1
100
4
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53176/BCU_Factums_G1218.pdf
876e996e8c9c032b64b7878017ea4de2
PDF Text
Text
TRIBUNAL
D E F E N S E
DE
PO U R le C. J UDDE-LARIVIERE ;
C O NTRE la dame B R A N D Y ? épouse
se disant divorcée du C. G O U R S A U D U M A Z E , demanderesse en cassation.
DIVORCE SIMULÉ,
OU FRAUDULEUX ET NON EXÉCUTÉ.
U
n
acte
p a rties ,
de
et
d iv o rc e ,
qui
q u i n ’a r e ç u a u c u n e e x é c u tio n e n tre
a été sim u lé
ou
f r a u d e r le s d r o i t s d ’ u n c r é a n c i e r ,
consenti
e s t -il
tout
exprès
pour
o p p o sa b le à c e c r é a n
c i e r , p l u s q u e n e s e r a i t u n e s é p a r a t i o n s i m u l é e , f r a u d u l e u s e et
non exécutée ?
T e l l e sera la p r in c ip a le q u estio n à ju g e r : — e lle in téresse é m i
n e m m e n t et l a fo i d u e a u x tra n s a c tio n s s o c ia le s , et la sa in teté d e s
m o e u rs , e t le r e p o s d e s fa m ille s.
CASSATION.
SECTION
c iv il e
.
�(»)
F A I T S E T P ROC É DURE.
A u 5 nivôse <lc l ’an 2 , les biens de la dame Brandy , femme
mineure du C. Goursau-Dum azé, étaient grevés de i g , 5oo livres
de dettes.
Pour se libérer de ces dettes , les deux époux ven diren t,
conjointement et solidairement , à Judde-Larivière , au prix de
20,200 livres , le domaine de la Renaudie , dont la valeur réelle
pouvait être de 10,000 livres écus.
L a mineure avait donc bénéficié de 10,200 livres par cette
vente : il paraissait impossible qu’elle eût jamais intérêt à l ’at
taquer.
Mais l'avilissement ultérieur du papier-monnaie lui fit espérer
de rembourser son acquéreur avec des valeurs nulles. — D e là
trois procès successifs : le premier , en restitution comme m i
neure ; le second , en rescision pour lésion d'outre moitié 3 le
troisièm e, encore en restitution pour cause de minorité.
L e tribunal observera quele premier procès en nullité pouv cause
de minorité avait été entrepris pendant que la dame Brandy était
encore mariée au C. Goursau-Dum azé : heureuse alors de celte
u nion, elle ne songeait point il la rompre.
Mais le mari ne pouvait reve nircontrc la vente qu’il avait ga
rantie. — E tla femme ne pouvait revendiquer un dom aine, pour
en remettre les jouissances sous la main de son m ari, qui les avait
aliénées.
Cette fu sio n dés intérêts de la dame B ran d y, et des intérêts
de son m ari, avait donc été un. obstacle au succès du premier
procès en nullité. — En sorte que pour intenter un nouveau
procès en restitution pour m inorité, la dame Brandy avait à
opérer préalablement une division d ’intérêts , à obtenir la qualité*
d 'administratrice de scs biens.
Pour atteindre ce b u t, la dame Brandy aurait pu demander litséparation. de ses biens • mais il eût fallu accuser son mari de
mauvaise administration; et le contraire était notoire: — il eût fallu
/
�*
3
*
( 3 )
persuader aux juges que celte séparation n’était pas frauduleuse
o r, il eût été évident qu’elle était faite seulement pour revenir
contre la vente. — Il eut fallu surtout e x é c u te r la séparation
de biens ; et mille raisons d ’intérêts s’opposaient à cette exé
cution.
L a dame B ran d y, ou pour mieux dire le C. Goursau-Dum azé,
son mari , éhercha donc un moyen à l ’abri de tous ces inconvéniens. — Et pour être réputée nécessairement administratrice
de ses biens , la dame Brandy se pourvut d ’un acte de d i
vorce.
L e 8 brumaire an 8 , les deux époux , devant l ’oflicicr p u b lic,
signèrent un acte de divorce par consentement mutuel.
Mais ils conservèrent la môme table , le même l i t , la même
.»
gestion d ’affaires.
Judde-Larivière produit l ’acte de naissance d’une fdle née de
l ’union continuée de ces prétendus divorcés. — C et acte est signé
par Goursau-Dumazé lui-même , et par lç père de lu tJdame
Brandy.
! t.
Elle-même est convenue au procès ( et c’est constaté par le ju
gement ) que , dans les contrats passés depuis son d ivo rce,. elle
a paru sous Vautorisation du ,C. Goursau-Dumazé. — Elle est
aussi convenue qu’il n ’a pas cessé d 'administrer S C S biens.
Quoi qu’il en s o it, aussitôt l ’acte de divorce sign é, c’est-à-dire
le 7 frimaire an 8 , nouvelle citation en restitution pour m inorité,
a. la requête de la dame B ra n d y , en sa qualité de femme divorcée.
Sur cette'assignation, Judde-Larivière n’opposa qu’une fin de
non-reccvoir , prise de la nullité du divorce , du défaut de
qualité.
D e son côté , la dame Brandy prétendit que Judde-Larivière
n’était pas recevable à querelcr son divorce.
8 fructidor an y , — jugement contradictoire qui admet la dame
Brandy à procéder en qualité de femme divorcée.
Appel. — Judde-Larivière avait, en première instance , querèlé le divorce comme nul, de nullité absolu e, pour irrégularités
�( 4 )
essentielles ou invalidité. En cause (l’appel, il ajouta que le divorce
était aussi n u l, de nullité relative à son égard, ou non opposable,
en ce qu’il était sim ule , et n ’avait pas reçu .exécution par la désu
nion effective des personnes et des biens. -,
■
>
26 mossidor an 9 , — jugement du tribunal d ’appel séant à L iinoees.
j ^
.
*
,1
». '
.
Sur la question de savoir si Judde-Larivière était recevable à
quereler le divorce de la dame B ra n d y , le tribunal considère que
l ’acquéreur d ’un domaine est essentiellement recevable à quereler
l ’acte au moyen duquel 011 prétend l’évincer.
Sur la question de savoir si la dame Brandy était recevable à pro
céder en qualité de femme divorcée, le tribunal considère que le
divorce est régulier et validé.
1
Que , cependant, deux époux qui continuent à vivre ensemble,
qui contractent ensemble, qui réunissent leurs soins pour l ’admi
nistration de leurs biens , ne peuvent avoir eu véritablement l ’in
tention de rompre le lien qui les unissait. *— D ’oü il" suit‘ que le
divorce est non sérieu x ou sim ulé , et non opposable.
r
Que , d ’ailleurs, la continuité de vie commune doit suffire pour
empêcher qu’un divorce soit opposable a u x créanciers j de
môme q u ’elle empêchait jadis une séparation d ’avoir effet à l ’é
gard des créanciers ( l ’article 11 du $ 3 cîe la loi du 20 sep
tembre 1792 n’attribuant au divorce que les mêmes effets d ’une
séparation. )
1
' Par c e s motifs , le tribunal déclare la dame Brandy non-rece~
vable , quant ¿1 présent.
Contre ce jugement la demanderesse présente six moyens d^
cassation..
,
,
R É P O N S E
A U X S I X M O Y E N S D JE C A S S A T I O N .
« L
e p r e m ie r
MOV e n c s t p r i s d c c e q u e lu s i m u l a t i o n n ’ a é lé
�( 5)
&
«5 alléguée qu'en cause d ’a p p el, — ce qui est qualifié, de conlra« vention à l ’article 7 de la loi du 3 brumaire an 2 , lequel détVrul
« de Amncr en cause d ’appel de nouvelles dem andes. »
11 .
-,
r
1
Mais l ’exposant n ’a formé qu’une seule demande : — en cause
d ’ap p el, comme en première instance , il a demandé que M arie
Brandy fut déclarée non-recevable.
¡,
'<■' !tl' üni')
H o ■
'
En cause d ’a p p el, comme en première instance > il a même
fondé sa fin de non-recevoir^sur la nullité du divorce.
)r
A la vérité , devant lè tribunal de première instance, il n’avait
querelé le divorce que pour nullité absolue ou invalidité ; et en
cause d ’a p p e l, il l ’a q uerelé, de p lu s, pour nullité relative ou
non-opposabilité , à cause de la simulation. r
(.j
Mais ce n ’est là qu’un dévetoppement de défense. — Ce n’est
du tout point une dem ande nouvelle.
■
A in s i, point de contravention à l ’article 7 ^dc la loi du
maire an 2.
/ •*y:
»
.
f I :.
.} J | ?.
! * ' • , ' »S : : r f J i »
-»11
3 b ru
« L e deuxîèm e moyen est pris dé^cc qu’un simple créancier a
« été re çu ’à quereler un divorce pour vice de simulation ; — ce
« que la dame Brandy appelle une contravention aux principes
« sur les questions d'état relatives au mariage formé ou <lis—
« sous. »;
, '
‘ ;
1
1
•
H
I
,
!)
::r.
i
f.!/
'
Réponse, — i° . Un moyen basé ,§ur la contravention à des prin
cipes 11’est pas un moyen de cassation : il faudrait présenter uiip
contravention à la loi.
!l|
«*
'»I
2°. L e jugement attaqué n’a pas, pronoiicé l ’invalidité du di
vorce : — donc il 11’a pas porté atteinte à Vétat civil de la dame
Brandy ; — donc les principes sur la stabilité de l’état civil doivent
rester ici sans application.
3 °.
La dame Brandy invoquerait vainement les principes
généraux sur les questions d ’état 5 car la seule raison <l'intérét
public peut, entraver l ’exercice 'd es actions qu’autorise l'in -
�(<S)
te'rét p riv é: o r, son cœur doit l ’avertir ({ue son divorce n ’est pae
du tout intéressant pour le public.
^
.?
Elle ne peut sérieusement établir de comparaison entre la
faveur due à un mariage , et l ’espèce d ’accueil que mérite un
divorce.
.
Sans doute il est éminemment' utile que des enfans, nés sur
la foi d ’un mariage apparent, ne soient pas relégués dans la
classe humiliée des'enfans illégitimes ou bâtards. — Sans doute
il est éminemment utile à la morale publique de ne pas cher
cher un odieux concubinage là où chacun s’était plu à res
pecter l ’union, sacrée de deiix époux légitimes.
D e là , l’irréfragabilité du mariage contre les atteintes des tiers,
surtout des créanciers.
Mais si qucreler un divorce c’est précisément préparer le bon
heur des enfans ; si c’est préserver la société d ’un scandale ; si
tous les motifs d ’utilité , de moralité pu bliqu e, se réunissent
également pour favoriser les mariages et pour restreindre les
d ivo rces, la conséquence^ n’en, est-elle pas q u e , moins il est
permis d'attaquer un m ariage, plus il doit être permis d ’atta
quer un divorce ?
L e cœur d ’une mère a-t-il pu ne pas sentir que le divorce
prépare aux enfans une jeunesse douloureuse, une éducation
dépravée , qu’il leur ôte toutes les chances de bonheur et de
v e r tu , qu’il les1vend plus mallikureux 'qùé des orphelins ?
Et la dame Brandy réclame la faveur de la loi pour cette
espèce d ’acte immoral et barbare !
,
Lu loi protectrice des enfans a un tout autre langage : elle or
donne impérieusement aux juges d ’être favorables à toute action
dirigée contre un divorce , a u t a n t qu’ils doivent être difficiles
quand il s’agit de roinprp, un.mariage*;.
......
Solutioncm cnim rnatrirnonii- >difficihorcni debcrc
favor imperat liberorum. ( L . , Cad. de Jiep itd .) i
8
esse
�A in s i, les principes mêmes de la matière étaient favorables
à l ’action de Judde-Lai’ivière.
Donc point de fondement au second moyen.
*
■ « L e t r o i s i è m e m o t e n de la dame Brandy est pris de ce que
« Judde-Larivière avait une voie plus simple que l ’exception do
« simulation. — Et cette voie plus simple la dame Brandy nous
« l ’indique dans l ’article i x dù § 3 de la loi du 20 septembre
,1 . Ε
,
« 1792. »
Réponse. — Il est difficile de comprendre comment un moyen
de cassation pourrait résulter de ce que Judde-Larivière n ’aurait
pas em p loyé, pour sa défense , la voie la plus simple.
Il est plus difficile encore de com prendre. pourquoi l'article
tm d u $ 3 de la llo i d u i 30 septembre 1792 > nouSje$t-indiqué
comme une voie plus simple , tandis.!que cette ))iênie dispo
sition a été appliquée -, et .que la dame Brandy prétend non
a p p lica b le .
. >
* ^
.
n
.
•
•’
v
•
.
J.
!
vjC iroisjeme moyen ne peut avoir aucune consistance.
V.
).V
« L e q u a t r i è m e m o y e n est pris de ce que le tribunal d ’appel
« ;i supposé susceptible de simulation un acte q u i, de sa nature ,
<< ne peut être simulé : — ce que la dame Brandy appelle une
« contravention à l'essen ce d es choses. »
R ép onse: — i° . L e tribunal décidera s’il connaît des contra
ventions à l’essence des choses, alors que cette prétendue essence
des choses n’est pas définie par la ïoi.
. >r
î ;!r.
Mm '
2°. Nous laisserons ¿1 l ’enfant de la dame Brandy , né depuis
son divorce , d ’examiner 1111 jour s’il a dépendu de son père et
de sa mère de lui ravir son état d ’enfant légitim e, et son droit
de successibilité. — Il Cxàininer.-V , ce malheureux enfant , s’il
y a divorce sans intention de se désunir à jamais. Divortium
non est nisi verum , qitoil animo èonstituèndi perpétuant dissensionem fit. ( L. 3 , H’, de Divortiis. )
1
Il examinera si un mariage , diésous par u n , consentement
�H Ô
( 8
)
mùlu’e l^'ne se é ta b lit point aussi par une réunion mutuelle.
Ciini eadetn m ulier ad eumdem virum revcrtatur , id matrivionium idem esse 'videtür'. ( L . 3 i» , 1T. de Ritu Nuptiarum. )
%
3 °. Quant à nous ', la question n ’est pas 4 p savoir s’il existe un
divorce , s’il a été fait v a lid em en t, s’il a été détruit >effacé par
la réuuion. — Bien queladame.Bx’andy le suppose constamment.,
ce ii’est pas la question à juger : — il s’agit seulement de savoir
si un divorce valide est susceptible de simulation.
O r. 7, l'affirmative
est écrite dans les lois
it
1i . romaines et dans les
lois,françaises,
r
TL
- it ,
j
j
A R o m e, l ’action en simulation de divorce était permise au
père dont la fille avait fait un acte de divorce tout exprès pour
le ifrustrer de sa dot profccticc ( laquelle retournait au p è r e ,
lorsque'la fdlem ourait dans l’état du mariage. )
S i ^fîlia èm ancipata idcirco divèrtat , at maritum lucro
dotis a fficia t, patrem fra u d et , qui profectitiam dotent potuit
petCt '6 , si constante matrimonio decessisset , ideo patri succiirrendum e s t , ne dotem perdat. ( L . s i F ilia. if. de D û ’ . )
A Rome , on tenait que la simulation de divorce ne nuisait à
personne; conséquemment que chacun pouvait arguer le divprce
de simulation.
Jma^inaria répudia et simulata nullius sunt monieriti, nec
P
i
ilV . • >■• •»!> îiirrti
cuiauam i\ocent.
» • i
1 .t ((j i: >>
.olr.#. •«.
.• *) •> •
En France , le divorce n’était admis que relativement à la
table et au lit , ( comme disent les auteurs ) f/uoàd niensam et
thor'itnï.
'
•>
i.
.
‘J
Mais , sous lps rapports établis en Fi a n ce , le divorce pouvait
élrc quçrçlé dp sbtmlatipn ou collusion.
. Les .arrêtiÿtps g o n t . ¡ r e m p l i s d ’exemples de divorces ou de
s é p a r a t i o n s de corps et, de biens ^annullés pour avoir été collusoirement consentis. ■
,a \
En F ra n ce , l’ancicnuc législation allait jusques à admettre la
�( 9 )
querele de simulation contre les m ariages, dont lu stabilité est
bien autrement importante que celle des divorces. — T els étaient
les mariages secrets et les mariages in extrem is.
Un homme se marie à l ’instant où. la m ort, planant sur sa tête ,
ne lui permet pas de se proposer une cohabitation perpétuelle.
Et bien , le mariage , quoique v a lid e , n ’a pas d '.effets civils ,
parce que l ’intention est contraire à l ’acte.
Une servante est épousée par son maître : cependant à tous
les yeux elle reste servante — Et bien , un tel mariage , quoique
valide , n’a pas à.'effets civils ; la loi n’y voit pas la réalité d'un
jnariage : elle n’y voit que la honte d ’un concubinage. ( Ord,
de 1689. — Edit de mars 1697. )
t.
Dans l ’un et l'autre cas , le mariage reste sans effets civils à
l ’égard des tie rs , parce qu’en réalité il n’est pas ce qu’an
nonce la form e , parce qu’il tend moins à faire des époux qu’à
frauder des successibles.
Par la même raison il serait possible et moral que le divorce
restât sans effets civils , lorsqu'on réalité il n’est pas ce qu'an
nonce la fo rm e , lorsqu’il tend moins à la désunion des époux
qu’à la ruine des tiers.
« L a dame Brandy nous dira-t-elle qu’il faut juger la ques« tionseulement d ’après les lois nouvelles? »
Sans doute l ’examen des lois nouvelles aura son tour, et sera
le siège principal de la difficulté. Mais ici nous avions à examiner
si le divorce, par son essen ce , est susceptible de simulation \ si
le jugement qui a prononcé l ’affirmative a contrevenu à l ’e j .
sence des choses
•
': s’il a dit une absurdité.
O r , ce qui a été pratiqué chez les Romains dans des circons
tances toutes semblables } ce qui a été consacré par les plus sages
de nos ordonnances , n’a sans doute r ie n , d ’absurde , rien de
contraire ¿1 l'e sse n ce des choses.
<c Vainement la dame Brandy nous dira que l ’essence du di-
3
�'l\ v D
'*
( 10
)
a vorce consiste dans l'assemblage des formalités prescrites ; que
« feindre nn divorce c’est l ’opérer -, que conséquemment il est
« impossible de le simuler. »
Toutes ces assertions sur l ’importance des formalités légales
pourraient nous conduire à une question très-délicate ; savoir s i,
à l ’égîird des actes qui tiennent essentiellement à la nature , au
droit des gens , la loi est créatrice de leur existence, ou si elle
en est seulement protectrice.
Mais il est inutile d e nous jeter dans ces abstractions ; — il
suffit d ’observer que la dame Brandy joue sur le mot simulation ,
cl le dénonce dans le sens où il n ’a pas été pris dans le jugement.
« Elle suppose que le divorce a été déclaré sim ulé ; en ce sens,
« qu’il n ’est qu'apparent, qu’il n ’est pas r é e l, qu’il n’a pas
« d ’e x is te n c e et de validité. »
A u contraire, le jugement a reconnu l ’acte de divorce exista n t
et valide.
Il a déclaré le divorce sim u lé , en ce sens seulement que les
* époux n’ont pas eu intention de séparer ni leurs personnes ni
leurs biens -, qu’ils n’ont voulu que frauder leurs créanciers.
L a question se réduit donc à savoir si la fra u d e , la collusion ,
la sim ulation, poursuivie par les lois dans toute espèce d ’acte,
devient respectable et sacrée, alors que le fraudeur se couvre
d ’un acte de divorce.
Sur la question ainsi posée , il est perm is, sans doute , de se
prononcer pour la négative , sans être absurde, sans contrevenir
à l ’essence des choses: — c’est ce qu’a fait le jugement.
.Voilà pour le quatrième moyen.
« L e c i n q u i è m e e t l e s i x i è m e m o y e n s sont pris d ’une pré€ tendue contravention aux articles i et 2 du $ 3 de la loi du 20
« septembre 1793 , e t , par suite, d ’une fausse application d e l ’ar« tiele 1 1 du même $ 3 . »
Que portent ces dispositions?
'
�/{ o i
(
11
)
L ’article premier rend a u x ép o u x divorces leu r entière indé
pendance , avec la fa c u lté de contracter un nouveau mariage.
— Et l ’article 2 leur donne la fa c u lté de se remarier ensem ble.
Mais le jugement attaqué ne prive pas la dame Brandy de la
faculté de se rem arier, soit avec son m a ri, soit avec tout autre
homme.
O ù est donc la contravention ?
« La dame Brandy fait résulter une contravention à l ’article 2
<( de ce que le jugement a déclaré, d it-elle, le divorce ejf'acé, le
<( mariage rétabli par le seul fait que les époux n’ont pas cessé
d ’habiter et d ’administrer ensemble. »
Mais le jugement ne déclare pas le divorce e jfa c é , ni le ma
riage rétabli.
L e jugement a reconnu le divorce existant et valide: — iln ’a Tait
que le déclarer sans e jfe t , quant à p résen t, a l'égard des créan
ciers.
Il n ’a donc pas contrevenu à l ’article 2.
Quant à l ’article prem ier, qui assure à la dame Brandy son e n
tière indépendance
« elle insinue que le jugement l ’a privée
K de son indépendance , en ne lui reconnaissant pas , quant à
« p r é se n t, le droit (opposable à ses créanciers) d ’administrer
« scs biens. »
'
C e qui suppose en principe général « que le droit d ’administrer
« les biens de l ’épouse est un droit m arital, un apanage de la
« puissance m aritale, vin effet d e là dépendance de l'épouse,
« qui doit cesser lorsque son mariage cesse.
On trouve bien dans quelques auteurs, surtout parm ilesancicns,
que le mari a la jouissance et l'administration des biens de la
fem m e, comme b a il, gardien o u mainbourg, c'est-à-dire comme
Bon seigneur et maître.
Mais ces expressions et ces idées n ’ont eu de vérité que jadis }
lorsque les maris achetaient leurs femmes , ou lorsqu’ils fai
saient , à raison de leurs fiefs, le service militaire. ( Deluuricre sur
jLiOysel, Viv. 1 , litre 2 , § 20 j et titre 4 > $ 3 . )
�t
(
1
2
)
C ’est ainsi que, selon le premier droit romain , le mari était le
seigueur de sa fem m e, le maître de sa d o t, et son tuteur perpétuel.
A ujourd’hui nos lois et nos mœurs 11c comportent plus ce droit
de seigneurie person nelle , ou de tutèle nécessaire.
En pays coutumier et en pays de droit é c r it, la femme , en sc
m ariant, peut conserver l ’administration de ses biens : il lui suffit
de le vouloir.
Donc cette administration de biens de l ’épouse n ’est pas 1111 apa
nage de la puissance maritale.
D onc la disposition lé g a le , qui assure l'indépendance de la
femme divorcée, 11e dit p a s, par cela même , qu’elle ait le droit
d ’administrer scs biens.
D onc il n ’y a pas été contrevenu.
Observons d ’ailleurs que le jugement n ’a prononcé sur les effets
du divorce que relativement a u x créanciers : — il est donc sans
rapport avec les articles 1 et 2 , qui disposent sur le d ivorce, quant
à scs effets entre épouæ.
Reste à examiner la disposition de l ’article 11 du § 3 , que la
dame B randy prétend mal appliquée. V oici comment elle est
conçue :
T ou t acte de divorce sera sujet a u x mêmes form alités d 'e n
registrement et de publication que l'étaien t les ju gem en s de sé
paration ; et le divorce ne produira, à l'égard des créa n ciers
des é p o u x , que les mêmes effets que produisaient les sépara
tions de corps ou de biens.
Cette disposition assimile évidemment le divorce à la sépara
tion dans ses effets à l ’égard des tiers. — L ’un et l ’autre sont
donc, sujets aux mêmes formalités subséquentes , et ne produisent
effet qu’après ces formalités remplies.
Etconiment le législateur a u r a i t - i l pu se dispenserd’as similer le
divorce ¿1 la séparation , quant à ses effets ,¿1 l ’égard des créanciers ?
L e divorce ne produit pas d ’autres changcmens extérieurs que
la séparation. — S ’il emporte de plus la faculté de convoler , cetfe
�( i3 )
différence est. sans rapport avec les créanciers : le convoi n'aug
mente ui ne diminue leurs droits.
L e divorce et la séparation se ressemblent tellement, que jadis la
séparation de corps était a p p e l é e divorce , divortium ¿1 m en sd et
thoro , — Les jurisconsultes disaient même que celte séparation
d i s s o u t le m ariage , à l'e f f e t du partage d e la com m unauté
e t d es e ffe ts c iv ils du ‘m ariage. ( Bouclieuil, sur la coutume du
Poitou , article 239 , n°. 60. )
» A in si, le législateur a dù nécessairemant prescrire , cc mme il l’a
fait, que le divorce soit assimilé à la séparation , pour !es fo rm a
lité s à observer , et pour les droits à exercer à l ’égard des créan
ciers.
L a dame Brandy nous propose une version toute différente, et
en fonde la nécessité sur des principes qui lui sont propres.
;I
A u lieu du texte de la lo i , elle nous propose cette rédaction :
« Quoique le divorce dissolve entre les époux le m ariage, comme
« s’il n’avait jamais existé, — néanm oins,à l ’égard des créanciers
« qui ont contracté sur la foi du mariage existant, les droits que
« leur donnait le mariage subsisteront. — Ainsi ils pourront con<c server contre les époux divorcés les mêmes droits qu'ils au« raient eus contre des époux simplement séparés. »
Si le législateur avait disposé littéralement « que le divorce dis« soûl, le mariage , com m e s ’i l n'avait ja m a is existé, » — et
« que les époux ne sont pas dégagés de leurs dettes par un acte de
« divorce , » on adeuserait le législateur d ’avoir dit une e rre u r, et
une insignifiance. ■
— Une e r re u r ,... car il n’appartient qu’à un ju
gement d ’annullation de faire que le mariage soit comme s’il n ’a
vait jamais existé. — Une in sig n ifia n ce ,.... car il est si évident
que ni le divorce ni aucun autre changement de condition ne
peuvent affranchir les débiteurs de leurs dettes, que ce n’est
du tout pas la peine de le dire par une disposition législative.
Cette version de la dame Brandy ne peut donc être adoptée, à
raison de ce qu’elle renferm e.
Elle doit aussi être rejetée à raison de ce qu’clle om et ; — car
�-
( H
)
celle version ne serait relative qu’aux droits des créanciers, au
lieu qu'elle doit aussi être relative aux form alités à remplir par
les divorcés , pour que leur divorce ait effet.
L a dame Brandy , pour faire adopter sa version , accuse le
jugement , qui a appliqué la loi dans le sens littéral, d ’avoir
méconnu tous les principes,dont voici la lliéoi’ie :
*
Jadis la séparation de corps et de biens avait lieu sous là
ti condition résolutoire de la: réconciliation des cœurs , ou du
« rétablissement de la fortune.
« O r , le divorce est absolu , exempt de toutes conditions ; il
« ne peut être effacé ni atténué que par un nouveau mariage.
« Donc il existe une grande différence entre le divorce et les
« séparations , quant à leurs effets , même à l ’égard des tiers. >.»
D e ce raisonnement , nous contestons et les principes et la
conséquence : — c’est-à-dire que les principes ne prouvent rie n ,
et que d ’ailleurs ils ne sont pas vrais.
L e jugement attaqué , se fondant sur la lo i , a assimile le
d i v o r c e à u n e sé p a ra tio n d a n s ses effets h l'egard des créait ciers. — O r , la dame Brandy invoque contre ce jugement des
principes sur le d ivo rce , considéré dans scs effets entre les
cpouoc. — Bien évidemment., c’est changer la question, ou éluder
la difficulté -, car savoir quel est ¡’effet du divorce à l ’égard
des créanciers , n’est pas la question de savoir quel est l'effet
du divorce entre les divorcés eux-mêmes.
L a dame Brandy affecle de confondre la validité d ’un acte et
scs effets entre p a r ties, avec son opposabilité, ou ses effets
<i l'égard des tiers.
