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COUR RO YALE
DE RIOM.
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1 e r . CHAMBREM . R edon - E c u y e r
POUR
Les Héritiers R E Y N A R D et N A L L E T , Appelans;
CON TRE le sieur Marquis D E S T R A D A , Intim e,
Et le sieur G R A N CH IER, ancien receveur des consignations.
D
eux questions se sont élevées dans ce procès :
1°. Lorsqu’un dépositaire judiciaire, qui, par le bénéfice de sa
charge , avait le droit de faire valoir les fonds deposés dans sa caisse ,
a usé de ce droit en faveur d’un créancier opposant en ses m ains,
pour une somme qui pourrait être imputée sur celles pour lesquelles
ce créancier prétendait se faire colloquer, est-il possible de v o ir ,
dans celte opération, au lieu d'un prêt fait par le dépositaire, à
ses risques et périls, avec délégation à son profit sur la collocation
future , un paiement effectué en l’acquit du débiteur saisi, et opérant,
des ce moment, sa libération?
C ’est la question principale.
2°. Les clauses d’une transaction qui se trouverait viciée par une
erreur de fait commune aux deux parties, peuvent-elles être scindées,
de telle sorte qu’on annulle celles qui sont favorables à l’un des
contractans, en maintenant celles qui lui sont contraires?
C ’est la question subsidiaire.
N i l’une , ni l’autre de ces questions ne semble difficile à résoudre.
1
premier Président.
�(2)
II paraît (l’abord Lien évid en t, que l’avance faite par le dépositaire,
sur une collocation non encore ordonnée, lui est purement person
n elle, qu’elle reste étrangère au débiteur saisi, et ne peut avoir
aucun ellet, ni à son préjudice, ni à son prolit.
li t , quant à la transaction, s’il y a erreur dans sa base, on ne
conçoit pas qu’il soit possible de ne l’annuller qu’en partie, et de
ne point remettre les contractans dans la position où ils étaient avant
dé la souscrire.
Ce n’est pas ainsi, néanmoins, qu’en a jugé le tribunal de R iom ;
il a résolu les deux questions dans un sens contraire à celui que
nous venons d’indiquer.
Faudra-t-il de grands efforts , pour démontrer l’erreur et ¡’injustice
de cette décision? Nous ne le pensons pas.
11 nous paraît facile d’établir que le tribunal a méconnu, sur l’un
et l’autre point, les principes de droit les plus constans et les pre
mières règles d’équité.
. Exposons d’abord les faits.
F A I T S .
r
Par acte du g février 1 7 8 1 , les père et mère du sieur Dcstrada
affermèrent, pour dix-huit années , leur terre de JBriailles aux sieurs
Reynard et N allet, auteurs des appelans.
Les fermiers payèrent d’avan ce, sur leurs ferm ages,72,000 francs^
Ce ne fut que la moindre partie des fonds qu’ils eurent à mettre
dehors. La terre de B riailles, long-terns négligée, était dans le
délabrement le plus complet. Les fermiers dépensèrent, pour la
remettre en valeur, plus de 100,000 francs.
Ils ne recueillirent point les fruits de ces énormes avances. Pour
prix de leurs sacrifices, ils ne trouvèrent, dans les propriétaires,
que de la mauvaise foi. Ceux-ci violèrent ouvertement les clauses
�du bail. Ils poussèrent le mépris de leurs engagemens , jusqu’à vendre
des coupes de bois par eux affermées.
Les fermiers se virent forcés de demander la résiliation de ce
b a il, qui avait mis toute leur fortune'daus les mains du sieur Dcstrada. Cette résiliation fut prononcée par une sentence de la séné
chaussée de Riorn, du 5 i Août 1 7^7 ? fi lli condamna les bailleurs
en des dommages-intérêts à donner par état, et à la restitution de
l ’avance de 72,000 f r . , au prorata du teins restant à courir sur la
durée du bail.
La créance des sieurs Reynard et Nallet fut depuis, fixée par
experts , à 207,000 f r ., avec intérêts, à partir du i er. Décembre 178c).
Le sieur D estrada, ayant appelé au parlement de P aris, de la
sentence de Riom ; cet appel se trouva, lors de la nouvelle orga
nisation judiciaire, dévolu au tribunal du district de Clerinont; et
là il intervint, le
I er.
Août 1792, un jugement qui maintint la plus
grande partie des condamnations prononcées au profit des fermiers.
Avant cette époque, et dès le 22 Août 1789, le sieur Destrada
avait vendu sa terre de Briailles au sieur de Saint-Cy.
Ce dernier avait obtenu des lettres de ratification, scellées, à la
charge d’un grand nombre d’oppositions, et notamment de celle
que les sieurs Reynard et. Nallet avaient form ée, en vertu de la
sentence du 5 t Août 1787.
Le ‘i[\ Janvier 1791 , l’acquéreur déposa le prix de la v e n te , mon
tant en principal et intérêts, à 5 6 i , 85 (i liv. , entre les mains du sieur
Graneliier, receveur des consignations, à Riom.
Les sieurs Reynard et N allet, prives des sommes importantes qui
leur étaient ducs p a rle sieur D estrada, furent contraints, en atten.
dant qu’ils pussent les recouvrer ; d’avoir recours à des emprunts.
Ils s’adressèrent au sieur Graneliier. Celui-ci leur prêta, le 10
Mars 1791 , une somme de 100,000 l i v , , pour laquelle ils lui sous
crivirent deux lettres de change de 5o,ooo liv. chacune.
�c
( 4 )
Vannée suivante, une autre somme de 20,000 fr. fut prêtée par
le sieur Grancliier au sieur P a g es, gendre du sieur R eyn ard , et
forma l’objet d’une troisième lettre de change, que ce dernier sous
crivit conjointement avec son gendre.
Ces faits sont importans. Ils servent à fixer la véritable date et
la nature d’un autre titre que se procura plus tard le sieur Gran
cliier, et dont nous parlerons tout-à-l’lieure. ils sont prouves par
des pièces non suspectes , et qui ont acquis date certaine par le
décès du sieur Reynard, long-tems avant la contestation actuelle.
i° . On v o it, par une lettre du sieur R e y n a r d au sieur G rancliier,
en date du (! A vril 1792, transcrite par celui-ci dans son précis
imprime', qu’il lui était dû alors 5 ,000 li v ., pour intérêts échus le
10 Mars précédent. C’étaient évidemment les intérêts à 5 pour 100
des 100,000 fr. portés dans les deux lettres de change du 10
Mars 1791.
20. Une autrelettre écrite au sieur Grancliier, par les sieurs Reynard
e tN a llet,le 3 mai 1798, lui annonce l’envoi de leur promesse de
i o , 25 o
fr. au 1 5 avril suivant. Cette somme se composait 1 °. des 5 ,000 fr. d’in
térêts échus le 10 mars 1792 ; 20. de 230 fr. pour les intérêts de cette
somme pendant un an, et 3 .° d’une autre somme de 5 ,000 fr. , pour
les intérêts d’une seconde année d elà somme principale.
5 °. Un compte arrêté entre les sieurs Reynard et Grancliier, le 6
Nivôse en 5 , et portant règlement des intérêts dûs à ce dernier jus
qu’au 9 Août 1794 ( 22 Therm idor an 2 ) , établit encore plus clairement
l’existence des divers titres dont il vient d’être parlé.
Y oici les articles qui s’y rapportent.
« Nous avons réglé les intérêts des cleux lettivs de change de
» 5o,ooo fr. chacune , d u 9 mars 179 1, jusqu’au 9 août 179^, faisant
» trois ans et cinq mois à la somme de 17,082 liv. 5 s.
» Les i rite rets de laletirede change île a0,000 fr. , depuis le 9 mars
> 1792 , jusqu’au 9 aoul i794,pour deux ans cl cinq mois, à la somme
» de 2,4i(ifr.
�)> L ’intérêt de 5 ,ooo liv. contenues a u billètdu 3 mai 17 9 3 , jus» qu’au g août I 7g 4 7 faisant un an et trois mois, à 3 i2 Ü v. 10 sols.
» E t l’intérêt des autres 5 ,000 fr. contenues au même b illet, depuis
» le 9 mars 1794, jusqu’au 9 Août suivant, pour cinq mois, à la somme
» d e io 4 1iv . »
Là se trouvent bien positivement rappelés les quatre effets succes
sivement souscrits au prolit du sieur G rancliier, tant pour le capi
tal , que pour les intérêts de ces prêts.
Antérieurement à cet arrête de compte du 0 Nivôse an 5 , et par
jugement du i er. thermidor an 2 , les sieurs Reynard et Nallet
avaient été colloque's dans l’ordre du prix delà terre de B riailles, pour
une première somme de 76,761 liv. 1 sol (ï deniers.
Ce même jugement avait ordonné que le surplus de leur créance
seroit de nouveau liquidé par experts, que la distribution resterait
à cet effet suspendue pendant deux m ois, et que le receveur des
consignations garderait dans ses mains une somme de 107,000 liv.
pour faire face à leurs répétitions.
Si avant cette époque les sieurs Reynard et Nallet eussent affecté
au remboursement des sommes par eux dues au sieur Grancliier,
celles pour lesquelles eux-mêmes devaient être colloque's sur le prix dé
posé dans ses mains, ils auraient ete libérés envers lu i , lors de ce
jugement du i cr. Therm idor an 2 , jusqu’à concurrence de la pre
mière collocation par eux obtenue.
Néanmoins comme 011 l’a vu , le sieur G ran cliier, dans l’arrêté
de comple du <i nivôse su ivan t, se considérait encore comme créan
cier de la totalité des sommes portées dans les engagemens sous
crits à son profit ; preuve certaine qu’il n’existait alors aucun acte
qui le subrogeât aux droits des sieurs Reynard et Nallet sur le jirix
dont il élait dépositaire.
Ce ne- lut donc qu’après cet arrêté de com pte, qu’il fut fait,
entre le sieur Grancliier et le sieur R eyn ard , agissant, tant pour
�( 6 )
/
lui que pour le -siçur- N allet, son associé, un nouvel arrangement
par lequel ils se libérèrent, envers le sieur Grancliier , d’une partie
de ce qu’ils lui devaient, et lui donnèrent sûreté pour le surplus.
