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c7e3a251e4012a24d08c3ca083bcd33e
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MEMO
•H*-
POUR
f
/
E lé a z a r d - R o s ta n g - E t ie n n e
D A U D IN ,
propriétaire ;
CONTRE
,
C A P E L L E ci-devant conseiller au
bailliage et siège présidial d’Aurillac ;
F r a n ç o is
EN
D ’A n t o i n e
P R É S E N C E
D ESPRATS
,
E t de dame M a r g u e r i t e SO B R IE R , veuve
de. Jean D a u b i n ,
EU à I38cses méritent autant l’attention de la
cour
Quels que soient les faits qui y ont donné lie u
A
m m
••
s, -— -h»
ÿ-j-
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fir.
Mi
�( 2)
le sieur Daudin ne se permettra aucun écart ; il n’aura
garde d’oublier qu’il plaide contre un ancien magis
trat ; il respectera, dans son adversaire, et la charge
dont il a été revêtu , et le tribunal dont il a été membre.
F A I T S .
: , dont il s’a g it , a appartenu
L e domaine de
Descaffres.
originairement à 3
L e 3 avi’il 1773 > Etienne Descaffres fit son testament,
par leq u el, après différens legs
différens n eveux, il
légua à la dame Sobrier, veuve D audin, sa nièce, tout
son mobilier , et l’usufruit de tous ses immeubles, jus
qu’à la majorité de Daudin son fils, et institua ce der
nier pour son héritier général et universel ; et attendu,
est-il dit, que l’héritier ne peut actuellement recueillir
l’hérédité , le testateur nomme pour exécutrice testa
mentaire la dame Sobrier, à laquelle, est-il ajouté, il
donne plein et entier pouvoir de vendre ou délaisser
des biens immeubles de son hérédité pour le payement
des legs et des dettes passives.
L e premier mars 1782 , la dame Sobrier, veuve D audin , simple usufruitière, a vendu au sieur Capelle le
domaine de V e r n e t, dépendant de la succession. C’est
ce domaine que fait l’objet de la contestation.
Rien de plus simple que les termes de la vente. La
dame veuve Daudin vend purement et simplement, en
son nom et comme chose à elle appartei
vec toute
garantie, ce domaine, moyennant la somme
j. i 600 fr .,
dont le contrat porte quittance.
�(3)
Mais comment cette vente a - t - e l l e étc consentie?
C ’est ce qui reste à développer; ce qu’il a fallu enfia
dévoiler, puisque Capolle en a imposé la nécessité. , , ■
L e jeune D au d in , héritier institu é , âgé alors seule- *
ment de 19 ans, avoit conçu__la^passion la plus violente j
pour celle qui est aujourd’hui son épouse.» Cette p a s - •
sion fut encore irritée par l’opposition d’une mère ,
qui ne désiroit pas voir sitôt l’établissement de son,
fils. Il résolut de vaincre tous lqft..obstacles , et de con
tracter, en pays étranger, un mariage auquel il ne
voyoit point de possibilité en France. Pour exécuter
ce projet, il falloit des ressources pécuniaires : il s’adressa __
au sieur Capelle.
'Xe hasard lVvoit mieux servi qu’il ne pouvoit espérer.
L a dame veuve D aud in , dans un moment où ses infir
mités ne lui permettoient pas d’a g ir, pleine de con
fiance dans un fils unique qu’elle aimoit aveuglém ent,
lui avoit confié des signatures en blanc. M uni de ces
signatures, ïl en fit confidence au sieur Capelle , et lui
proposa en môme temps de lui vendre le domaine de
V e rn e t, domaine contigu à une autre de ses propriétés,
et par conséquent singulièrement à sa bienséance.
Capelle n’eut garde de laisser échapper une si belle
occasion.
Il fut d’abord incertain s’il prendroit un acte de locaterie perpétuelle pour éviter le droit de lods , ou s’il
prendroit un acte de vente : il s’arrêta à ce dernier parti.
O n fut bientôt d’accord sur le prix ; C apelle le fixa
lui-meme à* 13800 f i\ , cheptel et grains tout com pris.
A a
�C'4 )
' Mais commènt; rédiger l’acte- de vente ?
j II ne pouvoit acheter du fils, parce qu’il étoit mineur.
L a mère avo it, à la v é r ité , pouvoir par le testament
de vendre ; mais le pouvoir n’étoit donné qu’à la charge
de l’emploi.
Î
/’ Capelle ne trouva d’autre expédient, que de faire
/ consentir la vente purement et simplement par la m ère,
et en son nom.
Ce point arrêté, il ¿élibéra s’il prendroit une vente
sous seing p r iv é , à l’aîde d’une des signatures en blanc.
Il y trouva trop d’inconvéniens ; la vente sous seing privé
.ne lui donnoit ni hypothèque ni date contre des tiers.
Il pensa qu’il ne pouvoit contracter avec sûreté que
par acte devant notaire.
Mais ici même les obstacles augmentoient. Comment
parvenir à une vente pardevant notaire ? Il falloit que
1a mère comparût elle-même. On ne pouvoit la sup
pléer par l’inteçposjtion^d’une autre personne : les suites
en auroient été trop dangereuses. On n e'p ouvoit la
suppléer non plus par les signatures en blanc ; le notaire
ne s’y seroit pas prêté. Il falloit donc que la mère se
présentât. Maisïcomment l’y déterminer ? Comment la
déterminer à vendre ce qu’elle savoit ne pas lui appar
tenir? à vendre 13800 fr. , cheptel et grains, un domaine
qui valoit près du double ?
D ’un autre c ô té , la vente, même consentie p a rla
mère en son n o m , pouvoit assurer les deniers, mais
n^ssuroijL Jp^s la propriété : nonobstant cette vente ,
Capelle n’étoit pas moins exposé à j t r c évincé un jour
par le fils. -
�( 5 )
Toutes ces difficultés furent aplanies.
Il fut convenu qu’on feindroit de porter le prix à
une somme beaucoup, plus considérable-, dont le contrat
porteroit quittance ; que Capelle 1er oit des billets ou
lettres de ch ange, pour Pentier montant de la somme
qui seroit énoncée en l’acte de vente : mais qu’en même
temps , et à l’instant de l’açteTle sieur ijaudin remettroit
secrètement une quittance de l’excédant, et qu’il rempliroit à cet eifet une des signatures en blanc étant en
ses mains. A u moyen de cette quittance, Capelle ne demeuroit effectivement oblige que pour 1,3800 fr.
La quittance délivrée , les billets représentatifs de
l’entier prix devoient être remis à la mère , des mains
de laquelle le fils se promettoit bien de les enlever ; ce
qui étoit facile par la confiance sans bornes de la dame*
Daudin , qui n’avoit ricô_dé* reSCT^e ni de secret pour
lui. Les billets enlevés , Capelle devoit les acquitter ju s - ^
qu’à concurrence du prix convenu.
j
Il restoit une dernière précaution. Capelle n’enten- \
doit avancer les deniers qu’autant qu’il auroit la pro
priété incommutable du domaine. Pour se mettre à
l’abri de toutes recherches de la part du fils , il falloit
imaginer encore un moyen.
Ce moyen fut de faire, remettre , avant tout , par
le sieur Daudin ,_une ratilication , avec la date en blan c ,
qu’il rempliroit comme bon lui sembleroit, à l’époque
de la majorité : et comme il étoit encore indécis s’il
prendroit une vente pour un prix fixe et déterminé ,
ou une lôcaterie perpétuelle , il ' la fit générale. Elle est
conçue
» en ces termes ;
•**
�( M
k .Te soussigné approuve et ratifie les actes que ma
« mère a consentis en faveur de M . Capelle , con« seiller , du domaine du Vernct et tout ce qui £n
« dépend , et promet le faire jouir en vrai propriétaire.
« Fait le
Signé Daudin d e là
cc Fabrie. » Il n’est pas indifférent d’observer qu’il n’est
.pas dit , F a it doubla ____
L a date a été.depuis remplie. X>a ratification est rap
portée aujourd’hui , à la date du 21 mars 1788. Il paroît
encore qu’il a été fait des altérations et des surcharges
sur plusieurs lettres du' corps de l’acte.
/ • j L e plan ainsi concerté et préparé , la mère se rendit
/ h Aurillac , et là elle consentit la vente dont il s’agit.
V
Par cette vente , elle vend en son nom , arec pro
messe de garantir , fo u r n ir et f a ir e v a lo ir, au sieur
Capelle , acceptant, J e Jdomajiie de V e r n e t, tel q iiil
se poursuit et com porte, arec les bestiaux et outils
d’agriculture , ensemble , sur la récolte pendante par
racines , la quantité de 5o setiers de blé seigle , et le
quart de ce que la récolte pourra produire en sus des 5o
setiers , moyennantla somme de 21600 f r . , dont le con
tr a t porte quittance. En représentation du pi’ix , Capelle
délivra des billets ou lettres de change fe t'D aü d in , de son
côté , lui remit, en particulier, et à l’insu de la mère, la
quittance conven ue, dont il avoit rempli une des signa
Y
^
tures en blanc.
Il ne s’asîissoit plus que d’enlever les billets ou lettres
de change. DaudîïTn'eut pas de peine i y parvenir ;
e t , au moyen de co , il eüectua le~projet qù’il avoit
�( 7 )
conçu d’aller en Italie contracter l’union dont il faisoît
dépendre son bonheur.
11 partit effectivement le n mai 1782.
L a mère s’aperçut bientôt de l’enlèvement dis effets.
E lle rendit plainte devant le sieur Sistrières , lieute
nant général civil et criminel au ci-devant bailliage
de V ie. Il y eut des témoins entendus. L e fils ayant
ensuite fait la paix avec sa mère . cette procédure n’eut
pas d’autres suites.
E lle fit naîtx*e cependant un autre procès.
L e sieur Sistrières , seigneur ou se prétendant seigneur
du domaine de Y e r n e t, éclairé par l’information sur
le véritable prix de la vente , voulut exercer le retirait
féodal. Capelle craignant que Daudin ne fît une décla
ration contraire à ses intérêts , lui fit parler par un de
ses parens ; et ce fut à cette occasion que celui-ci lui
écrivit la lettre du 10 août 1783 , lettre dont Capelle a
cru pouvoir faire usage , et qu’on transcrira plus bas.
Cette instance a été pareillement terminée à l’amiable
p arun acte du 5 mai 1789 , passé entre le sieur Sistrières
et Capelle. Il paroît que par cet acte Sistrières s’est
départi de sa demande.
Daudin , à l’époque de la vente , étoit, comme on l’a
déjà dit , âgé seulement de 19 ans.
L e temps a amené la réflexion. Il n’a pas tardé à
reconnoitre combien il avoit été lésé , combien on avoit
abusé de son inexpérience.
Après avoir cherché inutilement à terminer a l’amia
ble avec le sieur Capelle, il a pris le parti de céder au
�( 8 )'
sieur Desprats, par acte du 2 vendémiaire an 8 , tous
les droits qu’il pouvoit avoir résultuns du testament
d’Etienne DescaiFres , même les actions rescindantes et
rescisoires, m©yennant le prix convenu entre eux , porté
dans l’acte à la somme de\6ooo fr. seulement , et sous
la condition d’acquitter toutes les dettes et charges de
la succession. Par -une clause particulière , il est dit qu’il
demeure convenu que Desprats pourra agir et exercer
les droits et actions cédés, au nom du cédant;.à l’effet de
quoi le présent acte lui tiendra lieu de procuration pour
intenter audit nom toutes demandes , sans que ladite
procuration puisse être révoquée par le vendeur, comme
faisant partie de l’acte.
Cette vente et cession a été enregistrée le même jour,
2 vendémiaire , et transcrite au bureau des hypothèques
le i 5 du même mois,
En cédant ses droits , le sieur Daudin croyoit se
rédimer de tout procès : on va voir le contraire,
Desprats ne tarda point à agir.
E e 4 du même mois de vendémiaire , et avant la
transcription, il fit citer Capelle, sous le nom de Daudin ,
comme il en avoit le pouvoir par l’acte , en conciliation
sur la demande qu’il se proposoit de former en désis
tement dudit domaine dont il jouissoit, est-il dit , eu
vertu d’une vente surprise à la dame veuve Daudin,
Capelle comparut sur cette citation, par son fils , qui
répondit qu’il étoit d’autant plus étonnant que Daudin
l’accusât d’avoir usé de surprise, qu’il avoit lui-rinême
approuvé et ratifié la vente,
�( 9 )
L a conciliation n’ayant pas eu lieu , Capelle crut
devoir agir de vitesse. Il actionna, le prem ier, Daudin ,
sous le nom duquel il avoit été cité au bureau de paix ,
devant les juges du tribunal de Saint-Flour, par exploit
du 8 brumaire suivant, pour voir dire qu’il seroit gardé
et maintenu dans la propriété et possession dudit do
maine , se voir faire défenses de l’y tro u b ler, et se voir
condamner aux dépens.
X/e 9 du même m ois, Desprats obtint une nouvelle
cédule du juge de paix. Dans cette cédule , après avoir
rappelé la cession qui lui avoit été consentie par Daudin ,
il exposa qu’il avoit été convenu par ledit acte qu’il
pourroit agir au nom de son cédant, à l’effet de quoi
l’acte lui tiendroit lieu de procuration ; qu’il avoit en
conséquence c ité , sous le nom dudit D aud in , Capelle ;
mais que celui-ci ayant excipé d’une prétendue ratifica
tion , qui pouvoit faire naître des discussions entre e u x ,
il entendoit agir en son n om , et se subroger aux pour
suites encommencées.
La conciliation ne réussit pas plus cette seconde fois
que la première.
L e procès verbal de non-conciliation est du 16 bru
maire. Dès le lendemain .17 , Desprats fit assigner Capelle
au tribunal civil de Saint-Flour, et conclut par l’assigna
tion au désistement du domaine, avec restitution des jouis
sances et dégradations depuis l’indue détention.
L e i 5 floréal, jugement contradictoire intervint, qui,
sans préjudice du droit et des moyens r e s p e c tifs des par
ties , ordonna , avant faire d r o it, que dans la décade
Capelle seroit tenu do déposer au greffe du tribunal civil
B
�( 10 )
Ja ratification du contrat de vente consentie'par D audin,
dont il avoit excipé à l’audience , sinon qu’il seroit fait
droit.
Capelle ne se pressa pas d’exécuter le jugement.
Les tribunaux civils ayant bientôt après cessé d’être
en activité, Daudin le fit assigner, par exploit du 23
thermidor an 8 , au tribunal d’arrondissement d’A u rillac , p o u r, faute par lui d’avoir déposé la ratification
soit au greffe du tribunal civil de S ain t-F lo u r, soit à
celui du tribunal d’Aui'illae, conformément au jugement
rendu entre les parties, se voir condamner à se désister
du domaine, avec restitution des jouissances et des dé
gradations, à compter de l’indue détention ; sauf, est-il
d i t , audit D au d in , à s’arranger avec celui auquel il
avoit vendu ses droits, c’est-à-dire, avec Desprats.
