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MEMOIRE
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P o u r dame G i l b e r t e D U C O U R T I A L , v eu ve
de Joseph M a i g n o l , tutrice de leurs enfans
mineurs ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
veu ve de Michel d e P a n n e v e r t ; dame M a r i e
M A I G N O L , et sieur A n t o i n e B O U Y O N ,
son mari ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
et le sieur P i e r r e L E G A Y , son é p o u x ,e t sieur
A n t o i n e M A I G N O L , tous intimés ;
C
ontre
G
sieur G
u illau m e
u illau m e
M A I G N O L , autre
M A I G N O L , son f i l s , appelans
d ’un jugement rendu au tribunal d 'arrondisse
ment de R i o m , le 18 flo réal an 1 3 ;
E
t encore en présence
L A U M E , maréchal
d ’A n t o i n e G U I L
habitant de la commune
de P o n t a um u r , aussi intimé.
L E sieur Guillaume M aignol fils demande le désiste
ment d’ un pré vendu par Pierre M a ig n o l de Landogne
A
�S 2),
à Antoine Guillaume : il a osé revenir contre des engagemens contractés par Guillaume M a ig n o l, son père ; il
veut être tout à la fois créancier et débiteur de lui-même •,
et c’est après vingt-cinq ans d’exécution, après que Pierre
M a ig n o l, et son fils, héritier institué, sont décédés , que
Guillaume M aign ol fils a cru trouver les circonstances
favorables, pour arracher à la famille M a ig n o l, de L a n d o g n e ,u n héritage dont leur père avoitpayé le prix.
Cette tentative qui blesse la délicatesse et les conve
nances, a été rejetée par le tribunal d’arrondissement; et
la cour s’empressera de confirmer un jugement conforme
en tous points aux lois et à l ’équité.
F A I T S .
L e i6 m a i i y
55 ,
un sieur M ichel L e n o b le , habitant
du lieu de V a u r y , concéda aux dames C hefdeville, à titre
de rente foncière et non rachetable, un pré appelé
P ré -G ra n d , de la contenue d’entour sept journaux, situé
dans les appartenances de Vaury.
Cette concession fut faite moyennant la rente annuelle
de 90 francs.
P a r une transaction du même jo u r, le sieur Lenoble
se reconnut débiteur d’une somme de 1800 francs envers
le sieur G u i l l a u m e M a i g n o l , du Cheval - B la n c, père
d’au Ire Guillaum e M a ig n o l, qui est aujourd’hui la partie
principale.
P o u r le payement de cette somme de 1800 francs,
L enoble délégua à M aign ol, du Cheval-Blanc, la rente
qui avoit été créée le même jour par les dames Chefdeville.
�lit
(3 )
M aign ol,d u Cheval-Blanc, a joui de cette rente jusqu’au
6 juin 1777 , qu’il se fit subroger par A n n et Chefdeville,
héritier des preneuses, en i j ô ô , à la propriété du pré
concédé , à la charge par lui d’acquitter la rente de 90 fr.
A u moyen de cet arrangement, M aign o l, du ChevalBlanc , dcvenoit tout à la fois créancier et débiteur de
la rente de 90 fr. ; de manière que cette x’ente s’éteignit
par la confusion.
O n sait que 1’efTet de la confusion est d’anéantir les
deux qualités incompatibles qui se trouvent réunies dans
une même personne -, ce qui est fondé sur ce qu’il est
impossible d’être à la fois créancier et débiteur de soimême.
L e pré dont il s’agit n’étoit point à la convenance du
sieur M aign ol, du Cheval-Blanc; il étoit peut-être plus
rapproché du sieur M a ig n o l, de Landogne; mais point
assez ù sa portée, pour qu’il désirât de l’acquérir.
M a ig n o l, du Cheval - B la n c , avoit d’autres vu es; il
convoitoit depuis long-temps un domaine qui joignoit
ses p ro p rié té s, et qui avoit été vendu par lin sieur
de Larfeuil au nommé Jean Gastier.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, savoit que M a ig n o l, de
L an do gn e, etoit créancier du sieur de L a rfe u il, d’ une
rente foncière au principal de 1400 francs, de plusieurs
années d’arrérages, et qu’ il avoit fait déclarer le domaine
vendu à Gastier, affecté et hypothéqué au payement de
sa créance.
M aign o l, du Cheval-Blanc, n’ignoroit pas que le paye
ment de cette créance étoit au-dessus des forces du ven
deur comme de l’acquéreur; et il lui sembloit facile de
A 2
tji
�•¿ïüt
( 4 )
devenir propriétaire du domaine, s’il étoit acquéreur de
la créance.
Il va solliciter Pierre M aign ol, de L a n d o gn e, de lui
céder l’effet de celte créance, offrant de lui donner en
échange ce P ré -G ra n d , dont le sieur M aign ol, de L an
dogne , n’avoit nullement besoin, qu’il n’a pas même
conservé.
M a i g n o l, de L a n d o g n e , par obligeance pour son
parent, accepta la proposition; mais il ne vouloit pas
payer de droits de lods : il falloit prendre une tournure
pour les éviter; et en conséquence, le même jour 2 oc
tobre 177 9 , il fut passé deux actes entre les parties, l’ un
par-devant n o ta ire , et l’autre sous seing privé. Comme
ces deux actes font la matière du procès, il est im por
tant de les analiser.
P a r le premier acte notarié, Pierre M a ig n o l, de L a n
dogne , cède et transporte à Guillaume M a ig n o l, du
C h eval-B lan c, un contrat de rente de la somme de 28 fr.
par a n , au principal de 1400 francs, faisant moitié de
2800 francs, consentie par dame Marie L a c o u r , veuve
de Henri de I^arfeuil, au profit de dame G aum et, grandtante du cédant, le 23 octobre 1720.
Il cède pareillement les arrérages de cette rente de
puis l’année 176 8, jusques et compris 1779.
Il cède encore l’eilct de la sentence qu’il avoit ob
tenue en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , le 14 août 1 7 ,
56
contre Jean Gastier, acquéreur de L arfeuil, d’un do
maine situé au Cheval-Blanc, et sur lequel il avoit exercé
une action en matière hypothécaire.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, est subrogé à l’exécution
�l(y$
(5 )
de cette sentence, et aux procès verbaux de nomina
tion d’experts, sans néanmoins aucune garantie, ni res
titution de deniers pour cet objet.
L e jjrix de cette cession est fixé ù la somme de 2000 f r . ,
pour payement de partie de laquelle M a ign o l, du ChevalB la n c, cède et transporte, avec toute promesse de ga
ra n tir, un contrat de rente de la somme de 90 f r . , au
principal de 1800 f r . , à lui due par les héritiers de Pierre
Lenoble , suivant le traité du 16 mai i j 55 ; laquelle
r e n te , est-il d it, est -payable p a r les jou issa n s du pré
appelé P r é - G r a n d , su r lequel elle est spécialem ent
qjfectée.
A u moyen de cette cession , M a i g n o l , du ChevalB lanc, demeure quitte de la somme de 1800 francs, en
déduction de celle de 2000 francs , prix' du transport
consenti par M a ig n o l, de Landogne.
A l’égard de la somme de 200 francs restante, Pierre
M a ign o l, de Landogne, reconnoît l’avoir reçue de G u il
laume M a ig n o l, du Cheval-Blanc, en délivrance de pro
messe de pareille so m m e, dont quittance.
A la suite de cet acte, M a ig n o l, du Cheval - B la n c ,
donne la déclaration suivante, écrite en entier de sa main:
« J e soussigné, subroge M e. Pierre M aign o l, bailli de
« Landogne, à Veffet de la vente du b a il em phytéotique
« du pré appelé P r é - G r a n d , que sieu r A n n e t C h ef«
«
«
«
«
devüh m ’ a consentie devant M a ig n o l, n o ta ir e , le 6
ju in 1777 , pour par lui jouir dudit pré ainsi qu’il
avisera bon être, moyennant la somme de 280 livres,
dont 200 livres demeurent compensées avec pareille
somme de 200 l i v . , comprise en la cessiou que ledit
iê )
�V*n
( 6 }
« sieur M aignol m ’a faite devant A lle y ra t, cejourd’h u i,
« d’un contrat de rente sur les sieurs de L a rfe u il, et les
« 80 livres restantes me seront déduites sur les arrê
te rages réservés par l’acte ci-dessus daté. Fait ce 2 oc« tobre 1779- »
P o u r entendre cette dernière clause, relativement à la
somme de 80 francs, il est bon d’observer que par l’acte
n o ta rié , et par une clause finale, Pierre M a i g n o l , de
L a n d o g n e, s’étoit réservé les arrérages dûs antérieure
ment à 1758 , dont il devoit être fait compte entre le
cédataire et le cédant, sans que M a ig n o l, de L an d ogn e,
pût exercer aucune action contre Larfeuil de Lncour;
« attendu, est-il d i t , que Guillaume M aign o l, du Clieval« B lan c, s’est obligé de rapporter quittance au sieur de
« Larfeuil de ces mômes arrérages de rente. »
Cette dernière énonciation démontre assez que M a i
g n o l, du C h eval-B lan c, avoit déjà pris des arrangemens
avec le sieur de L arfeu il, et que tout étoit d’accord pour
que Guillaum e M aignol devînt propriétaire du domaine
vendu à Gastier.
Q uoiqu’on ait voulu à dessein répandre de l’obscurité
dans ces conventions, l’intention des parties n’en est pas
moins clairement manifestée. Il est évident que M aign ol,
du C h eval-B lan c, a voulu transmettre la propriété du
pré dont il s’agît il M a ign o l, de Tjnndognc. Il ne pouvoit
pas vendre une rente qui n’existoit plus, qui s’étoit éteinte
par la confusion : il vouloit vendre le pré ; et l’acte sous
seing p r iv é , qui a suivi l’acte public, 11’étoit autre cliose
que la promesse de 200 francs énoncée dans la cession
du méinc jour; promesse qui développoit les intentions
�(7 )
des parties, mais qui n’a voit pas besoin d’être faite double,
puisqu’elle ne contenoit point d’engagemens synallagmatiques, qu’il n’y avoit d’obligation que de la part de
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c, attendu que le prix de la
vente étoit payé jusqu’à concurrence de 200 francs, au
m o yen de la cession consentie le même jour.
Aussi n’y a-t-il pas eu de difficulté entre les parties
pendant tout le temps q u ’a vécu Pierre M a i g n o l, ainsi
que Joseph M a i g n o l , son fils et son héritier. Tous deux
ont joui du pré vendu en 1779 : mais l’exploitation étoit
pénible p o u r e u x ; et Pierre M a ig n o l, de L an dogn e, se
détermina
à le v e n d re , par contrat du 29 ventôse an 6 ,
à A n toine Guillaum e, m aréchal, du lieu de Pontauniur,
L es M a ig n o l, du C h eva l-B la n c, ont souffert, sans se
plaindre, et les jouissances de M a i g n o l , et la vente qu’il
a consentie.
Ce n’est que six ans après, et le 29 vendémaire an 1 2 ,
que Guillaume M aignol iils , se disant donataire de son
p è r e , a fait assigner A ntoine G u illau m e, acquéreur de
M a i g n o l , de L a n d o g n e , en désistement du pré dont il
s’a git, avec restitution de jouissances.
A n toin e G uillaum e, ¿\ son to u r , a fait dénoncer cette
demande aux héritiers de son ven d eu r, et a pris contre
eux des conclusions en garantie et dommages-intérêts.
U n premier jugement du tribunal de R iom , en date
du 6 thermidor an 1 2 , a ordonné la mise en cause de
Guillaume M aignol père , à la requête des intimés; ceuxci ont pris contre M aignol père des conclusions en contre
recours, h ce qu’ il fût tenu de faire valoir la vente par
lui consentie i\ Pierre M aignol ; de Landogne.
�(8 )
U n second jugement, du 23 ventôse an 1 3 , a ordonne
la comparution des parties eu personne ; elles ont satisfait
à ce jugement, et .ont été interrogées le 6 floréal an 13.
L es interrogatoires respectifs sont transcrits clans le
m émoire de l’appelant, pages 10 et suivantes, aux notes.
Il résulte de l’interrogatoire de Maignnl père , du
C h eva l-B la n c, i°. que le même jo u r de Cavte n o ta rié,
du 2 octobre 1779 , il y a eu un acte sous seing privé
entre les mômes parties ; 2°. que cet acte sous seing privé
a été écrit en entier de la m ain de M a ig n ol p è r e , du
C h eva l-B la n c ; 30. que M aig n o l, de L andogne, a dicté
les conditions ; 40. qu’il n’y a pas eu d’autre double sous
5
seing privé que celui qui lui est représenté; °. que cet
acte a eu pour but de céder à Pierre M a i g n o l la jouis
sance du pré dont est question , jusqu’à de nouveaux
arrangernens entr’e u x ; 6°. que l’acte notarié ne lui délaissoit pas cette jouissance, q u’elle ne lui est délaissée que
par l'acte sous seing privé; 7 °. que le m otif d’éviter les droits
de lods n’est pas entré dans sa pensée ; 8°. qu’il n’a pas
été question de la propriété du p r é ; que ce 11’étoit ni
son intention, ni celle de M a ig n o l, de Landogne. Si
l ’acte ne fait aucune mention de la jouissance, il a écrit
sous la dictée de Pierre Maignol.
L e fils M a ig n o l, du Cheval-Blanc, n’étoit pas présent
à cet acte. Il en a eu connoissance bientôt après, et a osé
en témoigner son mécontentement ù son père : le fils
avoit alors seize ans.
M aignol père convient que M a ig n o l, de L a n d o g n e,
a bien pu avoir l’intention de se soustraire aux droits de
lods, de devenir propriétaire du p r é ; mais il n’a pas été
question de la propriété entr’eux,
�f<6
(9)
A u surplus M a ig n o l, du Clieval-Blanc , ne jouissoit
p i s de ce pré -lorsqu’il a fait une donation à son üls ; il
ne lui a pas donné nominativement le pré , mais il lui a
donné en général tous ses biens. Il a eu connoissance de
la vente consentie par M a ig n o l, d e L a n d o g n e , à An toin e
G uillaum e; il l’a sue quatre à cinq mois après, et ne s’en
est pas mis en peine : cependant il a voulu , après ceLte
vente , se procurer l’acle de vente de 1777 » ma,s comme
la minute se t r o u v o i t chez M a i g n o l , de L and ogne, il n’a
pu se la procurer d’abord : enlin il désavoue que le sieur
Z.egay ait écrit un autre double de l’acte sous seing privé.
Il est important de s’arrêter sur ce premier interro
gatoire. O n voit que quelque soin qu’ait mis M aignol
p è r e , du Cheval - Blanc , à s’envelopper d’une certaine
obscurité, et d’être très-réservé sur ses confidences, il n’en
est pas moins constant que l’acte sous seing privé est du
même jo u r que l’acte notarié ; qu’il est écrit en entier de
la main de M a ig n o l, du Cheval-Blanc ; que son iils a eu
connoissance de cet acte dans le même temps, lorsqu’il
n’avoit que seize ans; qu’ainsi la date de l’acte est cer
taine , et que Maignol lils en imposoit à la justice, lors
qu’il disoit qu’il n’avoit connu cet acte qu’après sa do
nation.
M aignol fils, dans son interrogatoire, prétend n’avoir
eu connoissance de cet acte que depuis q u ’il est à la tête
de la m aison. A v a n t , son père lui a voit parlé des arrangemens faits avec M a ig n o l, de Landogne , mais lui disoit
qu’il espéroit rentrer dans le pré ; il a la maladresse de
dire que son père avoit consulté trois jurisconsultes qu’il
nom m e, sur l’acte sous seing p r i v é , et on lui avoit dit
B
�( 1° )
que cet acte étoit nul pour n’avoir pas été fait double ;
mais s’ il a consulté sur cet a cte , il l ’avoit donc dans les
mains : il répond que n o n , mais il en savoit le contenu.
L e père, interpellé sur ce f a it, répond affirmativement
que sur ce qu’il avoit rapporté de cet acte, M e. A ndrau d
lui avoit assuré qu’il étoit nul.
M aign ol fils n’a vu dans aucun temps un écrit sous
seing privé entre les mains de son père; ce dernier lui
a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu de double ; son père
ne lui a pas donné nominativement le p r é , mais lui disoit
toujours qu’il avoit le droit de s’en mettre en possession,
et lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre qui
établissoit la propriété de ce pré , la minute de ce titre
étant entre les mains de Pierre M aignol.
Mais si son père prenoit un prétexte pour se dispenser
de lui donner ce p r é , M aignol fils ne.peut donc pas s’en
dire donataire, et seroit sans qualité pour en demander
le désistement : lorsqu’on est de mauvaise f o i , on n’est
pas toujoui’s conséquent.
Enfin M aignol fils a ouï dire que le sieur L e g n y ,
gendre de M a ig n o l, de L a n d o g n e , avoit été le scribe de
l ’acte notarié , et non du sous-seing privé.
L e sieur B o u y o n , l’un des gendres de Pierre M aign ol,
de Landogne , a déclaré qu’il n’avoit eu connoissance, et
n’avoit entendu parler de cet a c t e , que depuis l’afïaire
dont il s’agit.
L e sieur L e g a y , autre gendre, se trouvoit à Landogne;
le sieur M aignol l’appela dans son cabinet, où il étoit
avec M aignol p è r e , d u Cheval-Blanc; il l’invita à écrire
un double sous seing p r i v é , contenant subrogation do
�t 6 c]
( 11 )
— s
rente , et notamment contenant aussi cession d’ un pré de.
la part de M a ig n o l, du Cheval - B la n c , au profit de
M a ig n o l, de Landogne ; il ne se rappelle pas sur quel
papier il écrivoit ; il croit, sans pouvoir le certifier , que
M a ig n o l, du C h eval-B la n c, écrivoit avec l u i , et que
M a i g n o l , de L a n d o g n e , leur dictoit ; il n’a écrit qu’un
acte, ne se rappelle pas qui signa ; M aignol père n’écrivit *
p o i n t , c’étoit lui qui dictoit.
Après ces interi’o g a t o i r e s , il a été rendu, le 18 floréal,
an 1 3 , un j ugement qui déclare M aignol père et fils non
recevables dans la demande en désistement du pré dont
il s’a g i t , met les parties hors de cause sur les demandes
en recours et contre reco u rs, compense les dépens entre
A n toin e Guillaume et les M a ig n o l, de Landogne ; conr
damne les M a ig n o l, du Cheval-Blanc , en tous les dépen s,
même en ceux com pensés, et aux coût , expédition et
signification du jugement.
Les premiers juges remarquent avec sagacité que G u il
laume M aignol père ayant réuni dans sa main la rente,
et le pré qui y étoit asservi, cette confusion de la qualié
de débiteur et de créancier a opéré nécessairement l ’ex
tinction de la rente.
n,£1 11
Dcs-lors le contrat de 1779
P avoir pour objet
la cession d’une rente qui n’existoit plus , et ne peut se
référer qu’à la propriété du pré.
Les premiers juges ont aussi très-bien observé que
par l’acte sous seing privé , M a i g n o l, du Cheval-Blanc ,
subrogeoit Pierre M aignol à la vente qui lui avoit été
consentie le
juin 1777 , et que celte subrogation ne
pouvoit s’entendre que de la p r o p rié té , puisque l’acte
B 2
6
�( 12 )
de 1777 étoit exclusivement translatif de la propriété
du pré.
L e tribunal dont est appel , répondant à l’objection
résultante du défaut de mention que l’acte a été fait
double, décide que les M aign o l, du Cheval-Blanc, dans
les circonstances où se trouvent les parties, ne peuvent
exciper de cette omission ; car il résulte des interroga
toires de M aignol père et fils, qu’ils ont connu la pos
session publique de M aign o l, de Landogne, et après lui
d’Antoine Guillaum e, tiers détenteur. Ils ne se sont pas
mis en devoir de réclamer contre cette possession ; ils
n’ont pas également réclamé contre l’acte sous seing,
p rivé du 2 octobre 1779, quoique cet acte f û t présent
à leur esp rit, quoiqu’il soit du f a it personnel de Maignol
p è re , qui l’avoit écrit en entier.
L e tribunal en tire la juste conséquence que l’exécu
tion donnée à cet acte sous seing p r i v é , du 2 octobre
17 7 9 , forme une fin de non-recevoir contre Guillaume
M a ig n o l, d’après l’article 1325 du Code c iv il; et c’est
sans contredit rendre bonne justice.
Guillaume M aignol père a été convaincu que ce ju
gement étoit le résultat d’une discussion éclairée; il a
gardé le silence, et ne s’est point rendu appelant. Son
fils a été plus courageux; il n’a pas même craint de rendre
sa défense p u b liq u e, comme si sa prétention pouvoit
faire honneur à sa délicatesse.
O n se flatte d’écartcr péremptoirement toutes les ob
jections qu’il a proposées : ou établira, i ° . que Guillaume
M aignol père n’a voulu et pu vendre que la propriété
du p ré , attendu que la rente étoit éteinte par l ’acqui
sition du 6 ju ia 1777
5
�I V
!3
(
)
2°. Que l ’acte sous seing p r iv é , du 2 octobre 1 7 7 9 ,
n’a voit pas besoin d’être fait double;
30. Que cette omission, dans tous les c a s , seroit ré
parée par l’exécution de l’acte pendant vingt-cinq années.
§. 1er.
L a rente de 90 fr a n cs était anéantie p a r Tacte de
vente du 6 ju in 1777*
L a conf usi on, disent les auteurs, est'l’union et le m é
lange de plusieurs choses ou de plusieurs droits, qui en
opèrent le changement ou l’anéantissement. Cette con
fusion s’opère principalement par la réunion de la pro
priété directe et de la propriété utile.
L ’effet de cette confusion est d’anéantir les deux qua
lités incompatibles qui se trouvent réunies dans une
même personne ; ce qui est fondé sur ce qu’il est im
possible d’être à la fois créancier et débiteur de soi-même.
Voici comment s’exprime à cet égard Boutaric, Des fiefs,
pag. 92.
« Je suis seigneur direct d’un fonds assujéti par le
« bail à une rente annuelle d’un setier de blé ; ce
« fonds revient en ma main par déguerpissement, prê
te lation, ou autrement ; je l’aliène ensuite sans réser« ver la rente : ce défaut de réserve rendra-t-il le fonds
«
«
«
«
allodial? O u i, sans doute; car, quoi qu’en dise Brodeau sur L o u e t, tel est l’effet de la confusion ou de
la réunion du domaine utile au domaine direct, d'é"
teindre absolument la rente. »
�C 14 )
Il cite la loi dernière, S i g u is, ff. D e serv. in b . P rœ àia œdes quœ suis œdibus servirent, cum ennsset, traditas sib i a ccep erit, corifusa sublataque servit as e s t ,
et s i rursùs vendere v u lt, imponenda servitus est alioquin libère veneunt.
L e même auteur ajoute que les deux qualités de sei- gneur et d’emphytéote ne peuvent subsister sur la même
t ê t e , qui ne peut servir à soi-m êm e, et être soi-même
son emphytéote et son seigneur; que cette réunion s’o
père incontinent et sans délai, quand bien même la vente
ne seroit faite qu’à faculté de rachat.
B r illo n , dans ses arrêts, enseigne que l’obligation est
absolument éteinte, toutes les fois qu’il y a concours de
la dette et de la créance dans la même personne; il cite
la loi y , if. D e solut.
Despeisses, tom. I er. , pag. 803, édit. in -4°., dit que
5
toutes obligations prennent fin par confusion; qu ia nem opotest apudeitndem pro ipso obligatusesse. L . Hœres,
2 1 , §. Q uod s i , 3 , ff. F id e jussoribu s.
O n ne voudra pas sans doute établir une différence
entre le seigneur et le bailleur à titre de rente foncière.
Personne n’ignore que la rente foncière étoit considérée
comme un immeuble réel : le propriétaire de la rente
conserve la propriété directe; il a l’espérance de rentrer
dans le fonds, faute de payem ent, et la rente représenté
le fonds.
D ’après ces principes fondés sur les assertions les plus
positives des docteurs du d ro it, comment seroit-il pos
sible de penser que Guillaume M a ign o l, par l’acte no
tarié du 2 septembre 1 7 7 9 , a voulu ou pu vendre sim-
�tr &
5
C i )
plement à M a ig n o l, de L a n d o gn e , la rente de 90 f r . ,
dont il étoit acquéreur en i y 55 ?
Cette rente n’existoit plus ; elle étoit éteinte par la
réunion du domaine u t ile , lorsque Guillaume M aignol
eut acquis le pré asservi. Il ne pouvoit donc pas vendre
une c h im è r e , une chose anéantie : il a donc entendu
vendre la propriété du pré. Cela est d’autant plus évi
den t, qu’il énonce dans cet acte notarié que la rente
dont il s’agit étoit due p a r les jo u isso n s du pré. O r ,
c’ étoit lui qui jouissoit du p r é , qui l’avoit acquis ; il ne
pouvoit pas vendre une rente sur lu i- m ê m e , puisqu’il
ne pouvoit être débiteur et créan cier, puisqu’enfin la
rente étoit éteinte absolument dès le moment de la réu
nion , et sans pouvoir revivre.
Il est donc démontré que la convention arrêtée entre
les parties étoit de vendre la propriété du p r é ; que la
rédaction de l’acte notarié n’a eu d’autre objet que d’éviter
des droits de lods ; et quoiqu’on dise que ces lods eussent
été peu considérables ; que M a i g n o l, acquéreur , étant
b a illi, auroit obtenu des remises, etc. etc.
Il ne s’agit pas d’examiner ou de savoir à quoi se portoient ces lod s; on sait qu’en général ce droit paroissoit
odieux autant qu’onéreux aux acquéreurs : il y avoit un
certain amour-propre à les éluder. Combien n’y a-t-il pas
d’exemples que des droits de lods très-modiques ont em
p ê ch é des ventes, soit parce qu’on ne vouloit pas solli
citer des grâces, ni payer rigoureusement le droit ! Enfin
les lods étoient en pure perte pour l ’acquéreur ; ils
l’étoient d’autant m ieux dans l’espèce, que l’objet cédé
*
�( i 6 )
à M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , n’en devoit pas, tandis
que M a ig n o l, de L an d ogn e, auroit dû le tiers denier
en ascendant sur le prix du pré dont il s’agit; et dans
ce cas la chance n’étoit pas égale.
Si l’acte notarié a quelqu’obscurité dans sa rédaction,
toute équivoque est levée par la déclaration sous seing
p rivée du même jour : il n’y a plus de doute sur la pro
p r ié té , puisque M a ig n o l, du Cheval - Blanc , subroge
M a ig n o l, de L an d o gn e, à l’acte du 6 juin 1777. On sait
que ce dernier acte est celui qui trausière la propriété
du pré à Guillaume M aignol.
Dans tous les cas, toute clause obscure s’interpréteroit
contre M a ig n o l, ven d eu r, qui pouvoit dicter la lo i, et
qui le pouvoit d’autant m ieu x , qu’il ne cesse de répéter1
que M a ig n o l, de L a n d o g n e , c o n v o i t o i t , désiroit le pré
dont il s’agit. S’il avoit un désir si violent de cet objet,
il se seroit rendu moins difficile sur les conditions, et
auroit subi la loi de son vendeur.
A insi le pré en question est nécessairement vendu par
l ’acte notarié, du 2 octobre 1779 : M a ig n o l, du ChevalBlanc, ne pouvoit vendre autre chose; et, sous ce rapport,
son fils seroit non recevable dans sa prétention.
S- IIL 'a c te sous seing-privé, du 2 octobre 1 7 7 9 , iia v o it pas
besoin cCétre fa it double.
Guillaum e M aign ol fils, qui sent toute la force de cet
acte,
�17
C
)
a c te , réunit tous ses moyens pour l ’écarter : en conve
nant qu’ il contient la vente du p r é , il soutient qu’il est
n u l , faute d’avoir été fait double, ou du moins faute
d ’en contenir la mention.
Po u r apprécier le mérite de cette objection principale,
il est bon d’examiner la nature de cet acte.
E n matière d’actes sous seing p r iv é , on distingue les
contrats bilatéraux ou synal lagmat iques , d’avec lps con
trats unilatéraux ; les premiei's sont ceux dans lesquels
chacun des contractans s’oblige envers l’autre; les seconds
sont ceux où il n’y a qu’une seule partie obligée.
On convient que les premiers doivent être faits doubles,
sauf l’exception dont il sera bientôt parlé, parce qu’il faut
bien que chaque partie ait son acte dans les mains pour
forcer l’autre à l’exécuter.
>
A l’égard des seconds, on n’a jamais prétendu qu’un
contrat unilatéral, comme une déclaration, une promesse
ou un b il l e t , dussent être faits doubles.
L e sieur M a ig n o l, appelant, à moins de s’a veu gler,
ne peut placer l’acte sous seing p riv é, du 2 octobre 1779,
parmi les contrats bilatéraux: la contexture de l’acte s’y
oppose absolument. G uillaume M aignol père y parle tout
seul : -/a. soussigné, d éclare, e t c lui seul contracte des
engagemens ; il a reçu le prix de la vente par le contrat
notarié. C ’est au contraire lui qui se trouve débiteur
d’ une somme de 200 francs ; il eu consent une promesse
au profit du sieur M a ig n o l, de Landogne : cette promesse
est même énoncée, son existence est exp rim ée, par l’acte
devant notaire, du même jour; lui seul s’oblige. M aignol,
C
�( 18 )
de L a n d o g n e, ne contracte aucuns engagemens envers
son parent; il ne dit mot : c’est toujours Guillaume Maignol qui parle exclusivement , qui se reconnoît débiteur.
Il n’y a rien de réciproque, tout est du fait de M aign o l,
du Cheval-Blanc. Ce n’est donc li\ qu’ un contrat unila
t é r a l, une simple déclaration, une simple promesse; et
comment pourroit-il y avoir nécessité, dans ce cas, de
faire un acte double ?
M a is, d i t - o n , cet acte est une vente, et toute vente
doit être faite double.
D ’abord, c’est mettre en fait ce qui est en question:
la vente se trouve dans l’acte notarié. Il faut bien donner
un sens quelconque à ce premier acte ; et on a vu qu’il
seroit absurde que M aign ol, du Cheval-Blanc, n’eût voulu
vendre qu’ une rente anéantie.
Mais est-il bien vrai, dans tous les cas, qu’ une vente
doit être faite d o ub le? On le conçoit, lorsque l’acqué
reur ne paye pas le p r i x , parce qu’il faut bien qu’il s’oblige
à le payer , et que le vendeur ait des moyens pour l’y
contraindre ; mais lorsque l’acquéreur paye entièrement
le prix , qu’il ne contracte aucune obligation , comment
seroit - i 1 essentiel que l’acte fût double? il devient alors
unilatéral ; il ne reste que l’obligation du vendeur de faire
jouir de la chose vendue, de garantir de l’éviction , etc. ;
•et dans ce cas, certes , il su (lit que l’acquéreur soit nanti
de l’acte qui lui transmet la propriété. C ’est la distinc
tion qu’on a toujours faite en jurisprudence; et la cour
l ’a consacrée par plusieurs arrêts , notamment par un
rendit sur la plaidoirie de M e. P a g è s, dans la cause de
\
�/ ï>
'
*9
(
)
M e. Bertier, avocat à Brioudc. L a c o u r , par cet arrêtr
ordonna l'exécution d’une vente sous seing privé non
faite double, par cela seul que l’acquéreur avoit payé
l’entier p r ix , que l ’acte en portoit quittance, et que l’ac
quéreur n’avoit contracté aucun engagement.
O p p o s e r a - t- o n que l’acte sous seing prive n’est pas
unilatéral, parce que M a ig n o l, du Cheval-Blanc, devoit
déduire une somme de 80 francs sur les arrérages
réservés ?
Ce seroit une erreur; le contrat ne change point de
nature par cette circonstance. Il en est de cette m ention,
comme si un débiteur, en souscrivant la promesse d’une
som m e, y mettoit pour condition de déduire tous acquits
bons et valables qu’il pourroit avoir faits antérieurement :
la promesse pour cela n’auroit pas besoin d’être faite double,
pa rce que le créancier ne pourroit se faire payer sans re
présenter la promesse, et sans souscrire à la condition.