C e sont cependant des qualités très-dislinctes, et qui se règlent
par des principes tout diflérens.
En g én éral, la validité d ’un acte dépend de Yohservation des
form alités légales. — ^ u contraire , il a ou n ’a pas e ffe t, scion
�la bonne ou mauvaise f o i (les parties co.nl raclantes. — IL est ou
n’est pas opposable aux tiers , selon qu’il est ou n ’est pas fra u
d u le u x cl dommageable.
Les donations, les ventes, les actes de m ariage, et les jugemens de séparation peuvent être revêtus de toutes les for
malités qui les rendent valides , et cependant n ’être pas oppo
sables : ces actes et tous autres peuvent avoir effet entre parties ,
sans avoir effet à l'égard des tiers. — Ainsi l ’.Utuite l ’usage
de tous les jours.
L e divorce lui-même est littéralement , et par l ’article i x
que nous discutons , déclaré sans effet à l ’égard des créanciers ,
tant qu’il n ’a pas ét<i enregistré et publié (d an s les pays de
communauté ) : ce point ne saurait être con sisté.
D onc autre chose e s t, même à l ’égard du divorce , l ’effet entre
parties, et l ’effet envers les créanciers.
D onc les principes de la dame Brandy sur la nature du di
vorce , sur ses effets entre parties , ne prouveraient, rien contre
le jugement qui a disposé sur les effets du divorce à l'égard d ’un
créancier.
Actuellem ent examinons si la théorie de la dame Brandy ,
fausse dans ses conséquences , repose sur des principes qui
6oient vrais.' ■!' r r
î
1
,
. t.-"'
« Elle affirme que jadis les séparations étaient prononcées sous
« la condition résolutoire d ’une réconciliation des cœurs , ou
« d ’un changement dans la fortune. »
Mais la fortune pouvait se rétablir , et les coeurs pouvaient se
réconcilier, sans que le jugement dç séparation cessât d ’exister
et d ’avoir effet : — il suflisait que les époux s’abstinssent de réunir
leurs corps ni leurs biens.
S ’il y avait une condition résolutoire } ce n’était donc pas
celle qu’indique la dame Brandy.
'
Quelle était cette condition ?
Il est généralement reconnu que le fait de non-exécution du ju-
�genient de séparation, suffisait pour que le jugement restât
sans effet. ( A rt. 2,3/| de la coutume de Paris , formant le droit
commun ). — Egalement il est reconnu qu’au cas d 'exécu tion , il
suffisait ultérieurement du fait contraire , c’est-à-dire de la réu
nion des personnes ou des biens , pour détruire tout effet du
jugement de séparation.
Donc l 'e ffe t des jugemenç de séparation dépendait absolu*ment de la volonté des époux.
Si donc la séparation était prononcée sous une condition réso
lutoire , c’était sous la condition d ’un changement de volonté
dans les époux.
L e magistrat n’intervenait dans les séparations , comme dans
le mariage , que pour le maintien de l'intérét public. Il ne
pouvait prononcer que sous ce rapport. — T o u t ce qui con
cerne purement l ’intérét privé des époux étant du ressort de
leur volonté , le magistrat devait s’en rapporter àeux-m em es.
Quoi qu’il en soit, un jugement de séparation n’obtenait pas
d ’effe t, ou perdait tout son effet , selon' la volonté des époux.
L a disposition judiciaire était subordonnée à la volonté des par
ties. — Tenons ce point pour constant.
Il importe à la cause de soigneusement distinguer ce qui est
l ’effet nécessaire de la lo i, et ce qui dépend de la volonté des
époux. — L a discussion qui suit aura pour objet d ’établir que
si la dame Brandy n’est pas encore réputée administratrice de ses
biens , c’est par le fait de sa volonté.
Reprenons la théorie de la dame Brandy :
« Elle affirme que le divorce est absolu , et opéré sans condition
« aucune. »
1
■
.
Ici est encore une équivoque:
, .(r
,
,
L e divorce est en effet opéré absolum ent, quant aux per
sonnes.
�4
or
( -*7 )
A u contraire , en ce qui touche les biens , l ’efict tlu divorc#
n ’est rien moins qu’absolu.
L e divorce ne saurait avoir plus d ’effet pour dissoudre , que
le mariage n’en a pour unir.
O r , le mariage n’a pas d ’effet absolu sur les biens.
En pays coutumier et en pays de droit écrit, les biens de la
femme qui se marie sont dotaucc ou paraphernaux , propres ou
communs , confiés à l ’administration du mari , ou réservés à
l ’adininistratiou de la fem m e, le tout selon sa volonté expresse
ou tacite.
Aussi on distingue partout ce qui appartient à Yacte de cé lé -*■
bration de l ’ofllcier c iv il, d’avec ce qui appartient au contrat du
notaire.
Nulle part on ne confond le lien conjugal qui affecte les
personnes , et le lien socia l qui se rapporte aux biens.
En ce qui touche leur personne , les époux reçoivent le joug
de la loi : dès l ’instant qu’ils ont voulu se marier , leur volonté
ne compte plus ; la loi seule règle le lien conjugal.
M ais, en ce qui touche les biens des époux , la loi s’en re
met à eux-mêmes. — Si elle dispose , ce n’est que subordonnément à leur volonté : Provisio hominis fa c it cessare provisionem le gis.
Sous ce rapport, les époux , entièrement leurs maîtres , règlent
leur sort comme des associés.
C e qui faisait dire aux anciens procureurs du Châtelet de
Paris que la communauté entre les époux n’est autre chose
qu’une société , et se règle par les mêmes principes ( ainsi at
testé par l’actc de notoriété du 18 janvier 17 0 1.)
Mais si l ’épouse en se mariant n ’est lié e , quant à scs b ien s,
que par un lien social ; si la loi ne dispose pour elle que subordonném ent à sa volonté , la conséquence eft est que l ’épc/use ,
en se divorçant, 11’csl déliée, quant à ses biens, que d ’une manière
subordonnée à sa volonté.
C ’est-à-dire que , si , en opérant son divorce , elle veut ne pas
rompre le lieu social, ne pas opérer une séparation de biens ,
3
�(
18
)
si clic ne veut pas en reprendre l ’administration , la loi doit
repu ter la société continuée : tanidi'u socielas d u râ t, quamdiu
voluntaspersévérât.
En un m ot, la loi permet à ceux qui se marient' d ’être époux
non associés : — donc elle permet à ceux qui se divorcent d ’être
associés non époux. — T elle est en substance la théorie que nous
opposons à la théorie de la dame Brandysur les effets du divorce,
quant aux biens.
L ’acte de divorce n’a opéré, quant à ses biens , que subordon
n é nient à sa volonté : — de même qu’un statut matrimonial, à l ’é
gard des biens de la femme qui se marie -, — de même encore
qu’ un jugement de séparation, à l ’égard de la femme qui demande
à se séparer.
T o u t gît donc dans ce seul point : quel lisage la dame Brandy
a- t-elle voulu faire de son acte de divorce relativement à la sé
paration , à l ’administration de ses biens ?
O r , il est constaté par le jugement que la dame Brandy n ’a
pas voulu faire usage de son acte de divorce , qu’elle n’y a
donné aucune espèce d ’crxccuUon -, qu'elle u conservé l ’adminis
tration de scs biens à son ci-devant mari.
D o n c, nonobstant l ’acte de divorce , l ’administration des biens
de la dame Brandy est restée dans les mains du C. GoursauDum azé, — non cn q u aliléd ’qpoï/a:, de supérieur y mais en qua
lité d ’a s so c ié , chef de l’association.
A in s i, et par l ’analogie des principes les plus usuels , se trouve
justifiée la disposition de l ’art. 11 du $ 3 de la loi du 20 sep
tembre 179 2, dans le sens applique par le jugement dont il
s’agit.
M a in te n a n t a p p r é c io n s le m o r c e a u d e la r e q u ê te e n ca ssatio n
't
q u i est l e p l u s p r o p r e à é b l o u i r .
« J e su is d i v o r c é e , et n o n d i v o r c é e , d i t l a d e m a n d e r e s s e : — d i
te v o r c é e , p u i s q u e je p u i s c o n t r a c t e r u n n o u v e a u m a r i a g e : — « n o n
« d i v o r c é e , p u i s q u e je n e p u i s a g i r à p r é s e n t c o m m e l i b r e c o n t r e
k un acquéreur
d e mes biens. »
�4
( 19 )
« Et. quand cessera cette suspension temporaire ? faut-il ne plus
<( voir mon ci-devant époux ? faut-il le liaïr ? faut-il de mauvais
« procédés, des sévices, de mauvais traitemens,? »
Non , madame j non: le jugement que vous dénoncez est beau
coup plus sage qu’il ne vous semble.
L e jugement reconnaît votre personne lib r e , parce qu’il
existe un acte de divorce régulièrement prononcé.
?
Quant à vos biens , il vous a déclaré non encore adminis
tratrice } parce q u e , de fa it , vous n’avez pas repris et voulu
reprendre cette administration ; parce que , d ’api'ès ce fa it, la
loi réputé l ’administration restée dans les mômes mains.
« Vous demandez quand se lèvera cette suspension temporaire? »
Il nefaut ni haine, ni mauvais procédés, ni mauvais traitemens.
Supposez que votre acte de divorce est un jugem ent de sé
paration ; — faites ce qui serait nécessaire pour que le jugement
de séparation devînt opposable à des tiers : — et dès lors votre
acte de divorce pourra être opposable , avoir tout son effet.
L a suspension temporaire dont se plaint la dame Brandy sera
\
,
donc levée , alors que , de fa it, il y aura entre elle et son mari
désunion des personnes et des biens ; — alors que , deve
nant étrangère à la personne , h la maison , à la gestion de son
mari , à ses enfans, peut-être elle pourra savourer l ’isolement et
les angoisses
^ /j^ ietyn ère^ qui î^’x^ as craint de
R É D U ISO N S t o u t e c e t t e a f f a i r e , b e a u c o u p t r o p c h a r g é e d e d i s
s e r t a t i o n s s u r l a f a v e u r d e s q u e s t i o n s d ’é t a t , s u r l a n a t u r e d e *
s é p a r a t i o n s et d u d i v o r c e , s u r le s e ff e t s d e l à p u i s s a n c e m a r i t a l e ,
s u r l a d i f f é r e n c e d u l i e n c o n j u g a l et d u l i e n s o c i a l e n t r e é p o u x .
Il suffit à notre cause d ’observer au tribunal qu’il s’agit
ici uniquement de V effet d'un divorce relativement à un
créancier. — Le cas étant prévu par la l o i , tout se réduit à com
parer le texte de la loi au texte du jugem ent, et h voir s’ils sont
en opposition. Yoici l ’opération :
<J°)
�L e d ivo rce, à l'égard des créanciers , n ’a que les mêmes
effets d ’une séparation de corps ou de biens : — c’est le texte de
l’art. 11 du $ 3 de la loi du 20 septembre 1792.
O r , toute séparation reste sans effet à l ’égard des créanciers ,
tant qu’elle n ’a pas été exécutée. ( A rt. 1 34 de la coutume de
Paris , formant le droit commun. )
D onc le divorce est sans effet à l ’égard des créanciers, tant
qu’il n’a pas reçu exécution. — Conséquence inévitable.
Mais le divorce de la dame Brandy n’a reçu , quant à présent,
aucune exécution , ni par la séparation des personnes , ni par
la séparation des biens. — Le fait est constaté, et n’est pas conteste.
Donc le divorce de la dame Brandy ne peu t, quant à p resen t,
avoir effet a l'égard des créanciers. — C ’est ce qui a été jugé.
Ainsi se justifie le motif pris de l ’union continuée des personnes
et des biens , ou de la non exécution du divorce.
Quant au m otif pris de la simulation } ou de la fraude , il re
pose sur les mêmes principes , puisqu’une séparation simulée ou
frauduleuse 11c serait pas opposable.
T elles sont les deux bases, également solides, sur lesquelles re
pose le jugement attaqué. — Il suffirait d ’une seule pour le rendre
indestructible.
C o n c lu sio n s.
— A u rejet d e la demande en cassation. J . - B . S i r e y ,
Le C. S IR E Y ,
pour le défendeur.
L e C. M É J A N ,
pour la demanderesse.
d e L ’I m p r i m e r i e DE BRASSEUr AINÉ , R U E DE LA H AR PE , N». 477.
Nota. On s’engage , dans c e tte imprimerie , à donner , dans le court espace de
quatre heures , sans frais extraordinaires, l’epreuve d’une feuille d'im pression, pourvu
que les feuillets de manuscrit ne soient écrits que d’un côté.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjean
Subject
The topic of the resource
divorces
divorces simulés
divorces par consentement mutuel
fraudes
créances
communautés familiales
coutume du Poitou
assignats
Description
An account of the resource
Titre complet : Défense pour le C. Judde-Larivière ;Contre la dame Brandy, épouse se disant du C. Goursau-Dumazé, demanderesse en cassation. Divorce simulé, ou frauduleux et non exécuté.
Annotations manuscrites. Exposé et motifs détailles dans Sirey, Vol. 3, p. 331, première partie.
Table Godemel : Divorce : 2. un divorce a pû être argué de simulation, en ce qui touche les biens des divorcés, et relativement aux créanciers.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Brasseur aîné (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0616
BCU_Factums_M0232
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53176/BCU_Factums_G1218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Renaudie (domaine de)
Vayres (87199)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
communautés familiales
coutume du Poitou
Créances
divorces
divorces par consentement mutuel
divorces simulés
fraudes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53731/BCU_Factums_M0232.pdf
3403b504dff06b6f62ea4d87e67c823b
PDF Text
Text
A P P E RCU
TRIBUNAL
DE
CASSATION.
POUR
le C.en J U D D E -L A R IV IÈ R E ,
-,
,
..
d e fen d eu r ;
‘
C O N T R E la dame B R A N D Y
demanderesse.
L a
J
dam e B r a n d y n e cesse d e p r é te n d r e q u ’en la d é c la ra n t
non-recevable , q u a n t à p r é s e n t , a e xcip er d e son d iv o rc e (e n
ce qui tou ch e la c o m m u n a u té de biens) , à I’ég a rd d ’ un cré a n
cier , o n a porté atteinte à son éta t c iv il de femme divorcée.
E lle ne veut pas entendre qu e son état d e fe m m e ou d e d i~
vo r cé e ne fait rien au procès.
P o u r éc laircir le sens d u jugem ent attaqué , p o u r q u ’ il p a r o isse bien
n’a v o ir a ucu nem ent disposé sur l 'état civil d e l a
dame; B r a n d y , rem ontons aux élém ens de cette affaire à l ’état
origin aire de la contestation.
L a d a m e -Brandy , pen dan t q u ’clle était fem m e G o u r s a u - D u mazé , était co m m u n e en. bieus . soit eu v e rtu d e son co n trat de
SECTION CIVILE
raPI orteur.
�m a r ia g e ,
soit p ar la force d u stalxit mûri c pal qui r é j i t R o -
ehouart ( jadis généralilé de Poitiers. )
D u r a n t le m a ria g e , et sans a vo ir cessé d ’être com m uns en
biens , les d e u x époux v e n d ire n t c o n jo in te m e n t un domaine.
C e tte vente sera n u lle , sans doute ; p arce qu e la venderesseé t a t m ineure. — Il s’agit seulement de déterm iner q u an d sera
ouverte l ’action en restitution.
Judde L a r iv iè r e , q u i a acquis de la com m unauté ou société,
p rétend ne p ou v oir être r e c h e r c h é , ju s q u ’à ce q u ’il y ait dissolu
tion effective de la com m unauté ou société qui lu i a vendu.
Il prétend que la dam e B r a n d y ne peut re v e n d iq u er ce d o
maine , tant q u ’elle sera de fait a s s o c ié e , com m u n e avec G o u r sau -D u m a zé tant qu e réclam er au nom de m adam e 6era récla
m e r p o u r le p rofit d e monsieur.
C ’est parce que la d am e B r a n d y avait encore son m ari p our
a s s o c ié que , lors d e sa p rem ière aclion en restitution , Ju ddeL a r i v i è r e fut fond é à lu i opposer une fin d e n o n -re ce vo ir.
Si la dam e B r a n d y , au lieu d ’être en co m m u n a u té d e b ien s
eut été mariée avec c occlus ion d e co m m u n a u té e t sép a ra tion d e
b ie n s ; si entre elle et son mari il n ’y avait eu ni société pour
les acquêts , ni société p ou r le m énage ; si elle avait eu à part
ses propriétés , scs revenus et ses dépenses , (ainsi q u ’une femme
de pays de droit écrit exerçant ses droits para p lie r n a u x ') lu.dame
B r a n d y aurait été recevahle , m êm e d u r a n t son m a r ia g e , à reve
n ir contre la vente par elle faite étant m ineure.
D a n s cette h y p o t h è s e , il n ’y aurait eu ni d r o i t s , ni intérêts
d u mari à opposer -, la dam e B r a n d y ,
fem m e G o u r s a u - D u -
mazé , eût été pleinem ent accueillie à r e v e n d iq u e r le dom aine
vendu.
A i n s i , la fin de n o n -re ce vo ir opposée à la dam e B r a n d y (lors d u
p rem ier procès) ne reposait au cu n em en t sur son é ta t c i v i l , sur
la q u alité àa fe m m e G o u r s a u - D u m a z c ; mais sur le f a i t d e s o
c i é t é , sur ce lle circonstance de f a i t , q u ’ elle était co m m u n e e n
b ien s avec le citoyen G oursau-D um azé.
C o n s é q u e m m e n t, p our ôter to u l fondem ent à la lin de non-
�r e c e v o ir , il fallait faire cesser , non l ’état c iv il, mais \qf a i t d e
s o c ié t é : il fallait , non cesser d ’ être ép o u se , mais cesser d ’être
réellem ent com m u n e e n b ien s. C on séquem m ent enfin , dans ce
n o u vea u procès com m e dans le p rem ier, la question se réd uit à ce
p oint : les intérêts sont-ils encore co nfond us? y a-t-il encore com
m unauté , m élange de L ie n s , s o c ié té entre la dam e B r a n d y et
G oursau-D um azé ?
« L a dam e B r a n d y est co n ven u e q u ’elle habite , mange et
« couche avec G oursau-Dum azé-, que leurs b ie n s , leurs r e v e n u s ,
« leurs dépenses sont a d m in istrés p ar lu i -, q u ’ainsi
l ’ exige
« son intérêt et celui de ses enfaus. — M ais elle nous défend
« d ’appeler cette com m ixtion un e s o c ié té d ’aucune espèce.
« N o n une s o c ié t é c o n ju g a le
puisqu’il n ’y a plus d e ma-
« riage qui en soit la source.
« N o n une s o c ié t é o rd in a ire , p u is q u ’il n ’ existe pas d 'é crit
« qui la constate. »
Q u e lle ([lie soit l’espèce d e société existante, peu nous importe ;
l ’essentiel est de savoir s’il en existe uue qui ren d e les in térêts
com m u n s entre G ou rsa u -D u m a zé et la dam e B ra n d y .
O r ce p'.iiul pouvait être constaté sa n s écrit. — L e principe
« que les sociétés doiven t êlre écrites » ne regard e que les a sso
c ié s c n lr ’ cuæ ; il ne re ga rd e pas les tie rs : à l ’égard des t ie r s , il
suilit que la société soit p ro u vée par des faits, p ar des a v e u x , par
la notoriété publiq ue , ( ainsi jugé le 23 messidor an 9 , au
rapp ort du citoyen Babille , sur la d e m a n d e r e je té e de la veuve
N o r m a n d et fils contre Peros. )
D ’ailleurs , et dans l ’ espèce , la fusion d ’intérêts , la société
résulte légalem ent d u fait s e u l , de la réunion des personnes ,
et d u mélange des biens.
L a dam e B r a n d y , habitante de R ochouart , est régie par la
coutume d u Poitou , dont l ’article
admet la s o c ié té ta isib le ,
ou ta cite , e n tr e d e s m a jeu rs ha bitant e n s e m b le , e t vivant
d e s m êm es b ie n s d e p u is un an e t un jo u r.
« C ette société taisible , (d it B o u ch e u d sur l ’article 2'ïi , 11".
5 7 , ) e u tr ’aulrcs que le mari et la i e m in e , a souvent
l ’un
�( 4 )
* d ’eux q u i en est le c h e f, com m ande a u x autres ,fa it toutes les
« affaires de la communauté , et en est appelé le maître ,
<? d ’après la loi i , ff. de Pactis. »
,
5
L e tribunal d ’appel pou voit d o nc , en p rc sc 'n d a n l d e l ’acle
de divorce , décider dans l ’espèce q u ’il y avait fusion d ’intér é t s , c o m m u n a u t é , ou société véritable; q u e , sous ce r a p p o r t , la
revendication
faite
au nom de
m adam e
devait to u r n e r
au
profit de jîionsieur.
L e trib un al pouvait d é cid e r que la com m unauté d e biens , née
jadis avec le lien conju gal , était a u jo u r d ’h u i conservée ou re
n o uvelée par la volonté des divo rcé s , par le fait d ’habitation et
administration commune.
O h ! si la question
qui nous divise a
pu être décidée
en
p rescin dan t de l ’acte de d ivo rce et de ses effets , en ne considé
ra n t qu e le fait de com m unauté
ou
société c o n v e n tio n n e lle ,
le jugem ent est loin d ’avoir m é co n n u l ’essence d u d i v o r c e , d 'a v o ir
statué sur une question d ’état.
A ctu ellem en t que nous voilà fixés sur l ’état précis de la co n
testation , exam inons le jugem ent.
E t p u is q u ’il ne s’agit qu e de savoir s’il existe encore commu
nauté, ou s’il y a séparation de biens, souvenons-nous que la d é
cision sur le d ivo rce ne doit être considérée que dans ses rapports
avec la com m unauté de biens ■
, que le mot m êm e divorce ne
doit pas être pris dans un sens absolu, qui tou ch e à la personne,
mais dans le sens relatif au p ro c è s , en ce qui touche la co m
m unauté de biens.
L e ju gem ent déclare la da m e B r a n d y n o n -r e ccv a b le h e x c ip e r
d e son d ivorce ; c ’c s t - a - d i r e que tel que soit l ’acte de d i v o r c e ,
tels que soient ses effets naturels , elle s’est ôié , p a r son f a i t ,
le droit d ’en tirer avantage > (fuant a p r ése n t.
L e jugem ent déclare le divorce non opposable, quant a pré
sent; c ’est-à-d ire que tel (pie soit l’acte de d iv o r c e , tels que soient
scs effets n a tu rels, sa vertu légale ou naturelle se trouve ncutraUsée ou suspendue par le f a i t , par la volonté positive et toute
puissante de la dam e B ra n d y .
�C 5 )
L a dam e B r a n d y est réputée en état d e société continuée ou
renouvelée avec G o u r s a u - D u m a z é ,
N o n par défaut d e vertu originaire dans l ’acte de son d i v o r c e ,
mais p ar suite d ’une restriction apposée a u x effets natui’els d u
d ivo rce , p ar le fait de sa volonté -, ou p a rce q u ’il lu i a p lu de
r e n o n c e r aux eiïcts d u d ivo rce en ce q u i touche la séparation
des biens , ou parce q u ’il lui a p lu d e r e n o u v e le r l ’association,
au cas q u ’elle fû t dissoute.
Q u els sont les faits , quels sont les actes de volonté qui ont fait
p résu m er au tribunal cette société continuée ou renouvelée , qui
ont fait d é cla re r le divorce sans effet, en ce qu i touche les biens?
L e fait de co-ha! itation et de co-administration -, — le fait d e
sim ulation ou d e fra u d e , — tel est le ju gem ent d é n o n cé :
D a n s son d is p o s it if , il déclare la dam e B r a n d y non recevable
à opposer son d ivo rc e ( en ce qui touche scs effets sur la com
m unauté de biens. )
D a n s ses m otifs , il considère qu e le d iv o rc e ( relativem en t
à la séparation des biens ) est simulé ou fr a u d u le u x
et no n
exécuté.
O r , est-il un e loi qui dise positivement q u 'u n e fem m e est
recevahlc à exciper de son d iv o rc e , ( p ou r se d ire séparée d e
biens) alors m êm e qu e le d ivo rc e n ’ a pas reçu d ’exécution , en
ce qui touche le bien , et encore q u ’il y ait simulation au p r é ju
dice des créanciers ?
N o n , aucune loi n ’a tenu u n langage si p e u r a i s o n n a b l e
si peu moral.
L a d a m e B r a n d y invoquait d ’abord les art. I cl H d u §
,
3
de la loi d u 20 septem bre 1792 sur le divorce.
M ais ces d e u x articles ne disposent qu e sur la facullt; de se
rem a rier : s'ils assurent V in d é p e n d a n c e des ép o u x , c est en ce
sens q u 'ils sont alfrancbis d u jo u g c o n ju g a l, ([lie le lien p e r
s o n n e l est dissous. — Point de rapp ort avec notre espèce , où il
s agit seulement d u sort des bien s.
E lle invo quait aussi l ’art. X I , p ortant q u ’à l ’ ég a rd d e s c r é a n
c ie r s le d ivorce n ’ a d 'e j f e l q u e com m e u n e sé p a r a tio n .
�-
( 6 )
Mais le sens naturel de celte disposition est tout en fa v e u r du
jugement :
C a r si le ju gem ent déclare q u ’un d ivo rce simulé , ou fra u d u le u x
et non exécuté , 11’a pas effet à l ’é g ard d e créanciers , c ’est p ar la
raison q u ’une séparation sim u lé e , frau d u le u se , et non e x é cu té e ,
n ’aurait pas d ’effet à l ’égard des c r é a n c ie r s , et parce qu e le d i
vo rce n ’a effet que com m e une séparation.
En vain la dam e B r a n d y s’évertue p our p ro u v e r que la sim u
lation n ’est pas réelle , et que ce q u ’elle a fait n ’a rie n d e fr a u
d u le u x ou d ’illicite.
L a l o i , qu i lu i a perm is d e cesser d ’être l ’épouse d ’un m ari par
qu i elle serait m a lh e u r e u se , n ’a certainem ent pas v o u lu q u ’elle
cessât d être son épouse p ou r d e v e n ir sa co n cu b in e \ q u ’elle
conservât p our elle seule toutes les do uceurs d u m ariage , en
faisant rejaillir tous les effets d ’ un d ivo rc e sur ses créanciers , ou
sur les m a lh e u r e u x fruits de ses voluptés illégitimes.
Il y a f r a u d e , en ce q u e V in te n tio n d e la loi est h o rrib le
m ent trompée , à la fa veu r de l ’observation ju d a ïq u e d e la le ttre
de la loi.
Il y a sim u la tio n ou f r a u d e , en ce qu e la dam e B r a n d y a con
senti 1111 acte de divorce p ou r p a ra ître séparée de biens -, alors
que de fait il y a fusion d ’ intérêts , com m unauté ou société de
biens , identité d ’administration -, alors q u ’ elle confesse que cet
état de choses est le seul réel et profitable p our elle.
I o u t le public est convaincu , ( et la dam e B r a n d y se glorifie
de cette croyance) q u ’aussitôt le dom aine r e v e n d i q u é , ou le procès
fin i, l ’aclc de d ivo rce sera d é t r u i t , ou p ar une transaction ju d ieiaire qui le dé clare n u l , ou , s’il en est b e s o in , p ar un nouvel
acte de mariage.
O r , il y a dans ce m anège tant d 'im m o r a lité , tant d ’incon
venance , tant d ’oppositiou avec les vues d u lé g isla te u r, q u ’il est
impossible de ne pas y
vo ir simulation , artifice , fraude.
l'.l dans les cas de divorce , com m e dans les cas de séparation ,
comme dans tous les cas possibles, nul n e d o it profiter de la fraude
qu'il a machinée au d étrim en t d ’autnii.
L i d:i ne B randy dénature le sens de la disposition légale-.