Par le môme ex p lo it, il fit citer Desprats pour assister
en la cause , et prendre telles conclusions qu’il aviseroit.
L e 7 fructidor, Capclle prit enfin le parti de dépo
ser l’acte ; il fut dressé procès verbal du dépôt , lors ■
duquel procès verbal, le greffier, qui avoit le plus grand
intérêt, pour ne pas s’exposera être compromis lui-mêm e,
de constater l’état de la pièce, telle qu’elle lui étoit re
m ise, vérifia et constata que dans le corps de l’acte, et
sur plusieurs lettres, il paroissoit qu’on avoit passé la
plume avec nne encre plus noire.
L e 9 vendémiaire an 9, nouvelle citation, aux mêmes .
fins, par Daudin, tant i\ Capelle qu’à Desprats; citation
nécessitée par le rétablissement des avoués.
L e 9 frimaire, demande en recours de Capelle contre
la veuve D audin, demande qui a ensuite été renouve-
�(
II
)
lée par autre citation du 29 messidor an 9 , après avoir
essayé la voie de conciliation ; formalité qui avoit été
omsse lors de la prem ière citation.
L e 25 ventôse an 9 , Capelle a présenté requête à
l ’effet de faire interroger sur faits et articles, et D audin,
et D esprats, et la dame veuve Daudin.
Gomme il a cherché à tirer avantage de ces interro
gatoires , il est nécessaire de les mettre en partie sous
les yeu x du tribunal.
I
n t e r r o g a t o i r e
de
D
a u d i n
.
S’il connoît des dettes actuellement existantes de la
f
succession d’Etienne Descaffres ?
. A répondu en con n oître, sans pou voir dire à quelle
somme elles peuvent se monter.
D ’où provient sa créance sur sa m ère , à raison de
laquelle il lui a fait souscrire des engagemens pour
une somme considérable , par actes des 7 octobre 1790
et 28 novem bre 1792 ?
A répondu que les différens actes souscrits par sa
•mère, en sa faveu r, jusqu’à concurrence de 47 à 48000 fr.,
eurent pour motifs des arrangemens de fam ille, étrangers
au sieur Capcllo.
Pourquoi il n’a vendu que 6000 fr. l’entière succession
de Dosçaiïres ?
A répondu que l ’événem ent de l ’acquisition dont se
chargeoit Desprats étant très-incertain , il n’en voulu t
pas donner une plus forto somme ; que le répondant fut
E 2
�( 12 )
obligé d’accepter à cause des besoins où il étoit en ce
moment, et qu’il seroit inutile de détailler ici.
P ou rqu oi, malgré les ventes consenties par sa m ère,
il n’a pas été payé des sommes qu’elle lui doit?
A répondu que ces ventes n’avoient pour objet que
des arrangemens de fam ille, et que ces ventes n’avoient
pas été faites dans l’intention de les opposer au sieur
Capelle.
Pourquoi il a vendu à Chaunac pour iooo fr. ses
créances m obilières, dont celles sur sa mère montent à
48000 fr. ?
A répondu que c’étoit pour des motifs d’arrangemens de famille, étrangers au sieur Capelle, et au procès
dont il s’agit.
S’il a payé les frais des ventes consenties à Desprats
et à Chaunac ?
. .
A répondu que oui-, mais qu’il avoit fait ces avances
pour leur compte.
Si le 2 vendémiaire an 2 il n’étoit pas créancier
du sieur Desprats d’une somme considérable ?
A répondu que depuis plus de 10 ans il a fait des
affaires avec le sieur Desprats; qu’ils ont été débi
teurs et créanciers mutuels ; mais qu’il ne se rappelle
pas si à cette époque il étoit créancier ou débiteur.
I
n t e r r o g a t o i r e
de
D
e s p r a t s
.
Si h l’époque de la vente qui lui fut consentie par
Daudin , il n’avoit pas connoissance que Capelle avoit
acheté depuis long-temps le domaine de Vernet ?
�C *3 3
À répondu avoir ouï dire que Capelle jouissoit de
ce bien en vertu d’un acte n u l, comme ne l’ayant pas
(acquis du véritable propriétaire.
S’il connoissoit quelques dettes passives de la succes
sion d’Étienne Descaffres ?
A répondu avoir ouï dii-e qu’il y avoit des dettes
passives -, mais qu’il n’en avoit point de connoissance
parfaite.
S’il avoit payé les frais de vente?
A répondu que Daudin en avoit fait les avances, et
qu’il les lui avoit remboursées.
Si ci cette époque il ne devoitpas à Daudin une somme
considérable ?
A répondu qu’il ne lui devoit pas grand’chose ;
qu’ayant des comptes courans avec lui depuis longues
années , et se trouvant tantôt débiteur , tantôt créancier ,
il ne pouvoit fixer de combien il étoit débiteur.
Pourquoi il avoit tardé jusqu’au i 5 vendémiaire à'
faire transcrire la cession ?
A répondu qu’il est libre à tout acquéreur de faire
transcrire quand il le juge à propos.
In t e r r o g a t o ir e
de
la
dame
veuve
D
a u d in
.
P o u rq u o i, à différentes ép oqu es, elle a souscrit des
actes qui la constituent débitrice de son fils de sommes
considérables?
A repondu que c’est pour certains arrangemens et
conventions de famille y dont elle ne doit compte & per
sonne.
�( *4 )
Si elle sait que son fils a vendu à Desprats la suc
cession dont dépend le domaine de Vernet qu’elle vendit
au sieur Capelle le i«1-. mars 1782?
A répondu qu’elle n’a aucune connoissance des affaires
que fait son fils.
Si elle sait qu’il a vendu ses créances mobilières à
Cliaunac ?
A répondu de môme.
Si elle a payé des legs portés au testament d’Ëtienne
Descaifres? si elle a payé des dettes pour la succession de
son mari ?
A répondu que oui,
A quelles sommes peuvent se monter les différens
payemens?
’
' ■
A répondu que les ayant faits à différens termes et
époques, elle n’en a pas conservé la mémoire.
Si Cliaunac lui a fait notifier la vente que son fils lui
a faite de ses créances mobilières?
A répondu que oui,
Pourquoi, après avoir vendu ses biens, elle doit encoro
des sommes considérables à son fils et à d’autres personnes ?
A répondu que les circonstances de la révolution lui
ayant occasioné des dépenses et des sacrifices considé
rables , elles ont absorbé les fon d s, et l’on]; mise dans
l ’ i m p o s s i b i l i t é d’acquitter sa dette,
A la suite de ces interrogatoires, et le 8 floréal an 9 ,
Capell e a présenté une requête contenant ses premières
défenses. Dans cette requête- il commence par rendre
poinpte du testament d étien n e Descaifres. Il rappelle
�( i 5 )
le pouvoir donné par ce testament à la mère de vendre.
11 explique après comment la vente a eu lieu.
« Les le g s , dit-il , ou les dettes reconnues par le
« testament , montant à i 58oo f r . , en ce non compris
« les autres dettes et charges de la succession , tout le
« mobilier étant légué à la veuve >il étoit indispensable
« de vendre des immeubles pour liquider l’hérédité ;
« c’est sans doute ce qui détermina celle-ci à vendre.
« Daudin devoit connoître la destination nécessaire de
« cette vente dont il f u t un des négociateurs. Devenu
« majeur il ratifia volontairement la ven te, par acte du
« 21 mars 1788 ; d’autre part, la veuve Daudin paya
« les legs et dettes d’Etienne Descaffres.
« A u ssi, ajoute-t-il, rassuré par le pouvoir que le
« testament, dont il avoit la connoissance, donnoit à
« la veuve Daudin , par l’emploi utile du prix de la
« vente , et par une ratification que rien ne rendait
« nécessaire, il se croyoit propriétaire irrévocable du
« dom aine, lorsqu’il s’est vu citer en désistement. »
Il expose ¡ensuite que Daudin , Desprats et la veuve
Daudin ont concerté ensemble le projet de lui enlever
une propriété qu’il avoit payée le double de sa valeur;
qu’ ils ont concerté le projet de lui enlever môme tout
espoir et toute ressource de garantie sur les biens de la
dame Daudin , en simulant une infinité d’actes pour
faire disparoître sa fortune.
D e là il passe au récit de la procédure.
Venant aux m oyens, il a soutenu d ’a b o rd que la m ère
avoit pouvoir de vendre , que le testateur avoit pu va
lablement donner ce pouvoir.
�( 16 )
V oîci comment il s’exprime :
a II est constant aujourd’h u i, par le rapport du tes
te tament d’Etienne D escaflïcs, du 3 avril 1773 , que
« le sieur Daudin est son h éritier} et conséquemment
« que le domaine de Vernet lui a appartenu. Mais le
cc même testament ne lui a fait passer la succession que
« sous la condition expresse portant plein et entier pou« voir à la veuve de vendre pour le payement des dettes
« et legs : la clause est conçue uno contextu avec cello
« qui renferme l’institution ; elles sont indivisibles. Ce
« pouvoir , ordinaire dans les testamens, n’a rien de
« contraire ni aux bonnes mœurs, ni aux bonnes lois.
« Les lois i re. et 3e. au Code, Quando decreto opus non
« e s t, le consacrent d’une manière expresse.
« La mère Daudin n’a pas mésusé de ce pouvoir : elle
« vendit 21000 fr. un domaine qui ne valoit que les
« deux tiers; elle fit payer la convenance et la fantai-*
« sie : elle a employé le prix à l’acquit des dettes et
« des legs. »
Il ajoute qu’on le dispensera, sans doute, de rapporter
les quittances des créanciers et légataires : la collusion
de toute la famille Daudin étant trop évidente, pour ne
pas croire qu’on a cherché, par toutes les précautions
imaginables, à lui en derober la connoissance ; que dans
le fait on ne connoît aucun créancier; que le conserva
teur des hypothèques a constaté, par son certificat du
1 1 pluviôse an 9 , qu’il n’y avoit aucune inscription sur
les biens d’Etienne Dcscaifres ; qu’il y en a uno, à la v é rité ,
de 10000 francs sur les biens do la dame Daudin par
Gabriel Chaunac, eu vertu du testament du 3 avril 17 7 3 ,
qui
�( 17 )
qui paroîtêtre celui d’Etienne Descaffres ;, mais qu'indé
pendamment qu’on ne voit pas qu’il soit rappelé dans le
testament, on voit encore moins ce qu’il auroit à de
mander à la veuve Daudin , q u i ri étoit pas héritière
d1Etienne Descaffres.
-• Il a soutenu que la vente étoit encore irrévocable
comme ayant été ratifiée par le fils.
. } Défendant particulièrement à la demande de Desprats,
il a dit que la cession à lui consentie , datée du 2
vendémiaire an 8 , étoit nulle , comme frauduleuse et
simulée ; qu’au surplus cette cession n’avoit pu lui trans
mettre plus de droits que n’en avoit son cédant.
Il ne s’est pas borné là : il a soutenu que la ratification
faite par Daudin , en majorité , ne le rendoit pas seule
ment personnellement non-recevable à provoquer le dé
sistement , mais le rendoit encore garant de la demande
de Despi’ats ; qu’il n’avoit p u , au mépris de cette rati
fication , vendre le môme objet à un autre , et qu’il
devoit être condamné , même par corps , comme stellionataire , à faire cesser la demande de Desprats , ou en
ses dommages-intérêts.
Il a insisté sur la demande en recours par lui formée
contre la veuve Daudin , qu’il a dit dans tous les cas ne
pouvoir être contestée.
Il a soutenu enfin que tous les actes passés , soit par
D audin , soit par la dame veuve D audin, et par eux si
mules , en fraude de la garantie, actes dont il a fait
l’énumération , étoient nuls.
Il a conclu , en conséquence, à ce que , joignant tou-«
tes les demandes , faisant droit sur le tout par même
G
�,( i8 )
jugement : en ce qui touchoit Daudin , il fût déclaré
purementetsimplementnon-recevabledanssa demande*, en
ce qui touche Desprats , que la vente du 2 vendémiaire an
8 fût déclarée nulle , frauduleuse et simulée ; subsidiairement que Desprats fût déclaré purement et simplement
non*recevable dans sa demande ; et où , soit Daudin , soit
Desprats parviendroient à leurs fins , faisant droit sur la
demande en garantie formée contre la dame S obrier, et
sur celle qu’il formoit présentement contre Daudin ,
ils fussent condamnés , et Daudin par corps , comme
stellionataire , à le faire jouir du dom aine, sinon à. lui
en payer la valeur , ainsi que le montant des construc
tions et améliorations qu’il y avoit faites , à dire d’ex
perts , à lui rembourser les irais et loyaux coûts de la
vente , et aux dommages-intérêts résultans de l’éviction ,
suivant l’estimation qui en seroit faite par les mêmes
experts , et en tous les dépens.
Desprats , Daudin et la dame veuve Daudin ont ré
pondu chacun à cette écriture.
Desprats a soutenu ïa sincérité de la cession. Il a d i t ,
au surplus, que Capelle la contestoit sans objet ; qu’en
effet , ou la vente consentie à Capelle étoit valable ,
ou elle ne l’étoit pas. Que si elle étoit valable , peu
importoit que Daudin eût revendu ou n o n , et que la
seconde vente eut été transcrite ou non ; que Capelle
n’en conserveroit pas moins la propriété , en vertu de
la pi’emière vente q u i, étant antérieure à la loi de bru
maire an 7 , n’étoit point sujette îi la transcription pour
la transmission de la propriété : que si , au contraire ,
la vente faite ù Capèlle n’étoit point valable , peu lui
�( i9 )
importoit d’être obligé de se désister envers Daudin ,
ou envers celui à qui Daudin avoit vendu.
