payer audit M abit l ’excédent, si aucuns y a desdits fruits et reven u s,
» après ladite com pensation, ensem ble les intérêts dudit excédant année
» par année: condamne ladite femme Rode et ladite veuve Caldagués ,
» tant envers ledit M abit qu’envers ledit de L agard e, chacun à leur égard
» aux deux tiers de tous les dépens, tant de cause principale que d’appel,
» interventions et dem andes, sommations et dénonciations, l ’autre tiers
s» desdits dépens compensé.
C o m m e le sieur M a b i t n’ avait acquis que pour recouvrer
une c r é a n c e , il ne fut pas plutôt devenu pr op ri ét air e, q u Jil
revendit au sieur P r i n c e , le 20 mai 1 7 8 2 ; par cet acte il fie
é le cti on de m i e u x , en sa f a v e u r , à la charge par ledit sieur
P r i n c e , de lui rembourser les sommes par lui a v a n c é e s ; et
de se c h a rg er du
surplus du prix de l’ac quisition, c o n f o r
m é m e n t à l ’a c t e de 1 7 7 4 et à l ’arrêt de 1 7 8 1 .
Il eût été heureux
ce tt e
pour le sieur
M ab it de
s en tenir a
première c o n v e n t i o n , puisqu elle lui évitait tout e m
barras à venir. Mais le sieur Prince plus p r é v o y a n t , l’en gagea
à prendre sur son c om pte le soin d’ex éc u te r l’arrêt et à régler
e nt r’e u x , le m o n ta n t de ce que devrait le sieur Prince pour
son acquisition. C e nouvel e n g ag e m e n t donna lieu a un acte
du 22 septembre 178 j , dont voici les dispositions.
« E n exécution de l ’élection faite par le sieur M abit en faveur du sieur
v P rin ce , par acte du 2o mai 17 8 2 , ils ont réglé et liquidé toutes les
» sommes avancées par M a b it, et celles qu’il s’était obligé de payer »
5 avril 16 6 7, p a r la vente
25 mai 1 7 8 1 , frais et faux-frais, à
» portées tan t, par le contrat d’hypothèque du
» du 9 août 1774» que par l ’arrêt du
» 1% somme de
35 , 5 oo l i y . , en ce non compris i,2 o o liv . pour le droit
de
�f
9 )
» de lods ( payé par le sieur M abit ); qui est à la charge du sieur Prince-'
» et dans le cas que contre toute apparence, il fût jugé être dû deux
» droits de lods, ledit M abit sera tenu de payer le second sans répétition,
se réservant, etc.
» Lesquelles sommes de
1
35 , 5 oo liv . d’une p art, et i,2 o o liv . d’a u tre,
» le sieur Prince s’oblige de payer audit M abit; savoir 14,000 liv. le 16
» octobre prochain, et 4,000 liv. chaque année ensuite, fora le dernier
'» terme a échoir le 16 octobre 178 8 , qui sera de 6,700 liv. avec P in » térêt qui diminuera à proportion des paiemens.
» A u m oyen desquels, et de la jouissance des domaines de Laribe et
» d u T e i l, qui appartiendra audit sieur M abit pendant les
5 premières
» années, qui comm enceront et prendront leur cours, à la Notre-Dame
» de mars prochaine; ledit sieur M abit s’oblige de délaisser à l ’expiration
» de ladite jouissance, audit sieur Prince le ch etel, outils d’agriculture
» et vaisselle de m ontagne, dont lesdits domaines se trouveront garn is,
» jusqu’à concurrence de la somme de 2,400 l iv ., dont 2,3oo liv . en
» bestiaux, et 100 liv. en outils et vaisselle, et en o u tre , de délaisser
» audit sieur P rin ce, les fo in s, p ailles, fum ier, et grains dont lesdits
» domaines se trouveront garnis, et ensem pncés; en conséquence ledit
y sieur M abit, aura la liberté pendant lesdites cinq années de prend.e
» du bois, à moins dom m age, pour le chauffage, clôture des possessions,
» et outils d’agriculture; à condition que ledit sieur M ab it, paiera foutes
» les charges, pendant lesdites cinq années, et qu’il fera entretenir les
» bâtim ens, des réparations menues et locatives, et qu’il usera du tout
» en bon père de fam ille : avec la liberté de faire exploiter lesdits do» m aines, par ferm ier, m etayer, ou domestiques; et ledit sieur Prince
» aura néanmoins la liberté de faire couper et prendre tels arbres qu’il
» jugera à propos ; immédiatement après l ’arrangement ou décision , des
» contestations a term in er, entre ledit sieur M a b it, la dame de Calda» g u és, les sieurs et dame de V ernières, ainsi et de même qu’il le pourra
» après lesdites cinq années: à l ’expiration desquelles ledit sieur M abit
y promet de remettre audit sieur Prince , lesdits contrats d’hypothéquo ,
» v e n te , arrêt et autres, qu’il pourra avoir en son p ou voir, concernant
» lesdits domaines.
B
�( <0 )
» D em eurant'expliqué que les ténem ent et m ontagne appelé de Bara»- to u , de la contenue de
53. septérées seulem ent, no fait pas partie des-
>> dits domaines ven d u s, quoique possédé par le ferm ier actuel.
» Expliqué
au ssi, que ladite vente est fa ite , avec promesse de la
» part dudit sieur M a b it, de faire jouir ledit sieur P rin c e , de l ’effet
» d’ic e lle , après lesdites-cinq a n n ées, et de le garantir et évictionner
» de tous troubles, et de le faire tenir quitte de toutes dettes, et arrérages
»• de cens du p assé, et jusqu’à l ’expiration desdites cinq années; même
» du droit de francfïef, s ’il en est dù au prorata desdites cinq années.
Il est aisé de voir., par cette c o n v e n t i o n , que le sieur M ab it
s attendait à n’avoir aucune difficulté
e t dame de V e r n i è r e :
sérieuse ave c les sieur
en e ff e t, il ne s’agissait que d’estimer
les jouissances faites depuis 1 7 7 4 . , et de les déduire sur les
3 .6 ,100 liv. ; d’après c e l a , et en supposant une ou deux années
em plo yé es à cette terminaison de p r o c è s , le sieur Ma b it pouvait
raisonnablement com pte r de jouir l u i - m ê m e
pendant 3 ans
desdits d o m a in e s , avant de les remettre au sieur Prince.
M a i s , c e n’était là qu’ un beau rêve., et le sieur de V e r n i è r e
préparait au sieur M a b i t une série de difficultés 3 qu’il avait
été loin de prévoir.
C e pe nd a nt des négociations furent entamées : le sieur L e g a y
p è r e , e x pe rt -g é o m è tr e , avait déjà fait des propositions au nom
d e la maison de V e r n i è r e ; le sieur Mabit se rendit à C l e r m o n t
ave c des fonds suffisans pour terminer. M . R e b o u l rédigea un
projet de traité qui fut ré v i sé ,
par M . res T o u t t é e p è r e , et
D a r t i s , il ne resrait que la somme à fixer : mais le sieur de
»Vernière la vo u lu t plus considérable que l’arrêt ne lui en d o n
nait le d r o it ; et le sieur Mabit fut forcé de re no nc er a un projet
de m é d i a t i o n , par lequ el il avait pr o u vé qu’il savait faire des
sacrifices.
�( I l ')
E n partant de C l e r m o n t ,
11 laissa
ses fonds en dép ôt., chez
le sieur d’A u b u s s o n , né g o cia nt ( i ) ; en faisant savoir aux per
sonnes qui avaient bien voulu s oc cu p er de c e tt e médiation y
que ces fonds seraient destinés a faire face a la dette du sieur
M a b i t , aussitôt que le sieur de V e rn i è re voudrait se borner à
des conditions que le sieur M a b i t pût adopter.
Après la rupture de cet a r r a n g e m e n t , les experts furent
no mmés par procès-verbal du bailliage de V i e , du 12 avril
1787.
Lo rs de h prestation de serment des e x p e r ts , les sieur et
dame de V e r n i è r e ann oncèrent une foule de demandes , résul
tantes des réserves qu’ils avaient fait insérer dans l’arrêt de
1781 : mais les experts ne se crurent pas autorisés à outre
passer les dispositions de c e t arrêt.
C e s experts ( R e d o u l y et T h o u r y ) , ne furent pas d’accord.
Redouly
estima les jouissances de chaque année a 1,800
liv. déduction faite des cas fortuits, des lab ou rs, s e m e n c e s ,
et réparations locat ive s; sauf néanmoins a déduire les i m p o
sitions royales et
autres charges
d é duc ti ble s, qu il n a v a i t
pu c a l c u l e r , parce que le sieur de V e rn iè re n’avait pas ju g é
à propos de remettre les extraits ni aucuns t i t r e s , quo ique
l ’expertise fut poursuivie à sa diligence.
T h o u r y estima les mêmes jouissances po ur chaque année
(1)
Ce dépôt est constaté par des pièces du procès, sous la date de
17 9 0 , et il l ’est encore plus par la consignation que le sieur Daubusson
fit de i5 ,5 o o liv. en assignats; consignation déclarée nulle par arrêt de
la Cour d’appel du 26 prairial an i 3 .
L e sieur Perret a touché cette som m e, et les intérêts (
23 ,000 liv . )
B 2
�(
h }6 ï o
12
)
l i v . , sy a n t fait les mêmes d é d u c t i o n s, sau f celles des
charges pour le m êm e motif.
..
Ils se ré unissent, a décla rer quMIs
n’o nt estimé aucuns
bestiaux ni c r o i t , parce q u ’ils n’en est pas men tion né dans
l ’antichrèse.
C e rapport est affirmé le 2 septembre
A cette épo qu e le sieur M a b i t
Vernière
178 7.
était absent, le sieur de
ne perdit pas un m o m e n t
pour obtenir un tiers
ex pe rt de son choix.
L e 1 2 du m ê m e m o i s , le sieur L e g a y fut n o m m é d’office
et le sieur M a b i t alarmé au-dela de toute expression, d ’avoir
po ur e x p e r t , celui
qui le premier en proposition
d’arran
g e m e n t , avait stipulé les intérêts de la maison de V e r n i è r e ,
se hâta de faire signifier une récusation.
L e sieur de V e rn iè re en poursuivit le dé bouté avec c h a l e u r ,
le bailliage de V i e délaissa les parties au pa rl e m e n t, ou après
une
foule
d'écritures
r e s p e c t iv e s , la
L e g a y fut confirmée par arrêt du 4 mai
nomination
du sieur
17.90.
Ma is rien ne tenait tant a c œ u r au sieur M a b i t , que de
s’ opposer à l’opération de c et expert (et les faits prouveront
b ie nt ô t s’il a calculé juste ) , il se pourvut au conseil d état
con tr e l ’arrêt qui le déboutait de sa récusation.
L e conseil était en séance pour y s a tu e r, lorsque le décret
de l’assemblée constituante lui apprit sa suppression.
La Cour
de cassation a été
ensuite saisie du
pourvoi ,
mais le sieur de V e r n i è r e } plus pressé 3 n ’avait pas m ê m e at?
�(
'3
,)
tendu pour faire opérer son tiers ex pe rt qu’on pût s a v o i r , s'il en
aurait l’autorisation ( i ) .
L e sieur L e g a y affirma son rapport le
1 6 a o ût 17^0.
II n’avait d'autre opération à faire qu’à c h e rc h e r un m o y e n
ter m e , qui fut de justice entre i ,800 liv. et 2, 6 <;o liv. s a u f la
déduction des charges foncières : le sieur de V e r n i è r e ne man
qua pas de lui f o u rn ir , à cet e f f e t , tous les titres nécessaires;
son e xp e rt de confiance ne pouvait pas être g ê n é en c e tt e
partie par l ’opinion de ses c oll èg ues à qui il avait affecté de
ne pas les confier (2).
P o u r ne pas anticiper sur les réflexions que fait naître en
fo ule le r apport du sieur L e g a y , il suffit de dire qu’il n’adopte
ni 2 , 5 5 0 liv. ni 1,800 liv. mais q u’en ex ce pt a nt de son estima-
(1) Pour ne pas revenir ensuite sur ce qui a été jugé au sujet de cette
récusation , il suffit de dire que la cour de cassation n ’a prononcé que le 3
pluviôse an 1 0 , et a rejeté le pourvoi.
L e sieur M abit ne craint pas d’avouer qu’il a fait tout ce qui était en lu i
pour n ’avoir pas un expert qu’il avait des motifs de suspecter. Il a eu la sa
tisfaction d’apprendre en 17 9 0 , par M M . les Conseillers d’état, après leur
suppression, que s’ils eussent ju g é, l ’arrêt aurait été cassé.
L e sieur de V ernière a fait sentir à cette occasion au sieur M abit qu’une
occasion de petite vengeance n ’était pas toujours à n ég lig e r; il a fait exécu
ter chez, le sieur M a b it, et vendre des lits , pendules et pincettes, pour Ie9
frais de cassation. Cependant le sieur M a b it, créancier des frais de C le rm ont et du parlem ent, n ’a pas usé de reprébailles ; on l ’a exécuté, quand
il devait croire a une compensation.
(2) C eci n ’est pas un fait simplement présumé; les extraits des cotes
sont
parmi les pièces de M . de V ern ière. sous la date du i 3 juillet 1787 ; et le
rapport des premiers experts n ’est affirmé que le 2 septembre
suivant.
�C »4 )
tion treize héritages sur vi ng t- hui t; en déduisant des charges
éteintes par l’a n t i c h r è s e , en doublant l ' i m p ô t , etc. il est par
venu à n’évaluer les joui ssa n ces , année c o m m u n e , qu’à .938 1,
6 sous 3 deniers.
P en dan t que les intérêts du sieur Mabi t étaient ainsi tr a it é s ,
les cinq ans de suspension qu’ il avait stipulés pour la mise e a
possession du sieur Prin ce s’étaient écoulés.
A l ’époque
fixe
du
mars
17851, le sieur Prin ce était
allé se présenter clans les do m a in e s, pour en prendre posses
sion et en faire constater l'état.
Su r le refus qu’il éprouva , il avait fait assigner le sieur
M a b i t le 14 juillet 1785?, devant le bailliage d ’Aurillac.
i.°
Pou r lui remettre des bestiaux et outils jusqu’à c o n
currence de 2,4.00 liv.;
2.0 P o u r lui c o m pt e r les jouissances depuis le 25- mars pré
cé de nt ;
3.0 P o u r le décharger de toutes hy po thè que s de la dame
de V e r n i è r e ;
4 . 0 P o u r faire désister ladite dame de V e r n i è r e des d o
maines à lu i vendus , aux offres par lui
de lui payer le prix
c o n v e n u , e t ce au moment ou il serait mis en possession.
S i n o n à lui rembourser les sommes par lui payées et les
l o y a u x - c o û t s de son acq u is itio n; plus 2 ^ 0 0 0 liv. de d o m mages-intérêts.
E n réponse à c e tt e d e m a n d e , le sieur M a b i t avait justifié
des diligences qu’il avait faites pour mettre le sieur Prince en
possession, et des obstacles survenus par la récusation néces«aire du sieur L e g a y .
�Néanmoins
( »s1 ) <
le sieur Prin ce obtint le y fevrier 17^0 une.
sentence par défaut adjudicative de ses conclusions.
S u r l’appel de cette sentence au par le me nt, le sieur P r i n c e
demanda l' e x é cu t io n pro visoi re, qui fit un incident appointé
à mettre et no n - ju g é .
A cette épo que e n c o r e , le sieur Prince prit occasion de sa
sentence par d é f a u t , pour faire des saisies-arrêts sur tous le s
débiteurs du sieur M a b i t , malgr é un arrêt de défense.
A u t r e procès au parlement à ce sujet: le sieur M a b i t ne
se défendait q u ’en donnant les mains à ce que le sieur Pr in ce
to uc hâ t les sommes dues par les tiers saisis, sa u f à en tenir
c o m p t e , a l ’ex cep ti on seulement de la som me de 1 5 ,5 0 0 li v.
déposée che z le sieur Daubusson., pour faire face en tant qu e
de besoin à la créan ce de la dame de V e r n i è r e .
S u r c e l a , arrêt sur productions respectives le
10 ju il le t
1 7 9 0 , qui fit ma in -l ev ée provisoire au sieur M a b i t desdits
saisies-arrêts, à la ch a rg e suivant ses offres de donner cau tio n
jusq u’a 30,000 liv. (1)
C ’est ainsi que le sieur Pr in ce harcelait le sieur M a b i t ,
pendant q u ’il avait besoin de tous ses m o y e n s , pour résister
aux efforts du sieur de V e r n i è r e , dont le but était de se main
tenir en possession.
Enfin quand le sieur de V e r n i è r e fut muni du rapport du
(1) L e sieur Prince a paralysé l ’effet de cet a rrêt, en contestant les
cautions offertes,
et lassant le sieur M abit qu’il publiait insolvable.—
D e l à sont nées des consignations, des procès et une privation pour le
sieur M abit de tous ses fonds disponibles depuis 1750.
�( I* )
sieur L e g a y , îl présenta une requête au parlement le 10 sep
tembre
17510,
par laquelle il co ncl ut
à ce que en h o m o
log uant le rapport du sieur L e g a y , le sieur Mabit fût tenu
de lui payer
i.° les 2 5, 3 00 l i v . , prix de l’antichrèse d ’après
l ’arrêt de 1 7 8 1 .
2.0
5,025
liv. pour l' e xc éd a n t de intérêts de ladite somme
sur les jouissances ;
3.0 5 , o o o liv. pour indemnité du pré Ôedissol, délaissé à
l 'a b b é L a r i b e ;
4.0 300 liv. par année pour les jouissances dudit pr é ;
10,000 liv.
pour indemnité
des héritages délaissés à
l a femme Cambon ;
5.° Les jouissances desdits héritages depuis 1 7 7 4 ;
7 . 0 721
liv. pour arrérages de c e n s , portés par sentence
'de 1578 ;
8.° 448 liv. pour les droits de Iods, payés à raison de l’antichrèse ;
p .° Les intérêts desdites deux sommes depuis
io.°
»578;
1 , 3 4 7 liv. pour les d eu x promesses r é s e r v é e s , ave c
intérêts depuis i 5 7 f .
( Nota. Ces conclusions ont été augmentés en l ’an i 3 , voyez page 2 i. )
A
peine ce tte requête fut signifiée,
agissant de c o n c er t c o m m e les dates le
senta une à son tour le
que le sieur P r i n c e ,
p r o u v e n t , en pré
du mêm e mo is, pour i n t e r v e n i r ,
c o m m e substitué au sieur M a b i t , au procès introduit par la
requête du
1 0 ; en conséquence il demanda à être mis en
possession des deux domaines en présence dudit sieur M a b i t ,
�(
>7 )
aux offres cle payer audit M a b i t , ce qu'il restait lui dev oir *
e t c e , aussi-tôt sa mise en possession: sinon et faute de c e
faire,
il
offrit
aussi de
payer
au sieur fde
Vernière
les
3 6 ,10 0 Iiv. portés par l’arrêt de 1781 et c o n c l u t , en ce c a s ,
con tr e le sieur M a b i t , à la répétition de ladite so mm e et de
Ce qu ’il lui avait déjà payé.
L e lendemain de ce tt e r e qu êt e , il en présenta une sec ond e
pour d emander l’adjudication provisoire de ses c o n c l u s i o n s }
cette demande fut appointée à mettre.
A son tour e n c o r e , le sieur de V e r n i è r e donna une nou
ve lle r e q u ê t e ,
pour
intervenir
dans la
demande du sieur
P r i n c e , c ’est-à-dire qu’il intervint dans sa propre instance.
.
A ce cahos de demandes, le sieur M a b i t ne répondait au
sieur Prince que par u n dilemme bien pressant: ou l ’acte que
je vous ai consenti en 1785 ( lui disait-il ) , est une électi on
de m i e u x , ou c ’est une vente. Dans le premier cas vous d e v e z
en me payant sans d é l a i , prendre sur votre c o m pt e toutes les
demandes du sieur de V e r n i è r e , et je n’ ai plus de procès à sou
tenir; dans le d e uxi èm e cas il y a lieu à lésion d’outre moitié.
T e l était l ’état de la p r o c é d u r e , lors de la suppression du
par lem en t: et de là jusqu’à la reprise des poursuites en l ’an
8 , il s’ est passé quelques faits intermédiaires, qu ’il suffira de
me nti on ner rapidement.
Q u a n t au sieur de V e r n i è r e demeuré en possession , il n y a
eu rien à demêler avec lui: il s’est seulement cru autorisé en
l ’an 7 à faire sur le sieur M a b i t une inscription de 60,000 liv.
L e sieur Prince assigné en 1790 pour les droits de lods de
son acte de 1783 , avait imaginé d ’assigner Je sieur M a b i t en
recours.
C
�(
*8
)
Condamné à V i e , il s’était pourvu au parlement et y avaîe
encore intimé le sieur Mabit; puis le tribunal de Figeac fut
saisi de cet appel en 17^2.
L à , le sieur M a b i t , for cé de plaider c o m m e vendeur, revint
à ce qu’ il avait demandé au parle me nt, et c o n c lu t à la réscision
de la cession par lui consentie en
1785 pour lésion d’outre
m o i t i é ; le sieur Pr in ce opposa que cette demande devait subir
d eu x degré s de j u r i d i c t i o n , et il n 'y fut pas statué.
L e 7 messidor an 7 , le sieur Prince profita d ’une circons
tance fav o ra b le , pour arriver tout d ’un coup à ce que tant de
personnes n’avaient pû obtenir; il paya les 25,300 liv. au sieur
de V e r n i è r e qui lui en donna qu it ta n ce , et l’autorisa à se me t
tre en possession des domaines de L ar ib e e t du T e i l au 2 ;
mars d e l a n S , sous réserve des bestiaux et c h e t e l , et sous la
réserve par le sieur de V e r n i è r e de répéter co ntr e le sieur
M a b i t , toutes les créances réservées par l’arrêt de 1 7 8 1 , sauf
le recours de M a b i t contre qui il avisera.
L e sieur Prince se mit do nc en possession, ne fit rien cons
tat er, et n’appela pas m ê m e le sieur Mabit.
E n l’an 8 il fut fait un c o m p r o m i s; mais le sieur Prince;
révoqua les arbitres, et il fallut rentrer en lice.
L e 25 germinal an 8, le sieur Prince assigna le sieur M a b i t
devant le tribunal de
Sai nt- Fl our . Par c e t ex ploi t qui fixe
ses con clu sio ns; il demande que Je sieur M a b i t soit cond amn é
à lui payer. i°. L es 26,300 liv. qu'il a payées le 7 messidor
an 7 av e c intérêts.
a.° Les jouissances des deux domaines depuis le 25; mars,
�( *J> )
I
culcure j
pou* Ja valeur des bestiaux et outils d'agrï-
^,p Les foins, pailles et fumier qui devaient se trouver aux
domaines en 178^;
j , ° L ’indemnité de soixante-dix-sept septerées sur le t é n e me nt de B a r a t o u , attendu qu’il n’en fût r é s e r v é ’que cinqu ant etrois , et q u Jil s’en trouve ce nt trente ;
6 ° L e s do m m a g es -in té r ê ts résultant de la n o n - jo u i s s a n c e
de la faculté de co uper du bois ;
7 ,# Les dégradations consistant dans l’éc rou lem en t d’une
maison et d ’une gran ge faute d’entretien ;
8.° L e s dégradations commises depuis « 7 8 9 ;
p.° A rapporter main-levée de l ’inscription de ¿0,000 liv.
faite par le sieur de V e r n i è r e ,
ou pa ye r ladite somme de
60,000 liv. av e c i n t é r ê t s ; payer e nc ore les dommages-intérêts
résultant de ladite inscription.
¡A u x offres faites par le sieur P r i n c e , de déduire sur le«
• om me s les moins pr ivi lé gié es, ce qu’il reste devoir au sieur
M a b i t depuis le 22 septembre 1783.
L e 2 floréal s u i v a n t , le sieur M a b i t d én on ça c e tt e de
mande au sieur de V e r n i è r e , et l’assigna en r e c o u r s , i . ° quant
au paiement des 26,300 liv. q u’il avait reçues mal à propos
avant d’en fixer la compensation ;
2.0
Q u a n t au paiement des jouissances; 5 / quant à la main
le vé e de l’inscription ; 4.0 quant aux dégradations.
L e p floréal suivant j le sieur Mabit assigna de sa part le
sieur P rin ce, pour conclure contre lui à la m ain-levée de*
Ca
�(
50
)
iJtisîes-arrêts sur lui faites a v e c d o m m a g e s - i n t é r ê t * , et pour
reprendre la demande en lésion intentée à F i g e a c , mais sur
laquelle le sieur Prin ce avait demandé à subir les deux degrés
de jurisdiction. Il soutint que toutes les demandes du sieur
Prin ce ne pouvaient être jugées en première i n s t a n c e , puis
que déjà il avait obtenu une sentence le j février i j ÿ o , de
laquelle il y eut appel au parlement.
L e tribunal civil d’Au r il la c rendit un ju ge me nt le 14 ther
midor an p , par lequel il retint la demande en paiement des
2 6 ,3 0 0 liv. et celle en indemnité du ténement de Baratou ,
et r e n vo ya la demande en lésion ; et au tr es , en la C o u r d'appel.
Mais y sur l’appel du sieur M a b i t , la C o u r , par son arrêt
du 2 6 prairial an 1 1 , infirma ledit j u g e m e n t , en ce que les
premiers juges n’avaient pas aussi r e n v o y é
la demande en
paieme nt des 26,300 liv.
L a C o u r ne re nvoya pas en première insta nc e, la demande
e n lésion par la raison seule que ce tt e demande avait été
f o rm é e à F i g e a c en de uxième ressort. L e sieur Ma bi t signifia
en ther mi dor an 1 1 qu’il sé désistait du droit de la poursuivre
en l’é tat où el'e é t a i t , sous réserve expresse de la reprendre
en première instance.
L e sieur Prin ce étant d é c é d é , la dame P e r r e t , sa fille, â re
pris les poursuites par exploit du 14. ventôse an 1 2 , où elle
a ajouté aux conclusions prises en l’an 8 , celles tendantes à
faire h o m o l o g u e r le désistement signifié par le sieur M a b i t de
«a demande en lésion , sans lui laisser le droit de la poursuivre
en premier degr é de jurisdiction.
t. D e sa part le sieur de V ernière, par «ne requête présenté«
�( 21 )
en la C o u r le a8 frimaire an 1 3 , a reno uve lé et e xpl iq ué toutes
ses préte nti ons ; il a diminué l’article 2 de ca requête du 10
septembre 1 7 5 0 , et a ajouté 6 nouveaux chefs de demande.
i.® E n paiement d’une somme de 2,000 liv. q u ’il dit avoir
été payé e pour la lé gitime de Charles L ar ib e en 1 Í P 4 ;
2.0
D e 2,000 liv. pour les améliorations par lui faites par
des burons à la m o n t a g n e , avec intérêts depuis la prise de
possession du sieur Pr in ce ;
3*° 3 j7 î>3 ü v. f sols pour les reconstructions d e s b a ti m e n s *
ave c intérêts depuis les quittances des ouvriers ;
4 .* $00 liv. pour les frais que le sieur de V e r n i è r e a é t é
o b li g é de faire pour se maintenir dans la jouissance des b ie n s ,
et en conserver la propriété à la famille L a r i b e ;
y . ° A ce que pour le paiement des sommes par lui d e m a n
d é e s , il soit autorisé à suivre l ’effet de son inscription sur les
deux domaines, et m êm e sur les autres biens des sieurs M a b i t
et Prin ce ;
. tf.® A u x c o û t des rapp or ts, et aux dépens.
M
O Y E N S .
L e dernier état de la procédure annonce à la c o u r , com
bien de délais et de lenteurs entraînerait cette interminable
a f f a ir e , s’il fallait ne pr oc éde r que pas à p a s ,
dans T o rd re
naturel qu’il faudrait suivre, pour obtenir une décision g é n é
rale sur toutes les difficultés.
D ’abord le sieur Perret ve ut faire juge r le désistement de
la lé s i o n , avant de revenir en pre mièr e in st a nc e , pour qu’il
y soie statué.
�( Ai )
Il lui reste en première instance ses eonclosicms en indem*
nité du ténement de tëaratou.
L e surplus de ses demandes en paiement des
a^ foo
liv»
joui ssan ces , c h e c e l , foins et pailles, d o m m a g e s - in t é r ê t s , dé
gradations et m a i n - le v é e , est pendant en la C o u r .
A l ’égard du sieur de V e r n i è r e toutes les contestations sont
pendantes devant la C o u r .
L ’expertise est v i c ie u s e , et c ’est en core une question préa
lable à examiner.
Ma is plus il est constant que les délais
brouillé l ’affaire
passés o n t
em
plus il est nécessaire de réunir toutes les
difficultés, pour que la C o u r soit à même de s t a t u e r , to u t
à la f o i s , sur ce qui peut être actuellement décidé , et pour
que les parties ne soient plus abandonnées à la divagation de
leurs demandes. L ’arrêt de 1781 a réservé des p r o c è s ; c ’est un
ma lh eu r:
mais si le sieur de V e r n i è r e se croit recevable à
s’en p r é v a l o i r , la C o u r jugera d’abord l ’effet de cette r é se rv e ,
en m êm e tems qu’elle statuera sur l’hom o lo g a ti on du rapport
L e g a y , et sur l’appel de la sentence obtenue par le sieur
P r i n c e en
179 0 . L e sieur M a b i t divisera do nc ses m o y e n * ,
en c e qui c o n c e r n e le sieur de V e r n i è r e et la dame Pe rre t ;
e t à l ’égard de chacun d ' e u x , il subdivisera sa défense en
autant de paragraphes qu’ils ont pris des chefs de conclusions.
Réponse
aux
dem andes du sieu r de V e r n iè r e .
,
L ’homologation du rapport le paiement des 1 6 3300 L
S. I . er
L ’ a r t i c l e des
00 liv. est aujourd’hui transporté au
�( *? )
«leur Pe rr et , et n*a d’ailleurs jamais ét é un sujet de contestation.
M a i s l ’hom o lo g a ti on du rapport du sieur L e g a y est le point
cur lequel le sieur de V e r n i è r e insiste ave c le plus de chaleur.
I l est certain que ce rapport est pour lui une p i è c e bien
essentielle ; c a r , par l ’effet du r a is o nn e m en t, c et expert e*t allé
jusqu’à pr ou ve r à c e u x qui auront la bo nté
de le croire ,
q u e deux domaines jugés par deux experts de 1 6 6 7 , d e vo ir
produire un revenu net de 1,315- liv. à c e t t e é p o q u e , n’o n t
cependant p r o d u it , cent v in g t- d e u x ans après, qu’un revenu
de P38 livres.
S i ce tte monstrueuse opération devait su b s is te r, il faudrait
rega rde r c o m m e une calamité le besoin où sont les tribu naux
et les parties de recourir à des experts : heureusement il est
permis de se po urv oi r contre leurs décisions ; et s i fo r t e raù on es non concludunty l ’équité et la jurisprudence ne pe rmet
tent pas que l’une des parties soient vic tim e de leurs erreurs.
L a C o u r se rappelle que les deux premiers experts étaient
divisés entre 1,800 liv. et 2 , 6 j o liv. de produit annuel ; tous
d e u x à la vér it é avaient laissé en arrière les impositions et
charges foncières : mais tous deux déclaraient avoir fait toutes
les autres d é d u c t i o n s , mêm e celle des cas fortuits.
L ’expert L e g a y n’avait d o n c , c o m m e tiers e x p e r t ,
q u ’à
départager ses c o l l è g u e s , et ensuite à déduire les charges d’a
près les quittances produites.
Si le sieur L e g a y eut borné son opération à ce qui était
de son d e v o i r ; si partageant m êm e l ’avis de R e d o u l y , il se
fût borné à 1,800 liv.; quelque modique que fût ce tte somme,
po ur une terre considérable j on ne pourrait au moins pas lui
�( *4 )
reprocher cette affectation ch o q ua nt e de c o nt ro uv e r des d é
ductions infinies et i n u s i t é e s , à chaque anné e de son esti
mation.
A chaque a n n é e , le sieur L e g a y , prenant le m o ye n t e r m e ,
est forcé de reconnaître que le produit annuel des biens est bien
au-dessus de 1,800 liv. sa moindre année est de 1,960 liv. la
plus forte est de 3,109 liv. toutes les autres années passent
a , 000 liv. A u total de 1774. à 1 7 8 9 , l ’année c o m m u n e est
estimée à 2,388 liv. 9 sous.
Ce rte s le sieur L e g a y ne sera pas suspect au sieur de V e r
nière , dans ces évaluations; c a r , sur vingt-huit héritages dont
les domaines sont c o m p o s é s , il en laisse treize sans estim a
tion.
A co m bi e n do nc aurait - il po rté l ’évaluation s’il eût
t o u t calculé ?
C o m m e n t le sieur L e g a y s’est-il don c do nné le droit ar
bitraire de faire ce tte omission? il a d i t , quant aux bâtimens,
g r a n g e s , v e rg e rs et ja rd in s, je fixe leur revenu à ^/"o, parce
qu e dans un domaine , ce n’est là q u u n accessoire ? V o i la toute
la raison qu’ il en donne.
I l en dit autant d’un m o u l i n ; il ne peut servir ( d i t - i l ) ,
q u ’aux personnes qui habit ent la ma ison, et si par fo is , il sert
à
quelques a u t r e s , les frais d ’entretien absorbent l e produit.
O n s’attendait qu’un bois de haute futaie , essence de chê ne
e t un bois t a il lis , auraient au moins trouvé grâce devant ce t
e xp e rt ; poi nt du to ut : il suppose qu’on n’y a rien coupé
( malgré les reconstructions articulées au procès par le sieur
de V e r n i è r e ) et il pense que ce tte nature de biens est plutôt
une jouissance p assive qu’ utile. En fin il d é co u v re une e x c e l
le nt e
�( 2? )
le nte raison pour effacer les bois de son rapport. Ils n’ étaient
pas porté s, dit-i l, aux rôles des impositions; c o m m e si le sieur
L e g a y ig n or a it , que c ’est pour la première fois, en 1 7 5 1 , que
les bois de haute futaie ont été cotisés pour leur produit, d ’après
la loi du premier décembre J7po.
L e s montagnes et herbages valaient enfin la peine d’être
comptées pour quelque c h o s e , puisque M . d e V e r n i è r e d e m a n d e
aujourd’hui ¿,000 liv. pour les améliorations q u ’il y a faites;
poi nt du tout e n c o r e , le sieur L e g a y dit qu ’elles n’ont rap
p or té aucuns revenus.
V o i l à c e p en d a n t , ave c quels élémens le sieur L e g a y a c o m
m en cé son est imation, pour l’a finir, pour ainsi d i r e , malgré
lui-même à 2,508 liv. p so ls , année com mu ne .
Mais vient ensuite le travail des déduc tio ns, et c ’est ici oti
le sieur L e g a y s’est ingénié à les multiplier; sans se souvenir
du travail de ses co nfr ère s, et sans se souvenir qu’il fallait être
con séq ue nt av e c ce qu'il vena it de dire.
i.°
A p r è s avoir porté à ^éro le produit des bâtimens et
jardins, il dit qu’il faut déduire les frais de leur entretien.
a*° D é d u c t i o n
des cen s:
c ’est la pencarte
du M u r
de
Barrés qu’il va che rche r à cinq lieues du domaine , tandis que
A u ri ll a c n’en est qu’à deux lieues; mais la mesure du M u r de
Barrés à un tiers en sus.
j . ° Déductio n des im po s ition s , et ici le sieur L e g a y
a fait un coup d’autorité qui passe les bornes de l ’exp er
t i s e ; cha rgé de déduire l ’i m p ô t , il a voulu doubler la d é d u c
t i o n , et voilà com m ent il s’y est pris: le sie u r d e C a l d a g u é s ,
a - i - i l d i t , comm e p r i v i l é g i é , n’a été imposé qu’à m i - t a r i f , il
. D
�( ai )
n’est pas juste qu’ un autre jouisse de son p r i v i lè g e ; en c o n s é
quence il faut lui rembourser le double de ce q u ’il a payé :
certes il est impossible que la C o u r ne soit pas révo lté e de
c et te manière d ’opérer. S ’il était poss ib le, en restitution de
jouissance, d ’obtenir plus qu’on a p a y é , on ferait remarquer
au sieur de V e r n i è r e que les forains privilégiés étaient ord i
nairement imposés av e c r i g u e u r , précisément parce q u ’ils g r e
vaient la paroisse par le mi-tarif; on ferait remarquer aussi que
les privilégiés payaient des ving tième s bien plus considérables
que les aut res , et que cependant le sieur L e g a y n ’a pas ju g é
à propos de réduire sur le v i n g t i è m e , dès q u ’il doublait l' i m
position. En fin le sieur M a b i t ajoutera que si
le sieur de
V e r n i è r e se fût désisté de s ui te , les d e u x domaines auraient
é t é donnés au sieur de C a l o n n e , gendre du sieur M a b i t , tout
aussi privilégié que le sieur de C a l d a g u é s ,
qui
n’avait pas
plus de privilège que le premier propriétaire, L ag a rd e .
4..0 L e
sieur
Legay a
déduit
une
fo ndation
due
aux
prêtres de P o l m i n h a c , et c ’est au moins un double emploi :
car l ’acte de 16 6 7 prouve que le sieur de C a l d a g u é s , en se
c har gea nt de payer l’abbé L a r i b e , le cha rg e l u i - m ê m e d ’ac
quitter ce tt e fond ation ; c e capital fut compris dans les 2 5 ,3 0 0
l i v . , de sorte que le sieur de
Vernière
aurait deux fois la
m ê m e c h o se ; mais comm ent le sieur L e g a y a-t-il supposé qu e
le sieur de V e r n i è r e avait p a y é , en 1774, et années suivantes,
cette
fondation annuelle? il laisse croire q u ’il a fait ce tt e
d é du ct io n sur les quit tan ces , mais on défie le sieur de V e r n i è r e
de les pr o d u ir e , car jamais la fondation
n’a é té à sa ch a rg e.
j.° Le sieur Legay déduit encore un huitième de ce qui lui
reste, pour les cas fortuits, en se fondant sur le titre d assiette
�( 2? )
des rentes de la c o u tu m e d ’ A u v e r g n e ; mais n’est-ce pas là
abuser de t o u t , après avoir supprimé tout-à-fait treize articles;
car si les produits des m o u l i n s , des b o i s , des jardins et des
bâtimens étaient des objets sujets à cas f o r t u it s , c ’était là q u ’il
f a l la i t appliquer le titre
de l ’assiette des rentes, et dé duire
un huitième ; mais quand le sieur L e g a y en a porté le produit à
%ero, parce qu ’il est fort uit , co mme nta-t-il osé ensuite réduire
un h u i t i è m e à 1 égard des produits les plus fixes et les moins
sujets à variation?
6 .° L e sieur L e g a y avertit q u ’il a eu égard en I . re l i g n e *
à ce que les bestiaux appartenaient au sieur de C a l d a g u é s ,
c ’est-à-dire q u ’il a moins estimé le produit b r u t , parce que
les domaines éta ient par ce m o y e n isolés et réduits à une
ex ploitation
é t r a n g è r e : mais il y a là un double préjudice
co nt r e le sieur M a b i t ; car en premier lieu toute la différence
devait être de ne pas estimer un croît de b es ti au x; en d e u
x i è m e l i e u , ces bestiaux se nourrissaient dans les paccages ec
m on ta gn es des domaines , que le sieur L e g a y a c o m p té pour
r i e n ; ainsi il a fait nourrir aux dépens du sieur M a b i t , des
b e st i a u x , dont le prod uit non-seulement a resté tout entier au
sieur de V e r n i è r e , mais qui e n c o r e , en vivant aux dépens des
d o m a i n e s , sont cause que le produit en est porté plus bas.
C e s bestiaux étant cotisés avant 17«?«, le sieur Ma b it ne pro
fitant pas de leur p r o d u it , il ne devait donc pas supporter cette,
imposition c o m m e le sieur L e g a y l ’a lui fait supp or ter , puis
q u ’il la double au contraire dans ses déductions.
V o i l à la justice du tiers e x p e r t ; c ’est ainsi qu’il a raisonné
e t o p é r é , pour parvenir à la vé ri té , à la solution d’un problème
D a
�( =8 )
bien difficile, dès qu'il s’agissait de rendre les revenus de 1 7 7 4
à
1785) beaucoup moindres q u ’il n’étaient en 1 6 6 7 , malgré
e n c o r e de prétendues améliorations.
L e sieur M ab it ne suppose pas m ê m e , q ue la Co u r mette
en q uesti on, si cet étr ange rapport doit être h o m o l o g u é , il
ne peut s’attendre à une injustice c r i a n t e ; en conséquence
les conclusions q u ’il a prises en am endement n’exig ent pas
d ’autre développement de sa part,
Cependant il est une voie d’abréviation que le sieur M a b it
indiquera l ui-m ê m e à la C o u r , quoiqu’il doive beaucoup y
p e r d r e ; la v o i c i :
L e sieur L e g a y , c o m m e tiers e x pe r t , a dû , suivant l’usage %
prendre un terme m o y e n , il l’a fa it: Tannée c o m m u n e de
son estimation est de 2,308 1. p so ls , sau f déduction de l ’im p ô t
et des charges.
Qu an d le sieur L e g a y a voulu faire par a v a n c e , et sans
m is sio n, l ’estimation de 1 7 9 0 , il a porté le revenu net d e
ladite an né e 1 7 9 0 , et années a v e n ir , à i , 6 o o liv.
So n m o tif a été qu ’alors, les privilèges aya nt c e s s é , il n’était
plus question de doubler l ' i m p ô t ; si donc pour le passé, il
était ridicule de le d o u b le r , le taux de 1790 peut servir d e
poin t comparatif, et alors le sieur M ab it fera une proposition
te lle m e n t modérée qu ’elle prouvera sûrement combien il désire
a c h e te r la fin du procès par des sacrifices.
Il conse nti ra, que
toutes les années
1 7 7 4 et
su iv a nt e s,
soient fixées a 1,600 liv. de produit net et franc de toutes
c ha rg es ; tmis ce co nsenteme nt est intégral et indivisible.
«Sil n’est pas nd>pté, il persiste à une nouvelle ex pe r tis e;
elle est c o m m a n d é e par la juscicei elle est d ’ailleurs néces-
�( 39
)
s a i r e , en ce c a s , pour les années postérieures au rapport des
premiers experts.
A u j o u r d ’hui il n’ y aura plus l ’in convénient des tierces exp er
tises, dès que le co de de procédure ve ut le co nc ou rs de trois
experts: leur travail sera do nc la règle invariable des par ti es,
pour toutes les années sujetes à estimation,
§.
I I.
JJexcédant de Vintérêt sur les jouissances .
E n 179 0, le sieur de V e r n i è r e demandait 6,026 l i v . , aujour
d ’hui il se borne à 4 ,^ 7 4 l i v . , parce q u ’il v e u t bien déduire
les v i n g ti è m e s , qu’il avait oubliés.
L ’arrêt de 1 7 8 1 , ne pr é vo ya it pas qu’il se tr ou vât un expert
au m o n d e , capable d’estimer après 1 7 7 4 les jouissances de
ces deux domaines au-dessous du prix de l ’année 1 6 6 7 : aussi
a-t-il condamné seulement le sieur de V e r n i è r e à payer au
sieur M a b i t l'ex céd a n t des jo u issa n c es.
L e sieur de V e r n i è r e lui-même ne le prévoyait pas davan
tag e ; car loin de demander, avant la découverte du sieur L e g a y ,
un ex céd ant d’in té rê t, il concluait le 10 avril er le 10 sep
tembre
1 7 9 0 , à être autorisé à jo u ir sans rendre co m p te, et
pour le seul revenu des 26,300 liv.
Mai ntenant que le sieur L e g a y a par lé, le sieur de V e r
nière veut absolument rendre c o m pt e et même avoir un e x c é
dant d ’ intérêt; à la vérité il s’arrête à propos, car dans sa
requ ête du 28 frimaire an 1 5 , par une inconséquence vra im en t
b i z a r r e , il demande à compenser les intérêts des 26,300 liy,
ave c les jouissances pour les années postérieures à 178$,
�(
)
L a cause de cette variation se devine a is é m e n t , et le sieur
de V e r n i è r e aime mi eux être incon sé qu ent q ue d ’y perdre,'
c ’est que L e g a y a porté ces dernières années à 1,600 liv. tan
dis que l'intérêt est de 1,515: liv. s e u le m e n t , voilà pourquoi
le sieur de V e r n i è r e offre cette fois une compensation.
L a loi est faite aux parties par l ’arrêt de
1781 , le sieur
de V e r n iè r e doit l’e xc é d a nt des jouissances, et le sieur Mabic
ne doit payer aucun ex céd a nt
Re m a rq u o ns e n c o r e , que les 26,300 liv. se c om pos ant en
grande partie d’intérêt des sommes d u e s , ne do ive nt produire
d ’autre i n té r ê t, que pour les capitaux seulement.
Si la C o u r croit devoir s’écarter des expressions de cet arrêt,
in voq ué cependant par le sieur de V e r n iè r e quand il y trouve
son i n t é r ê t , alors ce c h e f de demande doit rester en suspens
jusqu’à la no uve lle e x p e r t i s e , qui réglera toutes les estimations.
5.
III
et
IV .
U indemnité du pré B édissol.— Jouissances dudit pré.
E n 1 7 9 0 , le sieur Mab it ne pouvait répondre au sieur de
V e r n i è r e sur ce c h e f , que par l’acte de 1 6 6 7 , d’où résultait
néanmoins une réfutation suffisante.
E n 18 0 6 ,
11 a j) u t e r a
à ce tt e r é po ns e , la mention d ’un acte
du fait m ê m e du sieur de V e r n i è r e ou de c e u x qu ’il repré
se n t e , et dont il est surprenant qu’on lui ait c a c h é l ’existence.
En
1 6 6 7 , Ie
sieur de Cal dagués voulait deux
domaines
valant 2 6 ,3 00 l i v . , et il n’était c r é a n c i e r , malgr é toutes ses ces
sions , qu e de 22,21 2 liv. Il acquit don c de g r é a g ré d autres
c r é a n c e s , parmi lesquelles
était le
titre cl érical de l abb é
�( ?t
)
L a r i b s ; ce titre était du revenu de 60 liv. pendant sa v i e , dont
le capital fut porté à 1,600 l i v . ; le sieur de Cald ag ué s pouvait
les payer en a r g e n t , il pouvait aussi délaisser ceux des fonds
de la succession qui y éta ient hypothéqués.
Il
ne fit ni l’un ni l ’a u t r e , et préféra donner un sien pré
appelé de Bédissol.
C e pré valait 1,000 liv. de plus que les 1,600 l i v . , puisque
le sieur de Cal dagués eut quittance de 600 liv. d ’une part, et
4.00 liv. d ’autre.
Ce pendant c ’est à cette mêm e plus v a l u e , ainsi p a y é e , que
prétend aujourd’hui le sieur de V e r n i è r e , à la vérité en pre
n ant une tournure plus spécieuse.
\ L e mo t éch a n g e, é n o n c é dans les deux actes de 1 6 6 7 , la lui
a s u g g é r é e : il dit au sieur Mabie,y<? devois fournir à l ’abbé
L ar i b e des fonds de la succession pour 1,600 l i v ., je lui ai
do nné en éc ha ng e un pré qui vaut à présent 7,600 liv. O n
m ’é v i n c e de ce que je gardais en c o n tr e - é c h a n g e , d o n c il faut
que je trouve mo n pré ou au moins la plus value des 1,600 1.
D ’abord le sieur de Cald agués ne devait pas des fonds. U n
titre clérical emporte une h y p o t h è q u e , mais non la p r o p r i é t é ;
l e sieur de Caldagu és a donné un sien pré, pour s'acq uitt er
des 1,600 liv. et de 1,000 liv. en su s, c ’est là une vente e t
non un éch an g e, puisque le prix est in numerato\ d'ailleurs la
plus value fut payée à l ’é p o q u e , et ne doit plus l ’être.
L e sieur de V e r n i è r e , pour être c o n sé q u e n t, ne devait pas
recevoir toute la somme de 26,300 l i v ., s’il voulait garder le
droit de prétendre à une i n d e m n i t é , sous prétexte d 'é c h a n ge .
M a i s où est le con trat d 'éch an ge quand il n'y a d’une part
�( 3* )
que cîe l’argent. L e sieur de
reçue en
V e r n i è r e , outre la plus v a l u e ,
1 6 5 7 , a to uc hé les
1,600 liv. en l ’an 7 ,
puisque
cette somme est comprise dans les 26,300 li v .; il n’a do nc
rien à demander.
Jusqu’ici le sieur de V e r n i è r e persuade à la C o u r quJil est
év in cé du pré Bédi ssol, er que ne pouvant l’avoir en na tu re ,
dès que sans doute il a été aliéné par les héritiers de 1 abbé
L a r i b e , il faut lui en payer la valeur.
E h bien ! c ’est le sieur de Cald ag ué s lui-même qui
1a
vendu !
la vente est du 20 juin 1 7 1 4 , et sera produite si le sieur de
V e r n i è r e le désire; le renseignement e n v i e n t de ses propres
papiers.
Ainsi, c o m m e cela est vraisemblable, un titre clérical n’étant
q u ’une chose v i a g è r e , la rente étant seulement h y p o th é q u é e
sur les fonds de la succession, le sieur de Ca ld a g u é s ne d ut
donner à l’abbé L a r i b e , qu’ un é c h a n g e d’h y p o th è q u e : voilà
pourquo i le pré Bédissol revint dans ses mains.
Il est inutile s m s doute de répondre au m o y e n du sieur
de V e r n i è r e , que l’arrêt de 1781 lui accorde ce tte indemnité
e t les s u i v a n te s , qu ainsi c est chose jugé e.
C a r il fut inséré seulement en l’arrêt, ( e t sans doute pour le
con so ler de la perte
d’un procès par 1 ex pectative de plusieurs
autres ) ; s a u f à fa ir e valoir e t c ., défenses contraires réservéts à
M a b i t , et au sieur Lag ar de .
§.
V
et
V I.
Indemnités des héritages délaissés en 1 6 7 0 . - - Jouis
sances de ces héritages.
Cette demande est, s’il est possible, plus mauvaise encore
que
�( I? )
que la p r é c é d e n t e ; car le titre m êm e sur lequel
le sieur de
V e r n i è r e la f o n d e , est le meilleur m o y e u du sieur Ma bi t pour
la faire rejeter.
L e sieur de Cal dagués se chargea en 16 6y pour augm en ter
sa c r é a n c e , de payer à Jeanne L a r i b e , femme C a m b o n , une
so mm e de 2,3 f 7 liv.
Le
1 1 mai 1 6 7 0 , il lui délaissa des héritages à lui appar-
tenans , pour se Libérer du paiem ent de ladite somme.
Si ce délaissement se trouvait une a li é n a ti o n , il suffirait de
répondre au sieur de V e r n i è r e , que le sieur de Cal da gu és, ayant
délaissé de ses héritages pour s'acquitter d ’une som m e due et
pour faire sa condition me il le ur e, c ’est là une opération qui
était dans son intérêt seul: et il est étrange qu’il v e u i l l e , ce nt
v in g t ans a p r è s , rendre qui que ce soit responsable de ce
q u ’il a préféré payer en bien fonds.
Mais à cette ré p o n se , qui serait décisive, s’en joint une qui
l ’est bien da va nt a g e; c'est que le sieur de Caldagués ne délaissa
à Jeanne Laribe les immeubles en 1670, q t à titre d'hypothèque\
il ne les lui délaissa que pour en jo u ir ju s q u à l e ffe c tif pait~
m ent de ladite somme de 2, 3^7 liv.
D ’après cela rien n'empêcherait le sieur de V e r n i è r e , de
retirer les immeubles abandonnés en 16 7 0, rien ne l’en a em
pêché de les retirer en 1 7 7 4 ; et il est c h o q u a n t , q u ’il vienne
argumen ter de c et acte de 1 6 7 0 , co m m e d’un sacrifice f o r c é ,
po ur prétendre q u ’il lui est dû 10,000 liv. de capital, en indém.
nité de ce qu’il a perdu.
Si le sieur de V e rn iè re n’a pas ju g é à propos de rentrer da ns
ces immeubles en
1774;
c ’est <lue depuis lo n g - t e m s le sieur
E
�C
34 )
de C a ld s g u és y était rentré et m ê m e
les avait vendus en
1 7 5 ° , par acte reçu R a s t i g n a c , notaire à Ra u lh a c.
V o i là ce que le sieur de V e r n i è r e aurait peut-être dû r é
véler lors du procès de 1 7 7 4 ; au lieu de se faire des réserves
fondées sur l ’ignorance où devait être le sieur M a b i t d ’un fait
étranger.
E n un m o t , le sieur de V e r n i è r e s’est c har gé en 1 6 ^ 7 , de
payer à Jeanne Laribe 2,3^7 l i v . , pour avoir le droit de p u i r
des domaines de Laribe et du T e i l ; il en a joui pour l’intérêt
de 25,500 liv. et a reçu les 26,500 liv. ; donc il est payé en tiè
re me n t de tout ce qui a com po sé ses créances.
§.
V II.
Arrérages de cens portés par sentence de 1 6 7 8 .
L e sieur de V e r n i è r e a reçu en 1667 deux domaines impignorés pour 2 6 ,3 0 0 l i v . , il a laissé à ses débiteurs d’autres
b ie ns , et nota mme nt le domaine de Besse, dont il s est emparé
ensuite sans qu ’on sache c om me nt .
L e s titres de créa nc e, qu’il s’est procuré ensuite, lui ont bien
donné unea ct ion pour se pourvoir, paraction personnelle c o nt re
ses débiteurs, et par action hy po th é c a ire contre le domaine
de Besse; mais a-t-il pû ou voulu a ug me nte r la charge d h y p o
th èq u e des domaines
de
L ar ib e et du T e i l ? cela
n est ni
démo ntré ni vraisemblable.
E n 1 6 6 7 , il fit vérifier que ces deux domaines ne pouvaient
«uffire q u ’à faire face à l’intérêt de 25.300 liv.
Lorsqu'ensuite il a au gmenté sa c r é a n c e , il n’est pas à pré«umer qu ’il ait abandonné les biens libres pour surcharger le»
�( K )
biens grévéa: personne ne po v^ic l’y confraindr®, et les faits
p a rje n t , puisqu il s esc rnis ensuite en possession du domaine
de Bjsse.
Maintenant à l’égard du sieur M a b i t , quelle action a-t-il
pour le forcer à payer une dette étrangère à l’antichrèse?
L e sieur Ma bi t est subrogé aux Laribe pour les domaines
de Laribe et du T e l 1; il n’est o b ’igé par son a c t e , que de
paye r les sommes comprises en ce tte antichrèse, c ’est-à-dire
2 5, j c o
<
livres.
L e sieur de V e r n i è r e n'a do nc qu’une action personnelle
pour le surplus, contre le représentant de la maison L a r i b e , et
demander si bon
lui semblait l’exécutorialité de la sentence
de 16 7 8 : car on n’a jamais vu attaquer un acquéreur avant
d ’av'oir un titre personnel contre le vendeur.
D ’ail leurs, à l’égard du sieur M a b i t , et quand on le pour
suivrait par l’action hy pothécaire, l’ex ception cedendarum actionuni le garantit de toute recherche.
■ Perso nne n’ignore que la caution e ll e- mê m e est fondée à
u s e r de cette e x c e p t i o n , parce qu il est de justice qu en la
forçant à payer la dette d’autrui, on soit forcé de s u b r o g e r ;
et la subrogation n’est v a l a b l e , q u ’autant que l ’action cé d é e
par le créancier est entière et conservée.
C e s principes
anciens
sont maintenus
par l’article 2037
du c o de c i v i i , qui pro no nc e m êm e l’extinction du ca ut ion
ne me nt f o r m e l , lorsque la subrogation a u x dioits hypothèques
e t privilèges du créa n cier , ne p eut p lu s , p ar le f a i t de ce créaitc u r f s’opérer en fa v e u r de la caution.
'
O r , le sieur Mdbit dira au sieur de V e r n i è r e : quand vous
obtîntes une sentence en 1678 pour des cens, vous aviez un
E 2
�I ys )
pri vilè ge sur le domaine de B e s se , débiteur de partie de e t
c e n s:
commsnt
pouvez-vous
m’y
subroger,
puisque
ce
domaine n’est plus dans la famille? Il faut do nc que vous re
m e t t i e z , à mon é g a r d , les choses au
m êm e
état où elles
étaient en 1 6 7 8 ; il faut que vous me rendiez les biens de
la famille alors
existans
pour que
j ’y e x er c e vos
droits »
sinon vous ne po uv e z me contraindre au paiement.
C e t t e observation décisive dispense d’ex aminer la question
de sa v o i r , si la créance du sieur de V e r n i è r e est pr e s c r i te ;
il croit q u ’ ayant joui d’un g a g e il n ’a pas prescrit; mais cela
ne serait vrai que hors l’hypothèque, spéciale; car il répugne
au bon sens que c e l u i , à qui on laisserait un immeuble de.
3,000 l i v . , pour une dette de 3,000 l i v . , pût ensuite se faire
des créances de 100,000 liv. et soutenir q u ’elles n’ont jamais
pre scr it , parce q u ’il avait un g a g e de 3,000 liv.
Au reste, le sieur de V e rn i è re n'a plus ce g a g e depuis 1774,.
dès que les
domaines ont été ve nd us;
il devait don c au
moins se mettre en réglé depuis ce tte é p o q u e , et il a laissé
passer plus de trente ans, sans poursuivre les vrais débiteurs
de ce q u ’il entend récl am er; o r , il est responsable de la pres
cription courue pendant ses poursuites, ainsi que la C o u r la
j u g é les 27 thermidor an 8 et 17 messidor an 11.
Mais encore une fois, il ne f i u t pas surcharger ce tte cause,
de m oye ns inutiles; les principes veule nt que
le sieur de
V e r n i è r e ne puisse forcer le sieur M a b i t à payer
les dettes
de la maison L a r i b e , étrangères aux 26,300 l i v ., par cela seul
qu ’il ne lui a pas conservé les privilèges et h y p o t h è q u e s , exis?
tans en
1 67 B: et l’équité c omma nd e en core
plus impérati
veme nt au sîtur de V e r n i è r e de ne pas intenter des actions,.
�(
37
)
qu’il est présumé avoir éteintes depuis I o n g - t em s , dès q u ’il
s’est emparé du domaine de B e s s e , qui était le g a g e de ce qu’il
demande.
5.
V III
et I X .
L e s droits de lods adjugés par la même sentence .—
L e s intérêts*
L e sieur de V e r n i è r e demandait pour c e t article 448 liv.
en 1 7 9 0 , fondé sur la sentence de 1 6 7 8 , qui ne les liquide pas;
aujourd huy il les porte à 580 l i v ., d ’après un traité sous seingp r i v é , fait en 169 4 ave c le fermier.
C ’est ici une dette personnellè au sieur de C a l d a g u é s , et eri
effet lors de l ’arrêt de 1 7 8 1 , il n’a pas eu m ê m e idée de s’en
faire la réserve.
L e s droits de lods ne sont dus que pour les ventes ; à la v é
rité quand le titre de possession la prorogeait au-delà de dix
a ns , l’usage était d’accorder des droits de lods; mais ce n’étaic
là q u ’une indu lge nce pour les fermiers, afin d abréger le tems
d é leur surveillance, et d’empêcher les mutations frauduleuses.
Q u o i q u ’ il en soit de cet usage , la charge était imposée sur
le possesseur de dix ans; mais c ’est vraiment une idée nouve lle et
choqu ant e que d’appeler le propriétaire d ’un fo nd s, pour payer
le droit de lods de la cession q u ’il en a faite. Po ur qu o i le sieur
de V e r n i è r e n’a-t-il pas imaginé aussi de demander les loya ux
coi'ts de toutes les cessions q u ’il s’est procurées lors de l’an«
ti ch rè s e , et les loyaux coûts de J’antichrèse el le-m ême? C a r il
y a parité de moyens.
-
L ’arrêt de 17 8 1, dit le sieur de V e r n i è r e , ordonne
en quelque-
sorte c e tt e restitution; mais c ’eut été ordonner ce qu’il ne'de**
�( 38 )
mandait pas: d ’ailleurs l’arrêt n'eut fair que réserver l ’a r t i o n ,
et il est évident qu’elle n’est fond ée sur rien. L e sieur de C a l dagués entendit si b>en , dans le t e m s , que ces droits de lods le
concernaient s e u l , qu’il n’en forma aucune demande.
S.
X.
L e s deux promesses réservees en 1 66 y avec Vintérêt
depuis l 6
7 î-
L e sieur de Cald ag ué s se fit en 1667 la réserve d’un p r o c è s ,
c o m m e le sieur de V e r n i è r e e n 1781 s’en est réservé plusieurs
ai.trcs. 11 voulut faire exprimer dans l’antichrèse que deux pro
messes montant à 1,54-7 liv. n'étaient pas comprises dans ses
créances actives, parce qu’en effet il n’avait pas d ’action pour
les réclamer.
Il fallait bien en effet qu’il n’eut pas d ’a c t io n ; car o b l ’g é
pour devenir créancier de 26.300 liv. de prendre des trans
ports d ’autres cr éances, il lui eut été bien plus avantageux de
porter ses propres créances en ligne de c o m p t e : mais ces deux
promesses n’étaient .qu’un vain ti tre , et en voilà l’origine.
L e sieur Lari be avait cédé au sieur de C a l d a g u é s , une obli
gation de 1,3 j o liv. due par le sieur de P r a la t , sous la date
de 1722.
L e s biens du sieur de Pralat furent mis en snisie r é e l l e , et le
sieur de Ca ld a g u é s, après avoir fait quelques d il ig e n c es , revint
c o nt re le sieur L a r i b e , qui lui remboursa ladite som me de 13 j o
liv. au m o ye n de quoi le sieur de Calda gu és rétrocéda l ’obli
gation au sieur L a r i b e , pour en être pavé c o m m e il aviserait.
M aïs le sieur de C a ld a g u é s , ne vou lrn t perdre ni les intérêts
de son a r g e n t , ni ses frais a van cé s, fit faire d ’abord en 164.*
�(
3P
)
au sieur Laribe p è r e , un billet portant: « Je confesse devoir à
» Al. C a l d a g u é s , avo cat de C a r l a d e z , la som me de 6<jo l i v . ,
» procédant des intérêts et dépens à lui adjugés par sentence
» de 173 j , laquelle somme promets payer audit sieur, lo ts et
» au cas que j e sois colloque pour les intérêts et d ép en s, aux
» criées conduites au bailliage d ’A u r i ll a c , etc. »
N e u f ans après, c e s criées n’avaient sans doute rien pro du it ;
et le sieur de C a l d a g u é s , toujours vi g il an t , voulu t e n c or e un
titre de plus pour les mêmes in térêts, qui ne couraient plus
depuis l ’époque
du remboursement du principal.
U n nouveau billet fut fait en
i
6ji
, et il est é v i d e n t qu'on
ajouta au capital de 1, 370 liv. les intérêts calculés en 163.2;
car ce d e ux ièm e billet est ainsi co n c»u :
« Je soussigné confesse devoir audit sieur Caldagués, outre la somme
y ci-dessus et autres pour certaines causes et considérations, la somme
» de 657 liv. 16 sols procédant des intérêts à lui adjugé», contre le sieur
p de Pralat, par ladite sentence, que ledit sieur Caldagués ma fait cession,
» nonobstant qu’au m oyen de ladite cession je dusse prétendre lesJita
» intérêts m ’appartenir, et auxquels pour lesdites causes et considérations,
» je renonce en sa faveur, laquelle susdite somme je promets lui p a y e r,
» lors et au cas que j e sois colloque pour lesdits intcrets, par la senlenc»
y d’ordre et non autrement, £/c. »
T e l s sont les deux billets dont le sierr cîe Cal dagués se fie
réserve en 1 6 6 7 , ce qui prouve qu'alors encore il n’y avait
pas de collocation ; il fit assigner la veuve Laribe en paiement
de ce§, b i ll e t s, sans justifier que la cause de ce paiement fut sur
venue , et le 12 août 1 67 7 il obtint sentence qui o r d o n n e ,
que
la veuve
Laribe
défendra
p é r e m p t o i r e m e n t , sinon
et
faute de c e , la condamne au paiement d e b ite s sommes de
�( 40 )
i p o liv. et 6^-j liv. \6 sols avec in térêts, ainsi que le sieur de
Calda gu és l’avait demandé.
Cependant le sieur de Cald ag ué s s'en tint là , et ne poursuivit
pas une seconde s e n te n c e , sans doute pareequ’il y eut des dé
fenses le 9 janvier 1 6 7 6 ; d’ailleurs s’il est devenu ensuite cré
a n c ie r , il aura e m pl o y é sans doute ce tte créance vis-à-vis le
domaine de Besse, et rien ne semblait pouvoir l’emp êc he r d’en
agir ave c cette famille L a r i b e , c o m m e il le jugeait à propos.
Q u o i q u ’il en s o it , et dès que le sieur de V e r n i è r e demande
aujourd’hui des sommes qui n’étaient
dues que conditionnel-
lem en t, sans qu’il prouve l’évé ne me nt de la condition , le sieur
M a b i t , en ce qui le c o n c e r n e , s’ en tiendra à la réponse qu’il a
faite sur le §. 7 ci-dessus.
La demande ne peut être dirigée contre lui personnellement,
il ne s’est pas chargé de payer d’autres sommes que les 2 6,30 0
l i v . , il n’est pas héritier de la famille L a r i b e , et l’action h y p o
thécaire ne peut avoir lieu que quand l ’action personnelle est
entière.
L e sieur de V e r n i è r e n'est pas en état de subroger à ses pri
v i lè g e s et h y p o t h è q u e s ; les biens alors existans sont un g a g e
per du ; enfin le sieur de V e r n i è r e est garant de sa propre de
mande , tant qu’ il ne prouvera pas a quel titre il s est empare du
domaine de Be^se et Baratou : et au cas qu il en soit acquéreur ,
quelles créances il a e m pl o y ée s a cette acquisition.
S.
X I.
L a légitime payée à Charles Laribe .
Ma in te na nt ce sont des prétentions nouvelles auxquelles le
«leur de V e r n i è r e n’avait pas c o n c lu en » y p o , et qui en effet
n'étaient
�(
4l
)
n Yt a ie nt p^s dans l’arrêt de 1781 ; il ve»'t " ’avoir rien perdu
pour ar tîiidre, car il augmente aujourd’hui ses prétentions de
plu? de 8 000 liv. en capirai.
La légitime rie Cl'.rtrles Lpril e avait éré fix ée , par le testa
me nt de 1660 à 2,000 liv. et il est b:en étonnant q u e , si elle
n ’é n ï f pis p a y é i en
1¿ 6 7 , Pantichrèse n’en contînt a n c n e
mention, il esc étonnant encor e que Charles Laribe aîné . héri
tier bénéficiaire de la succession de son p è r e , ait reçu d e g r é à gré
-
une légitime d ’un é t r a n g e r , t .e n u sept ans après la m o rt de
son [ ère.
Al aissa quittance obscure et é q u i v o q u e , doit être connue de
la C o u r , pour q u ’elle y voie c o m m e n t le sieur de Caldagués
se fanait des titres, pour, envahir sans doute aussi le domaine
de Resse, qu'il v o u d r a i t retenir sans prix.
« L ’an t 6 >jy et le 2 m a i, a été présent M . Charles L arib e, diacre de
» l ’église de V ie , lequel a reconnu être content et satisfait de M . de Cal» dagues des droits paternels, qui pouvaient competer et appartenir en
» l ’hérédité de M .e Jean L a r i b e , et autres généralement quelconques, et a
» subrogé ledit sieur de Cal» agues, en son lieu et jdac.e, et ce( moyennant
» la somme entr’eux convenue, dont ledit L an be content, a quitte leuit sieur
V de Caldagués etc. »
L e sieur de V e rn i è re avait tenté ce c h e f de demande en
1 7 8 7 , co.imie on le voit par le procès-verbal de prestation de
serment des experts; mais ensuite dans sa requête de 1 7 ^ 0 , il
j î ’osa pas le reproduire.
C o m m e n t en effet voit-il là un titre pour demander 2,000
liv.? où est-il pr o uv é que le sieur de Cald ag ué s les a ( ay
?
La succession ét ut o bérée à ce que dit le sieur de V e rn ié re
lui m ê m e ; le d n i t d e s héritiers ne pouvait être réglé que sur
c e qui restait après les dettes payées.
F
�( 42 )
R i e n ne constate que Char les Laribe ait jamais rien
de
m a n d é , pas plus que sa sœur légit im ée à 3,000 l i v . , ils o n t
laissé prescrire leurs dr oit s, et rien ne prouve q u ’ils aient re
levé la prescription par aucun fait ni aucune procédure.
E t ce serait tout d’ un coup après trente-sept ans de délai,,
que le sieur de C a ld a g u é s , ave c quelque mod ique s o m m e , se
serait fait un titre de 2,000 l i v . , pour ne le mettre en lumière
que plus d'un siècle après sa date. L a raison se révolte contre
une semblable prétention.
Mais de quel droit e n c o r e , veut-il former dempnde pour la
première fois en 1 80 j cont re le s ieur Mabit ? q uan d celui ci en se
rait le débiteur p e r s o n n e l , il opposerait ave c f o n d e m e n t q u ’ il y
avait prescription de \66o à 1697 contre Char les L a r i b e , qu’ il
y a encoreprescription jusqu’en 1 7 7 4 contre le sieurde V e r n i è r e ,
et enfin que le droit eût-il été mêm e conservé j u s q u a 1 7 7 4 *
il y a prescription de 1 7 7 4 à i 8 o j .
L e sieur M a b i t
est en core fondé dans l ’ex ce pt io n ceden-
detum a ctionum } et dans les observations q u ’il a faites sur les.
chefs précédens.
f.
X II
et X I I I .
Am éliorations à une m o n ta g n e R é p a r a tio n s aux
batimens.
L ’arrêt de 178 1 n’en dit r i e n , et le sieur de V e r n i è r e se
souvient pour la première f o is , au bout de vingt-cinq a n s , de
c e qui n’aurait pas dû lui échapper quand il prenait des con~
clusions générales.
L ’objet n’était cependant pas d’un mince intérêt, car les.
deux articles se portent à ¿,763 liv.
�(
L e sieur de V e r n i è r e
4^ )
3 commencé
par l'amélioration la plus
ré c e n t e ; il prétend avoir converti en m on ta gn e très-productive
des
terres incultes et des bruyèr es, et y avoir fait bâtir un
buron et un v é d é l a t , à quoi il dit avoir dépensé 2,000 liv.
Si cela était e x a c t , le sieur de V e r n i e r e ferait la la plus
sévère des critiques contre le rapport du sieur L e g a y .
C a r cet expert a porté à tfr o le produit de cette m o n t a g n e ;
o r sans doute si on y avait dépensé 2,000 liv. pour la mettre
en v a le u r , l'expe rt
do nc fait un
tort
bien
volontaire
au
sieur M a b i t , en le privant absolument d’un revenu clair et non
con testé.
Ri^.n ie prouve que la mont ag ne ne fût pas en rapport, avant
ces prétendues a m é li o r a t i o n s , le sieur de V e r n i è r e n’a rien fait
constater; ses conclusions ne sonr fondées que sur son allégation.
Il y a plus, car il n’a rien fait constater e n c o r e , ni réclamé
en cédant les dom lines au sieur P r i n c e , il ne s’est pas m êm e
fait de réserve de ce q u ’ il demande aujourd’hui.
O ù serait d’ailleurs la jus ti ce, que le sieur de V e rn i è r e e û t
profité pendant plus d’un siècle de ses prétendues améliorations,
q u ’il n’eii rendît aucun c o m p t e , et que cependant i! vînt récla
me r toute sa d é pe n se , c o m m e s’il était au lendemain des répa
rations qu’il articule.
Il devait lo ge r les b e s t i a u x , dès q u ’ils sont à lu i; il les a
nourris sur la m o n t a g n e , pour en doubler le revenu: et sans
rien payer pour tout c e l a , son expert diminue le produit des
terres, parce que les bestiaux étaient à lui.
L e sieur de Ve rn iè re demande en suite , des réparations faites
après l’antichrèse, et il produit deux procès-verbaux de l ’état
des b i e n s , i’un de
1 autre de 1 6S6.
F 2
�(
44
)
D a n s le premier, on remarque q u ’entr’autres choses, le sîenr
de Caldagués se plaignait de ce que les granges et érables
n ’étaient pas de la longueur n écessa ire, de ce qu ’il y avait des
cheminées à refaire et des toits a réparer.
D a ns le second p r o c è s - v e r b a l , il s’agissait encore des toits
à réparer.
Un e partie de ces réparations était pour l ’aisance du posses
seu r, une autre partie était occasionnée par son défaut d ’entrerien.
R i e n ne constate qu^en \66y les bâtimens ne fussent pas en
bo n é t a t ; si le sieur de Caldag ués ne voulait pas demeurer
cha rg é des réparations à ve n i r, il devait faire dresser procèsverbal à son entrée.
C e m o y e n , qui serait valable contre un simple fe rmier, esc
bien plus décisif à l’égard d'un preneur à antichrèse; quand il
répa re, c ’est pour lui: car sa longu e jouissance lui donne le
tems de profiter de ses propres réparations.
Les deux procès -ve rbau x porteraient la dépense à moins de
2,000 li v . , ils ont encore un double e m p l o i , car si le sieur de.
C al d ag u és ent réparé les toits en 1 6 8 4 , il n’aurait pas eu à les
ré pnr er en 1686.
T o u t cela au reste n’est pas à demander à un tiers acquéreur.
L e sieur de V e r n i è r e peut se pourvoir co ntre ceux qui repré
sentent la succession et se défendre c o n t r ’eux des fins de nonre ce vo ir et de la prescription.
Q u a n d le sieur de Ve rn iè re a reçu du sieur Prince les 26,^00,
liv. en l’an 7 , il n a réservé contre le sieur M ab it que ce qui
suit: « Les créances a lui réservées par l ’arrêt de 1781 , pour:
» raison desquelles les parüesi etaient en instance au parlement
» de Paris ».
�( 4r )
Ainsi le sieur de V e r n i è r e n’a retenu aucune action pour ces
réparations, qu’il n’avait pas demandées au parlement.
C o m m e n t d’ailleurs les réclamerait-il contre le sieur M a b i r , .
sans inconséquence? il a refusé de lui faire c o m p te des dé gr a
dations.
s.
X I V .
Frais fa its pour conserver les biens à la fa m ille Laribe .
C e t t e demande n’est pas seulement nouvelle en d a te ; elle
l ’est aussi par son genrd: le sieur de C a ld a g u é s , possesseur en
1 6 6 7 , eut des pr o c è s; il lui reste de vieilles pro cédures, et il
veut q u ’on lui paye t o u t , sans savoir s'il avait tort ou raison.
Mais s’il avait raison, il a dû faire condamner aux d é p e n s ,
ce u x qui succombaient ; s ’il a e x erc é des recours contre la fa
mille L aribe, le sieur de V e rn i è re 11e peut leur demander des
dépens que s’il en a obtenus par ju g e m e n t , sinon il n’a d’autre
voie que de reprendre les instances pendantes. Voilà tout ce
q u ’il était nécessaire de dire sur ce c h e f extraordinaire de c o n
clusions.
S.
X V.
Sur Vinscription du sieur de Vernière,
I! demande à être autorisé d’en suivre l’effet sur les deux do
maine s , et même sur tous les biens des sieurs Prince et Mabic*
E v i d e m m e n t d é b i t e u r , le sieur de Ve rn iè re a fait une ins
cription de 60,000 liv. il a été pay é de son capital après ce tte
i n re ri p ti o n , et cependant il n’entend rien en déduire.
C e tt e inscription est aussi frustratoire que les conclusions
q u ’elle oc cas ionne ; car il y a des lettres de ratification du i a
a v r i l »788,
�(
4*
)
E lles sont scellées à h cha rge d’une opposition du sieur
de V ern iè re : dès-lors co m m e il n’a pas fait d ' e n c h è r e s , toute
son action se réduit à demander le rapport du prix de la vente
de 1774-, purgée par les lettres de 1788.
C ’est ici peut être le moyen le plus considérable auquel vien
n e n t a b o u t i r toutes les discussions des chefs de demande réser
vés par l’arrêt de 178 1 , mais réservée sauf défenses contraires.
Car q u m d l’arrêt de 1781 porterait des condamnations pré
cises et considérables qui grèveraient les deux domaines, la chose
j u g é e s’éteindrait devant les lettres de ratification, qui ont op éré
une pleine novation et une convention racite entre l'a cquéreur
et l'opposant. Celui-ci n’a plus eu le droit d'e xa gé rer la valeur
de l’im m e u b l e , et de vouloir être pavé de toutes ses c r é a n c e s ;
il était le maître d’e n c h é r i r , et s’il ne l’a pas f a i t , il en est résulté
de sa part l ’aveu formel que les biens ne valaient pas au-delà de
ce que portait l’acte de v en te ; dès lors ce prix est devenu tout
son g a g e , et toute action ex cédan te a été éteinte.
T e l s sont les principes et les conséquences de l’édit de 1 7 7 1 ,
e t ils détruisent tout à la f >is les quinze chefs de demande du
sieur de V e r n i è r e , quand même il aursic raison sur tous.
M ain tena nt , pour en revenir à l’i îscription , le sieur de
V e r n iè r e n’a pas pu la faire cur un immeuble purgé d hypo*thè que par les lettres de ratification, sauf l’action résultant de
son opposition ; il demande à la f ire valoir sur les autres biens
de ses prétendus d ébite urs, mais c e s t un songe qu ’il ne renou«
velle ra pas vraisemblablement ; il n’a de débiteur direct que les
L a r i b e , c ’est con tre eux seuls qu’il peut s ’inscrive. J a m a i s on
n’a vu un créancier opposant abandonner l ’effet de son oppo
s i t i o n , pour se dire créancier direct d ’un a c q u é r e u r , quand il
�( 47 )
croît que le prix de vente.ne lu i suffira pas, et qu’il a oublié
d’enchérir.
s.
XV I.
L e coût des rapports et les dépens .
L e sieur de V e r n i è r e a été condamne par l ’arrêt de 1781 à
restituer des jouissances à dire d’experts ; il soutenait ne pas les
d e v o i r , l’arrêt qui le cond amn e aux dépens a donc entendu y
comprendre ceux de l’estimation à laquelle il s’opposait.
D ’ailleurs il n’a fait aucunes o ff- es : et c e p e n d a n t , posses
seur à antichrèse » ayant dû s’attendre à c o mp te r des f r u i t s ,
au moins depuis la d e m a n d e , il était naturel q u ’il sût ce qu’il
fallait p a y e r , au moins par approximation.
C ’est don c le sieur de V e rn i è re qui doit le c o û t des premiers
rapports ; quant au coû t du trois ième, que la C o u r réformera sans
le moindre d o u t e , l'événement prouvera laquelle des parties
devra les frais ultérieurs.
R é p o n se
a u x
d e m a n d e s
d u
s i e u r
P r in c e ,
L e sieur Prin ce a long-temps poursuivi le sieur M a b i t a v e c
acharnement ; les se n te n c e s , les arrêts, les provisoires n’allaient
p a s assez vite à son g r é ; et c e p e n d a n t, débiteur de partie des
sommes portées par l ’acte de 1783 ^ le sieur Prince n'aurait eu
le droit d ’exiger du sieur Mabit l’exécution de ses e ng age m e n s , qu’après avoir rempli les siens lui-même.
A u j o u r d ’hui le sieur Perret son gendre est moins hâti f; il est
en possession des d eu x domaines depuis l ’an 7. 11 a to u c h é
2 j , o o o livres du sieur Daubusson ; il a touché ou dû to uc her
environ j o j o o o liv. de plusieurs autres tiers saisis; et il attend
�(
48
)
aujourd’hui avec patience que le sieur de V e r n i è r e et le sieur
M a b i t se soient e x p l i q u é s , pour s’expliquer lui-même.
Cependant ses demandes n’en subsistent pas m o i n s , et elles
entravent le procès , de manière que le sieur M ab it ne co m ba t
une difficulté d’un c ô t é , que pour en voir renaître d’un autre
en plus grand nombre. Ses deux a d ve rs a ir e s, au lieu de se pré
senter en même t e m p s , semblent s accorder et ne 1 attaquer
qu'alternativement. Mais il est temps de mettre une fin a cet
éternal procès, et le parti que proposera le sieur Mabit; dans son
d é c o u r a g e m e n t , ne peut erre refusé , puisqu’ il est l’adoption
des conclusions du sieur Prince.
En
1 7 8 9 , le sieur Prince a c o nc lu contre le sieur M a b i t ,
à ce que i ’acte de 178? fût résolu ave c dommages-intérêts.
Il a obtenu le f février 175)0 une sentence par d é f a u t , qui
condamne le sieur Mab it à lui rembourser les sommes par lui
reçues ave c intér êt s, et à ses dommages-intérêts, à donner par
déclaration.
Sur l’appel de cette sentenc e au parlement, le sieur Prince a
conclu au bien ju g é ; eh bien ! le sieur Mabit y donne les mains;
il adopte les propres conclusions de son adversaire. 11 se soumet
de venir à c o m pt e des sommes qu il a reçues, et a payer les
dommages-intérêts qu’évalueront des experts , au temps de sa r .
co nd am na tio n; dès-lors tour procès doit être fini entre le sieur
M a b i t et les sieur et dame Perret.
O b je c t e r a - t - o n que les choses ne sont plus nu même é t a t ,
parce que le sieur M a b i t a souffert que le sieur Prince se mît
en ’ ossession ?
D ’abord le sieur Prince ne l’v a pas même appelé ; mais quand
il y aurait de ia part du sieur M a b i t des approbations q
ii n’a
jamais
�( 49 )
jamais dofinées de cette mise de possession; elles ne seraient
que d’une bien faible c o n s é q u e n c e , lorsque les c l o s e s en sont
venues nu point qu’un procès serait r u i n e u x , et que le retour
aux premières conclusions du demandeur lui-même doit être
le but naturel de la justice , s’agissant d’éteindre de longues
contestations. Il y a d’aüleurs chose iugée par la sentence du y
février 1 7 9 0 ; l’appel est un droit facultatif pour celui qui l ’a
interjeté > et certes il peut s’en départir.
O r , le sieur Mabit s en est d é p a r t i , il acquiesce à la sentence
à condition qu’elle sera e xé c u té e telle qu’elle est rendue.
D o n c aux termes de
1art.
f du rirre 27 de l ’o r don na nce de
1 6 6 7 , cet te sentence passe aujourd’hui en force de chose j u g é e ,
et vaut c o m m e transaction entre les parties.
L a C o u r est suppliée de prendre cette offre du sieur Ma b it
en considération ; quelque long q u ’ait ét é un procès , il n’a ja
mais pu être refusé au défendeur de donner les mains à la de
mande ; car plus on s’est éloig né du premier é t a t de la cause ,
plus il importe à l’intérêt des parties d’y revenir. Q u e si le sieur
P e rr et obje ct e pour
s’en défendre des moyens nés
de son
intérêt actuel et du ch a ng em en t de la cause , la C o u r n’en
pesera pas moins dans sa sagesse le grand avantage qui résultera
pour le repos de deux f a m i ll e s , de les mettre hors d’sffaire tout
d’ un c ou p , plutôt que leur faire entretenir une foule de procès
interminables.
Il faudra, dira-t-on peut-être, une expertise pour statuer sur
les dommages-intérêts; mais elle est indispensable p^ur estimer
les jouissances que réclament les sieurs et dame Perret.
Enfin le sieur et dame Perret peuvent-ils avoir des moyens
G
�( fO )
pour s’opposer à l’adoption de leur propre d e m a n d e , et de la
sentence obtenue par leur père et beau-père.
D ’après ces offres expresses faites par le sieur M a b i t , par
des conclusions précises, il n’ en. doit pas moins, puisqu’il plaide
en C o u r sou veraine, suivre les sieurs et dame Perret dans leurs
chefs de d e m a n d e , sans néanmoins y porter toute l ’attention
qu ’ils ex ig e ra ie n t , si les sieur et dame Perret eussent voulu s’en
expliquer d a v a n ta g e , ou pl u tô t s’il n’était pas vraisemblable
que la C o u r n’aura point à y statuer.
A v a n t de suivre cette série , il est une question préalable
qui est celle de la lé si o n , à laquelle a con cl u le sieur M a b i t ;
et qu ’il devra suivre si la C o u r n'adopte pas ce qu’il vient de
proposer. C e t t e demande avait ét é fo rm ée à F i g e a c sur appel ;
mais le sieur Pr in ce a voulu d eu x degrés de jurisdiction : le
sieur M a b i t , pour ne pas contester ce qui est j u s t e , s’est départi
de cette demande c o m m e h o r s l a c o m p é t e n c e a c t u e l l e d e l a C o u r ,
sousla réserve expresse de la reprendre devant les premiers juges.
Il
n’y a point fait statuer e n c o r e , et il serait bien dans l’ordre
que ce tte action principale fût discutée la pre mi ère ; mais la
C o u r est saisie dès à présent de plusieurs demandes des sieur
e t dame P e r r e t , et le sieur Ma bi t ne peut pas en retarder la
discussion jusqu’après le juge me nt des questions préalables ,
parce que la C o u r a le droit de tout ju g e r, ec qu’il a intér êt de
ne pas diviser sa défense.
§. I . er
e t
II.
L e s 2.6,300 livres et les jouissances.
Si l'ac te de 1785 n’est pas résolu par la sentence du j f é
vrier 1 7 9 0 , ou par la lé s i o n , ce premier c h e f de d e m a n d e ne
sera pas contesté ; mais le sieur P r i n c e n ’a pas eu d’action di*.
�C
)
recte contre le sieur M abit, ou du moins elle est prématurée.
sieur Prince, a payé en 1 an 7 les 26) j 00 hv* il susit le droit
de s’en dire cr éa nc ie r, sauf à lui à rendre c o m p t e des sommes
q u ’il devait au sieur M a b i t , et de celles qu’il a reçues et pouvait
r e c e v o i r , du c ons en te me nt du sieur M a b i t , des mains des tiers
saisis; snuf e nc ore au sieur Prince à prendre à sa charge l ’é v é
nement du c om pte des jouissances que doit Je sieur de V e r n i è r e .
C a r ces créances devaient se compenser jusqu’à due co nc ur
rence ; et le sieur Prince n’a pas eu le droit de se faire une
créance particulière de ce qui était éteint par la compensation.
Les jouissances de 1789 à l’an 8 inclusivement, sont dues par
le sieur de V e rn iè re ; car c ’est lui q u i a j o u i , et le sieur Prince
ne l’a pas i g n o r é , puisqu’il a retiré les deux domaines de Laribe
et du T e i l de la main du sieur de V e r n i è r e , et de g ré à gré.
C e serait une double opération bien frustratoire que de
condamner le sieur Mabit à payer ces jouissances au sieur P e rret,
et de condamner le sieur de Vernière à les payer au sieur M ab it.
Les sieur et dame Perret n’ ont pas le droit de refuser de les
rece voi r directement du sieur de V e r n i è r e , que la C o u r c o n
damnera à les payer ; car 1 ,° le sieur Prince a traité lui- m ê m e ,
sans la participation du sieur M a b i t , et à son insçu, a v e c le
sieur de V e r n i è r e , d’un article capital qui devait 'j faire f a c e ,
2.0 il est intervenu dans le procès d’entre le sieur d e V e r n i è r e
et le sieur M a b i t , précisément pour e x e r c e r les droits d e son
p r é t e n d u d éb ite ur, de sorte qu’ il est venu au devant, lui-meme,
de la subrogation qui aura lieu en c o n d a m n a n t le sieur de
V e r n i è r e à rendre c o m p t e de ces jouissances dues aux sieur
et dame Perret depuis 1789 jusqu’en l ’an 8 , époque de leur en
tré e en possession des domaines dont s’ag it,
G 2
�'( f * y
§. I I I
ET I V .
L e s bestiaux, outils d*agriculture , f o i n s , pailles s
fum ier et grains .
L e sieur P er ret demande 2,400 livres pour le che ptel des
bestiaux et outils d ’agricultur e, promis par l’acte de 1783 ; mais
il est de fait positif que ce tt e somme n’est pas due.
L e sieur Alabit avait sur cela fait interroger sur faits et ar
ticles le sieur Prince. Mais il n’a pu en obtenir que des réponses
év asives, de sorte que pour en finir, le sieur Ma bi t défère sur
ce point le serment au sieur Perret et à son épouse.
Q u a n t aux foins , pailles et f u m i e r , la convention de 1783 a
eu son ex écution par le fait; car de sa part le sieur de V e r n i è r e , en remettant les domaines au sieur Perret en l’an 8 ,
ne pouvait emporter les engr ais, et il est constant qu’il a laissé
au sieur Perret lesdits domaines pourvus de fo in s, pailles, fu
mier et outils d’ag riculture, et la ré colte pendante par ra cines;
c e fait sera établi s’il est n i é , de sorte que l ’article ne peut être
alloué.
A l’égard des gr ains, on ne co mp re nd g u è r e à quel titre le
sieur P r i n c e , qui s’est fait céder deux domaines et les jouis«
sances ( ou grains ) échus depuis le 27 mars 1 7 8 5 , peut en outre
se croire fondé à demander les grains semés avant le 25 mars 9
e t dépendant de la ré col t e précédente.
Si ce n’est pas ce qu’il demande, il fait double emploi ave c
les jouissances de 178«?, q u ’il a demandées en l ’article premier,
et q u ’il ne peut avoir deux fois.
Enfin c ’est un chef de demande à diriger contre le sieur de
V e r n i è r e , qui aya nt pris à antichrèse le y avril 1 6 6 7 , et a y a n t
rendu le
mars 1799 a du laisser les immeubles iti statu
o r , c ’cst au sieur Mab ic qu ’il doit la dernière réco lt e.
�s. v.
L 9indemnité de 7 7 septérees de Baratou .
C e c h e f de demande, le plus ridicule de tous, ivestpas pendant
en la C o u r : il est donc inutile d’occuper ses momens d’une dis
cussion étrangère. L e sieur Ma b it sa flatte d ’avoir dém ontré à
Aur il lac q u e , ' n ’ayant cédé que ce qui est dans l ’anti chr èse , il
est inutile de chicaner sur l ’étendue de l ’e x c e p t i o n , pourvu
q u e l l e ne diminue rien de la chose cédée.
S.
V I.
Dommages-intérêts ¡p our privation de couper d u bois .
L ’acte de 178 j , portait que le sieur Prin ce aurait la faculté
de co uper du bois dans les d o m a in e s, immédiatement après
l ’arrangement ou décision des contestations à terminer entre
ledit sieur M a b i t et les sieur et dame de V e r n i è r e : le sieur
P r i n c e demande des dommages-intérêts pour n ’avoir pas usé de
cette faculté depuis 1783 jusqu’à 1789.
Si cette demande était fo ndée, le sieur de V e rn iè r e serait
seul pajsible de ces prétendus dommages-intérêts; c a r i e sieur
M a b i t n’a rien emp êché , et l ’obstacle serait venu du sieur de
V e r n iè r e .
M ais la clause mêm e de l ’acte de 1 7 8 3 , porte avec elle la
preuve d’une fin de n o n - r e c e v o i r : car le procès est encore
pendant.
S.
V I I.
Dégradations de maison et grange.
C e s dégradations ont eu lieu pendant l’antichrèse, et par con«
l é q u e n t le sieur P e r r e t , qui se considère co m m e acquéreur et
no n - su b ro g é , n’a pas droit d’y prétendre. Un nouvel acquéreur
n’a pas d’action pour les dégradations antérieures à son titre;
car il n’a acquis les choses qu’en l ’état où elles étaient alors.
�( 74 )
C e s principes sont co ns ta ns , et ont é té confirmés par un
arrêt du parlement de Paris q u ’on trouve au supplément de
D én iz a rt . La C o u r d’appel a ju g é de môme en l ’an n ,
la cause des O li va in et R o m e u f .
§.
dans
l-
V I I I .
Dégradations postérieures à 1 7 8 p .
A l’égard de c e ll e s - c i , le sieur Perret aurait eu une a c n o n
co ntr e c eu x qui les avaient c o m m i s e s , aussi en avait-il for mé
demande expresse aussi tôt après sa mise en possession, contre
le fermier , qui fut condamné à lui en faire c o m pt e .
L e sieur Perret a reçu depuis long-temps le montant de ces
dégra da tions , et s’est départi même de ce c h e f par requêce du
4. floréal an p.
5. I x.
M a in levée de l’ inscription du sieur de Vernière.
I c i , le sieur Mabit a moins à dire co ntre le sieur Perret que
co ntre le sieur de V e r n i è r e ; car c ’était une affectation presque
ridicule de faire une inscription de 60,000 l i v . , c o nt re tç sieur
M a b i t , qui ne pouvait devoir cette som m e dans toutes les sup
positions possibles. L e sieur de V e rn i è re devait bien penser
qu’en faisant semblant de s en croire cr éa nc ie r, il n y avait pas
là de quoi séduire les t r i b u n a u x , au point de les persuader qu’il
devait l’être. U n e seconde affectation a consisté à ne pas m ê m e
la d im in u e r , quoique le sieur de V e r n i c r e ait reçu 26,300 liv.
en l’an 7 , et cependant l’inscription est aussi de l’an 7.
C e t t e é n o r m e inscription a paralysé les affaires du sieur
M a b i t , et le sieur de V e r n i è r e lui devra des dommages-intérêts.
- Q - ' a n t a u sieur P e r re t, qu’il en o b t i e n n e , s’il le p e u t , c o nt re
Jouteur de l ’inscription ; mais non-seuiement i l n’a pas le d r o it
»
�d'en réc’ amer co ntr e le sieur M a b i t qui en a souffert le premiery
su contraire il lui devra lui-même des do mmages-intérêts pour
les saisies-arrêts q u ’ il a multipliées d’une manière v é x a t o i r e ,
m a lg ré un arrêt de
dé fe ns e , et en affectant de laisser tout
ignorer au sieur M a b i t , que cette conduite à mis lo ng - te m s
dans la détresse, et forcé de vendre des propriétés en assignats,
pour avoir les moyen s d’exister.
L e sieur Perret devra le c o m pt e des sommes qu’il é t a it c h a r g é
de payer d’après l’a c te de 1783 ; car le sieur Prince avait le
premier oublié ses e n gag em en s: il devait payer à termes fixes
avant 1 7 8 9 , et n’avait pas droit de suspendre ses paiemens jusqu a la tradition. C a r il autorisait au contraire le sieur M a b i t
a retenir 1 imme ubl ê jusqu au p a i e m e n t , suivant les principes;
et d’ailleurs le sieur Pr in ce l u i - m ê m e , pleinement rassuré par
des lettres de ratification et un arrêt souverain, n’était pas en
péril d ’éviction.
L e sieur M ab it n’ayant pas été assez heu re ux pour parvenir
à un arrangement à l’a m i a b l e , à cette cause, fait tous ses efforts
pour applanir les difficultés qu’elle pr é se nt e , et prévenir celles
qui pe uvent naître enc ore .
V i s- à - v i s le sieur de V e r n i è r e , il a offert un sacrifice pour
dispenser de la réf orm e inévitable du rapport L é g a y ; et, ce point
terminé, les autres difficultés peuvent être tout à la fois décidée»
par la C o u r.
A l’égard des sieur et dame P e r r e t , il s’est départi de son
appel, et a acquiescé à la cho se j u g é e ,
pour éviter les l o n
gueurs du procès en l é s i o n , et de celui de Baratou pendant
en première instance, de même que des autres chefs d’instance
pendant en la C o u r d’appel.
S i la Cour ne croit pas pouvoir adopter ces proposition
�( 5 6 )
ma lg ré leur utilité, il semble que la première opération à faire
sera naturellement de char ger trois e xpe rts , soit de reviser et
amender le travail du sieur L e g a y , soit d ’estimer les jouissances
postérieures et les objets o m i s , soit enfin d’évaluer les dégra
dations et no tamment la maison et gran ge écroulées.
P e n dant cette o pé r a t io n , le sieur Mabit fera statuer en pre
mière instance sur la lésion et sur le c h e f du té ne me n t de
Baratou, après quoi, et sur l’appel incident, s il y a lieu, la C o u r
prononcera en définitif sur toutes les difficultés, et fixera les
b ases du compte général qui aura lieu pour les créances respec
t iv e s, mais lequel c o m pt e se réduira alors à une simple opéra
tion arithmétique.
Q u o i q u ' i l en s o it , le sieur Mab it supplie la C o u r de prendre
en considération l’embarras ou l’ont placé depuis si lon g t e m s
les exagérations de l’un et de l’autre de ses adversaires, l’un le
peignit d ’abord c o m m e ayant grossi singulièrement sa fortune
par cette acquisition de
17 7 4 , l’autre
le représenta c o m m e
insolvable. A u j o u r d ’hui qu’il est vérifié que le sieur Mabit a eu
plus à perdre q u ’ à g a g n e r , ils sont d’accord tous deux pour
c o n s o m m e r sa ruine. C e t t e position doit mériter quelque intérêt
aux ye ux de la C o u r , lorsqu’elle sera co nvaincue sur-tout que le
sieur Mab it n’é lè ve aucune contestation d é p la c é e , et n’ a rien de
plus à c œ u r que d ’obtenir prompte justice.
M. e D E L A P C H I E R , A v o c a t.
M. e C O S T E , Avoue licencié.
À R IO M , D E
L ’IM P R IM E R IE
DE
Mr
DÉGOUTTE.
�
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mabit. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Coste
Subject
The topic of the resource
successions
créances
experts
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pour le sieur Mabit, défendeur et appelant ; Contre le sieur Rodde de Vernière, demandeur ; Et contre le sieur Perret et la dame Prince, son épouse, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de M. Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1781-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
56 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0325
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0329
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
Laribe (domaine de)
Teil (domaine de)
Besse (domaine de)
Baratou (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
experts
Successions
-
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fa8e732fcaa4da3f3ae419077bfbd542
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Text
COUR
P R E C I S
EN
D ’A P P E L
DE RIOM.
RÉPONSE,
C
h a m b r e s
assemblées.
P O U R
La
veu ve
B
et les enfa n s mineurs de
a p t i s t e
M A R C O U X ,
J
e a n
appelans;
C O N T R E
B
e n o i t
M A R C O U X
M A R C O U X
C O U X ,
L
jeu n e,
a in e,
et
N
B
o ë l
e n o i t
M A R
intim és.
E S intimés ont im p rim é
un m ém oire où B enoît
M a rco u x aîné ne parle que de lui et p ou r lui. E n syn
copant ainsi les faits de la cause 7 elle se dénature
les mineurs M a rc o u x ont besoin de les rétablir.
A
et
�( 2)
Claude M n rco u x a eu sept enfans.
j|
P a r le contrat de mai'iage de J e a n -B a p tiste , il lui a
fait donation de ses biens présens et à v e n ir , à la charge
de p a yer, i° . à N o ë l, Benoît je u n e, Claudine et .Agathe
M a rc o u x , une légitim ejde 12000 fr. ; 20. à Benoît aîné
12000 f r . , non com pris 2000 fr. de son titre cléric a l;
)
/ 'C .
-3 °- à A n to in e tte , religieuse, une pension de
5o francs.
Il se réserva 12000 francs p o u r en disposer , avec
m ention que s’ il n’en disposoit p a s ,
ces 12000 francs
seroieut partagés entre le f u t u r et les quatre enfans lé g i
timés à 12000 francs ( c ’est-à-dire, que B en o ît, p rê tre ,
en étoit exclus ).
Il fut stipulé q u e si le futur vo u lo it payer les lé g i
tim es, Claude M a r c o u x , son p è r e , lui en payeroit l’in
térêt au taux de l ’ordonnance.
Bientôt après ce m a ria g e , Benoît M a r c o u x , p r ê t r e >
s’empara de l’esprit de son p ère ; et Jean-Baptiste M a r
cou x fut relégué h o rs de la m a iso n , avec 1200 francs
de rente.
Benoît M a r c o u x , fait docteur en th é o lo g ie , ne vo yo it
paç a rriver les bénéfices en aussi grande hâte qu ’il l’eût
désiré. Il n’a jamais été que simple communaliste ou
sociétaire de sa paroisse; et tout p rou ve q u ’ il persuada
à son père de grossir sa l é g i t im e , sans égard p o u r ses
prem iers e n g a g e m e n s , sous la promesse p e u t - ê t r e de
rendre un jour avec u su re , à ses n e v e u x , la p ortion
q u ’ il alloit distraire de la donation de 1779.
" Claude M a r c o u x avoit acheté une maison à SaintÉtienne , le 28 mai 1 7 8 0 , m oyennant
55 oo francs. Il
songea bientôt à eu faire don ¿1 son fils Benoît ; mais.
�( 3 )
p o u r ne pas paroître don ner atteinte à sa d o n a tio n , on
p rit la tournure de faire d o n n er toutes les quittances à
B e n o ît , prêtre.
A p r è s en a vo ir retiré-’quelques-unes, on réfléchit q u ’il
n ’étoit pas encore ém a n cip é, et que le 'ra n g de sociétaire
de paroisse n’ém ancipoit pas*, en con séq u en ce, B enoît
M a rco u x , qui g o u vern oit son p è r e , se fit 'émanciper le
28 mai 1781.
i.I
A l o r s , ët coup s u r ‘c o u p , il se fit donner une foule
de-quittances; de sorte q u ’avant <là fin k l e ‘l ’année il parut
a vo ir payé la maison et tous les ouvriers qu i l’avoient
réparée et embellie.
Bientôt ces quittances'ne p a r u r e n t ‘pas un titre assez
solide; et B enoît M a i’cou x sc fit faire par son >père , le
29 mars ¡1783, unë Obligation de 7 7 1 4 fra n cs, où on
ne manqua pas de sp'écifier^en détail toutes les quittances
qu i en étoient le m o tif : cette somm e de 7 7 1 4 francs fut
dite payable à v o lo n té ' et requête , avec h yp o th èq u e
¿ p é d a le sur ladite maison.
Cette'-maison n’eûtf'été encore qu ’ an foible d o n , si
on ne vô y o it pas que M a rc o u x p è r e , m algré sa grande
disance, absorboit des capitaux considérables, dont on
ne p e u t qu e-d evin er ^’emploi/ Enfin lorsque la r é v o lu
tion vint ôter à B e n o ît, p rê tre , tout espoir de grossir
ses revenus par des bén éfices, il ne chercha plus de
Voies inditefctes ( qui d’ailleurs s’entredétruisent en se
m u ltip lia n t) j-et »il vo u lu t faire un coup de maître en
faisant participer le donataire l u i - m e m e à sa p rop re:
spoliation.
•'
’ \
• vi.
; i: j «•!
Ly 1
Bcnôît 'M a r c o u x , p r ê t r e , ’ se fit
A 2
�( 4 )
ven dre ou délaisser par Claude et J e a n -B a p tiste M a r
c o u x , i° . la maison sur laquelle il avoit hypothèque -,
2°. un domaine appelé de P arade, m oyennant 14000 fr.
à lui dûs p ou r légitim e et titre clérical.
Il fut ajouté que ces immeubles avoient une plusvalue de 2 5 00 francs qui seroient imputés sur les Liens
m aternels ( c ’est-à-dire, sur une créance im aginaire, car
la m ère est encore vivante en 1809).
L e m êm e jour il fut stipulé par un autre acte que
la p lu s - v a lu e étoit plus (considérable encore qu ’on ne
l ’avoit d it; et B en o ît, p r ê tr e , non-seulement se départit
de l’o b lig a tio n , devenue in u tile , de 7 7 1 4 francs, il
reconnut inême être rem p li par ces,' im m eubles d u .su p
plém ent de-légitim e*
i■
_' :j;
•
'f
Ce n’est pas seulement en faveur; de Benoît M a rc o u x :
que le donateur a oublié ses engdgemens. A g a t h e M arc o u x fut m ariée avec le sieur Frotton le 14 novem bre
1787 ; et non-seulement le père hii^constitua 12000 fr.
et 2000 francs sur sa r é s e rv e , ;imais il fut:dit en l ’acte
que la dame .Agathe . M a r c o u x ( qui n’étoit pas éman
cipée et n’avoit pas quitté la com pagnie de son p è r e )
se constituoit de plus une somme de 6000 f r . , q u ’elle
dit p ro v en ir de ses ép a rg n es, et dont l ’acte porte quit
tance.
■,
1
Q u e p o u v o it faire à ¡tout cela le donataire? rie n , sans
d o u t e , que tâcher de reconquérir l’allec lion de son p ère
par une soumission aveugle à ses v o lo n t é s ,,e t lui ôter,
s’il le p o u v o it, les.¿occasions d’aliéner encore, sous p ré
texte du payem ent des légitimes.
.
'
C ’est dans ces yues que Jean-Baptiste M a rc o u x paya
�( 5)
4000 francs sur la dot d’A g a t h e , et 12000 francs potiv
la légitime de N oël.
' ’>r. UIf'-iqr, - :
•r Jean - Baptiste M a rc o u x ïnçmrut en 1794 laissant
plusieurs enfans en bas âge : il espéra, q u ’iils trouvei’oient
un appui dans leur aïeul; mais il est,resté sous la m ê m e "
dépendance jusqu’à son décès arrivé en l ’an 10. E t si
la C our p ou voit douter encore de la spoliation du do
nataire , il suffira de lui dire que la v e u v e M a r c o u x ,
rentrée.)enfin dans la maison après les-scellés et in ven
taire, n’a pas trouvé dans la dépouille, de Claude M a r
coux
un centime p o u r , lui faire rendre les derniers
devoirs.
,!
k) . ° i
, pr
^ Ses plaintes ne lui ont valu q u e . des 4ironies et ides
procédés vexa.tpires ; six cohéritiers ont-affecté de . l u i
faire notifier l e m ê m e jour ^six citations, et ensiytej.&rx
exploits de demande en payem ent des légitimes -et de
la réserve; en proclamant encore q u ’ils,ne s’en tenoient
à leur légitim e en' argent jjq u ^ p a rc e , qu ’il n ’y en avoit
pas dans la succession, et.poijL;, $ejinénagerjle plaisir de
demander ensuite Un supplém ent en<corps héréditaires.^
E n s u ite , et de peur qu’il lui restât, des ressources
p o u r .acquitter ce q u ’ ils c^ein.indoiept, ils ,on t fait des
saisies-arrêts\sur le s d éb ü eu rsret-les, revenus ,de, la' suc
cession.
ij;, ,fT ■
iririJ-.n'T - i ' '
L a veu ve'(M arco u x a; opposé,(i 1?--; ¡q«’elle ne devoit
paâ.de réserve , -surtout par la circonstance qu’elle devoit
faire, face à la légitime im p révue de la .religieuse; 2°. que
A g a th e MarcouX/idevqit/Tapporter I;le. don sim ulé qui
lui avoit été fuit de; 6000,francs ;; 3 0/ q u ’il n’y: avoit pas
�(6)
liéu dë réserver un s u p p lé m e n t , lorsque la légitim e
étoit acceptée après le décès.
!L e tribunal de M ôn tbrison a rejeté ces moyens par
jugem ent dù i i 1 fructidor an i r , ' et à adjugé toutes les
dem andes, c’ëst-à-dirë , !la lé g it im e , lü ré s e rv e , et l ’ex £ëctative d’ uri supplément.
*- Su r l’appél j la.veuvê Mai'cOux a , par ordre d’ un conseil
d é "famille, °rdilbhcé é u ÿ biens à 'venir de la d o n a tio n ,
p o u r '¿’tin 't ë n i F a ü i biëhs ■
’p résëiis, et n’être tenue des
légitimes quë ‘par rëtranchëmerit.
L a C o u r ’ü ’àppel de L y o n , par arrêt du I er. tlierm idor
an 1 3 , a ordonné , i ° . que les légitimes seroient prises
aur les: biens libre's, dans lésquels sera dotifondue la réserve
dé 12000 f r a r i d y $ a ü f 'à !teriir par rëtratichemetit sur les
biën's ’ présent ; 20. que chaque iégitim aire ïa p p o rte ro it
cë qu ’i l ' à reçu à titré de lé g itim e ,’ ce qu i excejitoit
À jgatlie, à l ’égard de.ldtj'üëllë i l ’a été dit au surplus que
Boh'contrat de iiiûi‘iâgeIsëroit éxéëuté' suivant sa form e
ct'tën eu ri ( B llë^ V ô ît-fo riiiéld éU ia n d ë seulement de ce
qüi lui jrëstoit & 'tôüdlîét de
dot. )
î; Eti ^oürsuivdnt ;la éàssdtioii dë cët arrêt > (Benoît
Mafrcoiix , p r ê t r e , ¿voit fbrt bien 'sëhti à quoi le m è h e roit lë rbppbl-t dë ce qii’ il 'oVôlt reçu à titre de légi
tim e ; aussi, prenant l ’alarme sur les suites d ’un-déÎuissëttifeht (Jüi taë l ’Ntirôit pû’s inquiété S’ il ëût été lég itim e,'
il s’étôit ëhiprësSé'Së protestér, par tfôte du -'24 fév rier
1806, qüë &i ô ii ïie rës|)ëctoit pas sa 'V th ïe Üe v j ÿ l , il
dfta^üèMît ën ^aŸÎiritië1 lëfe miriëtiVs M itr c o u x , ëo'rtïine
hM itiéré:idé ‘(Té&iirBdj^tistë , qUFel'o'it-^ia’L'tit' aüdik'iTdle. ‘
�Quoi, q u ’ il en soit , l ’arret. (3<5ri>yon a été
;• 1a
•cause :a . étéoTeovQy.^i cî^vanfcllii' ,Goin\. cjgjliionj i ¡ fit la
cause a/été iphudée. devant elle.. -.aur/f] c c o d
i'(" . ;.(,f
L es mineurs M arcoux .ont renouvelé lé^; moyens; p té r
sentes en la C o u r de L yo n -, sur lu confusion'dt* la ré
serve dans les biens à ven ir. Ils le p o u v a i e n t , parce q u ’un
arrêt de cassation n’est q u ’. une opinion , e t rn ’e$tjpoirit
une lo i; ils le d e v o i e n t , p a r c e ‘que l’arret de I-yori fut
rendu avec solennité et méditation.!
- nn
Ils ont ajoiité à cette question p r i n c i p a l que la dona
tion des biens présens ne p o u v o it pas au surplus être
g re v é e d’une réserve .de 12000 f r . , si le. père en ovpit
disposé de son vivant! directement-.,ou indirectement.
O r , il étoit incontestable que 1b p ère a vo it retranché
plus de 12000 francs des biens donnés à son fils en J 7 7 9 ,
e t par conséquent la donation ne devo it pas souffrir
un second retranchement de 12000 fr. après sa .mojt’k
i ° . Claude M a rc o u x père av.oit ven du en 1778; un
im m eu ble en la com m u n e d ’A n ié r e ; il lui restoit 4
toucher 6000 francs lors de sa donation : il. les a reçus,
après 1 7 7 9 ; et q u o iq u ’ ils aient été évidem m ent em ployas
à payer la maison acquise en 1 7 8 0 , il ne reste aucune
trace de ce capital de 6000 francs.
.1
■ - •!
:
20. Il a vendu depuis 177 9 u n e /rente¡a 11 sieur, Pierre)
R iga u d , de S a in t-E tien n e, et .a touché p o u r le capital
2400 francs.
3 0. Il s’est fait rem bourser par le sieur Jacques Biti'aloi^
une rente au p rin cipal de
5 q o o francs.:
1.
40. Il a fait un don simulé à A g a th e M a r c o u x , de
6000 frans; et il est vra im e n t im possible :en fait et e à
�r ( 8 )
droit de prétendre, q u ’une fille n o n 'é m a n c ip é e , qui n ’a
"j’ainhis ë<i> d^aUtre doifticild' q'ue - c e lu i>de; so n -p ère , ait
pu avoir 6000 francs de sesïâ œ /tîersiW à u tcsles règles
•de droit/se* réuûfesent p o u r dire< que ¿cette; sommet est
réputée légalem ent p ro v en ir e x ' su b sta n liâ p a l ris ; et par
conséquent c è s 6 o o o francs sont encore retranchés de la
"donation des biens* présens.'
!'■ V. 1 ■
■*>.-_> ,Vi. •
Jxj!5 °. lia délaissé àBenoît>M arcoux, prêtre,‘ p ou r 14000 f.,
une maison et un domaine considérables. Si on ne peut
•pas p ro u ve r sans experts que ces objets valoient 30000 f . ,
au moins est-il avo ué par le prêtre lu i- m ê m e qu ’iL y
avoit 1 0 2 1 4 francs d e plus-value.
■Ces faits étoient clairs et positifs
aussi les oncles
M a rco u x ont-ils cru plus, à propds d’y répondre par des
fins de non-recevbir. < >
Ils disent, i° . que les'ca p itau x reçus par le père ne
sont pas pris, sur la donation de biens présens , parce
qüe le donataire n’est saisi du m obilier que lorsqu’il y
a un état a n n e x é 'à l ’acte; 20. q u ’à l ’égard des 6000 fr.
d ’ A g a tlie , il y a chose jugée et m êm e acquiescée; 3 0. que
B enoît M a rc o u x , p rêtre, est p ropriétaire par délaissement
du donataire l u i - m ê m e , et que d ’ailleurs il avoit un
pécule q u a s i c a s tr e n s e , étant sociétaire de sa paroisse,
ce qu i lui donnoit un revenu de 3000 fr. depuis 1779.
- L a prem ière objection des oncles M a rc o u x est une
erreur de d r o i t , sous deux points de vu e : car d ’abord
lds rentes foncières étoient, avant le Gode c i v i l , un im
m eu b le; les rentes constituées étoient un im m euble fictif;
ci à -ce titre il ne falloit pas d’état annexé à la donation.
E u second lie u , cet état n ’est pas exig é par l’ordonnance
de
�. (
9
)
de 1 7 3 1 , p ou r les donations faites par contrat de mariage.
C ’est l’article i 5 qui exige cet é t a t , et l ’article 17 ex
cepte form ellem ent les donations contractuelles de la dis
position de l ’article i 5 . Ce p rin cip e, au reste, est enseigné
par R ic a r d , L o u e t , M . de Lam oignon en ses arrêtés, et
par M . F u rg o le sur les articles 1 5 et 17 de l ’ordonnance
de 17 3 1 . Il est donc surprenant q u ’il ait p u être c o m
battu à l’audience'de la C our.
L a deuxièm e objection est plutôt fondée sur des mots
que sur des raisons : car p o u r opposer la chose ju g é e ,
il faut q u ’il y ait tout à la fois eadem r e s , eadem ca u sa
p e te n d î, eadem con d itio p erso jia ru m .
O r , la contestation particulière qui s’étoit élevée contre
A g a t h e M a rc o u x , est chose étrangère au x intimés a c
tuels. L es mineurs demandoient à chaque légitim aire le
rapport de ce qu ’ il avoit reçu p o u r com poser sa p ro p re
légitim e et la réserve , si elle étoit due. Il a été jugé
qu’ A g a tlie M a rc o u x ne devoit pas ce ra p p o rt, parce que
son contrat de mariage devoit être exé cu té . E t en effet,
si le p ère avoit dans ses mains plus de 6000 fr. dispo
nibles , les mineurs n’avoient aucune qualité p o u r exa
m iner si les 6000 francs étoient donnés ou non.
M ais en m êm e temps la C o u r de L y o n dispensoit les
mineurs de rien payer de la réserve ; de sorte que la
chose jugée se réduisoit à dire que les 6000 fr. , pris
ou non sur la ré s e rv e , étoient une chose acquise à titre
valable.
C om m ent se p e u t - i l que les adversaires syncopent
encore cet arrêt cassé, p o u r y prendre un fragm ent de
B
�( IO))
la chose ju g é e , et rejeter le surplus? C a u sa ju d ic a ti est
in d ivid u a .
>
•
D ’ailleurs il ne s’agit pas aujourd’hui de faire rap
p o r te r ces
6 q o o francs par celle .qui les a re ç u s , et de
les lui ô te r ; mais seulement de p ro u v e r que si le père
a pu les lui donner , c’est aux dépens de sa réserve.
A in s i il n’y a pas chose ju g é e , il n’y a pas eadem ca u sa
peten d i ; au contraire, c’est dem eurer dans le^cercle de
la chose jugée elle-m êm e.
L a troisième objection est ce que Benoît M a rc o u x a
vo u lu em bro u iller le p lu s , p ou r esquiver les éclaircissemens que la C o u r lui a demandés.
C ’est sur la foi (le sa parole q u ’il assure avoir pu
payer fort aisément en peu de mois une somme de
7 7 1 4 francs; et m ê m e , s’il faut l’en c ro ire , l’argent lui
abondoit si f o r t , q u ’en 1 7 9 4 , quand tout l’or de France
étoit m étam orphosé en p a p ie r , il avoit encore une somme
de 10830 f r . , précisément ¿t la portée du député J a vo g u e,
q u i , d i t - i l , le fit arrêter et prit son argent.
Ce député là 11e démentira pas la captu re; il est m ort :
et certes il faut bien se garder de l ’exh u m er p our q u ’il
nous rév èle ce q u ’ il en est. J a v o g u e , proscrit lui-mêine
p o u r ne pas s’être born e a tuer des aristocrates, ne seroit
digne de confiance p o u r p erso n n e; et Benoît M a rc o u x
a pu en toute sûreté de conscience le charger d’ une
iniquité de plus.
Jl faut au moins con ven ir que les biens temporels
abondoient grandement chez le sieur M a r c o u x , prêtre.
Q uand son père achète des m aisons, c’est lui qui les
�( 11 )
p aye; quand tout le m onde n ’a qu e des assignats, il lui
reste encore beaucoup d ’argent.
Ce n’est pas ce que la C o u r lui demandoit ; elle vo u lo it
juger par ses y e u x de la sincérité des quittances données
sous son n o m , qui m otivoient l ’obligation de 7 7 1 4 fr. :
mais il ne paroît pas qu ’il ait vo ulu les p ro d u ire , qu oique
l’acte de 1792 constate q u ’il se les est retenues.
- D ’a b o rd , il est p r o u v é , par l’o b lig a tio n , m êm e , >quer
la quittance la plus considérable étoit ^donnée R ivant
l ’émancipation. •
'
Jusque-là B e n o ît, p r ê tr e , étoit sous, la puissance pa
ternelle ; il u ’avoit pas 'dei fonctions ecclésiastiques ca
pables d’ém anciper; il n’étoit pas s u i ju r is : la loi donnoit
au père l’usufruit des choses m êm e venues d’ailleurs que
des deniers du p ère; et si on se pénètre bien de la p o
sition de B e n o ît, il y a du ridicule à le croire capable
de payer 7 7 1 4 francs en si peu de temps.
E t que f a u t - i l p ou r juger l ’avantage in d ire c t? des
preuves? n o n , car la fraude se cache sous les apparences
de la v é r i t é , n im ia p rcca u tio d o lu s , et la parenté de
ceux qui contractent est déjà le prem ier signe que les
auteurs exam inent et regardent com m e prépondérant.
Ricard ( 1 ) , D an ty ( 2 ) , C habrol ( 3 ) , disent sur cette
matière tout ce q u ’on peut penser. I , article 9 11 du
Code N ap o léo n réunit toute leur doctrine. « T o u t e
« espèce de disposition au
(1) P. i re. , ch.
3,
profit d’ un incapable. EST
sect. 16.
(2) Chap. 7 , sur Boiceau.
(3) Chap. 14, art. 26, sect. i 3 .
)
B a
�«
nulle
( 12 )
, soit q u ’on la déguise sou s la J b r m e d ’un
« co n tra t o n é r e u x , soit q u ’on la fasse.sous le nom de« personnes interposées. »
A in s i la loi ne com pose pas; elle ne se prête pas aux
arguties q u ’on peut tirer d’une précaution plus adroite.
E lle a n n ulle.
D u m o u lin n’avoit pas dit autrement sur les ventes et
quittances d’ un p ère à son fils ou à son gendre. C o n clusurn est qu od ven ditio fa c ta j i l i o , v el g en ero , n o n
y etiarnsi n o ta riu s d ic a t p retiu m num eratum .
f u i s s e cora m se. ( P a r is , 1 2 4 , n°. 1 2 . )
D isons donc aussi que B enoît M a r c o u x , f i l s et lé g i
timante, étant incapable de recevoir au delà de sa lé g i
v a le t
tim e au préjudice du donataire déjà s a is i, n’a à son
profit q u ’ un acte N U L et sujet à rapport.
M a rcoux p ère ne p ou vo it pas lui délaisser des biensfonds en 1 7 9 2 ; il n ’en avoit pas g re v é le donataire; e t ,
p o u r payer, il faut être p ro p riéta ire de la chose donnée
en payement (1). O r , le père ne l ’étoit plus après sa
donation de 1779.
B enoît M a rc o u x se p réva u t du consentement du do
nataire; mais ¿[lie ceux qui pourroient penser qu ’ un tel
consentement est obligatoire, lisent ce que dit R icard (2)
sur cette matière , et ils ne douteront plus. U n p ère
qui sollicite le consentement de son h é r it ie r , est tou
jours un père : h n p e r io sissim u n i rogandi g e n u s , eu tu ,
q u i itnperare p o te s t, rogat (3).
•
(1) Ccd. N a p . , art.
(2) P. i re. , ch.
1238.
?
.
.
3 , sect. 17, n°. 776»
(3 ) Plia, in Traj»
.ii r .
,
;
�( i3 )
D ’ailleurs,' Jean-Baptiste M a r c o u x , donataire, n ’étoit
encore saisi de rien : sa donation de biens présens et
ve n ir étoit en suspens jusqu’.au décès du donateur ; d ’après
l ’article 17 de l’ordonnance de 1 7 3 1 , elle étoit caduque^
en cas de prédécès ; ainsi les enfans seuls ont été dona
taires/«re sua : ils ont été saisis directem ent, et l ’option
n’a pu être faite que par eu x au jo u r du d écès. ] D c l
A in s i toutes les dispositions intermédiaires d u dona-.
taire p rédécédé sont résolues. Son consentem ent n’a p u
rien ôter au droit de ses enfans; ils ont opté p ou r les
biens p ré se n s, et par conséquent c’est lors dp décès.
seulement q u ’ils ont eu le droit de faire rapporter tout,
ce q u i ma'nquoit du x biens existans e n '1779.
,,,/ ? : 0
Ces principes étoient élémentaires jusqu’à nos jo u rs,
et c’est en 1808 q u ’ ils ont reçu une p rem ière atteinte:
mais quelque respectable que soit l’opinion qui les con
teste, la C o u r examinera si elle.doit laisser lesjidées plus
long-tem ps incertaines sur ce point de d r o i t , et quelle
influence doivent avpir,l’autorité de R icard et de C h abrol,
la lettre de la loi ( au jo u r du décès ) , et une lon gue
habitude de ne jamais pfcnser autrement.
>
• Si Benoît M arçou& pe, rapportait pas le dom aine q u ’ il
a ôté à la donation de 1 7 7 9 , il
devroit a u :jmoins la
plus-value : et c’est ce q u ’enseigne Duplessis ( 1 ) , p o u r
le cas m êm e où il n ’y a pas^d’incapacité de celui qu i
reçoit. Q uan d des experts auront estimé ce :dom aine(et
la m a iso n , la 1C o u r r a u ça q u i |ujLr^u;,ajimpcçsé; sui} la
valeur.
• , : :-p - '• • ••
r J, r ; -0{.
..
■•
,-r
'
(1) Des successions ,rliy. i cr. , ch. a. (,
, <.t h
r— ■■ . ,
)j(
�CM )
B enoît M a rc o u x prétend q u e cette demande en rapport
e s t 'n o u v e lle , et doit être ren voyée devant les premiers
jfigés p o u r subir les deux degrés''de juridiction.
" M ais sous tous les points de vu e cette prétention est
mal conçu e, et un autre procès seroit chose frustratoire.
n ' i ° . G’èât Berïoît‘)'M a rc o u x qui demande lu i-m êm e *
12000 fr. de réserve : s’ il l’a'dans les m ains, il ne peut
pas la5 demander.
D o n c les conclusions en rapport ne
sont q u ’une fin de n o n -re c e v o ir.
'
2°. Ses frèresr se joignent à lui p o u r demander ces
12000 fi-ancs : si l ’ ün des demandeurs en est nanti, c’est
à lui seul qü ’ il faut s’en prendre , ou bien le défendeur
est bien fondé à conclure contre lui à ce qu ’il rapporte
l ’objet de la dem ande, puisqu’il est dans ses mains. C ’est
donc encore là une exception légale qui est inséparable
de l ’action. • :
1 i •j -
i
< J3°. E n un m ot,' il àeroit ridicule de dire à celui q u ’on
assigne : P ayez-m o i aujou rd’hui avec Votre argent, et vous
m ’assignèrez demain p o u r obtenir!de m oi la restitution
de ce que vous aurez payé.
4°. L a v e u v e M a rc o u x a toujours demandé le rapport
parl;cliâôuri de ce q u ’il-?avoit reçu à titre de légitim e :
¿¿s^ébhclusionsf6ht été m êm e adoptées. M a r c o u x , p r ê t r e ,s’én eshpìaiht'^ p ou r ne pas rappot-ter le domaine. D o n c
les conclusions actuelles en rapport et désistement ne
sôrit pas' nôiïVellesi
«J't ;«t / , t *i
u, )
.?»•
Cë : q iiî)<ést:'clhii'f,'dans celte cause ;>c’eàt que M a rc o u x
p ère a retranché de sa donation de 1 7 7 9 , un dom aine
tirurnison a “payé" la-légitime-),- et -environ 20000 fr.
en capitaux. Le m om ent ’q u ’il ipcliofei^pouiv diifiinuer
�ainsi la donation , a été lorsque'des m oulins êt'dclüse«
à saumons furent détruits par une in o n d ation , avec/une
. *
;
7
i
pertfc de^plus de 60000, fraijcs.j nu O 1:f ¿b L?iu-»;r- i:J
Si le sieur M a rc o u x père a pu prendre sur ses<;biens
des capitaux aussi considérables, ce n’a pu être que sur
les biens. , lib r e s ,' c’est-à-dire:/sur
la réserve..
.. JjL k
'
.L ' \ k—
*.
» V o ilà l’im putation de droit.
Remarquons; encore q u c jM a r c o u x fils a payé 14000 fr.
sur les légitim es, avant l’ouverture de la succession. L e
p ère lui en doit l’intérêt par c o n v e n tio n , et il n’a pu
y obliger que ses biens l ib r e s , c’est-à-dire, encore sa
réserve. V o ilà une autre im putation de droit.
T elles sont les observations auxquelles les mineurs
M a r c o u x se bornent. Ils ne donnent aucuns dévelo pp emens à la question de cum ulation de la ré s e r v e , et p o u r
le soutien de l’arrêt de la C o u r de L y o n ; un précis aussi
rapide ne peut pas en com porter l’é te n d u e , et l ’arrêt
au reste plaide assez puissamment p o u r lui-m êm e.
L es mineurs M a rc o u x se sont plaints de la réserve
d’ un s u p p lé m e n t , dont le jugem ent de M ontbrison a
donné acte. Ce supplém ent ne peut être dem an d é, lorsq u ’après le décès il dépend des légitimaires de v o u lo ir
un partage ou une légitim e. L ’option des adversaires
est p ositive, et ne doit plus laisser de matière à procès.
Ils plaident s u r la su ccession . Q u ’ ils accum ulent au
jourd’hui toutes leurs prétentions, mais qu ’ ils ne prennent
pas texte dans un procès ju g é , p ou r un procès à naître:
cela n’est ni l é g a l , ni légitime. L e procès de la su c cess 1011 ■
M a r c a u x ;doitA,ê tvc ju g é c]cnnii(iruj L e tei^iple ;de
Janus ne çloitx pas: être o u y q r t 'f p ^ .^ .r n ê m e arrêt qu i
�( 16 )
doit le fermer ; et sî les oncles M arcoux trouvent du
plais ir à se menager un appendice de procès, il est de
la dignité de la Cour de leur ôter-'cette maligne jouissance.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat. '
Me. M A R I E , licencié avoué.
A RIO M , de l'imprimerie de T hibaud Landriot , imprimeur
de la Cour d appel.. — 20 Mars 1809.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. La veuve et les enfants mineurs de Jean-Baptiste Marcoux. 1809]
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Delapchier
Marie
Subject
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Précis en réponse pour la veuve et les enfants mineurs de Jean-Baptiste Marcoux, appelans ; contre Benoit Marcoux aîné, Benoit Marcoux jeune, et Noel Marcoux, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1779-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0324
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
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Saint-Etienne (42218)
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doctrine
donations
prêtres
prêtres non émancipés
Successions
-
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1f959743d90f37eb02b82bb3bc65be28
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Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
L e sieur R O B E R T
d e
L E I G E , appelant;
CONTRE
François
ASTORG
et M a r i e
VIGIER,
sa f e m m e ,
intimés ;
«
ET
CONTRE
R O T Q U I E R et J e a n - B a p t i s
L A C R O I X , son mari , intimés.
B r i g i t t e
«
«
*
«
«
t e
L orsque les parties ont stipulé que les fruits (de
l'immeuble donné à a n tichrese) , se compenseront
avec les intérêts, ou totalement, ou jusqu’à due
concurrence, cette convention s’exécute, com me toute
autre qui n ’est point prohibée par les Lois. ( C o d .
« civ. art. 2089. ) »
A
�C2 )
Ce principe de la législation acluelle, conforme aux
lois romaines , adopté par les auteurs du droit qui se
sont le plus élevés contre l ’ usure , décide la contesta
tion sur laquelle la Cour aura à statuer. U n créancier
a joui pendant dix ans avant 1 7 1 4 , un très-petit pré
pour l’intérêt légitime de sa créance. L e débiteur ren
trant dans son héritage à cette époque, a continué le
paiement de l’intérêt pendant quarante ans, et a retiré
vingt-trois quittances, parmi lesquelles sont plusieurs
arrêtés de compte. Quand on lui a demandé le capital,
il a refusé de p a y e r, sous prétexte de l ’ancienne anticbrèse, et a demandé une vérification préalable pour
savoir s i , lors de l ’antichrèse et avant mil sept cent
quatorze, les jouissances de son pré avaient été ou non
d’une valeur supérieure h l ’intérêt échu pendant leur
durée. Voilà en précis tout l’objet de la prétention des
.Astorg ; et si elle a été accueillie par les premiers juges,
c ’e stq u e la cause a été deux foisjugée par défaut contre
Tappelant.
L a créance cédée a passé en plusieurs m ains, et la
résistance du débiteur a occasionné une foule de re
cours et de procédures, qui ont occupé les tribunaux
depuis 1764. Une partie de ces demandes en recours
est encore pendante devant les premiers juges, et il
n ’y a principalement eu litige actuel que l’eifet de l’anthicrèse. L ’appelant rendra donc compte
la Cour de
la convention qui a établi celle anticlnèse, et des actes
qui l’ont suivie.
�C
F A IT S
ET
3
)
PRO CED U RES.
Guillaume Soubie était créancier de Géraud Sales et
sa fem m e d’une somme de 600 fr. en capital, prove
nant d ’une dot, et produisant par conséquent intérêt
de sa nature. Les parties traitèrent sur cette créance
le 19 a o û t i
, et elle fut stipulée payable en quatre
iermeségaux avec intérêt. Il fui convenu que, pour cet
683
intérêt, ledit Soubie pourrait jouir du pré de L a v a l;
niais cette convention n’eut pas son exécution jusques
à un autre traité de 1703. Ainsi il est inutile de fixer
l ’atention de la Cour sur ce premier acte.
Guillaume Soubie-maria Pierre Soubie , son fils , en
1689 , et lui donna ladite créance pour légitime. Celuici la céda au sieur D o u lé, curé de Noailles, par acte
du 10 septembre 16 9 5 , et ce dernier obtint sentence
contre les débiteurs, le
5 octobre
suivant. Cette sen
tence encore n’adjugeait q u ’une hypothèque indéfinie.
lies héritiers du curé de Noailles cédèrent au sieur
E m e ry -R o b e rt, leur créance de 600 fr. et le droit de
jouir du pré L a v a l, par acte du i
5 juillet
1703.
Par ce même acte on voit que Marie Sales, fem m e
Sartiel, débitrice, intervint avec ledit S artiel, son mari,
pour s’obliger en outre de payer audit sieur Robert une
somme de 194 liv. i
5 sous,
provenant d ’arrérages do
rentes, adjugés par trois sentences. L ’acte termine par
la clause suivante, qu’il faut transcrire littéralement
A 2
,
�4
(
)
parce que c’est contre son exécution que les sieurs
Astorg veulent revenir (i).
Faute de paiem ent, Ledit Robert pourra jo u ir du,
su sdit pré de L a v a l, p o u r
le l é g it im e
in tér êt
des
tant et si Longuement que lesdits mariés
seront en demeure DE r e n d r e i c e l l e s , ce qu iLs pour
dites
sommes,
ront fa ir e quand bon Leur semblera , et Jusques à ce ,
se réserve ledit Robert l ’hypothéqué précitée et privilège
de ses hypothéqués. A in s i a été convenu et promis tenir
par lesdites parties sous C obligation , etc.
Après cet acte le sieur E m e r y - R o b e r t se mit en
possession du pré L a v a l, et en jouit pendant les années
1704 et suivantes, jusques en 1714.
Alors Marie Sales était remariée à Pierre V ig ie r ,
et ce nouvel époux s’empara du p ré , sans autre lorme.
L e sieur Robert aurait pu sans doule refuser la remise
de son gage jusqu’à ce q u ’il fût p a yé: mais il était fort
aise d ’en Olre débarrassé et d ’avoir le droit de deman
der son revenu annuel ; en conséquence il assigna les
dits Pierre Vigier et Marie Sales par exploit du 18 jan
vier 1716 .
Il exposa «• que ladite Sales ne saurait ignorer être sa
« débitrice i.° de 600 fr.; 2 ° de 194 ir. i
«• causes portées par acte du i
5 juillet
5 s. pour les
1708; que pour
( 1 ) Il y a une légère différence entre l’expédition qu’en rap
portent les A storg, cote i.rc , et la copie signifiée cote 5; mais
cette différence ne change rien au sens de la convention.
�.
(5 )
v
\
« l’intérêt desdîtes sommes elle n’a'ye consenti engage« ment des fruits du pré appelé de L a v a l, duquel led.
« instant a j o u i paisiblement jusqu’au trouble *.
En conséquence il conclut à ce que lesdits mariés
Vigier fussent solidairement condamnés à lui payer * la
«‘ somme de 3p fr. 14 s. 9 d . , faisant le revenu desdites
»■sommes ‘depuis le 14 juillet 1 7 1 4 , au lieu de La non
« jou issa n ce d u d it p ré , avec condamnation de tous
dépens , dommages et intérêts ».
<
, '
fj'j
# ‘
Il prit d’autres conclusions étrangères à l ’anticlirèse,
et tendantes au paiement des arrérages d’ une renie en
grain, qu’il évaluait pour le passé à 70 liv. 2 s. 6 d.
Cette deman.le fut accueillie par une sentence non
attaquée du 26 février 1 7 1 6 .
Peu de tems après cette sentence, le sieur E m e r y Robert céda sa créance à Joseph R otquier, avec le
#
,l
» •
droit de jouir du pré L a v a l, ou de sè faire payer de
l ’intérêt de ladite créance.
' Cet intérêt fut payé p a r Vigiér , ' et ses premières
quittances prouvent, comme les postéiieures, qu il ne
s’agissait plus du passé.
. .
•'
L a première quil lan ce, du 16 mai 1 7 1 7 , est de 80 fr.
pour les non jouissances du pré de Laval engage, et ce
pour les années l'-jiiJet 1716. (Com m e ces 80 lr. excé
daient de quelques sous l’intérêt légal, lesieur Rotquier
ajouta à sa signature qù’il les i m p u t a i t sur les 70 francs
ci-dessus ).
P a r l a seconde, du
3
*
.
o juillet 1724., le sieur Rotquiér
reconnaît aroir reçu l'intérêt à Lui d u (le la somme de
�794 h'v-
*5
( 6 )
s- en lieu des non jouissances du pré Laval
pour les années 1 7 1 7 et suivantes ,ju s q u e s et compris
la présente, échu au 14 du présent.
M arie Sales décéda, laissant pour héritiers testamen
taires Pierre V igier, son m ari, el Françoise Sales, sa
sœur. Ils ne furent pas exacts à payer, el le sieur R o tquier fit des poursuites en se-servant du nom du sieur
11
E m e ry -R o b e rt, son cédant.
assigna par exploit du
11 mars 1780 lesdils Vigier, et Sales, « pour voir décla«r rer contre eux exécutoire la sentence de 1 7 1 6 , et
« payer i.° 600 liv. d'une part; 2 0 194I1V. i s. d’au« tre ; .° 70 liv. 2 s. 6 d. d’autre ; 4.0 les intérêts adjugés
5
3
« par ladite sen ten ce, et ceux échus depuis el ceux
<r qui écherront à l'avenir, sauf à tenir à compte ceux
<f que les assignés justifieront avoir payés », ( parce que
l ’intérêt des 70 liv. 2 s. 6 d. était resté en suspens).
Cette demande fut reprise en 1735 ; M arie Sartier,
fille du premier lit de Marie Sales et fem m e de Joseph
V ig ie r , fut mise en cause; et le 18 janvier 1 7 3 6 , il
intervint sentenceadjudicalive,el encore non attaquée,
laquelle condamne au paiement desdits capitaux, et seu
5
lement à l ’intérêt échu depuis le i ju ille t 1714.
Celte sentence est suivie de saisie exécution en 1787.
A u lieu de contester, les débiteurs présentent un gar
dien volontaire. Ils font plus, ils paient.
Les Astorgproduisenl sixquiltancesdonnées en 1787,
1 7 3 8 , 17 4 0 , 1741 et 17 4 4 , a compte des intérêts et
frais. Elles sont sur la même feuille.
A u bas de celte m êm e feuille on voit que les parties
�(. 7 ) ,
•.
ont arrêté compie à 88 liv. 16 s., y compris un billet
de 1 liv. ; sur laquelle somme lesV igier paient
liv.
5
53
ledit jour n avril 1746- I-a quitlancc est conçue en
ces termes : de compte arrêté entre nous de tous les reve
nus échus ju sq u 'a u 16 janvier 1 7 4 5 , d e là rente qui
m ’est due par les dénommés de l autre pari (Pierre êt
Joseph V ig ie r), il s ’est trouvé ni être d u la somme de
etc. , sans préjudice, etc.
1
Il paraît que le 28 août 1 7 4 6 , Jean et Joseph R o t
quier, père et fils, débiteurs envers Antoine Rotquier
d’une légitim e, lui cédèrent ladite créance avec pro
messe de garantir et faire valoir.
L esV igie r agirent avec ce nouveau créancier com m e
avec les précédens ; ils produisent huit quittances don
nées par l u i , à compte des intérêts pendant les années
1747 et suivantes, jusques à 1755.
!
•
' **"J
Mais 011 vint à compte le 22 novembre 1 7 5 6 , non
seulement des intérêts échus, mais encore des condamr
' '
|
nations d’une autre sentence étrangère ausieurRobert :
■
*
‘
lout fût réglé jusqu’au jour, h 241 liv. 1 2 s ., après avoir
déduit les dixièm es et vingtièmes , est-il dit, depuis que
ledit Rotquier avait droit
des
sieurs Labianche et R o t
quier, sans préjudice de La somme principale de 864*//^,
I ' ' I(
***
' ■■ *")!J•i‘ •
11 s.) et des intérêts encourus depuis {e 28 août dernier.
Ce règlement fat tellement 'définitif .que^ les lsept
quittances postérieures règlent positivement l’intérêt
annuel à une somme fixe, lantôt de 38,liv. , Jantôt de
36 liv. 1 o s. pour l'intérêt échu.le. . . ; vingtièmes clèdiutsi
^ C e s sept quittances ont toutes la m ehie fo rm u le ,
�m
depuis 1757 jusques au a janvier 1 7 6 4 , date de la
dernière.
,
'! • • I! ( '
ix:?. - 1:
est essentiel d’observer à la Cour que le com pte
de 1766 fut fait avec M ichel Vigier.
3
11
Antoine Rotquier désira être payé de son capital;
et par exploit du 4 juillet 1 7 6 4 , il forma demande en
la justice du Doignon contre ledit M ichel Vigier fils,
et héritier de Joseph et de Marie Sartier, en exécutorialité de la sentence du 18 janvier 1736 , et en
5
paiement dessommes de 600 liv. d’une part, 194ÜV. i s.
d’autre, et 70 liv. d ’autre, portées par ladite sentence.
Ledit M ichel Vigier dit en défenses « que sans ap«• prouver les sentences de 1 7 16 et 17 3 6 , contre les* quelles il se réservait de se p ou rvo ir, il devait lui
« être fait compte des jouissances du pré de Laval qui
5
11 fut engagé par contrat du i juillet 170 3, pendant
«■leur durée , pour être compensées pendant ledit
«• teins avec les intérêts des sommes qui en étaient sus« ceptibles, telles que celle de 600 liv., et subsidiaipe* ment sur le principal, pour être ensuite par lui fairiç
« des offres , etc. »
C e langage évasif d’un débiteur qui voulait éloigner
sa libération , s’est changé en un système sérieux sur
lequel on plaide depuis 1764*
On se disputa de cette manière as^e^ long-tems sous
le nom du sieur E m e r y -R o b e r t. O11 opposa à Vigier
les arrêtés de compte et les quittances. 11 résista le
plus qu’il put à Les m o n trer, en disant qu’il n ’y était
pas obligé, qu’il n’y avait aucuns arrêtés dé c o m p te ,
'
et
�( 9 )'
et que s’il avait renoncé à son droit par quelque acte
qui réglât le passé, c'était an créancier à le produire.
Enfin une sentence ordonna que Vigier exhiberait
ses quittances, et en ferait le dépôt au greffe.
Quand les sieurs Rotquier eurent assez plaidé à
l ’inscu du sieur E o b e r t , ils jugèrent à propos d’inter
venir dans leur propre procédure , et de conclure
contre le sieur Robert à ce qu’il fût tenu de les garan-lir. Cette intervention eut lieu de la part de Joseph
R o tq u ie r, cédataire de 1745.
lie sieur Robert-D eleige, successeur du sieur RobertLablanche, premier créancier, apprenant pour la pre
mière fois qu’il existait sous son nom un procès relatif
h une créance du sieur E ru e ry -R o b e rt - Lablanclie ,
conçut un soupçon bien fondé, sur une manœuvre
dont il aurait dû être informé plutôt. Il se défendit
d’abord avec quelque humeur, parce qu’on avait abusé
de son nom. 11 désavoua toute participation à la pro
cédure déjà fa it e , dit que si on s’était servi d’an
ciennes sentences obtenues par le sieur Lablanclie ,
elles lui appartenaient; et soutint dans tous les cas que
toute action était prescrite.
Mais quand on lui exhiba la cession souscrite par
le sieur R o b e rt-L a b la n c lie , il n’hésita pas en reconnaîlre l’écriture.
Une sentence du 10 juin 1766 appointa les parties
en droit, joignit la demande en recours du sieur R o t
quier à la demande principale, et en m êm e teins réiB
�( IO )
léra contre Vigier les dispositions de celle de 1764 qui
avait ordonné le dépôt au greffe de ses quittances.
Enfin le procès fut jugé par forclusion contre ledit
Vigier et contre le sieur Robert , le 9 mai 1767. L ’es
timation des jouissances du pré de Laval fut ordonnée,
5
sous la déduction des charges foncières depuis le 1 juillet
170 3, jusques et comprise l’année 1714.
L e sieur Robert-D eleige interjeta appel devant la
sénéchaussée d’Aurillac et intima, comme il led evait,
les deux parties de la cause; c ’e s t-à -d ire , les sieurs
Rotquier et Vigier.
Cet appel fut suspendu pendant vingt ans. Il fut
repris en 1787 par M arie V igier, fille de M ich e l, et
par Astorg son mari. Elle interjeta mêm e appel inci
dent de la sentence de 1 7 6 7 , fonde sur ce que les
charges, disait-elle, 11’avaient pas dû être déduites de
l ’estimation ordonnée.
L e procès fut encore jugé à Aurillac, com me il l ’a
vait été' en la justice du D o ig n o n , c ’e s t - à - d i r e , par
forclusion, et toutes les conclusions des Vigier et Astorg
adoptées le i
3 août
1790* L a sentence du Doignon fut
confirmée en ce qu’elle ordonnait une estimation des
jouissances du pré Laval ; elle lut infirmée en ce qu’elle
ordonnait que les experts déduiraient les charges fon
cières.
lie sieur Robert interjeta appel de celte seconde sen-
1ence
au parlement de Paris. L a suppression de cello
cour en déféra la connaissance au tribunal du district
�( II )
de Mauriac. L à , les héritiers de Joseph Rotquier colludant avec les Vigier et Astorg , signifièrent, dit-on ,
à c e u x - c i qu'ils acquiesçaient aux sentences de 1767
et 1790.
Pendant cçtte procédure, les Rotquier enlr’eux en
introduisaient une a u t r e ;le sieur M eilhac, pelit-filset
héritier d'Antoine Rolquier , cédât aire de Pierre et
Joseph en 174Ü , ne voyant pas rentrer sa créan ce,
quoique ces derniers eussent permis de fournir et faire
valoir, assigna leurs héritiers (parties adverses), pour
le payer eux-mêmes.
Ceux-ci mirent encore le sieur Robert en cause, on
ne sait pourquoi. Après une procédure très-embarass é e , dont il est fort inutile d’occuper la cou r, les débatsse terminèrent par 1111 jugement qui donna un délai
aux Rotquier, parties adverses, pour faire finir le procès
actuel, sinon les condamna à paj’er le sieur M eilh ac;
il fut sursis à faire droit sur. les demandes en recours
et contre recours.
Déjà , et avant ce jugem ent, le sieur R obert, pour
n ’être plus harcelé de tant de débats étrangers , avait
repris en la cour son appel de 17 9 0 , contre les R o t
quier et Vigier.
Ces deux adversaires tiennent aujourd’hui un lan
gage bien diilerent.
Les Rolquier se prétendent follement intimés , et
disent que n’ayant pus interjeté appel de la sentence
d’Aurillac, et ne voulant prendre aucun intérêt dans
la contestation, ils doivent être mis hors de cause, sauf
B a
�( 12 )
à plaider en première instance sur la demande en ga
rantie pendante. Telles sont les conclusions de leur
requête du 8 thermidor an 1 1 , répétées et expliquées
dans une écriture postérieure.
Les Vigier et Astorg se défendent plus sérieusement,
et font les plus grands efforts pour prouver qu’il y a
lieu de revenir à examen sur l’antichrèse de 1703, et
de confirmer la sentence de 1790.
M O Y E N S .
L
e
sieur Robert a intimé deux parties, et ce qu’il
y a de bizarre ce sont ceux-là même qui l ’ont appelé
au procès, et ont pris des conclusions contre lu i, qui
Veulent qu’il ait dû les regarder com m e étrangers à
cette m êm e contestation.
L es sieurs Rotquier et Lacroix qui ont pris tant de
peine à prouver qu’on aurait dû ne les compter pour
rien , mais q u ’on est forcé de compter pour quelque
ch ose, ne se sont plus souvenus que si le sieur Robert
plaide, c ’est parce que le sieur Joseph Rolquier leur
au teur, l ’a assigné en garantie , le 28 octobre 1765.
Ils ne se sont pas souvenus qu’il y avait une sen
tence rendue le 10 juin 1 7 6 6 , qui joignait celte de
mande à celle soutenue par V ig ier; el qu’ainsi après
une jonction, toutes les parties sont parties nécessaires,
tant qu’ une seconde sentence n’a pas prononcé de dis
jonction.
�( i3 )
Ils ne se sont pas souvenus que le même Rotquier
leur au teu r, était en qualité clans la sentence définitive
du 9 mai 1 7 6 7 ; qu’il était aussi en qualité sur l'appel
porté à Aurillac ; et aussi en qualité dans la sentence
cofifirmative du i août 1790. Ils en auraient conclu
3
eux-mêmes que celui qui a été partie nécessaire en
p r e m i è r e instance, et sur un premier a p p e l, est aussi
p a r t i e nécessaire jusqu’à la fin du procès.
Q u’importe qu’il ait été fait pendant l’appel actuel
une procédure additionnelle, où les Rotquier ont de
nouveau appelé le sieur Robert en garantie , et que
les premiers juges en soient encore saisis. Celte super
fétation n’est pas un m o y e n .
Ou l’objet de cette nouvelle demande en garantie
est le même que celui de 1765 , et alors la cour en
est saisie comme elle l ’est de toute cette procédure:
ou il n’est pas le m êm e, et alors les premiers juges
n ’ont retenu qu'un autre procès.
Mais qui pourrait dire que ces premiers juges ont
demeuré saisis de ce qui était de 1 attribution d e l à
cour ; ils ne le pouvaient pas.
L ’acquiescement que
les
Rotquier ont donné en 1792
seulement, aux sentences de 1767 et 1790 , n ’empêche
pas que le sieur Robert n’ait pu et dû les appeler en
cause.
Il l’a pu,' parce qu’il avait intérêt d ’avoir un juge
ment convenu ; et que quand la cour aura slatué sur
la garantie pendanle, les Rotquier quelconques ne se
ront pas assez m a l-a v isé s pour l’appeler ensuite en
�( H )
première instance, et conclure à la m êm e garantie.
Il l’a d û , parce que le parlement de Paris, et par suile
la cour., étaient saisis du procès, et n’ont pas encore
prononcé sur l’efïet de cet acquiescement.
A u reste le sieur Robert est si éloigné d’élever au
cunes contestations, mêm e douteuses , qu’il déclare
s’en rapporter à la prudence de la cour, non-seulement
sur le renvoi demandé par les Rotquier et L a c r o i x ,
mais encore sur le fonds de la garantie e l l e - m ê m e ,
s’il y avait lieu d’y statuer.
Il importe peu au sieur Robert d'être livré seul à
repousser la prétention des Y igier et Aslorg ; elle est
si extraordinaire et mal conçue, qu’il n ’y a véritable
ment qu’un avantage certain à l ’examiner pour la
combattre.
Les Vigier et Astorg ont recueilli beaucoup d’au
torités pour prouver que la convention de 1703 était
nsuraire , et que la prescription n’a pas couvert celle
prétendue usure.
L e sieur Robert n ’a pas mêm e besoin d’invoquer
la prescription ; il lui suffit de rappeler le caractère de
l ’antichrèse, pour démontrer q u e , sur-tout dans l’es
p è c e , elle a été une convention très-commune et trèslégitime.
L ’antichrèse est définie dans la glose de la loi
3 , au fT
depignoribus, un gage donné au créancier, pour q u ’il
en compense l’usage et les fruits qui eu naissent, avec
l ’intérêt de l’argent qu’il a prêté. P ig n u s quod sub
�( i5 )
hoc nomitie credilor accipit, ut ejtts itsum pro
sibi cornputet. D ’autres interprètes ont donné
u s u r is
une dé
finition plus intelligible encore, en disant que l’antichrèse a lieu quand un immeuble est donné au créan
cier , ul percipiat rei fru ctu s i n v i c e m usuratium ,
donec dcbitor pccuaiatn soLçat.
Ce conlrat aussi commun en France avant
de L a w , que les contrais de rente Tétaient
le système
avant r é
mission des assignats, avait été le sujet de beaucoup
de controverses pour ou contre sa légitimité.
Les auteurs les plus scrupuleux sur l’usure, s’accor
daient tous a justifier l’anliclirèse, quand les fruits de
vaient se compenser avec un intérêt légitime , ou dû
de sa nature; ils n’y voyaient de conlrat usuraire que
dans le cas où le créancier percevait les fruiis d’un im
meuble pour l’intérêt du prêt ordinaire, parce que les
lois défendaient de stipuler l’intérêt de l’argent.
Dans le premier cas , il y avait encore une aulre
distinction à faire , et celle-là se puisait dans les lois
romaines.
Le créancier pouvait avoir fait une stipulation évidem
ment trop avantageuse. I/immeuble pouvait produire
plus que l’inlérêt légal, et alors il était suspect d’usure.
Mais voici le tempérament que prenaient les lois ellesmêmes.
Si le créancier affermait à un autre l’immeuble im pignoré; alors, parce qu’il avait un revenu certain , il
était clair qu’il y avait usure dans l'excédant de ce
revenu au-delà de l'intérêt légal;
�( 16 )
Mais quand le créancier jouissait lui-m êm e, la loi
ne voyait aucune usure, dans le fait, même prouvé,
que les fruits de l'immeuble dussent surpasser l’intérêt
légal, à cause de Yincertitude des récoltes.
Ainsi s’expriment les lois 1 4 et 1 7 ,au code de usuris.
Les auteurs du droit français confirment pleine
ment ces principes. Le sieur Deleige rappellera le sen
timent de Cujas, et celui du Dictionnaire canonique*
pour fnontrer qu’il a choisi ses autorités parmi les plus
grands ennemis de l’usure.
Quœ conventio l i c t t a e s t etiamsL p lu r i s do/nus Locari soLeat quam ejjiciat legitimarum usurarum ratio ,
çel ut f u n d i oppigneratifructus omnes
v i c e usu raru m
credUor percipiatj quœ conventio propter incertum eçentum fructuum adm issa est, et propter incertum f r u menti pretium. Observât. C u ja cii in lib. 3, ch. 35.
Le Dictionnaire canonique au mot antichrèse, in
dique cet avis de Cujas, en l’appliquant même à l’in
térêt du simple p rê t, pro credito pigtioris usus. A la
vérité il ajoute que le droit canon ne s’y conforme pas.
Mais, a jo u te -t- il « le droit civil 11’a pas usé de la
«• même rigueur. L ’incertitude des fruits qui peuvent
« être recueillisse risque même que l’on court jusqu’à
jt la perception, d’en être privé; enfin la tranquillité
« qu’acquiert le débiteur, par cet accommodement, ont
• persuadé que cette convention n’avait rien d’illicite.
Le droit français n’a donc vu qu’un contrat aléatoire
dans une convention qui présente en e i l e t des chances
aussi incertaines. Car, à moins d’une disposition cho*
quante
�*7
(
)
quante enlre l’étendue d’un champ et les intérêts d’ une
-créance, nul Ine jpourra assurer que-le créancier sera
certain d ’obtenir en produit net l’intérêt qui lui est dû,
sur-tout pendant plusieurs années consécutives.
S’il s’agit de vig n e s, une année d’humidité ou de
brouillards peut fairè perdre un an de „culture ; s’il
s’agit d’ nn pré , un printems de,sécheresse peut aussi
r u i n e r tout espoir de récolte.); '
C ’est pourquoi un arrêt de 1 7 6 4 , rapporté par Cat e la n ,« a jugé que le contrat d’anticlirèse devait être
r observé en la cause d’une fem m e villageoise qui avait
g baillé a jouir à son créancier, une vigne h titre d’an« ticlirèse , avec celte convention, que le créancier
« jo u ira it'd es fr u its pour.les intérêts , quoique celle
« femme soutînt que les fruits; excédaient ad double le
« légitim e'intérêt. U in certitu d e'■
des fn u its , qu i est
« la raison des lois f u t une des..raisons de l'a rrêt».
Catelan , liv.
5,
ch. I.er ; et Brillon , v.° antichrbse.
•Or, Catelan qui était magistrat, pouvait, sans se trom
p e r , donner le véritable m o tif des arrêts de sa cour.
Ces auteurs citent un-autre arrêt de 1 6 5 9 , qui or
donna l’imputation de l ’excédant du légitime intérêt
sur le capital; mais jSarce que le créancier’ avait donné
la maison im p ign orée, à lo y e r , et qu’ainsi,1e revenu
étant connu, il n ’y avait plus pour lui d’incerlilûdè.
A u ro ü x , sur l ’art. 421 de la coutume de Bourbon
n a is , dit que l ’anliclirèse est un contrat très-licite
quand les intérêts sont dus jauX'créanciers.
•
L o u e t , qu’il a'.pluiaux Astorg deiçiter fcn leur faC
�( i8 )
v e u r , on ne sait pou rq u o i, vante au contraire les
avantages d e l’anlithrèse, et après avoir dit que Dum ou
lin n’admet l’antichrèse que sous deux conditions , la
i . cre que le débileur ait toujours le droit de reprendre
l ’im m e u b le ;la 2.e que les fruits n’excèdent pas année
commune le quinzième du principal, « néanmoins, dit
« Loue! , cet avis n’a été suivi au palais pour la ré« duclion des antichrèses au denier quinze. Car le do
te
«r
«
«
maine du roi a été vendu au denier douze en anticlirèse; et pour juger des actions des hommes seIon l ’ u l il i lé p u b l i q u e , l ’a n t i c h r è s e a p p o r t e plus de
commodité au débiteur que la rente constituée, et
«■est plus tolérable. L ’antichrèse est sujette aux cas
« fortuits, g rê le , g u e r r e , tem p ê te , f e u : pour telle
« année les fruits sont perdus par la violence des tems.
« S’il y auberté de fruits, le créancier jouit de cet heur;
«
«
«
«
si stérilité , il la faut supporter; s’il faut des réparalions, cela tombe sur le créancier. Les débiteurs ont
cet avantage qu’ils ne sont en arrière pour les arrérages qui est leur plus grandë ruine. L e débileur
<r n ’est grévé de cautions, etc.-« Let. P. N.° 9.
Voilà l’auteur que les Astorg ont supposé l ’ennemi
des antichrèses; ils y ont recueilli çà et là plusieurs
arrêts relatifs à des réductions de renies au laux de la
lo i, el par conséquent si dislans de la contestation que
ce serait s’en éloigner soi-même de les réfuler parti
culièrement.
L e s Astorg ont encore cité Roussonu-Lacoinbe , mais
seulement les principes qu’il fait valoir au mot usure.
�19
(
)
Ils ont. évité dë rappeler ce qu’il dit aü mot antichrbse ,
p o u r établir q u e cet acte n’est réputé usuraire que quand :J
il *a eu pour objet *dè faire porter un.intérêt illégitime à
uii.sim pie prêt d’argent, te:
V. ^ ^
v r
( ■
>
Ils citent un arrêt du 22 juillet 1 7 1 3 , du Journal des
audiences 5 mais il s’agissait d un créancier qui faisait
porter intérêt à l’intérêt de son argent, etron n’y lit
pas un seul moi d’ànticlirèse. '
. v > v/
Enfin ils citent Denizart et M .r Chabrol. L e premier
ne fait que copier Lacom be sur l’anticlirèse ; mais M .r
C h a b ro l, bien loin d’être opposé à ce genre de contrat,
dont il ne s’occupe qu’en parlant du contrat pignoratif,
fait une grande différence entre l ’un et l’autrè. Il regarde
le contrat pignoratif comme usuraire, mais il dit que les
antickreses sont plus favorables , en ce quelles n ’ont
rien de déguisé n i simulé. 11 pensé au resteique «le point
« décisif est de savoir si le créancier avait un titre qui
et liii assurât l’intérêt de son argent, ou s’il n’a fait que
c prêter son argent loïs de Fantiçhrèse »;
A la vérité, car il ne faut rien dissimuler j M .r Chabrol
d’accord en cela avec L a c o m b e et quelques autres au
teurs, pense!que l ’excédant desjfriiils ¡dè.vaitij en cas
d’anticlirèse , être i m p u t é ¡sur le capital. 5 mais dan?
'quel cas?
I-,
' •*
-uaMiU f :
’ ;r
IiNon seulement ce n’est pas quancj les partiesise
Sont
réglées volontairement lors de l’acte : encore moins
(quand elles se sont réglées ensuite jiar plusieurs arrêtés
.de compte. Mais comme dit L a co m b e : « Si én'faisant
« une année commune- derr p lu s ie u r s le s fruits excé" C 2
�( 20 )
« chiient considérablement les intérêts ordinaires, Tex
te cédant serait imputé chaque année sur le capital ».
C e que dit Lacom be est recueilli de G o d e fr o i, qui,
sur la loi 17 cletisur, ne s’occupe encore que du contrat
pignoratif, ou du cas où il y a vente : mais la G lose, sur
la même loi, s’explique d ’une manière à ne pas laisser
de doute sur la question.
M ulier obligavit m ihi vineam, et in vicem usurarum
convertit ut recipercm vindemiam. Si plus emolumentl
consecutus sim e x fru ctibu s quam etiam sit in usurâ,
an ULud revocari p ossit quœritur ? IDicitur quod non.
Q uia potueratevenisse quod tuhil provenisset , et tatneri
necesse habe 'ret stare conventtoni} et propter -incertum
non erit retractanda.
Opposera-t-on que les Romains admettaient le prêt
à intérêt, et que ce n’est pas dans leurs lois qu’il faut
chercher des principes?
Mais l’objection serait de mauvaise foi, si on l’ap
plique au cas où il s’agit d’une créance française, por
tant intérêt de sa n atu re; car alors c’est précisément
com m e s’il y avait eu stipulation permise.
Les Romains p e r m e t t a i e n t le prêt à intérêt com me
il est permis en France depuis le
3 octobre
1789; mais
bien loin de tolérer l ’usure, qui est très-loin du prêt à
intérêt, on sait que leurs lois étaient sur ce point plus
restrictives que les nôtres.
Un seul exemple le prouve. Nous soufïrons la ruine
d’ un débiteur par une accumulation criante d’intérêts.
A v e c quelques exploits, nous autoriserions que cent
�C 21 )
ans d’intérêts fussent demandés, et lesHomains ne per-'
mettaient pas que les intérêts accumulés surpassassent
le capital.
>
Les lois romaines disaient comme les ordonnances
françaises : P ro usurls stipulari nerno supra modum
usurarum licitum potest. L . 44 'J F ' d e usur'
Pourquoi donc les lois romaines ne seraient-elles pas
pour nous un règlement en matière d’anlichrèse quand
il s’agit d’y appliquer une créance portant intérêt-de sa
nature ? Pourquoi la loi citée ne serait-elle pas ici ratio
scripta, lorsqu’elle n ’est pas une loi arbitraire, lors
qu’elle est m otivée, lorsqu’elle déclare que sa décision
est fondéé sur une convention vraiment aléatoire ?
Ce n’est pas seulement dans les lois romaines qu’il
faut rechercher les principes de l ’antichrèse ; puisque
/ tous les auteurs du droit français s’en occupent, et que
si plusieurs la regardent com me prohibée dans le cas
d’un intérêt illégitime ,a u moins voit-on qu’ils se réu
nissent tous à penser que si le contrat ne présente pas
de détriment notable au débiteur, il faut l ’exécuter;
et qu’il ne faut ordonner d’imputation qu’au cas où la
convention serait évidem m ent usuraire, et les fruits
disproportionnés à l’intérêt.
-i
. Mais combieniles Astorg sonl loin de cette dernière
h ypothèse, malgré leurs exagérations ridicules sur la
valeur des fruits de leur héritage, qu’à la vérité ils
.précisent pas.
r
ne
L eu r pré de L a v a l , qu’ils ont dénaturé depuis lonr
.gîtes années parce, qu’il était rnai'écagéux ôliplein de
�( 22 )
joncs, avait en surface deux petits journaux ; et certes;
en 1703 il est bien difficile de voir dans un revenu
aussi médiocre et aussi incertain , quelque chose de
supérieur au revenu de 864 livres.
Si des expertsy étaient en vo yé s, comment fixeraientils cette année commune sur dix, que les auteurs et
Tusage veulent être le seul mode de connaître le véri
table revenu appréciable? comment sauraient-ils s’il y
a eu des années sans récoltes? la tradition ne leur rappelera que 1709. Com m ent encore sauraient-ils le prix
du foin, puisque les mercuriales n’ont fixé que celui
des grains?
Eviteraient-ils l ’erreur en estimant ce prix annuel
à une époque critique, ou la rareté du numéraire fut
la première cause de la création des billets de banque?
Les Astorg ont compté sur l’arbitraire quand ils ont
voulu une estimation plutôt impossible que difficile ;
ils s’efforcent d’y voir de la possibilité, mais leurs bases
incertaines achèvent de convaincre qu’il n ’y aurait
rien qui éclairât la justice plus qu’elle ne l’est par elle
m êm e et par les règles du droit.
S’il y a dans l ’acte de 1703 un contrat aléatoire qui
ne présente pas au créancier une chance certaine, une
chance usuraire, pourquoi ne faudrait-il pas l’exécuter
plutôt que de jet ter les parties dans le vague de l’opé
ration la plus conjecturale.
U n intérêt de dot est un vrai capital susceptible luim êm e de produire intérêt e x ojjtcio Ju d icis. A v e c ce
capital rien n’empêchait d’aifermer les fruits d’uu im-
�.
*( a 3 )
m euble pour un certain nombre d’années ; c’était une
vente de récoltes a prix fixe.
Pourquoi au parlement de Paris faisait-on imputer
les fruits sur le iprincipal, quand l’intérêt n’était pas
dû. C ’est qu’alors il n’y avait pas de vente valable des
fru its, en ce que le prix convenu n’était pas réel ; il
n ’y avait plus res, consensus et pretium , et alors pour
d o n n e r un prix aux fruits vendus, il fallait le retrouver
sur le capital, qui était la seule chose q u e l ’aclieteur
eût pu offrir dans ce contrat de vente.
Mais quand l’intérêt est légal, voilà un prix certain;
la vente des fruits est donc légale et valable, et jamais
.personne n'osa prétendre qu’entre le prix et la chose
vendue , il fallût toujours une égalité mathématique.
Si c’était un contrat aléatoire, il était toléré et il
l ’est encore. L ’incertitude des fruits a été la règle des lois et celle de la jurisprudence.
L e sieur Deleige a cité plus haut un arrêt de Cater
lan sur l’anlichrèse d’une vigne ; le journal du parle
ment de Toulouse en rapporte un autre plus r é c e n t ,
"du 3 i juillet 1 7 1 4 , qui dans le cas meme où un mou
lin, tenu à autichrèse, avait, été donné a ferme par le
créan cier, pour un prix supérieur a l intérêt de son
argent, n’a pas ordonné l ’imputation de l ’excédant sur
.le capital ; par cela seul qu’un moulin est sujet à de
-grosses réparations et à des.cas fortuits, et qu'ainsi
.malgré la certitude du prix annuel, il restait toujours
l’incertitude du vrai revenu.
f
Si les arrêts du parlement de P a ris, dans des cir-
�( H )
constances d’usure manifeste, n ’ont pas favorisé l’anlichrèse, au moins est-il certain, que dans les cas d’in
térêts légalement dus, il l’a toujours regardé com me
un contrat très-légitime. L e rédacteur de ce m ém oire
a sous les y e u x l’expédition en parchemin d ’un arrêt
rendu au rapport de M .r Dudoj^er , le
25
mai 1 7 8 1 ,
entre le sieur Geraud-M abit et les dames de Caldaguès,
lequel arrêt ne laisse pas le plus léger doute sur la ju
risprudence de ce parlement.
U ne Jeanne Découblat s’était reconnue débitrice du
sieur de Caladaguès, pour légitimes et autres objets,
de 26,3oo liv., le 5 avril 1 6 6 7 , et lui avait donné deux
domaines à antichrèse, pour en jouir tant et si longue
ment qu’il serait en demeure, de payerlesd. 26,300 liv.,
avec convention que les fruits en seraient compensés
avec l’intérêt de ladite somme.
L e sieur M a b i t , acquéreur desdits domaines, et
cédataire des D écoublat, en demanda le désistement
par exploit du 2 juillet 1774 , avec restitution de
jouissances depuis 16 6 7 , aux offres de compenser les
fruits jusqu’à due concurrence avec les intérêts qui
se trouveraient légitimement d u s, et le surplus im
puté sur les capitaux.
L ’arrêt du 26 mai 1781 a condamné les dames de
Caldaguès, à se désister au prolit du sieur M ab il, des
héritages énoncés audit acte de 1 6 6 7 , à rendre et res
tituer les fru its d'iccLix , à compter du 2 ju ille t 1 7 7 4 ,
jo u r de la demande , lesquels seront compensés jus
q u ’à due concurrence, avec les intérêts de leur créance,
échus
�(25)
échus depuis Ledit j o u r 2 ju ille t 1774. Sur le surplus
des demandes, les parties sont mises hors de cour.
L e Code civil n’établit donc pas un droit nouveau,
lorsqu’il dit, article 2089 , que l’anticlirèse doit être
exécutée comme toutes Les conventions qui ne sont pas
prohibées par les lois.
Or il y a lieu de se régler par la loi nouvelle, toutes
les fois qu’elle n ’est pas en opposition à une loi an
cienne, toutes les fois qu’elle se réfère, au contraire,
aux anciennes lois qui existent. S i nempe declaret j u s
antiquum nom constitutio ,* si declaret tantummodo
quod anteà leges caverant. Morn. I n leg. 7 , jj\ d&
Pourquoi donc ici le Code civil ne s e ra it-il pas la
loi des parties? L ’art. 2089 est la copie de la loi 17 au
code de usuris : il n’y a pas de lois intermédiaires qui
aient disposé autrement.
N
Les Astorg ont voulu établir une perpétuelle com
paraison entre le contrat pignoratif et l ’anliclirèse.
Mais personne n’ignore que par le contrat pignoratif,
le débiteur vend son immeuble sous une faculté de
rachat limitée , et qu’il
devient aussitôt son propre
fermier.
*
Ainsi non-seulem ent il court risque.de perdre son
im m euble, faute d ’argent, mais l'incertitude des fruits
tombe encore sur lui seul annuellement.
,
La différence des deux contrats prouve seule la lé
gitimité de l’un, et l’usure de l’autre.*
D ’après cela, il semble parfaitement inutile de reD
�( 2 6 }
chercher s’il y a prescription conire la prétention des
Astorg; car s’ils l’avaient élevée en 1 7 1 4 , ils auraient
été déclarés non recevables à demander une com pen
sation.
Mais en 1 8 0 4 , c’est véritablement une folie de
vouloir revenir contre cette compensation convenue
par un acte, et ratifiée surtout par tant de paiemens
postérieurs.
Quand les parties ont plusieurs fois arrêté des comptes,
soit en 1 7 4 5 , soit depuis, n’y a-t-il pas unepiésom ption
très-raisonnable, que le débiteur a alors fait valoir tous
les excédans de jouissances qui pouvaient m i e u x se véri
fiera ces époques, et que les rabais qui étaient de justice
ont été faits, s’il y avait lieu.
A cela les Astorg opposent une bien pitoyable ré
ponse. Ils n ’ont pas f a i t ni signé ces quittances, disentils; elles sont du fait du créancier, et 11e sont pas dou
bles ; on ne peut les leur opposer.
Mais ce sont eux-m êm es qui les opposent, c ’est leur
libération ; sans elles ils devraient payer 1renie ans
d ’arrérages de plus qu’ils n ’oifrent. D onc ils s’appro
prient ces quittances , donc elles sont virtuellement
doubles, puisqu’elles sont communes aux deux parties,
puisqu’elles sont pièces du procès.
L a cour a jugé le 29 brumaire an 1 1 , contre le sieur
do l’ enautier, q u ’une quittance à lui donnée desinlérêls
d ’un capital, sans réserves, valait acquiescement à la
demande de ce capital. Cependant la quittance n’était
pas double ; il n ’avait pas signé cet acquiescement.
�C 27 )
A u reste et s e u le m e n t, pour ne négliger aucun
m o y e n , quand le sieur Deleige n ’aurait pas pour lui
le point de droit , les circonstances et les réglemens
multipliés qui font entre les parties la transaction la plus
irréfragable, lien ne l'empêcherait de faire valoir la
prescription de trente ans.
I l , a prouvé que l’anlichrèse n'était pas usuraire ,
quand elle a pour objet des intérêts légitim ement dus
Cela
seul répond aux Astorg qui ne prétendaient
h Timprescriptibilité qu'en y supposant de l ’usure.
Mais encore la question n’e s t-e lle pas jugée par les
deux sentences de 17 16 et 1 7 4 5 , qui n'ont ordonné
le paiement des intérêts, et par conséquent le compte
des intérêts, que depuis 1714.
Vigier sentit si bien qu’elles étaient une fin de non
recevoir contre lu i, que par ses défenses, du
août
3
1 7 6 4 , il se réserva de se pourvoir contre ces deux
sentences.
Mais il ne s’est pas p o u rvu , puisqu’il les a exécutées.
Faut-il encore
parler
de l’appel incident des Astorg,
fondé sur ce que le juge du Doignon , en ordonnant
l ’estimation des jouissances, avait prescrit aux experts
de déduire les charges.
Les Astorg supposent que le propriétaire les p ayait,
et non le créancier.
L e prouvent-ils? ils ne s’en sont pas mis en peine;
mais ils prétendent que cela a du être ainsi.
Ainsi cet appel est fondé sur une présomption.
D a
i
�( aS )
Cependant les Astorg auraient pu voir dans les au
teurs déjà cités, que dans les antichrèses, le créancier
étant mis en possession pour un tems indéterminé pro
s u o , doit le paiement des charges. Mais cette nou
velle question est si peu importante qu’il est inutile
de la discuter en point de droit.
Celui qui jouit est présumé payer les charges, car
les charges sont une diminution des fruits annuels. Il
y a quelquefois exception pour des fermiers, mais c*est
que le propriétaire reçoit un revenu annuel par le paie
m ent de la ferm e; et d’ailleurs le bail en fait toujours
le règlement.
Le sieur Deleige ne suppose pas que les Astorg aient
opposé sérieusement, qu’ayant subi deux degrés de
juridiction, il ne doit pas y en avoir un troisième.
Si cela était a in si, il aurait fallu que l ’assemblée
constituante décrétât que tous les procès pendans aux
parlemens étaient éteints, parce qu’ils étaient au troi
sième degré de juridiction. L a loi du 19 octobre 1790,
a au contraire indiqué où seraient portés les procès
alors pendans aux parlemens. O r, celui des parties
était pendant au parlement de P aris, par exploit du
2
3 août
1790.
Il était pardonnable aux Astorg d’opposer tant de
moyens faibles et tant de prétentions bizarres dans le
désespoir de leur cause; mais quand ils taxent d 'indé
licatesse un homme qui peut s’honorer de sa probité
sans craindre de démenti de personne ; quand ils écrivent
�( 2
9
)
que Leur réveil a été commandé par la nécessité de ne
pas laisser perpétuer plus long-tems la rapine de ce
créancier altéré d ’ usure , les Aslorg ont ils cru se rendre
plus recommandables par une injure grossière, qu’ils
s’étaient bien gardés de se permettre en première ins
tance, où les deux p a rt ie s étaient connues.
L à le s ie u r de L e i g e ne s’ en serait nullement offensé ;
là au contraire il aurait félicité Astorg sur un change
m e n t de principes que l’opinion médisante ou calom
nieuse ne suppose pas; et cette opinion même éta
blissait assez de distance entre la délicatesse du sieur
de Leige et celle d ’un Astorg , pour rendre inutile de
sa part toute espèce de justification.
Quoique le sieur de Leige ne soit pas très-sensible à
l'insulte d’un tel hom m e, il ne lui est pas moins pénible
d’être accusé, loin de son domicile, du vice le plus
opposé à son caractère. Heureusement l’homme de
bien n’est pas jugé par l’injure qu’il reçoit. L a raison
évalue l’injure et en scrute l’auteur ; et quand un
Astorg a du scrupule et f a i t de la morale, l’expérience
apprend qu’il n’en fait que pour les autres, et la mé
moire rappelle l’adage de tant de moralistes. Video
meliora , probo q u e , détériora sequor.
MARCHEIX, Rapporteur.
M.e DELAPCHIE R , Avocat.
M.e MARIE, Licencié-Avoué.
M .r
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Leige, Robert de. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
antichrèse
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour le Sieur Robert de Leige, appelant ; contre François Astorg et Marie Vigier, sa femme, intimés ; et Contre Brigitte Rotquier et Jean-Baptiste Lacroix, son mari, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1714-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0322
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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Pleaux (15153)
Laval (pré de)
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Antichrèse
Créances
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47a9f9eb6dd152616b7610107af5b6ec
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MÉMOIRE
EN
R É P O N S E ,
POUR
Le Sieur J U S S E R A U D , intimé ;
CONTRE
La Dame DECHAZERO N et le S. A L B E R T
de B R A N C A S - D E - V I L L A R S , son mari,
appelans.
h
-
S
u.
/
A RIOM,
De l’imprimerie du Palais, chez J. - C. S a l l e s .
�MÉMOIRE
t o u r
L e Sieur J U S S E R A U D , intimé ;
CONTRE
La Dame d e C H A Z E R O N et Le S. d e B R A N CASD E - V I L L A R S , son m ari, appelans.
MADAME D e Brancas se plaint vivement de n’avoir pu faire
accueillir des demandes exagérées et extraordinaires qu’elle per
siste plus que jamais à reproduire ; le succès du sieur Jusseraud
l ’irrite, et les premiers juges eux-mêmes ne sont pas exempts de
l'humeur qu’elle lui témoigne. Mais le ton d’aigreur exige au
m oins.de la véracité, et madame de Brancas tire fréquemment
des inductions de faits peu exacts. L e sieur Jusseraud qui n’a
varié ni dans sa défense, ni dans s e s prétentions, répondra à
l ’humeur par de la modération, et à l’inexactitude par la sim
plicité des faits. Il établira sans peine que la réclamation bizarre
de 22,000 francs, dont madame de Brancas a paru concevoir l ’idée
par occasion, après plusieurs années de procès , n’est pas même
A
�( O
proposable, parce qu’elle ne peut s’en prendre au sieur Jusseraud
des accidens de la révolution : il établira aussi que la demande
en indemnité formée par lu i, ne peut être susceptible d’une
contradiction sérieuse, parce quelapremière règle en bail à Ferme
est de mettre le fermier en possession de toute la chose louée et de
le faire jouir.
»
F A I T S .
L e sieur Jusseraud prit à titre de ferme , en 17 8 1, la terre de
Chazeron de la mère de madame de Brancas, pour neuf ans qui
devaient expirer le 24 juin 1790.
L e bail lui fut consenti pour jouir de ladite terre et dépen
dances , ainsi que les précédons fermiers avaient joui ou dû
jo u ir , et par exprès le sieur Jusseraud, son père, moyennant
7 ,3 oo francs par an.
Parmi les conditions de ce bail on remarque, art. i 3 , que le
sieur Jusseraud fut chargé de faire renouveler les terriers à ses
frais par un bon féodiste, et d’en fournir une liève m odée,
dans huit a n s, sous les conditionsà ré g le ra v e cle S .1 Auzaneau
régisseur, ¿drt. 14 , que le S .r Jusseraud ne pourra prétendre
aucune diminution sur le prix de son b ail, pour inondation,
grêle, gelée, et autres cas fortuits prévus ouà prévoir, ni pour
les contestations qui pourraient etre faites par les emphjtéotes
et redevables des terres.
Cette dernière clause que madame de Brancas annonce comme
une convention n o u velle, avait toujours été de style dans les
précédens baux, et la Cour en aura la preuve : cependant le
dernier bail était à 6,000 fr. , et le précédent à 4,700 f r . , . tandis
que le sieur Jusseraud affermait à 7 ,3 oo francs , en se chargeant
encore de faire renouveler le terrier.
L'article des percières était de la plus grande conséquence :
il allait à 110 setiers de b lé , tandis que la directe 11e consistait
qu’en i 5o francs argent, 20 setiers de from ent, 3 o setiers de
seigle et 60 d’avoine.
�(3 )
Ces percières étaient en contestation avec tous les redevables’ ,
en 1781. La dame de Chazeron avait été obligée d’indemniser
les précédens fermiers qui n’en avaient pu jouir; mais elle an
nonçait que le procès était à sa Î111.
L e sieur Jnsscraud chargea le sieur Boitelet d e là rénovation
du terrier, et la première opération fut de lever des plans relatifs
a u x -percières, afin de hâter la fin des contestations. Elles n’en
t raî nèrent pas moins en longueur, et le sieur Jusseraud, ennuyé
de ne pas jouir, demanda une indemnité au tuteur de madame
de Iî rancas , qui lui répondit que jusqu’à la fin de son bail iL
n ’a v a i t
pas d’action. Les choses en ont resté là depuis, et à l’ex
ception d’un très-petit nombre d’articles, le sieur Jusseraud n’a
joui d ’aucune des percières.
A l ’égard du travail de la directe , il fallait, quoiqu’en dise
madame de Iîrancas des lettres à terrier : madame de Chazeron
ne les obtint que le 23 avril 1782, et 11e jugea à propos de les
faire entériner que le 17 avril 1783. Le travail de la rénovation
ne put commencer qu’après celte époque , et le féodiste avait
huit ans.
C epen d an t le sieur Boitelet 11e perdit pas de tems ; car il est
constaté qu’en 1788 il avait déjà reçu et fait contrôler 407 recon
naissances, ( l e précédent terrier n’en contenait que
385 ). L e
travail fut parachevé en 1 7 9 0 , et il y eutalorsoSi art. reconnus.
Suivant la police arrêtée entre les sieurs Jusseraud et Auzaneau , le féodiste devait remettre ses plans, les nouvelles recon
naissances , lièves et tables, reliées, et se soumettre à la vérifica
tion d'un nuire féodiste.
Pour cctlc vérification les parties Tirent choix du sieur Legp.y
de Fontgibaud , par aclc du 9 mars 1791- Les titres furent remis
à cet elfet au sieur Auzancau, qui les transmit hii-n icm c au
sieur L eg a y , comme on le voit par une citation dont excipe
madame de Iîrancas.
Le sieur Legay ne s’occupa point de cette vérification en 1791 ;
il fut emprisonné le 27 avril 17ÎÎ2 > e *- c es^ dans les loisirs
A a
�( 4 )
de sa prison que s’étant fait porter l'expédition du terrier
Boitelet, et celle du précédent terrier seulement, il s’occupa de
vérifier l’exactitude de l’opération du sieur Boitelet. L à il décou
vrit, dit-il, 352 articles défectueux sur 55 i.
A la vérité il finit par avouer qu’il n’a fait qu’ un travail con
ditionnel et hypothétique , parce qu’il n’a comparé le terrier
Boitelet qu’avec un seul des précédens, et qu’il n’est pas encore
a llé vérifier les plans. Il est même obligé de convenir que si les
3d2 erreurs se trouvent relevées sur les terriers antérieurs , l’ou
vrage de Boitelet vaudra mieux que le sien.
Quoiqu’il en soit de ce travail de prison, Je sieur Legay ne se
mit pas en peine d’aller le compléter, en vérifiant les plans quand
il fut lib re , ni même en se* référant aux anciens terriers qu’il
n ’avait pas vus : cependant en l’an 3 il assigna la dame de
Brancas en paiement de 800 francs pour ses honoraires; cette
demande fut dénoncée au sieur Jusseraud , et on.^ae voit pas
qu’elle ait été suivie.
L e sieur Jusseraud avait cessé d’être fermier, avons-nous dit,
en 1790 ; et il avait exactement payé ses fermages , sauf environ
2,000 fr. ; madame de Brancas n’avait eu garde de lui demander
ce reliquat , puisqu’elle l’avait renvoyé , pour l’indemnité des
percières , à la fin de son b a i l , et que le procès de ces percières
n’éLait pas encore jugé en 179°*
Cependant se croyant plus favorable en ce que la suspension
de ce procès paraissait venir de la force majeure , madame de
Brancas fit faire au sieur Jusseraud, le 24 frimaire an 7 ,1 m
commandement de payer la derniere annee de sa ferme en
deniers ou quittances ; sans réserver aucune autre action.
L e sieur Jusseraud y forma opposition, parle motif qu’il élait
créancier lui-mâme de plusieurs indemnités de non jouissances.
L e tribunal civil, sur cette opposition, accorda une surséance
provisoire.
Ces deux réclamations furent soumises à des arbitres ; le sieur
Jusseraud les récusa, et n’a nulle envie de s’en défendre ; il n’a
�(5 )
pas cru manquer à son devoir , en se conformant strictement à
la loi, et en faisant ce que lui semblaient exiger les circons
tances. Il savait d’ailleurs que si déjà un jugement arbitral eût
été rendu , il était plus fort que sa récusation. L ’événement a
justifié sa démarche : il paraît qu’il n’y a eu aucun jugement.
L a procédure fut reprise en brumaire an 10 , devant le trib u
nal de R io m ; le sieur J u sserau d réclama l’indemnité de non
jo uissance, i.° des percières de Gouzet et Roche-Touzet ; 2.° des
eaux m inérales de Chatelguyon , faute d’un bâtiment que la
daine de Chazeron devait y faire tenir en état ; 3 .° de la glandée
dans les bois; 4.0 d’un bâtiment et trois septerées de terre laissés
à un garde forestier, quoique ces objets ne fussent pas réservés
au propriétaire; 5 .° du four bannal supprimé par la loi du 4
août I7^9> 6.° de 389 fr. pour cens qu’il n’avait pu percevoir.
Après cette demande, madame de Brancas conclut à l’exécution
provisoire de son b a il, toujours sans réserve: elle poursuivit
l’audience, plaida sur cet incident', et par jugement du 4 ger
minal an 10 , le provisoire fut joint au fond, surséance tenant.
C e p e n d an t madame de Brancas, peu de jours après sa d e
m a n d e p r o v is o ir e , avait cru pouvoir neutraliser lfâ^ustes indem-
nités requises par le sieur Jusseraud , en en réclamant de sa part,
et revenant sur le procès du sieur L e g a y , oublié par elle depuis
l ’an 3 .
Ce n’était plus une simple demande en garantie des 800 liv.
à laquelle madame de Brancas entendait se borner. L e
17
ventôse an 10 , elle exposa que le sieur Jusseraud, s’étant chargé
de laire renouveler son terrier, et ne l’ayant fait que d’une ma
nière ju g é e défectueuse , il devait non-seulement lui payer les
irais de rénovation présumés déduits sur sa ferme, mais encore
l’indemniser de ses cens des années 1790» 1791 et x792 >qu’elle
n’avait pu percevoir, n ’ayant pas de titres; en conséquence,
elleconclut contre le sieur Jusseraud au paiement i.° de 10,000 1.
pour les frais de rénovation; 2.0 de 12,000 liv. pour l'indem
nité de trois aimées de cens.
�(6 )
Les parties en vin'rerit à l’audience le 14 prairial an n . L à ,
madame de Braneas eut encore quelque chose à ajouter : Crescit
eiindo. Elle réclama de plus l ’ancienne garantie des 800 liv.
demandées, en l’an 3 , par le sieur Legnv.
L e jugement dont est appel déboute madame de Braneas de
ces trois derniers articles de demande, adjuge celle de l’an 7 ,
et condamne le sieur Jusseraud ù payer 2,57") liv., pour reli
quat de sa ferme; et faisant droit sur ses demandes en indem
nité, condamne madame de llrancas à lui payer, 1 0 3 oo liv.
pour la non-jouissance du four banal ; 2.0 2,270 liv. pour la
nbn-jouissante des percières : sur le surplus de ses demandes,
il est mis hors de cam e, et tous les d.’pens sont compensés.
L e sieur Jusseraud pouvait justement se plaindre de ces der
nières dispositions, parce qu’indépendamment des non-jouis
sances de cens non perçus et d’objets distrails de sa ferme sans
être compris dans les réserves, il avait droit de regarder comme
très-inférieure à leur valeur une fixation à 2,27.) I. pour les pereiire-i qui cependant montaient à 110 setiers de blé pendant
chriciine dé.< ùcnf années de sa ferme.
Cependant, malgré ces griefs, le sieur Jusseraud ennuyé de
procès , a exécuté ce jugement ; mais madame de Braneas en a
interjeté appel, et ne veut faire grâce d’aucune de ses réclama
tions incidentes ; elle les prétend toutes londée.s, modérées même,
el de la plus exacte justice.
M O Y E N S.
Madame de Braneas s'oppose de toutes ses forces à une dispo
sition du jugement dont est appel, qu’on a passée sous silence,
parce qu’elle est absolument étrangère au sieur Jusseraud.
Les titres féodaux produits par elle ont paru aux premiers
ju g es, cempris dans la proscription de la loi du 17 juillet •7<;3)
fct ils ont cru devoir faire exécuter celle loi, comme toujours
en vigueur d’après le rcscrit du Conseil d’état. L e sieur Ju;seraud ne s’occupera nullement des moyens que madame de
�(7 )
Brancas emploie pour faire considérer cette disposition comme
monstrueuse et révolutionnaire , non nostrûm ---- tantas com ponere liles. L a Cour statuera, comme il lui paraîtra con
venable sur ce chef particulier, q u i , on le soupçonne, pourrait
bien avoir été le principal mobile de l’appel de madame de Brancas. Quoiqu’il en soit, cet appel est divisé en quatre griefs, que
le sieur Jusseraud va parcourir dans le même ordre que madame
de Brancas les a proposés.
PREMIER
GRIEF.
t: •
Y a-t-il lieu de payer 10,000 livres à madame de Brancas ,
pour vice de rénovation de son terriert
y
Pour trouver quelque chose de supportable à cette prétention,
il faut franchir une difficulté beaucoup plus ardue que la ques
tion elle-même. L e terrier renouvelé est-il vraiment défectueux,
et comment s’y prendra-t-011 pour juger sa défectuosité?
Tout cela est déjà f a i t , dira madame de Brancas ; le sieur
L eg a y a ju g é qu’il contenait trois cent cinquante-deux erreurs.
A la vérité , il d e v a it, suivant la convention arrêtée avec Boitelet, remonter aux anciens terriers. Il n’a vu que le plus
récen t, parce qu’en prison peut-être il n’avait pas l ’aisance
nécessaire pour un travail de ce genre. A la vérité encore ,
il fallait vérifier les plans , et chercher l ’application des titres
sur le local , mais le sieur Legay a déclaré, dans son procèsverbal , qu’il n’était pas encore a llé vérilier le local ; et à l ’im
possible nul n’est tenu.
Si le sieur Jusseraud trouve étrange cette maniéré commode
de vérifier le travail d’un féodiste , s’il observe que Boitelet
devait naturellement s’écarter du dernier terrier, dès qu’il y avait
eu nécessité de le refaire, on lui répondra qu’il s’est permis des
personnalités sur le sieur L e g a y , par cela seul que cet expert
avait reconnu des erreurs au travail de Boitelet.
Ce n’est vraiment qu’une réllexion ab iralo , de trouver le
�(S )
sieur L egay offensé de ce que le sieur Jus'seratuî a rappelé
qu’il était en prison , quand il s'occupa de la vérification du
terrier Boitelet. Ce fait était absolument nécessaire à sa cause;
et en se dépouillant de sa prévention , "madame de .Brancas
trouverait très-bizarre elle-m êm e, qu’un travail de géométrie;
locale, et une division de terrain en cinq cent cinquanle-im
immeubles distincts , fussent vérifiés dans les limites d’une
prison.
Pourquoi avait-on choisi un géomètre, si ce n’est pour voir
les 1¡eux, el chercher les inexactitudes sur le terrain même? A la
yerité , on ne prévoyait pas en 1791 , qu’il ne s’en occuperait
pas en 1791 , et ne pourrait jjas s’en occuper en 1792On ne doutera pas que le sieur Legay n’ait tout vérifié en.
prison. Il dit lui-mêine, dans son exploit du u brumaire an 3 ,
avoir employé à ce travail les mois de ju in , ju ille t , partie
d'août et d'octobre 1793. O r, le sieur L egay a été écroué dans
les prisons de Biom , le 27 avril 1702 ; il y a été jugé le i 3
août 1792. L e tribunal de cassation l’a renvoyé à Gueret, où
il a été traduit au mois d’octobre, et n’a été jugé qu’au milieu
de novembre de la même année 1792.
Son p r o c è s v e r b a l , clos le
septembre 1792 > n’est dono
qu’ un travail de prison , 011 plulôl qu’ une ébauche de travail ,
que le sieur L ega y lui-même a positivement déclaré n’êlre que
préparatoire , puisqu’il avoue i.° n’avoir fait sa comparaison
que sur 1111 terrier de 1686, tandis que Boitelel avait été as
treint à remonter aux p lus anciens, et qu’il y en avait deux autres
de 1488 et de 1090; z.° il avoue n’avoir pas encore été vérifier
les plans, ce qui montre clairement q u ’il regardait celle opéra
tion locale comme indispensable; 3 .° il avoue enfin que l'exac
titude de la vérification dépendait dé la comparaison avec les
terriers de 1488 et de laoo ; (pie celte vérification restait A
faire comme complément; et qu’il en pouvait résulter que les
trois cent cinquanle-deux erreurs se réduiraient à rien, et que
le sieur Boitelet aurait luit un bon ouvrage.
A in si
�C r9 )
Ainsi madame de Brancas veut trouver dans le travail du
sieur Legay une perfection qu’il n’y trouye pas lui-même. Par
cela seul, qu’elle a ce travail, elle veut y voir une vérification
de terrier, u n jugem ent qui annulle toute l ’opération du sieur
Boitelet.
Disons plutôt que le sieur Legay se promettait lui-m êm e
de voir les lieux ; que la loi du 28 août rendait son travail
inutile; q u ’ainsi il n’avait aucun motif pour aller après 1792,
s’occuper d’une opération sans but ; et qu’en l’an 3 , il essaya de
former une demande en indemnité du tems par lui em p lo yé ,
quoique la loi du 9 septembre lui refusât toute action par une
disposition expresse.
Il n’y a donc pas lieu de dire que le terrier du sieur Boi
telet soit défectueux , mais quand il serait vrai que le sieur
Legay a entendu le dire a in s i, cela est-il bien démontré aux
yeux de la Cour? Quand le sieur L egay aurait tout vu , le
sieur Boitelet, passible des vices de son trav ail, ne serait-il pas*
fondé à lui d ire , que c’est lui-même qui est dans l’erreur. IL
faudrait donc savoir qui des deux a raison.
On avait prévu dans la police de 1791 > que le sieur L eg a y
pouvait n’être pas infaillible , et loin de le prendre pour ar*
bitre en dernier ressort, il y était dit que celui qui ne vou
drait pas se tenir à sa vérification , payerait ses vacations.
Rien ne s’opposerait donc à ce que le travail du sieur Boi
telet ne fût soumis à une seconde vérification ; mais madame
de Brancas n’indique pas comment elle pourrait se faire ? si la
Cour trouve cet expédient praticable, et sur-tout nécessaire , si
elle pense que la loi du 9 septembre 1792 permet d’y recourir ,
il ne s’agira que de faire remettrè à un nouveau fé o d is te , les
terriers, les liéves , les plans et les titres de la terre de Chazeron.
Mais dit, madame de Brancas (page 16 et page 1 8 ) , les
titres et terriers n’étaient pas livres en 179 ° * sieur Jusseraud
se défendait, dans des requêtes de 1789 et 1790, en disant qu’il
n'était pas tenu de la négligence de Boitelet.
B
�( 10 )
Que signifie ce qu’on écrivait en 1789 et 1790 > si la remise
a eu lieu en 1791. Boilelet avait huit ans pour son travail ;
on ne lui remit des lettres à terrier qu’en 1783 , donc il avait
jusqu’à 1791 ; et madame de Brancas avait formé trop tôt cette
demande en remise, aussi ne l’a-t-elle pas suivie ; et son procès
actuel est à cet égard , bis in idem.
Il est très-vrai qu’en 1790, le sieur Boitelet n’avait pas fait
relier et timbrer la seconde copie de son terrier ; mais comme
le sienr Jusseraud refusa de le recevoir , alors tout fut mis
en règle et remis à A u za n ea u qui, lui-m êm e, le donna à Legay.
L a preuve que le sieur Jusseraud a remis les titres à A u zan eau ,
et non à Legay , se trouve dans l’exploit du 11 brumairje an 3 ,
où le sieur L egay expose que le cit. uduzaneau remit au requé
rant un ancien terrier sign é Besson , ensemble une expédition
de celu i, sig n é B o ite le t, et le plan sur lequel Vapplication avait
é té fa it e , avec les liéves et reçus et quelques autres documens.
Comment donc madame de Brancas qui a notifié cet exploit,
et qui en excipe, peut-elle dire de bonne foi que le sieur Jus
seraud a tout retenu, et n’a remis qu’une copie inform e du
nouveau terrier en 17 9 1, tandis que le sieur Auzaneau a porté
chez le sieur L e g a y une expédition notariée de ce nouveau ter
rier, les plans , les lié v e s , etc.
Mais dit-elle encore ce n’était pas la tout, il fallait aussi re
mettre Vinventaire des titres de la terre et les titres eux-méines,
qui assuraient la perception.
Pour montrer encore à la Cour, combien madame de Brancas
se pique de véracité malgré son ton d ’aigreur,Ue sieur Jusseraud
exhibera à la Cour le récépissé de ces titres au nombre de trois
cent soixante-dix-huit ; il lui a été fourni le 6 janvier 1792 , et
comme alors existait le procès, dont madame de Bancas excipe
encore (pages 1 5 et 18 de son mémoire) , le récépissé termine
par ces m ots, et nie départs de toutes demandes qui peuvent
avoir été formées pour la remise desdits titres.
Donc madame de Brancas redemande ce qu’elle a reçu , donc
�( ” •)
elle fait considérer comme en vigueur un procès qui n’existe plus,
Doqc encore quand madame de Brancas fonde sa demande en
paiement de 10,00© liv. sur ce que le terrier est inform e , et sur
ce que c’est la seule chose qui lui ait été remise pour la vérifi
cation , madame de Brancas dit ce qu’elle sait ne pas être.
M a is, au reste, madame de Brancas a-t-elle bien calculé le
but de sa demande sur cet article ? Par quel motif lui devrait-on
cette som m e arbilraire de 10,000 liv.? des dommages-intérêts
sont définis par la loi l’indemnité de la perte qu’on éprouve.
Si elle avait un nouveau terrier, vaudrait-il donc 'pour elle
10,000 liv. ? Mais quand il faudrait encore l’indemniser d’ une
perte arrivée par la force majeure, à qui madame de Brancas
pourrait - elle persuader, que pour refaire le terrier d’une di
recte de cent dix setiers de tous grains, et de i5o liv. a rg e n t,
il faut payer 10,000 liv. a un féodiste, indemnisé déjà par deux
ou trois cents reconnaissances à recevoir comme notaire.
Mais s’il fallait 10,000 livres, le féodisle est payé, et il n’en
coulerait donc que les frais de rectification des articles recon
nus défectueux. Les trois cent cinquante-deux articles con
damnés rappellent les cent une propositions, et prouvent que
celui, qui veut épiloguer un ouvrage quelconque, a toujours un
vaste champ pour la critique , sauf à la vérité à être redressé
lui-même. Ce serait donc se jouer de la Cour, que de sup
poser sérieusement qu’elle adoptera l’ébauche du sieur L e g a y ,
et ses trois cent cinquante-deux erreurs provisoires.
t
DEÜ XIÈME GRIEF.
E s t-il dû 12,000 liv. à madame de Brancas pour non-per
ception de ses oens, pendant 1790, 1791 et 1792 ?
10,000
liv. pour un terrier mal-fait, et 12,000 liv. pour trois
ans de cens , feraient précisément le capital de la directe de
madame de Brancas ; et ainsi les lois suppressives 11’auràient
atteint que le fermier.
B a
�( 12 )
. Ces lois ne calculent pas comme madame de Brancas ; au
contraire, elles accordent une indemnité au fermier qui n’a
pas joui de tous les cens de 1789 ; et c’est encore la position du
sieur Jusseraud.
Mais ne voyons que madame de Brancas , et écoutons-là se
fonder toujours , pour ce chef de demande comme pour le pré
cédent , sur ce que le sieur Jusseraud , en retenant ses litres ,
l ’a mise , par son fa it, hors d ’état de pouvoir se faire payer.
Toute la page 24 de son mémoire est encore consacrée à ré
péter qu’i l n’est pas douteux que le sieur Jusseraud a retenu
les titres et les terriers.
L ’éclaircissement de ce fait appartenait plutôt , à la vérité,
à la discussion de ce deuxième grief qu’au précédent, mais
le sieur Jusseraud s’est fait un devoir de suivre madame de
Brancas dans l ’ordre de ses moyens. I c i , pour ne pas se ré
péter , il se référera à ce qu’il a dit aux deux pages précédentes ,
où il se flatte avoir prouvé jusqu’à l ’évidence qu’il a remis les
terriers anciens et n ou veaux, plans , liéves et titres depuis le
commencement de l ’année 17 9 1 , puisque le sieur Legay a été
choisi par acte du 9 mars 1791 ; que cet acte suppose un rap
prochement certain et l’existence certaine et en forme du terrier
B oitelet, enfin que le sieur Legay reconnaît avoir tout reçu du
sieur Auzaneau en 1791*
Madame de Brancas voudrait-elle revenir sur ses p a s , et pré
tendre que cette remise de terriers et titres a été faite trop tard ?
Mais c’était lors du procès de 1789 qu’il fallait s’en apercevoir,
et madame de Brancas s’est départie de ce procès ; donc subla tâ causâ lo llitu r effectus.
Remarquons encore l’époque de ce département d’instance.
C ’est en janvier 1792, après que madame de Brancas avait été,
suivant scs expressions , hors d’ état de pouvoir se faire payer
pendant les années 1790 et 1791.
Si c'eût été par la faute du sieur Jusseraud, c’était le cas
au contraire d’ajouter à son procès les conclusions en indein-
�( 13 )
nité qu’elle prend aujourd’hui. Madame de Brancas, en renon
çant à ce procès, a donc reconnu en 1792 , que toutes ses pré
tentions se bornaient à la remise des titres , et qu’il lui suffisait
les avoir reçus.
Si nous trouvons dans ce récépissé une fin de non recevoir
pour les années 179° 6t I 7 9 I > ^ lie noils res^era a vaincre que
l ’année 1792 ; e t , à cet égard , la réponse est plus facile encore.
L a suppression des cens a eu lieu par la loi du 25 août 1792,
à la seule e xception de ceux fondés sur titres primitifs, et la terre
de Chazeron n’avait que des reconnaissances terrières.L’échéance.
des cens était à la St.-Julien, ou au 28 août; donc, en supposant
même toute la bonne volonté possible aux censitaires de s’ac
quitter , ils n’ont au moins pas été tenus de payer des cens, sup
primés avant l ’échéance de 1792.
Laissons encore cette suppression , il résultera au moins du
récépissé de 1792 , que le sieur Auzaneau avait tous les titres ,
et de l’exploit de l ’an 3 ; qu’il avait les terriers, liéves et plans.
Il a donc pu percevoir.
Il est, d’après cela, parfaitement inutile d’examiner si le dé
fenseur de madame de Brancas est convenu ou n o n , qu’il fallait
des lettres à terrier, et qu’elles avaient été remises au sieur
Boitelet seulement en 1783. Si ce fait était un peu plus impor
tant ,1e sieur Jusseraud rappellerait à madame de Brancas qu’elle
avait avancé (p a ge 2 de son premier m émoire) , quç lors du
bail de 179 1 , elle avait déjà obtenu des lettres à terrier, sui
vant l ’usage ; et il résulterait peut-être de cette commémoration,
que c’est mal à propos qu’elle a démenti le fait avancé à cet
égard par les premiers juges (page 26 du 2.e mémoire).
Ces lettres à terrier n’étaient point aussi inutiles que veut le
dire madame de Brancas, puisque sans elles, il n’y aurait eu
de ressource que d’obtenir un ¡jugement contre les censitaires.
L es anciennes ordonnances exigeaient cette formalité. Celle de
Blois, art. &4, et l’ordonnance de Melun , art. 26 n’en exemp
taient que les seuls seigneurs ecclésiastiques , et on lit dans le
�C h )
Dictionnaire des fiefs, v.° lettres à terrier : « Tous les seigneurs
« laïques, qui veulent faire , ou renouveler un terrier, doivent
« absolument prendre des lettres. Il n’y a que les seigneurs
« ecclésiastiques qui en soient exempts par les ordonnances ».
Madame de Brancas 's’élève avec force contre cette nécessité,
cependant elle a pris des lettres, mais en 1782 seulement. Elle
ne les a fait enregistrer qu’en 1783, donc elle a retardé les huit
ans donnés pour délai au féodiste. On n’a donc du lui remettre
ses terriers qu’en 1791 , et dès-lors si madame de Brancas n’a
pas perçu les cens de 1790 et de 1791 , elle ne peut s’en prendre
qu’à elle-même, ainsi qu’elle l ’a très-bien préjugé elle-même, eu
se départant de son procès prématuré de 1789.
Mais serait-il bien vrai que madame de Brancas a été hors
d 'état de percevoir ses cens de 1791 , faute du terrier Boitelet ? il
faut répondre négativement sur ce point comme sur tant d’autres.
Car i.° le sieur Auzaneau a donné des quittances en 1790; il en
a donné en 1791 , et ce ne sont pas des à-comptes ; 2.0 avant la
rénovation Boitelet, on n’était pas privé de poursuivre le paie
ment des cens: donc on pouvait se passer de son terrier ; 3 .° il
n’était aisé à personne de percevoir des cens après le 4 août
1789 , et la loi a prévu cette difficulté , en accordant des indem
nités aux fermiers pour les années postérieures. Madame de
Chazeron habitant alors son château , bien loin d être pressec de
se faire payer , engageait au contraire le sieur Jusseraud à no
pas poursuivre ses propres arrérages.
Comment donc, sachant ces faits , madame de Brancas a-t-elle
prétendu que c’était par le fa it seul du sieur Jusseraud qu’elle
avait été hors d’état de percevoir ses cens? Comment n’n-t-clle
pas trouvé (pie 12,000 livres et 10,000 liv. au sujet d'une directe
de 1,100 liv. de revenu étaient une demande d’une exagéra
tion singulière ? Comment enfin m ulame de Brancas a-t-elle
dit que ces sommes lui étaient dues, faute de remise <1« ses ter
riers cl du ses titres , lorsqu’elle est nantie des uns et des autres ?
�C iS )
)
TROISIEME GRIEF.
JEst-il du une indem nité au sieur Jusseraud pour la nonjou issa nce des percières ?
f ■
!
Maintenant que madame de Brancas conteste une demande ,
elle la trouve ridicule et exliorbitante. D ’abord il n’est pas établi,
dit-elle , que les redevables aient refusé le,paiement, à l ’excep
du plus petit nombre.
t . H;.
IC'
C ’est un système général adopté par madame de Brancas, de,
t i o n
tout nier; elle n’avoue pas même ce qui est de notoriété, et de
sa connaissance très-personnelle.
Il est positif, en eil'et, que la presque totalité des redevables
de percières refusait de payer depuis long tems^qu’il existait un.
procès avec eux tous ; que quelques particuliers seulement, qui
n’avaient pas voulu suivre ce procès, passèrent un jugement
volontaire en 1789 ; que tous les autres plaidaient encore en
1790 ; et le sieur Jusseraud se procurera les sentences interlocu
toires qui les concernent, pour convaincre la Cour qu’il n’en
impose pas.
Ces percières n’étaient pas un objet peu important ; elles
étaient plus considérables que la directe ; et les précédens fer
miers qui avaient aussi été empeches de jouir a cause de ces
mêmes procès , obtinrent 3,000 trancs d indemnités.
A cela madame de Brancas fait une objection qui aurait
quelque poids , si elle était applicable, mais qui peche toujours
par l’inexactitude.
C’est précisément, dit-elle; au sieur Jusseraud , pour ne pas
vous donner aussi des indemnités, que par votre bail il fu t
stipulé que vous renonciez à toute diminution pour cause de
grêle, gelée, cas fortuits prévus et à prévoir, et même pour les
contestations qui pourraient être formées par les redevables. O r ,
les procès des percières existaient avant votre b a i l, donc ils ont
¿té l’objet de cet article, et
particulière.
l’obje^ de cette convention
�( .6 )
Tout cela serait proposable si le bail de 1781 contenait
pour la première fois cette clause de précaution. Mais qu’on
lise les précédens baux de la terre de Chazerûn , on la reverra
copiée mot pour m ol : et cependant elle n’a pas empêché les
précédens fermiers d’obtenir une indemnité de 3 ,000 francs.
Rien en effet n’était plus juste , parce qu’une clause semblable
ne doit s’entendre que civ ilem en t, comme l’ont très-bien remar
qué les premiers juges , comme l’avaient aussi préjugé M M .
Verny et Touttée arbitres , en accordaht aux précédens fermiers
une indemnité pour la même cause.
Il est en-effet de principe que dans une renonciation générale,
il ne faut pas vaguement comprendre ce que le renonçant n’a pas
naturellement voulu abandonner. In generali renuntiatione
von veniunt eâ , quœ ijuis in specie non esset verisim ililet
consecuturuS.
A in s i, quand le fermier se serait chargé de tous les accidens de grêle, neiges, etc., la ldi toujours juste et prudente
distingue ce qu’il n’a pas distingué, et lui accorde d’elle-memé
une indemnité, si les dccidens de la saison ont été immodérés ,
si immoderatœ fu e r u n t, et contra consueludinem tempestaies.
L . 78. ff. de contr. empt.
Mais la position du sieur Jusseraud est plus favorable encore \
car ce ne sont pas les intempéries de l’air qu’il doit accuser de sa
non jouissance, niais madame de Brancas elle-même qui lui a
donné à bail ce qui sans doute ne lui appartenait pas.
Celui qui vend a beau stipuler qu’il ne sera garant de rie n 1:
s’il a vendu la chose d’autrui , il doit au moins rendre le prix
qu’il a reçu. De même que celui qui cède une créance sans
garantie, n’en est pas moins tenu de la garantie débitant suhcssé.
Il y aurait même quelque chose d’immoral de favoriser des
conventions contraires.
Dan-; un bail à ferme de biens ru ra u x , comprenant une sur
face connue, <nns doute on peut stipuler que la perte, même
totale, de* rcvchtl*' par 'cds fortuits sera pour le compte dn
p re n eu r,
�C
*7 )
preueur, parce que le bailleur est étranger à ces événemens. Il
a fait ce qui était en l u i , en mettant le preneur à même de jouir
de toute la chose louée.
Mais si l’étendue donnée n’est pas mise au pouvoir du pre^
neur , il en résulte que le bailleur n a pas satisfait a son obliga
tion en livrant la chose louée. Car la première obligation du
locateurest prccstandi conductori fin i h c c r c • elle est de 1 essence
du contrat de louage. C ’est par suite de ces priucipes que la loi
de 1789, ôtant aux fermiers une portion de la chose louée,
leur a accordé des indemnités , et personne n’a imaginé de
dire qu’elles n’eussent pas lieu dans les cas où le fermier s’était
chargé du risque des événemens.
On ne peut pas douter que madame de Brancas n’ait donné
a ferme les percièi’es de Gouzel et Roche-Touzet. Car, i . f elle a
afferm é au sieur Jusseraud la terre de Chazeron, ainsi que les
précédens fermiers, et notamment le sieur Jusseraud père, avaient
j o u i ou dû jo u ir . Précisément le procès avait commencé sous
leur ferme , et ils avaient été indemnisés, parce q u ’ils n’avaient
pas joui comme ils avaient dû jouir; 2.0 madame de Brancas
avait affermé toutes les perceptions de sa terre, suivant les titres
qu’elle remettait au sieur Jusseraud, portés par un inventaire;
et ces titres mentionnent expressément les percières, pour une
quantité de cent dix setiers.
Sera-t-il proposable d’oljjecter que la clause du bail porte qu’il
n’y aura pas de diminution pour les contestations qui pour
raient être faites par les redevables ?
S ’il fallait interpréter cette clause aussi littéralement que
l ’exige madame de Brancas , on n’y verrait d’abord rien qui
eut trait à un procès déjà existant, car il n’est prévu que dts
contestations futures.
:
Mais de bonne foi, avec urre telle cause, faudrait-il aller jus
qu'à dire qu’un fermier à qui on remet les titres d’une terre pour
percevoir un revenu sur quatre cents septerées de terre, est tenu
C
�( *8 )
de se contenter de cent cinquante, si le surplus lui est contesté.
Quelle raison y aurait-il pour ne pas le forcer à payer aussi
toute sa ferme, sans diminution, dans le cas où les redevables se
réuniraient pour contester le droit. L e contrat de louage pour
rait donc subsister sans l ’existence de la chose louée ; ce qui
choque les principes les plus élémentaires.
L e tuteur de madame de Brancas, procureur au châtelet, ne
prétendait pas donner un tel sens à cette clause, lorsqu’il écri
vait en 1786, dans un style simplement dilatoire, en renvoyant
l ’indemnité à la fin du bail et au jugem ent de l'arbitrage. Une
autre preuve aussi que madame de Brancas entendait bien n’en
être pas quitte pour renvoyer le sieur Jusseraud à une clause
générale et copiée sur les anciens baux , c’est qu’en se char
geant seule du procès des percières , qui autrement eut aussi
intéressé le sieur Jusseraud, elle lui notifia en septembre 1790,
q u’elle avait obtenu trois sentences contre certains des emphytéotes , pour qu’il eût à s’en faire payer. Ce sont ces jugemens
rendus de concert, déjà cités.
Madame de Brancas veut encore réduire à rien cet article
de percières ; elle a produit en première instance, dit-elle, des
baux y relatifs qui les réduisent à treize ou quatorze setiers.
II est difficile de répondre à une telle inexactitude, sans ou
blier la modération que le sieur Jusseraud s est imposée. Car
madame de Brancas sait bien que ces baux n ont de rapport
q u ’aux percières de Gouzet qui ne portent que sur quarante
septerées de terre, tandis que les percières de R o che-T ou zet
portent sur plus de quatre, cents septerées. Mais que madame
de Brancas veuille bien produire à la Cour l ’aveu et dénombre
ment dont elle a donné récépissé : c’est un acte bien antérieur au
bail du sieur Jusseraud qui s'en trouve une copie ; elle y lira :
« Plus quarante septerées de terres, ou entour, pcrcidrales,
« dans lesdites appartenances de G o u z e t ; ............ plus jouit et
« possède ledit seigneur de Cliozcron la terre de lloche*Touzet,
�C 19 )
c< dans laquelle se perçoit, commune année, q u a tre -v in g t-d ix
« seliers seigle en percières. . . lesdites percières confinées, etc.
D e tout cela le sieur Jusseraud n’a lien perçu que du trèspetit nombre de ceux qui ne voulurent pas plaider.
Cependant ces percières étaient comprises dans son bail», et
puisque madame de Brancas ne le faisait pas jouir de cette partie
de la chose louée , elle lui devait, suivant les principes, quantum
ei abest, et quantum hicrari potuit.
Ce n ’est donc qu’au sieur Jusseraud que les premiers juges
ont fait tort, en modérant à 2,275 liv. cè qui valait six fois cette
somme ; et si madame de Brancas la trouve arbitraire, il consent
très-volontiers à une estimation.
QUATRIÈME
GRIEF.
Est-il dû 3 oo liv . au sieur Jusseraud pour non-jouissance
du fo u r banal en 1790 ?
L e sieur Jusseraud a été obligé de payer cette indemnité à
ses souSTÎermiei’S par jugement du tribunal civil de l ’an 6 ; il ne
demande que la somme qu’il a payée : rien ne semble plus juste.
Cependant madame de Brancas veut encore contester cette
faible somme, et trois moyens lui sem blent la débarasser de cette
réclamation ; i.° dit-elle , c’est le sieur Jusseraud qui a été con
damné personnellement ; 2 .0 il faudrait qu’il y eût six mois de
non-jouissance, et il n’y en a que d eu x, parce que la loi de
suppression est du 24 mars 1790, et le bail finissait au 24 ju in
suivant ; 3 .° dans les 800 livres se trouvent confondues 75 livres,
allouées déjà par madame de Chazeron , et si le sieur Jusse
raud les a payées pour elle , il ferait un double emploi en les
reprenant.
Sur le premier moyen, comment concevoir que le sieur Jus
seraud ait été tenu en son nom d’une suppression féodale, tandis
C 2
�C 20 )
que la loi du i 5 mars 1790 accorde aux fermiers des indemnités,
que la loi du 28 août 1792 les leur conserve, et dit que « les fer« miers pourront se fa ir e restituer les sommes qu’ils auront
t payées aux ci-devant seigneurs, pour raison des mêmes droits
« échus depuis le 4 août 1789, et ce, au prorata desdits droits ».
Mais dit , madame de Brancas (p a ge 39) , le jugement de
l ’an 6 prononce hors de cour sur la demande en assistance de
cause contre m oi, ce qui prouve que vous êtes condamné per
sonnellement.
Toujours oubli des faits dans les choses les mieux constatées.
Si c’était le sieur Jusseraud qui eût été mis hors de cour sur une
demande en garantie formée par l u i , alors certes il ne pourrait la
renouveler ; mais c’étaient: les sous-fermiers qui avaient appelé
madame de Chazeron en assistance de cause; ils sont mis hors
de cour, donc la question reste entière pour le sieur Jusse
rau d, et le débouté ne le concerne pas.
Sur le second m oyen, les premiers juges ont constaté par l’aveu
des parties, qu’il y avait six mois de non jouissance. D ’ailleurs
le jugement de l ’an 6 rapporte aussi que les sous-fermiers n’avaient
pas joui dès avant la loi du i!> mars 1790*
Cette loi, comme on sait, n’était que le complément de celle
du 4 août 1789 , portant abolition en principe du régime féodal
et de ses effets, à la seule exception des droits fonciers. II était
naturel que les bannalités , les retraits féodaux, les droits de
chasse exclusive , et autres privilèges semblables fussent réputés
abolis, par le seul effet de la loi du 4 août 1789. Celle du i 5
mars 1790 en fut la loi organique, et ne fit que se référer a la
première. Aussi est-il de notoriété que les bannalités cessèrent
dès 1789, et madame de Brancas ne pouvait ignorer l’époque
des premiers effets d’une suppression à laquelle elle était si peu
étrangère.
D ’ailleurs calculons même comme madame de B ran cas, et ne
partons que de la loi du i 5 mars 1790 : de là au 24 juin , il n’y
�( « )
a pas deux mois, comme elle le prétend. Il y en a trois bien
comptés.
O r , la bannalité du four était sous-affermée 1,200 fr. par an ;
ce fait n’est pas contesté : c’était donc pour trois mois 3 oo fr. ,
et le tribunal civil avait supputé juste.
Enfin si par le fait le sieur Jusseraud a payé 3 o o f r ., pourquoi
les perdrait-il ?
L e troisième moyen, qui n’est plus qu’ un subsidiaire, ne
devait être proposé par madame de Brancas, que si elle avait en
main le mandement de
fr. donné par madame sa m ère, et si
elle prouvait que le sieur Jusseraud l ’a porté en compte dans
ses paiemens.
Car il importe peu que madame de Chazeron ait prom is 75 fr.
à ces sous-fermiers, si elle ne les a pas payés. Il a été dit déjà
pourquoi ces 75 fr. avaient été promis. Madame de Chazeron se
fit garder plusieurs nuits par les sous-fermiers , dans sa terre ,
lors des premières terreurs de la révolution, et leur donna en
récompense un bon de 75 francs. L e tribunal c i v i l , à qui on fit
plaider que ces rj'o fr. avaient eu aussi pour objet la non jouis
sance du four, déduisit cette somme sur les 3oo fr. d’indemnité
q u’il accorda à ces sous-fermiers.
Maintenant soit que le sieur Jusseraud ait payé cette somme
en vertu du m andem ent, ou en vertu du ju gem ent, il l ’a tou
jours payée de ses deniers , si on ne voit pas qu il a employé
le mandement dans ses comptes. Si madame de Chazeron ne le
prouve pas , il n’y a donc, dans sa derniere objaction, qu’un
double emploi imaginaire.
L e sieur Jusseraud a parcouru tous les griefs du mémoire de
madame de Brancas, qui le concernent, et il n’a eu besoin que
de développer les motifs de la décision des premiers juges, qui
porte avec elle sa pleine justification. Si la cause a été pour l’une
des parties, comme on le d i t , un objet de spéculation , le sieur
Jusseraud a l ’ayantage au moins de n’avoir spéculé que sur la
�vérité des faits et sur une constante exactitude. Ainsi madame
de Brancas n’a été victim e que de sa propre obstination; et si
ses intérêts ont été blessés , elle ne peut en accuser que l'injus
tice de ses demandes et la faiblesse de ses moyens.
M .e D E L A P CH I E R , A v o c a t.
M .e V E R N I È R E , A v o u é .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jusseraud. An 5?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernières
Subject
The topic of the resource
ferme
percière
terriers
féodiste
four banal
experts
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour le Sieur Jusseraud, intimé ; contre la Dame de Chazeron et le Sieur Albert de Brancas-de-Villars, son mari, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 5
1781-An 5
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0321
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0727
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chazeron (terre de)
Châtel-Guyon (63103)
Rights
Information about rights held in and over the resource
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féodiste
ferme
four banal
Percière
terriers
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db861774c3409e149173e175298fa0f0
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Text
c o ur
P
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RIOM.
POUR
A n t o i n e G A R D E T aîné, intimé ;
C O N T R E
t 'I G
J a c q u e s G A R D E T j e u n e , appelant.
r
L E sieur Gardet jeune élève une des prétentions les
plus choquantes que l’intérêt personnel ait pu concevoir.
P our lui payer une légitime conventionnelle de 1oooo f.,
le ;sieur Gardet aîné lu i a expédié, en vertu d’un jugement
arbitral, des immeubles estimés à la valeur de 1789.
L e sieur Gardet jeune,, qui demande un supplément
de l égitime veut qu’on estime ces immeubles de deux
m La n i è r e
. 1S u i v a n t lvaleur
a
de 178 9 , c ’est-à-dire, 13455 f r . ,
4
A- eù y
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U v s t 't o f i r - U i m u k S / V S Î , ^
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ïM U tu l/ -fo *
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pour accroître la niasse de la succession ,..et ‘opérer.un
êc^ ééf supplément en sa faveur; ; - ;•*
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2°* A la valeur seulement de 6606 ,fr. poiu^le rapport
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s a voir
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Uy*/{¿U&
qu’il<
afin
dè.sa
¡^d / l ^ M a j/**1
¡11
y / , Ü Î-" ' »supplément.
L e moindre défaut de cette prétention , est d’être
(foJ\c/uuat^
contraire à la cliose jugée. Les circonstances dont le
^ a u sieur Gardet aîné va rendre compte, prouveront de plus
^
%i /A * v h i/fy
<| 'f'U S 'D d d tr*
qu’elle est d’une injustice révoltante.
Jacques Gardet et Marie -Barbarin, père et mère des
parties, ont eu cinq enfans.
Antoine Gardet, l’un d’eu x , marié le 29 avril 1783,
a été institué leur héritier, à la charge de payer, no
tamment à Jacques G ard et, une légitime de 10000 f r . ;
ils se réservent 4000 francs pour en disposer par e u x ,
ou le survivant d’e u x ,, avec condition q u e , s’ils n’en
' | \
V^ ^ ^ ' -i ' • !»1 ^ i
•
; disposoient p a s , la somme appartiendroit a - A n t o i n e
vG a rd et, institué.
Gardet père est mort en ! 7 9 2 “Et aussitôt que la loi
du 17 nivôse fut portée, Jacques Gardet profita de son
' •
.
*
(
•.y
w N''eTet rétroactif pour demander un partage pat égalité!,
' '*■"«*.: m algré l ' i n s t i t u t i o n . '
i
1
• - JJip ..
Ce partage eut lieu : mais îd riigW-e1 d ü ^ l W k>i fut
v
•
court; et après \ù 8 vendérniairfccan '4 •, ili'f1vllt>t? rttidi'e
à César ce qui appartenoit:à Gésar! " • '!
>- • *
Un tribunal de famille fut -cômpoéély et rendit un
jngemént arbitral, le 5 bruinairO''niii,4 v ,Uansî;léqiiel,|ôri
lit la disposition suivante : « En ce qui touche Jacques
« G ardet, oilicicr de santé ’ lui donne -acte d e ;la dé-
;
�( 3 )
« claradon par lui faite, qu’il s’cn tient à sa légitime
« conventionnelle de dix mille livres; lui donne pa« rreillemeht acte de la'déclaration faite par Antoine
« Gardet j héritier institué, qu?il le* tient quitte* sans
« imputation quelconque, de la somme de mille livres
« réclamée par ledit Jacques G ardet, dudit A n t o in e ,
« eu assignats, pour vente de quelques meubles.
« En conséquence, ordonne que ledit Gardet aîné
« sera tenu de lui payer ladite somme de dix mille livres
« en deniers, fonds ou effets de ladite succession, bien
«
«
«
«
«
«
«
et dûment garantis, conformément à son contrat de
mariage, bien entendu que ledit payement ne pourra
être fait qu’en numéraire métallique, s’il est fait en
deniers; et s’il est fait en biensTfon ds, ce sera suivant
la valeur de 1789, et l ’estimation par les experts ciaprès nommés : et en attendant que ledit Gardet aîné
lui expédie ladite légitime , il sera tenu de lui en
« payer l’intérêt au sou pour livre. »
E n exécution de ce jugement,1 le sieur Gardet aîné
offrit à son frère de traiter à l’amiable, et celui-ci y
accéda, en choisissant les immeubles. Les parties traitèrent
le 14 nivôse an 4 , su r Vacquittement de la légitime
conventionnelle, faite à Jacques Gardet par le contrat
de mariage de 1783, et définitivement réglée par jugement
arbitral : en conséquence’," 'Antoine Gardet, pour se li
bérer de la somme de 1 0000 francs, montant de ladite
légitim e, paya en écus 3400 fr. ; et pour les 6600 fr.
restans, il délaissa avec garantie', une maison et cinq
héritages, dit Jacques Gardet J q u i , au moyen de c e ;
déclara être satisfait et rem pli de sa légitime conven
tionnelle.
A 2
�t
W uJÙ " f y ? .
( 4 }
JltJJato*-' ■W/)'
Jacques Gardet jeune n’avoit voulu des immeubles,
'ufîtv-atM - ujOO- e t (3es immeubles p récie u x , que pou r|s’en défaire ,et
_grossir sa légitime; il vendit au nommé Pradier la maison
|.
i h JdLSttfttfiJfo 01 ci u^ venoit de lui être délaissée, 5400 francs; il vendit
——------^ d e u x vignes au nommé Besson, moyennant 1455 fr. ;
i
C[ enfin, il revendit à A ntoine G a rd et, son frè re , les
trois objets restans , avec deux héritages de peu de
t
valeui’, provenus de la succession d’un frère, moyennant
i
8400 francs ( 1 ).
4
Ces trois ventes sont: de l’an 5 ; et elles prouvent que
■
.y
Jacques Gardet, après avoir reçu une légitime de 10000f.
en immeubles, en retira dans l’année i 6855 francs, outre
les; 1000 francs de meubles qu’il avoit retenus, et qui
à l’écïîelle , valoient 440 francs.
'La mère des parties est morte en l’an, 10 ; et,quoique
sa succession ne présentât pas matière à procès, Antoine
Gardet ne fut pas m oin s. tracassé encore par ses cohé
ritiers , pour la réserve de 4000 francs dont l’électionavoit resté au- survivant des père et mère.
A lors les idées étoieut fort incertaines sur le vrai sens
du législateur , au sujet des réserves de ce genre ; la
Cour de cassation n’avoit pas rendu les deux ari’êts cé-
(¿) Le sieur Gardet jeune,,en avouant qu’il a gagné beaucoup
sur son frère par cette vente , dit que son fr è r e , en les re
vendant , gagna à son tour 3ooo francs : mais rien n’est plus
faux ; car le aieur Gardet aîné a encore dans les mains tous les
héritages qu’il a acquis de son- frère en l’an 5 , excepté une
vigne qu’il n’a vendue,que 1800 f r . , et suc laquelle par consé
quent il n’a pas pu gagner 3 ooct francs.
�( 5 \
lèbres des Grim ai et des G ra ilh e , qui ont jugé que la
faculté d’élire ayant été ôtée au survivant par la force
majeure de la loi du 7 mars 1 7 9 3 , et l’indication du
défunt ne pouvant être changée sans un effet rétroactif,
la réserve étoit due h celui à qui le défunt avoit dit qu’elle
appartiendroit en cas de non élection.
L e tribunal de Clermont, en ordonnant le partage des
biens maternels demandé par exploit du zô floréal an i i ,
ôta à Antoine Gardet la réserve que ses père et mère
lui avoient destinée, et ce jugement a été confirmé; de
sorte qu’Antoine Gardet a été forcé de se soumettre à ce
nouveau sacrifice.
Après avoir plaidé un an sur le partage de la suc
cession maternelle, Jacques Gardet imagina de demander
un supplément de légitime dans la succession paternelle,
par une requête signifiée peu de jours avant le jugement.
Antoine Gardet répondit à cette demande que la lé
gitime conventionnelle expédiée à son frère, en l’an 4 ,
excédoit de moitié les légitimes de droit accordées à ses
autres cohéritiers } par un partage judiciaire auquel il
avoit concouru.
Cependant le tribunal de Clermont ordonna, par son
jugement du i 5 frimaire an 12, que les mômes experts
chargés du partage de la succession maternelle, estimeroient les biens meubles et immeubles du p è r e , d’après
letir valeur à son décès; estimeroient aussi, d’après leur
valeur à la môme é p o q u e , les biens meubles et im
meubles donnés en Van 4 à Gardet jeune ; . . . . et dans
le cas o iiH l résulteroit de l’évaluation desdits biens
paternels, que les 4000 francs ou la valeur des objets
A
3
�( 6 )
donnés en pnyement, distraction faite de ce qu’il doit
en rapporter à la succession maternelle, ne le rempliroit
pas de sa légitime, et qu’il lui seroit dû un supplément,
les experts furent chargés d’indiquer un ou plusieurs
immeubles jusqu’à concurrence dudit supplément, et
d’en estimer les jouissances, p o u r, après ladite expertise
faite , être ordonné ce qu’il appartiendroit.
.Après l’arrêt confinnalif de la C o u r, les sieurs Mazin
et Pallet ont été nommés e x p erts, et ont été d’une
grande discordance dans leurs opérations : mais cette
discordance est assez insignifiante pour un supplément,
puisque toutes les estimations de chaque expert sont
faites dans la même proportion.
L e sieur Mazin a estimé la succession du père 1 23900 f.
et par conséquent la légitime de Gardet jeune, qui est
un dixièm e, à 12390 francs.
Il estime , i°. les immeubles délaissés à Jacques G a rd e t,
en l’an 4 , ù la somme de 13455 francs; 20. il ajoute
les 3400 francs payés en numéraire ; 3°. 44° francs
valeur du mobilier. Il en résulte donc q u e , suivant cet
expert, J a c q u e s Gardet a réellement reçu pour sa légitime
une somme de 1739^ f l’ancs‘
Mais le sieur Mazin décide à l’instant une question
de droit, et juge que Jacques Gardet jeune, au lieu de
rapporter la valeur des immeubles par lui reçus, d’après
sa propre estimation , ne doit rapporter que la somme
de 10000 francs qui lui a été constituée parson p è r e ,
et que le surplus de la valeur desdits immeubles est un
bénéfice pour lui ; en conséquence, qu’ il revient au sieur
Gardet jeune un supplément de 2617 francs, pour lequel
il lui expédie d’autres immeubles.
�C 7 )
L e sieur Pallet, autre expert, n’estime les biens pater
nels qu’à 70482 francs; et comme il réduit la légitime
et les immeubles reçus par le sieur Gardet jeune, dans
la même proportion, il résulte de son rapport que le
sieur Gardet jeune a reçu 2566 francs de plus que ce
qui lui revenoit.
Lorsque ces deux rapports ont été produits au tribunal
de Clermont, le sieur Gardet jeune a cru n’avoir besoin
que de faire nommer un tiers expert; mais Antoine
Gardet aîné s’y est o p p o sé, en faisant remarquer que
d’après le rapport même de l’expert Mazin , et en adop
tant toutes ces estimations, le sieur Gardet jeune auroit
reçu 4212 francs de plus qu’il ne lui revenoit, d’après
le propre calcul de l’expert lui-même.
C ’est ce qu’a jugé le tribunal de Clermont le 26 no
vembre 1807, en déclarant le sieur Gardet jeune non
recevable'dans sa demande en supplément de légitime,
sans qu’il fût besoin de tierce expertise, parce qu’il résultoit' tant d’un rapport-'que de l’autre', que Jacques
Gardet étoit rempli et au-delà de sa légitime de rigueur.
L e sieur Gardet jeune n’a pas voulu s’en tenir à cette
décision; il s’est pourvu en la C our, et il est parfaiteMnent de l’avis de son exp ert, qu’il doit garder dans sa '
poche les 16000 francs qu’il a retires de son frère pour
sa légitime, et ne rapporter fictivement que 10000 francs,
pour pouvoir réclamer un supplément de légitime.
. Ce n’est donc point assez pour le sieur Gardet jeune
d ’a v o i r obtenu de la bonté de son frère que pendant la
vie!'du père il tînt sa bourse ouverte pour son ét at ,
A 4
�(S )
ses deltes et scs besoins, et sacrifiât ainsi 7 à 8000 francs,
dont il n’a jamais demandé le recouvrement ; ce n’est
point assez encore à Gardet jeune, qu’après la mort du
père il se soit fait adjuger, par un premier procès, des
immeubles valeur de 1789, quoique le père ne fût mort
qu’en 1792; que par un second procès il ait aiTaché de
sou frère une réserve qui aujourd’hui ne lui seroit pas
disputée; il faut qu’il le tracasse une troisième fois, pour
obtenir utl supplément de lég itim e , lorsqu’il a dans les
mains une légitime double de celle qu’il pourroit actuelr
lement obtenir.
C est pour la première fois certainement q u ’ uni légir
timaire prétend ne pas devoir rapporter ce q u ’ il a reçu ,
pour faire vérifier s’il y a lieu à supplément de légitime.
Cette prétention résiste aux idées les plus élémentaires.
En matière de succession, le premier principe est qu'elle
«e compose de tout ce que le défunt a laissé, et que
6i des immeubles ont été .vendus , ils doivent être
rapportés au moins fictivem ent; ensuite de quoi on
déduit les dettes ces aliénant, et ce qui reste s’appelle
la succession.
.
,
/ r . •
En matière de légitim e, le premier principe.’est qu’elle
doit se prendre sur les biens méine, pars ho n ora n t, ex
substantiel p a trisj et le légitimaire a le droit de faire re
présenter par les héritiers ou détenteurs runiversalilé
des biens, afin d’y prendre son retranchement quartam .
Et si la légitime fixée par le défunt ne lui convient
pas, il a le même droit de laire rapporter tous les biens
provenus ex substantiâ paln'.s; par conséquent, s’il en
�( 9 )
possède de. cette nature, il doit lesiïiipJ)Qi’ter,lui-mêxne;
après quoi on vérifie ce qui lui; manque id qt,tod deest,
ou bien s’il a toute sa portion ,,e t s’ il n’a aucun sup
plément à demander nullam superesse repletioiiem.
La combinaison de ces termes de la loi de eo quod
deest avec c e u x -c i e x substantiâ p a t r i s po u vo it-elle
laisser un doute dans l’esprit du $ieur Gardet jeune; et
a-t-il.pu prétendre de bonne foi qu'il n ed evoit rapporter
que ioooo francs en écus, et non la légitime réelle qu’il
a obtenue en corps héréditaires ?
'
Mais les iooqo francs qu’il ¡veut rapporter n’ont jamais
été qu’une chose fictive ;! ce ne! sont point des écus qui
sont provenus de la succession du père e x substantiâ
p a tr is, mais des immeubles : par conséquent voilà ce
que le sieur Gardet jeune doit rapporter, pour savoir
s’il lui est dû un supplément de légitim e, et d’ailleurs
le mot supplément l’indique Lien assez.
Point du tout, le sieur Gardet jeune assure..( page 10
de son mémoire ) que ce n’est pas liii qui est tenu de
rapporter, puisqu’il n’est pas cohéritier;.mais que son
frère étoit obligé de faire le rapport fictif ou réel de tout
ice quircoitiposoitlla ;masse dé i la succession paternelle.
: U n principe aussi étrange ¡est cependant .honoré par
le sieur Gardet jeune du nom idc fo r t e objection - mais
sans doute il n’em n pas'médité toute l ’injustice. Il n’a
pas calculé qu’ il en - naîtrait contre Gardet aîné un
.double emploi , c’est-à-dire., unrdoijble détriment j parce
q u e , après avoir, donhé ,j pour,‘ 66 oo f r . , dcs iinméubles
que le sieur Mazin a estimés Ü3 4 5 5 ifrancs, il faudroit
qu’il rapportât du partage i 3 4 5 5 fr.-, c’est-à-dire, ce qu’il
�f( 10 )
a>perdu;--et ainsi Gai’det jeune, qui a gagné 6855 f r . ,
forceroit Gardet aîné à perdre une seconde fois, en rapportant'lè bénéfice avenu à Gardet jeune lui-même. On
ne vit jamais de proposition aussi révoltante.
Sans doute A ntoine Gardet, comme h éritier, doit
faire face à la légitime ; mais il ne doit rapporter que
ce qu’il a', ou ce qu’il auroit vendu ; il n’est point tenu
à raporter ce qu’il n’a pas, et ce qui est entre les mains
de celui-là môme qui demande ce rapport. " v
Quelque simples que soient ces id ées, le sieur Gardet
jeune veut les combattre par un principe de droit, trèsexact en lui-même , mais qu’il étoit difficile d’appliquer
plus mal à propos.
'
D a lio in solutum est ven d itio , objecte-t-il; ainsi, en
lui'délaissant des immeubles pour sa légitim e, il dit qu’on
les lui a vendus. ..
Mais où est la nécessité d’examiner cette question ,
lorsqu’il ne s’agit pas de disputer au sieur Gardet jeune
les héritages qui lui ont été délaissés? Sans doute si
après avoir payé une légitime ou toute autre dette, en
corps héréditaires, un héritier vouloit les reprendre,
en offrant en échange l’argent qu’il i de voit, ce seroit
le cas de lui opposer qu’il y a datio in solutum j et une
transmission de propriété. A u contraire, personne ne
dispute au sieur Gardet jeune ce qui lui a été donné :
il ne s’agit de part et d’autre que de rapportsfic t ifs pour
faire une évalution, un calcul, sollicités par lui-même.
Ainsi ou ne veut pas qu’il rapporte des. immeubles pour
s’en dessaisir, mais qu’ il les soumette à l’estimation de
la fortune paternelle^ puisqu’ ils eu sont provenus.
�(■11 )
Si Garclet jeune avoit obtenu la moitié dos biens pour
10000 francs, ce qui eût été fort possible, son invocation
du principe datio in so lu tu m , etc. j levconduiroit, sui
vant l u i , à disputer l’autre^moitié h l’héritier; et ainsi
il finiroit par devenir plus héritier que l u i , au lieu d’être
un simple légitimaire.
Que le sieur Gardet jeune soit^lonc conséquent avec
lui-même : il veut savoir s’il lui est dû un supplément,
et il demande qu’on estime la masse de la succession
pour le vérifier.
O r , la masse se compose de ce qui lui a été délaisé,
comme de ce qui est resté dans les mains de son frère.
L e mot rapport qui l’offusque n’est là qu’une expression
figurée et hypothétique, car il s’agit seulement d’évaluer :
et comme raisonnablement il ne peut pas vouloir que
pour estimer une succession il y ait deux p o i d s et deux
mesures, suivant son intérêt ou son caprice, il faut bien
que la succession de Jean Gardet soit appréciée par
classe et nature de fonds, comme toutes les successions
du monde.
Ainsi il est inutile de rechercher lequel des experts a
le mieux o p é r é , et si le sieur Mazin a mieux connu les
valeurs de V a y r e , que le sieur Pallet qui opéroit dans
son propre pays. L e sieur Gardet je u n e , qui reproche
h son frère d’avoir blâmé Mazin et loué P allet, ne s’est
pas aperçu que dans le même instant il trouve Mazin
fort intelligent et judicieux, tandis qu’il reproche à Pallet
une partialité dégoûtante.
Et à quel propos cette vespérie, q u a n d il est mathé
matiquement vrai qu’on peut réduire de moitié ou du
�( 12 )'
r -
quart uue estimation de succession, sans que le légitimaire ait un denier à y. perdre, lorsqu’il prend sa légi
timé en corps héréditaires?
sv
■
' 1.......1 I 1
Les experts n’ont donc été discordans dans leurs ¿va
luations, puisque cela étoit insignifiant ; et d’ailleurs
Gardet jeune n’a rien à dire, dès qu’on suit son propre
expert : ils ne sont discordans que dans leurs consé
quences et dans la question de droit que le sieur Mazin
a voulu juger, sans que la justice lui en eût donné la
commission.
L e mandat de cet expert étoit cependant d’une clarté
frappante; car non-seulement le j ugement du i5 frimaire
an 12 le chargeoit d’estimer les immeubles délaissés en
l ’an 4 à Gardet jeune, mais encore de vérifier si les objets
ainsi délaissés le remplissoient de sa légitime de droit.
C’étoit donc contre la chose jugée que Mazin vérifioît si la légitime de droit étoit remplie p ar la somme
de ioooo fr a n c s ?
^
L e sieur Gardet jeune se plaint encore de n’avoir pas
obtenu 126 francs que l’expert Mazin lui donnoit pour
supplément de la légitime maternelle.
Ce n’étoit que par suite de sa décision fa u tive, que
cet expert trouvoit encore un déficit dans cette succession;
et cela est sensible.
Comme les 10000 francs étoient pour légitime pater
nelle et maternelle, Gardet jeune se garda bien en l’an 4,
du vivant de sa mère , de ne pas s’y tenir , de peur
d’avoir moins par un partage : et ainsi , en obtenant
pour 10000 francs d’immeubles, valeur de 1789, il se
�( *3 }
trouvoit n a n ti, par anticipation, d’une part des biens
maternels* , ' )<: ■
. J
jr ) :-‘i uoitet n .
•i Aussi le jugement de l’an 1 2, en ordonnant l ’estimation
pour le supplément des objets, donnés en payement en
l’an 4 , à Jacques Gardet, dit qu’elle aura lieu, distraction
fa ite de ce q u 'il doit en rapporter à la succession m a
ternelle.
‘ 'i
L ’expert Mazin a évalué la légitime maternelle à 793 f.,
c’est-à-dire, au quinzième de la succession paternelle.
S ’il s’en fût tenu à sa propre estimation, il auroit dit
que le sieur Gardet jeune, ayant dans les mains 17395 f.,
avoit évidemment plus qu’il ne lui falloit pour être
rem pli, et des biens paternels, et des biens maternels.
A u lieu de cela , cet expert a continué de penser que
les biens maternels délaissés à Gardet je u n e , au lieu
d’être estimés en nature,, ne devoient être qu’une fraction
des 10000 fr. de légitime et des 440 fr. de m o b ilie r;,
d’où il a- conclu que Gardet jeune n’avoit à rapporter
que 667 francs.
! ’ 1.
En c o n s é q u e n c e p o u r atteindre les 793. francs-, il a
pensé qu’il falloit lui adjuger 126 francs de plus en
immeubles.
C ’est bien encore plutôt dans cette opération que rationes non concludunt j. car si’ le siéur ÎVlazin avoit aussi
le prétexte d’invoquer le principe datio non solution
est venditio, comment le pouvoit-il à l’égard d’une por
tion de biens dont Gardet jeune ne jouissoit que par
avancement d’hoirie ?
U n héritier peut bien retenir l'avancement d’hoirie
quand il le veut; mais ic i Gardet jeune demandoit le partage
�( 14 )
de la succession maternelle, et dès-lors il ne lui étoit plus
permis de rien retenir : tout étoit sujet à rapport réel;
et supposer qu’on a entendu vendre à Gardet jeune une
portion de succession non éch u e , seroit une hérésie ju
diciaire, qui ne mérite pas de plus longue réfutation.
En un m o t, tous les efforts du sieur Gardet jeune
viennent se briser contre cet unique et simple raisonnemen t :
Il avoit à réclamer, 1°. pour légitime de droit pater
nelle, d’après l’estimation de son propre expert, 1 2390 F.;
2°. pour légitime maternelle, 793 f r . ; total, 13183 fr.
O r , il est prouvé par l’estimation du meme expert,
q u’il lui a été délaissé par l’h éritier, 1 . 3400 francs
en argent; 20. 13455 fr. en immeubles; 30. 440 fr. en
m obilier; to ta l, 17395 francs.
D onc le sieur Gardet jeune, en rapportant la valeur
des objets à lu i donnés en l'an 4 , comme l’exige le juge
ment de l’an 1 2 , est rempli et a u -d e là de ce qui lui
revient ; et le tribunal de Clermont a dû proscrire sa
demande, puisqu’elle n’étoit qu’une injuste tracasserie.
M e. D E L A P C H I E R ,
ancien avocat.
M e. M A N D E T jeu n e, avoué licencié.
A RIOM , de l’imprimerie de T h i b a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Février 1809.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gardet, Antoine. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
tribunal de familles
légitime
experts
Description
An account of the resource
Précis pour Antoine Gardet aîné, intimé ; contre Jacques Gardet jeune, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1783-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0319
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0546
BCU_Factums_M0547
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experts
légitime
Successions
tribunal de familles
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78ec2842a9d7408bc73bc0764809b65c
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PRÉCIS
TR IB U N A L
F 0 U R
C ô me - D a m i e n
FAYOLLE,
SP ÉCI AL.
Accusé;
CO N TR E
J a c q u e s
D E F F A R G E S , Plaignant.
J ' a i des en nem is, ils se cachent : un mannequin est l’ instrume nt de leur
animosité. L e s lâches n’attaqueraient pas ma r i e , mais ils cherchent à m’ôter
l ’h o n n e u r , parce que dans ce genre d’agression, toute représaille leur est
moins sensible, et que sur-tout ils sont plus à couvert. I l leur a été si aisé
de supposer quelques motifs d’intérêt personnel à un hom m e totalement nul
et sans ressources, incapable de méditer lui-même ce qui a été fait sous sou
nom.
Qui donc se défendra du soupçon d’im probité, quand avec une fortune
au-dessus de mes besoins, et après soixante-deux ans d’ une vie sans reproche,
j ’ai la douleur de me voir accusé d’avoir vo lé 2,000 francs ; et à qui? A D e f-
fa rg es qui vit dans la pénurie la plus extrême ? A Deffarges q u i , depuis le
v o l , a laissé passer sept a n s , quatorze ans même sans s’eu appercevoir.
C eu x qui connaissent l’accusateur et l ’accusé rougiront de penser que
c’ est moi qui suis accusé par Def f arges , ils croiront qu’ une transposition
de noms les abuse ; et leur indignation justificative sera le seul examen qu’ils
feront des détails relatifs à la misérable calomnie dont je suis un instant la
victime.
Aussi n’est-ce pas pour eux que j’ écris. J e n’ écris pas m ême pour mes juges ;
car en leur demandant la prison et venant me justifier avec des pièces a u th e n
tiq u e s , si j’ osais douter de leur jugement, ce serait douter de leur conscience.
J ’ écris pour ceux q u i, ne méconnaissant p a s, n’ont pu que recevoir l’impres
sion désavantageuse qui résulte naturellement d’ une accusation de faux. L a
calomnie est expéditive et laconique ; une justification est compliquée et
ennu yeuse; mais ceux qui méritent que leur opinion soit comptée pour quel
A
�( a
)
que ch o se, se défient de l’exagération du vu lg a ire, sont en garde contre leur
propre ju g em en t, et se font un devoir de lire ce qui peut les désabuser.
C ’est donc à ceux-ci que je vais donner l’explication de ce qui a donné lieu
ou plutôt de ce qui a fourni matière à la dénonciation signée Deffarges. J e ne
chercherai pas.des moyens dans les lois et les auteurs. J e me contenterai de
laisser parler les faits ; eux seuls me justifieront.
FAITS.
A n n e et Marie Tisseron sœ urs, avaient épo u sé, l’ une le sieur C h a lu s ,
l ’autre le sieur Laroche qui avait des enfans d’ un premier lit.
D e M arie Tisserou issu reut Margueritte, Jean-Josepli et A m a b le Larochej
c’ est cette’dernière qui a épousé le'sieur Deffarges.
E n 1 7 8 7 , J e a n - J o s e p li Laroche me vendit divers héritages venant de
M arie Tisseron , sa mère', parce que ces héritages se trouvaient voisins de
mes propriétés de St.-Amaut ; il ue lui en reveugit qu’ un tiers, et voilà ce qui
a am ené d’autres actes.
A u mois d ’avril 1789, j ’arquis les droits de Margueritte L a r o c h e , dans les
mêmes biens provenant de M arie Tisseron.
Com m e Jean-Josepli L aroche avait vendu plus qu’il ne lui revenait dans
les immeubles de l’acte de 1707 , il y eut un traité entre l u i , Deffarges et m oi,
comme représentant Margueritte Laroche. Jean-Joseph nous céda en indem
nité une terre et deux prés sis à Gondinangue.
C o m m e encore la succession Tisseron devait au sieur L ad ey te une rente au
principal de 2,5oo fr . , qui devait être remboursée par nous trois, Laroche et
Deffarges me vendirent une moitié de terre et un petit jardin,plus quatre rentes
et l’effet d’ une sentence de 1 7 7 9 , à condition de rembourser M . Ladeyte.
de Gondinangue étaient si peu de c h o s e , si peu à ma bienséance,
à m’ en défaire ; un nom m é Antoine B o y les demanda
en rente ; l’acto allait en être p a s s é , et Deffarges était venu d’Aubusson à cet
effet, à la fin de 1790. Mais qui eût voulu Deffarges pour caution? on ne vou*
Ces biens
que je cherchai aussitôt
lait acheter que de moi. L ’acte n’eut pas lieu.
En 1791 , un autre acquéreur se présenta avec les mfimes propositions;
voulant en fin ir , j’achetai alors de Deffarges sa moitié desdits héritages, par
acte du 4 mai 1 7 9 1 , reçu R o ch e et P io te t, notaires, m ojennant une rente de
cinquante f r . , pour ne pas perdre le capital en cas d’ éviction ; et presqu’aussit6t je vendis le tout par acte notarié au sieur Tardif, juge de paix à St.-Axnant,
avec ma seule garantie.
L e sieur C h a l u s , époux do M arie Tisseron avait retiré des héritages d’un,
mommé G r o le t , en 1 7 7 7 , pour l’acquit d’une créance commune aux deux
�(3 )
sœurs Tisseroïl. D ’autres créances étaient hypothéquées sur un domains
appelé de L o b é n i c h e , acquis par moi j j ’avois doue intérêt de dégager mon
bien de ces hypothèques.
C e fut le sujet d’ un traité du 21 thermidor an 5 , acte si peu destiné à être
caché qu’il (ut fait à O lm e t , en présence de plusieurs persounes.
On conçoit aisément qu’en traitant avec D effarges, je ne devais pas faire
un acte partiel , et laisser encore mes intérêts en commun avec un homme qui
m ’entravait dans tout ce que j ’avais à fa ire , et q u i , toujours aux ex péd ieu s,
m ’ennuyait encore plus.
II fut donc convenu que Deffarges m e céderait sa portion dans plusieurs
créances, plus son tiers dans les immeubles retirés par C lialu sen 1 7 7 7 ; plus
enfin le capital de la rente à lui due par l’acte de 1791. L e prix eu était con
venu à z , 5oo francs.
*
M ais cet acte devait naturellement être divisé en deux parties ; car je vou
lais distinguer les créances qui m’ intéressaient personnellement; et Deffarges
mit encore cette circonstance à profit.
C om m e l’acte se réd ig ea it, et que j’allais écrire 5oo francs pour le prix de
ces créances, Deffarges éleva des difficultés, voulut une augmentation j cette --1
somme de 5oo francs fut laissée en b la n c , et l ’acte fut continué. L e secoud
prix , fixé à 2,000 francs, n’eut pas de difficulté, dès qu’il y avait un article
en blanc.
Quand l’acte fut terminé et bien l u , quand il n ’y manqua que cetl»
somme et l’approbation, nous traitâmes sur le prix en blanc: il fut porté à
600 francs. L e blanc fut donc rempli après coup. L ’approbation le fut dans
la même m inu te, et cette approbation est ainsi conçue:
N o u s so u ssig n és . . . . approuvons Les présentes et les f e u ille ts
autres pa rts.
F a it d o u b le , e tc . ......... F
a y o l l e ............
des
lio n p o u r ce que.
d essus, D effarg es.
A u moyen de cet a c t e , le sieur Deffarges ne devant plus rien de la créance
L a d e y t e , il fut écrit aussitôt q u ’il en était tenu quitte, sur la quitance
m êm e du remboursement.
C om m e je ne cachais pas celte acquisition , j’en fis usage aussitôt.
L u i 3 floréal an 5 , j’assignai le sienr Clialus en partage.
J e nommai
Deffarges.
pour mon expert le sieur M a g n in , beau/rère du sieux
L e 21 thermidor an 5 , par acte notarié , ce partage fut fait.
L e y fructidor an 5 , par autre acte n o ta rié , ja vendis m ou lot au sieur
Grolet.
!
V o ilà tout ce qui s’ est passé.
A
2
�( 4 )
D É N O N C I A T I O N ,
m o t i f s
,
c h a r g e s
.
J ’ étais donc propriétaire depuis 1 7 9 1 , et depuis l ’an 5.
J ’avais revendu en 1 7 9 1 , et en l’an 5.
Depuis ces diverses épo qu es, Deflarges n’avait réclam é de personneni
créances, ni r en tes , ni immeubles.
Son enfant meurt en l’an 1 0 , et les collatéraux réclament la succession.
Deflarges la revendique com me ascendant. I l y a procès.
L e sieur Magnin , un des colla té ra u x , le m êm e q u i f u t expert en
L’a n 5 , se souvenant que j ’avais fait des actes avec D eflarges, m’ écrit le
j 6 messidor an 10 , pour demander des renseignemens sur ce qui s’ est passé.
J ’avais perdu de vue tous ces actes auxquels je n’avais ou ne croyais
plus avoir d’ intérêt. J e les cherche pour en envoyer copie au sieur Magnin ,
n’ ayant en vue que de l ’ obliger.
J e réfléchis que ces débats peuvent tne susciter un procès à moi-m ême ,
et j ’ewvoie au contrôle de ma résidence l’acte sous seing privé de l’an 5.
E n l’an 1 1 , le sieur Magnin paraît désirer une expédition de cet acte
de l’an 5, et pour cela il fallait le déposer chez un notaire. J e le dépose,
et qui choisis-je pour ce dépôt de son double ?
C ’est le sieur C ro s m a rie, notaire à A m b e r t , homm e de confiance du sieur
D e flarges, son d éfen seu r dans le procès contre le sieur Magnin et autres
collatéraux.
Cet acte et celui de 1791 allaient être funestes au sieur D e fla rge s; car
s'attendant à être exclu de la succession de son fils par le s 'c o lla té ra u x ,
il demandait au moins l’ usufruit coutumier.
Ces deux ventes en faisaient prononcer la privation.
I l n’a plus qu’ un parti violent à prendre. I l examine à tant de reprises
l ’acte de l’an 5 , qu’ il croit avoir saisi un trait de lum ière; il va aux en
quêtes et se perd en rech erches; il demande des conseils à tout le m o n d e ,
et tout le monde ne lui donne pas ceux de la prudence j il part pour R io m ;
il dénonce.
I l eût bien voulu ne dénoncer que l ’acte de l’an 5 ; mais le besoin do
i a cause exigeait l’annullation des deux. En conséquence il se prétend
trompé , « i.* par l ’acte de 1791 ; . . . il est f a u x , il n’a jamais v e n d u .. . .
« Si la signature e x iste , elle est du fait de l’auteur du faux ; . . . 2.» par
« l'acte d e l ’a n S ; . . . i l n’est pas double
. il est dit 600 francs comp« tant, quoique cette somme fût compensée en partie avec la créance du
« sieur Ladeyte.
