1
100
2
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53916/BCU_Factums_M0721.pdf
808db62bec3130c62199874b12efda15
PDF Text
Text
> +• + +T A
viv • o
r +j*++;v *?,> V «fo
■î'êrïimA
*i
«¿>
->«iV
+^ Jî.
4
o
m ém o ire s i g n i f i é
P ou r
Jeanne
Julhe,
Veuve de J e a n B r i o u d e ,
Maître C o r d o n n ie r habi
tants de la Ville d’Aurillac,
Défendereffe.
C ontre Me. J e a n -B aptiste
B o u c h i n c a n t , Prêtre,
Principal du Collège de cette
Ville Demandeur.
,
ne
L
I
s’agit quant à préfent que de décider d u
téim
erdes L ettres de refcifion prifes p ar le fieur
Bouchincan t contre les confentements & les offres
faits en Ju g e m e n t p ar Jeanne B a ftid e , dont il
eft héritier.
FAITS.
D u M a ria g e de V in ce n t B aftide & Jeanne R iv i e r e étoient
provenus fix Enfants ; fç a v o ir P i e r r e , autre P ierre , A n t o i n e ,
G uillaum e , M a rie & M a rg u e r ite .
�G u ill a um e Bafti de fut Pe re de Jeanne , qui époufa G é r a u d
B o uc h in c an t , & qui a difpofé de fes Biens en fave ur du
iieur Bo uc h in c an t > au préjudice de fa Famille.
M a r i e Baftide eft repréfentée par la DéfenderelTe fa Fille.
V i n c e n t Baftide fit fon T ef t am e nt le onze A v r i l mil fix
cent quatre v i n g t - f i x , par lequel il légua à titre d ’inftitution différentes fommes à chacun de fes Enfants , &
inftitua Jeanne R i v i e r e fa Fe m m e fon h é r i t i è r e , à la ch arge
de rendre à tel de fes Fils ou Filles q u ’elle votidroit chojiir.
L e ving t - f e p t F é v r i e r mil fix cent quatre vi ng t - neuf
ladite R i v i e r e reftitua c e Fi déi com m is h M a rg u e r it e Baftide
f a fille.
C e l l e - c y par fon T e ft a m e n t du v i n g t - q u a t r e D é c e m b r e
mil fix cent quatre - vi n g t - dix - n e uf laiifa à fa M e r e l'iilufruit de fes Biens , & inftitua héritiere M a r i e Bafti de fa
Sœur.
Jeanne R i v i e r e a joui de tous les Biens en vert u de ce
T e f t a m e n t ; elle fe retira dans la maifon de Gu ill aum e
Baft id e , où elle porta tous les meubles & effets de la
fucceflion de fon M a r i , & elle y eft décédée.
Guil la um e & Jeanne Baftide ont continué fuccefilvement
de jouir des Biens provenus de V in ce nt & M a rg u er it e
Baft id e fur le fondement de leurs Cré anc es.
E n mil fept cent c in q u a n t e - un la DéfendereiTe en a
demandé le cléfiftement a v e c reftitution des Fruits depuis le
décès de Jeanne R i v i e r e , & a conclu à une provifion.
Jeanne Baftide a donné les mains à cette demande par
des déclarations précifes repétées dans toute la Procédure
& qui ont étç acceptées ; on en rendra com pt e dans un
m om en t.
L e fieur Bo uchi ncant fon héritier a repris l’inftance &
obtenu des Lettres de refeifion , la demande en enté rine me nt
de ces Lettres a été jointe pour y être fait droit par un préalable.
MOYENS.
L e fieur Bouch in can t s’o c c u p e vainement de faire compulfer
la minute du T e f t a m e n t , de M a rg u er it e Baftide & d’en con-
�tefter la validité , fî l' approbation & les confenteirents donnés
par Jeanne 13ailide qu'il rcpiefente en aiîurent Inexécution .*
or ces «ipptobaticns remontent m êm e à la date du T ef ia m en t.
E n ciiet à quel titre J ea nn e R i v i e r e a-t-elle joui des Biens
en queftion , ii ce n’eft en vertu du T e i l a m e n t de mil iîx
cent quatre - vir^gt dix - n e u f , qui lui en ac co rd oi t l’ufufruir.
Inutilement diroir-on qu’elle jouifloit comme C r é a n c ie r e ;
cette qualité ne fuffit pas pour dépoiîeder les Propriétaires,
à moins d ’un J u g e m e n t qui prononce l’envoi en pofleffion ,
ou d’un traité pafîe a vec les Héritiers ; il n’y a que le
Teilament qui puifle juilifier cette poiTelIîon , & en faire
reconnoître l’origine.
Jamais Gu ill a um e Bafti de ni les autres enfants de V i n c e n t
Baftide n’ont entrepris de critiquer ce T e i l a m e n t , on t r o u v e ’
au contraire , dans la foule des T it r e s qui ont été c o m m u ni
qués , des p r e u v e s , que la plupart d ’entr’eux ont a p p r o u v é
Teilament par la demande , la ceflion , ou la reception
leurs L e g s particuliers.
Il eft fi peu vrai que la V e u v e Bo uc hi nca nt ou fon Pe re
le ioienc jamais coniiderés c o m m e Propriétaires de partie
des Biens , que Gu illaum e Baftide a ya nt été aiïigné en mil
•ept cent feize par Bern ard R i v i e r e C r é a n c i e r de la fucceifion
V incent Baftide , opp ofa qu’il étoit C r é a n c i e r antérieur
^ préférable , & prit même des conclufions hy po th éca ir e s.
Par une écriture du douze Juillet mil*fept cent d i x - n e u f ,
e même Gu ill aum e Bafti de déclara q u ’il ne prétendoir rien
^ n s la fucceifion de M a rg u er it e Bafti de c om m e h é r i t i e r ,
clu il s’en tenoit à fes créances.
Jeanne Baftide a joui des Biens après la mort de fon
^ ere , elle a fuccedé à fa pofîeiîion y elle avoit connoiflance
Teilament de Ma rgu er ite Baftide , qu’elle a trouvé parmi
^es autres Papiers ; elle avoit connoiflance de la Procédure
cle «»il fept cent feize ; puifque c ’eil elle qui l’a communi
quée , auili n’a-t-elle pas imaginé de contefter le défiftement
doma ine , elle s’eft renfermée dans fes créances.
, Il ne faudroit que l’intervalle de filence qui s' e i l écoulé
depuis le T e i l a m e n t de mille .fix cent q u a t r e - v i n g t - d i x - n e u f
4
�jufques en mil fept cent trente - quatre , époq ue du décès de
G u il la u m e Baftide pour valider le T e ft a m e n t , qui d’ailleurs
a eu l’ éxé cution la plus complette , confirmée par des a v e u x
& des déclarations irrévocables.
D e ces obfervations préliminaires , il réfulte que Jeanne
Baf ti de n’auroit pas été recevable à attaquer le Tef ta m en t
lors de la demande en défiftement , formée c o n t t ’elle en
mil fept cent cinquante - un. Il n ’eft donc pas étonnant
qu ’elle fe foit bornée alors au rembourfement de fes créances.
P a r fa Re qu ê te du dix-fept Juillet mil fept cent cinquanteun , elle déclara qu’elle étoit prête d’abandonner les Biens ,
étant payé e des créances dont elle fait le d é t a i l , foutint qu’elle
ne pouvoit être dépoiTedée qu’après ce rembourfement , en
ajoûtant qu e fi la Succeflion étoit plus confidérable , elle
établiroit qu’il lui en appartenoit moitié , mais qu’ayant plus
d ’intérêt à être p ay é e de fes créances , elle s’en départoit ;
en conféquence elle demanda a fte par fes conclufions , de
fes offres , de fe défifter des Biens , & de com pt er des
jouiiTances , étant p ay é e de fes créances. Q u e l la ngage plus
p o fi ti fî
Si l’on prétend q u ’ il a été tenu par erreur , & dans
l ’ignorance des nullités qui infeftoient le T ef t am e nt , il n’y a
p ou r fe defabufer q u ’ à lire la R e q u ê t e du d i x - h u it A v r il
mi l fept cent cinquante - deux ; Jeanne Baftide y déclare
q u ’elle feroit en droit de r e t r a c e r fon confentement donné
p ar erreur , attendu qu’elle a appris depuis par l ’infpeftion
de la Minute , que le T ef t am e nt de Ma rg u er ite Baftide du
v i n g t - quatre D é c e m b r e mil fix cent quatre - vin g t - dix - n e u f,
n’étoit p a s ' f i g n é par G é r a u d R o u g i e r e l ’ un des T é m o i n s ,
& qu ’il n’y a v o i t que qnatre T é m o in s fignataires , qu’elle
a vu aufli le T ef t am e nt de C ef a ir e Julhe qui lui don no it
droit pour moitié dans la propriété du D o m a in e que néan
moins elle offre de fe d é f i f t e r , confent à l’eftimation des
jouiiTances , & de venir à un compte.
T o u s ces confentements turent acceptes : en cet état
intervint une première Sentence le quatre Ma i mil fept cent
cinquante - de ux , portant que J ean ne Bafti de juftifieroit
�dans huitaine de fes T it r e s de créance , le temps p a i T é , e I le
e il condamnée au défiftement des Biens.
Pat line fécondé Sentence du lept Juillet mil fept cent
cinquante - deux , il fut ordonné que les Parties conviendroient
d ’Ex pe rt s pour eftimer les jouiffances , la même Sentence
donne a£te de la nomination de D e v e z e E x p e r t pour Jeanne
Bai tide , & de Lefpinats pour la DéfendereiTe.
Les E x p e r t s firent & affirmèrent leur rapport. V o i l a donc
des confentements & des Jugem en ts contradictoires rendus
irréfragables.
O n n’omettra pas qu’ à l’égard du T e ft a m e n t de C e fa i re
Julhe Frer e de la DéfendereiTe Jeanne Bai tide en a v o it
l o n g - t e m p s avant abandonné l'effet , foit en confentant que
Uéfendereffe acquitât les frais funéraires & les detres de
c ette fu cc e il i o n , foit par fa déclaration produite dans l’inilance,
qu'elle n’a profité en aucune maniéré de cette fucceilion j
011 fe difpenfe de rappeller dans quelles circonftances ce
T e i ta m e n t fut f a i t , puifque Jeanne Bartide n ’a jamais prétendu
en tirer a v a n t a g e , & ne s ’eil point écartée des engagements
qu on lui avo it impofés.
Q uo iq ue Jeanne Baitide eut annoncé legerement dans fa
dermere écrit ure que ces déclarations avo ient été données
par erreur
elle n’ofa tenter la vo ie de la refciiion.