Daudin a répondu qu’on ne pouvoit lui opposer la
vente consentie par sa mère ; que cet acte lui étoit étran
ger : qu’à la vérité elle avoit , par le testament , pou
voir de vendre ; mais que , d’une p a rt, le testateur n’avoit
pu donner ce pouvoir ; e t , d’autre p a rt, que le pouvoir
avoit été donné à la charge de l’em p loi, et que Capelle
étoit loin d’établir, ou de pouvoir établir que le prix
eût été employé conformément à1la volonté du testateur:
Qu’on ne pouvoit lui opposer davantage la ratification :
qu’à la vérité elle paroissoit aujourd’hui- à la date du 2
mars 1788 , époque à laquelle il avoit atteint la majo
rité ; mais qu’il avoit été facile à Capelle de remplir
comme il avoit voulu la date qu’il avoit eu soin de
laisser en blanc ; date si visiblement remplie après coup ,
que les chiffres et m o t, 21 mars 1788 , étaient écrits
d’une plume , d’une encre et d’une main différentes ;
que pour affoiblir le contraste on avoit eu la précaution
de repasser la plume sur les lettres du corps de l’acte ,
et de leur donner la teinte de l’encre de la date ; mais
que malheureusement la plume de la date s’étant trouvée
plus fine que celle qui avoit servi à écrire le corps de l’acte,
avoit laissé à découvert une partie de l’ancienne écriture,
en sorte que sur la même lettre il paroissoit deux encres :
Que cette ratification étoit nulle à tous égards ;
Comme donné« en minorité ;
Comme vague te gén érale, s’étendant indistinctement
à tous actes quelconques que la dame Daudin auroit pu
souscrire ; tandis qu’il est de principe que toute approC 2
�( 20 )
foation, pour être valable, doit être faite en connoissance
de cause , avec la connoissance du contenu en l’acte que
l’on entend approuver et confirmer ;
Comme n’ayant pas été faitç double.,
Quant ù la demande en reqours et dommages-intérêts
que Capelle avoit imaginé de former contre lu i, il a dit
qu’il n’y -e n avoit jamais eu de plus ridicule ; qu’il n’y
avoit de sa part ni stellionàt, ni fraude; que c’étoit lui
au contraire qui réclamoit contre la fraude. Il a au sur
plus offert, comme ilT a v o it toujours fait, de faire rai
son de la somme de 13800 f r . , payée effectivement par
le sieur Capelle, ou de la compenser, ensemble les in
térêts , avec la restitution des fruits ou dégradations.
• L a veuve Daudin a défendu aussi de son côté à la de
mande en garantie dirigée[contre: elle. Sa défense a été
sim ple;'elle a soutçnu Capelle non - recevable, comme
ayant eu connoissance du vice de l’acte, et non-seule
ment comme eu ayant eu connoissance , mais comme
ayant coopéré à la fraude.
- Le' y ventôse an 10 , nouvelle écriture de Capelle^
' Dans cette écriture, il a commencé, comme de rai
son , par son apologie ; il s’est efforcé d’écarter les faits
de dol et de surprise qu’on lui imputoit.
S’il faut l’en croire , il ignoroit par quel motif la
dame Daudin s etoit déterminée a lui vendre le domaine *
dont il s’agit. 11 n assure qu’il avoit acquis, parce que
cette acquisition lui convenoit; qu’il s’étoitpou inquiété
de savoir quels étôient les titres de propriété de celle
qui lui vendoit, parce qu’elle avoit une fortune suffi
sante pour le garantir \ que le prix avoit été fixé à
�( 21 )
21600 fr. , et payé comptant. Il a dit qu’il falloit toute
l’imagination do JDaudin pour jeter de l’odieux sur une
négociation aussi simple ; que Daudin avoit cru se ren
dre intéressant en s’accusant d’avoir surpris à sa mère
des blancs seings, pour donner le moyen de réduire la
vente au prix seulement convenu, mais que le fait est
invraisemblable ; que s’ il avoit eu des blancs seings, il
11’auroit pas eu besoin de combiner une intrigue aussi
compliquée ; qu’il auroit eu sur les billets de la mère
tout l’argent nécessaire à son projet de voyage; que
d’ailleurs, dès que le prix de la vente étoit payé comp
tant , que le contrat même portoit quittance, une quit
tance séparée, adaptée à l’ un des blancs seings , n’auroit pu avoir aucun effet ; que pour parer à cette ob
jection, Daudin avoit supposé que le prix avoit été
payé en billets , mais que pour éviter une invraisem
blance il étoit tombé dans une autre ; que cette quit
tance,auroit été datée et donnée avant ou après la vente ;
qiie.jçffflpnée avant, elle n’auroit été d’aucune valeur,
puisque les billets auroient été postérieurs; que si elle
eût été post-datée, l’acquéreur ne se seroit pas mis à la
merci du vendeur q u i, après s’être emparé du billet,
auroit pu protester contre la quittance, et la faire annuller ; que l’on ne pouvoit pas supposer une pareille
imprudence; que l’embarras ,de Daudin pour donner uu,
emploi à ces blancs seings, étoit tel, qu’il ne savoit pas
dire s’il en avoit fait un billet, une quittance ou une
•contre-lettre ; que le seul lait qui p a r o is s o it être vrai y
étoit celui de l’enlèvement commis par Daudin de l’ar
gent que sa mère avoit reçu du prix de la v e n t e ;
�( 2i. /
que la mère avoit aussitôt porté plainte qui n’avoit
pas eu de suites, Daudin ayant su à son retour dés
armer sa m ère; mais que la plainte et la réconciliation
étoient étrangères à celui qui avoit acquis de bonne foi et
payé comptant le domaine ; qu’il étoit vrai encore que
le sieur Sistrières, lieutenant généi*al civil et crim inel,
devant qui la plainte avoit été portée, et les témoins
entendus , avoit pris occasion de là pour former une
demande en retrait, mais qu’il s’étoit désisté par traité
du 5 mai 1789; qu’il étoit étonnant que Daudin cher
chât à l’inculper, après avoir été le premier à lui ren
dre , à l’occasion de ce même p rocès, toute la justice
q u i lu i étoit due. Ce sont ses expressions.
A l’appui de cette dernière assertion, il a produit et
fait signifier trois lettres.
Une première du 28 mars 1782, une seconde du 10
août 1783, dont on a parlé plus haut, sans songer aux
inductions qui en résulteroient contre lui-même. *
T>
• •
«H»*»-''
.hn voici les termes : « M onsieur, le curé de £ya<»>m’a
« marqué que je ne m’étois pas assez expliqué au sujet
« des affaires : voici plus clairement ce qui en est. Lors« que je fus arrive, je subis interrogatoire pou?'savoir
« ce que f a i reçu de vous. Sistrières croyoit et ci’oit
« encore que vous n’aviez fait de billets que pour
« 14000 fr. J ’ai repondu que vous en aviez fait pour
« le contenu au contrat, ce qui l’interloqua fort dans
« ce temps. Quoi qu’il en soit, je ne vous nuirai jamais,
« parce que vous rn’avez payé ce que vous m’avez promis,
« Si Sistrières fait travailler à Riom celte affaire au nom
« de ma m ère, elle l’ignore. Je vous prie de me mar-
�( 23 )
« quer ce qu’il faut que je lui fasse faire pour ne pas
t< être compromis dans les discussions que Sistrières
« a avec v o u s , et que je crois très-mauvaises. A u prê
te m ier jo u r, j’aurai l’honneur de vous voir y et nous con« férerons plus librement. »
Et une troisième, du 26 mars 1785, à l’occasion d’une'
censive que le seigneur de Yaladi réclamoit sur partie
du même domaine de V e rn e t, ainsi conçue :
« M onsieur, je n’ai reçu votre lettre que ces jours
« derniers. Je me hâte de vous marquer que j’ai demandé
« à ma mère si elle a jamais payé de la rente à M . de
« Yaladi. Elle m’a dit qu’elle avoit entendu dire que
« M . Descaffres lui en donnoit ; mais qu’elle ne sait
« pas si c’est du domaine de Vernet ou de R aulhac,
« car on nous en demande aussi pour Raulhac. Nous
« n’avons jamais vu de reçu dans les papiers de mon
« oncle pour l’objet dont il s’agit. Tâchez de terminer
« cela à votre profit : je serai dispensé par là de payer
« une vingtaine d’ écus d’arrérages. Je n’ai pas trouvé
« l’échange des héritages appartenans à mon oncle et
« à M . de Sistrieres. Vous ne devez pas douter que
« je ne voulusse vous obliger ; mais ce papier - là
« s’est sans doute perdu à la mort de mon oncle.
« L ’oncle Sobrier doit arriver dans peu du Querci;
« peut-être me donnera-t-il des renseiguemens : je vous
r en ferai part. »
Il a prétendu qu’il résultoit de ces lettres , et une
nouvelle approbation de la vente, et la preuve que
Daudin n’avoit imaginé qu’après coup, et pour le besoin
de la cause, toutes les imputations qu’il s’est permises.
�CM )
D e là passant à la discussion, il a développé, et les
moyens qu’il avoit déjà fait v a lo ir , et ceux que son
imagination lui avoit suggérés depuis.
Après a vo ir, dans sa requête du 8 floréal an 9 , prin
cipalement insisté sur le lesta m en t, il a imaginé tout à
coup de prétendre qu’il étoit nul.
Il a inféré de cette nullité que la propriété du
domaine avoit passé , après la mort de Descaffres, non
sur "la tête de D audin , mais sur celle de la m ère, plus
proche d’un degré ; que celle-ci avoit vendu sa propre
chose *, qu’elle seule pourroit réclam er, et qu’elle 11e
réclamoit pas ; que Daudin et Desprats étoient sans
qualité.
Il a fondé la nullité sur ce que de dix témoins , y
compris le notaire, qui yavoient assisté, il falloit retran
cher les deux derniers surnuméraires, ces deux témoins
n’ayant assisté qu’à la lectu re, et non à la rédaction ;
qu’il falloit encore retrancher Etienne Terissc , comme
n’ayant signé ni été requis do ce faire : ce' qui réduisoit le nombre à sept, y compris le notaire, tandis
qu’il en falloit un de p lu s, le testateur étant privé de
la vue.
Il a insisté avec complaisance sur cette nullité.
Revenant ensuite subsidiairement à ses premières
défenses, il a dit ; Qu’en supposant même la validité
du testament, la vente ne seroit pas moins inattaquable
d’après le pouvoir donné à la mère de vendre : qu’à
ja vérité il 11e • rapportait pas les quittances des créan
ciers et des légataires constatant l’em ploi, conformément
au vœu du testateur ; mais qu’il étoit d’abord trop év i
dent
�( *5 )
dent qu’on avoit pris dans la famille Daudin toutes
les précautions imaginables pour lui en dérober la connoissance, et q u e , d’un autre côté, il étoit hors de doute,
et prouvé par les réponses mêmes consignées dans les
interrogatoires, que les dettes et les legs avoient été acquit
tés ; que l’emploi étoit ainsi justifié par le fait.
Il a dit que dans tous les cas la ratification auroit cou
vert le vice de l’acte ; que cette ratification opéroit
seule une fin de n on -recevoir invincible contre la 'r é
clamation de Daudin ; qu’en vain on cherclioit à en
faier rapporter la date à la date même de la vente,
c’est-à-dire du I er. mars 178 2, pour en induire qu’elle
avoit été souscrite en minorité ; que quand cela seroit,
il n’en seroit pas plus avancé } qu’il auroit dû toujours
se faire relever dans les dix ans de la majorité ; qu’en
vain on objectoit encore qu’elle étoit conçue en termes
généraux ; qu’aucune loi n’exigeoit qu’elle fût spéciale ;
qu’il suifisoit qu’il lût constant que celui qui ratifioit
avoit eu connoissance de l’acte ; qu’aucune loi n’exi
geo it, non plus, que la ratification fût faite double ; que
Daudin n’avoit pas fait un nouveau contrat, qu’il avoit
consenti simplement que le premier eût son effet; qu’une
pareille approbation pouvoit être faite de toutes sortes
de manières , même par une simple lettre ou une
quittance.
A ces deux moyens résultans, et du pouvoir donne
par le testament , et de la ratification , il en a ajoute un
troisième : la prescription. Il a dit qu’en pays de droit
écrit il étoit constant qu’on prescrivoit avec titre , par
dix ans entre présens , et vingt ans entre absens ; qu’ici
D
�( 2 6 )
•
il avoit titre et possession de plus de dix ans , déduction
faite même du temps de l’absence de Daudin ; qu’ainsi
sous cet autre rapport Daudin étoit encore non-recevable.
Relativement à Desprats , il a soutenu que toutes les
cii’constances concouroient. à prouver la simulation de
la cession du 2 vendémiaire an 8.
i°. L ’antidate évidente. Com ment, a-t-il d it , si la cession.avoit été véritablement à la date du 2 vendémiaire,
le premier acte hostile , la citation devant le juge de p aix,
qui est du 6 vendém iaire, postérieure de 4 ¡ours, au1-oit-elle été au nom de Daudin ? Comment cette cession ,
qu’on a été si pressé de faire enregistrer , puisqu’elle
est enregistrée du même jour , n’a-t-elle été transcrite
que le 1 5 ? N ’est-il pas évident qu’on a profité de la
communication donnée au bureau de paix de la ratifi
cation , de la remarque qu’on a faite qu’elle n’étoit point
enregistrée , pour aviser au moyen de la rendre sans
effet ; qu’on a alors imaginé la cession ; qu’on a profité
du délai que la loi donne pour l’enregistrement des actes,
pour en faire remonter la date au 2 vendémiaire ,
et qu’en même temps, pour obvier à l’objection résultante
de la citation donnée, postérieurement à la cession , au
nom de Daudin , on a inséré dans l’acte la clause que le
cessionnaire pourroit agir au nom du cédant?
2°. lia qualité des parties. Daudin créancier de
Desprats , et par là ayant un empire absolu pour le faire
condescendre à cc qu’il désireroit.
30. La succession entière vendue 6000 fr. , tandis que
le domaine de Vernet avoit été vendu, seul, 21600 fr. ,
et de l’aveu même de Daudin , au moins 13800 fr. ,
�( 27 )
e lle domaine de Raulliac, vendu auparavant, 10177 fr*
40. La multiplicité des actes passés par la mère , par
le fils, pour dérober le gage de la garantie ;
5°. L ’impossibilité d’alléguer la moindre cause de celte
vente précipitée , autre que celle de rendre sans eifet
la ratification ;
6°. L ’avance faite par le vendeur des frais de cette
cession, ainsi que d’autre vente , consentie à Chaunac
à la date du même jour 2 vendémiaire.
Il a conclu de la réunion de toutes ces circonstances ,
qu’il ne pouvoit y avoir de doute sur le concert de
fraude.
Il a observé , au surplus , que les mêmes moyens qui
militoient contre la réclamation de Daudin , militoient
contre celle de Desprats.
Quant à la demande en gai’antie , par lui formée ,
contre Daudin comme stellionataire , et encore quant
à la demande en garantie solidaire formée , tant contre
la dame Daudin , que contre Daudin lui-même , et sur
la nullité des actes par eux passés en fraude de cette
même garantie , il s’est borné à persister dans ce qu’il
avoit précédemment dit.
Tels sont en analise les moyens que Capelle a fait
valoir dans sa requête du 7 ventôse an 10 , et auxquels
il a donné le plus grand développement.
Daudin et Desprats y ont répondu. Ils ont établi
quant au testament, d’une p art, qu’il étoit valable, et
de l’autre , que Capelle n’étoit pas r e c e v a b le à l’attaquer ;
qu’il ne pouvoit l’attaquer, ni comme exerçant les droits
de la veuve Daudin sa venderesse , puisque celle - ci
D 2
�(2S)
l’avoit approuvé et exécuté , ni de son propre ch e f,
puisqu’il l’avoit approuvé lui-même.