J ’ai intercalé
une feuille au m i li e u , l’acte n’en ayant
« d’abord qu’ u n e . . . . Cela se prouve par un extrait de l’enregistrem ent,
�( 5 )
« où on voit que l e receveur n’a perçu que 12 f r . , ce qui n’ est le droit
* proportionnel que d’une vente de 600 francs».
V o ilà sa dénonciation ; il y joint une liste de quatorze tém oins, et écrit
au b a s , « que les trois derniers déclareront que le 21 thermidor an 5 , il
« n’avait que 6 francs dans sa poche (après l’acte ) , et qu’il n’eut pas de quoi
« payer i 5 fr. que je lui gagnai à la bête ombrée ; ce qui prouve que je
« ne lui avais pas compté 600 fra n cs, et cependant l’acte avait été passé
k devant eux ».
Ces trois tém oin s, in d iq u é s particulièrem ent p a r D e jfa r g cs , ont en
effet d é p o s é , mais de manière à prouver que s’il y a un / a u x , c’e s t . . ..
dans La d én o n cia tio n .
Deux de ces témoins ( l e 2.e et le 4.® de l ’ in fo rm atio n ), ont vu faire
l’acte de l ’an 5 ; . . . il a été fait en d e u x feuilles ; . . . le prix a été couvenu devant eux à d e u x m ille et quelques l i v r e s . . . . I l fut souscrit des
effets par moi ; . . . . il fut fait d e u x d o u b le s .. . .
‘ L ’autre témoin in d iq u é ( le 3.a de l ’iu fo rm a tio n ), frère d e Deffarges ,
n ’a pas été témoin de l’a c t e ; . . . . il n’a assisté qu’au jeu , où je p a y a i .
dit-il, p our D effarges. . . . Son frère lui dit n’avoir vendu qu’ un petit o b je t ,
moyennant
cinq cents fr a n c s .
L e s deux notaires de l’actc de 1791 ont été entendus ; l’ un d’e u x , notaire
en second , n’ était pas à l’a c t e , c’est l’ usage. Mais R o ch e , notaire recevan t,
( l e 10.0 de l’ inform ation), déclare se rappeler très-bien que Deffarges est
venu chez lui en 1791 , faire cette vente.
Toutes les autres dépositions sont absolument insignifiantes.
V o ilà les ch a rg esj où plutôt, voilà la plus claire des justifications.
R E F L E X I O N S .
I l ne s’agit plus de la partie de la dénonciation qui concernait l’acte du
4 mai 1791.
L e sieur Deffarges qui accusait cet acte de f a u x , qui prétendait que sa
signature et celle du notaire étaient fausses, est reconnu avoir signé. L q
notaire est aussi reconnu avoir signé.
L ’acte a été contrôlé à Cunlhat en 1791- L e s registres du contrôle ont
été produits.
■
«
Aussi l’ acte d’accusation ne porte pas sur celte vente.
Cette première dénonciation est donc prouvée calomnieuse.
N ’aide-t-elle pas à juger la seconde ?
Dwffarges m’ a fait interroger. A mon tour je l’ interroge.
�(6)
Pourquoi a-t-il menti en disant qu’il n’ajamais vendu ? I l a vendu. Il est
forcé de ne plus le nier.
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que l’acte n’avait pas été fait double? I l a
signé qu’il l’ était. Il a montré son double à A m bert.
Pourquoi Defiarges a-t-il dit à son f r è r e , le m ême jour de l’a c t e , n’avoir
vendu que pour 5oo fr. II dit aujourd’hui que c’ était 600 fr. I l reconnaît
la partie de l’acte où est écrit le prix de s ix cents fr a n c s .
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que ces 600 fr. étaient com pensés a vec sa
portion d e là créance L a d e y te ? Et pourquoi a-t-il dit au procès qu’il lui fut
fait un b illet de 5oo francs, qti’il a cédé à G ateyrias ?.... V o ilà donc au
moins i j i o o fr. reconnus.... L e prix n’ était donc pas seulement de 600 fr.
L ’acte avait donc plus que la première feuille.
Pourquoi Deffarges a p p rou va it-il les feuillets d es Autres p a rts? I l y
avait donc plus d 'u n feu ille t, autre que celui de l’approbation.
P o u r q u o i Deffarges, propriétaire d’ im m eu bles, n’a-t-il jamais réclamé
ni ses propriétés, ni les j o u i s s a n c e s , ni aucuns fermages depuis l’an 5 ?
Pourquoi même a-t-il laissé le sieur T a rd if en,possession paisible depuis
1791 jusqu’à 1804, d ’im meubles dont auparavant lui Deffarges était si soi
gneux à percevoir les fruits ?
Pourquoi Deffarges ne s’est-il jamais mis en peine d e p u is , de savoir qui
payait les im p ô ts, ni de se faire cotiser s’il était propriétaire.
Pourquoi n’a-t-il jamais assigné ni averti les débiteurs de toutes ses rentes,
et m ’en a-t-il laissé rembourser plusieurs, sans se mettre sur les rangs pour
toucher.
P o u r q u o i m ’ a-t-il laissé partager avec C h a lu s ,e n l’an
5 , des immeubles
qu’il 11e m ’aurait pas vendus? Comment ce partage s’ est-il fait avec l'o n cle de
DefTargespar le beau-frère de Deffarges, sans queDeffarges l ’ait su?.. Il habite»
h trois lieues des biens partagés. J habite a plus de dix lieues de distance.
Si le sieur DefTarges s’ était fait toutes ces questions, ou si on les lui eût
fa ites, il n’y aurait pas de dénonciation.
S’ il avait réfléchi que rien ne m ’obligeait à délivrer un acte co n so m m é,
et sur-tout à le déposer en m inute chez son défenseur, dans le procès pac
lequel l’acte était produit , il n’y aurait pas de dénonciation.
Si Defrarge avait consulté les trois témoins qu ’il indiquait comme devant
me con d a m n er , en rappelant une partie de cartes, il aurait appris .d’eux
qu’ ils avaient une mémoire moins futile, ils l’auraient dissuedé ; et il n’y
aurait pas de dénonciation.
Si , pour parler plus ju ste, il n’y avait pas eu de demande en privation
d’ usufinîi fondée sur ces deux a ctes, il n’y aurait pas de dénonciation.
Si le sieur Delîargo n ’eût pas été aveuglé par l’impulsion d ’autrui et par
�(7
)
son i n t é r ê t , il aurait réfléchi que je n’ ai eu nul intérêt à être son acqué
reur , ou à ne l’ être pas ; puisque je suis exposé aux évictions des héritiers
de son fils , et que je- n’ai contre lui aucune gara n tie, aucune ressource.
N o n , a u c u n e , pas même pour la vengeance ; pas m ême pour la répa
ration du tort qu ’il m e cause.
J e sens bien qu’ un Def f arges ne portera aucune atteinte durable à ma
réputation, mais je ne trouve pas moins bien d u r , à mon â g e , de con
naître p ar lui, le séjour des prisons.
Quand un hom m e nul entreprend de louer ou de rendre se rv ic e , per
sonne ne s’aperçoit de sa tentative. I l est triste de penser qu’il est plus
heureux quand il veut nuire.
F A Y O L L E .
A RIOM, DE L’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Fayolle. Côme-Damien. 1805?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Fayolle
Subject
The topic of the resource
faux
acquisitions
successions
rentes
usufruit
jeux de cartes
Description
An account of the resource
Précis pour Côme-Damien Fayolle, Accusé ; contre Jacques Deffarges, plaignant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1805
1787-Circa 1805
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0318
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0225
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rentes
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usufruit
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Text
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COUR
*
i
M
E
M
O
I
R
E
D ’A P P E L
SÉANT
P O U R
A R IO M .
Les
h é ritie rs
F L O U V A T
;
C O N T R E
Jeanne
I
l
A S T A N IE R E ,
veuve
M A RCON.
est peu d ’héritiers aussi maltraités par les procès de successions,
que l’ont été les sieur et dames Flouvat. L a veuve Marcon est
depuis vingt-un ans en possession de son lot et de la presque tota
lité des autres biens; cependant, après des variations sans nombre,
elle se dit aujourd’hui leur créancière.
Quoique toutes les difficultés soient réglées entre les parties par
deux arrêts; à en juger par le mémoire que signifie la veuve Marcon
il resteroit encore à statuer sur un compte inextricable.
A Dieu ne plaise que les sieur et dames Flouvat aient le projet
d ’y fournir des débats détaillés ! Après trente-cinq ans déjà passés
en procès, le reste de leur vie n ’y suffiroit pas.
A
�(2 )
II semble que la veuve Marcon ait oublié ce règlement des arrêts,
car la base de ses calculs repose sur des systèmes nouveaux. 11 faut
encore chercher ces systèmes dans l’entassement de chiffres sous
lequel elle a affecté de les cacher, pour que la lassitude de la suivre
fit adopter en masse un compte qu’on ne comprendroit pas.
C a r, il faut l’avouer franchement, les héritiers Flouvat, épou
vantés d ’avoir à combattre un ennemi fort de soixante-dix pages
in-40. de chiffres, et d ’un errata de deux pages, ont senti toute
la difficulté de lutter contre de telles armes; et, semblables aux
E gyp tien s,
qui
se v o y o ien t
forces de résoudre, sous peine de la
vie, une énigme du Sphinx, ils ont hésité d’abord si, dans l’im
puissance de répondre à celle de la^veuve Marcon, ils ne lui lais—
seroient pas plutôt dévorer ce qui reste de leur fortune.
Cependant il étoit dur de penser que la veuve Marcon, ayant
cédé scs droits pour 4 ° ° ° livres, dans une succession estimée
27000 liv ., jouissant de son lo t, et débitrice en sus de i 3goo liv.
depuis plus de vingt ans, pût cependant se trouver libérée et même
créancière.
Cette impossibilité étoit tellement palpable qu’elle devoit résister
à tous les chiffres du monde; et quand les héritiers Flouvat se sont
un peu enhardis à considérer les détails du compte de la veuve
M arcon, ils ont vu bientôt le bout d ’oreille percer en plusieurs
endroits, et ont trouvé très-simple que la veuve Marcon parvint
à se dire créancière, lorsqu’elle fait porter intérêt a ce qui lui est
d û , et n ’en fait porter aucun ?» ce qu’elle doit; lorsque pendant
quarante ans elle s’obstine à trouver qu’un sixième revenant à sa
mère est absorbé par les charges , tandis que la moitié qu’elle y
amincie elle-m êm e se porte chaque année ù une somme consi
dérable ; lorsqu'cnfm, de son autorité privée, elle ajoute ù son
�C3 )
actif clos valeurs arbitraires, des sommes inconnues, et éteint dès
l ’origine, par une compensation à sa guise, les capitaux qu’elle
doit, pour qu’ils ne portent plus intérêt.
Voilà cependant sur quelle base est fondé un colosse de. compte
qui pourroit séduire d ’abord par l’immensité du travail et par
les précautions minutieuses qu’on a affecté de prendre dans des
tableaux explicatifs. Les héritiers Flouvat ne l’attaqueront pas
dans sa masse, ils n ’y sont pas tenus, et n ’oseroient d’ailleurs
l ’entreprendre; mais ils se contenteront de revenir à leur propre
compte, sur l’une des premières années, de le comparer à celui
que présente la veuve Marcon à la même époque, et d ’en exa
miner les points de discordance. Cela suffira pour toutes les autres
années et pour l'éclaircissement du procès.
Pour se rendre intelligibles, les héritiers
donneront
Flouvat
quelques explications sur les faits principaux qui ont précédé le
compte ; et il est surtout nécessaire que la cour ait sous les yeux
l’état de la famille des parties et les deux arrêts principaux qui
ont statue sur leurs contestations.
F A I T S .
E t i e n n e A s t a n i è r e , m ort on 1722.
M a r i e A u t EROCIIE , m orte le n m ars 1743.
I
I
I
M a r ie .
F r a n ç o is e ,
J ean a s t a n iè r e .
A n t o in e ,
J e a n -J o s e p ii,
m orte a i in te s u t.
C laU D A A u T E R O C IIE .
m ort le 27 sep-
rnoiuQ.
tem b re 1738,
r~
I
i
A s t a n iè r e ,
C la u d e M a rc o n .
I
I
M 1- C é s a r ,
M a r c - A lf .x .
M a r ie .
m ort le i 5 si-Ptem -
m ort le 22 ju in
A n to in e F lo u v a t .
bre 1739.
174 o .
|
1
�(4 )
Jean Àstaniere, par son testament de 1738, avoit institué ses
quatre enfans héritiers par égalité, sauf un préciput à César, de
5ooo livres.
César et Marc étant décédés peu de temps après, en droit écrit,
leur mère avoit recueilli une portion virile : mais elle passa en
secondes n o ces, et perdit par conséquent la propriété de cette
virile, sauf l’usufruit; elle ne conserva la propriété que de la por
tion recueillie en collatérale du chef de M a rc, dans la succession
de César, comme n ’étant pas provenue e x substantiâ patris, sui
vant la
distinction d u droit.
L a dame M arcon, héritière pour moitié dans le surplus, con
tracta mariage le 3 septembre 1743, et céda au sieur Flouvat ses
droits successifs moyennant 4000 liv ., et à la charge detre libérée
de la moitié d’une pension de 3oo liv. due à sa mère par la succes
sion paternelle.
Sa mère, présente, lui constitua de son ch e f 3ooo livres, et la
moitié de scs meubles m eublans, à la charge de ne demander
aucun compte. Cette constitution étoit conforme au contrat de
mariage de la dame Flouvat, qui avoit été instituée héritière de la
mère en 1742.
En 17 7 1, la dame Marcon se pourvut contre sa cession, 60us
prétexte de minorité.
Un arrêt du parlement de Paris, du 3 i juillet 1779, annulla
cette cession, condamna le sieur Flouvat à rendre compte des jouis
sances des successions cédées, depuis le 3 septembre 1743, avec
intérêts depuis la demande, à la charge par la dame Marcon de
. lui faire compte de la moitié de la pension de i 5o livres, et de la
somme cle 4000 livres, avec intérêts depuis les payemens.
\
En exécution de cet arrêt, les biens furent estimés par experts
�(5)
le 24 février 1780. L e sieur Flouvat présenta l’état des charges dont
les biens étoient grevés, justifia du payement des 4000 li v ., et de
quelques dettes de la succession.
L e procès sembloit toucher à sa fin : mais la dame Marcon ne
trouva pas avoir assez gagné, et elle éleva la prétention singulière
que les 4000 livres ayant été reçues par son mari ( insolvable), on
n ’avoit de recours que contre lui ; elle fit naître une foule de dif
ficultés sur les dettes payées, sur les charges, sur l’usufruit dû à
la mère, représentée en cela par le sieur Flouvat; car la dame
Marcon avoit trouvé plus lucratif de scinder sa cession, et de s’en
tenir à la dot particulière que sa mère lui avoit constituée.
Ces nouvelles difficultés donnèrent lieu à second arrêt du a 5
juillet 1781. Cet arrêt condamne la dame Marcon à payer person
nellement, i°. la somme de 4000 liv., arec les intérêts à compter
du jour de chaque payement ( Us sont de 174^, 1745 et 1746. ) ;
2". la somme de 726 livres pour quatre ans et dix mois de la pen
sion de i 5o liv.; 5°. la somme de 1000 liv. ( pour une provision
payée ); 4°*
somme de 5oo liv. ( pour autre provision p ayée) :
elle est encore condamnée à faire compte de 279 livres 5 sous de
dettes payées.
Il
est dit qu’il ne sera pas fait compte des intérêts de ces articles,
mais que les sommes seront compensées sur les jouissances jusqu'à
due concurrence.
Et à l’égard des déductions à faire sur les jouissances, des cens,
rentes, et usufruit dont les biens étoient grevés, l’arrêt porte les
dispositions suivantes :
O rd o n n e que sur le montant desdites jouissances revenante» à la fem m e
M a r c o n , seront déduites les sommes c i - a p r è s ,
�(6)
S a v o i r , i°. celle de i 56 l i v r e s , portée en l ’a rtic le i d u troisième c h e f
des conclusions de ladite d em a n d e ;
a 0. C e lle de 37 livres 2 sous , portée en l ’article 2 ;
3°.
La m oitié des arrérages de la rente de i 37 l i v r e s , pa y ée aux sieu's
Costet de C r e s p a t , à c o m m e n c e r du
3
septembre 1 7 4 s , jusques et com pris
l'é c h é a n c e de la T o u ssain t de 1769 seulem ent; le tout sauf la d é d u c tio n
des impositions royales ;
E t en outre la som m e de t i g l i v 10 sou s, faisant m oitié des 2^9 l i v . ,
payée à c o m p te par F lo u v a t fils a u d it de C r e s p a t, le 20 juillet 1774« en
sem ble la m oitié de tous autres payem ens faits par lesdits Flouvat audit
de C r e s p a t , depuis 1 7 6 9 , sous les mêmes d é d u c tio n s ;
4°. L a som m e de 997 liv . 10 s o u s , portée en l'article 4 ( dî'oït de sur
f i e de la m ère ) , sur laq u elle néanm oin s seront retenues les impositions
royales ;
5 °.
C e l l e de
55
livres 10 s o u s , portée en l ’a rticle
6°. L a m oitié des intérêts de la som me de i
25o
5
;
l i v r e s , form ant le q uart
revenant à C la u d a A u ter o ch e dans le prélegs de M ich el-C ésa r A s t a n i é r e ,
depuis le 3 septembre 1 7 4 $ , jusqu ’au 8 jan vie r 1 7 7 2 ; ensemble la moitié
de la som m e à laquelle se trouvera m o n te r , depuis led it temps , le seizième
des jouissances des biens de Jean A stan iére, qu i a appartenu à ladite C lau d a
A u t e r o c h e , du c h e f d u d it M ic h e l- C é sa r Astan iére, à titre d ’usufruit seule
m e n t , d éd u c tio n faite des intérêts, tant des charges foncières que des rentes
annuelles et autres c h a r g e s, lequel seizième sera liq u id é d ’après l’estimation
générale qui sera faite ( si fait n ’a été ) des jouissances des biens d u d i t
Jean A s t a n ié r e ;
7 0.
L a m oitié de la s o m m e à laq u elle se trouvera m onter, p o u r le temps
et d ’ après les estimations et d éd u ction s ci-dessus énoncés , le d ouzièm e
des jouissances des biens de Jean Astaniére , q u i a appartenu à ladite C lauda
A uteroch e,
à titre d 'u su fru it se u le m e n t ,
d u c h e f personnel de M a r c -
A le x a n d r e Astaniére :
P l u s , pe n d a n t led it tem ps, la m oitié des intérêts de la som m e de 4 16 liv.
i 3 sons 4 d e n ie r s, faisant le tiers revenant«! ladite C la u d a A u te r o ch e dans
le quart r ecu eilli par ledit M a rc-A le xa n d re Astaniére, du prélegs de
5ooo
liv .
de M i c h e l - C é s a r , son f r è r e ; p l u s , la moitié de la somme à laq uelle se
trouvera m o n t e r , po u r le tem ps et d ’après le» estimations et déd u ction s
c i dessus é n o n c é s , le quarante - huitièm e des jouissances des biens d u d it
Jean A siatuire , q ui a appartenu à ladite C l a u d a Au teroch e , à titre d ’usu
fruit s e u le m e n t, du c h e f d udit M a r c-A le x a n d r e , coium a a y a n t eu droit
�C7 )
de jouir d ’un tiers dans le seizième échu audit M a rc-A lexa nd re par le décès
d u d it M ic h e l- C é s a r , son frère ( * ) .
D éb ou te les héritiers F lou va t de leur demande en p a y e m e n t du surplus
de la som m e portée en l ’a rticle
3,
et en condam nation d'intérêts des sommes
portées aux sept articles ci-dessus, sauf l ’im pu tation et la com pe n sa tion
sur les jouissances , ainsi q u ’il a été ci dessus o rd onn é.
C o n d a m n e lesdits F lo u v a t à a cq u itte r et faire tenir q uitte ladite M a r c o n
de toutes dem andes et répétitions qui pourroient être formées c o n tre elle
pour raison d ’a u cun e des dettes , rentes et charges ci-dessus allouées auxdits F lou vat.
E t dans le cas où , par l ’évén em en t des imputations et com pensations
ci-dessus ordonnées , soit avec les jouissances a n n u e l l e s , soit a vec les autres
sommes particulières qui po urroien t se trouver dues à lad ite M a r c o n , elle se
trou v ero it reliquataire envers lesdits F l o u v a t , c o n d a m n e ladite M a r c o n à
p ayer auxdits F lo u va t le m on ta n t d u d it r e l i q u a t , avec les intérêts à c o m p te r
du ôo mai dernier , jour de la d em a nd e , dépens c o m p e n s é s , fors le c o û t
de l ’arrêt , q ui sera supporté par c e lle des parties qui , d ’après les im p u
tations et compensations ci-dessus ordonnées , se trouvera d éb itric e.
Après une aussi ample explication, il ne sembloit plus rester de
difficultés; mais la dame Marcon ne jugea pa6 le procès assez com
pliqué ; elle prétendit qu’on n ’obéissoit pas à l’arrêt de 1779, en
se désistant sur le champ; et cependant elle n ’adoptoil pas le rapport
d ’experts de 1780, et concluoil à un amendement : à cela elle ajoutoit plusieurs conclusions nouvelles.
i°. Elle plaidoit, en première instance, sur le partage de la suc
cession de Marie Auteroclie, son aïeule, ouverte en 1745; elle le
fit évoquer au parlement.
(■*) C e ca lcu l do fraction * se réd u it A un s ix iè m e ; en e ffe t , r ï ’ î’ T ï + 7 1
C ’e»t donc un six iè m e que la m ère a en usufruit.
P l u s , il lu i est accordé un quart et uuo m o itié dans le p réleg s de fcooo l i v r e s , aussi en
u su fru it.
l'n fin , scs d roits en propriété sont fix és i un n e u v iè m e , plu s u n tr e n t e -s ix iè m e , par
l ’arre t ci-ap rès.
�(8)
2°. Elle plaidoit sur le partage de la succession de son père et
de ses frères, quoiqu’il fût virtuellement ordonne par les deux
premiers arrêts, dès qu’on devoit lui rendre compte de moitié des
jouissances; elle le fit encore évoquer.
5°. Elle plaidoit sur le partage de la succession de Clauda Autcroche, sa mère, ou du moins de la virile à elle due, de l’argenterie,
des gains de survie et du compte de tutelle, quoique son contrat
de mariage et les précédens arrêts eussent réglé tout cela : autre
évocation, et jonction du tout.
4 °. Enfin, elle demanda les jouissances de 178 1, qui étoient de
droit, en vertu du premier arrêt.
Ces nouvelles réclamations, et les débats qu’elles occasionnèrent,
embrouillant de plus en plus le procès, il fut rendu un troisième
arrêt le 1". août 1781.
« L es F lo u va t sont co n d a m n é s à se désister d e la p o rtio n de biens cédés
» en 1 7 4 3 , a v e c r estitu tion de jouissances et intérêts depuis 1 7 7 1 .
« I l est o r d o n n é une nouvelle estim ation aux frais a va ncés de la dame
« M arcon. »
F a isa n t d ro it sur la d em ande en partage de la su ccession d e M a rie
A sta n iè r e , évoquée en la c o u r , c o n d a m n e les héritiers F lo u v a t à p ayer
à ladite dam e M a r c o n la som m e <le
livres , faisant m oitié de celle
de i 5o liv r e s , à laquelle les m eubles délaissés par M a r ie A u te r o c h e ont
été estimés par le p r o c éj
verb al de d e sc r ip tio n
fait après son décès ,
le i 5 octob re 1 7 4 S ; ensemble la som m e de 18 livres i 5 sous po ur le quart
en sus de ladite e s t im a tio n , a vec les intérêts du tout à c o m p te r d u d i t
j o u r ; ensemble la moitié de la valeur de tous autres meubles qui seront
justifiés a v o ir apparten u à ladite M a rie A u teroch e , au jo u r de sa i n o r t ,
m êm e des l i t s , ta b le s , a r m o i r e s , coffres et chaises de M a r ie A s t a n ic r e ,
que led it feu An toin e F lo u v a t a reconnu avoir eus en sa possession , sui
vant l'estimation qu i en sera faite à l'amiable entre les parties , sinon
par experts conven u s d ev an t le juge royal d 'I ssoire, que la c o u r c o m m e t ,
ou par lui pris et nomm és d'office. Q u a n t aux autres d roits de la suc
cession
de ladite M a rie A u t e r o c h e , r é s u l t a n t , soit de son
contrat de
mariage
�(9 )
m ariage avec Etien ne Astanière , d u
25
jan vier 1681 , soit (le la recon-
noissance passée pa r -d e v a n t n o ta ires , d u 16 juin 1 7 1 7 , sans s’a rrêter à
tous traités q u i auroient pu être faits au p r éju d ice de l'institution conten ue
dans le contrat de mariage de Jean Astanière , d u 16 fév rie r 1722 ;
O rd o n n e que ladite M a r c o n , p o u r sa moitié dans lesdits droits , sera
p a y é e sur les biens de la succession d u d it Jean A s t a n i è r e , de la som m e
de
3/(.o8
livres ; s a v o ir , celle de i 85o liv . à la date du z 3 jan vie r 1681 , et
celle de i 558 livres à la date du 16 juin 1 7 1 7 , ensemble des intérêts
d u tout à c o m p te r d u
A u t e r o c h e (*).
12 mars
1 7 4 3 , date du décès de lad ite M a r ie
E n c e q u i tou ch e les d em andes en partage d e la su ccessï> n d e Jean
A s ta n iè r e , père c o m m u n , évoquées en la cour , sans s’arrêter à la d em a n d e
en n u llité de la d isposition de J ea n Astanière , r elative à son m o b i l i e r ,
fo r m ée par ladite M a r c o n , la d éclare n o n -rec ev ab le dans sa d em a n d e
afin de partage des m eubles ineublans d u d i t Jean Astanière.
A l ’égard des im m eu b les autres que la maison située sur la place d 'I sso ir e ,
ord on n e que dans la q u in za in e de la signification d u p rése n t arrêt à
personne ou d o m i c i l e , il sera à l ’a m iab le , si faire se peut , sin on par
deux experts autres que c e u x qu i o n t dressé le procès verb al du 24 fé v rie r
1780 , procéd é A la v i s i t e , arpentage et e stim atio n des terres , prés
vignes et bois , proven an s de la succession
d u d i t Jean A stan ière , au
n o m b re desquels ils c o m p r e n d r o n t le bosquet ou petit bois Saussay, a ctuel
lem en t join t au p r é M o u to n par la partie seulem ent que lesdits experts
r e c o n n o itr o n t être devenué une d ép en da n ce d u d it pré M o u to n , laquelle
partie sera , par lesdits experts , mesurée et estimée avec ledit pré M o u to n .
O r d o n n e que lesdits experts procéd eron t ensuite au partage et division
de tous lesdits biens en deux lots é g a u x , autant
que faire se p o u r r a ,
lesquels l o t s , chargés de leurs soultes ou retour en d en iers, si aucunes il
y a , seront tirés au sort.
Q u a n t à la maison située sur la p la ce d 'Isso ir e, ayant égard aux demandes ,
offres et consentemens respectifs des parties , ord onn e que par les mêmes
experts il sera p ro c éd é à la v i s i t e , toisé et estimation de ladite m a i s o n ,
en distin gu a nt dans ic elle les trois parties d o n t elle se trouve actuelle*
m e n t com posée ; sa vo ir :
La prem ière p a r i e acquise par feu A n to in e Flou vat , de Jean-Baptiste
T i x i e r et sa fem m e , tenant du m id i
à la
maison de C h a b r a t , et
bise , à la seconde partie ci-après.
( * ) C o tte «omme a é té p a y é e. V o ir l ’acte de 1 7 8 3 , ci-ap rè s.
B
de
�( 10 )
L a d ite seconde partie énoncée et décrite en un procès V e r b a l et rapport
d ’experts , du p rem ier octobre 1667.
L a troisièm e p a r t i e , q u i , à c o m m e n c e r des confins de la précédente ,
suivant ledit procès v e r b a l , form e le reste de ladite maison actuelle ju s
q u ’au c o in de la maison du nom m e le l î l a n c , de bise.
Lesquels experts examineront s i , dans l ’état a ctuel de la m aison, les trois
parties qui la c om po sen t p e u ve n t se partager en telle sorte que les héri
tiers
F lo u v a t aient Ja prem ière portion
ci-dessus
d é s i g n é e , la
fem m e
M a r c o n et la ve u ve F l o u v a t , aient chacun e m oitié dans le surplus ; auquel
cas ils in d iq u e r o n t et fixeront la m anière d ’o p é r e r , au profit desdits h é r i
tiers , le partage et séparation de la prem ière po rtio n d ’a vec le su r p lu s ,
ainsi que le partage et séparation d udit surplus.
E t dans le cas où lesdits experts seroient d ’avis que ladite maison ne
p e u t se partager , et q u ’il seroit de l ’intérêt de toutes les parties ou de
q u e l q u ’une d elles de l i c i t e r , soit les trois portions de maison e n s e m b le ,
soit seulem ent les deux dernières portions , o r d o n n e qu'ils estimeront la
valeu r de ch acu n e desdites portions qui seront à lic ite r.
O r d o n n e au s u r p l u s , par rapport à la n ou velle estim ation des fruits
et jouissances c i - d e v a n t p rescrite , que par les mêmes experts il sera dç
s u i t e , et par un procès verbal sép a ré, p r o c é d é aux frais de ladite M a r c o n ,
et sauf à r é p é t e r , c o m m e d it e s t , à la nou velle estim ation du produit de
ch acu n e pièce de t e r r e ,
pré ou
v i g n e , depuis le
3
septembre
1743,
jusques et c o m p r is 1779» année c o m m u n e , eu égard aux bonnes et m au
vaises a n n é e s , d é d u c t i o n faite <les tailles , vin gtièm es et autres im p o s i
tions
royales , m êm e
de 8 livres l 3 sous
4
des cens et rentes
foncières
( autres
deniers due aux B én é d ictin s , de
3
que c e lle
livres due aux
prêtres de S a i n t e - A n n e , de trois c o u p e s fro m en t due aux mêmes , sur ]a
v ig n e a u x . C h ap elles ; desquels
cens
et
rentes les parties ont c om pté
e n t i ’elles jusqu’ en 1778 et 1 7 7 9 1 su iv an t l ’arrêt du 2,5 ju illet dernier ) ,
ensemble des frais de culture et semailles , suivant I usage des lieux , sans
a v o i r , par lesdits experts , aucuns égards à la prétention des héritiers FIouvat , dans le cas où ils prétendroient a ppliq u er à feu A n to in e Flouvat la
jouissance
à titre de percière , des objets dont
les baux à pe rcière ont
cessé pe n d a n t sa possession ; desquels obj»ts I s fruits et jouissances , à
com pter de la cessation desdits baux à percière , seront estimés pu rem ent
et s i m p l e m e n t , et suivant la d é d u c tio n ci-dessus.
C om m e aussi ord onn e que lesdits experts estimeront la valeur du prod u it
d'> c hacu n de«lits objets d ’année en a n n é e , et c e , suivant les m e r c u r ia le s ,
minages ou pancartes de c h a c u n e a n n ée, s'il
s'en trouve
po u r chaque
espèce du f r u its, e t , ù défaut d i c t l l e * , suivant la c om m u ne r eno m m ée et
�( 11 )
leurs connoissances p e r s o n n e lle s , dans laquelle
estimation
toutefois de
fruits et jo u is s a n c e s , ne sera , du consonteinen' r esp e ctif des p a r t i e s ,
com pris le prod u it du bosquet ou petit bois Saussay , joign an t le pré M o u to n .
O rdo nn e pareillem en t que lesdits experts e s t im e r o n t, c o m m e dit est , le
p r o d u it ou la valeur de tous les objets ( autres que ceux expressément e x
ceptés par le présent arrêt ) qui leur seront indiqués par l ’ une ou l ’a ulre
des p a r tie s , com m e d ép en da n s des successions d o n t il s’a g i t , et c e , sans
p r é ju d ic e du d ro it de la partie q u i se c ro iro it fo n d ée à em p êch er ladite
e stim a tio n , défenses réservées au con tra ire ;
C o m m e aussi q u ’ils estim eront les loyers q u ’o n t dû prod uire les deux
dernières parties de la m a is o n , eu égard à l ’ état dans lequel elles étoient
a va n t les réparations et reconstru ction s faites p a r feu A n t o i n e F l o u v a t ,
d éd u c tio n faite sur le m ontant desdits loyers , x°. de ceux des cham bres et
logeinens stipulés au profit de M a r ie A stan ière et de C la u d a A u t e r o c h e ,
aux termes des contrats de m ariage des i 6 février 1722 et i 5 octobre 1 7 4 a ,
po u r le temps qu’elles en ont joui ou dû j o u i r ; 20. de ceux de la m oitié de
la secon d e partie d é c rit e au procès verbal du prem ier o c to b r e 1667.
R e la tiv em en t aux dem andes des héritiers F l o u v a t , afin d 'in d em n ité des
r ép a ra tion s, n ouvelles a c q u i s i t i o n s , im penses et r econ stru ction s par eux
prétendues faites dans lesditcs deux dernières parties de maison , c o n d a m n e
ladite M a r c o n , suivant ses o ffr e s , i°. à pa yer auxdits héritiers F lo u va t la
som m e de 460 l i v . , de laq u elle ils ont d éclaré se c onten ter p o u r une in d e m
nité de la moitié des droits cédés a!feu A n to in e F l o u v a t , dans la seconde
partie de lad ite m a is o n , par Jean-Baptiste T i x i e r et Jeanne M o u r n a t , son
épouse ; a0, à leur p ayer le m on ta n t des réparations utiles et nécessaires
faites par led it A n to in e F l o u v a t ; à l ’effet de quoi ord onn e que par les
e x p e r t s , et dans le m êm e procès verbal d ’estimation des f r u i t s , revenus
et jo u issa n c es, estimation sera faite desdites rép a ra tion s, r e c o n s t r u c tio n s ,
impenses et am éliorations utiles et nécessaires.
S u r les demandes de la dame M a r c o n , afin d in d em nité des aliénations
faites p a r An toin e F lo u v a t , d ’aucuns des biens de la succession de Jean
A s t a n i è r e , d éc la r e ladite M a r c o n non recevable dans sa d em a n d e en in
d em n ité de la valeur et des jouissances des im m eubles donnés par led it
F lo u va t à M a r ie A sta n iè r e , par la transaction du
23 septembre
1744> pour
l ’a cq u it de sa légitime.
Q u a n t aux in d e m n ité s prétendues pour l ’aliénation de la p e tite inuison
de S a u v a g n a c , v e n d u e à rente au n o m m é Canassy , et de la vig n e aussi
donnée à rente à un p n rtic u lirr de S au v a gn ac , or d o n n e que par les mêmes
expert» il sera p ro c éd é à la visite, to is é, mesure et e stim a tio n , tant de
l a d ite maison que de ladite v i g n e , eu égard à le u r va leu r a c t u e l le , dé-
B a
�( 12 )
duction faite toutefois des im p e n se s, augmentations et am élioration1: qui
seroient du fait des preneurs à r e n t e , ensemble à l ’estimation des lovais et
jouissances depuis le
3
septembre 1743 jusques et c o m p ris 1779 ; et, dans le
cas où le m on tant de l'estim ation excéderoit le p r in c ip a l des rentes m o y e n
n ant lesquelles lesdites maison et vig n e o n t été a liénées, c o n d a m n e dés à
présent les héritiers F lo u v a t à pa yer l ’excédent à ladite M a rco n .
A l’égard des im m eubles qui ont pu être c o n c é d é s à aucuns p a r tic u lie r s ,
soit par ledit An toin e F l o u v a t , soit par sa ve u ve ou ses h éritiers, à titre
de pe rciére , d on ne acte auxd its ve u v e et héritiers F lo u v a t , de leurs
offres de ren d r e sans e f f e t , dans le déla i d ’un an à c o m p te r de la date du
présent a r r ê t , tous les baux à perciére qui ont pu être consentis par led it
feu A n to in e F lo u va t ou par eu x , sans au cun e garantie toutefois du fuit
des tenanciers q ui se préten d roien t en droit d ’en jouir audit titre de perc i è r e , i n d é p e n d a m m e n t desdits nouveaux baux à p e r c i é r e , et en vertu de
titres en possession antérieure à iceux.
S u r les autres dem andes respectives des parties , afin d ’estimation des
dég ra d atio ns ou améliorations prétendues fuites aux terres, vignes et p r é s,
les met hors de cour.
D e toutes lesquelles estimations de jou issa nces, répa ra tion s, r ec o n stru c
t i o n s , impenses et am éliorations et i n d e m n i t é s , sera, par lesdits e x p e r t s ,
dressé procès verbal sé p a r é , c o m m e d it e s t , lors d u q u e l les parties p o u r
r o n t faire tels dires , réquisitions et observations que bon leur semblera.
P o u rr o n t lesdits experts, à l’effet de toutes les opérations des deux procès
verbaux ci-dessus o r d o n n é s, faire telles autres o p é r a t i o n s prevues ou non
prév u es q u ’ils jugeron t nécessaires ou c o n v e n a b le s, m ê m e , en cas de par
tage e n tr ’e u x ,
c o n v e n ir d ’un tiers expert devant
le juge royal d ’Issoire ,
q u e la c o u r c o m m e t à cet e f f e t , ou en req u é rir la nom ination d ’office;
p o u rro n t aussi consulter , si bon leur semble , les voisins , ouvriers , et
autres a yan t connoissance de l ’ancien état et valeur tant de la maison d ’Is
soire que de la maison et vig n e baillees à r e n t e , meine , com m e renseignemens , les titres et papiers q u i leu r seront remis par les p a r tie s , n o ta m
m en t le procès verbal du p rem ier oc to b re 1667 , celui dressé a la requête
enfin celui du z/t février 1780.
K n ce q u i touche la d em ande en partage d rs su ccessio n s de M ic h e l-
d u d i t A n to in e F l o u v a t , le 22 avril
César et d e M arc * A le x a n d r e A s L an ière. , frères c o m m u n s , form ée par
la d am e M.ircon ,
Donne acte à ladite M a r c o n de ses offres de faire état ou payem ent en
deniers , à la ve u ve F lo u va t , de la valeur à laquelle se trouvera monter la
portion virile de C la u d a A u t e r o c h e , mère c o m m u n e , dans la succession
d u d it M a rc - Alexandre Astnnlèro ; lui donne pareillem en t acte de ce q u e ,
�( i5 )
par leur requête du 4 juin d e r n i e r , lesdits Flou vn l a cc e p te n t Iesdites offres;
en co n s é q u e n c e , c o n d a m n e ladite M a r co n à faire état ou p a y e m e n t en d e
niers , à ladite ve u ve F l o u v a t , de la m o itié de la som m e de
2 deniers , faisant le neuvièm e des
5ooo
555
livres 11 sous
livres de prélegs fait à M icliel-C é sar
Astanière , par J<;an, son p è r e , ensemble de la m oitié du trente-sixième de la
valeur à laquelle les biens d e Jean Astanière se tr ouveront monter , d ’après
l'estimation ci-dessus ordonnée , d é d u c tio n faite des capitaux tant des charges
fon cières que des dettes , ensem ble d u d it prélrgs et autres legs , si a ucun s y
a e n ; auxquels neuvièm e et trente-sixième
A u te ro c h e
le
droit de portion virile de C lau d a
, q u an t à la p r o p r ié t é , dem eure fixé p a r lu présent a r r ê t , sans
pr éju d ice de l ’usufruit de la totalité des portions viriles de ladite C la u d a
A u tero ch e , dans les successions desdits M ic h e l -C ésa r et M a r c - A l e x a n d r e ,
ses enfans , suivant q u 'il est fixé par l ’arrêt du a5 juillet dernier.
C e fa isan t, sur la dem ande en partage desd iteï su c ce ssio n s, met les partiel
hors de cour.
E n ce q u i touche les demandes relatives à la su ccessio n d e C lau d a
stu tero ch e , déboute ladite M a r c o n de sa d em a nd e en n u llité de l ’o r d o n
nance <1(1 juge d 'îs s o ir e , du 29 mai 1 7 7 3 , qui n permis à la veuve F lo u v a t de
prendre la qualité d ’héritière par bénéfice d 'in ventaire de lad ite C l a u d a
Auteroche.
Sans s’arrêter aux autres demandes de ladite M a rcon , afin de p a r ta g e ,
tant des portions viriles recueillies par C la u d a A u t e r o c h e , que de ses gains
de survie , ni à sa dem ande afin de remise de sa p a rt de l ’argenterie p r é
tendue trouvée dans la succession de C la u d a A u t e r o c h e , desquelles d em a n
des elle est déb ou tée, d on ne acte aux Flouvat de la déclaration faite par
ladite M a r c o n , q u 'elle n ’entend point d em ander le c o m p te de tutelle à
elle dû par C la u d a A u te r o c h e ; en conséquence , cond am ne lad ite ve u ve
F l o u v a t , en ladite qualité d ’héritiere b én é ficia ire ,
i ° . A payer à ladite M a r c o n la somme de
3ooo
livres à elle assurée par
ladite Clauda A u t e r o c h e , tant p a r l e contrat de mariage d ’A n t o i n e F l o u v a t ,
que pnr celui de ladite M a r c o n , sous la cond itio n de ne p.is d em a n d e r
ledit co m p te de t u t e l le , avec les intérêts à c om pter du 8 jan vie r 1 7 7 2 ,
date du décès de ladite C la u d a A u t e r o c h e ;
2 e. A d élivrer à ladite M a r c o n la moitié de tous les meubles en nature '
( autres que c e u x d e cure ) , à elle pareillement assurée par lesdits contrats
de m a r ia g e , et c e , suivant les procès verbaux d'apposition de s c e l l é s ,
reconnoissance d ’iceux et inventaire , des 8 jan vier 1772 , fi et iq j u i l
let 177S ;
5°.
A payer en mêm e temps à ladite M a r c o n ln som m e de
35o
livre*,
à laquelle la c o u r arbitre les dommages - intérêts r é s u lta n s , soit du dé-
�C *4 )
faut de jouissance desdits m e u b le s , soit d u
ép ro u v e r .
dépérissem ent q u ’ils ont pu
Sera ladite veuve F lo u v a t tenue de satisfaire aux condam nations ci-dessus,
dans deux m ois p o u r tout d é l a i , à co m p te r de la signification du présent
arrêt à personne ou d o m i c i l e , si m ieux elle n ’aime rend ra son com pte de
bénéfice d'inventaire , ce qu'elle sera tenue de faire dans le m êm e délai de
deux mois , sinon , et à faute de c e faire dans l e d i t d é l a i , et icelui passé ,
en vertu" du présent a r r ê t, et sans q u 'il en soit besoin d'autre , la déclare
d é c h u e d u d i t bénéfice d ’i n v e n t a i r e , et la répute d é b itric e pure et sim ple
d e ladite M a r co n .
L e tout sans p r é ju d ic e et sous la réserve des droits et prétentions des
héritiers F l o u v a t , c o n tre la succession de ladite C lau d a A u t e r o c h e , d é
fenses réservées au contraire.
E n ce q u i lou che l.i deirtande île ladite ATarcon , afin de jo u issa n ce pa r
m o itié , en la présente année , tle tous le s fr u its e t revenus des biens
d o n t il s ' a g i t , ensemble afin d ’ind em nité de la p riva tion q u ’elle a essuyée
d ’a ucuns
d iceu x
en 1 7 8 0 ,
nonobstan t
l ’arrêt
prov isoire
du
8 juillet
de la m êm e an n ée, ordonne que le d it arrêt sera exécuté pour la présente
ann ée
com m e
i l d ev oit l ’être po u r
1780; en c o n s é q u e n c e , que
ladite
M a r co n jouira de tous les biens des successions d on t i l s’a g it, par égale
po rtio n avec la veu ve F lo u v a t , à la charge par elle , su ivant ses offres ,
i ° . de faire état ou payem en t à la ve u ve F lo u v a t pour les années 1780
et
1 7 8 1 , d es
intérêts de
la som m e
à laquelle
se
trouvera
m on ter,
q u an t à la p r o p r i é t é , d'après les estimations ci-dessus ordonnées , la por
tio n v ir ile de Clpu d a A u t e r o c h e , dans la succession de M a r c - A le x a n d r e ,
son fils, appartenante à ladite ve u ve F l o u v a t , en sadite qualité d'h éritière
b én é firi lire ;
20, D e c on trib u er pour m o itié au payem en t des c e n s , ta ille s , v i n g
t i è m e s , frais d ’exp loitation, rentes et autres charges desdites su c c e ssio n s,
m êm e de p a v e r , à la Sain t-M artin p r o c h a i n e , aux héritiers F l o u v a t , la
som m e de 218 livres po ur intérêts des 4000 livres, d ’ une pr.rt, et 725 liv.
d 'a u t r e , allouée par l ’arrct du
25
juillet dernier, plus celle de 18 livres
répétée par les F lo u v a t p a r leur requête du
juillet d e r n ie r ; lesquelles
som m es néanmoins ladite M a r c o n demeure autorisée à retenir entre ses
m a in s , sur et en déd uction du montant des sommes par elle répétées à
titre de non jouissance pe n d a n t l'année d er n iè re, de tout ou partie d ’au
cuns des objets detdites successions ; à l'effet de quoi ord on n e que par
les mûmes experts qui procéd eron t aux opérations c i-d e v a n t ordonnées ,
la moiti» revenante à ladite M a r co n
dans les loyers de la deuxième et
Uoisiéine portion de la maison sur la place d ’Issoire , pour les années 1780
�( J5 )
et 17S1 , sera estim ée , eu égard à l ’état dans lequel étoien t lesdites p a r
ties de maison avant les réparations et r econ stru ction s faites par A n t o i n e
F lo u v a t , et d é d u c tio n faite seulement des loyers de la m oitié de lad ite
d eu x ièm e partie ; desquels loyers , ensemble du m o n ta n t d u prod u it de*
autres objets dont ladite M a r c o n n 'a pas eu la jouissance , elle pourra
im p u te r et d éd u ire la som m e sur le total de celles allouées p a r ledit arrêt
du ï.5 juillet dernier.
S u r le surplus des demandes , fins et conclusions d tsd ite s parties , les
met hors de cour.
>
C o n d a m n e les F l o u v a t , pour tous dom m ages et in t é r ê ts , aux trois quarts
des é p ic e s , v a c a t io n s , et co û t de l ’arrêt du 6 septembre 1 7 7 9 , q u i a dû être
a v a n c é par A n to in e F lou vat et sa fem m e ; c ond a m ne la dam e M a r c o n à
l ’autre quart des dépens réservés par les p r é c é d e n s arrêts; p l u s , à supporter
ou rem bourser le quart des épices , vacations , et c oû t d u d it arrêt du 6 sep
tem bre 1779 , tous les dépens relatifs
à la
nouvelle estimation réservés : c o n
d am n e la ve u v e F lo u v a t en une m oitié des autres dépens faits depuis l ’arrêt
du 6 septembre 1 7 7 g , autres q u e ceux de la cause jugée par l’arrêt d u
25 juillet d er n ie r , de laquelle m oitié ladite ve u v e F lo u va t pourra e m p lo y e r
un sixième en frais de bénéfice d ’inventaire : c o nd a m ne les héritiers F lo u v a t
en un sixième' desdits dépens, les deux autres sixièmes compensés, que la dam e
ve u ve F lo u v a t et la fem m e M a r c o n em p loiron t r esp e ctiv em e n t en frais de
partage.
E t sera le r.oùt du présent arrêt supporté po u r deux cinq uièm es par la
dame veuve F l o u v a t , qui pourra en e m p lo ye r un sixième en frais de b én é
fice d ’i n v e n ta ir e ; po ur un a u tre cin q u ièm e par les héritiers F lo u v a t ; un
c in q u ièm e dem eurant com pensé entre l a d ite veuve F lou vat et ladite M a r c o n ;
et l'autre c in q u iè m e réservé pour être répété en définitif,
11 esl aisé de voir, par plusieurs dfis dispositions de cet arrêt,
que le parlement étoit lassé de statuer sans cesse sur les mêmes
difficultés ; il donnoit tout pouvoir aux experts ; il régloit des in
demnités d ’office: et il y avoil lieu de croire qu'enfia il n’y auroit
plus de procès.
Mais les sieurs Flouvat éioicnt assez malheureux pour qu’il n ’en
fût pas ainsi. Les experts nommés pour l’amendement requis
par la dame M arcon, employèrent un rapport de neuf cent vingt
�( i6 )
pages à être divisés d’opinion ; un tiers expert estima la succession
à 27905 liv. 5 sous, et fixa les jouissances.
«
Les héritiers Flouvat purent enfin s’exécuter ; et ils prouvent,
par ce qui se passa alors, combien ils éloient jaloux de terminer
avec la veuve Marcon par tous les sacrifices possibles.
i°. L ’arrêt lui adjugeoit, dans la succession de l’aïeule, une
somme de 3408 livres; ils lui délaissèrent des fonds pour cette
somme.
20. L ’arrêt lui adjugeoit 85 liv. i 5 s. pour le mobilier de ladite
succession, estimé; plus, la moitié de celui qu'Antoine Flouvat
reconnut avoir en sa possession ( d ’après une transaction de 1756).
Les héritiers Flouvat le fixèrent eux-mêmes à i 5 o livres, lors du
premier rapport d’experts : ce qui eut lieu sans réclamation.
5°. Par traité du 12 novembre 1783 , ils délaissèrent des im
meubles à la veuve Marcon pour la payer de tout ce qui lui étoit
dû dans la succession maternelle, c’est-à-dire , de 3ooo liv. pour
sa d o t, de 1714
Pour intérêts, de 35o liv. pour dommages-
intérêls arbitrés d ’office, et pour la somme de 55o liv. pour un
quart des frais du premier rapport.
Et comme les immeubles cedes excedoient lesdites sommes de
celle de 1400 livres, il fut dit que cette somme de i/,oo livres
resteroit entre les mains de la veuve Marcon ; pour être ensuite
imputée : elle en est débitrice.
4°. Par autre traité du i y décembre 1784, la maison d ’Issoire
fut licitée entre les parties à iôfioo livres; la femme Marcon la
retint pour cette somme, et il fut réglé qu’il ne lui en revenoit
que pour 25oo liv. ( à cause des réparations et augmentations
faites par le sieur Flouvat. )
Sur le surplus, elle paya 600 liv. aux sieurs Flouvat; elle retint
eu
�( *7 )
en scs mains la somme de i 25oo liv. pour en faire le rapport. Sur
quoi elle s’obligea d’acquitter ce qui restoit dû au sieur T ix i e r ,
vendeur ( environ 800 li v .) ; et il fut ajouté qu’elle feroit compte
de Vintérêt du surplus au taux de la lo i , sans retenue.
A i n s i , la voilà débitrice de 1400 liv. depuis 1783 , et d’environ
11700 liv. depuis 178 4, avec l’intérêt au denier vingt.
D e leur p a rt, les sieurs Flouval dévoient la restitution des jouis
sances de la moitié des biens de Jean Astanière depuis 174^; mais
tout prouvoit que les charges les reduisoient à r ie n , puisque leur
père avoit donné tous les biens à jouir à sa belle-mère pour ses
reprises: fait dont la dame Marcon se fait elle-même un moyen.
T elle étoit la position des parties, lorsque le 18 mai 1785 la
dame Marcon assigna les sieurs Flouvat pour exécuter les arrêts,
et voir homologuer les rapports.
Alors les sieurs Flouvat présentèrent leur compte le 1". février
1786.
Ils divisèrent chaque année en deux chapitres ; le premier se
composoit, i°. des sommes payées à la dame Marcon , avec l’in
térêt , 20. des reprises de la mère ( représentée par eux suivant les
arrêts ) , 3e. des charges annuelles et rentes ; et le deuxième cha
pitre se composoit de la moitié des jouissances ducs à la dame
Marcon , suivant le l'apport.
Par ce com pte, les héritiers Flouvat s’établirent créanciers de
3 i 52 liv. en 1780, époque où la dame Marcon s’étoil mise en pos
session; à cela, ajoutant les provisions payées, et autres sommes
ne portant pas intérêt, plus, les ia5o liv. prix du retour de lot
de la maison, et enfin les intérêts du tout jusqu’à la fin de 1785;
il en résulta que la dame Marcon étoit débitrice de 17985 liv.
liientôt les sieurs Flouvat s’aperçurent qu'ils avoient omis dans
G
�( i8 )
ce compte quelques articles, et notamment la somme de 1400 liv.
portée en l’acte de 1783, comme restée dans les mains de la dame
Marcon : ils rectifièrent cette erreur par des conclusions.
L a dame Marcon signifia, le 17 décembre 1786, des débats à
ce compte, ou plutôt elle en présenta un nouveau, où elle se
reconnut débitrice, en compte final, de462g liv., déduction faite
des 4000 livres et des i 5ooo livres; laquelle somme de 462g livres
elle prétendit devoir rester en ses mains pour sûreté des frais par
elle faits , offrant de payer Vintérét de ladite somme de 4G29 liv.
suivant l’acte de 1784.
Comm e par ce débat la damer IVIarcon avoit fait apercevoir
quelques défauts de calcul au compte des sieurs Flouvat, ceux-ci
les rectifierent par une écriture du 6 avril 178g. Ce n ’est qu’après
celte dernière rectification que le compte fut affirmé par-devant
M . Ferrand , conseiller, le 2 juillet 178 g: après ce la , la dame
Marcon fit encore signifier de très-longs débats le 17 décembre 1790.
T e l fut le dernier état au parlement, supprimé peu de jours après.
On fait grâce à la cour du détail fastidieux d ’une foule de pro
cédures frustratoires et occultes , qui furent laites sous le nom de
la dame Marcon , au sujet du même compte. O11 avoit fait inter
venir sa fille, comme curatrice du sieur Marcon; c’est à e lle q u ’on
rendoit un compte : on y faisoit paroitre plusieurs prétendus créan
ciers, et le procureur lui-même y intervenoit sous son nom. On
faisoit trouver les sieurs Flouvat débiteurs de 57000 liv.; et on surprenoit des arrêts par défaut , auxquels , faute d ’en recevoir copie,
il n'y avoit pas eu d ’opposition. Enfin le scandale de cette procé
dure appela l’attention: un arrêt du 5o août 1786, la déclara toute
entière nulle et frustratoire, et condamna le procureur (le sieur
Golct de lilacy) aux dépens en son nom personnel.
�( *9 )
L e procès fut repris à R io m , comme tribunal choisi par les
exclusions respectives, en 1792. 11 n ’y fut rien statué; mais ce qui
s’y passa est important pour la cause.
L e 1 3 prairial an 4 , les fils Marcon, agissant pour leur mère, signi
fièrent aux héritiers F lo u vat, que le jugement du procès en reddition
de compte étoil peut-être fort éloigné, parce que le tribunal civil étoit
encombré d’affaires ( et sans doute que les assignats approchoient
de leur fin); qu’ils avoient intérêt de se libérer de trois objets indépendans du compte; en conséquence, ils firent des offres, à porte
feuille ouvert et papiers déployés ( ce sont leurs expressions), de
*999® ^v* > pour le prix resté en leurs mains des deux actes de
1783 et 1784, et pour la virile due à Clauda Auteroche, dans les
successions de scs enfans ; ils augmentèrent ces offres par autre
exploit du i 5 , et les portèrent à 21000 liv.
Ces offres ont été déclarées nulles, par jugement du a5 prairial
an 7 , attendu qu’elles dépendoient d ’un compte non réglé. Il n’y
a pas eu d’appel de ce jugement.
Enfin, le procès a été repris en la c o u r , où la dame Marcon a
fait signifier le mémoire auquel on répond.
•
m o y e n
s.
L a dame Marcon s’obstine à 11c vouloir pas suivre les formes
reçues. L ’ordonnance de 1667 dit que l’oyant compte donnera ses
blâmes et débats dans la huitaine; et c’est un compte nouveau
qu’elle a voulu présenter. Mais où en seroit-on , et comment pourroit-on s’entendre, si le comptable étoit obligé de débattre 1111
second compte? et quelle raison y auroit-il pour qu’il n’en donnât
pas aussi un troisième, sous prétexte de corriger le second? II fauC a
�( 20 )
droit bien aussi le présenter avec ses apostilles et ses preuves j et
malheur à la patience même la plus exercée, si les héritiers Flouvat
eussent voulu rectifier le second ou plutôt le troisième compte de
la dame Marcon par un quatrième compte!
L a course passera certainement de cette surcharge de chiffres;
il est même difficile de ne pas lasser son attention , par ce qui
reste à lui dire. Mais au m oins, puisqu’un soutènement décompté
est chose nécessaire, les sieurs Flouvat en abuseront le moins pos
sible, et se contenteront de prendre pour exemple la première
année 1743 , c’esl-à-dire, les quatre mois comptés de l’année 17^3 ;
de là ils parcourront
quelques
articles
d ’années
subséquentes.
Il faudroit peut-être répondre auparavant à un calcul prélimi
naire que fait la veuve M arco n, aux pages 4 et 5 de son mémoire.
Mais la plupart de ces articles sont des objets étrangers aux arrêts,
et déjà proscrits par les hors de cour : tout cela d ’ailleurs exigeroit
des développemens nouveaux; e t , dans une cause aussi compli
quée, ce seroit brouiller les idées de la cour, et s’embarrasser soim êm e, que de s’éloigner de l’objet positif du procès.
II s’agit d ’un compte de jouissances , dû à la veuve Marcon, qui
doit, de son côté, des créances réglées, et des charges. Ce compte
a été présenté, il ne s’agit donc que d ’examiner en quoi on le
dit défectueux.
§. 1". D e 1745. ( Page 8 du mémoire. )
L ’article premier est un capital de 5oo liv. pour un terme de
la dot reçue par la dame Marcon ; elle l’alloue. L ’article 2 étoit
de 7 liv. 10 sous pour les intérêts de cette dot en 174^. L a dame
M arcon, par sa requête de 178 6, allouoit 7 liv. 7 sous 9 den. ;
�( 31 )
par sa requête de 1790, elle allouoit seulement 29 sous ; et enfin,
par son mémoire , elle n’alloue rien du tout.
Cette négation parolt d’abord peu conséquente ; mais elle s’é
tend ensuite à toutes les années du compte ; et par ce
m oyen ,
la dame Marcon se dispense de payer pendant quarante ans l’in
térêt des 4000 livres qu’elle a reçues, malgré l ’arrêt de 1779.
Son moyen (qui se trouve page 10) est de dire que le capital
est éteint par la compensation de sommes antérieures au 3 septem
bre 1743, et ne peut porter intérêt.
Quelles sont ces sommes? Elle n’en dit rien. Quelles peuvent*
elles être? Aucunes, sans contredit; car les héritiers Flouvat ne
doivent rien d’antérieur.
Ils ne doivent que du mobilier de la succession de l ’aïeule : le
total étoit de 86 liv. par l’arrêt, à quoi ajoutant j 5 l i v ., suivant
le rapport des sieurs Petit et R o b e rt, on sera toujours bien loin
de compenser 5 oo liv., et à plus forte raison, dans les années
suivantes, sera-t-on éloigné de 4000 hv.
D ’ailleurs , de quel droit la dame Marcon raye-t-elle un article
autorisé? L ’arrêt du 21 juillet 1779 la condamne à faire compte
de la somme de 4000 liv. ; savoir, 5oo liv ., etc. avec intérêt à
compter de chaque payement.
Les articles 3 , 4 , 5 , 6 ont pou de différence entre le compte
Flouvat et la correction. Cette différence sera aisément rectifiée
lors de l’apurement; et
quoique
les héritiers Flouvat croient avoir
raison , il est inutile d ’en occuper la cour.
L ’article 7 , relatif au sixième revenant en usufruit a la m è re ,
est rayé par la dame M arcon; et son m otif ( page 10 ) est de
renvoyer 5 un tableau par elle rédigé, pour montrer qu’il n ’y a
rien de reste dans la succession après les charges payées, et qu’ainsi
le sixième se réduit à rien.
�( 23 )
Il y a p lu s, car nous verrons ci-après , dans le
I I , que la
darne Marcon fait supporter à sa mère le prétendu déficit qu’elle
dit avoir observé.
Cet article est encore très-important ; car il se répète à toutes
les années suivantes; et il en résulte que pendant vingt-neuf ans
( jusqu’en 1772 ) les Flouvat n ’auroient rien à prendre pour le
sixièm e des jouissances dû à leur mère : cela n’est exact que pour
très-peu d’années , et les héritiers Flouvat n ’ont pas attendu le
tableau auquel la dame Marcon les renvoie, pour diminuer, ou
rayer même les années absorbées par les charges.
Far leur
requête de
178g,
ils o n t réduit l ’article
7,
de
1743 , à
3g so u s, et ont indiqué les autres années pendant lesquelles il y
avoit des déductions à faire.
Mais la loi doit être égale, et les héritiers Flouvat prennent acte
du tableau lui-m êm e, pour en induire que la moitié de ces mêmes
jouissances due à la dame Marcon doit aussi être réduite à rien.
C e n ’est cependant pas là le calcul de la dame Marcon ; elle
raye les articles du sixièm e, et conserve ceux de moitié.
Ne nous étonnons donc plus qu’avec de tels élémens, en ôtant
tous les ans d ’une part, et augmentant de l’autre , il y ait au bout
de quarante ans une si grande différence entre les deux comptes.
Il faut rétablir l’article 7 comme les sieurs Flouvat l’avoient
réduit eux-mêmes en 178«), et il est juste de partir de celte base
pour les années suivantes, jusqu’il 1772. Les héritiers Flouvat con
viennent encore que le*kixième des jouissances revenant à la mère,
et devant être prélevé avant partage, doit n ’être compté qu’en
dernier article, c’est-à-dire, après le dégrèvement des charges.
Les articles 8 et 9 ne sont diminués que de peu de chose : c’est
encore un objet de calcul lors de l ’apurement.
�( ^
)
L ’article 10 consiste en 277 liv. i 5 s. pour le neuvième en pro
priété du prélegs de 5ooo liv. adjugé par l’arrêt du 1". août 1781.
L a dame Marcon ne rejette pas indéfiniment cette somm e; mais
il lui plaît de la transporter à l'année 1772 , comme elle le dit à
la page 10.
Ses motifs seroient assez curieux , s’ils n ’éloient contradictoires
avec ceux qu’elle emploie dans son tableau relatif à la radiation
de l’article 7. Si cela étoit p ayé, dit-elle, en 1743, la mère n ’auroit plus dû réclamer les intérêts; et il vaut mieux lui payer la
somme au moment de sa m o r t , parce qu’elle a besoin jusque-là
de son revenu.
D ’après cela, on -va croire que la dame Marcon portera tous
les ans l’intérêt de cette somme à sa mère pour la dédommager :
point du tout.
On croira au moins que, dans le tableau en question, elle lui
en fait compte, avant de la grever d ’un sixième du prétendu
déficit. Au contraire; car elle porte la moitié du prélegs en dé
duction , quoique la mère ne le prenne p a s, et il résulte du tableau
que la mère n ’a rien dans les jouissances à cause du prélegs qui
aide à les éteindre. Il résulte aussi des pages 8 et 10, qu elle n ’a
rien dans le capital de ce prélegs, à cause qu’il faut lui conserver
ses revenus.
Il
11e reste plus qu’à savoir à quelle page on lui accorde ces
revenus; mais la dame Marcon 11’en a accordé nulle part. Cepen
d a n t, dans son acte d’offres de l’an 4 , elle comptoit Gooo livres
d ’intérêts, et par conséquent elle y comprenoit ceux du prélegs
de sa mère, puisqu’il faisoit partie des trois capitaux offerts.
A u reste, comme la veuve Marcon n’est pas libre de transposer
des sommes qu'un arrêt ne transpose pas , les héritiers Flouvat
�(=4)
demandent qu’elles soient laissées à l’année où ils les ont placées,
parce que jamais on n’a vu attendre le décès d’un créancier pour le
payer.
Ils remercient la dame Marcon d ’avoir bien voulu veiller à leurs
intérêts, en disant qu’elle opéroit ainsi pour ne pas priver la mère
de ses revenus. M a is, s’ils se sont fait tort, ils s’en consoleront;
et ce n ’étoit pas la peine de refondre tout un compte pour faire
semblant de ne pas les priver d ’un intérêt qu’ils ne veulent pas.
L ’art, i i est encore renvoyé à 1779» par un semblable effet de
la complaisance de la dame Marcon. Les sieurs Flouvat n’en persis
tent pas moins à demander que la somme reste à l ’année 1742 , au
risque d’être privés des intérêts à courir.
L ’art. 12 est rejeté tout à fait par la dame M arcon; et ses
moyens ( page 10 ) sont, sur ce point, beaucoup plus étendus.
C ’est qu’aussi sa tâche étoit pénible , car il ne s’agissoit de rien
moins que de lutter contre l’arrêt du i*\ août 1781.
En e f f e t , cet arrêt dit textuellement que la dame Marcon fera
compte au sieur Flouvat de 450 livres pour indemnité à lui due
sur partie de la maison.
L a dame Mqrcon ne se le dissimule pas ; mais elle prétend
prouver que c ’est une injustice, parce que l’arret supposoit un par
tage et non une licitation.
Précisément l’arrêt prévoyoit aussi une licitation. Il fixa une
gomme d ’office pour empêcher de nouvelles contestations ; et on
croit possible de faire tomber cette fixation.
Par q u o i, au reste, est-il prouvé que la moitié de la maison, qui
revenoit dans l’origine à la dame Marcon , ait eu pour moins de
45o livres de réparations? L a dame Marcon veut-elle encore une
expertise ? Mais elle tranche la difficulté en n’allouant aucune
somme
�( ^5 )
somme. Elle veut en revenir à une transaction de 1667 , et à une
explication qui tendroit ù rejuger partie du procès. Elle convient
cependant que la difficulté étoit née lors de l’expertise et du traité
de 1784 ; m a is , dit-elle, on ne pensa pas alors à ces 45 o livres.
On pensa à tout, mais personne ne s’avisa de meltre en question si
l ’arrêt de 1781 seroit réformé lorsqu’il adjngeoit ces 45 o livres , en
mitme temps qu’il ordonnoit partage ou licitation. Les héritiers
Flouvat persistent donc à demander ces 45o livres, et les intérêts
dont ils ont iormé demande additionnelle par leur requête de 178g.
L ’art. i 3 consiste en une somme de 27g livres 5 so u s, pour les
dettes payées par Antoine Flouvat. L a dame Marcon, dans sa requête
de 1786, allouoitcet article, à la charge de produire les quittances;
aujourd’hui elle le réduit à 11 livres 18 sous , et se permet de ren
voyer le surplus à d ’autres années.
C ’est ainsi q u e , sans raison et avec le plus léger prétexte, elle
dénature un compte tout entier, et nécessite, à pure perte, des
frais plus considérables cent fois que la différence qui peut exister
entre l’intérêt d’une foible somme divisée en trois années , et l’in
térêt de la même somme porté tout à la fois.
A u reste, et ce n ’est pas seulement une inutile tracasserie qu’il
y a à reprocher là-dessus à la veuve Marcon , l’ arrêt du 25 juillet
1781 est impératif; il a ordonné qu’elle tiendrait compte de 27g 1.
5 sous sans intérêts, et par simple compensation avec les jouissances.
L a loi ne doit donc pas être dure pour le débiteur seul, qui s’est
libéré en payant la detlc du créancier. L ’arrêt n ’a rien distingué sur
cette somme; et cependant, quant aux4«oo livres, il a distingué les
époques de payeinens : il a donc fallu distinguer quand l’arrêt le
vo u lo it, et ne pas distinguer quand il ne le disait pas. Les héritiers
Flouvat ont en effet divisé la somme de 4000 livres à ses diverses
D
�(
)
époques; et quant aux 279 liv. 5 sous, ils les ont portés à la pre
mière année , ce qui est absolument sans conséquence, puisqu’ils
ne les portent que pour déduire et non pour produire intérêt. Cet
article doit donc être maintenu.
Quant à l’article i 4 > relatif aux impositions à déduire, les sieurs
Flouvat les portoient au hasard à 120 livres par an ( ce qui étoit
très-peu pour une succession de 27900 livres d ’immeubles ) , parce
qu’il leur avoit été impossible de trouver les rôles.
L a dame M a r c o n prétendit avoir élé plus heureuse , et dit qu’elle
avoit un étal général. Il
se p o r l o i t , d i s o i t - e l l e ,
à 101
livres
4 sous
pour 1743 ; e t , par une différence assez inconcevable, l’imposition
n ’éloit que de 27 livres en 1749 , quoique les biens fussent les
mêmes.
Aujourd’hui la dame Marcon fixe les quatre mois de 174$ à
10 livres, et l’année 1749 a 5 francs 77 centimes( pages 8 et 17 ) ;
et pour prouver combien tout cela est intelligible, elle dit ( page 11 )
qu’on trouvera dans trois tableaux tous les renseignemens néces
saires.
L a première chose, également intelligible dans le premier tableau,
est que la cote des biens Astaniere etoit con fondue avec celle du sieur
l ’a y o t , deuxième mari de Clauda Auteroche, de sorte que la divi
sion h en f.iire a été à la pure volonté de la dame Marcon.
Mais c’est assez s ’occuper d ’un article qui doit encore rester tout
entier soumis au calcul définitil- Si la dame Marcon a des extraits
en règle (les rôles, comprenant toute la cote <1<‘ S biens Astanière,
et qu’il soit possible de la distinguer, pas de difficulté alors h suivre
cette déduction ; sinon il faudra bien s’en tenir à celle fuite par
les sieurs Flouvat, ou la cour la fixera d’office.
�C 27 )
§ . 2. D e 1743. (
9. )
Les héritiers Flouvat n ’avoient d ’abord, dans leur compte, porté
en déduction que la moitié des jouissances au profit de la dame
M arcon; mais, par leur requête de 1786, ils ont reconnu qu’i^
falloit y ajouter le deuxième article relatif aux meubles dont ils
avoient fait omission.
Aujourd’hui la dame Marcon se fait créancière de neuf articles
au lieu de deux.
L e premier article n’est pas contesté; mais il plaît
Marcon de le porter
à i 5i
liv.
18
à
sous au lieu de 137 liv.
C ’est, dit - elle ( page 11 ) , une erreur qui s’est étendue
la dame
10
à
sous:
toutes
les autres années : aussi augmente-t-elle sa créance tous les ans ; et
sa preuve est encore renvoyée
à
un tableau.
Mais un meilleur tableau se trouve dans le rapport lui-même
du tiers expert. En 1743, il a porté les produits à 375
livres
: donc
la moitié étoit iZq liv. 10 sous; ainsi de suite dans les années
précédentes.
O r , la dame Marcon a assigné en homologation de ce rapport en
1785, aussitôt qu’elle fut nantie de 16900 liv. et de deux provisions.
T o u t est donc terminé, et il est inutile de refondre un compte
pour chercher au delà de ce qui est définitif.
L es jouissances doivent donc subsister telles qu’elles sont en
17 4 3 , et à toutes les autres années , saui au commissaire de la cour
à examiner si les sommes portées en compte par les Flouvat sont,
chaque année, la moitié exacte de la somme réglée par l ’expert.
L ’article 2 est relatif au mobilier de l’aïeule j il est fixé par le
troisième arrêt : donc pas de difficulté. Les héritiers Flouvat ont
«voué l’omission.
D 2
�( ’ a» )
De même, pour l’article 5 , ils conviennent qu’il faut déduire
cette autre partie de mobilier ; mais on ne peut diviser leur décla
ration : ils ont offert, nu rapport Petit,
1. pour moitié de i 5o 1.,
et non çp liv. i 5 sous.
Les articles 4 et 5 sont une nouvelle découverte de la dame
M arcon, fondée sur deux transactions de i y 5S et 1744*
Si elle avoit voulu lire celle de i j 5 6 , elle y auroit vu que le
sieur Flouvat s'est chargé seulement de mobilier pour
i 5q
livres,
et que le surplus avoit été vendu au sieur Payot.
Elle y auroit vu que Marie Astanière avoit la majeure partie
du mobilier par elle laissé à titre d’usufruit, et
que
cela concorde
avec l’acte de 17^8, où il n’est parlé d’autre mobilier que de celui
q u ’on lui délaisse dans une chambre garnie.
L a transaction de 175G est la dernière : donc les autres s’y rap
portent. Dira-t-on que si Clawla Auteroche a vendu à son mari
du mobilier de sa belle-mère , la dame Marcon doit le retrouver
dans sa succession à titre de prélèvement , puisque les sieurs
Flouvat en sont héritiers?
Mais précisément l’arrêt de 1781 règle tout ce qui doit appar
tenir à la dame Marcon dans la succession de sa mère : elle y demandoit plusieurs espèces de mobilier ; elle en est déboutée, ainsi
que de tonte réclamation en compte. 11 y a plus, elle est, sur tout
le reste de ladite succession , mise hors de cour.
Si dJnc il y a lieu de débattre le compte de la dame Marcon ,
et de devenir o y a n t, on soutient que les articles 4 et 5 du §. 2
doivent être rayés.
11
en est de même de l'article G , il n ’est fondé sur rien ; et ce
n ’est pas après tant de débats et de difficultés qu’il faut élever
des prétentions nouvelles. Comment la veuve Marcon , payée do
�( 29 )
la succpssion tic son aïeule, a-t-elle pu laisser en arrière le revenu
de la seule année 174^ ?
L ’art. 7 n ’est qu’une transposition de l’art. 3 du §. x". L a dame
Marcon veut déduire les vingtièmes de la pension viagère de sa mère.
Elle y est fondée , dit-elle, par son contrat de mariage : on y
lit que sa mère a une pension payable de trois en trois mois par
avance, mais il n ’est pas dit qu’elle sera sujette à retenue.
A la vérité, le contraire n’est pas exprimé ; mais une pension
est par sa nature une chose alimentaire, et ce n ’est pas une rente .
Dans ses écritures , la dame Marcon se fondoit sur Pédit de
1 749, qui parle des rentes viagères. 11 est curieux de voir appli
quer à des arrérages de 17/^3 , un édit de 1749L'art. 8 se rapporte à l’art. 7 du § . 1 " . , qui étoit relatif au sixième
îles jouissances appartenant à la mère.
Ici la dame Marcon , non contente d ’avoir réduit ces jouissances
à rien , veut que la mère lui paye à elle le déficit de ces jouissances.
Demandons lui à quel titre ; pour toute réponse elle renvoie à
l’ un de ses tableaux.
C e qu’on y voit n ’est autre chose qu’un calcul des charges qui
absorbent les revenus, en y
comprenant
merae la moitié du prélegs
que la mère n’a pas, mais qu’on n en met pas moins sur son compte.
T o u t cela n ’explique pas par quel étrange système la mère, qui
avoit droit au sixième des biens , cl qu on réduit a 11e rien prendre
pendant trente-six ans sur quarante,
est
obligée de fournir au déficit.
Q u’un hérilier paye ultra 'vires , cela se conçoit ; mais qu’une
mère, usufruitière d’un sixième, paye à l’héritière de moitié le déficit
du sixièm e, parce que la succession est épuisée par les charges ,
cela est impossible à comprendre ; et tous les tableaux du inonde
ne peuvent pas en donner la solution.
�( 3o )
E n fin , l’article 9 est aussi une nouvelle découverte de la dame
Marcon. C ’est encore la mère q u i , n ’ayant pas assez de fournir
un sixième à la succession de son m a r i , doit fournir un autre
sixième à la succession d e l’aïeule. La dame Marcon a calculé qu’il y
avoit cinq mois et demi de différence entre l’époque fixée par
l ’arrêt pour le calcul des intérêts ; et le temps où ils doivent com
mencer à cet égard.
Mais , i°. il est trop tard , encore une fois , pour élever de nou
velles prétentions ; 20. ce n’est pas à la mère à rien fournir au profit
de la succession de l’aïeule; 59. les arrêts de 1781 fixent le point
de départ général au 3 septembre 174^ : c’est donc les attaquer
que d'exiger des intérêts au delà.
D e 1744 à 1785.
L a dame Marcon n ’ayant plus jugé à propos de donner de
motifs de sa manière de calculer, et de son habitude de réduire et
rayer presque tous les articles de l’actif des héritiers F lo u v a t, il ne
sera nécessaire que de parcourir quelques-unes des années ci-dessus,
pour y faire quelques observations sur quelques articles, autant
néanmoins qu’on aura pu les comprendre.
i°. À pirtir de 174^, la dame Marcon annonce qu’elle ne
comptera plus d ’intérêt6 des capitaux de sa dot ; e t , en effet, la
cour se convaincra que tous les ans chaque article premier est
par elle rayé du compte Flouvat.
C ’est , dit-elle ( pages 12 et 14 ) , parce que les capitaux sont
absorbés par la compensation qui s’est opérée en 1743.
E t , en signe d ’exactitude, 011 voit en 1 749
C
Pa8c *7 )» fî u,°lle
ne compte pas l'intérêt de 3ooo livres , mais qu’elle le compte des
I
�( 5i )
1000 livras restantes; on voit encore (page 9 ) , qu’elle 11e se dit
créancière qu’en 1771* O r , comment a-t-elle pu compenser, trente
ans auparavant, et tant qu’elle a été débitrice, ces 4000 li\res?
Cependant elle se pcrmetde détruire la disposition de l’arrêt de 1779,
qui la condamne à faire compte des intérêts.
Voilà donc près de quarante ans d ’intérêts de 4 °oo livres à
rétablir.
2". Quelle raison donne la' dame Marcon d’une triple division
qu’elle fait à chaque année ( à son profit ) des excédans, avec ou
sans intérêt ?
Dès 17+6, elle se trouve en discordance de 2000 livres, c’està-dire , elle s’adjuge 2000 livres de plus ; car il faut s’entendre : et
on conçoit sans peine qu’avec un aussi bon commencement, et de
bonnes dispositions à ne pas le laisser péricliter , on doit aller loin.
A i n s i , il ne faut pas s’étonner de la finale de son compte.
Cependant, dans sa note sur 1745 ( page x5 ), elle laisse pei’ccr
quelque chose de son plan sur le calcul des intérêts. Elle a fait
scs imputations, dit-elle, d ’après les principes de l’arrêt du a5
juillet 1781 ; e t , par exemple, elle a éteint des capitaux par com
pensation , notamment l’article 2 , comme la dette la plus dure :
on voit la même explication à la fin de la page 2.
O r , quelle est celte detle la plus dure? C ’est justement un capital
de iooo li v ., auquel on veut bien donner un intérêt pour 1745 ,
quoiqu’il ne soit payé qu’en septembre, mais qui n ’en produit
plus pendant toutes les années subséquentes.
Voilà donc comment on s’est affranchi de cet embarras de payer
les inlérêts du prix d ’une cession, tandis qu’on la fait annuller,
et qu’on se fait rendre compte du revenu des jouissances. T o u t
cela n ’est ni juste, ni légal; mais la dame Marcon n ’en donne
�C 53 )
de raisons que par deux lignes d ’une note, ou par des tableaux de
chiffres, si on les trouve plus aisés à concevoir.
5°. Que signifie, en 17G7 (page 55 ), celte séparation d’un capital
qui ne produira d ’intérêt qu’en 1771 ? Pourquoi seulement en 1771?
Effectivem ent, en 1771 se trouve un grimoire d’excédans de six
espèces , sans la moindre réflexion ; et tout cela se perpétue jusqu’à
la fin , sans le secours encore d ’aucun tableau.
P e u t- ê tr e bien la veuve Marcon aura-t-elle pitié de ce qu’on
renonce à la comprendre; mais il vaut mieux se confesser incapa
b l e , que de raisonner sur ce qu’on n ’entend pas.
4°. L a dame Marcon ( page 49 ) déclare qu’elle a séparé du
compte sa delte de i 5Goo l i v . , quoiqu’elle y ait porté celle de
1400 liv. de l’année précédente.
Elle ne dissimule pas que c ’est une finesse de sa part pour ne pas
payer les dépens qui sont réservés pour être payés par le débiteur.
Elle a même quelque soupçon encore d ’être débitrice, car, à la
page suivante, elle appelle à son secours 629 liv. qu’elle a portées
en compte sur les 1400 livres. L e compte plus régulier des Flouvat
prouve qu’ils éloient créanciers en 1785 : et si la veuve Marcon ne
le croyoit pas elle-même, pourquoi oifroit-elle 21000 liv. en l’an 4?
Les héritiers Flouvat n ’élendront pas plus loin l’examen du mé
moire île la dame Marcon , quoiqu’à plusieurs des dernières années
il y ait bien des choses inintelligibles. Mais des doutes ne sont pas
des moyens; cl les héritiers Flouvat croient en avoir assez dit pour
démontrer que tout le travad de la dame Marcon doit être mis de
côté, et qu’il faut s’en tenir au compte qu’ils ont présenté, sauf
les corrections que la cour jugera convenables.
OBSERVATIO NS
�C 33- )
>
’
, • i»
O B S E R V A T I O N S
-r
G E N E R A L E si
Quoique la dame Marcon cherche à hérisser de difficultés un
procès déjà jugé trois fois, il est un fait certain qui parle plus haut
v >' ■
C ’est qu’elle a dans les mains la presque totalité de la succes
sion paternelle, qui est aujourd’hui la seule chose litigieuse.
que tous ses chiffres. .
.
Cette succession est estimée toute entière 27905 liv. 5 sous^non
compris une partie d e là maison à laquelle elle n ’avoit rien à pré
tendre , puisque c’étoit un acquêt du sieur Flouvat.
(J.
O r , elle a reçu en sus de la succession maternelle , et à imputer
sur la succession paternelle, 1400 liy. d ’une p a rt, et, 16600 livres
d ’autre, à la charge de payer une seule créance, qu’elle fixe ellemême à 8 i 3 livres ; elle a reçu deux provisions de i 5oo livres;
et enfin elle a encore reçu 4000 liv. pour sa d o t, dont elle n ’a
fait compte qu’en chiffres.
E lle a donc environ 22000 liv, en ses m ains, depuis a i ans.
Elle doit au moins l’intérêt de ce qui ne lui appartient pas, puis
qu’elle réclame l’intérêt antérieur de ce qui lui appartient.
C e qu’elle doit, dira-t-elle, doit être compensé. O u i, mais jus
qu’à due concurrence; telle est la convention de 1784*
O r , c ’est elle-même qui a calculé qu’à chaque année , depuis
1785 jusqu’à 177 2 , les jouissances étoient absorbées par les charges
et les reprises de la mère ( dont elle n’est pas héritière). Elle
n ’a donc rien à prendre pour ces jouissances; car si son cohéri
tier les perd , pourquoi ne les perdroit-elle pas ?
A u contraire, tout ce qu’elle a reçu en 17S3 et 1784 lui a été
donné franc et quitte; elle jouit depuis cette époque, de plus du
double de ce qui lui revient.
E
�(34)
Un second fait duquel il est fort aisé aussi de tirer des consé
quence , est l’acte d'offres, qui fut fait en l’an 4» de 21000 livres.
A qui persuadera-t-on que celui qui est créancier, se dise lui-même
débiteur, et offre de son bon gré une somme aussi considérable.
Les assignats sont en cendres; mais l’acte d’offres existe avec tous
*
ses résultats.
:
Voilà ce que Monsieur le rapporteur est supplié de prendre en
principale considération, parce que si on peut fasciner les yeux
avec des pages d ’arithemétique, au'm oins elles in’éteignent pas
l’évidence, et l’évidence préserve de l’étourdissement.
i1,
L ’étourdissement naitroit sans doute de la grande étendue que
la veuve Marcon donne à son com pte, et encore plus du compte
préliminaire qui se Jit aux pages 4 et 5. j
'
!
Car on ne peut douter a la page 4 > que la veuve Marcon veuille
entasser de nouveaux faits par sa différence des valeurs de 1784
et de 1782, par une transaction inconnue d e ri 6 g i , par des viriles
plus inconnues encore, des ventes de mobilier dont on ne parloit
pas avant les arrêts, et tant d’autres innovations.
Mais ‘il ne s’agit pas d ’un nouveau procès.
" Les héritiers Flouvat ont été assignés pour rendre un compte de
jouissances , dont les élémens sont fixés avec détail. Ils l’ont rendu;
V c s t donc lui seul qu’il faut suivre , et rejeter d’autres comptes,
'puisqu’ils ne serviroient qu’à rendre l’opération interminable.
C e ne peut pas être un travail extrêmement pénible, puisque
toutes les sommes sont connues. Les héritiers Flouvat doivent des
jouissances ; ils les doivent après les prélèvemens des reprises de la
mère, après la déduction des charges; ils doivent encore deux
’ articles du mobilier de l’aïeule.
I
’
De sa part, la dame Marcon doit l’intérêt de ce qu'elle a reçu :
�(3 5)
les deux sommes se compenseront en se rencontrant, et ensuite
il courra des intérêts pour celui qui ne devra plus de capitaux.
Déjà on aperçoit un résultat quelconque, même avant d ’arriver
au temps où la dame Marcon a reçu des immeubles ; car les
sieurs Flouvat ne lui devoient pour capitaux que la moitié d ’un
mobilier de 5oo livres , plus le quart de 7 5 livres : de sa p a rt,
la dame Marcon devoit depuis 1743 un capital de 4000 livres;
à l’égard des revenus , l’un des cinq tableaux de la dame Marcon
prouve que le sieur Flouvat n'en avoit perçu aucuns.
A u reste , les arrêts sont là pour tout ramener à la chose jugée,
et dissiper toutes les incertitudes. Les héritiers Flouvat ne pré
tendent pas qu’eux seuls ont raison. En se dépouillant de t o u t ,
sans attendre les ordres de la justice, ils ont prouvé qu’ils savoient
sacrifier à leur repos leurs droits et leur fortune. C e qu’ils désirent
principalement, est de voir la fin d ’un procès qui a été la ruine
de leur maison, et que la dame Marcon a seule aujourd’hui intérêt
d ’éterniser. •
M . C A T H O L , rapporteur.
M*. D E L A P C H I E R , avocat,
Me. F A Y E , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de L an d rio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Flouvat. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
généalogie
experts
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour les héritiers Flouvat contre Jeanne Astanière, veuve Marcon.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1738-Circa An 8
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0317
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Relation
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BCU_Factums_M0719
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Text
PRECIS
EN RÉPONSE,
POUR
L e sieur E S Q U I R O N - L A V I G N A C , propriétaire
à Aurillac , appelant et intim é ;
CONTRE
L e sieur R A G O U X , traiteur , habitant de la même
v ille, intimé et appelant.
P a r acte du 1
d ’A u terive
5 décem bre
vendirent
1 7 7 2 , les sieurs Croizet-
au sieur A lexa n d re - L auren t
�( o
F o r n i e r , prêtre , «ne maison sise en la rue N e u v e
de la ville d’Au'rilIac, com posée de deux corps de
logis séparés par une c o u r , çonfinée par le jardin
des vendeurs*, de b is e , e t c . , m oyennant
5,ooo
mille
livres.
I l est con ven u que l ’acquéreur pourra entrer dans
le jardin
des vendeurs , et se servir de la ruelle ,
large de trois pieds et d e m i, pour réparer sa m a iso n ,
placer des contrevents aux fen êtres, les élever 011
élargir pou rvu q u ’elles soient grillées ; com m e aussi
que le m ur scparant Ladite ruelle d u /a rd ifi, ne pourra
être é levé que de trois pieds et d e m i, sans préjudice
a u x vendeurs de pouvoir y placer des vases de fleurs;
et à la charge q u ’on ne ,pourra y jeter ni ordures,
ni eaux.
L a tnaison F orn iér a été aCqüise)par le sieur R a go u x,
qui en a fait une a u b e r g e , d e v e n u e , grâces à son
t a l e n t , la plus fréquentée d ’Aurillac.
Le
jardin
des sieurs
C roizet a passé ,
a vec la
maison dont il d é p e n d , au sieur Lavignac. L e sol de
ce jardin ,est plus é le v é que les croisées du rez-de«
(
_
f
chaussée de la maison R ago u x ; et précisémeut c ’est
a ce re z -d e -c h a u s s é e , du côté du jardin L a v i g n a c ,
q u e le sieur R a g o u x a placé sa salle à m anger prin
cipale.
C e n ’est pas le bruit de ce voisinage qui in co m m o
dait le plus le 'sieur L a v ig n a c ; m h is/ i.° les fen êtres‘du
p rem ie r;éta ge he*’sont'pàs; bhrréés 5 il’ fd lla it'q u e les
�(3)
dames de sa famille ou de sa société renonçassent à so
p ro m en er dansson jardin, ou q u ’il prît des mesures pour
faire cesser cette véritable com m unauté d'habitation.
A v a it-il le droit de se séparer du sieur R agoux par
un m u r? XI y aurait de la folie à dire absolument non;
et c ’est bien l’avis des premiers juges. M ais, à quelle dis
la n c e et hauteur devait-il faire ce m ur? voilà la difficulté.
L e sieur L avign ac n'usa pas de son droit dans toute
sa latitud e; on lui dit q u ’il pouvait bâtir à six pieds de
distance; il préféra de s’éloigner de sept pieds et d e m i,
pour é viter toute espèce de discussion avec son voisin ;
il laissa m êm e une porte à la ru elle , pour que le sieur
R ago u x pût aller réparer sa maison ^ quand elle en
a u r a i t besoin.
■ Ces précautions n ’ont rien épargné au sieur Lavignac,
et le sieur R a g o u x lui fit fa ir e , le i . er mai 18 0 6, une
sommation de cesser la construction de son m u r , que
le sieur L a vign ac ne pouvait cependant pas disconti
nuer sans de grands frais, puisque ses ouvriers étaient
reten us, et ses m atériaux à pied d ’œuvre.
Alors le procès a co m m e n cé , et le sieur R a g o u x ,
dans une re q u ê te, a manifesté ses prétentions a vec
exagération, et m êm e a vec hum eur. 11 a dit a v o ir ,
par sa vente , la servitude tout à la fois de passage
d ’aspcct et de prospect ; il a prétendu que pour éluder
la prohibition d ’élever le m ur alors exista n t, le sieur
L avign ac y en a substitué un nouveau, construit im m é
diatement après, et en quelque sorte plaqué contre te
pi entier; que déjà il dépasse de plus de douze pieds.
�(4)
Il assuré que ce m ur le prive de l ’a ir , de la clarté, et
de toute espèce de salubrité ; et là-dessus il reproche
au sieur L a vigu a c de traiter les lois et les conventions
comme les fr ê le s tissus de l ’araignée im puissante.
L e s juges d’Aurillac ont voulu savoir jusqu'à quel
point cet exposé du sieur R a g o u x était sincère; e t ,
le 9 août 1806, ils ont ordonné que des experts v é
rifieraient l ’état des lieu x; e t , après avoir dem andé
toutes les dimensions de la ruelle et des m u rs , ils
ont chargé les experts d’aller sur les lie u x , à quatre
heures après-m idi, et là de vérifier s i , malgré l’é lé v a
tion du nouveau m u r, les rayons du soleil peuvent
aboutir aux fenêtres du rez-de-chaussée de la maison.
R agou x ; dans quelle proportion, si le nouveau m ur
intercepte le jo u r des apparteniens d u re% de chaussée;
quel degré d ’obscurité il leur donne relativement à
Cusage auquel ils sont destinés ; à quelle hauteur du
m u r les apparteniens doivent recevoir le jour néces
saire. “
L e rapport des experts n'a pas confirmé ce qu'avait
dit le sieur L avign ac. Ils rem arquent qu’au lieu de la
distance ancienne de trois pieds et d em i, il y avait
sept pieds cinq pouces entre la maison R agou x et le
n o u ve au mur.
L e nouveau m u r, à partir du niveau ou accoudoir
des fen êtres, a n e u f pieds quatre pouces de hauteur
du côté du jardin, et dix pieds quatre pouces du côté
de la r u e lle , dont le sol est plus bas.
Et à partir du niveau de la ru elle, il 0, d ’un cô té,
�(5)
treize pieds, et de l ’autre douze pieds cinq pouces,
excède l ’ancien m ur de 9 pieds 9 pouces et demi.
L e s experts disent que Télé val ion actuelle du m ur
n ’em pêche pas les rayons du soleil d’aboutir aux fenê
tres du rez-de-chaussée. A deux heures et d e m ie , il a
com m encé à éclairer la façade de la maison en totalité,
à l’exceplion de la prem ière croisée de la cuisine.
A trois h eures, le soleil a pénétré ensuite dans le rezde-chaussée, par un rayon oblique de sept centimètres.
Cette lum ière intérieure a duré un q u a r t - d ’heure.
(iV. B. L a façade est au nord).
>
A quatre heures, les experts o n t,vu que les appartem ens du rez-de-chaussée recevaient le jo u r suffisan t
pour L'usage auquel ils sont destinés.
L e s experts pensent que le sieur L a v ig n a c a pu
élever davantage son mur que le premier, puisqu’il Ta
fait plus é lo ig n é ; mais ils s’abstiennent de décider
jusqu’à quelle hauteur il l ’a pu.
E n fin , com m e la prem ière visite avait été suivie d’une
médiation que rompit le sieur R a g o u x , les experts o nt (
voulu savoir quelle serait l ’obscurité de son r e z - d e chaussée dans l ’arrière-saison. E n co n s é q u e n c e , ils y
sont allés par trois fois et par un tems sombre et
n éb u leu x, les 10 septembre , 2 n o v e m b re et 9 d é
cem bre , tantôt une h eure après le lever du soleil,
tantôt une heure après son coucher. L à ayant pris
chaque fois un livre d’ un caractère assez m e n u , ils ont
lu à une certaine distance des fenêtres.
;
E n s o m m e } les experts disent bien que le m u r a
�(6)
donné de l ’obscurité au rez-de-chaussée de la maison
R a g o u x , mais qu'il entre asse% de lumière dans les
pièces de ce re%-de chaussée pour l ’usage auquel elles
sont destinées.
r
C ette relation des experts n’a pas satisfait le sieur
l l a g o u x , qui a sollicité les premiers juges de voir le
local eux-m êm es ; et on pense aisément que , dans
cette visite, il a dû exagérer le détriment q u ’il prétend
souffrir.
>
Q uoiqu’il en s o it, après cette descente non ordonnée
en jugem ent , le tribunal d’ Aurillac a condam né Ib
sieur L a vigu a c à réduire la hauteur de son mur à
neuf pieds.
-
I-es motifs de cette décision^ au nom bre de douze)
se réduisent à dire que le vendeur de 177 2 ne s’était
I;
*i! .
'*
i 'î
* ■
pas interdit la faculté de faire un mur de séparation
su r-to u t'en s’éloignant; mais q u ’il n’avait pas dû obs
curcir les appartemens d’une m anière nuisible.
:
L e sieur L avign ac a interjeté appel de ce jugem ent
3
en ce q u ’il l’oblige à dém olir une partie de son mur.
L e sieur R agoux en a aussi interjeté a p p e l, en ce
q u ’il ne condam ne pas le sieur L a vign ac à le déinolir tout entier.
M O Y E N S .
j
)
T o u t le système du sieur R agoux repose sur ce rai-
.aonuçment : J ’ai le droit de vu e { l u m i n u m ) sur
�( V)
ru e lle , e t p e u f - ê i i - e m êm e la ruelle tout entière. J ’ai
de plus la servitude d’em pêcher l ’élévalion du miir
‘ de celte ruelle (cilicàs non toLlendi). D o n c j ’ai aussi',
par une conséquence nécessaire, la servitude d ’aspect
'et prospect sur votre jardin; et vous ne p o u vez rien
changer à l’ancien élat des l i e u x p a r c e
que vous
m ’ôteriez non:seulement la ’ quantité d e 'lu m iè re que
j ’avais, mais encore l ’agrém ent que portait à m a mai
son la vue de votre jardin. C a r , dit le sieur R a g o u x ,
à moins de contester l ’é v id e n c e , il est dém ontré q u’il
a été concédé une vu e de prospect, et que la perspec
tive du jardin a été pour l ’acquéreur un m o yen de
séduction ou d’agrém ent qui a dû augm enter le prix
d e l à maison.
-
I l faut cependant que le sieur R ago u x soupçonne
que celte évidence prétendue ne soit pas sans réponse;
car il se plaint de ce que le sieur L a vig n a c ne lui a
présenté que des objections légères et dédaigneuses.
Sa fie r té , dit-il, a souffert de descendre dans l ’arêne
avec un traiteur.
C e reproche est bien dur, et le sieur L a vign ac y a
été sensible. L o in de lui tout mépris pour un art pré
cieux q u ’il honore, et dont il n’a garde de conteste^
l ’importance. S’il se fût senti coupable d’ un tel senti
m e n t, il l’aurait certainem ent dissimulé avec précau
tion. C ’est déjà un adversaire assez puissant q u ’ un
traiteur en rép u ta tio n :
tant d ’intérêts s’unissent au
s ie n , que tout ce qui peut le contrarier ou le dis
�(8)
traire, est exagéré par ce u x qui en gouffrent com m e
un e calam ité pu b liqu e, et le sieur L a vign ac ne se le
cache pas (i). Ainsi loin de se plaindre envers le S.r R a goux de sa juste fierté, fondée , plus que sa prétention,
sur des autorités précises (2 ), le sieur L a v ig n a c d é
clare en toute hum ilité q u ’il n ’a à s’accuser d’avoir
traité avec lég è re té , ni sa person n e, ni ses objections.
Il y a répondu de son mieux ; les m oyens qu'il a fait
valoir lui ont semblé très-solides; et il ne croira s’êlre
bien défendu encore q u’en les reproduisant sans les
affaiblir.
R evenons donc à la maison du sieur R a g o u x , et A
l ’arêne où il nous convie. V oyons com m ent la servi
tude a ltià s non toUendi pourra le conduire à la ser-
( 1) Pour aggraver les torts du sieur Lavignac envers ses con
citoyens, le sieur Ragoux s’est obstiné à s’expatrier jusqu’à la
fin de son procès. Mais le sieur Lavignac se liâte de dire , pour
sa justification, qu’il n’a porté aucun obstacle à un prompt ju
gem ent, et que forcé par ses affaires, de suspendre son départ,
il a mieux aimé s’abstenir d’être présent que de retarder d’un
seul instant la plaidoirie de sa cause.
» ( 2)
Faites cas de celui qui, fier de son talent,
S’estime votre égal, e t, d’un air im portant,
Près de son potager, que la flamme illum ine,
D onne, avec dignité, des lois.......dans sa cuisine.
G a str. Chant II.
?
vilude
�(9 )
Vitude de prospect, et • si elles dépendent nécessai
rement l’ une de l’autre.
E n matière de servitu d es, il n’est pas permis de
raisonner par analogie ou par simples conséquences.
Il faut trouver dans le titre qui les constitue tout ce
qu on veut exiger ou prohiber, sans que Tacle laisse
m êm e le soupçon du contraire; car les servitudes sont
de droit étroit ; et com m e elles font violence au libre
usage de la propriété du voisin, com m e la tendance
naturelle est pour l’affranchissement, il est de principe
que tout ce qui n’est pas m athém atiquem ent compris
dans la clause de servitude s’explique en faveur de celui
q u ’on v e u t,y asservir.'
C e n’est pas absolument aux lois romaines q u’il faut
recourir pour une question de servitudes urbaines. L a
coutum e de Paris était, sur cette m atière, le droit com
m un de la F ra n c e ; et qnand on compare les divisions
et subdivisions du digeste sur chaque espèce de servi
tude avec la brièveté de l ’article 686 du code civil ( i ),
on dem eure convaincu de plus en plus que l ’étendue
à donner à une servitude ne doit dépendre que du texte
liItérai et non équivoque de la clause qui la constitue.
L es lois romaines , au reste, distinguent très-expres
sément ce que le sieur R agoux veut confondre.
(i) Art. 686. Il est permis aux propriétaires d’établir sur leurs
propriétés telles servitudes que bon leur semble, pourvu que les
services établis. . . . n’aient rien de contraire à l’ordre public.
L ’usage et l'étendue des servitudes se règlent -par le litre qui
les constitue , et à défaut de titre, par les règles ci-après.
�C ro )
Il o , par son a cle , la servitude de jour (/u m in u m ),
et la servitude a ltius non toLlendi, non pas pour un
édifice en tier, ce qui est la plus fréquente supposi
tion des lois, mais bornée à un simple m u r , et pour
une distance convenue.
D e ces deux servitudes, il veut en faire quatre, car
il ajoute celle ne lurninibus officuatur, et m êm e celle
ne prospectai o jjicia tu r, qui sont très-distinctes dans le
droit, et qui portent une gên e bien différente.
A v e c sa servitude de jo u r, et sans celle a ltiu s non,
toLlendi, le sieur L avignac n’aurait eu nul besoin de
se reculer pour bâtir. Il aurait eu certainement la fa
culté d ’élever le mur ancien de sa ru elle , d ’après les
principes.
C ar la servitude de jours (lu m in u m ) n ’em porte que
nécessité de souffrir des vues droites, sans rien laisser
au prospect : il suffit de voir le c i e l , tel est le texte
des lois
et i du digeste de servit, prœd. urb. et
3
5
l'interprétation générale des auteurs.
C ’est pourquoi ceux qui veulent une gêne moins
grande à leurs vues doivent convenir de l’une ou
de l ’autre des servitudes d ’aspect; et alors ces lo is,
elles-m êm es, marquent une différence sensible au ré
sultat de ces servitudes.
Elles portent avec elles une dénomination qui en
m arque le sens ; ne lum inibus ojjiciatur exprim e a u
tant que possible , que si l ’acte porte expressément la
condition de ne pas offusquer la lum ière, on ne pourra
pas la diminuer par un b âtim en t, et çle m êm e ne p ros-
�( II
)
pectuí ojjlciatu r dénoie assez que tout ce qui ôterait
le point de v u e , m êm e dans l’éloignem en t, contrevien
drait à la convention.
T o u t le titre du digeste prouve que ces diverses
espèces de servitudes sont trè s-d istin ctes, et par con
s é q u e n t que l ’ une ne supplée pas l’autre, à moins que
sa plus grande étendue ne com porte de plein droit la
servitude moindre.
Ainsi la servitude ne lum inibus officiatur est à la
vérité comprise de plein droit dans celle ne prospectai
o fficia tu r, qui est la plus é te n d u e , parce que tout ce
qui tendrait ¿1 ôter la lumière d ’une f e n ê t r e , ôterait
bien, à plus forte raison, la perspective éloignée q u ’elle
doit avoir.
Mais on ne peut pas, com m e le sieur R a g o u x , ren
ferm er une servitude plus grande dans une servitude
moindre. Il fait beaucoup d’efforts pour prouver que
la servitude ciltiiis toLlendi em porte a v ec elle les ser
vitudes ne Luminibus , et prospectai ojjîciatur. C ’est
en effet de là que dépend toute sa défense.
V o y o n s sur quelles autorités celte prétention est
fondée : et pour ne pas m ériter une seconde fois le
reproche de,déd aign er ses moyens et ses objection s,
le sieur L avign ac va les suivre pas à pas pour y r é
pondre.
I . re o b j e c t i o n .
P a g . 16.
L es lois romaines, dil le sieur R.agoux , ne font
pas de différence e n tr ó la servitude aLtius ioL/endi,et
�( 12 )
celle ne Luminibus a u l prospectai ofjiciatur. L a loi 2 ,
a u / i D e ¿cr. pr. urb. le prouve.
RÉPONSE.
C e lte loi n’est que la série des différentes espèces
de servitudes : elle les classe et les distingue; par con
sé q u en t, elle ne les confond pas.
L e sieur R a g o u x veut lirer d’ une simple conjonction
une conséquence f o r c é e , q u’il n ’induit encore que
d’un argu m en t à c o n t r a r i o c a r ia loi parle des servi
tudes imposées par celui qui veut qu’on élève un mur
pour diminuer sa lumière. Mais cette servitude affir
m ative
ne juge ni n’indique rien pour la servitude
contraire.
U n e preuve que la servitude a ltià s non tollendi ne
ren ferm e pas celle ne Luminibus o jfîc ia tu r , c’ est q u e ,
suivant cette dernière ., il n ’est pas m êm e permis de
planter des arbres qui diminuent la v u e ; tandis que la
servitude altiiis non tollendi n'em p êch e pas de planter
des arbres à t o u t e distance. A l i u d est œ dificare, a liu d
est arborem ponere.
O11 pouvait m ô m e , chez les R o m a in s, en p lan ler,
en ce cas, au-dessus m êm e de l ’éd ifice , dont la hauteur
-était c e p e n d a n t déterm inée. Suprà eam a llitu d in em •
tandis que dans le cas des autres servitudes, cela aurait
été défendu.
II.* o b j e c t i o n .
P a g . 1 7.
Toujours la loi regarde la défense d ’élever plus haut
�(
*3
)
com m e le seul m o y e n d’em pêcher la lum ière. C àm
servitus im ponitur
ne
lu m in ib u s
o fficia tu r
, hoc
m a xim e adepti videtnur, ne j u s f i t vicitio invitis nobis
a ltiu s
æ d ifica re
, atqu.e ita rhinuere lum ina œ d ifi-
ciorum nostrorum.
RÉPONSE.
Il faut faire une inversion des termes de la lo i, pour
y donner le m êm e sens que le sieur R agoux.
Elle ne dit pas que celui qui aura la servitude a llia s
tollendi 'aura aussi celle ne Luminibus officiatur ■elle
dit, au contraire, que celui qui aura la dernière pourra
em pêcher d’élever plus haut. E t le sieur L a v ig n a c n ’a
jamais nié ce principe.
A insi, le sieur R a go u x n’a que faire de s’approprier
le minuere luminci qui term ine cette loi ; car il est
destiné à une autre espèce de servitude que celle de
son acte.
I I I .e O B J E C T I O N . P a g . 17.
L e s auteurs donnent le m êm e sens h ces lois. M . de
L am oign on a d it, en ses A rrêts, titre 20 , article 20 :
• S i, dans le litre de la servitude, il
cl
été convenu que
« l'on ne pourra obscurcir ou donner em pêch em en t
« au mur du voisin,, le propriétaire laissera les lieu x
« en l’élat où ils étaient lors de l’imposition, sans y
«< faire aucun plant d ’arbres ni bâtiniensjnouveaux, et
« sans pouvoir aussi élever les anciens biltimens-». T e l
est aussi le langage d’A u z a n e t , l e r r i é r e , L a la u r e ,
Desgodets.
�( i4 )
RÉPONSE.
A v a n t cet article 20 (qui ne s’applique toujours qu’à
la servitude ne lum inibus o jficia tu r) , M. de La moignon
avait dit ce que le sieur Rago ux a jugé à propos
d ’omettre.
Art. 19. « L e propriétaire d ’ un hé rita g e , sur lequel
« le voisin a droit de v u e , peut élever sur son fonds
* des bûlimens, et planter des arbres, pourvu qu’ il ij
« a it s ix pieds de distance entre le mur faisant sépara« tion des héritages des parties, et le bâtiment nou« v e a u , et douze pieds de distance entre le mur et
le pied des arbres ■
».
IV.e o b j e c t i o n .
P a g . 18.
11 a été dans l’intention des parties de donner à
l ’acquéreur une vue de prospect, tant qu’elle pouvait
s’ étendre; sans cela , il eût été inutile de stipuler que
le mur n’aurait que trois pieds et demi. La clause eût
. été sans i n t é r ê t , si le vende ur avait eu le droit de
. construire le lendemain un mur plus élevé à côté de
l ’aulre ; il eût été inutile aussi de se réserver la faculté
de placer des vases de fleurs. S’il n’y avait eu que l’in
tention de ne céder q u ’une simple vu e droite, on se
serait réservé le droit de construire à une distance
déterminée. L a perspective du jardin a dû augmenter
le prix de la maison.
�( i5 )
RÉPONSE.
Qu y a-t-il dans tout cela? D es présomptions.
E f c ’est par des présomptions que le s.r R a go u x veut
étendre une servitude au-delà des termes de son acte.
Il ne rem arque pas que les présom ptions, m êm e
de l ’intention des parties, se tourneraient contre lui.
L a latitude q u ’il prête à sa servitude serait une
grande injure aux sieurs d ’A u terive , et il faudrait
m ettre en problème si leur raison aurait bien.'présidé
à une convention aussi étrange.
^
5
N on conlens d ’avoir vendu pour ;ooo liv. une m ai
son qui avait deux corps de lo gis, une cour au milieu
et douze croisées d ’un seul c ô t é , se pou rrait-il q u ’ils
eussent ajouté à la souffrance de lum ière de ces d ouze
croisées, une prohibition perpétuelle de bâtir ch ez
e u x , et de n ’être, dans leur ja rd in , que sous la sur
veillance habituelle d’ une multitude d ’individus. Si
cela était supposable pour une maison de c h a m p s .»
com m ent adm ettre q u’ un propriétaire en ait m êm e
conçu l ’idée à l'égard d ’ un
d ’une ville populeuse?
jardin placé
au milieu
N e s t - il pas plus naturel de penser que le sieur
F o r n i e r , p r ê t r e , voyan t un petit m ur à trois pieds
de la maison q u ’il allait a c q u é rir, eût à l ’instant la
crainte q u’il ne fût élevé à une grande h au te u r? E t
com m e les parties doutèrent si le vendeur aurait droit
de le lever a ce lle d ista n ce, le sieur Forn ier demanda
�(
16
)
que ce m u r, si v o isin , 11e fût pas é l e v é , et le vendeur
y consentit.
Alors le ven deur n ’avait pas des projets de b â t ir ,
puisqu’il vendait une propriété. N e s’occupant doue
que de jouir de ce q u ’il avait, il ne voulut pas que
son con sen tem en t, de ne pas changer la hauteur du
m u r existant, s’opposât à ce qu’il y plaçât des fleurs,
1ant qu’il le conserverait.
V oilà la seule pensée que durent avoir les parties,
et la seule q u’il faut leur supposer, puisqu’elle est la
seule de bon sens. Voilà le vrai pacte de quo cogitatuni est, et au-delà duquel il est clair q u ’il n’y a pas
eu une ébauche de convention.
C e rte s , si les sieurs C roizet eussent le lendem ain
bâti un grand m ur à côté de l’an cien , e t , com m e le
disait d ’abord le sieur R ag o u x , plaqué contre le pre1m ie r, il eût été rép réh en sib le, parce q u ’une conven*tion ne s’élude pas a vec affectation.
Mais qui veut trop prouver ne prouve rien. Car ce
n ’ est pas en se jouant ainsi de ses engagemens, que le s.r
L a v ig u a c a bâti. Il a bâti a quatre pieds au-dela du pré
cédent m u r , c ’est à dire à 7 pieds et demi de la m ai
son Ragoux.
Sa convention n’était restrictive que parce q u ’ il était
en 1772 dans la dislance habituelle de la loi. Mais il
s’est conform e à la lo i; il a exécuté ce que dit M. do
T,amoignon ; et dès-lors, au-delà de 6 pieds, il retrouvo
le
droit
c o m m u n , par-delà lequel sa convention 11’cst
pas allé lui donner des entraves imprévues.
Co
�C 17 )
C e n’ est pas assez , dit le sieur R a g o u x , d’avoir sti
pulé q u’il ne bâtirait pas à trois pieds et dem i , il fa l
lait q u’il se réservât de bâtir plus loin.
Disons plutôt que c ’était à l ’acquéreur à stipuler
q u ’on ne bâtirait pas à une plus grande distance.
C ar c ’est lui qui avait besoin de la servitude, et par
conséquent du litre et de la clause.
O r , tout ce qui n’est pas dans la prohibition rentre
de plein droit dans la loi com m une.
C ette loi est l ’article 202 de la coutum e de P a r is ,
qui veut six pieds de distance entre les vues droites et
les murs voisins.
’
E l avec cette distance, la servitude altiics non toilen d i doit être bien moins rigoureuse que ch ez les ro
m ains, dont les maisons, presque toujours séparées en
îles, n’a v a ie n t, de distance lé g a le , que celle de deux
pieds (1 ).
V .e o b j e c t i o n .
P a g . 21.
M a i s , dit le-sieur R a g o u x , s’il y a de l ’incertitude
dans l’acte de 177 2 , elle doit s’interpréter conte le v e n
d e u r, q u i potuit legem apertiàs conscriberç.
RÉPONSE.
C ette règle de droit n ’est applicable q u’ci la r e
cherche (le la chose vendue et aux servitudes retenues
( 1 ) Si f/uis sepetn propè alienum prœdiurn fix e n t, tenninum ne excedilo. Si macerieïn, pedem relinquito y si verb do
nnait, pedes duos. L . ult. il', fin. reg.
3
�( i Q )
par le vendeur sur l’objet a lién é, mais pas du tout aux
servitudes q u’il s’impose. ;
i;
C a r d ’après la m a x im e non J i t eoçtensio in prohibitor i is , c ’est à celui qui fait constituerjla servitude à son
profit, à-lui donner plus de latitude. C ’est le vœu d e l à
coutum e de Paris, art. 216.
A v a n t de rechercher la règle de droit -1 7 2 , le sieur
R a g o u x pouvait s’arrêter à la 8 i , e qui paraît résoudre
pleiuem ent la difficulté.
Q u œ , dubitationLs toUendçe cçiusâ , contractibus in seru n tu r, j u s commune non Lœdunt. 1. 8 1 , de reg. jur.
O r com m e la convention de ne pas.élever un m ur ,
qui n ’élait alors, q u ’à trois'pieds et demi de la m aiso n ,
11e fut écrite visiblement que pour lever le doute du
droit de bâtir à cette courte distance, il ne peut pas en
résulter que les sieurs Croizet se soient abstenus à ja
mais d ’ user du droit c o m m u n , c ’est-à-dire de bâtir à
'six p ie d s , d ’après la coutume, $e Paris qui était la loi
générale.
N ’y aurait - il donc pas une injustice évidente de
forcer ainsi le sens d ’ un a c t e , au point de restreindre
une propriété à une a n n u la tio n absolue, pour le seul
avantage de donner une plus grande clarté à deux
pièces du rez-de-chaussée d’ une m aison; et si un v e n
deur étuil ainsi opprim é par le sens équivoque de sa
c o n v e n tio n , ne s e r a it- c e ' pas le cas de s’écrier a vec
la loi : iniquum . est périme pacto id de quo cogitaturn
non est, L . 9 ,
de trans.
L e sieur R a g o u x rejette fort loin l ’art, 2 1
5
de la
�I9
(
)
co u tu m e de Paris. Cependant c ’est cet article qui veu t
que le vendeur déclare spécialement quelles servitudes
il retient ou constitue tant pour Y en droit, h a u te u r ,
largeu r, que l ’espèce; autrem ent quelques espèces g é
nérales de servitudes, sans les déclarer comme dessus ,
dit l’article, ne valent.
■ Cet article est donc une preuve que la clause de
servitude ne doit pas s’expliquer par a n a lo g ie , ni
e x te n sio n , ni présom ption, mais spécialement et en
détail.
- O r Yendroit m arqué par la clause de 1 7 7 2 , est à
trois pieds et dem i : donc il n ’y a pas eu prohibition
de bâtir à sept pieds de distance.
V I.e O B J E C T I O N . P ag.
23 .
L e sieur R agoiix revient à une idée q u ’il avait aban
donnée devant les premiers juges. Il voudrait la pro-r
priété de la ru elle, parce q u e , dit-il, il est confiné(par
le jardin ; cela é t a n t , il en conclut que le sieur Lavignac ne devait au moins bâtir q u ’a six pieds au-delà
de la ruelle.
RÉPONSE.
. Voilà donc le sieur R ago u x forcé de s’em parer d’ un
m o t, pour se faire un m oyen.
E t quel m o t encore ! quel faible mot! Personne ne
l ’a m ieux évalué que lui; et il nous donne sa réfuta
tion lui m ê m e , à la fin de la page 22.
�( 20 )
Que signifierait alors la défense de je te r de l'eau oti
des ordures? 11 est clair en effet que si la ruelle eût été
ven d u e au sieur R a g o u x , il était contradictoire que
le ven deur s'occupât de ce qu’on jetterait ensuite sur
la chose vendue. C e n ’eût pas été immittere in alienum .
Ajoutons à cette réilexion : que sign ifierait a u ssi
la permission accordée au sieur F orm er de se servir
de La ruelle pour réparer sa m a ison ?
O n ne lui en a donc concédé que l’usage m o m en tané ;
et l’ usage est exclusif de la propriété.
l i e confin du jardin prouve seulement que la ruelle
était considérée com m e partie du jard in , et non de la
maison , ni m êm e com m e com m une. L a suite de l ’acte
explique parfaitement l’intention des parties, qui n e v e u lent accorder à l ’acquéreur q u ’un usage ou tolérance.
-j
CONCLUSION.
v l ia vente de 17 7 2 n e d o n n e à l ’acquéreur que le droit
de v u e et non de prospect.
" T o u te vu e droite com porte avec elle une dislance
de six pieds jusqu’au m ur voisin : et cela explique toutà-la-fois la convention dé ne pas élever un m ur alors
existant, parce q u ’il n ’élail q u ’à trois pieds et d em i, et
la faculté dem eurée au vendeur de bâtir à six pieds
de distance, par cela seul q u ’il ne s’est pas départi spé»
cia le nient de ce droit légal.
' Ainsi il a été m al jugé en ce que la hauteur du m ur
actuel a été d im in u é e , car un mur fait au-delà de la dis
tance voulue par la loi est hors d’atteinte.
�( 21 )
i
S’il y a lieu de dire que le sieur L a v ig n a c pouvait
bâtir à une distance quelconque , il n’y a pas d éra iso n
qui fusse penser que ce sera à quinze pieds, ou à d ix ,
ou à luiit, car la loi n’indique aucune variation ni ar
bitraire. Il faut donc que ce soit à six pieds.
D ’après c e la , il doit peu importer q u’il en résulte un
peu plus d ’obscurité à un rez-de-chaussée voisin ; c ’est
un mal nécessaire dans une ville. T o u t ce qui tend a
em p êch er la m itoyenneté des murs la térau x , et à peu
pler de jardins une rue p u b liq u e, ne m érite pas de fa
veu r.
.
Q u ’est-ce d’ailleurs que celte obscurité, si, le 9 dé
ce m b re , les experts ont pu lire un caractère m e n u , à
quelque distance des fenêtres, dans une salle plus basse
•que le sol d’ un jardin, par un teras n é b u le u x ?
E t c ’est pour une façade tournée au nord p l e i n ,
q u’on veut ménager les rayons du soleil pour quelques
m inutes de plus. T o u t autre croirait gagner à l ’élévation
d’ un mur à cet aspect. Mais le sieur R a g o u x avertit q u ’il
a des raisons particulières, et q u’il a intérêt d ’é g a y e r ses
commensaux par la vu e d’un jardin.
Voilà donc le secret principal du procès qu’il a sus
cité au sieur L avign ac. E n est-ce assez pour forcer le
sens d’une convention , et priver le sieur L avign a c du
bénéfice de la loi com m une.
L ’appel incident du sieur R agou x ne sert q u’à prouver
q u’il a cru en avoir besoin pour être conséquent avec
lui m ême.
Il fallait q u’il em pêchai le sieur L a v ig n a c de bâtir
�(
22)
nulle part, ou q u ’il avouât que le sieur L a v ig n ac en
avait le d r o i t , en reculant à six pieds. Alors il s’est
' donné la servitude de prospect ; et c’est là-dessus q u ’il
a fondé son appel.
M ais son titre n ’a rien qui ressemble à la servitude
de prospect ; et cette évidence achèvera de prouver que,
pour tacher d ’obtenir p e u , il dem ande beaucoup.
L ’exagération de ses plaintes et du tort q u’il souffre
sera appréciée com m e toutes les exclamations familières
aux plaideurs qui s’obstinent; ses m oyens de fortune
sont fort indépendans du prospect d’ un jardin qu’on ne
v eut pas q u’il m ontre à tout venant ; et le tems q u ’il
a perdu à plaider a dû lui être plus nuisible que ne le
sera jamais le m ur q u ’il voudrait détruire.
L e sieur L a v ig n ac , au reste, a usé de son droit par
nécessité et a v e c modération. Il fallait q u ’il renonçât à
son habitation et à son jardin, ou q u ’il y fût libre et
indépendant. Il a fait ce que tout autre eût fait et dû
fa ire; et
on
n ’est point un voisin inquiet et am b itieu x,
q u a n d , au lieu d’ usurper la propriété de son voisin, on
sacrifie à la décenc e et à son repos une partie de la
sienne.
M .e D E L A P C I I I E R , avocat.
M .c M A R I E ,
A
DE
licencié - avoué.
R I O M ,
L ’IM PRIM ERIE DU P A L A IS , CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esquiron-Lavignac. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
servitude de vue
auberges
experts
Description
An account of the resource
En réponse pour Le sieur Esquiron-Lavignac, propriétaire à Aurillac, appelant et intimé ; Contre Le sieur Ragoux, traiteur, habitant de la même ville, intime et appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1772-Circa 1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0316
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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auberges
Conflit de voisinage
experts
servitude de vue
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P
R
É
C
I
S
P O U R
P i e r r e ES P A R V I E R D ’ E S T R E S S E S , appelans;
J o s e p h
et
C O N T R E
J ea n -H ugu e s
L
SAIN T-PO L ,
in tim é .
E sieur Saint-P ol veut v e n ir sous deu x titres incom
patibles à la succession de ses bisaïeux.
Son aïeule é toit
dotée par e u x , et il a demandé sa dot après leur m ort.
V i n g t - s e p t ans après l’avo ir o b te n u e , sans alléguer
aucune vo ie de nullité ni de rescision, il a intenté un
procès p ou r demander le partage de ces mêmes suc
cessions.
P o u r l’intelligence de cette demande et des diverses
contestations qui y ont pris leu r s o u r c e , il faut a vo ir
A
�( O
sous les j e u x le tableau g énéalogique des familles Esparvier
et Saint-Pol.
François Lavolpilière,
Françoise de Volonzac,
eurent huit enfans.
r
laris.
Anne Lavolpilière eut deux maris.
2°. François Esparvier de Lodière.
Pierre Bonafos.
François.
I
Anne.
Françoise,
religieuse.
Marc-Antoine
Esparvier.
|
Joseph
Esparvier.
Charles.
Françoise,
Gabriel
Saint-Pol.
I l
I I
I I .1
Quatre de ces enfans sont représentés
par Joseph Esparvier.
Jeanne,
Fr.de Touret.
P ie rre
Esparvier.
Appelons.
Jean-Hugues.
Intim é.
Françoise E sparvier fut mariée au sieur G ab riel SaintP o l le 24 n o vem bre 1718 .
Ses p ère et m ère lui cons
tituèrent en dot 4000 francs , dont m oitié p ou r biens
paternels. L e contrat porte quittance de 1700 francs, dont
700 francs en immeubles : il fut pris des termes p ou r le
surplus.
A n n e L a v o lp iliè re avoit fait un testament le 17 mai
1 7 2 0 , par lequel elle instituoit p our héritier M a rcA n to in e E s p a rv ie r, son iils du second lit. Ce testament
ne se trouve plus q u ’au répertoire du notaire; on ignore
i\ quoi attribuer sa suppression, à moins que l’éclaircis
sement n’en vienne des faits ci-apres.
M a rc -A n to in e Esparvier alla en Espagne, et y contracta
mariage sans l’agréincnt de son p ère; ce qui. lui valut
une haine constant# > q llc François E sparvier conserva
contre lui jusqu’au toinbcau.
�( 3 )
A n n e L a v o l p i l i è r e , sa m è r e , vo u lu t faire nn second
testament la veille de sa m ort : elle fit appeler le sieur
Costerousse, v ic a ir e , et des tém oins, le n ayril 1735*,
et elle dicta un testament par l e q u e l , après quelques
legs et augmentation de dot à ses enfans p u în é s , elle
instituoit p ou r ses héritiers universels Hugues B o n a fo s,
son fils aîné du prem ier lit , et M arc-A n toin e E sparvier,
son fils aîné du second lit.
M ais lorsque le vicaire, rédacteur de ce testam ent, en
cominençoit la l e c t u r e , le sieur François E s p a r v ie r ,
instruit de ce qui se passoit , entra brusquem ent dans
la cham bre de sa fem m e , arracha le testament des mains
du vicaire, et en empêcha ainsi la clôture.
H ugues Bonafos seul rendit p la in te , et un grand
nom bre de témoins furent entendus ; ils déposèrent ce
qui vient d’être dit.
A p r è s décret et in terrogatoire, le procès fut civilisé.
O n mit en cause toutes les parties nommées au testa
ment et intéressées à ce q u ’il fût m ain ten u , c’est-à-dire,
A n n e B o n a fo s, fille à F ran çois, Charles E sparvier, M arcA n to in e E s p a r v ie r , P ierre et Joseph la V o lp iliè r e , frères
de la testatrice.
C e procès fut considérable , et défendu avec chaleur.
François E sparvier disputoit même üi M a rc -A n to in e , son
iils, le droit de succéder à sa mère à aucun titre, com m e
m arié hors de F r a n c e , et ayant perdu la qualité do
citoyen français, suivant une ordonnance de L ou is X I V .
E n fin , le 7 mars 1 7 3 6 , intervint sentence sur procé
dures respectives , q u i , « ayant égard h ce qui résulte
« des dépositions des témoins ouïs dans les inform aA
a
�( 4 )
'tions des 14 et 17 mai 173 5 , condamne François
Espai'vier de L o d iè re à se désister de l’indue possession
et jouissance par lu i faite des biens meubles et im
meubles dépendans de la succession de ladite A n n e de
L a v o l p i l iè r e , son épouse , et en délaisser la libre
jouissance audit Jean-H ugu es B onafos, sieur D alozier,
et audit M a rc -A n to in e E s p a r v ie r , sieur de B la zè re ,
fils de ladite dame, e n q u a l i t é D E s e s h é r i t i e r s ,
avec restitution des fru its, suivant l’estimation qui en
sera faite par e x p erts, sauf à faire distraction sur la
totalité des biens de ladite succession, de la légitim e
telle que de d ro it, qui doit appartenir audit Charles
E s p a r v ie r , autre fils dudit François E sparvier, et de
ladite défunte A n n e de L a v o lp iliè r e ; et attendu la
voie de fait pratiquée p ar ledit François Esparvier \
et l’enlèvem ent par lui fait du testament de ladite A n n e
de L a v o lp iliè r e ,
son
ép o u se ,
le déclare décliu et
p riv é du legs à lui fait par ledit testament ; et avant
faire droit sur les conclusions prises par lesdits P ierre
et Joseph de L a v o lp iliè re o n cles, de mêm e que sur la
part et portion prétendue par ledit François Esparvier,
sieur de L o d iè r e , en conséquence du tra n sp ort,
cession ou subrogation q u ’il prétend lui avoir été
consentie par François de L a v o lp iliè r e , il est ordonné
que les parties contesteront plus a m p le m e n t, dépens
quant à ce réservés : François Esparvier est condamné
en tous les autres dépens. »
François E s p a rv ie rd e L o d iè re m o u ru t le 7 fé v r ie r i7 3 8 ;
et pendant le procès ci-dessus , il avoit fuit un testament
olographe, ab irato ; exprès pour déclarer q u ’il déshé-
�C 5 )
ritoit M a rc -A n to in e E s p a rv ie r, son fils; il institua p o u r
héritier universel Charles E s p a r v ie r , son fils cadet.
Celui-ci se porta héritier bén éficiaire, et fit inventaire
le 28 avril 1738.
Charles E sparvier ne tarda pas à décéder ; et p ou r
dédom m ager son frère de l ’exhérédation du père com
m un , i l l’institua héritier universel, par testament du 18
m ai 1 7 3 8 , et fit à Françoise E sp a rv ier, sa s œ u r; un legs
<le 300 francs.
Com m e les biens de Charles E sparvier p e se compor
soient que de la succession de F ra n ç o is, M a rc -A n to in e
E sparvier imita son f r è r e , en ne se portant q u ’héritier
bénéficiaire ; en conséquence il fit un inventaire le io s e p r
le m b re 1 7 3 8 , consistant au récolem ent du p ré c é d e n t,
et auquel il appela notamment le sieur S a i n t - P o l ,
com m e créancier.
A p r è s la m ort de François E sparvier et A n n e L a •volpilière, le sieur Sain t-P ol auroit eu le droit certaine
m ent de demander le partage de leu r succession ; mais
il avoit aussi la faculté de s’en tenir à la dot constituée
par le contrat de m ariage de 1718.
C ’étoit une option à faire qui décidoit de la qualité
d ’héritier ou créancier; l ’une com m e l ’autre ne perm ettoit plus de varier.
Gabr ie l S a i n t- P o l , m or t en 1738 , avoit institué sa
sœur héritière fiduciaire. E n cette qualité, elle assigna
M a r c - A n t o i n e Esparvier en qualité d ’héritier de ses père
et m è r e , par exploit du 28 juin 1 7 3 8 , po u r payer la
dot constituée à la dame S ain t -P o l, en 1718.
J e a n - Gabriel S a i n t - P o l , fils et héritier de Françoise,
�( 6 )
E s p a r v ie r , loin de ré p ro u v e r ladite d em a n d e, la reprit
lu i-m ê m e , en 1748 , contre M a r c - A n t o i n e E sparvier ;
il conclut au p a yem en t, i° . de 2300 francs p ou r le
reste à payer de la dot de son aïeule ; 20. de 300 fr.
p o u r le legs à elle fait par le testament de Charles Espar
v i e r ; 3 0. au payement d ’ une provision de i 5oo francs,
sauf, a jo u ta -t-il, réserve de demander le partage.
L e 2 septembre 1749 il obtint une sentence qui con
damne M a rc - A n to in e E sparvier à lui payer lesdites
sommes de 2300 francs et 300 fra n cs, et qui lui adjuge
une provision dq 5oo francs.
M a r c -A n to in e en avoit interjeté a p p e l, com m e ne
se croyant pas tenu à payer les 2000 francs constitués par
François E sp a rv ier, dont il n’étoit qu ’ héritier bénéfi
ciaire , du chef de Charles ; mais il se départit de cet /
appel au m oyen du traité ci-après.
*
1
• L e 9 décem bre 1 7 4 9 , les parties transigèrent. M arcA n to in e E sparvier paya au sieur Saint-Pol les 5oo fr.
de p ro v is io n ; et p o u r le payement du surplus de la dot
de Françoise E sp a rv ie r, m ère du sieur S a in t-P o l, M a rc A n to in e E sparvier lui délaissa des fonds à dire d’experts,
ou moyen de quoi les parties se tinrent respectivement
quittes; et le sieur S a i n t - P o l se réserva tous autres
droits que ceux de la sentence , exceptions contraires
demeurant réservées au sieur Esparvier.
P a r une contre - lettre du même jour il fut con
ven u que le sieur Saint-P ol rendroit lesdits héritages au
s i e u r E s p a r v ie r , m oyennant le payement de la somme
u lui d u e , suivant ladite sentence.
< M a rc-A n to in e
E sp arvier m ourut en
1761 , après
�C7 )
a vo ir institué
bénéficiaire.
J o s e p h , qui se porta encore héritier
L e 12 avril 1.765 , trente ans et un jo u r après le
décès d ’A n n e L a v o lp iliè r e , le sieur S a i n t - P o l assigna
Josep h E sparvier en partage, 1°. de la succession de
ladite L a v o lp iliè i’e, son aïeule; 20. de celle de François
E s p a r v ie r , son aïeul ; 3 0. de la succession de Charles
E sp a rv ie r, son oncle.
E n 176 8 , il obtint une sentence par d é f a u t , qui adjuge
ses conclusions.
L e sieur Saint-Pol avoit vendu à un nom m é Coste
rousse , en i 759 et 1 7 6 1 , un p ré à lui délaissé par le
traité de 1 7 4 9 ; mais il avoit eu la précaution de stipuler
aussi une faculté de ra c h a t, p o u r le reprendre quand
le sieur Esparvier le demanderoit.
Le
I er.
juillet 1 7 7 8 , Joseph E sparvier demanda en
effet au sieur S a in t-P o l l ’exécution de la c o n tre-lettre
du 9 décem bre 1 7 4 9 , et le désistement de l ’im m euble
délaissé par le traité du môme jour. P o u r éviter un
circuit d’actio n s, il assigna Costerousse en rapport.
L e 6 septembre 1 7 7 9 , „il intervint une sentence q u i
condamne Costerousse à se désister, à la charge par le
sieur Esparvier d ’acquitter au sieur Saint-Pol les sommes
à lui dues en vertu de la sentence du 2 septembre 1 7 4 9 ,
en payement
desquelles ledit
p ré lui avoit
été
d é
laisse; condamne S a i n t - P o l à la restitution des fruits
perçus pendant sa jouissance et celle de Costerousse, à
dire d’expert 5 ordonne enfin q u ’il sera fait compte et
�.
.
.
.
.
(
8 '}
compensation desdites sommes, et in térêts, avec les jouis
sances , jusqu’à due concurrence.
C e désistement à eu lie u ; la sentence de 1779 a été
e x é c u t é e , et Joseph E sparvier s’est remis en possession
du p ré délaissé pignorativem ent en 1749.
L o r s de la demande de 1 7 7 8 , le sieur Esparvier avoit
pris un autre c h e f de conclusions, fondé sur un acte
étranger a u x successions jusqu’alors en litige.
Françoise E sparvier et G ab riel Saint-Pol a voient eu
Jean -G abrlël et H ugues Saint-Pol. Celui-ci ayant passé
au service d’Espagne avant la m ort de ses père et m è re ,
Jüan-G abriël S a in t-P o l rég it tous les biens.
Hugues S a i n t - P o l, revenù en F ra n c e, fit à Joseph
E sparvier une cession de droits, sous seing p r i v é , en 1760 ;
puis en 1761 il en fit une seconde à son f r è r e , par acte
notarié.
Joseph E sp a rv ier, inform é de ce stellionat, s’en plaignit
à IIu gues S a in t-P o l, qui se repentit sans doute de l ’avoir
t r o m p é , et offrit de l’en dédom m ager autant qu’il étoit
1
en lui.
E n e ffe t , il rem it à Joseph Espnrvier les billets que
lui avoit faits J e a n -G a b r ië l S a i n t - P o l , son frè re , p ou r
p r ix de 6a cession de 1761 ; il sollicita des lettres de
rescision contre cette m êm e cession, et les rem it aussi
au sieur E s p a rv ie r; enfin il ratifia à son p ro fit, par acto
notarié du z 5 avril 1 7 6 9 ,5 a cession de 1 7 6 0 , et lui céda
tous ses droits rescindans et rescisoires contre celle de 1761,
C ’est en vertu de ce dernier acte que Joseph Esparv i c r , par la demande ci-dessus, du icr, juillet 1 7 7 8 ,5 e
subrogea
�( 9 ° . ,
subrogea à la demande en nullité et rescision de Hugues
S a in t - P o l, conclut à la nullité de la cession du 9 janvier
1 7 6 1 , et au partage des successions de G ab riel SaintP o l et Françoise Esparvier', avec toute reddition de
compte et restitution de jouissances.
L e procès fut appointé en droit.
L e sieur Saint-P ol donna une écriture le 27 février
178 3 , p ou r persister dans la demande en partage q u ’ il
avoit form ée en 1 7 6 5 , des'trois successions de François
Esparvier de L o d iè r e , A n n e L a v o lp iliè r e , et Charles
E sparvier-d’Estresses ; il dit q u ’il n ’existoit aucun testa
ment d’A n n e L a v o lp iliè r e , et que quand les informa
tions de 1735 en tiendroient lie u , le testament projeté
seroit nul p ou r n’avoir pas été lu à la testatrice et aux
témoins ; il a r g u a aussi de nullité le testament de Charles
E sp a rv ie r, du 18 mai 1738 , com m e n ’ayant pas été écrit
par le notaire ; enfin il soutint n’avoir point a p p ro u v é
la destination de légitim e faite à Françoise E s p a rv ie r,
par son contrat de mariage de 1 7 1 8 , sons prétexte des
réserves insérées dans sa demande de 1748^ 20. relati
vem ent à la cession d’Hugues S a i n t - P o l , il prétendit
que celle de 1769 étoit un s t e l l i o n a t , et qu’ il n’y avoit
pas lieu à rescision contre la cession h lui consentie
en 1 7 6 1 , parce que Hugues Saint-Pol avoit approuvé
les testamens de ses père et mère.
Dans les écritures en rép o n se, Joseph Esparvier dé
montra que le sieur Saint-Pol avoit parfaitement connu
les informations de 1 7 3 5 , et la sentence de 17 3 6 , lors
qu’ il avoit traité en 1 7 4 9 , et lorsqu’il avoit réclamé la
dot de sa m è re , au lieu de demander le partage.
33
�( 1° )
A l o r s , et par requête du n décem bre 1 7 8 3 , le sieur
Saiut-Pol forma tierce opposition à la sentence du 7
mars 1736.
Il demanda en outre la vérification d’écriture du tes
tament du 18 mai 1 7 3 8 , p our établir que la minute
n’ étoit point écrite de la main du notaire; il demanda
la même vérification du testament de Françoise Espar
v ie r , sa m è re , de 1 7 4 7 , p our établir que celui-ci étoit
écrit de la main du notaire.
Cette double vérification demandée par l ’adversaire fut
ordonnée par sentence du 28 février 1784.
L es choses restèrent en cet état jusqu’au 7 prairial
an 6 , que Joseph Esparvier assigna en reprise.
L e 17 floréal an 7 , le sieur Saint-Pol cita aussi en
reprise des demandes en partage par lui form ées; mais
paroissant revenir ù des prétentions plus justes, il de
manda subsidiairement l ’exécution de la sentence du 2
septembre 1 7 4 9 , portant payement de la dot, et une
provision de 3000 franps, attendu, d it-il, q u ’au moyen
de l’éviction de Costerousse il étoit redevenu créancier du
m ontant des condamnations de ladite sentence.
M ais cette m odération ne fut pas de longue d u r é e ,
et bientôt le sieur S a i n t - P o l
prétendit mêm e s’être
trompé en ne demandant q u ’ un quart de la succession
de François E s p a r v ie r , son a ïe u l, parce q u e , d i t - i l ,
M a r c -A n to in e ayant été déshérité par le testament dudit
F ra n ço is, et le testament de Charles Esparvier se trou
vant n u l, il en i*ésultoit que la succession dudiL Fi’ançois
E sparvier devoit se partager par é g a lité , et par tiers,
entre C h a rle s, Jeanne
et
Françoise E s p a r v ie r , sans
�( 11 )
com pter M nrc - A n to in e qui n ’avoit rien à recevoir.
T e l étoit l ’état de la procédure et 'des prétentions
respectives lors du décès de J ea n -G a b riël S a in t-P o l,
arrivé en l ’an 9.
L es demandes fui’ent reprises le 20 th erm idor an 10.
11 fut question de satisfaire à la sentence de 1 7 8 4 , et
de faire procéder à la vérification requise par Jean G abriël S a in t - P o l; mais son fils notifia, le 1 5 ventôse
an 1 2 , qu ’ayant pris communication des deu x testamens
de 1738 et 1 7 4 7 , il i-econnoissoit que son père avoit
erré sur tous les deux : que le testament de Charles
E sparvier étoit écrit de la main du notaire recevant ;
mais qu ’au contraire celui de Françoise E sparvier étoit
d’ une main é tra n g è re , d ’où il s’ensuivoit q u ’il étoit
inutile de faire ladite vérification.
' P a r requête du 13 messidor an 12 , le sieur Snint-Pol
changea absolument toutes ses conclusions précédentes.
N e pouvant plus com pter sur un tiers , ni mêm e sur
un quart de la succession de François E sp a rv ie r, sonbisaïeul, il vit bien qu’ une légitim e de rigueur seroit
fort inférieui’e aux 2000 francs de dot constitués par
le contrat de 1 7 1 8 , du ch ef dudit François E sp a rv ie r;
en conséquence il imagioa qu ’il p ou vo it reven ir u n e
seconde fois sur ses pas, et déclarer qu ’il se contentoit
des 2000 francs donnés de cet estoc , sans se départir'
néanmoins du partage de la succession d’A n n e de L a v o lpilière ; en conséquence il con clu t, i ° . au partage desi
biens d’A n n e L a vo lp ilière ; 20. à être mis hors de cou r
sur les autres demandes en p artage, et à ce que Josep h
E sparvier fût condamné ù lu i payer a o o e f francs pour.
B 2
�( 12 )
la dot constituée par François E sp a rv ie r; 30. à lui payer
5 o francs p ou r le legs fait à la dame S a in t-P o l, par ledit
François E sp a rv ie r, par son testament du 3 août 173^»
4°. à lui payer 300 francs p ou r le legs fait à ladite dame
S a in t - P o l, par Charles E sp a rv ie r, suivant son testament
du 18 mai 1738.
Cette variation continuelle de conclusions et de m oyens,
et ce retour p o u r moitié à la sentence du 2 septembre 1749*
ne de vo ien t se r v ir, ce sem ble, qu ’à ramener les choses à
leu r prem ier p o in t; car cette sentence ne p ou vo it pas
être en partie chose ju g é e , et en partie chose inutile,
vis-à-vis celui-là même qui l’avoit sollicitée. Cependant
la cause ayant été plaidée au tribunal civ il de Saint-Flour,
le sieur Saint-Pol réussit dans tous les points.
L e jugement dont est ap pel, du 21 mars 1807, a besoin
d’être connu dans ses motifs , dont le grand nom bre est
une p reu ve assez claire de la peine q u ’ont prise les pre
miers juges p ou r donner quelque couleur à leur décision,
à force de raisonnemens.
C o n s id é r a n t q u e la p r e u v e d e la s u p p r e s s io n <Tun te s ta m e n t p e u t ê tr e fa ite
p a r t é m o in s , p a r c e
que c ’ e st u n p u r f a i t , m ê m e u n fa it q u i t ie n t d e la nature
du c r i m e , d o n t la p r e u v e n e p e u t ê t r e fa ite c o m m u n é m e n t q u e p a r té m o in s ;
Considérant qu’une preuve de ce genre doit être faite avec toutes les parties
Intéressées, pour pouvoir leur être légalement opposée ; qu’ainsi si celui qui
demande à faire cette preuve n’a d autre objet que d obtenir des dommagesintérêts contre l’auteur de la suppression du testament, et de le faire priver
de l’avantage que ce testament contenoit à son profit, il suffit qu’elle soit faite
contradictoirement; mais que si elle a également pour objet de faire remplacer
le testament supprimé, par la déposition des témoins, elle doit être faite avec
tous les héritiers présomptifs du testateur;
Considérant que ces principes ont été même reconnus dans l’instance, puisque
le sieur Dalozier, un des héritiers institués par le testament enlevé, appela dan*
la cause terminée par la sçütcnçc de 176 6 , non-seulement les enfans du pre-
�( i3 )
mier lit ¿ ’Anne de Lavolpilière, testatrice, mais encore 'Charles Esparvier-d’Estresses, un des enfans du second lit; d’où il suit que conséquemment au prin
cipe reconnu, il eût dû également appeler en cause, et la dame de T o u rret,
et la dame de Saint-Pol, comme héritiers présomptifs de ladite Anne de LavoJpilière, leur mère;
Considérant, sous ce rapport, que la dame de Saint-Pol n’ayant pas été
partie dans la sentence de 17 6 6 , eût été recevable à y form er tierce oppo
sition; que l’information convertie en enquête ne faisant pas foi à son égard,'
elle eût pu reprocher les témoins, contre-enquêter, demander même une nou
velle enquête; q u e cep end ant le s circon stan ces et les tem ps écoulés d ep u is
exig en t qu'aujourd'hui on ajou te f o i à la d ép o sition d es tém o in s, dès qu’à
raison de leurs dires il n’ est plus possible de les faire entendre de nouveau ;
Considérant que si la dame de Saint-Pol eût été recevable à demander tierce
opposition à la sentence de 1756, ses héritiers ont eu et ont incontestablement
le même d roit; qu’il ne peut résulter contre eux aucune fin de non-recevoir,
de ce que le sieur de Lodière , père de la dame de Saint-Pol, étoit partie
dans la sentence , soit que dans l’état a c tu e l de l’instance le sieur de SaintPol ne procède pas comme son h éritier, et s’en tient à la destination de
légitime faite à la dame de S a in t-P o l, sa fille , soit parce que la présence du
sieur de Lodière dans l’instance terminée par la sentence de 173 6 , n’empèchoit pas que la dame de Saint-Pol devoit y être appelée, celle-ci devant
l ’être comme héritière présomptive d’Anne de Lavolpilière , et le sieur de
Lodière l’ayant été pour les dommages et intérêts auxquels l’exposoit la voie
de fait par lui commise;
Considérant que si le sieur de Sain t-P ol est recevable à former tierce
opposition à la sentence de 17 3 6 , cette opposition peut être au fond bien
ou mal fon d ée, suivant que les dispositions testamentaires de la dame do
Lavolpilière, suppléées p a rla déposition des t é m o i n s , seront ou non jugées
valides et régulières;
Considérant qu’à cet égard il est juste de distinguer les formalités inobservées par le fait de l’enlèvement et suppression du testament , de celles
qui proviendroient du fait de la testatrice, ou de l’officier public chargé de
la rédaction du testament, et qui se trouveroient constatées par la déposition
des témoins; que s’il n’est pas juste que les héritiers institués souffrissent du
fait d’autrui et de l’inobservation de quelques formalités empêchées par l’en
lèvement du testament, il ne seroit pas juste non plus qu’ils se fissent un titre
pour déclarer valide un testament qui, avec l’accomplissement des formalités
empêchées, se trouveroit nul d’ailleurs par d’autres vices indépendans de la
voie de fait commise ;
Considérant qu’avant d’examiner si les dispositions testamentaires constatées
�( 14 )
par la déposition des tém oins, sont ou non valides et régulières sous' le rapport
précédemment envisagé, il convient d’examiner préalablement s i, comme le
prétendent les sieurs de Píiulhine , le sieur de Saint-Pol ou ses auteurs ont
approuvé et acquiescé á ces mômes dispositions ;
Considérant, quant à ce qu’on ne peut approuver ce qu ’on ne connoît
pas, qu’à l’époque de la sentence du a septembre 174 9, et du traité du 9
décembre de la même année, la sentence de iySG n’avoit pas été notifiée au
sieur de S a in t-P o l; qu’elle ne le fut qu’en 1779, long-tem ps après la de
mande en partage formée par le sieur de Saint-Pol ; que lors des sentences et
traité de 1749, il ne s’agissoit point d’une destination portée par le testament
d’Anne de Lavolpilière, mais de la constitution de dot faite à la dame de St.P ol, par son contrat de m ariage; qu’en réclamant le payement de cette dot,
le sieur de Saint-Pol ne donna point au sieur de Paulhine la qualité d’héritier
testamentaire de sa mère , mais la simple qualité d'h éritier et biens tenant d e
sa su ccession ; que lorsque le sieur de Paulhinc-Esparvier prétendit que la
qualité d’héritier testamentaire a lui attribuée par sentence , dont il ne donna
ni date ni copie, étoit suspendue par la voie de l’appel qu’il dit avoir in
terjeté de cette sentence, le sieur de Suint-Pol se restreignit à suivre l’effet
de la demande contre ledit de Paulhine, en la seule qualité de biens tenans
de sa succession ;
Q u’à la vérité tous le s droits du sieu r d e S a in t-P o l étant ouverts p a r le
d ècès d es père e t mère de la dame de Saint-Pol, le sieur de Paulhine eût pu
repousser sa demande, en le forçant à prendre qualité, à se dire et porter héri
tier, ou à renoncer à cette qualité, pour s’en tenir à la destination et constitution
dotale, dont le payement étoit réclam é; mais q u e , au lieu de cela, le sieur
de Paulhine, défendant à la demande par d’autres m oyens, fu t constamment
averti que le sieur de Saint-Pol n entendoit approuver aucunes dispositions
testamentaires , puisqu’il se fit constamment des reserves de se pourvoir en
partage de la succession de la dame de Lavolpilière ;
Considérant enfin que ces réserves expresses consignées dans l’acte de reprise
au g re ffe , du 6 décembre 1748» dans la requête du même jour, dans celle
du i*r. février 1749 > dans la signification de la sentence du 2 septembre
17/ff) , et encore i n d i r e c t e m e n t , dans le traite du g décembre de la mémo
année, excluent toute idée d’approbation de la part dudit sieur de Saint-Pol, d’où
il s’ensuit qu’il est r c c c v a b l c à proposer et faire valoir les nullités dont
peuvent ótre viciées les dispositions testamentaires ;
Considérant à cet égard que sans examiner si avant l’ordonnance de 1 7^5 ,
l e testament devoit ótre dicté et écrit en présence des'témoins, comme sembla
l’exiger l’arrét rapporté par H eiirys, rendu en forme de règlem ent, contre
le* notaires du F o rez, ou s’il suffisoit que les témoins fussent présens, pour
�( i5 )
tm'iir la lecture du testament, en présence du testateur, il est au moins certain
q u e, dans ce dernier cas, le testateur devoit, en présence des tém oins, dé
clarer que le testament lu étoit sa dernière vo lon té; qù’il est constant que
cette déclaration de la dame de Lavolpilière n’est attestée par aucun tém oin,
si ce n’est par le vicaire Costerousse, qui ne dit pas encore qu’elle ait été
faite après l’ expulsion et le départ des témoins; qu’il est également constant
qu’elle ne peut ê t r é suppléée par la réquisition faite par e lle au vicaire Coste
rousse, de faire lecture du testament; que cette déclaration devoit être re
nouvelée après la le cL u re , o u a u moins , dans l’espèce , a u moment où le
testament fut enlevé des mains du vicaire, comme ce dernier le donne à’
entendre dans sa déposition ;
C o n s i d é r a n t enfin que la déclaration du vicaire ne suffit pas pour constater
l’observation de cette essentielle form altié, qu’il faut encore celle de tous
les témoins ;
Considérant que ce vice n’est pas le seul dont fussent infectées les dispo
sitions de la dame de Lavolpilière ; qu’elles l’étoicnt encore du vice de prétérition, en çe que la testratrice n’avoit pas rappelé les dames de Tourret et
de Saint-Pol, ses filles; que la déposition du vicaire à cet égard est encore
contraire à la déposition uniforme de tous les autres tém oins, qui auroient
aussi bien dû retenir les legs faits aux dames de Tou rret et de Saint-Pol»,
que tous les autres legs qu ils mentionnent dans leurs dépositions; qu’au surplus y
d’après même la déposition du vicaire , le legs fait aux dames de Tourret et
de Saint - P o l, ne l’auroit pas été à titre d’institution d’héritier , à la différence
du legs fait au chevalier d’Estresses, également rappelé et par le vicaire et par,
tous les témoins ;
C o n s i d é r a n t que cette prétérition eût di\ suffire et suffit'encore pour faire
annuller les dispositions de la dame de Lavolpilière ; que dès-lors les sieurs de
Paulhine et Dalozier ont été mal à propos c o n f i r m a s ses héritiers par la
sentence de 17 3 6 , et qu’ en recevant le s i e u r de S ain t-P o l tiers-opposant
à ladite sentence, il y a lieu d’ordonner à son profit le partage de la suc
cession, comme ouverte ub intestat.
■E n ce qui touche le payement de la somme de 2000 francs pour la légi
time paternelle de Françoise Esparvier, aïeule du sieur de Saint-Pol, et du
legs de 5o francs à elle fait par le testament du sieur de Lodièrc ;
Considérant qu’outre que le sieur de Paulhine ni le sieur Esparvier do
Blazèdes n e se sont dans aucun temps légalement pourvus contre le te s ta m e n t
du sieur d e Lodière, d u 3 août 1735, ils s e r o ie n t non recevalles, comme l’eût
¿té le sieur d e Blazèdes, leur auteur, à l ’a tta q u e r de n u llit é , ledit d e Blazèdea
¿tant héritier pur e t simple d u sieur E s p a r v ic r - d ’ E s tr e s s c s , son fr è r e ; que
lui-méme avoit a p r o u v é le testament; quoiqu’il eût déclaré ne vouloir accepter1
�(i6)
l’hérédité que sous bénéfice d’inventaire, la succession à lui déférée par*
ledit testament;
Q ue les sieurs de Paulhine n’ayant pas plus de droit que le sieur de Blazèdes,
leur père et aïeul, et celui-ci que le sieur Esparvier-d’Estresscs, son frère ,
ne pouvoient, sous prétexte de l’inventaire fait à la requête dudit sieur d’Estrcsses,
en 173H, après le décès du sieur de L od ière, se prétendre simples héritiers
bénéficiaires de ce dernier, puisque lesdits sieurs d’Estresses n’ont pas usé
dudit inventaire v is -à -v is de la dame de Saint-Pol, sa sœ u r, so it pour ne
l'a v oir ap pelée à l'inventaire com m e créancière de la succession, soit pour
avoir compris dans ledit inventaire le mobilier de la succession d’Anne de
LavoJpilière , n’avoir pas distingué celui propre et personnel au sieur de
Lodière , et s’étre emparés de tout confusément ; jouissance et confusion
qui s’est perpétuée tant dans les mains du sieur de Blazèdes que dans celles
du sieur de Paulhine ;
Q ue la sentence de 1749 n’avoit condamné M arc-Antoine Esparvier, sieur
de Blazèdes, au payement de la dot de la dame de Saint-Pol, qu'en q u a lité
d ’ h éritier et bien tenant d’Anne de Lavolpilière, et ce à raison de la solidarité
d’obligation portée par le contrat de mariage de la dame de S a in t-P o l, et
qu’ elle ne prononce contre lui aucune condamnation, comme héritier du sieur
de Lodière ;
Considérant que l’effet de la condamnation portée par ladite sentence de
174 9 , n’étant plus qu’ un objet de rapport au partage de la succession d’Anne
de Lavolpilière, les héritiers de la dame de Saint-Pol ne peuvent être privés
du droit de requérir contre les héritiers du sieur de Lodière, la condamnation
tant du legs porté par son testament au profit de la dame de Saint-Po!, que de
la dot qu’il lui avoit constituée en la m ariant, et de reprendre, quant à la
d ot, l’effet de la demande qu’ils en «voient formée en 1748, dès qu’ils se dé
partent de leur demande postérieure au partage de lu succession du sieur de
Lodière.
En ce qui touche la demande en payement du legs de 3oo francs, porté par
l e d i t testament d e Charles E s p a r v i c r - d ’ E s t r e s s e s ;
Considérant que la sentence de i 74D 11 cn Pron°nce pas la condamnation ;
que sur la demande qui cn avoit été formée en 1748, elle ordonnoit, à cause
des qualités contestées, une plus ample instruction ;
C o n s id é r a n t , à c e s u j e t , q u e M arc-Antoine Esparvier d e Blazèdes n ’a y a n t
p a s f a it fa ir e d 'inventaire au décès de feu Charles Esparvicr-d’ Estresses, n’a pu
ïe d ir e e t p r é t e n d r e ê tr e s o n h é r it ie r b é n é fic ia ir e ; q u e l u i , e t après lu i les sie u rs
de Paulhine, n e p e u v e n t a v o ir d ’ a u tr e s qualiLés q u e c e lle s d ’ h é r itie r s p u r s e t
s im p le s d u d it c h e v a lie r d ’ E s trcs sc s ; q u e la d e m a n d e c n c o n d a m n a t io n c o n t r e
eux r e p r is e , à fin d e p a y e m e n t d p le g s d e 3oo francs, esi. b ie n f o n d é e , d è s
que
�C *7 )
sieur de Saint-Tol Se départ de la demande e n partage que lu i o u ses
auteurs avoient formi-e de la succession dudit d ’Estresses, sous prétexte de
nullité du testament de ce dernier; que le sieur de Saiiit-lJol ne doit encourir
d’autres peines, à cet égard, que celle des dépens mal à propos occasionnas
par ladite demande en partage.
. E n ce qui touche la demande du sieur de Paulhine, à fin de nullité de la
cession faite à Jean-Gabriël de Saint-Pol par Jean-Hugues de S ain t-P o l, son
frè re , le g janvier 17 6 1, et à lin de partage des successions de père et m ère,
frère , oncle et tante dudit sieur de Saint-Pol ;
Considérant que l’acte de 17^1 renferme l’approbation la plus expresse des
testaméns d e s père et mère dudit cédant; que la nullité du testament du père,
résultante de ce qu’il avoit été reçu par M. le curé, postérieurement à l’ordon
nance de 1735, éto if une nullité apparente, qui devoit être d’autant moins
q u e le
ignorée de Jean-Hugues de S a in t-P o l, cédant, que M arguerite de Saint-Pol,
sa sœur, femme Azalbert, l’avoit déjà fait prononcer par arrêt rendu en 1749,
ainsi que l’ont annoncé les sieurs de Paulhine eu x-m êm es; que la nullité du
testament de la mère , résultante de ce qu’il n’est pas écrit de la main du notaire
recevant, pouvoit être considérée comme une nullité cachée; mais que c’ est
ici d’autant plus le cas de l’application de l’arrêt invoqué par le sieur de SaintP o l, rapporté par Chabrol, sur l’articlc 5o du titre ta de la coutume d’A u
vergne, rendu en semblables espèces, en i 76 8 , contre un sieur de Lavolpilière,
au profit du sieur de Chambona, qu il n’est ni c o n s t a n t ni vraisemblable que
Jean-Hugues de Saint-Pol n’ait eu connoissance de cette nullité qi,ic postérieu
rement à l’acte de 176 1, soit qu’on ne s’en est pas fait un moyen dans les lettres
de rescision prises sous son nom-, soit parce qu’il avoit les moyens de consulter
les minutes, puisque la quittance qu’il avoit antérieurement fournie à son frère,
le 14 mars 1769, d’ une somme de y 58 francs, à compte de ce qui lui avoit été
légué par le testament de ses père et m ère, attestant qu’il en connoissoit, et
la date, et le nom de ceux qui les avoient r e ç u s , soit enfin que d’après les
termes de l’acte de 1761 il est évident que Jean-Hugues de Saint-Pol n’avoit pas
seulement entendu approuver et céder les droits résultans en sa faveur des testarnens, mais tous scs droits successifs, d’après les anciens principes confirmés
par le Code c iv il, l’acte de 1761 n’est pas même susceptible de rescision pour
cause de lésion ;
Considérant encore que l’acte de cession de îyfîi > comme premier en d a te ,'
oit l’emporter sur celui de 176g, nu sieur de Paulhine, par Jean-Hugues de
,aint-Pol; que ce dernier acte suppose une première cession faite au sieur de
Paulhine, sous la date de 1760, dont l’existence à cette époque est d’autant
plus suspecte, qu’oulre que rien ne la constate légalement, c ’est qu’elle préjenteroit Jcan-Iiugues de Saint-Pol comme un stcüionatairc sans pudeur, qin
C
�fi8 )
fa r trois fo ’s se scroit alternativement fait un jeu de tromper son frère, et le
ticur de Paulhine, son cousin, sans cependant qu’aucune des parties ait osé
donner une telle idée de son caractère; que si la première cession de 1760 eût
existé , le fieur de Paulliine se fût empressé de l’opposer à la demande en par
tage du sieur de Saint-Pol, dès qu’elle fut formée; qu'enfin les termes de l’acte
de 176.9, les circonstances dans lesquelles la cession qu’il renferme a été re
cherchée, l’intervention de Jean-Hugues de Saint-Pol, même après la cession
fuite au sieur de Paulhine , la modicité du prix de cette cession , comparé à
celui de la cession de 1761 , le besoin que crut en avoir le sieur de Paulhine
pour combattre et atténuer la demande en partage formée contre lu i, tout
fait présumer qu’elle fu t feinte et simulée, ou que si elle fut réelle, elle ne fut
que le fruit de la suggestion et de la captation ; d’où il résulte que sans s’arrêter
à l’ acte de 17^9, les demandes, soit en rescision de l’acte de 1761 , soit à fin
de partage de la succession de la famille de Saint-Pol, doivent être rejetées.
Finalem ent, en ce qui touche la demande en provision de 3ooo fr. , formée
par ledit sieur de Saint-Pol ;
Considérant qu’ il est certain que scs auteurs ont perçu diverses sommes à
compte de la constitution de dot de Françoise Esparvier, son aïeule, ou intérêts
d’icclles; que sous ce rapport il est censé pourvu ; mais qu’au lieu d’une simple
destination de légitim e, ayant droit au partage égal d’une succession ouverte
dès 173 5 , les sommes reçues peuvent n’être considérées que comme une pro
vision insuffisante, si les contestations qui divisent les parties doivent encore
se prolonger.
Par ces divers m otifs,
L e tribunal faisant droit aux parties, sans s'arrêter ni avoir égard à la cession
prise par Joseph Esparvier, de Jean-Hugues de Saint-Pol, le 25 avril 176g, aux
lettres de récision prises sous le nom dudit de Saint-Pol, contre autre cession
par lui faite le 9 janvier i j Gi > a Jean-Gabriël do Suint-l’ol , son frè re , ni
à la demande en entérinement desdites lettres, formée sous le nom dudit
de Saint-Pol, au ci-dcvant bailliage de V ie , et reprise en ce tribunal par ledit
de Paulhine ; sans s’arrêter pareillement aux demandes de Joseph et Pierre
Esparvier, père et fils, tant à fin de nullité des testamens de Gabriel de SaintPol du Chnyla, et de Françoise Esparvier, son épouse, qu’à fin «le partage de
leurs successions, ainsi que de celle «le Iloch de Saint-Pol, Gabriel, FrançoiscBlizabelh et Anne de Saint-Pol; de toutes lesquelles demandes, fins et con
clusions lesdits Esparvier de Paulhine, pore et fils, sont déboutés; faisant droit
sur la demande contre eux form ée, à fin de jwrtage de la succession d’Anne de
la Volpilière , aïeule et bisaïeule des parties, reçoit, en tant que de besoin,
Jean-Hugues de Saint-Pol, lils et héritier de Je«n-Gabrü:l , tiers opposant n la
sentence du bailliage de V ie , du 6 mars 1756, qui a déclaré Charles Esparvier
�C T9 )
3 e Blazèdes , et Agnès de Pdnafos-Dalozier, héritiers testamentaires de ladite
Anne de Lavolpilière, déclare quant à ce ladite sentence nulle et comme non
avenue; ce faisant, condamne ledit Joseph Esparvier, et Pierre Esparvier fils,
et son donataire , tenancier des entiers biens de la succession d’ Anne de La
volpilière, à venir à division et partage avec ledit de Saint-Pol, de tous les biens
meubles et immeubles provenus de ladite succession, savoir du mobilier suivant
l ’inventaire qui en a été fait ou dû être fait à l’épo'que du décès d’Anne de La
volpilière, sinon, suivant l’état quclesdits dePaulhine seront tenus d’en fournir,
sauf tous contredits, même toute preuve en sus, et des immeubles en nature,
dans les formes voulues par le Code c iv il, pour du tout en être fait six lots
égaux , et l’un d’eux délaissé par la voie du sort audit de Saint-Pol, par re
présentation de Françoise Esparvier, son aïeule, avec restitution des fruits
et jouissances des im m eubles, et intérêts du mobilier , depuis le décès de
ladite Anne , et intérêts d es intérêts à compter de la demande formée au
bailliage de V ie , le 12 avril 17 6 5 , à la charge toutefois par ledit sieur de
Saint-Pol de rapporter audit partage ce qui sera établi avoir été par lui ou
scs auteurs perçu, tant en capital qu’intérêts, de la dot constituée à Françoise
.Esparvier, dans son contrat de mariage avec Gabriel de Saint-Pol du Chayla',
<lu ch ef d e là dame Anne de Lavolpilière, sa mère.;
O r d o n n e que jjour parvenir audit partage, estimation préalable des im
meubles sera faite par un ou trois experts dont les parties conviendront, dans
les trois jours de la signification dtr présent j u g e m e n t ; et faute par les parties
d ’ en convenir dans ledit délai , ordonne qu’il sera procédé à l a d i t e estima
tion par les sieurs Chyrol, Daude et R od ier, experts que le tribunal nomme
dès à présent d’office; lesquels experts procéderont à la division ci-dessus
ordonnée, pour être ensuite les lots formés de la manière voulue par le Code
civil , et estimeront en outre les dégradations et améliorations si aucunes
existen t, et encore année par année la restitution des jouissances du sixième
revenant audit de Saint-Pol, et ce depuis Je décès de ladite Anne de Lavol
pilière ; qu’ il sera procédé au partage ci-dessus, devant M, Loussert, jugccominissaire nommé à cet effet; qu’ il renverra ensuite, s’il y a lieu, les
parties devant tel notaire qu’ il avisera, et qui recevra le serment des experts ;
Au surplus, donne acte à toutes les parties de ce que ledit Jean-Hugues
de Saint-Pol s’est d ép a rti d es d em a n d es en partage formées au bailliage de
[Vie , tant de la succession de François de Lodière et de Charles EsparvicrU’ Estresses ; ce faisant, déboute ledit de S ain t-P o l desdites demandes en
partage ; et statuant sur les conclusions par lui prises le 3 messidor an 1 2 ,
précédemment prises au bailliage de V i e , et sur lesquelles la sentence de
1749 avoit sursis à faire d ro it, condamne lesdits Esparvier de Paulhinc,
père et fils ,
comme h éritiers purs e t sim p les de l'rançois Esparvier i[q
�(
20
)
Lodière , par représentation de Charles Esparvier-d’Estresses', à payer audit
de S.iint-Pol, en derniers ou quittances valables, la somme de 2000 francs,
formant Ja dot paternelle constituée par ledit François de Lodière à
Françoise Esparvier , sa fille , par son contrat de mariage avec Gabriel de
Saint-Pol du Chayla , avec intérêt de cette somme depuis la demande origi
naire qui en fu t formée au bailliage de V ie ; 20. celle de 5 o francs, montant
du legs fait à ladite Esparvier, épouse de Gabriel de S a in t- P o l, par ledit
François Esparvier de L odière, par son testamant du 3 août iy 5 5 , pareille
ment avec intérêt de ladite somme, depuis la demande qui en a été formée le
l 3 messidor an 1 2 ; condamne en outre lesdits Esparvier, comme héritiers
■purs et sim p les de Charles Esparvier-d’Estresses, par représentation de M arcAntoine Esparvier de Blazère, ¿p ayer audit de Saint-Pol, en deniers ou quit
tances valables, la somme de 3oo francs, montant du legs fait à ladite Espar
vier, épouse de Gabriel de Saint-Pol du Chayla, par ledit Charles Esparvierd’Estresses, son frère, par son testament du 18 mai iy 3 8 , avec intérêt de
ladite somme, depuis la demande originaire qui en fut faite au bailliage de V ie ;
C o n d a m n e e n f i n lesdits E s p a r v i e r , père et iils, en tous l e s dépens faits tant au
bailliage de V ie qu’au tribunal civil du département du Cantal, qu’en ce siège*
moins toutefois le cinquième des dépens, depuis la première demande du
partage, formée au bailliage de V ie , jusqu’au 3 messidor an 12, époque à la
quelle ledit de Sain t-P ol s’est départi des demandes en partage des succes
sions de François Esparvier de Lodière et de Charles Esparvier-d’Estresses;
lequel cinquième des dépens , ensemble le coût entier de la sentence du
bailliage de V ie , de 1784* demeurent à la charge dudit de Saint-Pol, suivant
la taxe qui e n sera faite en l a manière ordinaire ;
E t en cas d’nppel du présent jugement , fait audit cas provision audit de
Saint-Pol de la somme de mille livres ;
Ordonne que le présent jugement sera exécuté nonobstant l’appel, et sans
y préjudicier;
S u r le s u r p lu s d e s d e m a n d e s , fin s e t c o n c lu s io n s d e s p a r t i e s , le s m e t h o r s
d ’ in stn n e e.
Sur l’iippel de ce jugem ent, la cour a confirmé la dis
position relative à la provision.
A u jo u r d ’hui le sieur S t.-P o lse trouve payé absolument
de la dot de 4000 francs et des deux legs de 360 fraucs.
E n e f f e t , i° . son aïeul a reçu 1700 francs en argent,
ou biens fonds, dont l ’adversaire est encore détenteur;
�(
21
)
2 °. Son père a reçu 1225 francs, ainsi qu ’il est reconnu
en la sentence du 2 septembre 1 7 4 9 ;
3 0. Il a reçu encox-e une somme de
5oo
francs, suivant
le traité du 9 décem bre 1 7 4 9 ;
4 0. 11 étoit débiteur de Hugues Saint-Pol de 82 0 francs;
et Hugues Saint-Pol ayant cédé cette créance à Josepli
E s p a r v ie r , c e lu i- c i, porteur des effets, a le droit sans
difficulté de les opposer en compensation ;
5°. Il étoit débiteur des jouissances du pré et cham p
abandonné en 1749 , depuis ladite époque jusqu’au désis
tement ordonné par la sentence de 1 7 7 9 ; ces jouissances,
à 200 francs par a n , se porteront à 6000 fran cs, sauf la
déduction des intérêts dûs à l ’adversaire suivant ladite
sentence ;
6°. L e sieur E sparvier est porteur de quittances ou
billets pour prêts signés p n rle sieur Saint-Pol p è r e , p o u r
la somme d’environ 700 francs.
A in s i l’adversaire est nanti d’ une somme de 10945 fr.
lorsqu’ il demande un partage.
Il demande ce partage après avoir demandé et fait
payer une dot constituée à sa bisaïeule.
Sans doute si cette sentence avoit été obtenue pendant
la vie de ceux qui ont constitué la d o t, elle ne seroit
pas une fin de non-recevoir contre l’adversaire.
Mais c’est après la m ort de ceux qui ont fixé cette
d o t , qu’elle a été d em and ée, obtenue et p ayée; dès-lors
il faudroit oublier tous les principes p our admettre le
sieur Saint-Pol à revenir par une nouvelle a c tio n , in
com patible avec la première.
�( 22 )
E n effet, quand une succession s’o u v r e , tous les enfans
du défunt ont le droit d ’y ve n ir par action en p artage,
ou par action en payement de la dot ou légitim e fixée
p a r le défunt.
Dans le prem ier cas , on est héritier et chargé des
dettes ; dans le second cas , on est créancier, et affranchi
Lde toutes charges héréditaires.
Celui qu i ne se présente que p o u r réclam er une dot
con ven tio n n elle, q u i agnovit ju d iciu m d e fu n c ti, ne peut
plus ensuite se présenter com m e héritier et demander un
partage.
Seulement s’ il prétendoit n’a vo ir p a s , dans ce qu’ il a
r e ç u , une légitim e de r ig u e u r , il pourroit la demander;
mais son action ne seroit pas changée ; car ce seroit
encore à titre de créancier q u ’il viendroit à la succession,
et la demande en partage ne lui seroit pas ouverte.
Ici le sieur S a in t-P o l, à l’époque où il pou vo it opter,
après la m ort d’A n n e L a v o lp ilière et François E sparvier,
a choisi la qualité de créancier ; il a forcé Yhéritier de
le payer.
Com m ent auroit-il p u rester lui-m êm e héritier après
cette demande ? Il auroit été son p rop re débiteur.
L e sieur Saint-Pol a donc renonce au droit d’être coh é
ritier , dès l’instant q u ’ il s’est présente contre lh é r itie r
p o u r être payé d’une dot due p a r la succession .
E n vain a-t-il fait des réserves dans des procédures où,
le plus so u v e n t, elles sont de style : ces réserves étoient
démenties par sa demande m êm e, et elles ne peuvent le
relever de son p rop re fa it, qui les rend inutiles : Facta
potentiora su n t verbis , et actu s p rotestation i cojitra riu s
tolllt protcslationenix
�( *3 )
L e sieur Saint-Pol dira-t-il que lors du procès de 17 48 ,
il ne connoissoit pas l’étendue de ses droits ?
M ais on voit par une écriture signifiée par*le sieur
S a i n t - P o l , le 12 avril 1 749, que le procès
mations de 1 7 3 5 , lui étoient conn u s, ainsi
tence de 1736.
D ’ailleurs la sentence de 1748 règle ses
so llicité e, il ne l’attaque pas. 11 l ’a exécutée
et les infor
que la sen
droits; il l’a
par le traité
de 1749 ; et ce traité lui-m êm e n ’a point été attaqué dans
les dix ans.
Ce silence du sieur S a i n t - P o l n’étoit pas un simple
oubli.
A lo r s la
succession étoit
poursuivie par des
créanciers. L e sieur L a c a rriè re , ancien adjudicataire des
biens , ne les avoit rendus qu ’à la charge d ’être rem
boursé de t o u t ; il p o u vo it se remettre en possession;
et voilà pou rqu oi le sieur Saint - P o l laissoit tous les
dangers à la charge de l’héritier. L e sieur saint-Pol étant
m êm e assigné hypothécairem ent par le sieur L a c a r r iè r e ,
com m e détenteur d’immeubles à lui abandonnés p ar
le contrat de 1 7 1 8 , assigna en recours M a r c - A n t o i n e
E s p a rv ie r, et ainsi il se mit à l’abri de toutes recherches.
C ’est seulement après que ces dangers ont passé à force
de démarches et de sacrifices, q u ’il est venu a d p a ra fa s
e p u la s , renier la qualité qu ’il avoit prise p o u r se dire
héritier.
L e sieur S a in t-P o l, qui nedisputoit pas en 1748 au sieur
E sparvier la qualité d ’h éritier en ve rtu de la sentence
de 17 3 6 , veut aujourd’hui la contester, et p o u r cela il
form e tierce opposition à cette sentence.
P eu t - il y être éc o u té , après avoir connu et discuté
cette sentence avant le traité de 1749 ?
�( M )
Est-il môme recevable dans sa tierce opposition, sous
prétexte qu ’ il a dû être appelé à la p ro c é d u re ?
Il s'agissoit de la poursuite d’ un délit; les seuls intéressés
étoient d’une part l’auteur de la suppression du testament,
et d’autre p a r t, ceux qu i étoient nommés dans ce testa
m en t et qui perdoient à sa suppression.
L a dame Saint - P o l , dotée au-delà m êm e des forces
actuelles de la succession , n ’avoit pas d’intérêt d’être
appelée à discuter cette suppression.
Sa dot étoit présumée de droit la rem p lir de sa p ortion ;
et d’ailleurs elle n’étoit pas réputée héritière tant qu’elle
ne renonçoit pas ù cette dot. Com m ent d’ailleurs le sieur
S a i n t - P o l peut-il attaquer une sentence qui a passé en
force de chose jugée v is -à -v is François E s p a rv ie r? Il a
procédé comme héritier dudit E sp a rv ie r, depuis i j 65
jusqu’au 13 messidor an 1 2 , qu ’ il a changé ses conclusions.
O r , la qualité d’héritier est indélébile.
A u x’este, quand la sentence de 1736 to m b e ro it, les
informations de 1735 sufliroient p ou r donner à M a rcA n t o in e E sparvier et à François Bonafos la qualité d’h é
ritier d ’A n n e L a vo lp ilière .
L ’enlèvem ent du testament ne peut pas ôter à l’héritier
appelé le droit q u ’ il tenoit de la volonté du d é fu n t; et
c’est ici le cas d’appliquer la m axim e : P o tiu s id quant
action est quant quod scripturn est. En eiïet, il est de
principe qu’ un titre perdu par accident ou force m ajeure,
est suppléé par la p reu ve testimoniale.
O r , les témoins de 173^ déposèrent avo ir une par
faite connoissance de la teneur du testam ent, tenorem
in strum en ti au divissc (lut percepisse ; et le nom des
héritier^
�C *5 )
héritiers fut tellement co n sta n t, qu ’ils furent confirmés
com m e tels par la justice , en grande connoissance de
cause.
L es premiers juges o n t - i l s pu , sans un arbitraire
r é v o lta n t, ôter à ces héritiers un droit aussi ancienne
ment reco n n u , et réform er aussi légèrem ent une décision
contemporaine , fondée sur des élémens de vérité que
le temps a affa ib lis, mais q u ’il n ’a pas entièrement fait
perdre ?
Rem arquons l ’inconséquence, et des premiers ju g e s,
et de l’adversaire. C ’est en 1736 que la justice donna à
M a r c - A n t o in e Esparvier la qualité d’héritier. Elizabeth
Sain t-P o l la lui confirma dans l’exploit de 1738 -, le sieur
Sain t-P o l lui-m êm e la confirma dans l ’exploit de 1 7 4 8 ,
dans la sentence et le traité de 1749.
E t cependant il est admis , soixante ans a p rè s , h se
rétracter.
Q uant aux dépositions des témoins de 1 7 3 5 , n’est-il
pns d’ un scrupule m inutieux d’y chercher si les légitimes
ont été faites à titre d ’in stitu tion ? Ces témoins ne p o u voient pas connoître des subtilités de droit q u i , au
jo urd’ hui sont proscrites du Code c i v i l , parce q u ’elles
ont été jugées n’avoir aucune importance réelle.
L es témoins ont parlé des legs; et s’ ils y avoient ajouté
quelque chose de plus scientifique, on auroit p u , avec
ra iso n , se défier de leur témoignage.
Enfin il est ridicule d ’exiger que la lecture du testa
ment eût dû être faite, parce que l ’ordonnance l’exige.
Car précisément la suppression eut lieu lors de cette
lecture , et c’est ce que l’ordonnance n’a pas p révu .
Si donc la sentence de 1736 étoit annullée , la qua*.
D
�c
2
6
}
lité ¿ ’héritier se retrouveroit dans les informations, et
aucune prescription ne s’y opposeroit; car le sieur Es par
vi er et ses en fans ont toujours joui des biens et de la
qualité d ’héritier.
Quant à la succession de François Esparvier de L o d i è r e , il est difficile de concevoir comment l’adversaire,
âpres avo ir demandé sa légitime en 1 7 3 8 , puis le par
tage en 1 7 6 5 , a pu revenir h demander la légi tim e,
après avo ir plaidé trente-huit ans p o u r le p a r t a g e , et
surtout comment il a pu faire sanctionner cette étrangô
Variation.
Ce n’est pas qu ’on lui conteste le droit de prendre la
légitime conventionnelle; mais dans le système des pre
miers j u g e s , c’étoit une inconséquence; car si le traité
de 1749 n’étoit pas une fin de n o n - r e c e v o i r , la qualité
d ’héritier une fois prise ne p ou vo it pas être répudiée
p o u r en revenir à une dot qui n’étoit sujette ni aux dettes,
ni aux charges de l’hérédité.
Cette variation du sieur S a i n t-P o l, au lieu d’être prise
au m o t , d e v o i t tourner contre lui.
A u contraire, les premiers juges en tirent parti pour
dire que le sieur Saint-Pol n'étant plus héritier de Fra n
çois E s p a r v ie r , a qualité p o u r former tierce opposition.
Ils ont encore posé en règle générale q u ’on peut tou
jours diviser une d o t , et c’est une erreur.
H o u s s e a u - L a c o m b e , v°. dot , enseigne que la consti
tution dotale est indivisible; et que l’enfant doté ne
p e u t , après la m o r t , s’y tenir pour les biens maternels,
et répudier les paternels. Il cite un arrêt du i 5 juillet
"1745. 11 p ou vo it en citer un autre du 23 févri er 1 6 3 4 ,
�( a7 )
qu’ on trouve au tome i er. du Journ al des audiences.
S o u v e n t, en effet, avec des fortunes inégales, des pères
et mèi*es ont des motifs
égalité.
p o u r constituer une dot par
Ceci a voit lieu dans l ’espèce, où plusieurs actes anté
rieurs à 1700 p rou vent que la fortune du sieur E sparvier
étoit en litige avec celle d’A n n e L a v o lp iliè re , avant m êm e
son mariage : ce seroit un chaos que de v o u lo ir aujour
d ’hui séparer ces deux successions.
A u reste, si le sieur Sain t-P o l obtient 2000 francs'
du chef de son bisaïeul, il sera soumis au com pte du
bénéfice d’in v e n ta ire , et il y auroit m êm e de l’injustice
à obliger le sieur E sparvier à payer com m e héritier p u r
et simple.
M al
propos a-t-il été dît que les inventaires ont
été faits sans appeler les créanciers. Il eût fallu les lire
avant d’alléguer ce fa it; on y auroit v u que précisé
ment le sieur Sain t-P ol a été appelé à tous deux.
✓
Il reste à parler du partage de la succession Saint»
P o l , demandé
en vertu de la succession de H ugues
Saint-Pol.
Q uand on mettroit de côté la cession de 1 7 6 0 , celle
de 1769 suffit.
A lo rs H ugues S a i n t - P o l avoit obtenu des lettres de
rescision contre sa cession de 1761 , et elles étoient
fondées.
Il
n’avoit que cinq ans au décès de son père ; il avoit
quitté la maison en bas âge : il avoit traité avec son
protuleur.
<
Il s’étoit pourvu dans les dix ans.
�( 28)
• O n dit qu ’ il a a p pro uvé le testament de sa mère.
M ais il étoit n u l d’ une nullité latente, puisqu’il n’étoit
pas écrit de la main du notaire ; et l’approbation en.
ce cas n’em pêche pas d’attaquer ensuite le testament.
L a cour l ’a ainsi jugé en thèse dans la cause des
nom m és G rangeon et A c h a r d , par arrêt du 4 pluviôse
an 10.
O n a opposé au sieur E sp arvier qu ’il n’insiste sur ce
partage que par récrim ination de la demande du sieur
Saint-Pol. E h bien ! il avoue franchem ent qu ’on a ren
contré juste. Il ne p ou vo it pas m ieux se ven ger d’ un
procès de mauvaise f o i , qu ’en se défendant avec les
mêm es armes.
^
L e sieur de S a in t-P o l veut le tracasser en demandant
le partage de la plus inextricable des successions, après
avoir accepté une légitim e conventionnelle en temps utile :
il est donc bien licite au sieur Esparvier de le tracasser
l u i - m ê m e , p o u r lui m ontrer combien de tels procès
sont o n éreu x à celui qui est forcé de les soutenir.
L e sieur S a i n t - P o l aura bientôt la conviction qu’il
a intenté un fort mauvais procès , et qu’ il s’est attiré
une demande t r è s - fo n d é e ; accident qu’il faudroit
souhaiter à la plupart des p laid e u rs, pour les corriger
de la convoitise du bien d’a u t r u i, et de la manie des
vieilles recherches.
M e. D E L A P C H I E R , a ncien a vo cat.
Me . D A U D E ,
A
RIO M , de l'im p rim erie d E T
a vo u é licen cié.
h i b a u d - L a NDR i O T ,
im prim eur d e la C o u r d'appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esparvier d'Estresses, Joseph. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
partage
successions collatérales
mariage hors de France
déchéance de nationalité
généalogie
testaments
Description
An account of the resource
Précis pour Joseph et Pierre Esparvier d'Estresses, appelans; Contre Jean-Hugues Saint-Pol, intimé.
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1718-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0315
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Flour (15187)
Deux-Verges (15060 )
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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déchéance de nationalité
généalogie
mariage hors de France
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Successions
successions collatérales
testaments
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MÉMOIRE
POUR
M a r i e D A Y M A R D , v e u v e L a c r o i x , et M a r i a n n e
C O U D E R C , fem m e de D U R A N D - R i e u x ,
appelantes;
C O N T R E
E m e ric, M a r i e , M a r ia n n e
G IN E S T E et a u tr e s ,
intimés.
L A
famille Gineste fait plaider les héritiers Daymard et Cou-
derc, depuis cinquante ans, pour obtenir le recouvrement d’une
créance qu’elle ne conteste pas , mais qu’elle ne veut pas payer.
Un arrêt souverain donne à ces créanciers deux gages plus que
suffisans; c’est-à-dire, la légitime d’un oncle, dont les adver
saires sont héritiers, et la succession bénéficiaire de leur aïeule.
Mais si on en croit les héritiers Gineste, ces deux gages se ré
duisent à un se u l, lequel se réduit à rien; car ils veulent que la
légitime n’existe pas , et que la succession bénéficiaire soit ab
sorbée pour leurs reprises.
x
�Ces prétentions ne devraient pas être bien longues à combattre
api'ès un arrêt; mais comme les juges de Saint-Flour se sont
permis d’ infinner cet a rrê t, sous prétexte de le commenter, il
est nécessaire de rappeler l’origine de la contestation, et quel
était son état lors de l’arrêt qu’il s’agit aujourd’hui de faire
exécuter.
F A I T S .
L e 7 juillet 1741, Marie Duvel de M u ra illa c, veuve de Gas
pard Second s de la ville de P le a u x , acheta du sieur Montesquiou de Saint-Projet , diverses rentes et censives, moyennant
6,124 fr.
Elle les revendit à Joseph Daymard et Jean Couderc, auteurs
des appelantes, le. 10 janvier 1706, moyennant 6,674 fr*
Quand les acquéreurs crurent se mettre en possession des
objets vendus , ils trouvèrent un fermier judiciaire qui leur
apprit que la terre de Saint-Projet était en saisie réelle au par
lement de Toulouse.
Ils se pourvurent pour obtenir la distraction des objets vendus,
ou une indemnité, et assignèrent leur venderesse en recours.
L ’arrêt d’adjudication ou J°rdre ne leur accorda rien, et les
laissa seulement à faire valoir leur garantie contre la veuve
Second.
*r Ils étaient en cause contr’elle , en 1761 , lorsqu’elle m o u ru t,
laissant pour héritiers Jean Second son-fils, prêtre, et les enfans
4
de Marie-Jeanne Second sa fille, mariée on 1787, au sieurEmcric
Gineste, juge à Pleaux.
Eineric Gineste, qui avait plaidé jusqu’alors avec sa bellemère et avoc son beau-frère, s’empara de tout; et néanmoins
il déclara, pour ses enfans, qu’il n’entendait se porter héritier
que sous bénéfice d ’inventaire. Il présenta une requête , fit
donner une simple assignation à son beau-frère qui habitait
Paris, et une assignation a cri public ù tous prétendans droit•
puis il lit dresser un inventaire comme il lui plut.
�C3)
. ' L e mobilier en évidence lui parut trop conséquent; et pour
en distraire la majeure partie, il produisit au juge l’inventaire
de son beau-père mort en 1781, pour prétendre que tous les objets
de même nature, inventoriés en 1781, devaient être retranchés de
la succession M uraillac; puis, ayant mis ordre à tout, il atten
dit la poursuite des Daymard et Couderc.
Ceu x-ci assignèrent en reprise, les i . er et 20 décembre 1764,
tant l’abbé Second, que le sieur Emeric Gineste père, et Pierre
Gineste, son fils aîné, majeur. ( NoLa. Marie-Jeanne Second et
Emeric Gineste avaient eu trois enfans ; Pierre, marié à Fran
çoise Delzor; Marguerite, qui a épousé un sieur Feneloux , et
Marianne).
Ils apprirent, i.° que la dame Muraillac , avant son décès,
avait déposé des effets chez la d am eD hauzers, abbesse de Brageac, et chez les ursulines d’Argentac, sous prétexte de les des
tiner à l’abbé Second , son fils, victime de la chicane de son
beau-frère; 2.° qu’elle avait vendu une maison au sieur Chantegrie-Lavigerie ; et pour en dénaturer le p rix , dont l’acte por
tait quittance, elle s’était fait consentir une obligation, dont le
sieur Gineste fils s’était emparé.
E n conséquence, ils firent des saisies-arrêts dans les mains
de tous ces débiteurs de la succession.
Nous verrons bientôt comment Pierre Gineste enleva des
titres précieux déposés chez l ’abbesse de Brageac, et qu’ il redou
tait singulièrement de laisser connaître. Pout-être chercha-t-il
à en faire autant chez les religieuses d’Argenlac; mais soit qu’il
n’y parvînt p a s , soit de concert avec elles , elles firent vendre ce
mobilier en place publique, on y appelant seulement Gineste
père et lils ; et la vente, frais déduits, produisit 96 liv. 7 sous
5
2 deniers.
Quant à la dette de Chantegrie, les Gineste se voyant décou
verts , avaient pris une autre tournure; au moyen de quelques
créances trouvées clans la succession , et auxquelles ils s’étaient
fait subroger, ils avaient ouvert un ordre, lors duquel ils
�( 4 3
se firent colloquer pour 1,742 francs, par sentence de 1765.
A in s i, par une main-mise générale, et par des manœuvres en
apparence régulières , mais qu’on ne révélait aux Daymard et
Couderc qu’à mesure qu’ils faisaient des découvertes , les
Gineste préparaient un long procès à des créanciers simples
et de bonne foi.
>
Cependant ces créanciers, convaincus de jour en jour que
toutes les démarches des sieurs Ginesle étaient une fraude diri
gée contr’e u x , conclurent, par requête du 11 mars 1 7 8 5 ,^
être reçus à prouver que postérieurement à 1770, Pierre Gineste, fils d’Emeric (décédé alors), avait fait acte d’héritier
en vendant des objets de la succession , et payant des dettes :
subsidiairement ils conclurent à ce qu’il rendît compte du
bénéfice d ’inventaire.
E n 1786, ayant appris que l’abbé Second était décédé, ils
conclurent à la reprise contre les Gineste en qualité de ses
héritiers; et on voit dans un mémoire du
juillet de la même
année, qu’ils y observent que l ’abbé Second est mort créancier
de sa légitime paternelle et maternelle, et que les Gineste doi
vent la rapporter pour faire face à la dette de la Muraillat.
On voit bien une réponse à ce mémoire de la part des G i
neste, sous la date du 29 août 1786; mais on n’y a pas remar
qué qu’ils aient trouvé une seule objection à faire contre cette
demande de la légitime paternelle de l ’abbé Second.
On a élagué de cette procédure toutes les chicanes et conclu
sions de forme des Ginesle , qui, à chaque suspension deproce
dure, commandée par plusieurs décès successifs des parties et
des procureurs, et plutôt par le besoin de surveiller leurs dé
marches , ne manquaient pas de demander des péremptions,
sur-tout lorsque le tems de la prescription fut venu; et quand
ils n’y réussissaient pas, ils demandaient leur renvoi de T o u
louse à A u i'illac, pour rendre commun aux Daymard un compte
bénéficiaire qu’ils y avaient présenté en 1 7 7 2 , à un créancier de
210 francs.
�(5 )
C ’est en cet état que fut rendu au parlement tle Toulouse , sur
productions respectives , entre les parties , et par défaut, contre
les tiers saisis, le 9 mars 1789 , lin arrêt qu’il faut mettre en son
entier sous les yeux de la co u r, puisque les difficultés princi
pales qui s’élèvent aujourd’hui, naissent de son exécution.
» Notredite Cour..........démet ( les Gineste ) des demandes
« à ce que l’instance soit déclarée périmée. . . . . ; condamne
« lesdits Delzor (ve u v ed e Pierre Gineste) , Parlange (tuteur),
« Feneloux et Marguerite Gineste mariés , en leurs qualités
« d'héritiers de Joseph S e co n d , fils de ladite Duvel de M u
te ra illat, et oncle maternel dudit Pierre Gineste , à p a ye ra u x « dits Daymard et Couderc, à concurrence de la légitim e duv dit Joseph S e co n d , la valeur des renteà vendues à leurs pères
« par ladite Duvel de Muraillat, par l’acte du xo janvier 1766,
«
k
«
«
«
«
suivant l ’estimation qui sera laite desdites rentes, de l’autorite de noire Cour, relativement à l’époque de l ’éviction, par
experts , avec les intérêts le'gitimes de ladite valeur , qui
seront fixés par lesdits experts..........et demeurant la déclaration fa ite par ledit fe u P ie r r e -J e a n G ineste devant les
ordinaires de Pleaux ; qu'il n'a accepté, en qualité de tuteur,
« la succession de ladite D u v e l son aïeule , que sous bénéfice
« (£inven taire, et recevant la répudiation de ladite succession,’
« a ordonné et ordonne q u ’à concurrence des sommes dues aux-’
« dits Daymard et Couderc, tant en capital, intérêts que dé« pens , ladite Delzor et ledit Parlange seront tenus, chacun
« comme les concerne , de rendre com pte auxdits Daymard et
« Couderc , de tous et chacun les meubles et effets mobiliers
« qu’ils ont reçus, provenans de la succession de ladite Duvel
« de Muraillat , ensemble des fr u its , intérêts et jou issa n ces
« jusqü’à cejourd’h u i, tant desdits meubles et effets que de tous
« autres biens par eux possédés, et dépendans de ladite succes« sion , suivant l’état que lesdits Daymard et Couderc en don« lieront, sauf les impugnations et exceptions de droit ; comme
« aussi ordonne que lesdits Parlange et Delzor seront tenus en
�(6 )
« leurs dites qualités de rendre compte de toutes ef chacunes les
k sommes , que lesdits Daymard et Couderc justifieront avoir
« été payées par ladite Duvel de M uraillac, à la décharge de
« l ’hérédité de Gaspard Second , et deles rembourser, le cas y
« échéant ; et déclarant les défauts pris contre lesdits Chantegrie« Lavigerie, les religieuses de Ste.-Ursule d’Argeutac, l’abbesse
« du couvent de.Brageac, et Jean Tillet tous bancaires, bien
« poursuivis et entretenus; ordonne qu’ils remettront, chacun
« en droit soi, auxdits Daymard et Couderc, les sommes en leurs
« mains bannies, à la requête de ces derniers, et ce, à concur« rence des sommes capitales, et que pour le surplus desdits
« banimens , lesdits banitaires en demeureront dépositaires
« jiiSQU d L apurement du compte d rendre,* comme aussi dans
« le cas que les sommes qui seront délivrées auxdits Daymard
« et Couderc ne seront pas suffisantes pour remplir le montant
« des condamnations prononcées en leur faveur par le présent
« arrêt ; leur permet d eJaire sa isir , d’autorité de notre C ou r,
«
«
«
«
u
a
les'im m eubles et autres o b je ts , qu’elles découvriront être1
dépendant de la succession de ladite Duvel. Sur toutes autres
demandes, fins et conclusions desdites parties, les a mises , et
met hors de cour et de procès ; condamne lesdits Delzor et
Parlange, comme procèdent, au x dépens de V in stan ce, envers lesdits Daymard et Couderc , taxés à
1 fr. i g s.
23
L a première opération, faite en exécution de cet arrêt
fut'
l ’eslimation des objets évincés. L e rapport des experts , en’
date du 22 février 1790, les évalue à 7,526 IV. 10 s. à quoi
ils ajoutent les intérêts de 1756 à 1782, fixés a 10,998 f. 17s. 9 d.
de sorte que la créance des sieurs Couderc et Daymard , à ladite
époque de 1782 , a été reglée à 18,624
7 s ..9 d.
Ce rapport a été homologué par un 2.e arrêt du o avril 1790.'
3
L e 19 janvier 1791 i après la suppression du parlement de
Toulouse, les héritiers Gineste assignèrent les héritiers Couderc
et Davmard devant le tribunal du district de Salers pour pré
senter le compte ordonné ; c’est ce compte qu’ il s’agit de dé
�(7 )
battre, et sur lequel il ne faut pas méditer lo n g -te in s , pour
s’appercevoir que de pre'tendus héritiers bénéficiaires s’efforcent
d’expolier un créancier légitim e, en ne révélant que ce qu’ils
ont cru le plus en évidence.
Avant de parler de ce co m p te, disons un mot de la position
de la dame Duvel de Muraillac , à son décès.
Mariée en 1720, elle eut pour oo fr. de bagues et jo yaux,
5
ou augment.
Elle fut héritière fiduciaire de son m ari, par testament de
1731 ; mais légataire personnelle des revenus.
Elle fut héritière fidéicommissaire de Marie-Jeanne Second,
femme d’Emeric Gineste, sa fille, par testament de 1744 , et
encore légataire personnelle des jouissances.
Elle f u t , pendant longues année?, fermière de Pleaux ; et
çlle passait pour la personne la plus aisée de l’endroit.
Elle laissait en immeubles plusieurs vignes et une terre de
deux septerées, plantée en châtaigniers.
Elle avait vendu un immeuble au sieur Lavigerie : le contrat
portait quittance ; mais il y avait une contre-lettre. ( No t a. U n
créancier en eut connaissance, força le sieur Gineste à rapporter
la somme : ce'qui donna lieu à l ’ordre dont on a déjà parlé ).
Elle avait vendu un moulin aux religieuses d’Argentac; et,
par une contre-lettre, ces religieuses s’étaient obligées de nourrir,
pendant trois ans , une demoiselle que devait envoyer la dame
de Muraillac. Cette contre-lettré était encore dans les papiers
de sa succession.
Enfin, comme on l’a déjà dit, elle avait fait, peu de tems avant
sa mort , 1111 dépôt de papiers et d ’argenlerie entre les inains
de l’abbesse de Brageac, pour remettre à l ’abbé Second son fils,
L e s r. Gineste n’avait pas eu plutôt connaissance de ce dépôl, qu’il
avait couru a l’abbaye de B ra geac, pour le réclamer. Juge de cette
abbaye , il dut persuader ou épouvanter une religieuse simple et
scrupuleuse, qui craignit d’avoirparu favoriser uulégitimaire, au
�(8 )
préjudice de l'institué. Comment d ’ailleurs s’exposer à uil procès
contre le sr. Gineste, juge, a vo cat, et qui passait sa vie à plaider?
L ’abbesse de Brageac devait faire valoir une saisie-arrêt faite
entre ses mains par les sieurs Daymard et Couderc ; mais le
sieur Gineste leva encore cette dilïiculté, en donnant une ga
rantie à l’abbesse de Brageac , et se soumettant à représenter le
dépôt aux créanciers.
Cette dernière particularité ne fut connue des sieurs Dnymard et Couderc, qu’après l ’arrêt de 1789, par une opposition
que fit l ’abbesse de Brageac, le 11 septembre 1790, à l’exécution
dudit arrêt, commencée contr’elle à leur diligence.
Cependant ils gardèrent le silence sur cette révélation, pour
savoir si les Gineste comprendraient dans leur compte ces objets
non inventoriés, ou s’ ils auraient l’infidélité de les taire.
Il ont eu cette infidélité.
L e compte rendu est divise' en trois chapitres de recette 7 èt
un chapitre de dépense.
3
L e i . er chapitre de recette n’a que articles.
I . er A rticle: 100 fr. pour le mobilier de la dame de Muraillac,
parce q ue, dit-on, il a f a l l u distraire de son inventaire, fait en
1 7 6 1 , le montant de celui du père, fait en 1781 , par la raison
q u ’elle avait retenu ce mobilier, en vertu du testament de 1731.
Article : oo fr. pour les bagues et joyaux de ladite M u
5
raillac. ( N ota. Les Gineste ont jugé à propos, après avoir fait
régler l’article à cette somme, par un jugement par défaut, de
réduire l’article à 66 liv. 12 sous 4 deniers , en disant que leur
mère n’avait droit qu’à une portion virile de ses propres reprises ).J
3 .e Article .*400 fr.
pour tous les arrérages de la ferme de
Pleaux, touchés par eux api'ès sa mort.
1
a . e Chapitre de recette, un seul article,
Composé des immeubles de la succession. Il n’est présenté
que pour mémoire.
.e Chapitre de rece tte, un seul article.
3
Des jouissances desdits immeubles depuis 1761 jusqu’à '1790«
à
�(9 )
• à 20 fr. par a n , attendu que l ’évalution dans les rôles ne porte
le produit net qu’à 11 fr. ; c’est, pour 29 ans. . .
o 1.
s*>
>Chapitre de dépense, 20 articles;
58
i . ° Reprise sur le mobilier...................................900
3
2.0 et .° L e sieur Gineste est créancier person
nel d e ................. ... ..................................................... .
<708
4.0, .®et 6.° Il est créancier, pour legs fait à
Marie-Jeanne Second, par Jeanne Muraillac , de
7 .0 Frais de maladie et enterrement.....................
546
114
8.° Frais de scellés , inventaire , requêtes,
exploits et affiches .......................................................
90
5
i
3
9.0 Pour valeur d'immeubles paternels, vendus
à M e d a l , par la Muraillac.................... ............. ... . 1,000
io.° et i i .° Payé au sieur L anglad e, ou gardes
baillistes de Saint-Projet, et frais . . . V ..............1,224
12.0 Payé à Etienne Boyer, créancier.................
3
1IO
1 .0 Pour frais faits contre ledit Boyer , pour
lui rendre compte du bénéfice d’inventaire . . . .
60
14.0 Pour impôts de iy 5g à i 7 7 i , o u pour in
térêts d’une créance Lacoste......................................
97
14
i .®Plus, au sieur Bastide, créancier d’un billet.
174
16
5
16.0 Plus , au sieur Vaissière , créancier d’un
billet . ............................................................................
144
17 .0 P lu s , à l’abbesse de Brageac, pour pro
messe du 26 mai 1761...................................................
72
18.0 Plus, au sieur Biard , créancier par sen
tence de 1742 , ............................................................
201
17
ic).° Pour les dépens auxquels Sont condamnés,
par l’arrêt de 1789...................................................... ...
23i
19
20.0 Pour les frais du présent compte.......................96
�( IO )
D ’où il suit que la dépense excède la recette de 4,191 //V:
6 den.; et les Gineste en concilient qu’ils doivent être renvoyés
de la demande (1).
5
Ce compte fut débattu par requête du novembre 1791; et
indépendamment de la critique faite aux articles ci-dessus, les
sieurs Couderc et Daymard firent un chapitre d ’omissions com
posé de
articles ;
i .° Pour la somme touchée par le sieur Gineste,
du sieur Chantegrie , acquéreur de la Muraillac . . . 1,782 .
5
1
2.0 Pour les trois ans de nourriture due par l ’ab
baye cVArgeutac , et dont Gineste avait donné ac
1,200
quit en 1 7 7 0 .................... .................................................
.° Pour valeur du dépôt retiré de l ’abbesse de
Brageac..................................................." . .......................... 10,000
4.0 Pour dix-sep t années de jouissances que lu
3
Muraillac avait eu droit de toucher des biens de
son mari, en vertu du testament de 1744, et dont
Gineste s’était emparé; la succession valant 80,000 fr. 34,000
.° Pour la quarte trébellianique qu’elle avait eu
droit de retenir sur ladite succession , d’après ledit
testament.............................................................................. 20,000
5
Par la même écriture, les sieurs Daymard et Couderc obser
vèrent que la légitime de l’abbé Second , dont les adversaires
sont héritiers , aurait dû être fixée ; et que comme il a recueilli
un sixième dans les biens de Gaspard Second , son p ère , il s’agit
de représenter ce 6.e pour faire face aux condamnations de l’arrêt
de 1789. En conséquence, ils indiquèrent les immeubles devant
servir à composer ladite légitime,
(1) E n 1772 » Gineste avait présenté un semblable compte à Etienne
B o y e r , d éno mmé aux articles 12 et i 3.
*
Al ors la dépense excédait la recette de a,304 fr. seulement.
Etienne Bo y e r n’ en a pas moins su se faire p a y e r , comme le prouvent
Icsdils
12
art.
et j3.
�•.
( 11 )
Ils conclurent, en conséquence, à ce que, sans s’arrêter au
compte frauduleux, présenté en 1790, les adversaires fussent
condamnés en leur nom.
Subsidiairement à ce que les adversaires fussent tenus de con
tester , dans la huitaine , la composition de la légitime de l’abbé
Second, sinon la déclarer suffisante, et condamner les adver
saires à en payer le montant, en exécution de l’arrêt ; sauf, en
cas de contestation , à faire estimer la succession.
Et en ce qui touche la succession bénéficiaire, et audit cas ,
à ce que les chapitres fussent réglés aux sommes ci-dessus , et
les adversaires condamnés aux dépens, sous réserve de pour
suivre les tiers-saisis , et dô faire saisir les immeubles , en con
formité de l’arrêt.
Les adversaires répondirent à ces débats par une requête du
16 mars 1792 ; et persistant dans leur compte, ils s’attachèrent
principalement à soutenir que l’arrêt de 1789 ne soumettait
au payement de la créance Daytnard et Couderc , que la le'gitimc maternelle de l’abbé Second.
Subsidiairement ils prétendirent qu’ il avait accepté la desti
nation de la légitime paternelle fixée à 1,000 fr. par le testa
ment de 17 3 1, et qu’il avait donné plusieurs quittances, soit
par des lettres missives , soit par un acte de 1752.
Quant au dépôt de Pabbesse , ils dirent, sans beaucoup de dé
tail (quoique la requête ait cent douze rôles) , qu’ils offrent com
munication de titres pris chez l’abbesse , lesquels ne signifient rien,
et que d’après l’arrêt, c’est aux Couderc et Daymard à indiquer
en quoi consistent les biens de la succession de Muraillac.
Les Ginestesenlaient bien (pie leur désir de soustraire ces deux
points principaux’ était singulièrement contrarié par l’arrêt du
parlement de Toulouse. A ussi, dans leur requête, firent-ils une
sortie vigoureuse contre ce parlement pour lui reprocher son
arrêt.
L'injustice de cet arrêt, disaient-ils, est révoltante , en ce qu’il
a jugé l’abbé Second, héritier pur et sim ple de sa mère : car
�( 12 )
Gine'fe étant héritier bénéficiaire, on ne p o u v a it, su iva n teu x ,
soutenir l’autre héritier pur et simple, suivant Dumoulin. « C ’est
« a in si, s’écriaient-ils, que des gens qyi ont acheté le droit de
« juger les hommes, remplissaient leur devoir. E t on s’est laissé
« entraîner par le torrent d’un siècle de despotisme, au point de
« regarder jusqu’à présent leurs jugemens comme des autorités
« respectables ».
Il faut croire que cet anathème, né à Salers, n’a pas au
trement nui à la réputation des magistrats de Toulouse, et que
leur arrêt n’en sera pas moins respecté.
L a cause était sur le point d’être jugée en 1793 , lors de
la suppression des droits féodaux, fort étrangère sans doute
à la contestation. Mais le tribunal de Salers , qui ne voulut
pas imiter le parlement de Toulouse, et se laisser accuser de
despotisme , ordonna qu’il en serait référé au comité de légis
lation , pour savoir s’il devait prononcer sur une vente de
rentes féodales, faite en 1756.
3
L e comité de législation répondit le 7 thermidor an
, au
tribunal de Salers , qu’il n’avait rien à juger sur la vente
féodale de 1756 , puisqu’il y avait un arrêt , et qu’il n’avait a
S’o c c u p e r que de son exécution ; qu’ainsi il devait passer outre.
Pendant c e tems-là le tribunal de Salers cessait d’exister, et
les femmes Couderc et Daymard assignèrent les héritiers Ginestc, par exploit du i . er fructidor an 4 , devant le tribunal
civil du Cantal pour voir donner acte de l'aveu , fait par les
Gineste , d’avoir retiré le dépôt de l’abbessede Brageac; en con
séquence être condamnés, en leur nom, à payer la créance ;
subsidiairement composer la légitime de
1abbe Second, d'un 6.e
des biens de Gaspard Second, et apurer le compte de la succes
sion Muraillac , de la manière exprimée en la requête du
5
novembre I7 9 1*
L e 14 pluviôse ail , les Gineste obtinrent tin jugement par
d é fa u t, lequel homologue l’entier compte présenté par les ad
5
versaires, à l ’exception de trois articles \ savoir , i.° l’intérêt des
�(
i
3
)
gains nuptiaux ; z.° des revenus de vingt-neuf ans, portés au
.e chapitre de recette ; .° de l’art. i du chapitre de dépense.
Autorise les adversaires à prélever les autres articles de dé
pense , en capital et accessoires.
Ordonne qu’ils seront tenus de se charger en recette des in
térêts de oo fr. montant des gains de survie depuis le décès de
3
3
5
5
la Muraillac.
Ordonne , avant faire droit sur l ’article des jouissances , qu’ils
seront estimés par experts, depuis et compris 1761 jusqu’à ce
jour.
Ordonne aussi, avant faire d roit, que la signature relative à
l’article i
5 du chapitre de dépense, sera vérifiée par experts.
Délaisse les Gineste à se pourvoir contre la femme Couderc ,
en remboursement de oo fr. par elle reçus pour la moitié de la
légitime, est-il d i t , de l’abbé Second , comme ladite somme ayant
été induement perçue avec l ’intérêt à compter du paiement.
( Nota. Ce dernier chef paraît être ajouté d ’oflice, sans con
clusions expresses ).
Condamne les Daymard et Couderc aux dépens.
5
Les femmes Daymard et Couderc formèrent opposition à ce
3
jugement, et les parties en vinrent à l’audience du i thermi
dor an , où les Gineste conclurent au débouté d’opposition,
et demandèrent à ne porter en recette qu’une virile dans les gains
5
5
nuptiaux de oo f r .; de leur p a r t, les Daymard et Couderc
persistèrent dans les conclusions ci-devant rapportées.
5
Par jugement du 14 thermidor an
, le tribunal du Cantal
prononça sur le tout, ainsi qu’il suit : i.° En ce qui touche la de*
inande en paiement personnel delà créance, il juge que les qualité»
des parties sont réglées par l ’arrêt de 1789 , lors duquel il fut
question du dépôt de l’abbesse de Brageac , et qu’on ne peut plus
remettre en question une chose jugée; que Picn-è Gineste avait
fait état des objets déposés et par lui retirés; qu’on en offre la
communication , et qu’il n ’est allégué aucune soustraction des
�c
1
4
5
pièces , or ou argent provenant du dépôt touché par Gineste.
z:° En ce qui louche la question de savoir si l ’arrêt parle de
la légitime paternelle de Jean Second, le tribunal juge que Jean
Second, étant réduit à une légitime de droit du chef mater
nel, et mort avant que Gineste prît la qualité d’ héritier béné
ficiaire en 1786, il n’a pu être tenu des dettes de sa mère que
sur son 6.e des biens maternels; que si 011 donnait à l’arrêt de
1789 une extension sur la légitime paternelle, ce serait prêter
aux juges qui l’ont rendu, une, ignorance des principes, invrai
semblable, et une contradiction manifeste, parce que si Jean
Second avait été assujéti sur les biens paternels, ce n’aurait pu
être que comme héritier pur et simple de la D u v e l , et alors
les mineurs Gineste, héritiers médiats de leur oncle, auraient dû
être condâmnés personnellement, tandis qu’ils ne l’ont été qu’à
rendre compte du bénéfice d’inventaire de la D u vel, et cette
dispôsition de l’arrêt ne paraît avoir été mise que pour que les
mineurs Gineste ne pussent demander la distraction du 6.e du
chef de Jean, sur la succession de la Duvel; d’où il suit que cette
condamnation ne peut porter que sur la légitime maternelle.
- Il est, ajouté que les paiemens faits parles Gineste, sur la lé
gitime paternelle de Jean Second, l’ont été par erreur et con
trainte , àxi en vertu des jugemens de Salers ; que le tout doit
êjre réparé en définitif, et que Jean Second ayant approuvé le
le legs et destination, en fournissant des quittances, acceptant
le titre, et se faisant payer les revenus en majorité, n’ayant ja
mais formé demande en supplément, les Dayniard et Couderc ,
après plùi de trente ans «le majorité, xi auraient jamais été recevables à exercer îles droits prescrits.
3.°
En ce qui touche les gains nuptiaux, il juge que d’après
les novëlles 98 et 127, la Muraillac. n’avait pu retenir qu’une
virile de s e s gains’nuptiaiix en propriété, et qu’il y a eu lieu de
changer les conclusions,
4.0 E h'ce qui touche les jouissances de la succession de Gas
pard Second, léguées à la Muraillac en 17 3 1, il juge qu’en ren-
�( i
5
)
dant le fidéicommis, elle ne s’est rien réservé; que le compte
énoncé au contrat n’est pas rapporté ; qu’elle n’a joui de la
maison, grange et jardin, qu’en vertu d’une contre-lettre non rap
portée , mais rappelée au testament de 1744, et au traité de 1747.
.° En ce qui touche les jouissances de la succession de
5
Marie-Jéanne Second, léguées à la Muraillac en 1744, il juge
que la Muraillac, ayant fait la remise de l’hérédité, sans rien
réserver, et sans faire publier la substitution , n’a pas eu droit
aux jouissances ; qu’il ne paraît pas qu’elle ait demandé judi
ciairement l’exécution de ce testament.
6.° En ce qui louche la quarte , il juge que la Muraillac ,
n’ayant fait aucun inventaire, l’avait tacitement abdiquée; que
d’ailleurs si elle avait joui, les trois quarts des fruits auraient
dû être imputés sur la quarte, et l’auraient absorbée.
7 .0 En ce qui touche l’abbaye d’A rgentac, il juge que rien
ne prouve que les Gineste en aient fait leur profit.
8.° En ce qui touche l’ indemnité demandée en l’art. 9 du
chap. de dépense, il a pensé que le testament de 1744 s’y oppo
sait, et que cette réclamation n’était pas fondée.
9.0 En ce qui touche les art. 2 , 3 ,
4 , 5,
10 et 11 du chap. de
dépense, il juge que, les premiers étant compensés par le traité
de 1747 , et même le ¡sieur Gineste étant resté débiteur de la
•Muraillac, de 678 f. 14 s., cette somme doit être portée en recette,
ou compensée avec, les 1,200 fr. de l’art. 10.
.
■
>
10.0 En ce qui touche le mobilier porté en l’inventaire de
1761 , et sur le fait de savoir s’il fallait déduire le mobilier de
17 3 1, il juge qu’il n’y a lieu de rapporter que les objets recon
nus n ’être pas les mêmes qu’en 17,31.
i i .° En ce qui touche l’art, i.er t]e dépense, relatif au mobilier
manquant, le tribunal du Cantal pose la question, et n’y donne
aucun motif de décision; mais il y a déboulé au n.° 6 ci-après.
En conséquence , ledit jugement définitif, du 14 thermidor
an , « i.° déboute les femmes Daymard et Couderc de leur de-
5
<tt mande eu condamnation personnelle, sauf à elles à prendre
�( 16 )
« communication de l ’état des pièces et actes déposés ès-mains
« de l ’abbesse de Brageac, et prendre à cet égard telles conclu«' sions qu’elles aviseront ;
« 2.0 Ordonne que la condamnation portée par l’arrêt dû par
te lement de Toulouse, du 9 mars 1789, en payement de la légi« tirne de Jean Second, n’a dû ni pu porter que sur la légitime
« maternelle, et nullement sur la légitime paternelle ; en consé« quence, ordonne que toutes les sommes payées par les Delzor
« et Gineste, à la suite des procès-verbaux et jugemens de pro*
« vision, seront portées au chapitre de dépense, ou compte de
« bénéfice d’inventaire de la succession de Marie Duvel ;
« .° Ordonne qué la somme donnée par Gaspard Second à
« la dame D u v e l, en leur contrat de mariage, sera réduite à
« i66.1iv. 1 sous 4 deniers pour le tiers faisant la portion virile,
« avec intérêts à compter du décès de la dame Duvel;
3
3
« 4.0 Déboute lesdits Daymard et Couderc de leur demande
« à fin de payement des jouissances de la succession de Marie« Jeanne Second, et distraction de la quarte trébellianique;
« 0 Les déboute de leur demande à fin de payement de la
« pension stipulée par Marie D u v e l , avec les religieuses d’Ar« gentac;
« 6.° Les déboute de la demande en rapport de 1,700 francs,
« montant de la collocation faite à Emeric Gineste, par la sen
5
te tence d’ordre de 1765 ;
« 7 .0 Déclare les Gineste non-i’ecevables a porter en dépense
5) 1,000 fr. pour dédommagement des aliénations faites par Marie
« D u v e l, de certains héritages de la succession, vente de cabanx,
« marchandises énoncées en 1 inventaire fait après le décès de
« Gaspard Second, ainsi que de la créance Faure, et legs fait à
« Jeanne-Marie Second; en conséquence, ordonne que les ar-
3
5
« ticles 1 , 2, , 4 , , 9 du chapitre de dépense seront rejetés;
« 7.0 Ordonne (pie le chapitre de recette sera augmenté de
ci 678 liv. 4 sous 4 deniers pour les causes du truité du 8 octobre
« 1747, pour être ladite somme compensée au désir dudit traité,
« avec celle de 1,200 fr. payée au fermier de Saint-Projet ;
�7
( i
)
• « 8.° Ordonne que les Gineste seront tenus de représenter les
« meubles reconnus par l’inventaire fait après le décès de Mario
« Duvel, être en sus de ceux portés en l’inventaire fait après le
« décès de Gaspard Second, pour iceux être vendus, s’ils sont
« en nature, ou en payer la valeur suivant l’estimation; décharge
« les Gineste de la délivrance du surplus des meubles;
« 9.0 Avant faire droit sur le surplus des articles du compte,
« et sur les demandes en main-levée du sursis, ordonne qu’il
« sera procédé à l’estiinalipn des fruits et jouissances des im« meubles de la succession de Marie D u v e l, depuis son décès
« jusqu’à ce jo u r , et des meubles ci-dessus, etc. dépens réservés. »
Tel est le jugement dont les héritiers üaymard et Couderc ont
interjeté appel. Ils vont, pour proposer leurs moyens avec plus
de clarté, parcourir séparément les chefs qui leur ont paru coït*
tenir des erreurs à leur préjudice, en suivant l’ordre même des
motifs dudit jugement.
r' '
1. Dépôt de L'abbesse de Brageac.
\ Des créanciers légitimes , qui disputent ce qui leur est dû
contre.¡un héritier soi-disant bénéficiaire, méritent toute la la
veur de la justice; car tout est caché pour eux dans une famille
étrangère : il faut donc que la conduite de l’ héritier bénéficiaire
soit franche et de bonne foi. Il ne doit rien retenir ou dissimuler;
et si apiôs son inventaire de nouveaux objets parviennent, soit
en ses mains, soit à sa connaissance, il est de sou devoir de les
faire (inventorier à lÜnslant :,car les créanciers doivent tout voir
•dans l’inventaire,' sans rieii chercher hors de cet acte. Tout cela
est d’équité et de principe. Voyons maintenant si le sieur Gineste
s’y est conformé.
;
t viLa, dame Mtirïitllac, veuve Second , voyant qu’elle avait plaidé
;t0ute sa vie av£Q le sieUr Emeric Gineste père, et que le sieur
¡Pierye Gineste son fils croissait avec les mêmes dispositions ,
conçut des inquiétudes au sujet de Jacques Second , prêtre ,
3
�-c
1 8 }
.
'son fils, qui déjà , pour avoir sa pension du séminaire, avait été
forcé aussi de soutenir un ou deux procès.
Elle déposa dans les mains de la dame Dhauzers, abbesse de
"Brageac, un sac de papiers, et une corbeille d’argenterie, pour
le remettre, après sa mort, à l ’abbé Second. L e sac contenait,
à ce qu’il paraît, plusieurs titres et obligations qui étaient des
créances de la veuve Second, tant contre divers particuliers,
que contre la succession de son mari. Il est notoire que sa ferme
de Pleaux était très-lucrative, et qu’elle avait un porte-feuille
considérable. Nous avons dit qu’elle mourut en 1761.
L e sieur Gineste se porta seulement héritier bénéficiaire, et
fit, en cette qualité, procéder à uu inventaire en la même année
1761.
Supposons , si on ve u t, que, lors de cet inventaire, il ne con
naissait pas ce dépôt.
Mais quand il est allé le retirer, devait-il s’abstenir de faire
ajouter ces objets à l’inventaire ?
*'
Il était avocat et juge de Pleaux; 'il ¿tait de plus juge de
l'abbaye même de Brageac. E ta it-il de bonne foi en retirant
pour lui seul, et non pour les créanciers , un objet inventorié?
Etait- il de bonne foi en induisant en erreur desTeligieuses qui
avaient pleine confiance en lui?
L es sieurs Daymard et Couderc avaient fait une saisie-arrêt
entre les mains de l’abbesse, le 22 août 1764.
Quand leurs veuves voulurent l’assigner sur leur saisie-arrêt,
en 1780, elle re'pondit, par une requête du 21 juin 1783, qu’à la
vérité la dame Second lui avait remis un sac cousu, contenant
des papiers, sans aucun état ou mémoire, et une corbeille de
jo n c , contenant o liv. à’étain travaillé, pour remettre, après
son décès , à l’abbé Second, son fils, alors a Paris; qu’elle remit
ce dépôt au sîeùr Gineste, en 1772 , et avait dû le lui remettre,
parce que la dame Second et l’abbé étaient m orts, et que Ids
sieur Daymard et Couderc s’étaient absentés; que d’ailleurs il
y avait prescription.
3
�9
( i
)
A v a n t cette signification, l’abbesse avait marqué à la veuve
Lacroix , par une lettre du 26 mai 1776, que M. Gineste, hé
ritier sous bénéfice d’inventaire, et autorisé en justice, avait
retiré ce dépôt, et l’avait porté à Aurillac, avec l’inventaire des
effets de la veuve Second.
Ainsi le sieur Gineste avait persuadé à cette dame qu’il était
autorisé de la justice pour retirer ce dépôt.
Il lui avait persuadé, pour vaincre ses scrupules sur la desti
nation du dépôt, que l’abbé Second était mort en 1772 , à Paris ;
et il n’est mort que le 21 avril 1777.
Il lui avait persuadé que les sieurs Daymard et C ou derc,
créanciers saississans en 1764, s’étaient absentés, et il savait
qu’ils étaient morts.
Il parlait de péremption à une religieuse qui devait certai
nement le croire; et cependant il savait bien qu’une saisie-arrêt
ne périme pas.
Voila donc comment agissait un héritier bénéficiaire envers
des créanciers, ou plutôt envers les veuves de deux créanciers,
pctrce qu’il lui était bien aisé de dénaturer alors tous les papiers
dont il venait de s’emparer, au risque de dire , comme il l’a fait,
qu’on 11e peut pas diviser sa déclaration.
Ilemarquons cependant les suites de cette infidélité. Il était en
procès en 1772; lorsqu’il retira ce dépôt, il garda le silence, il
ne fit rien constater ; ou du moins s’il y eut un récépissé dé
taillé , il n’a jamais voulu le produire.
, Il présenta un compte de bénéfice d’inventaire en 1772, et
ne dit pas qu’il avait des objets non compris en l ’inventaire
de 1761.
, Quand il a vu qu’on poursuivait en 1780 l ’abbesse de Brageac,
il a retardé le plus qu’il a pu les édaircissemens à cet égard.
79
Ce n’est qu’en » 1 c]u’il signifie un compte, quand il voit que
trente ans d’intervalle ont tout dénaturé, et que les créanciers
Daymard et Lacroix seront hors d’état de découvrir en quoi
consistaient les papiers, qu’il a enlevés lui-même, malgré leur
�( 20 )
85
saisie. C ’est alors, ou plutôt en i o , et après quarante ans ,
qu’il leur dit séchemçnt : Ces papiers étaient inutiles, vous ne
prouvez pas le contraire, donc ma déclaration doit prévaloir,
parce qu’elle est indivisible.
N o n , il est impossible de ne pas voir dans cette conduite le
cas d’application des lois sur la déchéance du bénéfice d’in
ventaire.
- L ’inventaire, dit M. d’Argent ré, doit être la description fidèle
de tous les biens meubles et immeubles du défunt, et son objet
est de conserver aux créanciers tout ce qu’il leur importe de
connaître : inventarium descrïptio est bonorum mobilium et
irnmobilium de/uncti , vocalis creditoribus. . . . F in is ejus , ut
res salvœ sint creditoribus. . . . . Inveniarii. materia bona sunt
tam mobilia quàm im m obilia, nam etsi im m obilia auferri non
possunt et p a te n t, et fo r is cubant, ut loquun tur, tamen possessio eorum interverti p o te s t, et seçretb in alios transferri.....
E rgo hœreditaria om n ia, bond Jide describenda puto , et in
eo creditorum interesse versatur ; est enim inventarium instmmentum commune hœredis et creditorum. (A rt. 514, gl. ).
A la vérité, d’autres auteurs, ont pensé que l’état des im
meubles n’était pas absolument nécessaire, mais ils exigent au
moins la mention des titres de propriété, par les mêmes raisons
que les créanciers doivent être mis à portée de connaître, par l'in
ventaire , tout l’actif de la succession.
3
Il faut m ême, d’après d’Argentré, un tel détail dans l ’inven
taire, qu’il 11e se contente pas de l ’état approximatif des grains,
mais il veut qu’on les mesure, dici debetfrugum mens lira, nec
sufficit cumulum d ixisse; il veut quon estime chaque.objet, ou
qu’o n l e décrive de manière a ne pas en substituer un autre,
ne ejusaem nom inis spccies pro aliâ supponi p o s sit, viliorpro
m eliorc ,* ef il déclare que tout cela est d’autant plus indispensa
ble qu’il n’a que trop vu de fraudes de ce genre , au préjudice
des créanciers, adhibitis cujusque arti/icii opificibus. Il s’élève
'.même contre ceux qui penseraient qu’il ne faut pas autant de
�( ai )
précautions. C a r , pourquoi ne pas proférer, dit-il, ce qui est
plus utile et plus sûr? Quarc quod u liliu s el cautius displicet ?
- O r , toutes les fois qu’il y a des omissions dans l’inventaire
l’héritier bénéficiaire est déchu du bénéfice , et réputé malgré lui
héritier pur et simple.
Une loi romaine à la vérité semblait ne le condamner qu’à
la peine du double, qui est inconnue parmi nous; mais elle
était contrariée par d’autres lois , et la jurisprudence française
n’a jamais admis que la déchéance du bénéfice d’inventaire pour
les recelés ou omissions, comme on le voit dans Brodeau , Leprêlre, Furgole et Pothier.
, En effet & bénéfice d’inventaire n’était accordé par la loi que
1
sous la condition de faire un bon et fidèle inventaire. Si la con
dition n’était pas remplie il n’y avait plus de bénéfice.
y a même , dit Fachinée , qui a fait une dissertation
sur cette question , plus à reprocher à celui qui.fait des omis
sions, qu’à celui qui 11e fait aucun inventaire; car on peut croire
à l’ignorance de celui-ci plutôt qu’à son dol. Mais celui qui n’in
ventorie pas tous les objets de la succession , ou qui en dissimule,
aux créanciers, n’est pas digne du bénéfice de la loi. Ig itu r s i
11
hæres non descripsit omnia bona , ea occullando , non est
dignus beneficio legis. ( L i v . 4 , ehap. 37).
Aujourd’hui le Code civil a fait de ces principes une loi pré
cise en l’art. 801. « L ’héritier, qui s’est rendu coupable de recélé,
« ou qui a omis sciemment de comprendre dans l’inventaire des
« e/fets de la succession, est déchu du bénéfice d’inventaire».
O r , comment peut-on dire que Pierre Gineste n’a pas fait
cette oir.ission sciem m ent, lui qui se cachait des créanciers pour
demander à l’abbesse de Brageac un dépôt, dont la valeur et la
consistance n’étaient pas connues.
Dira-t-on que Gineste ne connaissait pas lui-même le dépôt
en 1761 ? mais qu’il lise l’inventaire, il verra la clause de style,
par laquelle Gineste, en affirmant 11e connaître aucun autre objet
de la succession, ajoutait qu’il déclarerait ceux qui viendraient
par la suite à sa connaissance.
�( 22 y
Sans cela l’inventaire ne serait le plus souvent qu’ une ébauche
inutile ; car quand les papiers d’une succession sont chez les no
taires ou huissiers pour des recouvremens, lors de l’inventaire,
il faut bien que l’héritier bénéficiaire en fasse un second, s’il
ne veut pas expolier les créanciers.
L ’usufruit des pères était bien plus favoi-able que le bénéfice
d’inventaire. Cependant quand il y avait lieu de leur part à faire'
un inventaire, ils étaient privés de l’usufruit, si après en avoir
fait un premier, ils n’ajoutaient pas dans un second ce qui sur
venait ensuite.
La sénéchaussée d’Auvergne a prononcé deux privations d’usuiruit en ce cas; en 1775, contre James Tournilhas de V o lo r e ,
et en 1788, contre Jasseaume Dolmet.
Les premiers juges ont écarté tous ces principes, en disant
qu’il y avait chose jugée à cet égard par l’arrêt de 1789, parce
qu’alors il avait été parlé du dépôt de l’abbesse de Brageac. ■
Mais où ont-ils vu qu’il eût été question le moins du monde
de la difficulté. L ’abbesse était en cause elle-même comme tierssaisi ; il s’agissait d’obtenir contr’elle une condamnation à vider
ses mains, et c’est là ce qui a été ordonné.
L ’objet de la demande était donc une saisie-arrêt contre l’ab
besse elle-même , ainsi il n’y a pas chose jugée , puisqu’il faut,
suivant les principes , eadem res, eadem persona, eadem causa
p e te n d i, ce qui est rappelé en termes plus précis encore par l’art;
i3 5 i
du Code civil.
Les sieurs Aymnrd et Couderc n’avaient pas même intérêt
alors d’abandonner leur action directe contre l ’abbesse de Bra
geac, pour la suivre contre un héritier bénéficiaire: et si un instant
il y a eu d e s conclusions contre le sieur Gineste, en condamna
tion personnelle , elles venaient de tout autre cause, mais non
de la réception du dépôt, puisque les conclusions prises contre
l’abbesse ont toujours subsisté, ont été même adoptées par l’arrêté
Ce n’est qu’après l’arrêt, après commandement à l’abbrsse d’y
satisfaire, et même après saisie-exécution et assignation pour la
�( î3 )
■ . •. ■
vente, que l’abbesse fut forcée de révéler, par notification du r i
septembre 1790 , qu’elle avait un billet de garantie d u sr . Gineste.
Ces poursuites prouvent donc que la chose jugée, quant au dépôt,
était encore personnelle à l’abbesse; et lorsqu’on a appris, pour
la première fois, que le sieur Gineste avait tout pris sur son compte,
j)ar une garantie, alors seulement il y a eu lieu d’agir conte lui,
pour faire valoir tout le résultat de l ’infidélité par lui commise.
M ais, ont dit encore les premiers juges, les qualités des parties
sont réglées par l’a rrêt, et sont dès-lors invariables.
Erreur encore ; car il n’y a d’indélébile que la qualité d’héri
tier pur et simple : car celle d’héritier bénéficiaire peut être
changée d’un instant à l’autre, suivant les circonstances.
Un hériter bénéficiaire peut n’être pas réputé coupable d’omis
sions, lorsqu’on juge seulement sa qualité. Mais s’il en est con
vaincu ensuite, la faveur changera ; et le moindre recélé bien
justifié, comme dit Rousseau-Lacombe , le fera déchoir à l’ins
tant du bénéfice d’inventaire.
Ici on a pu croire Gineste de bonne foi dans le retirement du
'dépôt de Brageac, tant qu’il était incertain s’il voulait se l’appro
prier; et le parlement de Toulouse, en|ordonnânt un compte de
la succession, a dû croire que le sieur Ginèste ÿ ‘ porterait les
objets par lui retirés.
Point du tout ; le compte est présenté en 1791 , et on n’y trouve
ni la corbeille contenant ce qu’on à dit être de l’étain, ni le sac
de papiers , qui devait bien être de quelque valeur, puisque
c’était un don manuel destiné à un légilimaire.
A lors, sans contredit, a commencé le drbit des sieurs Day
mard et Couderc , de dire au sieur Gineste : Vous ne pouvez plus
être héritier bénéficiaire , puisque vous retenez sciemment un
objet de la succession.
■
'
Dira-t-il qu’on a conservé l’action en rapport contre l’abbesse?
Ce serait aujourd’hui une chose idéale; mais d’ailleurs il a de-
�( H )
meure seul en prise par sa garantie ; et en exerçant même les
droits de l’abbesse , l’action revient à lui.
Or quelle est cette action? Un saisi, qui ne représente p a s ,
est condamné à payer la dette lui-même, après un délai de grâce.
L e sieur Gineste, garant de l’abbesse, doit y être condamné; et
ce sera la même chose que le déclarer héritier pur et simple.
Dira-t-il encore qu’il ne peut pas être tenu à plus qu’il n’a pris?1
Ce n’est pas là la question ; car , en sa qualité d’héritier par bénéjice d’inventaire, il suffit qu’à l’instant actuel on ne voie pas
dans l ’inventaire , ni dans son compte, ce qu’il~a retenu, il est
dans le cas de l’art. 801 du Code civil.
Un créancier ne peut pas être astreint à prouver les circons
tances d’un retirement de dépôt , qui a eu lieu en 1772. Il suffit
qu’il établisse le fait matériel de ce retirement; cela lui suffit.
Comment saurait-il même ce que l’abbesse dépositaire ignorait,
et ce que le sieur Gineste eut tant d’empressement de cacher?
Cependant les précautions du sieur Gineste n’ont pas empêché
qu’une partie de la vérité ne soit venue aux oreilles des héritiers
Daymard et Couderc.. Ils ont indiqué quelques-uns des titres qui
formaient le dépôt, et notamment une obligation de 3 , 4 0 0 fi\ ,
consentie au sieur Melon , puis_dénaturée par le sieur Gineste:
ils persistent.enqore-à .offrir Ja preuve de ce fait particulier, si la
c o u r la juge nécessaire.
,
S’il restait encore quelque.doute à la cour sur cette question,
15
la plus importante de toutes, puisqu’elle,dispense de juger celles
‘ t‘
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1
1
*
qui suivent, y a-t il à hésiter diuis 1 alternative de faire.supporler
une dehe sacrée a u x. deisc e nclans jCt 11 débiteur, ou de (aire perd rp
•
des ¡créanciers» (é^itimeSj?. Upe, familjp opulente jouit de la: suc
cession qui est le gage de la d^lje ; et il est bien clair que tout
ce qu’elle retient n’esl pas^cojinu. Les Daymard * au contraire,
trompés par la Muraillac, plaidant depuj^(i o oiip^pour.ravoip
5
.•l’argpti I- qu*j!?(,o” 1
Qucorc. N’y eu,t-il .qpe
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•^}e,?*%l?i (lu’;'.
P'?s: twmipés
P»)jîcle^ r^j^té^.par le^ premiers jugesj,
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il
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^5
)
il serait bien certain au moins qu’on a cherché à les duper en
tout. Alors comment, dans l’incertitude m ê m e , la Cour pren
drait-elle sur son compte de sacrifier le créancier légitime qui
perdrait évidemment, plutôt que l’héritier du débiteur qui ne
peut jamais tout perdre, puisqu’il lui reste la succession?
L a Cour peut d’autant moins se faire scrupule de condamner les
héritiers Gineste à-payer la dette des D aym ard, que déjà en 1772 ,
après un semblable compte , et malgré un déficit considérable,
les Gineste furent assez sages pour payer le créancier clairvoyant,
qui était plus à portée de révéler beaucoup. Ainsi ce ne sera au
jourd’hui que leur rendre la justice que déjà ils se sont rendue
eux-mêmes.
2. Légitim e de L’abbé Second.
Les Gineste ne veulent pas rapporter sa légitime paternelle
et cette résistance ne peut pas étonner : car un héritier bénéfi
ciaire a toujours pour règle exprimée ou sous entendue, qu’il ne
ne doit payer que le moins qu’il peut. Mais il est inconcevable
que les premiers juges aient adopté les sophismes ridicules qu’on
leur a présentés sur cette question.
Ils sont cependant condamnés par l’arrêt à rapporter deux
choses,
i . ° L a succession bénéficiaire de la Muraillac ;
2 .0 L a légitime de l’abbé Second.
Si la légitime était comprise dans la succession bénéficiaire; il
était inutile d’en faire un article à part, et de distinguer aussi
positivement la légitim e.
' Les Gineste , tant en leur nom
que com m e
héritiers de l ’abbé,
auraient été condamnés à rendre le compte de la succession ma
ternelle. Voilà tout.
A u contraire l’arrêt explique fort bien que la légitime est indé
pendante de la succession bénéficiaire, et les adversaires qui n’ont
4
�(•26 )
5
pas voulu l’entendre en l ’an , l ’avaient cependant fort'bien en
tendu en 1790.
Car ils avaient donné alors aux femmes Daymard un à-compte
sur cette légitime; et cet à-compte ne pouvait pas se régler sur
la succession de la mère, puisqu’ils prétendent qu’elle est obérée.
Il faut être conséquent avec soi-même, et répondre à un di
lemme bien simple : ou les quittances de 1791 sont données sur la
légitime de la mère, ou sur celle du père.
Dans le premier cas, l’inventaire est faux, et les adversaires
doivent être réputés héritiers purs et simples.
Dans le deuxième cas, la question est jugée par eux-mêmes.
Mais un bail de copie du 7 juillet 1791 , va la juger mieux
encore, et voici comment.
Par la quittance de 1790, il avait été payé
5oo fr. à Marianne
Couderc à compte de la légitime de Pabbé Second, en exécution
de l'arrêt du 9 mars 1789, sous réserve de répéter s’il y avait
d’autres quittances excédantes.
L e 7 juillet 17 9 1, on signifia à ladite Couderc cette quittance
avec une autre de 700 fr. du 2 octobre 1762, et on conclut à être
remboursé de 200 fr. payés de trop.
L a cour se rappelle que le testament de 17S1 avait fixé pour
légitime paternelle à l’abbé Second 1,000 fr.; et voilà pourquoi
Gineste, ayant payé 1,200 f., disaient avoir payé de trop 200 f.
l e s
" Ainsi le meilleur interprète de l’arret du 9 mai 1789 est le
fait personnel des adversaires, ou l’exécution même de cet arrêt.
Combien d’après cela devient mesquin et pitoyable le motif du
jugement dont est appel, qui excuse celte exécution, en disant
qu’elle a eu lieu par erreur et contrainte, ou en vertu d’un ju
gement provisoire.
Qui a pu révéler aux premiers juges qu’il y avait erreur et
contrainte, lorsque les parties n’ont pas demandé à être restituées
à cet égard? les moyens rescasoires ne peuvent pas être suppléés.
�( *1 )
Où aurait été la contrainte quand on a payé volontairement, en
exécution d’un arrêt souverain?
'L e bail de copie seu l, du 7 juillet 179 1, détruit tout cet échaffaudage d’excuses puériles.
S ’il y avait eu erreur, ce ne serait qu’une erreur de droit con
tre laquelle on n’est pas admis à revenir. Mais ce n’est pas là la
question, car il n’y a pas d’erreur, puisque un an après le paie
ment, on 11’en conteste que la quotité.
Les premiers juges accusent aussi d’ignorance le parlement
de Toulouse, s’il avait jugé que l’abbé Second devait rapporter
la légitime de son père, parce que, disent-ils, il aurait fallu l’y
condamner comme héritier pur et simple de sa mère.
Mais sans contredit c’est bien ainsi que le parlement l’a entendu;
et dû l’entendre.
Où ont trouvé les Gineste , qui paraphrasent à leur guise cette
partie obscure du jugement de St.-Flour, que l’abbé Second ne
fût pas héritier pur et simple, par la seule raison que Gineste ne
l ’était pas?
Les qualités d’héritier sont personnelles. L a règle générale est
qu’on soit héritier pur et simple; la qualité bénéficiaire n’est que
l ’exception; mais elle n’atteint que celui qui la réclame.
O r , jamais l’abbé Second n’a voulu être héritier bénéficiaire,
quand dès 1761 Gineste en prenait la qualité. L ’arrêt et la pro
cédure prouvent cette différence avec clarté. Ainsi l’abbé Se• cond , qui a vécu jusqu’en 1777» est mort héritier pur et simple
de la Muraillac sa mère.
Quelles en sont les conséquences?
C ’est qu’il a été tenu des dettes de sa mère ullrà vires. C ’est
que toute sa fortune a été responsable de ces dettes, et par con
séquent sa légitime paternelle a dû y contribuer.
L e parlement de Toulouse n’a donc fait qu’appliquer les prin
cipes les plus élémentaires, en ordonnant que la légitime de l’abbé
Second (qui était entre les mains des Gineste), serait rapportée
par eux, pour payer les dettes de la M üraillac, et qu’ev/ outre,
�( *8 )
_
,
les Gineste rendraient compte de la succession bénéficiaire qui
était aussi dans leurs mains.
M a is , disent encore les premiers ju g es, l’abbé Second avait
approuvé la destination de légitime, en donnant des quittances ,
acceptant le titre, et recevant ses revenus en majorité. IL est mort
sans demander un supplément.
Est-ce qu’une légitime serait approuvée par des quittances
données à com pte?
Il est de principe au contraire que le légitimaire n’approuve
qu’après avoir connu le testament du père, n isi cogn itis inspectisque verbis iestam enli , comme la loi le dit elle-même.
L a coutume d’Auvergne dit que le legs doit être approuvé
sciem m ent $ et ces lois sont appliquées journellement parla Cour.
Un arrêt du 19 ventôse an 11 a même admis à revenir coutre
une renonciation, faite moyennant une légitime conventionnelle,
portée par un testament dont le notaire était indiqué, mais dont
la date n’était pas rappelée. A tte n d u , a dit la C ou r, qu’on n'a
donné connaissance , n i de la fo r m e , n i des clauses , ni de la
date de l ’a c te; cet arrêt n’a fait autre chose que l’applicatiou
textuelle de la loi, nisi inspectis verbis testamenti.
L ’abbé Second, né en 1729 , émancipé en 1749, plaida aussi
tôt avec le sieur Gineste pour avoir la pension qu’il devait payer
au seminaire, et dont le père avait chargé le sieur Gineste.
L a famille délibéra le 7 novembre 1749, qu’il lui serait payé
3oo fr. par a n , à condition que s’il ne se contentait pas dè la
légitime prom ise, et réclamait (lors de sa majorité) la légitime
de d roit, il imputerait l’excedant de l ’intérêt, s’il y avait lieu, sur
le principal de cette légitime.
En 1750 , le sieur Gineste fit a Pleaux un titre clérical de 80 .
par an à l’abbé Second , qui habitait Paris.
Mineur et absent, lors de cet acte, il n’a pas fait sans doute
1
d’acceptation légitime. Aussi ne veut-on la trouver que dans les
quittances postérieures.
�( 29 )
On produit deux lettres et deux reçus de 1750 et 1751. Mais
nulle part 011 ne voit d’approbation de légitime ; tout est donné à
compte.
Les reçus de 17*10 sont à compte de la sentence qui a con
damné Gineste à payer oo fr. par an pour la pension du sémi
naire; ne voilà donc que des revenus.
Aussi on n’a excipé, lors du bail de copie de 1791, que d’une
seule quittance du 2 octobre 1752, de 700 fr. que l’abbé promet
passer à c o m p t e , sans dire même que ce soit sur sa légitime.
D e 17&2 jusqu’à son décès en 1 7 7 7 , il n’y a plus de quit
3
tances; ainsi non agnovit ju d iciu m defuncti.
L ’action en partage dure trente ans utiles. L ’abbé Second a
été majeur le 24 septembre 1754 ; par conséquent «il ne s’est
écoulé jusqu’à son décès, au a i avril 1777, que vingt-deux ans
six mois et vingUhuit jours de prescription.
Par la règle, le mort saisit le v i f , les Gineste ses héritiers
ont à l’instant été substitués à ses obligations dans toute leur
étendue; eux seuls ont dû faire face, vis-à-vis les Daymard et
Couderc, à tout l’objet de leurs demandes.
Ces demandes étaient pendantes en 1777 contre l’abbé Se
cond et contre les Gineste; il y a eu reprise, et l’arrêt de 1789 ,
en ordonnant contre les Gineste, qu’ils rapporteraient la légitime
de l’abbé Second aux créanciers exerçant ses droits, a voulu
qu’elle fût rapportée télle qu'elle était due, sans oi’donner qu’elle
serait réduite à 1,000 fr. ou à oo fr., puisque les Gineste n’en
3
avaient jamais élevé la prétention.
L ’arrêt de 17O9 , par cette disposition , et par celle du compte
de la succession Muraillac , n’a donc fait que prononcer une con
damnation générale , mais indéterminée, parce qu’il ne s’agissait
alors que de régler les points de droit; le montant de la légitime,
comme le montant du compte, devaient être également inconnus
au parlement de Toulouse , lors de son arrêt. C ’était aux Gineste
à faire face à la double condamnation prononcée contre eux, eu
l’exécutant.
�C 30 )
Jusqu’ici donc l’arrêt de Toulouse a demeuré sans exécution
en cette partie; les adversaires se sont contentés de signifier un
compte infidèle. Mais ils ne peuvent pas se dispenser d’obéir à
la chose jugée. Ils doivent, on le répète, rapporter la légitime
paternelle de l’abbé Second , et cette légitime ne peut être qu’un
6.e de la succession en meubles et immeubles, sauf la déduction
de 709 fr. sur les revenus, puisque l’abbé Second est mort sans
avoir rien approuvé.
3 . Gains n uptia ux de la veuve Second.
5
L es adversaires,après avoir offert oo f r ., veulent réduire celle
somme à« un tiers.
11 est vrai que les principes du droit écrit ont sur cette ques
tion une disposition particulière.'
Par les lois du code, les gains nuptiaux étaient propres au sur
vivant. L a novelle 2 , chap. 2, 11e lui en laissa que l’usufruit. L a
novelle 22 , chap. 20, lui en rendit la propriété, sauf le cas des
secondes noces. La novelle 98, chap. i . er , a rétabli la novelle 22,
et enfin la novelle 12 7, chap. , a laissé au survivant non re
marié une portion virile eu propriété, et l’ usufruit du surplus.
Quoi q u ’ il en soit de cette variation , et sans examiner si cette
dernière loi a d’autre but que d’empêcher le survivant de faire
entre ses enfans une disposition inégale d’ une portion des biens
3
de l’autre époux, il y avait, dans l’espèce, dérogation expresse à
la nature du gain de survie.
Car dans le contrat de mariage de 1720, il y a donation des
5oo fr. pour être propres dès à prcscnL à |,i fuiurç; elle a donc
élé saisie dès l’instant même, et propriétaire de cette somme,
t
»
Mais admettons pour un instant que les adversaires eussent
droit de réduire au tiers les oo fr. de survie, promis par Gas
pard Second a la dame Muraillac sa veuve.
S’ils ont eu ce droit, ils l’ont perdu par leurs conclusions
5
admises en jugement.
�( 3 0
•Car non-seulement les adversaires ont offert cette somme de
oo fr. dans leur compte ; mais elle est aussi dans le jugement
par défaut du 14 pluviôse an , avec des motifs très-détaillés.
.O r , comment les premiers juges ont-ils pu corriger un juge
ment par défaut, dans une partie dont l’opposant ne se plaignait
pas? C ’était se réformer soi-même, et reconnaître qu’une ques
tion de droit avait été mal jugée la première fois.
Cette prononciation de mal jugé était au-dessus du pouvoir des
premiers juges.
5
5
1
4 , 5 , 6 . Jouissances des fidéicornm is et quarte trébelU anique.
'
>«,
L a dame Muraillac avait droit de jouir comme héritière fidéicommissaire des biens de son époux jusqu’à son décès; 011 11e le
lui dispute pas.
Mais on prétend qu’elle a remis l’hérédité sans rien réserver
et que cette remise ne lui a laissé aucun droit de jouissance.
Cela serait vrai, si la remise eût été volontaire; mais la veuve
Second ne fut forcée de ne pas jouir que par l’usurpation du sieur
Gineste, avec lequel elle plaida toute sa vie. Après le testament
de son.m ari, qui la fit héritière iidéicommissaire en i j d t , elle
rémit l’hérédité à sa fille en i j S j , et cela pour elle.
Redevenue héritière en 1744, p a rle testament de sa fille, elle
voulut reprendre les biens, mais le sieur Gineste s’y opposa.
Les appelans ont excipé devant les premiers juges d’une signi
fication qu’elle fit en 1746, du testament de 1744, pour deman
der qu’il fût exécuté à son égard. O r , peut-011 se faire un titre
contr’elle de l’impossibilité où elle fut de jouir.
O11 objecte que, d’après l’article
36 de l’ordonnance des subs
titutions, elle est reputee n’avoir jamais accepté le fidéicoinmis.
Mais cet article même ne dit pas qu’il faut jouir pour accepter ;
mais qu’on est censé accepter, soit par la possession, soit par
des demandes.
�(
3a
)
On dit que la veuve Second ne fut qu’héritière fiduciaire de
sa fille. Mais la principale distinction du fiduce, d’après Peregrinus et Henrys , est quand le fidéicommis doit être remis iti
dietn certum , et quand 011 prohibe la distraction de quarte.
Tout cela n’a pas eu lieu dans le testament de 1744.
D ’ailleurs, autre chose est le fiduce , autre chose est le legs
personnel des fruits.
>
Gomment admettre, sans injustice, que le sieur Gineste, détempteur de revenus quelconques, appartenant à sa belle-mère, .
ait pu les retenir en refusant de payer ses dettes ?
Tout est rigoureux contre l’héritier qui veut séparer les pa
trimoines; et il n’est pas juste qu’il distraye la moindre chose
de l’actif qui doit faire face à la dette , pour le laisser dans le
patrimoine qui ne doit pas y conjribuer.
Quant à la quarte tre'bellianique, elle appartient de plein
droit à tout héritier testamentaire chargé de rendre , d’après
les titres du Digeste : A d sénat. Treb.
Il ne doit se prendre qu’une seule quarte sur les cinq sixièmes
de la succession de Gaspard Second, advenus à Marie-Jeanne
Second, femme Gineste; et ce, en vertu du testament de 1744,
parce qu’elle fut prohibée par celui de 1781.
On oppose qu’elle ne peut se prendre par l’héritier fiduciaire,
mais les auteurs enseignent que ce n’est qu’au cas que la charge
de rendre soit à jour certain, et non de rendre au décès.
( D espeisses. t. 2, p.
, n.° 14)-
338
Les Gineste opposent qu’elle ne se cumule pas avec les jouis
sances. Ils ont raison.
" Mais ils disent eux-mêmes que Marie Muraillac n’a joui que
d ’une maison, jardin et grange. Ainsi il est question de savoir
si ces objets excèdent le quart de la succession ; en ce cas , il est
juste qu’en lui donnant. la quarte trébellianique comme proriélé distincte, à compter du décès, on déduise la portion des
jouissances qui excéderaient celte quarte ajoutée ù sa succession.
�7- L a .pension due par Le couvent d'A rgcntac.
En achetant un pré de Marie M uraillac, les religieuses d’A rgentac donnèrent un écrit, par lequel elles s’obligèrent de nour
rir une demoiselle , présentée par elle , pendant trois ans. Cei
écrit, resté dans la succession, était une créance.
Mais le sieur Gineste , qui a gouverné la succession bénéfi
ciaire à sa guise, et anirno dom ini, a donné aux religieuses ,
en 1770, un é c rit, par lequel il reconnaît, sans autre explica
tion , et sans époque, que cette promesse est acquittée.
Cette manière d’agir avait même été une des raisons pour les
quelles on avait offert preuve d’adition en 1770. Mais dès que
le parlement n’y vit pas un acte d’héritier, il reste au moins le
droit de demander aux Gineste le paiement de cette valeur.
Si la promesse eût été acquittée avant 1 7 6 1 , les religieuses
n’auraient pas manqué de la retirer, ou de prendre quittance.
L e sieur Gineste , qui a voulu la donner, a donc pris cela sur
son compte, comme v i s - à - v is l’abbesse de Brage'ac. On voit
bien qu’il a voulu par-tout éviter les révélations; mais y auraitil de la justice, dans l ’incertitude mên^e, de le dispenser du
paiement ?
8 et 9. ArticLes de dépense.
L e tribunal de Saint-Flour a rayé les articles 1 , 2,
5, 4 , 5,
6, 9 , 10 et 11 de la dépense du compte , rendu par les adver
saires en 20 articles.
Est-ce la preuve de la fidélité de l’héritier bénéficiaire ? Et ne
faut-il pas ajouter cette remarque aux moyens de déchéance?
Il faut répéter aussi que le jîarlement de Toulouse n’a pu
juger la qualité de bénéficiaire que pour le passé, et qu’il ne
savait pas en 17S9 , si le. compte serait rendu avec sincérité eq,
Ï
791 -
�( 34)
.ï
io . M obilier de M arie M uraillac.
II a été inventorié en 1761 ; mais les premiers juges n ’ont
voulu le faire composer que de ce qui restait dans cet inven
taire, après la distraction du mobilier délaissé par Gaspard Se
cond, en 17 3 1, parce qu’ils ont ajouté foi à l’allégation des ad
versaires, que Marie Muraillac en avait demeuré nantie.
Cependant on voit dans le contrat de mariage de la dame
Gineste, du
5 novembre 17 8 7 , que Marie
Muraillac sa mère,
lui remit tous les meubles et effets de Gaspard Second, inven
toriés en 1731. Donc voilà la preuve écrite qu’elle n’en retint
pas la possession.
On oppose que lors de ce contrat, et par uqe contre-lettre,
le sieur Gineste son gendre, lui donna pouvoir de les garder,
ainsi que des immeubles; mais que celte contre-lettre ne se
trouve plus.
Comment le sieur Gineste , qui conserva tant de papiers,
laissa-t-il perdre celui-là ? ou plutôt comment avait-on eu idée
tle faire une contre-lettre nulle et parfaitement inutile, puisque
rien n’obligeait de faire , par contrat de m ariag e, une remise
de mobilier, si on voulait aussitôt la révoquer?
A u reste, c’est là un point de fait à vérifier; et les appelans
ne veulent rien qui ne soit juste.
Mais aussi ils
ne
veulent pas s’en rapporter aveuglément à ce
que le sieur Gineste a fait faire en 1761, sans les appeler.
Que la Cour veuille bien prendre la peine de comparer les deux
inventaires-; et si les articles, qu’on peut dire.ressemblant, lui
identiquement les mêmes les appelans s’en rapportent,
s e m
b
l e n
t
,
* avec confiance, à sa conviction sur ce chef néanmoins impor
tant, de la contestation.
d é p e n s
.
Les héritiers Gineste ont porté en compte de dépense ceux
qu’ils ont faits au parlement de Toulouse.
�( 35 )
Ils',réussirent à ne pas y êlre condamnés en leur nom person
nel, quoique déboutés de leurs diverses demandes en péremp
tion , et de celles en renvoi. Mais alors on ne connaissait ni la
garantie donnée à l’abbesse de Brageac, ni l ’acquit de pension
donné au couvent d’A rg e n ta c, ni la contre-lettre du sieur Chantegrie , ni les nombreux articles rayés, que le sieur Gineste avait
projet de s’adjuger; il put paraître alors, ¡sinon en bonne foi,
au moins pas assez convaincu de mauvaise foi en sa qualité d’hé
ritier bénéficiah’e.
S ’il est déchu du bénéfice, comme tout le prouve, son compte
de dépense s’évanouit tout entier. Mais s’il était possible que ta
Cour ne le jugeât pas ainsi, au moins les dépens, faits depuis
1780 jusqu’à présent, doivent-ils être supportés par les adver
saires personnellement.
Ce n’est pas tout de les réserver sous prétexte d’une estima
tion relative à un seul article. Car le compte n’en sera pas moins
fixé pour tous les autres , et n’y eût-il que la radiation de neuf
articles sur vin g t, ou plutôt sur d ix-h u it , c’en est assez pour
convaincre la C our, que les adversaires ont élevé de mauvaises
contestations ; et dès-lors faire condamner les adversaires aux
dépens , en leur nom p erso n n el, dès à présent.
L ’article de la légitime de l’abbé Second l ’exige seul. Car il
est l’objet sur lequel les adversaires ont le plus raisonné, le
plus contesté , et chicané avec le plus d’opiniâtreté. C ’était en
effet l’article le plus im portant, car il suffira pour remplir
les condamnations en garantie dues aux appelans. L ’arrêt de
1789 l’avait placé le premier en ne considérant le compte à
rendre que comme un subsidiaire. A i n s i , la Cour, en jugeant
que les adversaires ont mal à propos contesté en cette partie
l’exécution de l’arrêt, leur fera supporter sans difficulté tous les
dépens déjà faits, et même réglera ceux de l’exécution du nouvel
a rrê t, comme il se pratique en matière de partage ; tout au plus,
e st-il vraisemblable, qu’elle réservera les dépens de cette exé
cution seulement.
�( 36 3
*' L es héritiers Daymard et Lacroix se flattent de n’avoir rien
proposé qui ne soit fondé, et sur-tout qui ne soit équitable.