D e même ic i, M a ig n o l, de Lan dogn e, n ’auroit pu
exiger de M aign o l, du Cheval-Blanc, la somme de 280fr.
sans représenter la promesse ; et alors il auroit bien
fallu déduire sur les arrérages la somme de 80 francs,
avec d’autant plus de raison, que l’acte notarié n’énonçoit qu’une promesse de 200 francs.
Ainsi diparoît le moyen principal de Guillaume M ai
gnol. L ’acte sous seing privé est unilatéral; il ne con
tient pas d’engagemens réciproques; dès-lors il est fort
indifférent qu’il ait été ou non fait double.
C 2
�/
* ■
*
C 20 )
§. I I I .
D ü 72S tous les c a s , cette om ission serait réparée p a r
l'exécution de l'acte.
’
Il est constaté par l ’interrogatoire des deux M a ig n o l,
du C h eval-Blanc, que cet acte sous s e in g ‘privé est du
même jour que l’acte notarié; il est écrit par le père;
il a été connu par le fils dès le moment môme , et lors
qu’il n’a voit qtie seize ans : le père comme le fils ont
connu et souffert la possession publique de l’acquéreur;
ils n’ont réclam é, ni contre M aign o l, de Landogne 3
ni contre Antoine Guillaume , tiers détenteur , quoiqu’ils
aient été instruits de la vente consentie par Maignol à
Guillaume.
L ’article 1325 du Code civil porte : « Les actes sous
«
«
a
cc
seing p r iv é , q u i contiennent des conventions synallagm atiques y ne sont valables qu’autant qu’ils ontété
faits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant
un intérêt distinct.
ce II suffit d’un original pour toutes les personnes ayant
« le même intérêt.
« Chaque original doit contenir la mention du nombre
« des originaux qui en ont été faits.
« N é a n m o in s, le défaut de m ention que les origi« n a u x ont été J'aits doubles, triples , etc. , ne peut être
a opposé p a r celu i q u i a exécuté de sa part la c o u « çention portée dans Pacte, »
�( 21 )
M . M a lle v ille , sur cet article, s’exprime ainsi : « S i
« l’une des parties avoit déjà exécuté l’acte , elle ne
« doit pas être reçue à opposer qu’il n’a pas été fait
« double; mais il y aura souvent de l’embarras à prouver
« cette exécution.» ( Il n’y en a pas dans l’espèce parti
cu lière, puisque les deux M aignols, père et fils, en con
viennent dans leur interrogatoire.)« On admettoit une.
« autre exception à la règle posée dans l’article, c’est
« lorsque l’une des parties n ’a voit pas d intérêt a avoir
« un douille : par e x e m p le , je f a i s une venta sous
« seing p rivé, et f e n reçois le p rix ; on jugeoit que la
« vente étoit v a la ble, quoiqu'elle ne f û t pas f a i t e dou« ble ; mais on l’auroit jugée nulle s’il étoit resté quelque
« partie du prix à payer. »
Cette doctrine d’ un magistrat écla iré, l ’un des rédac
teurs du Code c i v i l , confirme ce que l’on a déjà dit dans
le §. précédent, et prouve que l’exception admise par
l’article c ité , n’est pas nouvelle, comme a voulu le pré
tendre l’appelant. En effet, la rigueur du d ro it, le sum
mum ju s , ne peut etre invoqué avec succès qu’autant
qu’ il pai-oîtroit qu’on a pu ignorer l’existence de l’acte
qui vous est opposé ; mais lorsque tout annonce que cet
acte a été con n u , qu’on en a souffert l’exécution sans se
plaindre, aujourd’hui surtout que la justice se rappro
che de l’équité, qu’on a senti la nécessité d’écarter toutes
les subtilités du d ro it, Guillaum e M aignol ne peut espé
rer aucun succès.
Il aura beau se battre les flancs, reproduire une ob
jection mille fois détruite, que le Code civil n ’a pas
�(22)
d’effet rétroactif, q u’il ne peut régler une convention
antérieure à sa publication.
Foible et petite ressource! L e Code civil est aujour
d’hui la loi de l ’e m p ir e , et doit régler tout ce qui est
encore indécis.
D e même qu’on juge que la subrogation d’action peut
être admise pour une cession de droits successifs anté
rieure à la publication du Code , lorsqu’il y a eucore
indécision , de même on doit décider que l’omissiou que
l ’acte a été fait double n’est d’aucune conséquence, lors-,
que cet acte a été long-temps et pleinement exécuté,
avec d’autant plus de raison q u e , d’après l’opinion de
M . M alleville, cette exception n’est pas nouvelle, eta été
admise dans l’ancien droit.
E t s’il en étoit autrement, si le Code civil pouvoit être
mis de côté pour tous les actes antérieurs sur lesquels il
n ’a pas été p ro n o n cé , il vaudroit autant décider que ce
Code si long-temps attendu, que cette loi uniforme pour
tout l’empire , si souvent désirée, que l’immortel Daguesseau trouvoit si nécessaire, ne pourroit être exécutée
que dans trente ans, ou n’auroit été promulguée que
pour la génération future ; ce qui est une absurdité.
L e Code des Français est aujourd’hui leur unique loi.
S i , comme tout ce qui sort de la main des hommes, il a
quelque im perfection, on est au moins obligé de convenir
qu’on y retrouve toute la pureté du droit romain , tout
ce que l’expérience et la raison avoient remarqué de plus
îv'igc dans le droit coutumier; qu’ il n’a nullement besoin
de commentaire pour le jurisconsulte; que les pandectes
�*3
.(
)
ne servent qu’à l’obscurcir ; qu’enfin il a paru sous l’inilucnce d’un héros législateur, et qu’il suflit d’un rayon
de sa gloire pour que ce Code devienne bientôt la loi
de l’Europe entière.
Guillaume M aignol fils ne se tirera jamais de l’ar
ticle 1325; l’exécution de l’acte est pour lui la pierre
d’achoppement : sa mauvaise foi est à découvert; la loi
et l’équité repoussent une prétention ambitieuse et tardive,
qui n’auroit pas vu le jour si Pierre M aignol existoit
-encore.
Il ne s’agit plus que de parcourir rapidement quel
ques misérables objections proposées en désespoir de
cause.
L ’appelant reproche
aux premiers juges de s’ètre
occupé de l’acte sous seing privé , comme si cet acte
étoit souscrit par lui-même. On a confondu , d it - il, les
moyens du fils avec ceux du père ; cependant un fils
donataire ne pouvoit être tenu de l'effet d’un acte sous
seing privé, n’ayant de date certaine qu’après sa donation.
Ce paquet^ne peut aller à aucune adresse, et ne séduiroit. pas môme le praticien le plus formaliste.
Il est constant, d’après le père et le iils, que l’acte sous
seing prive est du même jour que l’acte notarié. Il est
constant que l’acte a été connu du iils et du p è re , et que
ce fils rebelle s’avisoit à seize ans d’en témoigner son
mécontentement au père.
Ce
faire
qu’il
resté
fils précoce n’a rien ignoré ; il a n)ême voulu se
donner ce pré ; mais le père a pris pour prétexte
11’avoit pas l’acte de 1 7 7 9 , et (lue
minute avoit
entre les mains de M a ig n o l, de Landogne.
�24
(
)
'D ’après ces a v e u x , il est assez maladroit d’équivoquer
sur les dûtes. Il est vrai qu’en général les actes sous seing
privé n’ont de date certaine q u’avec la formalité de l'en
registrem ent, ou par le décès de l’un des signataires ; mais
pourquoi ? c’est qu’il seroit facile de dater un acte sous
seing privé du temps que l’on v o u d r o it, et que par ce
moyen on anéantiroit des conventions postérieures.
Mais lorsque la date est avouée et reconnue ; lorsque
ce fils , qui parle si souvent de sa donation , a connu
auparavant un acte qui transmeltoit à un tiers la pro
priété d’un immeuble particulier ; lorsque surtout cet
immeuble n’est pas nominativement compris dans la dis
position qu’il in v o q u e , il n’a pas dû y com pter; il n’a
pas dû calculer la valeur de cet objet dans la donation
qui lui a été faite; il auroit même trompé la famille avec
laquelle il contractait, s’ il leur avoit fait entendre que
cet héritage faisoit partie de sa donation : dans tous les
cas, il n’auroit pu nuire au tiers détenteur.
On ne voit pas quelle analogie il peut y avoir entre
cet acte et une contre-lettre à un contrat de mariage.
Les lois ne proscrivent les contre-lettres aux contrats
de mariage qu’autant qu’elles seroient isolées, qu’elles
émaneroient de l’époux sans les avoir communiquées à
la famille avec laquelle il contracte.
■Mais si les contre-lettres otoient signées par toutes les
parties qui ont assisté au contrat, elles seroient très-vala
bles*, et auroiqnt tout leur eiïet. Il n’y a d’ailleurs aucune
comparaison à faire entre cet acte et une contre-lettre :
jYlaignol , de Landogrie , seroit propriétaire en verdi de
l ’acte notarié. L ’acte subséquent n’est qu’un acte iso lé ,
explicatif,
�( 25 )
explicatif, interprétatif, si l’on veu t, du précédent, mais
qui n’ajoute rien au droit des parties.
Q u ’on ne dise pas que cet acte sous seing privé est
obscur et équivoque ; l’appelant doit se rappeler q u 'il
subroge M a ign o l, de L a n d o g n e, a u x effets de Pacte du
6 ju in 1 7 7 7 , et que ce contrat transmet la propriété du
pré à M a ig n o l, du Cheval-Blanc.
M aignol fils tourne toujours autour de ce cercle vicieux;
il en revient ù dire qu’un acte sous seing p riv é , qui con^
lient des engagement synallagmatiques,doit être fait double;
il a recueilli quelques arrêts rapportés dans la dernière
collection de jurisprudence, en faveur de l’archevêque
de Reims , contre le prince de Conti ; entre le sieur Forget
et le duc de G ra m m o n t, etc. ,Qn»ne Uy^coptestQi pas le
principe's orF 11’est dirigé, que. sm-.J’appl ¡cation*
Il prétçnd prouver la nécessité que £<<£j;clje. fvtt^Jfait
double j dans le bai où'1b tfixiur Maignol «m-oi* été évincé
dq^son pré , ou qu’il l’eût perdu par .force -majeure*
Mais^si M a ig n o l, de L an d o gn e,eû t éte'évincu«^ il avoit
^sqiijtcte ]oou^ demander une gài'flntie ; il n’-uifroi-t pas pu
, e supprimer pour Yen feiiii' à' Pacte" notarié , et demander
la rente, parce qu’on lui ¡fiuVoitr répnfidu que-la renie et oit
^anéantie, et qu’il
voit acheté que'le pré\lont il jouissoit |niÎ)liqûerï^e'il'f; I f n ’aùroit jamais été' assez malavisé
1
pour ie c,onfenter d’une raîle,M orsqu’ i f po^ vôte obfbriîr
»'A».■,-1.
..C
,
*1. , *'
une indemnité gmvant la valeur actuelle du pré. •
E t s’il l’a voit perd vi par une force m ajeure, 'si ta ri
vière le lu i eut en lev é, comme 011 l’a dit plaisamment
en première instance, le pré auroit été perdu pour lui :
�( 26 )
Mais pour cela il faut supposer des accidens bien graves;
une révolution dans le globe, le contact d’une comète, etc.
C ’est prévoir les choses de loin : la pauvre humanité ne
va pas jusque-là.
A ntoine Guillaume attendra d’ailleurs l ’événement; et
il est à croire que sa postérité la plus reculée jouira pai
siblement du pré dont est question, malgré M aignol fils,
et malgré la rivière de Sioulet qui le fertilise et ne peut
lui nuire.
_
*
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
M e. M A N D E T , avoué licencié.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
actes sous seing privé
bail emphytéotique
créances
cens
rentes foncières
interrogatoires
longues procédures
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Gilberte Ducourtial, veuve de Joseph Maignol, tutrice de leurs enfans mineurs ; dame Marie-Gilberte Maignol, veuve de Michel de Pannevert ; dame Marie Maignol, et sieur Antoine Bouyon, son mari ; dame Marie-Gilberte Maignol, et le sieur Pierre Legay, son époux, et sieur Antoine Maignol, tous intimés ; contre sieur Guillaume Maignol, autre Guillaume Maignol, son fils, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Riom, le 18 floréal an 13 ; et encore en présence d'Antoine Guillaume, maréchal, habitant de la commune de Pontaumur, aussi intimé.
Annotations manuscrites : extrait de l'arrêt de la Cour d'appel, 1er août 1806, 1ére chambre. Met hors de cause Guillaume Maignol qui n'a aucun intérêt à la concertation.
Table Godemel : Acte sous seing privé : 1. un acte sous seing privé synallagmatique, contenant vente et subrogation, est-il nul s’il n’a pas été fait double ? peut-il être opposé à un donataire contractuel, s’il n’a de date certaine que postérieurement à sa donation ? enfin quels caractères d’exécution faut-il à cet acte pour qu’il soit obligatoire, malgré les nullités qui le vicient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1606
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0127
BCU_Factums_G1605
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53280/BCU_Factums_G1606.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bail
Bail emphytéotique
cens
Créances
interrogatoires
longues procédures
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53279/BCU_Factums_G1605.pdf
e4d56e6d23cac17b422750a75801fe59
PDF Text
Text
4M
U
M
E
M
O
I
R
7
E
POUR
M AIGNOL
fils, habitant à Bon/
lieu, canton d’E vaux, appelant;
G uillaume
CONTRE
A n to in e
G U I L L A U M E , maréchal
taumur, intimé ;
E T
a
P on -
C O N T R E
G i l b e r t e M A I G N O L , P i e r r e L E G A Y , son
mari , A n t o i n e M A I G N O L , G i l b e r t e
M A I G N O L , veuve Paneveyre , et autres, héri
tiers de Pierre M a i g n o l , de Landogne, intimés;
EN
PRÉSENCE
M A I G N O L père , habitant au
lieu du Cheval-Blanc , commune de Condat , a p
peléen assistance de cause.
G
D eu
illa u m e
U
n acte sous seing p r i v é , synalla g m a tiq u e , est-il nul
s’il n’a pas été fait d o u b le ? P eut-il être opposé à un dona
taire contractuel s’ il n’a de date certaine que postérieure
m ent à sa d o n a tio n ? E nfin quels caractères d’exécution
A
�rr
\
XlS
N
v
j
(2)_
faut-il à cet acte p o u r q u ’il soit obligatoire m algré les
.
nullités qui le vicient ?
i jj.
T elles sont les questions que présente celte cause, en
supposant q u ’ un acte sous seing p r i v é , p roduit par les h é -
‘ '
ritiers M a i g n o l , soit une vente. C a r , en point de fait,
' !
l ’appelant dém ontrera que cet acte n ’est q u ’ un titre de
■f
possession.
'
F A I T S .
:
'■
:1
P a r acte du 16 mai 1 7 5 5 , M ic h e l L en o L le donna à bail
em p ylitéotiqu e à des nom m és C h e fd e v ille , un p ré situé
*
près de L a n d o g n e , m oyennant 90 francs de rente annuelle.
C ’est ce p ré qu i fait l ’objet de la contestation.
L e m êm e j o u r , L e n o b le ven dit ladite rente de 90 fr.
à G u illa u m e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , p o u r le p ayer
de 1800 francs q u ’il lui devoit.
L e 16 juin 1 7 7 7 , C h e fd eville subrogea ledit G u illa u m e
M a i g n o l , du C h e v a l- B la n c , audit bail e m p y lité o tiq u e ;
1
de sorte q u ’il lui céda la p ro p riété du pré.
Ce p ré étant situé près de L a n d o g n e , étoit désiré beau
cou p par le sieur P ie rre M a ig n o l, notaire audit lieu ; et il
paroît q u ’il chercha les m oyens d ’en devenir propriétaire.
1
II étoit créancier dessieurs L a rfe u il d ’une rente de
.1
56 f . ,
au principal de 2800 fra n c s , créée en 1 7 2 0 , due p o u r
m oitié par les héritiers de Jean-Franoois L a rfeu il.
L e s L arfeu il ayant vendu en rente un petit dom aine à
Jean G astier, P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , avoit obtenu
i
contre lui une sentence h yp o th écaire en 1 7 6 6 , portant
permission de se mettre en possession ou faire vendre.
s
.
?
f
D e son c ô t é ,' G u illa u m e M a ig n o l , du C h e v a l- B la n c ,
�m
seigneur féodal dudit d o m a in e , et ayant acheté de l ’un des
L a rfe u il la m oitié de la rente due par Jean G a s t ie r , le
p ou rsu ivoit p o u r être payé des cens , lods et arrérages de
ren te, et se trou vo it em pêché par ladite sentence de 1 7 6 6 ,
en ce que sou ven d eu r l ’a vo it chargé de payer à P ie r r e
M a ig n o l la p ortion de la rente de 1720.
Cette p rocédu re fournit à ce dernier l ’occasion de faire
des propositions à G u illa u m e M a ig n o l , du C h e v a lB lanc , et de profiter de son ascendan t, en lui faisant
entendre que rien n’étoit plus aisé p o u r lui que de d e
v e n ir p ropriétaire de ce petit dom aine ven d u à G a s tie r,
lequ el étoit parfaitem ent à sa bienséance, puisqu’il jo i—
gn oit ses p ropriétés du C h eval-B lan c.
Il paroît que P ie rre M a ig n o l proposa à G u illa u m e de
faire par ce m oyen un échange de ses droits à ce d o
m aine , avec le p ré ven u de L e n o b le , assurant sans doute
q u ’ il n’y a vo it plus qu’à se mettre en possession dudit d o
m aine , au m oyen de sa sentence de 1766.
Cependant le sieur M a ig n o l, du
C h e v a l - B l a n c , ne
donna pas pleinem ent dans le piège. Il fut passé un acte
entre les parties, le 2 octobre 1779. M ais cet acte ne
contient pas de vente ; sa contexture m êm e p ro u v e que
le sieur M a ig n o l, du C h e v a l - B l a n c , entendoit stipuler
toute autre chose q u ’une vente , et
ne v o u lo it que
laisser le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , jo u ir du p ré
L e n o b l e , jusqu’à ce q u ’il y eut qu elqu e chose de certain
p o u r lu i-m êm e au sujet du dom aine Gastier.
E n e f f e t , on lit dans cet a c t e , du 2 octobre 1779 , que
P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , cède à G u illa u m e M a i
g n o l la rente de 28 fra n cs, au principal de 1400 francs,
A
2
�( 4 }
faisant m oitié (le celle de 1 7 2 0 , due par les héritiers de
Jean - François L a r f e u i l , ensemble les arrérages échus
depuis 1 7 5 8 ; p lu s , il cède audit G uillaum e M a i g n o l ,
du C h e v a l- B la n c , l ’effet d e l à sentence de i 7 6 6 , p a r l u i
obtenue contre Gastier.
Le
p r ix dudit transport est fixé entre
les parties
h 2000 fran cs, p o u r l'acquit de laquelle somme M a ig n o l,
du C h e v a l - B l a n c ( p rop riétaire cependant du p ré L e n o b l e ) , cède seulement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , le co n
tr a t de rente de 90 francs à lui du p ar les héritiers de
P ie rre L e n o b le , suivant l ’acte du 16 m ai 1 7 5 5 ; la q uelle
ren te est p a y a b le , est-il d i t , p a r les jo u is s o n s du p ré
appelé P r é - G r a n d , s u r le q u e l elle e st sp écia lem en t
affectée.
E n c o n s é q u e n c e , au m oyen de la remise que fera
G u illa u m e M a ig n o l des titres c o n stitu tifs de ladite rente
de 90 fra n cs , ensemble des titres de créances y énoncés ,
il demeurera quitte de la somme de 1800 francs: et quant
à la somme de 200 fra n c s, P ierre M a ig n o l rcconnoît
l ’avoir reçue en délivrance de promesse de ladite somm e.
D e sa p a r t , P ierre M a ig n o l remet à G uillau m e la sen
tence de 1 7 6 6 , obtenue contre G astier; et néanmoins il
se réserve le contrat de rente de 1 7 2 0 , p o u r p ou rsu ivre
le payement de la m oitié qui lui reste, et m ê m e , d it - il,
les arrérages de la m oitié v e n d u e , antérieurs à J
;
758
enfin les parties se cèdent respectivement les droits rescindans et rescisoires qui p eu ven t résulter des contrats cidessus énoncés.
Il paroît aujourd’hui un acte sous seing p r i v é , de la
m êm e date que le transport ci - dessus, assez difficile à
�|2i
( 5 )
accorder avec les clauses dont on vient de rendre com p te,
du moins dans le sens que les adversaires lui d o n n e n t ,
mais qui p ro u ve ro it assez, s’ il étoit réellem ent de cette
date, que le sieur M a ig n o l ,d e L a n d o gn e, n’avoit cherché
à extorqu er un écrit quelconque du sieur M a i g n o l , du
C h e v a l-B la n c , que p o u r tirer parti un jo u r de son obscu
rité. Il est néanmoins évident q u ’il ne s’agissoit alors que
de lui laisser les jouissances du p ré I g n o b l e p o u r 90 fr.
p ar a n , afin de le payer de l ’intérêt des 1800 francs cidessus stipulés, jusqu’à ce que l’occupation réelle du d o
maine Gastier perm ît de faire un échange définitif.
Q u o i q u ’ il en soit, et en attendant que cet écrit jus
q u ’à présent inconnu soit mis sous les ye u x d e là c o u r , et
d is c u té , il s’agit de continuer l ’ordre des faits. L e sieur
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , eut bientôt à s’applaudir de
n ’avoir pas entièrement cédé aux assurances du sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e ; car huit jours après l ’acte du 2
octobre 1779 , ayant pris possession notariée du dom aine
G astier, en vertu de la sentence de 1 7 6 6 , qui venoit de
lui être c é d é e , ledit Gastier loin de se rendre à une
expropriation v o lo n ta ire , com m e l’avoit prom is le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , alla au contraii'e t r ai t e r avec l’un
des L a r f e u i l , ses ve n d eu rs, qui offrit de payer le sieur
M a i g n o l , et conclut à ce qu ’il fût déchu de scs demandes.
E n e f f e t , par une sentence de la sénéchaussée d’ A u
vergne , au rapport de M . F a y d it , G u illa u m e M a ig n o l
fut d é b o u t é , à la ch arge d’être payé des cens à lui dûs per
so n n ellem en t, et seulement de la m oitié des arrérages
de rente par lui acquise de L a u re n t L a r f e u il.
Cette sentence ne dit rien de la moitié de rente cédée
par Pierre M a ig n o l à G uillau m e 7 qu oiqu ’elle fût de
�(
6
)
m a n d ée, et que la sentence de 1766 en portât condam
nation; de sorte que par le fa it, G uillaum e M a ig n o l, du
C h eva l-B la n c, n’a pas t o u c h é ,à ce qu’il p a ro ît, un denier
de ce qui lui a été vendu par M a ig n o l , d e L a n d o g n e ,
le 2 octobre 177 9 ; tandis q u ’on élève la prétention de
s’a p p r o p r ie r , sans bourse d élier, un p ré q u ’il n’a pas
vendu.
Cependant P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , s’ éto itm is en
possession dudit p r é , et les fruits devoient lui en rester
p o u r la rente de 90 fra n cs, suivant la clause du traité, tant
que le sieur M a ig n o l , du C h e v a l-B la n c , ne p référeroit pas
jo u ir lui-m êm e en payant ladite rente.
O n pense bien que le sieur M a ig n o l , de L a n d o g n e ,
s’arrangea p o u r faire d u rer cet état de choses encore lo n g
temps , et q u ’il 11e manqua pas de réveiller de loin en
lo in l ’espoir de son cousin de devenir p ropriétaire du
petit dom aine G a s tie r , qui étoit si fort à sa bienséance.
Le
sieur M a ig n o l, du C h e va l - B la n c , éloigné du p ré
L e n o b le , ne mettoit pas un grand p r ix à en jouir lu im êm e , et peut-être lui eu exagéroit-on les in convénien s;
peu t-être aussi le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , savoit-il
tirer parti d ’ une espèce de dépendance dans laquelle il
a v o it su tenir son parent.
L e s choses restèrent en cet état jusqu’en l ’an 7 , que
le sieur M a i g n o l , fils de G u illa u m e , donataire universel
de son p ère par son contrat de m ariage, se m it en pos
session de ses biens en celte q u a li t é , et demanda à son
p ère des rcnseigneinens sur le résultat de l’acte de 1 7 7 9 ,
et d e là prise de possession du dom aine G a stier, que son
p ère lui rem eltoit avec d’autres titres. C ’est alors que le
sieur M a ig n o l p ère expliqua à son fils que si, à la y é r ilé ,
�lö s
(7
)
il ne jouissoit pas du dom aine G a s t ie r , il resloit maître
du p ré L e n o b l e , q u ’il rep rendrait quand il v o u d r a it, et
que lu i , M a i g n o l p è r e , n’a vo itp a s encore récla m é, parce
q u ’on l’avoit toujours bercé d ’ un vain e s p o i r , et parce
q u ’il devoit au sieur M aign o l, de L a n d o g n e ,p o u r un procès
de fam ille; ce qu i l’avoit em pêché de le contrarier.
M a ig n o l fils vo u lu t a vo ir une e x p lic a tio n avec le sieur
M a i g n o l , de L a n d o g n e , qui lui refusa toute com m unica
tion sur ce p oint, et n e lui répondit qu ’en pressant le paye
m ent d ’une cré a n ce étrangère au procès actuel. M a ig n o l
iils paya le z
5 nivôse
an 9 , et se crut dès-lors autorisé à
rec o u v re r ses droits.
L ’acte de 1779 qui lu i nvoit été remis n’énonçoit que
l ’acte de 1 7 5 5 , lequel ne donnoit la p rop riété du pré qu ’à
C h efd eville : il s’agissoit donc de rechercher la vente que
C h efd eville a vo it dû faire au sieur M a ig n o l, du C h e v a lBlanc. M ais l ’acte en avoit été reçu par le sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , et il étoit difficile de se le p rocu rer -, il l’a vo it
refusé plusieui-s fois. E nfin M a ig n o l fils , étant parven u
à tro u ver la date de l’enregistrem ent, étoit p rêt à p o u r
suivre le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , lorsqu’il décéda.
A lo r s il demanda une exp éd ition au notaire , son suc
cesseur , q u i , en cherchant avec l u i , ne trouva pas la
m inute de l’acte dans la liasse de 1 7 7 7 , ni au répertoire.
A l o r s , p o u r éviter toutes difficultés, M a ig n o l fils p rit le
parti d’acheter du m eine C h e fd eville , lé 14 fructidor an 1 r ,
une ratification de la vente q u ’ il avoit consentie en 1777*
M u n i de celle p ièce, M a ig n o l fils inform é que le pos
sesseur du p ré L en o b le élo it A n to in e G u illa u m e , de P o n ta u m u r, le fit citer en désistem ent, par cédule du 3 v e n
dém iaire an 12.
�( 8 )
G uillau m e ne vo u lu t pas plus donner d ’explications que
le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , et ne com parut au bureau
de p aix que p o u r o b éir à la loi. Ensuite il se défendit
p ar des réquisitoires de qualités et de titres; et après c e la ,
il demanda la nullité de l’e x p lo it , sous prétexte que les
confins du p ré n’y étoient pas énoncés , qu oiqu ’ ils le fus
sent dans la cédule.
11 succomba justement sur cette c h ic a n e , par jugement
du 4 pluviôse an 12 , lequel néanmoins réserva les dépens
p o u r y être fait d r o it, en statuant au fond.
E n fin il plut à G uillau m e de rév éler q u ’ il étoit acqué
reu r du sieur M a i g u o l , de L a n d o g n e , par acte du 29 ven
tôse an 6 , et il assigna son vendeu r en garantie.
L e sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , étoit décédé dans l ’in
tervalle ; ses enfans in te rv in re n t, et en rendant compte
des faits, ils se contentaient d ’abord de dire que leur père
étoit p ropriétaire en vertu d ’ un acte , sans l ’indiquer. C e
pendant il falloit ne pas s’en tenir à des mots ; et les h é r i
tiers M a ig n o l produisirent enfin un acte sous seing p r iv é ,
sous la date du 2 octobre 1 7 7 9 , enregistré seulement depuis
le p r o c è s , et ainsi conçu :
« J e so u ssig n é, subroge M e. P ierre M a i g n o l , bailli
« de L a n d o g n e , à l’effet de la vente du bail em phytéo« tique , appelé P r é - G r a n d , que M e. A n n o t C h cfd ev ille
« m ’a co n sen tie d e v a n t M a ig n o l, n o ta ire, le six juin mil
« sept cent so ixa n te-d ix-sep t, p o u r p a r lu i jo u ir dudit
« p ré ainsi q u ’il avisera bon être , m oyennant la somme
« de deu x cent quatre-vingts liv r e s , dont deux cents livres
« dem eurent compensées avec pareille somme de d e u x
« cents livrescoinprise en la cession que ledit sieur M a ig n o l
« m ’a faite devant A lle y r a t cejourd’h u i , d ’ un contrat de
« rente
�9
(
)
« rente sur les sieurs de L a r f e u i l , et les quatre-vingts livres
« restantes me seront déduites sur les arrérages réservés
« par l’acte ci-dessus daté. Fait ce deux octobre m il sept
« cent soixante-dix-neuf; et sig n é M a ig n a l.
« Enregistré à R i o m , le 24 nivôse an 13 : reçu
5
fr.
« 60 cent. , etc. »
L es héritiers M a ig n o l com priren t bien q u ’ils ne p o u voien t pas opposer cet acte à M a ig n o l fils , com m e ayant
une date certaine antérieure au procès. E n conséquence,
p o u r a v o ir plus de droits vis-à-vis M a ig n o l p è r e , ils de
m andèrent sa misé en cause , qu i fut ordon née par juge
m ent du 6 therm idor an 12.
L e sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , ainsi assigné en
garantie par les adversaires, dit en défenses q u ’il reconnoissoit sa signature , mais que l ’ écrit qu ’on lui représentoit ne contenoit de sa part aucune con vention synallagm atique qui l’eût p riv é de la p ro p riété de son pré.
L a cause en cet état portée à l ’audience du tribunal
d ’arrondissement de R i o m , le 23 ventôse an 1 3 , les h éri
tiers M a ig n o l s’efforcèrent de jeter de la d éfa veu r sur
G uillau m e M a ig n o l p è r e ; et le sieur L e g a y , l ’un d ’e u x ,
q u i avoit écrit com m e scribe la m inute de l’acte du 2 oc
tobre 177 9 > u^ a jusqu’à d ire , en désespoir de cause, q u ’il
avoit écrit aussi un double du sous-seing p riv é p o u r être
remis au sieur M a i g n o l , du C heval-B lanc.
Q u e lq u e défiance que dût inspirer au tribunal une mise
en fait de cette im p o rtan ce , venant d’ une partie intéressée
a la fin d’ une seconde p la id o ir ie , elle r é u s s it, et le tr i
bunal ordonna la comparoissance des parties en personne
p o u r être questionnées sur ce fait.
B
�*
t i '
( 10 )
A l ’audicnce du 6 floréal an 1 3 , tout le m onde com
parut ; le tribunal fit p lu sie u rs questions à M aign o l père
et à M a ig n o l fils. L e sieur I.egay lui-même fut admis à
rép o n d re sur le fait par lui a llégu é , et le tout fut consigné
dans le jugem ent en form e d’interrogatoires.
M . le p rocu reu r im périal fut pleinem ent d ’avis que
l ’acte sous seing p r iv é n’avoit pas eu p ou r objet une vente
q u ’ il n’énonçoit p as, et q u ’il étoit d’ailleurs nul com m e
n ’étant pas double. Cependant le tribunal y vit une ven te,
et qui plus e s t , une vente valable ; en c o n s é q u e n c e, ii
d é b o u ta ‘ M a ig n o l fils de ses demandes (1).
( 1 )
J
u g e m e n t
d o n t
e s t
a p p e l
.
Entre Guillaume Maignol fils..........Antoine Guillaume............