Quant à la prescription de dix ans, qu’il ne suflisoit
pas d’avoir titre; qu’il falloit encore titre et bonne foi ;
que de plus, si l’on déduisoit, et le temps de l’absence ,
et le temps pendant lequel la prescription avoit été
suspendue par les nouvelles lois , il ne s’étoit pas écoulé
le temps requis pour cette espèce de prescription ; qu’enfin
l’usure ne se p r C s c r iv o it pas.
La cause en cet état portée à l’audience du 25 thermi
dor an 10 , est intervenu, sür les plaidoiries respectives
des parties, un jugement qui a ordonné qu’il en seroit
délibéré.
A vant le jugement sur délibéré , et le z 5 brumaire
an i i , Daudin présenta requête par laquelle il de-4
inanda , sous réserve de ses moyens de nullité contre la
ratification , et subsidiairement seulem ent, qu’il lui fût
donné acte de ce qu’il reconnoissoit l’écriture du corps
de la pièce , ainsi que la signature , pour être de sa
m ain, et désavouoit avoir écrit le mot et les chiffres 21
mars 1788; qu’en conséquence il fût procédé à la véri
fication de la date de l’acte.
* L e 4 pluviôse, autre requête aux mêmes fins.
Daudin conclut de nouveau à ce qu’il soit ordonné
que par experts convenus ou nommés d’office il soit
procédé à ladite vérification ; lors de laquelle opération
ils vérifieront et constateront,
i°. Si le caractère de l’écrilurc du corps de la pièce
et de la signature D a u d in , étoit conforme à la manière
dont il écrivoit en 1788 , ou si au contraire il étoit plus
�( 29 )
analogue a la manière dont étoit formé le caractère de
son écriture vers 1782 , et à laquelle de ces deux épo
ques paroissoit se référer davantage l’écriture du corps
de la pièce et de la signature ;
20. Si lors de la confection et rédaction de la ratifi
cation , la place destinée à recevoir la date ne paroissoit
pas avoir été laissée en blan c, et si ce blanc 11’avoit pas
été rempli après coup des mot et chiffres 21 mars 1788,
et si ces mot et chiffres n’avoient pas été tracé^avec
Une plume , iule encre et une main différentes ;
30. Si pour faire illusion à la vue on n’avoit pas
fessayé de repeindre les lettres du corps de la pièce et de
la signature Daudin , avec la même encre dont on
s’ étoit servi pour tracer les mot et chiffres 21 /»an? 1788,
et si cette encre n’étoit pas plus noire , et ne tranchoit
pas sur celle plus terne et plus ancienne du Corps de la
pièce et de la signature.
Capelle ne manqua pas de combattre cette demande.
Xl soutint qu’elle étoit nulle et contraire aux règles de
l’ordre judiciaire; d’une part, les juges ne pouvant sta
tuer que sur les fins et conclusions qui avoient été prises
lors du jugement qui avoit ordonné le délibéré ; e t ,
d’autre part, parce que Daudin reconnoissant la signature,
prétendant seulement que la date avoit été remplie après
cou p , et d’une autre m ain, il n’avoit que la ressource
de l’inscription de faux.
Il a ajouté que de plus elle étoit frustratoire ; que le
premier fait tenoit à une infinité de causes et de nuances
trop impossibles à vérifier , et ne pouvoit présenter un
motif assez certain de décision ; que le second et troi
sième fuit étoient également inutiles à vérifier.
�( 3° )
Il importe de mettre sous les yeux du tribunal cette
dernière^ partie de la requête en date du u pluviôse:
voici.com m e il s’exprim e, ou son défenseur pour lui :
« Il est fort inutile de faire vérifier si la date 21 mars
*■
« 1788 est de la main de Daudin , si elle est écrite de
« la même main et encre que le corps de la pièce. L e
« contraire a été constamment avoué. Daudin n’avoit qu’à
k en demander acte.
c«iiPuisqu’il est constant qu’elle n’a pas été écrite par
cc Daudin , mais par une autre main , avec une encre
« et une plume différentes , il est bien constant aussi
« que la date ne fut pas mise au même instant que
« Daudin écrivoit la pièce : deux mains_ ne pouvoient
« écrire à la fois sur le même papier. Il est donc encore
« fort inutile de faire vérifier un fait reconnu et physi« quement constaté. Mais de tout cela il ne résulte aucun
« moyen de faux. Il n’y a que Daudin qui puisse expli« quer comment cette pièce a été écrite, puisqu’elle est
« de son fait. Il suffit à Capelle do dire qu’elle lui a été
« remise telle qu’elle est : il faudroit que Daudin prouvât
« que l’acte a été romis, ou v u , sans date, ou qu’il l’a signé
« en 1782.
« L e troisième fait est encore inutile à vérifier , et le
« résultat en est indifférent, puisqu’il est impossible de
« dire par qui, et quand, ces prétendues surcharges ont
« été fa ites. La pièce étant du fait de Daudin , il est
« présumé l’avoir remise telle qu’elle est présentée, tant
« qu’il ne prouvera pas le contraire. Cette pièce lui a
« été communiquée à Saint-Flour du temps que la cause
« étoit pendante au tribunal civil. Le procès verbal du
« greffier à qui elle a été déposée , dit bien que dans le
�(3 0
« corps de l’acte, et sur certaines'lettres il parbît que
« l’on a repassé la plume d’une encre plus noire. Mais
« ce procès verbal ne constate pas le nombre de ces
« prétendues surcharges , ni l’identité de cette encre
« avec celle de sa date, ni môme qu’il y en eût sur la
« signature Daudin. C’est cependant alors que cela auroit
« dû être constaté , puisque la pièce cessoit d’être au
« pouvoir du sieur Cnpelle. »
• A la suite de cette requête il a conclu à ce que Daudin
fût déclaré non-recevable dans sa demande en vérification;
et, faisant droit sur les nouvelles demandes qu’il formoit
par la présente requête , dans le cas où les conclusions
précédemment prises contre Daudin ne lui seroient point
adjugées , attendu que par l’effet des fraudes par lui pra
tiquées et par la dame Daudin sa mère , il étoit nanti
de tous les biens affectés à sa garantie, sans s’arrêter ù ses
offres, lesquelles seroient déclarées courtes et insuilisantes,
il fû t condamné solidairement avec la dame Daudin à lui
de 21600 fr . , prix principal ,
^ensemble les frais et loyaux coûts; 20. p ré p a ra tio n s et
améliorations; 3°. les dommages résultans dft fa vente
par lui faite de la maison de son ancien domaine de
V e rn ct, ceux qui pourroient être dûs au fe r m ie r pour
la résiliation du bail , et ceux résultans de l’éviction.
Sur cet incident les parties furent renvoyées à l’au
dience ; et le i 5 du même mois de pluviôse, jugement
contradictoire in tervin t, q u i joignit au délibéré.
IjC délibéré a ensuite été prononcé le i 5 germinal.
V oici les dispositions du jugement :
L e tribunal, jugeant ù la charge de l’appel, sans s’ar-
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( 32 )'
rêter ni avoir égard a la demande fotmée par Capelle en
nullité de la procédure faite- postérieurement au jugement de délibéré du 25 termidor an 1 0 , non plus
qu’à la demande de Daudin en vérification de la ratifi
cation dont il s’agit, déboute les parties de leurs demandes î, dépens entre elles compensés à cet égai’d. Sans
s’arrêter pareillement aux demandes de Capelle en nul
lité du testament d’Etienne Descaffres , et de la vente
du 2 vendémiaire an 8 , consentie par Daudin à Despi-ats, dont il est débouté , non plus qu’à la vente du
ier. mars 178 2 , et à la ratification du 21 mars 1788 ,
lesquels deux actes sont déclarés nuls et de nul effet,
oi’donne que le testament dudit Etienne Descaffres , ainsi
que la vente faite à Desprats le 2 vendémiaire an 8 ,
seront exécutés suivant leur forme et teneur en consé
quence condamne le sieur Capelle à se désister, en faveur
dudit Desprats, du domaine du V ern et, dont il s’agit,
comme faisant partie de la succession dudit Descaffres,
dont ledit Daudin est héritier , avec restitution des fruits
,ei intérêts d’iceux , ù compter du jour de la demande ju-^
diciaire ,î^rinsi que des dégradations , s’il y en a , et condamne" le sieur Capelle aux dépens envers les sieurs
Daudin et Desprats.
e
même jugement, faisant droit sur les demandes en
recours et garantie formées de la part de Capelle, tant
contre la daine Daudin que contre son fils : en ce qui
touche la dame D au d in , la condamne à relever et ga
ra n tir ledit Capelle des condamnations contre lui prononcées , avec intérêts et dépens; en conséquence, à
rendre et rembourser audit Capelle la somme de 2 i6 o o f,,
prix
�( 33 ) '
prix principal de ladite vente par elle consentie, fraiset\
loyaux coûts d’icelle, av^c intérêts- du tout à compter
^u jo u r de la demande f ia conclamne , en outre: ,' au£
dommages-mtérêts résultans de l’éviction, et à ceux ré- i
sultans aussi de la vente faite par Capelle de la maison qu’il avoit ù son domaine de V ern et, comme aussi à
ceux qui seront dûs au fermier pour la résiliation de son
^............
b a il, le tout „avec intérêts légitimement dûs; et ce suivant l’estimation qui en sera faite par experts pris ou
nommés d’oilice, lesquels experts estimeront en même'
temps les dégradations, réparations et améliorations qui
peuvent avoir été faites par Capelle dans ledit domaine,
p ou r, après leur rapport fait et rapporté, être ordonné
ce qu’il appartiendra ; dépens , quant à ce, réservés.
En ce qui touche ledit Daudin ; le même jugement le
Gondamne , suivant ses offres, à rendre et rembourser
au sieur Capelle , sur et eji^gnt_moins du prix de la.
ven te, la somme de i38oôlTrancs, ainsi que les ré -. M
parafions et améliorations suivant l’estimation qui en
sera faite par lesdits experts, avec les intérêts du tout
légitimement dûs sauf à lui à se régler avec Desprats,
h qui il a ven d u , pour la valeur des améliorations dont
ce dernier doit profiter. Il ordonne ensuite q u e , sur
la demande en garantie solidaire parformée Capelle
contre la dame Daudin et. son fils , les parties con
testeront plus amplement pour leur être fait droit ,
ainsi qu’il appartiendra ; dépens, q u a n t i ce, réserves:
déclare l’assignation donnée par Capelle à là dame Daudin,
^
le 9 frimaire an 9, ensemble la procédure qui en a été
¿4_
la suite , nulle et de nul effet ; en conséquence , con-
éyJitcfUA
cjZi crtan.ci.fi.
�>. *
( 34 )
damne Capelle aux dépens faits à cet égard, et condamne
la dame veu ve D audin aux dépens envers toutes les
•
î:
\ y fÿ à r * '
«--- .................. ..... .
;•
:- . v ^ )art,es,
. ■. .
.............
\ ¡ v * l D audin a interjete appel le p re m ie r, par acte du i 5
messidor , en ce q u e , sur la demande en garantie soli
daire , il a été ox-donné une plus ample contestation.
Capelle a interjeté appel indéfiniment aux chefs qui
>*** lui étoient g r é v e u x , par acte du 27 messidor.
Q uoique cet appel soit postérieur , et que sous ce
rapport il puisse être c o n s id é r é comme appel in ciden t,
x
néanmoins Capelle doit être regardé comme principal
appelant, puisqu’il a succombé sur tous les points d elà
contestation, à l’exception de celui h l’égard duquel il
a été ordonné que les parties contesteroient plus am
plement.
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L a dame Daudin et Desprats se sont aussi rendus ap.jpelans.
Desprats, en^ce que Capelle, condamné envers lui au
désistement, n’a été condamné à la restitution des jouis£anç£s et des dégradations, qu’à compter du jour de la
demande, et non depuis'l’entrée en pggseçsÀon*.. ^
Et la dame D audin , en ce qu’elle a été condamnée
à relever et garantir Capelle de toutes les condamnations
contre lui prononcées envers Daudin et Desprats , et en
tous les dommages et intérêts résultans de l’éviction.
' C’est sur ces appels que la contestation a été portée
en la cour.
j| s’agit maintenant de développer les moyens, et
d’abord de justifier le jugement en ce qu’il a condamné
le sieur Capelle à se désister du domaine qui fuit l’objet
V%
�( 35)
du litige, Il ne sera pas difficile, malgré tous ses efforts,
d’y parvenir,
M O Y E N S .
Il ne peut déjà exister de doute sur les faits : le sieuu
Capelle a pris soin de se condamner lui-même.
Il a désavoué d’avoir traité avec le fils, d’avoir acheté
du fils,
>
Il a désavoué que le fils lui ait fait confidence des blancs
seings, et encore plus qu’il lui ait donné, à l’instant de
la vente, quittance d’une partie du prix , à l’aide de l’un
de ces blancs seings,
Il a désavoué que le prix ait été payé en billets, et
que ces billets , après l’enlèvement, aient été acquittés
au fils jusqu’à concurrence de la somme de 13800 fr.,
montant du prix convenu.
V oici comme il s’exprime , o u , si l’on v e u t, son dé
fenseur , bien avoué par lu i, dans sa requête du 7 ven
tôse an 10.
a L e sieur Capelle ignore pour quels motifs la dame
« Daudin se résolut à lui proposer la vente du domaine
« de Vernet. Cette acquisition lui convenoit, parce qu’il
« avoit un autre domaine dans ce village. 11 s’inquiéta
« peu de savoir quels étoient ses titres de propriété;
« elle avoit une fortune capable de garantir et de rassu« rer l’acquéreur. L e prix fut convenuet arrêté à 21600 ftJ
« et payé comptant. Il étoit exorbitant, mais il étoit
« celui de la convenance.
Plus bas : « Pour se prêter aux arrangemens de D au« d i n , il faut supposer que le prix fût payé en billets, et
E a
�•f qu’avant la vente Daudin avoit donné quittance de
«( partie au moyen d’un des blancs seings....... Sur ce
« premier poin t, il; faut se référer à la vente authenti« que du I er. mars 1782, d’après laquelle les 21600 fr.
'« ont été payés comptant à la dame Daudin. Rien ne
« peut détruire cette clause de la vente.
' Quelques lignes plus bas : « Daudin poursuit son
« con te, et dit qu’il enleva les billets. Il est en con« tradiction avec la vente, qui fait foi que les 21600 f.
« ont été' payés c o m p ta n t ; ce qui exclut toute idée de
soustraction d’effets. »
Et il a l’imprudence de produire lui-même parmi les
lettres du sieur D audin , une du 10 août 178 3, qui le
confond.
• Que dit cette lettre?