/
�p o u r lui faire dire seulement qu e le divorce ne dispense pas
les époux de remplir leurs obligations , contractées pendant
le mariage •• mais ce n ’est là q u ’ une interprétation h a s a r d é e ,
d ’où il ne pourrait jamais résulter u n e ou vertu re d e cassation.
D e notre p a r t , ce n ’est pas interpréter , c’est s’attacher au
texte de la loi , d e d ire q u ’un d ivo rc e simulé , ou f r a u d u le u x ,
et non exécuté , reste sans effet à l ’ é g ard des créanciers.
C a r s’il ne restait pas sans e f f e t , dans ces cas , le divo rce aurait
plus d ’effet q u ’un jugem ent de séparation , p u is q u ’un jugem ent de
séparation simulée ou frauduleuse , et no n exécutée , reste sans
effet à l ’égard des créanciers.
L e législateur a u ra it-il d û établir u n e différence entre les actes
d e d ivo rce et les jugem ens de séparation , quant à leurs effets à
l ’é g a rd des créanciers?
Ici la dam e B r a n d y p eu t p a rco u rir u n clia m p v a ste en c o n
jectures.
«
Q u an t à nous , nous avons suffisamment dém ontré q u ’ en ce qui
touche le sort des b ie n s , et relativem ent a u x c r é a n cie r s, le d ivo rc e
est absolum ent un acte de mêm e nature q u ’une séparation.
11 nous suffit de dire q u ’à cet é g ard le divo rce et la séparation
sont assimilés par la loi ( bo n n e ou m auvaise ) ; que l ’un et l ’autre
ont les mêm es effets , en ce qui touche le sort des biens , relative
ment a u x créanciers.
L a dame B r a n d y ne ré p o n d ra jamais à cet argument.
« Si u n d iv o rc e s im u le , fr a u d u le u x et non exécuté avait eflet
« à l ’égard des c r é a n c ie r s, il aurait plus d ’effet q u ’ un jugement
«. de séparation.
« O r , la loi asshnile le d ivo rc e et la séparation, dansleui-s effels,
« à l’éim id des créanciers.
« D onc,
à l ’égard de créanciers , un d ivo rc e simulé ou f r a u
d u le u x et non exécuté doit rester sans eflet. »
L a d a t n c B r a n d y se retranch edalis l a d sposition de l'a rticle IV du
même p a r a g r a p h e ,— qui ne dit rien de la co m m u n a u té ou s o c ié té ,
�(
8
)
continuée ou re n ou ve lé e après l ’acte d e divorce. — V o i c i le
texte d e la d is position :
•
D e quelque manière que le divorce ait lieu , les époux
divorces seront réglés par rapport à la communauté de biens,
ou à la société d’acquêts
qui
A EXISTÉ
entre
eux
, soit
par la loi , soit par la convention, comme si lu n d’eu x était
décédé.
A in si , et d 'après cette disposition , si des épo ux divorcés
avaient à régler la com m unauté qui a e x isté entre e u x , ils a u
raient les m êmes droits respectifs que si l ’un d ’eux était, décédé.
Mais s il le u r plait
de continuer ou de renouveler cette
communauté ou société , la loi n ’oppose au cu n obstacle , a u cu n e
restriction à l ’exercice de leu r volonté.
L a dam e B r a n d y a le courage d e professer q u e des époux
d ivo rcés peuvent rester amans. — E lle serait p a r trop in co n
séquente d e n ie r q u ’ ils puissent rester associés.
E t s'ils p eu ven t rester, ou seulem ent d e v e n ir associés, la
question d e communauté ou de société n ’est presque plus q u ’une
question d e f a i t , dont la décision , q u a n d elle serait e r r o n é e ,
ne serait jamais u n e contravention à la loi.
D a n s tous les cas , que ce soit un e simple question de f a i t ,
que ce soit, une question com pliquée de fait et de d roit , Reste ,
q u ’ en
déclarant la dam e B r a n d y
non - recevable
à exciper
de son divo rce , p ou r se dire séparée d e biens , pour opposer
cette séparation a des
cré a n cie rs, le jugem ent n’a pas
ju gé
une question d ’eta t , n ’ a contrevenu à aucune loi , et s'est a u
contraire conform é a l'article X I d u p aragrap he III d e la loi
d u o septembre 1 7 9 2 qui assimile le d ivo rc e et la sé p a ra tion
dans leurs e ffets à l ’égard des créanciers.
3
C o n c lu s io n s , com m e p ré c é d e m m e n t au rejet d e la d e m a n d e
en cassation.
L e C SlREY ,
p o u r le d é fe n d e u r.
Le C.eMÉJAN
p o u r la dem a n deresse..
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjan
Subject
The topic of the resource
divorces simulés
communautés familiales
fraudes
coutume du Poitou
Description
An account of the resource
Apperçu pour le Citoyen Judde-Larivière, défendeur ; contre la dame Brandy, demanderesse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1790-AN 11?
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0232
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0616
BCU_Factums_G1218
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53731/BCU_Factums_M0232.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochechouard (87126)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communautés familiales
coutume du Poitou
divorces simulés
fraudes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53876/BCU_Factums_M0616.pdf
acc3f73e37274f959253ecd39f3b4272
PDF Text
Text
APPERCU
i
T R IB U N A L
D S
C A SSA T IO N .
SECTION C IV IL E .
POUR le C.en J U D D E - L A R I V I E R E ,
défendeur ;
C O N T R E la dame B R A N D Y ,
demanderesse.
L a . dame Brandy ne cesse de prétendre qu’en la déclarant
non-recevable, quant à p ré s e n t, à exciper de son divorce (en
ce qui touche la communauté de biens) , à l’égard d ’un créan
cier , 0n a porté atteinte à son état civil de femme divorcée.
Elle ne veut pas entendre que son état de fem m e ou de di
vorcée ne fait rien au procès.
Pour éclaircir le sens du jugement attaqué pour qu' il pa
roisse bien n’avoir aucunement disposé sur l'état civil de la
dame B randy , remontons aux élémens de cette affa ir e a l'état
originaire de la contestation.
La d a m e B randy , pendant qu’elle était femme Goursau-Dumazé } était commune en biens , soit en vertu de son contrat de
Le C. C O F F IN H A L ,
rapporteur,
j
�(»)
m ariage, soit par la force du statut nnxr. c pal qui 1 é0it Roehouart 'jadis gé .éraîi é de Poitiers. )
Durant le mariage, et sans avoir cesse d’être communs en
biens , les deux époux vendirent conjointement un domaine.
Cette* vente sera n u lle, sans doute ; parce que la venderesse
éta.t mineure. — 11 s’agit seulement de déterminer quand sera
ouverte l ’action eu restitution.
Judde Larivière , qui a acquis de la communauté ou société ,
prétend ne pouvoir être recherché, jusqu’à ce qu’il y ait dissolu
tion effective de la communauté ou société qui lui u vendu.
Il prétend que la dame Brandy ne peut revendiquer ce do
m aine, tant qu’elle sera de fait associée , commune avec Goursau-Duma/.é ; tant que réclamer au nom de madame sera rtcla
mer pour le profit de monsieur.
C ’est parce que la dame Brandy avait encore son mari pour
associé
, lors de sa première action en restitution, JuddcLarivière fut fondé à lui opposer une fin de non-recevoir.
Si la dame B ran d y, au lieu d ’être en communauté de Liens
eût été mariée avec exclusion ule communauté et séparation de
biens ; si entre elle et son mari il n’y avait eu ni société pour
les acquêts, ni société pour le ménage •, si elle avait eu à part
ses propriétés, ses revenus et ses dépenses , (ainsi qu’une femme
de pays de droit écrit exerçant ses droits parapher/taux') la dame
Brandy aurait été recevahle, même durant son mariage, à reve
nir contre la vente par elle faite étant mineure.
Dans cette hypothèse , il n’y aurait eu ni droits , ni intérêts
du mari à opposer 3 la dame Brandy , femme Goursau-Dumaze, eût etc pleinement accuedhe a revendiquer le domaine
vendu.
A insi, la fin de non-recevoir opposée à la dame Brandy ('lors du
premier procès^ -ne reposait aucunement sur son état c iv il, sur
la qualité àc fem m e Goursau-Dumazé ; mais sur le fa it de so
ciété , sur celte circonstance de fait, qu’elle était commune en
biens avec le citoyen Goursau-Dumazé.
Conséquemment, pour ùter tout fondement à la liu de non-
�C 3 )
recevoir, il fallait faire cesser , non l ’état c iv il, mais le fa it de
Société : il fallait, non cesser d ’être épouse , mais cesser d ’être
réellement commune en biens. Conséquemment enfin , dans ce
nouveau procès comme dans le premier, la question se réduit à ce
point : les intérêts sont-ils encore confondus? y a-t-il encore com
munauté , mélange de biens, société entre la dame Brandy et
Goursau-Dumazé ?
« La dame Brandy est convenue qu’elle habite, mange et
« couche avec Goursau-Dumazé-, que leurs biens, leurs revenus,
« leurs dépenses sont adm inistrés par lui -, qu’ainsi l’exige
« son intérêt et celui de ses enfans. — Mais elle nous défend
« d’appeler cette commixtion une société d ’aucune espèce.
« Non une société conjugale , puisqu’il n’y a plus de ma« riage qui en soit la source.
« Non une société ordinaire , puisqu’il n’existe pas à ’écrit
« qui la constate. »
Quelle que soit l’espèce de société existante, peu nous importe;
l’essentiel est de savoir s’il eu existe une qui rende les intérêts
communs entre Goursau-Dumazé et la dame Brandy.
Or ce point pouvait être constatée sans écrit. — L e principe
a que les sociétés doivent être écrites > ne regarde que les asso
ciés entr’eu x ; il ne regarde pas les tiers : à l’égard des tiers, il
suffit que la société soit prouvée par des faits, par des aveux, par
la notoriété publique , ( ainsi jugé le 33 messidor an 9 , au
rapport du citoyen Babille , sur la demande rejetée de la veuve
Normand et fils contre Peros. )
D ’ailleurs , et dans l ’espèce, la fusion d ’intérêts , la société
résulte légalement du fait seul, de la réunion des personnes ,
et du mélange des biens.
L a dame Brandy , habitante de Rochouart, est régie par la
coutume du Poitou, f dont l’article 33 1 admet la s o c ié t é taisible t
ou tacite , entre des majeurs habitant ensemble > et vivant
des mêmes biens depuis un an et u n jour.
« Cette société taisible, (dit Bouchcuil sur l’article 33 1 , n°.
« 5 7 ,) entr’autres que le mari et la femme, a souvent l’un
�( 4 )
« d'eux qui en est le c h e f, commande aux autres ,fa it toutes le s
« affaires de la communauté , et en est appelé Je maître ,
« d ’après la loi 1 5 , ff. de Pactis. »
L e tribunal d’appel pouvoit donc , en prescindant de l ’acte
de divorce , décider dans l’espèce qu’il y avait fusion d ’inté
rêts, communauté, ou société véritable-, q u e, sous ce rapport, la
revendication faite au nom de madame devait tourner au
profit de monsieur.
L e tribunal pouvait décider que la communauté de biens , née
jadis avec le lien conjugal , était aujourd’hui conservée ou re
nouvelée par la volonté des divorcés , par le fait d ’habitation et
administration commune.
Oh ! si la question qui nous divise a pu être dé-idée en
prescindant de l’acte de divorce et de ses effets , en ne considé
rant que le fait de communauté ou société conventionnelle,
le jugementest loin d ’avoir méconnu l ’essence dudivorce, d ’avoir
statué sur une question d ’état.
Actuellement que nous voilà fixés sur l ’état précis de la con
testation , examinons le jugement.
Et puisqu’il ne s’agit que de savoir s’il existe encore commu
nauté, ou s’il y a séparation de b ie n s , souvenons-nous que la dé
cision sur le divorce ne doit être considérée que dans ses rapports
avec la communauté de biens -, que le mot même divorce ne
doit pas être pris dans un sens absolu , qui touche à la p erso n n e,
mais dans le sens re la tif au procès, en ce qui touche la com
munauté de biens.
L e jugement déclare la dame B ra n d y non-recevable à e x c ip e r
de son divorce i c’est-à-dire que tel que soit l’acte de divorce,
tels que soient ses effets naturels , elle s’est ôté , p a r son fa it ,
le droit d’en tirer avantage , quant à présent.
Le jugement déclare le divorce non opposable, quant à p r é
sen t; c’est-à-dire que tel que soit l’acte de divorce, tels que soient
scs eflets naturels, sa vertu légale ou naturelle se trouve neutra
lisée ou suspendue p a r le f a i t , par la volonté positive et toute
puissante de la dame Brandy.
�C5 )
L a dame Brandy est réputée en état de société continuée ou
renouvelée avec Goursau-Dumazé,
Non par défaut de vertu originaire dans l’acte de son divorce,
niais par suite d ’une restriction apposée aux effets nature's du
divorce , par le fait de sa volonté ■, ou parce qu’il lui a plu de
renoncer aux effets du divorce en ce qui touche la séparation
des l)icns , ou parce qu’il lui a plu de renouveler l ’association,
au cas qu’elle fût dissoute.
Quels sont les faits , quels- sont les actes de volonté qui ont fait
présumer au tribunal cette société continuée ou renouvelée , qui
ont fait déclarer le divorce sans effet, eu ce qui touche les biens?
L e fait de co-ha' itation et de co-administration •, — le fait de
simulation ou de fraude
tel est le jugement dénoncé:
Dans son d is p o s it f, il déclare la dame Brandy non recevable
à opposer son divorce ( en ce qui touche ses effets sur la com
munauté de biens. )
Dans scs motifs , il considère que le divorce ( relativement
à la séparation des biens ) est simulé ou frauduleux et non
exécuté.
O r, est-il une loi qui dise positivement qu’une femme est
recevable à exciper de son divorce, ( pour se dire séparée de
biens) alors même que le divorce n’a pas reçu d ’exécution , en
ce qui touche le bien , et encore qu’il y ait simulation au préju
dice des créanciers ?
Non , aucune loi n’a tenu un langage si peu raisonnable,
si peu moral.
La dame Brandy invoquait d ’abord les art. I et il du $ 3
de la loi du ao septembre 1792 sur le divorce.
Mais ces deux articles ne disposent que sur la faculté de se
rem arier : s’ils assurent. V'indépendance des époux, c est en ce
sens qu'ils sont affranchis du jou g conjugal, que le lien per
son nel est dissous. — P o i n t de r a p p o r t avec notre espèce , oii il
s’agit seulement du soi t des biens.
Elle invoquait aussi l’art. X I , portant qu’à l’egard des créan
ciers le divorce n ’a d ’cJJ'et </ue ccmtne une séparation.
�(6 ;
Mais le sens naturel J e cette disposition est tout en faveur du
jugement :
Car si le jugement déclare qu’un divorce sim ulé, ou frauduleux
et non exécuté , n’a pas effet à l’égard, de créanciers , c’est par la
raison qu’une séparation simulée, frauduleuse , et non exécutée,
n’aurait pas d ’eflet à l’égard des créanciers, et parce que le di
vorce n’a effet que comme une séparation.
En vain la dame Brandy s’évertue pour prouver que la simu
lation n’est pas réelle , et que ce qu’elle a fait n’a rien de frau
duleux ou d'illicite.
L a lo i, qui lui a permis de cesser d ’être l’épouse d ’un mari par
qui elle serait m alheureuse,n’a certainement pas voulu qu’elle
cessât d’être son épouse pour devenir sa concubine ; qu’elle
conservât pour elle seule toutes les douceurs du m ariage, en
faisant rejaillir tous les effets d ’uu divorce sur ses créanciers f ou
sur les malheureux fruits de ses voluptés il lé g it im e s .
11 y a frau d e, en ce que Y intention de la loi est horrible
ment trompée, à la faveur de l ’observation judaïque de la lettre
de la loi.
Il y a simulation ou fra u d e , en ce que la dame Brandy a con
senti un acte de divorce pour paraître séparée de biens •, alors
que de fait il y a fusion d’intérêts , communauté ou société de
biens , identité d’administration -, alors qu’elle confesse que cet
état de choses est le seul réel et profitable pour elle.
Tout le publie est convaincu , ( et la dame Brandy se glorifie
de cette croyance) qu’aussitôt le domaine revendiqué, ou le procès
fini, 1 acte de divorce sera détruit, ou par une transaction judi
ciaire qui le déclare n u l, ou , s’il en est besoin, par un nouvel
acte de mariage.
O r, il y «
ce manège tant d ’immoralité, tant d ’inconvenanct, tant d’opposition avec les vues du législateur, qu’il est
impossible de ne pas y voir simulation , artifice , fraude.
l'jt dans les cas de divoice , connue dans les cas de séparation ,
comme dans tous les cas possibles, nul ne doit profiter de la fraude
qu’ il a machinée au détriment d ’autrui.
Ija diime Brandy dénature le sens de la disposition légale,
�(7 )
pour lui faire dire seulement que le divorce ne dispense pas
les épou x de rem plir leurs obligations , contractées pendant
le mariage : mais ce n’est là qu’une interprétation hasardée ,
d ’où il ne pourrait jamais résulter une ouverture de cassation.
De notre part, ce n’est pas in terp réter, c’est s’attacher au
texte de la lo i, de dire qu’ uu divorce simulé , ou frauduleux,
et non exécuté , reste sans effet à l’égard des créanciers.
Car s’il ne restait pas sans effet , dans ces cas , le divorce aurait
plus d ’effet qu’ un jugement de séparation , puisqu’ un jugement de
séparation simulée ou frauduleuse, et non exécutée , reste sans
effet à l’égard des créanciers.
L e législateur aurait-il dû établir line différence entre les actes
de divorce et les jugemens de séparation, quant à leurs effets à
l ’égard des créanciers?
Ici la dame Brandy peut parcourir un champ vaste eu con
jectures.
Quant à nous , nous avons suffisamment déniontré qu’en ce qui
touche le sort des biens, et relativement aux créanciers, le divorce
est absolument un acte de même nature qu’une séparation.
Il nous sufiit de dire qu’à cet égard le divorce et la séparation
sont assimilés parla loi ( bonne ou mauvaise ) ; que l’un et l’autre
ont les mêmes effets, en ce qui touche le sort des biens , relative
ment aux créanciers.
L a dame Brandy ne répondra jamais à cet argument.
« Si un divorce simulé, frauduleux cl non exécuté avait effet
« à l’égard des créanciers, il aurait plus d’effet qu’ un jugement
« de séparation.
« O r, la loi assimile le divorce et la séparation, danslcui’s eflels,
« a 1 égard des créanciers.
« D onc, a l’égard de créanciers,, un divorce simule ou frau
duleux et non exécuté doit rester sans eflet. »
L a damelîraml y se retranchedans la disposition de l’article IV du
môme paragraphe, —qui ne dit rien de la communauté ou société,
�continuée ou renouvelée après l’acte de divorce. — Voici. le
texte de la disposition
D e quelque manière que le divorce ait lieu , les époux
divorces seront réglés par rapport à la communauté de b ien s,
ou à la société d'acquêts q u i A e x i s t é E N T R E E U X , soit
p ar la. l o i , soit p a r la convention., comme si l 'un d ’ eu x était
décédé.
Ainsi , et d ’après cette disposition , si des époux divorcés
avaient à régler la communauté qui a e x is té entre eux , ils au
raient les mêmes droits respectifs que si l’un d eux était décédé.
Mais s’il leur plaît de continuer ou de renouveler cette
communauté ou société , la loi n’oppose aucun obstacle , aucune
restriction à l’exercice de leur volonté.
La dame Brandy a le courage de professer que des époux
divorcés peuvent rester amans. — Elle serait par trop incon
séquente de nier qu’ ils puissent rester associés.
Et s’ils peuvent re s te r, ou seulement devenir a sso ciés, la
question de communauté ou de société n’est presque plus qu’une
question de f a i t , dont la décision, quand elle serait erronée ,
ne serait jamais une contravention à la loi.
Dans tous les cas , que ce soit une simple question de f a i t ,
que ce soit une question compliquée de fait et de droit , Reste ,
qu’en déclarant la dame Brandy non - recevable à exciper
de son divorce, pour se dire séparée de biens , pour opposer
cette séparation à des créanciers, le jugement n’a pas jugé
une question d’état, n’a contrevenu à aucune loi, et s'est au
contraire conformé à l’article XI du paragraphe III de la loi
du 20 septembre 1792 , qui assimile le divorce et la séparation
dans leurs effets à l'égard de's créanciers.
Conclusions, comme précédemment, au rejet de la demande
en cassation.
Le C.enS I R E Y ,
pour le défendeur.
L e C .en M E J A N ,
pour la dem anderesse.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Judde-Larivière. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Méjan
Subject
The topic of the resource
divorces simulés
communautés familiales
fraudes
Description
An account of the resource
Apperçu pour le Citoyen Judde-Larivière, défendeur ; contre la dame Brandy, demanderesse.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0616
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0232
BCU_Factums_G1218
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53876/BCU_Factums_M0616.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochechouard (87126)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communautés familiales
divorces simulés
fraudes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53428/BCU_Factums_G2132.pdf
751bc5d075f6ba4a5ef518cc93313334
PDF Text
Text
MEMOIRE AMPLIATIF
COUR
D E C A S S A T IO N -
P O U R le M aire de la commune d’E n n ezat , s e c t i o n
arrondissement de R i o m , département du des requêtes
Puy-de-Dôme ? demandeur en cassation ;
B a p . M. L o m -
CON TRE les habitans de la ville de Riom.
ubardquin
cieux.
C oncl. M . le
Comte Merlin ,
C O M M U N A U X . — C O M P É T E N C E . — P O S S E S S IO N .
p> * * L
s
%
»
'
H u i t moyens de cassation vont être soumis à la cour régulatrice
contre un arrêt de la C our impériale de R io m , du 13 février 1 8 1 1 .
— Et de ces huit m oyens, il n’en est pas un qui eût pu être sup
primé , sans que la loi restât gravement offensée !
A u total, la c o u r verra des magistrats ju g e s dans leu r propre
c a u se ; — statuant sur une matière a dm inistrative ; — condamnant
une commune à délaisser elle - même des biens non détenus
par elle ; — réputant victime de la fé o d a lité une autre commune
reconnue n’avoir pas eu de seigneur; — jugeant une question de
p ro p riété p a r d e s motifs puisés dans un titre de simple servitude
ou de droit d'usage ; — décidant qu’une possession séculaire ,
exclu siv e et ju d ic ia ir e , doit être réputée une simple tolérance
— en un m o t , violant la loi dans ses dispositions les plus posi
tiv es. les plus élémentaires : — tels et plus graves encore seront
les m otifs de censura contre l’arrêt d éno ncé.
,
êm
�( » )
I
FA ITS.
I r*.
S É R I E
DE
F A IJS.
D e p u is l 436 ju s q u 'à i 5 i o . — D r o it de p a t ü r à g e de la ville
de R io m dans la j u s t i c e d ’ E n n e za t.
Entre la ville de R io m et la ville d’E n n e z a t, exista jadis, et dans
les temps les plus anciens, une immense étendue de terrain loi's m a
r é ca g e u x .— Leshabitans des deux communes envoyaient pacager
leurs bestiaux dans ce marais.— Apres l’ an 1400, il s^éleva des con
testations entre Ennezat et R i o m , sur l’étendue respective du droit,
de chaque commune. — E n 1 4 3 6 , une transaction partagea ce
marais en trois paris; savoir : une première portion (touchant à la
commune d ’jh n n eza t) qui lut fut exclusivem ent réservée; une
deuxième partie (touchant à la commune de R io m ) qui lui fut aussi
exclusivem en t réservée; enfin une troisième portion interm édiaire
qui fut déclarée prom iscue entre les deux com m unes, pour leur
droit de p âturage. ( C ’est un point convenu. — V o y e z le Mém#oire
imprimé delà ville de Riom , pag. 5 et fi.)
Remarquons d’abord que ce m arais interm édiaire qui doit d e
meurer commun en p â t u r a g e entre les parties, est précisément
le marais (ou , pour mieux dire , les belles terres cultivées) dont la
commune de Riom vient de revendiquer et d ’obtenir, à titre de
p r o p r ié ta ir e , une partie proportionnelle qui se trouverait être les
onze douzièmes, à raison du nombre des leux des deux villes.
Remarquons ensuite que cette transaction des habilans de Riom
et d ’Ennezat fut ratifiée et confirmé«, d ’abord par la seigneuresse
d'Ennezat (de la maison de B o u lo g n e ,) el ensuite par les ducs de
Bourgogne et d’Auvergne , seigneurs de la \ille de U io in .(T o u l cela
est encore convenu.— V oyez le Mémoire de la ville de Rioin , pag. ".)
Nous verrons bientôt comment ce dut être alors une affaire de
seigneurs.
L a transaction du 9 juin i 4 3 6 , ainsi convenue par les deux co m
munes, et ratifiée par les deux seigneurs, toute contestation ne fut pas
�ya>&- '
(3 )
pour cela terminée, t a ville de Rioni éleva des prétentions exagé
rées ; enfin il fut procédé à une limitation et plantation de bornes.
— L e procès-verbal est du j y août i 48 g. On lit vers la fin de cet
acte , ces expressions du juge-commissaire : a Et avons baillé auxdits
» consuls, manans et habitans à' JEnnezat, la jouissance réo-lle et
y> actuelle à eux seuls, en ce qui leur était adjugé par ladite trand sacliori, et aussi en commun avec lesdits habitans de R io m , de
» faire dorénavant, ès-dits lieux à eux baillés, p â tu rer leu r bé» ta il....... » — Ce titre est reconnu de toutes parties, comme as
surant alors le droit <\c pâturage commun.
Depuis i 48 g jusqu’au 18e. siècle, on ne voit aucune trace de
p o ssessio n , p ro m iscu e, ou exclu siv e , du droit de p âturage com
m u n , dont est mention dans la transaction du g juin i 4 5 6 , et daus
le procès-verbal du î g août 1489.
Mais on voit au 18*. siècle que le m arais in term éd ia ire, au
jourd’hui litigieux, était alors possédé exclusivem ent par le sei
gneur et les habitans d ’Ennezat ; que le seigneur d ’Ennezat y exerça
un droit de tr ia g e , réglé avec la seule commune d ’Ennezat;— toute
fois, ne parlons pas encore de ce triage j fixons plutôt nos regards sur
cet espace de temps, trois siècles presque, pendant lesquels le droit
de la commune de Riom s'évanouit de manière à ne plus en laisser
de traces.
Com ment s’opéra cet événement? Faut-il croire que la commune
de R io n i, si puissante, et si entreprenante au i 5e. siècle comme
aujourd’h u i, sera devenue ensuite faible ou tim ide, et se sera laissée
dévorer par la petite ville d ’Ennezat, à ce point q u e , sans droit, et
sans raison, au mépris des titres de i 45 Û et l 48 g , la commune
d’ Ennezat aura fini par s’emparer de la totalité du droit de pâturage
dans le m arais in term édia ire, aujourd’hui litigieux?
Sur ce p o in t , qui est pour ainsi dire de m oralité dans la cause, il
est important de remarquer comment en Cour d’a p p e l, les habitans
de Iiioin onl rapidement ¿r/iss*/, faisant des jeux 011 des efforts d’esprit
là ou des juges scvcrcs devaient chercher des faits instructifs, (voyez
pages i 3 ci m du mémoire des habitans de Iiiom en Cour d ’appel).
L a commune d’ Ennezat au contraire a précisé clairement des faits
décisifs; — elle a dit et prouve que le fait de sa possession exclusive
du droit de p âturage dans le m arais in term éd ia ire, était la suite
d’unc loi survenue.
�I Ie. S É R I E
DE F A IT S .
D e p u is i 5 i o ju s g u 'à 1762.— Coutum e d ’ A u v e rg n e .— E xtin ctio n
du droit de p â tu r a g e de la ville de R io m hors de sa ju stic e .