Marie-Gilberte M aignol, et sieur Pierre L e g a y , son mari ; A n
toine M aignol, Gilberte M aignol, veuve Paneveyre, et autres.. . .
et Guillaume Maignol père.
Interrogatoire de Guillaum e M aign ol père.
A lui demandé si à l’époque de l’acte notarié, du 2 octobre
j 7 79 , il a été fait le même jo u r, entre les mêmes parties , un
acte sous signature privée. — Répond qu’il y a eu en effet un acte
sous seing privé. — Dem . Par qui les doubles ont été é c rits , et
s’il reconnolt le double sous seing privé qui lui est représenté
et rapporté par les parties de M°. Mayet. — Rép. que ledit acte
avoit été écrit de sa main. — Dem. Qui est-ce q u ia dicté les con
ventions. — Rép. que c ’étoit le sieur Pierre Maignol. — Dem . Si
ledit sieur Pierre Maignol avoit écrit quelque chose. — Rép. que
non , et qu’il est très-mémoratif qu’il n'y a pas eu d’autre double
écrit du sous-seing privé, que celui qui lui est représenté —
Dem . Quel a été le but de cet acte sous seing privé? — Rép.
�( 11 )
L e sieur M a ig n o l fils à interjeté appel de ce ju gem ent,
et ses m o y e n s , p o u r le faire accueillir , sont fondés sur
les principes les plus constans et sur la plus exacte justice.
que c’étoit pour céder au sieur Pierre Maignol la jouissance du
pré dont est question , jusqii à d&ïfômêauæ arrangemens entre
eux. — Dem. Le sieur Pierre Maignol ne devoit donc pas avoir
cette jouissance par l’acte notarié ? — Rép. que non ; qu il n’y
a que l’acte sous seing privé qui la lui délaisse. — A lui demandé
s’il ne fut pas question entr’eux de chercher à éviter les droits
de lods. — Rép. qu’il ne sait pas ce que le sieur Pierre Maignol
pensoit ; que pour lui ce m otif n’est entré pour rien dans cet
acte. — Dem . S’il a été question de la propriété du pré. — Rép.
que n o n , que ce n’étoit pas son intention, et que ce ne pouvoit
être non plus celle du sieur Maignol. — Dem. Pourquoi, n’ayant
été question que de la jouissance, l’acte sous seing privé ne fait
aucune mention de cette jouissance. — Rép. qu’il a écrit sous
la dictée de M. Maignol. — Dem . Si son fils étoit présent à cet
acte, — Rép. que non ; mais qu’en ayant eu connoissance peu
de temps après , il lui en avoit témoigné son mécontentement.
— Dem . Quel Age avoit alors votre fils ? — Rép. environ seize
ans. — A lui demandé si le sieur M aignol, ayant intention de
se soustraire aux droits de lods , n’avoit pas aussi l’intention de
devenir propriétaire au lieu de simple jouissant du pré. — A
répondu que M. Maignol a bien pu avoir cette intention ; mais
qu’il n’a pas été question de la propriété entre les parties. _
Dem . Lorsque vous avez fait donation de tous vos biens à votre
fils , aviez-vous alors la jouissance du pré? — Rép. que M. Mai
gnol en jouissoit alors. — Dem . Avez-vous donné le pré dont il
s agit? — Rép. qu’il a donné en général tous les biens qu’il avoit.
— Dem . Avez-vous eu connoissance de la vente du p r é , faite
le
ventôse an 6 par M. Maignol à Guillaum e? — Rép. que
ce t. objet pouvant se rendru ? il ne s’est pas mis en peine do
2
13
�-,
t
(
>2
)
/
M O Y E N S .
L e s premiers juges se sont occupés de l ’acte sous seing
s’informer de ce que le sieur Maignol feroit relativement à cette
affaire. — D em . S’il a su la vente. — Rep. qu’il en a eu connoissance quelque temps après ; et ensuite a ajouté affirmati
vem ent qu’il l’avoit sue quatre à cinq mois après. — Dem . S’il
avoit d’autres éclaircissemens à donner. — Rép. qu’ayant appris
la vente du pré par Pierre Maignol à Antoine Guillaum e, il a
voulu se procurer l’acte de vente de 1777, dont la minute étoit
chez ledit sieur Pierre Maignol ; il n’avoit pu se le procurer
d’abord. — Dem . Si le sieur L eg a y, notaire, a écrit un autre
double de l’acte sous seing privé. — Fiép. que non.
Interrogatoire du sieur M aig n ol f ils .
Dem . S ’il avoit eu connoissance des affaires faites par son père
avec le sieur Pierre Maignol, en 1779* — Rép. qu’il n’en a eu con
noissance que depuis qu’il a été à la téte de la maison ; qu’a
vant , son père lui avoit parlé des arrangemens faits avec le sieur
Pierre M aignol, en lui disant qu’il espéroit rentrer dans le pré.
— Dem . Rappelez-vous ce que vous a dit M. votre père à l’égard
de l’acte notarié et du sous-seing privé. —* Rép. qu’il lui a dit
avoir consulté MM. P a g è s, Andraud et Grenier sur l’acte sous
seing privé, et qu’on lui avoit dit qu’il étoit nul , pour n avoir
pas été fait double. — Dem . M. votre père avoit donc cet acte
alors? _ Rép. qu’il ne l’avoit pas, mais qu’il se rappeloit de son
contenu ; que son père lui a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu
de double de cet acte. — M. Maignol père interpelé s’il est
vrai qu’il a consulté les trois jurisconsultes sus-nommés. — Rép.
qu’ou i, qu’il n’avoit pas l’a cte; mais que sur ce qu’il en a voie
rapporté, M. Andraud lui avoit assuré que l’acte étoit nuU —
�C 13 )
p riv é dont les adversaires font leur titre , comme si cet
acte ctoit souscrit par le dem andeur lui-môme ; ils ont
Dem. à M. Maignol fils, s’il a vu entre les mains de son pere
un écrit sous seing privé. — Rép. n’en avoir pas v u , et que
son père lui a toujours assuré qu’il n’avoit pas été fait de double.
— Dem. Si lors de la donation à lui faite par son p ère, celuici lui avoit aussi donné le pré. — Rép. que son père disoit tou
jours qu’il avoit droit de se remettre en possession dudit pré,
mais qu’il lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre
qui établissoit la propriété de ce p ré , la minute de ce titre étant
entre les mains de Pierre Maignol. — D em . Avez-vous eu con
noissance que M. L e g a y , notaire, eût fait un des doubles du
sous-seing privé de 1779? — Hép. qu’il a ouï dire par son père
que le sieur Legay avoit été le scribe de l’acte notarié, et non
du sous seing privé.
Interrogatoire de M e. A n toin e Bouyon.
Dem . A vez-vou s eu connoissance qu’il eut été fait un acte
double sous seing privé ? — Rép. n’avoir eu connoissance et
11’avoir entendu parler de cet acte que depuis l’affaire dont
s’agit.
Interrogatoire de M e. P ierre Legay.
Dem . A vez-vou s eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. que se trouvant à L andogne,
M. M aignol, de Landogne, qui étoit dans son cabinet avec
M. M aignol, du Cheval-Blanc , l’appela, et l’invita à écrire un
double sous seing p riv é , contenant subrogation de r e n te , et
notamment contenant aussi cession tl’un-pré de la part du sieur
M aignol, du Cheval-Blanc, au profit du sieur Pierre Maignol,
de Landogne. — Dem . Etes-vous mémoratif si l ’acte que vous
écrivîtes étoit sur papier timbré ou sur papier libre? — Rép.
�C H )
confondules moyens de M a ig n o l fils avec ceux de M a ig n o l
p è r e , sans donner de motifs de cette résolution p rin ci-
qu’il ne se rappelle pas sur quel papier il écrivit. — Dem. Q uel
qu’un écrivoit il avec v o u s? — Rép. qu’il ne s’en rappelle pas
t r è s - positivement ; que néanmoins, sans pouvoir Lien le cer
tifier, il croit que M. M aignol, du Cheval-Blanc , écrivoit avec
lu i , et que M. M aignol, de Landogne, leur dictoit. — jD< m. Lors
que vous eûtes fini d’écrire , qui est ce qui signa? — Rép. qu’il
ne s’en rappelle pas. — Dem . S’il n’écrivit qu’un acte , et s’il
n’en écrivit pas deux. — Rép. qu’il est mémoratif d’en avoir
écrit un seulement. — D em . M. M aignol, de Landogne, écri
vit il en même temps que yous? Rép. que non; que c ’est lui
qui dictoit.
Après ces différens interrogatoires, M. le procureur impérial
a porté la parole ; et après un résumé de l’affaire , il a été d’avis
de déclarer nul l ’acte sous seing p rivé, du 2 octobre 1779 ,
parce qu’il n’avoit pas été fait double ; a conclu à ce qu’Antoine Guillaume fût condamné à se désister du pré dont il s’a g it,
en faveur du sieur Guillaume Maignol père , ou quoi que ce soit
Guillaume M aignol, son fils et donataire, avec restitution de
jouissances, et aux dépens. Il a pareillement conclu à ce que
les parties de M ayet fussent tenues de garantir ledit Antoine
Guillaume des condamnations contre lui prononcées.
Les débats terminés , le tribunal a ordonné que les pièces
seroient mises sur le bureau, pour en être délibéré en la chambre
du conseil.
La cause de nouveau appelée en cette au d ien ce, il en est
résulté les questions suivantes à résoudre.
Q uestions.
Quels effets doivent avoir les actes des 16 mai 1755, 6 juin
1777 > l ’acte notarié, du 2 octobre 1779, et l’acte sous seing
�«
( i
5
I
)
p a le ; et cependant ce n’étoit pas une m édiocre difficulté
que celle de savoir jusqu’à quel point un fils, donataire
p rivé, du même jour deux octobre 1779» intervenus dans la
i'amille des Maignol?
L ’acte sous seing privé, du 2 octobre 1779, n’énonçant pas
qu’il a été lait double , cette irrégularité doit-elle le faire dé
clarer n u l, lorsque cet acte a reçu , du consentement de celui
qui veut l’attaquer, uns exécution complète pendant plus de
vingt-cinq ans?
E n ce qui touche la demande en désistement, formée contre
le nommé Antoine G u illaum e, du pré dont il s’agit ;
Attendu que cette demande est subordonnée à l’effet que
doivent avoir différens actes qui ont été consentis entre les
M aign ol, relativement au pré en question.
En ce qui touche la validité de ces actes ;
Attendu qu’il est établi que par le contrat du 16 mai iy 5 5 ,
Guillaume Maignol père a acquis la propriété de la rente fon
cière de go francs , assise sur le pré dont il s’agit;
• Attendu que par contrat du 6 juin 1777, le même Guillaume
Maignol père étant devenu propriétaire de ce pré , a réuni par con
séquent dans sa main la rente , et le pré qui étoit asservi à cette
rente ; que dès-lors il y a eu en sa personne confusion des qua
lités de créancier et de débiteur, ce qui a opéré nécessairement
l’extinction de ladite rente ;
Attendu que le contrat du 2 octobre 1779, consenti par G uil
laume Maignol père à Pierre M aignol, son parent, n’a pu avoir
réellement pour objet la cession de la rente qui n’existoit plus,
et ne peut se référer qu’à la cession de la propriété du pré;
Attendu que l’acte sous seing privé du môme jour 2 octobre
» intervenu entre les mêmes Guillaume Maignol p è r e ,
et Pierre M aignol, a subrogé ledit Pierre Maignol à la cession
co n sen tie à Guillaume Maignol p a r le contrat du G juin 1777;
J779
�( 16 )
par acte authentique , p o u v o it être tenu de l ’effet d ’ un
acte sous seing p r i v é , n ’ayant de date certaine q u ’après sa
donation.
,
que cette subrogation générale des effets de l’acte de 1 7 7 7
ne peut s’entendre que de la propriété du pré dont il s’a g it,
puisque cet acte de 1777 étoit uniquement translatif de la pro
priété du même pré ;
Attendu que quoique cet acte sous seing privé , du 2 octobre
177g, ne fasse aucune mention qu’il a été fait double entre les
parties, Guillaume Maignol p è r e , ni Guillaume M aign o lfils,
ne peuvent, dans les circonstances où se trouvent les parties-,
exciper de cette omission , parce qu’il résulte des réponses
faites par lesdits Maignol père et fds, lors de leur comparution
à l’audience, qu’ils ont connu la possession publique de Pierre
Maignol, et après lu i, du mommé Antoine Guillaume , tiers dé
tenteur ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir de réclam er cofitre
cette possession ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir non plus
de réclamer contre l’acte du 2 octobre 1779, quoique cet acte
fût présent à leur e sp rit, et du fait personnel de Guillaume
Maignol père ;
Attendu que cette exécution donnée à cet acte sous seing
p rivé, du 2 octobre 1779, forme une fin de non-recevoir contre
Guillaum e M aignol, d’après l’article 1Z2Ü du Code civil ;
Par ces m otifs,
L e trib u n a l, par jugem ent en premier ressort, ayant au
cunement égard à ce <jui résulte des réponses faites par lesdits Maignol père et fils, lors de leur comparution à l’audience
dudit jour G du présent mois de floréal, déclare Guillaume et
autre Guillaume Maignol , père et fils , non recevables dans
leur demande en désistement du pré dont il s’agit. Sur le sur
plus de toutes les demandes en recours et contre recou rs, et
autres dem andes, met les parties hors de cause ; compense les
Une
�( 17 )
U n e donation contractuelle ne peut subir aucune dim i
nution ; car c’est sous la foi de cette promesse que deux
familles se sont unies. Q uand la donation contient tous les
biens p rése n s, elle doit se composer de toutes les actions
qui résultent des titres remis par le donateur au donataix*e; caries actions sont aussi des meubles ou des im m eu
b le s, suivant l’objet q u ’elles tendent à recouvrer. ,
Com m ent donc admettre que les droits assurés à des
futurs et à leurs d escen d an s , par leur co n tra t de m ariage,
puissent être d im in u és sous aucun prétexte par des sousseing privés , d’ une date à la v é rité a n térieu re, mais non
constatée par l’enregistrem ent? Il en résulteroit souvent
que deu x fam illes, après avp ir com pté sur une fortune
conséquen te et p ro p o rtio n n é e , sur le v u de plusieurs titres,
n ’auroient cependant fait q u ’ un calcul in u t ile , et que l ’ un
des ép o u x se t r o u v e r a it , après ses n o c e s , n ’avoir que la
moitié de la fortune qu ’il avoit établie et justifiée en se
mariant.
C ’est p ou r p rév e n ir de tels m écom ptes que les lois pros
crivent les contre-lettres aux contrats de m a ria ge, et q u e ,
dépens entre ledit Antoine G uillaum e, ledit Antoine Maignol
et consorts ; et condamne lesdits Guillaume et autre Guillaume
M aignol, père et fils , en tous les dépens faits tant à l’égard
dudit Antoine Maignol et consorts ès-dits noms , q u en ceux
qui ont été compensés entre lesdits Antoine G uillaum e, A n
toine Maignol et consorts; et aux co û t, expédition et significa
tion du présent jugement.
Fait et prononcé publiquem ent, à l’audiencc du tribunal civil
de première instance , séant à R io n i, par MM. P a r a d e s , prési
dent; D a n i e l , A s t ie h et M a n d o s s e , juges , le 18 flo réa l
i 3,
C
�I^K
M
( i 8 )
dans les donations de biens présens et à v e n i r , il est permis
aux ép o u x de s’en tenir aux biens présens, p o u r que leur
contrat ne souffre aucune dim inution dans la fortune alors
p rom ise, et qu ’ils demeurent entièrement hors de la dé
pendance du donateur.
Certes le sieur M a ig n o l fils n’entend en cette cause élever
aucune sorte de soupçon contre la sincérité de l ’écrit de
son p è r e ; mais il n ’est ici que le ch ef de sa fam ille, et
il plaide p o u r le maintien d’ une donation qui a saisi aussi
ses descendans. Son contrat de mariage a été compté p o u r
r ie n , et c’étoit l’acte qui devoit l ’em porter sur toutes les
autres considérations. D e vagues recherches sur l ’inten
tion des parties, et sur la connoissance que M a ig n o l fils
avoit pu avoir à seize ans de l ’existence d’ un sous-seing
p riv é , ne pou vo ien t conduire les premiers juges que des
hypothèses à l’abstraction , et de l ’abstraction à l ’erreur.
A quoi p ou vo ien t tendre en effet les questions faites au
sieur M a ig n o l fils, s’il avoit eu connoissance de l’écrit sous
seing p r iv é en 1779 > ^ un “ ge ° ù 011 n,° °lue ^a^re de s’oc
cuper des petits détails d’une fortune dont on ne jouit pas ?
I-e sieur M a ig n o l père avoit dit à son fils qu ’il avoit signé
un acte nul et n on d o u b le, p o u r céder au sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , les jo u issa n ce s d ’ un pré. U n e consultation
d’avocats en porta le môme ju gem en t; et dès-lors on pense
bien que cette d écision q u i sans d ou te tran q u illisa le p e re ,
n ’occupa bientôt plus le fils. 11 a fallu ensuite l’im por
tance et les débats d ’un procès p our lui rappeler uu fait
presque effacé de son souvenir.
T o u tes les précautions qu ’ont prises les premiers juges
�ki5
( 19 )
p o u r chercher la pensée des sieurs M a ig n o l père et fils dans
leurs réponses , et les mettre en défaut par des questions
inattendues, ne pou vo ien t donc changer l ’état de la cause.
Il y avoit un point de vu e c e rta in , qu i conduisoit à une
simple question de d ro it, et dispensoit de se perdre dans
le vague des conjectures.
P o u v o it-o n opposer à M a ig n o l fils , donataire contrac
tuel en l ’an 7, demandeur en désistement en l ’an 1 1 , un acte
sous seing p r iv é , en registré en l ’an 1 3 ? Ce_spus-seing p riv é
étoit-il une vente et une vente valable du p ré conten
tie u x ? L a jouissance dudit p r é , qu ’a vo it eue le sieur M a i
g n o l , de L a n d o g n e , s u p p o so it-e lle nécessairement une
vente , com m e l ’ont décidé les premiers juges ?
Q uand m êm e il auroit été possible de dim inuer par
une vente sous seing p riv é l ’efFet d’ une donation con
tractuelle , au moins au roit-il fallu que cette vente fût
p a rfa ite , et que l’acte duquel on v e u t la faire résulter en
eût tous les caractères et toutes les formes.
A u con traire, on ne vo it dans le sous-seing p r iv é , du 2
octobre 1 7 7 9 , et en
supposant à. celte d a te , q u ’ un
acte obscur et é q u iv o q u e , dont l’intention n ’a pas m êm e
p u etre bien exp liqu ée par ceu x qui s’en font un titre.
Si l’on se reporte aux circonstances qui ont p récéd é et
accom pagné cet a c t e , on est bientôt convaincu que le
sieur M a ig n o l, du Cheval-B lanc, n’entendoit céder son pré
L en o b le , que dans l ’expectative du dom aine Gastier ; et
q u e , jusqu’à ce q u ’ il pût etre p ropriétaire lui-meme ,
il n’entendoit pas vendre.
Sans cela , com m ent exp liq u e r cet am algam e d'aclcs
C 2
>|}»j
�Vai
( 2° )
inu tiles, et"en quelque sorte inintelligibles et incom pa
tibles ?
M a ig n o l père étoit prop riéta ire du p ré L e n o b le , di
sent les adversaires , puisqu’il a vo it acquis la rente en
55 , et l’effet du bail em phytéotique en 17 7 7 , par acte
passé devant M a ig n o l, de L a n d o g n e , lui-même.
Cela est certain ; et c’est précisément parce que M a ig n o l,
i j
de L a n d o g n e , étoit le rédacteur de l’acte de 17 7 7 , q u ’il
ne pou vo it pas ignorer que le sieur M a i g n o l , du ChevalBlanc , propriétaire du domaine utile et direct du pré
L e n o b le , 11’avoit q u ’un mot à dire p o u r le vendre , sans
user d ’autant de détours et de circonlocutions.
Si son intention eût été de vendre , p ou rq u oi donc
auroit-il vendu une î-ente de 1 7 5 5 , qui n’existoit plus ,
et q u ’il créoit sur lui-m êm e en d’autres te rm e s, en do n
nant une plus ancienne h yp othèqu e ?
P o u rq u o i auroit-il fait deux actes au lieu d’ un seul ?
p o u rq u o i a u r o it-il pris des précautions p o u r valider un
acte absolument inutile, et n’en auroit-il pris aucune p o u r
la rédaction du seul acte qui eût un sens et un résultat ?
A qu i persuadera-t-on que le sieur M a ig n o l, de L a n
dogne , bailli de sa justice , et notaire in telligen t, se fût
contenté de tels a ctes, s’il eût voulu devenir réellem ent
et solidement p rop riéta ire? ou p lu tô t, qui ne sera pas per
suadé , à la le ctu re de ces d e u x actes d u m êm e jour ,
que le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , a vo ulu enlacer le
sieur M a ig n o l , du C h e v a l-B la n c , par des clauses entor
tillées et peu intelligibles , qui présentassent au besoin
un sens favorable à l’intention de ce d e r n ie r , lequel dût
en effet s y laisser prendre.
�147
( 21 )
Car ne perdons pas de v u e que le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , a d icté ( on l’avoue ) l’acte sous seing p r iv é ,
du 2 octobre 1779. Il ctoit donc bien le maître de d icter
une ven te, si telle étoit l ’intention de M aign o l père. D èslors s’il n ’en a pas dicté une claire et non é q u iv o q u e , il
est clair que l’acte doit être interprété contra eum in
ci/jus potestata e ra t legem apertiiis dicere.
O r , le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e, s’est fait subroger
à l’effet d’ une vente de bail em phytéotique d’ un p r é , p o u r
p a r lu i jo u ir d u d it p ré ainsi qu’ il avisera bon ê tr e ,
moyennant 280 francs \ et cela ne ressemble nullem ent
à la vente franche et simple dudit pré.
Il
est bien plus clair q u ’il ne s’agissoit que de jouis
sances , et l’acte notarié le p ro u v e ; car la rente de 90 fr.
créée ou renouvelée par M a i g n o l , du C h e v a l - Blanc ,
étoit payable par les jo u is s a n s du pré. O r , peut-on à.
présent se m épren dre à l’intention des parties ? L ’acte
notarié étoit un prem ier pas vers une convention plus
importante. L es parties p révo yo ien t que M a ig n o l , du
C h e v a l-B la n c , auroit le domaine Gastier , et alors tout
auroit été consommé. Jusque-là il devo it une rente ; et
cependant il stipuloit q u ’elle seroit payée par ceux qu i
jouiroient du pré.
S’il eût jo u i, il devoit payer lui-m em e ; mais le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , devoit jo u ir , et alors il se payoit
par ses m ains, d’après la clause, com m e jo u is s a n t ; il lui
ialloit donc un nouveau titre p o u r jo u ir du p ré : voilA
donc le m o tif exact et visible du sous-seing p rivé.
Cette interprétation si facile 11’a point échappé aux
4SI
�(
22
)
héritiers M a ig n o l, à qui il auroit peut-être été nécessaire
de demander aussi à quoi avoit pu être utile de faire deux
actes p o u r un. Il est vrai q u ’ils avoient p ré v u l ’objec
tio n , et y avoient rép on du d ’avance; c’é to it, dirent-ils
d ’abord , p o u r év iter les droits d’cnregisti'ement.
M ais , d’après le tarif de 1722 , qui étoit suivi en 1 7 7 7 ,
une vente d ’immeubles payoit un droit de 1 fr. p o u r
les premiers 100 f r . , et 10 sous p ou r chaque 100 francs
suivans. A in s i , c’étoit 35 sous p ou r 280 francs ; et à
supposer , com m e l’entendent les adversaires , que le p r ix
eût été de 2000 fran cs, c’eût été 10 liv. 10 sous ; tandis
que l ’acte notarié , du 2 octobre 1 7 7 9 , a payé un droit
de contrôle de 14 liv, 12 sous; ce qui encore ne dispensoit pas du contrôle du sous-seing p r i v é , quand il y au
roit lieu de le produire.
A ussi n ’est-ce plus là la cause q u ’ont donnée depuis
les adversaires; c’é to it, ont-ils d i t , p o u r éviter le paye
ment des droits de lods.
Singulière raison p o u r le bailli de la justice, qui ne
pou vo it pas être traité bien rigoureusem ent en fiscalité*.
A u reste, le droit le plus ordinaire étoit de 2 sous 6 de
niers p ou r livre. Ce q u ’ il appelle son contrat de vente
portait un p rix de 280 fr. ; c’étoit donc 35 fr.
q u ’ il
s’ agissoit d’éviter.
D ira -t-o n cn c o rc q u e celte som m e n’ étoit pas le p r ix
réel ? Mais , si le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , ne faisoit
un sous-seing p riv é que p o u r 11e pas payer des lods , ce
n ’étoit donc pas la crainte de ce droit qui lui faisoit dis
sim uler le p rix : convenons plutôt que si au lieu du p rix
im aginaire q u ’il a fait écrire dans ce sous-seing p riv é , il
�avoit inséré un p rix ap pro xim atif de la valeur de l ’ im
m e u b le , il auroit excité la défiance du sieur M a ig n o l, du
C h eval-B lan c ; et c’est ce qu ’il vo u lo it éviter. R e m a r
quons encore q u ’avec cette version, les adversaires sont
forcés de donner p our prétexte de l’illégalité d’un a c t e ,
line fraude que leu r père vo uloit c o m m e ttre , et dont
cependant ils veulent s’adjuger le profit.
C om m ent donc v o ir une vente de p r o p rié té dans ce
sous-seing p riv é ? C o m m e n t c o n c e v o ir q u ’il ait une exis
tence com patible avec l’acte notarié du m em e jour ? A u
contraire , en ne vo ya n t dans le sous-seing p riv é q u ’un
p o u v o ir de jo u ir du p ré p ou r la rente de 90 fra n c s, et le
lé g e r supplément c o n v e n u , on entend alors parfaitement
l ’existence simultanée des deux actes: et on concoit c o m m ent le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , créancier d’une
rente payable par les jo u is s a n s du pré , eut besoin d’un
second titre qui le rendît jo u is s a n t lu i-m e m e ?
D e cette m a n ière, il n’ étoit plus nécessaire que l ’acte
sous seing p riv é fût double ; car si le sieur M a ig n o l, du
C h eva l-B la n c , avoit v o u lu demander les jouissances du
p r é , le sieur M aign o l, de L a n d o g n e, lui auroit exh ibé son
é c rit, portant q u ’il avoit eu le droit d’en jouir. Si à son
tour ce dernier avoit demandé les arrérages de rente ,
l ’autre auroit répondu q u e , com m e jo u is s a n t du p r é , il
se les devoit à lui-m em e.
L a cause est donc claire dans ce sens ; mais si on ve u t
v o ir une vente dans ce sous-seing p r i v é , alors non-seu
lement tout est in e xp lica b le, com m e on vient de l ’o b
server , mais encore les principes s’opposent a bsolu m en t
a ce que cet acte puisse contenir une vente vala b le.
�( 24 ?,
Les actes translatifs de p rop riété sont des notes trop im-
portans à la société, p o u r q u ’on puisse les dispenser avec
trop de légèreté de la rigu eu r des formes légales. Ce que
la loi a v o u l u , a dû être la règle com m une ; et si quelques
exceptions tolèrent par fois l’arbitraire, dont il faut tou
jours se tenir en défiance, ce 11e peut être que p o u r venir
au secours de l ’ ignorance qui a traité avec bonne fo i, et
qu i ne doit pas en demeurer victime.
M ais un notaire éclairé com m e le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , p o u v o it-il ignorer que tous les actes synallagmatiques doivent porter m in u te , s’ ils sont notariés, et
doivent être faits doubles, s’ils sont faits sous seing p r iv é ?
L a raison le d i r o i t , si les premiers élémens du droit ne
l ’enseignoient com m e un principe.
C ’est m êm e la plus usuelle des maximes ; car tous les
jours on fait de pareils actes, et les moins expérim entés
n’oublient pas de v o u lo ir en retenir une copie. Cela arrive
p o u r les actes les plus simples ; et com m ent un notaire
qui eût dicté une vente Pauroit-il oublié p o u r lui-m êm e ?
L a nécessité de réd iger en double écrit les actes synallngmatiques d é riv e évidem m ent de la nature m êm e de
ces actes ; car si p ou r la validité d’ un acte de ce genre
il est requis que chacune des parties soit obligée envers
l'autre; si p ou r la validité d’ une vente il est nécessaire que
l’un consente à ven d re, et que l’autre consente à acheter,
il faut dès-lors, par une conséquence fo rc é e , que chacun
puisse avo ir dans ses mains la p reu ve que l’autre a co n
s e n ti j sans cela , il seroit au p o u v o ir de l’ une des parties
de détruire l’a c t e , ou de contester son existence.
T o u s les auteurs enseignent ces principes, et prou ven t
par
�WiSl
*5
(
)
par une foule d’arrêts, qu’ils ont été consacrés p a rla juris
prudence la plus constante.
U n arrêt du 6 août 1740 déclara nul un acte par lequel
l'archevêque de Reim s s’étoit soumis à acheter l’hôtel de
Conti m oyennant 460000 fr. L ’acte n’étoit pas fait do u b le;
mais les héritiers du prince de Conti opposoient que l’acte
11’avoit pas dû être d o u b le , parce q u ’il n’étoit obligatoire
que p ou r l’archevêque qui l ’a v o i t signé. L a m êm e chose
fut jugée par a r r ê t du 2 9 no vem bre 178 1 , entre le sieur
F o rg et et le duc de G ram m o n t : il y avoit mêm e eu m en
tion de l’acte et réparations commencées ; néanmoins le
sieur F orget obtint que les lie u x seroient remis en leur
prem ier é t a t , ou des dom m ages-intérêts en cas qu’ils ne
pussent se rétablir.
U n autre arrêt du 23 juin 176 7 a jugé la rigueur du
principe dans des termes plus forts encore. D e u x co h éri
tiers a voien t fait un partage sous seing p r iv é , et l’ un d ’e u x
devoit payer p ou r retour de lot à l’autre 240 fr. L ’acte
fut déposé chez le curé du lie u ; chacun jouit de son lo t;
et dans un contrat de mariage postérieur, un des copartageans se constitua, en présence des autres, le lot à lui échu.
L ’ un des coh éritiers, après plusieurs an nées, demanda
un partage , et soutint que l’acte q u ’on lui présentoit étoit
nul p ou r n’a vo ir pas été fait double. O n lui opposoit le
dépôt en main tierce , sa p rop re exécution pendant six
an s, et des coupes d’arbres dans son l o t , sa présence m êm e
au contrat de mariage ci-dessus, et l’adhésion de tous les
autres héritiers.
Ces moyens avoient réussi en première instance en 1764;
mais sur l’appel à A m ien s , la force des principes p ré-
D
�(
2°
)
Valut. U n e sentence de 1766 pronoflça la nullité de l’acte,
et ordonna un nouveau partage. Su r appel au parle
m en t, cette sentence fut con firm ée, après une plaidoirie
très-d éb a ttu e, dit l’arrêtiste, et l’appel fut mis au néant.
Enfin on connoît l ’arrêt cité par I,ép ine de G rain ville.
U n e vente avoit été faite en deux doubles; mais il n ’étoit
pas fait m ention dans les deux écrits qu’ils eussent été faits
doubles : ils étoient représentés tous deux , et cependant
l ’acte fut déclaré nul.
C e u x qu i ne veu len t v o ir dans les procès que des cir
constances toujours variables, et ces apparences fugitives
de bon ou mauvais d r o it, qui s’évanouiroient souvent le
le n d e m a in , si on les exam inoit sous un autre point de
v u e , ceux-là , disons-nous , pou rroien t s’étonner d ’ une
telle jurisprudence, sans songer que si le su m m u m ju s a
p a rfo is ses inconvénien s, l’arbitraire en a m ille fois davan
tage. Ils p eu ven t lire dans L é p in e de G ra in ville les motifs
qu i engagèrent le parlement à se décider p o u r la nullité
dans l ’espèce ci-dessus, et peut-être cesseront-ils de penser
que le juge doit rester le maître de son o p in io n ,q u a n d il
en voit le d a n g e r , et quand il peut se gu ider par les
principes.