« Sistrières croyoit et croit encore que vous n’aviez
« fait de billets que pour 14000 fr. J ’ai répondu que vous
« en aviez fait pour le contenu du contrat. »
Donc il avoit fait des billets ! donc il n’avoit pas payé
comptant en numéraire ! donc il en a déjà imposé sur ce
premier point !
Suivons toujours la lettre.
* cc Je ne vous nuirai jamais. »
Donc il craignoit que Daudin ne lui nuisît ! et celuici ne pouvoit lui nuire qu’en déclarant la vérité. S’il
avoit fait des billets pour l’entière somme de 21600 fr .,
ou qu’il eût véritablement payé celte somme, auroit-il
eu cette crainte ?
« Je ne vous nuirai jamais, parce que vous m’avez
« payé ce que vous m’avez promis. »
�( 37 )
Donc c’est au fils que les deniers ont été comptés
après l’enlèvement des billets!
« Vous m’avez payé ce que vous m’avez promis. »
Donc il n’a pas payé l’entier prix porté au contrat!
donc il y a eu concert de fraude entre lui et le fils,
pour tromper la mère !
Comment échappera-t-il à ces conséquences ?
Comment n’a-t-il pas réfléchi qu’il produisoit contre
lui-même l’arme la plus victorieuse?
Se retranchera-t-il dans la vente? D ira-t-il que contre
un acte authentique on n’admet point de preuve testi
moniale , encore moins de simples allégations, qu’il
n’y a que l’inscription de fau x?
Il ne s’agit point ici d’allégations ; il ne s’agit point
ici de preuve testimoniale.
Il y a preuve écrite , et preuve du fait même de l’ad
versaire , puisqu’elle émane d’une pièce par lui produite.
La ratilication n’est-elle pas une nouvelle preuve, et
qu’il a traité avec le fils, et qu’il connoissoit le vice de
la vente?
Il a désavoué , et il le falloit bien pour la cause,
qu’elle lui ait été remise à l’époque de la ven te, et que
la date ait été laissée en blanc. Il a soutenu que c’est en
m ajorité, et à l’époque du 21 mars 1788, que Daudin
a lib rem en t, et en pleine connoissance de cause, ratifie
la vente.
Et sur la vérification demandée , il a été oblige d’a
vouer que la d ate, les mot et c h iff r e s 2 1 Jiu irs 1788,
étoient écrits d’une autre main , d’une autre plume et
d’une autre encre.
�13- ,
Il a été obligé d’avouer que ces mot et chiffres n’avoient pas été écrits au même instant que le corps de
la pièce.
( Il a été obligé d’avouer plus ; que les lettres du corps
de l’apte avaient été surchargées.
Ces aveux ont été acceptés. .
D e ces aveux ne ré s u lte -t-il pas la preuve la plus
évidente des faits avancés p{ir le sieur D audin, du fait
principal, que la date a été laissée en blanc ?
Indépendamment de ces aveu x, l’inspection seule de
la pièce su ffis a it pour le prouver.
Une remarque essentielle , c’est que l’écriture et l’encre
de la signature , en même temps qu’elles diffèrent de
1’écriture et de J’encre de la date, concordent parfaite
ment avec celles du corps de l’acte.
La concordance avec le corps de l’acte prouve que
le corps de l’acte a été écrit et qu’il a été signé uno
çontextu.
L a différence avec la date prouve qu’elle a été mise
ex intervallo , et lorsque l’acte étoit déjà signé.
O n d i t , lorsque l’acte étoit déjà signé : e t , en effet,
si la signature qvoit été mise après l’insertion de la date,
de deux choses l’une -, ou elle auroit été mise au môme
moment que la d a te, et alors l’encre de la signature
auroit concordé avec celle de la d ate, ce qui n’est pas;
ou quelque temps après, et alors on conçoit qup l’encre
de la signature auroit pu être différente de celle de la
date , mais elle auroit été plus différente encore de çelle
du corps de l’acte, avec laquelle cependant elle cpncorde.
�( 39)
Î1 est donc évident, par riiispection de la pièce, indé
pendamment des aveux arrachés au sieur Capelle par la
crainte de la vérification , que la date a été mise après
coup ; que lorsque l’acte a été sign é, il n’étoit point
revêtu de sa date ; que par conséquent la date a été
laissée en blanc.
Ce fait une fois constant, il doit demeurer également
pour constant, que la ratification a été consentie, non
en majorité , mais en minorité.
Que Capelle explique autrement à quelles fins la date
auroit été ainsi laissée en blanc ! qu’il explique com
ment D audin, après avoir écrit le corps de l’acte , n’aul'oit pas écrit en même temps la date! n’avoit-il pas
la force d’écrire quelques caractères de plus ?
Dira-t-on qu’après avoir écrit l’acte , et avant de lui
donner son complément par la d a te , il a voulu prendre
encore le temps de réfléchir; q u’en conséquence l’acte
a demeuré en simple projet ; que s’étant ensuite déter
miné , on a mis la date ?
Mais alors auroit-il signé ? Signe-t-on iîn acte avant
qu’il soit parfait? N*au roi t-il pas remis à signer, comme
il remettoità écrire la date? o u , s’il vouloit tant signer,
ne pouvoit-il pas écrire , dater et signer, sauf à remettre
l’acte quand bon lui sembleroit?
Comment ensuite la date se rencontrei'oit-elle, nonseulement d’une autre plume et d’une autre en cre,
x mais encore d’une autre main ?
Capelle n’a garde de dire que la ratification lui a été
remise sans date : il comprend qu’il se condamneroit
trop lu i-m êm e. Son système est, au contraire, de dire
�îa o y
'
que la ratification lui a été remise avec la date. Mais
alors comment cette date seroit-elle d’une autre m ain?.
Daudin ayant écrit le corps de l’acte, n’auroit^pas écrit
aussi la date ! Gomment concevoir qu’il eût présenté au
sieur Capelle un acte é c rit, partie de sa m ain, partie
d’une main étrangère? et Capelle l’auroit-il accepté?
.. Comment encore expliquer les surcharges?
Vaines difficultés ! Capelle écarte toutes ces objec
tions d’un mot.
Rien de plus simple que sa réponse.
Est-ce à m o i, d it-il, qu’il faut demander pourquoi,
comment? C’est Daudin seul qui peut le savoir; c’est
lui seul qui peut l’expliquer; c’est lui qui m’a remis
la pièce telle qu’elle est : je n’en sais pas davantage.'
Que Daudin prouve qu’il me l’a remise autrement : s’il
ne le prouve pas } s’il ne prouve pas qu’il me l’a remise
avec la date en blan c, l’acte doit faire foi.
Et vite il a recours à ce brocard de d r o it, que l’acte
fait foi jusqu’à inscription de faux.
Il est bien ici effectivement question de preuve et
d’inscription de faux , lorsque le fait est avoué , lorsque
l’adversaire est obligé de reconnoîlre que la date est
d’une auti’e p lu m e, d’une autre encre et d’une autre
main!
Cette réponse ne satisfaisoit cependant pas à tout; il
restoit encore les surcharges. Capelle ne pouvoit pas
dire qu’il avoit reçu l’acte ainsi surchargé ; ilauroit donné
une trop singulière opinion de sa dextérité et de son
intelligence en alïaires : il falloit imaginer une autre
raison. Convenir que les surcharges ayoient été coinr
�. ( 4M)
mises depuis ? Mais comment faire cet aveu ? Il ne pouvoit dire qu’elles avoient été commises depuis le dépôt
au greffe. L e greffier avoit eu la précaution de constater
l ’état de loLpièce, et elles existaient déjà. A vant le dépôt?
A utre embarras : il falloit supposer que l’acte étoit revenu
au pouvoir de Daudin ; autrement c’étoit se reconnoître
soi-même l’auteur des altérations, c’étoit s’avouer c o u
pable. Et comment mettre en avant une pareille pro
position ? comment lui donner une couleur ?
Capelle n’a point été en peine : il a dit que la piece
avoit été communiquée à Daudin , à Saint-Flour , dans
•le temps que la cause étoit pendante au tribunal civil.
C’est dans la même requête du n pluviôse : on en a
transcrit plus haut les termes ; et alors tout s’explique.
On pourroit cependant demander au sieur Capelle
comment il ne s’est pas plaint, à l’instant ? comment il a
r eu cette pièce ainsi surchargée, sans réclamation ? com
ment , en remettant la pièce au greffier, il n’a pas pro
testé contre les surcharges, surtout dès que le greffier
les constatoit ?
Est-ce devant des juges éclairés , devant un tribunal
renommé par ses lum ières, qu’on propose de pareils
moyens !
Il importoït de commencer par fixer l’opinion du
tribunal sur les faits : l’honneur, l’intérêt de la cause
en faisoient un devoir au sieur Daudin. Il s’agit main
tenant dentrer dans la discussion des moyens-de droit:
nous suivrons le sieur Capelle dans les diverses objec
tions qu’il a faites.
_*
F
�•y,-.-- - . .
1
i■
.•
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( 4* )
p r e m i è r e
' •
•
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o b j e c t i o n
.
-
'Nullité du testament d’Etienne Descaff'res ^qu&Ut est
cetio 'nullité ?‘ '
!
f
pelle a prétendu qu’il falloit retrancher du nombre
'des témoins instrumentaires les deux témoins surnu
méraires , comme n ’a y a n t assisté qu’à la lecture, et
Etienne Térisse , comme n’ayant ni signé , ni été requis
de signer; que, ces témoins retranchés, il n’en restoit
que sept , y compris le notaire, et que le testateur
étant privé de la v u e , il en falloit h uit, aux termes de
l’article 7 de l’ordonnance de 1735.
On a vu quelle est la conséquence qu’il a tirée ensuite
de cette nullité.
f
>
Sans le suivre dans la discussion à laquelle il s’est
'liv r é , il en resteroit toujours, de son propre aveu, sept,
y compris le notaire ; ce qui suiïiroit pour la validité
du testament.
A la vérité , l’article 7 de l’ordonnance des testnmens,
'porte que si le testateur est aveugle , ou si , dans le
temps du testament , il n’a pas l’usage de la vue , il sera
appelé un tém oin , outre le nombre porté par l’article
5. Mais le testateur étoit-il aveugle ? savoit-il perdu
‘ l ’u sa g e d e là v u e ? Il est dit : A cause de laJoiblcsse
’ de sa vue. A v o ir la vue foib le, est-ce être aveugle ? est-*
ce être privé de l’usage de la vue ? A v o ir la vue foible ,
r’est y voir foiblement ; c’est ne pas avoir la vue excel
lente ; mais c’est y voir.
�( 43)
L ’adversaire a donc fait une fausse application de cet
article. L ’intérêt l’a aveuglé.
? •
Il auroit encore moins fait cette objection , s’il avoit
réiléclii sur la disposition de l’art. 45 de la même ordon
nance. Cet article, en exigeant qu’i l ’ne puisse être admis
que des témoins signataires , 'fait exception à l’égard des
testamens passés ailleurs que dans les villes ou bourgs
fermés. Il suffit pour ceux-ci qu’il y ait deux témoins
signataires. Peu importe donc que Terisse ait signé ou
non , puisque , indépendamment de Terisse ,• il y a tou
jours le nombre de témoins signataires suffisant.
J >
En supposant le testament nul*^ poul’roit-il s’en pré
valoir ? Il ne pourront, sans doute , avoir plus ‘ de droits
que la dame Daudin, sa venderesse; ét celle-ci seroitelle recevable à attaquer le testament, après l’avoir ap
prouvé et exécuté?
' - i :s ■.
n
Elle l’a approuve et exécuté , eh s’emparant , aussi-*
tôt après le décès' } de tous les meubles , en vertu du
legs à elle fait, en propriété,' du mobilier.
Elle l’a approuvé et exécuté , en se mettant en pos
session de tous les immeubles , en vertu *du legs d’u
sufruit,
’
'■
>- . . .
' Elle l’a approuvé* et' exécuté *yv eü’Vacquittant partie
des legs.
'■
’
Dans un acte du 20 janvier 1774 , on voit qu’elle a
pris expressément la qualité d’exécutrice testamentaire.
Par cet acte , un>nommé* Etienne Rame laboureur j
en qualité d’héritier de Catherine Dèscnffres , sa m ère,
transige avec là daine veuve D a u d in , en qualité , est-il
d it, (Cexécutrice testamentaire $ E tienne D escajjres
�Ç44)
et comme mère et- tutrice d E tien n e D audin , -son
fils , ce dernier héritier dudit Descaffres ¡ sur la de
mande en entérinement des lettres de rescision prises par
Catherine Descaffres , contre la renonciation faite aux
successions échues et à échoir de,Pierre Descaffres et
Marguerite Déconquans , et sur la demande en payement de la somme de 800 fr. , pour legs à lu i f a i t par
E tienn e D esca ffres, par son testament du 3 avril 17 7 3 ,
desquelles demandes il se départ , moyennant la somme
de 1620 fr. , en sus de celle de 300 fr. , qu’il devoit au
dit Descaffres, et q u i lui a é t é , est-il,ajouté , pareillement léguée par ce dernier.
......
C a p e lle lui-méme en a excipé et argumenté dans sa
requête du 8 floréal an 9 contenant ses premières dé
fenses ; il s’en est fait un principal moyen , il en a ré
clamé l’exécution. Il û insisté sur le pouvoir donné , par
ce testament, à la mère de vendre.; il va même jusques à dire qu’il n’a acheté qu’en conséquence de c©
pouvoir. I l emploie plusieurs pages à prouver la légiti
mité d’une pareille clause. Dans un endroit il s’exprime
ainsi : R assuré par, le pouvoir que le testam ent, dont
il avoit connoissance , donnoit à la veuve IDaudin........
il s e proyoit propriétaire irrévocable. Dans un autre
endroit , il dit : I l est constant aujourd’h u i , par le
rapport du testament £ Etienne Descaffres „ d u 3 avril
1773 j que le sieur ¡Daudin. est son héritier , .et que la
propriété du domaine{ lui appartenQit^ mais le testa
teur' .ne lu i a \fa it passer sa succession que sofif, lat
condit on expresse de plein et entier pouvoir à la mère
ede r e n d r e lus bas \Oti(ne vu itp a s ce que C/iaunac,
�C 45 )
mtroil pu demander à la veuve. D audin , q u i n étoit
pas héritière d? Etienne Descaffres.
C ’est après s’être exprimé ainsi , et dans la requête
du 7 ventôse an 10 , qu’il a changé tout d’un coup de
langage , et qu’il a imaginé cette prétendue nullité.
Il ne peut pas dire qu’il ne connoissoit pas le testa
ment. Il dit lui-m êm e, dans sa requête du 8 floréal, qu'il
en avoit la connoissance ; et on voit qu’il lui en avoit
été de nouveau justifié, puisqu’il dit : I l est constant
par le rapport du testam ent, etc.
Il excipe de la nullité ; et il.fait , d’un autre côté ,
tous scs efforts pour prouver que les legs ont été payés.
