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ANALYSE
D e s M ém oires et Consultations rédigés pour
P ie r r e
G E R L E , jeu n e , et ses sœurs , de
S a u x illa n g e s, dem andeurs ;
Contre J e a n G E R L E , aîné , leur f r è r e , avocat
défendeur j
Sur les questions suivantes :
1ere D e quelle manière doit être f a i t , au partage , le
rapport du pré appelé de la P érich onne ? Sera-t- i l f a i t
en nature , ou le Sieur Gerle , aîné , ne rapportera-ti l qu’ une somme de3
#
4
8
2
, fo u rn ie p a r son père en
1759 pour l ’ acquisition de ce pré , fa ite pour lui en
son nom , en qualité de père et légitim e adm inistra
te u r de son fils aîn é , alors âgé de trois ans ?
2 .° Comment se fe r a le remploi du domaine du M oulinet
et de la Bâtisse -, appartenant dans le principe à A n n e
F ilaire, mère com m une, morte ab intestat, et q u i a
été vendu par le Sieur Gerle , père ?
3. A q ui doit appartenir la réserve de la pension viagère
de 150# , que le Sieur G e r le , p èr e, s’ est fa ite dans le
contrat de mariage de son f ils a în é , héritier in stitu é,
dont i l n ’ a point disposé ?
Les e rre u rs des e sp rits s y s té m a tiq u e s , c o m m e les p rét e n t ions injustes des a m b itie u x , se d iss ip e n t au g rand
jo u r de l’im p re ssio n , p arrce que le raiso n n e m e n t et la
discu ssio n les m è n e n t au creuset de la vérité’ ( 1 ).
R a y n a l . H is t. p h ilo s , et p o lit.
I L s’agit entre les parties , de déterminer les
( 1 ) O u connaît les in trigu es et les m anœ uvres qu’on.
T R IB U N A L
D ’IS SO IR E .
�( 2 )
bases d’après lesquelles doit être fait le partage
de la succession de P ie rr e G e rle , pçre commun ,
et de celle d ’Anne Filaire , son épouse.
Pour y parvenir , il
convient de fixer les
niasses qui doivenL composer la succession pater
n e ll e , et d’en distraire tout ce qui y est étran
g e r , afin de.faire la distinction de la succession
maternelle , qui doit se partager par égalité
entre tous les enfans , tandis que la succession
paternelle est grevée d’une institution contrac
tuelle , faite en 1786 , en laveur de Jean G erle ,
aîné.
On vient de voir quels sont les objets sur
lesquels les parties sont principalement divisées
d'après le procès-verbal dressé devant le Sieur
B o n f ib , notaire , le 6 prairial an i 5 , en e xécu
tion de la loi relative aux partages. Ils seront
discutés chacun dans leur ordre,après un exposé
rapide et succinct de ce qui s’est passé dans la
famille G erle , relativement aux dispositions de
tout genre qui existent..
F A I T S
F II I N C I P A U X .
L e i 5 août 1 7 5 0 , mariage de Pierre G e r l e ,
père commun
avec Anne Filaire.
a employées pour dissoudre dans le principe la réunion
«les trois cous ils que le S ieu r G e r le j . c ava it rassemblés
pour travailler à la délense de sa cause. O u sait tout cc
qu'on a l’ait depuis pour b rou iller le client avec celui
des défenseurs qui était resté chargé du tr a v a il, et cela
afin d’einpêclier l’ impression des mémoires qui auraient
jeté un trop grand jour sur cette affaire. Mais il ne
lestera à l’a u te u r de ces petits moyens que le regret de
11 avoir pu réussir , et la faculté de répondre , si bon
liu semble.
0
�( 3 ,
Sa dot est de 5 , 5 oofr ; les époux se font un
don mutuel d’un gain de survie de 5 oo liy.
Anne Filaire obtient dans la suite un augment
de dot de 5 oo liv.
De ce mariage sont issus cinq enfans encore
vivans, Jean G e r l e , Catherine , M a rie , F ran
çois et Pierre.
Anne Filaire, mère co m m u ne, est décédée
cib intestat : sa succession doit donc s e par
tager par égalité entre tous ses enfans.
Jean G e r le , a în é , s’est marié au mois d*octobre 1786 y son père l’a institué son héritier
u n iv e rse l, à la charge des légitimes de ses au
tres enfans ; elles seront réglées par le p a r t a g e .
' L e Sieur G e r l e , p è r e , outre la dot consti
tuée à Anne F ila ire , son épouse, paraît avoir
reçu ,
P rem ièrem en t} une rente de 1200 liv.
en
p rincipal, donnée a Anne Filaire par acte du
10 janvier 1780 ;
S econdem ent ,
p a r l ’effet d ’une vente con
sentie à son p r o f i t , en qu a lité de m ari d’A n n e
F i la i r e , p a r Marcelin F ila ir e , Pierre Barisson
et Marie-Anne Filaire , en date du 5 mai i 775 ,
p artie d’un dom aine a p pelé du M ou linet et de
la B â tisse.
Anne Filaire avait déjà une portion de ce
domaine,
en
vertu d’une donation consentie
à son profit par le Sieur T e i r a s , son oncle.
L e Sieur G e r l e , père , après le
décès de
�( 4 )
6on é p o u s e , a vendu le domaine du Moulinet
et de la Bâtisse : il en a employé les fonds en
acquisitions pour son
compte. Il s’agit donc
de remplacer en fo n d s ,à prendre à dire d’e x
perts dans la succession du Sieur G erle , père ,
la valeur actuelle du domaine du M o u lin e t,
pour être reportée dans la masse de la suc
cession m a tern elle, sauf à faire compte à la
succession du Sieur G erle , p è r e , d e l à somme
de 5666 liv. qu 'il a remboursée en papier mon
naie pour son épouse , et dont sa succession
doit répéter aujourd’hui le montant en numé
raire , d’après l’échelle
papier monnaie,
Jean G e r l e ,
de dépréciation
du
aîné, ne fait aujourd’hui au
cune mention du remploi de ce domaine du
M oulinet et de la Bâtisse , aliéné par son père.
Il propose de rapporter au partage une somme
de 5284 liv. pour la valeur du pré de la Peric h o n n e , acheté en 1 7 5 g par le Sieur G e r l e ,
père , se qualifiant dans la procuration de p ère
et légitim e adm inistrateur de son f i l s , au lieu
du pré lu i-m ê m e , qui vaut aujourd’hui plus de
¿5,000 liv.
Il glisse sur la réserve de la pension viagère
qui représente un capital de i 5 oo l i v . , qui est
exclusivement dévolue aux légitimaires.
Il n ’est fondé dans aucun de ses refus
de scs prétentions.
ni
�( 5 )
TR E M IE HE
Q U E S T IO N .
l e prâ de la P érïchonn e doit-il entrer p ou r sa valeur
actuelle, et absolue dans la masse des biens destinés
à composer la succession de Pierre C trie , père corn m un , ou Jean Gerle , a în é , d o it-il en être quitte
p our rapporter à la succession de sonpère une somme
de 3 a 84 liv. pour le p r ix de ce pré ?
Cette question vraiment neuve présente un
grand intérêt par les conséquences qui résul
teront en principes , de la manière dont elle
sera résolue dans cette affaire.
Si Jean G e r l e , a în é , n ’était point héritier
contractuel de son père , s’il renonçait à l 'ins
titution d'héritier faite
en
sa fa v e u r ,
non
seulement il ne serait pas question du faire
entrer ce pré dans la niasse de la succession
de Pierre G erle ; niais Jean G erle , son fils ,
qui aurait ce pré à titre de préciput et avan
tage , serait même dispensé de rapporter au
partage les 3284 liv.
fournies par son père
pour payer le p rix de ce pré.
Car un point capital dont il faut convenir
a v a n t tout pour s’entendre sur cette question ,
c’est qu’aux termes des lo i s , l ’acquisition qui
serait faite par un père au nom de son fils
en bas â g e , incapable de co n tra cte r, et ne
possédant rien ( comme dans l’espèce) , est une
véritable libéralité , une donation indirecte, dont
le fils profite sans dilllculté , si l’objet donné
n ’excède pas la quotité disponible.
�( O
Par la même raison , le9 qualités de dona
taire ou de légataire particulier étant incom
patibles avec celle d’ héritier contractuel ( quant
à ce qui n ’est point disponible d’après la l o i ) ,
et Jean G erle ne pouvant
cumuler
les deux
qualités d’héritier contractuel et de donataire
d ’ un objet p a r t i c u l i e r s a n s blesser la légitime
de droit de ses frères et soeurs , il
ne peut
pas être question
rapport
de 3284 liv. pour
dans la cause
le prix
du
de ce p r é , mais
seulement de l’option à faire par Jean G e rle ,
aîné , entre la qualité d’héritier institué de son
père et celle de donataire du pré dont il s’agit ;
l ’ une de ces qualités exclut nécessairement l ’au
tre , in clu sio unius est alterius exclu sio .....
Cet argument résulte de la disposition te x
tuelle de l'art. 845 du code civil s ainsi conçu:
« T o u t héritier , même bénéficiaire, venant à
w une succession, doit rapporter à ses cohéri-4
» tiers tout ce qu’il a reçu du défunt par do» nation entre-vifs directem ent ou in directew m e n t, etc. »
E t l’article suivant ajoute : « Dans le cas
» meine où les dons et legs auraient été faits
» par
préciput , avec dispense
du rapport ,
)> l’héritier venanL à partage ne peut les re)> tenir que jusqu’à concurrence de la quotité
3) disponible, l'excéd a n t est su je t à rapport.))
Cette d o c h in c e s t fondée sur le grand prin
cipe de justice qui appelle la légitime des e n -
�(1)
fans , debita portio h œ re d ita tis, et qui ne per
m et pas qu’on puisse les en p riv e r , dit D o m a t,
p ar aucune sorte de disposition
Aussi la loi 20 au cod. de collatione , qui
traite la question dans l’ hypothèse de l’égalité
promise à tous les en fan s, veut que tout ce
que les enfans et autres astiendans auront reçu
de leurs père et mère , soit sujet à r a p p o r t ,
ainsi que le profit qu’ils auraient fait sur ces
avance* , quand même -elles auraient servi à
acheter une charge militaire qui aurait augmenté
de valeur , afin que le profit qui en résulte ,
accroisse la niasse de la
les copartageans
succession pour tous
et que l’égalité entr’eux ne
soit point blessée par des bienfaits.
Q u o d tam in a tiis quam in /iis qua occa
sione m ililiœ , uni hœ redum e x d e fu n c lip e c u n iis 7acquisita: , lucratur is qu i mililiarti m eruit,
tocuM h a bebit, u tlu cr u m qu od tempore m ortis
d efu n cti a d eum pervenire p otera i non solum
testamento condito qUartœ p a rti ab intestato
successionis com p utetur, sed etiam ab intestato
conferatur. h . 20. Cod. de collatione.
Si donc dans le système du partage d’une suc
cession ab intestat et par égalité , le cohéritier
qui a reçu quelqueavance ne peut faire aucun
profit personnel et doit compte à la masse du
gain qu’il a fait par ce moyen , en retranchement
sur ce qui lui resto à prendre de sa portion aflëra n te
, combien la loi doit elle être encore plus
sévère à l’égardde l ’héritier institué, qui déjà par
�( W
les„avantages qpi lu i r o n t assures au-moyen dû
^institution,, fdiminue de moitié la portion natu
relle qui sans cela reviendrait ¡aux légitimaires ?
Ainsi, l’on volt clairement quelç système du Sieur
G e rle
aîné , qui .tend .à réunir sur
têteune
double, institution, d’héritier , un double emploi
de bienfaits., répugne également à l’équité natu
r e lle , e t à l a loi positive, qui a marqué | les limite&aïudelù desquelles laiportion des légilimaires
d oit'.dem eurer. intacte.
oîn
‘
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■». ,
O bjections 'd u Sieur- G erle y a'înéi !
, ‘.'Iln- i,
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’
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' »wji.y
<c Je ne fais point de difficulté , djt le Sieur
Î.uuj yi.».¡
» G erlev
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. -10.
a i n e , d e r a p p o r t e r l e s 0 2 8 4 liv . q u e
^
,
Vi)r£*f~*1)' •
)) m on p ere a iournies p o u r l'acquisition, du p ré
)) de la P é r ic h o n n e : ce n'est que de la plus
'..».V , •
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» value de .ce p ré que je v e u x p r o f i t e r , et je
», vous m ets dans la . m êm e position où vous
/l'.iV'V.W \ ‘ • ;1'.-.•
.W/.VOV , -9> . • .Oïi
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» s e r i e z , si m ou p e r e , au lieu d a c l i e t e r ce
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» pré en m on nom ‘ eût gardé sonar<>eiit oisif
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».(Vins un kcoin de son secrétaire. » ,
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^T^éjxonfie.M a is qui peut, se dissimuler qu’avec
ds pareilles suppositions , un perei, entraîné par
V.'.le- J^éiVilcetion
ayeugle , ferait tourner,.-au
? J ^ n a i t r j ^ | S,e -ul - ^ : SÇ?<.?nlf? n?;.£,u/ , ^ t.r ini8 Ç Î -.4 ®'
tous lesf» iautrps
íes résultats
,i ,■'* tous • :j.r
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Bfin¿lS8r.r?t ! d?i t0IIS IeS arl?^' nS t^
tent de bonifier sa fortune,?.,, •
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-Ji-f! ¿i;,h ii;p
jiij 7''iî: ;{,in
'1
ory/ùe
�.
(o)
«les acquisitions qu’il ferait au nom de son en
fant chéri , en «sorte, que celui-ci;’,' malgré ses.
rapports
toujours
insuffisans
relativement à
ses cohéritiers , se trouverait avantagé
contre
la lettre et l’esprit de la loi , au-delà de lu quo
tité disponibléii'Car il est certain; que tout ceque le pére donne de. plus à l’un de ses enfans’
par des voie» indirectes, ■et qu^l'empêche d’ac
croître la nïâü&3 réellp de sa fortune , diminue
d’autant la portion ‘d es autres ¡cohéritiers dans
sn! succéss'ion-? } de sorte que pour décider per
tinemment la question qui divise les. parties >
il-suffît de savoir ^si la prétention tde Jean G erle *
blesse ou nôn,)les""intérêls légitimes de ses f r è res:’el soeurs et ’si leur part dans la succes
sion à 3partdger ne serait pas plus fo rte', si
Pdc'qiiisitibiï* du’ pré dont il s’agit , au lieu d’af o i r été faite par Jean Gerle
en qu a lité de
p è r e 1,et légitim e adm inistrateur de son JtlfT^y
l ’avait été en .son nom
piopre' et p rivé ; et
ç ’est ce qui n’e^t pas douteux., puisque le Sieur
G e r l e , aîné
insiste à vouloir rapporter le prix
de la chose , au lieu de la chose ‘même.
pourquoi celle distinction ,
p rjx
forment^ cjiacun
avantage p ro h ib é ?. ,
Mais
si la chose . et le
dans leur ^essence
un
_
E t en e ffe t, si clans les partages sur-tout on
j
■ •_
1
6-.:.
•
h
distingue les valeurs suivant les, époques , on ne
b
_ . : ji ■
> -, j;Ii
i ■
persuadera jamais qu’une.somme pécuniaire de
^* **
‘ I•*{* ‘‘ 4^ - *' *
ou 84 h v . , valeur de 1 7 5 g , représente la même
�( io )
masse réelle en i 8 o5 ; car si en i 8o 5 un jo u r
nal de pré vaut 3 ooo f r . , et qu’en 1759 on
ait pu en acquérir six journaux pour la même
so m m e, il en résultera que celui qui, en i 8 o 5 ,
rapportera 0000 l i v . , valeur de 1 7 6 9 , r a p - '
portera cinq fois moins qu’il ne doit réellement,
et profitera par conséquent sur ses cohéritiers des
cinq sixièmes d ’un objet donné, dont il convient
cependant devoir faire le rapport pour une partie.
E t comme dans la masse d’ un tout sujet à
r a p p o r t , on ne peut pas établir des règles dif
férentes pour chaque p artie, ni les diviser de
• l e u r ensemble, il faut refuser le rapport en
e n tie r , ou l’accorder pour le to u t; car c’est
tomber dans une contradiction palpable que
d'offrir le remboursement du p rix de la c h o s e ,
si le prix ne représente plus la chose même ;
c ’est donner et retenir ; c ’est s’embarrasser dans
un cercle v ic ie u x , qui répugne à la raison.
-
A u tr e objection du S ie u r G e r le , aîné.
« L ’héritier , d i t - i l , qui vient à partage n ’est
/ t e n u de rapporter que ce qui a été distrait de ïa
» succession. A u moyen de l’acquisition dont il
3) s’agit, le fils aine du Sieur G erle n ’ a reçu
» que dgs deniers ; il ne doit donc rapporter
)> que les mêmes objets qu’il a reçus , c’est-à
- d i r e , les
deniers
employés par le père à
V) l’acquisition du pré dont il suagit.
Réponse. Ce 11’est i c i ‘qu’un sophisme , et
l ’argument porte à faux.
-
�( >1 )
Par cetle acquisition , Jean G erle n’a jamais
rien r e ç u , ni les deniers, ni le fonds. L e p è r e ,
pour acquérir } a pris une qualité impropre et
inappliquable, puisque son fils n'avait rien à
adm inistrer ; il n’a point acquis p o u r son /ils ,
niais pour lui-m êm e, puisque de fait il n’a point
d i t qu’il achetait pour son fils ,
q u ' i l a même
constamment joui comme ayant acheté pour lui
seul; et que c ’est à ce titre que l'on reconnaît
toujours le véritable propriétaire et. possesseur.
E n effet , le fils n ’ayant jamais joui du pré,
n ’a jamais
été
débiteur du père du p rix qui
avait servi à cette acquisition.
Il n’est pas da
vantage aujourd’hui débiteur de la succession de
son père pour cet o b j e t , puisqu'il n ’a contracté
aucune obligation personnelle à cet égard : ce
n ’est pas le p rix à r é p é te r, mais le fonds acquis
par le père p o u r lu i , en son n o m , en qu a lité
de p ère et légitim e adm inistrateur de son Jils ,
qui est resté à la m ort du père dans sa succes
sion , sans avoir jamais été séparé de ses autres
propriétés. Il n’y a jamais eu de distraction ré e U
lement faite , ni de la chose , ni du prix ; il ne
peut donc pas y avoir de fiction sur ce que le fils
peut être réputé avoir reçu
de son
père par
cette acquisition , puisque de fait il n ’a rien
reçu ; on ne peut pas faire après la mort du père,
une distinction qu’il n’a jamais faite de son vivant.
On ne peut paa non plus appliquer à l ’espèce
les principes des retraits lignagers sur lesquels
le bieur G e r l e } aine, s’etend à perte de vue dans
�•(. 1 2 )
son immense consultation ; la comparaison clo
che à vu.e d’œ il...[ . ,
Dans l ’espèce d’un père qui exerce un retrait
nu nom d ’un, de ses enfans, l’intention du pèr.e
de faire profiter son fils du bénéfice de l’objçt
retiré n’est pas équivoque ; et si, comme l’objecte
le Sieur G erle , aîné, le père lie peut pas vendre
en son nom dans la suite l’héritage retrait au
nom du fils , c ’est que le droit de propriété du
fils est reconnu et assuré par le retrait même fait
en son nom. Dans celte espèce , le père ne pou
vant pas retraire pour lui-même , il valait m ieux
qu’un de ses enfuns profitât de la plus value du
fonds r e t i r é , que de la laisser perdre ; ne pou
vant pas faire mieux , il faisait sans inconvénient
la cause bonne d’un de ses enfans , et tant qu’il
ne blessait pas de celte manière la légitime na.turelle des autres, les objets retirés profitaient
sans doute à celui sous le nom duquel était fait
le retrait ; mais il n ’en aurait pas été de même si
ce moyen indirect d ’avantager un de ses enfans ,
au préjudice des auLres, avait été poussé à l’e x
cès , et que le père , après avoir vendu ses biens ,
.eût épuisé sa fortune à faire des retraits.
L a question proposée par les auteurs que cilo
Je Sieur G erle dans sa consultation et l’arrêt rap
porté par Charondas , n’a lieu qu’entre le_ père
et le fils sur leurs droits réciproques ; il n’y s’agit
point du tout des intérêts des tiers qui auraient
eu à se plaindre du plus pu moins d’extension
I
�' quelè'pèrb aurait donnée à!/sbs libéralité^ îîf:rt,y
’ ri (Îi'rit- au'ôurte parité -, ni clans Fèspèdej'ni dans
lès ÌÌécìéio,rt'sV'qui d o iv e n t's ’ én suivre/'''7''
C a r 1 ori rie prétfend -paV'soutenir qù^il 'soit.
■<l(ïfendui' :£ku:‘père cVàéqùérJr'jSdn^'èôh-fiÎ^, n'i‘Ite
blâiriei’^dé là pVëférefice^ù’ il 'dô'nnë a l ?üri d’éux
sur lüi-nierne y m àisl'ô n 'veilt d’abord qrre'célfe
'p r ifé r é h c e ', et cette intention 'd?acqüét& 'p o iir
le f ils et é n ' son nom j’fe*dit*1>ïefi déterminée--;*
Èri second lieu, que lorsqu’elle l’est, et qiièTâcquisition ainsi faite est reconnuep dur une 1tixs.~
r a lilè , el(b'entre en computation et en lignède
c o m p t e ' datons les avaïrtagës possibles r[iieiai loi
permet ali père en fâveüf d’un de ses enfant,"au
$• ’ t »• 1 i * «T' ^ 11 r t fI λ ï - »» * * ' ‘ !^■
**•*
prejudice des autres.
• »
â.JciîïiiiVrcischn.,
A in si tout ce qu ’enseignent B ourgeon ? C h à r o n das jJÎa ÎÜi'i 8 C o
LàE b arib W -
s i é r e , G r im a u d é l, è t¿.^ ri e traitant point la ques
tion qui nous o c c ü p è y lô u r décisiòn iVe form e
a u c u n
p réjugé coiitMi ‘ lfes*-ÎÎ%itiVnàirés Gé'rlé;'' '
* 'L a dernière objfectiôti 'du Sieur1 GèrleJ'Wfiê*,
consisté’«'dire ; « ^deTifis’t'i'tntion d’HéVÎtïèi fuite
» 'e n :sa- faVcur en 1786; ri’ést pas 'iii<îdmparlble
'en
» a v e c '1l ’a c q u i s i t i o n Ô ù :p r é ' ' q u i n u r a i t é f é ' f u i l b
,, sor. noni e n V 75 ’9"J, pai’òe qu'en 1786 ^ M iéi'i» loge a'ciquis n ’était poiiitnun objet àiiplif&hiarit
» a u pèÎH , et qu’il lié ï V f ü inétituti héritier
.» que de ce qui lui était pfttpre’.
■
'
'■ <“ '<} y r ’' ~
1R éponse. C ’est déjà une questiort 'tyèi-étiuî*
vbqti (5 CL que nous discuterons dan 3:l?itrslatit}1Jtjtfe
�( ’4)
celle de savoir si, après les termes de la procura
tion ainsi conçue : « de pour lu i , en son nom ,
en q u a lité de p è r p e t légitim e a d m in istra teu r
d e son f i l s , acheter, etc. , l’acquisition est censée
faite au nom du père G erle ou de son fils, qui n’a
vait rien à administrer. Mais , quand même l’ac
quisition serait faite au nom du f ils , avec les de
niers du père , lorsqu’après sa m o r t , celte acqui
sition , qui est une véritable libéralité, vient à se
rencontrer avec l’institution d’héritier qui épuise
tout ce qu’il y a de disponible dans sa succes
sion ; on ne considère pas si le père possédait
ou non , lors de l’institution d’héritier , l’objet
* primitivement donné par une disposition indi
recte 5 mais seulement s’il a pu ajouter , au pré
judice de la l o i , une seconde libéralité à la prém ière ; et c’est ce que la loi défend impérieuse
ment par ces expressions : L Jhéritier doit rap
p o r ter tout ce q u ’ i l a reçu directem ent ou in d i
rectem ent. Car on ne saurait trop répéter que ce
qui entrera d é p lu s dans le lot du Sieur G erle ,
p ar l’effet des distractions ou des prélèvemens
exclusifs , de quelque manière qu’ils s’opèrent
se trouvera nécessairement
en moins dans la
portipn de ses frères et soeurs ,e t blessera leur
légitime de droit , qui cependant doit demeurer
intacte. H é ! comment concevoir en effet qu’un
père puisse acheter au nom d’un de ses enfans
«¡an^ que celui-ci fût tenu à d ’autre rapport qu’à
ççlui du p rix ostensible des acquisitions ? Ou en
�(i5 )
seraient les légitimaires , si d’une part le pèro
achetait au nom de son fils, pour à peu près la
moitié de sa fortune , et que de l’autre il l’ins
tituât héritier pour le surplus ? Ce qui serait vala
ble pour oooo fr. , le serait pour vingt , pour
tren te, et même davantage, jusqu’à l’universalité
même de la succession , et alors que devient la
légitime ? D ébita porlio hœ reditaiis ; elle est réduiteà zéro ; ce qui ruine à fond le système désas
tre u x de Jean Gerle.
Maintenant, si l’on examine de près les termes
dans lesquels est conçue la procuration du Sieur
G e r l e , père
^
donnant pouvoir d’accepter la vente
du pré dont il s Jagit ; si l’on juge de l’effet de cet
acte par la manière dont il a été exécuté , l’on n e *
p eu tgueres y trouver une vente réelle , un titre
v i ^
y
,
d ’acquisition en faveur de Jean G e r le , fils à P ie rr e .
L ’on voit par cette procuration , que le Sieur
G erle , père, en ajoutant la qualité de p ère et lé gitim e adm inistrateur de Jean G e r le , son f i ls
^
à ces mots qui précèdent , de p o u r lu i et en son
n o m , a voulu peut-être rendre plus difficiles l e
’ï j u t j )
1 / ^
s
i
moyens de revenir contre cette v e n t e , par ^
voies de r e ir a it , de lésion
ou tout autre y mais
,
l ’on n’y voit pas bien clairement qu’il ait voulu
L< (177^
’
acheter nominativement p o u r son fils ; car cette
expression nécessaire ne s’y trouve pas.