L ’article 1325 du Code civil les rappelle , et devoit
em pêcher les prem iers juges de faire autant d ’efforts p ou r
rechercher s’ il avoit été lait un double du sous-seing p rive
du 2 octobre 1 7 7 9 , q u i , par son slyle et son c o n te x te ,
p ro u v o it cependant assez par lui-m êm e q u ’il n ’avoit pas
du être fait double.
a L es actes sous seing p riv é , dit le C o d e , qui contien« nent des conventions syuallagnialiques, ne su n i valables
�7
(*
)
« q u ’autant q u ’ils ont été faits en autant d’originaux q u ’il
« y a de parties ayant un intérêt distinct.
« C h a q u e o rig in a là o it contenir la m en tion du nom bre
« des originaux qu i en ont été faits.
« N éanm oins le défaut de m en tion que les o rigin aux
« ont été faits doubles, ne peut être opposé par celui qu i
« a exécuté de sa part la convention portée en l ’acte. »
A i n s i , quand il eût été vrai que le sieur L e g a y eut
écrit un double sous la dictée du sieur M a i g n o l , de L a n dogne \ q u a n d il seroit aise de concevoir que celui-ci eut
de sa part signé un écrit par lequel il auroit dit : J e
sig n é
so u s
, subroge M e. P ie r r e M a ig n o l ( c’est-à-dire, lui-
m êm e ) , (i Veffet, etc.; quand celte rédaction insensée
seroit vraisem blable, un tel acte n’en vau dro it pas m ie u x ,
parce que ch a q u e o rig in a l ne contieudroit pas la m en
tion qu ’il a été fait double.
■ M a is , s’écrient les héritiers M a ig n o l , au moins êtesvous dans l’exception du Code que vous citez vous-m êm e;
Car vous avez la issé jo u ir le sieur M a ig n o l, de L a n d o gn e :
donc vous avez e x é c u té la vente.
O n pourvoit d ’abord rép on dre que le Code civ il peut
etre in v o q u é p o u r le passé , quand il est conform e aux
anciens p rin c ip e s , s i neiupè declaret ju s a n tiq u u n i n ova
co n stitu tio , mais qu ’il ne faut pas le suivre lorsqu’il s’en
écarte ; que d ’après cela il y avoit lieu de le citer poul
ie défaut de mention du m ot f a i t double , parce que les
arrêts y étoient conformes ; mais que les arrêts n’attaelioient aucune im portance à l ’exécution d ’ un acte nul
dans son p rin c ip e , com m e on le v o it notamment par l'arrêt
D
2
�•
«
C i
I
i . ( *8 )
de 1767 ; car ce seroit donner un effet rétroactif à la lo i,
ce qui n’est pas dans l ’intention du Gode.
M ais passons encore légèrem ent sur ce m oyen, et voyons
s’ il y a réellem ent une e x é cu tio n de l’acte sous seing p riv é
dans le sens de l’art. 1 3 2 6 , c’est-à-dire, si le sieur M a ig n o l,
du C h eva l-B la n c , en la issa n t jo u ir le sieur M a ig n o l, de
L a n d o g n c , a nécessairement entendu ex é cu te r un acte
de vente.
Sans doute , si j’acliète un p ré et que je paye le p r ix
co n v e n u , j’exécute la c o n v en tio n ; de m ê m e , si je vends
un p ré dont j’étois en possession h i e r , et q u ’après en
a vo ir touché le p rix je le liv re dem ain, sans autre cause
de tradition , et sans éq u iv oq u e , j’exécute encore le
m arché. V o ilà bien ce qu ’a vo u lu dire le Code : pas de
difficulté sur ce point.
M a i s , si l ’acheteur s’empare de l ’objet vendu , ou s’ il
a un autre titre de possession que la v e n t e , alors l’équ i
v o q u e du m ode de possession p rod uit l ’éq u iv oq u e du titre,
et le vice du titre renaît dès l’instant q u ’il n’est plus pos
sible d’être convaincu que l’occupation de la chose vendue
soit l’effet n écessa ire de l’acte de v e n te , com m e la p reu ve
certaine de son exécution.
O r , revenons à la position des parties en 1779. Sans
doute , s’ il n’existoit d ’autre acte que le sous-seing p r i v é ,
et si le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n c , n ’é to it en posses
sion q u e « vertu de cet acte , il sero it difficile de p ré
tendre qu ’ il n’a eu aucune exécution.
M a i s , i° . q u ’on supprime tout à fait le sous-seing p r i v é ,
et on concevra encore d ’après l’acte notarié du 2 octobre
1 7 7 9 , que le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n c , a eu qualité
p o u r jouir.
�^
»
9
( 2 )
E u effet, com m e le disent les adversaires, il fit créer
en sa faveur une rente qui n ’existoit plus. L e sieur M a i
g n o l , du C h e v a l-B la n c , ne stipuloit pas qu ’il la payeroit,
mais il disoit q u ’elle seroit payée p a r les jou issa /is du
pré. D o n c le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , clierchoit un
titre de jouissance, p o u r em pêcher de transporter cette
jouissance à d’autres : donc s’il a joui ensuite, c’est d’après
sa prop re convention p o u r le payem ent de sa rente. Sa
\ jo u is s a n c e n’est donc pas la p reu ve certaine de V ex écu tio n
d ’ un contrat de vente.
t
2°. Cette prétendue vente est encore si obscure, que ce
. n’est en vérité pas la peine de v io le r une loi p o u r elle.
U n notaire qui veut acheter p o u r être p r o p r ié ta ire , ne
se fait pas subroger à un bail em phytéotique p o u r jo u ir .
U n notaire qui dicte une vente p o u r lu i-m êm e, la dicte
com m e celles q u ’il rédige p o u r les a u tr e s , et ne fait pas
écrire un ba rb o u illa g e, ou astucieux, ou vide de sens.
M ais enfin les adversaires qui ne veulent v o ir que l’e x
ception du Code c i v i l , parce qu ’elle leur est fav o ra b le,
et que rien n’a plus de latitude au g ré des plaideurs que
les exceptions des l o is ; les adversaires, disons-nous, ne
rem arquent pas qu ’il faut cependant entendre la loi dans
un sens raisonnable ; car c’est bien là au moins l’inten
tion du législateur.
L a nullité ne peut pas être opposée par celui qui a
e x é c u té de sa pa rt la convention : voilà l’exception du
Code.
P o u r appliquer cette e x c e p tio n , fa u t - il une exécution
a c t iv e ? laut-il une exécution e n tiè re ?
J e vends aujourd’hu i un im m euble par acte non clou-
m
�33
(
)
b lc , et je le livre. Si au terme on ne me paye p a s , je
ne puis m e servir de ma vente , car je n’en ai pas. J ’aurai
bien une action eu désistement qui forcera l ’acheteur à
s’exp liq u e r : mais si la vente lui est onéreuse , il se
désistera ; s’il la tro u ve avantageuse, il la produira ; et
je ne pourrai l’em pêcher d’être maître de sa cause , parce
qu e j’aurai e x é c u té de m a p a rt la convention. A in si
une convention synallagm at/que m ’aura obligé s e u l:
voilà l’abus des interprétations forcées d’une loi qui n’a
rien vo ulu de pareil.
L es différentes parties de l ’article 1 3 2 5 , doivent s’ex
p liq u er l’une par l’autre , de m anière à être entendues
en s e m b le , et sans s’entredétruire. L e Code a vo u lu que
V exécu tion fût un m oyen contre le défaut de m en tion
que l’acte ait été fait double : mais si chacune des parties
est obligée envers l ’a u t r e , il est bien toujours néces
saire que celle qui a encore un in térêt distinct à l ’e x é
cu tio n de l ’a c t e , ait pardevers elle le double qui force
l ’autre à l'e x é c u te r de sa part.
Sans d o u te , quand le Code civil ôte toute action à
celui qui a e x é c u té de sa p a r t , c’est lorsque par cette
pleine exécution il n’a plus un in térêt à l’exécution qui
reste à faire de la part des autres : voilà sans contredit
l ’ unique sens que la loi puisse présenter, en l’expliquant
par ses propres expressions.
A cela les adversaires répondent que le sieur M a i g n o l ,
du C h e v a l-B la n c , étoit p a y é , et 11’avoit plus d’intérêt à
a vo ir un double.
D ’abord c’est une erreur de fait. L e sous-seing p riv é
�15/
( 31 )
p ro u v e lui-m em e le contraire; car si le p rix supposé à la
vcnteest de 280fra n cs, ile n resteroit dû plus du tiers, dès
que 80 francs demeuroient à im puter sur des arrérages de
rente , dont le prétendu vendeur ne p o u vo it pas de
m ander la compensation sans un double.
20. Les adversaires supposent que le vra i p r ix de la
cession étoit les 2000 francs cédés par la rente des Iiarfeuil ; mais le sieur M aig u ol père , q u i a remis les titres
de cette rente à son d on ataire , lui a atteste n’en a vo ir
jamais touché un denier ; celui-ci n’en a x’ien reçu non
plus : il fa llo it donc un double p o u r réclam er en rem
placement un p r ix de v e n t e , ou p o u r en demander la
résolution.
3°. Une circonstance non moins sensible p ro u v e encore
la nécessité d’a vo ir un double de vente, si c’en étoit une.
L e sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , p o u v o it être é v i n c é , ou
perdre son pré par force m ajeu re; alors en supprimant
son double il retrouvoit l’acte notarié du m êm e jo u r , et
demaudoit au sieur M aigrîo l, du C h e v a l-B la n c , le paye
ment d’une rente de 90 francs.
V o i là quelle étoit la position du prétendu v e n d e u r;
et voilà précisément les motifs de cette jurisprudence sé
vère q u i , en sacrifiant quelques intérêts particuliers , faisoit la leçon au x citoyens, et les préservoit de l’abus de
ces actes privés q u i , à l’économ ie près , sont le plus sou
ven t une occasion de surprises et une source de procès.
L a cou r doit juger ici la valeu r d ’un acte équ ivoqu e et
suspect. Si donc la rigueur de la loi fut jamais appli
cable , c’est sans doute dans une circonstance où il s’agit
�32
(
)
d ’ une prétendue v e n te , q u i , qu oique dictée par un no
taire, ne contient aucune des clauses d’ usage, aucune des
formes extrinsèques les plus com m u n es, et à l ’égard de
laquelle on n e donne aucune de ces excuses que la bonne
foi fait a d m ettre, ou que l’ignorance fait tolérer.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. V E R N I È R E , avoué.
A R IO M ,
de
l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Maignol, Guillaume. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernière
Subject
The topic of the resource
actes sous seing privé
bail emphytéotique
créances
cens
rentes foncières
interrogatoires
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Guillaume Maignol fils, habitant à Bonlieu, canton d'Évaux, appelant ; contre Antoine Guillaume, maréchal à Pontaumur, intimé ; et contre Gilberte Maignol, Pierre Legay, son mari, Antoine Maignol, Gilberte Maignol, veuve Paneveyre, et autres héritiers de Pierre Maignol, de Landogne, intimés ; en présence de Guillaume Maignol père, habitant au lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, appelé, en assistance de cause.
Table Godemel : Acte sous seing privé : 1. un acte sous seing privé synallagmatique, contenant vente et subrogation, est-il nul s’il n’a pas été fait double ? peut-il être opposé à un donataire contractuel, s’il n’a de date certaine que postérieurement à sa donation ? enfin quels caractères d’exécution faut-il à cet acte pour qu’il soit obligatoire, malgré les nullités qui le vicient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1605
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0328
BCU_Factums_G1606
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53279/BCU_Factums_G1605.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bail
Bail emphytéotique
cens
Créances
interrogatoires
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53278/BCU_Factums_G1604.pdf
f702618a802fe521ab0e4208200b6974
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m em oire
.
�Sí
G E N E A L O G I E
DES
PARTIES.
F ra n ço is V e s c lia m b e s,. m arié d eu x fois.
E n secondes noces
a
C a th erin e C o m b a rt.
E n p rem ières noces
M a rie la J a rrig e.
JeanJacq ues,
a
C la u d e .
G e n e v iè v e
la
V a is s iè r e .
M a rg u e rite . M a rg u e rite .
fo rclo se ,
à
F ran ço is
S am son .
C a th e rin e ,
idc n i
à
F ra n ço is
V escham bes.
,
M a rg u e rite , F ra n ç o ise ,
a
Ja cq u es
A n to in e
V a la rc h e r.
D a u z a t.
I
Jeanne,
à A n to in e
F au co n ;
intimés
et
appelan$.
A
¡E n grem y.
!---M ich elle ,
F ra n ço ise
F ra n ç o is ,
m ort sans
p o sté rité
après
le père.
M arg u e rite
à
N . R och e.
A n to in e ,
a in stitu é
Jacques
V a la rc h e r.
C a th e rin e ,
P ie r r e ,
à
m ort sans
Jean
p o s té rité ,
N au fa ri.
a in stitu é
M a rg u e rite
fpm m e
P ierre.
D a u za t.
I
A nue,
à
Jacq u es
de D o u e t.
I
Jeann e,
v îta l
de D ien n e;
appelons..
=JÎ
�P RECI S
E N
R E P O N S E ,
POUR
F r a n ç o i s e V E S C H A M B E S , veuve de Jacques
V a la rch er
; J e a n n e V A L A R C H E R , et
A n t o i n e F A U C O N , son mari , intimés et
incidemment appelans ;
CONTRE
Sieur
D E D I E N N E , et dame J e a n n e M a r i e D E D O U E T , son épouse, appelans
d'un jugement rendu au tribunal civil de M urat,
le II prairial an I I .
L A
V ita l
dam e de D i e n n e o c cu p e dep u is
lon g -tem p s les
t r i b u n a u x , d ’u ne v ie ille r e c h e r c h e sans i n t é r ê t , q u i jus
q u ’ici n ’a e u d ’au tre o b je t q u e d e d iv u lg u e r les m alh eu rs
d e sa fa m ille.
A
�H
( O
Un succès éphémère l’a enhardie dans ses prétentions ?
mais sa proie lui échappe au moment de la saisir ; et si
les intimés avoient été assez heureux pour avoir dans
les mains les titres, dont ils justifient maintenant T l’arrêt
de la cour, du 2 thermidor an 8 , auroit décidé dans un
sens tout contraire.
Mais aujourd’hui les suites de cet arrêt ne sont plus
effrayantes. La dame de Dienne a attaqué, contre ses inté
rêts , un traité de famille qu’elle devoit respecter. Il est
prouvé qu’elle a. plus à rendre qu’elle ne doit espérer
de recouvrer ; elle essaie de lasser la patience de ses cohé
ritiers par des discussions sans nombre ; elle ne viendra
pas à to u t de ses desseins ", elle succombera dans ses.
prétentions..
O n va présenter l’aperçu de cette cause * on élaguera
tous les détails inutiles. La généalogie jointe au mémoire
apprend l’état et les qualités des parties. On analisera
rapidement les titres qui ont donné lieu à la contes^
tation.
F A I T
S.
O n voit que François Veschambes, auteur commun
des parties , a été marié deux fois; qu’il a eu quatre
enfans d’un premier mariage, et cinq du second.
Far son second contrat de mariage avec CatherineCômbart, du février i
, sa seconde épouse se cons
titue une somme de 2700 fr. dont 300 pour meubles.
François Veschambes légitime ensuite ses enfans du pre
5
685
mier lit¿ et ceux (l u* pourront naître du nouveau mariage..
�JS
f
>
3)
Il constitue à Marguerite Yeschambes, sa fille aînée , une
somme de iooo fr. ; à autre Marguerite, 700 f r . , et à Jac
ques Veschambes, 1000 fr. ; et donne, par préciput et
avantage , aux enfans qui proviendront de son second
mariage, et au premier qui naîtra , soit fille o u garçon,
la somme de 3000 fr» de son clief, et aux autres, une
somme de 1000 fr.
L e 24 mars 1696, F r a n ç o is V e s c h a m b e s fit son tes
tament; il légua à A n t o i n e et Catherine Veschambes,
ses enfans du second l i t , et à chacun, une somme de
1000 f r . , et aux autres trois enfans la somme de 700 fr.
chacun.
Il institue pour son héritière générale et universelle
Catherine Com bart, son épouse, à la charge de payer
les légitimes , tant des enfans du premier que du second
lit. Il veut qu’en cas de convoi, sa femme soit privée de
l ’hérédité; qu’elle la rende à un de ses enfans, et du tes
tateur , que bon lui semblera , sans qu’elle soit tenue à
aucune reddition de compte ni payement de reliquat.
Si sa femme vient à décéder sans avoir fait son choix,
il veut et entend qu’Antoine Veschambes soit son héri
tier; mais cette disposition est toujours subordonnée à
l’élection de Catherine Combart.
François Veschambes, testateur, est mort le 23 février
*1700. L e 21 mars suivant, sa veuve prenant la qualité de
tutrice des enfans, tant du premier lit que du second, répu
dia a la succession de son m ari, par acte mis ou greffe de
la justice de Cheylades : il fut nommé un curateur à la
succession vacante ; mais , dans la même année, Jacques
Veschambes, fils aîné du premier l i t , représenté par
A 2
�4
(
).
toutes les parties , et se disant créancier de la succes
sion de son père, obtint une ordonnance du lieutenant
général de Saint-Flour , qui lui permit de jouir des
biens de la succession répudiée, sans qu’on pût en induire
aucune qualité préjudiciable.
Jacques Veschambes s’empara commodément de l’uni
versalité des biens; il afferma, le 13 avril 1700, à un
nommé Hugues Chevalier, un domaine appelé de la Buge.
Cette ferme fut consentie pour six années, moyennant 26
quintaux de fromage pour chacune d’elles : une partie
du prix de la ferme est déléguée à un sieur Dusaillant,
créancier personnel de Jacques Veschambes.
En 1706, un sieur D a n ty , ci’éaneier du père, trouvant
Jacques en possession des biens, le fit assigner en paye
ment de ses créances. En défenses, il oppose la répu
diation du 21 mars 1700, et soutient qu’il ne jouit
des biens que par permission de justice , et comme /
créancier.
L e 19 avril 1708, Jacques Veschambes vendit deux
prés de celte succession, moyennant 360 francs, au sieur
de Cheylades.
L e 31 mai 1708, Jacques Veschambes prit à titre de
bail emphitéotique, du sieur Dusaillant, un petit domaine
situé à la Buge, et voisin de celui de son père, moyen
nant la rente annuelle de 60 francs remboursable en deux
payemens.
Ce premier contrat fut résolu faute de payement5 mais
il lui fut consenti un second bail le 17 septembre 1729.
Il fut procédé à Pifrpcntement des héritages vendus; et
il résulte, du procès verbal des experts, que ce bien est
�(5)
d’une contenue de 12 journaux de p r é , et une septerée
et demie de terre en champ ou jardin.
On voit, d’après tous ces actes, que Jacques Veschnmbes- n’avoit d’auLres propriétés que le petit domaine qui
lui fut concédé à titre de bail emphitéotique. Il ne jouissoit que précairement des biens de son p è r e , et sous le
prétexte qu’il en étoit créancier. Cependant les appelans
veulent faire usage d’un-acte en date du 3 mars 1 7 1 0 ,
par lequel Catherine Combart avoit subrogé Jacques
Veschambes à tous ses droits et hypothèques sur la
succession de son mari. On verra bientôt qu’ils ne peuvent
tirer aucun avantage de cette prétendue subrogation qui
n’a jamais eu aucun effet.
Jacques Veschambes étoit lui-même si convaincu que
la succession de son père étoit absorbée par les dettes,
que, par acte mis au greffe de Cheylades en 1 7 1 2 , il
vient déclarer qu’il a connoissance de la répudiation
faite en son nom, le 21 mars 1700, par Catherine Com
bart, sa belle-mère : il adopte cette répudiation, et la
ratifie, et répudie de nouveau, en tant que de besoin.
Il fait un usage continuel de cette répudiation contre
les créanciers de son père. Une sentence du i mars
1 7 2 1, rendue au bailliage de Cheylades, le renvoie d’une
demande formée contre lui par un nommé M e y, mar
chand ù Billom, attendu la répudiation par lui rapportée,
et sauf aux créanciers à se pourvoir contre le c u r a t e u r
& la succession vacante. Dans cette sentence est visée
l’ordonnance rendue par le lieutenant général de SaintFlour, qui lui permet de jouir des biens de son père
sans se porter héritier.
5
�(6)
Le 21 mars 1729, Jacques Veschambes maria Michelle,
sa iille, avec François Samson ; il lui constitua une
somme de iôoo francs qui dans la suite a été payée
par Jacques Valarcher, représenté par les intimés.
L e 23 novembre 1735 , mariage de Catherine Ves
chambes , autre fille de Jacques , avec François Ves
chambes. L e père lui constitue une somme de 1400 fr.
qui a encore été acquittée par Jacques Valarcher.
Ici commencent les malheurs de la famille. En 1738 ,
Jean Naufary fut tué par Jacques Veschambes, son beaufrère. Ce dernier prit la fuite , et il fut rendu contre lui
un jugement par contumace, qui le condamna à la peine
de mort. Cette sentence fut suivie de la confiscation de
ses biens ; elle fut même exécutée par effigie; mais on ne
rapporte pas le procès verbal d’exécution.
Jacques Veschambes, en fuyant, vendit tout le mo
bilier mort et v if de la succession de son père, et laissa les
biens dégarnis de bestiaux.
L e premier octobre 1738, Antoine et Pierre Vescham
bes, frères, Marguerite, Françoise et Anne Veschambes,
nièces d’Antoineet Pierre, se virent obligés de prendre
à cheptel , d’un sieur Teillard , marchand ù M u r â t ,
vingt-quatre vaches suivies de dix ve a u x , quatre bourrets et deux doublons, m o y e n n a n t 868 francs ; ils ache
tèrent les meubles et outils d’agriculture nécessaires h
l’exploitation des biens : le prix de ce cheptel a encore
été remboursé par Jacques Valarcher.
Ces précautions n’empechèrent pas la saisie de tous les
fruits, de la part des collecteurs, pour les années 1738,
1739 et 1740. Antoine et Pierre Veschambes s’eu ren
dirent adjudicataires.
�f
7)
.
Antoine Veschambes ayant pris connoissance des pa~
piers de la famille , découvrit le testament de son père,
¿le 1696. Il apprit, par cet acte, qu’à défaut d’élection
faite par Catherine Com bart, sa m ère, le titre universel
reposoit sur sa tête. Il fit contrôler ce testament le premier
décembre 1741, se porta héritier de François Veschambes,
son p è re , et obtint, le 22 février 1743* ^ l’élection de
S ain t-F lour, une sentence qui déclara toutes les saisiesde fruits nulles, en fit main-levee à A ntoine Vesehambes,
comme propriétaii’e des biens. Cette sentence fut signifiée
le 23 février 1743, tant aux saisissans qu’à Pierre et
Jacques Veschambes, au dernier domicile de ce dernier,
en parlant à son fils. Cette sentence n’a jamais été atta
qu ée, et a acquis l’autorité de la chose jugée.
L e premier février 1 7 4 1 , Françoise Veschambes con
tracta mariage avec Jacques V alarcher; elle se constitua
tous ses biens , sans entendre néanmois^/àm? aucun acte
préjudiciable.
L e 14 mars 1744, Antoine Veschambes, qm étoit en
possession de tous les biens de Jacques, son père, en vertu
de son testament, fit donation au profit de Jacques Valarclier, de tous les droits par lui acquis, tant par le tes
tament de François Vescham bes, son père , que p a rle
deces de Catherine Com bart, sa mère. Cette donation
comprend même les droits rescindans et rescisoires ; elle
contient tradition actuelle et réelle; elle a été insinuée et
revêtue de toutes les formalités prescrites. Jacques V a îa relier s’est mis en possession de tous les biens de François
Vescham bes, a payé tous les créanciers qui se sont
présentés, et a joui de tous les biens sans trouble de^
puis, le moment de celle donation»
�(8 )
L e 31 mai 1744, mariage de Marguerite Veschambes,
autre fille de Jacques, avec Antoine Dauzat. Pierre Ves
chambes , son oncle consanguin, l’institue son héritière
universelle.
L e 4 juin 1744, traité entre Catherine Veschambes ,
veuve de Jean N aufary, et Pierre Naufary, son fils et
son héritier, et Jacques Valarcher, par lequel la veuve
Naufary et son fils cèdent à Valarcher tous leurs droits,
et tout ce qui peut leur rester dû sur la succession de
Françoise et Jacques Veschambes, en vertu du traité
passé entre Jacques Veschambes et Catherine Combart,
le 3 mars 1710.
L e 16 juillet 1744, mariage d’Anne Veschambes, mère
et belle-mère des appelans, avec Jacques de Douet. Par
ce contrat, Anne Veschambes, majeure, donne pouvoir
à son mari de rechercherions ses biens, traiter et tran
siger d’iceux , et en donner quittance.
L e 23 juillet, même année, cession de Jacques de Douet
au profit de Jacques V alarch er, de tous les droits suc
cessifs paternels et maternels d’Anne Veschambes , même
de ceux qui pouvoient lui revenir du chef de François
Vescham bes, frère et beau-frère commun: cette cession
fut consentie moyennant i 5 oo francs et quelques meubles,
le tout payé par Jacques Valarcher.
La condamnation de mort prononcée contre Jacques
Veschambes avoit entraîné la confiscation de ses biens.
M . de Montboissier, seigneur haut-justicier les réclamoit :
le 10 janvier 17 6 7, il se départit de tous scs droits eu
faveur de Jacques Valarcher et de Françoise Veschambes,
moyennant 60 francs de rente annuelle, et sans retenue;
plus,
�fo j
plus, 300 francs pour frais faits au bailliage de Saint-Flour,
et à Cheylades. Cet acte prouve que tousses biens du fu
gitif consistoient dans le petit domaine qu’il avoit pris
en empliitéose du sieur Dusaillant. L a confiscation ne
frappoit que sur cet objet.
L e 4 juillet 1757 , traité portant cession entre Fran
çois Vescliambes , mari de Catherine, à Jacques Valarc h e r , moyennant une somme de 2200 francs, payée par
ce dernier.
L e p r e m i e r février 1780, mariage de Jeanne V a la r-'
cher, fille de Jacques, avec Antoine Faucon ; elle est
instituée lieritière universelle de ses père et mère, et de
Marg uerite Vescliambes, femme Dauzat, sa tante.
La paix de la famille n’avoit plus été troublée jusqu’au
30 brumaire an 6, que la dame de Dienne et sou mari
imaginèrent d’attaquer les intimés en partage des succes
sions de Jacques Vescliambes et Geneviève la Vaissière^
leurs aïeux communs, pour leur en être délaissé leurs
portions afférentes, ainsi que ce qui devoit leur revenir
par le décès des deux mâles qui avoient profité du droit
d’accroissement d’Anne ? Michelle et Marguerite Vescliambes.
. ..
Les intimés opposèrent à cette demande le traité du 16
juillet 1744; mais les appelons demandèrent la nullité
de ce traité, sur le fondement que Jacques de Douet
n’avoit pas eu la faculté de vendre par son contrat de
mariage; que des-lors il qvoit aliéné des biens dotaux,
contre la prohibition de la coutum e; et ils c h e r c h è r e n t à
prouver que la demande en nullité 11’étoit pas éteinte
par la prescription.
B
-M
�Ils voulurent encore écarter le traité fait avec M . de
Montboissier, et soutinrent que la confiscation n’âvoit
pu avoir lieu, dès qu’on étoit hors d’état de rapporter le
procès verbal d’exécution du jugement de mort.
Toutes les prétentions, les défenses et les explications
données par les parties, n’avoient pour objet que les biens
2?ersonnels de Jacquds Vescliambes ; et sur ces contestations
il intervint au tribunal de S a in t-F lo u r , le 13 ventôse
an 8, un jugement qui déclare nul le traité du 23 juillet
1744, passé entre Valarcher et Jacques de Douet ; con
damne Valarcher et sa femme à venir à partage des biens
de Ja cques Veseham bes et Geneviève la V a issièr e ,
pour en etre délaissé aux appelans un sixième de leur
chef, un tiers dans le sixième que François Veseliamhes,
frère , décédé ab intestat, amendoit de son chef; un tiers
dans les deuxf autres sixièmes que ce même frère amendoit dans les successions du chef des deux filles forcloses ,
avec restitution des jouissances et dégradations depuis le
décès de Jacques Vesehambes et Geneviève la Vaissière.
On excepte de la restitution des jouissances toutes les
a n n é e s qu’a duré le 'mariage de Jacques de Douet avec
A nne Vesehambes. La dame de Dienne est tenue de rap
porter la somme de i oo francs, prix du traité de 1744 ,
et elle est également chargée de conférer proportionnel
lement 'les deux dots des iilles foi’doses ; elle est débou
tée dé sa» demande relative au partage de la succession
cl’Antoine Vesehambes; il est ordonné que les parties
conviendront d’experts, pour procéder au partage; les
dépens sont compensés pour etre employés en frais de
5
partage.
�Appel de ce jugement de la part du sieur Valarchev
et de Françoise Veschambes. La dame de Dienne et son
mari interjettent aussi appel incident de ce jugement, en
ce qu’ils avoient été condamnés au rapport de la somme
de i oo francs reçue par leur père; ils prétendent devoir
être déchargés du rapport de cette somme, parce qu’ils
ne sont pas héritiers de Jacques de D o u e t, leur père et
beau-père.
Il est bon de remarquer que l’appel de Valarcher et
sa femme étoit restreint au seul chef du jugement qui '
avoit prononcé la nullité du traité de 1744, et que, de
leur côté, les sieur et dame de Dienne ont respecté ce
.jugement, quant au chef qui les déboutoit de leur de
mande en partage de la succession d’Antoine Veschambes,
ainsi que de celui qui rejetoit également leur demande
en réduction du testament de 1693, à. raison de ce que
les biens étoient situés en coutume, et que le testateur
n’avoit pu donner que le quart. On ne s’est pas occupé
de ces deux objets , parce que tout est jugé entre les
parties sur ces deux points, et qu’il est inutile de grossir
le volume de la procédure qui n’est déjà que trop con
sidérable.
5
Sur les appels respectifs, arrêt de la cour,, du 22 ther
midor an 8, qui confirme le jugement du tribunal de
Saint-Flour, respectivement à la nullité du traité, et or
donne, avant faire droit sur l’appel incident, que Valar
cher et sa femme feront preuve, tant par titre que par
témoins , que la dame de Dienne a fait acte d’héritier
de Jacques de Douet, son père, en s’em p aran t de tout
B a
�m
( 12 )
ou de partie de sa succession, sauf la preuve contraire:
la moitié des dépens est réservée.
>
? En-vertu de cet arrêt, les experts ont été nommés
pour procéder au parLage. Valarelier et sa femme de
leur côté ont fait procéder à l’enquête sur l’appel incident.
La dame de Dienne a fait aussi une enquête contraire.
Les experts nommés se transportèrent pour vaquer
à leurs opérations ; il fallut établir la consistance de la
succession de Jacques Veschainbes, auteur commun; il
n’avoit laissé autre chose que le petit domaine qu’il avoit
pris à titre d’emphitéose du sieur Dusaillant; et encore
falloit-il en distraire le principal de la rente empliitéotique, qui avoit été remboursé par Jacques Vala relier.
La modicité de cette succession fait disparoître le
prestige. La dame de Dienne voit évanouir ses préten
tions chimériques, ses calculs exagérés, et alors elle veut
soutenir que les biens de François Veschambes, père de
Jacques, doivent entrer dans le partage; elle veut qu’on
y comprenne le grand domaine de la Buge qui avoit
appartenu à François.
Elle feignoit sans doute d’ignorer les répudiations
réitérées de Jacques Veschambes, son aïeul, l’institution
de François, son bisaïeul, au profit d’Antoine; elle vou■
loit mettre également de coté la disposition du jugement
de Saint-Flour qui la déboutoit de sa demande, soit en
réduction du testament de François, soit en partage de
la succession d’Antoine. Les opérations des experts furent
arrêtées; et, le i cr. messidor an 9 , nouvelle demande
des appelanSj tendant ù ce que la succession de Jacques
�3
( ï )
Vcschambcs fût composée, non-sculcmcnt des b'ens pr.r
lui acquis, mais encore cl’un dixième dans la succession
mobilière et immobilière de François Vcschambcs, son
p ore, eu égard au nombre de neuf enfans , Catherine
Combart comptant pour un ; d’un quart dans ceux de
sa mère, eu égard au nombre de quatre enfans; et qu’en
suite les jugemens des 16 ventôse et 22 thermidor an 8
fussent exécutés suivant leur forme et teneur.