L e lieur Bouc hi nc ant plus hardi , après a v o ir obtenu fa
fucceifion à force de mouvements & d’importunités a pris
des Lettres , mais ii Jeanne Baftide n’ y étoit pas r e c é v a b l e ,
c ncore moins peuvent - elles lui réuilir.
D é j à quoique le confentement porté par la R e q u ê t e du
- fept Juillet mil fept cent c in qu a nt e - un n ’ait été ac cepté
Qu’ail mois de F é v r i e r mil fept cent cinquante - deux , il e il
Vrai de dire que l ’acceptation a un effet r e t r o a f t i f au jou r
la déclaration ; dès lors les Lettres de refcifion font venues
à tard. Sans affoiblir cette premiere réfléxion , 011 croit p o u v o ir
ei1 propofer d ’autres auili décifives.
^
C ’eit une des notions élémentaires que l’on c o n t r a & e en
Jugement , & que les confentements que l’on y donne , font
aulii irrévocables que c eu x donnés par tout autre A 6 l e
�6
authentique •, il fembîe même que la furprife ne fe préfumant
pas à l ’égard de ce qui fe fait en J u f t i c e , il doit y a voi r
moins de facilité d ’en être reftitué , au moins f a u t - i l les
même s motifs qu’à l ’é gar d des C o n t r a t s paifés pard ev ant
Nota ir es.
O r on n ’ admet d ’autres moyens de refcifion contre les
a ft e s & L*s confentements donnés par des Ma jeu rs , que ceux
qui font tirés du dol ou de la crainte , de la vi olence ou de
l’ig no ran ce de fait-.
E n général même l’approbation d’ un Teft ametit n’eft pas
fufceptible de refciiion , les Auteurs n’ont jamais él ev é le
moindre doute fur ce point. E c ou to ns R ic a rd .
» Si la renonciation à la L ég it im e eft faite après la mort
»du Pere , il n ’y a pas de difficulté qu ’elle eft valable , n’y
» a y a n t en ce cas aucune coniîdération qui en e m p ê ch e
» l ’effet , puifqu’il eft en la liberté de chacun de renoncer à
» u n droit qui lui eft acquis , & cette renonciation étant une
»fois acc omp lie , le Fils ne peut p a s , s’il eft majeur fe faire
»reftituer , foit qu’ elle concerne le droit de légitime en
»e nt ie r , ou une partie , N . 9 7 7 , Part. 3.
Il dit encore dans un autre endroit » que le confentement
» p r ê t é après le décès du Défunt par celui qui a intérêt de
» c o m b a t t r e la D on a ti on ou le T ef t am e n t , le rend non
» recevable à contefter fa difpofition -, la raifon de cette
»refolution refulte de ce que dans l’éxecution d ’une D o n a t i o n
» o u d ’un T e l l e m e n t q u o i q u ’invalide en fo lem ni té, ou e x c e fli f
» e n quantité. Il ne laide pas de s’y rencontrer une O b li g a ti o n
»naturelle qui dépend de la volo nt é du d é f u n t , que l’héritier
»reconrioit par ton app robation , & ce qui étoit capable
» d ’arrêter l’effet de cette volon té , n’eft q u ’ un em p ê ch e m en t
» c i v i l introduit en fa ve ur de l’h é r i t i e r , auquel il peut par
» conféquent r e n o n c e r , c om m e il fait par fon c o n f e n t e m e n t ,
» q u e d’ailleurs les formalités d ’un a £ï e ne fervent que pour
» fa juftification , & pour faire vo ir qu’il eft véritable ; elles
» n e font pas néceffaires , lorfque les héritiers en demeurent
» d ’ acco rd .
L e s mêmes principes nous font enfeignés par M e . Denis
�7
Lebrun , J L i v . 3 . chap. 8. f e & . 1 . par M . Le p re tr e , par
G u e r e t Ion Anno ta teu r , par L a c o m b e ; tous les Auteurs
unanimement n’admettent d ’après l’ O rd onn an ce de 1 5 6 0 ,
d ’autre m o y e n de reiciiîon.à l’é ga r d des M a j e u rs que le dol
& la furprife.
O r il s ’ en faut de b e auc oup que l’on puifTe en imputer à
-la Défenderefle.
D é j à on ne peut pas Pa ccufe r d ’a v o ir eu part à la re d a &i on
du T e ft a m e n t fait l o n g - t e m p s a van t fa naiflance , en f a ve u r
de Marie Balli de fa M c r c . Elle n’a v o it pas môme [’ Ex pé di tio n
de ce T e ft a m e n t en fon p o u v o ir y on vo it qu ’elle afligna
Jeanne Baftide pour être condamnée à le lui remettre.
O n ne peut pas d ’a va n ta g e lui imputer d ’a v o ir iignifié
une copie défe&ueufe de ce T e ft a m e n t , différente de l’e x p é
dition.
Au lieu de cela Jeanne Baftide pour ne pas s’ éga rer
^c on fid éré m en t , confulte la Minute du T e ft a m e n t , dont
1*
E x p é d i t i o n étoit en fes mains ; elle y a vu ou dû v o ir toutes
Jes défeftuofités , Tomiffion de la..iignature d’ un T é m o i n , ;
malgré cela elle periifte à offrir le défiftement des Biens .,
étant rembourfée de fes créances , elle donne les mains à
leftimation des jouilTances , nomme un E x p e r t , acquiefce
à deux Sentences : el l-c e là agir fans connoiflance , fuivre
l ’imprefiion de la fraude de fon Adve rfa ire , ou plutôt e f t - i l
d exemple d ’ une conduite plus refléchie.
, Le concours des confentements donnés & répétés , &
‘ ^cquielcement à la Sentence du quatre M a i mil fept cent
Clr>quante - deux , qui ordonne l’eftimation des jouiflances ,
& en éxecution de laquelle il a été nommé des E x p e rt s de
part de toutes les Parties , rend leur état immuable ,
° n pourroit appeller d ’ une Sentence a r b i t r a l e , à laquelle on
n ’auroit pas acquielcé , on pourroit revenir contre des comp tes ^
l’on auroit ligné trop f a c i l e m e n t , mais quand on a
approuvé & éxécuté un J uge m en t , alors l’état des Parties
e!* c i m e n t é , de forte qu’ilDne peut plus devenir incertain11,
fa're la matiere d ’ une conteftation foumife au foçt'arbitraire
es Jugements.
�8
C ’eft ce que nous apprend l’O rd onna nce de 1 6 6 7 , titre 27 ,
article 3 , qui porte : que les Sentences & Jugements qui
, ,
doivent paffer en force de chofe jugée
font ceux rendus en
dernier reffort
& dont il n'y a point d'appel ou dont l'appel
n'eft point recevable foit que les Parties y euffent fo r m e lle m e n t
acquiefcé ou qu’elles n'en euf f ent point interjetté appel dans le
temps. L ’objet de l ’Ordonnance dans cet article eft de déter
, ,
,
miner quels font les Jugements dont l’autorité e ft i r r é f r a g a b l e ,
qui ne peuvent être reformés , & qui forment entre les
Parties une L o i confiante & in v a r i a b l e : & l ’O rd on na n ce en
tro u ve de trois efpeces , ceux qui ont été rendus en dernier
reffort , o u v r a g e d ’une autorité fupérieure qu ’aucune autre
ne peut r é f o r m e r ; ceux dont il n’y a point d ’appel int er jet té
parc e qu’on ne trou ve fans doute aucun prétexte pour s’élever
contre la fageffe de leur décifion : Enfin c eu x dont l’appel
n ’eft point rec eva bl e , foit qu’il y ait un acquiefcement
f o r m e l , foit qu’il y ait un acquiefcement t a c i t e , refultant
du défaut d ’en interjetter appel dans le temps ; tous ces
J uge m en ts m a r c h e n t , p o u r - a i n f i - d i r e , d ’un pas é g a l , leur
autorité eft la m ê m e , & l’on ne doit pas moins de foumiffron
à un jugement dont l’appel n ’eft pas rec evable , qu’à un
A r r ê t ou Ju g em e nt en dernier reffort.
A la vérité le fieur Bouchincant prétend que ces confentements ont été donnés fans p o u v o i r , mais ce m oy en eft
étranger à la Défendereffe , tant que le Procureur ne fera
pas de favoué , & le défaveu jugé valable , fes cris feront
im pui ffa nts , il eut agi prudemment de s’oc c u pe r com m e Jeanne
Baft id e de l' é tabliffement de fes créances.
M. E S Q U I R O U D E P A R IE U
Me
A R M A N D
,
Avocat.
Me. B E S S E
A
D e l’imprimerie
d
, Confeiller Rapporteur-
, Procureur.
A U R I L L A C ,
n t o i n e
V IA LLA N E S
’A
,
1 773
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Julhe, Jeanne. 1771]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Esquirou de Parieu
Armand
Besse
Subject
The topic of the resource
testaments
experts
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jeanne Julhe, veuve de Jean Brioude, maître cordonnier, habitans de la ville d'Aurillac, défenderesse. Contre Me. Jean-Baptiste Bouchincant, prêtre, principal du Collège de cette ville, demandeur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie d'Antoine Viallanes (Aurillac)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1771
1699-1771
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0721
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53916/BCU_Factums_M0721.jpg
experts
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53050/BCU_Factums_G0801.pdf
b0b30545d194e9b39181c8836fbee9dd
PDF Text
Text
M E M O I R E
A CONSULTER
ET CONSULTATION
S u r la
validité d’un Mariage contracté en Francc
fuivant les ufages des Proteftans,
�ME MOI RE
A C O N S U L T E R,
P O U R Dame M a r t h e Ca m p , Vicomtef f e de
B O M B E L L E S ...