- L eu r position , dans ce procès , est faite pour appeler la rigueur
de la Cour contre une famille qui leur conteste depuis si longtems le paiement d’une créance , que par honneur elle eut dû
payer depuis quarante ans. Q u ’elle jouisse, si bon lui semble ,
du privilège des lois, il faut bien le souffrir; mais que la suc
cession débitrice soit dissimulée, affaiblie, dénaturée même par
trois générations successives, c’est ce que la Cour ne souffrira
«
certainement pas. Car la bonne foi est de première nécessité
.pour tout le m onde, même pour ceux qui n ’attachent pas de
prix à respecter les engagemens de leurs auteurs.
M .e D E L A P C H I E R ,
A v o c a t.
M .e D E V È Z E , L ic e n c ié -A v o u é .
A
RIOM,
D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J.-C. S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daymard, Marie. An 6?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Devèze
Subject
The topic of the resource
créances
successions
saisie
rentes
censive
vie monastique
Description
An account of the resource
Mémoire pour Marie Daymard, veuve Lacroix, et Marianne Couderc, femme de Durand-Rieux, appelantes; Contre Emeric, Marie, Marianne Gineste et autres, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 6
1741-Circa An 6
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0311
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brageac (15024)
Pleaux (15153)
Rights
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Domaine public
Relation
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Créances
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Successions
vie monastique
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M
É
M
O
I
R
E
P O U R
M a rg u erite
CO U G U ET-FLO R AT,
d e R e y r o l l e s , in tim é e ;
v e u v e d u sieur
COUR
C O N T
D ’a p p e l
DERIOM.
R E
.
MA IG N E , se disant aussi veuve
dudit ____
sieur R
, appelante.
Ca t h e r i n e
de
eyrolles
l re. SECTION.
L A demoiselle Maigne n’est pas satisfaite d'avoir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une formule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l ’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa haine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas craint, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
Une première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sûr des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le mieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudroit pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel des lois de l’empire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sucré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
La dame de Reyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d’abord adopté par la demoiselle M a ig n e , et son premier
A
�( 2)
mouvement avoil été d’user d’une représaille bien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position , de rendre compte
des faits et gestes de sa rivale, elle n ’avoit rien tu de ce qui la tourrnentoit depuis tant d’années , et il lui paroissoit consolant de la
jtoursuivre encore, comme un remords vengeur, de la forcer à
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une haine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que cette jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour ; en consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d’écarter de son récit
toutes les épisodes étrangères à ses moyens. L a réclamation d ’un
état civil présente d’ailleurs trop d’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
L e mariage est-il un contrat d ’ordre public; c’est-à-dire, une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , après un divorce
nul, traiter irrévocablement avec son mari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé ?
T elle est la principale question de cette cause; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver difficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
' en jour ces antiques maximes, dont nous n ’avons éprouvé l’ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
Aujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la magistrature, a reconquis sa dignité primitive;
et tout ce qui tend à la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
f a i t s
.
L a dame C o u g u e t - F I o r a t contracta mariage avec l e sieur de
Reyrolles, médecin, le 7 novembre 1774, et se constitua en d o t
ses biens échus et à échoir, c’est-à-dire, qu’elle donna plein pou-
�(3 )
voir à son cpoux de rechercher et régir une fortune inconnue à
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation d’un douaire, et
autres avantages matrimoniaux.
Les premières années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m ère, et possédant toute l’affection de son époux , la dame de
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroil détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullement à craindre, et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur.
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrement, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne se règlent
pas toujours par leur estime. Dans sa fierté , elle abandonna un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, et se retira chez la dame
de F lo r a t, sa grand’mère.
Cet éclat, imprudent peut-être, tourna tout entier au profit de
sa rivale; la dame de Fxeyrolles fut privée de tout secours, de ses
bijoux ; et poussée d'infortunes en infortunes , pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu’elle les reçût de la demoiselle
Maigne. T e l étoit, après dix ans de mariage, l’humiliation à laquelle
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer.
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise , la dame de Reyrolles se trouvoit
encore heureuse des égards de son époux; mais l ’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se faire, céda à l’évidence : l’indignation
étouffa tous les calculs d ’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Les sieur et dame Caldaguès, parons de la dame de R eyrolles,
alloient s’établir à Limoges. Affligés de sa position, ils lui propo
sèrent un asile; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d ’être délivrée d’une surveillante incommode,
la pressa de consentir à cette séparation.
Combien étoit déjà changé le sort de la dame de Reyrolles! elle
avoit un époux; une étrangère lui faisoit oublier ses sermens et
ses devoirs : elle avoit eu un enfant; la m ort, moins cruelle, le lui
A 2
�....................................................................... / ( 4 )
avoit ravi à l’âge où il étoit incapable de tendresse. C ’est ainsi
qu'épouse sans é po ux, mère de famille sans enf’ans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
consolations de l’amitié et aux fantômes de l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de Reyrolles , par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement dè la révolution
elle ne reçut plus rien , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints.
est certain qu’il eût fait
son bonheur de rompre ses chaînes, et de mériter l'affection de
son'épouse, si la prévoyance allarmée de la demoiselle Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes
11
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d ’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
voyoit, et il n’osoil voir; il vouloit, et ne pouvoit s’enhardir à vouloir:
l ’homme le plus impérieux n ’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. L e premier acte de foiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, es t l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes ;
il reste désormais sans défense, et se dévoue à l’esclavage.
L a demoiselle Maigne triompha , et le premier usage de sa
victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors existoit une loi récente, que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la monarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours d’intervalle, et avant d ’atlaquer la
religion dans ses solennités, il n ’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire «» prononcer; et le lien du mariage, malgré son antique
inviolabilité, fut dissoluble indistinctement par le divorce.
Cette innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s ’e m p r e s s â t pas de la saisir. En conséquence , le
3/, mai 1797, il fut signifié à la dame de Reyrolles, de la part de son
�( 5 ;)
m a r i , un acte par lequel, il déclarait qu’il entenrloit divorcer pour
cause d ’absence, et pour incompatibilité d ’humeur et de caractère;
en conséquence de quoi il nominoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa part trois parens ou amis.
Dans cette conjoncture que pouvoit faire une épouse? plaider?
les tribunaux n’éloient pascompétens ; résister? la loi ne le lui permettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, et le divorce n ’eu alloit pas moins à sa fin.
Quoi qu’il en soit , le 27 mai il fut d éclaré, à la requête de
la dame die Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 24
elle nommoit trois parens, ajoutant que le sieur de R eyrolles, en
provoquant son divorce , n ’avoit fait que prévenir scs intentions.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de fam ille, tou
jours motivée pour absence et incompatibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : S u r quoi ladite Conguet-F lorat leur,a répondu
q u e lle étoit disposée à suivre en tout point la 'volonté de son
mari ; mais que s i son dit mari persiste à requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
Cette réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-même insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de l’incompatibilité s’accordoient mal avec l’im
patience de la demoiselle Maigne. On crut, donc découvrir dans
les dires de la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m utuel, pour lequel il n ’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1785, un mois après la seule
assemblée de famille, on fit rédiger u n acte de divorce , dans lequel
on suppose qu’il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fut porté à la dame de Reyrolles par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en dise, après la date qui
lui a été donnée : elle signa, il n ’y avoit pas à hésiter; d ’ailleurs
son re fu s, en l'exposant, n ’eùt fait que rendre cette pièce inu-
�( 6 )
lile , et forcer à reprendre la suite du premier mode de divorce.
Ainsi s’accomplit cette œuvre d ’iniquité , et la demoiselle Maigne
eut enfin levé le plus grand des obstacles : mais comme si le ciel
se fut joué de ses plus chères espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoil tant hâtée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que le sieur de Reyrolles,
pénétré de la perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à ses pre
miers engagemens.
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d’un esclave. Enfin , une
grossesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
Mais les assiduités du sieur de Reyrolles n’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse, T ro p adroits pour faire un éclat, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébranler l’imagination foible d ’un homme que le premier mouve
ment faisoit agir, et q u i , dans ce qui concernoit ses passions , ne
savoil j a m a i s p e n s e r par lui-méme. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la dame de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa porto : Inquivebant niala sib i, et doloy
totd die meditabantnr.
- L a grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
à leur malignité; l’époux lui-même fut entraîné à douter contre sa
conviction intime ; et ce que la dame de Reyrolles avoit cru être lo
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
- T o u t d’un coup la scène chango : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son ma
riage avec la demoiselle Maigne est consommé le 11 messidor
an 2 , douze jours avant que la dame de Reyrolles , sur son lit
do douleur , donnât le jour à une malheureuse créature sous d’aussi
sinistres apspiccs.
�( (7)
N o n , le ciel ne l’a point béni, ce fatal mariage ! Il a entendu Panathème prononcé par une épouse dans sa désolation; et elle n’a
pas eu la douleur de savoir plus heureuse qu’elle celle qui l’avoit
ch asscc du lit conjugal. En portant un nom usurpe , la demoi^
selle Maigne ne trouva plus dans le sieur de Reyrolles cet être
soumis sur lequel elle a voit exercé tant de fois une capricieuse
puissance.
L a demoiselle Maigne avoit calculécet effet habituel du mariage;
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’une époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitué de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an
5.
Quelque temps après, une séparation
volontaire les a éloignés jusqu’à la mort.
Cependant la dame de Reyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupée
des soins maternels que demandoit le premier âge de sa fille, elle
attendoit avec résignation que le sieur de Reyrolles, rendu de nou
veau à ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d ’un retour à-la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l’abus de son administration.
Il avoit recueilli la succession considérable de l’aïeule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’éloit emparé des effets mobiliers, sans compte
ni mesure.
Néanmoins, demeurant libre d ’en fixer la consistance, et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 , un acte d ’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le m o n ta n t, dit-il, de ce qu’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours élu d é de
déclarer ce qui pouvoit lu i être du ; qu’ elle ne cherchoit qu’à re
tarder la libération dudit Reyrolles , q u 'il étoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame Ue Reyrolles répondit qu’elle ctoit surprise et lassée
�(S)
des procédés iniques de son m a ri, et refusa les offres. Il y eut
procès verbal de non conciliation , après lequel elle fut assignée
le 21 messidor su ivan t, devant le tribunal du P u y , en réalisation
et validité desdites offres.
Ces diligences avoient lieu à la dernière heure du papier-monnoie;
le numéraire reparut au commencement de l’an ; et, dans ce pre
mier instant où l ’opinion en augmentoit la valeur, le sieur de R e y
5
rolles se hâta de faire proposer à sa femme une modique somme de
Gooo francs pour tout terminer ; ajoutant, pour l’intimider, que
si elle ne l’acceptoit pas , les offres de Fan /j seroient jugées vala
bles , parce qu’elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la daine de Reyrolles demanda-t-elle à être éclairée sur
la valeur réelle de sa propre fortune ; il fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n’avoir que les mandats offerts
au lien du numéraire promis, si elle s’exposoit à aller plaider dans*
un tribunal presque inconnu , à douze lieues de son domicile.
L a dame dé Reyrolles signa donc un traité le 16 frimaire an
5,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avec son
mari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un p a r t a g e de 1785, il lui revenoit 6126 liv. 10 sous; ¿1 quoi
ajoutant d/autres articles touchés par son m ari, quoique non com
pris dans l’inventaire, en valeur de 873 liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des Gooo fr. qu’il vouloit
payer , et dont l’acte porte quittance.
A ccnnpter de cette époque les époux furent séparés, et la dame
de Reyrolles 11’eut plus qu’à s’étourdir sur le passé et à supporter
son sort avec courage : elle se consoloit avec sa lille, et celte con
solation même lui lut enviée. Après le 18 fructidor , 011 lui donna
l ’alarme sur le sort de cette e n la n t , qui n’avoit pas encore d ’état
civil. On lui persuada que les peines de la loi pourroient l’attein
dre, et elle se décida à laire une déclaration à l’officier public. On
n ’eut garde de transcrire la qualité qu’elle vouloit se donner, par
la raison qu’il eût été incivique de mépriser un divorce, et quo
le sieur de Reyrolles, redevenu puissant, n’auroit pas trouvé bon
q u ’ il
�9
.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C )
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Comme ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 mes
sidor an . Cette erreur a été reconnue par la demoiselle Maigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d ’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de Reyrolles, nommé receveur du
département de la H aute-Loire, alla s’établir au Puy. Là , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle Maigne,
qui habitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui Ta conduit
au tombeau.
5
A celte époque terrible, où l’homme, ne trouvant plus d’asile
dans les illusions du monde, voudroit réparer dans un instant les
fautes de sa vie toute entière, l’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d ’attester qu’il n’avoit rien plus à cœur que de
se réconcilier avec sa femme, et de lui en donner, par un testament
honorable, la seule preuve qui fût désormais en son pouvoir.
En e f f e t , il est de notoriété au Puy que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par lequel , cassant celui qu’il regardoit
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 40000 f.
à la dame de Reyrolles personnellement, et faisoit en faveur du
sieur Vauzelles, ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de ne pas se hâter assez,
elle envoya au Puy le sieur Grancliier le mercredi, et arriva ellemême le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
sieur de Reyrolles , q u i, à ce qu’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tête avec un mouvement con
vulsif. Quoi qu’il en soit, il expira le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle Maigne que
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
sieur de Reyrolles, et en attendant les scellés qui ne dévoient être
posés que le lendemain, au lieu de verser des larmes stériles qu’il
li
�•
( 10 )
valoit mieux réserver pour la pantomime des audiences, la de
moiselle Maigne étoit libre de tout parcourir. Un certain porte
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n'a
plus paru; et le public qui se trompe rarement en conjectures dé
sintéressées, paroit avoir été imbu de l’idée que dans ce porte-feuille
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier tes
tament. Et qu’on ne dise pas que c’est là une fable de pure ima
gination ; ce bruit avoit pris une telle consistance, que le sieur
Vauzelles, légataire, a rendu sur ce m otif une plainte en suppres
sion de ce testament.
L a dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’un fait
qu’elle n ’a appris que par la notoriété publique. C e n’est point la
fortune du sieur de Reyrolles qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut son état civil, sa dot, et ne
dispute point à la demoiselle Maigne une opulence chèrement
achetée, et dont la source équivoque n’est de nature à donner du
crédit que vis-à-vis quelques collatéraux.
Après la mort du sieur de Reyrolles, ce n ’étoit plus que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence,
le 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses dot, trousseau et gains matrimoniaux, e t, en tant que de
b esoin, en nullité du divorce et actes postérieurs.
L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cette tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d ’enrichir sa fidèle moitié, ne s’allioit guère avec un domicile
constamment séparé, et à douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle Maigne, qui avoit toujours habité Brioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de Reyrolles, proposa un déclinatoire, soit qu’elle crût qu’il n’avoit pas transféré au Puy son do
micile de droit, soit qu’elle iiU entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n’avoit pas le même domicile de fait que celui qu’elle disoit
son époux; elle ignoroit que le sieur de Reyrolles avoit acquis une
maison au P u y , s’en déclaroit habitant dans les actes publics, et
�( * 0
avoit même fait rayer sa cote mobilière à Rrioude. En conséquence,
et par ces m o tifs, elle fut déboutée de son déclinatoire par juge
frimaire an i .
ment du
A u fond la demoiselle Maigne répondit que la dame de Reyrolles
n ’étoit pas recevable dans sa demande, soit à cause de la loi du
26 germinal an 1 1 , soit parce que la demande n’avoit été formée
qu’après la mort du sieur de Reyrolles, soit parce que la dame de
Reyrolles étoit divorcée par un acte requis et signé par elle-même;
qu’elle avoit traité avec son mari en qualité de femme divorcée,
23
3
et avoit pris la même qualité dans plusieurs autres actes , no
tamment dans la déclaration de naissance d’un enfant né un an
après le divorce; qu’à l’égard d ’elle-même Catherine Maigne, elle
11’avoit point à craindre le sort de ce divorce, parce qu’elle étoit
mariée légitimement, héritière universelle, et que le sieur de
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette volonté pendant sept
ans, qu’à sa mort on avoit trouvé le testament de la demoiselle
Maigne parmi ses papiers les p lus p récieux.
Il est inutile de rappeler les moyens opposés par la dame de
Reyrolles à cette défense de la demoiselle M a ig n e , les faits cidevant narrés les indiquent; et il suffit de dire qu’en déclarant le
divorce nul, les premiers juges ne virent plus dans la dame de
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance maritale, n ’ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , ni prendre
une qualité qu’elle n ’avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an 1 , le tribunal du P u y, sans s’arrêter aux fins de
non-recevoir proposées par Catherine M aign e, déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 1793, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du
frimaire an ; remit la dame de Reyrolles au
même état où elle étoit avant lesdits actes; condamna Catherine
Maigne, en qualité d ’héritière du sieur de Reyrolles, à lui payer,
i". oo ir. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 1774 ; 20. 1200 fr. pour ses bagues et
joyaux; °. /¡oo fr. pour sa pension vîtluelle; *- à lui fournir un
logement garni et meublé, suivant son état et sa fortune, dans le
3
3
5
3
5
4
B 2
�dernier domicile du défunt, à la charge par ladite dame de Reyrolles
de constater l’état dudit mobilier qui lui sera remis, pour être rendu
à qui et dans le temps de droit; °. à payer à ladite dame de R eyrolles i oo fr. pour son deuil et celui de sa domestique; et à l’égard
du payement de la dot, le tribunal ordonna que les parties conlesteroient plus amplement, et à cet effet fourniraient leurs états res
5
5
pectifs, sauf débats. Les inscriptions de la dame de Reyrolles furent
maintenues jusqu’à parfait payement, et il fut ordonné que ledit
jugement seroit exécuté en la forme de l’ordonnance nonobstant
l’appel.
Cette dernière disposition donna lieu à la demoiselle Maigne de
hâter singulièrement son appel et ses poursuites. Impatiente de
jouir sans entraves, elle remontra à la cour que la douairière d’un
receveur général ne pouvoit vivre avec des saisies qui arrétoient des
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressoit pour les rendre. L a co u r, par son arrêt provisoire du
3
24 floréal an i , a fait défénse d’exécuter le jugement jusqu’à son
arrêt définitif.
Les parties sont aujourd’hui sur le point de faire juger le fond
de la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude
une décision qui ne peut être qufe conforme à la morale et à la
justice.
m
o
y
e
'n
s
.
^Toute la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce
paradoxe : L e mariage est une simple convention privée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui supplée les formes
de la lo i , ou qui en dispense.
L a défense de la dame de Reyrolles est de dire, au contraire,
que le mariage est un lien destiné à union de deux fam illes,
intéressant la société entière, et ne pouvant être dissous que dans
la rigueur des formes légales.
Sans doute la solution de ces deux systèmes est écrite dans le
1
�( *3 )
cœur Je tous ceux qui n ’auront pas oublié ces principes immuables
qui résislent au fracas des révolutions et à l’éblouissement de^
systèmes.
Ici il est constant qu’en 1774 la dame de Reyrolles a été mariée
avec toutes les solennités civiles et religieuses, et que son époux
n'est mort qu’en l'an 12. 11 s’agit donc d’examiner si le mariage
a été légalement dissous par un divorce. Mais la dame de R e y
rolles oppose des fins de non-recevoir, qu’il faut examiner; et ses
prélentions donnent lieu aux questions suivantes : i°. L a d a m e ’
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son divorce
après la mort de son m ari, et malgré la loi du 26 germinal an
onze ? 2°. A u f o n d , le divorce opposé est-il valable ?
3°.
Si ce
divorce n’a pas été valable , a-t-il pu néanmoins être validé par
la convention particulière de la dame de*Reyrolles?
P
ï i e m i è r e
Q
u e s t i o n
.
I m dame de R eyrolles est-elle recevable à demander la nullité
de son divorcé après la mort de son m ari, et malgré la lo i
du 26 germ inal an 1 1 ?
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?
sur une loi romaine ? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
defunctorum post quinqiiennium queratur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’est pas même écoulé six mois de son
décès à la demande.
C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la demoiselle
Maigne. L ’article 188 porte que « l’époux au préjudice duquel a
») été contracté un second mariage, peut en demander la nullité,
w du vivant même de l’époux qui étoit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir avant la mort de l’époux,
q u ’à titre de grâce; et il semble, par ses expressions, que c’est à
regret qu’elle y a consenti : elle laisse entrevoir le conseil de ne pas
user de ce consentement ; et ce mot m êm e, qui semble pour ainsi
�*4
(
)
dire échappé à la plume du législateur, est cependant de la plus
grande moralité.
Q u ’est-ce en effet qu’une demande de ce genre, formée par l'é
poux abandonné contre l’époux coupable, si ce n’est une espèce de
dénonciation ouvrant le champ le plus vaste à la discorde, et ren
dant désormais toute réconciliation impossible?
Est-ce une foible épouse qui, du vivant de son mari, osera l’ap
peler devant les tribunaux pour lui dire ; Je veux qu’on vous oblige
à me rester fidèle? Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti
quité, la sensible Hypparelte a reconquis par un appel en juslice,
la tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigneroient d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient
leur amour propre par un abandon plus éternel! Car les hommes,
qui font les institutions, n’ont créé que la puissance maritale; et
quels que soient les dons que le sexe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foiblesse, ce pouvoir d’équilibre n'est plus
qu’une divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige. Malheür donc à epouse inconsidérée qui tenleroit de
proclamer son abandon et de chercher son époux jusque dans les
bras d’une rivale !
Il est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
c o n j u g a l peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
1
mariage est comme l ’amour de la patrie, Cunctos d u cit, et irnt
memores non sin it esse sut.
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyrolles que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur ha
bitation séparée , une haine qu’ils ne dissimuloient plus, annoncoient une rupture prochaine ; et sans les difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroil vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit à personne qu’il n ’étoil retenu que par cette considéra-,
lion. Quoi qu’il en soit, la darne de Reyrolles a fait ce qu’elle ;
�( i5 )
devoit faire; tant qu’elle a eu de l’espoir, elle a gardé le silence;
et quand la mort ne lui a plus présenté qu’une étrangère à pour
suivre, elle a réclamé ses droits.
L a demoiselle Maigne n’est pas le premier héritier qui ait op
posé que la nullité d ’un divorce ne pouvoit pas être demandée contre
lui. Mais la cour de cassation a décidé le contraire par arrêt du
i4 vendémiaire an 10.
L a deuxième fin de n o n -recevoir n ’a pas même le mérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : T ous divorces
prononcés, etc., auront leurs effets, on en a conclu qu’à compter
de cette loi il n’étoit plus possible d’attaquer les précédons divorces.
C ’est-à-dire que si la veille dé la loi nouvelle un divorce avoit
été prononcé sans aucunes épreuves, les époux n’en seroient pas
moins séparés à jamais; et c’est ainsi qu^on fait l’injure au légis
lateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses.
Mais la demoiselle Maigne n ’a réussi à se faire un moyen de la
loi du 26 germinal qu’en tronquant entièrement l’article invoqué.
« T o u s divorces prononcés par des officiers de l’état civil, ou
» autorisés par jugement, avant la publication du titre du Code
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément a u x
» lois qui existaient avant cette publication. »
Ainsi le législateur n ’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, n isi totd
logeperspectd, judicare. Maintenant que l’article entier est rétabli,
l ’objection de la-demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
L.e divorce du 28 ju ille t 1 yg
5 e st-il
.
valable ?
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�( 1 6 )
de procédures. L e sieur de R eyrolles, plus pressé qu’il ne devoit
l ’être, amalgama to u t, et interrompit au milieu de son cours une
première procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductive. Le sieur de Reyrolles, par son exploit ori
ginaire du 24 mai 1793, avoit formé demande en divorce, soit
pour absence depuis n e u f ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoit être demandé, comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2'. loi du 20 septembre 1792, § . 1 , art. 4. )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen*
dant cinq ans sans nouvelles , 'ù lui falloit pour première pièce
1 un acte de notoriété constatant cette longue absence ( § . 2 , art. 17):
mais sa femme étoit près de lui le 24 mai 1793.
S ’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon comportoit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dame de Reyrolles n’étoit allée à
Limoges qu’avec l ’agrément de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n ’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : l'exploit n’en dit rien.
Pour in co m p a tib ilité d ’i n i m e u r , le sieur de R e y r o lle s avoit sa
m a r c h e tracée d ’une m an ière positive,
« Il convoquera une première assemblée de parens, ou d’amis à
« défaut de parens , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
» la convocation. ( §. 2 , art. 8. )
» La convocation sera laite par un des officiers municipaux....
» L ’acte en sera signifié ù l’époux défendeur. ( A rt. 9. )
» Si la conciliation n ’a pas lieu , assemblée se prorogera à deux
» mois , et les époux y seront ajournés. A l’expiration des deux
» m o i s , . , si les représentations,11e peuvent encore concilier les
1
1
époux,
�( l7 ) * #
» époux , l'assemblée sc prorogera à trois mois. ( A rt. 10 et n . )
» Si à la troisième séance le provoquant persiste, acte en sera
» dressé. 11 lui en sera délivré expédition , qu’il fera signifier à
« l’époux défendeur. » ( A rt. 12. )
L e sieur de Reyrolles provoqua un divorce le 24 m ai, sans acte
de convocation d ’un officier municipal.
Il ne nomma point de parens ; il indiqua seulement des a m is,
sans même exprimer que ce fût à défaut de parens.
L a première assemblée eut lieu le 27 juin 1793. Il en fut dressé
acte; mais aucune signification n’ a été faite à la dame de Rey
rolles , parce que les moteurs craignoient que dans l’intervalle les
choses fussent pacifiées.
Il n’y a ainsi pas eu de divorce pour incompatibilité d ’humeur,
pas plus que pour absence.
C e seroit donc un divorce par consentement mutuel qu’il faudroit valider.
Mais l’acte primitif y est un obstacle perpétuel; on veut cepen
dant que les actes qui suivent aient corrigé cette première procédure.
L a loi en exigeoit une absolument différente.
■
*»
« L e mari et la femme qui demanderont conjointement le di» vorcc, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins
» des p lu s proches parens, ou d’amis à défaut de parens. ( §. 2 ,
art. 1". )
» L ’assemblée sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec
» les parens ou amis. . . . L ’acte de convocation sera signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( Art. 2. )
» Les deux époux se présenteront en personne à l’assemblée; ils
» y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( Art. 4. )
L e but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires.
L ’incompatibilité pouvoit n’avoir lieu que de la part d’un époux:
la procédure devoit donc avoir des formes hosliles ; c’est pourquoi
la convocation devoit être réglée par un officier m unicipal, et un
• G
�}
huissier devoit sommer l ’époux défendeur de concourir à la forma
tion de l’assemblée , et d’y comparoître.
Mais le divorce par consentement mutuel supposoit de la part
des époux un accord préalable né d’une égale satiété de vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation insupportable ;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches.
A in s i, bien loin de se signifier par huissier une nomination de
parens , et par actes séparés , ce qui marqueroit une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensem ble les
parens, en les choisissant par moitié; ellea vouluqu’ilsdemandassent
le divorce conjointement .- ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
(
1
8
L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et que l’autre y a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquée.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l ’un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i , provoqué par une demande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n ’éloit pas dans son cœur ; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord même, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n ’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
N on omnium quee à majoribus constituta sunt ratio reddipotest.
Il est encore un principe bien constant en fait de lois rigoureuses,
c ’est que toutes les formalités doivent etre suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du l\ germinal an 2 a étendu celte peine
à ^inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 178g.
�r9
(
)
Ce seroit donc s’abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a précédé le divorce prononcé le 28 juillet 1793, les actes
préliminaires d ’un divorce par consentement mutuel.
Non-seulement cette procédure n ’est pas conforme à la lo i,
mais le sieur de Reyrolles a donné un autre nom au divorce par
lui demandé. Il a requis seu l le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’il n ’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une demande, tellement
indélébile qu’elle ne coinportoit ni opposition, ni débats , ni ju
gement.
Lors de l’assemblée, la dame de Reyrolles ne paroît encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas le divorce , elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, s i son mari y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veu t le divorce ,
c’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
Voilà cependant ce que l’officier public , dans l’oubli de ses
devoirs , a reçu comme les épreuves suffisantes d’un divorce.
Un divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeoit
une foule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenlé
d ’un seul acte cl de trente-trois jours de délai.
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice, pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa forme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa famille, car il n ’a appelé aucun de ses parens à
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les deux proce'dures une dif
férence notable. Pour l’incompatibilité d ’hum eur, il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m utuel, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
Si , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eût été égal
d’avoir des amis , c’étoit inutilement que la loi étoit plus exigeante
C 2
�C 20 )
pour le consentement mutuel. Mais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffît de remarquer que la loi
ne vouloit des amis qu'« défaut de parens.
Oseroit-on supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n ’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai, il falloit au moins l’exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que cette formalité a été remplie. Déjà
la cour d’appel, dans une cause semblable, a annullé un divorce
entre des habitans de Riom , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n’exprimoient pas que des amis n ’eussent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité , qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguet et Iïéra ud ,
notaires, le 7 novembre 1774• Mais jamais on n’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. Avant 1792, l’église donnoit tout à la fois l’état
civil et le sacrement ; le mariage ne tenoit son essence que de la
célébration. Or , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 novembre
qui a été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d ’intérêt, et totalement incapable d’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d ’enregistrement et de publi» cation que l'éloient les jugemens de séparation » ( §. , art. 11. )
3
Or , le divorce opposé ne parolt pas même avoir été enregistré.
On avoitobjectéà ladame de Reyrolles qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n’en a jamais donné l’ordre ; mais, quand on supposeroit le contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer à son tour un divorce par con
sentem ent m utuel ?
Un exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’huriieur , et cet exploiltinême
seroit une nullité de plus.
�T
r o i s i è m e
Q
u e s t i o n
.
S i le divorce n'a pas été v a la b le, a -t-il pu néanmoins être v a lid é
par une convention particulière de la dame de R ey rolles?
Un contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut sans doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôt qu’elles
en ont exprimé la volonté.
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les formes
rigoureusement exigées. Celte différence est sensible, et lient à la
nature du contrat de mariage.
Oser dire qu’il est un simple contrat privé n ’est qu’une hérésie
insoutenable; elle est condamnée par toutes nos lois; et les R o
mains eux-mêmes, qui cependant admetloient la répudiation et le
divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu’ils avoient
sur l’importance du mariage.
« Parmi toutes les institutions humaines, a dit Justinien , rien
» n ’est si sacré et si important que le mariage, car c’est par lui que
t) se forme la suite des générations; c’est par lui que se peuplent
» les régions et que les citpa fleurissent : il est le conservateur de
» la république et la source de sa prospérité. »
N ih il in rebus mortalibus perinde venerandum est atque matrimoniurn : qu ip p eex quo liberi, omnisque deinceps sobolis sériés
e x is tâ t, quod regiones atque civitaies frequenter reddat, undè
déni que reipublicce coaugnientatio fia t. ( N ovell. i
T o u t ce qui lenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoient aussi considérées comme objet
d ’intérêt public : lïeip u b licœ interest dotes mulierum salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’attention du législateur ; il en
déterminoit les formes, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nombre, leur influence et leurs re
présentations fussent un frein à la rupture du mariage. ( ff. D e
divortïus et repudius. )
4°0
�Et si les formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nullum divorlium ratum est. ( L . g. eod. )
Quand cette nullité n ’auroit pas été textuelle, elle eût été pro
noncée par la loi qui portoit que toutes les conventions faites contre
le droit civil, contra ju r is civilis régulas, étoient nulles de plein
droit, et ne produisoient aucune action. ( L . 28, f f . D e p a ctis.)
O r, il n’étoit pas douteux que la forme de dissolution du mariage
ne fût réglée par le droit civil : Jure c iv ili dissolvere solet matrimonium. ( h . 11 , f f . D e divort. et rep. )
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l ’état
des hommes n ’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hom inis v e l conditio personarum mutari non potest. ( L . Ilhéros, c. D e lib. c. )
Sans doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n’est pas susceptible d’êlre validé par des conventions particulières •
et il résisteroit d'ailleurs au bon sens que la loi eût exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
dispenser indirectement.
Mais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
pour le divorce, avoit aussi prévu que des époux trop peu attachés
à son observation pourroientse permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
P actiones sanè s i quœ adversus prœsenlia scita nostrœ majestatis fu erin t attentatee, tanquam legibus contrarias nullam habere volurnus firmitatem. ( L . 8 , code D e repudiis. )
Ainsi la question est disertement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n ’a pas été légalement f a i t , les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi irançaise. On demande,
dit Vinnius, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
o u i , répond-il, s’il s’agit de valider le mariage : U t sponsa ma~
fieat sponsa, placet transactionem v a lcre; mais la transaction est
�23
(
)
absolument n u lle, s’il s’agit de relâcher le lien du mariage. ( V inn.
D e trans. )
L a demoiselle Maigne opposera-t-elle la loi du 20 septembre
1792. Mais quelle que fût l’opinion du temps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilité spontanée du
» mariage, disoit le rapporteur de cette lo i, la liberté d ’en con» tracter un second , après un premier qui ne seroit pas légalement
» rompu , seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d’une manière trèsconforme aux principes enseignés par les lois romaines.
a L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
» Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’après
» que le premier aura été dissous conformément auoc lois. »
Que la demoiselle Maigne ne se dissimule pas toute la force de
l’expression ne peuvent. Toutes les fois , dit Dumoulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de droit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
Il en résulte donc que la demoiselle Maigne n ’a jamais pu être
l ’épouse du sieur de R e yro lles, dès que son divorce n ’a pas été
fait conformément aux lois.
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n ’est plus c la ir , et il est difficile d ’y voir que si le divorce
n ’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le mariage par
des conventions particulières.
D ’ailleurs , suivant le Code c iv il, il faut pour la validité d ’une
convention ,
la capacité de contracter, 2". une cause licite dans
l ’obligation. ( Art. 1108. ) O r, suivant l’art. 1124, la iemmemariée
est incapable de contracter elle-même; e t , d’après l'art. i i 5 3 , la
cause est illicite quand elle est prohibée par la .lo i , ou contraire à
l ’ordre public.
Se départir de son état civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une iemrnc mariée puisse f.iire; et cependant elle n ’a
pas la capacité de faire des dispositions bien moindres. Comment
�24
(
) .......................................
• trailcroit-elle librement avec son m a r i , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré
sider? ( A r t . 2 i3 et i * )
L e mari lui-même , chef de la puissance maritale , ne peut y
déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i
. ) Com
ment donc concevoir que le mariage soit dépendant d’une transac
tion , quand la puissance maritale n ’en seroit pas susceptible, elle
qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du mariage?
Jusqu’ici la dame de Reyrolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce ; et , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
traité seroit nul : mais il n ’en existe d ’aucune espèce ; et ce que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an
et de quelques
exploits.
L a dame de Reyrolles, objecte la demoiselle Maigne, s’est donnée
24
588
5
plusieurs fois la qualité de femme divorcée: donc elle a approuvé,
elle a ratifié, elle a v a lid é son acte de divorce.
Ce qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince intérêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de mariage.
Mais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s , et perdre
par un seul mot son état civil ? U n mineur cesse-t-il de l’être en
se disant majeur ? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d ’être
engagé dans les liens du mariage ?
L ’exécution d’un acte n u l , dit M . Cochin dans son 37e. plai
d o y e r , n ’en a jamais opéré la ratification ; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclamer , si chaque acte d’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu il 11e iaut considérer que
l ’acte nul , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrolles ayant coopéré par sa signature
à un premier acte n u l , c ’est-à-dire , à son divorce , tout ce qu’elle
a fait ensuite n’en a été que 1 exécution.
Il fulloit qu’elle réclamât ou exécutât, M ais, étant en puissance
m aritale ,
�25
(
)
m aritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamer à compter du
décès de son mari : jusque-là elle étoit donc forcée d’exécuter un
divorce nul , car son intérêt n’étoit pas de réclamer , de peur que son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première exécution
du divorce ; et on a vu comment'elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e compte d’ins
truction qu’il lui devoit comme mandataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoit d’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand cette partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance maritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
L a dame de Reyrolles n ’a point traité sur son divorce : elle n’a
fait que l'exécuter par contrainte. Pour exister , elle fut obligée de
former quelques demandes ; et sans doute pour la régularité des
exploits, ne pouvant sc dire autorisée du sieur de Reyrolles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle demandoit.
Mais toutes les fois que celte qualité n’étoit pas de forme néces
saire, la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée ;
elle a même prouvé, par les registres de son m a r i , qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de F lorat-R ejrolles après le
prétendu divorce.
L ’exécution d’un acte nul, on le répète, n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dumoulin sur celle matière. « L a ratification d ’une
» obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en
« rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
» cette obligation, la mention du m otif de l'action en rescision,
» et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action esl iondée. »
( Art. i
.)
358
Une donation nulle ne peut même être ratifiée : il faut la refaire
en form e légale. ( A r t . i q. ) Un divorce auroil-il moins intéressé
D
53
�(* 6 )
le législateur? et pensera-t-on qu’il fut plutôt susceptible d’une
simple ratification ?
La jurisprudence ne s’est jamais écartée de ces principes. Un
jugement a été cassé le
messidor an 4» parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d’une vente de
bien dotal en coutume d’Auvergne, « attendu que les form alités
» n’ ont pas é té rem plies, et que l’ exécution pendant plusieurs
» années du traité du...... n’ a pii 'valider un acte nul dans son
» principe. »
23
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renversés par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en thèse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d’ordre public,
et qu’on est non recevable à demander la nullité d’un divorce quand
on l’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d ’un
tel paradoxe. Il n ’étoit question devant elle que d’un divorce 'va
la b le, dès-lors la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une arme trop puissante
pour qu’il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec cette seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aisé de voir que la demoiselle Maigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d’un arrêt de
circonstance.
« Le sieur Bocliler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la v a lid ité du divorce obtenu par sa icm m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» Celle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d’ailleurs et pé*
» rcrnptoircrnent que son ci-d evant mari étoit non recevable,
» attendu qu’il avoit reconnu la v a lid ité du divorce.
» Arrêt de la cour d’appel séante à Trêves, qui admet la fin de
» non-recevoir ; attendu que les moyens de n u llité étaient sans
)) fondem ent ; et encore, attendu que le inari a pu et voulu renoncer
�.7
( 2 )
)) au droit qu’il avoit de contester les effets civils du divorco de son
» épouse.
n Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article 6 du Code
» civil.
» L e demandeur soutenoit qu’une convention tendante à faire
» valoir un acte de divorce n u l, seroit contraire à l’ordre public
» et aux bonnes mœurs ; qu’ainsi, en supposant le fait de recon>i n o is s a n c e ou consentement par le m ari, la cour d’appel n ’auroit
» pu conclure, en point de d ro it, que par la force de celte con» vention le divorce fût devenu inattaquable.
» A r r ê t . — Attendu qu’en ajoutant à la considération de la non
» application des lois invoquées par le demandeur aux actes par
»
»
h
»
»
»
»
»
lui attaqués, celle de l’approbation par lui donnée à la régularité
de ces actes, et même celle de la reconnoissance par lui faite dans
d’aulres actes publics de sa qualité de fem m e divorcée, à celle
qui a fait prononcer le divorce d ’avec lui, la cour d’appel n’a
pas violé l’art. 6 du Code civil, q u i , défendant de déroger par
des conventions particulières à l ’ordre public et a u x bonnes
m œ urs, et bornant sa défense à ce qui concerne ces objets d’intérêt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissances et celui
» des transactions sur l’ intérêt civil et privé; ce qu’il a formelle» ment exprimé dans Fart. 2046, et ce que la loi transitoire de
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i . — Section des requêtes. »
( S ir e y , an i 5 , pag.
3
225. )
Combien de différences notables entre cet arrêt et la cause!
Après un divorce demandé et obtenu par une fe m m e , c ’est le
mari qui, n’étant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
11 traite librement; il n’est pas incapable.
11 traite sur les intérêts civils du divorce.
11
ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il reconnoit par plusieurs actes la v alidité du divorce.
D 2
�( *8 )
En plaidant, il ne peut pas même prouver que le divorce ait etc
nul d’aucune nullité.
L a cour d ’appel en effet ne se décide que par ce motif.
En cassation, l’époux n’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l, et il se borne à une dissertation polémique
sur l ’effet de la ratification qu’il a donnée.
Ainsi la position de la question n’étoit pas de savoir s’il avoit
pu transiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décide la cour de cassation ; et
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n’en résulte qu’une
plus grande conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tenoit
à l’ ordre public et à l’ intérêt civ il et privé, et qu’elle ne s’est dé
cidée à juger aussi le sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
L e m otif pris de l ’art. 2046 du Code le prouve. Il porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d ’un délit. On 11’est donc
pas libre de traiter aussi pour l’intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, el divorcée pour sa famille et pour elle-même,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ intérêt; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc bien loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle M a ig n e , en citant cet arrêt, a prétendu, avec
le rédacteur, que l'article 6 du titre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure el incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces ne sont pas d’ordre
public.
J1 est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�*9
(
)
comme un doute; mais il termine de manière à prouver qu’il ne
s’est pas décidé comme la demoiselle Maigne l’entend.
Cependant sa première application semble fautive; car en rédui
sant la définition d’ordre public à ce qui concerne l’état de la
république, quodadstatum reipublicœ pertinet, il n’a pas remar
qué que l’expression ju s publicum étoit alternativement employée
par les lois romaines pour le droit public et pour l ’ ordre p u b lic;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, comme
on peut le prouver par des exemples.
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire la falcidie
n’éloit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction, à peine par son héritier de payer une somme aux léga
taires, celte disposition étoit déclarée nulle, comme contraire au
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires ( i ) . . .
Cependant une telle nullité n’inléressoit aucunement l’ état de la
république.
Si en donnant la dot au mari on avoit stipulé qu’il ne contribueroit pas aux frais d ’inhumation que la loi meltoit à la charge
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins une
action en répétition contre le mari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation, parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire au
droit public (2)... Cependant encore l ’état de la république étoit
fort étranger à cette convention.
(1)
F ra ler cum hceredem sororem scriberet, e t aliu m ab e A , c u i dona-
tum v o le b a t , stipulavi cnravit ne f a lc id it i uteretur
niam
,
si contrd f e c i s s e t , prcestare
,
Tej'ragandum co n stitit ; e t ideo sororem
luram
(a)
,
,
et ut certain p e cu -
privatoruni cautione legibus non esse
ju r e
p u h lico
et action em e x stipulata denegandarn.
(
L.
1
retentionem Jiabi-
S , f f . A d leg. f a l c . )
N eratius quterit s i is q u i dotem dederat pro muliere
,
stip u la tili
est.... N e q u id m aritus in fu n u s co n jerret , ari funeraria m aritus teneatur?
e t a it... S i alius fu n eravit, posse eum m aritum convenire , q u ia p a c to hoc
J u s 1‘ u b l i c u m
infringi non possit.
(
L.
20
, f f D e rclig. et sum pt.
)
�3
( ° )
Ces dispositions n ’étoient donc que d'ordre public, et la loi ne
vouloit pas qu’elles pussent être éludées par des conventions par
ticulières. Comment donc seroit-il proposable de supposer à la
prohibition de dissoudre le mariage, un moindre intérêt d ’ordre
public? et au lieu de se jeter dans l'application vague de la loi 6 ,
cod. D e p a c tis, et de l’art. 6 du C o d e, comment ne pas trouver
une nullité radicale aux divorces faits sans toutes les formalités,
quand la loi a dit : N ullum ratum est divortium, m s i, ete.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : P actiones nullam habere voluinus
Jirm itatem , tanquam legîbus contrarias? enfin, comment ne pas
voir une disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tembre, quand elle dit qu’un second mariage ?ie p e u tè Ire contracté
qu’après un divorce lé g a l?
Quand les lois sont si claires, comment seroit-il possible do
penser qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité de femme mariée, ait pu s’en priver elle-même en se disant
divorcée, et en ne transigeant pas même sur la validité du divorce
qu’on lui oppose?
Que r e s t e - t - i l donc à la demoiselle M aigne, si ce n ’est de faire
d iv e r s i o n à la cause par la naissance d ’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d ’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre
u n e épouse et sa rivale, déterminé it fixer son irrésolution par un
retour à scs devoirs , en est tout à coup détourné par une séduc
tion toujours active; habitare fa c it sterilern in dom o, et la mère
doses enfans, r e p o u s s é e comme une vile esclave, est obligée de céder
ii une étrangère les honneurs du ht conjugal.
E h ! qu’importe à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle à scruter la conduite d’une épouse? Si cette conduite
étoit blâm able, cet adultère qu’elle proclame ne seroit-il pas
�(3 0
son propre ouvrage?-n'en porteroit- elle pas le poids éternel?
Mais il ne s’agit point ici de la naissance d’un enfant; il suffit
à la dame de Reyrolles de déclarer qu’elle n’a point à en rougir,
et qu’elle est à même de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n’est ici employé
que comme moyen de la cause, et parce que la qualité de femme
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. Mais ne seroit-il
pas bizarre que, dans la commune où un divorce a été prononcé,
l’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objection est dorlc absolument nulle , et rentre d’ailleurs dans la
discussion précédente, où elle trouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle Maigne,
et se justifie la décision des premiers juges.
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui est ôté , mais il lui
en reste la fortune. La dame de Reyrolles se borne à vouloir ce
qui lui appartient , d ’après son contrat de mariage. N ’est-ce pas
assez qu’elle soit réduite à le demander à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
envier, et que le sort de l’une et de l’autre soit aujourd’hui si
différent ?
Une règle de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e,et le vœu
du législateur n ’a pas balancé: M e liu s estfavererepetitioniqucim
cidventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans cette loi
seule , s’il n’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion , l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de Reyrolles; elle le sera de même aux yeux de la
co u r, puisque les lois ne réputent pas son mariage dissous. L a
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. Ainsi, les principes demeurent dans toute leur force , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-rccevoir. Mais que signifient de misérables
�( 33 )
subterfuges dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront qu’un mariage ou un divorce, c’e s t - à - d i r e , un objet
majeur et d ’ordre public. Alors disparoîtront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T , veuve D E R E Y R O L L E S .
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licen cié avoué,
À R IO M , de l ’ im p rim e rie de L a n d r i o t , seul im p r im e u r de la
Cour d ’appel. — F r im a ir e an 1 4
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
assignats
substitution de testaments
jugement moral du divorce
Description
An account of the resource
Mémoire Pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée; Contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles , appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1774-Circa An 4
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0309
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
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Coverage
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Brioude (43040)
Le Puy-en-Velay (43157)
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assignats
divorces
jugement moral du divorce
substitution de testaments
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2SS*
l r e . SECTION.
C O I F F I E R , docteur-médecin, et Ajuger
C l a u d e C H A L A M B E L , son gendre, le aoûtappelans d’un jugement du tribunal du Puy ;
u l i e n
C O N T R . E
GARDE , p rop riétaire,
B a r th é le m i-F e r r é o l
intimé.
----------“
tt<*éu
DE R I OM .
-----------
~
Une femme grevée de substitution a-t-elle pu instituer
/* s S f r * d
esétrangers? Les lois de 17 9 2 , abolitives des substitu/ ^ ^ ^ T L i o n s , en la rendant propriétaire non grevée, ont-elles
validé ses institutions antécédentes?
Etienne Galien et Françoise Reynaud ont eu cinq filles;
savoir, Marianne, qui épousa Jean Fontane, dont est
y.
issue la dame Coiffier, Françoise, Magdeleine, Gabrielle
e t A n n e L e s deux dernières ont été faites religieuses.
2
L e 4 m a i 1 7 3 3 Etienne Galien fit son testament. Il
'I
'
légua 4000 fr. à ses filles.
:
Il institua Françoise Reynaud, sa femme , son héri!
/n n
/ tière, a la charge de remettre l’hérédité à l’une de ses
<riquatre filles puînées, quand elle voudroit. E n cas de non
remise , il désigna Françoise.
A
�Il évalua son mobilier 4000 francs, et prohiba tout
inventaire.
En fin, il légua à sa femme la jouissance de ses biens
jusqu’à ce qu’elle eût fait remise de l’hérédité : il lui légua
aussi la plus-value de son mobilier.
Six jours après, Etienne Galien lit un codicile, par
lequel il déclara qu’il n’entendoit pas excepter Marianne,
sa fille aînée, de la remise de son hérédité.
Il déclara qui si celle à qui devoit échoir cette héré
dité mouroit sans enfans, ou scs enfyns avant la puberté r
il entendoit qu’elle ne pût disposer de l’hérédité en
faveur d’aucune personne étrangère , et qui fût hors sa
ligne, mais bien en faveur de ses sœurs, la primogéniture observée.
f
Etienne Galien mourut aussitôt après ces actes; et par
testament de 1749, Françoise Reynaud , sa veu ve, remit
la succession Galien à Magdeleine Galien, qu’elle institua
aussi son héritière.
L a dame Magdeleine Galien contracta mariage avec
Balthazard Pauze, le 7 novembre 17 5 4 ; et oubliant déjà
la nature de son titre, elle institua son futur époux héritier
de ses biens; à la vérité elle ajouta la clause suivante r
« et ce, au cas où elle décéderoit sans faire d’autres dis « positions valables, ou avoir des descendans, sansa cependant que ladite institution puisse^nuire ni préju« dicier à ses volontés. »
Bientôt elle eut l’occasion qu’elle s’étoit réservée; elle
se crut en d a n g e r de mort, et rédigea un testament olo
graphe, par lequel elle nominojt héritière la dame Foutane, sa sœur.
�(
3)
Mais sa destinée étoit de faire beaucoup d’actes inutiles;
elle a survécu quarante-cinq années à ce testament.
L e 23 octobre 17 9 0 , le sieur Barthélexni Garde, partie
adverse, neveu du sieur Pauze, contracta mariage avec
une demoiselle Vissaguet.
L e sieur Pauze, qui n’ignoroit pas le vice de l’insti
tution de 17 5 4 , et qui vouloit s’assurer quelque chose,
institua et fit instituer par Magdeleine Galien, sa femme,
le futur pour leur héritier commun.
Mais ce fut à deux conditions; la première, que le
survivant des deux instituans jouiroit des biens des ins
titutions; la deuxième, que luiBalthazard Pauze touche
rait la dot de la futui’e, sans être tenu à la rembourser.
Magdeleine Galien est morte sans postérité le 1 1 nivôse
an 8.
Balthazard Pauze, son m ari, lui a survécu, et a joui
de ses biens.
Les héritiers de la dame Fontane le voyant en pos
session, et ignorant l’institution de 179 0 , l’ont d’abord
assigué en remise de l’hérédité, en germinal an 8.
L e sieur Garde a été ensuite appelé, et il a été pris
contre lui des conclusions en nullité de tous les actes par
lui opposés.
Leurs moyens étoient fondés sur ce que la substitution
I733 avoit ôté à Magdeleine Galien tout pouvoir
d’instituer jusqu’en 17 9 2; et qu’après cette époque, elle
n’avoit fait aucun acte qui transmît sa succession.
Cependant le tribunal du Puy a débouté le sieur Coiilier
de ses demandes, par jugement du 16 pluviôse an 12 , dont
est appel.
A 2
�(
4)
M O Y E N S .
De trois institutions qu’a faites la dame Pauze, une
seule auroit été dans l’intention des testamens de 17 3 3 ;
c’est celle de 1756 : car la dame Pauze, décédant sans
enfans, devoit remettre les biens de son père à sa sœur.
Mais le sieur Coiffier n’a fait aucun usage de ce testament.
Il reste donc deux institutions qui s’entre-détruisent,
et que cependant le sieur Garde appelle au secours l’une
de l’autre : car s’il n’est pas héritier direct de la dame
Galien en 1790, il veut au moins retrouver sa succes
sion dans celle du sieur Pauze, héritier en 1764.
Mais comment le sieur Pauze auroit-il été valable
ment héritier de sa femme en 1764? elle n’entendoit rien
lui assurer, puisqu’elle se réservoit de disposer; puis
qu’elle n’entendoit pas que cette institution pût préjudicier à ses volontés.
Une institution ne donne pas une chose- présente ,
mais il faut qu’elle donne au moins une espérance irré
vocable : sans cela elle n’existe plus, car elle est aussi
une donation de succession et du nom d’héritier. O ï,
donner et retenir ne vaut.
L e sieur Pauze ne comptait pas lui-même sur cette
institution, puisqu’il a autorisé sa femme, en 17 9 0 , à
en faire une autre. On ne peut alléguer pour lui de ci’ainterévérentielle : il étoit le chef de la puissance maritale ; il
autorisoit l’institution..
Voyons donc si la dame Pauze a pu valablement ins
tituer en 1790,
�m( 5 )
Depuis 17 3 3 elle étoit grevée de substitution envers
une de ses sœurs ; il lui étoit défendu d’instituer un
étranger. O r, celui qui accepte un don conditionnel ne
peut s’affranchir de la condition.
On objecte que la dame Fontane étant décédée avant
la dame Pauze, n’a pas transmis îl ses enfans l’espoir de
la substitution, d’après l’art. 20 de l’ordonnance de 1747.
Mais l’article 55 du titre 2 porte que pour les substitu
tions antérieures on suivra les lois, et la jurisprudence qui
avoit lieu. O r , les biens de la succession sont situés dans
le parlement de Toulouse, où on a toujours jugé que
les substitutions passent, en cas de prédécès, aux enfans
de l’appelé. L e statut est réel ; et dès-lors les enfans de
la dame Fontane ont été saisis après elle de la substitu
tion. ( Furgole, sur l’art. 20 , injine. )
On objecte encore que la substitution de 17 3 3 est
nulle , faute de publication et enregistrement.
Mais c’eût été à Magdeleine Galien à remplir ces formes.
Celui qui se dit son héritier fait valoir ici un moyen
étranger, proscrit par les articles 32 et 34 du titre 2 de
l’ordonnance de 1747•
Magdeleine G alien, qui avoit accepté une succession
grevée, étoit donc dans l’incapacité absolue d’en disposer
autrement que dans l’intention du testateur, et surtout
d’en disposer contre sa prohibition.
Les aliénations qu’elle eût faites à de tierces personnes
auroient v alu , parce qu’elles auroient acquis de bonne foi?
n’y ayant pas eu de publication.
Mais un don quelconque, ù titre universel, n’a pas la
�( 6 )
même faveur. Magdeleine Galien n’en avoit pas le droit;
et son prétendu héritier, s’identifiant avec elle pour la
succession, ne peut en sépai-er ses intérêts pour faire
valoir des moyens étrangers.
Ainsi Magdeleine Galien n’étant pas , en 17 9 0 , pro
priétaire des biens substitués, n’a pas pu, à cette époque,
les comprendre dans son institution.
A cela on objecte que la loi du 14 octobre 17 9 2, en
supprimant les substitutions , l’a rendue propriétaire. O r,
ajoute-t-on, comme une institution n’est qu’un testament
irrévocable, l’effet ne s’en règle que par le décès : elle a
donc pu tester valablement d’une chose qu’elle n’avoit
pas, pourvu qu’elle l’eût à son décès.
L e moindre défaut de ce raisonnement est d’être fondé
sur une base fausse et captieuse.
Une institution n’est pas un testament ; c’est , dit
D elaurière, un don irrévocable de succession ,• et cette
définition est adoptée universellement.
L ’institution participe de la donation entre-vifs et de
la donation à cause de m ort; si elle n’avoit qu’un seul
de ces caractères, elle seroit dénaturée.
A in si, quand les lois ont prohibé aux pères d’avan
tager leurs enfans, une institution auroit été nulle de
plein droit, parce qu’un père ne pouvoit rien assurer
entre-vifs; il ne pouvoit pas alors faire un don irrévo
cable de sa succession.
De même Magdeleine Galien, enchaînée par une subs
titution , n’a pu disposer des biens grevés qu’après le 14
octobre 1792 ; mais elle n’a pas pu faire un don irrêvo -
�m
cable de ce qui s’en trouvèrent lors de l ’ouverture de sa
succession.
L a loi du 18 pluviôse est absolument dans ce système:
car l’article i er. ne maintient les institutions antérieures
au 7 mars 17 9 3 , en ligne directe, qu’en tant que ce sont
des actes irrévocables de leur nature. Elle ne valide
point du tout les institutions postérieures à la prohibi
tion, parce qu’alors un pore ne pouvoit pas instituer,
même en survivant aux lois prohibitives.
L e sieur Garde ne peut se créer un moyen qu’en com
parant son institution à un testament : il a raison; mais
cela seul le condamne sans retour.
Ce testament, qu’il est impossible de dire irrévocable
pendant la substitution , contient une disposition uni
verselle.
Il devoit donc être refait d’après la loi du 22 ventôse
an 2 , parce que la dame Pauze a survécu à sa publi
cation. II ne l’a pas été : donc la disposition antécédente
est radicalement nulle.
Enfin, on ne voit aucune apparence de liberté dans cette
institution, et tout prouve que la dame Pauze l’a ignorée.
Une signature fugitive, extorquée on ne sait comment,
pour une simple procuration, afin d’éviter la solennité
d’un contrat de mariage, est déjà un motif de suspicion.
Et quand on voit le sieur Pauze s’adjuger un usufruit
et la dot de la lu turc sans remboursement, 011 voit qu’il
dicte les conditions.
O r, son domicile étoit en coutume d’Auvergne. Ce
�(8),
statut régissoit la personne des époux, et prohiboit tout
don de la femme au m ari, directement ni indirectement.
Peut-être bien le sieur Pauze n’espéroit-il pas survivre
à son neveu, mais il prenoit des précautions actuelles.
L e premier bénéfice de l’institution étoit pour lu i, et
dès-lors la loi étoit violée.
En résumé, la dame Pauze a fait ce qu’elle ne pouvoit
pas faire, et n’a pas fait ce qu’elle pouvoit faire. Quand
elle a institué le sieur Garde, elle n’a pu lui donner que
ses biens personnels ; elle n’a pu lui assurer des biens
substitués, dont il lui étoit défendu de disposer au préju
dice des siens. Lorsqu’ensuite la substitution a été éteinte
en 17 9 2 , elle auroit pu en disposer, et elle ne l’a pas fait.
Les moyens de droit se réunissent donc aux circons
tances pour anéantir l’effet d’une institution évidemment
subreptice, ignorée peut-être par l’instituante, faisant
violence à la volonté d’un père qui eût réglé autrement les
affaires de sa descendance ; institution, enfin, qui blesse
les principes et les convenances, en trompant l’intention
d’une famille, pour faire passer tous ses biens dans une
famille étrangère.
«
M . B O N A R M E , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R ,
avocat.
M° . M A R I E , licencié avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L
andriot,
seul imprimeur d e l a
Cour d’appel. — Août 1806.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coiffier, Julien. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bonarme
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
coutume d’Auvergne
Description
An account of the resource
Précis pour Julien Coiffier, docteur-médecin, et Claude Chalambel, son gendre, appelans d’un jugement du tribunal du Puy ; Contre Barthélemi-Ferréol Garde, propriétaire, intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1733-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0308
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
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Saint-Germain-Lembron (63352)
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coutume d’Auvergne
Successions
testaments
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29524a768f458a507a7e113018108eb8
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veuve d e ^
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M. Jean-James B e a u f i l s , habitante de la f i — f a
Ville de S a in t-F lo u r, intim ée
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CO N TRE
Le sieur
R aym ond
v 'Îifa U '
drUAsàiH/ /JüMérfS A it r /il
D E M O L E N -D U M A S
a p p e la n t
________
¿A*to to U t'f*
mmmmm
^ ity G s f ¿ U ffK J
•»-
tU^ ' 'i
f i* JjtJ*
• L E grand-père de la dame Beaufils a acheté un domaine
et l'a revendu. Harcelé presque continuellem ent par des
demandes hypothécaires, il ne s’est toujours préservé de
l' éviction qu’en payant. L e sieur D em olen , qui prétend
représenter les vendeurs dudit dom aine, s’est fait l’illu sion de croire qu’il auroit une garantie contre celle dont;
($^Ê>Ù u*{<aa/
/ 'j '
.
diujàJ+ fiutkvJ
•
il est le garant lui-m êm e. P o u r y p a rven ir, il dénature
A
-
.
�et dément cq qui s’est fait il y a quatre-vingt-douze ans :
à l’en c r o ire , il faudroit remettre les parties au même
état qu’elles l’étoient à cette ép oqu e, et lui rendre un
domaine qu’il réclame sans savoir à quel titre.
Q uelque bizarre que soit ce système, il est enveloppé
de tant de faits, qu’il est devenu nécessaire de les simplifier
vpour les éclaircir. Quatre.-ving]t-dix ans.de procès doivent
¿'perm ettre à la fam ille Beauiijs de demander du repos;
et.si^le sieur Dem olen ne pense pas que ce soit avoir
fourîli^une assez longue carrière devant les tribunaux, il
faut espérer que la C o u r, plus compatissante, l'empêchera
" :'de p rép a rer'd e nouveaux; m atériaux de procès pour la
^yla. quatrième, génération.
^ w P a r acte du 10 décembre 1 7 1 8 , le sieur Jean B o y e r,
de Massiac ( représenté par la dame Beaufils ) , donna
*en «j^hange à C lau de, G abriel et G abriëlle Dussaulnier^
itères et sœur ( le sieur Dem olen prétend représenter
^ Mîaftï’iël et. G abriëlle X, un domaine appelé de Bijssac ^
Î1& lui donnèrent en contre-écliange un domaine appelé
Cham bon.
^ L o rsq u e le sieur B oyer voulut se mettre en possession
■- de^ce domaine, il'en fut empêché par un sieur Roucher,
* p r ê t r e , qui prétendit avoir droit d’en jo u ir , comme
; créancier d’une rente de 200 fran cs, constituée en 1 7 1 5
..xpar
C la u d e
D ussaulnier, avec assignat spécial sur ledit
domaine.
Il fallut donc soutenir un prem ier procès en 1720 j
s et ce procès fut assez vif. Enfin une sentence de la séné* chaussée’ d?A u v e r g n e , du 3 juillet 1 7 2 2 , condamna le
prêtre R oucher à- se! désister du domaine.
�■C 3 )
Les héritiers D ussaulnier, appelés en garantie par le
sieur B o y er, furent .condamnés par la même sentence à
faire cesser le trouble.
L e sieur R oucher interjeta appel au p arlem en t, et la
sentence de R io m fut confirmée par arrêt du ï8 août
1723.
E n fin , le sieur B oyer se m it en possession ; et par
traité du 2.6 juillet 1728 , il força le sieur R ou ch er à
lui payer 800 francs pour restitution de jouissances.
A p rès la m ort de Jean B o y er, arrivée e n . . . A n to in e,
son fils, fut assigné hypothécairem ent par un autre créan
cier du sieur Dussaulnier (le^sieur M atthieu R o d d e, de
Chalagnat ) , en 1736.
Il dénonça cette demande aux sieurs D ussaulnier, et
les fit condamner à la faire cesser, par^sentence du 4 mai
173 6.
C e u x -c i ne s’en m irent point en peine ; et le sieur
iBoyer fut encore obligé de payer la créance du sieur
R.odde, le 5 juin 1737. I l continua bien de poursuivre les
héritiers Dussaulnier en rem boursement de ses avances;
mais on ne vo it pas ce qui résulte de ces poursuites.
L e 28 novem bre 1739 , A n toin e B oyer et Claudine
B o y e r , sa sœ u r, croyant se délivrer de l’embarras que
leur donnoit ce domaine du C h am b on , le vendirent au
m ême sieur M atthieu R od d e, de Chalagnat, moyennant
6800 francs.
C est ici le Heu "de d ir e , pour l ’intelligence des faits
qui vont suivre, quel étoit l’état de la famille Dussaulnier
à cette époque.
A 2
�Jacques Dussaulnier.
Claude D ussaulnier du P o u z a t,
G abriel D ussaulnier, G abriëlle D ussaulnier,
m arié à
• cu ré de M o lèd e,
m orte sans postérité
Paule C lialvet de R o ch e m o n teix ;
m ort en 1758.
en 17 6 4 ;
m ort en 1746.
a tout donné
'|
au sieur D em olen.
M arie-A m ab le D ussaulnier,
m ariée à
A n to in e de T rem eu g e de la B arre J
décédée sans postérité en 174 2 ,
avant G abriel.
Jacques Dussaulnier étoit propriétaire de la terre du
P o u za t, d’ un domaine appelé le C ham bon, et d’une di
recte appelée de Serre. O n ignore si l’un de ses trois
en fans a eu quelque avantage. CJne procuration donnée
par G abriel D ussaulnier, le 7 novem bre 1 7 1 8 , pour le
faire entrer dans l’échange du domaine du Chambon ,
appartenant à Claude Dussaulnier , prouve qu’il étoit
seul propriétaire de ce d om ain e, et qu’il lui étoit échu
par un partage antérieur. D é jà , en effet, Claude D us
saulnier avoit seul constitué, en 1 7 1 5 , une l’ente sur ledit
domaine.
L a directe de Serre fut vendue p ar Claude Dussaulnier
à M . Farradesche de G rom ont, par acte du 8 juillet 1729,
moyennant 4610 fr. délégués à des créanciers de Jacques
D ussaulnier, son père.
La terre du P o u za t resta dans la famille Dussaulnier.
Claude et M a r ie , sa fille, l’ont habitée jusquVi leur décès:
G a b rië lle Dussaulnier qu i l’a habitée aussi, l ’a transmise
au sieur D e m o le n , son donataire.
�C'5 •)
Claude Dussaulnier se maria en i j i ô . La demoiselle
de Rochem onteix lui porta en dot 9000 francs payables
en différens termes.
M arie-A m able D nssaulnier, sa fille, se maria avec le
sieur de Trem euge le 6 février 1741. Son père ne lui
donna rien ; mais G abriel et G abrielle D ussaulnier, scs
oncle et tante, lui firent donation de tous les di*oits
successifs qu’ ils avoieut à recouvrer dans la maison , sous
la seule retenue d ’une pension viagère de 200 francs, et
de leur logem ent au Pouzat.
E lle ne survécut pas long-tem ps à ce m ariage, car
elle décéda en 1742 , sans postérité.
Comme ses on d e et tante n’avoient stipulé aucune
réversion des biens par eux donnés, Claude Dussaulnier ,
son p è re , héritier des acquêts eu coutume d’A u v e rg n e ,
réunissoit sur sa tête toute la terre du P ou zat, et tout
ce qui seroit provenu de G abriel et G a b riëlle, même le
domaine du C h am b on , s’il leur eût appartenu avant la
donation de 1741.
Claude Dussaulnier m ourut en 1746, ne laissant d’autres
héritiers que G abriel et G abriëlle D ussaulnier, ses frère
et sœur.
Ils pouvoient retrouver dans sa succession les biens
dont ils s’étoient dépouillés par la donation de 17 4 1 i
mais ces biens étoient devenus soumis aux dettes du
d é fu n t, et pour ne pas les payer ils répudièrent sa suc
cession , et un curateur y fut nommé. .
L a dame de R ochem onteix, veuve de C laude, obligée
par ce décès de quitter la m aison, fit donation a M arieFrançoise C halvet de N astra, sa n ièce, de toutes ses re
�( -6 )
prises, par acte du 9 septembre 17 4 6 ; et celle-ci obtînt
sentence contre le curateur à la succession vacan te, le
9 mai 17 4 8 , portant condamnation., i° . de 3000 francs
-touchés par Claude Dussaulnier ; 20. du gain -de survie
stipulé au contrat de m ariage de 1715 .
Aussitôt qu’elle eut cette sentence , la demoiselle de
Nastra fit assigner hypothécairem ent le sieur R o d d e, de
C h alagn at, com m e détenteur du domaine du Cham bon,
par exploit du 11 ju in ¡1748.
L e sieur Rodde dénonça cette demande le 9 mai 1749,
à A n toin e et Claudine B o yer, enfans de Jean B o y er, son
vendeur.
C eu x-ci d én on cèren t, le 9 mai 1 7 4 9 , à G abriel et
G abrielle Dussaulnier, non pas comme héritiers de Claude,
mais comme vendeurs eux-mêmes du domaine du Chamb o n , par l’acte du 10 décembre 1718.
L es Boyer dénoncèrent à leur tour à M .
com m e acquéreur postérieur de la directe
C ependant A n toin e et Claudine B oyer
sur la demande origin aire, firent valoir à
de G rom o n t,
de Serre.
se défendant
la demoiselle
de Nastra les créances payées par leur père, qui prim oient
l’hypothèque de la demoiselle de Nastra.
A cette é p o q u e , le sieur ¡Boyer étoit menacé d’un
autre procès de la part d’un sieur P o n s, de M o n servier-,
créancier de Jacques Dussaulnier d’environ 1000 francs.
Sa créance avo it été réglée le 2 décembre 1 7 4 1 , avec
le sieur de T r e m e u g e , qui s’étoit obligé de le p ayer;
mais comme il n’avoit stipulé qu’en qualité de m a r i,
il n’eut rien à payer après la m ort de sa fem m e, et le
sieur Pons n’avoit ù s’en prendre qu’aux biens venus du
�( 7 )
sieur Dussaulnier. Il fallut donc que le sieur B oyer payât
sa créance ; et en effet il lui en fut donné quittance avec
subrogation, le n juin 1749*
G abriel et G abriëlle Dussaulnier voyoient bien qu’ils
ne pouvoient éviter la garantie de tant de dettes de leurs
père et m è re , de la dette de leur frère envers ladite
demoiselle de Nastra ; ils le pouvoient d’autant moins
qu’ils jouissoient de la terre du P ou zat, m algré leur ré
pudiation : mais peu de personnes connoissoient leur
donation de 1741 , et ils passoient pour avoir un droit
indivis de deux tiers dans cette propriété.
A fin d’éloigner toutes les recherches sur ce p o in t, et
pour faire d iversio n , ils crurent embarrasser les enfans
Boyer par la plus étrange des prétentions ; et c’est ici
que commence la prétendue difficulté de la cause.
Jean Boyer , en recevant le domaine du Cham bon ,
avoit donné au sieur Dussaulnier le domaine de Bussac :
l ’acte de 1718 en prouve la tradition effective; et toutes
les sentences postérieures prouvent que le sieur Dussaul
nier n’articuloit rien de contraire.
\
Cependant le domaine de Bussac étoit rentré dans les
mains de Jean Boyer avant son décès. L ’avoit-il acquis
par acte sous seing privé ou notarié ? on l ’ignore; mais
les titres qu’il avoit remis en 1718 lui avoient été rendus :
t
aucune autre trace de cette nouvelle con%?ention ne se
retrouve; et les enfans Boyer ayant recueilli ce domaine
dans la succession de leur p è re , avoient continué d’eu
jouir paisiblement.
L eu r ignorance du passé parut une belle occasion à
Gabriel et G abriëlle D ussaulnier; ils dirent aux héritiers
�,
( 8 )
Boyer : Comm ent possédez-vous le domaine de Bussac,
et quel est votre titre ? Si vous n’en trouvez aucun , il
faudra croire que vous n’en jouissez que pïgnoraiiçem ent :
ainsi vous devez nous le rendre.
En effet, ils assignèrent, le 7 décembre 1748, les enfans
Boyer à se désister des deux tiers du domaine de Bussac,
avec restitution de jouissances.
M ais cette demande n’étant qu’ un épouvantail pour
repousser celle de la demoiselle de Nastra, du 11 juin
174 8 , les sieur et demoiselle Dussaulnier abandonnèrent
absolument cette demande; et la péremption en fut pro
noncée par sentence du 24 janvier 1764.
Lorsque la demande en garantie form ée contre eux fut
poursuivie activement contre eu x , ils voulurent réitérer
leurs prétentions par une requête incidente, du 8 mars
1 7 5 4 ; et comme le plus difficile auroit été de prouver
l ’im pignoration, ils voulurent donner une autre tournure
à leur demande en désistement ; ils dirent que l’acte de
1718 n’a vo it pas été exécuté , puisque le domaine de
Bussac étoit resté en la possession du sieur Boyer ; ils
soutinrent que leur action n’étoit pas prescrite, tant que
les héritiers B oyer étoient détenteurs du domaine de
Bussac, et que la demande en garantie pi'orogeoit celle
en désistement.
Les héritiers B oyer répondirent que leur jouissance
de Bussac ne venoit ni de l’échange de 1 7 1 8 , ni d’ une
jouissance pign orative; que l’action en désistement étoit
prescrite contre eux , et que d’ailleurs les sieur et de
moiselle Dussaulnier n’avoieut pas qualités pour exercer
cette actipn.
Gabriel
�( 9 )
G abriel Dussaulnier m ourut en 17 6 8 , n’ayant d’autre
héritier que G a b rië lle, sa sœur.
Celle-ci fit donation au sieur D e m o le n , le 16 janvier
1764 , du domaine du Pouzat ; et il fut ajouté dans l’acte
que ses droits contre le sieur B oyer faisoient partie de
la donation.
Aussitôt après cet acte, la demande im poursuivie depuis
1754 fut reprise par le sieur D em o len , par exploit du
19 mai 1764 , contre la demoiselle B o y e r, veu ve B iro n ,
héritière d’Antoine et Claudine Boyer.
L a veuve Biron m ourut quelques années après : MarieA n n e Boyer et Jean-James Beaufils, son m ari, reprirent
la demande contre ses héritiers.
Il est inutile de rendre compte d’une foule de procé
dures et de conclusions en recours, contre-recours, paye
ment de créances et actions hypoth écaires, qui eurent
lieu pendant les vingt-cinq années suivantes.
Enfin , il intervint sentence sur le tout en la séné
chaussée d’A u v e rg n e , le 22 août 1 7 8 9 , par laquelle la
demande hypothécaire form ée par la demoiselle de Nastra
fut adjugée contre le sieur R o d d e , pour le tiers seule
ment du domaine du Cham bon, qui appartenoit à Claude
Dussaulnier en 17 15 ; en conséquence, le partage dudit
domaine fut ordonné pour fixer la portion hypothé
quée; les Beaufils, héritiers B o y e r, furent condamnés à
garantir le sieur R o d d e; il fut ordonné plus ample con
testation , 10. sur j a demande en recours des Beaufils
contre M . Dem olen ; 20. sur leur demande en recours
contre M . de G rom ont; 30. sur ia discussion des créances
payées par Jean Boyer ; 4 0. sur la demande en recours
B
�( ro )
de M . de G rom ônt contre le sieur Dem olen ; 5 °. sur la
demande en désistement des deux tiers de Bussac.
'• Q uoique le siei.11* Dem olen ne fût tenu à rien par cette
'sentence , il'se jugea lu i-m êm e, et paya, à la demoiselle
’de'Nastra la créance qui avoit donné occasion à tant de
procès. Il articule avoir fait ce payement le 17 mai 1790.
Seize ans après, le sieur D em olen a voulu rentrer en
lic e ; il a repris-, le 5 août 1806, la demande en désis
tement des deux tiers de Bussac; et ajoutant à ses con
clusions, il a demandé le désistement du troisième tiers,
•comme exerçant les droits de la demoiselle de Nastra ,
qu’il a payée, si m ieux n’aim ent, a-t-il d it, les Beaufils
lui rem bourser ladite créance.
D e leur c ô t é , les sieurs B ’aufils ont repris leur de
mande en payement des créances de Jacques et Claude
«•Dussaulnier, payées par Jean Boyer.
C ’est sur ces nouvelles demandes qu’est intervenu au
tribunal de S ain t-F lo u r, le 16 mars 1 8 0 9 ,.le jugement
don t est appel : il juge que le sieur Dem olen n’a pas de
qualité du chef de ses donateurs, de demander le désis
tem ent; que d’ailleurs cette action est prescrite : il juge
’que ceux-ci étant garans du domaine du Chnmbon , le
sieur D em o len , en payant la créance N a s tr a , n’avoit
•acquitté que sa propre dette. En conséquence, le sieur
D em olen a été débouté de ses demandes; et faisant droit
sur celles des sieurs Beaufils, il a été ordonné une plus
am ple contestation , attendu que les titres des créances
par eux réclamés n’avoient pas été communiqués.
Sur l’appel que le sieur Demolen a interjeté de ce ju
gem ent, il s’agira de savoir, io,
a eu qualité pour
�( II )
demander le désistement des deux tiers de Bussac.; 2°. s i,
en lui supposant qu alité, l’action n’est pas prescrite; 30. s’il
a action pour demander le remboursement de la créance
]$astra qu’il a acquittée.
.
1
i
M O Y E N
S.
i° . IjC sieur D em olen n’a pas de qualité pour conclure
Contre la dame B eaufils, au désistement de tout ou partie
du domaine de Bussac.
: • ■
; j é ' , Il représente G abriel et G abrielle D.ussaulnier par une
donation de 1764.
*
! ./ ,7
.I:M ais ceux-ci n’étoient alors propriétaires1d’aucun im
meuble ni droit proveuant de Jacques D u s s a u lu ie r n i
de l’éclinrigé de 1718*
• n
Car ils avoient tout donné à M arie-A m ab le Dussauln ier, leur n iè c e , en 1741.
r
A la v é r ité , M arie-A m able Dussaulnier. étoit m orte
sans en fan s, en 1742 : mais C laude'I)ussaulnier > son
p è re , héritier des acquêts , avoit succédé aux biens ¡à
elle donnés.
r\ •
Î) - !■
■
■
'; ,
G abriel et G abrielle Dussaulnier ont répudié à la suc
cession de Claude : un curateur occupe ou a occupé la
succession-, ainsi lui .seul auroit qualité pour demander
Un désistement.
:
' nr.i’;
L e sieur Dem olen n’a jamais attaqué cette répudia
tion ; au con traire, il en excipe encore : et en effet il
ne p e u t, sur ce p o in t, changer ce qui a été fait par
ses donateurs.
. .
.
C e u x -c i ont toujours persisté dans leur répudiation;
B 2
�( i* )
et leur demande en désistement des deux tiers du doinaine de Bussac', suffit pour le prouver : car s’ils eussent
entendu se dire héritiers de C lau d e, ils auroient eu le
troisième tiers de son chef.
Ce n’étoit donc que ta donation de 1741 qu’ils dissim nloien t; mais point du tout la répudiation de 1746.
Cette lim itation à deux tiers du ch ef personnel de
G abriel et G a b rië lle , a duré depuis 175 4 , et dure en
core ; car en 1806 le sieur Dem olen n’a pas demandé
autre chose de leur chef : il a bien réclamé le troisième
tiers, mais ce n’est qu’en exerçant les droits d’un créancier,
et par la voie hypothécaire ; d’où résulte une double
preuve que le sieur D em olen ne prétend à rien comme
h éritier de Claude Dussaulnier.
•
Si donc il est prouvé que G abriel et G abriëlle n’ont
rien conservé, et que tout a passé à C laude, il en résultera
la conséquence nécessaire que le donataire de G abriël et
G abriëlle n’a rien à demander de leu r chef.
L e sieur D em olen a senti toute la force de ce m oyen,
et il y répond que la donation de 1741 n’a rien ôté à
G abriël et G abriëlle D ussaulnier, parce qu’elle est nulle
faute d’insintiation.
M ais on lui a déjà répondu que le donateur ne peut
pas opposer le défaut d’insinuation. T elle est en effet la
disposition de l’article 27 de l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
réitérée par l’article 941 du Code civil. .
Si le sieur Dem olen croyoit p o u vo ir insister, en disant
qu’ il est h éritier du donateur, on lui répondroit encore
qu’ il n’a pu prendre les choses qu’en l’état où elles
étoient lorsque les biens présens de G abrëlle Dussaulnier
�(* 3 )
lui ont été donnés en 1 7 6 4 , et que celle-ci ayant déjà
form é une demande sans q u alité , en 1764 , n’a pas pu
lui transmettre plus de droits qu’elle n’en avoit ellemême.
L e sieur Dem olen objecte que le défaut de qualité
est couvert par plusieurs sentences, et ne lui a pas été
opposé dans l’origine.
D ’abord il verra dans une écriture du 29 mars 176 4 ,
que les héritiers B oyer ont fait valoir ce moyen d’entrée
de cause. Quant aux sentences, comment ont-elles pu
juger les exceptions du défen deu r, lorsqu’elles se sont
bornées à ordonner une plus ample contestation ? L a ’
sentence de 1789 , qui seule a jugé au fo n d , ne prononce
rien que dans l’intérêt de la demoiselle de’ Nastra ; et
dès-loi's il n’en résulte rien pour ni contre les héritiers
B oyer, ni le sieur D em o len , dans leur intérêt réciproque.
E n ajournant la demande en désistement, cette sentence a
aussi ajourné tous les moyens y relatifs; car l’exception est
inséparable de l’action, et dure autant qu’elle. Qucù annalîctr
sunt ad agendum yerpetua sunt adexcipiendum .
■Il faut rem arquer encore que si le sieur Dem olen avoit
pu avoir une q u alité, au moins ce ne pourroit pas être
pour une demande en désistement des deux tiers d’un
domaine.
,
Car ne prétendant rien à la propriété du tiers appar
tenant à la succession de Claude D ussaulnier, il n’avoit
à exercer qu’ une demande en partage contre le cu rateu r,
tant pour ce domaine que pour les autres biens indivis,
auquel partage il auroit appelé le détenteur du domaine.
C ’est en effet un p rin cip e, qu’il n’y a entre cohéritiers
�( i4 )
ou copropriétaires que l’action en partage : on n’est pas
recevable à assigner de -piano un tiers détenteur en désis
tement.
Cette action étoit si bien la seule admissible, que le
sieur Dem olen jouit à lui seul du domaine du P ou zat,
et que s’il suffit pour form er son lot (s’il en avoit u n ) ,
il n’a plus rien à demander à personne.
2°. Quand le sieur D em olen auroit une qualité pour
demander le désistement des deux tiers de Bussac, il
est évident que son action est prescrite.
Il n’indique pas l’époque de la mise en possession de
Jean B o y e r, mais il suppose que c’est en 1 7 1 8 , et que
Jean Boyer n’a jamais été dépossédé.
Si cela est ainsi, il s’est écoulé trente-six ans jusqu’à
la demande form ée par G abriel et G abriëlle Dussaulnier,
en 1754.
L e sieur D em olen d ir a - t - il que déjà il y avoit eu
une prem ière demande form ée le 7 décembre 1748.
M ais d’abord elle a été déclarée périm ée par sentence
du 24 janvier 17 5 4 ; et on sait qu’un ajournement
périm é ne sert pas à relever la prescription, suivant le
texte de l’ordonnance de 17 4 3 , et l’article 2247 du Code
civil.
Il fa u t, dit le sieur D em olen , avoir joui de bonne
foi pour prescrire, anim o dom ini et opinionc dom inii.
O ù a-t-il pris ce principe, pour l ’appliquer à une pres
cription trentenaire? Il le transpose de la prescription
décimale. M ais sans combattre avec plus d’étenduo une
aussi fausse doctrine, il suffit de lui rép on dre, avec l’ar
ticle 2268 du C o d e , que la bonne foi est toujours p ré-
�(
15)
sumée au possesseur, et que c’est à celui qui articule
'la mauvaise foi à la prouver.
< L a daine Beau fils , après une si longue période de
tem ps, 11’a besoin que de d ire, passïdeo quia possideo.
E lle succède aux faits d’au tru i, et n’a rien à prouver pour
rester propriétaire. Ñeque titulus, neque bona Jidcs
requirnntur sed soJa possessio per tnennium.
T ou te la doctrine ancienne, sur cette m atière, est ren
fermée dans l’article 2262 du Gode civil,
« Toutes les actions, tant réelles que personnelles,
« sont prescrites par trente ans, sans que celui qui allègue
« cette prescription soit obligé d’en rapporter un titre ,
« ou qu’on puisse lui opposer l’exceptiou déduite de la
« mauvaise foi. »»
A insi le sieur Dem olen n’a pas d’action pour de
mander un désistem ent, sous prétexte qu’il a un titre
d’acquisition de 1718 ; car ce titre est prescrit. Sans dif
ficulté il résultoit bien de ce titre une action eu déli
vrance pour les sieur et demoiselle Dussaulnier contre
le sieur Boyei”, mais cette action, e x empto > est ellemême prescrite, et ne peut plus s’exercer.
Ici le sieur Dem olen veut faire une différence entre
l’acte de vente et l’acte d’échange. Il prétend que le sieur
Boyer ayant dénoncé une demande hypothécaire aux
Dussaulnier, ¿\ cause de la garantie promise en I 7 ! 8 ,
il a rendu à ce titre toute sa vigu eu r, parce que, d’après
l ’opinion de Salvain g, nul ne peut demander l’exécu
tion d un titre sans l’exécuter soi-m êm e.
O n ne peut pas entasser plus de fausses applications
�( 1 6 }
de p rin cip es, vrais cependant en eux-mêmes. Sans doute
si le sieur Boyer n’étant pas en possession du domaine
du C h am bon , avoit voulu en demander la délivran ce,
il n’auroit pas pu l’obten ir, sans être forcé lu i-m êm e
d’exécuter l’échange par la tradition du domaine de
Bussac. Si des m inorités eussent p ro lo n gé, pour lui
seu l, jusqu’à soixante an s, son action en délivran ce,
il est encore incontestable que l ’obligation de livrer
Bussac eût duré pendant le même d é la i, parce que
l ’action des Dussaulnier n’eût été alors qu’ une véritable
exception.
Mais qu’est-ce que tout cela a de com m un avec l’espèce
actuelle? L e domaine du Cham bon a été livré. L e do
u t des n’est plus la question actuelle : la demande en
désistement de Bussac n’est donc plus une simple excep
tio n , c’est une action bien ré e lle , bien isolée, et dèslors sujette à toutes les règles de la prescription.
Il y a plus , car cette objection du sieur Dem olen
conduit m êm e à fortifier la réponse par des remarques
de faits.
Bussac fut liv ré à l’instant même de l’éch an ge, et la
remise du terrier, constatée par l’acte, en fait mention :
au contraire , Cham bon n’étoit livrable que dans deux
ans.
L orsque le sieur Boyer appela les Dussaulnier pour
être présens à sa possession ; lorsqu’il les assigna pour
faire cesser le trouble de R ou ch er, en 1720, et celui du
sieur R o d d e , en 1737» lorsqu’il obtint contre eux des
condamnations en garantie, entre-t-il dans la pensée que
le
�( i -7 )
le désistement de B ussacn ’eût pas été demandé par e u x ,
si cette action-eût été ouverte■
;& cette'époque ?
Si elle ne l’étoit pas alors, commerit'est-elle née depuis?
L e sieur D em olen ¡n’a qu’une m anière de Fexpliquer ;
c’est de bouleverser son propre syàtème, et de dire que
le sieur -Boyer s’étoit bienialors désisté'de Buseac, mais
qu’il l’a repris depuis.
E n q u e lle q u a lité , et par quel titre? P ig n o ra tif, dit le
■sieur Dem olen ; >ét aussitôt coule de sa plum e l’adagé
s é v è r e , m elius est non habere tituhm i quàm ‘habere
vitiosum .
O ù a-t-il pris encore cette im pignoratiön ? car e^est
l u i , dem andeur, qui doit fournir la preuve de tout ce
quMl articule; ¡mais il ne fuit .que le soupçonner. Il a v u
que le sieur Boyer a voit payé des créances,'et il en conclut
que <c’est peut-être pour le ¡gage de 'ces créances qu’il a
dû reprendre Bussac.
~
'Ces soupçons ne peuvent pas créer un titre vicieux et
précaire. L ’actede 1718 p ro u ve q u e le domaine de Bussaè
fut livré ; à l’instant même le terrier en fut rem is, et
quittancé par l’acte.
A ujourd'hui >ce terrier est revenu au pou voir des h é
ritiers Boyer ; ce iqui prouve qu’il y a eu une nouvelle
convention. V o ilà ce qu’on n e retrouve pas, mais ce dont
on est dispensépffr la prescription,<qui vaut titre; car la
prescription est un mode d’acquérir aussi solide qu’un
contrat de vente. L ’article 712 du Code civil rappelle
sur ce point les principes du droit romain ißt ceux de la
coutume d’A uvergne. Ce qui confirme pleinement lapresC
�( 18 )
crip tio n , c’est la'circonstance essentielle, et que rien ne
peut affaiblir, que dans les procès R oucher et dans ceux
qui ont su ivi, Claude Dussaulnier, poursuivi en gai’antie
sans ménagement , s’est toujours défendu comme un
garant véritable, au lieu de récrim iner comme il l’auroit
f a i t , et de soutenir que l’acte de 1718 étoit resté sans
exécution.
*
A in si , le sieur Dem olen ne peut pas s’attendre de
bonne foi à voir réussir une prétention q u i , sous pré
texte de forcer un possesseur paisible de chercher les titres
de sa possession, bouleverseroit toutes les règles méditées
par le législateur pour assurer le repos des familles.
30. L e sieur Dem olen n’a pas d’action pour demander
le remboursement de la créance qu’il a payée à la de
moiselle de Nastra.
Car il n’a payé que sa propre dette : il a fait volon
tairement ce qu’il eût élé forcé de faire.
L a demoiselle de Nastra étoit créancière de Claude
Dussaulnier, propriétaire pour un tiers du domaine du
Pouzat.
C ’est le sieur Dem olen qui le possède en entier; ainsi
il a dû payer une dette hypothéquée sur un immeuble
qui ne lui a été donné qu’avec ses charges.
En second lieu , le sieur Dem olen , comme représentant
G abriëlle Dussaulnier, est garant des évictions et troubles
quant au domaine du C ham bon, en vertu de l’acte de
1718.
O r , la demoiselle de Nastra, en poursuivant son hypo
thèque contre le domaine du Chambon? donnoit lieu à
�( T9 )j
une' action récursoire' qui devoit rem onter jusqu’au^
sieur D em o len , donataire du prem ier garant.
?
Il
est donc évident q u e , sous tous les points de. vue
possibles, le sieur D em olen n’a fait qu’acquitter sa;propre
dette, en faisant cesser la demande de la demoiselle de
Nastra.
Lorsque le sieur Dem olen a demandé le désistement
d’un tiers de Bussac, si on ne lui remboursoit pas cette
créance, il n’a véritablem ent réclamé qu’une chose plus
ridicule encore que le désistement des deux tiers : aussi
n’en fait-on pas un article particulier de discussion.
C ’est par la voie hypothécaire que le sieur Dem olen
veu t être remboursé de la créance Nastra par la dame
Beaufils, détenteur de Bussac; et en effet, il lui donne
l ’option de payer ou de délaisser l’immeuble.
IVIais s’il forme cette demande comme subrogé par la
demoiselle de N astra, il ne peut s’aider que de la sen
tence de 178 9 , qui ne prononce rien en faveur de la
demoiselle de Nastra contre la dame Beaufils. Quand il
seroit encore subrogé par le sieur R odde, on lui répondroit que la dame Beaufils ayant exercé contre lui une
demande en garantie, fondée sur l’acte de 1 7 1 8, il n’a
payé que pour éviter ce recours, et qu’il est gai’ant de sa
propre demande.
Il n’est pas moins curieux de rem arquer combien le
sieur Dem olen a mis d’incertitude et d ’exagération dans
ses demandes. Il reprend le procès des Dussaulnier, qui
demandoient le désistement des deux tiers d’un domaine;
et-le sieur Dem olen veut enchérir sur e u x , et réclame
/
*
�(2 0 )
l’autre tiers par hypothèque. M a is ces deux prétentions
Sont é ga le m en t mauvaises; et la dame Beaufils doit être'
r assurée su r une p ro p r ié té qu'u ne aussi longue possession
a co n so lid ée dans sa fam ille.
•
,J
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e, F A Y E ,
——■
— —
^
1
avoué licencié.
— —— —
m
A R I O M , de l ’im p. d e T H I B A U D , im prim . de la C our im périale, et libraire
ru e des T aules ? maison L a n d r iot . — A v ril 1810..
I
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Biron, Marie-Anne. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
créances
terriers
coutume d'Auvergne
prescription
renonciation
possessions précaires
Description
An account of the resource
Précis pour Dame Marie-Anne Biron, veuve de M. Jean-James Beaufils, habitante de la ville de Saint-Flour, intimée ; contre le sieur Raymond Demolen-Dumas, appelant.
Annotations manuscrites
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1718-1810
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0306
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pouzat (terre de)
Chambon (domaine de)
Bussac (domaine de)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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coutume d'Auvergne
Créances
possessions précaires
prescription
renonciation
Successions
terriers
-
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7d1bf5415f90daab6f886f84aa489124
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MÉMOIRE
EN R É P O N S E
POUR
Louis BOISSIER, M a r i a n n e BOISSIER, et
le sieur CHAUV ASSAIGNE , son m ari,
M i c h e l - G a s p a r d BOISSIER , et P i e r r e
CHABRIDON , d e m an d e u rs ;
C O N T R E
Dame M a r ie - C a t h e r i n e D E R O C H E FORT
et sieur J e a n - A u g u s t i n - G u i l
laume D E F R E T A T D E C H I R A C , son
mari défendeurs.
L
A famille Boissier et V ialle plaide depuis 17 2 0 ,
contre la famille de R och efo rt, pour obtenir le payement
d’une créance considérable , hypothéquée en majeure
partie sur deux domaines.
A
�( o
Ces deux domaines furent pendant quelque temps en
la possession des V ialle : les héritiers Rochefort les leur
ôtèrent. Lorsqu’ensuite les V ialle ont demandé qu’on
payât leur créance, ou qu’on rendit les domaines, les
héritiers de Rocliefort ont Lcnu hon , et de moyens en
m oyens, de génération en génération, ils ont retenu
les domaines et la dette.
V oilà c o m m e n t la famille V ialle est ¿conduite depuis
quatre-vingt-dix ans! *>.
•
*
E t aujourd’hui q u ’elle veut en finir, on lui reproche
que c’est une vieille recherche : on lui dit des injures....
« C ’est une horde de plaideurs.... Ils seroient ruinés sans
« ressource, si la dame de Frétât exerçoit ses droits à la
v. rigueur.... Elle seroit creancieie de plus de 20000 fi.....
« L a fortune de ces éternels vexateurs ne suiliroit pas
« pour acquitter cette créance. »
Cette sortie un peu dure ne fera point oublier aux
sieurs Boissier les égards qu’ils veulent devoir à la dame
de Frétât. Il a pu lui être désagréable, au printemps d’une
belle vie , de se voir étourdir par un fort ennuyeux
procès. A tous les âges, un procès à défendre est toujours
une chose fort importune : cependant si le résultat devoit
être pour madame de Chirac une créance de 20000 fr.,
il n’y auroit pas de quoi savoir aussi mauvais gré aux
sieurs Boissier d’avoir troublé son repos.
Débiteurs ou créanciers, ceux-ci veulent en finir. Que
leurs a n c ê t r e s aient mérité aussi l e reproche de leur avoir
l a i s s é à débrouiller ce procès, ou qu’ils y aient été forcés
par des chicanes, les sieurs Boissier s’efforceront au moins
de ne pas le léguer eux-mêmes ù leur postérité.
�{ 3 )
F A I T
S.
I.a seule manière de se l’endre inteUig ble dans ce
long procès, consiste à préciser les faits et les époques,
sans'rien omettre de ce qui est connu-, et quelque pénible
que soit cette tâche, les sieurs Boissier croient devoir la
rem plir, parce qu’ils sont convaincus que les faits seuls
doivent tout éclaircir , et l’epondie à tout.
L e tableau généalogique des familles de Rocliefort et
de Boissier, doit d’abord être mis sous-les y e u x du tri
bunal , pour l’intelligence des actes et procédures dont
il y a à rendre compte,
Biaise C h a r d o n ,
A le x ie B o n n e t .
‘ise.
Antoinette.
Anne.
M a rie.’i M arie.
Françoise ;
Am able Rochefort.
G ilb.-A m able Rochefort,
___
François
Gilbert.
Antoinette Chardon,
Jean V ialle.
F ra n ço is C h a rd on ,
Jeann e F o u rn ier.
Réné Chardon,
Suzanne Fournier.
1
Joseph, Catherine, Annet. Jeanne, Franç
—_
■
V-%
.»
art 4 rrt
H flAl
Gaspard
Étiei
Marie
Étienne
M
om
et.
Payi
Auteroche. Boissier.
r'v.,. s~\
Guillaume. F rançois, Antoinette.
Suzanne
,
Mathieu.
H
Jean. R én é,
religieux.
7 7
François. Suzanne, Antoinette.
|
M , Valoi).
Madame
de Chirac.
I II
1 l 1
Ses enfans
Lcs_
ont cédé
Boissier
leurs droits
et
à leurs co- Chauvashéritiers.
saigne.
François Chardon se maria le 22 février 1645*, et
Jeanne F o u rn ier, sa fe m m e , lui porta une dot m obiliaire.
Il mourut au mois de mars 1662 , laissant quatre
enfans en minorité.
Par avis de parens, du 7 juin 1 6 6 3 , R éné Vialle
A 2
■ lì. 1
M om et,
les
Chabridon»
�(4)
fut nommé leur tuteur, quoique cette ciiarge dut être
déférée à Réné Chardon.
Mais par acte du même jour, passé entre R éné Chardon
et R ené V ialle , il fut convenu que R éné Chardon se
chargcoit de la tutelle.
R én é Chardon mourut en i 665. La famille fut as
semblée le 3 juin.
Il y avoit dans la succession de François C h a rd o n ,
trois domaines appelés L u c b a s , Bonabry, et A u r iè r e ,
une m aison, un ja rd in , un pré et un moulin à R o cliefort, et quatre rentes.
Les deux premiers furent donnés à bail judiciaire au
nommé Guillaudon : le domaine d’Au rière et les autres
objets continuèrent d’être jouis par Suzanne F ourn ier,
veuve de R éné Chardon.
‘ L e I er. mars 1666, elle communiqua
Réné Vialle
l ’état de la gestion faite par son mari, ou par elle-même.
R éné V ialle la déchargea de la tutelle pour l’avenir; mais
elle convint en être responsable jusqu’au jour.
Les pupilles continuoicnt de rester avec elle. Réné
Chardon, l’un d e u x , entrant dans la vie monastique,
elle se fit léguer par son testament le quart de ses biens.
Elle fit rég ler, par un acte du 2 octobre 1682, la
pension que le tuteur devoit lui payer pour les trois
autres. L e compte en fut fait pour tous arrérages à 3080 fr.
qui lui fu re n t payés par R éné Vialle.
Elle les engagea, aussitôt leur majorité, à prendre la
qualité d’héritiers bénéficiaires de François Chardon, leur
père , puis à répudier à sa succession, et à demander un
compte de tutelle à Réné Vialle.
�( 5 )
René V i aile défendit à cette d em án d ele i 5 janvier
1686. Il dit à Jean Chardon qu’il n’avo itp asp u répudier,
parce qu’il avoit vendu en majorité une terre du domaine
d’A urière et un jardin à Rocliefort. A l’égard de ses sœurs,’
il se contenta d’offrir le com pte, sauf à discuter ensuite
leur renonciation.
L e c o m p t e fut d o n c r e n d u p a r R é n é V i a l l e a u x risques
et p é r ils de S u za n n e F o u r n i e r , q u ’il assigna e n r eco u rs ,
ainsi q u e Biaise C h a r d o n , son iils..
Suzanne Fournier conclut incidemment au payement
d’une obligation de 2100 francs , consentie par François
C hardon , à R éné C hardon, le i 5 juillet 16 6 2 , et à la
délivrance du quart à elle légué par le testament de 1766.
Pendant ces débats on faisoit des diligences contre la
succession répudiée de François Chardon.
I>c 6 mai 1G89 , M arie et autre M arie Chardon ,
obtinrent une sentence contre Jean Taragn at, curateur
à ladite succession , qui « condamne ledit curateur, en sa
« dite qualité, à leur payer la somme de 8098 liv. 13s. 4d.
« pour les deux tiers à elle revenans dans la dot de Jeanne
« F o u rn ier, leur mère , et gains matrimoniaux, avec les
« intérêts depuis le décès de François C h ardon , arrivé
« au mois de mars 1662, jusqu’à l’entier payement d’icelle,
« liquidés jusqu’au mois de mars 1689 , à la somme de
« 10933 francs, sans préjudice d’autres droits contre la
« succession dudit François Chardon ».
Peu de temps ap rès, un nommé T h ie r r y , créancier
de la succession ,. lit des saisies-arrêts; il intervint au
procès pendant sur le compte de tutelle en treRéné V ia lle,
Marie et autre M arie Chardon , filles de François, Biaise,
�( 6 )
Antoinette et A n n e Chardon, assignés en qualité d’hé-
ritici’s de Réné Chardon , leur p è r e , et de Suzanne
Fournier, leur m ère, et ayant repris.
Il paroît que Jean Chardon avoit cessé d’être en.cause,
et qu’il étoit décédé avant 1688.
Ce procès fut enfin jugé à la chambre du conseil,
après un délibéré de onze séances, le 30 mars 1691.
Cette sentence, dont la dame de Frétât a une copie
(cote 12), iixc le reliquat de compte du par Réné V iallc
aux enfans de François Chardon, à 2494 liv. 12 s. 9 den.
et quarante-neuf setiers trois quartes seigle-, et condamne
R éné V ialle à. les leur payer , sauf déduction de trois
setiers d’avoine, avec intérêt depuis les six mois après la
clôture du compte rendu par la veuve de R éné Chardon,
sauf audit Réné V ialle son recours :
a E t faisant droit sur la demande en recours formée
contre lesdits Biaise, Antoinette et A n n e C hardon, les
c o n d a m n e en leu rs dites q u a l it é s , personnellement pour
leur part et portion, et hypothécairement sur le tout, à
gai-antir et indemniser ledit com ptable, aux termes des
traités des 7 juin 1663 , et I e r . mars 1666, tant du paye
ment de la somme de 2707 liv. 9 s. 7 d en ., et de ladite
quantité de quarante - sept setiers trois quartes seigle,
sous la déduction pour raison du reliquat de compte
rendu pour les années concernant l’administration de
défunt Réné C h a rd o n , leur p è r e , que de l’événement
des articles dépendans de ladite administration , ensemble
de l’intérêt de ladite somme et de la valeur dudit grain ;
et ce faisant, à payer a l’acquit et dechnrgedudit comptable,
la susdite somme de 2494 ÜV. 12 s. 9 d en ., ensemble lesditg
�C7 )
grains et intérêts ; autrement, et par faute de ce faire,
les condamne en tous les 'dommages-intérêts et dépens
envers ledit comptable à faire et à souffrir à l’avenir pour
raison de ce. — Et sur l’appel incident interjeté par la
requête desdits oyans compte, le 9 janvier 1689, ensemble
sur les iins et conclusions prises, portées par les requêtes
desdits Chardon , intervenons , des 28 mai 1688, 30 mars
1689, c *- 9 juin 1690, met les parties hors de cour
et de procès, sa uf audit intervenant de se pourvoir en
conséquence de la répudiation faite à la succession dudit
François C h ard o n , par lesdits oyans compte, tant pour la
délivrance du legs du quart porté par le testament de
Réné C hardon, frère desdils oyans com pte, du 9 août
1666, que pour le payement du contenu en l'obligation
du 13 juillet i 652, ainsi qu’ils verront bon être, exceptions
et défenses au contraire réservées: et faisant aussi droit sur
les saisies-arrêts dudit T h i e r r y , ensemble sur la préfé
rence et adjudication requise dudit reliquat de compte,
par les requêtes des 10 janvier et 6 février 16 8 1, ladite
sentence ordonne que les oyans compte et tiers y
viendront en contribution entr’eux au sou la liv r e , au
prorata de leurs créances sur lesdites sommes et grains. »
L e 10 octobre 1 6 9 1 , R éné V ialle transigea avec
M arie et autre Marie C h a r d o n . Elles lui cédèrent ce
qui po u voit.leu r rev en ir, soit de la dot et gains ma.Jrirnoniaux de leur mère et intérêts , soit du reliquat
de compte porté par la sentence d’apurem ent, et frais
d icelle, avec subrogation à leurs droits , actions et ltypothèques, moyennant la soirn»e de 6000 f r . , déduction
�( 8 )
Eiite des sommes par elles reçues pour leurs pensions
.
et provisions à elles adjugées.
Il fut dit que 3000 francs seroient payés dans dix ans,
et que les autres 3000 francs étoient donnés en pur
don au sieur R éné V ia lle , à la charge de leur payer
une rente de 300 fr. pendant leur v i e , de six en six
mois et par avan ce, à la charge aussi de les garantir
des poursuites de T h i e r r y , et de celles d’Antoinette
et A n n e Chardon, et autres, sans préjudice au recours
dudit sieur V ia lle contre lesdites demoiselles Antoinette
et A n n e C hardon , conformément à ladite sentence d’apu
rement.
R éné V ialle mourut en 1692.
M arie et autre M arie Chardon ne donnèrent pas un
moment de relâche à ses héritiers pour les poursuivre.
Elles obtinrent le 26 novembre 1692 une sentence contre
Joseph V ia lle , tuteur de scs frères et sœurs, portant
e x é c u t o r ia l it é du traité ci-dessus de 1691 : ensuite elles
v o u l u r e n t une"~i\atification notariée, que Joseph leur
consentit le 14 février 1693 -, et aussitôt qu’A n n et V ialle
fut m ajeur, elles lui en demandèrent une nouvelle.
Il paroît qu’aussitôt le traité de 1691 , R éné V ialle
avoit été regardé comme légitime propriétaire des deux
domaines de Lucbas et Bon abry, et que sans doute tous
les créanciers tournèrent tête contre l u i , et se firent
payer-, du moins il n’y a pas de trace qu’aucuns créan
ciers , et notamment T h i e r r y , aient fait de poursuites
ultérieures.
L a mort de R éné V ialle dut mettre beaucoup de dé
sordre dans ses affaires; Joseph V i a lle , son fils aîné,
ayant
�( 9 )
..
ayant eu la tutelle des autres enfans, ne les géra pas
fort bien. Il fit plusieurs affaires avec les nommés .¡Nicolas
et A u te ro c lie , qui ont occasionné à la famille V ialle
une longue suite de procès.
Il paroit que les 14 et i 5 mars 1696, Joseph V ialle
donna à ferme, au nommé Auteroclie, gendre d’Etienne
Nicolas, une porLion des biens provenus de François
Chardon ( l’a cte. ci-a p rè s supposeroit qu’il ne donna
que le domaine de Bonabry ; mais un .acte postérieur
suppose qu’il y eut d’autres biens).
L e 12 novembre 1699, il vint à compte avec M arie
et autre Marie Cliardon , de leur rente , et se reconnut
leur débiteur de 918 liv. 4 s. pour quoi il leur céd a,
i°. un bail à rente par lui consenti à Louis A uteroclie,
le 14 mars 1696, pour 130 francs; 20. le bail à ferme
de Bonabry, moyennant 125 fr. ; 30. deux rentes à lui
personnelles ; 40. une créance de 630 fr. avec subro
gation pour s’en faire payer à son lieu et place.
M arie Chardon aînée mourut le 20 mai 1701.
Ce décès persuada à Joseph V i a l l e , avec quelque
raison, que la rente viagère étoit diminuée de m o itié ,
et le refus qu’il fit de payer davantage lui attira beaucoup
de désagrétncns et le fit accabler de frais.
P o u r payer M arie Chardon , il falloit pouvoir re
couvrer soi-même la créance par elle cédée; et le pro
duit des deux domaines étoit à peu près nul à cette ^
epoque où les guerres ruinoient l’agriculture, et où les
propriétés étoient sans valeur.
Les cohéritiers de Joseph V i a l l e , mécontens de ces
arrangemens, qui ne leur faisoient tirer aucun parti utile
B
t
�C 10 )
du traité de 1691 , dont le principal étoit devenu exi
gible , voulurent e u x -m ê m e s se mettre à l’abri des
poursuites de M arie Chardon.
E11 conséquence, par acte du 6 août 170 9 , Annet
V ia lle , p rê tre , les sieurs Momet et Boissier, et Françoise
V ia lle , cédèrent à Etienne N icolas, les d ro its, actions
et hypothèques acquis u la succession de R ené V ia lle ,
leur p è r e , suivant la transaction du 10 octobie 1691 »
sur deux domaines appelés Bonabry et Lucbas , sur des
masures de maison, et un pré, situés à R ochefort, desquels
objets le sieur Nicolas a déclaré avoir parfaite connoissance, pour en avoir joui comme fermier depuis le i 5
mars 1696, et même sur . des rentes venues de la suc
cession de François Chardon. Ils le subrogèrent en leur
lieu pour par lui jouir desdites masures de maison, et
deux dom aines/com m e avoit fait ledit Réné V ialle de
son v iv a n t , et ledit N icolas, comme fermier, sans bes
tiaux. .
sous r é s e r v e a u x cé d an s de leurs autres droits
acquis par ladite transaction contre demoiselles A n to i
nette et A n n e Chardon y dénommées.
L a d i t e cession fut faite moyennant 7999 francs, dont
ils déléguèrent, i°. 3000 fr. à Marie C h ard on , pour le
principal à elle dû suivant ladite transaction ; 20. 1800 fr,
à la dame Carmantrand, veuve Desgiraud; 30. i 5oo fr.
aux créanciers de R éné V ialle ; 40. iô o o francs pour
rester entre lés mains dudit N ico la s, à l’effet de pro
duire 75 francs d’ intérêts qui furent délégués à ladite
M arie Chardon.
Ledit Nicolas fut encore chargé de rapporter aux
c é d a n s les quittances de ladite Marie Chardon , du prix
�des jouissances faites par ledit Nicolas et par A u teroch e,
desdits deux domaines et p rés, depuis le i 5 mars 1696,
à raison de ¿55 francs par a n , et de les en garantir.
L e 4 septembre 1 7 1 0 , M arie Chardon envoya des
huissiers chez le sieur A n n et V i a l l e , p r ê tre , pour l’exé
cuter , quoiqu’elle eût accepté la délégation des fermages
depuis 1699 , et qu’on eut pris des précautions pour
que tout le surplus lui fût payé.
Cette incursion inattendue et malhonnête excita les
cultivateurs d’ un domaine voisin à chasser ces huissiers
de chez un prêtre qu’on considéroit ; mais la résistance
des huissiers occasionna -des querelles et des excès ; un
huissier reçut un coup de serpe au visage, et il en ré
sulta une plainte.
I,e 10 octobre 1711 , la sénéchaussée rendit une sen
tence fort sevère qui bannit deux cultivateurs coupables
de ces excès ; et comme il étoit difficile peut-être de
ne pas présumer que le sieur A n n et V ialle avoit toléré
une rébellion qui n’avoit lieu que pour l u i , il fut dit
qu’il seroit mandé à la chambre du conseil pour être
admonété.
Cette sentence que la dame de Frétât s’est plue à
rappeler souvent, est bien peu de chose pour le procès
actuel j et nous verrons bientôt que M arie C h a rd o n , se
reprochant cette exécution eE ses suites , a voulu en
dédommager le sieur A n n et V i a l l e , en lui déduisant
400 francs pour les dépens.
En effet celte exécution étoit d’autant plus déplacée,
c]ue îsicolas, débiteur, n’avoit pas été mis en demeure;
B 2
�C 12
)
cl le 12 novembre T710, il avoit fait à Marie Chardon
des offres réelles de 300 francs pour sa pension , et de
continuer l’intérêt des 3000 francs, si mieux elle n’aimoit recevoir le capital desdits 3000 francs,
. A u préjudice de cet acte d’offres, Marie Chardon avoit
affecté d’assigner Joseph V ialle seul, et.elle avoit surpris
contre lui une sentence, le 16 décembre 1 7 1 0 , portant
condamnation à lui payer 3000 francs et les intérêts de
6000 francs depuis 1691 , sinon et faute de ce , la cession
étoit déclarée résolue.
E t par une inconséquence inexplicable, Marie Chardon
faisoit, dans le même temps, des saisies-arrêts entre les
m a i n s des Nicolas et A u te ro c h e , qui vouloient la payer.
Puis' elle poursuivit les héritiers V ialle en confir
mation desdites saisies. Les Nicolas furent mis en cause,
et il en résulta un procès considérable , lors duquel les
héritiers Vialle vouloient que le décès de Marie Chardon
aînée, eût diminué la r e n ie v i a g è r e de moitié. '
Ce procès fut jugé le 20 mars 1 7 1 1 ; les saisies-arrêts
furent confirmées; les héritiers Vialle furent condamnés
à payer la pension entière de 300 francs, et il fut fait
provision de 1200 francs à Marie Chardon. I,rs Nicolas
furent condamnés à garantir les Vialle jusqu’z\ concur
rence de 7800 francs, qu’ils resloient d evo ir, et à rap
porter quittance des jouissances qu’ils avoient dû payer
à. Marie Chardon depuis 1696 jusqu’à 170 9, à raison de
205 francs par an.
Il y eut appel de celte sentence au parlement, mais
elle fut confirmée par arrêt du 20 juin 1714.
L a dame de Frétât se plaint de ce que M arie Chardon
�( 13 )
_
ne reçut jamais rieri des Y ialle. Si cela éloit v r a i , ce
n’étoit pas au moins faute de poursuites.
Cependant elle reçut les 1200 francs de provision, et
elle en donna quittance le 26 mai 17 11.
Cela ne l’empêclia pas de faire vendre en place pu
blique les grains par elle saisis sur le sieur Joseph V ielle
de Brousse , qui n’étoit point en cause au procès de 1 7 1 1 . .
En 1713 e lle suscita u n procès d’une autre espèce aux
héritiers Y i a l l e ; elle fit cession et transport au sieur
G ilbert-Am able Rocliefort de 462 francs à prendre sur
e u x , en vertu de la transaction de 1 6 9 1 , et aussitôt le
sieur Rocliefort fit assigner A n n et et François Y ia lle en
payement.
C ’étoit le moment où ceux-ci plaidoient au parlement
sur l ’appel de la sentence de 1 7 1 1 , et soutenoient avoir
surpayé , en ce que la rente de 300 francs étoit réduite
à moitié. En conséquence ils opposèrent en défenses au
sieur Rochefort, i°. qu’étant magistrat, il n’a voit pas pu
prendre cession d’un droit litigieux •, 20. qu’il y avoit
alors procès, et qu’il ne pouvoit l’ignorer, puisque luimême avoit p o u rsu iv i, au nom de Marie C h a rd o n , la
sentence dont l’appel étoit pendant ; 30. que le procès
qu’il intentoit étoit bis in id em , et que les V ialle plaidant
avec la cédante pour l’objet par elle céd é, ne devoient
pas être traduits devant un autre tribunal par sou cédataire.
L e sieur Rochefort dénonça tout cela à Marie C h ard on ,
qui intervint. Enfin il obtint une sentence par défaut
contre les Y ia lle , le 6 février 1 7 1 7 , portant adjudication
de sa demande. Il en poursuivit l'exécution ; et ou a dit
�C Ï4 )
au procès qu’il aVoit été payé ; ce qui est au reste justifié
par son silence. Dans ce même temps .Marie Chardon
fit un autre procès en préférence de saisie contre la dame
Carmantrand, veuve Dësgiraud. Il fut jugé par sentence
du 6 mars 1717 *, Marie Chardon obtint préférence et dut
être payée,
E11 1 7 1 5 Marie Chardon avoit fait une autre saisie de
fourrages et grains sur Joseph V ialle -, mais après plusieurs
diligences , elle en donna main - levée moyennant un
acompte. D ’ailleurs cette année-là elle reçut de toutes
mains : on trouve six quittances d’elle en ladite année
1715 .
E n 17x8 Marie Chardon reçut encore 2,5o francs, et
en 1 7 1 9 , on ne trouve d’elle qu’ une quittance de 30 francs,
où elle ajoute q u e, pour raisons à elle connues, elle fait
remise aux sieurs V ialle de 400 francs, sur les frais à elle
adjugés au civil et au criminel ; mais il paroit que cette
s o m m e a c h e v o i t de p a y e r les arrérages de rente viagères
à elle dûs, lesquels d’ailleurs se payoient d’avance.
M arie Chardon mourut dans l’été de 1719.
L e 16 décembre de la même année 1 7 1 9 , le sieur
G ranchier fit une saisie-arrêt entre les mains de Joseph
V ialle de Brousse, comme créancier de Marie Chardon.
Joseph V ialle fit son affirmation au greffe le 4 janvier
172.0. Il déclara devoir 3000 francs en principal ; mais
ne devoir aucuns arrérages. ( M . Granchier a été paye
depuis de sa créan ce, montant à 825 francs, par les
Vialle. )
•
T e l étoit l’état des choses, lorsque le sieur Rochefort,
�( ï -5 )
héritier présomptif de M arie Chardon j prit la qualité
d’héritier bénéficiaire.
L e i 5 juillet 172 0 , Joseph V ialle déclara au greffe
se porter .héritier pur et simple de ladite M arie Chardon.
A lo rs les héritiers V ialle étoient rentrés en possession
des domaines de Lucbas et B o n a b ry , qu’ils ne gar
dèrent pas.
X^e 21 août 1 7 1 9 , ils a voient obtenu sentence contre
les Nicolas, p o r ta n t résolution de la cession de 170 9 ,
et permission auxdits V ia lle de se remettre en possession.
L e 6 juillet 1 7 2 0 , A n n et V i a lle , curé de D o n t r e ix ,
faisant tant pour lui que pour ses cohéritiers , fit cession
h M re. Pierre de Frétât des mêmes droits déjà cédés à
N icolas, c’est-à-dire, de tous les droits résultans de la.
transaction de 1691 , sur deux domaines appelés Lucbas
et Bonabry , moyennant 14000 francs, payés en billets de
b a n q u e , provenus de la dame Dagoneau , veuve de
F rétâ t, en qui ledit sieur abbé de Frétât déclara faire
son élection de mieux.
L a dame Dagoneau se mit en possession de ces deux
domaines, qui avoient été affermés à Louis Boucheix
pt François Chatagnier le 3 mars 1720.
P o u r consolider son occupation de la succession ,
Joseph V ialle prit possession authentique des biens le 30
juillet 1720.
L e même jour il fit un bail à ferme aux mômes métayers,
qui en avoient déjà un du 3 mars.
Ensuite il assigna le sieur Rochefort en remise des titres,
tneubles et autres objets restans de l’héréd ité, et il fit des
saisies-arrêts entre les mains des fermiers.
�( ï6 )
Ces actes ne furent d’abord point contrariés par le
sieur G ilbert-À m able Rochefort.
A n contraire, par acte du 28 décembre 1720, le sieur
Rochefort fit, comme héritier sous bénéfice d’inventaire
de Marie C hardon, une saisie-arrêt entre les mains desdits
Roûcheix et Chatagnier du prix de ferme des domaines
de Bonabry et L u c b a s , comme dépendons de la suc-r
cession de R é n é V ia lle.
Cependant le procès sur cette succession de M arié
Chardon devint sérieux , et le sieur Rochefort fit ses
efforts pour tout obtenir ; il soutint que le sieur V ialle
n’étoit point en ordre de succéder, et n’avoit pu l’exclure,
parce qu’Antoinette (]hardon, sa m ère, avoit été forclose.
Ces débats envenimèrent les parties, et les héritiers
V ialle agirent de leur côté en poursuivant à la fois le
sieur Rochefort à Riom et à Paris : voici à .quelle occasion.
1
L e 7 mai 1688, le sîeqr Amable R och efort, père de
G ilb e rt- Am able , s’étoit chargé de la procuration du
sieur Réné V i a l l e , pour faire le voyage de Paris et
poursuivre un procès pendant entre Gilbert Reynaud et
Gilbert Rochefort, son père, dans l’intérêt dudit V ia lle,
pour la portion à lui distribuée sur les effets de la sucçession dudit Gilbert Rochefort , montant à 1043 Hv. 11 s*
P ar ledit acte , le sieur Rochefort s’étoit engagé ù ne
répéter aucuns frais s’il succomboit; et au cas contraire,
il étoit dit q u ’ il auroit la moitié de la créance»
Il paroît qu’il obtint un arrêt le 14 février 1701.
L e 13 juin 1 7 1 0 , le sieur Rochefort donna un autre
écrit au sieur Joseph V ialle de Brousse, par lequel il
reconnu!
�C *7 )
reconnut tenir de l u i , i ° . un billet de 2000 francs du
sieur Gilbert Rochefort , son aïeul, portant promesse
de faire payer 2000 francs à Paris par le sieur Fauttrier,
valeur reçue dudit V ia lle ; 20. les causes d’oppositions
formées à Clerm ont, et le procès verbal de distribution
des effets dudit Gilbert Rochefort:, lesquelles pièces lui
étoient nécessaires pour suivre l’effet dudit arrêt de 1701 ;
qu’il s’obligea de nouveau de poursuivre aux mêmes
clauses et con d itio n s expi-imées en l’acte passé avec le sieur
R och efort, son p è r e , en 1688.
C ’est en vertu de ces deux actes que tons les héritiers
V ialle firent assigner le sieur G ilbert-Am able R ochefort,
par exploit du 12 juillet 1720; c’est-à-dire au bout de
d ix a?îs, pour voir déclarer exécutoire l’acte de 1688;
reconnoître l’écriture de l’acte de 1 7 1 0 , se voir con
damner à leur remettre tous les titres et papiers dont
son père et lui s’étoient chargés , et rendre compte de
l ’exécution, sinon leur payer, i ° . la moitié des 2000 fr.
suivant leur convention; 20. la moitié de 10 4 3 liv. 11 s-,
avec intérêt depuis le 7 mai 1688,
L e second procès intenté par les V ia lle , se réduisit
à poursuivre au parlement la péremption de l’appel in
terjeté par Antoinette et A n n e Chardon , de la sen
tence de 1691.
11
est vrai q u ’ il y avoit décès de part et d’autre; mais
la péremption étoit acquise lors desdits décès : en con
séquence, le i 5 juin 1720, les héritiers V ialle prirent
une commission au parlement pour faire assigner les
héritiers desdites Antoinette et A u n e Chardon ; et le
C
�C t8 )
12 juillet suivant, ils assignèrent le sieur Gilbert-Aniable
Rochefort en ladite qualité.
Ce procès fut appointé en droit. Il y eut des écritures
de part et d’autre. Et enfin , par arrêt sur productions
respectives, du 14 mai 17 2 2 , l ’appel fut déclaré p é r i,
et la sentence de 1691 maintenue en sa forme et teneur.
Pendant ce temps-là, on plaidoit à Clermont sur la
succession de Marie C h ard o n , et ce procès étoit consi
dérable.
t
Les cinq enfans de Gilbert-Am able Rochefort avoient
repris au lieu et place de leur père : ils concluoient à
être gardés et maintenus dans le d r o i t , et pour jouir
des biens de Marie Chardon.
L a dame Dagoneau de Frétât réclamoit ses droits en
vertu de la cession à elle faite le 6 juillet 1720.
Les métayers des deux domaines, ap pelés sur les saisiesarrêts , îigissoient e n recours c o n tr e elle et contre les
sieurs V i a l l e .
L e sieur Charmat, procureur de la défunte, réclamoit
5oo francs pour ses vacations, et jusque-là demandoit
l’autorisation de poursuivre le payement des dettes actives
de la succession , jusqu’à concurrence de son dû.
E n fin , à la veille du jugement, les cinq enfans R o
chefort déclarèrent qu’ils se portoient héritiers purs et
simples.
Sur tous ccs débats, et par sentence du 22 juin 1729,
lesdits irères et sœurs Rochefort furent gardés et main
tenus au droit et possession de jo u ir des biens meubles et
immeubles provenus de la succession de Marie Chardon.
�( *9 )
Les héritiers V ialle furent condamnés à rendre compte
des jouissances et dégradations depuis le 30 juillet 1720,
jour de la prise de possession. Il fut donné main-levée
de leurs saisies-arrêts. A v a n t faire droit sur les de•
mandes du sieur Charma t , il fut dit qu’il donneroit
état de ses vacations. Les dépens furent compensés entre
les Vialle et Rochefort , hors le coût de la sentence
auquel les Vialle furent condamnés. ( N ota. L e sieur
Charmat a été payé par les Vialle. )
Les héritiers Rochefort se mirent en possession de
tous les objets de la succession de Marie Chardon, dans
laquelle ils confondirent les deux domaines dont ils se
mirent aussi en possession, ainsi qu’ils en conviennent,
aussitôt après cette sentence.
L a dame D agon eau, veuve de F r é tâ t, ainsi évincée,
fit assigner les héritiers V ia lle , par exploit du 4 juillet
1 7 3 1 , pour la faire jo u ir, sinon lui rembourser 14000 fr.
L e 7 août 1731 , les héritiers V ialle dénoncèrent
cette demande au sieur François
R o c h e fo rt,y en lui oba
servant que Marie Chardon avoit cédé à leur p è re,
i°. l’effet de la sentence de 1691 , contre les auteurs
dudit R ochefort; 20. l’effet de la sentence de 1682,
contre la succession de François Chardon : ils ajoutèrent
que les biens jouis par la dame de F r é t â t, provenoient
dudit François C h ardon , et n’avoient jamais fait partie
de la succession de Marie Chardon, décédée. Ils l’assignerent en môme temps pour voir déclarer exécutoire
la sentence de 1691 , et se voir condamner comme
héritier de ses père et mère , personnellement pour sa
part et portion 7 et hypothécairement pour le t o u t , à
C 2
�payer 2707 liv. 9 s. 7 d en ., avec les intérêts adjugés
par ladite sentence, et qui ont couru depuis, ensemble
quarante-neuf setiers trois quartes de b l é , avec intérêts
de droit ; se voir faire défenses de troubler la dame
D a go n éa u , sinon être condamnés en leurs dommagesintérêts, sans préjudice à autres droits.
François Rocliefort signifia un committimus, et de
manda son 'renvoi aux requêtes de l’hôtel.
Il décéda peu de temps a p rè s, et les héritiers V ialle
reprirent la demande de 1 7 3 1 , contre Suzanne M athieu,
sa veuve, en qualité de tutrice, par exploit du 9 mai 1742.
L ’instance fut reprise par jugement du 2 août 174 2 ,
qui donne aux enfans la qualité d’héritiers de leur
père ; et le 14 du même m ois, Suzanne Mathieu défendit
à la demande.
Ces défenses, assez mal digérées, consistèrent à com
battre la cession et la sentence de 1691 , à opposer la
p r e sc rip tio n , et à p r é te n d r e q u e la sentence de 1729
avoit an n u llo ladite cession. Elle terminoit par dire que
si les domaines provenoient de François C hardon, elle
devoit être payée avant les V i a l l e , de son obligation
de i6Ô 2, antérieure à la dot de Jeanne F o u r n ie r , et
que s’ils ne provenoient pas dudit C h ard on , les V ialle
n’a voient aucun droit sur ces domaines.
L e sieur L ollier-C hateaurouge , héritier du sieur
de Frétât, intervint pour reprendre lès poursuites de la
dame Dagoneau.
Les héritiers Nicolas, de leur côté, assignèrent Suzanne
M athieu, et le sieur Guillaume Rocliefort, son filsP eu
�( 21 )
désistement des deux domaines. Ils opposèrent la sentence
de 1729.
Par requête du 7 avril 1 7 6 4 , les héritiers Vialle
ajoutèrent aux conclusions de leur exploit de 1731 ,
que la dame Matliieu fût condam née, en sa qualité, à
leur payer 8098 liv. 12 s. 4 d. adjugée à une demoiselle
Chardon par la sentence de 1689, avec les intérêts
depuis le mois de mars 1622 ; en conséquence, à les
garantir en ve rs le sieur Lollier jusqu’à concurrence des
sommes à lui dues, à diminuer sur celles dont lesdils
V ialle seront dits créanciers de ladite dame M a th ie u ;
et enfin , il demandèrent permission d’assigner les dé
tenteurs des deux domaines en matière hypothécaire.
L e 4 juillet 1 7 5 4 , le procès fut appointé ; et par
requête du 31 décembi-e 1 7 5 6 , les héritiers V ialle don
nèrent des avertissemens par lesquels ils prirent des
conclusions générales beaucoup plus précises et plus
régulières que celles prises jusqu’alors.
Ils demandèrent aux héritiers Rochefort, personnel
lement et hypothécairement, i°. les 8098 fr. portés par la
sentence de 1689, avec les intérêts adjugés; 20. 2494 fr.
et quarante-neuf setiers de blé portés par- la sentence
de *1691 ; 30. 2000 fr. portés par l’écrit de 1710.
crurent devoir ensuite, par exploit de 1 7 6 7 , si
gnifier cet écrit à dom icile, pour p a r v e n ir à la reconnoissance d ’ écritui;e ; mais quand il en fut question , Je
sieur Rochelort ne voulut pas s’exp liq uer, et se contenta
de dire q ue, de 1710 à 1 7 5 6 , le titre étoit prescrit.
La procédure fut de nouveau suspendue pendant plu
sieurs années; et on voit par ce qui en est rapporté dans
Ils
�des pièces postérieures, combien cette suspension eutuno
cause funeste pour la famille Vialle.
j
L e sieur L ollier se lit adjuger sa demande, sans doute
parce qu’elle fut disjointe, et il fit mettre en saisie réelle
tous les biens des V ia lle , qui le payèrent de sa créance;
ce qui leur coûta près de 40000 francs.
E n 1 7 7 1 , les V ialle reprirent leur demande contre
Suzanne Mathieu.
;
E lle signifia qu’elle n’étoit plus tutrice.
Ils assignèrent le sieur François Rochefort, son fils. Il dit
qu’il n’étoit pas héritier de François Rocliefort, son père.
Ils mirent en cause Antoinette Rochefort ; elle dit la
même chose.
Les sieur et demoiselle Rochefort signifièrent une
répudiation du 26 novembre 1771.
Les héritiers V ialle leur répondirent que cette répu
diation n’étoit pas sincère, parce que le sieur Rochefort,
leur p è r e , avoit laissé une maison à R io in , un bien ù
P o m o r t , et un autre bien à A u b ia t; de tout quoi le
sieur Rochefort étoit en possession.
Cependant les héritiers Vialle voulurent encore asrsigner la dame Valon en 1772 ; elle dit aussi n’être pas
héritière.
Eliifin, en 1773 , ils assignèrent Antoinette Rochefort,
tante des précédens, et elle répondit que son frère ayant
laissé des enfans, elle n’étoit pas en ordre de succéder.
A insi repoussés, les héritiers V ialle ayant lutté vai-r
ncment jusqu’en 1 7 7 6 , firent nommer un curateur à la
�( 23 )
succession répudiée du sieur Rochefort père, et ils com
mencèrent leurs poursuites contre lui.
' A lo rs le sieur François Rochefort se hâta de rétracter
une répudiation qui n’avoit été qu’ un moyen de procès:
mais ce ne fut que pour donner d’autres entraves aux
créanciers Vialle.
• L e 21 mars 1776 , il obtint des lettres de bénéfice
d’inventaire, et présenta R o y , cordonnier, pour caution.
11 notifia ces lettres, et le 13 juin suivant, il signifia des
moyens de défense fort étendus contre tous les chefs de
demande. Il est inutile de les analiser, parce qu’ils se
bornent à ce qui est opposé dans le mémoire de la dame
de Frétât.
L e 2 mars 1777 , le sieur de Rochefort vendit le
domaine de Bonabry à Louis et Martin Bouchet.
Ces acquéreurs prirent aussitôt des lettres de ratifi
cation-, mais elles ne furent scellées qu’à la charge des
oppositions des héritiers Vialle.
L e sieur de Rochefort, poursuivi par ses acquéreurs,
assigna les héritiers V ialle en m ain-levée, par exploit
du 30 décembre 1779. Cette nouvelle demande fut jointe
aux précédentes, par sentence du 7 mars 1780.
A près quelques autres procédures , des décès inter
vinrent , et le procès a resté suspendu pendant la l’é
volution. Enfin j en l’an 9 , il a été repris ; et depuis
le décès de M . de R o c h e fo rt, il l’a été encore contre
madame de C h i r a c , sa fille. Les héritiers Boissier ont
néglige ¿g remettre en cause les acquéreui’s du domaine
B onabry, parce que c’eût été compliquer encore plus le
�( M )
procès, et que cette précaution est parfaitement inutile.
V oilà en quoi consistent tous les détails de cette longue
contestation. 11 a été du devoir des héritiers V ialle de
n’en rien retrancher, pour montrer combien peu il a
été en leur pouvoir d’être jugés plu tôt, et combien il
auroit été de leur intérêt de l’être il y a cinquante ans.
Q u o iq u ’il en soit, les choses sont encore entières; et il
s’agit de savoir seulement qui sera créancier ou débiteur.
Ils von t prouver que cette question n ’est pas très-pro
blématique,
M O Y E N S ,
L a dame de Frétât est débitrice des héritiers V ia lle ,
en trois qualités différentes.
Comme représentant Réné V ialle et Suzanne F o w n ie r,
elle doit les sommes portées par la sentence de 1691.
Comme possesseur des biens provenus de François
C h ard o n , elle doit les sommes portées par la sentence
de, 1689,
Comme représentant Gilbert-Am able Rochefort, ma-,
dame de Frétât doit les sommes portées par l’acte de 1668,
et l’écrit de 1710.
Rien n’est plus évident que ces propositions qu’il seroit
oiseux de fortifier par des preu ves, après le détail dans
lequel on est entré : ce ne seroit que se répéter.
Cependant la dame de Frétât les réduit à un seul titre,
c’est-à-dire à la sentence de 1691 (p . 18 ) J et elle ajoute
que pour réclamer la somme portée par cette sentence,
h
j
■
�(25)
il faudroit établir l ’avoir payée à Marie C h ard on , ou
être poursuivi par ses représentans , et qu’il faudroit
encore prouver avoir payé T h i e r r y , tandis qu’il seroit
impossible aux V ialle de justifier aucun payement.
Mais d’abord le payement de T h ierry est étranger à
la dame de Frétât. Il est censé s’être fait payer, puisqu’il
avoit un titre , et que Réné V ialle étoit obligé de ga
rantir Marie Chardon de ses recherches : il a dû remplir
les engagemens , puisqu’on ne justifie d’aucune poursuite
de sa p art, et c’est là tout ce qu’ il s’agissoit de savoir.
Quant à ce qui étoit dû à Marie Chardon , il n ’en
est pas de même : la clame de Frétât a qualité pour s’en
inform er; et c’est pour cette raison que les héritiers V ialle
out mis sous ses yeu x tout ce qui prouve leur libération
jusques et à concurrence du moins de la renie viagère.
Ce n’est pas sérieusement sans doute que la dame de
Frétât oppose la sentence par défaut de 1 7 1 0 , qui a
prononcé la résolution de la cession.
Auroit-elle oublié la sentence de 1711 , sur laquelle
cependant elle a beaucoup insisté, comme obligeant les
V ialle à payer la pension entière, au lieu de moitié? Si
donc Marie Chardon s’occupoit du mode de payement
à venir de sa pension, il falloit qu’elle ne comptât la
sentence de 1710 , que comme condamnation d’arrérages,
sans s’occuper d’ une disposition qui étoit purement de
style ou comminatoire.
Tout ce qui s’es(; passy depuis prouve que cette sen
tence de 1710 n’a eu effet que pour les condamnations
y contenues. L a rente a été servie depuis 1710 jusqu’au
D
�( 26 )
décès de Marie Chardon ; et après son décès, le sieur
Rochefort a lui-même fait des saisies-arrêts comme hé
ritier, pour tous les arrérages échus jusqu’audit décès.
Ce n’étoit donc qu’un oubli de la pai't de la dame de
Frétât d’invoquer une résolution imaginaire, dont aucuns
de ceux qui ont plaidé avant elle n’avoient conçu l’idée,
parce qu’ils sa voient bien ce qui s’étoit passé après 1710.
L a cession , dit madame de F rétât, n’étoit que de la
dot mobiliaire de Jeanne F o u rn ier, et n’a aucun trait
aux domaines de Bonabry et Lucbas.
Cela est très-vrai à titre de propriété, mais non à titre
d’hypothèque ; car ces deux domaines provenoient de
François Chardon , mari de Jeanne Fournier, et débiteur
de la dot : ils éloient donc hypothéqués au rembourse
ment de cette dot et des reprises matrimoniales.
L a famille V ia lle , cédataire de cette d o t, a suivi son
gage depuis 1696 jusqu’à 1729, de gré à gré avec M arie
C h a r d o n , qui recevoit les fermages des domaines par délé
gation.
En 1729 la famille Rochefort a ôté ces domaines aux
nyans cause des sieurs V ia lle , qui ont voulu y rentrer en
1 7 3 i, 1742, 1757, 1 7 7 1 , et jusques dans les mains de l’ac
quéreur actuel, en 1777.
Ils ont dit à la famille Rochefort : Paycz-m oi, ou rendez
mon gage : aut cédai aut solvat est la règle la plus incon
testable en matière hypothécaire , et elle a été tout le
mobile de la procédure des héritiers Vialle depuis 1729
jusqu’à présent.
Que la famille Rochefort ait gardé ces domaines comme
�les croyant de la succession de M arie Chardon, ou de la
succession répudiée de François C hardon, ce n’est plus
aujourd’hui la question. Il ne s’agit pas de la propriété
de ces domaines, mais du i*ecouvrement de la somme de
8198 francs, dont ces domaines sont le gage depuis le
mariage de François Chardon.
A p rès l’éviction de 1729, les héritiers V ia lle pouvoient
exercer une demande hypothécaire ou revendiquer la
possession de leur gage ; ce qui étoit la même chose ,
puisque le but des deux demandes étoit de jouir p i g n o
ra ti vement.
Ils préférèrent d’abord le dernier p a r ti, parce qu’ils
ne voulurent pas reconnoitre l’usurpation de la famille
R o c h e fo rt, qui en effet ne s’étoit pas fait adjuger la
succession répudiée de François Chardon , mais celle de
M arie, qui avoit vendu son g a g e et son droit pignoratif
sur les domaines.
Ensuite les héritiers V ialle prirent indifféremment des
conclusions en remise des domaines ou en payement h ypo
thécaire des créances ; ce qui a été le dernier état en
1757 et en 1777 ; de sorte que leur droit a été parfaite
ment conservé , et sans prescription : ce qui est tout
l’intérêt actuel de la cause. Ils ont donc été fort consequens, et ne se sont jamais considérés comme pro
priétaires des domaines, ainsi que le leur reproche la
dame de Frétât (page 21 ) *, ils 11e se sont jamais consi
dérés que comme créanciers.
r
E t meme quand ils disposèrent des domaines en 1709
et 1720 , ils ne firent que céder leurs droits et hypo
thèques sur ces domaines.
D 2
�( ^8 )
Quand la dame de Frétât veut les renvoyer au curateur
à la succession vacante pour réclamer les 8198 francs, elle
ne réfléchit pas qu’il ne s’agit point ici d’une action per
sonnelle , et qu’il n’y a plus rien à demander au curateur,
dès qu’il a été condamné en 1691.
D ’ailleurs il faudroit remarquer (si les héritiers V ialle
a voient intérêt de l’examiner) qu’il ne peut plus y avoir
aujourd’hui de succession vacante, lorsque tous les biens
de François Chardon sont dans les mains des héritieVs
de sa fille , nonobstant sa répudiation.
M a is, dit encore la dame de Frétât, vous n’avez rien
demandé en 172 9, lorsqu’on vous évinçoit.
JSon erat Me lo c u s , et il ne s’agissoit alors que de la
succcession de Marie Chardon, disputée par deux héri
tiers ; il n’y avoit donc pas lieu de répéter des créances
dues par la succession répudiée de François.
S’il plut au sieur Rochefort d’abuser de cette sentence
c o n tr e la clame D a g o n e a u , il n e trouva son droit que
dans l’arbitraire ; d’ailleurs les héritiers V ialle étoient
désintéressés alors , ayant cédé leur créance ù la dame
Dagoneau ; il a fallu une éviction pour leur rendre le
droit de réclamer.
Ainsi les héritiers V ialle sont fondés à dire à la dame
de F rétâ t, comme i\ tous ses ancêtres: V ous vous êtes
emparés du gage de notre créance ; vous l’avez ôté ù
nos oyans cause ; vous devez donc payer la créance ou
rendre le gage : c’est à cela que se réduit toute la cause
relativement ù la créance de 8198 francs.
Quant à celle de 2194 francs ? elle est personnelle à la
�C 29 )
maison de R o c h e fo rt, et rétroagit tout à la fois sur la
succesion de Marie C hardon, occupée par la dame de
F r é t â t, parce que Marie Chardon doit faire valoir sa
cession.
A cet égard la dame de Frétât propose un seul moyen
(page 20) , et ce moyen est bien étrange. Elle veut qu’il
y ait cofifitsion de dette et créance, parce que le sieur
Rochefort est devenu héritier de M arie Chardon, créan
cière de Réné V ia lle , lequel avoit seulement un recours
contre le sieur Rochefort.
D ’abord il n’est pas trop aisé de concevoir comment
la confusion s’opère lorsqu’ il y a une troisième personne
intéressée , et que ce tiers n’est pas héritier : ici il y a
R éné Vialle.
Cependant l’objection auroit quelque chose de spécieux
dans un sens, sans la cession de 1691 , qui ôte toute idée
de confusion.
En e ffe t, Marie Chardon , par cette cession , donna
quittance finale à son tuteur du reliquat auquel il étoit
condamné envers elle ; elle n’avoit pas besoin de lui rien
céder à cet égard contre, Suzanne F o u r n ie r , veuve de
Réné C h ard o n , puisqu’elle n’étoit pas sa créancière di
recte , dès qu’elle avoit tout obtenu contre son tuteur.
C ’étoit ce tuteur q u i , en vertu de l’acte de 1666 et
de la sentence de 1 6 9 1 , étoit créancier direct de R én é
Chardon , comme forcé de payer seul le reliquat d’un
compte dû par ledit R éné Chardon.
Ainsi la qualité d’héritier de M arie Chardon n’a pas
pu dispenser les héritiers de R éné Chardon , de payer
a Réné Viulle les condamnations de la sentence de 1691.
�( 30 )
L e sieur R och efort, 0111:776, avoit fait une autre dé
couverte pour éluder ces condamnations de 1691.11 disoit
aux héritiers V ia lle : V ous n’avez fait condamner que
Biaise, Antoinette et A n n e C hardon, comme héritiers
de R éné en 1691 , et je ne les représente pas.
Mais , i ° . ce n’étoit là qu’éluder l ’application de la
sentence de 1691 , parce qu’elle étoit rendue contre
Biaise, Antoinette et A n n e Chardon , en qualité d’h é
ritiers de Réné Chardon et Suzanne Fournier. Ces trois
héritiers appelés sont condamnés personnellement pour
leur part et p o rtio n , et hypothécairement pour le tout.
A u jo u rd ’hui la maison Rochefort représente toute la
branche de Réné Chardon.
2°. L ’arrêt du 14 mai 1722 imprime au sieur GilbertA m a b le Rochefort la qualité d’héritier d’Antoinette et
A n n e C h ard on ; cet arrêt lui fut signifié ù domicile, et
il n’a jamais nié cette qualité.
A in si la sentence de 1691 est commune à la dame
de F rétâ t, q u i, non-seulement réunit sur sa tête la
qualité d’héritière de toutes les personnes condamnées,
mais qui encore a les biens des familles de Rochefort
et C h a r d o n , hypothéqués à cette créance.
Cette créance a toujours été en vigueur par des pour
suites. Elle le seroit au besoin par des minorités succes
sives ; mais au reste, on n’a jamais osé opposer la
prescription.
Il reste à parler de la créance résultante de l’écrit de
1710 : et ici le sieur de Rochefort crut n’avoir besoin
d’autre moyen que la prescription qu’il alléguoit de
�(3 0
quarante-sept années, en comptant de 1710 a 17^7* ï ja
dame de Frétât fait le meme calcul, et elle se trompe.
L ’exploit de 1720 d i m in u e d’abord cet intervalle, et
le réduit à trente-sept ans. Les minorités vont reduire
cet excédant.
E n 17 2 0 , Joseph V ialle
enfans Boissier ; les autres
dernier errement est du 6
On voit par la sentence
procédoit comme tuteur des
parties étoient majeures. L e
septembre 1720.
de 1 7 2 9 , que Joseph V ia lle
étoit décédé *, il étoit représenté alors par Marie A u te ro c h e, sa v e u v e , tutrice de leurs enfans.
E n 1 7 4 2 , Jean -G aspard et Jeanne Boissier étoient
majeurs ; ils procèdent avec Jeanne V i a l l e , veuve de
Gaspard M om et, et avec Françoise V i a l l e , épouse du
sieur Paye.
En 1767, les qualités avoient encore changé : la dame
Momet et les sieurs Boissier étoient décédés. L e procès
étoit poursuivi par Catherine et Antoinette M o m e t , et
par EtieDne Boissier.
Ainsi, en déduisant seulement les minorités de 1720 à
I 7 29 i ^ y a plus de temps qu’il n’en faut pour compenser
l’excédant qui se trouve sur trente ans, entre le 6 sep
tembre 1720, et la requete du 31 décembre 1766.
D ’ailleurs y a-t-il bien eu lieu à prescription dans la
circonstance où le sieur Am able R o c h e fo rt/ é to it rendu
dépositaire d’effets et papiers, et s’étoit chargé de pour
suivre le recouvrement d’ une créance?
lia prescription ne pouvoit pas courir contre lui le
j«ur meme de son écrit, et tant qu’il n’avoit pas achevé
les diligences nécessaires.
�(3 0
Il est impossible dépenser que le 'sieur Rochefort n’ait
pas été pnyé de cette créance; car Réné "Vialie avoit été
colloqué utilement pour 1090 francs, et la sentence de
Clermont fut confirmée au pui’lement. Il n’y eut besoin,
d’après le sieur Rochefort lui-même, que de justifier du
billet et de la demande, pour faire exécuter l’arrêt. Il
n’est pas possible de supposer que le payement n’ait pas
eu lieu, quand il y eut un arrêt; si cela étoit, le sieur
Rochefort n’auroit pas m anqué, en 1720 , de rendre les
titres ; son fils les auroit encore offerts en 1766 : mais on
n’a offert ni les titres ni l’argent.
Comment donc la dame de Frétât voudroit-elle pro
fiter, au détriment des héritiers V ialle , d’une somme
touchée par son aïeul pour le compte d’autrui ? Elle a
pu présumer qu’il n’avoit rien reçu ; et voilà pourquoi
les héritiers V ialle ont voulu la détromper, pour qu’elle
renonçât à proposer un moyen tel que la prescription.
I l est in u tile , d ’après ces remarques , de répondre
aux autres objections (page 16). L e sieur Rochefort, en
opposant que Gilbert-Amable Rochefort n’étoit pas héri
tier de G ilb e r t , n’avoit pas fait attention que GilbertA m able Rochefort avoit contracté une obligation per
sonnelle en 1688 et 1710.
A p rès avoir parcouru les trois chefs de créan ce, il
n’est pas difficile de présenter un compte par aperçu, de
ce que peut d e v o i r la dame de Iretat.
jo. Elle doit 8098 francs en principal, portés par la
sentence de 1689.
20. 10933 f. pour les intérêts liquidés par ladite sentence,
3°«
(
�( 33 )
3°. Les intérêts échus depuis 1689, jusqu'au payement
sous la déduction des jouissances dont il sera parlé ciaprès.
40. Les dépens adjugés par la même sentence.
5°. L a somme de 2707 liv. 9 s. 7 d. en vertu de la
sentence de 1691 , et en outre le coût de ladite sentence.
6°. Quarante-neuf setiers trois quartes de b l é , d’après
la valeur de ladite époque, qui paroît être de 299 f r . ;
sauf la déduction de trois setiers d’avoine •, sauf aussi au
tribunal à peser dans sa sagesse si c’est le total de ladite
som m e, ou seulement les deux tiers qui sont dûs aux
héritiers V ia lle , lesquels se font un devoir d’en proposer
eux-mêmes le doute.
7°. Les intérêts du capital porté en l’article précédent^
depuis la demande, ou au moins depuis la cession du 10
octobre 1691 , qui fait la quittance de Réné V ialle envers
M arie C h a rd o n , et son titre de répétition.
8°. L a somme de Ô2i liv. i 5 s. 6 d. pour la moitié
de celle de 1043 liv. 11 s., à laquelle R éné V ialle fut
colloque par sentence et a rrê t, sur Gilbert R o ch efo rt,
et que le sieur Gilbert-Am able Rochefort se chargea de
recouvrer par son écrit de 1688, à la charge d’un bé
néfice de moitié.
90. L a somme de 1000 francs pour moitié de la pro
messe de 1710 , sauf au tribunal ¿\ juger si le billet énoncé
audit acte ne fait pas double emploi avec l’objet de l’acte
de 1688.
io °. Les intérêts, soit des deux articles précédens, soit
de l’article 8 seulement , depuis la demande du 18 dé
cembre 1720.
E
�.'(34°
Les déductions à faire sur les créances ci-dcsRns pa.roissent devoir se composer principalement du capital
de 3000 francs, des dépens dûs à Marie Chardon , et des
jouissances des domaines.
L e capital de 3000 francs paroît diminué par deux
.quittances, l ’une du 22 décembre 17 2 0 , de 312 francs;
l ’autre du 10 janvier 1 7 2 5 , de 862 francs; toutes deux
postérieures au décès de Marie Chardon et ù l’affirmation
î
de Joseph Vialle.
Les sieurs V ialle pourroient contester l’intérêt de ce
capital, en ce qu’il n’a pas été demandé par les héritiers
R ochefort ; cependant , à titre de compensation, ils
croient juste d’offrir ces intérêts depuis l’échéance.
C a r , quant aux arrérages de la rente de 300 francs,
il paroît, par ce qui a été déjà d it, que tout est soldé
jusqu’au d écès, soit au moyen des quittances, soit au
moyen de la délégation des fermages à ladite M arie
Chardon , s o i t enfin d ’après l’affirmation sur la saisiea r r ê t du sieur Granchier.
Quant aux jouissances, il sembleroit d’abord qu’elles
doivent se borner à celles qui ont eu lieu depuis le 30
juillet 172 0 , jusqu’au 22 juin 1 7 2 9 , époque de la sen
tence et mise en possession de la famille Rochefort.
Cependant les héritiers V ialle ne veulent pas demander
une chose injuste; et dès que Joseph Vialle a jo u i, au
moins depuis le i 5 mars 1696, pour employer les fer
mages en son a c q u it au profit de Marie Chardon , ils
c o n s en te n t de rendre compte des jouissances depuis cette
époque; et même le tribunal examinera s’ils ne doivent
pas ce compte depuis 1691, époque de la cession.
�( 35 )
Seulement ils ne doivent le compte de ce qui est an
térieur au 30 juillet 172 0 , que suivant le prix des baux
de ferme.
Quant aux dépens adjugés à Marie C h a r d o n , que la
dame de Frétât représente, ils en sont débiteurs, sauf
la déduction de 400 francs, suivant la quittance de 1719*
A insi les déductions doivent se com poser, i°. du
capital de 3000 francs porté par la cession de 16 9 1 , dér*
duction faite de ce qui a été payé par les quittances de
T'jzo et 1725.
2°. Des intérêts du restant dudit cap ital, depuis 1701,
époque de son échéance, si m ieux.n’aiment les parties
le compenser à ladite époque jusqu’à due concurrence
avec les capitaux des créances des V ia lle , pour en éteindre
en partie les intérêts ; ce qui produira le même résultat.
30. Des jouissances des domaines sur le pied de 255 fr.
depuis le i5 mars 1696, jusqu’au 30 juillet 172 0 , sauf
au tribunal à prononcer s’il y a lieu d’en rendre compte
aussi depuis 1691.
4°. Des mêmes jouissances, à dire d’expert, depuis le
3° juillet 172 0 , jusqu’à la sentence du 22 juin 1729.
5°. D e trois setiers a v o in e , dont la déduction est or
donnée par la sentence de 1691 , avec les intérêts, ou
en procédant par compensation comme en l’article 2
ci-dessus.
6°. Des d é p e n s obtenus au civil et au criminel par
M arie Chardon , déduction faite de 400 francs.
Ce projet de compte est présenté par les héritiers
V ialle avec le sentiment de son exactitude. Ils ne der
�'mandent r i e n qui ne soit à eu x ; mais ils veulent obtenir
ce qui est juste , et rien n’est plus légitime. Tourm entés
par un siècle de procès, les héritiers V ialle n’ont pas été
les maîtres d’avoir justice plutôt; mais l a cause n’a jamais
été plus simple qu’aujourd’h u i , n’y ayant plus de débats
qu’entre le créancier et le débiteur; ils paroissent désirer
l ’un et l’autre de voir la fin de cette contestation,qui, pour
avoir été trop lo n g u e , n’en a été que plus onéreuse à la
famille V ia lle , et ne fait que lui acquérir plus.de droits
à une prompte justice.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. S I M O N N E T , avoué licencié,
■f?. ,,
' . }•■
■■
î*-; •)
A. R I O M
de l’imprimerie de T
iiib a u d -
L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Juillet 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Boissier, Louis. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Simonnet
Subject
The topic of the resource
successions
créances
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Louis Boissier, Marianne Boissier, et le sieur Chauvassaigne, son mari, Michel-Gaspard Boissier, et Pierre Chabridon, demandeurs ; contre Dame Marie-Catherine de Rochefort, et sieur Jean-Augustin-Guillaume de Fretat de Chirac, son mari, défendeurs.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1645-1808
Avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0303
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurières (63020)
Rochefort-Montagne (63305)
Bonabry (domaine de)
Aurière (domaine d’)
Rights
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Domaine public
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Créances
Successions
-
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099c59d7ddd03be2ffce190cb967941a
PDF Text
Text
MEMOIRE
t
SUR
UNE C O N T E S T A T I O N
RELATIVE
A
LA
POSSESSION
ET
PR O PR IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
i
A R I O M,
d e
l’ i m p r i m e r i e
IMPRIMEUR
d e
t)E L A
L A N D R I O T ,
COUR D ’ APPEL.
A o û t 1804.
s e u i
�MEMOIRE
COUR
EN RÉPONSE,
D’APPEL
SÉANT G
A RIOM.
POUR
P ierre - J ean - B aptiste T R E I C H L A
P L E N E , appelant
'
M a r ie
CONTRE
,
T R E IC H -D E S F A R G E S
L achaud ,
Jean
COUDER ,
veuve
et
Léo
n a r d C H A D E N I E R , in tim és.
A V E C des titres de propriété , et la garantie des lo is ,
le sieur T reich a été jusqu’à présent à la m erci de tout
•le monde. U n ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�,
.
.
( 2 \
. . .
à luî faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés , pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condam née,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i- c i trouva en son che
m in la révolution , qui lui ôta sa p r o ie , et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M a is, dans la l'apide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la v e ille ; e t, après uncalios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
g ra n d e , que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. U ne cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avdir éclairci la difficulté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui d o itle plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent', non pas quant au jugement d elà p rop riété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Q uoi qu’il en so it, cette m ultitude d’ar
rêtés ne peut plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une jn in e, qui l’a
vu exploiter pendant 46 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclam er une copropriété contre un tiers deten-
�.
( 3 \
.
tèur ; si encore il le p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire x*evivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits ; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
autres actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter. ces mômes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
\ . . . i ;! »
■
• •i •
A u village de la P le a u , dans le département de la
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean T reich ,
père de l’ap p elan t, en étoit le principal propriétaire^
En 1 7 4 7 , il acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée im proprem ent le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 25 mars 1 7 55 , il acquit du même P ierre BeynesJ
tout le terrein où étaient ses-mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. L ed it héritage vendu^
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon , que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , m oyennant 3000
Il fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le m aréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur,
auroit lui-inême sa provision annuelle dans les carrières
vendues. ,
'
W
'
•
,
”
,
,
.
A a
•
’
�.
.
'( 4 )
.
Cette terre de la C h aro u lière, qui a' en surface troiâ
septerées , avoit 'été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’A n to in ette, femme Chadenier;
sa v o ir, deux septerées avant 17 3 6 , par un acte que
l ’on ne conrioît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte
du
I er, décem bre 1 7 3 6 ; et cette
septerée vendue y est conjïnée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
O n y rem arque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit v e n d e u r, du consen« tement dudit acquéreur, de la m oitié de tout le cliar« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« C haroulière, une des deux ci-dessus vendue, h la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrem ent du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais tout prouve que cette charge fut rédim ée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de 1755.
.
A n to in e Beynes , fils et héritier dudit F rançois, tant en
son nom que com m ecédataire de ses frères et sœurs, vendit
à M arianne la Plène , veu ve dudit Jean T reicli (m ère de
l’app elant), par acte du 29 août 176 8 , un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lle s , les carrières communes dudit village de la
« P lea u , avec autres carrières et terrein de ladite de—
« tnoiselle la P lè n e , etc. ' ensemble les carrières à
« bon de p ie rre , pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein , etc.; comme aussi a vendu à ladite
�a
«
«
a
te
«
«
«
«
«
«
.
,
( 5 }
demoiselle la rPlène la part et portion appartenante
audit vendeur, èsdites qualités, sur les carrières situées
dans le communal de P leau , etc. ; sans par le vendeur
se faire aucune réserve de sa portion dans ledit com
m u n a l, etc. ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exécuter les conventions portées au contrat du 29 septem
bre 176 6 , etc.; de même aussi sera obligée ladite ac
quéreuge , de délivrer au vendeur et aux siens la quantite de soixante quartes de charbon annuellement^
tant et si l ong ue me nt qu’il se recueillera du .charbon
dans lesdites .carrières ci-dessus ven d u es, à la charge
« que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
« eux-mem es ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (leq u el seul A ntoine Beynes voulu t
rappeler) étoit un traité par lui fait avec Bernard D odet
pour extraire le charbon de ladite terre C hazalas, con
frontant,, disoit—il lui - môme audit acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière
des héritiers du fo u sieur Treich le .cadet. ,
A n toine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente de soixante -quartes de charbon , qu’il lit valoir
quelque tem ps, sans avoir garde de réclam er aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 6 janvier
1 7 7 1 , et M arianne la Plène la remboursa par acte du 27
du même mois.
T o u t se réunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de M arianne la Plène d’avec ceux dudit Bevnes,
lorsque M arie T reicli-D esfarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
�.
.
C 6 )
•
essayé de faire à M arianne la P lè n e ,e n 1 7 7 5 , un p ro
cès crim inel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l ’acte de 17 3 6 , e t, ne pouvant en user elle-m êm e, elle
eut recours à un m oyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. E lle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1 7 7 7 , avec Jean C o u d e r, à la fa c u lté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier , et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal,
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
n avoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Charo u liè re , la société ( évaluée à 4 t t ) n’auroit aucun effet.
L es trois associés se m irent en œ uvre au mois d’août
1781 , furent une fouille dans le com m unal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière , qui dom ine ce
communal.
M arie la Plèn e aussitôt présenta une re q u ê te , de
manda le transport du juge de S a in t-A n g e l, lequel fit sur
les lie u x , le 8 août 1 7 8 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment le
prem ier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
'
Les Desfarges, Beynes et C ou d er, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouillo
n’avoit pas pénétré sous la C haroulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils preuoient les démarches de la veuve la Plèue poui
�,
C7 )
un trouble à leur p ro p rié té ; que les causes dont se servoit et s'êtoit ci-devant servie ladite demoiselle la P lèn e,
pour tirer du charbon de la terre de la C h a ro u liere,
portoient un préjudice notable audit Beynes et autres, au
droit de retirer du charbon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la m oitié de. ce charbon depuis le temps qiCetle
avoit acquis.
ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
Ils
D e son cô té, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
feinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,• mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application , et que d’ailleurs il étoit doublem ent
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se liâtoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidem ent, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veu ve la P lè n e ,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. L a veuve Desfarges crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit o u ï, et interrogés ; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
O n continua le procès c iv il, et les intimés priren t, le
�c 8 }
.
•
20 novem bre 17 8 1, les conclusions qu’ils avoient annon
cées lors du procès verb al, c’est-à-dire, i° . qu à Vavenir
le charbon fût partagé par m oitié ; 2°. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qu’elle a retiré et J a it creuser
sous le champ de la Charoulière , et ce pour leur
m oitié , à quoi ils se restreignent 30. à la m oitié dudit
charbon retire de ladite terre depuis Tinstance 4°* erl
^000
de dommages-intérêts.
j
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du prem ier ju g e,
qui déclare les intimés propriétaires de m oitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou~
Hère , et de m oitié de celles du communal de la Pleau
(q u i n’étoient pas en litig e ); mais, attendu, est-il d it, que
les intimés n’ont pas réclam é dans le temps contre l’ex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la P lè n e , publiquement et ouvertement , en
vertu de son contrat de i'/ 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations , la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d ’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
L a veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M a is, Sic vos non n o b is , un nomm é Saint-Victou*’
profita do ces querelles pour persuader que l ’ e x p l o i t a t i o n
de
�.
, .
< •* > )
de ces mines étoit en m auvaises„ rnains +ril çn
d’abord de l’intendant dei.Lim oges la concession poui;
un an ; puis-il ¡fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration^ spn0i^tUit;é ,
.p ^ in t éfi. 1783 une
concession,de q^m ze.jris.
ob ar»*: ' J S 15{
L L a •loi du .28 juillpt;fi ^9.1;e ^ u ^ a < ,Sa;nt-„yiCtour4
qui néanmoins ne fut pas découragé, -et q u i, dans toutes
les phases de la ré v o lu tio n , se f.t iiït ,iu x avenues des
administrations etTdes, ministère^, ppur solliciter quelquesuns des arrêtés ci-après,
en veniir.4pr,longue mfvin à,
réussir.
, ,
r> q
^ f, s;i{
.,_T '
Les mines étant seulement sous la surveillance, admir
nistrative , les propriétaires de Pleau obtinrent , le
6 novem bre 1791^ un arrêté du département de la.Gorrè z e , qui les remettpit en possession de, leurs carrières..
Saint-Yictour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit; i l fallut .des enquêtes
pour le vaincre. E n fin , en 179 3 ,, il p aru t,céd er, et fit
faire par B ettinger, son associé ,..un,traifcé^avec Pierre-,
Jean T reich appelant , lequel, conçédoit, ¿1 p rj,x fixe ,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département hom ologua ce traité le 19 juin 1793.
D ’autres cliangemens amenèrent d’autres intrigues. O n
fit écrire au ministre de l’intérieur .par le ministre de la
m arin e, pour les mines de Pleau ; pn eut des avis de la,
leommission des m ines, d’autres de celle des travaux pu
blics. O n fit ordonner que les, propriétaires ex;ploiteroient en commun. •
L e département de la Corrèze p r it, les
viôse on
5,
5
et i5 plu
deux arrêtas qu’il crut etrje en conform ité
.j ;; illf
'
�r,
.. , . ............. C ™ / ) .
.
.
_
de ces feglemèris-, maïs ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
‘
Les propriétaires des minés se réunirent, le 24 nivôse
an 6 j poiir Organise^ une* exploitation en-commun, sous>
là direction de Mazaud. O n prëssent que T reich appe
lant, ét principal propriétaire, ne pouvoit y ! participer à
cause du traité^qü’il avoit fait avec Bettinger.
U n autre obstacle s’opposôit à cette union. Les arrêtés
des 6 n o v em b re2 1791 et 1 9 " 'juin ' 1793 subsistoient
enbdre', et élloiént exécutés.’
' Mais le ‘bien ’général ne permit pas sans doute- à l’ad
ministration dé"la C oirèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des Considérations
particulières. L e pliis difficile né fut donc pas de vaincre
te léger empêchement ':'
;
:
D ir u it , œ d ijic a t, '■m u tâ t q u a d ra ta ro tu n d is .
L e département de l ’an 6 ' cassa, le 23 ventôse, les1
arrêtés du département 611 plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut liom oiogu ée, et il f u t 1enjoint à T reich de déclarer
sous "quinzaine s’il entendoit s’y r é u n ir , sinon il étoit
censé avoir renoncé h son droit.
T reich se pourvut près des autorités supérieures; il
osa même élever sa vo ix jusqu’au chef de l’état ; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T r e ic h , fils et héritier
de Marie la P l è n e , fut porté ci T u lle s , comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu a la cour
d’appel de Limoges.
�.
c n,
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,; ■
Les
adversaires
,
forts
cje
la
.décision
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» •j 'j \j! -.y' -;a i j i * '>1' ;um ; *¡J .- .)¿jinistrative.
. • ;•
contestèrent, ^d’abord la xpm pçtence .judiciairp ; mais
comment un arrêt^. ^ r o it - i l pu suspendre un aj>pél
pendant?
D ’ailleurs„rarrêfp.pe
régloit rien.sur
la .*];•
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priété des parties : la, çouç dp ,ïfifn p ges,retin t donc ,1a
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t Les parties. plai<lèreftt;(^u^fyn^0;
' } xi
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j-< ,r*y »
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an g intervint Î’arrçt..suivait
’ *r . . . • .
k Considérant qu’il résulte du contrat.du i«”-. dccein•
• .
. .i
'K.j,
•> m‘ \ ïi:!ir> h , h.} • •. r i ?:j i a
« bre 1736 ,une : y ^ t ç -¡pure tj siniple)} et parfcifeo.de
« Tentier fonds,de.la portion de la, terre la, Charoulière,
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y
j ■.
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- • -1 :
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».^1- 1
. T i , . ) J J ; t ' 1) I,;
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« qui fut vendue,par cet acte,: que la réserve énoncée
• n
1 v ;'
■' !
i
; i , . ; , i ,. ‘ . [ >' r : - ■ »
cc à la suite ,de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su gplé« ment du p rix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait -retenir au vendeur; la. p r o p r ié té ( de. la
«1¡1
moitié
sous le tér. de la
1- mine- de
:'•/ charbon
il* 1. . II.èxistante.
-. ¡ :,v;
,
« rein aliéné ; qu’il n’en dériyoit contre: l’acquéreur
cc qu’une simple action en réclamation de cette m oitié
« de charbon ; que; cette action QU^soi, ^st; prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps^de rtrerite annéès;
« que les in tim és.ont avoué et soutenu, au p r o c è s. que,’
« n i François Beynes , auteur d A n to in e ' , 7 i i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
cc à ch a rb on , depuis ledit contrat d e i ^ 6 ,ju s q u e n
c* 178 0 ; ce qui embrasse un espace ^de quarante-quatre
ce ans , plus que suffisant pour prescrire ;
.
cc Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean B eyn es, prem ier a cq u é re u r,
•
■*
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•
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« Jean T reich , père de l’appelant, et l’appelant lui-même,
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■ . f ” ‘> . .
. . . . . .... .
.
« ÀWt |)dskecl6 ïad^c'mciîtie1cl;éJnfaiïe 3 avec titre èiiifisant
« pour eri àcqütéWi*' ïa ^ropriiké^Wee b o û W f d r e t saris
« interruption pendant plus'de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription së tro u ve acquise en faveur d e ‘ l’acqué-
« reür que dès-tors Tèxiiîioeii èï îü Solution dçÿ autres
« questions agitées au procès deviennent in u tile 1 etc.
r-. f - ...... . p „ ° „ r
. rK . f' } ....
... ' : ,r...
L e tribüntîl tfit'q u ’il a été friil ju g é;'....
et
« maintient l ’appelant aü d roit et possession de jouir 1
« d e s.m in e s a charbori existantes dans la terre la Cha« roülière [ ...' le ' ' rel'a'xô d 'e 'Î’aBcü^tioh ;et plainte;
condamne'" les intimes à-! lui Véùd'rë le ’ charbon par'
euX ^ e rç u dans ladite 'tërr'è ;./. depuis le trouble jus
te qu’au jo u r .... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et
« ioo'ri~ de dommqges-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y é c h e t, du charbon
'"«
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« ‘ perçu depuis ledit joür ¿ ¿ ' ventôse an 6 ,' etc. »
•
.Les intimes se pourvurent en cassation sur quatre
moyens: Celui de l’incompéteiice fut réjeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la m inorité de
B e yn esV cjù ’ il lie jirbuyoit encore pas régulièrem ent,
fit réussir Tàdriiission. L a "section civile rejeta à son
tour fce nVo'yfcn , et s’attacha à l’ incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit j tiges l’a em porté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qû’ilc n so it , Tes deu?i arrêts de Lim oges ont été cas
sés le T4'mvôsc an 1 1 , pour avoir statué sur la possession
en m êm e.tem ps ejue sur la p ro p rié té , parce q u e , dit
¿’a r r ê t, la possession dérivôit de l’arrêté du 23 ventôse
àn 6 ,\ ..e t cependant cet arrêté avoit été respecté à L im o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�. V . . . . .-C'^ )
■ .
. ...
E n voyées à ’ faire statuer sûr leur appel en (cette cour.
* Les intimes seîigurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des/m ines de Charoulière : ils y disposent
aujourd'hui 'eri'’maîtres.
,
.
’
u M ais bientôt les plaintes que T reicli avoit portées au
pieçt du trôneront été’ fructueuses. L e ministre a donné
Ordre aupréfet>Jdè la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a‘ été effectué par arrêté du 27 floréal
a n 'lV ^ q u V permet polir un an à T reich et. autres d’ex
ploiter (illacuii dans sa p ro p rié té , à la charge de s’exp li
quer dan"sJce délai pour régler le m ode d’extraction à
venir.
' N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens. administratifs ,
Fappel a été suivi en la cour. lies intimés ne voudroient
y plaider que sur la -p ro p riété; ils prétendent que leur
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pou r prescrire.
M O Y E N S .
v
Ce n’est pas un très-grand malheur' qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’une cour d’appel., reconnue com pétente pour h fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet a r r ê t, au fond , soit
suspect d’aucun vice.
�.
( .H )
#
A u re ste , le sieur T re ic li se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugem ent comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables;
car si son arrêt de Lim oges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le m oyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requetes , 'ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dan^ tous ses m otifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Lim oges dans les ques-,
tions de la p ro p rié té , et m ême de la possession antérieure,
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition,
à l’arrêté du départem ent, du 23 ventôse an 6.
, ,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils sont fondés , non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie M azaud à la possession, mais sur la pos ■
*
sibilité qu’elle y eût d ro it, quand le gouvernem ent auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6.
.
O r , M azaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événem ent, il n’y a aucun obstacle à ce que l ’arrêt
de Lim oges subsiste.
O11 répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se dem anderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins à être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parlies est remis en litige.
D’A rgen lréd ép lo ro it la inisçre des plaideurs et l’étermte
des procès: M iscri litigantes ! de quibus n ih il ccrti est
constitulum , et quo i ah arhitrio cujusque et opuiationo
putiùs pendet, quàrn àccrtis regulis, M ais q u ’ a uroit-il dit
�■V
f.
•
(
)
.?•
■ ,
si, 'ouixë les tribunaux, il eût fallu parcourir u n cercle d’admirii'strations sans etreplus certain le lendemain que la veil
le', et!sans que,ces administrations le fussent elles-mêmes?
Q uoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
p o ser, quë lés dioses sont au même état que lors de la
cassation ,'e t par conséquent qu’il existe un arrêté du
|
^I1 ' *f ! Jr' -J -| J '
>
¿3 ventôse an 6.
' Si cet arrêté subsistait aujourd’h u i, la cour auroit à exa
m iner encore la même question de compétence relative
m ent à lîr possession des m ines; et il seroit bien difficile,
o ï f oser le^dh-'e , qu’elle se conform ât m ieux que la cour
de Lim oges à la 'démarcation dès pouvoirs; car pourroitelle faire p lu s, que d’arrêter ses condamnations à l ’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
M ais , dans tous les sens possibles,, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; lés jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par?la sentence de S a in t-A n g e l, et par
l’appel dë la veuve T reich .
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p e l, et on ne peut pas inyoquer l ’art, i^r. de la
loi du'28-juillet' Í791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance adm inistrative, il n’ôte pas le fait de la posséssion", et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution, et ce
dernier arrêté ne les i*apporte aussi que pour l’avenir.
'A in si L im o ges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la co u r, en statuant de m êm e, s’y conform eroit encore.
�(*6)
_
M ais elle n’a pas même l’empêchement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les in tim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du p réfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
n istre, n’a pas borné cette infirmation à un seul c h e f,
comme ils- le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste, il est toujours vrai que la com pagnie M azaud
n’a plus le p rivilège • exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirem ent;
et d’ailleurs encore il est véritablem ent oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intim és ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
com pagnie M azaud y qui n’existoit p a s, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
em porte donc avec elle la question des jouissances.
' A in s i, bien'ldin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im o g e s, il semble que la cour n’a aucun empêchement
<Y adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la com pagnie M azaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l ’ap p elan t, seulement elle
y avoit une expectative au cas que T reich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. M ais l ’arrêté do
l’an 6 n’est plus. L a com pagnie M azaud , d’après même
les intimés ( page 14 de leur m ém oire ) , n’a plus (la
droits ; et s’il est vrai que la possession ' dés mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur T reich l’a encore
obtenue. A insi l'effet le plus immédiat de cette obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés m algré lui , doivent lui rendre compte.
.
A u reste , il s’agil ici de com pétence, et par conse:
quent
�.
t ij ^
.
quent d’ordre public : la.cour y>statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer, dans ses propriétés ; et
il n’y voit d’autre obstacle ' que l’obstination de ses
adversaires.
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: ’t
.
• ,•
- Soit que la cou r'ju ge toute la .possession,' ou seule
ment une partie de 1la . possession / il est au moins cer
tain qu’il n’y a ' de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de-Lim oges est cassé, même pour
ce qu’il avoit com p’é temment jugé , le sieùr T reicli ne
sera pas plus embarrassé d é prouver à R iom q u’à
Lim oges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
•„
•
i ° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. E lle
est vendue sans charges.
'
2°.. Son titre est fortifié par le fait même du pre
m ier vendeur , q u i , achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , ne s’est fait aucune
espèce de réserve. •
,
, 30. Il a joui plus de 10 ans avec titre et bonne foi :
il a’ joui même plus -de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. , Cette jouissance est constante au procès,
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen ; aussi ils s'efforcent de la
dim inuer par des négations.
' Ils n’ont jamais avo u é, disent-ils, que M arie la P lè n c ,
.
/,
c
�. . .
ç la >
veuve T re ic h , ait jo u i, et ils netrôuyeh t aucunes traces de
cet a v e u ; et l ’ap p elan t, au co n tra ire, a toujours d it,
suivant e u x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charo.ulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d i t , ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C ’est.donc
dans les interrogatoires? M ais de quel interrogatoire a-t-on
voulu p a rle r? est-ce de celui de 17 7 5 ? est-ce de celui de
.178 1 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
crim inels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e prem ier interrogatoire est vraim ent une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de
, la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la senténce. L e juge demande à la veuve
la Plèn e s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
m oitié du com m unal, et autres carrières ; ..... s’il n’eçt pas
vrai qu’elle tient sous son joug les habitons du v illa g e ;...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon , etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de m oitié du com m unal,
et d e plusieurs autres carrières particulières ; ...q u ’elle
n’em peche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai ; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veu ve la PJene
11e jouissoit p a s, 011 y voit au contraire qu’elle enlendoit très-bien jouir seule de scs carrières, envers etconl*c
tous ; clic ne s’en défondoit pas.
�.
f 19
-"Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? 'Car il est parle
de dix-huit mois dans l ’interrogatoire de M artin Beynes
èt dans celui de sa fem m e, qui Ont rendu compte de! la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plainte. M ais là
veuve la Plène explique., dans son interrogatoire du
même jo u r , que cette carrière n’est .qu’une continua-,
îion 4e creusement ; et plus loin elle parle encore de
ce nouveau creusement.
'
*
Comment la veuve la P lèn e.au roît-elle, en effet, m ènti
à la vérité contre elle-m êm e, lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de 1781 , qu’elle a »toujours
joui. « Les contrats de vente , dit-elle’( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d’exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des' fonds y m entionnés, notam
te meut de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
« tous autres, et sans opposition. »
’
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en prem ière instancè'. Leurs réquisitions au procès
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la reqùêté
du 20 novem bre su ivan t, qui en font le com plém ent,
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû se con vain cre, par
le seul récit des fa its, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
'
Q u’y a-t-il encore de plus .exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
Ca
�.. .
C 20 )
.
.
.
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, 'publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté, m otivé sur la jouissance exclusive à leur nu et su,
demeure inattaquable : le m otif et le dispositif n epeuven t
se séparer. E n fin , peut-on douter de la possession constante
de T re ic h , après avoir vu lés aveux faits devant la cour
de L im o g e s, et rappelés dans les motifs de son arrêt ?
A in si la jouissance des T reich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 1736. O r , avec ces
points de fa it, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescrip tion , indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 177 1.
'
'
V e u t- o n considérer A n toin e Beynes isolém ent, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la v é rité , il faudroit une prescriptioo de trente ans.
O r , cette prescription s’y tro u v e , car A ntoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1 7 8 1, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de L im o ges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en di s a n t
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, oulre q u ’ il
n’étoit p:is seul héritier du ven d eur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire ( pag. 1 1 ) , veulent trouver neuf ‘mS c^°
moins, c’est qu’ils 11e comptent pas l'intervalle de 1736
1705.
�.
( ' 2I )
#
1 P ou r justifier cette. Réduction, ils disent .que c’est en
i y 55 seulement que la cause de la possession a été changée.
M ais il n’est .pas né cessa ire‘de changer la cause d’une pos
session pour prescrire1par tyente ans; car cette pi*escription n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque bonajîdes requiritur, sedsola
possessio per tricennium. L e Code civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On, peut prescrire contre son titi-e, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« Contractée. » ( A l ’t. 2 2 4 1 . )
’
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
ven deur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de T reich acquéreur en i y 5 5 ; e t, sous
ce point de v u e , il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
d ix ans les charges 1 auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que* dans la plupart des pays de droit
é c r it, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de B o rd eau x,¡d ’où il paroît que ressortissoit l’ancien Lim ousin ,,açlmettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
L ap eyrère, lettre P , n°. 83.
? .
A la v é r ité , son'annotateur inconnu prétend que B or
deaux n’admet que la prescription de trente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré , au
cas qu’il V eût lieu d'aborder,cette question secondaire.
Lapeyrère avoit di t, au n °.5>6 o , que la prescription
s’acquéroit par dix ans au tiers possesseur/suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
#
M a is , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
«voir lieu dans la cause.
i ° . T o u s les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de d ix ans se fondent sur l’A uthentique Malœ
j i d e i , et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présum e pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présum er qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât io/igi temporis prcüscr/ptio, si verus doniinus ignoret ju s suum et alienationem fa cta m . Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
M ais comment ne pas v o ir q u’A n to in e Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lu i-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il
n’a pas même ignoré la vente de 17 5 5 , car en 1 7 66
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers T reich pour
propriétaires des catrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A uthentique Malçe fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un im m euble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de d ix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’ iminoublo lui-m êm e est g re v é , et que D u n od m et
sur la môme ligne quant à la proscription de dix ans.
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 17 3 6 , qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit à des fruits temporaires?
E t n’étoit-il pas ridicule que le juge de Sainl-Angcl
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimes,
même Couder et la veuve Desfarges, èlQiei\tpropriétaucS
�po u r moitié , comme si après une vente le vendeur dem euroit pi’opriétaire ; et comme si dans un fonds il y avoi,t
deux propriétés,, l’une du tréfonds et Fuutre de la super
ficie.
Mais.,, dans tous les cas, il est superflu de rem onter à
cette, réserve de 1736, parce que Jean T re iç li ayant acquis
en 1755 , sans, q u e lle fût m entionnée , a joui avec bonne
foi., au om et su du ven d eu r, qui connoissoit son droit
ainsi l’appelant a prescription suffisante,
.
Les intimés, répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’ab o rd , parce que
.c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la teri*e, il y a clandestinité.
. A u tan t vaudi’oit avoir dit etiam pet- mille annos ,
.comme le dit D um oulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en con ven ir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant i-éserve d’un droit peuvent tom
ber des'nues, à la vingtièm e gén ération , et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à aucun trouble.
L ’espèce de Cancérius, l'apportée par D u n o d , parm i les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’ un des faits principaux de la cause ; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les liabitans, c’est parce qu’ il
ne l’a pas réparé sans e u x ; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la cause d’une
-manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
'
( 24 5 .
,
.
« Il faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
fondem ent dans la n ature, dans le droit public commun
à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses ?
sa?is aucune ’p réexistence ou m élange de t it r e , de
convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
q u i tire son origine d'un contrat , qui est propre à
celui qui a le titre , qui résulte d’un droit fo rm é , qui
produit line action , et qui peut être déduite en jugement.
.- .
« L a prem ière de ces facultés n’est pas sujette à la pres
« cription , tant qu’elle n’est pas intervertie. M a is la se'-*
« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« riv e d’une convention et d’une action qui sont pres
« criptiblcs et dans le com m erce o rd in aire, à moins
<x qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne p o u vo ir être prescrites. » (D u n o d , pag. 90.)
Ces principes s’appliquent sons effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu. le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Lim oges.
Rem arquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le d ro it, non pas seulement d 'attendre qu’ou c r e u s â t
pour p a rta g er, mais de creuser lui-m êm e.
La p re u ve , c’est qu’il a associé pour creuser ; la p reu ve,
c’esl qu’on a creusé soi-même , et plaidé pour soutenu*
qu’on en avoit le droit.
L a preuve en fin , c’est que la sentence de 1782 ndjugc
ce
�¿■2 5 , h
'
ce droit; c’est qu’elle déclare lesj intimés propriétaires de,
la m oitié de4 la Imine.
.
,\
•* \
*
■ U ne propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un 'propriétaire qui conserve son droit sans
prescription'.quand un autre en jouit d’après lui-m êm e.
•exclusivement.or
> • : < •, . '
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.
•
M ais Cette jouissance', d it-o n , a été clandestine.
.
 cela il n’y auroit qu’un m ot à ré p o n d re ; c’est
qüe la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu.
au vuxet su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
jjas attaquée par les intimés. D ira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? M ais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le p ep d ., .
. ,}
^ ' '. .
.
•
D ’ailleurs, il est de principe que les aveux consignés
dans un acte subsistent m algré son annulation , com m e
F&nseîgne Cochin , tome 5 , page 2 7 4 , et com m e.l’a jugé
la cour de cassation’ le 29 floréal an 7.
*. Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de L im oges,
q u i . mentionne l’aveu de^la possession.
jÿlais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
. [I 1 ' " '
’■! ' ‘t ' ' 1 >■
'
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fa it ni dans le droit.
Dans le fa it, aucun habitant de la Pleau n’a m ieux su
que. Beynes tous les tours et détours des charbonnières ;
et quand il se'fait un moyen de ce que la Charoulièrc
n’a pas eu d’cxcavalion verticale, il sait bien qu’à la Pleau
.
•' g V
.
' ‘
.
..
D
�26
on n’a jamais, comme en Flandre , exploité ces mines
(
par des puits.
.
) .
•
■ . •-
v
L a montagne où est la houille est,en cône ré g u lier;
p a r conséquent, pour creuser dans une surface, il fout
creuser par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m o yen , qui est le seul usité à la P leau , rien
n ’indique m ieux où se dirige la fo u ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
..
L a procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que s'e trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sont au corhm nnal, mais au pied de la Charou-r
l iè r e , et eu direction de cette mine.
.
"
. r;
A u x termes du d r o it, une possession clandestine sup
pose le d o l , c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. 11 n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes c^iie
ceux-là même consignés au mémoire des intimés
Glcim possidere eum d icim u s, q u i f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o quern sib i controv ersia m fa ctu ru m s u s p i c a b a t u r , et ne fu c e r e t t j m E b a t . L . 6 , il’. D e a cq . P u ss.
V o ilà donc trois choses qu’ il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Plène ait ]o\i\fr(7tive?nenll
2°. qu’elle ait cra in t une action de la part d’Antoine
Beynes; 30. qu’Antoine Beynes a it ignoré la possession.
L:i sentence de 1782 répond à tous ces faits, en disant
que Marie la Plène a joui publiquem ent. La plainte de
1775 prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�( 27 )
# <
^
contestations ; èt enfin les écritures des intim és, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur m oyen.
M ais quand tout cela n’existeroit pas , vit-on jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
■ L a clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui'h
voulu prescrire par le seul secours de la possession, et
parce que sans possession publique il' n’a vraim ent pas
de possession.
'
v M ais celui qui a un titre n’a besoin d ’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lu i est‘point appli
cable.
'
'
lu i
. ■
D unod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en verlu
* d’un .'titre ne peut être regardé comme possesseur d a n
ce destin \ son titre le faisant supposer de bonne1foi dans
le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
;
:
. . .
. L e Code civil répète que la bonne f o i, quand il y a
.un titr e , est toujours présumée , et que c’est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( A rt. 2268. )
'
Les intimés disent qu’on -devoit avertir Beynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’ usage n’étoit pas de le faire par écrit : et d’ailleurs, ori
le répète , ils se sont dits copropriétaires.
•
Il
n’y a donc aucun obstacle à ce 'que la prescription
ait eu son cours ; et T reicli ayant-un’ titre et bonne foi
depuis 17 5 5 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777. -, ■
'•
;
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�.
.
,
(
2
8
3
.
.
cessaii’e ; c a r, indépendamment de la présomption bien
fondée , que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l’a été celle de 17 6 8 , par un acte que T reich avoit dés
espéré de trouver ; il doit d em eu rer, ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
•
C o m m en t, en e ffe t, Antoine B eyn es, qui a toujours
habité le village de la P le a u , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
A n to in e B e yn es, q u i en 1766 faisoit un traité pour ex-»
traire du charbon dans ses p ro p rié té s, aui’oit-il manqué
d ’y com prendre la C h aro u lière, s’il y avoit eu le même
d roit d’extraction ?
Com m ent A n toine B eynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux m ines, en se réservant du charb on , n’auro it-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T o u t prouve dono
qu’elle a ’existoit p lu s, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Lim oges ,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les c a s , n’y ayant
qu’une septerée de la C h arou lière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors v en d u e, e: non sur celle
qui l’a voit été depuis long-tem ps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’ il n’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se ièroit contre
le ven d eu r, in eu ju s potestnie fu it lisent, apertius di
cure. L a sentence do S a in l-A n gel étoit donc encore v i
cieuse, même sous ce rapport.
x Cette défense su résume en peu de mots. L a propriété
�( 29 )
,,
.
de la Charoulière est sans difficulté à Jean T re ic h L es
actes qu’il a passés avec les Beynes , p rouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’A n toin e Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T re ic h
et M arie la Plèn e ont joui .exclusivem ent et publique
ment , au v u et su dudit B eyn es, sans réclam ation de
charges ni de copropriété.
A in si Beynes a -perdu son d r o it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur , par une possession
de trente ans.
A in si T reich a acquis la franchise de la terre la Cha
rou lière, p a r la possession de dix ans entre présens, comme
acquére u r; et m ême surabondam m ent, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire , il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem m ent, sous tous les points de vu e possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirm ée par
la cour de Lim oges.
M . B A R B E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué .
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Plène, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
charbonnière communale
charbonnière privée
propriété du sol
concession d'exploitation
charbon
intendants
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0249
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53748/BCU_Factums_M0249.jpg
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
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Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intendants
Mines
propriété du sol
-
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10ca2d33409c80e1131fde20d17c2276
PDF Text
Text
M
E
L e citoyen
N icolas
■r:i '
L es
O
I
R
J U G E , demandeur;
C O N T R E
h éritiers
E
de la dame M
‘
. :
:
arguerite
D U B O I S épouse S O U B R A N Y , défendeurs;
j
'
e t
C O N T R E
H é l è n e D U B O I S et M a r t i n
son mari
9 aussi
VALLEIX
.
,
défendeurs
C E T T E cause est plus remarquable par sa singularité que
’difficile pour la décision.
Une fille naturelle, baptisée sous le nom de père et
de mère inconnus, qui depuis, soit dans son contrat de
A
�m ariage, soit dans d’autres actes , s’est qualifiée ellemême Hélène D u b o is , qui n’a jamais été connue sous
d’autre n o m , cherche tout d’un coup à se transporter
dans une autre famille.
Elle n'est plus D ubois.
Elle prétend qu’elle est fille naturelle de Marguerite
M ercier et de Jean-Pierre Carraud ; qu’elle a été légi
timée par le mariage- que le père et la mère ont con
tracté ensemble , peu après sa naissance ; que cette lé
gitimation a opéré le môme effet que si elle étoit née
pendant le mariage, et lui a donné tous les droits de famille..
J e a n -P ie r r e Carraud avoit un frè re , Jean - L o u is
Carraud' c P U j'b is e q u i est décédé en 1 7 8 3 , sans pos
térité. Ce frère a laissé un patrimoine assez considé
rable : c’est ce patrimoine qu’Hélène Dubois voudroit
s’approprier.
Elle ne réclame pas la succession du père qui lui a
paru peu avantageuse j c’est la succession de l’oncle qu’elle
ambitionne.
F A I T S .
L ’extrait baptistaire, ou pour mieux dire l’extrait d’ex
position d’Hélène Dubois à la porte de l’hôpital des enfans
trouvés, fixe sa naissance à l’année 1761 • elle est nommée
simplement llélèn c , sans désignation de père ni de mère»
Jean-Pierre Carraud à qui on voudroit déférer la pater
nité, a con tracté mariage en 1762, avec Marguerite M ercier.
Dans le contrat de mariage on lit les clauses suivantes.
« E n fa v eu r du présent mariage ladite Mercier et
�( 3 J
y> donné et donne flw lit ¿futur \époux^\ acceptant pàr do
» nationentre v ifs, tous les biens qu i lu i appartiennent
» présentement, meubles et immeubles , desquels le fu tu r
»' époux fera la ,recherche comme il avisera.
i
- » E n secondlieulafuture se.réserçe, en cas de viduité,
» Ja jouissance et usiifruit des hien's-donnés, et même la
»réversion en-cas de prédécès du ¿futur époux sa?is
j) enjansi
.
» Ladite donation tiendra lieu .az*d¿tfiitu r époux de
» gain de surv** n»
• '
O n prévoit le cas contraire, où la femme su rvivroit, et
il est stipulé pareillement en sa faveur un gain de survie et
un douaire viager.
Nulle mention de l’enfant prétendu né de leur com
merce antérieur.
JLe mariage a duré trente ans. Pendant tout ce temps ,
nulle reconnoissance, ni de la part de Jean-Pierre Carra u d , ni de la part de Marguerite Mercier.
.
Ce qui est à remarquer., ce qui rend le silence sur l’état
de l’enfant plus étonnant, c’est qu’il n y en a point eu du
mariage.
'
.
’
Jean-Pierre Carraud est décédé en 1781.
N ul écx*it encore, nulle parole, nul signe, même au der
nier moment* dont on puisse induire qu’il ait jamais ima
giné être le père de l’enfant qu’on lui attribueaujourd’ hui.
Il décède : Hélène Dubois paroît-elle pour'recueillir sa
succession? N on ; c’est Jean-Louis Carraud d’Urbise, frère
du défunt, qui se présente.
Ce frère répudie la succession par acte au greffe du a
janvier 1783. Sur cette répudiation, la v e u v e , Marguerite
A a
�C4}
,
.
M ercier, fait nommer un curateur à la succession vacante;
Jacques Labat est nommé par procès verbal du 7 du même
mois de janvier.
L e 10 , la veuve présente une requête aux juges de la cidevant sénéchaussée de cette ville , dans laquelle elle ex
pose q u e , comme créancière de la succession de son mari,
elle a x-equis l'apposition des scellés; que depuis Jean-X/Ouis
Carraud d’U r b is e , seul habile à succéder, a répudié la
succession, et que Labat a été nommé curateur à la succes
sion vacante. Elle demande en conséquence, qu’il soit pro
cédé à la rémotion des scellés, le curateur présent, ou
dûment appelé ,* qu’il lui soit permis de faire procéder ¿1
l ’inventaire par le premier notaire sur ce requis, et ensuite
à la vente dudit mobilier.
18 mars 1 7 8 3 , sentence de la ci-devant sénéchaussée de
R i o m , qui liquide ses reprises, et condamne le curateur ù
la succession vacante à en payer le montant.
En vertu de cette sentence, la veuve ne s’est pas conten
tée de faire procéder à la vente du mobilier j elle a encore
poursuivi la vente judiciaire des immeubles ; et sur qui l’at-elle poursuivie? sur le curateur à la succession vacante,
et vacante par la répudiation du frère.
8 juillet 1783, procès verbal de saisie réelle, notification,
criées, certification de criées, et enfin vente et adjudica
tion , toujours sur le curateur à la succession vacante d’après
la répudiation du frère.
Jean-Louis Carraud d’U rbise, qui avoit répudié la suc
cession de son frère , est décédé aussi sans en fans le 22 fé
vrier 1 7 8 3 , laissant aux collatéraux une succession aussi
opulente que celle du premier avoit paru obérée.
�................................................................................... '
-C’étaitleinowrentmirbtui oit la mère devoît reconnoître
l’état de sa fille ; toutlui èn faisoit ua devoir.
Elle’ laisse passer tranquillement ce riche patrimoine à
des collatéraux;- !
. ” ..rri î. :
L e citoyen J u g e , alors domicilié à Grenoble, n’a ,été
instruit t'u -décès de' ¡C à rra ù d 'd ’Urbiié j 'dont il étoit
unique héritier paternel, que long-temps après. ' v
- lia dame Marguerite Dubois , veuve Soubrany, qui sc
cioyoit en ordre de-succéder, s'est mise en possession de
l’universalité cio la succession. >j -îo *j
^
' L e 18 décembre 178 6 , le citoyen' Jugé à fait assigner la
dame D u b o is, veuve Soubrany, en la ci-d eva n t séné
chaussée de Clerm ont, en vertu d’arrêt d’attribution.du
ci-devant parlement de Paris., en désistement, avecrresli-;
tution des jouissances et des dégradations.! "
. \.
Sur cette citation la veuve Soubrany s’est pourvue par
opposition contre l’arrêt du parlem ent, qui attribuoit la
connoissance de la contestation à la sénéchaussée de Cler
mont. A rrêt est intervenu qui en recevant ladite Soubrany
opposante, a délaissé les parties à se pourvoir en la séné
chaussée de Riom.
Divers événemens survenus depuis cet arrêt, ont sus
pendu les poursuites du citoyen Juge.
L e i 5 fructidor an 2 , après ‘plus de 40 ans de silence,
Marguerite Mercier , alors octogénaire , déclare devant
notaires, qu’IIélène Dubois est sa fille, et de Jean-Pierre
C arraud , née du commerce qu’ils avoient eu avant leur
mariage. C ’est sur cette déclaration qu’Hélène Dubois
fonde sa métamorphose. ■
.
E n frimaire an 5 , le citoyen Juge a repris ses poursuites
�contre la veuv'e Soubrany ; il l’a fa \ijasâigner ciofn'©,uyeau
au tribunal civil'du département du Puy-de-Dôme. r ' '
A u moment où il s’attendoit'à recevoir une décision, la
dame Soubrany est décédée elle-même, le 27 prairial au y \>
sans postérité..
' ■
' h '1’
v r.
'
Après son d é c è s l e s scellés ont'été appèsfesur ses effets.'
L,e citoyen Juge, pour la conservation de-ses droits, a fait
faire différentes saisies-arrêts, entre les mains des débi
teurs et des dépositaires: des .effets de la succession.
Marguerite Mercier est décédée en l’an 8.
'
A v a n t son décès elle avoit fait un testament et un codi
cille. Par ce testament et ce codicille, elle iaijt differens legs
à safemme-de-chambre, au fils de son ancien domestique,
et à d’autres particuliers. Elle nomme pour son exécutrice
testamentaire Catherine de F rétât, veuve Mercier , sa bellesœur. Il n’est point question d’Hélène Dubois. Elle y ou
blie entièrement -celle qu’elle avoit reconnue pour sa fille.
Elle meurt. Hélène Dubois assure qu’après son décès
elle s’est mise en possession de sa succession , sans aucun
obstacle de' la part de la famille Mercier. C ’est ce qu’on
ignore.
Quoi qu’il en s o it, elle a prétendu avoir également droit
à la succession de Jean-Louis Carrand d’Urbise.
Elle a fait différentes saisies - arrêts, entre les mains des
débiteurs et des détenteurs des effets de la succesion de lu
veuve S o u b ra n y, détentrice e lle -m ê m e de celle dudit
Carraud.
E n cet état le citoyen Juge a fait citer , et les liânliers de
ladite veuve Soubrany , pour reprendre l'instance pen
dante entre lui et la veuve S o u b ra n y, et voir adjuger les
�I ?}
conclusions prises en kditciJmslahce ; et' ladite Héléne
BllbOis^êt:.VallelX',- son rmn>i j pour voir faire m ain-levée
d'e&-sa^it\^«aïn-êts',i-.éÊ' \Foir'ii<iblai!©r eommtm'avec euhri le
j^gëmëttt'âiitttevwftii’iponitré les héritiers Soubranyj -y\l(j
• 1‘I l m ¡peut ÿiayoii! âerdifS'oiilté relativènaehC -aux héritiers
de la dame Soubrany. L e citoyen Juge leur a com m uniqué
les titres établissant sa qualité. '
ïï. i : -, ' I
T oute la contestation est relativement à H élène Dubois.
OVd•à'ïÇw qûdllî: èst là’vpuétentîôn qu’elle élèvé. ' .r
1.
A la déclaration de M^i‘s « ^ irc’M ercicr du 1 5 fructidor
an 2 , elle demande à ajouter la preuve testimoniale.
Elle offre'suèsidiairementide p r o u v e r , '-r •
■ 'iovfQüal\e9t!qatotrie(:âansrl0lcüœfaiia)0p';de' Riom ¿qu'elle
a*-toùjours>ipassé poinr» êtrempaidusMÎxynmerce' de Jean-*
Pierre CaiTaüdav.ëc JVi'iirgiieritéîMetcier , avant lenaQria’g ej
z Q. Que Jettn-Bierrô-Garratud a;payé tesmaiside'la’riour*
rice ^eùa recommalndé àila>‘n ourrice cet e n f a n t ; t
. 3«. Q^àpuèsi quelle fùtseVréeij ijl la fit transporter dan»
son dotoaîne de 'Re^v^alleîyicliargeaMt Ses fermiers ou: mé~
tayers de sa subsistance et de son entretieii'^ët leur-en-four»
nissant tous les frais
a . * - ■-.•rr • > iV
r n i ) 40. Q u ’il'a ,a voué a pluçtetixs. personnes , qu’if ¡avoit eu;
cette fillô\dë -Margum'kü\^U:raiieuv.-.aVaiit<sow.niaviage'j* • >">
5 °. Que Jean-Pierre Car rnud.Tink'tuiVmêmo a Reyyial 1(\
pour régler les conditions dû» nxâciageldèisa; fille*;-qoîiÎlui
donna des Héritages’ pour, coroposeh'sa dot'; qu’à i]iù vérité
l’acte fut déguisé sous le nom de v e n te , mais que'Ciirraud
n’en reçut’pas le prixvceoqui'fut"dcmiu db-'toutes lèü per
sonnes iqui s’enU;emimïfr pour le mariage^ ’dont le?e<!)ntrat
iut passé le'lendemain'mûrhtifde- la' veiite-; eü recïtf par l é
môine notaire.-
�_
.
£ .V ;
.
.
• V o ilà les faits qu’elle artiotile.î r
' “'rr; • ' :
L a déclaration de Marguerite. Merciçr ést-elle un titre?.
• ; S i e lle n ’est!ip oin t
e tre adm ise subsidiâi’r éirieni 'ària pi'dav.q qiViîll'e.^Ç’llicite?
s-roieiles sont . l e s r ' d e L l K r q u ^ t i o i n s f q i f i l i d e discuter.
'
tt*
•
'r,r>
1; : :.T. novo)') -
P r e m i è r e
■ j ^ u J ' /.*
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q u e s t ?i , o n .
.
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coriTOvilnfo'i j.vj noij.'i.i - lri(/> /il îJij-
L a déclaration dp iMtt?^ucriïà M ercier estrelle
- ' ' on-' ■j: . .
Su.uri. litre ? - • ;oiJn- ' ¡/ , fi* •
■ : l ‘ •' '
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. ■■ ’
E lle ne seroit point) un titre , quand, même H élène
D u bois seroit néeijpettdrmtolo.mariage j à plus forte /raison
dès qu’e lle ‘.e«t>néej,(jdeisbnj;propiiè avcuj, Iro n ie mariage.
Nous ■
disons, quand'inéine ellc\ seroit néc\pendant le
mariage : lés ¡principes à cet égard sont conslans. .
N on seulement Ja) 'déclaratiah de la moce , . mais I.r
déclaration !incnüèudiü <père,et dcj'la ‘. m crqjréunisîjyic' $uflïseï it-pas.jj'sausawlücs? rçdmibiçolès i,; polir établir :1a 11égitimité .de l’êilfant.■>ijO,jJaü ne : . J'.: ojnnl - ^\n;\ v* • ■o-i‘
‘
Il y en a une loi expresse: non'f nudis asseveration ib u s, dit Ja l o i , nev. ;en u\n ttiâ profession e , licet utr-ique
consçntiantr. scdin airùuxm w ■
legitimo con àêptijilii civili
ju re p a ir i.. cannl i tribu thr.hu - . n - v
•• ’
'
• A .cette ■IojUÙu t-il ajo uter dés a u td rité s ?
Quand frie me, disoit'lc célèbre avocat général Talon,lors
de l’arrêt du 12 janvier 1686, rapporté dans le cinquième
tome d u Jou mul des audiences, connu sous le nom de Marsîint, les sieur fct demoiselle.do Marsant voudroient aujour
d'hui avouer l'intimée, pour leur fille légitime, ils ne le
pourvoient
�(9 >
pourroient pas sans rapporter eux-m êm es des preuves
par écrit et incontestables de la filiation; et il cite à ce
sujet la fameuse loi que nous venons de rapporter.
C ’est ce qui a été jugé dans les plus forts termes,
dans une cause ¿1 la première des requêtes du palais, et
qui intéressoit un magistrat du premier ordre et d’un
des plus grands noms du parlement. Dans cette cause la
déclaration de ce magistrat, partie dans l’instance, qu’une
fille qui aspiroit à être reconnue pour sa iîlle légitime,
étoit réellement
légitim e, ne fut d’aucune con
sidération. On donna acte à ce magistrat de sa déclara
-
tion, et sans s’y arrêter, la prétendue fille fut déboulée
de sa demande, afin de faire preuve des faits justificatifs
de filiation. Get arrêt est cité par M. A u b r y , qui en connoissoit les circonstances, dans la cause contre la demoiselle
.Ferrand.
Il faut que la déclaration soit soutenue non seulement
.par la vraisemblance, mais par d’autres indices, par d’au
tres preuves.
' ■ <
Telles sont les maximes; telle a été constamment la
jurisprudence.
, ,L a déclaration de M arguerite M ercier ne seroit donc
pas un titre , quand même Hélène Dubois seroit née
pendant le mariage.
,
Dira-t-on que les nouvelles lois ont dérogé à ces prin
cipes; que la loi du 12 brum aire an 2 , et les lois sub
séquentes qui ont admis les enfans illégitimes ù succéder,
admettent en même temps la simple reconnoissance pour
preuve de la filiation.
,
Cette objection s’écarteroit facilement.
B
�,
.
.
(
1
0
)
.
.
i ° . Il ne s’agit point de nouvelles lois. L a succession
soit de Jean-Pierre Carraud , soit de Carraud d’U rbise,
11e s’est point ouverte depuis la révolution; l’un et l’autre
sont décédés long-temps avant.
2°. L a loi de brum aire an 2 ne concerne que les enfans illégitim es, et H élène Dubois n’agit point comme
illégitim e; elle n’a git, et ne peut a g ir , que comme fille
lég itim e, comme légitim ée p a r le m ariage subséquent.
L a raison en est simple.
L a loi de brum aire an 2 a accordé aux enfans nés
hors le m ariage, le droit de successibilité que les anciennes
lois leur refusoient.
E n ligne collatérale elle ne l’a accordé que pour les
successions qui s'ouvriroient à com pter de la publication
de la loi.
E n ligne directe elle a fait rem onter le droit de suc
cessibilité aux successions ouvertes depuis le 14 juillet
1789 : cette disposition, comme renfermant un effet ré
troactif, a été rapportée par le décret du i 5 therm idor
an 4 , qui form e à cet égard le dernier état de la légis
lation. Ce décret a lim ité le droit de successibilité en
ligne directe aux successions ouvertes depuis la loi du
4 juin 1793O r , Carraud d’Urbiso est décédé lo n g -tem p s avant
l’une et l’autre époque.
H élène Dubois ne peut donc rien prétendre comthe
illégitim e; elle seroit exclue par la loi m ême qu’elle invoqueroit.
Cela est sensible.
Llic ne peut donc exciper de la loi de brumaire an 25
�.
,
11 5 ,
. .
elle ne le pourroit qu’aulant qu’elle agiroit comme illé
gitime , ce qui seroit d’un autre côté détruire sa propre
demande.
3°. La loi de brumaire an 2 admet la simple reconnoissance pour preuve de la filiation, mais contre qui?
contre celui qui a reconnu; dans quelles circonstances?
lorsque la déclaration ne tend à donner un héritier qu’à
celui qui a reconnu ; mais n o n , lorsque comme dans
l’espèce elle tendroit à donner un héritier à celui même
qui n’a point recon»«*
^
D ans l’ancienne législation, qui n’admettoit point les
bâtards à succéder, la question ne pouvoit se présenter
que dans l’une de ces deux hypothèses; ou dans le cas de l’en
fant né pendant le mariage m êm e , auquel le mari est
de droit réputé le père; ou, comme dans l’espèce actuelle,
dans le cas de l’enfant né ayant le m ariage, mais qu’on
prétendoit légitimé par le mariage subséquent. Dans l’un
et dans l’autre cas, la déclaration de la mère tendoit
nécessairement à donner un héritier au mari ; mais
comme d’un côté il eut été de la plus dangereuse con
séquence, et contre la raison, qu'un des conjoints eût
pu être lié par le fait seul de l’autre conjoint ; et que
d’un autre côté on ne pouvoit scinder l’ état de l’enfant;
on jugeoit avec raison que la déclaration seule du père
ou de la m è re , n’étoit pas suffisante, même pour la suc
cession de celui qui avoit reconnu.
Maintenant les enfans illégitimes succèdent. Dans ce
nouvel ordre de choses, il n’est pas étonnant que le lé
gislateur ait ajouté que la rcconnoissance feroit preuve
de la filiation. ; niais comment cela doit - il s’entendre ?
B 2
�( 12 )
contre qui doit-elle faire foi de la filiation? contre celui
seul qui a reco n n u, et non contre celui qui n’a point
reconnu. V o u lo ir l’entendre différemment, vouloir ap
pliquer ]a loi à l’espèce particulière dont il s’agit, au cas
où la déclaration tendroit à donner un héritier à celui
même qui n’a point reconnu, ce seroit prêter une absur
dité au législateur; ce seroit supposer qu’il a consacré en
principe qu’on peut être dépouillé par le fait d’autrui.
Quel a été le but de la loi ? le but de la loi a été d’a
doucir le sort des enfans nés hors le m ariage, de leur
accorder le droit de succéder qui leur avoit été jusquelà r e f u s é . L a loi n’a donc eu en vue que les enfans illégi
times; elle n’a eu ni pu avoir eu en vue les enfans légi
_
^
^
timés par le mariage subséquent. Il ne falloit pas de loi
pour accorder à ceux-ci le droit de succéder.
Lors donc que la loi a admis que la reconnoissance
feroit preuve de la filiation, elle n’a point porté atteinte
aux anciens principes, en ce qui concerne les enfans lé
gitimes , et pour les cas où la reconnoissance d’un des
auteurs de la naissance tendroit h donner un héritier i\
l’un et à l’autre. Elle a établi un droit nouveau , mais
pour les enians illégitimes, demeurés dans l’état d’ illé
gitim ité: elle a voulu à leur égard que la reconnoissance
fît preuve de la f i l i a t i o n ; mais pourquoi ? parce que
dans ce cas la reconnoissance ne tend à donner un héritier
qu’à celui qui a reconnu.
J3ie.ii loin qu’Hélèno Dubois puisse s’aider des nouvelles
lois, elles lui sont contraires.
Ces lois ont supprimé les déclarations de paternité;
et lu confession de Marguerite M ercier, qui recounoît
�,
( '* 3 )'
\
elle-même qu’IIélène Dubois est néei avant lë m ariage,
est-elle autre chose qu’uneIdéclarationjde paternité?
E t qu’on ne dise pas que s’agissant d’une succession
ouverte avant la révolution, cette.déclaration.se'.reporte
à un temps où ces déclarations étoient permises. Il ne
s’agit point de .reflet; il s’agit de-jfacte eri.lui-mê.më"Marguerite Mercier a f a i t ’ cé qu’elle ne pouvoit faire,
et n’a'point fait ce qu elle pouvoit. faire : elle n’a point
fait la déclaration lorsqu’elle■
po.Uvjpit.la-;fair£et elle l’a
faitei^ôrsque^la
Jui^lûterdisoit.
Hélène Dubois n’avoit aucun drbit acquis avant les nou
velles lois. On n’a pu dépuis lui en donner un.
• U n jugement; du tribunal de cassation d u '2 ï prairial
an 10 , à cpnfirraé iun j'ùgement clailrib.una], civil du Pasde-Calais, qui avoit'Cu:égard àune'^éèlaratipn de paternité.
Mais par quèls motifç ? -i^r.^arce ¡que* la déclaration- avoit
été faite, à la yéritéydepuis-la révolu tion , mais antérieu
rement 'à la loi de brumaire j quë le procès avoit même
étë intenté-antérieurement y la Iqv; a ° 4 ça^’ce .qu’il s’agissoit à’alim ent , et.non dii droit.de suçcess{.bilité.
Q u’Héièxie Dubois fasse;elle-m êm e l’application de ce
/•
f.
.
.* r
préjugé." a . - *
' ^ .
Ce n’est pas tout. La déclaration de Marguerite Mercier
li’es't même point1dans la)formëiY.oulue par la loi, '
I^a reconnoissarice iesfc^devant notaires et la .loi veut
qu’elle soit devant l’ ojjioifi'yubhQ dcü’etat civil.
.
L a reconnoissauce devant notaires pourroit peut-etre
suffire pour alimeris; mais pour succéder, il faut qu’elle
soit devant foflicier publie.
' .!
.
;
N ’oublions pas que lu déclaration de, Marguerite M er-
�((*4* r .
cier a été'ftfitc postérièurèmeiit tiu^' nouvelles lois., quelle .
a dû dès-lors être faite en la forme prescrite par ces
mêmes lois.
* -r. ,
- ‘
'■C ’est*done umactc informe qit’on .présente comme, un
titre. : ■’ ■ ' ( ■. i
îTjfil'v ■ v )j ' >
..
Hélène Dubois assure-qu’après le- décès de. M argue
rite M ercie r, elle a recueilli sans -obstacle sa succession.
O n ignore ce qui s’est passé à !cét égard; vrai ou-Sup
posé, le -fait est indifférent. .
,: •
Marguerite Mercier est. décédée en 1an 8 , postérieuremént aU& nouvelles lois quii:ont accordé aux 'eiifans
naturels les-mêmes avantagés qu’à ceux-, nés d’une union
lé g itim e ? d’après ces lois, Hélène Dubois a pu recueillir
.
sa succesion. Maig^ànquel titre ?: comme illégitime.
.
• P o u r être (autoriséèfjà»;s’eri "mettre' en posspsgion, elle
n’avoit à prouver qutttneictyoée.'; .quelle étoit- fille de
Marguerite" Merbier : •la loi ne l’appéloit pas seulement
comme légitime; elle l’appeloit encore.comme illégitime.
Mais ici elle a à prouver , et que Marguerite M ercier -lui
a donné -le jour, et que Jèan-Pierre Carraüd est le père;
elle a ¿i p ro u v e r, et la m aternité, et la'paternité. '
Si Hélène Dubois étoit née pendant le m ariage, la
preuve de la maternité emporteroit celle de la pater
nité ; l’une seroit la conséquence d e .l'a u tre , d’après la
maxime paler est queni ju.stœ nvqitiœ demonslrani j
maxime fondée sur riionnêtcté publique et sur la dignité
du mariage; maxime admise non seulement chez les R o
mains , mais chez tous les peuples.
Mais Hélène Dubois n’est pas née pendant le mariage;
elle est née avant : et alors la preuve du premier fait
n établit pas le second.
�S lÿs) ,
U n cas est Lien différent de l’autre. L ’enfant naît-il
pendant le mariage? le mari est de droit réputé le père;
la femme mariée ne peut pas'être mère sans que le mari
•soit le père.
>■*., ' ■. h
Mais hors le m ariage, il faut d’autres preuves pour
déférer la paternité. Marguerite Mercier auroit pu être
m è r e , et Jean-Pierre .Carraud n’être pas le père.
.
.
-Dans la circonstance o ù ’ l’enfant est né pendant le
■mariage, tout ^se réduite à un seul p o in t, «« fiiit de la
naissance. L e f a i t d c i a naissance établit, et la mater
n ité, et la paternité. Il n’en est pas de même de la cir
constance où l’enfant est né hors le mariage ; la mater
nité peut être établie sans que la paternité le soit. ' ■
Si on se fixe sur les anciennes lois, la déclaration de
Marguerite Mercier ne peut être d’aucun effet, ni pour
la succession du père, ni pour celle de la mère.
.. Si on se fixe sur les nouvelles lois, Marguerite M e r
cier aura p u , si l’on veut, donner un titre et un droit
à sa succession. Mais a-t-elle pu donner un titre et un
droit à la succession de Jean-Pierre Carraud, et des pa
rens de Jean-Pierre Carraud? non sans doute.
‘
S e c o n d e
q u e s t i o n
.
Hélène D ubois peut-elle être admise ci la preuve testimoniale. ?
■■
’
Il est des arrêts qui ont autorisé cette preuve. Mais si
l’on a pensé que la preuve testimoniale ne devoit pas
être interdite dans tous les cas, on a pensé aussi quelle
�f 16)
ne devoit être reçue qu’avec beaucoup de peine et de
circonspection; qu’on ne devoit pas légèrement faire dé
pendre la destinée d’une famille, son repos, sa sûreté,
de la déposition de témoins passionnés, surpris ou çoi>
.
rompus.
• L a loi. 2 au code de testibus , en a une disposition pré
cise..Telle est l’espèce de cette loi. Un affranchi prétendoit
être né libre et dans l’état d’ingénuité. Que répond ¡’em
pereur ? defende causcim tuairi instrumentis et argumentis quibus potes ; soli enini testes' ad ingenuitàtis
probationem non siifficiunt.
•
L ’auteur de la consultation en faveur d’Iiélène Dubois
répond singulièrement à cette loi ; il cite la note de Denis
Godefroi. Et que dit cette note? elle dit que ce m ot, s o li,
doit s’entendre, non solummodo. N e dites p a s ,' c’est ainsi
que l’auteur de la consultation fait pai’ler Denis Godefroy,
ne dites pas que la preuve de l’ingénuité ne peut être
faite que par témoins. Ce n’est là ni le sens ni l’esprit de la
loi : dites plutôt avec elle , que la preuve testimoniale n’est
pas la seule qui soit décisive , non solummodo ; mais que
tout autre genre de preuve aura la même autorité, pourvu
qu’il conduise à connoître la vérité.
Mais qui a jamais douté qu’à la preuve testimoniale, on
ne pût joindre la preuve résultante des actes ?
\ oilà , certes, line grande vérité que Godcfroy a mise
an jour ! Il valoit bien la peine de faire une note expresse,
pour apprendre ce que personne n’a jamais imaginé de ré
voquer en doute,
Accurse , Bartole , Paul de Castres, que l’autour de la
consultation cite égalem ent, n’ont fait que copier la note
de
�.
_ ( r7 )
p
de Denis Godefroy. Us disent comme lu i, que la preuve
testimoniale n’exclut pas les autres ; ce que personne ,
encore une fois , n’a mis en problème.
Mais ce n’est pas là la question. Il ne s’agit pas de savoir
si la preuve testimoniale peut marcher avec les autres
preuves; mais si elle peut être admise , sans le concours
d’autre preuve, ou commencement de preuve; ce qui est
bien différent.
L ’auteur de la consultation cite d ’A g u essea u 7 fils de l’il
lustre chancelier, ¿«na sou plaidoyer lors de l’arrêt de
Tocqueli«^
A v a n t d’en venir au fils nous citerons d’abord le père,
rimmortel d’Aguesseau lui - même. On ne dira pas, sans
.doute, que ce savant magistrat n’a pas entendu le texte de
la loi ; voici comme il s’exprim e dans la cause d’Henriette
d’A v r i l , se prétendant fille de Pierre d’A v ril et d’A nne
de L a va l, rapportée au second volum e de ses œuvres.
-■il « .Quand il.s’agit de prouver la naissance, permettra-t-on
» à une partie, sans in dice, sans présomption , sans commenceinent de preuve par écrit, de faire entendre des
■
» témoins pour déposer en sa faveur? C ’est un doute qui
» est éclairci par la loi 2 au code de testibus, »
^‘ Il rappelle les termes de cette loi et il continue : « Voilà
» donc trois sortes de preuves’que l’empereur distingue
•» i dans les questions d’état ; les actes, les présomptions, les
» témoins : il décide nettement que les témoins seuls ne
* peuvent pas suiïïi*e pour faire une preuve certaine; il
» faut nécessairement que les dépositions de témoins soient
» soutenues ou par la foi des actes ou par la force des pré
» somptions j et par là on concilie l’intérêt public avec
C
�.
.
.
ç 18 }
. .
celui des particuliers. L ’utilité publique est satisfaite en
ce qu’on n’admet pas légèrement la preuve par témoins,
et les particuliers ne sauroient se p laindre, puisqu’on ne
les réduit pas à l’impossibilité de prouver leur état, lors
que les actes qui ne peuvent l’établir sont perdus. Telle
est la disposition du droit civ il, à laquelle nous ne voyons
pas que les ordonnances, qui sont notre d ro it, aient
dérogé. »
L e iils de cet illustré m agistrat, invoqué par l’auteur de
la consultation, ne s’est pas expliqué différemment lors de
»
»
»
»
»
»
•»
»
l’arrêt de Tocquelin. Il rapproche les divers textes des lois
civiles et les ordonnances : il établit que la preuve qui sc
tire des actes n’est pas la seule preuve légitim e de l’état;
que, ni le droit c iv il, ni les ordonnances, n’interdisent au
juge de chercher une autre route pour parvenir à la connoissance de la v é r ité ; qu’il ne lui est pas interdit d’ad
mettre la preuve testimoniale; mais que la loi l’avertit en
m êm e temps de ne l’admettre qu’avec la plus grande cir
conspection et la plus mûre réflexion.
Il ajoute : « Les arrêts qui paroissent opposés entre eux
x> sur de pareilles contestations, peuvent se réunir pour
» l’établissement de la m ême maxime ; et ils prouvent
» tous que la preuve par témoins peut être adm ise, mais
» qu’elle ne doit l’être qu’avec une extrême réserve. Les
»
»
»
»
»
*
mis font voir ce que le juge peut fa ire , lorsque les circonstances l’exigent absolument ; les autres, ce que la
sagesse lui fait faire, lorsqu’elles 11e peuvent pas balancer
la juste appréhension qu’il y a de renverser l’ordre d'une
fa m ille, en y faisant entrer line personne qu’elle regarde
t-ounne étrangère. >1
�C 19 )
Que fa u t-il pour que les juges puissent admettre la
preuve testimoniale, sans cette juste appréhension ?
L a loi le dit : instrumenta , les actes ; il faut q u ’il y ait
au moins un commencement de preuve par écrit.
A rgum enta , les présomptions.
C ’est surtout, lorsque l’enfant qui réclame n’a pas en
sa faveur la possession d’état, lorsqu’il demande à acquérir
un titre n ouveau, un titre dont il n’a jamais j o u i, que la
preuve doit être admise difficilement. C'est alors qu’il n’ est
pas permis aux juges de s’érax^c de la disposition de la l o i,
des conditio«»' imposées par la loi : defende^causam tuani
argumentis et instrumentis .
- O u celui qui réclame a la possession, ou il réclame un
état dont il n’a jamais joui. A u premier cas, il n’a presque
pas besoin de prouver; il lui suffit presque de dire, comme
dans les matières communes, possideo quia possideo.
A u second cas, dit Cochin , celui qui réclame un état
dont il n’a jamais joui, trouvant le même obstacle dans la
possession , ne peut réussir dans son entreprise, s’il n’a en
sa fa veu r, ou des actes, ou des présomptions très-fortes !
Il n'est personne qui ne se pénètre, et de l'importance,
et de la nécessité de cette distinction.
Que seroit-ce, si la possession étoit même contraire!
Enfin il faut que les faits soient pertinens.
P rem ière
c o n d i t i o n
.
Commencement de preuve par écrit.
Y a-t-il ici le moindre acte du fait de Jean-Pierre Car-
C 2
�^
raud , dont on puisse induire un commencement de preuve
par écrit ?
Si Jea n -P ierre Carraud avoit dû reconnoître Hélène
Dubois pour sa fille, c’étoit principalement au moment où
il s'est marié avec Marguerite Mercier ; c’ étoit le moment
.
.
(
d’assurer son état.
Il n’en est fait m en tion , ni dans le contrat de mariage ,
ni dans aucun autre acte.
M ôm e silence pendant toute la durée du m ariage, et de
la part du p è r e , et de la part de la mère. '
L e i l mai 1779 , et la veille du mariage 'd’Hélène
D u b o is , un fondé de p o u v o ir , ou soi-disant fondé de pou
v o ir de Jean-Pierre Carraud, lui vend une portion d’hé
ritage, moyennant la somme de 700 francs. On argumente
de cette circonstance. Mais que signifie cette vente ? ren
ferme-t-elle le moindre indice que Jean-Pierre Carraud
ait reconnu q u ’Hélène Dubois étoit sa fille ? Bien loin
quTIélène Dubois puisse se faire un moyen de cet acte, on
le lui opposera à elle-même. Comm ent y est-elle qualifiée?
prend-elle le nom de Carraud ? Elle y prend le nom ÜH é
lène D ubois. Dans le contrat de mariage du lendemain ,
elle prend le même nom.
Cet acte prouve donc contre elle ; ou du moins ne
prouve pas pour.
On n’en produit point d’autre.
L a déclaration de Marguerite Mercier ! Cette déclaration
peut-elle même être proposée comme un commencement
de prouve par écrit?
i«. T o u t commencement de preuve par écrit doit être
du lait m êm e de celui à qui ou l’oppose.
�.
.
t 21 ï
Ensuite, il faudroit au moins que cette déclaration ne
fût pas combattue par des aveux contraires ; que M argue
rite Mjercicr ne fût pas en opposition avec elle-même.
Dans la requête du 27 janvier 1 7 8 3 , après le décès de
Jean-Pierre Carraud, elle a déclaré en termes exprès, que
Jean-Louis Carraud d’Urbise éfcoit seul habile ci lui suc
céder. Sur la répudiation de celui-ci, il a été nommé un
curateur à la succession vacante, et elle a dirigé toute sa
procédure contre ce curateur. N ’est-ce pas là la déclaration
la plus form elle, quelle ne reconnoissolt poi«t H élène
Dubois p o u r > Æ1Ie ^ Jean-Pierre C arraud, légitimée
le mariage subséquent ?
par
Hélène Dubois dit avoir la déclaration de Marguerite
Mercier en sa faveur. L a déclaration est contraire. Dans l’arrêt cité plus h a u t, la déclaration du père, d’un
magistrat du parlement , non seulement ne servit point de
preuve , mais même de commencement de preuve par
écrit ; et dans cette espèce le père n’étoit point en contra
diction avec lui-inême ; il n’avoit point donné deux décla
rations opposées.
. V o ici deux autres arrêts plus récens, qui ont jugé con
form ém ent aux mêmes principes.
L e premier a été rendu au parlement de Paris, sur
délibéré, le 23 mai 1765.
Par cet a rrê t, le sieur de Rougcm ont et la veuve Hatte
qui s’étoit réunie à lui , furent déclarés non-recevables
dans leurs demandes; et il fut fait défense au sieur de
Rougem ont de prendi’e le nom de Hatte.
Dans cette espèce, la maternité ,(et le sieur de Rougemont
étant nê pendant le mariage, la maternité faisoit preuve
�.
#
.
( 22 )
p
.
de la paternité), étoit établie par l’éducation fournie aux
dépens de ladite Hatte. Elle étoit attestée par la déclara
tion de la mère qui offroit de la faire judiciairement ; elle
étoit avouée, ce qu’il y avoit de plus particulier, par pres
que tous les parens paternels dont on rapportoit nombre
de lettres qui contenoient la reconnoissance la plus formelle;
il articuloit trente-huit faits dont il demandoit subsidiaireinent ù faire preuve. Par l’a r r ê t, la preuve fut rejetée.
.Voici les réflexions de l’arrétiste.
« L e sieur Rougem ont n’a v o it, d it-il, ni acte baptis>3 taire conforme à l’état qu’il réclam oit, ni aucune pos>3 session du même état. Il avoit titre et possession d'un
» état contraire ; déclaration tardive de la dame H atte
» au bout de quarante-quatre ans ' silence -perpétuel
» pendant plus de quarante ans que son m ari avoit sur53 vécu ¿1 la naissance du sieur Rougemont. Nulle date
» certaine, nulle preuve de l’aveu de la maternité qui lui
» avoit été fait; aveu fait, suivant lui-m êm e, au bout de
>3 trente-sept ans de silence ; silence dans les premiers
» momens de la mort du sieur H u tte , et au moment
» du partage de sa succession ,• reconnoissance de la
» dame H atte, tant avant qu’après le décès du m a r i,
» qu il Tt étoit issu de son mariage que deux jilles. Ce
» sont les motifs qui déterminèrent les juges. »
Est-il un arrêt dont les circonstances se rapprochent
davantage de l’espèce actuelle?
L e second est du parlement de Toulouse.
L e 3 juin 17 3 2 , une fille est baptisée sous le nom de
Jeanne-Gabriclle, Cille de père et mère inconnus. Lorscpi il
est question de régler la succession du c o m t e d e Sainton ,
�t
,2 3
)
qiii avoit pour fils, seul et unique h é ritie r, l’abbé de
Sainton, Jeanne-Gabrielle prétendit être fille légitim e des
sieur et dame de Sainton.
L e 28 janvier 176 5 , elle demande à partager la suc
cession, par m o itié , avec l’abbé de Sainton, qu’elle dit
être son frère.
'
P o u r constater l’état qu’elle vouloit s’attribuer, elle
articule et offre de prouver devant le sénéchal de Toulouse :
Que vers la fin de 173 1 , la dame de Sainio», quoique
séparée de son
¿toit devenue enceinte;
Q u ’avant et pendant sa grossesse, le sieur de Sainton
son m ari, lui rendoit de fréquentes visites, qu’il mangeoit
.chez elle , et y faisoit sa partiè;
Que le 30 mai 1732, la comtesse de Sainton étoit accou
chée d’une fille, dans, sa maison , rue V eïa n n e, qu’elle
avoit donné ordre ùraccouchèur de faire baptiser Fenfanta
sous le nomade père et mère in conn us , de lui faire
donner les noms de Jeanne-Gabrielle C l o t j l h e .
■ Que l’accoucheur avoit i-emis cet enfant à Jeanne-M arîe
-Loubert, femme de Laurent B ou cé, habitant de la paroisse
de Saint-M ichel de Tou lou se,-qui la fit baptiser sous le
•nom de père et mère inconnus.?.. . ■
Que la dame de Sainton avoit-payé sept mois de nour-rice, pension, et fourni «tout ce qui lüL étoit; nécessaire
jusqu’en 1743 , que la dame de Sainton, devenue vjouve!,
l’avoit retirée auprès d'elle, lui avoit apprisqu,’elle ¿toit
sa fille; que depuis elle étoit restée dans la maison, au
milieu delà famille, appelant la dame de Sain ton sa m am an ?
et'celle-ci la nommant sa\fdl&., /
; 'i ; !
Jeanne-Gabrielle rappbrtoit,au soutien dedix-septfaits.
�I h ) ............................................................
quelle articuloit, un acte extrajudiciaire du 29 janvier
1 7 6 5 , dans lequel la dame de Sainton convenoitde tous
les faits articulés;
■
- Les déclarations' données devant le notaire, par un
ancien chirurgien-accoucheur et par sa fille ;
l/n testament mystique fait en 1 7 6 2 , par la dame de
Sainton, dans lequel elle reconnoît Jeanne - Gabrielle
•pour s a jille , et lui léguoit sa légiLime et son mobilier;
D ix -h u it lettres de parens et amis, entr’autres, trois
de l’abbé de Sainton lui-m êm e, à la dame sa m ère, datée
de 176 4, où l’on parloit de Jeanne-Gabrielle, comme d ’un
enfant des sieur et dame de Sainton.
Sentence du sénéchal de T o u lo u se, qui permet la
preuve des faits articulés.
' ' , ,
Appel. A r rê t du parlement du. 11 mars 1766, qui in
firme la sentence, et fait défense à Jeanne-Gabrielle de
prendre le nom de Sainton , sous les peines de droit.
Jeanne - Gabrielle se pourvoit en cassation. Pendant
l’instruction, le comte de Betout contracte mariage avec
elle : et p o u r'd o n n er plus de consistance a la réclama
tion contre l’arrêt, ils) produisent dix nouvelles lettres
et une déclaration devant notaires, concernant la nais
sance et l’éducation privée de Jeanne G abrielle , et comme
îformarifciüne suite de preuves de l’ état qu’elle s’attrii>uoit. *’!
'
r ’
. ’ T je'23 juillet¡1 7 7 1 , là danie de Sainton fait devant
notaire les mêmes déclarations que celles consignées dans
son acte extra judiciaire.
•
>
’
Elle fait plus, elle intei’-vient daiis l’instance an conseil,
forme un incident en suppression de la requête impri
mée
.
�( 25 )
^
ïnée par l’abbé de Sainton, comme lui étant injurieuse,
et réitère les déclarations précédemment faites en faveur
de Jeanne, Gabrieïïe.
L a dame de Sainton est déboutée de sa demande.
Enfin, arrêt du conseil du 8 août 1 7 7 2 , qui déboute
le comte et la comtesse de Betout ( Jeanne-Gabrielle ),
de leur demande en cassation.: J
.
Dans 1’un- ek^dans l’autre 7 o o a
la déclaration
de la
malgré divers adminicules, n’a point été
re g a rd é e même comme un commencement de preuve.
Ici il y a un moyen de plus. L a déclaration de M ar
guerite Mercier a été faite en un temps où la loi l’in
terdisoit, même pour alimens; elle est donc nulle : et si
elle est nulle, quel effet peut-elle produire?
S e c o n d e
, 'V
‘
’r
'1
c o n d i t i o n
Précomptions."
:• - . .
’
.
••
i. '
,
' • .! ;J.’’
■ \x . <
A défaut de commencement de preuve par écrit,
Hélène Dubois a-t-elle au moins les présomptions en sa
faveur, argumenta? Mais ici, au contraire, toutes les
présomptions ne militent-elles pas contre elle ? '
A qui persuadera-t-on, si Hélène Dubois avoit été
effectivement la fille de Marguerite Mercier et de Jean
Pierre Carraud, qu’ils ne se fussent point empressés de
la reconnoître lors du mariage.
• '
Hélène Dubois expose elle-même, dans la consultation
im prim ée, que les deux fa m illes engagèrent Carraud
à se marier avec Marguerite M ercier j c’étoit donc
D
�( 26)
ru,
pour donner un état à l’enfant ; et il n’eil est point
question!
P ar le contrat de mariage, M arguerite Mercier donne
tous ses biens à son m a r i, en cas de survie : cette do
nation n’est* elle pas une preuve directe du contraire de
ce qu’on avance?
'
i , e mariage dure trente ans ; point d’enfans de ce
m ariage; et le père et la mère
, et paroissent ne s’accorder, qu’à ne pas reconnoitre celui provenu
avant le mariage , celui à qui la nature et la religion
leur faüsoient également un devoir d’assurer l’état.
Jean - Pierre Carraud meurt. Carraud d’U rb is e , son
frè re , répudie sa succession : sur cette répudiation, un
curateur est nommé à la succession vacante. L a veuve
poursuit contre ce curateur, et la liquidation de scs re
prises, et la vente du m obilier, et la vente judiciaire
des immeubles.
Elle n’avoit, diva-t-on, aucun intérêt à déclarer l’état
de sa fille : Jean-Pierre Carraud laissoit une succession
obérée. Mais n’y avoit-elle pas in térêt, au moins pour
la validité des poursuites et de la saisie réelle qu’elle
poursuivoit ?
Mais Carraud-d’Urbise meurt à son tour; voilà une
succession opulente, et elle continue à garder le silence.
Elle se détermine enfin à la reconnoitre. Après cette
rcconnoissance , il semble qu’elle auroit dû s’empresser
de la recevoir dans sa maison, de l’investir en quelque
sorte de son état : elle ne l’a vu e, ni avant, ni après.
Enfin, dans ses dernières dispositions elle l’oublie en
tièrement.
�.
(
2
7
^
.
Toutes les circonstances ne se réunissent-elles pas pour
démontrer que la déclaration dont on veut se faire
■un titre,, n’est que l’eifet de la surprise ; qu’elle n’est
rien moins qu’un hommage rendu par Marguerite M er
cier , à la vérité.
.
'
Hélène Dubois n’est donc pas dans le second cas de
la loi.
,‘
T a o - I S l È M B
ÇON.Dia-xoW.
»■
Possession d'état.
■
!
'
A-t-elle cette possession? Qu’est-ce que la possession
cl’état? .c’est le rapport des parens entr’e u x ; c’est le rap
port sous lequel l’enfant quitréclame a été considéré, ou
reçu dans la famille; lorqu’il a'co n n u un tel pour son .,
p è r e , une telle pour sa mèi*e , celui-ci pour son f r è r e ,
ceux-là pour ses cousins, et qu’il a été reconnu par eux.
Anciennem ent, dit C o c h in , et avant qu’on eût ima
giné la formation de registres publics, la possession étoit
la seule preuve de la naissance . C’était par cette pos
session , par cette dénomination réciproque de père, de
fils, de frère, de cousin, que'les hommes se connoissoient.
- ■
1
.Hélène Dubois peut - elle invoquer cette possession ?
A-t-elle jamais été connue dans. la; famille Carraud, pour
iille de.iJean-Pierre Carraud?
‘
L o in d’avoir la possession, elle a la possession con
traire.
*
Elle demande ¿1 prouver qu’elle est fille de Marguerite
Mercier, et de Jean*Pierue Carraud. E t dans la vente
‘
D *
'
•
"
�.
.
.
.
.
d u - i l im i 1 7 7 9 , dont' elle a cru pouvoir se'faire tin
moyen ; dans le contrat de mariage du lendemain, elle
s’est qualifiée du nom d’Hélène Dubois. Elle demanderoit donc à prouver contre ses propres titres , contre *
les titres qu’elle a produits, contre la possession, qu'elle
est C arraud , et non D ubois.
.
L e jurisconsulte, auteur de la consultation imprimée,
a voulu aller au-devant de cette objection.La réclamante,
dit-il, est qualifiée dans son contrat de mariage Hélène
D u b o is ; mais cette qualification ne peut faire preuve
d’une possession contraire ; on n’y a désigné ni le père
ni là mère. Ce nom d’ailleurs n'est point étranger à Jean
Pierre C arraud ; il a été pris dans sa famille m i m e ,
puisque c’est le vrai nom de la veuve Soubrany, qui
après la mort de Garraud-d'Urbise, s'est présentée pour
être "son héritière.
. Il faut convenir que c’est une singulière raison. L e
p è re'n ’est point désigné! Mais qu’est-ce donc que le nom
D u b ois ? c’est un nom de la famille de la veuve Sou
brany, parente des Carraud; et parce que c’est le nom d’un
parent, ou d’un parent des parens Carraud, il s’ensuit qu’il
faut l’attribuer à Carraud ! Ne suit-il pas au contraire que
le parent dont elle porte le nom est aussi le pere ?
V o ilà le mystère éclairci! L e père n’est point incer
tain. C ’est un Dubois ; et effectivement il existoit dans
ce temps, dans cette même commune de iliom , un D u
bois , olïicier.
Que devient maintenant la prétention d’Hélène D u~
bois ?
Dem ander j disoit Cochin ; dans la cause de la dame
�(C a # T
B'ruix^ii conquérir par là preuve par témoin un état
nouveau , non seulement^ sans possession , m ais lors
qu'on a un état.-et..une possession contraires ,■n est-ce
pas le comble de Vaveuglement^ . r i
viio-! ' ü
•
'v.. . iifi:■A)'i -■ 3 '
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''
:
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: Q u A T ' R Î È ME - - C O N D I T I O N .
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■. >’ . Pertinence des faits.
'
:
; - ^
run;-: ¡:;0 CTr
—•
'
- Hélène D>’W s ^demande à prouver premièrement
qu’il esc notoire dans la commune de R i o m , quelle a tou
jours passé pour être née du commerce de J e a n -P ie rre
Carraud avec Marguerite M e rcie r, avant le mariage.
O n le demande.-Si le'fait ayoit été si n o toire, Jean
Louis Carraud se seroit -• il présenté après la m ort de son
frè re ,n o n pour accepter, mais pour répudier une succes
sion à.laquelle il n’auroit eu aucun droit? fa u t- il d’autre
preuve que ce fait si public étoit ignoré de la famille m êm e,
et des plus proches de la famille ?. auroit-on sur la répu
diation du frère , nomm é u n curateur à la succession va
cante? au ro it-o n poursuivi sur ce curateur la vente des
meubles et des immeubles ?
L e premier fait est dorïc démenti par écrit, par les
pièces de la procédure, par les jugemens existans au greffe.
Les autres faits sont insignifians.
Les bienfaits, les soins, les faits d’éducation et de libé
*
.
ralité, ce que les docteurs appellent tractatus eteducatio ,
ne sont pas seuls une preuve de filiation. Comme on peut
aim er, dit encore C o ch in , dans la même cause contre la
dame de Bruix ? comme on peut éle v e r, gratifier un en-
�c 3° y
. .
fa n t, sans lui avoir donné le jour , la preuve de ces faits
est entièrement mutile quand il s’agit de prouver la filia
tion. Ces faits, ajoute-t-il, ne sont importans que quand il
s’agit de prouver Tidentité.
Ici, il ne s’agit point de l’identité. L e citoyen Juge ne
contestera p as, si l’on v e u t , qu’ïïé lè n e Dubois ne soit la
m êm e que celle qui est née de Marguerite Mercier avant
le mariage ; mais il désavoue , il soutient du moins qu’il
n’est pas constant,que Jean-Pierre Carraud ait été le père;
c’est la filiation qu’il s’a g it'd ’établir ; et pour prouver la
filiation , les faits seuls d’éducation et de libéralité ne suf
fisent pas.
Menochius dans son traité, des présomptions exige trois
circonstances : la p rem ière, que. l ’enfant ait été élevé dans
la m a iso n , et qu’il ait été traité comme tel par les père et
m ère ; la seconde , que les--père et mère l’aient souvent
nommé et appelé leur fils; la troisième, que l’enfant ait
été connu et traité dans le public comme l’enfant des père
et mère qu'il s’attribue: Sic à pâtre habitum fu is s e - sic
ab eo sœpius nomination et appellation ,• sic ab omni
bus com m unij'am u et voce habitum et creditum.
Il faut que les bienfaits, le traitement ne puissent sc
rapporter qu’à la paternité , et non à un sentiment de
bienfaisance. N on pronedit , dit encore Menochius , con
jecturafdiallonis quœ co tracta tu eteducatione provenit ,
quando is iractatus servare points in causa/n pielalis
quant fdiationis , ut pote in eo q u i simpliciter alimenta
prœ stitil ,• est ratio quia alimenta, quœ in altéram c#11'
s<*m quant Jilialionis prœ slari potuerunt} non ojjvrunt
concUalanlcm probalioneni,
�( 3i )
' Que faut-il polir que les soins se réfèrènt à la paternité?
les auteurs encore üous l’apprennent. Il faut que l’enfant;
non seulement ait-été élevé , mais qu’il l’ait été propor
tionellement à l’état d’enfant légitime de celui qui l’a élevé.
S’il n’a été dans la maison qu’à titre de domesticité, on
n’en peut rien conclure pour la filiation.
Helene Dubois ne sait ni lire ni écrire j elle a t o u jo u r s
gardé les bestiaux
? eE n’a tout au plus été re
gardée qu*> comme domestique et fille de peine.
La loi du 12 b ru m a ire , si favorable aux enfans illégiti
mes, 11 a point dérogé a ces principes; elle les a au contraire
consacres : quand elle parle de soms donnés , elle ajoute x
à titre de paternité.
' Quels sont les faits articulés par Hélène Dubois ?
Articule-t-elle avoir été élevée dans la maison même'
de Carraud ?
A rtic u le -t-e lle que Carraud et Marguerite Mercier
l’aient jamais appelée leur fille ?
Articule-t-elle que les voisins l’aient jamais appelée du
nom de Carraud , et traitée comme là fille de Carraud ?
O n l’appeloitau contraire D ubois; elle-même ne s’est point
donnée d’autre nom ; elle expose elle-m êm e qu’elle n’a
connu son état que par la déclaration de la mère en l’an 2.
Elle a été élevée chez le m étayer; mais à quel titre?
comme les autres domestiques. Que suit-il de là ?
Carraud s’est entremis de son mariage! la vente de 1779
est une libéralité déguisée ! Quand tous ces faits seroient
vrais , en résulteroit-il une preuve de filiation? il en résulteroit au plus, une preuve de bienveillance.
Le quatrième fait, que Carraud a avoué ¿1 plusieurs
�•
_
ï 33 >
__
personnes qu’il étoit.Je père', est encore plus insignifiant.
Quoi ! .la déclaration écrite et judiciaire du p è r e , n’a pu
servir de preuve, ni de commencement de preuve ; et l’on
admettroit la preuve par témoins d’un aveu verbal !
L e p è re , dit-on, a avoué à tout le inonde qu’Hélène
Dubois étoit sa fille. Il vient lui-même à Reyvialle pour
régler les conditions du mariage. II donne la dot. Ce q u i ,
ajoute-t-on , f u t connu de toutes les personnes qu i s'en
tremirent du mariage. E t il ne paroît point au contrat
qui se passe le lendemain ! Marguerite M ercier auroit dû
également s y rendre ; et elle n’y vient point ! et après ,
comme ayant, ni le père ni la mère ne lui donnent aucun
signe quils la regardent comme leur fille !
A u inoinsauroit-il fallu construire une fable vraisemblable?
A u défaut de commencement de preuve par é c r it, au
défaut de présomptions, au défaut de la possession, se joint
rinsullisance des faits. En faudroit-.il davantage pour
faire rejeter la p re u ve, quand même Hélène Dubois seroit née pendant le mariage?
L ’auteur de la consultation cite l’arrêt de T ocqu elin , de
la demoiselle de Choiseul, de la demoiselle Ferrand; mais
Hélène Dubois se rencontre-t-elle dans la même espèce?
L a demoiselle Ferrand a été admise à la preuve; mais
elle avoit dans les registres de la paroisse de Saint-Sulpice ,
et dans le procès verbal fait le meme jour, à la requête du
président Ferrand son père,un e preuve légale, une preuve
d’ordonnance de sa naissance, et de l'accouchement de la
r
présidente F erra n d , soutenue p a rla reconnoissance prL’~
ci se du la présidente Ferrand. La demoiselle icrra n d étoit
née pendant lo mariage même ; la naissance étant établie
par
�( 33 )
>
par les preuves écrites les plus authentiques, la paternité
étoit également constante, d’après la maxime , yater est.
On pülit vérifier ces circonstances dans Cochin, qui rap
porte cet arrêt.
.
Dans celui de T o c q u e lin , l’acte de baptême contenoit
une énonciation démontrée fausse; 011 l’avoit baptisée sous
le non de L ouise D u fe u , de la paroisse de Saint-Dénis
d’A n jo u , et il étoit établi a » * i ï - y «volt Jamais eu d eL o u ise
D u feu dar>c cette Par° isse* L ’acte de baptême contenoit
don« la preuve d’un d élit, la preuve d’un dessein marqué
de cacher au public la naissance de l’enfant. L e père avoit
fait les premières démarches pour donner l’état à sa fille ;
enfin il y avoit des comrnencemens de preuves par écrit.
L a demoiselle de Choiseul joignoit à des commencetnens de preuves par écrit, non une simple déclaration de
l’accoucheur, qui auroitpu paroître avoir été donnée pour
le besoin de la cause, comme dans l’espèce de l’arrêt du
président de T o u lo u se, cité plus haut; mais le livre-journal
de l’accoucheur, mort huit ans avant la contestation ,*
journal où il écrivoit, jour par jour, les opérations de son
a r t , et où il rendoit compte, dans le plus grand détail,
de l’accouchement de la demoiselle de Choiseul. Ce journal
étoit une espèce de monument authentique de la naissance.
' Mais sans entrer dans les circonstances particulières de
ces arrêts, qu’ont-ils ordonné? L a preuve de la maternité.
Soit la demoiselle de Choiseul, soit la demoiselle T o c queiin , étant nées pendant le m ariage, il n’y avoit à
établir que le fait de la naissance; la loi désignoit, démoniroil le père.
fait
Le
de la naissance çst un fait extérieur , un
E
faitsen-
�C
34 )
'
p
sible, un fait du ressort des y e u x , dont les témoins peu
vent déposer avec certitude.
Mais Hélène Dubois est dans une espèce tout#autre.
Elle ne demande pas à prouver la maternité : nous avoue
rons,. si l’on v e u t, que la maternité est constante; la mère
est co nn u e, c’est Marguerite Mercier : mais Hélène Dubois
demande à prouver la 'paternité.
L a preuve du premier fait, peut être certaine, mais non
la preuve du second.
E t de là la différence extrême entre l’espèce où elle se
ren co n tre, et l’espèce des arrêts qu’elle invoque ; ce qui
seul écarteroit toutes les inductions qu’elle veut en tirer.
Lorsque l’enfant est né pendant le mariage, la loi dé
cid e, la loi prononce, que le mari est le père.
A l’égard des enfans nés hors le mariage, qui sont,
pour nous servir de l’expression de la l o i, vu/go concepti ,
la paternité est toujours flottante.
V in g t témoins déposeront du com m erce, de la liaison
d’une personne avec une autre 3 c’est une présom ption, et
non une preuve.
Des témoins déposeront de visu : ce n’est pas encore une
preuve certaine ; rien ne constate que la mère 71a pas eu
commerce nçec (Vautres.
Les témoignages ne peuvent opérer qu’une présomption..Ici i l y a une présomption plus forte; c’est celle fondée
sur la nature. On ne présumera jamais, si Jcan-Pierrc
Carraud avoit été le père, qu’il eût persisté trente ans, et
jusqu'au dernier m om ent, à ne pas reconnoîtrc l’enfant,
surtout n’ca ayant point d ’autres do son mariage.
Enfin [[ n'y a point, pour nous servir des expressions do
�C 35 )
>
.
d’Aguesseau, de rapport intime entre le fait de la naissance,
et le fait qu’on veut prouver, qu’un tel est l’auteur.
Dirart-on que la déclaration de la fille, et la preuve des
hantises et fréquentations, a toujours suffi, en pareil cas?
C ’est encore ici un abus, et une extension de principes.
Lorsqu’il ne s’est agi que des alimens de l’enfant, et les
bâtards dans l’ancien régime ne pouvoient prétendre autre
cliose , cette présomption suffisoitO n t r o u v e , B a s s e t , un arrêt par lequel plusieurs par
ticuliers , au nombre de quatre ou cinq, ayant connu une
jeune fille le même jour , furent condamnés solidairement
à se charger de l'enfant. L u i auroit-on donné cinq pères ?
L ’objet des magistrats, dit F o u rn el,d an s son traité de
la séduction , n’est pas de rencontrer nécessairement l’au
teur de la paternité naturelle ; mais seulement la possi
b ilité, pour assurer des alimens à l’enfant.
Mais pour prétendre à succéder, pour demander à dé- .
pouiller une famille déjà en possession des biens, il faut
outre chose que la possibilité; il faut la certitude. E s t
majoris momenti.
.
E t voilà pourquoi les nouvelles lois ayant admis les bâ
tards à succéder , ont supprimé les déclarations de pater
nité; et c’est ainsi qu’en saisissant toutes les conséquences
d’une lo i, on en admire la sagesse.
Ce n’est pas seulement dans la nouvelle loi qu’on trouve
cette distinction ; elle es t encore tracée dans les anciens usages.
L e mariage subséquent opère la légitimation. L ’ usage
étoit que lors de la célébration du mariage, on faisoit passer
les enfans sous le poêle. Cet usage ne subsiste plus ; mais
il eu résulte toujours la uçcessilé d’une recoonoissauce pu-
�.
( 3 5 ,
blique, authentique. La paternité est alors d’ une au tre
conséquence ; et il ne faut pas s'étonner si on exige alors
d’autres preuves.
Il ne reste qu’à répondre à un passage de P o th ie r, cité
par l’auteur de la consultation.
P o th ier rappelle l’usage de-faire passer les enfans sous
le poêle; il ajoute que cette cérémonie n'est pas néces
saire , lorsque les -parties contractantes les ont recon
nus pour leurs enfans , de quelque manière que ce so it,
soit avant , soit depuis le m ariage, et en un m ot , lorsque
les enfa n s peuvent, de quelque manière que ce so it, ju s
tifier leur état.
L ’auteur dit : Lorsque les parties contractantes les ont
reconnus. Il faut donc que l’un et l’autre les aient recon
nus. O r , i c i , Jean-Pierre Carraud a-t-il jamais reconnu?
L ’auteur ajoute : Lorsque ces enfans peuvent justifier
leur état, de quelque manière que ce soit. Cela veut dire
par écrit ou par témoins.
Il
résulte de là, si l'on v e u t , que la preuve testimo
niale n’est pas entièrement exclue; mais cela ne dit pas
qu’elle doive être admise indistinctement.
La prétention dH élène Dubois n’est donc que le fruit
d’une vaine imagination.
'
Les anciennes et les nouvelles lois concourent également
à la faire proscrire.
Par conseil, P A G E S - M E I M A C , anc. jurisc.
M I O C H E , avoué.
•A-R I O M , do l’imprimeric de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel, — A n 10
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Juge, Nicolas. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mioche
Subject
The topic of the resource
abandon d'enfant
fausse identité
captation d'héritage
possession d'état
Description
An account of the resource
Mémoire pour le citoyen Nicolas Juge, demandeur ; contre les héritiers de la dame Marguerite Dubois, épouse Soubrany, défendeurs ; et contre Hélène Dubois et Martin Valleix, son mari, aussi défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1752-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0248
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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abandon d'enfant
captation d'héritage
fausse identité
possession d'état
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47adc67ff277359d0e73dce0f09f1482
PDF Text
Text
M
É
M
O
P
O
I
U
R
R
P i e r r e B A R D , cultivateur , habitant
d ’A g n a t j
E
de l a com m une.
dem andeur et défendeur en tierce opposition } t
C
O
N
T
R
E
S A B Y , fils a Pierre y défendeur,
Et C a t h e r i n e S A B Y y et J e a n M A G A U D
J
e a n
,
■ tous cultivateurs, habitans du lieu de B a listr o u x , com
mune de C h am pagnat , demandeurs en tierce opposition ,
.A .P R È S qu’une affaire, volumîneusement instruite, a eu reçu sa décision!
par un ju g e m e n t souverain et en dernier ressort ; après que l ’on a eu
é p u isé , dans le cours de l ’instruction, tous les moyens qu'un esprit
in g é n ie u x peut imaginer pour se maintenir dans un bien qui né lu i
appartient p a s, et au moment où une preuve était sur le point d’être
o r d o n n é e , où une expérience par expert devenait indispensable, où Bard
q u i r éclamait l'un et l ’autre depuis plus de trois an s, pressait, sollicitait
une audience pour les faire ordonner, de nouveaux athlètes se sont
présentés sur la scène t ils viennent proposer à la justice de prononcer
une seconde fois sur les questions que le premier adversaire de Bard
avait mis au jo u r, et de changer à leur égard un mode de partage qui a
é té ordonné contre leurs frère et beau-frère; ils font même p lu s, il a
poussent leurs prétentions jusqu’à soutenir que Bard n ’a aucun droit
contre eux. Seront-ils plus heureux que celui qui a déjà succombé
dans tous les in c id c n s qu’il a élevés ? c’est ce qu’on ne croit pas.
Jean S a b y , fils de Pierre , qui en suivant le genre de défense em ployé
par c e lu i-c i, a toujours soutenu que Pierre Saby et A ntoinette Lachaud
n ’avaient laisses aucuns biens m eubles, et qu’à l’égard des immeuble»
A
'
�il n ’en connaissait que quatre , même que deux qui leur eussent appar
tenus et qui fussent sujet?, au partage ordonné par le jugement rendu
contre son p è re , qui a toujours persisté dans ce système malgré la
justification qui lui a été faite de plus de quarante titres d'acquisition,
toup translatifs de propriété en faveuif de P ie rre . S a b y , ' de la succession
duquel il s’agit, persisterart-il toujours dans sa prétention ï E t aujourd’hui
que des témoins ont été entendus , que l ’application de tous les titres
produis par Bard a été faite, ne rçconnaîtra-t-il pas que c’est injustement
qu’il a toujours prétendu qu’il n ’y avait que ' quatre , même que deux
héritages sujets au partage ! O ji croit bien qu’il ne s’avouera pas vaincu,
mais oii a laicertitude que la justice lui en fera un devoir , et qu’elle le
forcera à reconnaître cjue celui qui retient injustement le bien d ’autrui
est) tôt ou tard, oblige de cesser d’en jouir.
■
F A I T S
E T
P R O C É D U R E
.
D u mariage d’André Saby avec Jeanne V id a l, issurent qua^e enfans ^
Catherine, A ntoinette, Marguerite et Pierre Saby.
Antoinette et Marguerite furent légitimées ; ni elles., ni leurs descen
dons , ne sont pour rien dans la contestation.
. . . . . .
Catherine Saby fut mariée deux fois ; en premier lie u , avec. Antoine
Saby., et en second lieu , avec Antoine Bruliat, et lors de ses deux contrats
de mariage, des 8 novembre i G74 et 2o aoiit 16 8 7 , ellg fut instituée
héritière , par son père , de tous les biens dont il mourrait saisi et vêtu ,
à la charge de payer à ses frère et sœurs des légitimes qui furent fixées.
Marguerite Bruliat, fille et héritière d’A ntoine et de Catherine Saby;,
se maria avec Jean Ma,gau,d , çt de ce mariage issurent deux enfans,
Antoine, et Gabrielle Magaud.
•
; L e premier se maria avec Catherine S a b y , fille de N o ë l, et Gabrielle
¿ppusli Pierre Saby, fils de ce dernier : c’est ce qui est prouvé par un seul
Contrat de mariage du 25 janvier 1744.
Antoine Magaud a laissé deux enfans, A nne et Marie ; la première a
¿pousé Jean D ègeorge, la seçonde François Mestrc ; et lui-même étant
décédé , Catherine Saby, sa vçuve, a cçmvolé en secondes noces avec.
Jean Magaud; ces deux derniers sont les tiers opposans.
Pierre Saby, fils d’André, et frère de Calheriiïc Saby , se maria avec'
Antoinetti; Lachaud , et lors de son contrat de mariage, qui est du 16
février 1G94, il s’associa avec Antoinç Bruliat, son beau-frère, en tous
et un chacun leurs biens , meubles et immeubles pn'scns et à venir,
avec convention qu’en cas de dissolution de leur société. , tous leurs lien s
seraient partagés entre eux par égalité.
Cet Antoine Bruliat survçquit plusieurs années à celle société, et
pendant tout ce temps les associés firent des profits assez considérables;
nuis étant décédé , Catherine Saby, sa veuve, héritière instituée dTYndré,
�.
...
„
r
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Î
S
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•
.
.