C’étoit évidemment revenir contre la chose jugée.
I-e sieur Valareher et sa femme soutinrent qu’ils
étoient non-recevables dans leur demande ; ils récla
mèrent différons prélèvemens sur les biens personnels
de Jacques et sur ceux de François, son fils. Jeanne
"Valarclier, femme F au con , en sa qualité d’héritière
instituée de Marguerite Veschambes, femme Dauzat,
sa tante, demanda à être reçue partie intervenante pour
assister au partage. Toutes les parties ainsi réunies, les
intimés opposèrent que le testamént avoit été approuvé,
et que 'toutes demandes en réduction, comme toutes
réclamations contre la qualité d’Antoine , héritier ins
titué, scroieut évidemment prescrites, si déjà la question
n’étoit jugée, soit par le jugement de Saint - Flour et
1 arrêt de la cour d’appel, soit par la sentence de l’élec
tion de Saint-Flour , signifiée en 1743 , et qui n’étoit pas
attaquée. E11 conséquence les intimés conclurent que sans
s’arrêter à toutes ces demandes, il fût expédié à Jeanne
Valareher , intervenante dans les biens p e r so n n e ls de
Jacques, du chef de Marguerite Veschambcs , femme
D auzat, sa taule, un sixième qui étoit sa p o rtio n affé
rente; que la nia: se de la succession de J a c q u e s suroit
�^14^
seulement composée des biens désignés au bail ernpliitéotique de 1729 ; que cette succession seroit respon
sable, envers Valarclier et Françoise Veschambes, de
l’entier mobilier mort et v if , provenu de la succession
de François Vescliambes , dont Jacques s’étoit emparé et
qu’il avoit vendu lors de son évasion ; qu’elle seroit éga
lement responsable des jouissances par lui faites des biens
de François, depuis 1706 jusqu’en 1738, ainsi que des
intérêts des jouissances et du mobilier; que ces divers
objets seroient imputés et précomptés sur la portion
qu’amendoient les appelans ; que la dame de Dienne fût
condamnée à rembourser préalablement, et avant toute
mise en possession, et toujours dans la proportion de son
amendement, les dots de Miclielle et Catherine Vescliambes , les dettes de la succession de Jacques acquittées par
Valarclier, avec les intérêts ; que de cette succession seroit
distraite la somme de 300 francs que Jacques avoit donnée
à titre de préciput h M iclielle, sa fille, femme Samson,
et qui avoit été payée par Valarclier.
Les intimés firent en même temps donner copie de
tous les titres qu’on a analisés jusqu’ic i, notamment du
bail du 13 avril 1700, consenti par Jacques Vescliambes,
du domaine de la Buge, appartenant à François, son père;
de la répudiation de Jacques Veschambes, du 22 no
vembre 1712; de la sentence du i mars 172 1, rendue
entre Jacques Veschambes, et M e y , marchand à Billom ,
qui décharge Jacques Veschambes des condamnations,
attendu sa répudiation; des extraits des rôles de contri
bution , qui prou voient la jouissance précaire de Jacques
Veschambes.
5
�4
( i5 )
V oici le détail des prélèvemens demandés par lesr
intimés.
D ’abord, comme on l’a d it, la restitution du mobi
lier et des jouissances, les dots de Miclielle et de Cathe
rine Veschambes, le remboursement de la valeur actuelle
des biens immeubles de François Veschambes, vendus
par Jacques au sieur d’Estaing, seigneur de Cheylades,
le 19 avril 1708, la c o m p e n s a tio n jusqu’a due concur
rence avec les jouissances adjugées aux appelans, d u
capital de cheptel du 24 octobre 173^*
Plus, le remboursement des dettes de la succession de
Jacques Veschambes, payées par Jacques Vala relier; les
quelles dettes consistent, i ° . en la somme de 1200 f r . ,
prix principal de la rente empliitéotique de 1729, ainsi
que les arrérages d’icelle, suivant la quittance; 20. la
somme de 261 fr. 90 cent, due i\ René Teillard par
défunt Jacques Veschambes, en vertu de jugemens qu’on
rapporte, tout quoi a été payé par Jacques Valarelier ,
suivant un traité du 26 mai 1744; 30. la somme de 398 fr.
payée pour frais de la procédure criminelle, ainsi qu’il
résulte du traité du 10 janvier 1767; 40. une somme de
63 fr. due par Jacques Veschambes ¿1 défunt GuyonD a u ty , par obligation du 29 décembre 1708, et dont la
condamnation fut prononcée avec les intérêts contre V alarelier, par jngement du
décembre 1761 ; ». en une
somme de 329 fr. avec les intérêts, due par Jacques Vcschambes à sieur Jean-Baptiste Teillard, par obligation
du 19 juin 1736; 6°. une somme de 162 fr. pour arré
rages du bail à rente de 1729, ou blé prêté à défunt
Jacques Veschambes par un sieur llaynal de Tissonuières,
5
5
5
�( x6 )
fermier de Cheylades, et dont la condamnation avoit été
prononcée par sentences des 20 avril 1736 et 23 février
17 3 7 , signifiées le 10 septembre 1758; suivies d’autre
sentence contre Yalarcher et sa femme, du 17 octobre
1758; 7U. une somme de 169 fr. provenant d’arrérages
de la rente de o fr. portée au bail de 1729, et dont la
condamnation avoit été prononcée en faveur de Gilbert
Lagravières, par sentence du
août 1752; 8°. une
somme de 36 fr. pour reste de celle de 80 fr. due
par défunt Jacques Veschainbes à Catherine, sa sœur,
suivant une reconnoissance par lui souscrite, et suivie
d’une sentence de condamnation.
Les intimés se réservèrent tous autres droits.
I-es sieur et dame de Dienne, à leur tour, en persistant
à demander que la succession de Jacques fût composée
de sa portion dans les biens de François, demandèrent
la réduction des avantages faits par défunt François
Vcschambes, au profit de sa seconde femme. Ils pré
t e n d ir e n t que Jacques Vcschambes étoit aux droits de
Marguerite, enfant du second l it , suivant une cession
du 21 octobre 17 14 ; ils demandèrent la portion de
cette Marguerite ; ils conclurent encore à ce que la succes
sion de Jacques fût composée du quart des biens délaissés
par Marie Jarrige, sa mère, d’un tiers de sixième qu’amendoit François V e s c h a in b e s , frère d’A n n e, et décédé
ab in testa t, sans postérité, le tiers de l’accroissement
revenant à François Vcschambes dans les deux sixièmes
qu’amendoit les filles forcloses.
5
5
Cet acte du 21 octobre 1714? ne contenoit pis une
cession de droits successifs de la part de Marguerite Vescluiinbes,
�( *7 )
cbambes , mais seulement un transport d’une -somme ue^
y o fr. que Marguerite Vescbambes prétendoit avoir a
répéter. Il étoit donc ridicule que les sieur et dame de
Piçnne voulussent prétendre que ce transport faisoit cesser
M e t de la répudiation de 1712. C’est ce que repondi-^
rent Jacques Valarclier et sa,femme, et c?cst le,dernier
acte de Jacques Valai’é h e r, qui décéda bientôt après
Jeanne Valarclier, qui ne figuroit d’abord que comme,
partie intervenante, s’est subrogée au lieu et place de son
père; et en cet état, la cause portée eq. l’audience du 11
prairial an x 1 , jugement contradictoire au tribunal civil
de M urât, qui , faisant droit sur toutes les demandes,
déboute les sieur et dame de Dienne de leur demande
tendant à ce que la succession de Jacques Vescbambes
fûteomposée d’une portion des biens deFrançois; ordonne
que cette succession de Jacques sera composée, i°. du
quart des biens de Marie la Jarrige , sa ,mère et des
intérêts à compter de 1738 , époque de l’absence de Jac
ques ; 20. des biens par lui acquis , et des jouissances telles
qu’elles sont fixées par le jugement du tribunal civil du
Cantal , du 16 nivôse an 8 ; 30. de la somme de 760 f r . ,
et de la valeur d’ une bourrète pour le pr,ix de la subro
gation faite à Jacques par Marguerite Vesclnambes, sa
sœur du second lit , le 20 octobre 1 7 1 4 , avec intérêts
h compter de 1738 ; 4«. des créances que la dame de
Dienne et son mari établiront avoir été payées par Jacques
en l’acquit de la succession deFrançois , avec les intérêts
à compter de 1738 , si mieux n’aime la dame de Dienne
rendre compte des jouissances du domaine de la Buge ,
appartenant à François Vescbambes, depuis 1701 ? jour
C
5
�c« Ÿ
du bail fait par Jacques Veschambes, des biens de son
p è r e , sous la déduction de la nourriture et entretien
fournis aux frères et sœurs de Jacques ; auquel cas le
tribunal ordonne que les intérêts des créances ci-dessus
courront à compter de l’époque où elles ont été payées ;
que ceux de la créance de yôo fr. entreront dans la
masse, à compter du premier octobre 17 14 , et ceux de
la portion de la dot de Marie la Jarrige revenant à
Jacques Veschambes , à compter de la mort de Fran
çois , sauf aux sieur et dame de Dienne à tenir compte
aux Valarcher des créances dont ils justifient le paye
ment , suivant la liquidation qui en sera faite par les
experts nommés par les parties, et qui continueront de
procéder au pai’tage. Sur le surplus des demandes, les
parties sont mises hors de cause , les dépens sont com
pensés pour être employés en frais de partage.
Ce jugement est m otivé, i°. sur la répudiation faite
par Catherine Combart, comme tutrice des enfans du
premier et du deuxième l i t , le 2 mars 1700; 2°. sur
l’ordonnance du lieutenant général de Saint-Flour, du
10 avril 1701 , qui permit à Jacques Veschambes de
jouir sans qu’il puisse être réputé héritier; 30. sur la
répudiation de Jacques Veschambes, du 22 décembre
1712 ; 40. sur la sentence du 14 mars 1721 , qui renvoie
Jacques Veschambes de la demande d’un créancier du
père ; renvoi motivé sur sa répudiation ; °. sur le bail
de ferme du i avril 1700 , et sur tous les actes de Jac
ques Veschambes qui prouvoient qu’ il n’avoit jamais
voulu prendre la qualité d’héritier de son père.
Les premiers juges se fondent encore sur le principe
5
5
�Hf
( '9 )
qu’il faut être né et c o n ç u pour succéder ; et que Jacques
Vesehambes n’étant pas encore marié loi’s de sa répudia:- ,
tino, ses enfans ne pouvoient se dire héritiers de leur aïeul.
Par un autre motif du jugement, il est dit que le
transport de Marguerite Vesehambes ne peut donner
aucun droit d’hérédité, parce qu’elle n’avoit vendu qu’une
créance , et n’avoit pas même pris cette qualité.
L e tribunal civil a encore pense que Jacques Vescliambes , a ya n t r e n o n c e a la succession de son p e r e ,
n’étoit pas recevable à critiquer son testament; mais sur
la demande en rapport des jouissances faite par Jacques,
des biens de son père, il a paru aux premiers juges que
tous les enfans avoient joui en commun, et qu’il n’étoit
pas même établi que Jacques Vesehambes eût vendu et
dissipé le mobilier de son père.
Ce jugement ne faisoit pas le compte de la dame de
Dienne qui voyoit évanouir toutes ses espérances , et
elle s’est déterminée à en interjeter appel purement et
simplement; et Françoise Vesehambes et la dame Valar
cher, sa fille, se sont elles-mêmes rendues incidemment
appelantes, en ce que la dame de Dienne n’avoit pas été
condamnée à rendre compte des jouissances perçues par
Jacques Vesehambes dans les biens de François, à res
tituer le mobilier mort et v if qu’il a voit vendu ou dis
sipé ; en ce que ce jugement avoit ordonné que la somme
de 750 f r . , prix du traité du premier octobre 17 14 ,
seroit portée dans la succession de Jacques Vesehambes;
et en ce que les dépens avoient été compensés, pour être
employés en frais de partage. Les intimés ont conclu à
ce que, en émendant quant ù ce le jugement, la dame
C 2
S
�v»;
(
20 \
de D ie n n e fût Condamnée à restituer ces jouissances avec
intérêts, le mobiliër mort et v if iiussi avec intérêts; qu’elle
fût déboutée de sa demiinde relativement au second chef.
f 1‘
I
If-'
f
et qu’enfin elle fût condamnée au x dépens.
Il
fulloit bidri aussi faire statuer sur l’appel incident
interjeté par la dame de D ien n e, du jugement du 16 ven
tôse, an’ Ô, en ce qu’elle avoit été condamnée au rapport
de la somme de i 5 oo fr. , prix de la cession consentie
par Jacques de D ou et, son p è re , en 1744. On se rap•pelle que la cour avoit interloqué les parties sur ce
point ; elles ont enquêté respectivement : les enquêtes
ont été signifiées ; là dame Faucon s’est fait subroger
au lieu et placé de son Jpère; les deux appels ont été
joints par arrêt de la c o u r, et les parties en viennent
aujourd’hui sur le tout. ‘
On sent qu e, d’après l’analise de tous les actes dont
les parties argumentent respectivement, cette cause né
cessite un grand détail auquel on 11e veut pas se livrei*
dans ce moment. On se Contentera de présenter les prin
cipaux moyens des intimés, pour ¿lire confirmer le ju
gement dont est appel dans la partie qui réduit la suc
cession de Jacques Véschambes à sa juste valeur, et pros
crit les prétentions exagérées des appelans.
L e jugement de Saint-Flour , en date du 16 ventôse
an 8 , a débouté les sieur et daine de Dienne de leur de
mande en partage de la succession d’Antoine Vescliambes. Cette disposition’du jugement est indéfinie; aucune
des parties iieTa attaquée dans ce chef : il y a donc chose
irrévocablement jugée, et tftut ce que proposent les appelans à cet égard est 'plus que subtilité.
�in
#
*
c
)
Ils prétendent que, dans le motif de ce jugement, il
y est dit que les sieur et dame de Dienne n’ont pas établi
qu’Antoine Veschambes eût d’autres biens que le mon
tant de la destination à lui faite par son p è r e , et les droits
à lui échus du chef de sa mère.
Aujourd’hui on prétend qu’Antoine est héritier uni
versel de François, son p ère, en vertu du testament de
1696 : il a donc plus que la d e stin atio n qui lui avoit etc
faite ; dès-lors le dispositif doit être subordonné aux
motifs -, ot comme les sieur et dame de Dienne n’ont été
déboutés qu’à raison de ce qu’Antoine n’avoit alors que
sa légitime, ils rentrent dans leurs droits, dès qu’il en
avoit davantage.
Vouloir subordonner le dispositif du jugement aux
motifs qui précèdent, ce seroitun système nouveau. Tous
les jours on rend des jugeinens sages et justes dans leurs
dispositions, quoique les motifs puissent être critiqués :
mais ce n’est que le dispositif qui juge , qui règle les
droits des parties ; et ici la disposition est indéfinie : tout
est terminé pour la succession d’Antoine.
D ’ailleurs, les premiers juges 11’ont-ils pas dit égale
ment qu’Antoine avoit approuvé le testament de son père;
que les sieur et dame de Dienne ne pouvoient s’aider de
son chef, ni de la réduction au quart, d’après la coutume,
ni de la réduction à une portion d’enfunt moins pre
nant , d’après l’édit des secondes noces. Voilà donc d’au
tres motifs qui sufïisoient bien pour faire débouter les
sieur et dame de Dienne. Ce qu’on a dit de plus , quoique
indifférent dans la cause , n’étoit que pour fortifier davan
tage la proposition qui étoit adoptée; c ’ e s t - à - d i r e , quo
/
�les sieur et dame de Dienne étoient étrangers h la suc
cession d’Antoine Vescliambes.
Mais quand on admettroit que le motif n’est pas judi
cieux , tous les jours on confirme les dispositions d’un
jugement sans s’arrêter aux motifs ; et si la chose n’étoit
pas irrévocablement jugée , les intimés n’auroient-ils pas
un moyen plus puissant encore à opposer aujourd’hui ;
le titre universel d’Antoine Vescliambes , son appréhen
sion des biens en vertu de l’institution portée au testament
de son père , la sentence de l’élection de Saint-Flour
q u i , en cette qualité , lui a fait main-levée des saisies de
fruits, sa longue possession depuis cette époque, et enfin
la donation qu’il a faite au profit de Jacques Valarcher.
Mais les sieur et dame de Dienne prétendent que c’est
une erreur d’avancer qu’Antoine étoit héritier institué .
de son j)ère ; qu’il n’avoit qu’une somme de iooo fr. par
ce testament. A la vérité ils conviennent qu’il étoit ins
titué à défaut d’élection de la part de sa mère ; mais ils
soutiennent que la mère ne devoit élire qu’en cas de
convoi ; que le cas prévu n’est pas arrivé , puisque Cathe
rine Combart est restée veuve.
C ’est étrangement raisonner, et commenter singulière
ment un testament qui n’a rien de louche ni d’équivoque.
On voit clairement que François Vcschambcs n’a voulu
faire , au profit de sa femme , qu’une institution fidu
ciaire. A la vérité il veut qu’elle soit privée de l’hérédité
en cas de convoi ; mais, dans un cas contraire, elle doit
également rendre l’hérédité à tel de ses enfansque bon lui
semblera , sans qu’elle soit tenue à aucune reddition de
compte. Dès-lors le convoi Pobligeoit d’abandonner l’hé-
�( 23 )
l'éclîté et de rendre compte ; la viduité l’astreignoit seu
lement à la rendre sans aucun compte de gestion. Aussi
le testateur ajoute-t-il, que dans le cas où sa femme
viendroit à décéder sans avoir nommé tel de leurs enfans
pour h éritier, il veut et entend qu’Antoine Veschambes soit son héritier ; il le nomme dès à présent audit
cas et non autrement ; c’est-à-dire , en cas de décès de
sa femme sans élection. O r, Gathex-ine Combai*t est mox*te
sans élire : c’est donc Antoine qui seul a été valablement
saisi de l’institution ; et en supposant que les sieur et dame
de Dienne n’eussent été déboutés de leur demande en
partage de cette succession que parce qu’Antoine n’avoit
qu’une simple légitim e, ilfaudroit aujourd’hui les déclarer
non-recevables, dès qu’Antoine étoit héritier universel.
Les sieur et dame de Dienne, tournant toujours autour
d’un cex’cle v ic ie u x , disent qu’au moins Antoine n’a eu
de Catherine Combart, sa mèx’e , qu’une destination en
argent. C’étoit Cathexùne Veschambes , sa fille aînée ,
femme Naufaiù, qui avoit été instituée son héritière.
Si Catherine Yesclxambes a fait une cession au pi’oiit
de Jacques Valax-clier , cette cession ne comprend que
des créances des sommes elle l’estées dues -, mais qu’ im
porte au sieur et dame de D ien n e, et que peuvent-ils
avoir de commun avec Catherine Combart? d’une p a r t ,
cette dernière n’avoit porté qu’une dot m obilière, et de
l’autre, les sieur et dame de D ie n n e , qui représentent
un enfant du premier lit , ne pourroient avoir x*ien à
prétendre sur les biens Combart , qui appartiennent
exclusivement aux enfans dxx second lit.
Antoine Veschambes étoit donc le seul px’opriétaxrc des
�( M )
Liens de François. Jacques avoit répudié à la succession
de son père ; s’il a joui des biens , ce n’est point à titre
d’héritier ; il n’en a joui qu’en vertu de l’ordonnance
du lieutenant général de Saint-Flour : sa répudiation a
été produite en jugement , et lui a servi à écarter les
demandes des créaciers de son père. Depuis 1738 , c’està-dire, depuis soixante-quatre ans , Antoine Veschambes
a joui de tous les biens comme héritier : la sentence de
l’élection de Saint-Flour lui a donné cette qualité.
L a dame de Dienne a bien senti que cette sentence
étoit un obstacle invincible à sa prétention ; mais elle
prétend que cette sentence est susceptible d’être attaquée,
et elle déclare en interjeter incidemment appel. Il faut
convenir que cet appel incident est d’un grand poids
contre une sentence qui a été signifiée à Jacques Ves
chambes en 1743 , et qui n’a jamais été attaquée par lui
ni ses descendans.
On a vu également que Jacques Valarcher réunissoit tous les droits de ses beaux-frères et belles-sœurs ,
par les différentes cessions dont on a fait le détail. Les
sieur et dame de Dienne veulent écarter ces différentes
cessions par un acte du 3 mars 1710 , qui émane de
Catherine Combart ; et 011 lui fait dire qu’elle cède ses
droits personnels , ainsi que les droits et portions héré
ditaires de chacun de ses enfans, à Jacques Veschambes ,
à la charge par lui de payer une somme à chacun , sui
vant le règlement fixé par cet acte.
Mais Catherine Combart n’avoit pas qualité pour traiter
valablement des biens doses enfans; elle n’en étoit pas
même la tutrice ; elle ne prend d’autre titre que celui
de
�'
.
(
2 5
)
'
âe mère pieuse. D ’ailleurs cet acte n’a point eu d’exécu
tion ; Jacques Veschambes n’a jamais rien payé du prix ;
les sieur et dame de Dienne n’en rapportent point de
quittances, et sont dans l’impossibilité d’en rapporter;
enfin cet acte n’est qu’un simple transport de créances
que lesenfans pouvoient avoir en vertu du testament de
leur père. Jacques Veschambes n’y pi’end point la qualité
d’héritier de son pèi*e ; Catherine Combart n’y a que celle
de créancière : cet acte n’auroit donc jamais eu l’effet de
faire c o n s id é r e r Jacques Veschambes comme héritier de
François ; et la preuve qu’il n’a jamais voulu l’être, résulte
de sa répudiation et de la sentence rendue contre M e y ;
tous ces actes bien postérieurs ù la prétendue cession
de 1710.
Les sieur et dame de Dienne dissertent longuement
sur la question de savoir si Jacques Veschambes seroit
aujourd’hui non-recevable à critiquer le testament de
son père. Ils savent bien que le jugement de Saint-Flour
a encore rejeté cette prétention ; mais ils croient pou
voir revenir sur cet objet : ils soutiennent qu’il n’est pas
nécessaire d’être héritier pour demander la réduction
portée par l’édit des secondes noces. Suivant e u x , un
fils du premier lit qui a répudié à la succession de son
p è r e , peut tout de même demander le retranchement
de l’é d it, parce qu’il tient ce bénéfice de la l o i , non
comme héritier , mais comme enfant.
En lisant cette dissertation, on peut douter que la dame
de Dienne ait bien compris ce qu’elle vouloit dire. : En
effet, où pourroit la conduire cette réduction ? elle ne
conccraeroit que Catherine Combart qui scroit réduite à
D
0,
�( *6 )
#
une portion d’enfant moins prenant, et q u i , par le tes
tament de son m a ri, n’étoit elle-même qu’héritière fidu
ciaire ; mais alors cette réduction ne profiteroit qu’à l’hé
ritier institué, et cet héritier , c’est Antoine Veschambes.
Jacques qui avoit répudié à la succession de son père,
ne pou voity rien prétendre ; la dame de Dienne n’amendoit rien du chef d’Antoine : c’est encore une chose jugée.
L a cession de Marguerite Veschambes , troisième du
nom , ne oontenoit qu’un transport d’une créance de
y o fr.; ainsi tout ce qu’a dit la dame de Dienne sur ce
point, est une énigme dont on attend la solution ou h
m o t, lorsqu’elle donnera plus de développement à ses
moyens.
Vient l’appel incident de la dame Valarcher et de sa
fille. L e jugement dont est appel a dispensé la dame de
Dienne de restituer les jouissances que son père avoit
perçues dans la succession d’Antôine Veschambes. Elle
est également dispensée de la restitution du mobilier
mort et v if, ainsi que des intérêts du tout. Cependant
il est reconnu par toutes les: parties que Jacques Ves
chambes a joui de tous les biens de son père; qu’il a
vendu et dissipé une portion des immeubles ; qu’il a
également dilapidé le mobilier mort.et vif, et qu’il s’en
fit une ressource , lors de son é v a s io n .
La dame de Dienne même se fait un moyen de la
jouissance de son père, pour soutenir qu’il étoit héritier.
Les intimés prouvent au contraire, soit par la répu
d i a t i o n personnelle de Jacques Veschambes, soit par
l’ordonnance du lieutenant général de Saint-Flour, soit
enfin par la sentence rendue contre M e y , créancier de
5
�«1-2&
\
'
( 27 )
la succession de François Veschambes, que la jouissance
de Jacques n’étoit que précaire ; qu^il n’a possédé ces
biens que sous le prétexte qu’il étoit créancier; et dèslors il en doit nécessairement la restitution, sauf la comr
}
pensation jusqu’à due concurrence , avec les créances
qu’il pourrait avoir acquittées; et il est prouvé qu’il n’en
avoit payé aucune.
' P a r quelle fatalité les juges dont est appel n’ont-ils
donc pas adjugé cette restitution de jouissance, ainsi
que celle du m obilier?
'
1
Ils ont donné pour motif qu’il paroissoit que tous les
enfans avoient joui en commun. Mais, i°. rien n’établit*
cette jouissance commune; il n’y avoit pas même de;icrt-fT
habitation entre les parties. 20. Eli Vdmett.-ùnt 'cette co
habitation , tous les enfans étoient d’un fige à gagner
leur nourriture et entretien , surtout dans la condition
des parties. Il est d’ailleurs établi que Jacques V es
chambes seul avoit ailcrmé‘les'biens ; que le •prix de la
ferme étoit délégué à ses créanciers'personnels , notam
ment au sieur Dusaillant. Le'prix des ventés par lui con
senties a également tourné ù son profit. Ce bail à cheptel
de 1738 prouve encore que Jacques Veséhîimbes avoit
vendu tous les bestiaux. :L a disposition du j u g e m e n t est
donc erronée et injuste en cette partie. E t certes ! si
quelqu’un peut invoquer1 là faveur dans iine cause' de
ce genre , elle serait toute pour ce cohéritier soigneux
et diligent qui a payé les dettes, traité' avec le père de
la dame de Dienne, sur la foi de s;6h 'c o n tr a t de ma•
•
'
f*
n a g e , et qui, quarante ans après, se voit assailli d'une
! ’
*
*
•
•
|
�[ 28 )
demande qui a tout l’odieux d’une vieille recherche ,
absolument sans intérêt.
Les intimés n’ont-ils pas à se plaindre aussi de ce que,
sur une demande exagérée qui tend à revenir contre
la chose irrévocablement jugée, qui a occasionné des
frais aussi considérables, les dépens aient été compensés
pour être employés en frais de partage.
Cette-espèce de compensation fait que chacun supporte
les dépens dans la proportion de son amendement, et
il en résulte que la dame de Dienne n’ayant qu’une
portion très-exigu ë à réclamer dans la succession de
Jacques Yeschainbes, son aïeul, succession qui par ellemême est déjà très-modique, feroit supporter aux intimés
la,presque totalité des dépens qui au moins doivent être
la peine du plaideur téméraire.
, Reste l’appel incident interjeté par la dame de Dienne,
du jugement de Saint-Flour, du 16 ventôse an 8 , qui
l’obligeoit au rapport de la somme de i oo francs,
reçue par son pèi*e. Cet appel ne fait pas honneur à
la délicatesse de la dame de Dienne ; elle ne pouvoit
se soustraire à ce rapport qu’en répudiant à la succession
de son père. En même temps qu’elle attaque la répu -'
diation de son aïeul, et qu’elle veut prouver qu’il est
héritier, elle n’honore pas assez la mémoire de son père,
pour accepter sa succession ; elle veut qu’il soit mort
ir. solvable. Cependant elle s’est emparée de son mobi
lier , de ses armes ; on a vu son mari revêtu de l’habit
écarlate qu’avoit porté défunt son père. O r , d’après
Duplcssis , il n’en faudroit pas autant pour la faire
répu ter
5
�4 «.
U )
( 29 )
réputer héritière. A u surplus, la discussion des enquêtes
respectives apprendra à la dame de Dienne qu’elle auroit
dû au moins s’éviter ce désagrément, et qu’elle ne peut
se dispenser du rapport qu’on lui demande? auquel elle
a été si justement condamnée.
M e. P A G E S ( de R io m ) , ancien avocat
Me. B R U N ,
avoué.
//fcfc f^ r ,-----<*■
S w
Ÿ/~~JtOfc
A R IO M , de l'im primerie d e L a n d r i o t , seul im prim eur de l a
C our d ’appel.
_
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Veschambes, Françoise. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Brun
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
experts
longues procédures
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher ; Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon, son mari, intimés et incidemment appelans ; contre sieur Vital de Dienne et dame Jeanne-Marie de Douhet, son épouse, appelans d'un jugement rendu au tribunal civil de Murat, le 11 prairial an 11.
Arbre généalogique
Notation manuscrite : 3 ventôse an 13, 1ére section, jugement, après délibéré, statue sur infinité de questions soulevées dans les plaidoiries, et même pendant le délibéré, après production d'une grande quantité de titres et pièces, fixe les droits des parties dans diverses successions et détermine les bases du partage, rapports et prélèvements. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1604
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1603
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53278/BCU_Factums_G1604.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
experts
gain de survie
généalogie
homicides
longues procédures
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53277/BCU_Factums_G1603.pdf
dbc8525fe9fbb08694164f53f67f527a
PDF Text
Text
PRECIS
COUR
D ’A P P E L
P O U R
SÉANTE
Sieur V i t a l D E D I E N N E , et dame J e a n n e - M a r i e
D E D O U H E T son épouse, appelans
C O N T R E
F
C
,
V E S C HA M B E S
veuve de Jacques
V a l a r c h e r , J e a n n e V A L A R C H E R , et A n
t o i n e F A U C O N son mari, intimés et incidemment
appelons.
rançoise
ette
contestation est la suite d ’une précédente, jugée par arrêt
de cette c o u r , du 2 thermidor an 8. Elle est tellem ent hérissée
d ’actes, q u ’on a cru ne pouvoir se dispenser d ’en présenter, avant
l ’audience, un aperçu.
François V esch a m b e s , bisaïeul des p a r t ie s , étoit propriétaire
d un domaine appelé de la B u tg e , de valeur aujourd’hui de plus
de 60000 francs.
A
A RIOM.
�'iV
f i )
II s’est m arié en prem ières noces avec M arie Jarrigo.
D e ce mariage sont issus quatre e n fa n s, Jacques, représenté
par les appelans, Jean, M arguerite i " . , et M arguerite 2'. du nom.
D e ces quatre enfans il en est décédé un avant le père, qui n ’en
rappelle en effet que trois dans le testament.
11 a contracté un second mariage avec Catherine C om bard.
D a n s ce contrat de mariage il com m ence par reconnoître à sa fu
ture épouse la som m e de 2700 francs; il réglé ensuite la légitimé
des enfans <ju premier lit. Il destine à Jacques Vescham bes une
som m e de 1000 f r . , à M arguerite 1” . du n o m , pareille somme
de 1000 f r a n c s , à M arguerite 2'. une somme de 700 fr a n c s , et
à Jean celle de 600 francs. 11 prévoit le cas où il décéderoit avant
son épouse; audit cas il lui assure et donne la jouissance d ’une
cham bre dans la m a i s o n , garnie de meubles nécessaires, et la
jouissance de la moitié de ses biens , tant qu ’elle demeurera en
•viduité. P ar une autre c la u s e , il donne par preciput et avantage
a u x enfa ns, est-il d i t , q u i proviendront du présent mariage, au
premier, soit f i l l e ou garçon, de son c h e f la somme deSooofrancs,
et a u x autres la somme de 1000 fra n cs. Il est enfin stipulé un gain
de survie réciproque de 100 francs.
D e ce mariage sont issus cinq enfans^ C ath erin e mariée au
sieur N a u f a r i, A n t o in e , P ierre , tf.onc*ww e , et M arguerite 5 '. du
nom mariée au sieur Roche.