'■
*—
^
On pourrait même dire en scindant la phrase,
que la qualité de p ère et légitim e adm inistrateur
de son f i ls , que prenait le Sieur Gerle , père,dans
cette procuration,, était illusoire et vftine j qu’elle^
i
/ITî
/
T n — /V
’
^ 1/ * ^
*
�.
( 16
.
. . . .
..
était même déplacée dans la circonstance oii Jean
G erle, âgé do trois dns , ayant pére et in è re , ne
possédaitjaucmi bien personnel qui pût être sujet
à ('administration de son père,ni fail'e face à l ’a c
quisition du pré dónt il s’agit.' Cette qualité'pré
ten d u e, sans la réalité du fait, sans'les moyens
d ’acquitter aux dépens de Jean G erle ,' fils , le
prix de cette acquisition''^ ne coristilue^pas ce
dernier propriétaire incommutablé de ce pré, qui
de fait a été joui par le Sieur G erle ,;:père , séül ,
jusqu’ à son décès.
"
..... Mn.::.
E t le Sieur G erle , pere, avait dautant plus' do
droit et de raison de jouir pendant sa vie du pré
dont il s’ a g i t , que la procuration pour acheter
porte expressément de p o u r liti et en son n o m
a cq u érir, etc. expressions qui , quoique suivies
de celles de p é r e et légitim e adm inistrateur d é
son f i l s ,n’excluent pas l’intention première d’ac
quérir p o u r lu i et en son nom ; mais qui-laissent
au contraire subsister la véritable intention
d ’acheter p ou r lu i , lorsque la fausse qualité qui
y est jointe vient a VTîs'paraître par le rappro
chem ent du véritalflfe état'des parties.
U n tuteur qui administre lesr hidni d’un mi
n e u r , achète en qualïte'^dè tiitëùr p o u r ct 'aà
nom de son mineur-, il* placé ainsi le fruit de
ses économies ou de/iém bourseiriens"q u’il re
çoit pour le mineur': ce d e rn ie r, lorsqu’il esi af
franchi de la tutelle , dévient do fait propriétaire
de ce qu’on a acquis pdür lui ‘et paye avec ses
�( 17 )
deniers. Mais dans l ’espèce, où il n ’est pas même
dit dans la procuration que le Sieur Gerle achète
pour son Gis , il serait absurde de tirer d’une qua
lité imaginaire et déplacée qu’a prise le Sieur
Gerle ., père
dans cette procuration , la consé
quence qu ’il a entendu faire celle acquisition ««
Hom de son f i ls et p ou r lu i ; tandis que sa con
duite à cet égard , pendant plus de quarante-cinq
ans , n prouvé le contraire.
Disons donc que non seulement le Siaur Gerle,
ame , ne pouvait p as, d ’apres la loi
cumuler la
qualité de donataire de ce pré , ni de son p r i x ,
r' n• *
j
avec celle d’héritier institué , si son père l’eût
ainsi voulu; mais que cet 1« disposilion même n ’est
jamais entrée dans la pensée de son père..
Cela est si prouvé,, que le Sieur Gerle , p è r e ,
avant comme après ie mariage de son fils , lors
qu’ils demeuraient ensemble , comme lorsqu’ils
ont vécu séparés, a constamment joui du pré de
^a Périchonne , comme de sa chose p ro p re , qii’il
en jouissait encore à son décès , ainsi qu’en est
convenu le Sieur Gerle , aîné, dans le proces-verbal du 6 prairial' an iô ;
Que le Sieur Gerle
o.
p è r e , 'a nommément dési
gné ce pré .domine sien dans les confins d’un
a u t r e pré conligu t}u’il a acheté depuis ;
Que le Sieur Gérle", p ère, a soutenu un procès
en so rin ô m 1'} dbnlfe le Sieur- -Portail'1, pour une
prise d?eau relative à ce pré ; "
Que jamais il ne l a considéré'^cimnie apparu
�(i8)
tenant primitivement à son fils ; que jamais ce
dernier lui-même n’en
a
réclamé la
jo u issa n ce,
qui est toujours demeurée sur la tête de son pere,
qui l’a constamment possédé anim o (lomini >
Q u ’ainsi,sous tous les ra p p o rts, le
S ie u r
Gerle»
aîné , ne peut se dispenser de comprendre le pr^
de l a Périchonne, tel qu’il existe a u j o u r d ’h u i , ^ans
la Buccession de son père^ pour en être délivre
à chacun des cohéritiers leur portion afférante »
comme de tous les autres objets propres au Sieur
G erle , père , lors de son décès.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
L e domaine du M ou linet et de la B â tis s e , appartenant
en propre à ¿inné P ilaire , mère commune , motte
ab in t e s t a t , et vendu p a r le sieur Gerle ,p è r e , doit
•
demeurer confondu dans la masse de sa succession >
p ou r profiter à l ’héritier institué du père , ou doit-011
en distraire la valeur représentative en fo n d s d ’égt&
v a le u r , pour composer la masse de la succession
maternelle ?
Cette
question ainsi posée ne semble paS
devoir souffrir de difficulté.
U n e partie de ce domaine appartenait en
p ropre à A n ne Filaire , épouse du sieur G er
le , père , avant la vente du su rp lu s, consentie
par Marcelin F ila ir e , Pierre Jîarisson et MarieA n n e Filaire ,
ses autres cohéritiers.
Cette
vente est consentie en 1775 au sieur G e r le >
père , en qu a lité de m ari d ’A n n e F ila ir e seu
lem ent , c’est-à-dire ? spécialement pour elle«
�( 19)
Ce sont des cohéritiers qui vendent leur p o r
tion à leur soeur , et c ’est le mari qui , dis
tinguant dans l’acte sa qualité de mari , pour
accepter la vente , de sa qualité personnelle,
pour payer les intérêts du prix jusqu’au rem
boursement, reconnaît formellement qu’il n’a
d’autre titre
à cette acquisition que celle d e
7fiari , agissant pour sa femme , uxorio n em in e »
en sorte que tout accroît et profite pour elle
dans cette affaire qui la regarde seule,' et où'
s°n inari n’est à proprement parler que
foadé de pouvoir.
4) Pierre Gerle ,
père , du
son
vivant de sou
épouse, pour des convenances et des arrange
o n s personnels, dispose de ce domaine comme
de sa chose propre , et le vend quoique d o tôl ou même p a r a p h e r n a l, puisqu’il n’avait
Point été compris dans la constitution
de dot
d’Anne Filaire.
Maintenant Pierre G erle
avait-il
le
pou
voir de vendre les biens dotaux ou même p a raphernaux de son épouse , au préjudice de ses
1 héritiers légitimes ?
Ces
biens d o iv e n t-ils être représentés en
Nature dans la masse de la succession
à la
quelle ils sont p ro p re s?D o it-o n les rapporter
en valeur équipollente , ou resteront-ils con
fondus dans la masse de la succession pater
nelle, parce qu’il a convenu au sieur G e r le ,
père , de
les aliéner ?
�(20 )
- C e sont tout autunl de questions qu’il sera
facile tle résoudre à l’avantage • des frères p111“1
nés y cohéritiers du sieur Gerle , aîné.
1
Premièrement1, 1111 point de droit nécessaire
h convenir à ;cet égard,
et qu’on ne saurait
raisonn ablem en t c o n t e s t e r , c’e s t - q u e le fonds
dotal ne peut être aliéné ni hypothèque par
le m a r i , sans les, formalités prescrites, quand
même la femme y consentirait',-!à plus fort0
raison lorsqu’il, s’a g it 'd ’un paraplîernal sur Ie'
quel le mari, n ’a aucune espèce de droit: f>in ‘
chtm dolalem
non
sulù/n hypothecae titido
darc 11e cous su lie’nta ai :i lie re. m ari tus pof!Slt
s c d n e c :a liena re; L . un. If. i 5 de rei uX01'
acti.
>•)
> '•
_.:ü
- : U n autre ip’rincipe également-inconteslab!0 »
c ’est que; quelque précaution
que' l’ on pnî*1'10
pour confondre; les biens dotauK de la feiiiin0dans ceux qui sont propres au mari , les<h°'^9
de la femme)ou'*le‘' ses héritiers sont toujolllS
les mêmes : itjuam ùis in bonis m a'riti dos slt ’
inultei 7s tam en est. L. 75 , if. de ju re doti’ll,lt'i
‘
* *' lf? i
Cela p o s é , si les aliénations -faites I>al
mari des biens propres- à la femme
ne ^0I1^
aucun préjudice à ses'h éritiers j’-et-si <-’eU*
ont le droit! do tes réclamer: en- nature aVGC
tous les accessoires et les bénéfices qui icur
sont propres , il e s t au moins certain
c
vento faite pur Piorre Gerle ,! père , du do-iUa,r'®
du Moulinet et de la liâtisse,n’a point ôté aii2teix-
�C 21 )
fans d ’Aline
Filaire
,
le
droit de demander
à l'lié—
" .
'
♦
..............
ritier de Pierre¡ G e r le la représentation du bien
de l e u r . m è r e , aliéné;,par Pierre^G.ej’ip..,
E t c’est ici sans dout,e que. les héritier? d’Anne
Filaire ont le droit de réclam er, noij pas le prix
de la chose vend ue, mais la chose même , d’après
* ' , ** } 7'
! i ! (*J
1î T" • 1 *‘ î f ) j
j'
la valeur’ actuelle', parce q u ’il n ’à pas pu dépen
dre dé Pierre Gerle', qui n’était qu ’ustifi'uïtier des
biens de ses enfans^dë dénaturer ceux qui-étaient
confiés à son administration , pour en faire le
profit particulier de son héritier institué , en en
reportant la valeur dans d ’autres _acquisitions
pour son compte.
|i
.
•t*•
•‘ ) « -
Ainsi 6e qui peut seul rétablir l’équilibre entre
les parties à cet é g a r d , et conserver leurs intorets
r ,
s
• : »♦ft ? »••••% •*
r é c i p r o q u e s , c ?e s t cl?o r t l o n n e r u n e o p é r a -
tioli d ’éîcpérts
qui’
après s'être assurés do
la valeur actuelle du ' d o m a in e 'd u M o u lin e t et
dé la Bâtisse ,'réprendront ‘en équivalant dans les
acquisitions faites par'Piérre G e rlè aûx dépens
des propt fétés'do ’ son épousé , de quoî reln'pla-
cWfcfc1qu’il en a a l i è n e p o u r faire entrer ensuite
J*'
; I ^ *1* I I * - ; * .
c e s ; objets J de distraction dans la ' masse de la
succession maternelle , à moins q u e 'le ‘ Sieiir
G erle “ aîné ,
pour éviter les frais infiniment
•
,
» J f ^! * *l '***’ **
COÛltiu^ de ces opérations / n ’offre Tui-inemê des
fajip orts e t des
distractions convenables.
Car
rïè n 'û ü inonde sans* cloute ne peut le dispenser
de re p ro d u ire dans la succession de sa m ero
è e : qu ’on lui établira aVoir cto confondu p a r des
Ju.
‘
•” •
•
�( S*)
ventes ou de tonte autre manière , dans la suc
cession paternelle dont il est héritier institué.
O n ne voit pas que le Sieur Gerle puisse rien
opposer déraisonnable à cette demande j passons
au dernier objet de discussion.
TR O IS IÈ M E
QUESTION.
A q u i appartient la réserve de la pension viagère de
i 5o //■. que le Sieur Ozrle , p è r e , s’ est fa ite dans le
contrat de mariage de Jean (ierle , son héritier institué]
Quelle est la somme capitale représentative de celte
pension , et comment doit-elle être prélevée sur la suc
cession de P ierre G erle Ì
L a clause
du c o n tr a t de
m ariag
Oe est ainsi
conçue :
« S e r a tenu ledit futur époux ( comme étant
« une charge de la présente institution ) de payer
» à telle personne qui lui sera indiquée par le
» Sieur instituant par
l’acte qu’il lui plaira ,
)) même sous signature privée , après le décès
» dudit Sieur instituant, une pension viagère de
)> cent cinquante f r . p a r an , franche de toutes
» retenues légales, de six en six mois et par
» avance )>.
L e Sieur G erle , père, n ’a pas disposé de cette
réserve ; d n^est pas dit qu’en cas de non-dis
position , elle demeurera réunie à l ’institution
d ’héritier. Cette mesure, au contraire, est annon
cée comme une cha rge de l ’ institution d ’ h é
ritier A u profit de qui doit-elle tou rn e r’
La
question est décidée en termes formels par l’art.
�I I de la lo i clu 18 pluviôse an
5
,
dont voici les
term e s :
« L es réserves faites par les donateurs
ou
» auteurs d’institutions contractuelles , qui n ’en
)) auront pas valablement disposé , feront partie
)) d e là succession ab in testa t, et seront parta)) gées également entre tous les héritiers autres
)) que les donataires ou institués , sans im puta)) tion sur les légitimes ou portions de légitimes
» dont les héritiers ou donataires auraient été
» grevés ».
Cette loi n ’a pas besoin de commentaire ; et
l ’on voit qu’elle entre parfaitement dans le sens
et dans les intentions du Sieur Gerle , père, qui
considérait la réserve qu’il
faisait comme une
charge de l’institution d ’héritier faite en fa
veur de son fils : il n ’en a pas disposé de son
v i v a n t , mais la loi en a disposé pour lui , et il
ne pouvait pas mêm e, depuis l ’an c in q , faire
de disposition à cet égard.
E n vain le Sieur G e r l e , aîné, dirait-il « que
)> cette charge de l ’institution était subordonnée
))à la volonté de son père ; qu’elle était purement
v facultative , et que
ne lui ayant point été
» imposée par son père avant sa mort , il s’en
» trouve affranchi)).
Ce raisonnement pourrait être plausible , si
la loi du 18 pluviôse , inlerprétant dans le sens
le .plu« raisonnable et le plus ju ste, l ’intention
des instituais qui ont fait des réserves } n ’avait,
|
�( 24)
en rétablissant l'effet des institutions et dona
tions qui étaient
mars 179.^ 'et
2
anéanties p ar les lois (les 7
5 brum aire an 2 , ajouté l’article
com m e un c o r r e c tif (le justice
y
,
ét ' u n e sorte
de déd om m agem ent nécessaire dans la circons
tance
pour
co n so le r
les légitimaires
de la
,
p e r t e q u ’ils faisaient de l'e s p o ir de partager par
égalité la succession entière
que les lois révolu
tionnaires des 7 m ars 1 7 9 3 et 5 brum aire an a
le u r avaient donnée , p a r un s y s tè m e de rétro
activité souverainem ent injuste.
L e s législateurs semblent avoir tout vu , fout
combiné dans cette loi qui a calmé les alarmes
que les lois révolutionnaires avaient jetées dans
la société. On voit qu’en assurant l ’effet des
donations et des institutions faites avant une
loi p rohibitive, ils ont voulu les restreindre dans
les bornes que le donateur ou l'instituant Iuimeine s était tracees 5 ils n ’ont pas voulu que le*
objets réservés par l’instituant et dont il 11’avait
pas disposé , pussent être ajoutés, même par sa
volonté , aux avantages déjà faits à l ’instituant j
ils les ont laisses aux légitimaires pour qui ils
semblaient destinés , a d solatium . C ’est un allè
gement
contre les avantages qui blessent déjà
leur portion naturelle • et aucune considéra
tion ,
encore moins celle du silence d ’un père
pour qui la loi a déjà p a r lé , ne peut entrer en
balance avec
la
volonté formelle et
ra iso n n ée
du
législateur. M ainten an t} puisque cette réserve n e
�( 25)
peut pas être
contestée raisonnablement aux
frères puînés du Sieur G erle , voyons
quelle
sera la somme dont le Sieur Gerle , aîné , sera
comptable à ses cohéritiers pour représenter la
5 o fr. réservée.
Si la rente ou pension de i 5 o f r . sans rele-
pension viagère de
j
tenue , était indéfinie , elle représenterait sans
doute un capital de 3 ooo fr. au denier vingt ;
mais comme, d’après l’usage, les viagers , en p re
nant le terme moyen des âges , sont fixés au
denier d i x , il en résulte qi:e les légitimâmes,
frères et sneurs du Sieur G erle , auront un p ré
lèvement de i 5 oo fr. à faire sur la niasse de la
succession de leur père
et le Sieur G e r l e , a în é ,
ne devant avoir aucune part dans ce prélèvement,
qui ne doit diminuer en rien la légitime des au
tres enfans, il convient de le faire avant tout, sur
le plus clair et le plus liquide des biens qui seront
destinés à composer la masse de la succession
paternelle, après même que toutes les reprises
m a te rn e lle s
auront été réglées et mises à part.
C O N C L
U S I O N S .
E n renfermant maintenant dans le cercle le
plus étroit les divers points de cette cause, on
ne peut se dissimuler ,
Sur la première question
que si l ’on pouvait
considérer l’acquisition du pré de la Périchonne
connue faite par le Sieur G e r le , père, au nom
�f 26 )
de son fils , elle serait incompatible aujourd’hui
avec l’institution d’ h éritie r, qui a épuisé tout ce
q u ’il y avait de disponible directem ent ou in d i
rectem ent dans la succession du Sieur G e r l e ,
c ’e s t - à - d ir e , dans sa fortune présente et passée;
Q u e dans cet état de choses , le Sieur Gerle ,
a în é , ne peut se dispenser de faire son option
entre les
qualités d’héritier contractuel
avec
tous ses attributs , et celle de donataire parti
culier d’un objet
qui
vaut huit fois plus aujour
d ’hui que le p rix qu’il offre de rapporter ;
Q ue si au contraire l’acquisition du pré dont
il s ’agit, par les expressions mêmes de la procu
ration , et par la manière dont elle a été exécu
tée , n 'est p a s réputée fa it e au nom du f i ls et
p o u r lu i s e u l , il n ’y a plus de doute sur les
droits du père à cette propriété , et par suite sur
la nécessité de comprendre ce pré
en nature
dans la masse de la succession paternelle.
Sur la seconde question , on voit aussi que le
remplacement en fonds d ’égale valeur à celle
du domaine du Moulinet et de la Bâtisse , ap
partenant à A n ne Filaire , mère commune , et
aliéné par le Sieur G erle , p è r e , est inévitable,
d ’après la loi qui défend au m a r i , dans tous les
cas , l’aliénation dos biens dotaux de sa femme ;
Q ue sur la troisième question , il est démontré
que la réserve de la pension viagère de
i5 o fr
par année , représentant un capital eiTecHf de
i 5 oo fr. appartient exclusivement aux légitimai-
�( 27 )
res, frères et soeurs dit Sieur G erle , aîné , héri
tier institué , et ce d ’après l’art. II de la loi du
1 8 pluviôse an 5 , dont on ne peut contester l ’ap
plication.
D É L I B É R É à Tssoire , le i.*r avril i 8 o G , p a r
le jurisconsulte soussigné.
A U Z A T.
M .e M A L B E T , avoué des légitim aires G erle.
M * T R I O Z O N - B A R B A T , avoué contre (î).
P . S . On im prim era incessam m ent, s’ il y a lion , la
discussion relative à quatre ou cinq autres oLjels de
controvei’se qui se présentent dans le partage des suc
cessions de Pierre G e r le e t d’A n ne I ’ilaire, son épouse.
P a r le prem ier, les légitimaires G erle demandent à leur
frère aîné le rapport d’une somme de mille liv. , p r o
venant d’un legs fait par le Sieur T e y r a s , curé de
Stc-Catlierine , à Anne P ilaire , sa sœur , et que le
S ieu r G erle , aîné , convient , dans une requête écrite
de sa main , avoir été reçu e par son père.
Il s’agit dans le second, d’ un autre prélèvement à faire
en faveur de Pierre , Catherine et Marie G e r l e , on
ve rtu d’ nn leslament du 26 juillet 1 7 8 8 , 'p a r lequel
M aric-An ne Pilaire , leur tante , a disposé en leur
faveur de tout h rnobilUr dont elle mourrait saisie et
vêtue , et dont le Sieur G e r l e , aillé , est encore en
possession.
Il est question dans le troisième , de savoir si au préju
dice de l’art. 85a du code civil , qui porte que les
fr a is d’ éducation ne doivent pas être rapportes , le
Sien)' G erle , aîn é, peut se prévaloir d’ une quittance
de 5oo liv. , que le Sieur Gerle , jeune , a reçue de
son pore pour étudier eu géométrie , chez le Sieur
Irançois G e i i e , son c o u s in } et si en pareille circuits-
�(28)
tance le lég itim aire a pu se défendre d’obéir à la
volo nté de son père ( 1 ).
I l s’agit , enfin , de décider si au mépris de l ’art. 2272
du code civil , qui prononce la fin de non-recevoir
contre le paiement des pensions après un a n , le Sieur
G e r le peut être recevable à prélever , sans aucune
convention à cet égard , le paiement de la pension de
M a rie -A n n e F ilaire , sa tante , dix-sept ans a p r è s sa
m ort , dans la circonstance 0u M arie-A n n e F ilaire
av a it fait en 1 78 0 , huit ans avant sa m o r t, une dona
tion au S ieur G e r l e , père , et à sa femme , de tout
ce qu’elle possédait en immeubles , et pendant q u e l le
Sieur G erle , père , n ’a rien demandé de son vivan t
po ur cette pension.
Toutes ces questions, qui se décident d’une manière plus
ou moins absolue en fa veur des légitimaires G erle ,
retardant nécessairement l ’opération définitive du
partage des biens des deu x successions que le Sieur
G e r le , aîné , possède-seul, prouvent le droit é v i d e n t
des légitimaires à des provisions proportionnées à
leu r fortune et au retard qu’ils éprouvent ou qu'ils
éprouveront dans la suite.
Jean G
erle
, entendez-vous la voix de la nature ?
Celle de la raison / .............. ..
( 1 ) N o n ta m v o lu is sc v id e tu r q u à m o b s e q u i im p e rio p a tr is v e l
d o m in i. F ab.
A CLERMONT-PERRAND,
D e l'im prim erie de J. V e y s s e t , I m p r i m e u r L ib ra ire , rue de la Treille.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gerle, Pierre. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Auzat
Malbet
Triozon-Barbat
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
fils avantagé
Description
An account of the resource
Analyse des mémoires et consultations rédigés pour Pierre Gerle, jeune, et ses sœurs, de Sauxillanges, demandeurs ; contre jean Gerle, aîné, leur frère, avocat, défendeur, sur les questions suivantes : 1ere. De quelle manière doit être fait , au partage , le rapport du pré appelé de la Perichonne ? Sera-t-il fait en nature, ou le Sieur Gerle, aîné , ne rapportera-t-il qu’une somme de 3284 # , fournie par son père en 1759 pour l ’acquisition de ce pré, faite pour lui en son nom , en qualité de père et légitime administrateur de son fils aîné , alors âgé de trois ans ? 2.° Comment se fera le remploi du domaine du Moulinet et de la Bâtisse ; appartenant dans le principe à Anne Filaire, mère commune, morte ab intestat, et qui a
été vendu par le Sieur Gerle, père ? 3. A qui doit appartenir la réserve de la pension viagère de 150# , que le Sieur Gerle, père, s’ est faite dans le contrat de mariage de son fils a in e, héritier institue, dont il n’a point disposé ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J. Veysset (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0631
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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acquisitions
fils avantagé
Successions
-
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r
P R E C I S
POUR
Sieur J e a n G E R L E , avo ca t, et j u g e d e paix
du canton de S a ux i l l a n g e s , i nti m é ;
CONTRE
F ra n ç o is
r i n e et
G E R L E , prêtre, P i e r r e , C a t h e
M a r i e G E R L E , frères e t sœurs,
U n e acquisition d ’im m euble particulier, faite par un
p è r e , en qualité de légitime adm inistrateur d ’un de ses
enfans en bas â g e , le p rix payé des deniers du p è r e ,
auquel des deux d o i t - e l l e p ro fite r? La translation de
p ro p riété qui s’est opérée p a r l’effet de l’acte de v e n te ,
n ’a-t-elle pas ré sid é , a b i n i t i o , sur la tête de l’en fan t,
au nom duquel l’acquisition a été faite ? o u l’objet ainsi
A
�( 2 )
acquis f a it - il partie des biens et de la succession du
père ?
L ’enfant doit-il être tenu de rapporter l’objet en na
ture , à la succession de son pèi’e ? ou n’est-il tenu qu’au
rapport des deniers employés par le père au payement
du p rix de cette acquisition, des frais et loyaux coûts,
et aux améliorations du fait de ce dernier?
T elle est la principale contestation sur neuf cliefs de
demande, qui seront développés lors de la plaidoirie.
* V
r
F A I T
S.
E n 1 7 5 9 , Pierre G e rle , père commun des parties,
en qualité de légitim e administrateur du sieur G erle, in
tim é, donna sa procuration pour acheter six journaux
d’un pré appelé la P érich o n n e, situé à Sauxillanges.
L ’acquisition fut faite par le fondé de pouvoir du sieur
G erle p è re, en cette q u alité, pour et au nom du sieur
G erle fils.
En 1 7 8 6 ,1 e sieur G erle fils contracta mariage. Son
père l’institua son h é ritie r, et .le chargea de payer, à
chacun de ses autres enfans , une légitim e déterminée.
A l’époque du contrat de mariage du sieur G erle fils
(5a mèi’e étoit décédée ab intestat) , Pierre G erle, son
père, jouissoit alors des biens de ses enfans, provenaus
du chef de leur m ère, en vertu de l’usufruit légal, effet
de la puissance paternelle alors en vigueur. Les parties
vivoient sous l’empire des lois-des pays du droit écrit.
A p rès le mariage du sieur G e rle , intim é, son père a
é g a le m e n t ! continué de jouir de ses biens, par suite du
�C
3)
môme usufruit, jusqu’au 19 août 1804, époque de son
décès.
A l’ouverture de la succession du sieur G erle p è r e ,
le sieur Gerle aîné, son héritier contractuel, a réclamé
les six journaux de pre comme à lui appartenans, ayant
été acquis pour lui et en son nom par son père ; il a
offert de rapporter a la succession paternelle les deniers
fournis et avancés par son père, et employés au payement
du prix de cette acquisition , les frais et loyaux coûts
d’icelle, et le montant des améliorations du fait de ce
dernier, s’il en existe, qui aient rendu l’objet acquis de
plus grande valeur.