Le moyen employé pour atteindre ce double b u t, fut de déléguer
au sieur Grancliier le montant des collocations des sieurs Reynard
et JNallet, sur le prix d e là terre de Briailles.
Le sieur Reynard, ne doutant point que la première collocation
déjà ordonnée, ne fut bientôt suivie d’une autre plus que suffisante
pour rembourser entièrement le sieur Grancliier , ne vit aucun in
convénient à reporter l’origine de la totalité de sa créan ce, au mois
de Mars 1791 , date du prêt de 100,000 fr.
Voici le texte de l’é c r it, par lequel la délégation fut consentie ,
et qui remplaça les autres engagemens dont le sieur Grancliier était
porteur :
« J e , soussigné, faisant, tant pour moj que pour M. N allet,
» mon beau-frère et mon associé, reconnais avoir reçu de M. Gran» chier, receveur des consignations, la somme de cent trente-cinq
» mille livres, à compte de celles qui me sont adjugées contre
»
»
»
»
»
»
M. Destrada et son épouse , par les sentences que j’ai obtenues
contre lui à la ci-devànt sénéchaussée d’Auvergne , et pour lesquelles je dois être colloque dans l’ordre qui doit être fait avec
les autres créanciers des deniers provenant de la vente de la
terre de Briailles ; laquelle somme je promets faire allouer audit
sieur Grancliier. Fait à R io m , le 29 Mars 1791.
» S ig n e R e y n a r d . »
C elte délégation ayant reçu son effet, quant à la somme de
75,7(11 liv. 1 s. (> d . , pour laquelle les sieurs Reynard et JNallet se
trouvaient colloques par le jugement du i er. Therm idor an 2 , ils
11c restèrent plus débiteurs , envers le sieur G ran cliier, que de
( il,208 liv. 18 s. ()d .
La liquidation ordonnée par ce jugement, fut depuis opérée; et
alors un second jugement rendu par défaut, le i(î Pluviôse an 5 ,
�( 7)
alloua au sieur Nallet et aux héritiers benéiic bures du sieur Roynard ,
décédé dans l’intervalle, une autre somme de G.S,553 liv. 10s. Gd.
avec intérêts et dépens, pour toutes les indemnités par eux réclamées.
A u m om ent où cette seconde partie de leur créance leur fut ad
jugée, les deniers sur lesquels devait s’en faire le paiement avaient péri;
les assignats qui les représentaient étaient démonétisés.
E t ainsi, faute de valeurs sur lesquelles put s’exercer la déléga
tion faite au sieur Graueliier pour le surplus de ses avances, elle
resta sans ellet. Les héritiers Reynard, et le sieur JYallet continuèic .it d’être ses débiteurs et créanciers du sieur Destrada. L ’unique
changement qu’apporta dans leur ¡position le jugement du iG P lu
viôse an 5 , fut de rendre leur créance liquide et exigible ; mais il
restait toujours à en faire le recouvrement.
Des inscriptions furent prises à cet effet sur les biens du sieur
Destrada.
Dans une première inscription à la date du i 5 Germinal an 7 , la
créance ne fut portée par erreur qu’à 9,574 fr. ; mais bientôt le sieur
Granchier fit connaître aux héritiers Reynard leur véritable situa
tion , tant à son égard que vis-à-vis du sieur Destrada; et l’erreur
fut rectifiée par une seconde inscription requise , le 25 Prairial de la
même année, pour sûreté d’une somme de c)G,o 12 liv. 17 s; 1 d.
L e sieur D estrada, après avoir retardé de tout son pouvoir la li
quidation des indemnités reclamées contre lu i, se montra prêt, lors
qu’elle fut terminée, à élever de nouvelles difficultés..
11 prétendit que c’était aux Reynard et N alletà supporter la perte
des assignats consignes ; qu il se trouvait ainsi non-seulement libéré
envers eux, mais en droit de répéter l’excédent de la somme restée
en dépôt au-dcla du montant de leur seconde collocation.
11 se prévalut aussi de ce qu’il pouvait encore in terjeter appel du
jugement par défaut du iG pluviôse an 5.
On lui répondit que c ’était par sa faute et à ses risques que h; dé-
�(8)
pot avait eu lieu ; qu’il ¿tait resté propriétaire des assignats jusqu’à
leur distribution effective, et qu’ils avaient par conséquent péri pour
l u i , suivant la maxime res périt domino ; que son a p p e l, en le sup
posant recevable, n’était point à redouter , attendu que les Reynard
et Nallet se trouvaient plutôt lésés qu’avantages par le jugement
contre lequel il menaçait de se pourvoir.
Durant ces discussions , le sieur Destrada fils devint le donataire
de son p è re , et le représenta en cette qualité.
Il entra en négociation avec les héritiers Reynard. Leurs diffé
rends furent terminés par une transaction du 21 Germinal an ia .
II fut d’abord reconnu dans cet acte que les Reynard et Nallet
avaient reçu la somme de 7^,701 liv. 1 s. (> d . , montant de leur pre
mière collocation. Il ne restait plus qu’à régler le paiement de la se
conde.
En considération de l’offre que fit le sieur Destrada de se libérer
sur-le-cham p, tant en espèces qu’en lettres de change, les héritiers
Reynard, agissants tant pour eux quepourle sieur Nallet, consentirent
à un grand sacrifice. Leur créance s’élevait en principal et accessoires
à plus de 100,000 fr. Ils la réduisirent à 47 , 25 o fr.
Sur cette somme le sieur Destrada paya 1 5 ,000 fr. en espèces. Il
fournit pour le surplus des lettres de change qui ont depuis été ac
quittées.
Par un arrangement que les héritiers Reynard firent à la même
époque avec le sieur G ran chier, il fut convenu que ce dernier les
tiendrait quittes moyennant une somme de i 5 ,o o o fr. à compte de
laquelle il lui fut payé 9,000 fr.
La reconnaissance souscrite par le sieur R eyn ard , le 29 mars 1791,
dont le texte était reste complètement inconnu îi ses héritiers , et
au sieur N allet, fut alors déposée par le sieur Granchier entre les
mains de leur fondé de pouvoir, pour leur être remise après le paie
ment des G,000 fr. dont ils restaient débiteurs.
�w
(9)
Lorsqu’ils offrirent cette somme au sieur Granchier, celui-ci, abu
sant de ce qu’il n’avait point ¿le dressé acte de la convention à la"
quelle il avait souscrit, porta plus haut ses prétentions, il exiga 9,4^0 f.;
on accéda encore à cette condition ; ces 9,45o fr. furent mis à sa dis
position chez un banquier de Riom. Il ne s’en tint pas davantage à
ce nouvel arrangem ent, et forma des demandes tellement exagérées
qu’on 11e put terminer avec lui.
T elle était la position des parties lorsque le procès actuel a pris
naissance.
Voici maintenant ce qui s’est passé depuis cette époque jusqu’au
jugement dont l’appel est porté devant la Cour.
L e 7 juin 1808 , le sieur Destrada fait citer le sieur Granchier en
conciliation sur une demande qu’il sé propose de former contre lui,
à fin de reddition de compte du prix de la terre de Briailles.
L e sieur Granchier se présente au bureau de paix et offre de
rendre compte. Les parties ne peuvent néanmoins se concilier.
Les choses restent en cet état jusqu’au 24 Août 1809.
L e sieur Granchier demande alors la radiation d’une inscription
prise sur ses biens par le sieur Destrada pour une somme de
i 5o,ooo liv.
Les
3 et 17 Novembre suivant, il fait assigner les héritiers Reynard
en assistance de cause, pour lui remettre les pièces justificatives de
leur collocation et lui en fournir quittance.
Le 17 Février 1811 il se désiste de cette assignation.
Pressé par le sieur Destrada de s’expliquer sur l’existence et
sur le contexte de la reconnaissance du 29 Mars 1791, il en indique
/ le dépositaire et consent qu’elle soit communiquée au sieur Des
trada.
Se prévalant ensuite de ce que les héritiers Reynard avaient né
gligé d’accepter son désistem ent, il le révoque par une seconde as2
�( 10 )
signatîon qu’il leur fait donner le 20 Mai 1812, aux mêmes fins que
la première.
Le sieur Destrada qui jusques là n’avait point eu d’autre adversaire
que le sieur Granchier, intervient dans l’instance introduite par ce
dernier contre les lie'ritiers Reynard et le sieur Nallet.
Le 28 Août *1812, jugement par défaut contre les lie'ritiers Rey
nard et le sieur Nallet, qui admet l’intervention et joint toutes les
demandes.
Le sieur Nallet étant décédé, l’instance est reprise avec ses enfans,
par jugement du 22 Décembre i 8 i 3 .
Le procès prend alors une face toute nouvelle.
Les héritiers Reynard et Nallet qui 11’étaient appelés qu 'en assis
tance de cause et pour donner des renseignemens, deviennent toutà-coup parties principales. Ils ont en même temps à se défendre et
des attaques du sieur Destrada et de celles du sieur Granchier.
L e sieur Destrada s’empare de l’acte du 29 Mars 1791. C ’est la
base sur laquelle il fonde toutes ses prétentions contre les héritiers
Reynard et Nallet.
Peu im porte, suivant lu i, qu’il s’agisse dans cet écrit d’une somme
qui leur a été avancée par le sieur G ranchier, à ses risques et périlsr
avant leur collocation , sans autorisation de justice , sans le consen
tement du sieur Destrada leur débiteur, ce n’en est pas moins un paie
ment fait en l’acquit de ce dernier.
Quoiqu’étranger qu’il ait été à cet^acte, il est impossible d’y voir
autre chose qu’une quittance à sou profit.
Par là les sieurs Reynard et N allel ont été remplis d’avance du
montant de leurs deuxcollocalions. Il devient indiñérenl que les assi
gnats consignés se trouvassent démonétisés lorsque la seconde a été
prononcée.