■Sâby , 'ttùT né 'p as pouvoir ïnfêiïx faire quê de s'aresôcië? éllë-Jrhêmfe' avec
l'ie ïre Soby y feon frère, et pdir acte public ctu 3 jà’n viër 1706-; ils 'ihirêrlt
ën communaut é ünivérseile tous- leurs biens meublés et immeubles 'préSëns
gt à ven ir, uveb éó'nvèfitìóti expieés'e 'Çà’éri cas de partage, ’tous làùi^s '
biens acquêts et conquets seraient partagés par moitié et égale, portion. \
- Suivons' l â ’géiVéaldgië de "Pierre7 Saby et d’Antôiiiette L àch'àud;' ils
üohAère’n t le jour à trois erifans nótìiift'és Nô'ël , André è't Catherine Sâbÿ.
L ors dû contrat dò mariage de celle-ci avec Etienne RôuX', du; 8 jànviéV
^7 19» elle fut constituée par son p è re , à’ ùnë s'onimè de trois cénts
fran cs, ét N o ci Saby qui n’éiait point partie contractante, fu t institué
héritier général ut universel- die fottà’ les biens doni sôxl pèrè mbürrâït
saisi
• Q uelque 'temps après , et'l'é 1 " . février 172 5 , N o ë l Saby pïssà son
tontrat de màriaigè' avec Marie Curabet, et Pierre Saby , son père ,, y
paraissant, a}>pràüva ét ratifia l’institution d’héritier qu’il avait f^'ae Cji
sa fa v e u r , dans le contrat dé mariage dé Catherine Sabir ¿t de Pierre
■Houft, et consentit qu’elle sortit son p lein et entier effet. . ■
- André Saby së iriaria avec Marie Héritier ^
lors de , leur contrat
de mariage, du a'i février 17 3ÿ , _i l . ^ _CQ’TisfUûa lui-même ïrne' somme
ûe trois-cerit cinquante francs qu’il àVait par devers lui," et N o ël' § a b y .
son frère s’obligea de lui payer celle de deux cents francs pour ses droits
légitimaires dans lés biens'de ses pèrè ét mère.
1
• D e ce mariage issut Antoinette Saby, mère" du demandeur » laquelle sé
'maria avec André Bard.
.
.
, . .
- O n voit dans leur contrat de m ariage,, du^ 2 i. septembre 1749 ,. que
Marié H éritier, y prit e n ’ présence de toute sa fam ille, et notamment de
N o ë l Saby, son bèaü-frère, la' qualité de veuve d’André S a b y ç é .q u l
était un preuve cjiie celu i-ci, qui s’était absente depuis plusieurs années,
¿tait alors décédé ou qu’au moins toute la famille le croyait ainsi.
, .\'r
■ N oël Saby eut de son mariage, avec Marie C urabet, deux ,e n fa n s>
Catherine et P ierre, qui comme 011 l ’a déjà dit en parlant d e là <;lpscenr
darice de Catherine Saby, épousèrent Antoine et Guillaume Magaud. , , '
L eur contrat’de mariage du 2 4 janvier' 17 4 4 , prouve, que les quatre
parties contractantes furënt instituées héritières générales et .universelles
de tous les biéns dont leurs père et mère mourraient saisis et, vêtus.
E nfin, Piérre Saby, second du nom, a laissé _plusieurs enfans, mais
Jean Saby , son fils aîné et son héritier institué, est en possession de tous
ses biens, et lui seul est défendeûr dans la c a u s e ..............
.
1
‘ L e 20 rniars 178 6, Pierre Bard , forma contre Pierre Saby fils de
N o ël , la demande en partage dé tous les biens meubles, et immeubles
provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud , demande qui fut ad
jugée par sentence rendue en la ci-devant justice de la Motte , le 10'
juillet ‘ suivant;
'
A 2
�Cette sentence Rit attaquée par la voie de l'opposition presque aussi-«'
tôt qu’elle fut signifiée ; l ’affaire fut ensuite appointée en droit ; mais
par une autre sentence du 6 avril 1787 , Pierre Saby fut débouté de son
opposition, et il fut ordonné que la première sentence serait exécutée'
suivant sa forme et teneur.
C e dernier se pourvut bientôt après par appel contre ces deux sen
tences. L a sénéchaussée d’Auvergne connut de cet appel , et le 11 dé»
cembre de Ja même année , elle confirma ces deux sentences.
Il restait encore une autre dégré de juridiction à suivre : Pierre
Saby ne manqua pas d’y avoir recours , et par exploit du 28 du même
mois de décembre 1787 , l ’affaire fut portée au ci-devant Parlement de
Paris.
L ’état de détresse de Bard ne lui permit pas de poursuivre l ’arrêt
qui devait mettre fin à toutes les chicanes de Saby ; il était dans l'im
puissance absolue de • pouvoir fournir aux dépenses que nécessitait ce
procès , niais heureusement pour lui les choses ayant changées de face ,
de nouveaux tribunaux ayant été substitués aux anciens ; la justice ayant
été rapprochée des justiciables , l ’affaire fut portée, du consentement ex
près des parties , au ci-devant tribunal du district de Brioude.
,
L à , des volumes d’écritures furent faits de part et d’autre ; l à , Pierre
Saby eut recours à tous les moyens qu’un esprit ingénieux peut ima
giner pour combattre des réclamations justes , et parmi toutes les dif
ficultés qu’il éleva , on remarque qu’il donna lieu .à traiter trois ques
tions principales qui étaient de savoir , i.° si l ’institution d'héritier
faite dans le contrat de mariage de Catherine Saby., en faveur de N oël
Saby son frère non contractant , du 8 janvier 17J9, était valable , ou au
moins si elle n'avait pas été validée par la ratification portée dans son
propre contrat de mariage de 1725 ; 2.° si un absent n ’est pas réputé
vivre cent ans respectivement à ses héritiers ; 3 .° si en Auvergne lesr
enfans des cultivateurs , travaillant hors la maison paternelle , peu
vent faire des profits qui leurs soient propres , ek si la somme de trois
cent cinquante francs qu'André Saby s’était constituée en dot dans son
contrat de mariage de 1787 , n’était pas sujette à rapport !
Ces trois questions furent jugées contre la (prétention de Pierre S a b y ,
par jugement souverain et en dernier ressort du 3o août 1792 , qui en
confirmant toutes les sentences sus-datées , ordonna que tous les biens
provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud seraient partagés par
égalité entre Pierre Saby et Pierre liard.
Celui-ci provoqua alors une nominaUon d’experts; Saby déclara qu’il youlait se pourvoir en cassation contre ce jugement , qu'au surplus il n»
■connaissait que quatre parties de terrein sujettes au partage , et q u ’il
consentait , sans préjudice de scs droits , que le partage en fut lait.
C ’est ce q u e l’on voit dans un procès-verbal du 2o octobre
�D es experts furent nômmcs , mais gagnés sans cloute par Saby , i l s
furent sourds à toutes les assignations qui leur furent données pour
opérer. U n premier jugement du 3o septembre 1793 , révoqua l ’expert
de Saby et en nomma un autre pour lui.
■
; Celui-ci fut également sourd à toutes; les diligences que put faire
Bard , et un nouveau jugement du 2 i messidor an I I , porte que tous
les premiers experts ont été valablement récusés par Bard, et que les
nouveaux qui seront nommés par les parties , seront tenus d’opérer
dans le mois.
_ Ces nouveaux experts nommés contradictoirem ent, tardèrent assez
long-temps à s’occuper des opérations qui leur étaient confiées, car ce ne
fu t que le 6 Messidor an I I I , qu’ils se transportèrent au lieu de.
Balistrour,
.
t
. ^ à , ils trouvèrent Pierre Saby, qui ne se rappelant plus de ce que la
mauvaise foi lui avait dicté lors du procès-verbal du 2o octobre 179 2 ,’
déclara qu’il n’y avait cjue deux héritages sujets au partage ; il eut même
la bonté de les leur designer, et comme de cette désignation il résulte
q u ’il n ’y a qu’un de ces deux héritages qui puisse s’identifier avec un
des quatre qu’il avait indiqué lors du procès-yerbal de 17 9 2 , il en.
résulte, qu’il y aurait au moins, cinq héritages sujets au partage.
C e s experts dressèrent procès-verbal des dires respesctifs des parties;
ils eurent même la complaisance d’y insérer des dires qui furent fait*'
par Jean M agaud, mari de Catherine Saby , et ils terminèrent par
renvoyer les parties -devant qui de droit pour faire fixer les bien*
sujets au partage.
Obligé de plaider encore avec Saby, >Bard le fit assigner au tribunal
civil du Puy,_et après que l ’affaire eut été reprise contre Jean Saby, son
fils., il intervint en ce tribunal un jugem ent, le G fructidor an V , par
lequel il fut juge en these que celui qui reclame un partage, doit
designer nommement les biens meubles et immeubles qui peuvent y être
sujets, et que celui contre qui la demande est formée n’était obligé à rien ,
quoiqu il eut toujours . demeure dans la maison des auteurs communs ,
quoiqu il fut présume nanti de tous les titres constitutifs des propriétés
des auteurs communs, quoiqu’il dut avoir par devers lui ou qu’au moins
il lui fut facile de se procurer les titre» des acquisitions qu'il pouvait
avoir faites
' ,
Quelque rigoureux que fut ce jugement contre Bard , il ne lui
restait aucun moyen pour revenir contre ; il ¿lait en dernier ressort
quoiqu’il ne dut pas l'&t;re, et son état de détresse ne lu i permettait
pas d’avoir recours à la cassation.
.Par un premier exploit, du 21 brumaire an V I , Bard motiva et
circonssUmcia la preuye . qu’il voulait faire de la consistance des bien*
meubles et irmneublcs provenus de__ Pierre Saby et d'Antoine lie Lachaud
�X
v
j
e î le i 3 fructidor suivant, son défenseur apréë aVoir diffé ;é fVTS'qifeslà,
de présenter sa cause , obtint contre Saby un jugement par défaut, q u i,
au iteu d’ordonner la-preuve qui était réclarhée, et à laquelle Bard s’Ctâit
soumis , lui permit de compulser les minutes de quelques notaires. • J
D o cile aux ordres que lu i donnai son ■
défenseur, Bard éru-t Entrevoir
dans ce jugement un .m oyénpour parvenir ty'lus facilem ent à un jugemCiit
définitif ; il ne fit pas attention que sa preuve vocale dépérissait, et qü’à
chaque jour il perdait quelqu’un de ses tém oins; il se livra à la recherché
de plusieurs actes; il parvint à en découvrir quarante, qui tous'Constatent
différentes acquisitions faites par André 8aby , ou par pierre i?aby,
*011 fils, ou par A ntoine Bruhat et Catherine Saby, associés de ce dernier.
Tous ces actes furent; signifiés à' Jeàil Saby , avec nouvelle assigna
tion , pour voir ordonner la preuve à laquelle Bard s’était soumis ^dirô
que de nouveaux experts feraient l ’application de tous ces titres , et
être condamné à payer une -provision de six mille francs.
Comm e si 8on defenseur eut été fêché de le voir admettre à cette
preuve , il se borna, à. réclamer une provision , et par jugement du 4
fructidor an VII , rendu encore par défaut contre Jean Saby , il fut ac
corde à Bard une modique somme de trois centfe francs : on dit medi*
que , parce, quîelle n e lui’ a pas suffit , n i à ‘ beaucoup jbrès , poufc
faire face aux dépenses que lui a occasionné la recherche des actes
q u ’il s’est procuré.
:
. ■
Cette provision parut cependant trop considérable à Jean 8abyV
il forma opposition.à.ce jugement ; et par un autre du 6 germinal an V I I I ,
il parvint à faire réduire cette provision à la somme de deux cents- francs*
C ’est dans ce jugement que l’on v o it jusqu’à quel point le défen
seur de Bard a compromis ses intérêts ; non seulement il ne fit
pas; ordonner la preuve à laquelle Bard
s’etaib soumis depuis le 2 i
brumaire an V f ; non seulement il ne dit pas: un mot) pour l ’obtenir;
non seulement il n’argumenta pas des quarante titres de propriété que
Bard lui avait remis pour soutenir que la provision accordée n'appro
chait môme pas do celle qui aurait dû; l ’étro , mais même il negli*
gea de faire prononcer sur des conclusions qui avaient été prises par
exploit du y brumaire an VIII , et qui avaient pour objet de faire déclaJ
rer Jean M agaud, Catherine Saby sa. femme , Krançois Mcstre e t ’ Marid
Magaud sa fem m e,non recevables dans l’opposition qu’ils avaient formée ait
jugement rendu contre Jean Saby , attendu q u e c e jugement n ’était point
rendu contre eu*; q u ’ils n’avaient jamais été en instance avec B ard; et que
dès lors leur opposition était insoutenable, ( i)
Q uoiqu'il en soit; l'affaire a été portée au tribtinal de Brioude ; Bard
( 0 Ce détail po u r ra p a r a î t r e f a s t i d i e u x , m n i i il a p a r u e s se n tie l p o u r i l c i n û n t r i r , d ' u n e p a r t j
t o u s les inciilcn^ (juc l 'a d v e r s a i re de Bard lui a fa it é p r o u v e r , e t «le l 'a u t r e j u s q u ’à qu el p o i n t
« et d r o its o n t etc c o m p r o m i t p r r lo-son fian cc
a en en so n 'd cfc iiscu r.
�• / ,
- 7r 1 a insisté pour, être admis à la preuve de la consistance du mobilier *
,
provenu dè Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud , des titres de créance
qui existaient et qui faisaient partie de leur su ccessio n , et à ce que
lés conclusions qu’il avait prises depuis l ’an V I , lui fassent adjugées.
^D ’üÀ àutre côté et par
exploit du i . er nivôse an I X , Bard après
avoir épuisé les voies de la conciliation , avait fait assigner Catherine
Saby et Jean MâgaudJ son m a r i A n n e Magaud et Jean D egeorge
son m a ri, Marie Magaud et français Mestre son m ari, pour voir
déclarer exécutoire" contre eux les sentences et jugemens rendus contre
Pierre Saby, tout ainsi et de même qu’ils l’étaient contre ce dernier.
C e ' n’a 'été qu’alors et .par exploit du 11 du même m o is, que
CatherineSabÿ/et Jean,Magaud son mari, seulement, ont attaqué p arla voie
d£ la tierce opposition ces mêmes sentences et jugem ent, pour d’une part
empêcher’ ' l'admission à la preuve à laquelle Bard s’était soumis contre
Jean Saby n et de l ’autre pour reproduire et faire juger de nouveau
toutes les questions que-Pierre Saby avait mis au jour dans le cours de
la constestation,
' Jean Saby, fils de ce d ern ier, invoquant cette tierce opposition , s’est
opposé1 -de toutes ses forces à la preuve offerte et réclamée par Bard r
mais tous ses efforts ont été vains ; son espoir à été déçu et il a vu
adjuger contre lui , par un jugement très - contradictoire du 2 i nivôse ,
an I X , toutes les conclusions qui avaient été prises.
'
Des témoins, ont été produits de part et d’au tre, ils ont été enten
des,,; des experts ont été . nommas, ils ont opéré; des- expéditions
authentiques prouvent l ’un et l ’autre.
T e l est l ’état actuel de l ’affaire. Après en avoir présenté les fa its;
après avoir remis sous lt s yeux d e - la justice une partie des incidens
que Bard a éprouvé depuis l ’époque de sa demande , il est facile de v o ir:
qu’il doit aujourd’hui repousser la tierce opposition formée par Cathe
rine Saby et- Jean Magaud ; démontrer en même temps que ses pré
tentions , sont justes et légitimes ; et prouver que des dépositions des
témoins, du rapport, des experts et des titres produits, il en résulté te
preuve la plus convaincante , en sa faveur.r
V É R I T É S
I N<C 0 N T E S T A B L E S.
L e s biens qui doivent composer la succession de Pierre Saby sont
la moitié de ceux qu’il avait lui-mêine acquis , de ceux acquis par
A.ntoine Bruhat et par Catherine S a b y, et enfin la moitié de tous
les biens provenus d’André Saby et de'Jeanne V id a l, ses père et mère.
C e la résulte positivement des actçs de sociétés générales faites en-'
lie l u i , 'Antoine Bruhat et Catherine Saby, les iG février if,q/. et
3 janvier 1706 , par lesquelles ils mirent en commun tous Leurs biens
�§-
•
•
' - (
5
ptésens et à venir avec convention expresse qu'en cas de dissolution
'> ç de so ciété, ils seraient tous partagés par égale portion.
Dans tous ceà biens , Pierre Bard amende un quart avec restitu' £ tion de jouissance ei intérêts dp la valeur du mobilier depuis 1788,.
"i? > époque, du décès de Pierre Saby premier du nom.
v.
C'est ce qui résulte du jugement souverain et en dernier ressort du
a °Û t
17 i)2 *
1
■
'
;
II est vrai que ce jugement est attaqué par la voie de la tierce
^ opposition de la part de Catherine Saby et de. Jean M agaud, mai»
^ les droits de Bard sont irrévocablement acquis contre Jean Saby
ÎC Î"G.finent dont on vient de parler. L a tierce opposition de
Catherine Saby et Jean Magaud ne peut rien changer à son égard ,
^ •quoiqu’on soit le résultat; parce que dans taua les cas , le jugement
^ Jv^rçndu doit toujours, être exécuté contre luî. ^
C ’est ce qui résulte des principes les plus certains, les plus i'nscon-.
~ ïstestables sur la matière des tierces oppositions; principes consacrés
T^l^d’une manière bien solennelle par deux jugemens rendüs au tribunal
V* fc de cassation les 26 germinal an V I et i 5 pluviôse an I X 'r a p p o r t é s—
d&ns le bu'Ilêtin des'jâ^omens de ce tribunal Is10. 2.~
, R s P a s s o n s ~ 'â c tu e lie m e n t à la discussion des questions Teproduites p a rle s
tiers opposans.
.
*'J
^ £
^
-
P R E M I È R E
De
quel jour un
.
Q U E S T I O N .
absent est-il réputé mort respectivement à ses
.
héritiers ?
I ».
Il n’y a rien de problématique , rien qui mérite une discussion séY ^ rieuse dans cette question. Presque tous les jurisconsultes anciens et mo
dernes assurent qu’un absent est réputé mort respectivement à ses
.> héritiers , du jour de son départ ou de celui des dernières nouvel„^
les qu’on a eues de lui. Il n ’y a qu’une envie de plaider , une intenJs ^ tion de se maintenir injustement dans un bien, qui. puissent aujourd'hui
faire soutenir le contraire.
.^ 5 Cette doctrine est consacrée d’un manière bien précise dans les arrê^ *h lés de M. le président de Lam oignon, où l’on lit : L ’absent est répu
té mort du jour qu'il n’a pas paru ou de la dernière nouvelle qu'on
~
a reçue de lui.
/v
Cette décision, dit un auteur plus moderne ( Bretonnîer page i 5 du
$ ' premier volume ) , est dans les règles , parce que l ’absent dont on n’a
point de nouvelles , est réputé mort par fiction, et que les fictions ont
$ tou jou rs un elfct rétroactif.
^
E n vain objecterait-on qu'un absentes! présumé vivre 100 ans, et que rc&ç pectivement à scs créanciers il n ’est réputé moi t qu’après cet espace de
temps, qu’ainsi il doit eu étie de même relativement à scs héritiers.
h*
�'
■ C- 9 . )
L a première partie de cette objection, est fausse et absurde, la
f seconde ne rcyjose que sur U n e erréur.
Toute présomption doit être fondée sur quelque vraisemblance èt
sur ce qui arrive le plus souvent, l ’ rœsumptio ex co quod plerumque
:f:t. 11 faudrait pour qu’un absent put être présumé vivre cent ans,
que ce fut le temps ordinaire de la vie des hommes ; et certes , l'ex
périence prouve bien le contraire.
•
L es lois 5 G, au d igeste, D e usuf. et qvemad. , et 8 D e usuf. leg; ,
invoquées par Saby et Magaud ne disent pas qu’un homme est présumé
vivre cent ans , mais seulement qu’il est présumé ne pas vivre au delà
de cent a n s, ce qui est bien d ifféren t, Placuit centinn annos tuendos esse
municipes , quia is finis vit.ee longuœvi hominis est. Jusqu’à ce que le temps
, de cent ans se soit écoulé depuis la naissance d’un absen t, il n’est ni
présumé vivre , ni présumé m oi.t, et c’est à ceux qui ont intérêt qu’il
soit vivant, à prouver sa vie. Pothier > sur le ckap. ly de la coutume
d ’Orléans.
.
, C et auteur , ni Brétonnier , dont nous avons déjà rapporté les propres
expressions , ne disent pas ce que Magaud et sa femme leur font d ir e ,
ou plutôt ils disent tout le contraire.
Voici les propres expressions de Polluer , traité des successions,
cliap. 3 . sect. i . ere §. i .er i « c’est une question difficile à décider, de
» quand doit être présumée ouverte la succession d’une personne dont
» on ne sait ni la vie , ni la mort. L ’opinion la plus probable est de
» réputer sa succession ouverte du jour des dernières nouvelles qu'on a
» eues de lui ; ce n ’est pas qu’il y ait lieu de le présumer mort dès
» ce temps plutôt que dans un autre , mais c’est que n’y ayant aucune
» raison d’assigner sa mort à un temps plutôt qu’à un autre, et étant
» néanmoins nécessaire de fixer le temps de l’ouverture de sa succes» sion , on n e peut mieux le fixer qu’au temps où on a cessé d’avoir
» des nouvelles de lu i; parce que s’il n ’est pas effectivement mort
^ dès ce temps , il 1 est au moins cquipollem ent par rapport à la
société des hommes ; car par rapport à la société , c’est à peu prè.»
» la même chose qu’un homme n ’existe pas , ou qu’on n ’ait aucune
» connaissance de son existence. »
, Q ue Magaud et sa femme qui ont cru en imposer en citant l'o p i
nion de ce jurisconsulte , pèsent actuellement ses expressions qu’ils n ’a
vaient sans doute pas lues ; qu’ils conviennent que c’est sans réflexion
qu’ils l’ont invoqué , et qu’il en est de même à l ’égard de Brétonnier
et Rousseau - de - Lacombe.
Celui qui s’est perdu , dit ce dernier , est réputé mort du jour qu’il
a disparu ; c’est la règle en succession. Même dans tous les cas si ceux
qui ont intérêt ne justifient que l ’absent est vivant.
S ’il est vrai que quelques arrêts puissent être invoqués à l ’appui de
B
�(
10
)'
'
la seconde partie de l ’objection , il est aussi certain qu’il y en a de
contraires , et que l ’arrêt de T iellem ent qui a été tant invoqué par Saby,
perd de son autorité quand on le rapproche de celui i 683 , rapporté
par H e n ri, tom. 2. page 890; de celui du 11 août 1 7 1 9 , rapporté au
journal des audiences ; et que cet arrêt de Tiellem ent q u i, comme le
dit P o th ier, n'est fon d é apparemment que sur cette vieille erreur , qu’un
homme est présumé vivre cent ans , ne doit pas être suivi.
T ous les anciens tribunaux paraissaient avoir embrassé cette opinion.
Ils l ’avaient consacrée par différents airèts. O n en trouve la preuve dans
les questions de droit de Brétonnier , où il est d it , qu’on ne doit pas
douter que cette jurisprudence n& soit la meilleure.
Monvallon dans son traité des successions , après avoir embrassé cette
même opinion, en rapporte à l ’appui un arrêt rendu à son rapport, le
: 21 mai 1 7 5 1 , par lequel il fut jugé que l ’hoirie de l!absent avait du
appartenir au parent le plus proche lors de l ’absence ou de la dernière
nouvelle , et avait passé aux héritiers de ce parent. A in si il ne peut pas
y avoir de doute sur la vérité du système que l’on soutient.
Mai3 pourquoi invoquer des autorités à l ’appui d’une opinion qui paraît
incontestable ? l\e suffirait-il pas , si elle pouvait être combattue avec
su ccès, de s’appuyer sur un fait particulier qui se rencontre dans l’a ffa ire ,
pour démontrer que quelques efforts que fassent les adversaires de Bard,
pour soutenir un système contraire, ils ne pourront jamais parvenir à
le faire adopter ] N e suffirait-il pas de dire que Marie Héritier ayant
pris "dans le contrat de mariage de Catherine S a b y , sa fille , du 2t
septembre 1749 , la qualité de veuve d'André Saby , en présence de
toute sa fam ille , et notamment de N oël Sa b y, père et beau-père des tiers
opposans ; qu’ayant repris cette même qualité de veuve d ’André Saby,
dans une quittance donnée au même Noël Saby', le 11 novembre de la
même année, les nouveaux adversaires de Bard qui représentent ce
N oël S a b y, a titre d ’héritiers universels, ne peuvent pas désavouer,
contester ce qui a été reconnu par lui en 1749? C e seul fa it, celte seule
circonstance, ne seraient-ils pas sulfisans pour persuader qu’au moin*
en 1 74 i).i André Saby était décédé; que toute la famille en était convain
cue , et par conséquent pour faire rejeter, proscrire tous les efforts, tous
les raisonnemens que pourraient faire Magarnl et sa femme.
Term inons celte discussion, et disons que dès qu’il est établi en point
de droit qu’un absent est réputé mort du jour de son départ ou des
dernières nouvelles qu’on a eues de lui ; dès que le fait particulier qui se
rencontre dans la ca u se, et qui résulte du runtrat.de mariage et do la
■quittance de 1741) , dans lesquels Marie 1lérilier p rit la qualité de veuve
d ’Andrc. Saby, vient d’ailleurs à l ’appui de celle vérité; dès qu’il (;5t
-ptouv«-' dan? lc procès que l ’action de Bard était'en tière en 17 8 6 , paf
�lc jn o y e n des minorités qui se sont perpétuées clar*s sa famille, ( i ) ; il en
risriiiLe' que c’est sans fondement qne ses adversaires ont donné lieu à
celte discussion.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
Une institution d'hcr Hier fa ite dans un contrat de mariage, en faveur ,
d’un non-coîitractant, est-elle valable /
Cette question est décidée par le texte précis de la loi- m unicipale
ne permet
les institutions d ’héritier qu’en faveur des mariés ou de leurs descendans
seulement; elles ne peuvent jamais ê tre,fa ites en faveur de ceux qui
ne contractent pas mariage ; ain si, un père qui marie un de ses c n fa n S '
et l ’institue son héritier avec un autre qui ne se marie p a s, fait un acte-'
inutile et nul à l ’égard de celui - ci , s’il ne charge le premier de
l'associer à l’effet de l’institution] parce que disent les jurisconsultes, l&
premier ca r a c tè r e d’une institution d'héritier, est qu’elle soit fa ite en.
faveur des mariés ou de leurs descendans : c’est d’ailleurs ce qui résulte
des dispositions de l’art. 26 du tit. 14 de cette coutume.
Cette nullité dont était infectée l ’institution d’héritier faite par Pierre
Saby , en faveur de N o el Saby , son fils , dans le contrat de mariage de Ca
therine Saby avec Étienne Ilo u x, du 8 janvier 1719 , était une nullité abso
lue qui ne pouvait jamais être mise à couvert que par une nouvelle dispo
sition qui eut tous les caractères distincts et nécessaires pour transmettre
la propriété d’un bien ; elle n ’attribuait par elle-même aucuns droits à
N o e l Saby; il n’était saisi de rien par cette disposition; elle était abso
lument nulle à son égard; elle ne pouvait jamais être validée, quod
nullum est nullo modo convalescere potest.
Mais disent les adversaires de B a rd , en supposant que cette institu
tion d’héritier fut n u lle , cette nullité a été couverte par la ratification
faite par Pierre Saby, en faveur de N o ël Saby , lors de son contrat de
mariage, du 1." février 172&: cette objection nous porte à examiner la
question suivante.
qui ré "it les parties. L a coutume de la ci-devant Auvergne
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N
Une ratification pure et simple d'une disposition nulle dans son principe y
d ’une nullité absolue, peut-elle produira quelque effet ! A
« L a nature de la ratification n ’est pas d’introduire un droit nouveau ‘
C O P i e r r e S a b y , de e/y a», es t décédé le î i o c to b r e 173S» cil c a l c u l a n t d e p u i s c e tte é p o q u e u u o u ' u .
c i s e p t e m b re 17^9 , d ate du c o n t r a t de m a r i a g e d’A n t o i n n c t t e S a b y av ec A n d r é B a rd , 011 n e t r o u v e nnio n z e a n s m o in s un m o is ; a u m o i n s a e s tte é p o q u e , 1e co u rs de la p r e s c r i p t i o n a été s u s p e n d u e h w i n
«S j a n v i e r 1781 i car A n t o i n e t t e i a b v , n w le s S f é v r i e r i 7 m , « t a i t e n c o r e m i n e u r e à l 'é p o q u e de “ o a
•lé c è s, a r riv é le 9 octflhre 1760 , et P ie r re B a rd s o n f i l s , ne le « j a n v i e r 17^ , n 'a été n r l i u r a u c le
i ç ja n v i e r 1781 ; a insi à 1 é p o q u e de la d e m a n d e d u 20 m a r i 1 7 *6 , 1 a c t i o n é t a i t e n t i è r e - a in s i le m o v e a
de p r e s c r i p t i o n d i s p a r a î t sa n s i c t o u ï . .
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ju y /o-
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12
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'dit un auteur moderne ; de donner un nouveau titre , de faire une
nouvelle disposition ; mais au contraire d’approuver un droit an cien , de
fortifier un titre précédent, d’affermir les premières dispositions et
d’en assurer l ’exécution. »
Toute ratification suppose un droit existant, un droit acquis; elle a
un rapport et une liaison immédiate avec le titre primordial. Ratificatio
ad hoc tantum Jîngitur ut quasi continuations duorum actuum contractus
validetur. E lle ne peut dans les règles ordinaires ni l ’étendre , ni
l ’.augmenter.
L ’esprit de celui qui confirm e, n ’est pas de faire une nouvelle dispo
sition, mais d’approuver celle qu’il avait déjà faite, qui confirmât, nihil
dat. T oute ratification, toute confirmation simple , renferme toujours
cette condition tacite , que le titre originaire soit valable , ou qu’au moins
il attribue quelque droit : aussi M. Charles Dumoulin après avoir dit que
la ratification qui est faite d’un acte nul , avec connaissance de la nullité
qu’il renferme et l ’intention île la réparer, valide cet acte, s’exprime-t-il
ainsi : seats in confirmationibus quœ jieren t sine causez cogn'dione , sivb
in forma communi ; ratio, quia hujus modi confirmatio nihil d a t, nihil
novi juris confert , nec invalidum validat. Non enim f i t ad finem dispon en d i, sed solum ad finem approbandi confirmabile, tale quale est , et
in quantum est verum , validum et efficax si taie est et non aliter ;
ainsi si le. titre est nul dans le principe , d’une nullité absolue ; s’il
n’attribue aucun droit ; si celui qui a disposé, n’est point lié à l’égard
de celui en faveur de qui la disposition est faite; si celui-ci enfin, ne peut
invoquer cette première disposition, ni en tirer aucun avantage, la
ratification la plus précise , la plus formelle , ne peut opérer l ’effet de
la valider, si elle n'énonce sa nullité elle-m êm e, avec l ’intention de la
réparer. Quod nullum est ipso ju r e , perperàm et inutiliter confirmatur.
T els sont les vrais principes qui s’élèvent contre la prétention des
nouveaux adversaires de Bard; principes qui ont été reconnus et confirmés
par le jugement rendu en dernier ressort, le 3o août 1792.
Mais dira-t-on encore , comme Saby l ’a répété plusieurs fo is , la rati
fication équivaut ù une nouvelle disposition ; elle est elle - mémo une
nouvelle disposition, et d’ailleurs la première disposition n’était nulle
que d ’une nullité relative.
C e sera toujours en vain qu’on voudra donner le change sur la ratifi
cation faite en 1t 2 S, de l’institution d’héritier portée dans le contrat de
mariage de Calheiiue Saby, du 3 janvier 1719 , en faveur de N oël Saby,
son frère, non contractant ; on rappèlera toujours les adversaires de Bard
au* termes que ni.ferm ent ces deux acies.
Par <clu i de
i îurre Saby niotituç Notil Saby, son fils, nonconl.ractant , «un ! ' u îu t gén.'îul et universel; celle disposition était:
ïiulle et illejv l e ,
pouvait produire aucun eilet ; elle n ’attribuait a
»
»
»
y
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,
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ce d ern ierJ
, aucuns droits ni presens ni futurs , dans les biens du
premier ; parce que le premier caractère de l’institution d'héritier , est,
on le re p è te , qu’elle soit fa ite en faveur des mariés ou de leurs
descendons.
L a nullité dont était infectée cette disposition, était une nullité
absolue qui n’a jamais pu être couverte par une ratification quelqu’expresse , quelque précise qu’elle ait été , parce que quod nullum,
est ipso jure , perperùm et inutiliter confirmatur.
'
L ’acte de 1725 ne contient point une nouvelle disposition, la rati
fication est pvire et simple , elle n’énonce point la nullité dont était
infectée la première disposition, ni l ’intention de la réparer. Il y est dit
seulement que Pierre Saby approuve et ratifie l ’institution d’héritier
faite en faveur de N o ël Saby son fils , dans le contrat de mariage de
Catherine Saby , du 8 janvier 1719 , et consent qu’elle sorte son plein
et entier effet.
Cette ratification ne contient donc point une nouvelle disposition;
L a première disposition est ratifiée et confirmée , elle doit sortir son
plein et entier effet. Mais si par elle-m êm e elle ne pouvait avoir au
cun effet ; si elle ne liait point celui qui l ’avait faite ; si celui en fa
veur de qui elle avait été faite ne pouvait pas l’invoquer , il faut
dire affirmativement , que la ratification , la confirmation ne peut pas
l ’avoir validée ; parce que l ’esprit de celui qui confirme n ’est pas de
faire une nouvelle disposition , d’attribuer un droit nouveau , mais com
me l’a clairement exprimé Pierre Saby lui-même , d’approuver seulement
la première disposition qu’il avait faite : qui confirmât, nildl dat.
E n vain dirait-on que le vice de la première institution a été cou
vert par la ratification ; cela serait vrai si la première institution n’ a
vait cté infectée que d’une nullité relative ; mais étant frappée d'une nul
lité absolue , l’objection ne peut avoir aucune force.
O n distingue en- droit deux sortes de nullités , les unes absolues qui
sont de droit public , et que plusieurs auteurs ont appelé nullités p o
pulaires , parce qu’elles appartiennent au public et aux membres de
l ’Élat qui ont intérêts -de les proposer ; les autres relatives , parce
qu’elles ne concernent que ceux au profit de qui elles sont établies ;
qu’elles dépendent absolument de leur volonté particulière , et qu’ils
peuvent y renoncer soit expressément , soit tacitement.
A insi 11ue vente faite par un mineur qui n’est nulle que relativement
à lui-même , peut être ratifiée par lui , lorsqu’il a atteint sa majorité ,
ou par le laps de dix ans , s’il n’a pas réclamé pendant ce tem ps,
après sa majorité.
_
A in si une vente des biens d’une femme faite prndant son mariage
n'.est mille que d’une nullité relative , et la femme devenue veuve v e u t
par une ratification expresse la confirmer.
.
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.
<■ ^
y
.
.
I,c mineur -devenu majeur et la lemn\e veuve sont alors, libre? , vnaî-,
1res de leurs dioits ; iis peuvent valider ce qu’ils ont fuit en m inunlé.
ou eu puissance de mari , et qui ne se trouve nul qu’à cause de ces
circonstances , et la seuie différence qu’il y ait entre leur ratification,
est que ceilç faite par ie mineur, a toujours un effet rétroactif au pre
mier acte , tandis que celle faite par la femme ne l ’a pas , et que
celui qui a traité avec elle en puissance d,e m ari, n’a de titre valabiej
que du jour de la ratification.
'
. Ces actes faits par le mineur ou par la femme en puissance du mari,,
ne sont nuls que d’une nullité relative ; nul autre, qu’eux-mêmes ne
peut s’en plaindre; eu*c seuls peuvent les attaquer, revenir contre , ou
les approuver, les confirmer.
. Mais il n ’en est pas de même d’un acte qui est nul d ’une nullité
absolue qui intéresse des tiers , et que des tiers peuvent faire valoir.
A in s i, par exem p le, un testament fait en pays de droit écrit, qui
pécherait par le défaut d’institution en faveur de ceux qui ont droit de
légitim e; une donation qui pécherait par le défaut d ’acceptation de la*part du donataire ; une donation qui pécherait par le défaut de tradition
de la part du donateur , ou dans laquelle celui-ci se serait réservé la liberté
¿ ’hypothéquer les biens donnés ; une donation qui ne serait pas faite,
en contrat de m ariage, et qui aurait pour objet les biens présens et à
venir du donateur; une donation, enfin, qui aurait été révoquée par
survenance d’enfans; de pareilles dispositions, disons-nous, seraient en
vain ratifiées, et quelques précises, quelques fo rm elles, quelques écla
tantes que fussent les ratifications, elles ne peuirrraient pas produirere fle t de les valider, parce que ces actes étant nuls d’une nullité absolue,
ne pourraient jamais être confirmés valablement. Quod nullum est ip so ,
ju r e , perpcrùm et inutiliter confinnatur.
'
Dans tous ces cas , il faudrait un nouvel acte revêtu de toutes les
formalités légales pour la validité cl’un testament, d’une donation, parce
qu’il est de l ’essence des testamens faits en pays de droit é c rit, qu’ils
contiennent institution d’héritier en faveur de ceux qui ont droit de
légitime ; parce qu’il est de l ’essence des donations , qu’il y ait une
acceptation , qu’il y ait une tradition; parce qu’il est de l ’essence des
donations qui ne sont pas faites en contrat de mariage, qu’elles ne com
prennent que les liiens présens du donateur ; et parce qu’en fin , à
l ’égard du dernier exemple proposé, une donation révoquée par surve
nance d ’enfans, ne peut jamais revivre , et que dans tous ces cas des
ratifications ne pourraient produire aucun effet.
Quand un acte est nul par lui-m êm e, il est loujours ratifié inutilem ent;
r.e contenant point d’engagement valable de la part de ceux qui l ’ont
souscrit, ne pouvant jamais être validé par le tem ps, la ratification qu*
tu est faite par les parties, ne les oblige pas à P^lis (i uc ne ^es obligeait
l ’acte même.
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,
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V5
)
L'institution d'héritier portée dans le contrat de mariage de 1719,'
était nulle par elle-même ; elle n ’attribuait aucun droit à N o ël Saby; elle
e lle ne liait en aucune manière Pierre Saby, son père ; et la ratification
q ue celui-ci.en fit en 17 2 5 , était absolument insignifiante, et ne le liait
pas à plus envers N o ël Saby, qu’il ne l ’était par l ’acte de 1719.
Toute la difficulté se réduit, enfin, en peu de mots. O u la première
disposition était nulle par elle-m êm e, ou elle était seulement susceptible
d ’ètre annullée ; dans ce dernier cas, c’est-à-dire si la disposition n'était
pas nulle par elle-m êm e, sed venit tantum annulandus, la ratification
l ’aurait fortifié, corroboré, validé; mais dès que la première disposition
était nulle par elle-même, la ratification, la confirmation qui en furent
faites ne purent pas la valider; parce que , comme le dit quelque part
B o ëriu s, coufrmatio vihil novi d a t , sed prius habita et possessa
confirmât.
C es principes , ces distinctions , sont enseignés par tous les juriscon
sultes , et ils furent consacrés d’une maniéré bien précise par un arrêt
du 26 février 1 7 2 6 , rapporté par Lépine-de-Grainvile page 408, dans
une espèce qui était tout aussi favorable pour les donataires , que veulent
l ’être lés nouveaux adversaires de Bard ; ils ont été renouvellés dans le
p ro je t du code civil qui peut être regardé comme raison écrite , quoiqu’il
n ’ait pas encore force de lo i; voici ce qu’on y lit, art. 22g du 2.me liv. ;
« l ’acte confirmatif suppose un contrat antérieur et un contrat valable. »
« Si l ’acte confirme est radicalement n u l, il n’est point validé par la
*» simple confirmation , à moins qu’il n’énonce, la connaissance de la
» nullité du premier, ave: l'intention de la réparer, qu’il n’en rapporte la
# substance et ne Contienne la déclaration de la volonté de vouloir lu i
» donner l ’exécution. »
Ces principes ont encore été consacrés par le premier jugement que
Bard a obtenu contre Pierre Saby; jugement qui a été attaqué par la
voie de la tierce opposition, mais qui doit nécessairement être confirmé,
quelques efforts que fassent Magaud et sa femme pour le faire réformer.
Ces derniers insistent et invoquent encore en leur faveu r, l ’autorité de
l ’immortel Dum oulin; et nous aussi nous l ’avons invoqué ! nous avons
rapporté les expressions de ce célèbre jurisconsulte, et certes nous sommes
éloignés de l«s croire en leur faveur.
11 est vrai que Dum oulin après avoir d it, ainsi que les adversaires de
’Bard en conviennent ( car ce sont leurs propres expressions que nous
trani'.crivons ) , que la confirmation d’un acte antérieur auquel celui qui Le,
confirme, se référé sans en rapporter la teneur, ni en relater les vices
pour les réparer, n’a d'autre but que de maintenir l'acte- dans sa valeur
primitive-, qu'elfe ne couvre pas la n u llité, ni les 7/ices de l’acte , ignorés
par L'auteur de la confirmation, et qu'ells n'empêche ni lui ni les siens de
fa ire valoir cas vices , pour se 'dispenser d’exécuter l’acte , ajoute que si
�.
.
.
je
>
.
.
îa confirmation d’une cüspositionr nulle est faite avec la connaissance de
cette n u llité, et intention formelle de la réparer, la ratification valide
.alors ce qui.était nul. Tn tantum quod etiamsi corjirmaium esset nv.h.um
x e l nw aiidnni, vahdarctur per coirfimiationem potestatem halerilis, scicnlis
nuilitatem et vilium confirmati.... Tune propnè non discilur corfirmatio,
sed nova et principaiis dispositio.
L es célèbres jurisconsultes , rédacteurs du projet du code civil qui est
.attendu avec tant d’impatience par toute la H a n c e , pour faire cesser la
bigarrure de nos lois , n ’ont-ils pas puisé dans' l'immortel D u m o u lin ,
. l ’article que l ’on a déjà rappelé, et cet article et les suivans ne sont-ils
pas la traduction presque littérale de ce que dit ce grand maître.
E n un m ot, l ’acte de 1725 11’enonce pas la connaissance de la nullité
dont était infectée la disposition contenue dans celui de 1719 ; ii n’y en
est pas dit un m ot; on n’y voit pas l ’intention formelle de Pierre S ab y,d e
.vouloir réparer ce-vice qu'il devait connaître, que la l o i ne lu i p erm etta it
pas d’ign orer, et dès-lors il faut dire avec D um oulin, avec les auteurs
du projet du code civil, que la confirmation d ’une disposition radicale
ment n u lle , n’est point validée par une simple ratification qui n'énonce
point la connaissance de la nullité, avec l ’intention de la réparer ; que
la disposition contenue dans l ’acte de 1719 , n ’a point dès-lors été
.validée par la-ratification contenue dans celui de 1725.
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N *
E n Auvergne , les en/ans des cultivateurs , travaillant hors la maison
paternelle, peuvent-ils fa ire des profits qui leur soient propres J
O n ne rappèlera point ici les distinctions faites par les lois sur les
différentes espèces de biens. O n se contentera de dire qu’en A u v e r g n e
et dans le Forêt, l ’usage constant a toujours été que les sommes gagn ées
par les enfans des cultivateurs, soit en s'expatriant, soit dans l ’etat de
domesticité ont toujours restées en leur libre disposition; qu’ils ont cu
le droit d’en disposer à leur gré; et que leurs pères n’ont jamais consi
dérés ces sommes comme faisant partie de leur patrimoine.
E lles ont toujours été classées, ces som m es, dans l’ordre des biens
désignés par la loi sous le nom de quasi-castrence, dont les pères n ’on t
ni l ’usufruit, ni la propriété , et qui ne sont jamais sujets à rapport à leur
succession. Nec castrense, nec quasi castrense peculium fratribus co n fcr lu r .
Tous les ans et à des époques périodiques on voit , des nuées de cul
tivateurs quitter "nos montagnes pour aller à la scie ou <\ la marre ; on
les voit à d’autres époques revenir, portant dan s leur m a iso n les fruits
de leurs sueurs et de leurs travaux ; les prêter le plus souvent <\ leur
frère ainé , et s’en fairo souscrire de8 obligations , d es re co n n a issa n ce s.
Tous les jours 011 voit les enfans des cultivateurs se constituer euxmèmea
�,
,
< ' > 7 "5
xnêrtics , dans leur contrat de mariage, des sommes provenues d e leura
épargnes et de leurs travaux ; on voit même des filles en faire autant
dans leur contrat de mariage , en présence de leurs parents , san* que
dans aucun-cas , dans aucun temps il soit encore entré dans l ’idée des
héritiers institués , des légitimâmes, de demander le rapport de ces- som
mes pour en grossir la masse des biens paternels. O ui , il est sans exem
ple que des héritiers aient exigés qu’un légitimaire mécontent de la
part qui lui était fixée, pour lui tenir lieu de ses droits, rapportai à la masse
des biens à partager , ce qu’il s’était liii-mème constitué dans son con
trat de mariage , comme provenant de ses épargnes , parce qu’encorô
une fois on a considéré ces profits comme devant participer de la na
ture des biens quasi-castrence , et que sous ce point- de vue ils’ n ’étaient
pas sujets a rapport.
Si c’était une erreu r, comme l ’â dit Pierre S a b y , qui contrarie le i
principes puises dan* la loi sur la puissance paternelle, il faudrait la
confirm er, parce- qu’étant devenue générale , elle a acquis force de loi;
F.rror fommunis fa ç it legem. E lle devrait être consacrée, parce qu’elle
sert d’un aiguillon puissant aux enfans-des cultivateurs pour les déter
miner à abandonner nos contrées , et à aller chercher chez les habitans
d'autres contrées , qui ont des richesses, mais non de l ’industrie
le n u
méraire qu'aucun autre canal ne pourrait- faire parvenir dans nos
montagnes.
.
Mais pourquoi se tant appéèantir sur l ’usage , sur la force qu’ik d o it
a v o ir, sur l ’avantage qui en résulte pour nos contrées ? N e suffit-il
pas à Bard d'invoquer en sa faveur ,. pour faire rejeter , proscrire la
prétention de ses adversaires , les dispositions • du contrat de maria«fe
de son ayeul ?
°
O n y voit dans >ce contrat’ dé manager qui est du 2 i janvier 1737V
qu’Andre Saby a ete constitue par N o ël Saby son frère , à une somme
de deux cents francs
pour ce qui lui revenait dans les biens de ses
père et mere , et qu il s est constitue lui-même une somme de trois
cent cinquante francs qu’il avait par devers lui , comme provenant de
ses épargnés.
D e la distinction de ses deux sommes n’en résulte-t-il pas évidem
ment q u d n y a que la somme de deux cents francs qui puisse êtrfc
sujette a rapport, si e lle 'a étépayée ? N ’en résulte-t-il pas sur-tout que
N o ël Saby père et beau-père des adversaires de B ard, était convaincu
que la somme de trois cent cinquante francs qu’André Saby son frère
se constitua lui-même , comme provenant de ses épargnes , lui était pro
pre , et que dans aucun cas , dans aucun temps il 11e pourrait y avoir
droit ? N ’en résulte-t-il' pas qu’il y a fin de non-recevoir contre là
prétention de Magaud et de sa femme , qui a pour objet le rapport
a t cette somme’ de trois c u it embuante francs à la succession dont
C
�'(
ï
ïe partage est ordonné. Concluons donc,' et
cette prétention qu’injustice, absurdité ( i) .
C I N Q U I È M E
..
..
disons qu’il n*y a dans
Q U E S T I O N .
U aclion en partage dirigée contre un des détenteurs des biens, possédant
' par indivis avec ses cohéritiers, interrompt-elle la prescription v is - à vis ces derniers ! (2).
C e n’est pas seulement par les mêmes moyens que Pierre Saby a fait
valoir contre B a rd , que la prétention de ce dernier est combattue ; ses
nouveaux adversaires , les tiers opposans, en les reproduisant, en a jou ten t
un qui leur est propre ; ils prétendent que l ’action en partage n ’ayant été
dirigée que contre Pierre S ab y, n ’a pas pu leur nuire, leur préjudicier ,
interrompre la prescription à ieur égard.
L a discussion de la question qu’ils mettent au jour, ne sera ni longue,
n i difficultueuse, et il sera facile de leur démontrer qu’il n ’y a encore
qu'erreur dans leur nouvelle prétention.
U n point essentiel à rappeler , pour ^parvenir à la solution de cette
q u estio n , est que les nouveaux adversaires de Bard et leurs auteurs ont
toujours jouis avec Pierre Saby, second du nom, contre qui la demande
en partage fut dirigée en 1736, de la totalité des biens sujets au p a rta g e ;
que cette jouissance commune qui avait pris naissance, qui était fondée'sur les
actes de sociétés générales et universelles contractées entre Pierre Saby,
premier du nom , d’une p a r t, et Antoine Bruhat et Catherine Saby,
.d’autre, par les actes publics qui sont rapportés et qui sont des 16
février 1694 et 3 janvier 170 6 , s’est perpétuée jusques à présent, de sorte
que quoiqu’il soit de principe en droit que toute société est r o m p u e ,
.dissoute par la mort d’un des associés , morte solvitur societas, il est
cependant certain que par une volonté tacite et bien exprimée par Ie
fait, les sociétés générales contractées entre les auteurs communs, se sont
perpétuées entre leurs descendans ; et que par le fait de la jo u issa n ce ,
de la cohabitation commune ; par la circonstance qu’ils ont toujours mis
en commun les profits qu’ils ont faits , et que dans plusieurs actes
.publics qu’ils ont passés , ils se sont dits communs et associes cfl
biens; il en résulte qu’il faut considérer ces sociétés générales établies
en 1694 et en 1706 , comme ayant été renouvellées e x p ressém en t *
.chaque génération.
Ci^ Q u o i q u e d a n s le urs m o y e n « en ti erce o p p o s iti o n , M a r a u d et sa f e m m e n ' a i e n t pas r e n o u v e l é
c e l u i q u e l ' u n v i e n t île d i s c u t e r , o n a c r u i l e v o i r l e p r é v o i r , p a r c e q u e P i e r r e S a b y l ’i v a i t e m p i
aveu f o r c e , et qu'cnx-niéines p e u v e n t to ujours y avoir recours.
, .
•
i . le I*
( î ) M a^ a tu l et sa f e m m e a p r i s a v o i r o p p u s é la p r e s c r i p t i o n , o n t dit q u ' e l l e était ac q u is e lor 1
d e m a n d e j n r t i u e c o n t r e P i e r r e S i l i y , e t o n t a j o u t e p a r é c r i t , i/u’iUr ttm t h i v plus im -ou tn tiélc enJ *
]lS
A ' C.tlhivs'it Snhy ; il on t d i t p u b l i q u e m e n t q u e l.t i l er . i ni i . l e n ' a y a n t p J s e t i f o r m e e dans l e m e m
¡v
c o n t r e cctt'-* d e r n i è r e , U p r e s c r i p t i o n a v a i t c o n t i n u é d e c o u r i r e n s a l a v e u r . L j l i mi t e ' j u ü s o n t t .
les p r o p o i qu 'i ls p u t te n u s o n t d é t e r m i n é à t r a i t e r l a q u e s t i o n p r o po s ée .
�^
y
. 1 e fait de la j'ouissance commune qui a toujours eu lieu entre tou»
les adversaires de Bard, qui existait- à l ’époque de la demande en partage
formée en 178G, et qui n’a cessé pour les biitimens seulement que d.epma
•
le 5 janvier 1792, époque d’un acte public reçu Vissae notaire, suffit seul'*
pour faire décider la question.
•*
t « l i e n est des héritiers du débiteur, comme des coobligés m êm es,1
» tant que ces .cohéritiers n ’ont pas (fait départage entr’eux. D es co -'
*> héritiers qui sont encore dans l ’indivision, sont réputés associés pour
y tout ce qui est relatif aux biens de la succession; ils sont çenscs jnaji- •
V dataires les uns des autres à cet égard; ainsi l ’interruption qui est
» faite contre l ’un d'eux, est réputée faite contre la succession elle
» même; » c’est ainsi que s’exprime sur cette question le dernier com
mentateur de la coutume de la ci-devant Auvergne.
• Écoutons ce que disent plusieurs coutumes de France, qui ont prévu$i
la difficulté :
,
« Interruption de prescription faite contre l ’un des frères ou communs Bourfconnaîs.
» p o s s é d o n s par indivis ; aucune chose sert et profite comme si elle
art-35» était, faite contre les autres communs personniers en ladite chose. »
« L ’interruption civile par ajournement lib e llé , ou convention judiBerry.
» claire, ou autrement, faite pour le regard de l ’un des possesseurs ou tlt- 1S',rt-l6» détenteurs par indivis , de la maison ou héritage que l ’on veut prescrire
» a effet contre tous les autres possesseurs et détenteurs par indivis ,
>> dudit héritage , et leur nuit et préjudicie. »
« Interruption de prescription faite contre l ’ùn des. frères ou communs. Nivcrneis.
ü> possédans par in d iv is , aucune chose ,. nuit aux autres frères o u t!t 36 art- ?•
>> communs. »
. .
,
.
.
.
« Pour empêcher prescription- de trente ans, ou icelle interrompre
Anjou
» entre frarescheur , suffit à celui frarescheur contre lequel on objicerait art. 435..
» p r e s c r ip t io n , montrer et enseigner quant aux choses communes et
» iiidivisees entre lesdits fraresclieurs , que l ’un d’eux a été inquiété , ou
2 sa possession interrom pue, car en ce cas où les choses sont encore
y indivisées , l ’interruption faite à l ’un préjudicie aux autres. »
T el est le langage unanime de ces coutumes sur la question à laquelle
donne lieu la prétention de, Jean Magaud et de sa femme. L eur décision
imiiormè prouve que cette question ne devrait pas même en faire une. Il
suffit qu’une action soit dirigée dans un temps utile , contre un des
détenteurs d’un bien possédé par indivis avec d’autres, pour que l ’action
n u i s e , préjudicie à tous, qu’elle interrompe la prescription à l ’égard
de tous.
« Quand on s’adresse contre l ’un des possesseurs , par indivis , dit
énergiquement Coquille , 1 adresse est faite poiius in rem , (¡uam
» in personnarn , et nuit à tous ceux qui y ont part. » A in si il est
certain que liard en Xormaut en 1786 la demande en partage deo
.
.
.
'
C 2
�biens <5e scs auteurs , contre Pierre S a b y , avait moins en vue d e
s'adresser directement à c e lu i- c i, qu’aux biens auxquels il prétendait
dxoit ; que les biens seuls m en ta ien t, attiraient toute son attention;
qu’eux seuls étaient le mobile de son action ; qu’ainsi et quoiqu’il ne
s’adressa alors qu’à Pierre S a b y , un des détenteurs des biens , son action
n'a pas moins eu l ’effet d’interrompre la prescription contre tous les
autres détenteurs , parce qu’elle était dirigée potius in rem quam in
personnam.
Q u ’on ne ’ dise pas que les autorités de ces coutumes ne peuvent
être d’aucun p o id s, d’aucune autorité en A u v e rg n e , leurs dispositions
ont de tout temps été reconnues si sages , et tellement fondées sur la
justice et la raison qu’elles ont toujours été approuvées par les juriscon
sultes , et regardées comme devant formeF le droit commun ; c’est ce
qui a fait dire à Chabrol , qu'il en est des héritiers d ’un débiteur
,
comme des coobligés même et que tant qu'ils n’ont pas f a i t de partage
entr'eux le principe est le même.
O n convient qu’il en ;est autrement à l ’égard des cohéritiers qui
ont cesse d etre dans l ’indivision, et que dans ce cas l ’action dirigée
contre un ne peut pas nuire aux autres. O n convient qu’il en est encore
autrement dans le cas ou un demandeur restreindrait sa demande contre
un cohéritier jouiesant par indivis avec d’autres, à la portion pour
laquelle il serait personnellement tenu de l’objet de l ’action , et que
dans ce cas encore l’açtion dirigée contre un ne nuirait point aux autres,
mais hors ces cas, et tant qu’il y a indivision entre des cohéritiers , tant
qu’ils jouissent en commun d'un bien , il est certain , il est incon
testable que l ’action dirigée contre
, n u it, préjudicie à tous.
;
Pour demeurer convaincu que ce qu’on vient de dire ne peut pas
être combattu avec succès , il suffirait de rappeler les expressions de
M . Charles Dumoulin sur l ’art. i 5 du titre i2 d e là coutume du Berry t
et sur ce mot prejudicie.
Fntellige , dit ce savant et profond jurisconsulte quando reus supeT
toto convcnitur et super toto procedit et H oc e s t v a l v e j v s t v m , quam -
,
t Îs
sit contra, ju s scriptum individuis : secits si aclor conveniat unnmE x possessoril us pro parte sud t ant um, quia tune re.mcmct. régula ju vis
commuais quoad ahos. Il suffit donc que celui qui réclame des droits
contre un des détenteurs d’un bien possédé par indivis , réclame la lo
calité de ce qui lui revient , pour que son action nuise , préjudicie à
tous les autres détenteurs. H oc e s t v a l v e j u s t u m (i).
_____ t
(0 Dv la nole mise nu Iws île h premii'rc question, il réjulte qu'ü l'époque île l:i ile*iamle forme;
cor.>'r;pj,.rrC Sahy tn t7HJ>, il ne l’etnit écoulc une ans un mois et >jours île temps utile pour
jee* motion . et en calculant tlepuis cette époque jiuqu’nu premier mmsiilnr a n V I ( 19 juin t; i'<
date Oc ln *•!t-nti-,n en 'rnncilintitm portée à Mi'.;:uii| et à si femme, il ii't a Tne H »lis : 11101^
■jour', ceji'ii r.ijr nn total Je 2« .111s4 mois 4. jour«, aütsi point île preterijuion en supposant
que Iïs l'rinv.fccilpUiuitnc l'ussmt pas en favïisr dî Bard.
.
�-
S I X I È M E
Q U E S T I O N .
-
IV a-t-il quelques biens meubles sujets au partage ordonné par ls jugement
en dernier ressort de 1792 / Y a-t-ïl plus de deux immeubles , mèm®
. ¿lus de quatre sujets à ce partage î
Nous avons terminé la discussion de toutes les questions de droit
âiix qu’elles a donné lieu la tierce opposition formée de la part de Catherine
Saby et de Jean Magaud. N ous sommes arrivés au moment d’établir deux
points dé faits qui sont certains, incontestables , c’est-à-dire qu’il y a
des meubles sujets au partage dont il s’agit ; qu’il y a plus de deux ,
même plus de quatre immeubles qui doivent y être compris , et cette
tâche 11’est pas aujourd’hui pénible à remplir.
• Dans tout le cours de la procédure qui a eu lieu depuis 1786 jusques à présent , Jean Saby et avant lui son père se sont toujours obs
tinés à soutenir qu’il n’y avait aucuns biens m eubles, aucuns biens im
meubles sujets à partage. U n jugement contradictoire l’a cependant or
donné , et ce jxigement est celui du 3o aoiit 1792.
• A lors l ’obstination de Pierre Saby à soutenir son système parut s’ac
croître de plus en plus , et cependant rentrant un peu en lui-mème, il
convint dans un procès-verbal du 2o octobre de la même année , qu’il
y avait' seulement quatre héritages sujets à ce partage , et il eut la
bonté de les désigner d’une manière assez précise.
Fâché sans doute d’avoir fait un pareil aveu , après avoir cherché par
tous les moyens possibles à éviter le transport des experts qui furent
nommés successivement ; après avoir donné lieu à plusieurs incidens ,
et voyant arriver les derniers experts nommés pour procéder au parta
ge , il soutint à ces mêmes experts ( ce fait est consigné clans un rap
port du t 6 messidor an. III ) qu’il n’y avait que deux héritages sujets*
à ce partage , et il eut encore la bonhommie de les désigner.
. E nfin, après plusieurs contestations il a été décidé par un jugement du 6
fructidor an V que Pierre Bard indiquerait 1ns biens sujets au partage, et
par un autre du 2i nivôse an IX , il a été chargé de faire la preuve de
la consistance des biens meubles , des titres de créance e t des immeu
bles provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Ladiaud.
.
Par ce même jugement , il -a été ordonné que des experts pris par
les parties ou nommés d’office feraient l ’application des titres produiu
par Bard , et comprendraient, dans leurs rapports tous les immeubles
qui avaient etc donnés pour confins aux .héritages acquis , et qui étaient
dits dans les a t.es, appartenir à ou aux acquéreurs , c’est à-dire, à Pierro
Saby, à André Saby, à Antoine Bruliat, ou à Cathcrino Saby, qui tous sont
désignés comme acquéreurs dans tous les actes produits par Bard.
Des témoins ont été produits de part et u’autre , ils ont élé enton•dus. Des experts on t. été nom m és, ils ont .opéré. 11 ne Va^it dvue
�C
255
)
.
.
,
,
.
plus que de jeter tiB côitp illceil rapide 'sur cc qui résulte des déposi
tions des tém oins, et du rapport des experts , pour juger du peu de
fondement de la prétention de Jean Saby.
D ’abord, relativement'aux dépositions des témoins qui ont trait à la
consistance des biens meubles , nous trouvons quatre dépositions pres
que 'uniformise dans l'enquête’ faite à la diligence -de Bard.
L e troisième témoin déclare qu’il y avait constamment dans la mai-*
son de Pierre Saby deux paires de bœufs, dix v a ch es, deux jumens
pBuiiniairjs , d ix chèvres , entour deux cents moutons , mais qu'en hiver
le troupeau diminuait quelquefois.
L e quatrième dit qu’il y avait quatre paires de bœufs, douze vaches,
deux jumens et un troupeau de moulons qui s’élevait quelquefois jus*
qu'à quatre cents , mais qui était quelquefois de deux cent cinquante.
■ L e sixième assure que la maison des Saby fa isa it le commerce d&
moutons , nu’habduellement i l y ayait un troupeau de deux cents bêtes
« laine , huit ou dix vaches et deux jumens, pouhniaires.
L e septième ne . parle que de deux paires de bœufA ; mais le hui-.
tième parie encore de deux paires de bivufs , d’un troupeau de moutons
de deux cents à deux' - cent quarante , de sept à huit vaches 3 de sept
à huit clùvres et d’une jument.
.
.
Jinfm T. tous ces témoins s’accordent parfaitement sur un point essen
tiel : ils disent que la maison des Saby passait pour être pécitnieuse eh
qu'elle jouissait d ’une aisance notoire.
Si nous jetons actuellement les yeux sur les dépositions des témoin*
qui ont été produits par Jean Saby ; si imus rapprochons ces déposilio n s'd e celles des témoins qui ont été produits par B ard, nous veri
iori6 que ce qu’on dit ces derniers , et que l ’on vient de rappeler , ac
quiert un nouveau degré de force et de vérité , et qu’on ne peut faire
autrement , d’aprèa la réunion de toutes ces dépositions , que de demeu
rer convaincu que Pierre Saby et Antoine Bruhat son beau-frère et son
associé , Catherine Saby sa iccur et aussi son associée, après le décès de ce
dernier , jouissaient d’une fortune opulente ; qu’ils avaient constamment
au moins deux ou trois paires de bœufs , d.ix vaches , un troupeau
moutons a entour deux cents , sept à huit chèvres et deux jumens.
U n pareil nombre cle bétail suppose nécessairement l ’existence de
tous les inslrumi. ns aratoires , des chars , des charrues, jougs , clefs de
parc elc. et tout cela suppose encore l'existence d'un mobilier quel
conque dans la maison de Tierre Saby , proportionné à l ’opulence dont
il jouissait.
,
.
Nous avouerons cependant , que d'après les dépositions des témoins
produits par Saby , il résulte que sa maison s’est cou.Vukrablement
accrue depuis le déct-s de Pierre S ab y, de cujus ; mais qu'il sache
*piu Bard n’a jamais poussé ses prétention.1* jusqu’il soutenir que 9
�J
M
)
...
.
totalité des biens dont il jouit actuellement 'e s t sujette au partage
'ordonné; mais qu’il a soutenu qu’il y avait plus de deux , même
plus de quatre immeubles sujets à ce partage ; qu’il y avait des meu
bles , et que convaincu par les dépositions des témoins qui ont été
entendus ; qu’accablé même par la réunion de ces dépositions , Saby
jentre une fois en kii-mêmeet qu’il convienne au moins aujourd’hui que son.
obstination et celle de son père , à soutenir qu’il ri’y avait aucuns
.biens sujets au partage n’ont été propres qu’à faire faire des frais
■dont il doit nécessairement être victim e, comme Bard avoue franche
m ent de son côté que lui Saby a droit à des distractions incontesta
bles et qu’il n ’a qu’à les faire connaître pour les obtenir.
L e jugement du 2 i nivôse an I X , ordonnait que Saby remettrait
entre les mains des experts, le9 titres qui devaient servir à établir ces
•distractions, mais il s’y est constamment refusé. L e s experts qui ont
opéré l’attestent dans leur rapport , et si ces experts n’ont point fait
jen sa faveur les distractions qu’ils auraient pu faire ; s’ils ont compris
dans leur plan une quantité plus considérable de terrein que celle qui doit
•en dernière analise être comprise dans le partage , il ne peut l ’impu
ter qu’à lui-m êm e, au refus constant de remettre ses titres.
D ’après le rapport de ces experts , tous les titres produits par Bard
.ont reçu une application parfaite sur les héritages jouis encore par
indivis par Jean S a b y , Catherine Saby et Jean Magaud. Ces experts
'ont
constaté l’identité
des héritages énoncés dans ces mêmes
’titres , avec ceux possédés par ces derniers , et enfin il résulte de leurs
opérations, de l’échelle jointe au p la n , du calcul que l ’on a fait d’a
près cette é ch e lle , que plus de soixante septerées de terre sont sujet
tes au partage ordonne ; ainsi , que Saby cesse donc de dire qu’il n’y a que
deux héritages même que quatre qui doivent être compris dans ce
partage.
Si cependant il lui restait a Saby quelque espoir de pouvoir répondre
à c? que nous venons de dire ; de pouvoir combatiré soit les déposi
tions des témoins , soit le rapport des experts, qu'il écoute avant de
l ’entreprendre ; qu’il lise avec attention une preuve littérale , une preuve
authentique et légale qui vient corroborer , fortifier soit la preuve vocalo,
soit le rapport des experts , et qu’il nous dise ensuite si l ’un ou l ’au
tre peut être critiqué avec succès.
V oici mot à mot en qu’on trouve dans le rôle de la commune (le
•Chainpagiiat-le-vieux , quartier de L ach au d , pour l’aunée 1 7 8 7 , rôle
rendu exécutoire le i 3 novembre 1 7 3 6 , et enregistré à Issoire le même
jour.
-
Ticrrc et N o ël
Suby , p ire et fils , et Jean Magaud
neveu dudit
�.
.
<
24
5
.
,
Pierre , communs en biens , labourant à deux- paires de - bœufs et une
paire dz vaches , cent quinze francs , ci. . . . . i i 5 fr.
» sois.
Capitation , quarante-sept francs trois sols , ci. . 4 7
3
.
1
Crue , vingt - deux Lancs un s o l, ci.............................22
T o t a l, ccnt quatre vingt-quatre francs quatre sols , ci.
184 fr.
4 sols
re u t-il d’après cela rester encore quelque doute sur la vérité des fait*
. nites-lés p a rle s témoins à l ’égard des meubl.es et des bestiaux , sur la quan
tité des immeubles sujets au partage ordon n é, tel qu’il résulte da
rapport des experts ? L'énonciation qui se trouve dans ce rôle ne les
dissipe - t - elle pas tous d’une manière irrésistible , et' Saby ne
scra-t-il pas forcé d’avouer que les témoins n’ont rien dit que de con-*
forme à la vérité ; que le rapport des experts n’embrasse pas même peut*
être tout cc qui devrait y être compris? Entrons maintenant dans un cal
cul simple mais palpable.
L e rôle de Champagnat., quartier de Lacliaud , comprend neuf villages,
Lachaud , Toiras , I\eyrolles , Leglial , Gcnestoux, le Boucharel ,.Balistre,
Balistroux et Olpignat, Ces neuf vdlages payaient en.principal ou acces
soire d’impositions 2673 francs i 3 sols. L a seule maison des Saby payait
184 francs 4 sois , c’est-à-dire à peu près le treizième des impositions ,
ce qui suppose que cette maison possédait à peu près- le treizième des'
biens ’des neuf villages. Faisons un autre calcul.
"
Il est de notoriété; publique', et il 11e faut pas avoir des connaissances
bien étendues pour savoir que les impositions ont considérablement ac
crues depuis 1787 jusques à nos jours; que tel bien qui à cette époque
payait 2oo francs d'impositions-doit aujourd'hui en payer 3 oo même 400
francs : mais supposons que cette augmentation d’imposition n’est pas ar
rivée ; supposons que le même bien qui.existait à cette époque n’est grevé
aujourd’hui , comme il était alors , que de 184 irancs 4 sols d’imposition,
et calculoii.3 d’après nos lois. •
L es impositions sont le cinquième du revenu net des biens. Pour
connaître le capital il faut donc quintupler le. montant des imposi
tions et par cette opération nous trouvons que le bien qui existait
en 1787 , grevé de 184 francs 4 sols d’im position, doit au moins
fitre en valeur de 18400 irancs : ce calcul ne peut pa* être com b a ttu avec
succès.
t
Ce rôle de l ’année 1787 , a donc non seulement corroboré , fortifie
la preuve qui résulte des dépositions de tous les témoins qui ont etc
cnU-iidus , mais encore, il a conduit à la découverte d e là valour au moins
Approximative, des immeubles sujets au partage ; ainsi il ne peut plus res
ter aucun «luutc sur la consistance des biens immeubles; ainsi le ra p p ort
des exports mj
pas paraître embrasser une plus grande quantité
de biens que Cyllc q u i est sujelty au par'.agc.
.LCS
�. f
ft5t
)
Le* titres translatifs de p r o p r e s rapportés par Bard , qu’il n ’a recueil
lis qu’à grands frais et qui ont été souscrits par différents particuliers
en favçur des auteurs communs , depuis 3 , jusqu’en 1 7 0 7 , constatënt 'q'iiëices dem iérs' ont acquis dans x e t espace de temps pour plus
de trois m ille 'liv re s d’immeubles.
:
■
11
est »de fa it in'scontestable que depuis la fin de 'l ’avant - dernier siè
cle jusqües à* présent, les propriétés foncières ont fait plus que quin-’
tiipler de valeur ; et cela conduit à la-certitude que les biens énoncés
dans le*s ventes rapportées par Bard doivent être aujourd’hui en valeur
aii m o in s de quin ie m ille francs; et si nous observons que les auteurs,
des parties jouissaient avant' ces acquisitions d’une fortune honnête ;
qu’iis étaient au morns présumés en jouir ( car les acquisitions qu’ils fai
saient le prouvent -), on demeurera convaincu que le premier calcul que
l ’on a fait n’a rien d’exagéré ou plutôt qu’il est au-dessous de la valeur
té e lle des biens sujets au partage.
N e pouvons - nous pas dire maintenant avec certitude, qu’il y a des
biens meubles sujets -au partage .ordonné ; que tous les immeuble*
énoncés dans les titres rapportes par Bard doivent y être compris • quç
la prétention de Sal>y est injuste et absurde , et que soutenir qu’il ne
devait: être compris que deux même qwe quatre immeuhles , c’etait
soutenir une'erreur qui n’était'propre qu’à faire faire des frais dont nul
autre que Saby ne peut être tenu? ■
L e s tribunaux saisis de la connaissance des contestations des parties,
ont à prononcer sur des intérêts majeurs ; ils ont à mettre fin à un procès
qui dure depuis lougues années, et à statuer si une famille plongée dans la
misère , privée depuis 60 ans et plus de la portion qu’elle amende dans un
bien conséquent,peut enfin espérer de voir la fin des incidens que ses adver
saires , qui sont dans l’opulence , ne cessent d’élever malgré un jugement
en dernier ressort, rendu depuis plus de 10 anç. L a tierce opposition
formée par Magaud et sa femme contre ce jugement, donne lieu à statuer
de nouveau sur les mêmes questions qui ont été décidées par ce jugement.
Ces tiers opposants seront - ils plus heureux que celui qui les a précédé
dans l'arêne ? Parviendiont - ils à prouver d’après les circonstances
particulières qui se rencontrent dans la ca u se , et qui résultent des
actes publics passés en présence de toute la famille , les 2i septembre
*749 et 11 novembre suivant , qu’un absent est répute vivre 100 a n s ,
que
pendant cet
espace de tem ps, toute action
est
inter
dite à ses héritiers de droits l i.tabliront-ils , en convenant qu’une ins
titu tio n d’héritier faite dans un contrat de mariage , en faveur d’un noncontractant, est nulle d’une nullité absolue ; que cette nullité a été co u
Verte par Une ratification pure " et simple faite postérieurement dans son
«ontrat de mariage ? Seront-ils assez heureux pour faire oublier les princi
pes, jusqu’au point de persuader qu’en Auvergne les enfaris des cultiva«
’
'
D
�partage, n’interrompt pas la prescription contre tous ! ils peuvent se flatter
de réussir , mais qu’ils n ’invoquent pas au moins P o th ier, Brétonnier ,
Rousseau-de-Lacombe, Dum oulin, qui tous prononcent leur propre condam
nation, et disent tout le contraire de ce qu’ils leur ont fait dire : et Jean
Saby qui en suivant le genre de défense embrassée par son p è re ,a toujours
soutenu qu’il n’y avait aucuns biens meubles sujets au partage , convien
dra-t-il au moins aujourd’hui q u ’il doit y en avoir quelques-uns ? et aban
donnant les assertions de son père à l’egard des immeubles, avouera - t-il
q u ’il y en a plus de deux , même plus de quatre sujets au partage ! Si
les uns et les autres continuent d ’esperer que fo .misère dans laquelle
Bard est plongé ne lui permettra pas de poursuivre jusqu’à jugement défini
t i f la réclamation de ses droits , qu’ils se désabusent ; cet espoir fonde
sur l ’indélicatesse , sur la mauvaise f o i , sera déçu , et ils a p p re n d ro n t
que la détresse la plus absolue peut quelquefois lutter contre l ’opu
le n ce.
'
"
‘
'
A L L E Z A R D ,
AU
homme de loi à Brioude
P U Y , de l’imprimerie de C r e s p y et G u i l h a u m e , Im p rim eu r
Libraires, rue du Collège.
A u X»
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bard, Pierre. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allezard
Croizier
Subject
The topic of the resource
communautés familiales
partage
absence
testaments
coutume d'Auvergne
droit romain
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Bard, cultivateur, habitant de la commune d'Agnat, demandeur et défendeur en tierce opposition, contre Jean Saby, fils à Pierre, défendeur, et Catherine Saby, et Jean Magaud, tous cultivateurs, habitans du lieu de Balistroux, commune de Champagnat, demandeurs en tierce opposition.
Annotations manuscrites
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l''Imprimerie de Crespy et Guilhaume (Puy-en-Velay)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1674-Circa An 10
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0247
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Agnat (43001)
Champagnac-le-Vieux (43052)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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absence
communautés familiales
coutume d'Auvergne
droit Romain
partage
testaments
-
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25bc946bc217202ffb203795c226a0cf
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Text
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’
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P O U R
C H E M E L ,
in tim é
• CONTRE
•
P h i l i p p e S A I N T - B U T , appelant.
L
’ a p p e l est d’un jugem ent du tribunal d'arrondisse
ment de M o u lin s , du 7 germinal an 11 , par lequel
l’appelant a été déclaré purement et simplement non
t
r
recevable dans la demande qu il avoit
form ée contre
l’intimé en payement d’une rente de 24 boisseaux de blé
seigle, et l’intimé quitte et absous, avec condamnation
des dépens contre l ’appelant.
L 'u niqu e question est de savoir si la rente réclamée
par l’appelant est du nom bre de celles qui sont com
prises dans l’abolition générale des droits fé o d a u x , p ro
A
�noncée par les lois de
1792 et
17 9 3 ; et c’est cette
question qui a été décidée pour l’affirmative par le juge
ment dont est appel.
L ’article X V I I du décret du z 5 août 1792 porte que
dans l’abolition des droits féodaux ne sont pas com
pris les ren tes , champarts et autres redevances qui
ne tiennent point à la féo d a lité , et qu i sont dûs p ar
des particuliers à des particuliers non seigneurs ou
possesseurs de Jiefs.
• 'v
D e là la conséquence nécessaire que les rentes, cliàmparts et
autres r ede vanc es
qui
t iennent
à la féodalité >
et qui sont dûs à des seigneurs ou possesseurs de fiefs,,
sont compris dans l’abolition.
Si la redevance de vingt-quatre boisseaux de seigle,
réclamée par l’âppelant, tenait à la féodalité, et si elle
étoit due à un seigneur de fief, il a donc été bien jugé
par le tribunal de M oulins, et l’appel est inai fondé.
O r , il suffit de rappeler les titres qui ont été pro
duits en cause principale, pour porter jusqu’à la démons
tration la preuve que la redevance dont il s’agit tenoit
à la féodalité, et qu’elle étoit due à un seigneur de fief.
On pourvoit même l’établir par la seule disposition
de la coutume de Bourbonnais, dans l’étendue de laquelle
se trouvoit situé l’héritage sur lequel étoit assise la rente
dont il s’agit.
L ’article C C G X C II de cette coutume dit que la pre
mière rente constituée sur aucun héritage allodial >
�(3 )
■s'appelle rente fo n cière, et emporte droit de directe
seigneurie et de lods et ventes. L a directe seigneurie
attachée à une rente, et les droits de lods qui en sont
une suite, n'impriment-ils donc pas à une pareille rente
le caractère de féodalité?
Mais c’est surtout dans les titres produits au p r o c è s ,
qu’on trou vera, A ne pouvoir s y m épren d re, que la
rente tenoit A la féodalité, et qu’elle étoit due A un sei
gneur de fief, A cause de son fief ; et ce n’est qu’en,
omettant la plupart de ces titres, ou en mettant de côté
leurs principales expressions, qu’on a tenté vainement
de dénaturer la rente dont il s’agit.
L.e fief
et
domaine
de
Pouzeux,
d’où dépend
cette
rente, fut adjugé sur une saisie réelle en la sénéchaussée
de M oulins, par une sentence du
25
juin 1697 : l’ad
judication qui fut faite A la demoiselle Françoise A ubert
comprend le domaine de P o u z e u x , cens et droits en
dépendants.
Il y eut trois ans après une reconnoissance de la
rente , du 20 mai 1700, par Pierre Jam in , alors proprié
taire de fhéritage sujet A cette ren te, en faveur de la
demoiselle
Aubert ,
maîtresse de la seigneurie
de
P o u zeu x. Cette reconnoissance n’est pas un titre nou.
.
*
.
veau : il y est dit qu’elle est faite conformément au
titre primordial que la demoiselle A u bert en a ’ et il
•y est dit encore que la rente sera portée et payée èa
■
ladite seigneurie de Pouzeux.
A 2
�4
(
)
II y a lieu de croire que le titre prim ordial, s’il étoiü
rapporté, donneroit encore plus ¿ ’éclaircissement sur lar
nature de la rente ; et l’on verra bientôt que ce titre
primordial doit être au pouvoir de l’appelant.
L e 23 août 1720, la demoiselle A u bert vendit le fief
de Pouzeux à la demoiselle T ix ie r de la Nogerette. Il
est dit que la vente est faite du domaine de P o u z e u x ,
bâtimens, terres, etc. avec ‘le fo n d s des cens et devoirs
q u i sont dûs et dépendans de ladite maison de P o u zeux. Il y est encore dit que parmi les titres délivrés à
1 acquereur est une expédition en papier portantperéque-
ment des devoirs vendus entre les codétenteurs, passée
pardevant Duclier en 1660; ce qu’on appelle en A u
vergne également de cens est connu en Bourbonnais et
ailleurs sous le nom de peréquement. Enfin il est ajouté
que la venderesse se réserve les arrérages des devoirs
qui sont échus dudit terrier.
L e même jour d e là vente il y eu t, de la part de la
demoiselle T i x i e r , un acte de prise de possession du
domaine de P o u zeu x , otVil fut dit qu’elle prenoit posses
sion dudit domaine avec lejbn ds des cens et devoirs qu i
en dépendaient.
L e 11 octobre 1 7 6 1 , nouvelle vente du fief de P ou zeux , par un procureur constitué de Jean - Baptiste
T ix ie r de la N ogerette, à Pierre D u ran d, où il est dit
que dans la présente vente sont aussi compris quelques
articles
de
devoirs qu i étoient dus au vendeur a
cause
�C 5
)
du terrier acquis avec ledit domaine. II est aussi dit, dans
cette vente, que le vendeur a remis à l’acquéreur quel
ques titres qui sont désignés, et qu’il s’est obligé à lui
remettre tous les autres titres, papiers et enseignemens
et terrier concernant la chose vendue.
' -
L e fief de Pouzeux étoit mouvant du duché de B ou r
bonnais ; aussi voit-on , à la suite de là vente du 11 octobre
5
i y i , l’acte d’investiture qui en fut donné àTacquéreur
par les officiers de la chambre du domaine de ce duché,
le 24 février 1762.
r
L e 26 juin 1 7 7 6 , Jean Dubost et Jacques Chemel
firent l’acquisition du domaine des C h o p in s, dans la
paroisse de Treb an , d’où dépendoit la terre des M o n taix,
assujétie à la rente dont il s’a g it, à la charge de servir
i\ l’avenir les cens et devoirs qui se trouvoient sur les
objets vendus.
Soit pour faire courir le délai du retrait lignager,
soit pour empêcher le retrait censuel sur les fonds qui
dépendoient d’ une censive , et q u i étoient tenus en
directe seigneurie, il étoit nécessaire, suivant la coutume
de Bourbonnais, de prendre l'investiture des seigneurs
directs : c’est à
quoi les acquéreurs du domaine se
conformèrent ; et on trouve aux marges du contrat du
26 juin 1776 les actes d’investiture des différentes sei
gneuries qui avoient des censives sur des héritages dépendans de ce domaine.
•
Dans le nom bre de ces investitures est celle donnée
A3
�.
(6)
par le sieur de Saint-But, appelant, et qui contient en
m êm e temps quittance des droits de lods. Il n’est pas
inutile de transcrire cet acte : « Investi le présent contrat
» pour ce q u i relève de notre terrier de P o u z e u x ,
» après que l’acquéreur nous a payé les simples et doubles
» lod s, pour raison de ladite acquisition, sans préju» dice aux droits d’a u tru i, et à l’année de cens qui
» écherra à la saint Michel prochaine, l’année échue à
» la saint M ichel dernière ayant été payée, et à tous
5> autres droits et devoirs seigneuriaux , à
» les acquéreurs de
».
zaine. Fait
» Sa
in t
-B u
à
t
reconnoitre
de
la
charge par
n o u v e a u dans q u i n
V e r n e u il , le 28 novembre 1778. Signé
. »
de
'
V o ilà un acte d’investiture qui n ’eût pas été néces
saire pour la vente d’héritages qui n’auroient été sujets
qu’à de simples rentes ; au lieu qu’il étoit indispensable,
pour des héritages sujets à des rentes en directe sei
gneurie : mais ce même acte renferme de plus la quit
tance des droits de lods, qui ne pouvoient être dûs qu’à
raison d’un héritage asservi à une rente seigneuriale.
Il qualifie de cens la redevance dont il s’agit.
Sans doute on 11e prétendra pas que l'investiture et
les quittances des droits de lods se rapportoient à tout
autre héritage du domaine qu’à celui des M on taix, qui
étoit sujet à la rente dont il sagit. Il faudroit pour cela
qu’on fît voir qu’ il y avoit dans ce domaine d’autres
héritages qui relevoient du terrier de P o u z e u x , ce qui
�(7 )
seroit impossible à l’appelant: et m ê m e , dans son mé
m oire, n’applique-t-iJ pas l’acte d’investiture, et le paye
ment de lods et ventes, à d’autres héritages qu’a celui
des M ontaix; mais d’ailleurs on va démontrer qu’il ne
r el ev oi t
du terrier de Pouzeux que l’héritage des M on-
• taix sujet à la rente dont il s’agit, et cela par un' acte
de fait même de l’appelant.
'
L e 9 mars 178 4 , il fut présenté une requête au senéclial de Bourbonnais, par Philippe de Saint-But, écuyer, ’ •
sieur de P o u z e u x , et la dame D urand sa femme de
lui- autorisée, où ils disent que comme propriétaires du
f e f de P o u ze u x , il leur est dû une rente annuelle et
foncière de vingt-quatre boisseaux de seigle, su r une
terre appelée des M o n ta ix , dépendante du domaine des
Cliopins, dans la paroisse de Treban j ils répètent, dans
plusieurs endroits de cette requête, que le devoir de
vingt-quatre boisseaux de seigle f a i t une dépendance
du f i e f de P o u z e u x , et que devenant propriétaires du
f e f de P o u z e u x , ils le sont devenus du même, devoir f
puisqu’ ils ont acheté et le f e f et ses dépendances. C ’est
après cet exposé que Saint-But et sa femme demandent
permission d’assigner Chem el, qui étoit propriétaire du
,
domaine des Chopins, situé dans la paroisse de T r e b a n ,
comm e
propriétaire détenteur et jouissant de la terre
des M o n ta ix , pour être condamné à payer la rente
de vingt-quatre boisseaux de seigle , et leur en passer
nouvelle reconnaissance , et leur justifier du titre en
a
4
�C8 )
vertu duquel il jouit de ladite terre, pour être pris par
eux telles conclusions qu’ils aviseront, même en paye
ment des lods et ventes , s’il y échoit.
Cette requête fut répondue d’une ordonnance de per
mis d’assigner, et suivie d’une assignation donnée à Ghemel le
5 avril
1784.
Il étoit bien étonnant que Saint-But et sa femme de
mandassent, en 178 4 , à G hem el, la représentation du
titre en vertu duquel il possédoit la terre des M o n ta ix ,
tandis que Saint-But l u i- m ê m e , six ans auparavant, le
28 novembre 1 7 7 8 , avoit donné
l ’i n ve st it u re en
marge
de la vente de 1 7 7 6 , faite à Ghemel du domaine d’où
dépendoit la terre des Montaix. L a réserve de conclure
au payement des droits de lods, dans la requête de 1784 ,
étoit encore bien étonnante, puisque l’investiture donnée
par Saint-But en 1778 contenoit expressément la quittance
des simples et doubles droits de lods.
D u concours de tous les actes et titres qu’on vient de
rappeler avec la plus grande exactitude, de leur parfait
accord, des aveux même les plus positifs qu’on y trouve
de la part de 1 appelant, sort évidemment la démonstra
tion entière que la rente de v in g t-q u a tre boisseaux de
seigle, qui étoit due sur la terre des M o n ta ix ,
là féodalité, et q u’elle étoit due
à
des
t en o it
p art icul iers,
à
sei
gneurs et possesseurs de fiefs.
Q u ’est-il compris dans l’adjudication du fief de Pouzeux
en 1697? le fonds des cens et devoirs en dépendent s. Ces
�C9 )
mots cens et devoirs ne peuvent pas sans doute s’appliquer
à de simples rentes qui n’auroient pas emporté la directe
seigneurie ; et si on avoit voulu y comprendre la rente
dont il s’agit comme une simple rente non censuelle et en
directe, il auroit fallu l’y exprimer nommément.
Quand on consent en 1700 une nouvelle reconnoissance,
au profit de la demoiselle A u b ert, de la rente dont il s’agit,
dont il est dit qu'elle en a le titre p rim itif, la demoiselle
Aubert prend dans cette nouvelle reconnoissance le titre
de maîtresse de la seigneurie de P o u zeu x . C ’est à ce
titre qu’elle se fait faire la nouvelle reconnoissance ; et il
est ajouté que la rente sera payée et portée en la seigneurie
de P o u ze u x .
Quand en 1720 la demoiselle A ubert vend le fief de
P o u ze u x , elle comprend dans la vente le fonds des cens
et devoirs qui sont dûs et dépendans de la maison de
Pouzeux. Nulle mention de simples rentes ; et on ne peut
entendre sous les mots de cens et devoirs que des rentes
en directe seigneurie. Elle délivre une expédition d’un
peréquement des devoirs vendus entre les codétenteurs;
et par cette expression de peréquement on en ten d, en
Bourbonnais, ce qu’on appelle en A u vergn e également
de cen s' c’est-à-dire, l’acte par lequel les codétenleurs
font entr’eux la division des cens, pour la portion que
chacun d’eux doit en payer. L a demoiselle A u bert se
réserve dans le même acte les arrérages des devoirs qui
sont éclius dudit terrier: et qu’est-ce qu’on entend géné-
�( ÏO )'
raleraent par un terrier , sinon le recueil des reconnoissances des cens et de la directe seigneurie.
Quand la demoiselle T i x i e r , qui venoit d’acquérir de
la demoiselle Aubert le fief de P o u ze u x , en prend pos
session , il'est dit dans Tàcte qu’elle prend aussi possession
du fo n d s des cens et devoirs qu i en dépendent.
5
Quand en i y i le fief de Pouzeux est vendu à Pierre
' D u ra n d , c’est aussi avec les articles de devoirs q u iéio ien t
dus au vendeur à cause du terrier acquis avec ledit do•
»
inaine.
L e domaine de Pouzeux ¿toit
un
fief du duché de
Bourbonnais; et c’est aussi pour cela que la vente en est
présentée aux officiers du domaine de ce du ch é, qui en
donnent l’investiture.
Quand ensuite, en 1 7 7 6 , Chemel acquiert le domaine
d’où dépendoit la terre des M o n ta ix , qui étoit sujette à
la rente dont il s’agit, pourquoi s’en fait-il donner l’inves
titure par l’appelant lui-m êm e, alors propriétaire du fief
de P o u z e u x , investiture qui ne pouvoit avoir lieu que
pour des fonds sujets à des rentes censuelles et en directe
seigneurie, et non pour de simples rentes? Mais surtout
pourquoi l’appelant se fait-il payer des simples et doubles
droits de lods, à raison de la terre des M o n ta ix , si la renie
due sur cette terre n'étoit pas une rente en directe seigneu
rie? et pourquoi même Saint-But porte-t-il la rigueur
jusqu’à se faire payer un double droit de lods, parce que
la payement du simple droit n’avoit pas été payé dans les
�quarante jours de délai prescrits par l'article 394 de la
coutume de Bourbonnais ? Pouvoit-il y avoir une rcconnoissance plus formelle que la rente assise sur la terre
des Montaix étoit une rente en directe seigneurie, qui
par conséquent tenoit à la fé o d a lité , et qu’elle étoit due
à un seigneur ou possesseur de fief? R ien n’est plus plaisant
que la réponse sur ce dernier article, dans le mémoire de
l’appelant. Ghemel a , dit-on, demandé l’investiture sans
nécessité ; il l’a demandée sans doute pour éviter des droits
de francs fiefs, qui auroient été considérables. Mais où
a-t-on pris qu’il fût dû des droits de francs fiefs sur la vente
d’un héritage sujet à une rente foncière ? et p u is , les
droits de francs fiefs eussent même été fort au-dessous
d’un simple droit delod s, et bien plus encore d’un double
droit de lods.
Il est encore plus pitoyable de dire que S a in t-B u t a
fait un fau x em ploi du m ot cen s , q u ’il a fait une per
ception illégitime qu’ on auroit pu lui contester en p ro u
vant que la rente n’étoit pas féodale. T o u s les actes p rou
vent au contraire la féodalité de la rente,* et l’investiture
et la réception des droits de lods n’en sont que la con
firmation de la part de celui qui avoit alors intérêt q.u’elle
fût féod ale, et qui ne change aujourd’hui de système
que parce qu’il auroit un intérêt contraire.
,
Il n’ est pas inutile de parler d’ une transaction du 1
septembre 1790, passée entre les parties, dont l’appelant
dans son m ém oire paroît vouloir tirei^avantage : mais
�( 12 )
on croît pouvoir établir quelle prouve au contraire
de plus en plus la qualité féodale de la rente dont il
s’agit.
Voyon s ce qui avoit donné lieu à cette transaction,
et quel en fut le résultat.
L a transaction nous apprend que G herael, proprié
taire de la terre des M on taix, qui faisoit l’assiette de la
rente dont il s’agit, prétendoit que toute cette terre des
M ontaix étoit entièrement couverte par des cens qui
étoient dûs, soit au domaine du roi, soit au seigneur de
Iiamotte-Juliet ; d ou il
prétendoit
qu’il
ne
pouvoit pas
devoir la rente dont il s’a g it , qui ne pouvoit pas avoir
son assiette sur la terre des Montaix.
Cette prétention ei\t été bien ridicule, si de part et
d ’autre les parties n’avoient pas reconnu que la rente dont
il s’agit étoit due en directe seigneurie; car il n’est pas
douteux qu’on peut donner à titre de rente foncière sans
directe des fonds déjà assujettis à des censives,
Néanmoins sur cette prétention les parties nommèrent
des experts qui vérifièrent que de l’objet qui avoit fait
l’assiette de la rente, il y en avoit une partie dans la
censive du ro i, et une autre dans celle de la seigneurie
de Iiamotte-Juliet; mais en même temps il fut reconnu
qu’il en resloit une autre partie sur laquelle no porloient
pas les censives du roi et de Lajnotle-Jullct; et le résultat
de la transaction fut que Chemcl ne pouvoit point se
dispenser de payer la rente; en conséquence il paya les
�*3
(
)
arrérages, et s’obligea de continuer la rente ;\ l ’avenir.
Voilà donc par cette transaction la rente dont il s’agit
bien assise sur un terrain qui n’étoit sujet ni'à la censive du roi ni à celle de Lamotte-Juliet, qui par con
séquent avoit été allodiale dans le principe, dans la main
du seigneur de fief de Pouzeux, qui ayant donné à rente
ce terrain allodial , cette rente par la disposition de
l’article G C C X C II de la coutume de Bourbonnais empor*
toit droit de directe seigneurie et lods et ventes ; ,et
une rente dépendante du f i e f de P o u z e u x y comme l’é
noncent tous les titres qu’on a rappelés, et qui étoit due
au seigneur de lief de Pouzeux. L a transaction de 1790
feroit donc , s’il en étoit besoin, une nouvelle preuve que
la rente dont il s’agit tenoit nécessairement ¿1 laféodalité.
Après tout cela , après des preuves si multipliées et
¿les aveux si positifs, le tribunal dont est appel auroit-il
pu laisser subsister la redevance dont il s’a g it , sans con
trevenir
formellement à la disposition de la l o i ?
Q ue
l’on s’écrie tant que l’ on v o u d r a , Q u ’elle est d u r e , cette
loi! ceux qu’elle affranchit des droits féodaux ne la trou
vent pas telle; et c’est sans doute le plus grand et le trèsgrand nom bre des F ra n ça is, p e u t - ê t r e plus des n eu f
dixièmes : mais d’ailleurs elle est écrite, ,cctte lo i , et les
•
•
m
f
juges ne pouvoient pas s en écarter.
Il
est maintenant facile de pressentir les motifs qui ont
dû dicter la disposition du jugement dont est a p p e l, et
�14
(
)
on va les répéter pour en rendre le b ie n -ju g é d’autant
plus sensible.
P rem ier motif. — Q u ’à l’époque de la transaction de
1 7 9 0 , Saint-But étoit, comme il est aujourd’ fîui, à cause
de son épouse, propriétaire du ci-devant fief et seigneurie
de Pouzeux.
Deuxièm e m otif.'■
— Que la reconnoissance de la rente
dont il s’agit ne fut consentie en 1700, à la demoiselle
A u b e r t , qu’en sa qualité de maîtresse de la terre et
seigneurie dudit P o u z e u x ; que cette rente y fut stipulée
payable et portable en ladite seigneurie, et que Jamin
èt sa femme ne reconnurent la rente que comme d’un
terrain appelé des Montaix.
Troisièm e motif. — Que des contrats de vente de 1720
et de 1751 il résulte qu’il dépendoit du fief de Pouzeux
un fonds de cens et devoirs consignés dans un terrier.
Quatrième motif. — Que lors de l’acquisition faite en
1 7 7 6 , par Chem el, du domaine des C h o p in s, dont dé
pend la terre des M on taix, Saint - But étoit tellement
persuadé que la rente à lui due étoit la première rente
constituée, conséquemment cens, qu’il investit le même
contrat, perçut les lods et doubles lods du prix de la
vente de la terre des M o n ta ix , qualifia cette rente de
cens dans sa réserve de l’année à éch o ir, et se fit de
plus réserve de tous autres droits et devoirs seigneuriaux.
Cinquième motif. — Que dans la demande formée en
�C
15
)
1784 ( à la requête de Saint-But et de sa f e m m e ) , on y
annonce que ce n’étoit qu’en qualité de fief, et en vertu
de la reconnoissance précitée (d e 1700 ) , qu’onréclam oit
ladite rente.
Sixième motif. — Que la transaction de 1790 n’ayant
eu lieu que parce que les censives du roi et de Lamotte
ne couvroient pas tout le terrain des M o n t a ix , et qu’il
en restoit d ix - h u it boisselées pour l’assiette de la rente
en question, ( cette transaction ) peut d’autant moins être
considérée comme le titre constitutif, que la reconnois
sance de 1700 y est rappelée comme le véritable titre ,
d’après un autre titre primordial que la demoiselle A u b e rt
y
convient
avoir pardevers elle.
Septième motif. — Que la constitution de la rente doit
être considérée comme la première q u i , aux termes de
l’article C C G X C II de la coutume, étoit qualifiée cens em
portant. droit de directe seigneurie et lods et ventes.
Huitième motif. — Q u’il est prouvé que la rente a
toujours été regardée, par ceux à qui elle étoit d u e , et
par ceux qui la devoient, comme seigneuriale.
Neuvième motif. — Que suivant les lois de 1792 et
1793 , toutes redevances seigneuriales et droits féodaux
ont été supprimés sans indemnité; et les arrérages, m êm e
ceux dûs en vertu du jugement ou de convention , ne
sont pas exigibles.
Dixièm e motif. — Q u’enfin nrayant été excepté que
les rentes qui ne tenoient pas à la féodalité, et qui étoient
�•
( 16 )
•
'
d ues par des particuliers à des particuliers non seigneurs
ni possesseurs des fiefs de P o u z e u x , il s’ensuit que SaintBut est non recevable à l’exiger.
■
Tels sont tous les motifs d’après lesquels le jugement
déclare en effet l’appelant non recevable dans sa demande,
en renvoie l’intimé quitte et absous, et condamne SaintB u t aux dépens. L e dispositif est justifié par les motifs;
et les motifs ne sont que l’application des conséquences
qui dérivent des titres et actes qui sont produits. L a féo
dalité de la
rente
dont il s’a g it, et dans la main d’un
seigneur ou possesseur de fief, est si
é vi d e nt e
par elle-
m êm e, que ce seroit perdre du temps que de répondre
aux objections du mémoire de l’appelant, qui ne sont
que des efforts d’imagination ; et ce seroit par trop se
défier des lumières du tribunal d’appel.
L e citoyen A N D R A U D , avocat.
L e citoyen V A Z E I L L E , avoué.
R
I O M , d e l' impr im erie de L
a n d r i o t
, seul imprimeur du
T r i b u n a l D’appel. — A n 1 1 .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chemel, Jacques. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chemel, intimé ; contre Philippe Saint-But, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0246
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0245
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chopins (domaine des)
Montaix (terre des)
Treban (03287)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contentieux post-révolutionnaires
fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières
-
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1e5328d6257faad47380f00218fc1207
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Text
1**Uuv* ']u y < ÿ u ^
TRIBUNAL
D’APPEL
P
UR
PO
OU
R
P h ilip p e SA IN T-BU T,
S É AN T A R I O M ,
propriétaire, habitant
au lieu de Pouzeux, commune de Comps, et
M a r i e D U R A N D , son épouse, appelans d’un
j u g e m e n t rendu au tribunal d ’arr ondissem ent de
M oulin s le 7 germinal an 1 1 ;
CONTRE
J a c q u e s C H E M E L , propriétaire, habitant de
la commune de Tréban, intimé.
QUESTION.
Rente -purementfo n ciè r e , dont on veut éviter le -paye
ment sous prétexte de féodalité.
I l n’est que trop fréquent de voir des débiteurs de
mauvaise fo i, s’aider des lois révolutionnaires pour se
A
�.
.
( 2 )
..
.
dispenser d’acquitter une dette légitime ! ces tentatives
sont rarement couronnées du succès; cependant le nouvel
arrêté du conseil d’état, dont on fait une fausse applica
tion , enhardit la plupart de ceux qui doivent des rentes.
Il est facile de trouver un prétexte avec la loi du 17 juillet
1793. Mais ce qui doit étonner, c’est que les tri'b^unaju'x ^
admettent légèrement des prétentions aussi odieuses J%sub-j?*;:i;
versives du droit sacré de propriété.
' * , ••
'"'‘''s
F A I T S .
L e cit. Saint-But et son épouse sont propriétaires du
ci-devant fief connu sous le nom de P o u z e u x , situé dans
le département d’Allier.
Il leur est dû par Jacques Chemel une rente fo n cière
de vingt-quatre boisseaux de blé-seigle. Cette rente, par
les titres les plus anciens, est qualifiée de foncière ; elle
n’a aucun caractèi’e de féodalité; elle n’entraîne avec elle
ni mutation ni droits de lods, et par conséquent ne peut
être comprise dans la suppression que prononce les lois
des 20 août 1792 et 17 juillet 1793.
On voit dans un titre du 20 mai 1700, que Pierre
Jamin et Philiberte R o llie r, représentés par l’intim é,
reconnoissent, au profit de demoiselle Françoise A ubert,
propriétaire de la seigneurie de Pouzeux, (a u x droits
de laquelle sont les appelans ) la quantité de vingt-quatre
boisseaux de b lé -seig le , mesure de M oulins, bon blé
loyal et marchand, de rente foncière duc à la demoiselle
A u b ert, annuellement, par les sieur et dame Jam in, af
fectée et hypothéquée sur une terre appelée les M ontaix,
�C 3 )
dépendante de leur domaine des Chopins, située en la
paroisse de Tréban; et généralement sur tous leurs autres
Liens, conformément au titre primordial de cette rente.
Il est dit que les sieur et dame Jamin ont promis et
seront tenus de payer annuellement ces vingt-quatre bois
seaux seigle , à chacun jour et fête de saint M ichel de
_ chaque année, et de les porter à la seigneurie de Pou- ..
zeux ; comme aussi de payer et porter les. arrérages .qui pourroient en être dûs.
..............
.
Il n’est rien ajouté qui puisse faire présumer cette rente
féodale : nulle obligation de payer les droits de lo d s, ou
autres casualités. La vente est pure et simple, sans aucunes
stipulations qui accompagnoient ordinairement les presta
tions seigneuriales.
Cette propriété passa dans la suite au citoyen T ixier de
la Nogerette, q u i, n’étant pas payé de la rente toujours
qualifiée fo n c iè r e , obtint le 23 mars 1735 une sentence
en la sénéchaussée de M oulins, qui déclaroit le contrat de
rente exécutoire contre Louis Jam in, héritier de Pierre.
Cette instance fut reprise contre Antoine Baratlion, tu
teur d’autre Louis Jamin , fils de L ou is, et ensuite contre
le curateur à la succession vacante de Louis Jamin ; et la
sentence condamna ce curateur à passer titre n ou vel, et à
payer les arrérages de cette rente.
Il arriva dans la suite différens cliangemens. La dame
T ro lle t, mère des appelans, obtint encore une sentence
le 4 septembre 1771 , qui condamna le nouveau pro
priétaire des héritages assujétis à la rente, au payement
d’icelle. Une autre sentence contradictoire, du 20 août
A 2
�(4 )
17 7 6 , porte encore condamnation de cette même rente
foncière.
"
Enfin, en 1784, les appelans se virent obligés d’assigner
l’intimé pour être tenu de payer cette même rente foncière.
Il s’éleva sur cette demande une assez longue discussion :
Cheme l , intim é, prétendoit que cette rente ne pou voit
avoir son assiette sur sa terre des M ontai x , parce que cette
^ terre se trou voit couverte par les reconnoissances consen
ties au profit du r o i, et au profit d’un sieur Lamotte-Juliet.
Il y eut une expertise sur le fait allégué par Chem el; mais
la contestation fut terminée par une transaction passée
entre l’appelant et l’intimé , le 7 septembre 1790. Chemel
reconnut, par cet acte, qu’il étoit possesseur et détenteur de
la terre assujétie à cette rente; en conséquence, il.s’obligea
de pa^er, a chaque jour de saint M ichel, la rentef o n d ère
de vingt-quatre boisseaux de blé-seigle, mesure de M ou
lins. Il acquitta les arrérages qui étoient dûs jusqu’alors,
ainsi que les frais du traité.
Chem el, intim é, a acquitté la rente pour l’an 1791 ;
m ais, étant en retard de payer l’année 1792, il lui fut fait
un commandement de payer, à la requête de l’appelant,
le 29 janvier 1793. Depuis, le citoyen Saint-But fut obligé,
et pour cause, de discontinuer ses poursuites. Mais , le 4
thermidor an 10, il fit citer l’intimé au bureau de paix du
canton du M ontaix, pour se concilier sur la demande ten
dante au payement de la rente Jbn cière dont il s’agit,
ainsi que des arrérages échus.
•
L ’intimé fit comparaître son fils au bureau de paix ; mais
il refusa de s’expliquer sur la demande ; il déclara qu’il ne
�.
i* ? .
.
se présentait que pour obéir à justice, et ne voulut pas se
concilier.
•
Assigné au tribunal de M oulins, par exploit du 24 du
même mois de thermidor , Chemel donna plus de déve
loppement à sa défense. Il prétendit que cette rente f o n
cière étoit entachée de féodalité ; il excipa des lois des 25
août 1792 et 17 juillet 1793 qui suppriment toutes rede
vances seigneuriales. La reconnoissance de 1700 n’étoit,
suivant lu i, qu’un titre féodal; Saint-But lui-même s’étoit permis de donner l’investiture de l’héritage assujéti à
la rente; dans la demande qu’il avoit formée en 1784, et
sur laquelle étoit intervenu le traité de 1790 , Saint-But
s’étoit réservé tous devoirs seigneuriaux. Enfin Chemel
argumenta de l’article CCG X C 1I de la coutume de Bour
bonnais , qui dit <x que la première rente constituée sur
» aucun héritage allodial, s’appelle rente foncière, etem» porte droit de directe seigneurie et de lods et ventes, a
Chemel conclut de toutes ces circonstances, et surtout
de ce que la rente étoit due à un propriétaire de fief,
qu’elle étoit évidemment abolie par la loi du 17 juillet
1 793*
.
.
.
Il fut facile au cit. Saint-But de repousser ces objections :
la coutume de Bourbonnais est allodiale ; les héritages y
sont présumés francs et réputés tels, tant que le contraire
n’est pas établi.
Un seigneur de fief^ comme tout autre propriétaire f
peut posséder de simples rentes qui n’entraînent avec elles
aucune redevancê'Teôdaïe?
’
Des expressions hasardées, des réserves insignifiantes,
ne peuvent changer la nature de la rente. -
�(6 )
^
L a disposition de la coutume de Bourbonnais ne con
sidère la rente en directe, qu’autant qu’elle est la première
constituée sur un héritage allodial de sa nature ; et cette
disposition, dans tous les cas, seroit aujourd’hui supprimée
par la loi ; c’est-à-dire, que le propriétaire de la rente ne
pourrait plus exiger le droit de lods, mais la rente n’en
seroit pas moins due.
lie tribunal de cassation s’étoit déjà prononcé en faveur
du propriétaire, et avoit proscrit la prétention des débi
teurs de mauvaise fo i, q u i, sous des prétextes aussi frivoles,
avoient cherché à se dispenser de remplir leurs obligations.
Cependant les argumens de Chemel prévalurent : un
jugement contradictoire, du 7 germinal an 1 1 , déclara le
citoyen Saint-But non recevable dans sa demande ; et ce
jugement est m otivé, i°. sur ce q u e, à l’époque de la
transaction de 1790, le citoyen S a in t-B u t et son épouse
étoient, comme à présent, propriétaires du ci-devant fief
et seigneurie de Pouzeux.
2°. Sur ce que la reconnoissance de la rente du 20 mai
iyoo n’avoit été consentie à la demoiselle A ubert, qu’en
sa qualité de maîtresse de la terre et seigneurie de Pouzeux.
30. On expose que cette rente a été stipulée payable et
portable à ladite seigneurie.
4°. Il résulte des titres, et notamment des contrats des 23
août 1720 et 11 octobre 17 5 1, qu’il dépendoit du ci-devant
fief de Pouzeux un fonds de cens et devoirs seigneuriaux
consignés dans un terrier.
O11 ajoute, en cinquième lieu , que lors de l’ncquisitiori
du domaine des Chopins , faite en 1776 par Chem el, le
cit. Saint-But étoit tellement persuadé que la rente et oit
;
�( 7 }
en directe, qu’il investit le même contrat, en perçut les
lods, qualifia cette rente de cens, dans la réserve de l’année
à échoir, et se réserva de plus ses autres droits et devoirs
seigneuriaux.
.
O n observe encore que , lors de la demande de 1784,
le citoyen Saint-But annonça qu’il répétoit cette rente
comme propriétaire du fief , et en vertu de la reconnoissance de 1700.
- 7°. O n dit que la transaction de 1790 n’a eu lieu que
parce que les censives du roi et de Lamotte-Juliet ne couvroient pas toutes les terres du M o n taix, et qu’il en restoit dix-huit boisselées pour l’assiette d elà rente.
8°. La reconnoissance' de 1700 ne peut pas être con
sidérée comme le titre constitutif, puisque la demoiselle
A ubert reconnoît en avoir un autre plus ancien.
90. Il n’est pas justifié que les dix-huit boisselées de terre
n’étoient pas allodiales, ou qu’elles étoient chargées d’une
redevance quelconque, lors de la constitution de cette
rente.
'
O n en conclut qu’elle doit être considérée comme la
première rente, q u i, aux termes de l’art. C C C X C II de la
coutume de Bourbonnais, étoit qualifiée cqyis emportant
droit de directe, seigneurie, et de lods et ventes.
10°. On prétend qu’elle a toujours été considérée, par
ceux à qui elle étoit d u e , et par ceux qui la devoient,
comme rente seigneuriale.
i i °. Que d’après les lois de 1792 et 1793, toute rede
vance seigneuriale et droits féodaux ont été supprimés sans
indemnité, ainsi que tous arrérages, même ceux dûs en
vertu de jugemens et de conventions.
�(8 )
. ,
. i2 °. Q u’il n’y a eu d’exceptées que les rentes qui n’avoient rien de féodal, ou possédées par des particuliers
non seigneurs on non possesseurs de fiefs.
Et celle en question étant due au seigneur ou posses
seur du iief de P o u zeu x, il s’ensuit que le cit. SaintrBut
n’est pas recevable à l’exiger.
- L e citoyen Saint-But, qui ne peut concevoir comment
on peut abuser ainsi des lois pour se dispenser de payer
une rente purement foncière, a interjeté appel d’un juge
ment qu’on peut qualifier de révolutionnaire; et c’est sur
cet appel que le tribunal a à prononcer.
A vant de proposer les moyens de l’appelant, et de dis
cuter les motifs^ du jugement dont est a p p el, il est à
propos d’examiner ce qu’on entend par première rente,,
et comment on doit expliquer l’art. C C C X C II de la cou
tume de Bourbonnais.
.
. Cet article est à peu près basé sur la disposition des
premiers articles du tit. X X X I de la coutume d’Auvergne.
Il seroit aujourd'hui bien difficile de définir ce qu’on entendoit par assiette de rente ; car le dernier commenta
teur observe lui-m em e que, quoique ce genre de con
venions fût très-essentiel pour le commerce des choses ,
dans les temps reculés, les rédacteurs, malgré tous leurs
eil’orts, n’ont pas réussi à l’éclaircir pour la postérité.
. Ce qu’il y a dé plus évident, c’est: que la première rente,
qualifiée de rente seigneuriale est celle qui avoit été créée
ou concédée par la constitution d’un héritage allodial , et
non une simple rente constituée à prix d’argent sur un héri
tage allodial. C’est ainsi que l’a observé Dumoulin sur cet
article C C C X C II de la coutume de Bourbonnais : Jtiiellige
�C9 )
lige , d it - il, n on p er emptionern sub p ecu n iâ , sed per
concessionem j'u n d i ■alitis consuetudo esset valdè stulta
et ineptci. Duret et Semin ont fait la même remarque.
A u roux des Pom m iers, sur cet article, nombre 16 ,
observe que quand le seigneur direct est maître du cens
et de la justice, et qu’il demeure sur le lie u , pour lors
le cens n’est point quérable; mais le tenancier est tenu
de payer et porter au seigneur censier, sans être de
mandé , à la seigneurie ou cliâteau où il est dû , si le
titre n’est contraire.
D e ces observations préliminaires il semble résulter
que l’article de la coutume ne s’applique pas à la rente
dont il s’agit. Rien ne prouve qu’elle soit le prix de la
concession d’un fonds allodial; tout annonce au contraire
que ce n’est qu’une simple rente assise sur un fonds ro
turier et non allo d ial, qui par conséquent n’emporte
point directe ni droit de mutation.
En effet, suivant l’acte du 20 mai 1700, on voit que
Pierre Jam in, et Philiberte R o llier, sa femm e, reconnoissent, au profit de Françoise A u b ert, la quantité de
vingt-quatre boisseaux de blé-seigle , mesure de M oulins,
bon blé loyal et marchand, de rentefo n ciè r e due à la
dite demoiselle A u b e r t, annuellement, par les sieur et
dame Jam in, affectée et hypothéquée sur une terre ap
pelée des M on taix, dépendante de leur domaine des
Chopins, et « généralement sur tous leurs autres biens,
» conformément au titre primordial de la rente que ladite
» demoiselle Aubert en a. »
’ Il est ajouté : « Laquelle quantité de vingt-quatre bois
» seaux seigle, comme dit est, ils seront tenus de payer
'
B
�.
( 10 )
.
,
» et porter a ladite demoiselle, à chaque jour et fête de
» saint M ich el, à la seigneurie de Pouzeux.
Rien n’annonce, dans ce titre, le prix de la concession
d ’un héritage allodial.
Si c’eût été une première rente emportant directe, il
eût été inutile de stipuler qu’elle seroit portable à la
seigneurie de Pouzeux, puisque, d’après A u ro u x , cette
rente étoit portable de droit au manoir du fie f, sans
aucune stipulation; dès-lors jusqu’ici elle n’a aucun des
caractères des premières rentes emportant directe.
D ’un autre cô té , C hem el, représentant le preneur à
rente, soutenoit, lors du traité du 7 septembre 17 90 7
que cette rente ne pouvoit.pas avoir son assiette sur la
terre des M ontaix, parce que cette terre se trouvoit cou
verte par des reconnoissances consenties au profit du roi
et du seigneur de Lam otte-Juliet ; de sorte que, dans le
système de l'in tim é, l ’héritage spécialement affecté au
payement de la rente ne pouvoit être allodial, si elle
étoit déjà couverte par d’autres terriers.
Il faudroit donc conclure, d ’après l’intimé lui-m êm e,
que l’article C CCX CII de la coutume ne reçoit pas son
application à la rente dont il s’agit; qu’elle n’emportoit,
de sa nature, aucune directe seigneurie; que par consé
quent le payement pouvoit en être exigé.
E n effet, toute renie qualifiée foncière, et sans aucun
accompagnement féodal, doit continuer à être servie. L ’ar
ticle II de la loi du 17 juillet 1793, cette loi si souvent in
voquée , et qu’on trouve encore à regret dans notre code
de législation , du moins pour tout ce qui est le prix de la
concession d’un fonds, excepte formellement toutes les
rentes foncières.
�c * o
Et certes, il est bien difficile de confondre des rentes
de cette nature avec des rentes féodales : les ci-devant
seigneurs n’étoient que trop soigneux de stipuler toutes
les clauses qui donnoient le caractère de féodalité ; on
les accusoit plutôt d’augmenter dans les nouvelles reconnoissances les charges d’une ren te, que de les modifier.
Combien de ratifications postérieures qui rendoient féo
dales des rentes qui n’étoient dans le principe que fon
cières ! Ne remontoit-on pas tous les jours au titre primitif',
pour vérifier si les reconnoissances postérieures étaient
conformes aux premières ? Tous les jours des plaintes
nouvelles sur les usurpations des seigneurs. E t dès que la
reconnoissance de 1700, qui, dans l’espèce, ne rappelle
qu’une rente foncière , n’a ajouté aucune clause, aucune
trace de féodalité , il faut en tirer la conséquence que c’est;
une simple rente foncière, dont la prestation ne fait pas
la matière d’un doute.
>
L e caractère d’une rente foncière ne peut se distinguer
que par les expressions du titre qui en porte la création.
L ’hypothèque spéciale donnée à la rente n’est pas une
preuve que la rente soit le prix de la concession. Il est
reconnu qu’on pouvoit constituer une rente purement
foncière en concédant un fonds roturier et non allodial.
L ’article CCCXGII de la coutume suppose deux faits constans ; l’un que la rente est la première constituée sur l’hé
ritage *, le second que l’héritage sur lequel la rente est cons
tituée , est allodial. O r, la preuve de ces deux faits ne se
trouve point dans la cause. Rien n’établit que la rente
dont il est question, soit la première constituée; rien ne
constate que l’héritage sur lequel elle a été constituée
B z
�(12 )
'
soit allodial. Chemel avoit même une prétention toute
contraire, puisqu’il soutenoit que son héritage étoit cou
vert par deux terriers diiFérens.
L e mot a llo d ia l, employé par la coutum e, prouve
qu’une rente foncière peut être assise sur un fonds non
allodial. Si aujourd’hui le citoyen Chem el, changeant de
langage, prétend que le fonds hypothéqué spécialement
à la rente, étoit allodial, ce seroit une exception, et c’est
à lui à le prouver.
M ais, en le supposant allodial, oseroit-on soutenir au
jourd’hui que la disposition exorbitante de la coutume
peut imprimer à la rente un caractère de féodalité te l,
qu’elle en entraîne la suppression ; ne peut-on pas d ire ,
au contraire , que la loi a fait disparoître l’article de la
coutume établissant la directe, mais laisse subsister une
rente qualifiée simplement dq fo n cière’, cette idée recevra
dans la suite un plus grand développement. On va s’oc
cuper d’analiser les motifs qui ont servi de base au juge
ment dont est appel.
L e premier consiste à dire que lors de la transaction
de 1790, le cit. Saint-But et son épouse étoient comme
à présent propriétaires du iief et seigneurie de Pouzeux.
Mais qu’importe la qualité des appelans ? n’arrive-t-il
pas tous les jours qu’un seigneur de fief possède des rentes
purement foncières, même dans l’élcndue de son fief ;
aucune loi n’a établi qu’une rente purement foncière de
sa nature, dût être réputée féodale, par cela seul qu’elle
étoit dans la main d’un ci-devant seigneur.
T e l fut le m otif d’un jugement du tribunal de cassa
tion, en date du 3 pluviôse an d ix , qui confirma un juge-
�( 13 )
ment rendu en dernier ressort au tribunal de Strasbourg,
portant condamnation contre les débiteurs de la ren te,
quoiqu’elle fût due à un ci-devant seigneur.
L e deuxième motif n’est qu’une suite du prem ier, et
s’écarte par le même moyen : on dit que la reconnoissance
de la rente n’a été faite à la demoiselle Aubert qu’en sa
qualité de maîtresse de la terre et seigneurie de Pouzeux.
Mais on n’apei'çoit pas dans l’acte que ce soit à cause de
sa qualité. Si elle prend celle de maîtresse du fief de Pou
zeux, on ne dit pas que la rente soit due par la raison
qu’elle est dame du iief. E t comme un propriétaire de fief
peut posséder de simples rentes, ce motif est tout à la fois
erroné et inconséquent.
Comment les premiers juges ont-ils pu relever, dans le
troisième m otif, que la rente avoit été stipulée payable et
portable à la seigneurie de Pouzeux -, tandis que si elle étoit
seigneuriale , elle seroit portable de sa nature sans stipula
tion, ainsi que l’a remarqué A uroux des Pommiers? Cette
clause tendroit donc au contraire à effacer le caractère de
féodalité qu’on veut lui im prim er, puisqu’on a jugé néces
saire d’imposer cette condition, pour qu’elle fût portable.
On d it, en quatrième lie u , qu’il est prouvé par titres
qu’il dépendoit du ci-devant fief de Pouzeux un fonds
de cens et devoirs seigneuriaux consignés dans un terrier.
Mais de ce qu’il a pu dépendre de cette terre des rentes
féodales, doit-on en conduire que celle dont il s’agit, qua
lifiée de fo n c iè r e , est une rente féodale ? D ’abord on ne
justifie pas que la rente réclamée fasse partie de ce terrier,
n i que l’acte du 20 mai 1700 y soit inséré; et quand il y
seroit, pourroit-on la regarder comme féodale, contre la
�.
.
(. I 4 )
teneur du titre qui la qualifie de rente purement foncière.
On sait qu’en général les terriers renfermoient tout à
la fois des redevances seigneuriales , comme des rentes
simples; il suffisoit qu’elles appartinssent à des seigneurs,
pour les consigner dans le môme terrier ; et le tribunal
d’appel, n’a pas eu égard à ce m oyen, dans la cause du cit.
de X/assalle, contre plusieurs habitans de Blanzac.
' Ces particuliers se refusoient à payer des percières, sur
le fondement qu’elles étoient dues à un seigneur, et que
la reconnoissance étoit extraite de son terrier.
- Mais ils n’en furent pas moins condamnés au payement,
parce qu’il fut vérifié que ces percières n’étoient nullement
féodales, et qu’un seigneur, surtout dans un pays où on
admet la maxime nul seigneur sans titre}pou voit, comme
tout autre particulier, posséder des rentes non féodales.
La teneur du titre, qui n’entraînoit aucun droit de mu
tation, ni aucun caractère de féodalité, détermina le ju
gement.
Cette décision est conforme à la doctrine qu’on trouve
consignée dans un jugement du tribunal de cassation du 29
thermidor an 10. On va môme jusqu’à dire, dans les motifs
de ce jugement, « que le faux emploi', dans un acte , de
» quelques mots appartenais A La féodalité, ne peuvent
» pas rendre féodale une concession qui ne pouvoit être
» telle, et qui d’ailleurs est caractérisée par l’acte de bail
à renie foncière. »
Ici on n’a employé aucune expression qui appariîenno
à la féodalité, on a caractérisé la rente àe purenient fon
cière., le juge ne devoit y voir que ces mois : la teneur du
liti-y est au-dessus de toutes les ¿illégations ou interpréta-
�( Z5 )
tions. D n’est pas justifié qu’elle fasse partie du terrier de
Pouzeux : si elle n’en fait pas partie, il faut en conclure
que la rente n’est pas féodale ; si elle y est consignée, on
ne pourroit en tirer aucune conséquence sur sa nature. Ce
motif n’est donc d’aucune considération.
On reproche dans le cinquième motif, au cit. Saint-But,
d’avoir investi le contrat d’acquisition fait en 1776 , par
Chem el, d’en avoir perçu les lods, d’avoir qualifié cette
rente de cens dans la réserve de l’année à échoir ; et enfin
de s’être réservé, dans sa demande de 1784, ses autres
droits et devoirs seigneuriaux.
■
Mais si le cit. Saint-But a donné une investiture qu’on
lui a demandée sans nécessité, s’il a perçu des lods qui ne
lui étoient pas dûs, s’il a qualifié sa rente de cen s, quoi
qu’elle fût fon cière, peut-elle être devenue féodale ? le
cit. Saint-But peut-il en avoir changé la nature ?
Chemel sans contredit pouvoit se passer de l’investiture;
il l’a demandée sans doute pour éviter des droits de franc
fief qui étoient considérables; il a payé des lods qu’il pou
voit refuser. Saint-But a fait un faux emploi du mot cens
qui appartient à la féodali té : qu’en peut-il résulter ? rien
autre chose sinon que le cit. Saint-But a fait une percep
tion illégitime qu’on auroit pu lui contester en prouvant
que la rente n’étoit pas féodale; mais il seroit injuste et con
traire à tous les principes de la matière, d’inférer d’une
circonstance indifférente en elle-meme, que la rente dont
il s’agit est comprise dans la suppression de la loi du 17
juillet 1793.
Certes, par cette perception, ou ces réserves inconve
nantes, Saint-But a fait eucore moins que si, dans des ra-
�.
.
.
' ,( , 5 } .
.
tifications postérieures, il eût fait reconnoître la rente
comme seigneuriale, emportant droit de lods, etc.
Cependant on sait que des ratifications de ce genre , ^
même souvent répétées, n’auroient rien ajouté à ses droits,
ni changé la nature delà redevance; il auroit toujoui*s fallu
remonter au titre prim itif, pour déterminer l’origine et
la nature de la rente.
.
“
E t pourroit-on croire que parce qu’un débiteur ignorant
a payé sans demande, sans jugem ent, des droits de lods
qui n’étoient pas dûs, ce même débiteur peut profiter de
sa faute, pour se dispenser de payer aujourd’hui la même
rente ?
O n lui répondroit avec succès : Ce que vous avez fait
dans un temps où on pouvoit errer sur la nature cl’une
redevance, où le créancier pouvoit avoir des prétentions
exagérées, n’a pu augmenter ni diminuer les droits de
chacun , n’a pu donner l’empreinte de la féodalité à une
rentcjo n cière; et comme les rentes foncières sont excep
tées de la suppression portée par la lo i, vous ne pouvez
vous dispenser d’en 'continuer la prestation.
Qu’importe encore que la transaction de 1790 n’ait eu
lieu que par la raison que les censives du roi. et de Lam o tle -J u lie t ne couvroient pas toutes les terres du
M ontaix, et qu’il eu restoit dix-huit boisselées pour l’as
siette de la rente.
Quand bien même tout ce terrain eût été couvert par
d’autres censives, ne p o u v o it- 011 pas reconnoîtrc une
rente foncière sur des héritages asservis à un cens? Que
voit - on dans l’acte de 1700? on n’y voit autre chose
qu’une hypothèque générale sur tous les biens du débi
teur ,
�#
( *7 )
teur, et une affectation spéciale de l’héritage y désigné
pour la sûreté de la rente. Chemel, dans la transaction
'de 1790, se déiendoit ,par la plus mauvaise objection. La
rente étoit assise sur tous ses biens': de ce que ces mêmes
biens étoient couverts par d’autres censives ,! c’étôit le
moyen le plus infaillible poùr établir que la rente due
au citoyen Saint-But n’étoit pas seigneuriale.
M ais, d it - o n , il restoit d ix-liu it boisselées de terre
qui n’étoient pas couvertes. Il n’est pas justifié que cette
quantité clc terrain fût chargée cl’une redevance quel■
conque, lôrs de la constitution de la rente. Ces dix-huit
boisselées de'terre étoient donc allodiales : c’est donc une
première rente q u i, aux termes de l’article C C C X C II de ■
la coutume de Bourbonnais, emportôit directe seigneurie.
i° . Il est difficile de penser, il est même impossible
que dix-huUJboisselées de terre aient pu servir cl’assiette
h une rente de vingt-quatre b oisseaux de blé. L e titre
annonce, au contraire, 'une affectation spéciale de toute
la terre du M ontaix; et si tout est couver^, excepté dixhuit boisselées, la rente ne peut être uné prémière rente:
la coutume ne peuT recevoir aucune applicationir'
Sur cette disposition p a r t ic ïïïï^ “dcTlïPc ou turn c de
►
Bourbonnais, qui en ce point est conforme à celle d’A u
vergne, voici comment a raisonné le conseil de l’appelant,
' sur les lieux :
« Ce n’est point la rente, a-t-il dit, qui seroit féodale,
53 c’est l’article C CCX CII de la coutume qui est une loi
» féodale; conséquemment ce n’est pas la rente, qui par
» sa nature ne tient en rien à la féodalité, qui seroit
C
>'
�.
.
.( i 8 )
» abolie; mais c’est l’article même de la coutume, parce
» que c’est en lui que réside la féodalité.
'
» On peut même dire qu’il y a long - temps qu’il est
» aboli : il l’est depuis que le territoire du Bourbonnais
» a été solennellement àéclavèjranc-alleu-, car l’article est
» visiblement une émanation de cette maxime féodale,
» nulle terre sans seigneur.
» Les lois de la révolution ont frappé la féodalité là où
» elle se trouve: si elle est dans la convention, si elle ré
» suite du titre constitutif, c’est le titre qui est aboli:
» mais si les parties n’ont voulu constituer qu’une simple
» rente ; c’est un contrat ordinaire qui n’a rien d’odieux,
» qui se pratiquera toujours dans le nouveau comme
» dans l’ancien régime. Cette convention ne prenant le
» caractère de servitude féodale que dans la disposition
» d’une l o i , c’est la loi qui est abolie ; mais la rente est
» maintenue. »
O n va plus lo in , et on soutient que la disposition de
cette loi est abolie pour le passé comme pour l’avenir;
parce que les lois suppressives du régime féodal sont
allées le rechercher jusque dans sa source, et interdisent
toutes répétitions d’arrérages échus pour le passé, aussi
loin qu’ils puissent remonter , eussent-ils été suivis d’o
bligations ou de condamnations en justice.
On doit adopter cet argument avec d’autant plus de
confiance, que cet article de la coutume ne peut s’expli
quer avec Pallodialité des héritages et la prescription des
cens et devoirs seigneuriaux établis par l’arlicle X X II de
la coutume.
�C 19 )
Aussi M . A uroux des Pommiers , tit. X X V I I I , n°, 4
et suivans, d on n e-t-il en m axim e, que de tout tem ps,
avant comme après la rédaction de la coutume, on a tou
jours reconnu la liberté et franchise des héritages ; de sorte
que c’est au seigneur à tout p ro u ver, et à établir par des
aveux et dénombremens, et autres titres de la tenuredu
fief, que tel héritage est dans sa censive ou m ouvance, par
le titre primitif et originaire de la constitution du cens, qui
est la concession de l’héritage et la charge de telle rede
vance , ou par d’autres titres équipollens.
Si sa qualité de seigneur est contestée, ajoute A uroux,
c’est à lui à l’établir. S i negatur se dominum prœstare
dcbet, dit le président D u ret, etpro régula est utalligans
qualitatem super quant ju s su u m fu n d a t, sip ro eo non
est prœsumptio , qualitatem probare teneatur, sive sit
a cto r, sive sit reus.
Il résulte de cette doctrine, que dans le doute, une rente
est présumée foncière ; que celui qui la prétend seigneu
riale est obligé d’établir cette qualité.
A combien plus forte raison, doit-on regarder la rente
comme purement foncière, dès qu’elle est qualifiée telle
par le titre constitutif-, qu’elle n’est accompagnée d’aucuns
caractères de féodalité ; lorsque d’ailleurs tout annonce
que l’héritage sur lequel elle est assise, se trouvoit déjà
dans toute autre censive.
C’est donc contre tons les principes de franchise recon
nus en coutume de Bourbonnais, que les premiers juges
ont refusé la prestation de la rente dont il s’agit.
C’est étendre la disposition d’une loi rigoureuse et
qualifiée môme inique dans les jugemens du tribunal
�.
,
20 )
...
.
de cassation , tandis que tous les efforts dés magistrats doi
vent tendre à la restreindre dans ses bornes ; puisqu’ils
n ’ont pas le pouvoir de la réformer.
Les difficultés dont on se hérisse, les entraves qu’on
fait naître nuisent singulièrement au commerce et aux
mutations : quel sera le père de fam ille, le propriétaire
' assez insensé pour oser aujourd’hui donner son bien en
rente? En privant une foule de citoyens de cette ressource,
on éloigne le plus grand nombre de la propriété ; on
dégoûte les cultivateurs d’un travail qui devient stérile;
l’industrie est éteinte; l’agriculture ne peut plus pros
pérer.
L e jugement dont est appel est donc tout à la fois
inconvenant, im politique, injuste; et c’est aux juges
supérieurs, dont les idées sont plus élevées, plus libé
rales, qu’il appartient de réformer des décisions dan
’ gereuses dans leurs conséquences ; de faire respecter le
droit sacré de propriété , que le gouvernement veut
essentiellement protéger.
L e citoyen P A G E S ( deRiom ) anc. jurisc.
L e citoyen M A N D E T , avoué.
A. R I O M , de l'im p r im e r ie fie L
a n d rio t
, seul im p rim eu r du
Tribunal d ’appel. — A n 1 1
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Saint-But, Philippe. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Philippe Saint-But, propriétaire, habitant au lieu de Pouzeux, commune de Comps, et Marie Durand, son épouse, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Moulins le 7 germinal an 11 ; contre Jacques Chemel, propriétaire, habitant de la commune de Tréban, intimé. Question : Rente purement foncière, dont on veut éviter le payement sous prétexte de féodalité.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0245
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0246
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53744/BCU_Factums_M0245.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Comps (03092)
Treban (03287)
Montaix (terre des)
Chopins (domaine des)
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fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières
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M É M O I R E
P o u r les h é r i t i e r s R I C A R D
Vichy
T R IB U N A L D
c r é a n c i e r s du ci-d e v an t m arquis de
, intim és ;
C o n t r e la D a m e L A N G L A R D : épouse se disant divorcée dudit
du V ic h y , ap pelante ;
E
t
c o n t r e l e C itoyen B e r n a r d
E n p résen ce des
C ito y en s
R
M A G A U D > aussi a p p e la n t;
ich a r d - C or b e r y
,
G
r im a r d ia s
,
J u g e , et autres créanciers de V i c h y .
Ergo est Isx , juslorum injuslorumque distinclio , ad tllam anliquissirnam et rerum omnium principem expressci naturam , ad
quant leges hom inum dirigunlur.
Cic. do Legib. lib. 2 .
11 est donc sûr que la loi consiste essentiellement à distinguer ce
qui est juste de ce qui ne l’est pas , et qu’elle se mesure sur ta
nature , cette pruni ¡ère et principale rfcglc de toutes choses ,
qui dirige les lois humaines.
Cicéron , traité des L o is, liv, 2.
La
fraude peut-elle jamais être consacrée , sn r-to u t lo rs q u ’elle
e st en évidence , et d o it-o n penser q u 'il ait été , ou m êm e q u 'i l
ait p u ê tre dans l'intention du législateur de la favoriser ? T e lle
�esl la question vrn'nient étrange , (¡ne !a darne rie V i c h y
et Te
c it oyen Magaud élèvent de concer t dans ceLLe c a u s e , et dont ils
n e craignent pas de soutenir l ’affirmative.
4
L a dame de V i c h y , qui se dit créancière de son mari de i o,ooo fr.
s ’o p p o s e , contre toute raison d’intérêt légitime . à ce que lçs biens
de ce d é bi t e ur , q u ’il n ’a vendus q u ’a une s omme de 80,000 fr , moitié
de leur valeur , soient r evendus à leur juste p ri x , par la voie des
enchèr es juridiques ; contre ioute p ud eur , elle nie d ’avoir elle—
nume
fait une enchèr e sur ces ventes , lorsque les preuves les
mo i ns
équivoques de ce fait sont rapportées ; enfin , lorsqu’elle
e6t convaincue
d ’a v o i / collusoirement c h er ch é à s u p p r i m e r ces
preuves , pour frustrer les autres créanciers , elle ose se plaindre
de ce q u ’en subrogeant c eux -c i à l ’effet de
sa soumission , sur
le refus q u’elle fait de la poursui vre e l l e - m ê m e , on l é s a i t admis
à se char ger de f a i r e , p o u r l 'i nt érêt de la masse c o mm u n e
ce
q u ’elle ne voulait plus exécuter.
E t de sa part , le citoyen Magaud r l ’un des acquéreurs , tandis
jjue ses co-i nl éres sés se Tendent justice pa r un acquiescement vo
lontaire au juge me nt qui a r e c o n nu l’exi stence des enchères et en
a ordonné la poursuite , vient seul se plaindre de ce q u’ on lui fait
p e r d re le b é n é fi ce , sur lequel il n ’avait jamais dû c o m p t e r , d ’une
acquisition- frauduleuse , ainsi que le fruit des man œuv re s i n g é
nieuses q u ’il-avait e m p l o yé e s avec la dame de V i c h y ,
p r i m e r et
faire
disparaître
toutes les
traces
de
pour s u p
l ’e nc hè re qui
faisait cesser l’eflet de sa vente.
O n voit aisément ce qui fait mouvoir le citoyen Magand dans cette
affaire. Si ses motifs ne sont pas licites , ils ne s’accordent pas moins
avec son intérêt ; ce ne serait pas un mince
bénéfice p our lui,,
que de conserver un bien en valeur de plus de 100,000 fr. , pour
58
le prix modique de ( ,000 fr.
auquel il lui a été seulement vendu.
Mais la d a m e d e V i c h y ! comment e xpli quer sa conduite , l orsqu’on
I11 voit agir d ’une manière si opposée à ses intérêts appareils ? Coni -
4
nif.Mil concilier avec ses prétentions d ’une m ' u i u c de j o, oooIi
nir
les biens de son mari r non seulement q u ’elle ait abandonné et voulu
s up pr ime r l ’e nc hè re qui devait faire valoir ces biens à un p r i x bien
�s u p é r i e u r , et
,
(
3
)
.
lui assurer (Vaillant le p aie me nt de sa d e t t e , niais
encore q u ’elle résiste à ce que les autres créanciers fassent valoir
cette e nc hè re en se chargeant e u x - m ê m e s de la poursuite ? V o i c i
le mot de l ’éni gme ; c ’est q u ’au lieu d ’être créancière de son mar i
de i 4o , o o o fr. , c o mm e elle le, s u p p o s e , elle ne l ’est
pas m ê m e
de 20,000 IV. , et q u ’ayant traité avec l ’acqué re ur Ma ga u d , elle a r e ç u
de lui en secret le p r i x de son acquiescement : en sorte que c ’est
lui qui , sous son npm , agit et parle p o u r elle. Ainsi la fraude est
ma ni fe s te , et dès-lors le j u g em en t du tribunal de C l e r m o n t qui l’a
proscri te , pourrait-il ne pas r ece voi r sa confirmation ?
A n t o i n e R i c a r d , architecte et e n t re p re ne u r de b àt i me ns à C l e r
m o n t , père des intimés , avait été e m p l o y é par les ci- devant c omt e
et marquis de V i c h y , à différentes constructions. L ’h o n n e u r de les
se r vi r devait être sans doute d’ un grand p r i x ; car ils t r ou v è r en t le
m o y e n , non seulement de ne rien lui p a y e r p o u r ses travaux , niais
e nc or e de le po rte r à se r e ndr e l eur caution , p a r voie d ’endosse
m e n t , p o u r une lettre de change q u’ils avaient souscrite en 1780
au sieur Camb efo rt.
A l ’é c h é a n c e , les sieurs de V i c l i y , suivant l ’usage de leu rs s e i
gneuries , ne p ayè re nt pas : l e sieur C a m b e f o r t fit p r o t e st e r e t
obtint sentence de condamnation solidaire et pa r corps , t a n t c ont r e
e u x que contre l ’e n d o s s e u r , en la jurisdiction consulaire de C l e r n i o nt - Fe r ra nd , le i o j anvi er 1781 , p our la s o mm e de 4,667 fr. en
principal
portée p a r l a lettre de c h a n g e , a vec intérêts et dépens.
L e C i t o y e n R i c a r d allait être e m p ri s o nn é en ve rt u de
cette
s entence , sans que les 8ieurs de V i c h y , qui lui avaient p r omi s , dans
les mouv eme ns de leur fr a n c h e reconnaissance , d ’e m pê c h e r q u ’il
11e f ût jamais inquiété pour le service qu’il leur avait rendu , fissent
aucuns efforts p our faire h o n n e u r à leur parole ni a l a deLte ; il
f ut donc obligé de payer l u i - m ê m e la totalité des c onda mna ti ons ,
s a u f son recours qui lui était adjugé par la m ê m e sent ence co nt r e
les sieurs de V i c h y .
Ceux-ci
ônl trouvé constamment le secret de r e n d r e ce recour»
illusoire par des ventes de leurs biens et des délégations simuloes ;
^ et le Cit oyen Ri card , p ei e , est \ en u a deceder étant toujous reste
�( 4 )
_
.
c ré an ci er de cet objet , c o mm e des autres avances q u ’il l eur avait
faites.
C e p e n d a n t , le 11 pluviôse an 7 , les héritiers Ri c ar d f ormè re nt
l eur i nscription h y p o t h é c a i r e sur les siturs de V i c h y au bur ea u
de C l e r mo n t } pour sûreté et paiement de la s omme de 9,667 fr. ,
à laquelle montai t leur créance résultante du j ug e m e n t de 17 8 1 ,
en princi pal et accessoires.
Ils ne f ur ent pas les seuls qui eussent usé de cette précaution ,
v i n g t - s i x autres inscriptions avaient été ou f ur ent f ormées sur les
si eur s de V i c h y .
P a r m i ces i nscriptions , on
distinguait
celle faite p ar la dame
L a n g l a r d , épouse se disant divorcée du ci-devant marquis de V i c h y ,
p o u r créances portées à 104,677 fr- 9^ c. , qu’elle prétendait faire
ré sul te r de son contrat de mariage du 18 mars 1 7 7 1 , et lui avoi r
été adjugées p a r sentence p or t an t sa séparation de b i e n s , rendue
en la sénéchaussée de Moulins le 8 j ui n
17 8 1 , et pa r j u g em en t
du t ri bunal de l’A ll i e r du 16 b r umai r e an 7.
D e p u i s plusieurs années , l’e x - m a r q u i s de V i c h y s’était réfugié en
H o l l a n d e ; mais avant sa r e t r a i t e , après avoir plaidé assez sérieu
s e me n t avec la dame
L a n g l a r d , son é p o u s e , au parl ement de
P a r i s , où il avait interjeté appel d e l à sentence de séparation q u ’elle
avait o bte nue contre lui , il paraît que les de ux é p ou x
r ap p ro c hé s en 17 85 et que leur réconciliation fut
s’étaient
dès-lors basée
sur le projet de r endr e dupes les autres créanciers du mari , et de
l e u r soustiaire tous ses biens , au profit et sous le nom de la f e m m e ,
s a u f à elle a faire p ar t
p our ra it en résulter.
s e cr èt eme nt à celui-ci du bénéfice qui
D e s ventes et des saisies collusoires firent i o m be r , en eiïet y
depuis cette é p o q u e , sous la main de la dame de V i c h y tout ce qui
f u t r e co uvr é sur son m a r i , tant en pr inci paux q u ’en revenus. L a
niasse é n o r m e et e x agér ée de ses créances el le privil ège qu ’elle
l eur su p p o sa it, avaient élé p our elle des m o ye n s d ’écarl er la c on
c urrence des autres créanciers plus sérieux e t plus légitimes , pur
la crainte 0O1 elle les avait jetés
q u ’ils agiraient i n u t i l e m e n t , et
�(S )
ne feraient q u ’fljouter à l eur perte p ar les n ou ve au x
frais q u’ils
auraient à faire.
A u mois de germinal an g , le sieur de V i c l i y
se rendit
dans
ce département p our y faire la v e n te de tout ce qui lui restait de
p r o p r i é t é s ; il en passa quatre c ont r ats , sous les dates des 26 et 28
«erminal et 1 . " floréal m ê m e a n n é e , savoir:
o
L e I . " au cit oyen Nicolas , j e u n e , p our la somme
5 ,000
de cinq mil le l iv r e s , c i ................................................
L e 2.0 au citoyen F a y o n , p o u r pareille s o mm e
de cinq mille l i v r e s ,
Le
5 .'
au
fr.
5 ,000
ci...................................................
citoyen Magaud , ayant p o u r objet
u n superbe domaine . p o u r la s o mm e de soi xant e
huit mille l iv re s , c i ........................................................ 68,000
4
E t le .* aux nommé s Brochet, Sabatier et antres ,
p o u r la s omme de trois mille vingt- cinq l i v r e s ,
c i ..................................................................................................
Ainsi le total
5,02
5
de ces ventes f orme seul ement
une s omme d e .................................................................... 8 1 , 1 2 5 fr.
E t les objets vendus sont en val eur de plus de cent t rente mille
francs ; le domaine qui a passé au citoyen M a g a u d , vaut à lui seul
plus de cent mille francs ; il y a donc lieu de croire que le sieur
de V i c h y n ’avait souscrit ces ventes que moye n na nt un s uppl ément
de p r i x assez considérable qui lui avait été assuré par des actes
secrets.
Ces contrats furent déposés par les acquéreurs et transcrits au
bureau des hypot hèques de C le rmo n t F e r ra nd , les
g , 12
Dans
28 g e r m i n a l ,
et 16 floréal an g.
le mois de la transcription , chacun d ’eux dénonça son
a c q u i s i t i o n
créanciers
,
avec l’état des inscriptions subsistantes
inscrits
,
,
a u x dirl'érens
et fit la déclaration prescrite par l ’article X ! X X de
la loi du 11 brumaire an 7 , sur le régime hy po t hé ca ir e , q u ’il acquit
terait les charges e x i s t a n t e s , mais seul ement jusqu’à concurrence
du p ri x énoncé dans son contrat.
�.
.
Plusieurs
créanciers et
proposaient d ’e nc hé r ir sur
de V i c h y
6
(
}
n o t am me n t
cette
le6
. .
.
héritiers Ri c ar d , se
dénonciation , mais
là
dame
vint en personne les assurer q u ’ils pouvaient se r e p o se r
sur elle de ce soin ; qu' el l e était la plus intéressée à faire p or t er
les objets vendus à leur véritable valeur. L e s
tant sur
créanciers , c o m p
ct-s p - o liesses , s ’absti nrent de faire a uc une
procédure
relative à cet objet.
C e pe n da nt la dame de V i c h y fit etTecüvement notifier a ux a c
q ué re ur s sa déclaration et réquisition de revente des i mme ub le s
dont il s ’agit
par voie de mise a u x enchères , avec soumission
de les p or t er ou faire p or t er au moins à un vingtièm e en .susdit
p r i x é noncé dans les contrats , ce qui
eut lieu par exploits en
date des 11 et 16 p r a ir ia l an g ; — et les i ÿ et
i
5 messidor
sui
v ant , elle dénonça le tout au sieur de V i c h y , son m a r i , a vec com
m andem ent tendant à la revente sur lu i p a r expropriation des
biens
compris a ux contrats susdatés. El l e fit aussi la dénonciation
de ce c o mm an de me nt aux a c q u é r e u r s , avec déclaration q u’elle allait
p o u r s u i v r e la revente.
C et te e nc hè re e xé c ut ée p a r l a datne de V i c h y , force
que
cette
fois elle ne s ’était pas trouvée
p ens er
parfaitement d ’accord
avec son mari ; sans doute il avait voulu s’attribuer à lui seul, pour
l ’e m po r t e r en
Ho ll ande
où il
allait r et our ne r , le bénéfice
des
arrangemens secrets pris avec les acquéreurs , ou n ’en faire q u ' u n e
très-petite part à la dame de V i c h y , et c ’est vrai semblablement
ce qui avait excité celle-ci à r efuser sa sanction aux ventes : mais
les enchères a ya nt amené le sieur de V i c h y et les acquéreurs à lui
cé de r ce q u ’elle d é s i ra it , il en est résulLé q u ’au m ê me instant elle a
consenti à s u p pr i m er ou tenir cachés les originaux de ses actes de
notification d ’enchères , réquisition de r event e et c o m m a n d e m e n t
en e x propr ia tion , et q u ’elle a
fait c h e rc h er et retirer les copies
qui en avaient été distribuées , afin parei llement de les anéantir et
de faire ainsi disparaître toutes les traces de la procédure q u' el le
avait entreprise.
L e s créanciers qui ignoraient ces circonstances , attendaient tou
j our s que la dame de V i c h y fît procéder a ux uil khes sur lesquelles
�(7 )
devait s ’o p ér e r la r event e en j u s t i c e , l orsqu’au mois
de f rimnire
an 10 , elle rompit le silence et leva le masque sur le plan qu'elle
avait, f ormé de les frustrer.
E n effet , elle se présenta
me nt de C l e r m o n t , pour y
au greffe du
requérir
tribunal d ’a rr ondi ss e
l’or dr e
et
distribution du
p r i x des ventes faites par son mari aux cit oyens Magaud , F a y o n ,
Ts’ icolas ,
Brochet et autres acquéreurs , c o mm e si elle n ’eût pas
fait d ’enchères sur ces ventes , et elle
appela ensuite les divers
créanciers inscrits p our c ompar aî tr e au procès-verbal
d ’ordre
et
produi re leurs litres.
5 pluviôse an 1 0 , les héritiers Ri car d p ar ur e nt à ce p r o
Le
cès-verbal et opposèrent q u ’avant d ’aller plus avant ¿ l a dame de
V i c h y devait mettre a f i n les enchères p ar elle faites el que jusques-là il n ’y avait pas lieu de pr océder à ordre ni à distribution ,
la revente devant s ’eflecluer au profil de tous les créanciers.
L a dame de V i c h y osa soutenir par un dire en r ép ons e du 8
du m ê me m o i s , q u 'e lle n ’ a v a it p a s J'ait d ’ enchères , et au
s u r p l u s , quand
abandonner
qu’il n ’y
il eu aurait existé , q u’il lui avait été
et de s’en
a jamais
départir.
eu de
sa
Mais
il
est
bon
libre de les
d ’obs erver
part aucun désistement en
souscrit ni notifié , en sorte que son e n c h è i e
est toujous
f o rm e
subsis
tante.
L e s parties ayant
été r envoyées à l’audience sur ces difficultés
et autres survenues au procès verbal , la discussion s ’engagea d ’ab o i d entre le cit oyen
K i c l u u ' d - C o r b é r y , l’ un des créanciers et la
daine de V i c h y , d ’après les conclusions prises par c el ui -c i, à ce que
les
créances de la dame de
V i c h y fussent
préalablement réglées
et fixées , attendu q u e , loin d ’être créanci ère , c o mm e elle le s up
posait, de 154 ,6 77 f r . , elle ne l ’était tout au plus que de s o ,
aux
tenues du c o mp t e
devait
Le
encore
tribunal
débattu
q u ’ il
44 o fr.
représentait ; sur quoi elle
i m p u t e r différentes sommes q u ’elle avait touchées.
sursit par jugement, à s ’o c cu pe r
de celte discus
sion y j us qu’à co q u’il aurait été reconnu s il avait été lait des e n c h è r e s
et s’il
devait être procédé à la revente , afin de
d ét e r m i n e r quel
serait le p r i x qui ferait l’objet de 1 ordre et distribution.
�(8 )
A lo r s fut plaidée la question
dans l eur
dire
é l evé e
par
les cit oyens Ri card
au procès-verbal .
Ils i nte rpe lè re nt la dame de V i c h y et le citoyen M a g a u d , l ’ un
des a c q u é r e u r s , qui seul faisait contestation de s’exp li que r cal liégoriqui=nient , s ’il avait été ou non signifié par la dame de V i c h y
des
réquisition de revente judiciaire , avec soumi s
actes portant
sion d ’e nc h èr e d ’un vingtième.
'
L a da me de V i c h y et le citoyen Magaud r é po ndi r ent n é g a ti
vem en t , et ajoutant PefFrontei'ie au m e n s o n g e , mi re nt les h ér i
tiers Ri car d au défi de p ro dui re , non seul ement
aucune p r e u v e ,
mais m ê m e aucun indice de l ’exi st ence de ces enchères. .Les a u
tres acquéreurs
faisant défaut , étaient loin de
vouloir partager
c ette t é m é r i t é , ils s ’en r ap po r ta ie nt à justice par leur silence.
E n ré pons e à la dénégation et au défi de la darne de V i c h y et du
c i t o ye n Ma ga u d , les héritiers Ri c ar d , qui étaient parvenus a se
p r o c u r e r des preuves positives du fait
i . ° des extraits du
des
e nc h è r e s , justifièrent
bureau de l ’enregi st rement qui relataient
les
notifications faites à la requête de la dame de V i c h y aux acqué
re ur s , par exploits des 1 1 et 16 prairial et i
2.0 E t ce qui
achevait de
3
messidor an 9 ;
l ever toute équi voque , de la copie
d ’e xploi t de signification faite à la requête de la dame de V i c h y ,
a u x no mmé s B r o c h e t , Sabatier et Pla ne ix ( trois des acquéreurs ) ,
le 10 messidor an g , c ont enant
la
dénonciation
des soumissions
d ’enc hèr es par elle faites envers Ions las a cq u ér e u r s , et du c o m
m a n d e m e n t tendant à la l'evente pa r e xp ropr iation, q u ’elle avait fait
au sieur de
échappé
V i c h y , son
à la r ec he r ch e
mari : celt e copie était la seule qui eût
de la dame
de V i c h y
p our
s up pr ime r
les traces de la p ro cé d ur e q u ’elle avait tenue.
Ine x is t enc e des enchères étant ainsi établie, et le concert f rau
d ul eu x de la dame de V i c h y avec les acquéreurs étant démontr é ,
les
héritiers
la dame de
Ri card soutinrent q u ’il
Vichy
de faire cesser
n ’était pas
au
p ouv oi r
de
Pell'et des enc hèr es ; que
les
contrats se ti ouvant anéantis, il fallait nécessairement
procédera
la r e v e n t e , et que dans le cas où la dame de V i c l i y ne voudrait
pas y do n ne r suite, e u x , c o mm e tous autres créanciers intéressés ,
�,
(9).
devaient y être subrogés : ils ajoutèrent que la dame rie V i c l . y était
sans intérêt et c ons équemment sans droit p o u r
contester celte
subrogation q u i , loin de lui n u i r e , we pouvait que lui être avan
t a g e u s e ; et à l’égard du citoyen Magaud q u’il était égal ement sans
droit pour s ’y opposer , parce que la loi n ’avait a uc une me nt eu p o u r
b ut de
le favoriser
tion de
et de lui
maintenir une v e n t e à l ’a n nu l la -
laquelle il avait dû s ’attendre dès q u’il paraîtrait
enchère.
une
.
L a , dame de V i c h y r épondi t que tout ce q u ’elle avait
pu faire
n ' é t a it que pour son seul intérêt et pour son p r o p r e c o m p t e ; que
dès-lors il lui étflit libre de ne pas y do nne r suite ; que les autres
créanciers devaient
s’i mp ut er de
ne pas
avoir e nc hé r i et veillé
’
e u x - m ê m e s à la conservation de leurs intéiêts.
L e Ci to y en Ma ga ud tint le m ê me langage , et ajouta q u ’il était
impossible d ’a dm e t t r e des créanciers qui avaient gardé le silence
dans le délai de la loi , et qui par cela seul devaient être réputés
s’en être tenus au p ri x des ventes à e u x notif iées , à profiter des
enchères et pr océ dur e
des motifs dont il se
qu’avait
p u faire un autre
créancier p ar
désistait.
L ’ un et l ’autre ne rép onda ie nt rien au surplus aux preuves
collusion qui l eur étaient opposées ; au contraire
de
( c o m m e s ’ils
avaient eu à s ’applaudir de la fraude et à enc hé ri r sur son évi dence
p ar un excès d’i mp u de u r dont, il
était réservé à cette
donner l ’e x e mp l e ) , la dame de V i c h y et
firent
intervenir
oéomêtre à
un
de
le c it oye n
Magaud
p r ét e n d u créanci er , le ci to ye n C h o u s s y ,
Cusset , dont
p ar ce que i ndé pe nda mme nt
date
cause de
ils
ont le
de la
rôle
à l eur
disposition ,
simulation de sa créance ,
la
son h y p o t h è q u e qui est des dernières en ordre , ne lui
p e r me t pas de rien e sp ére r dans la
distribution
du
prix
des
immeubles dont il s' agi t , et ils firent conclure cet adhérent offi
cieux à ce que
le s c ito y e n s
en
les ventes fu s s e n t'm a in te n u e s à leu r p rix , et
R ica rd déclarés n on - recevables dans l eur demanda
subrogation d’encheres.
L e s autres
créanciers , intéresses u yoir admettre cette s ubro—
B
�n
V
( j°)
-
gaticn , en désiraient a r d em me nt le succès et s’en remel.laient à
justice , dans l ’espoir q u ’elle 11e pourrait jamais consacrer un c o n
c e r t de fraude aussi manifeste.
E n cet état , i ntervint au tribunal d ’arrondi ssement de C l e r m o n t F e r r a n d _ , l e a messi dor an 11 , le jugement dont voici les 1er m e s :
« A l t e n d u que l ’acle de notification d.i î â messidor an 9 0 0 n s )) tate suffisamment l ' ex is te nc e de l’e nc h èr e fuite p ar la üame de
)> V i c h y a ux acquéreurs de son m a r i ;
» Atte ndu
que l ’article X X X I de la loi du 1 1 b r um a i r e an 7 ,
)) sur le régime h yp ot h éc a ir e , accorde
» faculté de requérir la mise aux
aux créanciers inscrits la
enchères de l ’i mme ub le v en du
par le débiteur ;
)) A t t e n d u
que,
d ’après l’art. X V I I I de la loi du 11 br umai re an
>, 7 , sur les e x p r o p r i i o n s f or cé e s, la soumission de p or t er l ’i m » me ub le
vendu , à lin vi ngti ème en sus de celui
stipulé
par
» la vente
vol ontai re, tient lieu de pr emi èr e e n c h è r e , qui né ce s -
)) sairement profite à tous les créanciers et leur donne la faculté
» de poursuivre la vente par ex prop ri ati on forcée ;
» Att e ndu que des créanciers inscrits , qui p euv e nt ne
)> fuit de soumission
de mise a ux e n c h è r e s ,
)) connaissance de celle faite par un autre
)) confiance de recueillir
pas avoir
pa rc e q u ’ils avaie-nt
créancier et dans la
les avantages résultant de celte s o u m i s
)> sion , 11e pe uv ent être privés de ces a v a n t a g e s ;
)) L e tribunal ordonne que la dame de V i c h y sera tenue de don ne r
)) suite a ses soumissions , dans le mois de la signification du présent
)) j ug e m e n t ; huite de ce f a i r e , déclare les héritiers Ricard subrogés
’
» à son lieu et pince, c l les autorise , en c ons é que nc e, à poursui vre
)) par ex pro p ri at io n forcce , c onf o rm ém ent a la ldi , les objets dé
)) signés dans la notification dudit jour 10 messidor an ç);déclure le
)) j ug eme nt c omm un avec les autres p a rt i es , et condamne la dame
,
» de V i c h y aux d é p e n s » .
L a Dame de V i c h y et le citoyen Magatid .«ont , chacun à l eur
é g a r d , nppidans de ce j ug e me nt envers les héritiers Ricard.
Ils ont mis en cause sur ces appels , les autres créanciers de l ’c x marquis de V ichy , pour yoir déclarer co mm un avec eux le j ug eme nt
�à int ervenir. L a p l u pa r t de ces créanciers assignés font défaut* ; les
seuls qui aient c ompa ru , sont les citoyens Juge , G r i m ar di a s et
B a rdo na ud , qui vi ennent d ’adhérer et se réunir par des conclusions
expresses , aux c it oye ns R i c a r d , p o u r de ma nd er la conlirmation
du j ug eme nt dont est appel.
T e l est
l ’état dans lequel la cause se présente. L e s héritiers
R i c a r d y ont combat tre successivement leurs d eu x adversaires.
§. I.er
Contre la D a m e de V ic h y .
Il est impossible à la dame de V i c h y , non s eul eme nt de réus
s i r , mais m ê m e de pouvoir être écoutée sur son appel , du moins
quant a ux dispositions principales du j ug eme nt attaqué ; car elle y
est n o n - r e c e v a b l e par défaut d ’intérêt réel et légitim e.
' E n p r i n c i p e , l ’intérêt est la mesure dès actions ; t oute d e m a n d e ,
toute contestati on, doivent d o n c a vo i r p ou r base un intérêt réel de la
p ar t de c e ux qui les s ou ti e n ne nt , a ut r eme nt elles t omb ent d ’elles—
mêmes. ¿Ictio ealenhs competit c/uale/iàs in lerest , nec com petit
antequàm cœ perit interesse. Il en est de m ê m e des a p pe l s ; c e u x
qui sont dépourvus d ’ i nté rê t, ne pe uv ent être admis. N on soient
ctudiri (impelíanles n id là quorum inlerest. I. 1. JJ\ de appellat.
recipiend. v el non.
Da ns l ’e s p è ce , quel intérêt p e ut avoir la dame de V i c h y à se
plaindre du j ug eme n t r endu par le tribunal d ’arrondi ssement de
C l e r m o n t , a u x c h ef s qu i o n t o r d o n n é , i . ° q u ’ elle serai t t e n u e de
donner suite à ses soumissions dans le m o i s ; 2.0 q u e , faute de ce
faire , les héritiers R i c a r d de me ur er aie nt subrosés
en son lieu et
t*
p la ce ; ." que ceux-ci étaient, en conséquence , autorisés à poursui vre
5
p a r ex pro p ri at ion f o r c é e , c o n f or mé me nt à la l o i , les objets d é
signés dans la notification du
i
5
messidor an 9 ;
4 ."
et que
le
j u g e m e n t était déclaré c o m m un avec toutes les auLres pat lies a p
pelées ?
L a p r emi è re de ces di sposit i ons, il est v r a i , reconnaît et j uge
l ’e xi st e nc e de l’e nchèr e , et prescrit à la dame de V i c h y d ’ y do nne r
sui te -, mais le fait de la notification d ’e nc hè r e ne p e ut être cont esté,
�( 12 )
il est p r o u v é j u s q u ’à l ’ é v i d e n c e , p a r les p i èc e s qui s o nt r a p p o r l e e s ;
( x ) mais la dame de V i c h y n ’a poi nt d ’intérêt légitime , p our en nier
l ’exi st ence et p our se refuser à continuer de poursuivre lu r e v e n t e ,
p u i s q u ’elle a r eco nnu , au c o n t r a i r e , pa r le l'ait m ê me de la p r o
cédure par elle e ntr epr ise , que son intérêt était de faire t o mb er
les pr emi èr es ventes. Mais e nf in, cette disposition n ’est a uc une me nt
coactive , elle est de p u r e faculté ; car aucune pei ne , aucune condi
tion o n é r e u s e , ne sont attachées au 1 efus que ferait
V i c h y de l ’exécuter : il lui est libre à son g:é de
la dame de
suivre
ou de
n e pas suivre , eile n ’est donc pas fondée à se plaindre.
L a seconde disposition non seul ement ne lui nuit pas , mais se
t r ouv e encore toute à son a vant age; car en subrogeant p u r e me nt
e t simplement en son lieu et place les héritiers R i c ar d à la pour
suite , on la décharge de tous les risques et évènemons attachés à
la qu a lité d en chérisseuse et p o u r su iv a n te , pour les r ep or te r e n
tièrement sur les s ub r og é s; de manière q u ’elle n ’a plus
que du
bénéfice a r e c u e i l l i r , soit de la revent e si elle pr odui t une plusvalue telle q u ’on a lieu de l ’c s pé i er , soit de la condition
qui est
( i ) La copie qui est rapportée (cl, dont il est parle page 8 ) de la notification
faite le i3 messidor an 11 , par ta dame de Vichy , aux acquéreurs Brochet ,
Salmlier et Plancix,contient dénonciation et transcription, entre autres pièces,
i.° de l’état et désignation des biens vendus au citoyen Magaud et aux autres
acquercurs, comme appartenait!) au sieur de Vichy ; 2 .° du commandement fait
h la suite )e t i messidor, môme année, par la dame de Vichy , à son mari , por
tan t « qu’a delaut de paiem ent, elle, entend porstiivre la vente et expropriation
p ar 1(1 voie de l enchere , dt'.s biens dont la désignation est faite en tête (/rs pré—
æen/es, lesquels biens ont été acquis par les citoyens Favon , M agaud, Nicolas,
B rochet, Sabaticr et Plancix , auxquels il « été J'uit déclaration d ’enchères par
actes des onze et seize, prairial dernier.
A l’appui de celte pièce décisive , on rapporte encore t°. l'entrait du bureau
d’enregistrement , qui pronve que l’original de cet exploit de dénonciation a
été enregistré le moine jour i3 messidor an g ; a ° l’exIraiL des eiircgislremcns
des actes d’enchères des il et l(> prairial précédent ; 3 u l’exlrait dY nrc'istrcnx iil de la procuration passée devant Chnssaigne , notaire à Clermonl , par la
clame de Vichy , le la prairial an y , pour la suite deadites caciièrcs.
�t r\
V iû)
i mposée aux héritiers Ri car d , au m o y e n de la subrogation p a r e u x
.
demandée et a c c e p t é e , de
fournir !e m o nt a nt de
l ’e n c h è r e , et
d'acquitter les (rais dans le cas où l’on ne trouverait pas d ’acquéreurs
p o u r couvrir cctte e n c h . r e : et c ’est ici ia différence qui
se r e n
c ontre dans l’espèce particulière , avec les causes qui se sont déjà
présentées en celte matière : car dans celle-l« les demandeurs en s u b
rogation voulaient laisser tous les risques à la cha rge de l ’ en
ch érisseu r qui abandonnait son enchère.
L e s troisième et quatrième dispositions n ’étant que la conséquence
des de ux précédentes, ne préjudicient. pas davantage à la dame de
V i c h y , d ’autant q u ’elles n ’ajoutent rien qui puisse la f r a p pe r ou
r e t o m b e r sur elle.
Il n ’y a do n c que la disposition qui la c on da mn e aux dépens ,
qn^elle
puisse t r ou v er onéreuse. Mais il fallait alors q u ’elle
traignît son appel à ce seul
c or e e sp ér er d ’y réussir ?
res-
c h e f j et c o mm en t pour rait- ell e e n
L a condamnation des dépens est la p ei ne des t émé ra ir es plai
de ur s, de ceux qui soutiennent d ’injustes contestations et qui y s uc
c o m b e n t . Il n ’est pas permis a u x tr ibunaux de leur en faire grâce ni
r emi se à cause de leur quali té, pas m ê m e sous p ré te xte d ’équité ,
ni pour quelque autre m ot if que ce puisse être. ( A r t . I . " du lit.
XXXI
de l’ord.ce de 1667 ).
O r la
daine de V i c h y avait i nd éc e mme n t nié des
et établis ; elle av,iit
qu elle
,
11 avait
pas
faits
vrais
té mé ra ir eme n t et fraudul eusement soutenu
fait
d e n c hè r es ni de c omm an de me nt
pour
engager la revente par e x p r op r ia t io n des biens de son mari. Klle
a v a i t , injustement
et sans cause léüilitne
./ contesté la c onti nuation
'
O
de la poursuite , elle s ’etail aussi injustement e l bien p l u s , c o n tr e
son propre intérêt , opposée ù la subrogation p ure el .sumple
m an dé e
par les héritiers Ilicard : elle devait
elle l’a é t é , c onda mné e aux dépens de c el l e
de
do nc être , c o m m e
t é m ér ai i e
el injuste
contestation , et le jugement dont est appel ne pourrait êi re l è f o r m é
en
ce point , sans blesser à la fois el la disposition textuell e de
l ’ordo nna nc e e l toutes les idées îe^ues eu justice.
�(i4)
$.
II.
Contre le Citoyen M agaucl.
la qualité du c i t o y e n Magnud dans cette affaire ?
Quel le est
c Jest c eüc d ’un acquéreur à titre s u s p e n s if et p u r e m e n t éventuel.
Que ls droits lui assure celte qualité , di aprés not re code h y p o l l i é caire , p our s’opposer a ux enchères qui ont frappe
son contrat et
e m p ê c h e r la revente qui doit en être la suite ? aucuns : car p our
avoir des droits acquis , il faudrait
que sa vente fût devenue d é
fin itiv e faule d ’enchères survenues
dans le délai pr esc ri t p ar la
loi; et il est r eco nnu et p rouvé en point de f a i t , q u ’il est s u r ve n u
dans ce
délai une enc hè re faite par la dame
de V i c h y sur son
acq ui si t ion, e nc h èr e qui , de d r o i t , n ’a jamais cessé d ’être e xi s
tante , p u i s q u ’ elle n ’a pas été retirée ni annullée légalement.
Par
le
de me ur é
doit se
seul Fait de l ’émission de celte e n c h è r e , son litre est
en
suspens
j us qu ’à l ’évé ne me nt
poursui vre p o u r la
d ’attendre
ce résultat
de l 'adjudication
revente. J1 est obligé
qui l 'expos e
qui
de soulTiir et
à la dépossession.
C ’est
condi ti on formelle que lui ont imposée les art. X X X I et X X X I I I
de la loi du
11 br umai re an 7 , et à laquelle il s ’est assujetti en
r e me t t a nt son contrat à la transcription.
C ’est donc contre le sens é vi de nt de la loi et contre sa dispo
sition que le cit oyen Magaud vi ent se plaindre de ce que le j u g e
m e n t de I.tru instance l ’a soumis à un évé ne me nt qui était a ll ac hé
à la nature
de son titre. Il a dû nécessai rement
c o m p t e r sur la
résolution de son c o n t r a t , dès q u ’il y élait survenu
dont l’exist ence
plus
q u ’à
11e peut actuel lement êl rc
re co uvr er
bour se me nt lui
ses
frais
et
l o y a ux
était offert , à moins
une
e nc h èr e
d és a v o u é e ; il n ’avait
coûls
dont
le r e m
q u ’il n ’arrivât , l o rs q u’ on
voudrait pr oc éd er à l ’adjudication , que le silence de tous les c ré
anciers inscrits et intéressés à faire valoir l’enc/ièie , ne vînt lui
restituer
XVIII
l ’ctlèt de son acquisition, c o m m e il est pr évu par
l ’ar(.
de la ¡oi sur les ex pro p ri ati on s forcées.
Ainsi son appel n ’est pas plus rcc cva ble que celui de la damo
�c i5 )
.
de Vieil y. C e t appel doit. «Vantant mie ux c ire r ep o us s é, qu’ii a été
encore interjeté d ’ une manière indéfinie , et q u ’au lieu de le r es traindre à ce qui touchait seulement la vente de ce qui lui
était
r e l a t i f , le citoyen M a g a u d , en le faisant poi ter sur le tout , de
mande également la reformal ion du jugement- de 1 . ' " instance dans
ce qui concerne les autres acquéreurs qui lie s ’en plaignent pas ,
et pour lesquels sans doute il n ’est pas en droit de se p l a i n d r e ,
l orsqu’ils
ne j u g e n t pas ' e u x - m ê m e s q u ’il leur a ppart i enne de le
faire.
E nf i n ce qui achève
de rendre le ^citoyen Ma ga ud défavorable
aux y e u x de la j us ti ce ,
et no n-r ec eva bl e à soutenir aucune c o n
testation ou a ppe l envers les créanciers de V i c h y , c ’est l ’e x c e p
tion qui naît du
dol dont il s ’est é v i d e m m e n t r endu coupable ,
soit en se prêtant à céler une partie du prix de son acquisition ,
p o u r la soustraire ?ux créanciers dont elle était Je gage , soit en
colluHant avec, la d a i n e de V i c h y p our c acher , désavouer et sup
p r im e r les enchères qui devaient met tre ces créanciers dans le
cas de relever cette première fraude , et de r am ene r la vente à son
véritable prix par une adjudication publique.
Cette except ion le rep ous se , et ne lui p e r me t pas m ê m e d ’être
entendu : p r œ lo r , dit la loi j
varias et dolosos qu i
fl' de dolo m alo , subvenil a d versus
a liis obfueru/it c a llid ita le
(¡uddain , ne
ve.l illis m nlitia sua s il lucrosa , vol ipsis si/nplicitas dmnnosa. O r
l ’objet de sou appel n’est-il pas de recueillir le bénéfice de la fraude
q u ’il a pratiquéeavec le sieur de V i c h y et son é p o u s e , au préjudice
des créanciers de celui-ci t Sa fraude lui serait donc utile , il en r ec e
vrait la r éco mp ens e , si cet appel pouvait êti,e écouté , tandis que
la loi naturelle v e u t ,
ail contraire, q u ’il en soit p u n i , lors m ê me
q u ’il pourrait trouver dans la r igueur ou dans la subtilité du droit
quelques
F
er
a rg ume ns à
p rosit L.
Qu'il
ait
l ’appui de sa cause.
o c c a s io n km JU iits
1
A V c/ii dolus suus
c i v u . i s conlrà n aluralem œ quitatem
. ii.d e (loi. m al. excep t.
ne dise pas au surplus que
eu pour
o b j e t , dans
de favoriser les moyens
son
la loi
esprit
frauduleux,
du
c o mm e
1 i b r umai r e an <j
dans
son
t ex te
qui p our ra ie nt ¿Lie concertés
�,
.
(16)
,
.
e nt r e l ’acquéreur et le vendeur, au préjudi ce des créanciers ; c’est
de sa part calomnier la loi et l ’intention du législateur dont elle a
été l ’ouvrage. II n ’a pas é t é , en e l f e t , ni pu être dans son
v œ u de
f a v o r i s e r ni de r éc o mp e ns e r la fraude , et si par une fausse in
t e r p r ét a t i o n de q ue lqu’une de ses dispositions , on pouvait induire
im a rgument contraire
il ne serait pas possible d’y avoir égard ;
car l a l o i ne peut vouloip que ce qui est juste et honnête , et doit
toujours
se r a pp o rt e r au p ri nci pe de l ’é q u i t é
naturelle.
Ma is si 011 c h er ch e les motifs de cette loi dans les r appor ts dont
elle fut précédée , on trouve q u ’elle a eu p o u r
objet , loin de
c r é e r de no u ve au x a b u s , d e r e mé d i e r à c e u x qui étaient nés
de
la législation p récédente. « Depui s longtems, disait le r ep ré se nt an t
)) Ja cquem inot , dans un de ces r a p p o r t s , tous les h o mm es éclai)} rés demandaient q u ’en écartant les préjugés , en surmont ant les
)> anciennes h a b i t u d e s , on établît enfin un mode conservatoire des
)) h yp o t h è q u e s , basé su r les p rin cip es de la loy au té et de la bonne
)>f o i , qui facilitât les transactions , qui les environnât (Vun g ra n d
)> j o u r , qui s’opposât i nv i n c i b l e m e nt à ce (jue la confiance f à l d c )) son n a is victim e des
détours de la fr a u d e , en un m o t , qui
» garantit à chacun ses droits et sa p rop riété n.
E t si
facile
de ces mo ti fs
de reconnaître
précautions
qui
velles , toutes
exposés
que cette
loi , sans
rien
existaient d éj à , n ' a fait q u' en
en faveur
sollicitude , et
on passe aux dispositions, il est'
r e tr a n c h e r
des
ajouter de n o u
des créanciers , qui méritaient toute sa
dont elle n ’avait en vue
que le seul intérêt
et
avantage , tandis q u’elle n ’a rien fait ni voulu faire p our les acqué
reurs
q u ’elle ne considère que dans un état p r é c a i r e , et n ’a y a n t
q u ’un litre incertain , j us q u ’à ce que l ’adhésion des créanciers i n
tervienne p ou r sanctionner leur contrat p ar le silence ou p ar lo
défaut d’e n c h è r e s , et le r e ndr e définitif.
Les
héritiers
Ricard
p our ra ie nt
te rmi ne r ici l eur discussion,
dès q u ’ il est p ro uv é que l ’ un et l’autre de
leurs adveisaircs sont
égal ement uoii-rcccvaldes dans leurs appels : mais ils ne doi vent
pas craiiulîu de les suivre et c ombat tr e jusques dans les moyens'
q u ’ils mettent
en avant p our
accuser d ’erreur^ ou mal j u g é au
�(
17
)
f o n d le j ug e me nt de I.cre instance, puisque ces objections 11e
posent véritablement que sur la subtilité.
$.
re
I I T.
Réfutation du système des appelcms 'sur le sens des lois du
11
brumaire an 7.
A v a n t le dernier code h y p o t h é c ai r e , 011 ne se serait pas permis
sans doute de met tre en question , que des créanciers
opposans
s ur les biens de leurs débiteurs , dans le cas de vent e par
volontaire
ou
lettres de ratification ,
décret
n ’eussent le droit , p o u r
l eur intérêt
l orsqu’il était survenu une e n c h è r e sur le p r i x de ces
ventes , de
la part de l ’un d’entr’ e u x , et que ce lu i-c i se montrait
négligent à suivre celte e nc hè r e ou l ’abandonnai t, , de se s ub ro g er
au bénéfice et à la poursuite de cette m ê me enc hè re et de re le
ver la négligence ou l ’abandon de l’ enchérisseur qui le plus sou
vent avait été désintéressé.
C e l l e opinion était fondée sur deux p ri nci pe s bi en
prem ier,
trouve
r econnus : le
que toute enchère, dès le m o me n t q u ’elle est f ormée, se
acquise
, soit
à la partie saisie, soit à tous les créanciers
intéressés , parce quo c’est un contrat que Venchérisseur passe
a v e c la justice et p a r lequel il s'engage à se rendre ad ju d ica
,
taire du bien décrété en
cas q u ’ il ne se
forte enchère , contr at qui
est obligatoire dès
et ne p eut
trouve p a s
de plus
le m o m e n t m ê m e
p l u s s e rétracter ( d ’ H é r i c o u r t , traité de la vente des
irnmeub. chap. 1 0 , n°. 18 g ) ; le s e c o n d , que
s ai sissant , et
tout opposant
est
q u’à ce t i t r e , dans toutes les poursuites qui se f o n t
sur un débiteur commun , soit q u ’il s’agisse d ’apposition de scellés
saisies et ventes mobiliaires , ou décrets et ventes immobiliai res ,
soit q u’il s ’agisse
niers saisis ,
il
a le
d ’ordre , distribution
droit
ou c o nt r ib ut i on
de faire po ur l ’intérêt de
p o u r le sien p ro pr e , tout ce que le poursuivant aurait
et de
de de
la masse
et
du faire ,
se faire s ubroger en son lieu et place , lorsque
néglige ou cesse d ’agir 5 c ’est ce q u i a été c o n s t am me nt
celui-ci
pratiqué
c
�( iS )
de tous les tems , c o m m e l ’ai lestent tous nos
( _
auteurs ( d ' H é r i -
c o ur t , traité de la vente des immeubl es , ch ip. 6 , 11."
4. me p a r t i e ,
traité de la pr océ dur e civile
24 . ; P o i t i e r ,
cliap. 2 , art. 8. j Rayant,
p r o cé d u r e du palais . etc. ).
E n f i n , c' est ce qui se pratique encore j our nel lement dans tou
tes les instances de saisie ou
ordre. C o m m e n t donc la dume de
V i c h y et le c i t o ye n Magaud ont-ils
pu
aurait dû être changé depuis la loi du 11
i maginer que cet usage
b r u m ai r e an 7 , sur le
ré gi me h yp o th é c a i r e , et q u ’il ne devait plus c i r e admis en m a
tière d ’ enchères ? E s t - c e que les principes et les motifs sur lesquels
il
était fondé , ont cessé d ’exi st er ?
-
Ils r ép o nd en t que cette loi ne parle pas de cette subrogation
aux enchères
;
m a i s , si
elle
n ’en parle pas
pour
l ’a ut oi i se r
n om in a tivem en t , elle n ’en parle pas non plus pour la défendre ;
dès-lors c ’est un p o i n t resté sous le droit c o m m un p r éc éd e mm en t
observé. L/édi t de jui n 1 7 7 1 ne parlait pas non plus de la sub ro
gation a ux enchères , et cependant 011 n' avai t jamais entrepris de
p ré te ndr e
que celte
voie ne dût avoir
lieu. Que ll e
en était la
raison ? c ’est que le concours des oppositions , c o m m e celui des
inscriptions
l ’ordre et
qui y o nt été substituées , engageant nécessairement
distribution entre tous les créanciers opposans ou ins
crits , tout ce qui se fait dès le m ê me m o me n t par l’un des o p p o
sans devient
c ommun
c ’est un incident
aux
autres.
survient
une enchèr e ,
h e u r e u x dont le bénéfice est acquis à Ions ; de
ni eme , s ’ il survient des lenteurs
tions
S ’il
, des distractions ou
au préjudice de la masse , dans le cours de
c o nda mna
la poursuite ,
tous sont obligés d ’en s up p or t er les évènemens.
Nos
adversaires
ex c ip e nt des art. X X X I et X X X H ; suivant eux,
d ’après ces ai l i c l e s , chaque créancier inscrit doit enchérir pour
son compte. A
défaut
d ’enchèr e de sa part dans
le délai pres
crit , la valeur do l’i mme ub le demeure définitivement fixée envers
lui au p r i x stipulé par le
contrat.
C ’oht-à-dire, suivant e u x, q u e dans le c a s d ’une vente qui serait por*
t é e p a r fraude
à un p r i x t rè s-i nf éri eur , et sur laquelle subsisterait
�(
]9
)
néanmoi ns,par e x e m p l e , un no mb re de vingt inscriptions, il faudrait
que chacun des vingt créanciers inscrits , ne pouv an t c o m p t e r sur
ce qui serait fait par les autres pour l’intérêt c o m m u n , fît son e n
c hè re parti cul ière, p our ne pas être dupe de la ruse du d éb it eu r:
mais les frais de ces vingt enchères , c eux de leurs dénonciations
et poursuites , devant être pris en privilège sur la val eur de l ’i m
m euble affecté ; il s’ensuivrait que le p r i x de cet i mme ub le serait
dans
le cas d ’être absorbé en', son entier par ces frais , et de ne
p ouvoi r m ê m e y suffire ; que dès lors il ne resterait r ien a ux cré
anciers à rece voi r sur ce qui l eur serait dû ; et q u’ils se trou
veraient nécessairement condamnés à re spe c te r la f ra ude pratiquée
p a r l eur débiteur , sans p ouvoi r
s ’en
plai ndre , à moins de s’e x
pos er à voir aggraver l eur perte.
U n e disposition aussi
absurde ne p eut se supposer dans l ’i n
tention de la loi. No u s vo yons au contraire dans
le
m ê m e art.
X X X I I et dans Fart. X X X I I I , que dès q u ’il est survenu une
déclaration d ’e n c h è r e , le contrat qui en a été f ra pp é , loin de d e
ve ni r définitif envers aucun des créanciers , se trouve au c on
traire , sinon anéanti , du moins suspendu
dans ses effets envers
toutes les p a rties intéressées , et que la poursuite à fin de revent e
doit nécessairement avoir l i e u ; ce qui ne peut se faire encore q u ’au
profit de tous les
créanciers i n s cr it s , puisque tous
appelés a l ’adjudication ( art. V I de la loi sur
doivent être
les expropr iat ions
forcées ).
L e contrat étant suspendu dans ses effets p a r l ’intervention de
l ’e nc hè re faite par un seul des c ré a n c ie r s, il en résulte également
que la
p ro pr ié té de
n ’a ya nt pas
avait
l ’objet ve ndu doit être considérée
c omme
cessé de résider en la personne du débiteur
qui en
consenti la vent e , et que l ’acquéreur
qui
s ’en tr ouv e e n
possession ne p eut être regardé que c o mm e en étant
le déposi
taire. C ’est aussi ce que déclarent les art. III et X V I I I
même
de
la
loi sur les e xpropr ia tions forcées.
C e n ’est pas t o u t , le m ê m e
art. X V I I I p or te que la soumis
sion faite p a r u n des créanciers d’aug me nt er le p r i x de la vente
vol ontai re sert de prem ière e n c h è r e , lors de l ’adjudication pour
�}
(
la revente : donc cette soumission est obligatoire tin j o ur où elle
est faite ; donc elle appartient el. doit profiter à tontes les par
ties i nt ér es sées; donc enfin elle
ne peut é h e séparée de l ’adju
dication a f i n de r e v e n t e , p ui squ’elle en lait
partie e l
torme la
p r e m i è r e mise.
Mais , disent les a d v er s ai re s , cell e soumission n ’est
p a r acte
exlra ju d icia ire ; pour q u ’on piiL
contrat f ormé en j u s t i c e , il
on faire résulter
faudiait q u ’elle fût
c o m m e sous le r égi me de l ’édit de
faile
que
un
faite au greffe ,
1771.
C e l l e objection n ’est q u ’u n e mauvaise équivoque. P a r le dé pô t
çt la transcription que l’acquéreur fait de son titre au bureau de
la conser vat i on des h y p o t h è q u e s , il contracte légalement envers
t ous les
créanciers
inscrits la condition
de r a pp o rt e r son p r i x ,
s ’ils y adhèrent ; ou , si quel qu’ un d ’e n l r ’eux ne veut pas y adhérer et
e n c h é r i t , il contracte l ’obligation de r ap p o r t e r l’objet vendu p our
ê tre soumis à la revent e pa r adjudication publique.
reau des h y p o t h èq ue s est le greffe institué par
voi r au profit des c ré a nci ei s inscrits
Ainsi l e b u
la loi pour r e c e
toutes les
soumissions et
obligalions des acquéreurs.
L e contrat élant ainsi une fois formé, la loi n ’a pas exi gé ni dû
e xi ge r que les
actes subséquens
qui
se r éféreraient à son e x é
cution , fussent également déposés ou transcrits ; elle s ’est con
tentée de simples
notifications : mais
ces notifications ptofi e ut
nécessairement a tous les créanciers , puisqu’elles sont la suite de
l ’engagement légal opéré par la
transcription , et que d ’ailleurs
elles doivent, être faites tant
ve nde ur qui s ’en
au
trouve
saisi
p o u r tous ses c ré me io rs appelés à e x e rc er scs d r o i t s , q u ’à l ’ac
q ué r eur qui est conslitné leur d ép os i la ir e, et q ui , dans foui ce qui se
fuit p a r s u i l e d e l à transcription , esL si bien censé agir pour e u x ,
que ! arl. X X X I V
le droit de
de la pr emi èr e loi du
se faire r emb ou rs e r
adjudicataire et sur le p r i x de
fhi
oppose
contraire } l ’lul
deux
j u g eme us
11 br umai re lui donne
de lotis ses frais par
le
nouvel
la chose.
rendus dans 1111 sens
pr étendu
p Ur ]« tributial d ’appel do Paris , le 1 (i thermi dor
�( Si )
an
lo
,
prairial
l'autre par
le
tribunal
d’appel
de
Riom
au 1 1. Mais , quelque respectables que soient
niens , ils- ne peuvent
f ormer aucun
dus
ces
le
n
juge-
préjugé dans la cause ; car ,
outre que les motifs qu’ils ont adoptés
sés par
,
se sont, trouvés c ont rove r
décisions di¡Terenies i nt ervenues
dans d ’antres tri
b u n au x , q u ’il est é g a e m e n t possible que la discussion qui les a
précédés
n ’ait pas
été assez ap pr of ondi e
ils
difîerenL encore
essentiellement de la cause actuelle.
D ’abord , on ne rencontrait pas dans les affaires
auxquelles ils
se r a p p o r t e n t , c e l t i connivence frauduleuse , ce (loi évident
qui
dans l’espèce actuelle ont été pratiqués e nt r e le vendeur , l ’a cq ué
r e u r et
l’enchérisseur p o u r f rustrer les créanciers légitime.*., et
- q u i , c o m m e ou l’a d é m o n t r é , doivent suffire seuls pour faire déclieoir la dame de V i c h y
et le citoyen
Magaud de toute e x c e p
tion et m o ye n s q u’ils voudraient i nvoquer en leur faveur.
E n second l i e u, il y avait eu clans l’une et l ’autre espèce , désis
t e m en t fo rm ellem en t et légalem ent notiJié par 'les enchérisseurs ;
ils pouvaient donc , avec quelque raison, soutenir q u ’ils n ’étaient
volonté ,
pas obligés d’aller plus loin c oni re leur i n t ér ê t et leur
s au f aux autres
à
leurs
ciéanciers à poursuivre
risques ,
comme
ils
aviseraient.
p our
leur
Ici , au
c omp te et
contraire
,
il n ’existe point ni n ’a jamais existé de désistem ent fait par la dame
de V i c h y de la soumission et déclaration d ’e nc hè r e , qui est prouvée
avoir été par elle (aile envers les citoyens Magaud et autres ac
quéreurs , sous les dates des i l
que
de la pr océ dur e par elle
commandement
ensole
que ces
et
16 prairial
an 9 , non plus
engagée p o u r la r event e
et dénonciation des 11
par ses
et 10 messidor sui vant ;
enc hèr es el c el l e pr océ dur e sont toujours s u b
. s if- tan les.
En
troisième lieu , dans l ’espèce jugée au tribunal d appel de
Paris , aucun des créanciers 11e demandait la mai ntenue de l’e nc lière ni sa subrogation.
Qua ti i ème i ne nl e n f i n , dans l’espèce
de Ri om , le 11
rogution ,
jugée au tribunal d ’appel
p i a i i u l an 11 , le créancier qui réclamait
la demandait
lafub-
a ux risques de l’enchérisseur qui s'éiait
�32
if
)
départi , et voulait que cet e n c h é r i s s e u r , non-olbstant son
désiste
m e n t et sa déclaration q u ’il était désintéressé , f ût tenu non seu
l eme nt
de
p arf our ni r
Venchère
du
vingtièm e
portée par sa
soumission , mais encore fût garant des frais de la p ro cé d ur e à fin
de revent e par adjudication : ici , au contraire , les citoyens R ic ar d
n ’ont dema ndé et obtenu q u ’ une subrogation p u re et sim ple
à
leurs pr opr es risques ,
l ’avantage de tous les
qui , loin de nuire à pe rsonne ,
et
fait
créanciers intéressés , celui de la dame de
V i c h y e ll e- mê me qui se dit la créanci ère la plus c o ns i dé r ab l e, et
celui de son mari qui est la partie saisie.
\ oyons , au surplus , si l ’opinion q u ’on nous oppose
n ’a
pas
été pui ssamment c omb att ue , et si en ce m o m e n t il p eut m ê m e
être permi s de la soutenir davantage.
O n trouve dans le r ap p or t fait p a r l a commission du tribunal de
cassation , sur le p r o j e t de code civil , 1om. 2 , pag. 1 7 7 } le pas
sage suivant : « Il pourrait souvent arri ver que le p ri x de la vente
» f ût inférieur à la vraie v a l e u r , et les créanciers ne doivent pas
» en s o u f f r i r . L ’édit de 1 7 7 1 l’avait prévu et avait autorisé les c ré a n
)> ciers à s ur e nc hé r ir d ’un di x iè me , ensuite d^un vi ngti ème l ’ un sur
« l ’autre ; mais il n Javait autorisé que les créanciers eu x-m êm es ,• ce
« qui e xé cuté à ia rigueur pouvait être injuste par l ’état de la f ortune
» des c ré a n c ie r s, leur impuissance ou leur i nc onvenanc e d’acquérir
» p o u r e ux -mê me s : ce qui d ’ un autre côté , était bien facile à éh » der , en faisant arr ange me nt avec un t i e r s , p o u r lui transmettre le
» bien adjugé , après lui avoir prêté son nom p our enc hérir.... L ’art.
» X X X I de la loi du 1 1 b r umai r e an 7 , est plus simple et plus rai
» sonnable : L e s créanciers inscrits ne sont pas seul ement autorisés à
sur enchér ir , mais à requérir la mise a u x enchères et adju dication
» p u b liq u e ..... L^edit de 1 7 7 1 autorisait l ’a cq ucr eu r à c ons e rv er
)) l’iinmeuble , en p a y a n t le plus h aut
p r i x auquel il aurait été
)) p o r t é ......Q u e l créanci er ou quel é tr ang er se résoudrait à enc hé ri r
)) et à don ne r à l’i m m e ub l e .tout son véritable p r i x , s’il était au
» c h o i x de l ’a cqué re ur , ou de laisser la chose à l’adjudicataire, ou de la
» prendre pour soi au m ê me p r i x ? Cela étuit moins déra iso nna bl e,
)) quand ou n ’avait affaire q u ’à des créanciers enchérisseurs et n on à
�(23)
)> des ét r angers ..... Mais p our des étrangers , il faut a vou er que cette
y> option <le l’acquéreur serait une règle décourageante, et le plus sûr
)> m o y e n d’e mpê ch er ,s oi t naturellement.soit par convention s ec rè te ,
» que la chose 11e parvînt à son véritable prix. I l ne f a u t c e r ta in e - !
» 1lient p a s q u e le s e u l d ésistem en t d u c réa n c ier q u i a r e q u is la \
)) m ise a u x e n c h è r e s , su jfise p o u r em p ê ch e r q u 'o n ne p ro cèd e ci '
« V a d ju d ic a tio n ; car alors le mois serait e x p ir é pour les autres
» créanciers
ils ne pourraient plus faire cetle r é q u i s i t i o n ^ et
)> ^acquér eur en désintéressant le p re mi er r e q u é r a n t , ou en faisant
» avec lui quelque autre a r r a n g e m e n t , obtiendrait le désistement
« et p r é ju d ic ie r a il to u jo u rs , p a r le v il p r ix , à V in térêt d es crèa n —
» cie rs : il faut donc q u ’en cas de dé si stement , les a u tr e s créa n ciers
)) p u is s e n t , après la n o tifica tio n du d é s is te m e n t, se su b ro g er a u
)> p r e m ie r r e q u é r a n t et su iv r e l'a d ju d ic a tio n p u b liq u e ».
L a subrogation
a ux soumissions
d ’e nc hè r es et
réquisition de
r eve nt e , d ’après l’opinion de ce r a p p o r t , devrait donc avoir lieu de
plein d r o i t , sous l’e mpi r e de la loi du i l br umai re an 7 , c o m m e
sous celui.de l ’édit de 1 7 7 1 . Aussi la question s’étant présentée à
j ug er au tribunal de cassation le i 5 germinal an 11 , sur le pourvois
du nommé G ir ou st contre V e r s e p u y et la Boullée , ce t r i b u n a l , dans
les motifs de son j u g e m e n t , reconnut et déclara « que l’art. iXX X V I
» de la loi du 11 b r umaire an 7 , abrogeant seulement les lois p r é
» cédentes en ce q u ’elles auraiêrit~tê c ontraire à ses di spositions«.
» et n >in te r d isa n t
)> créa n ciers
pas^ n om m ém en t la su b ro g a tio n de l'u n des
in scrits
au
cr é ancier^
p o u r s u iv a n t,
subi ogati on
)> que les lois précédentes autorisaient , on n e j j e ut p a s d ire q u e
)) cette su b ro g a tio n soit d éso rm a is p r o h ib é e ».
E n v a i n on oppose que dans l’espèce de ce j u g e m e n t , la p o u r
suite se trouvait engagée par l’alRche des biens
était demandée ; mais s i ,
on
dont la revente
c o mm e le p ré te nde nt nos a d v e r s a i r e s ,
devait regarder c o mm e p u rem en t p e r so n n e lle s à celui qui les
f a i t , les notifications d ’enclière et jy;oc:edure p our la r eve nt e , do
maniè re q u’aucun autre créancier 11e put demander a s ’y s ub ro
ger , il n’y aurait pas plus (le raison pour adme tt re cette s ub rogalion, dans le cas où ces pr emi er s actes auraient été suivis d ’alïï-
�( 24 )
clies : car ^ on pourrait dire de mémo que ces affiches et tout' ce
qui se fait pa r s u i t e , de la part
sont que p our son seul c o m p t e ;
a ux créanciers qui
du créanci er p o u r s u i v a n t , ne
on p our rait
n ’auraient pas fait
de m ê m e opposer
de nolificalion d ’enchères
dans le mois de la dénonciation du contrat
r e no nc é à e nc hé r ir , et doivent e x éc ut e r
t r a n s c r i t , q u ’ils ont
le
contrat. — Si donc
on reconnaît q u e , dans le cas d ’affiches , il y a lieu à la subroga
tion , on doit conveni r que c ’est parce que l ’e nchèr e survenue par
l ’ un des créanciers a e m p ê c h é le contrat de d even ir d é fin itif ^l'a
suspendu dans ses eifets, et faisant considérer le débiteur c omme non
dépoui ll é de la p ro pr ié té vendue , a mis chacun de ses
dans le
cas d ’en poursui vre
créanciers
sur lui la revente et adjudication ,
c omme il auruit pu le faire avant la transcription.
Mais toutes les objections doivent di sparaî tre, en ce m o m e n t ,
devant l ’art. X C 1 X , cliap. 7 , de la loijportée le 28 ventôse dernier
sur le r égi me h yp ot h éc a ir e , p our faire suite au code civil.
« L e désistement , y est-il dit , du créancier requérant la mise
» aux enchères , ne p e u t , m êm e q u a n d le c ré a n c ier p a y e r a it le
)) m o n ta n t d e la so u m issio n , em p êch er V a d ju d ic a tio n p u b liq u e ,
» si ce n ' e s t du consentement e x p rè s de tous les autres créanciers
)> hyp oth éc ai re s ».
Dira-t-on
que cette loi ne peut avoir d ’effel r é t r oa ct i f : mais
nous invoquons l’article cité , non pas c o m m e établissant le p r i n
c i p e , p ui squ’il est r econnu q u ’ il existait et a toujours existé : nous
l ’opposons c omme une r é pé t i t io n , c o m m e une confirmation de ce
princi pe.
Enfin , à ente ndr e la dame de V i c h y et le citoyen Magaud , les
hériti ers Ri car d plaident sans intérêt , et n ’agissent que par h u
m e u r dans cette cause ; l’ insuffisance de la valeur des biens du dé
biteur pour acquitter toutes les c ré a n c e s , et la postériorité du rang
d ’ h yp ot hè que des citoyens R i c ar d , 11e leur permettent pas d ’espérey
d ’obteni r la
Mais
reproches
m oindre
p e u t - 011
collocation «ur le p r i x des biens dont il s ’agit.
s ér ieusement
et
dé ce mme n t
proposer
des
uussi f au x et ridicules ? Q u o i ! les créanciers se trou
v e r o n t mi eu x traités et a ur ont
plus de ressources p o u r se payer
�(25 5
lorsque le p r i x
des ventes restera m oindre
d e m oitié
du t a u x
auquel il peut s ’é l ever p ar l’adjudication publique.
D ’a i l l e u r s , sur quoi la
soutenir qu' il ne doit rien
dame de V i c h y
s’appui e t - e l l e ,
pour
rester du p r i x de cette r eve nt e a u x
citoyens R i c ar d et autres créanciers ? c ’est sur sa p r ét ent i on de tout
4
a b s o rber en se disant créancière de son mar i de i o, ooo fr. M a is
cette
p r é tention n ’est
bien
craint
d ’ètre
q u ' u n e fiction ; e t
la da me de V i c h y a si
démasquée à cet égard , q u ’elle s’est r efusée
f o rt em ent à soutenir et laisser j ug er l ’i nci dent élevé par le c it o ye n
R i c h a r d - C o rb e r y , qui attaquait ses créances et pr ouvai t q u ’elles
devaient se réduire au-dessous de 20,0,00 fr.
A in si s ’évanouissent les suppositions e t les sophi smes accumulés
p a r le citoyen Magaud , de concert avec la dame de V i c h y , p ou r
faire prévaloi r des
appels téméraires.
L e j u g e m e n t du
t ri bunal
de p re mi èr e i nstance est basé s ur l’ esprit et sur le t e x t e de
la loi ; il a p ou r objet à la fois de mai nt e ni r la f aveur due à des
créanciers l é gi t ime s, et de garantir leurs intérêts contre les tenta
tives injustes de la fraude et de l ’avidité qui s ’efforçaient de les
frustrer. I l ne p e ut donc q u’o bte ni r sa confirmat ion des magistrats
supérieurs.
Signé R I C A R D .
L e C .”" D E V È Z E - C H A S S A I N G ,
avoué.
A C lerm ont-Ferrand , chez J. V e y s s e t , Im prim eur de la Préfecture
du P u y - d e - D ô m e , rue de la T reille.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ricard. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Ricard
Devèze-Chassaing
Subject
The topic of the resource
créances
hypothèques
doctrine
rétroactivité de la loi
Description
An account of the resource
Mémoire pour les héritiers Ricard, créanciers du ci-devant marquis de Vichy, intimés ; contre la Dame Langlard, épouse se disant divorcée dudit de Vichy, appelante ; Et contre le Citoyen Bernard Magaud, aussi appelant ; En présence des Citoyens Richard-Corbery, Grimardias, Juge et autres créanciers de Vichy.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1780-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0243
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1409
BCU_Factums_M0244
BCU_Factums_G1410
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53742/BCU_Factums_M0243.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanonat (63084)
La Varvasse (château de)
Saint-Sandoux (63395)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
doctrine
hypothèques
rétroactivité de la loi
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• P OUR
L e sieur R O B E R T
d e
L E I G E , appelant;
C ONTRÉ
F r a n ç o i s A S T O R G et M a r i e V I G I E R , sa fem m e ,
~
intimés ;
ET
'Br i g i t t e
CONTRE
R O T Q U IE R
L A C R O IX ,
son
et
J
e a n
m ari ,
-B a p t i s
t e
in tim é s.
« . L o r s q u e les parties ont, stipulé que les fruits (d e
« l ’i m m e u b l e d o n n é à a n t i c h èse) , se c o m p e n se r o n t
«• av ec les . i n t é r ê t s , ou t o t a l e m e n t , ou j u s q u ’à due
« c o n c u r r e n c e , cette convention s 'e x ê c u le , c o m m e toute
« a utre qui n e s t point prohibée par les~Lois. ( C o d .
« civ. art. 2 0 8 9 .
A
�C
2 )
C e principe de la légïslalion actuelle, conform e au x
lois romaines , adopté par les auteurs du droit qui se
sont le plus élevés contre l ’usure , décide l a contesta
tion sur laquelle la C ou r aura à statuer. U n créancier
a joui pendant dix ans avant 1 7 1 4 , un très-petit pré
p o u r l ’in térêt légitim e de sa créance. L e débiteur r e n
trant dans son héritage à celte é p o q u e , a continué le
paiem en t de l’intérêt pendant quarante an s, et a retiré
vingt-trois q u itta n ce s, parmi lesquelles sont plusieurs
arrêtés de com pte. Q uand on lui a dem andé le capital,
il a refusé de p a y e r , sous prétexte de l ’ancienne anlich rèse, et a dem andé une vérification préalable pour
savoir si , lors de l ’antichrèse et avant m il sept cent
q u a to r z e , les jouissances de son pré avaient été ou non
d ’une valeur supérieure à l ’intérêt échu pendant leur
durée. V o ilà en précis tout l’objet de la prétention des
.Aslorg ; et si elle a été accueillie par les premiers jug es,
c ’est que la cause a été deux fois jugée par défaut contre
l ’appelant.
L a créance cédée a passé en plusieurs m a in s, et la
résistance du débiteur a occasionné une foule de re
cours et de procédures, qui ont occupé les tribunaux
depuis 1764* U n e partie de ces demandes en recours
est encore pendante devant les premiers juges, et il
n ’y a principalem ent eu litige actuel que l ’effet de l ’anlliicrèse. L ’appelant rendra donc com pte à la C our de
la convention qui a établi celle anliclirèse, et des actes
qui l’ont suivie.
�C
F A IT S
ET
3 )
PR O CE D U R E S.
. Guillaum e Soubie était créancier de G éraud Sales et
sa fem m e d’ une som m e de 600 fr. en cap ital, p r o v e
nant d’ une d o t, et produisant par conséquent intérêt
de sa nature. L es parties traitèrent sur cette créance
le i p a c û t i 6 8 3 , et elle fut stipulée payable en quatre
term eségaux a vec intérêt. I l fut co n v en u q u e , pour cet
in té rê t, ledit Soubie pourrait jouir du pré de L a v a l ;
mais cette convention n’ eut pas son exécution jusques
à un autre traité de 1703. Ainsi il est inutile de fixei*.
l ’alention de la Cour sur ce prem ier acte.
G uillaum e Soubie maria Pierre Soubie , son fils , en
1689 , et lui donna ladite créance pour légitim e. Celuici la céda au sieur D o u lé , curé de N oailles, par acte
du 10 septem bre 1 6 9 5 ,,et ce dernier obtint sentence
contre les débiteurs, le
5 octobre suivant. C ette sen-
tence.encore n’adjugeait q u 'u n e 1h ypo th èq ue indéfinie.
Les- héritiers du curé de Noailles cédèrent air sieur
E m e r y - R o b e r t, leur créance de 600 fr. et le droit de
jouir du pré L a v a l , par acte du 1 5 juillet 1703.
P ar ce m êm e acte on voit que M arie Sales, fem m e
Sartiel, d é b itric e , intervint a ve c ledit Sartiel r son mari,
pour s’obliger en outre de p a ye r audit sieur Robert une
somme de 194 liv. i
5 sous, provenant d arrérages de
ren tes, adjugés par trois sentences. L ’acte term ine par
la clause suivante,, q u’il faut transcrire littéra lem en t,
A 3"
�( 4 )
parce qne c ’est contre son exécu tio n que les sieurs
A storg veulent revenir (i).
.
F a u te de p a iem en t, Ledit Robert pourra jo u ir d u
su sd it pré de L a v a i, p o u r l e l é g i t i m e i n t é r ê t d e s
d i t e s sommes, tant et s i Longuement que Lesdits maries
seront en demeure d e r e n d r e i c e l l e s , ce qu Us pour
ront fa ir e qua nd bon Leur semblera , et Ju sq u es à ce ,
se réserve ledit Robert L'hypothéqué précitée et privilège1
de ses hypothéqués, jé in s i a été convenu et promis tenir
p ar lesdites parties sous Cobligation , etc.
A près cet acte le sieur E m e r y - R o b e r t se mit en
possession du pré L a v a l , et en jouit pendant les années
170 4 et suivan tes, jusques en 1 7 1 4 .
Alors M arie Sales était rem ariée à Pierre V i g i e r ,
et ce n o u vel ép ou x s’empara du p r é , sans autre forme.
L e sieur R obert aurait pu sans doule refuser la remise
de son gage jusqu’à ce q u ’il fût p a y é : mais il était fort
aise d ’en être débarrassé et d ’avoir le droit de dem an
der son revenu annuel 5 en conséquence il assigna les
dits P ierre V ig ier et M arie Sales par exploit du 18 jan
v ie r 1 7 1 6 .
11 exposa « que ladite Sales ne saurait ignorer être sa
« débitrice i.° de 600 fr.; 2 ° de 194 fr. i 5 s . pour les
«• causes portées par acte du i
5 juillet 17 0 8 ; que pour
( 1 ) Il y a une légère différence entre l ’expédition qu’en rap
portent les A s to rg , cote i . r e , et la copie signifiée cote
cette différence ne change rien au sens db la convention.
5 5 mais
�'
(' 5 j
0
« l ’intérêt desdites sommes elle n’a y e consenti engage« m ent des fruits d u 'p r é appelé de L a v a l, duquel led.
« inslant a joui paisiblem ent jusqu’au trouble».
- E u conséquence il conclut à ce que lesdiis mariés
V igier lussent solidairement condamnés à lui p a ye r ^la
«■somme de 39 fr. r i p . 9 d; , faisaiit'le reven u desdites
« sommes depuis le 'i 4 -juillet i'7 1 4 ¡"àu Lieu de La nori
« jo u is s a n c e 'd u d it p r é , avec condam nation de tous
«• dépens , dom mages et intérêts ».
I l prit d ’autres conclusions étrangères h l ’antichrèse,
et tendanfesvau paiem ent des arrérages d’ une rent'è en
g r a i n , ‘q u ’il évaluait pour le passé à 70 liv. 2 s. 6 d.1
C e lle dem ande fut accueillie par une sentence non
attaquée du 26 fé v rie r 1 7 1 6 .
P e u de tems après cette sen ten ce, le sieur E m e r y R ob ert céda sa‘ créance à Joseph* R o lq u ie r , a v e c le
droit de jouir du pré L a v a l , ou de se faire p ayer de
l ’intérêt de ladite créance.
-
C et intérêt fut p a yé par V ig ie r , et ses premières
quittances p ro u ven t, co m m e'les postérieures,■q u ’il 11e
s’agissait plus du passé:
! '!
-
L a prem ière quittan ce, du 16 mai 1 7 1 7 , est dé 8 0 fr.
pour Les- non jo u issa n ces d u pré de L a v a l engagé, et ce
pour Les• années i r]ï'b et 1 7 1 6 . ( ‘C o m m e ces 8d Ir. ex c é
daient de quelques sous l’intérêt légal, lé'Siëûr R o tq u ièr
ajouta h sa signature q u’il les imputait sur les1 70 francs
ci-dessus).
P a r la seconde,-du
:’ 1 ' ! ;
;
3 o juillet 1 7 2 4 , l é ;sieur R o tq u ier
reconnaît avoir reçu L’intérêt w Lui d û .dei la'sbmxHe'de
�.
794 liv. i
.
( 6 ) .
.
5 s. en, lieu*des, non jouissances du pré L a v a i
pour les armées, r 7,i'7 et suivantes , ju s q u e s et com pris
La présente, échu au 1.4; d u présentVi
'
M a rie Sales d é c é d a , laissant pour héritiers testamen
taires P ierre Vigier* son m a r i, et Françoise Sales, sa
sœur. Ils n e.fu iien tjp a sj^ a cts à dp a y e r , et le sieur R o tquier fit /îes'ppi}rsui;les en: se^servanfcdu nom du sieur,
Emery-ï^oberjt ,■son, cédant. Il assigna- par .exploit du.
1 1 mars 173 0 lesdits,Vigier et .Sales, «.pour voir décla«• rer c.pntre eux 'exécutoire la sentence de 1 7 1 6 .^ et
« p a y e r i..° 600 liv. d'une part; 2 °' 1 9 4 liv. i 5 s. d ’a u « tre 3.° 70 liv. 2. s. 6,d. d ’autre. 5 4.°-les intérêts adjugés
« par ladite sentence.» et ceu x échus depuis et>ceux
«■qui écherront à l’a v en ir, sa u f à tenir à com pte ceux
« que les assignés juslineront avoir/payés », ( parce que
l'intérêt des 70 liv. 2, s. 6,dfi était restér-en suspens).
Cette,,demande fut reprise err 173,5,; M arie.Sartier,
fille du prem ier lit de Marie,Sales et fem m e de; Joseph
y i g i e r , fu t mise en, cause $ et le 18 jan vier 1,786, il
intervint sentence açljudicalive,;et encore non atta q u ée,
laquelle condam ne au paiement desdits capitaux, efseu-r
le m e n t'à ;l’intérêt échu depuis Le i 5 ju ille t 1 7 1 4 .
C ette sentence est suivie de saisie exécution en 178 7.
A u lieu de contes.ler, lesfdébiteur^ présentent,un gar
dien vpjoptaire. Ils font plus, ils paient.
lie s A storg produisent six quit tances cJonnées,eii; 1 7 3 7 ,
1 7 3 8 , 1 7 4 0 , 1 7 4 1 et i744> à compte des in térêts.et
frai£. Elles sont sur Ja m êm e feujlle.
;
,A u bas d.Q cette m êm e feuille pp iVoit que les parties
�•
.
( 7 )
ont arrêté com pte à 88 liv. 16 s., y compris un billet
de 1 5 liv. 5 sur laquelle somme les Y ig ie r paient
53 'liv,’
l ë d i t j ô u r i i avril 1 7 4 6 ’. L a quittance est conçue en
ces termes : de compte arrêté entre nous de tous Les'reve
nus échus ju s q u ’ au 16 janvier 1 7 4 5 , de La rente qui
m ’est ‘due par Les dénommés de l ’autre part (P ierre et
Joseph V i g i e r ) , IL s’ est trouvé m ’ être d u La somme de
etc. , sans p r é ju d ice , etc.
■
'
_
Il paraît que le 28 août 1 7 4 5 , Jean et Josepli R o t •quier, père et fils, débileurs envers A n to in e R olq u ier
d ’une lég itim e , lui cédèrent-ladite créance avec pro
messe de garantir et faire valoir.
L e s V igie r agirent avec ce nouveau créancier com m e
avec les précédens • ils produisent huit quittances don
nées par l u i , à compte des intérêts pendant les années
1 7 4 7 et suivan tes, jusques-à 175 5.
Mais on vint h com pte le 22 n ovem bre *1756, non
seulement des intérêts éch u s, mais encore des condam
nations d’une autre sentence étrangère au sieur R obert }
tout fut réglé jusqu’au jo u r , à 241 liv. 1.2s. , ’a près avoir
d éd u it Les d ixièm es et vingtièm es, esl-ildit, depuis que
led it R o lq u ier avait droit des sieurs L ab ian clie e t'R o tq u ie r, sans p réjudice.de La somme principale de 864 Liv.
11 s., et des intérêts encourus depuis Le 28 aouldernier.
C e règlem ent fut tellem ent définitif que les sept
■quittances postérieures règlent positiveinent l ’intérêt
tinnuel à une som m e fixe, tantôt de
38 li v ., tantôt de
36 liv. 10 s.pour L’intérêt échu Le... ; vingtièmes déduits*
‘Ces s t p t : quittances 'ont toutes la imêiïie f o r m u l é ,
i
�.
.
depuis 1 7 5 7 jusques, au
^ 3 jan vier 1 7 6 4 , date de la
dernière. ■
'
.
'
8 }
.
.. •
•
;; x f; )
Il /est essentiel d ’observer à la C our que le ,co m p te
de 175 6 fut fait a vec M ich el Vigier.
:
•
,
A n to in e R ofq u ier désira êIre p a yé de son cap ital;
et par exploit du 4 juillet 1 7 6 4 , il forma dem ande en
la justice du D oign o n contre ledit M ich el V igier fils,
et héritier de Joseph, et de M arié Sartier, en e x é c u torialité de la sentence du 18 jan vier 17 3 6 , et en
paiem en t des som m esde 600 liv. d ’une p art, i9 4 l i v . i
5 s.
d ’a u tre , et 70 liv. d 'a u tre , portées par ladite sentence.
L e d it MicheL V igier dit en défenses << que sans a p ff prouver les sentences de 1 7 1 6 et 1736 , contre les
* quelles il se réservait de se p o u r v o ir , il devait lui
» être fait com pte des jouissances du pré de L aval qui
«■fut engagé par contrat du i
5 juillet 1 7 0 3 , pendant
« leur durée , pour être compensées pendant ledit
«• tems avec les intérêts des sommes qui en étaient sus
ceptibles, telles que celle de 600 liv., et subsidiaire« m ent sur le principal, pour être ensuite par lui faire
« des offres, etc..*.
-,
‘
,
C e langage évasif d ’un débiteur qui voulait éloigner
sa libération , s’est changé en un systèm e sérieux sur
leq uel on plaide depuis 1764. ,,
,
O n se disputa de cette manière assez long-tem s sous
le n om du sieur- E m e r y - R o b e r t . O n opposa à V igier
les arrêtés de com pte et les . quittances. Il résista le
plus q u ’il put à les m o n tr e r , en disant q u ’il n ’y était
pas ob ligé, q u’il n ’y avait aucuns arrêtés de c o m p t e ,
et
■
�(
9 )
'
et que s’il avait renoncé à son droit par quelque acte
qui réglât le passé, c'était an créancier à le produire.
Enfin un e sentence ordonna que V igier exhiberait
ses quittances, et en ferait le dépôt au greffe.
Quand les sieurs R o lq u ier
eurent assez plaidé à
l ’inscu du sieur R o b e r t , ils jugèrent à propos d’inter
v en ir dans leur propre procédure , et de conclure
contre le sieur R o b ert à ce q u ’il fût tenu de les garan
tir. C ette intervention eut lieu de la part de Joseph
R o f q u i e r , cédataire de 1745.
L e sieur R o b ert-D eleig e, successeur du sieur RobertL a b la n c h e , prem ier créancier, apprenant pour la p re
m ière fois q u’il existait sous son nom un procès re la lif
à u n e c r é a n c e du sieur E m e r y - R o b e r t - L a b k i n c h e ,
conçut un soupçon bien fo n d é , sur une m an œ u vre
dont il aurait dû être inform é plutôt. Il se défendit
d’abord avec quelque h um eur, parce q u ’on avait abusé
de son nom.
11 désavoua-toute participation à la pro
cédure déjà f a i t e , dit que si on s’était servi d’an
ciennes sentences oblenues par le sieur L a b la n ch e ,
elles lui appartenaient; et soutint dans tous les cas que
toute action était prescrite.
M ais quand on lui exhiba la cession souscrite par
le sieur R o b e r t - L a b la n c h e , il n’hésila pas en reco n
naître l’écriture.
N
U ne sentence du 10 juin 1766 appointa les parties
en droit, joignit la demande en recours du .sieur R otq u i e r à l a dem ande principale, et en m ê riie !teins réiB
�'
( 10 )
léra contre V igier les dispositions de celle de 17 6 4 qui
avait ordonné le dépôt au greffe de ses quittances.
Enfin-le procès fut jugé par forclusion contre ledit
V ig ier et contre le sieur R o b e r t, le 9 mai 17 6 7 . L ’ es
timation des jouissances du pré de L a v a l fut o rd o n n ée,
sous la déduction des charges foncières depuis le 1 5 juillet
17 0 8 , jusques et comprise l ’année 1 7 1 4 .
■ L e sieur R o b e rt-D e le ig e interjeta appel devant la
sénéchaussée d ’A urillac et in tim a , co m m e il le d e v a it,
les deu x parties de la c a u se ; c ’e s t - à - d i r e , les sieurs
R o t q u ie r et Vigier.
C e t appel fut suspendu pendant vingt ans. Il fut
repris en 178 7 par M a rie V ig ie r , fille de M i c h e l , et
par Astorg son mari. Elle interjeta m êm e appel inci
dent, de la sentence de 1 7 6 7 , fondé sur ce que les
ch arg es, disait-elle, n ’avaient pas dû être déduites de
l ’estimation ordonnée.
L e procès fut encore jugé à A u rilla c, co m m e il l ’a
vait été en la justice du D o ig t io n , c ’e s t - à - d i r e , par
forclusion, et toutes les conclusions des V ig ie r et Astorg
adoptées le i
3 août 1790. L a sentence du D oignon fut
confirm ée en ce q u ’elle ordonnait une estimation des
jouissances du pré L a v a l; elle fut infirmée en ce q u ’elle
ordonnait que les experts déduiraient les charges fon
cières.
L e sieur R o b ert interjeta appel de celte seconde sen
tence au parlement de Paris. L a suppression de cette
cour en déféra la connaissance au tribunal du district
�C ” )
de Mauriac. L à , les héritiers de Joseph R o lq u ie r colludant avec les V igier et Astorg , signifièrent, d it - o n ,
à c e u x - c i q u ’ils acquiesçaient au x sentences de 1 7 6 7
et 1790.
Pendant cette p ro céd u re, les R o lq u ie r entr’eu x en
introduisaient une autre; le sieur M e illia c , petit-fils et
héritier d’ A n toin e R o iq u ie r , cédataire de Pierre et
Joseph en 1 7 4 5 , ne voyan t pas rentrer sa c r é a n c e ,
quoique ces derniers eussent permis de fournir et faire
v a lo ir , assigna leurs héritiers (parties ad verses), pour
le p a y e r eux-m êm es.
C eu x -c i m irent encore le sieur R ob ert en cause, on
ne sait pourquoi. Après une procédure très-embarassée , dont il est fort inutile d’occuper la c o u r, les d é
bats se term inèrent par un jugem en t qui donna un délai
aux R o tq u ie r, par lies ad verses, pour faire finir le procès
actuel, sinon les condam na à p a y e r le sieur M eilliac;'
il fut sursis à faire droit sur les dem andes en recours
et contre recours.
:•
■
D é jà , et avant ce ju g e m e n t, le sieur R o b e r t, pour
n ’être plus harcelé de tant de débats étra n g ers, avait
repris en la cour son appel de 1 7 9 0 , contre les R o t quier et Vigier.
Ces deux adversaires tiennent a u j o u r d ’h u i un la n
gage bien différent.
L es R o lq u ier se prétendent follem ent intimés , et
disent que n ’ayan t pas interjeté appel de la sentence
d’A u rilla c, et ne voulant prendre aucun intérêt dans
la contestation, ils doivent être mis hors de cau se/sau f
B 2
�(
;
à plaider en prèm ière instance sur la dem ande en ga
rantie pendante. T elles sont les conclusions de leur
requête du 8 iherm idor an n , répétées et expliquées
dans une écriture postérieure.
L e s V igier et Astorg se défendent plus sérieusem ent,
et font les plus grands efforts pour prou ver q u ’il y a
lieu de revenir à exam en sur l ’anticlirèse de 1 7 0 3 , et
de confirm er la sentence de 1790.
'
•
M O Y E N S .
L
e
sieur R ob ert a intim é deux parties, et ce q u ’il
y a de bizarre ce sont ceux-là m êm e qui l ’ont appelé
au procès, et ont pris des conclusions contre l u i , qui
veulent q u ’il ait dû les regarder co m m e étrangers à
cette m êm e contestafion.
L e s sieurs R otqu ier et L a cro ix qui ont pris tant de
peine à prouver q u’on aurait dû ne les com pter pour
rien , mais q u ’on esl forcé de com pter pour quelque
ch o se, ne se sont plus souvenus que si le sieur R o b ert
p laid e, c ’est parce que le sieur Joseph R o lq u ier leur
a u te u r , l ’a assigné en g a r a n tie , le .28 octobre 176 5.
Ils ne se sont pas souvenus q u ’il y avait une sen
ten ce rendue le 10 juin 1 7 6 6 , qui joignait ce lte de
m ande à celle soutenue par V ig ie r ; et q u ’ainsi après
un e jo n ctio n , toutes les parties sont parties nécessaires,
tanL q u ’ une seconde sentence n’a pas prononcé de dis
jonction.
�( i3 )
Ils ne se sont pas souvenus que le m êm e R otqu ier
leur a u te u r , était en qualité dans la sentence définitive
du 9 mai 1 7 6 7 ; q u ’il était aussi en qualité sur Cappel
porté à Aurillac ; et aussi en qualité dans la sentence
confirm ative du i
3 août 1790. Ils en auraient conclu
eux-m êm es que celui qui a été partie nécessaire en
prem ière in stan ce, et sur un prem ier a p p e l } est aussi
partie nécessaire jusqu’à la fin du procès.
Q u ’im porte q u ’il ait été fait pendant l ’appel actuel
une procédure addition n elle, où les R o tqu ier ont de
n ou veau appelé le sieur R o b ert en garantie , et que
les premiers juges en soient encore saisis. C ette super
fétation n'est pas un m oyen .
O u l ’objet de celte nouvelle dem ande en gàrarrtie
est le m êm e que celui de 17 6 5 , et alors la cour en
est saisie com m e elle l ’est de toute cette p r o c é d u re :
ou il n ’est pas le m ê m e , et alors les premiers juges
n ’ont retenu q u ’un autre procès.
Mais qui pourrait dire que ces premiers juges ont
dem euré saisis de ce qui était de l ’attribution de la
cour : ils ne le pouvaient pas.
L ’acquiescem ent que les R o tqu ier ont donné en 1792
seulem en t, aux sentences de 176 7 et 1790 , n ’em pêclie
pas que le sieur R obert n’ait pu et dû les appeler en
cause.
,
11 l ’a p u , parce q u ’il avait intérêt d avo ir un ju g e
m ent con venu ; et que quand la cour aura statué sur
la garantie pendan te, les R otquier quelconques ne se
ront pas assez m a l -avisés pour 1 appeler ensuite en
�t
( 14 )
.
^
prem ière in s ta n ce , et conclure h la m ê m e garantie.
Il l ’a d û , parce que le parlem ent de P a ris, et par suite
la c o u r, étaient saisis du procès , et n’ont pas encore
prononcé sur l’effet de cet acquiescem ent.
A u resle le sieur R o b ert est si éloigné d ’élever a u
cunes con testation s, m êm e douteuses , q u ’il déclare
s’en rapporter à la prudence de la co u r, non-seulem ent
sur le renvoi dem andé par les R otqu ier et L a c r o i x ,
mais encore sur le fonds de la garantie e l l e - m ê m e ,
s’il y avait lieu d ’y statuer.
I l im porte peu au sieur R o b e rt d’être livré seul à
repousser la prétention des V ig ie r et Astorg ; elle est
si extraordinaire et mal co n ç u e , q u’il n ’y a véritable
m en t q u ’ un avantage certain à l ’exam in er pour la
com battre.
L e s V ig ie r et A storg ont recueilli beaucoup d’au
torités pour pro u ver que la co n ven tion de 1703 était
usuraire , et que la prescription n ’a pas cou vert cette
préten du e usure.
L e sieur R ob ert n ’a pas m êm e besoin d’in voq uer
la prescription; il lui suffit de rappeler le caractère de
l’antichrèse, pour dém ontrer que , sur-tout dans l ’es
p è c e , elle a été une convention très-com m une et trèslégitim e.
t
■ L ’anticlirèse est définie dans la glose de la loi
3 , au fF
de p ig n orib u s, un gage donné au créa n cie r, pour q u ’il
en compense l ’ usage et les fruits qui en naissent, a vec
l ’intérêt de l’argent q u ’il a prêté. P lg n u s quod sub
�( i5 )
' hoc nomine creditor a ccip it, u t eju s usuin
pro u su ris
sib i com puttt. D ’autres interprêles ont donné une d é
finition plus intelligible e n c o r e , en disant que l ’an tichrèse a lieu quand un im m euble esl donné au créa n
cier , ut p erapiat reí J r u c tu s
in
vicem
usurarum
donec debitor pecuniam solvcit.
C e contrat aussi com m un en F ra n ce avant le systèm e
de L a w , que les contrats de rente Tétaient avant r é
mission des assignats, avait été le sujet de beaucoup
de controverses pour ou contre sa légitim ité.
L e s auteurs les plus scrupuleux sur l'usure, s’accor
daient tous à justifier l ’antichrèse, quand les fruits de
vaient se com penser avec un intérêt lé g itim e , ou dû
de sa nature \ ils n ’y voyaien t de contrat usura ire que
dans le cas où le créancier percevait les fruits d ’ un im
m eub le pour l’intérêt du prêt ordinaire, parce que les
lois défendaient de stipuler l ’intérêt de l ’argent.
D ans le prem ier cas , il y avait encore une autre
distinction à faire , et c e lle - là se puisait dans les lois
romaines.
L e créancier pouvait avoir fait une stipulation évid em
m en t trop avantageuse. L 'im m e u b le pouvait produire
plus que l’intérêt Légal, et alors il était suspect d ’ usure.
M ais voici le tem péram ent que prenaient les lois ellesmêmes.
Si le créancier affermait à un autre l’im m euble im
p ign oré; alors, parce qu'il avait un revenu certa in , il
était clair qu'il y avait usure dans l ’excédant de ce
r e v e n u au -d elà de l'intérêt légal.
�.
( 1 6 }
.
M ais quand le créancier jouissait l u i - m ê m e , la loi
ne vo ya it aucune usure, dans le f a i t , m êm e p r o u v é ,
que les fruits de l'im m eu b le dussent surpasser l ’intérêt
lé g a l, à cause de Yincertitude des récoltes.
_
Ainsi s’exprim ent les lois 14 et 17 ,a u code de usuris.
L es auteurs du droit français confirment plein e
m en t ces principes. L e sieur D eleige rappellera le sen
tim ent de Cujas, et celui du D iction n aire canonique?
pou r m ontrer q u’il a choisi ses autorités parmi les plus
grands ennemis de l ’usure.
• Quce conventio l i c t t a e s t etiam si p l u r i s dom us loca ri soleat quant ejjicia l Legitimarum usurarum ra tio ,
çeL ut f u n d i oppignerati fr u c tu s omnes v i c e u s u r a r u m
creditor percipiat; quœ convenlio propter incertum eçentum fr u ctu u m adm issa est, et propter incertum f r u
m enti pretium. Observât. C u ja c ii in Lib.
3 , -ch. 35 .
L e D ictionnaire canonique au mot a ntic lire se, in
dique cet avis de Cujas , en l ’appliquant m êm e à l’intéi'êt du simple p r ê t, pro credito pig/ioris usus. A la
vérité il ajoute que le droit canon ne s’y conform e pas.
M a is j a j o u t e - t - i l « le droit civil n’a pas usé de la
« m ê m e rigueur. L ’incertitude des fruits qui p eu ven t
« être recueillis-,le risque m êm e que l ’on court jusqu’à
je la p e rcep tio n , d’en être p riv é ; enfin la tranquillité
« q u’acquiert le débiteur, par cet a cc o m m o d em en t, ont
« persuadé que celte convention n ’avait rien d ’illicite.
L e droit français n ’a donc vu q u ’un c o n tr at aléatoire
dans une convention qui présente en eflet des chances
aussi incertaines. C a r , à moins d ’une disposition clio*
q u a n le
�( *7 )
•quanfe entre l’étendue d ’un chqmp et les intérêts d ’ une
c r é a n c e , nul ne pourra assurer que le créancier sera
certain d’obtenir en produit net l ’intérêt qui lui est dû 3
sur-tout pendant plusieurs années consécutives.
S ’il s'agit de vignes , une année d ’humidité ou de
brouillards peut faire perdre un an de culture ; s’il
s’agit d’ nn p r é , un printems de sécheresse peut aussi
ruiner tout espoir de récolte.
>
C ’ est pourquoi un arrêt de 1 7 6 4 , rapporté par Ca-r
-telan, « a jugé que le contrat d’antichrèse devait être
« observé en la cause d’ une fe m m e villageoise qui avait
«
«
«
«
baillé à jouir à son créancier, une vigne à titre d ’ai>
tichrèse , avec cette co n v e n tio n , que le créancier
jo u ira it des fr u it s pour les intérêts , quoique c e lle
fem m e soutînt que les fruits excédaient au double \e
« légitim e intérêt.
L ’incertitude des f r u it s , q u i est
« la raison des lois f u t une des raisons de l ’ arrêt».
Catelan , liv.
5 , ch. I.er ; et Brillon , v.° antichrèse.
O r , Catelan qui était m agistrat, p o u va it, sans se trom
p e r , donner le véritable m o t if des arrêts de sa cour.
Ces ailleurs citent un autre arrêt de 1 6 5 9 , cl u^ or~
donna l’im putalion de l’excéda nt du légitim e intérêt
sur le capital, mais parce que le créancier avait donne
la maison im pignorée , à lô.y,er, et q u ’ainsi le rev en u
étant c o n n u , il n ’y avait plus pour lui d ’incerlilude..
A u r o u x , sur l ’art. 4 2 1 de la c o u t u m e de B o u r b o n
nais , dit q u e l ’antichrèse est un contrat t r è s - l i c i t e ,
q u a nd lés intérêts sont dus a u x créanciers.
L o u e l , q u’il a plu aux A slo rg de citer en leur far
C
�( 18 )
_
v e u r , on ne sait p o u r q u o i, va n te au contraire les
avantages d e l ’an tich rèse, et après avoir dit q ueD urnoulin n ’ admet l ’antichrèse que sous deux conditions , la
i . ere que le débiteur ait toujours le droit de reprendre
l ’im m e u b l e ; l a 2.* que les fruits n’excèden t pas année
co m m un e le quinzièm e du principal, « n éan m oin s, dit
« L o u e t , cet avis n ’a été suivi au pillais pour la r é « duction des antichrèses au denier quinze. C ar le d o
te maine du roi a été vendu au denier douze en an
o- tichrèse; et pou r juger des actions des liom m es se« Ion l ’ utilité p u b l i q u e , l ’antichrèse apporte plus de
« com m odité au débiteur que la rente con stitu ée, et
est plus tolérable. L ’antichrèse est sujette aux cas
« fortuits., g r ê le , g u e r r e ,
t e m p ê t e , f e u : pour telle
« année les fruits sont perdus par la violence des teins.
« S’il y a uberté de fruits, le créancier jouit de cet h e u r;
« si stérilité , il la faut supporter; s’il faut des répara«- lions, cela tom be sur le créancier. L e s débiteurs ont
« cet a v a n ta g e 'q u ’ils ne sont en arrière pour les ur« rérages qui est leur plus grande ruine. L e débiteur
r n ’est grévé de cautions, etc.-» L et. P. N.° 9.
V o ilà l ’auleur que les A storg ont supposé l ’ennem i
des anlichrèses; ils y ont recueilli cà et là plusieurs
arrêts relatifs à des réductions de rentes au taux de la
lo i , et pa r conséquent si dislans de la contestation que
ce serait s’en éloigner soi-m êm e de les réfuter parti
culièrement.
L es Astorg ont encore cité R o u sse a u -L a co m b e, mais
•seulement les principes q u ’il fait valoir au m ot usure.
�( 19 )
Ils ont évité de rappeler ce q u ’il dit au m ot antichrhse ,
pour établir que cet acte n ’est réputé usuraire que quand
il a eu pour objet de faire porter un intérêt illégitime à
un simple prêt d ’argent.
Ils citent un arrêt du 22 juillet 1 7 1 3 , du Journal des
audiences ; mais il s'agissait d’ un créancier qui faisait
porter intérêt à l’intérêt de son a rg en t, et on 11’y lit
pas un seul m ot d’antichrèse.
•
Enfin ils citent D enizart et M . r Chabrol. L e prem ier
11e fait que copier L a c o m b e sur l ’antiçlirèse ; mais M .r
C h a b r o l , bien loin d’être opposé à ce genre de contrat
dont il ne s’occupe qu’en parlant du contrat pignoratif,
fait une-grande différence entre l ’ un et l ’autre. Il regarde
l e contrat p ig n o r a t i f c o m m e u suraire, mais il dit que Les
antichreses sont plus favorables , en ce qu elles ri ont
rien de déguisé n i sim ulé. Il pense au reste que «le point
« décisif est de savoir si le créancier avait un titre qui
« lui assurât l’intérêt de son a rg e n t, ou s’il n’ a fait que
« prêter son argent lors de l ’antichrèse ».
A la v é r ité , car il ne faut rien dissimuler, M .r Chabrol
d’accord en cela avec L a co m b e et quelques autres au
teurs, pense que l ’excédant des fruits d e v a it, en cas
d ’an tich rèse, être im puté sur le ca p ita l; mais dan?
quel cas?
N on seulem ent ce n ’est pas quand les parties se sont
réglées volontairem ent lors de l’acte : encore moins
quand elles se sont réglées ensuite par plusieurs arrêtés
de compte. Mais co m m e dit L a co m b e : « Si en faisant
“ une année com m une de plusieurs, les fruits c x c é C 2
�^
(
20
)
« daient considérablement les intérêts o r d i n a i r e s T e x
te cédant serait im puté chaque année sur le capital ».
C e que dit L a c o m b e est recueilli de G o d e f r o i, q u i,
sur la loi 17 d e u s u r , ne s’occupe encore que du contrat
p ign ora tif, ou du cas où il y a v e n te : mais la G lo s e , sur
la m êm e lo i, s’explique d ’ une m anière à ne pas laisser
de doute sur la question.
. :
M-uUer obligavit m ih i vinecim, et in vicem usurarum
conven.Lt u t reciperem vindemiam. S i p lus emoliirnentL
consecutus sim e x fr u c tib u s quant etiam sit in u sa râ ,
an illu d revocari possit quœritur ? D ic itu r quod*non.
Quta potuerat evenisse quod m lxiLproçenisset, et tamen
necesse haberet stare conventioni, et propter incertum
non erit retractanda.
O p posera-t-on que les Rom ains adm ettaient lé prêt
à in té rê t, et que ce n ’est pas dans leurs lois q u ’il faut
chercher des principes ?
-
•
M a is -l’objection serait de mauvaise fo i, si on l’ap
plique au cas où il s’agil d’ une créance française ^ por
tant intérêt de sa n a tu re ; car alors c ’est précisém ent
co m m e s’il y avait eu stipulation permise.
L e s Romains perm ettaient le prêt ¿1 intérêt com m e
il est permis en F rance depuis le
3 octobre 1 7 8 9 ; mais
bien loin de tolérer l ’usure j qui est très-loin du prêt à
in térêt, on sait que leurs lois étaient sur ce point plus
restrictives que les nôtres.
U n seul exem ple le prouve. Nous souffrons la ruine
d’ un débiteur par une accum ulation criante d’intérêts.
A v e c quelques exploits nous autoriserions que cent
�C 'a i )
ans d’intérêts fussent dem andés, et lèsR o m a in s ne p e r
m ettaient pas que les intérêts accum ulés surpassassent
le capital.
L e s lois rom aines disaient com m e les ordonnances
françaises : P r o usuris stip u la ri tiemo supra m oduin
usurarum Licitum potest. L . 4 4 , f f . de usur.
P o u rqu o i donc les lois romaines ne seraient-elles pas
pour nous un règlem ent en m atière d ’anliclirèse quand
il s’agit'd’ y appliquer une créance portant intérêt de sa
nature ? Pou rqu oi la loi citée ne serait-elle pas ici ratio
scrip ta , lorsqu’elle n ’est pas un e loi arbitraire, lors
q u ’elle est m o tiv é e , lorsqu’ elle déclare que sa décision
est fondée sur une conven tion vraim en t aléatoire ?
C e n’est pas seulement dans les lois romaines q u ’il
faut rechercher les principes de l ’antichrèse ; puisque
tous les auteurs du droit français s’en o ccu p en t, et que
si plusieurs la regardent com m e prohibée dans le cas
d’ un intérêt illégitim e ,a u moins v o it-o n q u ’ils se r é u
nissent tous à penser que si le contrat ne présente pas
de détrim ent notable au d é b ite u r , il faut l ’exécu ter;
et q u ’il ne faut ordonner d’im p u lalio n q u ’au cas où la
conven tion serait évid em m en t usuraire, et les fruits
disproportionnés à l ’intérêt.
M ais com bien les A storg sont loin de celte dernière
h y p o th è se , malgré leurs exagérations ridicules sur la
valeur des fruits de leur h érita ge, q u’à la vérité ils ne
précisent pas.
■
L eu r-p ré de L a v a l , q u ’ils ont dénaturé depuis lo n
gues années parce q u’il était m aréca ge u x et plein de
�O O
'
jo n cs, avait en surface deux petits journ aux ; et certes,’
en 1703 il est bien difficile de voir dans un reven u
aussi m édiocre et aussi incertain , quelque chose de
supérieur au reven u de 864 livres.
.
Si des ex p e rtsy étaient e n v o y é s , com m en tfixeraien tils cette année com m un e sur d ix , que les auteurs et
l ’usage veulent être le seul mode de connaître le véri
table revenu appréciable? com m ent sauraient-ils s’il y
a eu des années sans récoltes? la tradition ne leur rappelera que 1709. C o m m en t encore sauraient-ils le prix
du fo in , puisque les m ercuriales n ’ont fixé que celui
des grains?
Eviteraien t-ils l’erreur en estimant ce prix annuel
à une époque critiq u e, où la rareté du num éraire fut
la prem ière cause de la création des billets de banque?
L e s Astorg ont com pté sur l ’arbitraire quand ils ont
v o u lu une estimation plutôt impossible que difficile ;
ils s’efforcent d’y voir de la possibilité, mais leurs bases
incertaines ach èven t de convaincre q u ’il n ’y aurait
rien qui éclairât la justice plus q u ’elle ne l ’est par elle
m ê m e et par les règles du droit.
.
S’il y a dans l ’acte de 1703 un contrât aléatoire qui
n e présente pas au créancier une chance certaine, une
chance u su ra ire, pourquoi ne faudrait-il pas l ’exécuter
plutôt que de jetter les parties dans le vagu e de l ’opé
ration la plus conjecturale.
U n intérêt de dot est un vrai capital susceptible luim êm e de produire intérêt e x ojjicio ju d ic ts : A v e c ce
capital rien n ’em pêchait d ’ail’e n n e r les fruits d’un iin-
�(
2 3 )
.
m euble pour un certain nom bre d ’années ; c’ était une
ven te de récoltes à prix fixe.
.
Pou rqu oi au parlem ent de Paris faisait-on im puter
les fruits sur le p rin cip al, quand l ’intérêt n ’était pas
dû. C ’est q u ’alors il n’y avait pas de ven te valable des
fru its, en ce que le prix con ven u n ’était pas réel^ il
n ’y avait plus r e s, consensus et p re tiu m , et alors pour
donner un prix aux fruits ven d u s, il fallait le retrouver
sur le cap ital, qui était la seule chose que ra cliete u r
eût pu oiîrir dans ce contrat de vente.
Mais quand l ’intérêt est lég a l, voilà un prix certain;
la ven te des fruits est donc légale et v a la b le , et jamais
personne n ’osa prétendre q u ’entre le prix et la chose
ven d u e , il fallût toujours une égalité m athém atique.
Si c ’était un contrat aléato ire, il était toléré et il
l ’est encore. L ’incertitude des fruits a été la règle des
lois et celle de la jurisprudence.
L e sieur D eleige a cité plus h a u t un arrêt de Catelan sur l’anticlirèse d ’une vigne ; le journal du parle
m en t de Toulouse en rapporte un autre plus récent ,
du
3 i juillet 1 7 1 4 ? qui dans le cas m êm e où un m ou
lin , tenu à antichrèse, avait été donné à ferm e par le
c r é a n c ie r , pour un prix supérieur à l ’intérêt de son
a rgen t, n ’a pas ordonné l ’im putation de l ’excédant sur
le capital ; par cela seul q u ’un m o u l i n est sujet à de
grosses réparations et à des cas fo rtu its, et q u ’ainsi
m algré la certitude d u pr ix a n n u el, il restait toujours
l ’incertitude du vrai revenu.
f
■
Si les arrêts du parlem ent de P a r is , dans des cir-
�,
.{ H )
.
constances d ’usure m an ifeste, n ’ont pas favorisé l ’antichrèse, au moins est-il certain , que dans les cas d ’in
térêts légalem ent d u s, il l ’a toujours regardé co m m e
un conlrat très-légitim e: L e rédacteur de ce m ém o irè
a sous les y e u x l'expédition en parch em in d ’un arrêt
rendu au rapport de M .r D u d o y e r , le
25 m ai 1781:,
en Ire le sieur G e ra u d -M a b it et les dames de Caldaguès, '
leq u el arrêt ne laisse pas le plus léger doute sur la ju
risprudence de ce parlem ent.
U n e Jeanne D éco ub lat s’élait reconnue débitrice du
sieur de C a lad ag u ès, pou r légitimes et autres objets ,
de 2.6,?>oo liv., le 5 avril 1667 , et lui avait donné deux
domaines à anticlirèse, pour en jouir tant et si longue
m ent q u’il serait en dem eure, de pa}^erlesd. 26,300 liv. ,
a v e c conven tion que les fruits en seraient compensés
a v e c l’intérêt de ladite somme.
.
L e sieur M a b i t , acquéreur desdits d om ain es, et
cédafaire des D é c o u b la t, en dem anda le désistement
par exploit du 2 juillet
1 7 7 4 , a v ec restitution de
jouissances depuis 1 6 6 7 , au x offres de com penser les
fruits jusqu’à due concurrence a vec les intérêts qui
se trouveraient légitim em ent d u s , et le surplus im
puté sur les capitaux.
L ’arrêt du 20 m ai 178 1 a condam né les dames de
C aldagu ès, à se désister au profit du sieur M a b it, des
héritages énoncés audit acte de 1 6 6 7 , à rendre et res
tituer Les fr u its d 'ic e u x , à compter d u 2 /juillet 1 7 7 4 ,
jo u r de La dem ande , lesquels seront compensés jusq u à due con cu rren ce, avec les intérêts de leur créa n ce,
échus
�.
.
.
,
(2 *'V.
é c h u s depuis Ledit J o u r 2 ju ille t 1 7 7 4 . S u r'le'su rp lu s
des dem andes, les parties sont mises hors de cour.
\
■ L e C od e civil n ’établit donc pas un droit n o u v e a u ,
lorsqu’il d it, article 2 0 8 9 , que Tanticlirèse doit être ;
exécu tée comme toutes'Les conventions qui. ne sont pas
prohibées par les lois.
”
'
! ■
O r il y a lieu de se régler par la loi .n ouvelle, toutes
les fois q u’elle n ’est pas en opposition à une loi an
c ie n n e , toutes les fois q u ’elle se r é fè r e , au co n tra ire ,
a u x anciennes lois qui existent. S i nempe declaret j u s
antiqu um nova constitutio ; s i declaret tanlum m odo
q uod anteà leges caverant. M orn . I n leg. 7 , j f . d&
legibus.
.
P o u rqu o i donc ici le Code civil ne serait - il pas la
loi des parties? L ’art. 2089 est la copie de la loi 17 au
code de usuris : il n ’y a pas de lois intermédiaires qui
aient disposé autrem ent.
L e s A storg ont voulu établir un e perpétuelle co m
paraison entre le contrat pignoratif et- l ’anlichrèse.
M ais personne n ’ignore què par le contrat pignoratif,'
le débiteur vend son im m eub le sous une faculté de
rachat l i m i t é e , et q u ’il
ferm ier.
■-••••.
d evien t aussitôt son propre
<
r '
‘
.
,
Ainsi n o n -se u le m e n t il court risque de perdre son
im m e u b le , faute d ’a rg en t, mais Y incertitude des fruits
tom b e encore sur lui seul annuellem ent.
L a différence des d eu x contrats prouve sëule la lé
gitim ité de l’ u n e t l ’usure de l’autre.
'
'
«D’après cela , il semble parfaitem ent inutile de re
D
�_ ( *6 >
_
chercher s’i l y a. prescription contrfe la préten tion des
A sto rg ; car s’ils l’avaient é le v é e 'e n 1 7 1 4 * ils auraient'
été déclarés non recevables à dem ander une co m p e n
sation.
M ais en .1 8 0 4 , c ’est véritablem en t une
folie de
vo u lo ir revenir contre cette compensation co n v e n u e
par un a c te , et ratifiée surtout par tant de p a iem en s
postérieurs..
Quand les parties ont plusieurs fois arrêté des com ptes,
soit en. 1 7 4 5 , soit depuis., n ’y a-t-il pas une présom ption
très-raison n able, que le débiteur a alors fait valoir tous
les excédàns de jouissances qui pouvaient m ieu x se véri
fiera ces époqu es, et que les rabais qui étaient de justice
ont été faits, s’il y avait lieu.
’
A cela les A s to r g ’ opposent -une bien, pitoyable r é
ponse. Ils n ’ont pas f a i t ni signé ces quittances, disentils; elles sont du fait du créan cier, et ne sont pas dou
bles ; on ne peut les le u r opposer;
M ais ce sont eu x -m ê m e s qui les op p o sen t, c ’est leur
libération ; sans elles iis d evraient p a y e r trente ans
d ’arrérages de plus q u ’ils n ’ offrent. D o n c ils s’app ro
prient. ces quittances , donc elles sont virtuellem ent
doub les, puisqu’ elles sont com m unes aux deux.parties,
puisqu’elles sont pièces, d u procès.
,
L a cour a jugé le 29 brum aire an 1 1 , contre le sieur
de Penautier, q u ’ une quittance à lui donnée désintérêts
d’ un capital, sans réserves, valait a c q u i e s c e m e n t à la
dem ande de ce capital. C ependant la quittance n ’était
pas double ; il n ’avait pas signé cet acquiescem ent.
�G
A u reste
37 )
et seulem ent , pou r ne négliger aucun
ï n o y e n , quand le sieur D eleig e n ’aurait pas p o u r lui
le point de droit , les circonstances et les réglem ens
multipliés qui font entre les parties ^ tran sa ctio n la plus
irréfragable., rien ne l'em p êch erait de faire valoir la
prescription de trente ans.
‘
.. •
,
,,i
. Il a p ro u vé que l'antichrèse n'était pas nsuraire ,
quand elle a pour objet des intérêts légitim em en t dus
¡; Cela seul répond aux A sto rg qui n e prétendaient
à rim prescriptibilité qu'en y supposant de l'usure.,
M ais encore la question n 'e s t - e ll e pas ju g ée par les
deux sentences de, 1 7 1 6 et 1 7 4 5 , qui n'on t ordonné
le paiem en t des intérêts, et par conséquent le com pte
des in té rê ts, que depuis 1 7 1 4 .
V igier sentit si bien q u ’elles étaient une fin de lion
recevoir contre l u i , que par ses défenses ,< du
3 août
1 7 6 4 , il se réserva de se pourvoir contre ces d eu x
sentences.
•-1
.
M ais il ne s'est pas p o u rv u , puisqu'il les a exécutées.
.
■ ■■
'
.
y1
.■ ;
^■
?:' ‘ :
F a u t-il encore parler de l’appel incident des A sto rg,
fondé sur ce que le juge du D o ign o n , en ordonnant
l ’estimation des- jouissances ? avait'prescrit aux experts
de déduire les charges.
'
-
f' '
L es Astorg supposent que le,propriétaire les p a y a it,
et non le créancier.
•
L e prouvent,-ils? ilsi;ne s'en sontjpas m is en p e in e ;
;mais ils prélen den t que cela a dû* être ;ainsi.
a Ainsi c e t ;appel est fondé sur une présom ption.
' *
D 2.
,
�(
23 )
^
C ependant les A storg auraient pu vo ir dans les a u
teurs déjà cités, que dans les antichrèses, le créancier
étant mis en possession pou r un tems indéterm iné pro
s u o , doit le paiement des charges. Mais cette n ou
velle question est si peu im portante q u ’il est inutile
de la discuter en point de droit.
C elui qui jouit est présumé p a y e r les ch a rg es, car
les charges sont une diminution des fruits annuels. Il
y a quelqùéfois exception pour des ferm iers, mais c ’ est
que le propriétaire reçoit un reven u annuel p a r le paie
m en t de la fe rm e ; et d’ailleurs le bail en fait toujours
le règlem ent.
. . . . . . . .
L e sieur D ele ige ne suppose pas que les A storg aient
opposé sé rieu sem e n t, q u ’aya n t subi deux degrés de
juridiction, il ne doit pas y en a vo ir un troisième.
Si cela était a in s i, il aurait fallu que l ’assemblée
constituante décrétât que tous les procès pendans a u x
parlem ens étaient é tein ts, parce q u ’ils étaient au troi
sième degré de juridiction. L a loi du 19 octobre 1 7 9 0 ,
a au contraire indiqué où seraient portés les procès
alors pendans aux parlemens. O r , celui des parties
était pendant au parlem ent de P a r is , par exploit du.
2.3 août 1790.
;
I l était pardonnable a u x Astorg d’opposer tant de
m o y e n s faibles et tant de prétentions bizarres dans lè
désespoir de leur cause; mais quand ils taxent
in dé
licatesse un h o m m e qui peut s’honorer de sa probité
§ans craindre de dém en ti de personne ;q u a n d ils écrivent
�( 29 )
q u e Leur réveil a été com m andé par la nécessité de n e
pas laisser perpétuer plus lo n g-tem s La rapine de ce
créancier altéré d ’ usure , les A storg ont ils cru se rendre
plus recom m andables par une injure grossière, q u ’ils
s’étaient bien gardés de se perm ettre en prem ière ins
ta n ce, où les deux parties étaient connues.
L à le sieur de L e ig e ne s’ en serait nullem ent offensé ;
là au contraire il aurait félicité Astorg sur un ch an ge
m e n t de principes que l ’opinion m édisante ou calom
nieuse ne suppose p as; et cette opinion m ê m e éta
blissait assez de distance entre la délicatesse du sieur
de L e ig e et celle d ’un A s t o r g , pour rendre inutile de
sa part toute espèce de justification.
Quoique le sieur de L e ig e ne soit pas très-sensible à
Tinsulle d’un tel h o m m e , il ne lui est pas moins pénible
d ’être accusé, loin de son dom icile , du vice le plus
opposé à son caractère. H eureu sem en t l’h om m e de
bien n ’est pas jugé par l’injure q u’il reçoit. L a raison
évalue l’injure et en scrute F a u te u r ; et quand un
A storg a du scrupule et f a it de la m o ra le , l ’expérience
apprend q u ’il n ’en fait que pour les autres, et la m é
m oire rappelle l’adage de tant de moralistes. V ideo
meliora , probo q u e , détériora sequor.
M . r M A R C H E I X , Rapporteur;
M .e D E L A P C H I E R , A v o ca t.
M .e M A R I E , L ic en cié-A v o u é.
,
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE PU PA LA IS CHEZ J.-C. SALLES,
�
Dublin Core
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Factums Marie
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An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leige, Robert de. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
usure
créances
antichrèse
quittances
Description
An account of the resource
Mémoire pour le Sieur Robert de Leige, appelant ; contre François Astorg et Marie Vigier, sa femme, intimés ; et Contre Brigitte Rotquier et Jean-Baptiste Lacroix, son mari, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1714-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0242
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Laval (Pré de)
Pleaux (15153)
Rights
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Domaine public
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Antichrèse
Créances
quittances
Usure
-
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5c9250f0e87c08d26313a29fa891d3ab
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Text
OBSERVATIONS
P O U R
Y
Les Q U A Y R U T , T H O M A S et V I L L E M A U D , intimés ;
CONTRE
'
, A n t o i n e Q U A Y R U T , appelant.
C iia r l es Q u a y r u t a-t-il été comptable envers A n toin e, M arie et M agdeleine
Q u a y ru t, ses frère et sœurs ?
A n to in e , qui soutient aujourd’hui qu’ il ne l’étoit pas , a dit le contraire deux
fois ; i°. par un exploit du 2 nivôse an ; 2°. par l’exploit même de sa demande.
A u jou rd ’hui il objecte que C h arles, n’ étant pas m ajeur au décès de son père,
n ’ a pas été protuteur ni com ptable , d ’après la jurisprudence d ’un jugem ent
du i nivôse an i o ; que ses sœurs ont reconnu en m ajorité avoir perçu leur por
tion de m obilier à l ’échéance de chaque succession, avoir donné leur consente
ment aux actes passés par C h arles, et avoir joui chaque année en com m u n ;
q u ’ainsi elles ne.peuvent s ’élever contre leur f a i t ; qu’enfin Charles les a ins
truites suffisam m ent lors de leurs cessions de 178 9 et de l ’an 6 .
Ce qu’il y auroit de plus fort dans ces objections seroit la jurisprudence du
tribun al, si elle étoit applicable.
M ais le jugement opposé éloit dans une autre espèce : c’étoient des frères et
sœurs qui avoient habité ensem ble, et il n ’y avoit pas d ’actes faits par un seul
pour tous; il n ’y avoit que la présomption de jouissance exclusive par l’aîn é, à
cause de son âge plus avancé.
Aussi les m otifs du tribunal sont assez précis, pour qu’on ne puisse pas abuser
de sa jurisprudence : « Attendu , est-il d it, qu’ il n’y a pas de preuve de gestion
» exclusive. » L e dernier m otif prouve aussi qu’il ne s ’agissoit que de simple
jouissance.
L e tribunal a si peu entendu fixer pour jurisprudence qu’il falloit etre indiqué
pour tuteur par la coutum e, au moment du décès du père, pour,etre protuteur
et com ptable, qu’il a jugé depuis, le 18 ventôse an 10 , dans la cause des R e y et
R o u g ie r, qu’ un b e a u - h è r e , demeurant dans la m aison, avoit été com ptable
¡envers les frères de sa fem m e, m i n e u r s a u décès du p e re , par cela ;eul qu’étant
m ineurs quand il étoit m ajeur, il ctoit p r é s u m é avoir joui pour eux. L a cession
qu ’ils lui avoient consentie, et même une ratification, ont été déclarées nulles
comme non précédées d ’un compte:
Com m ent donc Antoine Q uayrut a-t-il osé prétendre que, par un renversement
total de la jurisprudence constante et des principes, le tribunal vouloit à l ’avenir
5
3
5
TRIBU!
d
’a
p p
J
de Ridl
�(
2)
adopter cîes actes suspects de frau d e, contre le texte précis des ordonnances cîe
i c) et de 1667 ^
U n 'y a eu diversité d ’opinions que sur la question des dix ans, c o m b a tt u e
entre l’ordonnance de i55() et les m axim es de l’arrêt de 17 0 6 ; m axim es adoptées
par le parlement tant qu’il a régné. L a jurisprudence en est revenue a u x dix
a n s; mais les principes sur l’incapacité des comptables n ’ont reçu aucune atteinte.