M O Y E N S .
C’est un principe généralement reconnu et avoué dans
le droit, qu’un père peut acquérir pour un de ses enfans;
et que l’objet acquis par le père, comme administrateur
légitime d’un d’eux, appartient irrévocablement à Tentant
sous le nom duquel l’acquisition est faite, exclusivement
au père. C ’est ce qui nous est enseigné par tous les ju
risconsultes qui ont écrit sur cette matière.
Ils ont assimilé le cas de l’acquisition faite par le père,
agissant en qualité d’administrateur -ou de curateur d’un
de ses enfans, au cas d’un retrait lignager exercé par
l’ascendant, agissant en la môme q u a lité , sous le nom
d’ un d’eux. Ils enseignent que les effets et les consé
quences sont les mêmes dans l’un comme dans l'autre
cas, et décident que de même que le p ère, ou un des
ascendans , ne peut disposer de l’héritage ainsi retrait
A a
�(4)
de même il ne peut aliéner l’héritage par lui acquis sous
le nom d’un de ses enfans.
G rim audet, en ses œ uvres, liv. 2 , cli. 12, agite d’abord
la question de savoir si un père peut valablement retraire
sous le nom d’un de ses enfans , n’ayant aucun bien ,
l’objet par lui vendu : après avoir décidé pour l’affir
m ative, il ajoute que lors du partage des biens du père,
l ’objet acquis appartient et reste à l’enfant comme propre;
qu’il en est l’incommutable propriétaire; et que, quoique
le père ait payé le prix de ses deniers, il ne sauroit pré
tendre à la propriété de la chose ainsi acquise. V o ici
comment s’exprim e Grimaudet :
« L a conséquence suit de ce que l’enfant de fam ille,
« ou son p ère, comme curateur, peut retirer ce qui a
« été vendu par son p ère; lequel acquêt demeure propre
« à l’enfant, et le père, après, ne le pourra retenir, par la
« raison commune que ce qui est acquis de mes deniers
« n’est pas fait m ien, mais à celui qui a fait l’acquisition. »
Cet auteur fonde son opinion sur la loi S i ex eâ
p ecu n id , au cod. de re ven ditâ ; et les raisons qu’il en
donne sont, ainsi qu’il les rapporte, fondées sur l’autorité
de G odefroy. Q uia empturn pecuniâ a lic u ju s , ejus
non f i t , sed ejus eu ju s nom ine emplio facta est ; et
quando pater d o n a tjîlio , relut pecuniam in rctractiu
ilia donatio non reddit ad commodurn pntris.
L e m êm e auteur ajoute ensuite :
« Entre les enfans ès lieux où les père et mère ne
« peuvent pas avantager les uns plus que les autres, celui
« sous le nom duquel l’acquet est fa it, doit rapporter
« les deniers de Vacquét avec les f r a i s , si mieux il n’aime
�(5 )
«
«
«
«
«
«
«
«
«
la chose retirée, demeurer en l’h érédité, pour les deniers en être partagés; et pour Cacquêt être, [fa it par
le p èr e, comme curateur de son e n fa n t, il ne f a u t
dire q u 'il fa s s e sa condition meilleure que Tun de
ses autres e ifa n s : ca r il ne lu i donne rien de son
b ien , et tout ce qui part du père ( q u i sont les dem ers) , il f a u t que Venfant les rapporte ,* le nom du
curateur ne doit f a i r e que la chose appartieitne au
père et a u x autres etifans.
« Ce que nous disons que le père ne peut avantager
« l’un de ses enfans plus que l’autre, se doit entendre,
« comme nous disons en d ro it, que l’homme et femme
« ne se peuvent faire don l’un à l’autre, dont l’un soit
« plus p a u v re , et l ’autre enrichi : o r , au cas présent ,
c par Vacquêt le père n'est appauvri; ca r il ne perd
« rien du sien , et débourse seulement des deniers pour
« lesquels il se peut p o u rvo ir; et quant à îa cquêt ^ le
« fils ne lef a i t de son père, niais de Vétranger] partant
« les autres enfans ne peuvent prétendre part audit
« a cq uêt, ou dire que par icelui le père ait avantagé
« leur fr è r e . »
Brodeau, sur l’article 139 de la coutume de Paris, qui
étoit une coutume qui astreignoit à une parfaite égalité,
a consacré les mêmes principes que G rim audet; il en
seigne que « les autres enfans, après le décès du père,
« ne peuvent rien prétendre à l’héritage retiré ou acquis
« par le p è r e , sous le nom de l’un d’eux ; que le fils
« n est tenu qu’au remboursement des deniers avances
« par le père; que dès-lors n ih il abest à fa r n iliâ , et
« qu’on ne peut pas dire que la gratification et le ch o ix
�(*•)
« que le père a f a i t de la personne d'un de ses eivfans
cc soit un avantage indirect et réprouvé. »
L eb ru n , en son Traité des successions, liv. 3 , chap. 6,
sect. 3 , traite la question de l’acquisition faite par un
père au nom d’un de ses enfans, et celle du î-etrait exercé
par le père sous le nom de l’un d’eux ; et dans l’un
comme dans l’autre cas, il enseigne et décide que le fils ne
doit rapporter que le prix de l’acquisition ou du retrait,
et non l’héritage acquis ou retrait.
A u nombre 1 5 , il dit :
« S i le père a acheté au nom de s o n jï ls , LE P R IX
ci D E L’ A C Q U I S I T I O N EST SU J E T A R A P P O R T . »
A u nombre 16, il ajoute :
« Il en est de même quand un père a exercé et exé« cuté un retrait lignager au nom de son fils; car le
« fils rapporte le prix du retrait à la succession de son
cc p è re , E T N O N L’ H É R I T A G E M Ê M E , Q U I n ’ a J A M A I S
a A P P A R T E N U A U P E R E , et qui ne l’auroit pu prétendre
cc en la succession de son fils, ni comme acquêt, ni à
« titre de réversion ; en sorte q u e, quoique le retrait
cc lignager soit très-avantageux, c’est un cas où le père
« peut avantager son fils d'un projit q u i n e st point
« sujet à rapport. » I l fa u t dire de même dans le cas
du nombre précédent, et « SI LE PÈRE A P A I T POUR
«
SON EIL S U N A C H A T A V A N T A G E U X . »
en son T raité du droit commun de la F ran ce,
cliap. 7 , sect. i re. , intitulée : D u rapport de ce que le
père achète pour son fils, pag. 729, s’exprim e ainsi.
B o u r jo n ,
A u norhbre i ot. , il dit :
« T o u t avantagé d’ascendans à descendans fonde le rap-
�C7 )
«
«
«
«
«
«
«
«
«
cc
«
«
«
«
«
a
port. Si les père et m ère ont exercé un retrait lignager
sous le nom de leur fils , il doit les deniers employés
pour l’exécution d’un tel retrait , m ais Vhéritage
retiré lu i appartient. » ‘
A u nombre 2 , il ajoute:
« D e m êm e, s'ils ont acheté et payé pour lu i un
im meuble, ce q u i résulte évidemment de la proposition précédente. »
A u nombre 3, le même auteur ajoute encore:
« D a n s Tun et Vautre ca s, c ’est-à-dire, du retrait, et
de Vachat d’un immeuble de la part d’un père pour
son J i l s , ce dernier ne doit pas le rapport de la
CHO SE, qui ne vient p a s de la substance du père $
m ais l e r a p p o r t DES D E N IE R S P A Y E S par Y ascendant à ce sujet. Mais il ne doit plus les deniers en abandonnant la chose , s’il se trouvoit lésé par le retrait
ou l’acquisition, et qu’il eût été restitué contre l’effet
d’iceux. 53
E n fin , au nombre 4 , Bourjon s’exprim e ainsi :
a Soit dans le cas du retrait exercé par le père pour
son fils, soit dans le cas de Vacquisition f a it e par le
père sous le nom du même J ils, CES SORTES D ’ A C T E S
a SONT DES ACT ES DE COM MERCE E T N O N D E L I B É «
R A L I T É . 55
F e rriè rc , sur l’article 3 0 4 'de la coutumë de Paris,
glose 2 , n». I er. } tom. 3, enseigne une semblable doctrinê.
« Ce q u i est a cq u is, d it-il, par le père, de ses deniers,
« au nom dé
son fils,
est sujet'
à
rapport,
‘smViint
le
« sentiment de C karo n d as, ce qui Jest sans d o ù tè ^ e t en
'« ce cas, C’EST LA SOMME QUI E S Ï S'üJEÏTEiA'^APPORT,
�(8 )
«
ET NON L’H É R IT A G E
A C Q U IS, D’ A U T A N T
«
J A M A I S É T É D A N S LES B IE N S D U PE R E . »
QU’ l L N ’ A
B oucheul, en son T raité des conventions de succéder,
chap. 6 , n°. 21 et suivant, pag. 66 et suivantes, traite,
ex professo , la même question que la cour a à juger.
A p rès avoir fait rénum ération des coutum es, telles que
celles de N orm andie, Bretagne et T ou rain e, dont les
dispositions sont contraires aux principes gén érau x,
Boucheul ajoute aussitôt:
« M ais l’on renferme ces coutumes dans leur détroit;
« et où la coutume n’en parle pas , la jurisprudence y
« est certaine que l’héritage ainsi retiré et acquis p a rle
« p è r e , sous le nom d’ün de ses enfans , q u o i q u e
«
M I N E U R , E N BAS A G E , E T M E M E SANS A U C U N B I E N ,
«
A P P A R TIE N T,
«
D E N IE R S
«
UN
«
ONT p o u r l u i ,
NON
AU
PERE
QUI
A FOURNI
LES
, mais ci l'enfant sous le nom duquel
k L’ A C Q U Ê T oit le retrait sont faits. »
Cet auteur a fondé son opinion sur les dispositions
de la loi 8 , au cod. S i quis alteri vel sibi emerit.
A u nombre 2 6 , Boucheul ajoute :
« Quand le père ou la mère a c q u i è r e n t un héi'i« tage sous le nom de l’un de leurs enfans, ce n'est pas
a v a n ta g e
que
cette
p r é d ile c tio n
q u ’i l s
et en remboursant le p r ix , l ’ h é r i -
sans qu'il soit besoin d'en fa ir e
v rapport à ses cohéritiers , parce que c'est un bien
a t A G E EST A U F I L S ,
d qui ne vient pas d e s u s s t a n t i a
p a t r i s. »
D en izart, au mot R apport, n°. 49, dit :
« S i le père achète , au nom de son f i l s , ou exerce
« w i retrait Ugnager, l e p r i x d e l ’ a c q u i s i t i o n ou du
v. retrait
�(9 )
«
retrait est sujet à rapport
;
M A IS
NON p a s
I.’ h é -
en
« sorte q u e , supposé que Va chat ou le retrait soit
« avantageux au J i l s , LE p r o f i t QUE F A I T LE FILS
« R IT A G E ,
QUI N ’ A J A M A IS A PPAR TEN U A U P E R E ;
« N ’ EST PAS SU JE T A R A P P O R T . 55
P o th ier, en son T raité des successions, cliap. 4 , §. 2 ,
page 180, édit. n i-40. , enseigne la même doctrine.
« L o rsq u ’ un père ( d i t - i l ) a a c h e té , au nom et
oc pour le compte de son f i l s , un héritage, et en a payé
« le p i'ix de ses deniers , CE n ’ e s t PAS l ’ h é r i t a g e
« q u i e s t s u j e t a r a p p o r t ; I L N’A J A M A IS
« P A S S É D U P È R E A U F I L S , P U I S Q U ’I L N ’A
« JA M A IS A P P A R T E N U A U P È R E , A Y A N T
« É T É A C H E T É A U N O M D U F IL S ; L E F IL S
« sera donc seulement ten u , en ce c a s , A U R AP P O R T
« D U p r i x que le père a ufourni pour V acquisition. »
O n trouve la même décision dans le répertoire de
jurisprudence, par Guyot. Les articles que nous allons
rapporter sont d’un célèbre m agistrat, vivant au temps
a ctu el, collaborateur de ce répertoire ( 1 ).
A u mot légitim e, tom. 10 , pag. 386, on lit :
« L e p r i x d ’ u n e a c q ^ s i t i o n que le père fait au
« nom de son fils, et qu’il paye de ses propres deniers,
« est, sans contredit, sujet à l’imputation : on a déjà
« vu que le parlement de Flandres l’a ainsi ju g é, par
« arrêt du 14 février 1776. »
" '
Mais il est essentiel de remarquer ici que c’est du
p r ix , et non de l’héritage acq uis, dont il est fait men( i) M. Merl... procureur général à la cour de cassation.
B
�C 10 )
tion , lorsqu’il s’agit de l’imputation de légitim e. On, va
vo ir qu’il n’est également question que du p r ix , et non
de l’h érita g e, lorsqu’il s’agit du rapport.
ü n lit encore, dans le même répertoire de jurispru
dence de G u y o t, page 4 1 3 , au mot rapport, nomb. 7 :
« Nous avons étab li, à l’article légitim e, qu’on doit
« im puter, dans la portion légitim aire, LE p r i x P B l ’ A C «
Q U I S I T I O N QUE LE P ER E A F A I T E DE SES PROPRES
« D E N IE R S , A U N O M D E SON f i l s ; la même raison
« veut que LE P R I X SOIT S U J E T A R A P P O R T , a
E n fin , à la même page il est ajouté :
« Nous ne parlons ici que d u R A P P O R T D U P R I X T
« parce qu’en effet il rfy a que l e p r i x q u i y p a « ROISSE S U J E T ,
« F A IT E
PAR
DANS
LE
PER E ,
« F A N S , L’ H É R I T A G E
« Y
ÊTRE
« PÈRE;
SOUMIS
IL
N’A
CONSÉQUEMMENT
«
LE
«
APR ÈS
SA
AU
D’ ü N E
NOM
DANS
D’üN
M Ê M E SEM BL E N E
JA M A IS
IL
N’A
P O IN T PASSÉ D U
«
M ETTRE
:
LE CAS
LA
M ASS E
DE
SES E N -
D E V O I R PAS
APPARTENU
PERE
LE F IL S N ’ EST
A C Q U I S I T IO N
AU F IL S ,
P O IN T
TENU
AU
et
DE
DES BIENS DU^ PERE
MORT. »
T e lle est la doctrine univwi&ellemeut enseignée par les
jurisconsultes qui ont écrit sur la question élevée au
jourd’hui dans la famille G erle : tous ont décidé que le
f i l s , au nom duquel l’acquisition ou un retrait sont faits
par le p è re , ou autre ascendant, est propriétaire seul et
i n c o m m u t a b l e de l’immeuble acquis 011 retrait ; que le
fils <est seulement tenu au rapport des deniers déboursés
fc p a rje p è re , et non au rapport de l’héritage acquis,
su rleq uel le père n’a jamais eu aucun, droit de propriété.
�C 11 )
D e ces principes, il résulte que les six journaux de
p r é , que le sieur G erle père a acquis au nom de son
fils a în é, en 1769, ont appartenu à ce d ern ier, dès l’ins
tant même que la translation s’en est opérée par l’eifet
de l’acte de vente qui a eu lieu ; il résulte enfin , et il
est dém ontré, que cette propriété a résidé sans cesse sur
la tête du sieur G erle, in tim é, à l’exclusion de son père,
et q u e , soit le sieur G erle p è r e , soit sa succession ou
ses h éritiers, n’ont à réclamer que le p r ix , les frais et
loyaux co û ts, et les améliorations du fait du p è r e , s’il
en existe du fait du père.
Quoique le père ait fourni les deniers pour le paye
ment de cette acquisition , cette circonstance ne sauroit
donner aux enfans légitimaires du sieur Gerle^ aucun
droit de propriété sur le pré dont il s’agit. G’est ce qui
nous est enseigné par G odefroy, en ses notes sur la loi i Ie.
au cod. S i quis alteri vel s ib i, s ub alterius vom inè vel
aliéna peciinïà lîm é r ït, tit. ¿ g ~ I iv. 4. Il décide que la
chose acquise n ’appartient pas à celui qui en a payé le
prix de ses deniers, mais à celui au n om duquel la chose
est achetée.
R e s , d it-il, ejus esse
videtur, n.o?i cujus pecunia T
sed cujus nom me empta est
E t sur la lo i 8 . du même_tit.. le m ême annotateur
ajoute : y?7umâ p ecu n iâ , quod co m p a i'a tu r, fit comparantis , non ejus eu]us fu it pecuma.
\
L a circonstance de l’existence de l’institution contrac
tuelle faite en 1 7 8 6 , en faveur de l’intimd , ¿ c ia part
de son père, ne sauroit changer son état, ni porter at
teinte à son droit exclusif de propriété Stir le pré dé°la
B 2
�( 12 )
i ’érichonne ; droit dont il a été irrévocablem ent investi
dès le 7 avril 17 5 9 , c’est-à-dire, dès le moment même
de la perfection de l’acte d’acquisition faite pour lui et en
son nom par son père.
E n devenant l’unique propriétaire de ce p ré, au même
instant il est devenu débiteur envers son pèi’e des deniers
par lui avancés et fournis pour parvenir à celte acqui
sition. O r , par cet état de chose, il est démontré que
jamais le père n’a pu être considéré comme propriétaire
du pré en question, et que cette propriété a nécessai
rement résidé dans la personne du fils.
L e père, en instituant son fils-aîné héritier universel,:
ne l’a institué que dans l’action qu’il avoit pour répéter
les deniers par lui déboursés, et non dans la propriété
du pré acquis pour son fils. .Car, eucore une fois, le père
n’en a jamais été ni pu devenir propriétaire, tant que
le fils n’a pas manifesté l’intention de l’enoncer à la
propriété de cet objet.
Ce seroit renouveller une absurdité qu’on a mise au
jo u r, en cause principale, si les appelans prétendoient
que l’acquisition faite au nom du fils , par le p è r e , est
un avantage indirect; que jojy^Jjg à l’institution contrac
tuelle, le père auroit alors excédé la quotité disponible;
que leur légitim e de rigueur seroit blessée; le pré dont
il s’agit a y a n t, depuis
considérablement accru de
valeur.
Toutes ces idées systématiques se trouvent détruites
d’avance par les autorités ci-dessus rapportées. Grim audet,
B rod eau, Lebrun et Boucheul enseignent que la prédi
lection que donne un père à un de ses enfans, en achetant
�( i3 )
soùs sôn nom un. im m euble, n’est point im avantage
indirect fait à cet, enfant. B ou rjon , au n°. 4 déjà rap
porté, dit que ces sortes d’acquisitions sont des actes de
commerce et non de libéralité.
Il est impossible de concevoir que de telles acquisitions
présentent l’ombre la plus légère d’un avantage indirect,
lorsque le fils rapporte les deniers fournis par le père;
par ce rapport, le fils réintègre dans la fortune du père
tout ce qui en est sorti : et tous les auteurs ci-dessus
cités enseignent que le fils n’est tenu qu’au jrapport de
ces mêmes deniers, qui ont constitué la substance sortie
de la fortune du père, et qu’il n’est point' tenu au rapport
de l’immeuble acquis, leq uel, ab in itio , a appartenu au
fils exclusivement au père : c’est ce rapport du prix
qui a fait dire à ces jurisconsultes que la prédilection ,
ou le ch o ix d’un des eirfans, f a i t par le p è r e , lié to it
point un avantage indirect.
L e p è r e , en achetant pour son fils , n’a sertf de la
substance de ses biens et de sa fortune, que des deniers;
le iils ne doit remettre à la succession du père que les
mêmes objets qui en ont été distraits ; c’est-à-dire, qu’il
ne doit remettre que des dCfliers. Cette vérité nous est
encore enseignée par P othier, en son T raité des succes
sions, tome 6 , chap. 4 , § . 2 , page 1 77, édition in-40.
V o ici comme il s’exprime :
cc
«
a
«
« T ous les actes d’ un père ou d’une mère , dont
quelqu’un de leurs enfans ressent q u e l q i i avantage,
ne sont pas des avantages indirects sujets à rapport;
il n’y a que ceux par lesquels les père et mère font
passer quelque chose de leurs biens à quelqu’un de
�( T4 )
leurs enfans, par une voie couverte et indirecte; c’est
ce qui résulte de l’idée que renferme le terme rapport;
car rapporter signifié remettre à la masse des biens du
donateur, quelque chose q u i en est sorti. O n ne peut
pas y remettre , y rapporter ce qui n’en est pas sorti:
donc il ne peut y avoir lieu au rapport, que lorsqu’un
père ou une mère ont fait sortir quelque chose de
leurs b ien s, qu’ils ont fait passer à quelqu’un de leurs
enfans. »
E n faisant l’application de ce principe lum ineux en
seigné par P otliier, il est donc clairement dém ontré que
les légitimantes G erle ne sont fondés à réclamer que le
rapport des deniers employés par le père com m un, à
payer l’acquisition faite pour son fils aîné , parce qu’il
n’est sorti du patrimoine du père que des deniers. L eu r
système de rapport de l ’objet acquis' est une erreur : cet
'objet n’a jamais fait partie des biens du p è re , puisque
tous le^fs* jurisconsultes décident qu’il appartient au fils
et non au père. L e pré de la Périchonne n’a donc pas
pu sortir de la fortune du p è r e , n’y étant jamais entré.
C ’est vouloir se révolter contre les principes du d ro it,
que de soutenir le rapport',*'en nature, du pré dont il
6’agit.
L a propriété du pré de la Périchonne ayant résidé
ab in it io , c’e s t - à - d ir e , dès le moment m ême de la
confection de l’acte de vente par l’effet duquel la trans
lation de propriété a passé de la personne des vendeurs
«
«
«
«
«
«
«
«
«
en celle du sieur G erle fils , acquéreur, il est ridicule de
prétendre que lès appelans aient jamais pu concevoir
l ’espoir d’un droit de légitim e sur ce pré. O n ne cessera
�C *5 )
de le répéter, ce pré n’a jamais fait partie du patrim oine
du sieur Gerle p è re; il n’a eu sur cet objet qu’un droit^
d’hypotlièque pour sûreté des deniers par. lui avancés
pour son fils. L e sieur G erle fils a în é , débiteur envers
la succession de son père de ces deniers, ne profitera
d’aucun de ceux que le père a sortis de son patrim oine,
en l’apportant le prix de l’acquisition dont il s’ag it, les
frais et loyaux coûts d’ic e lle , et la valeur des amélio
rations du fait de son p è r e , s’il en existe. C ’est sur ces
deniers, que n’a cessé d’offrir l’intimé dès le moment de
l’ouverture de la succession de son père, que doit frapper
en partie la légitime des appelans, et non sur le pré de
la Périchonne qui n’est jamais entré dans le patrimoine
du père, et n’en a jamais fait partie.
Par le rapport offert par l’intim é, la succession du
père ne reçoit aucune atteinte, et l’intimé lui-même ne
reçoit
aucun avantage.
Cette succession recouvre tout ce
i
o
qui a été distrait par le p è re, de la substance de sa for
tune et de ses biens.
~'
Lesappelans nesauroient être fondés à réclamer aucune
espèce de droit de légitim e sur l’accroissement de valeur
qu’a pu acquérir le pré de la Périchonne, depuis 176 9 ,
étant démontré qu’il n’a jamais fait partie des biens du
père commun. Cet accroissement de valeur n’a rien coûté
au père ; sa fortune n’en a souffert aucune espèce de
distraction; c’est une augmentation inopinée, qui est un
accessoire du pré , produite par la chance des temps, et
indépendante du fait de l’homme. O r , dès.qu’il est dé
montré«.quç
mtfriDsA
{ le père commun.
* p ’a-jApiaifcieuoBi}
^
■‘ .'1
.1
[' - h
'Ju o O f i o h
�<r
(16)
.
tant aucun droit de propriété sur cet h éritage, c’est une
absurdité de prétendre que les appelans ont des droits
à ses accessoires.
P o u r- p o u v o ir,
G E R L E .
r
, £i’1.-:** r.•v' ;r-"
:-* Ç *
'P.
"i
J
A. R I O M , de l’imprimerie de T hibaud -L andrio t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mai 1808.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gerle, Jean. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gerle
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
fils avantagé
minorité
Description
An account of the resource
Précis pour sieur Jean Gerle, avocat et juge de paix du canton de Sauxillanges, intimé ; contre François Gerle, prêtre, Pierre, Catherine et Marie Gerle, frères et sœurs, appelans.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0630
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0631
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53890/BCU_Factums_M0630.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauxillanges (63415)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
acquisitions
fils avantagé
minorité
Successions
-
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PDF Text
Text
*•
P R É C I S
POUR
S ie u r
Jean G E R L E , avocat, et juge de paix
du canton de Sauxillanges, intimé ;
CONTRE
F r a n ç o is
r i n e et
GERLE , p r ê t r e , P i e r r e , C
M a r i e G E R LE , f r è r e s et
a th e
sœ u r s,
appelans.
U n e a c q u i s i t i o n d’immeuble particulier, faite par un
p è r e , en qualité de légitime administrateur d’ un de ses
enfans en bas â g e , le prix payé des deniers du père ,
auquel des deux doit - elle profiter ? La translation de
propriété qui s’est opérée par l’effet de l’acte de v e n te ,
n’a-t-elle pas résidé, ab in itio , sur la tete de l’enfant,
au nom duquel l’acquisition a été faite? ou l’objet ainsi
A
�acquis f a it - il partie des biens et de la succession du
père ?
L ’enfant doit-il être tenu de rapporter l’objet en na
ture , à la succession de son père ? ou n’est-il tenu qu’au
rappôrt des deniers employés par le père au payement
du prix de cette acquisition, des frais et loyaux coûts,
et aux améliorations du fait de ce dernier?
T elle est la principale contestation sur neuf cliefs de
demande, qui seront développés lors de la plaidoirie.
F A I T
S.
E n 1 7 5 9 , Pierre G e rle , père commun des parties,
e n q u a l i t é Ue l é g i t i m e administrateur du sieur G erle, in
tim é, donna sa procuration pour acheter six journaux
d’un pré appelé la Périchon n e, situé à Sauxillanges.
L ’acquisition fut faite par le fondé de pouvoir du sieur
Gerle pè re, en cette qualité, pour et au nom du sieur
Gerle fils.