E t dès-lors c’est par erreur que l’on a supposé dans la transaction
�( ■' )
du 21 Germinal an i 5 , que cette seconde collocation restait encore
due. Les
fr. que les héritiers Reynard ont reçus pour cet
objet leur ont été payés sans cause; ils doivent les restituer.
Le sieur Destrada va plus loin ; il prétend que non-seulement il
s’est, par celte transaction, mal à propos reconnu débiteur, niais
qu’elle l’a constitué créancier.
Elle doit, à l’en croire, être annullée, en ce qu’il s’est obligé de payer
pour la seconde collocation 47?25o f r . , mais maintenue en ce que
cette seconde collocation a été réduite à cette somme d e4 7525ofr.
E t ainsi , les
deux collocations ne s’élevant ensemble qu’à
121,011 f r ., il a encore à répéter la différence de cette somme à
celle de i 55 ,ooo f r ., portée dans l’acte du 29 Mars 1791, c ’est-à-dire
15,989 fr.
De son côté le sieur Granchier a formé contre les héritiers Reynard et Nallet une demande absolument inconciliable avec celle du
sîeur Destrada.
Il a commencé par établir , et c’est ce qui lui était peu difficile,
que les sommes par lui remises aux sieurs Reynard et Nallet avant
leur collocation n’étaient alors qu’ une avance à lui personnelle, et
non un paiement sur les deniers consignés dans ses m ains, parce
que l u i , dépositaire judiciaire, ne pouvait payer valablement les
créanciers opposans que lorsque la justice l’avait ordonné ; que l’im
putation de cette avance sur les créances des sieurs Reynard et Nallet n’a pu se faire qu’au moment où elles ont étécolloquées; qu’elle
n’a eu lieu par conséquent que pour le montant de la première col
location, puisqu’à la date de la seconde , les deniers consignés n’exis
tant plus , il n’y avait plus de paiement possible.
L e sieur Granchier en a conclu qu’il était resté créancier vis-à-vis
des sieurs Reynard et Nallet, de l’excédent de ses avances sur le mon
tant de la première collocation.
Jusques-là rien qui 11c soit exact,
�( i» )
Mais ce qui doit surprendre, c’est que sans nvoir e'gard aux con
ventions par lui faites avec les héritiers R eyn ard , le sieur Grancliier
ait prétendu se faire payer intégralement cette créance , sauf seule
ment la déduction des 9,000 fr. qu’il a reçus en vertu de ces mêmes
conventions.
Au milieu de ce conflit de prétentions contradictoires, les héritiersReynard et Nallet se sont d’abord étonnés qu’on formât contre eux
des demandes directes et principales devant d’autres juges que ceux
de leur domicile. Ils ont proposé un déclinatoire ; le tribunal ne
l’a point accueilli, et la Cour a eru devoir confirmer son jugement.
Les héritiers Reynard et Nallet ont alors demandé qu’il fût préa
lablement décidé laquelle des deux actions intentées contre eux ils
auraient à combattre , attendu qu’elles sont exclusives l’une de
l’autre.
Ces conclusions aj'ant encore été écartées par jugement du i 5 dé
cembre 1816 , les héritiers Reynard et Nallet ont défendu au fond,
tant sur la demande du sieur D estrada que sur celle du sieur Gran
d i ier.
A l’égard du sieur Destrada ils ont soutenu :
i°. Que si aux termes de la reconnaissance datée du 29 Mars
17 9 1, les sommes avancées par le sieur Grancliier à leurs auteurs
devaient se compenser avec celles que ceux-ci auraient à recevoir sur
les deniers consignés, ce ne pouvait être qu’à l’instant de leur collo
cation ; et qu’autant, qu’à cette époque ces deniers existeraient en
core; que cette compensation ne s’était par conséquent opérée que
jusqu’à concurrence de la prem ière collocation ; que le sieur Destrada
étant ainsi resté débiteur delà seconde, le traité du 21 Germinal an
15 , qui en a réglé le paiement, avait une cause légitime et devait être
maintenu ;
20. Qu’en supposant qu’il y eut erreur dans ce traité, il fallait l’annuller pour le tout et remettre les parties au même étal que lors
qu’elles l’avaient consenti.
�.
)f
C i3 )
Quant au sieur Granchier, les héritiers Reynard et Nallet en réité
rant l’oiïre d’exécuter la convention faite avec lui, l’ont soutenu nor\
recevable dans toutes autres demandes.
Leur défense n’a point eu le succès qu’ils devaient en attendre.
Toutes les prétentions du sieur Deslrada ont été accueillies par
un jugement du »y Janvier 1817.
Le tribunal s’est proposé sur celles qu’il a élevées contre les
héritiers Reynard et N a lle t, les questions suivantes :
/ « L ’acte du 29 Mars 1791 est-il une quittance de la part des
» héritiers Reynard et N allet, en faveur du sieur G ranchier, sur
» leur collocation dans la distribution du prix de la vente de la
» terre de Briailles , ou seulement une promesse en faveur du sieur
» Granchier?
» S ’il est une quittance, le sieur Destrada peut-il s’en emparer et
» s’en servir pour établir ses demandes? En résulte-t-il la preuve
v qu’en recevant 155 ,000 fr. , les sieurs Reynard et Nallet ont été
» surpayés du montant de leur créance sur le sieur D estrada, de
» la somme de 10,929 fr.? Doivent-ils être tenus de rendre cette
» somme au sieur Destrada, comme provenant des deniers con» signés sur lu i, s ui v a n t la valeur des assignats du jour de la réception,
» ensemble les intérêts, à compter de la même époque?
» Doivent-ils également être tenus de rendre et restituer per» sonnellement et solidairement au sieur D estrada, la somme de
>v 47,260 f r . , qu’ils ont induement reçue de lu i, suivant le traité
» du 21 Germinal an i 5 , aussi avec intérêts, à compter dudit
» traité, comme ayant reçu ladite somme sans cause?
\ o ic i comment ces questions ont été décidées :
« Attendu , dans le fa it, qu’il a été déposé, le 24 Janvier 1791 ,
» dans la caisse du sieur G ranchier, ancien receveur des consigna« tîons, la somme de 5 l>i,85 () fr. par le sieur de S a in t-C y , eu
�( *4 )
» principal et intérêts, pour le prix de la terre de Briaillcs , qui
» lui avait été vendue par le marquis Destrada.
» Attendu en fait pareillement qu e, le 29 Mars 1791 , il fut
» reçu par le sieur Reynard père, faisant tant pour lui que
» pour le sieur N a lle t, son beau-frère et son associé, du sieur
» G ranchicr, sur la somme de 5 0 1 ,850 fr. , celle de i 55 ,ooo fr. à
» compte sur les condamnations qui avaient été prononcées par dif« férentes sentences de la ci-devant sénéchaussée d’Auvergne contre
» le marquis Destrada, au profit des sieurs Reynard et Nallet ,
» avec promesse de la part de ces derniers de faire allouer la
» somme de 1 55 ,000 fr. au sieur Granchier , dans l’ordre qui de» vait être fait du prix de la terre de Briailles , entre un grand
» nombre de créanciers opposans aux lettres de ratification, obte)> nues par le sieur de Saint-Cy, acquéreur de celte terre;
» Attendu qu’il est impossible de voir dans l’acte dudit jour 29
» Mars 17 9 1, qui fut souscrit par le sieur R eyn ard, autre chose
» qu’une quittance à compte des créances des sieurs Reynard et
» N allet, et un aveu manifeste que la somme de 1 55 ,000 fr. pro» venait des deniers consignés de la terre de Briailles ;
» Que cela résulte, i° . de la tenue et du contexte de l’acte , qui
» ne peut pas recevoir d’autre interprétation ;
» 20. De l’acceptation que fit le sieur Granchier de cet acte;
» car il est évident qu’il entendit que cet acte opérerait sa libération
» dans l’ordre envers le sieur D estrada, jusqu’à concurrence de la
» somme de 155 ,000 fr. ;
5 °. Que cela résulte encore de l’action en recours et gai’antie,
» qui a été formée par le sieur Granchier contre les sieurs Rey» nard et N a llet, alin qu’ils fussent tenus de lui faire allouer celte
» somme de la part du sieur D estrada, lorsque ce dernier a demandé
w au sieur Granchier le compte de la somme de 5 0 1 ,850 f r . , qui
» avait été consignée dans ses mains ;
» Enfin , que cela résulte de l’interrogatoire sur faits et arlicles ,
�rsr
( , 5')
» du sieur G ran cliier, qui a eu lieu le 29 Mars 1811 , et dans le» quel M. Grancliier a dit que les sieurs Reynard et N allet, peu
» de tems après la consignation, s’étant présentés chez lui et s’an« nonçant créanciers de sommes considérables sur le marquis Des» trada , ils avaient prié le sieur Granchier de leur prêter des fonds,
» à valoir sur leurs créances , et que ledit sieur Granchier pourrait
» se retenir dans l’ordre qui devaitêtre fait ; il avait prêté i 55 ,ooo fr.