En l’année i 5 i o , a dit la commune d ’Ennezat, les Etals d’Auver
gne furent assemblés pour la rédaction de la coutume.— Or, la cou
tume d ’A u ve rg n e , article ) " . du litre 18, porte que « Les pâtura» ges sont limités en L im agne, et pays-bas d ’Auvergne p a r ju s t ic e ,
» en manière qu ’il n’est bon n i perm is à aucun pâturer en autrui
y> ju stic e . »
Dès qu’une loi de p olice gén érale eut réglé que nul ne pourrait
p â tu rer hors des t e r r e s de son seigneur ju s t ic ie r , les seigneurs
durent ôlre jaloux de -ne souffrir aucuns étrangers dans leurs p â tu
rag es; ne fût-ce que pour éviter délaisser des nuages sur l ’éienduo
de\eur ju s t ic e .— L e seigneur d ’Ennczat n’eût donc q u ’à convenir, ou
faire juger, avec le seigneur de R io m , que le m arais interm édiaire
était compris dans la ju stice d ’Ennczat; — dès-lors, aux termes de
la coutum e, il n’y avait plus, pour les liabitans de R io m , de droit de
p â tu r a g e , dans le marais intermédiaire.
Ici les faits connus sont d'accord avec les conjectures que font
naître les convenances. — On trouve en effet que la justice d ’Emiezat
fut définitivement réglée en i 54 o.
Il est bon de lire comment s’ expliquait, à cet égard, le défenseur
de M. le duc de B o u illo n , sur sa demande en triage, dans une
écriture signifiée le a i mai 1 7 5 ii.
« E nfin, M. le duc de IJouillon produira un p r o c è s -v e ib a l, f a i t
» par M . le lieutenant-général de la sénéchaussée d ’siuvergnp. ,
» eu exécution d’arrêt de la cour du parlement, séant- en lu ville de
y> M oulins, pour le lait des grands jours, le o novembre lô-io.
t>
D
»
y>
»
11 parait, par ce procès-verbal, que 1 arrêt qui y est é n o n cé ,
rendu contradictoirement entre MM - François de L a to u r , vicomte
de T u r e n n c , seigneur et baron de Montgacon et de Chapes,
contre les liabitans d ’Ennczat et du a illagc d ’Entraigues ; et dame
Antoinette d’A m b o ise , dame de Uarbezicux, tutrice de ses en-
�'(5.)
» fans, intervenante; M. le sénéchal d’Auvergne fut commis pour
•» la vérification (les limites des lieux con ten tieu x, et pour mettre
» en possession réelle desdits lieux ledit François de Latour.
7>
y>
»
»
))
»
>j
»
» C ’est en exécution de cet arrêt, que M. Cliabrou, lieutenantgénéral, se transporta sur les lieux contentieux, et q u e , du consentement des liabitans, qui comparurent au procès-verbal, et
qui déclarèrent qu’ils ne voulaient empêcher l’ exécution de l ’arrêt
pour raison des pâturages y_ mentionnés; que ledit seigneur,
vicomte de T u re u u e , lut mis en possession de tous les lieux
contentieux, sunaut la vérification qui en fut faite; et les comnuinaux dont il s’agit font précisément partie de ces lieux contenlieux. »
Les habilans d’ Ennezat n’ont pas ce titre ; et ils ne l’ont jamais eu
en leur possession; mais on voit qu’il fut produit par M. le duc de
Bouillon. Il est sans doute aujourd’hui entre les mains de M. R o lle t,
qui est à ses droits, et qui plaidait, dans le tem ps, contre les liabitans
d’Ennezat, sous le nom du duc de Bouillon.
Quoi qu’il en soit, ce titre, dont on ne peut contester l’existence,
explique clairement com m ent, en <456 et i 4 ^Ç), dans Pincerlitude
des limites des justices, on était convenu, entre les seigneurs de
R iom et d’Ennezat, e l l e s liabitans des deux Ailles, d ’un pacage
promiscu dans une partie de ce marais;
Comment cet état de choses a changé, p a rle droit public établi
par la coutum e, qui limitait, dans la Lim agne, les pâturages par
justice ;
Comment ces limites de justice ont été fixées depuis, et spéciale
ment celles de la justice d ’Ennezat, par le procès-verbal fait, en
vertu dé l’arrêt des grands jours de Moulins, par le lieutenantgénéral de R io m , en iS'io;
Comment la situation du marais dont il s agit, dans les limites de
cette ju stic e , est devenue, dès ce moment, fixe et immuable;
Comment cette situation, ainsi fixée, est parvenue, sans contra
diction , jusqu’à nos joilrs.
C ’est ainsi que le seigneur justicier d ’Ennezat parvint à être r e
connu seigneur du m arais in term édia ire; — et c’est sans doute
�(6 )
par suite de ce droit du seigneur d’E n n era t, que les Iiabitans de
R i o m , étrangers à la seigneurie et ju s tic e d’Ennezat, cessèrent de
prétendre au droit de pâturage sur le marais intermédiaire.
D ès-lors, le m arais interm édiaire fut reconnu être dans le terri
toire de la commune d ’Ennezat; — E t si la commune de R iom a
récemment voulu rendre le point de localité problématique ( parce
que son plan de revendication l’exigeait ainsi ) sa prétention a été
souverainement proscrite par un décret impérial du 5 avril 1 8 1 1 .
Il importait à la commune d ’Ennezat de ne pas laisser s’établir la
moindre prévention, par l’ effet de cette transaction de i 436 . —
V o ilà donc bien constant qu’une loi survenue , ou la coutume rédi
gée eu i 5 i o , a détruit l’cfiet de la transaction; que depuis lo r s ,
tous les monumens sont d’ accord pour d ire, ou supposer, que la
commune d’Ennezat était l u s e u l e qui eût eu droit de p â tu r a g e ,
( inutile de dire comment il aurait cependant pu y avoir un droit de
m a rch a g e, qui ne fait rien au p ro cès,) sur le m arais in term éd ia ire,
à l ’époque remarquable de 17^ 3 , où ce marais fut soumis au droit
de triage.
Nous voici arrivés à une série nouvelle de faits, qui démontrent
de plus en plus q u e , dès avant 1 j 5'2 , il n’y avait plus de p rom iscu ité
de p â tu ra g e avec la commune de R io m ; que d ’ailleurs, depuis
1 7 5 a , la commune d ’Ennezat a joui ou possédé pendant, les der
nières soixante années, non plus à titre de servitu d e, établie sur le
seigneur, mais à titre de p ro p riéta ire, par suite de partage avec
son seigneur.
Iir.
S É R IE
DE
FAITS.
D e p u is 1 7 5 2 ju s q u ’ à V an 12 , ou i 8 o 4 . — P a r ta g e et d é fr ich e
ment du m arais litig ie u x , entre le seigneur et les Iiabitans
d ’E n n e za t. — P ossession exclu siv e. — P a r ta g e u ltérieu r entre
les habilana d ’ lïn n e z a t.
En 1752 , le duc do Bouillon , en qualité de seigneur h a u tj u s t i c i e r , demanda le triage de ce marais intermédiaire : et son
action fut dirigée contre les Iiabitans d ’E n n e z a t, seuls reconnus
pour en avoir la p ossession .
\
�7 2 /
( 7 )
L e procès dura huit ans ; il y eut des écritures immenses ( V . la
production des anciens mémoires respectifs) : l’instruction eut lieu
à la sénéchaussée de R iom , et devant la maîtrise des eaux et forêts
de Riom : les intérêts de la commune d’ Ennezat furent défendus
par des avocals de Riom , sous les yeux de l’universalité des habitans de llio m : et cependant la ville de Riom n’imagina point alors,
soit d ’intervenir, soit de prendre une part quelconque à la contes
tation , sous prétexte de son droit antique de p âturage prom iscu.
« L és liabitans de Riom furent toujours étrangers à cette querelle ,1»
dit le mémoire des habitans de R io m , page i 5 .
En 1760, la commune d’ Ennezat eut (011 parut avoir; cri tète un
nouvel adversaire, au lieu et place du duc de Bouillon. — L e sieur
R o lle t des M a r a is , qui n’était pas du tout un grand seigneur ( et il
importe d’en faire d ’avance la remarque ) , qui était simple payeur
des gages de la cour des aides de C le rm o n t, fut subrogé aux
droits du duc de Bouillon ; et ce particulier termina le procès com
mencé par le seigneur (si ce n’était p a r Jui-niéme R o lle t sous le
nom du seigneur. )
L e 10 décembre 1 7 6 0 , les habitans d ’ Ennezat abandonnèrent
au sieur R o l l e t , successeur du duc de B ouillon, cent six mille qua
tre-vingt-sept toises du marais interm édiaire, pour lui tenir lieu
de la portion qu’il pouvait obtenir pour son [¡rétendu droit de
triage.
Aussitôt, et dès 1761 , le sieur Rollet fit défricher son tiers du
marais intermédiaire ; et il l ’a possédé en état de cu lture, jusqu’à
l’époque où la commune s’en est mise en possession.
Que faisait alors la commune de Riom ? Faisait-elle p â tu rer ses
bestiaux sur le ci-devant marais devenu terre en culture ?
Réclamait-clle , du m o in s , contre l’exécution de cette transac
tion du 10 décembre 1760 , q u i, faisant les parts du marais inter
médiaire, avait tout attribué au seigneur et à la commune d’Ennezat,
ne laissant rien du tout pour la commune de R iom ?
Enfin, la commune de Riom fit-elle quelque signe d ’opposition
9
*>:
�V A "
(8 )
contre la possession exclusive de la commune d’E nnezat, dans les
deux tiers du marais , et du sieur R o llet dans le troisièm e tiers ?
N on. — La commune de R iom ne fit ni opposition , ni protestaion , ni acte de possession. — L e point de fait est reconnu par
l ’arrêt dénoncé. Il est également reconnu constant dans le mémoire
des liabitans de R iom (p^icl. page i 5 ) — Il est vrai qu’on y prétend
(p a ge 85 ) que cette p ossession est entachée de fé o d a lité ; ce qui
signifie que le sieur R o lle t , simple payeur des gages d’une cour
des aides , exerçait à E n n e z a t une p u issa n ce fé o d a le tout-à-fait
im p osante, même pour les liabitans de R iom .
En 176 2 , un particulier de la province d’ Auvergne imagina de
demander au roi la concession du marais de la ville de R i o m , sous
le prétexte d ’en faire le défrichement. — L a ville de Riom s’y
opposa de toutes ses forces. — Mais on voit dans la discussion
qu ’elle 11e songe à c o n s e r v e r que cette portion de Marais d’environ
cent cinquante-quatre arpens à elle cé d é e à titre exclusif par la tran
saction de l 45 f>; — q u ’elle reconnaît que ce marais, sa propriété
exclusive , confronte avec le m arais d ’ E nnezat-, — qu ’elle ne dit
pas un mot de sa prétendue p rom iscu ité avec les liabitans d ’Ennezat
sur le m arais d 'E n n e z a t.
Celte délibération des liabitans de la ville de R io m , du ao mai
1 7 6 7 , a cela de rem arquable, qu’on y raconte com m en t, « Un
)> p a r tic u lie r , le sieur R o llet des Marais étant aux droits de M. le
» duc de B o u illo n , seigneur d’Ermezat, a obtenu depuis quelques
» années le triage, c ’est-à-dire le tiers de la p a rtie (Í E n n e z a t
d dans ce m arais, l’a défriché et converti en nature de pré et de
v terres labourables, etc. etc. »
Impossible de reconnaître alors plus disertement que la ville de
R iom était sans droit sur la portion de marais partagé en 17G0 entre
le seigneur et la com m u ne; si la \ille de Riom n’a mis aucun obs
tacle a la transaction et à la possession e x c lu s iv e , c est qu’ elle
reconnaissait pailaitement 11’y a v o i r aucune espèce de droit.
Continuons :
En 1 7 7 9 , 1 7 8 0 , 1 7 8 1 , 178J et 1783, la commune de Riom
vend la portion de marais qui lui était échue par la transaction
�(9)
de l4 3 6 , et qui avait été limitée par le procès-verbal de J489.
— Les confrontations indiquent le m arais (V E n n eza t : ces actes de
vente étaient donc la reconnaissance du droit exclusif de la com
mune d ’Ennezat.
On conçoit d ’ailleurs qu’après avoir vendu les marais dont elle
était propriétaire à titre e x c lu s if, la commune de llio m dut mettre
le plus grand soin à conserver ses droits de prom iscuité dans
d’autres marais, si elle s’y croyait alors autorisée. — Son silence ulté
rieur est donc une présomption irrésistible que ce droit de p ro m is
cu ité revendiqué en l’an 1 2 , était inconnu vers l’an 1780.
E n 1 782 , les habilans d ’Ennezat délibèrent qu’il leur convient de
se partager la portion de marais communal , devenu la propriété
e x c lu s iv e , depuis la transaction faite avec le seigneur local ou son
cessionnaire.
Sur cette délibération de la commune d’E n n e z a t, pas le moindre
signe d ’opposition de la commune de R io m ; au contraire, elle fut
approuvée par 3VI. T o u lté e , célébré jurisconsulte et subdélégué de
la ville de Riom. — Et si les deux tiers du marais réservé à la com
mune d’Ennezat ne furent pas partagés, entre les babitans,dès 1782,
ce fut parce que l’autorité supérieure n’y donna pas son assentiment;
ce ne fut pas du tout par une cause relative aux intérêts ou aux
droits de la ville de Riom.
Après cet état de choses de possession exclusive, depuis 1760
jusqu’ en 1789 , survient la révolution ; — Et de suite, dès 1 7 9 2 ,
les habilans d’Ennezat songent à se partager la portion de marais
qu’ils avaient possédée jusqu’à ce jour, possédée soit en y faisant p â
turer exclusivement, so ite n la donnant à b a il à fe r m e en 1791.
Bientôt ils intentent contre le triage du sieur R o llet l’action en
nullité autorisée par l’art. 1 " de la loi du 28 août 1792. — L e triage
est annullc, à leur profit, par jugement contradictoire et de dernier
re ssort, du 2 brumaire an 3 ; — E t le 4 ventôse suivant, les habitans d ’E n n e z a t, délibérèrent d ’en faire le partage conformément
à la loi du 10 juin l'rg:*, et nommèrent pour experts, aux fins de ce
partage , trois habitans de la ville de R iom . C e s trois e x p e r t s de
R iom firent les opérations de partage entre les habitans d’Ennezat.
— L ’acte de partage fut consommé le 4 nivose an 4.
�* fc <
( »0 )
L a ville de R iom garda, sur le partage de l ’an 4 , comme sur le
procès avec le seigneur en l ’an 2 , comme sur la délibération de
partage entre les habitans en 1792 , comme sur la délibération anté
rieure à fin de partage de 1782 , comme sur la transaction et le
partage avec le seigneur en 1760 (nous pourrions dire aussi comme
sur un procès des novalcs entre le sieur R ollet et la commune
d’E n n e z a t, comme sur un autre procès entre ledit R ollet et la
commune d ’Ennezat ) ; le silence le plus absolu , tant elle était
convaincue que sur ces terres , objet de toutes ces opérations ou
contestations , elle n’avait aucune espèce de droits !
I Y C.
S É R IE
DES
FAITS.
PROCÉDURE.
C3 fut le 11 pluviôse de l a n 1 2 , que la commune de Riom
assigna la commune d ’Ennezat en revendication d ’un droit de co
propriété , et à fin de partage des marais partagés en l’an 4 .
Rappelons ici
Que le marais revendiqué avait été, par le partage, divisé entre
i o 3 5 individus de la commune d’Ennezat;
Que les ^o 35 individus ne formaient pas alors la totalité des habitans de la commune ; — que le surplus des habitans avait reçu des
portions équivalentes sur d’autres communaux partagés en même
temps 5
Q u e , de ces i o 33 individus, un certain nombre est allé résider
hors de la commune ;
QnJun grand nombre do ccs i o 35 propriétés particulières ont
¿le vendues, échangées, hypothéquées ;
Q u ’en tout cas, c’ est aux seuls détenteurs « répondre sur une
demande en revendication.
V o ic i les termes de l’exploit du 11 pluviôse an 12 :
d
« ........... ai signifié que les habitans de la ville de Riom sont c o propriétaires avec ceux d’Lrmczat d’un terrain contenant en :out
«
�( «I )
» douze mille deux cent cinquante arcs, ou trois cent sé lé r c e s ,
x> ancienne mesure , situé dans les appartenances de Riom , terrain
» du marais confiné de jour par les propriétés des citoyens R o l l e t ,
y> M agne, Mandet et D é co m b e, et par différons chemins, de midi
» par des chemins et voies communes, de nuit autre chemin venant
M des domaines des citoyens Bordère et T an tillon , les propriétés
» ayant appartenu aux citoyens Mathieu, et autre chemin entre
» deux aussi de nu it, et encore de nuit par les propriété* de diffé» rens particuliers, un ruisseau entre deu x , et de bise par un terrain
)> communal joui par les habitans de Clerlande, un ruisseau entre
)) d e u x , ledit terrain plus amplement désigné et confiné dans un
» procès-verbal fait en exécution d ’arrêt de la Cour de Parlement
» de P a ris, par M. Cambray , conseiller , commissaire nommé
» par le même arrêt du 24 septembre i 48 g , contradictoirement
» avec les habitans de la ville de Riom et ceux d ’Ennezat, et à la
)> réquisition de ces derniers, contenant vérification des bornes et
» limites dudit terrain com m unal, qui avaient été établies et fixées
» d’après des titres antérieurs audit procès-verbal , et contenant
7) aussi plantation de nouvelles bornes a difierens points ou il en
v manquait ; q u e , depuis ce procès-verbal, les habitans de la ville
» de Riom et de celle d’Ennezat ont toujours joui en commun dudit
» terrain jusqu’en Jjg'à , que les habitans d’Ennezat s’ en sont em» parés exclusivement, ce qui est une usurpation aux droits de pro)) priétc et de possession des habitans de R i o m , qui ont été autorisés
» à en faire la réclamation, par arrêté du conseil de préfecture de
d ce département, du 18 messidor dernier, contenant homologa» tion d ’un délibératoire du conseil général municipal de ladite
» ville de Riom , du uo pluviôse précédent.
» A ces causes, j’ai assigné les habitans, corps com m un et
)) maire de ladite ville d’Ennezat, à comparoir dans la huitaine,
» délai de l’ordonnance, par-devant les citoyens président et juges
y> du tribunal civil de première instance de l’arrondissement de
« R io m , siégeant en ladite ville , pour voir dire c l ordonner que
» lesdits instans s e r o n t gardés el maintenus aux droits de propriété
y> et possession, concurremment et par indivis avec les habitans et
x> commune d ’JEunezat, du terrain ci-dessus désigné et confiné,
)> circonstances et dépendances, c l avec défenses ue les y troubler
» à l’avenir, aux peines de droit. )>
18 août 1806. — Réponse de la commune d’Ennezat, et conclu-
�( 12 )
sions à ce que la commune de R iom soit déclarée n o n -re cev a b le ,
o u , en tout cas, m al fo n d ée .
a 4 juillet 1807. — Jugement préparatoire du tribunal civil de
R .iom , qu i, sans p réju d ice de tous les m oyens des p a rties, tant
de f a it que de d r o it , qu i leur dem eurent expressém ent réserv és,
ordonne q u e , par trois experts, il soit fait une visite des lieux con
tentieux, pour faire l’application de la transaction de i 456 .
L e procès-verbal des experts, commencé le 7 octobre 18 0 7 , et
clos le 27 juin 1 808, devait indiquer :
1". L a partie de marais réservée aux habilans de R iom ;
2*. La partie de marais réservée aux liabitans d ’Ennezat;
3 °. L a partie de marais restée en état de prom iscu ité y
L e tout aux termes de la transaction de i 456 .
A u lieu de cela, il confond la partie de marais réservée aux ha
bitons d’Ennezat, avec la partie de marais restée en état de p rom is
cu ité entre Riom et Ennczat. — Et l’on sent la conséquence de
cette erreur p rem ière, s’il devait arriver que les habitans de Riom
eussent aujourd’hui 1111 droit de copropriété, là où ils eurent un
droit de copàturage eu 1 456 .
A u total, laissons ce procès-verbal des experts, dont la discussion
serait oiseuse. Reprenons la marche de la procédure.
L e 4 décembre 1809. — La commune d ’Ennezat développant ses
premières conclusions, tendantes à ce que la commune de Riom lut
déclarée non-recevable, q u e la commune d’Ennezat en masse
n’est pas détentrice des terres revendiquées; que les terres reven
diquées ont été partagées en l’an 4 } entre i o 33 individus, alorsses
liabitans; — D ’où elle conclut que la commune de lliom n’ a aucune
action à exercer contre elle , itt univer.si. : elle d e m a n d e que la
commune de Kiom soit renvoyée à se pourvoir devers les déten
teurs individuellement pris ut sin g u li.
28 décembre 1809. — Jugement contradictoire qui rejette la fin
de non-recevoir, et ordonne à la commune d’Ennezat de rester en
cause ut universi :
» Attendu que la demande des liabitans de R i o m , contre ceux
«
�( i5 )
d ’Ennezat, a pour objet des communaux prétendus indivis, e tp r o miscus entre les deux v ille s, et le partage d’iceux ;
» A ttendu qu’une pareille demande n’a pu être intentée que
contre le corps commun collectivem ent, et non contre des parties
individuellement ;
» Attendu que les prétentions actuelles de la commune d’E n
nezat ne peuvent porter atteinte a la procédure déjà faite ;
» Attendu que la demande de la commune de Riom a été formée
antérieurement à la loi du (j ventôse an 12. »
L a cause fut renvoyée au lendemain pour le jugement définitif.
A u fond , — la commune d ’Ennezat avait conclu à ce que les
habitans de Riom fussent déclarés non-recevables et mal fondés.
7 février i 8 i o . — Jugem ent du tribunal civil qui accorde toutes
les conclusions de la commune de Riom.
J
u g e m e n t
d e
p r e m i è r e
i n s t a n c b
.
V o ici le texte des motifs et des dispositifs.
» En ce qui louche le fond , et d ’abord en ce qui louche la pos
session exclusive du marais dont il s’agit , invoquée par les habitans
d ’Ennezat.
i) Attendu que les appelans n’appuient leur possession que sur un
p r é t e n d u p a c a g e habituel dans le communal dont il s’agit ; qu’il est
de principe qu on n’acquiert aucune possession ni prescription par
le pacage , surtout en matière de communaux, quelque longue
q u ’ a i t été ladite possession; que ce principe est spécialement co n
sacré par les dispositions textuelles de la coutume d ’Auvergne ;
y> Attendu que ce prétendu pacage exercé par les habitans d ’Ennezatest fondé sur un titre que toutes les parties invoquent respecti
vement ; que ce litre était commun aux habitans de la ville de
Riom ; qu’ainsi les défendeurs n’ont pu jouir que conformément
à ce titre } m sauf le droit des habitans de Riom .
» En ce qui touche la possession fondée sur le défrichement qu’ils
allèguent avoir été fait d ’une portion dudit marais, par le fait du
triage de 1760 :
)) Attendu qu’il est reconnu
entre
les parties que la portion dudit
�( 14 )
com m unal, qui fut attribuée aux habitans d ’Ennezat, par l’effet
du triage , n’a été mise par eux en culture qu ’en 1796 seulement ;
)) Attendu que si la portion attribuée par le triage au sieur Rollet
fut par lui cultivée, ce défrichement ne peut être d’aucune consi
dération , puisque les lois des 28 août 1792 et t o juin 1795 ayant
anéanti le triage même pour le passé , ont déclaré vicieuses , illé
gales et comme non-avenues toutes possessions qui n’avaient pas
d ’autres sources ; qu’ainsi, en supposant même que la possession
du sieur Rollet pût s’appliquer aux habitans d’ Ennezat, elle ne peut
être plus utile à eux qu’ elle ne le serait à lui-m êm e , puisque ,
d ’après les lois ci-dessus, il n’a pu prescrire pour lu i, cl n’a pu
davantage posséder utilement pour e u x , d’où il résulte q u ’en
anéantissant le triage de 1 7 6 0 , et en ordonnant la remise aux
habitans des communaux qui en avaient été l’o b je t , les lois nouvel
les ont remis les ehosesau même état où elles étaient avant le triage;
b *
» Q u ’elles ont considéré la possession du seigneur comme n’ayant
jamais existé , et ont restitué les biens à ceux qui en étaient p ro
priétaires avant le triage ;
»A ttendu dès-lors qu’il faut se rapporter à cette époque antérieure
au triage, et examiner en elle-m ême la question de propriété;
y> Atten du que, pour déterminer ladite propriété, il importe peu
que le communal dont il s’agit lut ou 11c lut pas .dans la justice
d ’ Ennezat, puisqu’il ne s’agit pas entre les parties d ’un simple droit
de vaine pâture que la loi municipale n’accordait q u ’aux habitans de
Injustice en bas pays d ’A u v e r g n e , mais qu’il est question d ’une
propriété communale établie sur titres ; que par conséquent la ques
tion ne pouvait dépendre des limites de telle ou telle justice ;
w Attendu que rien n’a constaté la délimitation précise des justices
de R i o m et d ’Ennezat, que les habitans de R iom p r é t e n d a i e n t , l o r s
du p r o c è s - v e r b a l de 1489 , que la justice de leur s e i g n e u r couvrait
la t o t a l i t é diullt marais J q u ’ainsi l ' a l l é g a t i o n q u e l e d i t marais était
d a n s la justice d ’ K u n e z a t , ne p e u t ê t r e d a u c u n e considération d a n s
h» cause , en ce qui touche la demande en maintenue d a n s la pro
priété indivise dudit marais f formée par les habitans de Riom contre
les défendeurs ;
y> Attendu que le proces-verbal do 1-189 081 rapporté en forme
�Ï4J
( 15 )
probante par les deux parties ; qu’il ne s’élève point de doute entre
elles sur son authenticité, et qu’il devient un titre fondamental dans
la contestation ;
» Attendu que , si cet acte n’eut lieu qu’en exécution d ’ un arrêt
provisoire seulement, il ne faut pas en tirer la conséquence , que
les droits des parties , au fo n d ,so ie n t restés indécis à cette époque ;
qu’en effet on voit par la relation de ce procès-verbal que , le g juin
i 4 5 6 , les habilans des deux villes avaient transigé sur leurs pré
tentions respectives dans ces communaux ; que par cette transaction
il avait été attribué à chacune des deux villes une portion distincte
en propriété csclusi\e , et qu’il avait été convenu que le surplus
demeurerait commun et en pâturage indivis entre les parties; que
ce qui donna lieu au procès-veibal de 1489 fut que le duc de
Bourbon prétendant que sa justice s’étendait sur tout le marais
commun indistinctement, et que la transaction de i/| 56 lui était
étrangère et ne se liait p oin t, avait fait saisir quantité de bestiaux
des habitans d’Ennezat; qu’alors les habilans d’Ennezat, voulant
établir leur copropriété., justifièrent de la transaction de 14 56 , et
soutinrent que leurs droits étaient indépendants de la justice du duc
de Bourbon , et qu’eu effet, sur le vu de la transaction, ils obtinrent
un arrêt qui les maintint en possession provisoire sans examen de
l’étendue de la justice; que lors du procès-verbal fait en exécution de
cet arrêt, le duc de Bourbon ayant voulu renouveler sa prétention ,
les habitans d’ Ennezat lui repondirent, page i 5 > qu’ils n’entendaient
faire contenlieuse la justice dudit seign eur, et demandaient seu
lement leur droit de pâturage par provision; qu’à la page 16 ils
faisaient valoir les mêmes raisonnemens toujours relatifs à leurs
droits de pacage en vertu de la transaction ;
» Attendu q u ’il résulte do ces termes du procès-verbal de 1 »
qu’il n’y eutde provisoire, à celte époque , que la maintenue en pos
session des habitans d’ Ennezal ; que celle maintenue fut basée sur
la transaction de 1 ^56 ; que les défendeurs l'invoquèrent comme titre
de propriété commune entre eux et les habitans de I l i o m , laquelle
fixait définitivement les droits des deux \il!es sous tous les r a p p o r t s .