E11 1 7 8 6 ,1 e sieur Gerle fils contracta mariage. Son
père l’institua son héritier, et le chargea de payer, à
chacun de ses autres enfans , une légitime déterminée.
A l’époque d u c o n t r a t de mariage du sieur Gerle fils
(sa mère étoit décédée ab intestat) , Pierre G erle, son
père, jouissoit alors des biens de ses enfans, provenons
du chef de leur m ère, en vertu de l’usufruit légal, effet
de la puissance paternelle alors en vigueur. Les parties
vivoient sous l’empire des lois des pays du droit écrit.
A p rès le mariage du sieur G e rle , intimé, son père a
également continué de jouir de ses biens, par suite du
�C3 )
même usufruit, jusqu’au 19 août 1804, époque de son
décès.
A l’ouverture de la succession du sieur Gerle p è r e ,
le sieur Gerle aîné, son héritier contractuel, a réclamé
les six journaux:'de pré comme à lui appartennns, ayant
été acquis pour lui et en sou nom par son p è re; il a
offert de rapporter à la succession paternelle les deniers
fournis et avancés par son père, et employés au payement
du prix de cette acquisition , les frais et loyaux coûts
d’icelle, et le montant des améliorations du fait de ce
dernier, s’il en existe, qui aient rendu l’objet acquis de
p lu s grande valeur.
m
o
y e n
s.
C’est un principe généralement reconnu et avoué dans
le d r o i t , qu’un père peut.acquérir pour un de ses enfans;
et que l’objet acquis par le père, comme administrateur
légitime d’un d’eux, appartient irrévocablement à l’enfant
sous le nom duquel l’acquisition est faite, exclusivement
au père. C’est ce qui nous est enseigné par tous les ju
risc on sul tes qui ont écrit sur cette matière.
Ils ont assimilé le cas de l’acquisition faite par tle père,
agissant en qualité d’administrateur -ou de curateur d’un
de ses enfans , au cas d’ un retrait lignager exercé par
l’ascendant, agissant en ¡la même q u alité, sous de nom
d’ un d?eux. Ils enseignent q u e les effets ■et les-consé
quences-sont les mémos dans l’un comme dans l’autre
cas, et décident que de même que le -père, ou un cdes
ascendans , ne peut «disposer ide ^héritage ainsi referait ,
A 2
�( 4 }
.
de même il ne peut aliéner l’héritage par lui acquis sous
le nom d’un de ses enfans.
Gi'imaudet, en ses œuvres, liv. 2, ch. 1 2, agite d’abord
la question de savoir si un père peut valablement retraire
sous le nom d’un de ses enfans , n’ayant aucun bien ,
l ’objet par lui vendu : après avoir décidé pour l’ailirm ative, il ajoute que lors du partage des biens du père,
l’objet acquis appartient et reste h l’enfant comme propre;
qu’il en est l’incommutable propriétaire; et que, quoique
le père ait payé le prix de ses deniers, il ne sauroit pré
tendre à la propriété de la chose ainsi acquise. V o ici
comment s’exprime Grimaudet :
« L a conséquence suit de ce que l’enfant de famille,,
« ou son p è re , comme curateur, peut retirer ce qui a
« été vendu par son père; lequel acquêt demeure propre
« à l’enfant, et le père, après, né le pourra retenir, par la
a liaison commune que ce qui est acquis de mes deniers
« n’est pas fait mien, mais à celui qui a fait l’acquisition.»»
Cet auteur fonde son opinion sur la loi S i e x eâ
p ecu n iâ , au cod. de re venditâ ,* et les raisons qu’il cn>
donne sont, ainsi qu’il les rapporte, fondées sur l’autorité
de Godefroy. Q uia emptum pecitniâ a lic u ju s , ejus
non f i t , sed ejus cnjus nornine emplio facta est ; et
quando pater donat fd io y velut pecuniam in retracta,
ilia donatio non reddit ad commodum pntris.
L e môme auteur ajoute ensuite :
« Entre les enfans ès lieux où les père et mère ne
« peuvent pas avantager les uns plus que les'autres, celui
« sous le nom duquel l’acquêt est f a it, doit rapporter
t< les deniers de Vacquét avec le s fr a is , si mieux il u’aiine
�(5)
« la chose retirée, demeurer en l’hérédité, pour les doc< niers en cire partagés; et pour L’acquêt être f a i t par
« le p ère, comme curateur de son enfant , il ne fa u t
« dire q u il fa s s e sa condition meilleure que îitn de
« ses autres e ifa n s : car il ne lu i donne rien de son
« bien , et tout ce qui part du père ( qui sont les de« niei's') , il fa u t que Venfant les rapporte:; le nom du
a curateur ne doit fa ir e que la chose appartienne au
« père et aux autres enfans.
« Ce que nous disons que le père ne peut avantager
« l’un de ses cnfans plus que l’autre, se doit entendre,
« comme n o u s di so n s e n droit, que l’homme et femme
« ne se peuvent faire don l’un h l’autre, dont l’un soit
a plus pauvre, et l’autre enrichi : o r , au cas présent,
« par Vacquêt le père n'est a p p a u v r i c a r il ne perd
« rien du sien , et débourse seulement des d e n i e r s p o u r
a lesquels il se peut p o u rvoir; et jquant à Ia c q u ê t, le
« fils ne lef a i t de son père, mais de Vétranger; partant
« les autres cnfans ne peuvent prétendre part\ audit
« a cq u êt, ou dire que par icelui le père ait, avantagé
« leur frère. »
Brodeau, sur l’article 139 de la coutume de Paris, qui
étoit une coutume qui astreiguoit à une parfaite égalité,
a consacré les mêmes principes que Grimaudet ; il en
seigne que « les autres enfaus, après le décès du père,
« ne peuvent rien prétendre à l’héritage retiré ou acquis
« par le père, sous le nom de l’un d’e u x ; que le fils
« n’est tenu qu’au remboursement des deniers avancés
« par le père; que dès-lors n ih il abest à f a m iliâ , et
.« qu’on ne peut pas dire que la gratification et le ch oix
�( 6 )
« que le père a j'a it de la personne d'un de ses eirfans
« soit un avantage indirect et réprouvé. »
L eb ru n , en son Traité des successions, liv. 3 , chap. 6 ,
sect. 3 , traite la question de l’acquisition faite par un
père au nom d’un de ses enfans,et celle du retrait exercé
par le père sous le nom de l’un d’eux ; et dans l’un
comme dans l’autre cas, il enseigne et décide que le fils ne
doit rapporter què le prix de l’acquisition ou du retrait,
et non l’héritage acquis ou retrait.
A u nombre i 5 , il dit :
« S i lè père a acheté au nom de son fils, l e p r i x
êc"DË L’ ÀCQUÎSITI Ot t E S T S UJ E T A RAPPORT. »
A i l nômbre i'6, il ajoute :
« I l eti est de même quand un père a exercé e te x é « cuté un retrait lignager au nom de son fils; car le
« fils rapporte lè prix du retrait à. la succession de son
« p è re , É T frOtt l ’ h é r i t a g è S i ê m e , q u i n ’ a j a m a i s
* A P P A R T E N U A U PÈ RE, et qui ne l’auroit pu prétendre
«c en la succession de son fils, ni comme acquêt, ni à
s titre de réversion ; en sorte q u e , quoique le retrait
« lignager soit très-avantageux, c’est un cas où le père
te 1peut avantagét soh fils d’un projit q u i 71 est point
« 1sujet à ràpport. » Î/J'aut dire de même dans le cas
~dü ftombre précédent , et « si "le p è r e a f a i t p o u r
xt ‘s'dN W L S ÙN 'AiCHAT A V A N T A G E U X . »
^Bou^jon,“e n ‘sbhTraité du droit commun delà France,
tihap. 7,l$ect. i 1^ . , irititulée : D u ‘rapport de ce que le
“pèrb irchètb lpôur soh fils, png. 7 2 9 , s’exprime ainsi.
A ii nortibre '1^ . , il dit :
T o ü t aviinta^e d’ascendarrs'à descendons fonde’lerap-
�(7 )
«
«
«
«
port. Si les père et mère ont exercé un retrait lignager
sous le nom de leur lils , il doit les deniers employés
pour l’exécution d’un tel retrait , m ais Théritage
retiré lu i appartient. »
A u nombre 2, il ajoute:
« D e m êm e, s'ils ont acheté et payé pour lu i un
« im m euble, ce q u i résulte évidemment de la proposi« tion précédente. »
A u nombre 3, le même auteur ajoute encore:
« D a n s Tun et Vautre ca s. c'estr-à-dire, du retrait, et
« de Vachat d'un immeuble de la part d'un père pour
« son f i l s , ce dernier ne doit pas le rapport de la
« c h o s e , qui ne vient pas de la substance du p è r e ,•
« mais L E R A P P O R T d e s d e n i e r s p a y e s par Vascen« dant à ce sujet. Mais il ne doit plus les deniers en aban« donnant la chose , s’il se trouvoit lésé par le retrait
« ou l’acquisition, et qu’il eût été restitué contre l’effet
« d’iceux. »
Enfin, au nombre 4 , Bourjon s’exprime ainsi :
a Soit dans le cas du retrait exercé par le père pour
« son lils, soit dans le cas de Vacquisition f a i t e par le
« père sous le nom du même j i l s , c e s S O R T E S d ’ a c t e s
ce S O N T
DES
ACTES
DE
COMMERCE
ET
N O N ' DE L I B É -
« R A I jI T É . »
d errière , sur l’article 3 0 4 'de la -coutume de Paris,
glose 2 ,ii°. i£r., tom. 3, enseigne une semblable dqctrine.
« Ce.qui est a cq u is, d it-il,
pèrç, de ses deniçrs,
« au nom de sop fils, est'suj.et à rapport,1 suivant le
ik sentiment de Charondas, ce quùest>sans dpute',‘ et en
« ce cas, c ’ e s t l a s o m m e q u i e s t - s u j e t t e à ’R a p p o r t ,
�Ce )
x ET NON L’HÉRITAGE
ACQUIS , D’ A U T A N T QU’l L N’A
« J A M A I S ÉTÉ DANS LES BIENS DU PERE. »
B oucheul, en son T raité des conventions de succéder,
chap. 6 , n°. 21 et suivant, pag. 66 et suivantes, traite,
e x p ro fesso , la même question que la cour a à juger.
A p rès avoir fait l’énumération des coutum es, telles que
celles de N orm andie, Bretagne et T ou rain e, dont les
dispositions sont contraires aux principes gén érau x,
Boucheul ajoute aussitôt:
« Mais l’on renferme ces coutumes dans leur détroit;
« et où la coutume n’en parle p a s, la jurisprudence y
« est certaine que l’héritage ainsi retiré et acquis p a rle
« p è r e , sous le nom d’ un de ses enfans , q u o i q u e
« M I N E U R , EN BAS A G E , ET MEME SANS AUCUN BIEN,
« APPARTIENT,
NON AU
« DENIERS , m a is
à
PERE
l'e n fa n t
QUI
sous
A FOURNI LES
le
n om
du q u el
sont faits. »
Cet auteur a fondé son opinion sur les dispositions
de ld loi 8 , au cod. S i quis alteri vcl sib i emerit.
A u nombre 26 , Boucheul ajoute :
« Q uand le père ou la mère a c q u i è r e n t un heri« tage sous le nom de l’un de leurs enfans, ce n’est pas
«
L’ ACQUÊT
k
UN
«
ont pour l u i
ou
le retra it
AVANTAGE
que
c e tte
q u ’i l s
p ré d ilectio n
, et en rem boursant le p r ix ,
l ’h e r i -
« t a g e EST AU F I L S , sans qu’il soit besoin d’en f a ir e
a rapport à ses co h éritiers, parce que c e s t un bien
« qu i ne vient pas dm su b s t a n t i a p a t r i s. »
D en izart, au mot R apport, n°. 49, dit:
« S i le père achète , au nom de son J i l s , ou exerce
« uji retrait lignager, LE p r i x d e l ’a c q u i s i t i o n ou du
«
retrait
�(9)
« 7'etrait est sujet à rapport ; MAIS
non
pas
l ’h é -
« R I T A G E , QUI N’ A J A M A I S APPARTENU AU PE RE ; en.
« so r t e q u e , supposé que Vachat ou le retrait soit
« avantageux au j ï l s , LE PROFIT QUE F A IT LE FILS
« N’EST PAS SUJET A RAPPORT. »
Pothier, e n s o n T i’aité des successions, cliap. 4 , §. 2,
page 180, édit. in -40. , enseigne la môme doctrine.
« LorsqiCun père ( d i t - i l ) a acheté , au nom et
« pour le compte de s o n j i l s , un héritage, et en a payé
« le p rix de ses deniers , CE n ’ e s t p a s l ’ h é r i t a g e
« qui est s u j e t A r a p p o r t ; I L N’ A J A M A I S
« P A S S É DU" P È R E a u F I L S , P U I S Q U ’I L N ’A
« JA M A IS A P P A R T E N U AU PÈ R E , A Y A N T
« É T É ACH ETÉ AU NOM DU F IL S ; L E F IL S
« sera donc seulement ten u, en ce c a s , a u r a p p o r t
k d u p r i x que le père a jv u r n i pour Vacquisition. »
O a trouve la môme décision dans le répertoire de
jurisprudence, par Guyot. Les articles que nous allons
rapporter sont d’un célèbre magistrat, vivant au temps
actuel, collaborateur de ce répertoire ( 1 ).
A u mot légitim e, tom. 10, pag. 386 , 011 lit :
« L e PRIX d ’ u n e a c q u i s i t i o n que le père fait au
« nom de son fils, et qu’il paye de ses propres deniers,
« est, sans contredit, sujet à l’imputation : on a déjà
« vu que le parlement de Flandres l’a ainsi jugé, par
a arrêt du 14 février 1775. »
Mais il est essentiel de remarquer ici que c’est du
p r ix , et non de l ’héritage acquis, dont il est fait men~
( 1 ) M. Merl... procureur général à la cou r de cassation,
B
�( 10 )
tion , lorsqu’il s’agit de l’imputation de légitime. On va
voir qu’il n’est également question que du p r ix , et non
de l’h éritage, lorsqu’il s’agit du rapport.
ü n lit encore, dans le même répertoire de jurispru
dence de G u y o t, page 413 , au mot rapport, nomb. 7 :
« Nous avons établi, à l’article légitim e, qu’on doit
« imputer, dans la portion légitimaire, l e p r i x d e l ’ a C« QUISITION QUE LE PERE A FA IT E DE SES PROPRES
« DENIERS , AU NOM DE SON FILS ; la même raison
« veut que LE PRIX SOIT S UJ ET A RAPPORT. »
E n fin , h la même page il est ajouté :
« Nous ne parlons ici que DU RAPPORT DU T R i x ,
« parce qu’en effet il rfy a que l e p r i x q u i y p a a ROISSE SUJET ,
« FA IT E
DANS
P AR LE PERE ,
IÆ CAS D’ UNE ACQUISITION
AU NOM D’UN DE SES EN-
« F A N S , L’HÉRITAGE MEME SEMBLE NE DEVOIR PAS
« Y ÊTRE SOUMIS : J A M A I S IL N’A APPARTENU A U
« P È R E ; IL N’A POINT PASSÉ DU PERE AU FILS , et
« CONSÉQUEMMENT
a LE METTRE
«
APRÈS
LE FILS N’EST
POINT
TENU DE
DANS L A MASSE DES BIENS DU PERE
SA MORT. >3
Telle est la doctrine universqllement enseignée par les
j u r i s c o n s u l t e s q u i ont écrit sur la question élevée au
jourd’hui dans la famille G e r l e : t o u s o n t décidé q u e le
fils, au nom duquel l’acquisition ou un reirait sont fails
par le père, ou autre ascendant, est propriétaire seul et
incommutable de l’immeuble acquis 011 retrait ; que le
fils est seulement tenu au rapport des deniers déboursés
par le pè re, et non au rapport de l’héritage acquis,
sur lequel le père n’a jamais eu aucun droit de propriété.
�( 11 )
D e ces principes, il résulte que les six journaux de
p r é , que le sieur Gerle père a acquis au nom de son
fils a în é, en 1769, ont appartenu à ce dernier , dès l’ins
tant même que la translation s’en est opérée par l’effet
de l’acte de vente qui a eu lieu ; il résulte enfin , et il
est démontré, que cette propriété a résidé sans cesse sur
la tête du sieur Gerle, intim é, à l’exclusion de son père,
et q u e , soit le sieur Gerle p è r e , soit sa succession ou
ses héritiers, n’ont à réclamer que le p r i x , les frais et
loyaux coûts, et les améliorations du fait du p è r e , s’il
eu existe du fait du père.
Q u o i q u e le père ait fourni les deniers pour le paye
ment de cette acquisition , cette circonstance ne sauroit
donner aux enfans légitimaires du sieur G e r l e , aucun
droit de propriété sur le pré dont il s’agit. C ’est ce qui
nous est enseigné par Godefroy, en ses notes s u r la loi i rc.
au cod. S i quis alteri vel s ib i, sitb alterius no m iné vel
aliénât pecunià em erit, tit. 5o , liv. 4. Il décide que la
chose aCquise n’appartient pas h celui qui en a payé le
prix de ses deniers, mais à. celui au nom duquel la chose
est achetée.
R e s , dit-il, ejus esse'mm videtur, non eu ju s p ecu n ia ,
sed eu ju s nomine empta est.
Et sur la loi 8 , du même t i t ., le môme annotateur
ajoute : A lié n a pecuniâ , quod compara lu r ,J it compa
ra Jïtis , non ejus eu ju s f u it pecunia.
L a circonstance de l’existence de l’institution contrac
tuelle faite en 178 6 , en faveur de l ’intim é, de la part
de son père, ne sauroit changer son état, ni porter at
teinte à son droit exclusif de propriété sur le pré* dèJ là^
B 2
�Périchonue ; droit dont il a etc irrévocablement investi
dès le 7 avril 176 9, c’est-à-dire, dès le moment même
de la perfection de l’acte d’acquisition faite pour lui et en
son nom par son père.
En devenant l’unique propriétaire de ce pré, au même
instant il est devenu débiteur envers son père des deniers
par lui avancés et fournis pour parvenir à celte acqui
sition. O r , par cet état de chose, il est démontré que
jamais le père n’a pu être considéré comme propriétaire
du pré en question, et que cette propriété a nécessai
rement résidé dans la personne du fils.
L e père, en instituant son fils aîné héritier universel,
ne l’a institué que dans l’action qu’il avoit pour répéter
les deniers par lui d é b o u r s é s , et non dans la propriété
du pré acquis pour son fils. Car, encore une fois, le père
n’en a jamais été ni pu devenir propriétaire, tant que
le fils n’a pas manifesté l’intention de renoncer à la
propriété de cet objet»
Ce scroit renouveller une absurdité qu’on a mise au
jo u r, en cause principale, si les appelans prétendoient
que l’a c q u i s i t i o n faite au nom du fils , par le p è r e , est
un avantage indirect; que joiq^ à l’institution contrac
tuelle, le père nuroit alors excédé la quotité disponible;
que leur légitime de rigueur s c r o i t b l e s s é e ; le pré dont
il s’agit ayant, depuis 1769, considérablement accru de
valeur.
Toutes ces idées systématiques se trouvent détruites
d’avance par les autorités ci-dessus rapportées. Grimaudet,
Erodeau, Lebrun et Boucheul enseignent que la prédi
lection que donne un père à un de scs enfans, en achetant
�( i3 )
sous son nom un immeuble , n’est point un avantage
indirect fait à cet enfant. B o u rjo n , au n°. 4 déjà l’a p
porté, dit que ces sortes d’acquisitions sont des actes de
commerce et non de libéralité.
Il est impossible de concevoir que de telles acquisitions
présentent l’ombre la plus légère d’un avantage indirect,
lorsque le fils l’apporte les deniers fournis par le père;
par ce rapport,-le fils réintègre dans la fortune du père
tout ce qui en est sorti : et tous les auteurs ci-dessus
cités enseignent que le fils n’est tenu qu’au Rapport de
ces mêmes deniers, qui ont constitué la substance sortie
do la fortune du père, et qu’il n ’est point tenu au rapport
de l’immeuble acquis, lequel, ab in itio , a appartenu au
fils exclusivement au père : c’est ce rapport du *prix
qui a fait dire à ces jurisconsultes que la -prédilection ,
ou le ch oix d’un des en fa n s, f a it par le père , rfétoit
point un avantage indirect.
1 ■
^
L e p è r e , en achetant pour son fils , n’a sorti de la
substance de ses biens et de sa fortune, que des deniers;
le fils ne doit remettre à la succession du père que les
mêmes objets qui en ont été distraits ; c’est-à-dire, qu’il
ne doit remettre que des deniers. Cette vérité nous est
encore enseignée par Pothier, en son Traité des succes
sions, t o m e 6 , cliap. 4 , § . 2 , page 177? édition in -40.
Voici comme il s’exprime :
« Tous les actes d’ un père ou d’une mère , dont
« quelqu’ un de leurs enfans ressent quelqii avantage ,
« ne sont pas des avantages indirects sujets à rapport j
« il n’y a que .ceux par lesquels les père et mère font
« passer quelque chose de leurs biens à quelqu’un de
�( *4 )
« leurs enfans, par une voie couverte et indirecte; c’est
« ce qui résulte de l’idée que renferme le ternie rapport;
« car rapporter signifie remettre à la masse des biens du
« donateur, quelque chose q u i en est sorti. On ne peut
« pas y remettre , y rapporter ce qui n’en est pas sorti:
« donc il ne peut y avoir lieu au rapport, que lorsqu’un
« père ou une mère ont fait sortir quelque chose de
« leurs biens, qu’ils ont fait passera quelqu’un de leurs
«: enfans. »■
En faisant Papplication de ce principe lumineux en
seigné par Pothier, il est donc c la ii 'e m e n t d é m o n t r é que
les légitimaires G e r l e ne sont fondés à réclamer que le
rapport des< deniers employés par le père com m un , à
p a y e r l ’a c q u i s i t i o n f a it e pour son fils aîné , parce qu’il
n’est sorti du patrimoine du père que des deniers. L eu r
système de rapport de l’objet acquit est une erreur : cet
objet n’a jamais fait partie des biens du p è r e , puisque
tous le/*» jurisconsultes décident qu’il appartient au fils
et non au père. L e pré de la Périchonne n’a donc pas
pu sortir de la, fortune du p è re , n’y étant jamais entré,
C ’est v o u l o i r se révolter contre les principes du droit,
que de soutenir le rapport, en nature, du pré dont il
s’agit.
L a propriété- du pré de la Périchonne ayant résidé
ab in it io , c’e s t - à - d i r e , dès le moment même de la
confection de l’acte de vente par l’effet duquel la trans
lation de propriété a passé de la personne des vendeurs
en celle dû sieur Gerle fils, acquéreur, il est ridicule de
prétendre que lés appelant aient jamais pu concevoir
l’ospoir d’un droit de légitime sur ce pré. O n ne cessera
�(
)
de le l’épéter, ce pré n’a jamais fait partie du patrimoine
du sieur Gerle père ; il n’a eu sur cet objet qu’un droit
d’hypotlièque pour sûreté des deniers par lui avancés
pour son fils. L e sieur Gerle fils a în é , débiteur envers
la succession de son père de ces deniers, ne profitera
d’aucun de ceux que le père a sortis de son patrimoine,
en l’apportant le pi*ix de l’acquisition dont il s’a g it, les
frais et loyaux coûts d’icelle, et la valeur des amélio
rations du fait de son p è r e , s’il en existe. C ’est sur ces
deniers, que n’a cessé d’offrir l’intimé dès le moment de
l’ouverture de la succession de son père, que doit frapper
en partie la lé g itim e des nppclaiis, et non sur le pré de
la Périchonne qui n’est jamais entré dans le patrimoine
du père, et n’en a jamais fait partie.
Par le rapport offert par l’intimé, la succession du
père ne reçoit aucune atteinte, et l’intimé lui-même ne
reçoit aucun avantage. Cette succession recouvre tout ce
qui a été distrait par le père, de la substance de sa for
tune et de ses biens.
Lesappelans nesauroient être fondés à réclamer aucune
espèce de droit de légitime sur l’accroissement de valeur
qu’a pu acquérir le pré de la Périchonne, depuis 1769,
étant démontré qu’il n’a jamais fait partie des biens du
père commun. Cet accroissement de valeur n’a rien coûté
au père ; sa fortune 11’en a souffert aucune espèce de
distraction-, c’est une augmentation inopinée, qui est un
accessoire du p r é , produite par la chance des temps, et
indépendante du fait de l’homme. O r , dès -qu’il est dé
montré que le père commun n’a jamais eu ün tfeutifisA
t
";o
�(. 16)
tant aucun droit de propriété sur cet héritage} c’est une
absurdité de prétendre que les appelans ont des droits
à ses accessoires.
P o u r -pouvoir, G E R L E.
A R I O M , de l’imprimerie de T h i b a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mai 1808.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gerle, Jean. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gerle
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
fils avantagé
Description
An account of the resource
Précis pour sieur Jean Gerle, avocat et juge de paix du canton de Sauxillanges, intimé ; contre François Gerle, prêtre, Pierre, Catherine et Marie Gerle, frères et sœurs, appelans.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0549
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauxillanges (63415)
Rights
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Domaine public
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acquisitions
fils avantagé
Successions
-
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f
M
É
M
O
I
R
E
POUR
Dame M a r i e - U r s u l e S A L V A I N G D E
B O I S S I E U , et sieur J e a n - P i e r r e
S A U Z E T DE S A I N T - C L E M E N T ,
son m ari, appelans d’un jugement rendu au
tribunal du P u y, le 9 mai 1807;
C O N T R E
M e. J e a n - A n d r é - G u i l l a u m e S O U T E Y R A N , ancien avocat, intimé ;
E T
Le
E N C O R E
C O N T R E
c u r a t e u r à la succession vacante du sieur
P ie r r e -A n to in e B
runel
de
Sa in t -M ar cel,
aussi intimé.