Q
U’ UNE femme confiante foit trahie ,
q u ’u n
h o m m e d e-
v e nu heureux foit perfide, la corruption de nos mœurs a
rendu ces fortes d’événemens fi communs & prefque fi natu
rels , qu’on n’a plus le droit, d’en être
étonné. Mais qu’un
gentilhomme décoré d’un ordre- eccléftaftique & militaire,
après avoir feint- d’abjurer fa religion pour féduire une jeune,
perfonne , défavoue , pour la déshonorer, des actes fignés de
fa main ;. qu'un mari fe rende lui-même l’inftrument de la.dégradation de fon épouf e , & un pere celui de l’ignominie de
fa fille ; qu’il faff e de fa perfonne un trafic infame ; qu’il •
vende par avarice,d es droits qui ne font plus à lui, puif-.
qu’il, les a déjà donnés à l’amour ; qu’enfin, joignant l'infulte
. - A ij
�4'
au menfonge , & la plus étonnante audace à la plus coupable !
impoiture , il provoque
il néceflite lui-même un éclairciÎTe—
m en t, dont fa honte & peut-être fa punition doivent être le
fruit ; un éclairciiTement qui nele,dévoue pas moins à la févé-rité dè la Juftice qu’à^ l’indignation de tous les honnêtes gens : :
c ’eft une de ces fcen.es étranges, qui fe jouent rarement fur le
grand théâtre du m onde., & .c ’e.ft pourtant celle que M . de
Bombelles a voulu abfolument donner.. A qu elle. alternatives
il me réduit ! Il ne m’a point laiiïe <de milieu entre fon op
probre & le.mien. Com ptable envers mon enfant, du rangque
j!ai cru lui affurer avec la vie , je ne puis lui reftituer l’houneur qu’en l’ôtant à cefui de qui elle tient le jour. Jamais peutêtre une. femme n’a eu. à remplir des devoirs iLrigoureux &
des obligations Ci cruelles.
J'ë fuis néé à M ôntauban d’iine famille diilinguée , quoique
fans illuftration, & où depuis long-tems la vertu tient lieu d e .
titres : mes parens y vivent dans une aifance acquife par le com
merce. J’ai reçu-d’.eux une.croyance tranfmife.par. nos ancê^
très ., & . j’ai v u , par leur exemple , que l’honneur , la probité
ctoient de toutes les R eligion s, comme de .tous les Etats. Ja
vivois paifible , je puis même dire refpeûée dans ma Patrie ,
quand ma mauvaife deftinée y am ena.leVicom tede Bombelles.*
J’avois alors vingt-trois ans. lim e vit. Il fut frappé de quelques«
attraits foutenus par. la jeunefle, & . que les larmes n’avoient
pas encore.flétris. Il pauit fe.fixer auprès de moi. O utre ioiis
uniforme ,..il portoit encore la marque attachée au bonheur
d’avoir reçu l’éducation de l’Eçole Militaire ; il étoit décoréde la. C roix de.S. Lazare. A vec ces cautions extérieures de fz^
déliciitefle? aurois-je pu le foupçonner;d’en manquer?..
�y
,
O u i , fans doute : les premieres preuves de ion amour fu
ient une trahifon. Inilruit du culte dans lequel j’étois élevée ,
il affe£h de publier devant toutes mes connoiffances, que
c’étoit celui de fa famille ( i ) : des raifons d’in térêt, difoit-il,
l’obligeoient à diiïïmuler :■
c’étoit avec la plus grande répugnance
qu’il ornoit ia poitrine d’un cordon ennemi des .dogmes gravés
dans fon cœur. C e procédé fedl auroit fuffi pour motiver ma
défiance.
N ’aurois-je pas dû penfer qu’un homme capable de
déguiferfa-F oi, pourroit l’être un jour de renier fa femme ?
Mais il étoit v if, emprefle ; il avoit auffi de fon côté les
agrémens de la jeuneiTe ; il me perfuada ; je l’aidai à fubjuguer
mon p ere, que la difproportion de l’alliance effrayoit plus
qu’elle ne le flattoit ; enfin le jour fatal arriva où notre union
fut réfolue & confommée.
IÎ fut queftion entre nous du genre de formalités que l’on
émploieroit pour rendre indiiTolubles les liens que j’allois contratVer. D es exemples n o m b r e u x & une efpece d’ufage reçu
nous autorifoient à emprunter celles d'une Eglife étrangère.
Mais d’une part M. de Bombelles exigeoit qu’on fe
c o n te n tâ t
de la bénédiftion de notre Pafteur. Il alléguoit, pour juftifier
la nécefiité de cacher notre m ariage, les mêmes raifons qui
l’obligeoient à montrer fa Croix. D ’un autre côtéj la droiture
de mon pere 1 eloignoit d’une démarche que les circonilances
auraient juftifiée , mais à laquelle on ne pouvoit ôter l’appa
rence de faufleté qui la rendoit utile. T elle eft la triile fituation
d’une partie des Chrétiens dans ce Royaum e. Réduits à choiiir
entre le remords ou l’imprudence 3 placés entre leur coniciencc
& la loi,craignant toujours de bleffer l’une par l’hommage forcé
( i ) O n offre la preuve juridique de ce fait, V in g t témoins dignes de &*•
en dépoferont.
�6
qu’ils rendent à l’autre , ils ne peuvent faire un pas qui ne
compromette leur repos.
Après avoir bien balancé leurs fcrupules & le foin de ma
sûreté , nies parens donnèrent la préférence au'x premiers. Ils
étoient excufables. Ils ne lifoient point dans le cœur de M . de
Bombelles. Il eiï fans exemple qu’on ait jamais réclamé dans
nos Eglifes contre ces fortes d’engagemens. Unis par le mal
heur , nous en fommes plus exaâs , plus rigides obfervateurs
de nos promeiTes. Des devoirs qu’on fe fait à foi-même font
ordinairement mieux remplis que ceux qui font impofés parla
force. M . de Bombelles ne s’eil pas conduit par ces principes.
Il n’étoit pas digne de les cônnoître.
Sur fes inllances, on fe borna donc au contrat de mariage
paiTé pardevant Notaires le 29 Janvier 1 7 6 6 ( 1 ) , & à la béné
diction nuptiale d’un de nos Pafteurs, le 11 Mars fuivant (?.).
N ous eûmes pour témoins de nos ferm ens, ce Miniilre , nos
amis , nos parens & Dieu.
M on mari parut enivré d’amour & de rec<jnnoiflance. H é
las ! fe peut-il que des tranfports fi vifs aient ét^füints ! Il eft
donc vrai que le menfonge donne quelquefois une ardeur
que n’a point la vérité ! Le m yilere fembloit augmenter fon at
tachement. N otre mariage reiloitfecret, & fon union n’en paroiiToit que plus fin cere..
Il avoit d’autres devoirs à remplir. Il fut obligé de me quitter
au bout de quiihze jours pour fe rendre à fon R égim ent, comme
il la Providence avoit voulu me préparer de bonne heure ù
des féparations.
Son abfence n’eut rien de remarquable qu’un incident qui
( 1 ) V o y e z Pieccs Juftificativcs , N ° . I.
(2 ) L ’a ile qui la conftatc , fera produit.
�7
commença à me dévoiler l’impétuofité de fon cara&ere & ta
défordre de la conduite. Il m’écrivit deux mois après fon dé
part , pour me prier d’engager mon pere à lui prêter 1500 liv.
Je ne réuiTis point ; alors il s’adrefla à mon pere lui-même pour
lui demander mille é c u s , dont il a v o it , difoit-il, un extrême
befoin. N ’ayant pas été plus heureux par cette voie , il m’an
nonça par lettre , qu 'il étoit ■
\iu défefpoir , qu’zZ ri avoit
plus de rejfource } qu’z/ alloit quitter fon Régim ent, paffer en
Allem agne, &c. Si quelque chofe paroiffoit adoucir ces ter
ribles exprelîions, c’eft qu’en finiflant il m’aiïuroit que de fa.
vie i l i i oublieroit la plus vertueufe & la plus aimable
ÉPO U SE
qui f û t jamais.
Q u ’on fe peigne quelle révolution produiiît en moi un em
portement auffi furieux. Je me voyois à la veille d’être aban
donnée par mon époux, livrée fans reffource à la malignité
publique. Il n’y a point de fecret impénétrable dans les petites
V ille s , 6c même dans les grandes. N otre mariage n’étoit pas
connu , mais nosliaifons l’étoient. Les m édians, qui ne devi
nent jamais le b ie n , leur donnoient un objet
déshonorant
pour moi. Dans cette fituation, quelque révoltée que je fuffe
des menaces de M . de Bombelles , & de la froideur qu’elles
annonçoient, je facrifiai tout pour le ramener. Je prodiguai
les lettres les plus tendres, les expreifions d’une ame fenfible
& épouvantée. M. de Bombelles parut encore entendre ce
langage. Il arriva à M ontauban au mois d’O ftobre fuivant. Il
follicita fon p ard o n , & il l’obtint.
J em ’apperçus bientôt que j’étois enceinte. Alors il ne me
^ut plus poffible de me prêter au déguifement pour lequel M .
de Bombelles iniiftoit encore. U ne de fes principales raifons
etoit la crainte d’une vieille tante nommée Madame H . . .
-
�8
femme envîeufe par tempérament j & méchante pour le
plaifir de l’être ; femme d’ailleurs excluiîvement attachée à l’in
térêt ; femme qui n’ayant jamais fu calculer les douceurs d’une
fociété aifortie , ne connoiffoit que deux agrémens dans la
vie , fon bien propre, & le mal d’autrui. Cependant l’impofiibjlit.é de cacher mon état , mes inftances, un mouvement
d’honnêteté peut-être, auquel l’ame de M . de Bombelles Ce
trouva acceffible en ce m om en t, l’emporterent fur fes appréhenfions. Il fe décida à publier le mariages il m’avoua hau
tement pour fa femme. Nous fûmes en conféquence préfentés enfemble chez toutes les perfonnes diftinguées de Mon-*tauban , qui m’honoroient de leur eilime & de leur amitié. Je
-vis les fçeurs de M . de B om belles, qui me reçurent comme
lep o u fe de leur frere. Il vint loger avec moi chez mon pere*
S’il avoit un c œ u r, il ne pourroit pas dire que cet effort de
fa part ait été gratuit. Par .q.uel redoublement de tpndreffe .&
¿ ’amour il fut payé de la mienne 1
Il fallut une fécondé fois s’arracher à ces délices : fon Régi
ment le rappelloit, Il me quitta le 10 A vril 1 7 6 7 , époque fu^
nefte de la deitru&ion de mon bonheur & des égaremens dç
m on mari. Il parut encore à la vér.ité confprver .quelque tems
les apparences. Ses lettres ji’avoient rien qui pût m’alarmer.
A u contraire, elles étpient affeftueufes, vives. L ’amour le plus
fincere n’a jamais employé d’expreifions plus énergique?.. C e
qu’il y a de remarquable., c’eil qu’elles font toutes adreffées à
Mad<zme
Bombelles. D.ans to u tes, M . de Bombelles me
nomme fa chere éponfe. Il ne fongeoit pas alors qu’il auroit ua
jour la hardieffe de fouterür que c cil le calomnier qup de
jn’appeller fa femme.
.Cependant mji grofleife avançoit.: j’accouchai à terme d’une
•
'
fille.