Attendu cjne ni l’existence ni la teneur de cette transae'ion de
l 436 11e peut être révoquée en d o u te ; que l’une et l’autre sont
suffisamment établies par le procès-\ erbal de 1 aHj) , cl par l’an êt
qui l’avait p ré c é d é , qu’ elle était alors rapportée par les habitans
d’Ennezat, cl reconnue pour incontestable par toutes les parties ;
�V V -V
( 'G )
» Attendu qu’aux pages 4 o et 4 i du procès-verbal , on lit encore
que les babitans de Riom requéraient que bornes fussent plantées
pour faire la séparation de ce qui était et appartenait, par ladite
transaction de x/f36 , auxdits babitans de Riom seuls , et pour le
tout de ce qui appartenait par commun à eux et auxdits babitans
d ’Ennezat; que les babitans de Riom requéraient aussi plantation de
bornes tout à l’entour du marais qui demeurait commun entre iceux
de R iom et d ’E n n e z a t, pour éviter , pour le temps à v e n ir , les
débats et questions qui pourraient advenir; faute de non être, ledit
marais , bien borné tout à l’entour ;
»A tten d u que , bien loin d’épprouver aucune contradiction de la
part des babitans d ’Enn ezat, cette demande fut accueillie par eux,
en déclarant immédiatement q u ’ ils ne vou la ien t l ’ e m p ê ch e r ,
pourvu que ce fût aux dépens desdits babitans de Riom ;
)>A l tendu par conséquent que le procès-verbal de 1 480 est un
titre puissant pour éclairer la contestation , puisque , d ’une p a r t ,
il constate l'existence de la transaction de 1456 ;
» Q u ’il établit ensuiteque d ’après celte transaction, partie duMarais
appartenait en propre a u x h a bita n s de R io m , et p artie apparte
n a it p a r commun à eux et cî ceux d ’ E n n e z a t ; qu’enfin la planta
tion de bornes fut conforme à ladite transaction et d ’aprcs ses dis
positions; que dans cet ctat de choses il ne petit plus être question
que de fairfe l’application sur le terrain contentieux de la teneur du
procès-verbal de i 4 Hy;
» Attendu enfin que , s’il pouvait s'élever le moindre doute sur
l’cxistcncc de ladite transaction de i/|3 6 , il serait évidemment dis
sipé par l’examen de la procédure; qu’en effet le premier mot des
babitans de Riom , lors de leur délibération et de leur demande, fut
d’invoquer cette transaction de i 456 , et d ’en rapporter la teneur j
que bien loin d ’é le v c r à cet égard aucune réclamation, les habitans
d’Ennezat, par leurs défenses, signifiées le 18 août 1806 , en argu
mentèrent eux-mêm es et en rapportèrent les termes exprès; qu’il
leur lut re|uoché, soit dans un Mémoire im p rim é, soit lors du juge
ment interlocutoire, qu’ils avaient «lans leur dossier une copie (le
celle transaction , signifiée le a 5 juillet 17^9; qu ’ils 11c le désavouè
rent point, le jugement ni aucun écrit 11e constatant qu’ils aient nié
cette assertion ; qii’eniin ils oui eux-mêmes produit aux experts une
copie informe de cet acte ancien entièrement semblable à celle
qu’avaient fournie lesliabilans de Riom ; qu’ainsi, sous tous les rap-
«
�'( 17 )
ports possibles, il faut tenir pour constant, et l ’existence et la teneur
de ce monument précieux <lu droit de.6 parties ;
» Attendu que les autres titres produits par leshabitans’d ’Ennezat,
soit dans le cours de l’instance, soit devant les experts, n’ont aucune
influence sur la contestation ; que la plupart sont informes et sans
authenticité, d’où il suit qu’ils ne peuvent porter aucune atteinte
ni à la transaction de i 456 , ni au procès-verbal de 1439.
» En ce qui touche l’homologation du rapport :
» A lien du qu’iTcst unanimement constaté par les trois experts,
que le marais laissé en commun en l 4 4 6 , est la portion de terrain
désignée sur le plan par ces m o ts: M a ra is com m u n , circonscrit
d ’ un liseré rouge ;
» Attendu qu’ils établissent aussi l’exislonce de la porlion exclusi
vement attribuée à chacune des deux villes de Riom et d’Ennczat,
par la transaction distincte de ce marais commun , l’un à l’o r ie n t,
l ’autre à l ’occident;
» Attendu , à cet égard, qu’en faisant application sur le plan du
procès-verbal de i 4 *>9 > el e,} suivant Je rapport des experts, ?a
lumière jaillit de toute part; qu ’il est impossible de résister à l’évi
dence de celte application , el de ne pas distinguer les parties attri
buées exclusivement d’avec le terrain laissé en commun ;
» A tte n d u , enfin, qu’il est aussi constaté, par ledit rapport, que les
ventes faites en 1779 et en 1781 par la ville de R io m , n’ont frappé
que sur la portion qui lui était désignée comme portion exclusive,
parla transaction de a4^6 et le procès-verbal de 1489, à l'excep
tion seulement de la petite langue de terrain, n* a, qui a été prise
sur le marais commun.
» En ce qui touche la restitution des jouissances :
» Attendu qu e, par la loi du 9 ventôse au 12 , les jouissances ne
sont dues au propriétaire que depuis la demande se u lem e n t, lo rsue les terrains réclamés ont été partagés et sont jouis par des tiers,
epuis la loi du 10 juillet 17 ç 3 ;
y> Attendu que si les habitans d’Ennczat n’ont pas joui ut u n iv e rsi,
et si, en principe, on ne peut pas leur demander des jouissances
qu ’ils n’ont pas faites , il est certain que les habitans de Riom n’ont
pu se pourvoir directement contre les tiers détenteurs, parce qu’il
{allait auparavant faire juger avec les habitans d ’Ennezat collective-
3
3
�( 1» )
ment leurs droits de propriété indivise, et faire fixer par un partage la
portion qui doit leur appartenir en propre ;
» Attendu que c’est par le fait tLs habitans d’ Ennezat que la ville
de Riom a été privée de sa jouissance; que c’est par le fait de leur
mauvaise contestation que ces droits ont resté encore indécis et que
les habitans de Riom n’ont encore pu demander ni le désistement ni
les jouissances aux tiers-détenteurs; qu’ainsi, quoique les habitans
d ’Ennezat en corps ne soient pas garans envers les détenteurs des
condamnations que ces derniers peuvent éprouver au sujet des com
munaux. partagés en vertu de la loi du io juin
corps commun
n’en est jias moins garant envers les habitans de Riom de tous les
dommages que ceux-ci on tép rouvésparson injuste contestation,les
quels dommages consistent réellement dans la privation des jouis
sances qu’ont éprouvées les[liabitans"de Riom depuis la demande ori
ginaire jusqu’au jour où ils pourront réclamer directement contre
les tiers-détenteurs.
» En ce qui touche la demande en partage :
» Attendu qu ’elle est une suite naturel et inévitable du droit de pro
priété indivis appartenant aux habitans de Riom dans le marais dont
il s’agit; que les habitans en nom collectif ne sont pas plus que les
individus en particulier tenus de rester dans l’indivision;
» Attendu que l’avisdu Conseil d’Etatdu 20 juillet 1807 a déterminé
le mode de paitage des biens communaux dont deux communes
sont propriétaires par indivis.
» Par ces m otifs,
» L e tribunal, par jugement en premier ressort, et jugeant contra
dictoirem ent, statuant sur tous les objets de la contestation, ayant
égard à ce qui résulte du rapport d’expert des sieurs Delageneste,
Radot et l i e p o u x , du 27 juin 1808, et icelui homologuant, garde
et maintient les habitans de R io m aux droits, propriété et posses
sion, concurremment et par indivis, jusqu'au partage av«c les habitaus d ’E nnceat, du terrain dont il s’agit, déclaré et confiné, soit
audit rapport ci :m plan lait par les mémos experts, en cxecution du
jugement interlocutoire du tribunal, du i!\ juillet 1807 ? circons
tances et dépendances; fait défenses aux habitans d’ Ennezat de
troubler les habitans de Riom dans la p ropriété, possession et
jouissance dudit terrain, aux peines de droit; ordonne q u ’il sera
p ro cé d é , entrelesditshabitans des deux villes, au partage du terrain
�( *9 )
dout il s’agit, pour en être délaisse susdits habitans de Riom Ja
portion à eux revenante, eu é"ard au nombre de feux par chacune
des communes de R iom et d E n n e z a t, conformément à l’avis du
Conseil d’Etat du 28 juillet 1807;
» E tpo urpro céder aux opérations dudit partage, nomme les sieurs
V ig ie r Fasci, expert, à la résidence de Clermont; C ou clion , notaire
et expert, à la résidence de V o lv ie , et Fretier, e x p e r t,à la résidence
de Maringues, lesquels demeureront définitivement no m m és, faute
par les parties de s’être accordées sur le choix d ’un ou de trois
experts, dans les trois jours de la signification du présent jugement
à personne ou domicile; nomme M. le président du tribunal pour
recevoir le serinent desdits experts; condamne pareillement lesdits
liabilans d ’Ennezat à garantir et indemniser lesdits habitans de Riom
de la privation éprouvée par ces derniers, des fruits et jouissance
dudit marais co m m u n , et ce p a r le fait et la mauvaise contestation
desdits habitans d ’Ennezat, depuis la demande jusqu’au jour où ils
pourront actionner les tiers-détenteurs, ensemble le montant des
dégradations qui auront pu avoir été faites dans ledit terrain com
m u n , et en conséquence, les condamne à payer aux demandeurs le
montant des dettes, dégradations et jouissances , com m e dessus, et
c e , suivant l’estimation qui sera faite par les experts ci-dessus
nom m és, aux intérêts des dettes, jouissance et dégradations, depuis
(pie de droit. Sur le surplus des demandes, fins et conclusions, met
les parties hors du procès; condamne lesdits habitans d’Ennezat en
tous les dépens, même en ceux réservés par le jugement du 24
juillet «807; et attendu ce dont il s’agit, ordonne que le présent
jugement sera exécuté, nonobstaut 1 appel.
L e s habitans d ’Ennezat ont interjeté appel des deux jugeniens
interlocutoires du 29 décembre 180g, et du jugement définitif du
7 février 1 8 10 ; — L ’acte d ’appel est du 5 juillet 1810.
E n cause d ’appel, la commune d ’Ennezat établit, contre les juger a e n s dont ctail appel, 1*. contre le ju g e m e n t interlocutoire j
Q u e l’action en revendication dirigée contre e lle , u t universi,
n’ciait pas recevable, attendu que la commune n’ dtait pas détentrice.
3*. Contre le ju g em en t définitif',
Q u e l’action était d’ailleurs non-recevabîe , ayant été formée
fvant la loi du g ventôse an 1 2 , et sous l’empire de la loi du 21
prairial an 4 ;
Q u ’elle ne pouvait être partie devant l’autorité judiciaire ;
�( 20 )
qu e, pour faire repousser l’action de la commune de R io m , il
suffisait de ce fait, qu’elle n’était pas en p ossession, au 4 avril 17^9 >
des terres qu’elle revendique aujourd’h ui; qu’à cet égard, le juge
ment définitif avait omis de prononcer;
Que ces terres revendiquées sont la propriété de la commune
d ’Ennezat, acquises par prescription , attendu sa possession immé
moriale, ou du moins trentena ire, avant la loi du 21 prairial an 4 ,
qui a fait dormir toute prcseription de ce genre;
Que la commune de Riom ne pouvait tirer avantage de la
transaction de i 4 3 6 , soit parce que c ’est un titre é te in t, par la pres
cription, contraire; — soit parce que ce litre avait été rendu ,sans
e/ J ei p a r la disposition coutumière, qui restreignit le droit de pâ
turage dans l ’étendue de chaque justice; — soit enfin parce qu’un
titre de pâturage p rom iscu 11e pourrait, en aucun cas, autoriser
une prétention de propriété ou copropriété p a rfa ite ;
Qn au surplus, la restitution et indemnité seraient excessives.
T e lle est, en substance, la défense de la commune d’Ennezat,
consignée dans deux mémoires imprimés..
i 3 février 1811. — A rrê t co n jir m a tif, p arla Cour d’a p p e l, dont
voici les motifs :
AnnÈT
d é n o n c i ’:.
« En ce qui touche la fin de non-recevoir résultante de l’article 8
de la loi du g ventôse an 12, attendu que les lois de 1792 et 1793
ont re n d u , aux anciens propriétaires, tous les droits de propriété et
de possession dont ils avaient été dépouillés par l’exercice du
droit de triage; et qu’ainsi les habitans de lliom et d ’Ennezat, c o
propriétaires du tiers du communal délaisse à R o llc t , par le traité
du i o juin 17 6 0 , sont présumés avoir, par ledit R o llc t, continué
leur possession, et par conséquent doivent être regardés comme
possesseurs avant 1789, et en vertu de la même cause de pos
session.
T> En ce qui regarde la fin de n o n - r e c e v o i r résultante de la loi
du ai prairial an 4 , ,jUi surScoit à toutes actions et poursuites résul
tantes de la loi du 1o juin 17 9 6 , sur le partage des cotemunaux ;
» Attendu que cette fin de non-recevoir 11’a pas été proposée
d’entrée de cause et in Itniitie litis , attendu que celle loi ne s’ap
plique qu'aux actions en partage des com m unaux, et non aux
�( 21 )
demandes en revendication de la propriété ou désistement des
communaux ;
» Attendu même que cette dem ande, considérée comme acte
conservatoire, ne pourrait être attaquée de nullité.
» En ce qui touche l’exécution du partage :
:» Attendu q u e , quoique le partage devienne un accessoire de la
copropriété du communal adjugé aux habitans de Riom , cepen
dant l ’exécution de ce partage et la distribution des lots doivent être
laites par l’autorité administrative, conformément à l’article 2 de la
loi du io juin 179
et à l’arrêté du Conseil d’Elat du 29 niai 1808;
» A tten d u , au surplus, les autres motifs exprimés dans les jugemens des 28 décembre 1809, et 7 février 1810, rendus au tribunal
civil de Riom.
» La C o u r , sans s’arrrêter aux fins de non-recevoir opposées
par le maire et habitans d ’Ennezat, parties de Rousseau, met l’appellalion au néant; ordonne que les jugemens dont est appel, desdits
jours 28 décembre 1809, et 7 fovrier 1 8 1 0 , seront exécutés suivant
leur forme et ten eur, sauf aux parties à se retirer par-devant l ’amorité administrative, pour la division et distribution des parts, etc. »
M O Y E N S DE C A S S A T I O N .
L e nombre des moyens de cassation , porté à huit, est peut-être
e x c e s s if: mais il ne nous est pas permis d ’en dissimuler aucun.
C ’est un devoir p our nous d e 4 montrer comment tous les genres
d ’erreurs ont été cumulés dans celte affaire.
Et d ’ a bo rd , les tribunaux étaient incompélens à raison de la ma
tière, s’agissant de revendication et de partage de biens c o m m u
naux dans l’intérêt d’une c o m m u n e .— En tout cas, si les tribu
naux avaient été co m p éten s, ce n’eût pas été les juges de Riom ;
caria loi et les convenances prohibent à chacun d ’être juge dans sa
propre cause.
L ’action en soi était prohibée et n on -reccva ble, soit à raison du
temps où elle fut entamée ( c ’élait avant la loi du y ventôse an 1 2 ) ,
soit à raison des personnes contre qui elle fut dirigée, ( ce ne fut pas
contre les détenteurs des terres revendiquées), soit à raison des cir
constances dans lesquelles se présentait la commune défenderesse
elle ne justifiait pas d’avoir etc en possession en J789 ).
La demande étoit m al fo n d é e au p r in c ip a l, parce que les exposans ? alors défendeurs , jutifiaient être en possession paisible , pu-
�( aa )
blique et exclusive depuis trente et quarante ans; — ce qui assurait
leur succès; — d’autant que les liabitans de Riora , alors deman
deurs, n’avaient pour eux qu’un titre du i 5e. siècle, éteint par une
loi du 16*. siècle, titre au surplus q u i, 11e conférant aucun droit à
Impropriétéj ne conférant qu’un droit de pâturage ou se rv itu d e , ne
pouvait aucunement servir de fondement à une revendication de
copropriété.
Elle était m a l fo n d é e quant a u x a ccesso ires, en ce que les
dommages - intérêts seraient accordés en contravention à la loi
(même en supposant l’action recevable et fondéej, attendu que l’arrêt
dénoncé ordonnant la restitution des fr u its , les fait partir depuis une
époque prohibée par la l o i , et les élend à une époque in d éfin ie ,
également prohibée par la loi. — M ê m e contravention à l ’égard des
dégradations.
I er.
M O Y E N
DE
C A S S A T I O N ,
P r is de ce que les tribunaux étaient incom pétens à raison de
la matière.
Contravention à la loi, du 10 juin 1 7«)3 section 5 , art. 1 " . ; à
l’art. 6 de la loi du 9 ventôse an 12, et à l’avis du Conseil d ’ Etai du
3 juin 1809, en ce que ce 11’était pas à l’autorité ju d ic ia ir e à rendre
sans effet un p a rta g e exécuté sous la loi du 10 juin 17Cj3, et à ordon
ner un nouveau partageai p a r f e u x ; — surtouten ceque c’est ¿^’au
torité adm inistrative se u le , qu’il appartient de statuer sur la matière
d’usurpation de com m unes; lorsqu’il s’ngit de l’intérêt d ’une com
m une contre des usurpations réelles ou prétendues, commises après
la loi du 10 juin 1 7q3 . et avant celle du y ventôse an l a .
L ’art. 1 " . de la section 5 de la loi du 10 juin 1 7 9 5 est ainsi
: tc Les contestations qui [»ouï ront s’élever a raison du mode
» dé partage entre l e s com m unes, seront terminées sur simple m é•» m o ire , par le directoire du département, d ’après l’avis de celui
» du district. »
couru
L ’art. 6 de la loi du g venlôse an ia porte : « Toutes les contes-
�ÏJ S
(
)
» talions relatives à l’occnpation desdits biens, qui pourront s’é lc » ver entre les copartageans, détenteurs ou occupans depuis la loi
» du 10 juillet 1792 et les communes, soit sur les actes et les
preuves de partage des biens communaux , soit sur l’exécution
» des conditions prescrites par Fart. 3 de la présente l o i , seront
)) jugées par le conseil de préfecture. »
L ’avis du Conseil d’Etat , du 4 juin 1809 , dit littéralement
que « toutes les usurpations de biens com m unaux, depuis la loi du
» 10 juin i 793 jusqu’à la loi du g ventôse an 1 1 , soit qu’il y ait ou
» qu’il n’y ait pas eu de partage e x é cu té , doivent être jugées par
» les conseils de préfecture , lorsqu’il .s’agit de l’intérêt de la com » mune contre les usurpateurs. »
En fait, le jugement confirmé, adoptant le rapport etplanfait par
les experts, « O r d o n n e ’qu’il sera procédé, entre les habitans des
» deux v ille s, au partage du terrain dont il s’agit, pour en être dé)) laisse auxdits habitans de R iom la partie à eux revenante, eu
» égard au nombre de f e u x , par chacune des communes de R iom
» et d’E n n ezat, conformément à l ’avis du Conseil d ’État, du 28
7> juillet 1807 ;
» E t , pour procéder aux opérations dudit partage, n o m m e .........
» pour experts, etc. »
Ainsi voilà bien que le jugement de première instance ne se borne
pas à décider une question de propriété.
Il décide de plus que le mode de partage sera par feux.
II va plus loin ; il prend des moyens d 'exécution en ordonnant
l ’expertise.
On ne peut violer la loi plus ouvertement.
L a Cour d’appel aurait donc dû réformer. — A u lieu de c e la , elle
ordonne l’exccution.
A la vérité, on voit dans les considérans, « q u e l’exécution de
» ce partage et la distribution des lots doit être faite par l’autorité
j> administrative. »
Mais la Cour d ’appel n’en confirme pas moins la décision sur le
mode de p a rta g e p a r fe u x .
�( ai )
E t c’csl un point bien important flans la cause ; — car il en résul
terait , comme nous l’avons déj?» dit, que la ville de R i o m , douze fois
plus peuplée,prendrait les onze-douzièmes en p ropriété, d’un com
munal sur lequel scs bestiaux ne venaient jadis qu’en nombre infini
ment moindre que ceux de la commune d Ennczat.
D ’ailleurs l'autorité administrative, seule compétente pour o r
donner ce nouveau p a rta g e, l ’était également et exclusivement pour
examiner et décider la question de propriété.
Il est vrai que la loi du g ventôse an 12, article 8 , semble vouloir
que toutes contestations de la part de ceux qui reclamenl des droits
de p ropriété dans les communaux, soient portées devant l ’autorité
judiciaire. — Mais cette règle n’est pas générale : elle comporte des
exceptions; c l notre espèce est précisément exceptée de la règle
générale , par la raison que c’csl une com m une qui réclame , et qu’il
s’agit d’une usurpation prétendue commise depuis la loi du 10 jnin
. 1 /9'J, jusqu’à celle du g ventose an 12.
V o ici en effet comment s’exprime l ’avis interprétatif du 18
juin 180g, rapporté au bulletin 2 4 g , u°. 4790.
« L e Conseil d ’Etat, q u i , d ’après le renvoi ordonné par S. M ., a
entendu le rapport de la section de l’intérieur sur celui du
ministre de ce département, tendant à faire décider si ces usurpations de biens communaux do iven t, comme les détenteurs de
ces biens, en vertu de partage, être poursuivis en éviction devant
le conseil de préfecture ;
» V u le décret impérial du 12 juillet 1808, rendu p a rla comy> nnine de Q u cssy, département de l’Aisne;
» V11 les articles 6 et 8 de la loi du 9 ventôse an 12;
» Est d ’avis que toutes les usurpations de biens com m u naux,
depuis la loi du 10 juin 179^, jusqu’à la loi du 7 ventôse an 12 , soit
q u ’il y ait eu, soit qu ’il n’y ait pas eu de partage exécuté, doivent
être juges par le conseil de préfecture, lorstpi’il s’agit de 1 intérêt
île la commune contre les usurpateurs.
» Et qu’à l'égard des usurpations d’un copartageant, vis-a-vis
» d’un autre, elles sont du ressort des tribunaux. ))
»
))
»
»
»
V o y o n s à présent si l’ espèce actuelle est bien dans le cas prévu
l’avis du 18 juin 1809.
Et d ’abord lo procès n’ est pas mu entre les copartageans, puis
que la ville de Ilioru se plaint de n’avoir pas fait nombre dans le
par
%
�>/>
( 26 )
partage. — Donc ce n’est pas le cas que le Conseil d'Etat renvoie
aux tribunaux.
A u contraire, i l s’ a g it bien de l'in térêt d'une com m une, comme
dit Je d é cre t, puisque la commune de Riom réclame en masse
contre le partage.
Elle réclame bien contre une usurpation (réelle ou prétendue )
faite après la loi du 10 juin *79^
avan^ celle du 12 ventôse an 9.
— On lit en effet dans l’exploit introductif d ’instance : « Que depuis
» le procès-verbal de 1489, les habilans de la ville de Riom et de
* celle d ’Ennezat ont toujours joui en commun dudit terrain ju s» qu ’en 1 7 9 3 , que les habitons d ’Ennezat s’en sont emparés exclu» sivement. )>— Durant le p ro cè s, les habilans de Riom n’ont cessé
de prétendre ( à la vérité sans le prouver) qu’ils avaient exercé le
droit de p âturage prom iscu jusqu’à ce que la commune d ’Ennezat
partageât ce terrain entre ses habilans, par suite de la loi du 10
juin 1795.
D onc le litige introduit par les habilans de R iom tendait bien
expressément à faire restituer la commune de R iom contre une
usurpation prétendue faite depuis la loi du 9 ventôse an 12.
Donc la matière était a dm in istra tive, et ne devait pas être jugée
par Yautorité ju d ic ia ir e , pas plus quant à la question de p r o p r ié té ,
que relativement à la demande d ’un nouveau partage.
Ainsi les jugemens de première instance du 28 décembre 1809 et
du 7 février 18 io furent bien manifestement en contravention avec
le décret impérial du 5 juin précédent.
E l pour n’avoir pas annullé ces jugemens pour incom pétence,
l’arrêt dénoncé s’est rendu propre la contravention, et doit être
çassc de ce chef.
JIm\
MOYEN
DE
CASSATION,
P r is de ce que les ju g e s de Jiiom devaient s'a bsten ir.
Excès de pouvoir. Abus révoltant de la puissance de ju g er,
nul n’est juge dans sa propre cause : les juges , en ce c a s , étant
obligés de se récuser sous peine de faire fraude à la loi et d êtro
4
�( 26 )
exposés à l i prise à partie , aux termes des articles 38 o e t 5 o 5
C. pr. civ. — Contravention d’ailleurs aux articles i 8 e t i 9 de la sec
tion 5 de la loi du i o juillet i y y 3 ,
M M , les juges de U iom n’ont pu se dissimuler qu’une action
intentée par la commune do Riotu intéressait directement et
individuellement tous les habitans de Uiom ; que si la co m
mune d ’ Knnezat était dépouillée de la propriété exclusive des
trois Cents arpeus de terre dont il s agit , et si 1 on en faisait
un nouveau partage entre les deux com m u nes, à raison du nombre
des feux , il arriverait que la ville de Uiom , douze lois plus
peuplée i[iic celle d’ E n n eza t, aurait les onze douzièmes de ce
communal ; qu’ ainsi, et par suite, chaque habitant de Rioin (sans
excepter certainement les membres de l’ordre judiciaire) gagnerait
à cette décision un champ , plus ou moins grand , mais tou
jours assez pour que cc soit une propriété a cqu ise à chacun des
ju g es, en vertu de son propre jugement.
A la vérité , les fastes de la jurisprudence ne nous offrent pas
d ’exemples de récusation ou A'abstention de ju g es, dans le procès
de leur commune , sur le motif qu’ils y sont intéressés.
Ai ais la raison en est, dans les cas ordinaires qu etou sles procèssont
intentés pour un but commun ut univci'si ; ce qui est insensible pour
chaque par liculier; — au lieu qu’en matière de communaux essen
tiellement partageables, l’iutcrèl individuel est p résent, a ctif, et
doit motiver une récusation ou abstention; et à cet égard, nous
u’en sommes pas réduits à de simples lai.souncmens.
«
y»
î>
»
»
[/article ii» de la section 5 de la loi «lu 10 juin 179^ porte que
les assesseurs qui doivent assister le juge de paix sont toujours
choies parmi ceux des municipalités du canton, tous intéressés
dans l’ailairc. )> — F.t l'article
porte « que si toutes les municquilités du canton y sont intéressées , le tiers - arbitre sera
nonuné par le bureau de paix du canton le plti&voiî'iu. »
P ou r bien entendre le sens «le ces deux dispositions , il faut se
souvenir qu’en maiièrc do communaux, et touchant la p ropriété ,
l ’article 5 de la nn'iue section r e m o y a il toute contestation à des
arbitres choisis par les parties : ¡1 n’y avait donc de juges non ch o i
sis par les parties que le tiers-arbitre : ch bien ! le législateur 11e
veut pas (pie ce tiers-arbitre puisse être nommé par le juge de paix
ou par des assesseurs qui appartiennent aux communes mteressées.
%
�( 37 )
P eut-on dire plus clairement qu’il proscrit tontes décisions de
juges intéresses , de juges habitant les communes litigantes ? et si la
loi du 9 ventôse an 4 a créé des tribunaux à la place des arbitres
établis p a r la loi du 10 juin 179a , ne s’ensuit-il pas que ces tribu
naux doivent observer les règles établies pour les arbitres ; qu’ils
doivent donc 11e pas rester juges des questions de p ropriétés de
com m unes, dans les procès qui intéressent les communes auxquelles
ils appartiennent ?
Il y a donc ici violation du texte de la l o i , et de toutes les con
venances judiciaires.— La contravention em p orten t///^ , puisqu’il
s’agit de règles de compétence : Non est m ajor defectus tjucim defe c lu s potes la lis.
III*.
M O Y E N
DE
C ASSATIO N .