L
A dam e de S a in t-C lé m e n t d e v o it a v o ir une fo rtu n e
c o n s id é r a b le ; elle s’en v o i t tout à c o u p d é p o u illé e p ar
trente-trois ventes q u ’on a arra ch ées à la foiblesse d ’un
v ie illa rd n on agén aire. T o u t e s ces aliénations ont eu lieu
A
�( 2 )
sans nécessité et sans cause légitime-, un moment de ca
price ou de contrariété les a déterminées : il y avoit
même une certaine combinaison dans le choix des acqué
reurs. Il est pénible pour la dame de Saint-Clément de
se voir obligée de dire que son aïeul, sans autre m otif,
se félicitoit d’avoir trouvé des moyens plus sûrs de dé
pouiller sa petite-fille, parce qu’il avoit vendu à des
liommes de loi qui sauroient bien se défendre. E t ces
hommes de loi devroient être bien humiliés de se voir
signaler comme des gens redoutables ; ils devroient se
reprocher d’avoir accepté une vente faite dans un moment
d’humeur et de co lère, par un vieillard dont ils étoient
les conseils, qu’ils dirigeoient dans toutes ses démarches,
et dont les manœuvres étoient tellement connues, que
déjà ils avoient dans leurs mains une opposition qui les
avertissoit de l’incapacité ou de l’impuissance du vendeur.
I>es sieurs Souteyran , père et fils , ont n é gl i gé ces
avertissemens •, ils ont méprisé les avis
d’une mère alarm ée; ils ont voulu courir les risques de ce qu’ils appeloient une bonne affaire, et ne rougissent pas d’avoir
dans les mains un bien aussi mal acquis.
Les premiers juges leur ont été favorables : mais ce
succès ne sera qu’éphémère ; et la cour proscrira avec
indignation un contrat frauduleux et nul.
%
f a i t s
.
Thonias-François Arcis, et M a rie -T h é rèse Bossolade,
ont eu de leur mariage M a rie -C la irc A r c is , qui épousa
le sieur Antoine Brunei de Saint-Marcel.
�( 3 )
^
Son contrat ^le m a ria g e, du 13 juin 1 7 3 5 , contient les
conventions suivantes :
M arie Bossolade, veuve A r c i s , donne à sa iille la
maison et jardin qui lui appartiennent en la ville du Puy,
au-dessous de la porte de Vienne.
Elle se départ en faveur de sa fille, et du sieur SaintM a rcel, son ép o u x , de l’habitation à elle léguée par le
sieur A r c i s , son m ari, dans la maison située rue de la
Courrerie.
Elle se démet en faveur de sa fille, et du sieur SaintM a r c e l, son é p o u x , de l’hérédité du sieur A r c is , dont
elle étoit chargée par son testament, sans se rien ré
server ni retenir.
L e sieur Saint-Mai’cel décharge sa belle-mère de la
somme de 18000 francs portée en l’inventaire du sieur
A r c is , au moyen de la remise et délivrance que lui fait
la dame A r c i s , des meubles, a rg e n t, argenterie, pro
messes , obligations, contrats de vente qui provenoient
du défunt.
L e sieur Saint-M arcel, pour augînent de dot et gain
de su rv ie , donne à son épouse une somme de 4000 f r .,
payable en cas de prédécès.
D u mariage du sieur Brunei de Saint-Marcel, et de
la dame A r c is , sont provenues deux filles; l’une ClaireT h é r è se , qui a épousé le sieur Surel de Saint-Julien;
la seconde, M arie-Francoise-Louise, qui s’est mai'iée
avec le sieur Salvaing de Boissieu. C ’est de ce dernier
mariage qu’est née Marie-Ursule, épouse du sieur Sauzet
de Saint-Clément.
P a r le contrat de mariage de C la ire-T h é iè se, femme
A a
�( 4 ) . .
r
Saint-Julien, en date du 17 février 1 7 I 9 , ses père et
mère la légitimèrent à une somme de 40000 francs pour
scs droits paternels et maternels. L e contrat de mariage
porte quittance d’ une somme de i 5ooo irancs j et le
surplus de sa c o n s t i t u t i o n dotale, qui est de sôooo fr.,
est stipulé payable , savoir : 10000 francs dans Vannée
du décès du -premier m ourant des père et mère , et
1 5ooo fr. dans Tan révolu après le décès du survivant ,
sans in térêt, qu’à compter de l’échéance des termes.
Par le contrat de mariage de la dame de Boissieu ,
du 8 juin 176 2 , ses père et mère lui font donation
entre-vifs , irrévocable, contractuelle et dotale, de tons
et chacun leurs biens meubles et immeubles présens
•1
r
et à venir, sous la réserve expresse que se font les do
nateurs de la jouissance des biens donnés pendant leur
vie; laquelle jouissance sera réversible de l’un à l’autre.
Ils se réservent un capital de 12000 fr. p our p o uv o ir
s'en servir clans leurs besoins , et en disposer tant à la
vie qu’à la m ort, en faveur de qui ils jugeront à propos.
Il est dit que cette somme de 12000 francs, également
réversible de l’un à l’autre , sera prise sur les biens ¿1
ven ir, s’ il leur en échoit, et subsidiaircment, sur leurs
biens actuels.
Les sieur et dame Saint-Marcel se réservent aussi tout
ce qui peut leur être dû provenant d’arrérages de fermes,
censives, obligations, comptes de leurs journ au x, et gé
néralement toutes les dettes actives.
lin attendant que l’usufruit soit consolidé à la pro
priété des biens donnés , ils donnent et constituent en
d o t, à leur fille, eu avancement d’hoirie, et pour sup-
�( S )
porter les charges du m ariage, la somme de 20000 fr. ;
p lu s, d ix - n e u f marcs et deux onces d’argenterie : ils
payent 11000 fr. à compte, et s’obligent d’acquitter dans
un an la somme de 9000 fr. pour parfaire l’avancement.
« Mais comme ils n’ont deniers en mains pour le
« payement de la somme de 9000 francs, non plus que
« pour acquitter la constitution de la dame Saint-Julien,
« dont il reste dû 12600 francs, nonobstant la quittance
« insérée dans son contrat de m ariage, du 17 février
« 1759 , ainsi que les termes qui écherront à l ’a v en ir,
« et pour acquitter leurs autres dettes passives, il a été
« convenu et accordé qu’il sera libre aux sieur et dame
« Saint-M arcel, de vendre et aliéner les domaines de
« R ocharnaud, Mons et ü r z illa c , champs et vignes de
« Couchât, au terroir de Chadrac; les fonds dépendans
« du domaine de Pouzarol , situés ès-mandemens de
« cette v ille , consistans en m aison, p r é s , vergers, et
« champs; les prés situés au terroir de Ceissac ; et fm a« lement le domaine de Chaspuzac, à leur ju ste valeur,
« et su r le pied de Vestim ation, pour servir au payement
« desdites
créances , c o n c u r r e m m e n t aux susdites
« constitutions , et autres dettes connues des parties
« intéressées ; ensem ble, pour remplir la réserve du
« capital de 12000 francs, s i les donateurs sont dans
« le cas de s'en servir ; le tout suivant le payem ent,
« et délégation q u i en sera f a it e . »
O n s’oblige de fournir au sieur de Boissieu , futur
époux, un double de la quittance du produit des ventes.
I/excédant du produit des ventes a u-d elà des créances
et réserve, doit être placé, du consentement du sieur de
�Boissieu et de sa fem me, chez des personnes solvables.
L e revenu en sera payé aux donateurs pendant leur vie,
sans que les acquéreurs puissent être recherchés , en
rapportant néanm oins un légitime emploi de coiiform ité
à Vétat connu des parties.
Si l’intérêt des futurs époux peut exiger l’aliénation
des biens qui resteront a la fu tu re , il est convenu que
le sieur de Boissieu pourra les vendre à leur juste valeur,
après le décès des donateurs, sans que les acquéreurs
puissent être recherchés par la demoiselle de St.-Marcel,
ou les siens, qui ne pourront répéter dans les biens du
vendeur que le juste prix des fonds par lui aliénés.
O n excepte des ventes permises à l’é p o u x , le moulin
appelé de Saint-M arcel, et la maison du Puy. Ces objets
ne pourront être vendus que dans le cas où on en
trouveroit un prix avantageux.
E n ce qui concerne l e mobilier ou meubles m e ub l a n s ,
il est convenu, sans en faire un inventaire plus détaillé,
qu’ils seront remis à la dame de Boissieu dans l ’état où
ils se trouveront au décès du dernier mourant de ses
père et m è re ; ils sont cependant évalués, dans l ’état
actuel, à la somme de 6000 francs.
I.e même jour 8 juin 1762, il fut fait un état double
entre les sieur et dame de S a in t-M a rcel, et le sieur
Salvaing de Boissieu, leur gendre, des dettes qu’a voient
alors les père et mère : cet état se porte à la somme
de 49600 francs, sans y comprendre les 9000 fi\ faisant
partie de l’avancement d’hoirie de la dame de Boissieu,
et qui devoient être payés dans l’année du contrat de
mariage. Mais on porte dans cet état une somme qui
�( 7 )
n’étoit pas exigible ; on veut parler de celle de 2 5 ooo f.
due sur la dot de la dame de Saint-Julien, dont 10000 f.
étoient payables après l’an révolu du décès du premier
mourant des père et m è re , et i 5ooo francs n’étoient
exigibles qu’après l’an révolu du décès du survivant.
O n ne parle pas dans cet état de la somme de 12000 f . ,
montant de la réserve, parce qu’on se rappelle que cette
réserve ne devoit être prise que sur les biens à venir.
Les sieur et dame de Saint-Marcel se dépouilloient
donc irrévocablement de leurs propriétés, au profit de
leur fille, par ce contrat de mariage. S’ils se i’éservoient
la faculté de vendre une portion des biens donnés, ils
ne pouvoient le faire qu’en acquittement de leurs dettes.
■Les biens dévoient être vendus à leur ju ste v a le u r, et
sur le pied de Vestimation. Ils étoient obligés, d’en dé
léguer le prix aux créanciers; ils étoient tenus de fournir
à leur gendre un double du produit des ventes •, enfin,
ils devoient rapporter la preuve d'un légitime emploi
des deniers de ces mêmes ventes.
Les père et m è r e , au m o y en de ces conventions,
n’étoient plus que de simples mandataires, qui devoient
à leur fille un compte rigoureux de leur mandat; encore
cette faculté de v e n d re , réservée par le contrat, étoitelle exorbitante et contraire au droit commun. G’étoit
donner et retenir : o r , en g é n é r a l, donner et retenir
ne vaut. Si on excepte les contrats de mariage de cette
prohibition , c’est qu’ils sont susceptibles de toutes les
conventions qui ne blessent pas les bonnes mœurs. Mais
toujours on doit restreindre ce qui est exorbitant ; et
lorsqu’une faculté de ce genre est subordonnée à de cer
�( 8 )
taines conditions , on doit les remplir avec exactitude.
lia dame A rcis , femme Saint-Marcel, est moi’te le 16
juin 1784. L e sieur Saint-Marcel a parcouru une trèslongue carrière; il a survécu vingt-un ans à sa femme;
il est décédé le 24 octobre i 8 o 5 , âgé de quatre-vingtdix-sept ans.
Il semble qu’aussitôt après le mariage de la dame de
Boissieu, les père et mère ont ailecté de se jouer de leurs
engageinens. Les ventes se sont multipliées : depuis le 27
juin 1762, jusqu’au 18 novembre 1782, les sieur et dame
Saint7 Marcel ont vendu successivement des immeubles
donnés, pour la somme de 47009 francs.
L e sieur de Boissieu voj'oit avec regret toutes ces
aliénations ; il se permettoit à cet égard quelques obser
vations respectueuses : elles étoient mal accueillies.
Plusieurs lettres du sieur Saint-Marcel annoncent de
sa part un changement d’ailection , des regrets amers et
peu flatteurs pour sa fille, d ’avoir légitimé la dame SaintJulien , et institué la dame de Boissieu.
Ce fut bien pis encore après la mort de la dame son
épouse. Il se mit dans la téte de payer par anticipation,
à la dame Saint-Julien, la somme qui n’étoit exigible
qu’ un ail après sa mort. Il écrivoit à la .dame de Bois
sieu qu’elle, seroit encore la mieux partagée; qu’il auroit
dû laisser ses ,deux filles égales. Cependant la foi des
contrats de mariage doit être gardée : sans la donation
faite à la dame de Boissieu, son mariage n’eût pas eu
lieu ; ses enlans n’auroient pas vu le jour.;
Ce fut.avec des peines infinies que le sieur de Bois
sieu obtint de son beau-père la préférence pour un jardin
appelé
�C 9)
appelé de V ie n n e , que son beau-père lui délaissa avec
h um eur, pour une somme de 3500 francs, à condition
que son gendre sei'oit tenu de précompter 5oo francs
sur celle de 12000 francs, montant de sa réserve. L ’af
fection qu’avoient montrée le sieur de Boissieu et la dame
son épouse pour ce jardin déplut au sieur de SaintMarcel : il 11e destinoit point cet objet à son gendre; il
se crut humilié en accédant à ses désirs.
L e contrat de mariage de la dame de Boissieu contient
l ’énumération -des biens qui pourroient être aliénés pour
cause légitime. A la suite de tous les immeubles désignés,
on lit ces mots : E t fin a lem en t le domaine de Chaspuzac.
Il n’y a rien d’inutile dans un contrat. Ces expressions
limitatives mettoient le domaine de Chaspuzac au der
nier rang; il ne pouvoit être vendu qu’après que tous
les autres objets désignés auroient été épuisés : il y avoit
même de grands motifs pour conserver cette propriété;
elle étoit à la bienséance du sieur de Boissieu, près de
ses autres possessions , et en augmentait la valeur. L e
domaine d ’ Orzi llac étoit «11 des premiers destinés ù la
vente; il restait dans les mains du sieur de Saint-Marcel :
par contrariété, le sieur Saint-M arcel veut vendre le
domaine de Chaspuzac. Déjà le nombre des ventes par
lui consenties se portait u trente-deux, toutes sans esti
m ation j plusieurs avec cession de -plus-value ; toutes sans
épingles; la plupart sans cause, sans nécessité, ¿1 crédit,
au comptant, sans jamais justifier de l’emploi; toutes sans
alliches, sans formalités quelconques, et à vil prix.
Les sieur et dame de Boissieu apprirent avec effroi que
le domaine de Chaspuzac allait encore leur échapper; ils
B
�furent instruits que les sieurs Soutcyran, père et fils, l’un
procureur, l’autre avocat, se présentoient pour acquérir.
L e 31 mars 1 7 9 1, les sieur et dame de Boissieu prirent
le parti de faire notifier vin acte extrajudiciaire aux sieurs
Souteyran, par lequel ils declarent « qu’etant venu à
« leur connoissance que les sieurs Souteyran étoient sur
« le point d’acheter le domaine de Cliaspuzac, ils leur
« dénoncent que la propriété leur appartient; qu’il ne
« dépend pas du sieur Saint-Marcel de les en dépouiller;
« que par les ventes qu’il a déjà faites, il a plus qu’ab« sorbé les réserves contenues dans leur contrat de ma« riage ; que par ce moyen , et autres à d é d u ire , ils
« entendent se conserver ce domaine ; qu’ils n’auront
« aucun égard à toutes les sûretés que les ckmes Sou« teyran pourroient prendre, et terminent par leur laisser
« copie du contrat de mariage de la dame Boissieu.»
Cette déclaration d’une mère de famille qui voit dis
siper sans nécessité le bien de ses enfans , auroit dû
arrêter des personnes délicates, surtout des hommes
d’affaires. Mais les sieurs Souteyran bravèrent l ’opposition
des sieur et dame de Boissieu, et ils n’en furent que plus
empressés de terminer. U o cca sio n (fun bon m a r c h é ,
et la facilité que donnoient alors les assignais pour les
payemens, les déterminèrent.
L e 2Ô octobre 1791? le sieur Brunei de Saint-Marcel,
excipant des clauses du contrat de mariage de
fille,
qui lui permettent de vendre le domaine de Cliaspuzac,
dépendant de son patrimoine, et autres immeubles y
désignés, pour payer scs dettes, acquitter 12000 francs
qui restent dûs de la dot faite à son autre fille Saint-
�J u lie n , el se retenir et disposer de 12000 francs par lui
réserves, vend au sieur Souteyran , ci-d eva n t procu
reur , et à la dame O b r ie r , son épouse, l’entière pro
priété de son domaine de Chaspuzae, deux petites rentes
en dépendantes. Cette vente est faite par le sieur SaiutM arcel, comme seigneur haut-justicier, avec les charges,
pour l’aven ir, de la taille et des dîmes (supprim ées
par la loi du 14 avril 1790 ).
Cette vente est faite moyennant zo ô o o f r . , et 600 fr.
pour épingles ; sur lequel prix la dame Saint-Julien
reçoit la somme de 12000 francs sans aucune garantie,
et les 9100 francs restans, le vendeur déclare les avoir
reçus à compte de sa ré s e rv e , ou autres hypothèques
par lui acquises sur les biens des sieur et dame de Boissieu, suivant l’état par lui tenu, subrogeant les acquéreurs
î\ tous ses droits.
L e sieur Saint-Marcel se félicite d’avoir si bien choisi
ses acquéreurs; ce sont, écrit-il à sa fille, des hommes
de loi, qui sauront bien se défendre, q u i vous mèneront
dur. Il mêle l’ironie à scs menaces; il t rouve plaisant que
son gendre, qui est attaqué de cécité, et ne peut avoir
aucune jouissance, soit encore assez téméraire pour se
plaindre des ventes que fait son beau-père.
Ces hommes de l o i , si fort vantés par le sieur SaintM arcel, ne voulurent pas lui donner le démenti. L e sur
lendemain de la vente, c’est-à-dire, le 27 octobre 1 7 9 1 ,
ils firent citer le sieur de Saint-M arcel, pour qu’il fût
tenu de faire valoir la vente qu’il leur avoit consentie,
et de (aire donner main-levée de l’opposition formée par
les sieur et dame de Boissieu.
B 2
�( 12 )
Les sieurs Souteyran étoient assez maladroits dans cette
démarche précipitée. C ’étoit reconnoître qu’ils avoient
acquis des droits litigieux , ce qui est rigoureusement
prohibé aux gens de loi. Mais tout se faisoit concurrem
ment avec le sieur Saint - Marcel. L e gendre du sieur
Souteyran devient l’avoué du vendeur ; on assigne les
sieur et dame de Boissieu en main-levée de leur oppo
sition; on fait joindre les deux demandes; et le jugement
de jonction est notifié aux sieur et dame de Boissieu le
30 janvier 1792.
L e 3 février suivant, on leur fait notifier i° . l’état des
ventes consenties tant par la dame Saint-Marcel que par
son m ari, conjointement ou séparément, depuis le con
trat de mariage des sieur et dame de Boissieu , du 8
juin 1762.
20. L ’état général des payemens faits par le sieur d e
S a in t-M a rce l, depuis le mariage du sieur de Boissieu,
pour f o r m e r Pemploi des sommes pro venantes des ventes*
faites depuis la même époque.
L e 5 mai 179 2, les sieur et dame de Boissieu signifient
aux sieurs Souteyran le contrat de mariage de la demoi
selle de Boissieu, leur fille, avec le sieur Sauzet de SaintClément, en date du 8 janvier 1792; et comme ce contrat
de mariage contient une donation universelle au profit
de la dame de Saint-Clément, les sieur et dame de Bois
sieu déclarent qu’ils n’ont plus d’intérét dans la cause,
qu’ils doivent être mis hors d’instance, et que les sieurs
Souteyi’an peuvent, s’ils le jugent à propos, diriger leurs
poursuites contre les sieur et dame de Saint-Clément.
O n profite bien vite de cet avis. L e 9 du m êm e mois,
�( 13 )
de mai, les sieur et dame de Saint-Clément sont appelés
en cause. On obtient contre e u x , par défaut, un juge
ment de jonction, le 30; il leur est notifié sous le nom
de leur aïeul, le 9 juin suivant, avec un mémoire expli
catif vraiment injurieux, et qu’on pourroit qualifier de
libelle, si on ne s’étoit servi du nom du grand-père.
En tôle de cette signification se trouvent deux pièces
bien essentielles au procès.
La première est un acte n o t a r i é , du 20 avril 1792,
par lequel les acquéreurs et le vendeur reconnoissent ne
s ’être pas conform és a u x clauses du contrat de mariage
des sieur et dame de Boissieu, lors de la vente du domaine
de Chaspuzac. Ils dérogent au prix exprimé dans cette
vente; ils conviennent mutuellement que la vente du
domaine de Chaspuzac sortira son plein et entier effet,
pour son prix et v a le u r , suivant l’estimation qui en
sera faite par le sieur R eco u les, exp ert, habitant de la ville du P u y , qu’ils ont amiablement nommé pour leur
expert commun. Ils le dispensent de toute formalité ,
de toute prestation de serment; ils s’obligent d ’acquiescer
à l’estimation qui sera faite à frais communs. Si elle
excède la somme de 21100 francs, portée p a r le contrat,
les acquéreurs rembourseront sans délai l’excédant au
sieur Saint - M a r c e l, qui promet à son tour de rendre
le m o in s , s’il y a lieu.
L a deuxième pièce est le procès verbal d’estimation du
sieur Recoules , du 14 mai 1792. O n voit par ce procès
verbal que le domaine de Chaspuzac se compose de
q u a tre-vin gt-sep t pièces d’immeubles : sou estimation
est portée à. la somme de 21427 fr. ; de sorte qu’il y a
�( H )
un accroissement de prix de 327 fr. Mais on remarqué
que l’expert a négligé d’estimer les bois pins, les arbres
enradiqués autour des héritages, les meubles, la maison
de la ferm e, etc. On voit au bas de ce rapport que les
acquéreurs et les vendeurs l’approuvent et le confirment
dans tout son contenu, et veulent qu’ il sorte son plein
et entier effet; et cette approbation, en date du 16 mai
1 79 2 , n’a pas même étéJ a lte double.
O n élague les incidens de procédure qui eurent lieu
depuis cette signification ; on se contentera d’observer
que le 18 mai 1793, intervint jugement qui appointe les
parties en droit : le procès fut distribué le 17. L à se ra
lentit l’ardeur des sieurs Souteyran. L e sieur de Boissieu
mourut le 6 ventôse an 5 : bientôt les sieur et dame de
S ain t-C lém en t apprennent que leur aïeul étoit circon
venu , et qu’on vouloit encore arracher à sa foiblesse les
derniers immeubles qui lui restoient. Ils prirent le parti
de le faire citer de nouv eau , ainsi que les sieurs Sou
teyran , devant le tribunal civil du P u y , le 28 messidor
an 6 , pour voir prononcer sur les conclusions déjà prises
ou à prendre , avec déclaration expresse faite au sieur
S a i n t - M a r c e l , que les sieur et dame Saint-Clément s’op
posent formellement à ce qu’aucune nouvelle vente soit
par lai consentie, et avec protestation de se pourvoir
par les voies dé droit contre toutes les ventes qui avoient
été faites par le passé, ou qui pourroient l’être à l’avenir.
L e sieur Souteyran père est décédé le 10 nivôse an 13 ;
le sieur de S ain t-M arcel , figé do quatre-vingt-dix-sept
fxns, est mort le 2 brumaire an 14.
L e lendem ain de son d é c è s, les scellés furent apposés
�sur ses meubles; il fut procédé à la rémotiou, et à l’in
ventaire du mobilier , le 6 du même m o is , et jours
suivans.
Cet inventaire prouve que le mobilier est réduit à un
état pitoyable ; que tout étoit à l’abandon , et dans un
état de dégradation absolue.
L a dame de Saint-Clément , sous l ’autorité de son
m ari, en sa qualité de donataire contractuelle de tous les
biens présens et à venir de la dame Françoise - Louise
Brunel-Saint-M arcel, sa m ère, mit un acte au greffe du
tribunal civil du Puy , par lequel elle déclare q u ’elle
s’en tenoit à la donation de biens présens faite à sa mère
par feu S a in t-M a rcel, son a ïe u l, dans son contrat de
mariage du 8 juin 1762 ; qu'elle renonce à tous biens
à v e n ir , et répudie la succession du sieur Saint-Marcel,
son aïeul.
Cette répudiation a été réitérée le 20 février 1806 ;
et le 2Ô mars suivant la dame de Saint-Clément et son
mari ont fait citer le sieur Souteyran, avocat, au bureau
do p a ix , pour se concilier sur la demande tendante à
la reprise et continuation de l’instance pendante entre
les parties, et à ce q u e , ayant égard à ce qui résulte des
actes y énoncés, et à la répudiation par elle faite des
biens à venir de son aieu l, pour s’en tenir à la donation
dotale faite à sa mère le 8 juin 1 7 6 2 , la vente du do
maine de Chaspuzac, cousentie par feu sieur Saint-Marcel
au sieur Souteyran , le 20 octobre 1 7 9 1 , soit déclarée
n u lle , comme faite a non d o m in o , pro non deb>to ,
par contravention formelle au contrat de mariage de la
dame de Boissieu, sa in è r e , et au mépris de l’acte d’op-
�( 16 )
position du 31 mars 1791 ; qu’en conséquence le sieur
Souteyran soit condamné à se désister du domaine de
Chaspuzae, à en restituer les jouissances ainsi que de
d ro it, etc. L e sieur Souteyran comparoît au bureau de
paix ; il s’étonne que la dame Saint-CLement veuille at
taquer la vente du domaine dont il s’agit ; il argue la
procédure de nullité ; il prétend que la dame SaintClément n’avoit rien à faire dans toutes ces demandes ;
qu’en vertu de l’art. i 54 g du Code Napoléon, le mari
seul avoit le droit de poursuivre les détenteurs des biens
dotaux de sa femme ; que celle-ci ne pouvoit figurer
au procès. Ce moyen étoit assez mal imaginé pour un
a vo cat, parce que le Code s’applique principalement à
l’administration, et que la présence de la femme ne
vicioit pas la p ro céd u re, dès que le mari étoit en qua
lité. Cependant le sieur de Saint-Clément, effrayé de cette
demande en nullité, peut-être parce qu’il plaidoit contre
un a v o c a t , a cru d e vo ir renouv el er la citation , inter
venir dans l’instance; ce qui a donné lieu à un nouveau
procès verbal du bureau de paix, où le sieur Souteyran
a répété ce qu’il avoit déjà dit. Il y a eu ensuite assi
gnation aux fins de la cédule; jugement qui donne acte
de l’intervention, et ordonne la reprise ; et enfin autre
jugement du 13 août 1806, qui a nommé pour cura
teur à la succession vacante du sieur Saint-M arcel, la
personne du sieur Belledent, avoué. Bientôt il s’est ouvert
une longue discussion sur les prétentions respectives des
parties.