�9
fille. J’ignore fi elle fera plus heurëufe que fa mere ; mais je
voulus du moins la garantir à fa naiffance d’une épreuve à
laquelle font trop Couvent fournis des enfans plus fortunés. Je
ne la confiai point à des femmes mercenaires : je la nourris moimême. J’éprouvai qu’il y a un prix réel attaché à l’accompliffement d’un devoir. Sans cette confolation, j’aurois fuccombé
peut-être aux maux qui m’ont ^ccablée depuis.
M . de Bombelles m’avoit remercié dans les termes les plus
touchans de l’avoir rendu pere ; m ais, afin que fa conduite
fît toujours un contraire avec fon langage, il fembla n ’avoir
attendu que cet inftant pour fe livrer à des défordres dont il
pût nous faire partager la honte. Lui falloit-il donc deux vic
times ? O u , vouloit*il, avant que d’ôter fon nom à fa femme
fa fille, le rendre ii odieux, ii vil, qu’elles puffent fe féliciter
de l’avoir perdu ?
Il étoit en garnifon à Flile en Flandres. J’en reçus des nou
velles & des détails qui me mirent au défefpoir ; & ce n’étoit
point par mon mari que je me trouvois inftruite, mais par les
réclamations d’une foule de créanciers trompés , dont les me
naces auroient pu paiTer pour des outrages, il malheureufement elles n’avoient été fondées. .
T an tôt c’étoiei;t des camarades qui demandoient le paie
ment d’une dette d’honneur ; tantôt c’étoient des artifans de la
condition la plus baffe, qui revendiquoient des avances confidérables ; tantôt des femmes qui me dénonçoient de fauffes
lettres de change foufcrites par mon m ari, & les pourfuites
qui en devoient être l’effet. T o u s ne fachant où trouver M . de
B om belles, s’adreffoient à fon époufe pour être payés ( i) .
( i ) fo u t e s les lettres ex ifte n t, & feront p r o f i t e s ,
B
�10
' ‘ Il 11 etoit pas poiïible que de fi étranges nouvelles rie fiiïent
de l’éclat dans une Ville^ telle que Montauban. Par leur na
ture & p arleu r multiplicité, elles devoient fixer l’attenrion du
public. T o u s les honnêtes gens me plaignoient. La feuîe M a
dame H . . . . parut fe plaire à mettre le comble à mes dou
leurs. O n voit dans certains con tes, s’il m’eil permis de faire
~cette comparaifon , des Fées dont la malignité aigrie par l’âgen’a point d’autre occupation, d’autre plaifir que de défaire le
bien produit par leurs compagnes plus jeunes & plus fecou rables. M adam e H . . . . rempliffoit trop lc ru p u le u fe m e n tà
m on égard, l’office de ces Génies perfécuteurs. Il na me reftoit de reifource 6c d’efpérance que dans un prompt retour
de m on mari. Lui-m ême me Favoit annoncé. Toutes les per•fonnes à qui m on fort paroiffoit digne de p itié , s’efforçoient de m’entretenir dans cette illuiîon. La finiitre M adam e
H . . . . s’opiniâtra feulé à foutenir qu’il ne reviendroit point,;
que je ne le reverrois jamais*
La Fée malfaifante avoit mieux vu que les Fées proteilricesv
Peut-être fon art avoit-il forcé les événemens que fa bouche
prédifoit avec tant de confiance. M . de Bombelles , perdu
de dettes, traînant dans la débauche & la honte une vie
pénible & fcandaleufe, oublia dans Paris, ce qu’iL devoit à
l’honneur, à l’am ou r, à la nature. J’appris bientôt que fés excès,
l’avoient conduit au Fort-FEvêque. L e M iniftere, fatigué des
plaintes de fes créanciers, & des défordres qui les occafionn o ien t, n’avoit pas trouvé d’autre m oyen d’en interrompre '
le cours.
Je me crus alors parvenue au dernier degré de l’infortune. Je
ne voyois pas que je netois qu’au commencement de mes maux..
M.
de Bombelles ne m ’avoit pas annoncé fa détention*
�Apr^s un an de captivité , en A oû t 1770 , il m’inftruifit de
fa délivrance. Mais on ne devineroit jamais quelle efcorte il
donnoit à cette nouvelle , de peur quelle n’adoucît l'amer
tume-de ma fituation. Il me déclaroit qu’il avoit pris le parti
de quitter la France & moi. P our me rendre,encore plus affreufe cette réfolution défefpérée , il avoit la barbarie de m’acçufer de l’avoir néceffitée. Je vais , me difoit-il, courir une nou*
yelle carriéré dans un Pays où j e veux être ignoré de L’ Uni
vers. . . . .
D ans peu j e ferai fu r terroir libre. M es aUions n!y
feront mefurées par perfonne , & j e difpoferai de moi à ma
volonté. Voilà a quoi m'ont réduit vos lettres s vos menaces ,
vos inquiétudes mal fondées , ainji que vos clameurs. Il ajou*
toit pourtant à ces terribles imputations : f i je. ja is fortune t
vousferej lapremiere à vous en rejfentir. Cette.lettre effrayante
eft du 9 Septembre 1770.
Je crus, fans balancer, qu’il avoit pris férieufement le parti
de fuir un monde qui le fuyoit depuis ii long tems. J’ima?
ginai qu’il avoit fen ti, qu’après avoir perdu fes mœurs & fa
réputation , il ne lui reftoit en effet de refuge qu’un autre hér
mifphere. Je me perfuadai q u e , n’ofant s’expofer à^de trop
juftes reproches, il alloit en expier la caufe dans quelque ré*
gionéloignée, & qu’il n’en reviendroit qu’après avoir retrouvé
des riclieffes & des vertus.
Si cette idée ofTroit quelquç fecours à ma raifon , il n’en
«xiftoit point pour mon amour. Je pleurois fur une réparation
devenue néceflaire*Je pleurois fur un coupable que j’adorok
e n co re , & que je croyois fidele. Son efprit a pu l’égarer ,
îii
ecriois-je quelquefois avec un fai(ifTement involontaire ! Mais
fQn coeur eft innocent envers moi. Il ^’oubliera point ce tenSage de fon affeftion. Il reviendra , chajigé , recueilli1, *
B ii
�12
dans les embraffemens de fa fam ille, le prix de fes efforts p o u f
s’écarter du vice.
Crédule que j’étois ! tandis que mes larmes couloient ainii
pour lui, le perfide m’oublioit dans les bras d’une autre. C e
n’étoit pas une domination étrangère qu’il avoit été chercher;
c’étoient fes propres fermens qu’il avoit voulu brifer ; fes d ouloureufes menaces n’étoient qu’un voile impofteur , deftiné à
m ’empêcher de veiller fur fa conduite. Il avoit compté que les
pleurs quiobfcurciroient mes yeux ,le déroberoient à mes re
gards , &
faciliteroient la réuflite du complot criminel qu’il
méditoit. J’appris deux mois après, par la voix publique, qu’il
venoit d’époufer une fécondé femme avec les cérémonies de
l’Eglife Romaine,
\
- J’eilaierois en vain de rendre les mouvemens qui m’agiterent. Je n’avois à regretter ni le rang ni l’opulence. Je favois
trop que la femme de M . de Bombelles n’a point de diftinctions à prétendre ; & que ii elle en eit jaloufe , c’eit de fon
côté feulement qu’elle en doit efpérer. Mais l’honneur, mais
l’état de ma fille ! C ’étoit donc là ce* que j’allois perdre. La
c o n f ia n c e
de la vertu alloit être punie par la flétriiTure du vice l
Pour avoir rempli les devoirs de mon fexe , je me voyois près
d’en devenir l’opprobre! La foi du ferment étoit-elle donc une
illufion ? Ces aftes, ce con trat, cet appareil d’u i mariage
fcellé par l’intervention d’un M iniftre, ces aveux'publics & i i
long-tems foutenus, ce titre reçu avec une joie & des in
tentions fi pures , & dont tant de douleurs avoient été le prix,
tout cela n’étoit-il donc que des chimeres,des fantôm es, qu’un
fouffle pût faire évanouir ? Etoit-il poffible que des engagemens de M. de B om belles, il ne reftât que ma fille, ma honte
& fes remords ?
�13
Tandis que je cherchais à concilier ces idées avec le bruit
affreux dont je venois d’être frappée, tandis que je m’efforÇois de m’éblouir fur l’évidence de la trahifon la plus lâche
6c tout à la fois la plus audacieufe, celui qui n’avoit pas rougi
de la com m ettre, n’a pas craint d’y ajouter un dernier trait.
Sous prétexte de raffurer fa fécondé époufe , il a effayé de
confommer l’opprobre de la p^emiere. 11 a ofé diftribuer un
M em oire imprimé , où il nie d’avoir jamais contrafté aucun
engagement à Montauban. La véridique Madame H . . . y
eft evoquée pour déclarer que fon neveu peut avoir fait
des etourderies de jeune homme , avoir eu des foiülejfes , des
goûts vifs, mais paffagers ( i ) , & qui n’ont été précédés d’au
cune formalité folide. Feignant d’ignorer ce qui s’eft paffé , ce
qui cil connu de toute la V ille , elle produit, avec un air de
triom phe, les certificats du Curé , du Vicaire de la ParoiiTe
dans l’enceinte de laquelle eft iituée ma m aifon, qui atteftent
que ni mon mariage , ni le baptême de ma fille ne font inferits
fur leurs regiftres. Elle ne parle ni du Notaire qui a reçu notre
contrat, ni de la bénédiction nuptiale donnée à fon neveu
devant des témoins. Elle ne dit rien des raifons qui motivent le
filence des regiftres, & des précautions qui y fuppléent.
Fier de cette réticence honteufe, M . de Bombelles fe récrie
avec autant d’orgueil que s’il avoit démontré fon innocence. Il
fe plaint hautement qu’on le perfécute , qu’on Vopprime. Il foutient qu’il eft pourfuivi par une infâme calomnie (2) , qu’il eft
\widime de üimpoflure (3 ).Cette calomnie,c’eft mon mariage;
cette impofture, c’eft la fidélité qu’il m’a jurée. Il pouffe l’im0 ) Lettre de Madame H .......... citée page 4 du M ém oire à confulter de M. de
“ ombelles.
^
lbl<l} pag. 13.
(3) Ibid%
�14
pudencejufqu’à défier , au nom de l’h o n n eu r, Tes accufateurs
de paraître (i).