Contravention à la loi du a» p r a ir ia l an 4 , en ce que la Cour
d ’ appel a f a i t droit sur une action p ro h ib é e , « raison du temps
où elle f u t intentée.
V o ici le texte de la loi :
Art. I " . — « Il est sursis provisoirement à toutes actions et pour» suites résultant de l ’exécution de la loi du 10 juin 17 9 J , sur le
« partage des biens communaux. »
t>
j\rl> H. — « Sont provisoirement maintenus dans la jouissance
les possesseurs actuels desdits terrains. »
Ainsi la loi du 21 prairial an 4 défendait bien positivement à la
commune de Iliom d ’intenter une action qui eût pour objet d’annullcr un partage de communal fait en exécution de la loi du 10 juin
1 7()5 .
T e lle est cependant l’action intentée par la commune de Riom ,
le 11 pluviôse an 12.
[/action porte sur des m a rais......... p a rta g és........... .. par suite de
la loi du 10 juin 17^0. — i-a commune demande d ’en êtic reconnue
p ropriétaire , d’en être remise en possession , <jue les fiuits lui
soient restitués , q uc provisoirement le communal revendiqué soit
mis sous le séquestre.
�( 28
On no. peui mieux caractériser l’espèce d’acùon prohibée par la
loi du 21 prairial an 4 .
Pourquoi donc les juges l’ont-ils admise?
L ’arrêt dénoncé en donne trois raisons qn’il faut examiner.
Obt. i re. — « A tten d u , est-il dit, que cette fin de non-recevoir
» n’a pas été proposée in lim ine lilis . »
Rjîp. Mais il ii’y a nécessité de proposer in lim ine î i t i s , que les
nullités d’exploit et de procédure ( 1 7 3 , Cod. proc. civ. ) — O r , ici
la nullité ne tient pas à la régularité de l’exploit, la nullité se rappor
tait à la nature de l ’action ; elle étaitp érem p toire; elle pouvait être
proposée eri tout état de cause.
O b j. 2e. — ce Attendu que la loi du 21 praiqal an
4 ne
s’applique
7) qu ’aux actions en partage des communaux , Ot. non aux demandes
» en revendication de la propriété ou désistement des co m m u » naux. »
—
Nous prenons acte de ce que la Cour d’appel reconnaît
qu’il s’agit ici bien réellement d ’une demande en revendication de
la propriété, ou en désistement de co m m u n aux.— Plus loin nous
tirerons avantage de ce fait constaté.
11 nous suflit de dire ici que la distinction imaginée par l ’arrêt
dénoncé est littéralement proscrite par les articles 7 et 8 de la loi du
g ventôse an t a , ainsi conçu :
« Quant aux actions que des tiers pourraient avoir à intenter sur
ces mêmes biens (partagés depuis la loi du 10 juin i 79^), le sursis
prononcé par la loi du 2 1 prairial an 4 , à toute prohibition et aclion résultant de la loi du 10 juin 1 7f)5, est levé. — Lu conséqucnce , toutes personnes prétendant des droits de propriété sur
l e s biens communaux partagés ou occupés par des p a r t i c u l i e r s ,
comme biens communaux, pourront se pourvoir par-devant les
tribunaux ordinaires, etc. »
Ainsi les actions d o n t la loi du 21 prairial an 4 prononçait le
sursis, sont les même» <[UC celles dont la loi du 9 ventôse an l a
autorise la poursuite en levant le sursis. — O r , la loi du 9 ven
tôse an 13 autorise les poursuites des personnes p réten d a n t des
droits de propriété su r les biens com m unaux p a rta g é s, — do»«
»
3)
j>
)>
»
v
»
%
�( 2 9*)
la loi du 21 prairial an 4ayait sursis précisément aux actions et re ve n
dications delà propriété ; — donc l’arrêt dénoncé prêle à la lui un sens
littéralement contraire au vœu du législateur.
Obj. 5e. « la demande considérée comme conservatoire ne pour*)> rait cire attaquée de nullité ».
R é p . — Il est difficile de concevoir quel besoin la commune de
Riom pouvait avoir de mesure conservatoire sous l’empire d’une loi
qui lui défendait d’agir. — Cuntrà non valentem ogere non curril
prœ scriptio. — Aussi l ’art. 8 de la loi du () ventôse an 12 déclaret-il positivement qu’aucune prescription n’a co u ru , dans celte
matière , depuis la loi du a i prairial an /(.•
A u surplus, quelle que soit l ’ intention dans laquelle une action
a été fo rm é e , les juges ne peuvent l’accueillir, si elle l’a été
au mépris de la loi qui défendait expressément de l’exercer.
Il est vrai que, formée plus tard, c’est-à-dire après la loi du g ven
tôse an 12, elle eût été autorisée par la lo i, pourvu q u ’elle eût res
treint la demande en restitution cles fr u its dans le sens de ia loi
du c) ventôse an i u. — Mais que s’ensuit-il de là ? que la ville de
Riom devait se départir de l ’action intentée, et en intenter une
nouvelle.
La règle est que ce"qui a été fait au mépris d ’une loi prohibitive
est n u l, de nullité absolue.
Nous admettrons si l’on veut q u e , si la commune de R i o m , par
des conclusions expresses , s’était départie des conclusions de son
exploit du i l pluviôse an 1 2 , et en avait pris de nouvelles aux
mêmes fins, mais avec restriction, quant aux fr u its : si elle avait,
pour ainsi dire, renouvelé, purifié, et surtout restreint, son action,
il serait possible de soutenir que Yaction véritable prend sa date de
ces nouvelles conclusions, que la commune de Riom aurait pu les
former sans un nouvel exploit : que lesjuges auraient pu prendre ces
conclusions nouvelles comme fondement du p ro cè s, c l y l’aire
droit; — mais ce n’est pas ce qui a etc lait. — L a commune de Riom
n’a cessé de soutenir la régularité et le mérité de son action intentée
le 1 1 pluviôse an 1 2 , sous l’empire de la loi du ui prairial an
même quanta la demande en restitution des fruits, depuis le 11 plu
viôse an 1 2 : c’est cette aclion-là même qui a été accueillie p*i Ie*
juges de première instance et par l ’arrêt dénoncé.
�( 3o )
■
' L e jugement est réputé régulier et efficace, depuis l ’exploit introductif d instance, à ce point que c’est à partir de ce jour 11 pluviôse
an 1 2, que la commune d’Ennezat est condamnée à restituer les fr u its
et à payer les dégradations.— Impossible de dire plus clairement que
l ’on donne à une action intentée au mépris de la loi, un ejfet p écu
niaire prohibé par la loi. — C ’est bien ouvertement avoir violé la
loi du 21 prairial an 4 ; tel est le troisième moyen de cassation.
IY *.
M O Y E N
DE
CASSATION.
L ’action étant prohibée à raison des personnes contre qui elle
était dirigée , la commune d’ Ennezat ne devait pas être l’objet d’une
action en revendication, à l’égard d ’une propriété qu ’elle ne pos
sédait pas, et sur laquelle elle reconnaissait n’avoir aucun droit de
propriété commune { ut universi).
L a commune de R io m , par son exploit introductif d ’instance du
ï l pluviôse de l’an 1 3 , a dem andé, coulre la commune d ’Ennezat,
« d ’être gardée cl maintenue aux droits de p ropriété et p o ssessio n ,
» concurcmment et par indivis avec les habitans et commune d ’En» n e z a t , du terrain ci-dessus désigné;
» Q u ’il en soit ordonné le partage entre les parties, à l’effet d ’en
n être attribué auxdits instans la partie à eux revenante ;
£
»
»
yt
» Q u e les habitans d’Ennezat soient condamnés à la restitution
d e s f r u i t s ..... depuis leur usurpation en i 7Ç)5....... et des in tér êts,
et des d ég ra d a tio n s, pour les jouissances et dégradations faites
jusqu’à ce jour, et qui pourraient avoir lieu par la suite ;
» Q u e , par provision, les fruits et récoltes soient séquestrés. »
11 serait difficile de mieux caractériser une action rée lle , une
revendication.
Pourquoi tlonc la commune de Riom s’adrosse-t-elle à la com
mune d ’Ennezat i
C ’e s t , dit l’e x p lo it, parce que la commune d ’Ennezat s’est em
parée en 179-J> (époque de terre u r), du communal revendiqué.
La commune de Riom feint donc d ’ignorer (en tout cas on lui
a appris ) , que le communal reveudiqué a été partagé on l’au 4
%
�( 31 )
(ép oqu e oi'i il n’y avait plus de terreu r), que le ci-devant com m u
nal a etc converti en i o 55 propriétés particulières, devenues au
tant de jardins, ou d ’enclos, ou de manoirs différens; — qu’elle
doit donc s’adresser aux i o 35 individus possesseurs actuels de ccs
propriétés particulières ( habitons ou non habitons de la commune
d ’Ennezat.)
Sur ce point., les principes sont certains et littéralement écrits. •
L e titre 6 du livre 4 des instiluies de Juslinien , trace sur les a c
tions des règles aussi sages que claires. — 11 définit d ’abord ce que
c ’est qn'action en général, puis il les di\ise en personnelles c l
réelles ; il appelle personnelles, celles qui naissent des contrats et
des d é lit s ,‘puis il vient aux actions ré e lle s, et. s’exprime ainsi . . .
A u t cit/n eo agit qu i nullo ju r e ei obligatus e s t , m ovet lamett
a licu i de a liq u d re controver^iam qito casu p rod itæ activités in
rem sunt veluti si rem corporalem possideat quisquatn T iliu s
suant affirm e t,possensor aulent dom inum ejus se e u e dicat : nam
s i T itiu s suarn esse intendat in rem actio est.
L e s habitons de Riorn n’excipaient point d ’une obligation sousd ite par ceux d ’Ennezat; il excipaienl de leurs litre de p ro p riété■ils
réclamaient des fr u its au passe, une mise en possession à l’avenir,
un séquestre au présent; — voilà donc bien ce que la loi qualifie
une action réelle.
La loi elle-même du g ventôse an 12 , régulatrice de la matière ,
dit positivement que toutes les contestations relatives à l ’occupation
des biens communaux, sont des actions su r ces biens (art. V 7 ,
et 8 ) , c’est-à-dire des actions réelles.
Or , une action réelle était-elle recevable contre la commune
d’Ennezat, alors qu’elle disait et prouvait n’être plus en p o ssessio n ,
depuis le 4 nivosc de l’an 4 ?
Entre les divers textes de la l o i , choisissons les plus décisifs.
O fjicium aulem ju d ic is ( dit la loi 9 il', de rei vindicalione ) ,
hoc erit ut ju d t x in sp iciat an jîei/s p o s s i d u j t .............. ubi erti/rt
probaui rvm\meam esse necesse habebit po ssesso h ~RT.sriTur.iiv.
Donc toute restitution de la chose revendiquée doit être d e
mandée uniquement contre le possesseur.
Et cela est tellement vrai, que quand tout autre que le possesseur
voudrait soutenir à ses périls et risques l’action en revendication r
uéam noiuslc p o ssesseu r devrait être mis eu .cause un peu plutôt ,
�( 3a )
un peu plus tard ; si is g u i o btu lit se f u n d i v in d ic a tio n i, da m n alus est, n ihilom in u sà p ossessore, r e c tè p e titu r : sicu t P e d iu s ait.
( L . 7 id . )
11 y a p lu s , c’est qu ’il ne suffit pas même d’être p ossesseur au
moment de la contestation , il faut encore l’être au moment de la
décision ; sans c e la , l’action en revendication , recevable d’abord ,
aurait fini pour ne plus l’être : P o ssid ere autem a liq u is debet, utiqu è
et litis contestatæ tem pore, et quA res ju d ic a tu r . (L . 2 7 , § i , ff id.)
Enfin la possession est tellement décisive par la régularité de
l ’action en revendication, que cette action peut être utilement dirigée
même contre ceux qui possèdent à titre précaire. ( L . g , ff id. )
V o i l à , sans doute , pourquoi le législateur veut que toute action
réelle soit portée devant le juge du lieu o ù la chose est située.
( 6 9, C. P. C. ) — Sans cela il eût renvoyé le demandeur devant le
juge du défendeur, en vertu d e la r e g lv a c to r s e q u itu r fo r u m rei.
Quels motifs ont pu faire repousset la fiu de non-recevoir , et
décider qu’une action relative à Y usurpation , a la restitution , au
séquestre et au p a rtag e des communaux, pouvait être dirigée contre
la commune d ’Ennezat q u i, u tu n iv e r s i, était complètement étran
gère à la possession de ces communaux ?
O b j. i re. — U n premier motif ( allégué par la commune de Riom )
a été puisé dans la répugnance de scs conseils à faire donner
mille trente trois assignations. ( V . le M émoire des habilans de
R io m , page 4 ^ .) — Reste, à savoir s’il suffit d ’éprouver une ré
pugnance de délicatesse pour se dispenser d’exécuter la loi.
La commune de Riom n’a pas voulu donner mille trente-trois
assignations; elle a donc voulu que cc soit la commune d ’ E n n e z a t
q u i, a p r è s sa condamnation, fasse elle-même i o 33 p r o c « ; » , pour
exercer son recours contre chacun des détenteurs, qm» provisoire
ment, fasse tomcslcsni>a/iC<?s et e n résultat sohgcirant de toutes les
non-valeurs. — S’il en était ainsi, la délicatesse des habitans de
R iom ne serait pas du tout bien entendue.
Si la commune do Riom a voulu qu’un seul jugement lui servît
à opérer l’expulsion des I0i>5 détenteurs ; en cc cas, elle n’aura fait
que recule*'la difficulté; car chacun pourra très-bien s’opposer à
�fé é
( 33 )
l’exécution des jugemens obtenus contre la commune d'Ennezat;
chaque possesseur d’Ennezat pourra dire que sa commune ne le
représente aucunement dans les actions relatives à ses propriétés
pa rticulières. — A plus forte raison l’exception sera puissante ,
dans la bouche des anciens habitans d’Ennezat q u i , depuis l’an 4 ,
ont établi leur domicile hors de la commune d ’Ennezat; et des
étrangers de la commune d ’E n n ezat, q u i , depuis l’an 4 , ont
a cq u is une partie du marais dont il s’agit. — Quelques parcelles
ont ser\i à constituer la dot des enfans ; il en a été vendu et
échangé.
Impossible de lutter utilement contre la nature des choses et contre
la loi; l’une et l’autre voulaient que les possesseurs des terres revendi
quées fussent l’objet de l’action en. revendication : il a plu à la com
mune de Kiom d’en agirautrement;la conséquence inévitable sera de
n’avoir rien obtenu, et d’a\oir mérité la censure de la lo i, même
en supposant que ce soit par d é l i c a t e s s e «ju’ellc s’est adressée à la
commune d’Ennezat, ut u n iv e rsi, au lion de s’adresser à chacun
des possesseurs actuels des terres revendiquées.
Notre cas a élé prévu par f 'in n iu s, après Jason. — Q v i d , est-il
dit, si la chose revendiquée a été divisée entre mille maîtres, per
m ille m a n u s, contre qui faut-il agir ? Et la réponse est, a d v e n u s
quem eum que q u i quo tempore agitur rem pos&idet ( i u Institut. ,
lib, 4 3 tit. 6,11“. io. )
T outefois, n ’insistons pas sur cette objection. — L ’arrêt dénoncé
et le jugement confirmé en ont fait justice, en ne l ’adoptant pas.
»
»
»
»
OlîJ. 2P. — cc L e jugement interlocutoire ( dont l’arrêt a adopté
les motifs ) a décidé que l ’action en revendication avait dû être
dirigée contre la commune d ’Ennezat, attendu que la demande
des habitans de Kiom a pour objet des communaux prétendus
indivis cl promiscus entre les deux villes, et le partage d 'iceu x. »
L e mémoire cité de la commune de Riom (pag. 4 ^ ) f j 0111®00
m o tif: « Q u c ]cs communaux appartiennent en "énéral à ions les
» habitans, et »’appartiennent à personne en particulier : pluribus
» ut u n iv ersis, nu llis ut sin g u lis. »
5
�( 54)
D ’oû l’on conclut! par nécessité de conséquence , qu’il fallait s’a
dresser à la commune ut univrsi.
R é p . — Lorsque l’exploit fut donné, on y fit semblant de croire
qu’il s’agissait de communaux encore in d iv is ; — mais depuis que
la commune d’ Eunezat eut déclaré n’être pas en p o ssessio n , et eut
indiqué les mille trente-trois particuliers qui possédaient depuis
l’an 4 * cn vertu d’un partage fait conformément au \œu de la l o i ,
certainement il ne s’agit plus d è s-lo r s de communaux prétendus
in d iv is entre la commune d’Ennezat et celle de Riom.
D ’ailleurs, il ne suffit pas q u ’un demandeur prétende que le d é
fendeur est cn p ossession de l’objet revendiqué; il faut encore que
le défendeur soit réellement et de fait en possession; sans cela,
l’action en revendication dirigée contre lui n’est pas rccevable......
J u d ex in sp icia t an reus p o ssid ea t, ( L. f) if. id. )
En point de fait, le jugement confirme a reconnu que la co m
mune ne p o sséd a it plus ut u n iv e r s i, lors de l’assignation; — donc
l’aclion en revendication devait être déclarée non-recevablc.
O nj. 5 e. — L e jugement interlocutoire se fait un motif de ce
a que la prétention actuelle de la commune d’Ennezat ne peut porter
» atteinte à la procédure déjà faite. » En d ’autres term es, « de ce
» que la lin de non recevoir n’a pas été proposée à litnine Utis. y>
R i ’;i\ — L a décision serait fon d ée, en principe, si la commune
d’Ennezat avait proposé une exception piise d'un e n u llité
d 'exp lo it ou de procédure (art. 170 , C od . proc. civ. )
Mais la commune d’ Ennezat proposait une exception pérem p toire,
la plus décisive de toutes les exceptions, le défaut de détention «le
la chose revendiquée. L ’cxccplion était donc admissible, quoique
non proposée à litnine l i t i s ...........; d’autant (tins que , même à
litnine litis y la commune d’ Ennezat avait conclu vaguenumi à ce
que la commune de Riom lut déclarée uon -recevu ble, ou m a l
fondeeA u surplus, l’ob'p'.cnoii est littéralement résolue par les lois 7
et 2 7 , § 1 " . , if. de rei v in d ica tio n e, qui veulent que l’action soit
dirigée contre le p ossesseur a c tu e l, quand même l’objet revendi
qué aurait changé de main depuis la contestation en cause ; cl encore
«
�>
( 55 )
quand même tout autre que le possesseur défendrait à la demande
eu revendication. — L a loi 2.5 est peut-être plus expressive encore :
n ec videtur se h ti obtu lisse q u i discessit.
O k j. 5 e. — L e jugement définitif porte que « les hahitans de R io in
y> n’ont pu se pourvoir directement contre les tiers - détenteurs ,
» parce q u ’il fallait auparavant faire juger avec les hahitans d ’E n )) nezat, collectivement, leur droit de propriété indivise, et faire
» fixer par un partage la portion qui doit leur appartenir en propre. »
R k p . — Quoi ! les tiers-détenteurs n’auraient pas eu qualité pour
contester l ’action de Ja commune de Riom revendicatrice, ou pour
établir en sens contraire les droits e xclu sifs de la commune d ’Ennezat, leur ayant-cause ! Cette doctrine est tellement nouvelle,
qu’on ne saurait trouver aucune l o i , aucun auteur qui la combat
tent, parce que jamais encore on ne s’ était avise de la soutenir.
»
»
»
»
»
ObJ. G0. — On pourrait dire que cc Ja commune de Riom n’a
demandé contre la commune d ’iinnezat qu ’uric indem nité égalé
aux jouissances passées, présentes et fulnrcs, dont la commune
de Riom se trouvera privée par Je fait de la commune d ’Ennczat
( id. pour les dégradations) ; que c ’est-là une action non r é e lle ,
mais personnelle. »
R É r . — Nous voyons en efFet q u e, pour justifier l ’action intentée
contre la commune d’Ennezat, on s’est elforcc de rassembler des
mots de plusieurs sortes, où l’on peut trouver toute chose au b e
soin. Nous concevons q u ’en bien disputant, on pourait arrivera en
faire sortir une action eu in d em n ité, pour responsabilité.
Si la Cour pouvait trouver ici une action personnelle en g arantir,
alors le moyen de form e se convertirait en moyen d c fo / id , et offri
rait une contravention à l’article 10 de la loi du g venlosc au 1 2 , en
cc que la loi n’a pas voulu (pie les actes de partage faits par Ja
commune entre les divers hahitans, donnassent lieu à aucun re
cours contre la commune en masse.
Ma is l’objection est suffisamment résolue par cette observation
décisive, <pie l’exploit introductif d’instance présente l’action d’un
propriétaire se plaignant d ’ usurpation , réclamant Ja p ossession,
et provisoirement le séquestre : voilà tout le caractère de Riom
0
�\*\
( 36 )
,
.
d’une action en revendication. — 11 est également vrai que, lors de
l’interlocutoire, on n’a point prétendu que-l’action fût personnelle ;
que le jugement interlocutoire a lui-même bien reconnu que l’action
était réelle. — 11 est constant surtout ( et nous en avons déjà fait
l’observation) que l’arrêt dénoncé a reconnu, littéralement q u ’ il
s ’a g issa it bien réellem ent d ’ une dem ande en revendication de la
p r o p r ié té , ou en désistem ent de com m unaux.
D onc il ne faudrait pas nous dire à présent qu ’il s’agissait A'indem
n ité , de responsabilité par forme d ’action p ersonnelle.
L ’action était bien réelle. — D onc pour n’avoir pas été dirigée
contre le p o ssesseu r, elle était non-recevable ; — donc a\oir re
poussé la fin de n o n -r c c e v o ir , c’ est avoir contrevenu à la loi. —
; 4e. moyen de cassation.)
Y*,
e t
Y I e. M O Y E N
DE
C A S S A T IO N .
y fu fo n d . — S u r le p rin cip a l.
Ici nous reprochons à l’arrêk dén o n cé,
D'avoir accueilli la demande de la commune de R i o m , encore
q u ’il fût constant et convenu qu’elle n’avait pas eu une possession
réelle et de f a i t , au 4 août 1789;
E t d ’avoir refusé à la commune d ’Ennezat de donner effet à une
jircscripiion fondée sur la possession réelle et de f a i t , à titre de
propriétaire exclusif, quoique reconnue avoir eu lieu depuis 3 o et
4 o ans, et bien davantage.
Nous reprochons à l ’arrêt dénoncé d ’avoir commis cette double
erreur, en partant du faux principe, qu’ il suffit que les deux com
munes de Riom et d ’Ennezat aient été com m unistes en
à
titre de p â turag e, pour qu’elles soient, quatre siècles aj>r«s, com
m unistes a titre de propriété p a rfa ite.
Nous reprochons à l’arrêt d é n o n c é , d ’avoir fermé les yeux sur
cinq titres divers, postérieurs à i 45 ü , dont chacun a suffi pour faire
cesser l’indivision, et conférer à Ja commune d ’Eniiezat un droit
E x c lu s if.— Coutume locale :p a rta ge : culture : loi générale : juge*
nent.
�( 37 )
Voilà cinq titres divers, qui tous et chacun, depuis i/|3 6 , ont pro
clamé une propriété exclusive au profit d’Ennczat; — cependant
l ’arrêt dénoncé n’a voulu voir que le litre d ’indivision de i ¿*36 ; —
il a constamment cru que ce qui avait été acquis par la commune
d’ Ennezat se trouvait par cela même acquis par la commune de
Riom.
Et ce principe erroné a étc poussé à un tel point d ’exagération,
qu’en résultat, l’arrêt dénoncé a conféré à la commune de Riom
un droit de p ropriété p a r fa ite , en vertu d ’un titre qui lui avait con
féré, il y a quatre siècles, un simple droit de pâturage ! — Et de plus,
la commune de Riom a été jugée devoir profiler, comme celle d’E n
nezat, des lois de révolution qui ont frappé les possessions fé o d a le s
du seigneur d ’Ennezat.. . et devoir profiter aussi d e l à chose ju g é e
qui était acquise exclusivement au profit de la commune d ’Ennezat.
V o i l à , il faut en convenir, de bien étranges effets attribués à un
titre antique d ’indivision.
Nous devons remarquer, en passant, que si un titre de partage
in d iv is , du quinzième siècle, peut avoir de tels effets au dix-neuvième siècle, il n’y a pas de raison pour s’arrêter : on peut remonter
à l’enfance du genre humain, et s’étendre jusqu’à la fin du monde:
— ainsi, malheur à tous les propriétaires présens cl futurs contre
qui les descendons d'Adam ou de Noë pourraient justifier d ’un litre
originaire de pâturage prom iscu ! Il su (lira aux revendicateurs de
ne demander que m oitié dans la propriété a ctu e lle , à litre A'indi
vision pour faire taire tous les genres de titres et de prescriptions
des possesseurs actuels. — N ’est-ce pas là le chemin de la loi
agraire ! !
Donnons afix moyens de cassation la sévère forme d’une discus
sion judiciaire.
V e. M O Y E N D E C A S S A T I O N .
Contravention à l’ariicle 8 de la 'loi du g ventóse an 13 , — qui
exige comme condition première, que tout demandeur en reven
dication de biens communaux justifie de possession ou de litig e , au
4 août 1789. — En ce qu’il est coustantet convenu que la commune
�(58)
n’avait, au 4 août J789, ni p ossession ni p réten tion soumises aux
tribunaux.
V o ic i Je texte des articles 7 et 8 de la loi :
{ A r t . 7 . ) « Quant aux actions que des tiers pourraient avoir à
» intenter sur les mêmes biens, le sursis prononcé par la loi du
» 2 1 prairial an 4 , à toutes poursuites et actions résultant de l’e xé» culion de la loi du 10 juin i 7 g 3 est levé. »
( A r t . 8 .) « En conséquence, toute personne prétendant des
» droits de propriété sur les biens communaux partagés ou occupés
» par des particuliers, comme biens communaux , pourront se
» pourvoir par-devant les tribunaux ordinaires pour raison de ces
y> droits, « la charge cependant de ju s tifie r q u ’ elles ou ceux a u x
» droits de qu i elles se trou ven t, étaient en possession des biens
» dont elles répètent les propriétés avant le 4 août 1789, ou q u ’ à
)) cette époque il y a va it instancu devant les tribunaux p o u r lu
» réintégration, »
En fait, la commune de R i c i n , demanderesse, n’a point prétendu
qu’il y eut instance au 4 août 178g.
Quant à la p ossession , elle a soutenu que jnsques en 179^, elle
a envoyé p aître ses troupeaux dans le communal litigieux, en vertu
du titre de 1 4 ^ -
Toutefois, la commune de Riom est convenue qu’en 1760 ce
communal avait été p artagé à titre de triage entre le sieur R o llc t,
ccssionnaire du seigneur, et la commune d E n n ez a t,
Q ue depuis 17O0, le ccssionnaire du seigneur avait cu ltiv é son
tiers à titre de p ro p riéta ire, en vertu du triage ;
Q ue depuis 17G0 , la commune d’Ennczat avait également
posstUli- les deux autres tiers à litre de p ro p riéta ire, ™ vertu du
même niage.
D e la part de la commune d ’.Ennezat, il a été soutenu q u ’elle
avait toujours posséda -, iitrc de propriétaire e x c lu s if ; qu ’elle avait
pris en 17Ü4 un arrêté tondant à partager les (leux tiers entre ses
liabitaiis. *— De plus il a été nié que les babitans de R iom fussent,
au 4 août 178 9 , en possession de faire pâturer leurs bestiaux dans
le communal litigieux.
�( 59 )
Surtout elle a soutenu q u e , si les bestiaux de quelques proprié
taires de R io m , voisina du communal d ’Ennczat, avaient été tolères
à paître dans le com m unal, c’élaii à titre de metrehage ( 1 ) , ou bon
vo isin a g e , sans aucun trait au droit de propriétaire.