L e 4 m ars 169G , testam ent par lequel il rappelle et confirm e
les destinations déjà faites aux enfans du prem ier lit dans son
second co n trat de m ariage.
Il lègue à A n to in e et C atherin e
•Veschambes , deux, des enfans du second lit , une som m e
de 1000 fr a n c s , et aux autres Irois 700 irancs seulem ent. V en an t
ensuite à l ’institution d ’h éritier, il déclare q u ’il nom m e pour son
héritière générale et universelle Catherine C om bard son épouse;
«V eut et entend que son héritière générale et uni verselle, C atherine
aC o m b a rd
son épouse, n o m m é e , soit privée de l’hérédité en cas
; m ais bien
sem b lera , sans
» q u ’elle vienne à convoler à de secondes noces
rendre
» l ’héréditc à tel de scs enfans que bon lui
qu ’elle
�YS
(3)
n soit tenue à aucune reddition de com pte; et quand la demoiselle
» Com bard viendroit à décéder sans avoir nom m é tel de leurs en» fans pour h éritier, veut et entend que ledit A n to in e Vescliam bes
» soit son vrai héritier qu ’il nom m e pour héritier des à présent
» audit cas et non autrement ; mais au choix et option de ladite
» C om b a rd d ’en nom m er un autre tel que bon lui s e m b le r a , ainsi
» que dit est. »
O n voit q u ’A n toin e n ’étoit no m m é qu’ à défaut d ’d c c tio n ; et la
veuve elle - mêm e n ’étoit tenue de remettre 1 hérédité, et d é lir e
entre les e n f a n s , q u ’en cas de convoi.
L e cas prévu n ’est point arrivé; Catherine C o m b a rd a demeuré
en viduité.
L ’institution faite en faveur de la veuve étoit susceptible d ’une
double réduction,
i°. L e s biens étant situés en pays de co u tu m e , elle ne pouvoit
avoir effet que pour le q u a r t, d ’après la disposition de la C o u tu m e ;
elle étoit de plus réductible à la portion d u moins prenant des
e n f a n s , d ’après l’édit des secondes noces.
F r ançois
cscham bes. est m o r j ^ I ç ^ f é v r i e g 1700.
Jacques V escfîam bes, enfant du premier li t , s’est marié en 1707
avec Geneviève la Vaissière.
En 1710 Catherine V esclia m b e s, une des filles du second l i t ,
a contracté mariage avec Jean N au fari, P ar leur contrat de mariage,
ladite C atherine C om b a rd l’a instituée son héritière générale et.
universelle, à la charge de payer aux autres enfans du second l i t ,
savoir, à A n to in e et Pierre V escliam bes, la somme de 200 fr a n c s ,
et aux autres la somme de 5 oo francs.
En 1738 Jacques V escliam bes, fils du premier li t , m arié avec
Geneviève la V a is s iè r e , fut prévenu d ’un homicide. Il fut obligé
de se réfugier en Espagne. 11 paroît qu ’il y eut une procédure cri
minelle instruite par contum ace, qui n ’existe plus. Il n ’en reste de
traces que dans un acte du 10 janvier 1757 , produit par les ad
versaires, par lequel le sieur de M o n t - Boissier, seigneur hautjusticier de la terre de C h e y la d e , fait remise et abandon à F ran A 2
�«
(4)
çoise Vescham bes et à Jacques V alarclier, du droit qu'il avoit aux
biens de Jacques V e s c h a m b e s , en conséquence du jugement de
m ort rendu par contum ace en la justice de C h e y la d e ; jugement
dont la date est en blanc.
1
Jacques Vescliam bes m ourut peu de temps après, dans les cinq
années de la contumace.
Il avoit eu de son mariage avec Geneviève la Vaissière six enf a n s , cinq filles, et un m â le , François 2*. du nom , qui n’ a pas
survécu long-temps à ses père et mère.
D e s cinq fille s, d e u x , Michelle et C a th e rin e, ont été mariées
du vivant du père avant le fatal.événem ent dont on vient de parler ;
par conséquent forcloses.
D e s autres trois fille s, l ’a în é e , Françoise V e s c lia m b e s , s’est
mariée avec Jacques V alarcher. C e sont les auteurs des intimés*
L a seconde, M arguerite , s’est m ariée en 1744 avec D a u sa t,
après la m o rt du père.
L a troisième, A n n e V e s c h a m b e s , s’est mariée avec D o uh et.
L e contrat de m ariage d ’A n n e V escham bes est du 16 juillet 1 7 4 4 :
elle étoit majeure.:.P.ar..ce contrat, de m j n a g n e l l e çlgnnajiouvoir
au mari de traiter, transiger, de ses biens d o ta u x , les partager,
mais non de vendre.
L e 20 du m êm e môis de juillet 1 7 4 4 > -^nnc V esch a m b es, sous
l ’autorisation de D o u h e t, son m a r i, et celui-ci en vertu dù pou
v o ir , est-il d i t , à lui donné par son contrat de m a riag e, cédèrent
et transportèrent à Françoise V e s ch a m b e s, et V alarcher son m a ri,
tous les droits que ladite Anfte V escham bes pouvoit avoir tant en
son nom que com m e héritière en partie de François 2”. du nom ,
son frère, dans les successions desdils Jacques V escliam bes et G e
neviève V aissières, et encore dans celle de François Vescham bes
1 " . du n o m , m oyenn an t la som m e de i 5 oo francs.
Peu après ce traité mourut A n to in e V escham bes, fils du second
lit de François.
A v a n t son décès il avoit fait deux dispositions en faveur de la
m êm e Françoise V esch a m bes, fem m e V alarch e r, qui s’etoit mise
à la tête de la maison.
�*
*î
( 5)
r P a r un premier acte du 14 ma* 1 7 4 4 > ^ lui fit donation de'tous
les droits, est-il d i t , à lui acquis tant par le testament de défunt
F ran çois VeScham bes, son père, qui l ’y n o m m a pour son héritier,
que par le décès de Catherine C o m b a r d , sa m è r e , et par s,es dis
positions portées dans le contrat de mariage de Catherine V e s •chambes, sœur du do nateur, avec d é fu n t N a u fa r i, nom s, raisons
«t actions rescindantes et rescisoires, sous la réserve d ’une somme
de io o o fr. à disposer.
P a r un second acte du 50 octobre 1 7
il disposa de cette
com m e d e 1000 fr . eneore en sa faveur.
A n n e V es clia m b e s, et D o u h e t son m a r i, qui avaient cédé leurs
droits par l’acte du s 5 juillet 1744> o n t eu f^e
mariage une
fille, Jeanne-M arie D o u h et , qui s’est m ariée avec V it a l de D ienne.
C e sont les appelans.
!
C e tte cession du 23 juillet 1744 ¿toit évidem m ent nulle. D o u h e t ,
par le contrat de m a riag e, avoit pouvoir de transiger, p artager,
m ais non de vendre.
En l’an 6 , ladite D o u h et et ledit V it a l de D ienne ont fait citer
au tribunal civil du C a n ta l ladite Françoise V esclia m b e s, et V a larcher son m a r i , en nullité de ladite cession, en partage de la
succession de Jacques V escliam bes et Geneviève la Vüi&sière, et
encore en partage de la succession d ’A n to in e V escliam bes 1 " . du
n o m , pour leur en être délaissé la portion qu ’A n n e V e s clia m b e s,
leur mère et b e lle -m è re , am endoit dans lesdites successions, soit
de son c h e t , soit du ch e f de François 2*. du n o m , son f r è r e ,
décédé ab intestat .
C o n tre la demande en partage des successions de Jacques V e s cham bes et Geneviève V aissiè re, les adversaires ont opposé la ces
sion. Ils ont soutenu que ce lle cession ne p o m o it être raisonnable
m ent attaquée, s o it d ’dprès le pouvoir donné par A n n e Vescliam bes,
alors m ajeure, à D ouhet son m a r i , dans son contrat de m ariage,
de traiter et transiger, soit d ’après le laps de temps qui s ’éloit
écoulé depuis la cession. Ils ont ajouté q u ’ils ne tenoient point
d ailleurs les biens co m m e héritiers de Jacques Vescliambes ; qu’ils
�H
C 6 )
r e jouissoient point à tilre d ’héritiers, q u ’ils jouissoient en vertu
île l’abandon fait en leur faveur, par le seigneur haut-justicier, de
l ’effet de la confiscation résultante du jugement rendu par contu~mace.
'•
Ces moyens ont été facilem ent écartés.
1
C on tre la demande en partage de la succession d ’A n to in e V e s ch am bes, ils ont rappelé le testament de François. Ils ont dit que
François par son testament avoit institué Catherine C o m b a rd
pour son héritière, et destiné à A n to in e une somme de 1000 francs;
q u ’A n to in e avoit ensuite disposé en leur fa v e u r , par les deux
donations ci-dessus, du m ontant de ladite destin ation, ensemble
de tous les droits à lui échus par le décès de Catherine C o m b a r d ,
desquels droits faisoit partie l’institution testamentaire faite en.
faveur de ladite C o m b a rd par François ; qu’A ntoine n ’avoit pas
d ’autres biens.
L e s sieur et dam e de D ien n e ont répondu que l’institution faite
en faveur de Catherine C o m b a rd étoit doublement réductible; que
la donation des droits échus par le décès de Catherine C o m b a rd
ne pouvoit dès-lors porter sur tous les biens de François.
A
quoi il a été répliqué par V escham bes et V alarch e r q u ’A n
toine leur ayant fait donation du m ontant de la destination à lui
faite par le testament du pcre , il étoit non-recevable, et les sieur
et dame de Dienne de son c h e f , à s’aider de la réduction, soit de
la C o u lu m e au quart, soit du retranchement de 1 edit des secondes
noces ; que si on prétcndoit q u ’ Antoine eût d ’autres biens on devoit
l ’établir. C e sont les propres termes de leur défense consignée dans
le jugement.
En cet état, jugement est intervenu au tribunal civil du Cantal
le iG ventôse an 8 , q u i , en ce qui concerne la demande en partage
de la succession de Jacques V escham bes et Geneviève la Vaissière,
a déclaré la cession du 35 juillet 1744 'm ile; a ordonné le partage
des biens dépendans de la succession de Jacques V escham bes et
Geneviève la V aissière, avec restitution des jouissances depuis lo
d é c è i , à l'exception des années pendant lesquelles avoit duré lo
�C i)
mariage dudit D oülict arec ladite A n n e V escliam bes, à la charge
de rapporter la som m e de i 5oo fr a n c s, prix du traité, perçue par
ledit Douliet.
- E t en ce qui concerne la succession d ’A n t o in e ;
»
A tten d u qu’ A n to in e ayant approuvé le testament de François
Vescfïam bes i*r. du n o m , en disposant de la destination à lu i
faite en faveur des défendeurs , les sieur et dame de D ten n e
ne pouvant s ’aider de son c h e f, n i de la réduction au quart>
d’ après la Coutum e, n i de la réduction a la part du\moins
prenant des en fa n s , d’ après l ’ édit des secondes noces ; que^ les
demandeurs n ’ont p oin t établi que ledit A n to in e eût d’ autres
b ie n s, que le montant de la destination à lu i fa ite par son p ère ,
e t les droits à lu i échus du c h e f de sa m ère , de tout quoi il a
d isp osé en faveur des défendeurs ; a débouté les sieur et dam e
de D ie n n e de leur demande.
: ,
Françoise V escham bes et V alarch er ont appelé de la première
partie du ju g e m e n t, qui ordonnoit le partage des successions des
dits Y esch am bes et la Vaissière.
y.
L e s sieur et dam e de D i e n n e , de leur c ô t é , se sont rendus in
cidem m ent a p p e la n s, en ce q u ’ils avoient été condamnés à rap
porter et faire compte de l ’entier prix du traité de 1744» prix
perçu par ledit D o u h e t , à la succession duquel ils avoient renoncé.
Ils auroient pu aussi interjeter a p p e l, en ce q u ’ils avoient été in
définiment déboutés de la demande en partage de la succession
d ’A n to in e à défaut d ’indication de biens , tandis qu ’ils auroient
d u etre déboutés seulement quant à présent. Ils crurent cet appel
sans objet. Ils étoient loin de prévoir la contestation qui leur a
été suscitée depuis.
Sur les appels re sp e ctifs, arrêt est intervenu le 2 thermidor
an 8 en cette c o u r , par l e q u e l,
E n ce qui louche l ’appel incident des sieur et dame de D ie n n e ,
attendu l’articulation fai le par 1rs adversaires , que lcsdits de
D ienne avoient fait acte d ’ héritier dudit D ouh et en s’emparant
du m o b ilie r , a o r d o n n é , avant faire d r o i t , la preuve de l'im
mixtion.
�X s )
Faisant droit sur l’appel principal de Françoise Vescham bes et
V a la r c h e r , a dit avoir été bien jugé.
Vescham bes et V alarch er se sont pourvus en la cour de cassa
tion contre la disposition de Jarret qui les blessoit, mais inuti
lem ent. *
N ’ayant pu réussir de ce c ô t é , ils ont cherché à venir à leur
bu t d ’une autre manière.
»
« Ils ont p r o d u it ,
i°. U n e r e n o n c ia tio n , ou actes énonciatifs d ’une renonciation
faite après la m ort de François Vescham bes par Catherine C o m b a r d , tant pour ses enfans que pour ceux du premier lit , à la
succession dudit V e s c h a m b e s , par acte reçu au greffe de la jus
tice de C h e y la d e , le 2 mars 1700;
20. U n bail à fe rm e consenti par Jacques V esch a m b e s, n onob
stant ladite renonciation du dom aine de la B u t g e , dépendant de
ladite succession, le i 5 avril 1700;
5% U n e ordonnance sur requête du juge de C h eylad e , du 10
avril 170 0 , qui autorise Jacques V escham bes à jouir des b i e n s ,
sans qu'on puisse en induire aucune qualité préjudiciable ;
4“. U n e vente d u 19 avril -1708, faite par ledit Jacques V e s
c h a m b e s, de trois septerées de terre dépendantes de la succession,
m o yenn an t la som m e de 560 fr. ;
5 °. U n acte du 22 décem bre 17 12 , reçu au g reffe de la m êm e
justice de C h e y la d e , par lequel Jacques V escham bes déclare ap
prouver la renonciation faite par Cath erin e C o m b a rd le 2 mars
170 0, pour, et en son nom ;
6°. U n e sentence du 14 m ars 1721 , rendue contre un créan
cier q u i , en conséquence desdites renonciations , congédie V e s
chambes des poursuites faites contre lui , s a u f au créancier scs
actions contre le curateur nom m é à la succession va ca n te , nomination qui est rappelée dans le vu de la sentence;
7 9. U n acte de ch eptel, du i ,r. octobre 1758, par lequel, après
la disparition de Jacques V escham bes , ses e n fa n s , et A n to in e
et Pierre V e s c h a m b e s , scs f r è r e s , fils du second U t, déclarent
avoir
�r 9 )
nvoir pris à li Ire de cheptel vingt-quatre va ch e s, et autres lêtes
de bestiaux pour garnir le d o m a in e;
8°. D es reçus de re n ie s , et extraits des rôles d'impositions
jusqu'en 1 7 ^ 7 ;
'
1
9°. U n e requête présentée par A n lo iiic Vcscîiàm bes a 1 éjection
de S a in t-F lo u r , le i 5 février 1 7 4 3 , ’daris laquelle il a exposé que
les percepteurs des années 1758 , 1759 et 174° »voient lait saisir
sur Jacques Y escham bes , faute de’ payement des impositions-,- les1
ir.uils pendans par r a c in e , desquels fruits ils s étoîent' rendus ad
judicataires co m m e des biens dudit Jacqües V e s c h a m b e s , ignôrant’
le testament de François Vescham bes , par lequel il avoit été ins-i
titué héritier ; q u ’il venoit de découvrir ce testament ; qu’étànt
héritier il ne pouvoit être adjudicataire de sa propre chose ; qu ’e n 1
¿onséquence il demandoit à être déchargé du prix de l ’ adjudica»-;
lion ; requête suivie de sentence adjudicative des coirclliSiohs, dû
22 du m êm e m o i s , rendue par d é f a u t , tant contre les consuls
que contre Jacques V escham bes.
De
tous ces actes
ils ont
.
conclu que Jacques
V esch a m
bes n^avoit absolument aucun droit sur les biens d e . Françoi'Sj
i ' \ du nom ; que , par s i renonciation et par lèi tèstament
de François , testament qui
avoit été- confirmé
par la sen
tence de l’élection de S a i n t - F l o u r , tous les biens etoient sur
la tête d 'A n to in e , dans la succession duquel A n to in e les sieur
et daine
de D ienne n ’avoienl rien
à réclamer , puisque , par
le m êm e jugement dont ils poursuivoient l’ex é cu tio n , ils avòient
été déboutés de leur deniimde en partage à cet égard ; que dèslors il ne d e v o i t e n t r e r dans le partage ordonné de la succes
sion de Jacques^STilnn>l w
que ses biens personnels , c ’est - à -
d ir e , les biens par lui a c q u is , consistant en un petit domaine
appelé de la C o s t e , et aucun de ceux ayant appartenu à F ran
çois. A insi
les biens
qui d ’abord ,
pouvoir s ’aider de la cession du
et
tant q u ’on
22 juillet
avoit
cru
1 7 4 4 , éloient sur
la tête de Jacques V e s c h a m b e s , se sont trouves (oui à coup
snr la tête d ’Antoine.
B
�i l
( 10 )
D e ces mêmes actes ils ont inféré de plus, i°. que Jacques V e s chambes ayant constam m ent joui, et n ’ayant joui que com m e créan
cier , sa succession étoit comptable de toutes les jouissances par
lui perçues jusqu’en 1738 , s a u f à lui faire raison de ses créances;
2°. Que la succession étoit pareillement comptable de la valeur
des fonds q u ’il avoit aliénés;
5 °* Q u ’elle étoit également com ptable du m o b ilie r , et notam
m ent du cheptel qu ’il avoit dissipé ; que le cheptel avoit été
tellement dissipé, qu ’après sa fuite ses enfans et ses frères avoient
été obligés de prendre d ’autres bestiaux à cheptel pour garnir
le dom aine.
L e s sieur et dam e de D ien n e
ont rép o n d u que la renon
ciation avoit été sans e f fe t , puisqu’il résultoit des pièces m êm es
produites ' par les adversaires q u e , nonobstant la renon ciation,
il avoit v e p d u , a f f e r m é , et constam ment joui.
Ils ont dit que quand on donneroit à la renonciation tout
son e f f e t , il auroit acquis un nouveau droit par les cessions ou
par
le décès ab intestat de presque tous les enfans
tant du
premier que du second lit.
Ils ont produit un acte du 21 octobre 1714» par lequel
M arguerite ,y e s c h a m b e s , autre fille du second l i t , en approu
vant , est-il d i t , tous actes c i - d e v a n t fa its.e t règlemens de ses
d r o its , cède et transporte audit Jacques V escham bes tous sesdits droits , parts et portions èsdites successions de ses défunts
père et mère et autres q u elco n q u e s, m o ye n n an t la somme de
750 fr. et une bourète de ¡vache; a u ( m oyen de quoi elle quitte
et renonce auxdites
successions > et ià toutes
autres
directes
et collatérales échues et à échoir g é y ^ ’alerrrrrtt quelconques.
E n cet é t a t , Jacques Y a la r ch e r est décédé. Françoise Vescham bes , sa femme , a repris l’instance. Jeanne V alarchcr et
A n to in e F a u c o n , ses gendre et fille , sont interven us, et ont
adhéré aux conclusions prises par leur beau-père et belle-mère.
Ils ont répondu à
l’acte du 21
octobre
1714 , produit par
les sieur et dam e de D i e n n e , que cet acte étoit nul
com m e
�<*>£■
( «
/
)
contenant une renonciation à des successions échues et à é c h o ir ,
uniquo pretio.
L a cause portée à l ’audience , jugement est intervenu le 8
prairial an 1 1 , contradictoire entre les p a rtie s, doht voici les1
principaux motifs et le dispositif.
‘
« A tten d u , est-il dit , enlr’autrés motifs , que Jacques Y e s » cliambes ayant renoncé à la succession de son père, ses en'ans
» ne peuvent pas prendre sa place et succéder à leur aïeul.
» ï°. Jacques V esch a m bes n ’étoit pas marie a 1 époque de la
» m o rt de son père ; il ne s’est m arié q u ’en 1 7 0 7 , et son père
» étoit m o rt avant le 2 mars 17 0 0 ; ses enfans n ’étoient à cette
» époque ni nés ni c o n ç u s , et la renonciation de Jacques V e s » chambes ayant un effet rétroactif au m om ent de la m ort de son
» père , ses enfans ne pouvoient pas venir à la succession de
» leur aieuli 20. L e s enfans de Jacques ne pourroient venir à
» la succession de leur aïeul que par représentation de leur
» père : il est de principe consacré par une jurisprudence irrévo» cable , qu ’on ne représente pas une personne vivante.
» A tten d u que par l ’acte du 21
octobre 1 7 1 4 » passé entre
» Jacques Vescham bes et Marguerite sa sœur , du second l i t ,
» par lequel ladite Marguerite a renoncé aux successions de ses
» père et mère , et autres collatérales échues et à échoir , au
» profit
de
Jacques ,
m o yenn an t 760 fr . et
une
bo u rète,
>> ladite M arguerite a déclaré q u ’elle avoit fait des actes , par
» lesquels elle avoit réglé ses droits successifs dans lesdites suc» cessions; que la
som m e de y 5 o fr,
» légitime portion dans
les biens de
étoit sa
juste part
sesdits père
et
et
mère ;
» pour avoir une parfaite connoissance de leur co n sista n ce , et
» qu ’en subrogant par le m êm e
acte sondit frère à tous ses
» droits , pour par lui en avoir son recours sur lesdites succcs» sions , ainsi qu’il aviseroit, elle ne lui a point cédé scs droits
» rescindans et rescisoires, d ’où il résulte q u ’il n ’a e u , en vertu
* de cet acte de 1 7 1 4 » d ’autres droits que celui de demander
B 2
�(' «
)) à la succession de son
père la
)
somme
de 7 5o
fr. , et la
» bourète.
» A tten d u
q u ’ayant renoncé à la succession de son père ,
v Jacquçs Vescham bes s.eroit aujourd’hui non-recevable à criti—
» quer le testament dè son p ère ; et que cette fin de non-rece» voir ne peut être valablement opposée à un héritier repré;> sentant ledit Jacques.
» L e tribunal déboute les sieur et dame de D ien n e de leur de» m ande tendante à .ce que la.succession de Jacques V escham bes
» soit composée d ’une portion des biens de François Y escham bes :
» ordonne que la succession de Jacques Y escham bes sera com posée,
» 1°. du quart des biens de M arie la Jarrige sa m è r e , et des inté-
» rets à compter de 1 7 5 8 , époque à laquelle Jacques V escham bes
« s’est absenté, et a cessé de jouir en com m un des biens de F ra n » cois son, père; 20. des biens par lui acquis,, des jouissances telles
» q u ’elles sont fixées par le jugement du C a n tal , du iG ventôse
» an 8 ; 5°. de la somme de 7^0 fr. et de la valeur d ’une bou» r è t e , pour le prix de la subrogation à lui faite par M arguerite
» V e s c h a m b e s , sa sœur du second l i t , par l’acte du 21 octobre
» 171/f, avec intérêts à. compter de 17 3 8 ; 4 “. des créances que
» les parties de D u bois établiront avoir été payées par Jacques
» en l’acquit de la succession de François V escham bes , avec les
» intérêts à compter de 1 7 5 8 , si mieux n ’aiment les parties de
» D u bois rendre compte des jouissances du domaine de la B u lg e ,
» à compter de 1701 , jour du bail fait par Jacques Vescham bes
a des bienç.fje spn( p è r e , à la. déduction des nourriture et entre» tien des frères et sœur dudit Jacques; auquel c a s , le tribunal
)i ordonne que les intérêts des créances ci-dessus entreront dans
» 1.) tuasse de la succession de Jacques V es ch a m b e s, à com pter
» de l’époque où elles ont été pavées par ceux de la créance de
» 760 fr. et dç la valeur de la bom ète , et entreront dans la
» n ia s s e , de ladite successiot) à çpmptv«’ du 21 octobre 1714 , et
» ceux de la portion de la dot do Marie la Jarrige revenant à
» Jacquts V e s c h a m b e s , à compter de la m ort de François V e s -
�» c h a m b c s , sa u f aux demandeurs à lenir compte aux défendeurs
» des créances que ceux-ci prétendent et justifieront avoir payées
» en l’acquit de Jacques V e s c h a m b e s, suivant la liquidation qui
» en sera faite par les experts qui seront nom m és , et c e , sur les
» pièces que les défendeurs leur remettront : sur le surplus des
» d e m a n d e s, m et les parties hors de c o u r , dépens compensés. »
L e s sieur et dam e de D ienne ont interjeté appel de ce juge
m ent par acte du 6 germinal. L a veuve V alarcher s ’est rendue
aussi appelante par acte du 14 du m êm e mois , en ce que toutes
les conclusions par elle prises ne lui avoient pas été adjugées.
P endant que les parties étoient ainsi en instance au tribunal
de M u r â t , pour fixer la consistance de la succession de Jacques
V e s c h a m b e s , dont le partage a été ordonné par l’arrêt de celle
c o u r , du 2 thermidor an 8 , confirm atif à cet égard du jugement
de S a in t-F lo u r,
elles exécutoient l’autre disposition du même
a rrê t, q u i , avant faire droit sur l'appel incident interjeté p a r le s
sieur et dam e de D ien n e du jugement de S a in t-F lo u r, en ce que
par ce jugement ils avoient été condamnés à rembourser la somme
de i 5 oo f r . , prix du tra ité , nonobstant la renonciation faite à
la succession de D o u h e t , avoit ordonné une enquête sur le fait
d ’imm ixtion. 11 a été procédé de part et d ’autre devant le tri
bunal de M u r â t , com m is à cet e f f e t , à l’enquête et contreenquête.
L a cour a ainsi à statuer sur trois appels:
i°. Sur cet appel in cid e n t;
2°. Sur le nouvel appel interjeté par les sieur et dame de D ienne
du jugement de M u r â t , dont on vient de rendre co m p te;
E l sur l’appel incident de ce m êm e ju g e m e n t, interjeté par la
veuve V alarcher.
L e lout a été joint par arrêt du oo germinal dernier.
On ne s’occupera point ici du premier de ces trois appels; il
suffira de discuter à l’audience le mérite des enquêtes.
O n ne s’occupera que de l’appel respectivement interjeté par les
pnrlies du jugement de M urut , cl on ne proposera m êm e que
quelques réflexions.
�■ l*
( H
)
Depuis leur appel, les sieur et dame de D ie n n e , par la com
munication q u ’ils ont prise des pièces des adversaires, et par la
recherche des actes énoncés dans ces pièces , ont eu connoissance,
i°. D ’un acte passé entre Jacques V escham bes et Catherine
C o m b a rd le 3 mars 1710. Par cet acte , Catherine C o m b a r d ,
tant en son nom propre et privé que com m e m ère pieuse de ses
e n fa n s, et dudit François V e s c h a m b e s , a subrogé ledit Jacques
Vescham bes aux droits et hypothèques, part et portion que sesdits
enfans pouvoient prétendre sur la succession de leurdit défunt
p ère, soit par la destination portée au contrat de mariage de leur
feu père avec ladite C o m b a r d , qu’ autrem ent ; sa vo ir, pour C a th e
rine V e s c h a m b e s , fille a în é e, la som m e de 800 f r a n c s , et en.
p ayem ent d ’ic e lle , la maison , jardin et hérial , quatre brebis
et quelques m eub les; pour M arguerite et Françoise V e s ch a m b e s,
la somme de 600 fr. ch a cu n e ; et pour A n to in e et P ie r re , celle
de 55 o fr. chacun. L ad ite C o m b a rd , traitant ensuite de ses
droits personnels, cède et transporte audit Vescham bes tous ses
d ro its, est-il d i t , actions e t prétentions qu*elle a par préférence
sur les biens de Vescham bes son m ari, en quoi qu'ils consis
tent ou puissent co n sister, e t , par e x p r è s , le m ontan t de ses
conventions matrimoniales rappelées dans l’ acte , m o yen n an t la
som m e de 2700 fr. , dont partie est payée co m p ta n t, et le surplus
stipulé payable à terme. C e t acte a été découvert depuis l’appel'.
20. D u contrat de C atherine V esch a m bes l’alnée des enfans
du second l i t , du 14 mars 1 7 1 0 , par lequel elle se constitue par
exprès la maison , jardin et hérial à elle délaissés par le précédent
acte ; ce qui est de sa part une approbation dudit acte.
5°. D ’ un acte du 4 juin 1744* P ar lequel ladite Catherine V e s
chambes , fem m e N a u fa r y , alors v e u v e , cède et transporte à
Jacques V a la r c h e r , mari de Françoise Veschambes , c e qui pouvoit
lui rester du com m e héritière contractuelle de ladite Catherine
C o m b a r d , des causes du traité dudit jour 5 mars 1 7 1 0 , en ca-?
pilai ou intérêts , m oyenn an t la somme de 2000 fr,
�t)
( i5 )
4°. D ’un acte du i 5 février 1745 en Ire M arguerite Y e sclia m b e s,
qui avoit cédé ses droits à Jacques V e s ch a m b e s, par l ’acte du 21
octobre 1 714 rappelé ci-dessus, d ’une p a r t , et Valarclier d ’autre
p a r t , par lequel les parties , est-il d i t , étant venues à compte des
causes dudit tra ité , il s’est trouvé resté dû à ladite Y e s c lia m b e s ,
en capital ou intérêts, la somme de 749 fr* sur laquelle M arguerite
Vescham bes fait remise de celle de 124 f r . , et Y alarclier paye ou
s ’oblige de payer le surplus.
T e l est l’état de la cause.
Si le jugem ent de Saint - F l o u r , qui n ’ a point été attaqué
en cette p a r tie , avoit déclaré les sieur et dame de D i e n n e , à
défaut
d ’indication d ’autres b i e n s , no n -re ce va b le s
seulement
quant à présent dans leur demande en partage de la succes
sion d 'A n to in e , la question desavoir si les biens é to ien tsu rla tête de
Jacques ou d ’A n to in e seroit oiseuse ; ce qu ’ils n ’auroient pris dans
la succession de Jacques, ils l’auroient pris dans celle d ’A n t o in e ,
sa u f le prélèvement en faveur de V escham bes et V alarcher des
deux donations, de la destination paternelle, et des droits échus
de la m è r e , consistant pareillement dans la destination faite par
celle-ci.
Mais] le jugement les a déclarés indéfiniment non-recevables ,
et les adversaires se prévalent de cette disposition.
A v a n t , tout étoit à Ja cq u e s, et rien à A n t o i n e ; aujourd’hui
tout est à A n t o in e , et rien à Jacques.
L e s sieur et dame de D ien n e ont été exclus du partage de
la succession d ’Antoine. Il a été jugé e ffe c tiv e m e n t, et cette
disposition qui n ’a point été attaquée a acquis l ’autorité de la
chose jugée , q u ’ils n ’avoient rien à y réclamer.
M ais il a été jugé aussi que la succession consistoit unique
m ent dans la som m e de 1000 fr. destinée par le p è r e , et dans
les droits échus par le décès de la m è r e , droits qui se réduisoient pareillement à la destination faite
par lu mère dans le
�V!
( iS
co n lra l de mariage de
)
Callierine V cscham bes avec N a u f a r y ,
par lequel co n lra l de mariage la mère avoil institué ladite C a
therine Vcscham bes pour son héritière.
Les
adversaires ne peuvent pas scinder les dispositions du
jugement.
S ’ils ve u le n t,’ en vertu
du
ju g e m e n t , exclure
les
siéur et dame de D ien n e de la succession , il fa u t q u ’ils reconnoisscnt en même temps que cette succession se réduisoil aux
deux objets ci-dessus , à la destination à lui faite par le p ère ,
et à celle faite par la mère.