L ’honneur ! Et il ofe prononcer ce m ot facré qui le con
damne ! 11 en enfreint toutes les réglés, & il en réclame les
droits ! Eh bien ! je l’accepte pour Juge cet honneur qu’il
fouille & qu’il invoque^ Il demande le fecours des Loix qui
ont établi des peines contre les calomniateurs ; moi j’implore
celles qui flétriffent les parjures. IL n e jl point marié > dit-il, à
Montauban ; f a prétendue époufe ne j e montre pas ! Il fe fait
une arme contre elle de l’inaftion où l’a réduite le défefpoir
dans lequel il l’a plongée. Q u ’il tremble ! l’excès de la douleur
en eft quelquefois le rem ede, ou du moins le palliatif. C ’eit
de mes maux même que je tire la force d’en pourfuivre l’auteur. Q u ’il vienne aux pieds des Tribunaux nier des a£es
•qu’il a fouferits ; qu’il vienne y défavouer la fille qu’il a re
co n n u e, & abjurer le titre de pere., dont il n’a jamais eu les
fentimens; qu’il vienne y faire trophée de fes perfidies, & fe
juftifier d’un crime par un autre, J1 n’a plus que le choix des
forfaits. S’il n’efl: point mon ép o u x , il cft le plus infâme des
fédu&eurs. C ’eil fous le voile de la Religion qu’il m’a trompée;
c’eft fur la foi de D ieu même qui a reçu nos fermons, qu’il
m’a tirée des bras de mon pere, 11 a donc joint le viol au rapt,
l’apoilafie la plus vile à la plus odieufe débauche. J’ai à
pourfuivre en lui le gentilhomme d é lo y al, le pere dénaturé,
Je mari perfide, & le fuborneur facrilege.
Pour vo u s, imprudente rivale, d’autant plus malheureufe
que vous avez un nom & des vertus, pardonnez ; je vous
refpecte & je vous plains. C ’eft à regret que je vais porter
.dans votre cœ ur le poignard qui a percé le mien. Mais fi juf( i ) IbM, pag. 13.
�-* »
* \
'
qurà préfent nos droits font égau x, nos devoirs ne le font
pas. V ou s ignorez jufqu’où s’étendent l’amour & les obliga
tions d’une mere. V ous avez été abufée par un lâche indigne
de vous ; mais au moins la nature, en vous reftifant des dou
ceurs, vous a épargné des amertumes j elle n’a point voulu
que d’une union illégitime , quoique innocente de votre p a rt,
il réfultât des fruits qui auroie^t augmenté l’horreur de votre
fituation en la partageant : c’eit à moi feule qu’elle a fait ce
cher & douloureux préfent:. Si vous avez des titres contremoi , vous n’en avez point contre ma fille ; je lui ai donné
mon la it, je lui donnerois ma vie ; c’eft pour elle feule que je
vais combattre. O n fe prive d’un m ari, mais 011 ne fe paffe
point d’un pere ; & le nom du iien , tout fouillé qu’il e i l , eil
encore le feul héritage que je puiffe biffer à ma màlheureufe
enfant.
Signé 3 M
arthe
C amp
de
Bombelles.
C O N S UL T A T I O N .
I L j E Souffigné, confulté par la premiere époufe de M . d e
B om belles, & preffé de s’expliquer fur les efpérances qu’elle
peut concevoir de l’a&ion qu’elle va intenter en Juftice réglée
pour conferver l’état de fa fille , trouve la queftion aufîi déli
cate que la fituation de celle qui la propofe. Jamais peut-être'
on n a fenti plus vivement l’embarras dans lequel la confufioix
de nos L o ix , & fouvent leur contradiftion , foit entre elles,,
f *
°it avec nos mœurs & nos ufages jettent les Jurifconlültes.
>
n ait
Premier c oup-d’œ i l , il femble que M . de Bombel les
rien à redouter que de fon propre cœur* Il a feduit
�i6
une jeune p erfo n n e;il s’eit joué des cérémonies d’une Reli
gion méconnue dans le R oyau m e; il a porté dans une famille
.honnête, fous les apparences les plus propres à en im p ofer,
le trouble , la honte & le défefpoir. S’il a la trille fermeté de
s’accufer lui-même d’un libertinage auiTi outré ; s’il ne fent
point de répugnance à foutenir que fes liens ne devoient pas
avoir plus de durée que fes*caprices; s’il eil capable de voir
paifiblement fon propre fang avili fans reffource, ôz l’infamie
de la mere qu’il a trompée rejaillir fur fa fille qu’il facrifie ;
s’il peut fupporter fans émotion l’affreufe idée qu’un être, qui
doit l’exiftence à fes plaifirs maudira tous les jours de fa vie
l’inftant où lui-même eit devenu heureux par un crime; il enfin
il fe réfoud à fe prévaloir de l’erreur ou de la lettre d’une L o i,
& qu’il fe croie juitifié à fes propres yeux , parce que la Juft ic e , enchaînée par une force fupérieure, ne l’aura point puni,
on eft d’abord tenté de croire que Madame de Bombelles
auroit à craindre d’échouer dans fes réclamations;,fon féduc^
teur pourroit les éluder fans encourir d’autre peine que l’in
dignation publique./Il feroit dans le cas de ces banqueroutiers
m itigés, qui forcent la porte de leurs prifons par une ceiïion
de biens, 6c qui croient avoir toutfauvé quand ils n’ont perdu
que l’honneur.
M a is, d’un autre côté , fi l’on fait attention aux circonftances fingulieres de fon m ariage, aux aftes qui le légitiment,
au déguifement fcandaleux qui en a empêché la publication
légale ,aux approbations poftérieures & réitérées qu’il y a don
nées , à la bonne foi de la femme & de fes pareils, à la naiffance de l’enfant ; fi l’on confidere qu’il s’agit moins ici de l’état
de l’une & de l’autre que de celui d’une portion confidérable
(le nos compatriotes ; fi l’on penfc que leur dégradation , irré
vocablem ent
�17
vocablem ent confirm ée, entraîneroit peut-être la ruine d’une
infinité de familles u tiles, qui n’ont point cl autre garant de
leur repos que ces mêmes aiïurances dont Mademoifelle Cam p
s’eil contentée ; fi l’on ofe même fe permettre d’interroger la
L o i , & q u e , fans s’arrêter au texte, aifez éclairci par la con
duite du G ou vern em en t, on cherch e, fous la dureté de fes
expreflions, lefeulfens que la Vaifon , l’humanité, la politique
éclairée peuvent adopter : alors la Caufe de Madame de Bom belles deviendra plus favorable. O n verra que ce n’eft pas feu
lement à la compaffion des âmes fenfibles qu’elle a droit de pré
tendre, & qu el’efpoir ne lui eil pas plus interdit que la plainte.
O n ne fe propofe point ici de prévenir l’infiruftion juri
dique , ni d’entrer dans des détails réfervés pour une difcuffion approfondie ; on ne fe permettra que quelques obfervations préliminaires, qui peuvent motiver la confiance de la
D am e de Bombelles.
L e principal vice apparent de fon mariage , & même le feul,
c’eft l’omiffion du Curé. T o u t ce qui peut d’ailleurs rendre
valide un a&e de cette nature , s’y tro u ve': confcntement des
Parties , approbation des parens , contrat rédigé par un O ffi
cier public , ratification pofiérieure , confommation en tout
fen s, rien n’y m an que, fi ce n’eil cette préfence du témoin
réputé néceiTaire , ce concours du C h e f de la paroiffe , q u i,
fuivant la difcipline de l’Eglife fixée à T re n te , efi abfolument
indifpenfable.
Mais d’a b o rd , cette L oi qu’un Catholique ne pourrait pas
éluder, lie-t-elle irrévocablement des Proteftans ? Il faut les
plaindre fans doute de leur obftination à rejetter les principes
Concile ; mais peut-on les forcer de prendre pour réglé de
eur conduite une autorité qu’ils ont le malheur de méconC
�noitrc ? Les unions entre les Juifs font confacrées & main
tenues par notre Jurifprudence. L e célébré Arrêt rendu de
nos jours contre Borach Lévi, eftu n monument indeftruttible
du refpeft de nos Tribunaux pour des liens formés hors de
notre Eglife. Borach s’étoit marié fuivant les Loix Judaïques»
Converti depuis , & abandonné par fa femme qu’un zele
religieux éloignoit de l u i , il avoit prétendu , d’après le texte
même de M o y fe , être en droit de lui fubftituer une compagne
plus docile. Cependant nous avons vu fon fyftême rejette &
profcrit, après l’inftrutlion la plus folemnelle. Son mariage a
été déclaré valid e, quoique célébré fans l’intervention d’un
Curé. N os freres Protellans n’auront-ils pas le même privilege
que les Hébreux nos ennemis ? Sera-t-il plus nuiiible pour les
uns de ne recevoir qu’une partie de nos dogmes , que pour les
autres de les déufter tous ?
Q u ’on y prenne gard e, aux yeux de la Juftice il n’y a point
d’autre différence-entre les Confiftoires & les Synagogues du
R oyaum e. Borach L é v i , né en A lfa c e , étoit fujet du R o i ,
comme peuvent l’être les parens de la D a m e de Bombelles ,
habitans du Q uercy. Si les Ordonnances qui ont ap p u yé,
confacré la difcipline des Peres affemhlés à Trente , n’ont pas
été cenfées s’étendre à un Juif de Strasbourg, peuvent-elles
affujettir des Proteftans de Montauban ?
O n dira peut-être : mais les Juifs ont chez nous une exis
tence légale , & les Proteftans n’en ont point. Les Loix
fuppofent la réforme éteinte, & tous les François Catholiques.
C e feroits’abufer foi-même & vouloir combattre l’évidence,
que de raifonner ainfi. Il eft prouvé par le fait, que le Proteftantifme n’eft pas détruit en France ; & par le droit, les in
fortunés que réd u cation , l’habitude , le défaut de lumieres
�*9
entretiennent dans lin fchifme funeile , font autorifés à rcfpirer l’air de leur patrie.
Il y a plus : l’Edit de 1685 leur enjoint pofitivement d’y
tefter •ju fq u ’à ce qu i l ait plu à D ieu de les éclairer. L e
Prince a donc pris par-là l’engagement de les to lérer, eux &
leur incrédulité ; il eft donc cenfé avoir prévu qu’ils uferoient
de cette prérogative , & que t^nt que la Providence n’o u vriroit pas leurs y e u x , ils continueraient à vivre fuivant les
règles convenables à leur aveuglement. Dès-lors toutes les
Loix faites pour aflimiler les nouveaux Convertis au refte des
Sujets C atholiques, ne comprend que ceux qui ayant eu le
bonheur de fe convaincre de la vérité , ont abjuré les erreurs
de leurs peres.Les Conftitutions eccléfiaftiques 8c les L o ix fé c u lieres, qui n’ont fait que les confirmer, ne peuvent donc jamais
etre oppofées aux autres. En perfiftant dans une croyance &
des pratiques profcrites par l’Eglife , ils expofent leur falut , &
fe rendent dignes de la pitié des ames pieufes ; mais ils 11e
peuvent compromettre ni leur é ta t , ni celui de leurs ènfani
aux yeux des Tribunaux (1).