L e s faits étant ainsi articulés de part et d ’autre, les juges n ’ont
rnis aucune importance à constater le fait de p attirage de la com
mune de Riom ; ils ont senti que la possession de pâturage , fondée
sur un titre de l 4 3 6 , constitutif d ’une simple servitu d e, n’ était pas
la possession à titre de propriétaire exigée par l’article 8 de la loi
du 9 -ventôse an ta.
La Cour d ’appel ( car le tribunal de première instance ne s’éuût
pas occupé de la question)} la Cour d’appel est partie de ce fait, que
la possession à titre de ¡propriétaire était réellement et de f a i t , au
4 août 17Ü9 , dans les mains de la commune d’E im e za t, pour deux
tiera, et du sieur Rollet, ccssioimaire du seigneur, pour un tiers.
Mais elle a décidé en point de droit, que la commune de R io m ,
dem anderesse, pouvait se prévaloir de la possession de la commune
d’Ennezat, défenderesse, et même de la possession d u sieur Rollet
( a u j o u r d ’h u i r e p r é s e n t é par la commune d’Emiezat. )
Les juges d ’appel ont trouvé celle décision si simple, sur le p re
mier c h e f , relatif aux deux tiers possédés par la commune' d ’Ennezat, qu’ils n’ont pas pris la peine de l ’énoncer formellement : mais
011 voit que c ’cst leur entente habituelle -, que c’est un principe sousenlemlu quand il n’est pas exprime.
Il n’ y a de décision expresse que sur le tiers possédé au 4 août
1789 , 'par le sieur Rollet; — voici comment l’arrêt s’exprime :
« En ce qui louche la fin de non recevoir résultante de l’article
»> 8 de la loi du () ventôse an 1 2 ; — Attendu que les lois de J792
p et i ?<)3 ont rendu aux anciens propriétaires tous les droits de
)> propriété ei de possession dont ils avaient été dépouillés parl’cxcr» cice du droit de triage ; — et qu’ainsi les habitans de Riom et
V d’Knnezat, copropriétaires du liers du communal délaissé à Ilollft,
» par le traité du 10 juin 17G0, sont présum és avoir par ledit
( 1 ) Co mot m archage est consacré par la co u tu m e d’A u v e r c n e , titre 17 ,
art. 2- — l'CS co m m entateurs ne son! pas d’ accord sur In véritable acception '•
niais tous reconnais sent <jue c’ est u n droit moins étendu que ltf droit d" pti tarage
dont il est question dans l ’article premier du m êm e litre.
�lío
(4o)
)) R o llet continué Ies p o ssessio n s, et par conséquent doivent être
» regardes comme possesseurs avant 1 7 8 9 , et en vertu d e là même
» cause de possession. »
P our bien entendre ce co n sid éra n t, il faut se rappeler,
Q ue la commune de Riom part toujours de ce point ( o u les
juges pour elle), que pour transaction de i 456 , il lui fut accordé un
droit de pâturage prom iscu dans les communaux litigieux j
Q u ’elle fut niainteuue dans le droit de pâturage p r o m isc u , en
i 48 g ;
Q ue de 1489 jusqu’à 1 7 6 2 , il y a absence totale de preuves de
possessio7¡ de sa part ;
Q n’en 1 7 5 2 , il y eut procès à fin de triage entre le seigneur se
disant p rop riéta ire, et la commune d’Ennezat seule en possession ;
Qivnprcs liuii. ans de procès , II y eut partage de ce communal
entre les parties litigantes (la commune de Riom n’y étant aucune
ment p artie);
Q u e le sieur R o lle t , cessionnaire du seigneur d’Ennezat, reçut
nu tiers de ce marais, et la commune d ’Ennezat deux tie r s , l ’un
et l ’autre à titre de p ropriétaire e x c lu s if;
Que depuis le partage, le sieur R o llc l défricha et mit en culture
son tiers à litre de propriétaire e x c lu s if ;
Q u e la commune d ’Ennezal continua de jouir des p â tu rag es ; —
désormais à litre, non plus de servitude ou de p â tu r a g e , mais de
p r o p r ié té , et de propriété exclusive.
Eli bien ! voilà l’espèce de possession à titre de propriétaire, et de
propriétaire e x c lu s if ( possession pratiquée par la commune d ’E n
nezat, et p arle sieur R o l l c t ) , que les juges décident avoir équivalu
à une possession de fait de la part de la commune de Riom.
Sur quel fondement la p ossession du sieur R o lle t, et de la c o m
mune il’Ennezal, au 4 août 1 7 8 9 , est-elle réputée la possession de
la commune <lc Kiom?
C ’est parce que son litre de 1 456 lu i donnait un droit de pâturage
prom iscu sur les communaux dont il s’agit.
Suffit- il donc d’une copropriété en 1 456 ( ou même dans l’en
fance du genre Iiumain), pour que le copropriétaire d’alors puisse
être légalement présume possesseur aujourd’hui !
�y * -
(4i )
E t s’il est prouvé que les possesseurs actuels possèdent et ont
p ossédé, à titre e x c lu s if, par suite de lo i, de jugem ens, de con
trats ( comme dans l’espèce), faudra-t-il également supposer qu’il
y a , au profit de l’anlique possesseur, présomption légale de p os
session prum iscue, réelle et actuelle!
E t si l’antique possession p rom iscue n ’élait que l’exercice d ’un
simple droit de servitu d e, telle qu’un droit de p a tu ra g e, ( comme
dans l ’espèce) faudra-t-il que cette antique possession p ro m iscu e,
à litre de servitude ou de p a t u r a g e , opère une présomption lé
g ale, qu ’il y a aujourd’hui possession prom iscue à titre de pyioPRIÉTÉ ! ! !
Nous pourrions ajouter ici qu’en aucun cas l ’abolition d ’un triage
opéré entre le seigneur d’Ennezat et les habitans d’E n n eza t, n’a
pu p rofiter aux habitans de Iliom ;
Que d’ailleurs l’ abolition du triage n’a pn profiter à telle com
mune qui n’a pas réclamé contre , dans l ’espace de cinq ans , à par
tir de la loi du 28 août 1792.
T o u s ces moyens reviendront ailleurs. — Q u ’il nous suffise ici
de ce fa it , c la ir , constant et d é cisif, que la commune de Riom est
reconnue n’avoir pas possédé réellem ent et de J a i t , à litre de
p r o p r ié té , Je communal litigieux au 4 août 1789.
Est-il donc vrai que l’article 8 de la loi du 9 ventôse an 12 puisse
s’entendre d’une possession qui ne soit pas une possession réelle et
de f a i t ; qu’il suffise d ’une possession de droit simplement f i c t i v e ?
Q uel est le sens du mot possession dans le droit en g é n é r a l, et
singulièrement dans la loi du y ventôse an 12 ?
L a p o ssessio n , dans le sens grammatical, est la simple détention
d ’une chose; n u d a i i k i d e t k n t i o . ( L . î a , pp. ff. de acquirenda
v el am it tendu possessione. )
Jusqucs-Ià, on fait abstraction de l ’intention et du droit du
détenteur.
L e détenteur a-t-il intention de garder ( même sans droit ) pour
soi la chose détenue ? alors il y a possession naturelle , possessio
na tura lis. ( L . O7 , p p . f f d f u r t . — L . 1 ,
ult- f f u ti.
o
.s
�( 4* )
poss. j etc. — L .
satisdare cog. )
3 et 4 o , f f . de pign. act, — L . i 5 , §. 1, qu i
Enfin , le détenteur a-t-il intention de garder pour soi la chose
détenue y avec la conviction qu’il a sur elle un droit de propriété?
— En ce cas , il y a p ossession civ ile , ou opérant des effets civils,
p o ssessio civ ilis. ( L . 1 , § g , f f . de v i et vi arm . L . 2 , § 1 ,
f f . p ro hcered. )
« L a possession ( dit l’art. 22228, C . Nap. ) est la détention ou la
» puissance d ’une chose , ou d ’un droit que nous tenons, ou que
» nous exerçons par no us-m êm es, ou par un autre qui la tient ou
» qui l’exerce en notre nom. »
T e l est le langage du droit commun. ■
— Ainsi , lorsque le légis
lateur donne eflct à la p o ssessio n , lorsqu’il la considère comme
une présomption de p r o p r iété , c’ est toujours la possession c iv ile
( e x e m p t e de tous v i c e s ) , c ’est-à-dire la possession de fait, de
bonne l o i , et avec intention de garder pour soi.
E t en e f f e t , c’ est bien la possession réelle et de fait q u i , dans
l’origine, fonda le droit de propriété, q u i , de nos jo u rs, en est la
présomption , qui doit toujours opérer les prescrip tions , repos du
monde.
La seule extension ou développement à donner au p rin c ip e ,
c’ est que chacun puisse s’aider do la possession réelle de ses a y a n sc a u s e , de ceux qui le rep résen ta ien t, qui furent ses a uteurs.
( 2235 , C. Nap. )
O r , l’arrêt ne dit point que la commune de Riom ait succédé
aux droits de la commune d ’Enn ezat, ni du sieur R o llct ; — d o n c ,
point (Mayanl-cause , point de rep résen ta tion ; — d o n c , la pos
session des uns ne saurait être réputée la possession des autres.
Y
a-t-il quelque raison de croire que les auteurs de la loi du g
ventose an i a aient donné un autre sens au mot possession ? L e
mot p o s se s sio n , «huis {’article 8 <lc la loi du 9 ventose an 1 2 , est
nécessairement pns dans le même sens quo dans la loi du 2 1 prairial
an 4 , qu ’elle modifie. M«is la loi du 21 prairial an 4 , en statuant
sur la possession , parle évidemment d une possession de f a i t .
« Sont provisoirement (dit Farticlc 2) maintenus dans leur j o u i s 7> s a n c e tous possesseurs a c t u e l s desdits terrains. » — C e mot
�ît ï&
( 43 )
possesseurs actuels estcertainementbien là pour possession de f a i t ,
d ’autani qu’eux seuls ont réellement la jo u is s a n c e , eux seuls d éfri
chen t et a m élioren t, comme disait le considérant de la loi.
»
p
»
»
»
»
»
»
»
« Mais peut-on nous dire : s’il est vrai que la possession ne s’acquiert pas sans qu’il y ait un f a i t de possession, elle peut du moins
se conserver par la seule intention. — A c q u ir itu r corpore et
anim o sim u l, retinetur animo solo.— Or, ici pour la commune de
R i o m , il ne s’agissait pas de savoir si elle avait acquis la posses~
sion. Les titres de i 43(5 et i 48 g prouvaient qu’elle l’avait acquise
corpore et anim o ; il s’agissait de savoir si la commune de Riom
avait conservé sa possession ; si, au 4 avril 1809, elle avait une
possession conservée.. D onc il s’agissait d ’une possession düintention ou non réelle. »
RÉP. — Ce principe, que la possession se conserve par la seule
in tention , ou bien q u ’il suffit d ’une possession de d r o i t , sans besoin
de la possession de j a i t , n’est vrai que dans le concours de certaines
circonstances; savoir, lorsque le titre originaire n est pas contesté,
ou lorsqu’il n’y a pas soutien qu’il ait été é te in t, et encore lorsque la
possession du titulaire n’est contrariée par aucune autre possession
e x c l u s i v e , à titre de propriétaire. ( L . 8 , iT. de acq. v e l am itt.
poss.\ L . t 5 5 , ff. de reg. ju r .: 2254 * Cod. Nap. ) En reconnais
sant bien q u ’il n’y avait pas eu possession réelle et de f a i t au 4
août 180 g, on supplée à cette possession de f a i t à titre de p r o
p riété par un titre de p â tu ra g e prom it,eu du îô*. siècle. — Us ont
suppose que ce titre avait conservé tout son ellet, nonobstant toute
loi 011 prescription contraire. — Mais il est évident qu’un lilre de
p ropriété du i 5\ siècle ne prouve aucunement le fait de p osses
sion au 19 0. siècle; — et sur ce point , il y a arrêt de la Cour
régulatrice.
La commune de Trefford revendiquait, co n tre T o n n a r d , un bien
communal, et présentait, un titre de propriété qui paraissait incon
te s ta b le ;— niais Tonnard cxcipa du fait de p o ssessio n , à l ’cpocjue
de la loi du 21 prairial an
Il soutint que celte possession
suffisait pour assurer sa m aintenue en possession. — 5 i ’ioréal
an 5 , jugement du tribunal civil de l’A in , qui maintient Tonnard,
en vertu de sa possession. — La commune se pourvoit en cassation,
et prétend qu ’un titre évident et non contesté a dû l’emporter sur
\
*ir
�une possession quelconque. Tonnard répond que la loi du 21 prai
rial an 4 n e permet pas de s’occuper de propriété et de titres de
p ropriété', q u ’il Faut s’arrêter au fait de p o ssessio n . L e pourvoi fut
rejeté le 20 messidor an xo. ( R e c u e il de S ir e y , t o m . 2 , an 1 0 ,
1 ” . part., pag. 552 . )
I l est donc préjugé, par cet arrêt, que la Cour d’appel de R iom
n ’a pu aller puiser dans un litre de propriété du 1 5R. siècle ( surtout
dans un litre contesté ) un fait de possession au 19*. siècle.
E t , comme dans notre espèce, il y a , de la part de la commune
d ’Ennezat, possession à lilre de propriétaire, exclusivement à la
commune do Riom , comme il y a nombre de litres opposes a son
litre antique et éteint, ce n’est certainement pas le cas de se con
tenter d’une possession d ’ intention.
Term inons donc ici noire discussion du moyen de cassation pris
de la contravention à l’article 8 de la loi du 9 ventôse an 12.
Il est constant, cil fait, d ’après le jugement et l’arrêt, qu’au 4
août 1 7 8 9 , la commune de R iom ( par elle-même ou par un ayantca u se reconnu ) n’avait réellement et de fait la p o s s e ss io n , a titre
de p r o p r iété , du terrain litigieux.
• D o n c , il est constant que l’aclion de la commune de R iom man
quait de la condition essentielle exigée par l’arlicle 8 de la loi du j)
ventôse an 1 3 ; — donc les juges ne pouvaient l’accueillir. —
( 5 e. M oyen de cassation. )
Y K
M O Y E N DE CA SSA T IO N .
Contravention aux lois protectrices de la p rescrip tio n . — N o
tamment à l’article a 17 de la coutume d ’A u v e r g n e , qui est l’art. 1 .
du cliap. 117. —
ce que l’arrêt dénoncé a refusé «le donner cfl'et
à une posbcHaion exclu siv e à titre tic p r o p r i é t é 1 depuis plus de
trente et quarante ans, tandis que la coutume d’Auvergne admet
en toute matière la prescription de trente ans.
En point de fait, il est constaté que le communal litigieux était
possédé, en 1762, ou au moins en 176 0 , par le seigneur d’Enneaat
c l la cominunc, d ’Ennezat ;
�(45)
S a v o ir , wn tiers par le seigneur d ’Ennezat ( ou son cessionnairc )
en vertu d’un triage;
E t les d eu x tiers par la commune d’Ennezat.
II est constant que le tiers du seigneur a été p ossédé par la voie
de défrichem ent et de culture , — et que les deux tiers de la com
mune d ’Ennezat ont été possédés par un paturage exclu sif.
Il est constant que les uns et les autres ont bien jo u i, anim o dom in i , à titre de p ro p riété, — par suite d ’un très-long procès et de
la transaction de 1 7 6 0 : ------- tellement que la commune d ’Enne
zat, (e n 178a a pris une délibération tendante à partage entre ses
babitans. )
En un m o t , il est constant que la commune d ’Ennezat, soit en
nom personnel, soit comme représenlant le seigneur triager, avait
une possession de trente à quarante ans , à titre de propriété
exclusive du marais litigieux.
Donc, il y avait en sa faveur, o\\ présom ption iègale de propriété,
ou a cqu isition constatée du communal litigieux , — donc, en re
connaissant ces faits, l ’arrêt dénoncé n’a pu méconnaître son droit
de propriété, sans contrevenir aux lois institutives de la p r e s
cription.
»
„
»
»
3)
O e J. l re. — » Il est de principe qu’un communier ne prescrit
pas contre son co m m u n ier, et que nul ne prescrit contre son titre.
_Or la commune de Riom était coim nunière du terrain litigicux, selon le titre de i 43 G, titre que les deux communes rc connaissent avoir été le leur ; donc, la commune d’Ennezat n’a pu
prescrire contre la commune de Riom ,
11 est vrai que tout acte de possession équivoque s’interprète
selon le litre antérieur : qu’ainsi le communiste reconnu commu
niste est censé posséder pour lui et sa commune ; comme le pos
sesseur à titre précaire est censé posséder pour le propriétaire, c ’est
pourquoi l’arlicle ü z 5 i , C. Nap., porte : « quand on a commencé
y à posséder pour autru i, on est toujours présumé posséder au
» même litre. . . » E t l ’article 22/,o porte : « qu’on ne peut so
» changer à soi-même la cause et le principe de sa possession. »
Mais quand le prétendu communierprouvc avoir possédé riomine
proprio } quand il a fait acte de possession à litre e xclu sif 3 quand
�C 46 )
il est survenu en sa faveur cause n o u v e lle , telle que lo i ,
.;î ,
ju g e m e n t, etc., dès-lors il est impossible de présumer q u ’il a voulu
com biner posséder pour le communier. Dès-lors une cause étran
gère a changé son litre ; dès-lors il y a possession utile en la pres
cription contre son communier. ( A rg.
C . JN.— I .2 6 , ff. com
m unia dividundo. 81 f», C . N. — Répert. de Jurisprudence,
V . P r e s c r ip tio n , sect. 5 , § 3 , art. 1 ".
U n ferm ier, dit M. D e lv in co u r t, doyen de l ’E co le de Paris,
eût-il été trente ans sans payer de fermage, n’a point interverti,
si on ne le lui a pas demandé. — Mais s’il a refusé de le payer , se
prétendant propriétaire , il a in terv erti, et peut dès-lors prescrire ,
si le \éritable propriétaire ne fait aucune poursuite ultérieure. —
O r , la commune d’Ennczat fit bien davantage en 1 7 6 0 , lorsqu’ elle
fit d e c e communal une distribution entre elle et son seigneur ,
en proclamant que celle de R iom 11’y avait aucune part.
D onc i c i le t i t r e de i 4 5 6 a v a i t é t é interverti. — L a commune
d ’Ennezat en avait nombre d ’autres, tous e x clu sifs de la com m une
de Riom. — Donc le titre de 143 (> avait perdu l’effet d ’empecher la prescription.
O b j . 2*. — « C ’est un point de droit constant en A u ve rg n e ,
» qu ’on n’ acquiert aucune possession ni prescription par le p â tu » rage. » — Voilà pour les deux tiers poisédés par la commune
d ’Ennezat. — « Quant au tiers possédé par le sieur R o l l e t , ces» sionnaire du duc de Bouillon , c’est une possession à titre de
)) triage : donc elle est féodale ; donc elle est sans effet ; — do n c,
» ces deux chefs, point de possession utile à la prescription. »
R é f . — V o i là , certes, des principes étrangers, hasardés avec
une confiance plus étrange encore. — Examinons en détail.
E t d’abord sur la première branche de l’objection portant que
le fait de p acage habituel n ’est pas utile , dit-on , à acquérir
possession ou une prescription.— N ous ne pouvons y apercevoir rien
ni de vrai ni «ie spécieux 5 les règles do notre C ode civil , article
22129, sont que la possession doit être continua et non interrom pue
p a is ib le , p u b liq u e , nOI1 équivoq ue et à titre de p ropriétaire. —
L orsque la possession a ions ces caractères, elle est certainement
utile à la prescriptiou (d e toute chose prescriptible. )
Si ensuite la possession n’opère plus prescription en matière dr
�'ï r ï
( 4; )
servitude non apparente et d is c o n tin u e , ce n’est pas que la
possession soit sans elTet ; c’est parce qu’en ce cas elle n’a pas les
caractères essentiels ; elle n’est pas p u bliqu eet non équivoque.
Quant à la coutume d ’ Auvergne (qui est ici notre r è g l e ) , toute
servitude peut être acquise par prescription ou longue possession ;
comment se ferait-il qu’en matière de pâturage la possession fût
inutile ?
Il est cependant un cas où les auteurs ont dit qu’ en matière de
p â tu r a g e , la possession n’acquiert rien. C ’est le cas où ils possèdent
dans u n e ju s tic e autre que la sie n n e , parce que le statut local crie
contre la possession : ( L e x résistons in ficit possessionem . L . 24 ,
ff. de usuc. )Mais ce n ’est pas de quoi il s’agit ici ; et si cet argument
avait quelque force , ce serait pour établir contre la commune de
R j o m , qu’elle ne pouvait avoir un pâturage en la justice du sei
gneur d’Ennezat.
On pourrait encore dire, avec quelques auteurs cites par C h a b r o l
( sur l’article i ' 1'. du titre 18 de la coutume d ’Auvergne) 1. 3 , p. 5 3 i
et suivantes ) q u ’en matière de pâturage , la plus longue possession
ne fait pas titre ; et cela prouverait qu’il faut un titre pour acquérir
sur le terrain d ’ autrui la possession de la servitude de pâturage.
Mais ce n’est pas non plus de quoi il s’agit ici. — L e ^procès
porte, non sur une serv itu d e, mais sur un droit de p ropriété. —
I c i, nul n’a un titre de p ropriété opposé aux prétentions de la com
mune d ’Ennezat. Lors donc qu’elle invoque une p rescription ac
quise par la longue p ossessio n , elle ne contrarie aucunement la
doctrine des auteurs qui ont écrit sur la coutume d ’Auvergne.
En tout cas, la possession a nécessairement effet, quand elle a
un caractère déterminé, quand elle est vraiment possession. — On
conçoit que le fait do pâturage, momentané, dans des terres vagues,
que nul ne soigne ni ne réclame, qui sont également ouvertes aux
bestiaux de tout le monde, ne soit pas une présomption d ç, p r o p r ié t é ,
parce qu’en ce cas , il n’y a pas signe non équivoque de possession
Mais il De saurait en être de même du fait de pâturage habituel
et e x c lu s if , surtout lorsqu’il a eu lieu par suite d un titre de par
tage, par suite (]e triage et comme copropriétaire, et quand il a
etc accompagné de délibérations publiques annonçant l'intention
de partager ce communal entre les divers liabitans de la commune.
L ’article g de la loi des i 5 et 21 avril 1791 portait que « le»
«.‘ f i
�(48)
» seigneurs justiciers seraient censés avoir pris publiquement pos» session desdits terrains ( vains et vagues ) avant le 4 août 1789 ,
lorsqu’avant celte époque ils les auront, soit in fé o d é s, accensés
» ou arrenlés , soit clos de murs, de liaies ou fossés , soit cultivés
» on fait cultiver, plantés ou fait planter, soit m is à p ro fit d e toute
» a utre m anière y p ou rvu q u ’ elle a it été exclu sive et à titre de
3) p ro p riété ............... »
L ’article 9 de la loi du 28 août 1792 porte que les seigneurs
féodaux seront reconnus propriétaires des terres vaines et vagues,
» s’ils prouvent par titre ou par P o s s e s s i o n e x c l u s i v e , continuée
» p a isiblem en t et sans trouble p en d a n t 40 ans , q u ’ ils en ont la
» propriété. »
Ainsi , m êm e rela tivem en t aux. seigneurs féodaux, contre qui exis
tait une présomption de droit, qu’ils n’étaient pas propriétaires de
terres vaines et vagues, la loi donnait effet à \npossession e xclu siv e,
paisible cl sans tro u b le , quelle qu’elle f û t , si elle émit profitable
et à titre de propriété. — Et l ’on veut que , relativement à une
co m m u ne, en faveur de qui existe une présomption de d r o it, rela
tivement à un communal , sis dans son territoire, la possession p ro
fita b le et exclu siv e soit sans e fle t , parce qu’elle a eu lieu par la
voie du p a tu rag e. — Impossible de réfuter sérieusement un principe
que tout combat, et qui 11c porte sur aucune notion positive du droit.
V oilà doue bien q u e , relativement à la partie de com m unal,
aux deux tiers possédés par la commune d ’ Ennezat, nomirie p ro p rio ,
le fait de p aturage habituel et exclusif, est utile à la prescription.
Quant nu tie rs, défriche et cultivé p a r l e sieur R olletdepuis
1760, l’objection consacrée par l’arrét dénoncé, ou par le jugement
coiifn mé , c’ est « que la possession du sieur R o l l e t , aujourd’hui
)> reprisetiu'e par la co m m u n e, a été la suite d ’un triage : qu 0II0
y> est donc féodale: qu’elle est donc sons clfct. »
Est-il bien vrai, «l’abord, qu’un particulier non-seigneur, acqué
r e u r , à titre on é re u x , de terres acquises par un soigneur, à titre
de triage , n’ait pu les p osséder valablement? est-il bien vrai que la
possession de ce particulier , non scigneur, ait le caractère vicieux
d ’une possession féodale ? — L ’article 5 de la loi du u8 août i 79 a
dit positivement le contraire.
�( 49 )
»
»
»
»
»
))
« Les dispositions portées par les deux articles préccdens , est-ild i t , n’auront lieu (ju’autant que les ci-devant seigneurs se tro uveront en possession aelueUe desdites portions de b i e n , et autres
biens dont les communautés auront été dépossédées;— mais elles
ne pourront exercer aucune action en délaissement si des ci-devant
seigneurs ont vendu lesdites portions à des particuliers non-seigneurs par des actes suivis de leur exécution. »
E t d ’ailleurs quel rapport le triage du seigneur féodal d ’Enneznt
a-t-il donc avec la commune de Riom ? — L a commune d ’Ennezat
a pu réclamer contre son seigneur, parce que la loi du 28 août ] 702
a présumé que ce tri-.ge était l’cflet de rinlluence féodale. O r , le
seigneur d ’Ennezat u’avaitpoint d ’influence féodale sur la commune
de Riom : donc elle ne peut argumenter des lois suppressives de
la féodalité.
C ’est un point de jurisprudence consacré par nombre d’arrêts de
la Cour régulatrice, que « l ’a r t i c l e 8 d e Jn l o i d u ¡¿y ;i0 i n 179 2 , qui
réintègre les communes dans la possession des biens d o n t elles ont
été dépouillées par des c i - d e v a n t seigneurs, n ’a d ’efl'et que contre
les seigneurs mômes des communes réclamantes. ( A r r ê t du 5 p r a i
rial an 11 , contre la commune de Réaumont, recueil de Sirey,
tome 5, 3’ - partie, page 3 2 7 ) .— Arrêt du at> octobre 1808, contre
la commune de V élu ire; id. tome 9 , 1 " partie, page 21. — Arrêt
du 5 avril 1808, contre la commune de llcvingen; id. tom. 8, 1 " . part,
page s 5 9 . —
Ainsi l ’abolition des triages prononcée par l ’article i tr. de la loi
du 28 août 1 7 9 a , quoiqu’elle ait profité a la commune d ’Ennezat
contre ses seigneurs, et relativement à des terres de la commune
d ’Ennezat, n’a aucunement pu profiter à la ville de Riom.
Mais, supposons que l’article 1 " de la loi du 28 août 17g?. ait pu
profiter à la ville de R io m , au moins eût-il fallu que sou action en
nullité de iriage fût intentée dans les cinq ans, à partir de la publication
de cette loi. — T elle est la disposition expresse de l’article i cr.
« E t pour rentrer en possession des portions de leurs biens com » inunaux dont elles ont été privées...., les communautés seront
» tenues de se pourvoir dans l ’espace de cinq ans, par-devant les
)> tribunaux. »
R ien de plus positif.— La commune de Riom n’a point réclam é,
7
�( 5o )
dans les cinq ans, contre lo triage opcré au profit du seigneur d E n n ezat;— donc le triage est, par e lle, réputé valable; — do n c, rela
tivement à la commune de R i o m , la possession du seigneur triager
n’a rien d’illégitim e;— donc la loi ne veut pas que la possession du
seigneur triager d’Ennezat soit réputée la possession de la commune
de R iom .