Il assure, que le prix de la vente a été employé à l’acquit
tement des legs. Il a fait interroger , principalement sur
ce fa it, et le sieur Daudin , et la dame Daudin. Com
ment n’a-t-il pas vu qu’il étoit en opposition avec luimême : qu’il impliquoit de soutenir le testament n u l,
et d’argumenter en même temps de son exécution ?
Il faut donc écarter ce moyen , fruit tardif de son
imagination.
Passons aux antres objections qu’il ne propose, dans son
nouveau système, quesubsidiairement.
SECONDE
-, - *
'
OBJECTION.
1 / j
■■<!
Pouvoir donné à la mère par le, testament.
Déjà elle n’a point fait usage de ce pouvoir. Ce n’est
point en vertu de ço pouvoir q u ’e lle a vendu. Elle a
vendu en son .propre et privé nom ; et c’est, sur ce qu’elle
�(
46
\
a vendu en son propre et prive nom , que le sieur
Capelle fonde la demande en garantie , qui ne pouvoit
avoir lie u , si elle avoit vendu en vertu du pouvoir.
L e testateur a donné pouvoir à la mère de vendre ;
mais ce pouvoir n’a pas été donné indéfiniment; il a été
grevé de la condition , de la clïarge de l’emploi en
acquittement des dettes et des legs.
Capelle se donne beaucoup de tourment pour prouver
que les dettes et les legs ont été acquittés. On l’accor
dera, s’il veut : mais Font-ils été des deniers de la vente?
C ’est ce qu’il est loin d’établir. '
'J
Q u’il n’attribue pas l’impuissance où il est de rapporter
cette preuve au peu de bonne foi de Daudin et de la
dame sa m ère, qui retiennent les quittances. On pourroit d’abord lui dire qu’il dévoit veiller lui-même à
l’emploi , et se munir des actes qui poiivoient servir à
le constater. Mais ici non-seulement il'n e prouve _pas
l’em ploi, mais il a fourni lui-même la1preuve de noneinploi. La lettre du 10 août 1783 , qu’il a prod uite,
prouve que le prix a été payé en billets , 'lesquels ont
été ensuite enlevés par le fils , et par uüé suite nécessairepayés au fils.
■
■
11:1 • '
J
r
L e testateur a donné pouvoir de vendre ; mais ce
pouvoir doit s’entendre civilement dans le cas o ù ily auroit
nécessité, dans le cas où les créanciers et les légataires
feroient des poursuites.1Il y avoit si peu nécessité , que
le prix , comme on vient de le voir , a été payé en
biHets.
‘
: ! :
'
IiC testateur a donné pouvoir de vendre ; mais pour
l'acquit(ement'dcâ déttes'ét1dûs leg*s‘; et',°par 'conséquent'
�'(
47 5
%/
jusqu’à la concurrence seulement de ce qui étoit néces
saire pour les acquitter. L a mère ne pouvoit pas vendre
au delà. Elle avoit précédemment vendu le domaine de
Raulhac et autres héritages" dont le prix avoit été em
ployé. Il faudroit donc prouver que ces premiers deniers
ont été insuffisans. IL faudroit prouver qu’il restoil encore
des dettes et des legs assez pour absorber l’entier prix
du domaine de Vernet , c’est-à-dire , que la succession
étoit plus onéreuse que profitable , puisqu’il n’y avoit
point d’autres immeubles.
L e testateur avoit donné pouvoir de vendre ; mais
avoit-il dispensé, avoit-il pu dispenser des formalités
nécessaires pour l’aliénation des biens des mineurs ? S’il
s’agissoit d’entrer dans cette question , il ne seroit pas
‘difficile d’établir que les biens des mineurs sont sous
la surveillance des lois , et que nul ne peut déroger à
ce qu’elles prescrivent , suivant cette maxime : Nerno
potest cavere testamento ne leges valeant.
On ne inanqueroit pas d’autorités à l’appui de ce
sentiment.
L ou et, dans son Recueil d’arrêts, au mot A liénation ,
tome i , page 19 , sommaire 5 , rapporte un ari’êt qui
l’a jugé ainsi :
« L e bien , dit-il , que le père avoit ordonné de
« vendre par son testament, est aliéné par le fils même
« sans solennité. On a demandé si cette aliénation
« pouvoit subsister. Jugé au. contraire; et que la volonté
« du testateur dispense seulement de discussion et de la
« vente du mobilier. V oluntas testatoris excusât à
« discussione mobilium.
�U 8 )
« Mais pour faire vendre l’héritage , il faut que ce
« soit au plus offrant et dernier, enchérisseur, ut justo
« pretio alienetur. Et le père ou a u tre, par son testa« ment, ne peut dispenser de cette solennité, ut illœsum
a minorum servetur patrirnonium , qui ne peut se
« vendre , spretâ juris solennitate.
Brodeau , son commentateur , ajoute : « C’est une
« règle et maxime certaine, que l’immeuble du m ineur,
« qui est sous la protection de la loi et de la justice,
« ne peut être v e n d u , soit en pays coutum ier, soit en
« pays de droit é c r it, que sous les formes et formalités
« publiques; et la disposition d’un particulier, par tes« tam ent, qui ordonne la vente et l’aliénation , ne peut
« déroger au droit p u b lic, et empêcher que les lois et
« ordonnances aient lie u , ce qui a été souvent jugé par
« les arrêts. On ne suit point les lois contraires au Code:
« Quandô decreto opus non sit. »
Meslé , Traité des minorités , chapitre 8 , pose éga
lement pour principe que le fonds que le testateur a
ordonné être vendu , ne peut l’être sans affiche, estima
tion , publication et enchère,
From ental, la Peyrère , page 5 i 8 , enseignent la même
doctrine. Ils disent qi^e le bien du mineur ne peut être
vendu sans formalités , lesquelles, ce sont les expressions
du premier , doivent être observées , dans le cas même
oit le testateur, qui a institué héritier un m in eu r,
auroit ordonné la vente pour le payement de ses dettes,
et quoique le p rix eût été employé au payement de ces
mêmes dettes, u ivant l'intention du testateur.
Mais cette question est njiôinc indiiTérente. Quel que
fû t
�( 49 )
fût le p o u vo ir, il ne pouvoit être séparé de la condition
de l’emploi qui y étoit attachée , et il 11’a pas été satis
fait à cette condition ; quel que fût le p o u vo ir, le testa
teur a entendu autoriser une vente dont le prix seroit
sincère, et non une vente dont le prix seroit simulé ,
une vente qui ne seroit que l’eiTet de la circonventioa
et du dol.
T R O I S I È M E
O B J E C T I O N .
R atification du 21 mars 1788.
L e sieur Capelle a-t-il osé produire cette ratification ?
o s e -t-il encore y insister? a - t - i l pensé qu’il pouvoit
se faire un titre à lui-même en remplissant à son gré
la date ?
La ratification auroit-elle été consentie en m ajorité,
elle ne seroit pas moins sans effet.
Elle est triplement nulle : et comme n’ayant point
été faite double ; et comme ne contenant point de prix ;
et comme vague et générale, ne s’appliquant pas plus à
la vente dont il s’agit qu’a tout autre acte.
C ’est î\ la discussion de ces trois propositions qu’on
va se livrer. Ces trois propositions établies, il ne res
tera sans doute à l’adversaire aucune espérance.
Et d’abord , la ratification n’a pas été faite double.
Ici le sieur Capelle a crié à l’erreur. Ou a-t-on v u ,
a-t-il d it , qu’il soit nécessaire qu’une ratification doive
être faite double? est-il une loi qui l’exige?
G
�( 5o )
C’est dan» sa requête du 7 ventôse an 10 , qu’il s’est
attaché à combattre cette proposition. Il n’est pas indif
férent de mettre sous les yeux du tribunal une partie
de ses raisonnemens.
« La première id é e , d it-il, qui se présente naturel« lem ent, est que la ratification n’est que l’approba« tion de ce qui a été fait ; o r , l’approbation peut être
« faite de,toutes sortes de m anières, même par une
« simple lettre, par une quittance.........Celui qui ratifie,
« qui consent que tel acte soit exécuté , ne consent
« pas cet acte déjà subsistant, il n’en change ni n’en
« altère les clauses......... On ne peut appliquer ici les
« principes concernant les actes synallagmatiques. Il est
« évident qu’en ce cas il faut une preuve réciproque
« de ces obligations. Mais ici il y a un acte préexistant y
« une convention réd igée, qui contient les obligations
« du vendeur et de l’acquéreur. Si l’on vouloit y déroger,
« faire un nouvel acte, il est clair qu’il faudroit lui
« donner la forme du contrat de vente , et par consé« quent la fa ire double. Mais on n’a pas voulu cela;
« on a voulu seulement que le premier conti’at fût
« exécuté : celui qui ratifioit n’a eu besoin que de
f< renoncer au droit qu’il avoit d’attaquer l’acte, et
cc l’autre, dont le droit et les obligations restoient les
« m êm es, a dû par conséquent ne rien faire, si ce
« n’est recevoir la ratification............. On ne peut pas
« dire non plus que dans cet état de choses une partie
« ne puisse fo r c e r l’autre à exécuter l ’acte........... Elle
« est liée par le précédent contrat.........On défie Daudin
« de r a p p o r te r un seul préjugé qui ait la moindre ana-
�( 5i )
« logie avec l’espèce dans laquelle il se tro u v a Daus
« toutes celles-là il n'y avoit pas de co n tra t, et ces
« actes informes ont dû être annullés. » Il faut d o n c, suivant le sieur Capelle lui-m êm e, que
la ratification soit faite d ou b le, lorsqu'il n y a pas de
contrat préexistant, parce qu’alors la ratification est
moins une ratification qu’une vente.
En avouant ces principes, enseignés d’ailleurs par
tous les auteurs, il s’est jugé lui-même.
Qu’entendons-nous, en disant, lorsqu'il n'y a pas de
contrat préexistant ? Toute ratification suppose néces
sairement un contrat antécédent.
Nous entendons un contrat qui ait pu produire quelque
engagement.
,
Nous entendons un contrat fait par celui même qui
ratifie , ou au moins au nom de celui qui ratifie.
Si le contrat est absolument n u l, s’il n’a pu produire
aucun engagem ent, s’il est nul dans le principe, et ab
initio , pour se servir de l’expression des auteurs, l’acte
par lequel on ratifie n’est point une ratification ; c’est
un nouveau contrat : il n’y a point deux contrats, il
•n’y en a qu’un. Tune e s t , pour se servir des expres
sions énergiques de Dumoulin , nova et principalis
dispositio.
Si l’acte est étranger, à celui qui ratifie, s’il n’a été
fait ni par l u i , ni en son n o m , c’est encore impro
prement une ratification.
, 11 faut éclaircir ceci par des exemples, r
Un mineur devenu majeur ratifie l’acte qu’il a sous
crit en minorité. Il y a un contrat préexistant. A vant
G '2
�(5 0
la ratification , le mineur étoit déjà lié. On sait que
l’engagement du mineur subsiste tant qu’il ne sc fait pas
restituer. L ’acte n’est pas n u l, il est seulement sujet à
être rescindé ; venit annullandus. Il n’est pas nul de nul
lité absolue, il n’est nul que d’une nullité relative. Il
n’est pas même besoin d’une ratification expresse, la
ratification tacite par le laps de dix an s, sans réclama
tion , suffit: et la ratification , soit expresse, soit tacite,
remonte pour l’hypothèque, et a un effet rétroactif au
premier contrat.
Une femme en puissance de mari contracte une obli
gation sans le consentement de son m a ri, ou vend
■sans son autorisation, ou , si l’on veut, avec son autori
sation, une partie de ses biens dotaux. L ’obligation et la
Tente sont absolument nulles , elles n’ont produit aucun
engagement. Si la femme, après la dissolution du mariage,
ratifie, c’est un contrat entièrement indépendant. C ’est
un nouveau contrat dont l’effet ne remonte point au
premier contrat.
Exemple du second cas. Un m ineur, parvenu à la
majorité , ratifie un contrat qu’il a souscrit en mino
rité. Il ratifie un acte de son fait. Un commettant ratifie
ce qui a été fait par son mandataire , quoique hors des
bornes de son contrat. Un particulier dont on a fait l’affaire
à son insu , se portant fort pour lui , ratifie ce qui a été
-fait pour lui. L ’un et l’autre ratifient un acte fait en
leur nom. Dans tous ces cas, même dans les deux der
n iers, il y a un contrat préexistant. Le commettant,
le particulier dont on a fait l’affaire à son insu , en rati
fian t, sont censés avoir contracté.eux-mêmes les enga-
�( 53 )
gcmens qui ont été contractés en leur nom. C’est le cas
de la maxime , R atihabitio mandato comparalur. La
ratification a alors un effet rétroactif, parcequ’elle n’est que
l’accessoire et le complément des actes qui ont été ratifiés.
Mais un tiers vend la propriété d’un particulier. 11
la vend non au nom de ce particulier, mais en son propre et
privé nom ; le particulier ratifie ensuite : la ratification
n ’aura effet que du jour même , et non du jour de la
vente faite par ce tiers. Il n’y a point dans cette espèce
de contrat préexistant. O n ne peut pas appliquer la
maxime , R atihabitio mandata comparatur. On ne
peut pas feindre un m andat, là où le mandataire a
contracté, non au nom de celui q u i ratifie , comme dans
l’espèce précédente , mais en son nom propre et privé ;
non pour l’affaire de celui qui ratifie, mais pour sa
propre affaire : le contrat résiste dans ce cas à la fiction.
Ce que l’on vient de dire est la doctrine de tous les
auteurs.
C ’est principalement à l’occasion du retrait féodal et
d u retrait lignager, qu’ils ont traité la question de savoir
de quel jour la ratification devoit avoir effet pour faire
courir l’an du retrait; et ils la décident par les distinctions
q u ’on vient d’exposer.
Qu’on lise tous ceux qui ont écrit sur cette matière,
ils sont unanimes.
Pour ne pas s’étendre, on se bornera à citer Pothier,
traité des Retraits.
« Lorsqu’un m in eu r, dît - il , part. i erc. ch ap. 4 ,
« n. 124 , a vendu son héritage propre, et que devenu
* majeur il ratifie, c’est du jour du contrat do vente
« que le retrait lignagel* est 'ouvert ; ,caiv>la nullité de
�( 54)
l'aliénation des mineurs n’est pas une nullité absolue,
mais relative , et en faveur du mineur seulement.