C e principe e ft , fans contredit, applicable à l’efpece qua
l’on examine ici. La profcription apparente de la Religion ré
formée parmi n o u s, n’eft pas une raifon pour y déroger ; la
Politique, d’accord en cela avec le Catholicifm e épuré, laifle
aux Settateurs de ce culte une liberté dont ils ne peuvent plus
abufer ; elle les ignore & les protégé.
Si un zele outré a paru de nos jours même les expofer à
des vexations éclatantes , il en faut accufer une fatalité malheu•
V o y e z à cc lujct un petit é c r it , intitulé : Lonjultation jur l<i vdlïdïtt des md-
P ari1 <
^ S *>roteftans dt France. C e t ouvrage , fignè de deux A v o ca ts célèbres du
tt' Cnt ^ A ix , eft plein d’éloquence 8c de foUdité.
C ij
�F
10
reufe, plutôt qu’un p'rojet'réfléchi. Dans le cours ordinaire des
choies , les Tribunaux le font un devoir de compatir à leur
foliation : en général, tant qu’il y a une maniere de les trou
ver innocens, ils font afllirés de n’être point coupables.
O n peut juger de l’extrême indulgence du G ouvernem ent
pour eu x , de l’efprit de pacification avec lequel les traitent
les Miniftres qu’il honore de fa confiance,
les Chefs du
Clergé qu’on a tant accufés de leur conferver une haine
irréconciliable, d’après les deux certificats donnés à la Dam e
de Bombelles par M . l’Evêque de Montauban & par le C o m miffaire départi dans la Province ( i ) .
Ces deux pieces annoncent d’une p a rt, que les Proteftans
ne font pas vus comme des Sujets dangereux; de l’autre^ que
les mœurs de Madame de Bombelles ont toujours été refpecté e s, & lui ont valu l’eftime des perfonnes les plus faites pour
ne pas la donner légèrem ent; & en troifieme lieu, que fon.
mariage n’a été ni inconnu aux Chefs de la Hiérarchie eccléfiaftique & de la Police civile, ni défapprouvé par eux. C ette
circonftance eft très-remarquable.
L ’a v e u
fur-toutdu Magiftrat
qui appelle mariage cette u n io n , que tout M ontauban favoit
avoir été bénie au défert, fuivant l’expreiîion ufitée , eft de la
plus grande force. Les Proteftans, fans faire aujourd’h u i,
comme avant la révocation de l’Edit de N antes, un Corps
particulier dans l’E ta t, y ont donc cependant des droits, des
prérogatives, dont la condefcendance du Gouvernement les
laifle jouir. Celle de pouvoir contrafter des mariages valides,
fous l’atteftation de leurs feuls Pafteurs, eft une des principa
les, & c’eft celle que la Dam e de Bombelles révendiquev.
Inutilement objederoit-on que fon mari eft C atholique, &
( i ) V o y e z Pieces Juflifîcatives, N ° . II &
III.
�li
en cette qualité fournis au Concile de Trente. D ’abord on peut
demander fi, d’après fes procédés, fa Catholicité eit affez, épu
rée pour qu’il lui foit permis de s’en prévaloir. Cette Religion,
qui n’a point mis d’obitacle à fes dél'ordres, ne viendroit-elle
donc le favorifer que pour l’empêcher de les réparer?
. Mais d’ailleurs il pa'roît évident que la Dam e de Bombclles
& fa famille étoient dans la bonne foi. Il eft clair qu’en s’alliant
à ce gendre qui embraiToit les genoux de leur fille, en fe con
tentant avec lui des précautions qui auroient fuffi pour lier
irrévocablement un homme de leur croyance, malgré les iîgnes
extérieurs qui les avertiffoient de s’en défier, il faut qu’ils aient
cru avoir des fûretés capables de les tranquillifer.Et ces fûretés y
quelles pouvoient-elles être , finon la certitude de la foi du V i
comte de Bombelles ? Sur le moindre fo u p ço n , ils pouvoient
recourir à ces fubterfuges il faciles & fi communs , d’après lefquels on feroit excufable de croire que l’Eglife n’a en effet en
France que des enfans fournis , & qu’elle y compte autant de
Catholiques fideles,que nos Rois de Sujets. Ils ne l’ont pas fait;
ils n’ont donc pas çru en avoir befoin. Ils étoient donc intime
ment convaincus de l’adhéfion de M . de Bombelles à leurs
dogmes. S’il les a trom pés, à qui cette feinte peut-elle nuire ?
N ’eil-ce pas l’auteur de la fraude fe u l, qui doit en être puni ?
. N ’eil-ce pas là le cas d’appliquer ce principe, que quiconque
a contra&é fur la foi publique, a contra&é valablement ?
M . de Bombelles paffoit pour être Proteftant. Il affectoit d’en fuivre & d’en accomplir les pratiques. En fe mariant
avec une Proteftante, il a exigé qu’on fe bornât aux formalités
requifes dans cette Com m union. N ’en eil-ce pas affez pour ne
Pas fouffrir aujourd’hui qu’il s’en fépare, quand cette fépara-
tl° a coûte l’honneur à une fam ille, & l’état ù un enfant ? II
�21
eft le maître de retourner au giron de l’E glife, pour àffurer
fon falut : mais il ne l’eft pas de détruire par ce retour l’effet des
démarches qui lui ont donné une fille & une femme.
Cette exiftence d’un fruit né fur la foi d’une légitimité cer
taine , eft une confidération d’un grand poids : il feroit bien
dur de réduire au concubinage une union formée fous la ga
rantie des formalités les plus faintes ; mais il feroit affreux de
flétrir par la bâtardifeun enfant qui n’auroit jamais vu le jo u r,
fi l’on n’avoit pas cru fon état certain. C e feroit lui donner le
droit d’abhorrer à jamais la vertu qui auroit trompé fa m ere,
& juftifier peut-être fes préjugés contre une Religion qui au
roit confacré l’inhumanité de fon pere.
Sans fe livrer à cette idée attendriffante, que les Juges ne
doivent cependant pas entièrement écarter, il fuffit d’avoir
prouvé qu’il y a en effet un mariage bien réel entre le Sieur &
la D am e de Bombelles. Si l’on rapproche maintenant de ce
que l’on vient de dire les lettres du premier, que le Confeil
a fous les yeux ( i) ; fi l’on y joint un teftament olograp h e,
dépofé chez un N o ta ire , {igné à chaque page de la main de
M . de Bombelles, & dont le Confeil a également pris com m u
nication ( i) ; fi l’on fonge que pendant trois ans fes fœ u rs, fes
parens, fes amis , fes connoiffances, fes créanciers ont fu qu’il
étoit m arié; que to u s, à M ontauban, à L ille , à Paris, ont
regardé la D em oifelleCam p comme fa femme légitime, & l’ont
honorée ou pourfuivie en conféquence : on aura peine à con
cevoir comment il a pu autorifer de fa fignature un imprimé
où il menace d ’abandonner à leurs remords ceux qui oferont
affirmer qu’il eft marié à Montauban. Les remords font conve
nables fans doute iti ; mais à qui ?
( , ) V o y . Pieces J u ftificativcs, N \ I V .
(a ) lbid. N °. V*
�23
Si la Dam e de Bombelles eft effeftivement lepoufe légitime
du mari qui veut aujourd’hui la rejetter, il n’eft pas difficile
de fixer l’idée que l’on doit avoir du nœud qu’il a formé avec
la Demoifelle de Carvoiiin ; il faut bien que ce fécond ma
riage foit nul & abufif.
lia , on l’avoue ,une formalité de plus ; mais ce n’eft qu’une
faute de plus de la part de ]\^. de Bombelles. Enchaîné par
fes 'premiers lie n s, devoit-il les déguifer, les cacher aux
yeux de la femme qui confentoit à en partager avec lui de
nouveaux ?
Il eft vrai que dans ce cas la iituation de la Demoifelle de
Carvoifin fera trifte. O n fera d’autant plus porté à la plaindre,
que , de l’aveu de la D am e de Bombelles m êm e, elle a un
nom & des vertus. M a is, i°. il paroît que fon mariage eft
ftérile ; & quand il feroit également refpeSable aux yeux de
l’E glife, il l’eft infiniment moins à ceux de la fociété.
î°* Si elle a été tr o m p é e , il eft é v id e n t qu’elle a bien voulu
l’être. C ’eft de fon plein gré quelle s’eft unie à un homme
d éjà
marié. Elle
a
confenti
à
courir les rifques
de
cette
alliance
frauduleufe, d’une part ou de l ’autre. M . de Bom belles,
dans fon Mémoire à confu lter, déclare formellement * , que
dans l'intervalle de la fignature du contrat à la célébration
la
Demoifelle de Carvoifin apprit qu il étoit marié à Montauban ,
Q conféjuemment incapable de contracter une autre union. Sui
vant le même M ém o ire, ces notions fi précifes , fi conféquentes, n’étoient point parvenues à la D em oifelle de C ar
voifin par la voix publique, organe trompeur qui fe-prête
également au menfonge comme à la v é rité , & qui n’a fou-*
Vent d’éclat qu’en faveur du premier. C ’étoit une de fes parentcs ■
>qui les lui tranfmettoit.
* V o y . pag, 5.
�Si elle avoit voulu être inftruite , Sc ne courir aucun dan
ger, elle auroit remonté à la fource de ces imputations; elle
avoit un m oyen {impie de les éclaircir, c’étoit de faire pu
blier fes bans dans la V ille même qu’on, difoit avoir été le
théâtre, ou de la diffolution, ou des fermens réguliers du jeune
homme au fort duquel elle alloit lier le iien. Elle le devoit
même en tout état de caufe; il paroît que le domicile de M .
de Bombelles n’éroit pas encore changé , il n’en avoit point
d’autre aux yeux de la L o i,q u e la paroiffe fur laquelle il avoit
vécu à M ontauban. L a Demoifelle de Carvoifin étoit donc
o b ligée, pour fa fîireté, d’y faire publier des bans ; il n’y a
perfonne au monde qui fe fût difpenfé de cette précaution, &
cependant elle l’a négligée ; le certificat produit le démon
tre ( i) .