S ’il en étoit au tre m e n t, ils profiteroient de leur dol contre
la m a x im e , Nernini sua Jraus 'patrocinan debet.
L orsque pour parer au partage de la succession d ’A n t o i n e ,
ils ont borné la succession au m ontant de la destination pater
nelle
et
maternelle , lorsqu’ils ont
déclaré qu’ il n’ avait pas
drautres biens , ils ont volontairement renoncé à l’ effet de la
sentence de l ’élection de S a i n t - F lo u r , à l ’effet de la renoncia
tion de J a c q u e s , et de tous les autres actes q u ’ils opposent au
jourd'hui.
C e lle observation seule dispenseroit d ’entrer dans une plus
grande discussion ; mais allons plus loin.
P o n r r o i t - o n scinder le ju g e m e n t ; v o u d r o i t - o n
décision du
m o t if ,
faire abstraction
de
la
séparer
déclaration
la
des
adversaires ; il seroit facile d ’établir q u ’A n toin e n ’ avoit effec-*
tivement pas d ’autres biens.
C ’est une erreur d ’avancer qu'il étoit héritier institué du pèrer
il n ’avo it, par le testament du père , qu'une som m e de io o o fr,
A la vérité il est dit q u ’à défaut d ’élection de la part de la
mère , le père le no m m e dès à présent pour son héritier. Maid
ce n ’est q u ’à défaut d ’élection ; et la mère
elle-même n ’ étoit!
tenue d ’élire, e i d e remettre l’hérédité, q u ’en cas de convoi, L a
v o c a t i o n d ’ Antoine à l'hérédité, dependoit d ’une double condi
tion , du défaut d ’élection , et encore du cas de convoi ; et de
ces deux 'conditions subordonnées elle-mémcs l’une à l’autre , la
p rincipale, le cas du co n v o i, n ’est point arrivée. L a sentence de
l ’élecliou
�( *7 )
l'élection de Saint-FIour n ’a pu lui donner un droit qu’il n ’avoit
pas. Cette sentence porte sur un fait inexact. A u surplus , elle
a été rendue par défaut , et elle est susceptible, et d ’opposition,
et d ’appel ; les sieur et dame de D ienne sont encore en temps
utile pour l’attaquer. En e f f e t , par l ’arrêt du 2 thermidor an 8 ,
confirm atif à cet égard du jugement de Saint-FIour , la cession
faite par A n n e V escham bes et son mari de leurs droits dans la suc
cession de Jacques V escham bes , a été an n u llée, et les parties
remises au m êm e et semblable état q u ’elles étoient avant ladite
cession. L a cession est du a 3 juillet 1744*
sentence de l ’élec
tion de S a in t-F Io u r est de 1743. Il ne s’étoit écoulé entre la
sentence et la cession qu ’un an. À
l ’époque de la cession , les
sieur et dame de D ienne étoient donc en temps utile pour atta
quer la sentence, soit par la voie de l ’op p osition , soit par la
voie de l’appel ; et par l’arrêt de la cour ils ont été remis au
m êm e état q u ’ils étoient alors. O11 ne pense pas que les adver
saires insistent sur une sentence évidem m ent surprise à la reli
gion du tribunal qui l ’a rendue. D a n s tous les c a s , les sieur
e t dam e de D ie n n e déclarent subsidiairement s’en rendre inci
d e m m e n t appelans.
A n to in e n ’avoit donc , par le testament du
père , que la
som m e de 1000 fr.
P a r le décès de Catherine C om b a rd , il n ’a eu
également
q u ’une destination en argent. O n a vu que Catherine C o m b a rd
a institué pour son héritière Catherine V escham bes sa fdle aîn ée,
fem m e N a u fa r y .
Q u e les adversaires ne disent pas qu’ils sont également aux
droits de Catherine Vescham bes , au m oyen de la cession et subro
gation que celle-ci leur a consentie par acte du 4 juin 1744; car il
fa u t bien remarquer que cette cession n ’est que particulière. Par
cette cession , Catherine Vescham bes n ’a pas cédé la généralité
de ses droits ; elle n ’a pas cédé l’effet de l’institution contrac
tuelle faite en sa faveur par ladite Catherine Com bard : elle n ’a
cédé que le restant des sommes ù elle dues des causes du traité
C
�( i8
)
ilu S mars 1 7 1 0 , passé entre Jacques Vescham bes et Catherine
C om b a rd .
(¿u'on ne dise pas encore q u ’alors les biens aurolent appartenu
à ladite Catlierine V esch a m b e s, en vertu de l’institution faite en
sa f a v e u r , et que les sieur et dame de D ienne seroient également
sans dro it; c a r , indépendamment de l ’acte du 3 mars 1710 , par
lequel la mère, avant de marier sa fille, avoit déjà cédé et transporté
à Jacques Vescham bes tous les droits, actions et prétentions qu’elle
avoit sur les biens de son m a r i, lesquels n e pouvoient , par con
sé q u en t, faire partie de l’institution, on opposeroit la prescription
.de près d ’un siècle ; prescription que Catherine Vescham bes ne
pourroit écarter sous prétexte de co h a b itatio n , ayant été m a riée ,
et hors de la m a iso n , dès 1710.
E t cette prescription n ’a point p ro fité , m êm e en partie , à
A n to in e . Ici on com battra les adversaires par leurs propres armes.
-Leur défense contre la demande form ée par les sieur et dame de
D i e n n e , du c h e f d ’A n to in e , en réduction de l’institution faite par
François en faveur de Catherine C om b a rd , soit au quart d ’après
la C o u tu m e , soit à la portion de moins prenant d ’après l ’édit des
secondes n o c e s , défense consignée dans l ’attendu du jugement de
S a in t-F lo u r , a été q u ’A n to in e ayant approuvé la destination de lé
gitime à lui faite par le p è r e , il ne p ou v oit, ni les sieur et dame de
D ie n n e de son ch ef, demander laréduction. On va tourner contr’eux
le mêm e m oyen. L e légitimaire qui approuve la destination devient
étranger aux événemens de la succession ; il y est aussi étranger
que la fille forclose : il n ’a pas m êm e droit aux réserves coiiîuniières. C ’e s t , en effet , un principe constant , que le légitimaire
ne peut cumuler la destination et les réserves coutumières. A n
toine ayant approuvé la légitime n ’a donc pu p ro fiter, mêm e en
p a r t i e , de la proscription qui s’est acquise contre Catlierine V e s charnbes.
C V s t donc sans fondement , et contre la teneur des a ctes, que
les adversaires, changeant de langage, ont soutenu an tribunal de
M urât que la propriété résidoit sur la tête d ’A n toin e V escham bes.
�y
c 19 )
L e seul titre apparent à l ’appui de celte prétention in ju s te , est
la sentence obtenue en l ’éleclion de Saint-Flour. M ais cette sen
ten ce , contraire aux termes du te s ta m e n t, susceptible d ’être atta
q u é e , et attaquée en effet par l’appel incident qu ’on a déclaré in
terjeter , ne sauroit être d ’aucune considération.
V oudroit-on donner à cette sentence tout son effet ? elle a con
firmé le testam ent; elle a jugé que l'institution testamentaire devoit profiler à A n to in e : mais elle n ’a , ni p u , ni entendu donner au
testament plus d ’effet q u ’il 11c pouvoit en avoir. O r le testament,
s’il ne pouvoit êlre s u j e t , à l’égard d ’ A .n lo in e , au retranchement
de l ’édit des secondes noces , éloit toujours sujet à la réduction
au quart de la Coutum e. C ette sentence n ’auroil jamais opéré
contre Jacques Vescham bes une forclusion tolale.
E t qu ’on ne dise pas que Yattendu du jugement de Saint-Flour
a jugé que les sieur et d a m e de D ien n e ne pouvoient s’aider de
la réduction j car c ’est du ch e f d 'A n to in e , com m e A n toin e a ya n t
approuvé le testa m e n t, et non du ch e f de Ja cqu es, qui n ’a jamais
rien approuvé , et de la consistance de la succession duquel on ne
s’est m êm e pas occu p é, parce q u ’il falloit avant tout savoir si on
seroit admis au partage de sa succession, si le traité seroit annullé.
Sur qui résidoit la propriété du domaine ? non , encore une. fo is ,
sur la tête d ’A n t o in e , q u i, au contraire , étoit réduit à une légitime
en deniers , tant du c h e f du père que du ch e f de la mère , mais sur
la tête de Jacques , qui à sa portion directe réunissoit, ou à litre
successif par le décès ab intestat * ou par cession et tra n sp o rt, la
portion de presque tous les autres frères et sœurs.
N ous disons à titre successif: les deux enfans du prem ier l i t ,
Jean et Marguerite 1” . du n o m , sont décédés ab intestat cl sans
enfans.
P ar cession : Catherine C o m b a r d , par l ’acte m êm e du 5 mars
1710 , a cédé et les droits q u ’elle am endoit, et les droits et portions
héréditaires de chacun des enfans du second l i t , à la charge par
Jacques V esch a m bes de payer tant à chacun.
�( 20 )
Catherine Vescham bes a ratifié cet acte le le n d e m a in , en se
constituant dans son contrat de mariage ce qui lui avoit été assuré
par ce traité. Elle l ’a ratifié plus expressément encore , en cédant
depuis à V alarch er ce qui lui restoit du des causes dudit traité;
et V alarch er l’a approuvé lui-m êm e en prenant celte cession.
C o m m e aux droits de cette Catherine V escham bes Jacques V e s
cham bes a eu d r o it , non-seulement à la portion héréditaire qu ’elle
a m e n d o it, mais encore à la somme de 5 ooo fr. donnée par préciput au premier des e n f a n s , filles ou m â le s, à naître du mariage.
M arguerite 3*. du nom , veuve R o ch e , l ’a approuvé, el expres
sément par l’acte du 21 octobre 1 7 1 4 > e t ta citem en t, en ne reve
nant point dans les dix ans ni dans les trente.
V en on s au m o t i f qui paroit seul avoir déterminé les juges de
M u r â t à la renonciation de Jacques.
Quelle que soit cette renonciation , le jugement contient d ’abord
une erreur : A tte n d u , porte un des motifs , qu’ ayant renoncé à
la succession de son pcre , Jacques Vescham bes seroit aujour
d’ h u i non-recevable à critiquer le testament de son père. C ’est
en quoi les juges ont erré. Sans d o u te , pour demander la réduc
tion au quart portée par la C o u t u m e , il faut être héritier: mais
il n ’en est pas de mêm e pour le retranchement de l’édit des se
condes noces ; il n ’est pas nécessaire d ’être héritier pour demander
la réduction portée par l ’édit. Q u ’on lise P o t h ie r , L e b r u n , traité
des Successions; R i c a r d , nom bre
i
3 o i ; R e n u s s o n , t ra ité jie la
C o m m u n au té . L a raison e st, qu ’ils tiennent ce bénéfice d e l à lo i,
non com m e héritiers, mais co m m e enfans. L'institution faite par
le testament de François en faveur de Catherine C o m b a r d , n ’étoit
pas seulement réductible au quart d ’après la C ou tu m e ; elle étoit
encore réductible à la portion du
moins prenant par l ’édit des
secondes noces ; et quelque effet qu ’on veuille donner à la renon
ciation de Jacques V e s c h a m b e s , il auroit toujours eu droit au
retranchement. Pour l ’en exclure, il faudroit q u e lle comprit expres
sément le retranchement.
�- M ais quelle est c e lle renonciation ? D e quel poids peut être
une renonciation , qui n ’a été opposée q u ’aux créanciers pour sus
pendre leurs poursuites!, qui a demeuré sans effet dansila fa m ille ;
nonobstant laquelle il a j o u i , et non-seulement jo u i , mais -vendu,
et fait tous les actes de propriétaire.
' E t qui oppose cette renonciation ? une fille du r e n o n ç a n t , F ra n
çoise Vescham bes , qui seroit elle-même exclu e, si la cour s’y
arrètoit.
C e lt e renon ciation, dans aucun cas , ne pourroit com prendre
que la portion directe ; elle ne pourroil comprendre les portions
q u ’il a acquises des frères et sœurs , ou par cession et transport,
ou par leur décès ab intestat , com m e on vient de l’expliquer.
E t dans ces portions des frères et sœurs il auroit r e p r is , en
p a r tie , m êm e la portion directe qui par la renonciation se trou
verait avoir accru à tous les frères.
L e bu t q u ’on se propose dans ce m om ent n ’étant que de don
n er une idée de la c a u s e , on ne s’étendra pas davantage. O n se
réserve de développer à l ’audience les m o yens qui se présentent
pour écarter cette renonciation.
O n ne dira également q u ’un m ot sur le m o t i f que les juges ont
inséré dans le ju g e m e n t, relativement à la cession faite par M a r
guerite V escham bes 3*. du nom , par l ’acte du 21 octobre 1 7 1 4 .
Ils ont décidé que cet acte n ’assuroit à Jacques V escham bes qu ’une
reprise de 750 i r . , et non le droit de réclam er la portion héré
ditaire de ladite M arguerite V es c h a m b e s; parce q u e , d ise n t-ils
elle a annoncé dans cet acte que ses droits avoient été précédem
m e n t réglés , et qu ’elle n ’a pas cédé les actions rescindantes et
rescisoires.
E t quel besoin avoit-elle de céder les actions rescindantes et
rescisoires, puisque c ’est avec Jacques V escham bes lu i-m êm e que
les droits avoient été précédemment réglés par l ’acte du 3 mars
1790?
Q u importe q u ’elle n ’ ait point cédé le« actions rescindantes et
�rescisoires , puisqu’elle n 'a point réclam é ; et que non-seulem ent
elle n ’a point r é c la m é , m ais que soit e lle , soit Jacques V a la r c h e r , on t tout a p p ro u v é , tout ratifié par l ’acte portant arrêté d e;
co m p te , du 15 février
M ' . P A G E S - M E I M A C , jurisconsulte»
M*. C R O I Z I E R , avoué.
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la C o u r d ’appel. '
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Dienne, Vital. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Croizier
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Sieur Vital de Dienne, et dame Jeanne-Marie de Douhet son épouse, appelans ; contre Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher, Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon son mari, intimés et incidemment appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1603
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53277/BCU_Factums_G1603.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cheylade (15049)
Le Buge (domaine de)
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
gain de survie
généalogie
homicides
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53271/BCU_Factums_G1531.pdf
679a15557b70d4645732c35344fdca7f
PDF Text
Text
M É M O I R E
ET
CONSULTATION,
,
P o ur M. C H A B R O L , ancien colonel;
En r é p o n s e à l ' im p r im é de M. NEIRONDESAULNATS , a n c ie n m a g i s t r a t , i n t i t u l é
Précis,
e t à sa c o n s u lta t io n s ig n é e
M e im a c .
L E ruisseau des Gros - Bouillons, ou Gargouilloux,
commence aux environs du village de Saint-Genestl’En fant, situé à une lieue de la ville de Riom. Plus
de trente sources forment son origine; un large et grand
aquéduc à ciel ouvert, revêtu en pierres de taille, et
dont la largeur varie depuis six pieds j u s q u ’à douze, sur
une longueur de quarante-deux toises, reçoit et contient
A
�( o
ces trente sources dès leur naissance môme. Cet aqueduc
existe de toute ancienneté; il a été construit par les pré
décesseurs de M M . Chabrol : son objet est de favoriser
l’arrosement des nombreuses prairies du canton, dont
une grande partie leur appartient. Cet aquéduc et les
trente sources du ruisseau des Gros-Bouillons ont été
renfermés dans l’enceinte de l’enclos de M . Neiron à
Saint-Genest, en 1683, par Jean et Antoine de Brion,
créateurs du bien actuel de Saint-Genest, que représente
aujourd’hui M . Neiron-Desaulnats.
Il fut laissé à cette époque, au propriétaire du Chancet,
une petite porte d’entrée dans l’intérieur de l’enclos de
Saint-Genest; elle étoit placée h son extrémité nordouest : on en voit encore la trace, et nombre de témoins
pourroient déposer de son ancienne existence. Mais
Imbert R e b o u l, propriétaire alors du Chancet, consentit,
en 17 3 5 , qu’elle restât m urée, à condition qu’il auroit
son droit d’entrée et de passage par les portes charre
tières , qui sont à soixante toises plus h l’ouest : c’est par
là que M M . Chabrol, et autres co-usagers, exercent leur
droit de prise d’eau et de surveillance sur les sources du
ruisseau des Gros-Bouillons.
L ’état habituel de ce ruisseau est de servir au jeu des
moulins inférieurs situés sur son cours ; mais les meuniers
sont obligés de suspendre leur action tous les jours de
m arché, et ioutes les nuits des six mois d’été : ces temps-là
sont destinés à l’arrosement des prairies.
Indépendamment du droit de diriger en entier le ruis
seau des Gros-Bouillons dans leurs nombreuses prairies
ies jours et les nuits qui leur sont dévolus, d’après le règle-
�73 .S
(3)
ment local relatif aux arrosemens , M M . Chabrol ont
encore celui de conduire journellement à la maison et aux
jardins du Chancet une prise des mêmes eaux, par un
aquéduc d’abord couvert, puis souterrain. A la vérité ,
depuis long-temps l’eau n’y parvenoit plus par suite du
défaut d’entretien de la conduite; mais nombre de témoins *
peuvent déposer avoir vu les fontaines et jets d’eau du
Chancet en activité.
• ■
..
.
L e grand aquéduc à ciel ouvert étoit dans un état de.
ruine qui exigeoit impérieusement sa restauration; une
grande partie des eaux éclaappoient à leur destination ; les
prairies arrosoient médiocrement, et les propriétés infé
rieures en étoient submergées ou endommagées. M. Cha
brol résolut de faire travailler à ces réparations. M. Neiron
lui-même l’en avoit sollicité, d’abord de vive v o ix , puis
par une lettre du 21 janvier i o ; et enfin trouvant de
l’inconvénient à ce que les matériaux que faisoit conduire
M r. Chabrol entrassent par ses portes charretières, il lui
fit proposer de vive voix de les introduire par une brèche y
et l’autorisa à la pratiquer près du grand aquéduc , par
une seconde lettre du 26 février i o . M . Neiron lui
demande, par cette missive, d'y mettre une claie de parc
ou bouchon m obile, contre Vinvasion des bestiaux pen
dant la durée du tra vail, et de la fa ir e murer après
85
85
les travaux terminés.
Dans les derniers jours de fructidor de l’an 13, époque
où les canaux d’arrosage se ferment, M . Chabrol com
mença ses travaux ; la brèche fut ouverte à l'endroit
indiqué : on y plaça temporairement des jambages en
pierres de taille, et cela pour plus de précaution. Un©
A 2
�(4)
porte en planches, mais mobile, et non scellée, ne tour
nant pas sur des gonds, mais se plaçant et se déplaçant à
volonté, y servoit de fermeture ; on l’assujétissoit avec des,
pierres et des Lois lors de l’interruption des travaux les
jours de fêtes et dimanches, ainsi que pendant les nuits.
L e mur de cet enclos n’étant bâti qu’avec de la terre, la
brèche se fût nécessairement agrandie, et son entrée de
venue facile aux malveillans et aux bestiaux ; cela auroit
donné lieu à des plaintes, et sans doute à des actions juri
diques de la part de M. Neiron : c’eût donc été un piège
contre M . Chabrol, s’il n’avoit pas eu la faculté de donner
une certaine solidité à cette porte-brèclie. Si on s’est
permis ces détails, qui sont en quelque sorte étrangers
à l’affaire, c’est afin de prouver la mauvaise foi de M. Nei
ro n , d’avoir converti en reproche grave, en inculpation
majeure, contre M. C h a b ro l, ce qui n’étoit qu’une sage
précaution de sa part. Cette solidité étoit donc passagère;
elle étoit tout en faveur et pour l’avantage de l’enclos
de Saint-Genest.
Mais ce qui prouve sans réplique que c’est une calom
nie de supposer à- M. Chabrol le projet d’usurper une
porte d’entrée dans cet enclos, c’est le droit de passage et
d’entrée qu’il exerce, lui, ses domestiques et scs fermiers,
par l’une' des portes- charretières , et cela concurrem
ment avec les autres usagers des e a u x des Gros-Bouillons-;
qu’enfin M . N e i r o n lu i-m êm e, page 2 , dernier alinéa
de son imprimé intitulé Précis, convient que l’ordon
nance du tribunal civil, du 2 complémentaire an 13, dissipoit ses soupçons sur Vérection d'une brèche éphémère,
en porte permanente. Si ces soupçons injurieux étoient
�7‘.2rf
( 5)
calmés le 2 complémentaire de l’an 13 ? comment M. Neiron peut-il en faire l’objet d’une inculpation g rav e, après
dix mois écoulés depuis cette ordonnance, et au moins
quinze jours après la fermeture et la maçonnerie de cette
porte-brèche ?
M . Neiron a donné par ses écrits, même au public et à
ses juges, la preuve de sa mauvaise f o i , et la mesure de
son c a r a c t è r e ; il s’est donc démasqué lui-même : ab uno
dice omnes.
Dès que M. Chabrol eut fait renverser de fond en comble
les anciens travaux relatifs à ses aquéducs et prises d’eau,
préalable indispensable à leur réédification, M .Neiron, qui
avoit feint de s’éloigner, mais qui avoit établi un surveillant
pour observer et l’instruire, arrive de sa montagne; il
envoie M. son fils faire une scène à M . Chabrol, le 17 de
septembre i o , le sommer de cesser tous ses travaux de
sortir sur le champ de son enclos, lui et ses ouvriers, et
de lui justifier des titres en vertu desquels il faisoit ces
entreprises. M . Chabrol répondit qu’il continueroit ses
travaux , et ne lui justifieroit d’aucun titre. L e 19 de sep
tembre , M . Neiron fils, profitant de l’absence momen
tanée de M . C h abro l, chassa violemment ses ouvriers,
et fit murer la porte-brèclie.
Comment concilier la scène scandaleuse et la violence
de M . Neiron fils, avec les lettres de M . Neiron père? Il
provoque les réparations des prises d’eau ; il demande
l’apport des matériaux par une porte-brèche ; il en auto
rise l’ouverture; et quand tous les anciens travaux de
l’art sont renversés, il veut s’opposer leur réédification.
M. Chabrol vit toute l’étendue du danger où vouloit le
85
7
�73b
C .6 }
mettre M . Neii’on , et du piège qu’il lui avoit tendu. Il
connut alors qu’il n’avoit feint de désirer ces restaurations
que pour lui intenter un procès, et l'entraîner dans lés
longueurs et les dépenses d’une action pétitoire.Les digues
renversées, les aquéducs disparoissoient, les prises d’eau
devenoient impossibles; les prairies d e ’M. Chabrol, le
principal objet de ses revenus, étoient frappées de stéri
lité ; ses fermiers obtenoient de grandes indemnités , et
les co-usagers de ces eaux d’énormes dommages-intérêts:
car enfin valoit mieux pour eux des aqueducs en mau
vais état qu’entièrement renversés , puisqu’à chaque prin
temps on les raccommodoit passagèrement à force de
gazons, de pierres et de pieux.
Les conseils de M. Chabrol lui recommandèrent la plus
grande célérité dans le remède qu’ils lui indiquèrent,
comme le seul qui pût prévenir un péril aussi éminent,
contre un adversaire vrai prodige en chicane, et qui
connoît si bien l’art d’éterniser les procès.
Il se pourvut devant le tribunal civil, en requête de
plainte du trouble qu’il essuyoit dans l’exercice de scs
droits à réparer ses aquéducs, digues et prises d'eau.
Il exposa « qu’il avoit droit à des prises d’eau aux sources
« mêmes du ruisseau des Gros-Bouillons; que la digue
« pratiquée pour la direction de ces eaux étant en état
c< de ruine.........etc.
« Qu’il en avoit commencé les réparations à Tinstiga« lion même do M. Neiron p è r e , ainsi qu’il étoit prouvé
« par scs deux lettres, et que cependant il avoit été troublé
« dans ses travaux par les voies de fait et les violences dé
« M. Neiron fils, qui avoit expulsé ses ouvriers. »
�4 D ’après cet exposé, M . Chabrol demande à être auto
risé à continuer ses réparations. Sur cette requête, il in
tervint une ordonnance du 2e. jour complémentaire de
l’an 13; elie est ainsi conçue:
« Nous autorisons provisoirement le remontrant à faire
a continuer sans délai.............................les réparations et
« ouvrages en maçonnerie nécessaires pour la conserva
it tion et entretien de la digue dont il s’agit......... ..
« Faisons défenses audit sieur Neiron-Desaulnats, ou tous
u autres, de troubler les ouvriers du pétitionnaire dans
« leur travail et réparation à ladite digue........................ »
M uni de cette ordonnance, M . Chabrol rétablit ses
ouvriers sur les travaux. En réédiiîant le grand aquéduc,
il a aussi voulu restaurer la portion de l’aquéduc couvert
qui gît au fond et dans le lit même du grand aquéduc,
afin de rendre au Chancet l’agrément dont il étoit privé
depuis long-temps. A mesure qu’on nettoyoit le grand
aquéduc , on déposoit les débris de l’aquéduc couvert sur
les bords ; il en fît conserver les dernières toises, sans les
déraciner, pour témoignage de l’ancienne existence de ce
commencement d’aquéduc. Mais les gelées du mois d’oc
tobre i o l’ayant forcé d’interrompre ses restaurations,
lorsqu’il les a reprises au printemps de l’an 1806 , ils ne
s’y sont plus trouvés.
M . Chabrol mettoit enfin la dernière main à ces répa
rations ; il venoit de remplacer en canaux de pierres de
taille les trente premières toises de 5on aquéduc couvert,
lorsque le 14 mai dernier il s’est vu actionne par M. Nei
ron-Desaulnats devant le juge de paix de l’Ouest, canton
de Riom.
85
�,c 8 }
' Les parties sont venues à l’audience du tribunal de paix,
le 19 mai 1806.
jVJ. Neiron , alors pour la première fois, a précisé ses
conclusions qui tendent « à ce qu’il soit dit en dernier res« sort, que M. Chabrol a eu tort d’usurper, dans l’enclos de
« Saint-Genest, le terrain sur lequel il a placé les tuyaux
« ci-dessus énoncés ; que M . Neiron-Desaulnats est auto« risé à reprendre la libre jouissance dudit terrain......et
« que pour réparation du dom mage, M . Chabrol soit
« condamné en 40 francs de dommages-intérêts , et aux
« dépens. »
M. Chabrol a répondu que « M. Desaulnats ne pouvoit
« pas ignorer que pour l’irrigation de ses prairies il exis« to it, de temps immémorial, un aquéduc qu’il avoit été
« autorisé à faire rétablir ; qu’il avoit même le droit par
« lui ou ses auteurs, depuis longues années, de prendre
« les eaux des sources des Gros-Bouillons ; que céto it un
« droit de pure fa c u lté dont il a p u user à volonté; que
« la conduite de ces eaux est dans le lit même de Vaqué« duc ; qu'ainsi les constructions par lu i fa ite s ne sont
« point une nouvelle œ uvre, mais bien une réêdifica« tio n , une réparation de ce q u i lui a appartenu et lui
k appartient encore. »
M . Chabrol a ajouté que « d’ailleurs, en agissant ainsi,
« il n’avoit fait qu’exécuter ce que l’ordonnance de M. le
« président du t r i b u n a l c i v i l , en date du 2e. jour complè
te inentairc de l’an 13 , lui permettait de faire. »
L e genre de défense de M. Chabrol annonçoit assez
à M . le juge de paix de l’Ouest que la contestation 11’étoit
pas de sa compétence ; cependant il ordonna sou transport
�(93
sur les lie u x , pour connoître l’objet de la demande en
complaintes possessoire et réintégrande de M . NeironDesaulnats.
On lit dans le procès verbal de ce transport, qui a eu
lieu le 19 mai 1806, que « M . Neiron a fait remarquer
« à M. le juge de paix de l’Ouest, auprès des rochers,
a une élévation faite en pierres etgazonnées, qui cachoit,
« a-t-il dit, une conduite d’eau nouvellement pratiquée
<c par M . Chabrol, à côté de la rase d’irrigation, ainsi
« qu’une ouverture faite à son mur de clôture, pour la
« sortie de l’eau venant de cette conduite. »
! Il ajoute que « M. Desaulnats l’ayant mené en cet
« endroit, il lui a été facile de reconnoître qu’il a été
« fait récemment dans cette partie une nouvelle conscr truction ou une réparation. »
Il rapporte ensuite que « M . Chabrol est convenu de
« l’existence de la rase qui n’est pas apparente, puis« qu’elle est couverte en gazonnées ; mais que M . Cha« brol a dit que ce n’étoit pas de sa part une nouvelle
« œuvre ; qu’il n’avoit fait que rétablir une ancienne
« conduite, pour faire arriver l’eau au Chancet, où il
« existoit dans ses jardins des bassins en pierres de taille;
« que l’on voyoit encore des vestiges de cette ancienne
« conduite, tels que des morceaux de tuyaux en pierres
« de taille auprès des rochers; qu’à l’endroit du mur
« où sortoit sa conduite d’eau , il existoit une ancienne
« ouverture qu’il n’avoit fait que réparer pour lui ser« vir, à l’exemj)le de ses prédécesseurs.
« M. Neiron alors a nié l’existence de cette ancienne
« conduite d’eau ; il a préteudu que rien 11e prouvoit
B
�«
«
«
a
«
«
k
«
tc
que les morceaux en pierres de taille et en brique,
que M . Chabrol présenloit comme des marques d’imciens vestiges, eussent été trouvés dans la partie ou
est actuellement sa nouvelle conduite; que tous ces
objets avoient pu être apportés avec les pierres dont
on s’étoit servi pour la construction de la digue ;
qu’au surplus il lui seroit facile d’en faire voir dans
d’autres parties de son enclos, où il y avoit anciennement des machines hydrauliques. »
« Effectivement, dit M . le juge de paix de l’O u e st, à
« quelque distance au-dessus de la digue nous avons trouvé
c des morceaux de tuyaux de brique qui nous ont paru
« semblables à ceux que M. Chabrol nous avoit montrés. »
M . Neiron suppose ici que M . Chabrol, voulant usur
per une conduite d’eau, a fait apporter sur le local des
débris de vieux tuyaux, pour les présenter à M . le juge
de paix comme débris d’un ancien canal dégradé; et,
pour preuve de cette assertion, il montre à M . le juge
de paix de l’Ouest des morceaux-de tuyaux absolument
semblables, dans une autre partie de son enclos..
Nous pouvons dire avec l’Ecriture : M entita est iniquitas sibu
Comment expliquer cette parfaite similitude entre lesdébris que M. Neiron suppose apportés frauduleusement
par ordre de jYI. Chabrol, et ceux q u ’ il montre à M. le
juge de paix à. d’autres endroits de son enclos? Comment
l’expliquer! rien de plus simple r les mêmes mains qui
ont été employées pendant l’hiver, que* les travaux étoient
interrompus, à déplacer une partie des débris laissés par
M . Chabrol sur le bord de son aqueduc, à mesure qu’on
�\
74\
( 11 )
les déracinoit, ont du nécessairement les déposer à d’autres
endroits de l’enclos. M . Neiron les y ayant rencontrés,
n’aura pu s’empêcher de les prendre pour des vestiges
de ses machines hydrauliques, qui se seroient déracinés
d’eux-m êm es ; et les montrant à M . le juge de paix,
celui-ci n’a pu s’empêcher de leur trouver une parfaite
similitude avec ceux que lui avoit montrés M. Chabrol
au bord de son aquéduc restauré. ( Voyez son procès
verbal du 19 mai 1806. )
A u reste M . Chabrol prouvera par témoins, et l’an
cienne éxistence de l’aquéduc dégradé, et qu’il en avoit
laissé sans déraciner une portion qui a disparu pendant
l’hiver dernier, et ne s’est plus trouvée au printemps;
ce qui détruira cette calomnie.
Quant au prétendu mystère supposé par M. Neiron
avoir été mis à la restauration de l’acquéduc couvert, la
sommation qu’il fit faire à M. Chabrol par son affidé
M ichel, assisté de quatre témoins, le 13 mai, et qu’il
relate dans sa requête au tribunal de paix, prouve sa
mauvaise foi.