L ’acte n’est nul que dans le cas auquel le m ineur, ou
ceux qui succèdent à ses droits , jugeroient à propos
de s’en plaindre. L ’acte par lequel il ratifie en majori té , est un acte par lequel il renonce à s’en plaindre; mais ce n’est pas par cet acte, c’est par la vente
qu’il a faite de son héritage, qu’il l’a mis hors de
sa famille , et c’est cette vente qui donne ouverture
au retrait, et non sa ratification.
et 11 semble , ajou te-t-il, nombre 12 , qu’il en doit
« être autrement d’une vente qu’une femme sous puis« sance de mari auroit faite sans être autorisée , et
« qu’elle auroit ratifiée en viduité. L ’acte qu’elle a fait
« en la puissance du mari est absolument nul. La rati« fication qu’elle a faite en viduité n’est pas proprement
« une ratification , ce q u i est nul ne pouvant être con« Jîrmé. C’est un vrai contrat de vente qu’elle a fait de
« nouveau, par lequel elle a mis son héritage propre
« hors de sa famille. La vente qu’elle en avoit faite
« sous la puissance du m a ri, ne l’en a pas fait sortir
« puisque cette vente étant un acte absolument n u l, ne
« pouvoit avoir aucun effet. 3)
V oilà pour la première distinction entre le cas où l’acte
est nul par lui-meme , et le cas où il est simplement
sujet à être rescindé ; ce que les auteurs expriment par
nullité absolue , et par nullité relative.
V oici pour la seconde distinction entre le cas où celui
qui ratifie , confirme un acte fait par lui , ou par un
tiers pour lui et eu son nom , et le cas où au contraire il
ratifié un acte qui lui est totalement étranger.
o
«
«
«
«
«
«
«
«
«
�( 55 )
« Lorsque la ven te, dit le même auteur au même
« endroit, nombre 1 23, a été faite par un autre que
« par le propriétaire, quoique la tradition soit inter« venue ; ce n’est que du jour du consentement donné
« a la vente par ce propriétaire , qu’il y a ouverture
« au retrait ; car ce n’est que par ce consentement qu’il est
« censé vendre. »
C’est l’espèce dans laquelle se rencontre le sieur Daudin.
La vente a été consentie par la m ère, non comme
tu trice, non en qualité d’exécutrice testamentaire, non
pour les affaires du mineur , puisque l’acte ne constate
aucun emploi ; mais en son nom propre et privé , comme
de chose à elle appartenante. La ratification que le sieur
Daudin en a faite, n’est point une ratification : il n’y a
point de contrat préexistant, e t , de l’aveu même du
sieur Capelle, elle devoit alors être conçue en forme
de vente et être faite double.
Pour prouver qu’il n’y avoit pas de contrat préexis
tant, que la vente faite par la m ère, non en sa qualité,
de tutrice, mais en son nom propre et privé , étoit
entièrement étrangère au m ineur, on ne fera qu'une
question au sieur Cnpelle. La ratification tacite par le
laps.de dix ans, sans réclamation, auroit-elle dépouillé
le sieur D audin? N o n , sans doute..
Il y a p lu s, il n’y a de contrat préexistant, ni de la
part du fils, ni même de la part de la mère.
Il n’y en a pas de la part du f i l s , p u is q u ’ il n’existe
aucun acte de sa p a r t , et que le sieur Capelle n’a pas
môme voulu qu’il entrât dans la vente, pour qu’on ne
pût lui dire qu’il avoit eu connoissance du vice de l’acte.
�( 56 )
Et il n’y en a pas non plus de la part de la mère.
Ceci, sieur Capelle, va vous surprendre ; mais écoutez :
Vous sa v e z qu’il faut trois choses pour constituer la
vente ; la chose, le prix et le consentement : res , pre
tium et consensus. Il faut que le consentement porte
sur la chose et sur le p r ix , sans quoi il n’y a point de
vente. C’est la disposition de plusieurs lois.
Si je compte vendre une chose, et que vous comp
tiez en acheter une autre ; il n’y a point de vente.
Si je compte vendre pour un p rix , et vous acheter
pour un autre moindre; il n y a pas de vente.
Pour quel prix la mère a-t-elle entendu vendre? Pour
la somme de 21600 f r . , puisque c’est le prix porté au
contrat. Pour quel prix Capelle a-t-il entendu acheter?
Pour la somme de ig S o o fr. ; et il n’a effectivement payé
que ce prix. La lettre fatale du 10 août 1783 le prouve.
S istrières, dit Daudin dans.cette lettre, croit encore que
vous n a v e z f a i t de billets que pour 14000 f r . Q uoi
qu'il en s o i t , je ne vous n uirai jamais. V ou s rtCavez
payé ce que vous in a vez promis,
Si la dame Daudin a entendu vendre pour 21600 f r . ,
s’il est constant que Capelle n’a payé et n’a voulu payer
que 13800 f r . , il n’y a donc pas eu de vente. La vente
pèche par une de ses qualités constitutives, par le con
sentement.
Il n’y a donc pas de contrat préexistant, même d elà
part de la mère. C ’est donc mal. à propos qu’on veut
qualifier l’acte du 21 mars 1788 de ratification. On ne
peut confirmer ce qui est n u l, et non-seulement ce qui
edt n u l,• mais ce qui u’existe pas, puisque, par défaut de
consentement,
�C 57 )
consentement, il n’y a pas de vente, même de la part de
la mère.
Ce seroit donc une vente, et non une ratification que
le sieur Daudin auroit souscrite , et elle devoit être faite
double.
L e sieur Capelle veut faire regarder la vente consen
tie par la mère comme un contrat préexistant. Ce contrat
'porte i i 600 f r . , et il n’a payé que 13800 fr. ; il devroit
donc t)ifrir les 7800 fr. restans, puisqu’il demande l’exé
cution de ce contrat. M ais, n o n , il veut retenir, et cet
excédent de prix et le domaine.
L a ratification est nulle en second lieu comme ne con
tenant pas de prix.
L e p rix, dira l’adversaire , n’est-il pas dans le contrat?
O u i, s’il étoit sincère ; mais on a v u , et il est prouvé
qu’il étoit simulé.
M aintenant, quelle est la convention que le sieur
Daudin a ratifiée ? Il a consenti, si l’on v e u t, que le
sieur Capelle demeurât propriétaire; mais est-ce moyen
nant le prix réel qu’il a donné, ou moyennant le prix
simulé? E st-ce moyennant la somme de 13800fr ., ou
moyennant celle de 21600 fr. ? C’est ce que la ratification
11e dit pas , et ce qu’elle devoit dire. Il y avoit d’autant
moins d’inconvénient, que la ratification ne devoit pas
paroître aux yeux de la m ère, qu’elle devoit demeurer
entre les mains de Capelle.
- Enfin la ratification est n u lle, comme étant vague et
générale. Il faut encore développer les principes à cet
II
�, ( 58 3
égard. Ils sont consacrés dans la loi m êm e, dans la loi
nu Gode, S i m ajorjfactus alienationem Jactam ratam
h a b u erit, livre 5 , titre 74 : voici les termes de cette
loi.
S i sine decreto prœsidis prœdia tua à tutore tuo
alienata s w i t , nec speciali conjirmatione, vel ( si bonâ
Jîde p ossessorfuisset) statuti temporis excursu id quod
perperàm est actum , fu era t stabilitum , prœses provinciœ possessionem in ju s tuum retrahet.
La ratification doit donc être spéciale. Une ratifica
tion en termes vagues et généraux, qui ne désigne pas
même l’acte qu’on ratifie, ne suffit pas.
L a ratification doit être expresse et faite nom matïm ,
dit Pérésius, sur le titre 46 , au Code, livre 2 : S i major
jfactus ratum habuerit. Car si l’on confirme un acta
ou des actes en gén éral, sans exprim er, ni leur objet,
ni leurs clauses principales, ni le temps où ils ont été
passés, la convention est radicalement nulle par la seule
indétermination des choses qui en font la matière , et
par l’impossibilité d’assigner, d’une manière fixe et cer
taine , l’objet sur lequel a porté le consentement des par
ties contractantes.
L ’adversaire ne peut se dissimuler les termes de la loi ;
il cherche à les interpréter. Suivant l u i , si la loi exige
que la ratification soit spéciale, c’est en ce sens, qu’il faut
qu’il paroisse que celui qui a ratifié a eu connoissance
de l’acte ; mais en induire qu’il faut spécifier la nature,
les clauses, la date, le nom du notaire qui l’a reçu, c’est
une puérilité qui n’a été ni pu être dans l’esprit du
législateur,
�( % )
O r , ajoute-t-il, le sieur Daudin peut-il dire qu’i l n ’a
pas eu connoissance de l’acte, tandis que d’un autre côté
il soutient que c’est lui qui a traité, que c’est lui qui
a reçu le p rix?
D ’abord , on pourroit répondre, en admettant la res
triction que l’adversaire veut donner aux termes de la '
loi , qu’il ne suffirait pas qu’il fût constant d’ailleürs
que celui qui ratifie a eu connoissance de l’acte ; qu’il
faut que l’acte en renferme lui-même la preuve, probationem probatam ; qu’un acte doit contenir par lui-même
tout ce qui sert à en constituer la valid ité, toutes les
formes essentielles.
Mais l’adversaire interprète encore mal la loi. Lors
que la loi exige que la ratification soit spéciale , ce n’est
pas seulement afin qu’il soit établi que celui qui ratifie
a eu connoissance de l’acte ; il faut non-seulement qu’il
soit établi qu’il a eu cette connoissance, mais encore qu’il
a eu intention de réparer le vice de l’acte. C’«st prin
cipalement celte intention , et la manifestation de cette
intention , que la loi requiert.
Les interprètes ne l’ont jamais entendu différemment.
On a déjà cité Pérésius ; on pourroit citer Dum oulin,
l’Epine de G rainville; mais une autorité plus remarqua
ble, est ce qu’on lit dans le Projet du Code civil, art.
229 du livre 2, qui n’est que la transcription de ce que
Dumoulin avoit enseigné. « L ’acte confii’matif, dit cet
« article, suppose un contrat antérieur, et un contrat
« valable. Si l’acte confirmé est radicalement nul, il n’est
« point validé par la simple confirmation, à moins qu’elle
« n’éaonce la connoissance de la nullité du prem ier, avec''
II 2
�('6°)
« rintention de la réparer, qu’il n’en rapporte la sub
it stance, et ne contienne la déclaration de la volonté de
« lui donner l’exécution. »
L e sieur Daudin ne désavoue pas avoir eu connoissance de la vente ; mais il faut que l’acte porte la ma
nifestation de l’intention de lui donner l’exécution.
E t comment supposer cette intention, si le vice n’est
pas énoncé, si l’acte n’est pas même rappelé? C’est pour
que cette intention ne pût être équivoque , que la loi
a voulu que la x'atification fût spéciale.
On ne peut pas môme dire quel est l’acte que le sieur
Daudin a voulu ratifier. La ratification, pour s’étendre
à to u t, né s’applique à rien ; pour trop signifier, elle
est insignifiante.
On a vu comment elle est conçue : Je soussigné , est« il d it, approuve et ratifie les actes que ma mère a
« consentis en faveur de M . Capelle, conseiller, du do« maine de Yernet et tout ce qui en dépend, et pro« mets de l’en faire jouir en vrai propriétaire. »
Quels sont ces actes qu’il approuve et ratifie? Sont-ce
des contrats de vente , des baux emphytéotiques , des
échanges, des donations même ?
O n a cru écarter cette objection en disant que le sieur
Daudin Fa suffisamment expliqué en ajoutant, promets
Ten fa ire jo u ir en vrai propriétaire. Mais c’est rentrer
dans la difficulté ; car tous les actes qu’on vient d’énon
cer sont translatifs de propriété.
11 n’est pas dit Tacte, il est dit les actes ; ce qui em
brasse, par la généralité de l’expression, les actes au
thentiques, les actes sous signature p riv ée, les contre-
�( <5i ).
lettres, les quittances, les décharges et toutes les con
ventions quelconques qui pourroient être intervenues
entre la dame Daudin et le sieur Capelle.
Il est dit,.Zw actes, et cependant il n’en paroît qu’un.
L e sieur Daudin convient bien avoir eu connoissance
de la vente •, mais il ne convient pas avoir eu connois
sance d’autres actes, et on ne prouvera pas qu’il en a eu
connoissance. La ratification s’étend à tous ; elle est donc
n u lle, de l’aveu même du sieur Capelle, et d’après l’in
terprétation qu’il donne lui-même aux termes de la l o i ,
relativement à ces actes dont il n’a pas eu connoissance.
Si elle est nulle pour les un s, elle est nulle pour l’autre.
Il n’y a pas deux ratifications, il n’y en a qu’une: on ne
peut pas la diviser : on ne peut pas la déchii'er en partie.
Mais toute ratification doit au moins être postérieure
à l’acte qui est ratifié. O r, qui ne voit qu’elle a précédé,
qu'elle a été remise à l’avance ?
Capelle, ainsi que nous l’avons d it, étoit incertain s’il
prendroit un bail à locaterie perpétuelle pour éviter le
droit de lo d s, ou s’il prendroit une vente. Dans cette in
certitude, il se fit remettre une ratification en termes gé
néraux et à toutes fins.
T e l est l’acte qu’il oppose. T e l est l ’a cte qu’il produit
avec confiance, dont il fait le principal moyen de sa
défense.
*
Il argumente des lettres ù lui écrites par Daudin. Dans
l’uue, ce sont des renscignemens sur la forme-: dans
�^ (62)
l’autre, celle du 10 août 1783, Daudin dit qu’il ne lui
nuira jamais auprès de Sistrières: dans une autre, il parle
d’une rente réclamée par le seigneur de Valadi ; il ter
mine par lui faire des complixnens -, car l’adversaire a été
jusqu’à relever cette circonstance.
Que signifient ces lettres, écrites toutes en m inorité,
puisque Daudin n’a été majeur que le 2 septembre 1787?
Ces lettres seraient tout au plus une suite de la vente.
Mais qui sait mieux que le sieur Capelle que ce qui n’est
que la suite, l’exécution d’un acte, n’en est pas la ra
tification ?
Il fa u d r o it un engagement form el, une intention bien
manifeste de ratifier; et quand les lettres contiendroientcet
engagement, il resteroit à opposer ce qu’on a opposé
contre la ratification du i ei\. mars 1788, que l’acte devoit être fait double.
Q U A T R I È M E
O B J E C T I O N .
Prescription de 10 a n s , avec titre.
On sait qu’en pays de' droit écrit on prescrit nonseulemcnt l’hypothèque, mais encore, si l’on veu t, la
propriété , avec titre et bonne foi, par dix ans entre pré
sens , et vingt ans entre absens. L e sieur Capelle a cru
pouvoir invoquer cette espèce de prescription, admise
en pays de droit écrit, et rejetée par plusieurs Coutumes,
notamment par celle d’Auvergne. Il a soutenu que si la
vente consentie par la m ère, en son propre et privé nom,
ne lui avoit pas transféré la propriété, elle étoit au moins
�( 63 )
un titre apparent, suffisant pour prescrire; qu’au titre
il joignoit la possession pendant le temps requis par la
loi ; qu’ainsi, dans tous les cas, la réclamation du sieur
Daudin seroit tardive.