Elle ne peut donc s’en prendre qu’à elle-même il ces a v is,
trop méprifés, fe font trouvés des vérités ; cette omiffion v o
lontaire décele de fa part des vues fecrettes & une réfolution
décidée d’avoir M . de Bombelles , en bravant tous les périls
attachés à fa pofleilion,
' Par ces raifons, & beaucoup d’autres que la Dam e de Bom bèlles pourra déduire devant les Tribunaux, quand fa Caufe
y fera p ortée, le Confeil eiiime qu’elle peut fe flatter de réuflir.
Peut-être même le Légiilateur, inilruit , par la difcuifion de
cette Caufe , des abus quenéceflite la {ituation des Proteftans,
fe décidera-t-il à révoquer enfin publiquement une Loi ter( i ) A déclaré n’avoir proclamé les bans d ’un prétendu mariage à Paris, de M efiire de Bom belles , O fficier au Régim ent de P iém on t, dans fon Eglife paroiflialc da
Saint Jacques de M ontauban, ni dans aucune de fes deux annexes, ni n’a donn$
juicun ordre de les proclamer : & a fignù. A Montauban , ce 10 Septem bre 1 7 7 1 .
S jjyjé » I I v c a f o l , Chanoine S a crifie, C ure de Montauban.
rible
�M
tiblé'que lés circbriftances excufoient peut-être ôf-qui n’au^
roit pas dû leur furvivre : L oi inutile fi ôn né l’exécute pas i
.
& cruelle il on l’exécute : L o i q u i, dans ce dernier c a s, m o
tive une infinité de facrileges que l’on n’ofe punir : L oi qui
encourage à éluder des crimes de convention par des crimes
trop réels , & met la jouiffance des droits les plus doux de la
nature au prix de la plus lâche ^poftaiie.
-
•>
Délibère à Paris ce i z Novembre i j j i .
Signé
1
L
,
-
PIECES
I N G U E T.
-
JUSTIFICATIVES.
I.
Contrat de mariage.
L
’ A N mil fept cent foixante-fix, & le vingt-neuVÎeme jour du mois
de Janvier , après m i d i , dans la maifon du fieut M e r ig n a c , Négociant, 311
fauxbourg de Villebourbon-lès-M entauban , régnant Louis X V , pardevant nous Avocat au Parlement, Notaire royal de M onclar en Q u e r c y ,
fouiîigné, Sc en préfence des témoins fufnom m és, ont cté conltitués en
perfonnes Meflire Jean-Louis-Frederic-Charles de B om belles, Ecuyer,
C hevalier de l’Ordre royal militaire de Saint L a z a r e , Officier au R é g i
ment de Piém ont, infan terie, habitant de la ville de M on tau ban , paroiile
Saint Jacques, fils de feu Meffire François-Gabriel de Bombelles, Ecuyer,
Chevalier de l’Ordre militaire de Saint L o u is , ancien Capitaine au tneme
Régiment de P iém on t, infanterie, Sc de feue D am e M adam e JeanneCatherine de Z o lle s , d ’une part ; ôc D enldifelle M arthe C a m p , fille de
Pierre C a m p , B ourgeois, & de D em oifelle Marthe M e rig n a c , ma
riés , habitans dudit fauxbourg de Villcbourbon lcs-Montauban, paroiiTe
Saint A ran s, procédant du conferttement de M. ion pôre, ici pr^ferir,
^ autre part j lefcjuelles Parties, de leur bon g r c f o u s réciproque ftipulaD
1
�i6
tion & acceptation , ont convenu qu ’entre ledit Meflîre de Bombelles &
ladite D em oifelle C a m p , il fera fait & accompli m a r i a g e .........................
en faveur duquel ledit M. Camp a donne & conftitué à la Demoifelle
Cam p fa fille, future époufe, &■celle-ci audit Meflîre de Bombelles, fon
futur é p o u x , la fomme de 8000 livres, tant de fon ch e f propre, que de
celui de ladite Demoifelle de Mcrignac fon époufe, laquelle dite fomme
de 8000 livres ledit fieur Cam p promet & s’oblige de payer audit Meflîre
de Bombelles; favo ir, 6000 livres à la célébration dudit mariage , & les
autres 1000 livres ne feront exigibles &c payables qu ’après le décès tant
dudit M. C a m p , que de laditeDemoifelle M erignac, fans intérêts, atten
du qu’il fe réferve Pufufruit & jouiflance de cette derniere fomme de
z o o o livres pendant la vie de l’un & de l’autre, avec convention que ledit
Meflîre de Bombelles reconnoîtra la fufdite conftitution à mefure qu’il la
rece vra, fur tous fes biens préfens & à v e n ir , & fur les plus clairs effets,
afin qu’en cas de prédécès de fa part fans en fans dudit m ariage, le tout
faffe retour à ladite D em oifelle fuxiire é p o u fe , avec Paugment en pro
priété , qui eft moitié moins de ladite dot : le tout conformément aux U s
& Coutumes de la préfente ville de Montauban........................ ...
Fait en préfence de M. Sidrac N oailh ac, Bourgeois, & de M. Bernard
C a u fte , N ég o cia n t, habitans de cette V i l l e , fignés avec les Parties
6c
nous , Bombelles , Marthe Cam p, Pierre C a m p , No a i l ha c ainé , B. Caufte»
C a m b o m , Notaire royal. Signés à l’original, lequel eft contrôlé & infiinûé à Monclar le 7 Février 1 7 6 6 , par la C o f t e , C o m m is , qui a reçu
en tout 170 livres 10 fols. Expédie par nous Jean-Jofeph la C o ft e , N o
taire royal de M onclar, fouilign é, fucceiTeur & détenteur des minutes
2c
Office dudit feu Me Cambon. En foi de q u o i , & c.
II.
Certificat de M . l’Evêque de Montauban.
N ous,
F r a n ç o is -V iç to r
le
T o n ellier.
de
B re te u il
, par la mi*
féricorde de D ie u & l’autorité du Saint-Siege apoftolique, Evêque & Sei
gneur de M o n ta u b a n , Confeillçr du R o i en rôus fes C o n feils, à tous
�17
ceux qui liront ces préfentes, falut & bénédiction. Nous certifions à qui
il appartiendra, d ’après les inftrudtions que Nous avons prifes fur la con
duite de D em oifelle C a m p , qu’elle a toujours j o u i , en qualité de fille 3
d ’une bonne réputation j que depuis environ 1 7 66 elle a été Reconnue pour
Vépoufe de M . de B o m b e lle s & qu’elle a mérité l ’eftime du Public. C ’eft
pourquoi Nous lui avons fait expédier le préfent certificat, pour lui fervir
de certificat par-tout où bcfoin fera. D onné à Montauban le 7 O & o b re
17 7 1 , fous notre f e in g , le fceau <e nos arm es, Sc le contre-feing de
notre Secretaire. S i g n é L. T . de B r e t e u i l , Evêque de M on tau ban ;
E t plus basj par M o n fe ig n e u r , R o u e r e ., Prêtre,
. .
•
i
■
':
III.
r
Certificat de M . l’ intendant de Montauban.
.
' " ‘ ■
' ' iJ
Alexis-François-Jofeph de G o u rgu e , Chevalier ,-Confeillet du R o i en
fes C o n fe ils , Maître des Requêtes ordinaire de f o n :H ô t e l , Intendant de
Juftice, Police & Finance en la Généralité de M on ta u b a n , certifions à
qui il appartiendra , que Dem oifelle Marthe Cam p , habitante de M o n
tauban , & connue fous le nom de D am e de Bombelles depuis, l’année
1766 , a toujours eu , avant & depuis fo n mariage une conduite irrépro
chable, qui lui a mérité l’eftime du Public. En foi de quoi nous lui avons
fait expédier le préfent certificat , pour lui fervir en cas de befoin. Fait à
Montauban le 9 O & o b re 1 7 7 1 . Signé j D e G
1 V
ourgue.
'
E xtrait des lettres de M . de Bombelles à f a femme.
A dieu, chere ¿poufe_, je t’embraiTe un million de fois. D e Limoges} du
1 4 A vril 1 7 66.
Je ne ceiïe de pleurer comme un enfant, depuis que je me vois éloigne
de ma chere êpoufe , q u e 1j ’adore. D ’ O rléans, du zo A vril 1 7 66.
W
Sois convaincue du plus tendre amour qu’a pour toi ton cher & tendre
, 4 A vril , 7 S 7 .
U1age ta fan té, je t’en fupplie, ma chere 5c tendre amie. Ne ncP»s de me circonftancier'l’ctat ou tu te trouves. T a groiIeiTc eftU ij
�¿S
elle heureufe. T e s maux d ’eft'omac ont-ils un peù'diminué; . . '. . v .
Crois moi pour la vie,avec les fentimens que tu mérites, ton tendre
oux..
D i V"tcr\ou, du 19 A vril 1767.
A d i e u , ma chere amié.-Je t’ehibraiTe un million de fo is , & fuis, avëc
ta. pKiv.rendre amitié , le plus fixielle des> ¿y o u x, petite coquine q,ue tu es..
D e L ille ,• du jcr A v r il 17 6 7 . ' '•
t
N e penfe pas qu’un garçon doive me fiuisfaire plus qu’une fille. Neyient-iî pas de toii^Voilà la feule raifonqm me le rend cher.Tranquillifetoi d,u.côté.de ma fœur ainée. Je vois d ’où part la raifon qui l’a empêchée,
de t’aller voir. Mademoifelle C
fille de M . D . . » . . ; en.ëft caufe..
C ’eft fûrement elle qui lui aura fait un fantôme de l ’humeur de Madame
Hennet ; m ais, pour calmer toutes tes appréhenfions à cet é g a r d , voici
ce que je viens de faire aujourd’hui : j ’ai écrit à ma fœur pour l ’engager
à t’aller voir. J ’ai mis dans fa lettre une à l’adreiïe de Madame de C . . . ^
& je la prie de la lui faire remettre; & je prie cette derniere d’en re
mettre une autre, qui eft dans la fienne * a M adame de L . ;
, que je
prie bien inftamment d ’adoucir M adam e Hennet., & de lui dire, la chofe
tout au long. Je ne doute pas un inftant que ce ne foit là la meilleure
façon de prévenir ma tante. M a lettre à Madame L . —
. eft des plus
touchantes,: & affurément elle ne fe refufera pas à cette grâce ; ainfi j ’efpereque tu en reiTentiras les effets dans peu. Je fuis b i en - a i fe de te prévenir
cependant, qu'au cas que ma fœur te voie , ou M adam e Hennet , de ne
leur pas dire que ton pere ne t’a donné que 8000 livres : je la connois,.