On passera légèrement sur une seconde supposition,
que les gazons placés par M . Chabrol sur son aquéduc
couvert, étoient pour en dérober la vue; car si le fidèle
Michel et ses quatre témoins avoient vu ces travaux le
13 m ai, comment les auroit-on pu dérober aux yeux
le 19 m a i, six jours après.
O11 ne relevra point l’accusation chimérique de l’ins
cription lapidaire dont M. Neiron a fait tant de plaintes
et tant de bruit dans le monde; comme si d’inscrire son
uojn sur un immeuble donnoit droit u en dépouiller
B 2
�!
;:
......................
( ÏZ )
le propriétaire légitime. Pareille inculpation est trop
puérile ; car M . Chabrol a pu faire légitimement tout
ce qui tendoit à la conservation de ses droits : et si les
tribunaux jugeoient qu’il les a perdus, toute inscription
deviendroit inutile.
Nous nous arrêterons sur une autre calomnie présentée
par M. Neiron avec autant d’art que de perfidie ( page 4
du Précis pour Joseph Neiron ).
« A u jour indique pour la visite des lie u x , étant près
« d’arriver à Saint-Genest, j’aperçois M. Chabrol précédé
« d’une charrette chargée de vieux tuyaux de fontaine.
« Bientôt, vers un pont joignant la face extérieure démon
« enclos, cette voiture est arrêtée...... Je fais arrêter la
« mienne, et je vois qu’en faisant semblant de s’amuser
« auprès du pont, on y cache dessous les tuyaux voitu« rés......etc. Je ne pus me défendre du soupçon que si
« j’étois arrivé quelques momens plus tard, j’aurois trouvé
a ces tuyaux placés à côté de ceux qu'on avoit mis en évia dence dans mou enclos...... J ’invite IVJ. le juge de paix
« à ne terminer son opération que lorsqu’il aura visité le
« pont sus-énoncé....... Mon iils passant la main sous le
« pont, en retire deux tuyaux; il en auroit pu tirer davan« tage si cet échantillon n’eût été suffisant. »
Après avoir érigé en accusation aussi grave, le simple
soupçon dont M. Neiron. nous assure qu’il ne put se dé
fendre, il laisse avec pe rf id ie sous silence les dires de
M . le j"ge de paix et de M. Chabrol, sur la visite qu’il de
mande du pont. Il iaut donc les relater; les voici. Que
fuit M. le juge de paix à la vue des deux tuyaux sortis de
dessous le pont? il interroge M. Chabrol : « Ces tuyaux
�4
( 13 )
« proviennent-ils db l’ancienne conduite restaurée dans
« l’intérieur de l’enclos? »
M. Chabrol lui répond , « N o n , Monsieur, on vient de
« les apporter ici un instant avant votre arrivée; ils ont
« bien déjà s e r v i, mais ailleurs. »
M . le juge de paix fut si peu frappé de cette prétendue
découverte de M . Neiron, qu’il n’a pas même cru devoir
en faire mention dans son procès verbal.
Analisons maintenant cette prétendue, cette importante
découverte de M. Neiron.
D e sa voiture il voit cheminer u?ie charrette chargée
de vieux tuyaux.
’ Eh bien! il y avoit six tuyaux sur cette charrette relie
n’en ctoit donc pas chargée; car six tuyaux en brique ne
sont pas une charge de charrette.
I l voit cacher les tuyaux sous un pont.
On plaça sous le pont ces six tuyaux, pour les mettre
à l’abri d’êtrè brisés pur étourderie ou malveillance; en.
les cachant aux regards des passans, il n’y avoit rien qui ne
fût bien légitime..
J l ne -peut se défendre du soupçon que s'il étoit arrivé
un moment plus tard, il auroit trouvé ces tuyaux pla
cés à côté de ceux qu'on avoit mis en évidence dans son
enclos.
Si M . Chabrol eût pu concevoir un pareil dessein, sans
doute il n’eût pas pris l’heure et le jour auxquels le juge
de paix lui avoit donné rendez-vous pour voiries lieux.
Mais à quoi étoient donc destinés ces six tuyaux?
A s’emparer des eaux ,
les dévier pour opérer les.
vides nécessaires à l’entière confection du grand aquéduc
�C 14 )
dont il ne restoit plus à bâtir que les deux’dégorgcoirs. Ces
deux dégorgeoirs sont ce qui présentoit le plus dedilliculté;
celui s u r t o u t des sources près les rochers a coûté d-s peines
infinies. Les domestiques de M. Neiron, et le fidèle Michel
dont la surveillance u’n pas cessé un instant, ont bien vu
qu’on n’a réussi à dévier les enuX qu’à l’aide de iuyaux de
brique; les ouvriers, les passons peuvent le témoigner.
Que M . Neiron imagine une pareille supercherie, c’est
sans doute dans l’ordre des choses; mais qu’il ose en accuser
M . Chabrol au milieu de ses concitoyens, qui tous connoissent ses principes, ses idées libérales, sa générosité,
sa moralité enfin, c’est ce qui ne peut.se concevoir.
Après avoir démontré jusqu’il la dernière évidence la
fausseté des calomnies avancées contre M . Chabrol, nous
allons passer à la cause pour ne plus nous en écarter.
lies parties en sont venues contradictoirement à l’au
dience du juge de p aix , du 14 juin.
M. Chabrol a conclu à ce que, d’après la vérification
des lieux contentieux, M. le juge de paix se déclarât in
compétent, ou qu’il déclarât M . Neiron-Desaulnats nonrecevable dans sa demande en complainte possessoire, et
le condamnât en joo Francs de dominages-intérêts.
A la 6uite de vingt et un attendus, M. le juge de paix
de l’Oucst a prononcé son jugement en ces termes:
« L e tribunal, faisant droit sur la demande en comd plainte formée contre M . Chabrol, garde et maintient
« M . Desaulnats en la possession et jouissance du terrain
« dont il s’agit ; fait défenses à M. Chabrol de l’y troubler,
<x aux peines de droit; le condamne à remettre les clioses
</ dans leur ancien état,daai> huitaine à compter de la .si?; ni-
�10
(.
)
t.- fication du jugement faite à personne ou ¿1 domicile;
« faute de c e , permet à M. Desaulnats de le faire faire aux
« dépens de M. Chabrol, du montant desquels il sera rem« boursé suivant l’état qu’il en donnera , ou suivant le
« règlement qui en sera fait en la manière ordinaire', et
« pour dommages-intérêts, condamne M. Chabrol à tous
a les dépens. 55
M . Chabrol est appelant de ce jugement.
On lui oppose qu’il n’est pas recevable dans cet appel,
et cela, parce que, dit-on, le jugement est en dernier
vessor t.
Sans doute l’appel ne seroit pas recevable, si le juge
ment étoit en dernier ressort : mais M . Neiron part d’une
finisse supposition ; il n’est pas vrai que ce jugement soit
en dernier ressort, ni dans le fait, ni dans le d r o it , et
il ne peut pas l’être.
M . Chabrol avoit opposé l’incompétence du juge de
p a ix , en disant à la première audience qu’il 11’avoit fait
qu’user d’un droit de pure faculté, lorsqu’il avoit subs
titué des tuyaux neufs à des tuyaux dégradés, pour res
taurer un canal destiné de toute ancienneté à conduire
une prise d’eau du ruisseau des Gros-Bouillons au Chancet;
qu’en agissant ainsi, il n’avoit fait qu’exécuter ce que l’or
donnance de M. le président du tribunal c iv il, du 2 com
plémentaire , lui permettoit de faire.
avoit conclu d’une manière plus expresse, à la seconde
audience du juge de paix de l’O u est, du 14 juin , à ce
qu’ il se déclarât incompétent, ou déclarât IV . N e i r o n n o n
recevable dans sa demande en complainte possessoire,
appuyée sur les mêmes motifs déjà exprimés dans le juge
ment préparatoire.
11
1
�(
i <5 )
..........................................................................
Voilà donc un conflit de juridiction élevé , puisqu’il y
avoit un différent porté en deux tribunaux à la fois , de
vant la justice de paix et au tribunal d’arrondissement.
Cela donne donc matière à un règlement de juges. Ce
conflit a été vidé de fait par le juge de paix de l’Ouest.
En prononçant sur le fond sans statuer sur le déclinatoire, pouvoit-il lui-même trancher ainsi ce conflit inci
dent , et le décider en dernier ressort en faveur de sa juri
diction? Non, sans doute; s’il l’eût fait il eût commis un excès
de pouvoirs. C’est une conséquencede l’article 425 du Code
de la procédure, conforme en cela ù l’ancienne jurispru
dence, qui, en parlant des tribunaux de commerce, porte
que les dispositions sur la compétence pourront toujours
être attaquées par la voie de l’appel.
Les tribunaux de commerce jugent en dernier ressort
jusqu’à 1000 francs , les juges de paix jusqu’à o francs.
Il y a bien moins de raisons pour exempter de l’appel
les dispositions des jugemens de paix sur la compétence,
que celles des tribunaux de commerce.
Ce qui est fondé sur les mêmes principes doit donner
lieu aux mêmes résultats.
L e jugement dont est appel n’a donc pu être rendu en
dernier ressort, par cela seul que la compétence étoit
5
contestée.
Il n’a pu être rendu en dernier ressort sous un autre point
de vue ; celui de la d e m a n d e rcconvenlionnelle de M. Cha
brol en 100 francs de doinmagcs-intérêls, occasionnés par
l,i suspension de ses travaux , par la perte de temps de ses
ouvriers, par les vols et les avaries survenus à ses maté
riaux abandonnes sur un chemin au premier occupant.
On
�^
>47
C
1-7 ^
On n’exn minera pas jusqu'à quel point il faut considérer,
•comme constante et solidement établie, la prétendue juris
prudence de la cour de cassation , q u i, selon M. .Neiron ,
aUribueaux juges de paix la faculté de statuer en dernier
ressort sur les demandes possessoires, quelle que soit la
valeur de l’objet contesté, pourvu que le demandeur ait
restreint ses dommages-intérêts à o francs et au-dessous.
Si cette jurisprudence est telle qu’on la suppose, le temps
en fera justice ; mais elle n’est pas applicable à l’espèce dans
laquelle se trouvent les parties.
_ L e m axim um de la compétence des juges de paix est
fixé à o francs par les articles 9 et 10 de la loi du mois
.d’août 1790.
O r , il s’agit, dans l’espèce, d’une valeur bien supérieure
à cette somme de o francs , puisque M. Chabrol avoit
formé une action reconventionnelle de 100 fr. de dom
mages-intérêts.
. Vainement M . Neiron prétend-il que la compétence
devoit se régler par sa demande seule, et sans avoir égard
à la demande reconventionnelle de M. Chabrol.
La loi du mois d’août 1790 porte que les juges de paix
connoîtront en dernier ressort jusqu’à la valeur de o fr.
Les législateurs n’ont pas dit que les juges de paix con
noîtront en dernier ressort des demandes formées par le
demandeur seulement, jusqu’à concurrence de o fr. C’est
donc de la valeur de l’objet en litige dont la loi a voulu
parler, et non de la demande formée par celui qui intente
l’action. C’est une jurisprudence adoptée par l’universa
lité des tribunaux de l’empire, que la compétence du
premier pu dernier ressort ne doit pas,s’établir seulement
C
5
5
5
5
5
�I
* \ \
( 18 )
sur la demande , mais se composer encore de la défense,
quand elle est accompagnée de conclusions reconvention
nelles ; qu’il faut réunir les deux demandes, et non pas
se fixer sur une seule.
C’est ainsi que la cour de cassation l’a jugé par nombre
d’arrèts relatés dans les collections et les journaux de juris
prudence , et entr’autres par arrêts des 23 floréal an 8 ,
13 vendémiaire an 9 , 16 thermidor an 10, 18 vendémiaire
et
nivôse an 12. M . M erlin , dans ses Questions de
droit, tome 3, pag. 376 et suivantes, enseigne la même
doctrine, comme conforme aux vrais principes et à l’an
cienne jurisprudence.
Aussi l’auteur de la Jurisprudence de la cour de cassa
tion, au supplément de l’an 13 , page 116 , n’hésite point
à d ire , en parlant de la complainte possessoire dans la
quelle le demandeur s’est restreint à moins de o fr. pour
tous donimages-intérêts, que « si à cette première demande
« venoit se joindre une demande incidente ou reconven
ce tionnelle, q u i, réunie à la prem ière, excéderoit la
« somme de o francs, la décision de la cour ne seroit
« plus applicable, et il faudroit se guider par les règles
« ordinaires. »
M . Nciron prétend que cette demande rcconventionnelle de M. Chabrol, n’étoit qu’uiie tournure évasive,
imaginée lors du jugement définitif pour éluder le dernier
ressort.
Mais on a vu que cette demande avoit un objet aussi
sérieux que légitime, puisque M. Chabrol a souffert et
souffre encore un tort réel par l’interruption de ses tra
vaux; et qu’elle a été formée à temps, dès qu’elle l’a été
¿5
5
5
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r9
(
)
avant le jugement définitif dans nne justice de p a ix ,
puisqu’il est défendu d’écrire.
Les conclusions reconventionnelles de M . Chabrol
naissent d’ailleurs naturellement de l’objet de la demande
de M. Neiron.
se prétend troublé dans sa possession,
par les travaux de M . Chabrol; il demande contre lui
40 fr. de dommages-intérêts pour le prétendu tort qu’il
lui avoit occasionné; e tM . Chabrol, qui en avoit éprouvé
un bien plus grand par l’action de M . N eiron, h raison
de la suspension de ses travaux, du dégât et de la perte
de ses matériaux, avoit conclu contre lui en 100 francs
de dommages-intérêts.
Il n’y eut donc jamais reconvention plus régulière en
elle-même, qui eût plus de relation avec l’action princi
pale , et qui dût moins en être séparée.
L ’objet du litige, composé de ces deux actions réunies,
excédoit donc évidemment le pouvoir attribué au juge
de paix, pour prononcer en dernier ressort.
M . Neiron a demandé dans son premier exploit, d’une
manière expresse, que le juge de paix de l’Ouest jugeât
en dernier ressort; mais en prenant de nouvelles conclu
sions, à l’audience du 14 juin, il a cessé de conclure à
ce dernier ressort; et M . le juge de paix de l’Ouest, dont
M. Chabrol a attaqué la compétence, a tellement senti
qu’il ne pou voit ni ne devoit prononcer en dernier ressort,
qu’il n’a pas fait usage de cette formule, ce qui prouve
qu’ il n’a entendu juger qu’à la charge de l’appel.
M . Neiron oppose que si le juge paix n’a pas usé c!e
cette formulle, cette omniission 11e sauroit nuire à son ju
gement. Autrefois cependant les présidiaux étoient rigouC a
11
M
�C
20 )
reùsement astreint à déclarer s’ils jugeoient en premier ou
dernier ressort ; et toutes les fois que leurs jugemens ne
ifiisoient pas mention du dernier ressort , ils n’étoient
censés rendus qu’à la charge de l’appel. Pourquoi donc
les juges de paix seroient-ils affranchis de cette règle?
Enfin, quand cette ommission seroit indifférente en thèse
générale, elle n’a pu l’être dans l’espèce particulière, où
il s’agit d’incompétence, d’action reconventionnelle qui
excède le dernier ressort, et où M . Neiron, après avoir
conclu dans le principe à ce qu’ il fut statué en dernier
ressort, a cessé d’y conclure depuis que M. Chabrol a
opposé cette incompétence, et formé sa demande reconfV'entionnelle qui portoit à 100 fr. l’objet du litige..
À u reste, s'il y avoit du doute sur la question de savoir
si le juge de paix de TOuest a entendu juger en dernier
ressort, ou à la chai’ge de l’app el, il faudroit se décider
pour l’appel comme le plus favorable, la règle générale
étant que toute contestation doit subir deux degrés de
juridiction ; et la faculté de juger en dernier ressort n'étant
qu’une exception, elle doit être rigoureusement restreinte
aux cas clairement prévus par la loi.
Il faut donc regarder ce point comme démontré, que
l ’appel de Al. Cabrol est reccvablc.
Il reste à examiner s’il est fondé.
Cet appel doit être examiné d ’a b o r d sous le point de
vue de l'incompétence, et subsidiairement sous celui du
mal jugé.
L ’incompétence du juge do paix de l'Oucsl résulte de
l'ordonnance du président du tribunal civil , du 2 com• plemcnlaire de l’an 13 , Ct duconllit de juridiction qu’elle
�( ü )
établit, en la rapprochant de la cifation donnée devanï
l€ juge de paix.
M . Neiron père s'étoit permis des voies de fait contre
M . Chabrol, ayant fait interrompre ses travaux et chasser '
violemment ses ouvriers par Je ministère de M . son fils.
M . Chabrol obtient l’ordonnance du 2 complémentaire,
qui l’autorise dans l’accomplissement de ses restaurations,,
et cela provisoirement, contre les agressions de M M .
•Neiron-Dcsaulnats père et fils.
Mais M . Neiron prétend que cette ordonnance ne con
cerne que la digue, et que tout ce qui n’étoit pas digue
demeuroit prohibé à M. Chabrol/Cependant M. Chabrol,
par sa requête, avoit exposé « qu’il avoit droit à des prises
d’eau aux sources mêmes du ruisseau des Gros-Bouil« Ions. » Sa pétition avoit donc pour objet tout ce qui
•est relatif à ces prises d’eau. D ’ailleurs , les aquéducs, les
prises d’eau et la digue sont un ensemble de construction
qu’on ne peut séparer, et qui ne scroient rien les uns
sans les autres. Son aquéduc couvert gît au fond et dans
le lit même du grand aquéduc; il y est immergé : il falloit
donc profiter de l’absence momentanée des eaux qu’il
avoit déviées, pour compléter son entière restauration; et
ce n’est qu’après l’avoir terminée, qu’il a été possible dé
mettre la dernière main ¿\ la digue.
Si M . Chabrol eût négligé cette partie de sa restaura
tion, il eût commencé dès ce moment une espèce d’ab
dication de ses droits, dont M. Neiron n’eût pas manque
de se prévaloir un jour. Si cette ordonnance, du 2e. jour
complémentaire de l’an 13 >avoit mis des restrictions a la
faculté qu’elle accordoit ù M . Chabrol, au lieu d’une jus^-
1
�( 22 )
tice, c’eût été un mallieur pour lui ; c’eût été l’exposer â
de grandes dépenses sans espoir d’aucun fruit ; ce qu’on
ne peut présumer de la sagesse et de la justice de M . le
président du tribunal civil.
M . Chabrol n’auroiteu besoin de l’intervention d’aucun
tribunal pour être autorisé à la restauration de ses prises
d’eau, si M M . Neiron père et fils ne l’eussent troublé dans
l ’exercice de ses droits. L ’article 697 du Code civil veut
que « celui auquel il est dû une servitude ait droit de faire
« tous les ouvrages nécessaires pour en user et la con
te server. »
C ’est donc contre les agressions et les obstacles de
M M . Neiron père et fils, qu’il a invoqué l’autorité du
tribunal civil. L ’ordonnance du 2e. jour complémentaire
a donc saisi la juridiction de ce tribunal.
M . Chabrol supposera pour un moment que l’ordon
nance de M. le président du tribunal civil peut donner lieu
à interprétation , et présenter de l’incertitude sur le fait
de savoir s’il n’a pas entendu restreindre tous les travaux
à la digue seulement ; en ce cas à qui peut-il appartenir de
l’interpréter ou de la modifier ? Ce ne peut jamais être à
un juge inférieur. Il n’appartient qu’à la cour d’appel de
l’infirmer, comme au tribunal civil de l’expliquer. Que
cette ordonnance présentât ou non des équivoques, elle
n’en est pas moins 1111 exercice de la juridiction du tribunal
civil: à lui seul appartenoit d’interpréter sa volonté.
L e jugement dont est appel doit donc être annullé
comme incompétennnent rendu, subsidiairement il 11e peut
manquer d’être infirmé à raison du mal jugé.
Eu remo.itant à la demande originaire de M , Neiron-
�1 M
*3
#(
)
Desaulnats, on voit qu’il a conclu à ce qu’il fût dit « que
« M . Chabrol a eu tort d’usurper, dans l’enclos de Saint« Genest, le terrain sur lequel il a placé les tuyaux ci« dessus énoncés ; que M . Desaulnats soit autorisé à re« prendre la libre jouissance dudit terrain ; que défenses
« soient faites audit sieur Chabrol de l’y troubler à l’ave« nir...... et qu’il soit condamné envers lui à 40 francs de
« dommages-intérêts. »
Remarquons d’abord que ces conclusions en complainte
-possessoire de M . Neiron, et le jugement en maintenue
du juge de paix , ne portent pas sur les eaux des sources
des Gros-Bouillons. M . Neiron ne demande pas à être
maintenu dans la possession de toutes, ou partie de ces eaux;
il ne se plaint pas de ce que M. Chabrol en absorbe dans
.scs aquéducs : et pourquoi ne s’en plaint-il pas? parce que
ni lui ni ses prédécesseurs n’en ont jamais usé ; que l’état
naturel des lieux s’y opposoit, et qu’elles ont coulé de tout
temps en totalité et en toutes saisons hors des héritages de
l’enclos de Saint-Genest sans leur être d’aucune utilité, si
ce n’est depuis quelques m o is, que M . Neiron a pu en
diriger dans son pré-verger la portion méridionale , eu
profitant des travaux de M . Chabrol ; entreprise et nova
tion contre laquelle M . Chabrol fait toutes réserves, tant
pour lui que pour ses co-interessés.
Toutes les prétentions possessoires de M. Neiron se ré
duisent donc î\ être maintenu dans la possession du terrain
sur lequel sont gissans les canaux de M. Crabrol, terrain,
dit M. Neiron, qu'il a eu. tort d'usur-fier; et le juge de paix,
par son jugement, maintient uniquement M. NcironDesauluats dans la possession et jouissance du terrain
n
9
J ‘
�\\
Cm )
dont il s'agit, et fa it défense tï M . Chabrol de Py
troubler.
O r , ce terrain prétendu usurpé est le lit même du grand
aqueduc de M. Chabrol; il est et a toujours été submergé
par les eaux. On ne voit pas comment l\J. Neiron uuroit pu
en jouir, comment il auroit pu en avoir la possession
annale avant sa demande, lui qui convient n’avoir jamais
eu la propriété de cet aquéduc-digue ou agage , puisqu’il
invite M. C h ab ro l, par ses lettres, à le réparer.
C ’en seroit assez pour faire sentir le ridicule d’une pa
reille demande , ayant pour objet la maintenue dans la
jouissance d’un terrain qui est sous les eaux , sans qu’ il soit
jamais dans l’ordre des choses possibles que ce terrain sub
mergé, puisse servira autre chose qu’à soutenir les eaux.
Mais ce qui écarte toute idée de complainte possessoire dans l’espèce, c’est qu’il n’y a pas de nouvelle œuvre
de la part de M . Chabrol ; il n’a fait que réparer un
ancien canal existant de toute ancienneté , et destiné à
coiuluirc une prise d’eau du ruisseau des Gros-Bouillons
à sa maison du Chancet. M . Neiron à la vérité conteste
jce fait; il nie qu’il ait jamais existé de conduite d’eau
au Chancet. « Si cet aquéduc couvert eût existé, dit-il,
« M. Chabrol n’eût pas manqué d’en faire dresser procès
« verbal contradictoirement avec moi , avant de le res« taurer. » Mais M . Chabrol est aussi étranger aux af
faires co n t e n t ie u se s que son adversaire y est familier;
pouvoit-il se douter qu'un pareil fait pût être contesté,
que les débris des canaux et des tuyaux gissant sur le
lieu même rie sufliroient pas en cas d’opposition? IJouvoit-ril penser que partie de ces débris disparoîtroit de
ce
�\
C
25 )
ce local, que ceux qui n’avoicnt pas été déracines à
l’extrémité septentrionale seroient enlevés? Si M . Cha
brol a commis une négligeance, en ne demandant pas
à être autorisé à faire dresser procès verbal, il lui reste
la ressource de la preuve testimoniale. Quoique M . le
juge de paix de l’Oitest, dans son dix-septième attendu y
dise qu’ il ne l’ait point offerte, il n’est pas moins vrai
que, d’après l’avis de ses conseils, il recueillit les noms
des témoins , lui en proposa l’audition, et que M. le
juge de paix la jugea inutile; ce qui persuada à M. Cha
brol qu’il étoit décidé à se déclarer incompétent. Si la
mémoire de M. le juge de paix l’a mal servi, M. Cha
brol y a rérnédié depuis ; ce qu’il ne crut pas devoir
faire alors, d’une manière expresse et juridique, en
vers M . le juge de paix, il le fait aujourd’hui; il a
pris des conclusions formelles tendantes à être admis
à faire preuve par témoins, qu’il existoit dans le lit même
de l’aquéduc destiné à conduire les eaux du ruisseau des
Gros-Bouillons, une ancienne conduite, partie en ca
naux de pierres, partie construite en maçonnerie, et
partie en tuyaux de brique; et cela jusqu’à l’extrémité
septentrionale de l’enclos de Saint-Genest.
Ce fait une fois p ro u vé, il sera démontré que M . Cha
brol n’a point fait une .nouvelle œuvre; qu’il a seulement
restauré son ancienne conduite, en substituant des canaux
neufs aux anciens, obstrués ou dégradés par le temps et
le défaut d’entretien.
La réparation de cette ancienne conduite n’a pu donner
lieu à une action posscssoire de la part de M . Neiron,
parce que, comme on l’a déjà dit, aux ternies de l’art. 697
du Code civil:
D
�¡ ¡ il
>»'£ 26 )
' Celui à q u i il est dû une servitude a droit d e fa ir e
tous les ouvrages nécessaires pour en user et pour la
conserver. Cette disposition est tirée de la loi x i , au di
geste, livre 8, titre 4.
ü
I l résulte d’un droit de prise d’eau la faculté tacite de
la restaureryden approcher en conséquence le plus près
p ossible, so i et ses ouvriers.
S i ju s est m ihi aquam rivo ducere tacita hœc ju ra
sequuntur , ut reficere m ihi rivurn lic e a t, ut adiré
quinn proxim è possim y ad reficienduni euni , ego f a
brique mei. ( Loi 1 1 , §. 1 . titre 4 , au digeste. )
Si l’usage de cette conduite a été suspendu pendant
nombre d’années par suite de la non habitation des pro
priétaires du Chancet, ou par leur impossibilité de sub
venir aux dépenses de sa restauration, cette suspension
n’a pu nuire aux droits de M . Chabrol, qui ont toujours
été conservés par les vestiges et les restes de cet aquéduc ;
c’est un droit de pure faculté imprescriptible de sa na
ture , jusqu’à contradiction..
C ’est ce qui résulte également et des anciens principes
et des nouvelles lois. ( Voyez l’article 2232 du Code civil,
sur les droits de pure faculté, et l'article 688, sur la pres
cription des servitudes. )
D ’Argentré, qui a traité la question da ns son Commen
taire sur l’article 266 de la Coutume île Bretagne, prend
pour exemple des moulins et des colombiers dont il neresteroit que des vestiges.
_
Il dit, l’égard des m oulins, qu’il est toujours permis
de les rétablir, pourvu qu’il en subaste quelque portion.
Quandià qucvdam de priora maleriœ supersunt p a li,
cubiccv trabes , parietinœ quev symbolo. et notœ esse
�(*?)
possurit p rion s cònstructionis hœc 'enim sig/ta cum
sint temporis successivi, et permanentis signatum 'reti
ren t in possessione juris.
,n
Jsta inquam et superstantia fundam enta ( dit-il plus
bas ) possessionis interruptionem impediimt. Il en est de
môme , d it-il, des colombiers détruits ou dégradés par le
temps ; quand il n'y auroit pas eu de pigeons depuis un
siècle, il est pex*mis de les rétablir.
Q uandiù parietinœ et vestigia restabunt^etiamsi antè
'centurn annos in eo nulla columha résid en t, eoque
jure utiniur ; qnod nemo rectè prohibere possitT quia
!vestigia possessionem retinent..
'
On trouve les mêmes principes dans Mornac sur là
loi 34 au digeste Dì? servitutibus rusticorian prœdiorium*
S i colum barii, vel inolindini J la tilis, vel stagni ves
tigia restant, etiam post centum annos, possessio in
ipsis vestigiis retineri semper censeatur, ita ut restituì
instaurarique possint à domino.
C ’est toujours en raisonnant d’après ces principes, que1
Papon dans son Commentaire sur l’article 29 de la Cou
tume de Bourbonnois , dit que « ces sortes de droits
« que les docteurs appellent de pure faculté , sont con« servés parla simple possession civile, et 11e se perdent
« point par le non usage. »
Tlorum en ini jurium quæ facultatis doctores vocant r
sola possessio civilis prescriptionem im pedii, ncque non
utendo pereunt.
« D ’où il suit (dit A uroux des P o m m i e r s ) qu’il ne*
« peut se rencontrer de possession formée de liberté de:
« tels droits, que par un fait contraire. »
A u surplus, ces principes viennent d’être consacrés g a r
�c
2
8
}
le Code civil de manière à ne pas même laisser de prise
à la contradiction.
On lit dans l’article 688, que les servitudes continues
sont celles dont l'usage est uu peut être continuel sans
avoir besoin du f a i t actuel de l'homme ; telles sont les
conduites d 'ea u , les égouts, les vues, et autres de cette
espèce.
On voit dans l’article 707, q u e , lorsqu'il s’ agit de servi
tudes continues , les trente ans pour acquérir l'extinction
de la servitude ne commencent à courrir que du jo u r
où il a été fa it un acte contraire à la servitude.
D ’où il résulte que jusqu’à cet acte contraire M. Chabrol
a conservé la possession de la conduite d’eau dont il s’agit;
qu’il a été en droit de la faire réparer quand il l’a jugé à
propos, sans que cette restauration ait pu être prise pour
nouvelle œ uvre, ni donner lieu à une action en complainte
possessoire de la part de M . Neiron, surtout dans la cir
constance où il n’a jamais eu ni pu avoir la possession du
terrain sur lequel est le grand aquéduc, lequel forme son
lit, qui est immergé par les eaux , et dont il lui est im
possible de faire aucun usage,
La prétention de M. Neiron-Desaulnats est donc sans
intérêt comme sans fondement; elle doit être p r o s c r i t e ,
et le jugement dont est appel par M, C h a b r o l doit être
infirmé , si le tribunal civil ne croit pas devoir se décider
pour l'incompétence qui résulte de l'ordonnance du 2e,
jour complémentaire; de l’an 13.
P a r conseil,
B E R G I ER.
BOIROT.
A R I O M , de l'im p r im e r ie d e L a n d r i o t , seul im p r im e u r de la
C o u r d ’appel. — A o û t
1806 .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chabrol. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation, pour M. Chabrol, ancien colonel ; en réponse à l'imprimé de M. Neiron-Desaulnats, ancien magistrat, intitulé Précis, et à sa consultation signée Meimac.
Table Godemel : Complainte : 4. le juge de paix est-il compétent pour statuer sur la complainte possessoire de Désaulnat relative à la construction faite par le colonel Chabrol, d’une conduite d’eau dans son enclos de Saint Genest ? L’article 10 de la loi du 24 août 1790 est-il absolu ou limitatif ? Le juge de paix pouvait-il statuer sur les conséquences des réparations faites en vertu d’une ordonnance du président du tribunal ? 5. le jugement qui a maintenu Désaulnat en possession de son terrain, et ordonne la destruction des ouvrages, est-il un dernier ressort, dès que le demandeur avait restreint la valeur de ses dommages-intérêts à 40 francs seulement ? n’est-il pas, au contraire, en premier ressort par la nature même des conclusions du colonel Chabrol, qui, d’une part, en opposant l’incompétence du juge de paix, avait élevé un conflit de juridiction entre le tribunal et le juge de paix, et, d’autre part, avait formé une demande reconventionnelle de 100 francs de dommages-intérêts ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1683-1806
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1531
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0529
BCU_Factums_M0530
BCU_Factums_M0540
BCU_Factums_M0713
BCU_Factums_M0525
BCU_Factums_G1530
BCU_Factums_G1532
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53271/BCU_Factums_G1531.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Malauzat (63203)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
aqueducs
destruction de canalisations souterraines
Jouissance des eaux