A in si, de la part de la commune d’Ennezat, et surtout de la part
du sieur R o lle t, il y avait possession utile à prescription.
D onc la prescription devait être admise ; — donc un quatrième
moyen de cassation résulte de cc qu’ elle n’a pas été admise.
V I I e. M O Y E N D E C A S S A T I O N .
Nous partons de ce point constant, d’après l’arrêt que la co m
mune d’ Ennezat p o s s é d a i t à titre e x c l u s i f , du moins à l’ époque où
le procès a commencé. — U e-là nous concluons qu’il y a eu c o n
travention à la lo i, qui veut que la propriété reste au posses
seur, à moins de titre valable contraire; — en ce que le titre de i 43 G
n’était pas un titre v a la b le , par l’exercice de l ’action intentée.
1°. Puisqu’il avait été éteint par la coutume publiée en i 5 io.
2°. Puisque d ’ailleurs, et de sa nature, un titre qui ne confère
qu’un droit de p a tu ra g e, ne saurait être justificatif d’un droit à la
propriété parfaite du terraiu soumis à la servitude de pâturage.
§ i ' r.— Relativement à t extinction du droit des Iiabitans de R iom ,
au pâturage dans la commune d’Ennezat.— -V oici le texte de la co u
tume :
« L es pâturages (dit l’article i fr. du titre 18 ) sont limités en la
Limagnc et bas pays d’ A u vergn e, par justice, en manière qu’il
n ’est leu ni permis à aucun pasturer en aullrny iuslicc : et s’il le
Fait, et le bétail y est tro u vé, et prins pasturant, l’on est tenu
envers le seig neur ju s tic ie r , en l ’am ende de soixante {¡ois,
on laisser le \>éiail pour lo méfait, sinon «pie ledit bétail fût
trouvé paslurant par cas fortuit, ou d’cscliappés, cl qu ’il eût
suite. »
L e principe, consacré par cet article i*'1’. , n’est pas le même pour
le pâturage des montagnes. (A r t. Y . ) — II est d’ailleurs moins ri
goureux , quand il s’agit d ’un simple droit de m archage. ( A n . i l . )
— Mais ces exceptions ne nous regardent pas. — L e communal
»
y>
»
))
»
»
»
%
�( 5i )
litigieux est bien dans la L irnagne d’A uvergne; et le droit établi
par le titre de i 456 était autre chose qu’un simple droit de m arc h a g e , c’était bien un droit de p â turag e. — JN'ous voilà donc bien
sous l’empire de l ’article i er. du litre iB delà coutume d’Auvergne.
Com ment se pourrait-il donc que la commune de Riom eût con
servé son droit de p a tu ra g e, tel q u ’il était établi par la transaction
de i 456 ?
Est-ce qu’un droit de servitude peut continuer d’exister, nonobs
tant la disposition prohibitive d’une loi générale et d ’ordre
public ? ( C h ab rol, tome 3 , page 55 1. )
O b j . i 1®- — On a objeclé que les lois n’ont pas d’effet rétroactif.
— Q u ’une disposition statutaire ne peut détruire l ’effet d’un con
trat. ( page. . . du mémoire imprimé pour la commune de Riom
en Cour d ’appel. )
R ¿ p . — Nous lisons dans C h a b r o l n o m b r e d ’îii réts qui ont refuse
effet à tous usages contraires au statut : est-cc que ces usages
n’étaient pas des p r é s o m p t i o n s de volonté :
Quelle est d ’ailleurs la convention particulière qui puisse avoir
e f f e t , nonobstant une loi d ’ordre public? Quoi! le législateur aura vu
Je germe d’une guerre civile dans l’usage des pâturages promiscus :
il en aura fait la prohibition expresse; et cette disposition impor
tante restera sans effet, dans tous les cas où il se trouve y avoir eu
des conventions contraires !
C ’est gravement blesser l’esprit de la sage maxime que les lois
n’ont pas d’effet rétroactif.
C ’est d’ailleurs s’abuser tout-à-fait, d’opposer ici le titre de i 456 à
la disposition statutaire de î ô i o . — Ce titre était un accord entre
les habitans de Riom et d’ Enriezat sur le droit ou le fait de oomparcuité. — Mais si le législateur a dit [»lus lard que la propriété des
communaux résidait exclusivement dans la personne du seigneur; si
la coutume de i 5 i o a affranchi tous les seigneurs de la Limagnc des
servitudes de paturages exercés sur eux par gens étrangers à la jus
tice; qu’elle force contraire pouvait avoir la transaction de i 456 ?
L a commune <lc Lliom ne pouvait dire au s e i g n e u r d’Ennezat :
« J’ai acquis le droit de pâturage : je Je tiens de la commune
» d ’ Ënnczat. » L e seigneur d’Eimezat eût répondu : Entre vous deux
communes, vous avez pu vous céder mutuellement de vos droits :
�Î-7 V *
( 52 )
mais vous n’avez pu porter atteinte à mes droits de seigneur: votre
acte de 1406 est à mon égard res in ier a lios cicta.
« L a commune de Riom aurait-elle opposé, au seigneur d’Ennezat,
» qu :il avait approuvé la transaction de 1 j 56 ? » — L e seigneur
eût répo ndu, q u i confirm ât non dat : cc J ’ai approuvé la cession
y> mutuelle, des deux com m unes, faite entre elle, pour un bien de
» paix; je n’ai aucunement voulu me dépouiller au profit de l ’une
» ou de l’autre ; — donc le traité de 1436 ne peut m’avoir dépouillé
» d ’avance du droit d ’exclure les gens de R io m , étrangers à ma
» justice, du pâturage des com m unaux, qui sont ma propriété, dès
» qu’ils sont dans ma justice. «
O b j. 2e. — « Rien ne prouve que le communal litigieux soit dans
» la justice d ’Ennezat ; — donc rien n e prouve que la coutume eût
» dérogé au titre » — C ’est dans le jugement de première instance
que celte objection semble en être faite. ( Y . . d ’ailleurs le M ém oire
de R i o m , page 65 . )
Ri;p. — L es juges de R io m , très-décidés à ne pas sortir du titre
de 14^6, et du procès-verbal de 148 9 , ont puisé, dans ce procèsverbal, que le duc de Bourbon prétendait étendre sa justice sur le
communal litigieux.
Et qu’importent les [»rétentions respectives des deux seigneurs,
en
! — H s’agit de savoir cc (pii dut avoir lieu après la publi
cation de la coutume de 1 5 10 : o r , nous avons rappelé comment le
seigneur d’Ennezat avait établi son droit de ju s tic e .
:
Messieurs les juges de Riom sont un peu difficiles à persuader.
Quoi ! ils ont sous les yeux un triage fait, en 17O0, par le seigneur
d ’Ennezat, en sa qualité de seigneur justicier du communal litigieux;
ils ont sous les yeux la preuxe (pic le seigneur d ’Ennezat a jo u i,
pendant quarante ans, de l’effet de son triage; ils ont sous les yeux
la preuve que le possesseur do ces terres com m unale.» « payé ses
contributions a litinezat; qu’il y a eu 1111 p r o c è s , p o u r les n o v a le s,
avec la commune d’KimCzat; que toujours ces terres ont é té , sans
réclamation, réputées appartenir à la commune d’Eunezat, et ils
doutent si le communal tnagé était bien de la justice d’ Ennczat !
A u jo u rd ’ hui la preuve est irréfragable ; car elle résulte d ’uno
décision du Conseil d ’Etat en date du 5 avril i 81 1.
A u surplus, la commune d’Eimczat posait, en f a i t , que le corn-
�munal litigieux était situe dans la justice d ’Ennezat;— elle concluait,
en d ro it, que la coutume de i 5 i o avait aboli le titre de a456 sur le
droit de pâturage. Ce point de droit n’ étaitpas méconnu par les juges;
donc toutgissaft dansla vérité du point défait; doncles juges devaient
le décider : et puisqu’ils n’ont pas constaté, en fait, le contraire de
notre assertion, il en résulte qu’ en cour de cassation , le point de
droit doit être apprécié, comme si le fait était constant.
XS'ous disons donc, avec confiance: « Il s’agissait d’un communal
situé dans la justice d’Ennezat ( Limagne ) ;
donc nul ne pouvait
y p â tu r er , s’il n’était de la justice d ’Ennezat; — do n c, s’il y avait
eu titre contraire, le titre était rendu sans effet par la disposition
de la coutume ; — donc les juges de Riom n ’ont conféré à la com
mune de Riom la copropriété du communal litigieux, qu’ en don
nant effet à un titre éteint par le contrat.
D ’ailleurs (et il suffirait de cette dernière observation pour assu
rer la cassation de l ’arrêt dénoncé, )
Q u’était d ’ailleurs ce titre de i 4 3 6 ? Un acte assurant à la com
m u n e de R io m un d ro it de paturage sur le com m unal litigieux.
Or un titre de paturage ou de simple servitude ne saurait être
le f o n d e m e n t d’un droit de p r o p r ié té , — surtout lorsque, dans ce
même titre, on vo it, à côté des prétendans droits à la servitude,
d’autres individus prétendans droits à la propriété; — car il est
co n ve n u , dans l’espèce, que les deux seigneurs de Riom et d’Ennezat ont joué un rôle très-important sur l ’effet de cette transaction,
puisqu’elle a été soumise à l ’ approbation, et qu’ils y ont apposé
l ’ hom ologation ;
Q u ’un titre conférant le droit de p aturage ne puisse aucu' nement être invoqué pour justifier une prétention à la propriété ,
c’ est en soi de toute évidence , — et à cet égard nous avons
nombre d’arrêts de la Cour régulatrice.
Arrêt du 2.T brumaiie an 7. ")^ecuej] de S ire y ,to m e 5 , i re.part.,
------ du 14 ilorcal an 10. )
a5o.
0
— —- du l ü brumaire an 1 1 . ;
------ du a(j brumaire an 11.
T o m e 3 , a', p a rt., pag. 246.
Et il n’est pas sans importance de rappeler ici les résultats iniques
qui se trouveraient produits parle système contraire,s’il pouvait etre
consacré.
�( 5* )
La commune de Riom , placée à une lieue du communal litigieux,
ne tirait, en i 436 ou i 48 g , qu’un léger avantage de son droit de
paturage : il n’était utile qu’à un petit nombre de propriétaires de
R iom ayant leurs domaines et leurs bestiaux placés auprès du com
munal litigieux d’Ennezat. — Il pouvait même arriver que tous les
domaines voisins d’Ennezat fussent achetés par des habilans d’E n
nezat; — et dans celte hypothèse le droit d q paturage, reconnu à la
commune de Riom en 1436 , pouvait se trouver sans aucun avan
tage réel pour elle.
T e l est, en gén éral, la nature de tout droit tYusage : il sc mesure
sur le b e so in , et le besoin cessant, le droil d ’usage cesse aussi, car
ce droit n’est pas cessible ou transportable. ( 65 o et G3 1 , C. N . )
Mais si le droit, originairement u s a g e , finit par être converti
en droil de p ropriété 011 copropriété, dcs-lors le résultat va être
tout autre : la commune de Riom sera indivise avec la commune
d’Ennezat -, et pour sortir de cet indivis, il y aura heu à un p a rtag e
prétendu p a r fe u x - , — et comme la ville de Riom a une population
douze fois plus lo u e qu ’E n u e z a t, il se trouvera que la ville de llio m
absorbera les onze douzièmes en propriété du communal litigieux :
— et s’il était vrai qu’aulour du communal litigieux, il n’y a plus de
propriétaires de l l i o m , celle circonstance 11e changerait rien au
fond du droit. — A in sile so n zc douzièmes du communal pourraient
très-bien advenir» la commune de Riom , précisément parce qu’elle
aurait osé réclamer un droil de p r o p r iété , en \ erlu d’un litre de
i 43 G qui lui reconnaissait un simple droit de servitude ou d’usa g e,
droit qui, originairement, devait avoir plus d ’elfet au profit d ’E n nczal qu’au profil de lliom , parce que les habilans d ’Eiinezat ont
lous les bestiaux à la portée du communal litigieux.
V
»
y»
»
j)
»
O u i . — « I,a commune de Riom ne peut manquer de nous dire
que ce 11’cst pas à la commune d’ Eunczal à excipcr contre elle ,
ni de la disposition coulumièrc de
ni <lc la nature précaire
cl imparfaite du droit porté 'au titre de 1 436 ; — qu'au surpins il
doit y a\oir éga lité cuire Riom et Ennezat, rclaiivemcnl au co m inunal litigieux, puisque celle égalité est consacrée par le litre
de a 436 . »
R é f . — nous ne saurions trop rep ro d u ire c l réfu ter l ’id ée p rin ci-
«
�( 55 )
pale, sur laquelle repose tout le procès ; —- c’est que V ég alité re
connue clans le titre de i 456 n’est aucunement règle aujourd’hui
puisque la commune d’Ennezat justifient]ue le titre de 1 456 a reçu
des changemens par les évènemens ultérieurs.
Lorsque la commune de Riom nous demande un droit de co
propriété j en vertu d’un titre qui ne lui assure qu’un droit d ’ usage
ou de p a tu r a g e , nous sommes sans doute fondés à lui répondre
que son titre même réclame contre sa demande ; — elle n’a pas
qualité pour examiner si la propriété est bien à nous: dès que c ’est
à nous qu’elle s’adresse pour obtenir la propriété, c ’est à nous de lui
dire qu ’elle n’est pas fondée, que son litre même la condamne.
Par la même raison, et en supposant toujours que la commune
d’ Ennezat est p rop riéta ire, qu’elle est aux droits de propriété du
ci-devant se ig n e u r , c’est encore à elle d’exciper contre la commune
de Riom , de la disposition coutumière qui fit cesser le droit de p a
turage des habilans de R io m , (au profit du seigneur. )
Ici se reproduit en faveur de la commune d ’Ennezat, l’idée mère
de toute sa défense; c ’est que les lois du 28 août l'jg a et du 10 juin
1673 , lui ayant conféré la propriété des marais situés dans son ter
ritoire, et l ’ayant autorisée à la reprendre du seigneur d ’ E n n e z a t'
y ayant eu même chose ju g é e avec le seigneur féodal, relativement
à ces marais, il est essentiellement vrai que la commune d’Énnezat
représente aujou rd hui le seigneur d’Ennezat, dans tous ses droits de
p ropriété sur le communal litigieux; que ce droit lui est particulier •
qu’il ne doit profiler aucunement à la commune de R io m ; — t e l l e
est la cause réelle , légale, indestructible ; pourquoi il ne peut plus
y avoir égalité entre les deux communes : c’est pourquoi la com
mune de Riom doit voir sans envie que la commune d’Ennezat
conserve exclusivement le communal litigieux, sans qu’aucun droit
à la propriété puisse être attribué aux lmbitans de R io m ; toujours
par cette raison qu’ils n’ont jamais eu de titre de propriété et que
même le droit originaire d'usage ou de pâturage fut aboli par
la coutume de i 5 i o , postérieure au litre de 1406.
V I I I e. M O Y E N
DE C A SSA T IO N .
Nous allons, à présent, raisonner eu supposant (par impossible)
�( 56 )
que l ’action de la commune de Riom eut été recevablc, et fo n d ée ,
en ce qui touche l’action en revendication ;— nous allons démontrer
q u e , même en ce cas , l’arrêt dénoncé se trouverait ^mériter la cen
sure de la Cour régulatrice, à cause des effets excessifs donnés à la
condamnation, et du vice inhérent à son mode d’exécution.
Nous allons donc établir que la loi a été violé e,
En ce que la loi ne permettait pas d’ ordonner une restitution de
fr u it s , surtout de faire remonter cette restitution de fruits, jusqu’au
1 1 pluviôse de l’an 12 j
En ce que la loi ne permettait pas d’élendre indéfinim ent la durée
de l ’obligation, pour la restitution des fruits à venir ;
En ce que la Joi ne permettait pas de condamner la commune
d’Ennezat, à indem niser celle de R iom de dégradations passées cl
futures, prévues ou imprévues.
§ 1. — Contravention à l’article 7 de Ja loi du 7 ventôse an 1 2 ,
qui défend de condamner à la restitution des f r u it s , perçus p a r les
com m unes antérieurement au 1 " . vendémiaire de l’an i3 .
»
»
>*
»
»
« Il ne sera, est-il dit, prononcé de restitution de fruits en jouissance, ni par les tribunaux en faveur des tiers, dans les cas de
répétitions prévues par l’articlc précéden t, ni par les conseils de
p réfecture, en faveur des c o m m u n e s, dans celui mentionné à
l ’article 5 , qu’à compter du jour de la demande par les particuliers,
et à compter du 1 er. veudémiaire an i 3 .
En point de fait, le jugement confirmé condamne la commune
d’Ennezat à une restitution de fruits, depuis le jour de la demande,
c ’est-à-dire , depuis le 11 pluviôse an 12 ;
D o n c le précepte de la loi a été m éconnu;
Sur la question de restitution de fr u it s ; on avait douté si elle
pourrait être prononcée , au cas de non-partage : et le décret im
périal du 17 juillet 1808 (B . 198) décide I’affirmatnc.
Il est donc décidé que les communes sont tenues, en particulier
à restituer les fruits des terres injustement p o sséd ées, lorsque ce
«
�( 57 >
sont les communes elles-mêmes qui en ont joui, c’est-à-dire lors «
qu’il n’y a pas eu p a r ta g e , en exécution de la loi du 10 juin 179J.
Mais ce décret impérial est lui-même la preuve qu’au cas de
p a rta g e du com m unal, et lorsqu’il est possédé par des particuliers,
la commune en masse ne peut être recherchée p o u f la restitution des
fruits perçus par des pai liculiers.
Surtout ni ce décret impérial, ni aucun autre monument de légis
lation n’autorisent la pensée qu’une commune puisse être condamnée
à une restitution de f r u i t s , pour des temps antérieurs au 1er vendé
miaire an i 3 , pour des temps même antérieurs à la loi du 7 ventôse
an 12, pour des temps où elle jouissait de bonne loi en vertu de la loi
du 3 1 prairial an 4 .
Pourquoi donc cette condamnation à la restitution des fruits
perçus en l ’an 1 3 , tandis que la loi les restreignait à l’an 1 3 , etanuée
suivante?
L ’arrêt dénoncé ni le jugement confirmé n’en disent mot;
On y trouve seulement cette étrange doctrine, que ce sont des
particuliers ut s in g u li, qui ont perçu les fruits, et que cependant
ces fruits doivent être restitués par la commune u t u n iversi, pour
forme de responsabilité ou de garantie.
« A tten d u , est-il dit, (su r le f o n d , et relativement à la restitu
ai lio n ) que c’est par le fait des habitans d’ Ennezat que la ville do
» llio m a été privée de sa jouissance; que c’est par le fait de leur
» mauvaise contestation que ses droits ont resté encore indécis, et
» que les habitans de Lliom n’ont encore pu demander ni le d é sis7> U-ment ni les jo u issa n ces aux tiers détem pteurs : qu’ainsi qnoi» que les habitans d’Ennezat, en corps, ne soient pas garons envers
» les détenteurs des condamnations que ces derniers peuvent
» éprouver au sujet des communaux partagés en vertu de la loi
» du 10 juin 1 79 3 , le corps commun n’en est pas moins garant
» envers les habitans de Riom de tous les dommages que ceux-ci
» ont éprouvés par son injuste contestation ; lesquels dommages
» consistent réellement dans la pri\ation des jouissances qu’ont
»* ¿prouvées les habitans de R io n i, depuis la demande originaire
)) jusqu’au jour où ils pourront réclamer directem ent contre les
)) liers-détentcurs. »
A in s i, la commune d T nnczat est punie tic ce que les juges ap-
8
�( 58 )
pellent
grands
m oyen
malgré
m une,
une m auvaise co n testa tio n ; tandis qu’ elle a demandé à
cris de n’avoir pas de contestation ; et que son principal
de cassation est pris aujourd’hui de ce q u ’on l ’a tenue,
e lle , dans une contestation qui est étrangère à cette com
u t u n iv e n i.
A u surplus, l’article X de la loi du 9 ventôse an 12 prohibe
qu’au cas d’éviction le détenteur puisse revenir contre la commune,
p our garantie ou j-esponsabilité. — Evidemm ent la raison de dé
cider, c’ est que les dispositions de la loi du 10 juin 1 7 9 3 , et le lait
de possession, sont aux yeux de la loi une présom ption de bonne
J o i qui écarte toute idée de q u a s i-d é lit,• — le m otif une lois app erç u , ilts’applique également à louslescas ; — à la vérité l’action en
garantie n’est prohibée que de la part des tiers-détenteurs; c’ est que
le législateur r>'ima«ina j>as qu’un jour il se trouverait des revendi
cateurs auxquels i! ne suffirait pas d’obtenir leurs terres, avec les
fruits, du jour même o íd a loi autoriserait cette revendication.
£. 2. Contravention aux art. i l 5 o et n 5 i , C. N. , portant (ar
ticle 1 i 5 o): « le débiteur n’est tenu que «les dommages et intérêts
» qui ont été prévus ou qu’on a pu prévoir lors du contrat, lorsque
» ce n’est point par son i/o/que l’obligation n’est point exécutée. »
y>
»
»
»
( Art. 1 i 5 i . ) « Dans le cas même où l ’inexécution de la convention résulte du dol du débiteur , les dommages c l intérêts 11e
doivent comprendre, à l’égard de la perte éprouvée par le créancier et du gain dont il a été j u i v e , que ce qui esl une suite im m édiatc c l directe de l’inexécution de la convention. »
S ’il s’agissait de dom m ages-intéréts résultant d ’un d o l, la co m
mune d ’Énnezat n’aurait pu c l ic condamnée q u ’aux domrnagesintérêts q u ’ elle aurait p u p r é v o ir , et qui sci aient une suite imtnéd ia le et directe de l'inexécution de la convention.
A plus forte raison doit-il en être de même des dommngcs-intérêts résultant d’un fait qu’on n’a qualifié ni dol ni q u a si-d élit.
( .1 58 a , C . N. )
Rem arquons bien Y étendue donnée à la condamnation.
« C on d am n e, est-il d it, pareillement les babitans d ’ Rnnczat, à
)) garantir et indemniser lesdits babitans de Uiom de la privation
v éprouvée par ces derniers des fruits et jouissances dudit marais
%
�( 59 )
»
»
»
y>
»
»
»
»
com m un, et ce par le fait et la mauvaise contestation desdits liabitans d ’Énnezat, depuis la demande, jusqu’au jour où ils pourront actionner les tiers-détenteurs, ensemble le montant des d égradations q u i auront pu avoir été faites dans ledit terrain commun,
et en conséquence les condamne à payer aux demandeurs le montant desdites dégradations et jouissances comme dessus, et c e ,
s u i v a n t l’estimation qui sera faite par les experts, et aux intérêts
desdites jouissances et dégradations de qui de droit. »
Peut-être que celle condamnation aux intérêts de jo u issa n ce s et
de dégradations offrirait uri moyen de cassation, pour contravention
à l’article r i 5 4 , Cod. Nap. , qui n ’en accorde que pour des intérêts
échus.
Peut-être aussi aurions-nous à faire remarquer comment la com
mune d ’Ennezat est condamnée à restituer les fruits qu ’elle ne per
cevra pas jusqu’à l’époque indéfinie où la commune de Riom pourra
actionner les tiers-detenieurs.
Mais il nous suffit de montrer que la condamnation p o r te , notamnicnt quant aux dégradations, sur des dom m ages-in téréts, sans
dire qu’ils soient la suite immédiate et directe d’un fait de la c o m
mune d’Ennezat, sans dire qu’elle n’a pu les prévoir ; — ce qui est
en contravention aux articles combinés i i 5 o , 1 1 i îS tfa, Cod.
I\np.
R É S U M É .
Enfin, nous voilà au bout de l’exposé de nos huit moyens de
cassation. — C ’est beaucoup trop peut-être. — Mais il ne nous a
pas été permis de dissimuler aucune des nombreuses erreurs de
droit, échappées à la Cour de Riom , dans une affaire, dont nous
osons dire qu’elle eût dû s’interdire la connaissance , puisqu'on ré
s u lt a t c e sont des juges de R i o m , q u i, babitans de R i o m , pro
noncent au profit de la masse des babitans de Riom , c’est-à-dirc
d ’eux-memes.
Au total, ce sont les magistrats de R ’. om qui o n t , au 19e. siècle ,
conféré aux babitans de Riom un droit de p r o p r ié t é , sur des terres
ru plein rapport d a n s la belle Limagne , uniquement parce que les
babitans de Riom avaient e u , au i!>’ . siècle, un droit de paturage
sur les mêmes terres , lors en m arais , el cela au mépris ,
�1 °. D e la coutume d ’Auvergne , q u i , en 1 5 1 0 , abolit de
droit de p a tu rag e des hab itans de Riom dans une justice étrangère;
2°. Des actes de p a rtag e faits en 1760, des terres litigieuses ,
entre le seigneur et les habitans d ’Ennezat, sans réclamation au
cune des habitans de R iom ;
5*. D u défrichement et de la possession exclu sive de ces terres
depuis 1760 jusqu’en 1 8 o 3 , époque où il a plu à la ville de R iom
de co n ve n ir son antique droit de p a tu rag e eu un droit actuel de
p ro p riété parfaite.
E t ic i, com m e partout, l’erreur a enfanté l'erreur , c'est-à-dire
qu ’il y a encore plus de violations des lois dans la forme que sur
le fond.
C ’est ainsi q u e les j u g e s de R iom ont refusé d ’annuller une action
en revendication intentée dans un temps et dans des termes que
les lois prohibaient expressément.
C ’est ainsi qu’ils ont autorise une action en revendication contre
une commune non détentrice des terres revendiquées; — et l’ont
ensuite condamnée à des dommages-intérêts infinis ou indéfinis ,
pour avoir soutenu , en défendant, un procès q u ’elle n’a soutenu
que parce qu ’on lui a refusé de la mettre hors de cause.
C ’e s t ainsi enfin que les juges de R iom , entreprenant sur l'auto
rité a d m in istr a tiv e , ont pris sur e ux de statuer sur une prétendue
usurpation de co m m u n a l, et dans l’intérêt d ’une commune ; ils ont
également pris sur eux de décider quel serait le mode de partager
et d’o rdonner un mode qui confère aux habitans de Riom les onze
douzièmes d e l a propriété prétendue indivise.
Tant et de si graves erreurs ne peuvent éviter la censure d e la
Cour régulatrice.
J .- B . S I R E Y , A vo ca t de la Cour.
De l’Imprimerie de N. R E N A U D I E R E , rue des Prouvaires, N° 16.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Maire d'Ennezat. 1811?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Sirey
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
coutume d'Auvergne
triages
Bouillon (Duc de)
marais
experts
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire ampliatif pour le Maire de la commune d'Ennezat, arrondissement de Riom, département du Puy-de-Dôme, demandeur en cassation ; contre les habitants de la ville de Riom. Communaux-Compétence-Possession.
notes manuscrites.
Table Godemel : Communaux : 1. une demande en revendication et partage de biens communaux, dans l’intérêt d’une commune, est-elle de la compétence des tribunaux ? 2. les juges d’une commune qui a un procès doivent-ils s’abstenir de connaître la cause, comme étant partie intéressée, en leur qualité d’habitants ? 3. comment doit-on entendre la disposition de la loi du 21 prairial an 4 qui prohibe toute action relative au partage des communaux ? 4. une longue possession peut-elle opérer prescription sur un objet indivis et commun ? 5. est-il nécessaire pour former une demande en revendication de biens communaux, postérieurement à la loi du 9 ventôse an 12, que le demandeur justifie de possession ou de litige au 4 août 1789 ? 6. de quelle époque doit courir la restitution des fruits, en matière de revendication de biens communaux ? 7. à qui la copie de l’assignation à une commune doit-elle être laissée, en l’absence du maire ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de N. Renaudière (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1811
1436-1811
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
60 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2132
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Ennezat (63148)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53428/BCU_Factums_G2132.jpg
Bouillon (Duc de)
communaux
coutume d'Auvergne
experts
marais
pacage
triages