Les sieur et dame Saint-Clément ont soutenu que la
vente du domaine de Chaspuzae, consentie au sieur
Souteyran,
�( 17 )
Souteyran, étoit nulle ; que l’aliénation avoit été faite
au préjudice des véritables propriétaires •, qu’elle avoit
eu lieu sans cause comme sans nécessité, en contraven
tion formelle aux clauses du contrat de m ariage, du 8
juin 1762; qu’elle avoit été l’effet du repentir, d’une
humeur injuste, de la haine, de l’intrigue et de la col
lusion.
L e sieur de Saint-Marcel avoit fait une donation uni
verselle en faveur de sa fille, sous la réserve de l’usu
fruit : s i , en attendant que cet usufruit f û t consolidé
à la propriété, les donateurs s’étoient reservé la faculté
de vendre certaine partie de leurs biens, ce ne pou voit
être que pour acquitter des dettes exigibles, après une
estimation préalable, et à la charge d’un emploi dont
il seroit justifié.
Il falloit suivre dans les ventes l’ordre établi par le
contrat.
L e domaine de Chaspuzac étoit le dernier objet qui
devoit être atteint : tout le reste d evoit être épuisé avant
à l’aliénation de cette propriété.
Cependant la vente est faite pour payer ¿\ la dame SaintJulien une somme qui ne concernoit pas le sieur de
q u ’on pût songer
Saint-Marcel : c’etoit la dame de Boissieu qui en étoit
tenue ; sa sœur ne pouvoit l’exiger qu’un an après le
décès du sieur Sain t-M arcel ; cette somme ne devoit
produire d’intérêt qu’à défaut de payement à l’époque
de l’exigibilité.
D ’un autre cô té, le surplus du prix de cette vente est
employé à payer une réserve qui, aux termes du contrat
de mariage, ne devoit être prise que sur les biens à venir.
C
�x<6 &
( «« )
Les ventes ne contenoient aucune délégation au profit
des créanciers ; la délégation étoit une des conditions
essentielles de la vente.
L es a c q u é r e u r s 'avoient donc interverti l’ordre prescrit
par le contrat de 1762. Us avoient acquis sans estima
tion , et à vil prix -, ils avoient reconnu le vice de leur
c o n tr at , puisque, par un acte postérieur, ils avoient
dérogé à toutes les clauses de la vente, et s’en étoient rap
portés à l ’estimation d’un tiers. Cette estimation , faite
sans form alité, erronée et partiale, auroit dû au moins
être contradictoire avec les donataires , et n’a été ap
prouvée entre les acquéreurs et le vendeur que par un
acte sous seing privé non fait double.
Les acquéreurs ont eu sous les yeux le contrat de ma
riage de 176 2; ils ont connu la nécessité et le mode de
l’emploi ; ils s’en sont écartés en connoissance de cause.
L e s acquéreurs ont su que le sieur de S a i n t - M a r c e l
avoit plus qu’absorbe, par ses aliénations, le montant
des dettes connues et énoncées dans l’ état joint au contrat
de 1762.
E n effet, suivant cet état, il étoit d û , i ° . au sieur de
Sain t-Julien , p ou r reste de la dot promise par son con
trat, la somme de douze m ille six cents fi\, nonobstant
la quittance insérée au mêm e a c te , ci. . . .
12600
2°. A Messieurs du chapitre de la cathé
drale du P u y , pnr billet du 28 décem bre
2000'
1 7 4 6 , deux m ille francs, c i ..........................
30. A u x dames religieuses de V a is , par
14600 fr.
�S Z q )
— '
14600 fr.
( i9 )
C i-co n tre....................
contrat du 1 0 .avril 1737., pareille somme
de deux mille francs , c i ................................
4 0. A u sieur Farense, prêtre, de Cliarantus, par contrat du 14 octobre 1733, deux
mille francs, c i ....................... ..........................
2000
2000
5 °. A u même sieur Saint-Julien, la somme ;[
de vingt-cinq, mille fr. énoncée payable a u x !
termes portés par son contrat de m ar ia g e,, ci.
6°. A u sieur de St.-M arcel, prêtre, frère
du donateur, . par billet sous, seing .p riv é ,
du 24 janvier. 1 7 3 8 , pour ses droits successifs paternels et maternels, la somme de
six mille francs, c i ...........................................
T
otal
..................................
.
25 ooo
•;
.
6000
49600 fr.
T e l est l’état annexé au contrat. A u bas sont ajoutés
ces mots :
« Nous soussignés , certifions que l’état ci-dessus est
« celui dont il a été fait mention dans le contrat de
« mariage de cejourd’l n i i , auquel nous offrons respec
te tivement de nous conformer.. Fait d o u b le , ce 8 juin
« 1762. » Suivent les signatures.
11 est dém ontré, d’après cet acte fait double, que les
donateurs ne pouvoient vendre aux conditions exprimées
au contrat, que jusqu’à concurrence i° . de la somme de
n e u f mille francs, payable au. sieur Boissieu dans un an,
9000 fr.
ci.................................................................................
a0. A u sieur Saint-Julien,, douze m ille_____ _
9000 fr.
G 3
�( 20 )
D e Vautre p a r t . . . .
9000 fi'.
six cents francs, c i ..................................................12600
3 0. Que le sieur S a i n t - J u l i e n n’a pu
exiger qu’une somme de dix mille francs
sur les 26000 francs promis l’annee d’après
la mort de la dame Saint-Marcel ; c’est-àdii’e, le 16 juin 178 5, attendu que la dame
Saint-Marcel est décédée le 16 juin 178 4 ,
ci.............................................................................
4 0. A u x chapitre et religieuses, quatre
10000
m ille fra n cs, c i ....................................................... "
4 000
5 °. A u sieur Farense, ou au sieur SaintM a rcel, prêtres, huit mille francs, ci. : ... ■ 8000
6°. Enfin, si l’on veu t, pour remplir la
réserve de 12000 francs que s’étoit faite les
donateurs, la somme de neuf mille francs,
ci.............................................................................
9000
On ne trouvera que la somme de cinquante-deux mille six cents francs, c i . . . .
52600 fr.
Jusqu’à concurrence de laquelle les donateurs avoient
la faculté de vendre, à la charge de l’estimation et de
l’emploi.
On a restreint ci - dessus la réserve de la somme de
12000 francs, à celle de 9000 francs; et il faut expliquer
la cause de cette réduction.
On n’a pas oublié que cette réserve de 12000 francs
ne devoit être prise que sur les biens à v e n ir , et subsidiairement seulement, sur les biens actuels, en cas de
besoin. O r , le 17 septembre 1 7 7 3 , lu dame Arcis a re-
�/£ /
( ÎI )
cueilli un legs de 3000 francs, de la part de la dame
P e y r e t, veuve C alm ard, par son testament mystique ,
du 5 février 1 7 7 3 , ce qui réduit bien évidemment la
réserve à 9000 francs ; de sorte que les donateurs ne
pouvoient donc rigoureusement aliéner que jusqu’à con
currence de 62600 francs.
Q u’on compare maintenant l’état des ventes qui ont
été faites depuis 176 2 , par les sieur et dame de SaintM arcel, conjointement ou séparément, et antérieurement
à la vente du domaine de Chaspuzac, on voit par l’état
des ventes, signifié le %fé v r ie r 179 2 , état infidèle dont
on a relevé les omissions avec exactitude,
i° . Une vente par la dame Saint-Marcel,
d’ un champ compris dans la donation , au
prix de sept cents francs, en faveur de Jean
Arnaud, le 27 juin, 176 2 , ci........................
700 fr.
20. A u tre vente de la même au m ême,
le 29 août 1762, au prix de cinq cent qua
rante francs, c i ...................................................
30. A u tre vente sous seing privé, par la
dite dame, en faveur de M . Raymont, prêtre,
le 16 octobre 1762, au prix de huit mille
francs, c i ..............................................................
N ota. Plus , une somme de deux cent
cinquante fr. pour épingles, ainsi qu’il est
prouvé au procès, ci........................................
540
8000
25 o
4». Antre vente de deux prés, par la dame
Saint-Marcel, en faveur de Marie Enjolras,
9490 fr.
�( 22 )
D e Vautre p a r t . . . . ...........
veuve Gallien, le 7 décembre 1762, au prix
de deux mille francs ( P i c h o t , notaire ) ,
................................................................................
5°. A u tre vente par la meme, à Claude
Bernard , le 25 avril 1763 , au prix de
six cents francs, c i ...........................................
6°. Vente par M . Saint-Marcel, au sieur
949 ° &’•
2000
600
B ru n ei, le 5 septembre 1 7 6 3 , au prix de
six cents francs, c i ...........................................
7°. A u tre vente par le sieur Saint-Marcel,
à un sieur V in cent, le 4 novembre 1763 ,
au prix de trois mille deux cents francs, ci.
8°. A u tre vente par M . Saint-Marcel, à
Jean V ianis, de plusieurs fonds à Farreiv o le s , le 11 décembre 1762 (V a le tte , no
taire ) ,
600
3200
au p r i x de q u a t r e - v i n g t - d i x - n e u f
francs, c i ..............................................................
90; A u tr e ,’ parde même au m êm e, d’un
cliezal, le i 5 mars 1763 (m êm e notaire ) ,
au prix de neuf francs, ci.............................
io °. A u tre , par le même au même, d’une
maison et grange à Farreivoles (même no— •
ta i r e ) , au prix de cent francs, c i ................
i l 0. A u tre vente par M . de Saint-Marcel,
à V idal Masson j ' i e 6 avril 1 7 6 4 , pour
seize cents fr a n c s , c i . ..........................................
12°. A u t r e ve n te par le m êm e, à J.-P îerro
99
9
• 100
i
6 oq-
17698 fr.
�( *3 ) r
C i-con tre.....................
B u r r e l, le 28 août 1 7 6 4 , avec cession de
toute plus-value, au prix de trois cents fr., •
ci.............................................................................
13 0. ^A u tre vente à Jean-Pierre Sicard,
le 11 mars 1765, pour trois cents francs, ci.
140. A u tre vente parle même, à Matthieu
R o u x , le 30 janvier 1 7 7 0 , pour six cent
cinquante francs, c i.........................................
1 5°. A u tre vente par les sieur et dame
SaintrMarcel, au sieur B ru n ei, le 21 avril
1765, pour sept cent cinquante francs, ci. .
160. A u tr e , par le sieur Saint-M arcel, A
Pierre R o c h e , le 10 décembre 1766, pour
trois cent quatre-vingt-quatorze francs, ci.
1 7 0. A u tr e , par le m ême, à Hyacinthe et
17698 fr
300
300
65 o
750
394
Marie R o u d il, le 7 mars 1 7 6 7 , pour quatre
cent quatre-vingts francs, c i ......... ................
180. A u t r e , par le sieur Saint-Marcel,. au
sieur B r u n e i , le 18 mars 176 7, au p r ix de
sept cents francs, c i ............................................
190. A u tre vente p rivée, par le m êm e,
480
700
le 23 mars 1768, a Jean-Pierre Pages, pour
quatorze cents francs, ci.................................
1400
20°. A u tre , à A n dré R o u x , du 13 novem
bre 1769, avec cession de plus-value, pour
cinq cent cinquante francs, ci............. .........
55o
2.1°. A u tr e , en faveur de la dame veuve
23222 fr
�u n s <
( 24 )
D e Vautre p a r t . . . ..............
B o u lh io l, le 23 décembre 1 7 7 °? au prix
de trois mille huit cents francs, c i ................
22°. A u t r e , à Matthieu A l y r o l , le 21
janvier 1 7 7 2 , pour quatre cent cinquante
francs, avec cession de plus-value, ci.........
230. Autre, au sieur Flori, du 30 septembre
1771 , au prix de trois mille francs, ci. . .
240. A u t r e , au profit du sieur SaintM arcel, curé d e l’Hôtel-Dieu, le 4 décembre
177 2 , pour sept mille huit cents francs, ci.
25 °. A u tr e , au sieur Chaumel, le 21 mars
1 7 7 3 , pour neuf cent cinquante francs, ci.
26°. A u t r e , à Louis B le u , le i er. dé
cembre 1 7 7 6 , pour quatre-vingt-seize f r . ,
ci.............................................................................
27°. A u t r e - v e n t e privée, au sieur F l o r i ,
23222 fr.
3800
..
4^0
3000
7800
950
96
le i or. décembre 1 7 8 1 , po ur quatoi’ze cents
francs, c i ..............................................................
28°. A utre, du 8 novembre 1782, au prix
de cinq mille six cents francs, c i ..................
29°. A u tre , du 19 avril 1786, pour quatre
cents francs , c i ..................................................
30°. Expédition du jardin de Vienne, par
le sieur Saint-Marcel, au sieur de Boissieu,
son gendre, le 28 mai 17 8 8 , pour trois
mille cinq cents francs, c i ..............................
31°. Délaissement de fonds par le sieur
1400
56 oo 400
3^00
5o2 i8 fr.
�( 25)
C i-co n tre.......................
5 o a i 8 fr.
St.-Marcel, en faveur du syndic de l’hôpital
du P u y , le 6 novembre 1782, au prix de
trois cents fr., avec promesse que les pauvres
assisteront à son d écès, ainsi qu’est d’ usnge
d’y assister lors du décès d’un bienfaiteur,
C1.............................................................................
3 2°- A u tre délaissement de fonds, par le
môme , en faveur du directeur de l’HôtelD ie u , le 9 février 1783, au prix de quatorze
cents francs, c i ..................................................
T
otal
...............................
300
1400
5 1 9 1 8 fr.
Qu’on ajoute les 3000 f r . , montant du legs fait à la
dame Saint-M arcel, le 5 février 1 7 7 3 , et recueilli le 1 7 3 ^
décembre suivant, l ’on verra qu’il y avoit entre les mains
u u d z.
~
du sieur de Saint-Marcel, -£^918 fr. pour faire face aux 'ir o h x i— £ ^ ,
dettes exigibles de son vivant^
OÜ%Par quel inconcevable caprice le sieur Saint-Marcel
a-t-il donc vendu le domaine de Chaspuzac ? L e sieur
Souteyran, sous le nom du sieur Saint-M arcel, voulut
justifier cette vente, en donnant un état des prétendus
payemens faits par le sieur S a in t-M a rce l, et qu’il fait
porter à la somme de 76619 fr. ; de sorte que même en
ajoutant le prix de la vente de Chaspuzac, le sieur SaintMarcel se trouveroit encore en avance.
Mais de quel droit le sieur Saint-Marcel se seroit-il
permis de payer des prétendues dettes non comprises en
l’état fait double entre son gendre et lui ? d’un autre côté,
com m ent ces payemens sont-ils justifiés? la plupart par
D
�*
(» 6 )
des quittance? SQUS seing p r i v é , qui n’annoncent que des
dettes fictives ou des dettes postérieures au contrat ; par
des remboursemens de capitaux aliénés ù titre de rentes
constituées avec toutes l'etenues ; dettes qui ne pouvoient
exiger l’aliénation des immeubles. Ce seroit de la part
du sieur de Saint-Marcel la plus mauvaise administra
tion, s’il eût été propriétaire : c’est un mandataire infi
dèle , qui a excédé ou abusé de son mandat, dès qu’il
n’avoit qu’ un titre précaire.
D e v o it- il encore aliéner des immeubles pour rem
bourser à la dame Saint-Julien , sa fille , un capital qui
ne produisoit aucun in té rê t, qui n’étoit exigible qu’un
an après son décès, qui par conséquent n’étoit pas sa
dette personnelle? C ’est à sa fille de Boissieu qu’il devoit
laisser ce soin ; c’est elle seule qui étoit chargée de ce
remboursement.
L e sieur de Saint-Marcel étoit d’autant moins excusable,
qu’indépendiunment des sommes provenues des ventes
multipliées qu’il a faites, il avoit encore tous les effets,
meubles et bijoux de la dame A r c i s , son épouse, qui
avoit joui de ses biens a ven tifs considérables, puisqu’elle
avoit recueilli la succession de la dame Bossolade, sa
m è re , et de deux oncles. L e sieur de S a in t-M a rc e l ne
s’étoit-il pas réservé encore ses contrats, les arrérages
des renies, des baux de ferme, toutes ses dettes actives?
N ’étoit-il pas plus naturel d’utiliser ces objets , de les
vendre, et en employer le prix à l’acquittement des dettes?
Toutes ces circonstances établissoient que la vente du
domaine de Clinspuzac avoil été faite sans nécessité comme
sans caïue; qu’elle ctoit Je fruit de l ’intrigue, de la pré-
�( 27 )
vention et de l’artifice ; qu’elle avoit été consentie pav
une personne incapable ; que dès-lors elle devoit êtrê
déclarée nulle.
Les sieur et dame Saint-Clément donnoient une nou
velle force à ces moyens, en argumentant de la vilité du
prix de cette vente. Cette vilité est démontrée par les
baux de ferme. O n voit en effet que ce domaine étoit
affermé sous la réserve«du bâtiment du m aître, de tous
les bois p in s , de toutes les plantations qui sont autour
des propriétés, et du verger qui environne lés bâtimens,
mo37ennant 5oo francs argent, vingt-deux setiers seigle,
de seize cartons le setier; quatre setiers o rg e , même
mesure; huit cartons de pois blancs, cinquante livres
beurre, et cinquante livres de fromage, quatre paires de
chapons, dix-huit livres chanvre, deux charges de raves,
d’une charge pommes de terre, le tout portable au P u y ;
dix journés de b œ u fs, la moitié de la tonte des a rb re s,
tous les plançons à planter par le ferm ier, le chauffage
ù la v ill e et î\ la campagne.
Si on ajoute qu’à l’époque de la vente la dîine étoit
su pprim ée, on verra qu’un domaine qui rapporte plus
de 2000 francs de revenus n’a été vendu, le 21 octobre
1 7 9 1 , que 21100 fr. assignats, n’a été estimé, le 14 mai
1 7 9 2 , qu’ une somme de 21427 fr. assignats, q u i, d’après
l’ échelle du temps, donne la somme de 14784 liv. 12 sous
en numéraire.
D ’après ces détails, ilsembloit que la’ nullité de là vente
ne pouvoit faire la matière d’ un doute : cependant la
cause portée à l’audience du tribunal du P i i y , le 12
mai 1807 ? Ie3 sieur et dame S a i n t - C l é m e n t ont sucD 2
�( *8 )
combe. Il est indispensable de connoître les motifs et
le dispositif de ce jugement. Les premiers juges posent
trois questions.
i° . L e sieur de Saint-Marcel a-t-il été autorisé, en exé
cution des clauses insérées au contrat de mariage des sieur
et dame de Boissieu, à vendre le domaine de Chaspuzac?
2,0. L ’opposition faite de la part des mariés de Boissieu
et Saint-Marcel peut-elle être considérée comme un moyen
suffisant pour opérer l’annullation de la vente?
3°. Cette vente peut-elle être considérée comme faite
à vil p r i x , en ce qu’elle n’a pas été précédée d’ une
estimation contradictoire avec les parties intéressées; et,
sous ce l’app ort, doit-elle être déclarée n u lle ?
« Attendu qu’il résulte des clauses insérées au contrat
« de mariage du sieur Salvaing de Boissieu , et de dame'
a Marie-Françoise-Louise de Saint-Marcel, qu’il fut con« venu entre les parties contractantes , que le sieur do
« S ai n t - M ar c e l et son é p o u s é , donateurs , aïeuls des de« mandeurs , auroient la faculté de vendre les domaines,
« champs et vignes spécifiés au contrat de m ariage,
« parmi lesquels se trouve compris le domaine de Clias« puzac , vendu au sieur Souteyran ,
o i°. P o u r le piyeinent de la somme de 9000 francs,
« restée due au s:eur de Boissieu, pour la constitution
« de dot de son épouse; 20. pour la somme de 12600 fr.
« du premier payement de la dot de la dame Saint« J u lie n , outre ceux qui écherront à l’avenir; 30. pour
« les autres dettes passives des donateurs; 40. pour lu
« réserve de 12000 francs faite par les donateurs, à
a la chnrge que les ventes seroient faites ù leur juste
�( 29 )
cc valeur et sur le pied de l’estimation ; à la charge encore
« d’en rapporter un légitime emploi., de conformité à
«l’état connu des parties;
« Attendu qu’il est indifférent que le domaine de
« Chaspuzac ait été rappelé le dernier des objets à
c< vendre, puisqu’on n’a voit pas obligé les donateurs à ne
« l’aliéner qu’après avoir épuisé les autres héritages rap« pelés en ordre antérieurement ; qu’il étoit par consé« quent libre h ces derniers de vendre le domaine conten
te tieux avant les autres objets dont l’aliénation étoit
« autorisée ;
« Attendu qu’il résulte de la combinaison des clauses
« insérées au contrat de mariage, avec l’état connu des
« parties dont il y est fait m en tion, que les donateurs
« pouvoient aliéner des biens dépendans de leur patri« m o in e, jusqu’à concurrence, i°. d’une somme de
« 49600 fr. ; 20. de celle de 9000 francs, pour reste de la
» « dot de la dame de Boissieu; 30. de celle de 1200 fr.
« p o u r la réserve stipulée par les donateui*s; 4 0. enfin
« p o u r la somme de 4000 francs additionnée à PefFet
« connu des parties, a in si que les demandeurs en
« conviennent ,*
.« Que ces diverses sommes s’élèvent à celle de 74600 fr.
« Attendu que d’après les états produits des ventes,
« le prix total d’icelles ne s’élevoit pas, lors de la vente
v. de Chaspuzac, à beaucoup près, à la susdite somme
« de 74600 francs; que dès-lors , on exécution du contrat
«
«
«
«
de m ariage, les donateurs ou l’un deux étoient autorisés ;\ vendre le domaine contentieux , pour parvenir
an payement des dettes dont étoient grevés les biens par
eux donnés ; qu’en supposant qu’après les dettes payées,
�«
a
«
Ô° )
il se fût trouvé de l’excédant, la vente du domaine
n’en seroit pas moins valable, puisque les vendeurs
n’auroient été obligés que d’en faire un e m p lo i, ou
de placer cet excédant en mains sûres, du consentement des donataires ;
« Attendu qu’on ne peut pas soutenir raisonnablement
que les sieur et dame Sain t-M arcel ne fussent autorisés à anticiper les termes de la dot de la dame de
Saint-Julien , puisqu’il résulte tant du contrat de mariage que de l ’état y m en tio n n é, qu’il étoit libre aux
donateurs de vendre jusqu’à concurrence de 25 ooo fr.
qu’ils restoient devoir pour cet o b jet, et qu’on ne
les avoit restreints par aucune clause prohibitive dans
ce même contrat, à attendre l’échéance de tous les
termes de la constitution de dot ;
« Attendu q u’il seroit également injuste de prétendre
qu’il devoit se faire une compensation du pr oduit des
ventes des biens de la dame de Saint-M arcel, faites
par son mari antérieurement au contrat de mariage
a
cc
«
«
des sieur et dame de Boissieu, avec la réserve stipulée au contrat d’une somme de 12000 francs puisqu’il
résulte de l’esprit et de la lettre de ce dernier contrat
que les donateurs avoient entendu n’etre pas recherchés
cf
«
«
oc
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
a à raison desdites ventes par les donataires.
« En ce qui touche l’opposition faite par les mariés
« de Boissieu et Saint-Marcel, envers lu vente du domaine
« de Chnspuzac ;
« Attendu q u ’étant établi q u e le sieur de S a in t-M a rc e l
a étoit suffisam m ent autorisé à v e n d r e le d o m a in e c o n -
« t e n t i e u x , et q u ’à l ’é p o q u e de la v e n te les dettes d é « cla ré es tant dans le co n tra t d e m a ria g e q u e dans l ’état
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( 31 )
y énoncé, n’étant pas entièrement payées, on doit nécessairement convenir que l’opposition dont il s’agit
ne devoit pas arrêter la vente du dom aine, et qu’ainsi
cette opposition ne sauroit être un motif suffisant pour
constituer l’acquéreur en mauvaise f o i , et opérer la
nullité de la vente.
« E n ce qui touche le moyen de nullité proposé sur
la vilité du prix de la ven te, et du défaut de l’estimation préalable faite contradictoirement de l’objet
dont il s’agit;
« Attendu qu’en supposant qu’il y eût de l’irrégularite quant au défaut d’estimation, et que la vente eût
été faite à vil p rix, ces deux circonstances ne sauroient
en faire prononcer la nullité; que les demandeurs ne
pourroient tout au plus qu’être reçus à faire procéder
à une nouvelle estimation , eu égard à la valeur de
« l’objet vendu à l’époque du contrat de v e n t e , pour
« en réclamer l’excédant, si toutefois il étoit établi qu’il
« n’a pas été vend u h sa juste valeur.
« D ’après ces motifs , le t r i b u n a l , faisant droit nux
« conclusions prises par M e. Souteyran, sans avoir égard
« à celles prises par les demandeurs, non plus qu’à l’op« position faite par les sieur et dame de Boissieu, à la
« vente du domaine de Chaspuzac, les a démis de leur
« demande en nullité de la vente par fin de uon-valoir;
« ce faisant, a maintenu M<-\ Souteyran dans la propriété
« et jouissance du susdit domaine; demeurant néanmoins
« réservé aux sieur et dame de Saint-Clément de faire
« procéder, si bon leur semble, à leurs frais avancés,
« à l’estimation du susdit domaine, eu égard î\ sa valeur
�( 32 )
« à l’époq ue du contrat de v e n t e , et ce par experts c o n « venus ou pris d’office : les condamne en tous les dépens
« tant envers le sieur Souteyran q u ’envers le curateur à
« l ’hoirie vacante. »
Cette rédaction n’est pas un effort de g é n i e ; elle est
un tissu d ’erreurs et d’absurdités. L e s sieur et dame de
S a i n t - C l é m e n t n’ont pas hésité à en interjeter appel. Ils
v o n t démont rer que ce j ugement a tout à la fois consacré
l’injustice, et violé les principes les plus connus.