On prescrit par dix ans, avec titre; il faut ajouter,
et avec bonne f o i . Il ne suffit pas d’un titre apparent,
il faut encore la bonne foi. Qu’entend-on par bonne
foi? L ’opinion d’avoir acheté du véritable propriétaire,
opinio quœ siti dominii.
L e sieur Capelle avoit-il cette opinion? A - t - il cru
avoir acheté du véritable propi*iétaire ? Il a pris soin
encore de fournir des armes contre lui. Qu’on lise sa
requête du 6 floréal an 9 , il y fait lui-même l’aveu du
contraire. On n’en rappellera que ces expressions qu’on
a déjà citées : « Rassuré , est-il d it, p arle pouvoir que le
« testament, dont il avoit connoissance , avoit donné à
« la veuve D audin, par l’emploi utile du p rix , il se
« croyoit propriétaire irrévocable. »
A v o it-il la bonne foi lorsqu’il a pris la ratification ?
Est-ce pour prouver qu’il avoit acquis de bonne foi ,
qu’il a produit la lettre du 10 août 178 3 ?
A u titre et à la bonne foi il faut joindre la posses
sion de dix ans utiles ; e t , d’après le calcul même de
l ’ adversaire, il ne s’est point écoulé ce temps.
Il convient qu’il ne faut compter que pour moitié le
temps de l’absence de Daudin ; et par absens on sait qu’il
faut entendre, en cette m atière, n o n -seulement ceux
qui sont véritablement absens, qui sont hors du terri
toire français , mais même ceux qui sont domiciliés dans
des ressorts différens ; non-seulement ceux qui étoient
�...
(64)
alors domiciliés dans des parlemens , mais même dans
des bailliages diiFérens. Il ne faut donc compter que pour
moitié le temps qui s^est écoulé depuis le 2 septembre
1787 , date de la majorité de Daudin , jusqu’au 11 dé
cembre 1790., date de la suppression du bailliage de
V ie , lieu du domicile de Daudin , et de l’installation
du tribunal de district d’Aurillac , au ressort duquel il
a été réuni ; ce qui présente 1 an 7 mois et 24 jours
seulement de temps utile; à quoi ajoutant 8 ans îô
mois et 24 jours écoulés depuis , jusqu’au 4 vendémiaire
an 8 , date de la réclamation de Daudin , correspondant
au 26 septembre 1799 , il s’est écoulé 10 ans 6 mois et
18 jours : mais on connoît la disposition de la loi du i5
germinal an 3 , qui a relevé de la prescription et de
tout autre délai emportant j i n de non-recevoir tous les
détenus à l’occasion de la révolution , pendant le temps
de leur détention, et même j u s q u à la publication du
décret. Le sieur Daudin.a été reclus le 24 messidor an 2.
L ’arrêté du comité de sûreté générale qui l’a rendu h
la liberté , est du 17 pluviôse an 3. Si on déduit ce
temps de sa réclusion on. verra qu’il ne s’est pas écoulé les
dix ans utiles. Ainsi disparoît cette quatrième objection.
Tels sont les moyens que le sieur Capelle a fait valoir
pour, se maintenir dans son injuste possession. On croit
les a v o i r suffisamment combattus. O n croit avoir démontré
le bien jugé, du jugem ent, en ce qu’il l’a condamné à
se désister d’un domaine aussi illégalement acquis.
L ’ a p p e l qu’il a interjeté ne porte pas seulement sur
cette disposition.
il est appelant , en second lieu , en ce que le sieur
Daudin
�( 65)
Daudin n’a pas été condam né, comme stellionataire, ^
le faire jouir , sinon à lui rembourser l’entier prix porté
au contrat de vente , frais et loyaux coûts, et dommogesintérôts ; qu’il n’a été condamné qu’à lui payer la somme
de 1 3800 f r . , pour le prix de la vente. Cette seconde
disposition n’est qu’une suite de la précédente. Le bienjugé de l’une entraîne nécessairement le bien-jugé de
l’autre. Il est inutile de s’arrêter davantage sur ce se
cond clief.
O n ne dira qu’un mot sur la qualification de stellio
nataire. Qu’est-ce que le stellionat ? c’est le délit de celui
qui vend la même chose à deux , qui , après avoir vendu
à un , vend à un autre. Pour qu’il y eût stellionat ,
il faudroit qu’il y eût une première vente consentie à
Capelle par Daudin ; il faudroit que Capelle eût acheté
valablement , ou de la m ère, ou du fils. E s t - il dans
cette position ? On a vu comment il a surpris le consen
tement de l’une , comment il a abusé du délire de l’autre.
Est - ce le sieur Capelle qui inculpe Daudin de fraude ?
Q u is tulerit Gracchos de seditione querentes!
Il est appelant , en troisième lieu , en ce que sur la
demande en garantie solidaire il a été ordonné une plus
ample contestation.
Ici le sieur Daudin est loin de s’opposer à l’infirmation
de celte partie du jugement. Il est lui-inême appelant en
cc chef. Il a le même intérêt que le sieur Capelle, celui
d’éviter, et les frais, et les longueurs d’un nouveau procès.
lie tribunal n’hésitera sans doute point a accueillir leur
appel, à les sortir d’affaire par un seul et même jugement.
�(66)
La loi qui veut que dans toute cause il y ait deux
degrés de juridiction , ne s’y oppose point. On connoît
le jugement du tribunal de cassation, d u ...........................
qui a jugé que lorsque le tribunal de première instance
a jjrononcé sur certains chefs et ordonné une plus
ample contestation à l’égard des autres , le tribunal
supérieur , saisi par appel de la connoissance de ceux
sur lesquels il a été fait droit définitivement, peut statuer
sur le tout ; que ce n’est point là 1 évocation défendue
par les nouvelles lois ; et cela, pour que les parties ne
soient pas exposées à subir autant d’appels qu’il y a de
chefs de demande.
Ceci n é cessite d’entrer dans le mérite de la demande
même. Il sera facile d’établir qu’elle ne peut épouvanter
le sieur Daudin.
Garantie solidaire.
L ’adversaire commence par faire rémunération des
actes préparés, médités, concertés entre le fils et la mère
et Desprats, pour lui enlever tout à la fo is, et sa pro
priété et le gage dé sa garantie.
7 octobre 1790 , et 28 novembre 1792 , actes par
lesquels la dame Daudin se reconnoît débitrice envers
son fils de 47660 f r . , inscrits le 3 messidor an 7.
7,8,9
11 nivôse an 6 , ventes par la dame
D audin, à différens particuliers , pour plus de 40000 fr .,
toutes tra n sc rite s le 4 vendémiaire an 8.
6
c o m p lé m e n ta ir e an 7 , inscription par Louise et
Elizabetli Sobrier , sœurs do la dame D audin, pour
�( 67 )
1200 fr. , en vertu d’un testament du 30 septembre 1778.
D u même jour , inscription de 3000 fr. dûs à AnneRose A b eil, belle-sœur de Daudin, sur la dame sa m ère,
en vertu d’un acte du 2 complémentaire an 7.
7
brumaire an 8 , inscription de i 5ooo fr. par Gabriel
Cliaunac, beau-frère de D au d in , sur la dame Daudin ,
sa belle-mère, en vertu de deux testamens du i 5 février
1766, et 3 avril 1773.
2 vendémiaire an 8 , vente par Daudin audit Gabriel
Cliaunac, de ses créances mobilières, moyennant 10000 fr.
i 5 vendémiaire an 8 , transcription de la vente passée
entre Daudin etDesprats , sous la date du 2 vendémiaire,
même jour de la vente consentie à Chaunac.
Ne voit-on p a s, s’écrie le sieur Capelle , le concert
de fraude ? Ne voit - on pas que l’on a cherché par
tous ces actes à mettre à couvert la fortune de la mère ;
qu’on a voulu la constituer en faillite frauduleuse ?
O r , a jo u t e - t - il, ceux qui coopèrent à la fraude ,
ceux qui sont complices d’une faillite frauduleuse , sont
personnellement responsables , et responsables par corps.
Ce n’est pas dans l’espoir du succès, c’est dans l’intention
de jeter de la défaveur sur le sieur D audin , qu’on a élevéune prétention aussi chimérique.
Il n’y a point de com plicité, là où il u’y a point de
fraude. Il n’y a point de fraude : on n’a pas cherché y
comme il s’en plaint, à lui enlever le gage de la garantie,
s’il n’y a point de garantie, s’il n’a aucune action en ga
rantie à exercer, 011 ne dit pas contre le fils , mais meme
contre la mère.
Il 11’y a point de garantie , là où il n’existe point d’engaI 2
�C68)
gement : or il n’en existe point. On a prouvé plus haut
que le contrat de vente ne peut produire aucun enga
gement , même de la part de la mère. E t , en effe t,
moyennant quel prix a-t-elle entendu vendre ? Elle a
entendu vendre moyennant la somme de 21600 francs.
Capelle n’a entendu acheter et n’a acheté que 13800 fr.
Les parties ont donc été divisées sur le prix. Il n’y a
donc point eu de consentement. S’il n’y a point eu de
consentement, il n’y a point de vente. Il ne s’agit pas
ici de restitution , il ne s’ a g it pas de nullité : c’est plus.
I/acte n’est pas seulement n u l, il n’a pas existé; il n’y a
point de vente. L e prix est de l’essence de la vente : il
n’y a point de ven te, si les parties ne sont pas d’accord
du prix.
. Secondement, il n’y a pas lieu ù garantie, c’est-à-dire ,
à dommnges-intérêts , lorsque l’acquéreur a connu le
vice de la vente *, l’acquéreur ne peut en ce cas prétendre
que la restitution du prix. La loi dernière, C. Em ptor
conimunia de h g a tis, en a une disposition précise.
E m ptor sciens rei graçam en, adçersus venditorem
actianern habeat tantùni ad restitutionem p r e tii, nec
ex duplœ stipulatione locum haheat, cùm sufficiat ei
yro preiio quod sciens dédit pro re aliéna satisjieri.
. 'O n sait que ceux qui sont d’une opinion contraire,
qui pensent que la pleine garantie est due lorsqu’elle a
été stipulée , soit que l’acquéreur ait connu ou non le
yice de la ven te, prétendent que cette loi Ernptor est
-uue loi particulière pour les choses comprises au legs
et lidéicominis, par la grande faveur que les legs et les
üdéicommis, et généralement les dispositions des mou-
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rans, avoient chez les.Romains. M ais, en admettant cette
interprétation., le sieur Capelle se rencontreroit précisé
ment dans l’espèce de cette loi. Le fils avoit été institué
h éritier, la mère avoit été nommée exécutrice testamen
taire. Elle devoit en conséquence veiller davantage à la
conservation de l’h éréd ité, à la conservation des biens
compris dans l’institution , au lieu de les aliéner*. D ’un
autre côté, l’adversaire n’a point dissimulé avoir connu
le testament ; il auroit donc sciemment concouru avec ln
mère à l’inexécution de la volonté du testateur -, il seroit
donc dans le cas de la loi j e t, aux-termes de cette l o i ,
quelque cia use, qu’il ait stipulée, nec ex duplüü stipulatio n e , il ne peut exiger que la restitution du pri*.
Il
ne peut donc prétendre qu’on a cherché à frauder
la garantie quant aux dommages-intérêts, et il ne peut
dire que les actes dont il a fait l’énumération ont été
consentis en fraude de la garantie , quant au p r i x , puis
que le sieur Daudin a toujours offert, et par conclusions
précises, de lui faire raison de la somme de 13800 f r . ,
prix réel de la vente.
; Ces offres prouvent sa franchise et sa loyauté.
lie sieur Capelle, qui a exercé pendant plusieurs années
les fonctions honorables de la magistrature, n’ignore pas
que le mineur n’est tenu de rendre les deniers qu’il a
perçus, qu’autant qu’il en a profité par un emploi utile
et avoué par les lois : Qttatenùs in rem vers uni.
Daudin pouvoit donc se dispenser-de faire ces offreè;
il les a faites : il n’a donc point colludé pour faire perdre
le sieur Capelle ï
Et le sieur Capelle, qui l’accuse de fraude , réclame ce
�/
(
)
qu’il n’a même pas payé. Il réclame la somme de 21600 fr.
indépendamment de ses dommages-intérèts, tandis qu’il
est prouvé qu’il n’a payé que 13800 fr.
Et quels sont les actes sur lesquels il fonde la preuve
de collusion et de fraude ?
L a vente consentie à Desprats ! Mais cette vente doit
lui être indifférente ; il doit lui être indifférent d’être
condamné à se désister d’un domaine envers l’un ou
envers l’autre.
Les deux actes par lesquels la mère s’est reconnue
débitrice envers lui d’environ 48000 fr. ! Mais le sieur
Daudin lui a d it, dans son interrogatoire, que ces actes
avoient.eu pour motif des arrangemens de fam ille; que
loi’squ’ils avoient été souscrits , ils ne l’avoient point été
en vue de les lui opposer,
Les inscriptions faites par les créanciers, parens, si
l’on veu t, ou alliés de Daudin ! Mais elles ont été faites
en vertu de titres anciens qui ne sont du fait, ni de la
dame D audin, ni de son fils.
L a vente faite par Daudin à Clxaunac de ses créances
mobilières ! Mais Daudin n’a-t-il pas pu disposer de sa
chose propre? Est^il, a-t-il jamais été le débiteur du
sieur Capelle ? Quel titre le sieur Capelle a-t-il pour
être le scrutateur des spéculations qu’il a pu faire ?
Enfin on va plus loin. Auroit-il colludé ; il auroit
colludé , non pour commettre une fraude , mais pour
s’en rédimer, Seroit-il repréhensible?
Que voit-on dans cette cause ? D ’une p a r t, tin jeune
homme sans expérience, livré ù la fougue de l’â g e , et
�(
71
)
emporté par une passion ardente ; de l’autre, un ju g e ,
un ancien magistrat , faisant céder ses devoirs à son
ambition.
C’est entre eux que la cour a à prononcer. Est-ce le
sieur Daudin qui doit redouter le jugement?
P A G È S - M E I M A C j jurisconsulte.
M A L L E T , avoué.
A R I O M , de l'im prim erie de L a n d r i o t ,
la C o u r d ’appel. — A n 12.
seul im prim eur de
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Daudin, Eléazard-Rostang-Etienne. An 12?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meymac
Mallet
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
Description
An account of the resource
Mémoire pour Eléazard-Rostang-Etienne Daudin, propriétaire ; contre François Capelle, ci-devant conseiller au bailliage et siège présidial d'Aurillac ; en présence d'Antoine Desprats, et de dame Marguerite Sobrier, veuve de Jean Daudin.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 12
1773-Circa An 12
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
71 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0532
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Vernet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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Abus de confiance
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