Personne ne conteste que la première règle dans les ventes est de savoir ce
q u ’on ven d ; que dans le cas même où la chose vendue étoit distincte, il y avoit
l ’action rescisoire; et que dans le cas où elle n ’étoitpas distincte, comme dans les
droits successifs, il falloit que l ’acheteur et le vendeur eussent fait le jactum relis ,
c ’est-à-dire, que. l’un n ’eût pas su plus que l’ autre ce qu’ il y avoit dans le filet.
H ors de cela il y a fraud e, on n ’en a jam ais d o uté; et ja d is, dans ce c a sr
les cessions faites étoient nulles : aujourd’hui encore le Code civil ne valide que
celles qui sont sans fraude. ( L iv . III, art. C L X X I X . )
Com m ent donc contester de bonne foi que Charles Q uayrut ait été com ptable,
depuis 17 7 8 jusqu’à l’époque des cessions qu’ il s’est fait consentir? tous les actes
écrits de la gestion des affaires sont de son fait.
Com m ent concevoir que ses sœ u rs, et même A ntoine, partie adverse, aient
•joui et géré en com m un, comme on le leur a fait déclarer, lorsque dans tous
•les actes, les traités, les ventes et acquisitions, ori ne voit toujours que Charles
Q uayrut seul ?
,
Veut-on dire que c’étoit pour éviter les frais d'une procuration ? mais les actes
faits dans le lieu même n’en avoient pas besoin ; il falloit appeler les sœ urs, si
on les comptoit pour quelque chose.
Charles Q u ayru t, allant en A n jou acheter les droits de son oncle contre là
succession com m une, étoit chargé de payer 200 francs à ses sœurs : il ne leur
en a jam ais dit un m ot. Il y a là deux procédés d ’infidélité et de fraude.
Il a traité en 178 2 sur la succession personnelle de cet oncle; il n ’ a jam ais
dit à ses sœurs le résultat de ce traité : cela seul annulleroit la cession faite. C a r
com m ent o n t-e lle s pu connoltre la chose vendue, même par approxim ation?
S ’il y a fraude et nullité quant à la succession de l’oncle, il y a nullité pour le
to u t; car 1« vente est pour un seul prix.
D ans la cession de 1789 il n ’a rien dit de la créance M andon (
liv. 14 s. ).
D an s le traité de l ’an G il Fa réduite à 240 francs en principal et intérêts.
Il n ’a parlé dans l’une ni dans l ’autre d’ un traité fait avec les T h om as , en
17 8 8 , portant établissem ent d ’une servitude pour i o francs qu’il a reçus.
L ’inventaire, fait après son décès, m entionne, i°. un échange qu’il a fait en
17 7 8 ; 2°. plusieurs ventes d ’immeubles à son profit; °. une sentence consulaire
par lui obtenue en 17 7 9 ; 4*- une procédure suivie en son nom dans le même
tem ps; 5°. une quittance par lui donnée en 17 8 1 ; G*, u n e obligation de 178G , fie .
Ces actes, connus de 1 adversaire seu l, qui en e st dépositaire, et qui s’est tout
approprié au déccs du frère com m u n, achèvent de prouver tout à la fois que
Charles Quayrut géroit, plaidoit et recevoit se u l, sans que sr>s sœurs fussent
jam ais comptées pour rie n , même dans les procès; ils prouvant rncore que
Charles Q u ayrut, en faisant les affaires de la m aison, les i’aisoit au moins 1resbien pour son com pte, puisqu’il adicloit des im m eubles, même avant sa mur*
55
5
5
�jo rité , tandis que ses sœurs n’ont e u , en se m arian t, que ce qu’il a bien voulu
leur donner. E t qui croira que des filles, généralement plus économes que des
jeunes gen s, n’eussent fait aucune épargne, si elles eussent pris la moindre part
dans les jouissances, le m obilier, les achats, les ventes des bestiau x, etc.?
D ans tous les procès où des cessions étoient attaquées, on n ’a p e u t-ê tre
jam ais réuni autant de preuves écrites d ’une gestion exclusive.
M a is, dit l'adversaire, vous avez reconnu, en m ajorité, avôir joui en commun ,
avoir pris le mobilier à chaque ouverture de succession, avoir consenti à ces actes.
Rem arquons d’abord que si l’acte pèche en lui-même par le défaut d ’un com pte,
toutes les déclarations pèchent aussi. Elles étoient en effet une précaution néces
saire, l ’ouvrage du comptable plutôt que celui du cédant, comme dit Chabrol.
( T o m . i , pag. 4 14 . ) E t avant de m ériter une pleine croyance, le comptable
devoit instruire, et non exiger des déclarations tendantes à la décharge implicite
du compte, pour nous servir des expressions littérales d ’un jugement du tribunal
de cassation, rendu en semblable espèce. ( messidor an > bull. )
Com m ent ici encore, ajouter foi à ces déclarations, lorsqu’ elles sont démentie*
par des faits évid en s, et d'un genre absurde?
Dém enties par les faits. Depuis 17 7 8 jusqu’ aux cessions, on voit Charles dans
tous les actes con n u s, on ne voit pas une seule fois ses sœurs. Charles stipuloit
pour tous ses cohéritiers sans les appeler, donc il n ’y avoit pas gestion commune.
A insi la fausseté de la déclaration contraire est prouvée par écrit.
D ’un genre absurde. E n effet les deux sœurs ont dit avoir pris leur portion
de mobilier , à l’échéance de chaque succession. O r au décès du père ( 1 7 7 2 ) ,
l'une avoit trois ans et l’autre huit : au décès de la m ère ( 1 7 7 5 ) , l’une avoit
•six ans et l’autre onze. Elles ont dit avoir consenti à l’ acte important de 17 8 5 ,
où Charles ratifioit une cession de sa mère , après un procès g ag n é , après un
jugem ent qui annulloit celte cession ; mais alors elles étoient m ineures, la cadette
avoit quinze ans et demi. Or qui croira qu’on ait cherché le consentement de
deux filles mineures pour une vente d ’im m eubles? E t en quoi ce consentement
avoit-il de la v a le u r;
• T o u t se réunit à vicier les deux cessions de 178 9 et de l’an 6 , m algré les
fausses déclarations y insérées par le notaire , homme de confiance des frères
Q uayrut, à tel point qu’ il s'est attaché aux audiences du tribunal, sur la cause
actuelle, pendant presque deux semaines entières; malgré encore sa précaution
de faire ratifier un exploit son ouvrage, donné par une des cédantes , la veille
du traité de 1 7 8 9 , parce qu’ il y avoit énoncé aussi l’aveu d’une jouissance
commune.
Charles Q uayrut a été évidemment comptable envers ses sœurs , comme
envers son frè re , quoiqu’il ne le prétende plus aussi positivem ent; il l’a été au
titre d’ administrateur ou protutcur, et de nrgottorum gestor.
Il a été adm inistrateur, ayant ou n ’ayant pas le consentement de ses sœ urs;
c a r, dans les actes qu’il a passés, il s’est fait fo rt pour e lles; il a promis leur
laire agréer et ratifier.
. . , .
A insi dans les actes qu’il a commencés en m ajorité, il n 'a plus d ’initio inspecto à in voqu er, ces actes n ’éloient plus une suite nécessaire de sa gestion en
m in o rité; il géro it, m ajeu r, pour des sœurs m ineures, non émancipées.
5
4
�Désigné p a r la coutum e, comme le prem ier dans l ’ordre des tutelles } c’est lui
qui auroit été nommé s'il eût convoqué la fam ille ; il a m ieux aimé gérer et passer
des actes im portans, sans même faire émanciper ses sœurs ; donc l’obligation
qu’il a contractée en se faisant fort pour ses sœ urs, est une obligation de comp
table, de proluleur ( f f . qui pro tutore gerunt).
C e m oyen paroît puissan t, et ne se détruit par aucun des faits de la cause.
L e premier acte des filles devenues majeures a été de vendre, sans qu’elles aient
pu connoitre un seul instant ce qu’elles vendoient.
Charles Q uayrut a été negotiorum gestor, puisqu’il n ’ avoit pas de procuration
écrite, et qu ’il ne pouvoit pas même en avoir de ses sœurs non émancipées.
Or le negotiorum gestor est tenu de l ’action en reddition de com pte, comme
le tu te u r; il doit, comme le tu teu r, actus sui rationes reddere, suivant les
expressions de la loi qui s o n t , comme on v o it , les mêmes que pour le tuteur.
( L . 2 , ff. Neg. gest. )
doit les rendre ad exactissimam diligentiam. ( Inst. de
obi. quæ ex quasi contr. nasc. )
.
L ’ordonnance de 1667 déclare tout adm inistrateur comptable ; l’ordonnance
de 15 3 9 défend toutes dispositions au profit des tuteurs et adm inistrateurs, avant
qu’ils aient rendu le compte qu’ils doivent; et c’est sur le m o tif de cette ordon
nance, que le tribunal de cassation, se conform ant en cela à une jurisprudence
de deux siècles, a annullé une cession faite à un com ptable, qui cependant n ’étoit
pas tuteur , par cela seul qu’il y trouvoit la décharge implicite ae son compte.
L ’arrêt même de 170 6 étoit dans les termes de la cau se; c’étoit un fondé de
pouvoir, étranger, qui encore avoit rendu un com pte, mais qui n ’y avoit pas
donné assez de détail; il fut jugé que n’ ayant pas suffisam m ent instruit ceux à qui
il devoit ce compte , il n’avoit pu valablem ent traiter avec eux sur ce qu 'ils ne
connoissoient pas aussi-bien que lui. A insi ubi eadem ratio, etc.
Ce que demandent les intimés ne tend pas à obtenir une reddition de compte
coûteuse et difficile ; c’est au contraire pour empêcher qu’il n’en soit rendu un
¡1 l’appelant qui le dem ande, quoiqu’ il se soit ingéré dans les affaires , comme
cela est prouvé par quelques quittances. Antoine Q uayrut ne s’est absenté que
pendant cinq à six a n s, et pour quelques mois seulement. A son retour il participoit aux a ffa ire s, quand ses sœurs gardoient. les troupeaux. C e qu’il veut
obtenir laisseroit les parties dans un long procès , tandis que la demande des
intimés ne tend qu a obtenir un égal d ro it, pour tout confondre et compenser
dans la succession de Charles Q u ayru t, dont chaque partie est héritière, et à la
quelle il s’agira seulement d ’ajouter en rapport les sommes reçues par chaque
cohéritier.
.
A insi les premiers juges ont été conduits par la loi, et par un moyen puissant
de considération, ;i adopter un mode de juger qui amène la fin des procès entre
les parties, et qui tend à l ’égalité, considérée de tout temps comme l’âme des
partages.
D E L A P C I I I E R , homme de loi.
11
M A N D E T je u n e , avoué.
A R IO M , de l'imprimerie d e L a n d r i o t seul im prim eur du Tribunal d ’appel.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Quayrut. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
conflit de lois
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Observations pour les Quayrut, Thomas et Villemaud, intimés ; contre Antoine Quayrut, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1785-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0241
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0735
BCU_Factums_M0333
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Giat (63165)
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Domaine public
conflit de lois
coutume d'Auvergne
Successions
tutelle
-
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f95707a386f1ccd98161479b8a017c4f
PDF Text
Text
CONSULTATION
P
our
le citoyen
à n n e t
_
PERISSEL
avoué au
i bunal d’appel, appelant;
r
T
i
C o n t r e scs frè re s et sœurs légitimaires, intimés,
.
/
/
--------------------------------- -
FAIT
^<0M4JL
A rf
j
T
ierhe
.
Périsscl et Michelle L a b r y , père et mère des parties,
ont laissé huit enfans ; de ces huit enfans deux filles furent mariées,
|
en 1 7 6 7 , l'autre en 1 7 7 3 , dotées et forcloses.
|
A n n e t Périssel, fils aîn é, par son contrat de mariage du 4 mai
i
1789 , fut institué héritier universel de ses père et m ère, à la charge
de payer des légitimes fixes, en argent, à chacun de ses frères et
sœurs non établis, et un supplément, également en deniers, à ses
deux sœurs mariées.
L e père mourut dans les premiers jours d ’octobre 179 0; la mère
I
n ’est décédée qu’en floréal an 8.
L e s légitimaires, après l’ouverture des successions, préférèrent
les dons ou legs particuliers que leur frère aîné avoit été chargé de
.
leur p ayer, à leurs légitimes en corps héréditaires. Celui-ci voulut
se dispenser de payer ces dons ou legs particuliers, en offrant par
tage égal à ses frères et sœurs : mais les choses n ’étoient plus en-
_
tières lorsqu’ il prit ce parti ; ses offres furent rejetées par jugement
du tribunal d’ appel; il fallut p a y e r , et il paya en argent.
L e s légitimaires, remplis de tout ce qu ’ils avoient dem andé, se
sont rappelé que leur p ère, dans le contrat de mariage de l’héritier
universel, s’étoit rendu caution solidaire de la restitution de dot
de sa b r u , et du payement de scs gains éventuels de survie ; ils
prennent l ’alarme, et ils disent : Nous avons ruiné notre frère ; où
*
en serions-nous s'il ne laissoit pas assez de biens, a sa m ort, pour
répondre de la dot et des gains de sa fe m m e ? nous ne craindrions
�( 2 )
pas d ’action hypothécaire de la part de notre belle-sœur ni des siens,
dès que nous ne possédons pas un seul immeuble de la succession
de notre père, qui s’éloit constitué caution solidaire du payement de
ses reprises matrimoniales; mais l’action personnelle ne nous atteindroit-elle pas com m e héritiers lég itim aires? Oui certainement, çlle
nous atteindroit; car le premier engagement de tout héritier est
de succéder aux obligations contractées par le défunt, et de payer
ses dettes : o r , nous sommes véritablement des héritiers, puisque
nous sommes des légitimaires. E t les voilà qui se hâtent de former
une inscription hypothécaire de 26,000 fr. sur les Liens d ’Â n n e t
P e r isse l, pour la conservation de leur hypothèque de garantie des
suites du'cautionnem ent fourni par leur père.
A n n e t Périssel, justement surpris de voir ses frères et sœurs
sonner ainsi l ’alarm e, et mettre un embargo général sur les négo
ciations que l’arrangement de ses affaires pourroit exiger, a réclamé
contre une inscription om brageuse, à laquelle il est impossible
d ’assigner un fondement raisonnable, et il en a demandé la radia
tion, mais sans succès en première instance; sera-t-il plus heureux
en cause d ’appel? il doit le croire, car il sera jugé par un tribunal
également distingué par ses lumières, par l’amour de la justice, et
par son ardeur à réprimer les tracasseries.
M O Y E N S
D É C I S I F S .
D éjà il est évident que quand on considéreroit les intimés comme
héritiers, en partie, de leur p è r e , n ’ayant à redouter, de la part
des créanciers, que la seule action personnelle qui se divise de plein
droit entre tous les héritiers , et ne peut être exercée contre chacun
que proportionnellement à son a m en d em en t, ils n ’auroient à se
précautionner contre les recherches de la dame Périssel, dont la
perspective les inquiète, que pour sept seizièmes de sa créance :
l’ inscription conservatoire qu’ils ont form ée pour la garantie de la
dette entière est donc incontestablement exagérée pour les neuf'
seizièmes.
M ais elle n ’est pas moins évidemment dénuée de fondement pour
�(3 )
les autres sept seizièmes. L es intimés en conviendront, si la frayeur
qui les égare leur permet un instant de réflexion.
Us se dem anderont, Qui so m m e s-n o u s? E t certes, quoiqu’on
n 'y voie pas très-bien quand on a peur, ils ne pourront pas prendre
le change sur leur véritable qualité; ils s’apercevront q u ’ils ne res
semblent pas plus à des héritiers de leur p è r e , q u ’un légataire
étranger à qui il auroit légué cent écus par son testament. Ils ont
rêvé quand ils se sont crus héritiers de fait, chacun pour une seizième
portion de leur père; ils étoient habiles à le de ve n ir, oui : mais ils
. ne le sont pas devenus; ils se sont non-seulement abstenus, mais
opiniàtrément défendus d ’accepter la qualité d ’héritier, et de prendre
part au p artag e , pour s’en tenir au don ¡>arliculier qui leur avoit
été fait dans le contrat de mariage de leur frère , héritier universel,
par la voie de la charge qui lui, fut imposée à leur profit en l’ins
tituant. N ’ e s t héritier q u i ne veut. Us n ’ont pas voulu être hériritiers de leur pore ; ils ne le sont donc pas. U n donataire, un lé
gataire principal ou su b o rd o n n é, n ’im porte, lorsqu’il n ’est que
donataire ou légataire d’ un objet p a rticu lier, n ’est pas un héritier
et n ’en contracte pas les engagem ens, en acceptant le don ou le
legs qui lui est fa it ; il n ’épouse pas les dettes de son auteur, il
n ’en est aucunement tenu : les créanciers sont sans droits et sans
action contre lui. Ces règles, qui sont de tous les pays et de tous les
te m p s, du droit romain comme du droit fran ça is, viennent encore
d ’être consacrées de nouveau p arle tit. I". liv. III du co decivil, adopté
par le corps législatif le 29 g erm in al, art. C L X I , ainsi conçu :
« L e légataire à titre universel contribue avec les héritiers, au
» prorata de son ém olum en t; m ais le légataire particulier n’ est
h pas tenu des dettes e t charges : sa u f toutefois l’action hypothé« caire sur l’immeuble légué. »
E t cette règle est répétée dans la loi du i 3 floréal, iorm ant le
litre II du même livre du c o d e , art. C C C X I N , qui porte :
« L e légataire à titre particulier ne sera point tenu des dettes
m
de la succession ; saut l’action hypothécaire des créanciers,
h
V oilà un antidote.bien capable, ce semble, de guérir les intimes
�(4
)
de leur frayeur enfantine, sur les recherches des créanciers de leur
père.
V oilà aussi un m o t if bien tranchant pour le trib u n a l, de pro
n o n ce r, sans hésiter, la radiation de leur inscription de garantie
contre un danger imaginaire.
D
é libér é
à
C le r m o n t-F e r r a n d , par le jurisconsulte soussigné,
le 11 prairial an 11.
BERGIER.
L E S O U S S I G N É , qui a vu et examiné la consultation des autres
parts,
E
st d u
m êm e a vis et
par les mêmes raisons.
D a n s le f a it , les frères et sœurs du citoyen Périssel ne sont,
dans l’espèce, que des donata ir e ou légataires particuliers d ’une
somme de deniers.
C ’est un point jugé entre les parties, puisque le citoyen Périssel
aine a succombé dans sa prétention de vouloir les faire considérer
com m e héritiers légitimaires.
D a n s l’ancien d r o i t , de simples donataires ou légataires parti
culiers n ’étoient pas tenus des dettes du d é f u n t , quoiqu'ils fussent
ses héritiers présomptifs; com m e on le voit dans L e b r u n , traité
d es successions, liv. I V , chap. II, sect. II, n°.
52.
D ans notre droit nouveau ils le sont encore m o in s, d ’après les
deux articles du nouveau code qui sont cités de l’autre part.
O n pense donc que l’inscription faite par les frères et sœurs du
citoyen Périssel ne peut subsister, et que le jugement qui l’a main
tenue doit être infirmé,
D
é libé r é
à C lerm o n t-F erra n d , le i 5 prairial an 1 1 .
B O I R O T.
A R I O M , de l’imprimerie de
L
a n d r i o t
,
T r ib u n a l d ’appel. — A n 1 1
seul imprimeur du
�
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Factums Marie
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Périssel, Annet. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
successions
Description
An account of the resource
Consultation pour le citoyen Annet Périssel, avoué au tribunal d'appel, appelant ; Contre ses frères et sœurs légitimaires, intimés.
annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1767-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0240
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Aigueperse (63001)
Rights
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Domaine public
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Successions
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5dc3861c75576ee8c1a86567cd994c2d
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Text
M
E
M
O
I
R
E
T R IB U N A L
P O UR
É tie n n e
C O N T R E
E t
L
P R U G N A R D et M
sa femme, Intimés.
J e a n 'B a p t is t e
c o n t r e
A U D
1G 1E
a r ie
DEMURAT,
T
G R A N E T , A p p e llan t.
R f N o ta ir e ,
In te rv e n a n t.
a p rin cip a le q u e s tio n , qui d ivise les p arties , est c e lle de savoir si le
cito y e n G ra n et , qui s ’est m is à la tête de la m aison G en d ra u d en 1 7 6 3 ,
e t en
a
fait toutes les affaires com m e m ari ,
doit la com m unication,
à ses co h éritiers d ’une acqu isition q u ’il a faite ju d iciairem en t p en dan t
l ’instance du partage , com m e pou rsuivan t po u r la s u c c e s s io n , e t sans
bourse d élier.
L es autres questions son t rela tives aux rapports et prélèvem en s à faire
au partage ordonné en tre le s parties , e t sur leq u el i l n ’y a pas de con
testation.
.
P ou r l ’in te llig e n c e de la difficulté p rin cip a le , il est nécessaire de re
m on ter à des f a i t s , antérieurs à l ’ou vertu re des successions d iv isib les.
F
A
I
T
S
.
M ic h e l et autre M ic h e l M e rc ie r , fr è r e s , v iv a n s au m ilieu du d ix-sep
tièm e siècle ,
ach etèren t en com m un un m o u lin app ellé B o tte,
et d eu x
jardins y attenans ; il p aro ît que l ’aîné y am andoit deux cinquièm es , et
l e cadet trois cinquièm es.
C elu i-ci se fit M e û n ie r , re t gard a tou t le m ou lin ; i l
acte de 1659 ,
o b lig e a par un
de donner tà so n frère pour ses deux çinqièm es in d iv is
deux s etiers de b lé et dix sous d ’arg en t par année.
A
d’ a ï p b i
d e r io m
.
�.
.
.
.( 2 )
.
M ic h e l M e r c ie r , aîn é , a vo it laissé deux fils ; L a u r e n t , qui fut C uré e n
D au p h in é ; et M ag d e la in e ,
qui fu t m ariée à L e g e r G en d rau d ,
souche
dç la fa m ille de cujus.
P ou r form er le titre clé ric a l de L au ren t M e r c ie r , M a g d e la in e M e g e , sa
_ m ère , lu i constitua ces deux cinquièm es du m ou lin et ap p a rten an ces., u n
b an c sous la h a lle de R o c h e fo r t, une m aison et ja r d in , un pré et une b u ge.
, L a u ren t M e r c ie r , ren o u vela lu i-m ê m e e n 1692 , a v e c Jean M e r c ie r ,
fils
de M i c h e l, j e u n e , les arrangem ens pris par so n père en 1669 ; e t
i l fit d on ation en 17 2 6 à la fem m e de L e g e r G en d rau d , sa sœ ur ,
die
tout ce qui lu i a vo it été constitué p ar son titre clérica l.
Jean. M ercier,' détem pteur du m o u lin in d ivis éto it alozs d écé d é, laissant
deux enfans , dont A n n e C h a rd o n , sa v e u v e , éto it tutrice. L e g e r G e n
draud
et sa fem m e la firent assigner ,
e n cette q u a lité ,. p o u r p a y e r le»,
arrérages de ferm e des d eu x cinquièm es du m o u lin , Le 26 m ars 17 2 7 .
C e tte poursuite fut suspendue pendant b ien des ann ées ,
ch a n g em en s qui su rvin ren t dans la fa m ille G endraud ,
.
çu p er m ain tenant.
à cause de*
dont il faut s’o c-
>
M ag d e la in e M e g e éto it m orte e n 1 7 3 0 , laissan t u n seul e n fa n t , L a u
ren t G endraud ,
qui fut m arié à A n to in e tte M a lle t ,
et q u i décéda lüi.-
m êm e e n 17 3 5 j L e g e r , son père , n e décéda qu’en 174 2.
L au ren t G endraud et A n to in e tte M a lle t , eu rent trois en fans ; sa v o ir
Jacqu elin e , M a rie et C atherin e y i l n e p a ro ît pas que cette dern ière a it
eu de la postérité.
Jacqu elin e fut m ariée à A n to in e D em u rat ; ils m oururen t peu de tem *
après le u r m ariage , laissant trois enfans ; sa v o ir , A n to in e tte , m ariée à
A n to in e F o u m ïe r 3 M a rie , fem m e P ru g n a rd , intim és s et A n to in e , q u i
est représenté par lesdits Prugnard.
A p rès la m ort d’A n to in e D em u rat et de sa fem m e , A n to in e tte M a lle t,.
h a b i t a n t dans la. m aison de R.ochefort a vec les enfans de sa f i l l e , j; fa iso it
u n p etit com m erce , et v iy o it de ce produit , et de ce lu i des h éritages de
la fa m ille
'
G e n d ra u d , réunis p a r l a d onation de 1 7 2 6 .
M a rie G en d rau d , sa fille , é to it a llé e en co n d itio n ch ez M . de C h a z e r a t*
et ch ez le C., D . m arquis
de L in iè re .
E lle paTtit d elà en 17 5 8 ,
après
a vo ir em prunté tren te lou is du C u isin ier de la m aison pou r fa ire le co iü r
»xerce à R o c h e fo r t , ou sa m ère d eyo it lu i céd er so n m agasin,.
�..
( 3 )
A u s îl- tô t qu’e lle y fût a r r iv é e , v o y a n t dans la m aison de p etites nièce»
•
q u i a vo ien t le m êm e
droit q u ’e lle , e lle a v is a , e n fille
qui a v a it v u
le inonde , aux m oyens de tou rner les choses a son bén éfice exclu sif.
E lle présen ta requête ,
pour n ’habiter la m aison p a te rn elle ,
qu’a v e c la
p erm ission de la justice. E lle répudia le i . er m ars 17^9 à la su ccéssion
de son père ,
et le 3 , e lle se fit co n sen tir p a r sa m ère , m oyen n an t
cin q liv res u n
b a il de la m aison pour
une
an n ée ,
a v e c la
fausse
d éclaration q u ’il n ’y avoit pas d ’autres biens.
M a rie G r a n e t , après toutes
à R o ch efort deux ou trois ans ;
q u elle q u a lité ,
ces précautions , vo u lu t b ie n dem eurer
après c e la ,
e lle a lla , o n n e sait en
dem eurer à C lerm o n t ou à C h am alière ; et c ’est là , que
le 2 i m ars 176 8 , e lle con tracta m ariage a v e c le c ito y e n G r a n e t ,
alor*
c h iru rg ie n .
' 11 est dit dans le co n trat que la future se co n stitu e ses biens e n dot ;
il est dit aussi qu’en cas qu’e lle p r é d é c è d e , le futur g ag n era ses m e u b le s,
tels qu ’ils seront d ésig n és, p ar un acte q u ’ils se p rop osen t de passer en
sem ble ; et la jouissan ce de ses biens présens , d ’un reven u de cinquante
liv re s , à la eh arge de nourrir et entretenir sa m ire i laq u elle , de son
côté , sera tenu de lu i d on n er ses petits travaux et soins ; ce qui p rou ve
déjà que la m ère n e g o u v e m o it pas.
E lle g o u vern a b ien en core m oin s , quand le cito yen G ra n e t fut étab li
dans la m aison. 11 n ’éto it pas attiré à R o ch efort pour l ’ex ercice de son
é t a t , puisqu’il le
quitta bien tôt pour
en trer dans la g ab elle. M a is il j
a v o i t là une m aison , u n p e tit c o m m e rce , des im m eubles et des créances ;
c ’étoit de quoi com m en cer une fo rtu n e , ou tro u ver du m oins son existen ce.
11 a été dit plus h a u t , que J ea n M e r c ie r , détem pteur du m ou lin B o tte ,
a v o it laissé deux e n fa n s, appellés A n to in e et L o u is ; A n to in e étoit m ort
lors du m ariage de G ra n et , laissan t aussi d eu x enfans ; s a v o ir , A n to in e
et M ag d e la in e.
L e citoyen G r a n e t , e n son n o m et celu i de sa fe m m e , sans s’o c c u p e r
de* enfans D e m u r a t, fit a s s ig n e r, le 14 juin 176 6 lesdits enfans de Jean
M e rc ie r , en reprise de l ’ex p lo it du 26 m ars 17 2 7 . Ils ren o n cèren t a la
•u ccession de le u r pere.
•
A u m oyen de cette ré p u d ia tio n , la succession de Jean M e rc ie r n ’étant
o ccu p ée par Aucun t s d iv id u de la branche de M ic h e l; jeu n e , son p^re }
A. 2
�’
toute la lig n e étant décédée ,
.
excep té
. .
le s deux r e n o n ç a i s , il est clair
que les biens de cette lig n e re v e n o ie n t de d roit à la b ra n ch e de M i c h e l ,
aine , et que la créan ce se con fon doit dans la succession. M ais ce n ’éto it
pas le com pte du cito y en -G ra n et. Il aim a m ie u x supposer la su ccessio n
vacan te ; il y fit nom m er un curatcur.
i l co n clu t con tre ce
curateur , à la rep rise du m êm e e x p lo it de 17 2 7 ,
conten an t-dem an de des arrérages du blé dû pour la ferm e des deux c in
quièm es du m ou lin Botte , et au partage dudit m ou lin et jardin.. Ge* co n
clusions furent adjugées , par sen ten ce du 3 septem bre 1767..
C ette sentence ordonna le partage du m o u lin , p erm it au cito y en G ra n e t
et à sa fem m e de se m ettre en possession du m ou lin et autres im m e u b le s,,
jusqu’à ¿extinction de leurs créanecs
*
ou de faire vend re s u r placard..
L o rsq u ’il fallu t faire exécuter cette sentence , le
cito yen G ra n e t s ’ap-
perçu t que le sieur de Chabanes-de-G urton , G. D . se ign eu r de R o ch efort,
éto it en possession
de tous les im m eubles de la branch e de J ea n M e r
cier , à titre d ’acquisition de L ou is M e rc ie r , ou par hypothèque. Il le fit
assigner en 1 7 6 8 , toujours com m e m a r i , d ’abord en d éclaration .d’h yp o
thèque ; s u r , i . ° un pré à faire sep t chards de foin ; 2 .° un pré de tro is
ch a rd s.; 3 .° u n 'ja r d in d ’une quartelée ; 4 .0 u n e terre de trois septérées.
E n su ite il ch a n g ea ses con clu sion s , et d e m a n d a , o n n e 's a i t p o u r q u o i,
le partage co n tre lu i en 176 9.
U n e sentence de là sé n é ch a u isé e , du 6 se p te m b re , adjugea' ces dernières,
co n clu sio n s ,' ordonna le partage d es'bien s de J ea n M e rc ie r , pour en êtredélaissé un sixièm e au sieu r de C u rton , com m e acquéreur de L o u is M e r
c ie r ;. et cinq sixièm es au cito y e n G ra n et e t sa fem m e a vec restitu tion
de jouissan ces depuis
176 3.
L e sieur de Curton in terjetta
firm ée por arrêt de
des
qui fut co n
17 7 7 . D es experts, lui attribuèrent l ’article quatre de'
la dem ande de 17G8 ,
tio n
appel de cette sen ten ce ,
et le surplus aux G ran et. Ils fixèrent la restitu
jou issan ces, depuis 175 9 jusqu ’à 17 7 8 , à
1,4 2 5 liv .
L e cito y en G ran et reçu t ces 1,4 25 liv re s , sur lesqu elles i l 1 déduisit , à
q u ’il d i t , 56 y liv . de cens. Il reçu t aussi le m ontant des frais de R io m
e t du Parlem ent.
’ A p rès-a v o ir "ainsi term iné a v e c l e f sieur de C u rfo n , il' rep rit ses dilirgônees contre le curateur, de là sùccessiou M ir c i e r ; _fit liq u id e r le 4 avril'
�( 5 )
1780 , le s arrérages de jouissances du m ou lin B o tte , ju squ ’à 1 7 2 7 , seu
le m e n t à 408 liv . i 3 sous
6 deniers ; e t o btin t un exécu toire de dépens
de 246 liv . 18 s. 4 dcn.
L e cito y en G ran et dut se m ettre en possession en
ijj
Q. C ar on v o lt
sur l ’expéd ition de la sentence d’h o m o logatio n du rapport ,
que M . dâ
C u rto n n e paya les jouissances que jusqu ’en 1778 ; l ’é v ic tio n éto it p o u r
su iv ie et obtenue par G ran et > c ’est donc lu i qui se m it en possession alors.
C e p e n d a n t, le 6 ju in 1 7 8 0 ,
il fit saisir sur placard ,
de sa fem m e et la sien n e , sur le
son et un jardin jo ig n a n t ,
à la requête
cu rateu r ; i . ° une m azure de m ai
d ’une quartonnée ;
2.0 ,
3 .°
et 4 .0 les
deux prés e t le jardin ou ch en evière , m en tion n és en l ’e x p lo it de 1768 ,
5 .° une terre d’ une ém inée , sise au terro ir de la croix-p en d u e 5 G.° u n e
terre d ’une ém in ée , si*e à g rig n o l.
Le
3o août 1 7 8 0 ,
ces héritages
^
fu ren t adjugés , au sieu r A c h o n >
p rocu reu r des poursuivons-, m o y en n a n t i,2 o o liv re s ,
qui d em eu rero n t,
(
est-il d i t , en tre les m ains de l ’ad ju d icataire, à compte de • SES' créances*
L e sieu r A c h o n lit,sa d éclaratio n de m ieu x , et dit qu e'son ,.m ieux éto it
le cito y en G ra n et
..
„
. ..
•
-
,
.
L e cito yen G ra n et prit possession le 27 se p te m b re , tan t en. son rtom ',:
qu’en qualité de mari de A larie Gendraud , sa fem m e , de lui autorisée. Il1
r é p é t a q u e les h éritages lu i avo ien t été adjugés pour j,2 o o l i v . , à com p te
dé SES créances.
'
O n s ’étonne , sans doute , de n e plus entendre p arler dans .cette lo n g u e
procédure des deux cinquièm es du m ou lin B otte et des deux jardins. L e
sieu r de C u rto n a vo it vend u ces objets', à ce qu’il p a ro it, au, nom m é L a s s a la s , et le cito y en G ra n et a v o it fait assigner ce d ern ier en. d ésistem en t, ’
le 14 juin 1766*
•
.
Sans doute , il éto it n atu rel de faire effectuer ce désistem ent , en m êm e
tem s que celu i du sieu r de C u r to n , ;le succès en auroit été encore plus*
sûr. M a is les cio yen s G ra n et pen sant que leu rs cohéritiers p erd raien t la
trace de cet. o b je t , a vo ien t traité pour leu r com pte avec L a s sa la s, le
ju in 17 7 8 ,
et lu i a vo ien t cédé leurs
droits sur le m ou lin et jardini
attenant. D e sorte què v o ilà un o b je t perdu peu t-être par la p rescrip
tio n et par le u r faute , avec les jouissances depuis. 17 2 7 jusqu ’à p résent. '
Te^le é t o it la
m anière d’adm inistrer, des citoyen s G r a n e t ,
/
o u b lia n t
�. . . .
toujours qu ’iU a v a ien t
Ils a vo ien t
des
( « )
c o h é r itie r s , et qu’ils é to ien t
leurs
comptables^
en co re en 1768 assigné un nom m é A n n e t G irau d , en dé
sistem ent d’une ch en ev ière , ap p elée c h a m p m ia le t, a v ec restitution de
jouissan ces. Ils traitèren t a v ec l u i , le m êm e jo u r 16 ju in 1 7 7 8 . R en tra n t
dans la c h e n e v iè r e , ils reçu ren t 18 liv . pour frais , mai® firent g râ ce de
toutes les jou issan ces , pour raisons à eux connues.
P en d an t ces diverses p ro c é d u re s, le cito y en G r a n e t , d even u capitaine
de g a b e ll e ,
éto it a llé a v e c sa fam ille dem eurer à E b re u il ,
m ais il j
iivo it em porté les m archandises , et sur-tout les papiers.
P ru gnard et sa fem m e se disposoient d’assigner les citoyen s G ra n e t en
p a rta ge , lorsque ceu x-ci im agin èren t de les p ré v e n ir , pou r se ren d re plu*
fa v o ra b le s: ils form èren t eux-m êm es la dem ande en partage con tre les P ru
gn ard , en 177 6 .
L a fem m e G ran et décéda e n 1780 , laissant une fille unique j al or«
G ra n et reprit la d em a n d e, com m e lé g itim e adm inistrateur , e n la sén é
ch a u ssée', où le procès fut appointé.
L e s P rugnard "dirent p o u r défenses , qüe b ien lo in de contester le p ar
tage ,
ils y co n clu o ien t eu x-m êm es ^ m ais que G r a n e t s'é ta n t femparé de
to u t, le u r d evo it le rapport du m o b ilie r , su iva n t l ’ in v e n ta ire , et les jou is
sance* , à dire d’expert* ; que , s ’il éto it de b o n n e foi , il n ’avoit q u ’à dé
cla rer ce qu’il avo it p r is , et qu’il n ’y aurait plus de procès : ils co n clu ren t
aussi à u n e p rovisio n .
'
G ra n et refusant toujours de s ’e x p liq u e r ,
fut si lon g-tem s à prod u ire ,
qu ’ il laissa rendre par fo r c lu s io n , le 2 ju ille t 178 8 , la sen ten ce dont est
a p p e l, qui ordonne le partage des successions ,
de L e g e r G e n d ra u d , M a -
g d ela in é M e rc ie r et L au ren t Gertdraud , auquel G ra n et rapportera le m o
b ilie r et jouissances , y fera procéder dans le m o is ; s in o n , et en cas d ’ap
p e l , il est fait p rovisio n aux P ru gn ard de 2oo liv .
L e cito yen G ra n et in terjetta appel au P arlem ent. Dan$ ses g riefe du
l 3 d écem bre 17^ 4
1
se defendoit de d evo ir n i m o b ilie r , n i jo u issan ces t
en disant que sa b e lle-m ere s’éto it em parée de tout ; et à l ’égard de la
créan ce M e rc ie r ,
i l re c o n n o is s o it, q u ’ayant a gi pour la » u ccessio n , il
fera it le rapport des bien s adjugés en 1730 ; et il offrait ce r a p p o r t , à
la charge d ’être indem nisé, de ses frais et faux-frais.
Il répétoit cette offre dans une requête d u 2o d écem bre , et c o n c l u o i t
lu i-m êm e au partage de ces im m eu bles adjugés.
�( 7 )
D 'ap rè» c t la , si les choses eussen t restées en c e t é t a t , i l n ’y auroit
plus de d ifficu lté en tre les parties sur cet objet m ajeur dans la cause. M a is
u n e m ain infidèle et am ie des p ro c è s, a bâton né , tant dans les griefs que
dans la requête ,. tout ce qui a vo it rapport à cette offre de partage , p o u r y
substituer celle en rapport de i,2 o o l i v . , p rix de l ’adju dication .
Il est aisé de v o ir que les co rrectio n s fu ren t faites , p arce que G ra n et
ch a n g ea n t d ’a vo cat en 178 5 , fut in d u it à croire qu ’il p o u vo it refuser ce
partage. O n n ’osa d ’abord in terca ler dans la co p ie prise en com m u n ica
tio n , q u e l ’offre du partage
du
P R IX des b ien s , p ou r n e rie n effacer ;
et on fu t o b lig é , par u n e requête
du 18 juin 178 5 ,. de rectifier ces p ré
tendues c o n c lu s io n s , e n offrant la totalité de la créan ce M e rc ie r , au
lie u de
i , 2 oo l i v .
'
G ra n et produisit p a r cette m êm e requête u ne
tra n sa ctio n , du 9 ju in
178 2 , de laq u elle il résu ltait que les F o u r n ie r , co h éritiers de P ru g n a rd
a vo ien t traités
avec
lu i pour
la
quitte de leu r portion po u r 600 liv . ;
le s dires
pas
créan ce
M e rc ie r ,
l ’a vo ien t
ten u
et lu i avo ien t laissé in sérer dans
de l ’acte tou t ce q u ’il lu i a v o it p lu ,
pou r p rou ver qu’il n ’é to it
débiteur. IL e n in d u iso it que le s P ru gn ard
d evo ien t
adopter
cette
tran sactio n .
L es P ru gn ard rép o n d iren t p ar une é c r itu r e , du 7 septem bre 178 5 , q u e
cette transaction leu r étoit étran gère ; et n e co n n oissan t dans la créan ce
M e r c ie r , que ce qu ’ils en a vo ie n t lu dans l'é c ritu re de G r a n e t , ils so u tin
re n t qu’ayant poursuivi une créan ce com m une ,
il d evo it le rapport e n
nature des biens qu’il avo it retirés.
L e procès s’est co n tin u é au P arlem en t jusqu’en 1 7 8 8 , «ans beaucoup plu*
¿ ’e x p li c a t i o n
sur le m ode du p artage. E n l ’a n
2,
G ra n et a vendu les
deux pré* provenans du placard au cito y e n A u d ig ie r , m o yen n a n t 1,70 0 l i v . ,
a v ec ch arg e de payer aux P rugnard le u r p o rtio n de la créan ce M e rc ie r ;
« Et
attendu ,
a -t-il dit , qu ’il y a co ntestation
pou r raison
de cettft'
» créa n ce et autres prétentions ; l e d i t G ra n et su bro ge A u d i g i e r , tant à
» l ’effet du procès., qu’à tous les droits en rcsultans pour lu i j A u d ig ie r est
» chargé d ’en reprendre le s poursuites, et de faire p r o n o n c e r sur le tou t» ..
P ru gn ard qui ig n o ro it cette cession litig ie u se a repris le procès en ce'
t r ib u n a l, le 10 flo réal an 9 *, co n tre le cito yen G ra n et ,■com m e usufrui
tie r seu lem en t * attendu, le décès de *a fiUer
�...
, ..
..
A u d ig ie r est in te rv e n u le
( « )
................................................
23 plu viôse an u , et fidèle au p lan
ûq
v a cilla tio n qu’ il a trouvé dans la procédure de P a r ia , il a com m encé p a ï
dire q u ’il d evoit le tiers de la créance M e rc ie r , m ontant à
l3
sous , sur quoi il a vo it à se reten ir ;
i.°
1,4 6 6 liv ,
pour frais et faux-iraU
Soo liv . ; 2 .° pour une créance payée à u n nom m é E p in erd 240 livre# }
3 .° pour réparation 1 1 6 liv . ; 4 .0 pour la provision 2oo l i v . ; total des
retenu es 1 ,1 5 6 liv . ; de sorte q u ’il con sen toit de p ayer le
tiers du sur
p lu s , a vec les intérêts.
et par une requête , du 5
M a is bientôt il a trouvé qu’il o ffroit trop ;
g erm in a l an 11 ,
il a dit qu’au lie u de 1,4 5 6 liv . , il n e d evoit que le*
408 l i v . , portées par laliq u id a tio n de 17 8 0 , a vec les intérêts depuis 17805
su bsidiairem ent en suite
i l a offert 1,200 liv . ; enfin il a dit que si cette
dim inution étoit ad o p tée, i l consentoit de ne déduire que 2 oo liv . au lie u
de 5 oo liv . sur les fau x-frais.
'
D ès qu’A u d ig iè r paroissoit se m êler de tout , il n e sem bloit pas que le
cito y en G ran et eût à s’ingérer davantage dans ce débat ; cependant il e3t
ve n u a son tour , dans une écriture , du 4 fr u c tid o r , faire de n o u veau x
calcu ls , qu’on n e répétera p a s , de peur d ’a ch ever de rendre cette partie
de la cause com pliquée e t obsçure 3 car il dim inue en core sur A u d ig ie r ,
a v e c leq u el il collude.
Il étab lit un systèm e n o u veau pou r lui-m êm e. Q uan t
au com pte des
jouissances , il dit , pour la prem ière f o i s , après .28 ans de p r o c è s , que
c ’est A n to in e D em u rat qui a tout géré dans la m aison G endraud. Il ex
p liq u e divers prélèvem en s à faire de sa part. T e l est le dernier état de la
procédure.
t
M
O
Y
E
N
S
.
Il n ’y a pas de difficulté sur le partage en lui-m êm e ; il n ’y en a que
sur les raports a faire , et peu im porte q u ’ils soien t faits par le citoyen
G r a n e t , ou par le cito y e n A u d ig ie r , qui n ’avo it que faire de ve n ir se
m êler dans une caus# déjà assez em barrassée, pour qu’il n e fût pas besoin
d’y m u ltip lier les procédures. Q u o iqu ’il en soit , les intim és s’occu peron t
de fixer les rapports qui d oiven t être faits au partage , et après c ela ,
d ’en d éterm iner la form e. A i n s i , la discussion se réduit aux
question*
suivantes. i.° Le» citoyen s G ran et 'et A u d ig ier d oiven t-ils le rapp ort de*
biens
�bien s p r e v e n a tii
des
m
_
M o reier ? a .q S u b s id îa ire m e n t, q u el rapp ort d a -
v ro ien M la / relativem en t à cette créa n ce ? 3 .° G ra n e t d o it-il le rapport
du m o b ilie r et dea jouissances f 4 -° Q uels p rélèvem en s gont dus à G ra n e t
et A u d ig iç r ? 5 .Q Q u elle doit ê t r e , d’après le s ex p licatio n s ci-dessus , la
form e du partage ?
6°. Q u i doit les dépens ?
I.°
Granet et A u d ig ier, doivent-ils le rapport des biens venus des M ercier .*
C ette question dépend m oins du d roit rig o u reu x , que du fait et de»
circon stan ces.
L a dem ande en partage éto it pendante depuis 4 a n s , lorsq ue les citoyen s
G r a n e t firen t saisir les biens sur le curateur.
1
A lo r s l ’effet de la sen ten ce de 1 7 6 y , qui o rd o n n o itle partage du m o u lin
B o tte , et perm ettoit de se m ettre en possession des bien s M e r c ie r , éto it
un accessoire in séparable de la dem ande en p a rta g e . L e s condam nations
obtenu es , éto ien t tout à la fois u ne ch ose h éréd itaire ,
de la ju stice.
et sous la m ain
•
•
A in s i , de m êm e que le co h éritier 11e peu t ven d re u ne p o rtio n de la
su ccession in d ivise , si ce
pendente , pars rei communis ,
aussi ,
et
p a r parité
n ’est antè intentatum ju d iciu m ;
cceteris invilis ,
alienari
eo enim
nequit. D e m êm e *-2 .e t3 .C 0 r .
de droit , un co h éritier ne p eu t faire sa co n d i
tio n m eilleu re aux dépens de la ch ose com m une ,
profit seul , l ’effet d’une
en détournant
sen ten ce lu cra tiv e pour la succession .
Com. d iv id ,
à son
'
O n n e peut pas o b jecter que les biens M e r c ie r , autres que le m o u lin ,
n ’éto ien t q u ’ une sim p le hypothèque dans la su ccession G endraud ; quand
ce la s e r o i t , l ’hypothèque n ’en tom boit pas m oins dans la m asse com m une
et d iv isib le , su ivan t le texte de la lo i : Pignori res data in fam ilial erctscundce ju d iciu m venit. E n g én éra l , tout ce qui a pour o rig in e la succès- ^
sion ,
en tre dans le partage. Res haredïlariœ omnes ; sivè in ipsâ hære-
ditate inventer sint ; s i r k
M a is
e jv s
occasion e
a c
QUISITÆ.
que répondra le cito y e n G ra n et à la circon stan ce im portan te ;
que par la répudiation de» enfans d ’A n to in e M e r c ie r , et par la d éfaillan ce
de toute la lig n e de M ic h e l M e r c ie r , je u n e , les seuls h éritiers du san g
éto ie n t
le# G e n d r a u d ,
déscendan*
de M iç h e l
M e rc ie r / a î n é ,
B
in-
• 1 9 * f£ fara.
crise.
�.
.
( 10 )
>diqués par la lo i , com m e su ccessibles par la rè g le de la représen tation .
C o m m en t donc adopter qu’un protuteur ait abusé
de la m ain - m ise
gén érale qu ’il a v o it faite sur la su ccession com m une , au po in t de faire
m ettre en ven te jud iciaire , sans nécessité , des h éritages advenus à cette
su ccession , pour les acquérir lu i-m ém e à v il prix ?
L a justice m ain tien d ra-t-elle cette opération frauduleuse , d ’un hom m e
qui d evo it g ére r de bonne fo i,p o u r t o u s , et qui n e p o u vo it rie n dénaturer ?
L e cito yen A u d ig ie r , se p révau t d ’ une co n su ltatio n de jurisconsulte*
estim és , auxquels il n ’a
m ais
eu garde de soum ettre les pièces du procès ,
seulem en t un m ém oire à co n su lter , où il a posé la question lu i-
m êm e : C ’étoit de savoir , si en g én éra l le m ari qui a ch è te .a v e c les de
niers de sa fem m e
a ach eté uxoris nomine', ou-pour lu i-m ê m t. M a is rce
n ’estpas-là la difficulté , et J.e cito y en A u d ig ie r n ’a pas obtenu u ne solu
tio n pour la cause.
.
•
'
Il seroit peu t-être difficile de fo rcer le cito y en G rà n e t à don ner com
m u n ication
d ’une acquisition qu’il auroit faite , m êm e avec les deniers
co m m u n s,
si . cette acqu isition avo it été faite expressém ent pour
son
com pte particu lier , et d ’un objet tout-à-fait étran ger , et indépendant de
la succession com m une.
.>
‘ '
M a is , c ’est au nom de la su ccession ,
qu’ il pou rsuivoit la
"
'
.
r
et pour une dette com m une ,
v e n te jud iciaire ; c ’est com m e
protuteur ,
ou au
m o in s . negotiorum gestor , qu ’il a cond u it la! p rocédu re jusqu ’à exprop ria
tio n ; ¡et q u ’il a fait adju ger les im m eubles au p rocureu r des poursuivans ,
et par suite à lu i-m êm e j en cette qualité.
C e qu’il a- fait adjuger , éto ien t des im m eubles
de la su ccession G e n
d ra u d , pour laq u elle il auroit pu s’en m ettre en p o ssession , soit à titre
d ’h éritier , soit d’apres la sen ten ce de 1 7 6 7 .
Il
en
éto it réellem en t en
possession lu i- m ê m e , d ’après la sen ten ce du 10 d écem bre 177 8 ; e t la
su ccession
y auroit trouvé un g ag e suffisant , n o n seulem en t des a rré
rages du m ou lin , antérieurs à 1 7 2 7 , auxquels il lu i a p lu de s ’en t e a i r ,
m ais en co re des arrérages échus , depuis 17 2 7 , jusqu’en 1780 , qu’il a
m ieu x aim é p aroître abandonner po u r son avantage p articu lier.
Cent. 3 : cii.jt.
C e p e n d a n t,
com m e dit L ep rêtre , l ’on tie n t pour m axim e au palais ,
que ce que l ’un des c o h é ritie rs, retire ou achète , qui a été dépendant de 1*
succession c o m m u n e ,
/
b ie n que ce soit en son n o m p a r tic u lte r , peu t être
�. .
( ” .)
néunmoins réclamé p w tous les autres cohéritier
commun, en le remboursant. r
*, pour être partagé
.
en
'
.
T e l est aussi le vceu de la lo i, Coheredes debent inter se communicare l . rg.fjf.familcommoda et
incommoda. E t c ’est le devoir du ju ge ,
d it-e lle ailleu rs , de
W1C*
v e ille r à ce qu’un co h éritier ne fasse pas seul ça co n d itio n m eilleu re a vec
le s
deniers co irm u n s : Prospiceredcbet ju d e x ut quod unus exhœredibus ex re -
hœreditariâ p ercep it, stipulatusye est , ncn ad ejus solius lucrum pertineat.
Ces p rin cip es n e son t n u llem en t in com p atibles avec ceu x rapp elés dans
la consu ltation du cito yen A u d ig ier. L e tuteur peut ach e te r en justice le s
biens du pu pile , o u i , c e la est quelquefois v ra i ; m ais il n ’a pas poursuivi la
v e n te po u r ach eter ; e lle a été au con traire p o u rsuivie contre lu i ; m a is
il
a fa llu , avan t d ’exprop rier , que la nécessité de vendre fût c o n s ta té e ,
et qu’il n ’y eût pas d ’autre vo ie de lib éra tio n . Ici ,
G ra n e t p o u vo it se
m ettre en p o sse ssio n , il auroit co n servé un g a g e suffisant pour répondre
d ’une créance qui n ’est co u verte q u ’en u ne fo ib le partie.
L e m ari , peut ach eter pou r lu i-m êm e a vec les deniers d o ta u x , sans que
la ven te soit pou r sa fem m e , cela est vrai en core en g én éra l ; m a is, c ’est
q u ’il est le seul m aître de la d o t ,
a v e c laq u elle il a fait l ’a cq u isitio n , et
le citoyen G ra n et n ’étoit pas le seul m aître de la créance M e r c ie r , dont
il a pris prétexte pour se faire adjuger.
Il seroit d ifficile , après a vo ir lu la procédure , de p la cer G ra n e t dans
la classe d’un m ari qui achète a vec les deniers dotaux. D ’a b o rd , la dot de
«a fem m e con sistait dans ses droits successifs u n iversels , a vec pou vo ir de
le s rech erch er. E n secon d l i e u , le C ito y en G ra n et a ex écu té ce m a n d a t,
e n faisant les poursuites , co n cu rrem m en t a vec sa fem m e ; ce qui prouve
q u ’il ne consideroit
pas la créan ce M e rc ie r
com m e uniqu em ent m o b i-
lia ire. 11 a. fait faire la saisie aux m em es nom s. Il a eu so in de faire insérer
que l ’adjudicataire retien d ro it le p rix , à com pte de ses créances. E n fin ,
après la ven te , au m om ent de p arler en son nom s e u l , s ’il vou loit que
les
poursuivans et l ’adjudicataire n e fussent pas la m êm e chose ,
p ris possession des biens , tant en son nom ,
fem m e n ’étoit donc pas étran gère à
la ven te ,
il a
qu’en guatite de mari. Sa
puisqu’il l ’a cru e partie
nécessaire à la tradition.
O n pou rroit donc dire avec fondem ent que le cito y e n G ra n et a vou lu
ach eter pour la succession , ou dum oins uxoris nomine. Car dans le ca3
xnûme où la lo i dit en g én éra l que le m ari n ’acquiert pas pour U fem m e ,
ifcid.
'
�( 12 )
t . Penult. G . * 116 dit 3U3si qu,il
■
^u e ,la
Cotn. utr, jud, tra& ta fu erit possession
C ’est en sem b lable espèce ,
>
trad it’l o n ait été faite à lu i-m êm e . S i ei
que C o ch in argum ente de la qualité prise
n.pla^d. pa r l e m a r i J ans ie3 poursuites , à la vérité d ’une licita tio n . M ais ce qu’il
•
dit es; trop rela tif a la cause , pour l ’om ettre. « S i le m ari se rend adjudi—
y cata,ire, on ne peu t pas dire que ce soit à lui p erso n n elle m en t que l ’adjudi'
» cation est faite ; il ne ch inât pas de qualité au moment de l ’adjudication, ;
» et com m e jusqu es-lk il n ’a procédé q u ’en qualité de m a r i , ot pour fa ire
» valoir les droits de sa fem m e ; de m êm e ,
dans l ’adjudication , ce n ’est
» que pour elle q u ’il se rend adjudicataire ».
A u reste , le cito yen G ra n e t, après avo ir si b ien exp liqué en q u elle qua
lité il s ’é to it rendu adjudicataire , a vo it d on n é une exp licatio n p lu s p o sitive
e n co re dans ses g r ie fs , et sa requête , des 18 et 2e> décem bre 1784. Il se
ren d o it justice ,
en
offrant le
partage ,
il y co n clu o it lui-m êm e. F a u -
d ro it-il donc que des coh éritiers , qui o n t eu un protuteur dans sa per
son n e , et qui n ’ont jam ais eu ni pu avo ir un seul p ap ier de la su cces
sio n , fussent victim es
d’une infidélité , qui
a em pêché les parties de
s ’accorder sur le point p rin cip a l. L es in terlig n es ajoutées n e sont pas de
la m êm e plum e. O n lit e n co re dans
cito y en G r a n e t ,
ce
qui a été bâton né ,
l ’aveu du
qu ’ il a acquis pour sa fem m e e t ses coh éritiers un b ien
de leu r fam ille , et qu’il
en
doit la com m u n ication , m oyen n an t ses
reprises. E n fin , si G ra n e t n ’avoit pas acquis pour ses co h éritiers , il au ro it au m oins, d ’après sa prise de p o ssessio n , acquis pour sa fem m e. A lo r s
le pis a lle r pour les intim és sero it d’attendre son d é c è s, puisqu’il est usu
fruitier. M ais il est cla ir que le
cito y en G ra n e t ,
doit la com m un ication
de ce qu ’il a a cq u is, parce que les lois n e v e u le n t pas q u ’il se soit en rich i
aux dépens de ses cohéritiers , avec une créan ce com m une , dont il s ’éto it
em paré seul ; il la d o it , parce que c ’est à tort qu’il a regardé la succession
c o m m e
vacante ; lu i qui étant de la fa m ille, ne peu t s ’autoriser du p rétexte
de sa bonn e f o i , com m e un étran ger ;
il la d o i t , parce qu’il n ’a
m êm e entendu acheter en son nom seu l j
pas
il la doit enfin , parce qu ’il
l ’avoit offerte lu i-m êm e.
I I.°
Quels rapports devroit le citoyen G ra n et, hors les biens-fonds des M ercier ,
'
S’il
et pour en tenir lieu.
fa llo it décider cette
question subsidiaire > p ar les proposition»
�( 18 )
qu ’ont faites les adversaires , il n ’y auroit certain em en t
rien de
p lus
difficile , car ils n e son t pas d’accord en tr’ eux à ce t égard ; b ien plus , ils
n e le sont pas , chacun a vec lui-m êm e.
G ra n et offroit le prix de l ’adjudication en 17 8 4 ; puis la cré a n ce M e r
cie r en 178 5. Il a revu et corrigé tout cela en l ’an 1 1 .
A u d ig ie r o ffroit d ’abord un tiers de 1 , 4 5 6 liv . ,
a vec l ’in térêt d epuis
1 7 2 7 . Ensuite il offre le tiers de 408 liv . , a vec l ’in térêt depuis 178 0 . E t
le
cito y en G ra n et , charm é de cette d im in u tion est ve n u par delà e x p li
qu er qu’il ne fa llo it paver que deux neuvièm es au lie u d ’un tiers.
A quoi donc s’en ten ir dans cet em barras ? à rien de ce qui est p rop osé.
Q u ’éto it G ra n et dans la fam ille G en draud , un p r o tu te u r , s>ans doute»
il éto it m ajeur au
décès du père de la fem m e P ru gn ard , c e lle ci étoit
a lo rs au berceau ; G ra n et s ’e3t em paré des bien s P ru gnard et D em u rat ;
•1
,
.
„
,
. L. 1 j C. </e to
11 n a donc pu jouir que com m e protuteur. C a r , pro tutore gerit qui qui p [utt
r0
munere tutoris fu n gitur in re impuberis , siv'e se putet tutorem , sivè non esse i
Jîngit tamen esse.
M a is si G ra n et n ’éto it pas p r o tu te u r , il n e contestera pas au m oins
q u ’il ne fût v is-à -vis de la fem m e P ru gnard , negotiorum gestor.
L .y . de negot.
L es procès M e rc ie r , de C u rton et autres ; les traités d e 1 7 7 8 , n e p e r-
Vc,t‘
m etten t pas d’en douter. A in s i abrégeon s la discussion à cet égard.
O r , le negotiorum gestor est com ptable de la faute lé g è re e t d’une ex a c
titude scrupuleuse. Spondet solertiam et exactissimam diligenliam.
V oyons
s ’il a tenu cet en gagem en t.
cont. natc.
L e cito yen G ra n et s ’étant em paré des poursuites de 17 2 7 , a fait rendre
en
17 6 7 une sen ten ce
qui ord o n n o it un p a r ta g e , et condam n oit à des
arrérages de ferm e , antérieurs à
17 2 7 .
M a is pourquoi n e co n clu o it-il pas
aux arrérages échus jusqu’à 176 7 ?
Pourquoi en 1 7 8 0 , en reprenant ses poursuites , n e co n clu o it-il pas aux
arrérages postérieurs ; il n e d evoit pas crain dre la prescription , il l ’a vo it
r e le v é e en 1 7 6 7 .
A in s i , il a fait tort à la su ccession com m une de ces arrérages.
D iro it-il que c ’éto it la mCme ch o se de faire ordonner le p artage du
m ou lin ; m ais ici plus grande n é g lig e n c e , et m êm e in fid élité. C a r au lie u
d ’y faire procéder depuis 1 7 6 7 , il a vendu ses droits p erso n n els ,
et a
laissé prescrire la portion de ses coh éritiers 5 dem eurant n éan m o in s n an ti
de tous le s titres et diligence».
�C 14')
t
,
après a vo ir dem andé un désistem en t au sieur da
P ourquoi en core ,
C u rto n , a -t-il ch a n g é ses co n clu sio n s pour se born er t\ un partage ? II
co n sen to it de lu i laisser la p o rtio n acquise de L o u is M e rc ie r j
m ais c ’é -
to it-là culpa lata. C a r l ’hypothèque des G en d rau d éto it assise sur les b ien 9
de l ’a ïe u l et du père de L o u is M e r c ie r , depuis
A in si , lou is M e r
c ie r n ’avo it pas pu ven d re sa portion h éréd itaire franch e d ’h ypoth èqu e j
pas plu s que
de C u rto n ,
le surplus des b ie n s , dont cep end an t o n é v in ç o it le sieur
à cause de la m êm e hypothèque.
C ette dem ande en partage , n ’é to it-e lle pas elle -m ê m e un e x e rc ic e de 9
d roits successifs des M e rc ie r , à cause des répudiations. Q u o iq u ’il en s o i t ,
par l ’effet du partage demandé par G r a n e t , il a perdu deux septérées et de
m ie de
terre , plue les jouissances
en core u ne
depuis
176 9 jusqu’à p résent. V o ilà
d édu ction co n sid érable dans le g a g e d ’une créan ce , que le*
adversaires cependan t disputent
à qui m ieux m ie u x ,
s ’ils
d oiven t la
réduire au tiers , ou aux deux neuvièm es de 408 liv . en p r in c ip a l,
saujf
en core des dim inutions exagérées et rid icu les.
Sans d o u te , le cito y en G ra n et n e préténd pas , de b o n n e fo i, avo ir traité
de tous ce3 droits ou créances à sa guise et à sa plus gran d e u tilité , et
cependan t
d ’en être quitte aujaurd’h ui pour d ir e , v o ilà les titres ; vous
adopterez ce que j ’ai fait pour v o u s , e t je garderai ce que j ’ai fa it p o u r
m oi ;
cette p réten tion n e sero it pas so u ten able.
11 est juste que ce lu i qui a été Hanti pendant 40 ans de tous le s titre»
d’une
fam ille ,
qui a retardé pendant 27 ans un partage
dem andé lu i- m ê m e ,
qu ’il
avo it
qui s ’est établi au m oins le negoliorum gestor de la
fa m ille , rende en tières les actions héréditaires dont il s’est e m p a ré , jus
tifie au m oins qu’elles
p lo y é
exactissimam
son t dim inuées sans sa faute ,
diligentiam. S in o n ,
de vo u lo ir reten ir pour lui-m êm e
fa m ille P rugnard ,
ou qui
il
seroit
et qu’il y
des b ien s devenus héréditaires
éto ien t au
m oins
le
a em
absurde de sa part
gage
à
la
d ’une créan ce
considérable.
E n fin , pour resum er ce subsidiaire , le cito y e n G ran et doit rapporter au
partage , s ’il retien t les bien s à lu i adjugés ; i . ° les 1,200 l i v . , p rix de
»on adju dicatio n , qu ’il doit aux créanciers , a vec l ’in térêt depui» la ven te*
2 .° la som m e q u ’il a tou chée du sieur de C u r to n ,
le paiem ent.
a v ec l ’intérôt depui*
�C 15 )
V o ilà
d ’abord ce qu’il doit , sans difficulté , p arce qu ’il n e retien t cela
q u e pour le com pte de ses cohéritiers.
E n second lieu , il doit le rapport fictif de3 deux cinquièm es du m o u lin ,
et des jouissances depuis 17 2 7 ; faute p ar lu i d ’a vo ir p o u rsu iv i la sen ten ce
de 17 6 7 . (E t c e la , il le doit dans tous les c a s, outre les bien s saisis en 178 0 ).
L a lo i y est expresse. Debet rationem. reddere de eo quod gessit et de eo quoi
rion g e ssit, aut ut non oporluit.
..
I MP VNÉ negotium periturum deserit.
P ar cette sen ten ce , les M e rc ie r éto ien t condam nés au rapport des jou is
san ces depuis 172 7 . A in s i , leurs biens possédés par G ran et d evo ien t ré
p o n d re de cette condam nation.
A lo r s , si le cito yen G ran et n ’é to it pas tenu de ces jou issan ces e lle sm êm es , il
acquis ,
saces ,
C u rton ,
doit représen ter leu r g a g e ,
pour
c ’est-à-d ire , les b ien s par lu i
être hypothéqués à ces condam nations ,
a v ec les jouis-
â com pter de 177 8 ; et en outre , la terre laissée au sieu r de
par le partage fait a v e c lu i en 1 7 7 8 , a v ec les jouissances de
puis 1 7 5 9 , faute d ’avo ir aussi exercé les droits de la succession sur cette
terre , parce qu’e lle étoit hypothéquée aux m êm es créances.
L e cito yen G ra n et doit rapporter aussi les dépens faits en T727 ,
a du faire com prendre dans son exécu toire
Sur ces dem an les
qu’il
du i . er m ai 1760.
en rapp ort , il faut p réve n ir deux objections , que
fera peut-être le cito y en G ra n e t.
i ° . D ir a - t-il , j ’ai obtenu des lettres de ratification sur l ’adjudication
du 3 o août 1780 , donc j ’ài purgé v o tre hypothèque. J e n e dois , d’après
l ’é d it de 1 7 7 1 , que le rapport du p rix de l ’adjudication.
L e s lettres de ratification , il est vra i , p u rgen t les hypothèques à l ’é
g ard de toutes les créances des vendeurs. I c i , le ve n d eu r et
l ’acq u éreu r
son t la m ôm e personne. I c i , celu i qui dem ande l ’extin ction de l ’hypothè
que éto it dépositaire des titres constitutifs de cette m êm e hypothèque. N e
sero it-il donc pas m onstrueux de prétendre qu’il a pu l ’éteindre à son profit.
L e dépôt com m e le g a g e o b lig e celu i qui s ’en ch arge , de le rem ettre
e n nature et sans altération , au m oins de
son fait ; sub îege ejusdem in
Specic restiluenioe. Com m ent donc co n ce v o ir que le cito y e n G ra n et ,
qui
éto it n a n ti en 17 6 7 et 1780 , de tous les titres constitutifs d ’une créan ce»
d evan t prod u ire ce
'L
^
. Qui tamen negotium aliquod suscepit non ntg. gej’t.
qui est dit ci-dessu s', ait le droit d ’étein d re p artie de
cette c r é a n c e , e t néanm oins de reten ir les im m eu bles qui p o u vo ie n t en
�.
(
1 6
,
)
.
re fo n d re , C ’est com m e ei le porteur d ’uno procu ratio n gén érale 80 fa u o ij
u ne o b lig atio n à lu i-m ê m e ,
,
L e cito y en G r a n e t , dépositaire des titres d ’une créan ce de 363 c o h é r i
t i e r s , n ’a pu v a la b lem en t pren d re pen dant son nan tissem ent des lettre»
de ratification ;
e lle s
son t n u lles et de n u l effet à leu r égard ; i l n ’a pu
l ie n in n o v er à leu r é g a rd , en co re m oin s lo cu p k ta r i, eorum dctrimento, II*
d oiven t retro u ver le u r créan ce et l ’hypothèque de cette cré a n ce , au m êm e
état qu’avant, le nan tissem ent du citoyen G ra n et.
,
E n fin , les bien s M e r c ie r é to ien t deven us partie de la su ccession P ru g n a rd ; or le s lettres de ratification n e p u rgeo ien t pas la prop riété.
2 .° Il o b jectera que L assalas est détem pteur du m o u lin B o tte ,
le
et que
p artage n e peut en être ordonné qu ’avec lu i.
M a is le m o u lin est hors la fam ille M e rc ie r depuis 17 6 9 . L a se n ten c e
qui o rd onnoit le partage
est b ie n de 17 6 7 ; m ais e lle n ’est pas rendue
a v ec L assalas , n i le sieur de C u rton. A in s i , L assalas pou rroit opposer la
.prescription . L e cito y en G ra n et savoit b ie n cette o ccu p atio n de Lassalas ,
p u isq u ’il l ’a vo it assigné en 17 6 6 ,
et q u ’il a traité a v ec lu i en 177 8 . Il
é t o it , lors de ce t r a it é , com m e à p ré se n t, n a n ti de la sen ten ce de 1 7 6 7 ; i l
a don c laissé p érir par sa fa u te un effet de la su ccession ; il en est com pta
b le ; d on c il
en
doit le rapport com m e s ’ il e x is to it, sauf à le faire
éch eo ir à son lo t. S’il prétend qu’il n e l ’a pas laissé prescrire , c ’est à
lu i à en p ou rsuivre le reco u v re m e n t 3 et le s in tim és
lu i o ffren t tou te
su b ro gatio n de le u r part.
I I I.°
Qui doit le rapport du mobilier et des Jouissances !
» S i on s ’en rapportoit aussi à ce qu ’a écrit le cito yen G r a n e t, et à un
dossier qu’il a in titu lé « preu ve de l ’in d igen ce d’A n to in ette M a lle t » , il
n e doit rien.
Sa fem m e et sa b e lle-m ère o n t déclaré par plusieurs a c te s, cop iés l ’un
«ur l ’a u tr e , avan t son m a r ia g e , que toute la succession consistoit en u n e
m aison délabrée ; et le citoyen G ra n et rapporte dans le m ê m e dossier u ne
espèce d’enquête à fu tu r, du 3
ju ille t 1 7 8 7 ,
où des tém oins par lu i
m e n d ié s, ae disoient cependan t ferm iers de quelques parcelles d ’héritages.
Il y avo it donc quelque chose. Q uant au m o b ilie r , on y fait dire que les
créancier*
�-
(
l7
)
créan ciers l ’avo len t fait vendve \ m ais pou r év ite r de p lu$ lo n g s débats , le»
in tim és offrent de p rou ver qu’il y avoit notam m ent u n e ju m en t p o il B a y ,
que le cito y en
G ran et a vendue i 5 o francs 3 treize ou quatorze b reb is ,
u n e petite boutique de m ercerie , en v a le u r à peu près de 800 fra n cs, que
le s citoyen s G ran et ont em porté en a llan t dem eu rera E b r e u il; enfin qu’a
près son départ de R o c h e fo r t, le citoyen G ran et y reven an t de tems à
a u tr e , a vendu du m o b ilie r , et notam m ent une arm oire de frên e à deux
battans , au nom m é Joseph H ugon , cordonn ier.
E n v o ilà a sse z, sans doute > pour d ém entir le cito y en G r a n e t; a lo r s ,
com m e un m enteu r ne doit jam ais être c r u , c e la suffira pour faire ordon
n e r la preu ve de la consistance du m ob ilier par com m une renom m ée.
Il en est de m êm e des jouissances. L es intim és offrent aussi de prou ver
que G ra n et se m it en p o ssessio n , aussitôt après son m a r ia g e , de la m aison
de R o ch e fo rt, du jard in en d é p e n d a n t, du banc de la h a lle et de deux ter
res , sises au lie u de Chedias. Il a jou i du to u t, 9oit par lu i-m êm e à R o
c h e fo r t, soit p ar des colon s quand il a été à E b reu il.
L e traité de 1 7 7 8 , fait a vec G ir a u d , p rou ve l ’existen ce d ’une autre t e r r e ,
e t que le cito yen G r a n e t , pendant son séjour à E b r e u il, con tin u oit de
rech erch er et jo u ir ce qu ’il savoit apparten ir à la succession de son b eau père. A cet égard il doit le rapport des jou issan ces, m êm e antérieures à
1 7 7 8 , puisqu’il en a fait rem isé de son a u to rité , et pour raisons à lui
connues.
D e sa p a rt, P rugnard rapportera les jouissan ces depuis l ’an 7 , de deux
t e r r e s , dont il a évin cé la com m une de R o ch efort qui s ’en éto it em parée ;
plus les jouissances de la m aison depuis qu ’il l ’a v e n d u e , car auparavant
il ne s ’en est jam ais m is en possession.
A u reste, si G ran et persiste à n ier ce qui est de son fa it, une preu ve
su ppléera aux raisonnem ens qui p o u rraien t co n v ain cre le t r ib u n a l, qu’un
gen d re n ’éto it pas a llé s’établir à R o c h e fo r t, pour laisser tout entre les
m ains d’une belle-m ère de 6 1 a n $ , r e m a r ié e , et p o u r ne se m ê ler lu i.
m êm e de rien.
.
L e cito yen G ran et a prétendu pour la prem ière fois en l ’an 1 1 , qu ’A n toin e D em urat avoit été l ’adm inistrateur des biens jusqu’en 175^ ; m ais n ’y
a-t-il pas de l ’inconséqueuce à prétendre q u ’A n to in ette M a lle t éto it à la
tête de sa m a is o a , après 1768 , et cependan t qu e lle éto it en quelque sorte
«n tutele ; 5 ans auparavant.
C
�( 18 )
i v.°
Prélèvemens réclames par le citoyen Granet ou par Audigier.
i . ° Ils de.nandent 5 oo fr. pou r le3 fa u x -fra is em ployés dans les p our
suites des procès.
11 est assez bizarre que le cito y en G ra n e t prétende être payé pour des
affaires dont il ne veut pas com m un iquer le bénéfice. Ils offrent le tiers
ou les d eux-neuvièm es d j 408 fr. et ils osent dem ander 5 oo fr. de fauxfrais ; cela est ridicule. A la vé rité ils o n t eu honte eu x-m êm es de leu r
prop osition , et ont réduit hypoth étiquem ent les 5 oo fr. à 2oo fr. ; m ais
d an s'l’ un com m e dans l ’autre cas , et pour év iter les discussions inutiles ,
cet a rticle dépend du sort d ’un autre.
Ou Us seront condam nés à com m uniquer l ’adjudication , ou n on .
D a n s le prem ier c a s , ayant fait
les affaires com m unes , les intim és
o ffrent d ’a llo u er ce qui sera rég lé par le trib u n a l, s ’il y a lieu .
D aus le second c a s , G ran et n ’ayant pas l ’action mandati contraria, n e
peut répéter que ce qui est porté en ta x e ,
et il a eu soin de s ’en faire
payer.
.
L e procureur fondé a b ie n , quand il a agi de bonn e fo i, une action pour
I n s lit oblig,
quœ ex quasi
l ’indem nité de ses faux-frais 5 mais le negoliorum geslor n ’a actio n que pour
cvntracc nasc.
les frais utiles qu’il a faits. Repetit sumplus quos u t i l i t e r f e c i t
,
.
2f.° Ils dem andent 240 fr. pour une créance E pinard : elle n ’est pas éta
b lie ; quand e lle le s e ra , les intim és n e la con testeron t p a s , si e lle est
légitim e .
.
5 .° Ils dem andent 222 fr. p our réparations à la m a iso n ; m ais on ne
p arle que d’un devis estim a tif, et o'n ne rapporte aucune quittance qui éta
b lisse le paiem ent de la som m e ; e lle n ’est don c pas due.
4 .0 Ils dem andent le s 3 oo francs de p rovisio n s ; pas de difficulté.
6 .° G ra n et dem ande i2 o francs payés à Josep h G iro n : on p ou rrait le*
con tester 5 m ais les intim és s ’en rapp ortent a la prudence du tribunal.
6 .° Il parle d ’une dette payée à Battu , d ’après une sen ten ce co n su laire
de 1 7 6 6 , sans cepend an t y co n clu re. Il n ’est donc pas question de la dis
cu ter 5 d ’ailleu rs c ’est une créan ce p e rso n n elle à la fem m e G ra n et j il n e
peut en être question au partage.
/
�( *9 )
V °.
Quelle
*
doit être la forme du partage i
L e s rapports et prélèvem en s étant co n n u s, cette question n ’est plus que
le co rro laire des précédentes.
L a m asse doit être com posée de la m aison et jard in de R o c h e fo rt; 2 .°
des deux te rre s , sises au C liedial ; 3 .° de c e lle retirée de G irau d ; 4 .0 du
b a n c de la h alle ; 5 .° des deux jardins qui ont été retirés de la com m une
de R o c h e fo r t, par les P rugnard ; 6 .° des h érita ge s portés par la sen ten ce
d ’adjudication du 3 o août 1780 , et su bsidiairem en t des rapports à faire
par les citoyen s G ra n et et A u d ig ie r , d’après le §. 2 ci dessus; j . ° du m o b i
lie r de la su ccessio n ; 8.° des jouissances à rapporter par ch acu ne des par
ties , su ivan t qu’ il a été éxpliqué au §. 3 .
D a n s le cas où les deux derniers héritages ,
én on cés en la sen ten ce de
1 7 8 0 , ne feraien t pas double em p loi avec ceu x ci-d essu s, le cito y en G ran et
e n devra aussi le rapport à la m asse , a vec les jouissances 3 car il a déclaré
par un e x p lo it du 16 septem bre 17 8 0 , qu’ils éto ien t de la fa m ille G endraud
e t a vo ien t été com pris m al à propos au placard.
A p rès la m asse ainsi com posée, les adjudicataires p ré lèvero n t ce qui a
été dit au §. 4 , et les Prugnard p rélèvero n t leurs créances au procès con tre
la m u n icipalité de R och efort et autres , s ’il y a lieu .
L e surplus doit être partagé d ’abord en deux portions , dont l ’une de
m eu rera en usufruit a u 'cito y e n G r a n e t ,
son
pour être réunie à l ’a u tr e , après
décès 5 l ’autre form era le lo t de Jacq u elin e G e n d ra u d , et sera sou-
divisée en trois.
D e u x parts de cette so u s-d ivision seront allouées aux P rugnard , tant
pou r eux ,
que com m e représentans A n to in e D e m u ra t; la troisièm e sera
d éla issée, pour form er le lo t de la fem m e F o u r n ie r , sauf au citoyen G ran et
à s’arran ger a v ec e lle , p o u r ce qui co n cern e le résultat de sa transaction
de 1782.
V I.°
, Qui doit les dépens
L e cito y en G ra n et y a été condam né
par la sénéchaussée ; c ’étoit h
�t
2 0
juste titre, Il refusa constam m ent de s 'exp liq u er
n î communiîquer a u c u n e
p ièce , quoiqu’il fût nan ti de tout,
Il a interjetté ap p el ,
ç t n ’a cessé de v a rie r
dans sés m oyen s et se§
co n clu sio n s ; cette incertitude a o ccasio n n é le plus de frais , il doit les
supporter.
S ’il est ju g é qu ’il doive un rapport de m o b ilier et de jouissances , i l
d oit les depens par cela seul , car c ’éto it le m otif unique de son appel.
E n fin , il a jette dans le procès une tie rce partie , qui n ’a in térêt qu’à
p laid er et à contester sans m oyen term e ; car il lu i a v e n d u , et le droit
de p laid er , et ce qui éto it le g a g e de la paix. Ce n ou veau venu a rem p li
sa
tache
et certes , il sero it de la d ern ière in ju stice de reje te r sur la
m asse ce su rcroît de dépens in u tiles et
em barrassans pour la cause.
A u reste , le s dépens sont la p ein e la plus juste de ceu x qui soutien
n e n t de m auvaises contestation s ; et c ’est b ie n la m oindre qu’on puisse
in flig er à celu i qui résiste à un partage ,
depuis
dont la dem ande est form ée
2 7 ans.
C ertes ,
ce n ’est pas le cito y en G ra n et qui m érite de la Faveur dan»
cette cause , c ’est en core m oins le
cito y en A u d ig ie r : ca r c e lu i qui a
vo u lu acheter n o m in ativem en t un p r o c è s , celu i qui s ’est classé parm i ces
ergolabos , litium. redemplores , que la lo i rep rou ve et d écrie , n ’est d ig n e
d ’aucun succès dans ses prétention s , pour peu q u ’e lle s soien t douteuses j
e t sur-tout quand e lle s sont com battues par des considérations d’équité »
qui , de toutes m anières ,
m ériten t la p référen ce.
M A N D E T ,
D E L A P C H I E R ,
Rapporteur
H om m e
de lo i.
D E M A Y , A voué.
—
A
C h ez
M
a r t i n
R
1
O
D É G O U T T E ,
—
—
—
»
M ,
Im p rim eu r-L ibraire ,
la F on tain e des L ig n e s . ( 1804 ).
vis-à-vis
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Prugnard, Étienne. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandet
Delapchier
Demay
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
immeubles
partage
moulins
Description
An account of the resource
Mémoire pour Étienne Prugnard et Marie Demurat, sa femme, Intimés. Contre Jean-Baptiste Granet, Appelant. Et contre Audigier, Notaire, Intervenant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1659-1804
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0239
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0238
BCU_Factums_M0731
BCU_Factums_G1405
BCU_Factums_G1406
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
immeubles
moulins
partage
Successions
-
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abd7d20643b359877cf6ec4e81a233f6
PDF Text
Text
C O N S U L T A T IO N S .
�CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture
du m ém oire à consulter pour le citoyen Pierre Audigier ,
notaire p u b lic , habitant de la commune de R o ch e fo rt,
Contre Étienne Prugnard , et Marie D em u rat, sa
fe m m e ,
'
que le citoyen A u digier doit seulement res
tituer les deniers dont Granet est débiteur envers les héri
tiers de sa fem m e, conformément à son contrat de vente ;
et que la propriété des immeubles adjugés par sentence
du 31 août 1780, appartient incontestablement au citoyen
E stim e
Audigier , subrogé aux droits de Granet.
Quel seroit donc le prétexte d’Étienne Prugnard, et
de Marie Dem urat, sa fem m e, pour faire rapporter ces
héritages à la succession de Laurent Gendraud ? Seroit-ce
parce qu’ils voudroient prétendre que l'adjudication a été
A 2
�..
.
(4 )
.
.
faite avec les deniers dotaux de Marie Gendraud ? Mais
on sait que l’acquisition, faite par le mari avec les deniers
dotaux de la fem m e, n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers.
Seroit-ce parce que la créance qui a conduit à l’adju
dication étoit une créance commune aux héritiers de
Jean G endraud, père de Marie , femme Granet ? Mais
l’adjudication a été faite à Jean-Baptiste Granet, en son
nom et pour lui. L e mari n’achète uxorio nom ine , qu’au
tant qu’il acquiert une portion indivise dans les biens
de sa fem m e, ou par la voie de la licitation, ou à titre
de cession. I c i, il n’y a d’indivis que des deniers ; le m ari,
- qui a acheté avec ces deniers, ne doit autre chose que
la restitution des deniers. E n fin , le mari a vendu ces
„mêmes immeubles qui lui avoient été adjugés; et, quand
il auroit acquis uxorio nom ine , il auroit toujours eu la
faculté d’aliéner.
La prétention d’Etienne Prugnard
murat est donc une véritable chimère.
trer , en rappelant quelques principes
en analisant succinctement les faits qui
question.
et de Marie D eOn va le démon
de la matière, et
donnent lieu à la
Il paroît que Laurent Gendraud avoit trois filles: Marie
G en draud, mçiriee Jean-Baptiste Granet, représentée
aujourd’hui par le citoyen A u d ig ie rj Jacqueline Gen
draud , femme D e m u r a t, d’où est issue Marie D em urat,
épouse d’ Etienne Prugnard • et Catherine Gendraud, ma
riée à Michel Labonne.
La succession de Laurent Gendraud étoit créancière
d’Antoine Mercier. Ce dernier mourut sans avoir payé
�(
5 )
les sommes dont il étoit débiteur ; et sa succession fut
répudiée. Jcan-Baptiste Granet fit liquider et adjuger la
créance due à la succession de Laurent G en draud, contre
le curateur à la succession répudiée d’Antoine M ercier;
il en poursuivit le recouvrem ent, et fut obligé de passer
à la saisie et vente des biens de la succession débitrice.
L e 31 août 1780, sentence de la ci-devant sénéchaussée
d’A u v e r g n e , qui fait étrousse et adjudication des immeu
bles saisis, à M .A c h o u , procureur, pour lui ou son m ieux,
moyennant la somme de 1.200 francs. L e m ême jour de
la sentence d’adjudication, Aclion fait sa déclaration de
m ieu x , au profit de Jean-Baptiste G r a n e t, en son nom.
Granet notifia la sentence d’adjudication , toujours en
son nom ; la déposa au bureau des hypothèques, et obtint
personnellement des lettres de ratification.
L e i 5 septembre 1780, Marie Gendraud, et G ranet,
son m a r i , formèrent contre Marie Dem urat , fille de
Jacqueline G en draud, la demande en partage des biens
de Laurent Gendraud, père et aïeul commun ; et ceux-ci
imaginèrent de demander le rapport au partage, des biens
vendus sur le curateur à l’hoirie M ercie r, et adjugés à
Granet.
Granet soutint qu’il n’étoit pas tenu à ce rapport; qu’il
ne devoit autre chose ù ses cohéritiers que le prix de son
adjudication. Il y eut même erreur en ce p o in t, parce
que la créance due à la succession de Gendraud étoit infé
rieure au prix de l’adjudication ; et il ne devoit que le
rapport du montant de la créance.
Les choses ont resté en cet état : mais , le a 5 prairial
an 2 Granet a vendu au citoyen Audigier les héritages
A 3
�.
.
.
.
( 6 )
..
qui lui avoient été adjugés, provenans de l’hoirie M er
cier. Cette vente a été faite moyennant la somme de 1,700 f.
e t, en outre , « A la charge par l’acquéreur, de payer en
« l’acquit du vendeur, à Etienne Prugnard et à Marie
« D em urat, sa fem m e, ce qui restoit dû du tiers seule« ment de la créance dont Granet est débiteur envers
« les ci-dessus dénommés , et qui a donné lieu à la vente
« judiciaire des biens. Et attendu, est-il d it , qu’il y a
« contestation pour raison de cette créance et autres pré• tentions, Granet subroge Audigier , tant à Feffet du
« procès , qu’i'i tous les droits en résultant pour lui. Audi« gier est chargé d’en reprendre les poursuites, et de faire
« prononcer sur le tout. »
C ’est Marie Demurat et Prugnard qui ont repris les
poursuites. Audigier est intervenu, et a offert,ainsi que
l’avoit fait G ran et, de rapporter 1,200 francs, prix de
l’adjudication des biens Mercier. Mais Prugnard et sa
femme ont refusé ces offres; et, comme Marie G endraud,
femme G ran et, et Françoise G ran et, sa fille, sont décé
dées; que Marie Demurat leur a succédé; elle insiste sur
le désistement des immeubles adjugés à Granet.
II s’agit de prouver que cette prétention est sans fon
dement.
1
On établira, i ». Q ue l’acquisition, faite p a r le mari
avec des deniers d o ta u x , n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers ; 20. que l’ad
judication étant faite en justice appartient au mari seul ;
30. que le mari, dans l’espèce, ne peut avoir acquis uxorio
nomme.
�( 7)
PREMIÈRE
PROPOSITION.
Il est de principe généralement reconnu, que celui qui
achète des deniers d’autrui, acquiert pour son com pte, et
non pour le maître des deniers. F a b e r , sur le code ,
livre I V , titre S i quis alteri vel s ib i , def. X , dit même
que quoique la chose achetée ait été livrée à celui qui a
fourni les deniers , il n’en est pas moins tenu de rendre
tous les fruits qu’il a perçus, à l’acquéreur. M azuer, au
titre D e vendit, nomb. 23 et 38, enseigne également que
la chose achetée appartient à celui au nom duquel l’acqui
sition a été faite, et non à'celui qui a fourni les deniers de
la vente. Telle est la disposition de la loi S i eapecunia , V I,
au code D e rei vendit.
Par une suite de ce principe, lorsque le mari achète
avec les deniers dotaux de sa fem me, il acquiert pour lui,
et non pour sa femme, à qui il n’est jamais dû que la resti
tution des deniers. C ’est ce qu’enseigne Bacquet, traité des
droits de justice, tome I er. chap. 2 1, n°. 302 et suivans,
et M. d’Aguesseau dans ses plaidoyers, tome 2, page 643.
Despeisses, tome 1 e1'. page 5o o ,n o m b . 1 1 , s’exprime ainsi :
« Lorsque la dot a été constituée en deniers, bien que
« desdits deniers le mari en ait acheté un fonds, ncan« moins elle doit être rendue en deniers. Il n’est pas au
« pouvoir de la femme de contraindre son mari ou ses
« héritiers de lui rendre le fonds acheté de ses deniers,
« puisqu’il n’est pas dotal. P a r e i l l e m e n t , continue D e « peisses, il n’est pas au p o u v o i r du mari de bailler
t. ledit fonds, contre la volonté de sa femme même.
A 4
�•
A
( 8 )
•
« Bien que par le m ême contrat de mariage, par lequel
« la constitution de dot a été faite en deniers, il soit dit
« qu’en payement des deniers constitués, le mari a pris du
cf père de sa femme certains fonds évalués à la somme
« constituée; néanmoins le mari ou ses héritiei’S, après la
« dissolution du m ariage, ne sont pas recevables à vouloir
« contraindre la femme à reprendre ledit fonds : mais ils
« sont tenus de lui bailler lesdits deniers, ainsi que cela a
« été jugé par un arrêt du 30 mars 1635. Toujours la
« même raison demeure, que les deniers ont été constitués
«r en d o t, et non pas un fonds : et si le mari a voulu prendre
« en payement un fonds, il doit imputer cela à sa facilité,
« qui ne doit pas être préjudiciable à sa femme. »
D ’après ces différentes autorités, qui sont encore dans
la raison, Marie D e m u ratetso n mari ne peuvent réclamer
les immeubles adjugés à G r a n e t, quand bien même ils
auroient été acquis avec les deniers dotaux de la femme
Granet, puisque Granet a acheté pour lui et en son nom ;
qu’il ne pourroit contraindre sa femme ou ses héritiers à
prendre ce fonds en payement. Il est donc juste alors qu’il
soit autorisé à conserver cette propriété.
On ne peut pas même dire, dans l'espèce particulière,
que Granet a employé exclusivement les deniers dotaux
de sa femme à cette acquisition. La créance due à l'hoirie
Mercier appartenoit à la succession Gondraud; la femme
Granet n’en amendoit qu’une portion; le prix de l’adjudi
cation excède le montant de la créance : dès lors Granet a
employé à l’acquisition partie des deniers dotaux, partie
des deniers d’autrui, et partie des siens propres; ce qui est
une raison de plus pour que les immeubles adjugés lui
�( 9)
appartiennent, et qu’il ne soit pas tenu de les rapporter
au partage, ou de les restituer aux héritiers de sa femme. Il
ne doit autre chose que les deniers ; sous ce point de v u e ,
la prétention de Marie Demurat et de son mari est donc
inadmissible.
'
SECONDE
PROPOSITION.
L ’adjudication des immeubles, ayant été faite en justice j
ne peut appartenir qu’à l’adjudicataire.
S’il n’a jamais été interdit au mari d’acheter pour lui avec
les deniers dotaux de sa fe m m e , on d o it , à plus forte
raison, regarder une adjudication judiciaire comme propre
au mari. O n sait qu’il est interdit aux tuteurs et curateurs
d’acquérir les biens de ceux dont ils ont l’administration.
Telle est la disposition de la loi In emptLone, I V , §. Tutor
nït. au ff. D e contrahenda empt. S’il en étoit autrement, il
y auroit à craindre que bientôt les pupilles seroient op
primés par leurs tuteurs, qui s’empareroient, à vil prix ,
de tous les biens de leurs mineurs. Cependant si les biens
des mineurs se vendent en justice et aux enchères, alors le
tuteur peut s’en rendre adjudicataire, parce q u e , dans ce
cas, tout soupçon de fraude cesse, et qu’il est utile aux
pupilles qu’il y ait plusieurs enchérisseurs. C ’est ce qui
a été jugé par un arrêt du 12 janvier 1620, rapporté par
T ro n ç o n , sur Paris, titre X V I , des criées, article C C C L IX .
O r , si le tuteur peut se rendre adjudicataire, en justice,
des biens de ses m in eu rs, à plus forte iviison le mari, dont
l'administration n’est pas aussi rigoureuse. E l ici le mari
île s’est pas même rendu adjudicataire d u n bien apparte-
�.
( 10 )
.
nant à sa fem m e, mais seulement de quelques immeubles
affectés et hypothéqués à une créance indivise entre sa
femrne et ses cohéritiers. Il est donc personnellement adju
dicataire et propriétaire incommutable des immeubles
adjugés, sans autre charge que d’être tenu de rendre
compte de la créance, soit à sa femme, soit à ses cohéritiers.
TROISIÈME
PROPOSITION.
L e mari n’a pas acquis uxorio nom me .
O n dit communément au palais , et on tient comme
vérité certaine, que le mari qui achète une portion de biens
indivise avec sa fem m e, acquiert uxorio nom m e , c’est-àdire , pour le compte de sa femme , et qu’il ne peut
réclamer autre chose que les deniers qu’il a fournis pour
l ’acquisition. Quoique personne ne semble douter de ce
principe, lorsqu’on veut remonter à la source, on trouve
un très-petit nombre d’autorités pour l’appuyer. On p e u t,
à la vérité, l’induire de la disposition de la loi unique, au
code D e rei uxoriœ actione , q u i, expliquant tous les cas
de restitution de dot, semble dire qu’un fonds commun
entre la femme et un autre, ayant été licite et adjugé au
m a r i, celui-ci est obligé de le restituer tout entier à sa
femme. Dumoulin, tome Ier. titre Ier. des fiefs, page 303,
glose i ere. nombre 48, examine si le retrait féodal, exercé
par le mari à cause de sa fem me, est un conquit de commu
nauté, ou s’il doit appartenir à la femme. Il décide qu’il
appartient exclusivement à la femme. E t n ota , quod
j'cudwnyjure etpotestatefeodah à viro rétention,77on cen~
x'Uur inter conquestus vel acquestus, nec ejjicitur corn-’
�C ” )
mune inter conjuges ? sed propnw n sohus a x o n s à
cujus propriis dependet. Quomam vi retractus fco d a lis
unitur et incorporatur jnensŒfoudi dommcintis, nec in
eo habet maritus nisi iisumfructum et administrationem , sicut in reliquis propriis uxoris. Tarnen soluto
matrimonio media parspretii est legalium impensarum
solutarum à marito , debeht ¿psi vel ejus hœredibus
restitui.
Il résulte de cette autorité, que lorsque la femme est
propriétaire du fief dom inant, et que le mari exerce le
retrait féo d a l, ce qu’il a acquis par la voie de ce retrait
appartient â la femme et non à lui, et que le mari ou ses
héritiers ne peuvent réclamer que la moitié du prix dans
le pays de communauté.
C ’est en raisonnant par analogie, et d’après cette opinion,
qu’on a introduit dans notre droit la maxime que le m ari,
qui achetoit une portion indivise dans les biens de sa
fe m m e , acquéroit pour la femme et non pour lui. C ’est
ainsi que l’a expliqué M r. l’avocat général B ignon, lors
d’un arrêt du 22 décembre 1639, rapporté dans Bardet,
tome 2. Dans l’espèce de cet arrêt, une femme étoit pro-'
priétaire du quart d’une maison située à Paris. L e mari
avoit acquis les autres trois quarts à titre de licitation et de
cession. Après la mort de la m ère, le fils exerça le retrait
des trois quarts acquis par son père. L e père soutenoit avoir
agi pour lu i, et prétendoit d’ailleurs que le fils étoit non
recevable à exercer le retrait, parce que le délai en étoit
expiré. Mais, sans examinerce point, M r. l’avocat général
établit qu’un fonds commun entre la femme et un autre,
ayant été licité et vendu au m a ri, il étoit obligé de le resti-
�.
( 12 )
.
tuer tout entier à sa femme. Cette m axim e, ajoute-t-il, fit
dire autrefois à un empereur que l’on sollicitoit de répudier
sa femme dont il tenoit l’empire : S i dimittamus uxorem ,
reddamus et imperium. En conséquence la maison fut
adjugée en entier au fils.
M ais, en partant de ce principe, on voit que le mari
n ’achète pour sa fe m m e , qu’autant qu’il acquiert une por
tion indivise avec les cohéritiers, par la voie de la licitation
ou autrement. Ici les immeubles adjugés ne proviennent
pas de la femme ni d’une succession indivise; ce sont des
immeubles étrangers à la succession. Granet n’a fait autre
chose que poursuivre le recouvrement d’une créance com
mune. Pour y parvenir , il s’est vu obligé de faire saisir et
vendre les biens du débiteur ; il s’en est rendu adjudicataire
personnellement ; il a fait, en cela, le bien de la succession ,
en faisant rentrer la créance ; il a rempli son objet; mais il
n’est pas tenu de rendre l’immeuble qu’il a acquis. Il n’est
ici qu’un acquéreur étranger; il n’a fait que ce que tout
autre enchérisseur auroit pu faire : et comme on ne p ourroit pas demander à un enchérisseur étranger la restitution
des immeubles adjugés, de même 011 ne peut les demander
au mari q u i, en ce point, est étranger à la succession de sa
femme.
O11 ne peut pas étendre une maxime rigoui’euse. P ou r
que le mari acquière uxorio nom ine , il faut lui en sup
poser l’intention ou la nécessité. Celte intention ou cette
nécessité ne peut se présumer que lorsqu’il s’agit d’un
bien indivis entre sa femme ou ses cohéritiers. Aucune
de ces circonstances ne se rencontre dans l’cspèce particu
lière: point d’indivision d immeubles, intention bien ma-
�( i3 )
^
#
nifestée par le mari d’acquérir pour lu i, adjudication en
son nom personnel ; signification , d ép ô t, obtention de
lettres de ratification , toujours en son nom personnel :
donc il n’a acquis que pour lui, et non pour sa femme.
Il a donc pu transmettre cette propriété à un tiers, puis
qu’il n’a acheté que pour lui. Eût - il acquis uxorio no
mine , il eût même été le maître de vendre. Dès-lors ,
le citoyen A u d ig ie r, subrogé aux droits de G ran et, n’a
rien à redouter de la demande de Marie Demurat et son
mari : leur prétention est exagérée, et contraire à tous
les principes du droit.
Délibéré par les anciens jurisconsultes soussignés," à
R io m , le 25 ventôse an n .
PAGES.
ANDRAUD.
L E S O U S S I G N É , qui a vu la consultation ci-dessus,
et des autres parts, e s t AB S OL UME NT DU MÊME A V I S ,
et par les mêmes raisons.
L a demande formée par la femme P ru gn ard , est d’au
tant plus déplacée, qu’en supposant qu’il eût acheté les
immeubles dont il s’a g it, uxorio n om in e , ce qui n’est
pas, il n’y a pas de sens de prétendre qu’il a acheté pour
sa belle-sœur.
D élibéré à Clermont-Ferrand, le
I er.
germinal an n .
BOIROT.
�(
14
)
L E J U R I S C O N S U L T E A N C I E N , S O U S S IG N É ,
EST
DU
MÊME A V I S , et par les m ê m e s raisons.
L a i ere. section du tribunal civil de Riom , présidée
par le citoyen B on arm e, a poussé plus loin la rigueur des
principes en cette matière ; car elle a jugé en principe,
en messidor an 4 , ainsi que l’a rapporté le défenseur
officieux de l’une des parties, que le mari qui achetoit
des biens indivis avec sa femme , n’acqucroit pas uxorio
nom ine , à moins que l’acte ne le portât expressément,
mais bien pour son compte personnel. On auroit de la
peine à adopter cette jurisprudence qui est contraire aux
principes; m ais, dans l’espèce des parties, il ne peut y
avoir de doute que l’adjudication dont il s’agit ne doive
profiter à l’adjudicataire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le
I er.
germinal an 11.
DARTIS-M ARCILLAT.
L E J U R I S C O N S U L T E S O U S S IG N É e s t d u MÊME
A V I S , par les mêmes raisons ; et il ne voit pas com
ment il seroit possible de dire rien de raisonnable pour
l’opinion contraire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le 4 germinal an n .
B E R G I E R.
�C
)
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , en adoptant les principes
ci-dessus d éveloppés, n’y ajoutera qu’une réflexion. A u
moment de la mort de Laurent Gendraud, père commun
de la mère de la femme Prugnard et de la femme G ran et,
il n’existoit dans sa succession, outre ses biens immeu
bles , qu’une créance de 1,200 fr. due par Mercier.
En se m ariant, les filles de Gendraud se sont consti
tué cette créance. Il n’y a donc jamais eu que cette somme
qui fût dotale. Les poursuites, et l’adjudication pronon
cée au profit de G ranet, n’ont pu avoir la force d’im
primer le caractère de dotalité à des immeubles acquis
par G ra n e t, en son nom personnel ; pour opérer la dota
l i t é , il auroit fallu , ou que les immeubles eussent fait
partie de la succession du père commun , ou qu’ils eussent
été acquis en remplacement d’un fonds dotal aliéné.
O r , dans l’espèce , les immeubles ne proviennent ni
de la succession de Laurent Gendraud, ni ne servent au
remplacement d’un fonds dotal aliéné.
Que doit Granet, adjudicataire? le rapport du prix de
l’héritage affecté à cette créance. En supposant qu’ il se fût
trouvé plusieurs créanciers hypothécaires, et que quel
ques-uns eussent primé les héritièresde Laurent Gendraud,
dira-t-on que l’adjudicataire auroit dû le rapport du prix
aux créanciers premiers en hypothèque ; et qu’à l’égard
des Glles Gendraud, il étoit tenu au rapport de la chose.
Son sort ne’ sauroit: s’aggraver par la qualité de mari; e t,
�16
dans tous les cas, il ne d o it, comme tout autre adju
dicataire , que le prix devenu le gage de cette créance.
D élibéré à C lerm ont-Ferrand, le 5 germinal an 11.
"
M A U G U E.
A- R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d'appel. — An 11.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Audigier, Pierre. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Andraud
Boirot
Dartis-Marcillat
Bergier
Maugue
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
immeubles
partage
moulins
Description
An account of the resource
Consultations [Citoyen Pierre Audigier, notaire public, habitant de la commune de Rochefort, contre Étienne Prugnard, et Marie Demurat, sa femme].
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1780-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0238
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0239
BCU_Factums_M0731
BCU_Factums_G1405
BCU_Factums_G1406
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
immeubles
moulins
partage
Successions
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PDF Text
Text
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C 44Z ^I^/^Ï^7
M E M O I R E l t
EN
RÉPONSE,
P o u r J e a n n e et M a r i e -G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et J osep h G R E L I C H E , leurs m a r i s , habitant à
M o z u n , intimés ;
i
Contre J o s e p h N O Y E R - D U B O U Y , habitant à
Chamaliere, appelant ; en présence d ’ A n n e N O Y E R
L A G A R V E , avoué au Tribunal civil de C 1ermont t
intimés.
'
|
'
�M É M O I R E
EN
RÉPONSE,
P o u r J e a n n e et M a r i e - G a b r i e l l e N O Y E R , P i e r r e
et Jose p h G R E L IC H E , leurs m a r i s , habitant à
M o z u n , intimés ;
Contre J o s e p h N O Y E R . - D U B O U Y , habitant à
Chamalière, appelant,- en présence d 'A n n e N O Y E R L A G A R D E avoué au Tribunal civil de Clermont,
intimés.
L e citoyen Noyer-Dubouy crie au voleur, pour qu’on
ne le soupçonne pas; il se plaint de tout le monde: il
ne veut pas tout-à-fait, comme Harpagon,, faire pendre
la ville et les fauxbourgs, mais après avoir mis une foule
de personnes à l’index de sa colère, il va grondant
encore contre ceux qu’il ne désigne pas. Son mémoire
est un acte d’accusalion contre son pere , ses frères,
ses sœurs , ses beau-frères, le juge de paix et assesseurs
de M ozun, les juges, le commissaire et le greffier du
A
�( a )
Iribunal civil de,Clermont, le magistrat de sûreté, etc.
Il ne s’agit rien mqins que de v o l , bris de scellés , pré
varication ; et véritablement son procès semble être la
matière d’une conspiration vaste,méditée depuis l’an 5,
et dont les ramifications sont sans nombre.
Ces personnalités si multipliées, mêlées à des moyens
présentés cependant avec talent et adresse , doiventelles ajouter plus de persuasion en faveur de la narra
tion du citoyen Noyer-Dubouy, et convaincre davantage
de la sincérité des faits qu’il avance ? non ; la vérité
plus simple et plus naïve n’a pas pour escorte des in
jures et des accusations. Les daines Greliche diront au
citoyen D u b o u y, avec moins d’aigreur et plus de fran
chise , qu’il a voulu les faire ses dupes; qu'elles résislent
de tout leur pouvoir à le devenir ; et que c’est là tout
le secret de ses plaintes et de la contestation : qu’après
avoir fait régler ses droils dans les successions confon
dues des père et mère , il a voulu faire distinguer la
succession de la mère pour s’en créer de nouveaux ;
et sur une réponse équivoque au bureau de paix , il a
bâti l’édifice gigantesque de ses préfenlions toujours
croissantes, et du procès interminable qui menace de
dévorer toute la succession.
D ans ce cahos de faits, de débals minutieux el de
" procédures, s’il y avait un point de départ positif, il
faudrait s’en emparer pour se rendre plus promptement
intelligible; mais malheureusement la cause le serait
moins, si les détails en étaient omis, si l’ensemble en
était rompu ; car le système du citoyen Noyer-Dubouy
�( 3 }
.
est fondé principalement sur la procédure; il faudra
donc la parcourir toute entière. Il s’attache aussi à
prouver que sa mère a laissé une succession opulente;
il sera donc nécessaire d’en examiner la consistance.
F A I T S .
Jean-Baptisle-Joseph Noyer épousa,en 17^0, Fran
çoise T ix ie r , fille de Marien Tixier , commis-greffier
de la cour des aides.
• Marien Tixier , marié à Jeanne L e y m e rie , qui lui
porta 5oo livres de d o t , avait de son chef une petite
maison , un jardin de deux œuvres, une vigne de huit,
à dix, une terre de trois quartonnées ; tout cela était
imposé , à son décès, pour un revenu présumé de 168
livres. Il avait trois enfans.
'
L e contrat de mariage de 1760, a des clauses pro
portionnées' à cette richesse ; i.° la future porte un
.trousseau estimé 35o liv. ; 2° elle est instituée héritière
par égalité avec Gabrielle sa sœur, sauf 1111 préciput
de 1000 liv. ; 3.° ses robes, ses bagues et joyaux font
un total de 120 liv.; 4.0 riche douairière, la future a
l'expectative d’un gain de survie de 120 liv. en capitai.
Marien Tixier, qui dans sa qualité était commis ail
paiement des gages de la cour des aides, mit de la
négligence dans ses comptes. A sa mort, en 1760, il
avait été condamné à plus de 80,000 liv. de contraintes
ou d’amendes. Sa succession se trouva en outre d éb i-•
trice de sommes assez considérables envers une seconde
femme.
.
A 2
�I
'
■'
,
.
.
Le fisc s'empara de la succession ; le mobilier fut
vendu publiquement, et produisit 1269 livres; il fallut
en distraire 264 liv. de frais, et le surplus fut déposé
au greffe.
L a dame Noyer et sa sœur répudièrent au greffe ,
le 14 avril 17*60. Jean Giraudias fut nommé curateur.
L e sieur Noyer avait acquis les créances de la veuve;
il en donna l’é t a t , de même que des siennes, p a ru re
requête du 16 avril. L e total de ses demandes se por
tait alors à 5029 liv. 5 sous 7 à prélever sur la succession.
L e curateur fit faire le bail judiciaire des immeubles.
Beaucoup d’enchérisseurs se présentèrent ; des remises
furent ordonnées; l’adjudication fut faite à 95 livres.
Cependant le citoyen Noyer fit des démarches pour
l’honneur de son beau-père et pour sauver quelque
chose de sa succession ; il fit des voyages à Paris ,
sollicita des modérations, et enfin obtint, le 29 mai
1 7 6 4 , un arrêt du conseil qui réduisit les droits du
fisc à 2000 livres, chargea le ’citoyen Noyer de payer
cette somme au trésor public , outre ce qui serait dû
au sieur de Pille, procureur c'i la chambre des comptes
(il paraît que c’était 1200 liv.), au moj^en de quoi le
citoyen Noyer fut subrogé aux droits du fisc conlre la
succession.
Celle liquidation néanmoins n’engagea pas la dame
Noyer à se rendre héritière. On voit qu’ un auire cura
teur fut nommé après Giraudias , et que ce curateur
vendit ;'i M.r Reboul la petite maison Tixier, moyen
nant 3 i 2o livres, dont 2000 livres furent déléguées au
�. .
( 5 5 .
trésor, et ioôo liv. à M .r de Pille. M .r Reboul voulut
la garantie clu sieur N oyer, créancier principal, qui in
tervint pour la donner.
L e m ê m e jour le sieurNoyer,toujours comme person
nellement créancier, obtint la main-levée de deux saisiesarrêts, faites sur les deniers consignés au greffe, sur
le sieur Rérard de Chazelle, débiteur de 1400 liv., et
sur le sieur de Vicliy-Varvas, débiteur d’une rente de
25 livres. On ne voit pas s’il toucha ces deux sommes.
En 1 7 6 7 , il vendit le jardin au sieur Reymond ,
chirurgien , à la charge de payer une rente de 2 5 liv.
et moyennant 748 liv. (Marien Tixier l’avait acheté,le
6 avril 1742, moyennant 35 liv. de rente ). Quant à la
vigne et à la terre , le citoyen Dubouy dit que son père
les a aussi vendues.
'
'
Françoise Tixier, femme N oyer, n’était pas seule
héritière de Marien , elle avait une sœur religieuse ;
l’autre était Marie-Gabrielle, vivant avec elle.
Quand la succession du père fut liquidée, celle-ci
voulut y avoir part, et demanda un compte, non à sa
sœur, mais au cit. N oyer, qui, comme créancier, oc
cupait la succession. Il fut, à ce sujet, fait entre eux un
traité, le 27 décembre 1767. L e citoyen Noyer y rend
compte delà succession fixée à 11,088 liv.; sur quoi il
dit qu’y ayant pour 5,689 liv. ^ sous de dettes, il reste
net 5,399
^ sous ; que Françoise Tixier ayant un
prélèvement de 1,000 liv-, il reste a Gabrielle Tixier
prendre la moitié du surplus, c est-a-dire 2,200 liv .,
a quoi le cit. Noyer ajoute 700 liv. quJil a touchées pour
�■
(
6
?
.
sa belle-sœur sur d’autres affaires;'de sorte qu’il se re
connaît son débiteur de 2,900 liy., pour laquelle il crée
une rente rachetable de 146 liv.; et comme Gabrielle
"‘Tixier avait projet de resler près de sa sœur, il est dit
qu’en cas d’incompatibilité, elle pourra demander rem
boursement des 700 liv.
,
;
Y eut-il'séparation? La rente fut-elle rachetée? on.
l’ignore ; mais ce qu’on remarque, c’est qu’en 1766 et
1 7 6 7 , Gabrielle Tixier acheta une maison et des im
meubles dans le village de Provarel prèsSermentizon,
par trois ventes, moyennant 658 liv. On remarque aussi
que par acte du i 5 janvier 1775 , elle revendit tous ces
héritages au cil. Noyer son b e a u -frè re , moyennant
600 liv. dont elle lui donna quittance.
Ainsi ces immeubles s’effacent de sa succession, qui
consisterait tout au plus dans ses vêlemens et dans la
rente de 145 liv.,s’il n’est pas jugé queles ventes qui l’ont
suivie de si près, en prouvent le remboursement.
Les sieur et dame Noyer avaient cinq enfans, trois
mâles et deux filles; le'tems était venu de les établir;
mais la fortune de la mère était toujours incertaine,
ou plutôt elle était réputée entièrement nulle, puis
qu’elle n’avait pas révoqué sa répudiation.
Pour ne pas jouer un rôle tout-à-fait neutre lors de
rétablissement de ses enfans, on voit qu’elle sollicita
de son mari une reconnaissance de 5,000 liv., qui lui
fut faite le 8 novembre 1 7 7 5 , pour deniers, est-il dit,
louches de la succession de son père, et prix des ventes;
lion compris ce qui serait porté par quittance donnée
�( 7 )
par Annet Tardif audit défunt Tixier. La dame Noyer
accepte cette reconnaissance.
■ Elle avait cinq enfans; la générosité de son mari la
mettait à même de leur donner à chacun i,oco liv. On
voit en effet par les contrais de mariage de ses enfans ,
et notamment de ses deux filles mariées aux deux ci
toyens Greliche, en 1775 et 1777 , qu'elle leur promet
de son chef une somme de 1,000 livres, payable après
son décès.
.
Gabrielle Tixier étant décédée, il paraît que la dame
N oyer, sa sœur, fit assigner son mari en 1783, pour
obtenir u#é moitié de la succession de ses père et mère,
comme héritière de sa sœur, attendu que cette succes
sion lui était paraphernale. Elle reprit cette demande en
1788, et on ne remarque dans l’un ni l’autre des ex
ploits qu’elle se plaignit de la reconnaissance de 1775,
ni aucun des faits que son fils Dubouy lui fait dire six
mois après, dans un testament.
Ce testament, daté du 20 juillet 1789 , qui n’est
revêtu d’aucunes formes, ne mériterait pas les regards
de la justice, si le cit. Dubouy ne s’en faisait positive
ment un titre. Mais il en argumente expressément, il
en fait une pièce de sa production ; il faut donc en
rappeler le contenu.
La dame Noyer institue le cit. D u b o u y , son héritier
universel; elle prie son époux de lui reconnaître ce qui
lui est dû en conscience et probité.
Autant que je puis m’en souvenir, dit-elle, mon mari
a recu , i.° 7 à 8,000 liv. déposées chez M .r Reboul.
�( 8 ' ) ...................................
2.° Environ 2 5o louis d’or de 24 liv. que je pris moi-même
dans l’armoire de mon père, à L’instant de sa mort. 3.° Les
Liens qu’il a vendus...... Je n’ai de reconnu que 5,oooliv.
Je prie mon époux de reconnaître Le surplus, en con
science et probité, à Jean-Joseph Noyer-Dubouy, mon
héritier, q u e j e p r i e d ’ é v i t e r l a r e c h e r c h e d e m e s
D R O I T S P A R C O MM U N E R E N O M M E E .
Qui ne voit, dans ce testament, une copie, une
caricature du légataire universel?
■
:
On devient certain de la captation, quand on re
marque que le citoyen Noyer-Dubouy s’est marié un
an après, en 1790., sans que la mère ait répété cette
institution. '
Par son contrat de mariage, on voit que son père
lui Lègue les biens du Bouy, pour lui être remis après
son décès et celui de sa fem m e, la jouissance desquels
leur demeure réservée : ledit Legs fait pour lui tenir lieu
de sa porlion héréditaire quand elle sera échue.
A la charge de pa}Ter, après Le décès desdits sieur
et dame Noyer, 2,000 liv. à chacune des dames Grelic lie , pour pareille somme qui leur sera due par La
succession desdits sœur et dame Noyer 7 pour reste de
leurs dots, à elle faites par ledit sieur Noyer et sa femme;
plus 2,000 livres aux héritiers de droit, faisant au total
6,000 livres.
La mère ne paraît à ce contrat de mariage, que par
un fondé de pouvoir, ayant charge d'autoriser le ma
riage; mais elle n’inslitue pas. L e legs est évidemment
fait pour tenir lieu des deux successions.
Le
�.
,
(
9
.
.
L e cit. Noyer père, fut mis en réclusion à Billom;
le neuf thermidor ne l’en délivra pas. Un chagrin
profond, dont il est inutile de dire les causes, fer
mentait dans son ame. Il mourut le huit fructidor
an deux.
Quinze jours avant sa mort, il avait fait un testament
en présence des citoyens Girodias , Lasteyras, MartinGibergue , Bom pard, Fournier et Quesne, détenus
comme lui ; en présence des citoyens Beynaud et
Bouchardon, commissaires du comité de surveillance,
et de Voltaire-Lausset, concierge de la maison de ré
clusion.
La loi du 19 ventôse devait lui inspirer des craintes
de confiscation. Il était encore fortement occupé du
projet de diminuer le legs, qu’il avait fait au citoyen
Dubouy, de son principal immeuble, et la loi du 17
nivôse ne le Rassurait pas assez. Dans celte double
occurence, le parti le plus prudent était de tenter une
reconnaissance au profit de sa femme; il déclara donc
lui devoir 12,000 liv. pour le prix des ventes des meubles
et immeubles de son beau-père et de sa belle-sœ ur,
sans préjudice à d’autres reconnaissances.
A tout é v é n e m e n t , il lui légua l’usufruit de ses biens,
et institua ses cinq enfans héritiers par égalité.
Cependant le district de Billom décida sagement et
légalement, le 11 fructidor, que les biens d un detenu
mort et non ju gé, n’étaient plus susceptibles de con
fiscation ni de séquestre; il permit aux héritiers Noyer
de faire lever par le juge de paix , les scellés mi?
B
�( 10 )
par le comité de surveillance, lors de l’arrestation (i).
Les droits de la dame N o yer, sur la succession de
son mari, étaient plus confondus que jamais dans la
succession du père, par le legs.d’usufruit à elle fait par
le leslament. A la vérité, ce legs ne devait être que de
moitié, et il restai! des difficultés pour liquider ses droits
sur l’autre moitié.
Ces difficultés, elle voulut les applanir toutes de son
vivant, pour ne laisser à ses enfans aucune semence de
discorde. Elle les réunit tous pour leur céder ses droits
•et reprises, moyennant une pension viagère de i , 5ooliv.,
son logement, la jouissance d’un jardin, et moyennant
le délaissement de deux vaches, et tous les comestibles.
Cette pièce est rappelée au jugement.du 25 ventôse
an 5. Folio 5 , E°.
Ce traité liquidait entièrement la succession pater
nelle; les cinq héritiers en firent vendre tout le mobibilier. Mary Noyer aîné, vendit sa portion à ses frères
et sœurs, moyennant 16,000 liv ., sous la réserve du
mobilier qui se trouverait chez sa mère, à son décès,
c’est-à-dire, de ce que les uns et les auLres entendaient
par la succession effective. Au moyen de quoi le partage
fut fait par quart ou par égalité , comme le voulait le
père par son testament.
. ( i ) Cette expression de scellas prouve que le comité n’avait
pas fait un inventaire général, comme le prétend le cit. D ubouy,
pour ajouter qu’on l’a soustrait ; si quelqu’un est suspec t de cette
soustraction , ce ne peut être ceux d ’entre les parties qui n’ont
lihnlé les comités révolutionnaires que comme supplûuis.
�( II
)
Les deux dames Greliche eurent les biens de Mozun.
Les citoyens No.yer-Lagarde et Noyer-Dubouy eurent _
indivisément le domaine du B ouy, que l’intimé a au
jourd’hui seul.
...
L a dame;Noyer ne survécut pas long-tem s à ces
arrangemens de famille: elle décéda le 8 messidor an 3 ;
et comme ses. héritiers supposaient toujours que sa suc- ,
cession n’était que dans son mobilier, il en fut fait un. .
partage sans réclamation.
.
Mais bientôt advint, le rapport de l’effet rétroactif :
de la loi du 17 nivôse ; et malgré le testament de Son ;■
père, le citoyen Noyer-Dubouy se crut autorisé à pour
suivre ses frères et sœurs, au moyen de son contrat de .
mariage. Il ne perdît pas un iuslaul.
.
La loi qui permet lait de revenir à partage élait du
4 vendémiaire an 4. Il commença les liosliliiés le 28,
par faire poser les scellés sur une armoire du père com
mun , dans laquelle restaient des papiers de sa succèssion , de même que d’autres objets restés indivis.
Il est à remarquer que dans le procès-verbal du juge de paix, il signe N ojer-D uboujj, requérant seulement
l'apposition des scellés , en qualité d ’acquéreur et de
légitimair.e, conformément ci son contrat de mariage.
C ’est qu’en effet, il ne prétendait pas alors que celle
armoire contînt des papiers si précieux pour la suc
cession: maternelle; il était nanti de ces litres lui-meuie,
et savait que celle succession' 11 était rien.
On y voit q u e la clef de cette armoire était au pou
voir du citoyen Noyer-Lagarde.
B 2
�( 12 )
^
Celte hostilité fut le signal des procédures. I^e cit.
I.cigarde, qui avait vendu à Dubouy sa moilié du do
maine du Bouy, et qui sans doute en était mécontent,
assigna ses cohéritiers en partage.
Au bureau de paix, le citoyen Dubouy dit qu’il s'en
tenait à la donation fuite par son contrat de mariage,
et qu’il entendait seulement venir \\ partage des biens
de sa mère , sauf ses droits, dans le cas où il se trou
verait un litre qui le rendrait héritier.
A l’audience, il ne s’occupa plus de celte succession
maternelle, parce qu’il savait bien que tout était con
fondu dans le domaine du Bouy: et par jugement du
26 ventôse an 5 , les ventes faites par Mary Noyer
et par N o y er-L a g a rd e , de même que le partage du
22 fructidor an, 2 , relatif aux biens paternels , furent
annuités, comme prenant leur source dans l'effet rétroactifde la loi du 17 nivôse. 2.0 Le domaine du Bouy
fut délaissé au citoyen Noyer-Dubouy comme dona
taire contractuel; 3.° le partage de la succession pa
ternelle fut ordonné enlre les quatre autres en fans
N oyer; 4.0 il lut réglé ce que chacun devait payer à
l ’autre, soit Dubouy à ses frères, pour les réserves de
la donation, notamment les 6,oool. dont il était tenu, et
p o u r c e q u ’ i l a v a i l louc hé en mobilier,soil les deux frères
à Dubouy,pour ce qu’ils avaient touché de leùrsvenles.
Ce jugement tout avantageux qu’il était au citoyen
D u b o u y , élait un règlement de famille; les quatre
cohéritiers appelés au purlage nouveau, ordonné par
ledit jugement, s’empressèrent de l’exécuter.
�.
.
(
1
3
}
.
Ils avaient besoin pour cela des papiers de famille
et effets paternels, contenus dans l’armoire oii étaient
les scellés du 28 vendémiaire an 45 le juge de paix
était sans doute tenu de les le v e r , sur la représenta
tion du jugement du 25 ventôse : mais avec le.cit.
D u bo u y, il fallait des précautions.
Les copartageans l’assignèrent donc le 5 germinal
an 5 , pour être présent à la rémotion, sans que cela
fût bien nécessaire; le 6 germinal au soir, en son
absence, il fut fait un inventaire.
L e juge de paix était îi la vérité beau-frere des beaufrères des copartageans; mais quand un juge de paix a
niis des scellés sur les titres d’une succession , il n’y a
pas de prévarication , quand un juge de paix les lève
sur la réquisition de ceux indiqués par un jugement,
pour partager seuls cette succession.
L e juge de paix et ses assesseurs firent un inven
taire , contenant quatre-vingt-dix-sept coles de titres.
Cet inventaire n’est pas une pifece occulte, le citoyen
Dubouy en a une expédition.
A la suite de l’inventaire les copartageans, voulant
éviter d’autres frais, firent un partage en deux lots de
la succession Noyer ;Noyer-Li)gaide, pour lui et Mary
Noyer , eut à son lot les 6000 liv. à prendre sur NoyerDubouy, en vertu de la donation de 1790,0! du juge
ment de l’an 5.
L e cit. Dubouy, favorablement traite par la justice,
trouva dans celte opération les matériaux d’un procès
kien plus lucratif que le premier. 11 fit citer ses colié-
�'
•
C 14 )
ïitiers pour être condamnés à réintégrer le mobilier
enlevé. Il demanda en outre pour dommages-intérêtS'
60.000 livres écus, quoique les écus ne fussent pas alors
très-communs. Il prétendit qu’on avait soustrait l’or,
l’argent,
O ' les titres,' les bordereaux des ventés '* et Le
testament du 20 ju illet 17^9. ( Menteur!' il est dans ses
pièces, cote 14 de sa production).
On pense bien que sur une telle demande , la séance’
du bureau de paix dut être orageuse (18 floréal an 5 ).
Comme Dubouy voulait faire représenter les effets
d ’ u n e succession qu’il n’avait pas voulue, on lui demanda
en quelle qualité il entendait agir ; il répondît : que
c’était comme héritier universel de sa mère, aquéreur
de ses frères, et légitirnaire de son père.
Alors lescitoyeusGreliche, faisant pourleurs femmes,
lui disent qu’ils en étaient bien aises, parce qu’ayanl:
1.000 liv. du clief maternel par leur contrat de mariage.,
et ne sachant où les prendre , puisque La mère avait
répudié à la succession de ses père et mère, ils lui de
mandaient chacun ladite somme dë 1,000 liv.
N oyer-D ubou y, qui en savait plus qu 'eu x, quoiqu’il
les accusât d’avoir pris tous les titres, répondit qu’il
acceptait la renonciation qu’ils faisaient de la succession
maternelle, et qu’il se chargeait d elesp ayer, si la somme
leur était due.
Les cito}rens Grcliclie alors, quoiqu'ils né soupçon
nassent pas un piège, dirent qn ils n avaient jamais
renoncé à la succession maternelle, commeleprélendait
le cil. Dubouy, mais qu’ils acceptaient les 1,000 liv.
�( i5 )
Au surplus ils répondirent que s’ils avaient fuit-lever
les scellés, ils en avaient le droit, en vertu du jugement
du 16 ventôse.
Voilà le précis exact de ce procès-verbal du 18 floréal
an 5 , sur lequel le cil. Dubouy a basé toutes ses pré
tentions, pour ruiner la succession ab intestat de son
père, par la recherche de celle de Marien Tixier son
aïeul.
Cependant le citoyen N oyer-Dubouy avait interjeté
appel du jugement du 25 ventôse. Il prétendait ne de
voir pas rendre compte delà majeure partie du mobilier
qu’il avait retiré de la succession paternelle, parce qu’il
l’avail, disait-il, acheté en vente publique, et payé à
ses cohéritiers, c’est-à-dire, mis en dépôt dans ta r
moire sceUée.
.
L e i i ventôse an 6 , cet appel fut jugé au P u y, et
le jugement de Riom fut infirmé dans l’objet de la con
damnation ci-dessus rappelée.
L e cit. N oyer-Lagarde, qui dans tout le procès a pris
mal à propos bien des choses sur son compte, déféra
le serment décisoire au cit. Dubouy , qui en consé
quence fut autorisé à retenir le mobilier, à la charge
d affirmer.
Comme la levée des scellés lui avait fai! naître l’idée
d obtenir le partage des droits maternels , il plaida forlûinent pour l ’obtenir5 mais il ne put obtenir que la
réserve de son action, qu’on ne pouvait lui refuser, et il
est même essentiel de remarquer qu’il ne plaidait pas
pour être héritier universel 5 car i.° il ne dit rien de la
�(
)
m
'
'
prétendue répudiation du 18 floréal ; 2.0 il fait dire au
premier m olif que la succession de la mère est divi
sible en cinq.
L'affirmation ordonnée fut un autre sujet de discorde
entre les frères Noyer. Le cito}ren Dubouy fut accusé
d’avoir soufflé les copies de signification du jugement,
pour faire son affirmation incognito. L ’huissier fut mis
en prison ; mais les choses se pacifièrent : Mary-Noyer
déclara par-devant notaires avoir reçu sa copie; l’huis
sier fut mis en liberté. Enfin le cit. Dubouy a affirmé,
et on ne lui dira pas par récrimination quJil a volé ce
mobilier j car res j a die ata prô veritate habetur.
L e cit. Dubouy reprit sa demande relative à la suc
cession maternelle, le 7 prairial an 6. Il cita au bureau
de paix ses frères et sœurs pour lui remettre la succes
sion, les papiers, le testament, etc., comme étant seul
héritier, à cause de l’abdication faite le 18 floréal, si
non à lui payer 60,000 liv. (1). Au bureau de paix on
(1 ) Il rciut être bien osé pour motiver des conclusions aussi
exagérées , sur le fait présumé que les titres, relatifs à la succes
sion de la m ère, ont été enlevés , lorsqu’on les a soi-même.
L e cit. D u b o u y est porteur, i .° de l'o rig in a l du contrat de
mariage de sa m è r e , expédié à ellc-m cm e, cote i . r* de sa pro
duction ; 2 ° du traité orig in a l de 1765, cote 4 ; 3.° de l’expédi
tion originale de la reconnaissance de 1 7 7 5 , cote 11 ; 4.0 des
orig in a u x d ’exploits donnés a la requête de la mère contre son
m a r i , en 1787 et 1788 , et du pelit d é fa u t, délivré au greffe , sur
ces exploits , cote i3 ; 5.° du testament de sa m ère, du 20 juillet
1789, toujours en o rig in a l, cote 14«
ne
�.
.
^ 17 )
neditrien. L e cit. Dubouy expliqua sa citation par son
assignation du 18 thermidor, el demanda i.° le mobilier
suivant l’inventaire; 2.0 5,ooo liv. pour la reconnaissance
de 1775; 3.° 12,000 liv. pour celle de l’an 2 ; 4.0 43,000
liv. pour les autres reconnaissances énoncées dans celle
de l’an 2.
Sauf à déduire 4,000 liv. dues; savoir: 1,000 livres à
Mary N oyer, lesquelles lui resteront comme son aquéreur , et 3,000 livres aux citoyens Greliche et NoyerLagarde.
,
Il saisit en ses mains 4,000 liv. (il avait écrit 6 ), par
lui dues en vertu de sa donation ; ladile somme prove
nant de La succession dit père ■
l’huissier lui fait défenses
de s’en désaisir.
Cetle demande ne pul être jugée à Riom ; il la reprit
en l’an 8, devant le tribunal de Clermonl; là il pré
senta une pélilion pour demander 6,000 liv. de provi
sion ; puis il augmenta même ses conclusions principales
et demanda 3,900 livres de plus , par un exploit du 9
fructidor an 8 , pour la succession de Gabrielle Tixier,
comme échue à sa mère en paraphernal.
L e cit. Dubouy se croyait si bien prêt à obtenir ces
sommes imaginaires, qu’il fit des saisies arrêts., des
inscriptions au bureau des hj'pothèques, etc.
Q ui donc-esl le vo le u r?
Mais il a avoué avoir eu une clef lors des scellés , el Laghrde
'lue aulre. Peut-être voit-on là pourquoi il veut absolument
persuader que L agarde collude avec tous les autres , et pour
quoi. il le signale comme sou ennemi déclaré.
�( 18 )
La translation du procès de Riom a Clermont semble
peut-être une chose très-ordinaire et indifférente au
procès; elle n ’est cependant rien moins que cela; car
on pressent bien que le cit. Lagarde, étant avoué à
Clermont et partie lui-même en son nom dans la cause,
dut naturellement en suivre l’instruction. Elle l’inté
ressait d’ailleurs seul en quelque sorte ; car il plaidait
pour conserver les 6,000 1. échues à son lot, par le par
tage du 6 germinal an 5.
L a copie d'exploit était posée à son domicile ; il pou
vait donc se présenter sans en attendre d’autres. Il
n’avait nul besoin de procuration, et il n’en demanda
pas; ce qu’il y a de certain, c’est qu’il a toujours agi
seul et à sa guise.
Il paraît vrai qu’il y eut sur la demande provisoire
de Dubou}7une plaidoirie, non pas le 1 5 fructidor, mais
le 2 vendémiaire an 9, etqu ’ilfut rendu un jugementqui
joignit le provisoire au fonds. Ainsi il était inutile de nom
mer et placer les juges et les auditeurs, de crier tollé
contre le greffier qui a dû faire son devoir. Le tribunal
sera indigné de ces injures qui n’avaient pas d’o b je t,
et qu il /allait au moins appuyer par un certificat. Mais
c’était perdre l’occasion cle dire que le jugement lût
motivé sur la répudiation - ce qui est faux.
L e cit. Lagarde étant dans la cause avoué pour luim ê m e , et procurator in rem sua/n pour ses beau-frères,
ne s’en tint pas à l ’instruction ordinaire de sa cause; il
fit donner, le 25 ventôse an 9, une assignation à sa re
quête et à celle des citoyen et d a m e G r e l i c h e , p o u r con-
^
�( *9 )
dure le citoyen D u bou y, i.° au paiement de r,ooo liv.
pour chacun en sa qualité d’hérilier de la mère ; 2.0 à la
radiation des inscriptions par lui faites; 3.° en 12,000 1.
de dommages-intérêls.
Certes ce ne sont pas les cit. et dame Greliche qui
firent pour cet exploit ; i.° ilsliabilentMozun , et l’huis
sier est de Clermont ; 2.0 c’est le cit. Lagarde qui s’y
constitue avoué ; 3.° il est écrit en entier de la main du
cit. Lagarde; mais jusques-là il n’y avait pas de répu
diation, et cet exploit n’en ferait pas une. A u reste,
quand les citoyens Dubouy et Lügarde o n tp u se p ar’tager des titres , ils ont bien pu aussi arranger un ex
ploit entre eux.
L e 6 floréal an 9, le cit. Dubouy se laissa condam
ner par défaut, et par conséquent il se laissait débouter
de ses demandes; mais aussi il se faisait condamner à
payer les 1,000 liv. en qualité d’hérilier. C ’était là son
but et son piège. La collusion est-elle donc tout-à-fait
imaginaire?
D u b o u y , dans son appel, déclara expressément
acquiescer au ju g em en t, en ce qui concernait la répu
' dial ion et son acceptation de la qualilé d’héritier.
Beaucoup plus urgent sur l’appel, parce qu’il croyait
avoir atteint son but, il donna ses causes d’appel quinze
jours après son exploit ; c’est là que jouissant de son
adresse, il appelle le citoyen Lagarde, praticien tressubliL, et le raille, en feignant le louer ou le craindre.
11 argumente du testament de sa mère pour prouver
l ’opulence de la succession Tixier; il dit que le traité,
•
C 2
�fiiil avec elle, est une démission de biens, révocable
et inutile, qui ne l’a pas empêché de transmettre sa
succession à ses héritiers, et par conséquent à lui seul,
puisqu’il est reconnu seul héritier maternel.
L e citoyen T ard if, constitué avoué pour tous les
intimés, tenant sa correspondance et les pièces du ci
toyen Lagarcle, y voyant les citoyens et dame Greliclie,
en qualité, étant dès-lors suffisamment autorisé de faire
sa procédure , et n’ayant ni ne pouvant avoir aucun
sujet de méfiance dans celte affaire, donna sa réponse
à causes d’appel , et ne put qu’écrire en faveur du
jugement, attaqué pour en obtenir la confirmation.
L a cause avait été au rôle de l’an 9; le cil. D u b o u y
surprit un ju geme nt par défaut , sur ce m êm e r ô l e ,
le 11 ventôse an 10. 11 se fil adjuger les deu x recon
naissances de 1 7 7 5 et de l’an 2. Mais il n ’osa pas sans
doute conclure aux 43,000 livres pour les reconnais
sances présumées ; le jugement ne lui adjuge , à cet
ég ard , que des d o m m a g e s - in t é r ê l s à donner par d é
claration , de m êm e que pour le mobilier.
11 signifia sa déclaration en exécution de ce juge
ment, et ne parla que du mobilier.
Les citoyens et dame Greliclie ne se doutaient guère
qu’il se fil en leur nom une telle procédure; mais ils
avaient peine à croire que le ciloyen Dubouy les eût
laissés si long-teins sans procès. Dans leur méfiance,
ils s’informèrent, et quand ils eurent appris la vérité,
ils se hâtèrent de réparer ce qui avait été l’ail en leur
nom ; leur seule voie légale et juste était un désaveu.
�( 21 )
Ils ne pouvaient ni ne devaient le proposer contre le
ciloyen Tardif ; sa procédure était régulière et de bonne
foi. Tout partait du ci toyen Noyer - Lagarde ; c’était
donc lui qu’il fallait désavouer.
En verlu de leur déclarai ion le désaveu fut mis au
greffe de Clermont, l’assignation pour le voir statuer,
fut donnée non seulement au ciloyen Lagarde, mais
au ciloyen D ubouy, pour qu’il y veillât à ses intérêts;
et n’eût pas le prétexte de crier à la collusion. lie 20
prairial an 10 ,1 e désaveu fut prononcé par défaut;
le ciloven Dubouy a interjeté appel de ce jugement.
Dans cet intervalle encore, survint un nouveau pro
cès; le citoyen Lagarde se plaignit de ce que les 6,oool,
qui lui avaient été cédées par le partage du 6 germinal
an 5 , ne lui étaient pas payées, et il cita les ciloyens
et dame Greliclie , au bureau de paix, le 26 prairial
an t o .
.
.
C e u x - c i lui répondirent qu'ils n’entendaient plus
rien aux chicanes qui s’élevaient journellement sur la
succession ÎVoyer. Qu’ un jugement de R io m , et un ju
gement du Puy y condamnaient le citoyen D u b o u y,
et qu’il n’y avait qu’à les exécuter. Il fut donné as
signation néanmoins par le citoyen Lagarde aux cit.
Greliclie qui la dénoncèrent au citoj^en Dubouy.
Ainsi se termine cette éternelle procédure ; l’appel
du désaveu a été instruit de part et d autre , et joint
à l’opposition pendante, sur la demande du cil. Dubouy.
La cause a clé plaidée sur le toul, le 14 fruclidor an io ;
et le tribunal a prononcé un appointerne 11t.
�-
.
( * o
M O Y E N S .
L e cit. D u b o u y, dans son m ém oire, prétend que le
désaveu n’est pas recevabie, parce qu’il est couvert par
désapprobations suffisantes, et que l ’opposition au ju
gement du 11 ventôse an 10, n’est aussi pas recevabie.
Il ne s’occupe que par subsidiaire du fonds de la con
testation. Pour suivre son plan d’attaque, il faut éta
blir comme lui plusieurs questions. L a première sera
de savoir si le désaveu du cit. Noyer-Lagarde doit être
reçu; la deuxième, si l’opposition au jugement du 11
ventôse an i o , doit être admise, quoique la cause ait
été au rôle; la troisième, en quoi consiste la succes
sion de Françoise Tixier ; la cinquième , quel est le
droit des parties sur ladite succession.
P R E M I È R E
Q U E S T I O N .
L e désaveu doit-ii être reçu ?
Ce désaveu a été prononcé par défaut, le 20 prairial
an 10; le ciloyen Dubouy en est appelant; ainsi il ne
devait avoir rien à combattre que l a demande. Mais le
citoyen Dubouy s’attache à tout, et il trouve un vice
de forme dans le jugement du 20 prairial, comme non
motivé. Mais il n’a pas bien lu sa propre copie, car
elle porte un motif et la loi n’en exige pas un plus
Eçrand nombre. D ’ailleurs attaquer le jugement d a n s sa
forme ne serait pas faire tomber la demande; le tri
b u n a l d’appel n’en jugerait pas moins le fonds, ainsi
�( 23 ) .
le premier moyen est tout à la fois inexact et inutile:
passons donc au désaveu en lui-même.
Pour qu’il ait lieu , dit le citoyen Dubouy ; il faut
que ce que l’avoué a fait, l’ait été hors de ses pouvoirs,
sans consentement et sans approbation postérieure. Or
y ayant eu instance avec les dames Greliclie , le cit.
Lagarde en étant l’avou é, y ayant eu plaidoirie et
jugement en fructidor an 8 et le 6 floréal an 9 , les
dames Greliclie les ont approuvés, et par conséquent
l ’avoué et la procédure. Or encore le citoyen Lagarde
avait plusieurs pièces pour constater son pouvoir , i.° le
procès-verbal du 18 fructidor an 5 ; 2.0 l’exploit du 21
Ventôse; 3.° la signification du 21 floréal an 9. Enfin
le citoyen Dubouy oppose que le cit. Tardif, avoué
des dames Greliclie, au tribunal d’appel, n’est pas
désavoué pas plus que les huissiers Cliassaing et Massis
qui ont signifié des actes de la procédure.
Sans doute, s’il y avait une approbation postérieure
du citoyen Lagarde , elle équivaudrait à une procu
ration précédente, car ratikabilLo ma/idalo comparalur:
mais peut-on raisonnablement voir, dans des actes faits
sous le nom des citoyens et dame Greliclie, des appro
bations de la procédure du citoyen Lagarde.
Il était, dit-on, nanti de la copie d’exploit et du
procès-verbal du 18 floréal an 5. Et certainement on
ne peut pas nier qu’une copie d’exploitet procès-verbal,
contenant des dires, ne soient un pouvoir suffisant à
un avoué pour se présenter, et répéter les mêmes dires
en jugement. Mais le cil. Lagarde n ’avait pas besoin
�.
.
#
#
de la copie posée aux citoyens Greliche ; il avait la
sienne, car il était partie au même exploit 3 et il s’est
présenté pour tous.
Les dires du procès - verbal ne l’autorisaient pas à
répudier, car ce procès - verbal du 18 floréal, porte
au contraire que les citoyens Greliche nentendent pas
répudier.
D ’ailleurs, c’était une successioa paraphernale ou
verte aux dames Greliche. Les maris, exclus par la loi
de jouir même les paraphernaux , ne pouvaient pas
disposer de la propriété de ces paraphernaux. Ils ne
l’eussent pas pu davantage, quand la succession aurait
été dotale, parce que le mari n’a que Y administra
tion de la d o t , et n’a aucune qualité pour répudier
une succession ouverte au prolit de sa femme ; car ce
serait aliéner.
L e cit. Noyer-La garde ne pouvait ignorer ces prin
cipes; ainsi quand même il aurait eu une procuration
pour occuper, il ne devait pas répudier en jugement,
si la procuration n ’en portait le mandat exprès, et
n’était donnée pour cela par les dames Greliche ellesrnêmes.
L e jugement do fructidor an 8 , est un être imagi
naire. Lors du jugement du 2 vendémiaire an neuf,
il paraît qu’on attaquait les reconnaissances, ce qui
esl l’opposé d’une répudiation ; enfin le jugement de
iloréal an 9, est précisément l’objet principal du désaveu.
L ’exploit du 21 ventôse lait partie de la procédure
suivie parle cit. Lagarde. Il l’a lait donner pour fixer
les
�■
( a5 )
les conclusions prises dans l’instance, et s’y est consti
tué avoué; il paraît même qu’il est écrit de sa main. (
L a signification du a i floréal ne fait qu’un avec l e jugement du 6 , qui est la .principale pièce désavouée.
Et tout le monde sait b ie n , que quand un avoué ins
truit une procédure, dans laquelle ily a lieu de faire des
significations, c’est lui qui charge l’huissier de les faire.
Si d onc, il fallait désavouer aussi l’huissier, ce serait
un cercle vicieux , car l’huissier dirait : je tiens mon
pouvoir du cit. Lagarde , et ce serait î\ celui-ci qu’il
faudrait revenir.
Enfin, et par les mêmes raisons, le citoyen Dubouy
ne peut pas argumenter de' ce que les dames Greliche
n’ont pas fait aussi un désaveu contre l’avoué qui a
occupé pour elles, au tribunal d’appel. Elles se sont
bien donné garde de faire celle injure à l’exactilude
et la délicatesse du cil. Tardif qui a été induit en erreur
par le c. Lagarde. A vec l’expédition du 6 floréal et la copie
d’appel , il était en règle et à l’abri de tout reproche;
il aurait même eu une action en dommages-intérêts.
Toute la question du désaveu consiste donc dans les
déclarations qui ont pu être faites en justice, à Cler
mont; car dans les pièces précédentes, rien n’autori
sait le cit. Lagarde à répudier pour les dames Greliche.
L e procès-verbal du 18 floréal devait au contraire l’en
empêcher.Il s’est donc exposé à un désaveu, et comment,
sous prétexte d’ une collusion qu’il plaît au cit. Dubouy
de supposer, ce désaveu serait-il rejeté s’il est fondé.
N ’y aurait-il pas plutôt lieu de croire que celle
•
D
�( ^6 )
collusion a eu lieu entre le citoyen Lagarde son ven
deur, et lui. Quand on mit les scellés, l’ un d’eux prit
la clef de l’armoire , et l ’autre la porte du cabinet,
cela est avoué au mémoire Dubouy. L e cit. Lagarde
a dans son dossier tous les titres de la succession du
père ; et le citoyen Dubouy a dans le sien tous les
litres originaux de la succession de la m è re , quoiqu’il
se fasse un moyen de n’avoir pas assisté à l’inventaire
du 6 germinal. Enfin, le citoyen Lagarde fait des dé
clarations en jugement, et le citoyen Dubouy se laisse
condamner par défaut pour les accepter incontinent.
A la v érité, il serait difficile de croire à ce que ces
deux frères fussent en bonne intelligence, lorsqu’on
lit tout ce que le citoyen Dubouy exprime aux pages
21 et 22 de son m ém oire, pour insinuer fraternelle
ment ^que le cit. Lagarde s’est mis dans le cas d’une
destitution. Mais qu’il ne fasse pas tomber l’odieux de
ce danger surles cit. Greliclie ; car dussent-ils encourir en
core le reproche de collusion, ils déclarent qu’ils auraient
fait les sacrifices les plus grands, si l'insidieux anatliême
du cit. Dubouy eût dû être le résultat de leur demande.
Ils déclarent aussi que lorsqu’ils ont fait , amère
ment peut-être, au citoyen Lagarde le reproche d’avoir
usurpé leur confiance et d’avoir sacrifié leurs intérêts,
le citoyen Lagarde lenr dit avoir agi d’après une con
sultation des citoyens Bergier, Boirot et D artis, par
laquelle ces jurisconsultes étaient d’avis que toute la
succession maternelle était confondue dans celle du
père, par le traité de l’an 2; qu’elle ne consistait que
�( 27 )
dans ce que la mère a laissé en mobilier, après son
décès, et qu’ainsi il avait vu plus d’avantage à la laisser
toute entière au citoyen D u b o u y , pour qu’il payât
les sommes promises par les contrats de mariage.
Que le cit. Dubouy trouve inconséquent ou non de
rapporter un fait qui disculpe le citoyen Lagarde ,les
dames Greliclie n’en ont pas moins cru de leur devoir
de ne pas le taire. Mais tout en reconnaissant que le
citoyen Lagarde a pu agir de bonne foi et même avec
précaution , elles n'en sont pas moins fondées à dire
qu’une consultation n’est pas un mandat, et que le
cit. Dubouy , en faisant une procédure et des décla
rations sans pouvoir, s’est mis dans le cas d’ un désaveu.
Ce n’est pas que ce désaveu eût-été absolument né
cessaire, puisque la succession de Françoise-Tixier est
à peu près nulle, comme on l ’établira sur la troisième
question. Il aurait .peut-être même-été plus avanta
geux aux dames Greliche d’adopter ce qui a été fait
en leur nom j car une répudiation conditionelle doit être
acceptée, comme a voulu la faire le renonçant, ou toutà-fait rejetée. Mais la ténacité du cil. D u bou y, à.vou
loir ruiner la succession de son père par celle de sa mère,
a fait que les dam es'Greliche, venant pour la première
fois en cause, ont voulu s’y présenter sans 1 entrave
des faits d’autrüi. Ne pouvant préjuger 1 opinion du
tribunal, elles auraient véritablement débuté avec té
mérité et en dupes,-si pour ménager.le cit. Lagarde ,
elles avaient ratifié sa procédure. Le désaveu a'é té
pour elle un acte prudent, nécessaire, et-quoiqu’on
D a
�.
.
. c a8 )
#
v
dise le cit. D u bouÿ, il ne peut être rejeté , parce qu’il
ne s’agit pas ici d’une simple instruction de procédure,
qu’il y a répudiation en jugement, et que pour cela
seul il fallait un mandat spécial.
D E U X I È M E
Q U E S T I O N .
«
X?opposition au jugement du 11 ventôse an 10, est-elle
recevabLe ?
les prétentions du c i t o y e n Noyer-Dubouy
sont nouvelles et singulières. Aucun autre que lui n’a
vait imaginé, depuis 1790, de rappeler un article de loi
T
o u t e s
qui ne peut plus s’adapter aux formes actuelles, et on
peut dire,presqu’avec certitude,-qu’il n’est pasde journal
parmi ceux qui rapportent depuis long-tems la jurispru
dence du tribunal de cassation et des autres tribunaux de
la république, qui contienne aucun jugement, ni même
aucune tentative pareille. Mais le cit. Noyer-Dubouy
veut être modèle , il veut faire juger la question: on n’a
pas le droit de l’en empêcher. Cependant cette oppo
sition est antérieure au désaveu; ainsi la question n’int’éresserait les dames Greliche , que dans le cas où le
désaveu serait rejeté. Elles ne vont donc s’en occuper
que par subsidiaire, et pour répondre à tous les moyens
opposés par le citoyen Dubouy.
Il est très-vrai que l’ordonnance porte en l’art. III
du titre X X X V , que les parties ne peuvent se pour
voir, par opposition, contre les jugemens en dernier
ressort, quand ils ont été rendus à tour de rôle.
�; ( *9 )
Il est très-vrai aussi qu’une loi rie tombe en désué
tude que tdcito omnium consensu; et il était assez inu
tile de transcrire un plaidoyer de Merlin pour corrobo
rer ce principe, et appliquer à la cause toutes les au
torités qui y sont rapportées. Il ne s’agissait, dans ce
plaidoyer, que delà fin de non recevoir de l’opposition,
après La huitaine, mais' non à tour de rote ; et lé cit.
Merlin n’y a recueilli des extraits des arrélistes de plu
sieurs parlemens, que pour établir que la jurisprudence
du parlement dè Paris, d’admettre les oppositions après
la huitaine, n’était pas uniforme dans le royaume.
Ces citations ne peuvent rien sur la question de
l’opposition aux jugemens pris à tour de rôle , car il
n’y a pas parité de raison ; c’était une jurisprudence
particulière au parlement de Paris, et dans quelques
autres, d’admettre l’opposition après la huitaine; mais
^
le parlement de Paris ne l’admettait pas, quand la cause
était venue à tour de rôle. Il y avait donc une dis
tinction à faire, et cette distinction même juge la ques
tion qui nous occupe.
Avant la révolution, on faisait une différence entre
les causes venant sur placet, et les causes appelées h
tour de rôle. Celles-ci étaient placées au rôle bien longtemsavantd’être appelées. L e rôle était public, à Hiom,
deux fois dans l’année, à la St. Martin et a la St.-Jean, v
et tous les mois au parlement. La lecture publique des
causes prévenait les parties long-teins à l’avance ; et
comme la loi était précise, et l’usage: des tribunaux
constant sur ce point, il fallait bien se tenir prêt au
�.
( 30 '}
.
tour de rôle; ce qui, au reste, n’était pas très-urgent ;
caria multiplicité des placets occupait la majeure partie
des audiences.
Aujourd’hui, toutes les causes doivent être placées
au rôle, sans distinction, d’après la loi du 24 août 1790,
et la loi du 21 ventôse , relative aux droits de greffe.
Ainsi il est contraire aux principes reçus, qu’une loi
rigoureuse qui ne s’étendait qu’à une partie des causes,
s'étende aujourd’hui facilement à toutes les causes ; car
les peines ne peuvent être que restreintes, mais non
étendues au-delà de leurs strictes dispositions} et certes
la fin de non recevoir d’une opposition, est bien une
peine prononcée contre le plaideur en retard.
Si le tribunal de cassation a jugé que l’article de l’or
donnance n’était pas tombé ¡en désuétude pour Top
position après la huitaine, c’est que dans la révolution
la fin de non recevoir avait été presque généralement
prononcée par les tribunaux : mais il ¡n’en est pas de
même de la fin de non recevoir des causes venues à
tour de rôle. Aucun jugement conforme au système du
cit. Dubouy ne peut être cité par lui depuis 1790 ;
et comme le mode d’appel des causes a changé à cette
époque, il est clair que ce changement a fait tomber
en désuétude l’article de l’ordonnance tacito omnium
consensu. L ’usage universel a expliqué la loi du 24 août
1790. En cette partie, tous les tribunaux ont admis l’opposiiion aux jugemens en général, pourvu qu’elle fût
formée dans la huitaine. Ainsi il ne s’agit plus de re
chercher la loi ancienne qui permettait aux parties de
�( 3i )
mettre au rôle les causes qu’il leur plaisait, puisque
la loi nouvelle ôte cette liberté et y assujettit toutes
les causes. L e mode d’interprétation de ces lois est donc
suffisamment justifié par quatorze ans de jurisprudence 5
car consuetudo optima est legum ¿nterpres (1).
Mais au reste le cit. Dubouy est non recevable luimême à demander la fin de non recevoir, par deux
motifs ;
'
i.° L ’opposition au jugement a été formée le 18
ventôse an 10; elle a été suivie de la procédure du
désaveu dont Dubouy a interjeté appel.
Orj par requête du 28 thermidor an 10, il a conclu à
ce que son appel du désaveu fût joint à ¿a cause pen
dante stir Copposition.
Il a donc reconnu que cette opposition était rece
vable , puisqu’elle faisait une cause. Ainsi il a couvert
la fin de non recevoir qu'il oppose.
2 ° L a cause a été contradictoirement plaidée sur
Le fo n d s } le 14 fructidor an 1 0 , quand le tribunal a
appointé. L a fin de non recevoir devait encore y être
proposée à Limine litis ■elle est donc couverte, et le
cit. Dubouy doit, malgré. Lui, plaider le fonds.
( 1 ) D epuis la rédaction de ce m ém oire, le tribunal de cassa
tion a jugé la question en thèse. I l a cassé, le 3 pluviôse an 12 ,
un jugem ent du tribunal de N eufchâteau, qui avait déclaré une
opposition à un jugem ent en dernier ressort non recevable ,
parce q u ’il était rendu à tour de rôle.
Voy. le Journal des audiences de cassation, par D en ev ert,
an 1 2 , page 2 i a .
�32 )
C
T R O I S I È M E
QUESTION".
E n quoi consiste la succession de
F r a n ç o is e T i x
ie r
?
Françoise Tixier n’a traité avec ses enfans que pour
éviter que cette question se présentât après elle.
T ous ses enfans étaient seshériliers par égalité, même
avant le 17 nivôse , puisqu’elle n’en avait avantagé au
cun. La forclusion de ses filles était abolie depuis le 8
avril 1791.
A la vérité, le cit. Dubouy dit : Je suis donataire de
mon père ; et après le prélèvement de ma donation ,
mes cohéritiers ont partagé le surplus sans moi : mais
je dois prélever aussi sur le surplus ma portion, au
moins des biens de ma mère ; ainsi il faut connaître sa
succession.
Mais le cit. Dubouy ne veut pas se rappeler que par
son contrat de mariage , son père , en lui léguant le
domaine du Bouy après son décès et après le décès de
Françoise T ix ier, en le chargeant de payer à chacune
de ses deux sœurs 2,000 liv. qui leur resteraient dues
alors, par la succession des sieur et dame Noj/er, a dou
blement marqué par ces expressions que les deux suc
cessions étaient confondues, et que les dettes de la
mère devaient se payer indifféremment par la succes
sion du père, qui les englobait toutes deux. Aussi la
mère, qui se fuit représenter à ce contrat, ne donne
rien.
,
L a mère n’a donc fait que ratifier en quelque sorte
celle
�'( 33 )
cette confusion des deux successions, en traitant avec
ses enfans, réunis en l’an deux(i). A la vérité on peut
objecter qu’alors les circonstances n’étaient plus les
mêmes, parce que la loi du 17 nivôse voulait un par
tage par égalité. Mais ce ne sont pas les enfans seuls
qui ont traité én vertu de cette loi ; la mère elle-même,
que la loi n’obligeait pas, est venue traiter avec eux
pour ses droits et reprises; et qu’a-t-elle fait autre chose
que de les confondre dans la succession du père, comme
déjà ils l’étaient respectivement à Noyer-Dubouy.
Ainsi, que la loi du 17 nivôse soit ou ne soit pas, il
( 1 ) L e cit. Duboivy conteste , à la page 41 de son m ém oire,
l ’exislence de cet acte comme non vérifié ni enregistré. Il le
produisait d’abord lu i-m ê m e; il en argum entait, et il l ’a sans
doute retiré de ses pièces. Mais il produit, sous la cote 1 8 , un
acte du même jo u r , quoique aussi non enregistré, et il y a
souligné lui-même ce qui suit : C onvenu en outre que dans la
p résente cession sont com pris les droits cédés par notre mère
com m u n e, p ar acte de c e jo u r d h u i; 2.° dans ses causes d ’appel,
cote 4 0 11 il excipe plusieurs fois du traite fait entre la mère et
les enfans , et il le date, à chaque fois , du 22 fructidor an 2;
3.° il en assure encore l’existence à la page 7 de son mémoire ;
4 0 on lit dans le jugement du 25 ventôse an 5 , folio 5 R . ° , ce
qui suit : « ¿¡.près que tous les héritiers eurent pris des arran~
gem ens avec F ra n ço ise T ix ic r leur m ère, relativem ent à sa
co n stitu tio n de d o t, gains , avantages m atrim oniaux et autres
créances qiCellc avait à répéter contre la su ccession de so n
mari , e tc . « Ce traité est donc un acte constant au procès. L e
c ^- D u b o u y , qui en a toujours e xcipé, 11e peut donc refuser de
le remettre dans sa production.
E
�pas m o i n s vrai que le: cit. Dubouy n ’a eu- à
prendre que le domaine du Bouy après le décès de, ses
père et 'mère, a la charge de payer 6,ooo liv. dus par Les
deux successions : et le s a u t r e s héritiers o n t eu à p r e n d r e
ces 6,000 livres , et le surplus des biens comme formant
l a succession ab intestat, p l u s les bestiaux et C o m e s
tibles qui furent laissés à la mère lo r s de l ’a r r a n g e m e n t ,
et pris sur l a succession paternelle.
' C ’est ainsi que toutes les parties l’ont e n te n d u non
'seulement en l’an 2 , mais lors du ju g e m e n t de ventôsè
an 5, puisqu’elles laissèrent toutes ordonner le partage
de la succession du père, sans demander celui de la
n ’ e n est
mère ; puisque le cit. Dubouy se laissa notamment cont
.
»
Í■
^
damner à rapporter les 6,000 liv. dues par la sucçession
du père et de La mère, sans proposer de compensation
de cette somme avec les prétendues reprises qu’il de
mande aujourd’h u i, et qu’il fait frapper sur la succès
.
. .
.
<,
sion paternelle.
'
_
Cette intenIioti des parties est claire; elle é.jait fon
dée sur les actes de famille, à l’exéculion- desquels
chacun se rendait; aucun ne doutait alors que la suc
cession de la mère ne fût composée seulement de son
m obilier, tel qu’il était spécilîé parle Irailé de l’an 2 *
et si l’appelant a varié au P u y, c’est que la levée des
scellés lui avail donné le prélexle de se créerune nou
velle source de réclamations.el de procès.
Ce n ’est pas toul que lesiparlie-s l’aient eYilendu ainsi>
car c’est aussi de celle manière qu’elles devaient l’en
tendre j les actes les y obligeaient.
' l ' '■ ,l
�'
. .
(
35
}
Françoise Tixier avaitf-elle le droit de traiter avec
ses enfans eu l’an 2? et peut-on appeler1l’acte'qu’elle
a fa it, un partage anticipé d’une succession qui s’est
ouverte cle nouveau à son décès ; car voilà le système
actuel du citoyen Dubouy. ■
‘ ’Les principes sur les démissions ne s’appliquent pas
à la cause; ce n’est pas ici un abandon fait par une mère
de ses
biens meubles et immeubles ', évidens. connus,'
1
desquels elle se désaisisse pour eux, et qu’ils partagent
en sa présence.
“
1
Il n’y a dans l’espèce ni biens connus, ni désaisisse
ment effectif, ni partage actuel. Ce n’est donc pas ce
partage anticipé dont excipe le cit. Dubouy comme
moyen principal; il n’y a donc pas de démission.
C ’est un traité sur des droits inconnus , litigieux;
c’est une vente à fonds perdu de ces mômes droits,
autorisée par l’article 26 de la loi du 17 nivôse;, qui
était encore en vigueur au décès de la mère.
Dans le cas même où la mère aurait prévu le rétablisse
ment des actes de sa famille et le rapport de la loi du
17 nivôse dans son effet rétroactif, la cession qu’elle
faisait était valable ; car le cit. Dubouy devait s’en tenir
à son domaine, et alors ses reprises fra p p a ie n t sur la
succession ab intestat, c’est-à-dire, contre les autres
héritiers.
E h bien, elle vend ses reprises à fonds perdu à ceux-«
ci ; et comme il lallait, suivant la loi, que les autres
successibles y consenlissent et y intervinssent, le cit.
Dubouy y est intervenu et y a consenti. L e vœu de la
loi a donc été re m p li.
�.
,
(
3
6
)
.
.
...
Il ne dira pasqué c’est un acte forcé par la crainte
révérentiellé; car la loi n’admet pas ce m oyen, lors
qu’elle exige le consentement des successibles, sans
distinction. •
,
\' <
A u reste , quand ce ne serait pas là une vente h
fonds perdu , on demanderait en vertu de quelle loi
il peut être défendu à une mère de traiter avec ses
enfans,sur des droits susceptibles du plus grand litige;
les lois protègent les transactions comme l’acte le plus
utile à la société , puisqu’il éteint les procès ; et se
pourrait-il que les procès, entre une nière et dés enfans,
fussent une chose nécessaire et non susceptible d’ar
rangement ?
;.
Ce système choque; car si Françoise Tixier pouvait
agir et plaider, sans conlredit elle pouvait transiger ;
car la transaction a lieu de Lite motâ aut moçendâ.
Or qui contestera à Françoise Tixier le droit de de-mander ses droits et reprises en l’an 2? Mais parce que
rien n’était plus confus et inextricable que ses droits;
parce qu’elle savait elle-m êm e que son mari, en lui
donnant l'usufruit de moitié , n’avait pu reconnaître
12,000 liv. a u -d e là de la quotité disponible; parce
qu’elle .savait qu’il landrail prouver Y Linde habuit de
la première reconnaissance, Françoise Tixier a fait,
avec ses enfans, une transaction, que la nécessité et son
intérêt rainaient obligée de faire avec les étrangers les
plus divisés d’intérêt avec elle; et c’est là cette transac
tion qu’on veut confondre avec une démission , avec
une simple libéralité dictée par la tendresse maternelle,
�*
■( 37 )
spontanément, sans nulles circonstances, et pour;la seule
utilité de ses enfans.
.
Si la mère a traité avec tous, il n5y a là que de la
ressemblance avec une démission, parce que la mère
était bien obligée de traiter avec tous ceux qui avaient
jun procès à soutenir contr’elle.
Ainsi, vouloir que cette réunion nécessaire de tous
les enfans change la nature de l’a c te , ferait .retomber
dans le système qu’on ne peut transiger avec ses enfans.
Lorsque le fils du sieur de Langhac(i) a demandé par
deux fois, au tribunal de cassation, la nullité d’ un traité
fait avec son père pour ses droits maternels, il n’osait
pas même plaider qu’on ne peut pas traiter avec son
père; il faisait valoir des moyens rescisoiresi, et cepen
dant le traité a été maintenu. Une transaction peut donc
être à l’abri, même de la puissance paternelle. Préten
dre que le rapport de l’effet rétroactif de la loi du 17
nivôse a annullé le traité fait avec Françoise T ix ie r ,
c'est vouloir oublier qu’elle n’avait que faire de la loi
»
du 17 nivôse. Car d’une part, elle traitait pour ses re
prises, et de l’autre pour un usufruit qui n’en a pas
été moins maintenu par les lois postérieures.
Françoise Tixier n’a donc laissé de succession que dans
son mobilier et non dans ses reprises; et en partant de
cette vérité la plus évidente, la plus naturelle, le tri
bunal élague toutes les autres questions du procès. Car
le cit. Dubouy a pris sa portion du mobilier, il n’a pas eu
idée de prétendre qu’on en eiit volé : il a donc tout sou lot.
( 0 Journal de Sirey. Jugcm cnldecassationclu 25friiu.rf an 10.
�( 38 )
^
Tout conduit h penser que telle a toujours été Fintention elle but des parties, et que c’est là la plus exacte
justice à leur rendre. Mais pour suivre le cit. Dubouy
dans ses prétentions, et s’il pouvait faire composer la
succession de Françoise Tixier de ses droits et reprises,
voyons quel en serait le résultat.
•Qu’aurait obtenu Françoise Tixier, si elle eût voulu
plaider en l’an 2?
Ses droits étaient-ils fixés parles deux reconnais
sances, ou par la consistance réelle de la succession de
son pèrë et de sa sœur ?
Pour celte explication, il faut se baser sur quelques
principes.
Toutes les reconnaissances que fait le mari, après le
mariage, sont réputées des libéralités, si la femme ne
prouve undè habuit, et alors ces libéralités n’ont d’efïet
que pour la portion dont le mari pouvait disposer. ConJessio de dote receplâ facta per m aritum , constante
matrimonio, valet Lu vim donationis. Et il faut, comme
dit Coquille , enquérir et prouver la vérité du fait, si
on veut faire valoir la reconnaissance a u -d e là de la
portion disponible. Ainsi renseignent encore Ricard et
Furgole. Ainsi l’a jugé le tribunal, le 21 prairial an 10,
en ordonnant l’apport de l’inventaire d’une succession
indiquée comme 1 undè kabuit , dans une reconnais
sance semblable.
Il est encore de principe, qu’en pays de droit écrit,
où fe sieur Noyer était domicilié, le mari et la femme
ne peuvent se faire de donations pendant le mariage,
�( 39 )
et cela par une prévoyance de la loi, ne mutuoamore
inter se Lnvlcetn spoLLentur.
A la vérité ces donations prennent leur effet par
la m o rt, si elles n’ont pas été révoquées auparavant.
Mais parce quelles ne font qu’une donation à cause
de mort, elles se règlent par la quotité disponible qui
a lieu à l’ouverture de la succession.
O r , au décès du sieur N o y e r , la loi du 17 nivôse
régissait toute la république; et si elle effaçait les prohi
bitions du droit é c r it, en donnant toute latitude aux
dispositions entre époux, au moins elle les restreignait,
quand il y avait des enfans, à l’usufruit des choses don
nées, si elles n’excédaient pas la moitié des biens. (Art.
i 3 et 14).
Ainsi Françoise Tixier devait prouver en l’an 2, la
consistance de la succession liquidée de son père.
Il fallait faire estimer les biens vendus non par le
/
curateur, mais par le sieur Noyer en son nom ; non
pas-suivant les évaluations ridicules, que le cit. Dubouy
leur donne au taux actuel, mais à la valeur de 1760.
11 fallait établir la consistance du mobilier, et ensuite
déduire les charges et les dettes. Ces dettes sont con
sidérables, puisque le seul article des reprises du sieur
N o yer, justifiées par la requête du 16 avril 17 6 0 , se
porte à une somme de 5,029 liv. 16 s., outre les 2,oool.
payées au trésor public, 1,200 liv. au sieur Üepille, et
Ö9.liv. 7 s', au sieur Dufraisse. P é jà , par la comparai
son de celle seule dette avec les biens, il est évident
en simple aperçu,'que si le sieur .Noyer fit une recon-
�.
,
(
4 0
3
.
naissance de 5,ooo à sa femme, c’était pour qu’elle ne
fût pas humiliée de n’avoir rien à donner à ses enfans,
lors de leur établissement, et pour la mettre à même
de donner à chacun 1,000 liv.
Mais quand il y aurait quelque excédant, tout ce
que Françoise Tixier n’aurait pas justifié lui apparteten ir, dans les reconnaissances , devenait simple libé
ralité, et alors combien de diminution cette libéralité
n ’éprouvait-elle pas?
D ’abord le cit. Dubouy faisait passer, avant tout,
le don ou legs du domaine , puisqu’il lui était assuré
par son contrat de mariage, et puisque les reconnais
sances ne prenaient effet qu’à la mort.
Les deux reconnaissances de 5,000 liv. et de 12,000 1.
ne valaient en l’an 2 que pouV l’usufruit de ces deux
sommes, mais cet usufruit était confondu dans l’usu
fruit de moitié qui était aussi légué par le sieur Noyer
à sa femme ; il absorbait toute la quotité disponible.
Les deux reconnaissances devenaient donc nulles et
sans effet.
Non seulement l’usufruit de moitié absorbait tout,
mais il ne pouvait avoir lieu concurremment avec lo
don du domaine, sur lequel l'usufruit ne frappait pas ,
qu’autant que la légitime des puînés devait rester inlacle, et sans charges suivant les principes, ce qui ne
se pouvait pas. Françoise Tixier n’était donc pas fon
dée à plaider pour obtenir les deux reconnaissances.
Il est inutile d’occuper le tribunal de la demande ridi
cule que le sieur Noyer avait formée de 43,000 liv. ,pour
représentation
�■
.
1
4
1
)
Teprésentation des reconnaissances supposées enlevées,
et du testament de sa mère (quoiqu’il en soit nanti) ;
.il a abandonné celle demande qui d’ailleurs ne méri
tait pas qu’on s’occupât sérieusement de la combattre.
Françoise Tixier était encore héritière de sa sœur,
mais les droits de celle-ci étaient liquidés par un traité
dont le cit. Dubouy n'a demandé le prix qu’en l’an 8.
Or ce traité ne donne pas une somme exigible, mais
une rente qu'on ne peut forcer à rembourser : et tout
prouve qu’elle avait été remboursée par le cit. Noyer
p ère, puisque sa belle-sœur acheta des immeubles pour
à peu près ce qui lui était dû.
Ces immeubles ne font pas partie de sa succession,
puisqu’elle les a revendus au sieur Noyer père ; ainsi
quand celte succession ne serait pas confondue dans le
traité, elle n ’en serait pas moins absolument nulle.
Voilà donc à quoi se réduit la pré ten lion du citoyen
D ubouy, sile tribunal veut faire discuter, à grands frais,
le mérite des reconnaissances; et si, en les approfondis
sant de plus en plus , il ne se trouve pas encore plus
fortement convaincu , que Françoise Tixier a fait une
transaction respectable et nécessaire, et qu’en traitant
avec ses enfans, ut à fraterno certamine eos prœserva•'et, elle a prudemment calculé leurs intérêts et le sien.
Quel est Le droit des parties sur La succession T i x i e r ?
L
e
citoyen D u b o u y a un testament de sa mère qui
le fait héritier universel. Ce testament est ologra ph e, et
F
�,
. .
( 42 )
.
.
.
daté de 1789 î mais il n’est pas enregistré, ainsi ce n’est
pas une pièce à produire.
Ce testament, dicté évidemment parle cit. Dubouy,
semble tacitement révoqué par son contrat de mariage
qui est postérieur, et dont les clauses semblent con
traires à ce testament, au lieu d’y renouveler l'institu
tion , il serait aussi annullé de droit par le traité de
l ’an 2. Car un testament est ultlmœ çoLantatis testatio.
Or un acte de 1789 n’était pas la dernière volonté de
Françoise Tixier.
Mais à quoi servirait ce testament, dès que la succes
sion de la mère ne consiste que dans son mobilier ;
il est partagé ; et voilà ce qui faisait prendre au mot
le cit. D u b o u y , lorsqu'il se disait seul héritier d’une
succession nulle , parce que cette nullité même rendait
illusoire la promesse de 1,000 livres, que la mère avait
faite à ses filles lors de leur mariage.
Il ne servirait à rien encore si le tribunal voulait
annuller le traité de l’an 2 ? et fixer la succession de la
m ère, carie pis aller serait d’adjuger la reconnaissance
de 5,000 liv. la seule que son époque puisse faire res
pecter; et alors les dames Greliclie y auraient i^oooliv.
chacune, des que cctle somme leur est promise avant
le testament. Ce serait donc à leur égard un partage
par égalité, malgré l’institution.
Mais soit que la succession maternelle se compose de
mobilier j ou de ces 5,000 liv., ou de toute autre chose,
le cit. Dubouy doit toujours rendre compte des 6,oool.
qui sont une charge de sa donation, ce qui est Iota-
�'
( 4 3 ')
lement distinct du procès actu el, et ce qui est jugé.
Il a cherché jusqu'à présent à retarder le paiement
de cet le somme , et il y est parvenu, en plaidant qu’il
fallait attendre la décision relative au partage de la
mère; le moment est donc venu, non'pas d’y rapporter
ces 6,000 liv. mais de les payer , car il n’est donataire
qu’à cette condition.
Ainsi ce procès si compliqué par les conclusions si
souvent changées du cit. D u b o u y , se simplifie extrê
mement, et se réduit à dès points certains.
L ’opposition au jugement par défaut est recevable;
ainsi le jugement surpris par le cit. Dubouy est comme
non avenu.
L e désaveu est fondé au cas qu’il ait été nécessaire;
mais quand les sieurs Greliche auraient répudié au
bureau de p aix, et même en jugement, une succession
parapliernale à leurs femmes, celles-ci ne sont pas liées
par cette répudiation ; c’est une nullité viscérale ; les
maris n’ont promis aucune garantie. S’il y avait enga
gement de leur p a rt, ce serait le sujet d’une action
particulière à diriger contre eux; mais cela ne produi
rait pas une répudiation.
' D ’après cela, le partage de la succession de Françoise
Tixier doit êlre ordonné enlre toutes les parties ; mais
celle succession se réduit au mobilier, puisque les droits
liligieux et incorporels, dont elle pouvait se composer,
sont vendus par transaction.
Si le tribunal annullail celle transaction, alors la suc
cession de Françoise Tixier n’en serait pas moins réduite
•
J
F 2
�( 44 )
à rien , soit parce qu’elleiest décédée sans avoir révoqué
sa répudiation de 1760., soit parce que les recouvremens des biens de son père sont absorbés par les dettes,
soit parce que sa sœur ayant ^acquis des ¡biens, pour le
prix de sa cession: de droits , les a revendus.
Si le tribunal donnait efiet aux reconnaissances sans
les compenser avec les reprises du cit. Noyer père, il
annullerai sans doute ¡celle de l’an 2 , -comme n’étant
qu’ un avantage indirect, tendant à surpasser la quotité
disponible par la loi du 17 nivôse, et ne donnerait effet
qu’à celle de 1775.
La succession de Françoise Tixier une fois connue,
se régie aisement; il est à peu près égal que'le citoyen
Dubouy en soit héritier ou ne le soit pas; mais le tri—
bunalnepeul avoir égardautestamentde 17 8 9 ,puisque
i.° il n’est pas enregisti’é; 2.0 il est annullé par le con
trat de mariage de 1790 , et le traité de l’an 2.
Il faut donc en revenir au point d’où on est parti,
c’esi-à-dire , au jugement du 25 ventôse an 5 ; tout est
réglé par lui, et le tribunal n’a pas de guide plus sûr;
car le cil. Dubouy avait tout demandé alors, comme
on peut le voir par le procès-verbal du i . er pluviôse
precèdei)I , el ce iait n’est pas détruit par de simples
réserves qu’il a laites au Puy postérieurement et dans
d’autres circonstances. Ces deux pièces du procès mar
quent assez que les parties entendaient faire terminer
toutes leurs contestations a celle époque, el celle in
tention fait crouler toutes les procédures, toutes les
conclusions, toutes les injures du cil. N oyer-D ubou y;
�;
j
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3
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.
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.
(
4
5
}
car il devait alors bien expliquer ses prétentions, et il
les avait expliquées ; toutes les considérations ont été
pesées alors, et il ne p eu t, sans mauvaise f o i , faire
renaître un procès d'un autre procès, et exiger que la
Justice partage avec lui ses embûches et ses cavillations.
s
M .r M A R C H E I X , Rapporteur.
L . F. D E L A P C H IE R , Homme de loi.
E A Y E , Avoué,
iI
.
*
L
.
R I O M , DE L ’I MP R IM E RI E DU P A L A I S t CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer, Jeanne. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Faye
Subject
The topic of the resource
successions
confiscations
fisc
abus de confiance
avoués
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Jeanne et Marie-Gabrielle Noyer, Pierre et Joseph Greliche, leurs maris, habitant à Mozun, intimés ; contre Joseph Noyer-Dubouy, habitant à Chamalière, appelant ; en présence d'Anne Noyer-Lagarde, avoué au Tribunal civil de Clermont, intimé.
annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1750-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0237
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0236
BCU_Factums_G1319
BCU_Factums_G1320
BCU_Factums_G1322
BCU_Factums_G1324
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53736/BCU_Factums_M0237.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
avoués
confiscations
fisc
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53735/BCU_Factums_M0236.pdf
a78e1507435a379a61898c62ff18e691
PDF Text
Text
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MÉMOIRE_
P o u r Je a n -Jo s e p h -M a rie
N o y e r - D u b o u y t , habitant
de la commune
C h amalières -
de
,
appelant ;
N O Y E R et P i e r r e
G R E L I C H E , son mari ; M a r i e G a b r i e l l e
N O Y E R
et J o s e p h
G R E L I C H E , son ma r i , habitans la
commune de Mozun } et A n n e N O Y E R -
C o n t r e
Jeanne
L A G A R D E , avoué près le Tribunal
civil de première instance de l’arrondissement
de C lerm ont-Ferrand, intimés.
Quand une causc a été appelée a u tour du rôle;
que le jugement a été rendu par défaut!. faute de
plaider , et en dernier ressort, il est définitif,
l'opposition ne peut plus être reçue. -Art. I I I du titre
X X X V de L'ordonnance de 1667. Domat, lois civ les , litre I I , art. X V I I , page 230.
-
F
MA
A
R I E N T ix ie r ,
I
T
.
commis
S
.
„
...
...........
greffier et receveur des gages de la
cour des aides de C lermont - Ferrand
et Jeanne de L eym erie , son
�( a )
.
. .
ép ouse, eurent trois enfans ; i.Q M ichelle T i x i e r , qui fut religieuse ;
2.° M arie-Gabrielle T ixier
qui vécut célibataire ;
3 °. Françoise T ixier
qui fut mariée à Jean-Baptiste-Joseph N o y er-D u b o u yt,
le 9 novem
bre 1750.
Sont nés de ce mariage cinq enfans ;
1 .° Marie N oyer , fils aîné.
2 .° Anne N oyer-Lagarde , fils cadet.
3 .° Jeanne N o y e r, épouse de Pierre G reliche.
4 .0 M arie-Gabrielle N oyer , épouse de Joseph G reliche.
5 .° Jean-Joseph N oyer-D ubouyt.
'
Les quatre premiers enfans sont héritiers testamentaires de Jean-baptisteJoseph N oyer-D u b o u yt, p è re , à l ’exclusion de J e a n - J o s e p h N oyerDiibouyt.
Noyer-Dubouyt est héritier de Françoise T ixier , sa mère , soit par
son testament olographe du 20 ju illet 1789 , soit par la répudiation qu'en
ont faite le8 héritiers du père co m m u n , par acte du 18 floréal a a V ,
réitérée par le jugement du 6 floréal an 9 ; enfin par l’acceptation qu’ il a
faite, soit par acte du 18 floréal an
5 , par autre acte du 1 5 thermidor an
9 , par jugement en dernier ressort du 11 ventôse an 10 ,
et par l ’acte de
signification d’ice lu i, le 29 prairial même année.
Françoise T ix ie r , mère com m une, en se mariant avec Jean-BaptisteJoseph N oyer-D ubouyt, fut instituée héritière de Marien T ix ie r , son père,
à la charge d’associer à ladite institution M arie-Gabrielle T ix ie r , sa sœur.
E lle eut en avantage et préciput 1,000 l i v . , son trousseau fut estimé
35o
l i v . , les .bagues et joyaux 120 l i v . , le gain de survie 120 l i v . , les habits
île deuil 60 liv ., et la pension viduaire 75 liv,
Marien Tixier mourut le 25 mars 1760. N oyer-D ub ou yt, p ère, se saisit
de la succession pour sa femme et pour sa belle-sœ ur, M arie-Gabriello
Tixier.
Il prit lui-même au moment du décos
5 6,000 liv. en or qui étaient dans
¡une armoire de la maison.
Françoise T ix ie r, son épouse, trouva dans un secrétaire 6,000 liv, en
2 5 o louis en or qu'elle remit à son mari.
L e lendemain du d é cè s, N oyer-D ubou yt, p ère, fit emporter dans sa
m aison, à M o z u ij,le s meilleurs meubles qui étaient daus la maison,
�.
3 } .
.
.
.
Il se saisit des papiers et des titres actifs qui constituaient la fortune de
son beau-père, b ille ts, promesses , contrats de rente , obligations, etc.
Il retira une somme de 8,000 liv. qui ¿tait en dépôt chez M. Reboul ,
ancien lieutenant général.
Comme Marien T ix ie r, en sa qualité de receveur des gages de la cour
des aides de Clermont-Ferrand , était comptable de ses exercices à la
chambre des comptes de Paris ,
Il fut réputé débiteur, soit d’ un prétendu débet de 10,000 l iv ., soit
d’une somme de 70,000 liv . pour am endes, d isait-on , encourues par dé
faut , faute de formalités.
L e i.e r avril 17 6 0 , huit jours après son d écès, le fisc fit apposer le3
scellés sur tout ce que
Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ub ou yt, mari
de
Françoise T ix ie r , avait laissé dans la maison ; il fit aussi séquestrer les
immeubles.
L ’on fit vendre judiciairement le m obilier qui avait été saisi': la vente
procnra une somme de 1,259
qui resta déposée au greffe.
L ’on fit procéder au bail judiciaire des im m eubles; ils furent portés à
un très-bas p r ix , parce que les adjudicataires n’étaient que les prêtp..
noms du mari de Françoise Tixier. ■
Les choses restèrent en cet état jusqu’au 9 mai 1 7 6 4 , où N oyer-D ubouyt,
p ère, présenta une requête au roi par laquelle, comme il est d’ usage , il
amoindrit absolument la succession; il fut bien éloigné de parler de l’ar
gent dont il s’était em paré,
de celui que lui avait remis son épouse, du
dépôt qui était chez M. R eb ou l, ni des contrats, obligations, b illets, etc.
Par arrêt du conseil d’état du r o i, la succession fut acquittée de la de
mande énorme, qui lui était faite , moyennant 2,000 liv. ; et il fut dit dan 3
l ’arrêt, que si le mari payait cette som m e, il était subrogé sur les biens
de son épouse pour cette somme de 2,000 liv.
11 est dit dans la requête présentée au r o i , que les héritiers de Marien
T ix ie r, Françoise et M arie-G abrielle T ix ie r, avaient, par acte déposé au
greffe du 14 avril 176 0 , répudié à sa succession. ( Cette répudiation n’a
jamais été connue au p rocès, on ne peut la retrouver au pr^ffp )
Enfin en supposant cette répudiation avoir existé, elle 11’eut plus lieu ,
après l ’arrêt du conseil d’état, et la succession fut reprise.
N oyer-D ubouyt, en sa qualité de mari et de b eau-frère, en fit la ges».
1
2
�.
(4 ).
..
.
tio n le 19 juin 1764511 obtint les mains levées des saisies-arrêts qui
avaient été faites par les cautions de la charge de receveur des gages de
Marien T ix ie r, et il toucha 1,400 liv. chez M. Berard-de-Chazel, 600 liv.
chez M. de Y ic h y -d e -V a rv a s, et 1,2 5.9 liv. qu’il retira du greffe; de sorte
que sans les immeubles et meubles qu’ il avait emportés, il avait en ses
mains , non compris les contrats , obligations , etc. , près de 54,000 liv .
L e même jour ig juin 1764> sans besoin et sans formalité de jus
tice , il vendit la maison de Marien
T ixier , située à Clermont.
Par
l ’énoncé de cette vente , il paraît qu’un huissier , qui sans doute avait
été nommé curateur pour la forme , figure à cette vente ; il délègue au
mari 3,000 liv . , et ce dernier délègue à payer les 2,000 liv. portées par
l ’arrêt du conseil , fixant le débet de la succession. Cette maison vaut
aujourd’hui 10,000 liv.
L e 14 juin 1765 , il fait un espèce de compte à Marie - Gabrielle
T ixier , sa belle-sœ ur , et porte la succession de Marien T ix ie r , son
beau-père à 1 1 ,0 8 4
5 et Par une réduction qui n’est pas expliquée ,
Marie-Gabrielle T ixier paraît fixe? Cé qui llii 'doit revenir à 2,200 i i v . ,
et de suite elle cède ses droits à sa sœ u r, Françoise T ix ie r , et à son
beau-frère
uxorio nomine. Il annonce devoir encore à sa belle - sœur
700 liv. q u i, d it- il, proviennent de titres qui étaient parmi les papiers
de Marien T ix ie r , son beau-père ; il n’est point expliqué ce que sont
ces titres , ni par nature, ni par quantité".
.
M arie-Gabrielle T ix ie r , qui restait à C lerm o n t, fit l’acquisition d’ un
bien situé à P ro u va re l, commune de Serm entison, canton de C om v
pière ; les actes d’acquisition sont en date des 27
décembre 1765 .,
i'-i février 17G 6 , i 5 avril 1767 : ce bien vaut aujourd’hui 6,000 liv.
L e y mai 1767 , le mari vendit encore en son nom les jardin , grange
et colombier de son épouse : on ne voit aucun m otif ni autorisation de
justice pour ces ventes ; il a vendu encore les vignes , les terres , etc.
L e 12 février 17 7 5 > Marie N oyer épousa Joseph G reliche ; on lui fit
une dote de 6,000 liv. ; savoir
5 ,000 liv . du chef du p ère, et 1,000 liv.
du c h e f de Françoise T ixier ; .on la fit renoncer aux deux successions.
L e 8 novembre 1775 , Noyer-Dubouyt , p ère, fit à soi} épouse une
reconnaissance de
*j,000 liv. provenant , est-il dit , (les deniers reli~
rds du g reffe , d’autres deniers provenons de la vente
des maisons ,
�.
.
, ( 5 }
ja r d in , vignes et terres situés à Clermont ; contrat d e rente à prix d’ar
g en t , et meubles , le tout provenant de la succession de Maricu T ixier ,
son
beau-père; n'est point comprise dans cette reconnaissance la créance
duc par A/met. Tardif.
L e a i juillet 1 7 7 7 , Jeanne N oyer épousa Pierre G reliche: comme à sa
sœur M arie-^abrielle N o y e r, on lui fit une dote de 6,000 l i v . , dont
5,ooo Uv. du clief du \>ère,et 1,000 du c h e f de Françoise T ix ie r ; 011 la
fit aussi renoncer aux deux successions.
Marie-Gabrielle T ixier , sœur de la mère com m une, mourut au mois
de décembre 1779 *, sa succession, tant mobiliaire qu’ im m obiliaire, échut
à Françoise Tixier ; N oyer-D ub ou yt, son m a ri, s’en empara.
Le 25 juin 1783 , Françoise T ixier voulut jouir à part du ménage de
ses biens paraphernaux , de ce qui lui appartenait provenant de la suc
cession de sa soeur ; elle fit donc assigner son mari à cette fin ; il ne
comparut pas , elle obtint un petit défaut.
L e 20 ju illet rySQ , Françoise T ixier fait un testament olograp he;
elle institue Jean-Josepli-Marie Noyer-Jbubouy 1“ süll illy le plus jeune ,
son héritier géut-nil et universel.
Toutes les expressions de ce testament portent avec elles le tableau
de la candeur , de l’ingénuité , de la vérité -et de l’exacte probité. La
dame Noyer parle à sou mari , elle Pinvite de reconnaître à son héritier
tout ce qui lui peut revenir, en conscience et p robité, des successions de
M arien T i x i e r , son père , et de M a rie- G abri elle T ix ie r , sa sœur.
E lle dit à son mari ;j e vous ai remis moi-même la somme de 6,000 Uv.
en 2 5 o louis en o r , que j ’avais prise dans l’armoire de mou père.
Vous avez louché de M .
Reboul
8,000 liv. qu’il avait en d ép ô t,
appartenant à mon père.
Vous avez vendu mes biens ; j e n’ ai rien de reconnu que 5,000 liv. Je
vous supplie de reconnaître tout le surplus à mon héritier , Jean-JosepkM a rie Noyer-Dubouyt.
Jean-Joseph-M arie N oyer-D ubouyt , fils p lus jeiiQe > a p p elan t,
s’est
marié le 21 novembre 1790. L e père com m un, de son "chef seulement ,
iui donna le domaine du Bouyt 5 il le clu ugea, après sa m oit , de payer
4 ;ooo iîv-, , d© son çh ef ) u ses lient.ers , et 2,000 liv. a Jeanne et
�.
.
.
(6 )
.
.
..
Marie-Gabrielle N o yer, qui leur avaient été promises par Françoise T ix ier,
leur mère.
L e 19 thermidor an 2 , Jean-Baptiste-Joseph Noyer-Dubouyt , père ,
fit un testament authentique ; il reconnut à Françoise T ix ie r, son épouse,
la somme de 12 .0 0 0 /¿V. provenant du prix des ventes qu’ il avait faites
de d ifférais meubles et immeubles des successions de son beau - père et
de sa ■belle-sœur. îl déclare que cette somme ne se confond point avec
les reconnaissances précédemment faites.
Comme il avait fait renoncer ses filles et ses fils à sa succession , il
les rappela et les institua tous ses h éritiers,
,/ / •
‘lu lltftV fr
à la charge de rapporter ^à
la masse de sa succession ce qu’ils avaient reçu.
*
yL e 8 fructidor an 2 , le père commun mourut.
L e lendemain 9 fructidor , les dames N oyer et G re lic h e , leurs maris 5
Marie N oyer , fils aîn é, et Aune N oyer-Lagarde , qui n’étaient qu’héri
tiers en vertu du testament du ic) thermidor , s’empressèrent de le faire
enregistrer ; ils firent aussi enregistrer la reconnaissance de
12,000 liv .
faite au profit de Françoise Tixier.
L e 11 fructidor , ils se déclarèrent héritiers en vertu de ce testament ;
ils le présentèrent à l’administration du district de Billom avec une péti
tion tendante à obtenir la m ain-levée du séquestre et des scellés qui
avaient été apposés par le comité de surveillance de la v ille de
Billom ,
L e même jour intervint un arrêté de cette administration qui ordonna
qu'il serait f a i t rêmotion des scellés par le ju g e de p a ix , que délivrance
des objets séquestrés serait fa it e aux pétitionnaires ;
gardien déchargé.
à '* * * ''. ,.
quoi fa is a n t , le
L e juge de paix lève les scellés le même jour ; l ’inventaire fait par le
c omité de surveillance fut vérifié. Cet inventaire a disparu par le fa it des
in tim és, parce qu il relatait les titres de la succession de AJarieu T ix ier
et de M arie-G abrielle T ix ie r , et qu’il était f a i t avec la mère commune,
Françoise T ix ier , qui avait été établie gardienne.
Comme tous les héritiers étaient majeurs et qu’il fallait mettre à part
tout ce qui pouvait appartenir à Françoise T ixier , mère commune , qui
ava it, outre ses biens et droits à elle , la moitié de l’usufruit des biens de
son mari , il était nécessaire de faire un inventaire détaillé et exact de
toute la succession du père com m un, ce nnTfut Tait à l’amiable entre tou
tes les p arties, sous je in g -p riv é , mais très-exactement; cet inventaire
�.
^ 7 )
commença l e i l fructidor et ne fut fini que le
'
i 5 . Toutes les
parties
signèrent et arrêtèrent, chaque séance , avec Françoise T ix ie r, mère com
mune; les titres et droits de Françoise Tixier y étaient détaillés et marqués.
Au bout de cet inventaire et dans le même a cte, il fut traité et convenu
que tout le mobilier serait vendu , à l’exception de celui de la mère qui
avait été reconnu lui appartenir comme provenant de la succession de
son père et de Marie-Gabrielle Tixier , sa sœ; j .
L e i 5 fructidor , la vente du m obilier fut commencée , le public y fut
ad m is, et elle dura jusqu’au 22.
L e 2 2 , Françoise T ixier fit à tous ses enfans un abandon anticipé de
sa succession , un partage, un département de tous ses b ien s, à la charge
par eux de lui payer une pension viagère de i 5co liv. ; cet acte fut fait
sous seing-privé ; il était un vrai et réel acte de partage ; c a r , au même
m o m e n t, les héritiers du père partagèrent les deux successions, celle
du défunt et celle de la mère vivante.
Par le dernier de ces actes, Marie N oyer , fils aîné , vendit sa portion
des deux successions à ses cohéritiers ; il fit la reserve du mobilier qui
se trouverait chez la mère lorsque son décès arriverait: cet acte contenait
en partie le mode du partage entre les quatre acquéreurs.
IL fa u t observer que N o yer-D u b ou y t, appelant \ ne fg v r a .it dans
tous ces actes , soit du départem ent, démission ou p a r ta g e , soit de
l’ acquisition des droits du frère aîné , soit du partage de la succession
paternelle , que comme h éritier, par l’existence que l’ effet rétroa ctif de
la loi du 17 nivôse an 2 , et tous les actes fa its en conséquence avec lu i,
quoique la plupart fu ssen t des actes de vente , fu ren t regardés et ju g é s
être réellement des actes de partage : aussi les intimés ont-ils tout f a i t
annuller ,
soit Le département , démission ,
acte de partage de la
succession de Françoise T ix ie r , soit toutes les ventes qui avaient pré
cédé ou su iv i, parce que N oyer-D ubouyt, appelant, y fig u ra it connue
h é r itie r , en vertu de L’effet rétroactif de la loi du 17 nivose.
L e 6 germinal suivant an
5 1 le jugement fut signifie a N oyer-D ub ou yt;
le même jour à 4 heures du soir , les intimés brisèrent les scellés qu’il
avait lait apposer le 28 vendémiaire an 4 ■
>p ° ur l*1 conservation dos titres
de la succession de Françoise Tixier.
Cette opération se fit avec le juge de paix , leur beau-frère , hors la
présence de N oyer-D ubouyt, sans «pic justice l’ciit ordonné. Dès et Linstant,
�.
.
.
.
(
8
}
.
.
.
,
tous les titres qui constituaient la succession de Françoise T ix ie r , n’on^
■
plus reparu, ont é té , ou lacérés , ou divertis , ou recelés .par les intim és,
■
à l ’aide de la prévarication du juge de paix qui est leur beau-frère.
N oyer-D ubouyt, appelant , ayant appris cette vio latio n , cite les inti
més en co n cilia tio n , à l’effet de réintégrer tous les effets confiés à la garde
des scellés , et il leur demande de gros dommages et intérêts.
L e 18 floréal an
5 , les intimés et l ’appelant comparaissent au bureau
de paix ; les daines N oyer y étaient avec leurs maris. Dans le procèsverbal de conciliation, les dames N oyer et leurs maris
demandent à
N oycr-D uboiiyt en quelle qualité il form e sa demande : c e lu i- c i leur
rép ond, que c’est en qualité d’héritier général de Françoise T ixier ,
sa mère.
L es dames N oyer et G re lich e , leurs maris , reconnaissent à Noyer—
D ubouyt cette qualité, et en conséquence, à la conciliation, ils forment
contre lui une demande incidente, tend ante, attendu qu’il a pris la
qualité d ’héritier général de Françoise T ix ie r , à ce qu’il ait à leur payer
à chacun la somme de 1,000 liv. à eux due parleur contrat de m ariage,
du c h e f de lad ite Françoise Tixier. Noyer-Dubouyt accepte leur option
leur répudiation 5 il offre de leur payer à chacun les 1,000 liv. portées
par leur contrat de mariage. D ès cet instant, toute la succession mater
nelle appartjent à Noyer-Dubouyt.
Comme le jugement du
>.
de famille faite
25 ventôse an 5 , qui annullait tous les actes
avec Noyer-Dubouyt , contenait des dispositions de
détail qui nuisaient à ses intérêts ; que, par le f a it,
•
,
.
^ / ', '
ce jugement le con-
t raignait à payer les légitimes maternelles , tandis que les objets de cette
succession étaient encore entre les mains des adversaires ; il interjeta
appel de ce jugement.
^
' *
L e tribunal civil de la Haute-Loire fut choisi pour être le tribunal
-
d’appel.
L e r 1 ventôse an 6 , intervint jugement qui régla , en dernier ressort,
ï*
^
* GS *llt(-‘r^ts
fi
i
y
Successl0n (*u P®rc commui1. *
Le 7 p rairia l, Noyer-Dubouyt obtient une cédule du juge de paix de
■
M ozim , pour reprendre la demande des droits maternels.
ax
28 p rairial, l’on paraît au bureau de paix sans se concilier.
Le 18 thermidor an 6 , Noyer-D ubouyt fit assigner les dames Noyer
a»
�#
X d )
et G reliche , leurs m a ris, et N oyer-Lagarde. Il leur fit donner copie de»
procès-verbaux de conciliation qui avaient eu rapport à cette succession ;
celui du x.er pluviôse an 4 , où Noyer-Dubouyt demande cette succession ;
ceux des 4 et 18 floréal an
5 , et celui du 28 floréal an 6 , ainsi que la
copie des reconnaissances qui avaient été faites à Françoise Tixier.
Il conclut à ce qu’ils soient condam nés, en leur qualité d’héritiers du
père commun , à lui remettre et lui payer en sa qualité de seul héritier
_
de François T ixier ; i . ° Tout le m obilier qu’elle a laissé lors et après
son décès 5 2 °
à lui payer le montant des reconnaissances ; 3.® à lui
payer une somme considérable pour les dommages - intérêts , aux intérêts de tout et aux dépens ; sauf à eux à se retenir les 1,000 liv. à eux
dus et promis par leur contrat de mariage.
L e 1 3 fructidor an 6 , la cause fut mise au rôle publique et appelée ;
les intimés com p aruren t, elle fut remise pour être plaidée à son tour ,
e lle était au n.o 677g.
L e Z m essidor an 8 , N oyer-D ubouyt fit assigner les intimés , en re
prenant tous les actes déjà énoncés.
.
L e i 5 m essidor, la cause fut appelée , les qualités furent posées, e t
elle fut remise pour être plaidée à son tour.
L e 26 thermidor an 8 , N oyer-D ubouyt présenta requête au tribunal
civ il de Clermont - Ferrand, à l ’effet d’ obtenir permission d’assigner, à
bref délai , pour obtenir une provision de la somme de 6,000 liv . ; inter-'
vin t ce même jour jugement qui permit d’assigner, et indiqua l ’audience
pour le
Le
5 fructidor an 8.
3 fructidor , la requête et le jugement furent signifiés ; le 5 , la
cause fut appelée et plaidée ; N oyer-Lagarde agissait pour lui et pour Ie3
dames
N oyer et G re liclie , leurs maris. Il prétendit n’avoir pas la copie
d’un procès-verbal de conciliation ; la cause fut continuée et remise au
l
5 fru ctid or; ce jour e lle.fû t plaidée. N oyer-Iagarde plaidant toujours
pour lui et pour les dames N o y e r , et G reliclie leurs maris, qui étaient
presens à l’ audience; pour éviter le paiement de la provision dem andée,
n em ploya d’autre m oyen que celui que lui et les dames N oyer et Grelic h i!, leurs maris , avaient répudié à la succession de Françoise T ixier;
jl«« leur acte de répudiation étaient authentique ,
que Noyer-Dubouyt
avait accepté,
a
■
}'} ^
�( 10 )
Que les titres sou9 lesquels N oyer-Dubouyt fondait sa demande en pro
vision , ils les contestaient; que l ’on ne pouvait accorder une provision à
Noyer-Dubouyt
sur
ces titres ; que ce serait juger le fonds en même-
temps que le provisoire ; qu’eux-m êm es ayant répudié, et Noyer-Dubouyt
ayant accepté leur répudiation, et s’étant soumis à leur payer les 1,000 1.
à eux dus par leur contrat de m ariage, pour lesquelles sommes ils avaient
fait leur option , que c’était eux plutôt qui seraient dans le cas d’obtenir
une provision ; que lorsqu’à l ’audience du
5 ils avaient demandé la remise
de la cause pour obtenir des secondes copies du procès-verbal du 11 flo
réal an 5 , c’était pour faire constater, dans le jugement qui allait être
rendu , l’existence de leur répudiation et de l’acceptation q u ’e n avait
faite N o yer-D u b o u yt, afin qu’il ne put plus revenir sur ses pas.
L e commissaire du G ouvernem ent , Picot
-r
Lacombe
,
porta la parole
dans cette cause ; il conclut au renvoi de la demande en provision au
fonds , motivée sur la répudiation des dames
N oyer à la succession de
Françoise T i x i e r p a r acte du 18 floréal an S , sur l’acceptation qu’en
avait fait l ’appelant.
Intervint jugement m otivé et conforme aux conclusions du commissaire
du Gouvernement,
Le jugement a été rendu et prononcé publiquement à l’audience , en
présence des dames N oyer et de leurs maris , de N oyer-Lagarde plai
dant pour elles , de N oyer-D ubouyt. L e citoyen Boyer faisait les fonc
tions de président ; le c.en Jeudy fut un des juges en rem placem ent
d’un absent : les c.ens T iolier et T ou m ad re, juges au tribunal d’a p p e l,
étaient dans l’auditoire assis au fond de la salle d’audience ; ils entendi
rent plaider et prononcer le jugement,.
Mais par une collusion coupable entre le greffier de
ce tribunal et
les intim és, le jugement n’existe plus dans les registres du greffe ; cette
pièce qui jugerait la ca u se , disparut. Les juges sont aussi coupables de
ne point veiller à la conservation des litres authentiques qui reposent au
greffe. L ’on voit que les intimés sont familiers à cet exercice ; c’est la
B :conde fois q u e , de concert avec les officiers ministériels , des pièces
essentielles sont soustraites.
Mais ce qu’il y a de plus horriblement m erveilleu x, c’est le pouvoir
magique qu’i k ont de paralyser l ’action publique sur de pareilles viola
tions de dépôts publics , au point que personne n’ose élever la voix pour
éviter? daus la suite , de pareils abus.
�Le 21 ventôse au g , les dames N oyer et G re lic h e , leurs m aris, et
Noyer-Lagarde, font assigner N oyer-D ubou yt, aux délais de l’ordonnance
de 1667 , pour aller en avant sur les demandes par lui formées relative
ment à la succession de Françoise T ixier 5 ( cet exploit est rédigé par
Antoine-Jean-Baptiste C hassaing, huissier ) , et se voir condamner , en
conséquence de la qualité qu’il a prise d’héritier de Françoise T ixier ,
à leur payer à chacun la somme de 1,000 liv. à eux promise par leur
contrat de m ariage, se voir débouter de toutes ses demandes , aux offres
qu’ ils font de lui remettre ce qu’ ils ont touché du mobilier de Fran
çoise T ix ie r; se voir condamner à leur payer 12,000 liv . de dommagesintérêts , et aux dépens.
L e 6 floréal an g , ils obtinrent dn tribunal de première instance de
Clermont-Ferrand un jugem eut, après que la commissaire du Gouver
nement fut en ten du , qui a été ainsi rendu et rédigé.
A ttendu que depuis la mise à exécution de Pordonnance de 16G7 ,
Noyer-Dubouyt n'a point comparu ;
A ttendu que , dans son exploit de demande , il ne ju stifie d’aucinis
titres , que par conséquent sa demande n’est point établie quant aux
sommes par lui réclamées ;
A tte n d u , quant à la valeur du mobilier de la succession de Françoise
T ix ie r , des offres fa ite s par N oyer-Lagarde e t consorts de remettre
ce qu’ils ont touché du mobilier;
Attendu qiien conséquence de la demande de Noyer-Lagarde et consorts,
que cette demande est fo n d ée sur leurs contrats de mariage , par les
quels Françoise T ix ie r , mère commune,
leur a constituée à chacun la
somme de 1,000 liv. ;
Attendu, que ledit N oyer-Lagarde et consorts ont [répudié à la succession de
ladite Françoise T ixier , pour s'en tenir à leur constitution
dotale.
>
Attendu que cette soumission a été acceptée par N oyer-D ubouyt, et
qu'il ne ju stifie pas que N oyer-Lagarde et consorts aient été payés du
montant desdites constitutions ;
A tte n d u , d'ailleurs , que lors de la conciliation il a déclaré se charg er de payer l esdites sommes.
■
E n ce qui concerne la main-leY<ie des inscriptions faites par Noyera
2
�( 12 )
D u b o u yt, les dom m ages, intérêts reclamés par ces derniers , relative
ment à ses inscriptions.
.
Attendu que d’après la l o i , aucune inscription ne peut être reçue
qu'autant que le créancier qui la fo rm e , rapporte un titre authentique ;
Attendu que dans Vétat des choses a ctu elles, Noyer-Dubouyt ne ju s
tifie d'aucuns titres ;
Attendu que par suite du défaut de rapport de titr e , les inscriptions
de N oyer-D ubouyt doivent être rad iées;
A ttendu que l’ existence des inscriptions a pu nuire à N oyer-Lagarde
e t consorts y et qu’il est ju s te , tant qu’ il
n'apparaîtra point de titres
authentiques , d’accorder à Noyer-Lagarde et consorts des dommages ,
intérêts proportionnés aux torts qu’ils ont pu éprouver ;
L e tribunal condamne Noyer-Lagarde et consorts , de leur
consente-
ment et suivant leurs offres contenues en leur exploit de demande du 21
ventôse an 2 dernier , à remettre et délivrer à Noyer-D ubouyt ce qu’ils
ont touché du mobilier personnel à Françoise T ix ie r , mère commune ;
sin on , e t fa u te de ce f a i r e , dans la décade de la signification du pré
sent jugem ent à personne ou dom icile, les condamne à en payer la valeur
suivant l’estimation qui en sera fa ite sur l’éta t qu’en fournira NoyerD ub ouy t, s a u f tous légitim es contredits ; aux intérêts de la valeur, â
compter du jou r de l’ ouverture de la succession ; déboute N oyer-D ubouyt
du surplus de la demande.
Faisant droit sur la demande de N oyer-Lagarde et consorts, condamne
N oyer-D ubouyt, en sa qualité de seul héritier de Françoise T ix ier ,
piere commune , à. payer à chacun des demandeurs la somme de 1,000 l,
qui leur a été constituée par lad ite défunte T ixier , par leur contrat de
mariage , avec l'intérêt desdites som m es, depu'is le décès de ladite
Tixier.
•
F a it main-levée des inscriptions fa ite s par Noyer-Dubouyt sur NoyerLagarde et consorts > ordonne que radiation en sera fa it e aux bureaux
des hypothèques où eües sont é té mises.
Condamne Noyer-Dubouyt aux dom m ages, intérêts des demandeurs,
à donner par déclarations, aux intérêts et aux dépens.
'
L e 21 floréal môme m o is , ce jugement fut signifié à N oyer-D ubouyt ,
A
requête de« dames Noyer et Greliclie , leurs m ari», à son dom icile,
�.
.
(
I j
)
par François G a illa rd , huissier ; Noyer-Lagarde y est encore de nouveau
constitué
avoué
pour en
poursuivie
l ’exécution et faire taxer les
dépens.
L e i 5 therm idor, N oyer-D ubouyt fait signifier qu’il acquiesce à plu
sieurs parties du ce jugrment.
i . ° A la réitération de leur répudiation énoncée , soit dans le proccsverbal du 18 floréal an
5 , soit dans l’exploit du 21 ventôse , dans le
jugement du 6 floréal au 9 ,
et dans la signification d’ icelui.
2 .0 Qu’ il acquiesce audit jugem en t, quant aux condamnations pronon
cées contre eux , tendant à lui remettre et payer la valeur du mobilier
de Françoise Tixier , ainsi que des intérêts.
Par le même acte , il interjette appel des dispositions de ce jugement
qui blessent ses intérêts.
10.
D e la disposition qui le déboute de ses demandes coutenues en
l ’exploit du 18 thermidor an 6 , et exploits subséquens.
2.0 D e celle qui ordonne que les inscriptions faites à son profit seront
rayées.
3.0 D e celles qui le condamnent aux dommages , intérêts et aux
dépens.
Le 28 brumaire an 1 0 , les dames N oyer et G relich e , leurs maris , et
N oyer-Lagarde , par le ministère du c.en T a r d if , leur avoué , et par
le ministère de Sim on et, huissier , font encore signifier le jugement du
6 floréal an 9 .
L e 8 nivose an 10 , à la requête de N oyer - D u b o u y t, on leur fait
signifier que la cause est mise au rôle publique sous le n.o 460, et l’huis
sier fait sommation de venir plaider au tour du rôle.
L e 18 nivose an 1 0 , les intimés font s ig n if ie r leurs réponses aux cau
ses et m oyen d’a p p e l, par le ministère du c.en T a rd if, leur a vo u é, et
par celui du c.en Mazin , huissier ; à toutes les p a ges, la réitération de
ï-a répudiation et de l’acceptation qui en a été faite , est répétée 5 à tou
tes ces p a ges, ils parlent du bien jugé du jugement du 6 floréal an 9 >
et enfin ils concluent ainsi :
■Attendu que rien, n'établit la sincérité
Noyer-Duboityt réclame le paiement ;
.
des reconnaissances dont
�( H )
.
,
A ttendu que tout concourt , au contraire , à les fa ir e considérer
comme des avantages indirects f a it par le père commun à son épouse ;
A ttendu qu’il a épuisé envers elle
le maximum de ses libéralités par
la donation d’usufruit de La moitié de ses biens ;
Attendu que Noyer-Dubouyt , en qualité d’héritier de sa mère ,
est
tenu du paiement des constitutions fa ite s à ses frères , sœurs et beaufrères ;
A ttendu que ses fr è r e s , sœurs et beau-frères ne lui contestent pas la
remise des effets mobiliers dont elle est morte nantie, et que le ju g e
ment dont est appel les lui adjuge ;
D ire qu’il a été bien ju g é par le jugem ent rendu au tribunal d e
l ’arrondissement de Clermont-Ferrand , le 6 floréal an g, mal e t sans
cause appelé; ordonner que ce dont est appel, sortira son plein et entier
e ffet , condamner Îappelant en l’amende et aux dépens.
L e 27 nivôse , la cause fut appelée au tour du râle public 5 le s qua
lités furent posées , les intimés demandèrent la remise.
L e 27 nivôse, la cause fat appelée au tour du râle , les qualités furent
encore posées. L ’avoué Tardif s’attacha dans sa plaidoirie, et se borna
à obtenir des secondes copies des reconnaissances fondées sur son réqui
sitoire du 6 pluviôse précédent ; il fut ordonné que les copies deman
dées lui seraient signifiées dans le jour , et la cause fut continuée.
Les copies réclamées lui furent signifiées dans le jo u r, et on lui fit
sommation de venir plaider , à peine de défaut.
L e 1 t , la cause fut appelée encore au tour du rôle ; l’avoué fit refus ,
à l’audience de plaider : intervint jugement définitif et en dernier’
fessort, ainsi rendu et prononcé.
Attendu la rénonciation fa ite par les intimés à la succession de Fran
çoise T ix ie r , leur m ère, pour s’en tenir chacun à la somme de 1,000 L
A eux promise par leur contrat de mariage ;
Attendu l’acceptation fa ite au bureau de p a ix , les 4 et 18 floréal an.
■5 , par l’appelant ;
A ttendu que les intimés , par jugem ent rendu par la tribunal de
première instance de l’arrondissement communal de Clermont-Ferrand ,
le 6 floréal an ( j , ont f a i t ju g e r contre l'appelant leur répudiation e t
�.
.
.
.
( 15 )
.
.
renonciation à ladite succession ; que le 21 dudit mois ils ont f a i t signi
fie r ce jugem ent avec sommation de l’exécuter ;
Attendu que l’appelant leur a f a i t signifier son acquiescement audit
ju g e m e n t,
en ce qui était r e la tif au mobilier trouvé lors et après le
décès de la mère commune, dans sa maison, et qu’il s’est soumis de
compenser , avec la valeur dudit mobilier , lesdites sommes de 1,000 liv.
promises à chacun d’eux par leur contrat de mariage
Attendu que le 6 germinal an
5 , les intimés ont violé les scellés
apposés à la réquisition de l’ appelant, le 28 vendémiaire an 4 , sur l'ar
moire contenant les papiers relatifs à la succession de ladite Françoise
T ixier , ceux des successions de Marien T ixier , son père, de Jeanne de
L eym erie, sa mère, et de M arie-G abrielle T ixier , sa sœur ;
Attendu que les inscriptions fa ite s à la conservation des
hypothè
ques par l’appelant sur les biens des intim és, sont fo n d ées sur des titres
authentiques ;
L e tribunal d’a p p el, par jugem ent en dernier ressort , d it qu’il a
été mal ju g é par le jugem ent rendu par défaut contre l’appelant, au
tribunal d’arrondissement de C lerm onl-Ferrand, le 6 floréal an (j t
quant aux dispositions qui le déboutent de ses demandes qui fo n t main
levée des inscriptions par lui fa ite s sur les intimés ;
M a l ju g é encore , en ce qu’ il est condamné aux dommages - intérêts
de ses frères , sœurs e t beau-frères , résultant desdites inscriptions et
aux dépens ; bien appelé quant à c e , émandant ,
condamne les inti
m és, solidairement , tant en leurs noms , qu’ en qualité d’héritiers de
Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ubouyt, père commun , à payer à l ’appe
lant , en qualité de seul héritier de Françoise T ix ie r , mère commune ,
les quatreJ cinquièmes
son trousseau; 2.0
3 .o de celle de
1.0 de la somme de 35o liv. pour la valeur de
de la somme de 120 liv. pour bagues et jo y a u x ;
120 liv. pour gain de survie ; 4.0 de celle de 60 liv. pour
habits de d e u il; 5.o de celle de yb liv. pour une année de pension viduaire ; toutes les sommes ci-dessus fa isa n t ensemble celle de 725 liv. ;
l ’ intérêt d e ladite somme , depuis l’ouverture de la succession de Fran
çoise T ix ie r ,* 6.0 de la somme de 2,300 liv. portée par !a reconnaissanc e
f a it e ¿1 Gabrielle T ixier , sœur de ladite mère commune , le 1 4 ju in
x765 ; p lus ¡a sommc de 200 liv. pour la valeur du mobilier y reconnu,
�.
.
(
i
6
)
.
les intérêts desdit es sommes , à compter du mois de décembre 1779 >
époque de l’ouverture de la succession de M arie - Gabrielle Tixier ;
7.0 de celle de
5 ,000 liv. portée en la reconnaissance fa ite par le père
commun , au profit de Françoise T ix ier , le 8 novembre 1775 ; 8.0 de
celle de 12,000 liv. portée par la reconnaissance fa ite par le père com
mun , le 12 thermidor an 2 , par acte reçu P é tu r e l, notaire à Billom ;
les intérêts desdites deux sommes de 5,000 liv. et de 12,000 liv. , depuis
le décès de Françoise T ix ie r , sa u f aux intimés à se retenir sur lesdites
sommes et sur La valeur du mobilier auquel
ils ont été
condamnés par
le jugem ent du 6 floréal an 9 , ainsi que des intérêts , celle de 1,000 l.
chacun , à eux due par leur contrat de mariage. Condamne de plus les
intimés aux dom mages-intéréts de l’appela nt, à fournir par déclara
tions résultées de la violation des scellés par eux commise le 6 germ inal
an S sur les effets , papiers et documens servant à établir la consis
tance des successions de M arien T ixier et de Gabrielle T ixier , lesquels
effets ont été soustraits et recelés : lesd its dommages - intérêts , pour
tenir lieu de toutes autres reconnaissances, même de celles énoncées
dans celles des 19 thermidor an 2
et 8 novembre 1775 ; ordonne que
les inscriptions fa ite s sur les in tim és, à la requête de l’appelant, seront
maintenues ju squ ’ à Ventier paiement de ce qui
lu i est dû ; condamne
les intimés aux dépens des causes principales et d’appel.
L e jugement fut signifié à avoué le 12 ventôse an 10.
L e 18 ventôse même mois , le s dames N oyer , et G reliche leurs ma
ris , et Anne N o yer-L agan le, par le ministère du c.en T a r d if, leur
avoué , présentèrent une requête au tribunal d’appel , le 18 ventôse
même m o is, par laquelle ils demandèrent à être reçus opposans au juge
ment du 1 r ventôse an 10 , parce que , disent-ils , ce jugem ent a infirmé
celui du 6 floréal an 9 ,• ils concluent à ce qu’il soit
d it qu’il a été
bien ju g é par le jugem ent du G floréal an 9 , mal appelé ; que ce dont
est appel sorte son plein et entier e f f e t , et que N oyer-Dubouyt , appe
lant , soit condamné en l’amende et aux dépens.
F a its relatifs au prétendu désaveu.
L e 17 germinal suivan t, Jeaune et M arie-Gabrielle N oyer , autori
sées de Pierre et Joseph G reliclie , leurs m aris, par a’cte reçu
notaire à B illo m , douneat pouvoir au c.eu M oaestier,
P étu rel,
avoué près le
tribunal
�( x7 )
.
tribunal civil à C le rm o n t, de comparaître pour elles au greffe dudit tri
bunal , e t d ’y déclarer, en leurs noms, qu'elles désavouent Anne NoyerLa garde qui parait avàir occupé pour elles audit tribunal,
tance qui y éta it pen d an te,
entr’ eux
en l’ins
et Jean-Joseph-M arie N oyer-
D u b o u y t, leur frère et beau-frère , relativement à la succession de
Françoise .Tixier , leur mère et belle-mère ; et avoir , par exploit- du
21 ventôse an 9 , f a i t renoncer lesdits Noyer et Greliche à ladite suc
cession de Françoise T ixier ; renonciation qu’il a encore réitérée lors
d’ un jugem ent du même tribunal du 6 floréal su iv a n t, dont il y a appel
au tribunal à Riom , et qui y est encore pendant ; qu’ils n’ont jamais
donné pouvoir d’y renoncer, entendant au contraire s’en porter héritier,
sous la réserve de tous leurs droits et dommages - intérêts contre ledit
N oyer-Lag arde, et de réitérer le présent désaveu au tribunal d’a p p e l,
ainsi que leurs droits e t actions contre ledit N oyer-D ubouyt.
L e 21 germinal an 10 le c.eu Monestier accepta la procuration ; il
comparut au greffe , et y fit la déclaration de d ésaveu , en remettant la
procuration pour minute au greffe.
L e 22 germinal an 1 0 , par cédule , les dames N oyer , et G reliche
leurs maris , appellent en conciliation N oyer - Lagarde , à l’effet de for
mer demande contre l u i , tendante à fa ir e déclarer le désaveu f a i t au
greffe bon et valable , et à ce qu’il soit tenu de leur payer des domma
g es - intérêts ; ils citent également l ’appelant pour faire rendre le juge
ment commun avec lui.
L e premier floréal an 1 0 l ’on comparaît au bureau de paix; là NoyerLagarde déclare et consent par écrit à être désavoué, il s’en rapporte
à la prudence du tribunal pour prononcer
contre lui les dommages et
intérêts auxquels il consent d’ être condamné.
N oyer - Dubouy.t répond au bureau
de
paix que la demande ,
la déclaration et soumission de N oyer - Lagarde sont un concert fraudu
leux pour chercher à revenir sur la chose ju g é e , soit au tribunal de pre
mière instance , le 6 floréal an 9 , soit au tribunal d ’a p p e l le 11 ventôse
an 10 ; que les deux jugemens sont définitifs et en dernier ressort, et
qu’en conséquence , i l 11e p r e n d aucune part a la conciliation.
L e 18 floréal, les dames N o y e r , et Greliche leurs maris , font assi8ner , tant Noyer-Lagarde que Noyer-D ubouyt a comparaître au tribu
nal civil de première instance a Clermont , 1 . 0 pour voir déclarer le
■
3
�.
( î 8 )
.
.
désaveu f a i t au g r e ffe , ban et valable ; 2.0 voir déclarer nul l’exploit
du 21 ventôse an y ; voir égalem ent déclarer nul le jugem ent du 6 floréal
an 9 / 3.o voir aussi déclarer nuls tous les actes qui ont suivi ledit ju g e
ment du 6 floréal an 9 ; 4.0 pour voir condamner N oyer-La garde aux
dommages - intérêts
auxquels il s’é ta it soumis au bureau de paix ;
5 .° leur voir donner acte de ce qu’ils se portent héritiers de Françoise
T ix ie r ; voir dire qu’ils seront mis au même et semblable état oh, ils
étaient avant ledit jugem ent ; voir condamner N oyer-Lagarde aux dépens,
et voir déclarer que le d it jugem ent sera commun avec Noyer-Dubouyt.
N oyer-D ubouyt qui avait vu que par leur demande ils avaient eu xmêmes fait justice de leur opposition formée par la requête présentée
par le c.en Tardif leur avoué , le 18 n ivô se, et qu’ils venaient de l’annuller en demandant que tous les actes qui avaient été faits pour eux ,
postérieurement audit jugement , fussent déclarés nuls , que d’ailleurs
cette opposition faite contre La disposition textuelle de l’ordonnance de
1 667 ne pouvait pas être reçu e, le ur fit signifier à d o m icile, le 29 prai
rial an 10 , le jugement en dernier ressort et d éfin itif, rendu le 11 ven
tôse an 1 0 , avec sommation de l’exécuter : à dater du jour de cette
signification , ils n’ont formé aucune demande tendante à s’y opposer ;
ils ne se sont point pourvus dans le d é la i, ni en requête c iv ile , ni en
cassation.
Le
3 o p ra iria l, par le ministère de Dubois , huissier à C lerm on t, les
dames N oyer et G reliclie firent signifier à N oyer-D ubouyt le jugement par
défaut qu’ils avaient obtenu
contre N oyer - Lagarde ; il a été rendu
£t prononcé ainsi qu’if suit :
Attendu que le désaveu n'est pas c o n te s té , et que le défendeur f a i t
défaut en ce qui concerne Noyer-Lagarde , déclare le désaveu f a i t con
tre lui au greffe du tribunal, bon et valable ;
.
E n conséquence , déclare nul et de nul effet la répudiation de la
succession de Françoise
T ixier , fa ite en leur nom par exploit du 21
ventôse an Q , réitérée par jugem ent du 6 floréal suivant.
Ce fa is a n t, remet lesdites N o y er, femm es G relich e, au mérrie ef sem
blable état ou ellçs étaient avant lesdits exploits et jugem ent.
Leur donne acte de ce qu’ elles entendent se porter héritières de ladite
Françoise T ix ie r , leur mère.
Condamne N oyer-Lagarde aux dommages - intérêts , « donner pqr
déclaration, et le condamne aux dépens.
�(
19 )
D éclare le présent jugem ent commun avec N o yer-D u b ou y t.
P arle m ô m e exploit de signification,on donne assignation àNoyer-Lagarde
pour comparaître à la chambre des avoués , pour voir taxer contre lui les
dépens. Noyer-Lagarde a acquiescé à ce jugement ; il ne s’est point
pourvu contre, ni par op p osition, ni par a p p e l, dans les trois mois de
signification à domicile.
L e 16 messidor an 10 , par acte extra-judiciaire , les dames N o y er, et
Greliche leurs m aris, font signifier à Noyer-Dubouyt un procès-verbal
de conciliation qu’ils ont rédigé avec Noyer-Lagarde ; ils font sommation
à N oyer-D ubouyt de payer pour eux à Noyer-Lagarde ,le s io o o liv. qui
leur avaient été promises par leur contrat de mariage.
L e 26 messidor an 10 , N oyer-D ubouyt a interjeté appel du jugement
du 20 prairial an 10 , qui a désavoué N oyer-Lagarde, en ce qui était rela
tif aux dispositions qui - portaient atteinte à ses droits
de lui Noyer-
Dubouyt.
.
Sur l ’a p p e l, les dames N o y e r, et G reliche leurs maris , et N oyerLagarde , ont fait encore cause commune , ils ont pris le même avoué ;
et le 12 thermidor an 1 0 , Germain Faye a signifié à l ’avoué de NoyerDubouyt qu’il avait charge d’occuper sur l’appel du désaveu , pour les
dames Noyer et G reliche , leurs maris , et pour N oyer-Lagarde.
Le
3o thermidor an 10 , l ’appelant fit présenter requête au tribunal
d’a p p e l, tendante à faire joindre l'appel sur le désaveu à la cause sur
l ’opposition ; par jugem ent, il fut ordonné qu’il serait prononcé sur le
tout par un seul et même jugement.
Le
3 fructidor su iva n t, les daines N oyer et G reliche firent signifier la
révocation du c.en T ardif, et veulent que la procédure ne se fasse qu’avec
le c.en Faye.
L a cause en cet état fut p] aidée à plusieurs audiences ; le tribunal
d appel crut devoir ordonner l’a^pointcment au conseil.
M
O
Y
E
N
S
.
L e tribunal d’a p p e l, d’après l’état dû la cause et l’exposé des faits ,
a à ju g e r , If0 l’ appeL interjeté par Noyer - D u b o u y t, par acte du 26
3
a
�.
( 20 ^
messidor an i o , du jugem ent rendu sur le désaveu
..
le 20 prairial
même année, cet appel étant un incident de la cause.
2.0
S i l’opposition form ée par requête à un jugem ent rendu par d éfa u t,
fa u te de p la id er , peut être reçue contre les dispositions textuelles de la
lo i , l’arrêté des Consuls , l’ordonnance de 1 6 6 7 , et contre la volonté
des intimés q u i, trois mois après, Pont eux^mémes déclarée nulle et
sans objets , e t ne Üont pas form ée de nouveau après la signification
dudit ju gem ent à d om icile, le 29 prairial an 10.
\em ieio
S L u e tfio n .
L e désaveu form é par les dames Noyer , et Greliche leurs m aris,
est-il valable , relativement au c.en Noyer-Dubouyt ?
L a disposition du jugem ent du 20 prairial an 10 , rendu par le tri~
bunal de première instance de l’arrondissement de Clermont-Ferrand ,
qui déclare nulle la répudiation des dames Noyer à la succession de
Françoise T ix ie r , qui les remet au même et semblable éta t oh elles
étaient avant le jugem ent du 6 floréal an 9 , et qui leur donne acte de
ce q u elles se portent héritières de ladite succession , peut - elle être
maintenue ?
^ Ü eu jciem o
- 2 -ucttiovi.
"
N oyer-Lagarde avait-il abusé de la confiance de [5« cliens ? L es
ficles qu’il avait f a i t s , comme avoué , lui
flétrissant du désaveu (*).
avaient-ils mérité l ’acte
‘Czouiemo J^uetfiou,
'
(
f
Les dames N oyer, et Greliche leurs maris, n’avaient-ils pas approuvé,
par actes judiciaires postérieurs , tout ce qui avait été f a i t pour elles
dans le ministère de cet avoué ?
„ r
.
*nntfak(K ) U tout observer que l ’iMiinw, ne pose cette question que relativement
ii scs m terits et nullement pour ceux (Je NoycrrLngnrdc,
�( 2 0
E n examinant le jugement du 20 prairial an 10 , qui prononce sur le.
désaveu , on le voit entaché d’u 11 vice de forme , qui seul en constitue la
nullité; c’est que les juges n’ont ni prononcé ni donné des motifs à leurs
décisions. A in si, la loi est violée dans son texte ; ce m oyen suffirait seul
à N oyer-Dubouyt pour eu faire prononcer la nullité par rapport à lui ;
mais les autres moyens qu’il propose sont également péremptoires pour
obtenir une décision qui lui soit favorable, et dont la justice soit la base.
L e désaveu est une voie de droit qu’a la partie contre son procu
reur ou avoué, lorsque, sans pouvoir u’e lle , il a formé en son nom quel
ques demandes , donné quelques consentemens , ou fait quelques déclara
tions qu’elle croit être contre ses intérêts, et contre lesquels elle croit
avoir droit de réclamer.
Cette procédure, toujours déshonorante
pour le procureur ou avoué
qu’elle attaque , n’intéresse pas que l u i , elle intéresse également la par
tie adverse ; aussi cette partie adverse a-t-elle le droit de la faire déclarer
nulle par rapport à elle.
En principe , la présomption est que l’avoué n’a point manqué à son
devoir , ni voulu nuire aux intérêts de son client ; aussi quand il est
reconnu in n o cen t, il obtient de gros dommages-intérêts contre ceux
qui l ’ont attaqué ; mais lorsqu’il a été reconnu en justice, coupable , la
partie publique a toujours provoqué sa destitution, et les tribunaux la
prononcent
de suite , parce
que l’abus de confiance est un crime x
non seulement qui nuit aux particuliers , mais qui offense les mœurs.
E n ouvrant les pièces de la cause , il est impossible d’admettre que
par une procédure de désaveu collusoire , concertée entre N o y e r - L a g a i'd e
et ses c lie n s , ils puissent annuller le jugement du € floréal an y , dans
la partie qui est la chose ju g é e par les consentemens postérieurs qu’ont
donné toutes les parties intéressées.
Ce que N oyer-La garde n’a pas voulu, ce qu’il aurait dû faire , s’ il se
fut guidé par les lois de l’honneur, Noyer-Dubouyt doit et peut le faire
pour la conservation de ses intérêts; il est indispensable qu il lasse valoir
contre le désaveu tous les movens que Noyer - Lagarde eut dû faire
valoir , s’il n’ eut pas voulu se laisser avilir , ni dégrader sou état.
Si les avoués pouvaient ainsi être désavoués, sans sujets ni réels ,
ni apparents ; si eux-mêmes pouvaient colluder aussi honteusem ent, aussi
frauduleusem ent,il n’y aurait iav.ais rien d\-.ssuré d a n sl’ordiv ji dioiaire ;
�( 2» )
.
^
les procr'1ures et les ii io n ien s ne seraient qve des illu sion s, que des pièges
teudus impunément à la bonne foi , à la confiance 5 l’avoué qui aurait
reçu des pouvoirs , qui sont dans ses mains , les dissimulerait 5 il décla
rerait n’en avoir point reçus , il faudrait replaider de nouveau ; les
jugemens qui interviendraient seraient toujours attaquables par les mêmes
m oyens , et cela ne finirait jamais.
Il 11e sera pas difficile à N oyer-D ubouyt d’établir la collusion et lafraude concertées entre N oyer-Lagarde et ses cliens.
Lorsque Noyer-Lagarde a été appelé en conciliation , sur la demande
formée contre lui
en validité de désaveu , et en dommages-intérêts 5
après qu’on eut déposé au greffe cet acte aussi honteux pour lu i, il répond
au bureau de paix qu’il s ’en rapporte et la décision du tribunal, de sorte
qu’il a approuvé le désaveu déposé au greffe contre lui ; il a consenti à le
voir déclarer v a la b le , il a consenti à payer à discrétion des dommagesintérêts et les dépens 5 les dames Noyer et Greliche , aujourd’h u i, n’ont
plus d’ intérêt à plaider contre Noyer-Dubouyt ; Noyer-Lagarde les dé
dommage süffisaui'nent eu capital , intérêts t t frais , de ce qu’elles pré
tendaient avoir perdu: Noyer - Lagarde a poussé la générosité ou l’aveu
de sa culpabilité, au^point d’engager le mi ri is p r ë~ptibll£ et les tribunaux,
mais sur-tout le G ouvernem ent, à prendre des m oyens prompja._et sévères
pour ôter l’effroi qu’ une conduite aussi criminelle pourrait donnera ceux
que leurs intérêts attirent dans les temples de la justice.
Si le tribunal , qui doit aujourd’hui juger la cause , ne voit pa9 le
c.en
Noyer-Lagarde comme coupable envers les
intérêts des dames
N oyer et Greliche ; au moins verra-t-il une collusion horrible consignée
dans le procès-verbal de conciliation, par le consentement qu’il a donné
en se laissant condamner sans murmurer ; par la
confiance que les
intimés onteu en l u i, postérieurementà ce jugem en t, dans d’autres affaires
que les dames N oyer avaient contre N oyer-D u b ou yt, et enfin en se pré
sentant devant vous , c.ens Magistrats , ayaut le même avoué que les
dames Noyer et G re lic h e , ses co m p lices, pour soutenir letbieu jugé
de ce jugement.
«
L e désaveu peut être valable , c’est-à-dire qu’il peut avoir été fait
avec des formes régulières, mais il ne s ’ensuit pas de là qu’il doive pro
duire effet entre le 9 parties plaidantes ; il faut que ce que l’avoué est
�.
.
. •
' ( 23 )
.
•
••
accusé avoir f a i t , l’ait été hors de ses pouvoirs, sans consentement ,
et sur-tout sans approbation postérieure de Ta part de ses çliens.
E n lisant l ’acte de désaveu , on voit que les dames N oyer déclarent
^qu’ elles étaient en instance avec Noyer-D ubouyt ; elles n’avaient point
d’autre avoué que Noyer-Lagarde , elles ont dû conférer avec lui de
leurs intérêts.
Au tribunal civil de première instance de l'arrondissement commu
nal de Clermont-Ferrand , à la dernière audience du mois de fruc
tidor an 8, lo rsque Noyer-D ubouyt demandait une provision de 6,000 liv .
aux intimés , Ñoyer-Lagarde était chargé de la confiance des dames
Noyer , et Greliche leurs maris ; c’est en plaidant en leur présence leur
m oyen unique , la répudiation ; c’est en la faisant plaider au com missaire_du_Gouveriiement, leur protecteur lé g a l, de p lu s, leur ami iutim e,
qu’elles parvinrent à obtenir un jugement qui réunit la demande provisoire
au fond.
.
Les dames Noyer ont trouvé ce jugement ju s te , éq uitab le, parce
qu’ il était en faveur de leurs intérêts. Noyer-Lagarde pouvait donc suivre
la môme marche au fond , sans craindre d’être compromis ; les dames
Noyer l’ayant approuvé , ne peuvent plus aujourd’hui avoir l’air d’igno
rer les pouvoirs qu elles lui avaient donnés.
Mais avant de
colluder les moyens de désaveu , les intimés ont
em ployé leurs pouvoirs magiques dans les registres du greffe; ce juge
ment rendu sur le provisoire , n’y est plus ,
il 11’y en a pas la moindre
trace ; s’il y avait possibilité de le faire revenir dà’ns le lieu que la loi
lu i d e s tin a it, la cause serait toute jugée,
Y o iià deux fois que , dans la même affaire, les actes nécessaires à la
cause ont été enlevés dans les dépôts publics ; voilà
neuf ans , depuis
le décès de Françoise T ix ie r , que ces soustractions ont traîné l ’appe
lant devant les tribunaux, et nécessairement amené la ruine
de sa
fortune.
L e Gouvernement et ses magistrats trouveront nécessairement des
moyens pour que les actes qui reposent dans les greffes y restent inva
riablement pour la conservation des intorots des justiciables , d'ailleurs
c est le vceu de l'ordonnance de 1667 ? tiLre 26.
Mais quoique ces actes aient disparu, il resto encore assez, de moyens
�lf
C24)
à l’appelant pour établir que Noyer-Lagarde avait des pouvoirs des daines
Noyer et G reliche , et prendre des conclusions qui ont fait la base du
jugement.
Les pouvoirsqu’ ila va itreçu s, les fonctions qu’il avait à remplir étaient
tracés et écrits dans deux pièces de la procédure qui sont du fait des
dames^Nflyer , et G reliche leurs maris.
L ajireiïû ère est l’expédition du procès-verbal de conciliation du juge
de pa>x du canton de Mozuu , du 18 floréal an_ 5_, ou les dames N oyer
et Greliche leurs maris ont fait leur option pour leur légitime maternelle,
portée par leur contrat de mariage , et ils ont répudié au surplus la
succession de Françoise
T ix ie r , mère
commune ; ils
n’ont pas dit
alors qu’ils voulaient se réserver la succession de Françoise Tixier ,
en vertu de la démission de b ie n , de l ’acte de partage du 22 fructidor an
2 , acte qui a été annuité .jT a p rès leur dem ande, par le jugement du 25
ventôse an 5 , rendu au tribunal civil à Rioin , jugement exécuté selon
«a teneur.
Dans
le
jugement du 6 floréal an 9 , ils ont demandé seulement
l ’effet de leur option, les 1,000 liv. à eux promises par leurs contrats
de mariage ; et si alors ils eussent voulu ou pu retenir l a succession
m aternelle, il y aurait contradiction frappante d’exiger les 1,000 liv. ,
d’en faire prononcer la condamnation ; car la mère , en faisant la démis
sion générale de tous ses biens , en partageant entre ses cinq enfans par
égalité , ne devait plus les 1,000 liv . qu’elle avait promises par les con
trats de mariage. Ils
ont reconnu à Noyer-Duboilyt la qualité d’héritier
général de cette succession ; là ils ont formé contre l u i , à raison de
cette qualité , la demande qu’il ait à leur paÿér~ce qui leur était dû d’a
près leur contrat de mariage 5 N oyer-D ubouyt s’y est soumis , il a accepté
leur option et répudiation. Cette expédition de procès-verbal, entre les
mains de Noyer-Lagarde , était uiTpouvoir suffisant? '
L a seconde piece est l e x p to if tlu 2 1 ventôse ; l’huissier qui a rédigé
cet exploit avait dans ses mains le procès-verbal de conciliation , il en
est la conséqueuce ; dans cet exploit , Noyer-Lagarde y est constitué
avoué des dame3 N oyer , et Greliche leurs maris. L ’original lui a été
remis pour exercer ses fonctions.
L e 6 floréal au 9 , la cause est appelée ; Noyer-Lagarde , comme avoué,
lit les conclusions de l’e x p lo it, il fait aussi lecture du procès-verbal de
conciliation ,
�( 25 )
conciliation ; il remet lès pièces aux juges pour les vérifier : le tribu
nal , après un examen réfléchi , rend un jugement qui contient onze
m otifs; tous ces motifs sont pris dans le procès-verbal du j8 floréal an
et il est nommément cité ; il est impossible de trouver dans les
5,
opéra
' lions du ministère de N oyer-Lagarde} qu’il ait a b u sé, qu’il ait fait plus
qu’il ne devait faire.
'
Mais après le jugement rendu , les dames N oyer l’ont approuvé , ont
ratifié les pouvoirs de Noyer-Lagarde par des actes postérieurs , par des
actes judiciaires et authentiques.
L e 21 floréal an q , par le ministère de G a illa rd , huissier , elles ont
fait signifier ce jugement à l ’appelant à son dom icile , avec sommation
de l ’exécuter ; elles ont constitué de nouveau N oyer-Lagarde pour leur
a vo u é , pour les actes relatifs à son exécution, et pour faire taxer les
dépens. V o ilà un acte judiciaire qui confirme les pouvoirs de N oyerLagarde ; ni l ’huissier Chassaing qui a fait l'exploit du 21 ventôse , ni
l’huissier G aillard qui a signifié le jugement du 6 floréal an g , ne sont
désavoués.
'
L e 1 5 thermidor an 9 , presque deux mois après cette signification ,
Noyer-Dubouyt fait signifier aux intimés qu’il acquiesce à partie de ce
jugement ; il indique les dispositions où se fixe son consentement : les
parties auxquelles il a consenties sont La chose ju g é e . Il interjette appel
des dispositions qui blaissaieiit ses intérêts ; sur cet a p p e l, signifié à
personne et dom icile , les_dames N o y e r , et G reliche leurs maris retirent
le urs ]j)ieces d’entre les mains de N o yer-L agarde , les remettent avec
leurs copies d'appel "au c.en T a r d if, avoué
près le tribunal d’appel ;
parmi ces pièces étaient l’expédition du jugement et l ’original de sa signi
fication , et les copies de l’acte d’adhésion de Noyer-D ubouyt.
.
L e jugement du 6 floréal an c) est de nouveau signifié à N oyer-D u
bouyt , le 28 brumaire an 1 0 , par le ministère
de T ard if,' avoué ,
et
celui de Sim onet, huissier.
L e 18 nivose an 1 o , par requête présentée au tribunal d'appel , les
dames N oyer et Greliche donnent leur répoose aux causes et m oyens
d’a p p e l, elles concluent au bien jugé du jugement du 6 floréal an g ;
cette requête est signifiée à l’avoué de N oyer-D ub ou yt, elle est signé©
de Tardif , avou é, et de Mazin , huissier.
�( 26)
Ni l’huissier Simone t , ni Mazin , ni l ’avoué Tardif n’ont point été
désavoués ; ainsi il est donc établi- q u e , postérieurement au jugement
du 6 floréal , les dames N oyer , et G reliche leurs maris ont approuvé
les pouvoirs qu’ils avaient donnés au 'c.en Noyer-Lagarde ; ce désaveu
n?est donc qu’un jeu , une collusion sans exemple.
Mais pourquoi ce désaveu a -t-il été concerté et mis en pratique ? pour
quoi les intimés ont-ils eu recours à un m oyen si extraordinaire ?. c’est
que le procès pendant au tribunal d’appel était perdu , tant pour les
dames N oyer , et G reliche leurs maris que pour Noyer-Lagarde. Il avait
été jugé le 11 ventôse , définitivem ent, sans qu’il put être attaqué ni
par opposition, ni par requête civile , ni par pourvois en cassation.
A la vérité, l’avoué Tardif avait présenté requête pour les intimés au
tribunal d’appel le iQ ventôse ,
G reliche ,
tendante à ce que les dames N oyer et
et Noyer-Lagarde , fussent reçus opposans à ce jugement
du 11 ventôse. Cette requête n’a d’autre m otif que de
se plaindre de
ce que le jugement du n ventôse a infirmé celui du 6 fioréal an 9.
L e jugement du 20 prairial an 10 , donne acte aux dames N oyer de ce
qu’elles entendent se porter héritières de la succession de Françoise
Tixier ; cette partie dn jugement confirme les dispositions de celui du
T1 ventôse an 1 p , relativem ent à la validité des reconnaissances ; elles
se sont déclarées elles-mêmes non recevables à les contester , elles ont
reconnu que leurs moyens contenus dans leur requête du 18 nivose
an 10 , n’étaient pcs soutenables ; en e f fe t , si la succession de Françoise
Tixier n’eut été qu’une chimère , il serait inconséquent de vouloir ea
être l'héritier. Mais cetle-volonté sert à éclairer les juges , mais ne peut
rien changer au sort des intimés ; le jugement du 11 ventôse an i o , est
rendu en dernier ressort, il est inattaquable, c'est la chose ju g é e . Ce sont
le vœux et les expressions de la l o i , de L'arrêté des C onsuls, de 1‘ordon
nance de 16 6 7 , litre
35 , art. 3 , paragraphe Z.
Mais Noyer-Lagarde , eu colludant pour se faire désavouer, en y con
sentant , approuvait par avance les demandes en dommages - intérêts
que N oyur-D ubouyl aurait faites contre lu i; car 1111 procureur désavoué ,
uou seulement est tenu aux dommages - intérêts envers celui de la con
fiance duquel il aurait ab usé, mais il est encore
condamné aux dom-
nia^cs-init'rêls envers la partie adverse; ou ne se joue point de la fortune
r!\;n cito yen , en le faisant plaider sans su^et pendant iq ans; c’est oiiCok »
�( 27 )
une loi de la nature et de la justice , et l’opinion générale de tous les
auteurs.
Ce jugement du 20 prairial au 10 , qui déclare le désaveu bon et
valable , etc. , porte également nne disposition qui le rend commun
avec Noyer-Dubouyt ; si le jugement eut été motivé , on ne serait point
embarrassépour en appliquer les dispositions. L ’appelant pense que le défaut
de m otif , dans la forme , que la collusion et la fraude sont si évidem
ment prouvées, que les conclusions suivantes, quant à ce c h e f, lui seront
adjugées avec dépens.
Attendu que les dispositions du jugement du 20 prairial an 10 , par
lesquelles le jugement est rendu commun avec N o y e r-D u b o u yt, ne sont
point m otivées;
Attendu qu’il y
a évidemment
Noyer-Lagarde , désavoué,
concert
de
fraude et
et les dames N o y e r , et
dol
entre
G reliche leurs
maris qui désavouent que ce concert est établi par le consentement de
Noyer-Lagarde au bureau de paix le i.er floréal an 10 par l’adhésion
q u ’il a donné audit jugem en t, en ne prenant que le même avoué que
les dames N oyer , et G reliche leurs maris 3 pour en soutenir le bien
jugé contre Noyer-Dubouyt ;
Attendu que le concert de fraude et le dol sont établis parce que R éel
lement et de fait , N oyer-Lagarde était l ’avoué , l’avait toujours été ,
et'avait des pouvoirs des dames N oyer , et G reliche leurs maris , ayant
toujours eu leur confiance dans la même affaire et dans d’autres posté
rieures ; que les conclusions qu’il a prises sont celles contenues eu l’ex
ploit du 21 ventôse an 9
et l’acte de conciliation du
18 floréal an 5 ;
qne les huissiers qui ont fait cet exploit et signifié le ju gem en t, n’ont
point été désavoués.
Il
plaise
au tribunal dire qu’il
a
été
m al
jugé
ra r le juge
ment du 20 prairial an 1 0 , relativem ent à N oyer - Dubouyt ,
appelé ;
ordonner
bien
que le jugement dn 6 floréal an 9 , quant aux
dispositions auxquelles N oyer-D ubouyt avait acquiesce par acte judiciaire
du i5 thermidor an 9 , seront exécutées suivant leur forme et teneur ;
condamner les intimés aux dépens ; ordonner que 1 amende cousignée
par N oyer-D ubouyt lui sera restituée.
�.
.
C 28 )
'S L u etfio v i Juv
L ’ opposition form ée à la
f ’op p ofitw n .
requête des dames N o y er, et Greliche
leurs maris , e t Anne N oyer-Lagarde , au jugem ent du 11 ventôse an
10 , rendu en dernier ressort à tour de rôle , fa u te de plaider , est
elle recevable , contre les dispositions textuelles de Varrêté des Con
suls du 18 fru ctid o r an 8 , et le te x te précis de l'article
3 du titre 35
de l’ordonnance de 1 6 6 y , même après avoir été annullée par la volonté
des intimés , en form ant leur demande en désaveu.
L a solution de cette question est dans la loi , elle est encore dans la
conduite des intimés qui y ont renoncé en demandant que tout ce qui
avait suivi le jugement du 6 floréal au g , fut déclaré nul 5 elle l ’est
encore quand après avoir reçu à dom icile la signification de ce jugement
le 2Q prairial an 1 0 , ils n’ont point manifesté la volonté par aucun acte
d’en arrêter l'exécution ; alors il est absolument la chose ju g é e .
L ’arrêté des Consuls du 18 fructidor an 8 , est impératif et non facul
tatif.
.
L ’article
3 du titre 35 de l ’ordonnance de 1 6 6 7 , ne souffre ni inter
prétation , ni modification , ni restriction ; son exécution est tracée par
la lettre de la loi , elle est de rigueur.
Cet article permet de se pourvoir par simple requête contre les jugemens , en dernier resso rt, qui auraient été rendus faute de se présenter,
ou à l ’aud ien ce, faute de plaider , pourvu que la requête soit
donnée
dans la huitaine du jour de la signification.
Mais il excepte expressément les jugemens rendus à tour de r ô le , si
ce n’e s t , est-il d it , que la cause ait été appelée à tour de rô le, auquel
cas
les parties ne se pourront pourvoir contre les arrêts et ju gem en s, en
dernier resso rt, intervenus en conséquence , que par requête civile.
l.e jugement du 11 ventôse an 10 , est un jugement en dernier ressort;
11 a été rendu à tour de r ô le , faute de plaider , en présence du l’avoué
qui s’y est refusé, il n’est donc pas susceptible de l’opposition par simple
requête , dans lu huitaine de sa signification.
Dans l’esp èce, 011 pourrait dire que c’est un jugement contradictoire,
parce que les qualités avaient été posées , que l ’on avait plaidé pour
fleniauder c l obtenir des remises.
�( 23 )
Le
3
ventôse
l ’on plaida
an
io ,
les
qualités
contradictoirement sur le
tendant à obtenir "ties 'seco n d es
furent
encore
réquisitoire
copies
des
p osées J
du 6 pluviôse ;
reconnaissances ; ces
copies furent de nouveau signifiées le même jour , l ’on donna même les
pièces en com m unication; l’on fit de plus sommation de venir plaider e t
continuer la cause qui serait encore appelée^au tour du rôle , à peine de
défaut fatal ; il est donc certain que ce jugement ne pouvait être atta
qué que par la requête civile ou le pourvois en cassation, si l’on était
dans le cas ou dans les délais.
Avant la révo lu tio n , cela n’a jamais éprouvé de contradiction , car
personne ne doute que la disposition de l ’ordonnance ne fut rigonreusement suivie dans les anciens parlemens et tribunaux.
Il n’y a pas un commentateur , pas un compilateur , pas un auteur
en droit , qui ne l’atteste ; les ordonnances publiées en i 53 g , article
C X IX ; D o m a t, titre II , article X V II , page 23 o ; le répertoire uni
versel de jurisprudence , rédigé par M erlin-d e-D ou ay , ex-directeur ,
actuellem ent commissaire du Gouvernement près le
tribunal de
cassation ; par G uyot , jurisconsulte , attaché au ministère de la ju s
tice , chargé d’ expliquer et interpréter les questions contentieuses de
ce ministère , e t autres jurisconsultes etc. Aux mots défaut , opposi
tion , procédure, requête civile , cassation. BriU on , dictionnaire des
arrêts , Dénisard , Rousseau-de-Lacom be , P othier etc.
L a question a été ju g é e par arrêt du parlement de Paris , le ‘i.'j
août 1 668 ; par arrêt du parlement de Flandres en
1767.
D ans l’ espèce du prem ier, au parlement de Paris , l’ avocat chargé
de la
cause
se présenta à l'audience
lorsquelle fu t
appelée , il
f i t une remontrance et demanda la remise ; il refusa de plaider ainsi
q ue le procureur , il f u t donné défaut ; le
défaillant form a opposi-
s itio n , l’ autre partie le soutint non-rp.r.pvahle . parce que le jugem ent
éta it rendu après une remontrance ; l’arrêt prononça
l’opposition non
recevable.
'
Dans l’espèce du seco n d , au parlement de Flandres , l avocat s'éta it
présenté, et. np. demandait qu’ un d éla i;
on lui dit de plaider , il dé
clara qu’ il ne pouvait le fa ir e fa u te d 'in stru ction ;
défaut , on y form a opposition , l’opposition f u t
ivable.
on prononça le
déclarée non rece
L ’ auteur qui cite les arrêts , d it que les causes étaient venues »tir
�.
(zo)
,
placets et qu'elles n'étaient point sur le rdle ; l ’espèce dans laquelle
la cause de N oyer-D ubouyt se trouve , est bien plus favorable , puis
que la
cause était au rôle public , que des sommations avaient averti
le N.o du rôle , et appelé les adversaires pour venir plaider ; que les
qualités avaient été posées plusieurs fois ; mais les intimés y ont 1énoncé
par le fuit , en
demandant la nullité de tous les actes qui avaient
été faits à leur requête depuis le jugement du G floréal an 9.
En un mot c’est la jurisprudence de tout les
tribunaux d’appel et
notamment de celui de Caen , qui vient de le juger dans la même
espèce.
C ’est encore l’opinion
des anciens jurisconsultes du
Puy-de-D ôm e , qui l’ont
délibéré , les
commissaire du gouvernement près le uibunal
ment législateur , Dartis - Marcillac , etc.
Les adversaires objectaient que cette
département du
citoyens A ndraud, D e v a l,
criminel , actuelle
disposition de
l’ordonnance
était tombée en désuétude depuis la révolution.
D ’abord ce serait une erreur de croire qu’il ait été un temps où
toutes les dispositions de l ’ordonnance de
1667 ayent cessé de de
voir être suivies ; la loi du 24 août 1790 avait réglé l’organisation
des nouveaux
n’avait rien
tribunaux
changé à
et détermine
la forme
leur compétence y mais
de procéder ; celle du
elle
19 octobre
suivant leva les doutes qui pouvaient rester à cet égard , son
article
II porte : les tribunaux de district suivront provisoirement en toutes
matières les formes actuellement existantes tant qu’il n’en sera pas autre
ment ordonné. Les formes de la procédure existante , lorsque cette loi
a été ren d u e, étaient celles prescrites par
Les lois des 20 et 27 mars 1791 , et celle du
plusieurs c h a n g e mens
l’ordonnance de
1667 5
3 brumaire an 2 , ont fait
; la première détruit la
vénalité des
offices
et leur hérédité dans les tribunaux, elle y établit des avoués ; la seconde
détermine d’après quel tarif leurs frais doivent être réglés; la der
nière les
parties
supprime , ainsi que l’ usage des requêtes , elle
laisse aux
le droit de se faire représenter par de simples fondés de pou
voirs , mais ni les unes ni les autres ne parlent de l’ordonnance de
1 6 6 7 , ni ne l’abrogent, elle a donc dû continuer à être exécutée et
suivie dans toutes les dispositions qui ne lui
sont pas contraires , et
par conséquent dans celle qui veut qu'il ne puisse être form ée d'op-
�( 5 0
position aux jugem ens en dernier ressort , rendus par défaut fa u te
de plaider à tour de rôle.
Aussi n’y a-t-il pas eu besoin d’une nouvelle l o i , un simple arrêté des
Consuls a suffi pour la remettre dans toute sa vigueur , cet arrêté a été
lu et publié dans tous les tribunaux sur le réquisitoire du commissaire
du Gouvernem ent, il n’en est aucun qui ayent refusé de l’enrcg’ oi.rer ,
aussi s’exécute-t-il par-tout ; on peut défier les adversaires de citer
un jugement où lorsque les parlies ont exigé l’exécution d e T o rd onnance de 1667 T Tes tribunaux ayent rftTKÏÏTTtés jugemens qui ne l’ayent
pas
ordonnées. ~Si là
maxime
que Tes
intimés voudraient"”- intro
duire était suivie , il n’y aurait plus besoin de rôle ; sa p u b licité, son
existence , son enregistrement , son authenticité , tout cela serait des
chimères ; les procès seraient éternels , il ne sexaient plus nécessaire _
de plaider que pour faire le sort des officiers ministériels , l ’intérêt
des parties serait à la merci de toutes
les chicanes.
Les intimés ont prétendu qu’au tribunal d’appel à Riom , cet arrêté
des Consuls et l’ordoniutnce de 1667 dans Iam spositition de cet ar
ticle n’y avait jamais été suivie , et que c’est une disposition parti
culière du règlement de ce Tribunal , que l’ordonnance de 1667 y est
tombée en désuétude.
Se serait donner de l ’ importance à cette objection que d’y répondre,
se
serait même un moydn
et
jurisconsultes ou officiers ministériels qui composent ce tribunal ,
dont les connaissances
de blesser
en droit ,
leur
la délicatesse des
membres
attachement aux lois de la
République , et leur impartialité , sont connus et cités avec éloges.
11 est dans l’ordre des choses possibles , que personne
n’aye récla
mé l ’exécution de l’ article de l’oWonuance de 1667 à cet é g ard ; mais
si la loi s’exprime ainsi , son application peut être invoquée , sans
qu’il y ait rien d’extraordinaire; l’appelant n’aurait-il que ce seul m oyen ,
les intimés 11e pourraient le
combattre , parce que quand
la loi est
écrite , ou doit l’applinuer même sans que la partie 1 invoque , a plus
forte raison,quand la p a n ie le
r e q u ie r t .
Les intimes 11e peu\entarguer avoir
été surpris , trompés , la i>rocédure s’est
faite trop lentem ent pour
^appelant qui est toujours dépouillé de ses biens. Si l ’on examine l ’usage
ou lu jurisprudence des anciens tribunaux , les
(i u^‘ la jurisprudence
parlemens , on verra
du parlement de Bor?Îeaux
était l’exécution de
�( 52 )
l ’article III du titre X X X V de l’ordonnance de
sa jurisprudence du parlem ent, imprimée en
i ÇGy ; S a lv ïa t, dcms
1787 ,
page 5 g 6 , s’ex
prime ainsi : l’opposition formée par requête dans la huitaine est reçu e,
hors le cas oii_Jta cause a été appelée à tour de rôle.