C ’est dans le contrat du 8 juin 1762 qu’ il faut chercher
la solution des questions à juger. Les premiers juges disent
qu’ils en ont combiné les clauses , qu’ils ont apprécié
Tespi'it et la lettre de ce contrat, et que le résultat est
tout en faveur du sieur Souteyran. Il s’agit donc d’analiser
cet acte, qui ne laisse point de louche dans son interpré
tation.
Il contient d’abord une donation entre-vifs, irrévocable
et dotale , au profit de la dame de Boissieu , de tous les
biens meubles et immeubles, présens et à v en ir, des sieur
et dame $aint-M arcel, donateurs.
Cette donation emporte dessaisissement actuel de tous
les biens présen s, puisqu’elle est accompagnée de la tra
dition la plus ordinaire, la réserve de Vusufruit au profit
des donateurs.
A la vérité , elle est tout à la fois de biens présens
et à v e n ir, ce qui nécessite la survie du donataire pour
en calculer les effets, mais n’emporte pas moins la tra
dition de tous les biens présens ; puisque le donataire,
comme on le sait, a le droit d’abdiquer à la mort du
donateur les biens à v e n ir , pour s’en tenir aux biens
présens,
Au
�( 33 )
A u moyen de cette abdication, le donataire a le droit
de conserver la propriété de tous les biens qui existaient
lors de la donation, sans autre charge que de payer les
dettes antérieures à cette même donation.
Tels sont les principes certains en cette matière, con
sacrés par l’ordonnance de 1731.
Les sieur et dame de Saint-Clém ent, par représen
tation de la dame de Boissieu , leur m ère, ont déclaré ,
au moment de l’ouverture de la succession du sieur SaintM a rc e l, qu’ils abdiquoient les biens à v e n ir , pour s’en
tenir aux biens présens : les voilà donc irrévocablement
propriétaires de tous les biens qui existoient le 8 juin 1762.
Il est vrai que lors de ce contrat de mariage les dona
teurs se sont réservé, nonobstant la donation, la faculté
de vendre certains biens qui en faisoient partie.
Mais cette faculté exorbitante est subordonnée à des
conditions et à des causes disertement exp rim ées, et dont
il étoit impossible de s’écarter : dicta lex est contraclui.
Dans un contrat de mariage , tout est à l’avantage des
é p o u x ; tout doit être largement et libéralement inter
prété pour eux : le père lui-même est présumé s’être
conduit avec des intentions libérales pour l’avantage de
ses enfans ; et tout ce qu’il a fait ou voulu faire est
toujours censé en leur faveur.
Les conditions apposées à la vente 11e sont pas des
conditions potestatiçes, elles sont irritantes. On ne peut
séparer la faculté de la condition; l’une ne peut subsister
sans l’autre. Tels sont encore les principes généraux.
O r , peut-on dire que la faculté de vendre, réservée
dans le contrat de mariage de la dame de Boissieu, soit
E
�( 34 )
une faculté absolue et illimitée ? N ’est-il pas évident,
au contraire , qu’elle est restreinte à un objet prévu ,
passé ou présent, c’e s t - à - d i r e , le payement des dettes
contractées antérieurement à la donation, et qui existoient
alors ? Dans ce cas, l’événement ou la cause étant déter
miné , la condition en est inséparable ; elle anéantit ou
fait subsister la faculté , sans qu’elle puisse être étendue
d’un cas à un autre. Conditio in prœteritum non tantum
in prœsens tempus rela ta , statim aut peremit obligatio n em , aut om nino non diJJ'ert. L . 100, ff. IDe verb.
obligat.
Eu effet, les sieur et dame de Saint-Marcel ne se ré
servent la faculté de vendre que pour certains objets :
i° . pour le payement de la somme de 9000 francs , qui
faisoit le complément de l’avancement d’hoirie de la
dame de Boissieu ; 20. pour la somme de 12600 fr. due
à la dame de Saint-Julien, et pour acquitter les autres
dettes passives des donateurs.
Si le montant de ces dettes passives n’est pas exprimé
au contrat, c’est parce qu’il est dit et répété que cet état
est connu des parties. On voit en effet que le même
jour cet état a été donné au sieur de Boissieu, et que
les père et mère ont certifié qu’ il étoit le même que celui
dont il a été fait mention dans le contrat de mariage,
et auquel on s'oblige de se conform er.
Si les père et mère, en se réservant la faculté de vendre
p o u r acquitter le premier terme de la dot de la dame
Saint-Julien , ont ajouté ces mots
: Outre ret/x qui écher
ront (i fa ^ e n tr , ils n’ont pu nécessairement entendre
que le prem ier terme qui devoit é choir un an après la
�( 35 )
mort du premier d’eutr’e u x , c’cst-à-dire, 10000 francs :
il est impossible qu’ils aient eu en vue celui qui ne devoit
être payé qu’après le décès du survivant. Cependant on
v o it, dans l’état annexé a u ’contrat, qu’ils y ont compris
ces deux termes; e t, malgré cette cumulation, l’état des
dettes ne se porte qu’à 49600 francs.
Ce seroit donc donner une grande latitude à la faculté
reservée, que d’autoriser les ventes jusqu’à concurrence
de 49600 francs, en les employant à l’acquittement de
ces dettes connues.
Mais encore à quelle condition devoient être faites ces
ventes ? Suivant le co n trat, on ne pouvoit les faire
qu’avec délégation aux créanciers; et la plupart des ventes
ne contiennent aucune délégation.
Les sieur et dame de Saint-Marcel ne pouvoient vendre
les immeubles qu’à leur juste valeur, et sur le pied de
l’estimation : partout il y a vilité de p r ix , et jamais on
11’a pris la précaution de faire estimer.
L e s donateurs devoient rajîporler un légitime e m p l o i ,
de conformité ¿1 l’état connu des parties, et aucun acqué
reur n’a veillé à cet emploi,
La première somme qui devoit être acquittée étoit
celle de 9000 francs, servant à compléter l’avancement
d’hoirie de 20000 francs, constitué à la dame de Boissieu ; et le sieur de Boissieu n’a jamais reçu cette somme;
il n’a touché sur celle de 20000 francs r constituée en
avancement d’h o ir ie , qu’ une somme de 12000 francs ,
en payemens morcelés, o u , comme il le d it, et comme
le père en convient dans ses lettres, à parties brisées.
Dans le contrat ou désigne par ordre les immeubles
E 2
�qui doivent être vendus. L e domaine de Chaspuzac est
le dernier qui peut l’être : il faut épuiser tous les autres
avant d’en venir à celui-ci ; et cependant il a été vendu,
tandis que les autres, notamment Orzillac, , un des pre
miers désignés, est encore existant dans la succession.
Les premiers juges, à la vérité, sont peu touchés de
cette circonstance. Peu im porte, disent-ils , que C hasp uza c soit le premier ou le dernier-, il auroit fallu une
prohibition expresse d’aliéner celui-là avant les autres;
et comme il n’existe pas de clause de ce g e n re , le sieur
de Saint-Marcel a pu faire comme il lui a plu.
C ’est étrangement raisonner. H n’y a rien d’inutile dans
un contrat de mariage. N ’est-il pas raisonnable de penser
que lorsque les donateurs se sont réservé la faculté de
v e n d r e , ils ont dû d’abord penser aux objets les moins
importans et les moins précieux? E t ils ont bien claire
ment stipulé que le domaine de C h a s p u z a c ne pourroit
être v en d u que le dernier , par ces expressions limita
tives, et finalem ent : ce qui veut dire, en bon français,
qu’une chose doit être faite avant l’autre; c’e s t-à -d ir e ,
que les pi’emicrs immeubles désignés doivent être épuisés
avant d’en venir au dernier.
E n un m o t, les père et mère donateurs n’avoient plus
sur les biens donnés qu’un titre précaire : s’ils en conservoient l’administration par leur réserve d’usufruit, ils
ne pou voient plus en disposer à titre gratuit.
S’ ils sc sont réservé la faculté de vendre une portion
de ces biens don n és, ils se sont imposé des conditions
dont ils n’ont pu s’écarter. Ils ne pouvoient aggraver la
condition des donataires, sans manquer à la foi promise.
�,
,
J $ T
( 37 )
U
Ils sont devenus de simples mandataires, les procureurs
constitués de leur iille, et ont dû se renfermer dans leur
mandat. Personne n’ignore que le mandataire qui a ex
cédé ses pouvoirs, ne peut engager le mandant : la loi 10,
au cod. D e p ro cu r, en a une disposition expresse.
Quelle étoit la charge des mandataires ? Ils devoient
vendre pour cause légitime ; ils devoient déléguer le prix
des ventes aux créanciers connus ; ils devoient faire un
emploi des deniers ; ils devoient vendre les immeubles
à leur juste valeur, et sur le prix de l’estimation. Toutes
les ventes sont faites sans délégation, sans em ploi, sans
estimation ; donc toutes les ventes sont nulles.
Celle consentie au sieur Souteyran a des circonstances
particulières auxquelles l’acquéreur ne peut échapper.
Il a connu le vice de sou acquisition ; il a été averti de
l ’incapacité du vendeur; il a acheté sciemment u n p ro cès;
comment p o u r r o it-il donc résister à l j demande en
nullité ?
11 faut se rappeler que les sieur et dame de Boissieu avoient été prévenus des manœuvres pratiquées auprès
du sieur de Saint-Marcel par le sieur Souteyran p è re ,
pour se faire vendre le domaine de Chaspuzac.
Les sieur et dame de Boissieu, pour l’é v ite r , firent
notifier une opposition au sieur Souteyran, le 31 mars
1 7 9 1 , et lui donnèrent copie du contrat de mariage, du
8 juin 1762 , qui étoit le pacte (le famille.
Par cette notification, les sieur et dame de Boissieu
apprenoient au sieur Souteyran que le sieur Saint-Marcel
étoit dans l’incapacité d’aliéner ; qu’il avoit épuisé la
�quotité permise ou réservée, et que désormais toute vente
par lui consentie seroit absolument nulle.
La première idée que devoit faire naître cette décla
ration, surtout à un homme d’aflaires, étoit d’abandonner
tout projet d’acquisition.
En effet, c’étoit acquérir un procès; c’étoit entrer en
litige sur le fo n d du d ro it, puisqu’on contestoit la capa
cité du vendeur.
A u m oins, si on ne vouloit pas acheter de procès,
devoit-on, avant tout, faire statuer sur l’opposition qui
avoit été formée par le sieur de Boissieu : les tribunaux
en auroient apprécié le mérite. C ’étoit un procès de fa
m ille, une discussion qui nécessitoit l’examen des droits
du sieur de S ain t-M arcel, de l’état des ventes par lui
faites, des dettes par lui payées; en un m o t, des affaires
les plus secrètes de l’intérieur de cette famille, dans les
quelles le sieur Souteyran ne devoit pas pénétrei*.
Mais c e l u i - c i croit p o uv o ir tout braver. U n procu
reur qui a de l’empire sur son clie n t, le détermine à lui
vendre, pour avoir le droit de plaider le surlendemain,
et d’ entamer un procès qui dure depuis cette vente. Aussi
voit-on le plaisir qu’avoit le sieur Saint-Marcel d’avoir
si bien choisi son acquéreur. Par une première lettre
du 27 octobre 1791 j lu père écrit à sa fille qu’ il a dé
pouillée deux jours auparavant , q u 'il lu i se ra J b rt aisé
de f a i r e valoir cette vente.
Plusieurs lettres ensuite, des 5 , 9 , 19 , et jours suivans
du mois de novem bre, portent « qu’il a fait cette vente
« pour se libérer envers sa fille d’ une somme de 12000 f . ,
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( 39 )
quoique non payable qu après l u i , qu’il a bien voulu
gratuitem ent lui payer, parce q i i i l lu i a plu a in si ;
que sa fille et son gendre se souviennent qu’ils auront
affaire à un hom m e de loi entendu, q u i saura bien
donner au contrat de vente toute l’authenticité et
valeur qu’il mérite.
Dans une autre il écrit que « les sieur et dame de
Boissieu auront affaire à un homme de loi q u i les
mènera dur • que de son côté il a tant de moyens
de faire repentir M. de Boissieu de tout ce qu’il a osé
e n t r e p r e n d r e , qu’il en sera toujours la dupe., et en
payera la façon. »
L e sieur Souteyran donne bientôt cette satisfaction à
son vendeur, puisque le surlendemain il assigne le sieur
de Saint-Marcel pour faire valoir la v e n te , donne son
gendre pour avoué au sieur de Saint-Marcel, et fait mettre
en cause les sieur et dame Boissieu.
Mais cet homme de l o i , qui devoit si bien savoir son
m é t i e r , qui d e vo it donner à cette vente une s i grajide
a u th e n tic ité et v a le u r , qui avoit sous les y e u x le contrat
de mariage de 1 7 6 2 , s’aperçoit cependant qu’il ne s’est
pas conformé aux clauses du contrat, et que la vente est
nulle.
Il croit réparer sa faute en dérogeant à cettc vente
par un acte postérieur, et en faisant estimer pour la forme
le domaine qu’il venoit d’acquérir. Mais s’il savoit si
bien son m étier, comment ri’a-t-il pas vu que cette esti
mation devoit être contradictoire avec les sieur et dume
B o i s s i e u ; qu’elle ne pouvoit être faite amiablemeut, sans
form alité, et par un seul expert. O u ne voit là que ma-
�( 40 }
ladresse , embarras d’un homme incertain , comme on
l ’est toujours quand on achète un procès ; et le sieur
Souteyran a évidemment trompé le sieur de Saint-Marcel
dans son attente.
Cet homme de loi si instruit croit justifier d’un emploi,
en payant à la dame de Saint-Julien une somme qui ne
lui étoit pas due ; en faisant porter le surplus du p rix
sur une réserve qui ne devoit être prise que sur les
biens à venir ,* et il étoit échu des biens depuis la do
nation, notamment le legs de 3000 fr. de la dame veuve
Calmar/
Cet homme de lo i ne s’est pas dissimulé le vice de
son acquisition, puisqu’il a essayé de le réparer : il
s’est jugé luï-même; comment donc pourroit-il échapper
à la nullité ?
Il étoit homme de loi ; le sieur de Saint-Marcol étoit
son client ; il a acquis un procès : il y avoit contestation
sur le f o n d du droit, puisqu’ on altaquoit la capacité
du vendeur. La chose étoit donc litigieuse, d’après l’art.
1700 du Code N ap oléon , qui ne fait, en ce p o in t,
que rappeler les anciens principes. L e sieur Souleyran
n’a donc pu acquérir ; sa vente est réprouvée par les
lois anciennes et nouvelles. Les lois V e r diversas mettent
au dernier rang de la société ceux qui achètent des procès;
l ’article '54 de l’ordonnance de i 56 o défend à tous juges,
avocats, procureurs, d’en acquérir. Cette prohibition est
renouvelée par l’article 1697 du Code Napoléon. Et
ce n’est point ici le cas d’une subrogation ; c’est un vice
radical, qui entraîne la nullité de la vente : il y a incapa
cité absolue de la part de l’acquéreur.
fl,
Le
�41
L e sieur Soutcyran ne justifiera jamais cette acquisition.
Quels sont en effet les moyens qu’if a proposés pour
sa défense ? On les trouve répétés dans fes motifs du
jugem ent, qui fes a adoptés dans feur entier.
Il prétend, i ° . que les père et m ère, lors du contrat
de mariage de 1762 , stipufèrent la faculté de vendre et
aliéner les immeubles y désignés, parmi lesquels on trouve
le domaine de C haspuzac ,* il en tire la conséquence
que la propriété de cet immeuble ne quitta jamais le
donateur; et si le sieur de S a in t-M a rce l avoit ju s in
re , pourquoi le sieur Souteyran père n’auroit-il pas
acquis?
L e sieur Souteyran , en proposant ce moyen , 11e s’aper
çoit pas qu’il commet une erreur évidente. La donation
portée au contrat de mariage de 1762 est universelle; les
donateurs ne se réservent que l’usufruit, ce qui est une
tradition feinte qui emporte le dessaisissement de la pro
priété : et si les donateurs conservent la faculté d’aliéner
certains immeubles, ce n’est que comme mandataires de
leur fille , et en remplissant toutes les conditions q u ’ils
se sont imposées.
L e sieur Souteyran rit de l’opposition qui a précédé
la vente ; il trouve plaisant que les appelans aient la
prétention de penser qu’avant d’acquérir le domaine de
Chaspuzac il auroit fallu faire statuer sur l’opposition :
le sieur Souteyran ne trouve aucune loi qui l’y ait obligé.
Il semble cependant que la loi se trou voit dans le contrat
même qu’il avoit sous les yeu x; qu’ un donataire universel
a le droit de s’opposer ¿\ ce qu’on vende les objets qui
fout partie de la donation. L e contrat fait la loi dos parties :
F
�(
4 0
.
dicta lex est contractui. S’il restoit des dettes à acquitter,
le sieur de Boissieu n’avoit-il pas le droit d’arrêter les
ventes, en offrant de payer les dettes ? Son opposition
avoit pour objet de prouver qu’il n’existoit pas de dettes,
et que la faculté de vendre, réservée par le contrat, étoit
absorbée.
L e sieur Souteyran répond à cet argument, en disant
que M . de Boissieu s’appeloit Monsieur court d'argent;
qu’il avoit été obligé de stipuler dans son contrat la
permission honteuse d’aliéner des immeubles de son
épouse ; que lui Souteyran avoit prêté 3000 francs au
sieur de Boissieu, en 178 5 , et avoit été obligé de lui
envoyer les huissiers.
Ce n’est là qu’ une grossièreté qui ne répond ni au
point de fa it, ni au point de droit. Tous les jours on
voit dans les contrats de semblables permissions d’aliéner,
sans qu’on ait jamais regardé des clauses de ce genre
c omme honteuses. Elles sont plutôt des clauses de con
venance , pour faciliter des rCviremens de fortune , et
annoncent au contraire une grande confiance dans la
solvabilité du m ari.
L e sieur Souteyran veut prouver la légitimité de cette
vente, par l’état des ventes précédentes, et des payemens
qui ont été faits par le sieur de Saint-Marcel. Mais 011
a vu au contraire, par ces états, que le sieur de SaintMarcel avoit abusé de la permission , et excédé son
mandat, p u i s q u ’ il avoit vendu au-delà des sommes portées
en l'état donné au sieur de Boissieu, le jour du mariage;
état qui se réfère au contrat , et ne fait qu’un seul et
même acte.
�( 43 )
L e sieur Souteyran approuve le sieur de Saint-Marcel
cl’avoir anticipé le payement de la dame de Saint-Julien,
comme d’avoir pris les 12000 francs de s& réserve. L e
contrat lui en donnoit le droit; et s’il avoit pris un terme
avec la dame de Saint-Julien , c’étoit un avantage qui
lui étoit personnel ; il étoit le maître d’en user sans que
la dame de Boissieu pût s’en plaindre. Mais comment
accorder cette proposition avec ce qui est exprimé dans
l’état, que la somme de z 5ooo francs due à la dame de
Saint-Julien , est payable a u x termes portés p ar son
contrat de mariage. Telle est la loi de9 parties. Il ne
pouvait y avoir qu’uiï seul terme exigible, c’étoit celui
payable un an après le décès du premier mourant. Ce
terme étoit écliu depuis le 16 juin 1786; il étoit payé
depuis le mois de novembre 1784, ainsi que la quittancé
en fait foi : le payement du surplus, fait à la dame de
Saint-Julien , n’a donc pas été une cause légitime de
vente , ni un légitime em ploi?
I>a réserve ne de voit être prise que sur les biens à
venir, et il en étoit écliu de cette nature : 011 ne pouvoit
donc vendre pour cet o b jet, sans avoir épuisé les pr e
miers. D ’un autre côté, le sieur de Saint-Marcel avoit
déjà employé sur cette réserve, partie du prix du jardin
de V ie n n e , qu’il avoit délaissé à son gendre : il l’avoit
ainsi exigé. Comment donc a-t-il pu vendre ainsi pour cet
objet ? En vain le sieur Souteyran diroit-il que le sieur
Saint-Marcel s’étoit réservé là faculté de disposer de cette
somme, tant à la vie qu’à la mort : en vain accuseroit-il
les appelans d’avoir tronqué cette clause du contrat,
quoiqu’ils aient fait imprimer le contrat eu entier. Une
�■?'
C 44 3
disposition gratuite ne s’entend ordinairement que pour
avoir effet après la mort. Auroit-elle dû avoir effet pendant
la v i e ,; q u e le sieur de Saint-Marcel devoit, dans tous
les cas, épuiser les biens à venir échus avant la dona
tion ; et c’est ce qu’il n’a pas fait.
L e sieur Souteyran prétend que les appelans usent dô
la chicane la plus ra jin ée, en soutenant que le domaine
de Chaspuzac ne pouvoit être vendu que le dernier. L ’or
dre énoncé au contrat lui paroît la chose la plus indif
férente. L e sieur de Saint-Marcel a bien fait de garder
O rzilla c, qui est plus avantageusement situé que Chas
p u za c : d’ailleurs C haspuzac a été vendu à son p r i x , et
le sieur Souteyran consentiroit même à une nouvelle esti
mation. Il se fait ensuite des complimens sur sa proposi
tion honnête et lo y a le , et termine par se répandre en
injures contre les sieur et dame de Boissieu, qui ont fait
m ourir leur père insolvable. Comme il faut être consé
q u e n t , il vante ensuite la fortune q u ’il leur n laissée, en
faisant avec emphase rénumération des immeubles qui
leur restent. ; .
Cette diatribe ne vaut pas la peine d’une réponse. O n
croit d’ailleurs avoir p r o u v é , par ce qui précède, qu’en
effet le domaine de C haspuzac étoit le dernier en ordre,
et ne pouvoit être vendu qu’après que les auti’es auroient
été épuisés.’
Q u ’ importe que ce domaine de C haspuzac fût un patri
moine du sieur Saint-Marcel, dès qu’il l’avoit déjà d on n é,
ou qu’il ne pouvoit vendre qu’à des conditions qu’il n’a
pas remplies? Si la dame Saint-Clément a déjà échoué
dans une demande eu nullité de vente d’uu bien dotal do
�( 45 )
la dame Saint-Marcel, le sieur Souteyran ne peut in vo
quer ce préjugé, puisqu’il y a appel en la cour de ce juge
ment qui choque ouvertement les principes, et qu’il y sera
nécessairement réformé.
O n ne doit pas passer sous silence l’énonciation qui se
trouve dans un des motifs du jugement. Il y est dit qu’il
avoit été additionné à l’état connu des parties une somme
de 4000 francs, et que les demandeurs en conviennent.
C ’est une fausse énonciation, qui ne peut être que le
fruit de l’erreur ou de la surprise. V o i là l’inconvénient
de laisser rédiger les jugemens par les parties intéressées.
Il n’y a aucune trace de cet aveu dans toute la procé
dure. Ce seroit d’ailleurs contre toute vérité, parce qu’il
n’y eut jamais d’addition à l’état annexé au contrat, et
remis au sieur de Boissieu. C ’est une allégation controuvée
du sieur Souteyran, et qui doit être effacée du jugement.
En résumant : les circonstances, les motifs de considé
ration , ainsi que les moyens de d r o it, tout se réunit en
faveur des sieur et dame de Saint-Clément. Ils réclament
le patrimoine de leur mère : ils n’en ont été privés que
par caprice ; et la cupidité des acquéreurs ne doit pas leur
profiter.
Signé S A U Z E T D E S A I N T - C L É M E N T .
*
M e. P A G E S ( de R iom ) , ancien avocat,
M e. G A R R O N je u n e , avoué.
A R I O M , de l’imprimerie de T
h Iibau d - L a n d r i o t
de la Cour d'appel. — Avril 1808.
, imprimeur
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Salvaing de Boissieu, Marie-Ursule. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Garron
Subject
The topic of the resource
abus de faiblesse
successions
ventes
donations
assignats
créances
inventaires
dot
contrats de mariage
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Marie-Ursule Salvaing de Boissieu, et sieur Jean-Pierre Sauzet de Saint-Clément, son mari, appelans d'un jugement rendu au tribunal du Puy, le 9 mai 1807 ; contre Jean-André-Guillaume Souteyran, ancien avocat, intimé ; et encore contre le curateur à la succession vacante du sieur Pierre-Antoine Brunel de Saint-Marcel, aussi intimé.
Particularités : Notation manuscrite : 14 juillet 1808, 2éme section. Bien jugé
Table Godemel : Donation : 11. le père qui, par contrat de mariage de sa fille, 8 juin 1762, lui a fait donation de tous ses biens présents et à venir, sous la réserve expresse de vendre et aliéner les domaines par lui spécialement désignés, à leur juste valeur, et sur le prix de l’estimation, pour servir au paiement de ses dettes, des constitutions dotales de ses deux filles, et de la réserve qu’il s’était faite d’une somme de 12 000 francs pour en disposer à son plaisir et volonté, a-t-il pu user de la faculté de vendre les objets désignés, tant que ses obligations n’ont point été amorties ? sa fille peut-elle critiquer les dernières aliénations, en se prétendant donataire de tous les biens présents, et en soutenant que la faculté insérée dans son contrat de mariage est exorbitante et doit être interprétée en sa faveur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1822
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1821
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53349/BCU_Factums_G1822.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chaspuzac (43062)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
assignats
contrats de mariage
Créances
donations
dot
inventaires
Successions
ventes
-
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9703132916a291d3c967012d4e6350f3
PDF Text
Text
P R É C I S
POUR
Sieur J e a n G E R L E , avocat, et juge de paix
du canton de Sauxillanges, intimé ;
CONTRE
F r a n ç o is
r in e
et
GERLE} p rêtre, P i e r r e
M a r i e G E R L E , frè re s
,
i
C a th e
et s œ u r s ,
a p p e la n s .
U n e acquisition d’immeuble particulier, faite par un
père, en qualité de légitime administrateur d’ un de ses
enfans en bas âge, le prix payé des deniers du père ,
auquel des deux d o it-elle profiter? La translation de
propriété qui s’est opérée par l’effet de l’acte de vente,
n’a-t-elle pas résidé, ab initio, sur la tête de l’enfant,
au nom duquel l’acquisition a été faite? où l’objet ainsi
A
�acquis fa it-il partie des biens et de la succession du
père ?