& ce feroit une raifon qui peut-être l e lo ig n e r o it , &
qui l’empêcheroic
de donner le fien en cas de mort ; ainfi il faudra grolîir de beaucoup-
1 objet , ôc ‘lui faire parade de groHes efpérances de tes parens. Puifquc
c’eft à ce prix là que nous devons avoir la tranquillité , il ne. faut point
négliger les moyens qui«y conduifent. Ne néglige pas Madame de C . . .
parce que par fon canal tu pourras devenir bonne amie de Madame de
L . . . . , & pour lors tu n’aurais pas de grands efforts à faire pour être
bien avec ma tante.
,
C . . . . , N . . . . & la C . . . .
te font les a(Turances les plus vives
tic leurs refpeéts. Peut-être fi j e n’ Jcois ton m ari, ils me c h a rg e a ie n t de
toute autre chofe. D e L ille , du z i Mai 1767-
�¿9
j- L e rems eft un bon m aître, ma chere amie. J ’augure on ne peut m ieu x
des bontés de Madame de L . . . . : elle feule eft capable de faire parler
l ’humanité. L e pathétique de fes difcoucs. donneioit une aine & un cœur
au marbre■
, &c défarmeroit un Arabe , à plus forte raifon Madame Henner,
qui m ’aime , & dont le cœur eft ouvert aux cris des malheureux j M a
dame de C . . . . , qui a bien voulu me feconder dans un projet qui pac
les fuites, j ’efpere, te donnera toute la tranquillité que je deûre.............
D e L ille 3 du 2.7 Juin 1767.. .
^
Q ue je fuis heureux, ma chere a m ie , d ’apprendre que m viens de'
donner le jour à une petite fille qui fera le bonheur de ma vie : elle te
reflemble aiïurém ent, c’eft tout ce que je defirois. M a coufine B . . . . ne
favoit trop comment me l’annoncer j elle fembloit craindre qu ’ une fillen ’eut quelque chofe d’al ar ni ant . . . . . . Ma fanté délabrée depuis longte m s , éprouve aujourd'hui que le meilleur remede eft la douce fatisfaction d’apprendre que ma tendre époufe fe porte b ie n , 8c qu’elle me donne
une fécondé elle-m êm e. Je fuis d’une gaieté inconcevable } ton état & tes
heureufes couches y ont la plus grande part. T o u s les Officiers du R é g i
ment te font mille co m p lim ens, fur-tout C . . . . , N . . . . & la C . . . . .
qui t’aiment autant que m oi. A d i e u , ma chere amie ; recommande à I».
petite detre bien f a g e , & d’avoir le cara&ere aufli doux que fa chere
2c
tendre mere. Embralïc la un million de fois de la part de celui que tu
crois être fon pere. Engage la à le bien aim e r; il ne lui fera pas difficile
de fuivre ton exemple.........................J ’ai eu la vifue de plufieurs de mes
camarades 5 dans le nombre il y en a trois qui font m a r i é s q u i ont reçu
aujourd’hui la nouvelle des couches de leurs femmes j il femble que nousnous foyions donné le m o t , car elles ont toutes fait des filles.
.
.
Je leur difpute à tous le plaific qu’ils reiTentent, parce que je crois qu’au
cun dveux ne doit aimer autant leur femme que m o i , parce que la m ienne
eft la plus aimable de toutes. J ’oubliois, de te faire part que notre ami
C . . . . veut être ton gendre, ainli garde lui bien fa petite femme. De.
"Lillej du 7 Septembre 1767.
T u me fais toujours des reproches, ma chere amie... Connois m ieu *
kntimens pour t o i,
8c
rends juftice à leur Habilité ^ crois que difïi-
ei*ient l’on fe détacheroic d ’un objet comme toi. Je n’avois pas befoi«i;
�}°
de la douce fatisfaftion d ’être pere, & de ce refpe&able titre, pour t’aimer
avec plus d ’ardeur. Mes fentimens pour toi font à l’abri des révolutions
du teins, ils ne fauroient s’altérer.........................Je vois avec chagrin que
tu foufFres beaucoup en nourriffant........................ Confidere • que tu n ’es
pas ta maitrefle en pareille circonftance, & que tes jours font égalemeut
précieux à ta chere fille comme à ton tendre époux.
.
.
. J ’ai defiré
toujours que les couches fuiTent heureufes pour ma tendre èpoufe..............
M a chere a m i e , ne doute plus de ma tendrefTe pour toi j elle eft trop
légitim e, pour que je ne defife fincérement de t’en c o n v a i n c r e ................
M a fageiTe & ma fidélité me placeront comme l ’exemple des maris. Q uand
on a une femme telle que t o i , l ’on n ’a pas grand mérite à réferver tout
pour eile. C . . . . , qui n ’eft point prelïe de rompre le célibat, attendra
que la virginité de la petite foit à maturité , ainfi il t’en rend refponfable. Fais enforte de la lui confcrver. Il fe réjouit d ’avance du plaifir
q u ’il aura de cueillir le jour des noces ce fruit fi rare dans le fiecle où
nous Tommes, & qui rarement fe croque dans le lit nuptial ; mais il efpere que la petite fuivra l ’exemple de fa m e te .D e Lille 3 du 27 Septembre
1 7 ^ 7*
L e Monfieur que vous citez comme ayant porté obftade aux nouveaux
liens que je devois former , n ’exifte que dans l ’imagination des auteurs
de cette impofture. M es démarches auprès de mes parcns, pour donner
quelqu’authenticité a cf vx que j ’ ai formés avec voiiSj dctruifent ce pré
rendu f a i t .......... Je ne dois qu’à vous, M a d a m e, pour votre tranquillité
( s ’il.eft vrai que vous puilliez l’être ) la certitude q ue , f i vous n’ avie^que
ma fim plc parole pour l’ inviolabilité de mon ferment 3 ce contrat ferait
auffi fa c ti que celui qui eft une preuve incontejlakle des droits que vous aure\ fu r moi, tant qu’ il circulera une goutte de fa n g dans mes veines. D u 3
M ars 1769.
L e voile dumyftere m ’a offert à tes yeux comme un crim inel, qui tramoit fourdement des moyens de rompre des liens qui n’ont befoin d’autre
garant que le J/tiic précieux que tu as porté dans ton fein. Rend-m oi plus
de juftice; & n ’imagine point qu ’une paillon brutale ait pu allumer le'
flambeau du tendre amour (qui embrafera toujours mon ame. Lettre du
Mars 1770.
�31
V.
Tejlament de M . de Bombe lies.
A u nom de D i e u , & c . Nous fouifignés, Meilire Jean-Louis-FrcdericCharles de Bombelles, Clievalier de l’O rdre r o y a l, & c . fils de feu Meilire
François-Gabriel de Bombelles, C hevalier de S. L o u i s , &
de D am e
Jea nne-Catherine de Z olle s, mari<^ , habicans de Monrauban , étant
en bonne fa n tc , & en tous mes bons fe n s } confidéranc la fragilité de
cette v i e , & l’incertitude de l’heure de la m o rt, ai difpofé de mes biens
par mon préfent teftament, que j ’ ai écrit moi-même en la forme fuivante.
En premier lie u , je prie D ie u de me pardonner mes péchés, &c de rece
voir mon ame en Paradis ; voulant qu’après mon d é c è s , mon corps foie
enleveli avec tels honneurs funebres qu’il plaira à mon héritier, bas nom
me ; & quant à mes biens ; je donne à Marthe Camp, ma chere époufe} la
jouiffance, pendant fa vie , de mes entiers biens & hérédité, à la charge
par elle d ’en acquitter les charges annuelles, y faire faire les réparations
neceiTaires, & de nourrir & entretenir dans fa m aifon, à fon pot au feu ,
fes enfans qui feront provenus de notre mariage, jufqu’à ce q.
■i®""
accompli leur vingt-cmquieme année, ou qu ’ils viennent à fe m arier; a,,
moyen de quoi je veux que madite époufe ne puilTe être obligée de rendre
aucun compte de fes jouiiTances ; & en cas que le compte lui en feroit de
mandé , je lui donne &
legue le reliquat, & conftitue en ce mon hcriticre
particulière, 5c en tons & chacuns mes biens meubles & im m eub les, n o m s ,
v o i e s , droits, raifons & actions préfens & à venir. Je nomme
8c
inftitue
pour mes héritiers univerfels & généraux, les pofthume & pofthumes
dont ladite D am e mon époufe pourroit être ou devenir enceinte , venant
en lumiere de notre mariage, pour par eux en jouir après mon décès &
après le dcces de mon é p o u fe, ôc en faire & difpofer à leur plaiiir £c vo
tante , en payant mes dettes : & en cas où je décéderois fans enfans ou
Püfthumes, audit cas je nomme & inftitue mon héritière univerfelle
8c.
. ncra' f > ladite D am e Marthe Camp., ma chere époufe} pour par elle en
r > f^ire & difpofer de mes biens
2c
hérédité, après mon décès, à
(lrs & volontés, en payant mes dettes. Er, en cette form e, j ’ai i-*ic
on pccffcin teftament, voulant qu’ il vaille comme teftament ou comme
�31
codicille donation , & difpofition à caufe de m o rt, & en la meilleure
forme que de droit pourra valoir ; révoquant tous les autres teftamens &
difpofitions de derniere volonté que je puis avoir fait: voulant que le prefent foit le feul valable. Et après l’avoir lu & r e lu , & trouve conforme
à ma v o lo n té , je l’ai figné à la fin d’ic e lu i, & au bas des autres pages. A,
M on tau ban, ce 5 A v r il 1766. Sig n é, B o m b e lle s .
-MF.
L
I N
G U
E T ,
Av oc at .
d E l'im prim erie de L . C E L L O T , rue D auphin e, 177 1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum.Camp, Marthe. 1771]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marthe Camp de Bombelles
Linguet
Subject
The topic of the resource
diffusion du factum
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
protestants
vices de forme
actes de mariage
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, pour Dame Marthe Camp, Vicomtesse de Bombelles.
Contrat de mariage
testament.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de L. Cellot (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1771
1766-1771
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0801
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0802
BCU_Factums_G0803
BCU_Factums_G0804
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53050/BCU_Factums_G0801.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montauban (82121)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de mariage
diffusion du factum
Protestants
validité d'un mariage entre un homme et femme de confessions différentes
vices de forme