O n vo it, en parcourant Rodier sur l’article III du titre X X X V , que
telle était la jurisprudence du parlement de Toulouse.
^
L e parlement de Grenoble était aussi sévère et aussi e x a ct observa
teur de la loi , que celui de Toulouse et de Bordeaux ; c’est ce que
prouve un arrêt de règlement de cette c o u r, du 5 septembre 1 7 8 5 ,
portant que l’opposition formée à un jugement rendu en dernier ressort
lorsque la cause a été appelée à tour de rôle , n’est point recevable.
L e parlement de Douay jugeait
reusement observé
de même ,
et a toujours rigou
la même jurisprudence.
E n thèse générale , l ’usage peut-il abroger la loi ?
Sur cette question, on trouve dans le droit romain deux textes qui
sem blent, au premier apperçu , se contredire.
L a loi X X X I I , paragraphe I.er , au D ig e ste de
l ’usage
général et universel
peut quelquefois
legibus , dit que
déroger aux actes de
l ’autorité législative : Nam quid interest , suffragio populus voluntatem suam d ec la r et,
illud
an rebus ipsis et fa c tis ? quarè rectissimè etiam
receptum e s t , ut leg es non solum suffragio legislatoris , sed
etiam tacito
consensu omnium per desuetudinem
abrogi^tur.
Au contraire la lo i II au code , quæ sit longa consuetudo , déclare
que l’usage, quelque respectable qu’ il soit , ne peut pas prescrire contre
la raison et contre la
loi.
Consuetudinis ususque
longœvi
non vilis
autoritas est ; verum non usque a d eQ su i valitura momenlo , ut aut
rationem v in ca t, aut legern.
Mais à supposer que les adversaires voulussent persister à invoquer
un usage qu’ils prétendraient avoir
Riom , depuis son organisation ,
été
on leur répondrait
l ’usage fasse ainsi cesser l’empire de la
fut concentré dans
une partie du
suivi au tribunal d’appel à
que
pour que
l o i , il* ne suffirait pas qu’il
territoire dans lequel la loi a été
originairement l u e , publiée et enregistrée , il faut qu’il soit commun
à tout le territoire de la république.
Lorsque l ’usage n’est pas commun à tous le pays pour lequel la
loi;
�,
loi a été faite
( 33. )
il n’a pas pour lui la volonté
il ne peut conséquemment
générale du peuple ;
faire loi , et par une conséquence u lté- ■
rieure -, il ne peut abroger une disposition législative.
L a première loi citée , la lo i
X X X II, paragraphe I , au digeste de
legibus , n’attribue pas à des usages locaux le pouvoir de faire tomber
en désuétude les lois- générales ; il ne le donne qu’aux usages qui
sont l’expression tacite du consentement unanime du peuple : Tcicito
consensu omnium per desuetudinem abrogantur.
.Voilà le principe ; il a été consacré par le tribunal de cassation,
par deux jugemens des
12 vendémiaire an q e t u
pluviôse an 1 0 ,
où il n’a eu aucun égard à l’usage qui était établi contraire au texte
de l’ordonnance de 1667.
L ’usage que l’on voudrait invoquer 3 ne peut donc pas déroger au
texte de la loi et à la raison. L a loi dans la République
dit que sa volonté souveraine
française
doit être respectée. E n conséquence, le
législateur a-t-il voulu dans la lo i du 27 ventôse an 8 , article L X X X ,
que le Gouvernement, par la voie de son commissaire, et sans préjudice
du droit des parties intéressées , dénonce au tribunal de cassation,
section des requêtes , les actes par lesquels les ju g e s auraient excéd é
leurs pouvoirs , c’est-à-dire jugé , contre les dispositions textuelles de
la loi.
L ’art.
L X X X V III
de la même loi veut que si le commissaire du
Gouvernement apprend qu’il ait été rendu en dernier ressort un ju g e ment contraire aux lois et aux formes de v ro céd er, ou dans lequel
un ju g e ait excédé ses pouvoirs , et contre lequeF~cepeTidant aucune
des parties n’ait réclamé dans le délai jix é ; après ce délai expiré*,
il en donnera connaissance au tribunal de cassation ; et si les form es
ou
les lois ont été violées, le jugem ent sera
parties
cassé sans que les
puissent se prévaloir de la cassation pour éluder les dispo
sitions de ce jugem ent , lequel vaudra transaction pour elles.
D ’après la disposition textuelle
des
lois
françaises
actuellement
en vigueur , on 11e peut donc opposer l’usage, et la jurisprudence
ne peut l ’emporter sur le texte de la l o i , ni l’abroger. Le texte de
la loi
2y ventôse an
8
veut que
l’on
ne
puisse juger contre
les dispositions des lois. L ’arrêté des Consuls a ordonné que l’ordonnauce du 1667 serait mise à exécution dans tous les tribunaux de la
5
�.
. '
( 54 }
République ; le commissaire du Gouvernement est chargé de la part du
Gouvernement de l’honorable commission de requérir l’exécution des lois,
même contre la volonté des parties ; c’est la disposition textuelle de l’ar
ticle L X X X V III de ladite loi du 27 ventôse an 8 ; le citoyen N oyer-D ubouyt l’invoque, il conclut donc ainsi :
Attendu que d’après les dispositions textuelles de'l’arrêté des Consuls ,
du 18 fructidor an 8 , l’ordonnance de 1667 a été mise à exécution dans
tous les tribunaux de la R épublique, pour la forme de la procédure ;
Attendu que le paragraphe III de l ’article III du titre X X X V de
l’or
donnance de 1667 défend de recevoir les oppositions formées aux jugemens rendus en dernier ressort, par défaut faute de p laider, lorsque la
cause a été appelée au tour du rôle ;
Attendu que les articles 80 et 88 de la loi du 2 7 ventôse an 8 ordon
nent textuellement l’exécution des lois ; que quand même les parties vou
draient et consentiraient à ne pas les exécuter, le commissaire du Gou
vernement, près les tribunaux, doit requérir et se pourvoir en cassation
contre de pareils jugemens 5
’
.
Atteudu que l’ opposition formée par l’avoué T a rd if, le 18 ventôse an 10,
avait pour seul m otif que le jugement du 11 ventôse an 10 avait annullé
le jugement du 6 floréal an 95 que les dames N o y e r , et G reliche leurs m a
ris, ayant demandé ensuite la nullité
de ce même jugement du 6 floréal
an 9 , en désavouant le citoyen N oyer-Lagarde, et faisant juger le désaveu
bon et valable contre lu i, le citoyen Noÿer-Lagarde y ayant consenti >
l’opposition qui avait été formée en leur nom par l’avoué T ardif, était par
conséquent annullée par la volonté de toutes les parties ;
Attendu qu’après ce jugement ( qui par le
tion
fait annullait l ’opposi
) le jugement du onze ventôse an 10 a été signifié à
dom i
cile , et qu’aucune des parties condainuées ne s’est pourvue contre ses
dispositions ;
Attendu qu’on ne peut invoquer un usage local et particulier, lorsque
cet usage est en opposition avec une loi précise et formelle faite pour la
généralité de la République française; que pour qu’ nue loi générale puisse
être; envisagée comme étant tombée en désuétude, il est nécessaire d’éta
blir le non usage dans la généralité de l’htat ;
Il plaise au tribuual débouler les intimés de l’opposition formée en leur
nom par l’avoué Tardif au jugement du 11 ventôse an 10 , ou en tout cas1
�Ç - 35’ )
les déclarer non recevables; ce faisant, ordonner que; ledit jugement, ren
du le i l ventôse an 10 sera exécuté suivant sa forme et teneur, condam
ner les intimés aux dépens.
.
•
, ■
o^CoyenùL- JuênviauecL..
L ’appelant aurait pu s’eri tenir à établir ses faits et prendre des conclu
sions, soit sur l ’appel du désaveu, soit sur le débouté ou la fin de non
recevoir de l ’opposition formée à la requête des intim és, le 1 8 ventôse
an i o , par l’avoué T a rd if, au jugement du n ventôse an io .
Mais comme dans les ci-devant parlemens ou cours souveraines, aujour
d’hui représentés par les tribunaux d’ a p p e l, l ’on plaidait et l ’on écrivait
à toutes fins; quoique convaincu que l’adjudication de ses conclusions n’é
prouvera aucune difficulté ; s i , contre son attente, il y en avait, en ce
cas , et sans aucune approbation de sa p a r t, il va prendre des conclusions
à tontes fins, et établir ses moyens subsidiaires.
i . ° L es dames N oyer, et Greliche leurs maris , et N oyer-La g a rd e, in
timés , héritiers de Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ubouyt, par son testa
ment du 19 therm'dor an 2 , qui n’ont recueilli sa succession qu’ à ce titre,
peuvent-ils être recevables à critiquer les reconnaissances que leur père
avait fa ite s à son épouse Françoise T ixier , soit celles antérieures à la.
révolution, soit celle contenue dans son testament ?
Comme il est incontestable q u e , sous aucun rap p o rt, ils ne peuvent
être admis à les quereller ni à les critiquer , vidht naturellem ent la question
suivante.
2 .0
Peuvent-ils retenir la succession de Françoise T ix ie r , autre que
son m obilier, sous le prétexte que Françoise T ixier avait f a i t A tous ses
etfa n s , du nombre desquels éta it N oyer-D ubouyt, en
q u a lité
d’héritiers
de Jean-Baptiste N oyer-D ubouyt, son m ari, une démission de biens, un
acte réel de partage de sa succession, par acte sous seing privé ?
Cette prétendue démission ,
cet acte de partage ne faisant point
pièce de la procédure , n’étant ni vérifié , ni enregistré , ni signifié s
ni connu , peut-il faire un titre pour les intimés ?
Sur la première question , il suffit d’observer qu’étaut au lieu
place du mari de Françoise
•
et
Tixier , comme étant ses héritiers , ils
5 a
�.
.
(
5
6
.}
.
n’ont pas plus de droit qu’il en avait lui-m êm e
.
.
il n’aurait pu reve
nir contre ses prqpres actes.
2 .0 Ce qui les rend
non-recevables à les quereller , ces reconnais
sances , c’est que celle de
dans le testament qui les
12 ,000 liv res , qui est la dernière , est
rend
héritiers ; ils. la
reconnaissance , puisqu’ils en ont payé
saisir de la succession ; celle-là
connaissaient cette
l’enregistrement avant de se
maintient
les
autres , puisque
la
clause y est , ainsi les héritiers du mari n’auraient pas osé la dispu
ter à leur mère
de son vivant ; ils
n’ont pas plus de droit à les
Contester à son héritier , après sa mort.
Mais le père a motivé ces reconnaissances ; il dit qu’elles
pro
viennent des biens qu’il a vendus appartenant à son épouse ; ces biens
étaient des immeubles
qu’il n’avait pas le
droit de vendre , dans
lesquels sa femme pouvait rentrer , dans lesquels son héritier pour
rait et peut rentrer s’ il l’eût jugé convenable à ses intérêts.
En quoi consistaient ces biens ? en une maison que M. Reboul avait
acquis pour le prix extrêmement modique de 3,120 livres : cette maison
vaut aujourd’hui 10,000 livres,
2 .° En un jardin , grange et colombier , placés dans la ville
Clef-mont ,
dans
un des quartiers des plus
de
agréables , qui ont été
vendus , on peut le dire , au sixième de leur valeur 1,200 livres : cet
objet vaut aujourd’hui au moins 8,ooo~Iîv.
Une vigne de 10 œuvres située dans urç des meilleurs coteaux de
.Clermont : cette vigne v a u f aujourd’hui 4,000 liv.
4.0 Une terre, également à C lerm ont, que l ’on estime 1,200 liv.
Ces reconnaissances ont encore d’autres sources; la vente des meubles
que le père a déclaré avoir faite; les 1 ,2 5g liv.
qu’il a avoué avoir retiré
du greffe; les 1,400 liv. qu’ il avait touché chez M. Berard-de-Cliazelle ;
les 600 liv. qu’ il-avait aussi touché chez
M. de V ich y-de-V arvasse; de
plus les contrats de rente à prix d’argent, les obligations, etc.; la créance
duç par sieur Ajmet. Tardif, etc.
Ai.qiis ces objets ou valeurs, il faut ajouter les
36 ,000 liv. prises par lui
dans l’armoire de sou beau-pcrc; les 8,000 liv. en dépôt chez M. de Het)m l , et les 6,000 liv. que la mère lui avait remis en louis d’or : cette déclaiation de 6,009 liv,, les adversaires 11e la diront point fuile pour la cause.
�.
3
7
}
Ainsi l’on voit que les reconnaissances ne font pas le quart des droits
de Françoise T ix ier; il faut ensuite y ajouter la succession de M arie-Gabrielle T ix ie r, sa sœur.
Mais une autre fin de non recevoir contre les intimés, c’est qu’à suppo
ser que l ’appelant dût établir la consistance des biens de sa m ère, qu’il
fût dans une hypothèse où la lo i l’y contraindrait, ou il y aurait du doute,
il dirait à ses adversaires : vous êtes non recevables, parce que le crime
que vous ave/, commis en violant les scellés , en recelant les titres de l a
fam ille. m’en ôterait les moyens, et c’est par v otre fait que je suis dépouillé •
de ma propriété, c’est par votre coadulte répréhensible
sans doute que
j’en suis empêché ; mon titre est la bonne foi de mon père; la sincérité
des actes qu’ il a faits, il n’a pu ni voulu rien faire qui pût être soupçonné
d’illégitime ; ces actes étaient pour lui des actes de devoir qu’il a rempli et
qui ne pouvaient nuire à personne ; et v o u s , si vous vous croyez, en droit
de les contester, commencez par abandonner sa succession qui ne vous était
donnée qu’à la charge de respecter et honorer tous les titres qu’il avait
faits , et tous les engagemens qu’il avait pris.
Les reconnaissances portent le caractère de la sincérité par elles-m ê
mes , parce que la fraude ne se suppose pas ; celui qui ? allègue doit la
prouver.
M a is ,
disent les intim és, ce sont des avantages indirects que la loi
défend.
Reconnaître ce que l’on d o it, ce que l’on a tou ch é, n’est pas faire un
.don, c’est payer sa dette; la lo i ne défend pas de payer ses dettes, et l’a
vantage est pour celui qui s’acquitte.
S je u x ie m o
^2netfoovi.
Peuvent-ils retenir cette succession , à Vexception du mobilier trouvé
lors et après le décès de Françoise T ixier , ou ne la fa ir e consister que
dans ce mobilier qu'ils abandonnent à l'appelant , sous lep rétcx te d’une
démission d’un partage de succession anticipé, f a i t par suite de Pexécu
tion de l’effet rétroactif de la loi du 17 nivose an 2 ; dém ission, départe
ment ,a c te d e partage qui nefont, point pièce auprocès que Noyer-D ubouyt
/l(" reconnaît p a s , parce qu’elle n’est ni sig n ifié e , ni reconnue, ni
�( 38 )
avouée , e t qui en outre a été annullée par tous les actes fa its par les
adversaires , et spécialement par jugem ent du
25 ventôse an 5 .
Cette prétendue démission de biens , cet acte de partage annullé est
un acte qu’ils n’ont pas fait connaître , que l’ on ne retrouve point au
contrôle, qui n’est ni reconnu , ni vérifié , ni~enregistré^, ni signifié ;
pour qu’ il pût faire pièce au pro c è s , il faudrait le mettre dans les for
mes voulues par la lo i.
Cet acte , en le supposant ex istan t, est un acte de partage de succes
sion an ticip é, un département que faisait Françoise Tixier à tous ses
enfans , en qualité d'héritiers de Jean-Baptiste-Joseph N oyer-D ubouyt ,
son mari.
C et acte avait donc été fait avec l ’appelant en qualité d’héritier de
son p ère, et il ne l’était héritier que par l’existence de l’effet rétroactif de
la loi du 17 nivose an 2 , qui a été rapportée.
Il est incontestable que la mère avait la faculté de l’antiuller , parce
que tous les actes faits par les ascendans à leur descendans en ligne
directe , quelque forme qu’ait l’acte , quand il opère transmission de la
totalité des biens aux descendans , sont toujours regardés comme des
partages par anticipations de succession qui sont révocables à volonté T
à moins qu’ils n’aient été faits par contrat de mariage.
Mais les intimés ont été si fort persuadés que cet acte avait pris
son fondement dans l’effet rétroactif de la loi du 17 nivose au 2 ,
comme étant fait avec l’appelant en qualité d’héritier du père com
m ua
; qu’eux
mômes ont fait annuller tous les actes faits avec l u i ,
môme les actes de vente
qui avaient été la suite de cet acte ’ de
partage , et
qui avaient pris leur
jugement du
25 ventôse an 5 , la nullité de tous les actes faits daii3
fondement dans c e lu i-c i; par le
la famille a été -prononcée comme étant fies partages
qui
naissance et qui n’avait d’effet que par l’eflet rétroactif de
ont pria
cette loi.
L ’exemple que l’on va citer, que les adversaires 11e peuvent contre
di re, eu est la p re u v e ,
L ’on ne pouvait faire
puisque c’est eux qui en sont les acteurs.
le partage de la succession du
père sans
faire celui de la succession de la mère , parce que tous les biens de
�.
la mère étaient
était
( 39 } ,
dans ceux du père ; la première
fondas
donc celui de la mère ,
l’engageant à
faire
un
et l ’on ne
pouvait le
opération
faire
qu’en
acte de partage entre ses enfans , qui avec
N oyer - Dubouyt étaient alors tous héritiers de son mari -, aussi l’acte
fut-il fait avec eux en cette qualité : au même moment Marie Noyer ,
fils aîné , vend à ses quatre cohéritiers le cinquième
qu’ il prenait
dans la succession du père et de la mère , qui n’en faisait qu’ une ;
il
fut expliqué que la portion de la succession de
partie ,
pourrait lui contester lorsque le
Au
la more en faisait
sous la réserve du cinquième de son mobilier , que l ’on 11e
décès de la mère arriverait.
moyen du partage fait par la
m è re , et de la vente faite par
l’aîné des héritiers , il ne resta plus qu’ à diviser ces deux successions
entre les
4 héritiers , du nombre desquels était Noyer-Dubouyt ; il
fut divisé en deux lots , un pour Noyer-Dubouyt et Noyer-Lagarde,
et l’autre pour les dames Noyer et leurs maris.
L a succession de la mère et du père fut donc ainsi divisée , par
Fexistence de l’effet rétroactif de la loi du 17 nivose , puisque NoyerDubouyt y figurait comme héritier de son père , et qui 11’a plus été
héritier , lorsque cet effet rétroactif a été aboli^ que les adversaires
l’ ont fait juger contre lui.
Trois mois
après , Noyer-Lagarde vend à N oyer-D ubouyt sa por
tion à lui revenante dans les immeubles ; l’ acte était du 1 5 nivose
an
3.
L’effet rétroactif fut rapporté au mois de fructidor an
4
fut faite la
3 , et en l’au
loi du 4 vendémiaire an 4 , qui ordonnait le mode
des partages à refaire , lorsqu’ils l’avaient été par la
rétroactif dont était iniectée la loi du
17
suite de l’effet
nivose.
Immédiatement après , N oyer D ubouyt est' attaqué par les intimes ;
N oyer-Lagarde
et Marie
N oyer prétendent que les actes
de vente
qu’ils ont faits ne sont que des partages qui avaient pris leurs sour
ces dans l ’effet rétroactif de la loi du 17 nivose an a , puisque tous
les actes de
famille avaient été faits
avec N oyer-D ubouyt en cette
qualité ; en conséquence ils ou demanderont et firent prononcer la nul
lité : ce partage du bien <le la mère , cet acte du 22 fructidor an 2
<st du nombre , puisque
les eflets qu’ il produisait
ju m Noyer-Du-
�(
4o
)
’
bouyt ont eu le même sort ; et s’ils eussent
alors voulu
et enten
du le faire considérer comme tout autre acte , même comme vente
ordinaire dont ils auraient voulu souteuir l’e ffe t, ils l’auraient fait pro
noncer par exceptions.
Ils auraient bien fait ordonner que Noyer-Dubouyt prendrait avec eux
un cinquième , puisque l ’acte était
fait à son profit
comme au leur ;
ils n’auraient pas fait ordonner que N oyer-D ubouyt leur paierait à chacun
1,000
liv. d’après leur contrat de mariage , somme qui
pas d u e, ne pouvant pas cumuler la qualité d’héritiers et de légitimâmes ,
y
j s Æ G• 4
avoir la succession par le moyen du partage du 22
fructidor, et les
ïjOoo liv. chacun par l’effet de leur contrat de mariage.
Ce n’est que dans leur écriture du 18 nivôse qu’ils ont essayé à
balbutier quelques moyens pour tâcher de faire considérer cet acte
comme une vente pure et simple ; mais dans la plaidoirie , leurs défenseurs
qui étaient fort embarrassés, pour d’ une très-mauvaise cause en faire en
apparence une passable, abandonnèrent ce m oyen; ils s’ attachèrent seule
ment à contester la valeur des reconnaissances ; ils embrouillèrent leurs
plaidoiries par des demandes de créances comme héritiers de le ur père
envers la -succgssicm de la mère"7 ils ne savaient de quelle manière con
clure pour revenir sur leur répudiation , et la combiner avec la qualité
d’héritiers et de créanciers qu’ils voulaient prendre d’une succession qu’ils
représentaient comme n’ayant rien ; enfin ils mirent le tribunal dans la
nécessité d’appointer la cause au conseil.
_ Il reste pour constant, et les intimés ne peuvent donner des moyens
pour empêcher que la cause 11’ait été jugée définitivement et en dernier
ressort , sans pouvoir recommencer ; la loi est écrite , elle est invoquée.
L appelant est convaincu qu ils 11 en auraient pas été plus heureux quand
ils seraient dans le cas de revenir sur leurs p a s, par la voie de l’opposi
tion ; toute leur con du ite, tous leurs actes sont marqués au coin de la
mauvaise foi ; et les cliicaues sans nombre mises en actions , n’ont servi
qu’à retarder l’exécution du jugement du 11 ventôse an 1 0 , contre eux.
Néanmoins et ^subsidiairement seulement , sans aucune approbation
préjudiciable
de sa*pdrt-‘,‘ Ktfipelànt croit devoir proposer au tribunal
d’appel les conclusions suivantes ;
'
En
ne leur serait
�(4 0
‘
E n ce qui touche la réalité et la sincérité des reconnaissances, attendu
que la fraude ne se présume pas , que l’existence d’un titre en établit la
vérité ; que c’est à ceux qui l’allèguent à en faire la preuve ;
.
Attendu que les intimés sont n o n recevab les, i . ° à alléguer la fraude ,
puisque c’est eux-mêmes qui ont brisé ou violé les scellés où reposaient
les titres de famille ; 2 .0 non recevables à contester les reconnaissances,
puisqu’ ils ne sont héritiers du père commun qui les a faites que par le
même acte qui les contient, et qu’ils ne peuvent séparer le commodo de
Vincommodo.
j
Attendu d’ailleurs que les sommes touchées ,
chez M.
soit au greffe ,
soit
B erard-de-C hazelle, V ich i-d e-V arvas , et la valeur des biens
im m eubles, sont d’une valeur au-dessus du montant des reconnaissances ,
que d’ailleurs elles représentent aussi la succession de M arie-Gabrielle
En ce qui touche la démission de b ie n s, l’acte de partage des biens
de la mère ;
.
•
Attendu que l ’acte ue fait pas pièce au procès , qu’elle n’est ni con
nue , ni vérifiée , ni enregistrée , ni signifiée , et qu’elle a été annullée
par les actes judiciaires faits par les intim és;
Attendu que quand il existerait, ayant été fait avec N oyer-D ubouyt;
en qualité d’héritier de son père , il aurait pris sa source dans l ’effet
rétroactif de la loi du 17 nivose ,
que conséquemment il serait nul ;
Attendu que les intimés l’ont considéré eux-mêmes comme t e l , puis
qu’ils l’ont fait aunuller par jugement du
25 ventôse, que les effets qu’il
avait produits avec N oyer-D ubouyt ont été aunullés ;
Il
p la’se au tribunal débouter les intimés de leurs oppositions au juge
ment du 11 ventôse an 1 0 , ou ea tout c a s , les déclarer non r e c e v a b l e s ,
ordonner que ledit jugement sera exécuté suivant sa forme et teneur j
condamner les intimés aux dépens.
.
N O Y E R - D U B O U Y T .
V A Z E I L L E S ,
père , avoué.
im iS / u tY
~
Clem o n t fe r r a n d d e l’imprimerie de L IM E T , P èr e et F us.
i
c
t
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Noyer-Dubouyt, Jean-Joseph-Marie. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Noyer-Dubouyt
Vazeilles père
Subject
The topic of the resource
successions
confiscations
fisc
abus de confiance
avoués
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Joseph-Marie Noyer-Dubouyt, habitant de la commune de Chamalières, appelant ; contre Jeanne Noyer et Pierre Greliche, son mari ; Marie-Gabrielle Noyer et Joseph Greliche, son mari, habitans la commune de Mozun ; et Anne Noyer-Lagarde, avoué près le Tribunal civil de première instance de l'arrondissement de Clermont-Ferrand, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Limet (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1750-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0236
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0237
BCU_Factums_G1319
BCU_Factums_G1320
BCU_Factums_G1322
BCU_Factums_G1324
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53735/BCU_Factums_M0236.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chamalières (63075)
Mauzun (63216)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
avoués
confiscations
fisc
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53733/BCU_Factums_M0234.pdf
78e90b66d07aefbf4e6875d40d25fe59
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Text
MEMOIRE
Ire. Section.
P O U R
J
acques
B R U N E L D E P R IV E Z À C , proprié
taire, habitant actuellement du lieu de C h a n z y ,
mairie de B esset, département d’A llie r, intimé
et défendeur en opposition
C O N T R E
C h a r l e s - P i e r r e et G a b r i e l L A N D R I E V E
,
,
fermiers, habitans du lieu de Chantagret mairie du
,
Peyrouse appelans et demandeurs en opposition.
le cours du papier-m onnoie, le citoyen de
Privezac a réafferm é aux appelans deux domaines où
leur famille a trouvé le germe d’ une fortune très-con
séquente pour eux. L e bail a été fait en l’an 4 pour
commencer eu l’an 5 ; le p rix en a été exprim é en nuA
P
en d an t
�.
( 2 }
.
méraire. E n abusant des nouvelles lois sur les t r a n
sactions entre particuliers, les appelans veulent se jouer
de leurs promesses ; ils ont conçu le projet inique de
payer plus de moitié moins que ce- à. quoi ils sont
obligés. Il en résulte la question de savoir si un fer
m ier qui a requis la réduction d’un bail à ferme
germ inal an 4 , au p rix d’un bail ancien, peut obtenir
cette réd u ctio n , quoiqu’il n’ait pas payé dans le mois
de la publication de la lo i du 6 messidor an 6 , l’arriéré*
des fermages. Les premiers juges ont dit non ; leur langage
est celui de la loi..
F A IT S.
L e sieur de T illy , m aréchal des camps et armées de
France, demeurant à P aris, étoit propriétaire de la terre
de B eauvoir, située arrondissement de R iom ,. canton de
M ontaigut-les-Com brailles.
D e cette terre dépendoient deux domaines très-con
sidérables, connus sous les noms de Cliantagret et C ornassat. Les L an driève en ont été fermiers pendant plu
sieurs générations. Ils y ont acquis plus de 80,000 francs;
la commune renommée leur donne 60,000 francs d’ar
gent' comptant.
L e 5 août 178 4, le sieur de T illy étant alors en son
autre terre de B ostes, département d’A llie r , distante
de huit lieues de celle de Beauvoir, le sieur de T illy re
nouvela au profit des L andriève la ferme des domaines
de C liantagret, et Cornassat. L e cours de ce nouveau
bail devoit commencer seulement î\ la Saint-Jean 178&,
et finir à lu Saint-Jeun
1797*
Pr^x ostensible fut de
�(3 )
'
îa somme de 1,300 francs argent, quarante - cinq- livres
cle beurre et douze poulets. L e bail contient plusieurs
clauses inutiles à rappeler ici.
L e sieur de T illy habitait la capitale ; sa naissance
et son rang l’attaclioient à la cour. E loigné de ses biens,
il n’en connoissoit pas le produit réel : les L an driève
les exploitaient depuis longues années; il avoit la bonté
de s’en rapporter trop à eux : aussi s’y sont-ils enrichis.
D ’ailleurs, le sieur de T illy étoit n ob le, et par cette
raison exem pt de taille; comme noble, il ne de voit que.
des vingtièmes : cette imposition étoit assise en propor
tion des p rix de ferme. Par ce m otif, tous les gentils
hommes a voient un grand intérêt a mettre en évidence
des fermages moindres en sommes; mais ils 11’y perdoient
rien. Ils recevoient des pots de vin conséquens. T o u
jours il y avoit Ou des co n tre - lettres ou des eiTets an
nuels , qui pour l’ordinaire égal oient le p rix exprim é
au bail.
I l en fut ainsi entre le sieur de T illy et les L an
d riè v e , en 1784. L e sieur de T i l l y , dont les alfaires
n ’étoient pas en très-bon état, passant alors une reno
vation de bail qui ne devoit commencer que quatre ans
après, (à la Saint-Jean 17 8 8 ), le sieur de T illy , disonsnous, reçut beaucoup d’argent com ptant, et le p rix écrit
dans l’acte pardevant notaire, en fut d’autant moindre.
L e 13 juillet 1 7 9 0 ,1 e citoyen de Privezac acquit la
terre de Beauvoir et dépendances, par acte passé devantnotaire à Paris : la vente comprenoit beaucoup de droits
féodaux que la révolution a fait disparoîlre.
L e citoyen de Privezac arrivé sur les lie u x , trouva
A u
�( 4 ) _
tontes choses dans le plus mauvais ordre. II vit les L a n driève en possession des deux domaines de Chantagret
et Cornassat -, il fut frappé de la vilité du p rix du bail :
mais il étoit obligé à l’exécuter ; il le lit.
' L orsq u ’il fut question de passer nouveau b ail, les
L andriève se m irent sur les rangs. Plus d’un an avant
l ’expiration de celui de 178 4 , ils prévinrent le citoyen
de Privezac ; ils devinrent très-pi'essans. Celui-ci étoit
dom icilié dans le département de l’A v e y ro n , où l’on attachoit peu de p rix au papier-m onnoie. Q uoiqu’il eût
à se plaindre de ce que les Landriève l’avoient payé aussi
avec ces non-valeurs, ce ne fut pourtant pas une raison
d’exclusion contr’e u x -, il se contenta de faire avec eux les
conventions qu’on faisoit alors pour n’avoir que des écus,
ou tout au moins la valeur représentative des écus.
A in si il fut passé bail entre les parties, ( et pardevant
n o ta ire,) le 8 germ inal an 4 ; il fut fait pour neuf ans,
qui devoient commencer le 24 juin 179 7, (id e s t, le 6
messidor an 5 ) ; il y est dit : à titre de b a il à fo r m e et
PRIX
D’ARGENT.
. C e bail contient à peu près les mêmes clauses que celui
de 178 4; il y a pourtant cette d iffére n ce, que p ar
l ’article X I I , le citoyen de Privezac donna aux L andriève
le droit de prendre chaque année dans un b o is , appelé
les Saulzeixr la m oitié d’une douzième portion de bois,
avantage que ne leur accordoit pas le bail de 1784; il
y a aussi cette autre différence, que p a rle bail de fan 4 ,
les Landriève
furent chargés
des contributions,' tandis
«
^
qu’ils 11’y étoient pas obligés par celui de 1784.
.
L e prix, annuel du bail de l’ail 4 fut convenu à la
�( 5 }
..
.
Somme de 3,000 francs, payable au dom icile dn citoyen
de Privezac et en numéraire (1).
Cette somme est le juste p rix de la ferme de.ces deux
domaines ; et les fermiers peuvent encore y faire de trèsbonnes affaires.
A la suite viennent les bestiaux de ces deux domaines.
Les Landriève reconnoissent a v o ir, depuis 1782, six
bœufs arans, neuf vaches m ères, un taureau, line v êle,
trois suivans et tx-ente brebis. Les bestiaux à cornes sont
estimés à la somme de 5a 6 francs : les L an driève s’en
gagent à en rendre pour môme somme en fin de ferm e;
quant aux b rebis, ils doivent seulement les remettre
tête pour tête.
Toutes ces précautions étoient dictées par les circons
tances d ’a lo rs. Instruits par le passé, les propriétaires
en usoient ainsi p o u r éviter l’écueil d u papier-monnoie.
I,e citoyen de Privezac étoit dans la ferm e persuasion
d’en avoir exprim é assez pour s’en mettre à l ’abri ; mais
il ne fut pas long-temps dans cette sécurité, les L a n d rièv e,
dans lesquels il lui avoit paru quelque honn êteté, se
m ontrèrent tels qu’ils sont. L e 9 vendém iaire an 6 , ils
lui notifièrent, en son domicile dans l’A v e y ro n , que le
(1) A rt. X Y I . E l enfin pour le p r ix de ladite ferm e , lesdits
preneurs ont promis et se sont obligés de payer audie citoyen
bailleur} chacun a n , a u x lieuoc portés ci-dessus, l a somme de
3,000
l'HANCS EN NUMÉltAIUE OU VALEUR nEHlÉSENTATTVE , Cil deUX
termes égaux tic chacun i , 5.oo francs; le premier payem ent échoira
le 11 novembre 1797 , le second le 24 ju in 1798 et a in si con
tinuer, etc.
�.
.
(6 )
,
bail du 8 germinal an 4 , se trouvant passé entre le pre
m ier janvier 1792 et la publication de la loi du 5 ther
m idor an 4 , ils en requéx’oient la réduction au taux
de celui existant en 179 0 , (d e celui du 5 août 1784 ).
Celui de 1784 n’ayant qu’un p rix ostensible, un p rix de
1,300 francs , tandis que lors de ce bail ils a v o i e n t versé
beaucoup d’ax*gent dans les mains du sieur de T illy ;
il suivroit de cette perfidie que les L andriève jouiroient
des biens du citoyen de P rivezac, pour une somme infi
niment inférieure à la valeur réelle de son produit.
L e 16 nivôse an 6 , le citoyen de Px*ivezac fit aux
Landi’iève commandement de payer la somme de i , 5oo fr.
montant du demi-terme alors échu. P ar cet acte, il fit
élection de domicile en sa maison à Pagas dans l’A v e y r o n ,
( et encore en la m aison .et dom icile du citoyen J e a n
B r u n , habitant du lieu de L a - M o iso n -N u e, com m une
du P e jr o u s e , -pour la décade seulement. Il nous a semblé
nécessaire de rapporter ici le m ot pou r mot de cette
élection ).
L e 21 du même mois , les Landrièv.e firent au citoyen
de P rivezac, ( au domicile du citoyen Brun ), des offres,
i ° . de la somme de 65o fran cs, formant le demi-terme du
ferm age sur le taux du bail de 178 4 ; 2°. de celle de
42 li'ancs pour la dîme supprimée ; 30. de celle de 6 liv,
I.o sous pour frais du commandement -de payer ; et
rien pour le beurre et les poulets; et rien pour le bois
des Saulzeix. L e citoyen Brun n’avoit pas pouvoir de
toucher ; ces offres ne furent pas reçues.
A p rès avoir cité au bureau de p a ix , et en vertu de
procès verbal de non conciliation, le 26 du même m ois,
�(
7
).
.
les Landriève assignèrent le citoyen de P riv e z a c , au
tribunal civil du département du P u y-d e-D ôm e, i ° . en
réduction du prix du bail de l’an 4> au taux de celui
de 1784; 20. en réitération et consignation de leurs offres.
Cette assignation fut donnée au dom icile du citoyen Brun.
A cette époque, le citoyen de Privezac étoit dans sa
terre de Pagas ; les Landriève profitèrent de la circons
tance pour prendre contre lui jugem ent par défaut ; il
est du 27 messidor an 7.
P ar ce jugem ent, le p rix du bail de l’an 4 est réduit
au p rix de celui de 178 4, en y ajoutant 42 francs pour
la dîme. Les Landriève réalisèrent leurs offres de la
somme de 692 fra n cs, seulement pour le terme échu le
2,1 brumah-e an 5 , ou frais, pas un centime pour ceux
échus depuis. Leurs offres sont déclarées suffisantes; la
consignation leur en est permise aux frais du citoyen de
Privezac ( 1 ) .
(1)
Attendu que d’après l’article V I de la loi du 9 fructidor an 5,
tous les haux passés entre le 1". janvier 1792 et la publication de
la loi du 5 thermidor an 4 , sont réductibles aux prix des baux des
mêmes objets en 1790, en y ajoutant les droits supprim és, quel
ques expressions et dénominations de inonnoie que les baux em
ploient.
A ttendu que tous cloutes à cet égard sont levés par l'article II de
la loi du 6 messidor an 6.
A llen d u que le bail consenti par le défendeur, le 18 germinal
an 4 , est placé au nombre de ceux sujets à r é d u c t io n .
A llen d u le fait constant que le bail desdils biens ne s’élevoit,
en I 79°> (Iu’à une somme de i,5oo frîmes.
•
Attendu que conformément aux dispositions de ladite loi du.
�.
.
.
.
( 8 )
.
P oin t de signification de ce jugem ent, point de con
signation des offres; les Landriève demeurent nantis de
tout.
L es prem ier fructidor an 8 et 5 frim aire an 9 , oppo9 fructidor an 5 , les demandeurs ont ajouté à leurs offres la
somme de 65 o francs pour un dem i-term e du bail a ferm e , la
somme de 42 francs pour les droits supprimés, plus celle de 6 fr.
5 o centimes pour frais; que dès-lors leurs offres sont régulières.
L e tribunal, par jugement en dernier ressort, donne défaut
contre le défendeur, faute de plaider ni personne pour lui ; et pour
le profit, ordonne que le prix du bail à ferme par lui consenti aux
demandeurs le 8 germinal an 4> demeurera réduit et fixé, pour
toute sa durée, tant pour les termes échus que pour ceux à échoir,
à la somme de i , 3oo francs d’une p art, comme faisant le prix
du bail existant en 1790; à la somme de 42 francs d’autre p a rt,
pour la valeur de la partie de la dîme qui doit être ajoutée au prix
de cedit bail ; en conséquence, donne acte a u x demandeurs de
leurs offres réalisées sur le bureau de F audience, 1*. de la somme
de 65o francs pour le terme de leur ferm e échu le 2 1 brumaire
an 6 ; 2°. de celle de l\2 fra n cs pour la 'valeur de la dlme sup
prim ée, qui doit être join te au prix- de l ’ancien bail ; 5°. de celle
de G francs 5o centim es pour fra is ; déclare lesdites offres bonnes
et 'valables et suffisantes ; ordonne que ledit Brunei sera tenu de
les recevoir et d’en fournir quittance aux demandeurs; faute de
c e , leur permet de les consigner entre les mains du receveur établi
en la commune de R io m , aux frais dudit Brunei : ordonne, en
con séqu en ce, que la quittance de consignation délivrée par le
receveur, leur tiendra lieu de quittance et valable décharge,
tant du p rix du bail échu le 21 brumaire an G , que de la totalité
de la 'valeur de la dîme des fru its récoltés en l'an 5 , qui doit en
faire p artie, ainsi que des fra is fa its par le citoyen B ru n ei; et
coniUimne ce dernier a u x dépens.
_
silion
�.
t 9 )
sition du citoyen de Privezac. Il demande la nullité des
offres et la continuation des poui'suites commencées.
L e 3 floréal an 9, jugement contradictoii-e rendu entre
les parties, au tr ib u n a l civil de l’arrondissement de R iom ;
l ’opposition du citoyen de Privezac au jugement par
défaut du 27 messidor an 7 a été reçue; les L andriève
ont été déclarés non recevables en leur demande en*
réduction -, l’exécution pleine et entière du bail de l’an.
4 a été ordonnée ; le citoyen de Privezac a été auto
risé à continuer ses poursuites (1).
(1) Attendu que quoique les parties du citoyen Bayle jeune,
par leur acte du g vendémiaire an 6 , aient requis en temps utile
la réduction du bail dont il s’agit, autorisée par la loi du g fruc
tidor an 5 ., néanmoins elles n ’ont donné aucun effet à ladite ré
duction , en faisant les offres des arrérages cchus, d’après les formes
voulues par les;lois’subséquentes.
Attendu que-l’article VJIII de la loi du 6 messidor an 6 , pour
autoriser la demande en réduction des b au x, exigeoit de la part
des fermiers le payement de tous 'les termes desdits baux échus
antérieurement à ladite demande.
^ A tten d u que lés parties du citoyen Bayle n ’ont pas fait des offres
de tous les termes qui éloient éclius à cette époque. ‘
Attendu pareillement qu’à ’l’qudicnce du ci-devant tribunal du
départem ent, 'eîle6 r>\}nt fait les1 6ffres: intégrales de tous lesdits
ternies échus à> cette époque. ‘ ■
'*
Attendu que les oflies cPuh denlùlerme par elles faites, et autres
accessoires* <n’onl pas'été renouvelées à dom icile, ni'-'cilecluees ait
bureau do conciliation, en consignant du in o ii'S ^ '1^0' 1^ 1^ dû çé
qu’elles avoient offert ù l’audNmfce.
"
'* "
1
Attendu que d’après toutes ces c o n s i d é r a t i o n s , lès parties du
C i t o y e n Bayle n ’ont pas satisfait, n i £1 ce qui étpit prescrit par la
‘
B
�*■ . ^10) .
.
c L e 28 du même m o is, signification de ce jugement au
domicile des Landriève.
. L e 3 prairial suivant, appel des Landriève.
• L ë 4 du même m ois, offres réelles faites par les Landriève au citoyen d e P riv e z a c , (en son
domi
cile actuel ii Chanzy, département d’A llie r ,) de la somme
de 6,352 francs 90 centimes pour les arrérages de la
ferme sur le taux du bail de 1784 échus alors, pour
intérêts et frais; offres non acceptées.
L e 26 messidor an 9 , demande par les L an d riève, en
défenses, contre l’exécution du jugement dont est appel.
Jugem ent qui ordonne que les parties en viendront à
l'audience du 6 th erm idor, toutes choses demeurant en
état.
L e 6 therm idor an 9 , jugement contradictoire 'q u i
don n e, i°» aux L a n d rièv e, acte de leurs offres de la
somme de 6,362 francs 90 centim es; 2«. au'citoyen de
P rive za c, acte de ce qu’il offre de recevoir'à bon compte
et sans aucune approbation préjudiciable. "
1 . ‘
loi du g fructidor an
6 messidor an G.
5,
ni à ce qui ctoit ordonné par celle du
•
,
r
l
i
, L e tribunal, par jugement en premier ressorly reçoit,la partie
de Lorignon opposante au jugement par d é fa u t, du 27 thermidor
an 7, lequel demeurera sans effet ; et sans s ’arrêter à la demande
en réduction du p rix du bail d u ¡8 germinal an 4> dans laquelle
les parties du citoyen B a y lc sont déclarées noiv-recevablès, fai-.
6ant droit au ioïid , ordonne que ledit lj;iil du '8 germihal an
sera exécute suivant sa form e et .teneur, jusqu’à l ’expiration d ’iceJui;
ordonne en oulreque les poursuites commencées seront continuées,
condamne les parties du citoyen lîajle aux dopçns,.
,.
,
�C rô
..
_
Réception par le citoyen de Privezac «le' la somme de
S,682 fran cs, et le 20 fructidor su ivan t, réception par
le citoyen Gourbeyre de la somme de 672 francs ; total
6,354 francs, avec la clause, le surplus et moyens res
pectifs demeurant- réservés a u x parties.
L e premier floréal an 10 , défaut contre les L an driève,
défaut non expédié.
L e i 5 du môme m ois, opposition par les Landriève,
1
M O Y E N S .
j
Dans cette cause, nous avons des lois très-positives,
rien n’est laissé à l’arbitraire. Les premiers juges ont
appliqué bien exactement ces lois ; leur jugement est le
résultat d’une m é d ita tio n sage. D a n s le n o m b r e d e ces
lois ils n e se so n t p as m é p r is ; ils o n t a p p r o p r ié à l ’espèce
celles qui lui appartiennent.
'
•
Il
en est une du 9 messidor an 4 , qui soumettait à la
réduction tous les baux à ferme passés après la publication
de celle du 4 nivôse an 3 , portant levée du maxim um . (1).
U ne autre loi du 5 therm idor an 4 , autorisa tous les
citoyens à «contracter comme bon leur semblerait. E lle
voulut que les obligations qu’ils auraient souscrites fussent
exécutées dans les termes et valeurs stipulés (2).
(1) A rt. X . Les prix des baux non stipulés en denrées, et qui
Ont été passés postérieurement i la publication de la loi du 4 ni
vôse an 3 , qui a levé le m axim um , seront réduits au p r ix du
bail précédent, etc.
(2) A rt, I", A dater de la publication de la présente lo i, chaqu»
B 2
�.
t 12 )
,
,
- Celle du 18 fructidor an 4 , .fit une exception à la r é •duclion exprim ée en l’art. X de celle du 9 messidor
précédent. ;Dans cette exception elle com prit les baux
.stipulés en denrées ou en N u m é r a i r e , E u sorte que
p a r-là , le propriétaire qui ayoit contracté moyennant
des'éctts, fut assuré de n’èti’C'payé qu’en écuset' sans aucune
réduction. Il est à remarquer ici que cette loi se sert seu
lement du .substantif num éraire , parce qu’en l’an 4 ,
quand 011 disoit n u m éra ire, l’on entendoit parler d’es
pèces sonnantes et non de;'papier-monnoie. Les mots non
stipulés en deiirées ou en num éraire ? qui y sont aussi r
signifient bien clairement que la réduction ne s’étend pas
jusqu’aux baux qui contiennent la .stipulation en numé
raire ( 1 ).
’
' '
1-'-V ient ensuite la -loi.si connue 'du 9 therm idor an
.5 :
par l’article V I , elle assujettit ù la réduction les baux
passés entre la publication de la loi du 4 nivôse an 3
et celle de la loi du 5 therm idor an 4 ; i ° . au taux du
ci'loycn sera libre de contracter comme bon lui semblera. L e s
obligations qu’ il aura, souscrites seront exécu tées dqns les ternies
et valeurs stipules.
,
(1) A rt. III. L a réduction prononcée par l’article X de la loi
du 9 messidor dernier, des prix des baux qui ont été passés pos
térieurement à la levée du m axim um , aura son effet pour l’an 5
comme pour l’an 4 >et en général pour toute la durée desdits baux.
L a même réduction pourra être demandée, sur les b a u x non
STirur.ÉS en df.nhkes ou kn •numkrauik, postérieurs au - i " . ja n
vier "179 3 , dont les anciens p r ix sont augmentés' 'de p lm J ’ un
cinquième.
'
'
�•X 13 )
b ail de 1790 , s’il en existe'u n ; 20. au, taux fixé par des
.experts, s’il n’y a point de bail èxistant en 1790. Dans
les deux cas elle veut ( article V U ) que pour le p rix o.u
l ’évaluation du pi‘ix de 1790 , on ajoute lés dunes et asulres
.charges supprimées p a rla loi du 10 avril 1791
a^ res.ï
.elle;veut que l’on comprenne aussi les sommes q:ui^pro
m ises, soit a titre d ép ôt de v in , so it par]contre-lettre5
s o itd e toute autre m a n ière, seront reconnues avoir f a i t
dajis le temps partie du p rix.
/ ' '>•
- L ’article X oblige le fei'm ief y ;depa,ander p ar éqrit la
réduction : il doit le faire dans le m ois.de la publication
de la lo i; après ce d éla i, il y est nonrecevablej (r). ‘ ,
IVarticle I I de-la loi du
messidor ari 6., (expliqua
l ’article V I de celle du 9 fructidor a n '5 , ¡¡ainsi;qu^ii suit'*
« Sont compris clqns l ’article V I'd e lu ¡loi ilu.'9:J[iîuçfeidor
» an 5 , et .suscepliblcs'de la ryductiünjlipe.ntiounéc, audit
p article, les baux stipulés, en tout ou en ¡partie,, à p rix
» d’argent, passés entre le prem ier'jajjvier;::i792, et La
6
» publication de la loi du
5 tliennidor an 4 , r elative aux
» transactions entre citoyens, quelques expressions et dé
» nominations derm om ioie , cjui1y aient été'çmployées ».
••
'r
• 1 • 11.*1 *1 *
‘ •* T7 'î •' [’ ' ’ 1» '4ï
. Mais
V III')
les ferm iers,
.) A la 'môme 1loi
’• iv‘article
*
' 'i astreint
'Y 'ft
"r
1°. à .¿requérir dans le mois la .rédiicfion
à payer
dans le jrnômc délai .au. propriétaire,-, soit-Je ipontant des
t ■ îl
(1) A rt. X . Ceux des
f e r m
t
; . . V •i : i f .f\ *i
.^’après jes.articles
i e r s , q u i
précédons, droit à la réduction du prix de l.e y r .Î w l 1 - a u r q i ç n t
pas encore demandée 011 obtenue, s e i v f . i t : >iA •
.p V i
ΔX’he d éch u s, de la demquder par écrit, dans le¿n o is fjiu¡s^iiyra
la publication de la présente.
.
•V »
1
�.
C 14)
ternies échus suivant le bail de 1 7 9 0 , soit le montant
de quatre fois la contribution foncière assise en l’an 5 ,
sur les objets afferm és, et cela dans le cas où il n’y auroit
point de bail existant en 1790. Ces deux conditions sont
de rigueur : sans demande et sans payement dans le m ois,
le ferm ier encourt la peine de la fin de non recevo ir,
parce que la loi ne veut pas que le ferm ier abuse des
circonstances, et tienne le propriétaire en état de souf
france ( 1 ).
.
^
P a r l’article X V , la même loi veut que toutes contes
tations à ce.sujet soient réglées suivant ses dispositions (2).
L ’article X V I I porte que les dispositions de cette loi
ne sont pas faites pour les baux passés par anticipation,
et dont le preneur ne seroit pas encore entré en jouis
sance. L e »bail du 8 germinal an 4 , a commencé en
m essidor'an 5. Les adversaires sont d ès-lors entrés en
jouissance avant la loi du 6 messidor an 6 ; elle est
donc applicable à la cause.
_________ 7 . '_______
-
'
'J. • i y
'
'
(1) A rt. Vlir. L es fermiers qui provoqueroient la réduction
du prix du b a il, n e l e p o u r r o n t , a p e i n e d ’ ê t r e d é c l a r é s n o n recevab les,
que
p r é s e n te ,
q u ’e n
e t
dans
le
m ois
p a ya n t
g u i suivra la p u blica tio n de la
dans le
même
m ois,
ou
au proprié
ta ir e , ou au receveur des dom aines, suivant les cas,
m o n ta n t des term es
échus,
d 'ap rès l e
d ail
exista n t
soit
en
le
1790,
so it, h défaut do b a il ou dans le cas de l’article V c i-d e s s u s ,
q u a t r e f o i s l A c o n t r i b u t i o n F O N C I E R E de Vau 5 , des objets
dont il s’agit, s a u f à com p ter, m êm e à répéter s’il y a lieu, lors
de la liquidation définitive.
(a) A rt. X V . Tontes contestations non définitivement terminées,
seront jugées eu conform ité de la présente.
�( i 5 )
- E ’analyse de ces lois met Lien en .évidence-le point
de droit. O n peut donc juger bien aisément dans quels
cas il y a lieu à réduction, quelle marche et quelles con
ditions sont à suivre pour l ’opérer légitimement.
*
t
•
A in si donc nous aurions à traiter deux questions ;
l’une de s a v o ir si le bail du 8 germ inal an 4 est'sujet
à réd u ctio n ; et l’autre d e 'sa vo ir si les Là'ndrièvë ÿ.
sont rècevables : nous nous attacherons principalement
à cette, dernière. Nous ne ferons ressortir; que comme
m oyens de considération les circonstances ¡relatives à la
p rem ière, parce que s’il y a Æn dei nonrrecevoir cei>.
ta in e , une discussion plus étendue seroit superflue^ u
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r L e 9 'vendémiaire^an ' 6 r, les ‘’Lan drièvèiion t signifié
<|u’ils' requéraient-lit ¡réduction du prixi du :'<bail r du 8
germ inal an 4 , au taux de celui de 178 4, en ;vertu tde
la loi f du 9 fructidor an 5» r i l! 1-> v'ji !i iJ- 'i ' î ' .
’ • Cette réquisition paroîtroit ê tre veriue! dansde/m ois,
3u com p tei\ dé la 'p u b lica tio n de cettei lo i'; parce ’gué
ceLte publication -n’a 'é té faite au département d u 1Puy~
de-Dôme'^ que Ae1 231 fructidor an* 5 .rio;b u b ' -i ;;i
•
’" M ais-il ne' suffisait; pas d’une simple; ré q u is itio n de la
part des fermiers. Elle constitiioitseulemëntrmieideriiande;et une demande n’est pas toujours un droit, invariable
ment acquis. Une demande n’est que le commencement
d’une contestation.
;-
1)1 -
‘
�.
( 16 )
.
P o u r que tout soit réglé , il -faut "entre les fermiers et
lé p ro p riétaire, ou un consentement récip roq u e, qui
form e un contrat entre eux , sur lequel les deux puissent
rep o ser, ou un jugement qui en tienne lieu. P ou r que
tout soit'certain de la part des fermiers , il faut qu’ils
signent leur réquisition et en l’original et en la copie
il faut qu’ils le fassent ou par* e u x ’ ou par un fondé- de,
pouvoir:spécial j etm ëm d que l’on donne au propriétaire
copie de' la procuration, parce que les fermiers y con
tractent ùn engagcrttenty celui de payer sur l’ancien bail.
Sans signature ÿlar réquisition peut être désavouée : il n’y.
a rion>deçanstâratji
t
' ;
Ici point de signature de la part des L an d riève, ni d’un
fondé de pouvoir spécial. L?ex!plôit du 9 vendémiaire an 6 ,
a été posé par un nommé A u b in , huissier reçu en vin
tribunal de distijôfci'idans lV k v e ÿ r o n 'h u is s ie r qui ne
présente aucune assurance en cas de désaveu. En sorte
qitê. Îes-Laaadidè^èrfiiiroient !pu(Yen;moqùer ■impunémen t ,
di l’on ¡¿.véitLVüiilitcles prendre! au m’ot sur lleffet de-leur
réquisitions -à 8 "i l > iuioj 'ï >
ni; , ¡\ r» i¿.ri•rrrt
A u reste il n’y avoit rien.de term idé’en(i-e,les)par,tîesy
lorsqu’à.' ipîirLÏï laulor-dui6 imossidoii an,j6.'iydrei )quoi le
etqit leuivposi‘ti'én‘ji’ti8peotive oit môj0a£nt<de<lai publication;
île cfcUeloL:,nous venons de le dire', leSrLandrièvc avoiei^t
requis la réduction.île 9 vendém iaire aü 6,: lp' citojyeifc
dé -PriiVGiiâc! n>’y[a^oit«-pas adhéré ;’hu contraire', il leur
av6it faitblerr 6'nivôse su iv a n t, commandement de payer
k fe^mme' de' rôboi francs, pour le d e m i- te r m e échu de
lftiJarme’-Siir le pied de 3000 Irancs par an. L e 26 du
moine mois , lçs Landriève l’avoient fait assigner au
tribunal
�( i7 >
tribunal civil du département du Puy-de-D ôm e , pour
vo ir prononcer sur la réduction requise par l ’exploit
du 9 vendémiaire. A u moment de l’apparition de la lo i
du 6 messidor an 6 , il n’y avoit encore rien de réglé
ni par les parties , ni par les tribunaux ; les parties en
étoient seulement en état d’une contestation bien form elle.
Elles se trouvoient donc précisém ent dans le cas de
l’article X V . -L’affaire devoit donc être conduite et jugée
en conform ité de cette loi. Il falloit donc aussi que les
L an driève payassent dans le mois de la publication
(suivant l’art. V I I I) tout l’arriéré des ferm ages, sur le
taux du bail de 1784 , existant encore en 1790 ; sans cela
fui de non recevoir écrite très-expressément dans la loi.
O r , c ’est ce que 11’ont pas fait les L an driève : en effet,
au moment de l ’é m is sio n de ceLle l o i , étoient échus les
termes de novem bre 1797 ( ou brumaii-e an 6) et de juin
1798 ( ou messidor an 6 )-, ces deux termes form oien t,
suivant le bail de 1784 , un total de 1300 francs de p rix
principal. Les Landriève devoient dès-lors payer et cette
somme et les accessoires expliqués en ce bail , et les
objets supprimés par les lois nouvelles.
. Il est vrai que les L an driève ont offert au citoyen de
Privezac ( au dom icile du citoyen Brun ) , le 21 n iv ô s e
an 6 , la somme de 65 o francs pour le demi-terme écliu
le 11 brum aire p récéd en t, plus celle de 42 francs pour
la dîme supprimée , et enfin celle de 6 francs 10 sous
pour frais.
M ais , i°. ces offres n’ont pas été faites ni a la personne,
ni au domicile du citoyen de Privezac. IiC p rix du bail
etoit payable au dom icile de ce dernier ; cela est dit dans
c
�.
.
( ï8 } .
.
,
le bail du 4 germinal an 8. Celui de 1784 portoit même
engagement de la part des Landriève. D ’ailleurs c e u x -c i
l’ont jugé eu x -m ô m es ain si, puisqu’ils sont allés au
dom icile du citoyen de Privezac pour faire leurs offres
tardives du 4 p r a i r i a l an 9. L e domicile élu par le citoyen
de P rivezac chez le citoyen Brun , n’autorisoit pas les
Landriève à y faire leurs offres du 21 nivôse an 6. Des
offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu , qu’autant que le créancier a notifié au
débiteur l’indication de payer là , ou que ce créancier
a donné à celui chez lequel est l’élection de domicile ,
le mandat form el de toucher ( 1 ). Ici rien de tout cela.
2°. Ces offres seraient encore insuffisantes, parce que le
( 1 ) D en izart , verbo o f f r e s , r i . 20, dit : « Les offres doivent
» être faites en temps et lie u , c’est-à-dire ( pour le lieu ) à la
v personne du créancier, ou à son dom icile, ou à celui qui a été
» désigné pour la convention. On ne peut pas valablement les
» faire au domicile élu chez un procureur, s’il n’y a sur cela une
» convention expresse entre le créancier et le débiteur. L a cour a
» jugé de pareilles offres insuffisantes, par arrêt rendu le 17 déj) cembre 1714» entre le sieur le Breton et la dame Jossure, quoi
» qu’elles eussent été réitérées ù l’audience sur le bureau ( en cause
}> principale ). »
Pigeau, en sa procédure civile, liv. II, part. I V , tit. I, chap. I,
note B , dit : « Elles ne peuvent l’être au domicile élu par les actes
» de procédure, tel que celui de procureur ou autre, parce que
» cette élection n ’est faite que pour que les actes que l ’on veut
n signifier à une partie parviennent sur le champ à scm procureur,
» et qu’il fasse en conséquence ce qu’il estime convenable; mais
» elle ne donne pas au procureur pouvoir de recevoir pour sa
» partie. »
�C T9 )
_
bail de 1784 , comme celui du 8 germinal an 4 , obligeoit
lesL an driève à payer annuellement quarante-cinq livres
de beurre et douze poulets rendus et conduits au château
de Bostes. Les Landriève n’ont rien offert pour cela.
30. Dans le bail du 8 germinal an 4 , le citoyen de
Privezac a accordé aux L andriève une portion à prendre
annuellement dans le bois des Saulzeix ; celui de 1784
ne leur donnoit pas cet avantage. Dans leurs offres, pas
un centime pour raison de cet objet : autre moyen d’in
suffisance.
4 0. Lorsque les Landriève prirent au tribunal civil
du département du P u y-de-D ôm e, le 2 7 messidor an 7 ,
un jugement par défaut contre le citoyen de P rivezac,
il étoit échu une autre année de ferme en son entier ;
ils devoient donc a lo rs deux années q u i, suivant le bail
de 1 7 8 4 , auroient monte à 2,60 0 fra n cs de prix prin
cipal, à 82 francs pour dîmes supprimées, à quatre-vingtdix livres de beurre , et à vingt-quatre poulets. Néanmoins
ils ne réalisent sur le bureau de l’audience , que les
sommes offertes le 21 nivôse an 6 , c’est-à-dire, 65 o fr.
d’une part, pour prix principal d’un demi-term e, 42 fr.
pour dîme supprim ée, et 6 francs 10 sous pour frais. 11
y auroit donc insuffisance énorme.
5 °. D e simples offres ne suffisent pas, et suivant les anciens
principes, et suivant les nouveaux principes sur les tran
sactions entre particuliers. Dans l’ancien droit, l’on tenoit
pour maxime que des offres labiales n e libéroicnt pas.
Les tribunaux les jugeoient toujours c o m m e non-avenues,
quand elles iréloiept pas suivies ou de réception par le
créancier, ou de c o n s ig n a tio n par le débiteur. Dans le
G %
�.
,
/ 20 ]
~
.
nouveau d ro it, même règle (i) : il faut que le débiteur
ne plaide pas les mains garnies; il faut qu’il soit dessaisi
des deniers offerts ; il faut que sa libération soit opérée
par une consignation.
- I c i ,■point de consignation par les Landriève ; ils sont
toujours demeurés rétentionnaires des deniers offerts ;
ils ont plaidé les mains garnies.
Les choses en étoient en cet état de dénûment absolu
de la part des L an d riève, lorsque la cause a été portée,
plaidée et jugée au tribunal de prem ière instance à R io m ,
le 3 floréal an g : même en cet instant point d’offres
réalisées sur le bureau de l’audience, pas même de&
sommes expliquées au procès verbal du 21 nivôse an 6.
L ’article V III de la loi du 6 messidor an 6 , est de la
plus grande rigueu r; il veut très - form ellement deux
choses infiniment essentielles : i ° . demande en réduction
dans le m ois; 20. payement de tout l’arriéré, aussi dans
le mois. L ’une de ces conditions m anquant, fin de nonrecevoir très-expresse. N e le p o u rro n t, A p e i n e d ’ê t r e
D É C L A R É S N O N - R E C E V A B L E S , que dans le m ois qui
suivra la publication de la présente, E.T q u ’ e n p a y a n t
d a n s l e m ê m e m o i s . Si l’on ne requiert pas dans le
m ois, et si l’on 11e paye pas aussi dans le m o is, c’en est*
fa it; le fermier est obligé d’exécuter le bail sans réduc
tion aucune. T elle est la peine prononcée par la lo i; efe
les tribunaux ri ont qu’a en faire l’application.
'
(1) A rt. X V de la loi du 9 fructidor an
5.
I l en est de même
de ceu x qui ont f a it des offres et consignations valables et suf
fisa n tes.
'
�(
21
)
^
Que les L andriève ne disent pas que tout a été réparé
par leurs offres du 4 prairial an 9 ; qu’ils ne disent pas
que le citoyen de Privezac les ayant reçues, il en résülte
qu’il est payé , et qu’il ne souffre plus aucun tort.
i° . Ici tout est de rigueur. L e délai donné par la loi
du 6 messidor an 6 n’est pas comminatoire', il est fatal.
L e mois écoulé sans payement de rla part du ferm ier,
la fin de non-recevoir est acquise au p rop riétaire, èt il
n’est pas au pou voir des tribunaux de le priver d’un
avantage assuré par la loi.
•
-2°. A u temps des offres du 4 prairial an 9 , le mois
donné par la loi étoit plus que passé;; la firi d e-n on recevoir étoit encourue ; la justice avoit prononcé la
peine ; les choses 11’étoient plus entières.
30. Suivant la loi du 6 m essidor, c’étoit ici une a ffa ire
d’argent ; les L andriève dévoient commencer par l ’offrir
et le consigner dans le temps utile ; ne l ’ayant pas fait à
propos, ils sont dans la même position que s’ils avoient
exercé une faculté de rém éré contre le citoyen Privezac.
S ’ils en avoient été déchus par une sentence sujette à appel,
pour n’avoir pas offert et consigné, sur l ’appel ils seraient
non-recevablcs à purger la demeure : la sentence seroit
confirmée purement et simplement.
Ici il s’agit uniquement de décider si les premiers
juges ont bien fait en prononçant la fin de non-recevoir
écrite dans la l o i , faute dir payement dans le mois. Il
est constant qu’alors il n’y avoit point de payem ent, point
d’offres suffisantes, point de consignation tenant lieu de
payement. P ar conséquent le tribunal de R iom a trèsbien jugé. C ’est l’état des choses au temps du jugement
�»
t C 23 )
du 3 floréal an 5 , qui est déterminant. A cette époque,
y a v o i t - i l oiYres et consignation ou payement ? Non. Ce
qui a été fait après le jugement et même après l’appel ,
lie peut pas faire que ce qui n’existoit pas encore lors du
jugem ent, eût existé avant ce jugement. Comme ici il ne
peut êtr« question ’que du an henè an m a lè , il faut
nécessairement remonter à l’état des choses au temps de
ce jugement.
•
’4°.' L e citoyen de P riv e za c, en recevant les sommes
offertes en cause d’q p p el, ne les a touchées qu’à bon
.compte ; il s’est réservé tous ses moyens de fait et de
droit.' Il lui étoit- dû pltis de 12,000 francs , il n’a reçu
q u’èntour j6,000 francs ; il ne risquoit donc rien en
prenant cet acompte.
■
0 ‘ 5 °. Quand au tort résultant de la conduite des adver
saires envers le citoyen de P rivezac, ce tort présenteroit
une lésion de plus de moitié , si leur projet réussissoit.
:Nous, allons le dém ontrer dans le paragraphe suivant ;
mais en attendant il doit paroître démontré que les
premiers .juges ont parfaitement bien jugé en déclarant
les adversaires non reçevables en leurs demandes en ré-r
dnçtion, ‘
: ; ■
>
•
§
II.
C eseroitpour le citoyen de Privezac un grand m alheur,
6i les L andrieve pouvoient se soustraire impunément
aux engagemens qu’ils ont contractés envers lui parole bail
du 8 germinal an 4* S’ils avoient obtenu la réduction de
ce bail au p rix de celui de 178 4, ils y auroient l’avantage
�( 23 )
^
Criminel de jouir de ses biens moyennant un prix moindre
que celui qu’ils ont p^yé au sieur de T illy .
En effet, dans l’exactitude des faits, le vrai p rix de
ferme des domaines de Cliantagret et de Cornassatj est
celui s t i p u l é au bail de germ inal an 4 .' L e bail de 1 7 8 4
et antres antérieurs avoient été préparés et faits par des
agens d’affaire, qui auraient dû m arquer plus de fidélité
envers le sieur de T illy . C e lu i-c i liabitoit la capitale;
entraîné par le tourbillon des affaires de l’état, éloigné
de ses propriétés, il étoit obligé de s’en rapporter à autrui,
et ses intérêts n’en étoient que plus m al soignés. Par cette
raison ses biens n’étoient pas affermés comme ils devoient
l ’être. D ’un autre côté, l’on faisoit donner en pot de v in ,
et sans en fa ir e m e n tio n dans les b a u x , des sommes con^
sidérables. Par ce biais , le sieur de T illy obtenant de l’ar
gent comptant ( dont il avoit très-souvent b esoin ), il avoit
cet autre profit que ses domaines ne paraissant affermés
que moyennant 1,300 francs, il ne payoit des vingtièm es
que sur ce revenu ostensible. L e bail de 1 7 8 4 a été passé
pour commencer seulement en 1 7 8 8 . Cette anticipation
nous présente sûrement la pensée bien exacte , qu’alors
il y eut de l’argent donné en secret, parce qu’il n’est pas
ordinaire qu’un propriétaire renouvelle ses baux quatre
ans avant l’expiration de ceux déjà ex is tan s.
Si aujourd’hui le citoyen de P rivezac étoit r é d u it au prix
du bail de 178 4 , au prix ostensible de i,3 ° ° francs, il
s'ensuivrait qu’il n’auroit pas le p rix réel. Il n’aurait
aucune ressource pour se faire faire raison du p rix supplé
mentaire et caché, parce que tout se passa en secret entre
le sieur de T illy et les Landriève : en sorte qu’il y aurait
�.
.
.
.
,
(
2
4
)
impossibilité absolue de rem plir le vœu des lois nouvelles
sur les fermages. Ce vœu est que le pi’opriétaire ait au
moins le p rix an cien , et ici le citoyen de Privezac ne
l ’auroit pas.
Q u’à cette considération entraînante on ajoute les ex
pressions et les inductions que présente le bail du 8
germ inal an 4 , il ne restera pas le moindre doute que
les parties ont traité en écus , et que sans la vue cer
tain e, autant que possible alors, d’être payé de cette
manière , le citoyen de Privezac n’auroit pas affermé.
E n e ffe t, i l est dit dans ce b a il, i° . que le citoyen de
P r iv e z a c a ffe rm e à p r ix d'argent. E n F ran ce, quand en
l’an 4 on disoit argent, p e r s o n n e ne se trom poit sur
l ’acception du mot. T o u t le monde entendoit des espèces
sonnantes, et non du papier - monnoie ; les plaies pro
fondes qu’avoit faites ce signe monétaire étoient encore
toutes vives , toutes saignantes ; et alors on évitoit avec
soin' ces m aux pour l’avenir.
20. Ce bail exprim e encoi*e que la somme de 3,000 fr.
sera payable en num éraire ou valeur représentative.
N um éraire signifioit alors des espèces métalliques. L a
loi du 18 fructidor an 4 , n’emploie que le mot num é
raire , pour rendre que les baux stipulés en écus, ne
seroient pas réductibles. Par valeur représentative, l’on
entendoit aussi des denrées, etc. qui représentoient aussi
des écus.
L ’usage est la m eilleure explication du sens des termes
dont on se sert dans certaines contrées; cet usage donne
toujours la mesure de l’ intention des parties. O l-, une
preuve que dans le canton de M ontaigut, par le mot
num éraire
�.
(
_
’ um éraire on vouloit dire é c u s , et non assignats ou
n
m andats , se trouve dans la relation du contrôle du
bail de germinal an 4 , faite au bureau de M o n taig u t,
le 12 germinal. Dans cette relation, 011 voit que le con
trôleur a perçu i o 5 francs; savoir, 100 francs en mandats,
et 5 francs en num éraire ( 1 ). Delà il suit, que dans ce
canton l’on ne considéroit pas les mandats comme du nu
méraire ; il s’ensuit que l ’on ne considéroit comme numé
raire que le num éraire proprem ent dit, et non ces valeurs
fictives qui ont désolé tant de Français.
30. L e bail du 8 germinal an 4 , contient rém unéra
tion et l’appréciation des bestiaux garnissant les domaines
du citoyen de Privezac. Ces bestiaux consistoient en six
bœufs arans, n e u f v a c h e s m ères, un taureau, une je u n e
vache et trois suivans; total, vin gt bêtes à co rn e s. E h Lien,
ces vin gt bêtes n’ont été estimées qu’à la somme de
5z 6 francs. Cette circonstance dépose bien clairement que
toutes les stipulations des parties ont été faites en espèces
sonnantes ; car en papier-m onnoie, vingt bêtes à cornes
auraient été portées à plusieurs m ille livres.
Considérons, enfin, que le citoyen de P riv e za c , en
affermant pour n euf années, moyennant 3,000 francs
par a n , a dû com pter sur 27,000 francs à toucher pour
toute la durée du bail , tandis qu’ il ne recevrait que
11,700 francs dans le sens du bail de 1784. L a différence
serait én o rm e; elle serait de 15,300 francs: elle vaut
(i) Enrcgislró à M onlaigut le 12 germinai an /{. Kecu 10Zfraitcs
en mandatile 100 Jvancs et 5 fra n cs de numéuaiue. Signe Pietre.
'
D
�( 25 )
b ien la peine qu’il résiste aux prétentions déloyales des
Landriève.
Que les Landriève aient fait une fortune de 8 0 ,0 0 0 francs,
on ne la leur envie pas : on la croit légitim em ent acquise ;
mais ils d evroien t être bien contens d’un aussi grand p rofit,
et ne pas viser à avoir injustement le bien du citoyen
de Privezac. Ils se sont engagés à le payer en numéraire.
C ’est chose qui appartient incontestablement à ce dernier ;
et le ti'ibunal d’appel partagera la sorte de satisfaction
q u’a dû éprouver celui de l’arrondissement de R io m ,
en trouvant dans les circonstances de l'affaire et dans la
lo i du 6 messidor an 6 , une fin de non-recevoir invincible ,
un moyen infaillible pour forcer les Landriève à tenir
leurs promesses , à rem plir un engagement sacré sans
lequel ils n’auroient plus eu la ferme des deux domaines
en question.
G OURBEYRE.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T rib u n al d ’appel,— A n 10,
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel de Privezac, Jacques. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant actuellement du lieu de Chanzy, mairie de Besset, département d'Allier, intimé et défendeur en opposition ; contre Charles-Pierre et Gabriel Landriève, fermiers, habitans du lieu de Chantagret, mairie du Peyrouse, appelans et demandeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1784-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0234
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0233
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53733/BCU_Factums_M0234.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
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71020f039f7e2494bb57ca332f6e629a
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Text
TRIBUNAL
MEMOIRE
EN
d ’a p p e l
,
séan tàR iom .
RÉPONSE,
POUR
et G i l b e r t L A N D RIE V E ,
père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de
C h a r le s , P ie rr e
C h a n t a g r e t , commune d u P e y r o u z e , appelans
d ’un jugem ent rendu au tribunal d’arrondisse
ment de cette ville d e Riom, le 3 floréal an
et demandeurs en opposition ;
9,
C O N T R E
J A c q u e s B R U N E L D E P R I V E Z A C , pro
priétaire, habitant du lieu de Chauzy , commune
de B esset, département de l ' a l l i e r et
défendeur en opposition.
J a c q u e s Brunel de Privezac a afferme, le 8 germinal
an 4 deux domaines aux appelans , le prix de ce bail
A
�( a ) ‘
^
est de 3,000 fr. par année. Les appelans étoient précé
demment fermiers des mêmes objets depuis 1784', et le
prix de ce bail ancien n’étoit que de 1,300 fr. argent,
quarante - cinq livres de beurre et douze poulets pour
chaque année.
Les appelans ont demandé la réduction du nouveau
bail au prix de l’ancien, et leur notification a été faite
dans le temps prescrit par la loi.
Par une singulière fatalité, les premiers juges ont
refusé d’admettre la réduction demandée, et ont con
damné les fermiers à payer la somme de 3,000 fr. chaque
annee, pendant la durée du bail.
Les fermiers reclament contre ce jugement qui viole
ouvertement la disposition des lo is, et blesse tous les
principes de justice et d’équité.
L ’intimé qui affiche un grand désintéressement, a
des raisons personnelles pour ne pas désirer qu’on paye
toujours sans réduction ; il prétend néanmoins que le
jugement dont est appel est sage dans ses motifs, et juste
dans ses dispositions : il a cru devoir rendre sa défense
publique, et s’imagine que des déclamations bannales
contre les fermiers peuvent servir de moyens.
Les appelans se flattent au contraire de démontrer que
sa prétention est exagérée, et qu’en payant le prix du
bail ancien ils sont entièrement libérés.
FAITS.
L e 5 août 1784, un sieur T i ll y , propriétaire de deux,
domaines appelés de Chantagret et de Cornassat ; situéa
�( 3 )
#
Commune du Peyrouse, les donna à titre de ferme aux
appelans : ce bail fut consenti pour neuf années consécuti
ves, qui ne dey oient prendre cours qu’à compter du 24
juin 1788.
L e prix de la ferme est de 1,300 fr. par année ,
payables en deux termes égaux ; et pour droit de surv in e , les fermiers doivent payer en outre quarante-cinq
livres de beurre et douze poulets.
L ’intimé devenu acquéreur de ces deux domaines de
puis le 13 juillet 1790, avoit droit d’interrompre le bail
. en vertu de la loi JEmptorem ; mais il le trouva assez
avantageux pour ne pas user de cette faculté, et il en
perçut le prix pendant toute sa durée.
Quoique ce bail ne dût échoir que le 6 messidor
an 5 , néanmoins il voulut le renouveler un an avant ;
et le 8 germinal an 4 , il fut passé entre les parties un
nouveau bail pour neuf années, moyennant la somme
de 3,000 fr. par an. Il est dit que ce bail est consenti à
■prix d’argent, que la somme est payable en numéraire
ou valeur représentative : mais on verra que cette énon
ciation , dont l’intimé voudroit abuser, ne peut être
d’aucune importance; elle ne s’appliquoit qu’aux man
dats qui devoient être reçus comme espèce m étallique,
d’après la loi du 8 ventôse précédent.
Bientôt les mandats furent retirés de la circulation ;
il falloit dès-lors concilier les intérêts divers, et déter
miner la nature des engagemens de ceux qui avoient
contracté pendant les assignats ou les mandats.
L e législateur s’occupa principalement du prix des
fermages, et la loi du 9 fructidor an 5 , art. V I } régla
A a
�( 4 )
.
tpae tous les baux qui avoient été passés entre la publi
cation de la loi du 4 nivôse an 3 , portant suppression
du m axim um , et celle de la loi du 5 thermidor an 4?
seroient sujets à réduction, c’est-à-dire, que le prix en
seroit réduit à celui des baux existans en 1790.
Une loi postérieure du 6 messidor an 6, veut, art. II,
que tous baux stipulés en tout ou partie à pi'ix d’ar
gen t, passés entre le Ier- janvier 1792 et la publication
de la loi du 5 thermidor an 4 , soient susceptibles de
la i-éduction mentionnée en l’article V I de la loi du 9
fructidor précédent, quelques expressions ou dénomi-,
nations de monnoie qu i y aient été employées.
Les appelans avoient fait leurs diligences avant l’émis
sion de cette dernière loi. Dès le 9 vendémiaire an 6
ils firent signifier au domicile de l’intimé un acte par
lequel ils déclarèrent qu’ils enlendoient profiter du bé
néfice de la loi du 9 fructidor an 5 , et réduire le prix
du bail du 8 germinal an 4 , à celui du bail qui existoit en 1790.
Cette notification n’arrêta point le citoyen de Privezac.
Iæ 16 nivôse an 6 , il fit commandement à ses fermiers
de lui payer la somme de i,5oo fr. en num éraire, pour
le premier terme échu le 21 brumaire précédent.
Les fermiers , pour éviter des poursuites plus rigou
reuses , se déterminèrent à faire un acte d’offre au domicile
du cit. de Privezac , le 21 nivôse an 6 ; i°. de la somme de
65o fr. pour la moitié du prix du bail du domaine existant
en 1790; 20. de la somme de 42 fr. pour la valeur de
la dîme ; 30. 6 fr. 5o cent, pour les frais du commande
ment ; total 698 fr. 5o cent.
�( 5 )
_
Refus de recevoir : citation au bureau de paix en réa
lisation et validité d’offres ; assignation au ci-devant tri
bunal civil du département du Puy-de-D ôm e, pour voir
dire que conformément aux art. V I et I X de la loi du
6 fructidor an 5 , et en conséquence de la demande en
réduction, le prix du bail du 8 germinal an 4 demeu
rerait fixé à la somme de 1,300 fr. d’une part, comme
faisant le prix du bail existant en 1790, à celle de 42 fr.
d’autre, pour la valeur de partie de la dîme, dont les
fermiers devoient compte, et pour voir donner acte de
la réitération des offres; à défaut de les recevoir, per
mission de consigner les sommes offertes.
U n premier jugement par d éfau t, du 27 messidor
an 7 , adjugea les conclusions des appelans.
L a cause n’ayant pu être vidée sur l’opposition du
citoyen de Privezac , il fit citer ses fermiei's au tribunal
d’arrondissement de cette com mune, pour procéder sur
cette opposition.
L a cause portée à l’audience , il y est intervenu, le
3 floréal an neuf, un jugement contradictoire q u i, sans
s’arrêter à la demande en réduction du prix du bail
du 8 germinal an 4, dans laquelle les fermiers sont déclarés
non-recevables , ordonne que le bail du 8 gei’minal an 4
sera exécuté selon sa forme et teneur jusqu’à son expi
ration ; que les poursuites commencées seront continuées:
les fermiers sont condamnés en tous les dépens ; et il est
ordonné que le jugement sera exécuté nonobstant oppo
sition et sans préjudice de l’appel.
Ce jugement est principalement motivé sur ce que les
fermiers n’ont donné aucun effet à la réduction par eux
A 3
�(
6
)
demandée, enne faisant poiiitles
offres des arrérages échus,
d’après les formes voulues par les lois subséquentes.
O n prétend que l’article V III de la loi du 6 mfessidor
an 6 n’autorise la demande en réduction, qu’autant que
les fermiers payent préalablement tous les termes des baux
échus antérieurement à la demande : on ajoute que, dans
l’espèce, le's fermiers n’ont point fait des offres de tous les
termes échus à cette époque; on en conclut qu’ils n’ont
point satisfait à la loi du 9 fructidor an 5 , ni à ce qui
étoit ordonné par celle du 6 messidor an 6.
Les fermiers ont interjeté appel de ce jugement; et
pour ne pas plaider les mains garnies , ils ont, le 4 floréal
an neuf, renouvelé au domicile du citoyen de Privezac
les offres qu’ils lui avoint déjà faites, en y ajoutant tous
les termes échus.
L ’intimé n’a pas cru devoir se rendre à ces nouvelles
offres ; il a fait signifier de nouveau le jugement portant
nonobstance, avec sommation de se trouver au greffe
pour y voir présenter sa caution, et pour éviter des
poursuites plus rigoureuses. lies appelans ont présenté
requête au tribunal pour demander acte des offres réalisées
sur le bureau de l’audience delà somme de 6,362francs
90 centimes : il a été rendu sur cette requête un jugement
qui donne acte de l’appel et des offres , renvoie les parties
à une audience extraordinaire , toutes choses jusqu’à ce
demeurant en état.
Ce jugement a été notifié au citoyen de Privezac ; et,
le 6 thermidor an 9 , jugement contradictoire qui
dorme aux appelans acte de leurs offres, acte au citoyen
de Privezac de ce qu’il offre de recevoir à' bon compte
,
•
-
.
�C7 )
et sans aucune approbation préjudiciable; le surplus des
moyens respectifs demeurant réservé aux parties : c’est
en cet état que se présente la cause.
Pour prouver que le jugement dont est appel, est con
traire à la disposition des lois , et qu’il y a nécessité de
le réform er, il est essentiel d’analyser les différentes lois
rendues sur les fermages ; e t , quoiqu’en général on puisse
reprochera ces lois une grande obscurité dans la rédaction,
leurs dispositions ne sauroient être plus claires relative
ment à la question particulière qui divise les parties.
L ’article X de la loi du 9 messidor an 4 , porte « que
» les prix des baux non stipulés en denrées et qui ont
» été passés postérieurement à la publication de la
» loi du 4 nivôse an 3 , qui ¿1 levé le m axim um ,
» seront réduits au prix du bail précéden t, en y ajou» tant la valeur des dîmes et autres charges supprimées,
» conformément à la loi du 10 avril 1791 , et autres.
» S’il n’existoit pas de bail antérieur , ajoute le
» même article , le prix du nouveau bail sera réglé
» par experts , valeur de 1790 ; dans les deux cas, le
» prix de ce nouveau bail sera payé de la même manière
» que le seroit celui d’un bail passé en 1790. »
L ’article V I de la loi du 9 fructidor an 5 , dit « que ,
» si le bail a été passé entre la publication de la loi
» du 4 nivôse an 3 , portant suppression du m axim um ,
» et celle de la loi du 5 thermidor an 4 , le prix doit
» en être réduit à celui du bail existant en 179°* a
L ’article V II de la même loi veut « que l’on com
» prenne dans le prix, outre l’évaluation du prix de 1790,
a la valeur des dîmes et autres charges supprimées pair
'’
A 4
�.
.
( 8 )
■
.
» la loi du io avril 1790 , et autres, et dont étoient
»
»
»
»
tenus les ferm iers, ainsi que les sommes q u i, promises,
soit à titre de pot de v in , soit par contre-lettres, soit
de tout autre manière, seront inconnues avoir fait dans
le temps partie dudit prix. »
Enfin , l’article IX de cette même loi porte « qiie les
» b au x , soit à ferme, soit à portion de fruits dont une
» partie de loyer a été stipulée à prix d’argent , sont
» soumis pour cette partie du prix et suivant le cas, aux
a dispositions des articles précédens , dans lesquels se
» trouve compris l’article Y I précité. »
Il est ajouté « que la somme stipulée en argent dans
» le nouveau bail sera réduite à celle portée dans le bail
» existant en 1790 , augmentée de la valeur des objets
» mentionnés en l’article V I I , si la quantité des fruits
» ou denrées promises, est la même dans l’un et dans
» l’autre. »
'
L ’article I I de la loi du 6 messidor an 6 , « comprend
» dans l’article V I la loi du 9 fructidor an 5 , et regarde
» comme susceptibles de la réduction mentionnée audit
» article tous baux stipulés en tout ou partie à prix
» d’argent, passés entre le I er. janvier 1792 et la publi» cation de la loi du 5 thermidor an 4 , quelques ex
» pressions et dénominations de monnoie q u i y aient
» été employées. »
L ’article V III veut « que les fermiers qui provoque
» roient la réduction du prix de Leur b ail, ne le puissent
» à peine d’être déclarés non - rccevables , que clans le
55 mois qui suivra la publication de la présente, et qu’en
» payant dans le même mois , ou au propriétaire } ou
�( 9 )
_
» au receveur du domaine , suivant les-cas, soit le mon
» tant des termes échus suivant le montant du bail de
» 1790, soit à défaut de bail ou dans le cas de l’arti» cle V , quatre fois la contribution foncière de l’an 5 , des
» objets dont il s’a g it, sauf à compter et parfaire , ou
» même à répéter, s’il y a lieu, lors de la liquidation dé
» iinitive. »
T elle est l’analyse des différentes lois sur les fermages;
on a cru devoir la présenter de suite pour ne pas inter
rompre la discussion , et en faire plus facilement l’appli
cation au cas particulier.
Il s’agit d’examiner si les appelans ont satisfait à la
disposition de ces lois , et si le défaut d’exécution de
l’article V III de la loi du 6 messidor, peut être opposé
avec succès aux appelans , et faire obstacle à leur demande
en réduction?
Point de doute d’abord sur la faculté de réduii’e.
L e bail est du 8 germinal an 4 , par conséquent il a été
passé antérieurement à la loi du 5 thermidor an 4 ,
époque déterminée pour la réduction.
lia dénomination argent ou de numéraire ne change
pas la nature des engagemens : déjà l’article IX de la
loi du 9 fructidor an 5 , l’avoit ainsi expliqué et déter
miné , et l’article II de la loi du 6 messidor an 6 , 11e
laisse plus d’équivoque à cet égard.
Maintenant il faut se lixer sur l’époque de la demande
en réduction qui a été formée par les appelans , et ne
pas perdre, de vue que la notification par eux faite est
du 9 vendémiaire an 6 ', c’est-à-dire, antérieure à la loi
du. 6 messidor.
“
A 5
�L ’acte d’offre, la citation au bureau de paix , l’assi
gnation au tribunal c iv il, ont également précédé l’émis
sion de la loi du 6 messidor , puisque tous ces actes sont
du mois de nivôse an 6.
Ils ont tous été faits en exécution de la loi du 9 fruc
tidor an 5 , en exécution des articles Y I et IX cle cette
loi qui n’astreignoit point les fermiers pour obtenir la
réduction à faire des offres des termes éclius.
Cependant même avant la loi du 6 messidor, ils avoient
fait des offres de la moitié du pi'ix du bail précédent :
c’étoit alors tout ce qu’il y avoit d’écliu ; ils avoient donc
satisfait même au delà de ce que la loi du 9 fructidor
sembloit exiger.
V ouloir astreindre les fermiers à l’exécution de l’ar
ticle V III de la loi du 6 messidor, c’est alors donner évi
demment un effet rétroactif à la loi ; c’est lui faire régler
pour le passé ce qu’elle n’a voulu déterminer que pour
l’avenir. En effet , la loi ne parle que des fermiers qui
n’ont point encore fait de diligences ; elle veut que ceux
qui n’ont pas encore provoqué la réduction de leur bail,
ne le puissent faire que dans le mois qui suivra la pu
blication , et qu’en payant dans le même mois au pro
priétaire le montant des termes éclius d’après le bail
existant en 1790.
Mais les fermiers qui s’étoient déjà mis en règle, qui
avoient manisfesté leur intention de réduire, conformé
ment à la loi du 9 fructidor an 5 , ne sont point astreints
à la même obligation ni aux mêmes délais. L ’article X
de la loi du 9 fructidor an 5 , n’obligeoit les fermiers
qu’à la formalité de demander cette réduction par écrit,
dans le mois de la publication.
�( 11 )
L ’article X I de la même loi donnoit dans ce cas au
propriétaire la faculté de résilier, si la réduction blessoit
ses intérêts , et en avertissant le fermier dans les deux
mois de la même loi du neuf fructidor.
Cette loi du 9 fructidor n’exige pas le payement des
arrérages : faculté de_ réd uire, faculté de résilier ; voilà
tout ce qu’elle accorde.
La notification des appelans est du 9 vendémiaire
an 6 ; c’est-à-dire , qu’elle est dans le mois de l’émission,
et avant celui de la publication. Ainsi , il ne faut donc
consulter que la loi du 9 fructidor, celle du 6 messidor
est étrangère à l’espèce : ce n’est qu’une loi additionnelle
toujours favorable aux ferm iers, qui proroge encore le
délai de la notification , mais qui aggrave la condition
de ceux qui ont été négligens , en les contraignant de
payer tout ce qui est échu.
D ’ailleurs les appelans, au moment de leur acte d’offre
du 21 nivôse an 6 , ayant offert la moitié du prix du
bail antérieur, offroicnt tout ce qui étoit échu. Leur
bail a commencé le 24 juin ; il étoit payable en deux
termes égau x, l’un au jour de Noël , le second au jour
de St. Jean , et il est clair qu’à l’époque du 21 nivôse
an 6 , qui représente le 11 jan vier, il n’y avoit que le
premier terme d’échu ; c’est-à-dire , la moitié du prix
du bail ; par conséquent les fermiers ont offert tout ce
qu’ils devoient, même dans le sens de la loi du 6 ther
midor.
Comment donc concevoir d’après des raisonnemens
aussi simples, le jugement dont est appel qui oblige les
fermiers à payer 3,000 francs par année, pour un bail
�.
.
^ 12 ) .
qui, avant le papier monnoie, n’étoit que de 1,300 francs,
et qui a été augmenté de plus de moitié ?
Les fermiers, dit-on, n’ont donné aucun effet à leur
demande en réduction , dès qu’ils n’ont pas offert les ar
rérages échus, d’après les formes voulues par les lois
subséquentes ; et on explique qu’on entend par lois sub
séquentes, l’article V H I de la loi du 6 messidor.
M a is, d’une part, on a démontré que cette loi sub
séquente n’avoit aucun rapport avec les appelans qui
avoient fait leurs diligences antérieurement à sa publi
cation , et en vertu d’une loi différente. D ’un autre côté ,
on a prouvé qu’au moment des offres les fermiers avoient
offert tout ce qui étoit échu.
M ais, dit-on, lors du jugement du tribunal civil, les
fermiers n’ont pas oiï’e rt ce qui étoit échu à cette époque.
Ce motif est bien extraordinaire : la loi même du 6 mes
sidor n’astreignoit qu’au payement des termes échus à
l’époque de la notification ; elle n’obligeoit point de
faire à chaque échéance de nouvelles offres ; si la discus
sion se prolongeoit ; et si, lors du jugement du tribunal
civil qui a été rendu en thermidor an 7 , il étoit échu
d’autres termes, l’intimé pouvoit en faire prononcer la
condamnation, et même obtenir des dépens contre les
fermiers débiteurs. A u lieu de former sa demande, il
s’est laissé condamner par défaut ; les appelans 11e pouvoient donc encourir aucune peine, et, rien ne les obligeoit à faire de nouvelles olires.
Il est plus difficile d ’expliquer pourquoi on reproche
dans ces motifs aux appelans de n’avoir pas renouvelé
leurs offres à domicile. L ’acte d’offre du 21 nivôse a n 6 j
�( i3 )
étoit fait au domicile du citoyen de Privezac; il y a eu
refus de recevoir ; il n’étoit donc pas nécessaire de re
nouveler à dom icile, il suffisoit de les reitérer à l’au
dience ; et c’est ainsi que cela a toujours été pratiqué.
Les motifs du jugement une fois écartés, il n’est plus
question que de discuter les moyens proposés par l’intimé;
et on va voir qu’ils n’ont rien de spécieux.
D ’abord, l’intimé présente de prétendus motifs de
considération ; suivant lui les Landriève ont fait une
grande fortune dans cette ferme : il auroit trouvé le
''meilleur moyen d e là dim inuer, ou d e là détruire, s’il
pouvoit se faire payer, pendant neuf années, une somme
de 3,000 francs pour deux domaines qui n’étoient af
fermés auparavant que 1,300 francs par année.
Il prétend aussi que le sieur T i ll y , peu soigneux dans
ses affaires, répandu à la cour et livré aux plaisirs, faisoit peu d’attention à la valeur de ses biens, s’en rapportoit à des gens d’affaire , ou recevoit à l’avance des
sommes considérables de la part de ses fermiers.
Mais ces allégations ne sont que ridicules ; elles ne sont
appuyées sur aucun adminicule de preuves, et les appelans
ont toujours désavoué d’avoir payé par anticipation aucun
pot de vin ; ils ont soutenu que les domaines étoient
portés A leur juste va le u r, et que le prix du premier
bail ne leur promettoit aucun bénéfice.
L ’intim é, aii fond , examine deux questions : la pre
mière , celle de savoir si le bail du 8 germinal an 4
est sujet à réduction ; et la seconde, si les Landriève sont
l'ccevables ¿1 la proposer. Il observe judicieusement que
fin de non-recevoir doit être examinée lu prem ière,
�( H )
parce que la question principale seroit surabondante, si
les Landriève étoient non-recevables.
L ’intimé convient cependant que la demande en ré
duction a é.té signifiée dans un temps utile ; mais, sui
vant l u i , une demande n’est que le commencement d’une
contestation : on ne sait pas trop où il veut en venir
avec cette distinction, Il faut toujours commencer par
demander; mais au moins le jugement doit toujours se
reporter à la demande.
U n des grands griefs contre cette demande, c’est que
l ’exploit n’est pas signé des fermiers, ni d’un fondé de
pou voir; l’huissier, dit-il, ne présente aucune assurance
en cas de désaveu , et les Landriève auroient pu s’en
moquer impunément.
C ’est la première fois qu’on a imaginé de prétendre
qu’il falloit signer un exploit pour constituer une de- „
mande : comme il y a beaucoup de gens qui ne savent
pas signer , il faudroit en tirer la conséquence que toutes
les personnes illitérées n’ont pas capacité de former une
demande, ou de faire donner un exploit.
. L ’intimé ajoute qu’il n’y avoit rien de terminé entre
les parties, loi'squ’a paru la loi du 6 messidor an 6; et
quoiqu’ils fussent en litige au tribunal civil du Puy-deD ôm e, il n’y avoit encoi'e rien de réglé, ni par les par
ties , ni par les tribunaux.
O r , dit-il, l’article X V de la loi du 6 messidor an 6 ,
porte que toute contestation non définitivement terminée
sera jugée en conformité de la présente loi. Si l’ail’aire doit
ctre jugée en conformité de la loi du 6 messidor, les fer
miers doivent donc offrir tous les arrérages échus \ et c’est
ce qu’ils n’ont pas fait.
�( x5 )
Il se présente deux réponses péi^emptoires à cette ob
jection ; et d’abord les appelons eux-mêmes peuvent in
voquer avec succès les dispositions de cet article, relati
vement î\ la dénomination de numéraire qui a été em
ployée dans le prix du bail. Cette loi d it, article I I , que
le bail sera toujours sujet à réduction, quelques expres
sions et dénominations de monnoie qui y aient été em
ployées ; donc le citoyen Privezac ne peut pas dire que,
parce qu’il s’est servi de l’expression num éraire, le bail
ne peut pas être réduit.
Mais c’est aller trop lo in , que de soutenir que les fer
miers doivent offrir tous les termes échus ; il suffirait
qu’ils se fussent conformés à la loi précédente du 9 fruc
tidor an cinq : on a vu que l’article V III de la loi du
6 messidor , en exigeant le payement des termes échus,
n’avoit entendu parler que des fermiers qui jusques-là
ü’avoient fait aucune diligence.
D ’un autre côté, les Landriève, lors de leur acte d’offre,
avoient offert tout ce qui étoit. échu à cette époque,
quoiqu’ils n’y fussent pas obligés , et le citoyen Privezac
est forcé d’en convenir. M ais, d i t - i l , ces offres n’ont
été faites ni à ma personne, ni à mon dom icile, quoique
le prix du bail fût payable à mon domicile; elles ont été
faites au domicile par moi élu chez le citoyen B ru n , et
des offres réelles ne peuvent être valablement faites à un
domicile élu.
Quelque prépondérance qu’ait l’autorité de Denisart
sur laquelle le citoyen de Privezac s’appuie, ce ne seroit
point i\ lui à proposer une semblable objetiou. L e citoyen
de Privezac a changé cinq ou six lois de domicile pendant
�'
,
.
(i6)
.
la révolution ; et comme il n’a pas toujours été en de
mandant , plusieurs de ses créanciers ont éprouvé souvent
l’embarras de ses changemens de domicile : mais il n’est
pas exact lorsqu’il annonce que le prix du bail est payable
à son domicile. L ’article X V - du bail du 8 germinal an 4
porte que le beurre, ou les poulets que doivent les fermiers
pour survine , seront conduits à Riom ou à C lerm on t,
ou à une distance égale ; et l’article X V I dit que la
somme de 3,000francs, formant le prix du bail, sera payée
par eux aux lieux portés ci - dessus : ce n’est donc point
au domicile que Privezac a pris dans le département de
l’A veyron , que les fermiers doivent porter le prix du
bail.
D ’un autre côté, la notification en réduction du 9 ven
démiaire an 6 a été faite en la commune de Pagas, dé
partement de l’A veyron , en parlant au fils de l’intimé.
Lors de son commandement du 16 nivôse an 6, l’intimé
a élu domicile, pour une décade, chez le citoyen Jean
B run , cultivateur du lieu de la Maison-Neuve, commune
du Peyrouze près Montaigut ; et c’est à ce domicile
que les fermiers ont fait les offres le 21 nivôse an 6, le
cinquième jour du commandement, et avant l’expiration
du délai pendant lequel il y avoit domicile chez le citoyen
Brun.
Enfin , le citoyen Brun a répondu à l’acte d’offre, qu’il
n’avoit aucun pouvoir de B runei, et que cela ne le concernoit pas; et lorsque les appelans ont fait citer Brunei
au bureau de paix du canton de M ontaigut, pour voir
déclarer les ofires valables, et en cas de refus, qu’il fût
permis de consigner, Privezac a comparu par Desmaroux,
�C1 7 )
son fondé de pouvoir, et a persisté dans la réponse faite
par le citoyen Jean Brun.
Sur l’opposition formée au jugement du tribunal civil du
27 thermidor an 7 , le citoyen Brunei a assigné les appe
lons au tribunal d’arrondissement de Riom ; il a donc
reconnu, et le domicile par lui é lu , et la juridiction du
tribunal d’arrondissement : mais ensuite, en renouvelant
son opposition par exploit du 5 frimaire an 9 , il n’est
plus domicilié dans le département de l’A v e y ro n , il élit
domicile dans la commune de Cliauzy , département
d’A llier.
.
Comment pourroit-on saisir le citoyen Brunei avec des
changemens de domicile aussi fréquens ? Voudroit-il que
les offres eussent été faites aux lieux où le prix du bail
étoit portable ? c’est à Riom ou ù Clerm ont, ou à une
distance égale, et sans aucune désignation que l’indication
qu’il voudroit en faire. V o u d r o i t - i l que les fermiers
allassent au lieu de Pagas , département de l’Aveyron ?
mais il se dit tantôt domicilié de l’A v e y r o n , tantôt du
département d’A llie r , suivant l’intérêt qu’il a à em
barrasser ses créanciers ou ses débiteurs, comme il l’a fait
pour les héritiers Tassy qui ne savent où le prendre.
En un m ot, le bail est fait en la commune du Peyrouze
près Montaigut ; point d’indication déterminée pour
le lieu du payement-, élection de domicile chez le citoyen
Jean Brun-, c’est donc là ou ces fermiers ont dû s’adresser;
et il peut d’autant moins s’en plaindre, qu’il a connu l’acte
d’oifre , qu’il a comparu au bureau de paix sur la citation
par tout autre fondé de pouvoir que B ru n , et qu’il a
adhéré à la réponse de Brun.
�,
( 18 )
En un m ot, la loi qui ordonne que les offres seront
faites au domicile du créancier, doit être entendue civile
ment : elle n’a pas exigé l’impossible , elle a voulu prin
cipalement favoriser la libération ; et il est absurde de
prétendre qu’un débiteur soit obligé d’aller faire des offres
à deux cents lieues, lorsqu’il n’y a point d’indication
précise pour le payement, et lorsqu’il y a un domicile élu
dans le lieu où sont situés ces immeubles affermés.
O n ne peut pas reprocher aux appelans le défaut de
consignation de leurs offres ; il y a toujours eu litispen
dance sur la suffisance ou la validité de ces mêmes offres,
rien de déterminé à cet égard jusqu’au jugement définitif:
et comment consigner, lorsqu’il y a toujours des doutes ?
Les appelans ont réitéré leurs offres après ce jugement ;
l ’intimé a reçu à bon compte ; les appelans ne plaidoient
donc pas les mains garnies comme voudroit le prétendre
le citoyen de Privezac.
Telles sont les fins de non-recevoir singulières qu’oppose
le citoyen Privezac à ses fermiers. Bientôt par une con
tradiction choquante, et tout en invoquant la loi du 6
messidor an 6 , il vient dire q u e , dès qu’il a stipulé le
payement en num éraire, il ne peut pas y avoir lieu à la
réduction ; il croit appitoyer sur son sort en disant qu’il
a du compter sur 27,000 francs , et qu’il ne toucheroit
que i i , 5oo francs dans le sens du bail de 1784 : cette
différence, d it-il, seroit énorm e, et vaut bien la peine
qu’il résiste aux prétentions déloyales des Landriève.
Mais Icsljandriève n’ont promis 3,000 francs par année,
que parce qu’ils devoient croire qu’ils payeroient en
mandats; mais ils n’ont promis 3,000 francs, qu’à raison
�( 19 )
de la progression survenue dans les denrées pendant
l’émission du papier-monnoie ; et aujourd’hui que tout
est rentré dans l’ordre, on ne peut exiger d’eux que la
juste valeur des immeubles affermés. L a loi a prononcé ,
les appelans ont satisfait à la loi ; et le jugement qui les
condamne présente une contravention manifeste à la
disposition des lois de la matière.
s
Par conseil, PAGES ( de Riom ), anc. jurisconsulte.
BAY L E ,
avoué.
A R io m , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du Tribunal d’appel. — A n 10.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Landriève, Charles. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bayle
Subject
The topic of the resource
bail à ferme
loi Emptorem
conflit de lois
cadastre
bail
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Charles, Pierre et Gilbert Landriève, père et fils, cultivateurs, habitans du lieu de Chantagret, commune du Peyrouze, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de cette ville de Riom, le 3 floréal an 9, et demandeurs en opposition; contre Jacques Brunel de Privezac, propriétaire, habitant du lieu de Chauzy, commune de Besset, département de l'Allier, intimé et défendeur en opposition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1784-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0233
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0234
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53732/BCU_Factums_M0233.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Peyrouse (63187)
Paris (75056)
Chantagret (domaine de)
Cornassat (domaine de)
Rights
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Domaine public
bail
bail à ferme
cadastre
conflit de lois
loi Emptorem
-
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3403b504dff06b6f62ea4d87e67c823b
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Text
A P P E RCU
TRIBUNAL
DE
CASSATION.
POUR
le C.en J U D D E -L A R IV IÈ R E ,
-,
,
..
d e fen d eu r ;
‘
C O N T R E la dame B R A N D Y
demanderesse.
L a
J
dam e B r a n d y n e cesse d e p r é te n d r e q u ’en la d é c la ra n t
non-recevable , q u a n t à p r é s e n t , a e xcip er d e son d iv o rc e (e n
ce qui tou ch e la c o m m u n a u té de biens) , à I’ég a rd d ’ un cré a n
cier , o n a porté atteinte à son éta t c iv il de femme divorcée.
E lle ne veut pas entendre qu e son état d e fe m m e ou d e d i~
vo r cé e ne fait rien au procès.
P o u r éc laircir le sens d u jugem ent attaqué , p o u r q u ’ il p a r o isse bien
n’a v o ir a ucu nem ent disposé sur l 'état civil d e l a
dame; B r a n d y , rem ontons aux élém ens de cette affaire à l ’état
origin aire de la contestation.
L a d a m e -Brandy , pen dan t q u ’clle était fem m e G o u r s a u - D u mazé , était co m m u n e en. bieus . soit eu v e rtu d e son co n trat de
SECTION CIVILE
raPI orteur.
�m a r ia g e ,
soit p ar la force d u stalxit mûri c pal qui r é j i t R o -
ehouart ( jadis généralilé de Poitiers. )
D u r a n t le m a ria g e , et sans a vo ir cessé d ’être com m uns en
biens , les d e u x époux v e n d ire n t c o n jo in te m e n t un domaine.
C e tte vente sera n u lle , sans doute ; p arce qu e la venderesseé t a t m ineure. — Il s’agit seulement de déterm iner q u an d sera
ouverte l ’action en restitution.
Judde L a r iv iè r e , q u i a acquis de la com m unauté ou société,
p rétend ne p ou v oir être r e c h e r c h é , ju s q u ’à ce q u ’il y ait dissolu
tion effective de la com m unauté ou société qui lu i a vendu.
Il prétend que la dam e B r a n d y ne peut re v e n d iq u er ce d o
maine , tant q u ’elle sera de fait a s s o c ié e , com m u n e avec G o u r sau -D u m a zé tant qu e réclam er au nom de m adam e 6era récla
m e r p o u r le p rofit d e monsieur.
C ’est parce que la d am e B r a n d y avait encore son m ari p our
a s s o c ié que , lors d e sa p rem ière aclion en restitution , Ju ddeL a r i v i è r e fut fond é à lu i opposer une fin d e n o n -re ce vo ir.
Si la dam e B r a n d y , au lieu d ’être en co m m u n a u té d e b ien s
eut été mariée avec c occlus ion d e co m m u n a u té e t sép a ra tion d e
b ie n s ; si entre elle et son mari il n ’y avait eu ni société pour
les acquêts , ni société p ou r le m énage ; si elle avait eu à part
ses propriétés , scs revenus et ses dépenses , (ainsi q u ’une femme
de pays de droit écrit exerçant ses droits para p lie r n a u x ') lu.dame
B r a n d y aurait été recevahle , m êm e d u r a n t son m a r ia g e , à reve
n ir contre la vente par elle faite étant m ineure.
D a n s cette h y p o t h è s e , il n ’y aurait eu ni d r o i t s , ni intérêts
d u mari à opposer -, la dam e B r a n d y ,
fem m e G o u r s a u - D u -
mazé , eût été pleinem ent accueillie à r e v e n d iq u e r le dom aine
vendu.
A i n s i , la fin de n o n -re ce vo ir opposée à la dam e B r a n d y (lors d u
p rem ier procès) ne reposait au cu n em en t sur son é ta t c i v i l , sur
la q u alité àa fe m m e G o u r s a u - D u m a z c ; mais sur le f a i t d e s o
c i é t é , sur ce lle circonstance de f a i t , q u ’ elle était co m m u n e e n
b ien s avec le citoyen G oursau-D um azé.
C o n s é q u e m m e n t, p our ôter to u l fondem ent à la lin de non-
�r e c e v o ir , il fallait faire cesser , non l ’état c iv il, mais \qf a i t d e
s o c ié t é : il fallait , non cesser d ’ être ép o u se , mais cesser d ’être
réellem ent com m u n e e n b ien s. C on séquem m ent enfin , dans ce
n o u vea u procès com m e dans le p rem ier, la question se réd uit à ce
p oint : les intérêts sont-ils encore co nfond us? y a-t-il encore com
m unauté , m élange de L ie n s , s o c ié té entre la dam e B r a n d y et
G oursau-D um azé ?
« L a dam e B r a n d y est co n ven u e q u ’elle habite , mange et
« couche avec G oursau-Dum azé-, que leurs b ie n s , leurs r e v e n u s ,
« leurs dépenses sont a d m in istrés p ar lu i -, q u ’ainsi
l ’ exige
« son intérêt et celui de ses enfaus. — M ais elle nous défend
« d ’appeler cette com m ixtion un e s o c ié té d ’aucune espèce.
« N o n une s o c ié t é c o n ju g a le
puisqu’il n ’y a plus d e ma-
« riage qui en soit la source.
« N o n une s o c ié t é o rd in a ire , p u is q u ’il n ’ existe pas d 'é crit
« qui la constate. »
Q u e lle ([lie soit l’espèce d e société existante, peu nous importe ;
l ’essentiel est de savoir s’il en existe uue qui ren d e les in térêts
com m u n s entre G ou rsa u -D u m a zé et la dam e B ra n d y .
O r ce p'.iiul pouvait être constaté sa n s écrit. — L e principe
« que les sociétés doiven t êlre écrites » ne regard e que les a sso
c ié s c n lr ’ cuæ ; il ne re ga rd e pas les tie rs : à l ’égard des t ie r s , il
suilit que la société soit p ro u vée par des faits, p ar des a v e u x , par
la notoriété publiq ue , ( ainsi jugé le 23 messidor an 9 , au
rapp ort du citoyen Babille , sur la d e m a n d e r e je té e de la veuve
N o r m a n d et fils contre Peros. )
D ’ailleurs , et dans l ’ espèce , la fusion d ’intérêts , la société
résulte légalem ent d u fait s e u l , de la réunion des personnes ,
et d u mélange des biens.
L a dam e B r a n d y , habitante de R ochouart , est régie par la
coutume d u Poitou , dont l ’article
admet la s o c ié té ta isib le ,
ou ta cite , e n tr e d e s m a jeu rs ha bitant e n s e m b le , e t vivant
d e s m êm es b ie n s d e p u is un an e t un jo u r.
« C ette société taisible , (d it B o u ch e u d sur l ’article 2'ïi , 11".
5 7 , ) e u tr ’aulrcs que le mari et la i e m in e , a souvent
l ’un
�( 4 )
* d ’eux q u i en est le c h e f, com m ande a u x autres ,fa it toutes les
« affaires de la communauté , et en est appelé le maître ,
<? d ’après la loi i , ff. de Pactis. »
,
5
L e tribunal d ’appel pou voit d o nc , en p rc sc 'n d a n l d e l ’acle
de divorce , décider dans l ’espèce q u ’il y avait fusion d ’intér é t s , c o m m u n a u t é , ou société véritable; q u e , sous ce r a p p o r t , la
revendication
faite
au nom de
m adam e
devait to u r n e r
au
profit de jîionsieur.
L e trib un al pouvait d é cid e r que la com m unauté d e biens , née
jadis avec le lien conju gal , était a u jo u r d ’h u i conservée ou re
n o uvelée par la volonté des divo rcé s , par le fait d ’habitation et
administration commune.
O h ! si la question
qui nous divise a
pu être décidée
en
p rescin dan t de l ’acte de d ivo rce et de ses effets , en ne considé
ra n t qu e le fait de com m unauté
ou
société c o n v e n tio n n e lle ,
le jugem ent est loin d ’avoir m é co n n u l ’essence d u d i v o r c e , d 'a v o ir
statué sur une question d ’état.
A ctu ellem en t que nous voilà fixés sur l ’état précis de la co n
testation , exam inons le jugem ent.
E t p u is q u ’il ne s’agit qu e de savoir s’il existe encore commu
nauté, ou s’il y a séparation de biens, souvenons-nous que la d é
cision sur le d ivo rce ne doit être considérée que dans ses rapports
avec la com m unauté de biens ■
, que le mot m êm e divorce ne
doit pas être pris dans un sens absolu, qui tou ch e à la personne,
mais dans le sens relatif au p ro c è s , en ce qui touche la co m
m unauté de biens.
L e ju gem ent déclare la da m e B r a n d y n o n -r e ccv a b le h e x c ip e r
d e son d ivorce ; c ’c s t - a - d i r e que tel que soit l ’acte de d i v o r c e ,
tels que soient ses effets naturels , elle s’est ôié , p a r son f a i t ,
le droit d ’en tirer avantage > (fuant a p r ése n t.
L e jugem ent déclare le divorce non opposable, quant a pré
sent; c ’est-à-d ire que tel (pie soit l’acte de d iv o r c e , tels que soient
scs effets n a tu rels, sa vertu légale ou naturelle se trouve ncutraUsée ou suspendue par le f a i t , par la volonté positive et toute
puissante de la dam e B ra n d y .
�C 5 )
L a dam e B r a n d y est réputée en état d e société continuée ou
renouvelée avec G o u r s a u - D u m a z é ,
N o n par défaut d e vertu originaire dans l ’acte de son d i v o r c e ,
mais p ar suite d ’une restriction apposée a u x effets natui’els d u
d ivo rce , p ar le fait de sa volonté -, ou p a rce q u ’il lu i a p lu de
r e n o n c e r aux eiïcts d u d ivo rce en ce q u i touche la séparation
des biens , ou parce q u ’il lui a p lu d e r e n o u v e le r l ’association,
au cas q u ’elle fû t dissoute.
Q u els sont les faits , quels sont les actes de volonté qui ont fait
p résu m er au tribunal cette société continuée ou renouvelée , qui
ont fait d é cla re r le divorce sans effet, en ce qu i touche les biens?
L e fait de co-ha! itation et de co-administration -, — le fait d e
sim ulation ou d e fra u d e , — tel est le ju gem ent d é n o n cé :
D a n s son d is p o s it if , il déclare la dam e B r a n d y non recevable
à opposer son d ivo rc e ( en ce qui touche scs effets sur la com
m unauté de biens. )
D a n s ses m otifs , il considère qu e le d iv o rc e ( relativem en t
à la séparation des biens ) est simulé ou fr a u d u le u x
et no n
exécuté.
O r , est-il un e loi qui dise positivement q u 'u n e fem m e est
recevahlc à exciper de son d iv o rc e , ( p ou r se d ire séparée d e
biens) alors m êm e qu e le d ivo rc e n ’ a pas reçu d ’exécution , en
ce qui touche le bien , et encore q u ’il y ait simulation au p r é ju
dice des créanciers ?
N o n , aucune loi n ’a tenu u n langage si p e u r a i s o n n a b l e
si peu moral.
L a d a m e B r a n d y invoquait d ’abord les art. I cl H d u §
,
3
de la loi d u 20 septem bre 1792 sur le divorce.
M ais ces d e u x articles ne disposent qu e sur la facullt; de se
rem a rier : s'ils assurent V in d é p e n d a n c e des ép o u x , c est en ce
sens q u 'ils sont alfrancbis d u jo u g c o n ju g a l, ([lie le lien p e r
s o n n e l est dissous. — Point de rapp ort avec notre espèce , où il
s agit seulement d u sort des bien s.
E lle invo quait aussi l ’art. X I , p ortant q u ’à l ’ ég a rd d e s c r é a n
c ie r s le d ivorce n ’ a d 'e j f e l q u e com m e u n e sé p a r a tio n .
�-
( 6 )
Mais le sens naturel de celte disposition est tout en fa v e u r du
jugement :
C a r si le ju gem ent déclare q u ’un d ivo rce simulé , ou fra u d u le u x
et non exécuté , 11’a pas effet à l ’é g ard d e créanciers , c ’est p ar la
raison q u ’une séparation sim u lé e , frau d u le u se , et non e x é cu té e ,
n ’aurait pas d ’effet à l ’égard des c r é a n c ie r s , et parce qu e le d i
vo rce n ’a effet que com m e une séparation.
En vain la dam e B r a n d y s’évertue p our p ro u v e r que la sim u
lation n ’est pas réelle , et que ce q u ’elle a fait n ’a rie n d e fr a u
d u le u x ou d ’illicite.
L a l o i , qu i lu i a perm is d e cesser d ’être l ’épouse d ’un m ari par
qu i elle serait m a lh e u r e u se , n ’a certainem ent pas v o u lu q u ’elle
cessât d être son épouse p ou r d e v e n ir sa co n cu b in e \ q u ’elle
conservât p our elle seule toutes les do uceurs d u m ariage , en
faisant rejaillir tous les effets d ’ un d ivo rc e sur ses créanciers , ou
sur les m a lh e u r e u x fruits de ses voluptés illégitimes.
Il y a f r a u d e , en ce q u e V in te n tio n d e la loi est h o rrib le
m ent trompée , à la fa veu r de l ’observation ju d a ïq u e d e la le ttre
de la loi.
Il y a sim u la tio n ou f r a u d e , en ce qu e la dam e B r a n d y a con
senti 1111 acte de divorce p ou r p a ra ître séparée de biens -, alors
que de fait il y a fusion d ’ intérêts , com m unauté ou société de
biens , identité d ’administration -, alors q u ’ elle confesse que cet
état de choses est le seul réel et profitable p our elle.
I o u t le public est convaincu , ( et la dam e B r a n d y se glorifie
de cette croyance) q u ’aussitôt le dom aine r e v e n d i q u é , ou le procès
fin i, l ’aclc de d ivo rce sera d é t r u i t , ou p ar une transaction ju d ieiaire qui le dé clare n u l , ou , s’il en est b e s o in , p ar un nouvel
acte de mariage.
O r , il y a dans ce m anège tant d 'im m o r a lité , tant d ’incon
venance , tant d ’oppositiou avec les vues d u lé g isla te u r, q u ’il est
impossible de ne pas y
vo ir simulation , artifice , fraude.
l'.l dans les cas de divorce , com m e dans les cas de séparation ,
comme dans tous les cas possibles, nul n e d o it profiter de la fraude
qu'il a machinée au d étrim en t d ’autnii.
L i d:i ne B randy dénature le sens de la disposition légale-.
/
�p o u r lui faire dire seulement qu e le divorce ne dispense pas
les époux de remplir leurs obligations , contractées pendant
le mariage •• mais ce n ’est là q u ’ une interprétation h a s a r d é e ,
d ’où il ne pourrait jamais résulter u n e ou vertu re d e cassation.
D e notre p a r t , ce n ’est pas interpréter , c’est s’attacher au
texte de la loi , d e d ire q u ’un d ivo rc e simulé , ou f r a u d u le u x ,
et non exécuté , reste sans effet à l ’ é g ard des créanciers.
C a r s’il ne restait pas sans e f f e t , dans ces cas , le divo rce aurait
plus d ’effet q u ’un jugem ent de séparation , p u is q u ’un jugem ent de
séparation simulée ou frauduleuse , et no n exécutée , reste sans
effet à l ’égard des créanciers.
L e législateur a u ra it-il d û établir u n e différence entre les actes
d e d ivo rce et les jugem ens de séparation , quant à leurs effets à
l ’é g a rd des créanciers?
Ici la dam e B r a n d y p eu t p a rco u rir u n clia m p v a ste en c o n
jectures.
«
Q u an t à nous , nous avons suffisamment dém ontré q u ’ en ce qui
touche le sort des b ie n s , et relativem ent a u x c r é a n cie r s, le d ivo rc e
est absolum ent un acte de mêm e nature q u ’une séparation.
11 nous suffit de dire q u ’à cet é g ard le divo rce et la séparation
sont assimilés par la loi ( bo n n e ou m auvaise ) ; que l ’un et l ’autre
ont les mêm es effets , en ce qui touche le sort des biens , relative
ment a u x créanciers.
L a dame B r a n d y ne ré p o n d ra jamais à cet argument.
« Si u n d iv o rc e s im u le , fr a u d u le u x et non exécuté avait eflet
« à l ’égard des c r é a n c ie r s, il aurait plus d ’effet q u ’ un jugement
«. de séparation.
« O r , la loi asshnile le d ivo rc e et la séparation, dansleui-s effels,
« à l’éim id des créanciers.
« D onc,
à l ’égard de créanciers , un d ivo rc e simulé ou f r a u
d u le u x et non exécuté doit rester sans eflet. »
L a d a t n c B r a n d y se retranch edalis l a d sposition de l'a rticle IV du
même p a r a g r a p h e ,— qui ne dit rien de la co m m u n a u té ou s o c ié té ,
�(
8
)
continuée ou re n ou ve lé e après l ’acte d e divorce. — V o i c i le
texte d e la d is position :
•
D e quelque manière que le divorce ait lieu , les époux
divorces seront réglés par rapport à la communauté de biens,
ou à la société d’acquêts
qui
A EXISTÉ
entre
eux
, soit
par la loi , soit par la convention, comme si lu n d’eu x était
décédé.
A in si , et d 'après cette disposition , si des épo ux divorcés
avaient à régler la com m unauté qui a e x isté entre e u x , ils a u
raient les m êmes droits respectifs que si l ’un d ’eux était, décédé.
Mais s il le u r plait
de continuer ou de renouveler cette
communauté ou société , la loi n ’oppose au cu n obstacle , a u cu n e
restriction à l ’exercice de leu r volonté.
L a dam e B r a n d y a le courage d e professer q u e des époux
d ivo rcés peuvent rester amans. — E lle serait p a r trop in co n
séquente d e n ie r q u ’ ils puissent rester associés.
E t s'ils p eu ven t rester, ou seulem ent d e v e n ir associés, la
question d e communauté ou de société n ’est presque plus q u ’une
question d e f a i t , dont la décision , q u a n d elle serait e r r o n é e ,
ne serait jamais u n e contravention à la loi.
D a n s tous les cas , que ce soit un e simple question de f a i t ,
que ce soit, une question com pliquée de fait et de d roit , Reste ,
q u ’ en
déclarant la dam e B r a n d y
non - recevable
à exciper
de son divo rce , p ou r se dire séparée d e biens , pour opposer
cette séparation a des
cré a n cie rs, le jugem ent n’a pas
ju gé
une question d ’eta t , n ’ a contrevenu à aucune loi , et s'est a u
contraire conform é a l'article X I d u p aragrap he III d e la loi
d u o septembre 1 7 9 2 qui assimile le d ivo rc e et la sé p a ra tion
dans leurs e ffets à l ’égard des créanciers.
3
C o n c lu s io n s , com m e p ré c é d e m m e n t au rejet d e la d e m a n d e
en cassation.
L e C SlREY ,
p o u r le d é fe n d e u r.
Le C.eMÉJAN
p o u r la dem a n deresse..
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjan
Subject
The topic of the resource
divorces simulés
communautés familiales
fraudes
coutume du Poitou
Description
An account of the resource
Apperçu pour le Citoyen Judde-Larivière, défendeur ; contre la dame Brandy, demanderesse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1790-AN 11?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0232
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0616
BCU_Factums_G1218
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Rochechouard (87126)
Rights
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communautés familiales
coutume du Poitou
divorces simulés
fraudes
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MEMOIRE
POUR
DOUV RELEUR DE G À R D E L L E ,
homme de loi, demeurant à A rlane , fils et
- héritier universel de défunt M i c h e l DOU
V RELEUR DE G A R D E L L E , notaire pu-
J
oseph
X) N T R
**r <------ ----- ------
W -
.
^
.
^
A N T O I N E V E L A Y , cultivateur y habitant du
village de Capartel, mairie d’Arla n c tant en
son nom que comme f ils et héritier de défunt
^ S^M
^^trDEV E L A Y , dit le m en so n g eA NTOiNE
B R A V A R D , jardinier, demeurant en la ville
d'A rlanc; et M a g d e l a i n e V E L A Y , sa femme,
aussi. fille et héritière de C l a u d e V E L A Y
,
intimés.
une affaire due au système du papier-m onnoie ! Ce signe a fourni à la famille des V elay des moyens
trop faciles, pour donner à leurs ruses et à leur mau
vaise foi tout l ’ e s s o r qu’ils ont voulu. Depuis le commen
E n c o r e
cement du 18e siècle, cette famille nous devoit une rente
'
A
.
�(2 )
.
foncière , que d’abord elle servit très-m al, et puis qu’elle
ne servit pas du tout. A la fin , mon père obtint une
sentence de résolution du contrat ; il se m it en possession
des biens ; il les afferma à A n toine V e la y , l’un des adver
saires , fils du débiteur de la rente, parce que cet A ntoine
V ela y lui montra de la conduite et une grande envie de
prospérer. L a révolution ven u e, le père et le fils V ela y
se sont coalisés pour tourner contre nous le bienfait de
mon père envers V ela y fils. Les dénonciations, les réclu
sions révolutionnaires ont grandement aidé leurs projets
iniques. M on père a demandé que V elay fils évacuât les
fferfoé»r<x>j V æ ky f i l w & u y ' P r o p r i é taire..,L e*
p ère étr^6k$on^«Sifcuite offert des assig^ ts« fta arJ xi^ l^ t^ )
de la rente : ils les onV ^consignés/ Une •sofitoace -rerïflue
■
>
^
<
au tribunal de district à A m b e r t, le 26 juin 1793 , lui a
donné gain de cause sur ces deux points : j’en demande
la réform ation ; je dois l’obtenir.
F A I T S . .
% * V
Par acte du 17 septembre 1 7 1 4 , Jeanne C o te , veuve
de Jean D o u v re leu r, ma bisaïeule, et Pierre-Joseph D ouvrcleur d e là Barba te , mon grand o n cle, donnèrent en
rente à G régoire et Sébastien V e la y , père et fils, un
m oulin appelé C apartel, et d’autres im m eubles, moyen
nant la prestation annuelle d elà somme de 140 fr. et d’un
cochon, en valeur de 5 fr. le tout payable à la S. M artin.
L e capital de cette rente fut déterminé à la somme de
2,900 francs j elle fut pourtant stipulée non rachetable.
lie contrat contient la clause résolutoire que voici : « $ e
’ y
.
�C3 )
-
« "pourront non plus les acquéreurs arrenter icelle ; et
« f a u t e par eu x de payer ladite rente et de rapporter
« quittances des cens q u i se trouveront asservis, année
« p a r a n n ée, demeure permis auxdits vendeurs de ren« trer dans lesd itsfon d s sans aucune fo r m a lité à ju s -
« tice. »
L e 21 juillet 17 4 4 , il fut passé entre P ierre-Joseph
D ouvreleur de la Barbate et Sébastien V e l a y , l’un des
preneurs, tant en son nom que comme tuteur de ses frères
et sœ urs, un traité par lequel le p rix de l’empli ithéose
fut réduit à la somme de 125 francs, et au co c h o n , en
Valeur de 5 fr. par an. L a 'c a u se de cette réduction
procéda de l’éviction de partie des immeubles compris
t
* au bail de 1714.
1 7 4 4 , il y eut dans la fam ille D o u v re le u r
^‘^
^ ^arrâng e iiie n t, p ar lequ el cette rente fut attribuée à
L y jJ tîo s e p ir D o u v r e le u r de G a r d e lle , m on aïeul.
octobre i y 5o , ce Joseph D ouvreleur de Gardelle
au bailliage d’A riane une sentence contre les des“^-cendans de G régoire et Sébastien V e la y , preneurs; il les
fia*/
condam ner, i° . au payement de la rente de 130 fr.
J744> jusques et compris 1749, avec intérêts ; 20. au
^ » ^ « / ¿ ^ 'a p p o r t des’ quittances des cens ; 3°. au rétablissement des
J ^ ^ £ ^ ^ b â tim e n s en bon état. Il fut dit q u e , faute de c e , le bail
.
à rente seroit résolu.
L e 21 octobre
, ce Joseph D ouvreleur de G ar
delle obtint au même bailliage , contre un autre descen
dant des
une autre sentence portant les mômes
condamnations pour les années 17 5o , jusques et compris
1756 j elle prononça aussi la résolution faute du payement
A 2
�,
{ 4 }
.
des arrérages de la ren te, faute du rapport des quittances
des cens, et faute du rétablissement des bâtimens en bon
état.
•
___
L e 9 octobre 1766, 00 Josepli D ou vreleur de Gardelle
prit une troisième sentence en la même justice, contre
Claude V e la y , pèi’e des adversaires, et contre Sébastien
V elay son frère. P ar cette sentence, le bail à rente de
I 7 I 4? Ie traité d u '21 juillet 1744 , eflessen ten ces.d e
17.50 et 17 5 7 , furent déclarés exécutoires contre e u x ; ils
furent condam nés,
à payer les arrérages de la rente,
depuis 1744 jusqu’en iy 65 inclusivem ent, avec intérêts,
h com pter de la demande; 20. à rapporter les quittances
des cens ; 30. à faire aux,bâtimens les réparations néces
saires pour les mettre en bon état , sinon, et faute d e c e faire dans le m ois, le bail à rente étoit déclaré résolu. . \ >
L e 23 décembre 1772 quatrième sentence, portant
mêmes condam nations, et disposition résolutoire?**'”
Joseph D ouvreleur de Gardelle étant d écéd é, -il »T-nHf
fait entre mon père, son héritier universel, et les autf&î^..
emans , un partage qui donna h mon père la rente dont
il s’agit.
D
1
lie 12 novem bre 1 7 8 4 , mon père fit assigner en lût***”1
sénéchaussée d’Au.vergne Claude Y e la y , A ntoine V elay '/ "
cousin de ce dernier ; A n d ré V e la y , Sébastien V e la y ,
cinquième du n om ; Sébastien V e la y , sixième du nom ;""*
-et Antoinette B œ uf, femme de Jean Grangier ; tous petitsenfans et arrière petits-enfans de G régoire V e la y , pre
neur à rente en 1714*
L e 22 juin 178 5, mon père obtint contre eux , en cette
sénéchaussée, sentence, par laqu elle, i°. le bail de 1714
�. ( 5 )
f
et les autres titres subséquens furent déclarés exécutoires ;
2°. les ¡Velay furent condamnés 'chacunf personnellement
pou r-sa p a rt, e t ’ hypothécairem ent pour le to u t,,.a u
payement des vingtrneuf dernières années de la ren te,
avec intérêts , à compter de la demande. Les Y e la y furent
aussi condamnés à rapporter les»-quittances des cens , çt
à l'emettre les bâtimens en bon 'état;>3°l les sentences de
i y 5 o y . 1 7 5 7 1 7 6 6 et 1 7 7 2 ; fureht aussi déclarées exé
cutoires , et les V elay condamnés à-en »acquitter le m on
tant : faute de payement des arrérages de. la rente,, faute
du rapport des quittances des cens , et faute du rétablis
sement des choses en bon état dans le m ois, le bail à rente
r
t
/
* •’ j
‘V .
^ >. j
lut déclaré résolu com m e non f a i t * et a v e n u , et il fut
perm is à mon père de rentrer en possession des immeu
bles ar rentés. '
’
Cette sentence fut signifiée aux V e la y , le 25 du même
mois.
L es V elay ne payèrent point les arrérages de la rente ;
ils ne rapportèrent point les quittances des cens ; ils ne
firent aucune réparation aux bâtimens qui étoient dans'
dans un état déplorable : dans cette position , mon père
se détermina à les déposséder.
- y•
^
/
iU U lU Ctv
L e 4 août 178 5 , mon père fit Htfiwiaer la sentence
de résolution ; et le 1 7 , près de deux mois après la signi
fication de cette sentence, il en lit faire aux V elay une nou
velle signification. Il les fit assigner au 19 ,pour être présens
a sa rentrée en possession, et au procès v e r b a l de l’état des
.lieux •, par son exploit il se réserva l’exécution entière
île la sentence du 22 juin p r é c éd e n t.
L e icj il y eut prise de possession pardevant notaire.
�( 6)
.
Claude V e la y , A ntoine V e la y , l’un des adversaires, son
fils; autre A n toine V elay et A n d ré V elay y parurent:
ils répondirent n ’être p oin t surpris de notre tra nsport,
■
(nous rapportons ici le mot à m ot) et n être point à même
présentement de- satisfaire a u x condam nations portées
par ladite sentenceyà aucun égard, et qu'ils ne pouvoient
empêcher la m ise en possession dudit sieu r requéran t,
(>mon pèrè ) / en conséquence-nous avons auxdïis V e la y
présens donné acte de leurs dires et consentement.
Sur c e , mon père prit possession sans q u e , a écrit le
"notaire, personne se so it présenté, pour fo r m e r opposi
tion à la présente possession.
*
‘
') 0
Claude V elay et mon père demandèrent que le notaire
dressât procès verbal de l’état des lieux : le notaire 1-e fit.
Antoine V e la y , l’un des adversaires, pria mon père
de lui affermer les immeubles dont il s’agit. M on père
crut pouvoir prendre confiance dans l’honnêteté du fils;
mon père crut devoir venir au secours de cet homme qui
lu i manifesta le plus ardent désir de bien faire *, mon père
lui afferma ces biens moyennant la somme de i5 o francs
par an , à em ployer d’abord aux réparations des bâtimens
qui en avoiçnt „Le,,plus grand besoin.
. L e 31 août 1792, mon père, mécontent d’Antoine V elay
.fils, le fit citer pour qu’il eût à vider les lieux , et à lui
payer les fermages.
L e lendemain , Claude V ela y père, et Antoine V e la y ,
son fils, firent à mon père des offres de la somme de 4,000 f.
assignats-, savoir, de celle de 2,600 fr. pour le capital de la
•rente, et de celle dp 1,400 f. pour les arrérages, intérêts et
�(7)
.
fra is, ia u fd e suppléer, -parfaire oit recouvrer : ces offres
tendoient au rachat de la rente,
>
1P o u r toute réponse, mon père s’en référa à la citation
de la veille, et demanda copie du procès verbal d’offres.
L e procès verbal fut clos, et on n’en donna pas copie
à mon père.
L e 3 septembre 179 2 , Claude et A n toine V ela y citèrent
m on père sur leur demande en rachat de la rente.
L e ¿14 septembre il y eut deux procès verbaux de
non conciliation entre les V elay et mon p ère; le pre
m ier sur la demande de mon p è r e , et le deuxièm e sur
celle en rachat de la rente par les V elay.
r
A n toin e V ela y ills répondit à la demande de mon
p è re , que lui et Claude V e la y , son p è re , avoient joui
des biens en question, non en ferm e, mais en rente.
M on père répondit au rachat des V e l a ^ ^ j i ï i n’avoit
pas reçu copie de l’acte d’offre ; qu’il ^ rotoetoit^ n son
dire consigné au commencement de ces actes, et qu’il
protestoit de nullité.
L e même jour (4 septem bre), mon père fît assigner
A ntoine V ela y fils, aü tribunal de district à A m b e rt; il
conclut à ce que V ela y fils fût condamné à lui payer,
en deniers ou réparations, sauf vérification , la somme
de i 5o francs par chaque année depuis 1 7 8 5 , pour la
ferme verbale des biens en question. M on père conclut
à ce qu’Antoine V elay fût tenu de vider les lieux dans
la huitaine. Dans le cas où V elay fils dësavoueroit les
conventions verbales sur la ferm e, mon père demanda
subsidiairement que celui-ci fut condiftnné au désistement
�,
( 8 )
_
' ,
, . ■
de ces immeubles , avec-restitution des jouissances, à dire
d’experts, depuis iy 85. • ■
1
J- L e 6jdu .mêiïiQ rmois {septem bre)y -Yelay^ père.et>‘fils
firent assigner, m on pèr.e au m êm e-tribunal, i ° . au 12
de ce mois
en réitération» ; et, consignation
des offres de
. . .
o
la somme de 4,000 francs assignats, toujours avec la'
clause soirf, de suppléer ., parfaire ou recouvrer ; 2°. aux
délais
de 1Tordonriance
en pvalidité de ces, offres'.
,
■y t ‘
|^ J i
^
'
.Le i2^du même m ois, sentence par défaut contre mon
p è r e , 'laquelle d o n n é ’aux V éla y acte décimalisation de
leurs offres1de la somme de 4*000 francs assignats s a u f
Jl
•/,
‘h t
i'« ..
('
ü
. ,
, •( ’
J
de suppieer, parfaire ou recou vrer, et leur permet de
T
•
J S.'ij'tM' 'mii
i.
/
la consigner a jo u r et heure certains \ ( cette sentence
lie'fixe point les’jour et heure)!'
0
* L e 20 du m êm e'm ois, signification de cette sentence à
mon p è re, avec assignation pour le 22 au bureau d e là
1*•
T I
*
recette.. "/• .
1
. : •
■
Le; 22-du-m êm e mois consignation 'de la somme de
4,000 f. assignats, s a u f de' suppléer,parfaire ou recouvrer.
A n toine V elay défend à la demande de mon père :
comme 011 doit b ie n ‘s’y attendre, il nie la convention
verbale du bail à'ferm e ; il dit qu’il est inconciliable de
con clure, par le même e x p lo it, à l’exécution d’un bail
à ferme et àm n désistement. Il invoque la demande en
rachat de la ren te, et par un trait d’esprit adm irable, il
fait à mon père un crime de repousser des assignats : la
phi*ase d’Antoine V e la y est si heureuse, que l’on me saura1
peuUêlre quelque gré de la publier. M a is la d versa ire,
dit Antoine V e la y , en parlant de mon père , ?ic peut pas
s’expliquer : il lu i "en coûte de recevoir des a ssign a ts,
Aü
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(9 )
.
A U L I E U Q ü ’ l L D E V R O I T LES RESPECTER. O u i , s a n sd o u te ,
m on père devoit les respecter ; aussi l’a-t-il fait de ma
nière à ne. pas y tou ch er; mais il a i-especié davantage
sa propriété ; et certes il n’y avoit pas à balancer sur le
choix.
Ces deux demandes respectives furent jointes par une
sentence contradictoire, du i 5 septembre 1792.
A lo rs s’engagea un combat très-vif entre les V elay et
mon père, dont l’objet divers étoit pour les V e la y de'
forcer mon père à se contenter d’assignats pour des valeurs
territoriales, et pour mon père de ravoir la jouissance de
son b'en.
M o n p è r e opposa la sentence de r é so lu tio n et la prise
d e possession de 1 7 8 5 .
M on père opposa le bail verbal fait
îi
Antoine V elay fils.
M o n pè re opposa son in d ictio n au rôle des v i n g t i è m e s ,
au lieu des V e l a y ; in d ic tio n p r o u v é e p a r u n ex trait de
ce r ô le , extrait fo u r n i p a r le c it o y e n L u s s i g n y , c o n t r ô le u r
des v in g tiè m e s (1).
(1) En 178G il cxistoît deux cotes au rôle des communes tl’A rlaric et de Champeaux.
A rt. i 5 a. Claude V e la y , fils de Sébastien , dit le M ensong er,
................................................................................... l6 liv. l 5 S0US.
A rt. i 53 . Annet V elay, dit Cachouille , ci. . 9 liv. 11 sous.
En 1787 ces deux cotes ont été réunies sous l’article 5/¡o, sous
la dénomination suivante :
Claude et Antoine V e la y , le sieur Dottrrelrttr île G ardelle ,
et ai il res actjuereiirs , ou lieu de V eloy-M en son g er, et si^né
ijtissigny.
Appert que pnr r|iiiltance notariée du 29 avril 179$, Michel
Douvreleur a payé lçs vingtièmes de i j 85.
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�M on père opposa le payement des cens faits par lui
aux; fermiers des directes, desquelles relevoient les biens
en question (t).
( i) J’ai reçu du citoyen D ouvreleur de G ardelle la somme de
1,076 liv. qui me sont dues comme devenu propriétaire du moulin
que jouissait Claude V elay et consorts, situé à Capartel, pour
arrérages de cens sur ledit moulin , comme fermier des rentes
des prêtres du bourg d ’Arlanc et de Beaufranchet, conformément
aux obligations , sentence et exploits que j’ai remis audit sieur
D ouvreleur, et le subroge en m on lieu , droit et place, sans autre
garantie que de mes faits et promesses. A A ria n e , le 28 septembre
a s,gné Barthélémy Y a c iiie r.
Appert que par sentence rendue au bailliage d’Arlanc , le 18 août
1790 , Michel Douvreleur de Gardelle, notaire , Claude et Antoine
V elay ont été condamnés solidairement à payer au citoyen de
Merle et à son épouse, ‘alors seigneurs d’Arlanc , les cens y expli
qués pour les années 178 7, 1788 et 1789.
Je soussigné, Jacques Meilhon , fermier de la directe d ’A rla n c ,
reconnois avoir reçu des deniers de M . Michel Douvreleur de Gardelle,
notaire royal à A ria n e, et ce en plusieurs fo is, et en numéraire
m étallique, la somme de 3G2 fr. 17 sous, qui me restoit due, toutes
déductions faites pour les cens assis sur deux moulins et d’autres
fonds situés à C apartel, montant annuellement argent 20 fr. 3 d.
fro m en l, sept quartons quatre coupes et demie un huitième ; seigle,
Üeux quartons deux coupes trois quarts un huitièm e; avoine, deux
coupes un huitième et un seizième ; à raison desquels cens il y avoit
eu des diligences, tant contre ledit sieur Douvreleur de G ardelle,
que contre Claude et Antoine V elay , dit Cavalier, père et fils , et
c.onlre André et Sébastien Velay , frères, lesquelles diligences j’ai
remises audit sieur Douvreleur de Gardelle, le subrogeant en mon
lieu et place, sans garantie, si ce n ’est de mes faits et promesses.
D ans la somme ci-dessus sont compris les intérêts et frais. Fait
le 20 septembre 1791 ,, a signé M eiliion .
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M on père opposa enfin le bail à ferme par lui consenti •
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à A n toine V elay fils; et pour preuve de ce b a il, il articula v;
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le fa it, que cet A ntoine V elay iils a vo it, depuis i y 85 , v-« .*!.^ v W
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joui seul de tous les biens de C ap artel, à l’exclusion de v-.-ci .*%
Claude V elay son père , et des autres V elay compris en
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la sentence du 22 juin 1785.
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M on père soutint qu’il n’y avoit pas lieu au rachat de •k s,
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la rente.
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M on père soutint les offres irrégulières et insuffisantes.
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D e leur côté les V elay attaquèrent la prise de posses
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sion du 19 août 1785. Ils dirent qu’elle étoit nulle ou
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tout au moins inutile : n u lle, pour n’avoir pas été signée
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par e u x , ou pour ne pas contenir la mention qu’ils avoient
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été requis de le fa ire , et parce qu’ils supposent qu’il n'y
a eu qu’un témoin signataire : inutile, parce q u e, disent- ils , ils n’ont jamais été dépossédés de fait ; parce que
depuis ils ont continué le payement de la rente; parce que
.
en pareil cas tout est com m inatoire, et qu’ils ont toujciîùV
été à temps de purger la demeure en faisant des offres. „
P o u r juger de la suffisance ou de l’insuffisance des offres,^(
ils ont demandé qu’il soit fait un compte ; ils ont demandé
' -A1
que mon père y rapportât ses titres, même le livre-journal
q u i l a dû tenir p our suppléer a u x quittances qu'i/s ont •
pu adhirer.
U ne sentence par défaut fut rendue contre mon père :
il y forma opposition.
L e 26 juin 1793 intervint au tribunal d’A m b ert sen
tence contradictoire, dont il est important que les juges
supérieurs aient sous les y e u x , et les m otifs, et le dispositif, a .*%«;
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« A tten d u , 1 °. que ledit Claude V ela y a vendu à A n “ V 1 *•
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4 YeMml.* toine V e la y , dit T o in ette, par contrat passé devant R io taire, le 17 novem bre 17 7 8 , deux coupées du
etrde la chenevière appelés la Pradon et la Routisse,
^"!2^#i*c^.^fcrticii{oyennant 24 francs; lesquelles deux coupées de terrain
font partie de dix-sept vingt-quatrièm es, que lesdits Claude
^ ^ ét^ A ntoine V elay ont prétendu leur appartenir dans les
‘^ '^ ^ ^ b ie n s baillés à rente foncière à G régoire et Sébastien
} par Jeanne Cotte et P ierre-J o sep h D o u vreleu r,
iils , par l’acte du 17 septembre 1714*5 lesquelles deux
=v
t -TAtt 3,7 coupées de pré et chenevière ont été revendues audit
ff f i^ ^ ir r D o n v r c le u r et à ses cohéritiers par ledit Antoine V e la y ,
dit T o in ette, moyennant la somme de 48 francs, par acte
k ^ -p a s sé devant ledit R iga u d o n , notaire, le 12 avril 1783:
li
que par l’eilet de ladite vente et reven te, ledit
*)uvreleur est devenu propriétaire desdites deux coupées
terrain , et que la demande en éviction est incontesPour cet o])JcL
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20. que lesdits Claude et Antoine V elay, père
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et iils , possèdent le surplus des dix-sept vingt-quatrièmes
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^^s ùnmeubles , en vertu du bail à rente dudit jour
\éhu/jduA ydLt fa iiç y ! septembre 1714 ? et de l’acte de ratification du 21
fé * 2«*^—»■«
Ilet 1744 ? et que l’acte de possession fait à la requête
y ^ ^ ^ ^ ^ T / i.^ ih u lit D ouvreleur, par le mijiistère de Rigaudon, notaire,
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a£,e C()m,ne auparavant ; ce qui est p ro u v é , soit par les
qu il tances que ledit D ouvreleur leur a données depuis
— ledit acte de prise de possession, soit par leur habitation
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cu conséquence de la sentence de la ciI s é n é c h a u s s é e d’A u v e rg n e , du 22 juin précédent,
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j,’a pas été suivi d’exécution, puisque lesdits Claude et
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Antoine V elay ont continué leur possession depuis ledit
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' ap artel, dans les Lirais sujets à la re n te , soit par la
•rception des loyers,
et revenus desdits moulins
perception
loyei’s, fruits
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fonds
nds d’héritages, soit par le payement de d i f f é r e^ n j
charges , soit par la continuation des cotes d’impositions
faites sous leurs noms ; attendu sur cette question, q u e Océui
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bien que ledit acte de possession ne soit pas nul en la form e^ ™ ^ '
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p a r le défaut de nombre suffisant de tém oins, pu i squ’ il/?*^ /^ 4 - / y T îÿ^\
contient la dénomination de quatre, dont deux ont signé
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il est insignifiant, comme n’ayant pas opéré la dép ossession ^ <^ 1»lifcr'^-/'<^*'‘j(
réelle; attendu aussi que rien ne prouve qu’il y ait eu d esy ^ ** *
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conventions nouvelles entre ledit D ouvreleur et l ’un ou
’?il
l’autre desdits V e la y , et que dès-lors il doit demeurer
constant que le titre de leur possession remonte à celui de
-6 .e-.f A t 4 *.
1 7 x 4 ? et qu’il n ’a jamais changé.
« A tten d u , 30. que lesdils Claude et A ntoine V elay ne
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sont présumés jouir des autres sept vingt-quatrièm es desd.
moulins , bâtiinens et h éritages, que pour et au nom des
enfans et héritiers d’A n n et V e la y , pour lesquels ils nn p
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sont ni obligés, ni parties capables de défendre à la d e - ^ w ^ ^
mande en désistement dudit D ouvreleur.
« Attendu , 40. que quoiqu’ il soit de principe que le
droit de racheter la renie dont il s’a g it, accordé par I
loi , ayant passe
passé aux herm
héritiers
ers des premiers q
qui ont suc cédé aux héritages , et qui en sont possesseurs en tout ou
en partie , néanmoins ledit Douvreleur ayan t, par son
écriture du 1 ‘i décembre 170 2, reproché auxdits Claude
et A ntoine V e la y , père et fils, que quand ils auroient
été à temps d’exercer le rachat, il devoit paroitre é t o n - ^
nant qu’ils eussent voulu l’exercer sur la totalité , tandis
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„ qu’ils ne représentoient pas les enfans et héritiers dudit
 n n et V elay , qui en avoient à peu près un tiers avant
îa sentence dudit jour 22 juin 178 5; et lesdits Claude et
A n t o i n e V e l a y a ya n t r é p o n d u , p a r le u r r e q u ê te signifiée
le 11 février 1793 , qu’ils n’avoient offert que ce que ledit
•
D ouvreleur pouvoit exiger d’eux à cause de la solidité ;
^ niais que ledit D ouvreleur ri’avoit qu’à s’expliquer. S’il
„ '
.. ^ouloit diviser sa rente et la dégager de la solidité , ils
^
•
•
•
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î**’ restraindroient leurs offres aux dix-sept vingt-quatrièmes
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q u ’ils am endoient, et qu’ils possédoient de leur chef dans
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Ues héritages baillés à rente; ce que ledit D ouvreleur a
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,
v" * ’ ^ ^¿formellement accepté par les conclusions qu’il a prises lors
• ^ .{L^ de .sa plaitlpirie dus20 du présent mois.
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« Attendu , 5y . q ueïèdit D ouvreleur a soutenu les offres
{ ^ ^ ^ f ^ ' « * ^ i nsuflisantes; qu’il a prétendu que les arrérages, intérêts
frais à lui dûs , et les sommes payées sur les objets qui
(^ # i X g y r é t o i e n t à la charge desdits V e la y , excédoient de beaucoup
les sommes offertes ; que lesdits Claude et A n toine V e la y ,
' ' àe leur p a r t, ont proposé différentes exceptions aux p ré
tentions dudit D ouvreleur , et que la décision de cette
, ^partie de la contestation dépend de l’événement d’un
compte entre les parties, lequel doit être ordonné e
' .v
l’hôtel d’un des juges; et at tendu néanmoins, sur la même
¿ Q
u i uesli on , que ledit D ouvreleur a été mis en demeure de
sa déclaration du montant de la créance , et cjue jus^ ." q u ’au compte les offres, sauf de suppléer, sont valables.
Sur tous ces motifs , après que les parties ont été ouies par
7
l’organe de leurs défenseurs rcspec tifs, a près que les pi èces
............ *
ont été mises entre les mains du^citoyen Guillaum e Pellef,
�( i5 )
qui en a fait son rapport , et qu’il en a été délib éré;
« L e tribunal jugeant en prem ier ressort, a rendu et
prononcé le jugement dont la teneur suit :
« L e tribunal reçoit ledit M ichel D ouvreleur opposant
au jugement par défaut, faute de plaid er, contre lui rendu
le prem ier mai dernier ; ordonne que ledit jugement de
meurera nul et sans effet ; faisant droit sur la demande en
désistement formée par ledit D ou vreleur , contre ledit
A n toine V e la y , fils de Claude, par exploit d u 4 septembre
179 2 , et sur la demande en validité et suffisance d’offres
form ée par lesdits Claude et A ntoin e V e la y , père et fils,
contre ledit D ouvreleur , par exploit du 6 du même mois
de septem bre, laquelle a été jointe à celle en désistement
par celle du 21 novem bre suivant; condamiie lesdits Claude
et Antoine V e la y , pèi*e et fils, à se désister en faveur
dudit D ouvreleur des deux coupées de pré et clienevière,
mentionnées aux deux contrats de vente et de revente desd.
jours 17 novem bre 177 8 , et 12 avril 1 7 8 3 , à rendre et
restituer audit D ouvreleur les jouissances par eux perçues
sur lesdites deux coupées de terrain , depuis et compris
l ’année 1786, jusqu’au désistement , suivant l’estimation
qui en sera faite par experts, dont les parties convien
dront devant un des juges du tribunal, dans la huitaine, à
com pter de la signification à personne ou d o m icile, du
présent jugem ent, ou qui seront par lui pris ou nommés
d’office , même un tiers-expert, s’il y échet, aux intérêts
du montant desdiles jouissances ; sa v o ir, pour celles per
çues avant la dem ande, à compter du jour d’icelle ; et'
pour les postérieures , à compter de chaque p ercep tion ,
jusqu’au payement.
�.
(i6)
.
.
« E t pour ce qui concerne le surplus des dix-sept vin gtquatrièmes desdits moulins , bàtimens et héritages , le tri
bunal débouté ledit D ouvreleur de sa demande en désis
tement.
« E t à l’égard des sept vingt - quatrièmes que lesdits
A ntoine et Claude V elay sont réputés jouir ponr et au
nom des enfans et héritiers d’ Annet Velay-, le tribunal
déboute aussi ledit D ouvreleur de sa demande en désis
tement à cet égard, sauf à lui à se pourvoir contre lesdits
héritiers d’A nnet V e la y , à raison desdits sept vingt-qua
trièm es, ainsi qu’il avisera.
« En ce qui concerne les offres faites par lesdits Claude
et Antoine V ela y, père et iils , le tribunal les autorise à
retirer des mains du receveur des consignations près du
tribunal, sept vin gt-q u atrièm es de la somme de deux
m ille six cents livres offerte pour le rachat du principal
de ladite rente, d’une part, et sept vingt-quatrièmes aussi
cle la somme de quatorze cents livres , offerte pour les
arrérages de ladite rente , intérêts, frais et dépens ; ce qui
réduit la somme consignée à deux m ille huit cent trentetrois livres six sous huit deniers; sa v o ir, dix-huit cent
q uaran te-un e livres treize sous quatre deniers pour les
dix-sept vingt-quatrièmes dont lesdits V elay sont tenus
dans le capital de ladite rente, et neuf cent quatre-vingtonze livres treize sous quatre deniers pour les sept vin gtquatrièmes des arrérages de ladite rente, intérêts, frais
et dépens.
« Déclare les offres desdils V elay , ainsi réduites, bon
nes , val ailles et suilisanles pour les dix-sept vingt-qua
trièmes du capital de ladite rente qui étoientà leur charge,
comme
�( r7 )
_
comme étant lesdites offres conformes à la disposition des
art. II et X I V de la loi du 29 décembre 1790.
« D éclare aussi les offres desdits Claude et A n to in e
V e la y faites sauf de suppléer , parfaire ou recou vrer,
bonnes et valables pour les dix-sept vingt-quatrièm es des
arrérages de ladite rente et des in térêts, frais et dépens i
et pour .en déterminer la suffisance ou l’insuffisance , or
donne que dans la huitaine, à com pter de la signification
du présent jugem ent, à personne ou à domicile , les pay<",*
ties se retireront devant un des juges du trib u n a l, pouiwii*$2^ ->»^*0pr
être procédé à un compte desdits arrérages, intérêts, *'■ V .À C
frais et dépens, lors duquel compte lesdits C l a u d e T e t i - ' w V
A n to in e V ela y rapporteront leurs quittances , et ledit
^ ^ * **
D ou vreleur sera tenu de rapporter tous ses titres, pièces
et procédures, même le liv re- jo u r n a l qu i l a dû tenir
\pour suppléer au rapport des quittances q u i pourraient
étrc adhirées ,• et s i après Tévénement dudit compte il
se trouve un d éjicit auxdites offres, lesdits Claude et A n
toine V ela y f père e t f ils , seront tenus de le rem plir dans
la huitaine précise après ledit com pte, aux peines de
d roit; et si au contraire il se trouve de l’excédant, ils sont
autorisés à le retirer des mains du receveur des consigna
tions.
« Ordonne que dans la huitaine après que le compte
ci-dessus ordonné aura été fa it, et qu’il sera établi que
ledit D ouvreleur a été entièrement satisfait des dix-sept
vingt-quatrièm es à la charge desdits C la u d e et A ntoin e
V ela y dans le principal de la rente dont il s’a g it, ainsi
que dans les arrérages , intérêts , frais et dépens , ledit
D ouvreleur sera tenu de leur rem ettre, s’ils le requièrent,
C
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et à leurs frais, les extraits de tous les titres, pièces et procédnres qu’il a en son pouvoir , relatifs à ladite rente en
p rin cip al, arrérages, intérêts et dépens, et qu’il sera pa
reillement tenu de consentir à leur profit quittance du
rachat et du payement dudit capital, et desdits arréi’ages,
intérêts et dépens •, sinon et faute de ce faire dans ledit
d é la i, et icelui passé , le tribunal ordonne que le présent
, i
jugement tiendra lieu de ladite quittance. Sur le surplus
demandes , fins et conclusions des parties, le tribunal
met hors de cause et de procès ; condamne ledit D ou_ r
.yreleur aux trois quarts des dépens envers lesdits Claude
^ ^ - ^ ^ ¿ ♦ / ÿ l^ e ^ în to in c Y e la y , à com pter depuis la signification de
l ’acte de consignation exclusivem ent, suivant la taxe qui
\
3
en sera faite en la manière ordinaire ; compense l’autre
quart desdits dépens , et condamne ledit D ouvreleur à la
totalité des tbds.^expédition cl'iL-Présent ju^emen.L, aussi
suivant la taxe; le tout fait et ju g é , etc. »
L e 6 juillet suivant, mon père appela de cette sentence :
cet appel fut porté au tribunal de Brioude.
M ou père et moi avion s, avant la révolu tion , la con
fiance du seigneur d’Ariane. Ici je dois publier que nous
avons toujours eu en horreur ces faits qui ont désolé la
France ; j’ai osé le dire : itidè iras. Nous avons été en
butte à la tourmente révolutionnaire : j’ai été reclus jus
qu’après le 9 thermidor. L e chagrin m ’a enlevé mon
p è re ; il est m ort le 17 janvier 1 7 9 4 .
Les V ela y ont poursuivi sur l’ap p el, contre Jean
Joseph D o u vreleu r, mon frère, et contre Jeannc-M arie
et Julie D ouvreleur, mes sœurs, qui n’a voient à me de
mander qu’une légitim e. C e u x - c i , cités au bureau de
�.
.
( r9 )
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p a i x , avoient beau d ire , en germ inal an 2 , que les
papiers étoient sous les scellés ( le moyen d’en avoir la
rém otion ! j ’étois sous les verroux forgés par les auteurs de la loi du 17 septembre 1793 ) , les V elay n’en furent
que plus ardens : il leur étoit si facile de combattre des
personnes sans défense !
A in si donc les V ela y m ’ont mis de c ô t é , quoique je
fusse la partie p rin cip ale, la partie la plus intéressée,
comme héritier universel; ils n’ont agi que contre mon
frère et mes sœurs : la reprise d’instance a été ordonnée
avec e u x , par un jugement du 8 messidor an 2.
E n fin , la cause portée à l’audience du 4 vendém iaire
an 3 , époque si voisine du 9 th erm id o r, dont à Brioude
on n’a voit pas encore x'essenti les effets; la cause, dis-je,
portée à l’audience entre les V e la y , d’une part; Jeanne
M arie D ouvreleur, son m ari, et Jean-Josepli D ouvreleur,
d’autre part; ma sœur et mon frère, sans papiers aucuns,
furent hors d’état de se défendre utilement ; aussi y eut-il
un jugement confirmatif de la sentence d’A m bert : mais
heureusement Julie D o u v re le u r, mon autre sœ ur, n’est
point partie dans ce jugem ent; je n’y suis pas p lu s; les
choses sont donc encore entières à cet égard.
I<e 19 du même mois (vendém iaire an 3 ), les V elay,
armés de ce jugem ent, firent assigner au tribunal d’A m
bert J e a n n e-M a rie D o u v re le u r, mon frère, et Julie
D ou vreleur (n o n partie dans ce ju g em e n t), pour être
procédé au compte ordonné par la sentence du 26 juin
J793 ; ils demandèrent le î-apport de nos titres, et no
tamment du journal de notre aïeul et de notre p è r e ,
pour suppléer a u x qu itta n ces, a tten d u , disent-ils , que
C a
�D o u v releu r, a ïe u l, n e n donnait p o in t, a in si qu il est
notoire sur les lieu x.
L e 3 brumaire an 3 , nouvelle assignation par les V elay
à mon frère et à mes sœ urs, toujours pour ce com p te,
toujours demande en rapport des livres-jo u m a u x, et
toujours attendu que D o u v r e le u r , a ïe u l, ne donnoii
ja m a is de quittance.
L e 26 du même mois ( brum aire an 3 ) , ti’oisième
assignation à mon fr è r e , à mes sœ urs, et enfin à m oi
( contre lequel il n’y avoit pas encore de jugement coniirm atif de la sentence du 26 juin 1*793, avec lequel les
choses étoient toujours en état d ’appel de cette sentence ),
pour vo ir adjuger les conclusions ci-devant prises.
L e 22 frim aire suivant ( an 3 ) , sentence par défaut
nous tous : cette sentence oi-donne que les pièces
"seront mises es mains d’un des ju ges, et que nous y
j0iuj r0ns particulièrem ent le journal supposé tenu par
notre père.
T ro is assignations ont suivi cette sentence. J ’ignore ce
que les V elay ont fait depuis; mais je proteste contre
tout ce qui nuiroit à mes intérêts : quand on in’en aura
donné cennoissance, je me pourvoirai.
Ceux qui ont étudié les révolutions, se sont convaincus
de cette très-grande vérité , que l’homme sage doit s’at
tacher principalement à gagner du temps, parce que le
temps est le prem ier maître : par lu i, les idées extra
vagantes sont chassées; la raison reparoîl sur l’ horizon;
elle éclaire les torts de la majorité ; l’on revient au point
de départ.
A in s i, j’ai dû gagner et j’ai gagné du temps. En atten-
�( 21 )
.
.
clant, les' orages se sont dissipés ; j’ai vu l ’ordrè renaître :
des tribunaux d’appel ont été créés; j’ai senti renaître
aussi la confiance ; j’ai i’epris au lieu et place de m on
p è r e , sur son appel du 6 juillet 179 3, de la sentence
d’A m b e rt, du 26 juin précédent. Claude Y e la y , pèi’e ,
est m ort ; j’ai assigné ses héritiers en reprise d’instance.
L a procédure est en règle ; et je vais démontrer le mal
jugé de la sentence dont est appel : je ne m ’occuperai
pas de tout ce qui a été fait à A m b e r t, depuis le juge
m ent rendu à Brioude, le 4 vendém iaire an 3 ; je m ’at
tacherai à la sentence du 26 ju in , parce qu’en la faisant
•anéantir, tout ce qui a suivi aura le môme sort.
D I S C U S S I O N .
L a cause a deux objets : le p rem ier, est dans la de
mande de mon père contre A ntoine V elay fils; le second,
est dans celle en rachat de la rente , form ée par les V elay
contre- m on père. Je vais discuter ces deux objets sépa
rément.
§.I.
Cette partie de la cause présente la question principale
de savoir si, après la sentence du ¿«»juin 1786, et la prise
de possession du 19 août suivant, les V elay ont dû être
considérés encore comme propriétaires des biens arrentés
en 1714.
Ici le contrai: de 1714 contient le pacte commissoire le
plus lormel. Il y est stipulé q u e, faute du payement de
la rente et du rapport des quittances des cens, le bailleur
�(2 2 )
^
auroit le droit de rentrer en jouissance des im m eubles,
sans aucune fo r m a lité à justice.
Ici il paroît, par les sentences de i y 5o , 17^ 7, 1766 et
1 7 7 2 , que les V elay étoient d’âge en âge dans l’habitude
de ne point .payer la rente, de ne pas acquitter les cens,
et de laisser les immeubles en très-mauvais état. Il paroît
qu’à chacune de ces époques mon aieul avoit été obligé
d’obtenir des condamnations à payement, ou la résolution
du bail à rente.
E n fin , en 1784 mon père fut contraint d’em ployer les
mêmes voies rigoureuses contre les V elay. E n 1785 il les
fit condamner r i° . au payement des arrérages des vingtneuf dernières années antérieures ; 2.0 au payement du
montant des condamnations portées par les sentences
de i j 5o , 176 7, 1766 et 1772. Il obtint contr’eux la réso
lution du bail à ren te, faute de payement dans le m ois,
à compter de la signification de la sentence; cette sentence
a été signifiée, et point de payement dans le mois. Aj>ors
mon père a dépossédé les V e la y ; il a fait Mi&'inor la
sentence de résolution ; il a pris possession civile et régu
liè r e , le 19 août 1785. La résolution du bail a été par
faite; il a été ensuite imposé au rôle des vingtièm es; il
a payé les cens postérieurs à sa mise en possession, même
les antérieurs, ceu^rA?tant à la charge des V elay. Il a
affermé verbalement les mêmes biens à Antoine V elay (ils,
qui n’a voit jamais été possesseur des biens arrentés; et
Antoine Velay fils en a joui seul depuis.
Suivant l’ancien d r o it, suivant la loi 2 , au code de
jure em p hileu tico, le pacte comrnissoire devoit être suivi
à la lettre; s’il étoit convenu qu’à défaut, de payem ent,
�( 23 )
le bailleur rentreroit dans son fonds , le cas arrivé , il
pou voit de sa propre autorité expulser le preneur, faute
du payement d’une année. In em phiteuticis contractibus
sa n cirn us, s i quidem aliquœ pactiones in em pliiteuticis
in s tr u m e n tis f u e r in t conscriptœ , easdem et in omnibus
a i iis capitulis obserça ri, et de rejectione ejus q u i emphiteusïm su scep it, si solitam pensionern, vel publicarum
J'unctionum apochcts non prcestiterit.
S’il n’y en avoit point de stipulation , il falloit alors
une cessation de payement pendant 3 ans. S i per totum
tnenniitrn , neque pecunias so lv e r it, 71eque apochas
domino tributorutn reddiderit.
Dans les deux cas de stipulation o u d ê non stipulation,
le maître du fonds pouvoit évincer le preneur à rente :
P ü te st do m inus proprid auctoritate citraque rninislcr i uni ju d icis expellere.
Notre droit français a tem péré cette rigueur. L a juris
prudence a voulu qu’il y eût non seulement arrérages de
la rente, mais encore jugement de résolution. M orn ac,
sur la loi 2 précitée , dit : Legem com m issoriam 7ion
obtinere in G a lliâ , nisi post acception judicium . La
raison en est écrite dans la police attachée aux bons gouvernemens. C lan auteni invisuni n il m a gis apud n o s ,
quàtn s i quis v i auctoritnteque propriâ sib i ju s d ixen t.
L a jurisprudence française est allée plus lo in ; elle a
exigé que la dépossession du débiteur de la rente fût
constatée par un acte authentique. E lle a exigé de la part
du bailleur un acte de possession civile.
Quand il y a une sentence de résolu tion , quand elle
est suivie de possession c iv ile , tout est fini : il n’y a plus
i
�(2 V .
.
de contrat de rente. L e propriétaire de la rente, qui aupa
ravant n’avoit sur le fonds que la propriété directe, en
reprend la propriété utile. E lle est incommutable dans ses
mains. Il n’y a plus aucun retour en faveur du débiteur.
A u tre fo is, en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , on exigeoit
deux sentences pour opérer irrévocablem ent la résolu
tion de l’empliitéose : la prem ière disoit que le débiteur
pnyeroit dans; et la seconde prononçoit la résolution.
M . C habrol, tom. HE, page 7 4 , dit qu’après cette der
nière sentence, la chose étoit sans retou r; il ajoute, et
nous avons vu de nos jours qu’il sufïit d’une sentence ,
et que le débiteur qui laisse passer le délai cle grâce sans
p a y e r, et quand il y a acte de possession, est déchu pour
toujours.
■y<
Il
est certain , en point de d ro it, qu’en vente d’im
m eubles, la possession civile du fonds est le complément
du contrat; si le vendeur aliénoit le fonds à un autre,
celui qui auroit la possession civile auroit la préférence.
P ar parité de raisons, le créancier de la rente, qui a ■
obtenu la résolution du contrat, qui a poursuivi l’exé
cution de sa sentence, qui a pris possession civile du
fonds , a mis le dernier sceau à la résolution ; elle est sans
aucun retour pour le débiteur de la rente; c e lu i-c i en
est expulsé pour jamais. P o th ier, au contrat de bail à
ren te, chap. 111, art. I I , §• I , n. 4 0 , dit : jip r è s que
l'arrêt (1) a été e x é c u té , et que le bailleur est rentré
(1) L a sentence de résolution, du 33 juin i 785 , inc vaut arrêt;
elle a acquis la force de chose jugée; il n y on a point d’appel :
les Velay y ont acquiescé par leurs d ires, u la possession civile
du 19 août 1785.
�( 25 )
_
en -possession de Théritage , il ne seroit plus temps
d'offrir le payem ent des arrérages. S’il y avoit auparavant
un contrat, il est effacé.
. '
Les adversaires diront ici, comme devant les premiers
juges , i° . que la possession du 19 août 1785 , n’est point
régulière; 20. qu’elle n’a eu aucun effet, puisqu’ils n’ont
pas discontinué de jouir, et-que depuis, mon père a éga
lement perçu la rente. Ils citeront encore une sentence
rendue en 1 7 7 2 , en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , au
rapport de M . Vissac.
i ° . L a signature des V elay n’étoit pas nécessaire à la
prise de possession du 19 août 1786; il n’étoit pas plus
nécessaire d’y insérer la mention que le notaire la leur
avoit demandée. Il s’agissoit ici d’un acte judiciaire, d’un
acte fo r c é , et en pareil cas on n’a pas besoin ni du con
sentement , -ni du seing de la partie condamnée. M on
père avoit une sentence de résolution ; il en poursuivoit
l’exécution ; pour cela il lui falloit seulement un notaire
et deux tém oins, pour constater sa rentrée en possession;
d’ailleurs le notaire a terminé son acte par ces mois :
L esd its V ela y n ’ont rien voulu signer. CeLte relation
prouve suffisamment ; elle prouve que le notaire leur a
demandé s’ils vouloient sig n er, et qu’ils ont répondu
négativement : la réponse signifie l’interpellation préa
lable , et le vœu de la loi est rempli.
I<e notaire qui a rédigé l’acte de possession, étoit as
sisté de quatre témoins; deux ont signé : c’en est assez
suivant la loi. A u reste, les premiers juges l’ont décidé
ainsi, dans ia sentence dont est appel : les adversaires
1
D
�. . ,
(2<s )
.
.
ont signifié cette sentence sans protestation ; ce point est
donc terminé irrévocablem ent.
2°. Les V ela y ont été dépossédés de fait et de droit; ils
l ’ont été de fait par la prise de possession, du 19 août i j 85.
Cette prise est certainement un fait extérieur, un fait
très-positif : par le procès verbal , il est bien constant,
en f a it, que mon père s’est transporté sur les lie u x , et
qu’il y a fait toutes les démonstrations propres à mani
fester sa volonté bien form elle de rentrer en jouissance de
ses biens. Ceci caractérise parfaitement une dépossession
de fait de sa p art, contre les V elay.
c
Les V e la y , débiteurs de la ren te, ont été dépossédés
en ré a lité , puisque depuis le 19 août 17 8 5 , ce ne sont
plus tous les V ela y réunis qui ont jo u i, c’a été A ntoine
V ela y fils, seu l, tant de la portion de Claude V e la y ,
son p è r e , que de celle appartenant aux descendans
d’A n n et V ela y : cet A n toin e V elay fils ne l’a fait ainsi
qu’en vertu du bail verbal que lui avoit consenti mon
père.
N ’aurois-je pour moi que ma possession civile du 19
août 178 6; elle me su lfiro it, parce q u e, appuyée sur la
sentence de resolution , elle auroit opéré la destruction
totale du bail à rente. Personne ne peut me contester q u e,
aussitôt la clôture de ce procès v e rb a l, le bail à rente a
cessé d’exister. D ès cet instant, il a été comme non f a i t
et avenu ; ( la sentence du 22 juin le prononce ainsi : elle
a force de la chose jugée. ) M on père avoit acquitté le
droit de transmission ; il avoit fait insinuer sa sentence de
ïésoliuiou ; il étoit propriétaire incommutablc. Les V e la y
�.
( 27 ^
. .
avoient cessé de l’être ; la sentence et la possession civile
réunies, valoient contre eux tout autant que s’ils avoient
consenti pardevant notaire un acte de résolution du bail
à rente ; s’ils avoient passé cet acte vo lo n taire, ils n’auroient pas pu se prétendre encore propriétaires sans un
nouvel acte de transmission de la part de mon père. Ici
il y a même raison : il faut donc juger de même. Réso
lution complète opérée en faveur de mon p è r e , et par
la sentence, et par l’acte de possession. P oint de nouvel
acte de transmission de la part de tnon père en faveur des
V e la y ; point d’acte destructif de la résolution devenue
parfaite : par conséquent, les V ela y ne sont pas redevenus
propriétaires.
Les adversaires répéteront-ils >que m algré la possession
du 19 août 178 5, tout étoit encore comminatoire ; que
depuis, mon père a reçu des à-com pte sur la rente, et
qu’ainsi il a renoncé à la résolution.
E n jurisprudence, l’on tient qu’une renonciation à un
droit acquis doit être form elle ; ce seroit une e rre u r, que
vouloir l’établir par des inductions : il la faut expresse, ou
il n’y en a point.
O r , je défie mes adversaires de rapporter aucun acte où;
mon père ait renoncé au bénéfice de la résolution pro
noncée par la sentence du 22 juin 178 5 , et assuré par la
possession du 19 août suivant.
E n cause principale , les adversaires ont donné copie
des quatre quittances fournies par mon père les 9 avril
178 8 , 24 mars 178 9 , 17 mars 1790? et 10 avril I 7 9 ï.
En cause d’appel mon conseil, mon défenseur a pris com
munication de leur dossier ; il y a trouvé seize quittances
•
D 2
�(-* 8 )
ou notes qu’ils ont envoyées à leur défenseur, sans doute
pour établir leur libération des.arrérages de la rente. Je
ne parlerai que de celles qui sont postérieures au 19 août
1785 : je vais les analyser.
Il
en est une du 16 janvier 178 6; elle est fournie par
mon père à Claude et A ntoine V ela y ; elle est de la somme
de 96 fr. à compte des arrérages de rente q u i nie sont
dûs, y est-il d it , et prem ièrem ent sur les intérêts et f r a i s ,
et sans préjudice à la so lid a rité , à Texécution parée de
la sentence du 2 2 ju in i j 85 , à la possession du 19 août
1785 , et a u x jouissances à venir.
U ne seconde, du 13 mars 17 8 7 , est de la somme de
114 fr. à compte des arrérages de rente d û s, avec la
clause, sans préjudice du surplus et de tous autres droits
que je me réserve expressément.
C elledu 9 avril 1788 renferme encorcla clause, à im puter
prem ièrem ent sur les intérêts et f r a i s , et sans me f a i r e
préjudice à tous mes droits , sentences et diligences,
Teffet desquels je me ' réserve expressément.
M ôm e réserve dans celle du 24 mars 1789.
Celles des 17 mars 179 0 , et 10 avril 1791 contiennent
seulement Vimputation etabord su r les intérêts et fra is.
D e tout ceci l’on ne peut raisonnablement conclure
une renonciation de la part de mon père à la résolution
du bail <\ rente. D ’une part, il n’y a pas renonciation for
m elle; d’un autre côté, il n’y en a pas même une im plicite,
puisque par la quittance du 16
1786 mon père
s’est réservé la possession du 19 rmtrs 1786, et même les
jouissances à venir. .l?*ïr ces jouissances à venir il faut
entendre celles qu’Antoine V elay fils leroit en vertu de
�( 29 )
t
_
la ferme verbale. Il ne sauroit y en avoir d’autre sens bien
juste.
■
i
...... • -, ; .
lies réserves apposées dans les quittances postérieures
embrassent tous les droits de mon père. Elles se réfèrent
à celle du 1 6 janvier 1786. Elles sont clairement expliquées
par celle-là, et en somme il faut dire que non seulement
mon père n’a pas formellement renoncé -, mais qu’il a tenu
constamment- à la résolution, à sa prise de possession.
lia sentence rendue en 1 7 7 2 , au rapport de M . Vissac,
en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , ne fait pas préjugé pour
les adversaires : elle est contr’eux. E n effet, M . C h ab ro l,
qui la c ite , tome 3, page 7 5 , en son commentaire sur la
coutume d’Auvergne-, tit. 2 1 , art. III, après avoir posé les
principes exacts sur la m atière, dit : « Il a été ju g é , en
« 1 7 7 2 , au rapport de M . V issa c , contre M . D e ja x ,
y avocat à Brioude , que le débiteur contre lequel il avoit
« été prononcé une sentence de résolution, avoit pu ï é « parer sa demeure pu* des offres : mais des circonsv tances particulières avoient donné lieu à ce jugement :
« le sieur JDejax n avoit pas pris possession des héri*« toges , et il avoit reçu volontairem ent les arrérages
« antérieurs à la sentence ».
Ici il n’y a pas identité d’espèces. M on père a pris
possession. L e m ais de M . Chabrol signifie bien claire
ment que si le sieur D ejax avoit mis le sceau à la résolu
tio n , en prenant possession, la sénéchaussée d’A uvergn e
auroit jugé tout autrement. Elle auroit été obligée de
juger que la résolution’ étant parfaite par la possession,
le débiteur de la rente étoit déchu pour toujours.
Toutes les ibis que le “bailleur obtient la résolution du
�.
( 3o )
contrat, le preneur n’en est pas quitte par la perte du
fonds :,il doit encore les arrérages antérieurs à la réso
lution ; il faut qu’il les paye ; et le b ailleu r, en les recevant
après la sentence, après sa mise en possession, ne renonce
pas pour cela à sa propriété du fonds. E n reprenant son
fonds , il ne. prend qu’une portion de la chose qui lui
revient : en touchant les arrérages il perçoit l’autre. M ais
cette autre n’est pas destructive de la prem ière ; le fonds
lui demeure toujours.
I c i , qu’a fait mon père ? Il a reçu à compte des arré
rages, intérêts et frais qui lui étoient dûs. Il a fait chose
légitim e. M ais il n’a pas r e n o n c é à la r é so lu tio n ; il a au
contraire fait réservé de ses droits. Il s’est r é se rv é expres
sément la sentence de résolution et la possession.
L es adversaires rep ro d u iro ien t-ils sur la scène le
m oyen qu’en cause principale ils avoient tiré des con
clusions prises par m on père? D iront-ils qu’il est incon
ciliable de demander tout à la fois l’exécution d’un bail
'
<
f
à ferme verbal d’un bien , et le désistement du même
bien ?
iñ.
M ais , qu’on neyÉ^Tméprenne pas sur la con textu re,
sur la substance de ces conclusions. Elles sont très-conci
liables; elles sont très-bien appropriées à la position des
parties. J e vais même jusqu’à dire qu’elles sont alors
d ’usage.
E n eifet, mon père avoit affermé verbalement. Il de
mande qu’on lui paye les ferm ages, et qu’on vide les lieux.
M ais il n’a point de titre écrit pour constater la ferme.
Si Antoine V ela y fils nie la convention, m onp ère ne peut
eu faire la preuve testimonia l e , parce que l’objet est en
�C 31 )
.
^
^
Valeur de plus de 100 francs. Mais alors il a un titre dans
la jouissance faite publiquement par cet A n toine V elay.
Celui-ci est détenteur du bien de mon père : il faut bien
l ’en so rtir, et pour cela il n’y avoit que la voie du désis
.
tement.
.
.
E n cet état de choses, mon père a dem andé, i ° . dans
le sens de l ’aveu du bail verbal 3 qu’A ntoine V elay eût
à vider les lie u x , et à lui payer les fermages ; 2°. en cas
de déni de la ferme verbale, et subsidiairement seulement,
qu’A ntoine V elay fût condamné’à se désister, et à rendre
compte des jouissances, suivant l’estimation par experts.
M ais il est très-clair que les conclusions subsidiaires, néces
saires dans les circonstances, n’étoient pas exclusives des
conclu sions p rincipales.
J ’en ai dit assez, je crois, sur cette prem ière partie de
ma cause : mes moyens me paroissent victorieux ; en les
comparant avec la première disposition de la sentence
dont est app el, il est très-clair que les premiers juges ont
erré en ne condamnant pas Antoine V ela y à vider les lieu x
et à payer les fermages sur le taux de i 5o francs par an ,
ou à payer les jouissances de notre b ien , suivant l’esti
mation par experts.
4
*
a
Je ne vais traiter que très-subsidiairement la partie
•
relative au rachat de la rente.
Il
seroit inutile d’exam iner, s’il y avoit oü non lieu au
l’achat de la rente : cette question est subordonnée au sort
de la prem ière, que je viens de développer \ si sur la pre-
À
�,
. ^ 32
-, .
•
,
m ière, il est jugé que je suis propriétaire, mes juges n’au
ront que faire de descendre à la seconde.
A in si donc, je dirai seulement à toutes fins, et'parce que
nous sommes en tribunal souverain; je dirai que le procès
verbal d’offres du prem ier septembre 1792 est nul', parce
qu’on n’en laissa point copie à mon père ; il demanda,
cette copiç, parce que l’ordonnance de iô ô y l’exige, à peine
de nullité. Les notaires, comme les huissiers , peuvent
bien faire des actes d’offres ; mais ces actes alors ne font
que remplacer ceux des huissiers ; par cette raison , ils
sont soumis-ci- la même règle ( l ’ o r d o n n a n ce de 16 6 7 \
. . ¡''u,«..;,:
■
in 1
.
' '
L ’acte d’offres est ici la base de l’édifice : s’il est nul ; tout
.
-' V * ' î * .
ce qui a suivi l’eSt aussi.
■ Je dirai que.dans l’exploit d’assignation du 4 septembre
179 2, et'dans la signification du jugement ordonnant la
consignation, il n’est pas dit à qui les copies de ces exploits
ont été laissées : autre moyen de n u llité, suivant l’art. III
du tit, II de l’ordonnance de 1667 ( 1 ) .
Je dirai que les délais de l’ordonnance sont de ri
gueur , et pour le défendeur ; il n’est donné de les abréger
que par une permission de la justice, et dans les cas urgens.
t■ r d o ,fl^fb^é^latic^ : du ^premier se]>jo
téinbre^Y^^^n 12-dumôm e m ois, jour tÎu jug£irven| cjuj N
a ordonné la consignation, il n’y ¿1. qu’un intervalle de .dix.,
jours francs , et il en falloit vingt-sept, avant qu’011 pût
donner défaut contre mon père.
Pour ne pas ennuyer davantage par cette discussion
( I ) Sera fait mention en l’ original [et en la copie, des pet'sonnes auxquelles ils auront été laisses, a peine de nullité.
sèche
�,
C 33 )
sèche sur la form e, je terminerai par dire que les offres
des V elay sont insuffisantes d’abord suivant eux , et puis
bien davantage dans la réalité.
Leurs offres faites à domicile sont du prem ier septembre
1792; elles sont de la somme de 4,000 fr. assignats pour
capital de la rente , arrérages, intérêts et frais. Il les
ont réalisées le 12 du même mois , et consignées le 22 :
mais ils n’ont réalisé et consigné que 4,000.
E n point de d ro it, le débiteur n’est libéré que , ou par
une quittance finale de la part du créan cier, ou par une
quittance du receveur des consignations, et à l’instant de
la quittance. Jusqu’à cet instant l’intérêt court, si la créance
en porte : cela posé, les V ela y auroient dû consigner l’in
térêt co u ru , depuis le prem ier septembre 179 2, jour des
offres, jusqu’à la consignation : ne l’ayant pas fait, il y
auroit insuffisance dans la consignation, et nullité dans
tout ce qui a suivi.
Les adversaires voudroient-ils soutenir que la somme
de 4,000 francs étoit plus que suffisante? mais alors leur
consignation seroit encore vicieuse : les offres et la con
signation sont faites avec la clause , S a u f de suppléer,
parfaire ou recouvrer. Un débiteur doit faire l’appoint
du créancier ; il ne doit offrir ni plus ni moins que ce
qu’il d o it; il faut que l’affaire finisse là; il ne lui est pas
permis d’exposer le créancier à une action en restitution.
U ne pareille faute a fait annuller nombre de cons'gnations en papier-monnoie : les registres du tribunal civil
du P u y - d e - D ô m e , sont pleins de jugemens sur cette
matière.
A in si je dis aux V ela y : O u vous m’avez offert le preE
�.
( 34 )
.
, . *
m ier septembre 179 2, rigoureusement ce qui m’ étoit dû.
alors, ou vous m ’avez offert plus; dans le prem ier casr
votre consignation est insuffisante, puisque vous n’y avez
pas ajouté l’intérêt couru depuis le prem ier septembre jus
q u ’au 23 ; dans le second cas, j’aurois eu raison de ne
pas accepter, puisque vous m’auriez exposé à une action
en resti tution , en m ’induisant à prendre plus qu’il ne
m ’étoit dû.
‘
Mais ce n’est pas tout. Dans la réalité , il étoit dû
beaucoup plus le prem ier septembre 1792 : les V ela y
dévoient, 1». le principal de la rente; 20. les arrérages
adjugés par les sentences de 1760, 1 7 5 7 , 176 6, 1772 et
178 5; 30. les intérêts de ces arrérages depuis les demandes
qui en avoient été formées ; 40. les dépens adjugés par
ces sentences. Par celle du 22 juin 178 5, ils avoient été
condamnés à payer, i° . en deniers ou quittances, les
vingt-neuf dernières années échues à la-Saint-Martin 1784;
20. le montant des condamnations prononcées par les
sentences de 1760, 176 7, 1766 et 1772. Celle du 22 juin
1785 n’est pas attaquée; elle est inattaquable aujourd’hui.
C ’est à eux de rem plir ces condamnations en quittances
ou en deniers. Les arrérages de la rente s’élèvent à plus
de 5,ooo francs; ajoutez-y les intérêts et les frais, vous
aurez un total de plus d<* 8,000 francs : que l’on juge
donc de la suffisance de la consignation !
' Il est vrai qu’en cause p rin cip ale, les adversaires ont
demandé et fait dire que mon père représenteroit le livre
journal qu’il a dû tenir pour suppléer aux quittances
adhirées; ils ont fait dire que s i, par l’événement du
compte , il y a déficit dans les offres consignées, les V elay
�■
(
3
5
°
.
.
Seront tenus de le rem plir dans la huitaine; et que s i,
au con traire, il y a de l’excédant, ils le retireront du
bureau de. la recette.
,•
• •r
*
Cette dernière disposition de la sentence dont est appel,
est totalement opposée aux vrais principes. C ’est au dé
biteur a faire le compte juste du créancier; ce lu i-c i ne
peut pas être jeté dans les évolutions de la procédure ;
pour vérifier si on lui a offert assez ou trop : c’est au
„débiteur à établir, par ses titres et par ses quittances,
qu’il n’a offert et consigné que ce qu’il devoit.
Jej i ’ai point de journal de recette : c’est ù vous h pro
duire vos.qu\ttnnc :s; vous devez nous payer le montant
des condamnations prononcées contre vo u s, en deniers
ou quittances. V ous dites aujourd’hui que vous avez
adhiré des quittances; mais c’est un mensonge de votre
part : vous ne voulez pas montrer celles que vous avez,
parce qu’elles contiennent des clauses qui vous sont con
traires : mais les sentences que j’ai vous y forcent. M ais
ce qui vous convainc de mauvaise f o i , ce qui devroit
vous faire ro u g ir, c’est la manière contradictoire dont
vous vous êtes expliqué devant les premiers juges. Dans
une requête du n février 179 3 , vous avez demandé le
rapport d’un journal, p o u r s u m ,'{(i w a u x q u itta n c e s q u e
v o u s a u r ie z p u a d h ir e r . \ m t , a excvez donc eues, ces
quittances, dès qu’alors vous d1 b^nç.culemcnt en avoir
ad h iré? Dans vos exploits des 19 vendém iaire et 3 bru
maire an 3 , vous dites que m o n a ïe u l n e d o n n a it
j a m a i s de q u itta n c e s , et q u e ce la é ta it n o to ir e s u r les
Il y a opposition absolue dans ces deqx façons de
s'exprim er; elles sont l’ouvrage de la ruse et du nienl ie u x .
�1 36 )
songe; et nos juges doivent être bien en garde contre
les assertions de mes adversaires et de leurs adhérens.
Nos juges doivent se renfermer dans la règle; cette règle
est que le débiteur doit payer en deniers ou quittances
valables : mais toujours est-il bien évid en t, et par les
sentences que j’a i , et par la somme offerte et consignée,
qu’il y a insuffisance de plus de 4,000 francs. Si les ad
versaires soutiennent encore le con traire, ils sont obligés
de le prouver mathématiquement : jusque-là, le mal—
jugé des premiers juges est palpable.
G OU RBEYRE.
A R IO M , de l'imprimerie (h L a n d r i o t , seul imprimeur du
T ribunal d ’appel. — A n 10.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Douvreleur de Gardelle, Joseph. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
assignats
bail
bail emphytéotique
surnoms
contre-révolution
Description
An account of the resource
Mémoire pour Joseph Douvreleur de Gardelle, homme de loi, demeurant à Arlanc, fils et héritier universel de défunt Michel Douvreleur de Gardelle, notaire public, appelant ; contre Antoine Velay, cultivateur, habitant du village de Carpatel, mairie d'Arlanc, tant en son nom que comme fils et héritier de défunt Claude Velay, dit le Mensonge ; Antoine Bravard, jardinier, demeurant en la ville d'Arlanc ; et Magdelaine Velay, sa femme, aussi fille et héritière de Claude Velay, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1714-An 10
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0231
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0712
BCU_Factums_G1221
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53730/BCU_Factums_M0231.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Arlanc (63010)
Capartel (63010)
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Domaine public
assignats
bail
Bail emphytéotique
contre-révolution
surnoms
-
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5c8189c34b35b48998af38d186589819
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Text
MÉMOIRE
POUR
_
_i
__
J e a n - B a p t i s t e D E V E Z E , appelant ;
CONTRE
A
n t o in e
L A M O U R O U X , intimé ;
EN RÉPONSE
L
’a
p p el
A CELUI DE L' I N TI MÉ.
est d’une sentence de la Sénéchaussée
d'Auvergne, du 29 mars 1790. U ne simple réflexion
suffirait pour en établir le mal-jugé. Elle a refusé l'ho
mologation d’un jugement arbitral qui devait être ac
cordée , sans se permettre le moindre examen du bien
ou mal-jugé. Elle a fait, plus, elle a jugé le contraire
de ce qui l’avait été par le jugement arbitral : en un
mot , la Sénéchaussée s’était érigée en tribunal d appel
d’un jugement arbitral. Tout cela ne peut être consi
déré que comme une monstruosité dans l'ordre judi
ciaire.
A
�( s )
#
Il ne doit donc pas paraître difficile de justifier l’appel
de la sentence de la Sénéchaussée d’A uvergn e; on fera
plus., et on espère de prouver surabondamment qu ’abstraciion du jugement arbitral, si la contestation eût été
portée directement en la Sénéchaussée , la sentence
eût été aussi injuste qu’elle a été irrégulière après le
jugement arbitral.
Commençons par rappeler les faits etlescirconstances
singulières de cet te affaire.
Par un acte sous seing pri vé, du 2 avril 17 8 6 ,
Lamouroux vendit à Devèze l’élat et office de greffier
en ch ef de la maîtrise des eaux el forêts de Si.-Flour.
L e vendeur promit de remettre à l’acquéreur, quand
l<on semblerait à celuî-ci,la procuration a d resignandum. L e prix de la vente fut de 18,000 fr., pa}rab!es
aux.termes convenus, avec intérêts. Il est convenu , par
la vente, que Lamouroux partagera avec Devèze tous
les arrérages qui pouvaient lui être dus dans le greffe,
même les gages et chauffages jusqu’au jour de la vente;
de loul quoi, est-il dit, D evèze se chargera de faire le
recouvrement , et d’en faire compte à Lamouroux à
fur et mesure qu’ils rentreront. Lamouroux se réserva
seulement les revenus el profits casuels du greffe, de
l ’année i y B ô , tant dans l’élection de S l.- F lo u r, que
dans celles d ’Aurillac et de Mauriac. Lamouroux avait
affermé à Daude le greffe de la maîtrise de St.-Flour,
et il avait aussi affermé a Seriez les droits de ce greffe,
qui se percevaient dans les élections d’Aurillac el de
Mauriac.
11 fut stipulé dans la vente , que D e vè z e serait
�.
c.
3
}
.
.
obligé d’entretenir le bail de Daude jusqu’à son ins
tallation , et qu’alors, s’il voulait l’interrompre, il ga
rantirait Lamouroux des dommages-intérêts que Daude
pourrait exiger pour l’interruption ; et à l’égard du bail
de Seriez, Devèze lut obligé de l ’entretenir dans toute
sa durée.
,
Lamouroux se repentit sans doute d’avoir vendu à
D evèze l ’office de greffier ; en vain celui-ci le pressait
chaque jour de lui remettre sa procuration a d resignandu/n, ses provisions, quittances de marc d’or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires pour se
faire pou rvoir; en vain lui demandait-il toutes les
pièces, sans lesquelles il ne pouvait se faire payer des
gages et chauffages qu’il devait partager avec L a m o u
roux, et dont il était chargé de faire le recouvrement,
et les baux des fermiers Daude et Seriez , pour se faire
payer du prix de leurs fermes, qui ne devait point en
tier en partage avec Lamouroux; celui-ci trouvait tou
jours des prétextes pour ne pas remettre tous les actes
nécessaires, et cependant l’intérêt du prix de la vente
courait toujours.
Déjà huit mois s’étaient passés , lorsque Devèze se
vil obligé de faire , par un acte du 2 décembre 1786 ,
une sommation à Lamouro ux, de lui donner et déli
v r e r , dans les 24 heures, sa procuration a d resignand u n i, ses provisions , quillanc es de marc d or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires. Celle
sommation ne put pas être ignorée par L a m o u ro u x ,
puisqu’elle lui fut faite, parlant à s.a personne, par
A 2
�(4
)
Biron , huissier audiencier au bailliage
_
de Saint-
Flou r.
Il n ’est pas inutile de remarquer que danscettesommation, D evèze ne fit pas mention de l ’acte de vente
•du 2 avril 1786, pour ne pas se mettre dans la nécessité
de le faire contrôler et d’en payer les droits; ce qu’il
voulait éviter avec raison , puisque l’acte devait ensuite
être passé par-devant notaire: il se contenta d’énoncer
dans la sommation , que Lamouroux lui avait vendu
l ’office de greffier des eaux et forêts, et qu’en cas de
déni, il offrait de le pi’ouver tant par titres q u e par
témoins. Cette remarque répond d’avance à une ob
jection faite à cet égard par Lamouroux.
Après cette sommation , Lamouroux ne put pas re
culer plus lon g-tem s, et se trouva enfin obligé de
manifester son repentir. La sommation était du 2 dé
cembre; et le 7 du même mois, il fit signifier à Devèze ,
par Pertuis, premier huissier audiencier de l’élection
d’Aurillac, un acte , par lequel, «en répondant à la
« sommation qui lui avait été faite par D e v è z e , le 2
« du même mois , il lui déclara qu’il n’enlendait point
« donner la procuration acl res/^nandunide son office
* de greffier en c h e f de la maîtrise des e a u x et forêts
k
d e S t . - F l o u r ; q u ’à la v é r it é , par des c o nv en t io ns faites
* entre parties, au mois d avril dernier, il avait vendu
« son office à Devèze , mais que dès le lendemain même,
« et depuis, il s’en était repenti; qu’élan! encore jeune,
<r et ayant plusieurs enfans maies pour le remplacer,
« il ne pouvait pas raisonnablement se défaire d’un
�5
C
)
office qui lui donnait un état, et auquel il était atta
ché par le long exercice qu’il en avait f a i t , et,qu’en
outre cet office lui avait ete transmis par son p e r e ,
qui le tenait aussi de ses auteurs, et attendu encore
les privilèges et prérogatives qui y étaient attachés :
c’est p o u rqu o i, bien loin de donner la procuration
a d resignandum , il se propose de, se servir de l a
faculté que la jurisprudence accorde à tous les offi
ciers ; et en exerçant le regrès de son office, il se
croyait fondé à demander que les conventions faites
entre les pariies, fussent déclarées nulles et comme
non avenues ».
>’
Par ce même acte, où il est dit q u e . ¡D e vè z e ;;a
fait refus d’acquiescer au repjrès., quoique l’a c t e .n e
soit fait qu’e/i parlant à sa servante, il est donné
assignation à De.vèze, au bailliage de Saint-Flour,
pour voir prononcer la nullité, et déclarer, en con
séquence, queLamouro ux demeurera libre et déchargé
des conventions faites avec Devèze.
,
Celui-ci était absent au moment de ce^ acte fait
en parlant à sa .servante, et à son retour* l/^ç/e lui
ayant été remis, s’étant c o n s u l t é e ! ayantappris qu’il
ne pouvait pas résister à Taction en regrès ; voulant
d ’ailleurSj se débarrasser de toutes tracasseries avec
L a m o u r o u x , le 12 du, même mois, lui ,fit signifier
un açle par Ceuille, h u i s s i e r audiencier en l’ élection
de Saint-Hour , par lequel il déclara, en réponse à
la déclaration et à l ’assignation de L a m o u r o u x , q u ’il
consentait et acquiesçait aux conclusions prises par
�,
.
(
6
}
.
.
.
.
Lam o u roux , par l'assignation qu’il luiavaitfait donner,
et à ce que les conventions faites h raison de l ’oflice
de grdfïier, demeurassent nulleset comme non avenues,
el que Lamouroux pûl disposer de son office comme
bon lui semblerait.
T o u t alors-paraissait consommé entre les parties:
L a m o u ro u x avait fait le regîès,- et D evèze l’ avait
accepté. Devèze eut toute raison de se croire dans
la plus grande sécurité. Déjà huit mois s’étaient passés
dans un profond silence de part et d’autre. Devèze dut
e lle donc bien surpris lorsque , le i août 1787, Lamou roux lui fit faire, à son domicile et en son absence,
3
im acte insfmmenlaire, contenant sommation de se
trouver le lendemain, luiil heures du matin, en l’étude
d’uri notaire de Sainl-Flour, pour passer la vente de
l'office, ou voir déposer l’acte sous seing p rivé, du
2 avril i786,etacce[)tersii procuration a d résignandum.
L e lendemain 14 août, procès - verbal de défaut
chez le notaire, où D evèze n’avait garde de se 1rouVer, étant encore absent, et 11e pouvant avoir con
naissant^ de lh' sommation qui lui avait été faite la
veille; el ■ée'même j
14 août, assignation à D evèze
par Lain0tirori;x >en veVlu de com m illim us en la sénéchausséé d'/Urvergne, pour reconnaître les écritures el
signMlurefc"dè l’acle dé’ vente Sons seing privé, du 2
avril 1 786 ,; el ;n't principal, pour ratifier la vente, sous
olfre de délivrer la procuration ad resignanduni.
Lors de celle assignation, le grand-m'ai Ire des eaux
C-t forêts ¿e trouvail dans la ville de Sainl-Llour. Lii
�7
(
)
contesta lion élevée par Lamouroux fut connue , .et
plusieurs personnes s’entremirent pour
engager les
parties à la faire terminer par la médiation du grand
maître. Lamouroux et D e v è z e passèrent un compromis
sous seing privé, le premier septembre 1 7 8 7 , par lequel
ils convinrent de s'en rapporter, pour le procès pen
dant entr’e u x , à L'avis et médiation du grand-m aître,
promirent de lu i envoyer, incessamment, dans l’espace
de trois m ois, tous leurs titres, papiers nécessaires,
et pièces y afférentes, même chacun , le double sous seing
privé de la vente, se soumettant de s’en rapporter à
son a v is , à peine-de 4000 liv. qui demeureront encou
rues , de pLein droit, contre le contrevenant.
Les parlics envoyèrent leurs pièces et mémoires au
grand-mai:re, alors de retour à Paris; ¡1 ne les reçut
qu’au mois do décembre 17 8 7; mais il ne pouvait
prononcer son jugement qu’après avoir fait-contrôler
le compromis, ce qui fut fait à Paris le 9 décembre
1 7 8 7 , et le dépôt en fut fait cjiez un notaire de Paris,
le même jour. L e 9 février suivant, 1788, le grand
maître rendit son jugement arbitral.
.
'
I»
Dans ce jugement il est énoncé que toutes les pièces
et mémoires despariiesont été vus par le grand-maître,
et notamment la sommation faite par D e vè ze à L a
mouroux , le 2 décembre , 1786 , l’acte signifié par
L amouro ux, le 7 du même mois, contenant son regrès
et la vente de l’office ; enfin , l’acte d’acceptation
du regrès.,signifié par D evèze à La mouroux , le 12 du
même mois. On doit croire que ce furent les origi-
�C8 )
naux de tontes les pièces qui furent vus par le grand
maître, sans quoi il aurait énoncé qu’il n ’avait pro
noncé que sur les copies.
Après le vu de tou les les pièces, voici comment s’ex
prime le
« Sans
« ployés
« nullité
«
«
«
«•
grand-maître dans son jugement arbitral:
enlrer dans la discussion des moyens e m
par les parties pour soutenir la validité ou la
de l’acte du 2 avril 1 7 8 6 , j ’ai considéré
l'affaire sous son véritable point de vue; et la queslion qu’elle présente, n’est pas de savoir si l’acte
de 1786 est valable j mais s’il est détruit par la réponse
du sieur 'Lamouroux , à la sommation qui lui fut faite
« de délivrer la procuration ad resignandum , et par
« l ’acquiescement du sieur D e vè z e aux conclusions
« portées en ladite réponse.
« L e sieur Lamouroux a bien senti le faible de sa
k
demande; aussi n’est-il nullement question de ces
« actes dans son mémoire à consulter, et c ’est son
«
«•
«
«
silence’ sur l’existence'de ces pièces qui lui a procuré des avis favorables. Si l’acte du 2 avril 17867
est valable, comme contracté entre majeurs , pourquoi les actes subséqiiens ne le seraient-ils point ?
« L e sieur Lamouroux avait vendu : malgré Tacquies-
« cernent à son regrès, il entreprend de suivre Follet
« du premier a c te ; sa marche est contradictoire, et
« sa procédure est dérisoire.
"
« Eu conséquence, nous disons que le traité dudit
« jour 2 avril
1786 , sera cl demeurera comme 11011
« avenu, et que ledit Lamouroux pourra disposer,
« ainsi
�9
C
)
« ainsi que bon lui semblera, de son office de greffier
« de la maîtrise de Saint-Flour, le condamnons eu
« tous les dépens.; sur les demandes en dommages
* intérêts, mettons les parties hors de cour ■
».
C e jugement était du 9 février, et le 12 du même
mois, il fut envoyé par le grand-inaîlre (Boisneuf de
Chenevière ), au sieur M u ret, garde-marteau des eaux
et. forêts de Saint-Flour, pour en faire lecture aux
parties, et le déposer chez le notaire qu'elles v o u
draient choisir. La. lecture et prononciation du juge
ment arbitral furent faites aux parties par le sieur
Muretjet par acteinstrumentaire du premier avril 1788,
D e vè ze fit sommer Lamo uroux de déclarer entre les
mains dequel notaire il voulait que le jugement fût dé
posé, lui protestant, qu’à défaut de s’expliquer, le dépôt
serait fait entre les mains du notaire, sur ce requis.
Lamouroux feignant d’être absent de chez l u i , ne fit
que présenter sa servante, en parlant à laquelle, il
fut déclaré que le dépôt du jugement arbitral aurait
lieu entre les mains du syndic des notaires de SaintFlour, le lendemain huit heures du matin, dans le
cabinet du sieur M u ret, o ù , en conséquence, L a m o u
roux fut sommé de se trouver pour y voir faire nou
velle lecture et prononciation, et le dépôt entre les mains
du notaire.
On conçoit bien dans la conduite qu avait déjà
tenue L a m o u rou x , et par celle qu’il a tenue dans la
suite, qu’il n’avait garde de se rendre à la sommation;
en conséquence, procès-verbal par défaut contre lui,
B
�( 10 )
de la lecture, prononciation et dépôt du jugement, 1©
2 avril 1788.
L ’inaction où demeura L a m o u ro u x , après avoir eu
connaissance du jugement arbitral, dut persuader à
D e v è z e , que toute contestation entr’eu x, sur la vente
de l ’office de greffier, était terminée; il fut d’ailleurs
confirmé dans cette idée, par les renseignemens qui
lui parvinrent, que L a m o u r o u x , depuis la vente de
1786 , n’avait jamais cessé de prendre la qualité de
greffier, et d’en faire les fonctions; mais que de plus,
il avait perçu les gages, chauffages et émolumens du
greffe, qui devaient appartenir h D e v è z e , du jour de la
vente. D e v è z e s’était aussi rendu certain, que même
après l’acte de dépôt, du 2 avril 1788, du jugement
arbitral, Lamo uroux avait obtenu , contre Sériez, une
sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , l e 6 m a i 1788,
qui condamne Sériez à lui payer les fermages du bail
de l’année 1787561 dans laquelle sentence, Lamouroux
se qualifie, comme dans tous les actes précéderas, de
greffier en c h e f de la maîtrise de Saint-Flour. Et ce
pendant, si la vente du 2 avril 1786 , avait dû avoir eilet,
si Lamouroux n ’avait pas cru qu'elle était anéantie par
son actede regrès, et par l’acceptation de D e v è z e , quel
droit aurail-il eu au mois d’octobre 1 7 8 7 , après tous
ces actes, de demander et de percevoir le prix des
baux, pour les années postérieures à la vente, puis
que aux termes de celte ve n te , tous les droits et prix
de baux de fe rm e, devaient appartenir à D evè z e ?
T o u t concourait donc à affermir D e vè ze dans sa sé-
�( 11 )
eu ri té, et a lui faire croire que Lamouroux avait
persisté dans son regrès, puisque après le regrès, il
avait tout perçu , ce que sans cela il n’aurait pu
faire ; tout lui prouvait que Lamouroux approuvait
le jugement arbitral, puisque après ce jugem en t, il
avait exercé des actions, et obtenu des sentences pour
se faire payer des prix de baux, que ce jugement
seul pouvait l’autoriser à recevoir.
- A u reste, tous les faits dont on vient de rendre
comple, ne sont pas même contredits, et ils sont
établis par les pièces authentiques qui seront jointes
a la production de D e v è z e , et notamment la sen
tence de la Sénéchaussée d’Auvergne , rendue en
faveur de Lamouroux, contre Sériez, le 6 mai 1788.
La confiance de D e vè z e fut bientôt troublée par
des menaces qui lui parvinrent de Lamouro ux, de
sorte que pour plus grande précaution, il crut devoir
présenter le jugement arbitral, à l’homologation de
la Sénéchaussée d’Auvergne. La mouroux s’opposa à
,cetle homologation, et prétendit faire revivre l’action
q u ’il avait originairement formée contre D e v è z e , pour
l ’exécution de la vente du 2 avril 17 8 6 , et il s’y crut
fondé par un acte de désaveu qu ’il fit du regrès qu’il
avilit notifié à D e v è z e , le 7 décembre 1786, pré
tendant même que l’acte précédent, du 2 du merae
mo is, et celui d’acceptation du 12 , étaient des actes
faux.
Ces nouvelles prétentions de Lamouroux donnèrent
lieu à une assez longue discussion, sur laquelle interB 2
�( 12 )
vint la sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , du
24 mars 1790, dont est appel, et par laquelle ayant
égard au désaveu formé contre les héritiers de l’huissier'
P e r f u i s , d e l’acte du 7 décembre 1788, cet acle fut
déclaré nul et de nul effet ; D evèze débouté de
la demande en homologation d e i a sentence arbitrale,
la vente du 2 avril 17 86 , fut confirmée, et D evèze
condamné à payer le prix d e l à vente, el les intérêts.
E n exécution de celle sentence , et même aupa
ravant Lamo uroux avait fait faire des saisies-arrêts
entre les mains des débiteurs de D e vè ze ; et pour se
procurer une plus prompte exécution de la sentence
qui était ordonnée, nonobslant l’appel, il s’était hâté de
donner caution, mais D evèze interjela appel au Par
lement, où il obtint un arrêt de défense, et demanda, en
même-tems,la main-levée des saisies-arrêts: Lamouroux
de son côté,demanda,par une requête du i
5 mai 1790,
l ’exécution provisoire de la sentence de la Sénéchaussée.
Ces demandes firent la matièred’ unapoinlé à mettre, sur
lequel inlervinl un arrêt du i juin 1790 , qui accorda
5
à D evèze la main-levée des saisies, en ordonnant, que
sur le fond et le surplus des conclusions des parties,
elles feraient diligence pour faire juger, el en viendraient
à l’audience; les dépens furent reservés, hors le coût
de l’arrêt qu ’il fut ordonné que Lamouroux serait lenu
d’avancer, sauf à répéler s’il y avait lieu.
L ’arrêt fut signifié à Lam ouroux, le 9 juillet 1790.
I^amouroux 11c paraissant pas encore rebuté de ses
poursuites , avait fait faire à Devèze deux actes instru-
�13
(
)
mentaires; le premier ,le 7 janvier 1791 ; el le second ,
le
3o juillet suivant.
Alors la suppression des offices des
eaux et forêts, depuis long-tems annoncée, avait été
effectuée.
Par le premier de ces actes il fît
D eveze des oiires
de quelques pièces nécessaires à la liquidation de l’office
de greffier en chef, notamment de trois quittances du
centième denier, depuis et compris 1 7 7 9 , jusques et
compris 1789 ; ces quittances étaient sous les dates,
l ’une du
3o décembre
1 7 7 9 , la seconde du ‘do septem
bre 1 7 8 0 , et la troisième seulement du 11 décembre
1788.
3
P a r l e second acte, du o juillet 1 7 9 1 , Lam ouroux
somme Devèze de déclarer s’il entendait que la liqui
dation de l’oflice de greffier , que Lamouroux avait an
noncé vouloir poursuivre comme créancier du prix de
la vente , fût faite eu égard au prix de la ve n te , ou
autrement d’après les bases déterminées par les décrets.
D e vè ze répondit ¿1 ce dernier acte, qu ’il était bien
étonnant que Lamouroux demandât l’exécution de la
vente dont il s’agit , pour faire la liquidation de l ’office,
tandis que cette vente avait été déclarée non avenue
par le jugement arbitral du 9 février 17 88, depuis
confirmée par Lamouro ux, et par lui exécutée par la
continuation de l’exercice de cet office; que sa préten
tion pour faire revivre une vente anéantie , était le
comble de la mauvaise foi; qu ’il était constant q u e c e
n ’était que l o r s q u e Lamouroux avait appris, aux mois
de juillet et d’août 1 7 8 7 , qu’il était question de la sup-
�.
A .
(
14
\
.
pression des maîtrises , qui avait depuis été effectuée
par Tédit du mois de mai 1788 , qu ’il n ’avait plus voulu
garder son office au préjudice de la résolution de la
vente qui en avait élé faite : c’est pourquoi D e vè ze
déclara qu’il n’empêchait Lamouroux de faire pour la
liquidation de son office , tout ce que bon lui sem
blerait.
A partir de ce dernier acte de la part de Lamouroux,
3
du o février 1791 , on ne voit de sa part qu’un pro
fond silence pendant près de six ans, c’e s t - à - d i r e ,
jusqu’en l’an 6 de la république.
Néanmoins il méditait dans le silence les moyens de
se procurer par la violence ce qu’il ne pouvait pas espé
rer d’oblenir par la justice, et l’occasion s’en présenta
bientôt, lorsque survinrent les tems désastreux des pre
mières années de notre révolution.
Alors Lamouroux fut trouvé digne d’être procureur
de la commune de St.-Flour; il se persuada aisément
pouvoir effrayer D evèze , et sous le faux prétexte d’é
migration, par l'autorité de sa place, il le fit incarcé
rer. Sans doute si Devèze eût voulu céder à la crainte
des maux dont il était menacé, en consentant une vente
déjà annullée par un jugement arbitral, il eût bientôt
obtenu sa libel l e } mais les efforts de Lamouroux furent
vains, et D evèze trouva d’autres moyens plus légitimes
d’échapper aux malheurs que lui préparaient les effré
nés suppôts de la tyrannie décernviiale. D evèze invite
Lamouroux à se rappeler les horreurs de ces tems-là,
et l’assassinat d’un magistrat respectable, le lieutenant.
�( i5 )
-
Criminel d’Àurillac, commis sous les ye u x de tous les
membres du département, qui siégeait alors dans celle
ville, sans'qu’aucun d’e u x , loin d’arrêter les fureurs
des brigands, y donnât le moindre signe d’improbalion.
Grâces à la journée du 9 thermidor, il y eut un mo
ment de calme, qu’une autre journée de fructidor fit
bientôt disparaître , jusqu'à ce qu’enfin la Providence
suscitât le héros qui devait réparer les maux de la France
opprimée.
Ce ne fut donc qu’en l’an 8, que Lamouroux imagina
de reprendre les poursuites de l ’appel qui avait été
pendant auparlement, de la sentence de la Sénéchaussée
d’Au ve rgn e , de 1790; et on n’a pas oublié qu’au parle
ment il avait déjà échoué dans la demande qu ’il y avait
formée , tendant à l ’exécution provisoire delà sentence
de la Sénéchaussée. Ce fut par deux exploits, l’un du
8 thermidor an 8 , et l’autre du 26 brumaire an 9, que
X.amouroux assigna D evèze au tribunal d’a p p e l , pour
procéder sur l’appel qui avait été pendant au parle
ment , de la sentence de la Sénéchaussée, de 1790, et
pour voir confirmer cette sentence.
Comme la sentence avait été rendue sur apointement en droit, elle fait la matière d’un procès par écrit
au tribunal d’appel , sur lequel D evèze a déjà fourni
des griefs, qu’on a cherché à combaltre dans un m é
moire im prim é, que Lamouroux a fail signifier ; et
c ’est à ce mémoire qu ’on se propose de ré p o n d r e ,
après avoir rétabli, comme on vient de le faire, les
faits, les actes et autres circonstances de cette affaire.
�]
L
a
sentence dont est a ppel, a été irrégulièrement
et mal rendue. D ’un côté elle ne pouvait pas refuser
Tliomologalion qui était demandée, par D e v è z e , du
jugement arbitral qui avait été rendu entre lui et Lamouroux; elle devait prononcer cette homologation,
sans même prendre connaissance de ce qui avait été
décidé par le jugement arbitral. D ’un autre côté,
elle 11e pouvait prononcer sur des demandes de Lam ouro ux, qui ne tendaient qu’à détruire la décision
du jugement arbitral. On se propose, enfin, de prou
v er surabondamment,que lesdemandescîeLarnouroux,
n ’eussent elles pas déjà été jugées par une sentence ar
bitrale , et eussent-elles été portées directement en la
Sénéchaussée, loin de pouvoir être accueillies, elles au
raient dû être rejetées. Ce n'est point là l’ordre qui a
été observé dans le mémoire de La mouroux; il aurait
rendu sa défense plus difficile ; mais c ’est celui qui a
paru le plus naturel à celle de D e v è z e , et qui paraît le
mieux convenir aux véritables questions que le tribu
nal doit juger dans cette aflaire. A u reste, ce nouvel
ordre ne laissera rien échapper des réponses qui peuvent:
se faire aux objections du mémoire de Lamouroux.
P
r e m i e r
M
o y e n
.
»
L ’homologation demandée ne pouvait être refusée.
L ’article i . er de la loi du mois d’août 1790, concer
nant l'organisation judiciaire, dit : que l’arbitrage est le
mo yen
�17
(
)
m o y e n le plus raisonnable de terminer les conlestations entre les citoyens. C ’est une vérité reconnue dans
tous les tems , que cet article de la loi ne fait que pro'clamer et confirmer.
" l/article 5 veut que les sentences arbitrales dont il
n ’y aura pas d ’a p p e l , soient rendues exécutoires par
une simple ordonnance du président du tribunal, qui
sera tenu de la donner au bas, ou en marge de l’expé
dition qui lui sera présentée.
Ces termes de l’article, qui sera te n u , annoncent
assez que le juge auquel le jugement arbitral est pré
senté , pour le rendre e x é c u to ire , ne peut pas entrer
en connaissance du bien ou mal-jugé ; et ce n ’est point
encore là une loi nouvelle.
Que nous disent tous les auteurs qui ont parlé des
sentences arbitrales? voici comment ils s’en expliquent,
et particulièrement ceux du Recueil de jurisprudence,
1om. i.er pag. 549. «La partie qui poursuit llio m o lo g a * tion d’une sentence arbitrale, doit faire assigner l’au« ire partie devant le juge c o m p é t e n t, lequel doit en
« conséquence procéder sommairement, à celleliomo « logation, sans prendre aucune connaissance du fo n d
« du procès, sauf aux pallies à se pourvoir par appel,
l< contre la senlence arbitrale, si elles le jugent à proc< pos : ainsi aucune des parties ne peut empêcher l’ho
" mologation , sous prétexte que La sentence arbitrale
« est irrégutiere, ou autrement vicieuse ».
D ’après ces principes, il doit paraître évident que,
quelque moye n qu’on pût opposer contre la senlence
C
�.
( 18 }
.
arbitrale, la Sénéchaussée ne pouvait pas refuser l’ho
mologation , elle devait la prononcer sommairement,
et sans entrer en aucune manière en connaissance de
cause, ni du fond de ses dispositions, ni des irrégula
rités ou des vices qu ’on pouvait opposer à cette sen
tence. Les moyen du fond, les vic es, les nullités, les
irrégularités de la sentence arbitrale, étaient autant
de griefs contre cette sentence, qui ne pouvaient être
proposés et jugés qu’au tribunal d’ap p e l, si en effet
1 appel en était interjeté.
Un de ces moyens par lesquels on voulait empêcher
l ’homologation, était une nullité prétendue du com
promis, tirée de ce que ce compromis ne déterminait
pas à l’arbitre un délai pour juger: mais cette nullité
n ’eût mêm e été proposable que devant le tribunal
d ’appel, s’il y eût eu un appel d’inlerjeté; et même
en ce cas , elle n’aurait pu être accueillie par le tribu
nal d’appe l, q u ’autant qu ’une révocation du compro
mis aurait eu précédé la sentence arbitrale.
3
Que nous dit encore sur cela l’article
du lit. des
arbitres , dans la loi du 16 août 1790? « Les compromis
« qui 11e fixeront aucun délai dans lequel les arbitres
« devront prononcer; et ceux dont le délai sera expiré,
seront néanmoins valables , et auront leur exécution,
«■jusqu’à ce qu ’ une des parties ail fait signifier aux ar
« bilres, qu ’elle ne veul plus tenir à l’arbitrage».
Ce n’est pas là encore un règlement nouveau. Que
nous disent tous nos auteurs qui ont écrit avant la ré
volution ? l is o n s ce
qui
est écrit par llousseaud- *
�9
( i )
Lacombe au mot Compromis , n. 2. «■Après que les par
ti lies ont subi volontairement la jurisdiction des ar
« bitres , asqae ad fm em negotiù,e\. que les arbitres ont
« rendu leur sentence arbitrale, les parties ne sont plus
« recevables à dire qu’il y avait nullité au compromis,
« de ce qu’il ne contenait aucun tems limité. Ainsi
« jugé par arrêté du 27 janvier 16 26 , sur les conclu« sions de M. Bignon , avocat général, rapporté au
« Journal des audiences ». L'auteur aurait encore pu
citer un arrêt semblable, du 16 janvier 1628. rapporté
5
par Mornac, sur la loi ¿ . ff. D e recept. qui arbitr.
Il était étonnant qu ’en la Sénéchaussée d’A u ve r gn e ,
on eût osé combattre ce principe, et plus'étrange en
core qu’aujourd’hui au tribunal d ’a p p e l , dans le m é
moire de Lamouroux , un jurisconsulte ait prétendu
le réfuter par l ’autorité de M orn ac , à l’endroit m êm e
où l’on vient de le citer. 11 faut être exact dans ses cita
tions, et on ne l’est pas dans cette occasion.
1 5
M orn ac , sur la . 2
ff. de recept. qui a rb ilr., cite
deux arrêts, l’un du 16 janvier 1628 3 l’autre du 27
mars 1618. L e premier adjugea la peine d’un comproniis, quoique ce compromis ne contînt pas de délai pour
juger; le second au contraire réfusa la peine du c om
promis qui n’exprimait pas non plus de délai. Mais il
11e faut pas croire que ces deux arrêts furent contradic
toires. Dans l’espèce de l’arrêt de 1628 , M. l’avocat
général Servin observa, que la partie qui avait appelé
do la sentence arbitrale, s’était soumise à la jurisdiclion
des arbitres, en écrivant et produisant ses litres et méC 2
�( 20 >
moires; devant les arbitres. JEutn qui appellaüerat et
scripsisse et instruxisse penitus instrumentes 3%tabules-*
que obsignatis arbitraient litem. M. Servin citait à cette
occasion les termes des lois. Quis est ferendus a d appellationis veniens a u xiliu m in iis quœ ipse fa cien d a
procuraçit. En conséquence l ’arrêt de 1628, adjugea
la peine du compromis , quoiqu’on y eût omis le délai.
Senatus ergo ex kis pœtiam deberi p ron u n cia çit, tametsi tempus omissum esset compromisso.
Mais l ’arrêt de 16 28 , que cite aussi Mornac, n’élait
pas dans la meme espèce. Celui qui se refusait i'i la peine
du compromis, n ’avait rien écrit ni produit devanl les
arbitres; ainsi Mornac, après avoir rapporté l’arrêt de
16 2 8 , qui avait adjugé la peine du compromis dans le
quel il n’y avait pas de d é l a i , parce que l’appellant
avait produit aux arbitres ses titres et mémoires, Mornac
dit qu’il en serait autrement, si, lorsque le compromis
ne contenait pas de délai, celui qui appelle de la sen
tence arbitrale, n’a rien dit ni produit devant les arbi
tres , et que c’est ce qui a été jugé par l ’arrêt de t 6 i 8 .
Secus enim s i, prœler omissum in compromisso d iem ,
nihU ab eo qui postcà appellavit, prolatum , productum que fu erit ; eo enim casu judicaturn pœnam non
deberi ab appellatore ; et c ’est en ellet ce que Mornac
dit avoir été jugé par l’arrêt de 1618.
.
O r , nous ne sommes pas ici dans l’espèce de ce der
nier arrêt, mais bien dans celle de l ’arrêt de 1628. L a
mouroux avait produit devant le juge arbitre ses titres
el mémoires.
�C 2ï )
_
• L ’auteur du mémoire de Lamouroux n ’est pas plus*
exact dans la citation de l’arrêt du 22 décembre 1627 ,
rapporté‘au journal des audiences, et il faut qu’il ne
se soit pas donné la peine de lire tout le chapitre,
quoique très-court, où cet arrêt est rapporté.
D e quoi était-il question dans l ’espèce de cet arr êt?
il y avait un compromis sans fixation de délai; mais il
n ’y avait pas eu de sentence arbitrale,rendue sur le
compromis.Une des parties, qui avait produit ses titres
devant les arbitres, avait traduit l’autre partie'devant,
le juge du M a n s , pour l’obliger à produire de sa part
devant les arbitres. C elle partie s’y était refusée, 'et la
sentence du juge dù Mans l’y avait condamnée. C ’était
de cette sentence qu ’il y avait appel ; mais comme il
n ’y avait pas de délai: dans le compromis, l’arrêt in
firma la sentence du juge du Mans; et dans le fait,le
refus de produire devant les arbitres, emportait avec
lui la révocation d’ un compromis qui ne fixait pas de
délai : mais pourquoi ne s’est on pas donné la peine
de lire ce que dit encore le journaliste? «Toutefois si
K les arbitres avaient rendu la sentence arbitrale, ce
« ne serait pas nullité en icelle, de ce qu’en compro
" mis il n’y aurait point eu de jour, d’autant que lorsK qu’ils l’auraient rendue , les parties pouvaient encore
K se soumettre devant e u x , et les prendre pour arbitres1;
K et de fait, la cour l’a jugé ainsi par ses arrêts».
L e journaliste a eu raison de dire que les arrêts l ’a
vaient ainsi ju g é : outre celui de 1628, que rapporte
M o r n a c , le journaliste lui-m êm e rapporte celui du
5
�( 22 )
janvier 16 2 6 , dont a parlé Rousseaud-Lacombe,- par
lequel il fut jugé que toute audience devait être d é
nuée à un appelant., jusqu’à ce qu’il eût payé la peine,
encore que l’on remontrât qu ’il y avait nullité au com
promis, en ce que par icelui on n'était convenu d ’au
cun tems, ni jour, dans lequel les arbitres pourraient
rendre la sentence-, et le m otif f u t , dit le journaliste,
que ce n ’est point une nullité en une sentence arbitrale ,
de ce que au compromis i i n i j avait eu aucun tems n i
jo u r lim ités, parce les parties l ’ai/ant ainsi convenu,
et ensuite subi volontairement la jurisdictiori des ar
bitres, usque ad finem negotii, ils l’avaient pu fa ir e ,
et ne sont plus recevables à s'en plaindre.
'
« M ais, ajoute le journaliste,'quand il n’y a point de
« jour ni de tems limité au compromis, c ’est une nul« lité qui donne matière à s’en retirer; en sorte que
« la partie qui ne veut plus l’entretenir, n ’y peut être
« contrainte, parce que autrement la jurisdiclion des
« arbitres serait prorogée , in infinitum ».
C ’est donc un principe inébranlable que le jugement
arbitral est valable, quoiqu’il n’y ait point de délai
dans le compromis, lorsqu’il n’y a point eu de révoca
tion qui ail précédé le jugement, et que les parties se
sont soumises à la jurisdiclion par la production de leurs
litres el mémoires.
'
‘
On ne se serait pas livré à une si longue discussion à
cel égard , si l’on n’eûl pas cru nécessaire de rappeler
à plus d’exactitudo dans les citations.
’
Il doit donc paraître démonlré que le défaut d ’ex-
�(
*3
)
.................................................................
pression de délai dans le compromis, lie pouvait pas
.empccher l’homologation de la sentence arbitrale.
M a i s , a-t-on dit e n core , le compromis n’a pas été
représenté en la Sénéchaussée, quoiqu’ on n’ait cessé
d’en demander la représentation. Il est bon de rappeler
ce qui est dit à ce sujet à la page 22 du mémoire de
Lamouroux ; on va le transcrire mot pour mot.
•
« L e citoyen Lamouroux allait même ju s q u à con« venir, que si Le citoyen Deve&e rapportait un compro«■mis régulier, il n'aurait d ’autre moyen que de se
« pourvoir au parlement , pour fa ire réformer une sen
»«
«
«
«
te
tence qui sera le fr u it de la surprise et de la fraude;
il somma en conséquence le citoyen D e v è z e d’exhiber du'compromis , qui n ’est cité ni dans la sentencearbitrale , ni dans aucun acte. L ’appelant s’est tou
jours refusé à représenter ce compromis ; dès-lors la
« sentence arbitrale n ’était plus qu’un simple a v i s ,
« émané d’ un particulier sans caractère. Sous ce rapport
« la Sénéchaussée a donc pu connaître d e l à demande
« en nullité et défaut de l’exhibition du compromis:
« et quand le citoyen D evèze rapporterait aujourd’hui
« un compromis régulier, cette discussion serait sans
“■intérêt , parce que le tribunal d’appel représente le
cc ci-devanl (1) parlement, et qu’il suffirait alors d ’interjeler incidemment appel de cette prétendue senff tence arbitrale ».
C1) Que v e u l e n t d i r e c e s mo t s cL -d c v a n t? q u a n d on
PaRO d A t h è n e s , ou d u Sénat d e U o u i e , il f a u d r a d o u e
A r é o p a g e , l e c i - d e v a n t Sénat.
p a r l e r a tie
dire,
le
l’Aréo-
ci-devaut
�( H )
^
Il y avait inexactitude dans les cilations d’arrêt faites
dans le mémoire ; et dans le passage qu’on vient de
transcrire, il y a mensonge et erreur.
Mensonge , en ce qu ’on dit à la page 22 du mé
moire, qu’en la Sénéchaussée le compromis n ’avait pas
été représenté; mensonge à la page
, en ce qu’on y
36
suppose qu’il n’exisle pas de compromis, et qu ’on est
hors d’élal de représenter; et le mensonge est prouvé
par une requête donnée par D evèze en la Sénéchaus
sée, le 14 janvier 17 89, par laquelle il fit production
du compromis
et la signification de cette requête ,
faite au procureur de I^amouroux, fait aussi mention
du bail de copie du compromis.
D on c alors, et dès que le compromis avait été re
présenté en la Sénéchaussée, il riy avait d'autre moyeu,
suivant Lamouroux lui-même, que de se pourvoir au
parlement; par conséquent la Sénéchaussée ne pouvait
pas juger; par conséquent l’appel de son jugement est
bien fondé.
Inutilement ajoute-t-on qu ’il fallait un compromis
régulier ,• on vient d ’établir invinciblement que le com
promis était régulier, et <|iie, quoiqu’il n’y eût pas
de délai fixé , dès qu ’il n’y avait pas eu de révocation ,
dès que les parties avaient produit à l’arbitre titres et
mémoires, on 11e pouvait plus arguer de nullité ni le
compromis, ni la sentence arbitrale.
Mais, dil-on encore, dans le passage que l’on vient
de transcrire, la discussion est sans intérêt, parce que
le tribunal d ’appel représente le parlement , et qu’il
suffirait
�.
..
(
)
suffirait alors d ’interjeter appel incident de la sen
tence arbitrale.
Il y avait mensonge dans la première partie du pas
sage ; il y a erreur dans celle-ci. L ’appel'incident du
jugement arbitral serait aujourd’hui non recevable ,
parce que'ce jugement a passé en force de chose jugée.
L e jugement fut signifié à La m o u roüx , le 2 avril 1788 ;
et mêm e encore aujourd’hui il n’en a pas été interjeté
5
d ’appel. Voilà plus de 1 ans de la signification ; mais
suivant la disposition de l’article 17 du titre 27 de l’or
donnance de 17 67 , les sentences acquièrent force de
chose ju gée, après dix ans du jour de leur signification,
et on ne p eu t plus alors en in te rj et e r appel.
Jousse, sur ccs mots de l’article après d ix ans , dit
qu’ils sont trop précis pour vouloir en changer la dis
position , en étendant jusqu’à o ans la faculté d’ap-
3
On ne doit cependant pas dissimuler qu’au parlement
de Paris on s’était écarté de celte disposition de l’or
donnance , et que les appels y étaient reçus pendant
3o ;
niais que pouvail la jurisprudence contre la dispo-
silion de la loi? une jurisprudence, et sur-tout celle
d un seul parlement ne peut pas c h a n g e r la loi ; el l’on
«si toujours fondé à réclamer contre la transgression
de la loi. Aussi aujourd’hui Ions les tribunaux d’appel
se conforment-ils à la disposilion de l’ordonnance de
*667 , même pour les senlences pendues avant la sup
pression du parlement, et s’il y a eu quelques jugemens
contraires, ceux du tribunal de cassation les ont anéauD
�.
( 26 }
■
.
tis. On pourrait même soulenir qu’à compter de la loi
de 1 7 9 0 , il n ’y a eu qu ’un délai de
3
mois pour se
pourvoir par appel contre les jugemens antérieurs; mais
cela devient inutile^ parce que même les dix ans de
l ’ordonnance de 1667 , ont constamment donné à la
sentence arbitrale la force de la chose jugée.
C ’est donc aujourd’hui par une erreur bien reconnue
qu’on voudrait
prétendre qu ’on pourrait interjeter
appel incident d ’une sentence signiiiée il-y a plus de
10 ans, et qui a constamment acquis la force de chose
jugée.
Enfin un dernier moyen ^ par lequel on prétend jus
tifier la sentence de la Sénéchaussée d’Auvergne.dont
est appel, est le désaveu qu’avait fait Lamouroux de
l ’acte de regrès, signifié à Devèze par l'huissier Pertuis.
On examinera dans la suite le mérite de ce désaveu;
mais pour ce moment-ci il suffit de remarquer que le
désaveu eût été bien ou mal fait , ce ne pouvait pas
être en la Sénéchaussée qu ’il devait l’être, et que ce
désaveu lel quel ne l’aulorisait pas à refuser 1 homo
logation de la sentence arbitrale ; et pour s’en con
vaincre, il n’est besoin que de rappeler et de répéter
ce que l'on a dit ci-devant des principes enseignés par
les auteurs, que «le juge auquel l'homologation d ’une
« sentence arbitrale est demandée, doit procéder som« mairement à cette homologation, sa/is prendre aa« cune connaissance du fo n d du procès' sauf aux par
te tiesà se pourvoir par appel, si elles le jugent à propos.
« Ainsi aucune des parties 11e peut empêcher l'hom o-
�27
(
)
« logation, sous prétexte que la sentence arbitrale est
« irrégulière, ou autrement vicieuse ».
D ’où il doit se conclure nécessairement que le désaveu
sur lequel on voulait élablir le vice de la sentence ar
bitrale , bien ou mal fo n d é , n ’aurait pu être jugé qu’en
tribunal d’a p p e l , et que le vice du désaveu, quel q u ’il
pût être, ne pouvait pas empêcher l’homologation de
la sentence arbitrale.
Mais on aura d’ailleurs occasion de prouver dans la
suite de ce mémoire, que le désaveu n’était pas receYable, dans le ’cas même où l ’affaire n’eût pas été jugée
par une sentence arbitrale, et qu’elle eût été portée
directement en la Sénéchaussée. Ce sera la dernière
proposition de ce m é m oire , d’ailleurs par elle-même
très-surabondante, comme on l’a déjà dit, et parce que
le désaveu n’aurait pu être jugé que par un tribunal
d’appel, qu’il n ’y a jamais eu d’appel de la sentence
arbitrale , et que celui qu’on en interjetterait aujour
d ’hui , serait non recevable.
Ainsi donc mal-jugé évident de la sentence dont est
appel, en ce qu’elle a refusé l’homologation de la sen
tence arbitrale.
'
-
�(
D
*8
e u x i è m e
)
M
oyen
.
L a sentence de La Sénéchaussée ne pouvait prononcer sur
des demandes déjà ju g ées par une sentence arbitra Le,
et détruire par des dispositions contraires celles de la
sentence arbitrale.
I>a proposition du mo yen semblerait seule devoir
l ’établir, parce que la proposition elle-même n’énonce
qu’ un principe., et ce principe a déjà été suffisamment
développé dans la discussion du premier moyen.
Une sentence arbitrale ne peut être réformée, quel
que vice qu’elle renferme , que par un tribunal d’appel;
elle n ’est sujette qu’à l ’homologalion du juge inférieur,
et cette homologation ne peut être refusée p a rc e juge
inférieur. D onc il ne peut connaître, lorsqu’on lui de
mande l ’homologation, ni du fond du procès déjà jugé ,
ni des vices du jugement déjà rendu par les arbitres.
N e serait-il pas ridicule, quand une sentence arbi
trale a été rendue sur les demandes d’une partie , de
prétendre q u e l ’aclion peut être renouvelée devant des
juges autres que ceux devant lesquels doit être porté
l ’appel de la sentence arbitrale , el que les juges infé
rieurs jugeassent tout le contraire de ce qui l’aurait été
par les arbitres ? et c ’est ce ridicule, on pourrai! même
dire celle absurdité, qui se rcnconlre dans la sentence
dont est appel.
L a sentence arbitrale avait déclaré comme non avenue
�C 29 )
la vente de l’office de greffier, et celle de la Sénéchaus
sée déclare celte vente valable, et en ordonne l’exécu
tion. Voilà donc une contrariété évidente de jugement ;
niais le premier ne pouvait être réformé , ne pouvait
être détruit que par des juges d’appel, el la Sénéchaus
sée n ’avait pas ce caractère. Donc son jugement est
nul , et le mal-jugé est par cela seul démontré.
Si par la sentence de la Sénéchaussée il eût été dit
en termes formels , qu’il avait été mal jugé par l e juge
ment arbitral, oserait-on proposer qu ’une pareille sen
tence pût être confirmée? mais n’esl-ce pas la même
chose, quand la sentence de la Sénéchaussée a jugé
absolument le contraire de ce qui l ’avait été par la
sentence arbitrale? En un m o t , la Sénéchaussée s’est
elle-même érigée en tribunal d’appel. C ’est ce qu’on a
eu raison d’appeler une monstruosité dans l’ordre judi
ciaire. En voilà assez, sans doute , pour justifier l’appel
de la sentence , sans qu’il soit nécessaire de le qualifier
comme de juge incompétent.
T
r o i s i è m e
M
o y e n
.
S i ta contestation rieût pas été déjà ju g é e par une seti
. lence arbitrale, et quelle eût été portée directement
en la Sénéchaussée, la sentence de ce tribunal eût été
aussi injuste dans te jo n d , quelle a etc irrégulière,
après une sentence arbitrale.
•Ai' ivüs l’élablissemenl des deux premiers moyens, on
comprend aisément que celui-ci ne peut être que subsi-
�. .
( 30 3
diaire et surabondant; aussi ne veüt-on le présenter,
qu’afin d ’avoir occasion de justifier la conduite de'
De vè ze dans toute celte affaire , et de rendre sensibles ^
les variations et la mauvaise foi qui ont régné dans toute
celle de Lamouro ux, et qui l’ont amené à un désaveu
q u ’il a regardé com meun edernièreplanched e naufrage,
enfin pour démontrer l’infidélité de ce désaveu. Ici il
est nécessaire de rappeler quelques-uns des faits dont
•on a déjà rendu compte.
Lamouroux était propriétaire de l’office de greffier
en ch e f de la maîtrise de St.-Flour. A u mois d ’avril
1 7 8 6 , il vend cet office à D evèze , par un acte sous
seing privé, moyennant 18,eoo francs, et il l’oblige
de remettre à Devèze sa procuration a d resigna ada/n,
et tous les titres nécessaires, p o u r, par D e vè ze s’en
faire pourvoir, lels que ses provisions, quittances de
finance et de centième denier.
Lamouroux nous apprend lui-même dans son m é
moire , que la vente laite à D e vè z e , qui n’était que
sous seing privé, étant encore inconnue , il se pré
senta d’autres acheteurs, et entrJautrcs un citoyen
M alb e t, cjni lui offrit 24,000 francs au lieu de 18,000,
prix de la vente qu’il avait faite à Devèze. Un béné
fice de 6000 francs était bien fait pour le tenter. Mais
comment taire une nouvelle venie à Malbel ? il y avait
la voie du regrès. Mais un regrès si prochain de la pre
mière v e n t e , et une seconde vente faite incontinent,
lout cola aurait paru bien frauduleux. Hésitant alors
sur le parti qu'il avait ;à prendre, il prit du tems pour
�C 3i )
y réfléchir, en différant de remettre à D evèze sa proJ
curation ad resignandum , ses provisions. quitlànceS
de finance et d e . centième
denier. Mais toutes ces
pièces étaient nécessaires, et Devèze ne pouvait, sans
les avoir toutes, se faire pourvoir de l'office.
Cependant Devèze impatient de tous ces délais,
prit enfin le parti de faire faire à Lamouroux une
sommation de lui délivrer la procuration a d resignand u m , et toutes autres pièces nécessaires pour parvenir
à obtenir des provisions. Cette sommation est du 2
décembre 1786.
-
Lamouroux ne pouvait plus reculer. Il se repen
tait do la vente par l’espérance d’ un plus grand prix
que Malbet lui avait offert. Il sentait bien qu’il ne
pourrait p as , sans se perdre de réputation * profiter
de ce bénéfice par un regrès qui. serait aussitôt suivi
d ’une nouvelle v e n t e ; mais il se flattait qu’en exer
çant ce regrès et conservant l ’oiïice de greffier, il
pourrait s’en défaire plus avantageusement dans un
tems plus éloigné. Il se vit donc forcé, par la som
mation de D evèze d’exercer ce regrès contre la vente
qn’il lui avait faite, ce qu’il fit en effet par l’acte qu’il
iitsignilier à D evèze, le 7 du mêm e mois en répon
dant à lu sommation du 2; ce D evèze à son tour ins
truit qu’il ne pouvait pas résister au regrès que le ven
deur d’ un office est toujours fondé à exercer, tant
qu’il
st pas dépoudlé par les provisions de l’acheteur,
pour se débarrasser d’ailleurs de toute inquiétude
sur une affaire de cette nature, et employer à son
�,
. c 32 }
.
.
ulilité les fonds qu’il avait destinés au prix d’une
acquisition qui ne pouvait plus avoir lieu, se déter
mina à faire signifier à Lamôuroux un nouvel acte,
par lequel il accepta le regrès. Cet aclè fut signifié
le 12 décembre, cinq jours après le regrès. Après ce
dernier acte, huit mois se passèrent dans le plus
profond silence de la part de Lamouroux envers
Devèze qui crut d ’autant mieux que tout était con■sommé à l’égard de la vente, que depuis le regrès
I,amoureux n’avait cessé d’agir comme lilulaire et
propriétaire de l’office de greffier, percevant les émolumens courans qui auraient appartenu h D e v è z e ,
si’ la vente avait ,dii subsister^ se faisant payer des
arrérages des gages et chaüflàges antérieurs ¿1 la vente,
q u e , s u i y a n l les clauses de l’acle, il devait partager
avec Devèze,, et don t celui-ci devait seul faire le re
couvrement.
'
Mais les événemens survenus dans l'intervalle , firent
craindre à Lamouroux une suppression prochaine des
maîtrises,, ef par conséquent', de son office de Greffier.
O n conçoit qu’ il dnl alors se repentir de sou regrès.
Les discours prononcés; à rassemblé des-notables*, le
25
mai 1 7 8 7 , et devenus publics, lui annoncèrent
le projet de s occuper de la suppression des
maîtrises,
el le risque q u ’il courait de perdre- un office dont î;i
liquidation ne pouvait jamais se porter au prix qu’ il
l ’avait vendu. Mais comment put - il se flatter de faire
cesser l’eilèl du regn>s qu’il avait e x e r c é , surtout après
l ’acceplation de Devèze ?
Cependant
�'
(
3 3
5
.
,
Cependant dans cette confiance illusoire, il voulut
revenir sur ses pas. Il imagina de faire signifier à
D e v è z e , le i 3 août 1 7 8 7 , un acte par lequel il lui
fil sommation de se trouver chez un notaire, pour
y voir déposer la vente du 2 avril 1786. D e vè z e ne
’pouvait se rendre h l’heure de la sommation remise
chez lui en son absence ; en conséquence * le 14
a o û t , procès-verbal de défaut chez le notaire, et le
même jour assignation à la senéchaussée d’A u v e r g n e ,
pour reconnaître la signature, et pour être condamné
a l ’exécution de la vente, sous offre de délivrer la
procuration a d resignandum.
.
Il 11’est pas inutile de remarquer que dans la som
mation faite pour se trouver chez le notaire, et dans
l’assignation donnée le lendemain, on fait bien offre
de délivrer une procuration a d resignandum , maiso n
ne fait point d’offres réelles de la procuration ellemême , et on ne pouvait pas le faire, parce que cette
procuration n’existait pas encore, et 11’a même jamais
existé : cependant un tel acte pouvait se faire sans
la présence de D e v è z e ; il n ’était pas même d ’usage
<I'ie ces sortes de procuration fussent acceptées dans
le même acte par l’acheteur de l ’office. Mais il n’au
rait pas même suffi d’offrir réellement la procura l io n ,
il aurait encore fallu offrir les provisions du vendeur,
les quittances de finance et celles du centième denier,
pièces qui devaient nécessairement accompagner la
procuration, et sans lesquelle s l’acheteur n’aurait pas
pu obtenir les provisions de l’office.
E
•
�.
( 34 }
.
.
* ,
On a v u ci-devant les causes qui avaient empêché
qu ’il ne fût donné suile à la demande portée par
L am ouroux en la Sénéchaussée d’Au vergne, c’est-àdire, le compromis par lequel les parties so u m ir e n t
l a contestation à l’arbitrage du grand-maître, et le
jugement arbitral qui déclara Lamouroux non receVable dans sa demande, en déclarant la vente comme
non avenue. On a vu que la conduite que tint L a
mo u ro u x, après le jugement arbitral, après qu’il lui
en eût été fuit lecture et qu’il lui eût été signifié avec
bail de copie : on a vu que de tous les actes qu ’il
avait exercés en prenant la qualité de greffier, en se
faisant payer du prix des bau x, et percevant les émolumens, on a vu, dit-on, que de cette conduite résul
tait nécessairement de sa part l ’ap pr o ba tio n et l'exé
cution du jugement arbitral. Mais nous avons promis
que dans ce mo yen subsidiaire et surabondant que
nous examinons, nous mettrions à l’écart le compro
mis, le jugement arbitral et toute leur suile, pour
attaquer la sentence de la Sénéchaussée d’Au vergne,
dans la supposition même que les demandes de L a
mouroux n’eussent jamais été soustraites à la juris
diction da ce tribunal par un compromis, et jugées
par une sentence arbitrale.
Remarquons cependant que ces demandes, portées
en la Sénéchaussée d’Auvergne, par une assignation
du
14 août 1 7 8 7 , lie lurent reprises dans celle Sé
néchaussée, que long-tems après, et lorsque Devèze
y eût fait assigner Lamouroux pour voir ordonner
�3 5
.
.
l'homologation de la sentence arbitrale, la résistance
(
}
à l’homologation, qui ne devait pourtant pas l’ar
rêter comme on l ’a prouvé c i- d e v a n t , et sa persévé
rance à demander qu’il fût fait droit sur des deman
des éteintes par un compromis et par une sentence
arbitrale, étaient d’ailleurs repoussées par le regrès qu’il
avait e x e r c é ,e t l ’acceptation de D e v è z e ; e t ce fut alors
qu’il eut l ’audace de faire un acte de désaveu du re
grès, et d’assigner les héritiers de l’huissier, pour faire
juger avec eux le désaveu, car prudemment il avait
attendu la mort de cet huissier pour former ce dé
saveu. ,
On a vu , dansla discussion des deux premiers moyens,
que le désaveu n’aurait pu se proposer en la Séné
chaussée d’Auvergn e, et qu’après la sentence arbitrale,
ce n’eût pu être que sur un appel de cette sentence
qu’on eût pu se faire un moyen d’appel qui, par con
séquent alors, n’aurait pu être jugé qu’au parlement.
Mais nous supposons ici qu’il n’y aurait eu ni com
promis, ni sentence arbitrale; qu’en un m ot, la Séné
chaussée aurait seule été saisie de la contestation, et
alors même on va prouver que la Sénéchaussée ne
pouvait avoic égard au désaveu dans les circonstances
où on venait de le produire.
Il ne faut pas se persuader qu’on puisse désavouer
les actes d’un officier public, par la seule raison qu’ils
110 sont pas signés de la partie, ou qu’elle n’a pas
donné par écrit un pouvoir de faire ces actes, lorsque,
d ailleurs, il se rencontre des circonstances et des préE 2
�.
.
(
36 }
somptions puissantes que l’officier n ’a pas agi sans pou
voir, et que les actes ou des faits postérieurs sont
des suites naturelles de l’acte qui est désavoué, sur
tout encore lors qu ’il y a preuve que l’acte a été
connu de la partie qui le désavoue, mais qui reste
long-tems dans le silence, après qu ’on lui en a donné
connaissance, et attend, pour en iaire le désaveu,
la mort du ministre de l’acte.
Quelques praliciens, et même Denisart , avaient
voulu donner en m a x i m e , que le procureur ou l’huissier
lie pouvaient être désavoués après leur mort 5 mais
cette maxime générale eût été trop dangereuse ;aussi
les arrêts l’avaient-ils fait dépendre des circonstances,
Observez néanmoins, disent les auteurs du réper
toire de jurisprudence, que quoique le désaveu puisse
avoir lieu après le décès du procureur , on ne doit
l ’admetlre que quand les circonstances font présumer
qu’il y a eu dol et malversation de la part de cet
officier. L a raison en est qu’on doit supposer, en
g é n é ra l, qu’ un procureur n ’agit pas sans pouvoir, et
que les héritiers ne sont pas instruits suffisamment
de ce qui pouvait l'autoriser.
O r , quelle circonstance plus propre à prouver que
ce désaveu est fait de mauvaise foi, lorsqu’on établit
que l’acte a été connu par la partie qui le désavoue,
long-tems avant le désaveu, cl qu’on a attendu, pour
faire ce désaveu, la mort du minislie d e l ’acle qui est
désavoué.
Ici on ne peut pas mettre en doute la connaissance
�37
(
)
qu’a eue Lamouroux de V^cte de regrès. D e v è z e lui
fait, le 2 décembre 1786, une sommation de lui déli
vrer une procuration ûd résignaridu/n, et les autres
pièces nécessaires pour se faire pourvoir de l’office de
greffier. Lamouroux ne peut pas dire qu’il n’a pas connu
cette sommation, qui a été faite en parlant à sa per
sonne ; il ne pourrait le dire qu’aulant qu’il formerait,
contre cet acte, l’ inscriplion de faux.
•Après cetle sommation, que devait-il faire, s'il vou
lait accomplir la vente? C ’était de délivrer la procu
ration a d resignandum , et les autres pièces qui lui
étaient demandées par la sommation.
Que pouvait-il faire., s'il ne voulait pas accomplir la
vente? Il u’avait pas d’autre mo yen que d’exercer le
régi ès.
Il a exercé ce regrès cinq jours après la sommation,
le 7 décembre;" et le 12 du même mois le resrès
a été
O
accepté par D e v è z e , par un acte signifié à Lamouroux.
11 ne peut donc pas dire non plus qu ’ii n’a pas connu
l ’acte par lequel le regrès a été accepté, puisque cet
acte lui a été signifié, et il ne pourrait le prétendre
encore qu’en s’inscrivant en faux contre la signification
qui lui a été faite de l’acceptation du regrès.
D e là donc qu e , d’ un côté, il n’a point satisfait n i a
sommation du 2, en délivrant à D e vè ze la procuration
et autres titres nécessaires, on doit conclure qu ’il n ’a
plus voulu que la vente s’accom plît, puisqu’elle ne pouvau l’être qu’après la remise de tous les litres.
D e là q u e , par l ’acte du 1 2 , D evèze lui a fait si-
�#
^
( 38 )
............................
gnifier l’acceptation d’un regrès qu’il disait lui avoir été
signifié à la requêle de Lamouroux , si le regrès n’avait
pas été de son fait, s’il n ’en avait pas donné pouvoir
à l’huissier, il devait s’empresser de désavouer l’huissier.
Mais dès qu’alors il n’a rien fait pour contredire le
regrès, que le désaveu n’est venu que plus de deux ans
après, et que,, pour le faire, il a attendu la mort de
l ’huissier, tout cela ne manifeste-t-il pas la mauvaise
foi de ce désaveu tardif?
N en sera-l-on pas même encore plus convaincu , si
toutes les actions de L am ou rou x, postérieures à l’acle
de regrès, se concilient parfaitement avec la vérité de
ce regrès, si ces actions emportent avec elles la consé
quence que Lamouroux avait l ’intention de se main
tenir dans le titre et la propriété de l'office qu’il avait
vendu à D e v è z e ?
A u t re m e n t , de quel droit aurait-il perçu lui-même
les émolumens du greffe, qui devaient appartenir à
D e v è z e ? de quel droit aurait-il perc;u les arrérages an
térieurs à la vente des gages et des chauffages qu ’il
devait partager avec D e v è z e , mais dont, aux termes
de la vente, D e vè ze devait seul faire le recouvrement ?
de quel droit a-t-il poursuivi Seriez, l’a f;)ii condamner
au paiement du prix de la ferme, et s’en est (ait payer?
11 n a pu faire tout cela qu’en manifestant son inten
tion do conserver le titre et la propriété du greffe, et
par conséquent sans approuver le regrès et reconnaître
le pouvoir qu ’il avait donné à l’huissier; et ce ne pou
vait être que par l’effet du regrès qu ’il pouvait con
server le titre et la propriété de l’oflicc.
�3
( 9 )
C ’est d’ailleurs en vain que pour rendre suspeci l’acte
de regrès du 7 décembre 1 7 8 6 , et pour fortifier le
désaveu, on prétend qu’il se trouve un acte du même
jour, fait par le même huissier à plus de dix lieues de
distance de Saint-Flour; d’où l’on conclut que l’huis
sier ne pouvait pas être à Saint-Flour ce même jour.
i°. Il ne serait pas physiquement impossible qu’un
huissier fit le même jour deux actes en deux lieux différens, à la distance de dix et douze lieues l’un de
l'autre.
2.0. Devèze produit un acte signifié à Saint-Flour le
6 d é c e m b re , la veille de celui qui a été signifié le 7 à
D ev èze ; et ce même huissier pouvoit être encore à
Saint-Flour le lendemain 7, signifier le regrès de Lamouroux le même jour au matin, et parlir de suite pour
al!er plus loin faire d’autres exploits. On ne pourrait
pré'endre qu’il n’était pas à S a in t -F lo u r le 7 , qu’en
formant l'inscription de faux contre l ’acte par lui si
gnifié ce même jour à la requête de Lamouroux.
3 .°
Mai* Lamouroux a eu connaissance du regrès,
par l ’acceptation que D evèze lui en a fait signifier le
12. S’il n ’avait pas donné de pouvoir à l'huissier, il ne
pouvaû pas trop se presser de le désavouer, et ilallend
plus de deux an s, et la mort de l’huissier, pour faire
ce désaveu.
4 *°
Pour admettre le désaveu de Lam ouroux , il fau
drait qu’il y eût trois actes faux, ceux du 2, du 7 et
du ï2 du même mois, et trois actes faits par trois différens huissiers. Comment supposer qu ’011 eût pu cor
rompre trois huissiers ?
�40
(
)
A lors , de foule manière le mal-jugé de la sentence
de la Sénéchaussée d’Auvergne, en ce qu’elle avait jugé
le désaveu valable, ne doit-il pas paraître évident,
même en faisant abstraclion de la sentence arbitrale,
et en supposant toujours que le compromis et la sentence
arbitrale n’auraient jamais existé?
Mais on peut encore aller plus loin, et soutenir avec
fondement q u e , n ’y eût-il jamais eu d ’acte de regrès,
ou que jamais Lamouroux n ’eût montré l’intention de
se conserver le titre et la propriété de l’office , malgré
la vente qu il en avait faite, la sentence de la Séné
chaussée aurait encore mal jugé en ordonnant l’exéculion de la vente.
Pour cela il suffit d’observer que D e vè z e ne pouvait
devenir titulaire et propriétaire de l’office, que par reflet
des provisionsqui lui en auraient été accordées, et qu'il
ne pouvait obtenir ces provisions qu ’autant qu ’il aurait
eu en son pouvoir les provisions de Lamouroux, sesquittances de finance et de centième denier, qui ne lui
avaient jamais été délivrés par L am o u rou x , et que
jusques-la , Lamouroux restait absolument le maître et
le propriétaire de l'office, d ’où doit résulter la consé
quence que cet office ayant été supprimé , il l'a été sur
la tôle de [/¡imouroux , et que la perle n'en a pu re
tomber que sur lui , par la règle de droit , res petit
Domino.
' 11 est bon de rappeler les principes de la matière,
nous en ferons ensuite l’application.
L a vente ne peut recevoir sa perihelion que p;ir la
tradition ÿ
�41
(
)
tradition ; elle ne peut transférer la propriété qu’autant
qu’elle est suivie de la tradition ; traditionibus dominia
rerum transferuntur, non m idis pactis. 1. 20, cod. de
pactis 1 ainsi jusqu’à la tradition, la propriété de la chose
réside toujours dans la personne du vendeur; ce qui est si
vrai que dans le droit , le propriétaire qui a fait une
première v e n t e , venant à en faire une seconde d e l à
même chose à un autre ach e te u r, s’il lui en fait la tra
dition, ce dernier acquéreur est préféré.
L a tradition et la délivrance des choses qui sont
fermées sous clef, ne s’opère que par la remise des
clefs que fait le vendeur à l’acheteur : sed qui nier~
ces in horreo depositas vendiderit, simuL atque ciaves
tradident em pton, transfert proprietatem merciutn a d
cmpiorern. In st. §. 4b de ter. divis.
L a délivrance des immeubles, dit D o m a t , d’après
la dispostion des lois, se fait par le v e n d e u r, lors
qu’il en laisse la possession libre à l ’acheteur, s’en
dépouillant lui-meme, soit par la délivrance des ti
tres , s’il y en a , ou des clefs, si c ’est un lieu clos,
comme une maison.