L ’enfant doit-il être tenu de rapporter l’objet en na
ture, à -la succession de son père ? ou n’est-il tenu qu’au
rapport des deniers employés par le père au payement
du prix de cette acquisition, des frais et loyaux coûts,
et aux améliorations du fait de ce dernier?
Telle est la principale contestation sur neuf chefs de
demande, qui seront développés lors de la plaidoirie.
F A I T S.
En 17 5 9 , Pierre G erle, père commun des parties,
en qualité de légitime administrateur du sieur Gerle, in
timé, donna sa procui’ation pour acheter six journaux
d’un pré appelé la Périchonne, situé à Sauxillanges.
L ’acquisition fut faite par le fondé de pouvoir du sieur
Gerle père, en cette qualité, pour et au nom du sieur
Gerle fils.
, .
En 17 8 6 , le sieur Gerle fils contracta mariage. Son
père l’institua son héritier, et lé chargea de payer, à
chacun de ses autres enfans, une légitime déterminée.
A l’époque du contrat de mariage du sieur Gerle fils
(sa mère étoit décédée ab intestat'), Pierre Gerle, son
père, jouissoit alors des biens de ses enfans, provenans
du chef de leur m ère, en vertu de l’usufruit légal, effet
de la puissance paternelle alors en vigueur. Les parties
yivoient sous l’empire des lois des pays du droit écrit.
Après le mariagç du sieur G erle, intimé, son père a
également continué de jouir de ses biens, par suite du
�( 3 ) A
même usufruit, jusqu’au 19 août 18 0 4 , époque de son
décès.
A l’ouverture de la succession du sieur Gei’le p è re ,
le sieur Gerle aîné, son héritier contractuel, a réclamé
les six journaux de pré comme à lui appartenons, ayant
été acquis pour lui et en son nom par son père ; il a
offert de rapporter à la succession paternelle les deniers
fournis et avancés par son père, et employés au payement
du prix de cette acquisition , les frais et loyaux coûts
d’icelle, et le montant des améliorations du fait de ce
dernier, s’il en existe, qui aient rendu l’objet acquis de
plus grande valeur.
M O Y E N S .
C’est un principe généralement reconnu et avoué dans
le droit, qu’un père peut acquérir pour un de ses enfans;
et que l’objet acquis par le père, comme administrateur
légitime d’un d’eux, appartient irrévocablement à l’enfant
sous le nom duquel l’acquisition est faite, exclusivement
au père. G est cc qui nous est enseigné par tous les ju
risconsultes qui ont écrit sur cette matière.
Ils ont assimilé le cas de l’acquisition faite par le pèrft,
agissant en qualité d’administrateur ou de curateur d’un
de ses enfans, au cas d’un retrait lignager exercé par
l’ascendant, agissant en la même qualité, sous le nom
d’ un d’eux. Ils enseignent que les effets' et lfeà consé
quences sont les mômes dans l’un comme dans l’autré5
cas, et décident que de même' que le pèrëyou un deg
ascendans , ne peut disposer de l-héritage ainsi retrait^
A 2
�iJrt
\
( 4 ) _
de même il ne peut aliéner l’héritage par lui acquis sous
le nom d’un de ses enfans.
Gri maudet, en ses œuvres, liv. 2 , ch. 12 , agite d’abord
la question de savoir si un père peut valablement retraire'
sous le nom d’un de ses enfans , n’ayant aucun bien ,,
l’objet par lui vendu : après avoir décidé pour l’affir
mative, il ajoute que lors du partage des biens du père,,
l ’objet acquis appartient et reste à l’enfant comme propre;,
qu’ il en est l’incommutable propriétaire; et que, quoique
le père ait payé le prix de ses deniers, il ne sauroit pré
tendre à la propriété de la chose ainsi acquise. Voici
comment s’exprime Grimaudet :
« La conséquence suit de ce que l’enfant de fa mi lie y
« ou son père, comme curateur, peut retirer ce qui a
« été vendu par son père; lequel.acquêt demeure propre
v à l’enfant, et le père, après, ne le pourra retenir, par la
« raison commune que ce qui est acquis de mes deniers
« n’est pas fait mien, mais à celui qui a fait l’acquisition.>3
. Cet auteur fonde son opinion sur la loi S i ex câ
pecujiiâ, au cod. de re venditâ,* et les raisons qu’il en
.donne sont, ainsi qu’il les rapporte, fondées sur l’autorité
de Godefroy. Quia empium pecuniâ alicu ju s, ejus
non f i t , sed ejus cujus nomine emplio facta est ,• et
quando pater d o n a tjilio , velut pecu niam in retractur
ilia donatio non reddit ad cornmodum p a tris.
L e même auteur ajoute ensuite :
« Entre les enfans ès lieux où les père et mère ne
« peuvent pas avantager les uns plus que les autres, celui
« sous le nom duquel l’acquêt est fait, doit rapporter
a les deniers de V acquêt avec l e s f r a i s , si mieux il n’aime:
�( 5 )
ef-la chose retirée, demeurer en l’hérédité, pour les de« niers en être partagés; et pour Cacquêt être fa it p a r
« le p è re , comme curateur de son e n fa n t, il ne fa u t
« dire qu'il fasse sa condition meilleure que Vun de
« ses autres ci {fans : car il ne lui donne rien de son
« b ien , et tout ce qui part du père ( qui sont les dé
fi 7iiej's') , il fa u t que Yenfant les rapporte; le nom du
cc curateur ne doit f a ir e que la chose appartienne au
« père et aux autres enfans,
« Ce que nous disons que le père ne peut avantager
« l’un de ses enfans plus que l’autre, se doit entendre,
« comme nous disons en droit, que l’homme et femme
« ne se peuvent faire don l’un à l’autre, dont l’un soit
« plus pauvre, et l’autre enrichi : o r, au cas présent,
« par Yacquêt le père ri est appauvri ; car il ne perd
« rien du sien, et débourse seulement des deniers pour
« lesquels il se peut pourvoir; et quant à la cq u êt, le
« fils ne lef a i t de son père, mais de Yétranger", partant
« les autres enfans ne peuvent prétendre part audit
« acquêt, ou dire que p a r icelui le père ait avantagé
a leur fr è r e . »
.
Brodeau, sur l’article 139 de la coutume de Paris, qui
étoit une coutume qui astreignoit à une parfaite égalité,
a consacré les mêmes principes que Grimaudet ; il en
seigne que « les autres enfans, après le décès du père,
a ne peuvent rien prétendre à l’héritage retiré ou acquis
« par le père, sous le nom de l’un d’e u x; que le fils
« n’est tenu qu’au remboursement des deniers avancés
« par le père; que dès-lors nihü abest à fa r m liâ r et
«■ qu’on ne peut pas dire que la gratification et le choix
M
�.
( 6 }
« que le père a J'a it de la personne d’un de ses eiifans
« soit un avantage indirect et réprouvé. »
Lebrun, en son Traité des successions, liv. 3 , chap. 6,
sect. 3 , traite la question de l’acquisition faite par un
père au nom d’un de ses enfans, et celle du retrait exercé
par le père sous le nom de l’un d’e u x; et dans l’un
comme dans l’autre cas, il enseigne et décide que le fils ne
doit rapporter que le prix de l’acquisition ou du retrait,
et non l’héritage acquis ou retrait.
A u nombre i 5 , il dit :
« S i le.père a acheté au nom de son J l l s , l e p r i x
« DE L’ ACQUISITION EST SUJET A RAPPORT. »
A u nombre 16 , il ajoute:
« • Il en est de même quand un père a exercé et exé« cuté un retrait lignager au nom de son fils; car le
« fils rapporte le prix du retrait à la succession de son
a. p ère, e t n o n l ’ h é r i t a g e m ê m e , q u i n ’ a j a m a i s
a APPARTENU AU p è r e , et qui ne l’auroit pu prétendre
« en la succession de son fils, ni comme acquêt, ni à
« titre de réversion; en sorte que, quoique le retrait
« lignager soit très-avantageux, c’est un cas où le père
a peut avantager son fils d’un projit qu i nest point
a sujetià rapport. » I l J'a u t dire de même dans le cas
du nombre précédent, et « si l e p è r e a f a i t p o u r
SON F I L S U N A C H A T A V A N T A G E U X . »
Bourjon, en:sonTraité du droit commun de la France,;
chap. 7 , sect. iFe; , intitulée : Du rapport de ce que le
père achète pour son fils, pag. 729, s’ëxprime ainsi.
A u nombre 1er., il d it:
cvTout avantage d’ascendans à descendans fonde le rap-
�( 7 )
'
' ' &
« port. Si les pore et mère ont exercé un retrait lignager
« sous le nom de leur fils, il doit les deniers employés
« pour l’exécution d’un tel retrait , mais Vhéritage
« retiré lui appartient. »
A u nombre 2 , il ajoute:
« D e m êm e, s ils ont acheté et payé pour lu i an
« immeuble, ce q u i résulte évidemment de la proposi« tion précédente. »
A u nombre 3, le même auteur ajoute encore:
« D ans Tun et Vautre cas, c’est-à-dire, du retrait ¡et
« de rachat d'un immeuble de la part d’un père pour
« son fils y ce dernier ne doit pas le rapport de la
« CHOSE, qui ne vient pas de la substance du père j
« mais LE r a p p o r t DES DENIERS PAYÉS p a r Vascen« dant à ce sujet. Mais il ne doit plus les deniers en aban*
« donnant la chose , s’il se trouvoit lésé par le retrait
« ou l’acquisition, et qu’il eût été restitué contre l’eifet
« d’iceux. »
Enfin, au nombre 4 , Bourjon s’exprime-ainsi :
« Soit dans le cas du retrait exercé paï le père pour
« son fils, soit dans le cas de Vacquisition fa it e p a r le
« père sous le nom du m êm ejils, c e s s o r t e s d ’ a c t e s
« SONT DES ACTES DE COMMERCE ET NON DE LIBÉ« R ALITÉ. »
'
Ferrière, sur l’article 3 0 4 'de la coutume de Paris,
glose 2 ,n °. 1e1'., torn. 3 , enseigne une semblable doctrine.
« Ce qui est acqu is, dit-il, par le père, de ses denier&}
« au nom de son fils, est sujet à rapport, suivant le
« sentiment de Gharondas, ce qui est sans doute*, et en
« . ce cas, C’ EST LA SOMME QUI ESTçSUJETTE A^APPOUÏ*,
**
�ET NON L'HERITAGE ACQUIS , D’ AUTANT Q ü’ iL N’ A
« JAMAIS ÉTÉ DANS LES BIENS DU I>Èl\E. »
Boucheul, ou son Traiié des conventions de succéder,
chap. 6 , n°. 2 i et suivant, pag. 66 et suivantes, Irai le,
ex professa, lu même question, que la cour a à juger.
Après avoir fait rémunération des coutumes, telles que
celles de Normandie, Bretagne et Touraine, dont les
dispositions sont contraires aux principes généraux,
Boucheul ajoute.aussitôt;
« Mais l’on renterme ces coutumes dans leur détroit;
« et où la coutume n’en parle pas, la jurisprudence y
« est certaine que l’héritage ainsi retiré et acquis parle
« p è re , sous le nom d’un de ses enfans , q u o i q u e
« M INEUR, EN BAS A G E , ET MEME SANS AUCUN BIEN,
« A P PA RTIEN T,
NON AU
PERE
QUI A FOURNI LES
, mais à Venfant sous le nom duquel
r l ’ a c q u ê t o u le retrait sont faits. »
Cet auteur a fondé son opinion sur les dispositions
de la loi 8 , au çod. S i quis alteri vel sib i emerit.
A u nombre 26 , Boucheul ajoute :
. « Quand le père ou la mère a c q u i è r e n t un héri« tage sous le nom de l’un de leurs enfans, ce rtest pas
« DENIERS
« UN
AVANTAGE QUE CETTE
PRÉDILECTION Q u’iLS
« ONT POUR L U I , et en remboursant le p r ix , l ’ i i é r i « t a g e e s t a u E iL S, san s qu?il soit besoin à?en fa ire
« rapport à ses cohéritiers, parce que c’est un bien
« qui ne vient pas jde s u b s t a n t i a p a t r i s »
Denizart, au mot Rapport, n°. 4 ^ d.it :
« S i le père achète , au nom de son J i l s , ou exerce
* un retrait lignager, LE p r i x d e l ’ a c q u i s i t i o n o u du
« retrait
.
�« retrait est sujet à rapport ;
m a is
non
pas
l ’h é -
en
« sorte qu e, supposé que Vachat ou Je retrait soit
« avantageux au J ï l s , LE PROFIT QUE FA IT l e f i l s
« R IT A G E , QUI N’ A JAMAIS APPARTENU AU PE R E ’,
« N’ EST PAS SUJET A RAPPORT. »
Pothier, en son Traité des successions, cliap. 4 , §.
page 18 0 , édit. in-40. , enseigne la même doctrine.
« Lorsqu'un père ( dit - il) a acheté, au nom et
« pour le compte de s o iijils , un héritage, et en a payé
« le p rix de ses deniers , c e n ’ e s t p a s l ’ h é r i t a g e
« QUI EST SUJET A R A P P O R T ; I L N’ A J A M A I S
« P A S S É D U P È R E A U F I L S , P U IS Q U ’IL N’A
« JA M A IS A P P A R T E N U AU P È R E , A Y A N T
« É T É A C H E T É A U NO M DU F I L S ; L E F I L S
« sera donc seulement tenu, en ce ca s, AU RAPPORT
« DU p r i x que le père a fo u r n i pour Vacquisition. »
On trouve la même décision dans le répertoire de
jurisprudence, par Guyot. Les articles que nous allons
rapporter sont d’un célèbre magistrat, vivant au temps
actuel, collaborateur de ce répertoire ( 1 ).
A u mot légitim e, tom. 10 , pag. 386 , on lit :
« L e PRIX d ’ u n e ACQUISITION que le père fait au
« nom de son fils, et qu’il paye de ses propres deniers,
« est, sans contredit, sujet k l’imputation : 011 a déjà
« vu que le parlement de Flandres l’a ainsi jugé, par
« arrêt du 14 février 1775. »
Mais il est essentiel de remarquer ici que c’cst du
p r ix , et non de l’héritage acquis , dont il est fait men(1) M. Merl... procureur général à la cour de cassation,
B
�tion , lorsqu’il s’agit de l’imputation de légitime. On va
voix* qu’il n’est également question que du p rix , et non
de l’héritage, lorsqu’il s’agit du rapport»
ün lit encore, dans le même répertoire de jurispru
dence de G uyot, page 4 1 3 , au mot rapport, nomb. 7 :
« Nous avons établi, à l’article légitime, qu’on doit
« imputer, dans la portion légitimaire, l e p r i x d e l ’ a c « QUISITION QUE LE PERE A FAITE DE SES PROPRES.
d e n ie r s
cc
veut que LE PRIX SOIT SUJET A RAPPORT. »
E n fin , à la même page il est ajouté :
« Nous ne parlons ici que d u r a p p o r t d u p r i x , .
parce qu’en effet il n\y a que LE pB.ix q u i y p a -
«
, AU NOM DE SON
; la même raison
«
k ROISSE SUJET ,
« FAITE
f il s
DANS LE CAS D’ UNE ACQUISITION
PAR LE PERE ,
AU NOM D’ UN DE SES EN—
« FANS , L’ HÉRITAGE MEME SEMBLE NE DEVOIR PAS« Y
ÊTRE
« PÈRE
SOUMIS : JAMAIS IL N’ A APPARTENU AU
IL N’ A POINT PASSÉ DU PÈRE AU FILS
« CONSÉQUEMMENT
« LE METTRE
LE FILS N’ EST
POINT
, et
TENU DE
DANS LA MASSE DES BIENS DU PÈRE
tf APRÈS SA MORT. »
Telle est la doctrine universellement enseignée par les
jurisconsultes qui ont écrit sur la question élevée au
jourd’hui dans la famille Gerle t tous ont decide que le
fils, au nom duquel lTacquisition ou un retrait sont faits
par lep èi'e, ou autre ascendant, est propriétaire seul et
incommutable de l’immeuble- acquis ou retrait ; que le
fils est seulement tenu au rapport des deniers déboursés
par le père, et non au rapport de l’héritage acquis,
sur lequel le père n’a jamais eu aucun droit de propriété-
�De ces principes, il résulte que les six journaux de
p r é , que le sieur Gerle père a acquis au nom de son
fils aîné, en 1769, ont appartenu à ce dernier , dès l’ins
tant même que la translation s’en est opérée par l’effet
de l’acte de vente qui a eu lieu ; il résulte enfin , et il
est démontré, que cette propriété a résidé sans cesse sur
la tête du sieur Gerle, intimé, à l’exclusion de son père,
et q u e , soit le sieur Gerle p ère, soit sa succession ou
ses héritiers, n’ont à réclamer que le p r ix , les frais et
loyaux coûts, et les améliorations du fait du p è re , s’il
en existe du fait du père.
Quoique le père ait fourni les deniers pour le paye
ment de cette acquisition , cette circonstance ne sauroit
donner aux enfans légitimaires du sieur G erle, aucun
droit de propriété sur le pré dont il s’agit. C’est ce qui
nous est enseigné par Godefroy, en ses notes sur la loi i re.
au cod. S i quis alteri vcl s ib i, sub alterius 11 aminé vel
alienâ pecunià em erit, tit. 5 o , liv. 4. Il décide que la
chose acquise n’appartient pas à celui qui en a payé le
prix de ses deniers, mais & celui au nom duquel la chose
est achetée.
R e s , dit-il, ejus esse imm videtur, non euju s pecunia,
sed cujus nomine empta est.
Et sur la loi 8 , du même tit., le même annotateur
.ajoute ; A lien â pecuniâ , quod com paralur , J i t comparantis , non ejus cujus fu it pecunia.
La circonstance de l’existence de l’institution contrac
tuelle faite en 1786 , en faveur de l ’intim é, de la part
de son père, ne sauroit changer son état, ni porter at
teinte à son droit exclusif de propriété sur le pré de ]La
B %
�Périchonne ; droit dont il a été irrévocablement investi
dès le 7 avril i'jôc), c’est-à-dire, dès le moment même
de la perfection de l’acte d’acquisition faite pour lui et en
son nom par son père.
En devenant l’unique propriétaire de ce pré, au même
instant il est devenu débiteur envers son père des deniers
par lui avancés et fournis pour parvenir à cette acqui
sition. O r, par cet état de chose, il est démontré que
jamais le père n’a pu être considéré comme propriétaire
du pré en question, et que cette propriété a nécessai
rement résidé dans la personne du fils.
L e père, en instituant son fils aîné héritier universel,
ne l’a institué que dans l’action qu’il avoit pour répéter
les deniers par lui déboursés, et non dans la propriété
du pré acquis pour son fils. Car, encore une fois, le père
n’en a jamais été ni pu devenir propriétaire, tant que
le fils n’a pas manifesté l’intention de renoncer à la
propriété de cet objet.
Ce seroit renouveller une absurdité qu’on a mise au
jou r, en cause principale, si les appelans prétendoient
que l’acquisition faite au nom du fils, par le père, est
un avantage indirect; que jointe à l’institution contrac
tuelle, le père auroit alors excédé la quotité disponible;
que leur légitime de rigueur seroit blessée; le pré dont
il s’agit ayant, depuis 17 5 9 , considérablement accru de
valeur.
Toutes ces idées systématiques se trouvent détruites
d’avance par les autorités ci-dessus rapportées. Grimaudet,
Brodeau, Lebrun et Bouclieul enseignent que la prédi
lection que donne un père à un de ses enfans, en achetant
�( 13 )
sous son nom un immeuble, n’est point un avantage
indirect fait à cet enfant. Bourjon, au n°. 4 déjà rap
porté, dit que ces sortes d’acquisitions sont des actes de
commerce et non de libéralité.
Il est impossible de concevoir que de telles acquisitions
présentent l’ombre la plus légère d’ un avantage indirect,
lorsque le fils rapporte les deniers fournis par le père;
par ce rapport, le fils réintègre dans la fortune du père
tout ce qui en est sorti : et tous les auteurs ci-dessus
cités enseignent que le fils n’est tenu qu’au jrapport de
ces mêmes deniers, qui ont constitué la substance sortie
de la fortune du père, et qu’il n’est point tenu au rapport
de l’immeuble acquis, lequel, ab in itio , a appartenu au
iils exclusivement au père : c’est ce rapport du prix
qui a fait dire à ces jurisconsultes que la prédilection ,
ou le choix d’un des eirfans, fa it p a r le p è r e , ji’étoit
point un avantage indirect.
L e p è re , en achetant pour son fils , n’a sorti de la
substance de ses biens et de sa fortune, que des deniers;
le iils ne doit remettre à la succession du père que les
memes objets qui en ont été distraits ; .c’est-à-dire , qu’il
ne doit remettre que des deniers. Cette vérité nous est
encore enseignée par Potliier, en son Traité des succes
sions, tome 6 , chap. 4 , § . 2 , page 17 7 , édition zrc-40,
Voici comme il s’exprime :
K Tous les actes d’un père ou d’une m ère, dont
« quelqu’ un de leurs enfans ressent quelqii avantage ,
« 72e sont pas des avantages indirects sujets à rapport,*
K il n’y a que ceux par lesquels les père et inère font
K passer quelque chose de leurs biens à quelqu’un de
�( 14 )
« leurs enfans, par une voie couverte et indirecte; c’est
« ce qui résulte de l’idée que renferme le terme rapport;
« car rapporter signifie remettre à la masse des biens du
« donateur, quelque chose q u i en est sorti. On ne peut
« pas y remettre , y rapporter ce qui n’en est pas sorti:
« donc il ne peut y avoir lieu au rapport,! que lorsqu’un
« père ou une mère ont fait sortir quelque chose de
« leurs biens, qu’ils ont fait passer à quelqu’un de leurs
« enfans. »
En faisant l’application de ce principe lumineux en
seigné par Potliier, il est donc clairement démontré que
les légitimaires Gerle ne sont fondés à réclamer que le
rapport des deniers employés par le père commun, à
payer l’acquisition faite pour son fils aîné , parce qu’il
n’est sorti du patrimoine du père que des deniers. Leur
système de rapport de l’objet acquis est une eri’eur : cet
objet n’a jamais fait partie des biens du p ère, puisque
tous le^wrc jurisconsultes décident qu’il appartient au fils
€t non au père. L e pré de la Périchonne n’a donc pas
pu sortir de la fortune du p ère, n’y étant jamais entré,
iC’est vouloir se révolter contre les principes du droit,
que de soutenir le rapport, en nature, du pré dont il
s’agit.:
1 .-La propriété du pré de la Périchonne ayant résidé
ab initio , c’e s t-à -d ire , dès le moment même de la
.confection ; de l’acte de vente par l’effet duquel la trans*
,lation de propriété a passé de la personne des vendeurs
.en celle du'siéur Gerle fils, acquéreur, il est ridicule de
prétendre que . les appelans aient jamais pu concevoir
l ’espoir d’un droit de légitime sur ce pré. On ne cessera
�( i5 )
»
l
.
.
de le répéter, ce pré n’a jampis fait partie du patrimoine
du sieur Gerle père ; il n’a eu sur cet objet qu’un droit
d’hypotlièque pour sûreté des deniers par lui avancés
pour son fils. L e sieur Gerle fils aîné, débiteur envers
la succession de son père de ces deniers , ne profitera
d’aucun de ceux que le père a sortis de son patrimoine,
en rapportant le prix »de l’acquisition dont il s’agit j les
frhis et 4oyat*x
d’icelle M et la valeur des amélio
rations du' fait de son p ère, s’il en existe. C’est sur ces
deniers , que n’a cessé d’offrir l’intimé dès 'le moment de
l’ouverture de la succession de son père, que doit frapper
en partie la légitime des appelons, et non sur le pré de
la Périchonne qui n’est jamais entré dans le patrimoine
du père, et n’en a jamais fait partie.
Par le rapport offert par l’intimé, la succession du
père ne reçoit aucune atteinte, et l’intimé lui-même ne
reçoit aucun avantage. Cette succession recouvre tout ce
qui a été distrait par le père, de la substance de sa for
tune et de ses biens.
** *
Lesappelans nesauroient être fondés à réclamer aucune
espèce de droit de légitime sur l’accroissement de valeur
qu’a pu acquérir le pré de la Périclionue, depuis iyô p ,
étant démontré qu’il n’a jamais fait partie des biens du
père commun. Cet accroissement de valeur n’a rien coûté
au père ; sa fortune n’en a souffert aucune espèce de
distraction; c’est une augmentation inopinée, qui est un
accessoire du p ré, produite par la chance des temps, et
indépendante du fait de l’homme. O r, dès qu’il est dé
montré que le père commun n’a jamais .eu tvn
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tant aucun droit de propriété sur cet héritage, c’est une
absurdité de prétendre que les appelans ont des droits
à ses accessoires.
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À R I OM; de l'imprimerie de T h ib a u d - L a n d r i o t , imprimeur
de la Cour d’appel. — Mai 1808.
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Gerle, Jean. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gerle
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
fils avantagé
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour sieur Jean Gerle, avocat et juge de paix du canton de Sauxillanges, intimé ; contre François Gerle, prêtre, Pierre, Catherine et Marie Gerle, frères et sœurs, appelans.
Particularités : notation manuscrite : » 28 mai 1808, 1ére section. Arrêt confirmatif du jugement qui avait attribué la propriété à l'usufruitier. »
Table Godemel : Mineur : 18. une acquisition d’immeuble particulier, faite par un père, en qualité de légitime administrateur d’un de ses enfants en bas âge, le prix payé des deniers du père, aux quels des deux doit-elle profiter ? la translation de propriété qui s’est opérée par l’effet de l’acte de vente, n’a-t-elle pas résidé ab initio sur la tête de l’enfant au nom duquel l’acquisition a été faite ? ou, l’objet ainsi acquis, fait-il partie des biens et de la succession du père ? l’enfant n’est-il tenu qu’au rapport du prix et des frais et loyaux coûts ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
1759-1808
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1706
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0549OCR
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53309/BCU_Factums_G1706.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Sauxillanges (63415)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
acquisitions
fils avantagé
Successions