» en assignats, tels qu’il les avait reçus peu de tems auparavant;
» Attendu que le sieur Granchier reconnaît encore cet écrit pour
» quittance , quant à la première collocation des héritiers Reynard
» et N allet, de la somme de 75,769 f r . , et qu’il 11e peut y avoir
» aucune raison pour que le même acte ne tienne pas lieu de quittance
» de la deuxième collocation, parce qu’il n’y a aucune distinction
» dans cet acte , et que la somme de 155 ,000 fr. couvre l’une et
» l’autre des collocations;
» Attendu que le sieur D eslrada, en allouant l’acte du 29 Mars 1791
» pour la somme entière de 1 55 ,000 fr ., se l’est rendu p ropre, et
» qu’il avait droit de s’en emparer, parce que le montant de cet
»’ acte provenait de ses fonds ;
» Attendu qu’il serait impossible de dire que l’acte du 29 Mars 1791
» doit être regardé comme un billet et une reconnaissance, qui
» constituerait le sieur Granchier créancier personnellement des
ir sieurs Reynard et jV allet, qui auraient fait au porteur em prunt
» de la
somme de
155 ,000 fr. ; que la lecture seule de l’acte
>v réfuterait suffisamment celte objection, et qu’elle serait détruite
» par des conséquences subversives de tous les principes ; il im» pliquerait en effet de supposer que les assignats qui furent con» signés , auraient péri pour le propriétaire , et qu’il en aurait été
»■autrement pour le receveur, à qui sa qualité de dépositaire ne
»• pouvait pas permettre de s’arroger les objets qxii lui étaient
i> confiés;
\
�( i6 )
» Attendu que , dès deux collocations obtenues par les sieurs
» Reynard et Nallet contre le marquis Destrada , l’une a été' por» tée par le jugement d’ordre du premier Therm idor an 2 , à la
» somme de 76,761 fr. , l’autre pour dommages-inte'réts à 68,1 55 ,
» par jugement par défaut du 16 Pluviôse an 5 ; mais attendu que
» ce jugement étant susceptible d’opposition et d’app el, la liquida» tion des dommages-intérêts a été lixée à ¿+7,a 5o fr. par traité du
» 11 A vril i 8o 5 , en sorte que le total des deux collocations forme
» 121.011 fr ;
»
»
»
»
«
» Attendu que les héritiers Reynard et Nallet ont été entièrement remplis de cette somme par le paiement fait le 29 Mars
1791 au sieur Reynard père, faisant tant pour lui que pour le
sieur N allet, son associé, d e là somme de 155 ,000 fr. à valoir sur
leurs collocations dans l’ordre qui devait avoir lieu du prix de la
terre de Briailles ;
» Attendu que les sieurs Reynard et Nallet étaient même sur-
» payés à cet égard de la somme de 10,989 fr. dont ils sont auv jourd’hui débiteurs envers le marquis Destrada en qualité d’héri» tiers de leur père ;
» Attendu que lorsque, par la transaction du 11 A vril i 8 o 5 , le sieur
» Destrada a payé aux héritiers Reynard et Nallet la somme de
»
»
»
»
»
47j25o f r . , à laquelle fut réglée la seconde collocation, pour dommages-intérêts liquidés par jugement par défaut du 16 Pluviôse de
la même année , il ignorait la quittance de 155 ,000 fr. du 29 Mars
1791, dont il n’a eu connaissance que par l’interrogatoire sur les
faits cl articles du sieur Granchier du a 5 Août 181 1 ;
p A ttendu qu’en recevant du sieur D estrada, lors de la transac» tion de i 8 o 5 , la somme de 47 ?25 o f r . , les héritiers Reynard et
» N allet reçu ren t ce qui 11e leur était pas d û , et se sont obligés, par
» cette raison, <* la restitution d’après tous les principes anciens et
» nouveaux, et particulièrement l’article 1,376 du Code civil;
i> Attendu néanmoins que la quittance du 29 Mars 1791, de i 55 ,ooofr.
�( r7 )
» n’est point du fait de ces he'ritiers , mais de celui du défunt R e y -;
» nard, p è re , que rien ne justifie que les héritiers Reynard et Nallet
» aient eu connaissance de cet acte avant la transaction du 11 A vril
)> i 8 o 5 , qu’ils ont pu croire qu’ils étaient, encore créanciers duinar» quis Destrada, du montant de la dernière collocation, et que la
» fraude ne se présumé pas ;
» Attendu qu’ils doivent être considérés dans ces circonstances
» comme ayant reçu seulement par erreur ce qui ne leur était pas
» dû , et qu’ils ne doivent par conséquent les intérêts que du jour
» de la demande :
v
» Par ces m o tifs, le tribunal condamne les he'ritiers Reynard et
» N allet, savoir , les héritiers lleynard en qualité' d’héritiers be'né» ficiaires de leur père , à payer au marquis Destrada la somme de
« 13,929 fr. valeur des assignats au mois de Mars 1791 , suivant le
» tableau de dépréciation du papier-monnaie ;
» Condamne les he'ritiers Reynard et Nallet personnellement à
» rendre et payer au sieur Destrada ]a somme de 47 ?25 ofr. ?avec les
y inte'rêts des dites deux sommes, depuis la demande jusqu’au paie» ment. »
T el est le jugement dont les héritiers Reynard et Nallet viennent
se plaindre devant la Cour. Ils n’ont point à craindre qu’elle le con
firme. Il résulte déjà de l’expose des faits, que le tribunal les a mal
appréciés. Nous allons achever de démontrer ces erreurs.
D I S C U S S I O N .
L e plan de notre discussion est tracé d’avance :
i°.N o u s prouverons que le montant de la reconnaissance du 29
Mars 1791 , n’ayant pu s’imputer que sur la première collocation des
sieurs Reynard et Nallet , ils restaient réellemeut créanciers de la
seconde, lors de la transaction du 21 Germ inal an 13 , et qu’il n’y. a
0
�( i8 )
point lien à restitution de ce qui leur a été paye par le sieur D es
trada, pour les remplir de cette cre'ance.
2°. Suhsidiairement et dans l’hypothèse où les sommes avancées
par le sieur Granchier seraient par impossible considérées comme
i mputables non-seulement sur la première collocation, mais sur la
seconde, nous prouverons que la transaction n’ayant été consentie
de part et d’autre que dans la confiance que le sieur Destrada n’était
pas libéré du montant decette seconde collocatior, elle ne pourraitpns
é re annullée partiellement; que si alors il y avait lieu à rescinder
l’a c te , il devait l’étre dans la totalité et sans division ; et que dans
tous les cas il est impossible d’imputer sur la créance des héritiers
Eeynard etN allet contre le sieur Destrada,les i 5 ,ooo fr. compris pour
intérêts dans la reconnaissance souscrite au profit du sieur Gran
chier.
5 °. Nous terminerons par quelques observations sur la demande
formée par ce dernier.
§ I erLes premiers juges ont décidé que l ’acte du 29 Mars 1791 était
a ie quittance de la créance des sieurs Roynard et Nallet contre le
sieur Destrada.
Nous soutenons, nous, que cet acte ne pouvait être que laj'econnaissance (Fun jnét fait par le sieur Granchier, avec délégation h son
profit sur les sommes pour lesquelles les sieurs Reynard et Nallet se
raient colloques dans l’ordre.
De quel côté est l’erreur ? C ’est ce que les principes vont nous
apprendre. Ceux que nous invoquerons se présentent d ’eux-mêmes *
ils sont aussi simples que constans.
J1 ne peut y avoir de quittance qu’autant qu’il y a paiement.
Voilà une première vérité sur laquelle nous ne pensons pas qu’on
élève des doutes.
�(
*9 )
Dès-lors, et avant de s’occuper des termes de l’acte du 29 Mars 1791,
la première chose à faire pour vérifier s’il est ou non une (¡uittance , c’est de voir si le sieur Granchier pouvait, le 29 Mars 1 7 9 1 ,
faire, aux sieurs Reynard et N allet, sur les deniers déposés dans ses
mains, un paiement valable, un paiement qui lui fut alloué dans le
compte qu’il aurait à rendre de ce dépôt.
Si nous prouvons la négative, il faudra bien convenir qu’il ne
s’agit p a s , dans l’acte du 29 Mars 179 1, d’une somme payée par
le sieur Grancliier, en sa qualité de dépositaire ; mais d’une somme
'avancée, prêtée par lui à ses risques et périls ; il faudra bien convenir
que cet acte n’est point une quittance, mais la reconnaissance d’un
emprunt.
Or , il est de toute évid en ce, que le sieur Grancliier ne pouvaitt
à cette époque du 29 Mars 17 9 1, payer valablement la créance des
sieurs Ileynard et Nallet contre le sieur Destrada.
Q u’était en effet le sieur Granchier? J1 était dépositaire judiciaire
de deniers appartenans au sieur D cstrada, et saisis par ses créan
ciers.
En cet é ta t, il n’y avait de paiement possible au profit de l’un
des créanciers, que d’après une convention faite entre eux, ou en
vertu d ’un jugement d’ordre.
U n principe si évident n’a pas besoin d’être confirmé par des
autorités. V o ic i, au surplus , comment il est rappelé dans le nou
veau Denizart :
« Il ne se fait pas toujours un ordre en toute règle du prix d’une
»
»
»
»
»
»
adjudication. Pour l’ordinaire, lorsque la somme consignée est
m odique, les créanciers, pour éviter les frais d’un o rd re, demandent aux juges qu’elle soit distribuée de concert entre eux,
suivant l’ancienneté de leurs titres. Dans ce cas , les créanciers
peuvent toucher sur la sentence qui intervient en conséquence,
et qui énonce les titres de ceux qui se trouvent utilement colloD quéfr. Mais lorsqu'il y a 1111 o rd re, le reoe\eur ne peut payer
5 *
�( 20 )
<( valablement qu’en vertu du jugement d’ord re, ou des mande» mens des commissaires et directeurs. » ( V . Consignation, §. (i,
n°. 5 . )
Nombre d’arrêts de règlement ont défendu aux receveurs des
consignations de payer par avance les créances dont la collocation
était demandée. Nous nous bornerons à rapporter celui du 18
Juini(H ) 5 , frelatif aux frais des procureurs , q u i, quoique privilé
giés , n’ont point été exceptés de la prohibition.
»
»
»
»
»
»
« La Cour fait défenses à tous les receveurs des consignations
de payer aucune somme de deniers aux procureurs, sur leurs
quittances, à compte et par avance des frais ordinaires et extraordinaires de criées , qui peuvent leur être d us, avant l’arrêt, sentence et jugement portant liquidation desdits frais, à peine contre
lesdits receveurs des consignations, de perte desdites som m es,
et de ne les pouvoir répéter contre lesdits procureurs, leurs liéri-
» tiers et ayant-cause ; et à l’égard des procureurs, d’interdiction
» et de io o liv. d’amende. » ( I b id , n°. 4 -)
Ainsi, au 29 Mars 17 9 1, rien ne pouvait légitimer un paiement
au profit des sieurs Reynard et N allet, puisqu’il y avait un ordre
ouvert, et que ce n’est que long-tems après que leur collocation
dans cet ordre a été prononcée.
A in si, point de titre de leur part pour exiger du sieur Grancliier le montant de leur créance ; point de possibilité pour lui de
la leur payer valablement. Ce qu’ils ont reçu, ils l’ont réellement
emprunté.
Sn;>p(s:>ns qu'immédiatement après leur avoir fait cette avance,
le sieur Granehiei dit d e loi ce de îendre compte du prix de la
terre de B riaillcs, lui aurait-on alloue dans ce compte les sommes
par lui remises aux sieurs Reynard et N allet? N o n , assurément.
Quel m oyen, en eü et, de justifier un paiement entre leurs mains,
quand il n’existait point encore de collocation à leur profit? L e
sieur Grauchier n’avait de tilre que contre eux 5 ce n’est qu’à eux
�( »> )
qu’il pouvait s’adresser pour se remplir de ce qu’il leur avait compté.
Comment donc ne pas reconnaître que c’était un prêt qu’il leur
avait fait?
Voyons encore ce qui serait arrivé, s i, en définitif, les sieurs
Reynard et Nallet n’avaient pas élé colloques. Est-ce à une action
contre eux que se seraient réduits les droits du sieur Destrada?
Est-ce lui qui aurait supporté la perte des sommes par eux reçu es,
s’ils se fussent trouvés insolvables? N o n , sans doute, se hâterat-on de nous répondre. Le sieur Destrada aurait actionné le sieur
Granehier ; il n’aurait tenu aucun compte de tout ce qui avait été
fait sans son consentement et sans autorisation de justice : c’eût été
au sieur Granehier à poursuivre à ses risques les sieurs Reynard
et N allet; c’est lui qui aurait perdu les sommes qu’il leur avait
com ptées, s’il eut été impossible d’obtenir le remboursement. M ais,
dès-lors, ne devient-il pas de plus en plus évident que c’était, de
sa p art, un p ro tê t non un paiement?
S ’il a été exprimé dans la reconnaissance du 29 Mars 171)1 , que
les sieurs Reynard et Nallet en avaient reçu le montant à valoir
sur leur créance contre le sieur Destrada ; s’ils se sont obligés à
faire allouer cette somme au sieur G ranehier, tout ce qui a pu
résulter de cette clause, dans la position où se trouvaient les parties ,
c’e s t , comme nous l’avons plusieurs fois ré p é té , une délégation'
imparfaite , une indication de paiement au profit du sieur Granehier.
L ’eilet de col te délégation était d’opérer, lors de la collocation
des sieurs Rivyuard et N allet, une compensation entre les sommes
que le sieur Granehier leur avait avancées , et celles qu’ils auraient
à exiger de lu i, en sa qualité de dépositaire.
11 fa IIait bien , pour lui donner celte garantie, une stipulation
expresse; autrem ent, il n’aurait pu opposer la compensation ; elle
n’est point admise en matière de dépôt.
Ce n’est qu’à l’instant de celte compensation , et jusqu’à concur
rence do la somme com pensée, qu’il y a eu paiement eh l’acquit
�( 22 )
du sieur Destrada , car ce n’est qu’alors que le sieur Grancliicr a pu
ee faire allouer celte somme dans le compte à rendre par lui du
montant de la consignation.
Mais évidem m ent, . pour que cette compensation s’opérât , il
fallait qu’au moment'clfe la collocation des sieurs .Roynard et N allet,
il existât encore des deniers déposés entre les mains du sieur Gran<’liier; autrement il restait leur créancier, sans être leur débiteur;
plus de compensation possible.
Il n’y a donc eu compensation des sommes avancées par le sieur
Granehier; il n’y a eu paiement par ses mains, en l’acquit du sieur
D estrada, que jusqu’à concurrence de la première collocation.
Point de com pensation, point de paiement de la seconde col
location , puisqu’à l’époque où elle a été prononcée, les assignats
laissés en dépôt pour l’acquitter, avaient péri ; puisque le sieur Granchier n’avait plus dans ses mains de valeurs sur lesquelles pût
s’exercer la délégation consentie à son profit.
Cette seconde collocation est donc restée due aux héritiers Reynard et N aliet; le paiement qui leur en a été fait par le sieur
D estrada, a donc une cause réelle et légitime; ils ne peuvent donc
être tenus de restituer la somme qu’ils ont reçue.
Comment le tribunal de Riom a-t-il pu méconnaître des principes
si élém entaijes, des conséquences si évidentes?
Parcourons scs m otifs, et relevons ses erreurs.
Pour établir que l’écrit du 29 Mars 1791 est une quittance, le
tribunal dit d’abord : « Que cela résulte de la teneur et du contexte
» de l’acte, qui ne peut, suivant lu i, recevoir d’autre interpré« tation. »
C ’est s’arrêter à la superficie ; c ’est ne voir que la lettre de
l’acte, tandis qu’il fa u t, avant tou t, en rechercher l’esprit et en
apprécier les clfeLs.
Quelle règle plus certaine en matière d’interprétation , que celle
�( aS y
qui veut que les tenues d’un acte soientf expliqués dans le sens
ou il peut être valable ?
Qu’importe donc que l’on trouve dans l’acte du 29 Mars 17 9 1,
des expressions en usage dans les quittances , s i , comme nous l’a
vons dém ontré, le sieur Grancliier ne pouvait alors, valablement,
ni payer, ni par conséquent obtenir quittance.
Dans une telle position, de quelque manière que l’acte soit conçu,
n’est-il pas impossible de v o ir , dans le prétendu paiem ent, autre
chose qu’un p r ê t, et dans l’imputation convenue, autre chose qu’une
délégation?
Non-seulement l’a c te , quoiqu’en aient dit les premiers juges ,
reçoit très-naturellement cette interprétation ; mais elle est la seule
qu’avouent les principes.
Aati'e m otif du jugement.
« L ’acceptation que fit le sieur G ranchier, de cet acte; car il
» est, dit-il, évident qu’il entendit que cet acte opérerait sa libe—
» ration dans l’ordre envers le sieur Destrada , jusqu’à concurrence
» de la somme de i 55 ,ooo fr. »
L e sieur Granchier entendit que cet acte opérerait sa libération!
S o it; m ais, envers quelle personne, à quelle époque, et dans quel
cas? Envers les sieurs Reynard et Nallet seulement, ou leurs ayantcause, à l’époque où il pourrait leur faire un paiement valab le,
c’est-à-dire, après leur collocation, et dans le cas où il serait encore
a’o .s dépositaire d’une somme dont il aurait à justifier l’emp’oi.
O r , plus de dépôt lors de la seconde collocation; plus d’emploi
à faire d’assignats démonétisés.
E t ainsi, les circonstances dans lesquelles l’acte du 29 Mars 1791
aurait pu être employé comme quittance de la seconde collocation
ne se sont point réalisées.
Il n’est devenu l’équivalent d’une quittance que jusqu’à concur-
�1
( 24 )
ronce du montant de la première collocation. J1 est reste', pour
le surplus , ce qu’il était originairement pour le tout; c’est-à-dire,
une reconnaissance au profit du sieur Granchier , et la seconde
collocation n’a pas cessé d’être due par le sieur Destrada.
Troisième motif.
« L ’action en recours , qui a été formée par le sieur Grancliier
»
>i
«
»
contre les Reynard et jNiallct, afin qu’ils fussent tenus de lui
faire allouer cette somme de la part du marquis Destrada, lorsque
ce dernier a demandé au sieur G ran ch ier, le compte de la
somme de 5 ( ii, 85(> fr ., qui avait été versée dans ses mains. »
Toujours le tribunal confond les deux collocations, toujours il
étend à la seconde ce qui ne peut s’appliquer qu’à la première.
Quel a été l’objet du recours du sieur G ranchier, contre les
héritiers Reynard et ÜNallet? Quelle justification, quelle déclaration
leur a-t-il demandée? Il a demandé qu’ils vinssent justifier de leur
première collocation , et déclarer qu’ils en ont été payés, au moyen
de la compensation opérée jusqu’à due-concurrence, avec la somme
de 1 55 ,ooo fr. qu’il leur a prêtée; mais en même tems , il a con.
clu contre eux au remboursement de l’excédent de cette somme
de i 55 ,ooo f r ., sur le montant de leur première collocation. Pour
quoi? P a r c e que cet excédent n’a pu s’imputer sur la seconde collo
cation.
IS’est-il pas étrange que le tribunal lire de l’action du sieur Granchicr , la conséquence qu’il a regardé la seconde collocation comme
payée d’avance, aussi-bien que la prem ière, lorsque cette action
à précisément pour base le système contraire ?
Quatrième motif.
« L ’interrogatoire sur faits et articles du sieur Granchier qui a
„ ou lieu le «y mars 18 11 , et dans lequel le sieur Granchier a dit
�( ■=5)
» que les sieurs Reynard et N allet, peu de tems après la consigna» tion ,s ’etant présentés chez lui et s’annonçant créanciers de sommes
)> considérables dues au marquis D estrada, ils avaient prié le sieur
» Granchier de leur prêter des fonds à valoir sur leurs créances ’
» et que ledit sieur Granchier pourrait se retenir dans l’ ordre quj
» devait être fait ; il avait prêté 1 55 ,ooo fr. en assignats tels qu’il les
» avait reçus peu de tems auparavant. »
Le sieur Granchier a déclaré qu’on était venu le prier de prêter
des fo n d s qu’il pounnit se retenir dans Fordre, et qu’il avait prêté
1 55 ,ooo fr.
E h bien ! y a-t-il là autre chose que ce que nous y avons tou
jours vu ; un emprunt avec délégation
Comment de cette déclaration , que le sieur Granchier a prêté ,
le tribunal a t-il pu conclure que le sieur Granchier a payé et que
le titre qui lui a été donné n’est pas la reconnaissance d ’un prêt
mais une quittance ? c’est ce qu’il ne nous parait pas facile de com
prendre.
Il nous semble que , pour répondre à ce m o tif, il suffit de l’op
poser à lui-même.
» Le sieur Granchier, ajoute le jugement, reconnaît encore cet
» acte pour quittance , quant à la première collocation des héritiers
» Reynard et Nallet de la somme de 75,7(19 f r ., et il ne peut y avoir
» aucune raison pour que le même acte ne tienne pas lieu de quit» tance de la deuxième collocation, parce qu’il n’y a aucune distinc» tion dans cet acte, et que la somme de 1 55 ,000 fr. couvre l’une
» et l’autre des deux collocations. »
Point de raison pour que l’acte ne tienne pas lieu de quittance de
la seconde collocation comme de la première ! mais il y a au con
traire pour cela une raison tranchante, c’est que la compensation
qui s est opérée lors de la première collocation n’était plus possible
lors de la seconde,
4
�*j
«
(»6 )
P oin t clc distinction dans l ’acte ! Mais la distinction résulté do lit
nature m:"me des choses; elle résulte de l’événement de force ma
jeure survenu dans l’intervalle des deux collocations , et de l’impos
sibilité absolue que l’acte eût pour la seconde les mêmes effets que
pour la prem ière.
» L e marquis D estrada, continue le tribunal, en allouant l’acte
» du 29 Mars 1791 , pour la somme entière des 155 ,000 fr. se l’est
» rendue propre, et il avait droit de s’en emparer, puisque le mon» tant de cet acte provenait de ses fonds.»
L e marquis Destrada n’est pas le maître de s’emparer d’un acte où
il n’a point été partie, d’un acte qui ne pouvait faire titre vis-à-vis de
lui tant qu’il n’y avait point de collocation prononcée , et qui n’a pu
faire titre vis-à-vis de lui pour la seconde collocation puisque , lors
qu’elle a été prononcée , les deniers destinés à la payer n’existaient
plus.
Que le montant de cet acte provînt de ses fonds, c’est ce que rien
ne constate; mais quand on le supposerait, dès-lors que le sieur Granchier tirait celle somme de sa caisse à ses riques, dès - lors qu’il
pouvait être forcé en recette pour cette somme, tant que les sieurs
Reynard et Nallet n’étaient pas colloqués , dès-lors que cette somme
devait être perdue pour lu i, s’ils n’étaient'pas colloqués et ne pou
vaient la rem bourser, il reste constant que c’était un prêt qu’il leur
faisait, que ce prêt ne pouvait devenir un paiement qu’à l’instant de
leur collocation, et par compensation avec ce qu’illc u r devrait alors,
et que ce prêt n’a pu devenir un paiement quant à la seconde col
location , puisqu’au moment où elle a été prononcée, il n’y avait,
plus de compensation possible.
En soutenant , comme nous l’avons fait, que l’acte du 29. Mars
17«)! ne peut être considéré que comme une reconnaissance au pro
fit du sieur Grancliier , on arrive, s’il faut en croire le tribunal, « à
des conséquences subversives de tous les principes : il implique»
�(
»
»
»
»
27
)
rait, dit-il, de supposer que les assignats qui furent consignés auraient péri pourlepropriétaire, et qu’il en aurait été autrement pour
le receveur à qui sa qualité de dépositaire ne pouvait pas permetIre de s’arroger les objets qui lui étaient confiés, h
Nous croyons avoir prouvé que c’est le système du tribunal qui
est subversif des principes.
E t quant aux considérations d’équité, nulle preuve comme on l’a
déjà fait observer, que les fonds prêtés aux sieurs Reynard et Nallet
fussent pris sur la consignation faite par l’acquéreur de la terre de
lîriailles, qu’ils n’app;ulinssent pas au sieur Granchier, ou ne pro
vinssent pas d’autres consignations.
Mais en raisonnant dans l’ hypothèse gratuitement admise par le
tribunal, c’est d’ailleurs de sa part une erreur manifeste que de dire
que le sieur Granchier 11e pouvait disposer des fonds versés dans sa
caisse ; il est constant au contraire que celte faculté était positive
ment attribuée aux receveurs des consignations, par les réglemens
concernant leurs offices , à charge par eux de représenter, lorsqu’ils
en seraient requis, les sommes dont ils étaient com ptables; qu’y
aurait-il donc de si étrange, de si injuste que le sieur Granchier eût
tiré un avantage d’une opération faite à ses risques? De quoi vient
se plaindre le sieur Destrada ? En quoi son sort a-t-il été aggravé ?
Si le sieur Granchier n’eût point voulu courir de chance, s i,
comme il le pouvait, il eût attendu que les sieurs Reynard et Nallet
fussent colloques, pour leur remettre le montant de leurs colloca
tions , les deniers laissés en ses mains pour faire face à la seconde
co.location ne seraient-ils pas restés consignés jusqu’à la démoné
tisation des assignats? N ’auraient-ils pas alors péri pour le sieur Des
trada? Ne serait-il pas resté débiteur de cette seconde collocation ?
Comment le résultat serait-il différent, parce que le sieur Granchier
a pris sur lui de faire personnellement et à ses risques une avance
�o
( aS )
aux sieurs Reynarct etN allet, avance que le sieur Destrada aurait bien
certainement me'connue et laissée pour le compte du sieur Grancliier , s’il eût trouvé à cela le moindre avantage.
E st-il juste que le sieur Destrada puisse invoquer aujourd’hui un
acte qui lui est étran ger, un acte que dans des circonstances diffé
re n t's , il n’aurait pas manqué de rejeter ?
Non, une telle prétention n’est pas plus conforme à l’équité qu’aux
règles du droit.
Concluons donc que le montant de la reconnaissance du 29 Mars
1791 , 11e s’est point imputé sur la seconde collocation , que le sieur
Destrada était encore , en l’an i 5 , débiteur de cette seconde col
location, et qu’il 11e peut revenir sur le paiement qu’il en a fait.
§ II.
Quelque certaine , quoiqu’évidente que soit la proposition que
no; s venons d’établir, abandonnons-la pour un instant, admettons
que les sommes avancées par le sieur Granchier aux sieurs Reynard
et Nallet se sont imputées sur les deux collocations, que c’est par er
reur qu’on a supposé dans la transaction du 21 Germinal an i 5 ,
qu’il n’avait rien été payé sur la seco n d e, et v o y o n s, dans cette
hypothèse , quel sera le sort de cette transaction.
F a u t-il, comme l’a jugé le tribunal de Riom, que cette transaction,
anéantie en tant qu’ellepréjudicie au sieur Destrada , subsiste en tant
qu’elle lui est favorable? Faut-il, en condamnant les héritiers Rcynard à lui restituer ce qu’il a payé, maintenir la réduction de leur
créance, les sacrifices consentis par eux en considération de ce
paiement?
Dès le premier abord on sent que ce système est injuste; on en
est convaincu lorsqu’on l’examine.
�rv
/
(
29)
L'équité veut que, si l’erreur de fait dans le paiement donne lieu
à restitution, cette même erreur soit une cause de nullité dans la tran
saction.
C ’est là un principe consacré par la législation de tous les tems et
auquel l’article 20*55 du Code civil n’a fait que donner une sanction
nouvelle.
« Une transacliou , dit cet article, peut être rescindée lorsqu’il
» y a erreur dans la personne ou sur l'objet delà contestation. »
Venons à l’application. Quelle question s’est élevée entre les par
ties , lors du traité du a i Germinal an i 5 ? Sur quoi ont-elles tran
sigé ?
De part et d ’autre on est parti de ce point de fait que les héritiers
Reynard et Nallet n’avaient rien reçu sur lu seconde collocation.
Si c’était une erreur, elle était commune aux deux parties. L e tri
bunal de Rioin l’a positivement déclaré. L ’acte du 29 Mars 1791 ,
souscrit par le sieur R eyn ard, seul, était resté jusqu’alors entreles
mains du sieur G rjnchier. Son contexte n’étaitpas plus connu des hé
ritiers Reynard et Nallet que du sieur Destrada lui-même. Us n’en
savaient que ce que leur en avait dit le sieur Granchier. Ils ne dou
taient pas, d’après les explications qu’il leur avait données, qu’ils ne
fussent en même temps et ses débiteurs et créanciers du sieur Des
trada.
Dans cette position , il s’agissait de savoir qui devait supporter la
perte des assignats laissés en dépôt pour faire lace à la seconde col
location , et démonétisés avant qu’elle fut prononcée.
Le sieur Destrada prétendait que les héritiers Reynard et Nallet
devant, aux termes du jugement du iG Pluviôse an 5 , être payés
avec les assignats consignés, ces assignats étaient leur chose etavaient
péri pour eux.
Les héritiers Reynard et Nallet soutenaient au contraire que le
�( 3o )
/rieur "Destrada restaitpropriétaire des deniers déposes j su qu’an paie
ment effectif, et qu’ils avaient péri pour lui.
Voilà l’effet de la contestation.
L e sieur Destrada ajoutait, il est vrai, qu’il pouvait encore ap
peler du jugement du i(> Pluviôse an 5 ; mais dans la réalité il n’atta
chait aucun prix à cette faculté, puisque c ’est précisément sur les
dispositions île ce jugement qu’il fondait sa prétention de faire re
tomber la perte des assignats sur les héritiers Reynard et Nallet.
Nous ne disons rien qui ne soit écrit dans la transaction. V oici
dans quels termes elle explique les difficultés qui divisaient les
parties :
« Dans cet état le sieur Destrada a
» nard et le sieur îia lle t ne pouvaient
» contre lu i, que suivant les termes
» tm '5 , ils devaient être payés sur les
prétendu que les héritiersReyexerc<ir aucune action directe
âu jugement du itî Pluviôse
deniers consignés par l’acqué-
» reur de la terre de Briailles , et qu’il s’était formé à ce sujet un
» contrat judiciaire et irrevocable.
'« Le sieur Destrada ajoutait que ce
n’était pas sa Tante si 1ns
» valeurs remises ou receveur des consignations étaient péries, et
» qu’il ne pouvait sonffrir du coup de la force majeure, puisque c’é»
«
»
»
tait par le fait de l’opposition des créanciers que le prix avait été
consigné ; que la collocation utile avait un effet rétroactif et qu’ elle
faisait réputer le créancier propriétaire du jour de la consignalion. »
» Ledit sieur Destrada 'observait d’nillcitrs qu’il était encore dans
» le« délais d ’appeller du jugement du iG Pluviôse an 5 , qui avait été
» rendu par défaut contre l u i , et qu’il pourrait le faire réform er, en
» r e ■qu’il avait accordé «les indemnités excessives.
» Lesenfans Reynard objectaient que si le sieur Destrada usait de
» la faculté de 1’a p p d , il ne ferait que renouvcller-et prolonger d’une
�A ?*
(5 0
» manière nuisible pour lu i, une contestation dans laquelle îî serait
» toujours condam ne, parce que rien n’était mieux établi que les in» demnités qu’il devait aux ferm iers, et qui avaient été fixées et li)> quidées par plusieurs rapports d’experts faits avec le plus mûr
» examen; que quant au contrat judiciaire, le jugement n’a pas pu
» ordonner leur paiement dans une monnaie qui n’avait plus de cours,
» que la perte des assignats consignés ne pouvait sous aucun rapport
»■leur être im pulée, qu’elle n’avait eu lieu que par Je fait même du
» sieur Destrada , et par la demeure où il avait été de payer ses créair
». ciers ; que les oppositions hypothécaires que ceuxrci avaient for» mées n’avaient, été de leur part qu’une mesure conservatoire quj
» leur donnait une sûreté de plus, mais qui ne les avait pas rendus
» maîtres de disposer du dépôt tant qu’un jugement ne les y aurait
» pas autorisés ; qu’ ainsi la perte qui était survenue demeurait né» cessairement pour le compte du sieur Destrada , qui n’avait pas
»
»
»
»
»
»
cessé d’être leur débiteur, qui. avait conservé la propriété de la
chose déposée , et qui ne pourrait être libéré que par la distributîon effective ; qu’au surplus le sieur Destrada avait toujours pu
faire cesser les oppositions et reprendre les sommes consignées eir
désintéressant les-créànciers , et qu’au, lieu d e ce la , il avaitprolongé lui-même les contestations , en profitant de toute lav longueur
)> des- délais après lesquels il s’était laissé condamner par défaut.
» Dans cet état, les parties considérant que les prétentions respecj> tives pouvaient les jeter dans un procès long et dispendieux , se
» sont rapprochées , etc.
On voit que, comme nous l’avons dit, le point de difficulté, l’objet
de la transaction éLail de savoir qui devait supporter la perte d«s assi
gnats restés en dépôt, et frappés par la démonétisation.
O r, nous le demandons , cette conteslationaurait-ellc pu s’élever;
y aurait-il eu matière à transaction, s’il eût été reconnu en fait que
�* ,
( 3 0
les héritiers Reynard ét Nallet avaient reçu d’avance le montant de
leur seconde collocation? j\on assurément.,non; car alorsles assignats an
lieu d’être restés en d é p ô t, se trouvaient avoir été utilement em
ployés , avant la démonétisation; ils n’avaient point péri dans la
caisse du receveur, il ne pouvait donc être question de savoir pour
qui ils avoient péri; nulle discussion sur ce point, nulle matière à
transaction.
Il y aurait donc e u , dans l’hypothèse très-subsidiaire où nor*
raisonnons, erreur sur l’objet de la transaction ; elle serait rîidicalem ent nulle, et ainsi tomberait la clause portant réduction de la
créance liquidée au profit des héritiers Reynard et N allet, par le
jugement du i(» Pluviôse an 5 . Les premiers juges l’ont cependant
maintenue cette clause, et pourquoi? Uniquement parce que ce juge
ment de l’an 5 était susceptible d’appel.
Combien de réponses à ce motif! E t d’abord, bien qu’il soit parlé
dans le traité du a i Germinal an i 5 de la possibilité d’un appel de
la part du sieur D estrada, n’cst-il pas évident que, dans la pensée des
parties, ce n’était point là le véritable objet de la tranasetion ?
Quel espoir pouvait avoir le sieur Destrada de faire réformer ce
jugement? T outne se réunissait-il pas au contraire, pour garantir aux
héritiers Reynard et Nallet que les condamnations qu’ils avaient ob
tenues, si elles étaient attaquées, seraient augmentées plutôt que
restreintes?
Il était constant que les fermiers avaient déboursé avant leur en
trée en jouissance, un capital de 72,000 fr.
Il était constant qu’ils avaient fait, dans les batimens et dans les
fon d s, des réparations énormes autorisées par un jugement.
Il était constant que, par sa déloyauté, M. Destrada les avait forcés
�ïïf
( 55 )
à demander la résiliation de leur b ail, qui, contracté pour dix-huit
années, n’en avait duré que deux, etqu’il leur était du. des indemnités
proportionnées aux dommages que l’inexécution de ce bail leur avait
causés.
J1 était constant qu e, par un premier jugem ent, leurs répétitions
avaient été fixées à 207,000 avec intérêts à dater du Ier. Décembre
1789; et quoique les bases de cette évaluation eussent souffert des
modifications, ce 11’en était pas moins un préjugé favorable pour eux.
Qu’avaient donc à redouter, ou plutôt, que n’avaient pas à espé
rer les ferm iers, d’une attaque dirigée contre le jugement du 0 Plu
viôse an 5 , qui ne leur accordait pas même les sommes qu’ils avaient
déboursées ?
Le sieur Destrada n’aurait donc eu garde d’interjeter cet appel.
C ’eût été d’ailleurs ruiner par sa base, le système dans lequel il met
tait toute sa confiance, celui qui consistait à soutenir que les héritiers
Reynard et Nallet ne pouvaient exiger autre chose, en vertu du ju
gement de l’an 5 , que les assignats restés en dépôt et affectés à leur
paiement. Sur quoi en effet le sieur Destrada fondait-il ce système?
Sur les dispositions de ce même jugem ent, sur le contrat judiciaire
qui, suivant lui , s’était alors formé; mais commentpouvait-i! y avoir
contrat judiciaire, s’il n’y avait point acquiescement du sieur Des
trada? L ’appel n’exeluait-il pas les prétentions appuyées sur le jugegement? Concevra-t-on que, dans le moment même où le sieur Destrada
soutenait que la collocation des héritiers Reynard etN allet avait eu
l’effet de le libérer avec des assignats sans va leu r, il remît en ques
tion cette collo calio n ;.il provoquât une liquidation nouvelle, dont
le montant devait, être nécessairement payable en numéraire? Concevra-t-onque, pour obtenir une simple réduction de sa dette, il ap
pelât d’un jugement d’où il prétendait faire résulter son entière li
bération? Non sans doute , on n’admettra point de sa part une conti -
�(
34)
diction si évidente, un si étrange oubli de ses prétentions et de son
intérêt. La faculté qu’avait le sieur Destrada d’interjeter appel n’a
donc été d’aucun poids dans Ja transaction ; l’unique difficulté, nous
le répétons , était de savoir pour qui les assignats avaient péri ; et
s’il n’était pas vrai qu’ils eussent p é ri, si cette difficulté ne pouvait
s’élever, la transaction ne peut être maintenue.
20. En supposant même que l’appel qui pouvait être formé par
le sieur Destrada ait été l’un des élémens de la transaction, l’un des
motifs qui ont déterminé les héritiers Reynard et Nallet à la con
sentir , au moins faudrait-il reconnaître que ce n’était là qu’un mo
tif bien accessoire , bien subsidiaire ; toujours serait-il vrai qu’il y au
rait eu erreur sur la question principale, sur l’objet essentiel de la
transaction; toujours y aurait-il nécessité de l’anéantir.
La transaction étant réputée non avenue, les créances des h é
ritiers Reynard resteraient telles qu’elles ont été fixées par les
jugernens des I er. thermidor an 2 et iG pluviôse an 5 , et sur ces
créances viendraient s’imputer les sommes qu’ils ont reçues, tant
du sieur Granchier que du sieur Destrada. Ce serait l ’objet d’un
compte à régler entre les parties.
Pour quelle somme entrerait dans ce compte la reconnaissance
dite du 29 Mars 1791 ?C en e serait certainement pas pour les i 55 ,ooo fr.
qu’elle énonce, s’il est constaté que les Reynard et Nallet n’ont
pas réellement reçu la totalité de cette som m e, et qu’elle se com
pose en partie d’intérêts.
U s e ra it, en effet, par trop étrange de les forcer à tenir compte
des intérêts de ce qui leur était dû , de ce qu’ils auraient reçu en
paiement d’une créance portant elle-même intérêts.
O r, il est constant qu e, dans les i 55 ,ooo fr. énoncés dans la
reconnaissance du 29 Mars 1791 , il entre pour i 5 ,ooo fr. d inté
rêts. C ’est ce qui résulte positivement de la lettre du sieur Reynard, du
G A vril 1792 , de celledes sieurs Reynard et N a lle t, du
5 Mai 1795?
�7
//
(35)
de l’arrête de compte fait entre les sieurs Reynard et Granchier, le
6 JNivose an 5 , toutes pièces ayant acquis date certaine par le
décès du sieur Reynard, et faisant pleine foi contre le sieur DesIradat
Il ne pourrait donc y avoir que 120,000 fr. imputables sur les
créances des héritiers Reynard et JNallet.
Mais c ’est trop s’arrêter à une supposition inadmissible. Il est
tcms de revenir au véritable état de la question , et de rappeler que
l ’opération qui a eu lieu entre le sieur Granchier et les sieurs R ey
nard et N allet, n’a eu pour objet qu’un emprunt de la part de
ceux-ci; qu’il est impossible de le considérer autrement, puisque
les uns et les autres n’ont pu faire que ce qui n’était pas défendu
par les lois ; or la loi défendait expressément aux reçcveurs des
consignations de faire des paiemens par anticipation, au lieu qu’ils
étaient autorisés p a rle s règlemens et déclarations R oyales, à faire
valoir à leur profit les fonds de leurs caisses.
Dès-lors, les sieurs Reynard et Nallet ont pu emprunter lieiteteinent au receveur Granchier ; mais ils n’ont pu recevoir de
paiemens sur la somme consignée, qu’au moment où leur créance
a été liquidée, etaprès que la justice 1 a eu ordonné. E t comme leurs
doinm ages-intérets n’ont etc liquides qu en 1 an 5 , qu’a cette époque
les assignats consignés étaient dém onétisés, ils n’ont donc pu re
cevoir alors aucun paiement du receveur , ni faire avec lui aucune
compensation. Leur créance pour cette partie était entière, et M. le
marquis Destrada restait indubitablement débiteur de cette deuxième
collocation.
A insi, il n’y a point eu erreur dans la transaction, et cet acte
oppose un obstacle invincible aux prétentions du sieur Destrada.
§
III.
.Nous arrivons h la demande du sieur Granchier, et sur ce point,
�( 56)
nous nous bornerons à peu de mots , parce que rien n’est plus simple
que notre défense.
S i , contre toute attente, le système du sieur Destrada pouvait
prévaloir; s’il était jugé que lui seul a droit de s’emparer de l’acte
du 21) Mars 1791,11011s n’aurions point à nous occuper des con
clusions du sieur Granchier. Loin d’être créancier des héritiers
Reynard et N allet, il devrait leur restituer les 9,000 fr. qu’ils lui
ont comptés.
Mais telle ne sera p o in t, telle ne peut être la décision de la
Cour.
Il faut donc voir ce que peut réclamer le sieur Granchier,
comme personnellement créancier de l’excédent des 1 35 ,000 fr .,
sur le montant de la première collocation.
Ce qu’il peut réclamer! Mais , est-ce encore là une question ? Tout
n’est-il pas réglé à cet égard? Comment le sieur Granchier ose-t-il
revenir sur des conventions formelles?
Par une première convention faite en i 8 o 5 , sa créance a été fixée
à 1 5 ,ooo fr. ; sur quoi il lui a été payé 9,000 fr. La preuve s’en
trouve dans ce fait, reconnu par lu i, qu’il s’est alors dessaisi de
son titre , qu’il l’a déposé entre les mains du fondé de pouvoir des
héritiers Reynard.
E l qu’on ne s’étonne pas qu’ une créance s’élevant en valeur
nominale à (>1,000 f r ., ait été réduite à 1 5 ,000 fr. ; c’était encore
plus que le sieur Granchier ne pouvait rigoureusement exiger.
Les prétentions étaient réglées par l’article 22 de la loi du iC> N i
vôse an 0 5 relatif aux comptes-courans pendant la durée du papiermonnaie.
Suivant cet a rticle, si le débiteur, par compte-courant, justifie
qu’il a tenu les fonds à la disposition du créan cier, il n’est tenu
�( 37 )
<pic do vendre on même nature ce qu’il a reçu, ou sa valeu r, sui
vant l’échelle , à l’époque de la suppression des assignais. Dans le
cas contraire, le solde du compte est réduit d’après l’éch elle, u
l’époque où le compte aurait dû être arrêté et soldé.
O r, il y avait compte-courant entre les sieurs Reynard et Nallet et
le sieur Granchier; c’est ce qui est prouvé par l’arrêté de compte
du 0 Nivôse an 5 , où l’on voit que les intérêts se capitalisaient
chaque année.
C ’était donc à l’époque de cet arrêté de com pte, qu’il fallait se
fixer pour opérer la réduction , et les assignats perdaient alors
82 pour 100.
Ainsi , la créance du sieur Granchier valait à peine 12,000 fr.
Néanm oins, abusant, et du défaut de preuve écrite du règlement
fait avec lu i, et des dispositions conciliantes des héritiers Reynard,
il ne craignit pas de leur demander i),45 o fr- au lieu de (>,000 f r .,
qui lui restaient dus.
Cette somme lui fut allouée; et cette fois, la convention fut
constatée par écrit, non pas , il est vrai, dans un a cte , mais dans
une correspondance tout aussi positive.
Le sieur Granchier écrivait au sieur P ag ès, à la fin d’A vril 1806 :
« Je me contenterai définitivement de 9 / p o f r . et des f in is que j ’ai
« avancés. »
i l lui disait encore , le 5 Mai suivant : « Pour la dernièj'e f o i s ,
» j e demande g , 45 o f r . et les fra is d ’inscription} ou rien. »
L e sieur Pagès lui répond it, le 10 du même m ois, qu’il accédait
à sa dem ande, et qu’il envoyait au fondé de pouvoir des héritiers
Reynard la somme nécessaire pour compléter les 9,45o fr. deman
des , et cette somme a é t é , plus d’une année, déposée chez le
sieur A lb e r t, banquier à Ilio m , et tenue ù la disposition du sieur
Granchier.
�C 38 )
Ainsi , proposition d’une part, acceptation de l’autre : voilà Lien
le contrat irrévocablement forme'.
E t d elà, une fin de non-recevoir, irre'sistiLle contre les prétentions
actuelles du sieur Granchier.
Si l’absence d ’un acte en forme pouvait laisser quelque doute
sur l’existence de ce co n trat, au moins ne serait-il pas douteux que
les lettres du sieur Granchier n’oifrent un commencement de preuve
par écrit, plus que suffisant pour faire admettre la preuve testimo
niale. Mais , faudra-t-il en venir à cette extrémité?
Les héritiers Reynard ne feront point à M. Granchier l’injure
de croire qu’il se respectera assez peu pour tenter, sans succès, de
manquer à ses engagemens.
Il
n’est pas inutile de rappeler à la suite de cette discussion ,
que la fortune des auteurs des appelans a été entièrement compro
mise par le fait seul du sieur marquis Destrada , père ; que c’est après
avoir été traînés, pendant plus de trente ans, de tribunaux en tri
bunaux , que les héritiers Reynard se sont rapprochés du sieur
marquis Destrada, fils; et que c’est pour éteindre toutes dissensions
entre e u x , qu'ils ont consenti, et qu’ils croyent avoir réellement
fait d’inonnes sacrifices, par la transaction du ix A vril i 8 o 5 ( 2 1
Germinal an i 5 ).
L e sieur marquis Destrada, égaré par une illusion trompeuse,
voudrait-il cesser dYtre juste envers deux familles qui lui ont aban
donné plus de la moitié d’une créance légitim e? Méconnaîtrait-il
assez ses propres int rets pour vouloir, après trente-cinq an s, recom
mencer un procès, et remettre en question ce qui a été décidé par
la sentence du iO Pluviôse an 5 ? Les héritiersIJeynard 11e dissimu
leront pas qu’ils verraient avec beaucoup de peine celte lutte se
renouveHer; mais ils h» soutiendraient avec persévérance, parce
que le succès ne pourrait eu être douteux.
�( 39)
Au surplus, ils espèrent que ce ne sera pas en vain qu’ils auront
réclamé auprès des Magistrats, supérieurs en lumières comme en
autorité, la réformation d’un jugement qui a consacré l’infraction
d’un acte solennel.
Joseph
PAGES ,
Pour la dame R e y n a r d , son épouse, et pour les autres co-intéressés.
M e. P A G E S , p è r e , A vocat plaidant
Me. GAR RO N , jeune , Avoué.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Reynard. 1816?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès Joseph
Pagès père
Garron jeune
Subject
The topic of the resource
assignats
fisc
créances
ventes
domaines agricoles
institutions intermédiaires
conciliations
collocation
ferme
lettres de change
experts
receveur des consignations
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les héritiers Reynard et Nallet, appelans ; contre le sieur Marquis Destrada, intimé, et le sieur Granchier, ancien receveur des consignations.
Table Godemel : Consignation : autorisé par les règlements à faire valoir à son profit les fonds déposés dans sa caisse) a prêté en son nom diverses sommes en papier monnaie à un créancier ayant droit d’être colloqué dans l’ordre et distribution des deniers prêtés, et ce, par un acte portant reconnaissance des sommes prêtées et des intérêts, avec promesse de les lui faire allouer, s’est-il opéré un paiement par anticipation qui a libéré le propriétaire du fonds jusqu’à concurrence des sommes prêtées bien que le créancier qui les a reçues n’ait été colloqué, que postérieurement, après même que les assignats consignés avaient perdu leur valeur ?
dans ce cas, le propriétaire des sommes prêtées peut-il s’emparer de l’acte de reconnaissance, quoiqu’il n’y soit point partie, et l’opposer au créancier pour établir sa libération envers lui, comme au receveur pour régler le compte des fonds consignés ?
2. après un traité, intervenu entre deux personnes dont l’une avait à régler des droits de créance contre l’autre, le débiteur qui se trouve avoir surpayé, par suite d’une erreur de fait, peut-il répéter les sommes payées par erreur sans que le créancier ait le droit de revenir sur la réduction qu’il lui avait accordée par le même acte ? - le traité doit-il être annulé ou maintenu pour le tout, soit que la partie qui a surpayé agisse par voie de résolution, soit qu’elle agisse par voie de restitution des sommes non dues ?
3. la loi du 23 7bre 1793, qui a supprimé les offices de consignation, n’obligeait-elle les receveurs à verser dans la caisse du district, qu’autant que le directoire du district aurait fait faire la vérification de leur caisse ou qu’il les aurait constitué en demeure de faire le versement des sommes consignées ? La loi du16 germinal an 2, en expliquant et complétant celle du 23 7bre 1793, n’a-t-elle obligé les receveurs de consignation à verser dans la caisse du district, qu’après la vérification et l’arrêté de leurs compte, qu’ils ont pu présenter jusqu’au 30 frimaire de l’an 3 ?
A défaut pour les receveurs d’avoir fait le versement des assignats restés dans leur caisse, doivent-ils en faire compte au propriétaire d’après leur valeur au temps où ils étaient tenus de rendre compte, lors même qu’ils offriraient de rendre les assignats consignés en nature et de même espèce ? Sont-ils responsables pour avoir privé le propriétaire du droit d’en obtenir la restitution du gouvernement ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1816
1789-1816
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2420
BCU_Factums_G2421
BCU_Factums_G2422
BCU_Factums_G2424
BCU_Factums_G2425
BCU_Factums_G2426
BCU_Factums_G2427
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53477/BCU_Factums_G2423.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lyon (69123)
Riom (63300)
Briaille (terre de)
Saint-Pourçain-sur-Sioule (03254)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
collocation
conciliations
Créances
domaines agricoles
experts
ferme
fisc
institutions intermédiaires
lettres de change
receveur des consignations
ventes