En ne parlant que de ces principes généraux, car
on verra bientôt qu’il y en a de particuliers pour la vente des offices, la tradition de l’oflice vendu ne pour
rait se faire que par la remise des titres nécessaires
pour en faire pourvoir l'acheteur; c ’e s t - à - d i r e , de
la procuration ad resignanduni, des provisions de
Latnouronx, de ses quillances de finance el centième
denier. L a remise de loutos ces pièces était nécessaire
Y
�4
.
( 2 )
pour opérer la tradition de la chose vendue , de mémo
que la remise des clefs du grenier dont on a vendu
les grains qui y étaient renfermés, de même aussi
que la tradition d’une maison qu’on a vendue, et qui
n ’a pu aussi s’opérer que par la remise des clefs.
Ainsi, n’y ayant pas eu de délivrance des litres né
cessaires pour faire pourvoir D e v ò t e , et le faire jouir de
la chose vendue , il n’a pu y avoir de tradition, sans la
quelle la propriété de l'office ne pouvait lui être transfé
rée, tradi-twmbus dominici rem ni Irans/cmntur, non m i
dis p aclisj mais comme Liinioiu oux ne pouvait perdre la
propriété qu’au moment qu’elle passerait à D e v è x e ,
ce qui était impossible par le défaut de la remise dos
titres qui n ’a jamais été faite, dès que l’ofiicd a été sup
primé, la perte n’en
pu retomber que sui' Lamon-
roux , q u i , au moment de la suppression , en était seul
propriétaire.
Lamo uroux voudrait-il dire qu ’il Avait fait desoflies
de délivrer la procuration ad rcsignandutn , et autres
titres nécessaires? mais dans quel teins a-t-il lait ces
ollres? il devait les faire au moins aussitôt après la som
11
mation que lui en lit D c v è / e , le 2 décembre 1786.
avait annoncé qu ’il ne voulait j oint les faiie dans l’acte
du regrès du 7 du même mois, cl qui fut accepté par
Dovèze dans l'acte signifié le 11 à Lamouroux.
Et ces offres tle délivu r, il ne le-, a laites que deux
ans après , et long-tems même apn s lu sentence arbi
trale qui avait déclaré la vente comme non avenue.
.Mais supposons mémo q u ’il n ’y eût eu ni rciirès, ni
�43
(
)
_
acceptation, ni compromis, ni jugement arbitral, qu’eniin Lamouroux ne se fût pas toujours porté et .qualifié
propriétaire en recevant les éinolumens du greffe, les
gages, les droit de chauffage, qui auraient dû appar
tenir à D evèze , en percevant les droits du greiïe, en
poursuivant le paiemen t, obtenant des jugemens où
il se qualifiait toujours de greffier en chef, et touchant
le prix des fermes ; niellant tous ces faits à l’écart,
quelle est doue cette espèce d’offres tardives faites
par L am ouroux?
J1 olliait , disait-iUde délivrer une procuration ad
rcsignandum ; mais ce n’était pas là une offre réelle
qui seule pouvait le libérer de l'obligation qu ’il avait
coul raclée ; il aurait fallu qu’il eût réellement une pro
curation loule faile, et non pas une procuration à faire,
et qui 11e l’a jamais été.
jKien d'ailleurs n'aurait pu l'empêcher de faire celle
procuration el de l'offrir réellement; il n’avait besoin
pour cela ni de la présence de D e v è z e , ni de son conseulement; et jamais dans ces sortes de procurations
il n’y eut d’autre partie que le constituant.
Lors même q u ’il lit ces oflres, et quand elles auraient
été réelles, D e vè z e aurait élé fondé à les refuser, parce
qu elles auraient élé tardives et i’a i k s à couli*'-tem.s. (.ts
offres miraient dû être laites inum'diaUnm ni a^r>s H
scinmalion que Dev -zelui avait fail faiiv k* z d *cembro
; mai;; on nr- 1: > aviit laites que pu : Ij d:*ux ans
*4 * *• , et
1«:; -que lu mm i u
i-ti cî .v nuàlnses ét'ût d j;’i
�44
C
)
On croit donc avoir démontré par les principes gé
néraux de la vente et de la tradition, que Lamouroux
élait seul propriétaire de l’office lorsqu’il a péri par la
suppression des maîtrises ; et alors quelle est la règle?
res périt Domino. Mais il y a de plus des principes par
ticuliers pour les ventes d ’offices : nous ne pouvons pas
les puiser dans une source plus pure que le traité des
offices de Loyseau ; c ’est là vraiment le siège de la
matière.
« C e l u i , dit Loyseau, liv. i , ch. 2, n. 2 1 , qui après
« avoir composé de l’office, e.l payé le prix d’i c e l u i,
« a relire de son vendeur une procuration irrévocable
« pour le résigner en sa fa veur, même un acle exprès
« de résignation, n ’a point encore de droil en l’ofiiGe
« jusqu’à ce que la résignation soit admise par le col« Ialeur et la provision expédiée à son profil; de sorte
« que jusqu’alors l’office est encore in bonis du rési« gnant
et par conséquent peut être saisi pour ses
« dettes , comme a décidé la Coutume de Paris, art.
® 97, et peut par lui-même êlre résigné à un au tre,
« s’il prévient par eflet son premier résignalaire ».
(( Dont la raison est, conlinue Loyseau , que la ré
* signalion n'est pas une tradilion de l’office, attendu
« que les offices ne sont pas en la libre disposition des
«• pourvus, pour les pouvoir directement et imnié« dialement transporter à autrui ; mais il iaut qu’ils
« passent auparavant par les mains du collaleur, duquel
« leur disposition dépend principalement ».
Ainsi, d’après la doctrine de L o y s e a u , celui qui a
�(
)
vendu l’office en reste toujours propriétaire, lorsmême
qu’il a délivré sa procuration ad resignandum ,• 1ant
qu’il n’y a pas eu de provision, l’office est toujours l u
bonis du vendeur; mais si l’office vient à être supprimé
dans l'intervalle, il ne peut périr qu ’entre les mains du
vendemvpuisque celui-ci en reste toujours propriétaire.
Si cela est vrai, même à l’égard du vendeur qui
a déjà délivré la procuration a d resignandum, à com
bien plus forte raison do'.i-il en être de m ê m e , lorsque
non seulement la piocuration a d resignandum
n’a
pas été délivrée , mais lorsque encore il n’y en a ja
mais eu de faite , surfont encore lorsqu’il y a eu som
mation de la 06'iv.ei , comme on voit qu ’il en fut
Dait une le duux. décembre 1786 ; et qu ’ensuite ,
prés de deux ans après, Lamonroux a offert de déli
vrer la procuration ad. resignandum , alors les choses
n ’étaient plus entières, et d’ailleurs ce ne sont pas
des offres réélles de la procuration elle-même, mais
de simples offres de délivrer une procuration qui n’exislait pas encore, et qui n’a jamais existé , procuration
qu’on pouvait faire sans la présence de D e v è z e , où
il n’était pas besoin qu ’il concourut.
1
Il
doit donc paraître démontré que quand même
a flaire eût été portée directement en la Sénéchaus
sée d’Auvergne , la sentence qui y fut rendue était
de toute injustice.
Comment cette sentence avait - elle d ’ailleurs pu
]"ger valable le désaveu d’ un regrès qui devait paraître
constant par toute la conduite de L a m o u ro u x , surtout
�46
(
)
par une suile des actes des 2, 7 et 12 décembre 1786,
_
trois actes faits par trois huissiers différens qu’il aurait
fallu corrompre tous les trois pour leur faire faire ail
lant de faux , le premier et le dernier, en ne donnant
pas copie de ces actes à Lam o u rou x, quoique leurs
exploits énoncent le bail de copie, et l’huissier qui
avait fait le regrès de L am ou rou x, pour l’engager à
faire cet acte sans l’aveu de Lamouroux. L ’acte du
12 décembre 17 86, donna connaissance à Lamouroux
d’un regiès signifié à D e vè ze le 7 , par l’acceptation
du regrès faite par cet acte qui ne pouvait être atta
qué que par l’inscription de faux. Pourquoi donc le
désaveu n ’a - t - i l pas suivi de près, et attendre à le
faire, deux ans après la mort de l’huissier. Nulle autre
cause vraisemblable du désaveu, que la connaissance
qu’a eue Lamouroux de la suppression prochaine de
l ’office qu ’il avait , vendu à Devèze.
Et quant à ce qu’on dit que la relation du con
trôle dans le registre de l’acte de regrès, parle d ’un
acte signifié à D e v è z e , qualifié habitant du Pont du Vern e t , au lieu qu'il, est habitant de Saint-Flour, de quelle
conséquence peut être celle énonciation, contraire à
celle de la copie du regrès signifié à D e v è z e , où il est
qualifie habitant de Saint-Flour? I,e contrôleur ou le
commis qui a fait 1 enregistrement, pouvait avoir dans
l'idée quelque acte précédent, où il était question d’un
habitant du V e r n e l , et il a pu confondre. D ’ailleurs il
n ’existe pas d'individu du nom de D e v è z e , qui soit ha
bitant du Pont du Vernel. Mais ce qu ’011 veut ensuite
�47
(
)
•supposer, que c’était Devèze lui-m êm e qui avait écrit
sur ie registre la mention du controle ^ est lout-a-lait
niai adroit. Si le fait était vrai, comment D evèze luim ê m e , habitant de Saint-ïlour, se serait-il donné un
domicile au Pont du V e r n e t ?
Dans de telles circonsîances, il est impossible de con
cevoir comment la sentence dont est appel, a pu dé
clarer valable le désaveu de L am o u roux, et ordonner
l ’exécution de la vente. Cette sentence est donc évi
demment injuste, en écartant même le compromis et
le jugemen arbitral qui l’avait précédé.
Mais la sentence est encore plus insoutenable : elle
est nulle et irrégulière, en ce qu’elle a jugé le con
traire de ce qui l’avait été par un jugement arbitral
qui ne pouvait être détruit que par un appel, dont la
Sénéchaussée n’aurait pas pu connaître. C ’est ce que
l ’on se persuade avoir démontré dans les deux premiers
moyens.
On finira par observer que L am ouro ux n’avait cessé
de se répandre en injures contre D e v è z e , dans tout le
cours du procès. 11 semblait s’en être repenti, lorsqu'il
avait dit à la page1 i x de son mémoire, q u il éviterait
avec soin tes personnalités, pour ne s'occuper que de La
cause, et que sans doute Devele lu i saurait gré de sa
Modération ,• mais on a bien mal tenu parole en ter
minant le mémoire par celte phrase, que Le citojen
Devèze est parvenu ci ce p oin t, qu il. est difficile de le
calomnier. Quand on est méchant, on ne devrait pas
�promettre, par réflexion, ce qu’on ne peut pas tenir
par caractère. Mais qu ’est-ce que cela fait à la cause?
L e citoyen T
L e citoyen A
io lier ,
ndraud,
rapporteur.
avocat.
L e citoyen C r o i s i e r avoué.
A R I O M , DE L 'IM P R IM E R IE DU P A L A I S , C1IEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Devèze, Jean-Baptiste. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Andraud
Croisier
Subject
The topic of the resource
ventes d'office
arbitrages
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Baptiste Devèze, appelant ; contre Antoine Lamouroux, intimé ; en réponse à celui de l'intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1786-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0229
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1411
BCU_Factums_G1412
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53728/BCU_Factums_M0229.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Mauriac (15120)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
ventes d'office
-
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e56da23e4fdb5d871b95c4ea1e6f3c69
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E
.
�Ju lie n ,
décédé sans
postérité.
V ital,
décédé sans
postérité.
Antoine Ier,
décédé sans
postérité.
Antoine II,
marié à
Marie-Thérèse
Delchier.
Anne-Marie,
mariée au cit.
T artel,
de cujus.
ont donné tous leurs biens
à Julien Dejax.
I
2
V italJu lie n ,
François, appelant.
décédé
•ans postér.
il
3
AnneM a rie ,
mariée à
Peyronnet.
4
A gn ès,
m ariée à
Pierre
Dalbine
intimés.
,
i
2
3
Anne
Marie ,
mariée à
Robert
G izaguct,
intimée.
Joseph,
intimé.
M arie,
intimée.
�MÉMOIRE
EN
R E P O N S E ,
P O U R
Dame A g n è s D E J A X , et le citoyen P i e r r e
. D A L B I N E , son mari, juge au tribunal d’ar
rondissement de Brioude;
D ALB IN E , M a r ie D ALBIN E ,
A n n e - M a r i e D A L B I N E , veuve de Robert
C r o z e - M o n t b r i z e t - G i z a g u e t , tant en
son nom que comme tutrice de ses enfans ;
tous intimés :
J oseph
C O N T R E
•
.
I
D E J A X , homme de lo i, habitant de la
ville de Brioude, appelant d’un jugement rendu
au tribunal de cette même ville , le 6 messidor
an 10.
J ulien
Sous
l’em pire des lois p ro h ib itiv e s, les transactions
les p lus ordinaires étoient toujours suspectées de fraude;
l' injustice , la c u p id ité , l’a m b itio n , avoient un cham p
vaste pour leurs spéculations ou leurs calculs. Quelle jouis
sance p our le cit. D e ja x , connu p ou r avoir la passion
A 2
�.
-( 4 )
,
du procès! Il doit sans cloute regretter le temps où la
loi du 17 nivôse étoit en vigueur. Il paroît que la loi du
4 germinal an 8 lui a singulièrement d é p lu ; il sera bien
plus irrité contre le code civil, qui perm et des dispositions
universelles en ligne collatérale; et son m om ent n’est pas
bien choisi p o u r attaquer des règlemcns de famille dictés
par la reconnoissance, ou des ventes aussi sincères que
légitimes.
Ce n’est pas assez p o u r le cit. D eja x d’avoir o b te n u ,
par im portunité ou par lassitude, la majeure partie de
la succession de l’un de ses oncles, d ’a vo ir été donataire
universel de deux a u tres, il est jaloux de la plus légère
préférence de la tante qui lui restoit. Il l’a négligée dans
sa vieillesse; l’auroit abandonnée à des soins mercenaires,
sans la généreuse bienfaisance de la dame D albine : mais
aujourd’hui il en ve u t à sa succession; et tous les actes
q u ’a faits la dam e T a rtel sont à ses y e u x des libéralités
frauduleuses et déguisées, que la loi proscrit et lui réservoit exclusivement.
Ses prétentions sont défavorables et odieuses, sa récla
m ation impolitique et injuste, attentatoire au droit sacré
de propriété : en l’adoptant, ce seroit récompenser l’in
gratitu de, blesser la reconnoissance, et proscrire les con
ventions les plus légitimes.
F A I T S .
L a dame D e j a x , ve u v e T a r t e l , de la succession de la
quelle il s’agi.t, a été la bienfaitrice de toute sa famille.
E lle donna une somm e de 3?000
^ A n n e-M a rie D e ja x ,
fem m e P e y r o n n e t, lors de son contrat de mariage.
�C 5 )
Elle fît également un clon de 6,000 fr. à Julien D e j a x ,
son n e v e u , ap pelan t, lors de son mariage avec la dem oi
selle C r o z e , du 2,5 novem bre 1 7 7 1 . Ce sacrifice fut absolu
de sa p a rt, et sans aucune réserve d’ usufruit.
L e 9 décem bre 1 7 7 1 , A gn ès D e ja x épousa le citoyen
D a lb in e , et la dame T a rtel lui fit donation de quelques
immeubles situés à F ontanes, évalués à
5 ,000 francs, et
non d’un d o m a in e , com m e le prétend D e ja x ; p lu s, d’une
somme de 2,000 fr. ; mais elle se réserva, pendant sa v ie ,
l’usufruit des objets donnés.
L e 19 juin 1 7 7 8 , la dame v e u v e T a rtel fit donation à
A n n e -M a r ie D a lb in e , sa petite-nièce, de six parties de
rente au principal de 4,000 fr.
L e 17 germ inal an 2 , elle fit donation du sixième de
ses biens î'i A n n e - M a r i e , Josep h et M arie D a lb in e , ses
petits neveu et nièces.
I æ 6 messidor an 8 , elle a fait un testament par lequel
elle a institué p our son héritière de la m oitié de tous ses
biens, par p récip u t et avantage à ses autres héritiers de
d r o it , A gn ès D e j a x , femme D albine.
T elles sont les libéralités qu ’a exercées cette fem me
bienfaisante. Mais le citoyen D e ja x conviendra lui-m ém e
qu’A g n è s , sa s œ u r, m éritoit quelque préféren ce, et devoifc
obtenir la prem ière place dans l ’affection de sa tante.
D ep uis longues années la dame D albine lui a rendu les
services les plus empressés et les plus généreux. L a dame
T a r te l, indépendam m ent des infirmités qui accompagnent
la vieillesse, étoit atteinte d’une cécité c o m p lète; sa nièce
ne l’a pas quittée, lui a prod igu é ces tendres soins qui c o n
solent les m alheureux et les dédom m agent des privations.
Julien D e j a x , au c o n traire, s’occupoit peu de sa tante
�( 6 ]
.
pendant q u ’elle a vécu ; il n y pense que depuis qu ’elle
est m o r t e , parce qu ’ il est très-h a b ile à succéder. Il lui
sera sans cloute diilicile d’attaquer des libéralités que les
lois autorisent : mais il fait rém unération des ventes que
la clame T a rtel a consenties ; il est donc essentiel de les_
rappeler.
L e 31 août 1 7 9 1 , le cit. D albine se rendit adjudicataire,
au ci-devant district de B rio u d e , de deux maisons natio
nales, m oyennant la somme de 2 ,g 5 o fr. ; et l’adjudication
lui fut faite au nom de M arie D e ja x , veuve Tartel.
L e 26 floréal an 2 , cette dernière subrogea A g n ès
D e ja x , autorisée de so a m a r i, à l’effet de ces deux adju
dications, à la charge par elle de payer 1,960 francs q u i
étoient encore dus à la nation ; de payer le montant d’un
devis qui avoit été d o n n é p ou r quelques réparations; et
m oyennant le rem boursem ent qui fut fait de deux sommes
qui avoient déjà été payées par la dame T a r t e l; savoir,
celle de 1,221 fr. dJune p a r t , versée à com pte du prin
cipal ou intérêts dans la caisse du r e c e v e u r , et celle de
'1,200 fr. pour les réparations déjà faites.
. L e 24 vendémiaire an 5 , la dame veuve Tartel a vendu
a R o bert G ro zu -G iza g u ct, é p o u x d’^ n n e -M a rie D albin e,
sa petite-nièce, un domaine appelé de VW.elieües, l’a su
b ro g é à une vente nationale de partie d’1111 domaine appelé
le P o u x , et lui a également cédé les meubles qui garnissoient ce domaine de V azelicttes, dont l’inventaire est
«
annexé au contrat.
Celte vente est faite sous la réserve de l'usufruit de tous
les objets vendus et des bestiaux du dom aine, moyennant
la s o m m e de 2Ô,ooo IV. qu ’elle reconnoît avoir reçue
comptant lors çle la vente,
�( 7 ) r
t '
L a clame veu ve T a rte l est décédée le I er. vendémiaire
an 9 , c’est-à-dire, q u ’elle a survécu quatre ans à la vente
par elle consentie au profit de R o bert Croze de Gizaguet.
A p rè s son décès, les intimés espérèrent, pendant quel
que tem ps, que le cit. D ejax n’ éleveroit aucune contesta
tion ; il sernbloit se rendre justice : il nomm a son arbitre,
lit estimer les fonds, et on procéda à l’inventaire du m obi
lier; cet inventaire fut écrit par son fils en sa présence.
Mais bientôt il changea d’opinion. Il éludoit toujours
les propositions qui lui étoient faites : la dame D a lb in e
se vit contrainte de le faire citer p o u r procéder au par
tage des biens délaissés par la dame ve u v e Tartel.
C ’est alors que le cit. D eja x manifesta ses intentions
hostiles. Il demanda d’abord la nullité de la donation faite
p ar la tante c o m m u n e , le 17 germ inal an 2 , du sixième
de tous ses biens au profit des enfans de la dame D a lb in e,
sa nièce ; 20. il attaqua l’acte de subrogation de floréal
an 2 , au profit de la dame D albine ; 30. il conclut à la
nullité de la vente faite au profit du cit. R o b e rt CrozeG iz a g u e t, le 24 vendém iaire an
5 ; 4 0. il soutint la nul
lité du testament du 9 messidor an 8 , qu i attribuoit à la
dame D albine la m oitié des biens de sa tante, en préciput;
5 °. il prétendit que la dame D a lb in e , épouse M o n t b r iz e t ,
devoit lui faire raison des arrérages d’une rente d’un seticr
seigle, faisant moitié d’une rente de deux setiers par elle
perçue
d’un nom m é P o u g h o n de R e illa c , tant avant
q u ’après le décès de la dame Tartel ; 6°. il conclut à ce que
la dame D albine fût tenue de déposer, entre les mains de
tel notaire qui seroit com m is, tous les titres, papiers et
docuinens de la succession, p our que chacune des parties
put en prendre co m m u n ica tio n , ainsi
qu’elle
aviseroit.
�,
.
c 8 ) .
.
Il prétendît que la dame D albin e devoit demeurer cau
tion de toute prescription qui auroit pu s’opérer depuis
le décès de la tante com m une jusqu’au dépôt des titres
de créance ; il demanda q u ’elle fut tenue de faire raison
de tous les arrérages de rente , b a u x à fe r m e , et gén é
ralement de tout ce q u ’elle peut avoir perçu des créances
dépendantes de la succession ; que tous les biens meubles
et im m e u b le s, effets , créances , composant cette succes
sion , m êm e
ceux dont la dame T a r te l avoit disposé
entre-vifs, en faveur de ses héritiers de d r o i t , fussent
rapportes à la masse com m une par les détenteurs, avec
restitution de jouissances et intérêts, depuis le décès de
la dame T a r t e l , jusqu’au partage effectif,
, E nfin il conclut subsidiairem cnt, dans le cas où tout
ou partie des actes attaqués ne seroit pas a n n u llé , et q u e ,
par l’effet de ceux co n servé s, ou de tout autre disposi
tion non contestée , plus de la m oitié des biens de la
dame T artel se trouveroit absorbée , il fût ordonné que
les dernières dispositions de la dame T artel seroient re
tranchées jusqu’à due concurrence , de manière qu’il
restât toujours à diviser la m oitié des biens meubles'et
immeubles composant cette succession.
L e cit. D ejax , en expliquant ses p réten tion s, se fondoit , p ou r la nullité de la donation de germinal an 2 ,
du sixièm e des bien s, i° . quant aux meubles, sur ce
que cette donation n’en contenoit pas l’é ta t, qu oiqu ’il
n’y eût q u ’ une tradition feinte.
P a r rapport aux im
m eu b les, il prétendoit que la loi du 17 nivôse ne p ermettoit pas la forme des donations entre-vifs; et que la
d(ime T artel ne p ou voit disposer du sixième de ses b ie n s ,
que
�(9)
que par donation p our cause de m o r t , ou par testament.
L a subrogation de floréal an 2 , étoit suivant lui une
libéralité déguisée , faite au profit d’une successible. L a
dame Tartel avoit ép ro u vé une lésion énorm e, en ce qu’elle
avoit acquis dans un temps 011 les assignats perdoient peu
de leur v a le u r; tandis qu’ils étoient discrédités à l’époque
de la subrogation , en supposant m êm e q u ’elle en eût
reçu le rem bo u rsem en t, ainsi que celâ a été dit dans l’acte.
Il prétendoit encore que cette maison, avoit acquis une
grande valeur dans l’in te rv a lle, par la démolition de plu
sieurs bâtimens
nationaux , qui auparavant embarras-
soient ou obscurcissoient les avenues de la maison.
L a vente du domaine de Vazeliettes éloit aussi une
donation d é g u isé e , faite à vil p r ix au gendre d’ une successible, h un h o m m e dont la fortune ne lui permettoit
pas de payer 2Ô,ooo ft\ comptant. A l’en te n d re , cette
vente étoit faite sans nécessité, sans ca u se, sans em ploi
du p r ix , qui auroit du se trouver dans sa succession,
q u atre ans après son décès.
L e testament du 6 messidor an 8 étoit encore n u l ,
parce que le notaire n’ avoit pas indiqué p o u r quel dé
partem ent il étoit établi; l’un des témoins n’avoit pas
signé son vrai nom ; ce m êm e témoin étoit parent avec le
gendre de celle au profit de laquelle les dispositions étoient
laites ; enfin , on n’ avoit pas suffisamment désigné le
huitièm e témoin , qui avoit été appelé h raison de la
cécité de la testatrice.
L e cit. D e ja x , dans toutes ses demandes, a eu le désa
grément de ne pas trouver de son avis des cohéritiers qui
avoient le môme intérêt. L a dame v e u v e P cyronn et a
B
�IÔ )
demandé acte de ce qu'elle consentait au partage de la
succession de la dame v e u v e T a r t e ! , conform ém ent à son
testament; 2°. de ce q u ’elle n ’entendoit point contester
la vente du domaine de Vazeliettes et dépendances, faite
au profit de R o bert C ro z e -G iz a g u e t, ni aucune des do
nations partielles faites par la dame veu ve Tartel.
L es petits-neveux, donataires du sixièm e, ont consenti
que la donation demeurât sans effet quant au mobilier ;
mais ont demandé son e x é c u tio n , par rapport aux im
meubles.
L a dame D a lb in e , de sa p a r t , a soutenu que la subro
gation faite à son p r o f it , le 27 floréal an 2 , n’étoit pas
du nom b re des actes prohibés par la loi*, que toutes les
circonstances en prouvoient la sincérité ; que la loi ne
défendoit pas de v e n d r e , et q u ’elle validoit ce qu ’elle
n’annulloit pas.
•
.
A l’égard du testament, le notaire avoit désigné le lieu
de sa résidence, qui est la ville de B r io u d e , et cette dé
signation étoit suffisante. 20. L es noms et prénom s de
jVlontbrizet-d’A u v e r n a t , un des tém oins, étoient expli
qués dans le testament. Dans tous les actes publics et
p r i v é s , jamais ce tém o in -n ’avoit signé d’autre nom que
celui de d’A uvernat. Ce témoin n’est pas parent de l'hé
ritière instituée. L a parenté n’est pas une cause de p ro h i
bition. E t l’ordonnance de 1735 ne dit pas qu'on désignera
nom inativem ent le huitième tém oin, qui doit être appelé
p o u r cause de cécité.
L a dame veuve M ontbrizet , com m e tutrice de ses
enfans, a o b s e rv é , relativement à la vente du domaine
de V azeliettes, qu’elle étoit consentie en laveur du mari
�( 11 )
d’ une personne non successible. EUe a p ro u v é que la
prohibition rigoureuse de la loi ne s’étendoit q u ’à ceux
qui étoient appelés au partage de la succession. Son m ari,
acquéreur , étoit d'ailleurs étranger à la dame T artel :
les b ie n s , qu’elle lui transm ettoit, à titre de v e n te , passoient à tout autre famille que la sienne. Il est invrai
semblable q u elle l’eût p ré fé r é , si elle avoit eu des in
tentions libérales. Croze-Gizaguet tro u vo it, dans sa for
tune , et dans son ertiploi de capitaine de gendarm erie ,
des ressources suffisantes p o u r payer le montant de cette
acquisition : la dame T a rte l avoit survécu quatre ans à
cette vente , et devoit naturellement en avo ir em p lo y é
le p rix à ses affaires ou à ses besoins, dans un fige sur
tout où ils se font plus i m p é r i e u s e m e n t sentir, et où les
i nf irmit és augmentent nécessairement les dépenses.
Ces défenses si simples devoient faire présager à Julien
D e ja x , quelle seroit l'issue des prétentions de ce collatéral
avide. L e jugement dont est appel « l'a débouté de
» sa demande en n u llité, tant contre la subrogation à la
» vente des deux maisons nationales, consentie par la
» dame D e ja x , veuve T a rtel, au profit de la dam eD albine,
« par acte du 26 floréal an a , que de la demande en
» nullité de la yente du domaine de Vazeliettes, au profit
» de llo b e r t Croze-M ontbrizet, du 21 vendémiaire an
5,
» et encore de celle intentée contre le testament de la
» dame T a r t e l, en date du 6 messidor an 8.
» Il est ordonné que les v e n te , subrogation et testa
ment sortiront leur plein et entier effet j il est donné
» acte aux parties de ce qu’elles s’en réfèrent à leur
» qualité d’héritiers, et offrent de rapporter tout ce qu ’elles
B 2
�( 12 )
'
» tiennent à titre de libéralité particulière, et c e , de la
» 'm ê m e manière q u ’elles l’ont pris ou dû le recevoir. E n
» conséquence il est dit que , par experts nommés par les
»
»
»
»
parties ou pris et nom m és d’o ffic e , il sera procédé au
partage des biens meubles et immeubles provenans
de- la succession de la dame T a rtel , pour en être
délaissé à la dame D a lb in e , héritière testam entaire,
» une m oitié en cette q u a lité , et un tiers dans l’autre
» moitié com m e successible \ le second tiers au cit. D e ja x ;
» et le dernier à la dame D e ja x , veuve P eyro n n et ;
» auquel partage chaque partie rapportera les jouissances
» perçues dans les immeubles , suivant l’estimation qui
» en sera faite par les e x p e rts , et les in té rê ts , revenus
» et autres objets dépendans de la succession, sauf tous
» les prélèvem ens de droit que chacune d'elles aura droit
» de faire.
» Il est ajouté que dans la m oitié p o u r l’institution
» de la dame D a lb in e , sont comprises toutes les facultés
» de disposer de la dame T a r t e l, faites depuis la p u b li»
»
»
»
»
cation de la loi du 17 nivôse an 2 : en conséquence
la disposition du sixième en faveur des enfans D albine
dem eure sans effet quant à p résent; ils sont mis de
leu r consentement hors d’instance p our ce c h e f, sa u f
h se p o u rv o ir contre leur m ère ainsi q u ’ ils aviseront.
» Il est ordonn é q u e , dans le délai d’ un mois à com pter
» de la signification du ju gem en t, le cit. D eja x sera tenu
» de faire faire inventaire du m ob ilier, papiers et titres
» de créances laissés par la dame T a rtel à l’époque de
» son décès, si m ieux il n’aime s’en rapporter à l’état
» qui en a été dressé par son f ils , laquelle option sera
» censée faite le délai passé.
�( 13)
» Il est encore ordonné que la dam e G izaguet sera
» tenue de rapporter le contrat de rente annuelle d’un
» septicr seigle, qui fait partie intégrante de la succession
» de la dame T a r t e l , et à en rendre compte suivant le
» p rix des pancartes des années par elle perçues depuis
» l’ouverture de la succession , sauf au cit. D eja x de
» faire raison de ce qu’il a touché de la m êm e rente.
» Sur le surplus des demandes respectives, les parties
» sont mises hors de jugem ent; e t , en cas d’a p p e l, il est
» ordonné que tous les papiers et titres de créances
» dépendans de la succession de la dame T a r t e l , seront
» déposés ès mains du cit. B e lle m o n t, notaire public de
» B r io u d e , désigné par les parties, et com m is par le
» tribunal ; et le cit. D e ja x est condam né au x dépens
» envers toutes les parties. »
Il est bon de connoître les motifs qui ont déterm iné
ce jugem ent ; on verra q u ’ils sont tous m arqués au coin
de la sagesse, de l’équité et de la raison.
E n ce qu i touche la subrogation faite au profit de la
dame D albine , « il est dit que cette form e d’acte n’a
» point été interdite par la loi du 17 nivôse an 2 ; que
» le lég isla teu r, en interprétant dans ses décisions sur
» diverses questions relatives à ses effets, a décidé que
» ce qui n’étoit pas annullé par la loi étoit validé par
» elle.
» Q u ’en anéantissant les ventes h fonds perdu entre
» successibles, la loi n’y a pas compris les autres transac55 tions com m erciales, contre lesquelles on n invoque ni
» lésion ni défaut de payement ; que l’acte p rou ve que
M le prix dont il porte quittance a été c o m p té , et que
�( M )
» le surplus l’a également é t é , ainsi q u ’il résulte des quit'» tances rapportées. »
E n ce qui concerne la vente du domaine de V azeliettes,
faite au profit de R o b e rt Croze de G izag uet, on remarque
« que R o b e rt G izaguet n ’étoit point dans la ligne de
» ceux sur qui frappe la proh ibition des nouvelles lo is ,
» qu ’il n’étoit ni successible ni m êm e é p o u x de successible.
» O n observe que la jurisprudence constante du tri—
»
»
»
»
bunal de cassation, est de ne point ajouter à la rigueur
des prohibitions des lo is, mais au contraire de se re n
ferm er dans le texte précis de ces p ro h ib itio n s, sans
les étendre,
» L es ventes pures et simples et à p rix fixe ne sont
» pas interdites en faveur des successibles ; et quand
5) bien m êm e R o b e rt Croze-G izaguet eût été successible
» de la dame T a r t e l , la vente n’en seroit pas moins valide
» et inattaquable, tant qu ’aux termes précis des lois on
» ne l’argueroit pas de fraude ou de lésion. Enfin il
» est d i t , dans cet a c te , que le p rix en a été com pté
» présentement à la dame T a rtel ; et dès-lors on ne peut
.» élever aucun doute sur ce point de fait. »
E n ce qui touche ,lcs nullités résultantes contre le tes
tam en t, « A ttendu que la lo i, sur l’organisation du nota
» r i a t , astreignant les notaires A. indiquer le lieu de
» leur résidence et du d ép a rtem en t, n’a eu en vu e que
» d’em pêcher les Iraude’s qui pourroient être commises
» par des hommes qui usurperoient faussement la qu a
» lité de n o ta ire, ou par des notaires m ê m e , recevant
» des actes hors de l’arrondissement p ou r lequel ils sont
p
institués; mais q u ’un n o taire, en indiquant le lieu de
�( i 5 )
'» sa résid e n c e, fait connoître assez qu’ il ne sort point
» des limites qui lui sont fixées, et satisfait suffisamment
» à ce que la loi lui impose; que s’il falloit annuller les
» actes dans lesquels la désignation du départem ent est
» omise,-ce seroit p orter le trouble et la confusion dans
» la société.
» A tten du que d’A u v e rn a t , l ’un des tém oins, a été
» désigné par le notaire sous les noms et prénom s portés
» en son acte de naissance, de Jean-Baptiste C ro ze-M o n t» brizet-d’A u v e r n a t , et que par sa signature d’A u v e rn a t
» il a suffisamment attesté sa présence audit acte.
» A tten du que dans tous les actes généralem ent quel
» conques il ne signe que d’A u v e r n a t , et qu ’il n’est connu
» dans le public que sous ce nom.
» A tten du que sa parenté avec la fille et les petits
» enfans de l’héritière testamentaire ne dérive que du
» lien d’affinité , ne suffit point p o u r annuller un acte
» auquel il n’est appelé que com m e témoin.
» A tten du que la loi n’impose point aux notaires l’obli
» gation de désigner nominativement lequel des tém oins
» a été appelé en huitième par le m o tif de la cécité de la
» testatrice, et qu’il su ffit, aux termes de l’ordonnance
» sur les testainens, que le nom bre des témoins requis
» soit constaté.
» A tten du que le cit. D eja x ne demande point à être
» admis à p ro u ve r le dol et la fraude dans les actes qu’ il
» attaque , ni que ces actes aient été l’effet de la sug» gestion ou de la violence.
» A t t e n d u que les successibles ne peuven t cum uler
» les qualités de donataire et d’héritier.
�(' i 6 )
» A tte n d u que la faculté de disposer étant bornée à
» la m o itié , par la loi de germ inal an 8 , toutes les dis
.
» positions qui exeéderoient cette quotité doivent y être
» restreintes. »
T els sont les motifs qui ont déterm iné la décision des
prem iers ju g e s ; ils sont certainement très-ju dicieu x. Il
s’agit d’examiner si les objections du cit. D e ja x , qui a eu
le courage d’interjeter appel de ce ju g e m e n t , peuvent
balancer ces motifs , et faire annuller des conventions,
légitimes.
D o n a tio n du 17 g erm in a l an 2.
L e cit. D ejax d’abord p ou vo it s’épargner une discus
sion oiseuse sur la validité ou la nullité de cette dona
tion du six ièm e , faite au profit des petits-neveux de la
dame T artel. L e jugem ent dont est appel ordonne que
cette disposition demeurera sans e i f e t , et la réunit h la
disposition de m o it ié , faite au profit de la dame Dalbine.
Mais s i , en thèse-générale , on devoit exam iner le
mérite de cette donation , il seroit aisé d ’établir q u ’elle
doit avoir son e x é c u tio n , puisque les donataires ne sont
point successibles de la donatrice.
E n effet, l’article X V I de la loi du 17 nivôse perm et
de disposer du dixième de son bien en ligne directe, ou
du sixième en ligne collatérale, au profit d’autres que
des personnes appelées p a r la lo i au partage des s u c
ce ssio n s: d o n c, on ne peut tirer d’autre conséquence de"
cet article, sinon que tous ceux qui ne son t p o in t appelés
au 'p a rta g e sont susceptibles de recevoir la disposition de
cette quotité.
Les arguinens les plus simples sont les
meilleurs j
�C *7 )
. •
meilleurs ; toutes les subtilités , tous les raisonnemens
captieux disparoissent devant les termes de la loi , qui n’a
exclu que ceux qui sont appelés directement au p artage,
et on ne doit point étendre les prohibitions.
O n trouveroit encore la preuve , que le descendant du
successible , loin d’être exclu par la l o i , est au contraire
capable de recevoir. L ’article X X I I lui permet de profiter
de la retenue , quoique son ascendant prenne part â la
m em e succession.
•
L o in de nous ces discussions inutiles sur l'incapacité
des enfans! P o u rq u o i rappeler cette m axim e a n cienne:
P a t e r et J iliu s una eadernque person a ? ' V o u d ro it - on
iaire concourir l’ancienne législation avec la n o u velle?
lorsque la loi veut q u ’elles n’aient plus rien de com m un
par la suite, ainsi que cela est dit textuellement par la
réponse à la question 47 de la loi du 2a ventôse an 2.
Si l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse a com pris les
descendans du successible dans la prohibition des ventes
h fonds perdu , le m otif en est assez exp liq u é dansJa loi
du 22 ventôse. Ces ventes à fonds p e r d u , dit-on, sont
une source trop fréquente de libéralités indirectes. C ’est
une exception qui confirm e la règle. Ces sortes de vente
m êm e ne sont annullées qu’autant qu ’elles seroient sus
pectes ; elles peuvent être validées par le concours ou
le consentement des autres successibles. M ais précisément,
parce que la loi a com pris dans cet article les descendans
du successible , qu ’elle ne les a point nommés dans les p ré
cédons , on ne doit pas raisonner d ’ un cas à un autre ,
ni exclure d’oiïice ceux que la loi n’a pas déclarés inca
pables.
c
�Il
C 18 )
faut au surplus laisser au .cit. D ejax le plaisir de
dire que cette donation est nulle pour le mobilier. L ’ar
ticle X V de l'ordonnance de 1731 le veut ainsi ; les intimés
y ont consenti ; enfin cette donation n’a aucun effet par
rap port au cit. D e ja x : pourquoi donc a-t-il pris tant de
p e in e , p o u r discuter un point qui n’est pas con testé,
et p o u r lequel il n’ép ro u v e aucune perte ?
Subrogation
du 17 flo r é a l an 2.
P a rc c t acte, la dame veuve T a rtel a subrogé la dame D a l
bine sa nièce à une acquisition nationale. L e p r i x ¿toit
encore dû en majeure p artie; cette subrogation n’est (aile
q u ’c\ la charge de verser dans la caisse du district tout
ce qui n’a pas été p ayé; elle est laite sans aucune garantie ;
les sommes que la daine veuve T a rtel avoit payées sont
infinim ent m od iqu es; et il faut a vo ir une grande manie
du procès p o u r attaquer une subrogation (pii préseule
aussi peu d ’ importance. C e p e n d a n t, le cit. D ejax épuise
les autorités, se livre à une intempérie de citations pour
p r ouver la .simulation de cet a c te ; il met ;\ contribution
les lois et les auteurs , dans une matière où il y a peu
de décisions certaines, et où tout dépend des circons
tances ou des présomptions.
L e savant R i c a r d , dans son traité des d onations, p re
m ière partie, chap. III,>ect. X V I , nomb. 7 ^ 7 , dit bien
qu'une vente étant passée entre personnes qui sont p ro h i
bées de se d o n n e r ,
peut être prise pour un awinta^e
in d ire ct, et que des présomptions violentes puurroirnt
quelquefois suffire : com m e si le donateur veuoii à décéder
�.
( 19 )
.
bientôt après une semblable vente simulée , et que le
p rix fût considérable , sans qu ’ il se trouvât dans sa m ai
son aucune somme proportionnée aux deniers q u ’ il devroit avo ir reçu s, cl que d’ailleurs il ne parût pas qu’ il
en eût fait aucun em ploi dans ses a lia ires; avec quoi
qu ’autre conjecture résultante du fait particulier. Ricard,
com m e on le vo it, ne se décide pas légèrem ent à prononcer
la nullité d’un contrat de vente. L a présom ption la plus
forte suivant l u i , c’est lorsque le vendeur décède b ien
tôt après : on peut alors supposer aisément que ce v e n
deur , m ortellem ent a ttein t, cherche à transmettre ses
p r o p r ié t é s , A titre gratuit, à celui q u ’il préfère ou qu’ il
affectionne le? plus. T e l est le m alheureux effet des lois
prohibitives, qu'on cherche toujours à les é lu d e r, surtout
clans ces derniers momens. Mais , il n’est pas dans la na
ture qu'on cherche A se dépouiller , lorsqu’on a l’es
poir de jouir encore : 011 préfère souvent un héritier ù
tout au tre, rarement on le préfère A so i-m êm e; e t, parm i
nous, les donations entre-vifs deviennent infiniment rares.
L t peut-011 ici argum enter de présom ptions, de fraude
ou de simulation , lorsqu’on
voit (pu: la dame v e u v e
1 arlcl a subrogé en l’an 2 , et n’est décédée q u ’en l’an 9 ;
lorsqu'il est établi, que le p rix , ou au moins la majeure
partie de la subrogation , étoit encore dû par l'adjudica
taire; qu'il a été payé à la caisse national-1 par la su bro
g é e : ¿Alors, sans d o u te , doivent disparoitro toutes ces
Conjectures , tous ce* mov^’n» 1 anauv de simulation ,
qu'on v ou droit faire ré'ult-'r de la loi A W < /, ou d<> l’aut n r it'• 1; Papou , qui , même sur la 1 n Sufi>icius , 11c
P- • <* pi.; pour avoir tj'ijo u i'j dit la v o n t* .
C 2
�'
( 20 )
L e célèbre Cochin plaidoit sans cloute p our un hom m e
qui com m e D e ja x ne revoit que simulations; et le plai
doyer d’ un orateur fameux peut donner de grandes leçons,
et apprendre à bien discuter; mais on ne doit pas le citer
com m e un ouvrage doctrinal.
D ’ailleurs si la loi du 17 nivôse a défendu de d o n n e r,
elle n’a point défendu de ve n d re; et le législateur veut
bien nous apprendre lui-m êm e que la loi valide ce qu’elle
n’annulle pas.
V e n te du 24 vendém iaire an
5 , au profit du cit. G iza g u et.
Cette vente est faite en l’an
5 au profit d’un étranger
ù la venderesse ; mais cet acquéreur étoit le gendre de
la dame D albine ; et com m e il est dans le système de
D e ja x d’étendre les prohibitio n s, il veut les porter à
l’infini : quoique l’objet vendu passât à une famille étran
gère à la dame T a r t e l , qu ’il appartînt aux héritiers M ontbrizet plutôt q u ’aux héritiers D a lb in e , cependant D eja x
veut encore que cette vente soit simulée.
L e tribunal de cassation n’a pas pensé com m e le cit.
D e j a x , lors d’un jugement du 6 prairial an 1 0 , qui a
confirm é une vente à fonds perdu , faite h l’ascendant
d’un successible. Samuel Dalau avoit vendu tous ses biens
a M arie B o n n a u , veuve D a la u , sa belle-sccur, moyennant
une rente viagère. Samuel Dalau n’avoit point d’enfant,
et les enfans de M arie Bonnau , ses n e v e u x , étoient du
nom bre de ses successiblcs. L es autres héritiers atlaquoient
celle vente de nullité; ils se fondoient sur la disposition
de l’art. X X V I du la loi du 17 nivôse; ils rappcloient
�( 21 )
toutes les autorités qu’invoque le cit. D e ja x , et ne manquoient pas de dire que les arrêtsavoient toujours confondu
le père avec le fils, d’après la maxime : P a t e r et f û i u s
nna eadem quc persona. L e tribunal d’appel de P oitiers,
sans égard pour cette m axim e , avoit validé la vente :
pou rvoi en cassation; e t , com m e le tribunal de cassation
apprend qu’on doit restreindre les lois proh ibitives, il
est à propos de rappeler les motifs qui l’ont déterm iné
y rejeter le pourvoi.
« Considérant que l’art. X X V I de la loi du 17 nivôse
» an 2 ,■est p ro h ib itif, et ne peut par conséquent s’éten» dre d’un cas à un autre.
» Considérant qu ’il ne com prend que les successibles
» et leurs descendans, et que s’il y a quelques i n c o n v é » niens de ne l’a vo ir pas éte n d u , soit aux descendans,
» soit à l’époux en com m unauté avec le successible, ou
» avec les descendans du successible, il y en auroit encore
» davantage, à c r é e r , sous le prétexte d’an alogie, des
» prohibitions que la loi n’a pas établies.
» Considérant que créer ces nouvelles prohibitions, ce
» seroit ( quelque justes qu ’elles puissent être ) entre
» prendre sur l’autorité législative ; ce q u i , dans l’espèce,
» seroit d’autant moins pardonnable, qu ’il n’y avoit pas
M de question plus controversée avant la loi du 17 nivôse,
M que celle de l’étendue des prohibitions : d’où il suit quç
t e s t en connoissance de cause que les législateurs l o n t
M restreinte expressément aux successibles et à leurs desM ceudans.
a Considérant enfin qu ’ il ne peut pas
yaVoir ouverture
» a cassation d’un j ugement auquel on ne peut faire d’autre
�(
22
)
» reproche que d’etre conform e à la lettre de la l o i , etc.
T els sont les véritables principes en matière de p ro h i
bition. Cette décision de l’autorité normale doit servir
de règle invariable en cette matière. Il en résulte que
R o b e rt Croze - Gizaguet n ’étoit pas personne p ro h ib é e ,
quoiqu'il fût r é p o u x de la descendante du successible ;
qu ’il p ou voit traiter, acquérir d e là dame v e u v e T a r te l:
e t , en écartant aussi victorieusement la prohibition , on
fait disparoître toute idée de simulation ou de déguise
ment du contrat.
- X/es conventions doivent être généralement exécutées:
tous les efforts des tribunaux doivent tendre à valider
les actes plutôt qu’à les ann uller, U tp o tiù s a ctu s v a le a t,
qucim u t y erea t. N ulle présomption de fraude dans la
vente dont il s’agit: celle qui a si fortement touché R i c a r d ,
la m ort prochain e du v e n d e u r , ne se rencontre pas dans
l’espèce particulière , puisque la dame T artel a survécu
quatre ans à cette vente. E t s’ il falloit annuller tous les
contrats qui portent quittance, il faut convenir qu’il n’y
auroit plus rien de solide ni de certain parmi les hommes.
Dans les mutations actuelles, presque toujours les con
trats portent quittance , quand bien m êm e le prix ne
scroit pas entièrem ent payé. O n y supplée par des effets
ou des reconnoissances particulières, p o u r éviter de plus
grands droits.
Ici le p rix principal n’est pas e x o rb ita n t, et ne choque
en aucune m anière la vraisemblance. D e quel droit le
cit. D eja x voudroit-il scruler la solvabilité ou les res
sources du cit. Gizaguet ? N est-il pas notoire qu ’il appartenoit à une famille rich e, q u ’il avoil uu patrimoine con-
�C 23 )
sid érable, un em ploi dont les appointemens étoient de
3,ooo francs par ann ée? ne sont-ce pas là des ressources
suffisantes p ou r payer une somme de 2Ô,ooo francs? pourroit-on , sur des prétextes aussi légers, dépouiller une
famille , des o rp h elin s, d’un bien légitimement acquis ?
quiconque oseroit le penser , n’auroit aucune idée des
principes du droit et de l’équité.
,
L e cit. D eja x , dans son aveu g lem en t, va jusqu’à cri
tiquer les intentions libérales et bienfaisantes de la dame
T a r t e l; il rappelle avec affectation ses dispositions anté
rieures et subséquentes : p ou rqu oi a - t - i l oublié celles
dont il a été l’o b je t, et dont il étoit si peu d i g n e , puis
q u ’il attaquç la m ém oire de sa bienfaitrice ? N ’a-t-il pas
reçu d’elle , en se m a ria n t, une somme de 6,000 francs ,
avec tradition réelle ? tandis que les libéralités faites au x
autres ont toujours été grevées de l ’usufruit envers la
donatrice.
P o u rq u o i n ’a-t-il pas dit qu’il étoit donataire universel
de deux de ses o n cle s, qu ’il a profité exclusivement de
leurs d épouilles, et que la dame D albin e , sa s œ u r , en
a été p r iv é e ; que par ces donations il a tro u vé le moyen,
de r é u n ir , en majeure partie , les biens de J u lie n , son
o n c le , p rem ier du n o m ? Il a craint sans doute de justes
reproches d’avidité , lorsqu’il se m ontre aussi jaloux de
ce que sa sœur a reçu la récompense des soins les plus
tendres et les plus assidus. Dans son hu m eur in q uiète,
il va jusqu’à reprocher les quittances et la décharge que
1Q dame ve u v e T a rtel a données à sa nièce pour la gestion
de ses biens ou la perception de ses
r e v e n u s.
T artel devoit-elle quelque chose sur
ses
Mais la dame
revenus au cit.
�CH )
#
D ejax ? n’étoit-elle .pas au moins la maîtresse d’en dis
poser à son g r é ? Si la dame D albine a pris la précau
tion de se faire donner une décharge, c’est q u ’elle avoit
la procuration de sa tante, et qu ’elle devoit crain d re,
avec raison, que son frère lui demandât com pte de son
m a n d a t; mais on ne voit rien là que de très-ordinaire.
L a dame T artel a pu dissiper ses revenus com m e ses capi
taux , sans que personne eût le droit de critiquer sa con
du ite; elle en a fait tel em ploi que bon lui a sem blé; et
ce n est pas la p rem ière fois que des collatéraux avides
ont été trompés dans l’espoir qu ’ils avoient de trouver
des capitaux ou des deniers à la m ort de celui dont ils
convoitoient la succession.
L a coutum e de N orm andie ne les leur a pas fait rendre;
et l’article C C C C X X X I V , quia servi de base à un jugem ent
du tribunal d’appel de R o u e n , rapporté au m ém oire
du cit. D ejax , ne reçoit aucune application à une suc
cession ouverte en droit écrit.
T esta m en t du 6 m essid or an 8.
L e notaire qui a reçu ce testament , en dé>ignant la
ville de B rio u d e , a-l->il dû désigner le département dans
lequel il éloit d om icilié? A -l-il dû faire mention du nu
m éro de sa p atente?
O n défie le cil. D ejax de citer
aucune loi qui o b lig e , à peine de n u llité, les notaires
d.; désigner leur département ou lu num éro de la pa
tente: ils n'ont m êm e jamais pratiqué cet usage, lorsqu’ ils
reçoivent dans les villes de leur résidence, et pour des
personnes qui y soul domiciliées. Lu désignation du dé-
parlem ent
�2 5
.
partement ne seroit utile q u ’autant qu ’ on recevroit un
*
(
}
,
acte p ou r un tiers étranger au département dans lequel
il transige ou fait un testam ent, parce q u ’il peut y a v o ir
des formes ou des règles diftérentes de tester d’ un dé
partement à l’autre : m ais, dans l'esp èce, cette mention
n ’avoit aucun bu t; e t , com m e l’ont o b s e r v é les premiers
juges, la désignation de la résidence à B rio u de étoit sans
Contredit suffisante. L es huissiers seuls sont astreints par
les lois à rappeler le n u m é ro de leur patente : les no
taires auroient dû être dispensés d’en prendre ; et la
nouvelle loi qui organise le n o taria t, les en dispense
expressément.
L e tém oin M o n tb rizet d ’A u v e r n a t , en signant sim
plem ent ¿ L u v e m a t, ne l’a fait que d ’après l’usage cons
tant où il est de signer ainsi; c’cst ainsi q u ’il a signé le
contrat de mariage de son frè re ; c’est ainsi q u ’ il a signé
tous les actes publics ou p riv é s , depuis q u ’il a l’exercice
de ses droits; et les intimés rapportent un acte de no
toriété qui le constate, et qui apprend m êm e qu ’il n*est
pas connu ni désigné sous d’autre nom.
O n a satisfait à tout ce qu’exige la loi qui veut q u ’on
prenne le nom de sa famille, en rappelant dans les qua
lités des témoins le p rénom et le nom de la famille du
témoin d’Auvernat.
L a parenté de ce témoin avec R o b e rt C ro ze-G iza g u ct,
ép o u x de la petite-nièce de la testatrice, n’est point une
incapacité •. F u r g o l e , des testament, chapitre I I I , section
I I , nom bre 1 0 , nous donne en principe que les parens
collatéraux peuvent être témoins aux testümens de leuré
parens, et qu’ on doit dire la m êm e chose des parons de
D
�l’ héritier; car le paragraphe X , aux instituts, de testam .
ordin. n’ exclut du tém oignage le père et les frères de l’hé
r itie r , q u ’autant q u ’il est en la puissance de son p è r e ,
et que ses frères sont aussi en la puissance de leur père
co m m u n ; à plus forte raison le parent du parent de l’hé
ritière p eu t-il être tém oin dans un testament.
L e cit. D e ja x n’insiste pas fortement sur ces singuliers
m oyens de nullité ; mais il se plaint de ce qu ’ en sup
posant ce testament valable, les prem iers juges n’ont pas
com pris dans la disposition de m oitié toutes les dispo
sitions faites antérieurement à la loi du 17 nivôse. C ’est
u ne erreur de sa p a r t ; et les prem iers juges ont sage
m ent restreint cette confusion aux dispositions faites de
puis la publication de la loi du 17 nivôse an 2.
P o in t de doute d ’abord p o u r les objets v e n d u s , qui
sont hors de la succession du testateur; et il doit en être
de m êm e p o u r les donations e n tr e -v ifs faites dans un
temps utile , parce q u ’une donation a le m êm e effet
q u ’une v e n t e ; elle dépouille le d o n a te u r, dès l’instant
m êm e : les objets anciennement donnés ne peuvent faire
partie d’une succession ouverte sous l’em pire des lois
nouvelles.
L e cit. D eja x a la prétention d’intéresser le public dans
]a décision de cette cause. O n ne voit pas trop com m ent
l ’ordre public seroit t r o u b l é , parce que le cit. D e ja x
n’auroit pas u ne portion égale dans la succession de sa
tante. Mais la société seroit b o u le v ersé e, si les fconventions des hom m es pou vo ien t être anéanties sous
des
prétextes futiles; si des ventes ou des mutations qu’il im
porte de faciliter et d’assurer ? pouvoient être annullées
�( 21 )
par des chimères ou des allégations de fraude. Ce seroit
porter atteinte au droit de p ro p r ié té , au droit le plus ch er
à l’h o m m e , de dispenser ses bienfaits, de récom penser le
m érite ou de p rotéger la foiblesse, si on s’écartoit jamais
du respect qu ’on doit avoir p ou r les volontés du défunt.
L e code civil nous rappelle sagement à des idées plus
saines, à des principes plus sages, en rendant aux testamens toute leur ancienne faveur. A u jo u r d ’ hui nous p ou
vons répéter cette m axim e des Rom ains : Q u id q u id legassit} lia lex esto !
PAGES
'
( de R io m ) a n c. ju r is c .
V A Z E IL L E ,
-RIO M de l'imprimerie de
L
a n d r i o t
,
avoué
.
seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — A u 11.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dejax, Agnès. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
donations déguisées
donations
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Dame Agnès Dejax, et le citoyen Pierre Dalbine, son mari, juge au tribunal d'arrondissement de Brioude ; Joseph Dalbine, Marie Dalbine, et Anne-Marie Dalbine, veuve de Robert Croze-Montbrizet-Gizaguet, tant en son nom que comme tutrice de ses enfans ; tous intimés : contre Julien Dejax, homme de loi, habitant de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au tribunal de cette même ville, le 6 messido an 10.
Annotations manuscrites
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1771-Circa An 11
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0228
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Vazeliettes (domaine de)
Rights
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Domaine public
Relation
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donations
donations déguisées
Successions
testaments
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******
PRÉCIS
,
T R IB U N A L
P OUR.
Côme- D amien
SPÉ C IA L.
EAYOLLE,
Accusé;
C O N T R E
J a c q u e s
J
’a
i
D
E F F A R G E S ,
P la ig n a n t.
des e n n em is, ils se cachent: un mannequin est l’ instrument de leur
animosité. L e s lâches n’attaqueraient pas ma vie , mais ils cherchent à m’ôter
l ’ h o n n e u r , parce que dans ce genre d’agression, toute représaille leur est
moins sensible, et que sur-tout ils sont plus à couvert. I l leur a été si aisé
de supposer quelques motifs d’intérêt personnel à un Hom m e totalement nul
et sans ressources, incapable de méditer Iui-mêmee ce qui a été fait sous son
nom.
v
Q u i d on c sè d éfend ra du soupçon d’ im p r o b i l é , q u a n d a v e c u n e fortune
au-dessus de mes b e s o in s , et après so ix a n te -d eu x ans d ’ une v i e sans r e p r o c h e j
j’ai la d ouleur de m e v o ir a ccusé d ’a v o ir v o l é 2,000 francs ; et à qui ? A D e f o rg es ! qui vit dans la p é n u r ie la plus e x tr ê m e ? A D e ffa rg e s q u i , depuis la
v o l-, a laissé passer sept a n s , q u a to r z e ans m ê m e sans s’ en a ppero evo ir.
C e u x qui connaissent l’accusateur et l’ accusé rougiront de penser que
c’ est moi qui suis accusé par Deffarges. ils croiront qu’ une transposition
de noms les abuse ; et leur indignation justificative sera le seul examen qu’ils
feront des détails relatifs à la misérable calom nie dont je suis un instant la
victime.
Aussi n’ est-ce pas pour eux que j’ écris. .J e n’ écris pas m ême pour mes juges ;
car en leur demandant la prison et venant me justifier a vec des pièces a u th en
tiq u e s , si j’osais douter de leur jugem ent, ce serait douter de leur conscience*
J ’ écris pour ceux qu i, ne me connaissant p a s , n ont pu que recevoir l’impres
sion désavantageuse qui résulte naturellement d une accusation de faux. L a
calomnie est expéditive et laconique ; uns justification est compliquée et
ennuyeuse ; mais ceux qui méritent que leur opinion soit comptée pour quelA
�( 2
)
que chose, se défient de l ’exagération du vu lgaire, sont en garde contre leur
propre ju g em en t, et se font un devoir de lire ce qui peut les désabuser.
C ’est donc à ceux-ci que je vais donner l’explication de ce qui a donné lieu
ou plutôt de, ce qui a fourni matière à la dénonciation signée Deffarges. J e ne
chercherai pas des moyens dans les lois et les auteurs. J e me contenterai de
laisser parler les faits 3 eux seuls me justifieront.
’
FAITS.
'
A n n e et Marie Tisseron sœurs, avaient épo u sé, l’ une le sieur C h a lu s ,
l’autre le sieur Laroche qui avait des enfans d’ un premier lit.
D e M arie Tisseron issurent M argueritte, Jean-Joseph et A m a b le Laroche;
c’ est cette dernière qui a épousé le sieur Deffarges.
E n 17^7 > J eai>-Joseph Laroche me vendit divers héritages venant de
M arie T iss e r o n , sa m è r e , parce que ces héritages se trouvaient voisins de
m es propriétés de St.-Amant ; il ne lui en revenait qu’ un tiers, et voilà ce qui
a am ené d’autres actes.
■
A u mois d ’avril 1789, j’acquis les droits de Margueritte L a r o c h e , dans les
mêmes biens provenant de M arie Tisseron.
1
Com m e Jean-Joseph Laroche avait vendu plus qu’il ne lui revenait dans
les immeubles de l’acte de 1787 , il y eut un traité entre l u i , Deffarges et m oi,
Comme représentant Margueritte Laroche. Jean-Joseph nous céda en indem-
c ité une terre et deux prés sis à Gondinangue.
,
Com m e encore là succession Tisseron devait au sieur L ad e y te une rente au
principal de 2,5oo fr. , qui devait être remboursée par nous trois, Laroche et
Deffargesme vendirentune moitié de terre et un petit jardin,plus quatre rentes
et l’effet d’une sentence de 1 7 7 g , à condition de rembourser M . Ladeyte.
Ces biens de Gondinangue étaient si peu de chose , si peu à ma bienséance)
que je cherchai aussitôt à m’ cn défaire ; un nommé Antoine B o y les demanda
en rente j l’acte allait en être p a ss é, et Deffarges était venu d’Aubusson à cet
e f f e t , à la fin de 1790. M ais qui eût voulu Deffarges pour caution? on ne vou
lait acheter que de moi. L ’acte n’ eut pas lieu.
E n 1791 , un autre acquéreur se présenta avec les mêmes propositions j
voulant en fin ir , j ’achelai alors de Deffarges sa moitié desdits héritages, par
acte du 4 mai 1 7 9 1 , reçu R o c h e et Piolet t notaires, moyennant une rente de
cinquante f r . , pour ne pas perdre le capital en cas d’ éviction ; et presqu’aussijôt je vendis le tout par acte notarié au sieur Tardif, juge de paix à St.-Amant,
a v ec ma seule garantie.
.
L e sieur C h a l u s , époux do M arie Tisseron avait retiré des héritages d ’un
üomiaé G v o le t, eu 1 7 7 7 , pour l’acquit d ’uno créance cotnmuno aux deux
�( 3 )
sœurs Tisseron. D ’ autres créances étaient hypothéquées sur un doroaino
appelé de L o b é n i c h e , acquis par moi j j’avois donc intérêt de dégager mon
Lien de ces hypothèques.
■
C e fut le sujet d’ un traité du z i thermidor an 5 , acte si peu destiné à être
caché qu’ il fut fait à O lm e t, en présence de plusieurs persounes.
O n conçoit aisément qu’en traitant avec D e flarges, je ne devais pas faire
un acte partiel , et laisser encore mes intérêts en commun avec un homme qui
m ’entravait dans tout ce que j ’avais à fa ir e , et q u i , toujours aux expéd ieu s,
m ’ennuyait encore plus.
I l fut donc convenu que Deffarges me céderait sa portion dans plusieurs
créances, plus son tiers dans les immeubles retirés par Chalus en 1 7 7 7 ; plu*
enfin le capital de la rente à lui due par l’acte de 1791. L e prix en était con
venu à 2,5 oo francs.
,
, M ais cet acte devait naturellement être divisé en deux parties ; car je vou
lais distinguer les créances qui m’intéressaient personnellement} et Deflarges
mit fencore cette circonstance à profit.
,
C o m m e l’acte se réd ig ea it, et que j’allais écrire 5oo francs pour le prix de _
ces créances, Deffarges éleva des difficultés, voulut une augmentation 5 cette
somme de 5oo francs fut laissée en blanc , et l ’acte fut continué. L e second
prix , fixe a 2,000 francs, 11’eut pas de difficulté, dès qu’il y avait un article
en blanc.;
■'
.
,
,
,
Quand l’acte fut terminé et bien l u , quand il n’y manqua que cetl®
somme et l’approbation, nous traitâmes sur le prix en blanc: il fut porté à
. 600 francs. L e blanc fut donc rempli après coup. L ’approbation le fut dans
la même m inu te, et cette approbation est ainsi conçue:
•
N o u s so u ssig n é s . . . . approuvons Les présentes et les fe u ille ts
d essu s,
D
des
B on p our ce que
a u t r e s p a r t s . F a it d o u b le , etc ........... F a y o l l e ............
effarges.
-
A u moyen de cet a c t e , le sieur Deffarges ne devant plus rien de la créance
L a d e y t e , il fut écrit aussitôt q u ’il en était tenu q u ille , sur la quitauce
m êm e du remboursement.
Com m e je ne cachais pas celte acquisition , j’en fis usage aussilôt. L e i 3 floréal an 5 , j’assignai le sieur Chalus en partage.
J e nommai
.
pour mon expert le sieur M a g n in , beau-frère du sieu*
Deffarges.
.
L e 21 thermidor au 5 , par acte notarié , ce partage fut fait.
L e 9 fructidor an 5 , par autre acte n o ta rié, je vendis mon lot au sieur
Ci rôle t.
"V o ilà tout ce qui s’ est passé.
'
.
.
,
A
2
�( 4 )
D É N O N C I A T I O N ,
M O T I F S ,
CHARGES.
J ’ étais donc propriétaire depuis 1 7 9 1 , et depuis l ’an 5.
J ’avais revendu en 1791 , et en l’an 5.
Depuis ces diverses époqu es, DeiFarges 11’avait réclam é de personne ni
créances,, ni ren tes, ni immeubles.
Son enfant meurt en l’an 1 0 , et les collatéraux réclament la succession.
DeiFarges la revendique comme ascendant. Il y a procès.
L e sieur Magnin , un des collatéraux , Le même q u i f u t expert en
L’ an 5 , se souvenant que j’avais fait des actes avec DeiFarges, m’ écrit le
16 messidor an 1.0 , pour demander des renseignemens sur ce qui s’ est passé.
J ’avais perdu de vue tous ces actes auxquels je n’avais ou ne croyais
plus avoir d intérêt. J e les cherche pour en en v o y e r copie au sieur Magnin ,
n ’ayant en vue que de l’ obliger.
J e réfléchis que ces débats peuvent me susciter un procès à m o i- m ê m e ,
et j ’envoie au contrôle de ma résidence l’acte sous seing privé de l’an 5.
E n l’an 1 1 , le sieur Magnin paraît désirer une expédition de cet acte
de l’an 5 , et pour cela il fallait le déposer chez lin notaire. J e le dépose,
et qui choisis-je pour ce dépôt de son double ?
C ’est le sieur Crosinarie, notaire à A m b e r t , homme de confiance du sieur
DeiFarges, son d éfen seu r dans le procès contre le sieur Magnin et autres
collatéraux.
Cet acte et celui de 1791 allaient être funestes au sieur Deffarges ; car
s’ attendant à être exclu de la succession de son fils par les collatéraux,
il demandait au moins l’ usufruit coulumier.
Ces deux ventes en faisaient prononcer la privation.
I l n’a plus qu’ un parti violent à prendre. Il examine à tant de reprises
l ’acte de l’an 5 , qu’il croit avoir saisi un trait de lum ière; il va aux en-*
quêtes et se perd en recherches ; il demande des conseils ù tout le m o n d e ,
et tout le monde ne lui donne pas ceux de la prudence ; il part pour Rioni ;
il dénonce.
I l eût bien voulu ne dénoncer que 1 acte de Lan 5 ; mais le besoin de
sa cause exigeait l’annullation des deux. Xl>n conséquence il se prétend
trompé , « i.° p ar L'acte de 1791 ; . . . il est f a u x , il n’a jamais v e n d u .. . .
« Si la signature e x iste , elle est du fait de 1 auteur du faux ; . . . 2.0 par
•f L'acte de L’an 5 ; . . . il n’est p a s double ; . . . il est dit 600 francs comp
« tant, quoique cette somme fût compensée en partie avec la créance du
« sieur Ladeyte.
J ’ai intercalé
une feuille au milieu , l’acte n’ en ayant
« d’abord qu’ u n e . . . . Cela se prouve par un extrait de l’enregistrem ent,
�(5)
« où on voit que le receveur n’a perçu que 12 f r . , ce qui n’ est le droit
« proportionnel que d’ une vente de 600 francs».
V o ilà sa dénonciation ;'il y joint une liste de quatorze tém oin s, et écrit
au b a s , « que les trois dorniers déclareront que le 2,1 thermidor an 5 , il
« n’avait que 6 francs dans sa poche (après l’acte ) , et qu’il n’ eut pas de quoi
« payer i 5 fr. que je lui gagnai à la bête ombrée ; ce qui prouve que je
* ne lui avais pas compté 600 fr a n c s , et cependant l’acte avait été passé
« devant eux ».
Ces trois tém oins , in d iq u és particulièrem ent par D effa rg es , ont en
¡effet d é p o s é , mais de manière à prouver que s’il y a un / a u x , c’e s t . . . .
dans la d én on cia tion .
D eux de ces témoins ( l e 2.e et le 4.“* de l’in fo r m a tio n ), ont v u faire
l’a c l e d e l ’an 5 ; . . . il a été fait en d e u x feuilles ; . . * le prix a été con
venu devant eux à d e u x m ille et quelques l i v r e s . . . . Il fut souscrit des
effets par m o i ; . . . . il fut fait d e u x d o u b l e s . . . .
L ’autre témoin in d iq u é ( l e 3.6 de l’iuformation ) , frère de D effa rg es ,
n’ a pas été témoin de l’a cte; . . . . il n’a assisté qu’au jeu , où je p a y a i,
{lit-il , p o u r D effarges. . . . Son frère lui dit n’avoir vendu qu’ un petit o b je t,
moyennant cinq cents fr a n c s.
L e s deux nplaires de l’acte de 1791 ont été entendus ; l ’ un d’ e u x , notaire
en second , n’ était pas à l’acte , c’est l’ u sa ge . M a i s R o ch e , notaire recevant,
( l e i o . e de l’ inform ation), déclare se rappeler très-bien que Deffarges est
venu chez lui en 1791 , faire cette vente.
Toutes les autres dépositions sont absolument insignifiantes.
V o ilà les charges; où plutôt, voilà la plus claire des justifications.
#
R É F L E X I O N S .
«
Il ne s’agit plus de la partie de la dénonciation qui concernait l ’acte du
4 mai 1791.
L e sieur Deffarges qui accusait cet acte de f a u x , qui prétendait que sa
signature et celle du notaire étaient fausses, est reconnu avoir signé. L e
notaire est aussi reconnu avoir signé.
L ’acte a été contrôlé à Cuulhat en 1791. L e s registres du contrôle ont
été produits.
Aussi l’acte d’accusation ne porte pas sur celle vente.
Celte première dénonciation est donc prouvée calomnieuse.
N ’aide-t-elle pas à juger la seconde ?
Deffarges m ’a fait interroger. A mon tour je l’ interroge.
�( 6 )
Pourquoi a-t-il menti en disant qu’ il n’ajamais vendu ? I l a vendu. Il est
forcé de ne plus le nier.
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que l’acte n’avait pas été fait double? I l a
signé qu’il l’ était. Il a montré son double à Am bert.
Pourquoi Deffarges a-t-il dit à son f r è r e , le m ême jour de l’a c t e , n’avoir
vendu que pour 5oo fr. Il dit aujourd’hui que c’ était 600 fr. I l reconnaît
la partie de l’acte où est écrit le prix de sôa~, cents fr a n c s .
Pourquoi Deffarges a-t-il dit que ces 600 fr. étaient com pensés avec sa
portion d e là créance L a d e y te ? Et pourquoi a-t-ihdit au procès qu’il lui fut
fait un b illet de Soo francs, qu’il a cédé h G ateijrlas
V o ilà donc au
moins 1,100 fr. reconnus.... L e prix n’ élait donc pas seulement de 600 fr.
I i acte avait donc plus que la première feuille.
'
P o u rq u o i Deffarges a p p r o u v a i t - il les feuillets des autres-parts ? 1\ y
a v a it donc plus d'un f e u i l l e t , -autre que c elu i de l’approbation.
Pourquoi Deffarges, propriétaire d ’ im m eubles, n’a-t-il jamais réclamé
ni ses propriétés, ni les jouissances, ni aucuns fermages depuis l’an 5 ?
Pourquoi m ême a-t-il laissé le sieur T a rd if en possession paisible depuis
1791 jusqu’à 1804, d ’im meubles dont auparavant lui Deffarges était si soi
gneux à percevoir les fruits ?
Pourquoi Deffarges ne s’est-il jamais mis en peine d e p u is, de savoir qui
payait les im p ô ts, ni de se faire cotiser s’il était propriétaire.
Pourquoi n’a-t-il jamais assigné ni averti les débiteurs de toutes ses rentes,
et m ’en a-t-il laissé rembourser plusieurs 3 sans se mettre sur les rangs pour,
toucher.
Pourquoi m ’ a-t-il laissé partager avec Chalu s, en l’an 5 , des immeubles
qu’il ne m’aurait pas vendu?? Comment ce partage s’ est-il fait avec L'oncle de
Deffarges par Le beau-frère de Deffarges, sans queD effargesl’ait su?.. Il habile
à trois lieues des biens partagés. J ’habite à plus de dix lieues de distance.
Si le sieur Deffarges s’ était fait toutes ces questions, ou si on les lui eût
fa ite s, il n’y aurait pas de dénonciation.
S ’il avait réfléchi que rien ne m’ obligeait à délivrer un acte co n som m é,
et sur-tout à le déposer en m inute chez son défenseur, dans le procès pat
lequel l’acte était p ro d u it, il n’y aurait pas de dénonciation.
Si DefFarge avait consulté les trois témoins qu’il indiquait comme devant
m e condam ner ^ en rappelant une partie de cartes, il aurait appris d’eux
qu ’ils avaient une mémoire moins fu tile, ils 1 auraient dissuadé; et il n’jr
aurait pas de dénonciation.
Si , pour parler plus ju ste, il n’y avait pas eu de demande en privation
d’ usufruit fondée sur ces deux a ctes, il n’y aurait pas de dénonciation.
Si le sieur Dellarge n'eût pas été aveuglé par l’impulsion d ’autrui et par
�(7 )
son i n t é r ê t , il aurait réfléchi que je n’ ai eu nul intérêt à être son acqué
reur , on à ne l’ ctre pas ; puisque je suis exposé aux évictions des héritiers
de son fils , et que je n’ai contre lui aucune g ara n tie, aucune ressource.
N o n , a u c u n e, pas même pour la ven g ean ce; pas m êm e pour la répa
ration du tort qu ’ il me cause.
J e sens bien qu’ un Deffarges ne portera aucune atteinte durable à m a
réputation, mais je ne trouve pas moins bien d u r , à mon â g e , de con-,
naîtré p a r Lui le séjour des prisons.
•
Quand un hom m e nul entreprend de louer ou de rendre se rv ice , per
sonne ne s’aperçoit de sa tentative. I l est triste de penser qu’il est plus
heureux quand il veut nuire.
FAYOLLE.
A R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J .- C . S A L L E S .
�
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Factums Marie
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Fayolle, Côme-Damien. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Fayolle
Subject
The topic of the resource
successions
rentes
usufruit
jeux de cartes
faux
Description
An account of the resource
Précis pour Côme-Damien Fayolle, Accusé ; contre Jacques Deffarges, plaignant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1787-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0225
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0318
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Amant-Roche-Savine (63314)
Rights
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Domaine public
Faux
jeux de cartes
rentes
Successions
usufruit
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c8c2df25a21c58ed0c023e0767e7c757
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P R É C IS
C O U RS
D’APPEL.
POUR
SÉANTS
A RIOM;.
D am e A n n e L A G U L H E , veuve de F r a n çois - X a v i e r C E L L IN -D U M O N T E L , appe
lante ;
C O N T R E
M onsieur J
oseph
C O R N U D E T ,
membre
du sénat conservateur, et madame J e a n n e
C E L L I N , son épouse , autorisée en ju s tic e , intimés.
LA dame v e u v e D u m o ntel a eté traduite devant les
tribunaux par sa fille et son gendre. Cette provocation
lui fait éprouver un sentiment p enible, L es querelles.
A
�.
.( 2 >
.
.
de famille laissent toujours des traces d ’animosité et
d’a ig re u r, qui s’effacent difficilement.
P ar quelle fatalité la dame Dum ontel se voit-elle forcée
d’entrer en lice avec sa fille unique ? Des prétentions
exagérées remplacent ce tendre resp ect, ces soins touclians qu’une fille doit à sa m ère, et qui consolent des
m aux de la vie.
L a dame Dum ontel ne veut pas descendre jusqu’aux
reproches ; elle avoit même pris la résolution de ne rien-:
publier pour sa défense : m ais, inform ée que'’ sà^fhle-et
son gendre avoient fait circuler un m ém oire , elfe se.croit
dans la nécessité de présenter un extrait des réglemens
de fam ille qui ont fait naître le procès’, et
doijcter *
une idée de ses m oyens, qui recevront un plus grand
développem ent lors de la plaidoirie.
.FAITS.
'
L e 20 août 1765 la damé L agulhe a épousé le sieur
D um on tel; elle s est constitué en dot tous ses biens
échus et à échoir. Il a été stipulé un gain de survie
de 20000 if~, 2000
de bagues et joyaux , des habits
de d e u il, et un douaire de 600
par année.
L e sieur D u m on tel, légitim aire, avoit tout au plus
alors 40000^ de foi lune. Bientôt après il lui échut
une succession qu’il accepta indiscrètement sans en conïioître les forces. Assiège de demandes hypothécaires et
personnelles de la part des créanciers de M . V in p fa u d ,
dont il s’étoit porté h é r itie r , les amis et les conseils
de madame D um ontel l’engagèrent à recourir au remède
de la séparation de biens.
�( 3 ),
..
.
Cette séparation fut prononcée par une sentence de
la sénéchaussée d’A u vergn e , du 20 juillet 1779. L e
m ari est condamné à restituer à sa fem m e, 1°. 26637
5o centimes qu’ il avoit reçus d’elle;, suivant une reconnoissance du 28 janvier de la même année ; 20. celle de
12950
pour vente d’immeubles faite par le mari.
Il falloit encore trouver d e s, moyens pour em pêcher
la saisie des revenus. M . D um ontel con sen tit, au profit
de sa fem m e, un bail de ferme qui ne com prenoit cepen
dant qu’une-foible portion de ses biens. Son domaine
de Chanteloube , le domaine de B rughail et le pré de
Combes ne faisoient point partie de ce bail.
L a dame D um ontel n’a eu qu’une fille de son mariage.
• U ne fille unique qui a l ’espoir d’une fortune considé
rable est toujours fort recherchée. M . Cornudet obtint
la préférence. Son mariage est du 17 avril 1787. Madame
D um ontel institue .sa fille son héritière universelle, sous
la réserve de 5o,ooo
: elle lui constitue en avancement
d’hoirie tous les biens immeubles qui lu i appartiennent
dans le lieu de C h astrix, elle n’en excepte que les rentes
foncières ou pécuniaires qui dépendoient des biens qu’elle
possède dans ce lieu -, elle lui délaisse encore au mên e
titre l'eiTet d’une créance en p rin cip al, intérêts et fra is,
qui lui étoit due par la succession d’un sieur M orin
du Sauzet.'
Cette institution et le délaissement sont faits à la charge
p a r la dame Cornudet de payer au sieur D um ontel, son
père, dans le cas où il survivroit a la dame son cpouse,
une pension viagère et annuelle de 2400
mais cette
pension n’étoit payable qu’en cas d’incom patibilité entre
A 2
�'£ 4 )
’là fille et le p ère; et dans le même cas madame C or
nudet est obligée de laisser à son père un m obilier con
venable. •
L e sieur D u m o n tel, au moyen de cette pension, ne
*se réserve aucun usufruit; elle doit lui tenir lieu de tous
gains n uptiaux qui lu i sont a cco rd és, ou p a r son con
t r a t , ou p a r la-Coutum e.
P a r une autre clause, les sieur et dame D um ontel
délaissent dès à présent la jouissance de tous les biens que
le sieur D um ontel pouvoit avoir dans le lieu de Chastrix
ou ailleurs, quelque part qu’ils soient situés, ensemble
les contrats de rentes foncières et constituées , actions
m obilières ou im mobilières généralem ent quelconques,
-«‘ans autre réserve-que de la maison que les sieur et dame
D um ontel habitoient dans la ville d’A rd e s, du domaine
■du FromentaL, et d’une rente due par la dame Savignat;
desquels objets réservés, e s t-il dit., la dame D um ontel
•-contiauera de jou ir en dim inution de ses créances contre
son m ari.j^ aux im putations de d r o it, et en exécution
du bail à ferm e que son mari lui en a consenti / le q u e l,
•quant au -dom aine, accessoires, maison et ren te, sera
exécuté suivant sa form e et teneur.
<"Ce délaissement de jouissance et avancement d’hoirie
^sont faits par les pere et m ère, a condition que les époux
acquitteront, comme ils s’y obligent, en décharge du
T-aieur D u m o n te l, la somme de 10800^" de dettes chixograpluiires ou hypothécaires personnelles au sieur
;D u m o n tc l, ou rt la daine son epouse , pour s’être obligée
personnellement et conjointement avec lui.
<
sM. -Coruudet est aussi obligé d’acquitter son beau-
�'( -s :)
f
_
¡père, envers son procureur ,a R iora , des dépens qui
.peuvent lui être dûs sur une action hypothécaire qu’il
-poursuit contre les débiteurs de la succession des sieurs
D u m on tel et Vinpfaud.
’
.
- L a dame D um ontel se -réserve Vhypothèque q u ’elle
•à su r les biens de son m a r i, soit en vertu de son con
t r a t de m a r ia g e s o it en vertu de la sentence de sépa
r a tio n portant liquidation de ses d ro its, sans aucune
-novation n i dérogation. • .
,
- E lle -subroge cependant, sans aucune garan tie, les
-époux à cette .h yp o th èq u e, p o u r , sûreté de la jouis
sance des fonds <que son m ari leur a délaissés:, afin qu’en
;cas de trouble de la part des créanciers de son m ari,,
¿ils se servent de cette hypothèque-, de m anière cepen
dant que-la jouissance réservée par la dame Dumontel,,*
¿-sur. les biens de son m ari, ne soit pas diminuée.
• ,
Les père et m ère consentent que M . Cornudet aliène
:tous les immeubles réèls ou fictifs dont-la jouissance vient
de lu i être délaissée v qu’il en dispose à titre o n é re u x , en
tout ou en partie, par un ou plusieurs contrats, à ’tels
p rix et conditions qü’il jugera l e plus convenables; l’au
torise à traiter-et transiger sur les actions mobilières ou
im m obilières comprises dans le délaissement, <et de la
m anière qu’il jugera la plus;convenable et la plus avan
tageuse ; qu’il fasse telles .remises que l’ insolvabilité, des
•débiteurs ou l’incertitude de l ’événem ent d un procès
■
p o u rro n t, de bonne fo i, lui faire -juger . convenables,
■•sans qu’en aucun cas sa f e m m e , ou les siens, puisse se plain
dre des ventes ou traités qui in terviendront, soit pour lè
¿prix,, -soit pour, les conditions, ni qu’elle puisse revenir
�• S 6),
contre les ventes ou traités, prétendre aucuns dommagesintérêts contre son zn ari, cette clause faisant partie ex-^
presse des conventions du mariage.
M . Coi'nudet est te n u , conjointem ent et solidaire
ment avec son père , d’em ployer les deniers qui pro
viendront des traités ou aliénations , par préférence, à
l ’acquittement des dettes personnelles du sieur D u m on tel,
dont les époux ont été chargés.
Dans le cas où M M . Cornudet , père et fils , n’eus*
sent pas fait em ploi du reste des deniers qui provien
dront des ventes on tra ités, et que restitution de la
dot ait lie u , ils seront tenus de rem bourser ce qu’ils
auront reçu des deniers, à raison de 2 0 0 0 ^ par an ,
avec l’intérêt du surplus des sommes à restituer ; mais
ils doivent prélever les frais et dépenses qu’ils auront
été obligés de faire pour la poursuite ou recouvrem ent
des effets.
Cette clause de r e m p lo i, au surplus , n’est ajoutée
que pour expliquer la manière dont M M i Cornudet père
et fils pourvoient en disposer-, les acquéreurs sont dispensés
de veiller ù cet em ploi ou de l ’exiger ; les sieur et dame
D um ontel et leur fille ne prétendent d’action que sur
les biens des sieurs Cornudet.
Enfin , il est stipulé que la pension et logement réservés
au sieur D um ontel seront insaisissables pou r quelque
cause que se so it, même par les créanciers du sieur
Dum ontel.
L e sieur D um ontel père a vécu jusqu’il la fin de 1787.
L e deux janvier 178 8, madame Cornudet a obtenu des
lettres de bénéfice d’in ven taire, et u’a accepté la succès-
�( 7 ) .................
sion de son père qu’en la qualité d’héritière bénéficiaire,
L a dame D u m o n t e l à son tour a poursuivi contre sa
fille , en cette qualité d’héritière bén éficiaire, la liq ui
dation des gains qui venoient de s’ouvrir par sa survie
à son époux : elle a ob ten u , le 28 avril 1789 > une
sentence par défaut, faute de plaid er, en la sénéchaussée
d’A u v e rg n e , qui déclare son contrat de mariage exécu
toire contre la dame Cornudet, en sa qualité d’héritière
bénéficiaire de son p è r e , et la condamne au payem ent,
i ° . d’une somme de 20 00^ pour bagues et jo y a u x ;
2°. de celle de 20000 ^ pour gain de survie ; 30. de
celle de iô o o ^ " pour habits de d e u il, e t , en fin , de
celle de 600 1i~ par année pour sa pension viduelle.
Il est bon d’observer que cette sentence ne frappe
précisément et exclusivem ent que sur les droits qui ve
noient de s’ouvrir en faveur de la dame D um ontel \
qu’il n’y est nullem ent question des sommes dont la
condamnation avoit été prononcée par la sentence de
séparation de 1779*
L a dame D um ontel n’avoit point exercé son action
dans des vues hostiles ; elle vouloit être en règle sur ses
droits : mais elle se borna à obtenir celte sentence qui
n’étoit jamais sortie du g re ffe, et qu’elle 11’a fait expé
dier qu’après l’oppositiûn *, elle n’a même pris aucune
précaution conservatoire qui pût gêner son gendre et sa
fille dans leurs spéculations ou leurs transactions. Q uel
a dû être son é t o nn e me nt , lorsq u e, le i 5 brum aire an
11 , 14 ans après l’obtention de cette sentence, elle a
reçu une o ppo sit io n, de la part de son gendre et de sa
fille , à cette même sentence, aycc assignation au tri—
�( 8 y
bunal d'Issoire pour procéder 'su r cette opposition ? ;
L e môme jo u r, i 5 brum aire, M . et M c1e, Gornudet
ont 'fait une inscription j au bureau des hypoth èques, sur
les biens de .leur défunt père et beau-père , pour une
somme de 13600
qu’ils prétendent avoir payée en
décharge de cette succession; de sorte q u e, plus soigneux
que la dame D um on tel, ils ont acquis une hypothèque
antérieure à la sienne ,, et apprennent au moins les
sommes dont ils se prétendent créanciers.
D evant le tribunal d’Issoire les sieur et dame Cornudef,,
en concluant à être reçus opposans à la sentence du 28
avril 1789-, ont soutenu, que la dame D um ontel devoit
être déboutée de toutes ses demandes. Seulement ils ont
consenti que- son contrat de- mariage fût déclaré exécu
toire contre la dame G ornudet, en sa qualité d’héritière
bénéficiaire de son père ; mais ils ont voulu en l’estreindre
l’exécution sur les biens paternels dont la dame D um ontel’
s’étoit réservé la jouissance par leur contrat de m ariage,
si m ieux elle n’aim oit leur abandonner le quart de tous
les biens qui lui appartenoient à l’époque du mariage de
sa fille , d’après l’article 6 du titre 14 de la Coutume
d’A u v e r g n e , avec restitution des jouissances depuis le
décès du sieur Dum ontel.
M . et M cl'c. Cornudet fondoient cette singulière pré
tention, i ° . sur la circonstance que la dame D um ontel
leur m ère avoit délaisse , conjointement avec son m a r i,
les biens propres î\ ce dernier ; 20. sur ce q u’elle avoit
renoncé , par le contrat de mariage de sa fille, à l'exer
cice de son hypothèque sur les biens délaissés , et avoit
mi,me subrogé sa fille ¿l cette môme hypothèque.
M..
�( 9 ) .
M . et M<ï<v Gornudet ajoutoient' que Îe sieur D u-,
montel étoit m ort insolvable. L a sentence de séparation
prouvoit cet état d’insolvabilité ; dès-lors la dame D u m ontel étoit ten u e, aux termes de l’article 6 du titre 14
de la Coutume , de doter sa fille jusqu’ù concurrence du
quart de ses biens : elle devoit d o n c , ou se désister de.
ses prétentions, ou abandonner à sa fille le quart de tous,
les biens qu’elle possédoit à l’époque du mariage.
.
L e jugement du 2 therm idor an n , rendu au tribunal
d’Issoire, a adopté ce système dans son entier.
.
M . et M de. Gornudet - ont été reçus opposons à la
sentence par d éfau t, du 28 avril 1789 , en ce que , par
ce ju gem en t, tous les biens immeubles ayant appartenu
au sieur Cellin ont été affectés et hypothéqués au paye
ment des gains nuptiaux et douaire , et en ce que fes
biens immeubles délaissés par le sieur Cellin à M . Cor-,
nudet et à sa fem m e, par leur contrat de mariage , n’en
sont pas exceptés. Faisant droit sur cette opposition , les
biens délaissés sont déclarés affranchis de cette hypo
thèque : la dame D um ontel est d é b o u té e , quant à c e ,
de sa demande hypothécaire; il est ordonné qu’au résidu
le jugement sortira effet, sans dépens.
•
L es motifs de ce jugement sont très-nom breux, O n a.
posé deux questions principales. « L a première est de.
» savoir si la dame Cornudet peut être tenue personnel
» lem en t, on qualité d’héritière par bénéfice d’ inven» taire de son père , au payement des gains et avantages
» m atrim oniaux réclamés par la dame Dum ontel.
>3
O n exam ine,'dans la seconde question , si les biens
» immeubles dépendais de la succpssion paternelle, qui
*
B
�C 10 )
>5
»
»
»
ont été délaissés en avancement d’h o irie , doivent être
affranchis de l’hypothèque éventuelle que la dame
D um ontel avoit sur ces mêmes biens pour le paye
ment de ses gains et avantages matrimoniaux,
» O n subdivise ensuite cette seconde question en point
» de fait et en point de droit. Dans le fa it,la dame veuve
» Dum ontel s’est-elle départie de son hypothèque en
» faveur de sa fille ?
» Dans le d ro it, ce département fait sous la puissance
» maritale est-il valable?
33 Sur la pi’emière question , on reconnoît que la
>3 dame C o rn u d et, en sa qualité d’héritière bénéficiaire,
» est tenue des dettes de son p è r e , jusqu’à concurrence
j> des forces de la succession.
n Sur la seconde, considérée dans le point de fa it,
»
33
»
»
»
»
la dame veu ve Cellin a délaissé, conjointement avec
son m a ri, tous les biens meubles et immeubles de ce
d e rn ier, sauf la réserve de quelques objets. Ce délais
sement de la part de la dame D um ontel lui impose
au moins l ’obligation de garantir de toutes actions
provenantes de son fait les biens qu’elle a délaissés.
» Ce délaissement n’a pas été gratu it, puisqu’il est fait
» sous la condition que la dame Cornudet et son m ari
» payeront les dettes personnelles du sieur Dum ontel.
33 L a réserve faite par la dame veuve Cellin de la
» maison d’A r d e s , du domaine de F rom en tal, et de la
» créance de Savignat, pour en jouir en dim inution de
» scs créan ces, est une restriction de son hypothèque ,
» afin qu’elle ne portât que sur les objets réservés.
» Cette restriction résulte encore d’ une manière plus
�»
»
»
»
»
( " 5
.
manifeste de la clause du contrat de mariage de la dame
C o rn u d et, par laquelle la dame veuve C e llin , en se
réservant l'hypothèque qu’elle a sur les biens de son
m a r i, soit en vertu de son contrat de mariage , soit
en vertu de la sentence de ^séparation , subroge cepen-
»
»
»
»
»
dant sa fille et son gendre à cette h ypothèque, pour
sûreté de la jouissance des fonds que le sieur Cellin
vient de leur délaisser y afin de s’en servir en cas de
trouble de la part des créanciers, et qu’elle ne met
d’autre condition et d’autre lim itation à cette subroga
» tion à son hypothèque , que la conservation intcCte
» de la jouissance des biens de son m a r i, qu’elle s’est
,
,
.i .
»
» reservee.
» Les termes de cette clause annoncent que cette sub
» rogation renferm oit non - seulement l’hypothèque
» qu’elle avoit pour le payement.de ses reprises liquidées
» par le jugement de séparation, mais e n c o re . l’hypo» thèque éventuelle qui'résu ltait de son contrat de raa
» riage pour la sûreté de ses gains et avantages m atri» moniaux.
J
» L e consentement donné par la dame veuve C e llin ,
conjointement avec son m ari et sa fille , à ce que son
»
»
»
»
»
»
gendre aliénât tous les immeubles réels et fictifs dont
la jouissance lui étoit délaissée, sans que la darre
Cornudet pût s’en p la in d re, et seulement sous l’obli
gation d’em ployer le p rix pr ove nant des ventes par
préférence à l’acquittement des dettes du sieur C e llin ,
est une abdication formelle et sans retour , de l:i part
» de la dame son épouse, de son hypothèque sur les
» immeubles dont elle"autorisoit la v e n te , et une renon
-
‘
'
y
E> z
�.
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
»
>
.
( *2 )
d ation à être payée sur le p rix en p roven an t, parce
qu’il n’est pas possible de concevoir qu’un créancier
consente que le gage de sa créance soit v e n d u , que
le p rix en soit payé à d’autres créanciers, sans con
sentir en même temps que le gage soit affranchi de
l’hypothèque de sa créan ce, cette conséquence étant
la suite forcée et nécessaire de la faculté d’aliéner.
» Si le délaissement fait à la dame Cornudet et à
son m a ri, des biens de son père , ne fut qu’en jouis
sance et ¿\ titre d’avancement d’hoirie , ce délaisse
m ‘nt a pris un caractère d’irrévocabilité par l’aulorisation d’aliéner.
» L a déclaration faite par les sieur et dame D u m o n tel,
» que pour raison du rem ploi des deniers provenans de
»
»
»
»
»
la vente des biens délaissés, avec restitution du p rix
du restant d’iceux , ils ne prétendoient action que sur
les biens du sieur C o rn u d et, écarte sans retour toute
idée d’hypothèque de la dame veuve D um ontel sur
les biens de son m ari délaissés à la dame Cornudet.
» En point de d r p it, la dame D um ontel avoit la
» faculté de se, départir , sous la puissance m aritale,
» de son hypothèque éventuelle sur les biens délaissés :
» d’après l ’article 6 du titre 14 de la Coutume d’A u
» v e r g n e , la femme m ariée peut disposer du quart de
ses biens dotaux pai contrat entre—vifs, pour le mariage
* de ses iillcs ou autres desccndans, lorsque son mari
» n’a pas de quoi les marier selon son état.
» O11 ne peut regarder comme une dot l’institutiVui
» faite par la dame D um ontel à sa il]le : une riispo» sition de ce genre ne présente que des espérances
�( *3 )
» éloignées et souvent très - fugitives ; elle n’offre au
» mari aucunes ressources pour le soutien de sa famille
»
:
»
'»
pendant la vie de l ’instituant.
"
>3 Sans la renonciation de la part de la dame veu ve
Cellin à son hypothèque éventuelle , pour le paye
ment de ses gains et avantages m atrim oniaux sur les
» biens délaissés, il étoit impossible au sieur Cellin. de
» doter sa fille selon son état.
3) Son insolvabilité étoit notoire ; elle résultoit de
» la sentence de séparation de biens , de l’abandon par
» lui fait à sa fille et à son gendre de tous ses b ie n s,
» à la .'charge de payer ses dettes moyennant une pen
sion an n u elle, viagère et insaisissable , q u i‘"ne lui fut
33 même assurée que par sa femme.
•
33 T o u s ses biens étoient g revés de l ’h y p o t h è q u e de
33 son épouse , soit pour le payement de ses reprises
33 liquidées par la sentence de séparation, soit pour la
33 sûreté de ses gains et avantages m atrim oniaux. Il n’au33 roit donc donné à sa fille qu’une ch im ère, une chose
33 illusoire , s’il lui avoit constitué une dot dont sa
-.33 femme auroit pu détruire tout l’e ffe t, soit pendant
>3 la vie de son m a r i, soit après sa m o rt, par l’exer3) cice de son hypothèque.
33 P o u r marier sa fille selon son état, il falloit le con
» cours du mari et de la femme ; du mari , comme pro
» priétaire des biens délaissés en d o t; et de la fem m e,
» comme créancière , et c ouv rant de son hypothèque
» toute la fortune de son mari.
» E n supposant que l’hypothèque éventuelle fût
» d o t a le , le département de cette hypothèque étoit
» indispensable pour faire une dot «\ sa fille.
�( i 4;)
» Mais on ne peut considérer comme dotale l’h ypo» thèque éventuelle que le contrat de m ariage donne
» à la femme pour le payement de ses gains. L e bien
» dotal est celui qui est donné au m ari par la femme
» pour supporter les charges du mariage : on ne peut
» donner cette dénomination à des gains n u p tia u x , qui
» doivent être p r is , en cas de survie de la fem m e, sur
» les biens mêmes du m a r i, et qui ne peuvent être
» jouis par elle que lorsque ce dernier est décédé.
» Quoique les principes s’opposent à ce que la femme
» puisse pendant le mariage se départir de cette hypo
» thèque éven tu elle, comme étant une convention sur
» la succession d’un homme v iv a n t , néanmoins cette
» stipulation est permise lorsqu’elle est faite dans un
»
»
j)
»
»
contrat de mariage susceptible de toutes les conven
tions qui ne heurtent pas les bonnes m œ u rs, en présence et du consentement de celui de la succession
duquel on traite ; enfin , lorsque cette stipulation
devient nécessaire pour doter une fille selon son état. »
T els sont les motifs qui ont déterm iné les premiers
juges. Ils violent ouvertem ent les principes du d ro it:
on n’y a pas même abordé la question , et la cause n’a
pas été connue.
L a dame Dum ontel s’est pourvue par appel contre ce
jugement', elle a droit d e n espérer la réform ation eu la
c o u r , et va soinmaii'ement enoncer ses moyens.
T o u s les biens de la dame Dum ontel sont dotaux; ils
sont donc inaliénables de leur nature. L ’article 3 du
titre 14 de la Coutum e (Jéfcncl au mari et à la fem m e,
conjointem ent,ou séparém ent, pendant le m ariage, de
�( i 5 )
ven d re, alién er, perm u ter, ni autrement disposer des
biens dotaux de la femme au préjudice d’icelle. L e der
nier commentateur observe qu’il n'y a point d’article
dans la Coutume où elle s’explique en termes plus im
périeux et plus irritans.
L ’article I er. du titre 18 ajoute encore à cette prohibi
tion. Il est interdit à la femme de s’obliger pour le fait
de son m ari ou de ceux à qui il peut succéder : elle ne
peut aussi renoncer aux obligations et hypothèques à elle
appartenantes.
En supposant pour un instant , dans le système des
intimés , que la dame D um ontel eût renoncé à son hypo
thèque , elle auroit fait ce qui n’étoit pas en son p o u v o ir ,
puisque la Coutum e le lui défend im périeusem ent 5 et
veut que ce telles obligations soient de nul effet et valeur ,
» qu’elles ne puissent même être validées par serment. »
Cette interdiction absolue ne pouvoit être m éconnue
des premiers juges. L a disposition de la Coutum e est con
form e aux lois romaines ; la lo i unique au C o d e , D e rei
uxoriœ a c tio n e , ne perm et pas m ême à la femme d’h ypothéquer sa dot pendant le mariage.
M ais la dame D um ontel a-t-elle abandonné son h ypo
thèque ? O n vo it tout le contraire dans le contrat de
mariage de sa fille ; elle s’y réserve expressément Vhypo
thèque q u elle avoit su r Ids biens de son m ari f soit en
vertu de son contrat de m ariage , soit en vertu de la sen
tence de séparation, et sans aucune novation ni déro
gation. Comm ent expliquer cette réserve avec le dépar
tement qu’on veut supposer? Il faut bien qu’une réserve
expresse ait un effet q u elcon q u e} et on ne peut lui en
�( 16 )
donner d’autre que la conservation de cette même hypo
thèque qu’on veut lui enlever aujourd’hui !
Mais elle a subrogé sa fille à cette m ême h ypothèque?
Sans doute, vis-à-vis des tiers, parce que la dame Dum ontel
nç vouloit pas que les créanciers postérieurs pussent gêner
sa fille dans sa jouissance. M ais de ce qu’elle a voulu
c o uv r i r sa fille de son é g id e , pour la mettre à l’abri des
recherches des créanciers , s’en su it-il qu’elle a voulu
renoncer à ses droits personnels ? droits qu’elle se réserve
avec tant de soin et sans dérogation n i novation.
E lle a restreint son hypothèque aux biens dont elles’étoit
réservé la jouissance ? M ais comment peut-on voir une
restriction dans une clause qui tend au contraire à étendre
ses droits? E lle dit qu’elle continuera de jouir des biens
réservés en dim inution de ses créances et a u x im puta
tions de droit. Si elle jouit en dim inution de ses créances,
elle les réserve au lieu de les abandonner. Jou ir en dim i
nution , c’est sans doute conserver; c’est précom pter sur
ses jouissances une portion de ce qui lui est dû pour re
prendre le reste sur les autres biens , si les jouissances
q u e lle a fuites n’ont pas absorbé ses créances.
V eut-on prétendre encore contx*c l’évidence qu’il existe
lin département de l’hypothèque ? Mais au moins ce
dépnrtement ne pourroit frapper que sur les biens qui
éloient alors acquis k la dame Dum ontel. Il résulte bien •
clairement des termes du contrat de mariage , qu’elle
ne s’est pas occupée de ses droils non-ouverls.
On y voit que la dame D um ontel n’a voit en vue que
la survie de son mari. E lle n’a lait une institution au
profit de sa fille , elle ne lui a délaissé en avancement
d’hoirie
�C 17 )
d’hoirie des biens personnels , qu’à condition que..la.
dame Cornudet payeroit,à son père une pension viagère
et annuelle de 2400 /f". •
■
; L a dame Duraontel ne pou voit pas s’occuper de ses
droits non-ouverts , lorsqu’elle ne prév^ yoit et ne pensoit
qu’à la survie de son époux ; et ;cela est d’autant plus
é v id e n t, qu’au moyen de cette pension 'le .mari se départ
de tout droit d’usufruit
sur les biens de sa fem m e, et der
1
tous gains nuptiaux coutam iers ou conventionnels.
O r , si on a porté l’attention à faire départir le mari
de tous ses gains n up tiau x, coutumiers ou conventionnels,
n ’auroit-on pas pris la m ême précaution pour la dame
D u m o n te l, si telle avoit été son intention ? D ès qu’on
l ’a expliqué disertement pour le mari , et qu’on ne l’a
pas fait pour la femme , il faut en tirer la conséquence
que la dame D um ontel n’a pas voulu le faire, qu’elle n’a
point pensé à ses droits éventuels ; et on conviendra bien
au moins qu’il falloit une renonciation expresse pou r des
1 ♦
•
.
•
• *
.
‘
1
droits qui pouvoient ne jamais s ouvrir.
Q u’a demandé la dame D um ontel par la sentence de
178 9 ? E lle pou voit sans doute faire déclarer la sentence
de séparation exécutoire contre sa fille , faire prononcer
la condamnation des sommes liquidées par celte sentence;
elle s’est bornée au payement de ses gains, e til paroît qu’on
ne lui sait aucun gré de cette modération.
Mais la dame D um ontel a délaissé, conjointem ent avec
son m a r i, la jouissance des biens qui appartenoient à ce
dernier? P ar ce délaissem ent, la dame D um ontel n’a
contraclé aucune obligation solidaire *, elle jouissoit d’ une
portion de ces mêmes biens en vertu d’ un bail de ferm e:
G
�( i8 )
*
.•
il y avoit donc nécessité «qu’elle se prononçât sur ce dé
laissem ent, noii pour les abandonner sans reto u r, mais
au moins pour se départir de la jouissance qui lui étoit
assurée par son bail. E lle n’a contracté par là d’autre
o b l'ga tio n , que de''céder sa jouissance comme ferm ière.’
X/’article 6 du titre 14 de la Coutum e d’A u vergn e per
m et à la femme d’aliéner ses biens dotaux jusqu’à concur
rence du quart, pour doter ses filles, lorsque le mari est
liors d’état de le' faire;1 et le m a ri, dans l’espèce, étoit
insolvable?
C ’est faire une étrange application de cet article, dans
le fait comme dans le droit.
Dans le fait, il n’y avoit point insolvabilité de la part du
mari. L a sentence de séparation ne fut qu’une précaution
superflue. Les biens paternels que la dame Cornudet a
reçus en jouissance sont en valeur de plus de 70000 11~; ils
existent encore en nature : c’est un point de fait aisé à
vérifier.
Q u’a payé M . Cornudet sur ces mêmes biens ? Son
inscription nous l’apprend. Il a acquitté une somme de
13600 th en principal ou intérêts. Il est le seul créancier
inscrit : la dame Dumontel rapporte un certificat négatif
de toute autre inscription. Il 11’y a donc pas insolvabilité;
le mari est donc en état de doter.
Dans tous les cas, la dame Dum ontel n’a-t-elle pas doté
sa fille p a r l’avancement d’hoirie qu’elle lui a fait sur ses
propres biens; délaissement qui excédoit ses pouvoirs, et
sur lecjuel elle a la bonté (3e ne pas revenir.
’
jVIais dans quel cas la Coutum e pennet-elle à la femme
d’a lién er, poul- doter sa fille ? C ’csl avant le m ariage,
�■
( T9 )
lorsqu’ on doit forclore ou-exclure la fille de la succession :
car laîd o t d’une fille , père et m ère viva n s, entraînoit
nécessairement.la forclusion coutumière. Ici la fille étoit
retenue dans la maison ; c’étoit une iille u n iq u e, héritière
de tous les biens; et cet espoir sufïisoit sans doute pour
trouver un parti convenable. Il est véritablem ent ridicule,
après seize ans de m ariage, d’entendre dire qu’une m ère
est tenu e, ou d’abandonner ses d ro its, ou de délaisser le
quart de ses biens pour le mariage de sa fille.
'
Il n’est pas plus sage de soutenir qu’ une hypothèque
éventuelle n’est pas dotale, et qu’une femme peut s’en
départir sous la puissance maritale. O n répondra à cette
assertion par un préjugé bien précis de la cour d’a p p el,
en date du 26 prairial an 10. M a r i e Suchet, femme B o y ,
n’avoit porté aucune dot à son m ari; elle n’avoit que des
droits éventuels, pour la conservation desquels elle fit une
inscription sur les biens de son époux. Son m ari avoit
aliéné une maison : cette vente étoit avantageuse; la femme
consentit à la radiation de son inscription. L e conservateur
refusa de ra d ie r, et soutint qu’en Coutum e d’A u verg n e
la femme en puissance de m ari ne pou voit se départir
d’une inscription h yp o th écaire, même pour ses droits
éventuels. M arie Suchet se pou rvoit contre le conserva
teur. E lle fut déboutée de sa demande par jugement du
tribunal d’arrondissement; e t, sur l’appel, ou la cause fut
très-solennellement plaidée, le jugement fut confirm e.
A in si s’écroulent les motifs qui ont déterm iné le juge
ment du tribunal d’Issoirc. L a prétention des intimés est
une véritable chim ère. Ils auroient dû avoir plus d’égards
pour une m ère indulgente qui avoit conservé ses droits
�10}
sans les'exiger. L e u r opposition est inconvenante e t mal
fo n d ée; et sans doute que M . et M de. C ornudet, en reconnoissant leurs to r ts , reviendront à ces sentimens de
respect qu’une m ère a toujours le droit d’e x ig e r, et sur
lesquels repose la morale publique.
.
P A G E S , ancien avocat.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul im prim eur de
la C our d ’appel — A n 1 2 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lagulhe. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Subject
The topic of the resource
biens dotaux
droit coutumier
gain de survie
douaire
Description
An account of the resource
Précis pour Dame Lagulhe, veuve de François-Xavier Cellin-Dumontel, appelante ; contre Monsieur Joseph Cornudet, membre du sénat conservateur, et madame Jeanne Cellin, son épouse, autorisée en justice, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1765-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0224
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanteloube (domaine de)
Brughail (domaine de)
Chastreix (63098)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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biens dotaux
douaire
Droit coutumier
gain de survie
-
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77ead9065ef3c0a6988e2fcc13d24a5f
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Text
MÉMOIRE
SUR
LA N U L L IT É ET LA R É C LA M A T IO N
C O N T R E DES V Œ U X EN RELIG IO N .
A
DE L* IM P R IM E R IE
IMPRIMEUR
DU
R IO M ,
PE
L A N D R I O T , SEU L
T R I B Ü H A L D APPEL.
i 8 o 3. =
x i i
.
,
�MEMOIRE
PO UR,
J
e a n
- J
a c q u e s
D A N C E T T E ,
prêtre,
habitant de la commune de B e a u z a t , départe
ment de la H a u t e - L o ir e , défendeur en tierce• opposition, et aussi demandeur en tierce-oppo
sition
CONTRE
F rançoise
F A U G IE R
et J a c q u e s
M A S S A D I E R son mari, de lui autorisée
,
demandeurs et défendeurs.
JEa n - J a c q u e s DANCETTE est défendeur à une tierceopposition form ée par Françoise Faugier et son mari ?
à une sentence do l ’officialité du diocèse de M à co n , qui a
A
�C2 )
déclaré nuls ses actes de vêture et de profession dans
l’ordre de Cluny, et l’a renvoyé au siècle, et h ùn arrêt du
parlement de P aris, qui a déclaré n’y avoir abus dans la
sentence de l’officialité. D ’un autre côté, Dancette a formé
opposition à un arrêt du parlement de Toulouse, où il
n’est point partie, et qui cependant attribue à Françoise
Faugier le patrimoine de Dancette.
Si Françoise Faugier et son mari doivent succomber
dans la tierce-opposition à la sentence de l’ofïicialité de
Mâcon et a l’arrêt du parlement de Paris, alors il ne peut
y avoir aucune difficulté dans la tierce-opposition de
Dancette à l’arrêt du parlement de Toulouse. C’est donc
principalement à la tierce-opposition à la sentence de
l’olïicialité de M âcon, et à l’arrêt du parlement~de Paris,
qu’il faut s’attacher.
r:
- Celte affaire tient tout à la fois à l’ordre public et à l’in
térêt privé. C’est du développement des faits que naîtront
les questions sur lesquelles le tribunal d’appel doit pro
noncer.
F A IT S .
»
D u mariage d’André Dancette et de Marie Robin
étoient nés trois enfans, Claude, Marguerite et Jean
Jacques Dancette.
.
Toute l’ailection des pere et merc s’étoit portée sur
Claude Dancette, leur fils aîne, qui ilsdestinoient toute
leur fortune, qui étoit considérable, en lui sacrifiant sou
frère et sa sœur. Dès les premières années de c e u x -c i,
ils les vouèrent au célibat dans l’état monastique. A lVige
de huit ans, la fille fut mise dans un couvent de religieuses
�•
C 3.)
ursulines, où, sans qu’elle en fût jamais sortie, dès qu’elle
eut atteint sa seizième année, on lu i■
fit faire.le sacrifice
qu’on exigeoit d’elle : les caresses et les menaces, et les
insinuations des'religieuses toujours portées 'à faire des
prosélytes, rien ne fut épargné.
'^ 1 v
On trouva plus'de résistance de la part du fils cadet.
•Aux caresses employées vainement succédèrent les mena
ces , qui étoient aussi sans succès. Bientôt les mauvais traitemens suivirent et s’accrurent chaque jour : on en vint
à le forcer de partager avec les domestiques les travaux
les plus pénibles de la campagne, que son âge et somiîtat
ne pouvoient com porter; il fut privé de la tableiderses
parens.
i
•.
• Peut-être le cœur du père se seroit-il ouvert aux prières
et aux gémissemens de son fils ; mais que ne peut sur un
mari foible l’ascendant et l’empire que prend sur lui une
femme audacieuse , que sa-prédilection pour u n 1de ses
'enfaris veut enrichir- aux dépens des autres, et q u i, pour
parvenir à son b u t, les livre à la persécution, en faisant
partager à son mari ses caprices, sa'haine et ses mauvais
traitemens!
• .
Il n’est pas surpi-enant après cela qu’un enfant si cruel
lement persécuté, pour échapper peu t-être à de plus
grands dangers, se jette en désespéré dans la captivité
d’un cloître. T elle futla malheureuse destinée qui entraîna
Jean-Jacques Dancette dans la maison de Cluny.
Cependant la providence permit que son entrée dans
le monastère ne fût pas accompagnée des formes prescrites
par les lois pour l’y retenir à jamais; elle lui ménagea des
ressources assurées' pour reprendre sa liberté ’ lorsqu’il
A a
�C4 )
.
n’auroit plus à craindre lés effets funestes dé la haine ,et
de la violence. .C'est cè qu’on établira dans la discussion
des moyens. Continuons le,récit des faits.)
'
Jean-Jacgues Dancette n’avoit céssé de protester contre
la violence qui l’avoit conduit dans la maison de Cluny;
il avoit fait des actes dé protestation par-^devant notaires
en 1761, en 1766, en 177.1., exi 1776, en 1781 et en 1785.
Claude Dancette, son frère aîné, étoit mort en 1767.
Cette circonstance paroissoit devoir le rendre à l'affection
de ses père et mère : il tenta auprès d’eux toutes les voies
pour les engager à venir à son secours; mai$ les sentiment
de haine conçus contre lui par sa mère avoiejit pris dan?
son cœur de trop profondes racines, et la perte de son fils
aîné ne lui fit que reporter ses affections sur ses parens
collatéraux; elle prit d ès-lors le dessein dé leur faire
passer non-seulement ses propres biens, mais ceux même
de son m ari, au préjudice de ses enfans', ses héritiers
naturels; en sorte qu’abusant toujours de l’empire qu’elle
s’étoit donné sur un maili foible, elle le rendit insensible
aux prières et aux larmes de son fils, et se fit faire par lui,
dans un testament, une institution d’héritière universelle,
autorisée par les lois du pays de droit écrit, qui régissoit
les parties et leurs biens. Le testament qui contenoit cette
institution'étoit do'r*7;68.
.
Une circonstance bien remarquable dans ce testament,
c’est qu’oa instituant sa femme son héritière universelle,,
et faisant à son fils, par le môme testament, Je legs d’une
pension.viagère, ily est d itqu’il mstitueson iils,son héritier
particulier dans celte pension ¡ pourquoi ce legs h titre
d’institution particulière ? CeLa n’étoit pas nécessaire si le
�.
c 5 )
fils étoit vraiment mort au monde par une profession en
religion, libre et régulière ; mais il falloit prévoir le cas où
le fils réelameroit contre sa profession, ou laferoit déclarer
nulle : et si cela arrivoit, et qu’il n’y eût pas d’institution
particulière en sa faveur, l’institution universelle faite à la
femme eût été nulle par la prétention du fils. Cette précau
tion annonce suffisamment que le père et la mère connoissoient les vices de la profession de leur fils.
L e père, qui'avoit fait son testament en 1768, mourut
en 1773. En vain encore alors Jean-Jacques Dancette agitil et fit-il agir auprès de sa m ère, pour la rappeler à la
tendresse maternelle : vains efforts, la haine étoit trop
t
i
invétérée.
- Cependant, dès après la mort de son p ère, il avoit aban
donné la maison de Cluny , et quitté l’habit monastique ,
continuant toujours de renouveler ses protestations. Les
religieux de Cluny n’eurent garde d’user des voies qui
auroient pu le contraindre à rentrer-clans le cloître; ils
savoient trop eux-mêmes que sa vocation avoit été forcée,
et ils connoissoient sans doute la nullité des actes qui l’y
avoient introduit. Sorti de la maison de Cluny dès la mort
de son p è re , ne trouvant point d’asile auprès de sa mère, il
n’avoit cessé d’errer çà et l à , chez des parens et des amis
compatissans et sensibles à ses malheurs.
Mais sa mère étant morte en 1782, il se mit dès-lors en
possession des biens de son père, et n’a cesse depuis ce temps
d’en jouir et d’en disposer pendant un grand nombre cl an
nées, sans éprouver de contradictions de qui que ce soit.
Sa mère avoit fait un testament par lequel elle avoit ins
titué son héritier Barthclemi Robin son neveu, et par un
�C 6 )
codicile elle avoit fait en faveur de Jean-Barthelemi R obin,
autre de ses neveux, le legs d’un domaine considérable qui
venoitdesonm ari; et, dans la vue sans doute d’engager son
fils à ne pas contrarier ses volontés par les voies qu’elle
sa voit bien lui être ouvertes contre la profession en religion, .
elle lui avoit donné la jouissance du domaine dont elle avoit
disposé par son codicile en faveur de Jean - Bartlielemi
Robin : mais, ce qu’il y a encore à remarquer dans le testa
ment de la mère, elle qualifie son fils de prêtre sécularisé ,
et elle a aussi la précaution de lui faire un legs d’usufruit,
à titre d’institution particulière.
Il n’est pas non plus inutile d’observer que depuis 1773,
époque de la mort du père, jusqu’en 1782 qu’arriva celle
de la m ère, les collatéraux du père n’imaginèrent pas d’at
taquer le testament d’André Dancette, et laissèrent toujours
sa femme, son héritière testamentaire, jouir de l’universa
lité de sa succession. Ils auroient pu cependant demander la
nullité du testament, comme ils l’ont fait dans la suite ; et
s’ils ne le firent pas alors, ce ne put être que par la connoissance qu’ils avoient de la nullité de la profession de Jean
Jacques Dancette, qui seul alors pouvoit avoir le droit
d’attaquer le testament de son père : mais, même après la
mort de la m ère, le fils n’éprouva aucun obstacle dans la
possession où il se mit aussitôt des biens de son pèue.
Cependant,peu de temps après, Claude Faugierqui vivoit
encore alors, qui étoit fils et héritier d’Anne Dancette, la
quelle étoit sœur d’André Dancette, et qui auroit eu droit
à la succession de son o n d e, si Jean-.Jacques Dancette son
cousin-germain eût pu être considéré comme mort civile
ment par une profession en religion régulière, Claude
�( 7 ) ^
Faugier imagina d’attaquer les héritiers de Marie Robin ,
et de demander contre eux la nullité du testament d’André
Dancette.
Il doit paroîlre étrange que Claude Faugier ne se fût
adressé qu’aux héritiers de Marie R o b in , qui n’étoient pas
en possession des biens, ou qu’il n’eût pas en même temps
dirigé son action contre Jean-Jacques Dancette, qui s’étoit
emparé de ces mêmes biens après la mort de sa mère.
L ’action de Claude Faugier fut portée en la sénéchaussée
du P uy, où elle fut reprise après sa mort par André Faugiei',
tant en son nom que comme tuteur de l’enfant mineur de
Claude Faugier son frère, et par Françoise Faugier sa sœur,
et Massadierson mari; et, après une assezlongue instruction,
le testament d’ André Dancette fut déclaré nul, e ties Faugier
envoyés en possession de ses biens. Les Robin interjetèrent
appel de la sentence de la sénéchaussée du Puy au parle
ment de Toulouse , où elle fut confirmée.
Mais l’envoi en possession prononcé contre les R o b in ,
ne pouvoit pas être effectué à l’égard de Jean-Jacques Dan
cette qui s’étoit mis en pleine jouissance après la mort de
sa mère. Cependant, craignant d’être troublé parles collaté
raux, à la faveur de la sentence de la sénéchaussée du P u y ,
et de l’arrêt coniirmatif, il se persuada qu’il étoit de plus
grande précaution de faire prononcer judiciairement la
nullité des actes de vêture et de profession qu’on pourroit
lui opposer.
Il se pourvut en conséquence en l’oflîcialite du diocese
de M/icon, où étoit situé le monastere de Cluny, et demanda
la nullité des actes de v ê t u r e et de profession. Il appela ,
pour faire prononcer la nullité, non-seulement les religieux
�C8 )
de C lun y, mais aussi ses parens paternels et maternels, qui
à son défaut auroient été en droit de succéder à ses père et
mère. Les parens paternels étoient André Faugiei;, prêtre,
tant en son nom qu’en qualité de tuteur de l’enfant de
Claude Faugier son frère, tous deux héritiers d’Anne Dancette leur mère, sœur d’André Dancetté. Les parens mater-*
nels étoient Barthelemi et Jean-Bartlielemi R obin, neveux
de Marie Robin sa mère.
Par une sentence contradictoire de l’officialité deM âcon,
et sur les conclusions du promoteur, les actes de vêture et
de profession de Jacques-André Dancette furent déclarés
nuls, et il fut renvoyé au siècle en état de prêtre séculier.
I/a sentence est du . . . . juillet 1790,
Les Robin, parens maternels, interjetèrent appel comme
d’abus de cette sentence, au parlement de Paris, où ils ap
pelèrent en même temps André Faugier, tant en son nom
qu’en qualité de tuteur de Fenfant mineur de Claude Fau
gier , pour voir déclarer commun avec lui l’arrêt qui interviendroit sur l’appel comme d’abus; ils appelèrent aussi
les religieux de Cluny. L ’affaire ayant été discutée au parle
ment par des écritures de part et d’autre , intervint arrêt
contradictoire le 6 octobre 1790, sur les plaidoieries de
quatre avocats, et sur les conclusions du ministère public,
par lequel il fut dit qu’il n’y avoit abus dans la sentence
de I’oilicialité de M âcon , et il fut ordonné qu’elle sei’oit
exécutée selon sa iorme et teneur; et cet arrêt fut bientôt
après signifié aux parties.
De ce moment Jean-Jacques Dancette continua do
jouir paisiblement de la succession de son père, et eu
disposa librement ; il fit même des ventes de quelques
héritages
�(9 )
héritages détachés, sans que ses acquéreurs éprouvassent
aucun trouble de la part de ses pareils.
' Mais bientôt après survinrent les décrets funestes contre
les prêtres insermentés, et Dancette étoit du nombre : il
fut obligé de se cacher, et il fut même mis sur une liste
d’émigrés. Lesagens nationaux le considérèrent tellement
comme vrai propriétaire des biens de son père, qu’ ils
s’empressèrent de faire mettre le séquestre sur ces mêmes
biens, meubles et immeubles, et comme lui appartenans,
en vertu d’un arrêté du district de M onistrol, du mois
de floréal an 2 ; et l’administration du district adjugea la
ferme de ses p r o p r ié té s s u r la réquisition du receveur
de l’enregistrement.
îv
'
Cependant les temps étant devenus moins orageux, et
les prêtres commençant à repai'oitre, Dancette obtint du
directoire du district de Monistrol un arrêté du mois de
thermidor an 3 , qui le rétablit dans ses propriétés. Le
juge de paix vint avec les officiers municipaux de la com
mune de Beauzat lever le séquestre, et le remettre en
possession des meubles qui se trouvoient n’avoir pas été
vendus, et-de ses domaines, à la charge toutefois de laisser
subsister l’adjudication qui en avoit été faite, pour le
temps de sa durée.
L a jouissance de Dancette fut encore paisible. L e 25 fri
maire an 4 il afferma son domaine de Confolent au citoyen
Porchier, pour neuf ans; et le 7 nivose suivant son do
maine de la D orlière, pour six ans', au citoyen Rey.
Jean-Jacques Dancette avoit pris en affection AndréM arie Faugier, son neveu à la mode-de Bretagne, et qui
étoit son héritier présomptif du côté-paternel ; il l’avoit
B
�C I0. )
retiré auprès de lui : mais il eut le malheur de le perdre
le 6 comp’ émentaire an 5. A vant de m ourir, ce jeune
homme , qui avoit été mécontent de l’administration
d’A ndré Faugier, son oncle et son tuteur, lui avoit fait
signifier qu’ayant atteint l’âge de puberté il n’avoit plus
besoin de tuteur, et qu’il choisissoit Jean-Jacqucs Dancette pour son curateur. On conçoit aisément que cette
démarche dut déplaire à l’abbé Faugier, surtout en ce
que Dancette lui étoit préféré pour la curatelle. Cepen
dant tant que le jeune Faugier vécut on n’imagina pas
de troubler Dancette dans sa possession-, ce ne fut qu’après
sa mort que l’abbé Faugier et la femme de Massadier,
sa sœur, prétendirent se prévaloir de la sentence de la
sénéchaussée du Puy et de l’arrêt coniirmatif du parle
ment de Toulouse, qui les a voient envoyés en possession
de la succession d’André Dancette, et qu’ils se persua
dèrent qu’ils pourroient, par une tierce-opposition, faire
cesser l’effet de la sentence de l’officialité de Mâcon et de
l ’arrêt du parlement de P aris, qui avoient annuité la
profession de Dancette et l’avoient renvoyé au siècle.
Il seroit assez inutile de rendre compte de toutes les
procédures tenues dans les tribunaux du Puy et d’Issengeaux; il suffit de remarquer que Massadier et sa femme,
qui ont acquis les droits d André Faugier, ayant formé
tierce-opposition a l’arrêt du parlement de P aris, et
Dancette à celui du parlement de Toulouse, ces oppo
sitions ont enfin été renvoyons au tribunal d’appel, seul
compétent pour juger des tierces-oppositions à des jugemens rendus par des tribunaux souverains. M ais, comme
011 l’a déjà observé en commençant, c’est seulement à la
�( 11 )
tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris qu’il
faut s’attacher, parce que si cette tierce-opposition n’est
ni recevable ni fondée, l’arrêt du parlement de Toulouse,'
absolument étranger à Jean-Jacques Dencette, n’a jamais
pu produire aucun effet contre lui.
Si la tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris
est non recevable, on pôürroit se dispenser d’établir
qu’elle est mal fondée. L a fin . de non recevoir est le
moyen principal; le mal fondé n’est qu’une proposition
subsidiaire. Cependant c’est par l’examen de celle-ci que
l’on va commencer : la fin de non recevoir, qui sera la
seconde proposition, n’en sera que plus favorable.
>
M O Y E N S ,
'
Prem ière -proposition.
Dans cette proposition il faut mettre à l’écart l’arrêt
du parlement de P a ris, qui avoit déclaré n’y avoir abus
dans la sentence de l’oificialité, qui avoit annullé les actes
de vêture et de profession, et qui avoijj ordonné l’exé
cution de cette sentence : il faut supposer que la sentence
n’eût pas été attaquée.
Elle n’auroit pu l’être que par un appel simple à l’ofiicialité métropolitaine, ou par un appel comme d’abus au
parlement de Paris. Mais l’appel simple n’auroit pas été
recevable après que, sur l’appel comme d abus, il auroit
été dit qu’il n’y avoit pas d’abus, et que 1 execution de
la sentence auroit été ordonnée. Mettons-nous donc dans
la position où il n’auroit pas été prononcé sur l’appel
.
B 2
�( 12 )
comme d’abus , et que ce fût aujourd’hui le tribunal
d’appel qui dût y faire droit. En un m ot, y a u ro it-il
des moyens d’abus contre la sentence de l’officialité ?
Il n’y en a pas certainement, si cette sentence, en pro
nonçant la nullité des actes de vêture et de profession de
Dancette, s’est conformée à la disposition des oi’donnances,
en jugeant que ces actes n’étoient pas revêtus des forma
lités qu’elles prescrivent.
,
C ’est sans doute une mauvaise objection que ce qu’on
a dit que l’official n’avoit pas énoncé les motifs de son juge
ment : ce n’est que dans ces derniers temps que les juges
ont été assujétis à cette énonciation ; et la sentence de
l’officialité est antérieure à la loi qui a prescrit dans les
jugemens cette nouvelle forme jusqu’alors inconnue dans
les tribunaux. C ’est dans la lo i, la justice et la raison
qu’on cherchoit seulement le m otif du jugem ent, sans
qu’ il fût exprimé dans le jugement même : aujourd’hui
même il n’est pas sans exemple de voir de bons jugemens
rendus sur de mauvais m otifs, et qui sont confii’inés
par d’autres motifs que ceux qui paroissoient avoir déter
miné les premiers juges.
Il y a deux moyens pour attaquer les vœux monastiques :
la nullité des actes par lesquels on veut les établir, pour
n’avoir pas observé dans ces actes les formalités prescrites
par les lois pour les rendre valides; et la nullité des vœux
dans leur substance, parce qu’ils n’ont été produits que
par la crainte ou la violence; et cette seconde nullité a
tout son eifel, lors même que, dans les actes, les forma
lités ont été gardées. Commençons par examiner la pre
mière de ces deux, nullités.
�/
( 13 )
■
Prem ière nullité,
./
•
■
•
'
L ’ordonnance de Moulins et celle de 1667 avoient
réglé les formalités des actes qui devoient assurer l’état
des religieux. Ces formalités ont été non-seulement con
firmées, mais exprimées et prescrites avec plus d’étendue
dans la déclaration du 9 avril 1736, dont il est néces
saire de rappeler les dispositions.
A rticle X X V . « Dans les maisons religieuses, il y
« aura deux registres en papier com mun, pour inscrire
« les actes de v ê tu re, noviciat et profession , lesquels
« registres seront cotés par premier et dernier, et para
« pliés sur chaque feuillet par le supérieur ou la supé« rieure -, à quoi faii’e ils seront autorisés par un acte
« capitulaire qui sera inséré au commencement du
« registre. »
A rt. X X V I. « Tous les actes de vèture, noviciat et
« profession , seront inscrits en français sur chacun desd.
« deux registres, de suite et sans aucun blanc; et lesd.
« actes seront signés sur lesd. deux registres par ceux
« qui les doivent signer, le tout en même temps qu’ils
« seront faits; et en aucun cas lesdits actes ne pourront
« être inscrits sur des feuilles volantes. »
Art. X X V I I . « Dans chacun desd. actes il sera fuit
« mention du nom et surnom et de l’âge de celui ou
« de celle qui prendra l’habit ou fera profession ; des
« nom s, qualités et domicile de ses père et m ère; du
« lieu de son origine, et du jour de l’acte, lequel
« sera signé sur lesdits registres, tant par le supérieur
�( i4 )
«
«
«
«
«
ou la supérieure, que par celui ou celle qui prendra
l’habit ou fera profession ; ensemble par l’évêque ou
autre personne ecclésiastique qui aura fait la cérém onie, et par deux des plus proches parens ou amis
qui y auront assisté. »
A rt. X X V I I I . « Lesdits registres serviront pendant
« cinq années consécutives, et l’apport au greffe s’en
« fera , savoir : pour les registres qui seront faits en
« exécution de la présente déclaration, à la fin de
« l’année 174 1, et ensuite de cinq ans en cinq ans, » etc.
C est d après ces dispositions de la déclaration de 1736,
que la sentence de l’officialité de Maçon a dû juger
de la validité ou de l’invalidité des actes de vêture et
de profession de Jean-Jacques Dancette. Voyons si dans
ces actes on s’est conformé aux dispositions de la lo i,
et si l’on y a observé les formes qu’elle prescrit.
Commençons par l’acte de vêture, qui est celui qui doit
constater l’introduction dans le noviciat.
Cet acte de vêture, comme celui de profession, devoit
être inscrit sur deux registres, et autorisé par un acte
capitulaire inséré au commencement du registre, suivant
l'article X X V de la déclara tion de 1736. On n’a pris pu
savoir s'il y «voit eu deux registres, et il y a lieu de croire
qu’il n’en avoit ele tenu qu un seul, puisque dans le procès
jugé par la sentence de 1 oilicialité, ni les religieux de
C lm iy, ni les parons de Dancette, qui étoient parties
dans ce ‘p rocès, n’ont pu représenter le regislrequi auroit
dû rosier dans les archives du monastère, et que leur oppo
sant des nullités dans le registre déposé au greffe, 011
n’auroil pas majiqué de tenter de les faire cesser par la
�( 15 )
représentation du registre qui devoit demeurer dans le
monastère, si dans le lait ces mêmes nullités n’eussent pas
existé dans ce second registre. Ce seroit déjà une première
contravention à. la disposition de la loi.
En second lie u , dans le registre déposé au greffe du
bailliage de M âcon, il n’y a point eu d’acte capitulaire
qui ait autorisé le supérieur à recevoir les actes de vêture
et de profession , formalité encore prescrite par le même
article. Et cette formalité n’est pas sans raison, puisque
la réception au noviciat et à la profession ne peut se faire
qu’après avoir recueilli les suffrages des religieux qui ont
droit de les donner, et qu’il n’y a qu’un acte capitulaire
qui puisse constater la pluralité des suffrages, sans laquelle
l’entrée au noviciat ne peut pas être accoi'dée. Les actes
de vêture et de profession sont des contrats synallagmatiques, qui doivent engager le novice ou le profès envers
la communauté, et la communauté envers le novice ou
le profès.
.
Eu troisième lie u , l’acte de vêture n’a pas été signé
par Dancette; et cette signature est exigée par l’art. X X V II.
E t comment ne l’auroit-elle pas été ? Un pareil acte est.
un acte authentique dont le supérieur du monastère est
le ministre établi parla lo i; et en général tous les actes
volontaires n’acquièrent l’authenticité qu’au tant qu’ils sont
signés par les parties, et le défaut de signature ou de la
mention que les parties ne savent pas signer, les rend par
cela seul radicalement nuls.
En quatrième lieu, l’acte de veture, comme celui de
la profession, doit être fait, suivant le môme article X X V II,
en présence et signé par deux des plus proches païens ou
�( r f)
amis. O r, clans celui dont il s’agit, il n’y a ni présence ni
signature de parens ni d’amis : et si l’on disoit qu’il n’y
avoit sur les lieux ni parens ni amis , au moins auroit-il
fallu les remplacer par deux tém oins, la présence des
témoins pouvant seule constater l’authenticité des actes,
et les ordonnances prononçant la nullité des actes publics
qui sont faits sans témoins.
En cinquième lieu, suivant l’article X X V I I I , le dépôt
de l’un des deux registres doit se faire, dans les cinq ans,
au greffe cta la justice royale. O r, ce n’est que huit ans
après l’acte de vêture dont il s’a g it, qu’il a été déposé
un registre au greffe du bailliage de M açon; en sorte que
pendant les trois ans qui ont suivi le délai prescrit par
la loi on a eu la facilité de faire ou refaire le registre à
volonté, pour y faire tous les changemens possibles.
En sixième lieu , suivant l’article X X V I I , il doit être
fait mention, dans les actes de vêture et de profession,
non-seulement des noms des père et mère de celui qui
est admis au noviciat ou à la profession, mais même de
leurs qualités ; et dans l’acte de vêture dont il s’« g it,
nulle mention des qualités des père et mère de Dancettc,
Ce u’est donc pas en un seul point qu’on s’est écarté
de la disposition de la loi ; elles ont toutes été violées dans
l’acte de vêture, ou l’on n’a observe aucune des formalités
essentielles qu’elle prescrit. D e là doit s’ensuivre néces
sairement la nullité de l’acte de vêture.
Mais la plupart des formalités négligées dans l’acte de
vêture, l’ont été également dans celui de la profession.
i°. Point d’acte capitulaire qui ait autorisé à recevoir la
profession. 2°. Point de double registre. Ni en l’ofïicialité
de
�( i7 )
dé M âcon, ni au parlement de Paris, les religieux de
C lu n y , ni les parens de Dancette n’ont pas pu justifier
de celui des deux registres qui devoit demeurer déposé
dans les archives du monastère. Il est possible que ce
registre n’ait jamais existé, ou que l’acte de profession
qui devoit s’y trouver manquât des formalités nécessaires;
sans quoi on n’auroit pas négligé de le représenter, soit
en l’officialité, soit au parlement. 30. Dans le registre
déposé au greffe, l’acte de profession n’énonce pas les
qualités des père et mère ; formalité exigée par l’ar
ticle X X V I I de la déclaration de 1736. 40. Une autre
formalité essentielle dans l’acte de profession, également
exigée par l’art. X X V I , c’est que cet acte soit entièrement
écrit en français ; au lieu que le plus essentiel de l’acte de
profession , le serment qui devoit attacher le religieux
au monastère, se trouve écrit en latin.
L e défaut d’observation d’un si grand nombre de for
malités , soit dans l’acte de v ê tu re , soit dans celui de
profession, doit donc nécessairement rendre ces deux
actes invalides, et les faire considérer comme n’ayant
jamais existé.
Et qu’on ne dise pas que les lois, en prescrivant ces
form alités, n’ont pas prononcé la nullité des actes où
elles n’auroient pas été gardées. Ecoutons sur cela ce
que nous dit notre célèbre Domat.
« Les formalités ont été inventées pour rendre les
« actes valables, c’est-à-dire, pour faire qu’ils aient leur
« effet, par la preuve qu’elles font de leur vérité. Que
« s’il est nécessaire qu’ils aient quelque forme qui en
« prouve la v é r ité , il y a autant ou plus de nécessité
n
*.4
�( 18 )
«
«
«
«
«
«
«
qu’un acte sérieux et important soit accompagné des
preuves de la vo lo n té, qui non - seulement excluent
tout soupçon d’autre volonté que de la sienne, mais
qui donnent à ses dispositions le caractère d’une volonté bien concertée, et dont la fermeté et l’autorité
doivent établir le repos des familles que ces dispositions peuvent regarder. »
Il est vrai que l’observation de Dom at, que l’on vient
de rapporter, est placée dans son ouvrage sous le titre
des formalités des testamens : mais le principe qu’il établit
est général ; il parle de toutes sortes d’actes, et ce n’est
que l’application du principe qu’il en fait aux testamens.
L a preuve en est dans ce qu’il dit que les form alités des
actes n ont été inventées que pour les rendre valides,
c e s t - à - d i r e , pour fa ir e q u ils aient leur effet. D ’un
autre côté, lorsqu’il ajoute, à l’égard des testamens, qu’il
y a nécessité qu’un acte sérieux et important soit accom
pagné des preuves de la volonté, qu’il fait résulter de
l’observation des formalités, quel acte plus sérieux et
plus important que celui qui exclut un individu de la
société, et qui attribue à des tiers les droits qu’il a déjà
Ct qu’il pourroit avoir à l’avenir; qui enfin intervertit
l’ordre des successions dans les familles? quel acte par
conséquent où il soit plus indispensable de garder lesf o r
mai: lé s , qui n'ont été inventées que pour rendre les actes
valides, c'est-à-dire, pour fa ir e q u ils aient leur effet.
Si donc l’acte de vêturc et celui de profession sont in
valides, s’ ils sont nuls, ou, c:e qui est la même chose,
s’ils sont censés n’avoir jamais existé, comme nos lois
exigent impérieusement une profession écrite où l’on ait
�( ï 9 ’)<
obsérve les formalités qu’elles prescrivent, on ne peut pas
argumenter d’une profession tacite par la résidence sous
l’habit monacal qu’eût pu faire -Dancette dans le monas
tère , quelque longue qu’eût pu être cette résidence.
X/ordonnance de-M oulins, celle de 1687, et la décla
ration de 1736, n’admettent d’autre profession que celle
qui est faite dans un acte par écrit, revêtu de toutes les
formalités; erl un m ot, c’est une maxime générale en
France qu’on n’y reconnoissoit point de profession tacite.
C’est ainsi que s’en expliquent tous nos canonistes : T/i
Galliâ minime prorsùs admittitur ulla tacita professio j
dit le père Cabassut; et après lui tous nos autres canonistes , et entr’autres d’Héricourt et Rousseau-Lacom be,
s’en expliquent de même ; et c’est ce qui a été cons
tamment jugé par les arrêts.
Ces arrêts l’ont ainsi jugé; bien que celui qui opposoit
la nullité ou qui réclamoit contre ses vœux eût demeuré
d ix , vin gt, trente ans et même plus dans le monastère
et sous l’habit religieux. D e là l’axiome du droit canon :
L ’habit ne fait pas le m oine, H abitas n o n fa c it monac h i n n ce que les canonistes expriment encore en d’autres
termes : L e capuchon ne fait pas le m oine, mais la pro
fession, Cuculla n o n fa c it monachwn , sed professio.
On trouve les arrêts qui l’ont ainsi jugé dans presque tous
les arrêtistes : on peut citer en particulier celui du 28 mai
1603, rapporté par M . Bouquier,'dans l’espèce duquel
il y avoit vingt-huit ans de résidence dans le cloître, sous
l’habit monacal; mais surtout on doit remarquer l’arrêt
du Journal des audiences, du 16 juillet 1657, rendu en
faveur de Christine de Haro contre son frère. Elle avoit
C 3
�( 2° )
résidé pendant trente ans dans le monastère de la Saalle,
dépendant de l’ordre de Cluny, toujours sous l’habit de
religieuse; i l y avoit de plus contr’elle cette circonstance
que dans plusieurs actes capitulaires où elle avoit assisté
elle y a v o i t pris la qualité de professe : son frère offroit
môme la preuve du vœu et de la profession, et il avoit
déjà obtenu monitoire à cet effet. Cependant elle fut
admise au partage des successions de ses père et mère.
L ’arrêt fut rendu en grande connoissance de cause, après
l’instruction qxii suivit un appointements
Parmi beaucoup d’autres arrêts semblables qu’on pourroit citer, et dont quelques-uns sont même rappelés dans
les Mémoires du clergé, il y en a surtout un bien remar
quable, en ce qu’il a été rendu pour cette province, et
pour une profession qui avoit été faite dans le couvent
des cordeliers de cette ville. En voici l’espèce.
Pierre de Pannevert de la Rocliette avoit pris l’habit
religieux dans le couvent des cordeliers de Riom . Son
acte de vôture étoit du 3 août 1690, et il avoit fait pro
fession le 6 août 169 1, après un an et quelques jours de
noviciat. Quelques années après il avoit déserté le monas
tère; il fut lieutenant au régiment d’Orléans; il fut ensuite
interprète dans les ordres du M ont-C arm el et de SaintLazare, écuycr du duc de la Force; et, dans tous les actes
qu’il avoit faits, il avoit toujours pris le nom de Pierre de
Pannevert, écnyer ou chevalier, seigneur de la Rochette.
Il se maria en 1729 avec la demoiselle M ansion, et ne prit
d’au Ire qualité que celle d’écuyer, sieur de la Rochette.
Il mourut sans enfans en 1743*
Un au après sa m o rt, sa veuve fit assigner au chûtelet
�)
le sieur de Pannevert, frère du défunt, pour voir ordonner
l’exécution d’une donation réciproque de tous les biens
du prédécédé en faveur du survivant, portée par leur
contrat de mariage.
'
On lui opposa que le mariage n’avoit pu produire
aucun effet c iv il, parce que Pierre de Pannevert étoit
engagé par des vœux en religion dès l’année 1692.
11 y eut appel comme d’abus du mariage, interjeté par
M . le procureur général; et le frère du défunt adhéra
ù cet appel.
Sur cet appel la veuve opposa la nullité des actes de
vêtui’e et de profession de Pierre de Pannevert, sqp mari.
Elle dit que l’acte de vêture n’avoit pas été signé par
Pierre de Pannevert; que l’acte de profession n’étoit signé
qu’imparfaitement Pierre de la R ocliette, sans exprimer •
le nom de famille Pannevert; qu’il y avoit plusieurs fa
milles dans la province du nom de la Rochette, et qu’une
signature imparfaite ne valoit pas plus qu’ un défaut absolu
de signature. Elle opposa que dans l’acte de vêture ni
dans l’acte de profession il n’y avoit aucune signature de
parens ni d’amis. Elle disoit que tant de vices rassemblés
dans ces actes formoient autant de moyens d’abus, parce
que toutes contraventions aux lo is , commises par les
ecclésiastiques séculiers ou réguliers dans les actes de leur
juridiction volontaire ou contenticuse, etoient des abus;
qu’il n’étoit pas nécessaire que la peine de nullité lût
prononcée par la loi pour caractériser l’abus, qu’il suffisoit que ce qu’elles ont ordonné, de quelque manière que
ce soit, n’eut pas été suivi et exécuté de la part dis ecclé
siastiques. On ajoutait que les formalités prescrites par
.
(
�C
)
les ordonnances, pour la solennité des mariages, n’étoient
point ordonnées à peine de nullité, et que cependant les
mariages qui pèchent dans l’une ou dans plusieurs de ces
formalités étoient abusifs, et jugés tels journellement par
les arrêts.
Tels furent les moyens sur lesquels fut rendu l’arrêt
du 16 mai 1746, par lequel il fut dit qu’il n’y avoit point
d’abus dans le m ariage, et qu’il y avoit abus dans la pro
fession de Pierre de Pannevert. On a î-ecueilli cet arrêt,
l’espèce et les moyens sur lesquels il fut rendu, dans le
traité de la mort civ ile, de Riçher ; et il est encore rappelé
dans le Répertoire de jurisprudence,
Il y a sur cet arrêt une observation qui n’échappera pas
au tribunal, c’est quependant cinquante-un ans qui s’étoient
écoulés depuis la profession de Pierre de Pannevert en
1692, jusqu’à sa mort en 1743, il n’y avoit jamais eu de
sa part aucune réclamation conti’e ses vœ ux; et par con
séquent ce ne fut que sur la nullité des actes de vêture et de
profession, que l’arrêt prononça qu’il y avoit abus, quoique
la nullité opposée ne fût pas prononcée par les lois, mais
parce qu’on jugea l’inyalibilité des vœux par l'inobserva
tion des formalités.
Il y a donc entre l’espèce présente et celle de l’arrêt de
1746, des rapports sensibles et même encore plus frappans.
Point de signature dans l’acte de vêture, point d’acte capi1Hlai rc qui ait autorisé ni l’entrée au noviciat, ni la profes
sion ; point de présence ni de signature de parons ou amis,
ni même d’aucun témoin, et la présence et la signature des
témoins est une formalité indispensable pour donner aux
actes qui doivent ê tre publics rauLhenLici té, et dont le défaut
/
�C *3 )
est même une nullité prononcée paf les ordonnances. Point
d’expression des qualités des père et mère. Il y a même une
autre nullité qu’on n’opposait pas dans l’affaire de Pannev e rt, c’est celle qui résulte de ce que l’acte de profession
se trouve écrit en latin : il est vrai que celui de Pannevert
étoit également en latin ; mais la nécessité de l’écrire en
français n’avoit pas été établie par l’ordonnance de 1667,
au lieu qu’elle fut prescrite par la déclaration de 173 6 ,
postérieure à la profession de Pannevert, mais antérieure
ù celle de Dancette*
Les actes de vêture et de profession de Dancette abondent
donc de nullités parle défaut d’observation des formalités*
mais on va présenter une autre nullité qui tient directement
à la substance des vœux.
Seconde nullité.
.
L e droit canonique, comme le droit civil, déclare nuls
tous les actes qui sont l’effet de la crainte ou de la violence ;
mais surtout la profession en religion exige la plus parfaite
liberté dans les personnes qui l’embrassent : de là la récla
mation autorisée par le concile de Trente et par l’ordon-*nance de Blois, contre les vœux de religion forcés par la
crainte ou la violence.
■
Il est vrai cependant qu’en g én éra l, et le concile et
l’ordonnance exigent que la réclamation soit faite dans les
cinq ans; mais, suivant tous les canonistes et la jurisprudence
constante des arrêts, et comme le disent les Mémoires du
clergé , tome 4 , pages 208 et 289 , « les cinq ans donnés
« à ceux qui sont entrés par force dans les monastères ,
« pour réclamer contre leurs v œ u x , ne doivent point être
�( 24 )
«
«
«
«
«
«
expliqués précisément de cinq ans après la profession y
sans avoir égard aux circonstances et empecliemens qui
n’auront pas laissé la liberté de réclamer; mais on doit
les entendre de cinq années utiles, qui sont comptées du
jour que la violence a cessé, et que celui qui a été forcé
à faire profession a pu agir pour se faire restituer. »
D ’un autre côté, il n’est même pas nécessaire que l’action
en réclamation ait été exercée dans les cinq ans utiles après,
que la violence a cessé; il suffit qu’il y ait eu des protesta
tions de la part de celui qui veut réclamer : c’est encore le
principe enseigné par tous les auteurs. Il suffit de citer
d’H éricourt, titre de la réclamation contre les vœux ,
article XIII. « Quoique le religieux, dit cet auteur, qui
« veut réclamer contre ses vœ ux, soit obligé de proposer
« ses moyens au supérieur, et à l’ordinaire dans les cinq
« ans de sa profession, il n’est pas nécessaire qu’il fasse des
« poursuites dans le même temps pour être relevé, ses pro
« testations conservant le droit qu’il a de demander à ren
« trer dans le siècle, pourvu qu’il n’ait pas laissé écouler
cc depuis un assez grand nombre d’années, pour qu’il soit
« ccnse avoir i-atifié tacitement sa profession. »
Pour appliquer ces principes , nous avons à établir ,
i° . que les vœux de Dancette ont été l’effet de la crainte et
de la violence; 2°. qu’il a protesté dans un temps utile ,
pendant et après que la violence et la crainte ont cessé;
3°. qu’il a exercé son action en réclamation et nullité des
vœux , dans un temps prochain de ses dernières protesta
tions. Trois articles qui doivent justifier pleinement la
Bcntence de l’ollicialité, qui a déclaré nuls les actes de veturo
et de profession , et qui l’a renvo3Té au siècle.
A r t ic l e
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A .B.-T I 'c L* E''>jP R ‘È rÏVÎ ?t E R. ’
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• En l’officialité-, Dancettç a,voit m isen fait la violence et
la crainte qui avoient-forcé son entrée dans le monastère
de Cluny : il en avoit offert la preuve par témoins; mais
il en avoit.dejplus rapporté, des -.preuves écrites, et ces
preuves écrites-furent jugées suffisantes;, sans être obligé
de recourir à la prejive par témoins ; et ce motif joint
d’ailleurs aux nullités des actes, de vêture et de profession,
déterminèrent la sentence de l’ofKcialité à prononcer la
nullité et le renvoi au siècle. Çes mêmes preuves écrites
furent présentées au parlement; sur l ’appel comme d’abus;
et elles sont dfautant plus éyi^e^tep quelles actes qui lea
renferment procèdpnt du fait; même ¡des personnes qui sont
aujourd’hui nos seules parties dans la tierce-opposition à
l ’arrêt du parlement de Paris.
’
'
'
Il faut ici se rappeler le procès jijgé en la sénéchaussée
du Puy et au parlement de Toulouse , entre les parens
collatéraux de Dancette , paternels et maternels : procès
dans lequel les-parens paternels liront déclarer nul le tes-,
tament d’André Dancette qui avoit donné tous ses biens
a Marie Robin sa femme , et se firent envoyer en'posses-»
sion d es- biens d’André Dajjcctt.ç , père de Jean-Jacques
Dancette.
,• •
Quels étoient les' parens paternels parties dans le procès?
C ’étoit André Faugier , Françoise Faugier sa sœur , et,
Massadier «on mari. Quellcî?sont aujourd'hui nos parties
adverses? C’est la même Françoise Faygierj et Massadier
son m ari, qui agissent n o n - seulement en leurs'nom s,
mais encore comme ayant les droits d’Aline Faugier, ' ,
D
�( 26)
Dans le procès en la sénéchaussée du Puy> et au par
lement de Toulouse, Annet F au gier, sa sœur, et Massadier son mai’i, étoient entrés dans les plus grands détails
sur la conduite de Marie R o b in , mère de Dancette, pour
faire passer à ses propres héritiers tous les biens de son
m ari, au préjudice des héritiers de celui-ci; et ils s’étoient expliqués on ne peut pas plus clairement sur les
violences exercées contre Jean-Jacques Dancette et sa
sœ ur, pour les forcer à prendre l’état religieu x, dans
deux mémoires imprimés et signifiés au parlement de
Toulouse : mémoires qui ont été heureusement conservés.
Dans le premier de ces mémoires, signifié le 7 avril 1789,
après avoir dit que du mariage d’André Dancette et de
Marie Robin éloient issus trois enfans, du nombre des
quels étoient Jean-Jacques et Marguerite Dancette, voici
comment ils s’expliquoient sur les mo}Tens employés par
M arie R o b in , pour obliger ces deux derniers enfans à
prendre l’état religieux :
« L e sieur A ndré Dancette étoit d’un caractère timide
« et foible, se laissant aisément conduire et subjuguer par
« ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lu i; il fut
« marie avec la demoiselle Marie R o b in , femme d’un
« caractère difficile, acariâtre, im périeux, exigeante,
« n’aimant rien qu’elle-même.
.
«
«
«
«
«
« Il provint de cette union trois enfans, Claude Dan
cette, avocat, qui deceda en 1767, Jean-Jacques et
Marguerite Dancette , qui furent forcés d’embrasser
l’état monastique, ne pouvant plus supporter l’humeur
difficile, les tracasseries et les mauvais traitemens de
leur mère.
�( 27 )
. Après avoir forcé,ses enfans à faire profession, l’un
« dans l’ordre de' Cluny , l’autre dans le couvent des
« ,ursulines,.il ne manquoit à la demoiselle R obin , pour
« être au comble de ses v œ u x , que de se revêtir des
« dépouilles de ses enfans, etc. »
•
Dans un autre mémoire imprimé, en réponse à celui-ci,
que firent signifier les héritiers de la demoiselle R o b in ,
qui soutenoierit la validité du testament par lequel elle
avoit été instituée héritière d’A ndré Dancette son mari,
ils se récrièrent contre les imputations qu’on faisoit à la
mère contre ses enfans, et traitèrent de fable et de calom
nie le reproche qu’on lui faisoit d’avoir par ses mauvais
traitemens forcé deux de ses enfans à embx-asser l’état
religieux.
Mais comment A ndré Faugier, sa sœur, et Massadier
çon mari répondirent - ils à ces dénégations , dans un
second mémoire signifié le 3 juin 1789, Il faut encore
rappeler les termes de ce second mémoire,
« On n’a pas calomnié la demoiselle R o b in , quand
« on a dit qu’elle avoit forcé ses enfans à faire profes« sion dans l’état monastique, Comment les adversaires
« peuven t-ils soutenir le contraire? eux qui ont été
« témoins, ainsi que tous les habitans.de la ville de
« Beauzat et des environs, des reproches que le religieux
« Dancette a faits à lçi demoiselle R obin, d’avoir contrarié
« ses goûts et son inclination décidés pour le commerce,
« Les tentatives inutiles de ce religieux, sa conduite, sa
« ,fu ite, ne prouvent que trop l’aversipn qu’il a toujours
« eue pour un état que sa mèx’e lui fit embrasser malgré
« \m, ?
D 3
�M >
.
.
.
Qui est-ce donc qui a terni ce langage?'C'é sont ceuxlà même qui âùjourd’liui1attaquent lés jügenïe:ns qui ont
annullé des vœux formés'pàr la crainte, par la violence
et par les mauvais traitem ens,qui, de leur propre aveu,
ayoient forcé l’entrée en religion de Jean - Jacques
Dancette.
.
:
::
V oilà donc la preuve par écrit, et la preuve la plus
irrécusable, puisqu’elle est sortie de la bouche des adver
saires de D ancette, et qu’ils l’ont rendue d’autant plus
éclatante dans des mémoa-es imprimés , que les vœux
de Dancette n’ont pas été libres', qu’ils n’ont été que
l’effet de la crainte et de la violence.
Après des aveux si formels dans des mémoires imprimée
et signifiés, et qui furent produits au parlement de Paris,
sur l’appel comme d’abus, comment le parlement auroit-il
pu ne pas dire qu’il n’y avoit pas d’abus dans la sentence
de l’oflicialité qui avoit déclaré nuls les vœux de Dancette,
e t l ’avoit renvoyé au siècle? et comment, encore aujour
d’hui, s’il pouvoit être question de prononcer de nouveau
sur l’appel comme d’abus , nos adversaires pourroient-ils
sans impudeur rejeter la preuve qu’eux-mêmes nous ont
fournie dans leurs mémoires imprimés et signifiés , qui
tiennent une place intéressante dans les productions de
Dancette.
.
A
r t i c l e
II.
On a vu ci-dévant qu’il est de principe que les cinq
ans accordés pour réclamer contre des vœux qui sont
l’elïèl de la crainte et de la violence, ne commencent à
courir que du jour où la crainte ou la violence ont cessé.
�i
-
‘
( 29 )
_
Mais la crainte et la violence n’ont jamais cessé. D ’abord
ces motifs ont toujours subsisté jusqu’à la mort du fils
aîné Dancette : c’étoit l’envie d’enrichir ce iils aîné aux
dépens des autres enfans, qui avoit excité les mauvais
traitemens de la mère et du père , qui forcèrent leurs
enfans à prendre l’état religieux.
A près la mort de ce fils aîné, la m ère, qui voulut se
rendre maîtresse des biens de son m ari, auroit eu de justes
sujets de craindre de ne pas réussir dans son p ro jet, si
elle n’eut pas entretenu son mari dans les sentimens de
haine qu’elle lui avoit inspirés et fait partager avec elle,
contre ce fils malheureux qu’on avoit entraîné dans la
captivité d’un cloître, la réclamation n’eût fait encore
que confirmer et envenimer la haine. I-e iils sortant du
cloître sc seroit trouvé sans ressource, et sans asile dans la
maison paternelle : ainsi la mère eut toutes les facilités
que son ascendant et son empire sur son mari pouvoient
lui donner pour se faire instituer héritière universelle
dans son testament ; et aussitôt après la mort de son mari
elle se mit en possession de sa succession.
Cependant, long-temps avant la mort du père, dès
176 1, le fils avoit fait des protestations pardevant notaires,
qu’il avoit renouvelées en 1769.01 en 1771- M ais, son
pere m ort, il espéra trouver grâce auprès de sa mère. Il
n’hesita pas dès ce moment à déserter le monastere et à
•quitter l’habit monacal. Tous ses efforts, toutes ses solli
citations auprès de sa mère furent inutiles, et il lut oblige
d'errer cà et là chez des parens ou des amis compatissans
cl sensibles à ses malheurs, toujours pourtant renouvelant
ses protestations en 1776, en 1781 et en 1785.
�( 3° )
.
Mais sa m ère, depuis la mort de son fils aîn é, avoit
tourné toutes ses affections du côté de ses parens et de
deux de ses neveux, l’un desquels par son testament elle
fit son héritier universel, laissant à l’autre un legs consi
dérable par un codicile. Touchée sans doute de quelque
rem ords, elle ne fit le legs d’un domaine venu du patri
moine du p è re , à un de ses n eveu x, qu’à la charge d’en
laisser la jouissance à son fils ; e t , ce qui est surtout à
remarquer, c’est que dans ce dernier actç la mère étoit si
pénétrée de la nullité des vœux de son fils, qu’elle ne le
qualifie pas de religieux, mais bien de prêtre sécularisé.
Elle eut encore la précaution qu’elle avoit déjà fait pren
dre dans le testament du p è r e , de faire faire une insti
tution particulière en faveur du fils, de faire elle-m êm e
une pareille institution dans la jouissance du domaine
dont la propriété fut donnée à son neveu par son codicile j
institution particulière, qui ne put être faite que dans
la prévoyance que le fils pourrait un jour faire déclarer
la nullité de ses vœ ux, et pour, dans ce cas, ne pas vicier
ses dernières dispositions par la prétérition.
A lo rs, qui est-ce qui ne comprendra pas que jusqu’à
la mort de la mère la volonté et la liberté du fils ont tou
jours été enchaînées, que les motifs de crainte et de vio
lence n’ont cessé de subsister tant que le fils a pit craindre
que sa m ère, par des voies extraordinaires qui n’échap
pent pas à la haine, le privât de toute ressource et de tout
secours pour réclamer les biens de son père, qu’elles’étoit
fait donner par un testament, testament que le fils ne
çonnoissoit que par la vo:e publique, sans qu’il en eût
jamais eu une counoissance particulière qui pût i’iijslruire
�( 3i )
des moyens par lesquels il pouvoit attaquer ce testament.
M ais, même encore après la mort de sa mèi’e, il renou
vela ses protestations en 1785. Il fit plus encore; il se
mit en possession de tous les biens de son père , sans
éprouver aucune opposition de la part de ses parens ni
paternels ni maternels, et sans même qu’il se crût obligé
de réclamer contre ses vœ ux, qu’il de voit regarder comme
absolument nuls,'non pas seulement parce qu’ils étoient
l’effet de la crainte et de la violence, mais parce que
tous les actes qui auroient pu les rendre valables étoient
frappés de nullité par l’inobservation des formalités né
cessaires pour les rendre valides.
•
Cependant ayant dans la suite été informé des contes
tations qui s’étoient élevées en la sénéchaussée du P u y ,
et au parlement de Toulouse , entre les Robin et les
Faugier, les premiers demandant la validité du testament
d’André Dancette, et les Faugier demandant la nullité
de ce testament, qui avoit été en effet ordonnée par la
sentence de la sénéchaussée dù P u y , et par l’arrêt confirmatif du parlement de Toulouse, Jean-Jacques Dan
cette , pour se mettrè à l’abri des contestations qu’à la
faveur de ces jugemens on pourroit lui élever pour le
dépouiller des successions de ses père et m ère, il prit
le parti de se pourvoir à l’oflicialité du diocèse de M âcon,
pour faire prononcer la nullité de ses vœux.
Ainsi on croit avoir établi la seconde proposition,
que Dancette avoit protesté dans un temps u tile, puis
que ses protestations avoient non - seulement précédé ,
iriais même suivi immédiatement le temps où la crainte
et la violence avoient pu cesser.
�C 32 )
A
r t
. III.
Enfin , il avoit exercé l’action en réclamation et en
nullité dans un temps prochain de ses dernières pro
testations.
Ou a vu ci-devant, dans les Mémoires du clergé, que
les cinq ans dans lesquels doit se faire la réclamation,
ne courent que du jour où la crainte ou la violence
ont cessé.
•
On a vu également dans d’H éricourt, qu’il n’est pas
nécessaire d’exercer l’action en r é c la m a tio n dans les cinq
ans, pourvu que dans ce temps il ait été fait des pro
testations, et que ces protestations conservent l’action,
si depuis les protestations on n’a pas laissé passer un
assez grand nombre d’années, pour qu’on ne soit pas
censé avoir ratifié tacitement la profession,
D ’après ces principes, quand même la nullité des
vœux n’eût été fondée que sur la crainte ou la violence,
abstraction faite de l’invalidité des actes de vêture et de
profession par l’inobservation des formalités, l’action
de Dancette seroit venue à temps, puisqu’elle lui avoit
été conservée par scs actes de protestation , dont le
dernier n’étoit pas antérieur de cinq ans à l’action
en nullité. La dernière protestation étoit du i 5 avril
1785 , et l’action en nullité fut exercée au mois do
mars i'tqo. D ’ailleurs, cette dernière protestation avoit
été précédée de plusieurs autres, dans l’intervalle des
quelles il ne s’étoit jamais écoulé cinq ans. Enfin , u’étoit-ce pas une protestation continuelle de la part de
Dancette,
�C 33 )
Dancette, d’avoir, d’abord après la mort de son père,
abandonné le monastère, et quitté l’habit m onacal, et
de s’ètre, après la mort de sa m ère, mis en possession
des successions paternelle et maternelle ?
On se persuade donc d’avoir établi invinciblement
les trois articles annoncés pour prouver l a secondé
nullité. i°. On a établi que la profession en religion de
Dancette a été l’effet de la crainte et de la violence ;
et toutes les lois civiles et canoniques déclarent nuls les
actes qui ne sont pas faits dans une parfaite liberté. z°. O n
a prouvé que Dancette avoit protesté dans un temps
U t i l e , avant et après les cinq ans où la crainte et la
violence avoient ce9sé. 30. On a encore prouvé que
l’action avoit été exercée dans les cinq ans de sa der
nière protestation, précédée de plusieurs autres qui
toutes avoient continué de conserver son action.
Mais on avoit encore, auparavant établi une première
nullité par l’inobservation des formalités dans les actes
de vêture et de profession. .
Tout concourt donc à justifier la disposition de la
sentence de l’oilicialité qui avoit déclaré nuls les actes
de vêture et de profession de Dancette, et l ’avoit renvoyé
au siècle. Tout démontre qu’ il n’y avoit pas d’abus dans
cette sentence, et que déjà n’eût-il pas été fait droit
au parlement sur l’appel comme d’abus, et put-il être
question de le juger de nouveau, les appelans ne pour
voient pas attendre du tribunal d’appel un jugement dif
férent de celui qui fut prononcé par l’arrêt du parle
ment. Mais alors quel avantage ne peut-011 pas se pro
met Ire de la lin de non-recevoir contre la tierce-oppopilion?
Ji)
�( 34 )
Seconde proposition.
Quels sont les tiers-opposans ? C’est Françoise Faugier,
et Massadier son mari. A quel titre se présentent-ils
pour former la tiei’ce opposition? C’est d’abord au nom
d’A ndré Faugier dont ils disent avoir les droits. Mais
A ndré Faugier étoit partie dans la sentence de l’ofïicialité et dans l’arrêt du parlement.
Sous ce premier rapport , et comme cessionnaires
d’A ndre F au gier, Françoise Faugier et son mari sont
constamment non-recevables dans la tierce-opposition.
L ’article II du titre X X X V de l’ordonnance de 1667 ne
permet la tierce-opposition contre les arrêts et jugemens
en dernier ressort, qu’à ceux qui n’y ont pas été parties:
or, A ndré Faugier avoit été partie non-seulement dans
la sentence de l’officialité, mais encoi’e dans l’arrêt du
parlement. Ainsi la tierce-opposition qu’il auroit formée
lui-même seroit évidemment non-recevable ; et elle l’est
également contre Françoise Faugier et son mari, q u i, à
cet égard, n’ont pas plus de droits que leur cédant.
Eussent-ils même obtenu la cession d’A ndré Faugier
avant l’arrêt auquel ils forment la tierce-opposition, ils
y seroient également non-recevables, étant do principe
que les successeurs et ayant-cause de ceux qui ont été
parties dans les jugemens en dernier ressort ne peuvent
pas plus qu’eux y former tierce-opposition. C ’est ce que
tous les auteurs et les praticiens nous cnseigncnl, et ce
qui a été jugé par une infinité d’arrefs : on eu trouve
jusqu’à onze dans Denizart et dans le Répertoire de juris
�prudence, qui ont été recueillis dans les arrêtistes. C’est
la faute de l’acquéreur ou du cessionnaire de celui contre
lequel a été rendu le jugement contradictoire en dernier
ressort, de n’avoir pas fait connoître sa vente ou sa cession,
et de n’être pas intervenu.
S’il en est ainsi lorsque la vente ou la cession est anté
rieure au jugement, à plus forte raison doit-il en être de
même lorsqu’elle est postérieure.
La fin de non-recevoir du chef d’A n dré Faugier doit
même paroître d’autant plus accablante, que l’arrêt du
parlement fut rendu de son consentement : c’est ce que
l’on voit dans le contexte même de l’arrêt.
Ce n’étoit d’abord que les R obin, parens maternels de
D ancette, qui avoieht interjeté l’appel comme d’abus de
la sentence de l’officialité ; mais sur cet appel ils avoient,
en vertu d’une commission, assigné A ndré Faugier au
parlement, pour se joindre à eux dans leur appel, et à fin
d’arrêt commun. O r, nous voyons dans l’arrêt qu’André
Faugier avoit donné une requête par laquelle il avoit
conclu à ce que les R obin fussen t déchirés noji-receçcibles dans leur demande en déclaration d'arrêt com
mun par eux form ée contre M e. A n d ré Faugier, ou
en tout cas et subsidiairement seulement qu'ils en f u s
sent déboutés. On ne pouvoit pas un consentement plus
formel de la part d’André Faugier à la sentence de l’officialité , et un aveu plus précis qu’il n y avoit pas
d’abus dans cette sentence : aussi l’arrêt qui intervint et
qui jugea qu’ il n’y avoit pas d’abus, ne condamna pas
seulement les Robin aux dépens envers Dancette, il les
y condamna également envers André Faugier.
E 2
�( 3^ )
Il seroit donc impossible de se refuser à l’évidence des
fins de n on -recevoir contre la tierce-opposition que
Françoise
Faugier
et Massadier son mari ont formée du
j
ii
chef d’André F au gier, et comme cessionnaires de ses
droits.
’
Mais cette tiei’ce-opposition a encore été formée du
chef de Françoise Faugier, en son nom propre et per
sonnel, sous le prétexte qu’étant elle-m êm e héritière
d’A ndré Dancette par la profession en religion de son fils,
elle auroit dû être appelée soit en l’officialité , soit au
parlement sur l’appel comme d’abus de la sentence de
l’oiiicialité.
Il y a trois réponses ù cette objection.
i°. Il n’est pas exact de dire qu’il faille que celui qui
demande la nullité, ou qui réclame contre ses vœ ux, soit
obligé d’assigner sur sa demande ceux de ses pareils qui
sont directement intéressés à ce que sa profession subsiste.
Il n’y a absolument aucune lo i, ni canonique, ni civile,
qui exige cette nécessité. Onproposoit néanmoins la même
objection lors d’un arrêt du mois d’avril i 665 , rapporté
par M . de Catelan ; et voici ce qu’on y répondoit : « Une
« religieuse, par sa profession et scs vœ ux, n’est engagée
« qu'à D ie u , dont les intérêts et les droits résident dans
« la communauté qui l’a reçue, et à laquelle 011 laisse le
« soin de les menager et de les défendre. Ainsi on n’u
« point dû y appeler son frerc, qui n’y a qu’un intérêt
« bien moins considérable en comparaison, et à regarv der la vraie importance des cl 1oses; un intérêt d’ailleurs
« accessoire, et qu’on nomme un intérêt per couse« quentias- tout comme, selon nos arrêts, les seigneurs
�( 37 )
« ne sont point appelés à l’entérinement des lettres de
« grâce-, quoique intéressés aux condamnations-, et tout
« comme les substitués ne sont point appelés dans des
« procès où il s’agit de la validité ou invalidité des ma
lt riages, et dont l’événement peut servir d’obstacle ou
« d’ouverture à la substitution. Aussi la chose'fut-elle
« décidée de même dans le cas pareil d’un frère non
« appelé à la fulmination du rescrit obtenu par la sœur
« qui réclamoit contre ses vœ ux, par l’arrêt du 30 mars
« 16 61, qui déclara n’y avoir point d’abus dans la sen
« tence de l’officialité de M ontauban, qui avoit fulminé
« le rescrit sans appeler le frère. »
Ce que l’on vient de rappeler de Catelan est répété par
les auteurs du Répertoire de jurisprudence, au mot P r o
fe s sio n , où ils disent que n’y ayant aucune loi canonique
ni civile qui exige la nécessité d’appeler les pareils, il est
à croire que l’inobservation de cette formalité ne seroil;
pas regardée comme abusive.
2°. Si 011 étoit obligé cl’appeler les parens, au moins
ne seroit-ce que ceux qui seraient alors directement inté
ressés a ce que la prolession- subsistât. Mais Françoise
F au gier, ù l’époque de la demande en nullité et de lu
réclamation de Dancette, n’avoit pas droit à la succession
(Tu père de Dancette. A la vérité elle étoit sa nièce; mais
elle ne pouvoit venir à la succession que par représenta
tion d’Anne Dancette, sa m ère, sœur d’André, Dancette,
et. laquelle elle-m êm e 11’étoit mor[o qu’après soiijlrère.
Ainsi c’eût élé la mère de,Françoise Faugier qui auroit
succédé à André Dancette, si, les vœux du lils n’eussent
pas été nids.
_ • \ •
�( 38 )
Mais Françoise Faugier, par son contrat de mariage
avec Massadier, du 28 avril 17 18 , avoit renoncé à la
succession de son père et à celle de sa m ère, moyennant
une dot qui lui fut constituée tant pour biens paternels
que maternels, et dans laquelle il fut distingué ce qui
lui étoit donné pour chaque espèce de biens. Par con
séquent sa mere auroit eu recueilli la succession d’André
Dancette son frère, si les vœux du fils eussent été vala
bles ; et cette succession auroit fait partie de celle d’Anne
Dancette, mere de Fi’ançois Faugier, à laquelle elle avoit
renonce. Donc alors , et au temps où Jean-Jacques
Dancette avoit demandé la nullité et réclamé contre ses
vœ ux, Françoise Faugier n’avoit aucun intérêt à ce que
la profession de Dancette subsistât. Il n’eût donc pas été
nécessaire, pour former la demande en nullité et en récla
mation , d’y appeler Françoise Faugier.
30. On croit avoir prouvé que quand les choses seroient
entières, et qu’il s’agiroit de prononcer de nouveau sur
l’appel comme d’abus, étant d’ailleurs démontré qu’il
n’y a point d’abus, la nullité des actes de vêture et de
profession se trouvant évidente par l’inobservation des
formalités prescrites par les lois, et d’ailleurs n ’a ya n t été
que l'effet de la crainte et de la violence, la tierce-oppo
sition seroit sans objet, puisqu’il fa adroit toujours déclarer
la nullité des vœux. A quoi donc pourroit servir la tierceopposition?
'
Il doit donc paroître démontré que Françoise Faugier
et Massadier son mari sontI non-recevables
dans leur tierce-*
*
opposition du chef de Françoise la u g ie r, soit parce qu’cu
général aucune loi civile ni canonique n’exige d’assignej’
�( 39 )
les parens sur les demandes en nullité des vœux, soit parce
que si cela étoit nécessaire, ce ne pourroit être que pour
les parens qui au moment de la demande en nullité
auroient un intérêt présent à ce que les vœux subsistassent,
et qu’à cette époque Françoise Faugier ne pouvoit pas
avoir cet intérêt, parce qu’elle avoit renoncé à la succession
de sa m ère, et par conséquent ne pouvoit pas la repré
senter dans celle d’A ndré Dancette-, soit parce qu’enfin
on ne pourroit jamais empêcher que les vœ ux de Dancelte ne fussent déclarés nuls.
f
Mais Françoise Faugier n’a voit renoncé qu’à la succes
sion de sa m ère, et non aux successions collatérales de
l’estoc ni paternel ni maternel. Sa renonciation aux suc
cessions directes avoit profité ù Claude et André Faugier
ses frères : or, Claude ayant laissé un fils qui est ensuite
décédé sans postérité, Françoise Faugier la tante a dû lui
succéder conjointement avec A ndré Faugier son autre
frère ; c’est une succession collatérale dans laquelle elle a
dû trouver la moitié de la portion que Claude Faugier
et son fils après lui auroient eue dans la succession d’A ndré
Dancette; et si le fils de Claude Faugier avoit dû être
appelé dans la demande en nullité et réclamation contre
les vœ ux, la tierce-opposition du chef du fils de Claude
Faugier, que Françoise Faugier représente, devroit être
accueillie.
D ’abord cette objection se réfuterait par ce qu’on a
déjà v u , qu’il n’y a aucune loi, ni canonique, ni civile,
qui exige d’appeler les parens dans les demandes en nullité
ou en réclamation contre les vœux; mais d’ailleurs le fils
de Claude Faugier s’est trouvé partie dans l’arrêt du par-
�( 4° )
.
lemcnl de Paris, dans la personne d’André Faugier, son
oncle et son tuteur.
'
Il est vrai qu’on a répondu à cela qu’André Faugier,
lors de l’arrêt, ne pouvoit pas figurer pour son neveu,
parce que la tutelle avoit cessé au moment de la puberté
que le mineur avoit acquise à cette époque, ayant accom
pli sa quatorzième année au mois de mars 1790, c’est-àdire, quelques mois avant l’arrêt du mois d’octobre de
la même année.
Mais comment Jean-Jacques D ancette, qui avoit été
si long-tem ps éloigné de sa fam ille, au ro it-il pu être
informé de l’âge du fils de Claude Faugier, tandis surtout
qu’A ndré Faugier procédoit lu i-m ê m e en qualité de
tuteur ? et s’il n’avoit plus cette qualité, ne devoit-il pas
cesser de la prendre, et en instruire Dancette ? Si lui—
même aujourd’hui proposoit cette objection, pourroit-il
y être recevable, lui qui auroit induit Dancette en erreur?
est-elle donc plus proposable dans la bouche de Françoise
Faugier et de Massadier son m a ri, qui se présentent
comme ccssionnaires d’André Faugier? ne pourroit-on
p-is même ajouter qu’André Faugier n’avoit cessé dêfre
tuteur jusqu’au moment de l’acte par lequel son neveu
lui signifia qu’il avoit atteint sa puberté, et qu’il s’étoit
choisi un curateur?
11 (¡1111enfin toujours en revenir y cotte vérité, qu’aucune
loi canonique ou civile n’exige la nécessité d’appeler les
parens; et il ne faut pas non plus perdre de vue que la
liei'ce-opposilion seroit sans ol^jcl, puisqu’ il faudroit tou
jours prononcer la nullité des vieu x, soit à cause qu’ils
n’étoient que l’eilet de lu violence, soit parce que les
actes
�( 41 )
actes de vêture et de profession n’avoient pas été revêtus
des formalités prescrites par les ordonnances, soit enfin
parce que les protestations avoient conservé l’action en
réclamation qui fut exercée dans les cinq ans de la ces
sation de la crainte et de la violence.
Une autre fin de non-recevoir se tire de l ’approbation
de la sentence et de l’arrêt, par l’exécution qu’en ont
soufferte tant André Faugier que Françoise Faugier et son
mari.
Déjà avant la sentence et l’arrêt, et dès l’instant de la
mort de sa m ère, Dancette s’étoit mis en possession tant
des biens de sa mère que de ceux de son père*, et après
la sentence et l’arrêt il s’étoit conservé dans cette posses
sion sans obstacle de la part de ses parens, et notamment
de Françoise Faugier. Si Dancette , par la rigueur des
décrets rendus contre les prêtres insermentés, dans les
temps désastreux de notre révolution , est mis sur une
liste d’émigrés et obligé de fuir et de se cacher, qui est-ce
qui met la main sur les biens de son père qu’il possédoit?
ce ne sont pas ses parens, ce n’est point A ndré ni Fran
çoise Faugier; c’est la régie nationale qui s’empare de ces
biens,comme appartenans à un prêtre déporté ou émigré;
rc’est la régie qui les met en séquestre et qui les afferme :
et dès l’instant que le'm alheureux Dancclle peut reparo ître, c’est lui seul qui demande la main-levce du sé
questré, c’est à lui seul qu’elle est accordee; et ses parens
continuent et ne cessent de le laisser jouir.
Françoise Faugier et son mari ont prétendu, dans leur
mém oire, que tant que le fils'de Claude Faugier avoit
vécu c’étoit lui qui attennoit les biens; mais c’est de leur
F
�C 42 )
part une fausse assertion, et qui est démontrée par les
baux de ferme consentis par Dancette lui-même avant la
mort du fils de Claude Faugier. Un de ces baux, du do
maine de la D orlière, est du 4 nivôse an 4 ; un autre,
du domaine de Confolent, est du 5 fructidor de la même
année : et la mort du fils de Claude Faugier est posté
rieure à ces baux; elle n’est arrivée que le 5 complémen
taire an 5.
Quel est le moment où Françoise
Faugier
et son mari
3
O
imaginèrent de troubler Dancette dans une possession où
ils l’avoient laissé si paisiblement pendant plusieurs an
nées? c’est seulement lorsqu’il a fait quelques dispositions
. de ces mêmes biens qu’ils espéroient de recueillir un jour
dans sa succession : ce n’est donc qu’ambition et cupidité
de leur part. Toutes ces circonstances se réunissent pour
rendre de plus en plus favorables les fins de non-recevoir
d’ailleurs bien fondées contre la tierce-opposition.
Après cela il est inutile d’observer que si Françoise
Faugier et son mari pouvoient réussir dans leur tierceopposition du chef du fils de Claude Faugier, la sentence
de l’ofiicialité et l’arrêt du parlement de Paris ne devoient
pas moins avoir tout leur eifet du chef d’A ndré Faugier,
constamment partie en son nom dans la sentence et dans
l ’arrêt«, suivant ce que dit Jousse sur l’article X du titre
X X V II de l’ordonnance de 166 7, d’après la disposition
de l’article L I de l’ordonnance de M ou lin s, qui porte
en eifet que « Si un jugement portant condamnation
« de délaisser un héritage, il survient des oppositions
« formées par des tierces personnes, néanmoins celui qui
« a obtenu le jugement sera inis en possession en laquelle
�( 43 )
« étoit le condamné, sans préjudice-aux droits desdits
« opposans. »
,
O n pourroit ici rappeler avec avantage la savante dis
sertation du jurisconsulte M erlin , aujourd’hui commis
saire du gouvernement près le tribunal de cassation, qui
se trouve dans le Répertoire de jurisprudence à la suite
des questions qui y sont traitées sur les mots V œ u x
solennels, et où l’auteur, par les plus profondes recher
ches puisées dans les saintes.écritures et dans les pères de
l’église, établit toute la faveur que méritent les demandes
en réclamation et en nullité contre les vœux. Il suffit de
renvoyer à cette dissertation, dont on se bornera à saisir
quelques traits. « A in si, dit-il, l’intérêt des familles ( dans
.« cette matière ) ne doit être d’aucune considération ; il
« n’entre pour rien dans ]a profession religieuse : ce n’est
« ni pour elles ni avec elles que l’on contracte; elles n’ont
« donc rien à voir dans le contrat, et ne peuvent em
it pêcher sa résiliation. Up religieux qui rentre dans le
« siècle est, par rapport à ses parens, ce qu’est un absent
« dont on partage la succession, dans la fausse persuasion
« qu’il est m ort, et qui reparoît ensuite........Puisque les
« vœux monastiques sont devenus une affaire capitale,
« c’est bien la moindre chose que les conditions requises
« pour leur validité s’observent en rigueur, etc. etc. »
Voilà sans doute qui justifie ce qu’avoit dit D om at, que
les formalités n’ont été inventées que pour rendre les
actes valides, et pour faire qu’ils aient leur eflet; d’ou
suit nécessairement la conséquence que l’inobservation
des formalités doit rendre les actes non valides et sans
elfe t.
�( 44 )
Il n’y a plus qu’un mot à dire sur la tierce-opposition
qu’à son tour Dancette a formée à l’arrêt du parlement
de Toulouse. Il n’a pas entendu former cette opposition
sur ce que cet arrêt a annullé le testament d’A ndré Dan»
cette , son p è re , mais bien sur ce que les Faugier ont
été envoyés en possession des biens de sa succession.
E t m ôm e, à cet égard, la tierce-opposition n’eût pas
été absolument nécessaire, parce que n’étant pas partie
dans cet arrêt, il lui devient tout à fait étranger, et qu’il
n’a pu lui porter aucun préjudice ; ce principe est incon-i
testable: Tes inter alios judicata, aliis neque prejudicium ,neque emolumentum afferrepotest. L . 2 God. quib.
jud. Ce n’est donc que par exhaberance de droits, qu’il
a été formé tierce-opposition à cet arrêt ; et la tierceopposition est recevable, dès que l’arrêt qui n’a pas été
rendu avec l u i , tendroit à le dépouiller d’un bien qui
lui appartient, et sur lequel ceux qui ont été condamnés,
pas plus que ceux à qui il a été adjugé, n’avoient aucuti.
droit.
O n ne peut mieux terminer ce mémoire qu’en rap
pelant encore une foui les aveux des parties adverses, que
l ’entrée en religion do Dancette n’avoit été que l-elfet de
la iorce et de la violénce; aveux consignés dans les deux
mémoires imprimés qu’ils avoiènt signifiés au parlement
de Toulouse.
'
.
v
Page 2 du premier mémoire. L e sieur D ancette
otoit d’uii caractère timide et foible
3 se
laissant
�( 45 )
.
aisément conduire et subjuguer par ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lui ; il fut marié
avec la demoiselle R o b i n , femme d’un caractère
très - difficile , acariâtre , impérieuse, exigeante,
n’aimant rien qu’elle-même.
11 provint
de cette union trois enfans, Claude
D a n c e t t e , a v o c a t , qui décéda en 1 7 6 7 , Jean
Jacques et Marguerite D ancette qui furent forcés
d’embrasser l’état monastique , ne pouvant plus
supporter l ’humeur difficile, les tracasseries et les
mauvais traitemens de leur mère.
‘ Après avoir forcé ses e n f a n s ' à faire p r o f e s s i o n ,
l’un dans l’ordre de C l u n y , l’autre au monastère
des ursulines de M o n istro l, il ne manqua à la
demoiselle Robin , pour être au comble de ses
vœux , que de se revêtir des dépouilles de ses
enfans ; il ne lui fut pas difficile d’obtenir du
caractère foible de son époux une disposition en
sa faveur, telle qu’il lui plut de l’exiger,
etc.
P a g e 7 du second mémoire. On n ’a pas calomnié
la demoiselle R o bin , quand on a dit qu elle avoit
forcé ses enfans à faire profession dans 1 état mo
nastique. Com m ent les adversaires peuvent - ils
soutenir le contraire , eux qui ont été témoins ,
ainsi que tous les habitans de la ville de Beauzat
�( 46 )
et des environs, des plaintes amères, des reproches
que le religieux D ancette a faits à la demoiselle
R o b i n , d’avoir violenté ses goûts et son inclina
tion décidée pour le commerce. L e s tentatives
inutiles de ce religieux, sa conduite, sa fuite et
sa position actuelle, ne prouvent que trop l’aver
sion qu’il a toujours eue pour un état q ue sa mère
lui fit embrasser malgré lui.
Com m ent, après de tels aveu x, a -t-o n assez peu de
pudeur pour vouloir dépouiller un malheureux fils du
patrimoine de ses pères, à la faveur d’un titre que l’on
reconnoît soi-même n’avoir été produit que par la force
ou la violence ? Les parties adverses reprochoient à la
mère de Dancette de s 'etre ,revétue , par ces mauvaises
voies, des dépouilles de ses enfa n s j et eux-mêmes7 que
tentent-ils dans ce moment ?
L e citoyen M A R C H E IX , juge-rapporteur
Le citoyen A N D R A U D , avocat,
L e citoyen V A Z E I L L E ,
avoué,
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Dancette, Jean-Jacques. 1803]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité et la réclamation contre des vœux en religion. Mémoire pour Jean-Jacques Dancette, prêtre, habitant de la commune de Beauzat, département de la Haute-Loire, défendeur en tierce-opposition, et aussi demandeur en tierce-opposition ; contre Françoise Faugier et Jacques Massadier son mari, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1803
1761-1803
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0223
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0725
BCU_Factums_M0726
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53722/BCU_Factums_M0223.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Beauzac (43025)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53721/BCU_Factums_M0222.pdf
1c31a9f9c03b82e405d9144e964d4341
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Text
!
m.
:<
H
1
O
2
Claudine, Catherine
à Jean
décédée
Forissier,
sans
décédée postérité.
postente.
HH
H
* Jean Sabot.
Secondes noces :
Françoise Royon,
veuve de Denis
Courbon.
Marguerite.
�\\
GÉNÉALOGIE.
Claude l ’AIlier,
à Claudine Naime.
____
I
Antoinette l’A llier,
mariée deux fois.
Secondes noces :
à Louis Vachon.
Premières noces :
à Claude Besson.
I
Claudine, Catherine
Marie - Thérèse,
à Jean
décédée
mariée deux fois.
Forissier,
sans
décédée postérité.
trT1 noces:
2e*' noces :
sans
Jean Bcsson. à Jean Sabot*
postérité.
de Peubert.
Pas d’enfans.
4
Antoine.
Anne,
à Jean Sabot de Dunières.
_________X ______
s
Marguer.
Marie-
à
A nne,
Antoinette,
a Jean Varinier.
Rouchon. à Raucon.
* Jean Sabot.
Secondes noces :
Françoise Royon,
veuve de Denis
Courbon.
Marie Sabot,
née le 16 septembre 1702,
mariée le 19 janvier 1726 ,
à Matthieu Courbon. *
fi
I
Marguerite.
I
Françoise
à Jean
Delage.
^
1
✓N
J. Bapt.
à Antoi
nette
Boudarel.
|
Jean
Claudine
Delage
a cédé ses Courbon,
droits à
à Joseph
Claudine Chômât,
Courbon.
intimés.
—■--
-T- •
Marie-Anne,
à Claude Crouxet.
*M atth.
Courbon.
2,lc*- noe.
Françoise
Verdier.
deux
enfans.
I
Antoine,
défendeur
en assist,
de cause.
s
3
Margue
Marierite,
Anne,
à Claude
décédée
Gamicr,
sans
défendeur postérité.
en assist.
de cause.
Margue
rite.
4
,
Pierre
décédé
sans
postérité.
3
4
Antoine,
défendeur
en assist.
de cause.
Pierre.
5
Jean,
à Marie
Couvert.
■V I
Jean ,
appelant.
ñX
�MEMOIR E
.
...........
E N
R
E
P
O
N
S
E
,
.
POUR
“C la u d in e COU R B O N , femme séparée de biens de
Joseph C h om â t ) notaire public, habitant de la ville
‘ de Saint-Etienne, département de la L o ir e , et le citoyen
C H Ô M Â T , tant en son nom .que comme autorisant
sa femm e intimés et demandeurs
TRIBUNAL
D 'A P P E L
C O N T R E
J e a n et a utre J e a n V A R I N I E R , père et fils , pro
' priétaires, habitans du lieu des Ronzes , commune
- de T en ce , département de la' H au te-Loire , appelons
et défendeurs ,•
,
e t
e n c o r e
C O N T R E
A n t o in e V A R I N I E R , A n t o in e C R O U Z E T ,
M a r i e - A n n e C R O U Z E T , et C l a u d e G A R N I E R , son m a riy défendeurs en assistance de cause.
QUESTIONS.
L a femme mineure peut-elle, en contractant mariage, donner à
son mari le droit d'aliéner ses immeubles dotaux?
Les appelans peuvent-ils revenir contre la chose ju g és?
Y a-t-il lésion dans la vente portée p a r le traité du 20 avril 1728.’
F A I T S . '
Du mariage de Claude l’Allier avec Claudine N a im e ,
est issue Antoinette l’A llie r, qui fut mariée deux fois :
A
SEANT A R IO M .
�(
2
)
en premières noces avec Claude Besson, un seul enfant ;
Antoine Besson est provenu de ce mariage.
E n secondes noces, Antoinette l’Allier.a épousé Louis
Vaclion, et à e u , de cette union, quatre enfans; savoir :
Claudine, Catherine, Marie-Thérèse, et Anne.
Claudine, mariée à Je a n Forissier, est morte sans pos
térité; Catherine est décédée iîlle : M arie -T h é rè se fut
mariée deux fois; en premières noces, avec Jean Besson,
dont elle n’a point eu d’enfans ; en secondes-noces, avec
Je a n Sabot de Peubert : elle a e u , de ce m ariage, une
fille, Marie Sabot, née le 16 décembre 1 7 0 2 , et mariée
le 19 janvier 1 7 2 6 , à Matthieu Courbon.
Après la mort de Marie-Thérèse Vachon , Je an Sabot
de Peubert a convolé avec Françoise R o y o n , veuve de
Denis Courbon, et a eu de ce mariage une fille, M ar
guerite Sabot.
D u mariage de Marie Sabot, fille de M arie-T h érèse
Vaclion et de Je a n Sabot, avec Matthieu Courbon, sont
issus deux enfans; savoir : Françoise Courbon, mariée à
Jean D elage, d’où est issu autre J e a n ; et Jean-Baptiste
Courbon, marié à Antoinette Boudarel, d’où est provenue
Claudine Courbon, mariée à Joseph Chômât : ce sont les
intimés.
Claudine Courbon, femme Chôm ât, représente Jean
D e la g e , son cousin , qui lui a cédé ses droits.
Matthieu C ourbon, devenu veuf de Marie Sabot, a
épousé en secondes noces Françoise V e rd ie r, dont il a eu
deux enfans, qui ne sont point parties au procès.
Anne Vaclion, sœur de M arie-Thérèse, épousa Je an
Sabot de Dunièrcs, dont elle a eu trois filles: Marguerite,
�-
.
( 3 )
femme Rouclion ; M arie-A nne, femme Raucon ; el A n
toinette, femme de Je a n Varinier. Il n’est question, au
procès, que de la descendance de cette dernière, qui a
eu cinq enfans; savoir: M arie-A nne, femme de Claude
Crouzet, qui a eu quatre enfans, Antoine, Marie-Anne,
femme de Claude Garnier; Marguerite et Pierre Crouzet :
ces deux derniers sont morts sans postérité; les deux pre
miers sont défendeurs en assistance de cause,
Marguerite et Pierre Varinier ne paroissent point dans
la cause; Antoine, autre enfant de Jean V arin ie r, est
aussi défendeur erç assistance de cause; pt..enfin , Je a n
V arin ier, second du n o m , a épousé Marie Couvert, et
a eu pour fils autre J e a n , troisième du n o m , qui est
appelant.
Telle est la généalogie exacte des parties : on en joindra
le tableau au m ém oire, pour plus grande facilité.
Marie-Thérèse Vachon contracta son premier mariage
avec Jean Besson; Antoinette l ’A llie r, sa m ère, lui fit
donation de la moitié de ses biens présens et à ven ir, et
Louis V ach o n , son p è re , lui donna la moitié de toutes
les liquidations, réparations et améliorations qu’il avoit
à reprendre sur les biens d’Antoinette l’Allier, son épouse»
Les mômes dispositions furent renouvelées et con
firmées par le second contrat: avec Je a n Sabot de Peubert,
du 7 janvier 1702.
L e patrimoine d’Antoinette l’Allier étoit principale
ment composé de deux domaines ; 1 un situé au lieu d(î
D u n ières, et l’autre au lieu de 1 A llier, paroisse de D u nières: elle possédoit également des bois considérables, et
un mobilier d’assez grande valeur,
A z
�.
.
,
( 4 )
.
.
Marie Sabot, le seul fruit de ce mariage, naquit le 16 dé
cembre 170 2 : elle contracta mariage, le 19 janvier 1 7 2 5 ,
avec Matthieu Courbon ; elle n’étoit alors âgée que de
vingt-deux ans et un mois. Elle procéda sous l’autorité de
Jean Sabot, son père; Marie-Thércse V achon, sa m ère,
étoit décédée, et son père étoit remarié avec Françoise
Royon , veuve de Denis Courbon , et mère de Mat
thieu , lors futur époux.
E lle se constitua , tous et un chacun , ses biens meu
bles et immeubles , noms, droits, raisons et actions pré
sens et à venir, qui sont « par exprès, est-il dit, ceux de sa
« défunte m ère, qui consistent en deux petits domaines,
a l’un situé au lieu et appartenances de Dunières, et l’autre
k au lieu et appartenances de l’Allier,paroisse de Dunières;
« donnant pouvoir, icelle fiancée, audit Coui’bon d’exiger
« et recevoir ces biens, de les vendre et aliéner si bon lui
« semble, et d’en disposer comme d’une chose à lui appar« tenante en propre, et tout ainsi qu’il jugera à propos; du
« reçu passé toutes quittances valables, et au refus de
« payement faire toutes poursuites et diligences en justice,
« qu elle veut éti’c aussi valables que si elle-m ém ey étoit
(f intervenue, sans que ledit Courbon soit tenu d1en fa ire
« aucun em ploi , si ce n’est seulement que, du prix qu’il
« retirera de ces biens, d’en achever de payer la constitu« tion de Catherine Courbon sa sœur, femme Teyssier;
« et pour la validité de tous actes que Courbon pourra
r passer, soit pour aliéner, arrenter ou transporter des
« biens de sa femme, elle le constitue son procureur géné« r a l , renonçant à toutes lois contraires.
On a cru devoir transcrire littéralement cette clause
�..
( 5 y
.
singulière èt inusitée ÿ'en observan tique cette permission
indéfinie d’aliéner sfins emploi étoit absolument de nulle
valeur, parce que la femme mineure ne peut donner h son
mari le pouvoir de faire ce qu’elle n’avoit pas le droit de
faire elle-même.
‘
'
Cette remarque est essentielle, et on aura occasion d’y
revenir dans la suite, parce que cfest là.toute la difficulté de
la cause.
L e 20 avril 1 7 2 8 , 1 1 fut passé un traité entre Marie
Sabot, Matthieu-Courbon son mari, et Jean Sabot père,
par lequel ils cédèrent efrenon'cèrent > en faveur d’Anne
Vachon , tante de Marie et femme de Jean Sabot de'Dunières, à tous les droits, actions et prétentions de Marie
Sabot sur les hoiries de Louis Vaclion et Antoinette TAllier,
aïeux de Marie Sabot, aux hypothèques que Jean Sabot
de Peubertpouvoit s’ctre acquises sur ces hoiries, à l’augrnent gagné par lui au moyen de sa survie à Marie-Thérèse
Vachon son épouse j et à tous autres droits généralement
quelconques, avec subrogation au profit des céda taires, et
sans aucune autre garantie, si ce n’est de la loyauté de leurs
créances et droits.
: i ,
' ‘
Il est à remarquer que par cet acte Anne Vachon ,
cédataire, s’est permis de se qualifier de donataire unwer~
selle de Louis Vachon'et d’Antoinette l’AUier ses pere et
m ère, quoiqu’ il n’existe aucun titre qui puisse lui attribuer
cette qualité, qu’au contraire on a v u , par le contrat de
mariage de Marie-Thérèse Vachon , mère de la cédante,
qu’elle'étoit donataire de la moitié de tous les biens de ses
s
.
«
,
*
pore et mère.
1
'
On a encore rapporté une note relative h ce traité du
A 3
�(
6
)
20 avril 1 7 1 8 , conçue en ces termes : « Nota. Cet acte
« n’est point signé de'Courbon, .qui savoit le faire, parce
k qu’il ne voulut point y consentir , et se retira avant la
« confection d’icelui. On voit même sur la minute, qui
•e est au pouvoir du notaire Marnat h P u n ières, que la
te déclaration faite par Courbon de ne savoir signer, a.été
k mise pprès coup par apostille en interligne, et en plus
« petits caractères que ceux du corps de l’acte, et après que
« les autres parties et les témoins ont eu signé. »
Cette note est littéralement transcrite dans le jugement
rendu au tribunal civil de laHaute-Loire, le 4 thermidor
an 4.
.
Marie Sabot, femme de Matthieu Courbon, est morte
le 2 3 février 1 7 3 2 , laissant ses deux autres enfans en mino
rité ; et Matthieu Courbon, son é p o u x, s’est remarié avec
Françoise Verdier dont il a eu deux enfans. Ce second
mariage est du 6 mai 1739.
On a encore exposé, dans le cours de la procédure, que
Claudine Vachon , sœur d’Anne , femme de Sabot de
Dunières, et tante de M arie Sabot, femme Courbon , avoit
epouse Jean Forissier , qui étoit mort laissant un enfant
mâle qui décéda peu de temps après son père , et à qui
sa mère succéda. Cette Claudine Vachon est elle-même
morte sans postérité, le 17 juillet 1 7 5 7 ; elle n’avoit fait
aucune disposition. A u moyen de co qu’elle avoit succédé
à sou fils , elle avoit recueilli un domaine appelé de M erle,
qui devoit être partagé entre tous ses héritiers de droit:
mais Jean V a rin ic r, représenté par l’appelant, jugea à
propos de s’emparer de la totalité de cette succession.
L e 2Q octobre 17 4 9 , Matthieu Courbon, Jean-Bapliste
�.
f( 7 )
... .
.
Courbon son fils; Françoise Courbon sâ fille, et Jos'epïi
Delage son- mari ,'firent assigner Je an 'V a rin ierY e t A n
toinette Sabot fille d’Anne Vachon , et de Jeai^Sabôt de
Dunières , en la ci-devant justice ordinaire de Dunières ,
pour'se voir condartinër à leur délaisser lés domaines de
D u n ières, dëTAllier et de'M erle , dépendais !de la succes
sion dë M arie-Tliérèse Yâclidn^ en "vertu1 des’&onations
a Jelle faites par SeS p ère ',e t‘ tn'è^è ,I’ daihk‘1sôn contrat de
mariage du'7 janvier-1702VaVëfc fëstitù'tiion des jouissances
ainsi que1 de 'droit,<suiV-a!ni? Tëistimatîtiirqui ëri! s’eroit ‘faite.
Antoinette Sabot ë? Jean Vftrinièr opposèrent unë fift
de non recëvoii“ qu’ils Tai'sbi'ent resuiter1, 'soit d ü Jco^tHal:
de "mariage" de M arié!Sa b'ot',' du i^ ’ Jàhvier
} soit
du traité du 20 avril"1^ ^ ’/-' ! nî) "• ! 8 - Ji y-’~ '
*
•
• . -*
*r
»•
*
-.
‘
1 Antoinette'Sabot décé'd’a'dans l’ïnteifVàlTeV-ïfinslancè fut*
reprise, par exploit du 29 mai i y ô o , avec Je an V'arinier
son m ari,'tan t‘ enKs6n iioih propre et'^privé quen qua
lité d’administrateur defi^ersonnes et biens de 'èès enfans 5
et le 17 mars 17 5 3 , Matthieu Courbon e‘t ses ërifans se pour
vurent eriMétfres de réscisibh''èôh:ti;e lè'liüitë de 1728 ¿‘ et
firent signifiér ces lettres, le 21 mài'suiVant, à Jean Marinier.
L a cause «fut appointée par le juge* de Dunièrcè, et,
le 5 juillet'1 7 5 5 , il rendit'tme seliterrcë surproductions
respectives, q u i , en entérinant les lettres'de rescision obte
nues par les demandeurs, cassant, annullant et réVoquant
la clause du contrat de mariage du 19 janvier 1 7 2 6 , en
semble l’acte du 10 avril 1728 ? remettant les parties au
même état qu’elles étoient avant la passation de ce traité,
à défaut pat V a n n i e r d’avoir justifié !d’aucune disposi
tion. valable, en faveur d’Antoinette Sabot sa fciume , dis'
A 2
�..
.
c, 8 :?
.
.
biens par lui jouis et possédés , consistans aijx trois do
maines de T A llier , de Dunières et de Merle , condamne
Jean Varinïer à en faire 4e.,délaissement a(ux intimés , avep
restitution des jouissances depuis la demande.formée con
tre l u •i - V a n n i e "t
r e t contre
Antoinette'Sabot
*■)
^ 'i
) . sa fem m e,s
suivant l’estimation qui en sera faite par experts. "
Il est ordonné q u e, par les mêmes exp erts, .il sera
procédé à l’estimation des .dégradations faites tant dans,
les bois qu’aux bâtimens des trois domaines , dont V arim er sera tenu de leur faire compte, à la charge], par
les demandeurs, de compenser, sur la restitution des
fruits et dégradations, tout ce qui se trouvera avoir été
légitimement payé-sur les biens 5 même de rembourser
tout excédant , s’il s’en trouve.,„par le comptç qui sera
fait entre les:partie.s(; Varinier est condamné en tous les
dépens. ,
c ,
:
,
,
Cette sentence fut signifiée le 26 août -1755 : Varinier
en interjeta appel en la ci-devant sénéchaussée du P u y ,
le .29 du même mois.
, . .
,,
.
. L e procès y fut appointé pqv, jugement du 22 mars 1 7 56.
Jean Varinier mourut le 25 mars 1769 ; Matthieu Cour
bon mourut le 16 mai de lu même, année ; et, le 19 mars
J 7 7 9 , l’instance fut.reprise par Jean-Joseph Chômât et
Claudine Courbon son épouse, Joseph Delage et Françoise
Courbon sa femme, contre Jean Varinier, second du nom ,
liLs de Jean premier et d’Antoinette Sabol.
Los poursuites n’ont pas discontinué : il est même inutile
de grossir ce mémoire des détails de la procédure qui a eu
hou chaque année, jusqu’au 14 décembre 1789. Bientôt le
décès de Joseph Delage interrompit les procédures: les
�( 9 )\
anciens tribunaux furent supprimés et enfin Claudine
Courbon ayant acquis les droits de Je an Delage son-cousin,
par acte du 1 3 nivôse an 4 , reprit les poursuites sur.Rap
pel , par exploit du 3 pluviôse suivant, lies parties se con
certèrent pour attribuer la connoissarice de l’appel au tri
bunal civil: defla¡Haute-Lóire,¡qui, le 4 thermidor ans'4, a ’
rendu un jugement définitif dont il.est important de connoître les dispositions, ainsi que :les< principaux motifs.’-.
Mais avant ,’il est bon d’obsenvè® que Claudine Courbon
s'étoit elle-même rendue appelante de la sentence de D u n ières, en ce quelles ïV&rinier’a voient “été, éondamnés-au
désistement des énl’éao biens .délaissés» par Louis! iVachon,
et Antoinette de FAllier-, .attenduiqu’i^n’erfrevehoit que:
moitié à Claudine' Courbon j etde> tribunal ' de la Hautes
L o ire , par son jugeme’nfcjtfaisant droit suñlesiáppels [res
pectivement- relevés) paroles parties, :deilâî sentence du )5
juillet 1 7 5 5 , dit qu’il a été .m al ]û^&rquant à ce , bie«
appelé' et avant faite droit sùr la demande en restitution
formée par Matthieu Courbon et ses en fan s , contre, l’acte
du 20 avril 1 7 2 8 , et sur les autres'demandes, fins et con
clusions des parties, orddnne qu’aux frais et (avancestde
Claudine C ourbon, sauf'à répéter s’il y échoit , et par des
experts dont les'parties conviendront dans la'décade, il
sera procédé à l’estimation des biens, immeubles délaissés
par Louis Vachon et Antoinette de l’AUier,. pour en rap-t
porter la valeur à l’époque de l’acter.du 20 avril 17285
ordonne que, dans.le môme delüi, Varinier{donnera 1 état
du mobilier délaissé par Vachon et 1 Allier,'sauf les débats
et contredits de Claudine Courbon y ou , à défaut de ce, la
preuve de lu qualité, quantité, valdur et consistance de co
A 5
�mobilier, par commune renommée; reçoit Claudine Cour
bon à prouver et -vérifier^ tant par acte que par témoins,'
dansée même'délai, que le domaine de M erle, ou partie
d’icelui, dépendoit des successions Vaçhon et F Allier, et de
Claudine V ach on leur jille , veuve F o rissier ; enfin-que
Varinier ou ses auteurs 'avoient fait des dégradations considé
rables dans les imnieublCsi dépèndàns de ces successions ,;
soit en; faisant des coupés'dans les bois, soit en défrichant
les prés ou pâturaux, soit en laissant dépérir les bâtimens
des domaines, sauf la preuve contraire dans le même délai.
Il est ordonné que les enquêtes et nominations d’experts
seront faites devant le juge de paix où est située la succes
sion , et lequel est, à cet effet , commis pour entendre les
témoins, nom/ner un expert id’offïce, s’il y a lieu , même
un tiers, s’il-.y^ échoit, et recévbjr l’affirmation du rapport.
P o u r , le tout fait et fapporté,!être ordonné ce qu’il ap
partiendra^'dépens-réservés.
r ’
;
lies j!uges:de la Hautei-Loire se sont mépris sur la véri
table-question. D ’après les motifs qu’ils ont donnés à leur
jugement, ils ont considéré que Marie Sabot n’avoit qu’une
simple actioü en restitution', contre la permission d’aliéner
quelle avoit donnée pav son contrat de mariage. Suivant
èuxyla validité de la clause portant permission de vendre,
dépendoit particulièrement de la question de savoir si elle
avoit été lésee par la. vente. Ils reconnoissent bien que le
délai idb l’action en restitution n a pas utilement couru,
soit contr'elle, parce qu’elle est decédée avant les dix ans
de majorité, soit contre ses enfans, parce qu’ils éloient
mineurs ou sous la puissance paternelle; ils élèvent même
des doutes sur Je point de savoir si l’acte du 20 avril 1728
�( II )
/
contient aliénatîon.de bien dotal;wais il$ regardent comme
certain, qu’au moins l’acte de 1728 est un premier acte
entre cohéritiersi, susceptible- d’être rescindé pour cause
de lésion du tiers au quart. , r> h
¡:i ; ï \ ('r
■ , Ce n’est là qu’une confusion de.prinçipes!|quel que soit
le motif qui ait dicté leur-jugementyil iri’en £st pas-moins
irrévocable et en dernier ressort y, et il faut,partir de la
chose jugée. ,
.
.
¡fn ; .om • ..
■
,- Sans doute il seroitl facile, d’ établir ^sîles choses étoient
entières , que tous les biensrde
Sabot Revoient lui
sortir nature de bien, dotal,; puisqu’elle s’ estjClonstitué; tout
ce qui lui étpit échu p ar le' décès de ses père et mère ; et,
il seroit ridicule d e 'fa ire une' d iffé r e n c e , -pour fixer la na
ture des biens , „entre ceux .que la femme se .Constitue elleiriême, ou ceux quiilui sont cônstitués par des ascendans
ou des tiers-. 1 On sait qü’il n’y a de biens -paraphernaux que ceux' qui sont réservés comme tels; .mais qu’en
pays de droit écrit, lorsqu’ils sont constitués par contrat
de mariage r ils ne peuvent être que.,dotaux.
La femme mineure .qui se m arie, et qui se constitue ses
biens, ne peut donner à'spn mari la permission de les
vendre; cette autorisation , si elle est stipulée, est absolu
ment nulle : la constitution faite par la femme imprime
un caractère d’inaliénabilitéiaüx biens qui y sont compris;
si le mari .vend dans la-suite, l’aliénation est nulle de,
nullité absolue, sans que la femme ou ses héritiers aient
besoin de se pourvoir en restitution.
Mais, dans l’espèce particulière, leti’ibunal de la HauteLoire ayant ordonné l'estimation,il n es’agitplus que d’exa‘
A 6
�miner le mérite du rapport des experts et des enquêtes
qui ont été faites.
Les experts ont opéré sur l'indication de trois cultiva
teurs de la contrée, qui avoient une exacte connoissance
des immeubles délaissés par Louis VaeKon , Antoinette
l’A llier, et Claudine Vachon leur fille. Ils ont cru devoir
prendre deux époques pour base de leur estimation; savoir :
la valeur du moment où ils opéroient, c’est-à-dire, l’année
1 7 9 7 , et celle de l'année où le traité fut passé, c’est-à-dire,
1728. Us ont estimé les fonds composant le domaine de
Dunières à la somme de 16 ,18 7 ^r* valeur de 1797 , et
à celle de 5,277 fr. valeur de celle de 1728.
L e domaine de l’Allier a été porté à 1 1 ,4 5 6 fr. valeur
de 1 7 9 7 , et à 3,747 francs, valeur de 1 7 2 8 ; de manière
que ces deux domaines forment un objet de valeur de
27,643 fr. ; et en 1728 ils valoient 9,024 fr.
Cette dernière base doit faire la règle. Elle établit une
lésion énormissime, puisque Marie Sabot renonça , à cette
époque, moyennant une modique somme de 1 , 1 3 0 fr.
aux droits qu elle avoit sur les biens dans lesquels elle
amendoit moitié, laquelle moitié forme un objet de 4 5i 2 f.
outre le mobilier pt les dégradations qu’elle avoit droit de
répéter.
Relativement à ce m o b ilier, l’enquête à laquelle elle
a fait procéder est composée de sept témoins.
L e premier ignore en quoi consistoit ce mobilier; mais
il est à sa connoissance que Je an Varinier père avoit fait
couper en entier un bois pin, appelé la Garenne d’ Hougeuet, une partie ‘de bois appelée Palissac, le tout dépen-
,
�( 13 )
^
dant de ces successions. Il ignore s’il a existé un domaine
appelé du Merle, situé au bourg de Dunières ; mais il as
sure qu’il y a eu un pré de ce nom, qui dépendoit des succes
sions de Louis Vachon et d’Antoinette l’A llie r, et de celle
de Claudine Vachon, veuve Forissier.
L e second témoin ne sait pas précisément en quoi consistoit le mobilier délaissé par Louis Vachon et Antoinette
FAllier ; mais il a cependant connoissance que Claudine
V ac h o n , veuve Forissier, avoit laissé deux vaches, un
cochon, trois lits et autres meubles meublans.
-Quant aux immeubles, ce témoin atteste que le pré
appelé du Merle dépend de la succession de Louis Vachon
et Antoinette l’A llie r , et de Claudine Vachon leur fille; il
déclare que Je a n Varinier père a dégradé le bois de
Garenne d’Hougenet, et qu’il existoit une maison, dépen
dante de ces successions, qui a été démolie par les acqué
reurs de Jean Varinier.
' L e troisième témoin dit que Claudine Vachon ameublissoit et récoltoit le fourrage du pré du M erle; il dépose
également de la dégradation commise dans le bois d’Hou
genet.
L a déclaration du quatrième témoin est relative à la
destruction de deux bois faisan! partie de la succession de _
Vachon et l’A llier, et qu’il impute à J e a n Varinier.
Les troisautres témoins, dont la déclaration est uniforme,
disent que Claudine Vachon n laissé un mobilier dont ils ne
Connoissent pas la valeur; mais ils attestent également le sdégradations commises par les Varinier ou leurs auteurs,
dans les bois dépendons- des successions de Louis Vachon
et Antoinette l’Allicr.
�( *4 )
Ces déclarations suffisent sans doute pour prouver qu'il
existoit un mobilier dépendant de ces successions, dont
Jean Varinier a à se reprocher de ne pas avoir fourni
l’état. Si on n’a pas acquis de grandes lumières sur la valeur
et la consistance de ce mobilier, 011 doit le fixer par ap-*
proximationet proportionnellement à là valeur des immeu
bles possédés par les auteurs des parties ; ce n’est point
exagérer que de le fixer à une somme de 2,490 fr.
T e l étoit l’état de la cause, lorsqu’il est encore survenu
un changement dans l’ordre judiciaire, qui a procuré aux
parties l’avantage d’être jugées par le tribunal d'appel ,
comme substituant le tribunal civil,
Jean Varinier a élevé une foule d’incidens, et a proposé
plusieurs moyens de nullité,* mais, la cause plaidée contra-*
dictoiremeut le 6 fructidor an j o , le tribunal a rendu un
jugementqui,sanss’arrêteraux moyens de nullité,a ordonné
qu’il seroi t passé à la discussion du fond, et de suite a appointé
les parties au conseil sur l’appel, et en droit sur la demande
en assistance de cause qui a voit été formée contre les autres
cohéritiers de Jean Varinier, Çe jugement a écarté lus
moyens de nullité, sur le fondement qu’il remplaçoit le
tribunal civil de la H aute-Loire, saisi de la connoissance
de l’appel 5 qu'il rie pouvoit connoitre des moyens de nul
lité proposés par Jean V arin ier, parce qu’il ne pouvoit se
réformer lui-même, et que le délai pour se pourvoir en
cassation étoit expiré.
Il faut donc s’attacher uniquement aux moyens du fond ;
Jean Varinier s’est rendu justice sur ce point, eu aban
donnant tous les moyens de (orme.
Cette discussion ne peut présenter de difficultés sérieuses
dans le point de droit,
�( i5 )
Marie Sabot étoit mineure lors de son mariage avec
Matthieu Courbon ; c’est-un point de fait incontestable. E n
pays de droit écrit, la dot des femmes est inaliénable: la
loi Ju lia et la loi unique au code D e rei uxorice actione ,
§. ï 5, défendent d’ aliéner, même d’hypothéquer la dot.
L a conservation des dots est d’intérêt p u b lic , R eipublicœ
interest dotes mulierum salvas esse. 11 n’étoit pas besoin,
dans l’ancien ordre , d’obtenir des lettres de restitution
contre une vente de biens dotaux. Telle est l’opinion de
D u m ou lin , sur l’article C L X X I I I de la coutume de Bour
bonnais , et de d’Argentré sur Bretagne, art. C C L X X X I I I ,
glose I eie. nombre 12.
D ’après ce principe d’inaliénabilité des dots, on a stipulé
souvent dans les contrats de mariage que le mari pourroit
aliéner les biens de sa femme. Mais cette stipulation ne
peut avoir effet que lorsque la femme est majeui-e, lors
de son mariage ; si au contraire elle est m ineure, elle
ne peut donner une pareille autorisation. Les mineurs
ne peuvent aliéner, et par conséquent rien faire qui tende
à l’aliénation de leurs immeubles. C’est ce que donne en
principe le dernier commentateur de 3a coutume sur l’ar
ticle III du titre X I V \ et l’opinion de cet auteur n’est
pas seulement fondée sur le statut coutumier, mais encore
sur la disposition des lois romaines dont la coutume n’est
qu’une exception, et qui n’ajoute rien à la prohibition
des lois.
L e dernier commentateur ajoute que le temps pour
se faire restituer d’une pareille clause ne doit courir que
du jour de la viduité, parce que le mari pourroit em
pêcher sa femme d’exercer son action.
�C t6 )
Marie Sabot est morte long-temps avant son mari ?
laissant ses enfans en minorité : de sorte qu’à l’époque
de la demande en restitution, l’action étoit entière, et a
été formée en temps utile.
L e jugement rendu à Dunières ‘étoit conforme aux
principes, en annullant la clause insérée au contrat de
mariage de Marie Sabot, ainsi quel*acte du 20 avril 1728 ,
Il n’y avoit erreur dans ce jugement qu’en ce qu’il prononçoit le désistement de la totalité des biens, tandis qu’il
n en revenoit que moitié à Marie Sabot. C ’est pour cela
aussi que Claudine Courbon et ses cohéritiers s’en ren**
dirent incidemment appelans : mais la nullité du traité
du 20 avril 1728 étoit d’autant plus évidente, qu’indé^
pendamment de ce qu’il contenoit aliénation de biens
dotaux, les cédans avoient été induits eu erreur , à raison
de ce qu’Antoinetle Sabot avoit pris la qualité de do
nataire universelle, tandis qu’elle ne pouvoit justifier
d’aucnne disposition valable en sa faveur.
Les juges du Puy en ont disposé autrement dans le droit,
mais de la môme manière dans le fait. Us ont pensé que
s’il y avoit quelque difficulté sur la rescision de l’acte y
comme contenant aliénation d’uu bien d otal, il n ’exist oi t
aucun doute pour le regarder comme un premier acte
de partage sujet à restitution , pour cause de lésion du
tiers au quart.
C’est ce motif contre lequel les appelans dirigent tous
leurs efforts, Suivant e u x , le traité de 1728 contient une
cession de droits : un acte de celte nature est aléatoire et
incertain , dénégatif de tout partage; et là les appelans se
veiU’ai'cent d’autorités pour établir que cet açle u ’étoit pas
�C 17 )
g
.
^
susceptible d’être attaqué par la voie de la restitution.
Ils mettent à contribution tous les auteurs du droit
écrit et de tous les parlemens; ils rappellent l’ancienne
jurisprudence, pour en faire la critique, et la nouvelle,
plus conforme à leur opinion, pour la justifier.
Efforts inutiles! parce qu’ils reviennent contre la chose
jugée; parce que, s’il est vrai qu’une cession de droits suc
cessifs ne soit pas susceptible d’être rescindée pour cause
de lésion, il faut en excepter les cas d’e rre u r, de dol ou
d’ignorance, qui se rencontrent dans l’espèce particulière,
où Antoinette Sabot a traité comme donataire univer
selle, quoiqu’elle n’eût en sa faveur aucune disposition,
et ou ses cohéritiers étoient dans un état d'ignorance
absolue de la consistance de leurs droits.
Mais pourquoi se livrer à une discussion superflue? L a
question est jugée en dernier ressort, par le jugement
du tribunal civil du P u y , du 4 thermidor an 4. Il ne
s’agit point de réformer ce jugement; ce n’est plus au
pouvoir des hommes ni des tribunaux; le délai de la cas
sation est expiré ; il ne s’agit que d’exécuter la chose jugée,
c’est-à-dire, d’examiner s’il y a véritablement lésion ou
non dans le traité de 1728. ’
Les appelans prétendroient encore vainement que le
jugement du 4 thermidor n’est que préparatoire; qu il
ordonne, avant Ja ir a droit sur la demande en restitu
tion , que les parties c o n v i e n d r o n t d experts ; que ce n est
qu’ un interlocutoire dont les juges du P uy , comme le
tribunal qui les remplace , peuvent s’écarter à leur gré.
Ce n’est ici qu’une erreur. L a disposition du juge
ment de la Haute-Loire est très-absolue , et n’a rien de
�( i8 )
préparatoire. Il décide, en dernier ressort, que le traité
de 1728 est sujet à restitution ; il fait dépendre la resti
tution d’un seul point de fait, qui est de savoir s’il y a
lésion du tiers au quart.1
Les appelans insistent cependant sur cette objection. Ils
disent que le jugement du tribunal civil de la Hàute-Loire
contient deux dispositions très-distinctes. Par la première,
ajoutent-ils, il a décidé que la sentence de Dunières avoit
mal ju g é , en entérinant les lettres de rescision obtenues
contre le contrat de mariage de 17 2 5 et la cession de 17 2 8 ,
et ils conviennent que cette disposition est très-définitive.
Mais ils s’abusent encore dans ce système, parce que
le jugement de la Haute-Loire n’infirme pas la sentence de
Dunières, en ce qu’elle a entériné les lettres de rescision ,
mais seulement en ce qu’elle a adjugé la totalité des biens ù
Claudine Courbon.
On doit l’inférer du rnotif qui porte que l’appel inci
demment relevé par Claudine Courbon jusLifie le mal
jugé de la sentence du 5 juillet 17 5 5 , en ce quelle a coudamné lesVarinier au désistement des entiers biens, et,
dans Je dispositif, le tribunal de la Haute-Loire n’infirme
cette sentence que quanta ce. Les appelans ne sont donc
pas Ibrt heureux ni fort adroits dans cette première obser
vation,
(Quanta la seconde disposition du jugement, elle établit
au contraire que le bien jugé de la sentence de Dunières,
qui a entériné les let 1res de rescision, dépend du point
de savoir s’ il y a lésion dans la vente portée par le traité
de 1728.
O r, cette décision est absolue et définitive ; elle juge
�( i9 )
le point de droit; elle emporte profit en faveur de Claudine
Courbon. Si le jugement eût été rendu en premier ressort,
il étoit susceptible d’ap p el, nonobstant la loi du 3 bru
maire invoquée par les appelans : aujourd’hui qu’il est
rendu sur l’appel, il n’est plus susceptible d’être réform é;
et la seule question que doit et puisse examiner le tri
bunal, se réduit à ces termes : Y a -t -il ou non lésion
dans la vente de 1 7 2 8 ?
'
P our établir cette lézion, il suffit de rappeler que tous
les droits de Marie Sabot ont été cédés pour une somme
de 1 , 1 3 0 francs. L a valeur des biens a été portée, par
le rapport des experts, à l’époque de 17 2 8 , à une somme
de 9,024 francs; la moitié, revenante à Marie Sabot,
étoit de 4 , 5 i 2 francs : il y a donc lésion énormissime,
et presque du tout au tout.
L a critique , que font les appelans du rapport des
experts , ne porte sur aucun fait essentiel. Des objec
tions banales , des reproches d’erreur ou de partialité.
Ils veulent argumenter par comparaison avec les rôles de
la commune de Dunières, des années 1697, 1701 et 1706,
qui prouvent que Claudine Naime n’étoit imposée qu’à
une somme de 3 1 francs 3 sous, 25 ou 27 francs pour
les autres années, etc. comme s’il n’étoit pas de la connoissance de tout le monde que, dans ces temps reculés,
la taille n’étoit jamais en proportion de la valeur de la
propriété.
Ils ont également voulu , sans doute dans 1 intention
d’obscurcir ou de confondre, prétendre que les experts
avoient composé le domaine de Dunières de difïerens
articles provenus de diverses branches de successions.
�C 20 )
Mais ce ne sont là que des allégations qui ne sont appuyées
d’aucuns titres , et qui ne méritent pas de fixer l’attention.
Les appelans ont encore voulu sortir de la poussière
un prétendu testament de Claudine Naime , en faveur
d’Anfoine Besson son petit-fils, en date du 2 1 mai 1694.
Mais on a écarté ce testament d’un seul mot. Il éfoit
nul pour cause de prétérition d’Antoinette de l’A llier,
fille de la testatrice ; et jamais Antoine Besson n’en a ré
clame 1exécution : il paroît, au contraire, qu’Antoine
Besson n a pas meme accepté la succession de sa grand’m è re ; et, dans la requête qu’il présenta le 5 juin 17 0 0 ,
il ne fait aucune mention de ce testament : il ne vouloit
se porter héritier de son aïeule que sous bénéfice d’in
ventaire.
L a dernière objection que proposent les appelans, est
de dire que Claudine Courbon est garante de sa propre
demande, comme héritière de son p è re, qui vendit soli
dairement lors du traité de 1728,
Mais Claudine Courbon répond, i°. qu’elle n’est pas
héritière de son père, dont tous les biens ont passé, ù
titre d’institution , aux enfans de son second mariage avec
Françoise Verdier.
20. Il est jugé irrévocablement, par le jugement de la
llau te-L o ire, « Que le rescisoire de l’acte de 1728 l'ait dis<r paroître la garantie, et les fins de non recevoir que les
« Vannier prétendoienl y puiser. »
A in si, en élaguant de ce procès tous les détails inu
tiles, il y a nullité dans la clause du contrat de m ariage,
parce que la femme mineure ne pouvoit donner per
mission d’aliéner,
�(2 1 )
Il est jugé en dernier ressort que le traité de 1728 est
susceptible d’être rescindé pour cause de lésion.
L e rapport des experts établit une lésion énormissime.
L ’enquête prouve qu’il existoit un mobilier dépendant
de la succession de Louis Vaclion et d’Antoinette de
l'Allier. Faute par Jean Varinier d’avoir fait inventaire
de ce mobilier, on doit en fixer la valeur ou la consis
tance dans la proportion des autres biens, dès que les
témoins ne donnent pas des lumières suffisantes.
Les appelans ne peuvent réussir dans leur demande
subsidiaire en amendement, parce que le rapport des
experts est régulier et satisfaisant; que l’amendement qui
est à l’arbitrage du juge, ne doit être ordonné qu’autant
qu’il y a partialité, erreur ou ignorance de la part des
experts.
Il est constaté qu’il y a eu des dégradations considé
rables commises dans les bois, ainsi que dans les autres
immeubles, dont Varinier doit restituer la v ale u r; et
comme il importe que les affaires finissent, il est juste
que Claudine Courbon obtienne, après tant de travaux
et de frais, la restitution d’un patrimoine dont elle a été
dépouillée par l’injustice et la cupidité.
rapporteur.
L e citoyen B R A N C H E ,
Par conseil : P A G È S ( de Riom ) anc. jurisconsulte.
M A N D E T jeu n e, avoué.
A
R I O M , de
,
de L à n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel.. — A n 1 1 .
l'imprimerie
\
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Courbon, Claudine. An 2]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Branche
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
biens dotaux
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Claudine Courbon, femme séparée de biens de Joseph Chomat, notaire public, habitant de la ville de Saint-Etienne, département de la Loire, et le citoyen Chomat, tant en son nom que comme autorisant sa femme, intimés et demandeurs ; contre Jean et autre Jean Varinier, père et fils, propriétaires, habitans du lieu des Ronzes, commune de Tence, département de la Haute-Loire, appelans et défendeurs ; et encore contre Antoine Varinier, Antoine Crouzet, Marie-Anne Crouzet, et Claude Garnier, son mari, défendeurs en assistance de cause. Questions. La femme mineure peut-elle, en contractant mariage, donner à son mari, le droit d'aliéner ses immeubles dotaux ? Les appelans peuvent-ils revenir contre la chose jugée ? Y a-t-il lésion dans la vente portée par le traité du 20 avril 1728 ?
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 2
1725-An 2
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0222
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Eienne (42218)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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biens dotaux
coutume du Bourbonnais
-
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47ea75bacd2238721c6f74191cc9620a
PDF Text
Text
R
i
E
P
O
N
I*
S
E
.
MEMOIRE
IMPRIME,etc.
P O U R
Les enfans L E C L E R C - C H A M P M A R T IN ,
demandeurs e n intervention et subrogation, et
subsidiairement appelans ;
i»
C O N T R E
É tien n e
D U S S O N - P O I S S O N défendeur
et
intimé.
L e citoyen Dusson retiendra-t-il, pour 5 i?6oo francs,
des Liens qui ; au temps de leur adjudication, en l’an 9 ,
v aloient plus de 100,000 francs? les retiendra - t - il au
A
�( 2)
'
.
,
détrim ent de nombre de créanciers auxquels il est dû
entour 5o,ooo francs, et q u i, dans le sens de la maintenue
de cette adjudication, ne seroient pas entièrement payés?
lie citoyen Dusson réussira-t-il à rendre notre père insol
v a b le , tandis que le vrai prix de ces biens payeroit et
au delà tous les créanciers ? L e citoyen Dusson et l’homme
a u x algarades rép o n d ro n t, avec une extrême d u re té ,
oui ; et nous répliquerons, non. N otre prétention, tout
équitable, toute légitim e qu’elle est, fait leur désespoir;
ils s’en irrite n t, et crient au fie l, à la calom nie, à l’ab
surdité, au déraisonnement, etc. comme si l’on n’étoit
pas bien convaincu de cette grande v érité , que, soit qu’ils
s’abaissent bien aisém ent, soit qu’ils s’élèvent pénible
m en t, ils sont incapables d’offenser personne. Q ui les
connoîtra leur rendra cette bonne justice : on leur doit
aussi celle de laisser dans leurs mains le rameau d’or ; il
y fructifie si bien !
”
1
Nous ne rendrons pas ici compte des faits de la cause ;
nous sommes forcés de le renvoyer à la plaidoierie. L e
citoyen Dusson n’y perdra rien : alors on n’oubliera aucune
des circonstances propres à prouver qu’il ne se présente
pas aussi favorablement qu’il le publie.
�i °. L e s enfans Cham pm artin peuvent-ils intervenir en
la cause de Tappel de leur père ?
.
2°. P e u v e n t- ils suivre soji appel du 9 p ra iria l an 9 ,
nonobstant le traité du 10 m essidor an g ?
Intervention des enfans Cham pm artin.
Il p aro ît constant, dans la cause, que les enfans C ham p
martin ont qualité suffisante pour intervenir. i ° . Ils sont
tout au moins créanciers inscrits contre leur père : cette
qualité est établie par la substitution du 18 novem bre 17 7 9,
et par la quittance donnée par le citoyen Dusson le
3 janvier 1783; enfin, cette qualité est bien form ellem ent
reconnue par le citoyen Dusson. Ce n’est pas le m oment
d’examiner de quelle quotité est la créance. Ils sont créan
ciers d’ une somme quelcon que, et cela su ffit, dans les
circonstances, pour constituer leur qualité.
Ce n’est pas plus le m oment de discuter la question de
savoir si les enfans Champmarli,n sont ou non copropriétaii’es des biens acquis par le contrat du 22 octobre 1782;
s’il s’en agissoit aujourd’h u i, il sci'oit facile de dcm ontrer
au citoyen Dusson qu’il est non recevable à en élever la
d ifficulté, parce qu’il a concouru à la vente du 2z oc-
4. 2,
�( 4 )
<
tobre 1782; parce que le citoyen de Champmartin père
l’a approuvée en faits et en écrits authentiques.
■
M ais ce n’en est point ici le lieu. I,es enfans Champmartin ne peuvent se pourvoir que par action en reven
dication, en conform ité de la loi du 11 brum aire an 7 ;
et l’on accorde -que cette demande ne peut être portée
d’abord qu’au tribunal civil de G a n n a t, sauf l ’appel .111
doit en être de même de leur demande en restitution contré
leur renonciation, du 12 fructidor an 9 , au bénéfice de
~"iir*-vente du 22 octobre 1782 ; elle est accessoire à la reven• $icyiion,>-.Le tout est sujet aux deux degrés de juridiction.
* .*■
attendant, les enfans Champmartin peuvent
toujours ’être considérés au -moins com m e créanciers.
L a question de savoir si certains des enfans Champttiartin, n’étant ni nés n i conçus au temps du testament
du sieur-Lecïerc-de-Beauvoisin, du 18 novem bre 1779?
doivent participer à la substitution, est sans intérêt p o u r
le .citoyen-Dusson ; parce que si les non nés ni conçus n’y
participoicnt p o in t, le tout appartiendroit aux nés ou
conçus, et le citoyen Dusson n’y gagneroit rjen. Les nés ou
conçus auroient droit pour le tou t; et si aujourd’hui tous
les enfans Champmartin sont d’accord entre eux , il n’a pas
qualité pour s’en plaindre.
20. Les enfans Cham pm artin ont figuré en cause prin
cipale : à leur é g a rd , le prem ier degré de juridiction a
été stibi ; ils ont donc pu demander d’in terv en ir, potir
le u rs’ intérêts , en caisse 'd’apjjel ? dans une aiiaire où ils
ont figuré en prem ière instance.
M a t s y avoit-il instance en tre-le citoyen Cham p.maviiji
(»t i c citoyen PusjüîU Î
'
�......................................
( 0 )
.
' "L e citoyen Dusson soutient la négative ; i ° . parce que,
dit-il,"(contre sa science, et profitant sans doute de l’igno
rance des enfans Gliampmartin sur les fa its ), l’appel du
citoyen de Cliam pm artin père étoit sim ple, et que
celui-ci n’avoit pas intim é le citoyen Dusson*, ( i l nous
-renvoie à l ’article X X V I I I du titre X I de l’ordonnance
de 1 6 6 7 ) ;- 2 ° . parce q u e, par le traité du 10 messidor
arf 9 , le citoyen de Cliampmartin s’est départi de son
appel.
Ici l’on répond au prem ier moyen seulem ent, et l ’on
renvoie la réfutation
du second au §. su iv a n t, parce
qu’il s’y rapporte plus particulièrem ent.
L e moyen du- citoyen D usson, contre l’ intervention,
m anque par le fait. En e ffe t, il est bien vrai que le
citoyen de Chiim pm avtin lî’a pas in tim é le citoyen
Dusson; mais celui-ci a anticipé le citoyen de C ham pm artin, par exploit du 12 prairial an* 9 ; il l ’a assigné
pour procéder sur l’a p p el, pour vo ir confirmer la sen
tence du 8 floréal an 9 : s’il est certain que les tribunaux
ne sont saisis des affaires que par les assignations don
nées devant e u x , ils le sont, très-certainem ent, aussitôt
l ’assignation donnée. A lo rs les_tierces parties intéressées
peuvent intervenir , et prendre les conclusions utiles
a leur position. D e là une conséquence irré sistib le , que
c’est le conseil du citoyen Dusson q ui, après un travail
p é n ib le , a accouché de l’absurdité q u ’il nous impute.
- ,»
;
t .* ., * . ’ | ■ . . • §.
o» »>I I . , : j j /
.¡¿ippel du .g p ra iria l an 9.
-,
•
. ,
Ce p oin t d épen d de la ‘va lid ité du traité du 10 mes-
U
/
•pi1
$
�(6 )
, .
sidor an g. Dans les termes où en étoit le citoyen de
Cham pm artin, a-t-il pu le passer valablement à l’insu,
sans le concours des créanciers inscrits ?
A cet égard , nous avons dans le digeste des lois faites
pour la cause, au titre X I , quœ in fr a u d , cr e d .fa c ta
.
s u n t, UT RESTITUANTUK, liv. 42.
>
Dans ce titre sont deux édits du p réteu r, et des dé
cisions des jurisconsultes romains , qui font loi en
France.
L e prem ier édit porte : « Quœ fr a u d a tio n is causa
« gesta erunt cum eo q u ifr a u d e m non ig n o r a v e r itd e
« his cu ra to ri bon oru m , vel ei c u i de ea re actionem
« dare opportebit, intrii annum quo experiundi potesc< tas f u e r i t , actionem dabo : idque etiam adçersüs
t< ipsum q u i fra u d em f e c i t , serçabo. »
.
Sur ces m ots, quœ fr a u d a tio n is causa gesta e r u n t,
V u lp ie n d it , n °. 2 : « H œ c verba generalia s u n t, et
« c o n t i n e n t in se om nem omninà in fr a u d e m f a c t a m ,
« vel alienationem , vel quem cw nque contractant. »
E n la loi 3 , V u lp ien d it , §. I : Gesta fra u d a tio n is
ca u sâ accipere debem us, non solîim ea quœ contrahens
gesserit a liq u is , v e r u m e t i a m s i e o i i t È d a t a o r E R A
ad
JUDICIUM NON ADFUIT , VEL
LITEM MORI
PA
TI AT UR. (H parle du débiteur). E t § . I l , E t q u i a l i QUID FECIT UT DESINAT HABERE QUOD HABET, ad
hoc edictum perlm et.
.
.
D e là il suit , i 9. que tous les actes passés entre un
débiteur et celui qui n ’ignoroit pas la fraude, au détri
ment des créanciers, donnent lieu à l’action révocatoire,
et que cette action dure un a u , à com pter de' l’instant
�C7 )
.
^
où les créanciers ont pu a g ir , c’est-ù-dire , du jour où
ils ont découvert ces actes, à die detectœ J ’r audis ;
2°. qu’il y a fraude contre les créanciers, toutes les fois
que le débiteur ne se défend pas, lorsqu’il Je peut, sur
une demande qui lui est formée. S i ad ju d iciu m non
a d fu it, ì>el litem m o ri p a tia tu r, gesta fr a u d ottoni s
causa accipere debemus. Cela sétend jusqu’à un traité
sur p ro cès, par ce que dit A ccurse : Ciim p otuit litem
'con testari, et non fe c it etc. quod non placet \ parce qu’il
ne peut pas faire qu’il n’ait plus ce qu’il avoit aupara
v a n t : desinai habere quod h a b etj p u tii, ajoute A ccu rse,
patiendo se ju d icio v in c i, vel alias in jr a u d e m obli
gando se.
.
' Dans la lo i 10 , est le second édit du préteur ; il porte:
A I T p r æ t o r : quce L u c iu s T ìtìu s ( le civi^iexiv^fraudandi
*( ses créanciers) causâ^ sciente te ( l’accepteur) , in bonis
q uibus de ea re agitur f e c i t '; ea illi (au x créanciers),
s i eo nom ine quo de agitur, actio e i e x ed icto 'm eo
competere esse-ve o p ortet, e i se non plus quàm annus
e s t , cum de ea re qua de agitur experiun di potestas
o s t , RESTITUAS. I n t E R D U M CAUSA COGNITA , ET SI
SCIENTIA NON S I T , IN FACTUM ACTIONEM PERMITTAM.
«
«
'«
«
«
U lpien d i t , n°. 2 : « Q uod a it præ tor s c i e n t e ( et
non pas SCIENTER, comme l’a fait imprim er le c o n seil Dusson ) TE , sic a ccip im u s, te conscio et J ra u d en i
participante : non enim s i sim plicitçr scio ilium ereditores ha bere, hoc sufficit ad contendendurn te n e r i,
cutn in fa c tu m actione ; sed si particeps fr a u d is est. »
E t n°. 3 : « S i quis particeps quidem fr a u d is non f u i t ,
« verum tam en vendente debitore testato conventus à
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( 8 )
crcditorìbus , ne em eret : an infa c tu m actione teneatur s i co m p a ra ie n t ? et magi s est ut teneri debeat.
N uyi enim caret f r a u d e , q u i consenties testato perseverat. »
v
I,a loi 1 5 , invoquée .par le citoyen D ü sson , porte : « S i
qais cùni haberet T itium crèditorem et\sciret se sof
vendo n o n e s s e hbertates dederit testamento : deindè
dim ïsso T itio , posteà Sem pronium creditorem habere
cœpei'it • et eodem testamento manente decesserit :
hbertates datœ ratœ esse deben t, etsi hœreditas sol
s’endo non sit: qm a Hbertates ut rescindanturi u t ;ru m QUE IN EORÜMDEM.rERSOKAM EXIGIMUS, ET GONSILIUM ET EVENTUM. »
.
.
Dans le cas p ro p o sé , Sempronius-n’a^pas'à se plaindre,
.
«
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.
.
parce qu’au temps où il-est devenu créancier, libertates
datœ erant. L a chose étant faite avant /qu’il y<eût, inté
r ê t , il n’a pas été trom pé. Titius'.seul auroit eu rqualité
pour réclam er, et il a-été satisfait.
<. •
A
..
• Il en seroit autrem ent, si .l’argent prêté»par Sempro,nius avoit seryi à payer T itiu s , parce-que c e lu i- c i en
auroit pris la plncc. Aussi la loi 16 dit - elle -, nisùpripreç
pecunia postenorum dilu issi probentur. A u ssi, Bartole
d it- il, « Q u i scit se habere creditores, et fa cu lta tes suas
n on su fficere, videtur a l ion arenitif r a udem , credito ru m .
.L'insolvable qui v e n d , est jugé vendre in fra u d e m creditorum . D e là il suit tju e, si Sempronius avoit rem
place TiLius, le jurisconsulte Julianus auroit dit qu’ il y
¿1voit consilium et eventus ; et d è s - lo r s , lieu à l'action
,révocatoirc : cela nous paroît h o rs'd e doute, ,
. Dans l’espèce, le citoyen Dusso.11 prétend pue le citoyen
de
�(S Ü
,
dë Champmartin est insolvable : cela seroit v r a i, si l ’ad
judication étoit m aintenue, puisqu’il y a aux hypothèques
pour plus de 80,000 fr. de créances inscrites, et qu’ il y
auroit seulement 5 i , 6 oo fr. à distribuer. Ce seroit donc
.
le cas de dire avec Bartole, i ° . que le citoyen de Cham pmartin scit se habere creditores , et J'acultates suas non
su fficere’, 20. que le citoyen Dusson le savoit tout aussi
b ie n , puisque l’état des créances inscrites qu’il a retiré
du bureau des h yp o th èq u es, puisque cet é t a t , disonsnous , comparé au p rix de l ’adjudication , dém ontre l’in
solvabilité ; 30. que dans l ’acte du 10 messidor an 9 ,
le citoyen Cham pm artin et le citoyen Dusson videntur
y a cisci in fr a u d e n t creditorum . L ’adjudication étoit à
v il p rix ; les créanciers derniers en h y p o th èq u e, tels
que les enfans C ham pm artin, n’avoient d’espoir que dans
la valeur réelle. Sans y appeler ces créan ciers, on fait
le traité ; on sacrifie ce qui constitue leurs espérances ; 011
leur fait un tort qui seroit irréparable , si le citoyen
D usson réussissoit.
•
.
D ira-t-il qu’il ne s’agissoit pas ici d’aliénation? i° . Il
s’agissoit de l’approbation d’une aliénation, q u i, quoique
ju d iciaire, étoit funeste aux créanciers inscrits, parce
qu’il y a vilité dans le prix. 20. L e jurisconsulte U lpien
comprend dans la proscription quem cunujue coniractum .
C ’est ici le lieu de dire que Champmartin p erc, ad
ju d iciu m non a d fuit ,* litem n iori passas est. Il avoit
appelé des deux sentences du 8 floréal an 9 ; il étoit assigné
sur son appel. L e tribunal d’appel étoit saisi de l’afia ire:
il 11’avoit qu’à poursuivre et à faire ju g e r -, tout auroit
été- annuité. N e l’ayant point f a it, scs créanciers ont le
B
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.
.
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droit de reviser sa conduite et celle du citoyen Dusson.
:
Ils ont droit de faire révoqu er ce qui a été fait à leur
*
^
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*
préjudice.
C ’est encore ici le lieu d’appliquer le n°. 3 d elà lo i 10 ,
au tit. quœ in fr a a d . cred. L a position du cit. Dusson
étoit telle, qu’il ne pouvoit pas traiter valablem ent avec
le saisi, à l’insu et sans le concours des autres créanciers
inscrits; il étoit consent us ¿1 cred itoribu s, ne erneret y
c’est-à-dire, ne pacisceretur.
'
E n e ffe t, en expropriation forcée , il en est aujour
d’hui comme autrefois dans les saisies - réelles. i° . L e
créancier poursuivant ne saisit pas et ne poursuit pas
pou r lui seulem ent, mais bien pour la généralité des
V
.
créanciers inscrits.
r
L e citoyen Dusson pose lu i-m êm e
vce prin cipe, pages i 5 et 21 de son m ém oire im prim é.
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! .
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-f-
2° ‘ Pendant les poursuites, le saisi est en état d’interdic.j.*on a])soj ue ^ respectivem ent à la propriété des objets
/m 'Jx/JJvî.
saisis ; il en est seulement dépositaire de justice; il ne peut
pas en disposer directement ni indirectement.
En effet, l’art. V III de la deuxièm e loi du 11 brum aire
an 7 porte : « Pendant toute la durée des poursuites, le
« débiteur reste en possession, comme séquestre et dé« p ositaire de ju s tic e , sans préjudice néanmoins du droit
« q u ’ont les créanciers de faire procédera la saisie m obi« lia ire des fru its, conform ém ent aux lo is, etc. »
« 11 ne p e u t , à compte?' de Vinscription prescrite
« p a r ¡'art. V I , de la notification des procès verbaux
« d'affiches , disposer de la propriété , etc, »
Celte interdiction est contre le saisi, en laveur de la
généralité des créanciers inscrits : ce qui le p ro u v e , c’est
�( 11 )
,
. .
que la loi constitue le saisi seulement dépositaire de jus- î
tice; ce qui le p ro u v e , c’est que l ’interdiction date seu
lement de la notification des affiches, tant aux saisis qu’aux
créanciërsTnscnts.'' .......
“
i Q. D e ces principes il suit que;, la poursuite étant
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,
.
,
.
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commune a tous les créanciers, le poursuivant ne peut
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1
r
faire rien qui préjudicie aux autres, et que tous traités
doivent être passés aussi avec e u x , à peine de n u llité;
parce q u e , sans cela, ces traités sont à leur égard res
inter alios acta.
J* /'vrv/i'tutA'ajZf
, *
,
j'*‘■
'i'U-J itfV
'
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3 °. D e ces principes il suit q u e , les biens saisis étant
sous la main de la justice, ils le sont à la conservation
des intérêts de tous les créanciers ; il n’y a que la justice
«jui puisse en disposer. I l s’ensuit que le saisi ne peut
les alién er , sans le u r concours ; cela est incontestable
ment v r a i, même jusqu’au tribunal d’a p p e l , lorsque l’une
des parties a appelé du jugement d’adjudication. Jusqu’à
ce que le tribunal supérieur ait prononcé , les choses de
m eurent dans le même état; c’est-à-dire , en état de dépôt
de justice, en état d’interdiction d’aliéner par le saisi,
*
ni d’approuver rien de ce qui serçit aliénation, quem cion que coiitractum . L ’adjudicat-fta^est, respectivement
aux créanciers, réellem ent conventus ne erneret, id est,
ne pacisceretur cuni debitorc.
S’il en étoit autrem ent, il en résultcroit des inconvéniens énormes. Ce seroit ouvrir à la fraude une porte
inconnue jusqu’à la loi du n brum aire an 7. U n créancier et un saisi, quiseroient de concert, pourroient frus
trer impunément les autres créanciers. L e créancier saisiroit les bien s, et feroit à dessein des nullités dans la
B
s
/
[
�( procéd u re: le saisi les opposerait; les créanciers inscrils
1 ne diroient m o t, parce qu’ils verroient le saisi faire valoir
les moyens : des ju ges, peu versés dans ces m atières, J es
j rejetteroient : les enchérisseurs, épouvantés par la dis—
/ cu ssion , n’oseraient pas faire une mise. L ’adjudication
( auroit lie u ; le poursuivant aclieteroit à vil p r ix , parce
j q u’alors il n’auroit pas de concurrens : la partie saisie
j appellerait et transigerait ensuite ; s’il n’y avoit pas moyen
} de revenir co n tre, l’exécution de la loi du 11 brum aire
) serait donc un coupe-gorge pour les créanciers.
.
Dira-t-on que ces créanciers, appelés par la notifica
tion de l’afficlie, peuvent paraître à l’adjudication, pro
poser eux-mêmes les moyens de n u llité, et appeler du
j
jugem ent, s’il leur paraît m auvais? O u i, sans doute ; ils
èn ont le d r o it, la loi le leur donne : m a is, ils se ¡Drésentent ; ils voient le saisi opposer les moyens qu’ils op
poseraient eux-mêmes ; ils jugent qu’ils n’ont rien à y
ajouter ; ils croient que tout se passe avec sincérité ; ils
croient dès-lors d evoir se taire. Des créanciers ne deman
dent que d’être payés; ordinairem ent ils sont très-avares
jjou r les frais ; ils tyÿÿgnent justement d’avancer de l’ar
gent : le saisi le iaiT**rFaudra-t-il qu’ils m ultiplient les
êtres? quand le saisi fait en apparence tout ce qu’il fa u t,
sont-ils obligés d’aller jusqu’au superflu? il ne serait pas
raisonnable de le prelcndre. Faudra-t-il qu’ils soient en
suite dupes de leur bonne "foi? iaudra-t-il qu’ ils soient
ainsi volés im punément par deux hommes m alhonnêtes?
L a raison se révolte contre cette idée.
E n fin , rappelons ce qui se passe ordinairement dans
toutes les ven tes, m êm e volontaires. U n particulier an-
�( 13 )
_
nonce qu’il veut se défaire de tels biens : celui à qui il
plaît le plus , le décrie et le fait décrier ; il répand et
fait répandre qu’il n’y a pas sûreté : c’en est assez pour
éloigner quelques gens sages et tim ides, parce qu’ils veu
lent acquérir pour jouir paisiblement.
S’il s’agit d’une vente judiciaire, les enchérisseurs peu
vent arriver en foule. Chacun a fait, préalablem ent, son
calcul particulier sur la qualité et la valeur des b ie n s,
et a , par dessus tou t, com pté sur la solidité attachée à
la form e de la vente. Des moyens de nullités sont dé
veloppés par le saisi. Sur trois juges de prem ière ins
tance, deux ne sont pas en état d’apprécier ces m oyens-,
ils les rejettent. Il est passé outre à l ’adjudication. M ais
le mal est f a it, il est sans rem ède pour le moment. I<a
confiance des assistans sages a fui ; il n’est pas possible
de la l'am ener, parce qu’ils ne veulent pas acheter un
procès. L e bien saisi devient nécessairement la proie d’un
avide poursuivant ; de là extrêm e vilité dans le p r i x ,
et dès-lors anéantissement infructueux du gage des créan
ciers. C eux-ci sont horriblem ent dupes de leur bonne foi :
ils le seroient bien davantage, si le saisi, ayant appelé
du ju gem en t, pou voit ensuite, -après avoir été séduit
par le saisissant devenu adjudicataire, p o u v o it, disonsnous , transiger avec lui sans le concours des créanciers
inscrits.
L ’on peut et l’on doit parer a cet inconvénient bien
vivem ent senti ; l’on peut y parer par un moyen v ra i,
parce qu’ il est dans la loi et dans la raison. Il huit dire
alors que l’appel interjeté par le saisi ne lui appartient
p lu s , mais aux créanciers inscrits j il faut dire alors qu’il
�( i4 )
ne peut plus s’en désister sans leur participation. D é p o
sitaire de justice dès l’instant de la notification de l’alliche
aux créanciers in s c rits , dépositaire de justice envers la
généralité de ces créanciers, ce dépôt doit continuer
jusqu’à cc que les juges supérieurs ont prononcé sur son
appel. Il peut et doit faire tout ce qui convient pour la
conservation du d ép ô t, et rien pour le détruire; s’il fait
Quelque chose de nuisible , les créanciers ont le droit
d’en demander la révo catio n .—
D e tout ce que nous venons de d ir e , il résulte que les
enfans C h am p m artin , comme créanciers légitim es et
inscrits, sont fondés à révoquer le traité du 10 messidor
an 9 , à suivre l ’appel de leur p ère, du 9 prairial an 9 ,
et à faire valo ir les moyens de nullité qu’il a proposés
devant les premiers juges. Ces moyens se lient à ceux
qu’ils ont de leur ch ef; nous les présenterons en même
temps.
C H A P I T R E
II.
¿îp p cl incident des enfans Cham pm artin ^de suo.
I,e citoyen Dusson le soutient, i ° . irrégu lier; 20. non
recevab le, comme fait hors du délai; 30. non recevable,
parce q u e , d it-il, les enfans Cham pm arlin sont sans
qualité ,
cojmhc
sans in tér êts, pour le soutenir.
§. I.
Les enfans Cham pm artin o n t , par leur requête signi
fiée d’avoué ù avo u é, le 26 th erm id o r d ern ier, demandé
�_ ( 15 )
acte de ce que subsidiairement ils in terjetten t, de leur
c h e f , appel de la sentence.d’adjudication , du 8 floréal
an 9 , ensemble, de ce qui a précédé et suivi.
.
i? . Cet appel est régulier , parce que le citoyen
D evèze, constitué avoué par le citoyen D usson, l’est pour
toutes les dépendances de l’affaire. Cet appel çst régulier,
parce que , dans la règle et l’usage, il auroit pu être in
terjeté, m ême sur le barreau, lors de la plaidoirie de la
cause. A u surplus, voyez l’art. X X I I I de l’ordonnance
de 1667 , qui autorise les appels incidens, par requ ête de
procureur à procureur.
20. Par exploit du 6 frim aire d e rn ie r, les enfans
Chainpm artin ont, en tant que de besoin, et sans aucune
approbation préjud iciable, réitéré leur appel à dom icile,
et assigné le citoyen Dusson en adjudication de leurs
conclusions. Ils y ont repris ces conclusions.
§• II.
L e citoyen Dusson soutient l’appel n o n -reccv a b le,
parce que, d it-il, le jugement d’adjudication a été signifié
au dom icile du citoyen Cliam pm artin p è re, le 12 prairial
an 9 , et que l’appel des enfans 11’est venu qu’en thermi
dor an 1 0 , et la réitération en frim aire an 11.
■
> Cette prétention est une erreur. L a signification d’un
jugement d’adjudication à la partie saisie ne fait pas courir
le délai des trois m ois, prescrit par l’article X I V du titre
V de la loi du 24 août 1790 > snv l’ordre judiciaire.
E n effet, cette loi dit qu-’aiicun appel ne pourra être
signifié, APRÈS L’EXPIRATION DE TROIS MOIS, A COMP
TEE DE L A SIGNIFICATION DU JUGEMENT (coûtl'adic-
�( i6 )
t o il ’e ) FAITE A PERSONNE OU DOMICILE. E lle d i t q u e
ccs deux termes sont de rigueur, et leur inobserva
tion emportera la déchéance de l'appel.
i ° . O diosa restringenda et fa vores am pliandi. Ici
il s’agit de matière rigoureuse; il s’agit d’une prescription
très-courte. Si donc il y avoit du doute , il faudroit
l ’expliquer en faveur de celui auquel on oppose la fin
de non recevoir.
2°. Ici point de doute : la lo i est claire ; elle porte en
principe général que , pou r faire courir le délai des
trois mois de l’appel, il faut une signification du juge
m ent (contradictoire) à personne ou dom icile. Sans cette
signification, point de cours du délai. Ce délai d o r t , et
il dureroit trente ans, s’il n’y avoit point de signification
aux parties intéressées.
N e perdons pas de vue que cette lo i d it, en termes
précis, « signification fa ite ¿1 personne ou dom icile. »
Ces termes signifient bien fo rt, bien sacramentellement,
que la signification doit être faite individuellem ent à
chacune des parLies intéressées; q u e'la signification doit
être faite à la personne ou au vrai dom icile de la partie
intéressée.
Il ne suffiroit même pas d’ une signification à un do
m icile élu.
E n effet , l ’arliclc X I V
de la loi du 24
» août 1790, n’a lait que îaccouicn le délai accorde par
l’ordonnance de 16 6 7 , titre X X V I I , article X V 1L Cet
article de l’ordonnance ne donnoit que d ix ans pour
l’appel, à com pter de la signification de la sentence.
O r , M . Jousse dit : « C ette signification doit être laite
« au vrai dom icile de la p a rtiej c a r , si elle avoit éLé
« faite
�C 17 )
t
« faite au dom icile du procureur , ou à un dom icile
« élu par un acte passé entre les parties, elle ne pou r« roit opérer la fin de non recevoir qu’après trente ans. »
S’il en étoit ainsi pour une iin de non recevoir après
dix ans, à j o r t i o r i , doit-on être plus rigoriste sur une
fin de non recevoir après trois mois.
3 °.L a signification faite au citoyen Cham pm artin p è re ,
le 12 prairial an 9 , n’a pas fait courir le délai des
trois mois envers les enfans, comme créanciers inscrits.
E n e ffe t, la partie saisie et ses créanciers inscrits ne
sont pas une seule et même personne ; ils sont au con
traire très-opposes entre eux : ainsi la signification faite
par le poursuivant ou l’adjudicataire au saisi, ne sa u ro it,
sous aucun ra p p o rt, être considéi’ée comme fuite aux
créanciers.
Il y a plus : une signification faite à cinq cohéritiers
sur s ix , ne seroit bonne que contre les cin q; la fin de
non recevoir des trois mois n ’auroit pas lieu contre le
six ièm e, suivant la règle nom ina ipso ju re dividuntur.
4°. 1 /article X X II I de la loi du 11 brum aire an y ,
donne au saisi et aux créanciers la voie de l ’a p p el, tant
contre le jugement qui déchoit des moyens de n u llité, que
contre celui d’adjudication. M ais le saisi et les créanciers
nejio n t pas liés entr’eux ; le saisi peut appeler sans les
créanciers ? et vice ve r s a , ceux-ci le peuvent sans lésai si.
Il n’y a entr’eux de rapport que celui que , en cas de
reform ation du jugem ent, le bénéfice en reflue égale
ment sur le saisi et sur les créanciers, en cas de vilité
du p rix de l’adjudication.
Cela posé ; le saisi ayant la faculté d’appeler sans les
G
�( 18 )
_
créanciers, et ceux-ci le pouvant également sans le saisi,
il s’ensuit que lorsque l’on veut acquérir la fin de non
re ce v o ir, lorsque l ’on veut donner à l ’adjudication l’au
torité de la chose ju g ée, il faut la signifier à toutes les
parties intéressées : n’en om ettcroit-on qu’u n e , elle seule
peut appeler dans les trente ans.
V o u d ro it-o n considérer le saisi comme le procureur
des créanciers inscrits, contre le poursuivant et adjudi
cataire? M a is, suivant Jousse, une signification, faite au
dom icile 'du procureur-,--même-à un-dom icile é lu , ne faisoit'pa? -courir--la- fin..de.non recevoir , des d ix ans : mais
la loi de 1790 exige une signification f a i t e à personne
ou dom icile.
L es m ots, signification f a i t e â personne ou dom icile,
sont de la même rigueur que le délai de trois m ois; en
m atière rigoureuse , on ne peut rem plir par équipol
lence ce que commande une loi.
A in si, la signification, faite par le poursuivant, ne
sauroit jamais être considérée comme faite ni explicite
ment ni implicitement par les créanciers inscrits.
E lle ne sauroit l’être explicitem ent, parce q u e, si le
poursuivant s’avisoit de les y com pren dre, ils pourroient
le désavouer.
^
_
E lle ne sauroit l’etre implicitement , parce que le pour
suivant 11’est point le mandataire des créanciers inscrits.
Ils ne l’ont chargé de rien ; ils ne l’ont pas chargé de
faire vendre. S’ils avoienl voulu en venir là , ils l ’auroient fait eux-m êm es, et m ieux que le citoyen D usson,
et sans détours. L eu r inscription aux hypothèques n’a
d’autre objet que de veiller à leurs intérêts, de les infor-
�( i9 )
mer de ce qui se passe , et de les mettre à même de
s’e x p liq u e r, suivant les cas.
P ar ces raisons, c’est une grande erreur , de la p aît du
cit. Dusson, que de prétendre que le poursuivant rep iesente la généralité des créanciers inscrits ; cela n’étoit pas
vrai avant la révo lu tio n , et cela ne l’est pas plus depuis
la loi du i i brum aire an y.
A v a n t la ré v o lu tio n , dans les discussions sur saisies
réelles , la masse des créanciers n’ étoit point représentée
par le poursuivant : cliacun y discutoit ses m terets; il n y
avoit de réunion entr’e u x , que lorsqu’il s’agissoit de choses
communes à tous ; et alors ils figuroient dans la personne
du procureur ancien des opposans.
Depuis la lo i du n b ru m aire, les créanciers inscrits
sont contre le poursuivant. C elu i-ci e s t, p ar l’art. V I de
cette l o i , obligé de les appeler à la vente ; eux sont
autorisés, par l’art. X X I I I , à proposer des nullités contre
la procédure : s’ils ne sont pas conTens clü'jugement inter
venu sur leurs m oyens, ils peuvent én interjeter appel.
Dans cette p o sitio n , il est ridicule de prétendre que
la signification, faite par le poursuivant ou l’adjudicataire,
est censée faite également au nom des créanciers ins
crits, et qu’elle suilit pour faire courir le délai de l’appel.
Ce ridicule est d’autant plus g ra n d , que ccseroit mettre
le pour et le contre dans la même m ain; cc seroit icndre
impossible l’exécution de l’article X X 11I de la loi du 11
brum aire.
E n effet, cet art. porte: « L e saisi NI LES CRÉANCIERS
« ne peuvent exciper contre Vadjudicataire d'aucun
« moyen de n u llité, ou om ission de fo r m a lité s , dans
C a
'
�« les a c te s de la p oursuite, q u ’a u t a n t q u ’i l s l e s a u
« R.OIENT PROPOSÉS àV'audience oiiTadjudication aura
« eu lie u , s a u f l ’a p p e l t a n t d u j u g e m e n t i n t e r
« VENU A CET É G A R D , QUE DE CELUI D’ADJUDICATION,
k s i Ton opposoit à ce dernier quelque nullité ou Vomis-
« s ion de q u elq u u n e des form a lités prescrites. »
A in s i, point de doute que les créanciers peuvent ap
peler. O r , contre qui le peuvent-ils, si leurs moyens de
nullité sont rejetés, ou si le jugement d’adjudication est
v ic ie u x ? contre celui qui a fait rendre ces jugem ens,
c’est-à-dire, contre le poursuivant. Il ne faut donc pas
accorder que la signification qu’il fait au saisi, est cen
sée faite au nom de tous les créanciers in scrits, parce
qu’alors la voie de l ’appel seroit impossible ; parce que
ce poursuivant auroit p a r là un moyen trop facile, pour
se dérober aux vices de sa procédure.
. '
5 °. Enfin , les enfans Cham pm artin n’ont pas été ouïs
dans le jugem ent d’adjudication du 8 floréal an 9 ; il est
par défaut à le u r é g a r d , ~ëfTT~ne leur a pas été encore
signifié ; ain si, le délai de l’appel n’a pas encore com
m encé de courir.
E n vain le citoyen Dusson dit-il , qu’il représenloit
la masse des créanciers, et que d è s -lo r s il est réputé
contradictoire avec tous.
'
Ceci n’est qu’ une subtilité. i ° . Nous avons prouvé que
le poursuivant ne représenle pas les créanciers, puisqu’il
est leur partie adverse , et q u ’ils peuvent lui opposer des
moyens de n u llité, ap p eler, etc. 2.0 A u palais, nous ne
connoissons que deux espèces de jugem ens, les contra
dictoires, cl ceux, par défaut : dans les contradictoires,
�il est fait mention que telles et telles-parties ont ete ouies
par tel leur avoué ; lorsque cette mention n’y est p oin t,
le jugement est par défaut. I c i , pas de mention que les
enfans Cliam pm artin ont été ouïs : le jugement est donc
par défaut : ce fait répond à tout ce que dit le citoyen
Dusson.
• D ira-t-on e n c o re , comme le citoyen D u sson , que s’il
en était a utrem en t, les juge?nens cCadjudication ne trans
m e tta ie n t qu’u'nê propriété précaire pendant trente ans.
M ais .pour éviter le précaire , vous avez un moyeu
facile ; faites signifier aux créanciers inscrits.
M ais les choses ne peuvent pas être-en fluctuation
pendant trente ans. Introduisez Tordre du p rix de l’ad
judication ; demandez que les créanciers produisent leurs
titres : vous en avez le droit par l ’art. X X X I I de la loi
du 11 brumaire. S’ ils paraissent et demandent collocalion ,
ils acquiescent à l’adjudication-, et vous êtes tranquille :
si.certains ne paroissent pas, l’ordre est fait et h om ologué;
les créanciers colloqués sont p a y é s, les défaillons sont
d éch us, e t vous êtes également tranquille.
D ’apres cela , nous voyons bien clairem eut que le
citoyen Dusson *a créé des monstres pour se rendre un
peu reeommandable. M a is , dans le fa it, son véritable
objet est de couvrir les fautes énormes qu’il a faites, h
dessein peut-être , dans sa procédure en expropriation ,
pour éloigner les enchérisseurs, et avoir pour 5 i , 600 ir. «•
des biens que tous les conuoisscurs du canton portent ù
plus de 100,000 fr.
- Dans son m ém o ire, le citoyen Dusson a mis en pro-*''*
position .que les enfans Cliampmartin sont sans qualité ,
�I
( 22 )
com m e sans in té r ê t, pour soutenir leur appel. Nous
avons bien trouve et débattu ce qu’il a écrit sur le défaut
de qiiiilité , mais il n’a dit mot sur le sans intérêt : pour
quoi ? c’est là sans doute le sujet de sa colère , de son
d ésesp o ir , et de ses ruades contre tous ceux qui prennent
la défense des m alheureux enfans Chainpm artin.
E h quoi ! les enfans Chainpm artin n’ ont pas d’intérêt
à soutenir leur appel ! et si l’adjudication est maintenue
ils n’ont r ie n , et le citoyen Dusson bénéficie de plus
de 50,000 fr. et le citoyen Dusson insulte à leur misère!
L ’homme a u x algarades ose lu i prêter assistance pour
cela : le cœur s’en ir r ite , la raison s’en r é v o lte , et la jus
tice en vengera nos infortunés cliens!
'
r
t*
ry
A .
.
!
j
C H A P I T R E
III.
N u llités ou om issions de fo r m a lité s contre Vadjudi
cation j etc.
t
Les enfans Chainpm artin ont des- moyens qui nous
paroissent bien forts, et contre la sentence d’adjudication,
et contre tout ce qui a précédé. Examinons-les séparé
'
m ent , et commençons par ceux contre le jugem ent d’aduidicatiou.
'
ü o A iï, f
§-
Ior-
A d ju d ica tion .
A'jpfdZ*
ï>rcm ii.rcm cnt ; dons ce jugement les qualités des enfiins
Chainpmartin lie sont pas exprimées. Ceci est une omis-
r
i
�( 23 )
sion de ce qui est prescrit par l’art. X V du titre V de la
lo i du 24 août 1 7 9 0 , portant : « L a rédaction des juge« m en s, tant sur appel qu’en prem ière instance , con« tiendra quatre parties distinctes.
« D a n s la prem ière , les nom s et les qualités des
'« parties seront énoncés.
« Dans la seconde, etc. »
'
L ’art. II de la loi du 4 germ inal an 2 , porte : « A
« l’avenir toute violation ou om ission d es,fo rm es près« cri tes en m atière civile , p a r les lois ém anées des
ft représentans du peuple , depuis 1 7 8 9 , QUAND MÊME
« ELLES NE PRONONCEROIENT PAS EXPRESSÉMENT LA
« p e i n e d e n u l l i t é , d o n n e r a o u v e r t u r e <1 c a s s a t i o n . »
A rt. I V . « Cette violation ou omission ne peut donner
« ouverture à la cassation, que lorsqu’elle a été alléguée
« par l ’autre partie ( celle contre laquelle il y a viola
it tio n , etc. ) devant le tribunal dont celle-ci prétend
« faire annuller le jugement, pour n’y avoir pa<= eu égard. »
D e ces deux articles il suit que ce qui est moyen de
cassation au tribunal de cassation, est sûrement m oyen
de nullité au tribunal d’appel.
Ici les qualités des enfans C h am pm artin, et autres
créanciers, n’étant pas énoncées dans le jugement d’ad
judication, il en résulte , i° . omission de l’ une des quatre
formalités voulues par la loi du 24 août ; 20. nullité du
ju g em en t; suivant la loi du 4 germ inal an 2.
L e citoyen Dusson convient du la it de l’omission; mais
il soutient que les enfans Cham pm artin n’éloient pas dé
fendeurs , parce qu’en expropriation forcée il n’y a que
�( 24 )
deux parties, le p o u rsu ivan t, qui est le demandeur, efc
le saisi, qui est le défendeur.
L e citoyen Dussonest dans l’erreur; il est démenti par
la lettre et l’esprit de la loi du n brum aire an 7. Sui
vant cette l o i , les créanciers sont, tout aussi-bien que le
saisi , défendeurs en expropriation , ou il faut aller jus
qu’à dire que le saisi lui-m êm e n’est pas défendeur.
E n « ffe t, 1 '\ après avoir , dans ses premiers articles,
déterm iné les formes des affiches, du dépôt au greffe et
des procès verbau x d’apposition des affiches, cette loi ,
article V I , porte : « Ces procès v e r b a u x , ainsi que les
« affiches, seront n otifiés, et copie en sera laissée , tant
« au s a isi q u a u x créanciers in s c r its , etc. »
V o ilà tout ce que dit la loi pou r exprim er de quelle
m anière seront appelés et le saisi et les créanciers; elfe
n’exige pas plus respectivement au saisi que respective
ment aux créanciers.
.
Cependant le citoyen Dusson est obligé de convenir
que le saisi est défendeur en expropriation. D ès que les
créanciers sont appelés en justice dans la même form e
que le saisi, il faut en conclure que les créanciers sont
défendeurs, et que leurs qualités doivent être énoncées
dans le ju g em en t, à peine de n u llité , suivant la loi du
4 germ inal an 2.
20. Les créanciers inscrits o n t, de s u o , le droit d’ap
peler du jugement d’adjudication. Ce droit leur est donné
par l’article X X 1U de la loi du 11 brum aire an 7 ; ils
doivent donc être parties dans ce jugement : sans cela ils
uepourroient pas interjeter appel, parce que cette voie ne
peut
�'
O B
.
S U R
■
L E
S E R
V A
D É F A U T
T I O N S
D ’ I N T É R Ê T .
CSuite du paragraphe I I ypage 16. )
| Ï - J e s enfans Champmartin répètent éternellem ent
,
^ ns leur mémoire , que la valeur du bien de Bierrë ,
r|
acquis en 1 7 8 2 ,au prix de 92,000 liv. , a suivi la pro
u Sression des tem p s, et qu’il vaudrait aujourd’hui au
j\ moins 100,000 liv. Mais on dissimule i.° que 1 acqui«ition de 1782, fut un coup de tête de la part du cit.
Champmartin et de sa m è r e , car un autre acquéreur
„1
‘/en avait fait marché qu’à 6 3,000 liv.
i . a.° Que ledit Champmartin s’y est ru in é , et qu’il
I
doit plus que le prix de ladite acquisition; 3.0 que
|
dîme de vin et de grain perceptible dans les terri-
I
toires de Clairac et
M arsillac , était de la comprise
|
de la v e n t e , et qu’elle a été supprimée ; 4 .u qne la
^ *ecolte qui devait être conduite aux frais du vendeur
(
)usqu’à la St.-Jean
1783, faisait
partie
de la
v en te;
^ 0 était aussi de la comprise de ladite vente , partie
|
I
|
t
mobilier de la m aison, le cuvage tout m eublé et
Ustencilé de ses • cuve» grandes et petites, la futaille ,
tous les outils et harnais de labour , enfin les chevaux
®t bêtes à corne qui ameublaient la co u r; 6. quo
\
ledit Champmartin a aliéné 12. à 15 septérées de terre
�des m eilleures qui envoisinaient ses bâtimens ; 7 .0 (î1'/
l ’époque de ladite acquisition, les héritages étaie^
entourés d’arbres et qu’ils ont été tous arrachés ; ^
qu’il a laissé dépérir la maison et bâtimens , - que u
granges et étableries se sont éboulées; 9.® qu’une ri13
vaise administration réduit ledit bien à tel état
gradation, qu’il faudrait pour le rétablir plus de 2A10 ^
liv. de mise de fonds;
i©.° que le revenu net ilïlP,
.sable n’en e st, d’après les matrices des, rôles , que de
fr. 18 sous ; de sorte qu’en achetant ce bien 6o»°
liv. j compris les charges d’affiches et tous les fi'alS
procédure, le C. Dusson l ’a acheté au prix de vi1^ l
huit fois le revenu imposable.
,
Mais quand il y au ra it, par im possible, une ^
mentation de 20 à 2Ô3ooo liv. s ils n ’en seraient V ,
plus avancés, voulant faire honneur, à ce quils tl,s®
aux dettes de leur père ; car celles qui sont inscflte *
suivant les extraits qu’en a retiré le C . Dusson,
tent en principal
à 7 4 , 0 13
l i v , non compris i ’enc° ^
de l ’année du capital desdites inscriptions; les “e
privilégiées, q u i, suivant l ’art. XI du chap. IV
^
loi du 11 brum aire, doivent passer avant toutes ^
d ettes; l ’inscription indéfinie des enfans C ham pm ^ '^ ,
on peut aussi m ettre en ligne de compte- 20 à 2^ jj/
liv. dus à différens émigrés rentrés, dont réclai^ 11 |
de leur part.
Ainsi la déchéance de l ’adjudication de l ’an 9 ’
leur procurerait aucun profit; par
conséquent l ‘l
nem ent avec lequel ils poursuivent le G. Dussofl*
d’autre intérêt que celui de la passion.
j
(
�- ( 25)
#
peut être em ployée qu’après l’épuisement du prem ier i)Vy i .'
degré de juridiction.
L e citoyen Dusson p eu t, s’il le juge à p ropos, se traî
ner tant qu’il lui plaira sur ce m oyen ; il peut , à son
g ré , le taxer de chicane absurde; cela ne nous em pê
chera pas de croire que les enfans Cham pm artin ont
raison, et que sa réponse n’est qu’une pitoyable algarade.
Secondement. Il saute aux yeu x que le citoyen Dusson
■
.
.
.*
a imaginé tout ce qu’il a pu pour éloigner les concurrens , et devenir adjudicataire à v il prix. P o u r s’en con
•
vaincre , il suffit de lire les conditions de son affiche et
d’exam iner sa conduite lors de l ’adjudication,
A F F I C H E S .
■
'
'
•
1 °. E lle s , contiennent, par le m enu, le détail de tous
les immeubles saisis, Ghaque h éritage, composant les
divers d o m a in e s y est désigné par sa n a tu re , son éten,d u e , sa situation, et ses nouveaux tenans et aboutissans.
'
2P. Dans les conditions de l’adjudication , le citoyen
Dusson im pose, n°. 4 , à l’adjudicataire, l’obligation de
lui p a y e r, sans terme n i délais la somme de 32,000 fr.
ainsi que ses intérêts et frais, et cela, avant tous autres
créa n ciers, qu’il renvoie à l’ordre (1),
N°. 4 . « De payer audit cit. D usson-Poisson, s a n s t e r m e n i
» h é la i , les 3a,000 fr. en prin cip al, et tous les intérêts éclms et
» irais , pour raison de q u o i la vente est poursuivie, a v a n t t o u s
•» a u t u k s c r é a n c i e r s , comme bailleur de fo n d s, suivant Tar
(i)
D
pL,
�'y jf c
,
[ / Xy fr :
Aie*'
.
(
2
6
}
.
' 3°* L e citoyen Diisson y stipule que, si dans l ’affiche
sont compris des immeubles appartenons à des tiers,
ils en seront rayés sur la simple justification des titres,
ec sans jugement de revendication (i). A insi donc le
citoyen Dusson se met au-dessus de l a - l o i , et se rend
juge absolu, (p uisqu e la loi dit que la revendication
sera jugée avant l’adjudication ).
4°. L e citoyen Dusson avertit le p u b lic, que les biens
-saisis seront vendus', ou partiellem ent ou en masse,
et que dans le cas où les enchérisseurs pour le tout
» ticle X I V , cliap. Y de la loi du x i brumaire an y , e t l e s u r
« p l u s d u d i t p r i x , e t î c a s d ’ e x c é d a n t , aux créanciers inscrits
i> qui seront utilement colloques par le jugement qui en homolo~
v>guera l’ordre et distribution, ainsi qu’ il sera ordonné par le
» jugement, et les.bordereaux qui seront délivrés aux créanciers. »
Pourquoi cette clause contre la vérité des principes ? Parce
que 32,000 fr. ne naissent pas sous la main ; parce que le citoyen
Dusson vouloit épouvanter les enchérisseurs ; parce qu’il vouloit
les priver du délai qu’il y a forcément entre l'adjudication et la
perfection de l’ordre.
’
I c i, le citoyen Dusson en a imposé : les créanciers que le sieur
D uroset avoit chargé le sieur D claboulaic d’acquitter, en lui
vendant en 1774 lcs Billauds et la Jonclière, doivent passer avant
le citoyen Dusson ; de ce nom bre, la citoyenne A lla rd , etc.
le citoyen Dusson a donc cherché à induire en erreur.
(1)
N°. 8. Si parmi les immeubles ci-énoncés, il s’en trouvoit
apparlenans à des tiers, en justifiant du titre de propriété ou
d’acquisition, h l’audience indiquée, l’héritage revendiqué sera
rayé de la susdite affiche , sans qu’ il soit besoin d’un juge
ment de revendication, art• X X V I c la loi du 11 brumaire an 7).
�( ^7 )
'
couvriroient les enchères partielles, ils auroi ent la p ré
férence (i).
5 °. L e citoyen Dusson ne garantit point ni les objets
m eubles, ni les mesures des immeubles : il en laisse le
plus ou le moins de contenue en perte ou gain pour l’adjudicataire (2) ; c’est-à-dire , qu’il présente des incertitudes
pour que les mises soient moins fortes.
6°. Enfin le citoyen Dusson ne veut pas q u e , après
l ’adjudication, le saisi, l’adjudicataire, ni les créanciers ,
puissent avoir aucun recours contre lui poursuivant (3).
(1) TS°. g. « Uadjudication sera faite ou partiellemeut, con
» fermement aux lozs ci-après énoncées, » ( c ’est le cit. Dusson.
lui-même qui iait ces lo is, il ne peut donc pas les récuser, si
elles prononcent contre lui , les voici teltes qü’il les a dictées ) :
)! mais à condition que la vente n’aura lieu par parties détachées1,
» q u ’autant qu ’elle le sera en m êm e tem ps de tous les objets com
» pris en la présente affiche ; le poursuivant ne vo u lan t séparer les
» im m eubles qui sont grevés de son h yp o th è q u e , qu’autant q u ’il
» seroit payé de toute sa créance tant en p rin cip a l, intérêts que
» frais. »
Les enchérisseurs pour le tout, d a n s le cas ou i l s
couviutvoiENT les e n c ii Èues p a r t i e l l e s , auront la préférence. »
N °. 10. «
(2) N°. 12« « L ’adjudication sera faite avec toutes les charges
» dont les immeubles peuvent être légitimement grevés, et s a n s a u
» C U N E G A R A N T I E D E S O B J E T S , M E U B L E S E T M ESUIIES DES IM M E U B L E S ,
» portés aux étals de sections et matrices des rôles, indiqués par
» la présente affiche, l e t l u s o u l e m o i n s é t a n t a l a c h a r g e
» d e t / a d j u nie a t a 1 n e , et sans aucune garantie des dégradations.»
( 3 ) N “. i3 . » Enfin que le citoyen Leclcre C ham pm artm ,
j) l’adjud ica taire et tous créanciers ne pourront conserver la plént-
D a
\
)<0* ^ ¿
ùutrct
fflM vt
¿7
�C 23 )
#
V o ilà bien des entraves ; elles font sentir que le citoyen
Dusson convoite le bien saisi : s’il l’obtenoit justem ent,
nous nous garderions bien de nous en plaindre. Il est
créancier , cela est incontestable ; et notre désir le plus
c h e r , est qu’il soit payé de ce qui lui est du légitim e
ment. Nous disons légitim em ent, parce q u e , dans le fa it,
il demande plus qu’il ne lui appartient : cela sera dé
m ontré en temps et lieu. Mais que le citoyen Dusson ait
em ployé des moyens tortueux pour atteindre son b u t;
qu’il ait hérissé la vente de difficultés telles , que tout
hom m e sage en ait été repoussé, c’est ce que nous ne pou
vons lui pard on n er.,
•
A D J U D I C A T I O N .
L e citoyen M ancel , a v o u é , requiert la mise aux en
chères , et l ’adjudication. D es feux sont allumés pour
l ’adjudication du tout : quatre enchérisseurs seulement se
présentent, le cit. D ussonjlu i-m ê m e , le cit. M an cel, son
a v o u e ,le cit. Tessot et le cit. M ou illard , gendre et com
----mensal du cit. Dusson.
Dans le f a it , le citoyen Dusson n’avoit pour concur
rent que le citoyen T esso t, parce que le citoyen M ancel
et le citoyen M ouillard n’étoient là que pour la forme.
T o u s les autres assistans avoient été écartés par les moyens
de nullité : personne n’auroit osé acheter un procès.
» tude de leurs droits et de leurs moyens respectifs
» POURSUIVANT,
U N E FOI S L* A DJ I NDI C A T I ON
» cO« eu la présente af fi che, rn0îi0?<c£E.
conthe
i ,e
et YClUC tlca objets 011011
�*9 )
L a présence du citoyen Tessot contrarioit les vues du
citoyen Dusson. Pour l’é lo ig n e r, le citoyen Dusson fait
observer que , son afïiclie portant que la vente auroit lieu
par enchère totale et par enchères partielles, la totale ne
l’em porteroit que dans le cas où elle surpasseroit les par
tielles : l’adjudication sur la totalité ne seroit que p ro v i
soire , et subordonnée aux enchères partielles.
L a dernière mise étoit de 40,000 francs sur le citoyen
M ouillard , gendre du citoyen Dusson. A utres deux feux
sont allum és, et s’éteignent sans que personne dise m ot.
L e cit. Tessot, qui aperçoit du manège , et qui d’ailleurs
ne veut pas se jeter dans un p ro cès, se retire et ne reparoît plus. L ’audience est levée , et continuée à quatre
heures de relev ée.
L ’in terv alle est em ployé très-u tilem en t : on se pro cure
quelques citoyens com plaisans p o u r figu rer aux enchères.
Les biens saisis sont divisés en quatre lots.
L e prem ier com prend la maison de Bièvre, l’enclos, etc.
et trois des personnages nommés par le cit. Dusson font
enchère. Les citoyens M a n ce l, Dusson et M ouillard n’y
sont plus pour rien. Dans l’afïiche , le citoyen Dusson
avoit fait enchère de 10,600 fr. lia dernière mise est à
18,000 fr. de la part du citoyen D eboudard.
L e second lot embrasse tout le domaine des Billauds.,
composé de bûtimens , p r é s , terres et vignes : dans l’affiche , le citoyen Dusson l ’avoit porté à la somme de
n , 5oo fr. U ne seule enchère est faite par un citoyen
N euville ; elle est de 11,600 fr. Tous les autres feux sont
allum és, et éteints, sans q u e personne dise mot.
L e troisième lot est du domaine de la B ou lau d e, com~
(
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^
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^ 30 ^
.
posé aussi de bâtimens , p rés, terres et vignes. Dans l’af
fich e, le citoyen Dusson l’avoit mis à n , 5oo francs: un
M . Papon le porte à 11,600 francs. D ’autres feux sont
a llu m és, et éteints , sans aucune autre mise.
L e quatrièm e lot est de la locaterie de la Jonchère.
T ro is enchérisseurs la portent successivement à 4,000 fr.
et en demeurent là.
'
Les enchères partielles forment un total de 45,200 fr.
L ’on en revient aux enchères pour le tout : alors se
présentent d’abord le cit. M ancel et le cit. M ouillard pour
le cit. Dusson; après, un citoyen D eboudard; et enfin, le
citoyen D usson, qui parle et dit le d ern ier m o t, lorsque
les "choses sont au point convenu entre les conjuréscontre l’intérêt du saisi et ses créanciers légitimes.
Les enchères des cit. M ouillard , M ancel et D eb ou dard,
s’ étoient élevées graduellem ent ^ la somme de 5 i , 55 o fr.
le cit. Dusson y ajouta 5 o francs, et fut proclam é adju
dicataire, m oyennant 5 1,600 fr.
L a mise aux enchères partielles qui a été em p loyée,
n ’est pas celle avancée par les affiches. L e citoyen Dusson
y avoit annoncé que les biens saisis seroient vendus p ar
tiellem ent ou en gros , et que le mode qui donneroit le
plus auroit la préférence. P ar vente en d étail, on doit
entendre que chaque immeuble se vend séparément. L e
citoyen Dusson l’avoit donne à entendre ain si, puisque
son affiche contcnoit la description du tout , article par
article. Si on l’eût fait ain si, tous les biens saisis auroient
rendu plus de 120,000 francs. Tel achète un héritage plus
qu’ il 11e v a u t, parce qu’il le jo in t, ( quôd sœpè confines
Jhn dos supra ju sta n i ccstuncitionem mterest nostra
�( 31 )
acquirere ) ; et qui ne veut pas ou ne peut pas acheter
un domaine entier : les petits objets ont beaucoup d’ama
teurs ; la concurrence fait la hausse.
A u lieu de cela , on a mis à l ’enchère des domaines
en entier : on a donc trom pé les créanciers et le public ;
on a fait autrement qu’on avoit annoncé.
Nous concevons que le citoyen Dusson auroit pu se
dispenser de requérir la vente partielle ; mais l’ayant in
séré dans son affiche, en ayant fait une l o i , il a dû s’y
con form er, h peine de nullité.
.
L a vilité du p r ix , à 5 i , 6 oo francs , saute aux y e u x :
on la touche avec l a main.
i°. L a maison de B iè v re , etc. sont mis dans l ’afficlie
par le citoyen D u sson , seulement à 10,600 francs; les
enchères partielles sont de 18,000 fr. en résultat : il y
auroit donc une différence de 7,400 fr. à l’avantage du
saisi, ce qui ferait près de quatre cinquièmes en sus.
L e citoyen Dusson avoit porté chacun des domaines
des Billauds et de la Boulaude à n , 5oo fr. Suivant lu i,
chacun d’eux valoit donc plus que B ièvre; et néanmoins
ses prétendus enchérisseurs n’ont fait au-dessus de lui
q u ’une mise de 100 francs; ce qui présenterait un p rix
de u ,6 o o fr. pour chacun de ces deux domaines. S ’il y
.avoit eu du sé rie u x , si les enchères n’avoient pas été un
jeu peu lo u a b le , il est à croire que ces deux domaines
auraient eu la même progression dans les enchères : il
est à croire que, même en adjudication, ils auraient donné
plus de 5 o,ooo francs ; surtout si l’on considère , i°. qu’en
1774 le sieur de la Boulayc avoit acquis le domaine des
Billauds ? la locaterie de la Jon clière, et line petite dîmerie ?
�( 32 )
moyenant 30,900 fr. ( nous en avons le contrat ) ; 2°. qu’en
-1782 le citoyen Cliam pm artin , p è r e , acquit B iè v r e ,
les B illau d s, la Boulaude , la Jonchère et la d îm erie,
moyennant 92,000 fr.
Dans l’addition à son m ém oire, le citoyen Dusson d it,
i° . queCtiam pm artinpèreavoit acheté chèrem ent en 1782.
•( L ’acquisition fut faite par madame L eclerc-B eauvoisin
a ieu le , qui eut la sagesse de se p r o c u r e r, préalable
m ent, des renseignemens certains sur la véritable valeur),
20. Que la dîmerie a été abolie par la révolu tion, et
;que notre pere a vendu douze à quinze septcrées des
meilleures terres. ( L a dîmerie et les terres aliénées par
Cham pm artin père, valoient à peine 10,000 francs en
17 8 2 , et depuis 1782 jusqu’en l ’an 9 , le p rix des biens
ruraux est plus que tiercé. D ’ailleurs les biens en ques
t io n devoient des cens , etc. puisqu’en 17 7 4 le sieur
D uroset en chai'gea le sieur de la B o u la y e , et q u’en
1782 celui-ci en ch argea, à son to u r , Cham pm artin
,père ).
•
3°. Que Champmartin père a dégradé les bâtimens
de B iè v r e , et fait couper les arbres enradiqués autour
des héritages. ( L e citoyen Dusson parle ici contre sa
science : en l’an 9 , les choses étoient en m eilleur état
qu’en 1782. Q u ’il ne nous parle plus de son procès ver
bal du 18 messidor d ern ier; il sait bien comment il a
été fait ).
4 0. Q u e , suivant les matrices des rôles, le revenu
présumé n’est que de 2 ,14 2 livres 18 sous. ( Il est inouï
• que l ’on ait jamais calculé la valeur des b ien s, d’après
les matrices des rôles. L ’on sait bien que dans les temps
chaque
�\
( 33 )
#
.
cliaque contribuable a fait tout ce qu’il a pu pour rendre
ses revenus moins apparens. L e terrain des biens en
question est aussi productif que celui des meilleurs
fonds de la Lim agne d’A u vergn e ).
5°. Que le citoyen Cham pm artin fils aîné, et le citoyen
S im on n et, curateur des trois m in eurs, étoient présens
lors de l ’adjudication , et qu’ils n’ont dit m o t , parce
qu’ils ont jugé que les 5 i , 6 oo francs et les frais de l’adju
dication balançoient la valeur des biens. ( D ès que le
citoyen Dusson en appelle au citoyen Sim onnet, celui-ci
lu i répond que ce bien vaut plus de 100,000 fran cs, et
qu’un administrateur bien entendu en retirera constam
ment. 5,ooo francs de re n te , toutes charges déduites ).
6°. Que ce bien est encore dépi'im é p a r les dégradad a tio n s et les exp o lia tîo n s faites après l'a d ju d ica tio n .
( D ’une part, ces cxpolialions et dégradations sont une
calomnie ; d’un nuire côté , suivant le citoyen Dusson
lu i- m ê m e , elles seraient postérieures à l’adjudication,
et elles n’influeroient point sur l ’appréciation. du b ie n ,
au temps de l’adjudication ).
Troisièm em ent, les enchères faites par les citoyens
M o u illard , T esso t, D eb ou d ard , P a p o n 'et autres, ont
été faites sans l’assistance d’un avoué ; le citoyen Dusson
seul avoit le sien à côté de lui. Les enchères M ouillard ,
etc. sont nulles, et opèrent la nullité de l ’adjudication }
suivant la m axim e, q u i cadit à sy lla b a , cadit ¿1 toto. •
• Nous convenons que la loi du 11 brum aire an 7 f
porte , article X I X : « T o u t citoyen peut enchérir par
« lu i-rnônic ou par autrui. Ceux qui enchériront pour
« un tiers , 11e peuvent être contraints de justifier de leurs
E
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( 34 )
t
« pouvoirs ; mais ils sont tenus de faire , dans les v in g t« quatre heures, leur déclaration en com m and, etc. »
L ’article X X dit , que le saisi ne pourra se rendre
adjudicataire, et que celui qui l’aura fait pour lui ( saisi )
en dem eurera responsable.
L e m ême article dit : Que dans le cas où l’on se rendroit adjudicataire pour un insolvable , celui qui pren
dra l ’adjudication en sera responsable. .
• L ’article X C I V de la loi du 27 ventôse an 8 , porte:
« L es avoués auront exclusivem ent le droit de pos«_ tuler et de prendre des conclusions dans le tribunal
« pou r lequel ils seront établis. »
P o s tu le r , disent les praticiens, et notamment D enizart,
verbo
«
«
«
«
po stu latio n ,
est l’exercice du droit « q u e les
procureurs ad lites ( aujourd’hui les avoués) ont de
représenter leurs cliens en justice; de procéd er, fo r m er des dem andes , d éfendre, et généralem ent signifier des actes en leu r nom . »
A in si donc toutes les fois qu’ il s’agira de postuler ou
de conclure, il faut un a v o u é , k peine de n u llité , sui
vant les lois des 27 ventôse an 8 , et 4 germinal an 2.
O r > pour les enchères, il faut postuler, il faut con
clure. S i, sur une enchère à la somme de 10,000 francs,
un feu s’éteintsans autre enchère, il faut demander q u e ,
faute de plus haut m e tte u r, le bien soit adjugé à l’en
chérisseur. Quand on fait une m ise, 011 dit a la justicer
Je prends cet objet moyennant cette somme; je conclus
à ce que vous me l’adjugiez moyennant celte som m e;
je contracte envers la justice l ’engagem ent de payer celte
�( 35)
somme ; mais tout cela ne se peut faire sans l’assistance
d ’un avoué.
Ce que disposent la lo i du 11 brum aire an 7 , et celle
du 27 ventôse an 8 , réunies, n’est que la répétition de
ce qu’avoit déjà statué l’édit de i 55 i , et ce qu’ensei-..
^
grioient M . le président Lem aître et d’H éricourt.
,^ .
Gomme la loi du 11 brum aire an 7 , l’article X de
l ’édit de i 5 5 i défendoit de recevoir l’enchère du s a is i;comme la loi du 11 b rum aire, l’a rticle X I défendoit la
* •
même chose par rapport aux personnes insolvables.
r I/article I X de cet édit porte : « E t seront tenus les
« enchérisseurs de nommer, leur p ro cu reu r, en faisant
« leur en ch ère, et élire^erTÎa maison dudit procureur ;
« e t a u t r e m e n t n e s e r a r e ç u e la d ite e n c h è r e .»
M . le président IiCmaître dit que si l ’enchère n ’est point
faite de cette m an ière, elle est-nulle, à raison de ces termes :
E t autrem ent ne sera reçueladite enchère. Q uando enim
statutum concipitur verbis prohibitions, elia in si non
adjiciat actum fo r e t-.nullw u, non tamen valet quod
agitur. L . non d u b iu m , cod. de legibus.
lia lo i du 11 bïurnnire an 7 laisse bien aux parties la
faculté d’enchérir; celle du 27 ventôse an 8 ne la leur
ôte pas, mais elle ex ig e , comme l’édit de i 55 i , l’assis
tance d’ iiu.ayoué.
'
•
* « L ’enchère,,dit d’IIéricou rl,. chnp. I X , a r t - X X V I I I ,
est un (iontrat q u e 'l’enchérisseur passe avec la justice,
« et par lequel il s’engage à se rendre ad judicataire, etc. »
Ce contrat 11’e peut pas se faii’e sans dem ande, sans pos
tulation; il fatil donc.rtn avoué. ^
.
D e cc que nous venons de dire il suit que les enchères
k
-
E 2 ‘
'
�.
(
3
6
)
faites par les citoyens M o u illa rd , etc. sans l’assistance
d’a v o u é , sont nulles; et cette nullité produit le même
effet que s’ il n’en étoit pas fait mention dans le jugement
d’adjudication.
\Mî
O r , par jugement du 14 floréal an 10 , plaidant le
.
citoyen M arie pour une partie saisie, et le citoyen D evèze
1
•.
A il
1
• •
-1 > 1 .
.
,
/ y
pou r le citoyen A lb a n e l, saisissant et adjudicataire , le
Mwvutf&vbf tribunal a annullé une adjudication sur exp ropriation,
f/ a W r
V
*
parce q u e , dans la sentence, l’on n’avoit pas fait mention
des noms des autres enchérisseurs; l’on avoit dit seule
ment qu’il y avoit eu plusieurs feu x, pendant lesquels
plusieurs enchères, etc. • .
^
I c i , plusieurs enchères, mais nulles; mais non mention
lég a le; e t, à p a r i; nullité de l’adjudication.
§.
II.
N otification a u x enfans Chanrpm artin, com m e créan
ciers inscrits.
Cet acte est infecté de nombre de vices : pour en bien
ju g e r , il faut commencer pai' établir certains principes.
i°. L ’article X X III de la loi du n brum aire an y , dit :
A u c u n m oyen de nullité ou om ission deform alités.
Il
faut rem arquer que cette lo i, dans aucun de ses ar
ticles, ne porte les expressions usitées dans celles d’avant
la ré v o lu tio n , les expressions a peine de n u llité ; en sorte
que celle du 4 germ inal an 2 est applicable dans toute sa
latitude; en sorte que lu znoinclre omission opère une
nullité.
�'
C 37 )
2°. Il ne faut pas croire q u e, par la loi du n bru
m aire, il y ait dérogation absolue aux anciennes lois, aux
anciennes coutumes et aux anciens usages qui iaisoient
lo is ; son article X X X V I dit seulement : « Toutes lo is,
« coutumes et visages antérieurs, demeurent abrogés E N
« CE
q u ’il s
« SENTE.
»
AÜB.OIENT
DE
CONTRAIRE
A
LA
PRÉ-
‘
D e cette disposition il suit, en prem ier lieu , que toutes
les fois que les lo is, les coutumes et les usages antérieurs
n’ont rien de contraire à cette lo i, ils ne sont pas abrogés;
ils sont encore lois. Il s’ensuit, en second lie u , que lors
que la loi du 11 brum aire est muette ou équivoque sur
quelque p o in t, elle doit être expliquée par les anciennes
lois. N on est novurn ut priores leges ad posteriores tra hantur. X/. 2 6 , au Lit. de legibus. Seci et po sterio res leges
ad priores p ertin en t, m si contrariœ sin t, idque m ultis
argiimentis prnbatur. L . 28, eod.
P o u r les exploits, nous connoissons deux sortes de for
m alités, les formalités intrinsèques , qui sont la substance
des exp loits, et les formalités extrinsèques et sans les
quelles les exploits sont nuls. Cette explication nous est
donnée par Jousse, tome 1 , page i 5 .
Dans l’espèce , la notification aux créanciers inscrits
pèche, et par les formalités intrinsèques, et par les forma
lités extTinsèqtTC57'Cornmençons par les e x t r i n s è q u e s .
A u nombre des formalités extrinsèqives^'iïoussü «place4a
nécessité d’écrire les exploits sur papier timbré. Il dit
tome 1 , page 16 : « Une autre formalité nécessaire aux
« exploits, est qu’ ils doivent êlro écrits su r papier thnhrê,
« même ceux laits à la requête des procureurs du r o i, à
�.
.
. . .
( s? )
.
...
« peine db nullité. » Il s’appuie sur l ’ordonnance du mois
de juin 1680, et les autres règlemens sur cette matière.
Dans la nouvelle législation, la loi du 13 brum aire an
7 , p o rte , i°. article X I I : « Sont assujétis au droit du
« tim b re, en raison de la dim ension, tous les papiers i\
, « em ployer pour les actes et écritures soit publics, soit
« privés. Savoir :
« 1 • L e s actes des n o t a i r e s , et les e x t r a i t s , c o p i e s et
« e x p é d i t i o n s q u i en s o n t d é l i v r é e s .
« C e u x d e s h u i s s i e r s , e t l es c o p i e s e t e x p é d i t i o n s q u ’ ils
« en d é liv r e n t. »
L ’a r l i d c
III a d é t e r m i n é l es p a p i e r s d e d i m e n s i o n ,
c e s o n l les f e u i l l e s d e 5 o c e n t . ,
cl les d e m i - f e u i l l e s d e
v
«
«
«
c e n t . , u n f r. 5 o c e n t ,
zü> c e n t .
L ’arl. X Y J I porlo. : c< Les notaires, huissiers , elc. ne
pourront em p loy er, pour les actes qu’ ils réd igero n t,
et leui's copies cL expéditions, d'autre papier que celu i
tim bré des déparlemens 011 ils exercenl leurs fonclions. »
L ’artirle X V i l I p o r lo : « L a
faculté ( d e
« extraordinairem ent) accordée,
faire t i m b r e r
p a r ¡ l' ar ti cl e Y II d e l à
« p r é s e n t e , a u x c i l o y r n R q u i v o u d r o n t e m p l o y e r d ’a u t r e
« p a p i e r j j j U ’ c x' h u f <mr m p a r l a r é g i n ^ e n le faisant t l m « brer
«
«•»vaut d ' e n ' i T . m '
usage7 t"st
ivtfiiditk
aux
ils seront fë?ius de so
rwr~ïTÏÏ~poj'!<’r timbré débité par la régir, n
n o t a it î^,
I
nuissirp,«!,
etc.
l i r a - t - o n q u e c e t t e l o i , p >r *011 nriicb* W V I ,
n°. 5 ,
p r' M; -’ r <* u n e ¡ m o n d e d ’ * 1 0 0 fr. e n e;:- . l e c o n t r a v e n t i o n
à 1’ . r . \ \ i I i , et q i i ‘ ’ l'-ni n e p Mt J' i - n j ' U ' e r la f x ' i n e
�( 39) '
M ais il n’y a pas m oyen de fuir la rigueur de la dis
position de la lo i du 4 germ inal an 2. Celle du 13 bru
m a ire 'a n 7 dit que les huissiers écriront leurs actes,
tant en originaux qu’en copies, sur du papier timbré de
dimension , et qu’ils 11e le pourront sur du papier tim bre
extraordinairem ent : elle est tout à la lois im pérative et
prohibitive*, comme im pérative, elle doit être obéie, u
peine de nullité , dit celle du 4 germ inal an 2 ; comme
p ro h ib itiv e , elle frappe forcém ent de nullité tout ce qui
seroit contraire à sa disposition : Q uando cni/n s(atulum
concipitur verbis prohibitivis , ctiam si non adjiciat
actum fo re nu Hum , non larnen valet quod agi tur.
ÜN’ im porle l’amende des to o IV. contre l'huissier *, celle
peine lui est personnelle*, s'étendroit-elle jusqu’à la partie,
il y aumit é g a l e m e n t milliu' : Scd cl s i /ex ulteriùs procedat cl peenaru- a d jic ia t, idem ad/tue diccndum e s t ,
modo pœ/ta a djic iatur a u n ulla tio u iactus , ut loquuntur;
nam et lune nullum est ipso jure quod factum e s t ,
f
,
tn-HWult
ÿ if
et prœtereà pivna , et adjecta annullationi prœstanda
est. E sem p la , dit V innius , habem us in /. 4 , /. 6 , cum
•
autli. seq. C. de incest, n u p .cl^ .
A in s i, amende par la loi du 13 brumaire an 7 , et
nullité par celle du 4 germ inal an 2 , el par l'ordon
nance de 1680 : conséquence irrésistible aux veux de la
raison.
Dan* l'espèce, la co p ie de l'alliehe de* procès v e r b a u x
.
t
d a p p o s i t i o n , de l'acte du d épô t tic l'alliehe au g p ' i . e de
C un; t , et de h n<'liticaiiôîiT^-i c*o|»ir ,,,> t,ul' <'•'* «ctr«
s u p p t w e lai.vM-e , dans le t e m p s . au\ 1 ;.| ns C’ h- mj>—
mu lti li } ^
n/-eA
JiTp; irtïcT u r ' ’p p i ê r timbre e x t r a o r d in a i r e -
^ .
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( 40 )
m en t, en partie sur papier marqué au tim bre des jour
naux ( et non de dimension ) , et en partie sur papier
non timbré.
.
V o ic i l ’état exact de cette copie : elle est en trois grandes
feuilles. L a prem ière est m arquée au timbre de 1 franc
5o centim es; la deuxièm e, au tim bre de 5 centim es; et
la troisième est sans aucun timbre. Sur cette troisièm e,
est la copie du procès verbal d’apposition d’afïiclies à
Gannat. L a nullité ne sauroit en être m ieux établie : il
y a om ission, même violation d’une form alité extrin
sèque.
L ’on va jusqu’a articuler que l ’o rigin al de l ’affiche est
infecté du même vice. M ais le citoyen Dusson l ’a sous
trait de son dossier, dont nous avons pris com m unication:
le pourquoi en est frappant.
Quant aux formalités intrinsèques , il y en a de plu
sieurs sortes dans la procédure -du eitoyen D u sson , res
pectivem ent aux enfans Champmartin.
'cvJ-Tïi
_ "if
l0* ^ ’originsil de la notification aux créanciers est im , prim é en son entier. Peut-on croire que l ’huissier qui
faite éloit accom pagné d,’uix.impu jjuieiir ^ qui im prim oit sous la dictée de l’huissier à mesure que celui-ci
exploitoit ? L e citoyen Dusson p ro u v e ra -t-il que l’im prim eur ait prom ené ses caractères, ses presses et scs
<•
ouvriers à G a n n a t, à C h an tel, à Gharroux , etc. pour
im prim er l’exploit- 4 e l’huissioi-? —
'.U n v
^
V,
v
T o u t est im p rim e, ni£me Ja^matti-e-ulc de l ’huissier.
Cependant l’article II du t it r a i! de.l’iiixLQi:uiançc de 1667,
* 7
7 * *
x
porte; « Déclitrcron^flUSSi^M^. hms&ier^çt sar^cjis , pyr
% •->».%'. « leurs exp loits, les ju rid ictio n s où ils sont im inatriV'
« cillé s.
�( 41 )
« c u lé s , leur domicile , etc. le tout à peine de nullité. »
L e mot déclareront, signifie que c’est à l’huissier de
déclarer lui-m êm e, qu’il l’écrira de sa propre main : sa
m atricule doit être écrite par lui-mêm e. E n la sénéchaussée
d’A u v e r g n e , nombre d’exploits en retrait lignager ont
été annullés par cette seule raison; pourquoi? parce qu’il
s’agissoit de matière infiniment rigoureuse. I c i , il y a
même raison : une expropriation l ’est tout autant. A
A thènes , à R o m e , et en France , les subhastations ont
toujours été soumises à toute la sévérité de la- m axim e,
q u i cadit <i syllaba cadit à toto,
21°. Les enfans Ghampmartin o n t , par leu r inscrip
tion , élu dom icile chez A lexandre B ^ l l a t n o t a i r e à
G annat; la notification paroît avoir été faite chez un
cit. Rollat. Point de nom de baptême donné à ce citoyen
R ollat ; en sorte que l’on ne peut pas dire très-exaetement
que c’est le même Rollat.
Dans la même in scription , les enfans Champmartin
\
\
Jt
sont dits habitans du lieu de B iè v r e , village de Culhat ,
mairie d’Etroussat ; dans la notification , ils sont dits seu
lement demeuranfcen la commune d’Etroussat.
3°. C ’est le citoyen Baudet, huissier, qui a posé l’exploit
de notification. A u n °. 4 , il y dit qu’il a laissé aux enfans
Champmartin « copie cCautre procès verbal d’apposition
« de ladite affiche , j a i t e en la com m une de G a n n a t,
« EN MA niÉSENCE, p a r le cit. L a ssim o n n e , le ia
« germ inal an 9 , après m idi. »
Dans les numéros précédons , Baudet dit que les procès
verbaux d’apposition ont été faits-par V m cen t, huissier.
Dans le n °, 4 , il 11e dit pas que V incent a fait l’appoF
2
Io.
Cl/a.
CM LU a. b/KilcUJU.
�...............................
"
'
( 4 0
-sition d’affiches, à Gannat j il dit seulement, faite en la
com m une de G a n n a t, en ma présence, p a r le citoyen
Ija ssiin o n n e. Gela signifieroit que Lassim onne.auroitposé
l’affiche (et Lassimonne n’est point huissier) : cela signi
iieroit que Baudet, huissier, auroit fait le procès verbal
d’apposition ; ce qui n’est pas v r a i, puisque c’est l’huis
sier V incent, qui l’a fait. Il y a donc divergence entre
la notification et le procès verbal d’apposition. U n créan
cier inscrit a dû en induire qu’il y avoit fausseté, ou dans
la copie de notification , ou dans celle du procès verrbiriT"
d ’apposition. E n cet état des choses , il a dû ne pas y
c r o ir e , 'et. demeurer tranquille chez lui.
4 °. L a copie^de la notification aux créanciers ne con
tient point, assignation à l’audience du 8 floréal an 9 ,
jour indiqué pour l’adjudication. Il n’y a point d’assigna
tion ni aux enfans Charnpmartin., ni au cit. Slm on n et,
cu ra teu r, pour assister ses mineurs ; les uns et les autres
« ’ont donc pas été tenus d’y com paroir.
...
11 est vrai que l’art. V I de la loi du 11 brum aire an 7,,
d it: « S u r m it n o tifié s , et copie en sera laissée ta n t au
c< sa is i q u 'a u x créa n ciers , etc. » L e législateur ne se sert
........
pivs du terme ussig/rés.
■
M a is, c’est ici le lieu de ré p é te r, non est novitm ut
t p 7'io n s leges ad posteriores trahantnr. L ’art. X X X V I
de la loi du 11 brumaire an 7 11’abroge les ]ois., cou
tumes cl usages antérieurs , (,.ie dans les parties où elle
leur seroit contraire. Hors celle contrariété, point d’abrogaliou. Quand la loi nouvelle ne dispose pas sur un
p o iu t, l’ancienne loi et 1 ancien usage y suppléent.
1/
Les anciennes forjnes préliminaires aux ventes d’ im-
�\
'
C 43 )
‘
meuble?, sont remplacées par l’affiche. L ’affiche renferm e
ci elle seule la saisie réelle, les criées, la certification des
criées, et le congé d’adjuger. O r , la coutume de Bour
bonnais', art. C L , l ’édit de i 55 i p è t l’usage attesté par
tous les praticiens, voüïoient et’veûlent encore ùne.assignjr5'“
tion au saisi et aux créanciers. Il y en a plusieurs raisons
très-puissantes.
L a prem ière de ces raisons est qu’une affaire ne peut
être portée devant les tribunaux que par une assigna
tion. Sans assignation, les tribunaux ne sont pas saisis..
A in si celui q u i, par un e x p lo it, déclarerait simplement
qu’il demande telle chose, et s’il n’assignoit pas, il ne
pourrait pas dire qu’il a saisi même tribunal j il n’y aurait
pas moyen de statuer sur sa demande.. A in s i, celui qui
déclarerait simplement”, "jpà'r'exploil^-qu’ il appelle de" tel
jugem ent, ne pourrait pas dire qu’il a saisi le tribunal
d’appel. Il n’y aurait pas moyen de rendre un jugement
sur son appel.
L a seconde raison se tire de la loi du 11 brum aire an 7 ;
en l’article X X I I I , elle parle de jugement qui rejette les
moyens de n u llité , et de jugement qui adjuge. Dans la
règle, point de jugement sans demande préalable; et point
cfodemande légale sans assignation aussi préalable.
lia troisième raison se tîrô~üncôrê dé 'FürtT'XX^ I de
la même lo i, ainsi "conçu : « Ceux qui , avan-t-i ad judî«” cuti0rr,"voÎidroie 111 exercer aucunes des revendications
« mentionnées en l’article précèdent, poCtritvnE icirriie ,
«"ÊN SE RENDANT rÂlVTÏES INTERVENANTES , 'DANS
« la
p rocédure
ci-après. »
cCadjuiiLCii^o^ ■> s u i v a n t les fo rm es,
■
t
.
.
F ^
�( 44)
'
D ’ une p a r t, point de procédure sans assignation préa
lable : cela est certain.
D ’ un autre c ô t é , point d’intervention , s’il n’v a j oa^de cause; s’il n’y a pas d’instance ni procès ; et point
"cTêTcause, point d’instance, point de procès, s’il n’y a pas
eu d’assignation : le cit. Dusson le dit lui-m êm e, p. 8 et 9
de son mémoire. Il nous cite l’auteur du dictionnaire de
droit et de pratique, et l’ordonnance de 1667. Nous lui
opposons les mêmes autorités : s’il est de bonne f o i , il
s’y rendra.
E n cet état, par les quatre moyens que nous venons
de d évelop per, nous avons démontré que la notification
aux créanciers est n ulle ; il s’ensuit que les enfans C hann>
martîï^ n ’o n tp a s été obligés de com paroir. L ’on nous
diroit en vain , que Bien ou mal assigné , il faut se pré
senter. Cette règle signifie seulement que lorsque l’on est
assigné régulièrem ent, il faut p a ro ître, quoique la de
mande ne soit pas juste ; m ais, lorsque l’exploit est n u l,
le défendeur peut se dispenser d’y répondre : il a ensuite
la liberté d’en demander la n u llité , parce qu’un exploit
nul ne doit produire aucun eiTet légitim e.
A insi donc , les enfans Champinartin n’ ont pas dn se
présenter à l’audience du 8 floréal an 9 , et point'de iln
(Îè^noïï recevoir contr’eux.
, sur l’art. X X V I
àeT ïrto T flii n b ru m a ire, dit,, n°. 192 : « L e s défaillons
« y seraient néanm oins recevablex t d^iiTs~7e cas où le
te procès verbal d appositio n ne je in 'jiu ro it pas été notjr
« fié. » U ne notification nulle et l’absence de la notifica
tron sont synonym es, parce que ce q u i est nul ne peut
*
■—
produire aucun effet. R ien n’empêche donc que les on-
�( 45 )
fans Champmartin puissent exciper de moyens de nullité
contre la procédure antérieure à l’adjudication.
§.
III.
A c te du dépôt d u n exem plaire de Vaffiche a u greffe.
■V
Cet acte est du 12 d u m ême mois : il constate que le
■citoyen Dusson a d é p o sé , au greffe- du tribunal de
G a n n a t, i°. un exem plaire de l’affiche; 20. l ’extrait de /
la matrice du r ô le , et en a requis acte à lu i o ctro y é,
y est-il dit m ot pour mot.
11 faut rem arquer , x°. que le citoyen Dusson a fait
seul cet acte , et sans l’assistance d’un avoué ; 2,0. qu’il ne
• l’a point signé ; 30. que cet acte esUdaté du i a germ iliai a\>ant m idi.
- A u jo u rd ’hui le citoyen Dusson produit une. expédi
tion de cet acte de d ép ô t, où il est fait m ention qu’il
a signé sur la minute. Mais., i°. il y a une différence
entre cette expédition et la copie qui en a été donnée
aux créanciers inscrits. Dans l’ex p éd itio n , il est dit : L e
citoyen E tien n e D u sso n - P o is s o n , •p ropriétaire, sans
profession sp écia le, tant en son nom q u e n qu a lité .
de m a r i, etc. Dans la co p ie , après l’adjectif sp écia le,
■est le participe du présent a g issa n t, qui n’est point
dans l’exp éd itio n ; ce qui conduiront à l’idée q u e, depuis
-que la copie a été don n ée, il y a eu quelques change
mens sur la minute. D ’ailleurs il s’agit ici de m atière
rigoureuse ; notre copie nous tient lieu d’ original : il n’y
est pas dit que le citoyen Dusson a signé sur la minute*
'
�(46)
Il peut d’autant moins récuser cette co p ie , que lui-m em e
y a écrit plusieurs mots.
2°. Cet acte atteste que le dépôt de l’affiche a eu lieu
le 12 germ inal avant m id i (i). L e m ême jour paroît
avoir été fait le procès verbal d’apposition de l’affiche
à G a n n a t, lieu du bureau des hypothèques de la situa-
\<T-V
f
/■
* 'êf'DiJ'' tlou ^es biens. Ce procès verbal est daté d'après m idi.
O r , il est dit qu’alors l’affiche n’étoit pas encore dé
n*.
posée au greffe ; il y est dit seulement qu’elle 1&
seroit (2).. .
.
Dans cette position, il y a nécessairement un faux bien
evid en t, ou dans 1 acte de depot au greiïc, daté du 12 ger
m in a l avant m id i, ou dans le procès verbal d’apposition
d’affiche , daté du 12 germ inal après m idi • c a r, en rap
prochant ces deux .actes, ils s’entredétruisent. En e lle t,
le greffier atteste en avoir reçu le dépôt avant m idi ■
l’huissier y au contraire, certifie en avoir fait la publi-
(1) Aujourd’ hui 12 germinal an 9 , avant midi, a comparu
au greffe , etc.
'
(2) L ’huissicr y dit : « M e surs transporté dans tous les lieux,
» places publiques , et entrées de la commune de G a n n a t, et à
» tous endroits accoutumés'. »
A u x q u e l s lie u o c l e
h a u te v o ix ,
s ib le ,
c it o y e n iM S S im o n e a p u b lie e t a n n o n c é
et. a u s o n d u t a m b o u r , e t d e l a m a n i è r e l a p l u s o s t e n
la . v e n t e
des
m e u b le s
et
J ^ e c lc r c -C h a m p n ia r lin , d é s i g n é s
cistkée
a
DÉPOSÉE ,
ÇIVIL
1JE
il
G a n n a t,
le
ii
CONI ' OI t M É j t t E N T
im m e u b le s
I' IUiJUlÈRE I N S T A N C E
a u d it
d a n s i.’ a f f i c h e q u i a é t é e n k i ; -
germ in al
A
a p p a r ie n a r is
hies-kn t m ois, e t
LA
LOI,
AU
UK
GANNAT.
G HEF I' E
UU
qui
seha
TUIÜUNA^
�.
.
r ‘4 7 )
,
■cation après midi ' il-enonce 6n son procès verbal qu elle
sera déposée au greffe, Si le greffier dit v r a i, il s’ensuit
.que l’huissier a in e n ti, en certifiant l ’avoir publiée après
m id i; parce que,-si dès avant m idi l'affiche étoit déposée
au greffe, il étoit impossible que l’huissier la publiât après
m idi dans la .commune de Gannat. Si au contraire l’huissier
dit v r a i , il s’ensuit que le greffier a m en ti, en attestant
que l’affiche lui a été déposée avant m id i; parce que l’huis
sier , dans'son prücès~verbal*ï2la p r ê y 7?nW-,-assure^'avoir
publié ralRcIicT,~ct~'as5trre enee-rer rpreife sem dépotée au
greffe du tribunal de Gannat. E n disant qu’elle sera dé
posée , il donne à entendre bien-clairement que., après
m id i, elle ne l’étoit pas encore.
Dira-t-on que 1’liui.ssier a fait sa publication sur des
copies de .l’ailiche , et que déjà l’original en étoit au greffe
du tribunal de Ganuat ?
(
‘•
\
^
V
Nous répondons qu’il a été fait un, original de l’affiche
en question ; que cet original a été enregistré au bureau ^
de G annat, le n
germ in al; et que cet original est dit
^ ^
'}
avoir été déposé au greffe du tribunal cl,^ G an n at, le
12 germinal avant midi. A in s i, cet original ne pou voit
^>;is être au pou voir de l’huissier le même jour après midi.
Cependant l’huissier cite l ’original de l’ailiche ; il en
cite la date de l’enregistrem ent; il dit qu’elle sera déposée
au. greffe : donc elle ne l’est pas en core, donc elle est encore
dans ses mains , parce que., sans être nanti de l’original^
iJ lui étoit impossible de faire son opération.
A in si donc , il y a faux ou dans l’acte du dépôt au
greffe, ou dans l’apposition d’affiche à Gannat : dans le
prem ier cas, point d ’acte de dépôt ; dans le second cas,,
¿ fti
J t
�.
.
v
c 48 )
point d’affiche à Gannat : et dans l’un de ces deux cas ,
nullité absolue de toute la p ro céd u re, suivant la m axim e
q u i cadit à syllaba cadit à toto.
Que l’on ne dise pas que ce vice puisse être pallié par
aucune iin de non recevoir : c’est ici un faux , un faux
bien évident ; et toutes les fois que l’on vient à le décou
vrir , l’on est toujours à temps de s’en plaindre. A u reste,
nous en serions quittes pour passer à l’inscription de faux
incident ; èFlious sommes tous décides à êiT venir là , si
le citoyen Dusson pousse plus loin son obstination à
garder notre bien.
Sur la nécessité de l’assistance d’un avoué pour la régu
larité de cet acte, il suffit de rap peler, i ° . que la loi
du 27 ventôse an 8 rend le ministère des avoués néces
saire dans tout ce qui tient à la postulation et a u x conclu
sions ’ et que , sans cette assistance, il y a nullité des
actes de postulation, suivant la loi du 4 germ inal an 2 ,
et même suivant l’ordonnance de 1667 , remise en acti
vité-, 2°. que l’acte en question est un acte de postulation.
D ’abord , cet acte est nécessaire dans la procédure en
expropriation. 1°. L ’art. V de la loi du 11 brum aire dit :
« I l en est déposé un exem plaire au greffe ». 2.0. L ’art, 1
de la loi du 22 prairial an 7 , sur les droits de greffe,
porte : « Sont assujétis, sur la m inute, au droit de rédac« tio iy etc. i°. Pacte de dépôt de Vexemplaire d?affiche t
« en exécution de Varticle V d e l à loi du 11 brumaire. »
En second lie u , cet acte est de postulation. Rien ne
le prouve m ieux que sa contexture et sa dernière partie :
cl en a requis a c te , y est-il d it, à lui octroyé. C ’est lo
citoyen Dusson lui-m êm e qui a demandé et requis a cte ,
et
i
�C 49 )
et sans l’assistance de son avoué. J1 a_donc fait un acte
de postulation : et il ne le pouvoit pas. Il y a donc nullité.
§.
IV .
P ro cès verbaux (Vapposition cTaffiches, etc.
Les appositions sont nulles pour avoir été faites les 11 et 12
germ inal an 9 , qui n’étoient pas les jours convenables à
leur publicité. Elles auroient dû l’être un décadi, et renou
velées un jour de m arché suivant.
Il
est vrai que la loi du 11 brum aire an 7 est abso
lum ent muette sur le jour de l’apposition.
M ais elle n’abroge pas absolument les lo is, coutumes
et usages antérieurs, q u i, lorsqu’elle ne dit rien sur un
p o in t, doivent encore servir de règle; prîorcs leges ad
posteriores trahuntur. P o sterio res leges ad priores
p ertin en t, n isi contraria} sint. Ici point de contrariété
sur le jour des affiches, puisque celle de brum aire.n’en
dispose rien. Il faut dès-lors rem onter aux lois et usages
an teneurs.
A v a n t la ré v o lu tio n , et jusqu’à la loi du 17 messidor
an 7 , les criées pour parvenir à la vente des biens par
décret sur saisie ré e lle , les affiches pour les ventes sur
simple placard, dévoien t, suivant la coutume de B ou r
bonnais régissant le bien de B iè v r e , suivant l’édit de 1 55 i ,
devoient, disons-nous, être faites les dimanches, a l’ issue
des messes de paroisse, pour en instruire le plus grand
nombre de citoyens, pour opérer un plus grand nombre
d’enchérisseurs. Cela se pratiquoil ainsi dans toute la
France.
G
�C 5o )
La^loi du 19 messidor an 5 changea cet ordre ; elle
voulut quelles criées fussent faites les décadis, et rennuveléos le jour du marché le plus prochain. E lle l’avoit
voulu ain si, parce que les décadis étoient des jours de
cliornme, et que, ces jours-là, l’oisiveté conduit à écouter
les proclamations et à lire les affiches*, parce que les
marchés attirent beaucoup de m onde; parce q u e, par ces
m oj’cns, la vente acquiert toute la publicité nécessaire,
et que les enchérisseui-s se présentent ensuite en foule.
E n l’an 9, temps où l’expropriation dont il s’agit a eu
lie u , il y a v o it, sans con tredit, mêmes raisons de con
venance et d’utilité , pour exiger que les affiches pour
expropriation fussent posées le décadi, et renouvelées le
jour de marché suivant. L e citoyen Dusson n’étoit donc
pas maître de choisir le jour pour l’apposition des affiches :
ayant pris des jours ordinaires, il s’ensuit que la vente a
été en quelque sorte clandestine. Aussi y a - t - i l eu peu
de concours; aussi un bien en valeur de plus de 100,000 f.
a-t-il été adjugé pour 5 i , 6 oo fr. Cela est révoltant.
Des expressions même de la loi du 11 brum aire, il
suit que celle du 19 messidor an 5 est maintenue. E n
e iïe t, l’article V I dit que la notification sera faite dans le
délai de cinq jours de la date du dernier procès verbal
d'affiches. Ces m ots, dernier procès verb a l, donnent à
entendre qu’il en faut plusieurs; et il n ’en faut plusieurs
que dans le sens de la loi du 19 messidor an 5 ; c’est-àd ir e , dans le sens de l’apposition un jour de décadi, et
de la rénovation au jour de marché suivant.
Dans les procès verb«n\ d’alliches, on remarque une
autre faute bien essentielle. L ’huissier n’a pas rem pli lui-
�C 5i )
^
même sa matricule ; son nom et son surnom sont écrits
par une main étrangère ; la mention de la juridiction ou
il est l’c ç u , est en caracteres cl impression : tout ceci est
contraire à l’article II du titre II de l’ordonnance de 1667.
L a loi du 7 nivôse an 7 y a ajouté la form alité de la
(¿ ¿t^ J^
-j,
.
. .
—
¿ 7 " '“' • u
y
patente.
T o u te la procédure du citoyen Dusson est donc nulle.
E lle doit être déclarée telle.
Il
est cruel sans doute pour le citoyen Dusson , d’avoir
à combattre si longtemps pour obtenir la i-entrée_de_S£j
créance. Sur ce p o in t, il se plaint de beaucoup plus de
mal qu’il n’en a réellement. L ’on sait même que pour
appitoyer davantage sur son sort, il va jusqu’à des sup
positions invraisem blables, et qu’il espère infiniment de 4
certains moyens bons partout ailleurs.
Si
le citoyen Dusson n’est pas encore payé , qu’il s’en
accuse lui seul, et m êm e, s’il le v e u t, la bonhom m ie du j
citoyen Champmartin père.
P ar acte sous seing p r iv é , du 4 vendém iaire an 10 , le
citoyen de Champmartin père avoit vendu une portion
de son bien au citoyen Reynaud de Blanzat, moyennant
la somme de 5o,ooo fr. dont 36,000 f’r. payables le 30 prai
rial au citoyen Dusson. Il paroît que le citoyen Dusson
n ’a pas voulu recevoir cette somme. L ’on a été dans l’ im
puissance de contraindre le citoyen Reynaud en prairial,
le temps cle l’enregistrement étant passé. Depuis la date
du sous seing p r iv é , le double droit etoit encouru. P o u r
agir contre le citoyen R eynaud, il eut fallu faire enre
gistrer le double ; il en aiiroit conte ü,ooo francs. On ne
les avoit pas; 011 u’avoit pas crédit sullisaul pour les cm -
�( 52 )
_
prunier, E n sorte qu’après une conférence dans le cabinet
du citoyen B o iro t, avocat à C lerm on t, l’on a été obligé
de biffer les signatures au bas du sous-seing.
L ’ o n a v o i t préparé la vente d’une autre portion de biens.
U n citoyen estimable en donnoit 2 5,000 francs. M ais on
a craint d’avoir affaire au citoyen Dusson : la confiance ne
se commande pas.
C ’est ainsi que la famille Champmartin est aujourd’h u i
reduite à une misèi'e extrêm e, par l’épouvante qu’a inspi
rée le citoyen Dusson.
D epuis la contestation actuelle, en vendém iaire dernier,
est venue chez le citoyen G ourbeyre la demoiselle Bosredon de St. A v it , adressée p a rle citoyen Boirot. E lle désire
% acquérir le bien de B ièvre et dépendances. E lle en offre son
vrai prix. E lle ¡rayera 5o,ooo francs comptant. Suivant le
conseil du citoyen G o u rb eyre, elle a fait écrire au citoyen
^ D usson, pour lui proposer de x'cnoncer à l’adjudication ,
et recevoir de suite ce qui lui est légitim em ent dû. ( L a
demoiselle de Bosrcdon nous a autorisé à le publier. ) L e
citoyen Dusson n’a répondu que par un redoublement de
poursuites. Il a donc décrété la perte absolue de la maison
Champmartin.
A u reste, le combat n’est plus entre le poursuivant et
le saisi ; le combat est entre le poursuivant, et des indi
vidus qui sont au moins créanciers.
P ar certaine ru b riq u e , le poursuivant a accaparé le
gage des créanciers : il l’il & vil prix. S’il le g a rd e , il
profite au moins de 5o,ooo lrancs; et les en fans Champmarlin perdent to u t: ils sont sans ressource. A in s i, le
citoyen Dusson certat de lucro ca çta n d o , et les enfans
�( 53 )
Cham pm artin certant de danmo vitando. Dans cette
position, si le citoyen Dusson se dit favorab le, les enfans
Champmartin le sont bien davantage. Beaucoup moins
h abiles que le citoyen Dusson , ils mettent à découvert
leur situation, tandis qu’il dissimule la sienne, pour tâcher
de com bler la mesure de leurs maux.
Nous finirons par une assertion sur laquelle on peut
compter. Nous dirons q u e, le lendemain de l'annullation
de l’adjudication, le bien est vendu sa valeu r, et le citoyen
Dusson est payé com ptant; les acquéreurs sont prêts,
ainsi que l’argent revenant légitim em ent au cit. Dusson :
nous irions m ême jusqu’à lui garantir son payement.
G O U R B E Y R E.
A
de
l ’i m p r i m r r i o d e
L
a n d
RI
o t
,
T ribunal d’appel. — An 11,
seul imprimeur du
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leclerc-Champmartin. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
créances
affichage
droit de criées
droit romain
adjudications
expropriations
Description
An account of the resource
Réponse à mémoire imprimé, etc. pour les enfans Leclerc-Champmartin, demandeurs en intervention et subrogation, et subsidiairement appelans ; contre Étienne Dusson-Poisson, défendeur et intimé.
annotations manuscrites. 2 pages insérées entre page 24 et 25 et intitulées « Observations sur le défaut d'intérêt (Suite du paragraphe II, page 16.)
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1779-An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
53 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0220
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Paris (75056)
Bierre (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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adjudications
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droit de criées
droit Romain
expropriations
-
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dbc5bcedd6fac9a6256e5e2f9eab764e
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MÉMOIRE
PO UR
DE
LES
LA V I L L E
PAU VRES
D’A U R I L L A C ,
LÉGATAIRES d’ u n e
SOM M E
DE
4
80000
'
4
¿ktyiA/ty,
n
/'y^V
<kitÂxP\i/\x
Sm ^l/o^^tuX bijflcS
6 4 t.
A RI OM,
ee
l’im prim erie
IMPRIMEUR
de
DE L A
LANDRIOT,
COUR D ’ A P P E L »
Ju in 1804.
se u l
/
�M
É M
O
I R E
PO U R
'
L e s Pauvres d’A u rillac, représentés par le Bureau
de bienfaisance de cette v ille , ap p elan t;
r
t
V
C ONT R E
.
t .
#•.
•
-
*
Le sieur C A P E L L E , héritier de madame
G
a l i e u
de,
.
I l existe un corps q u i, né avec la société, est destiné à
durer autant qu’elle. Objet de la prévoyance du législa
teur, de la bienfaisance des particuliers, des sollicitudes
de la religion, les lois veillent pour le protéger, des mains
généreuses le nourrissent, la piété se charge’ de le consoler, et tous les hommes le resp ecten t car le respect est
du au malheur.
A 2
�_
.
u ?
L es pauvres composent ce corps; ïes pauvres, c’està-dire, cette portion des citoyens de chaque état, h qui
le ciel a donné la vie, et refusé les moyens de la soutenir :
membres souffrans de la société, en les recevant dans son
sein elle contracte l’engagement sacré de les secourir,
X/’arbre fertile ne prive aucun de ses rameaux de la sève
qui les féconde.
L ’homme a donc ménagé des ressources à l’homme
¡contre les disgrâces de la nature ou de la fortune. Il est
des biens mis en réserve pour ceux qui n’en ont point :
la société encourage et protège les dons faits à la pau
vreté par l’opulence. Ces biens, ces dons, fruits de la
munificence des princes ou de la générosité des parti
culiers,-se-nomment également fondations : ce sont des
dépôts inviolables consacrés par la charité publique; ce
.sont des eaux salutaires dont rhumanîtë, la bienfaisance,
la religion gardent la source.
Des pauvres se présentent aujourd’hui pour réclamer
une de ces fondations : c’est l’unique débris échappé au
naufrage qui a englouti tous leurs biens; c’est un legs de
80000 1i~, dei'nier gage du souvenir d’une femme ver
tueuse dont ils pleurent encore la pei’te. Ii’héritier le
refuse ; des premiers juges Îont annullé : mais le gouver
nement l’approuve, mais toutes les lois l’autorisent___
les magistrats supérieurs le coniiinieront» Il est -digne de
la justice de protéger les monumens de la bienfaisance ;
<et l’autorité publique doit consacrer, les dernières volontés
d’ujiç ferpmq assez généreuse pour vouloir faire le bien
a,u delà, même
-■* * ■du
* .tombeau,
- * • * et assez heureuse pour le
pouvoir*
�(5)
’
^
C’est à des femmes que madame de Galieu ayoit confié FA IT S,
la distribution de ses bienfaits. Les femmes semblent des
tinées par la nature à soulager les infortunés; leur pitié
est plus douce, leur compassion plus affectueuse, leurs
soins plus délicats que ceux des hommes : elles sont des
gardes avancées, placées sur la route du malheur pour le
•découvrir ; elles apparoissent dans ces obscurs asiles où
il se dérobe'aux regards, telles qu’un Dieu bienfaisant
qui ramène avec lui l’espérance. Quels pleurs ne se sèchent
point à leur approche ! quels maux ne sont pas adoucis
par leurs soins! que de consolations sorties de leur bouché!
que de dons échappés à leurs mains !
iSans parler ici des Sœurs de la charité , des Hospitaliè
res et des autres femmes <jui se consaeroient par des vœux
au service des pauvres, plusieurs villes comptoient avant
àa révolution des associations de dames pieuses, réunies
par le seul intérêt de la religion et de l’humanité : on
les -nommoit indifféremment Dames de la :c harité, Dames
de la miséricorde, Trésorières des pauvres. Rio'm, Cler
mont avoient les leurs, et parmi «lies comptoient leurs
noms les plus illustres. On en trouvoit dans toutes les
paroisses de Paris : -on en trouvoit aussi dans la ville
d’Aurillac.
Les Dames de la charité étoient ordinairement les
dames les plus respectables et les plus distinguées de
•chaque ville: c’ étoient des femmes du monde, les unes
mariées, d’autres veuves, d’autres célibataires. Elles ne
knsoient aueun vœu ; libres ^abandonner à leur gré
un joug qu’elles s’imposoient librement. Elles ne for—
«noient point de corps; dégagées de tous liens publics s
�(6 )
ne retirant d’autres fruits de leurs travaux que le plaisir de
faire le bien, distinguées non par des signes particuliers
•mais parleurs vertus', connues de l’autorité seulement par
.leurs bienfaits, comme la ‘fleur modeste par ses parfums.
. Solliciter la piété dans les temples, et la bienfaisance
rdans les maisons ; obtenir dé l’avare pitié des dons qu’elle
refuse a un homme, et qu’elle accorde à une’ femme ;
secourir l’infortuné qui se cache, en lui dérobant la main
■qui le nourrit; assister l’artisan malade, trop pauvre
pour soutenir sa famille privée de ses travaux, trop fier
pour mendier vin lit à l’hôpital ; porter aux douleurs
des remèdes, et des consolations aux chagrins : voilà les
fonctions et les plaisirs des Dames de la charité. Dirai-je
des maux plus secrets qu’elles soulageoient? parlerai-je
des nourrices récompensées , des orphelins recueillis ,
des filles dotées, et de tant d’autres bienfaits oubliés
avec les bienfaitrices ?
J ’ai dit que la ville d’Aurillac avoit Ses Dam es de la
charité : on les nommoit dans cette ville, comme dans
la plupart des provinces méridionales, Dames de Vœuvre
de la miséricorde,' ce qui veut d ire, dames chargées
du travail de la charité. Tel étoit leur titre à Grenoble,
à Montpellier, etc. A Figeac, on en trouve la preuve
dans le testament de madame' de Galieu, qui lègue le
revenu cle l’une de ses terres aux pauvres de Cœuvre de
la miséricorde de 1(igeac. Croira-1-011 que ce titre par
ticulier soit le seul fondement du procès que l’héritier de
madame de Galieu intente aux pauvres? C roira-t-on
que ce procès n’auroit jamais existé , si quelques dames
pieuses .d’Aurillac n’avoient été connues que sous le
nom de Dames de la miséricorde ?
•
�c 7 y
. "
'
' Leurs aumônes / leurs quêtes, leurs soins, étoient le
seul Lien des pauvres de cette v ille , dont la population
s’élève à plus de dix mille âmes. Il n’y avoit alors qu’une
seule paroisse, et cette paroisse étoit sans fabrique et
sans marguilliers. Toutes les oblations, les fondations,
et les autres objets affectés aux fabriques dans la plupart
des paroisses du royaume, se trouvoient à Aurillac entre
les mains des prêtres connus sous le nom de Communalistes , érigés en titre de collégiale par des lettres pa
tentes , et q u i, après avoir prélevé les frais du service
de l’église ,. se partageôieïit' ce: qu’il y avoit de reste ,
sans en faire aucune part aux pauvres. ‘ La ville avoit, à la vérité, un hôpital; mais cet éta
blissement ne jouissoit que d’un revenu médiocre. La
classe indigente et laborieuse du peuple-attaclxoit d’ailleurs
une espèce de honte aux secours qu’elle auroit pu trouver
dans l’hôpital. On ne comptoit de fonds destinés au sou
lagement des pauvres, qu’une rente de 4 3 2 ^ , payable
sur la quittance des échevins et du curé ; ils en confiè
rent la distribution aux Dames de la miséricorde.
• Le zele de ces dames: sembla s?accroître lorsque la
marquise de Fontanges se joignit à elles : le trésor des
pauvres s’enrichit de ses libéralités. L ’évêque de Troyes,
son oncle, y ajouta les siennes. Plusieurs femmes riches,
jalouses d’imiter de si nobles exemples, rivalisèrent dë
charité avec madame de Fontanges. On fit aux pauvres,
dont les Dames de la miséricord'e prenoient soin , divers
legs dont plusieurs sentences du bailliage de Vie ordon
nèrent la délivrance. X>es quêtes devinrent plus nom
breuses ; les assemblées de charité plus régulières ; le
)
�( 8>
çuré d’Aurillae les présidoit, en son absence madame
de Fontanges prenoit sa place : cet honneur, dû à son
nom, l’étoit plus encore à son zèle. C’est sans doute ce
qui fait dire à madame de Galieu, dans son testament,
que la marquise de Fontanges étoit Ja supérieure des
Dames de l’œuvre de la miséricorde. Jamais elle ne reçut
çe titre de supérieure ; il n’étoit donné, comme on sait,
qu’aux femmes qui étoient à la tète d’un couvent, d’une
communauté. Comment des dames qui avoient des époux,
des enfans, des engagement avec le monde, auroient-*elles formé une communauté ? Comment madame d©
Fontanges, épouse et mère, en auroit-elle été la supé»
rieure ? ce titre est incompatible aveç çeux qu’elle avoit
yeçus des lois et de la nature.
- A cette époque, vivoit à Aurillae une veuve extrême-*
ment riçhe et sans enfans : on la nommoit Françoise^
Dorothée de Cabridens. Elle avoit été mariée au sieur
de Galieu de Eigeac, qui lui avoit laissé tous ses biens,
sous la condition de rendre la terre de Grialou, située
dans le Querci, à l’un de ses parens. Pour remplir la
substitution, madame de Galieu fit une donation de cette
terre à l’abhé Cabridens de Clavières, son frère, parent
d’ailleurs du sieur de Galieu. L a donation fut passée
à Paris en 1774? et l’abbé de Cabridens a joui de la
terre jusqu’il sa mort,
C’étoit un homme aussi recommandable par sa piété
que par sa bienfaisance. Il fut question, en 17 7 7 , d’éta
blir à Aurillae une école de Frères de la doctrine chré
tienne, pour l’instruction des enfans des pauvres. L ’abbé
de Cabridens donna, pour cet établissement, une rente
de
�( 9 )•
de 65o , et un capital de 10000 ft. Il-voulut que ces
sommes demeurassent à jamais consacrées à ■l’instruc
tion de la jeunesse, même en cas de retraite des Frères
de la doctrine chrétienne. L ’acte authentique fut passé
avec les officiers municipaux d’Aurillac, le 29 septembre
I777'
.
. .
*
. ' . '
L ’abbé deCabridens destinoit encore d’autres bienfaits
aux pauvres de sa ville natale. Il jouissoit d’une grande
fortune. La succession de madame de Galieu, sa sœur,
est composée de biens situés en Auvergne et en Querci.
Tous ceux d’Auvergne appartenoient à l’abbé de Cabridens ; savoir, les domaines de Faillitou et de la Bartassière , qui viennent d’être vendus plus de 80000 ^ , et
le fief de Clavièrcs, qui vaut à peu près cette somme.
Je ne parle pas de plusieurs maisons et de quelques
autres immeubles de médiocre valeur. La fortune de
l’abbé de Cabridens s’étoit encore accrue par le don de
la terre de Grialou, dont il pouvoit disposer à son gré.
Madame de Galieu, sa sœur, n’avoit point d’enfans. Il
crut devoir a son état, à son caractère , d’adopter les
pauvres pour les siens; mais, pressé par l’âge,.et assiégé
par les iniirmités qu’il traîne à sa suite, il confia à sa
sœur L’exécution des pieux desseins qu’il avoit conçus.
Il la chargea de vendre les biens qu’il possédoit en A u
vergne, au profit des pauvres. Il lui indiqua ceux qu’assistoient -les Dames de la miséricorde pour l’objet de
scs secours , et il la chargea de payer jla=rente qu’il avoit
destinée à l’éducation de la jeunesse.': Ces' dispositions,
il ne les consigna point dans un testament. Sa sœur pos
sédoit toute sa confiance. Il ne vouloit pas, lui dit-il,
B
�X
)
'que le public pût en douter. H lui laissa donc àb iritéstdt
sa succession tout entière. Mais madame de Galieu a
pris soin dé nous apprendre à quelles conditions : en
léguant ^oooo7*" aux pauvres, pour remplir, dit-elle.,
les pieux desseins qui lui ont été communiqués p ar
'son fr è r e avant sa m ort, et «n ordonnant de vendre,
pour acquitter ce legs, tous ses biens d’Auvergne, c’està-dire tous ceux qui ,lui venoient de -l’abbé de'Gabridéns.
■Cependcntla maison de madame de Gaiieu étoit assiégée.
"Que d?amis, que dei parens ne se trouve pas une testatrice
opulente'! 'Qui poürroit dire-toutesles manœuvres*, pein>dre toutes les intrigues qu’on employa pour obtenir la
;prëmière .place, ou du moins une place dans son testraient'?
- X e .jour si'long-temps attendu arriva enfin :'ee fut le
- 4 'octobre 1785. Madame de Galieu avoit-, à "ce qu’il
rparoît, plusieurs.parens au même degré-: ¿’étaient des
'enfans de ses cousines germaines, -c’est-à-dire, ses neveux
bretons. Deux habitoient Aurillac. L e troisième vivoit
à-Saint-Constant, yillagie à.quelques lieuesde cette -ville-:
eon te nommdit le sieur Capelle, et il avoit quatre enfana,
-¿Leux ifilles et detix> fils. Madame de Galieu •choisit l’aîné,
alors âgé de cinq ans, ' pour son héritier ;;elle lui substitua
*s©n f r è r e , sans faire aucune mention des-îillcs. La substi
tution ne 1s’est rpas ouverte-, et -:Pierrc-Anloine-Urbain
’ Gapelle,cousin auquatrième degré de madame deGalieu, •
jouit seul aujourd’hui d’une fortune dont il'ne pouvoit
^espérer qu’un .douzième, 'suivant l’ordre de la nature.,
¿puisqu’il aüroit‘ été'obligé de _parl/iiger avec son irètfe
�c ï't y
.
Qt ses deux sœurs le tiers, qui revenoit à- soa père..
Ces détails feront juger si l’extreme faveur que croit
mériter l’iiéritier de-madame de Galieu-,, si çetle pi:édi—
lection spéciale que lui- portoit, dit-il, sa. bienfaitrice r
si. ces droits respectables du sang et de la nature qu’il
invoque, sont des prétentions fondées ou de vaines çlii-<
mères. Quelle faveui: extrême ne inéiiite- pas un héritics?préféré à des païens pki? rapprochés! préféré à son propre*
-père, à son frère , à ses sœurs ! Quelle prédilection spé~.
eiale n’a pas témoignée madame d.e Galieu à un enfant
de cinq ans, qu’elle n’avoit jamais vu 5l qu’elle n’a choision le sait, que parce que la- foiblesse- de son âge semi
bloit ne pas. lui permettre de contrariée les volontés de
sa bienfaitrice ! Combien sont respectables les droits du
sang et de la nature lorsqu’ils sont invoqués par un
héritier que ni le sang ni La nature n’appeloient person~>
Bellement à la succession ?
Madame de Galieu laissoit environ 5ooooo de biens y
■ en meubles, en créances., ou; en terres.. E lle possédoit.
le fief de Grialou, celui de. Claviçres, les domaijaes.de
Feicelle,, de Lacombe, de Faillitou , de la Bartassière,
etc.; des, maisons, à Arpajon.,, à,Aurillac, k Figeac; ua
mobilier considérable. E lle a fait, il- est vrai, des legs,
en très-grand nombre ils s’élèvent, dit l’héritier, à
270000 tir. On veut l’en croire : mais, enfin la moitié
de cette somme est consacrée à acquitter les dettes, de la
nature ou de l’amitié ; il n’y a que* l’autre, moitié qui *■
soit destinée à des œuvres de charité ou de religion. Ces
liegs ne paroîtront pas exorbitans relativement aux forces
4 e la succession , et quand ou songera aux conditions
B 2
�1 12 )
'
imposées par l’abbé de Cabridens à madame de G alleu,
sa sœur et son héritière.
Entre les legs pieux, on remarque celui du revenu
de la terre de Grialou, laissé pendant,un ¿ra aux pau~
vres de Tœuvre de Ici miséricorde de la ville de Figeac.
Ce legs a été fidèlement payé ; il devoit l’être avant la
révolution ; il n’étoit pas considérable. L ’on n’a point
demandé si les Dames de la miséricorde de Figeac avoient
des lettres patentes. ' ■ :
■
t
Il est une autre disposition qui excite de vives récla
mations , qui ( s’il eu faut croire l’héritier ) est nulle
faute de lettres patentes , qui du moins a fait retour à
la succession , qui enfin doit être réduite, toujours sui
vant l’héritier. Elle est faite en faveur des pauvres de
l’œuvre de la miséricorde d’Aurillac : elle est l’objet de
ee mémoire.
.
On sait que l’abbé de Cabridens avoit laissé tous ses
biens à sa sœur, à de certaines conditions. Voici de quelle
manière madame de Galieu les a remplies.
' « E t -pour rem plir, dit-elle, les pieux desseins qui
¥ ni ont été communiqués par J 'a i monsieur Cabri« dens , mon f r è r e , avant son décès , je lègue aux
« pauvres de l’œuvre de la miséricorde de la ville d’Auc rillac, laquelle •oeuvre est administrée par de pieuses
« dames, et dont madame’'la marquise de Fontanges est
« la supérieure, la somme de 80000 ; à la charge
« néanmoins que les administrateurs de l’œuvre seront
« tenus de payer annuellement, et à perpétuité, aux
« Frères de l’école de la doctrine chrétienne établis à
* Aurillac, la pension et rente annuelle que monsieur
�( i3 )
« i’abbq de Cabridcns, mon frère ,• s’étoit obligé de
« leur payer par les actes passes avec eux, et avec les
« consuls et communautés, d’Au villa c , .sans ’laquelle
« condition je n’aurois légué-jù li\dite œuvre que lq
« somme de 60000
Je veux qu’il soit employé le
« revenu de 20000 pour, assistermessieurs les prêtres
« de la ville et çom?nunauté d’^Aurillac^ qui seront
« ,dans le besoin , .et encqre les autres•prêtres des çeh
« virons de ladite v ille ,r si le retenu de ladite,somme
« de 20000
peut le comporter ; et que le revenu des
« 40000 restantes soit employé à soylager et assister
« le surplus des pauvres- que. Iqdiie, .çsupvexa. cputumG
« d'assister. Je ?,*reux en conséquence' que la .^pnime de
« 80000 , ci-dessus léguée aux conditions mentionnées}
« .soit payée auxdjtes dames administrant ladLte opuvrp ,
« sur la quittance qui en sera fournie par-ladite dame
« marquise de Fonümges, leur supérieure , et aux termes
« ci-dessous .fixés. » ,
;
• ; . , ..
Madame de Galieu 11e fixa aucun terme précis pour
le payement de ce legs : mais elle chargea,son exécuteur
testamentaire de recueillir, jusqu’à ce que son héritier
eut atteint l’âge de vingt-cinq ans, fous les revenus de sa
succession , et d’employer ces revenus à acquitter nonseulement le legs fait à l’oeuvre dp la miséricorde, mais
tous ceux qu’elle laissoit. Elle destina au môme usage le
prix d.e tous ses biens d’Auvergne, dont elle ordonna la
vente conformément aux intentions de l’abbe de Cabridens. Elle nomma le fils de son exécuteur testamentaire
pour remplacer son père, s’il venoità mourir avant que
le sieur Gapclle eût atteint vingt-cinq ans. Enfin elle prit
�( i -4 y
toutes lès- précautions que pouvoit suggérer la prudence*
<V une bienfaisance éclairée; Vaines précautions! soins*
inutiles ! Tant de mesures, si sagement concertées, n’ont
servi qu’à faire voir que personne nepeut se flatteraujour—
d’hui d’étendre son pouvoir au delà de son existenee; que^
les héritiers testamentaires , aussi avides et plus ingrats,
que ceux du sang, -ne trouvent jamais assez considérablela-succession qu’ils nrosoient espérer; et qu’ils regardent
presque comme un vol' personnel les legs que leur bien
faiteur's’est permis de faire, et ceux dé ces legs surtout
que la religion a dictés, la religion qui seule plaide au lit
de la mort la cause des malheureux.
Madame de (ïaliëu survécut quatreans à son testament.
Ses résolutions ne- se démentirent point relie mourut sans,
y avoir rien changé-, au mois de janvier 1785:; heureuse
de quitter, pour le séjour deTéternel repos, une terre où
fërmentoient déjà tant de semences de discorde! Elle
mourut : les pauvres la pleurèrent, et ils.la; pleureront
l:ong-temps_
Surveillante fidèle des intérêts des pauvres,.la marquise
de Fontanges , qui se trouvoit à Paris à cette époque
s’occupa de leur faire délivrer le legs de 8toooo ti") que1
madame de Galièu- leur avoit laissé. L ’article 3 d’un édit
de 1749 veut que toutes les fondations; faites en- faveur
des pauvres soient approuvées par le- parlement, qui
nommera- des administrateurs au legs ( sans doute si le
testateur n’en a pas nommé ). La marquise de Fontanges
se rendit chez M. le procureur général, pouir le prier de
demander en son nom l’homologation nécessaire. M1. le
procureur général y. consentit.. Il traça la- marche qu-’oii.
�( i'5 )
''âevoit srîivre. Il falloit, dit-il-, remettre une rcopie du.
•'testament au procureur du roiprès le*bailli âge d’Aurillac,
qui la lui advesseroit, en l’invitant à requérir.quelle lçgs
fût approuvé >par le parlement.- M. le procureur général
promit de -le demander. Ce fait est certain ^madame de
ï ’ontanges, qui v it1encore., madame^de Fontanges, -.qui
-liabite Aurillac -, l’attesteroit -, et un ;tel témoignage ne
-sera pas-récusé,
,, ' . .1 • ' ■
'
'Le testament fut ènvoyé à Paris, vers la Æn de 179-..
Les troubles survenus alors, les alarmes de la magistrature
sur son état,'firent négliger cetteaffaixej comme beaucoup
d’autres, par le procureur général, Il.étoit peu question
•de fondations, lorsqu’on ne s’oceupoit qu’à détruire. Bien
tôt le parlement fut supprimé /.et Sans lui;l’homologation
-devenoit impossible.
'
-Cependant l’exécuteur testamentaire de madame de
IGalieu s’étoit -mis en possession .de tous ses biens,, con
formément à ses volontés; il devoit les,garder jusqu’à ce
■quë<l’héritier eût "atteint vingt-cinq ans. Il fit l’inventaire
des-meubles,-et les'vendit pour acquitter une partie des
legs.-Il voulut ensuite «faire procéder,, suivant les ordres
de la testatrice, à la-vente des:biens d’Auvergne. Le sieur
■Capelle ,'père de l’héritier qurn’avoit alors que neuf ans,
•s’ opposa à cette vente : il représenta.que le-moment n’étoit
¿pas favorable à'ia ventesdes immeubles; et il-avoit-raison,
-l’année 1789 achevoit son; cours. *
,
-Mais les troubles qubcommençorent, et les-désordres
‘•plus grands Encore dont ils éfoient avant-coureurs, inquié^oient.peu le.père du sieur Capelle : ce . qui l’alarmoit ?
�(
16 X
c’ctoit la nécessite de payer des legs qu’il regardent comme
son b i e n ' et'sa conduite, l’a assez montre.
: (Je* ne fut’1tfù’eja 1792 ,.et api'ès ayoir laissé »¡écouler les
aimées moins orageuses àe.l<jgo et 17 9 1, que l’exécuteur
testamentaire fit rendre un. jugement qui l’^iutorisoit à
vendre les biens désignés pan madame dé Galieu ; ce juge
ment est du 27 janvier 1792. Dès que le sieur Gapelle père
le connut, il lit solliciter une suspension de vente; ^exé
cuteur testamentaire y consentit..Mais enfin, press,é sans
doute par les légataires, et après !un délai de six mois,
il fit poser des affiches qui indiquaient au i 5 juillet les
premières enchères^ e t l’adjudication définitive au 30 du
même mois.- >an >
•
•
•
1 lié '30 juillet 1 yg2, l’assemblée déjà formée, les enché
risseurs réunis, le sieur Capelle père, manifestant alors;
le projet qu’il avoit formé depuis long-temps de ne point
acquitter les legs-faite par madame de Galieu, projet suivi
depuis par son fils; le sieur Capelle, dis-je, fit signifier
à l’exécuteur testamentaire, et au notaire chargé de rece
voir les enchères, un acte d’appel du jugement qui ordonnoit la vente. Cet incident surprit et troubla l’assem
blée; et ori vendit seulement quelques petits biens épars,
à l’aliénation desquels consentoit le père de l’héritier.- ■
L ’cîüécuteur testamentaire auroit fait sans doute statuer
sur l’appel du jugement du 27 janvier; mais il n’y suxvécut pas long-temps : son. fils prit alors l’administration
et la jouissance dés biens de la succession. Ainsi Tavoit
ordonné lu testatrices jusqu’à ce que son héritier eut
atteint l’âge de vingt-cinq arts : mais ce qu’elle ne vo.ulqit
pas,
�'
C *7 )
p
pas, mais ce qu’elle défendoit, il abandonna bientôt après
les rênes de l’administration qui lui ëtoit confiée, et toute
■la succession 7 au sieur Capelle’ (père, qui mourut avec la
joie de la transmettre entière à son'fils, mais avec leremords
peut-être d’avoir payé dUngratitudè la bienfaitrice de sa
famille, qui s’étoit défiée de lui avec raison, et qui avoit
■nommé à son ^héritier d’autres ’ administrateurs >que son
père.
: Ainsi l ’héritier de madame 'de Galieu possède depuis
douze ans une fortuné qui ne lui appai'tiendroit même pas
encore, car il n’aura vingt-cinq ans que Tannée prochaine!
Ainsi n’ont pas été'acquittées les dettes dè ¡la charité-et
de la religion, -que les revenus -dont il jouit devoient
éteindre ! Ainsi s’accomplissent les volontés suprêmes de
ces hommes que la justice place sur leur lit'domort comme
des législateurs dont toutes les paroles deviennent des
oracles! Les exécuteurs testamentaires exécutentiainsi les
vœux les plus chers de leurs amis qui ne sont plus! - i .
Si quelque chose peut excuser lafoiblesse derceux q u V
voit choisis madame de'Galieiij c’est (le sinistre, étatde’la
. France au moment où ils remirent ou plutôt laissèrent
échapper le pouvoir confié à leurs mains. Le'soleil de 1793
avoit lui : tout se bouleversoit, toutpérissbit, et les talens
*et la vertu, et la religion et la ‘patrie.
•
Alors parurent ces lois à ja m a i s inémorable's, qui dé
clarèrent qu’il 11’y avoit plus.de pauvres-, que la bienfai
sance nationale 11’en souffriroit plus. Puisqu’il n’y avoit
plus de pauvres, les biens que les siècles avoient accu
mulés pour leur soulagement devenoieut inutiles : /a bicnJaisance nationale s’en empara. Un décret rendu cil 17.94
G
�(i8)
réunit au domaine de l’état toutes les propriétés des hos
pices, toutes les fondations particulières faites en faveur
de l’indigence ; en un mot, l’actif et le passif de tous les
établissemens de charité. Les hôpitaux devinrent des ca
sernes, les maisons de secours des maisons de force , les
églises, le dirai-je! des écuries.........Qùi auroit alors ose
réclamer la fondation faite par madame de Galieu? Les
Dames de la miséricorde étoient dispersées plutôt que
supprimées ; les unés avoient fui aux approches de l’orage,
d’autres habitoient les prisons, le reste gémissoit en silence.
Ges jours affreùx semblent déjà loin de nous. Un héros
a paru, suivi de la victoire, et de la sagesse plus utile que
la ^victoire : sesi premiers soins ont- été de rendre leur
cours-à rces soùrces salutaires, et pures qu’alimente la cha
rité publique*. Il à-rétabli les hôpitaux dans leurs biens;
il a relevéi ces autels à l’ômbre desquels les infortunés
trouvôient toujours un refuge ; il a remplacé, s’il est pos
sible \ les Dames de la miséricorde, les Dames de la cha
rité , et tant d’auti’és anciens et dignes tuteurs des pauvres,
en créant; dans'la,plupart'des villes de l’empire, des bu
reaux de bienfaisance, i
.Les administrations de ces nouveaux établissemens sont
distinctes descelles des hôpitaux, aussi-bien que leurs attri
butions. Le gouvernement a ordonijé que les hôpitaux
aüroient des administrateurs particuliers, chargés de-régir
les biens qui leur étoient rendus, et ceux que des personnes
bienfaisantes consàcreroient a fonder de nouvelles places,
ou h conserver les anciennes, dans ces tristes asiles des dis
grâces de la nature et de la fortune.
,
Les bureaux de bienfaisance sont une réunion d’hommes
�( 19 )
charitables, qui,nommés par le gouvernement, recueillent
sous ses auspices les dons que la pitié oiï’re à l’infortune,
et surtout à l’infortune qui se cache; ils sont chargés de dis
tribuer ces secours qu’on appelle à domicile. Un arrêté du
gouvernement leur attribue tous les biens affectés à l’entre
tien des Hospitalières et Filles de charité, toutes les fon
dations relatives à des services de bienfaisance, à quel titre
et sous quelque dénomination que ce soit. C’est pour les
bureaux de bienfaisance que le comte de Rumford a ima
giné ses soupes économiques. Ce sont eux qui sont chargés
- de les distribuer.
Un de ces établissemens a été formé à Aurillac ily a trois
ans : d’anciens magistrats le composent; et les pauvres n’ont
qu’un l’eproche à. leur faire, c’est de ne leur offrir que du
zèle, et de ne leur donner que des promesses.
- On a dit quelle étoit la misère des pauvres d’Aurillac
avant que les Dames de la miséricorde s’occupassent de les
soulager. Ces dames, dont plusieurs vivent encore, n’ont
pas repris leurs fonctions, devenues sans objet, depuis que
le gouvernement a chargé de l’administration des biens des
pauvres les bureaux de bienfaisance : celui d’Aurillac se
propose d’engager quelques-unes de ces femmes respectables
à se joindre à lui pour la distribution des secours à domicile.
Ces secours ont été nuls jusqu’à ce jour; la seule esperance
des pauvres, c’est le legs qui leur a été fait par madame de
Galieu.
On a dit que ce legs n’avoit été paye ni par l’exécuteur
testamentaire, ni par l’héritier de madame de Galieu. Le
bureau de bienfaisance, chargé par les lois de veiller aux
intérêts des pauvres, ne tarda point à le demander au siçur
G 4
.
.
�(
20
)
Capelle, qui fut cité en conciliation , et ensuite devant les
juges de première-instance d’Aurillac, pour être condamné
à le payer. Le sieur Capelle commença par récuser tous ses
juges, sur de futiles prétextes ; et bientôt il obtint de la cour
de cassation un arrêt qui renvoya la connoissance de l’af
faire aux juges de première instance de la ville de Saintl'Iour.
Xes pauvres auroient- pu1 se plaindre de cet arrêt, et
peut-être le faire réformer. Il- avoit .été obtenu sur une
requete qui ne leur avoit pas-été communiquée : il étoit
rendu sur un faux exposé des faits. Mais., certains de la
justice de leur cause, ils crurent qu’aucun tribunal ne
devoit leur paroître suspect, et ils citèrent à Saint-Ftour
l’héritier de madame de Galieu.
Cependant-, suivant les dispositions de l’article 3 de
l’édit de 1749, toutes les fondations devoient être homo
loguées par le parlement, qui, par attribution spéciale,
remplaçoit le prince dans cette fonction. Cette formalitén’avoit pas été remplie à l’égard du legs fait par madame
de Galieu ; la suppression des parlemens ne l’avoit pas
permis. Les pauvres crurent devoir demander au gou
vernement un arrêté q u i, tenant lieu d’homologation,
approuvât le legs, autorisât le bureau de bienfaisance
à l’accepter en leur nom, et fit connoitre à l’héritier de
madame de Galieu que le bureau exerçoit tous les droitsdes Dames de la miséricorde.
Toutes les pièces, tous les renseignemens nécessaires
furent envoyés h Paris. Le ministre de l’intérieur se fit
rendre compte de l’aflaire, et, sur son rapport, fut donné,
le 7 juillet 1802, l’arrêté du gouvernement qu’on va lire.
�( 21 )
Copie de VArrêté des Consuls.
Les consuls de la république, sur le rapport du mi
nistre de l’intérieur ,
- ’
Le conseil d’état entendu,
'
•
Arrêtent ce qui suit :
A r t i c l e i er.—Le legs de 80000
fait à l’Œuvve delàmiséricorde de la ville d’Aurillac, par madame Françoise-;
Dorothée de Cabridens, veuve Galieu, suivant son tes
tament du 4 octobre 1785., reçu par Marmontel, notaire'
à Aurillac, enregistré, sera accepté au- nom des pauvres ■
de ladite ville par le bureau de bienfaisance , rempla
çant aujourd’hui l’Œ u vre de;la m iséricorde, pour la dis-)
tribution des seco.ui’s à domicile.
A r t , 2 .— Le montant de ce legs sera réuni aux autres
biens et revenus des pauvres de. la ville d’A urillac, pour
être administré et régi par les membres du bureau de
bienfaisance, a l’instar des autres biens des établissemens
de charité.
A r t . 3. — L e legs étant fait en argent, il sera employé
en acquisition de rentes sur l’état.
A r t . 4 . — Les administrateurs du bureau de bienfai
sance fero n t, sur les biens de la succession de la tes
tatrice, tous les actes conservatoires qu’exigera la garantie1
des droits des pauvres d’Aurillac.
A r t . 5 . — En cas de contestation ou de refus de la
part des héritiers, les administrateurs du bureau de
bienfaisance poursuivront la délivrance du legs devant
�( 22 )
les tribunaux, en s’y faisant préalablement autoriser, dans
'
les formes voulues par les précédens arrêtés.
A r t . 6. — U ne somme annuelle de 65 o ^ sera pré
levée sur le revenu du legs, pour être employée par
le maire à l’instruction de la jeunesse, sous la direction
et la surveillance du préfet du département.
A r t . 7. — Pour remplir les autres intentions de la
testa’trice, il sera pareillement prélevé, sur le montant
des rentes, une somme annuelle de 100 0^ , représen
tant au denier vingt un capital de 20000
, pour êti'e
employée chaque année à secourir les prêtres de la ville
et des environs, qui se trouveront dans le besoin.
- A r t . 8. — E n cas’ qu’il n’y ait pas de prêtres indigens,
ou en assez grand n o m b re, la somme ou le restant de la
somme sera distribué aux pauvres par le bureau de bien
faisance.
■ A r t . 9. — Le ministre de l’intérieur est chargé de
l’exécution du présent arrêté, qui sera inséré au Bulletin
des lois.
L e premier consul; signé B o n a p a r t e ,
Tel est l’arrêté du gouvernement, en faveur des pauvres
d’Aurillac. Le bureau de bienfaisance, autorisé par le pré
fet, a poursuivi le jugement de 1 aiïaire, qui lui paroissoit
décidée à l’avantage des pauvres par cet arrêté, l/es pre
miers juges n’en ont pas eu cette idée ; le procureur im
périal seul a conclu au payement du legs. Quant aux juges
de St.-rFlour, ils ont pensé que madame de Galieu n’avoit
pas fuit un legs aux pauvres d’Aurillac, mais bien à l’Œuvre
�C 23 )
de la miséricorde, qu’ils ont considérée comme un corps ;
ils ont jugé que ce prétendu corps étoit une communauté
illicite, non approuvée, qui n’avoit pas été fondée par des
lettres patentes; que par conséquent elle étoit nulle et inca
pable de recevoir des libéralités. Par ces motifs, les premiers
juges ont déclaré le bureau de bienfaisance non-recevable
dans sa demande. '
Analyser les erreurs qui servent de base à leur décision,
et réfuter successivement les fausses conséquences déduites
de ces deux faits supposés constans et qu’il falloit prouver,
savoir, que les Dames de la miséricorde formoient une
communautéet que madame de Galieu a légué à cette
communauté, et non aux pauvres, la somme que son frère
avoit destinée h des œuvres de charité , ce seroit vouloir,
sans être utile à la cause , aifoiblir l’intérêt qu’elle doit
inspirer. Etablissons la justice de la demande , et laissons
l’éclat de la vérité dissiper les ténèbres de l’erreur.
.
La cause, en cet état,présente des questions également MOYENS,
importantes aux yeux du barreau et des hommes du monde.
On n’agite plus ici des discussions purement civiles. Ce
n est point la fortune d’un particulier • c’est l’ordre, c’est le
droit public qui est en suspens.
Sera-t-il permis à un tribunal inférieur de s’ériger en
reformateur des arrêtés du gouvernement, et de déclarer
les pauvres d’une ville considérable incapables de recevoir
un legs, lorsque le gouvernement les a reconnus capables
d’en profiter ?
Ces mêmes juges, s’ils n’ont pas excédé leur compétence,
n’out-ils pas porté atteinte au droit public, en déclarant les
�( 24 )
,
pauvres d’Aurillac non -recevables à demander un legs
qui leur a été fait en 17 8 5 , et que l’arrêté du gouver
nement, tenant lieu d’homologation, a rendu valable?
Voilà les deux questions de droit public que fait naître
cette affaire; leur examen est l’objet principal de ce méïnoire. On y ajoutex’a une seconde partie, dans laquelle on
réfutera rapidement les moyens subsidiaires opposés par
l’héritier de madame de Galieu devant les premiers juges ;
savoir, que le legs a fait retour à la succession, et que du
moins les magistrats doivent le réduire.
P R E M I È R E
PARTIE,
On a dit que les deux propositions qu’il s’agit de prou
ver dans la première partie de ce mémoire, l’incompétence
des premiers juges, l’erreur dans laquelle ils sont tombés,
sont des questions de droit public. C’est que les fondations
et tout ce qui les concerne font partie du droit public. Pour
le faire v o ir , et pour établir en même temps la capacité
des .pauvres en général à recevoir des libéralités, il est
nécessaire de rappeler des principes qui s’appliquent
également aux deux propositions à démontrer.
Les pauvres, en nom collectif, dit J . M. Ricard,
forment un corps irrégulier que les lois n’ont point créé,
et qui subsiste par soi-meme, toujours renouvelé, tou
jours existant, Les législateurs de Rome, aussi-bien que les
nôtres, ont toujours autorisé les dispositions faites à leur
profit. Elles sont même de toutes les libéralités les plus
favorables.
XI est inutile d’en donnor la raison, Chacun voit que lo
nécessaire
�( *5 )
^
nécessaire du pauvre fait le superflu du rich e, et que c’est
à la bienfaisance éclairée à réparer les injustices de l’aveugle
'fortune.'
,■
‘ Les dons faits aux pauvres, considérés comme un corps f
se nomment en général fondations. Les fondations sont
de droit public, parce que le gouvernement seul crée t
établit les corps, et'prononce sur tout ce qui les regarde.
C’est par cette' raison que divers édits ont pourvu à la
manière dont les’ fondations pourvoient être faites, à leur
acceptation et à leur administration au nom des pauvres.
La déclaration de 1749 formoit le dernier droit sur cette
matière avant la révolution. En voici les dispositions r o
latives à la cause :
.
'
<
Déclaration de 17 4 9 .
A r t i c l e ïe r.— Voulons qu’il ne puisse être fait aucun
nouvel établissement de chapitres, collèges, séminaires,
maisons ou’ communautés religieuses, même sous prétexte
d’hospices; congrégations, confréries, hôpitaux ou autres
corps, et communautés, soit ecclésiastiques, séculières
ou régulières, soit laïques, de quelque qualité-qu’elles
soient; ni pareillement aucune nouvelle création de chai
pelles, si ce n’est en vertu de notre pei'mission expresse,
portée par nos lettres patentes , enregistrées en nos p arlemens ou conseils supérieurs.
A r t . 2 . — Défendons de faire à l’avenir aucune dispo
sition par acte de dernière volonté, pour fonder un nou
vel établissement de la qualité de ceux qui sont menv
tionnés'dans l’article précédent, à peine de nullité, quand
D
�»
.
..
( 26 \
.
même la disposition seroit faite à la charge cPobtenir nos
lettres patentes. ,
'
A r t . 3. — N ’entendons comprendre dans les deux ar
ticles préeédens les fondations particulières qui ne tendroient à l’établissement d’aucun nouveau corps, collège
ou communauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice, et qui n’auroient pour objet que la célébration
subsistance d?étudions ou de pauvres
ecclesiastiques nu séculiersyetc*, ou autres oeuvres pieuses
de messes ou o b i t s
de même nature et également utiles au public j à. l’égard
desquelles fondations il ne sera point nécessaire^’obtenir
nos., lettres patentes, et il, suffira, de faire h&mologuer les
actes ou dispositions qui les contiendront,, eh nos parle*mens et conseils supérieurs, sur les conclusions ou réqui
sitions de'nos procureurs généraux. Voulons qu’il soit en
même temps pourvu par nosdits parlemens à l’adminis
tration des biens destinés àTexécirtion' desdites
fondations /*
•
et aux comptes- qui en seront rendus-..
A r t . 9* — Annulions tous les actes ou: dispositions qui
pourroient avoir été faits directement ou indirectement
en. faveur des- établissement mentionnés en l’article I er..
A r t . 29-— Toutesles demandes formées en exécution du
présent edit seront portées.directement en la grand’ehambue du parlement, et ce privativement à tous autres juges,
pour y être statue sui’ lfîS conclusions de notre procureur
général.
-
,
*
^
*
.
D ’après cette déclaration , il a sufii jusqu’il nos jours
pour faire valoir ,les fondations destinées à la subsistance'
des pauvres, d’obtenir l’homologation du.parlement, qui
�( *7 )
^
rcmplacoit le prince dans cette fonction, et qui étoit
clj«rgé de nommer des administrateurs aux legs qu’il
approuveroit.
Depuis que l’ompereur a pris les rênes de l’état, le
droit public a changé relativement aux fondations. Ce
ne sont plus les cours d’appel qui les autorisent. Le gou
vernement s'est réservé ce soin*, et il a nommé à jamais,
pour les administrer, les/bureaux de bienfaisance et les
administrateurs des hôpitaux. Cette prérogative du chef
de l’état lui demeure attribuée pour toujoui’s par l’article
910 du Code civil, portant : a Que les dispositions au
« profit des hospices, des pauvres d’une commune, ou
« des établissemens d’utilité publique , n’auront leur
« effet qurtautant qu’elles seront autorisées par un arrêté
.« du gouvernement.
^
iT®
.
En cet état de choses, il s’agit d’examiner s’il a été
T
,
• \
»i
. r .
~
.
Incompepermis a un tribunal inférieur de s’ériger en réformateur tence des pred’un arrêté du gouvernement, et de déclarer les pauvres ¡¡¡^ipJnond’Aurillac incapables
cer
?".r des
,la
, # de recevoir un don dont le gouverO
capacité
îiement les avoit jugés capables de profiter.
pauvres.
Jamais le tribunal de Saint-Flour n’a pu s’arroger
ce droit. Ce n’est point à ceux qui tiennent la balance
de la justice, à diriger le gouvei'uail de l’état. Le chef
de l’empire prononce seul sur l’existence et la capacité
des corps qui font partie de son empire. Ses actes su
prêmes ne sauroient être ni suspendus, ni, réformés, ni
annuités par les autorités secondaires. Le droit public
est aujourd’hui l’arche sacrée que les cours elles-mêmes
ne peuvent toucher ; et des magistrats inférieurs ont bien
D a
p r o p o s itio n
Jj
j’
*
’
�( 28 )
osé y porter atteinte, en déclarant nul un legs approuvé,
autorisé parle gouvernement, sous prétexte que le gou
vernement n’a pas autorisé, approuvé le corps auquel
il a été laissé, et par conséquent le legs lui-même !
Eh quoi! le gouvernement aura reconnu la capacité
des pauvres d’Aurillac pour accepter des libéralités en
i y 8 5 , par l’entremise des-Dames delà miséricorde; et
un tribunal de première instance déclarera les pauvres
non - recevables dans leur demande, précisément par
défaut de capacité! Cependant le gouvernement-est l’uni
que juge, de cette capacité : le gouvernement seul peut
donner ou refuser aux( pauvres les qualités nécessaires
pour recevoir comme pour demander. Ainsi c’ est en vain
que le ministre de l’intérieur, que le conseil d’état, que
l’empereur lui-même, ont jugé que les pauvres avoient
été l’objet, et les Dames de la miséricorde les ministres
de la bienfaisance de madame de Galieu ! c’est en vain
, que l’empereur, voyant que de pieuses dames avoient
été remplacées ,par des hommes charitables, leur a or
donné d’accepter et de recueillir les dons de madame de
' Galieu au nom des pauvres ! en vain il a réglé remploi
du bienfait,• ( #conformément
aux
vœux de ■la
bienfaitrice!
•
'
i
t.- :/ . 1
.
inutilement il a voulu qu’une partie du legs fût appliquée
ü i’inslruction de la jeunesse
y une. autre consacrée au
soulagement des ecclésiastiques indigens ; une autre des
tinée à secourir,- dans leurs( humbles demeures, les pau■vres de toutes les classes! Ce règlement d’administration
publique a été
pesé-dans
la balance des juges de Saint-
jFlour; e t, trouvé trop léger, il s’évanouira comme un
songea devant l’intérêt personnel de l’héritier de madame
�C 29 )
de Galieu. Nous avons droit de mieux augurer de la
sagesse des magistrats suprêmes : c’est à eux qu’il est
réservé de venger l’ordre public d’un tel scandale.
}
Il seroit superflu de prétendre que l’arrêté du gou
vernement est contraire aux deux premiers articles de
rédit de 174 9 , puisqu’il autorise le bureau de bienfai
sance à accepter, au nom des pauvres, un legs qui n’a
pas été laissé aux pauvres, mais à l’Œuvre de la miséri
corde, communauté non approuvée, nulle par consé
quent , et au nom de laquelle le bureau ne peut rien
demander. Il est certain d’abord que l’arrêté n’est point
Contraire à l’article 1 e1'*, mais bien conforme à l’article 3
de l’édit de 1749- Cet article autorise les legs laissés aux
pauvres, à condition qu’ils seront homologués. Lie gouver
nement approuve et homologue le legs fait par madame
de Galieu, parce qu’il le considère comme fait aux pau
vres seuls, par l’entremise des Dames de la miséricorde.
Il ne faut que relire le texte de l’arrêté, pour se convainci’e de cette vérité. Mais enfin, et quand on supposerroit que le gouvernement a dérogé à l’édit de 174 9 , il
n’appartient pas, cncore une fois, aux autorités judi
ciaires d’annuller les actes émanés du pouvoir suprême.
Si l’arrêté a été surpris, que l’héritier de M cle. de Galieu
se pourvoie au conseil d’état pour le faire réformer.
Une objection plus solide, en apparence, sera de sou
tenir qu’en vain le gouvernement, par l’article 5 de son
arrêté, auroit renvoyé aux tribunaux la connoissance
des contestations qui pourroient s’élever au sujet de la
délivrance du legs fait par madame de Galieu , s’il ri’étoit
pas permis aux juges de s’écarter de l’tUTÔté.. Il est vrai
�C
3°
)
que l’ un des articles porte : « Qu’en cas de contestation^
« ou de refus de la part de l’héritier, le bureau de bien
« faisance poursuivra la délivrance du legs devant les
tr tribunaux. » On convient que l’autorité judiciaire est
chargée d’ordonner le payement du legs, en cas que Fhér
ritier s’y refuse, ou qu’il élève des difficultés mal fon
dées. C’est une formule répétée dans tous les arrêtés semr
blables, dont sont remplies les archives des lois. Mais
i’héritier ne peut contester, les juges ne peuvent exa
miner, que ce qui a rapport au droit civil; savoir,
la validité du testament, la capacité de disposer de la
testatrice , la quotité du legs , par exemple. Tout ce qui
est de droit public est au-dessus de leur atteinte. La capa
cité des pauvres, pour recevoir comme pour demander,
fait partie de ce même droit public ; et le gouvernement
seul s’est réservé d’en décider. Cependant c’est précisée
ment par défaut de capacité que les premiers juges ont
déclaré les pauvres d’Aurillac non-recevables dans leur
demande. C’est trop abuser sans doute de l’ambiguité
appax*ente des clauses de l’arrêté. Comment supposer le
gouvernement assez contraire à lui-même dans les arrêtés
qu’il rend chaque jour au profit des pauvres, pour per
mettre aux tribunaux de prononcer sur la capacité des
demandeurs , lorsqu il a reconnu cette capacité par l’acte
même qui saisit les juges? Comment concevoir le sens
de l’article 910 du Code civil, qui yeut que les disposi
tions en faveur des pauvres n’aient d’eiïét qu’autant qu’ils
auront été autorisés à recevoir et à demander par le gou
vernement, si les juges peuvent, après l’arrêté rendu,
déclarer que les légataires n’ont pas de qualité pouy
demander.
�( 31
3
^
Il est inutile d’employer d’autres raisons à réfuter une
objection qui n’est que spécieuse; et l’on croit avoir suf
fisamment prouvé que les premiers juges ont excédé leur
compétence , en déclarant les pauvres d’Aurillac nonrecevables dans leur demande, par défaut de capacité. Si
cependant on pouvoit penser encore que le tribunal de
Saint-Flour a eu le droit, malgré l’arrêté du gouverne
ment, de prononcer sur la capacité des demandeurs, il
sera facile d’établir que ce tribunal a y dans tous les cas,
porté atteinte au droit public, en déclarant les pauvres
d’Aurillac non-recevables à demander un legs qui leur
avoit été fait en 178 5, et que l’arrêté du gouvernement,
tenant lieu d’homologation,, a rendu valable..
On l’a déjà prouvé : les legs farts aux pauvres sont les p r o p o s i t i o n .
plus favorables de tous. L ’article 3 de l’édit de 1 7 4 9 ren- Le legs a
ferme à ce sujet des dispositions précises, que voici : « Les été fait aux
1
pauvres d’ Au« jondations laites pour la subsistance de pauvres étu- riiiac, et rar
« dians, ecclésiastiques ou séculiers, seront valables , à la veme^nent"1",
« charge de faire homologuer par le parlement les actes d’homoioga-'
« qui les contiendront. » Le parlement est chargé, par tion >le rcntl;
le raeme article, de nommer des administrateurs aux iondations qu’il approuvera*
Le legs fait par madame de Galieu, s’il a été laissé aux
pauvres, et non à l’œuvre de la miséricorde,, comme le
prétendent les premiers juges, devoit donc, pour devenir
Valable, être homologué par le parlement.
La révolution n’a point permis aux tuteurs des pauvres
de remplir cette' formalité : mais le gouvernement actuel
y a suppléé; et ou a fait voir que son arrêté tenoit en-
�C-3 * )
'fièrement lieu d’homologation. L ’évidence de cette vérité
frappe d’ailleurs tous les yeux. Il ne s’agit que de prouver
1 que le legs fait par madame de G-alieu a été.laissé nom
mément non moins qu’uniquement aux pauvres d’Aurillac.
Mais cela même devient évident par les circonstances
qui ont précédé le legs, par les termes du legs lui-même.
L ’abbé de Cabridens, homme d’une bienfaisance éclairée
-par la religion, se voit riche au delà de ses espérances >
•et par son patrimoine, et par le don de la terre de Grialou
que lui a fait sa sœur : il n’a que des parens éloignés ; il
veut faire d’utiles aumônes ; il jette les yeux autour de
lui, et voit les pauvres d’Aurillac dénués de tout secoursr
et même du bienfait inestimable de la première instruc
tion. Il commence par donner, en 17 7 7 , une rente de
6 5o
et une somme,de 10000 ^ pour l’instruction de la
jeunesse. Et qui nom m e-t-il pour diriger cette bonne
œuvre? les Frères de la doctrine chrétienne.
Résolu de verser d’autres bienfaits encore sur.les pauvres
de la ville qui l’a vu naître, il ne veut pas charger ses
derniers jours des pénibles soins de vendre ses propriétés;
, i l ne veut pas dépouiller une sœur qui lui est chère : c’est
à elle qu’il confie, avant de mourir, l’exécution de ses
pieux desseins. Etoit-ce en effet les Dames de l’œuvre de
la miséricorde qu’un homme aussi bienfaisant avoit en
vue, ou les indigens qu’elles soulageoient? Cet ecclésias
tique éclairé, qui, dans l’acte de 17 7 7, prévoit que les
Frères de l ’ é c o l e chrétienne pourroient être supprimés,
■et donne en ce cas la rente de 65o
à la ville, pour
l’instruction de la jeunesse, ne fondoit-il que sur le pré'tendu corps appelé l’Œuvre de la miséricorde^ et non
pas
�( 33 )
pas sur les pauvres, objet des secours de l’ GEuvre ? N e
l’en tend-on pas parler par la bouche de sa sœur, partager,
distinguer les indigens en trois classes, pauvres à instruire,
pauvres ecclésiastiques, pauvres honteux? Ecclésiastique,
il témoigne une prédilection spéciale aux ecclésiastiques
indigens; bienfaiteur éclairé, il secourt, par préférence,
l’infortune qui rougit de solliciter des secours.
Non, jamais les magistrats ne croiront que l’abbé de
Cabridens ait eu de pieux desseins en faveur des Dames
delà miséricorde, et non en faveur de ces pauvres qu’elles
avoient choisis pour l’objet de leurs soins : cependant
madame de Galieu ne fait, dit-elle, qu'exécuter les pieux
desseins de sonfrère. Si donc l’abbé de Cabridens n’avoit
en vue que les pauvres, si madame de Galieu 11’a fait
qu’exécuter ses charitables volontés, ce n’est qu’aux pau
vres qu’elle a pu , qu’elle a dû léguer, qu’elle a légué, et
à trois classes de pauvres distinctes et clairement désignées :
aussi dit-elle qu’elle lègue aux pauvres. Voici les expres
sions dont elle! s’est servie : « Et pour exécuter les pieux
te desseins qui m’ont été communiqués par l’abbé de
« Cabridens , mon frère, avant sa m ort, je lègue aux
« pauvres de TŒuvre de la miséricorde d’Aurillac, la
« quelle Œuvre est administrée, etc........ la somme de
*' 80000
dont une partie sera employée à l’instruction
« de la jeunesse, une autre au soulagement des pauvres
« ecclésiastiques, le reste enfin à secourir les autres peu« vres que l’Œuvre a coutume d’assister. »
Les circonstances qui ont précédé le legs s’accordent
donc avec les termes dans lesquels il est conçu , pour
montrer qu’il a été fuit aux pauvres, et à trois,classes de
E
�( 34 ) '
*
pauvres, et que par conséquent les Dames de l’œuvre
n’étoient chargées que d’en toucher le capital, de le placer
en contrats de r e n te e t d’en distribuer le revenu -, le tout
de l’agrément du parlement.
>
.
•Tous les esprits ne sont pas également frappés de la
justesse d’une preuve qui n’est formée que par une réunion
de circonstances et d’inductions tirées de ces circonstances.'Appelons le raisonnement au secours des faits , et que
toutes les armes de la parole fassent triompher la vérité.
• Si le legs étoit laissé aux pauvres d’Aurillac, sans autre
explication-, personne ne douteroit qu’il ne fût valable.
Toute la difficulté vient donc de ce qu’il est laissé aux
pauvres de l’Œuvre de la miséricorde, d’où l’on prétend
induire qu’il est fait à l’Œuvre elle-même. Eh bien, qu’on,
admette l’hypothèse où il seroit fait simplement aux pau-,
vres d’Aurillac : que seroit-il arrivé? .
•
•
Il
étoit nécessaire que le parlement homologuât le tes
tament. Qui auroit demandé l’homologation ? L ’exécuteur
testamentaire, dira-t-on, l’auroit demandée. . . Soit; mais
qui auroit reçu les fonds, qui les auroit administrés? Les
administrateurs choisis par le parlement; car l’édit de 1749
le charge d’en nommer. Eh bien ! s’il eût plu au parle
ment de choisir les Dames de la miséricorde, pour dis
tribuer les fonds, et leur supérieure pour les recevoir,
n’étoit-il pas le maître? Et quel choix plus sage auroit pu
faire l’autorité publique? C’étoit doubler le prix du bien
fait que d’en confier la distribution à de si pures mains ;
c’étoit commettre la vertu'modeste, la piété éclairée, la
charité vigilante, à l’exécution des derniers vœux de la
vertu, de la piété, de la charité.
'
■-
�'•
C 35 )
;
'
- Objectera-t-on que le parlement n’auroit pas nommé
les Dames de la miséricorde? Pourquoi? parce qu’elles
formoient un corps illicite. 11 faudroit d’abord prouver
qu’elles formoient un corps. Mais ensuite, et toujours en
supposant que le legs eût été fait simplement aux pauvres
cl’Aurillac, l’autorité publique ne reconnoît pour corps J
dans l’état, que ceux que sa volonté a créés. Le parlement
n’auroit donc point jugé illicite un corps qu’il n’auroit
pas même reconnu pour corps. Informé par le substitut
du procureur général, auprès du bailliage d’Aurillac, des
bienfaits et du zèle des Dames de la miséricorde, lepar->
lement les auroit sans doute commises à la distribution du
don de madame de Galieu. Peut-être même il auroit or-
donné que les fonds seroient versés entre les mains de ces
dames; peut-êti-e aussi il auroit exigé alors que les échevins veillassent à l’emploi des sommes en contrats de rente,
suivant l’intention de la testatrice , et que les contrats
fussent passés en leur nom : précaution sage, parce que
les Dames de la miséricorde n’étoient qu’une associationpassagère , et parce que la ville et son corps municipal
devoient toujours durer. ,
Ici triomphe la justice de la cause des pauvres; la vérité
paroît ici dans tout son jour. Ce que le pax-lement auroit
fait', auroit pu faire, la testatrice l’a pu faire : elle l’a fait.
XiC parlement auroit pu choisir , pour administrer les*,
fonds laissés par madame de Galieu, les Dames de la mi
séricorde; madame de Galieu les a choisies, elle a pré-.,
venu le choix de l’autorité : elle l’a indiqué du moins
car les fondations, on le répète, sont de droit public, et
l’autorité publique peut changer les administrateurs nom
E 2
�(3 0
més par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix. Il falloit bien que le legs fût reçu au nom des
pauvres, fût placé au profit des pauvres, fût distribué à
ces mêmes pauvres. La testatrice a chargé les Dames de
la miséricorde de tous ces soins, toujours sous la condi
tion que l’autorité publique ratifieroit ses volontés particulièi*es.
i
Que les premiers juges viennent dire maintenant que
l’Œuvre de la miséricorde étoitun corps, et un corps non
approuvé ; qu’ils tirent des termes mêmes dans lesquels est
conçu le legs, la preuve que la testatrice regardoit l’CEuvre
de la miséricorde comme une communauté, comme un
corps existant dans l’état, et qui devoit toujours exister.
Cela n’est pas constant : mais enfin qu’importe l’opinion
qu’avoit la bienfaitrice de ceux qu’elle chargeoit de la dis
tribution de son bienfait, si elle ne les regardoit en effet
que comme des administrateurs, comme on vient de le
prouver ?
.
•
i L ’Œuvre même, fût-elle un corps (ce qu’on nie), ce
corps ne-fût-il pas approuvé, quelle loi empêehoit la
testatrice de préposer un tel corps i\ la distribution de
son bienfait, toujours sous la’ condition que le parlement
approuveroit ce choix?
.
,
L ’édit de 1749 v e u t-il que les dispositions faites aux
pauvres soient annullees, lorsque la distribution en a été
confiée à des personnes incapables, ou à des corps non
approuvés? Non.: l’article 3 de 1édit- confirme toutes les
fondations en faveur des pauvres, à la charge de les faire
homologuer: mais il ne dit pas que si l'administration a
été- laissée à des mains incapables, les fondations seront
�(
37
)
aimullécs; il'ordonne seulement au parlement de nom
mer des administrateurs à la fondation. N’est-ce pas dans
le cas où ceux qui auront été nommés seront indignes ou
incapables de cette honorable fonction? Peut-on eXpli*
quer autrement cette dernière disposition de l’édit, et
seroit-elle applicable, si-les administrateurs choisis étoient
des personnes dignes de toute la confiance publique, oii
des corps légalement établis, tels que des hôpitaux ou
des fabriques ?
• *
L
C’est en vain que l’on s’aveugle sur la justesse de cetté
conséquence, et que l’on soutient que, s’il en étoit ainsi,
rien ne seroit plus facile que d’éluder la prohibition de
l’édit, en léguant indirectement à des corps illicites, qu’on
nommeroit simples administrateurs en apparence. Erreur
évidente ! Le corps, ou la personne à qui le legs seroit
laissé, ne s’opposeroit-il pas à l’avidité du corps chargé
de l’administration? Le parlement ne nommeroit-il pas
d’autres administrateurs? Eh quoi! madame Galieu choisit
trois classes de pauvres pour ses légataires ; elle rend son
testament public, notoire dans la ville entière d’Aurillac,
par l’ordre de vendre tous ses biens d’Auvergne ; elle or
donne de placer le capital de son legs, pour n’en distribuer
que les revenus; et l’on osera dire que l’Œuvre de la misé
ricorde , que ce corps chimérique qui n’existe que dans
l’imagination du sieur Capelle et des premiers juges, auroit
pu s’enrichir des dépouilles des pauvres, et détourner à
son profit la source des charités d’une femme vertueuse!
C’est trop abuser de l’obscurité qu’on voudroit répandre
sur la cause la plus claire.
Ne laissons pas môme à l’erreur le dernier retranche-
�...
-
C 38 )
•
ment qu’elle rélève contre la vérité. L ’Œuvre delà misé
ricorde, ce corps illicite! cette communauté illégale! qui
avoit une supérieure! une assistante! un receveur! un
titre particulier ( disent les premiers juges)! n’étoit point
un corps, n’étoit point une communauté; c’étoient quel
ques dames vertueuses rassemblées pour foire le bien. Les
communautés-ne meurent-jamais. Ce sont des personnes
dans l’état. Elles ont leurs biens, leurs statuts, leurs chefs:
Les dames de la miséricorde étoient des femmes du monde,
jnariées, veuves , célibataires, qui ne faisoient pas de
vœux, qui n’avoient pas de biens. Elles s’étoient chargées
seulement de distribuer ceux qu’on donneroit aux pauvres.
Qui a appris aux premiers juges qu’elles avoient un titre
particulier, une assistante, une supérieure, un receveur?
Les Dames de la miséricorde n’avoient pas de titre par
ticulier. On les nommoit à Aurillac D am es de l’œuvre
de la m iséricorde, comme dans d’autres villes Dam es
de la charité. Ce mot d'œuvre ne désigne point un corps
nouveau : il signifie travail, et indique les modestes fonc
tions des femmes pieuses qui s’étoient dévouées au service
des pauvres. X<es Dames de la miséricorde n’avoient pas
d’assistante. Iæur prétendu receveur, c’étoit l’une d’elles,
çhoisie entre les autres pour recueillir les dons des per
sonnes généreuses. Elles n’avoient pas de chefs. Madame
de Fontanges, il est v ra i, est appelée par madame de
Galieu leur supérieure ; mais c’est un titre imaginé par
la testatrice, ou uniquement inventé pour désigner celle
que scs égales a voient cliargee de présider leurs assemblées
en l’absence du curé d’Aurillac. Le curé d’Aurillac, qui
étoitleur véritable chef; ejevoit assister, comme 011 vient
�. ( 39 )
cle le dire, à toutes leurs réunions, et on en rapporteroit
la preuve, s’il le falloit. Ces dames s’étoient réunies naguère :
leur société se seroit rompue à la mort des plus zélées,
comme toutes les sociétés. Elle est rompue en effet aujour
d’hui , quoique plusieurs des associées vivent encore, et
entr’autres la plus illustre.
.•
Mais, à quoi bon tant de détails pour apprendre ce qu’à.
Saint-Flour seulement on ignore, ce que chacun sait à
Aurillac comme à Clermont, comme dans la ville où on
écrit ce mémoire. Cette ville aussi avoit ses Dames de la
charité. Furent-elles jamais considérées comme une cornmunauté ?
■ •
' • C’en est assez sans doute pour montrer que le legs fait
par madame de Galieu n’a été laissé qu’aux pauvres, et
non point à un corps imaginaire. Il est donc valable, puis
que l’arrêté du gouvernement supplée à l’homologation;
et les premiei’s juges ont porté atteinte au droit public j
en déclarant les pauvres d’Aurillac non recevables à de
mander un legs qui leur a été laissé nommément non
moins que directem entun legs que le gouvernement, a
autorisé. D’ailleurs, le gouvernement avoit déjà reconnu
la capacité des pauvres pour recevoir et pour demander :
il n’appartenoit plus au tribunal de Saint -Flour d’en
décider. Ce tribunal a donc à la fois excédé sa compétence
et mal jugé au fond. Son jugement doit donc être infirme
sous ces deux rapports.
1
D E U X I È M E
'
PARTIE.
Moyens sub
. L ’héritier de madame de Galieu, plus instruit que s,dlfIr,:5,0P
,
x
posésparl he
personne de la foiblesse de sa cause, après que la validité riii«.
�' ( 4° )
du legs qu’il prétend nul a été démontrée, soutiendra,
Comme il l’a fait devant les premiers juges, que du moins
le legs a fait retour, si l’on peut ainsi s’exprimer, à la
succession dont il étoit séparé, et il se fera une dernière
ressource de la condition de retour écrite dans le testa
ment de sa bienfaitrice.
1°. Prétendu
retourdu legs
à la succes
sion.
La voici : « Et dans le cas, d it-elle, où l’Œuvre de
« la miséricorde viendroit, par la suite des temps, à être
« réunie à l’hôpital général d’Aurillac, ou à tout autre
« hôpital, je veux et entends qu’en ce cas le legs de
« 80000
que je fais a ladite (Euvre, fasse retour à mou
« héritier. »
Que peut-on espérer d’une clause aussi extraordinaire,
qui est contraire au droit du pouvoir suprême, et qui
fait dépendre le retour du legs d’un événement qui n’est
pas encore arrivé, et n’arrivera vraisemblablement ja
mais? Cependant le sieur Capelle a fait de ce moyen un
des principaux motifs de ses refus. Foible , impuissant
auxiliaire, qui ne défendra point une cause privée de
ses appuis les plus solides depuis que la validité du legs
est démontrée! Inutile et dernièi'e ressource, qui ne
résistera point à la force du droit public et de la v é rité!
Dans les matières qui appartiennent au droit public,
il faut se garder de cette opinion, trop générale, que
l'intention du testateur est la supreme loi; qu’il peut
resserrer les siècles dans le cercle de sa volonté ; et donner
des chaînes aux générations qui n’ont pas encore reçu
le jour. Il faut mettre de sages restrictions à ce raisonnejnent des âmes généreuses, que le bienfaiteur est libre d’im
poser
�'
^ 41 ^
.
.
,
poser des conditions à des bienfaits librement accordes.;
Ce raisonnement peut être-fonde, lorsqu il s agit, dans
le droit civil, de savoir si un légataire a droit à un legsqui ne lui a été fait qu’à de certaines conditions ; c’est
alors la volonté du testateur qu’il faut considérer. Mais'
les fondations sont de droit public ÿ comme l’héritier
dé madame de Galieu en convient sans doute*, et les
vrais principes du droit public sont que le bienfaiteur
peut ne point donner, mais qu’il n’est pas toujours libre
de reprendre. Il est le maître de ses biens ; mais ils appartenoient avant lui à la société, et ses dons ne sont en
effet qu’une dette. Le bien public est son but ; mais
c’est à l’autorité publique à le remplir de la manière la
plus utile à l’état, la plus convenable aux circonstances.
On trouve le développement de ces principes dans les
préliminaires de l’ouvrage nommé par l’illustre Grotius
le Droit de la guerre et de la p aix, et dans la première :
partie du Droit public, de M. Domat.
. •
• ,
C’est ainsi que des sommes, destinées par le fondateur
à élever une église, ont été employées par le prince à.
doter un hôpital ; c’est ainsi que divers arrêts ont changé,
les administrateurs nommés par un testateur à la fonda
tion , et que le gouvernement actuel a chargé le bureau
de bienfaisance d’Aurillac de distribuer aux pauvres les
dons de madame de Galieu, qui avoit confié ce soin aux
Dames de la miséricorde.
Toutes les clauses par lesquelles un fondateur met des
entraves aux droits de l’autorité publique sur sa fondation,
sont donc regardées comme non-écrites ; c’est une maxime
de la jurisprudence romaine, comme de la nôtre. Telle est
'
F
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c 42 ) ■
t
la condition mise par madame de Galieu à son bienfait.
On diroit qu’elle-m êm e en a reconnu le vice ; elle l’a
placée ou plutôt cachée à la fin de son testament, comme
une idée étrangère à son cœur, et qui ne lui avoit pas été
inspirée aù moment où elle commençoit son testament
par laisser 80000
aux pauvres.
! Madame de Galieu vouloit bien soulager les pauvres : mais
elle vouloit que les Dames de la miséricorde fussent les
seuls ministres de sa bienfaisance; elle leur attribuoit ex
clusivement le droit de distribuer ses dons.- C’est, dira
t-on , parce qu’elle les destinoit uniquement aux pauvres
que l’Œuvre soulageoit, c’est-à-dire ¿ aux pauvres honteux,
aux pauvres qui n’alloient point à l’hôpital. Si cependant
le parlement avoit jugé qu’il seroit plus utile à la ville
d’augmenter les fonds de l’hôpital général que d’employer
lés dons de madame de Galieu en secours à domicile, s’il
n’eut voulu homologuer le legs qu’à cette condition, peuton douter que la ville tout entière n’eût réclamé contre
la clause de retour stipulée par la testatrice ? Le parlement
sans doute n’y auroit eu aucun égard : il eût usé du droit
que lui attribuoit l’édit de 1749, de nommer des admi
nistrateurs aux fondations soumises à l’homologation, et
il auroit attribué aux administrateurs de l’hôpital celle de
madame de Galieu, s’il avoit jugé plus utile d’en faire
cet usage.
E n iin , un moyen victorieux contre la-pré tendue clause
de retour invoquée par l’héritier, c’est l’arrêté du gouver
nement qui prononce tacitement qu’elle est comme nonécrile. Quand on supposeroit même que l’événement
prévu par la testatrice est arrivé, ce qui est fa u x , le chef
�(
43
)
r
de l’état, usant de son autorité suprême, a déclare que
la réunion du legs à la succession ne s’est point opérée ;
il a reconnu la capacité des légataires; il a nommé de
nouveaux administrateurs aux dons de madame de Galieu.
L ’autorité judiciaire n’a point le droit de réformer cet
acte, émané de la première des autorités.
’
Mais la clause de retour, non-seulement est contraire
au droit public, non-seulemetft est annullée par l’arrêté
du gouvernement, elle est encore illusoire autant qu’inu
tile. L ’événement qu’elle prévoit n’arrivera jamais, sui
vant toute apparence; du moins il n’est point encore
arrivé, comme il est facile de le démontrer.
Est-ce le prétendu corps appelé l’Œuvre de la miséri
corde qui a été réuni à un hôpital? cela est impossible.
On a prouvé que ce corps n’existoit point. La testatrice,
d ir a -t-o n , pensoit qu’il existoit, car elle suppose que
l’Œuvre de la miséricorde pourroit être réunie à un hô
pital. Cette objection rentre dans la proposition déjà
réfutée, que les Dames de la miséricorde formoient une
communauté. Ce n’est pas la lettre, c’est l’esprit de la
clause qu’il faut chercher. La testatrice a voulu prévoir
le cas ou les biens destinés à être distribués aux pauvres
par les Dames de la miséricorde seroient réunis à ceux
de l’hôpital général d’Aurillac ou de tout autre hôpital ;
elle ne vouloit pas que ses bienfaits, consacrés à soulager
l’indigence laborieuse, servissent à nourrir l’oisiveté et la
paresse dans un hôpital, comme il arrive quelquefois. Ses
craintes ne se sont pas réalisées, ses desseins n’ont pas été
trompés; aucune loi^de la révolution n’a confondu les
biens desïiinês aux secours à domicile} avec ceux que la
F 2
�( l44 -/)
générosité publique offre à tous les pauvres indistincte
ment dans les hôpitaux : ces biens ont toujours été dis
tincts, comme les administrateurs qui les régissoient. Je
le prouve.
La première loi rendue au sujet des étnblissemens de
bienfaisance, c’est celle du 18 août 17 9 2 , qui supprime
toutes les associations, confréries et congrégations de piété
ou de charité, et qui ordonne que leurs biens seront
administrés et vendus comme les autres domaines natio
naux. Dès ce jour plus de secours à domicile, mais point
de réunion des biens des pauvres qui les recevoient aux
biens des hôpitaux.
.
La loi du 19 mars 1793 rétablit les secours à domicile:
elle ordonna qu’il seroit formé, dans chaque canton, une
agence chargée de la distribution du travail et des. secours
aux pauvres; que ces secours seraient divisés en_secours
pour les pauvres valides „ et secours à domicile pour les
pauvres infirmes.
,
,
Enfin parut le fameux décret qui déclara propriété
nationale l’actif et le.passif des hôpitaux et des autres
établissemens de bienfaisance. L ’article 4 ordonne à la
commission des secours publics de faire parvenir ( aux
administrateurs des hôpitaux ) les fonds nécessaires aux
besoins de ces établissemens, pour leur dépense courante,
jusqu’à ce que la distribution des secours soit déimitivement arrêtée. •
'
• • .
• -,
Ainsi furent conservés, et les administrateurs des hô
pitaux, et les secours que tous les pauvres indistinctement
recevoient „dans ces établissemens ?/ comme 1 ^ sexH^r^ iV
domicile l’avoient été par la loi du 19 mars ,1:793,,.,£jui
�(
4$
)
charge de leur distribution les agences cles cantons; ainsi
n’ont jamais été confondus,. ni les biens des diverses classes,
de pauvres, ni, les administrateurs de' ces biens.
L e s . choses sont demeurées en cet état jusqu’à la loi qui
maintient les hôpitaux dans ceux de leurs biens qui n’ont
pas été vendus. Çeu de temps après, et en 17 9 6 y fut
rendu le décret qui crée des bureaux de bienfaisance,
chargés spécialement de la distribution des secours à do
micile. Ges bureaux remplacèrent les agences établies par
la. loi du 19 mars 1793 ; et bientôt un décret leur rendit
les biens des pauvres qui avoient échappé à la vente
ordonnée par le décret du 18 août 1792. Le legs fait par
madame de Galieu est de ce nombre»
Ces détails ont paru nécessaires pour montrer que
jamais les biens destinés aux secours à domicile n’ont été
réunis à ceux des hôpitaux, comme le prétend le sieur
Capelle : il faut fermer les yeux à l’évidence, pour sou
tenir une pareille opinion. Il est vrai que pendant quel
que temps les biens destinés au soulagement de toutes les
classes de pauvres ont été réunis au domaine national,
et confondus, si l’on veut, dans le même trésor, dans
le trésor public : mais cette source commune se divisoit,
pour ainsi dire, en deux ruisseaux dont le cours éloit
séparé. Bientôt les sources sont devenues distinctes comme
les ruisseaux; mais jamais celui que devoit alimenter la
bienfaisance de madame de Galieu n’a été tari.
C’est donc inutilement que l’héritier de madame de
Galieu prétendroit que le legs réclamé par les pauvres
¿ifait retour à la succession., Ses raisons sont aussi foibles
�•
c "
4
6
3
.
.
à cet égard que les prétextes qu’il allègue pour obtenir
la réduction de ce même legs.
Une somme de 80000
est exorbitante, s’écrie-t-il,
relativement aux forces d’une succession que la révolu
tion a presque anéantie. La suppression des cens lui a causé
d e s pertes immenses, incalculables. Il est vrai: des rentes,
et en assez grand nombre, sont perdues pour lui; mais
enfin l’héritier de madame Galieu ignore-t-il que la réduc
tion d’un legs ne peut plus être demandée quinze ansaprès l’ouverture de la succession, et lorsqu’en acceptant
l’hérédité sans condition , il s’est exposé aux disgrâces
comme aux faveurs de la fortune ? Mais encore quelles
preuves, autres que ses plaintes, a-t-il'donné jusqu’ici
de l’insuffisance de la succession ?' Où est l’inventaire des
meubles ? On sait qu’il existe : pourquoi ne pas le pro
duire ? Où est celui des créances? L ’état des immeubles,
les baux à ferme, où sont-ils ? Quels contrats de rentes
établissent les dêtrimens énormes que la suppression des
cens lui a causés ? Il sera un moins riche héritier, il est
vrai; mais il sera riche encore': devoit-il l’être, s’il n’avoit
été héritier? on en appelle à lui-même. Il sera un moins
riche héritier : mais il vient de vendre les domaines de
Faillitou et de la Bartassière, plus de 8 0 0 0 0 ^ ; mais il
lui reste la terre de Clavières, qui vaut cette somme; mais
la terre de Grialou lui appartient ; mais il possède des
vignes dans le Querci ; mais il ne compte que vingt-quatre
ans, et depuis dix années la succession de madame de Ga
lieu lui produit 10000
de revenus. Grâce à ces événejnens qu’il accuso, il les reçoit, ces revenus, qui, suivant le
�_
.
( 47 )
.
..
'
testament de sa bienfaitrice, ne devoient lui appartenir qu’à
sa majorité ; ces revenus qui jusqu’alors devoient être
employés à acquitter les dettes del’aniitie et de la religion;
ces revenus que grossit encore l’intérêt produit par le ca
pital du legs que les pauvres attendent depuis quinze ans.
Que l’héritier de madame de Galieu se garde donc d’in
voquer des motifs de considération à l’appui de ses foibles
droits ! Des motifs de considération en faveur de sa cause !
il auroit mieux fait de garder le silence ; ce n’est pas à lui
de les réclamer. Ils se présentent en foule pour combattre
ses prétentions. La morale, la religion, la pitié, l’intérêt
public, viennent au secours des pauvres. La morale, invo
quant le respect dû aux derniers vœux d’une femme ver
tueuse , s’écrie que le legs qu’ils réclament est une dette
plutôt qu’un bienfait. La religion, offrant à nos regards
le lit de mort de l’abbé de Cabridens, le montre dépo
sant dans le sein d’une sœur chérie ses volontés expia
toires ou bienfaisantes, et précédé dans le séjour céleste
par les prières reconnoissantes des pauvres , comme par
un doux encens. La pitié attendrit les cœurs sur les souf
frances des indigens d’une ville entière, gémissans sans
secours depuis quinze années, n’espérant plus qu’en ce
legs, dernière ressource qu’on veut leur ravir. L ’intérêt
public peint »les malheurs des temps ; la misère, fille de
la guerre extérieure et des discordes intestines; les hô
pitaux dévastés, les établissemens de charité détruits: il
représente que ces jours ne sont plus, où il sembloit néces
saire de refroidir la bienfaisance : il repousse ces pré
jugés trop funestes et trop répandus, que c’est un abus
de fuira l’aumône $ que semer les dons, c’est faire naître
�48
les pauvres, qui, malgré ces idées libérales , sont plus
nombreux que jamais. Enfin, toutes les affections nobles
et généreuses appellent à protéger cette cause les hommes
vertueux, les hommes religieux, les hommes du monde,
les hommes d’état:leurs efforts, réunis à la force du droit
public et des lois, entraîneront la balance de la justice.
L.
j.
L
e
JULES,
b. M A L L E T , avoué.
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a lu le mémoire ci-dessus,
E stim e
que les moyens qui s’y trouvent développés sont con
form es aux principes du droit public, auquel appartient la cause.
II est certain, d ’abord, que l’arrêté du gouvernement est une reconnoissance form elle de la capacité des pauvres d’A u rilla c , et que
les juges de Saint-Flour ont excédé leur compétence en les décla
r a n t n on-recevables dans leur dem ande, précisément1 par défaut
dé capacité. A u fo n d , les droits des demandeurs ne sont pas moins
evidens que l'erreur des premiers juges. Les circonstances et les
termes du legs démontrent assez qu'il a été laissé aux pauvres, et
à trois classes de pauvres j et que les Dam es de la miséricorde
étoient seulement chargées d ’en faire la dis tribulion. On ne parle
pas des m otifs de religion et d’ intérêt public que les pauvres in
voquent à l’appui de leur demande. L a justice n ’a pas besoin dans
cette cause du secours de l ’équité] et l'esprit n’est pas moins satis
fait que le cœur.
D é lib é ré à
C lerm o n t, le 10 juin 1804,
BO IR O T , B E R G IE R , B E IL L E -B E R G IE R .
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bureau de bienfaisance de la ville d'Aurillac. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jules
Mallet
Boirot
Bergier
Beille-Bergier
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire pour les pauvres de la ville d'Aurillac, légataires d'une somme de 80000 francs. Mémoire pour les Pauvres d'Aurillac, représentés par le Bureau de bienfaisance de cette ville, appelant ; contre le Sieur Capelle, héritier de madame de Galieu.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0219
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53718/BCU_Factums_M0219.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
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62acddb602fa7eba1dcf78cda40691d0
PDF Text
Text
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^MEM OIRE
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LA N U L L I T É D’ U N L EGS
DE 8 0 0 0 0 * ,
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F A I T A L ’Œ U V R E D E L A M IS É R IC O R D E
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DE
R I O M ,
L’ I M P R I M E R I E
IMPRIMEUR
DE
DE
LA
L A N D R IO T ,
COUR
Juillet 1804.
D’APPEL.
SEUL
�M E M O I R E
cour
D ’A P P E L
EN
RÉPON SE,
s£antk
A RI OM.
POUR
P
ierre
- A
ntoine
- U
rbain
CAPELLE,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
S a i n t - C o n s t a n t , intimé ;
C O N T R E
Les A d m i n i s t r a t e u r s
b i e n f a isance
du
B ureau
de
de la ville d ’A u rilla c , appe
lans d ’un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de S a in t-F lo u r , le 20 flo réa l an 11.
administrateurs du bureau de bienfaisance de l a
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
L
ES
►
�( O
t
80000 fran cs, fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricoi’de de cette ville. Ils seront lus avec in térêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
M ais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordres qui raccom pagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’ utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en démontrer
les inconvéniens, comme l’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout en tière, c’est au gouvernem ent,
q u ’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’être u tile ,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
être perm anentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais finissent presque toujours par dégé
nérer.
'
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’il rend
hommage aux vertus et à la piété de ces dames respec
tables qui trouvoient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoient la chaum ière du - p a u v r e , soulageoient ses
�( 3 )
t .
besoins, et lui donnoient ces marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre resp ect, qui fut créé pour notre bonheur !
femmes vertueuses et tend res, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société ! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion ? par qui avez-vous été rem placées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour en obtenir
la délivrance ?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orothée G abridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rilla c dans le
'courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de connoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-U rbain Gapelle , fils aîné du sieur G apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent a la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent a une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 f r ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en u su fru it, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�.
.
,{ 4 )
plusieurs immeubles en toute p ro p riété, dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seul, de la seconde classe,
et le plus considéi'able de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
« P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« com m uniqués par feu M . C abridens, mon frè re , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uçre de la m iséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ u vre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funta/iges est
« la supérieure , la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétien ne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’Â u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ u vre que 60000 fr. ; qu’il
« sera em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’ A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le r even u de ladite somme
« de 20000 lr. peut le com porter; et que le revenu de
« la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r . ,
« soit em ployé à assister et soulager le surplus des pau« vres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
« en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
« léguée, aux conditions m entionnées, soit payée auxa dites dames administrant ladite Œ u vre, sur la quittance
�.
.
c
5
« qui en sera fournie par ladite dame d e-F on tan ges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veux et entends qu’au cas où ladite Œ u vre de la
« miséricorde v în t, dans le tem ps, à être réunie à l’h ô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je v e u x , d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u v re , J'asso
« retour à mon héritier. »
- Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d ’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ u vre de la m isé■ricorde, qui étoit administrée par des dames pieuses,
•mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cette même ville
q u ’en 1777.
•
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C iiyla, qui étoit chargé
■
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés ,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
.de la succession, jusqu’à ce que l’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e p rix des ventes et des revenus de la succession devoit
être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquiLtcment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Les legs de prem ière classe, autres que celui qui lait
l’objet de la dem ande, dévoient être payés dans l’année
du deces. L e p rix du m obilier lut insuilisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�_
C6 )
II est probable qu’en 178 9, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. Il est au moins certain que cette'Œ uvre n’a jamais
réclamé ni form é aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur C a y la , exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y fit même
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u ril
la c, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque le sieur Antoine Capelle, pore et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu, se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l ’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pouvoit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sœurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit cadu c, et beau
coup d’autres étoient également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieuv Cayla père vint à décé
der. S011 fils, en vertu du même testament, prit la jouis
sance des biens, qu il a gardée jusqu’en 179^. Il n’est pas
exact de dire qu’il rem it 1 hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en charger; et ce n’est
(*ï C ’est une erreur qui s’est glissee dans les copies : il n’est point question
de Sœ urs-grises dans le testam ent.
�( 7 )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit La succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Ï1 est dit, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
« et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant p ou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« p o u r T in té rêt de so n h é r it ie r , et encore sans qu’ il soit
« tenu de payer aux légataii-es aucun intérêt de leurs
« legs. »
Les employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait ù une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alieu, pour le payement de cette somme
de 80000 fr. L e 8 thermidor même aim ée, ils firent un
nouveau com m andement; e t, s u r l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Cnpelle avoit encore à discuter contre
�.
•
,
•( 8 ) r
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulû t faire de cette somme l’emploi auquel elle étoit
destinée.
Bientôt api'ès, l’hospice d’Aurillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle,
Cette prétention ne tendoit qu’à faire exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice n’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brumaire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres fuirent nom
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer le
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
m iséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateurs
y disent que cette Œ uvre n’a jamais été. supprim ée,
qu’elle 11’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749 ,
l’Œ uvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespa tentes;
L e cas prévu par la testatrice, pour le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r . , n’étoit pas ax-rivé ; le
legs devoit donc être versé dans leux-s mains.
Tels sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
cilation devant le tribunal d’A urillac. L e sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. Et comme on a paru
im prouver la récusation, il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D e lo r tz - L a b a r th e , l ’un-des juges, est m em bre
du
�C9 )
du bureau de bienfaisance -, les sieurs L aval et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même ville ; ils avoient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur D esta in g , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julhes et V e rn io ls, l’un étoitle défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u rillac, qui ne pouvoient rem placer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d ’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l ’intérêt de tous
les habitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : eu
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
'
Ce jugement lut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse su ivan t, les administrateurs citèrent eux
) memes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
s’étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u r illa c , le legs dont il s’agit, et à en p ou r
suivre la délivrance devant les tribunaux j 20. d’un arrêté
B
�( 10 )
du conseil de p réfectu re, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les tribunaux, les poursuites com
mencées contre le sieur Capelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S a in t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i . Suivant e u x , les legs faits pour cause pie dévoient
recevoir leur exécution , et être jugés favorablement.
I/incapacite du légataire ne rend pas même n u lle legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner l’em
p lo i et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des le g s , et
l ’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
5 °. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u
vre de la m iséricorde, comme corps et com m unauté;
mais ¡1 fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de VŒ uvre de la m iséricorde,
�'
( II )
cela n’a été que pour désigner l ’espace et la qualité des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit en
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n ’a jamais été réunie à l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile , n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde •, mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été consei'vées.
8°. L a condition clu retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’a voit p révu e; et, en matière favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. On ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les prévoir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’ une grande révolution ,
surtout lorsque tout est l'entré dans la ligne presci’ite par
le fondateur.
io°. L a réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l ’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges ; et court tous les risques :
B «
‘
�R e s périt domino.
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
pertes considérables.
i i ° . L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quai'te falcidie. E lle n’a lieu qu’au profitde l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n ’a pas lieu pour les
legs pies. Il irapliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuilisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son c ô té , le sieur Capelle soutint, i°. que le legs fait
â l’Œ uvre de la miséricorde étoit caduc, soit lors de sa
con fection , soit au m oment de l’ouverture de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation , aucune dotation, aucun établisse-’
ïnent avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée.
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établissement,
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations,
associations et hospices : d’où il résultoit qxie le legs auroit
cessé d’être e x ig ib le , du moment que l’intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le con/ioit exclusi
vem en t; et alors la reversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. Le patrim oine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g e n re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée liéri-
�f 13 )
tière par son m a r i, de qui elle tenoit la plus grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Capelle , son petit-neveu et
son héritier p résom ptif’, et la dame Galieu devoit moins
se considérer comme propriétaire , que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
étoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères macédons , ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Capelle,
ne pouvoit être tenu que cl’en payer annuellement l’in
térêt.
.
6°. En pays de droit é c r it , l’héritier institué ou
ah intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 1 7 4 g , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à acheter des rentes
sur 1 état ; et le sieur C a p e lle, en ce c a s , pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du legs ; en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
L a cause portée en cet état au tribunal de Sain t-F lou r ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement contiddictoire , qui déclare le legs fait par F ran çoise-D o ro
thée d e C a b rid e n s , ve u ve de G eraud G alieu , à l’Œ u v r e
de la miséricorde de la ville d’AurillaC , par son testa
ment du 4 octobre 1785 , nul et de nul eiîèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette mêm e ville non - recevables dans la
�.
( r4 )
#
demande par eux form ée contre le sieur C a p elle, héri
tier de la dame G a l i e u , en délivrance de ce même
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
' « i° . D ’api*ès la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
« 2°. Par une exception néanmoins établie par la
« jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
« pie , les legs pieux faits au profit des communautés
« illicites étoient appliqués aux pauvres ou autres
« œuvres p ie s, et la disposition, même
imparfaite ,
«
«
«
«
«
«
«
n’empêchoit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. Mais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1735 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’cdit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p i e , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
« 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui renou« velle les défenses de form er aucun établissement
« de corps ou communauté quelconque , sans l’obtencc tion préalable de lettres-patentes, sont nommément
« compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u« nautés sous prétexte d’hospices. Par une disposition
k rigoureuse et nouvelle 5 qui ajoute a celle des precé-»
« dentes lo is, il est défendu de fonder de tels établis-
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( i 5 )
semens par disposition de dernière volonté , quand
même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
des leí tres-patentes.
•
tc 4 °' L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
que l’homologation du parlement pour fondation de
messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pauvres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut rai
sonnablement recevoir son application lorsque la
disposition est faite à un corps ou communauté non
approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
contradiction avec l ’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
pleine exécution de l’article i er. , non - seulement
déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
sans qu’il soit besoin de lettres de rescision , nonobs-
« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
«
«
«
«
«
«
« 5°. Adm ettre l ’exception portée en l’article 3, au
profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
moyen indirect de fonder réellem ent, contre le vœu
de la l o i , des établissemens qui , quoique déjà existan s, n’auroient eu jusque-là qu’une existence épliém è r e , fa ute de moyens suilisans.
K 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition inftniment rigoureuse, veut que les enfans ou héritiers
�( 16 )
« présom ptifs, du vivan t môme de ceux qui ont fait
« les dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
« réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
« envoyer en possession , même avec restitution de fruits,
« du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
« de l’ édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
« de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis« sement non-aj>prouvé , en appliquoit le bénéfice aux
« hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
« cause pie.
‘
cc 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774 et 178 0 ,
« qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela« tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
« des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
« articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir«
«
«
«
‘ «
‘
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger suivant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
cc fait à une corporation ou com m unauté non légale-,
cc ment établie , h l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
cc d’A u rilla c,q u i n’avoit point obtenu de lel tres-patentes,
« S’il est dit que le legs a été fait aux pauvres de l’Œ uvre
cc de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-« tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
te des pauvres à laquelle la testatrice entendoit faire du
cc bien. L ’Œ uvre de la miséricorde avoit tous les carac->
ce tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�( 17 ) _
^
« communauté , puisqu’elle avoit une su périeure, une.
« assistante, un receveur; elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, l Œ uvre de la m iséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister -, c’est l’Œ uvre,
« que la testatrice avoit envisagée, plus encore que les
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau« vre s, ecclésiastiques et séculiers, -qu’elle .avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à p erp étu ité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ u vre à l’hôpital
«r g é n é r a l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses« ne sont applicables ni aux pauvres individuels , tels« que les pauvres lionteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l ’Œ uvre de la m isé« rico rd e, considérées comme individus.
« 9 0. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
cc pour cette interprétation avec l’arrêté des consuls,
c< q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it, l’a qualifié de legs f a i t à ï Œ uvre
« de la miséricorde quoique le gouvernem ent ait eu
a sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de Y Œ uvre d e la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres - patentes ; l’a considéré comme légalem ent
4
�.
c 1 8 -}
,
..
« représenté, par suite des lois des 16 vendém iaire et y
« frim aire an cinq.
« Cet arrêté d’ailleurs ne préjuge rien sur l'invalidité*
« ou la validité du le g s, puisqu’en cas de contestation:
« il renvoie les parties devant les tribunaux.
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana
« lisées, le legs fait à l ’Œ uvre de la m iséricorde d’A u « rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;
« 'e t, d’après l’article 10 de Fédit de 17 4 9 , l ’héritier seuî
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs. »■
Ees administrateurs du bureau de bienfaisance on t
interjeté appel de ce jugem ent, et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Capelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à
propos de relever quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpital
c^Aurillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, com m e
Font prétendu les appelans , on doit d ir e , d’après lanotoriété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richem ent d o té , proportionnellem ent
à la population de îa ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde.. L e bailliage de V i e
n’auroit pas été competent pour connoitre de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas.
L ’Œ u v re de la m iséricorde n’étoit pas même une cor-,
poration. O n se souvient avec reconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées dans les. villes princi*-
�( 19 ) .
_
.
pales. Les daines charitables qui en faisoient partie form oient une société particulière, et parfaitement lib re ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le , n’étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ie u x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m êm e, faire respecter sa m émoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne 'peut l ’espérer qu’autant
qu’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernem ent.
'
L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune delà tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelle
son n eveu, père de l ’in t i m é , et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelle p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelle
fils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
1774. A la vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou , de la Bartassière, et du fief de Clavières.
Ces deux premiers domaines ne s’élèyent point à une
C 4
�C 20 )
Sommede 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im pro
prement de fief, puisqu’il ne l’a jamais é té , ne vaut pas
la même somme. Il n’a fait aucune disposition, et tout
ce qu’ont dit les appelans, page 9 de leur m ém oire, 11e
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
P o u rqu oi dire encore que la dame G alieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proclies : elle n’en avo it
aucun dans la ville d’À u rilla c , qui fût au même degré.
L e sieur Capelle p è re , neveu du sieur G a lie u , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la nature, pour se ser
v ir des expressions des appelans , appeloient personnel
lem ent le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G ria lo u , qui faisoit partie de ses
propriétés, et q u i, dans l ’état actuel, ne produit pas 800 fr„
de rente*
A la page 12 du m ém oire, on prétend que l ’Œ u v re
de la m iséricorde de la ville de Figeac avoit été payée du
legs porté p a r le testament, et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac a voient des lettres**
patentes. M ais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que l’Œ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de iilles de l’éta
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d>un siè cle, jouissoit d’une existence légale, et en voyoit
¿es sceurs de son ordre dans un© foule de villes.
L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14? Q110 niadame deFontanges, se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, 'avoit fait des dé
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�( 21 )
absolument faux et controuvé : on peut môme assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G a lie u , la
société des Dames de la m iséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fuit aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n ’ont été remis- au fils qu’après la m ort du
p è re, et il n’en jouit que depuis iy g 5 . Si le sieur Capelle
père s’opposa , en 179 2 , à la vente de quelques immeu
bles, c’est que déjà le sieur Gayla en avoit vendu pour
58ooo
assignats, dont il n ’a fait aucun u sage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papiei'-monnoie.
L e s membres du bureau de bienfaisance p r é t e n d e n t ,
page 19 , qu’ils ne peuvent oifrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienlaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
ch arité, de leur piété : les q u êtes, les aum ônes, les dons
m anuels, doivent composer principalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
l ’unique but de leur établissement.'
r
Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le point de vue de l’intérêt public }
car s’il faut en croire les administrateurs , qui paroissent
avoir des v u es.é lev é e s, leur.cause ®st une question de
droit public.
�( 23 )
M a is com m ent Tordre et le droit -public seroievt-ïls
en suspens ( pour se servir des termes des app elon s),
parce que le legs de 80000 fï\ fait à l’Œ uvre de Ici misé
ricorde serait contesté?
■ Q u’étoit l ’Œ u vre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et'
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établissemens étoient bornés à certains lieux et à
certains tem ps; ils n’entroient point dans le système de
l ’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliei’s , lorsqu’il s’agissoit de rem édier aux m aux
d une disette, d une epidemie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations m om entanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portan t, parce
qu’elles avoient des vues vraim ent utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrem ent volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s , des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible que , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; cest toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cesse, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’ecrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�C 23 3
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution et le
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu Fempêclier pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se vo ir
« privées de leur fortune , par les dispositions que les
« liommes ont à former des établissemens nouveaux qui
« leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos
« térité avec le titre de fondateurs. L e meilleur usage
« que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
« importante, est de concilier autant qu’il est possible
« l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
On aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit; mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit incom pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
;
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur mémoire l’arrêté des consuls, en date'
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. I/article 5 de
cet arrêté porte, « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des héritiers , les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablement
« autoriser dans les formes voulues par les précédons
« arrêtés. »
’
�( 24 )
Il est bien évid en t, d’après cet article, que l ’a rrêté,
comme l’ont dit les premiers ju g es, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
de renvoyer devant les trib u n au x, pour prononcer sur
les contestations qui pou voient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvex-nement, comme ou veut le prétendre,
çût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’em ploi en cas que
l ’on reçoive. Il en est de cet a rrê té , comme il en étoit
autrefois des lettres de bénéiice d?inventaire ou des let
tres de restitution. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition
nellement une succession, soit pour se pou rvoir contre
un engagement indiscrètement contracté. Mais pour
qu’elles eussent leur ex écu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les tribunaux , qui n’en px’ononçoient l’enté
rinem ent qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs. A uroit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non com m uniquée , un arrêté qui les* autorise,
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en connoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les trib u n a u x , en cas
de contestation, si le legs doit etre ou non acquitté. T e lle
est
�c
*5 )
_
est la seule idée raisonnable, le seul point de vue sous
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoierit une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugneroit à tous les prin
cipes de lDoerté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le m érite de la
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit
de réform er les actes du go u vern em en t, que ce n’est
point à lu i ci diriger le gouvernail de f état. Ces expres
sions im propres sont absolument vides de sens. Il faudroit
•au moins rayer l’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vain
le gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
lë droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il
s'a git, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter.
; Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;
mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce qui
a'rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice , la quotité du legs,
par exemple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour recevoir com m e pour demander fait partie
de ce même droit public.
' Il est assez difficile de com prendre ce que les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. O n ne conteste
pàs la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seroient
confiés depuis leur création. O n sait que le gouvernem ent
D
�C
)
seul* s’est, réservé le droit de .les y autoriser, et ce n’est pas>
ce que les juges de Sain t-Flour, ont examiné. Ils ont seule
m ent décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avo it été fait, puisque ce bureau n’existoit
pas l o r s - d u décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des. dames pieuses à laquelle le legs avoit été,
fa it:, étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelons •eux-mêmes ,;les premiers juges avoient droit de
connpître de la validité du testament , de la capacité de
disposer et de la quotité ,du le g s, on ne voit pas comment,
ils n’auroient pas eu. le droit de prononcer sur la validité
de ce meme legs,, comment il auroit été interdit à l’iié-riticr de discuter devant les tribunaux la capacité de la'
testatriee ou. du légataire..
-, O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé—
tencej'pour s’occuper de la. validité du legs ou.fondation!
de la dam e-G alieu,; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en l’evenir, à i ’édit de 1749,, qui fait la loi dans cettematière.
■. ..
/
]D’a près l’article 1". de cet é d it, il ne peut être forméaucun établissement qu’en vertu- de lettres-patentes enre
gistrées .dans les cours. Sous ce mot gén éral,d’établisse
ment. , ■
on y: com.prend nominativement les Ziospices y,
congrégations ,, confréries hôpita ux ,. etc, .
.
L ’art. 2 défend de faire à l’avenir aucunes dispositions
par acte de derniere volonté pour, fonder un nouvel, éta
blissement,, ou au p,r°fit des personnes qui seroient ch ar-'
gées de le form er , le tout à peine de n u llité, ce qui sera,
observé quand même la disposition seroil faite à la ch arged’obtenir des lettres-patentes..
�( 27 )
. .
■ L ’article g déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pouiToicnt avoir été faits en faveur des établissemens uon
autorisés, directement ou indirectem ent; et tons ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant touté prescription , tous consentemens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnés à l’exécution de
ces actes ou dispositions,
' Par l’article 10 , les enfans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions, à réclamer les biens par eux
^donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,a vec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
r Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’éloit qu’ une association libre non
a p p ro u vée, une congrégation sous -prétexte d’ h o sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de leitres-patentes : donc
les dispositions faites ù son profit, directement ou indi
rectement , à elle-même ou à ceux qui l’administrent 7
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pour-roit en réclamer la restitution, si le legs avoit été p ayé,
nonobstant tou te prescription , toute approbation expresse
Q.Utacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des >
termes irritans des articles 9 et xo de l’édit dé 1749. ' .
' Les administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable. Ce n’est point à ¥ Œ uvre de la m iséricorde que x
‘
D a
*
�.
.
. c 28
}
le legs A 6tê fa it,’ mais bien a u x pauvres dé l’Œ uvre.' Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
r
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait â l’Œ uvre. Civibus
« civitatis legatum, velJldei com m issum , datum ciçita ti
« relictum videtur, loi 2 , D e rébus dubüs. L a lettre
« du testam ent, con tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lég u é , car ce n’est que les re-*
« venus'dés 80000’^" qui doivent être employés à soulager
« les pauvres que l’Œ uvre a coutume d’assister; et p ar
« qui doivent-ils être employés ? par l ’Œ u v re ,q u i a cou—
a tume de les assister. Ce n’est point aux p au vres, mai»
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’uner
« rente annuelle envers les Frères macédons , d’une fon
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la v ille
«
a
«
«
«
«
«
«
cc
d’A u rillac. Ce n’est point aux pauvres qu’on a légué ,
puisque ce n’est point eux qui peuvent dem ander,
recevoir et quittancer. Il n’y a pas même fidéicommis ,*
car ils n’auront jamais de droit et d’action pour posséder ; c’est pour leur soulagem ent, mais ce n’est pas sur'
eux que l’on a fondé. Ils sont l’objet et non les dépositaires de la fondation : ce n ’est point eux q u i forment
le corps et la congrégation de l’Œ u vre de la m iséri-:
c o r d e , mais bien les pieuses dames qui administroient
« cette Œ u vre ; £ar les pauvres n’auront jamais de puis« sance et de d ro it, ni dans ^administration , ni contre^
« les administrateurs. »
Xæs administrateurs invoquent l’article 3 de l’édit de
1749 ? cl u* excepte les fondations particulières, qüi ne ten.-* '
�( 29 )
droient à rétablissement d’aucun nouveau corp s, college
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou seculiers, etc. A 1 égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sui les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans.
ces exceptions , les appelans ajoutent : La révolution n a
point permis aux tuteurs des pauvres de rem plir la fo imalité de l’hom ologation, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette hom ologation.
Cette objection, souvent renouvelée , et toujours detruite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l ’exception portée par l ’article 3 étoit.
étrangère à la cause, puisque la disposition est faite au^
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas, disent-ils, l’exception seroit en contradiction avec
l ’article 9 de l’édit ; ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœ u de la l o i , des établissemens q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de moyens suffi sans.
L ’article 3 ne dispense de la formalité des lettres-pnten
tes , auxquelles il substitue l’h o m o lo g a tio n , que les ion
dations particulières et les actes qui les c o n tie n n e n t , et
non les corps à qui elles sont confiées. Dos font ations
confiées à un corps non approuvé tendent n< cessai] <m< nt
à établir un nouveau corps, contre la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�(
30
)
t
^
O n poiuToît citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’hériLier. M . de Séguiran,
évêque de N e v e r s , fit son testament le 3 avril 1789 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient em ployés
à l’exécution des établissemens de charité qu’il avoit coxn-r
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’ instruction et charité chrétienne, et des fonds néces^
saires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif1, ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible a ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans le rapport qui fut
fait au conseil des Cinq-cents, le 21 germinal an 6 , par.
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise à l’h éritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
p o u v o it ê t r e demandé, etle nouvel ordre de chosesen ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie
p ;n' conséquent le legs doit être-reversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�( 3T )
mais le sieur Capelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande aiïinité entre cette espèce etcelle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évêque de N evers, la testatrice n est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivran ce, elles n’en
ont jamais été saisies; le nouvel ordre de choses a changé
la destination du legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprim és; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pou rroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontangcs , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués à une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. I l ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que les appelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée en acquisition
de reu tessu r l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éra l, comme les bureaux de bienfaisance,
ne peuvent aujourd’hui recevoir des capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’intérêt à quatre pour cent; oui
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u ’im porte que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la miséx-icorde assistoient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré qu’ elle vouloît exé
cuter les pieux desseins de son fr è r e , elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les unes ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
'
Les appelans, qui veulent faire triom pher la vérité par
toutes les arm es de la p a ro le, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’ A u r illa c , sans autre explica~
tion , personne ne douteroit qu’il ne fût valable. M ais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
Les pnuvres forment un corps irrégu lier, qui n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoir. IL faut un inter
m édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de letat. Si le corps ou l’hos
pice 11’est pas fondé en vert,u de lettres-patentes, le legs
est caduc, et revient à l’héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749- Bientôt les appelans s’égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué un legs fait aux p a u vres, ilnuroit au
torisé
�( 53)
torisé les Dames de la m iséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droi(
public ; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer sou ..
choix.
•
.
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignore
où les appelans ont pu les puiser. L a règle la plus cer-,
taine en matière de testamens, c'est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions ; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l ’exé
cu tio n , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.,
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a ses limites : comme elle doit respecter les pro
priétés , efle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit p u b lic , ce n’est qu’en ce sens , que l a ,
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon
dation faite par la dame G-alieu, le legs ne pouvoifc
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le i-ecevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespatentes.
L ’G iuvre de la miséricorde n’avoit aucune existence
légale. V oudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs •, ils conviennent qu’il Fal—
loit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an dix j et vouloir qu’un arrêté, postérieur
'
E
'
*
�C 34 )
de treize années à l’ouverture du legs, puisse faire re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fo rtu n es, supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner un effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du»
le g s , ou a présumé le consentement de l’héi’itier à en
verser le montant.
«
/ Il est contre toutes les règles , contre toutes les idées
l’eçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvertr
en 1789? puisse être réglé par' les lois actuelles; qu’ un,
legs essentiellement nul dans l’ancien oi*dre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’ une libéralité
faite à l’Œ iivre de la miséricorde depuis 1785 , puis e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur Câpellë ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se •trouve dans une position si dif->
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? l^a fortune
de sa bienfaitrice a éprouvé une dim inution si considé
rable depuis la rév o lu tio n , qu’elle suffiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice'? eû t-elle'été aussi lib érale,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son h éritier; elle ne suppose aucune di
m inution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
à l’acquittement des legs, pendant la.m inorité de son hé-
�( 35 h
#
ritier. Si cile, permet, de vendre quelques • im m eubles,
elle désigne les moins -précieux -, .encore a-t-elle excédé
ses pouvoirs en ce p o in t, parce que c’est éluder la dis-,
position des r.rt:cles 1 4 i 5 et 16 de l’édit de 1749.
(
.-E t cependant-, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’acquitter l e ’ legs de 80000 f n , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
q u ’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
, .
D ’après ces considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’affoiblissent pas les moyens p rin cip au x, le .sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance, établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères macédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours à dom icile ; dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
2°. Il y a encore à prendre sur le legs .pareille somme
de 20000 f r . , dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
.
.
�( 35 3
.
3®. E t toujours dans l’hypothèse que le surplus du
legs pourroit être e x ig é , le sieur Gapelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être employée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir q u ’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes 1
ce n’est pas là ce quTa entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoiènt dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose que des rentes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l ’article 13
de la déclaration du 20 juillet 176 2 , enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiers et représentans des.
donateurs ou testateurs à donner, en payem ent, des rem
boursemens des rentes de la nature de celles dont if est
perm is a u x gens de m ain-m orte de f a i r e ta c q u is itio n ,
par Varticle 18 de Védit de 1749. C e subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être refusé à Pintimé ; il a pour lui
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vig u eu r, et qui ont dû régir le legs dont il s’agit.
40. L e sieur Capelle est encore lé maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. , O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de l’hérédité; qu’elle se prend eu'égard’
à la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.'
h o i 30 , lo i 7 3 , ad J'aie. §. 4 , a u .C o d .
’
T o u t héritier testamentaire ou ah intestat a le droit
�( 37
'
e
de la distraire, lorsqu’il a été fait inventaire; et, dans
l ’espèce, cette formalité a été rem p lie.'E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6 ,a d fa lc . §. i , au Cod. E t le sieur Capelle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
:
5 °. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l ’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; on
n e peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en prem ière instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le rem boursement; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
M ais c’ est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considération peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
fiur une vaste m er, et dont l’ utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les fféctiotrs nobles et généreuses
s’opposent à ce qu’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’intérêt public. L 'h om m e d ’état 11e
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
£3
�particulières, qui absorberoient à la longue
toutes les propriétés. L 'hom m e religieux vient au secours
de ses semblables ; et garde le silence sur ses bienfaits.
L ’ h o m m e d u m o n d e pense que les fondations sont presque toujours des-monumens de van ité et d’o rg u eil, et
les apprécie à le ur-juste valeur. L e m agistrat, impassible
com m e la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
te n tio n sur les questions qui lui sont soum ises et ne
-fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les hommes sont véritablem ent 'égaux
-en droits.
fondation
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
M e. - M A R i E , a v o ué,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
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Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité d'un legs de 80000 francs, fait à l’œuvre de la Miséricorde établie en la ville d'Aurillac. Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53717/BCU_Factums_M0218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
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POUR
C O N T R E
le Sieur C
le B
a p e l l e
u r e a u
de
B
,
d é fe n d e u r,
i e n f a i s a n c e
de
la v ille d'A u rilla c, demandeur.
L
a
D am e G a
l i e u
d écéd ée en
17 8 9 , a v a it, par
son testam ent du 5 octobre 1 7 8 5 , institué pour son
h éritier le sieur C a p e lle , son n eveu , à la charge
d ’une quantité considérable de legs divisés en trois
classes.
,
A la tête de ceux de la seconde est un legs de 80,000
fait à l ’O Euvre de la -m iséricorde de la V ille d ’A u rilla c,
C o n grégatio n non approuvée.
C e legs est ainsi conçu :
« Pour exécu ter les pieux desseins qui m ’ont été
com m uniqués par feu M. C abredens , m on f r è r e ,
» je lègu e aux pauvres de l ' o e uvre de la m iséricorde
» de la V ille d’A u rillac , laquelle oeuvre est administrée
» par de pieuses dames, et dont M e. Fontanges est la
« S upérieure, la somme de 80,000, à la charge néan» moins que les Adm inistrateurs
de ladite
œ u vre
» seront tenus de p a ye r annuellem ent et à perpétuité
�( 2 )
,
» aux F rères m acédons de l’école ch rétien n e établis
» à A u r illa c , la rente et pension annuelle que feu M,
» C abreden s s’était obligé de leur payer par acte e t c .,
» sans laqu elle condition je n ’aurais légu é à ladite
^ œ u v r e que 60,000 ; qu’il sera em p loyé 20,000 pour
assister M M . les Prêtres de la V ille et Com m unauté
d’A u rillac qui seront dans le b e s o in , et m êm e ceu x
yy des environs si le reven u de ladite somme le p erm et;
» que le reven u des 40,000 restans sera
em p loyé à
» assister et soulager les pauvres q ue ladite Œuvre a
?? coutume d'assister , etc. etc.
« Je veu x et entends qu’au cas que l’œ u vre de la
» rniséricorde vînt à être réunie dans le temps à
» l ’hôpital gén éral , ou à tout autre hôpital, le legs de
» 80,000 que je fais à ladite œ uvre , fasse retou r à
» mon héritier. «
^
L e testam ent porte en outre que cette somme sera
p ayée aux termes ensuite fixés aux Dam es adm inistrant
ladite œ uvre , sur les quittances à fournir par M e. de
F on tan ges leur Supérieure.
E t attendu l’im possibilité de payer des legs si con
sidérables , ( ils se portent à près de 3 oo,ooo ) avec
le p rix du m o b ilie r , il est dit qu’après le décès de la
testatrice il sera p ro céd é à la vente du m obilier et de
divers im m eubles d é s ig n é s , parmi lesquels se trouvent
¿ es
t à l ’effet de quoi elle nom m e le sieur C a y la
�'
exécu teu r testam entaire ,
,
.. •
ou plutôt fiduciaire , pour
3 5
que celui-ci acquitte lesdits legs avec le prix desdites
ventes , ou des revenus de la succession qu’il percevra
jusqu’à ce que l ’h éritier ait atteint sa
25 me
année ,
(p rairial an i 3 ) , term e jusqu’ auquel doit durer l ’exé
cution testam entaire ou plutôt la fid u c ie , bien que
par le décès du sieur C ap elle il arrivât un autre h éritier
qui ne fût pas m in e u r, voulan t que cet exécuteur
testam entaire ne puisse être rech erch é ni pressé par
personne , mais que pour ven d re il puisse choisir et
attendre le m om ent qui lui paraîtra con ven able ; de
sorte q u ’il n’y pou vait être forcé , et que par suite il
pouvait retard er le payem ent du legs jusqu’au dernier
m om ent de l’exécu tio n , jusqu’en prairial an i3L e payem en t des legs de la prem ière classe devait
être fait dans Fan du décès. C es legs absorbaient plus
que le prix du m o b ilie r, de sorte que les legs suivans
ne pouvaien t être acquittés qu’avec le reven u
des
biens resta n s, et le produit de ceux vendus. C e tte
i circonstance est précieuse à recueillir.
Q uan t aux legs de la seconde cla sse, ils devaien t
être payés à fur et m esure que les ventes des l iens '
ou les reven us de l ’h éréd ité auraient produit des
fonds sufiisans.
L a révo lu tio n survint ; au m ilieu d’un désordre
■épouvantable, toutes les corporations furent dissoutes,
�et les
biens de
toutes
les Institutions aum ônières
allèrent se fondre et se perdre dans la m ain de la Nation.
D e p u is , un G ouvern em ent sage , travaillant de
toute m anière à réparer tant de m a u x , a rétabli ou
créé des B ureaux de bienfaisance.
'
\
C e lu i de la V ille d ’A u rilla c , autorisé par un arrêté
du G o u v e rn e m e n t, dem ande la délivrance du legs
fait à l’œ uvre de la miséricorde,.
Pour
com m encer , supposant
le legs valid e
au
fonds , nous nous bornerons d’abord à proposer les
exception s qui tendent à reculer l’époque du payem ent
ou à restreindre la quantité.
Il devrait être accordé term e à l’h éritier jusqu’en
prairial an i5 .
L ’exécuteur testam entaire ou plutôt le fid u c ia ire ,
car le sieur C a y la d o it être regardé com m e t e l , puis
que selon le testam en t, il d evait rester en possession
de toute l’h é r é d ité , à la charge seulem ent de rendre
tout ce qui se trouverait entre ses mains , à la iin de
l’exécu tion ; le sieur C a y la , disons-nous, avait term e
pour acquitter ce legs , jusqu’en prairial an i5 ; c’està-dire , jusqu’à ce que led it C ap elle eût atteint l ’àge
de 25 a n s, soit q u’il restât h é ritie r, ou qu’ un autre
m êm e m ajeur fût appelle a son défaut. C e la résulte
�( ' ) •
I
du testam en t, car d’un coté on ne peut supposer que
les revenus accum ulés pussent rem plir le legs avant
cette époque ; de l’autre , l ’exécuteur qui ne pouvait
être recherché et pressé par p erson n e, pouvait re
tarder et ren v o yer les ventes à ce temps.
O r , quoique l’exécution et la fiducie ayen t cessé
avant l ’époque p révu e par la te sta tric e , et qu’avant
ce temps l’h éritier ait été mis en possession , il ne
doit pas pour cela être p rivé du term e : car il avait
été accordé , non en faveur de l’exécuteur et du fi
duciaire qui d evait to u t r e n d r e , mais seulem ent en
faveur de l ’h é ritie r; et cela est si v r a i, qu’il n ’avait
pour objet que de faciliter l ’acquit des legs , e t de
d égrever la succession d ’a u ta n t, en perm ettant d ’ac.cum uler les reven us, ou en donnant le temps de vendre
avan tageusem en t, au m oyen de quoi jusqu’à cette
ép oqu e il ne pouvait être dû aucun intérêt. T e l est
d ’ailleurs le sens de la L .
36
de cond. et demonst.
D ans ces 80,000, une somme de 20,000 est légu ée
a condition que l’œ u vre
de la m iséricorde payera
aux F rères m acédons de l’ école ch rétie n n e , la rente
et pension à laquelle feu M. C abredens s’était o b ligé
envers eux par acte du
etc. ; con d ition sans la
quelle il n’ eut légué que 60,000.
C ette partie du legs est donc subordonnée à l’acte
dont s’agit : cette disposition n ’a pour ob jet que de
�'
(
6
} .
.
■
.
.
lixer le m ode suivant leq u el il devra être exécu té ,
de d éch arger l’h éritier de cette o b lig a tio n , et de la
rem ettre à un tiers. T e lle est la cause et la condition
du le g s , sans cela. J lI n'eût été léguée que 60,000.
M ais le Bureau de bienfaisance qui en dem an
dant les 80,000, dem ande aussi cette partie du legs ,
aurait du d ’abord prouver que les F rères m acédons
ont obtenu des lettres patentes sur cet a c t e , ou tout
au moins qu’il est dans la classe des exceptions por
tées par l’art. 3 de l’édit de 17 4 9 ; ce que nous n io n s ,
et sans quoi il est nul : que l’acte est postérieur à la
D éclaration de 1762 , et qu’en ce cas les F rères m acé
dons étaient proprem ent une école
de charité , sans
quoi l’acte serait nul encore , parce q u ’il donnait une
ren te constituée , tandis qu’aux term es de l’éd it de
1740 il ne pou vait être
donné que des rentes sur
l ’E tat ou autres de cette espèce.
Ainsi tom be et l’acte par lequel feu M . C abredens
s’ était obligé envers les F rères m a céd o n s, et la dis
position testam entaire qui lui correspond.
L e legs est d’ailleurs caduc , car son o b j e t , ainsi
que l ’obligation de M. C abreden s ont péri avec les
F rères m acédons ; dq sorte que la condition pour la
q u elle on a expressém ent lé g u é , sans laquelle on n’eut
légué que 60,000 , n existe plus.
A joute/ à cela q u ’une partie du capital de la rente
�C 7 )
.................
pour le service de laquelle le legs avait été l a i t , se
trouve rem boursée , ainsi qu’il résulte des quittances
produites par le sieur G apelle.
Sur les
Gûjooo restans
,
20,000 sont légués pour
que le reven u soit em ployé à soulager M M . les Prêtres
pauvres de la v ille d ’A u rillac.
11 n’est m alheureusem ent que trop sûr que cette
classe , h orriblem ent d écim ée par la révolu tio n , est
en
proie à la plus
affreuse m isère ; mais le G o u
vernem ent va faire cesser ce scandale ; les
titulaires
auront un
anciens
traitem ent ; les E vêq u es , sans
doute , se feront un d evo ir de placer ceux qui n ’en
auront pas ; de sorte que sous peu tous les prêtres
existans se trouveront à l ’abri du besoin ; les prêtres
à ven ir n’auront pas plus à craindre ; car les titres
cléricaux seront désormais de 5 oo de rentes.
A in si d o n c , si le reven u des 20,000 ne suffit pas
pou r les besoins actuels des prêtres , à l’avenir il sera
plus que su fiisa n t, et il serait juste que l’excéd en t
revien n e à l’h éritier. Il
dem ande en conséquence à
être autorisé à retenir ces 20,000, tant qu’il le vo u
d ra , à la charge d ’en payer l ’ entier reven u , ou partie
suivant qu’il en sera b e s o in , par ce m oyen le retour
sera exact et parfaitem ent d ’accord avec les volontés
de la testatrice j il ne sera ni m o in d re , ni excessif.
�(
8
)
_
L ’h éritier dem ande à p rélever la quarte falcidie
sur le legs entier ou réduit.
O n a répondu que pour p rélever la quarte , il fallait
être h éritier bénéficiaire. Si cela é ta it, le sieur C ap elle
n ’étant pas encore parvenu à sa 3 5 me- année pourrait
se faire relever d ’une acceptation faite en m inorité ,
mais nous ne ferons pas valoir ce m o y e n , parce que
le principe avancé par le B u reau de bienfaisance est
absolum ent faux. Il est vrai que pour p rélever la fal
c id ie , il faut avoir fait inventaire , pour constater la
masse de la succession. ( ici il a été fait )
M ais il
ne l’est p a s , qu’il faille être h éritier bénéficiaire. L à dessus nous renverrons aux auteurs qui ont traité la
m atière.
O n a ensuite s u p p u té , accum ulé des zéros. C es
brillantes exagérations d oiven t être réduites de plus
de m o itié ; et quand cela ne -serait-pas, la testatrice
chargée envers l ’h éritier d ’un riche iid eicom m is, a du
le lui rem ettre franc et quitte'; et ce fideicom mis p ré
le v é , on verra que ce q u ’elle laisse de son c h e f ne
rem plit pas lés legs qu’elle a faits.
Enfin , com m e il sera établi dans le cours de la
discussion qui suit
1 h éritier a le d r o it, aux termes
de la D éclaration de 1762 ou 1774 > d ’offrir le p aye
m ent de ce legs en rentes sur l ’E ta t, et le T rib u n a l
ne pourrait le lui refuser.
'
.
M OYENS
�(- ° ' )
MOYENS
AU
.
FONDS.
..
“
L ’affaire présentée sous ce prem ier r a p p o r t, nous
l ’exam inerons au fo n d s, et nous discuterons la validité
du legs.
L e legs dont il s’agit est une fondation. L e s fonda
tions sont .définies ; « une dotation faite à un E tablis
sem ent pour l’acquit d ’une o u de plusieurs charges. »
P ou r déterm iner la valid ité d ’une fo n d a tio n , il faut
con sid érer quatre choses : i °. q uel est le C orps auquel
on donne ; 2°. quelles sont les form alités nécessaires
pour saisir ce C orps ; 3 °. quels biens, on peut lui don
n e r ; 4°. quels sont les termes dans lesquels on a
donné.
C ’e s t, je pens,e, traiter la question sous tous ses
rapports p o ssib les, et sous tous ces rapports il sera
constant que le legs est nul.
i° . Q u e l est le C orps auquel on a légu é ?
C ’est un principe de droit public qu’il ne peut exister
de co rp o ratio n s, et qu’ elles ne p eu ven t obtenir d ’exis
tence légale que par l’approbation du G ouvernem ent.
C e principe consacré par les lois rom aines, a traversé
les siècles , et a été reçu par tous les em pires raison*
r.ablem ent constitués.
2
�(■ 1 ° )
Il a été régularisé en F ran ce par divers édits y
notam m ent par ceu x de 16 6 6 , de 1 7 4 g , et par 'la
déclaration de 1762 qui n ’a été enrégistrée au Parle
m ent de Paris q u ê n i 774Ils se réunissent tous pour déclarer illégau x
les
C o rp s non approuvés , et pour prononcer la nullité
de tous actes faits à leur profit."
Q u ’on lise l’édit de 1749- G ela se trouve à chaque
a rtic le ; nous nous contenterons de rapporter L’art. 9
ainsi conçu :
ce D ésirant assurer pleinem ent l ’exécution du présent
» é d it, concernant les Etablissem ens m entionnés dans
» l ’art. 1.
( qui sont tous C hapitres r Sém inaires ,
» C o llèg es , M aisons ou Com m unautés , re lig ie u se s,
}•> même sous prétexte d'hospice , Congrégations, C onfrai-
. » ries , H ô p ita u x , ou autres C orps , Com m unautés
» ecclésiastiques , séculières , religieuses ou laïques ,
« de quelque qualité qu’elles soient etc. etc. ) déclarons
« nuls tous ceux qui seront fa its sans avoir obtenu nos
lettres patentes , et les avoir f a i t enregistrer dans les
yy form es ci-après prescrites, voulons que tous les actes
» et dispositions qui pourraient avoir été fa its en leur faveur
» directement ou indirectement, ou par lesquels ils pourjy raient avo ir obtenu des biens de quelque nature
n que ce s o it, u titre g iatu it ou o n c r c u x , soient dé~
�'
^ 11 ) .
...
» 'cla rés nuls , sans qu il soit besoin d’ obtenir des lettres de
m récision contre lesdits actes , et que ceux; qui se
>> seraient ainsi établis , ou qui auraient été chargés
» de form er lesdits Etablissem ens , soientr déclares de
» chus de tous droits résultans desdits actes , nonobstant
» tous consentem ens exprès ou tacites qui pourraient
« avoir été
donnés à l’exécution d e sd its, actes ou j
» dispositions. »
. ■'
"
' L ’article 2 prononce la n u llit é , quand même ces
dispositions seraient fa ite s à la charge d’ obtenir des lettfes
patentes .
,
- ,
: ' >
» t t - -‘t | ’ .
;f
1 >? ‘
C es articles sont formels , et-tom bent d ’aplom b sur
l ’e s p è c e , ils prononcent égalem en t la n u l l i t é des
C orps non a p p ro u v é s, et des dispositions faites à
leu r profit.
1 1 ......
.
:
Ici ^Etablissem ent , la 'C orporation , l’t t o p it a l, la
C o n gréga tio n , sous prétexte d’hospice y dite l’œ u vre d e là
m iséricorde n ’est poin t approuvée ; donc elle est n u lle,
donc aussi les actes faits à son profit directem ent ou
in d irectem en t, à, e lle - m ê m e o u à ceu x qui l’adm inis
tr e n t, sont n u ls , d ’une n u llité a b s o lu e , car il n ’est
1
.
1
'
'
1
.
.
1
pas besoin de lettres de récisÎQ n; (d ’i^ne nullité irré
parable , et dont ils ne pourraient être relevés dans
Ip cas où ils seraient approuvés par la suite-; car l’art. 2
prononce, la n ullité quand; m êm e les dispositions se-
�C 12 ) >
raient faites à la charge d ’obtenir les lettres p aten tes;c ’est-à-dire , quand
m ême le bienfaiteur v o u d ra it,
autant qu’il est en l u i s e conform er à la loi de T E t a t ,
v o u d r a it, autant q u ’il est en l u i , cou vrir et réparer
l ’incapacité du C orps auquel il donne ; enfin ces actes
sont n u ls , d’une nullité que le m inistère public doit
p ou rsu ivre, « nonobstant tous conseritemens exprès ou
tacites des parties intéressées » , et ainsi qu’il est plus
expressém ent dit dans divers autres articles de cet édit.
L e B ureau de bienfaisance écrasé p ar cet article
tâche de se r e le v e r , et dit : c’est aux pauvres de
Fceuvre de la c h a r ité , et non à l’œ uvre que l’on a
donné. '
;
■' •
L
.
•
i
.
F aib le et m isérable argu m en t, que pulvérise la rai
son d ’accord avec les lois , et la lettre du .testam ent.
« C ivibu S ciyitfitis legatum , v e l iidei commissum
datum • civitati re lic tu m , videtur. » L . 2. de reb.
f.
,
w
I
.
dub. L e legs fait aux pauvres de -l’œ u vre est fait à
l ’œ uvre.
,
•
. ...
L a lettte du testam ent n’es-t' pas' moins - exp resse1,
c’est au coi'ps qu’il a!:été lég u é ; rar ce^n’èst que les
reven us d e s 80,000 q u ivd o iven t être em ployés à sou-,
lager les paiiVres , que f a t ivre à coutume d'assister ; et
par qui d o iven t-ils -être em ployés ? par Poeuvre qui
à coutum e do lès a s s is té
c^ n’-est' poin t aux pauvres
�'
( >3 )
mais au corps que l ’on a l é g u é , puisqu’on le charge
d ’une rente
annuelle envers les F rères m acéd o n s,
d ’une fondation p erpétuelle envers M M . les prêtres
pauvres de la V ille
d ’A u rillac. C e
n’est p oin t aux
pauvres qu’on a lég u é , puisque ce n’est 'p o in t eux
qui peuven t dem ander , recevo ir , et quittancer. 11
n ’y a pas m êm e fideicom m is , car ils n’auront jamais
de droit et d’action pour posséder. C ’est pour leur
so u lag em en t; mais ce
a fon d é : ils
sont
n ’est pas sur eux que
l’o b je t , et non
l’on
les dépositaires
de la fondation : ce n ’est point eux qui form ent l e ’
corps et la con grégation de l’œ u vre de la m iséri
corde , mais -bien les pieuses dames qui adm inistrent
cette œ uvre ; car les pauvres n ’auront jamais de puis
sance et de droit ni dans l ’adm inistration , ni contre
les adm inistrateurs.
. .
• L ’on a ensuite préten du que par un acte ordinaire
on pouvait légu er à un être étranger , non existant ;
que le le g s v a u d r a it, si le légataire ven ait à exister ,
et le Bureau de bienfaisance appliquant ce prijiçipç ,
a dit : nous représentons l ’œ uvre d e là m iséricorde ,
nous existons lég a lem en t, donc le legs vaut ; et il
a cité en preuve deu x arrêts qui déclarenjt valables
«les legs
faits à des posthum es^nés 11 et i 5 m ois
après le décès de leur P ère testateur.
'
A u tan t d ’erreurs quo d e mpts. L e J legs fqit à uii
�J
. 1
,
.
C
)
.étranger non existant ne vaut p o in t , car il n ’aurait
-
pas de m o tif raisonnable : ces dispositions permises
dans les contrats de mariage .par une exception au
droit , n e le sont qu’en faveur des descendans , et
on t un m o tif, car on les affectionne d ’avance.
Il n ’est pas possible que le B ureau de bienfaisance
représente civilem ent l’œ uvre de la m isé ric o rd e , car
on ne peut pas représenter civilem en t ce qui n’a point
existé civilem ent ; N ous reviendrons ailleurs sur cet
argument.
'
•Quant aux arrêts cités , s’il n’y avait pas e r r e u r ,
il y aurait m auvaise foi. E n e f f e t , ils n’ont, pas jugé
que des legs faits par le P ère à ses enfans pdsthumesnés i i
ou i5
mois après son
d é c è s , étaient faits
à des enfans qui n ’existaient p o in t, car ils auraient
ju g é que des enfans posthumes étaient bâtards , et il
y aurait eu contradiction entre le m ot et la chose ;
mais ils ont jugé que des enfans nés 11 et i 3 mois
après le décès étaient légitim es , et par conséquent
étaien t conçus au temps du décès.
O n a ajouté que le legs fait à des incapables pour
r e n d r e .à des capables était b o n ; ce qui est vrai des
incapacités re la tiv e s, et non des absolues, comme celle
du C orps dont n o u s1 parlons,
�■ ( -5 )
_
M ais à quoi bon ces argumeris. L ’article est fo rm e l,
les dispositions en faveur des C orps non approuvés
sont nulles , d’une n u llité radicale , absolue , irrépa
rable , quand m êm e ils seraient faits à la charge d’ob
tenir des lettres patentes ; et on ne peut con cevoir un
événem en t qui ressuscite une pareille disposition.
O n oppose aussi mal à propos l ’article
3
de l’édit
de 1749 , que l’on a em brouillé avec art pour en faire
le n œ ud de l’affaire : pour le résoudre,, il suffira
d ’expliquer ce t article conçu
com m e il suit :
« N ’entendons com prendre dans les deux articles
« précéd en s , les fondations. particulières , qui ne ten
draient a Rétablissement d’aucun nouveau corps , c o llè g e ,
» ou com m u n au té , ou à l ’é re c tio n d ’u n n o u v e a u titre
» de bénéfice , et qui n ’auraient pour ob jet que la
y? célébration de messes o b it s , la subsistance d ’étu-
» dians, ou de pauvres ecclésiastiques ou séculiers etc.,
» ou
autres œ uvres pieuses de m êm e nature et éga-
» lem en t utiles ; à l’ égard desquelles fondations il ne
» sera pas besoin d’obtenir nos lettres patentes , et il suffira
de faire hom ologuer lesdits actes ou dispositions en
» nos parlemens etc. e tc ., q u i , est-il ajo u té, p o u rvoi
» r o n t à l ’adininislration desdites fondations.^
C e t article ne dispense de la form alité des lettres
patentes auxquelles il substitue l’hom olagation , que
>
V.
�,
c «> )
;
..
les fondations particulières et les actes qui les co n
tiennent , et non les Corps à qui elles sont confiées.
E n effet , il n’y est question que de fondations parti
culières qu i ne tendraient point à établir un nouveau corps,
à Végard
desquelles il ne sera point nécessaire d'obtenir
des lettres patentes , mais il suffira de Vhomologation
dans les cours supérieures ; cela est clair.
O r , des fondations confiées à. un C orp s non apr
p r o u v é , tendent nécessairem ent à établir iin nouveau
C orps , soit qu’il les em ploie à obtenir des lettres p a
tentes pour se faire approuver , soit qu’il les em ploie
à exercer le but de son institution , et par-là à s’éta
b lir plus fortem ent quoi jue d ’une m anière illégale.
L ’article 3 de la d éclaration de 1762 ou 1774 con
firm e cette exp lication : « déclarons R a v o ir voulu
» com prendre au nom bre des fondations
m en tion
» nées en l’article 3 de l’édit de 1749 > les fonda-?
y> tions 'des vicairies , ou secondaires am ovibles , des
)} chapelains qui ne sont point en titre de b é n é fic e ,
des services , p rières , lits , p laces dans les hôpitaux f
)3 et autres établissemens duement autorisés, des b o u illo n s,
» tables des pauvres des paroisses ; ( les fabriques '
?> sont des
»corps duem ent autorisés ) des distribu
ai tions à des pauvres ou autres établissem ens q u i ,
» ayan t
pou r obje|t des peuvres de religion
et de
» ch arité
�.
. c ' p . ,
.
'
» charité , ne tendraient point à établir des
nouveaux
yy Corps , collèges , etc, : voulons ,(]u à l’ égard desdites fo n
» dations , il en soit usé com m e il est dit par
»
3
1 article
de l ’éd it de 1749- »
C ’ est ic i qu’il faut rem arquer la prudence et l ’éco
nom ie de la loi : elle a vo u lu d’un côté em pêcher
que les corporations ne devinssent trop riches , et de
l ’a u tr e , asssurer l’exécu tio n des fondations.
L e G o u vern em en t est de d roit le protecteu r et le
conservateur n é de toutes les fo n d a tio n s, et le lé
gislateur a vo u lu que les C o rp s approuvés l ’avertissent
à chaque fois qu’ils en recevraien t ; mais pour les
fondations p a rticu lière s , c ’est-à-dire qui n’auraient pour
o b jet que q u elq u es in d iv id u s , et q u i par conséquent
seraient p eu considérables , il a vo u lu que quand elles
seraient faites à des hôpitaux et fabriques ; car c ’est à
jeux seuls que pevjv.ent se rapporter ces espèces con
tenues
dans
les
articles
précités.
L e lé g is la te u r ,
disons-nous, a vo u lu que ces C orp s ne fussent point
tenus d’avertir le G o u v e r n e m e n t, et les a dispensés
de la form alité
gênante e t dispendieuse des lettres
p a te n te s, sau f l’h om ologation , faite dans une cours
su p é rie u re , de l’acte qui étab lit la fondation : ( ce
qui n’a point été fait ici. )
E t cela était
ra iso n n a b le, car les hôpitaux étan t
5
�Ç ' 8 )
_
alors adm inistres par les prem iers m agistrats de l’errd r o i t , et les fabriques par les C u rés qui avaient u n e
existance lé g a le , et un office c i v i l , le G o u v e rn e m e n t
avait des agens auprès de ces C orps , pour surveiller
l’exécu tio n et l ’em ploi
de la fondation ; mais cela'
n ’est plus applicable aux C orps non approuvés. T e l l e
est leu r p o s itio n , que d'un côté , le G ou vern em en t
n’a point auprès d ’eux des agens qui les su rv e ille n t,
e t l ’avertissent des dispositions faites à leur p r o fit, et
que de l ’autre , ils ne p euven t eux-mêmes l’en avertir,
car le prem ier regard de sa tou te puissance les ferait
ren trer dans la poussière et le néant dont ils n ’auraient
pas du sortir.
Si donc le G ou vern em ent nra pas des surveillans;
auprès des C o rp s
dem ander
sa
correspondre
leu r
fidélité ?
non approuvés , s’ils ne p eu ven t
surveillance
avec
faute
lu i , q u’est - ce
de
m oyen
qui
de
garantira
q u ’est - ce qui garantira ^ exécution '
des fondations qui leur auront été confiées ? q u ’est-ce
qui em pêchera qu’un C orps é t a b li, sous' p rétexte'
d ’hospice et de charité , n’abuse de la confiance du
fo n d a te u r, pour détourner la fondation à son profit ?'
Ici le B ureau de bienfaisance n’osera pas présenter
l ’arrêté du G ou vern em en t
qui- üautorise à accep ter
le le g s , com m e ,des lettres patentes portant appro
bation de la con grégation de l ’œ uvre de la m iscri-
�< ¿9 )
corde. T o u t 'c è qu’il p e u t fa ire , c'est de le présenter
com m e lettres patentes confirm ant le legs : ce
que
nous discuterons dans le paragraphe suivant.
D o n c la con grégation de l ’œ uvre de la m iséricorde
n’est pas a p p ro u v é e , donc le legs qui lui a été fait
est absolum ent nul.
'
iDes formalités prescrites pour saisir le Corps sur lequel
' on fon de.
' L a n ullité résultan t de l’illégalité du C orp s sur le»
¿fuel on fonde , est une n u llité principale , e t qui em
porte toutes les n ullités secondaires ; de sorte , que
pour traiter de celles-ci , il faut pou r un m om ent
o u b lier la prem ière.
•
II suit des édits
rendus sur la m atière , et de ce
q ue nous avons d i t , qu’en p rin cip e gén éral les fon
dations d oiven t être confirm ées par lettres patentes»
C e tte form alité à - 1 - elle été observée ?
L e B ureau d e bienfaisance, présen te l ’arrêté .qui
l ’autorise à accepter Je le g s , com m e des lettres pa
tentes.
N ous lui répondrons que , si ce sont des lettres
p a te n te s, elles sont obreptices , e t que le Gouverne-*
nient a été trom pé sur l’état du corps légataire.
�'
.
( 20 )
•
Ï 1 est en effet de principe , que les lettres paténtes
ne sont accordées que
co n d itio n n ellem en t, et sous
cette clause expresse ou tacite , s a u f notre d ro it, sa u f
le droit d’autrui.
S a u f notre d r o it , c’est-à-dire, sauf le
d ro it pu blic et les lois politiques ; sau f le droit d ’au
trui , c ’e s t- à - d ir e , sauf les lois civiles.
O r , l’arrêté qu’on nous, o p p o s e , s’il était au tre
chose qu’une simple au torisation , et un règlem ent
éven tu el du m ode d’ad m in istration , répugnerait aux
lois politiques , car . il serai£_en contraven tion a v e c
l ’é d itd e 174 9 ; il répugne aux lois c iv ile s , car, com m e
il sera -prouvé ailleurs , le legs est caduc à cause d é
l ’évén em en t p révu par la testatrice.
C e s principes sont de droit public et s o c ia l, Ws
appartiennent à ce droit que J u s tin ie n , au com m en
cem en t de ses institutes, appelle le droit im m uable des
nations; sans eux il n’y aurait plus que despotism e, d ’où
il faut conclure qu’ils sont non seulem ent re s p e c té s,
mais encore recom m andés par notre gouvernem ent.
Ils ont été de tout temps admis en F r a n c e , ils
appartiennent au droit ancien com m e au droit n ou
v e a u ; car la m onarchie aussi avait sa liberté et son
respect pour les propriétés : ils sont consacrés par le
concours unanim e et im posant des auteurs de la juris-,
pruden ce et des édits.
�E t sans aller plus lo in , v o ilà pourquoi l’éd it de 1749
in trod u it u n -grand procès sur la vérification des lettres
paten tes, pourquoi l’article 7 v e u t , sous peine de nullité,
q u ’il soit fait une en quête de com m odo et incom m odo,
q u ’elles soient com m uniquées aux procu reu rs-gén éraux des cours souveraines , pour être par eux requis
ce qu’ils a v is e ro n t, aux supérieurs m édiats et im m é
diats du C orps sür leq u e l on fo n d e , aux seigneurs
des biens donnés , e t enfin aux autres personnes dont
l'avis et le consentement seront jugés n écessa ires, qui
s o n t , comme on peut vo ir par l’article X , les enfans
et les héritiers m êm e
présom ptifs d u bienfaiteur.
V o ilà pourquoi l’article 8 parle des oppositions faites
soit avant soit après l’enrégistrem ent desdites le ttr e s ,
sur lesquelles oppositions il devra être statué ainsi
qu’il appartiendra ; de sorte que tantôt il pourra arriver
que la lettre patente ( com m e aujourd’hui l ’arrêté du
G o u v e rn e m e n t, s’il pou vait être regardé com m e t e l,
ce qui n’est pas : ) de sorte , disons-nous , que tantôt
il pourra arriver que la lettre patente soit écartée par
•les cours so u vera in e s, et tantôt que cette lettre p a
ten te ,•revêtu e d e la sanction ju d ic ia ire , v é r ifié e , h om o
lo gu ée , dev/enWe' loi , soit annullée par les m êmes
cours qui
1ont
enregistree.
■
L ’autorité ro yale et .celle des parlem ens n’ont pas
hon te de se rétra cte r'e t de reculer devant la simple
�'
(a a -)
_
'
apposition d’un particulier , que dis-je, elles procla
m ent ce droit donné contr’elles au dernier des indi
vidus , et s’en font un titre de gloire.
E t si cela était ainsi sous la m o n arch ie, à plus forte
ra iso n , cela doit être sous notre G ouvernem ent plus
lib re et plus populaire.
A in si d o n c, si cet arrêté était une lettre p a ten te, il
d evrait etre écarté comme obreptice et conti'aire au
d roit politique et civil.
Il d evrait encore être annullé conform ém ent aux
articles 5 , 6 et 7 de l’édit de 17 4 9 , qui prononcent
la n ullité en cas d’inobservation des form alités qu’ils
prescrivent.
M ais le T ribun al n ’aura point cette p e in e , car cet
arrêté n ’est point dans l’e s p è c e , ce que devraient être
des lettres patentes ; et cela ' résulte de ce q u ’il n e
p e u t recevo ir les form alités nécessaires pour leur vali
d ité , de ce qu’il ne peut d even ir la base d ’un grand
p r o c è s , magni processûs , de ce qu’il n’est point destin é
à d even ir une l o i , com m e des lettres patentes enrér
gistrées , de ce qu ’il n’est q u ’ un acte de simple admir
n is tra tio n , un acte qui autorise à re c e v o ir , et régie
l ’e m p lo i, en cas que l’on reçoive.
Q u e le T rib u n a l se rassure , il n’aura point à com
battre cet arrêté , car il ne raisonne que condition-?
�C 25 )
nellem ent / et dans là supposition d e la valid ité dti
legs ; car il ne tou ch e p oin t au fond de la q u estio n ,
qui de droit est rem ise à la décision des T r ib u n a u x ,
e t sur laquelle le G o u vern em en t n’a poin t em piété.
L e Bureau de bienfaisance oppose ensuite l ’article
3
de l ’ édit de 1749 et de la déclaration de 1 7 7 4 , qui
dispense certaines fondations de la form alité des lettres
patentes^
Il est v r a i, mais cet article ne parle que des fon
dations particulières >fa ite s à des Corps duement autorisés :
o r , d ’un côté * l’œ u vre de la m iséricorde n’était pas
a u to ris é e , de l ’a u t r e , la fondation n’était point parti
culière , c’est-à-dire in dividu elle , ou relative seulem ent
à quelques individus*
D e p lu s , cet' article im pose la form alité de l’hornolo g a tio n , et ici il n’y en a pas rla .d e m a n d e en d éli -5
vrance du legs ne p e u t e n tenir lie u y c a r on ne procède^
pas devant urfe cour s u p é r i e u r e o n ne .procède pasdans les form es nécessaires pour hom ologuer. -
.•
A in si le Bureau de bien faisance né rapporte pas de
lettres patentes qui ratifien t la fondation ; cette fon
dation et le C orps sur leq u el on a fondé ne s o n t point
dans les exceptions portées par l’article
3
;
quand'
on le su pposerait , il n ’y pas eu hom ologation com m e
�.
• ..................................................C ' ¿4 )
.
_
il est prescrit, à peine de n u llité ; ainsi q u ’on pou rrait
le prouver.
'
D ’ailleurs la disposition fût-elle revêtue des form a
lités req u sies , le Corps n’étant pas approuvé , e lle
est absolum ent nulle,
■ ' •
'
L e legs est-il fait en biens dont il soit permis d e
disposer en faveur des gens de main-morte ?
L ’article 14 de l’édit de 1749 défend aux gens d e
m ain-morte d’a c q u é rir, p o sséd er, recevoir à l ’avenir
aucuns immeubles , rentes
fo n ciè re s, droits réels ,
rentes constituées sur les p a rticu liers, sans avoir au
paravant obtenu des lettres patentes pour l’amortis
* isement.
L e s articles i 5 e t
’
16 éten den t la disposition aux
fonds , droits r é e ls , e t rentes réputés m eubles par les
coutm ues et statuts , aux acquisitions , échanges ,
v e n te s , e t c ., donnations simples ou à charge de fonda
tion , etc. e t c ., à titre gratuit ou onéreux.
L ?article 17 défend à l’avenir toutes dispositions de
d ern ière vo lo n té pour donner au*: gens de main-morte
des biens de la qualité m arquée par l’article 14 , quand
m êm e elles seraient faites à la charge d’obtenir des
lettres patentes , QP
lieu d,e donner directem ent
des
�( 25)
des biens fonds aux gens de m ain-m orte , celui qui lés
aurait donnés, aurait ordonné quils seraient yendiis ou
régis par d’autres , pour leur en remettre le prix ou les
revenus.
C e t article com m e on v o i t , contient deu x parties ,
l ’une prononce la n ullité des dispositions de der
nière volon té qui donneraient aux gens de main-morte
•des im m eu b les, et autres biens désignés par l’art. 14L ’autre assim ile aux dispositions prohibées d’im
m eubles e t c ., celles par lesquelles le testateur aurait
ordonné que les biens seraient vendus ou régis par
un tiers , ch argé de rem ettre au C orp s institué , ou
légataire , le prix desdits biens vendus ou des revenus
perçus.
,
L e s arrêts appliquent rigoureusem ent la seconde
partie de cet article. L e s Parlem ens ont pensé en fait,
q u ’il était de leur d evo ir de rejeter et de p réven ir tous
les m oyens -détournés , toutes les fraudes par les
quelles on ch erch erait à éluder
les dispositions d e
l ’édit i y49 y ds ont pensé en d ro it, que dans ces c a s , le
p rix représentant la chose vendu e , devait être sujet
à la rigueu r de l’article.
•
" A in si un arrêt de i 755 déclare nulles , quant aux
im m eu b les, les dispositions d ’un h u issier.d e Y itr i ,
par lesquelles il avait lég u é tous ses biens à l’hôpital
4
�f c a G ) ..................................................
de cette- ville. L e testateur avait a jo u té , si la dis
position est contraire à l ’éd it de 1749 , je charge m on
exécu teu r testam entaire de vendre tous mes biens
fonds et c o n tra ts, pour le prix en être em ployé en.,
rentes , dont il soit permis de disposer en faveur des>
gens de m ain-m orte.
,
L e C u ré de B ern euil lègue à sa fabrique 12,000 'a
prendre chez des tiers où ils sont d ép osée C eu x -ci
avaien t aliéné les sommes , et en avaient donné deu x
reconnaissances, portant prom esse de passer contrat :
au bas de chacune de ces recon n aissances, le C u r é
dresse un co d icile par lequel il les lègu e à- sa fabrique.
L a cause était favorable , la promesse de* passer con‘ trat avait été
ignorée du m aître , elle n ’avait point
eu d ’effet ; la fabrique arguait encore des dispositions
de la déclaration
de 1762
enregistrée et exécu tée
d an s. les autres p arlem en s, mais non. encore dans celui
d e Paris ; cependant arrêt de
codicilles.
.
i 764 qui casse les
L a /dame C oqu etariat lègu e à la fab riqu e d’ A illan t
3,40° , pour faire un fond destiné à l ’entretien d ’un
vicaire : de cette somme 1,000 doivent être pris sur
ses m eubles , et
2 ,4 ° °
sur ses inimeubles . . . . co n
testation'. . . L a fabrique disait qu’on ne lui avait légu é
qu’une somme p é cu n ia ire , qu’on n’avait pas rappelle
�.
C 27 5
,
.
les im m eu b les, pour ordonner q u ’ ils seraient ven d u s,
maïs seulem ent pour fixer la part contributoire des
divers h éritiers , car la testatrice avait des héritiers
de m e u b le s, e t des héritiers d ’immeubles. A rrê t des
1764 qui casse le legs pour la partie qui doit être
prise sur les im m eubles.
- V o y o n s si le legs dont s’agit est dans l ’e s p è c e , et
s’il est aussi favorable.
„
L a dame G a lieu a fait trois classes de legs. C e u x
de la prem ière classe d oiven t être acquittés dans l’an
du décès , pour ceu x de la seconde , l ’exécuteur tes
tam entaire chargé de les p a y e r , ne pourra être pressé ,
de sorte qu’il pouvait retarder la délivrance du legs
jusqu’au dernier m om ent de l’exécution.
. P ou r le payem ent de ces l e g s , elle ordonne qu’aprèsson décès on ven d e ses m eubles. M ais le prix qui
pouvait en p roven ir ne d evait pas suffire, il était visible
q u ’il serait absorbé par ces legs exigibles dans l’an du
décès de la testatrice. E lle a donc voulu qu’ils fussent
payés avec c e prix q u’ils d evaien t a b so rb er; quant
aux legs de la seconde classe non
exigibles , elle a
donc su q u ’ils ne p o u vaien t être payés avec le prix
d ’un m obilier déjà absorbé ; elle a donc voulu q u’ils
fussent payés avec le prix des im m eubles v en d u s, et
des revenus perçus.
.
*
�\
( 28 )
C e la est m an ifeste, quant on se rappelle qu’elle veuf;
d ’un c ô t é , que l’exécu teu r testam entaire ne puisse être
pressé pour l’acquit de ces legs, et de l’autre , qu’il n e
puisse être pressé pour vendre.
E lle
v eu t qu’il n e
puisse être pressé d’acquitter les l e g s , parce qu’il nep eut être pressé de vendre et réciproquem ent ; d e
sorte q u e , comme nous l ’avons d éjà d it , il peut re
tarder jusqu’aux derniers m om ens d e l’e x é c u tio n , e t
la ven te des im m eubles, et l’acquit des legs. C e s
d eu x volontés se correspondent.
D o n c la dame G alieu a sçu que son legs ne pour
rait être acquitté qu’avec le prix des- im m eubles et
des revenus , donc elle a vou lu qu’il le f u t , donc
elle a légu é le prix d’im m eubles à ven dre et de re
venus à p e r c e v o ir , donc la disposition est dans le
cas prévu par l’art. 17 de l’édit d e 17 4 9 , donc au x .
termes de cet article elle est nulle. C e la est aussi évi
d e n t qu’une proposition dé m athém atiques, v
L ’article 9 de la, déclaration d e 1762 ou 1774
vo u lan t favoriser les H ôpitaux et autres établissemens
de c h a r ité , leu r perm et de recevo ir des im m eubles,
dérogean t à.cet égard à 1 art. 17 de
1édit
1 749> qui p ro
nonce la n ullité des actes de dernière v o lo n té , par
lesquels il leur en serait légué.
\
�0 * 0
O n observera d ’ab ord , q u ’il n ’est d érogé à l’art. 17
d e l ’édit
1749 que pour la partie qui prononce la
nullité r mais non pour la partie qui assimile aux dis
positions de biens fo n d s, celles qui ordonneraient que
-
des im m eubles seront ven dus , ou le reven u perçu par
des tiers , pour le prix en être rendu aux C orps lé
gataires. Ainsi- cette partie de l’art, étant m aintenue ,
les héritiers d e ceux qui auront ainsi lé g u é , devront
être traités com m e les héritiers de ceux qui auraient pu
rem ent légu é des im m eubles. A in si aux term es des art.
suivans et notam m ent du i 3 / ( déclaration de 1762
o u i 774 ) le sieur C a p elle aurait le droit d’offrir en
rentes sur FEtat f le payem ent des 80,000 qui devaient
être acquittés avec le produit des im m eubles à v e n
dre , et des revenus à percevoir.
Il est vrai que l’art, X I o b lig e les h éritiers qui
profiteront de cette faculté , à retirer les im m eubles
dans l’année de l’o u vertu re de la succession. M ais le
sieur C a p elle ne p ou vait être ten u de retirer le prix
considéré ici com m e d ’im m euble légu é , puisqu’il ne
,
i
l’a pas fourni ; il a fait plus que le r e t ir e r , puisqu’il
la retenu.
>
1
■
M ainten an t, ces articles ne sont poin t applicables à
un C orps non approuvé , et nous n e sommes entrés
;
dans ces détails q ue pour prouver de plus en plus la
'i
m ilit é du legs,
•
(
•
�/
■
.
.
Ç
5o
) _________
.
'
Q uels sont enfin les term es dans lesquels on a ’légu é?
O utre la clause de retour exprim ée dans l’acte ,
e x pressis verbis , il est une condition réso lu to ire, qui
résulte des ternies darçs lesquels on a légué.
L e legs est fait aux pauvres que l’ æuyre a coutumç
d ’assister, c ’est-à-dire aux pauvres que l ’œ uvre c h o isit,
d on t le choix est laissé 3 son
pouvait la gêner.
arbitre j car rien ne
O r il est de principe général que quand un arbi
trage , un droit d ’élection sont laissés à un tiers , lui,
seul peut arbitrer et choisir ; que s’il ne le peut , ou
ne le v e u t , la stipulation tom be.
L a L.
43
de verb. ob. , après l’avoir expressém ent
d écid é , dit : «
magis
probandum
est à personâ ,
non esse recedendum cui arbitriurn confertum est. »
L a L . 44 ajoute : « si non arbitretur stipulatio non
v a le t , adeo ut si pœ na adjecta s i t , ne ipsa quidem
pœ na commitatur. »
C e principe ainsi exposé au titre général des o b li
gations , est répété au titre de chaque obligation par
ticu lière , v o ir ceux de contrah. empt, au c o d e , pro
socio : de locat. e tc ., etc., de hæred. inst. de légat,
etc. , etc. , etc. ,
L a loi multa de cond. et démonst. pose , le cas
où un h éritier ou légataire a été chargé d’é le v e r un
�(
3.
)
_
_tom beau sur les plans d ’un tiers , e t elle dit : « si
cujus arbitrium est, non v iv a t, v e l adesse rei non possit,
v e l arbitrari n o lit, m u lta n o n com m ititur ab hæ rede. »
L a peine , la d éch éan ce portée par le testam ent n ’est
pas encourue , pourquoi ? parce que l’obligation est
tom bée.
Ici l ’h éritier était chargé de donner 80,000 pour
.être em ployés suivant l ’arbitrage des pieuses dames
com posant- l’O E u vre de la m iséricorde , en d’autres
term es pour être em ployés à l'assistance des pauvres
q u’elle a coutume d’assister. L a
congrégation n ’existe
p lu s , on ne peut savoir quels sont ceux qu’elle aurait
choisis , car ce n’est pas la gén éralité des pauvres
qu’elle a ssista it, puisqu’elle n ’était point hospice g é
n éral, c ’étaient des pauvres choisis dans la gén éralité :
ce n’est pas à la gén éralité des pauvres que la dam e
G a lieu avait lé g u é , mais
seulem ent à ceu x choisis
dans cette généralité.
, .
•
t
E h b ie n , la C o n g rég a tio n chargéé d’a r b itr e r , de
choisir, la C o n grégatio n qui d evait fournir le plan sui
van t leq u el le monument aumônier devait être é le v é ,
n ’existe plus. « N o n a d e s t, non v i v i t , non potest
arbitrari » donc « stipulatio ( legatum ) non valet. «
.
L e Bureau de bienfaisance oppose à cela qu’il repré
sente l’œ uvre. N ous avons prouvé que cela n’était pas
�■
.
(3 0
^
'
.
p o ssib le , et dans un m om ent nous ajouterons à la
preuve donnée ;
mais
en a tte n d a n t, supposons-le
puisqu’il le veut.
« N o n recedendum est à personâ cui arbitrium
con fertu m est. » L e droit d’é le c tio n , d’arbitrage étant,
fondé sur la con fian ce, est p e rso n n e l, coinm e elle :
c e d roit donné à l’œ uvre ne peut passer au C orps
qui la rep résen te, non plus que celui donné à un in
d ivid u ne peut passer à son h éritier ; aussi les lois ne
distinguent p o in t , elles prononcent absolum ent : celle
d e obligat. dit « stipulatio non valet » , et la loi m u lta ,
avan t de prononcer , « m ulta non com m ittetur » n’exa
m ine pas si l ’architecte a laissé des héritiers , pu plutôt
îles élèves qui aient pris son g e n re , son faire, son style.
D o n c de d ro it l’a rb itra g e, l ’élection sont person
n e ls , >et cel^i est juste : car cjui^sait si M e. G a lie u ,
lié e avec M e. de Fontanges , n ’était pas dans le secret
de ses coutumes ,, de ses choix ; qui sait m êm e si elle
ne lui avait pas fait des recom m andations particulières
e t verbales.
E t cela est d’un grand poids dans la cause ; car en
m atière d ’aum ône, et de legs p ie , les recom m andations
verbales sont adjnises et exécutées contre la lettre du
te sta m en t, sur la déclaration de l'exécu teu r testa
m entaire ou du fiduciaire.T ém o in
�.
.
c 53 )
,
: T é m o in u n arrêt du parlem ent de P aris, du 2 août:
1 7 3 4 , dont voiei l’espèce : 1\ 1. D e v a u x , chanoine à
Chartres fait son testam en t, après quelques disposi
tions pieuses , il ordonne que le restant de ses biens
sera em ployé au soulagem ent des pauvres. 11 nomm e
ensuite un exécuteur testam entaire. L e Bureau de
l’hôpital de C hartres réclam e le legs j com m e fait à
l’hôpital ; l?exécuteur testam entaire conteste , et pré
tend avoir des recom m andations particulières et v e r
bales en faveur des jeunes étudians : arrêt au profit
de l’exécuteur testam entaire.
■
. Mais la disposition de la testatrice a corroboré celle
du d roit; en e f f e t , elle a ordonné que le legs ferait
retour à l’h éritier aussi-tôt qu’il ne serait plus adm i
nistré par l’O E u v re , aussi-tôt qu’elle serait réunie à
l’ h ôp ita l, ou à tout autre hôpital ; N ous ' reviendrons
bientôt sur le sens de cette c la u s e , qui dans la cause
est profond et décisif. *
M ais le B ureau de
C o rp s que l’O Euvre ?
"
bienfaisance est-il le m êm è
Q u ’est-ce qui établit l’m dentité d ’un C orps ?
C ’est i°. sa continuation par des m embres indi
viduellem ent aggrégés , et non par un nouveau C orps
.qui le rem placerait brusquem ent , ce qui exclud
tou te id é e de continuation.
5
�\
C 54 p
,
C ’est 2°, l’id en tité de principes de régies , enfin d e
tout ce qui forme l’esprit d’un C orps.
O r , y a -t-il id en tité à cet égard entre l’O E uvre e t '
le B ureau de bienfaisance. Rendant égalem ent ju s tic e ,
e t applaudissant égalem ent aux principes des hom m es
bienfaisans qui le co m p o sen t, et des pieuses dames
qui adm inistraient l’œ u v r e , j’oserai cependant dire
q u ’il n ’y a pas id e n tité , et là-dessus j’en appellerai
à la conscience de tout homme qui ne sera ni en têté
ni prévenu. J ’ajouterai en preuve , que M e. de Foritange exerce et continue de son côté les œ uvres de
la m iséricorde. Si ses principes étaient les m êmes que
ceu x du Bureau , ne viendrait-elle pas se placer à leur
.
tête ou parmi e u x , e t joindre des e ffo rts, qui réunis ,
•
seraient plus heureux.
•
E lle ne le fait pas , et si elle voulait le faire elle ne
serait pas reçue : de sorte que 'ce C o r p s , qui se prétend
le même que celui de l’œ u v r e , rejetterait la S u p é^ rieure de l’œ uvre.
'
Il y a p lu s , le G ouvern em ent n’a pas voulu que les
C orps qu’il créait eussent les mêmes règles , les mêmes
p rin cip e s, le même esprit q u e ceu x qu i étaient dé
/
/
truits. S ’il l ’avait v o u lu , il les aurait ré ta b lis, comme
■. «
il a rétabli les herm ites du M ont St. Bernard , ou tout
au m oins il aurait com posé les nouveaux C orps des
débris des anciens ; s’il ne voulait pas de femmes , il
ne m anquait pas d ’hommes élevés dans ces institutions.
�(
35)
O r il rie Fa pas f a it , et dans tous les B u reau* de
bienfaisance de la R épublique , il n 'y a peut-être pas
un seul in divid u ayant appartenu à ces C orps ; du
moins il y en a très-peu. D o n c , etc.
L e Bureau de bienfaisance oppose qu’ il a été appelle
à représenter l’œ uvre. Pour l ’é tab lir, il allègue qu’il
est institué pour le m ême ob jet ; s a v o ir, pour l’assis
tance des p a u v re s, et la distribution des secours à
dom icile.
•
Mais de droit un corps ne représente pas tous les
corps institués pour le m êm e o b je t; de d r o it , il n’est
pas le m êm e , sans quoi il faudrait dire que l’œ u vre
représentait les F illes et les P ères de la ch a rité, etc. etc.
D e d r o it , un corps ne représente pas et n ’est pas
l ’h éritier de tous les c o rp s, q u i, institués pour le m êm e
o b je t, viennent à p é r ir , à plu$ forte raison de ceux'
qui ont, péri avant qu’il/ existasse«!?-»
S i’ le Bureau de bienfaisance était aujourd’hui d é
claré l’h éritier de l ’œ u v r e , d em ain , par la force des
m em es p rin cip es, il pourrait dem ander à être d éclaré
l’héritier des T em pliers ou de toute autre institution
du même g e n re , qui aurait péri m ille ans avan t lui.
E n fin , il est des corps com m e des in d iv id u s, on
n’a jamais prétendu que ceux-ci fussent de la m êm e
famille et fussent appellés à se représenter et à se suc
céd er , parce qu’ils exerçaient la m êm e profession.
�C 36)
.
A in si donc le legs doit faire retour à l’h érilier par
l ’effet et l’événem ent de la condition résolutoire ta
citem ent exprim ée par ces mots : les pauvres que Vœuvre
a coutume d’assister.
Exam inons m aintenant quel d o it être l’effet de la
condition résolutoire expressém ent énoncée dans la
clause qui suit. '
'
« E t au cas que l’œ uvre d e l à m iséricorde vin t à,
être réunie à l’H ôpital général , ou à tout autre hôpital,
je veu x que le legs fasse retour à mon héritier. »
L a condition a eu lieu , puisqu’il y a eu confusion
des C orps e t des biens.
-
11 y
a eu confusion des C o r p s , car toutes les insti
tutions aumônières de F ran ce ont été réduites à une
seule e s p è c e , qui les a toutes rem p lacées, savoir le s
hospices généraux.
Il y a eu confusion de biens , elle s’est op érée
dans la main de la N ation , qui s’en est em parée ;
tém oin entre autres lois celle du 19 mars 1 7 9 3 , qui
ordonne q u e les biens des hôpitaux , ceux des d o tâtions e t donations en faveur des p a u v re s, seront
vendus com m e nationaux : la N ation par ces 'lois'
et autres , a délaré l ’assistance des pauvres , dette na
tionale , et s’en est chargée : ainsi d o n c , comme 011
l ’a d i t , elle est devenue le véritable h ôp ital, l ’hôpital
universel d e l’em pire ; et les hôpitaux qui son t restés,
»
�..
.
.
.
.
.
n’ étant plus propnétaire's èt iridépéndans , n’ont été
que l’a g e n t, et l’interm édiaire par leq u el cet hôpital
universel exerçait l ’hospitalité.
M ais dit-on , il n’y à plus co n fu sio n , et de nouveaux
C orps ont été établis ; c’est parce
que de nouveaux
C orps ont été établis , que la confusion des anciens
n ’a pas c e ssé , et qu’elle dure encore ; quand il n’y aurait
plus confusion , qu’ im porte ? le droit du légataire
n ’en a pas moins été résolu , le legs n’en a pas moins
_ dès l ’instant fait retour à l ’h é ritie r, tout n’en est pas
moins consom m é.
A u re ste , je vais plus lo in , je soutiens que les rapports,
que le B ureau de bienfaisance nous dit exister entré
l’œ uvre e t l u i , sont une preuve que la condition
prévue est a rriv ée , et que l’événem ent dont i l s’a g i t ,
sa v o ir la réunion , a eu lieu en sa faveur : je le prouve.
t )
E n cas de réunion de deux C o r p s , qu’est le.
C orps auquel on r é u n it ,
par rapport à celui qui
est réuni ? il h érite de ses droits , il lui est substitué ,
il le rem place , il le représente.
O r , le Bureau de bienfaisance ne cessé de répéter
qu’il hérite des droits de l’oeüvre , qu’il lui ést subs
titué , qu’il la rem place , qu’il la représente ; c’est ëri
vertu de ce prétendu titré qu’il ftg it, qu’il deiiiandé»
D o n c , etc.
�. c 38}
' Q uand la tentatrice a é c r it, au cas que l’oeuvre
vin t à être réunie à l ’hôpital général , ou à tout autre
h ô p ita l , c’est com m e si elle avait é c r it , au cas que
l ’hôpital g é n é r a l, ou tout autre hôpital vienne à rem
placer et à représenter l’œ uvre.
M ais pourquoi a -t-elle dit l ’hôpital g é n é r a l, ou touf,
autre h ô p ita l, parce qu’elle a vo u lu s’énoncer d’une
m anière g é n é r a le , qui put em brasser toutes les insti
tutions de ce genre -, et cela était conséquent à la
clause dont nous avons parlé plus h a u t, par laquelle
elle léguait exclusivem ent à l’œ uvre de la m iséricorde ,
e t rejetait tout autre C orps çle ce genre , tou t autre
institution aumônière, charitable , pitoyable , pour nous
servir des term es des anciennes chartes.
^
O r , .on ne peut douter que le Bureau de bien^faisance^sôit
une institution aum ônière , pitoyable ,
charitable , donc il est compris dans
l’expression :
thôpital général ou tout autre hôpital.
' D o n c les rapports qui le lient à l’œ u vre de la mi
séricorde , et dont il prétend tirer son d r o it, sont une
preuve qu’ il n’en a pas : donc le titre auquel il d e
m ande , prouve qu’ il n’a point de titre pour „demander.
M ais enfin qui lui aurait donné les droits qu’il
vien t exercer ici ? de qui tient-il sa mission ? ce n’est
que du G ouvern em en t ; or le G ouvernem ent n’avait
point de d roit au legs dont s’agit ; donc il n’a pu
^Jui en donner.
�J
( 3<)'5
Com m e cette partie de l ’affaire est non pas la plus
contraire aux ad versaires, car les autres ne le sont
pas moins , mais celle où l’injustice de leu r dem ande
frappe le plus ceux qui n 'on t aucune connaissance du
d r o it; c’est sur ee p o in t, que pour en imposer au
public , ils ont entassé les sophismes.
C ’est là leu r dernier r e fu g e , c’est là
que nous^
allons les forcer:
O n a d ’abord opposé que toute'clause résolutoire
apposée à un legs pie était im m orale, et partant nulle.
L ’argum ent est n e u f : c ’est la prem ière fois qu’on
l’avance , faisons en sorte' que ce soit la dernière.
C e tte proposition est à contre sens de la raison et
des lois.
E n e ffe t, une condition réso lu to ire ou n égative n e
peut être im m orale, q u’autant que l’obligation qu’elle
r é s o u t, est com m andée par les m œurs
lois : telle serait la condition
ou par les
résolutoire de l’ob li
gation de payer les im pôts, ou de nourrir son. père
pauvre.
.
Mais quand l’obligation n’est pas recom m andée par
les mœurs ou par les l o is , la condition qui la résout
ne peut pécher con tr’clles.
C elui qui a la puissance et le droit de ne pas fa ire,
a bien la puissance et le droit de ne faire qu’à m o itié ,
en tel cas , en tel te m p s, en un m o t , de ne faire que--
l
�C
conditionnellem ent. E t
4o
> ‘
la D am é
.
G alieu,, qui avait
incontestablem ent le droit de ne pas: d o n n e r, avait
bien aussi celui de ne donner que souis les conditions
im plicites et explicites dont nous avons parlé. •
L e s lois n e sont pas moins! formelles- ; nous en ' ci
terons une dans- l’espèce , d ’une fondation 'de- jeux
funèbres.
O n sait que ces jeux étaient dans l’im tiquité ce que
sont dé nos jours les oraisons- fu n è b re s, les prières ,
les m esses; la différence est que les anciens appelaient
autour du tom beau, l’am bition avec ses jeux , ses tu^
mult.es ., ses d ispu tes, ses combats , ses haines et ses
vengeances ; tandis qu’aujourd’hui nous y appelions
l ’indulgence et les bénédictions du C ie l, des réflexions
m orales sur la double nécessité de m ourir et de bien
fa ire , des souvenirs honorables pour celui qui n’est
plus, et des idées consolantes pour ceu x qui sont restés.
H é b ie n , la L . Titius Lucius de anuuis lég a t., pose
l ’espèce qui suit : T itiu s L ucius lègue à la R épublique
une certaine so m m e, à condition que les revenus en
seront em ployés à des jeu x funèbres en son honneur.
E lle d écid e que si la condition n’est pas re m p lie ,
les h éritiers rép éteron t ce qui aura été payé , et retien
d ront ce qui sera du.
L a glose fait plus , elle renvoie à la, loi n de cond.
indeb.
« Si hceres. arbitratu
lib e r t i, m onumentum
,
facere
�.
-
C4 0
.
.
facere jussus, (^testam ento) pecuniali! liberto dederii,
e t is accepta pecunia m onumentmn non faciatt, con
dì tione tenetur. « L a glose décide donc que la R épu
blique est tenue des conditions qui lui sont im posées,
aussi rigoureusem ent que le dernier affranchi.
Il n’y a d ’exception à ces principes que quand les
conditions sont illicites , com m e celles de célébrer
ces jeux dans un em placem ent prohibé par les lois ,
ou quant la condition étant purem ent m o d a le , n e
peut être exercée : alors le testateur est censé avoir
principalem ent v o y lu d o n n e r, et n’avoir fixé le m ode
que secondairem ent.
.
O n trouve des exem ples da.ns le droit romain.
O n a ensuite opposé une loi de 17 9 0 , q u i, à l’égard
des fondations dont la N ation s’est e m p a rée, veu t que
les héritiers du fondateur n e puissent profiter des
clauses de reto u r, apposées dans les actes constitutifs.
L ’argum ent tout m isérable q u ’il e s t , ne prouve
point en faveur de la conséquence des adversaires
qui citent cette l o i , après avoir prétendu que les
clauses de retour apposées dans ces actes étaient im
m orales, et par conséquent nulles.
Si ces clauses étaien t im m orales et nulles , pour
quoi le L égislateu r a - t - i) eu besoin d ’en préven ir
1 effet par une l o i , peut-être odieuse ?
Exam inons m aintenant la loi qu’on nous oppose.
6
�■
(4 0
U n e lo i qui d éroge au droit com m un n e peut être
étendue. Dans c e lle -c i, il ne s’agit que de fondations
d éjà v a lid é e s, d éjà exécutées , dont les biens se trou
vaie n t entre les mains des C orporations supprim ées ,
e t dont la N ation s’était em parée ; mais il n’y est au
cun em ent question de celles dont les biens n e sont ni
saisis ni re m is, qui ne sont poin t exécu tées ni vali
dées , dont le droit est contesté.
T e l est donc le systèm e des m oyens avancés par le
sie u r C apelle.
L e C o rp s n’était point a p p ro u v é , de là une n ullité
a b s o lu e , irréparable.
•
L e C orps étant a p p ro u vé, l’acte de fondation au
rait du être ratifié par des lettres p a te n te s, tou t au
moins par l’hom ologation dans une cour supérieure.
L e s biens donnés n e sont point de la nature de
ceu x dont il est permis de d isp o ser, aux termes de
l’article i 4 d e l ’é d itd e 1749. L e s C orps non approuvés
ne p eu ven t être compris dans les exceptions portées
par les déclarations suivantes.
E n fin , le legs est nul par l ’ événem ent des condi
tions
r é s o lu to ire s , explicitem ent ou im plicitem ent
portées dans le testam ent.
�(43)
Il nous reste m aintenant à répondre à quelques ob
jections détachées.
L ’adversaire a prétendu que le legs pie r é d u it , ne
faisait point retour à l ’h é ritie r, mais devait être em
p lo yé à des usages pieux. '
•
N ous nous contenterons de lui répondre qu’apparamment il n’a pas lu les articles 1 0 , n et 12 de
l ’édit de 1749Q n a blâm é la dem ande et la réclam ation de l ’h é n t i e r , elles ont été représentées com m e l’acte d ’une
avid ité co n d a m n a b le, que les T rib u n au x devaient
s’empresser de flétrir.
.
•
C ertes , telles ne furent point les o p in ion s, tels ne
furent poin t les exem ples de ces homm es illustres
7
.dont le nom sera toujours ch er à la m agistrature , des
D aguesseau , des G ilb e rt de
V o is in s , des Joli de
F le u ry , des S e g u ie r, e t c . , etc. Ils savaient et ils pu
b liaien t que ces dem andes et ces réclam ation s, loin
d ’être répréh en sib les, sont au contraire encouragées
e t recom m andées par le législateur.
•
E n e ffe t, les articles 1 0 , 11 et 1 1 , donnent lé droit
d e réclam er les biens ainsi d o n n és, non seulem ent
�(-4 4 )
aux h éritiers , mais encore aux enfans e t autres h éri
tiers présom ptifs q u i, vivant même le donateur , seront
envoyés en possession ; que s’ils ne veu lent ou n’osent
exercer ce d r o it , la loi de suite et sans a tte n d re , le
rem et au Seign eur dont les biens dépendent ; et si
celui-ci se t a i t , alors les procureurs-généraux. doiven t
en poursuivre la confiscation.
.
L ’article ajoute : il vrai que ces biens ainsi con
fisqués au profit du r o i , seront par lui em ployés en
faveur d’un autre h ô p ita l, au soulagem ent des pau
vres , ou à quelque usage publie.
M ais ce n’est là qu’une mesure p a rticu lière, qui est
étrangère aux principes constitutifs de l’édit ; le prince
écartant toute idée de fiscalité, n’a pas voulu se gorger
de la dépouille des citoyens.
.
Il
a été opposé que l ’intérêt public exigeait que la .
fondation fût acquittée , que tou t devait se taire d e
van t cette considération d ’un ordre su p é rie u r, et on
s’est com plaisam m ent arrêté sur ce t argument.
M ettons ici de côté la se n sib ilité , affection toujours
hon n ête et g é n é re u se , mais qui doit aussi céder à la
raison ; et voyons si l’in térêt public exige que toutes
les lois politiques et civiles d’un E tat soient im m olées
aux prétentions du simple Bureau de bienfaisance.
L ’in térét de l’E t a t , l ’intérêt public , c’est le respect
pour les lois politiques et c iv ile s , et par suite pour
les propriétés.
.
�■
(
45
y
.
C e n’est poin t l ’in térêt d ’un jour , d ’u n e h e u r e ,
d ’un m o m e n t, celui d’un ou de quelques individus.
L a société qui reste , ne considère
ni l’instant qui
s’é c o u le , ni l’hom m e qui passe, et l’un et l’autre ne sont
pour elle qu’un point fu g itif, que le temps absorbe et
d évore : ses jours â elle sont des siècles , ses enfans
sont
des masses entières ,
c’est eux seuls qu’elle
considère quand il s’agit de stipuler ses in té rê ts , et
non quelques individus , qui tour-à-tou'r se présentant
sur son théâtre , n ’y sont que des usufruitiers d’un
instant , pour lesquels tout est viager , tout est m o
m entané dans l ’ordre social.
Mais quel serait enfin le produit de cette grande
mesure , de cette considération d’uu ordre su p érieu r,
à laquelle on veu t , sans h é site r, faire lé sacrifice d ç
tout ce que les N ations d o iven t respecter sous pein e
de vie , des lois de l’E tat et de la propriété.
.
C e t intérêt p u b lic, nous le diron s, n’est autre chose •
d ’un c ô té , que la facilité donnée au G ouvern em ent
d ’économiser' quelques écus , en le
dispensant dé
payer ce qu’il d o n n e , et ce qu’il d oit pour l’assistance
des pauvres ; de l’a u tr e , celle de recevo ir quelque
a rg e n t, parce que le fonds du legs doit être placé
en. rentes sur ¡’Etat.
;
�'
■
c . 46 ?
. , ,
.
E h 'bien ! ce' n’est poin t là l’intérêt public : nous
irons plus lo in ; ce n ’est pas la volonté du G o u v e rn e
m ent ; en douter serait ne pas lui rendre justice.
M alheur donc à cette opinion vaine et dangereuse,
qui renversant les id é e s , place l’intérêt public dans
une économ ie m o m en tan ée, à laquelle il fait céder
toutes les lo is , et appelle des conséquences funestes.
A n ath êm e à ces principes q u i, s’ils étaient connus »se
raien t égalem ent ré p ro u v é s, et par le G o u v ern em e n t,
fier de com m ander à un peuple gén éreu x et lib re , et
par la N ation qui s’applaudit d ’avoir trou vé un C h e f
qui se fait honneur de respecter ses droits.
E n fin , Y on a prétendu que le legs est favorable.
M ais sur quoi donc serait fondée cette fa v e u r ,
serait-ce sur les articles 2 , 3 , 9 ,
10 , 11 , 12 , i 4 ,
i 5 , 16 , 17 , 1 9 , 2 0 , 21 , 1 1 , de l’éd it de 1749»
sur les déclarations qui l’expliquent ? serait-ce sur les
clauses du testam ent ?
S i la faveur n’est qu’une couleur hon nête donnée
à l ’ in ju stice , ah ! sans doute le B ureau de bienfaisance
a d ro it de la réclam er. E t encore sera-t-il difficile ,
se ra -t-il im possible de tro u ver un vernis qui puisse
effacer et cou vrir ia u t de nullités : mais si au con
traire ce m ot exprim e le respect dû à une réclam ation
qui réunit pour elle la force du droit et de l’é q u ité ,
v
�( 4 7
)
.
alors c’est à l’h éritier qu’elle est d u e , car il a pou r lui la
lo i de l’E t a t , qui défend de donner aux C orps non
ap p ro u vés, e t la loi de l’éq u ité qui ne perm et point que
les familles soient dépouillées pour .enrichir des C o r
porations , m êm e des h ôpitaux , parce que la spolia
tion d’une fam ille produit plus de m isé ra b les, que
n ’ en peut soulager l’opu len ce d ’un hôpital. Il a pour
lui la lettre du testam ent. E t si la dam e G alieu ( i )
im prudem m ent évo q u ée par l’adversaire , pou vait un
m om ent sou lever la pierre du sépulchre , et franchir
les barrières de la m ort , son om bre pâle et in d ig n é e ,
ne crierait-elle pas à l’adversaire.
« Pourquoi êtes-vous venu troubler le silence et la
yy paix du to m b ea u , pourquoi m ’avez-vou s appellé ?
55 quare inquietasti me u t suscitarer.'
« M a vo lo n té n’est-elle pas claire, n’est-il pas eviden t
5> que j’ai voulu vous exclure , que vous n’avez pas
55 plus de droits que l’autorité qui vous envoie : pour
quoi donc m ’avez-vous appellé ? quare inquietasti me
55 ut suscitarer. E h bien , je vous ré p o n d ra i, je vous
« dirai que vous-m ême ne cro yez point à la valid ité
« du l e g s , je vous dirai que vous confiant en des
3? circonstances étrangères , vous avez osé mentir à
^ votre co n scien ce; que vous avez espéré séduire les
( ’ ) M. Jullic Avait dans sa plaidoirie '¿vcqnc l’ombre de Udamc 'Galieu.
�.
C 4 8 )
.
.
Juges en leu r proposant de s’associer à la bienfaisance
« d ’un te sta te u r, mais vous vous serez trom pé : vos
Juges savent que le legs est révoqu é , ils savent,
» que leu r d evo ir est de dire rigoureusem ent droit à
» t o u s , et que là où la justice fin it, l ’injustice co m» m ence. »
.
P. S. Le st. Cape|le n’a pu se procurer le testament du sr. Gérauld
Galieu 5 mais il n’en est pas moins vrai qu’il y a eu une substitution.
Au reste , cela est étranger à la question, et c’est par les principes
qu’il faut décider.
Le sr. Capelle a découvert que la quittance dont nous avons parlé
au commencement, est relative à un autre acte que celui rapporté
dans le testament ; il doit à sa loyauté d’en avertir les Juges.
Le citoyen Lamouroux, Président,
Rapporteur du délibéré.
B E R T R A N D , fils.
S E V E R A C , Avoué.
A Saint-Flour, de l'imprimerie de V e. S A R D I N E ,
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum Capelle. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Lamouroux
Bertrand fils
Séverac
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Précis pour le Sieur Capelle, défendeur, contre le Bureau de Bienfaisance de la Ville d'Aurillac, demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Veuve Sardine (Saint-Flour)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1749-1805
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0217
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311_0CR
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53716/BCU_Factums_M0217.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments