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COUR
P R E C I S
EN
D ’A P P E L
DE RIOM.
RÉPONSE,
C
h a m b r e s
assemblées.
P O U R
La
veu ve
B
et les enfa n s mineurs de
a p t i s t e
M A R C O U X ,
J
e a n
appelans;
C O N T R E
B
e n o i t
M A R C O U X
M A R C O U X
C O U X ,
L
jeu n e,
a in e,
et
N
B
o ë l
e n o i t
M A R
intim és.
E S intimés ont im p rim é
un m ém oire où B enoît
M a rco u x aîné ne parle que de lui et p ou r lui. E n syn
copant ainsi les faits de la cause 7 elle se dénature
les mineurs M a rc o u x ont besoin de les rétablir.
A
et
�( 2)
Claude M n rco u x a eu sept enfans.
j|
P a r le contrat de mai'iage de J e a n -B a p tiste , il lui a
fait donation de ses biens présens et à v e n ir , à la charge
de p a yer, i° . à N o ë l, Benoît je u n e, Claudine et .Agathe
M a rc o u x , une légitim ejde 12000 fr. ; 20. à Benoît aîné
12000 f r . , non com pris 2000 fr. de son titre cléric a l;
)
/ 'C .
-3 °- à A n to in e tte , religieuse, une pension de
5o francs.
Il se réserva 12000 francs p o u r en disposer , avec
m ention que s’ il n’en disposoit p a s ,
ces 12000 francs
seroieut partagés entre le f u t u r et les quatre enfans lé g i
timés à 12000 francs ( c ’est-à-dire, que B en o ît, p rê tre ,
en étoit exclus ).
Il fut stipulé q u e si le futur vo u lo it payer les lé g i
tim es, Claude M a r c o u x , son p è r e , lui en payeroit l’in
térêt au taux de l ’ordonnance.
Bientôt après ce m a ria g e , Benoît M a r c o u x , p r ê t r e >
s’empara de l’esprit de son p ère ; et Jean-Baptiste M a r
cou x fut relégué h o rs de la m a iso n , avec 1200 francs
de rente.
Benoît M a r c o u x , fait docteur en th é o lo g ie , ne vo yo it
paç a rriver les bénéfices en aussi grande hâte qu ’il l’eût
désiré. Il n’a jamais été que simple communaliste ou
sociétaire de sa paroisse; et tout p rou ve q u ’ il persuada
à son père de grossir sa l é g i t im e , sans égard p o u r ses
prem iers e n g a g e m e n s , sous la promesse p e u t - ê t r e de
rendre un jour avec u su re , à ses n e v e u x , la p ortion
q u ’ il alloit distraire de la donation de 1779.
" Claude M a r c o u x avoit acheté une maison à SaintÉtienne , le 28 mai 1 7 8 0 , m oyennant
55 oo francs. Il
songea bientôt à eu faire don ¿1 son fils Benoît ; mais.
�( 3 )
p o u r ne pas paroître don ner atteinte à sa d o n a tio n , on
p rit la tournure de faire d o n n er toutes les quittances à
B e n o ît , prêtre.
A p r è s en a vo ir retiré-’quelques-unes, on réfléchit q u ’il
n ’étoit pas encore ém a n cip é, et que le 'ra n g de sociétaire
de paroisse n’ém ancipoit pas*, en con séq u en ce, B enoît
M a rco u x , qui g o u vern oit son p è r e , se fit 'émanciper le
28 mai 1781.
i.I
A l o r s , ët coup s u r ‘c o u p , il se fit donner une foule
de-quittances; de sorte q u ’avant <là fin k l e ‘l ’année il parut
a vo ir payé la maison et tous les ouvriers qu i l’avoient
réparée et embellie.
Bientôt ces quittances'ne p a r u r e n t ‘pas un titre assez
solide; et B enoît M a i’cou x sc fit faire par son >père , le
29 mars ¡1783, unë Obligation de 7 7 1 4 fra n cs, où on
ne manqua pas de sp'écifier^en détail toutes les quittances
qu i en étoient le m o tif : cette somm e de 7 7 1 4 francs fut
dite payable à v o lo n té ' et requête , avec h yp o th èq u e
¿ p é d a le sur ladite maison.
Cette'-maison n’eûtf'été encore qu ’ an foible d o n , si
on ne vô y o it pas que M a rc o u x p è r e , m algré sa grande
disance, absorboit des capitaux considérables, dont on
ne p e u t qu e-d evin er ^’emploi/ Enfin lorsque la r é v o lu
tion vint ôter à B e n o ît, p rê tre , tout espoir de grossir
ses revenus par des bén éfices, il ne chercha plus de
Voies inditefctes ( qui d’ailleurs s’entredétruisent en se
m u ltip lia n t) j-et »il vo u lu t faire un coup de maître en
faisant participer le donataire l u i - m e m e à sa p rop re:
spoliation.
•'
’ \
• vi.
; i: j «•!
Ly 1
Bcnôît 'M a r c o u x , p r ê t r e , ’ se fit
A 2
�( 4 )
ven dre ou délaisser par Claude et J e a n -B a p tiste M a r
c o u x , i° . la maison sur laquelle il avoit hypothèque -,
2°. un domaine appelé de P arade, m oyennant 14000 fr.
à lui dûs p ou r légitim e et titre clérical.
Il fut ajouté que ces immeubles avoient une plusvalue de 2 5 00 francs qui seroient imputés sur les Liens
m aternels ( c ’est-à-dire, sur une créance im aginaire, car
la m ère est encore vivante en 1809).
L e m êm e jour il fut stipulé par un autre acte que
la p lu s - v a lu e étoit plus (considérable encore qu ’on ne
l ’avoit d it; et B en o ît, p r ê tr e , non-seulement se départit
de l’o b lig a tio n , devenue in u tile , de 7 7 1 4 francs, il
reconnut inême être rem p li par ces,' im m eubles d u .su p
plém ent de-légitim e*
i■
_' :j;
•
'f
Ce n’est pas seulement en faveur; de Benoît M a rc o u x :
que le donateur a oublié ses engdgemens. A g a t h e M arc o u x fut m ariée avec le sieur Frotton le 14 novem bre
1787 ; et non-seulement le père hii^constitua 12000 fr.
et 2000 francs sur sa r é s e rv e , ;imais il fut:dit en l ’acte
que la dame .Agathe . M a r c o u x ( qui n’étoit pas éman
cipée et n’avoit pas quitté la com pagnie de son p è r e )
se constituoit de plus une somme de 6000 f r . , q u ’elle
dit p ro v en ir de ses ép a rg n es, et dont l ’acte porte quit
tance.
■,
1
Q u e p o u v o it faire à ¡tout cela le donataire? rie n , sans
d o u t e , que tâcher de reconquérir l’allec lion de son p ère
par une soumission aveugle à ses v o lo n t é s ,,e t lui ôter,
s’il le p o u v o it, les.¿occasions d’aliéner encore, sous p ré
texte du payem ent des légitimes.
.
'
C ’est dans ces yues que Jean-Baptiste M a rc o u x paya
�( 5)
4000 francs sur la dot d’A g a t h e , et 12000 francs potiv
la légitime de N oël.
' ’>r. UIf'-iqr, - :
•r Jean - Baptiste M a rc o u x ïnçmrut en 1794 laissant
plusieurs enfans en bas âge : il espéra, q u ’iils trouvei’oient
un appui dans leur aïeul; mais il est,resté sous la m ê m e "
dépendance jusqu’à son décès arrivé en l ’an 10. E t si
la C our p ou voit douter encore de la spoliation du do
nataire , il suffira de lui dire que la v e u v e M a r c o u x ,
rentrée.)enfin dans la maison après les-scellés et in ven
taire, n’a pas trouvé dans la dépouille, de Claude M a r
coux
un centime p o u r , lui faire rendre les derniers
devoirs.
,!
k) . ° i
, pr
^ Ses plaintes ne lui ont valu q u e . des 4ironies et ides
procédés vexa.tpires ; six cohéritiers ont-affecté de . l u i
faire notifier l e m ê m e jour ^six citations, et ensiytej.&rx
exploits de demande en payem ent des légitimes -et de
la réserve; en proclamant encore q u ’ils,ne s’en tenoient
à leur légitim e en' argent jjq u ^ p a rc e , qu ’il n ’y en avoit
pas dans la succession, et.poijL;, $ejinénagerjle plaisir de
demander ensuite Un supplém ent en<corps héréditaires.^
E n s u ite , et de peur qu’il lui restât, des ressources
p o u r .acquitter ce q u ’ ils c^ein.indoiept, ils ,on t fait des
saisies-arrêts\sur le s d éb ü eu rsret-les, revenus ,de, la' suc
cession.
ij;, ,fT ■
iririJ-.n'T - i ' '
L a veu ve'(M arco u x a; opposé,(i 1?--; ¡q«’elle ne devoit
paâ.de réserve , -surtout par la circonstance qu’elle devoit
faire, face à la légitime im p révue de la .religieuse; 2°. que
A g a th e MarcouX/idevqit/Tapporter I;le. don sim ulé qui
lui avoit été fuit de; 6000,francs ;; 3 0/ q u ’il n’y: avoit pas
�(6)
liéu dë réserver un s u p p lé m e n t , lorsque la légitim e
étoit acceptée après le décès.
!L e tribunal de M ôn tbrison a rejeté ces moyens par
jugem ent dù i i 1 fructidor an i r , ' et à adjugé toutes les
dem andes, c’ëst-à-dirë , !la lé g it im e , lü ré s e rv e , et l ’ex £ëctative d’ uri supplément.
*- Su r l’appél j la.veuvê Mai'cOux a , par ordre d’ un conseil
d é "famille, °rdilbhcé é u ÿ biens à 'venir de la d o n a tio n ,
p o u r '¿’tin 't ë n i F a ü i biëhs ■
’p résëiis, et n’être tenue des
légitimes quë ‘par rëtranchëmerit.
L a C o u r ’ü ’àppel de L y o n , par arrêt du I er. tlierm idor
an 1 3 , a ordonné , i ° . que les légitimes seroient prises
aur les: biens libre's, dans lésquels sera dotifondue la réserve
dé 12000 f r a r i d y $ a ü f 'à !teriir par rëtratichemetit sur les
biën's ’ présent ; 20. que chaque iégitim aire ïa p p o rte ro it
cë qu ’i l ' à reçu à titré de lé g itim e ,’ ce qu i excejitoit
À jgatlie, à l ’égard de.ldtj'üëllë i l ’a été dit au surplus que
Boh'contrat de iiiûi‘iâgeIsëroit éxéëuté' suivant sa form e
ct'tën eu ri ( B llë^ V ô ît-fo riiiéld éU ia n d ë seulement de ce
qüi lui jrëstoit & 'tôüdlîét de
dot. )
î; Eti ^oürsuivdnt ;la éàssdtioii dë cët arrêt > (Benoît
Mafrcoiix , p r ê t r e , ¿voit fbrt bien 'sëhti à quoi le m è h e roit lë rbppbl-t dë ce qii’ il 'oVôlt reçu à titre de légi
tim e ; aussi, prenant l ’alarme sur les suites d ’un-déÎuissëttifeht (Jüi taë l ’Ntirôit pû’s inquiété S’ il ëût été lég itim e,'
il s’étôit ëhiprësSé'Së protestér, par tfôte du -'24 fév rier
1806, qüë &i ô ii ïie rës|)ëctoit pas sa 'V th ïe Üe v j ÿ l , il
dfta^üèMît ën ^aŸÎiritië1 lëfe miriëtiVs M itr c o u x , ëo'rtïine
hM itiéré:idé ‘(Té&iirBdj^tistë , qUFel'o'it-^ia’L'tit' aüdik'iTdle. ‘
�Quoi, q u ’ il en soit , l ’arret. (3<5ri>yon a été
;• 1a
•cause :a . étéoTeovQy.^i cî^vanfcllii' ,Goin\. cjgjliionj i ¡ fit la
cause a/été iphudée. devant elle.. -.aur/f] c c o d
i'(" . ;.(,f
L es mineurs M arcoux .ont renouvelé lé^; moyens; p té r
sentes en la C o u r de L yo n -, sur lu confusion'dt* la ré
serve dans les biens à ven ir. Ils le p o u v a i e n t , parce q u ’un
arrêt de cassation n’est q u ’. une opinion , e t rn ’e$tjpoirit
une lo i; ils le d e v o i e n t , p a r c e ‘que l’arret de I-yori fut
rendu avec solennité et méditation.!
- nn
Ils ont ajoiité à cette question p r i n c i p a l que la dona
tion des biens présens ne p o u v o it pas au surplus être
g re v é e d’une réserve .de 12000 f r . , si le. père en ovpit
disposé de son vivant! directement-.,ou indirectement.
O r , il étoit incontestable que 1b p ère a vo it retranché
plus de 12000 francs des biens donnés à son fils en J 7 7 9 ,
e t par conséquent la donation ne devo it pas souffrir
un second retranchement de 12000 fr. après sa .mojt’k
i ° . Claude M a rc o u x père av.oit ven du en 1778; un
im m eu ble en la com m u n e d ’A n ié r e ; il lui restoit 4
toucher 6000 francs lors de sa donation : il. les a reçus,
après 1 7 7 9 ; et q u o iq u ’ ils aient été évidem m ent em ployas
à payer la maison acquise en 1 7 8 0 , il ne reste aucune
trace de ce capital de 6000 francs.
.1
■ - •!
:
20. Il a vendu depuis 177 9 u n e /rente¡a 11 sieur, Pierre)
R iga u d , de S a in t-E tien n e, et .a touché p o u r le capital
2400 francs.
3 0. Il s’est fait rem bourser par le sieur Jacques Biti'aloi^
une rente au p rin cipal de
5 q o o francs.:
1.
40. Il a fait un don simulé à A g a th e M a r c o u x , de
6000 frans; et il est vra im e n t im possible :en fait et e à
�r ( 8 )
droit de prétendre, q u ’une fille n o n 'é m a n c ip é e , qui n ’a
"j’ainhis ë<i> d^aUtre doifticild' q'ue - c e lu i>de; so n -p ère , ait
pu avoir 6000 francs de sesïâ œ /tîersiW à u tcsles règles
•de droit/se* réuûfesent p o u r dire< que ¿cette; sommet est
réputée légalem ent p ro v en ir e x ' su b sta n liâ p a l ris ; et par
conséquent c è s 6 o o o francs sont encore retranchés de la
"donation des biens* présens.'
!'■ V. 1 ■
■*>.-_> ,Vi. •
Jxj!5 °. lia délaissé àBenoît>M arcoux, prêtre,‘ p ou r 14000 f.,
une maison et un domaine considérables. Si on ne peut
•pas p ro u ve r sans experts que ces objets valoient 30000 f . ,
au moins est-il avo ué par le prêtre lu i- m ê m e qu ’iL y
avoit 1 0 2 1 4 francs d e plus-value.
■Ces faits étoient clairs et positifs
aussi les oncles
M a rco u x ont-ils cru plus, à propds d’y répondre par des
fins de non-recevbir. < >
Ils disent, i° . que les'ca p itau x reçus par le père ne
sont pas pris, sur la donation de biens présens , parce
qüe le donataire n’est saisi du m obilier que lorsqu’il y
a un état a n n e x é 'à l ’acte; 20. q u ’à l ’égard des 6000 fr.
d ’ A g a tlie , il y a chose jugée et m êm e acquiescée; 3 0. que
B enoît M a rc o u x , p rêtre, est p ropriétaire par délaissement
du donataire l u i - m ê m e , et que d ’ailleurs il avoit un
pécule q u a s i c a s tr e n s e , étant sociétaire de sa paroisse,
ce qu i lui donnoit un revenu de 3000 fr. depuis 1779.
- L a prem ière objection des oncles M a rc o u x est une
erreur de d r o i t , sous deux points de vu e : car d ’abord
lds rentes foncières étoient, avant le Gode c i v i l , un im
m eu b le; les rentes constituées étoient un im m euble fictif;
ci à -ce titre il ne falloit pas d’état annexé à la donation.
E u second lie u , cet état n ’est pas exig é par l’ordonnance
de
�. (
9
)
de 1 7 3 1 , p ou r les donations faites par contrat de mariage.
C ’est l’article i 5 qui exige cet é t a t , et l ’article 17 ex
cepte form ellem ent les donations contractuelles de la dis
position de l ’article i 5 . Ce p rin cip e, au reste, est enseigné
par R ic a r d , L o u e t , M . de Lam oignon en ses arrêtés, et
par M . F u rg o le sur les articles 1 5 et 17 de l ’ordonnance
de 17 3 1 . Il est donc surprenant q u ’il ait p u être c o m
battu à l’audience'de la C our.
L a deuxièm e objection est plutôt fondée sur des mots
que sur des raisons : car p o u r opposer la chose ju g é e ,
il faut q u ’il y ait tout à la fois eadem r e s , eadem ca u sa
p e te n d î, eadem con d itio p erso jia ru m .
O r , la contestation particulière qui s’étoit élevée contre
A g a t h e M a rc o u x , est chose étrangère au x intimés a c
tuels. L es mineurs demandoient à chaque légitim aire le
rapport de ce qu ’ il avoit reçu p o u r com poser sa p ro p re
légitim e et la réserve , si elle étoit due. Il a été jugé
qu’ A g a tlie M a rc o u x ne devoit pas ce ra p p o rt, parce que
son contrat de mariage devoit être exé cu té . E t en effet,
si le p ère avoit dans ses mains plus de 6000 fr. dispo
nibles , les mineurs n’avoient aucune qualité p o u r exa
m iner si les 6000 francs étoient donnés ou non.
M ais en m êm e temps la C o u r de L y o n dispensoit les
mineurs de rien payer de la réserve ; de sorte que la
chose jugée se réduisoit à dire que les 6000 fr. , pris
ou non sur la ré s e rv e , étoient une chose acquise à titre
valable.
C om m ent se p e u t - i l que les adversaires syncopent
encore cet arrêt cassé, p o u r y prendre un fragm ent de
B
�( IO))
la chose ju g é e , et rejeter le surplus? C a u sa ju d ic a ti est
in d ivid u a .
>
•
D ’ailleurs il ne s’agit pas aujourd’hui de faire rap
p o r te r ces
6 q o o francs par celle .qui les a re ç u s , et de
les lui ô te r ; mais seulement de p ro u v e r que si le père
a pu les lui donner , c’est aux dépens de sa réserve.
A in s i il n’y a pas chose ju g é e , il n’y a pas eadem ca u sa
peten d i ; au contraire, c’est dem eurer dans le^cercle de
la chose jugée elle-m êm e.
L a troisième objection est ce que Benoît M a rc o u x a
vo u lu em bro u iller le p lu s , p ou r esquiver les éclaircissemens que la C o u r lui a demandés.
C ’est sur la foi (le sa parole q u ’il assure avoir pu
payer fort aisément en peu de mois une somme de
7 7 1 4 francs; et m ê m e , s’il faut l’en c ro ire , l’argent lui
abondoit si f o r t , q u ’en 1 7 9 4 , quand tout l’or de France
étoit m étam orphosé en p a p ie r , il avoit encore une somme
de 10830 f r . , précisément ¿t la portée du député J a vo g u e,
q u i , d i t - i l , le fit arrêter et prit son argent.
Ce député là 11e démentira pas la captu re; il est m ort :
et certes il faut bien se garder de l ’exh u m er p our q u ’il
nous rév èle ce q u ’ il en est. J a v o g u e , proscrit lui-mêine
p o u r ne pas s’être born e a tuer des aristocrates, ne seroit
digne de confiance p o u r p erso n n e; et Benoît M a rc o u x
a pu en toute sûreté de conscience le charger d’ une
iniquité de plus.
Jl faut au moins con ven ir que les biens temporels
abondoient grandement chez le sieur M a r c o u x , prêtre.
Q uand son père achète des m aisons, c’est lui qui les
�( 11 )
p aye; quand tout le m onde n ’a qu e des assignats, il lui
reste encore beaucoup d ’argent.
Ce n’est pas ce que la C o u r lui demandoit ; elle vo u lo it
juger par ses y e u x de la sincérité des quittances données
sous son n o m , qui m otivoient l ’obligation de 7 7 1 4 fr. :
mais il ne paroît pas qu ’il ait vo ulu les p ro d u ire , qu oique
l’acte de 1792 constate q u ’il se les est retenues.
- D ’a b o rd , il est p r o u v é , par l’o b lig a tio n , m êm e , >quer
la quittance la plus considérable étoit ^donnée R ivant
l ’émancipation. •
'
Jusque-là B e n o ît, p r ê tr e , étoit sous, la puissance pa
ternelle ; il u ’avoit pas 'dei fonctions ecclésiastiques ca
pables d’ém anciper; il n’étoit pas s u i ju r is : la loi donnoit
au père l’usufruit des choses m êm e venues d’ailleurs que
des deniers du p ère; et si on se pénètre bien de la p o
sition de B e n o ît, il y a du ridicule à le croire capable
de payer 7 7 1 4 francs en si peu de temps.
E t que f a u t - i l p ou r juger l ’avantage in d ire c t? des
preuves? n o n , car la fraude se cache sous les apparences
de la v é r i t é , n im ia p rcca u tio d o lu s , et la parenté de
ceux qui contractent est déjà le prem ier signe que les
auteurs exam inent et regardent com m e prépondérant.
Ricard ( 1 ) , D an ty ( 2 ) , C habrol ( 3 ) , disent sur cette
matière tout ce q u ’on peut penser. I , article 9 11 du
Code N ap o léo n réunit toute leur doctrine. « T o u t e
« espèce de disposition au
(1) P. i re. , ch.
3,
profit d’ un incapable. EST
sect. 16.
(2) Chap. 7 , sur Boiceau.
(3) Chap. 14, art. 26, sect. i 3 .
)
B a
�«
nulle
( 12 )
, soit q u ’on la déguise sou s la J b r m e d ’un
« co n tra t o n é r e u x , soit q u ’on la fasse.sous le nom de« personnes interposées. »
A in s i la loi ne com pose pas; elle ne se prête pas aux
arguties q u ’on peut tirer d’une précaution plus adroite.
E lle a n n ulle.
D u m o u lin n’avoit pas dit autrement sur les ventes et
quittances d’ un p ère à son fils ou à son gendre. C o n clusurn est qu od ven ditio fa c ta j i l i o , v el g en ero , n o n
y etiarnsi n o ta riu s d ic a t p retiu m num eratum .
f u i s s e cora m se. ( P a r is , 1 2 4 , n°. 1 2 . )
D isons donc aussi que B enoît M a r c o u x , f i l s et lé g i
timante, étant incapable de recevoir au delà de sa lé g i
v a le t
tim e au préjudice du donataire déjà s a is i, n’a à son
profit q u ’ un acte N U L et sujet à rapport.
M a rcoux p ère ne p ou vo it pas lui délaisser des biensfonds en 1 7 9 2 ; il n ’en avoit pas g re v é le donataire; e t ,
p o u r payer, il faut être p ro p riéta ire de la chose donnée
en payement (1). O r , le père ne l ’étoit plus après sa
donation de 1779.
B enoît M a rc o u x se p réva u t du consentement du do
nataire; mais ¿[lie ceux qui pourroient penser qu ’ un tel
consentement est obligatoire, lisent ce que dit R icard (2)
sur cette matière , et ils ne douteront plus. U n p ère
qui sollicite le consentement de son h é r it ie r , est tou
jours un père : h n p e r io sissim u n i rogandi g e n u s , eu tu ,
q u i itnperare p o te s t, rogat (3).
•
(1) Ccd. N a p . , art.
(2) P. i re. , ch.
1238.
?
.
.
3 , sect. 17, n°. 776»
(3 ) Plia, in Traj»
.ii r .
,
;
�( i3 )
D ’ailleurs,' Jean-Baptiste M a r c o u x , donataire, n ’étoit
encore saisi de rien : sa donation de biens présens et
ve n ir étoit en suspens jusqu’.au décès du donateur ; d ’après
l ’article 17 de l’ordonnance de 1 7 3 1 , elle étoit caduque^
en cas de prédécès ; ainsi les enfans seuls ont été dona
taires/«re sua : ils ont été saisis directem ent, et l ’option
n’a pu être faite que par eu x au jo u r du d écès. ] D c l
A in s i toutes les dispositions intermédiaires d u dona-.
taire p rédécédé sont résolues. Son consentem ent n’a p u
rien ôter au droit de ses enfans; ils ont opté p ou r les
biens p ré se n s, et par conséquent c’est lors dp décès.
seulement q u ’ils ont eu le droit de faire rapporter tout,
ce q u i ma'nquoit du x biens existans e n '1779.
,,,/ ? : 0
Ces principes étoient élémentaires jusqu’à nos jo u rs,
et c’est en 1808 q u ’ ils ont reçu une p rem ière atteinte:
mais quelque respectable que soit l’opinion qui les con
teste, la C o u r examinera si elle.doit laisser lesjidées plus
long-tem ps incertaines sur ce point de d r o i t , et quelle
influence doivent avpir,l’autorité de R icard et de C h abrol,
la lettre de la loi ( au jo u r du décès ) , et une lon gue
habitude de ne jamais pfcnser autrement.
>
• Si Benoît M arçou& pe, rapportait pas le dom aine q u ’ il
a ôté à la donation de 1 7 7 9 , il
devroit a u :jmoins la
plus-value : et c’est ce q u ’enseigne Duplessis ( 1 ) , p o u r
le cas m êm e où il n ’y a pas^d’incapacité de celui qu i
reçoit. Q uan d des experts auront estimé ce :dom aine(et
la m a iso n , la 1C o u r r a u ça q u i |ujLr^u;,ajimpcçsé; sui} la
valeur.
• , : :-p - '• • ••
r J, r ; -0{.
..
■•
,-r
'
(1) Des successions ,rliy. i cr. , ch. a. (,
, <.t h
r— ■■ . ,
)j(
�CM )
B enoît M a rc o u x prétend q u e cette demande en rapport
e s t 'n o u v e lle , et doit être ren voyée devant les premiers
jfigés p o u r subir les deux degrés''de juridiction.
" M ais sous tous les points de vu e cette prétention est
mal conçu e, et un autre procès seroit chose frustratoire.
n ' i ° . G’èât Berïoît‘)'M a rc o u x qui demande lu i-m êm e *
12000 fr. de réserve : s’ il l’a'dans les m ains, il ne peut
pas la5 demander.
D o n c les conclusions en rapport ne
sont q u ’une fin de n o n -re c e v o ir.
'
2°. Ses frèresr se joignent à lui p o u r demander ces
12000 fi-ancs : si l ’ ün des demandeurs en est nanti, c’est
à lui seul qü ’ il faut s’en prendre , ou bien le défendeur
est bien fondé à conclure contre lui à ce qu ’il rapporte
l ’objet de la dem ande, puisqu’il est dans ses mains. C ’est
donc encore là une exception légale qui est inséparable
de l ’action. • :
1 i •j -
i
< J3°. E n un m ot,' il àeroit ridicule de dire à celui q u ’on
assigne : P ayez-m o i aujou rd’hui avec Votre argent, et vous
m ’assignèrez demain p o u r obtenir!de m oi la restitution
de ce que vous aurez payé.
4°. L a v e u v e M a rc o u x a toujours demandé le rapport
parl;cliâôuri de ce q u ’il-?avoit reçu à titre de légitim e :
¿¿s^ébhclusionsf6ht été m êm e adoptées. M a r c o u x , p r ê t r e ,s’én eshpìaiht'^ p ou r ne pas rappot-ter le domaine. D o n c
les conclusions actuelles en rapport et désistement ne
sôrit pas' nôiïVellesi
«J't ;«t / , t *i
u, )
.?»•
Cë : q iiî)<ést:'clhii'f,'dans celte cause ;>c’eàt que M a rc o u x
p ère a retranché de sa donation de 1 7 7 9 , un dom aine
tirurnison a “payé" la-légitime-),- et -environ 20000 fr.
en capitaux. Le m om ent ’q u ’il ipcliofei^pouiv diifiinuer
�ainsi la donation , a été lorsque'des m oulins êt'dclüse«
à saumons furent détruits par une in o n d ation , avec/une
. *
;
7
i
pertfc de^plus de 60000, fraijcs.j nu O 1:f ¿b L?iu-»;r- i:J
Si le sieur M a rc o u x père a pu prendre sur ses<;biens
des capitaux aussi considérables, ce n’a pu être que sur
les biens. , lib r e s ,' c’est-à-dire:/sur
la réserve..
.. JjL k
'
.L ' \ k—
*.
» V o ilà l’im putation de droit.
Remarquons; encore q u c jM a r c o u x fils a payé 14000 fr.
sur les légitim es, avant l’ouverture de la succession. L e
p ère lui en doit l’intérêt par c o n v e n tio n , et il n’a pu
y obliger que ses biens l ib r e s , c’est-à-dire, encore sa
réserve. V o ilà une autre im putation de droit.
T elles sont les observations auxquelles les mineurs
M a r c o u x se bornent. Ils ne donnent aucuns dévelo pp emens à la question de cum ulation de la ré s e r v e , et p o u r
le soutien de l’arrêt de la C o u r de L y o n ; un précis aussi
rapide ne peut pas en com porter l’é te n d u e , et l ’arrêt
au reste plaide assez puissamment p o u r lui-m êm e.
L es mineurs M a rc o u x se sont plaints de la réserve
d’ un s u p p lé m e n t , dont le jugem ent de M ontbrison a
donné acte. Ce supplém ent ne peut être dem an d é, lorsq u ’après le décès il dépend des légitimaires de v o u lo ir
un partage ou une légitim e. L ’option des adversaires
est p ositive, et ne doit plus laisser de matière à procès.
Ils plaident s u r la su ccession . Q u ’ ils accum ulent au
jourd’hui toutes leurs prétentions, mais qu ’ ils ne prennent
pas texte dans un procès ju g é , p ou r un procès à naître:
cela n’est ni l é g a l , ni légitime. L e procès de la su c cess 1011 ■
M a r c a u x ;doitA,ê tvc ju g é c]cnnii(iruj L e tei^iple ;de
Janus ne çloitx pas: être o u y q r t 'f p ^ .^ .r n ê m e arrêt qu i
�( 16 )
doit le fermer ; et sî les oncles M arcoux trouvent du
plais ir à se menager un appendice de procès, il est de
la dignité de la Cour de leur ôter-'cette maligne jouissance.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat. '
Me. M A R I E , licencié avoué.
A RIO M , de l'imprimerie de T hibaud Landriot , imprimeur
de la Cour d appel.. — 20 Mars 1809.
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. La veuve et les enfants mineurs de Jean-Baptiste Marcoux. 1809]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
prêtres non émancipés
donations
prêtres
doctrine
Description
An account of the resource
Précis en réponse pour la veuve et les enfants mineurs de Jean-Baptiste Marcoux, appelans ; contre Benoit Marcoux aîné, Benoit Marcoux jeune, et Noel Marcoux, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1809
1779-1809
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0324
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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doctrine
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Text
M E M O I R E
EN
R É P O N S E ,
POUR
L e cit. A R M A N D , J u g e au Tribunal d ’appel, intimé
^
C O N T R E
L e citoyen B A I L E , marchand, appelant.
L A contestation, qui divise les parties, ne présente
qu’une simple question de f a i t , celle de savoir si la,
clause, portant que le restant du p rix d ’une vente d ’im
meubles , ne sera payée par l'acquéreur, qu'après cinq
ans révolus } sans pouvoir anticiper le terme, équivaut
à une stipulation en numéraire , ou si le reliquat est
sujet à réduction, d ’après le mode prescrit par la loi
du 16 nivôse an 6 ?
F A I T .
Par acte du 5 frimaire an 2 reçu par Chassaigne, notaire, le
A
TRIBUNAL
d
DE
’ app el
RIOM .
�cit. A rm a n d , tant en son nom propre et p riv é , qu’en qualité de
mari d’A n n c-A m a b le Cassière, et en vertu du pouvoir porté par
leur contrai de mariage , vendit au cit. B a ile , un bien situé dans
la commune de R o m a g n a t, consistant en bâtimèns, g r a n g e ,
c u v a g e , jardin clos de murs , deux prés-vergers , de la contenue
d ’environ six œuvres , environ vingt septerées de terre, environ
trente œuvres de vignes, et deux saussaies, moyennant la somme
de cinquante-cinq mille livres, sans énonciation d’assignats ni
de numéraire.
L e citoyen Baile avait beaucoup d ’assignats à sa disposition;
le citoyen Arm and qui n ’avait ni des créanciers à satisfaire , ni
des projets d’em ploi, consentit, après bien des débats, d’ en re
cevoir pour 27,500 liv. ; l’acte en contient quittance.
A l’égard des 27,600 livres restant, il lut convenu qu’elles
seraient payées en num éraire, mais on ne pouvait pas l ’expri
m er; cela eût compromis le notaire et les contractans.
Présumant bien que dans l’espace de cinq ans, les assignats
seraient ôtés de la circulation et remplacés par le numéraire,
le citoyen A rm a n d , à l’exemple d’ un grand nombre de vendeurs
d ’im m eubles, proposa de suppléer au silence de l’a c te , par la
stipulation d’ un long terme, et la clause prohibitive de pouvoir
l ’anticiper ; cela fut accepté , et la clause fut rédigée en ces
termes :
« L a présente vente faite moyennant la somme de cinqunnte« cinq mille livres, dont ledit acquéreur en a présentement payé
« comptant audit vendeur, vingt-sept mille cinq cents liv r e s ,
« dont quittance; et à l’égard de la somme de vingt-sept mille
« cinq cents liv. restante , ledit acquéreur promet et s’oblige de
« les payer , et porter audit vendeur, d’aujourd’hui en cinq ans ,
« sans pouvoir anticiper ledit term e, pour quelque cause et sous
« quelque prétexte que ce puisse être, comme clause expresse
¥. et substantielle des présentes.
L e délai de cinq ans n’a pas paru trop long au citoyen Euilc ;
�Ç 3 )
il n’a ni fait des offres du capital, ni même payé une année en
tière d ’intérêts.
En revanche il a fait une inscription hypothécaire pour sa
garantie , sur le citoyen A r m a n d , quoique celui-ci eût répugné
d ’en faire pour sa créance.
Il a dans la suite déclaré qu’il entendait profiter de la réduc
tion décrétée par les lois du 16 nivôse an 6.
Comptant peu sur cette m esure, il profita du passage du cit.
A r m a n d , sur la fin de l’an 6 , pour lui témoigner des craintes
sur une éviction future. Celui-ci ne se borna pas à les dissiper,
il offrit même de reprendre le bien à des tempéramens rai
sonnables.
D e s voies de conciliation s’ engagèrent; elles n’étaient sin
cères que de la part du citoyen A rm a n d : cela résulte clairement
des propositions faites par le citoyenBaile. Les médiateurs furent
de son choix; ils méritaient trop la confiance du cit. A r m a n d ,
pour ne pas augurer d’heureux résultats.
L e citoyen Baile proposa pour conditions de la revente, le
remboursement,
i.° D es assignais qu’il avait déboursés, conformément à l ’é
chelle de ce département, avec l’intérêt sans retenue.
Cet article était accordé par le citoyen A r m a n d , malgré 1g
dépérissement total de ces papiers en ses mains ,et la faveur du
tarif de ce d épartem en t, pour le citoyen Baile.
2 ° Des droits d’enregistrement, d’inscription , frais et loyaux
coûts de la vente. Cet article était encore accordé, quoique la
perte de ces frais dût retomber sur la première vente.
3 .° Des frais de construction d’une grange sur les fondemens
et avec les matériaux de l’ancienne, q u ’il évaluait modérément,
compris de prétendus dommages-intérêts, à 10,000 livres.
L e citoyen A rm a n d observa que la nouvelle grange avait été
bâtie sur le même local de l'ancienne , le seul convenable pour
l’habitation du propriétaire, et néanmoins il o lirait la plus valueA 2
�Jïl
V ■'
( .4 ?
que cette reconstruction pouvait ajouter aux objets vendus, sous
la déduction des anciens m atériaux, et la compensation a vec les
dégradations commises par l’arrachement de quantité de noyers,
d’arbres fruitiers , et d’ une vigne de douze œuvres en plein
rapport.
4 .0
Baile exigeait que les intérêts par lui dus , demeurassent
fixés pour l’an 3 , à 32g liv. 11 sous 3 deniers.
P o u r les huit premiers mois de l’an 4 , à 23 o liv.
P o u r les quatre derniers mois de l’an 4, à 2 17 liv. i 3 sous.
P o u r l ’an
5 , à 653 liv. 2 sous 6 deniers.
E t pour l’an 6 , à pareille somme; quoique le conlrat de vente
l ’oblige de compter de ses intérêts à raison du denier vingt sans
retenue.
5 .° Enfin il entendait continuer de jouir pendant deux a n s ,
lors prochains, ou jusqu’au remboursement de ses reprises.
D es propositions aussi déraisonnables ne présentèrent au cit.
A rm a n d que la perspective des tribunaux; là finit la médiation.
E lle fit place à une demande en nullité, ou résolution de la vente
motivée sur le péril d’éviction. Près de cinq années s’étaient
écoulées depuis le retour du num éraire, et près de trois ans
depuis l’échéance du terme c o n v e n u , sans que le cit. Baile eût
montré de l’empressement à se libérer.
l^a demande en nullité de la v e n te , fondée sur ce que le bien
était d o ta l, (demande contradictoire avec les réunions , les amé
liorations ou les dégradations qu’il a com m ises) , par laquelle il
a préludé, et rejetée, par un jugement auquel il a acquiescé, ne
tendait certainement pas à ce but. L a lenteur affectée dans la
poursuite de cette demande , qui a pris naissance le 4 vendémiaire
an 7 , et n’a été terminée que le
¿3
ventôse an 9 , a persévéré
depuis.
B aile a attendu avec constance un commandement de payer,
auquel il a formé une opposition, qui a été suivie d’une requête
du 2 prairial an 3 , tendante à ce que le reliquat du prix nu fût
�( 5 )
payable qne suivant l ’estimation par experts convenus ou pris
d ’oilice , de la moitié des objets vendus; qu’il lui fût donné acte
de ses offres d’avancer les frais de cette eslimation , et cependant
sursis à toute poursuite, jusqu’à ce que le montant de la dette
fût connu et jugé.
L ’ ordonnauce qui lui donna acte de son opposition, sur laquelle
on en viendrait à la première audience provisoire , toutes choses
demeurant en état, fut signifiée le 9 prairial su iv a n t, mais sans
citation , ce qui obligea le citoyen A rm a n d à le citer en conci
liation , et ensuite en débouté d’opposition et condamnation à
payer en numéraire.
Jugem ent contradictoire est intervenu après un intervalle de
n e u f m o is, par le q u e l, attendu que par le contrat de vente du
5 Frimnire an 2 , il est expressément convenu que la somme de
27,500 liv. , excédant du p r i x , ne pourra être payée qu’au bout
de cinq ans ;
Attendu que les lois sur les transactions des particuliers, con
senties pendant le cours du papier-monnaie , n’ont pas eu en vue
celles où les débiteurs avaient prévu l’abolition du papiermonnaie et le retour du numéraire, et que la clause du paie
ment à long t e r m e , présuppose que les parties ont eu en vue
le retour du numéraire ;
A ttendu que la loi du 27 thermidor an 6 , additionnelle et
interprétative de celle du 16 nivôse précédent, d éclare, art. 1 4 ,
qu’ il n’est point dérogé par les lois du 16 n ivôse, aux clauses
prohibitives, apposées dans les contrats d’aliénations d’immeubles,
pendant la dépréciation du papier-monnaie, sans s’arrêter à l’op
position au commandement de p a y e r, et à l’ordonnance de
surséance du 2 prairial an g , non plus qu’à la demande en réduc
tion de la somme de 27,500 l i v . , desquelles Baile est débouté,
ordonne que les poursuites, en commencées , seront continuées.
E n conséquence le condamne à payer la somme de 27,500 liv.
en numéraire , ensemble les intérêts légitimement d u s , et aux
dépens.
*£<+
�c 6 }
C e jugement n’a été rédigé, expédié, et signifié que deux mois
après.
A p p e l de la part du citoyen Kaile.
Jugement par défaut, auquel il a formé opposition.
L ’appelant vient de répandre un mémoire à consulter, suivi
d’ une consultation, et ci’ un jugement du tribunal de cassation ,
auxquels il attache la plus grande confiance.
M O Y E N S .
L ’appelant a beau se dissimuler, la promesse d’acquitter, en
numéraire, le reliquat du prix en question; promesse qu’on n’a
cessé de lui rappeler, et qui n ’a jamais été désavouée, peut
être pourtant de quelque
considération. On l’a interpellé de
déclarer en quelles espèces il s’est obligé de payer le restant du
prix , et de quelle somme il a entendu se constituer débiteur ,
car d’une part l’acte ne fait point mention d’assignats, et d’autre
part le terme de cinq années révolues , et la défense d'anti
ciper , pour quelque cause et sous quelque prétexte que ce
f û t , comme clause expresse et substantielle de la r e n te , ont
été taxativement stipulés pour l’intérêt du vendeur.
D e déclarer, s’il n’est pas vrai que le notaire refusa d ’insérer
la convention du paiement en numéraire.
D e déclarer, si le délai de cinq ans, aveo défense de l’antici
p e r , n’ont pas eu pour motif de suppléer au silence de l’a c te ,
et la prévoyance du changement des espèces.
])e déclarer, pourquoi il n’a pas payé l’entier p r ix , alors qu’il
s’in q u ié ta it
sur le placement de i 5 o,ooo liv. d’assignats, q u ’il
avait (d isait-il), à sa disposition.
D e déclarer, s’ il n’exista pas un débat sur la quantité d’assignats
que l’intimé serait tenu de recevoir.
De déclarer, pourquoi-il a attendu cinq ans pour demander la
nullité, ou la résolution de la vente, sur le prétexte qu’il était
en péril d’éviction.
�J
íí
^ 7 ^
Pourquoi il avait rejeté les offres qui lui furent faites par la
tîame A r m a n d ,- p e u de jours après la v e n te , de l’indemniser
entièrem ent, s’il voulait s’en départir.
Cette promesse de payer le prix restant en num éraire, lui a
été rappelée loi’S du procès-verbal de non-conciliation, et dans
toutes les journées de la cause principale , l’appelant a été sourd
à toutes les interpellations.
, Son hésitation à proposer la réduction , est bien une recon
naissance tacite de la violation de sa promesse.
Il n’appartient pas à l ’intimé de prononcer sur le degré de
confiance due à l’une et à l ’autre des parties; qu’il lui soir p e r
mis néanm oin s, en appréciant à sa juste valeur le désintéres
sement de l ’a ppelant, et en se renfermant dans les conséquences
qui résultent de son systèm e, d’observer que, si les assignats
avaient duré jusqu’à l’échéance du terme , et suivi progressi
vement la dépréciation où ils étaient lors de la ve n te , et sont
arrivés en l’an 4 ( les assignats réduits en mandats à trente
capitaux pour u n ) , il se serait acquitté, moyennant six livres,
à l ’époque du 29 messidor an 4.
Q ue ce citoyen, que l ’on qualifie dans la consultation d'homme
ju ste et de bonne f o i , n’a encore déboursé que des assignats
que l’échelle du Puy-de-Dôme a élevés ( à la v é r ité ) , à treize
mille francs , mais dont le citoyen A rm and n’a tiré aucun parti.
Q u ’il a , par tous les incidens im aginables, retenu dans ses
m ains, depuis l’an d e u x , le capital et les intérêts; il y aurait
de la bonhomtnie de penser que ces fonds sont restés oisifs eu
ses mains : son administration est trop éclairée.
E n voilà assez pour le convaincre de la violation de sa pro
messe verbale.
Sa prétention te n d , comme on l’a déjà d i t , à substituer un
prix d ’estim ation, proportionnel à ce qui reste à payer,
li se place dans la classe ordinaire des acquéreurs redevables
d’ une partie du prix de leurs acquisitions, et qui ne sont pas liés
�( 8 }
par la clause prohibitive de se libérer avant un terme éloigné.
Mais l’intimé n’en est pas réduit à se reprocher un excès de
confiance.
Indépendamment de la promesse de payer en numéraire ,
dont le récit des faits donne déjà la conviction , on se flatte
de prouver que la réduction demandée est absolument inad
m issible, d’après les clauses même de la v e n te , les lois qui
leur sont applicables, et la jurisprudence des tribunaux, ou, en
d’autres termes , que ce qui reste à payer est exigible sans ré
duction.
C ’est une vérité consignée dans les nouvelles lois relatives
aux conventions faites dans le cours du papier-monnaie , qu’elles
n ’ont pas en vue celles dans lesquelles les parties avaient prévu
le changement des espèces et le retour du numéraire.
L orsque le législateur ôta au papier-monnaie le cours forcé
qu ’il lui avait g a ran ti, il fallait bien qu’il vînt au secours de ceux
qui avaient eu une pleine confiance dans celte garantie.
Une loi du i 5 fructidor an
5 , établit d’une manière précise
la ligne de démarcation des obligations que le législateur croirait
pouvoir et devoir m o d ifier, d’a vec celles qui ne jouiraient pas'
du droit nouveau q u ’on allait introduire.
L e législateur déclara d’abord qu’il n’entendait pas porter
atteinte aux conventions, même postérieures à 1791 , contenant
fixation en numéraire métallique , réduction ou atermoiement
d ’ une créance.
« Quelle que soit la valeur exprimée dans ces actes ( dit le
« lé g isla te u r), elles auront leur pleine et entière exécution ».
P a r la loi du 12 frimaire an 6 , les obligations, pour simple
p r ê t, consenties valeur nominale du papier-m onnaie , furent
déclarées réductibles d’après les échelles de dépréciation.
L es articles 5 et 7 veulent (pie, lorsque l’obligation aura été
passée à plus de deux ans de terme au-delà de l’époque du 29
messidor an 4 , le débiteur 11e soit admis à domander la réduc
tion,
�J 3 Ï
( 9 )
tion , qu’autant qu’il aura notifié au créancier , dans les deux
m ois, à compter de la publication de la l o i , pour tout d é l a i , à
peine de déchéance, la rénonciation aux ternies à échoir, avec
offre de rembourser le capital réduit, dans le délai d’ un an ,
avec l’intérêt au taux de cinq pour cent.
L e s articles 1 4 , i 5 , 16 , 1 7 , contiennent plusieurs exceptions,
et notamment à l’égard des ventes de droits successifs , des
sommes, rentes et pensions , dues à titre de libéralité, par des
actes entre vifs, ou à cause de mort.
L a loi du i 3 pluviôse suivant, a décidé que les rentes viagères
11e seraient pas réductibles , quoiqu’elles aient été créées valeur
nominale du papier-m onnaie, et n’aient pas été stipulées paya
bles en num éraire, parce que de l ’obligation de payer la rente
pendant la vie du créancier, résulte nécessairement la consé
quence que les parties avaient prévu le changement des espèces.
« Lorsque le changement des espèces aura été expressément prévu par le titre c o n stitu tif , et qu'en conséquence le
débiteur se sera soumis d'acquitter la rente en la monnaig
qui aura cours aux échéances ». ( A r t . 3 de la loi précitée).
C ’est par une suite du môme principe que la loi du 16 n ivôse,
n.°
i65i
, a voulu que les rentes perpétuelles et viagères, créées
pour cause d’aliénation d’immeubles pendant le cours du papierm onnaie, soit qu ’elles l’aient été sans prélixion du capital, ou
moyennant un capital faisant partie du prix de v e n te , soient
acquittées en espèces métalliques, et sans réduction.
E n un mot, toutes les lois sur les transactions entre particu
liers, pendant la dépréciation du papier-monnaie , ne diffèrent
ni dans la lettre, ni dans l’esprit ; elles ont voulu venir au secours
de ceux qui avaient suivi la f o i de la garantie promise à lu
dm ce du p a p ier , et décidé que ceux qu i, prévoyant le change
ment de la monnaie, se sont obligés pour ce cas, n’ont aucun
m o tif pour qu’on inodiiie leurs •ngagemens.
�( 10 )
O n ajoute que les articles 2 ,
3 , 4 et 5 de cette loi du 16 ni
vôse, ne lui sont pas applicables.
Et d’abord, il résulte des termes mêmes de l’art. 2 de la loi du
16 nivôse an 6 , n.° i 65 i , lorsque la réduction devra avoir lie u ,
que sa disposition n’est pas générale. Aussi la loi du i 5 fructidor
v
an 5 , avait-elle excepté les conventions desquelles doit s’induire
la fixation en numéraire métallique, quelle que soit la date du.
titre , et la valeur exprimée dans les nouveaux actes.
L e détail de la loi du 16 nivôse , peut se réduire à cinq règles
principales ;
i .° Réduction à dire d’experts de tous les reliquats de prix
d ’immeubles vendus pendant la dépréciation du papier-monnaie.
Cette x’ègle générale , posée dans les articles invoqués, reçoit
bientôt plusieurs exceptions.
2.0 Point de réduction pour les rentes viagères et perpétuelles,
créées pour cause d’aliénation d’im m eubles, si m ieux le débiteur
11’aime résilier. (A r tic le s 7 et 8 ).
3 .° Point de réduction pour les délégations ou indications de
paiement des dettes antérieures; l’acquéreur est tenu de rappor
ter les quittances des créanciers délégués , si m ieux il n’aime
résilier. ( A r t . 10).
1
4 .0 Point de réduction pour les constitutions de dot en avan
cement d’hoirie , ou faites pour tenir lieu d’un droit acquis.
( A r t i c le i 3 ).
5 .° Point de réduction pour les douaires p ré fix , augment et
contre augment. ( A r t . 1 4 ) .
6.° D ans les cas où elle autorise la résiliation , elle veut que
le débiteur en lasse l’option et la notification au créancier ,
dans les deux mois de la publication de la loi. ( A r t . 7 ) .
D e l’ensemble de ces dispositions, il suit évidemment que les
conventions censées stipulées en numéraire, ou dans lesquelles
on a prévu le changement de la monnaie, en sont exceptées , et
qu’elle n’a trait qu’à celles consenties en papier, valeur nominale.
Est venue la loi du 27 thermidor suivant, additionelle , inter-
�c«o
^
prétative et explicative de la précédente, qu i, aux exceptions
contenues dans la première, ajoute celle concernant ^ p o r t i o n s
de prix de vente d’im m eubles, dont le paiement ue pouvait se
faire qu’après un terme éloigné, et ave c défense de l’anticiper.
L ’article 14 est conçu en ces termes: « Il n’est point dérogé par
« les lois du 16 nivôse dernier, aux clauses résolutoires, ni aux
« clauses prohibitives, expressément apposées dans les contrats
« d’aliénation d ’im m eubles, pendant la dépréciation du papier« monnaie ».
Cet article, qui excepte d e là disposition, ou de l’application de
la loi du 16 nivôse , les contrats de vente renfermant des clauses
prohibitives, régie absolument le sort des parties.
I)u fait constant, que l’appelant s’étant soumis à la clause pro
hibitive, n’aurait pu se libérer avant l ’expiration de cinq années,
«t de la conséquence qui en résulte que l ’extinotion du papiermonnaie ayant été prévue, il avait souscrit à un autre mode
de p a iem e n t, aussi formellement qu’à la condition de ne pou
voir payer q u ’à telle é p o q u e , on est conduit à cette consé
quence ultérieure j q u ’il est hoi’s de l’application de la loi du
16 nivôse, ou si l’on veut, dans l’exception consacrée par celle
du 27 thermidor.
L a prohibition insérée dans la vente, est écrite taxativement
en faveur du vendeur.
O n ne peut supposer que l ’intention de l’intimé n été de rece
voir son paiement en papier, sans supposer q u ’il eût voulu re
cevoir un paiement illusoire ; cela résulte nécessairement de la
chute progressive des assignats.
11 faut bien se garder de confondre la disposition de la; loi du
27 thermidor, avec celle du 11 frimaire précédent, concernant
les obligations pour simple prêt en dette à jo u r , ou autrement
depuis 1791*
!
Dans celle-ci, rien n’ empêche que le débiteur d’obligation à
long terme, 11e puisse se libérer avant l’échéance du term e, qui
A 2
�C 12 )
n’ a été prolongé qu’en sa fa v e u r, au lieu que dans l’espèce sou
mise nu trib u n a l, et qui se réfère à la loi du 27 thermidor, le
terme n’a été apposé que pour l’intérêt du créancier, et qu’il n’est
pas au pouvoir du débiteur de se libérer au mépris de la prohi
bition , sans le consentement du créancier.
L e s clauses d’un même acte sont indivisibles; les parties ont
consacré cette indivisibilité par une clause expresse; l’appelaut
ne pouvait pas plus réclamer l ’estimation et lu réduction, q u ’il
ne pouvait anticiper le terme du paiement.
C ’est la conséquence qu’a tirée le citoyen B e r g ie r , d’ une pa
reille clause dans une consultation écrite en entier de sa uuiin,
en ces term es:
¡
• « D ans l’espèce particulière , l ’interdiction imposée à l ’acqné« r e u r , d’anticiper les termes convenus pour le paiement, et de
« les augmenter ou d im in u e r, était certainement très-licite;
« cependant son exécution est inconciliable avec la réduction
« du prix de la vente à l’estimation, que les articles 2 et
3 de la
« loi du 16 nivôse autorisent les acquéreurs à requérir; car d’a« près l’article
6,
celte réduction 11e peut être demandée sur le
« prix stipulé payable à longs termes, qu’à condition que le dé« biteur renoncera aux longs termes, et les anticipera , ce qui
« présuppose que les termes convenus , n’ont été stipulés que
« pour l u i , et sont purement facultatifs; d’où il suit q u e , lorsque
« l’anticipation lui est prohibée, la condition d’anticiper, sans
« laquelle il 11 y a pas de réduction à prétendre, 11e pouvant
« pas s’a ccom p lir,
la réduction est inadmissible ; ou tout au
« moins qu ’elle ne pourrait s’admettre qu’en laissant au vendeur
« l ’option de résilier la vente , a raison de l’inexécution des
. u clauses essentielles du contrat , etc. »
L a loi mêipe du 16 nivôse a subordonné la demande à lin
d’estimation , lorsqu’elle devra avoir lieu, à l'accomplissement
de plusieurs conditions, et notamment de renoncer, le cas
■
éch éa n t , aux termes stipulés. O r , il ne dépendait pas de l’ap-
�X I
( >3 )
pelant d’anticiper le terme ; donc la soumission à îa clause pro*
hibitive emporte «la prohibition de l ’estimation.
Si l’on pouvait ne pas reconnaître dans cette clause une obli
gation d e'p a yer en num éraire’, ce qui roste (disait le citoyen
D uchêne , rapporteur de la plupart des lois sur les transactions,
dans une consultation im prim ée, du 22 prairial an 7 , relative à
une
espèce'sem blable ) , l ’on serait au moins fo rcé'd ’y avouer
l ’ existence d’ une stipulation-aléc.loire, et la conséquence serait
toujours, qn’,1 n’y muait lieu à aucune réduction ; il faudrait donc
alors que le vendeur et Fiicheteur courussent la chance respective;
011 du paiement en assignats , s i , à l’échéance de la dette les assi
gnats él aient’ e iu o ré dans ta circulation, ou du paiement en nu
méraire. Tuciallique, les assignat'« venant h n’avoir plus de cours;
et' il M:rnit clair en partant de là , et d ’après l’événement, que les
vendeurs o n t lé. droit» de refuser la proposition de l’estimation.
Mnisi(.coutinui'-l-il;) l’on n?a pas besoin de s’arrêter à celte
idée, parce que l obligation de payer en a rg e n t, fut dans l’inten
tion bien exprimée des parties.
(hiaïui le.Si lois ^interdisait nt sévèrement toutes stipulations en
argent
, dillërer le paiement à des termes éloignés, par non
prohibition formelle , imposée au débiteur , c ’élait exprimer
autant qu’on le pouvait l’obligation de payer en argent; l’on
savait bien que la circulation des assignats 11e durerait pas jusques là.
1' ■ .
O n ne dissimulera pas ( dit encore le cit. D u c h ê n e , dans la
consultation p récitée), que les longs termes qu ’avait rendus trèsfréquens le dessein d’attendre le teins où les assignats auraient
été retirés de la circulation , ont fait la matière de quelque
.diversité d’opinions.
Selon,quelques-uns, l’ exception de la loi de i 5 fructidor an 5 ,
à l’égard des dettes qui avaient été expressément stipulées
payables en numéraire, ne devait être entendue que des stipu
lations liLldralcs , et il n y avait pas d ’équivalent que l’on n’y
�(.I4 ).
pût a d m e ttre , comme si la stipulation pour être expresse avait
dû renfermer tels m ots, plutôt que tels autres, comme si inter
préter ainsi la loi du i 5 fructidor , ce n ’eût pas été l’annuller ,
les stipulations qu’elle avait en vue datant d’un époque où il
n’avait pas été permis d ’écrire dans un acte le mot argent.
Cette difficulté , à peine spécieuse , n’a pas perdu ( dit-il ) uns
consistance qu’elle n’avait pas , mais elle n’a pu être reproduite
après la loi du 27 thermidor an 6.
Suivant l’article 14 de cette dernière l o i , l’on ne doit pas p lu s,
dans celte matière, que clans toute a utre, donnera la lettre d’un
a c t e , cette importance que l’intention des parties en dépende
nécessairem ent, et dans quelques mots que l’obligation de payer
en argent ait été écrite , elle est exclusive de toute réduction.
C ’est ainsi que l’avait pensé le citoyen M uraire dans l’aflaire
du citoyen St.-Denis , contre le citoyen Moynat , sur laquelle
est intervenu un jugement du tribunal de cassation , dont on
parlera bientôt.
L a loi ne demande que tel ou.tel signe de la volonté, et certes
elle doit bien prévaloir à celle que l’on tire d’ un prem ier paie
ment reçu en assignats.
L a consultation opposée pur l’appelant, ne sera pas d’un plus
grand poids cpie celles dont 011 a extrait quelques fragmens.
E lle n’est que la répétition des moyens q u ’avait fait valoir Io
citoyen F erey , dans différentes consultations, e n l a v e u r du cit.
M o y n a t , demandeur en cassation du jugement du tribunal de
L o ir et Cher, et dont le pourvoi fut rejeté le 21 ventôse an 10.
D ’ailleurs le ton acerbe qui règne pages 7 et 8 de la con
sultation, où l’on qualifie de démence rengagement de l’appelant,
et d’aveuglement le droit de l’intimé, et ces passages, où l’on fait
dire par des jurisconsultes aussi sages : « D a n s ce choc des
arguties de la subtilité cu p id e, contre la candeur de /’homme
ju s te et de bonne f o i , qui doit Í em porter? I l serait honteux
sans doute de couronner la cupidité ». E nlin où l’on certifie en
�C«5 )
leur nom , que la totalité du bien vendu n’a jamais va lu au-delà
de 20 ou 22,000 l i v . , ne décèlent-ils pas l’auteur de cette con
sultation, et ne donnent-ils pas la conviction
qu’elle n’a été:,
souscrite qu’au nom de la déférence q u ’entretiennent lesicom-,
munications journalières parmi les hommes du barreau.
Eût-elle été délibérée, elle n’en serait pas moins en opposition
ave c la lettre et l ’esprit des lois p ré c ité e s, avec les maximes
d é v e lo p p é e s, lors de leur adoption , et avec la jurisprudence
des tribunaux.
- E t d ’a b o r d , rentrons dans le sanctuaire de la l é g is la t io n ,o ü
ont été conçues , discutées, mûries et délibérées les lois appli
cables à la cause.
P o u r se convaincre de la lettre et de l’esprit de la loi du 27
t h e r m id o r
, il suffit de lire les rapports faits au .conseil des
anciens , par le citoyen L assée , siir l’adoption de cette loi.: ¡,\ »
V o tr e
commission doit vous prévenir ( dit le rapporteur ,
page 10 et 11 de son pi-emier rapport ) « qu’après avoir lu les
« mémoires pour et contre l ’article 14 , et avoir examiné de
« nouveau l ’article dont il s’agit, la disposition qu’il contient, lui
« a paru de plus en plus juste et conforme aux lois déjà rendues.
« E n e f f e t , lorsque le législateur ne peut concilier des intérêts
« si opposés entr’eux , il doit donner la préférence à ceux qui
« émanent de la convention même des p a rties, et la loi qu’ils
« se sont imposée doit leur être la plus agréable à exécuter.
« Dans l’espèce c itée, où des vendeurs ont imposé à leurs acqué« le u r s , pour condition prohibitive , qu’ils ne pourraient leur
« payer le prix de la vente ou partie cl’ic e lu i, que dans un tems
« déterm iné, et pour clause résolutoire, qu’ils pourraient rentrer
« clans leur p ropriété, en cas d’infraction à la première clause
« prohibitive, il n’y a rien qui ne soit très-licite; il était libre au
« vendeur de ne se dépouiller de sa propriété, qu’en prenant do
« telles précautions, de même q u ’ il était au pouvoir de l’acqué« reur de 11e pas accepter la ven te, si les conditions qui l’accom-
�..................................C ’ 6 )
k pngnaient ne lui convenaient pas. D ’ailleurs le même principe
« qui a fait excepter par la loi du i 3 pluviôse les rentes viagères
« de la réduction, lorsque le changement dés espèces aura été
« expressément p r é v u p a r le titre constitutif, et qu’ en conséquence
« le débiteur se sera soumis d’acquitter la rente en la monnaie
« qui aurait cours aux échéances, doit déterminer à faire exécuter
« les clauses résolutoires et prohibitives, qui n’ont pu avoir d’autre
« objet que de prévoir ce changement de monnaie ».
Dans son second rapport sur la même lo i , après être entré dans
l ’examen des
c la u se s
prohibitives et résolutoires , maintenues par
cet a r tic le '14 , le rapporteur continue ainsi, page i 5 :
« Q uel est en général l’objet qui occupe et qui doit occuper le
« vendeiir dans un contrai d’aliénation ? C ’est le paiement du prix
(c de la vente; il ne veut se dépouiller de'sa propriété, qu’après
« avoir pris toutes lés précautions nécessaires pour s’en assurer
« la valeur ; ausfci pendant que ce vendeur avait intérêt d’accé« lérer son paiement, soit pour s’en servir, soit pour plus grande
« sûreté, c’est-à-dire, avant l'émission des assignats; et durant
« la c ircul.ition du numéraire métallique , il imposait ordinaire« ment à son acquéreur la. stricte obligation de le payer dans
« un bref délai , avec la condition qu’à défaut de paiement dans
« ce -d é la i, la vente serait résolue. C ’est pendant que la monnaie
« avait une valeur réelle, que les vendeurs press'ai(int ainsi leur
« paiement ; mais q u ’est-il arrivé pendant le cours do cette
« monnaie fictive et décroib\snnle chaque joui'? c ’est que lesven« (leurs ont au contraire cherché les conditions pour défendre
« leur p a ie m e n t, de sorte que la premieré clause qui n’était
« autrefois qu’excitalive. , est devenue p ro h ib itiv e,
et elle a
« prescpie toujours été accompagnée de la clause résolutoire,
k
pour dire à l’acquéreur, lu 11e tue payeras que dans tel d é la i,
U si non je 1entrerai dans ma propriété.
« Des vendeurs vou1- ont exposé avec, leurs contrais,, que ponc danl la dépréciation sensible des assignats, ils n étaient convenus
« de
�f a
i
!
¿M ,
( *7 )
'« de l ’aliénation de leurs propriétés, que sur le pied de valeurs
« réelles, mais q u e 'n e pouvant stipuler en numéraire métal« liq u e, à cause de la loi qui défendait le discrédit des assignats^
« sous peine de six années de fers, ils avaient stipulé que le prix,
« ou restant de p r i x , ne serait payable que dans un terme
« é lo ig n é , époque avant laquelle ils regardaient comme certain ,
« ainsi que leurs acquéreurs, le rétablissement de la circulation
« du numéraire m é ta lliq u e, et que pour plus grande sûreté, ils
« avaient accompagné la défense de paiement de la condition
« résolutoire; que si l’acquéreur voulait anticiper le terme de sa
« libération, le vendeur rentrerait dans sa propriété».
E n fin , page 17 , il continue ainsi: «Où est-ce que vous trouvez
« que les clauses prohibitives ne font point un obstacle à la
« réduction ? vous ne pouvez l’induire ni des lois déjà rendues,
« ni des conventions des parties; car tout le contraire résulte de
« l’ un et de l’autre de ces monumens publics et privés.
« Si en effet les parties n’avaient eu en vue que de se faciliter
« dans leurs transactions, pour les paiemens q u ’elles avaient à
« se faire, il leur eût sufli de consentir simplement des termes
a pour les paiemens ; mais si au lieu de cet acte de complai« sa u ce , les vendeurs ont imposé à leurs acquéreurs l’impéra« tive obligation de ne pouvoir les payer avant un délai déteikm
i n é , un autre m otif d ’intérêt personnel les y a visiblement
« conduits ; car en vendant dans un tems où les assignats étaient
« déjà réduits à peu de va leu r, en fixant de longs termes pour
« le paiem ent, en prenant toutes les précautions possibles pour
« que tes paiemens ne pussent s’effectuer avant l’époque coll
et venue , enfin en prenant un prix inférieur pour retarder da« vantage le paiem ent, c’est a v o ir, par toutes ces précautions,
a pi ¿vu le ctunij’ iNiM ni qui allait s’opérer dans la circulation dfe
« la 11101111.lie existante. Jl ne faut que le concours de toutes ccs
« circonstances,
pour démontrer que les pai tics ont par-là
a compté sur la non -existence (.les a l i g n a i s , à l’époque du
C
1
N
�•
c
, 8
)
« terme convenu , qu’elles ont stipulé sur le retour inévitable et
« prochain du numéraire , l’iine pour faire son p a ie m e n t, et
'« l ’autre pour le recevoir dans une valeur réelle.
*' i< J ’ai dit ( c’ est tbujouis le rapporteur qui p a r le ) , qu’ au lieu
¿c de favoriser le systc'me de la réduction , lorsqu’il y a dans une
'« convention des clauses prohibitives , le législateur a au con« traire entendu interdire ces réductions. J e trouve maintenant
« la preuve dé cette, v é r ité , consignée dans l’article
3 de la loi
« du i 3 pluviôse dernier »,
Il est dit, eh effet, par cet article, en parlant des rentes via
gères : « qu’à l’égard de celles établies par des contrats posté*
« rieurs à l’époque du i.«r ja n v ier 1792 , elles ne sont pareille« ment soumises à aucune réduction , lorsque le changement
'« des espèces aura été'expressém ent prévu par le titre consti« t u t i f , et qu'en conséquence le débiteur se sera soumis à
« acquitter en la m onnaie qui aura cours aux échéances*
« E h bien ! s’il est démontré que dans les cas cités, les clauses
« prohibitives de paiement n ’ont eu pour but dans les contrats
« d’aliénation , que d’éviter les paiement en assignats, que de
« prévoir'et de faire altendrele retour du numéraire m étallique,
« pour qu’il servit à acquitter le prix de ces immeubles, Kxé
« d’après des valeurs réelles, ne s’en suit il pas évidemment que
« c’est là l’application de la loi du i 3 pluviôse? E lle a v o u l u que
« ceux qui avaient calculé sur des v a l e u r s réelles, ci lormé leurs
«' engagemens sur ces bases invariables, 11c pussent les remplir
« que de la même manière, c’est-à d ire , avec des valeurs réelles
« et sans réduction ; c’est précisément le cas où se trouvent ceux
«1 qui ont souscrit ces prohibitions de paiement à longs termes,
* en prévoyant le changement de monnaie.
Disons donc que ce serait contraire aux principes déjà cou*
u sacrés par nos lois, et notamment pas celle du i 3 pluviôse,
• que de ne pas maintenir les clauses prohibitives et résolutoires,
« lorsqu’ elles ont eu pour objet de prévoir le changement de
�M
C *9 )
« monnaie,' qne ce serait trom per la confiance des pa rties, que
« d’anéantir les conditions qu’elles se sont expressément impo« sées, avant que de se dépouiller de leurs propriétés, ce serait
« ruiner des vendeurs qui ont c r u , et qui croient encore avoir
« tout fait pour s’ussurer la conservation de leur fortune ».
On ne peut rien ajouter à des traits aussi lumineux.
Us répondent victorieusement à l’objeclion de l ’appelan t, que
l’article 14 de la loi du 27 thermidor , ne contient pas d’excep
tion à la règle générale de réd u ctio n , décrétée p a r c e lle du 16
nivôse; que cet article ne dit autre chose, si ce n’est que si les
vendeurs qui ont stipulé des termes de paiement, avec prohi
bition de les anticiper, tiennent à 11e pas recevoir leur paiement
a v a n t ces term es, 011 ne pourra d é ro g e ra cette stipulation; mais
q u ’i l ne s’en suit nullement que les portions de prix soumises à
ces termes, ne seront pas sujettes à réduction.
Pour fortifier de plus en plus la réfutation d ’ une erreur aussi
profonde, le rapport lait au conseil des cinq-cents, par le cit.
G renier, au nom d ’une commission sp éciale, Je 7 floréal an 7 ,
et ratifié par 1111 décret du même jo u r , vient encore s’oii'rir; on
n’en présentera que l’analyse:
« Pendant le cours du papier-monnaie ( dit le rnportcur ) ,
o une vente a été faite, moyennant une somme payable à iongs
« term es, avec clause expresse que le paiement 11e pourrait en
« être fait avant l’ expinition de ce term e; ou moyennant une
« sómme
pu
assignats payée com ptant, et indépen dammentde
« cette som m e, moyennant une rente perp étu elle, avec la même
« clause qu’elle ne pourrait ¿tre remboursée avant une époque
« déterm inée.'1]! s’agit de savoir si , dans ces deux cas qui se
« présentent, et q u i , quant ù la solution, reviennent au même,
■a 'l’acquéreur p e u t , pour l'acquittement ,de la somme ou du ca. « pital de la rente, faisant le restant du prix de l’aliénation, rc« clam er la réduction au taux établi par la loi du 16 nivôse an
6,
’ « c’est-à-dire, s’il peut demander use libérer pour le tout, s’il n’a
(3 2
i
�( 2° )
« rien payé sur le p r ix , ou proportionnellement au restant du prix,
« s’iln déjà été fait un paiement suivant uneestimationparexperts.
« L a difficulté consiste à savoir si d ’après la clause expresse,
ti que l’acquéreur ne pourra se libérer du prix ou de ce q u ’il en
« reste devo ir, avant une époque fixée p a r le contrat, cet arqué« reur peut se trouver dans les cas portés aux articles que je
« viens de citer , s’il ne doit pas être placé dans le cas prévu par
« l’article 14 de la loi du 27 thermidor an 6 , et quel doit être
« l'effet de cet article.
« Il est ainsi conçu : il n’est point dérogé par les lois du 16
« nivôse dernier, etc.
« Les motifs qui vous le firent admettre, furent, que souvent
« l ’intention des parties était que le prix de la v e n t e , ou ce qui
« en restait au pouvoir de l’acquéreur, devait être payé en nu
it méraire métallique; que c o m m e , suivant les lois d ’alors, on
« ne pouvait faire cette stipulation, on prenait le parti de ren
ie vo yer le paiement à de longs termes, dans l’idée q u ’après
« l’écoulement des assignats, la libération 11c pourrait se faire
k
qu’avec du numéraire métallique , qui devait remplacer la
« papier monnaie ; que s i , dans le tas du renvoi du paiement
« à de longs term es, avec clause expresse de 11e pouvoir lesan« ticip e r, le vendeur était obligé du se soumettre à la loi du 16
« nivôse , il en résulterait souvent un détriment considérable
« pour l u i , contre son intention et colle de l'acquéreur.
« Supposons par exem ple que dans l’ idée des contractans,
« l’héritage ait été porté à
25,000 fr. en numéraire métallique;
« qu’en acceptant par le vendeur 80,000 francs sur le prix en
« assignats , il ait entendu recevoir
5 ,000 fr. en numéraire , et
« que les 20,000 restant, stipulés payables à longs termes sans
« pouvoir anticiper, aient représenté pareille somme en numé« raire métallique, l ’intérêt du vendeur serait immensément lésé,
«< si l’acquéreur pouvait invoquer les articles 2 ,
3 , 4 et 5 de la
« loi du iG nivôse , n.9 i 65 i. Il en résulterait en effet que lu
�C 21 )
* réception qu’il aurait faite de 80,000 fr. en assignats , le rem
it plirait des quatre cinquièmes du prix de la v e n l e , et qu’il ne
« pourrait réclamer que le cinquième restant à dire d’e x p e rts,
« tandis que dans le fait il n’avait entendu recevoir qu’un cin« quième, et qu’il entendait réclam er les quatre autres cinquièmes
« en numéraire , et que l’acquéreur s’était aussi soumis de les lui
« payer.
« C ’est pour éviter cette injustice, et pour forcer l’acquéreur
« à respecter son engagement , que vous assimilâtes , citoyens
« re p ré s e n ta is, la clause simplement prohibitive, à la clause
« résolutoire , quoique celle-ci parût plus forte que l ’autre ; car
« le résultat est qiie si les conditions ne sont pas intégralement
« remplies , le contrat sera résolu ; mais vous avez attribué le
« même effet à la clause seulement prohibitive , parce que vous
« en a ve z vu les mêmes intentions de la part des eontractans.
« Cette clause a été vue du même œil au conseil des anciens;
« c’est ce dont 011 peut se convaincre en jetant les y e u x sur le
« second rapport fait à ce conseil, par notre collègue L a s sé e ,
,< page 17.
« En fix a n t, disait-il, de longs termes pour ces paiemens, etc.
« ( ce fragment a été transcrit plus haut ).
« O n ne peut donc douter de l’esprit de l’article 14 de la loi
« du 27 thermidor an 6 , et sa lettre y est absolument conforme.
« L es questions qui vous ont été soumises , trouvant leur
« solution dans les lois déjà rendues sur celte matière , votre
« commission ne pense pas que ce soit le cas de vous en pré« senter une nouvelle. L orsque le principe se trouve dans la
« lo i, c’est aux tribunaux à en saisir les conséquences et à en
« faire l’application. C e principe doit servir de guide pour les
« cas que le législateur n’a pu prévoir , comme pour ceux qu’il
« a p ré vu s, et certes dans cette
m a tière
sur-tout, il était impos-
« sible de les prévoir tous.
« En
conséquence^ votre com m ission, a l’u n an im ité, vous
�C 22 )
te propose , par mon organe , de passer à l’ordre du jour ».
Cette proposition a été adoptée.
A v a n t d’aller plus loin , reportons-nous à la vente dont il s’agit;
il est impossible de n’y
pas reconnaître la volonté manifeste
d’échapper au papier-monnaie pour les 27,500 liv. qui restaient
à payer.
O n y voit l’obligation expresse de l ’a p p e la n t, de garder dans
scs mains pendant cinq ans celte gomme ; on y voit qu’elle était
une clause substantielle , et faisait non seulement partie du p r ix ,
mais encore que sans elle la vente n’aurait pas été consentie.
C ’est une m axim e familière qui nous est enseignée par tous les
a u te u rs, et singulièrement par M ornac , sur la loi 7 <) J f. de
contrah. emt. , que les clauses d’un contrat de vente font toutes
partie du prix.
O n y trouve en un mot toutes les précautions que la pré
voyan ce et la prudence pouvaient employer pour que celle
som m e n’essuyât aucune diminution; et quand par la réunion de
ces circonstances, du terme reculé après cinq ans révolus, et de
la défense de l’anticiper , il est évident qu’on 11’a pas voulu q u ’elle
fut payée en papier-monnaie; quand en la séparant des 27,500 liv.
reçus , en assignais ( quoique la vente ne le dise p a s ) , 011 en a
fait le sujet d’ une stipulation particulière , dans la vue d'em pê
cher qu’ elle ne fût amortie avec la monnaie du jo u r; quand cette
intention des parties , que sous les peines les plus graves , il
n’était ni perm is, ni possible d ’énoncer plus clairement, perce
et sort du titre m ê m e ; comment l’appelant o s e - l- il demander
la réduction, comme s’ il s'agissait d’une simple obligation con
tractée en papier-monnaie ?
Il est vrai qu’il u y a point de distinction de monnaie ( si elle
avait élé faite, il n’y aurait pas de procès ) ; mais si le terme de
cinq ans, qui fut un délai de rigueur pour l’a c q u é re u r, et la
défense de l’anticiper , qui fut une condition substantielle et
indivisible, de la vente, suppléent au silence de l’a c le , et placent
�( 23 )
l ’intimé clans les termes d’une stipulation en num éraire, il n ’y a
ni exactitude, ni justesse, à se prévaloir de la réception de 27,500
livres en assignais, pour en inférer que les 27,600 liv. restant
étaient payables dans les mêmes espèces , comme si les contractans n’avaient pu mettre aucune différence entre la partie du prix
qui restait à payer , et celle qui l’avait été.
T elle fut donc la clause q u ’étanl exécutée( et elle devait l’ê tre ),
elle donnait au vendeur la certitude qu’il ne recevrait la somme
qui lui était promise, pour un terme si éloigné , que lorsque les
assignats auraient été retirés de la circulation, et par conséquent
en argent.
Et
puisque l’iutimé voulut avoir cette certitude , et que
l ’appelant consentit à la lui donner , ce fut dans l’intention des
parties une obligation de payer en numéraire, et en dernier terme;
il n’y a lieu à lu réduction de la dette par aucune v o i e , car la
loi en excepte toute stipulation en valeur métallique.
L a jurisprudence des tribunaux, sur laquelle il plaît à ¡’appelant
d’élever des doutes, est en tout conforme à la législation.
L ’appelant peut s’ en convaincre dans les jugemens des tribu
naux de première instance, d ’appel et de cassation.
L e s dispositifs de ceux qui
sont intervenus dans l’ailhiie
d’Eugénie S e r v a n d o n y , femme divorcée L a r i v e , contre le cit.
M a i l l y , acquéreur de la maison L a r i v e , située au G ro sca illo u x,
à P a r is , dispense d’en rappeler les circonstance!!.
L e tribunal civil du département de la Seine , saisi de celte
contestation en première instance, prononça, le i 5 germinal
an 7 , la décision suivante :
« Attendu en point de f a i t , q u ’il est constant dans la cause ,
« que par contrat passé, e t c . , il a été convenu , comme condition
« essentielle de la ve n te , que les deux paiemensdont il s’agit ,
« 11e pourraient être avancés sous aucun prétexte;
« Attendu en point de d ro it, que les dispositions des différentes
«< lois rendues sur le mode de paiement des obligations passées
�. C 24 ) e
« pendant le cours du papier-monnaie , ont ordonné l ’exécution
# pure et simple en numéraire et sans réduction , de celles pour
« lesquelles, m êm e pour assignats prêtés, le débiteur se serait
« expressément obligé d ’en payer le montant en numéraire;
« A ttendu que la loi du 1 6 nivôse an 6 , n.° i 6 5 i , qui autorise
« les acquéreurs de biens fonds, pendant l’existence du papier« m o n n a ie, à en payer le prix réduit d’après une expertise, en
« renonçant toutefois aux termes et délais portés en leur faveur
« dans le contrat , ne s’applique évidemment qu’aux contrais
« ordinaires , et non pas à ceux qui renferm ent, comme celui
« dont il s’a g it, clause expresse et particulière de ne pouvoir par
« l ’acquéreur anticiper le paiement de son p rix ;
« V u l’article 14 de la loi du 27 thermidor an 6 ;
« A ltend u que s’il est constant , en principe g é n éra l, que les
« pactes et conventions doivent être^ religieusement maintenus,
« cette règle d >it être encore plus expressément observée, lorsque,
« comme d.ins l’espèce, les circonstances démontrent que l ’inten« lion des parties était de traiter en numéraire par rapport aux
"« 100,000 liv. dont il s’a g it; mais qu’étant empêchées par une
« loi pénale, non encore abrogée , de stipuler expressément et
« ouvertement en numéraire , prévoyant la lin prochaine des
a assignats , elles ont reculé à cinq ou dix années, c ' e s t - à - d i r e ,
« à d e s époques où tout annonçait qu’il n’y aurait plus que d u
a numéraire cm circulation, le p a i e m e n t du la plus forte partie
« du prix , avec, la clame prohibitive d'anticipation par Jbrine
« d ’ é q u i v a l a n t à la stipulation expresse en nu m éraire, qui était
« alors d é f e n d u e ;
« Attendu aussi que les termes portés dans l ’acte de vente du
« 9
germinal
an
3 , n’ayant point été stipulés en faveur de l’ac-
« quére'.ir, mais bien en faveur de la citoyenne Servandony ,
« veuderesse, il résulte du texte et de l’esprit des dispositions
« ck: la loi du 16 nivôse, dont le citoyen JVlailly excipe dans la
« c a u ie , à L’appui de la réduction, d’après l expertise qu il a
ci demandée
�S &
■'
Ç*3 )
« demande que celte réduction ne peut avoir lieu qu’à la con_
« dition par l’acquéreur d ’anticiper le paiem ent, et cette antici« pation lui étant expressément interdite, par une clause prohi« bitive de son contrat ,1a loi du 16 nivôse, ne lui est nullement
« applicable.
« L e tr ib u n a l, sans s’arrêter aux demandes et oflVes du cit.
« M a i lly , dans lesquelles il est déclaré non-recevable, condamne
« le citoyen M ailly à payer à la citoyenne S erva n d o n y, en numé« raire métallique, la somme de douze mille quatre-vingt-ti'ois
« francs trente ce n tim e s, pour deux années cinq mois, échus
« depuis le premier thermidor an 4 , jusqu’au 12 nivôse an 7 ,
« des intérêts à cinq pour cent par a n , sans retenue des cent
« mille francs numéraire, q u ’il lui doit, sur le prix de la maison
« et dépendances dont il s’agit; le condamne en outre à payer
« et continuer lesdits intérêts, dus et échus depuis ledit jour, 12
« nivôse au 7 , et à échoir jusqu’au paiement effectif du capital
« de cent mille francs, pareillement en numéraire m étallique,
« et sans réduction ; le tout dans les termes et de la manière ex« primée, etc. »
L e tribunal d’a p p e l, séant à P a ris, par son jugement en date
du
23 thermidor an 8 , v i l les m otifs exprimés au jugem ent dont
est a p p el, et que le tribunal ad o p te , l’a confirmé purement
et simplement avec dépens.
Enlin sur le pourvoi en cassation est intervenu , le 24 pluviôse
tin 9, jugement par lequel, oui le rapport de Cassaigne, et les
conclusions de L efessier, commissaire;
« Considérant que par le jugement du
23 thermidor an 8, il
« a été jugé en la it, que des clauses du contrat de vente du (j
« germinal ¡111 3 , et de celui du 11 pluviôse an 4 , il résulte que
« la convention des parties lut, que les 100,000 livres, formant
« le résidu du prix de ladite vente, seraient payées en mimé« raire métallique; qu’ainsi il n’y a eu dans ledit jugement , ni
« violation des lois qui garantissent l’exécution des actes , ni
D
�v Vv ’
C 26 )
« contravention à celle du 16 nivôse an 6 , n i fa u s s e applica « tion de l’art. 14 de celle du 27 thermidor de la même anée.
« L e tribunal rejette , etc. »
\
L e s mêmes questions ont été agitées et décidées de la même
manière, entre le citoyen St.-Denis et le citoyen M o y n a t; voici
le fait :
Huit juillet i 7 g 3 , vente de la terre de L e u g n y , par le citoyen
Sairit-Denis au citoyen Moynat.
L e prix fut de 600,000 livres; 400,000 liv, com ptant, 200,000
liv. payables dans dix ans.
A v e c clause expresse q u e , « l’acquéreur ne pourra anticiper
« le remboursement sous tel prétexte que ce soit; attendu que
« c’est à cette condition, et
sur
la foi de son exécution, que le ven-
« deur a consenti la vente , et n’en a porté le prix qu’à la somme
« de 600,000 livres ».
L ’acquéreur demande, 011 à résilier son contrat, ou à ne payer
le restant du p r ix , que d’après expertise.
L e vendeur soutient que tout est consommé de par la loi et le
contrat ; q u ’il doit lui être payé 200,000 liv. écus.
L ’acquéreur observe
que l’immeuble ac h e té , ne vaut pas
200,000 liv. écus; il se retranche dans les articles 2 et
3 , de la
loi du 16 nivôse an 6 , dont la disposition est gé n éra le , et seule
équitable, puisqu’elle ordonne l’expertise de la portion d ’im
meubles non payée.
Vingt-sept ventôse an 7 , jugement du tribunal de T o u rs , qui
ordonne la n d u ction dans le sens de la loi du 16 nivôse.
Cinq germinal an 8 , jugem ent du tribunal de Loir et Cher ,
q u i, ré fo rm a n t, déboute l ’acquéreur de sa demande en ré
duction.
Pourvoi en cassation , fondé sur fausse application de la loi
du 27 thermidor, et contravention à la loi du 16 nivôse an 6.
L e défenseur du demandeur en cassation soutient, qu’à l’égard
des créauces du tems du papier-m onnaie, il n’est permis il or-
�C 27 )
donner un paiement en n u m é r a ir e , q u ’a v e c faculté de réduc+
l io n , résiliation ou expertise.
Que la loi du 27 thermidor ne contredit pas ce système géné
ra l , q u ’elle o rd on n e, à la vérité , l’exécution des clauses pro
hibitives et résolutoires , c’est-à-dire , que dans l’espèce elle
maintient la clause qui défend de payer avant le terme convenu.
M ais l ’acquéreur avait consenti à ne payer qu’au terme con
venu.
Il n’y a contestation que sur le m o d e , sur la quotité du paie
ment.
O r , la clause dont il s’a g i t , qui a réglé le terme du paiement,
n ’en a pas réglé la quotité.
P our que l ’article 16 de la loi du 27 therm idor, eût été appli
cable , il faudrait que les parties eussent dit:
« Convenu par exprès que le vendeur ne pourra ni réduire la
« som m e, ni s’acquitter en papier-monnaie ».
O u b i e n , « le contrat sera résilié, si le vendeur élève la pré« tention de payer en papier-m onnaie, ou de réduire la somme ».
V o ilà deux clauses, l’une prohibitive , l’autre résolutoire ,
dont l’ellet pouvait être un paiement en numéraire.
D o n c fausse application de la loi du 27 thermidor.
M a i s , dira-t-on, ce lut évidemment l’intention des parties.
O bservons d ’abord qu e les lois parlent de la stipulation des
parties, et non de leur intention.
Entendez-vous que les parties n’ont pas osé le dire, et que les
juges doivent deviner leur intention, interpréter leur stipulation?
mais le législateur ne laisse point aux juges d ’intentions à pré
sumer , mais bien des dispositions à appliquer.
L a loi du 16 nivôse règle la manière de payer les sommes
restantes pour prix d’immeubles.
D o n c , et l’intention des parties, et la volonté du législateur
en réclamaient l’application; donc il y a eu contravention.
P o u r le défendeur, on a soutenu que la loi du 16 nivôse n’était
D a
�V <~x1
«
(28)
pas applicable, en ce qu’ elle est faite pour les cas généraux, et
non pour les cas particuliers, ou le contrat offre une clause^ro-
hibitive.
Ces cas particuliers sont réglés par l’article 14 de la loi du
27 therm idor , en ce que, d’après cet article, la défense de payer
avant un tel terme, équivaut à la défense de payer autrement
qu’en écus.
>
■>
Il cite les rapports de L assée, et celui de G r e n ie r , sur-cette
loi.
Il ajoute, que si l’article I4 d e cette loi ne dit pas, que , clause
prohibitive sur le terme du p a iem en t , signifie , convention en
numéraire , du moins il autorise les juges à fixer le sens de celte
clause prohibitive, d’après l’intention des parties.
Il invoque l’autorité de deux jugemens de re je t, rendus par le
tribunal de cassation; celui que l’on vient de c ite r, est du nombre.
L e tribunal a maintenu cette jurisprudence , pur jugement du
21 ventôse an 10 , ainsi qu’il suit :
>lri
« A ttendu que les lois intervenues sur les transactions passées
* dans le tems du papier-monnaie, n’ont pas condamné les dé« biteurs, à payer en numéraire , dans le cas où il y aurait eu
« une stipulation expresse à ce su je t, mais qu’elles l’ont ainsi or« donné dans celui où il .paraîtrait, par des circonstances par
ti ticulières qu’elles ont indiquées, que telle avait été l’intention
« des parties.
« D ’où il suit , que le jugement attaqué, a pu, sans violer au« cune de ces lois, voir celle intention dans les clauses parlicu« lières du contrat de vente , dont il s’agissait au procès, et nota« ment dans celle par laquelle le demandeur s’était obligé de ne
« pouvoir rembourser la somme de 200,000 IV. avant le délai
« de dix années, attendu ( y est-il d it) , que ce n’est qu’à cette
« condition , et sous la foi de son exécution , que les vendeurs
« ont consenti la veille de ladite terre de L e u g t i y , et n’en ont
« porté le prix qu’à la somme de 600,000 liv.
�(
29 )
L e tribunal rejette, etc.
O n a encore jugé de îa même manière dans l’espèce suivante :
Dix-sept fructidor an
fem m e,
a u
3 , vente d’ une maison par Lenain et sa'
citoyen L augier. *
1
1
Prix i 3 o,ooo liv. en assignats, 90,000 liv. payées comptant.
A l’égard des 40,000 livres restans , l’acte porte : « qu’elles
« resteront entre les mainS de l’acquéreur pendant deux ans, à
« compter du i . er vendém iaire, lori prochain, sans qu’il puisse'
«' s’en libérer avant l ’expiration desdiles deux années , pour
« quelque cause et sous quelque prétexte que ce puisse être , si
« ce n ’est du consentement exprès , et par écrit, des vendeurs,
« et’eïicore sous la condition què la présente clause ne pourra
« être réputée comminatoire , mais de rigueur, comme faisant
« partie du prix de ladite vente, ét sans laquelle les parties re« connaissent qu’elle n’eût pas été faite ».
Question de savoir, si les 40,000 livres sont réductibles, ou si
elles doivent etre payéès intégralement en numéraire.
T reize fructidor an 7 , jugement du tribunal civil de la Seine^
qui proscrit la demande en réduction.
Six frimaire an 9 , jugement coniirm atif du tribunal d’a p p e l,
séant à P a ris, fondé sur ce qu’on ne peut supposer aux parties
contractantes d’autre intention dans la clause dont il s’agit, que
celle de suppléer à une stipulation en num éraire, alors interdite
par les lo i s , et depuis validée par la loi du i 5 fructidor an 5.
Pourvoi en cassation, fondé sur une fausse application de cette
l o i , et de l’art. 14 de celle du 27 thermidor.
Rejet par jugem ent contradictoire, du 5 prairial an i o , sur
le rapport du citoyen Coffinhal , dont voici les motifs:
« Considérant, que par le jugement attaqué, il a été jugé en
« fait, que des clauses de l’acte du 17 fructidor au
3 , ilrésulte
a que l’intention des parties fut, que les 40,000 fr. formant le
« résidu du prix de la ve n te , seraient payés en n u m é r a i r e mé« lalliquc, et que la convention ainsi envisagée, il
n ’y
a eu dans
�( 3o )
« ledit jugem ent, ni fausse application des articles
« loi du i 5 fructidor an
5 et 6 de la
5 , ni de l ’article 1 4 , de celle du 27
« thermidor au 6 , ni contravention à celle du 16 nivôse p rê
te cèdent ».
L a jurisprudence des tribunaux, aussi invariable que les lois,
ne permet donc pas plus q u ’elles de douter que les portions de
p r i x , payables à des termes éloignés, avec prohibition de les
anticiper, ne soient dues en valeurs métalliques sans réduction,
O n ne connaît pas un seul jugem ent é m a n é , soit des tribu
naux d’appel , soit du tribunal de cassation,
que l’on puisse
opposer à l'intimé.
Celui du tribunal de cassation , qui a été accolé à la consul
tation de l’appelant, n’a rien jugé de contraire.
Dans l’espèce , 011 doutait d’abord si la clause de.vait être
qualifiée prohibitive ; il n ’y avait pas de défense expresse d ’anti
ciper le terme.
O n avouait au moins qu’ elle ne portait que sur l’époque du
remboursement et non sur lu quotité ; qu’elle avait simplement
pour b u t , d’assurer la prestation de la rente pendant la vie de I4
daine P h ilip p e , propriétaire de la maison vendue.
L e tribunal de cassation n’a pas jugé que le tribunal de J\ouen
eût bien ou mal pénétré le sens du ba il; il a décidé que ce tri
bunal , qui n’avait pas été assez frappé des considérations pro
posées par le vendeur , pour établir la stipulation <în Argent ,
ayant prononcé sur un fait , son jugemnt devait etre maintenu.
Cela est conforme au
principe , que le pouvoir de ju g e r
quelle a été l’intention des parties contractantes , est une des
attributions naturelles et essentielles des tribunaux; principe
consacré par le citoyen L assé e , dans son second rapport, en ces
termes :
« E n maintenant les clauses prohibitives et résolutoires expres« sèment apposées dans les contrats d’aliénation d’immeubles,
« pendant la dépréciation du papier-monnaie, vous mettez lçs
�( 3 0 ,
« tridunaux à même de rendre justice à toutes les parties ; ils
« décideront d’après les actes et les conventions qu’elles auront
« faites entr’elles; ils connaîtront par les faits et les circonstances
« les intentions qui les auront dirigées dans leurs contrats, et leur
« appliqueront la lo i, suivant l’exigence des cas; vouloir que le
« législateur fasse en quelque sorte ce ministère , en descendant
« dans tous les cas particuliers , pour les prévoir et saisir toutes
« les différentes nuances , ce serait peut-être jeter de l’obscurité
« sur la matière, à force de vouloir l’éclairer.
« A in si reposons-nous donc sur la sagacité des magistrats
chargés de l’exécution de la loi.
D ’après l’opinion du citoyen L a m a rq u e qu’il fallait une stipu
lation formelle de paiement en numéraire , pour empêcher la
k
réduction
du prix des aliénations, il ne serait lien resté à ju g er
par les tribunaux, sous le rapport de la fixation de l’effet des
conventions qui est de leur domaine exclusif, puisque les aliéna
tions avaient été faites dans un teins où la stipulation en num é
raire était prohibée , sous des peines capitales; et la loi du 27
thermidor, qui met hors d ’atteinte les clauses prohibitives, aurait
été vide de sens.
L e s tribunaux o n t-ils expliqué la convention en faveur des
vendeurs , d’après les circonstances particulières de chaque
affaire ; leurs jugemens ont été maintenus par le tribunal de
cassation, qui, comme on ne saurait trop le ré p é ter, n’ est juge
que de la contravention à la lo i, de la violation des formes, et
jamais du fait.
Celte doctrine est avouée même dans la consultation de l’ad
v e rs a ir e , page 9.
Il suit d e là ( y est-il dit ) que les tribunaux peuvent chercher
celte intention dans les clauses particulières des contrats, sans
violer les lois y et que lorsqu’ils ont cru la trouver suffisamment
exprimée dans une clause prohibitive, par l'ensemble'des cir
constances, quoi que ce soit qu’ils aient prononcé, c’ est unique-
�^oV\.
(3 °
ment lin fait et ses circonstances qu’ils ont appréciés, et qii’en
conséquence il ne peut pas y avoir lieu à,cassation contre leur
jugement.
Ne confondons donc pas le dispositif de ce jugement , avec
l ’opinion du commissaire q u i, appelé depuis peu de tems à ses
fonctions , a discuté le fonds étranger à son ministère , et a
lieurté de front la lettre et l’esprit de la loi du vingt-sept ther
midor, l’explication q u ’en ont donnée les rapports du cit.L a ssée,
sur lesquels elle fut a d o p tée , et le décret d’ordre du jour du 7
floréal suivant , rendu sur le rapport du citoyen Grenier.
Qiiel que soit son respect pour l’opinion de ce m a g is tra t, il ne
peut affranchir l’intimé de celui qui est du a des autorités pré
dominantes.
A u reste, le tribunal de cassation ne s’y est pas arrêté, comme
l ’on peut s’ en convaincre par le dispositif qui est conçu ainsi :
« Attendu qu’aucune des clauses du bail à rente foncière, du
« 5 juin 1792 , ne s’opposait à ce que les juges y appliquassent
« les dispositions de la loi du 16 nivôse an 6 , et qu’en faisant
« cette application , ils ne sont point contrevenus a la loi du
u 27 thermidor suivant » ;
L e tribunal rejette le pourvoi.
En d’autres termes, il a jugé que le tribunal de Rouen n’avait
pas excédé son pouvoir, en expliquant la clause du bail a ic n te ,
et jugeant (pie telle était l’intention des parties.
V a i n e m e n t p o u r s é d u i r e les j u g e s , l ’a p p e l a n t déprecie-t-il les
biens par lui acquis; il n’est ni plus ju ste , ni de meilleure foi
sur ce point.
Jaloux de l’opinion publique et de l’estime de ses collègues,
l'intimé
S.111S
entendre nuire à des moyens qu’aucune hypothèse
11e peut balancer , ne craint pas de présenter, avec la même
franchise, irti tableau de la valeur de ces biens, propre a forti
fier IV.ttnchemi’ilÎ'd u tribunal pour les lois protectrices, cl ù
calmer le dése-;poir de l'a p p ela n t, de faire accueillir la réduc tion
à
�(
33>
_ J (f¡
h la q u elle il n’a conclu que par l’appât de l’article 5 de la loi du
1 6 nivôse, snivant lequel les acquéreurs qui ont payé une partie
du prix en assignats, sont déclarés valablement acquittés d’une
quotité proportionnelle de la valeur estimative des fonds.
S ’il avait perdu de vue cette p r im e , i l.s e serait convaincu*
qu’il'n è payera même pas le prix réel.
.•
.
.. ,
E t d’abord le bien vendu se com pose, i ,° de plus de vingt septeréesd e terres susceptibles, presque en totalité,d’un rapport annuel ;
i f est notoire que le. prix des terres de pareille, n a tu re , toutes à
proximité du chef-lieu , qui l ’est à son tour ,de C le rm o n t, est de
2,000 francs pa r septerée ; .ne les évaluons qu’à i , 5oo francs ,
ci
3 o,ooo fra n c s;
2°. D e trente-deux œuvres de vignes ,en plein rapport , dans
les meilleurs territoires, le prix com m un est de
3 oo fr. l’œ uvre;
elle a été-portée eu l’an i o . jusqu’à 900 fra n cs, pour la v e u v e
ILacrota ; ne les évaluons qu’à 200 francs, ci 6,400 francs;
3 .° D e six œuvres de p ré -v e rg e r, bien plantées d’arbres frui
tie rs , arrosées par des sources d’eau viv e ; le prix com m un est
d e 3,ooo fr. l’œ u v re ; ne les évaluons qu’à 2,000 f r . , ci 12,000 fr.;
4.0
D e l ’assense des noyers , produisant une année d¿ins l’autre
i 5 o livres d’huile; n’évaluons q u ’à ttp fr. ce produit susceptible
d’augmentation , ci 1600 francs ;
5 .° D e la m ayère que produisent d e u x sa u ssay e s, et les saules
ou peupliers plantés autour des.vergers et des terres, de 100 fr.
de produit annuel,; ci 2,000 Irancs;
6 .° D e la m a iso n , l’emplacement et les matériaux de l’ancienne
g range, d ’ un petit cuvage séparé, d ’une cour cl jard in, contigus
aux bâtim ens, de la contenue de trois ou quatre cartonnées,
clos de murs et couvert d’espaliers ou d ’arbres à fruit, (pie l’on
n’évalue q u ’à 3 ,000 francs.
T o ta l de
1évaluation , 55 ,000 francs.
■.C ’est d’après cette appréciation que l’intimé régla sa vente,dont
le prix en assignais aurait été porté à 200,000 francs.
E
�Sa résidence dans les montagnes du C a n ta l, à
3o lieues de
distance, les dépenses, les dégouls q u ’entraînaient des voyages
indispensables,’ soit à lui , Soit à son épouse, et leur séparation
pendant plusieurs mois de l’a n n é e, ont pu seuls le déterminer
aux sacrifices q u ’a exigés l’appelant.
■i
L ’inti.né a souscrit à recevoir pour 27,500 francs d ’assignats,
qui n’ont été pour lui d'aucune v a le u r ; cependant l ’échelle du
P u y - d e - D ô m e les évalue à i 3,o 6 a fr.
5o centimes.
E n les déduisant sur ce taux , il resterait encore un capital de
41,937X1'. 5o cent, en numéraire à co u vrir, et néanmoins la
vente 112 constitue l’appelant redevable que de 27,500 fr.
55 ,000 fr.
L e prix effectif de la vente, 11’est que de 40,662 fr. 5 o cent. ,
L e prix réel des biens , en num éraire, est de
en comptant les assignats sur le pied de 1 echelle.
L e prix est donc au-dessous de la valeur réelle de 14,487 fr.
5o centimes.
T el est le rapport du prix, avec les biens v e n d u s , qui réunis
sent , dans une proportion convenable , tout ce qui peut Jes
rendre utiles et agréables.
O n se demande comment les jurisconsultes honorables, dont
les noms figurent dans l«i consultation, ont pu cerülier que ces
biens ne son! en valeur que de 22,000 francs.
C elle évaluation est appuyée ( d i t - o n ) par l ’é v a l u a t i o n des
rôles de la contribution foncière , formés sur les mati ic.es de
555 fr.
1791 , d’après lesquelles le r e v e n u net n’est porté qu à
20 centimes.
Sans porter ses regards sur le mode adopté dans les différentes
communes pour la fixation du produit de leurs propriétés terri
toriales , l’intimé 11e craindrait pas le rapprochement des fonds
vendus, ave c ceux des autres propriétaires, le tableau de com pa
raison de sa cote, avec celle des plus forts tenanciers , fortifierait
l'exactitude de celui (pie l’on vient de soumettre , sur-tout si l7ou
remontait à des teins plus calmes que l ’époque de 1791.
�( 35 )
O n terminera par quelques considérations qui sans doute
n’auraient pas échappé au tribunal.
D ’ une p a rt, il est peu d’acheteurs qui aient à se plaindre du
résultat des clauses prohibitives , tandis que tous les vendeurs
seraient lésés de leur inexécution.
D ’autre part , le bien ven d u étant le patrimoine de la dame
A r m a n d , il n’y a q u ’un dilapidateur qui eût pu le trafiquer sur
le perron Egalité.
E n fin on ne peut nier que la rétention du prix restant par
l ’appelant, n’ait occasionné une perte énorme à l’intimé et à son
ép o u se , par l’impuissance où il les a mis d ’en faire un remploi
avantageux.
C e s développemens pourront paraître longs ; mais indépen
damment de ce que l’intérêt de l’intimé s’accorde entièrement
avec les règles de la justice distributive, il a cru se devoir à luim êm e et à son état, de présenter les principes et les bases de sa
conduite,
A R M A N D .
M A R I E ,
avoué.
A RIOM , DE L’IMPRIMERIEE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Armand. 1795?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour le cit. Armand, Juge au Tribunal d'appel, intimé ; contre le citoyen Baile, marchand, appelant.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1795
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1314
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1316
BCU_Factums_G1315
BCU_Factums_G1317
BCU_Factums_G1318
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53203/BCU_Factums_G1314.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
Créances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53700/BCU_Factums_M0201.pdf
088061ff685920a1cc7033fe1faa5b78
PDF Text
Text
MEMOI RE
EN
REPONSE,
POUR
L e cit. A R M A N D , J u ge au Tribunal d ’appel, in tim é ;
C O N T RE
L e cito y e n B A I L E ,
L
a
m archand,
a p p e la n t .
contestation qui divise les p a r tie s , ne présente
qu’ une simple question de f a i t , celle de savoir si la,
clause, portant que le restant du p rix d'une vente d ’im
meubles , ne sera payée par l’acquéreur , qu après cinq
ans révolus , sans pouvoir anticiper le term e, équivaut
à une stipulation en numéraire , ou si le reliquat est
sujet à rédu ction , d ’après le mode prescrit par la loi
du 16 nivôse an 6 ?
F A I T .
,
Par acte du 5 frimaire an 2 reçu par C bassaigne, notaire,le
TRIBUNAr
d ’ a p p e l "^
DE R I O M
�.
( °
.
..
cit. A r m a n d , tant en son n o m p r o p r e et p r i v é , q u ’en qualité de
ma ri d ’A n n e - A m a b l e Ca s s i èr e , et en vertu du p o u v o i r por té p a r
l e ur contrai de ma ri ag e , vendit nu cit. B a i l e , un bien situé dans
la c o m m u n e de R o m a g n a t , consistant en b â t i m e n s , g r a n g e ,
c u v a g e , j a r d i n clos de m u r s , deux prés-vergers , de la contenue
d ’envi ron six œ u v re s , e nv i r o n vi ngt septerées de terre, e nvi ron
trente œ u v re s de vi gne s, et d e u x saussaies, m o y e n n a n t la s o m m e
de c i n q u a n t e - c i n q mi ll e l i v r e s , sans énonciation d ’assignats ni
d e n u mé r a i r e .
L e citoyen Ba il e avait b e a u c o u p d ’assignats à sa disposition;
le ci toyen A r m a n d qui n ’a vait ni des c ré anci er s à satisfaire , ni
des projets d ’e m p l o i , consentit , après bi en des d é b a l s , d ’ en re
c e v o i r p o u r 27,500 l i v . ; l ’acte en contient quittance.
A l’égard des 27,500 livres r e s t a n t ,
il lut conve nu q u ’elles
seraient p a y é e s en n u m é r a i r e , mai s on ne pouv ai t pas l ’ ex pr ii n e r ; cela eût c o mp r o m i s le notaire et les contrac'tans.
P r é s u m a n t bien q u e dans l’espace de c i nq a n s , les assignats
seraient ôlés de la circulation el r e mp l a c é s p a r le n u m é r a i r e ,
Je c i t o y e n A r m a n d * à l ’e x e m p l e d ’ un g r an d n o m b r e de ve nd eu rs
d ’i m m e u b l e s , proposa de suppl éer a u silence de l ’a c t e , p ar la
Stipulation d ’ un l o ng t er me, et la clause pro hi bi ti ve de p o uv o i r
l’ant iciper ; c e l a fut a cc e pt é , et lu cl ause iut rédigée en ces
termes :
« L a présente v ent e faite m o y en n an t la s o m m e de c i n q u a n l c « c i nq mi ll e l i v r e s , dont ledit a c q u é r e u r en a présentement pay é
« c o mp t a nt audit v e n d eu r , vingt-sept mille ci nq cents l i vr es ,
« dont quit tance; et à l’ é g a r d de la s o m m e de vingl-sept mille
« c i nq cents li v. restai,le , ledit a c q u é r e u r pronu I el s’oblige de
« les p a y e r , et porter audit v e n d e u r , d ’a u j o u r d ’hui en einq ans
« sans p o u v o i r a n l i c i p c r j c d i t t e r m e , pour q u el q u e cause et sous
« q u e l q u e prétexte q u e . e e puisse ê t r e , c o m m e clau.se expresse
« et substantielle des présentes.
L e délai de c i n q ans n ’a pas p a r u trop long au citoyen Ba il e •
�( 3 )
A
F
il n ’a ni fait cles ôffies du-capital ni m ê m e p a y é une p nné e en?
tière d ’ intérêts.
'
> I
E n r e v a n c h e il a fait u n e inscription hypot hécai re p our sa
ga ra nt ie , sur le ci toyen A r m a n d , qu oi q ue celui-ci eût r é p u g n é .
faire p our sa créance.
I l a dans la suite dé c la ré q u ’il entendait profiter de la r é d u c
tion dé cr ét ée par les lois du 16 niypse an 6.
C o m p t a n t p eu sur cette m e s u r e , il profita du passage du cit.
A r m a n d , sur la fin de l ’an 6 , p o u r lui t é m oi g n er des craintes
s u r u n e évi ction f uture. Ce lui -c i ne se b o rn a pas à les dissiper,
il offrit m ê m e de r e pr endr e le bi en à de s t e m p é r a m e n s rai
sonnabl es.
Des
voies de conciliation
.
•
s’ e n g a g è r e n t ; elles n’étaient sin-
çères que de la part du citoyen A r m a n d : cela résulte cl ai rement
de s propositions faites p ar le c i t o y e n B a i l e . L e s mé di a te ur s f ur ent
de son c h o i x ; ils méritaient trop l a co nf ia nc e d u .cit. A r m a n d ,
p o ur ne pas a u g u r e r d ’ heureux, résultats.
L e ci t oye n B a i l e proposa p o u r conditions de l a r e ve n t e , le
remboursement,
l.°
D e s assi gnat s q u ’il nv aï t d é b o u r s é s , c o n f o r m é m e n t à l'é r
chelle de ce d é p a r t e m e n t , a ve c l’intérêt sans retenue.
Cet article était a cc o rd é par le ci t oy en A r m a n d , m a l g r é le
dépé ri sse me nt total de ces papiers en ses ma ins , et la f a v e u r clu
t a r i f de ce d é p a r t e m e n t , p o u r le citoyen Baile.
2 ° D e s droits d ’e nr eg ist re me nt , d ’ inscription , frais et l o y a u x
coûts d e la ve nt e. Cet article était encor e a c c o r d é , q u oi q ue la
perl e de ces frais dût r e t o m b e r sur la p re m i è r e vente.
3 .° D e s frais de construction d ’une g r a n g e sur les l o nde me ns
et avec les ma té ri aux de l 'ancienne, q u ’il évaluait m o d é r é m e n t ,
compri s de p ré te ndus domma ge s -i nt ér ê ts , à i o , o oo livres.
L e u t o y en A r m a n d o b s e r v a que la n o uve ll e g r an ge avait été
bâtie sur le m ê m e local de l’ancienne , le seul c o n v e n a b l e pour
l'habitation du propri étai re , et néanmoi ns il
ü lirait
!a plus v a lu e
A
a
�.
c 4 ?
.
q u e cette reconstruction p o uv ai t a j ù ut er a ux objets v e n d u s , sons
la déducti on des a nc ie n s m a t é r i a u x , et la compensati on a v e c les
d é g r ad a ti on s c o m m i s e s p a r l ’ a r r a c h em en t de quantité de n o ye r s,
d ’a rbr es Fruitiers , et d ’ une v i g n e d e d ouz e œ u v r e s en p le in
f
rapport .
4.0
B a i l e exigeait que les intérêts p a r lui dus , demeurassent
f ixés p o u r l ’an 3 , à 329 liv. r i sons 3 deniers.
P o u r les huit p r e m i e r s mois de l’an 4 , à i
,
3 o liv.
P o u r les q u at r e derniers mois de l’an 4 , à 2 / 7 liv. i 3 sous.
P o u r l ’an 5 , à 653 liv. 2 sous 6 deniers.
E t p o u r l ’an 6 , à p areille s o m m e ; quoi que le contrat de v e n t e
l ’o bl ig e d e c o m p t e r de ses intérêts à raison du deni er vingt sans
retenue.
5 .° E n f i n il entendait continuer de j oui r pendant deux a n s ,
l o r s p r o c h a i n s , ou j u s q u ’au r e m b o u r s e m e n t de ses reprises.
D e s propositions aussi dé ra is onna bl es ne présentèrent au cit.
A r m a n d qu e la perspect ive des t r i b u n a u x ; là finit la médiation.
E l l e fit place à une d e m a n d e en n u l li t é, ou résolution de la v e nt e
m o t i v é e sur le p ér il d ’éviction. P r è s de c i nq années s’étaient
éc oul ée s depu is le r et our du n u m é r a i r e , et près d e trois ans
depu is l ’é c h é an c e du t er me c o n v e n u , sans que le cit. B a i l e eût
m o n t r é de l ’ emp r es s em en t à se li bérer.
L a d e m a n d e en nullité de la vente , fondée sur c e que le bi en
était d o t a l , ( d e m a n d e contradictoire a v e c les réunions , les a m é
liorations ou les dégradat ions q u ’il a c o m m i s e s ) , p ar laquelle il
a p r é l u d é , et r e j e t é e , par un ju g em en t a uquel il a a c q u i e s c é , ne
tendait certainement pas à ce but. L a lenteur affectée dans la
poursui te de cette d e m a n d e , qui a pris naissance le 4 vendémiaire
a n 7 , et 11’a été terminée que le 23 ventôse an 9 , a persévéré
depuis.
E a i l e a att endu a v e c constance un c o mm an d em e nt de payer
a u q u e l il a f or mé une opposi ti on, q u i a été suivie d’ une requête
d u 2 p ra i ri al a n 9 , tendante à c e que le r e li qua t du prix ne lut
�.
.
c. 5 >
:
.
p a y a b l e que suivant l ’estimation p ar e x p e rt s c o n v e n u s ou pris
d ’office , de la moiti é des objets v e n d u s ; q u ’il lui Fût d o n né a ct e
de ses olïres d ’a va n c e r les frais de cette estimation , et c e p e nd a nt
sursis à toute pour sui te, j u s q u ’ à ce q u e le mont ant de la dette
■fût co nnu et jug é.
L ’ o rdo nna nc e qui lui donna acte de son opposition , sur l a qu e ll e
011 en viendrait à la p r em i è re a udi ence provi soi re , toutes choses
d e m e u r a n t en é t a t , fut signifiée le 9 prairial s u i v a n t , mai s sans
citation , ce qui o b l i g ea le ci toyen A r m a n d à le citer en conci
liation , et ensuite en d é b o u l é d ’opposition et c o n d a mn a t io n à
p a y e r en n u m é r a i r e .
J u g e m e n t con'.radictoire est i nt er venu après un i nt er val le de
n e u f m o i s , p a r l eq ue l , attendu que par le contrat de vente d u
5 Frmictire an 2 , il est expressément c o nv e n u que la s o m m e d e
27,600 !i v . , excédant du prix , no p our ra être p a y é e q u ’au bo ut
d e c i nq ans ;
A t t e n d u que les lois sur ¡es transactions des p a r t i c u l i e r s , co n
senties pendant le cours du p a p i e r - m o n n a i e , n’ont pas eu en v u e
celles
où
monnaie
les débi teurs a vaient p r é v u l’aboli ti on du papiern u m é r a i r e , et cjue la c l a u s e du p a i e
(M le reluui- d u
m e n t à l o ng t e r m e , pré suppose q u e les parties ont eu en v u e
le r et our du n u m é r a i r e ;
A t t e n d u q u e l a loi du 27 t her mi dor a n 6 , additionnelle et
i nt er pr ét at ive d e celle du 16 ni vôse p r é c é d e n t , d é c l a r e , art. 1 4 ,
q u ’ il n ’est point d é r o g é p a r les lois du 16 n i v ô s e , a u x clauses
p ro hi b i t i v e s , a p po s é e s dans les contrats d ’aliénations d’ i m m eu b le s ,
pendant la dépr éci ati on du p a p i e r - m o n n a i e , sans s’arrêter à l’o p
position
au
commandement
de p a y e r , et à l’ordomitince de
surséance d u 2 prairial an 9 , nop plus q u ’à la d e m a n d e en r é d u c
tion de la s o m m e de 27,600 l i v . , desquelles Baile est d é b o u l é ,
or d on ne qu e les poursuites, en c o m me n cé e s , seront continuées.
E n co n sé qu e nc e le c o n d a m n e à pay er la s o m m e de 27,600 liv.
en n u m é r a i r e , e n se mb l e les intérêts l é g it ime me n t dus } et a u x
dépens.
�_
_
( 6 ) .....................................
_
C e jug eme nt n’a été r é d i g é , e x p é d i é , et signifié que deux mois
après.
A p p e l de la part du citoyen Baile.
J u g e m e n t par d é f a u t , a u q u e l il a f or mé opposition.
L ’a ppelant vi ent de r é pa ndr e un m é m o i r e à c o n s u l t e r , suivi
d ’ une c o n s u l t a t i o n , et Ci’ un j u g em e nt du t ribunal de cassation ,
a u x q u e l s il attache la plus g r a n de conf iance.
'
M O Y E N S .
L ’a p p e l a n t a b e a u se di ssi mul er, la promesse d ’a c q u it te r , en
n u m é r a i r e , le reliquat du prix en ques ti on; pro me sse q u ’on n’a
cessé de lui r a p p e l e r , et qui n ’a j a m a i s été d é s a v o u é e , peut
être pourt ant de q u el q u e
considération. O n l’a interpellé de
d é cl a re r en quelles espèces il s’est o b li g é de p a y e r le restant du
p r i x , et de quelle s o m m e il a entendu se constituer d é bi t e u r ,
c a r d ’ une part l’acte ne fait point me nt ion d’assignats, et d ’autre
par t le term e de cin q années révolues , et la défense d 'a n ti
c ip e r , pou/ quelqu e cause et sous quelqu e p r é te x te que ce
f û t , com m e cla u se expresse et su b sta n tielle de la v e n te , ont
été t a x a t i v e m e n t sl i pul és p o u r l ' i ntérêt d u
v en d e u r .
I)e d é cl ar e r, s’ il n’est pas vrai que le notaire r efusa d ’insérer
la conventi on du paiement en numérai re.
D e d é c l a r e r , si le délai de ci nq ans, aveo déf ense de l’antici
p e r , n’ont pas eu p our m o t i f de sup pl ée r au silence de l’a c t e ,
et la p r é v o y a n c e du c h a n ge me nt des espèces.
D e d é c h i r e r , pourquoi il n’a pas p ay é l’entier p r i x , alors q u ’il
s’inquiétait sur le pl ace me nt de i 5o , o oo liv. d’assignats, q u ’il
a vait ( d i s a i t - i l ) , à sa disposition.
D e déclarer, s’ il n’exista pas un débat sur la quantité (l’assignais
q u e l’intimé serait tenu de recevoir.
D e d éch ir er , pourquoi il a attendu ci nq ans p our d ema nde r la
n u l li t é, ou la résolution de la v ei ll e, sur le prétexte q u ’il était
e n pér il d ’ éviction. •
�(7 )
_ _
_
P o u r q u o i il avait rejeté les offres qui lui furent faites p a r l a
d a m e A r m a n d , peu de jour s après la v e n t e , de l ’i ndemniser
e n t i è r e m e n t , s’il voulai t s’en départ ir.
.
'
Ce tt e promesse de p ay e r le p r i x restant en n u m é r a i r e , lui a
.été r appelée lors du pro cè s-ve rb al de no n-co nci li ati on, et dans
toutes les journées de la cause p ri ncipale , l’a p p el a nt a été sour d
à toutes, les interpellations.
Son hésitation à p r o po s e r la réducti on , est bi en un e r e co n
naissance tacite de la violation de sa p romesse.
11 n ’appartient pas à l ’i nt imé de p ro non ce r sur le d e g r é de
conf iance due à l’ une et à l ’a ut r e des parties; q u ’il lui soit p e r
m i s n é a n m o i n s , en a pp ré ci ant à sa juste v a l e u r le dési nt éres
s e m e n t de l ’a p p e l a n t , et en se r e n f e r m a n t dans les conséquences
qu i résultent de son s y s t è m e , d ’o b s e r v e r q u e , si les assignats
•a vaient d u r é j u s q u ’à l ’é ch éa nc e du t erme , et suivi progressi
v e m e n t la d épr éci ati on où ils étaient lor s d e la v e n t e , et sont
a r r i vé s
en
l ’an 4 ( les assignats r éduits e n ma nd a ts à trente
c a p i t a u x p o u r u n ) , il se serait a c q u i t t é , m o y en n an t six l i v r e s ,
a l’é p o qu e du 29 messidor a n 4.
Q u e ce c i l oy e n , q u e l ’on q u a l i f i e d a n s la c o ns ul tat i on d ’Jiornm e
ju s te et de bonne f o i , n’a encor e dé bo u rs é que des assignats
• q u e l ’éche lle du P u y - d e - D ô m e a élevés ( à
la v é r i t é ) , à treize
m i l l e f rancs , mai s dont le citoyen A r m a n d n’a tiré a u cu n parti.
Q u ’il a , p a r tous les i nci de ns i m a g i n a b l e s , retenu dans ses
m a i n s , d e p u i s l ’an deux , le capital et les intérêts; il y aur ait
de l a ' b o n h o i n m i e d e p e n s er q u e ces f onds sont restés oisifs en
ses mai ns : son a dmi ni str at io n est trop éclairée.
E n voilà assez p o ur le conva incr e de la violation de sa p r o
me sse v e rb al e.
Sa prét ent ion t e n d , c o m m e on l’a déjà d i t , à substituer un
p r i x d ’estimation , pro po rti on ne l à ce qui reMe à p a y e r ,
Il se place dans la classe ordi nai re des a c q u é r e u r s r edevables
d ’ une partie du pri x de leurs a c qu i si t io n s, et qui n e sont pas liés
�•
. . .
c
8
}
•
,
.
p a r l a clause prohibitive de se l i b é r e r ava nt nn t er me éloigné.
M a i s l’intimé n ’en est pas rédui t à se r e pr oc he r un excès de
conf iance.
: Indépendamment
dont le récit
'
de la promesse de pay er en nu mé r ai r e ,
des faits donne déjà la convi cti on , on se flatte
de p r o u v e r que la réducti on d e m a n d é e est a bs ol ume nt i na d
m i s s i b l e , d ’après les clauses m ê m e de l a v e n t e , les lois qui
l e u r sont a p p l i c a b l e s , et la j u r i s p r ud e nc e des t ri bunaux, ou, en
d ’aut res termes } que ce q u i reste à p a y e r est e xig ibl e sans r é
duction.
C ’est une vérité consi gnée dans les no uve l le s lois r elati ves
a u x c onvent ions faites dans le cours du p a p ie r -m on n ai e , q u ’elles
n ’ ont pas en vu e celles dans lesquelles les parties a v a i e n t p r é v u
le c h a n g em e n t des espèces et le r e t o u r du numér ai re.
L o r s q u e le légi slateur ôta au p ap ie r - m o n n a i e le cours forcé
q u ’ il lui avait g a r a n t i , il fallait bi en q u ’il vînt au secours de c eux
q u i a vaient eu une p l e i n e conf ia nc e dans cette garantie.
U n e loi du i 5 f ruct idor an 5 , établit d’ une ma ni èr e précise
la ligne de d éma rca ti on des obligations que le légi slateur croirait
p o u v o i r et d e v o i r modi fi er , d ’a v e c celles qui ne jouiraient p as
du droit no uv ea u q u ’ on allait introduire.
L e lég isl ate ur
d é cl ar a d ’a bo rd q u ’ il n’entendait pas porter
atteinte a u x co nve nt ions, m ê m e postérieures à 1 7 5 1 , contenant
fixation en nu mé r ai r e m é t a ll i qu e , réducti on ou ater moiement
d ’ une c ré a n c e .
« Q u e l l e q u e soit la v al eu r e x p r i m é e dans ces actes ( dit le
« l é g i s l a t e u r ) , elles auront leur pleine et entière exécution ».
P a r la loi du 12 f ri mai re an 6 , les o b li g at i on s, p our simple
p r ê t , consenties va le ur nomi na le du p a p i e r - m o n n a i e , furent
dé cl ar é es réductibles d ’après les échelles de dépréciation.
L e s articles 5 et 7 veulent q u e , lorsque l’obligation aura été
passée à plus de deux ans de t erme au-delà de Fépoqne du 29
messidor an 4 , le débi teur ne soit admi s à d e m a n d e r la r éduc-
�C 9 )
tion ; q u ’autant q u ’il a u r a notifié a u c r é a n ci e r , dans les d eux
m o i s , à c o m p t e r de la p ubl i ca ti on de la l o i , p o u r tout d é l a i , à
p e i n e de d é c h é a n c e , la rénonci at ion a u x termes à é c h o i r , a ve c
offre de r e m b o u r s e r le capital r é d u i t , dans le délai d ’ un an ,
a v e c l ’intérêt au t au x de c i n q p o u r cent.
L e s articles 1 4 , i 5 , 1 6 , 1 7 , contiennent plusi eurs e x ce pt i on s,
et n o t a m m e n t à l’é gar d des v ent es de droits successifs , des
s o m m e s , rentes et pensions , dues à titre de l i bé r a l i t é , p a r des
actes entre v i f s , ou à c aus e de mo r t .
.
L a loi du i 3 p l u v i ô s e - s u i v a n t , a déci dé que les rentes viagères
n e seraient pas r é d u ct i bl es , q u o i q u ’elles aient été créées v al eu r
n o mi n a l e du p a p i e r - m o n n a i e , et n’aient pas é lé stipulées p a y a
bl es e n n u m é r a i r e , p ar ce q u e de l ’ obl ig at ion d e p a y e r la r ente
p en dan t la vi e du c r é a n c i e r , résulte néce ssai re me nt la consé
q u e n c e qu e les parties a va i e n t p r é v u le c h a n g e m e n t des espèces.
« L o r s q u e le cha n g em en t des esp èces aura é lé exp ressé
m en t p révu p a r le tilr e c o n s t it u t if , et qu en co n séq u en ce le
d éb iteu r se sera so u m is d 'a cq u itter la rente en la m on n a ie
q u i aura cours a u x éch éa n ces ». ( A r t . 3 de la loi p r é c i t é e ) .
C ’est p a r une suite du m ê m e p r i n c i p e q u e la loi d u 1 6 n i v ô s e ,
n . ° i 65 i , a v o u l u q u e les r en t es perpétuel les et v i a g è r e s , créées
p o u r cause d ’ aliénation d’i m m e u b l e s pendant le cours du papierm o n n a i e , soit q u ’elles l ’aient été sans p ré fi xion d u c a p i t a l , ou
moyennant un
c apit al faisant partie du p r i x de v e n t e , soient
a cqu it té e s en espèces m é t a l l i q u e s , et sans réduct ion.
E n un m o t , toutes les lois sur les transactions entre p a r t i c u
l i e r s , p e n d a n t la dépr éci ati on du p a p i e r - m o n n a i e , ne diffèrent
ni dans la lettre, ni dans l ’esprit ; elles ont v oulu v e n i r au secours
de c e u x qui a va ien t s u iv i la f o i de la garantie p rom ise à lu
durée du p a p ie r , et d é ci d é q u e ceux q u i , p ré voy an t le c han ge
m e n t de la m o n n a i e , se sont obli gés p o u r ce c a s , n’ont a u c u n
m o t i f p o ur q u ’on modi fi e l e u r s «n ga ge me ns.
E
�.
.
( 10 ^
•
.
.
O n ajoute que les a rti cles 2 , 3 , 4 et 5 d e cette loi d u 1 6 ni
v ô s e , ne lui sont pas app li ca bl es.
E t d ’a b o r d , il résulte des termes méi nes de l’art. 2 de la loi du
1 6 nivôse an 6 , n.°
i
65 i , lorsque la réduction devra
a voir l i e u ,
q u e sa disposition n’est pas g énér al e. A u s s i la loi du i 5 f ruct idor
an 5 , a va i t - e l l e e xcept é les convent ions desquelles doit s’induire
la fixation en n u m é r a i r e m é t a l l i q u e , q u elle que so it la date du
titre , et la valeur exp rim ée dans les n o u v ea u x actes.
L e détail de la loi du 16 nivôse } peut se rédui re à ci nq r ègl es
p ri nc ipales ;
i . ° R é d u c t i o n à dire d’ e xpe rt s de tous les reliquats de p r i x
d ’i m m e u b l e s v e n d u s pendant la d épr é ci a ti on du p ap ier -monnai e.
Cette r ègl e g é n é r a l e , posée dans les articles i n v o q u é s , reçoit
b i ent ôt plusi eurs exceptions.
-
z .° P o i n t de r éduction p o u r les r entes vi ag èr es et p e r p é tu e ll es ,
c ré é es p o u r cause d ’aliénation d ’i m m e u b l e s , si m i e u x le dé bi teur
11’a i m e résilier. ( A r t i c l e s 7 et 8 ).
3 .° P o i n t de r éduct ion p o u r les délégations ou indications de
p a i e m e n t des dettes a n t é ri e u re s ; l ’a c q u é r e u r est tenu de r a p p o r
t er les qu it ta nc es des c r é a n ci e rs d él ég u és , si m i e u x il n ’a i m e
résilier. ( A r t . 10).
4.0
P oi n t de r éd uc t io n p o u r les constitutions de dot en a v a n
c e m e n t d ’hoirie , ou faites p o u r
t enir lieu d ’ un droit acquis.
( A r t i c l e i 3 ).
5 .° P oi n t de r éduct ion p o u r les douaires p r é f i x , a u g m e n t et
co nt re a u g me nt . ( A r t . 1 4 ) .
6.° D a n s les cas où elle autorise la résiliation , elle veut que
le
dé bi teur en fasse l’option et la notification au cr éa nci er ,
da ns les de ux mois de la publ icati on de la loi. ( A r t . 7 ) .
D e l’ense mb le de ces dispositions, il suit é v i d e m m e n t q u e les
c on ve nt i on s censées stipulées en n u m é r a i r e , ou dans lesquelles
011 a p r é v u le c h a n ge me n t de la m o n n a i e , en sont exceptées , et
q u ’elle n’a trait q u ’à celles consenties en p a p i e r , v al eu r nomi nale.
E s t v en u e l a loi du 2 7 t he rmi dor s u i v a n t , udditionelle , inter-
�C 11 )
p ré ta li ve et e xpl ic at i ve de l a p r é c é d e n t e , q u i , a u x exceptions
contenues dans l a p r e m i è r e , ajout e cell e concer nant les portions
de pri x de v e n t e d ’i m m e u b l e s , dont l e p ai eme nt ne p o uv ai t se
faire q u ’après u n t e r m e é l o i g n é , et a v e c défense de l’anticiper.
L ’article 1 4 est c o n ç u en ces termes : « I l n ’est point dérogé p a r
« les lois du 16 nivôse d e r n i e r , a u x clauses r ésol ut oi re s, ni a u x
■
N
« clauses ^prohibitives, e xpr essément apposées dans les conlrats
« d ’ali énati on d ’i m m e u b l e s , p en da nt la d épr éci at io n du p a p i e r
« mo nna ie ».
.
C e t article, qui excepte d e l à disposition, ou de l ’appli cati on d e ’
l a loi du 16 ni vô se , l es contrats de vent e r e nf erma nt des clauses
p r o h i b i t i v e s , r é g i e a bs o l u m e n t l e sort des parties.
-
D u fait constant, q u e l ’app el ant s’ étant soumi s à la clause p r o
h ib i t i v e , n ’aurait p u se l i b é re r a v a n t l ’expi rati on de c i n q anné es,
et d e la conséquence q u i en résulte q u e l ’ exti ncti on d u p a p i e r m o n n a i e a ya nt été p r é v u e , il avait souscrit à u n a ut re m o d e
d e p a i e m e n t , aussi f o rm el l em en t q u ’à la c ondi ti on de ne p o u
v o i r p a y e r q u ’à telle é p o q u e , on
est condui t à cette c onsé
q u e n c e u l t é r i e u r e , q u ’il est hors de l ’a pp li ca ti o n de l a loi du
1 6 n i v ô s e , ou si l ’o n v e u f , dans l ’e x c ep t i o n c o n s a c r é e p a r c e l l e
d u 2 7 t he rmi dor .
L a p rohi bi tion i nsérée dans. l a v e n t e , est écrite t ax at iv eme nt
en f a v e u r d u v e n d eu r .
'
O n ne peut supposer q u e l ’ intention d e l’i nt imé a été de r e c e
v o i r son p ai e m e n t en p a p i e r , sans s up po se r q u ’il ait v o ul u r e
c e v o i r un p a i e m e n t illusoire ; cela résulte n é ce ss ai re me nt de l a
chut e p ro gre ssi ve des assignats.
Il faut bi en se g a rd e r d e conf ond re la disposition d e la loi d u
27 t h e r m i d o r , a v e c c e l l e. du i r f r i m a i r e p r é c é d e n t , c o n c e r n a n t
les obl i gat ions p o ur s i m p l e prêt e n d e t t e à j o u r , ou a u t r e m e n t
d e pu i s 1 7 9 1 .
•
D a n s c e ll e - c i , rien n’ ei npôche que le d é b i t e u r d ’obli gat ion à
l o n g t e r m e , 11e puisse se li bérer a v a n t l ’é c h é a n c e d u t e r m e , qui
.
A
2
�( 12 )
^
n’a été p r o l o n g é q u ’en sa f a v e u r , au lieu que dans l’espèce sou
m i s e au t r i b u n a l , et qui se réfère à la loi du 2 7 t h e r m i d o r , le
t e rm e n’a été apposé que p o ur l’intérêt du c r éa nc i er , et q u ’il n’ est
pas au p o u v o i r du dé bi t eu r de se l i b ér e r a u mé pr is de la p r o hi
b i t i o n , sans le consentement du cr éanci er .
L e s cl auses d’ un m ê m e act e sont indivisibles; les parties' ont
co ns a cr é cette indivisibilité p a r une cl au se e xpresse; l’app el ant
ne p o u v a i t pas plus r éc la me r l ’ estimation et l a r é d uc t i o n, q u ’il
n e p o u v a i t a nt ic i pe r le t erme du paiement.
C ’est la co nsé quence q u ’a tirée le ci toyen B e r g i e r , d ’ une p a
r e il l e cl ause da ns une consultation écrite en entier de sa m a i n ,
en ces t ermes :
« D a n s l’espèce par tic uli èr e , l ’interdiction i mp osé e à l’a c qu é « r e u r , d ’anticiper les t er me s c o n v en u s p o u r le p ai e m e n t , et de
« les a u g m e n t e r o u
« ce pe nda nt
diminuer,
était certainement t rè s -l ic i te ;
son exécution est i nconci li able a v e c la réducti on
« du p ri x de la ve nt e à l’e s t i m a t i o n , que les articles 2 et ‘à de la
« loi du 16 nivôse autorisent les a c q u é r e u r s à r e q u é r i r ; car d ’a« près l ’arti cle 6 , cette réducti on ne peut êire d e m a n d é e sur l e
.« pri x stipulé p a y a b l e à l o ng s termes, q u ’à condi ti on que le d é « b i t e ur r en on c er a a u x lungs t e r m e s , et les a n t i ci p e r a , c e qu i
« p r é s u p p o s e q u e les termes c o nv enu s , n’ont été stipulés q u e
.« p o ur l u i , et sont p ur eme nt facultatifs; d ’où il suit q u e , l o i ' s q u e
« l ’anticipati on luif est p r o h i b é e , la condi ti on d ’a n t i c i p e r , sans
« l a q u e l l e il n ’y a pas d e réduct ion à p ré t en dr e , ne p o uv a n t
« p a s s’ a c c o m p l i r ,
la r éd uc t io n est i nadmissible ; ou tout a u
« mo in s q u ’ elle ne p our ra it s’a d me l t i ’e q u ’en laissant a u vendeur
« l ’op tion de résilier la v e n t e ,
à raison de l ’i nexécut ion des
«. cl ause s essentielles du contrat , etc. »
L a loi m ê m e du 16 nivôse a su b or d on né la de ma nd e à fin
d ’ e s t i m a t i o n , l o r s q u ’ e ll e d e v r a a v o i r l ie u, à l’a ccompli sseineut
de plusieurs conditions , et n o ta mm e nt
de r e n o n c e r , le ca s
é c h é a n t, a u x termes stipulés. O r , il ne dépendai t pas de l ’a p -
�( »3 )
pelant d ’ant iciper le t e r m e ; donc la soumission à la clause p r o
hibit ive e m p o r t e
la prohibition de l ’estimation.
'
’
Si l ’on pouv ai t ne pas reconnaît re dans cette clause u n e o b l i
gation de p a y e r en n u m é r a i r e , ce qui reste (di sa it le ci t oye n
D u c h ê n e , r app or t eu r de l a ' p l u p a r t des lois sur les transacti ons ,
dans une consul tat ion i m p r i m é e , du 22 p ra i ri al an 7 , relative à
une espèce s e m b l a b l e ) , l ’on serait a u moins forcé d’y a v o u e r
l ’ existence d’ une stipulation a l é a t o i r e , et la c onsé qu en ce serait
t o u j o u r s , q u ’il n ’y aurait lieu à a u c u n e réduct ion ; il faudrait donc
alors qu e le v en d e u r et l’achet eur cour ussent la c ha nce respect ive,
ou du paiement en assignats , s i , à l’é ch é an c e de la dette les assi
gnats étaient e nc o r e dans la c i r c u l a t i o n , ou du p ai eme nt en n u
m é r a i r e m é t a l l i q u e , les assignats venant à n’a v o i r plus de c o u r s }
et il serait c l ai r en p a rl an t de l à , et d ’après l’é v é n e m e n t , q u e les
v en d e u r s ont le droit de refuser la proposition de l’ estimation.
Ma i s ( continue-t-il ) l’on n’a pas besoin de s’arrêter à celte
i d é e , parce q u e l’ob li gat ion de p a y e r en a r g e n t , fut dans l’int en
tion Lien e x p r i m é e des parties.
Q u a n d les luis interdisaient s é v è r e m e n t toutes stipulations eil
a r ge n t , d i l ï cr e r le p a i e me n t à d e s t er m e s é l o i g n é s , p a r lOut^
p ro hi bi t io n f or me ll e , i mp os é e a u
dé bi teur , c ’était e x pr i m er
autant q u ’on le pouv ai t l ’obli gat ion de p a y e r en a r g e n t ; l’on
savait bi en q u e la circulation des assignats ne dur er ai t pas jusq u es là.
O n ne dissimulera pas ( dit e nco re le cit. D u c h ê n e , dans la
consultation p r é c i t é e ) , que les longs termes q u ’a v a it r e n d u s Irèsl'réquens le dessein d’att endre le (ems où les assignats auraient
été retirés de la circulation , ont fait la m at i è r e d e
quelque
di ver si té d ’opinions.
S e l o n q u e l q u e s - u n s , l ’ e xc ep ti on de la loi de i 5 f r uct idor an 5 ,
à
l’é g ar d
des dettes qu i
avaient été
e x pr essé me nt stipulées
p ay a bl es en n u m é r a i r e , ne devait être ent endue qu e des stipu
lations liltd ra les , et il n y avait pas d ’ équi va len t que l’on n ’y;
�^ 14 \
,
.
p ût a d m e t t r e , c o m m e si la stipulation p o u r être expresse a v ai t
dû renfermer tels mots , plut ôt q u e tels a u t r e s , c o m m e si i nt er
p ré te r ainsi la loi du i 5 f r u c t i d o r , ce n ’eût pas été l ’a nnulle r ,
les stipulai ions q u ’elle avait en v u e datant d ’ un é p o q u e où il
n ’a vait pas été p e r m i s d ’ é cr ire dans un acte le mo t argent.
C e t t e difficulté , à peine spécieuse , n ’ a pas p er d u ( dit-il ) une
co nsi sta nc e q u ’ elle n’avait pas , mai s elle 11’a p u être reprodui te
après la loi du 27 t her mi dor an 6.
'
S u i v a n t l’article 1 4 de cette dernière l o i , l’on ne doit pas p l u s ,
dans cette m a t i è r e , que dans toute a u t r e , d o n n e r a la lettre d ’u n
a c t e , cette i mp o r t a n c e que l’intenlion des parties en d é p e n d e
n é c e s s a i r e m e n t , et dans q uel que s mots que l ’ob li gat ion de p a y e r
en a rge nt ait été écrite , elle est e x c lu s i ve de toute r éduct ion.
C ’est ainsi q u e l’a vait pensé le ci t oy en M u r a i r e dans l’affaire
du ci toyen S t. - D e n i s , contre le c i t o ye n M o y n a t , sur l a qu e ll e
est i n t e r v e n u un j u g e m e n t d u t r ib u na l de cassation , d ont on
pa r le r a bientôt.
L a loi ne d e m a n d e qu e tel ou tel signe de la v o l o n t é , et certes
elle doit bien p r é v a l o i r à celle q u e l’on tire d ’ un p r e m i e r pai ere<ün en assignats.
L a consultation opp osé e p a r l’a p p e l a n t , 11e sera p as d’un plus
g r a n d poids que celles dont on a extrait q uel que s i ï a g m e n s .
E l l e n ’ est que la répétition des mo ye ns q u ’avait fait va lo ir l e
c it oyen F e r e y , dans différentes c onsul ta tions, en f a v e u r du cit.
M o y n a t , d e ma nd e ur eu cassation du j u g e m e n t du t ri buna l de
L o i r et C h e r , et dont le p ou rv o i fut rejelé le 21 venl ôse a n 10.
D ’ailleurs le ton a ce r be qui r ègne p a g e s 7 et 8 de la c o n
sul tat ion, où l’on qualifie de d é m e n c e l ’e ng age men t de l’a pp e l a n t ,
et d’a v e u g l e m e n t le droit de l'intimé, et ces passages, où l’on fait
di re par ' des jurisconsultes aussi sages : « D a n s ce ch o c des
arguties de /a su b tilité cu p id e , contre la candeur de /’/tomme
j u s t e et de b o n n e / o i, q u i doit l'em p o r ter ? I l serait h o n te u x
sa ns dou te du couronner lu cu p id ité ». E u t i u où l ’on certifie en
�l e u r nom , qu e la totalité du b i e n v e n d u n’a jamais v a l u a u - d e l à
d e 20 ou 22,000 l i v . , ne décèlent-ils pas l’auteur de cette con-i
sul tat ion,
et ne donnent-il s pas la convi ct ion
q u ’ elle n’a élé
souscri te q u ’au n o m de la d é f é r e n c e q u ’ entretiennent les c o m
muni ca ti on s journali ères p a r m i les h o m m e s du b ar r eau .
Eut-ell e été dé li bé r ée , elle n ’ en serait pas moins en opposi ti on
a v e c la lettre et l ’ esprit des lois p r é c i t é e s , a ve c les m a x i m e s
d é v e l o p p é e s , lors de leur a dopti on , et a v e c la j u ri sp rud enc e
des t r ib u na u x.
E t d ’a b o r d , rentrons dans le sanct uai re de la législation , où
ont été conçues , d i s cu t ée s ,
mû ri es et d él i bé ré es les lois a p p l i
ca bl es à l a cause.
P o u r se c o n v a i n c r e de .la lettre et de l’esprit de la loi du 27,
t h e n n i . l o r , il suffit de lire
les rapports faits
a u conseil des
a n c i e n s , par le citoyen L a s s é e , sur l'adoption d e cette loi.
Voire
c o m m i s s i o n doit v o us p r é v e n i r ( dit le r a p p o rt eu r ,
p a g e j o et 11 de son p re mi er r a p p or t ) « q u ’après a v o i r lu les
« m é m o i r e s p o u r et contre l’a r t i cl e 1 4 ,
et a v o i r e x a m i n é de
« n o u v e a u l ’arii cl e d o nt il s’a g i t , la disposition q u ’il c o n t i e n t , l ui
« a p a r u de plus en plus jusre et c o n f o r m e a u x lois d éjà rendues^
« E n e f f e t , l o r sq ue le l égi slateur n e peut co nci l ie r des intérêts
« si opposés e n t r ’ eux , il doit d o n n e r la préf érence à c e u x q u i
« émanent de la c o n v e n t i o n m ê m e des p a r t i e s , et la loi q u ’ils
« se sont i mp os ée doit leur être la plus a g r é a b l e à exécuter.
« D a n s l’espèce citée, où des v e n d e u r s ont i mp osé à leurs a c q u é « r e i i r s , p o u r condition p ro hi bi t iv e , q u ’ ils ne p our ra ie nt leur
« p a y e r le p ri x de l a v e nt e ou partie d ’i c e l u i , q u e dans un tems
« d é t e r m i n é , et p our cl ause ré sol ut oi re , q u ’ ils pourraient rentrer
« dans l eur p r o p r i é t é , en cas d ’infraction à la p r e m i è r e clause
« p r o h i b i t i v e , il n’y a rien qui ne soit très-licite; il était li bre a u
« vend eur de 11e se dépo ui l ler de sa propri été, q u ’en p re na nt de
« telles p r é c a u t i o n s , de m ê m e q u ’ il était au p o u v o i r de l’a c q u é « r eu r de 11e pas a c c e p t e r la v e n t e , si les conditions qui l’a cc om-
�...................................
c * y
« p à g n a i e n t ne lui co n ve na i en t pas. D ’a il l eur s l e ' m ê m e pri ncipe
« qu i a fait e x c e pt e r p a r la loi du i 3 pluviôse les rentes viagères
« de la r é d u c t i o n , l or s que le c h a n g e m e n t des espèce? aura été
« expressément p r é v u par le titre constitutif , et q u ’ en co nsé quence
« le d é bi t e u r se sera soumi s d ’a cqu it te r la rente en la mo nna ie
« qui aurait cours a u x é ch éan ce s, doit d é t e r m i n e r a faire e xé cut er
« les cl auses résolutoires et prohi bi tives, qui n’ont pu avoir d ’au Ire
« objet que de pr év o ir ce c h a n g e m e n t de m o n n a i e ».
D a n s son second r ap p or t sur la m ê m e l o i , après être entré dans
l ’e x a m e n des clauses p rohi bi tives et résolutoires , maintenues par
c et a rti cle 1 4 , le r app or t eu r continue a i n s i , p a g e i 5 :
« Q u e l est en g é n é r a l l ’objet qu i oc c up e et qui doit o c c u p e r le
« v e n d e u r dans un contrat d’aliénation ? C ’est le p a i eme nt du p r i x
« d e l à v e n t e ; il ne v eu t se dé po ui l ler de sa p ro pr ié té q u ’a pr ès
« a v o i r pris toutes les précauti ons nécessaires pour s’en assurer
« la v a l e u r ; aussi pendant que ce v e n d e u r avait intérêt d ’a ccétt l é r e r s o n p a i e m e n t , soit p o u r s’en s e r v i r , soit p o u r plus g r a n d e
« s u r e l é , c ’ est -à-dir e, ava nt l’émission des assi gnat s; et durant
« la circulation d u n u m é r a i r e m é t a ll iq u e , il i mposai t ordinaire« m e n t à son a c q u é r e u r la stricte ob li gat ion de l e p a y e r dans
« u n b r e f délai , a v e c la co nd i ti on q u ’à dé f a ut de p ai ement dans
« c e délai , la vente, serait résolue. C ’est pendant que la m o nn ai e
« a v ai t une v a l e u r ’ r é e l l e , q u e les vendeur s pressaient ainsi leur
« paiem ent;
ma is
q u ’ est-il a r r i v é pendant le cours
de cette
« m o nn a i e ficti ve et décroissante c h a q u e j o u r ? c’ est que lesven« deur s ont au contrai re c h er ch é les conditions p our défendra
« leur p a i e m e n t , de sorte que la p re mi èr e clause qu i n’élait
« autrefois q u ’exci tative , est d e v e n u e p r o h i b i t i v e ,
et elle a
« p r e s q u e toujours été a c c o m p a g n é e de la clause r ésol utoi re ,
« p o u r dire à l’a c q u é r e u r , tu 11e me p ay er as q u e dans tel d é l a i ,
« si non je renlrerai dans ma propriété.
« De s ve nd eu rs vous ont e xposé a v e c leurs co nt ra ts, que pen■ dant la dépréci ati on sensible des assignats, ils n ’étaient c o nve nu s
« de
�'
' ( *7 0
tu, de P a lp it at ion de leurs p r o p r i é t é s , q u e . s u r le pied de .valeurs
-* r é e l l e s m a i s q u e - ne p o u v a n t ' s t i p u l e r e n n u m é r a i r e m é t a l « l i q u e , à cause de la loi q u i défendait-le discrédit des as si gnat s,
« sous' peine de six années de f e r s , ils avaient stipulé q u e le pri x,
ou restant; d e. p r i x , , n e serait p a y a b l e q u e dans un t e r m e
.« éloigné , é po q ue - av an t laquelle ils r e g a r d a i e n t c o m m e certain ,
« ainsi que leurs a c q u é r e u r s l e rétabl issement de la ci rcul at ion
j« du n u m é r a i r e m é t a l l i q u e / e t qu e p o ur plus g r a n d e sûr et é, ils
« a vaient a c c o m p a g n é la déf ense de p a i e m e n t d e (l a condition
résol utoi re; q u e si l’a c q u é r e u r voulait, ant ic ip er l e . t e r m p d e s a
.n l i b é r a t i o n , le v e n d e u r r e n t r e r a i t ' d a n s s a ' p r o p r i é t é ».
.
..
-,
E n f i n , p a g e 1 7 , il c ont inue ainsi : « O ù est-ce' q u e - v ou s t r o u v e r
« q u e les clauses prohibitives, n e t font .poipt un' obst ac le à la
-« réducti on ? vous ne p o u v e z l’i ndui re ni des lois déjà r e n d u e s ,
ni des convent ions des parties; c a r . t o u t , 1^ c ont ra ir e résulte de
« l’ un et de l’autre de c,es t n on ume ns p ubl ic s et privés.,
r
« Si en effet l e s ;parties n’avaient eu en v u e q u e de se faciliter
<* dans le ur s transacti ons, pour les p a i e m e n s q u ’elles avaient à
:« se iaii-e, il l e u r , e û l suf fi .de consentir s i m p l e m e n t - d e s termes
f K p o u r les p a i e m e n s • m a i s si au; l i eu d e c e t ac t e
de
complai-
•« sance , les v e n d e u r s ont i m p o s é j à . l e u r s - a c q u é r e u r s , Pi mpé ra « tive ob li gat ion de ne p o u v o i r les pay er a v a nt u n délai dé t er « m i n é , un a ut re m o t i f d ’intérêt personnel les y a vi si bl ement
.« condui ts ; c a r en ve nd an t dans un lems où les,assignats étaient
« déjà réduits à p e u de v a l e u r , en fixant de longs t er mes p our
« le p a i e m e n t , en p r e n a n t toutes les p ré c au ti ons possibles p o ur
« qu e ces p ai e me ns ne pussent s ’e i l e c lu er a va nt l’é po que cun,« v e n u e , enfin en p r e n a n t un pri x i nf éri eur p o u r re ta rde r da
« va nt a ge le p a i e m e n t , c ’est a v o i r , p ar toutes ces p r é c a u t i o n s ,
« p r é v u le c h a n ge me nt qui allait s ’o p é r e r dans la circulation de
« la m o nn ai e exislanle. 11 11e faut que le concour s de toutes ces
t« circonstances ,
pour
d é m o n t r e r que les parties
ont par-l à
(t co mp t é sur l a n o n - e x i s t e n c e des assignats , à P é po que du
C
�. .' •
( lV
.,.
;
l ’ une p o u r f a i r e ' s o n p a i e m e n t , et
« t er me è onve nu ,* q u ’ ellès ont stipule sur le r et o ur i névi table et
« pro'chain du n u m é r a i r e ,
•/ •« l*kntré ;p'tfur le r e c é v o i r d a i i ^u n e v a l e u r r ée ll e. -
,
^ “ ¿1 j ’.' tf'dit^d’ est tonjoui'^‘le r a p p o r t e u r qui par le )' ; q u ’au li eu
« cW f al or Î! $r t é ’sÿstême de \à‘ réduction' , l or squ’il y a dans une
« :conventiüri dè'é clauses p r o h i b i t i v e s , 'le légi slateur a a u con«
t r a i r e
'entendu interdire ces réductions. 'Je t r o u ve ma int enant
« L V p r é n v e ’ 'dë-cfette: v é r i t é c o n s i g n é e 1'dans lfàrlicle 3 de la loi
V du i 3 p l uV iô ^' t Îé rn ie r ».
S i ! '"jU r ' ^
'
'
: 11 ëéi d i t , ' e n efPét', p a r ’cét' a r t i c l e ,. en p a r l a n t des renies vi a
gères i « *c]u’à 1’ é g a r d ’dé ce ll es
éïà’b'Iiés p ar deà Contrats posté
ri eurs à l ' é p o q u e ' d u i . ” j a n v i e r 1792 , elles ne soin par el l le rheïit solimisés
à ü c h n e réducti on , lorsque le changem ent
des esp èces'a u ra ëiëébepTèssLVtcnï-'prévupar le titre con stit ü ï i f , et qd'en con séq u en ce l é débiteur se sera soum is à
a cq u itter bn h d M onnaie q u i " aura- dours a iix éch éa n ces.
« E h bien ! s’il est d é m o n t ï é que dans les cas cites, les clauses
-prohi bit ives de' 'paiement i\?ont eu p our but dans les contrats
d ’a l i é n a t i o n ; q u e d ’é'viter-fe, p a i e m e n t en A s s i g n a t s , qu e d e
p r é v o i r et de faire attendre le r et our du n u m é r a i r e m é t a l l i q u e ,
p o u r q u ’ il servît à ' a c q u i t t e r le p ri x de c es i m m e u b l e s , fixé
d’après des v a le u rs rée ll es, ne s’ en suit il p as -é vi de mme nt q u e
c ’ est là l’a ppl ica ti on de la loi du i 3 p luv iôse ? E l l e a voulu q u e
c e u x
q u i
avaient calculé sur des v a le u rs r é e l l e s , et f ormé leurs
e n g a g e m e n s sur ces bases i n v a r i a b l e s , ne pussent le.s r empli r
que de la m ê m e m a n i è r e , c ’esl-à d i r e , a ve c des valeurs rcellns
et
san s
réducti on ; c ’est pré ci sé me nt le cas où se trouvent <c UX
qui ont souscrit ces pro hi bi t io ns de paiement à longs t er mes,
en p r é v o y a n t le c h a n g em e n t de monnaie.
« D is o ns donc que ce serait cont rai re a u x principes déjà con
sacrés par nos lo is , et no ta mm en t pas cell e du i 3 p l uv iô s e,
q u e de 11e pas ma int en ir les clauses p rohi bi tives et resoluiou es,
« l o r s q u ’ elles ont eu p o ur objet de p r é v oi r le ch ang eme nt de
�'
C *9 )
« m o n n a i e , q u e c e serait t r o m p e r la c o n f ia nc e de s par ti es, q u e
« d ’anéantir les conditions q u ’ elles se sont ¡expressément i m p o « s é e s , a v a n t q u e ! d e s e ,d é p o u i l l e r de leurs p ro pr ié té s, ce serait
(t rui ner d e s ' v e n d e u r s i q u i ont c r u , et qui croient, encor e avoir,
« tout fait p o u r s ’assurer la c o ns er va ti on de leur fortune».
* O n ne peut rien ajouter à des traits aussi l u m i n e u x .
.
Ils r é p o n d e n t v i c t o ri e u se me nt à l’object ion de-l’a p p e l a n t ,/que
l ’article 14 de la loi d u 2 7 t he r mi d or , nè coutielit p a s ’d ’ exeeption à la règl e g én ér al e de r éd uc t io n , \dé.crétée;p^r c ell e ,du 16
ni v ô s e ; qu e cet.article ne dit aut re chtise, si ,ce n ’est que si les
v en d e u r s qu i ont st ipul é des t er mes de p a i e m e n t , a v e c p ro hi
bi tion de l e s , a n t i c i p e r ; tiennent à ne pas r e c e v o i r leur paiement
’a v a n t ces t e r m e s , ,011 ne p our r a d é r o g e r à cette st ipul at ion; mais
q u ’il ne s’ en suit ¡nul lement q u e les p o r t i o n s ude pvix:’ so..u/m ^ es ^
ces t e r m e s , - n e seront -pas sujettes à ré duct ion.
- ...
P o u r fortifier de p lus en plus la r éfutat ion d ’ u n e ' e r r e u r .aussi
p r o f o n d e , le r a p p o r t fait au conseil dés jçinq-Cenls, p ar le cij.
i G r e n i e r , a u n o m . d ’une c o m m i s s i o n ! s p é c i a l e , le 7 floréal^an
*et ratifié par tin/décret du m ê m e j o u r , vient .encore s’o$Tnr; on
n ’en présentera q u e ' l ’a n a l y s e :
t.
i ’ r
' 1
« P e n d a n t le cours du p a p i e r - m o n n a i e . (, dit l e r e p o r t e u r ; ,
l«
une v e nt e a'étéifaite,* m o y e n n a n t rine s o m m e p a y a b l e à longs
•'^«’ t e r m e s , a v e c cl au se e xpresse q u è l e pai emqn t ne pourrait en
« être lait a va nt l ’ e xpi rati on de "ce* t erme ; oUf m o y e n n a n t uije
• « s o m m e ei vassigi iats p a y é e c o m p t a n t , et indép.en d a n m i c n t d e
« cette s o m m e , m o y e n n a n t une reni e p e r p é t u e l l e , a ve c la m ê m e
« cl ause q u ’elle 11e p our ra it être r e m bo u rs é e avant 11,11e é p o q u e
’ « . d é t e r m i n é e . Il s ’agit de s av oi r si ,1 dans ces d eux cas qui se
« p ré se nt ent , el q u i , quant à ’ia solution, r e v j e m iÆ u La ü. m êm e,
« l’a c q u é r e u n p e u t , pour l' acqui tt ement i d e : lü s o m m e ,ou du ç;a« pil ai de la r e n t e , faisant le restant du pri x de l ' a j i é n a l i o n , vp« c l a m e r la r éduction au taux établi par la loi du 16 ni vôse an 6,
« c’ est-à-dire^ s’il peut d e m a n d e r à se libtr,er p«ur le tout, s’il n’a
�Ç 20 )
^
« rien p a v é sur le p r i x , ou propo rti on ne ll emen t au restant duprîxjp
a s’i l s déjà été fait un p ai e m e n t suivant u n ee s t i m a t i o n p a r e x p e r t s .
« L a difficulté consiste à s a vo i r si d ’après la clause e x p r e s s e ,
ii q u e l’a c q u é r e u r ne p o u r r a se l ibé re r d u prix ou de ce q u ’ il eu
« reste d e v o i r , a va n t un e é p o q u e f ixée par le contrat, cet a cqu é« r e u r peut se t r o u v e r dans les cas portés a u x articles que j e
» viens de citer , s’il ne doit pas être p l acé dans l e cas p ré v u par
« l’a rti cle 1 4 de la loi du 27 t he rmi dor an 6 , et quel doit être
« l ’eiTet de cet article.
-
.
« Il est ainsi c o n ç u : il n ’est point dé rog é p a r les lois du 16
<1 ni vôse d e r n i e r , etc.
« L e s motifs qu i vous le firent a d me t tr e , f u r e n t , que s o uve nt
a l ’ intention des parties était q u e le pri x de la v e n t e , ou ce qu i
« en restait a u p o u v o i r de l ’a c q u é r e u r , de vai t être p a y é en n u
« raéraire m é t a l l i q u e ; que c o m m e , suivant les lois d ’a lors, on
« ne p o uv ai t faire cette s t i p u l a t i o n , on prenait le parti de r e n
« v o y e r le p a i e m e n t
à
de longs t e rm es , dans l ’idée q u ’après
« l’é c o u l e m e n t des a ss i gn at s , la li bé ra ti on ne pourrait se faire
« q u ’a v e c d u n u m é r a i r e mé t a l l i q u e , qui devait r e m p l a c e r le
« p ap ie r m o n n a i e ; que s i , dans le cas d u r e n v o i du p ai e m e n t
« à de longs t e r m e s , a v e c cl ause e xpresse de ne p ou v oi r l e s a n « ticiper , le v e n d e u r était' o b l i g é de se s o u m e t t r e à la loi du 16
« ni vôse , il en résulterait souvent un détriment consi dérable
« p o u r l u i , contre son i ntention et cell e de l’a c q u ér e ur .
« S u pp os ons p a r e x e m p l e q u e dans l’ idée des c o n t r a c t a n s ,
« l’h é r i ta ge ait été por té à 25,000 IV. en n u mé r a i r e m é t a l l i q u e ;
« q u ’en acceptafft p ar le v e n d e u r 80,000 francs sur le p ri x en
« assignats , il ait e nt endu r e c e v o i r 5 ,000 fr. en n u mé r ai r e , et
« q u e les 20,000 r e s ta nt , stipulés p a y a bl e s à longs t ermes sans
« p o uv o i r a n t i c i p e r , aient r epr ésent é pareille s o m m e en n u m é « raire m ét a ll i qu e , l ’intérêt du v e n d e u r serait immens ément l ésé,
d si l’a c q u é r c u r pouvai t i n v o q u e r les articles 2 , 3 , 4 et 5 de la
« loi du 16 nivôse , n.» i 65 x. Il en résulterait en effet que la
�C 2I. )
... «'.réception q u ’ il aurait faite de 80,000 fr. en assignats , le r e m
et plirait des quatre ci nquièmes du p r i x d e la v e n t e , et q u ’il ne
« p o ur r ai t r é c l a m e r q u e le c i n q u i è m e restant à di re d ’expert s ,
« tandis q u e dans le fait il n’avait entendu recevoir q u ’ un cin
« quième, et q u ’il entendait r é c l a m e r les q uat r e autres c i nq ui ème s
« en n u m é r a i r e , et que l ’ a cq u é r e ur s’était aussi soumis de les l ui
« payer.
,
^ « C ’est p o u r évi ter cette i nj usti ce , et p o u r f or ce r l’a c q u é r e u r
« à r e sp ec t er son e n ga ge men t , que vous assimilâtes , citoyens
« r e p r é s e n t a i s , la cl ause s i mp le me nt p r o h i b i t i v e , à la cl ause
« résolutoire , q u o i q u e celle-ci parût plus f orte que l ’autre ; car
« le résultat est q u e si les conditions ne sunt pas i nt ég ra le me nt
« r e m p l i e s , le cont rat sera r é s o l u ;
mai s v o u s a v e z att ribué le
« m ê m e effet à la cl ause seulement p ro h i b i t i v e , p a r c e q u e v ous
« en a v e z v u les m ê m e s intentions de l a p ar t des contractans.
« C e tt e clause a été v u e d u m ê m e œi l a u conseil des anci ens ;
« c ’est ce do n t on peut se c o n v a i n c r e en jet ant les y e u x sur le
« second r a p p o r t fait à ce c o n s e i l , p a r notre c o ll è g u e L a s s é e ,
•« p a g e 17.
,
« E n f i x a n t , d i s a i t - i l , de l o ng s tei-mes p o u r c es paiemeftis, elc.
« ( ce f r a g m e n t a été transcrit plus haut ).
:
« O n ne p eut d o n c douter de l’esprit de l’article 1 4 de la loi
« d u 2 7 t h e r m i d o r a n 6 , et sa l e t t r e y est a bs o l u m e n t c o nf or me .
« L e s questions qu i v ous ont été soumi ses , t rouvant leur
« solution dans les lois d é jà rendues sur cette mat ièr e , votr e
« c o mm i s s i o n n e pense pas q u e ce soit le cas de v ous en pré« senter une no uv el l e. L o r s q u e le p ri nc ipe se t ro uve dans la
« l o i , c ’est a u x t r i b u na u x à en saisir les c o ns é qu en c es et à en
- « f a i re l’app li ca ti on. C e pri ncipe doit s e r v i r de g ui d e p o u r les
• « cas qu e le l ég is la te ur n’a pu p ré voi r , c o m m e p our c eux q u ’il
« a p r é v u s , et certes dans cette matière s u r - t o u t , il était i mp o s« sible de les p r é v o i r tous.
« En
conséquence^ v o tr e c o m m i s s i o n , a l ’ u u a n i m i t é , vous
�k
( 22 )
p ropose , p a r m o n o r g a n e , de passer à l ’ordre du j o ur ». •.
C e ll e proposition a été adoptée.
A v a n t d ’aller plus loin , reportons-nous à la v e nt e dont il s’agit;
il est i mpossible de n’y
pas r econ na ît re la volonté manifeste
d ’é c h a p p e r au p ap ie r - m o n n a i e p o ur les 27,500 l iv . qui restaient
à p aye r.
O n y voit l ’obli gati on expresse de l ’a p p e l a n t , de g a r d e r dans
ses ma ins pendant ci nq ans celte s o m m e ; on y voit q u ’ elle était
u n e clause substantielle , el faisait non s eul ement partie du p r i x ,
ma i s encore q u e sans elle la vente n ’aurait pas été consentie.
C ’est une m a x i m e f ami li ère qui nous est e nsei gnée p a r tous les
a u t e u rs , et si nguli èr ement p a r M o r n a c , sur la loi 7 g f f , de
con lra h . em t. , q u e les clauses d’un contrat de v e nt e font toutes
p a r t i e du prix.
O n y t ro uv e en un m o t toutes les p ré c au t io ns que la p r é
voyance
et la p r u d e n c e p ouv ai e nt e m p l o y e r
p our que cette
s o m m e n ’essuyât a uc une di mi nut i on; et q u an d p a r la ré uni on de
c e s ci r co n st an c es , du t e r m e r ecul é après ci nq ans r é v o l u s , et de
la défense de l ’ant ic ip er , il est é vi dent q u ’on n ’a pas v o ul u q u ’elle
fût payée en p a p i e r - m o n n a i e ; q u an d en la séparant des 27,500 liv.
reçus , en assignats ( q u o i q u e l a v e nt e ne l e dise p a s ) , on en a
fait le sujet d ’ une stipulation particulière , dans la v u e d ' e m p ê
c h e r q u ’ elle ne fût a mo rt i e a v e c la mo n na i e du j o u r ; q uan d cette
intenti on des parties , q u e sous les peines les p lus g r av e s , il
n’était ni p e r m i s , ni possible d ’é n o n c e r plus c l a i r e m e n t , perce
et sort dn titre m ê m e ; c o m m e n t l ’a pp e la nt o s e - t - i l de mande r
la r é du ct i on , c o m m e s’il s'agissait d ’ une si mple obli gati on co n
tractée en papier-monnai e ?
11 est vrai q u ’il 11 y a point de distinction d e mo n na i e ( si elle
avait élé f a i t e, il n’y aurait pns de procès ) ; ruais si le terme de
c i nq a n s , qui fut un délai de r igueur p o ur l ’ctcquéieur ,
d éf ense de l’ant ic ip er , qui fut
r|
la
une condition substantielle et
i ndi vi sible de la v e n t e , suppléent an silence de l ’a c t e , et placent
P
i
�( 2 .3 )
.
,
.
.
l ’intimé clans les termes d ’une stipulation e n n u m é r a i r e , il n ’y a
n i e xa ct it ude , ni j u s t es s e , à se p ré val oi r de la réception de 27,500
l iv re s en a s s i g n a t s , p o u r en i nf ére r que les 27,500 liv. restant
étaient p a y a b l e s dans les m ê m es e s p è c e s , c o m m e si les co nt ra ctans n’a vaient pu mettre a u cu n e di f fé r enc e entre la partie du p r i x
qui restait à p a y e r , et cell e qui l ’a vait été.
T e l l e fut d o nc la cl ause q u ’ étant e x é c u t é e ( et elle devait l ’ ê t r e ) ,
elle donnait a u vend eur la cert it ude q u ’il 11e r ece vr ai t la s o m m e
qui lui était pi o m i s e , p o u r un terme si él oig né , que l o r sq ue les
assignats auraient été retires de la c i r c u l a t i o n , et p a r c o n sé qu en t
en argent.
Et
p ui s que l’ intimé
v o u l u t a vo ir cette
certitude ,
et que
l ’a pp el anl .consenti! à lu lui d o n n e r , c e fut dans l’ intention des
parties une ou' ig' ition do p a y e r eu n u mé r a i r e , el en dernier t e r m e ;
il n y a lieu à iu réduct ion de la dette p ar a u c u n e voie^ car l a
loi en e xcept e toute stipulation eu v a l e u r mét alli que.
L a j u r is p ru de n ce des tri buna ux , sur laquelle il plaît à ’a pp el ant
d ’é le ve r di s doutes, est e n tout c o n f o r m e à la législation.
L ’a p p e L m t j. eul s ’e n c o n v a i n c r e dans les j u g e m e n s des t ri bu
n a u x <le pre miè re i ns t an ce , cl’ ippet et de cassation.
L e s dispositifs de c e u x
qu i
sont
i n t er v en u s dans l ’ a flaire
d ’E u g é n i e S e r v a n d o n y , f e m m e divorcée. L a m e , contre le cit.
M a i l l y , a c q u é r e u r de l a ma ison L a r i v e , située a u G r o s c a i l l o u x ,
à P a r i s , dispense d ’en r a p p e l e r les circonstances.
L e tri bunal c i v i l du d é p a r t e m e n t de la S ei n e , saisi de cette
contestation en p r e m i è r e i n s t a n c e , p r o n o n ç a , le i 5 g e r m i n a l
a n 7 , la déci si on sui va nt e :
« A t t e n d u en point de fait , q u ’ il est constant dans la cause ,
« que par contrat p a s s é , e t c . , ii a été couve nu , c o m m e condi ti on
« essentielle de la v e n t e , que les deux pai emens dont il s’a g i t ,
« ne pourraient être a va n cé * sous aucun prétexte ;
« A t t e n d u en point de d r o i t , que les dispositions des différentes
« lois r e n d u e s s ur le m o de de p ai eme nt des obli gat ions passées
�••
. ( 24 ) .
.
« pen dan t le cours du p a p ie r -m on n ai e , ont or do n né l ’ exécut ion
« p ur e et s i mp le en n u m é r a i r e et sans réduction , de celles p o ur
« l esquelles, m ê m e p o u r assignats p r ê t é s , le d ébi teur se serait
•« e x pr essé me nt o b l i g é d ’ en p a y e r le mont ant en n u m é r a i r e ;
« A t t e n d u que la loi du 16 ni vôse an 6 , n.° i 65 i , qui autorise
«
les
a c q u é r e u r s de biens f o nd s , pen dan t l’existence du p a p i e r
« m o n n a i e , à en p a y e r l e p r i x réduit d ’après une e xper tis e, en
ce r en on ç an t toutefois a u x termes et délais portés en leur f a v e u r
« dans le contrat , ne s’a pp l i q u e é v i d e m m e n t q u ’a u x contrats
« ordi nai res , et non pas à c e u x qui r e n f e r m e n t , c o m m e celui
« dont il s’a g i t , clause expresse et particulièie de ne p o u v o i r p ar
« l ’a c q u é r e u r anticiper le p ai e me nt de son p r i x ;
’
« V u l’article 14 de la loi du 2 7 t he rmi dor an 6 ;
« A t t e n d u que s’il est c o n s t a n t , en principe g é n é r a l , q u e les
« p ac te s et c onve nt i ons doivent être religieusement maintenus,
« cette r è gl e doit être encore plus e xpr essé me nt observée, lorsque,
« c o m m e dans l’e s p è c e , les ci rconstances démontrent que l ’inten« tion des parties était d e traiter en n u mé r a i r e par rapport a u x
« 100,000 liv. dont il s ’a g i t ; ruais q u ê t a n t e m p ê c h é e s par une
« loi p é n a l e , non e nco re a b r o g é e , de st ipul er e xpr essé me nt et
« o u v e r t e m e n t en n u mé r a i r e , p r é v o y a n t la fin p r o c h ai n e des
'« assignats , elles ont r ecul é à c i nq ou di x a n n é e s , c ’e st -à-dir e,
« à des é p o q u e s où tout annonçai t q u ’il n y aurait plus que d u
cc n u m é r a i r e en circulation , le p ai eme nt de la plus forte partis
« du p r i x , a v e c la clause p rohi bi tive d'anticipation p ar f o r m e
« d ’ é qu i va l an t à la stipulation expresse en n u m é r a i r e , qui était
« alors dé fe ndue ;
« A t t e n d u aussi que les termes portés dans l’acte de vent e du
« 9 germinal an 3 , n’ ayant point été stipulés en l a v e u r de l'ac
te q u é r e u r , mais bien en f a v e ur de la ci toyenne S e r v a n d o n y ,
« vend<T(\sse, il 1exulte du texte et de l’esprit des dispositions
« do la loi du 16 n i v ô s e , dont le c it oyen M a i l l y exci pe dans la
v c a u s e , à l’a p p u i de la r é d u c t i o n , d’après l’expertise q u ’ il a
« demandée
�( 25..).
_
«_ d e m a n d e q u e cette réduct ion ne peut a v o i r lieu q u ’à la con« dition p ar l ’a c q u é r e u r d ’ant iciper le p a i e m e n t , et cette,antici« pation lui étant e xpr essé me nt i nt er di t e, p a r une cl ause pro hi « bi tive de son contrat , 1 a loi du 16 n i v ô s e , ne lui est n u l le me n t
« appli cabl e.
i
« L e tri bunal , sans s’arrêter a u x de ma nd e s et offres du cit.
c M a i l l y , dans l esquelles il est décl ar é n o n - r e c e v a b l e , c o n d a mn e
« le ci toyen M a i i l y à p a y e r à la ci toyenne S e r v a n d o n y , en n u m é « raire m é t a l l i q u e , la s o m m e de do uze mi ll e quatre-vingl-trois
« f rancs trente cent imes , p our d eux années c i nq m o i s , échus
« depuis le p r e m i e r t he r m i d o r an 4 , j u s q u ’au 12 ni vôse an 7 ,
« des intérêts à c i nq p o ur cent par a n , sans retenue des cent
« m il l e f rancs numér ai re, q u ’ il lui doit, sur Je p r i x de la mai son
« et dé pe nd an ce s dont il s ’a g i t ; le c o n d a m n e en outre à payer, ,
« et continuer Jesdits intérêts, dus et échus depuis ledit jour, 12
«. nivôse an 7 , et à é ch o ir j u s q u ’au p ai ement el l èc ti f du capital
« de cent mi l le f r an c s, parei llement en n u m é r a i r e m é t a l l i q u e ,
« et sans r éduct i on ; le tout dans les termes et de la ma ni èr e e x
« p r i m é e , etc. »
L e t r i b una l d ’a p p e l , séant à P a r i s , p a r son j u g e m e n t en date
du 23 t hermi dor an 8 , vu les m o tijs exprim és au ju g e m e n t dont
est a p p e l , et que le trib u n al a d o p te , l’a c o nf i r m é p ur e me nt
et s i m p l e m e n t a v e c dépens.
E n l i n sur le p our vo i en cassation est intervenu , le 24 p luv iô s e
an 9 , jug eme nt p a r l e q u e l , o u ï le rapport de C a s s a i g u e , et les
conclusions de L e f e s s i e r , commissaire’ ;
« Considérant que p a r le j u g e m e n t du 2.3 t he rmi dor an 8 , il
« a été j ug é en lait , que d i s clauses du contrat de vente du 9
« g e rm in a l an 3 , et de celui du 11 pluviôse an 4 , il résulte q u e
« la co nve nt ion des parties lut, que les
j
00, c o q livres, f or ma nt
« le résidu du prix de ladite v e n t e , sciaient payées en n u m é « raire mé t a l l i q u e ; q u ’ainsi il n’y a eu dans ledit j ug eme nt ; ni
« violation des lois qui garantissent l’exécution des actes , ni
D
�« c ont rave nti on à celle du 1 6 ni vô se an 6 , n ifc lu s s e applico.v
« tio n de l’art. 1 4 de cell e d u 2 7 t h e r m i d o r de la m ê m e a n é e .
« L e t ribunal rejette , etc. »
• ^
L e s m ê m es questi ons ont été agitées et décidées de la m ê m e
m a n i è r e , entre l e citoyen St .- De ni s et le citoyen M o y n a t ; v o i c i
le fait :
H u i t juillet 1 7 9 3 ,
vente
de la terre d e L e u g n y , p a r l e c i t o y e n
S a i n t - D e n i s an ci toyen M o y n a t .
^
L e p r i x fut d e , 600,000 livres; 400,000 liv, c o m p t a n t , 200,000
Uv. p a y a b l e s dans di x ans.
l i '
.* *
A v e c clause e x pr esse q u e , « l a c q u e r e u r ne p our ra a nt ic i pe r
« le r e m b o u r s e m e n t sous tel prétexte que c e soit ; attendu que
«
c ’est
à cette condi ti on, et sur la foi de son e x é c u t i o n , q u e le v e n -
« de ur a consenti la v e n t e , et n ’en a porté le pri x q u ’à la s o m m e
« de 600,000 livres ».
L ’a c q u é r e u r d e m a n d e , ou à résilier son cont rat , ou à 1 1epayer
le restant du p r i x , que d ’apr ès e xpe r ti se .
^
• L e v e n d e u r soutient qu e tout est c o n s o m m é de p a r l a loi et le
cont ra t ; q u ’il doit lui être pay é 200,000 liv. écus.
L ’a c q u é r e u r
observe
que l ’i m m e u b l e >at h e t é , ne vaut pas
200,000 liv. é cu s ; il se retr anche dans les articles 2 et 3 , de la
loi du 16 ni vô se an 6 , dont la disposition est g é n é r a l e , et seul e
équitable,
p u i s q u ’elle o rd onne l’expertise de la porti on d ’i m
m e u b l e s non p a y é e .
V i n g t - s e p t ve nt ôs e an 7 , j u g e m e n t du tribunal de T o u r s , qui
o rdo nne la réducti on dans le sens de la loi du 16 nivôse.
C i n q g er mi nal an 8 , j u g e m e n t du t ribunal de L o i r et C h e r ,
qui,
réform ant,
d é bo u l e l ’a c q u é r e u r de sa d e m a n d e en r é
ducti on.
P o u r v o i en cassation , fondé sur fausse a ppli cati on de la loi
du 2 7 t h e r mi d or , et co nt ra ve nti on à la loi un 16 ni vôse an 6.
L e dé fe nse ur du d e ma nd e ur en cassation s o u t i e n t , q u ’à l’é gar d
des c ré ance s d u tems du p a p i e r - m o n n a i e , il n ’est permis d ’or -
�( 27 )
donner tin paiem ent en n u m é ra ire , qu’a v e c facu lté de réduc
tio n , r é silia tio n o u 'e x p e r tis e .
.
Q u e la loi du 2 7 t h er mi d or ne contredit pas ce s y s t è me g é n é
r a l j »qu’ elle ordonne^ à la vé r it é , ¡l’ exécution des clauses p ro -
h ib itiv e s et résolu toires , ‘ c ’est-à-dire , q u e dans l’espè ce elle
m a i n t i e n t la clause qu i d é f en d de p a y e r a v a n t le t e rm e c o nv en u .
M a i s l ’a c q u é r e u r , a v a i t consenti à ne p a y e r q u ’a u t e rm e c o n venu.
,
•
. .
.
*
.
»•
1
t
.
•
1
„,r
1
I l n ’y a contestation que sur le m o d e , sur l a q u o tité d u paie*
ment .
,
» ■
O r , la c l au s e dont il s’a g i t , q u i a r é g l é le term e du pai ement ,
n ’ eu a pas r é g l é l a q u o tité.
îii i
, •
»..•»
P o u r que l ’article 1 6 de la l o i ' d u 2 7 t h e r m i d o r , eût été appli
c a b l e , il faudrai t q u e les parties eussent dit:»-
r
•=
« C o n v e n u p ar exprès q u e' l e v en d eu r ne p o u r r a ni r é d ui r e
la
« s o m m e , ni s’a cqu it te r en p a p ie r -m on n ai e ».
O u b i e n , « le cont rat ser a r é s i l i é , si le v e n d e u r él ève la prê
te tention d e p a y e r en p a p i e r - m o n n a i e , ou de rédui re la s o m m e » .
V o i l à d eux clauses , l’une p ro h ib itiv e , l’aut re ré so lu to ir e ,
dont l’elïet p ouv ai t être un p a i e m e n t ‘en nu mé r ai r e.
D o n c fausse a ppli ca ti on de la loi d u 2 7 thermi dor.
M a i s , dira-t-on, ce fut é v i d e m m e n t l’i ntention des parties.
O b s e r v o n s d ’a b o r d q u e les lois p ar le n t de la stip u la tio n des
par t ie s, et non de l e u r in te n tio n .
■
E n t e n d e z - v o u s q u e les parties n’ont pas osé le d i r e , et que les
j u g e s do iv en t de vi ne r leur intention, interpréter l e u r stipulation?
ma is le l ég is la te ur ne laisse point a u x ju g e s d ’intentions à p r é
s u m e r , niais b ie n des dispositions à a p p l i q u e r .
L a loi du 16 nivôse r è gl e l a ma ni èr e de p a y e r l es s o mme s
r estantes p our prix d ’i m me u bl es .
’
D o n c , et l’intention des par ties, et la v ol ont é du légi slateur
en r écl ama ie nt l’application'; d o n c il y a eu c o nl ra vc nt ion .
P o u r le d é f e nd e ur , on a soutenu que la loi du 16 nivôse n ’était
D
2
�.
.
c 2
8
.
p as a p p l i c a b l e , en ce q u ’ elle est faite p o u r les cas g é n é r a u x , et
n on p our les cas p a r t i c u l i e r s , ou le contrat offre une clause p ro
h ib itiv e.
I' '
:
'
'
'
C e s cas p ar ti cul i er s sont r égl és p a r l’article 14 de la loi d u
2 7 t h e r m i d o r , en ce q u e , d’après cet a rti cle, la défense de p a y e r
a v a n t 1111 tel t er ni e, é q u i v a u t à la défense de p ay e r a ut re me nt
q u ’en étais,
j.
up •!
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.
■; •
Il cite les rapport s de L a s s é e , et celui de G r e n i e r , sur. cette
loi. r ijf-- ‘
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II a jout e, que si l’article i 4 d e cette loi ne dit p a s , q u e , cla u se
p ro h ib itiv e su r le terme du p a ie m e n t , signifie , con v en tio n en
n u m éra ire , du moins il autorise les j u g es à ii'xer le sens de celte
c l a u s e ' p r o h i b i t i v e , d ’après, l’i ntention de s parties.
'
I l i n v o q u e l’autorité de d e u x . j ù g e m e n s de r e j e t , r endus p a r le
•tribunal de cassation; celui q u e l ’on vient de ci ter , est d u n ombr e.
L e tri bunal a mai nt enu cette j u r i s p r u d e n c e , p ar j u g e m e n t du
21 ventôse an 1 0 , ainsi q u ’il suit :
.
« A t t e n d u que les lois i nt ervenues sur les transactions passées
« dans le lems du p a p i e r - m o n n a i e , h ’ont pas c o n d a m n é les dé« b it e u r s , à p a y e r en n u m é r a i r e , dans le cas où il y aurait eu
« une stipulation expresse à ce s u j e t , mai s q u ’ ell es l ’ont ainsi or« donné dans celui où il p ar aî tr ai t, p a r des ci rconstances p a r
« t ku li è re s q u ’elles ont i n d i q u é e s , que telle avait été l a i t e n l i o n
« des parties.
« D ’où il s u i t , q u e le j u g e m e n t a t t a q u é , a p u , sans vi ol er a u
« cune de ces l o i s , vo ir celte intention dans les clauses part icu
le li ères du contrat de vente , dont il s’agissait au p r o c è s , et nota'
« me nl dans celle p ar laquelle le d e m a n d e u r s était o bl ig é de ne
« p o u v o i r r e m b o u r s e r la s o m m e de 200,000 ir. avant le délai
« de di x a n n é e s , attendu ( y est-il d i l ) , que ce n’est q u ’à cette
« c o n d i t i o n , el suus la loi de son exécut ion , que les vendeurs
« ont consenti la v e n l e de ladite terre de I - e u g n y , et n ’en ont
« porté le p ri x q u ’à lu s o m m e de 600,000 liv.
�( 29 )
L e tri bunal r e j e t t e , etc.
'*
T O n a encore j u g e de la m ê m e ma ni èr e dans l ’espèce sui vant e :
D i x - s e p t f ructidor a n 3 , v e n t e d ’ une maison p a r L e n a i n et sa
f e m m e , a u ci toyen L a u g i e r .
‘
P r i x i 3o,ooo liv. en assignats, 90,000 liv. p ay é es c ompta nt .
A l’é g ar d des 40,000 l i vr e s restans , l'acte p or te : « q u ’elles
« resteront en Ire les ma ins de l’a c q u é r e u r p e n d a n t deux a n s , à
« compter du i . er v e n d é m i a i r e , lors p r o c h a i n , sans q u ’il puisse
« s’en li bé re r a v a n t l ’expiration
desdites d e u x a nnées , p o ur
« q u e l q u e cause et sous q u e l q u e prét exte q u e ce puisse être , si
« ce n ’ est du consent ement e x p r è s , et p a r é cr it, des v e n d e u r s ,
-« et encore sous la condi ti on que la présente clause ne p o u r r a
« ê ti e r éputée c o m m i n a t o i r e , mai s de r i g u e u r , c o m m e faisant
k
partie d u p r i x de ladite v e n t e , et sans l aque lle les parties r e
« connaissent q u ’elle n’eût pas été faite ».
Questi on de s a v o i r , si les 40,000 livres sont r é d uc t ib le s , o u si
elles doivent être p ay ées i nt ég r al eme nt en numérai re.
T r e i z e f ructidor an 7 , j u g em e nt du t ribunal ci vi l de la S e i n e ,
qu i proscrit la d e m a n d e en réduction.
S i x f r i ma i r e an g , j u g e m e n t i - o nf i rma t i f du t r i b una l d ’a p p e l ,
séant à P a r i s , f ond é sur ce q u ’on 11e peu ! suppos er a u x parties
co nt ra ct ant es d ’autre intention dans la clause dont il s’a g it , q u e
ce ll e de suppl éer à une stipulation en n u m é r a i r e , alors interdite
p a r les lois , et depuis va li d ée p a r la loi du 15 fr uct idor an 5.
P o u r v o i en c ass at io n, fondé sur un e fausse appli cati on de cette
l o i , et de l’art.
1 4 de cell e du 27 t hermi dor.
R e j e t p a r j u g e m e n t c o n tr ad i ct o ir e , du 5 prairial an 1 0, sur
le r apport du citoyen C o i l i n h a l , dont voici les mo t i f s :
« C o n s i d é r a n t , q u e par le j u g e m e n t a t t a q u é , il a été j u g é en
« fait, que des clauses de l’acle du 17 lructi dor an 3 , il résulte
« que l'intention des parties f ut, q u e les 40,000 Ir. f ormant le
« résidu du pri x de la vente , seraient payés en n u m é r a i r e mé« t al l i q u c, cl que la co n ve n ti on ainsi e nv i s a g é e , il n ’y a eu dans
�( 3o ) _
.
« ledit j u g e m e n t , ni fausse appli cati on des articles 5 e t ' 6 de la
« loi du i 5 f ruct id or a n 5 ,
« t he r mi d or an
6,
ni de l ’article 1 4 , de celle du 2 7
ni c ont ra ve nt ion à celle du 16 nivôse p r ê
te cèdent ».
L a jur isp rude nc e des t r i b u n a u x , aussi i nv ar i ab l e q u e les lois,
ne p er met do n c pas plus q u ’elles de do ut er qu e les portions de
p r i x , p ay a bl es à des t ermes é l o i g n é s , a v e c prohibition de les
a n t i c i p e r , ne soient dues en valeurs mé ta ll iqu es sans r éduct ion.
O n n e connaî t pas un seul j u g e m e n t é m a n é , soit des t ri b u
n a u x d ’a p p e l , soit du t ri buna l de c as s a t i o n ,
q u e l ’on puisse
o pp ose r à l’intimé.
C e l u i du t ri buna l de cassation , qu i a été a c c o lé à la consul
tation de l’a p p e l a n t , n’a rien j u g é de contraire.
Dans
l’espèce , on doutait d’a bo rd si la clause devai t être
qu al if i ée p r o h i b i t i v e ; il 11’y a vait pas de déf ense expresse d ’anti
c i p e r le terme.
O n avouait au m o in s q u ’ elle ne portait q u e sur l’é p o qu e d u
rem boursem ent et non sur la q u o tité \ q u ’elle avait s i mp l eme n t
p o u r b u t , d ’assurer la prestation de la r ente pendant la v i e de l a
d a m e P h i l i p p e , p r o pr i é t ai r e d e l à ma ison v e n d u e .
L e t ribunal de cassation n’a p as j u g é q u e le tri bunal de R o u e n
eût bien ou m a l p én ét ré le sens du b a i l ; il a dé ci dé q u e ce tri
b u n a l , qui n’avait pas été assez f r ap pé des considérations p r o
posées p a r le vendeur , p o ur établir la st ipul at ion en a r ge n t ,
a y a n t p ro non cé sur un f a i t , son j u g e m n t devait être mai nt enu.
C e l a est c o nf o r m e au
p ri nc ipe , q u e
le p o u v o i r de j u g e r
q u e l l e a été l’ intention des parties contractantes , est une des
att ribut ions
naturelles et
essentielles des t r i b u n a u x ; p ri nc ipe
co ns a cr é par le citoyen L a s s é e , dans son second r a p p o r t , en ces
termes :
« E u maintenant les clauses p rohi bi tives et résolutoires ex pres
te sèment apposées dans les contrats d ’aliénation d ’un m e u b l e s ,
« pendant la d épr éci ati on du p a p i e r - m o n n a i e , vous mettez les
�.
„
*
c 3 i. y .
,
■
'
.
« t r i d u i i a u x ' à m ê m e de r e n d r e justice à toutes les ’parties"; ils"
« ' déci deront d ’a pr ès les actes èt les c onve nt i ons q u ’ elles a u r o n t
« faites e n t r ’elles; ils connaîtront p a r les faits et les ci r con st anc es *
« les intentions qui les a ur on t dirigées dans leurs contrais, et l e u r
« a p p l i qu e ro n t la l o i , s u iv an t l’ e xi ge nc e des c a s; v o u l o i r que lé
« l égi slateur fasse en q u e l q u e sorte c e m i n i s t è r e , en d es ce nd an t
«- dons tous les cas particuli ers , p o u r les p r é v o i r et saisir toutesl
u . l e s différentes nuances , ce serail p eu t-ê tr e jeter de l’obscuri té'
« sur l a ma ti èr e, à force de v o u l o i r l’écl ai re r. ’
>
■ .
« A i n s i r e p o s o n s - n o u s donc sur la s agac it é d e s - m a g i s t r a t s
« c h a r g é s de l’>.xécution de l a loi.
'
r
- D ’après l’opi ni un du ci t oye n L a m a r q u e q u ’il fallait un e st ipu
lation f o r m e l l e de p ai e m e n t en n u m é r a i r e , p o u r e m p ê c h e r la
r é d uc t i on du pri x des a li é na ti on s, il ne serait rien resté à j u g e r
p a r lès t r i b u n a u x , sous le rappor t d e la fixation de l’effet des'
convent ions qui est de leur do ma in e e x c l u s i f , p u is q ue les aliéna
tions ava ie nt é lé faites dans un tems où la stipulation en n u m é
raire était p r o h i b é e , sous des peines capitales; et la loi du 2 7
t h e r m i d o r , qui me t hors d ’atteinte les clauses p ro h i b i t i v e s , aurait,
été vitle de sens.
.
L e s t ri bunaux o n t - i l s e x p l i q u é la co n ve nt i on en f a v e ur des
ve nd eu rs , d ’après
les
circonstances
particulières de c h a q u e
affaire ; leurs j u g e m e n s ont élé mai nt enus p a r le tri buna l de.
ca ssa tion, q u i , c o m m e on 11e saurait trop le r é p é t e r , n ’ est juge^
qu e d e la c ont ra ve nt ion à la l o i , de la vi ol at ion des f o r m e s , et
j a m a i s du fait.
Cette doctr ine est a v o u é e m ê m e dans la consultation de l ’adv , e r s a i r e , p a g e 9.
Il suit d e l à ( y est-il dit ) que les t ri b un au x p eu ve nt ch er ch er
cette intention dans les clauses particulières des contrats, sans
v io ler les l o i s , et que l or squ’ils ont cru la t r o uv er s uf f is amme nt
e x p r i m é e dans une clause p r o hi b i t i v e, p a r l’e n se mb l e des cir
constances , qu oi q u e ce soit q u ’ils aient p r o n o n c é , c’ est u n i q u e -
�.
.
<30
.
.
m en t u n fait et ses circonstances q u ’ils ont a p p r é c i é s , et q u ’en
c o nsé qu en ce il ne peut pas y a v o ir lieu à cassation contre leur
jugement.
N e confondons donc pas le dispositif de ce j u g e m e n t , a v e c
l ’opinion du commi ssai re q u i , app el é depuis peu de tems à ses
f o n c t i o n s , a discuté le f onds étranger à son m i ni s tè re ' , et a
h eu rt é de front la lettre et l ’esprit de la loi du vingt-sept ther
m i d o r , l’ expl icati on q u ’en ont d onné e les rapports du c i t . L a s s é e ,
sur lesquels elle fut a d o p t é e , et le décret d ’ordre d u j o u r du j>
f loréal suivant , r e n d u sur le r apport du citoyen Gr en ie r.
Q u e l que soit son respect p our l’opinion de ce magistrat , il'ne
peut a ff ra nc hi r l’intimé de celui qui est dû a des autorités p r é
dominantes.
.
A u r este, le tribunal de cassation ne s’y est pas a r r êt é , c o m m e
l'on peut s ’ en c o n va i n c r e p a r le dispositif qui est conçu ainsi :
« A t t e n d u q u ’a uc une des clauses du bail à rente f o n c i è r e , du
</ 5 juin 1792 , ne s’opposait à ce que les juges y appli quassent
« les dispositions de la loi du 16 nivôse an 6 , et q u ’en faisant
« cette application , ils 11e sont point conlrevenus à la loi du
« 2 7 t her mi dor suivant » ;
L e tribunal rejette le pourvoi .
E n d’autres t e r m e s , il a j ug é (¡ne le tri buna l de R o u e n n ’avait
pas e x c é d é son p o uv o ir , en expl iquant la d a n s e du ba il à r e n t e ,
et j ugeant q u e telle était l’ intention des parties.
V a i n e m e n t pour séduire les j u g e s , l’appelant déprécie-t-il les
b ie ns p a r lui a c q u i s ; il n’ est ni plus j u s t e , ni de me il l eu re foi
sur ce point.
J a l o u x de l’opinion p u b l i q u e et de l’estime cio ses c o l l è g u e s ,
l'intimé s m s entendre nuire à des moye ns q u ’a ucune hypothèse
ne peu! b a h i v c r , ne craint pas de p r é s e n t e r , avec, la mémo
frauchi.-T, un lal leau du la v a l ( u r de ces biens
propre à lo rl i -
fi r >.'H iclieint 11I du tribunal pour les lois protectrice-, , ci à
c a l m e r le déoe >p jir de l ’a p p e l a n t , de faire accueillir
r éduction
�( 33)
à l a q u e l l e il n’a concl u que p a r l’a p p â f d e l’article 5 de la loi du
1 6 n i v ô s e , sni vant l eq ue l les a c q u é r e u r s qui ont p a y é une par tie
du p r i x en assignats, sont décl arés v al ab l eme n t acquittés d ’une
quotité proporti onnelle de la v a l e u r est imat ive des fonds.
S ’ il avait perdu de v u e cette p ri me , il se serait c o n va i n cu
q u ’il ne p a y e r a m ê m e pas le p r i x réel.
' E t d ’abord le bien v e n d u se c o m p o s e , i . ° de plus de v ing t septer é e s d e terres susceptibles, p r e s q u e eu tot al it é,d’un rapport annuel ;
i l est notoire que le p r i x des terres de parei lle n a t u r e , toutes à
p r o x im it é du chef-li eu , qui l ’est à son tour de C l e r m o n t , e.st de
2,000 f rancs p a r septerée ; ne les é v a l u on s q u ’à i , 5oo f r a n c s ,
ci 3o , o oo frar.es ;
2°. D e trente-deux œ u v re s de vignes en plein r ap po rt , dans
les me ill eur s territoires, le p r i x c o m m u n est de 3oo fr. l’œ u v r e ;
elle a été portée en l’an 10 j u sq u’à 900 f r a n c s , p o u r la v e u v e
L a c r o t a ; ne les é va lu o ns q u ’à 200 f r an cs, ci 6,400 f rancs;
3 .° D e six œ u v r e s de p r é - v e r g e r , bi en plantées d ’arbres f r ui
t ie r s , arrosées p a r des sources d ’ eau v i v e ; le p r i x c o m m u n est
de 3, o o o fr. l ’œ u v r e ; ne les é v a l u o n s q u ’à 2,000 f r . , ci 12,000 fr. ;
4.° D e l ’assense des n o y e r s , pr o du i s a n t u n e a n n é e clans l’a u Ire
i 5 o livres d ’h u il e; n’é v a l u on s q u ’à 80 fr. ce produit suscepl ible
d ’a u g m e n t a t i o n , ci 1600 f r a n c s ;
5 .° D e la m a y è r e q u e produisent d e u x s a u s s a y e s , et les saules
ou peupliers plantés aut our des v e r g e r s et des t er res, de 100 fr.
de produi t a n n u e l , ci 2,000 f r a n c s ;
6.° D e la m a i s o n , l ’e m p l a c e m e n t et les m a t é ri a u x de l’a nc i enne
g r a n g e , d ’ un petit c u v a g e s é p a r é , d ’ une co u r et j a r d i n , contigus
a u x biitimens, de la c o nt en ue de trois ou q uat r e c a rt o n n é e s ,
clos de mu rs et c o u v e r t d ’espaliers o u d ’arbres a f r u i t , que l ’on
11’é v a l u e q u ’à 3,000 francs.
T o t a l de l ’c v a l u a l i o n , 55,000 francs.
C ’est d ’après celle a p p r éc ia t io n que l’intimé r é gl a sa v en t e , d o n t
le pri x en assignats aurait été p o r té à 200,000 francs.
*
�.
C 34 )
Sa résidence clans les m o n t a g n e s du C a n t a l , à 3o lieues d e ’
distance, les d é pe n se s , les dégoûts q u ’entraînaient des vo ya g es
in di s pe ns a bl es , soi ! à lui , .soit à son é p o u s e , et leur séparati on
pendant’ plusieurs mois de l’a n n é e , ont p u seuls le d ét er mi ner
a u x sacrifices q u ’a exigés l’appelant.
L ' i n t i m é a souscrit à r e ce vo ir p o u r 27,500 f rancs d ’assignats
■
C
^
q u i n ’ont été p o ur lui d' aucu ne v a l e u r ; cependant l ’é c he ll e du
P u y - d e - D ô m e les é v a l u e à 13,062 fr. 5o centimes.
E n les déduisant sur ce taux , il resterait encore un capital de
4 1 , 9 3 7 fr. 5o cent, en n u m é r a i r e à c o u v r i r , et né a nmo i ns la
v en t e ne constitue Pappelunt r e d e v a b l e que de 27,300 fr.
L e p r i x r ée l des biens , en n u m é r a i r e , est de 55 ,000 fr.
L e p r i x effectif d e l à v e nt e , n’est que de 40,562 fr. 5o cent. ,
en c o mp ta nt les assignats sur l e pied de l’échelle.
L e p r i x est donc au-dessous de la v a l e u r réelle de 1 4, 487 fr.
5o centimes.
T e l est le r a p p o r t du p r i x , a v e c les biens v e n d u s , -qui r é u n i s
sent , dans une p ropor ti on
co n ve na b le , tout ce qui peut les
r endr e utiles et agréables.
O11 se de ma nde c o mm e n t les jurisconsultes h ono rab le s , dont
les no ms figurent dans la c o n su l t a t io n , ont pu cert if ier q u e ces
biens ne sont en v al eu r q u e de 22,000 francs.
C e tt e évaluat ion est a p p u y é e ( d i t - o n )
p ar l’éva luat ion des
rôles de la contri buti on foncière , f ormés sur les ma tr ice s de
1 79 1 , d ’après lesquelles le r e v e n u net n ’est porté q u ’à 555 f r .
20 centimes.
S m s porter ses r egar ds sur le mo de adopté dans les différentes
c o m m u n e s pour la fixation du produit de leurs propnéie., terri
toriales , l’intimé ne craindrait pas le r app roche me nt des fonds
v e nd u s, a v e c ceux des autres propriétaires, le tableau d e c o m n a raison de sa c o te , a v e c celle des plus forts tenanciers, fortifier lit
l’exactitude (h* celui que l’on vient de soumet tr e , sur-tout si l’on
r emontai t à des teins plus c al me s que l ' é po qu e de 1 79 1.
*
�C 35 }
On
t er mi ner a p a r q u el q u e s
considérations
qui
sans doute
n ’a ur aie nt pas é c h a p p é au tribunal.
D ’ une p a r t , il est p eu d’acheteurs qui aient à se p la in dr e du
résultat des clauses p ro hi bi t iv e s , tandis que tous les v en d eu r s
seraient lésés de l eur i nexécut ion.
D ’autre part , le bi en v e n d u étant le p at r im oi ne de la d a m e
A r m a n d , il n ’y a q u ’ un di lapi dateur qui eût pu le trafi quer sur
le p e r ro n Eg ali té.
E n f i n on ne p eut ni er que la rétenti on du pri x restant p ar
l ’a pp e la nt , n’ait occasionné une perte é n o r m e à l’i ntimé et à son
é p o u s e , p a r l’i mp ui ssan ce où il les a mi s d ’en f ai re un r e mp loi
a va n t ag e u x .
C e s d é ve l o p p e m e ns p o u r ro n t paraître lo ng s ; ma is i n d é p e n
d a m m e n t d e ce que l’intérêt de l’i nt imé s’a cco rde e nt ièr ement
a v e c les règl es de la justice di s tr i bu ti ve , il a cru se de vo ir à luim ê m e et à son é ta t, de présenter les pri nc ip es et les bases de sa
conduite.
A R M A N D .
M A R I E ,
avoué.
A RIOM , DE L'IM PR IM ER IE DU P A L A IS , CHEZ J.-C. SALLES.
�
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Factums Marie
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[Factum. Armand. 1795?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour le cit. Armand, Juge au Tribunal d'appel, intimé ; contre le citoyen Baile, marchand, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1795
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0201
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G1314
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Romagnat (63307)
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Domaine public
assignats
Créances
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bb84c3c0213d07b07c6874ffe729317c
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SECOND MÉMOIRE
‘
P O U R
L e citoyen A R M A N D , Juge au Tribunal d ’appel ,
in tim é
CONTRE
L e citoyen B A I L L E ,E
n marchand, appelant
ordonnant, par son jugement préparatoire du 28 nivôse
dernier, avant faire droit sur l’appel, et sans préjudice des fins,
une convention d’experts à l'effet d’estimer, article par article,
valeur de 1790 , les différens objets compris au contrat de vente
du 5 frimaire an 2, le tribunal a moins cédé au besoin de la
cause, qu’à celui de mettre de l’austérité dans une affaire qui
intéresse un de ses membres : cette circonspection ne peut
paraître que louable.
Des rapports séparés existent, malgré mes invitations pres
santes aux experts de s’accorder.
Ils ont vérifié que les contenues, exprimées dans la vente,
sont remplies ; c’est là leur unique point de ralliement.
C es experts, que l’on suppose en état de juger de la valeur
A
�C O
des fonds qui dès-lors devaient opérer avec des légères diffé
rences, ont présenté des évolutions distantes de quinze à trentequatre mille francs.
Il a plu à Perrin de faire une estimation inférieure d’un tiei'S
à celle de l’appeldnt lui-même.
On ne peut l’expliquer , qiie par le souvenir de ce que, obligé
de conclure , comme commissaire, dans la cause des citoyens
Ricard et Mallet de Clermont, j’ai relevé des écarts révoltons,
entassés clans son rapport : cette circonstance eut été pour tout
autre1expert une invitation, si non de s’abstenir de la commis
sion, du moins de la remplir avec droiture et sagesse.
Quoiqu’il en soit, son rapport est en opposition avec le rôle
matrice^ avec les ventes des biens nationaux, faites en 1791 ,
èt avec le cours notoire des fonds de la commune de Romagnat ;
toutes les bases y sont violées.
Il invoque la matrice du rôle,,pour fixer le produit de ces
biens à 493 francs, compris ce qui dépend de la commune de
Cédrat , quoique la matrice porte ce produit à 62B franos
pour lis seuls fonds situés à llomagnat.
Il me fa it, à la vérité , la faveur d’ajouter une moitié en sus,
présumant que l’évaluation du rôle n’est pas rigoureuse : je m’in
terdirai de faire à son imitation dfes conjectures sur le rapport
du produiHadopté par la matrice, avec le produit e f f e c t i f ;
chacun peut se faire une idéo de la sollicitude des administra
tions nutnieipales ¿1 cet égard.
11 a , dit-il, recueilli le prix de trente-quatre ventes qui em
brassent toutes les espèces de biens qu’il vient d’esfimer, passées
depuis le ^ ja n v ie r jusqu’au 3 i décembre 1790, devjint Goughou,
notaire à Beaumont, et T aché, notaire ù llo m a g n a t, et y a puisé
des résultats semblables.
On observe , i.° que ces ventes, triées à l’avance par les soins
du citoyen Baille, comprennent des fonds d'Optne, de S au lzet,
de Coyrot, de Boissejoux; il était réservé à cct expert de coniondrô les fonds de ces diilérentés commuues, avec ceux de
Romagnat •
�(3 )
2,° Il s’est bien gardé de dire que les dépositaires dé ces ventes
l’ont prévenu q u e celles qui concernaient R o m ag n a t, né pou
vaient donner aucune lumière sur le cours des fonds, les objets
vendus consistant en petits lopins de terre, que quelques indigens, dévorés de dettes et de besoins, hors d’état d'offrir une
garantie, étaient forcés de vendre pour la subsistance de leur
famillè; parcelles assises dans des 'réduits isolés, et grevées,
pour la plupart, de cens, de percières.
Et en effet ces 34 ventes n’offrent pas 25 quartelées de terre, et les
contrats énoncent dans plusieurs la charge des redevances fon
cières dont 011 vient de parler ; chaque article ne forme qu’un,
point inaccessible à la concurrence. Quel parallèle entre ces
langues de terre et un domaine propre à former une exploita
tion, à doter une famille nombreuse, des denrées de toute espèce?
L ’allégation que ce sol tient de celui de la montagne, n’a
d’autre fondement que la prétention de placer assez mal-adroiteinent dans son rapport le terme de m olécules. Les fonds en
question sont avantageusement distribués autour de Romagnat
et dans les meilleurs territoires.
*
3 .° Quel ca? peut-on faire de l’assertion, qu’il a consulté deux
propriétaires, cultivateurs, et les seuls estimateurs du p a y s ,'
qui l’ont assuré qu’aucune des terres ne pouvait être placée
dans les première et deuxième classe ; qu’il n’y avait pas une
vigne de bonne qualités; que les ayant aussi consultés sur les prix,
ils lui ont attesté qu’en «790, les trois ares et 79 centiares, ou
la quarlonnée de terre, première classe, se vendaient 60 fr. ; •
deuxième classe, 55 fr. ; et troisième classe, 40 francs ; que la
même superficie en pré, première classe, se payait 120 francs;
et deuxième classe, 80 francs. Il a , à la vérité, la prudence
de ne pas nommer ces estimateurs; et si l’on pouvait l’en croire
sur sa parole, la scfule conséquence qui jeu'naîtrait , serait la :
nullité de son rapport, pour n’avoir pas pris ces renseignemens
en présence du citoyen L e g a y , investi d e là mime mission! Je
lui opposerai des témoignages plus certains et plus respectables :
A 2
�( 4 )
l ’extrait de la matrice du rôle, certifié par le maire dé Romagnat, duquel il résulte que tous les fonds vendus, appartiennent!
aux premières classes ; et l ’extrait des adjudications de biens"
nationaux situés à R o m agn a t, faites en 1790 et 1791 ,■de l’a i w
torité de l’administration de district, dont je parlerai dans un;
moment.
'
m
!
L e sol de Romagnat est connu de nombre dé'ceux qui nous*
écoutent , la valeur des fonds dans la banlieue de Clermout
l ’est aussi ; deux des vergers vendus sont , quoiqu’il en dise ,
l’un complètement et l’autre suffisamment arrosés ; l’un et l’autre
produisant des regains; le troisième est siiué au bord du ruis-1
seau et dans un bas-fond.
1.
.
?
. Quant à la qualité du vin, on pourrait la ranger parmi les
vins grecs, depuis qu’elle est devenue la propriété de l’appelant.>
■
L e zèle de cet expert l’a emporté jusqu’au point de glisser
que les ventes qui lui ont été 1communiquées, et qu’il date»
de 1790, ont calculé l’accroissement,' résultant de la suppres*
sion de la dîme des percières et des cens; cependant les dîmes
ont été perçues jusqu’en 1791 ,.e t devaient l’être jusqu’à ce
que les ancien^ ¡possesseurs seraient entrés en jouissance de
leur remplacement,
j .
.1
,
L es percières imprégnées de féodalité , ainsi que les droits
féodaux et casuels, n’étaient déclarés que rachetables, et n ont
été abolis, sans indemnité, que par le décret du 22 juillet
Ï793 ; il’irilleurs, on répète q.,,e
plupart de ces ventes sont
grévées de cens et de percières;comment donccet exjiert a-t-il pu
prostituer aiqsi son opinion et son talent ? tout ce qui est purement
arbitraire, çst:,ou doit être .suspect à la justice.
1
On ne s’appesentiru pas sur l ’induction qu’il a voulu tirer
d’une vente du 3 fructidor an 2 , consentie au citoyen Baille
par la citoyenne (Richard ; ou n’eu connaît pas l’objet , il y
a d’ailleurs trop de danger de raisonner sur íes négociations.
Il n’en est pas de même du rapport de L eg a y ; il la uaolivé
sur des bajes éternelles, co.mue lu justice.
�a r. )
* Aprfeiavoir reconnu que la loi du 19 flaréaban 6,.relative à ï®»
restitution pourlésioiï d’autre mûitié ,i était inapplicable paprès»
avoir pris en considération les avantages de'la>suppressibn;ide la»
dîme.et des douanes, jjéfùlé: l’objection dejyaeraoisse:meTit;des va-j
leurs
en
des immeubles
mis:dcHis^e
I' U I O V
U tc lir
l lc u
MlIat
U I iI o
U n,
K J p a r *l’augmentation
D
--- ------' ----------- -------------7 ¿
o m m e r ç e , çt prpuv.é qu,^ l ’a ugiT>ej>.l ^ *i
corn
d U. ; p r b } dg$.f d e n ré e s
lait le th e r m o m è tr e sû r d e l ’a u g m e n ta tio n du prix,'cl^ sLf o n d s ,,
éla
que les valeurs Requises en 1790, n’étaient (que. des .valeurs^
naissantes; ¡1 rapporte :
1 « j;°- 'Que les itères sont par lèùr'riaturé’ , léur position et la
«’■qualité du-Sol, toutes s'iïscéptiblés1 de produire du irbrhènVjrrét*
«• même!,sbnt, ce qu’on -pëuf '¡appeler' généralement, dé lionnes”
« terres à Froment, toutes situées en pente douce, et non sujettes8
r. . t
•
' 'J '
i
* aux necidens de la plaine.
’ '
« « Elles peuvent être afïermées depuis la *suppression cde la°
« dîme, six q’uartès Froment, quitte d’impôt, pàr S e p t e r é è ', c’est-a«?dîre , cinq niyriàgtammés par décare ; le blé valait ’, coninui-*
«•îvément, en 1789* et 1790, de 24 à 28 f r . W s 1le seller, ou*
« c!e 48 à 56 sous le myriagramme. En ne le mettant qu’à 24
«ifrancs-leselier, ou 48-sous le myriagramme, cela donnera un
«revenu de 36 francs par chaque!septeréè, m esure'du pays,
« qui est de 800 toises qunrrées en superficie, ou ce qui est
« la même chose ,1 environ trois ’décarts, et représenle un ca« pital au denier vingt, de 720 -francs par septerée, ou par
« trois décares.
v
>■
■
i
« Les vignes sont également situées en très-bon sol, excepté
« uneseu!q (la vigne de Javaude ou du R o c , article 18), qui est
« en pente qs^cz rapide, et qui perd de sa terre végétale^
a mais elle doit produire dYxcullent vin, à raison de son ex« position u 1 aspect d e . midi ; cl la vigne elle-môme relient lo
a. terrain, de manière qu’il ne peut £-ire dégradé par les eaux,
« c o m m e s’il ét ait nu.
« Elles sont toutes susceptibles de rapporter l’une dans l’uulre,
« en les considérant comme elles étaient lors de la vcnle, c ’est-à-
�C6 )
«■dire, quelques-unes vieilles, et ne pouvant plus produire que
« de minces récoltes, trois pots, quittes de toutes dépenses et
k d’impôts , par œuvre , qui est de 100 toises de superG* cie, suivant la mesure du pays, c’est-à-dire, de 57 litres pour
« quatre ares.
« L e pot de v in , ou quatorze livres un quart, valaient,
a communément, trois francs, ce qui fait neuf francs par œuvre,
a et représente un capital au denier vingt, de 180 francs.
Pr^.s fit-prés-vergers, entpurés .d ’arbres . à
it.mayère, et plantés d’arbres fruitiers, on sent qu’ils sont encore,
«..plus précieux que toute, autre, espèce d ’immeuble^, puisqu’ils.
« ne peuvent exister que dans un excellent s o l, et qu’ils pro« duisent plus; et ils le deviennent d’autant plus dans le pays,
« (gu’ils .¿ont .plus rares-, et dispensent cqlui ,qui en possède,
« d’aller" chercher au loin des fourrages çt des échalas pour lesf>
« vignes; ajissi vç rra t-o n les héritages de cette nature, portés,
k dans les estimations ci-après, à un prix bien supérieur aux
« autres, à surfaces égales.
« Les capitaux, ainsi fixés d’après les revenus, nous avons
« pensé qu’il était dq toute justice de les augmenter d’un tin
te quièmeen sus, soit à cause des noyers qui sont sur les bords des
«.terres,soit parce ([lie je revenu ci-dessus est quitte d’impositions,
« soit à raison de l'abondance du numéraire dans le pays, et de
« la localité des h ér it ag es qui sont à la convenance des villages
a.de Ccyrat, Clémunsut, llom ngnat, et même lieu u m ont, tous
« villages riches et peuplés »*
'■ '
C ’est d’après toutes ces considérations que cet export a attri
bué à chaque héritage, sa valeur particulière, et porté la
valeur totale des biens vendus, à ........................... ... 3 ^ 3 0 l'r.
S a v o t n :
20 Septci’des moins deux quartonnées cl demie,
�(7 )
£
ou ;sîx hectares moins deux ares , à 900 francs la
, ;j
>
septerée. . . . .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .
1771O' fr.
29 œuvres un guart.de v ig n e ,o u un hectare lin vt..
>_■
décare un are, ¡1 2 12(francs l’œuvre...........................
672o4
œuvres et demie de près-vergers e{(s^ulée.,pu ; .... * iuyf
n oy éré e , i(ou un hectare cinq ares,,0à 5oo francsJ[t.<
jj3;j
l ’œ u v re .................... ..........................
...' l .lM. .. .il
. i-H,:
C 6800Bûlimens et 'j a r d i n ................................................ .I . J?J . . U 3 io o
- • •
Somme ¿gale . ..................'3433b fr
L e seul reproche’ qu’on puisse faire à ' cet('expèr,fl,nnest'’de
n’aVoir pas osé atteindre la juste valeur de ces taie11s'a l’époque
1 '
- • 1
1
'
1
'> r )W il" ’ .
de i y g o , sans doute par honneur pour la profession’, et pour
saüver à son adjoint unir partie dû ïidiciilë dont" il n’a” pas craint
de se couvrir.
Je 11e me dissimule pasles difficultés d’une semblableopération.
L a valeur intrinsèque des fonds qui présenie elle-même des
combinaisons infinies, n’entre pas>seule dans leur appréèiâtion.
Leur nature, leur position, la 'commodité et la facilité-dd
l ’exploitation , des communications , la concurrence des biens à
vendre, celle des acquéreurs, la proximité des grandes com
munes, l’abondance ou la rareté du numéraire1, :)e tatr* des
denrées, la solidité de la ven te, le prix d’aiïection'cle convènance., et une foule d’autres considérations, servent à en dé*
terminer le prix.
L eg a y n’a pas apprécié toutes ces considérations , il a ’, arithmé
tiquement analysé ld produit du sol, il a interrogé la nature^
inaccessible aux efforts do ltf séductioii. M ■
fIt»'
-! L es résultats do l’experti L e g a y , sont fortifiés par le rôlo
matrice de la commune de I\omagnat , et plus: que doublas
par les extraits des adjudications de biens nationaux , dépen
dant de la incuie commune , faites en >79®
*79* > certi
fiés par le receveur des domaines ; car les ventes des biens
nationaux de l ’annéo 17 9 1, ofïVout lo tableau suivant :
�( 8 )
X.’œuvre de vigne
V- . . .*•; V v ' l ¿'‘l ' W V“'7.131 • 2701 liv/
.•ilLa~£$pterée de terre . . .
.• . .• •• . . .• 2662 . :
L ’œuvre .de pré ,'L '•.
. . .v. . . : :T : . . K''1 2400' "
On n’exige pas que l’appelant attribue plus de faveur’ 'aux
ventes de biens'patrimoniaux, qu’à celles des biens nationaux;
cette distinction ihéîÇique a'¿té condamnée par'une'loi formelle,
D ’après ce premier tableau 'd’évaluation','nous aurons le
^
tableau suivant : •
• ........................* ’ ri‘*'J *. * '
..¡2o septerées de le r r e , à 2652 francs. . . . 53o4Q fr.
»
*. 3o œuvres de vigne , à 270 fr. . . . .
.
8100... ■
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o h j i o ,“ n, .
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5 journaux de pre-verger ,.a 2400 tr. . . . . 12000
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Ces extraits seront imprimés à-ila suite du mémoire. . r r
?*)»1
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L e ttybumil n?a pasîperdu de vue que la vente a été consentie
le 26 novembre 1793 (i5 friuuiïre!nrt!2 ) , après laisuppression
des droits féodaux, des percières , des .douanes ou droit de traites
dans l’intérieur f/des droits exclusifs de chasse j de colombit rs et
de gore«nes: ,01111e croint pasjde direlque depuis c-es franchises
et après.ll’époqiie assignée -aux experts, l’œuvre de v i g n e a été
portée) à ,5oo IV. , la quartonné.e de terre à plus <1° 4 ° °
> «-elle
de pré à plus de 5oo fr., qu’ il s’est opère un accroissement de
plusj du quart ■0111‘,11 trouve la preuve dans les ventes faites dans
dçsLAnu^ft ;5 ,y* 6, p;tr(l,e citoyen Dlesers ; dunfj une adjudication faite en l’an.10 , de l’üu{onté,du tribunal d’arrondissomenf de Clertt)pnt, pare^pcoprialion forcée, sur le cit..J.ertinM ontigni; dons une autre vente par expvopriation, sur les héri
tiers Lacço/a.» et dans le refus du ei'.|Guerier de H om agnat, de
vendre s*qs tprrtvs ¡\ raison de 2400.fr,. la.:ieptercc. . 1
i> :
L e jv in c ip e .n ’eiV tfsljpus; nioinfvcprU>iu que.TeHiimétion, doit
se rapporter (1 l’époque do lu ¡vente >des aines timoirées croiraient
peut-être
•
�< S ?&
C9 )
' _ .
peut-être devoir là rapporter à celle du paièmerit, par ce motif
de justice rigoureuse, que le prix devant représenter la chose,'
le vendeur doit avoir l’équivalant.
'" S i'Ie dernier r a p p o r t a laissé les biens en question au-dessous
de leur valeur en 1790, un tiers expert ne pouvant dépasser son
estimation , ne pourrait promettre un travail satisfaisant pour
le tribunal; il ne pourrait pas en fournir non plus sur la diffé
rence des valeurs de 1790 , avec celles de 1793 ou 1794.
L e tribunal^qui s’était promis plus d’impartialité et de lu
mières de ces rapports, en est dédommagé par les autres renseignemens dont on vient de parler.
11 en puisera , sans doute , dans la décision des premiers
juges imbus de la connaissance personnelle des fonds dans la
banlieue de Clermont ; dans la demande de 10000 fr. de dommages-intérêts , faite par Baille dans le cours de la coneiliatioü.
entamée en /an 10 , et répétée dans son inscription hypothé
caire.
A u surplus le magistrat, que la loi seule doit gu id er, élevé par
elle au dessus des vues qui conviennent aux experts, tirera des rap
ports qui existent, les motifs capables de l’éclairer; il combinera ce
qu’ils ont de favorable dans une partie, avec la défiance qu’ils
inspirent dans une autre ; destinés à lui communiquer leurs
lumières, les experts ne peuvent jamais asservir les siennes. Ce
serait un paradoxe injurieux à la magistrature que de faire dé
pendre les droits les plus légitimes du hasard des conjectures,
des contradictions, des erreurs et de la corruption de la plupart
des experts.
L eu r avis est raison, non autorité, et raison sujet le ’îson exa
men; il peut, quand il le juge à propos , s’en é c a r t e r , mfme dans
les cas où l’expérience est jugée n é c e s s a i r e pour fixer une vérité
intéressante. Ici l’opération la plus exacte , n’aurait d’autre avan
tage que de justifier les tableaux que j ’ai offerts , que de mettre
en opposition la défection du cit. Baille avec le caractère qui doit
ïnc lirer de la classe des vendeurs ordinaires.
B
.M L
�tâ
V *v
.
C*o)
Que reste-t-il donc? si ce n’est d’abandonner une voie qui au
lieu de calmer la c o n s c i e n c e du juge, d’éclairer sa justice, no
sert qu’à démontrer qu’après le rapport de Perrin, on serait un
peu plus incertain sur la valeur du bien, qu’on ne l ’était au
paravant.
L e contrat de vente forme une preuve si décisive de l’en
gagement du citoyen Baille, qu’il n’est pas besoin d’en puiser
ailleurs. Pouquoi, en e ffe t, multiplier les rapports , s’ils ne
ne peuvent changer l’état de la question ?
Par respect pour l ’attention du tribunal, je ne répéterai pas .
les moyens développés ailleurs; on n’a pas entrepris de les com
battre : les clauses de la vente, inconciliables avec le système
de la réduction, des lois précises, des rapports qui en expliquent
les motifs , qui ont interprété les doutes que l’intérêt paiticulier
avait fuit naître, la jurisprudence constcnle des tribunaux, celle
rnême du tribunal de cassation, ne laissent à l’appelant que le
désespoir d’avoir épuisé les lenteurs et l’art de l ’intrigue.
C ’est à ceux qui vendent et qui achètent , à se consulter sur
le prix qu’ils veulent ou donner ou recevoir.
Pourvu que le dol et la fraude ne soient pas mis en usage, il
est libre au vendeur de vendre au prix le plus cher qu’il peut
obtenir, et à l’acquéreur d’acheter au meilleur marché. Lu loi
va m im e plus loin , in pretio em tionis et venditiom s naturaHier licerc conlrahcntibus se circumvenire. L . 16 . f f . de Min or.
C ’est une aulre règle aussi certaine, que 1ai quercur n’est pus
restitué pour acheter trop cher, car pci sonne n’ist forcé d’ac
quérir ; ce n’est qu’au vendeur seul que cette grâce était accor
dée , dans le cas d’ une lésion d’oulre-iuoilié, sur la présomption
qu’il avait cédé à une dure nécessité.
L a nouvelle législation la refuse au vendeur tomme à l ’a c
quéreur.
L ’estimation n’a pas été ordonnée pour fixer le pri.\ de la
vente, car il ne s’agit pas de savoir si le citoyen Baille a été
lésé; et d’aillcuis les parties n’ont pas entendu veudre et ache-
�ter suivant que les fonds en question seraient estimés; c’est uni-«
quement pour vous entourer de toutes les connaissances , pour
tentourer de l’opinion publique un engagement souscrit en faveuç
d’un de vos membres ; rien n’a été préjugé sur l’effet du long
terme et de la clause prohibitive : cetle clause , contre laquelle
vont se briser les erreurs accumulées contre une loi qui est peutêtre la plus juste et la plus nécessaire de toutes celles qui ont
été rendues sur l’importante et difficile matière des transactions,
pendant la dépréciation du papier-monnaie, cette clause est,
dis-je, une partie indivisible et essentielle, sans laquelle la
vente n’aurait pas été consentie, ou le prix eût été plus consi
dérable.
*
II y aurait de l ’ineptie à supposer que , frappé comme le cit.
Baille de la baisse progressive du papier-monnaie , je n’ai dicté
la clause prohibitive que pour recevoir des valeurs illusoires. >
Assurément personne ne partageait, à l ’époque de la vente;
l’opinion que Baille dit avoir eue, que les assignats reprendraient
leur valeur primitive ; la baisse qu’ils avaient éprouvée, et les
lois sévères prononcées peu de terus avant la vente contre ceux
q u i mettraient de la différence entre les assignats et le numé
raire, étaient des pronostics infaillibles de leur chute prochaine.
Si l’on pouvait d’ailleurs en croire le citoyen Baille, lorqu’il
assure qu’il n’a jamais eu l’intention de payer en valeurs métal
liques, mais bien en papier, et qu’il avait l’espoir qu’il serait
maintenu jusqu’à l’échéance du terme, elle entraînerait la mémo
conséquence; car s’il a pu se persuader en l’an 2, qu’il existerait
du papier en l’an 7 et qu’il pourrait payer dans cette monnaie ,
il s est nécessairement soumis à la chance de payer en valeurs
métalliques si leur cours était rétabli à l’époque du paiement 1
les risques devant être réciproques; et la vente, sous ce rapport,
dégénérant en contrat aléatoire, est devenue exclusive de toute
ïéduction.
»
J ’ui louché fort rapidement les conséquences d’un pacte aléa
toire , parce qu’elles se présentent naturellement à tous les esprits^
B 2
�(
)
j*ai oru*devoir;;m’otendfe davantange sur la promesse de-paye#
le reliquat en numéraire , dérivant du long terme et de la clause
prohibitive, qui étaient les seules précautions admissibles dans les
ventes d’alors , et je crois en avoir assez dit pour ramener le cit,
Baille à la foi promise. Quoiqu’il en soit, si le cit. Baille a en
tendu s'eli affranchir à la faveur d’une restriction mentale , ou si
l ’on veut, d’une erreur, sur la durée du p a p ie r , restera-t-il
toujours constant, d’une part, qu’il ne devait pas compter sur
J’existence du papier pour s’acquitter d’une somme qui n’est pas
Stipulée payable dans cette monnaie, et de l’autre qu’il a en
tendu courir la chance de payer en numéraire, si cette valeur
était en circulation à l’échéance du terme.
. Citoyens J u g es, l’on a cherché à dénaturer cette cause.
Dois-je être payé du reliquat en num éraire, sans réduction
ou avec réduction ? c’est purement une question de droit,
elle naît d’un fait qui est la convention; celle-là ne peut pas se
nier.
Il existe une stipulation de paiement à long terme , avec
prohibition de l’anticiper comme clause expresse et substan
tielle de la yente.
. Les lois relatives a la matière , veulent qu’elle éqnipolle
li une stipulation en numéraire, sans réduction; tel est l'effet
de l’article 14 de la loi précitée, du 27 t h e r m i d o r , d o n t le
sens a été reconnu dans le rapport fait au c o ns e i l des anciens sur
cette l o i , par le c i t o y e n L a s s é e , et par le citoyen Grenier, au
conseil des cinq-cens, lors du décret d’ordre du jo u r , du 7
floréal an 7.
C ’est, comme juges, que vous devez fixer le sens et l’effet
de nptre convention ; c’est à vous seuls que la loi a confié
cette importante fonction : vous renonceriez à votre plus belle
prérogative, si vous formiez votre décision sur des résultats
étrangers.
- Certes, s’il s’agiss:ùt de régler une réduction établie p a r la
loi,, il faudrait, sans doule, consulter les experts ; mais s’agit-il
�( >3 )
de juger ce qu’ un acquéreur s’est obligé de payer ? leurs opi
nions ne peuvent pas vous conduire à ce but : que ces biens
fussent de plus grande ou de moindre valeur, il n’en résul,.
tera pas que Baille n’a pas promis, que ce qui reste à payer,
le sera en numéraire.
L ’idée d’une estimation proposée en désespoir de cause,
par B a ille , tendait à anéantir ou éluder l ’effet de la loi du 27
thermidor, et de la convention, à faire adopter par le tribu
nal un autre mode de juger^ l’intention des parties, que celui
de consulter ses lumières et sa conscience.
L a présomption de la lo i, est plus puissante que celle qui
peut résulter d’une estima lion.
Toutes les c o m m i s s i o n s chargées de préparer les lois rela
tives aux transactions consenties durant le cours du papier
m onnaie, ont avoué que la chance du retour et du paiement
en numéraire était p ré v u e , lorsque le prix était payable à
termes l'eculés.
D ’autre p a rt, toutes les lois relatives déclarent qu’elles ont
voulu venir au secours de ceux qui avaient suivi la foi de
la garantie promise à la durée du papier; et que ceux qui,
prévoyant le changement des espèces , se sont obligés pour
ce cas, n’ont aucun motif pour qu’on modifie leurs engagemens.
Les clauses prohibitives, maintenues par la loi du 27 ther
midor , sont évidemment inconciliables avec la réduction du
prix de la vente et l'estimation que les articles 2 et .3 de la
loi du 16 nivôse, autorisent. L e citoyen Bergier lui-même a
rendu hommage a celte vérité, dans un tems d’autant moins
suspect, qu’il concourait avec plus de zèle à la perfection de
ces lois , et des décrets des 27 thermidor an six, cl 7 floréal
an sept, qui ont fixé la jurisprudence des tribunaux, et décidé
pour toujours, que lorsqu’il existe des clauses prohibitives,
le législateur a entendu interdire la réduction.
Il
n’est pas nécessaire que le paiement en argent ait été
formellement écrit dans l’acte; alors il ne pouvait pas l’être,
il suffit qu’il soit une conséquence des clauses de l’acte.
�■VV'<»
. ,
y
( *4 *)
Quant à la jurisprudence, je me suis borné à trois espèces,
deux jugées par les tribunaux de première instance, et d appel
de Pàris, la troisième par le tribunal d’appel de Loir et C her;
ces trois jugemens ont été maintenus par le tribunal de cas
sation. Il en est intervenu nombre d’autres, et notamment du
tribunal d’appel de Rouen.
E h ! que l’on ne dise pas qu’ils ont été rendus pour des
circonstances plus favorables; la clause écrite dans la vente
qui vous est soumise, les réunit toutes.
Ces principes sont éternels; l’apparence d’équité qu’on cher
che à leur substituer, n’en serait que la violation.
On entend paV équité , cette lueur de raison que la nature
a imprimée à tous hommes, et qui est, en effet, le fonds de
la saine jurisprudence; mais comme cette lueur pourrait dé
générer en illusion, et souvent même devenir arbitraire, sui
vant le caprice ou l’intérêt des hommes , les sages en ont
prudemment fixé les règles par des décisions réfléchies et
modérées , et ce sont ces règles qu’ils, ont appelées , équité
civ ile .
Les docteurs nous donnent pour règle, que celui qui a droit
de juger selon sa conscience, est astreint à juger secundùm
conscienliam ju r iu m .— Non licet ju d icib u s de legibus ju d ica r e , sed secundùm ipsas.
Heureux le peuple qui vit sous un gouvernement ou il ne
saurait se présenter d’.-iHiiirc qui ne soit réglée par quelque
loi. En suivant ces codes, où les cas seront prévus, ou des
conséquences naturelles des principes, on ne courra aucun
risque de s’égarer: je poursuis.
Si le tribunal pouvait se décider pour lu nomination d’ un
tiers expert, il ne l’exposera pas sans doute à être entraîné
par le caprice, ou d’autres motifs moins excusables. L e moyen
de l’en garantir, est d’ordonner qu’il sera tenu de départager
les premiers, et de se réunir à l’un ou à l’autre avis.
Userait à souhaiter que les tiers experts fussent toujours asservie
�( , 5 )
J
à. cette règle ; elle peut seule remédier à la frivolité de leurs
opérations, elle influerait même sur l’exactitude et la fidélité
des premiers experts ; assurés qu’en étajant leurs opinions de
motifs sages et réfléchis, en cas de p artage, le tiers chargé de
départager, serait retenu par l’autorité imposante de la sa
gesse et de la raison , par le soin de sa réputation , et que
le meilleur avis ne manquerait pas d’obtenir la sanction du
tribunal ; les premiers ne hazarderaient pas des écarts et des
systèmes qui ne peuvent que les compromettre; tous seraient
en garde contre les préventions, la séduction, la corruption;
nous aurions de meilleurs experts, ou de moins mauvais rapports.
V ou s les avez vus , ces hommes dont les connaissances et
la moralité, bien plus e n c o r e , sont souvent très-bornées, dont
les jugemens vous ont paru si outrés, s’ériger en tribunal,
pour juger , à leur gré, les actes fondamentaux de la société,
et la loi même.
Cette cause vous offre elle-même, citoyens juges, un exem
ple de l'égarement où peut les jeter un dévouement aveugle,
pour ne rien dire de plus.
L ’expert Perrin convaincu , plus que tout autre de l’indé
cente réclamation du citoyen B aille, et de l’impuissance d’as
socier sou aJjoint à une mauvaise opération, n’a rien négligé
pour entrevoir les bases de celui-ci, et pour lui déguiser les
siennes; il n’y a eu entr’eux rien de commun que le toise
ment; il a pris, s’il faut l’en croire, des renseignemens hors
la présence cl à l’insçu de Legny ; il a divagué et entassé im
posture sur imposture, pour déprécier et avilir les biens en
question; sa conclusion a néanmoins été bien simple. Legay,
s est-il dit , ne peut évaluer ce bien au - dessous de 34000
francs, valeur de 1790, tout me le fait p r e s s e n t i r ; je n’a i,
pour servir le citoyen Baille, d’uutre parti que d’abaisser mon
estimation au-dessous de i 5 ou 16000 francs; la vérité, mon
amour-propre, en seront blessés, d’autant plus que le citoyen
Baille a évalué ce bien à 24000 francs; n’importe, le montant
�( 1 6 )
des deux évaluations, sera de 48000 francs. Uu tiers expert,
également fragile et commode, prendra un terme moyen; le
résultat soumis au tribunal, sera donc de 24000 francs. O r , le
citoyen Arm and a déjà r e ç u , en assignats, réduits d’après
Fechelle, i3o62 francs 5o centimes; Baille ne devrait donc,
dans son système, que 10987 francs cinquante centimes, au
Keu de 27500 francs, exigé d’après la convention.
Ainsi, Perrin et le citoyen Baille, ont cru voir dans leur ré
sultat, la possibilité de me réduire à 10000, ou si l’on veut,
à 28000 francs, en comptant pour i 3ooo francs d’assignats,
suivant l’échelle du Puy-de-Dôme, pour un bien en valeur de
Soooo.
Ces idées ne paraîtront pas exagérées, lorsqu’on saura que je
n’ai pas fait un pas dans cette a ffa ire, sans découvrir une
perfidie de l’adversaire.
Puis-je qualifier autrement celle d’avoir fait dresser un pro
cès-verbal de l’état des bâtimens et des murs de l’enclos au
quel je n’ai été ni présent ni appelé?
Celle d’avoir scruté mes affaires domestiques ; celle d’avoir
a rra ch é , soit de mes parties, soit de leurs avoués ou des
m iens, des copies des jugernens rendus par le tribunal du
C an ta l, de la Lozère et de cassation ;
Celle d’avoir sollicité contre m o i, des aiTnircs absolument
ét rangères à celle qui nous divise ;
D ’avoir persécuté le citoyen Cassière, mon beau-frère, pour
lui arracher des déclarations sur les arrangeinens de famille;
D'avoir publié et fait publier à Clertnont, après le juge
ment interlocutoire , que j’avais succombé, et que le jugement
de première instance avait soulevé l’indignation;
D ’avoir préparé un triage de ventes au nombre de trentequatre, pour égarer les experts;
D'avoir dit à plusieurs des magistrats qui nous écoutent,
que le bien vendu n’était entré dans le partage de mon épouse
que pour Cooo francs, contre sa propre connaissance ; car le
traité
�c y y
traité, ainsi que nombre de quittances et autres pièces relatives*
aux successions de mes beau-père et belle-mère, sont encore
dans le cabinet du citoyen Bergier.
Je ne chargerai pas davantage ce tableau, qui peut être toute!
fois de quelque considération pour écarter la demande d’un tiers
expert , sur laqu elle, à toutes fin s , je me permettrai ‘encore
quelques réflexions.
L a question de savoir si le tiers expert est obligé d’adopter
l ’avis d’un des premiers experts , n’a été problématique que
pour les experts ou les praticiens.
G o u p y, dans ses .notes sur Desgodets, a pensé de plein vol
que le tiers expert peut mettre le prix qu’il juge à propos entre
les deux estimations ou confirmer l’une ou l’autre: il était assez
naturel qu’il cherchât à agrandir son domaine, celui de l’ar
bitraire.
Jousse prétend qu’il ne peut estimer plus haut que le plus
haut prix, ni plus bas que le plus bas prix de la première esti
mation; il ajoute que plusieurs arrêts ont annuité des rapports
de tiers experts qui avaient contrevenu à celte règle ; on ignore
où il les a puisés.
Denizart pense que le tiers n’est pas tenu d’embrasser l’avis
de r un des premiers experts, mais de donner le sien propre.
Pigeau hésite entre ces deux derniers avis, et ne prononce pas.
Tous ceux que nous avons nommés ont donc une propension
vers 1 arbilraire ; ils étaient orfèvres, lleste le dernier avis dont
je crois avoir déjà lait sentir plus haut tout l’avantage.
L e tieis e x p eit, dit le r r iù r c , est celui qui est proposé pour
décider, lequel rapport des experts, nommés par les parties ,
doit prévaloir, lorsqu’ils sont d’avis contraire.
L article 5 du litre i . er de la coutume de Bayonhe , qualifie
leui-s rapports de jugeuiens.
I
En comparant les experts aux juges, l’on a cru avec r a i s o n ,
C
�Ci»)
que tout ainsi que lorsque les juges sont partagés, la chambre ou
le juge qui est chargé de les départager, doit embrasser l’une
des deux opinions , le tiers expert doit, par parité, se réunir à
l ’avis de l’un des deux premiers experts. J e pourrais citer, pour
cet avis, Dum oulin, qu’on ne cessera jamais d’appeler l’oracle
de la raison judiciaire et de la jurisprudence.
Pigeau, qui semble incliner à croire qu’il n’est tenu que de
donner son propre avis, cite pourtant.en note un arrêt de i 5o 8 ,
raporlé par Fontanon, que M .r d’Aguesseau assure tenir lieu
d’ancien règlement sur cette matière.
On assure que Fréminville cite un arrêt du 8 juin 1763 , qui
a jugé que le tiers doit embrasser l’avis d’un des premiers experts;
et qu’il en existe un autre du parlement de Rouen , du 17 février
3777, recueilli dans la Gazette des Tribunaux ; il ne m’a pas été
possible de les vérifier.
,
D ’a p rè s ces dernières autorités, s i, ce que je 11’ai garde de
penser, le tribunal se déterminait pour la nomination d’un tiers,
il jugera peut-être dans sa sagesse devoir l ’asservir à ce dernier
mode.
Mais je persiste à soutenir qu’après avoir cédé d’abord à ces
considérations, que, d’un côté, l’aflaire intéresse l’un de ses m e m
bres , et de l ’autre, qu’un citoyen recommandable y prend une
part très-active, le tribunal doit se hâter d e r e n d r e hommage
aux saines maximes, desquelles seules découlent les saines lu
mières.
E nfin, puisque le tribunal a accordé au citoyen Baille la
faveur d’ordonner une estimation, il croira peut-être devoir à
l ’un de scs membres, et on ose le dire, se devoir à lui-même,
d’entendre le notaire qui a rédigé la vente.
C e notaire a été le dépositaire des intentions des parties , le
ministre de leur convention : il ne s’agit pas de dévoiler des
faits particuliers; aujourd’hui que nous sommes libres, que la
clause, de l’expression en numéraire, pourrait être écrite, rien ne
�C
*9
)
j'& b
s’oppose à ce que ce notaire, qui en a connaissance; soif en
tendu.
Outre que le principe que l’on ne doit point recevoir da
témoignage contre, ni outre le contenu aux actes, ni sur ce qui
serait allégué avoir été dit avant, lors, ou depuis, étant fondé sur
la possibilité où l’on a été de faire insérer dans l’acte tout ce qui
s’est fait lors de sa confection, et de faire un écrit de tout ce
qui s’est passé d ep u is, il faut en conclure qu’il souffre excep
tion , toutes les fois que l’on n’a pas eu cette possibilité ; il ne
s’agit pas ici de témoignage, mais d’un moyeu de connaître l ’in
tention des parties.
' L e citoyen Baille n’a pas osé démentir en cause principale
l ’assertion du refus fait par le citoyen Chassaigne, d’insérer dans
l ’acte la clause du paiement en numéraire. Ce n’est pas sans
raison qu’il a évité de s’expliquer devant des juges, qui pouvaient
profiter des raprochemens, que les relations sociales offrent pour
¿claircir des faits que l’on a intérêt de cacher.
En dernière analyse, la cause se réduit à l’interprétation de la
convention , et à l ’application de la loi du 27 thermidor, loi
équitable qui a pris sa source dans la défense de stipuler en
argent, loi qui a voulu sauver le seul moyen de conserver aux
vendeurs le prix de leur propriété.
E n résumant une cause déjà décidée par les principes, dont j’ai
bien l’assurance, que jamais mes juges n’ont eu ni n’auront l ’in
tention de s’écarter; j ’ai démontré que la cause prohibitive
de mon contrat, emportait nécessairement entre nous la sti
pulation q u e le re li qua t serait acquitté en n u m é r a i r e , et dans
le nouveau systeme de mon adversaire, la c o n v e n t i o n qu i l
serait forcé de me payer, ou que je serais moi-même forcé
de recevoir ce reliquat en la monnaie qui a u r a i t cours à l’expira
tion du long terme que nous avions capté; qu’alors nous avions
l’un et l’autre la prévoyance quVi cette époque le papier au
rait fait place au numéraire ; que nous aurions certainement
�Ç*>)
exprimé ,1’acquit en numéraire de la somme dont nous avions
reculé le paiement, si nous avions eu la liberté de le faire;
que nous nous en expliquâmes positivement, devant l’oflicier,
rédacteur de l’acte, que nous rendions dépositaire et témoin
oral de l ’esprit de notre contrat; que ce témoin important
se ressouviendrait sans doute, et ne se refuserait certaine
ment pas à déclarer un fait qui avait été lam e de la rédaction
de son contrat, et le principe de la pi'ohibition.
r P a r surabondance de preuves, j ’ai demandé que ce notaire
Soit entendu; non que son aveu soit nécessaire à ma cause,
puisqu’elle est indubitable en droit, mais parce que d’une
p a r t'u n magistrat, qui a le malheur de plaider, semble de
voir éclairer la justice de sa cause au delà de ce qu’on a
droit d’exiger de tout autre citoyen; et parce que de l’autre
je dois cet hommage à un ofli.cier public , qu’il ne trahira
pas la vérité; et que lors même que sa mémoire ne lui re
tracerait plus le fait que j ’avance, je ne dois pas craindre.,
du m o in s, qu’il le démente.
Ce fut le même esprit qui dicta votre jugement interlocu
toire ; -et sans rien préjuger sur le fonds de ma cause, vous
crûtes devoir à votre délicatesse et à la mienne, de c o n f o n
dre l’injustice de mon adversaire; et vous p e n s A i c s , qu une
cstirnntlbn do la valeur des choses v e n d u e s , vous conduirait
à ce b ut .
vT’ai respecté votre jugement, comme je le devais, sans en
espérer le même avantage; je connais trop le danger des opi
nions d’experts souvent pris nu linzard, plus souvent à mau
vais dessein, et dont rien ne garantit la moralité ou les lu
mières, pour avoir espéré que celui de mon adversaire se ren
contrerait avec le mien dans le chemin de la vérité. Si le
rapport de L eg a y pouvait vous laisser de l’incertitude sur ce
que vous désiriez savoir, l’événement a justilie ma deii:ince.
L e g a y , mon expert, n’a pas, je crois, mieux atteint le but,
�( 21 ')
an ne portant cette valeur qu’à 34,3?o;francs , valeur.de 1790 j
m a is d u m o in s .il a opéré sur des bases , il a raisonné.
Ces rapports vous sont soumis. Il est impossible que vous
ne voyez dans celui de L e g a y , des çaratères de sagesse, qui
le .rapprochent de la vérité, s’il 11e la pas découverte toute
entière.
_ Il est impossible, au contraire, que vous ne remarquiez
pas dans celui de P errin , tous les caractères du mensonge,
çt que vous ne soyez pas révoltés de son opinion; les base?
de l’un sont de notoriété publique; elles sont telles que les
connaissances communes suffisent pour juger qu’elles sont in
failliblement sures, qu’on ne peut lui reprocher, que de ne les
$voir pas assez élevées; l’autre n’a ni bases, ni principes.
. Si le rapport de L egay pouvait vous laisser de l’incertitude
sur ce que vous désiriez savoir, je la crois victorieusement
dissipée pgr les documens que je me suis procurés; je v e u x
dire, l ’extrait du rôle matrice de la commune de Romagnat,
çt celui des ventes des domaines nationaux de la même com
mune , faites en 1791 ; l ’un et l’autre sont authentiques.
Dans des circonstances plus impérieuses , vous hésiterez,
peut-être, si vous ne devez pas suivre la règle o rd inaire,
en nommant un tiers expert pour départager les deux autres.
J ’ai dit pour départager; d’abord, parce qu’ en matière d’estimalion, où il ne s’agit pas d’un fait qui tombe sous les sens,
mais d’un fuit sujet à l’opinion, le tiers expert, comme le juge
comparateur, doit adopter l ’une ou l’autre opinion des deux
premiers, sans dépasser l’une, ni estimer au-dessous de l’uulre,
tt a plus iorte raison sans pouvoir donner u n e opinion moyenne,
qui ne serait ni l’une ni l’autre, et qui , v o u s donnant trois avis
diiïerens , ne vous laisserait aucune rai son de préférence, ou
Vous offrant trois témoins discordons, sur le même fait, vous
mettrait dans le même élat que si vous n’en aviez aucun; car
.s’il est interdit au tiers experts d’estimer plue haut ou plus bas,
�^22)
îl est évident que ce n’est plus son opinion personnelle qu’il
est chargé de donner , puisqu’il pourrait aussi bien penser que
le plus haut a trop peu estim é, que penser que les deux ont
estimé trop d’une part, et trop peu de l*autre. Donc son devoir
strict est dedire exclusivement laquelle des deux opinions il croit
la plus vraie, ou la plus approchante de la vérité.
J ’ai cru néanmoins devoir vous soumettre ces deux observa
tions essentielles ; l’une que d éjà , et par la connaissance que
y o u s avez des rapports , vous connaissez aussi ce que devrait
vous dire le tiers que vous nommeriez; et si, comme je dois
le croire, vous êtes convaincu de la fausseté, je puis dire du men
songe du rapport de Perrin, il ne peut vous resler aucun doute
que le tiers se rangerait, ou devrait se ranger, à celui de Legay.
L ’autre, que, dans aucun cas, il ne saurait être utile de nommer
un tiers expert, soit parce que vous ne pourriez lui donner aucune
confiance s’il adoptait l’avis de Perrin, soit parce que, quand même
j ’aurais les deux experts unanimes en ma faveur, je ne pourrais
pas me permettre , pour cela, et je me garderais bien de vous
demander l’iiomologation de leurs rapports, comme certainement
vous ne les prendriez pas pour motif de votre jugement. Ma
cause gît en droit, et non en fuit, ou plutôt le fait est c o n s t a n t
par le droit. Si j’ai vendu à haut p rix, l’acquércurn’a pas droit
de s’ en plaindre.
Si j’ai vendu à bas prix, je n’ai pas non plus a m ’en plaindre,'
parce que je ne serais pas fondé à répéter la plus value.
,
Et enfin, si nous avons fait un conlrat aléatoire, il a dû dé
pendre, et doit être jugé selon l’événement, auquel chacun do
nous s’est soumis.
En un m o t, nous avons un contrat, et dans ce contrat une
clause expressément prohibitive, et qui ne permet pas de dou
ter de nos intenlions. Ce contrat , cette clause sont nos lois.
Coutractus sunt leges. Et comme vous vous laites gloire de ne
juger que selon les lois , j ’ai la certitude que vous jugerez selon
�J t ï
• ( • 23 . )
notre contrat , et indépendamment de toute valeur réelle .ou
arbitraire, parce qu’en jugeant hors de notre contrat, vous
jugeriez contre notre contrat et contre notre loi ; ce que vous
vous interdirez toujours de fa ire , et ce qu’il m’est impossible
de craindre ; sur-tout dans une cause où j ’ai l’assurance que ma
demande est parfaitement honnête, autant qu’elle est légitime,
impossible même que l’honnêteté ne soit pas toute entière , et
é’xclusivement de mon côté , sur-tout encore après avoir tenté
une première épreuve, pour vous assurer, si elle est aussi stric
tement juste en elle-même, qu’elle est fondée et incontestable
en droit ; surtout enfin, après qu’éclairés par un rapport d’ une
sagesse évidente, et par des preuves au-dessus de toute critique
qui complètent les éclaircissemens que le tribunal a paru dési
re r, vous savez à quoi vous en tenir, sur l’opinion qu’on doit
prendre de la conduite de mon adversaire.
Mais si dans cet état des choses vous désirez une convic
tion de plus, ou du moins épuiser le moyen de vous la procu
rer , celui d interroger le notaire ; a X)tcu ne plaise que je vous
en détourne, je le demanderai même. Loin de me plaindre
du retard, je vous en remercierai; parce qu’en négligeant, de
mon consentement, ce que vous devez à la justice, vous aurez
tout fait pour l’honneur de la magistrature.
Quant à cet interrogatoire du notaire , il arrivera de trois
choses l’une , ou il niera ce que j’avance (je ne le croirai jamais
jusqu’à l’événement ); j’aurai alors droit d’opposer mon témoi
gnage au sien, vu que ma cause n’en dépend pas.
Ou il dira qu’il ne s’en ressouvient point, et moi qui m’en
souviens très-bien, qui le déclare, j’ai titre pour être cru.
Ou il en conviendra, et alors vous aurez le jugement d’une
cause, écrit dans sa déclaration, comme il l’est dans le contrat;
vous aurez le contrat tout entier qui vous attestera littérale
ment notre convention; car il sera vrai, par le témoignage ir
réfragable de l’officier public dépositaire de nos intentions,
�( 24)
qu’il faut imputer écrit, ce
que des circonstances nous ont
forcé d’omettre, et qui Sera prouvé avoir été la base de nos
conventions.
Citoyens juges , si je n’ai tiré aucun parti du papier que j ’ai
reçu, je ne dois m’en prendre qu’à moi ; mais rien ne peut
justifier le refus de l’appelant, d’acquitter, sans réduction, ce
qui reste a payer: ce reliquat qui représente le patrimoine de
mon épouse, est sous la sauvegarde de ces conventions et de
la loi. Quel titre de recommandation auprès d’un tribunal connu
par son attachement inviolable pour elles?
ARMAND.
M A R I E , avoué.
E jr r R jn '
�.
( 25 )
’S X T R d i T de La Matrice du Rôle foncier de La
Commune de Ho magnat.
A r t ..
-
Produit net.
liv.
s.
. .
3 i5
»
16
»
Trois quartonnées au m ê m e .................................
52
Deux septerées trois coupées au Teitaux . . . . .
Trois quartelées verger à Glémensat................. . .
Une quartonnée saulée à P r é n e u f .................... . .
19
8
»
3
4
»
. .
19
»
»
»
Trois septerées au m êm e........................................
Deux quartelées au pré B a r a ..............................
Trois quartelées aux B u g e s ................. ... . . . .
Trois quartelées à L u c .................................
Une quartelée v e rg e r...............................................
»
»
»
Six œuvres de vigne à L a g a r d e ........................
Tr,ois œuvres au m ê m e ......................................... . .
Six œuvres à Ghampoumey.................................
i5
i5
»
»
»
Six coupées vigne au même..................................
i5
Une septerée terre à J a v a u d e ..............................
i5
»
. .
Six œuvres au R o c. . . ........................................ . .
48
24
Bûtiinens et j a r d i n .................................................. . .
45
»
10
»
l7
Je, soussigné,certifie l’extrait ci-contre sincère et conforme au
rôle , observant que les terres et vergers oui été divisés en cinq
dusses, el les vignes en six classes. Fuit en Mairie , à llo magnat,
le z j messidor an 11 > signé B ru n , Maire.
;
•
d
�tyù
E x t r a i t
B U R E A U
du Som m ier.— ■ Compte ouvert avec
les acquéreurs.
Dk C lir sio h t,
V
en tes
des Biens nationaux, situés dans la commune
de Romagnat.
âa novem bre 1791.
M
« »
M a r a d i i x , acquéreur de 7 œuvres de v i g n e , terroir des GateauXj
provenant des prêtres F ille u ls, de R o m a g n a t , moyennant
22 novem bre 1791.
P au l M a r a d e i x , de B e a u m o n t, acquéreur d’ une vigne d’ une œ uvre et
d e m i e , terroir Descheix , provenant des niêmi'S , moyennant
%2 novem bre 1791.
600 fr«
Jean A r n a u d , de B e a u m o n t, acquéreur d’ une vigne de (rois œuvres»
terroir des C h eix , provenant des m ê m e s , m oyennant
l 5 décem bre 1791.
385 fr*
L ig ie r M e ss e ix , de B ea u m o n t, acqnéreur d’une vigne de trois œ u vres,
provenant des m ê m e s , moyennant
22 novem bre 1791.
1600 fr.
490 fr*
Pierre Tach<5 , notaire à R o m a g n a t , acquéreur d ’une terre de deux quar*
te lé e s , au terroir de Soutras, provenant des m ê m e s , moyennant 12/îo fr#
dudit.
Pierre T a c h é fils , notaire à R o m ag n a t, nquéreur d ’ une terre d’une quartonnée , terroir de L a u b i z e , provenant des prêtres F i ll e u l s , de Romagnat»
dudit.
m oyennaut
4 00 ^r'
Guillau m e A rnau d , d ’ A u b i è r e , acquéreur d’une terre d ’une quartonnée/
terroir de Soutras, provenant des m ê m e s , moyennant
dudit.
720 fr*
A nto ine P osan t, cultivateur h R o m a g n a t, acquéreur d’une terre de ciu i
quartonnées, terroirde la Postias, provenant des mûines^ moyennant 2000 fr*
dudit.
Jean Courtial , de R o m a g n a t , acquéreur d’ une terre de trois quarteléei»
terroir do Saindoux , provenant des mêmes , moyenant
dudit.
terroir des P ré s - d e - R o c lio , provenant des m ê m e s, moyennant
dudit.
2î5o
'
Rouchand , d’A u b i è i e , acquéreur d’ uue terre d ’uno qu artelée, terr<j|
do la R a s e , provenant des m êm es, moyennant
dudit.
3 ooofr*
Pierre T aclié fils , d c R o m a g n n t , acquéreur d’ uno terre d ’ une éminé®»
terroir des Palis , provenant des m ê m e s , inoyennai t
dudit,
1950 fr*
Anto ine T a c b é fils , de Romagnat, acquéreur d ’uue terre do 3 quarteléc*»
terroir des Pré»-de-Uoclie, provenant d is mêmes } moyennant
dudit.
2700 fr*
François B a y l e , d’ Aubifcre, acquéreur d’ une terre de sept quartonnées»
2^°
Autoino Bellard , de C lerin o n t, acquéreur d ’uno terre d’ une quai*«'
terroir d e l à li'oisse} provenant des m ûm es, moyennant
*
38 °
L
�—
dud't.
4
(2 7 )
Sû)\
P ierre T a c h e f i l s , de R o m a g n a t , acquéreur d’ une terre d’ une é m i n é e ,
terroir des p a l e s , provenant des m ê m e s , moyennant
Jea n Bourché ,
dudit.
1700 fr.
cultivateur à A u b i è r e , acquéreur d’une terre de six
c o u p ées , terroir des T e y ta u x , provenant des m ê m e s , moyennant 410 fr.
dudit.
An to i n e J a n o u x , d’A u b iè r e , a cq ué re u r d’une terre d’une é m i n é e , ter
dudit.
roir de J a v aud e , provenant des m ê m e s , moy e nn an t
625 fr.
Demoiselle A m e i l , de C lém en sat, acquéreuse d ’une terre de cinq quart o n n é e s , terroir de J o u v e t , provenant des m ê m e s, moyennant
M artin C e l é r i e r , de R o m a g n a t,
dudit.
9 6 0 fr.
acquéreur d’ une terre de trois quar-
tonnées , terroir de C o m b a t , moyennant
695 fr.
Pierre T a c h é fi l s , de R o m a g n a t , acquéreur d’une terre de trois quarlelées,
dudit.
terroir de L afo n t-S a u zet, provenant des m ê m e s, moyennant
dudit.
1 3 oo fr.
Austrem oine D o m at , de R o m a g n a t, acquéreur d ’ une vigne de quatre
œuvres et d em ie , terroir de la S a ig n e , provenant des mêmes , m oyen nant
1425 fr.
N o ë l V a s s o n , de R o m a g n a t, acquéreur d’ une vigne de quatre œuvres ,
dudit.
terroir des V iguaux sive de las S a u ch a s, provenant des m ê m e s , m o y e n
nant
dudit.
~
1 5 oo fr.
Gilbert M a z i n , d’A u b i è r e , acquéreur d ’une vigne de trois œ u vres, située
terroir des A n t e s , provenant de la cure de R o m ag n a t, moyennant 10 5o fr.
*
Certifié véritable , à Clerm ont-Ferrand , le 6 messidor an I I de la,
R épublique. L e receveur des dom aines , sigué T a b a r i e z .
A R I O M , D E L ’I M P R I M E E
IR
D U P A L A I S , C H E Z J .-C . S A L L E S .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Armand. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Marie
Subject
The topic of the resource
biens nationaux
ventes
créances
assignats
experts
vin
percière
domaines agricoles
cours des terres et des denrées
Description
An account of the resource
Titre complet : Second mémoire pour le citoyen Armand, juge au tribunal d'appel, intimé ; Contre le citoyen Baille, marchand, appelant.
Publication d'un extrait de la matrice du Rôle foncier de la Commune de Romagnat. Suivi de « Extrait du sommier. Ventes des Biens nationaux, situés dans la commune de Romagnat ».
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1315
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1314
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1316
BCU_Factums_G1317
BCU_Factums_G1318
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53204/BCU_Factums_G1315.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
cours des terres et des denrées
Créances
domaines agricoles
experts
Percière
ventes
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53206/BCU_Factums_G1317.pdf
4bf104b0d5a233503ff25a68b91d2cf6
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Text
TROISIÈME MÉMOIRE
POUR
L e Citoyen A R M A N D , Juge au Tribunal d’Appel,
Intimé
CONTRE
L e Citoyen B A I L L E , M arch an d, A ppelant.
L E S observations que j'ai cru devoir me perm ettre, citoyens
j u g e s , lorsque vous avez prononcé un interlocutoire , et lorsque
vous avez ordonné la tierce expérience, ne m ’ont pas empêché
d ’exécuter vos jugemens avec le respect dont je dois donner
l ’exemple : mais je vous l ’a v o u e , les trois rapports , q u e ces j ug em ens ont produits , n ’ont fait que m e convaincre q u ’il n ’en
jaillirait aucune lumière dans la cause.
Celui du citoyen C onchon a pleinement justifié tout ce que
j' avais prédit ; au to n de suffisance près qui y règne d ’un bout à
l'a u tr e , et qui y tient la p lace des preuves et de l'im partialité,
qu'offre -t -il, qu' un tissu d ’erreurs et d ’inconséquences ?
L a , il compose le territoire de Clémensat de tout ce qui est
au-dessus des murs de R o m a g nat.
O
I c i , il place les vignes a la proxim ité des montagnes:
A
�L à , il voit dans les terres des rocs immobiles, qui n’ont pas été
aperçus par L e g a y , pas même par Perrin.
I c i . il proclame le danger des ra v in e s, pour des terres situées
en pente d o uce, qui ne pourraient même que g a g n e r, et le dan ger du dommage pour des vergers qui ne sont pas clos de murs.
L à , il suppose que les parties se sont accordées sur les conte
n u e s, et assure que l ’arpentement fait p a r les premiers experts,
était exact, u n iq u e m e n t, parce q u ’on l’a dispensé d ’en vérifier
l'exactitude.
Ici , il réduit la contenue d ’un verger.
L à , il altère le véritable prix des b au x qui lui ont été co m
muniqués.
Non moins physicien q u ’agronome , il trouve ici des pierres
basaltiques parmi les pierres et les molécules volcaniques.
L à , il suppose que les terres de première qualité ne peuvent
produire le grain sept et huit.
I c i , il suppose que Perrin a évalué l’œuvre de vigne 1 3o liv.
quoiqu’il ne l ’ait portée q u ’à 112 liv.
L à , il place la progression toujours croissante de la valeur
vénale des fonds , à l ’époque de la cessation du signe monétaire,
.quoique sa disparution dût opérer un effet contraire.
I c i, il critique l ’estimation article par article, sur le prétexte
que la vente ayant été faite en masse , l’estimation a dû se faire
dans le même sens.
L à , sans q u ’il y lut autorisé par vos ju g emens , il énonce les
avantages de l’abolition des cens, des dîmes, des douanes , pour
avoir occasion de vous dire q u ’on ne pouvait alor s compter sur
la stabilité des lois qui les avaient abolis; q u ’aucun acquéreur
n ’a acheté ave c cette confiance absolue, ou du moins a balancé
ces avantages avec la crainte de les voir disparaître.
Cette crainte , déjà dissipée par le brûlement des titres féo
daux gênait-elle encore la conscience de cet expert, lors de sou
opération ?
I c i , il applique aux estimations ordinaires, les lois relatives
�6 o&
( 3 )
à l ’estimation des biens nationaux , ou au rachat des rentes féo~
dales et foncières.
N u lle p a rt, il ne prend en considération les extraits des ventes
des biens nationaux situés clans les mêmes territoires de Clémensat et R om agnat, pendant les années 1 7 9 0 a 1791 , n i l ’extrait
du rôle matrice de cette c o m m u n e, où les fonds vendus sont ins
crits dans les premières classes, n i les documens sur les ventes de
fonds de pareille nature q u ’on lui a administrés.
N u lle p a r t , il ne fait le rapprochement des b au x consentis en
1 7 7 4 , qui ont été remis en ses mains.
A cette première esquisse de son tra va il, que voit-on , qui ne
présente le caractère de la prévention ?
N o u s allons reprendre ses raisonnemens.
L e tribunal se rappelle que j ’ai vendu en l'an 2 , en stipulant
que ce qui restait dû ne serait payable que cin q a p r è s , c’est-àd ir e , en 1799 ; q u ’en ordonnant une estimation valeu r de 1790*
il a placé les experts à une époque qui n’est pas celle de ma
vente ; q u ’entr’elle et celle de ma venlc , il y a eu évidem m ent
une transition d’ une valeur moindre à une plus haute v a l e u r ,
opérée par l’effet du tems et des nouvelles l o i s , ce qui les a jetés
dans un embarras q u ’il leur était presque impossible de sur
monter. A u ssi n ’o n t-ils donné dans trois avis , énormément
discordant , aucun résultat certain , si com m e cela devrait être
n aturellem ent, l’on accorde une égale confiance à. chacun des
trois.
Si vous avez voulu connaître, citoyens j u g e s , com m e je dois
le p ré su m er, de quelle valeur était le bien vendu à l’époque de
la vente , l’estimation ordonnée n’ayant 'p:n été exsuutéu dans
ce sens; aucun de ces expert; n’a atteint votre but.
11 me
semble néanmoins (pie si L e g a y ne l’a pas a tte in t, c ’est
parce q u ’ il <1 voulu se renfermer dans les expression{ de votre
jugement qui lui demandait une valeur de 1792; et q u ’en pre
nant en considération la hausse d e j fo n d s , résultant de l ’ubull-
A 2
�C4 )
tion des droits féodaux, des dîmes , des douanes , à l'estimation
de L e g a y , la valeur réelle des objets vendus en 17 9 4 , époque
de la vente , dépasserait sensiblement le prix convenu.
Je quitte le rapport de L e g a y , pour revenir à celui du citoyen
Conch on.
î
A l ’exemple du citoyen Perrin , il a entrepris d ’analyser la
nature du sol ; l ’un a dit qu’il s’imprégnait des molécules de
la montagne ; l ’autre vous dit que c’est un am algam e d’argile
et d ’une décomposition de substance volcanique ; un autre
pourrait vous d ire , avec plus de v é rité , que c ’est un composé
d ’argile , et d ’une fusion considérable de pierre calcaire. E t
m o i, sans craindre de m e . tromper, et sans entrer dans des dis
sertations g éologiques, je vous dis tout bonnement, que c ’est de
la terre végétale qui produit du from ent, et dont on reconnaît la
fertilité , soit aux récoltes, soit aux arbres de toute espèce dont
elle; est couverte.
, L e citoyen Conchon reconnaît la justesse et la vérité des prin
cipes exposés dans le rapport de L e g a y ; il avoue notamment,
que c ’est toujours sur le produit réel de la terre q u ’il faut '
en fixer la valeur capitale, mais il s’en écarte totalement dans
l ’application, et se contente d’opposer aux raisonnemens du cit. 1
L e g a y , sa propre opinion , voulant q u ’on l ’en croie sur sa p a r o le .
11 prétend que pour que ces terres produisent le revenu net
de six cartes , que le cit. L e g a y leur attribue, il faudrait q u ’elles
fussent de la première qualité.
Il dit d'ailleurs q u ’il y en a peu et peut-être po int, qui soient
propres à produire chaque année , et il est c o n d u it , d i t - i l , à
c o t t e a s s e r t i o n , par le coup d’œil q u ’il a jeté sur le territoire, dans
lequel il « aperçu beaucoup de jachères , ce qui indique que
cette pratique est en usage et même nécessaire pour amender
les terres qui n’y s o n t , ni d ’assez bonne qualité , ni d ’un sol ass«z
précieux pour porter deux récoltés de suite.
L E n admettant une assertion d émentie par la notoriété, le cit.
�(5)
6
#
Conchon aurait dix ajouter que les prés sont rares ; q u ’il y a
peu de bestiaux, et par conséquent très-peu d’engrais dans les
terres ; que néanmoins le sol produit du blé fro m e n t, et sans con
tredit le plus beau du département ; q u ’il est très-peuplé ; que
les h a b ita n sy sont presque tous dans l ’aisance, et plusieurs dans
l ’opulence.
L a fertilité de la terre est une conséquence et une suite de ces
vérités , puisque c’est à elle se u le , sans autre secours que celui des
bras qui la cultivent, qu ’on doit les récoltes les plus abondantes.
Exam inons maintenant, si ce n’est pas avec légèreté , que le
cit. Conchon nous assure que les terres ne produisent pas le grain
sept et huit.
O n ne contestera pas, sans doute , que toute terre en culture
doit produire, ou parle secours des engrais, ou par le croît et pro
fit des bestiaux, ou par la main d’œ u v re, à défaut des bestiaux,
une portion de revenu quelconque pour le propriétaire, et une
portion égale au tra v a il, aux avances et dépenses du colon qui
l ’exploite; ou en d ’autres termes, que si celui qui cultive la terre
d ’a u tr u i, ne trouvait pas dans sa portion de récolte de quoi s’indemniser des frais de cu ltu re, du tems qu’il y e m p lo ie , qui sont
sa véritable propriété, il s’adonnerait à toute autre occupation ,
ou passerait dans une contrée plus fertile. O r , il est certain que
les territoires de Cléinensat et R o m a g n a t sont cultivés , et des
m ieux cultivés de la L im a g n e , par des indigènes; que personne
n ’étnigre. L e cultivateur y trouve donc l’avantage attaché à la
culture de la terre, c’est-à-dire , sa subsistance , et le salaire de
son travail. Ce premier raisonnement nous conduit ¡1 la consé
quence ultérieure que le sol qui produit avec peu ou sans le
secours des engrais, donne, quoiqu’en dise le cit. C o n c h o n , un
revenu net de six cartes au moins par septerée, pour le pro
priétaire.
Car d’après l ’allégation du citoyen C o n c h o n , que ces terres
qui ne reçoivent pas ou très-peu d ’engrais , ne produisent que
d ’anuée à a u tre , et que lu moitié reste en ja c h è re , celui q u i ,
�com m e le citoyen B a i l l e , sera propriétaire de v in g t septerées
de terre, n’en aura , à la vérité, que dix en production ; ces dix
septerées p ro d u iro n t, au grain sept et demi , soixante - quinze
setiers de blé ; il faut en déduire dix pour la semence , reste
soixante-cinq setiers, dont trente-deux et demi pour le c o lo n , ce
q u i lui donne un peu plus de six cartes par septerées , pour les
v in g t septerées*
Sur ces six cartes par septerée, il doit payer les contributions ,
trouver sa subsistance , son v ê te m e n t, les g a g e s , et la nourriture
des b e stia u x , ou le prix des journées des. bestiaux q u ’il lo u e ,
et le prix des journées d ’ouvriers employés à sarcler,.recueillir ,
ecosser ou. battre les grains.
O r , je demande à tout cultiva
teur , si les six cartes de blé , au prix de vingt-quatre livres le
setier, valant trente-six livres, ne sont pas rigoureusement né
cessaires pour les avances q u ’exige la culture de deux sopîerées
de terre, dans le cours d'une année, l ’une en production , et
l'autre en jachère , q u ’il, faut préparera recevoir-la semence pour
l ’année d ’après.
Si ce produit est strictement nécessaire pour le colon , il faut
en conclure q u ’il le relire de la terre q u ’il prend la peine de
cultiver , et que le propriétaire en relire autant.
E t si, comme le citoyen Gonchon en convien t, q u e l q u e s - u n e s
de ces terres sont susceptibles de porter deux ou p l u s i e u r s ré
coltes de s u i t e , au moyen de quelques engrais , ou par le secours
de la bêche q u ’on emploie oll’c ctiveincnt dan*» ce* village , parce
(pic la couche de terre végétale est considérable, on cultive plus
de d ix septerées sur les v i n g t , on aura plus de six cartes do
revenu ; et il faudra en conclure que le citoyen L e g u y n ’a fait
q u ’approcher de la vérité.
Est-il bien vrai d ’ailleurs, q u ’il faut des terres de la première
qualité pour rapporter le grain sept et huit. L e cit. Gonchon
ignore-t-il donc que les terres d e l à première qualité produisent
au moins jusqu’au grain q u in z e , et ju sq u ’à quatre seticrj d ’assenco pour le propriétaire?
�A l’égard des vig n es, le citoyen Conchon convient que le sol
est le même que celui des terres; que leur exposition est au midi ,
et que si ces vignes étaient moins vieilles , il aurait embrassé
l ’avis du citoyen L e g a y ; q u ’il suppose les avoir estimées sui
te pied de deux cents trente livres l’œ uvre, quoique dans la v é
r i t é , celui-ci ne la porte qu’à un prix com m un de deux cents
douze livres.
Mais le citoyen L e g a y ne les a réduites à un revenu net de
trois pots par œ u v r e , comme il le dit dans son rapport , que
parce que quelques-unes étaient vieilles, il n’a eu garde de dissi
m uler qu ’une jeune vigne produit davantage ; et nous le deman
derons au citoyen Conchon , donnerait-il en f e r m e , à trois pots
p a r œ u v re, les vignes q u ’il possède à V o l y i c , bonnes ou m au
vaises , bien ou mal exposées; et tout en convenant que celles
dont il s’agit sont en bon sol et en bon aspect, comment a-t-il
pu s’écarter de l’estimation du citoyen L e g a y , si évidemment
au-dessous des b au x qu’on lui a communiqués , dans lesquels la
septerée de terre était affermée en 1 7 7 4 , sur le pied de u c a r
tons de froment , ou de 36 liv. en a rg e n t, et les vignes à raison
de 10 livres par œ u v r e , en y comprenant des réserves de pa
niers de raisins , de grains, et des journées à b ra s, ainsi que de
la valeur commerciale des fonds de pareille nature, dans le lieu
de R o m a g n a t , où l’œ uvre de vigne contiguë à celles du citoyen
Baille , a été vendue cinq cents liv re s , peu de jours avant les
rapports.
L e citoyen Conchon soutient que le citoyen L e g a y a eu fort
de fixer le prix des grains et du v in , eu égard à la valeur qu’ils
avaient en 1789 et 1 7 9 0 , et décide d ’ un ton tranchant q u ’il
s’est éearlo, tant de lu règle qui fut toujours observée par les
experts , de former l’année commune sur 10 , que de l’article 14.
de la loi du 9 mai 1790, qui a tracé leur conduite dans ce cas.
M a is, i.° le jugem ent interlocutoire , dans le sens qu’il pré
sente, assujétit les experts à estim er, valeur de 1790.
2.0 Où le citoyen Conchon a-t-il donc pnisé cette prétendue
�rè g le? O ù ont-elles existé, m ême depuis la révolution , les. cir
constances *où le jugement interlocutoire a placé les experts?
On peut co nvenir, sans danger, que dans les tems ordinaires ,
et abstraction faite de toute variation subite, de toute secousse
imprévue , un spéculateur, soit acheteur , soit vendeur de fonds
ne pouvant pénétrer dans l’avenir qui n’appartient pas à la con
naissance de l’homme, n’a , pour se régler sur des valeurs futures,
que le tems présent et l’expériencedu passé; que les experts, qui
ne lisent pas plus dans l’avenir que les autres hommes , n’ont pu
que se reporter au tems de la vente, en considérant ce qui avait
précédé celte époque, et ce que les circonstances pouvaient pré
sager pour l’avenir. Car ils ne devaient pas peidre de v u e , que
ce ne sont jamais des jouissances passées que l’on vend, mais
bien des valeurs futures: que dès-lors, les considérations du passé
ne peuvent seules servir de base, même dans un tems ordinaire,
pu isqu e, en opérant ainsi , les estimations ne se ressentiraient
presque pas de la videur progressive des fonds qui a élé perpé
tuellement croissante en F r a n c e , abstraction faited e toute autre
cause , que celle de l’augmentation du numéraire en circulation.
3 °.
Quel rapport peut avoir à la contestation, la loi du 9 mai
1790, dont parle le citoyen C onch on , et qui était relative au
rachat des rentes féodales, dont le capital devait être iixé sur un
prix commun de quatorze années précédentes , en retranchant
les deux plus tories et les deux plus faibles? C ’était une loi do
circonstance. I.es biens de pareille nature perdaient .alors do
le u r faveur; les biens fonds s’élevaient en sens contraire. l Tne
pareille confusion d’idées pouvait-elle échapper à un expert aussi
versé que lui dans le. régime administratif?
Je possédais mon bien en 1790; je l’ai vendu en l’an 2 , dans
un tems où la loi de 1790 n était susceptible d’aucune appli
cation, où les cens étaient abolis , el je n’ai vraiment entendu en
consommer la vente qu’en l’an 7 ( en 179 9); puisque j ’ai renvoyé
à cette époque le paiement du prix. O r , le citoyen C o n ch on , tout
çn disant luusscment qu’il u eu égard à lu suppression des cens,
�¿3 0 0 )
J
C9 )
des dîmes et des douanes, tout en reconnaissant que c’est le pro
duit seul de la terre qui doit régler sa valeur capitale , ne vous
a présenté q u ’une estimation moyenne proportionnelle de 1780
à 1790, c’est-à-dire de 1785 ; s’il avait fait attention, com m e l ’a
fait le citoyen Legay\, que j ’avais vendu, en 1793, des valeurs
futures, que le prix du blé s’est soutenu au prix de vingt-quatre
livres le setier, et celui du vin au prix de trois livres le pot, depuis
1790 jusqu’à présent, et se sont élevés bien a u -d e là , il n’aurait
pas plus trouvé d ’exagération dans cette évalution , qu’il y en a
eu dans la fixation des produits, p a r le même e x p e r t, à soixantesept livres par septerée.
C e tiers expert trouve également à redire à ce que L e g a y ait
ajouté à son estimation , sur un produit aussi médiocre , un cin
quièm e, soit à cause des noyers , arbres à fruit ou saules qui bor
dent les héritages, et qu’il n’a pas comptés dans les revenus, soit
pour la valeur des arbres en eux-m êm es, soit enfin pour l’attache
ment que l’on porte généralement à la propriété, sur-tout dans un
pays où la nature du s o l, et les différentes espèces de production
retiennent les habilans , comme s’il ignorait que plus les pays sont
populeux, plus les fonds y ont de valeur; plus ils sont morcelés,
et plus il y a de concurrence.
Conchon a semblé applaudir en théorie aux considérations de
L e g a y ; il ajoute même que les biens se vendaient en 1790 audessus du denier 20, mais il s’est accroché à la loi du 6 floréal
an 4 , contenant instruction pour l’exécution de celle du 28 ven
tôse précédent, relative à l’estimation des biens nationaux, et a
cru ne devoir ajouter qu’un dixième , en sus de son estimation.
L e citoyen Conchon aurait dû reconnaître que l’esprit de
cette loi, n'était pas d ’atteindre la véritable valeur des biens na
tionaux, par une sage politique, celle de 11e pas éloigner la con
currence.
Aussi a-1-011 généralement observé que les enchères qui for
ment une des règles les plus suies des valeurs foncières ont porté
B
to ü
�1)0
( 10 )
les biens de celle espèce à des prix bien supérieurs aux estima
tions fuites en vertu de la loi du 6 floréal.
V o u s ve rre z, citoyens juges, que le rapport du cit. C o n ch on ,
n’ est, à le bien prendre, qu’une critique des deux prem iers, qu’il
n négligé les preuves qui étaient sous ses yeux , et qu’il n’oppose
à celui de L eg a y que des assertions fugitives.
On doit présumer qu’il ne se serait pas autant écarté de la
v é n l é , s’il avait fait le raisonnement du citoyen L e g a y , duquel
il résulte clairement, que le territoire de Clémensat doit produire
le 7-c ou S.e g r a i n , et que le propriétaire doit retirer au moins
six cartes froment par septerée.
Si donc, le citoyen L eg a y n’a fait qu’ une estimation m o d é ré e ,
le citoyen Baille a eu tort, de lui faire partager a vec moi , dans
son dernier m ém o ire, des injures qu’il ne mérite pas plus que
moi. L e citoyen B a ille , et l’auteur de son m é m o ire , savent l’ un
et l’autre, que le citoyen Legny marche depuis long-lems sur les
traces d ’ un p è r e qui s’est distingué dans la profession d’ex pet l .p e n
dant plus de cinquante ans,et qui l’avait, j’ose te d ir e , honorée; et
ils sont bien convaincus , que si j’avais été capable d’influencer
un e x p e r t , ce n’eut pas été le cit. L eg a y que j ’aurais choisi.
Ce rapport de L e g a y , justifié par les baux de 177 4 , commu
niqués au citoyen C o n ch on , et qui étaient inconnus au citoyen
L e g n y , n’excède pas le produit connu de 1 7 7 4 , malgré l’inter
valle de seize ans, qui s’était écoulé jusqu’en 179° » c t >S1 l)i,r 11,1
contraste frappant, Conchon est resté si fort au-dessous de l’éva
luation de L e g a y , où doit-on en chercher le motil. J e m'arrête :
quand on a tant à dire contre 1111 ra p p o rt, ne convient-il pas
d’ user d’indulgence pour l’expert?
O ucl usa^c a-t-il fait de l’extrait du rôle matrice de la comïmme de R o m a g n a t , où mes biens sont compris dans les pre
mières classes, de l’extrait des ventes de biens nationaux de cette
commune, portées en 1790et 1791 , à deux 011 trois fois au-dessus
de son estimation , maigre la laveur due aux biens patrim oniaux,
des notes de ventes particulières, laites d ansccttc connu une? quels
�C *1)
égards a-t-il eus pour la suppression des cens , des dîmes , des
percières féodales , des douanes, etc.?
Fallait-il reprendre une carrière abandonnée depuis d ix ans ,
pour se mettre en opposition avec les faits, les écrits , la noto
riété , et la saine raison?
E n condamnant ce ra p p o rt, à l ’o u b li , comme celui de Perrin ,
le tribunal ne pourrait puiser quelques lumières que dans le ra p
port de L eg a y.
J ’o b se rv e , en p a ss a n t, que la légère différence que l ’on re
m arque entre les contenues énoncées dans le contrat de vente ,
et celles vérifiées par Perrin et L e g a y , n’existe pas. Je d o is , à
ce su je t, des renseignemens au cit. Baille , que je n’ai pu four
nir aux experts.
S ’il m ’est permis de rapprocher , du rapport de L e g a y , le
fruit de mes nouvelles recherches, je dirai qu ’il est p ro u vé , par
des baux authentiques , que la septerée de terre, ni de la meil
le u re , ni de la moindre q ualité, était affermée en 1 7 7 4 et 177 5 ,
en a r g e n t, sur le pied de
33
et
36
livres, et en grains, à raison
de 11 cartons froment.
Q ue l ’œuvre de vigne était affermée à raison de 8 Iiv. 10 sous
et 9 livres.
Que l’œuvre ou journal de pré-verger l’était à raison de 40 liv.
Q u ’indépendamment de l’argent et des grains ci-dessus, les
fermiers étaient chargés de délivrer chaqu’anuée des paniers de
.raisin , de fruits , des grains et des journées d’hommes et de bes
tiaux ; que les baux contenaient la réserve des noyers , arbres à
fruit, à m ayère, qui bordaient les héritages, du bois mort et mort
b o is, et de la résolution des baux, en cas de vente, sans dédom
magement.
D ’après ces baux , la valeur capitale de vingt septerées de terre
s’élevait à 14,000 livres.
Celle de trente œuvres de vigne , à 5,400 livres.
Celle de cin q œuvres de pré-verger à 4,000 livres , outre les
réserves précitées.
�Q u ’en ne portant la valeur capitale du jardin , des bâtimens
et enclo s, et des arbres qui en faisaient partie, q u ’à
3 ,ooo liv r e s ,
et eu laissant le produit et la valeur des arbres enradiqués autour
des possessions, pour faire face aux contributions, on a v a i t , en
1774 , une valeur capitale de 26,400 livres.
Si l ’on ajoute à ce capital un cinquième en sus, à cause d e l à
progression vénale des fonds depuis 1774 jusqu’à 1793 époque
de la vente , on aura un capital de 31,640 livres.
II convient d’ajouter, même d’après l ’avis des experts, un autre
cinquième en sus , soit parce que les fonds se vendent au-dessus
du denier 20, quitte de contributions, soit à cause de l ’assiette
de ces fonds , à proximité des communes de C e j r a t , de Beaum o n t, de R o m a g n a t , d ’Obière et D o p m e , et dans la banlieue
deClerinont. Conchon n ’accorde qu ’un dixième; m ais, outre que
cet expert est seul de cet avis, il est notyire que les receveurs de
l ’enregistrement, dans la perception des droits de mutation ou
d ’insinuation, augmentent d ’un cinquième l’évaluation des biens,
à cause des impositions, soit q u ’elles restent à la charge des pro
priétaires ou des fermiers, ce sont là leurs instructions conformes
aux lois.
O n aura donc un capital de
38,016
livres.
Enfin , ajoutant un autre cinquième en sus, à cause de l'abo
lition des cens et redevances de toute espèce, revêtues de féoda
l i t é , dîm es, et des autres franchises opérées par la révolution,
on aura, à l’époque de la vente, un capital de 45,619 liv. 4 sous.
J e pourrais, sans exagération, a v a n c e r, qu ’abstraction faite
de la suppression des cens, des dîmes et des douanes , etc. la
v a l e u r des f o n d s situés dans les banlieues de Clermont et de lli o m ,
a plus que doublé depuis 1774 jusqu’en 1794.
C ’est, au reste, donner trop d’elfet à des calculs , que la vérité
seule a pu me dicter , et qui ne doivent pas faire la base de votre
décision. J e ne dissimulerai pas cependant, que tout étranger
que me paraît ce tableau , j ’ai quelque satisfaction de vous dé
montrer , combien le prix promis par le citoyen Baille } est iu-
�( 13 )
férieur à la véritable valeur des fonds en question, combien peu
les rapports de Perrin et de Conchon mériteraient de co n fia n ce,
.si des estimations pouvaient influer dans la cause , et combien
il serait dangereux de faire dépendre le sort des conventions
d ’une expertise?
J ’ai dit que ces calculs ne doivent pas faire la base de votre
décision, car il s’a g itd e j u g e r , s’il y a lieu ou n o n , à une réduc
tion; or, cette question , purement de droit, ne peut pas dépen
dre d’une estimation , mais bien de la convention des parties et
des lois relatives.
Ce tableau est en m ême tems bien propre à calmer la con
science des magistrats , et à éclairer leur justice; e t, puisque le
tribunal n ’a rien voulu préjuger, c ’est toujours, et c’est unique
ment dans les termes d e là convention', et dans les lois, comme
à sa véritable source, q u ’il doit puiser sa décision.
Il e s t , d’après les clauses de la v e n t e , d’ une évidence lé g a le ,
que ce qui reste dû par le citoyen Baille , n ’est pas sujet à ré
duction.
C ’est une vérité avouée même par lu i, ou q u ’il n ’oserait pas
n ier, que la vente tient du pacte aléatoire, par suite de la stipu
lation du paiement à long terme.
C a r , dans l ’intention même du citoyen B a ille , il avait l’espoir
de se libérer en papier m onnaie, si cette valeur se trouvait e x i
lante au jour convenu , comme le vendeur avait l’espoir de rece
voir en numéraire le paiement de cette partie du prix ; le risque
était égal; la chance pouvait tourner contre l’ un et contre l ’autre.
L ’événement était hors de la prévoyance et de la puissance des
parties.
O r , toute convention qui repose sur des risques indépendans
de la volonté et de la puissance des parties, est une convention
aléatoire , et doit suivre les règles particulières aux actes de cette
n a tu re , qui n ’admettent ni réduction ni restitution.
M ais je ne cesserai de le d ir e , la convention, sous ce rap
p o rt, serait absolument dénaturée.
�( 14 )
E lle est expresse pour le paiement en num éraire, et si le;
termes n ’y sont pas, c ’est parce q u ’ils ire pouvaient pas y être ,
la loi les a suppléés; et c’est ici le véritable état de la cause.
L ’erreur où le citoyen Baille a cherché à nous entraîner, ne sau
rait prendre la place de la vérité; et le retour aux principes im immuables fut toujours l ’appanage de la justice.
L a loi du 16 nivôse an 6, invoquée par le citoyen B a ille , est,
com m e je crois l ’avoir démontré dans les précédens m ém oires,
sans application.
Inpépendamment de ce que sa disposition, au lieu d’être gé
nérale , est littéralement restreinte aux cas , où la réduction
devra avoir lie u ; une loi postérieure en a textuellement excepté
les ventes contenant les clauses résolutoires ou prohibitives.
Il est superflu de rappeler, q u ’à l’époque d e là v e n te ,il n'exis
ta it, comme avant et depuis , aucune autorité pour dépouiller
■
un propriétaire, d ’nprôs une expertise à laquelle il n ’eût pas con
senti; si ce n’est pour une destination pu bliqu e, c’est là un des
points fondamentaux de nos lois anciennes , et de la constitution
sous laquelle nous vivons aujourd’hui.
Aussi cette loi du 16 nivôse , est-elle regardée com m e une loi
exorbitante , de circonstance, et q u ’il ne faut pas étendre audelà de ses bornes ; elle n ’a point en vue les ventes dans lesquelles
les parties ont prévu le changement des espèces , et le retour du
numéraire.
L a loi du 27 thermidor qui en est l’ interprétation , décide for
mellement que la première n’a point dérogé aux clauses résolu
toires ou prohibitives, expressément apposées dans les contrats
d ’aliénalion d ’immeubles , pendant la dépréciation du papier
monnaie. L es lois des i 5 fructidor an
5,
i 3 pluviôse au 6 , les
rapports du citoyen L assée, sür lesquels celle du 27 thermidoi4a
été rendue, sont décisifs; celui du citoyen G renier, concernant
des réclamations postérieures , a fixé la j u r i s p r u d e n c e .
11 n’existe pas un seul jugem ent des t r i b u n a u x de P a n s , plus
�particulièrement imbus des maximes de la nouvelle lég islatio n ,
qui n’y soit conforme.
A défaut de moyens , le citoyeu Baille s’est retranche' dans des
considérations q u ’il appelle d’équité.
O ù serait-elle donc blessée l’équitc?
L a lésion, ( et l ’on a vu q u ’il n ’en existe p o i n t , ) ne fut jamais ’
un moyen pour l ’acquéreur ; aujourd’hui m êm e, le vendeur pour
lequel elle avait été introduite, ne pourrait pas l ’invoquer.
M a is, citoyens juges, l’équité peut-elle se trouver en opposi
tion avec la loi ; qui mieux que l’illustre chancelier Daguesseau
pouvait démêler ses véritables caractères; ce que ce magistrat
immortel en a dit dans ses i 3 .* et 14 .' mercuriales, est gravé dans
vos coeurs.
Ce serait d’ailleurs une marche bien fausse ou bien d a no^ o
reuse que déplacer la mesure de l’équité dans une expertise , et
de prétendre que tous les intérêts y sont ménagés.
D ’abord , il n ’existe point de base certaine pour déterminer la
valeur des im m eubles, comme on l ’a observe ailleurs.
O n veut bien supposer que les experts 11c seront pas intéressés
au résultat de leur opération; qu’elle sera étrangère à leurs p.ixeus , à leurs vo isin s, à leurs amis ; on veut bien mettre à l’écart
le danger de la corruption : où sera la garantie d’une bonne esti
mation ? Le prix des fonds varie d ’une commune à l’autre, d ’un
territoire, d ’un héritage à l’a utre, dans la même commune.
L a qualité du sol trompe les plus habiles. L ’expert d ’une com
mune asseoit son éval nation d’après celle du territoire q u ’il habite;
il n’envisage qu'avec incertitude et dans le v a g u e , les lieux et les
tems qui onl vu consommer une aliénation.
P rend ra-t-il pour basj? les ventes de biens n a tio n au x, v lmi
Jes reventes? les unes e t ÿ a u lie r o n t élé généralement 1111 objet
d ’agiotage, de dilapidation ou de fraude ?
Se (ixera-t-il sur le cours des ventes des biens patrimonnu'ç ,
elles ont clé eu bien petit nombre pendant le courô du papier ;
�s 'v '
,
( .‘ 6 )
celles qui existen t ont été nécessitées par le beso in, par le malheur,.
peut-être par des motifs moins naturels encore ?
O u ne peut faire ces rapprocheinens sans les connaissances
lo cales, celles, surtout, de l’influence des moùvemens révolu
tionnaires sur la population , sur le c o m m e r c e , et sur les pro
priétés territoriales.
Il n ’est d’ailleurs que trop malheureusement confirmé par
l ’expérience que dans la réunion de deux experts , ils se préoccu
pent de l’intérêt de ceux qui les ont nommés.
L ’intervention d’un tiers ne saurait être plus rassurante.
Cette cause où les mêmes objets soumis à l’estimation de trois
experts, ont été portés par l’un à quinze , par l ’autre à trentequatre, et par le tiers à vingt-quati'e mille francs, n ’en est -elle
pas une preuve effrayante ?
O n demande s’il eût été de la sagesse des contractans, de courir
ces chances, et d ’asseoir les bases de cette équité sur des avis de
Perrin et de Conchon.
L a prudence ne commandait-elle p a s , au contraire, de pré
voir et d ’éviter les dangers d ’une estimation; et n ’est-il pas évi
dent que le paiement à long terme , et la clause pro h ibitive, n ’ont
été stipulés que pour ce but essentiel.
On demande enfin , s’il serait du devoir , on a presque d i t ,
du pouvoir des tribunaux d’enlever aux parties l’efïet des pré
cautions aussi salutaires , et dictées à la fois par l’équilé même ,
et par la raison.
Il existe, je ne saurais trop le répéter , une stipulation en nu
m é ra ire , elle est indépendante de l’aveu ou du désaveu du cit.
B a ille , heureusement pour m o i; elle est expresse, d ’après l’ar
ticle 14 île
27 therm id or, toutes les objections seront
écartées par cet te l oi , par l’iiiterprctation q u ’en donnent les rap- ,
ports de Lassée et de Grenier.
L a loi du 16 nivôse et celle du 27 therm idor, ont des dispo
sitions entièrement, opposées.
L es
�¿ ti
.................................... *7 ) _
L e s clausès résolutoires et prohibitives , dont la loi du 27 ther
m idor consacre.l’exception , tendent à maintenir intégralement
la convention, ou à la résoudre entièrement.
L a loi du 16 nivôse tend , au contraire , à la dénaturer , à la
*
1
#
m o difier en substituant un prix arbitraire au prix convenu. Si
le législateur avait entendu que la clause prohibitive ou la clause
résolutoire, n ’étaient pas incompatibles a v e c l ’estimation, il les
aurait annullées, au lieu de les maintenir.
L e citoyen Baille a joui pleinement des termes et de l ’effet de
la clause prohibitive ; non seulement il n’a ni payé , ni fait offre du
prix principal qui reste à p a y e r , il n’a même pas payé les revenus.
Fussions-nous dans le cas de la loi du 16 nivôse , pourrait-il,
sans im pudeur, p ro p o ser, en 1804, une estimation , valeur de
1793 ou 1794; et le tribunal croirait-t-il faire un acte de justice
en l ’ordonnant?
Ces réflexions seraient affligeantes pour tout autre que le cit.
B a ille; quoiqu’il en so it, la loi du 27 thermidor a mis un obstacle
invincible à cette estimation; elle nous ramène aux termes des
lois anciennes.
Il n’y a que des considérations supérieures qui aient pu faire
concevoir au tribunal l’idée de son jugement préparatoire, pour
l ’honneur de la m agistrature, pour celui d’ un de ses membres ,
contre lequel on s’est permis , dans deux différens mémoires, les
qualifications les plus injurieuses, qualifications dont le public
fera justice. A u m oins, j ’ose me flatter qu’elle n’apercevra de
mon côté , que la droiture et l’honnêteté ; et du côté de mon ad
versaire , que la violation de ses engagemens , et l’intrigue.
Jaloux de l’estime de mes collègues, je ne puis négliger aucun
des moyens de la justifier, en me renfermant dans la loi qui doit
n o u s juger; j insiste à demander que l’officier public qui a rédigé
la vente, et qui est le dépositaire de nos intentions, soit appelé
pour faire sa déclaration sur la convention de paiement en numé
raire, que les circonstances nous ont forcé d’ém ettre, et qui sera
prouvée avoir été la base de notre contrat.
�( 1 8 )
C e tte déclaration n e fera q u ’ajouter à la conviction du tribu
n a l , que le jugem ent dont est a p p e l, s’accorde avec les principes
a l’intention des parties.
A R M A ND .
M
A
R IE , avoué.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Armand. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Marie
Subject
The topic of the resource
experts
biens nationaux
ventes
créances
assignats
vin
percière
domaines agricoles
cours des terres et des denrées
tiers-expert
Description
An account of the resource
Titre complet : Troisième mémoire pour le Citoyen Armand, Juge au Tribunal d'Appel, intimé ; contre le Citoyen Baille, marchand, appelant.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 4. la condition imposée, en l’an 2, à un acquéreur d’immeuble, de ne payer le prix de son acquisition, qu’au bout de cinq années, doit-elle être considérée comme une clause prohibitive ? équivaut-elle à une stipulation en numéraire ?
Solde d'une dette à régler dans les 5 ans en numéraire et non en assignats. Le reliquat peut-il être sujet à réduction ?
méthode de travail des experts
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1793-Circa 1795
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1317
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1314
BCU_Factums_M0201
BCU_Factums_G1315
BCU_Factums_G1316
BCU_Factums_G1318
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53206/BCU_Factums_G1317.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Clémensat (63111)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
cours des terres et des denrées
Créances
domaines agricoles
experts
Percière
tiers-expert
ventes
vin
-
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ae66e5f296a037ecb0c0270d7e38b715
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MÉMOIRE
^ y?
POUR
L e s s ie u r s A nnet et M
ichel
B O N H O U R S , d ame A
nne
BONHOURS
et le s i e u r J e a n - B a p t i s t e C E L M E , son m a r i , et le s i e u r L o u i s COUR
B O N H O U R S , t u t e u r l é g a l d e ses e n f a n s m i n e u r s , to u s p r o DE
p r i é t a i r e s , h a b i t a n s la v i l l e d e M o n t f e r r a n d , Intimés;
-—
CONTRE
D a m e A n t o i n e t t e B R U N , veuve en premières noces du sieur
G u i l l a u m e B U J A D O U X , et sieur J o s e p h V E R N I E T T E ,
son second m a r i , marchands , demeurant en la 'ville de
Clermont , Appelans.
S ans d o u t e , le droit de transmettre sa fortune à un héritier de
son choix est u n des droits les plus précieux de la société. Tout
acte qui renferme l ’exercice de ce droit, lorsqu’il se présente revêtu
des formes légales et des caractères de la sincérité, mérite la pro
tection de la justice.
Mais aussi la justice frappe toujours de sa réprobation l ’acte
mensonger que l ’on ose faire apparaître sous les couleurs de la
vérité. E lle sait déjouer les manœuvres criminelles, à l ’aide des
quelles on voudrait substituer la fiction à la réalité.
Dans le procès qui s’agite, la dame V er n ie tte , égarée par une
basse cu pi dité, n ’a pas craint de s’arroger la qualité de légataire
universelle du sieur B r u n , son frère. On l ’entend dire et répéter
(que c ’est là un don de la gratitude, de l ’amitié fraternelle. A l ’en
tendre, que n ’a - t - e l l e pas fait pour la mériter! Soins attentifs,
égards , peines , sacrifices , rien n ’a été épargné pour embellir
l ’existence du sieur Brun , ou p o u r la soulager dans les tristes
années d ’une vieillesse infirme.
Q ue faisaient pendant ce tems-là les enfans Bonheurs, neveux
du sieur B r u n ? Ils oubliaient leur oncle, qui disait, s’ il faut en
croire la darne V e r n ie t te , avoir depuis long-tems à s’en plaindre.
C e langage de la dame Verniette respire l ’exagération et la ca
lomnie. Il est démenti par les nombreux élémens de la cause.
La correspondance du sieur Brun , les enquêtes, sagement a p
préciées, réduisent à leur juste valeur les assertions de la dame
Verniette. C e q u ’elles apprennent, c ’est que la dame Verniette,
en attirant son frère à C le r m o n t , eu le recevant chez elle, était:
�w
.
( * >
dominée par l ’arrière-pensée de s’emparer de toute sa fortune. E lle
savait q u ’ il chérissait les enfans Bonhours, ses neveux ; elle chercha
à les lui rendre odieux. Elle prit soin de les éronduire, toutes les
fois q u ’ils se présentaient pour rendre leurs devoirs à un bon parent.
Doux et tim id e, affaibli par les souffrances', et privé souvent de
l ’usage de sa raison, le sieur Brun était entièrement sous la domi
nation de sa sœur : elle le tenait en charte privée.
C e t état moral ne permettait pas au sieur Brui', de nommer un
héritier testamentaire, quand il l ’eut voulu.
Non; jamais il ne voulut donner tout son patrimoine à la dame
V er n ie tte , et dépouiller ainsi de leur part les Bonhours, ses neveux,
dont il n ’avait point eu à se plaindre. Jamais, dans sa nombreuse
correspondance, dans ses propos, il 11e laissa pressentir une pareille
disposition.
Aussi l ’étonnement fut général, quand on parla dans le public
d ’un testament olographe, qui attribuai t à la dame Verniette toute
l ’ hérédité du sieur Br u n . On ne pouvait y croire : chacun voulait
voir cette pièce.
Tous ceux qui la virent soupçonnèrent sa sincérité; elle apparut
comme une œuvre de fraude.
Les enfans. Bonhours durent l ’a tt a q u e r, par respect même pour
la mémoire de leur oncle. S ’ ils eussent gardé le silence, on aurait
pu l ’accuser d ’injustice a leur égard.
Si le blâme de la société retombe sur la dame V e r n ie t te , elle ne
doit l ’imputer q u ’à elle-méinc. Pourquoi tant d ’avidité? N ’était-ce
pas un assez beau lot que la moitié d ’ une succession qui s’élève à
plus de Go,000 fia lies ?
L ’écrit informe sur lequel elle fait reposer sa prétention n ’a pas
été tracé par la main du sieur Brun . Il n’émanerait pas dans tous
les cas d ’ une volonté libre.
L a vérification qui en a été déjà faite par experts 11e mérite point
de confiance. Les premiers juges l’ont rec onnu’, ils en ont ordonné
une nouvelle.
La p reu ve , qui avait été offerte par la dame Verniette et or
donnée par la C o u r , n ’a point été administrée*, au contraire, le
résultat de celte mesure ajoute encore aux moyens qui tendent à
démontrer la fausseté ou l ’illégalité du testament attaqué.
FATTS.
L e sieur Brun , chirurgien à Montferrand, avait eu trois enfans,
un fils et deux tilles. __________
�T ^ J
Antoinette B r u n , l ’une de ces filles, s’était mariée en premières
noces avec le sieur Bujadoux; en secondes noces, elle est devenue
réponse du sieur Verniette. Ces époux soilt appelans dans la cause.
iV!ici)elle B r u n , sœur de la dame Verniette, avait épousé le sieur
Bonliours, propriétaire à Montfcrrand. Elle est décédée depuis
plusieurs années, laissant cinq enfans, qui sont les intimés.
L e sieur B r u n , frère des dames Verniette et Bonliours, est dé
cédé, sans postérité, depuis 1824. Leu r père était mort quelques
années auparavant.
La surcession du sieur Brun fils est assez considérable- elle est
toute mobilière. Elle se compose du bénéfice de son commerce du
fruit de ses économies et de la valeur de sa part dans l ’hérédité
paternelle.
L a dame Verniette a fait apparaître un prétendu testament,
sous la forme olographe, qui lui assurerait l ’intégralité de la suc
cession de son frère. C ’est l ’appréciation du mérite de ce testament
qui fait l ’objet du procès.
L e sieur Brun fils avait été d ’abord élève en pharmacie. Il aban
donna cette carrière pour embrasser le commerce, et vint demeurer
à Paris en 1802. Il choisit la commission. Il expédiai-t les diverses
sortes de marchandises q u ’on lui demandait. Originaire de Montferrand, les envois de marchandises q u ’il faisait à C l e r m o n t durent
être fréquens, et ses recouvremens dans la même proportion , ce
qui mult iplia les relations q u ’il eut avec cette ville durant un grand
nombre d ’années.
Les élémens de la cause n ’apprennent point quelles furent pen
dant long-tems les personnes chargées de sa confiance à Clermont.
Seulement ia dame Verniette produit plusieurs lettres dont les dates
sont postérieures à 1820, et desquelles il résulte q u ’aux tems où ces
lettres étaient écrites, la dame Verniette était chargée par le sieur
B r u n , son frère, de faire quelques recouvremens. Il l ’accuse même
par fois de négligence à ce sujet.
C e n ’est assurément pas 1111 sentiment de prédilection qui portait
le sieur Brun à s’adresser quelquefois à la dame Verniette pour
l ’aider dans ses recouvremens. Il 11e pouvait la préférer à la dame
Bonliours, qui était alors décédée depuis long-tems; et celte der
nière eu t-e lle vécu, comme elle habitait Montferrand et que sa
famille était nombreuse, elle n aurait pu servir les intérêts du sieur
B r u n , sou frère, sans nuire beaucoup aux siens; inconvénient qui
ne*se rencontrait point à l ’égard de la dame Ver niette, qui a tou
jours habité Clermont.
�I
T T T
L a clame Verniette veut s’emparer exclusivement île l'affection
(le son frère. Toujours, dit-elle, exista entr’eux la plus vive amitié;
amitié q u ’avait entretenue un échange mutuel de soins, de services
et d ’attention , et qui engageait le sieur Brun à venir de tems en
tems à Clermont pour passer quelques semaines avec elle.
A u contraire, dit-elle encore, les rapports du sieur Br un avec la
dame Bonhours et sou époux étaient nuls ou peu agréables; il
éprouvait même pour eux une sorle cl’éloigneinent , dont i l est
in u tile de -rechercher les causes, mais q u ’il a manifesté dans p l u
sieurs circonstances.
C e langage, suggéré par une Lasse c u p i d ité , est outrageant pour
la mémoire de la dame Bonhours. Il est hautement démenti pur
diverses lettres que rapportent les intimés, et qui renferment des
témoignages d ’affection et de confiance de la part du sieur B run
pour les époux Bonhours et leurs enfans; démenti encoie par les
nombreux témoignages invoqués pour éclairer la justice, il n est
rien moins que justifié par la correspondance dont se prévaut la
dame Verniette. O ù sont donc les preuves de sa perfide allégation?
Quelles sont donc les circonstances qui manifestent Véloignem ent
q u ’elle suppose avoir existé entre le sieur Br un et les époux Bon
hours? On la défie même d ’indiquer des causes qui eussent dû
amener ce prétendu-éloignement.
E lle a calomnié la mémoire deson frère.Non, il n ’eut paspour elle
une amitié exclusive. O u i , la dame Bonhours, son époux et ses
enfans , ont partagé son affection , et n’ont rien fait pour démériter.
L o r s q u ’ il venait en Au vergne, avant la-mort de sou p è r e , il té
moignait à ses sœurs une égale affection; et s’il avait quelque pré
férence , c’était pour la dame Bo n h o u r s, bonne mère et bonne
épouse. Tantôt à Montferrand, chez son père ou chez sa sœur; tan
tôt à C le r m o n t , chez la dame Bu jadoux (depuis Verniette), et chez
des amis, il recevait partout un bon accueil.
A u voyage q u ’il fit en 1818 pour le partage de l ’ hérédité pater
nelle, il résida à Montferrand plus long-tems q u ’à Clermont. La
veille de son arrivée était décédée la dame Bonhours, sa sœur; il
en témoigna les plus vifs regrets à son .beau-frère.
11 faisait des cadeaux à la dame Bonhours, à sou époux et à ses
enfans. Il en recevait d ’eux. C ’était ordinairement quelques fûts
tie vin blanc., quelques paniers de pommes choisies que sa sœur et
son bcait-lrèie lui adressaient à Paris. La vérité de cette allégation
est établie par su correspondance avec, les époux Bonhours.
La mort de la dame Bonhours lui causa beaucoup de chagrin. Il
�----------------------------- m
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témoigna sa douleur à son beau-frère. Il le plaignit, en l ’assurant
de son inaltérable amitié, avec ce ton de sincérité qui part du cœur.
C e t événement, si funeste pour les en fans Bonhours, livra le
sieur B r u n , leur oncle, à toute l ’obsession de la dame Verniette.
L ’amitié q u ’il portait aux neveux, bien q u ’elle lut sincère, ne
pouvait pas être aussi vive que celle q u ’il avait eue pour leur mère:
il les connaissait moins.
La dame* V e r n i e t t e , qui convoitait la succession du sieur B r u n ,
craignit moins alors de voir déjouer ses manœuvres pour éloigner
les eu fans Bonhours et leur enlever l ’aiFection de leur oncle. Elle
cherchait à l'aire parade d ’un atLacheinent sans bornes pour un
frère qui sans doute lui laisserait en récompense toute sa fortune.
On ne doit pas s’étonner si, postérieurement à 1820, la correspon
dance du sieur Brun est plus active avec la dame Verniette q u ’avec
le sieur Bonhours et ses enfaris. Une sœur, qui montrait tant d'a
mitié et un zèle aussi apparent pour les intérêts de son frère, de
v a i t , par rapport à ces intérêts, l ’emporter sur des neveux à qui
leur grande jeunesse et leur position 11e permettaient pas de rendre
service à leur oncle. Mais cette correspondance ne prouve p o i n t ,
elle n’indique pas même que son affection leur fut aliénée. Il se
souvint toujours q u ’ils étaient les enfans d ’une sœur chérie.
Au mois de lévrier 1821, et non en 1822, comme elle le dit dans
son mémoire, la dame Verniette se rendit à Paris. A l'entendre,
elle accourut en cette ville, n ’écoutant que khi affection et aban
donnant son ménage et son commerce pour venir entourer de ses
soins un frère malade.
On ignore si le sieur Brun était alors malade; plusieurs lettres
' q u ’il écrivait à sa sœur, dans les mois de janvier et de lévrier,
persuadent le contraire; mais ce qui est positif c ’est q u ’elle était
indisposée en arrivant à Paris; que durant le séjour d ’environ deux
mois q u ’elle lit en cette ville, elle éprouva une forte maladie.
Dans une lettre que le sieur Brun écrivait au sieur Verniette son
beau-frère, sous la date du 29 avril 1821 , il lui annonce que la
dame Verniette part de Paris dans deux heures; « il faut croire,
« ajo ut e-t-i l, q u ’elle s’est rétablie bien promptement, et j ’ai fait
« pour le mieux pour vous la renvoyer en bonne santé et en m eilleu r
« et al (¡ue j e ne l ’ai reçue. »
C e n’était donc pus pour donner des soins h son frère malade que
la dame Vcrnielte était venue à Paris, mais bien pour satisfaire sa
curiosité, et plus encore, aiin de faciliter le traitement de la
maladie dont elle se son lait atteinte.
�tq
( c )
•
L e sieur B r u n avait subi plusieurs faillites. L e chagrin q u ’ il en
éprouva altéra sa santé, qui devint de plus en plus chancelante.
Bientôt arrivèrent les infirmités, et il sentit q u ’il était teins d ’a
bandonner le commerce, de liquider ses affaires , et de réunir sa
for tu ne, q ui était toute mobilière, et qui s’élevait à plus de
60,000 fr.
L a dame Verniet te le savait. Trouver le m oyen de s’approprier
cette fortune fixait continuellement son attention. Elle'sollicita son
frère de se retirer à Clermont. E lle offrit de le recevoir chez elle,
et même d ’envoyer son mari pour prendre soin de lui dans son
voyage. C ’est ce q u ’apprennent deux lettres écrites par le sieur
B r u n , les 26 août 1822 et 8 octobre 182,3.
L a i re de ces lettres apprend aussi toute la peine que ressentait
le sieur Brun d ’être forcé d ’abandonner ses habitudes commerciales.
On voit q u ’à ce sujet il a soutenu une longue lutte avec lui-même.
C e n ’est pas lui q u i , par initiative, a résolu de se retirer à C l e r
mont. Il n ’a fait que céder aux instances de sa sœur, et il n ’a fallu
rien moins, pour l ’ y déterminer, que des infirmités croissantes et
diverses attaqu es, qui le plaçaient momentanément dans un état
de paralysie.
En fin le commerce et P a r i s sont abandonnés par le sieur B r u n ,
q u i arrive à C le n n o u t le 2 novembre 1823. C ’est de ce jour q u ’était
d ’abord daté le testament produit par la dame V e r n ie t t e , tant
elle avait hâte de s’assurer sa proie; depuis on a pensé q u u n e date
plus récente, écrite même par surcharge , conviendrait mieux.
Quoi q u ’il en soit, la dame Verniette a fait apparaître un écrit
q u ’elle prétend être le teslameut de son i r è r e , el q u i est ainsi
conçu :
« Ceci est mon tesmament
« J’ institue mon héritière universelle
« Ma sa u r Antoinette Brun
« A C le rmont-Ferrand , le vingt-trois novembre
« Mil huit cent vingt-trois
B R U N ( M iciiei ,)
Bien de plus informe que ce prétendu testament. Il est écrit eu
six ligues, dont, aucune n’occupe la largeur de la page. Plusieurs
mots sont surchargés. On a employé trois sortes d ’encre. L ’écriture
et la signature n'ont aucune ressemblance avec les écritures el les
signatures qui se trouvent dans la nombreuse correspondance du
sieur B r u n , produite au procès.
On ne peut se faire à l ’idée que le sieur Brun qui écrivait assez
.
�7
correctement, et qui avait la prétention de bien écrire, soit l’auteur
d ’un pareil écrit. Il ne l ’aurait pas laissé subsister tel q u ’il est. Il
aurait eu plutôt recours au ministère d ’un notaire, pour exprimer
régulièrement ses dernières volontés.
Cependant le sieur Brun n ’était arrivé à Clermont que pour
être mis en charte privée chez la dame Verniette, q u i , à ce sujet,
avait intimé ses ord es à son mari et à ses enfans. On l ’obsédait :
on voulait l’isoler de ses connaissances, de ses amis, excepté de ceux
qui de vaieut lui parler constamment dans l ’intérêt de la dame
Verniette. On voulait sur-tout empêcher que les enfans Bonhours,
ses nev eu x, eussent accès auprès de lui. On redoutait l'affection
q u ’ il leur portait; on travaillait à les faire oublier.
Malgré tant de précautions pour les tenir éloignés, deux des
enfans Bonhours, l ’ainé et le plus jeune, an premier jour de l ’année
1824 , surmontant tous les obstacles, parvinrent jusqu’à leur oncle.
Vainement 011 avait cherché à les éconduire. Le sieur Brun expritna
son mécontentement de ce que l'on repoussait ses neveux. 11 té
moigna beaucoup de plaisir de les voir, en les engageant à revenir.
Les souffrances physiques avaient affaissé les forces morales dans
la personne du sieur Brun. E t encore ce qui lui restait de f.icultés
intellectuelles était-il absorbé par des assoupissemens fréquens. Si
le sentiment n’était pas encore é t e i n t , sa raison affaiblie le livrait
entièrement à la domination de la dame Verniette. Il la craignait
et tremblait devant elle. On le traitait comme une personne inca
pable de se conduire seule. Quand il sortait la dame Verniette le
faisait accompagner. S ’il échappait à cette active surveillance, ce
qui lui a r r i v a i t très-rarement, 011 faisait courir après lui : on le
cherchait comme un prisonnier qui a brisé ses fers, tant 011 craignait
ou q u ’il ne révélât au public le traitement q u ’on lui faisait subir
et l ’isolement o ï l on le plaçait, si momentanément sa raison pouvait
lui permettre cette révélation, ou q u ’il ne rendit ce même public
témoin de l’absence de sa raison.
Dans une circonstance, étant parvenu à s’échapper, il était
a r r i v é seul chez le sieur Bergougnoux, pharmacien, son ancien ami,
à qui il s’était plaint de ce q u ’on le tenait en charte pr ivée, et
même de ce q u ’on exerçait sur lui des sévices, tandis q u ’au contraire
011 prétendait q u ’il rendait malheureuses les personnes qui l’appro
chaient pour lui donner dès soins.
C ertes, un pareil langage est loin d ’annoncer que les soins que
prétend avoir prodigués la dame Verniette lui avaient mérité
toute la gratitude de sou frère et obtenu son affection exclusive.
*C*
�Il éloigne au contraire la pensée que le sieur Brun ait jamais eu la
volonté d ’oublier entièrement les enfans Bonhours ses nev eu x,
pour assurer à la dame Verniette l’ universalité de sa fortune.
L a dame Verniet te alla plus loin. Elle trouva sans doute avan
tageux q u ’ une partie de cette fortune passât dans ses mains, même
du vivant du sieur Brun.
U n e procuration générale, portant pouvoir de régir et a d m i
nistrer tous biens; de poursuivre le recouvrem ent de toutes
créa n ces; de donner q u it ta n ce , etc., parut un moyen assez
plausible d ’atteindre ce b u t ( O n se rappelle que la fortune du
sieur Brun était toute mobilière); peut-être aussi voulait-on avoir
la signature du pauvre m alade, tracée en présence d ’un officier
ministériel, afin d ’en faciliter l ’imitation.
C ett e procuration est faite selon le vœu de la dame Verniette.
E l l e porte les signatures de M£* Asteix et Costes, notaires recevant.
TJn incident grave se rattache à la manière dont cet acte fut
confectionné. C ’est le sieur Anglade, aujourd’ hui notaire à Cornon,
et alors maître clerc du sieur A s te ix, qui fut chargé de rédiger
l ’acte. Pour le faire, il dut se transporter chez la dame Verniette.
Il trouva le sieur B r u n , m ala de, souffrant, abasourdi. Les
réponses du malade étaient faites péniblement et presque toujours
par monosyllabes. L e sieur Anglade déclare formellement q u ’il ne
vo ulut point rédiger l ’acte sans en référer au sieur Asteix ; ce q u ’ il
aurait fait s’ il eût trouvé le mandant bien portant. Il fallut que le
sieur Asteix, notaire, vint lui-même chez la dame Verniette pour
connaître l ’état du sieur B r u n , q u i , pendant la lecture de l ’a c t e ,
serait tombé dans un assoupissement et n ’aurait signé l’acte
q u ’après l ’assoupissement dissipé. On ne peut q u ’applaudir à la
délicatesse du sieur Anglade. Nous reviendrons plus lard sur sa
déposition et sur celle de ¡VIe Asteix, que nous mettrons en parallèle.
L e sieur Brun mourut le 29 octobre 1824* L ’ homme moraî.
était déjà éteint chez lui depuis plusieurs mois.
La dame Verniette put alors manifester sa prétention. On lui fit
entendre, sans doute, que par un reste de convenance, et peut-être
encore pour éviter des incidens qui contrarieraient ses vues , il ne
fallait pas q u ’elle présentât, elle-même à la justice le prétendu
testament de son frère. C e fut Me F a b r e , notaire à Clermon t qui
fut chargé de ce soin.
Requis par le sieur Bonhours et ses enfans, MM. Costes, juge de
paix, et llozier, son greffier, devaient se transporter dans l’apparteinent où était décédé le sieur Br un , pour y apposer les scellés.
�•
_
\ V J
-- -----------
Mais ils en furent dispensés par la présentation que leur fît du
testament prétendu la dame Vern iette, q u ’assistait un clerc de
M e Fabre.
Toutefois, cet écrit, examiné par ces deux fonctionnaires publics,
fut frappé de leur réprobation comme on le verra plus bas.
Après l ’accomplissement des formalités exigées en pareil cas,
l ’écrit fut déposé dans les mains de M e Fabre, notaire.
Une ordonnance du 3 décembre i 83 o envoya latlame Yerniette
en possession de l ’ hérédité du sieur Brun.
L ’apparition de cet écrit excila l ’étonnement général. Quo iq u’elle
connût l ’avidité de la dame Verniette, la famille Bonhours ne
jüouvait d ’abord croire k tant d ’audace. Il fallut pourtant se rendre
à l ’évidence du fait.
Bieniot elle se mit en mesure de signaler à la justice cette œuvre
de déception, si l ’on osait s’en prévaloir.
Un e assemblée de f a m ill e, réunie le i 5 janvier 1 8 2 5 , autorisa
Bonhours père à réclamer comme tuteur de ses cnfans, le partage
de l'hérédité du sieur Brun. Si dans la délibération du conseil de
fam ille, on garda le silence sur le prétendu testament, c’est q u ’il
n ’était pas encore légalement connu, et q u ’on espérait encore que
la dame Verniette n ’oseraii le produire et en soutenir la sincérité
devant les tribunaux.
L a demande en partage fut formée le 4 février i 8 a 5 .
E t bientôt après, la dame Verniette fit signifier le prétendu
testament.
A la vue de cet écrit informe, le sieur Bonhours et ses enfans
restèrent convaincus de sa fausseté. Ils savaient d ’ailleurs q u ’avant
la date que l ’on avait donnée au prétendu testament, l ’affaiblis
sement complet de ses facultés morales avait laissé le sieur Brun
dans un élat habituel d'imbécillité et même de démence.
lis déclarèrent alors q u ’ils ne connaissaient ni l ’écriture ni la
signature qui constituaient l ’acte produ it, et formèrent opposition
à l’ordonnance d ’envoi en possession. Ils soutinrent en même tems
que l ’état mental du sieur Brun ne lui aurait pas permis d ’exprimer
une volonté libre et éclairée, même en se reportant à une époque
antérieure à la date du prétendu testament.
U n e vériiication fut ordonnée par un jugement du 3 décembre
1825. LeS experts nommés pour procéder à cette opération étaient
les sieurs Im b ert , avoué à C le rm o nt, Bonjour et Cavy_, notaires.
Sans doute, sous le rapport des qualités qui constituent l'honnèie
Jiomme et le rende.it recomrnauduble aux yeux de ses concitoyens;
3
�sans doute aussi sous le rapport du talent qui rend propre h Lien
remplir l ’emploi d o n f o n est inve sti, il e û t été très-difficile de
trouver une plus forte garantie que celle q u ’offraient les trois
experts nommés.
Mais à côté de tous ces avantages ne se rencontraient pas, on
pe ut le dire parce que l ’événement l ’a justifié, les connaissances
spéciales et nécessaires pour bien re m plir’ la mission qui leur était
confiée. L e résultat a prouvé en effet que l ’art plus ou moins
conjectural de vérifier les écritures leur était peu familier.
L e dépôt du prétendu testament au greffe du tribunal civil de
Clerrnont fut suivi d ’un procès-verbal de description sous la date
du 8 avril 18*26."
'
Diverses pièces de comparaison furent présentées. Les unes
étaient authentiques, les autres sous seing privé.
U n procès-verbal du 17 juin admit les unes, rejeta les autres.
Des pièces produites--par les Bonhours, sont admises quatre lettres
des 17 mai et 29 novembre 1 8 1 5 , 18 août 18 18, et 9 janvier 1821 ;
un acte sous seing ptivé du 6 mai 1818 e t , 11 actes authentiques
de différentes dates et portant la signature du sieur Brun.
T.a dame Verniette avait présenté un grand nombre de lettres;
7 seulement sont admises : elles portent les dates des 2 , 2 1 et 3 1
juillet 1821 , 1 1 juillet et l\ octobre même an n ée, 19 juin et
5 novenibie 1.822.
E lle observe que l ’admission des lettres produites est nécessaire
pour faire connaître la différence qui est survenue dans les é a i t u r e s
et signatures du sieur B r u n , à raison des attaques et m aladies
q u ’ il a éprouvées.
Les experts procèdent à la vérification ordonnée. L e u r procèsverbal est dressé. 11 est clos le 11 août 182G.
Jettons-y un coup d ’œil rapide.
L a dame Verniette, clans scs dires aux experts, articulconze faits,
dans l ’espoir q u ’ils y verront autant de-motifs de proclamer la sin
cérité du testament. L ’énonciation de ces faits devant les experts
était inutile : elle ne pouvait avoir pour b ut que de leur rendre
favorable la cause de la dame Verniette.
E lle ajoute que si quelque différence se remarque dans les écri
tures et signatures du sieur B r u n , cela ne provient que des attaques
et m aladies q u ’ il a éprouvées, ce qui est établi par diverses lettres,
dans lesquelles il dii qu il a la main trem blante et q u ’il n’écrit
q u ’avec beaucoup de pe in en t de difficulté.
�Voici maintenant une analyse rapide des opérations des experts
vérificateurs.*
i° Ils remarquent que « la physionom ie , qui résulte de l ’assem, « blage des caractères du testament, s ’éloigne de celle q u ’off.e la
« contexture des onze lettres missives comparées. Cependant en
« descendant dans les détails de la comparaison, on est obligé de
« reconnaître que la conformation de beaucoup de mots entiers et
« de chaque caractère est très-ressemblante à celle des mots sein« blables et des caractères isolés des lettres missives; q u ’ainsi la
« différence de physionomie des caractères paraît provenir de ce
« que celle de la pièce déniée a été exécutée avec pesanteur et clif« j i c u l l e ', tandis que celle des lettres missives annonce une plus
« grande faci ité d ’exécution.»
C ette dissemblance remarquée par les experts était décisive. L a
physionomie de l éc riture, comme celle de l ’homme^ constate
l'identité.
La ressemblance de quelques caractères, de quelques syllabes,
de quelques mots, n ’avait rien de déterminant. L ’imitation aurait
été bien maladroite si elle ne s’était étendue jusques-là. Il es’t donc
facile de trouver dans onze lettres de trois ou quatre pages cha
c u n e , des mots, à plus forte raison, des syllabes, des caractères
ressemblans ; toutefois il suffit du rapprochement de ces lettres,
de leur comparaison avec la pièce arguée de faux, pour faire
ressortir une diflérence matérielle et frappante;
2° Les experts disent que les actes et titres authentiques qui
leur sont produits ne présentent q u ’un seul mot sur lequel ils
aient à porter leur examen; c ’est la signature du sieur B r u n ; et
à L’exception de ce lle apposée sur la minute de la pr o cu r at io n ,,
reçue A sta ix , le l\ février 18 2 4 , toutes les autres signatures, q u i
ont entr elles et avec ce lles q u i terminent les lettres missives ,
beaucoup de sim ilitu d e , en ont très-peu avec ce lle qui se trouve
su r la p iè ce dentée.
Cet te signature de la procuration Astaix a plus particulièrement
frappé l ’attention des experts. « Llle s éloigné, d i s e n t - i l s , du
«' caractère de la signature ordinaire du sieur Br u n ; mais 011 ne
« peut se refuser à lui trouver une grande ressemblance avec celle
« du testament : ils ne doutent pas q u e lle s aient é té toutes d e u x
« produites p a r la même main. »
Ces explications ne sont rien moins que décisives. Elles décèlent
tout l ’embarras des experts pour asseoir leur opinion. Cette opinion
n ’a rien de ferme, lien de positif : elle reste flottante. Toutes les
�i#
.
i 12 )
frvO sîgnatures l^es pièces comparées, excepté celle (le la procuration
^
de 1824? ont beaucoup de similitude entr’elles et en ont très-peu
avec c e lle de la p iè ce déiùée. Encore les experts reconnaissent-ils
que cette signature de la procuration s’éloigne du caractère de la
signature ordinaire du sieur Brun . E t c ’est pourtant par la ressem
blance de deux signatures isolées que les experts ont déterminé leur
opinion. L ’erreur palpable dans laquelle ils sont tombés ressort et
de leur propre langage et des lacunes q u ’offrent leurs opérations.
Nous le prouverons en son lieu ;
3 ° L a comparaison de quelques-uns des caractères qui forment
les mots de la pièce déniée, avec les caractères des lettres missives,
établit aux yeux des experts une conformation peu exacte, quoique
cependant il y ait assez de ressemblance avec d ’autres lettres.
Les experts qui sont entrés dans des détails m in utie ux , et que
les meilleures intentions ont toujours animés, nous nous plaisons
k leur rendre cette justice, les experts ont négligé un objet trèsim p o r tan t, l ’examen des surcharges q u ’offrent plusieurs mots du
prétendu testament, qui est pourtant on ne peut plus laconique;
4 ° Enfin 011 arrive au résumé qui exprime l ’avis des experts; le
voici :
« Par suite de l ’examen et des observations qui précèdent, les
« experts ont formé leur opi nion , et déclaré, à 1 unanimité, q u ’il
« demeure évident p o u r e u x que l ’acte soumis à leur vérification
« a été écrit et signé de la même main qui a tracé les caractères de
« comparaison. »
C er te s, les premières remarques exprimées pa rle s experts, sur
tout cette dissemblance de physionomie q u ’ils avaient si bien re
connue ne semblait pas devoir amener la conclusion q u ’ils ont
adoptée.
La vérification opérée était loin d ’être satisfaisante. E lle ne pré
sentait point à la justice les garanties, qui seules pouvaient en
faire sanctionner le résultat.
L e sieur Bonheurs et ses enfans la critiquèrent. Ils en signalèrent
les lacunes et en démontrèrent l ’insuffisance : une nouvelle véri
fication lut demandée.
Ils offrirent subsidiairement la preuve de différons faits q u ’ils
articulèrent. Parmi ces faits étaient ceux-ci :
Le sieur Brun avait toujours vécu en bonne intelligence avec son
beau-I1ère et ses neveux Bon hou rs ;
E t a n t tombé malade-à la fin do 1 S a3 , le sieur Verniette alla le
chercher k Paris, et le conduisit à C le r m o u t; depuis cette époque,
�( - 13 )
.
.
w
la dame Verniette avait fait tout ce qui était en son pouvoir pour
éloigner de lui le père et les enfans Bonhours;
La plupart du tems, lorsqu'ils venaient le voir, ils étaient re
poussés avec rudesse;
La dame Verniette le tenait en charte privée, pour empêcher,
autant q u ’il était en elle, q u 'il eût des communications avec ses
parens et amis;
E l l e ' l e maltraitait et il en faisait ses plaintes à ceux qui pou
vaient l ’aborder;
II avait fréquemment des attaques, qui lui faisaient perdre con
naissance, et qui l ’avaient réduit à un état d ’im bécillité.
Ces faits ne sont pas seulement vraisemblables, ils sont vrais et
graves; les enquêtes l ’ont prouvé.
La dame Verniette essaya de les combattre en les présentant
comme erronnés, invraisemblables, non pertinens, en même tems
q u ’elle soutenait que le rapport des experts était tout-à-fait con
c lu an t , et que la justice devait s’empresser de lui en accorder l ’ho
mologation.
Elle fut trompée dans son attente. U n jugement du 2 3 avril 1827
ordonna une nouvelle vérification, et la confia aux sieurs IÎugues,
instituteur et maître d ’écriture à Clermont, et Cailhe et De Murât,
experts écrivains à Kiom.
L a vérification ordonnée sera faite sur les pièces de comparaison
admises entre les parties.
Les experts s’expliqueront sur les surcharges qui existent dans
le testament, notamment sur le mot v in g t, et sur la date qui
existait avant. Us examineront si ce mot vingt a été tracé par la
même main qui a écrit et signé le testament. Ils pèseront enfin dans
leur sagesse les doutes que peuvent faire naître les réflexions
exprimées dans les motifs du jugement.
Ces m otifs , qui sont nombreux, annoncent dans les premiers
juges la conviction que ce testament n ’était pas sincère. On voit
que cette conviction est née de l ’examen qu ils en ont lait euxmêmes, et du rapprochement avec les pièces de comparaison.
Après avoir rappelé, ce qui est vrai, que la science des experlsvérificateurs, en matière d ’écritures et signatures, est conjecturale;
q u ’ils 11e sont obligés d ’adopter leur opinion q u ’autant q u ’elle s’ac
corde avec la leur, et que tout en rendant justice à la moralité et
aux lumières des experts qui ont opéré, leur rapport laisse beau
coup à désirer, les premiers juges expriment les circonstances qui
leur ont fait sentir la nécessité d ’une nouvelle vérification.
�S
A ';-.'
( *4 )
' C ’est d ’abord la conviction que beaucoup de m o ts , beaucoup de
caractères des lettres missives ne ressemblent pas du tout à ceux du
testament ;
Q u ’il y a d ’autant moins lieu de tirer avantage de la ressem
blance de quelques traits, q u ’ il faudrait q u ’un faussaire (Vit bien
maladroit po u r ne pas imiter en quelques points ré critur e q u ’il
cherche à contrefaire;
C ’est que la signature du testament, bien q u ’elle ait paru aux
experts ressemblante à celle de la procuration de 182.4, ne ressemble
en réalité à aucune de celles qui se trouvent sur les pièces de com
paraison; et cependant quelques-unes de ces pièces sont d'une date
peu éloignée de celle du testament : deux entr’autres ne sont anté
rieures que d ’un mois et quelques jours;
Q u e les deux signatures du testament et de la procuration ne
présentent pas de similitude si parfaite q u ’on puisse en induire la
sincérité du testament;
Q u ’il y*a dissemblance de conformation dans la lettre finale ¡7./ \
Q u e le prénom , M i c h e l, qui se trouve à la suite de la signature
du testament, n ’est point contenu dans les autres pièces produites,*
Que*récr itur e du testament, d ’ une exécution plus pénible que
celle des lettres missives, doit, par cette raison, paraître suspecte;
Q u ’il y a dans le testament plusieurs mots écrits sans gène et
avec facilité, notamment ceux de la dernière ligne;
Q ue les experts avaient négligé de parler d ’ un point très-impor
t a n t , celui des surcharges qui se rencontrent dans le testament,
notamment au mot v in g t, qui est écrit en encre plus noire, et q ui
parait couvrir le mot de u x; lequel dernier mot indiquerait le jour
de l’arrivée du sieur Brun à C l e r m o n t , et jetterait du louche sur
la sincérité du testament; car il n’c.'t pas présumable que le jour
même de son arrivée le sieur Br un se fut occupé d ’ un acte aussi
important.
L e laconisme du testament frappe vivement les premiers juges.
Les circonstances ne l ’exigeaient pas, Il parait, au contraire, q u ’il
facilitait l ’ imitation.
Ces motifs, largement déduits par les premiers juges, sont puissans, Si le rapport des oxperts-vérificateurs avait laissé à la dame
Verniette un pressentiment de succès, l’ illusion fut,dissipée par le
jugement qui apprécie ce rapport.
La dame Verniette comprit alors tout le danger d ’ une nouvelle
vérification. Klle 11e pouvait se dissimuler que des circonstances
nombreuses cl entraînantes surgissaient contre la sincérité du tes-
�( -5 )
fit
l a m e n t ; que le seul examen de cette pièce ne pouvait laisser de
doute sur sa fausseté.
E l l e veut de tout son pouvoir empêcher la nouvelle vérification*
elle forme appel du jugement qui l ’ordonne; elle se rattache for
tement au rapport d ’experts, pour lesquels les premiers juges n ’ont
pas eu d ’égard; elle prétend q u ’il est concluant, q u ’il mérite toute
confiance ; cependant elle n ’est pas tellement convaincue de ce
q u ’elle essaie de persuader aux autres, q u ’elle n ’emploie devant la
C o u r ses plus grands efforts à faire admettre la preuve d ’une série
de faits q u ’elle articule comme devant établir la sincérité clu tes
tament. Elle y inet tant d’insistance, la preuve sera si entraînante,
q u ’elle repoussera la nécessité d ’une nouvelle vérification.
L a C o u r , dans sa sagesse, dut ordonner cette preuve.
C ’est ainsi q u e , par son arrêt du i 5 juillet 1829, elle dispose:
« Atten du que, d ’après la nature de l ’affaire et les circonstances
« qui s’y ra t ta ch en t, il ne peut q u ’être utile pour la découverte
« de la vérité, de corroborer l ’existence du testament dont il s’agit
« par des preuves testimoniales; que cette marche est admissible,
« soit dans l ’esprit, soit dans la lettre de la législation romaine et
« de la législation du Code civil:
« Par ces motifs,
« L a C o u r , sans p ré ju d ice des Jin s et moyens , tant de f a i t que
« de droit j qui demeurent réservés aux parties sur le f o n d ,
« ordonne, avant de faire d r o i t , que dans le mois à compter de la
« signification du présent arrêt, faite à avoué en la C o u r , les
« parties d ’Allemand feront preuve, tant par titres que par
« témoins par-devant M. V e r n y , conseiller-auditeur, commis à
« cet effet;
« i° Que la dame Vernietle et ses filles ont soigné le sieur Brun ,
« tant à Paris q u ’à C le r m o n t , pendant les dernières années de sa
« vie, clans les maladies que celui-ci a essuyées, ou à raison de ses
« infirmités;
« 20 Que le sieur B r u n , voulant venir se fixer à C lerm ont à la
« fin de 1823, invita le sieur Vernie!te à venir le chercher à
« Paris, et que le sieur V er n ie tte , cédant à cette invitation, se
« rendit effectivement à Paris et revint à Cle rm on t avec le sieur
« Brun , qui depuis, jusqu’à son décès, a continuellement habité
« avec les époux Verniette;
« 3 ° Q u e le sieur B r u n , depuis son arrivée à Clermont ju sq u’à
« son ‘décès, a reçu et rendu de nombreuses visites et est allé
“ dîner plusieurs fois chez des personnes avec qui il avait eu
�« d ’anciennes relations; que d ’ailleurs il sortait fréquem ment,
« soit pour se promener, soit pour voir ses amis;
« 4 ° Q u ’il a souvent exprimé à diverses personnes son affection
« particulière et sa reconnaissance pour la dame Y e rn ie t ie sa
« sœur, ainsi que sa v o lo n té de lu i donner toute sa fo rtu n e y
« 5 ° Qu e lorsque son testament eut été f a it, ce testament a été
« présenté à des jurisconsultes pour savoir s’il était régulier;
« 6° Qu e depuis la date de ce testament, le sieur Br un a d é cla r é
« p lu sieu rs f o i s q u i l avait d on n é toute sa fo rtu n e à la dam e
« V ern iette sa sœ ur ;
« S a u f aux parties de Godemel (les Bonhours) toute preuve
« contraire dans le même délai, dépens réservés. •>
L a preuve, mise à la charge de la dame Verniette eùt-elle été
complètement faite, n'aurait pas pour conséquence absolue d ’assurer
le triomphe de la prétention de la dame Verniette. Seulement elle
aurait pu la rendre plus spécieuse et entourer de quelque faveur
l ’appréciation matérielle du testament; mais cette preuve n ’a point
été administrée. Si quelques-uns des faits interloqués semblent
établis, d ’autres et les plus importans ne le sont pas. Au contraire,
il ressort des témoignages invoqués que le sieur B run chérissait les
enfans Bonhours comme ses autres parens; q u ’ il n’a jamais rien
d i t , rien fait, qui annonçât de sa part l ’intention de les frustrer
de sa succession; que d ’ailleurs, pendant la dernière année de sa
v i e , l ’affaiblissement de ses facultés intellectuelles ne lui aurait
pas permis d ’exprimer à ce sujet une volonté légale.
L ’analyse des enquêtes amènera aisément la preuve de cette
proposition. Mais comme nous devons suivre l’ordre de discussion,
adopté par la dame Verniette dans son mémoire, nous nous occu
perons en première ligne du rapport des experts.
MOYENS.
L a daine Verniette divise sa discussion en i paragraphes :
i° Examen du rapport des experts;
s>.° Exam en de l ’enquête.
Nous ajouterons un 3 ",e
dont l ’objet sera de démontrer que
le sieur B r u n , au tems de son décès, même à l'époque à laquelle
on reporte la date du prétendu testament, était incapable de lester.
S I".
E x a m en d u rapport des experts.
C e r a p p o r t , dit-on , était aussi satisfaisant que décisif. Puis
arrive l ’éloge obligé des experts, dont l ’opinion est si positive, si
�bien appuyée sur de nombreuses et de puissantes raisons, q u ’elle
mérite toute confiance et ne souffre pas de contradiction. Toutefois
on veut bien descendre ju s q u ’à réfuter les futiles objections que
les intimés ont osé élever contre ce rapport et contre le testament.
C e langage de la dame Verniette, qui affecte beaucoup de
confiance dans la bonté de sa cause, ne peut rendre concluant un
rapport qui ne l ’est pas, ni valable, comme testament, l ’œuvre
d ’un faussaire.
A peine le prétendu testament a-t-il paru, que son état informe
sa contexture insolite fixent l ’attention de tous ceux sous les yeux
desquels il est mis.
M. Costcs, juge de paix , le sieur Rozier son greffier,
M. Chassaing, juge au tribunal civil de Clermont, n’y voient q u ’un
écrit irrégulier et auquel il est impossible d ’accorder quelque
confiance. Ils le frappent de leur réprobation.
Il est difficile, en effet, de ne point s’arrêter à cette opinion,
quand on a vu et examiné l ’écrit; mais du moins n ’y a-t-il pas eu
possibilité de repousser les violens soupçons q u i , dès le premier
moment de son apparition, se sont élevés sur sa sincérité.
L a nécessité d ’une vérification a été reconnue judiciairement.
Il fallait des experts pour l ’op ércr, mais il les fallait capables de
bien remplir la mission qui leur était confiée, c ’est-à-dire, possé
dant les connaissances spéciales qui constituent l ’art de vérifier
les écritures et signatures.
II ne suffit pas que l ’on ait sous plusieurs rapports beaucoup de
ta len t , beaucoup de connaissances, un caractère honorable, une
impartialité qui pe se démentit jamais; avec tous ces avantages, si
l ’on n’a pas les connaissances spéciales qui rendent propres à faire
telle chose, on ne peut convenablement apprécier cette chose.
« Experts sont des gens versés dans la connaissance d ’une science,
« d ’ un a r t , d ’ une certaine espèce de marchandises ou autres
« choses, lesquels sont choisis pour faire leur rapport sur quelque
« point de f a it, d ’où dépend la décision d ’une contestation, et
« q u ’on ne peut bien entendre sans le secours des' connaissances
» fjui sont pro/uns a u x personnes d ’une certaine profession..........
« Par exemple, s’il s’agit de vérifier une écriture, on prend pour
<« experts des maîtres écrivains, et ainsi des autres matières. »
Encyclopé die, verbo experts.
Même avec les connaissances spéciales en matière de vérification
d ’écritures, il est facile de s’abuser sur la ressemblance; à plus forte
�ï
.
) 1 }
raison, en est-il de même si l ’on est étranger ou peu familier avec
ces connaissances.
C ’est ce qui a fait dire à M. T ou ll ier, droit civil, tome 8 de la
troisième édition, page 8/jG, n° 2 3 5 . « Rien en général de plus
« incertain, rien qui soit si peu digne de déterminer l'opinion,
« que l’avis donné par les experts sur la comparaison des écritures,
« lorsqu’il n ’est pas soutenu par d ’autres preuves, au point q u ’on
« doit moins le considérer comme une preuve que comme une
« simple présomption, comme un moyen qui peut éclairer le
•« magistrat et le guider dans la recherche de la vérité. »
De l à , cette conséquence forcée que plus il y a d ’incertitude pour
obtenir un bon résultat d ’ une pareille opération, plus il importa
d ’être sévère sur le choix des expeits qui doivent en être chargés.
Cett e sévérité n ’a point été apportée dans le choix des experts
auteurs du rapport critiqué. Faute de connaissances spéciales, ils
ont évidemment mal rempli la mission qui leur était confiée. L e u r
manière d ’apprécier le prétendu testament, et leur langage décèlent
l ’embarras et l ’incertitude qui les dominaient. Il semble q u ’ils
impliquent contradiction avec eux-mêmes, si l’on compare leur
remarque la plus importante avcc les minimes détails dans lesquels
ils sont descendus et la conclusion q u ’ils en ont tirée.
C e qui les frappe d ’abord, c’est que la j)hysionom ie qui résulte
de l ’assemblage des caractères du testament s’éloigne de c e lle
q u ’offre la contexture des onze lettres missives comparées.
Voilà une observation dominante. On recherche par la compa
raison s’il ÿ a identité entre des physionomies; et l'examen apprend
que cette identité n ’existe pas; q u ’il n’y a pas ressemblance entre
les physionomies comparées. Cependant c ’est par la ressemblance
que se constate l ’identité.
Pour expliquer cette dissem blance , qui les a frappés, les experts
disent q u ’en descendant dans les détails de la comparaison , on est
obligé de reconnaître que la conform ation de beaucoup de mots
entiers et de chaque caractère, pris isolément de la pièce indi qu ée ,
est très-ressemblante à celle des mots semblables et des caractères
isolés des lettres missives; et q u ’ainsi la différence de physionomie*
des caractères paraît provenir de ce que celle de la pièce déniée a
été exécutée avec pesanteur et d i f f i c u lt é , tandis que celle des
lettres missives annonce une plus grande facilité d ’exécution.
L explication n’est pas heureuse. Klle est en opposition avec la
cri table acception du mot..physionom ie.
L a physionomie de l ’écriture comme celle de l ’ homme se c o m p o s e
�( >9 )
fc/pa
d ’ un assemblage de traits et non pas de chaque trait pris isolément.
On voit chez les hommes une foule de visages qui présentent
dans certains traits isolés la ressemblance la plus frappante. Celte
ressemblance existe tantôt aux yeux,, tantôt au n ez , tantôt à la
Lo uche, et de même des autres parties qui composent le visage.
Parfois même elle embrasse presque tous les traits; et pourtant
lorsqu’on vient à considérer dans leur ensemble, tous ces traits,
ce qui seul constitue la physionomie, on ne trouve plus de ressem
blance véritable, quoique la ressemblance partielle subsiste.
Il en est de même des écritures. La comparaison de plusieurs
pièces d'écriture, qui se ressemblent, avec une autre pièce q u ’on
attribue à la même m ai n , peut offrir dans quelques lettres, dans
quelques mois même des traits de ressemblance plus ou moins
saillans; mais la ressemblance cesse quand la pièce d ’écriture est
considérée dans son ensemble. Alors reste une différence de p h y
sionomie que l ’on ne peut méconnaître.
On s’étonnerait si une pièce d ’écriture, signalée comme l ’œuvre
d ’un faux, ne présentait pas quelques traits isolés de ressemblance
avec les écritures véritables de celui auquel on l’attribue. Il faudrait
que le faussaire, qui s’est mis sous les yeux les écritures véritables
q u ’il veut im iter , fût bien maladroit , pour ne pas réussir à
donner le change sur quelques ¡»oints. Pour peu q u ’il ait du savoirfaire, il-parviendra toujours à imiter quelques lettres, quelques
mots entiers; mais l ’imitation n ’atteindra jamais ou presque jamais
la physionomie que forme l ’ensemble de l ’écriture.
La ressemblance de physionomie dans l’ensemble de diverses
pièces d ’écriture peut se reconnaître a i s é m e n t a l o r s même que
quelques-unes de ces pièces sont écrites avec plus ou moins de
hardiesse, en traits plus ou moins déliés, plus ou moins renforcés.
L e faire habituel de l ’écrivain surgit toujours au milieu de ces
variantes.
L a différence dans la physionomie des écrits est donc le principal
moyen qui puisse faire connaître s ils sont vrais ou faux. L t dans
l ’espèce cette différence demeure frappa 11Le aux yeux mêmes des
experts qui onl vérifié le prétendu testament.
Q u ’imporle après c e la q u ’ilsaient remarqué de la similitude dans
la conformation de quelques lettres et de certains mots de la pièce
arguée de faux', avec des lettres et des mots des pièces de compa
raison. Il en résulterait tout au plus que le faussaire aurait obtenu
une imitation partielle; mais imitation manifestement insuffisante
pour imprimer à l’écrit qui eu est l’œuvre les caractères de la sin-
�M
.
.
.
( 20 )
Les détails minutieux auxquels se sont livrés les experts, pour
laire disparaître cette différence de ph ysionom ie, q u ’ils avaient
remarquée avant t o u t , loin de justifier leur opinion définitive,
prouvent seulement q u ’ils n ’ont point épargné les efforts pour la
rendre spécieuse.
Mais en portant ainsi leur investigation sur la pièce déniée, ils
ont négligé des observations très-importantes. Ils n’ont rien dit des
surcharges, rien sur l ’empreinte d ’une griffe soigneusement effacée,
et qui indiquait sans doute le fonctionnaire qui avait fourni la
feuille sur laquelle est écrit le prétendu testament.
Cependant les surcharges à plusieurs mots sont remarquables,
sur-tout au mot vingt du millésime. Le mot vingt a été évidem
ment posé sur le mot d e u x ,%i[\x\ fut écrit primitivement. Les lettres
en sont formées par des traits larges et épatés, et avec une encre
beaucoup plus noire que celle qui a servi à écrire le mot pr im itif
d e u x et les autres mots du testament qui ne sont pas surchargés.
Les surcharges, autres que celles du mot v in g t, sont opérées avec
un certain soin. A-t-on voulu renforcer une écriture trop déliée,,
trop facilement exécutée, pour la faire apparaître d ’une exécution
plus difficile et plus conforme à l ’état de souffrance de ceiui q u ’on
v ou la it en faire croire l’auteur? On ne craint pas d ’adopter l'affir
mative comme une vérité.
Il parait que les experts n’ont vu dans ces surcharges q u ’une
écriture exécutée avec pesanteur et difficulté. Mais alors on de
mandera pourquoi la première et la dernière ligne de l ’écrit, et
plusieurs mots des lignes intermédiaires, sont écrites couramment,
sans pesanteur, sans difficulté? On ne pressent point de réponse
satisfaisante à cette question , dans le système des appelans.
Us ont cl t q u ’il était inutile de constater les surcharges, parce
que telles q u ’elles sont elles n ’infirmeraient point le testament. Il
en serait ainsi peut-être si d ’ailleurs le testament était reconnu
sincère. Si la signature comme l ’écriture n ’en était pas déniée; s’il
ne s’agissait que d ’une irrégularité. Mais les surcharges que présente
un testament argué de faux dans tout son ensemble, doivent, fixer
l ’attention de la justice, comme pouvant aider à la découverte de
la vérité.
C e n ’est pas sans m otif non plus que l ’empreinte de la griffe a
été effacée très soigneusement. On ne voulait pas sans doute que
l ’on put s ' i n f o r m e r auprès de la personne qui aurait fourni la feuille
de papier, à qui et à quelle époque elle aurait délivre celle feuille,
tant 011 craignait les rapprochemens, qui plus tard pouvaient avoir
�D ’autres singularités ont échappé h l ’attention des experts : c’est?
la pose des lignes; ce sont les fautes grossières d ’orthographe.
L e sieur Brun avait de l ’éducation ; il écrivait assez correcte
ment, sous le rapport du style; il faisait rarement des fautes d ’or
thographe. Les experts avaient dû s’en convaincre en lisant, en
examinant sa nombreuse correspondance. Eli bien ! les cinq lignes
qui formeraient le testament n ’occupent point toute la largeur du
papier; elles laissfcnt à droite et à gauche deux grandes marges;
elles sont d ’inégale longueur. La première,' la troisième et la cin
quième, ne sont que des demi-lignes. 11 est difficile de découvrir le
m o t if qui a pu porter l ’écrivain à couper ainsi les lignes; à moins
que l ’on ne suppose que la signature qui est au bas est sincère, et
q u ’ayant été surprise en blanc au sieur B r u n , on a voulu faire con
corder la signature avec le corps de l ’écrit, de manière à ne pas
laisser trop d ’intervalle entre la dernière ligne et cette signature.
E t comme le faussaire aurait commencé trop h a u t, que ce q u ’ il
avait à écrire pouvait être aisément compris dans deux lignes et
demie, et q u ’il s’en serait aperçu assez tôt, en tronquant les lignes,
au lieu de trois il en aurait fait cinq.
Deux fautes d ’orthographe grossières se remarquent dans l ’écrit.
A la première ligne, au lieu de testament 011 à écrit tesmarnent ;
à la dernière ligne, le mot ving t, écrit par surcharge, n ’a pas de t.
L e sieur Brun 11’aurait pas fait de pareilles /ailles, s u r - t o u l la
première. Son amour-propre l ’aurait porté à refaire le testament
après l ’avoir l u ; car ayant survéi u de plusieurs mois à l ’écrit par
lequel il aurait transmis à un seul de ses païens toute son hérédité,
il n’eut pas manqué de lire et de relire cet acte 1111 grand nombre
de fois, lui qui avait toujours montré beaucoup d ’ordre et de soin
dans l'administration de ses affaires. Il parait que l ’on avait d ’a
bord donné au prétendu testament la date du deux novembre, qui
était précisément le jour de l ’arrivée du sieur Brun à Clermont ;
mais comme l ’on s'aperçut q u ’il n ’aurait pas élé présumable q u ’à
un pareil jour il se fût occupé d ’un acte aussi important, on subs l i l u a , par surcharge, le mol v m g l au mot d e u x .
L e laconisme insolite du testament élève aussi contre la sincérité
de cette pièce le plus violent soupçon. Ilien qui n’y soit absolument
indispensable. O11 voit que le faussaire avail hâte de terminer son
œuvre.
A toutes ces réflexions, qui démontrent largement la fausseté du
rorps de l’écrit, vient se joindre la remarque encore plus accablante,
que la signature, mise au bas, 11’esl pas celle du sieur Brun.
�y.?
rCW?
.
)
Les experts qui ont examiné et comparé les nombreuses signa
tures du sieur B r u n , apposées, soit sur des lettres missives, soit
sur des actes authentiques, ont remarqué que la signature du pré
tendu testament s'éloigne du caractère ordinaire de la signature du
sieur Brun . De toutes les signatures prises en comparaison , une
seule leur a paru avoir de la similitude avec la signature déniée;
c ’est celle de la procuration reçue Astaix, notaire^ le 4 février 1824.
O n ne peut se refuser, disent-ils, à lui trouver une grande ressem
blance avec celle du testament.
Mais celte ressemblance avec une signature u n i q u e , lorsque la
dissemblance avec une foule d ’autres signatures est frappante, estelle suffisante pour convaincre de la sincérité de la signature déniée?
L a dissemblance q u ’ils ont reconnue 11e repousse-t-elle pas celte
conviction ?
E t d ’ailleurs, la ressemblance q u ’ils ont cru apercevoir est loin
d ’être parfaite. Q ui sait si le b ut de la procuration du 4 lévrier 1824
n ’avait pas été d ’obtenir sur un acte authentique la signature du
sieur B r u n , afin de pouvoir l ’imiter sur le testament que l ’on v o u
lait créer? Alors , l ’imitation opérée avec soin, a dû établir entre
les deux signatures une espèce de similitude.
Toutefois, entre les deux signatures, il y a beaucoup d<? diffé
rence : celle de la pr ocurat ion, qui serait postérieure de plusieurs
mois, est mieux faite, plus hardie; celle du testament est gênée;
elle annonce le travail méticuleux d ’une servile imitation. L a lettre
finale n n ’a pas la même conformation dans les deux signatures.
Dans l ’un e, celle du testament, le dernier jambage de la lettre n
est supérieur et bouc lé; dans l ’autre, celle de la procuration, ce
dernier jambage est inférieur, et forme dans son entier la figure
informe du chiffre 3 . O11 pensera difficilement q u ’une même main
ait tracé ces deux lettres. Bien plus, la signature du testament est
suivie du prénom M ic h e l, qui 11e se trouve sur aucune des nom
breuses pièces qui ont servi de comparaison. L e faussaire a voulu
trop bien faire; c’esl ici le cas d ’appliquer l’adage nimia /trecaulio
do/us.
T an t et d ’aussi notables dissemblances, d ’aussi étranges irrégu
larités dans la confection matérielle du prétendu testament., 11e
permettent pas de le considérer comme vrai; elles en font ressortir
la fausseté; elles détruisent l'opinion hasardée des experts, qui
n ’ont pas su les apprécier; elles font du moins sentir la n é c e s s i t é
d ’ une nouvelle vérification; par des personnes que leurs connais
sances spéciales rendent propres à une semblable mission,
�( . 23-7
-</£
L ’écrit dénié n ’est donc pas encore un titre : il reste avec toutes®
ses imperfections. Peti importe q u ’il ne soit combattu que par des
héritiers collatéraux. La dame Y e r n ie t te , qui s’obstine à s’en pré
valoir, n ’est aussi q u ’une héritière collatérale, qui vou dra it, par
la manœuvre la plus criminelle, dépouiller les Bonhours, ses ne
ve u x, de droits non moins sacrésoque les siens.
S ’il n ’y a pas déjà conviction entière de la fausseté du testament,
il y a au moins la plus grande incertitude sur sa sincérité; et cer
tes, l ’enquête à laquelle a fait procéder la dame Yerniette n ’a
aucunement dissipé cette incertitude.
S II*
E xa m en des enquêtes.
A v an t de démontrer que celle de la dame Yerniette n ’est rien
moins que concluante, posons les faits interloqués.
i° L a dame Yerniette et ses filles ont soigné le sieur B r u n , tant
à Paris q u ’à C l e r m o n t , pendant les dernières années de sa vie, dans
les maladies que celui-ci a essuyées, ou à raison de ses infirmités;
2° L e sieur B r u n , voulant venir se fixer à Clermont à la fin de
18 23, invita le sieur Yerniette à le venir chercher à Paris; celui-ci
cédant à cette invitation, se rendit effectivement à Paris, et revint
*à Clermont avec le siaur B r u n , qui depuis, jusqu’à son décès, a
continuellement habité avec les époux Verniette;
3 ° L e sieur B r u n , depuis son arrivée à Clermont jus qu’à son
décès, a reçu de nombreuses visites, et est. allé diner plusieurs fois
chez des personnes avec qui il avait eu d'anciennes relations; d ’ail
leur s, il sortait fréquemment, soit pour se promener, soit pour
voi r ses amis ;
4 ° Il a souvent exprimé à diverses personnes son affection parti
culière et sa reconnaissance pour la dame Y ern ie t te, sa sœur, ainsi
que sa v o lo n té de lu i laisser toute sa fo rtu n e y
5 ° Lorsque son testament eut été fa it , ce testament a été pré
senté à d e s jurisconsultes, pour savoir s’il était régulier;
6° Depuis la date de ce testament, le sieur Brun a déclaré p lu
sieurs f o i s q u ’il avait donné toute sa fortune à la dame Y ern ie tte ,
sa sœur.
Les trois premiers faits, isolés des trois derniers, seraient sans
importance. Les trois derniers ofirent plus de gravité ; car, s’ils
étaient établis, ils prouveraient que le sieur Brun avait voulu
donner sa succession à la dame Yerniette ; q u ’il a déclaré l ’avoir
donnée, et que l ’acte qui renfermait le don avait été soumis à
l'examen de jurisconsultes.
�2
Recherchons maintenant si la preuve offerte par la dame Verniette a etc administrée; et l ’appréciation des témoignages invoqués
nous conduira à un résultat négatif.
C hacun des faits interloqués est complexe ou composé.
L e premier est attesté partiellement. Plusieurs témoins déposent
q u ’à son arrivée de Paris à C le ft n o n t, au commencement de no
vembre 182 3, le sieur Br un vint habiter chez le sieur Verniette ;
q u ’il y demeura ju sq u’à sa m o r t , arrivée en octobre 1824; q u ’il
f ut fréquemment m alade, et q u ’il reçut les soins de la famille
Verniette. Mais la preuve de ces particularités était inutile; elles
n ’ont jamais été désavouées. Il en résulte seulement que, durant la
dernière année de sa vi e, le sieur Br un a logé à Clermont chez la
dame Ve rnie tte , et y a été plus ou moins bien soigné. C e n ’est pas
là seulement ce q u ’ il fallait prouver. L a preuve devait encore s’é
tendre à des soins donnés pendant plusieurs années, tant à Paris
q u ’à C le rm o n t ; et il n’est pas établi, il n ’est pas vrai que la dame
Verniette ou ses filles soient venues à Paris pour soigner le sieur
B r u n dans sa maladie. On en a fait courir le b r u i t ; deux témoins
m êm e, le cinquième et le treizième, semblent en attester la vérité
d ’après des ouï dire; mais ce b r u i t , qui repose sur deux voyages
que la dame Verniette et l ’une de ses filles-auraient faits à Paris, à
deux époques différentes, est démenti par la correspondance même
du sieur Brun.
L a dame Verniette fit un voyage à Paris au commencement de
1 8 2 1 ; elle y séjourna quelque teins dans la maison de son frère.
L e principal m o t if qui T y attira fut moins le désir de voir son
frère, que l’espoir de trouver des ressources pour obtenir la guérison
d ’une maladie dont elle était atteinte. Elle n ’y vint donc pas pour
donner des secours au sieur Brun . C ’est ce q u ’apprennent deux
lettres q u ’ il écrivait les 29 avril et 4 mai 1821. Dans la première,
adressée au sieur V e r n ie t te , il dit : J ’a i f a i t p o u r le m ieu x p o u r
v o u s la renvoyer (la dame Verniette) c m bonne santé et en m eilleu r
état que j e ne l'a i reçue.
L ’ une des filles de la dame Verniette était la filleule du sieur
B r u n ; il voulait la faire venir à Paris. 11 s’eft explique dans une
lettre du 9 février 1823 , écrite au sieur Jarton aîné. « ,1e fais venir
« mon espiègle de filleule Amélie; çà lui fera du b ie n ; c’est l ’àge
« pour faire ce petit voyage, »
C e 11e fut point l'espiègle Amélie qui fit le voya ge , mais bien
mademoiselle A g a t h e , sa sœur, qui vint passer auprès de son oncle,
à Paris, cinq ou six semaines, 11011 pour être garde-malade, mais
�^ :*:> ; ----- -------------------- --------- ----pour j o u i r , sous les auspices cle son oncle, de quelques-uns des
agrémens qu'offre cette ville,
Il est. constant désormais que la dame Verniette ni ses filles ne
sont point allées à Paris pour porter des secours au sieur B r u n ,
pour le soigner dans ses maladies, et q u ’elles ne lui ont donné
de soins que pendant la dernière année de sa vie , q u ’il a passée
à Clermont.
- L e premier fait, gisant en preuve, n ’est donc pas établi, puisque
des diverses circonstances qui le composent, une seule est attestée
par les témoins.
L e second l’ait comprend deux circonstances. L a première est de
savoir si c’est le sieur Brun q u i , de l u i - m è m e , avait pris la réso
lution de venir à Clermont et invité le sieur Verniette à venir le
chercher à Paris : la seconde, si après son arrivée à Clermont il
avait continuellement habité avec les époux Verniette ju s q u ’à
son décès.
L a vérité de cette dernière circonstance n ’a jamais été méconnue
par les Bonhours. 11 ne fallait pas d ’enquête pour l ’établir.
A u contraire, la première circonstance n ’est aucunement jus
tifiée. Plusieurs témoins de l ’enquête directe parlent de l ’invitation
du sieur B r u n , du voyage fait par le sieur Verniette à Pari s, pour
en ramener son beau-frère, niais ils ne disent absolument rien sur
la cause première de cette démarche.
L a dame Verniette désirait attirer et fixer son frire à Clermont.
E n offrant de le recevoir et de le garder au sein de sa famille, elle
avail une arrière-pensée que l ’événement a mise au grand jour.
E l l e était persuadée que le sieur Brun ramènerait avec lui sa
f o r t u n e , qui était toute mobilière. L e m ot if ap par en t, q u ’elle
a vo uait, était de l ’entourer de scs soins; le m oti f réel était de
s’emparer plus aisément d ’une hérédité assez considérable, à l’ex
clusion des autres parens. Elle a travaillé à son projet avec per
sévérance.
E lle avait rencontré pendant quelque lems un assez grand
obstacle dans l’attachement du sieur Brun pour ses habitudes com
merciales. Il ne se rendit à ses sollicitations que quand les attaques
q u ’il éprouvait, devenant plus fréquentes, et ses souffrances aug
mentant chaque jour, il perdit l'espoir de voir rétablir sa
nié, et
senli la nécessité d ’abandonner entièrement son commerce.
Dans une lettre du 26 août i 8 '->.3 , le sieur Brun écrivait à sa
sœur : « T u m ’as déjà dit dans ta lettre du 4 août que ça me ferait
« deux saisons, en parlant sans doute des eaux de Néris et des
�T
v\( vendanges, de p a rtir v ite > p o u r p o u v o ir en p ro fite r, mais as-tu
« réfléchi si je le pouvais.» 11 ajoute, q u ’il eût été trop inquiet d ’a
bandonner une maison q u ’il avait formée depuis 12 ou i S a n s . . . Mon
intention depuis p lu s d'un an , et j e dois te l ’avoir dit 3 a é té de
céd er ma suite d'affaires.
C e langage était tenu à la dame Ve rn iette, en réponse à la lettre
q u ’elle avait écrite le 4 du même mois.
E n septembre 1 8 2 3 , elle écrivait à son frère pour l ’inviter à
venir à C le r in o n t, d ’où ils seraient partis pour ÜNéris, où la dame
Ver niette voulait aller, espérant que les bains lui feraient du
bien. E lle le pressait, beaucoup de v e n ir .......
A i n s i , c’est la daine Verniette qui in v ita it, qui pressait son
frère. Déterminé à se rendre à l ’invitation, il en instruit sa sœur
par sa lettre du 8 octobre 1823.
U n passage de cette lettre est rappelé dans le mémoire de la
dame Verniette. Il apprend que le sieur Brun voulait écrire pour
demander que l’on fit p artir le sieur V erniette sou beau-frère,
mais ([ue M. Jarton ou M. Vauglade lui avait dit que cela était
i n u ti le , puisque Ï\J. Bard avait écr t à ce sujet, en lui marquant
de ne pas perdre de teins. Là se termine la citation imprimée par
la daine Verniette. Elle pourrait laisser croire que c’élait le sieur
B run qui avait demandé de son propre mouvement que le sieur
Verniette vint le chercher à Paris. La suite du passage cité per
suadera le contraire. « Je suis lâché que ça se trouve environ dans
les vendanges, continue le sieur B r u n , cependant puisque vou s
l ’avez offert > je pense que ceia se peut.
Plus de doute désormais que le sieur Brun ne soit venu de Paris
à Clerinont habiter chez sa sœur, que sur l’invita lion et l’offre de
celle-ci et de son époux. Il est prouvé que ce n’est pas lui qui a
pris l'initiative. Il n ’a fait que céder aux sollicitations de sa sœur,
sans se douter des vues q u ’elle avait sur sa fortune , et sans lui
accorder une affection exclusive. L ’amour de son pays natal le
ramenant à C le rinont, il 11e pouvait refuser l ’asile qui lui était
offert.
L e troisième fait interloqué a pour objet de détruire cette asser
tion des intimés , que le sieur Brun était tenu en charte [»rivée.
La preuve faite a-t-elle eu ce résultat? Non sans doute.
Que le sieur Brun ail dîné plusieurs fois chez lesieur Jarton aîné,
qui était 1 ami intime des époux V er n ie tte , ainsi que le déposent
le premier et le second témoin, cela ne prouve pas q u ’il fût libre
�de èes actions. Pour assister à ces dîners il était toujours accompagne
de quelques personnes de la famille Verniettc.
II en était de même lorsque sa santé lui permettait de rendre des
visites, d ’aller à la promenade.
L e quatrième témoin, le sieur Bonna baud , médecin, déclare
que le sieur Brun lui a rendu plusieurs visites sans être accompagné
de personne; mais une foule d ’autres témoins, qui l ’ont vu sortir
plus ou moins fréq uem m ent, soit pour des visites, soit pour la
promenade, l ’ont toujours ou presque toujours vu accompagné,
tant on exerçait sur lui une active surveillance.
L e troisième et le quatrième témoin de l ’enquête contraire par
lent d ’une circonstance où il s’était échappé de chez la dame Vern ie t te , et était venu se réfugier chez eux. Peu de minutes après,
la dame Verniette était chez le sieur Bergougnoux pour ramener
son frère. E lle se plaignit de ce q u ’o’n avait ofïert à celui-ci un
demi-verre de vin et un biscuit pour le fortifier. Elle semblait se
plaindre de ses procédés. Il lui répondit avec un ton de colère :
« Vous meniez, madame, vous prétendez que je vous bats, c'est
« au contraire v o u s q u i me battez. » E n causant, le sieur Brun
avait dit q u ’on le tenait en charte p riv é e, et q u ’il était mal chez
sa sœur. Il témoigna au sieur Bergougnoux la crainte d ’en être mal
accueilli, parce q u ’on l ’avait aâsuré que le témoin avait couru de
la haine pour l u i , et q u ’on lui avait d éfen du de v e n u 'le voir.
L e sieur Brun avait demeuré cinq ou six ans chez le sieur Ber
gougnoux, comme élève en pharmacie. Des liaisons,, d ’amitié en
étaient résultées en tr ’eux. La dame Verniette connaissait ces liai
sons ; elle les redoutait, comme une entrave à l ’accomplissement
de ses desseins sur la fortune de son frere; c est pour cela qu elle se
permit d ’employer la calomnie pour l ’éloigner du sieur Bergou
gnoux, chez qui elle montra tant de mécontentement de le trouver.
Le huitième témoin de la contr’enquête parle d ’ une circonstance
où le sieur Brun était arrive chez lui en l u y a n t , sous le pretexte
q u ’on voulait le faire confesser.
Le neuvième témoin atteste la même circonstance; de plus, il
déclare que plusieurs fois il a vu sortir de chez la dame Verniette
le sieur Brun , ayant l ’air de s échapper.
L e dix-septième témoin de l’enquête directe a vu le sieur Brun
se promener, mais toujours accom pagné de (ju eh ju u n de la maison
Verniette.
L e onzième témoin fait la même déposition ; il ne se rappelle
pas l ’avoir vu sc promener seul.
�(.
2
8
)
De même le douzième témoin.
De même le onzième de l ’enquête contraire.
L e treizième témoin de la contr’enquête était la sœur de lait du
sieur Br un. Elle va chez la daine Verniette pour le voir; les de
moiselles Verniette la refusent; elle insiste; alors elles lui disent de
repasser, que leur mère est absente, et q u e lle s n ont pa s la c l e f de
la cham bre du sieur B r u n .
Le témoin se présente un autre jour : nouveau refus. Elle eut
été éconduite encore cette fois, si le sieur Brun , de sa croisée, ne
l ’eùt aperçue dans la rue, et n ’eut exigé q u ’on lui permît l ’entrée
de sa chambre.
Le quatorzième et le quinzième témoins ont vu le sieur Brun qui
f u y a i t , et la dame Verniette et l’ une de ses filles qui le rejoignaient
et le forçaient brusquement à rentrer.
Les en fans Bonheurs se présentaient-ils pour voir leur oncle, la
dame Verniette et sa famille les repoussaient avec colère. On v o u
lait q u ’il restât isolé. Plusieurs témoins parlent de cette circonstance,
e n t r ’autres le neuvième témoin de la contr’enquête.
C om m en t, après de pareils témoignages, persister a soutenir que
le sieur Br un était libre dans ses actions? O u i , par fois on l ’a vu
seul, rendant quelques visites, ou se promenant; mais alors n’estce pas parce q u ’il avait échappé à ses gardiens, trompant leur v i
gilance? Et quand il ne pouvait mettre cette vigilance en d éfau t,
n ’était-il pas poursuivi par la dame Verniette 011 les personnes de
sa maison, jusques chez les amis ou les connaissances chez lesquels
il se réfugiait, et ramené comme un criminel qui se serait évadé?
N ’a-t-il pas dit lui-même q u 'il était tenu en charte p riv é e?
E t pourtant la dame Verniette ose soutenir q u ’ il était libre dans
sa maison! C ’est assurément là une singulière libert é, dont per
sonne ne voudrait.
L e quatrième fait, gisant en preuve, est que le sieur Brun avait
exprimé à diverses personnes son affection particulière et sa recon
naissance pour la dame Verniette, ainsi que sa volonté de lui laisser
toute sa jo r tu n e .
C e f a i t , qui est complexe, n ’est point é tab li, quant à la der
nière partie, (|ui est la plus impor tante, et qui consiste dans la
manifestation de donner toute sa fortune.
Que le sieur Brun ait toujours eu de l’aflVcliou pour la dame
V e r n ie t te , sa sœur, jamais ou a cherché à dire le contraire. Son
aileclion se reportait sur tous ses parens. La dame Bonheurs y avait
�une part non moins grande que son autre sœur; il aimait les enfans
Bonliours après comme avant la perte de leur mère.
L e dixième témoin de l'enquête directe, M. D e b e r t , juge de
paix , pense q u e , ju s q u ’au décès du sieur B r u n } i l a v é c u dans
la p lu s p a rfa ite a m itié et la m eilleure intelligence avec sa sœur
(la dame Bonliours), son beau-frère et ses enfans. La plus p a tfa it e union régnait, notamment dans cette famille en i8 r 8 ,é p o q u e
du partage de la succession du père.
Le treizième témoin de la contr’enquête atteste cette bon ne in
telligence avec la famille Bonliours. L e sieur Brun témoigna beau
coup de regrets de la perte de la dame Bonliours.
Selon le quatorzième témoin, le sieur Brun partageait son a f
fe c tio n entre ses d e u x sceui's.
Le quinzième dépose que le sieur Brun avait une même affection
pour les Bonliours et les Verniette. Il disait q u ’ils seraient tous
égalem ent ses héritiers.
Mais cette affection est exprimée par le sieur Brun lui-même,
dans des lettres q u ’il écrivait ¡1 sa sœur, la dame Bonliours, et no
tamment .dans une qui est sous la date du 29 novembre 181G. Il
embrasse la mère, les enfans et le mari, q u ’il aime bien , parce
qu i l rend sa sœ ur heureuse.
L e 9 janvier 1821 , il écrivait au sieur Bonliours père une lettre
qui renferme des expressions amicales. Il embrassait de cœ ur le
])èie et les enfans.
U ne autre preuve que la bienveillance de l ’oncle pour scs neveux
n ’avait point changé, c ’est le soin q u ’apportait la dame Verniette
d ’empêcher que les neveux n ’arrivassent jus qu’à l ’oncle.
n ’est
q u ’en forçant la consigne que deux d ’entr’eux étaient parvenus
auprès de lui ; ils en avaient été bien reçus.
II importerait peu q ue, dans deux ou trois circonstances, il les
eut mal accueillis. Une pareille réception s’expliquerait par son
état de souffrance, et encore plus par l ’ompire que la dame Verniette avait acquis sur un homme dont les facultés intellectuelles
étaient affaissées par les douleurs physiques. La dame Verniette
l ’obsédant continuellement voulait qu'il ne songeât q u ’à elle, et
q u ’il oubliât completlemenl les enfans Bonliours, ses neveux. Elle*
avait, d ’autant mieux réussi à le maîtriser et à s’en faire craindre,
q u e , mémo en é t a t 'd e santé, le sieur Brun était d ’ un caractère
f a ib le et tim ide ju s q u ’à la p u silla n im ité. C ’est ce qui est attesté
par le premier témoin de la c o n l r ’enquête prorogée, le sieur blatl.in,
�médecin, qui connaissait la maladie du sieur B r u n , et ses causes,
et avait été à portée d ’apprécier son moral.
On ne désavoue pas non plus que le sieur Brun n ’eùt reçu q u e l
ques bons offices de la dame Vern iette; mais ces bons offices étaient
réciproques. L e sieur B r u n , commerçant, avait des relations assez
fréquentes avec Clerinont : tantôt c’était des commissions de mar
chandises à prendre, tantôt des recouvremens à faire. L a dame
Verniette était dans le commerce; il n’est donc pas étonnant que
son frère correspondit quelquefois avec elle, pour l ’aider dans cer
taines opérations. Dans plusieurs lettres de 1821 et 1 8 2 2 , il lui
reproche sa négligence à faire ses commissions, même à lui répondre.
C er te s, ce n ’est pas là exprimer de la reconnaissance. S ’il en devait,
ce n ’était pas au point d ’absorber toute sa fortune.
Mais avant le prétendu te sta m e n t, avait-il exprimé à diverses
personnes la volonté de laisser toute cette fortune à la dame
Verniette sa sœur? On a vainement essayé d ’établir l ’affirmative.
Il fallait pour cela un plus grand nombre de témoignages que
ceux que la dame Verniette a péniblement recueillis.
C e l u i des sieur et dame Jarton ainé ne se rapporte pas au
quatrième fait^ mais bien à la seconde partie du cinqu ièm e, que
nous désignons comme un sixième fait. Nous l ’apprécierons en son
lieu.
L e sieur B o n n a b a u d , quatrième témoin de l ’enquête directe,
qui était le médecin du sieur B r u n , qui l ’a vu fréquemment , qui
avait sa confiance, ne l ’a jamais entendu parler de ses dispositions
bienveillantes en faveur de sa sœur, la dame Verniette.
U n seul témoin, le douzième, a entendu dire au sieur Br un :
Ce (¡lie j e p o ssè d e , j e le laisserai à ma sœ ur T'' en d ette , à q u i j e
conserve beaucoup de reconnaissance. L ’époque à laquelle ce
propos aurait été tenu n ’est point indiquée. 11 aurait été provoqué
par l ’invitation de se m arier , que le témoin faisait au sieur Br un
en plaisantant.
Ce tt e déposition , comme perdue au milieu de nombreuses
dépositions, n ’est fortifiée par rien. Il est étonnant ([lie le sieur
Pmin , s’il avait eu la volonté de tout donner à la dame Ve rn iette,
n’en eut point fait part à ses anciens amis, tels que le sieur
Bergougnoux , à scs vieilles connaissances, telles que la femme
Meteix.
Il est étonnant sur-tout q u ’il ne l ’eùt manifestée dans aucune
des nombreuses lettres q u ’ il écrivit h. la dame Vern iette, durant
les années 1 8 2 1 , 1 8 2 2 , 182.3, Faire espérer, même entrevoir à
�T ? n
cette sœur le don de toute sa fortune, eût été le meilleur moyen
de vaincre la négligence q u ’elle apportait h faire les commissions
dont il la cha rg ea it, négligence q u ’il lui avait reprochée dans
plusieurs lettres.
Ainsi le quatrième fait reste dénué de preuve.
Lorsque le testament eut été f a i t , la dame Verniette le présenta
à des jurisconsultes, pour savoir s’il était régulier. Tel est le cin
quième lait dont la preuve était offerte.
Deux jurisconsultes honorables ont été appelés en témoignage
sur ce fait.
jVL B i a u z a t , l ’ un d ’e u x , déclare que c’est lui qui a donné le
modèle du testament. Il ne peut se rappeler l ’époque précise à
laquelle on lui fit cette demande, ni la personne par qui elle fut
faite. Il a beaucoup réfléchi à cette dernière circonstance, dont il
sent toute l ’importance; mais la faiblesse de sa mémoire ne lui a
pas permis de se rappeler la personne qui a fait cette démarche
au près de lui. I l penche cependant à croire que c est la -dame
V ern iette elle-m êm e.
Plus t a r d , la même personne ou toute autre , lui présente la
copie du testament, q u ’il trouva conforme au modèle.
I l croit bien que le testament déposé au greffe et q u ’on lui a
représenté est le même.
La déposition de INI. Biauzat n ’a rien de positif., si ce n ’est q u ’il
a fourni le modèle d ’un testament.
Quelle est la personne qui lui avait demandé ce modèle? Il croit
que c ’est la dame Verniette; et il se trompe, d ’après la déclaration
de la dame Bernardin , neuvième témoin, qui affirme que c’est elle
qui a demandé et reçu le modèle du testament. A quelle époque?
M. B iauzat l ’ignore.
Il ignore également quelle est la personne qui lui lui a présenté
la copie du testament pour savoir si elle était conforme au modèle.
Il ne précise pas davantage cette seconde époque. L ’incertitude
q ui a présidé à cette déposition en détruit l'influence.
D ’ailleurs le jurisconsulte dit bien que la copie.du testament
q u ’on lui a présentée était conforme au modèle donné (sans doute
quant à la disposition , mais non quant à la confection matérielle;
car on ne peut penser q u ’ il l’eut tracé avec le même nombre de
lignes). Mais il ne s ’explique nullement sur la validité du testament.
A v an t la mort du sieur Brun aucun autre avocat n’a vu le
testament. La dame Verniette a prétendu q u ’elle l ’avait soumis à
l ’examen de M. Boii'ot oncle, qui lui avait déclaré que ce testa
�ment e'tait fo r t régulier. Elle avait instruit de cette particularité
la dame B e rn a rd in , saconfidente, son amie in t im e , celle qui avait
fait des démarches auprès de Me Biauzat.
L e témoignage de MeBoirot est venu démentir formellement cette
assertion. On connaît toute la loyauté de ce vénérable vieillard. Il
déclare sans hésitation et dans le langage le plus positif, que le
testament ne lu i a é té présenté , ni p a r la dam e V ern iette , ni p a r
personne de sa p a r t, soit avant, soit après le décès du sieur B run.
I l assure n ’avoir ja m a is vu ch ez lu i la dam e K ern iette et ne pas
la connaître.
T o u l ce q u ’on a dit et imprimé pour atténuer l ’effet cle cette
déposition , c ’est q u ’i l paraîtra p eu étonnant que Me Boirot ne se
soit pas rappelé un fait qui remonte à plus de 6 ans.
Nous arrivons au sixième fait interloqué. L a dame V ern ietle
s’était soumise à prouver q ue, depuis la date du testament, le sieur
B r u n avait déclaré p lusieurs f o i s q u ’il avait donné toute sa fo rtu n e
à la dame V er nietle sa sœur.
Des nombreux témoignages invoqués, quels sont ceux desquels
on voudrait faire surgir cette preuve?
On se complaît à rappeler celui du sieur Jarton a în é , qui est
lié d ’amitié avec les époux V e r n i e l t e , et qui déclare que le sieur
Br un lui avait manifesté des intentions bienveillantes pour la clame
V er nielte sa sœur, et qui lui avait d i t , à l ’époque où il fit son tes
t a m e n t, époque q u ’ il ne peut préciser, cjn’il avait e x é c u té ce q u ’il
avait toujours eu Vintention de fa ir e .
Mais tout cela signifie-t-il bien que le sieur Brun avait fait un
testament en faveur de la dame V e r n ie l t e , et lui avait donné son
entière hérédité? L'interprétation la plus large craindrait d'adopter
l ’affirmative. L e sien r Brun avait des intentions bienveillantes pour
la dame Ver niette , comme il en avait pour tous ses parons. Il a dit
q u ’ il avait exécuté ce q u ’il avait toujours eu l ’intention cle faire.
Mais q u ’a-l-il exécuté et eu faveur de q u i ? Il ne le dit point. S ’il
n’a exécuté que ce q u ’ il a toujours eu /’intention de faire, il n’a
point dépouiljé les enfans Bnnhours, ses neveu x, de toute partici
pation à son hérédité 5 ca r, lorsqu’ il écrivait à la dame Bonheurs
sa sœur des lettres qui renfermaient des expressions de la plus
franche amitié; que dans une de ces lettres, sous la date du 29
novembre 1 8 1 ( i , il lui disait : Jem b ra sse la m ère, les enfans et
le m ari que j'a im e b ie n , /Jarcequ' il rend ma santr heu reu se, il
n'avait assurément pas l'intention de frustrer de sa succession elle
et ses enfans. 11 11’avait pas celle int ention, quand il déplorait la
�. ( 33 )
’
V V
mort de cette sœur, q u ’il aim ait ; quand il eut témoigne tous ses ^
regrets au sieur Bonhours son beau-frère; q u ’il lui tenait un langage
affectueux dans une lettre du 9 janvier 1821 ^ q u ’il termina en
embrassant les Bonhours de cœur.
L ’intention q u ’il avait toujours eue était, n ’en doutons pas,
de laisser sa fortune àses deux sœursou à leursenfans. Cette intention
était le vœu de son cœur. Elle était commandée par ses affections.
Q u i osera assurer que ce n ’est pas cette intention q u ’il aura dit
au sieur Jarton aîné avoir réalisée ? L ’acte qui en ferait f0£
n ’apparaît point; mais on sait que la dame Verniette a fait main
mise sur l'intégralité de la succession, sans compte ni mesure
sans aucune espèce d ’inventaire. On pressent dès-lors quel aurait
été le sort d'un acte, qui aurait détruit son projet et anéanti le
testament, q u ’elle a osé produire.
Ai nsi , on ne trouve nulle part la preuve que le sieur Brun ait
déclaré, non p a s plusieurs f o i s , mais une seule fois, q u ’il avait
donn é toute sa fo rtu n e à la dame Verniette.
Le sixième fait reste donc dénué de preuves.
L e résultat de l ’examen et de l ’appréciation des enquêtes n ’est
point favorable au prétendu testament. Il est loin d ’en corroborer
V e x iste n c e . Il le la isso sous le poids de tous les vices q u ’on lui
reproche. La preuve offerte n ’est point administrée. N o n , il n ’est
pas prouvé que la dame Verniette et l ’une de ses filles soient allées
à Paris pour porter secours au sieur Brun dans ses maladies. Il n ’est
pas prouvé q u ’il eut, par initiative, invité le sieur Verniette a venir
le chercher à Paris pour le conduire à Clermont. Il est pr ouvé, au
con tr aire , que c ’était la dame Verniette qui l ’avait pressé de se
retirer à Clermont et de prendre chez elle un logement, offrant de
lui envoyer son mari pour l ’accompagner dans le voyage. Il n ’est
pas prouvé que le sieur Brun avait pour sa sœur, la dame Verniette
une affection exclusive, mais il est prouvé que la dame Bonhours
et ses en fans avaient part à cette affection.
II n ’est pas prouvé q u ’il jouissait de la plus grande liberté chez
la dame V er nietle ; mais il est prouvé q u ’il était gêné dans ses
actions; q u ’il était soumis à une active surveillance et tenu souvent
en charte privée.
Il n ’est pas prouvé q u ’il ait annoncé plusieurs fois le projet de
faire à la dame Verniette don de toute sa fortune, ni q u ’il ait dit
à plusieurs personnes q u ’il avait réalisé ce projet par un testament
ou par tout autre acte.
�r
_
•
( 34 )
Ja reconnaissance rlu sieur Br un et le don de toute sa fortu ne,
restent encore à établir, malgré l'interprétation favorable q u ’elle
s’est étudiée à prêter aux dépositions de certains témoins.
Que si les témoignages invoqués par la dame Verniette n ’ont
poi nt corroboré V existen ce du testament qu'elle prod uit, on peut
dire au contraire que plusieurs dépositions de la contr’enquête le
signalent comme un acte informe, irrégulier, comme un mensonge
que l ’on a osé présenter pour la vérité.
E n effet, il a suffi à MM. Costes, juge de paix, Rozier, greffier,
C u l h a t , géomètre, et B o i r o t , oncle et neve u, avocats, de voir
le testament, pour être frappés de ses irrégularités matérielles, et
pour manifester l ’opinion q u ’ils ne le croyaient pas sincère.
E t cependant les deux premiers avaient ainsi condamné ce tes
ta m ent, avant d ’être instruits de la démence dont avait été frappé
le sieur Brun.
s ni.
In c a p a c ité du sieur B run.
Pour faire un testament il faut jouir de ses facultés intellec
tuelles et avoir toute sa raison. Il faut aussi que la volonté du
testateur soit exprimée avec une entière liberté; q u ’elle ne soit
influencée, ni par la crainte, ni par la violence, ni par aucune
suggestion étrangère. Alors il y a capacité légale, autrement cette
capacité n ’existe pas.
Si nous supposons maintenant que le testament attribué au sieur
Brun est écrit de sa m a i n , il nous reste à rechercher si à la date
que porte le testament, le testateur avait la jouissance de scs facultés
morales, l ’exercice de sa raison, e t , en admettant l'affirmative,
s’il avait librement exprimé sa volonté.
Il n ’avait pas sa raison : de nom bi eux élémens concourent à le
démontrer. Il est certain q u ’avant de se retirer à C l e r m o n l , il avait
eu à Paris plusieurs atta qu es , qui avaient porté atteinte à sou
moral et le privaient de tems en teins de sa raison. T1 dit lui-même,
dans une de ses lettres, q u ’il perd la mémoire. Dans une a u t re,
sous la date du i ?. septembre i 8 a 3 , il se plaint d ’avoir un assou
pissement tous les soirs, de pleurer souvent de faiblesse, et d ’é
prouver un accès de jour à autre.
Le sieur Bergougnhoux père , troisième témoin de la contr euquêUî , alla voir le sieur B iu n à Paris, environ un mois avant que
celui-ci se retirât a (deiinont. «Je le trouvai , dit ce témoin , dans
« un état de démence piesqu’absolu ; il divaguait et ne répondait
« exactement à aucune de mes questions. Ses réponses, faisaient
�« rire deux domestiques à la garde desquels il était abandonné.
<. Je sortis de chez lui fort affligé de son état. » C ’est le lendemain
que le sieur Bergougnhoux, rencontrant le sieur Jarton aîné, l ’in
vita à prévenir ,1a famille du fâcheux état dans lequel était tombé
le sieur Brun. Il écrivit pour le même sujet à la dame Bergou
gnhoux son épouse.
Selon le septième témoin, le sieur Brun passait dans le voisinage
pour être tombé dans un état de démence. Il faisait, dit-on, des
extravagances. L a femme Ramade dit un jour au témoin que le
sieur Brun avait mis le f e u à de la paille dans l ’escalier de la
maison qu'il ha bita it, et q u ’on la v a it trouvé se chauffant à ce
fo y e r .
L e huitième témoin parle du bruit qui s'était répandu que le
sieur Brun avait perdu la tête, q u ’il faisait des extravagances. II
raconte que s’étant un jour échappé, il était venu se réfugier chez
le témoin et cherchait à s’y cacher. Ou lui a dit que le sieur Brun
était enfermé dans sa chambre par les personnes de la maison , dans
la crainte q u ’il ne s’échappât.
L e neuvième témoin rappelle le même fait.
Selon le quatorzième témoiu , 011 racontait que le sieur Brun
avait perdu la tête à Paris.
Le sieur B lati n , médecin connaissait les causes de la maladie du
sieur Brun . Il n ’a pas dù les révéler. Elles n ’ont pas peu contribué,
sans d oute, à le faire tomber dans l ’état d'aliénation mentale qui
parait avoir précédé sa mort. Il était aussi d ’une grande douceur
de caractère.
Ces témoignages géminés sont sans doutesuiiisans pour démon trer
([île le §ieur Brun était atteint de démence, même avant de quitter
Paris.
*
Mais la vérité q u ’ils proclament apparaît encore dans un plus
grand jou r, si l’on considère la confection matérielle du testament
et les circonstances dans lesquelles il est intervenu.
L e lecteur n ’a pas perdu de vue que le sieur Brun avait la
prétention de bien écrire, et q u ’en eftet il écrivait assez correcte
ment. Comm ent comprendre alors q u ’il e û t , avec discernement,
jeté sur une feuille dp papier quelques lignes inégales pour disposer
de toute son hérédité; q u ’il eut surchargé plusieurs mots, tandis
que d ’autres seraient traces nett em ent; q u ’il eût fait dans les
mots testament et vingt des fautes grossières d ’orthographe; q u ’il
eût. fait suivre sa signature patroniinique du prénom Michel, qu on
ne voit , nulle autre p a r t , accompagner sa signature.
�Non; il n ’aurait pas laissé subsister cet écrit informe sans
démentir son caractèr e, son amour-propre. Il l ’aurait recopié. Il
en avait eu la facilité, le teins, pu isq u’il a survécu près d ’un an
à la date de l ’écrit.
D ’ailleurs, on ne peut guère supposer que le sieur B r u n , qui
avait l ’intelligence des affaires, eût eu besoin d ’ un modèle pour faire
son testament olographe, ou bien s’il n ’avait pu lui-même rédiger
ses dernièies volontés, il se serait adressé à un notaire pour le
charger de ce soin.
Les précautions que l ’on a prises pour se procurer une feuille de
papier timbré et pour effacer l ’empreinte de la griffe qui aurait in
diqué le nom du fonctionnaire public, par qui cette feuille avait été
fournie, sont aussi un indice de fraude. On redoute la lumière. On met
à contribution la complaisance de certaines personnes. C ’est le sieur
G i l l e t , septième témoin de l ’enquête directe, qui est venu déclarer
q u e , sur l ’invitation de la dame Vern iette, il alla chercher chez
M e Roddier ou chez M. Bonnefoi ou chez Me Bergier , notaire, une
feuille ou demi-feuille de papier. Puis il ne peut préciser si c ’est
le mari ou la femme Verniette qui lui a fait l ’in vi tation , q uoi
q u ’ il ait d ’abord dit que c ’est la femme. Il ajoute q u ’il ne peut se
rappeler non plus si c’est lui ou l ’ un de ses ouvriers, qui serait allé
chercher ce papier, quoique d ’abord i l eût dit que c était lui-m êm e.
L a singularité de cette déposition est frappante.
C ’est la dame Bernardin, neuvième témoin, qui serait allée chez
M e Bi auzat demander le modèle du testament.
Mais ni la dame Bernardin, ni aucun autre témoi n, n ’ont vu le
sieur Br un copier ce modèle. Il n ’a dit à personne q u ’il eût fait un
testament olographe. Cette clandestinité est inexplicable. L e sieur
Brun n ’aurait eu aucune raison de s’y tenir. Il était maître de sa
fortune. Il n ’eut pas craint de manifester par un acte aussi positif
la prédilection exclusive dont la dame Verniette se dit l ’objet.
Qu e si l ’on admet que le testament est vraiment écrit par le
sieur B r u n , et que le testateur savait ce q u ’il faisait, ce testament
ne resterait pas moins vicié d ’ une nullité radicale, comme n ’étant
pas l ’expression d ’ une volonté libre.
E n effet, quand on a lu les enquêtes, 011 ne peut révoquer en
doute que le sieur Br un 11e fut tenu en charte privée. Il l ’a
dit lui-même au sieur Bergougnhoux. Plusieurs autres témoins
l ’attestent, et notamment le treizième à qui les demoiselles
Verniette répondirent, un jour q u ’elle insistait pour voir le sieur
�B run son frère de lait, qu*elles n avaient pas La c l e f de la chambre,
et que leur mère était absente.
La dame V er n ie tte , que l ’on dit douée d ’un caractère ferme
ju s q u ’à la rudesse, maîtrisait complètement son frère par la crainte
q u ’elle lui inspirait. ( O n a même vu q u ’il se plaignait d ’en être
b a t t u ) . Cette domination avait'été facile à acquérir par suite du.
caractère doux et timide du sieur Bru n, caractère que les souffrances
avaient achevé de rendre pusillanime.
Dans cet état m ora l, obsédé continuellement par la crainte que
lui inspirait son ty ra n , il ne pouvait exprimer de volonté.libre sur
le don de sa fortune. Aussi toutes les démarches qui ont facilité
le prétendu testament, sont-elles laites par la dame Verniette ou
par son ordre. Il semblerait q u ’elle dirigea la main qui l ’écrivait.
C ’est elle qui l ’avait en son pouvoir, et qui en f it , contre l ’usage,
la remise à un notaire.
T o u t , comme on le voi t, s’est passé à l ’égard de cet acte, d ’une
manière insolite, extraordinaire.
Ma inte na nt, q u e , selon M. Tou llier, un testament olographe
soit p lu s fa v o ra b le que le testament reçu p a r des notaires; que la
présom ption de sagesse soit toute entière en fa v e u r du testateur
<jui p ren d le soin d ’écrire ses dernières v o lo n tés, nous ne con
testons point cette doctrine; mais nous soutenons q u ’elle ne peut
recevoir d ’application à l ’espèce, parce que l ’écriture et la signature
ne sont point reconnues par les héritiers naturels q u i , au con
traire, en dénient formellement la sincérité; parce que la présomp
tion de sagesse, en faveur du testateur, disparaît devant le double
fait d ’aliénation et de charte privée.
Lorsque tant et de si graves circonstances s’élèvent contre la
sincérité du testament a t t a q u é , quelle confiance pourrait lui
accorder la justice? A h ! sans doute, si la C o u r , dans son amour
ardent pour la justice, ne frappe point immédiatement de sa répro
bation celte œuvre de fausseté et de déception, c’est que les intimés,
jaloux eux-mêmes de voir briller la vé r it é , n ’ont point formé
d ’appel incident pour amener une décision sur le fond, et q u ’ils
se sont bornés à demander la confirmation du jugement qui ordonne
une nouvelle vérification.
F O U L H O U X , A v o ca t.
MA RIE., L ice n cié -A v o u é .
R I OM ,
de
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De
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bonhours, Annet. 1831?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Foulhoux
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
testament olographe
testaments
infirmes
conseils de famille
experts
faux en écriture
expertises graphologiques
signatures
témoins
démence
médecine légale
affection fraternelle
charte privée
abus de faiblesse
procuration
notaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour les sieurs Annet et Michel Bonhours, dame Anne Bonhours et le sieur Jean-Baptiste Celme, son mari, et le sieur Louis Bonhours, tuteur légal de ses enfans mineurs, tous propriétaires, habitans la ville de Montferrand, Intimés ; contre dame Antoinette Brun, veuve en premières noces du sieur Guillaume Bujadoux, et sieur Joseph Verniette, son second mari, marchands, demeurant en la ville de Clermont, Appelans.
Annotations manuscrites.
« 19 mai 1931, 1ére chambre… Déclare le testament du sieur Michel Brun, du 20 octobre 1823, vrai et valable. »
Table Godemel :
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1831
1802-1831
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2718
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2717
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53555/BCU_Factums_G2718.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus de faiblesse
affection fraternelle
charte privée
conseils de famille
démence
expertises graphologiques
experts
faux en écriture
infirmes
médecine légale
notaires
procuration
signatures
Successions
témoins
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53435/BCU_Factums_G2206.pdf
57faaa203273b38aaa28ea6671185c98
PDF Text
Text
ÏTOU^TOJTOTjjJTOJ'iüaijij'
juTJm
TABLEAU GÉNÉALOGIQUE.
Benoit
Bourgade
N .................
_J L
I
Hugues Ie'.
A
Françoise
Bourganel.
Marin.
A eu neuf enfans,
tout décédé*
sans postérité.
-/V
I
Antoine Ier.
à
Marie
D ecouzon.
Claude 2*.
*
Pétronille
à
Claude 4e.
I
Jacqueline
à
G ilbert.
Louis Ier.
à
Marguerite
D ecouzon.
Intimée.
M icliel.
Intimé.
H uguei 2e.
M a u rice,
décédé «ans
postérité.
A cédé à
M ichel.
Antoine 5e.
Louise.
Jeanne.
Ont cédé leurs droits à Louis.
*»
fi
~ò
-s
ñ
3
Ht
Claude 4e.
G ilbert
Jeanne
à
à
à
Pétronille. Jacqueline.
Claude 3®.
Héritiers institués par le contrat de
»77» »
Hugues 3e.
décédé sans
postérité.
Claude 5®.
curé
á Cusset.
A n toin e,
génovéiin.
Marin.
G ilb ert,
décédé sans
postérité.
I
Marie
à
Bonnet.
A cédé A
Claude 4e.
età Jeanne,
veuve de
Claude 3®.
Q
Q
C
S
c
g
b
=»
3
3
s
Jeanne,
religieuse.
M arie-Françoise
Bonnabaud.
n»
*5
Claude, 1er. du nom,
Hugues
à
Chèze.
Jppelunt.
Marie.
Claude
Jacqueline.
A cédé à ses
à
A cédé à
frères.
N . Malaleuge. Claude,
Appelant.
son frère.
Claude
à
R oche.
Appelant,
Hugues
à
R och e.
Appelant.
Antoinette
à
Louis
Bourgade,
Intimés.
Louis 2e,
à
Antoinette.
Antoinette,
mineure.
�i
Marín.
A cu Deuf enfans,
tous décédés
sans postérité.
I
Claude 2®.
Jeanne,
religieuse.
Antoine *er.
à
Marie
D ecouzon.
(s
K.
8
1
Marie
à
Bonnet.
A cédé A
Claude 4eetà Jeanne,
veuve de
Claude 3e.
g
B
'r>
h
i.
c
»>
I
-$
b
Hugues
Jacqueline.
Marie.
Claude
A cédé à
a
A cédé à sei
a
Clièze.
frcrc».
N . Malaleuge. Claude,
son frère.
Appelant.
yippeUnt.
Claude
Hugues
R oche.
Appelant,
R oche.
Appelant.
à
3
!K £ I ^ l i e f f . r 1c.clr f S X ¡w r r r : r ¡{:C)rír i f Ln ( ir f £ M jú .( f I J m { I i L r £ £ M ir ffr ¡r ir iC £ £ Í
�M
P ou r
E
M
O
I
R
E
IMPERIALE
Hugues B O U R G ADE-CHEZE, habitant
à Vollore; C l a u d e B O U R G A D E -M A L A LEU G E , habitant à la Dardie, commune de
V ollore; C l a u d e et H u gu es BOURG ADE-
ROCHE, appelans;
B O U R G A D E , et
Louis B O U R G A D E son mari;M a r g u e r ite D E C O U Z O N } veuve d 'autre
Louis B o u r g a d e , tous habitant au lieu du
Buisson, commune de Vollore- V i l l e ; et
M i c h e l B O U R G A D E prêtre desservant
la succursale de V ollore-V ille intimés
C o n tre
//
A n to in e tte
E n p r é s e n c e de C l a u d e B O U R G AD E y
prêtre curé de Cusset d'A n t o i n e BO URG A D E ex-génovéfin ; de J e a n n e BO URG A D E , veuve de Claude; et de M a r i n
BOURGA D E , propriétaire toushabitans
de la commune de Vollore.
LA coutume d’A u v e rgne autorisoit les contrats d’association universelle; mais ces associations etoient restreintes
A
O"7*6'
�par la loi aux contractans eux-mêmes, ù moins que par
une clause expresse elles n’eussent été étendues aux descendans.
O n conçoit le motif qui avoit dicté la règle générale.
C ’est sur les travaux et l’industrie de chaque associé,
que repose l’espoir des bénéfices communs : à la mort
de l’un des associés, les travaux et l’industrie de l’autre
s’isolent; ses bénéfices doivent donc s’isoler aussi. Il ne
seroit pas juste qu’il partageât ses gains avec des héri
tiers qui n’ont pas partagé ses sueurs.
Dans la cause, une association avoit été formée en
1748 , entre Antoine et Hugues Bourgade. L a société
avoit été contactée pour deux têtes et portions égales ,*
la convention n’y appeloit pas les descendans.
Quelques années après le décès de l’un des associés,
des acquisitions avoient été faites y et ne pouvoient ap
partenir à une société depuis long-temps dissoute.
Cependant? par une erreur, effet de l’ignorance sur
l’époque des acquisitions, les objets acquis ont été con
fondus avec les biens de la société , dans un partage
volontaire fait par une tutrice, et contraire môme aux
dispositions de la sentence qui l’ordonnoit.
Les mineurs réclament aujourd’hui la réparation de
cette erreur.
On crie contr’eux u l’injustice; et pour prouver que
l ’on a raison , on emploie des fins de non-recevoir y
comme si des fins de non-recevoir étoient'les moyens
ordinaires de la cause la plus juste.
- On les appelle de jeunes ambitieux , sans réfléchir
que l’ambition, ou plutôt la cupidité, consiste moins à
�X 3 )
réclamer ce qui nous appartient, qu’à vouloir retenir
ce qui ne nous appartient pas.
On les traite môme de jeunes effervescens, en oubliant
que dès l’instant où ils furent éclairés sur leurs droits,
par des jurisconsultes recommandables, ils présentèrent
avec autant de calme que de loyauté, leurs consultations
à leurs adversaires; ils les invitèrent à consulter euxmêmes, et à confier ensuite au silence du cabinet d’un
arbitre, les discussions qui pourroient s’élever entr’eux.
Enfin , l’on compare la société dissoute à la société
séculaire de la famille des Pinon.
Comparaison noble, sans doute, mais peu exacte;car
dans la famille Bourgade il n’avoit jamais été contracté
d’association avant celle de 1748 , qui n’a pas duré trente
ans.
C ’est ainsi que par des reproches hasardés et par des
exemples imposans, quoique mal choisis , les intimés
cherchent à prévenir les esprits et à distraire l’attention,
-en l’éloignant des idées simples que présente cette eause.
Ramener à ces idées simples, sera le but des appelans,
qui se proposent de faire vo ir,
Que des fins de non-recevoir ne peuvent arrêter les
réclamations d’un mineur dont les droits ont été méconnus
dans un partage fait avec sa tutrice^
■
* Que ce partage est un contrat synallagmatique, q u i,
étant anéanti pour certainsdes copartageans, nepeut$ul>
sister pour les autres ;
Qu’une société formée pour deux tetes seulement,
n’a pu, «ans une -clause expresse, s’étendre aux dix-huit
cnfans -des deux associés.
A 2
�L e 18 juin 1748, Antoine Bourgade et Hugues Bour
gade, 2e. du nom, son frère, formèrent par le contrat
de mariage de celui-ci une société universelle.
Ils y confondirent les dots de leurs femmes, quoiqu’elles
fussent inégales : la dot de la femme d’Antoine n’etoit
que de 5oo francs; celle de la femme de Hugues s’élevoit
à i , 5oo francs.
Il est essentiel de transcrire la clause constitutive de la
société , clause q u i, dans le mémoire des intimés, a été
copiée sur une expédition inexacte.
« A été aussi présent sieur Antoine Bourgade, frère
« dudit futur, aussi marchand, demeurant audit village
« de la D ardie, le q u el, de son gré et bonne volonté,
ce aussi-bien que ledit futur, de g ré , se sont associés,
« abutinés et accommunautés en tous biens meubles,
« immeubles, présens et à. venir, pour deux têtes et par
ti. tions égales y c o m p r i s les droits de leurs femmes, avec« pacte de succéder; et sera ladite association, ambula« toire du premier au dernier, comme frères germains. »
A la fin du contrat il est dit :
« Des autres clauses dont n’est fait mention en ces
« présentes, les parties ont déclaré vouloir se régir
« suivant la coutume d’Auvergne. »
A l’instant où la société fut contractée, les deux frères
avoient une s œ u r nommée Jeanne, qui n’étoit pas encore
entrée en religion : Jeanne auroit eu droit à la succes
sion de celui des associés qui seroit mort sans enfansj
,
�\ifit '
, c’est pour changer cet ordre d’héritiers naturels, qu’A n toine et Hugues, unis d’une affection plus particulière,
firent entr’eux une association avec pacte de succéder,
ambulatoire du premier au dernier, exprimant par là
leur intention que tous les biens de la société appar
tinssent au survivant des associés.
Mais le pacte de succéder est resté sans effet, parce
que chacun des associés devint le père d’une nombreuse
famille^ Antoine Bourgade eut neuf enfans, et Hugues
qui en avoit eu d i x , en conserva lui-même neuf.
La société prospéra ; elle fit diverses acquisitions. Ses
bénéfices, si l’on en croit les intimés, auroient été prin
cipalement dus à l’activité et. à l’industrie d’Antoine.
<Cette allégation n’est pas prouvée ; elle n’est pas même
-vraisemblable. L ’éducation plus soignée qu’avoit reçue
Hugues , devoit augmenter le x-essort de son industrie
naturelle, et rendre son association plus avantageuse à
Antoine.
Aussi les assertions des intimés sont-elles autant d’er
reurs.
Antoine n’avoit succédé ni au commerce, ni aux fermes
de son père ; car celui-ci n’avoit jamais été ni commer-çant, ni fermier.
Antoine n’a jamais fait un grand commerce de bestiaux.
Les gains de la société ont été produits par des en
treprises de fermes; et ces entreprises étoient conseillées
et dirigées par le plus instruit des deux associés. C’est
Hugues qui a réellement été l’artisan de la prospérité
commune.
Pendant la durée de la société, les deux frères unirent
*•
�entr’eux les aînés de leur famille. U n triple contrat de
mariage fut fait le 24 janvier 1771. Claude, 3e. du nom ,
Pétronille et Jacqueline, enfans d’Antoine, épousèrent
Jeanne, Claude 4«. et Gilbert, enfans de Hugues. Institués
héritiers universels par leurs pères et mères respectifs ,
les futurs époux furent chargés seulement de payer une
légitime de i , 5oo francs à leurs frères et sœurs.
Antoine Bourgade ne vécut pas long-temps après cette
•triple alliance; il décéda le 6 novembre 1773 , laissant
six de ses enfans en bas âge.
P ar ee décès, la société fut considérée comme dissoute.
La loi en prononçoit la dissolution, et l’équité n’exigeoit
pas qu’elle fût maintenue.
Une association de travaux et d’industrie ne pouvoit
subsister dès l’instant où les travaux et l’industrie avoient
cessé d’un côté. O r , il est évident que les six enfans
mineurs d’Antoine ne pou voient pas contribuer, par leurs
efforts, aux bénéfices communs; la foiblesse de leur âge
et les frais de leur éducation devoient, au contraire,
présenter des charges d’autant plus g ra n d e s , que leur
éducation n’a pas été négligée : les intimés Font reconnu
dans leur mémoire.
Les secours qui ont été nécessaires à Hugues Bour
gade pour ses travaux multipliés, il n’a pu les trouver
que dans ses propres enfans mâles, et dans Claude,
3e. du nom, son gendre; il seroit donc injuste que les enfans mineurs qu’avoit laissés Antoine, vinssent prendre
part û des gains auxquels ils n’ont pas concouru, et
qu’ils auraient plutôt diminués par leurs dépenses,
qu’augmentés par leur industrie.
�(7 )
Si Hugues Bourgade a perçu les revenus de leurs
portions légitimâmes, il leur en devra l a . restitution ; il
n’étoit pas chargé d’ailleurs de veiller à leurs intérêts ;
ils avoient une mère , Marie Decouzon, qui étoit leur,
tutrice naturelle , et qui devint leur tutrice judiciaire
par procès verbal du 19 mars 1777.
O n reproche à Hugues de n’avoir pas fait d’inven-,
taire au décès de son associé.
Mais il n’y étoit pas obligé. Cette formalité n’étoit
pas nécessaire en Auvergne pour la dissolution des
sociétés.
La probité même ne la commandoit pas. Marie D e couzon , veuve d’Antoine , connoissoit la situation de
la société à l’instant du décès de son mari.
D ’ailleurs, un registre d’administration, tenu exacte-,
ment par Hugues, présentoit un tableau j o u r n a l i e r et
fidèle de la société. C e registre a été confié, quelque temps,
avant le procès, au sieur Antoine Bourgade , que repré-sentent les intimés. On agissoit avec franchise , on ne
vouloit rien cacher.
L e registre a été depuis redemandé, mais inutilement/
Qu’on le représente, on y verra des états qui pourront
tenir lieu d’inventaire;, on y trouvera aussi la preuve
que Hugues Bourgade, après le décès d’Antoine, con-,
sidéroit comme dissoute la société qu’il avoit contractée^
avec c e lu i- c i, et que s’il' se croyoit a s s o c i é , .c’étoit ù.
Claude 30., son gendre, à Claude 4e. , et à Gilbert, ses,
deux fils aînés ; parce que tous les trois, partageant seuls
ses travaux, avoient, par leur ac ti vi té et leur industrie,
beaucoup accru se$ bénéfices.
r
t
\
�Hugues Bourgade a fait plusieurs acquisitions depuis
la dissolution de la société.
La première et la plus considérable eut lieu le 9 juin
1 7 7 5 . Hugues Bourgade et Claude 3e. du nom, acqui
rent conjointement le domaine de Laverchère, dont les
deux tiers devoient appartenir à Hugues, et le tiers à
Claude.
Sur 16,000 francs, prix de la vente, 6,000 francs furent
payés comptant, savoir, 4,000 francs par H ugues, et
2,000 francs par Claude ; le surplus fut stipulé paya
ble par termes annuels de 2,000 francs.
La longueur des termes pris pour le payement, in
dique assez que les acquéreurs comptoient moins sur
leurs ressources présentes que sur les ressources futures
que leur fourniroit leur industrie.
Claude, qui paya comptant 2,000 francs pour sa part
contributive, ne pouvoit les avoir pris sur les biens de
la société qu’il n’a voit jamais régie.
H u g u e s lu i-m ôm e av o it p u faire des économies de
puis la dissolution de la so c ié té , arrivée en 1 7 7 3 .
Les gains avoient augmenté par la réunion des efforts
du gendre et des deux fils aînés. Les dépenses, au con
traire, avoient diminué, quelles quesoient les allégations
multipliées que les intimés aient fait répandre dans leur
mémoire.
On est en effet étonné d’y lire, page 14, que Hugues 2e.
avoit fait des dépenses considérables,
P o u r son f ils , chanoine ¿1 T'hiers , tandis que ce fils
se mit en pension d’abord, et se fournit ensuite, à scs frais,
les provisions , l'ameublement, les prnemens qui lui
étoicut nécessaires;
�(9 )
P o u r un "procès sérieux q u i s'éleva daîis le chapitre,
tandis que ce procès, porté à l’ofücialité, s’arrangea sans
frais ;
•
■Pour le congé et Ventrée d*Antoine Bourgade dans
la communauté des génovéfms , tandis que toute la
famille sait que M . Montboissier, qui aimoit les Bour
gade, obtint un congé gratuit, et paya même les dé
penses du voyage ;
P o u r un prieuré à V o llo re, tandis qu’on n’ignore pas
que les sommes modiques qu’avança le père, lui furent
remboursées par le fils, devenu prieur, la première année
même de la jouissance d’un bénéfice de plus de 3,000 fr.
de revenu ;
Enfin, pour élever ses eirfans ou les établir, tandis
que l’éducation des enfans de Hugues 2e. étoit alors à peu
près achevée, et qu’il n’en a établi aucun depuis la mort
d’Antoine.
Mais c’est trop nous occuper de ces vaines assertions;
par celles que nous réfutons, que l’on juge des autres.
Le 13 décembre 1776, une septerée de terre fut aussi
acquise, moyennant 200 francs, par Hugues et Claude
Bourgade, et dans les mêmes proportions.
Il est vrai que le 7 avril 17 7 8 , Hugues Bourgade
acheta , tant pour lui que pour les enfans de son frère,
une moitié par indivis des propriétés que possédoit un
nommé Costes, dans le ténement de Bonetias.
On argumente de cette acquisition.
Comment prouvcroit-elle que la société eût continué
depuis le décès d’Antoine ? Il y est dit que défunt
Antoine étoit associé, mais non que ses enfans le fussent
B
�Cio)
eux-mêmes par continuation. Si Hugues acquit pour
ceux-ci comme pour lu i, c’est que le vendeur étoit débi
teur envers la société de Hugues et Antoine , et que
l’acquéreur se retint la dette sur le prix de la vente ;
c’est aussi, sans doute, parce qu’il lui restoit quelques
fonds communs, dont il eut la délicatesse de faire l’em
ploi au nom de tous.
A u reste, l’induction que tirent les intimés de cette
acquisition, est détruite non-seulement par les actes an
térieurs, mais aussi par un acte postérieur, du 12 janvier
1783, par lequel Hugues Bourgade acheta quelques hé
ritages en son nom seulement.
r
L ’année 1783 fut funeste à la famille Bourgade; elle
perdit pi’esque dans le même moment trois de ses mem
bres les plus précieux r Hugues, mort le 10 avril; Claude,
3e. du nom , son gendre, qui étoit décédé deux jours
auparavant, et G ilb e rt, son fils, qui mourut le 19 du
même mois.
D epuis, et pendant les années 17830! 1784, les biens
des deux branches restèrent indivis comme auparavant.
L ’action en partage fut formée le n octobre' 1784 ,
par Michel Bourgade, alors vicaire à Augerolles, et
qui depuis long-temps n’habitoit pas auprès de ses parens.
Cette action fut dirigée contre toutes les parties inté
ressées, parmi lesquelles étoient beaucoup démineurs, et
n o t a m m e n t contre Jeanne Boui’gade, veuve de Claude 3e.,
et tutrice des quatre enfans mineurs qu’il avoit laissés.
11 n’est pas inutile de se fixer sur les expressions de
l’exploit de demande.
Michel Bourgade expose d’abord qiCAntoine et IIu -
�( 11 )
gues Bourgade étoient communs en biens , chacun
pour moitié ,* qu’après le décès de Hugues j ses repré
s e n t a i s’étoient emparés de la totalité des biens, et en
disposoient à leur gré sans lui en donner aucune conlioissance, ce qui lu i donnoit lieu ci ne pouvoir plus en
tretenir la communauté de biens et jouissance com
mune , qui E X Ï S T O I T E N T R E L E SD IT S A N T O I N E E T
H ugues
Bourgade.
Ensuite, il conclut au partage de tous les biens mo
biliers et immobiliers qui étoient communs et joui$
indivis entre l e s d i t s A n t o i n e e t H u g u e s B o u r g a d e ,
pour lui en être délaissé sa portion afférente.
Telles sont les conclusions principales de l’exploit.
On voit qu’il y est question seulement des immeubles
communs et indivis entre les deux f r è r e s , et non'de
ceux qui avoient été acquis depuis la mort d’Antoine.
Il est vrai que dans la suite de ces conclusions, M i
chel , prétendant que deux des fils de Hugues s’étoient
emparés des clefs de la maison commune, demande qu’ils
soient tenus « de rapporter tous les titres papiers et
« documens, concernant les biens sujets au partage; tout
« le mobilier, o r, argent, billets et obligations qui'se
« sont trouvés au décès dudit Hugues Bourgade, »
Mais les expressions relatives au mobilier n’ajoutent
rien aux conclusions principales, restreintes aux seuls
immeubles conununs entre les deux frères.
Et pour le mobilier m êm e, ce sont les conclusions
principales que l’on d o it co n sid érer; les expressions
qui les suivent supposent seulement que le mobilier
B 2
�»‘ VV>
,,* i
existant au décès de H ugues, étoit considéré comme
représentant celui qu’avoit laissé Antoine.
11 n’est pas d’ailleurs question, dans l’exploit, de conti
nuation de com m unauté,* e t, loin même de demander
le partage d’une communauté continuée, l’on conclut,
ce qui en excluoit l’idée, à des restitutions de jouissances
suivant Vestimation q u i en seroit fa it e par experts.
La sentence rendue le i er. décembre 1784 , ordonne
aussi le partage de tous les biens mobiliers et immo
biliers q u i étoient communs et par indivis entre lesdits
A ntoine et Hugues B ourgade, et le rapport par deux
des fils de Hugues, de tout le mobilier, o r, argent,
billets , obligations qu i se soiit trouvés au décès dudit
Bourgade ( termes de la sentence ).
Telle est la sentence en exécution de laquelle il fut fait,
le 27 janvier 178 5, un partage à l’amiable, où figurent
deux tutrices et des mineurs émancipés, et lors duquel
tout annonce que les titres de famille et les droits res
pectifs des copartageans furent absolument inconnus.
O11 ne r a p p e l l e dans ce p a r t ag e ni les actes des acqui
sitions faites depuis le décès d’Antoine, ni môme un tes
tament du .29 août 17 6 1, par lequel un grand-oncle com
m un , Claude Bourgade,.prêtre, avoit légué le quart de
tous ses biens à Claude 3e., fils d’Antoine, et à Claude 4e,
fils de Hugues, ses petits-neveux.
Les biens acquis, les biens légués, furent confondus
par l’ignorance,’ dans la masse commune; et cette masse
q u i, d’après la'sentence , ne devoit comprendre que les
biens immobiliers qui avoient été communs entre A n -
t
�Πi 3 )
................................ I
toine et H ugues, se trouva composée, et de biens que
le pi’emier n’avoit jamais possédés, puisqu’ils n’avoient
été acquis que depuis son décès, et de biens même qui
n’avoient jamais appartenu ni à l’un ni à l’autre.
Il est v r a i,• et les intimés l’ont remarqué avec affecta
tion, que d’après le partage des rentes actives et passives,
qui fut fait le lendemain 26 janvier, les dettes passives ,
les pensions et entretien des eirfàns de la maison , qu i
\pourront être dûs jusqu’aujourd’h u i, est-il d it, devoient
être acquittés en commun, aux dépens de la récolte de
l ’année 1784, et des dettes actives-.
Mais si cela fut ainsi réglé , ce fut pour la'commo
dité du partage, et parce que l’actif et le passif mobilier
qui se trouvoient alors, parurent balancer celui qui avoit
existé à l’époque de la dissolution de la société ,! non
d’ciilleurs que l’on considérât la société comme ayant
existé jusqu’à ce moment..
La demande en partage même, par laquelle on avoit
conclu au rapport du mobilier seulement qui existoit au
décès de H ugues, la sentence qui condamnoit à rendre
compte des jouissances, suivant l’estimation qui en seroit
faite par des experts, tout prouve que la société étoit
considérée comme interrompue depuis long-temps.
Quelle qu’eût été, au reste, l’intention des copartageans,
on ne pouvoit blesser les intérêts des mineurs nombreux,
au nom desquels ce partage fut fait; leurs tutrices ne
pouvoient aliéner une partie de ce qui leur revenoit; le
partage, à leur égard, ne pouvoit être que provisionnel :
ils ont eu depuis, ils ont encore aujourd’hui le droit de
reclamer un partage définitif.
�( 14 )
Pendant l’exécution de ce partage provisoire, on re
connut une des erreurs qu’il renfermoit. Le testament
du 29 août 1761 fut découvert, et des conventions furent
faites, le 9 ventôse an 4> avec les légataires.
A la fin de ces conventions on ajoute : A u surplus,
le susdit partage recevra son exécution.
Ces expressions fournissent aux adversaires l’occasion
d ’argumenter; mais peuvent-ils les opposer à des mineurs
qui dans l’acte ne sont représentés que par une tutrice?
E t ceux même qui y sont personnellement parties,
ne pourroient-ils pas dire que cet acte sous seing privé
-est resté informe?
Il est dit fait décuple, et il n’en existe que deux doubles.
D ix personnes y sont en qualité,( et le double même
le plus en règle n’a que cinq signatures,
Louis Bourgade seul parmi les intimés, Hugues Bour
gade seul pai’mi les appelans, ont signé cet acte, qui
renferme cependant des conventions synallagmatiques,
et qui ne pouvant obliger les non signataires, ne doit
pas être considéré comme valable à l’égard des autres.
L e second double n’a que deux signatures.
On argumente encore d’un second acte du 4 germinal
an 4 , contenant une subdivision de lots.
On a vu avec surprise daus le dossier des adversaires
cet acte qui leur est étranger. On croit devoir se taire
■
sur la manière dont il leur est parvenu,
Mais quels moyens pourroient-ils y puiser? ils n’y
•sont pas partie; tout ce qui 0 été d it, tout ce qui a été
•fait hors leur présence, ne peut pas leur profiter, par
cela même que cela ne pourroit pas leur nuire,
�( 15 )
Cet acte, au reste, où figure encore une tutrice, a été
anéanti depuis entre ceux qui l’avoient fait.
Cependant, eu l’an n , les enfans de Claude 3e. et de
Jeanne Bourgade, tous devenus majeurs, et plus éclairés
sur leurs droits 1 formèrent, par cédule du 29 pluviôse,
une demande en partage définitif, en observant que le
partage de 1786 n’étoit pas valable, et en rappelant le
testament du 29 août 1 7 6 1 , et le contrat de l’acquisition
du domaine de Laverclière.
„ Toutes les parties intéressées comparurent au bureau
de p aix , le 3 ventôse an 11 ; plusieurs refusèrent de se
concilier; mais les enfans de Claude, 4«. du nom, comparoissant par Hugues Bourgade, l’un d’e u x , déclarèrent
qu’ils n’entendoient point contester la demande en par
tage.
f
Cette Antoinette Bourgade, qui étoit majeure, reconnoissoit alors la nécessité du partage qu’elle conteste
aujourd’hui.
L é 2 messidor an 1 1 , Antoinette Bourgade fut partie
contractante dans un acte de partage provisionnel, qui
fut fait entre les descendans de Hugues 2^ *
L e partage ne fut que provisionnel, parce que l’on re
connut que celui de 1785 reposoit sur une base inexacte.
Cepeudant, une procédure en partage définitif fut com
mencée.
■.
*
*
On a lu avec étonnement,' dans le mémoire des intimés,
que les appelans avoient, après des explications, aban
donné cette procédure, et payé les frais.
•Voilà encore une de ces a l l é g a t i o n s trop nombreuses,
hasardées par les i n t i m é s dans leur défense. Ils il’ignorent
�(16 )
pas cependant que si l’action en partage ne fut pas pour
suivie avec activité, des projets d’arrangement ou d’ar
bitrage en furent la seule cause.
Les demandeurs vouloient obtenir justice, et cepen
dant conserver dans leur famille une union que l’in
térêt n’anéantit que trop souvent.
C’est dans ce double but qu’ils proposèrent aux inti
més de s’en rapporter à des arbitres, en leur laissant
môme le choix des jurisconsultes.
Cette proposition qu’ils ont toujours faite, qu’ils re
nouvellent encore, on a feint pendant long-temps de
l ’accepter, en retardant toujours l’exécution du projet.
V oilà le seul motif de la suspension des poursuites.
D epuis, et le 12 août 1808, Antoinette Bourgade,
alors épouse de Louis 2e., forma contre Hugues et Claude
Bourgade, ses frères, la demande en partage des biens
de Claude, 4e. du nom , et de Jeanne Bourgade, père
et mère communs,
Ceux-ci répondirent qu’il falloit d’abord procéder ¿\
un partage général entre les descendans d’Antoine I er.
et ceux de Hugues 2*. ; ils observèrent que le partage
de 1786 n’étoit pas définitif.
L a justesse de cette observation fut sentie; et un ju
gement contradictoire, du 19 avril 1809, ordonna la
mise en cause de tous les représentans d’Antoine et de
Hugues.
■Les motifs de ce jugement méritent d’être connus.
fx Attendu qu’il n’existe aucun partage régulier et
ç< d éfin itif des biens d’Antoine et Hugues Bourgade ,
« aïeul et grand-oncle des parties ;
« Attendu
�( r7 )
*»
« Attendu qu’un partage, pour être régulier, doit se
« faire d’objets certains, dont la propriété est reconnue
« certaine et appartenir aux copartageans. »
C ’est en exécution de ce jugement, que plusieurs par
ties, et notamment les enfans de Claude 3e, , ont été
mis en cause.
L ’un de ceux-ci, nommé Claude Bourgade-Malaleuge,
à cause du nom de son épouse, et qui étoit cédataire
des droits de Jacqueline Bourgade, sa sœur, présenta
une requête, le 10 juin 1 8 1 1 , et demanda un partage
général, qui étoit indispensable pour attribuer à chacun
ce qui devoit lui appartenir.
Toutes les parties, si l’on en excepte quatre, qui sont
les intimés, adhérèrent aux conclusions de la requête.
On dut être étonné de voir parmi ceux qui y résistoient, les deux époux, Louis et Antoinette B o u r g a d e ,
avec qui ce partage général avoit été jugé indispensable,
par le jugement du 19 avril 1809.
Cependant les mêmes magistrats qui avoient déclaré le
nouveau partage nécessaire, ont refusé de l’ordonner,
par leur jugement définitif, du 6 février 18 12 , et ont
déclaré que la société avoit continué après le décès de
l’associé Antoine.
On ne rappellera pas les dispositions de ce jugement,
qui ont été détaillées dans le mémoire des intimés.
On se bornera à observer que les premiers juges, dans
leur propre système, auroient commis plusieurs erreurs
au préjudice de Claude Bourgade-MalaleuSe >
i ° . En considérant les intimés comme ayant droit à
la masse totale des biens compris au partage de 1 7 8 5 ,
C
�M
( 18 )
tandis qu’on devoit distraire de cette masse le quart des;
biens de Claude 1 er. , grand-oncle commun, qui, par
testament de 17 6 1, avoit légué ce quart à ses deux petitsneveux, Claude 3e. et Claude 4e.;
*
20. E11 se bornant à ordonner la vérification des lots
des intimés, afin d’attribuer à Claude Malaleuge, deux
dix-liuitièmes seulement de ce dont ces lots excéderoient
les dix trente-sixièmes de la masse totale, au lieu d’or
donner, comme il y avoit conclu, un nouveau partage,*
pour connoître si le mineur jouissoit de la totalité du
lot qu’il devoit avoir;
3°. En ne lui attribuant pas, du chef de M arie, sa
sœur, qu’il représentoit en partie , les mêmes droits qu’on
n’a pu lui refuser de son propre chef, et de celui de
Jacqueline Bourgade, son autre sœur.
• Ces remarques seront bientôt développées.
• Mais suivons d’abord les intimés dans leur discussion ¿
et examinons avec eux ,
i°. Si la demande en partage est recevable;
2 ° . S i elle est f o n d é e ;
3°. Quel pourroit être le sort des demandes incidentes
qu’ils ont eux-mêmes formées.
P r e m i è r e
q u e s t i o n
.
L a demande en partage est-elle recevable ?
Sur cette question, les intimés divisent les objections;
ils opposent la sentence de 1784, à Bourgade-Mulaleuge,,
et des acquiescemens aux autres demandeurs.
�( i9.)
fIS7
Divisons aussi les réponses.
La sentence, dit-on au sieur Bourgade-M alaleugey
a été signifiée à domicile; elle a été exécutée volontai
rement : c’est chose jugée.
Cette objection, employée devant les premiers juges,
n’a rpas fait fortune. Ils l’ont repoussée, sans l ’honorer
meine d’une réponse; ils ont pensé que Bourgade-Malaleuge avoit le droit de demander le partage, et c’est
par l’examen du fond seulement qu’ils ont jugé que ce
partage devoit comprendre les acquisitions faites depuis
le décès d’Antoine.
S’il étoit nécessaire aujourd’h u i, pour faire accueillir
la demande, d’écarter la sentence, on y parviendrait de
plusieurs manières.
L ’exécution volontaire ne seroit pas un obstacle; cette
exécution, émanée d’une tutrice, n’a pu nuire à ses pu
pilles. Une tutrice ne peut acquiescer, parce qu’elle ne
peut aliéner, et qu’un acquiescement relatif à des droits
immobiliers, est une aliénation. Il seroit inutile d’insisler
sur la preuve de cette vérité.
Quant à la signification faite au domicile de la tutrice,
en supposant qu’elle eût pu faire courir le délai contre
le mineur, à qui personnellement la sentence n’a jamais
été signifiée, on renverrait les intimés à l’examen de
l’original de l’exploit de signification ; ils y verraient que
l’huissier qui déclare s’être transporté au domicile d’en
viron douze personnes ayant des intérêts distincts, ne
fait mention que d’une seule copie laissée pour tous. J e
leur ai laissé co p ie, est-il dit.
*'
Et 1’on ne peut pas équivoquer sur cette mention.
C 2
�(
20
)
La preuve qu’il n’a été laissé qu’ une copie, résulter
i°. delà modicité des vacations de l’huissier, qu’il a fixées
lui-même à un franc, par une note qui pnroît avoir été
écrite de sa main sur l’original; 2°. de la mention diflé-.
rente qui se trouve dans un exploit posé quelques jours
après, par le même huissier, aux mêmes personnes, où
il a soin de dire qu’il a laissé copie à chacun d’eux.
Ce dernier exploit ne contient pas de signification de
la sentence, et même le parlant à . . . . . relatif à. JeanneBourgade , tutrice, est resté en blanc.
11 seroit superflu de rappeler les principes de procé
dure consacrés par plusieurs arrêts, et qui exigent quechaque partie, dont l’intérêt est distinct, reçoive une
copie particulière de l’acte de signification qu’on veut
lui opposer.
L ’on conçoit qu’une signification aussi irrégulière, ou
plutôt qui n’a janïais été faito, n’a pu faire courir contre'
des mineurs un délai fatal.
’ Ainsi l’opposition à la sentence, formée surabondam
ment devant les premiers juges, seroit encore recevable,.
si elle étoit nécessaire.
A u reste, cette opposition n’eût pas été nécessaire,
quand le dispositif de la sentence seroit même contraire
aux réclamations des appelanSé
• Autrefois un partage ordonné et fait avec une tutrice
ne pouvoit être que provisionnel, au moins à l’égard
des pupilles : la jurisprudence ancienne n’étoit pas dou
teuse sur cette vérité. On peut voir ce que dit M. Lebrun
sur cette question , liv. 4 , cliap. ier, ? no#
et suivans<.
• ‘ L a Cour impériale ( i re. chambre ) a appliqué ce
�c 2i )
ito
príncipe, le 18 messidor an 10, dans la cause des Malîet,
'
et a décidé qu’un, partage ordonné par plusieurs sen
tences, sur la demande d’une tutrice, fait d’après un
rapport d’experts, par un traité entre la tutrice et les
autres héritiers, et exécuté pendant vingt-sept ans de
majorité, n’a voit pas empêché le mineur de demander
un nouveau partage, parce que, disent deux des motifs
de l’arrêt, tout partage f a i t avec un mineur est essen
tiellement provisoire, et que Vaction du mineur dure
trente ans pour revenir contre un partage provisoire.
Il n’est- donc pas étonnant que l’objection illusoire,
tirée de cette sentence, n’ait pas même excité l’attention
des premiers juges.
Mais en proposant l’objection, a-t-on bien considéré
les dispositions de la sentence ?
Comment n’a-t-on pas vu que la comparaison de la
sentence au partage de 1785, étoit la plus forte critique
qu’on pût faire du partage?
C’est avec beaucoup d’art qu’on a rapproché certaines
expressions de l’exploit de demande, pour en conclure
que la sentence qui l’a voit suivi, déclaroit la société
continuée jusqu’au décès de Hugues.
Mais l’art doit céder à la vérité; et des inductions
forcées, quelqu’ingénieuses qu’elles soient, ne suffisent
pas pour créer le dispositif d’une sentence.
Les intimés ont eu la prudente précaution d’éviteude fixer l’attention sur les termes du dispositii.
Quels sont-ils donc ?
Les voici textuellement :
« Condamnons lesdits B o urgad e et Marie Decouzon x
..¿i
�0
( 22 )
a ès-dits noms et qualités, à venir à division et partage
« de tous les biens mobiliers et immobiliers , q u i
ce étaient communs et par indivis entre lesdits A n « toine et Hugues Bourgade , à reflet d’en être délaissé
« la portion afférente audit sieur demandeur ; et pour
ic y parvenir, etc. »
Cette disposition, qui est la principale de la sentence ,r
a-t-elle quelques traits à une continuation de commu
nauté ?
Peut-elle s’entendre d’immeubles acquis après le dé
cès d’Antoine ?
N ’est-il pas évident que les immeubles acquis depuis
ce décès, n’ont jamais été communs entre A ntoine et
Hugues ? et que, par conséquent, le partage n’en est pas
ordonné ?
Que les intimés s’égarent à leur gré dans leurs dis
sertations ; on les ramènera toujours à ces expressions
aussi simples que claires : Qui étoie?it communs et par
indivis entre lesdits A n toin e et Hugues ; et là viendront
se briser tous leurs raisonnemens.
D ’ailleurs, on demandera aux intimés : Quelle qualité
prend le demandeur dans l’exploit de 1785 ? quelles
qualités donne-t-il à ceux qu’il assigne?
Il prend seulement la qualité d’héritier de Hugues ;
il donne aux défendeurs la qualité seule d’héritiers de
Hugues ou d’Antoine,
Il ne se dit pas assoeié lui-même;
Il n’appelle pas les autres ses associés ou communs.
O r , s’il est de règle, en procédure, que les qualités
prises et données servent à déterminer la demande, com-
�( 23 )
ment pourra-t-on croire que Michel Bourgade, demon-*
d e u r, alors p rêtre, et depuis long-temps éloigné de la
famille Bourgade, ait entendu agir comme membre d’une
société continuée avec l u i , malgré son absence, et de
mander le partage de cette société?
i
Mais que demande réellement Michel Bourgade par les
conclusions de son exploit? car ce sont les conclusions
qui forment la demande, et non quelques expressions
vagues qui auroient été jetées dans un exposé peu
réfléchir
Il demande ce qu’on lui a accordé; le partage de tous
les biens mobiliers et immobiliers qui étoient communs
et jo u is indivis entre A ntoine et Hugues Bourgade.
Pas un mot d’ailleurs sur la continuation de la so
ciété ; pas une ligne de conclusions pour obtenir le par
tage de cette prétendue société continuée.
Comment donc le juge l’auroit-il ordonné ?
Pouvoit-il penser à ce qu’on ne lui demandoit pas ?
C’eût été beaucoup trop exiger de lu i, surtout dans
une sentence par défaut.
Que l’on cesse donc de parler de la demande en rap
port du mobilier, de l’or, de l’argent, des billets et des
obligations trouvés au décès de Hugues Bourgade.
Cette partie des conclusions peut se concilier avec la
première, en considérant le mobilier qui se trouvoitau
décès de Hugues , comme représentant celui qui existoit
au décès d’Antoine.
I>a demande sur cet ob jet, et le dispositif de la sen
tence, pourroient être justifiés jusqu'à un certain point
�( 24 )
par le défaut d’inventaire légal pour constater le mobi
lier existant au décès d’Antoine.
r Mais enfin, en prenant même à la lettre la sentence,
quant au mobilier, cela ne détruiroit pas ses dispositions,
quant aux immeubles.
Seulement, si elle avoit acquis la force de chose jugée,
il faudroit l’exécuter telle qu’elle est, c’est-à-dire, par
tager le mobilier existant au décès de Hugues, mais se
restreindre au partage des seuls immeubles qui étoient
communs et indivis entre Antoine et Hugues ,. c’est-àdire, que les deux frères possédoient au décès d’Antoine.
On voit donc combien est chimérique la fin de nonrecevoir opposée à Claude Bourgade-Malaleuge ; on voit
qu’il a encore le droit d’examiner si la société étoit dis
soute au décès d’A ntoine, et si les immeubles acquis
depuis doivent être compris dans le partage des biens de
cette société.
Si le sieur Bourgade-Malaleuge a ce droit, il l’a nonseulement de son chef, mais aussi du chef de Jacqueline
B o u r g a d e , sa s œ u r , d o n t il n acqui s la p o r t i o n hérédi
taire par acte du 13 juillet 1809, mais encore de celui
de M arie, son autre sœur, dont il est également cédataire partiel.
Nous disons du chef de Jacqueline ;
Car Jacqueline n’a jamais assisté personnellement aux
divers actes que l’on oppose; elle y a été seulement re
présentée par une tutrice, comme Bourgade-Malaleuge;
en sorte que les moyens de l’u n , sont également les
moyens de l’autre.
Les mêmes observations s’appliquent à Marie Bour-
�( i5 )
íé&
gade; c’est Jeanne Bourgade, sa mère et sa tutrice, qui
agissoit pour elle en 1785.
Marie Bourgade n’a pas signé les conventions du 9
ventôse an 4.
Et celles du 4 germinal an 4 , étrangères aux intimés,
faites en l’absence de plusieurs des parties intéressées,
ont été rétractées depuis, notamment par le partage
provisionnel, du 2 messidor an 11.
A in s i, trois des enfans de Claude Bourgade, 3C* du
n o m , peuvent demander un nouveau partage, sans avoir
à craindre aucune fin de non-recevoir.
L e quatrième enfant, Hugues Boui’gade-Chèze, comme
cédataire de moitié des droits de M arie, sa sœur, en
vertu d’ un acte postérieur aux approbations qu’on lui
oppose à lui-même, pourroit aussi, au moins au nom
de cette sœur, réclamer le nouveau partage.
Mais quels sont les actes d’approbation dont on ar
gumente contre lui?
Il étoit aussi mineur, et représenté seulement par sa
mère tutrice, dans le partage de 1785.
L ’acte du 4 germinal an 4 n’est pas fait avec les
intimés, et a été anéanti depuis long-temps.
Il ne reste donc que l’acte du 9 ventôse an 4 , qu’ou
puisse lui opposer , à cause des expressions qui y ont
été placées sans réflexion , et dans un instant où les
droits des parties ne leur étoient pas encore connus :
P o u r le surplus y le partage de 1785 aura sa pleine
et entière exécution.
Mais ces expressions dont on croît pouvoir tirer un
si grand p a rti, à qui appartient-il d’en argumenter ?
D
�• A ceiiï-là seuls sans cloute qui ont signé l’acte du 9
ventôse ; car si Hugues s’est o b lig é , ce n’est qu’envers-,
ceux qui s’obligeoient eux-mêmes à son égard.
O r , parmi les signataires de cet acte, il n’en est qu’un
que représentent deux seulement des intimés.
Ce signataire est Louis Bourgade, i er. du nom , pèrede Louis 2e. et d’Antoinette, mineure.
L a fin de n o n -i’ecevoir ne pourvoit donc pas être
invoquée au nom de tous les autres enfans ou deseendans d’Antoine, i er. du nom.
Mais des deux enfans même de Louis 1er. T l’un r
savoir Louis 2e. , ne seroit plus admissible à faire va
loir un tel moyen ; lui avec qui il a été jugé contradic
toirement dans lu cause actuelle, le 9 avril 1809, qu'il
iCexistait aucun partage régulier et définitif des biens
d'Antoine et Hugues Bourgade, aïeul et grand-oncle
communs des parties„
!
A in s i, de tous les intimés, Antoinette Bourgade,,
sœur de Louis 2 % paroîtroit la seule autorisée à résister
a la demande en nouveau ptavtage, relativement à HugueS'
Bourgade-Cheze.
La femme de Louis 2e. , Antoinette Bourgade, ne
pourvoit elle-même invoquer aucune fin de non-receçoir,
elle qui a consenti à un nouveau partage par le procès
verbal, du bureau de paix, du 3 ventôse an 1 1 ;
Elle qui a été partie aux conventions de messidor
au 11 , par lesquelles 1 irrégularité des anciens partages
fut reconnue ;
Elle, enfin, avec qui fut rendu le jugement.du 19 avril,,
dont nous venons de parler»
�( *7 )
La résistance qu’oppose aujourd’hui cette Antoinette,
est d’autant plus inconséquente, qu’elle combat évidem
ment ses propres intérêts; car le partage proposé lui
attribueroit dans les acquisitions faites depuis le décès
d’Antoine i cr. , une portion assez forte, dont la prive
le partage de 1785.
Quant aux Bourgade-Roche, autres appelons, comme
leur p è r e , Claude 4e., a été présent au partage de 1 ^8 5 ,
et qu’il étoit majeur, la fin de non-recevoir seroit plus
sérieuse, à leur égard, s’ils étoient les principaux de
mandeurs en partage.
E n core, comme nous l’avons déjà observé, cette fin
de non-recevoir ne pourroit-elle pas être opposée, ni
par Antoinette Bourgade, ni par Louis 2e. , son mari,
puisqu’il a été jugé avec l’un et l’autre, en 1809, que le
partage de 1785 n’étoit ni régulier, ni définitif.
M a is ce qui est décisif en faveu r des B o u r g a d e - R o c h e ,
c’est qu’ils ne sont point demandeurs directs , c’est qu’ils
n’ont fait qu’adhérer aux conclusions prises par Bonrgade-Malaleuge, et- lés-autres enfans de Claude 3e.,' qui
ont réclamé un nouveau partage.
Si ce nouveau partage, réclamé par des cohéritiers,
est indispensable, ainsi qu’on le démontrera bientôt, il
est certain que l’ancien partage étant anéanti pour quel
ques-uns des copartageons, doit l’étre pour tous.
L e partage est un contrat sÿnallagmatique, contenant
des obligations réciproques qui ne peuvent disparoître
pour les uns sans ôtre anéanties pour tous.
• C’est sur la foi de cette r é ci p r o c i t é d’engagemens que
D 2
�( *8 )
le contrat a élé formé : dès l’instant donc où le lien est
rompu d’ un cô té, il ne peut plus avoir de force de l’autre.
D e là il suit que si les B o u r g a d e - R o c h e , par l’effet du
partage gén éral, résultat nécessaire de la demande de
Bourgade-Malaleuge et Chèze, sont forcés de rapporter
à la masse des objets dont ils jouissent , alors le partage
de 1785, quilétoit leur titre, étant détruit à leur égard ,
disparoît en leur faveur comme contr’eux, et ils rentrent
dans tous leurs droits, par la même raison qu’ils perdroient les avantages que pourroit leur valoir l’ancien;
partage. *
;
Cette vérité est indiquée par la raison comme par les
principes élémentaires en matièi'e de contrats synallagmatiques. Toutes les fois que sur la demande d’un seul
cohéritier, il y a lieu à un nouveau partage général y
l ’ancien est annullé pour le tout. C’est ainsi qu’un par
tage
fait en l’absence d’un des cohéritiers est anéanti
O
pour tous les copartageans, lorsque l’absent reparoît et
réclame ses droits. ( V . D om at, lois civiles, 2e. partie,,
liv. I er. , titre 4 , sect. i re. , n°. i 5. )
A v o ir été absent, ou n’avoir pas été valablement re
présenté dans un acte de partage, n’est-ce pas la même
chose ?
Une tutrice, à qui la loi n’accorde que le droit d’ad
ministrer et non celui d’aliéner, ni par conséquent de
partager, ne représente pas valablement son pupille
dans un partage volontaire. Ce pupille, d’après la loi,,
n’est réellement pas partie dans l’acte de partage, et par
conséquent, si, sur ce m otif, il le fait anuuller, il doit
�( *9 )
en être comme dans le cas de l’absence d’un des cohé
ritiers, et le partage ne peut subsister pour aucun des
copartageans.
Les premiers juges n’ont éludé l’application de ces
principes , qu’en supposant que le sieur Bourgade-Malaleuge deniandoit moins un nouveau partage qu’un sup
plément de l o t , et qu’il ne réclainoit ce supplément que
contre les intimés.
'
.
Mais cette supposition est.une erreur. Boùrgade-Malaleuge demandoit un partage général, et contre tons les 1
cohéritiers, afin d’avoir, aux dépens de la masse totale,
le lot entier auquel il a droit; tandis que, d’après Je ju
gement dont est appel, il n’obtiendroit qu’une partie de
ce qui lui appartient.
i r i
i ! . n ir ■
’
Nous développerons bientôt cette erreur du jugement.
L ’arrêt du 5 thermidor an 12 est aussi sans apj)li-i
cation à la cause actuelle. Dans l’espèce qu’il jugea, la
demande du mineur n’obligeoit pas le majeur, dont la
réclamation fut rejetée, au rapport à la masse des objets
qu’il avoit reçus. En .un «mot, il ne s’agigsoit pas:d’un
partage général à refaire •*. tandis que, dansil’affaire' des
Bourgade, le partage général', et le rapport à la masse,,
par les Bourgade-Roche, des objets dont ils jouissent,
est une conséquence nécessaire de la réclamation de Bourgade-Malaleuge.
• _:vi;
O r , ils ne peuvent être astreints à ce rapport, sans»
rentrer dans tous leurs droits.
A in si, point de fin de n o n - r e c e v o i r , même à leur
égard.
Examinons donc la seconde question proposée. '
;
�( 3° )
S E C0 NDE
QUESTION.
;)
vLa demande est-elle fondée ?
« :
-
,-•/
...
,
!'
C ette question a îp ou r objet l ’exam en de la durée de
la société.
Elle seroit f ac il eme nt résolue, si l’on ne consultoitque les principes généraux’ de là matière \ abstraction
faite des termes particuliers dé la clause de la société. ' r
On connoît la maxime morte luniûs societas dissolçitur.
si) •
- Cette maxime ne souifroit pas d’exception dans le
droit romain, au moins relativement aux héritiers d’un
des associé^. Les héritiers ëtoient nécessairement exclus
de la société : Hœres socii m ei non'est socius meus ; et
la rigueur", à cet égard , étoit portée si lo in , qu’il n’étoit
pas même permis de stipuler que la société passeroit
aux descendans.XVoyézmne dissertation-de M. Chabrol,*
sur la question, 'tome i r p«ge ’5 i 5. ) •
1 l!
i. ‘
-'L’ A u v e rg n e étoit régie pat lés lois rom aines, dans
tout ce qui n’étoit pas réglé d’une manière-contraire
par son statut particulier.
Les sociétés 'universelles étoient aussi admises en A u - '
vergne; et dans cette province comme dans le droit é c rit,5
elles étoieqt dissoutes par la mort d’un'des associés.
Seulement, par une dérogation aux lois romaines,
il étoit permis de stipuler qu’ôlles passeroient aux des
cendais des associés. C’est ce que décident les articles %
et 3 du’ titre. i 5,
1
- ^
«
�( 3* )
Mais il falloit que-la stipulation fui expresse j sinon
l’on rentroit dans le droit commun, et la j mort d’un
des associés anéantissoit la société. L ’article 3 renferme
même sur ce point une disposition^textuelle.
1
Convaincus de cette v é r ité , lesl intimés ont cherché
à en éluder l’application > en 'argumentant d e la qualité
des parties, des termes de l’acte dè société, d elà conduite
de l’associé survivant.
*
’ • .■
?- . Suivons-les dans leur discussion ,r et:démontrons’j
Que la qualité deà partièâ'ne prouve rieri1;
! 1^
, Que les termes de l’acte sont contraires h leur systèm^
. Que la conduite des deux associés, cellé'memé de l^as1socié survivant , fait voir que l’on ne croyoit pas à la
continuation de la société. .
L a qualité des parties! ne prouve rien..
Les deux associés étoient frères, il- est vrai ; maisqu’importe! Ne sait-on pas que? c’étoit'ordinairement
entre les parens les plus' proches, que des associations
étoient formées. C’est dans le but de protéger ces réunions1
de parens, quelles rédacteurs d elà coutume y'onfc inséré
des règles sur les associations ;letcependant ils n’en 'dnt
pas moins exigé que la stipulation fut expresse , pou?
que la société fut transmise aux Üescéndans.
il ‘ : r,i
Les,termes de.l’acte, loin d’etre favorables aux Intimés,
ce présentent iV leurs efforts qu’un éeneil inévitable'.1 ‘
La société est stipulée* pour deux têtes ' cl portions?
égales, avec pacte de-succéder.......*. ladite association
ambulatoire du premier au dernier, com m efrères ger
m ains.
Fixons-nous sur ces expressions : P o u r deux têtes $
�lie
m yH
;
,
( 3“ )
elles repoussent toute idée de continuation de commu
nauté; c’est à deux, têtes seulement que la société est
restreinte : comment donc l’étendre à toutes les têtes qui
ont paru dans une nombreuse*descendance?
. Mais la fin de la clause paroît aux intimés de la plus
grande clarté en faveur de leur système.
. Ils y trouvent le mot am bulatoire, qui produit pour
eux un effet magique; ce mot, disent-ils, signifie néces
sairement que la s o ci ét é a é té transmise aux descendans.
Cherchons donc quelle peut-être la signification de ce
mot, et cherchons-la, cette signification, soit dans les lois,
soit dans les dictionnaires.
i La loi d’une province voisine ./de l’Auvergne a em
ployé le mot ambulatoire dans Un de ses articles. On
trouve cette expression dans l’article 215 de la coutume
du Bourbonnais.
Cet article autorisant les pères et mères à faire, pendant
leur vie, le partage de leurs biens entre leurs enfans,
ajoute : « E t est tel partage où division, ambulatoire et
_
^
«¡c r év o c a b le jusqu’au trépas du disposant. »
Que signifie donc, dans le langage des lois, le mot
ambulatoire ? Rien autre chose, si ce n’est que le pacte
auquel il s’applique est variable et révocable.
Et c’est aussi le sens que lui donne M . A u ro u x , dans
son commentaire sur l’article 215 , aux n°s. 25 et 2 7 , et
que lui donnoient avant lui D u rer et Menudel.
En adoptant cette, signification, le mot am bulatoire,
appliqué à une association faite avec pacte de succéder,
exprime que l’intention des contractans étoit que leur as
sociation fût variable et révocable, jusqu’à l’événement
du
�( 33 )
du pacte de succéder, jusqu’à ce que, par cet événe
ment, le dernier, le survivant des associés, eût recueilli
tous les Liens de la société, du premier au dernier,
est-il d it; en un m ot, jusqu’à la dissolution de la so
ciété.
L e sens indiqué par l’article 2 i5 de la coutume du
Bourbonnais, est aussi celui que les dictionnaires don
nent au mot ambulatoire.
Ambulatoire, disent-ils, signifie, qu i n'est pas j i x e ,
qu i est sujet à changer.
Une société ambulatoire avec pacte de succéder, doit
être considérée comme n’étant pas fix e , comme étant
sujette à changer, c’est-à-dire, à être révoquée, jusqu’à
ce que son sort soit fixé par la dissolution, ou par l’exécu
tion du pacte de succéder.
Mais en donnant, même avec les intimés, au mot
ambulatoire sa signification é ty m o lo g iq u e , en supposant
qu’une association entre deux personnes, avec pacte de
succéder y et ambulatoire du premier au dernier , doive,
comme ils l’ont dit, se promener de Vune à Vautre, en
qui veut dire passer de l’une à l’autre , qu’en résulteroit-il
de favorable aux intimés ?
Rien absolument !
L e pacte de succéder ne doit pas être séparé de la
convention que la société sera ambulatoire du premier
ait dernier.
O r , ce n’est qu’en les séparant que les intimés ont
raisonné, et qu’ils ont établi un système sans lequel, à
les entendre, la clause où sc trouve le mot ambulatoire
geroit vide de sens,
E
�Ç 34 ) #
»■Réunissons ces conventions ,qui sont réunies dans l’acte
môme, et dont l’une est l’explication de l’autre, et alorsr
tout devient clair, et d’une interprétation aussi facile que
naturelle.
Les deux frères établissent entre eux le pacte de suc
céder, et ils ajoutent en conséquence, et immédiatement,
que Vassociation sera ambulatoire du premier au
dernier, c’e s t - à - d i r e , qu’elle passera du premier au
dernier.
Que peut signifier cela, si ce n’est que tous les biensde la société passeront du prémourant au survivant, et
qu’alors l’association qui existoit auparavant sur deux
têtes , sera réunie sur une seule ?
.
M ais, disent les intimés, il ne peut y avoir de société,
sans deux associés au moins.
Cela est vrai; aussi la convention ne dit-elle pas,
comme le supposent les intimés, que l’association du
rera après la réunion, ce qui seroit absurde; elle dit
seulement que l’association sera ambulatoire jusqu’à l’é
vénement, du premier au dernier , est-il dit : c’est comme
si la clause portoit que l'association seroit ambulatoire
selon les chances de l’ordre du décès; que tous les biens
appartiendroient à Hugues, si Antoine mouroit le pre
mier sans enfans; et que, dans le cas contraire, Hugues
en deviendroit seul propriétaire.
Pour parer à l’absurdité qu’ils supposent, les intimés
raisonnent à leur manière, et donnent à la clause un sens
qui en détruiroit les termes.
« S i la société, disent-ils, doit durer avec le dernierT
« c’est-à-dire, avec le survivant, comme il faut néccs-
�« sairement deux têtes pour former ou soutenir une
« société, il s’ensuit qu’elle dure entre le survivant et
« les représentans du prédécédé. »
La conséquence seroit exacte ; mais la supposition
dont elle est déduite, le si est une erreur.
Cette erreur est signalée par les expressions de la
clause.
Si la société eût dû passer aux enfans du prédécédé,
on auroit dit ambulatoire du prémourant à ses enfans,
et non pas du premier au dernier des associés.
La société qui existoit déjà sur la tête de l’associé
survivant, pour sa portion personnelle , ne pouvoit
passer tout à la fois, pour l’autre portion, et sur sa tête,
et sur celle des enfans de l’autre associé ; et la clause,
en disant que l’association passeroit toute entière sur la
tête du dernier mourant, étoit évidemmeut étrangère
au cas où le prém ourant laisseroît des enfans; car sup
poser que des enfans viennent remplacer leur père ,
c’est empêcher que l’association ne soit ambulatoire du
premier au dernier, et qu’elle ne passe toute sur la tête
d u survivant. C’est donc détruire les termes même de
la convention.
A in s i, l’on voit que le mot am bulatoire, et la clause
où il se tro u v e , ne peuvent se prêter au système des
intimés.
L ’exemple qu’ ils puisent dans la sentence de septembre
1747, n’est pas applicable; et l’explication qu’ils en
donnent, n’est pas conforme à ce qu’en dit M . Chabrol.
(V o ye z tome 2 , page 5 17 .)
Il étoit dit dans la clause de société, qui fut interE 2
�I'
M
( 36 )
prêtée par la sentence , que la société serait ambula
toire de l'un ti Vautre, du premier au dernier, et que le
pacte de succéder auroit lie u , n o n o b s t a n t l a m o r t .
« On pensa , dit M . Chabrol, que les enfans étoient
« appelés à l’institution , et que ces expressions nonobs« tant la m o rt, ne pouvoient avoir d’aulre objet que
« (Rappeler les enfans qui survivx*oient. »
Ce fut donc sur ces expressions nonobstant la m orty
et non sur le mot am bulatoire, que se fixèrent les es
prits , pour pénétrer l’intention des contractons.
On pensa, et avec beaucoup de raison, sans doute,
que le pacte de succéder ayant lieu N O N O B S T A N T L A
M O R T , appeloit n éc essai re me n t les enfans du défunt;
car un mort ne peut succéder lui-même. Appelés à jouir
du pacte de succéder, les enfans étoient par cela seul
appelés aussi à l’association. Ces deux choses étoient in
divisibles, d’après la clause telle qu’elle est rapportée; le
pacte de succéder n’étant établi qu’à cause de l’associa
tion , et pour les associés seulement.
R e m a r q u o n s , au reste, que M . Chabrol ne dit pas:
que le mot ambulatoire eût été d’aucune considération'
pour la décision qu’il cite, et qu’il ne dit pas mem ece
qu’on jugea quant à l’association ; il ne parle que de l’effet
du pacte de succéder , pacte que l’on interpréta en
faveur des enfans.
Cet exemple ne peut donc etre d’aucun poids dans
la causç actuelle; et l’on doit convenir que les termes
de l’acte de la société qui nous occupe, d’une société
stipulée pour deux tètes seulement, sont très-peu pro
pres, sous quelque rapport qu’on les envisage, ù faire
�( 37 )
considérer la société comme s’étendant à tous les enfans
des associés contractans.
'
'
;>
La conduite des associés ’, avant ou depuis la mort
d’A n to in e , est loin d’indiquer que dans leur intention
la société eût dû continuer au décès de l’un deux.
Avant cette époque, en 1 7 7 1 , les deux associés se
réunissent pour faire une institution universelle, chacun
en faveur de trois‘de ses enians.
Les héritiers institués devoient , à ne consulter que
la volonté des inslituans, avoir la fortune entière dé leur
père, tant mobilière qu’immobilière; ils étoient chargés
seulement de payer une légitime pécuniairë aux autres
enfans.
O r , i°. si les deux frères Antoine et Hugues avoient
entendu contracter, tant pour eux que pour leurs enfans,
une association générale avec pacte de succéder, cette
convention fuite, surtout par contrat de mariage, ne
leur eût pas permis d’instituer quelques-uns de ces enfans
seulement, héritiers universels j tous leurs enfans, appelés
également par la convention, auroieut été saisis, d’ un
droit égal aux biens de la société. Les institutions d’iVé-j
ritiers auroieut donc été nulles.'
*f
Cependant on n’a pas pensé à les critiquer. Pourquoi?
Parce qu’on étoit convaincu que les pères avoient eu le
droit de les faire; paçce qu’on ne pouvoit se dissimuler
que l’association étoit limitée à Antoine et ù Hugues,
et s’étoit dissoute au décès du premier.
'
2°. On conviendra bien au moins que ces institutions
d’héritiers, grevées seulement d’une légitime pécuniaire
envers les autres enfans, annoncent une volouté bien pro-
�«I
f
t
C38)
noncée dans Antoine et dans Hugues, qu’après le décès
du premier, la société ne se continuât pas avec les légitimaires.
Gomment se fait-il donc que ce soit précisément ces
légitimaires qui prétendent avoir été appelés par l’in
tention de leur père à participer aux bénéfices d’une
prétendue continuation de c o m m u n a u t é ?
)
Ce qu’a fait Hugues, après le décès d’Antoine, n’est
susceptible ni de critique ni d’interprétation favorable
aux intimés.
,
S’il a acquis quelques héritages en-son nom et au nom
des enfans de son frère, on en a déjà expliqué les mo
tifs; et cette acquisition isolée ne prouve pas qu’il considéroit la société comme continuée.
Cette idée seroit écartée par trois autres acquisitions,
deux antérieures et l’autre postérieure ; les deux pre
mières , qu’il a faites conjointement avec Claude , son
gendre, et la dernière, où il stipule pour lui seul.
Nous avons déjà remarqué aussi qu’aucun devoir, ni
légal, ni m ê m e m oral, ne l’astreignoit à faire inven
taire, dans la circonstance surtout où Marie Decouzon,
mère des enfans d’A n to in e , étoit chargée par la l o i ,
comme par la nature, de veiller à leurs intérêts.
Cette dernière observation nous conduit à la discus
sion d’une autre objection présentée dans le mémoire.
On prétend que le défaut d’inventaire a opéré la
continuation de la société.
L ’objection n’est pas dangereuse ; et les articles de
coutumes, ou les autorités que l’on cite, ne peuvent pro*
du ire un grand effet.
«
�( 39 )
; Que les coûtâmes du Bourbonnais, du Nivernais, du
Berry, et de quelques autres provinces, exigeassent un
inventaire pour opérer la dissolution d’une communauté,
même après la mort d’un des communs, cela ne doit
pas étonner.
Ces coutumes reconnoissoient les communautés tacites?
formées par la cohabitation et la confusion des revenus.'
A plus forte raison devoient-elles considérer comme
continuées tacitement, les sociétés qui, d’abord stipulées
entre les premiers associés, conservoient entre leurs héri
tiers les mêmes caractères apparens.
Mais en Auvergne, où lesrsociétés'tacites n’étoientpas admises; en A u vergn e, où le statut déclaroit ex
pressément que les sociétés étoient dissoutes par le décès
d’un des associés; en A uvergn e, où la dissolution n’étoit
subordonnée à aucun inventaire, à aucune espèce d’acte
ni de formalité, les principes des autres coutumes n e ’
peuvent être sérieusement invoqués.
L ’associé survivant, qui a perçu les revenus communs,
ne peut être tenu.,que d’en rendre compte. Il rend par
là, aux héritiers du défunt, la justice qui leur est due;
et il seroit injuste de le soumettre lui-même à les faire
participer à des gains que ses travaux particuliers et son
industrie lui ont procurés. ( V o i r ce que dit M. Chabrol
sur l’article ier. du titre i 5 , pages 509, 5 n . )
r
La citation puisée dans le dictionnaire de Rousseaud-'
Lacom be, ne s’applique qu’aux pays où les;communautes
tacites sont reconnues; aussi l ’ a u t e u r c ite -t-il les cou
tumes du Bourbonnais, du Berry et du Nivernais.
L ’espèce t rai tée p a r M . H e n r y s n’a pas le moindre'
�( 40 )
rapport, et prëscntoit un bien plus haut degré de faveur;
c’étoit un tuteur qui plaidoit avec son pupille, iiis de
son associé.
>
M . Henrys remarque,
cc Que pendant l’administration, le tuteur ayant fait
« quelques acquisitions , il les auroit fait concevoir
« aussi-bien au nom de son mineur que du sien , et
« l’auroit de plus qualifié son associé et personnier ou
« consort ; ayant, le même tuteur, prêté quelques
« sommes de deniers, et baillé des bestiaux à titre de/
« cheptel ou de commande, il y auroit pareillement fait
« comprendre son mineur avec les mêmes qualités et
« dénominations. »
Aussi Bretonnier, dans ses observations sur l’opinion
de Henrys, s’exprime-t-il ainsi :
• « L ’auteur convient qu’il s’est déterminé par les cir« constances particulières de Taffaire; ainsi il n’en faut
« pas faire une décision générale. »
L ’objection, au reste, est d’autant plus foible, qu’elle
est opposée au x enfans de C la u d e , 3e. du n o m , aux
sieurs Bourgade-Malaleuge et Bourgade-Chèze.
O r , si dans certaines provinces l’associé survivant qui
ne faisoit pas inventaire en étoit puni par la continua
tion de la société, au moins est-il certain que les enfans
du prédécédé avoient le choix d’accepter cette conti
nuation ou d’y renoncer.
« La communauté se continue entre le survivant et
« les enfans, si bon leur semble, dit l’article 290 de la
k coutume du Bourbonnais ; et telle est la disposition
f< des coutumes de Paris, du M aine, du Poitou, etc, »
Ainsi
�( 4* ) '
Ainsi l’objection Manqueroit Sôô but* relativement
aux enfans de Claude Bourgade, 3e. du faora; et ce sont
les principaux dëftiandeui^s.
La discussion des divers moyens dértiontre que là so
ciété des deüx frères, Antoine et Hugues ^ a été dissoute
<àu dëéès du premier; .
0 ,Qüé lëà acquisitions faites par'Hujgiïeâ et par Claude»
conjointement ou séparément j ne doivent pas être com
mises daüs lé partagé de là société ;
'*■Qu’aibsî lé partagé dé ï ÿ 85 tep&së sur uûé bàse éssecf-*
tiélleiiiént faussé;
- : » ¡V.
Q ue, par conséquent, il ést itidispénsable ¿ ’ordonne*
un nouveau partage géhéral.
Ce nouveau partage obligera les copartageans, qui
<étoièftt majeurs en 178Ô, & rapporter tout Gè qu’ils ont
reçu ; ils doivent donc aussi rentrer dans tous leurs droits.
C’est aùx domptés et aux liquidations qui seront faits
lors du partage, que l’on doit renvoyer la’ discussion deà
demandes incidentes des ititirrtès.
A u resté j que peùveûti ils detnandér?
" La restitution dés jouissances depuis le décèà ; ."t:
L e rapport du mobiliéf de la société. ' j Ùj , n
Cës deux objets Set ont Une suite nécessaire du partage,
parce que chacun ràpportéra à la masse tout ce que luimême ou ceux qu’il rfeptéserité auront feçu*
. r
i
.
1'
T."
‘ Q & É S ï ï ô S r â â*üBBiD iÂin.E8.
En adoptant môftié, quant au* principes* la décision
des prem ier jugés, l’application qu’il& ea ont faite ren*
F
�_
( 4 0
_
fermeroit plusieurs erreurs préjudiciables au sieur Bourgade-Malaleuge.
Première erreur. La portion des intimés, dans la masse
totale des biens de la société, étoit de dix trente-sixièmes j
les premiers juges l’ont dit ainsi atvec raison.
Mais ils ont considéré cette masse comme devant, être
la même que celle qui fut composée pour le partage
du 28 janvier 1786; et c’est en cela qu’ils se sont trompés.
Car on devoit distraire de cette masse le quart des biens
de Claude I er. , grand-onclé;cQmmun, que celui-ci, par
son testament du 29 août 17 6 1 , avoit légué à Claude 3^
et à Claude 4e., ses petits-neVeux. Ce quart ne faisoit
pas partie des biens de la société.
'
Ce n’est donc qu’après la distraction du quart légué,,
que les intimés auroient droit à dix trente-sixièmes de
la masse générale. '
{v
. Seconde erreur. Les droits du sieur Bourgade-M alaleuge se composoient,
i° . De deux trente-sixièmes, ou d’un dix-huitième
dans la masse des biens de la société , de son propre chef;
20. D ’une pareille quotité, du chef de Jacqueline, sa
sœ ur, dont il est le cédataire ; !
30. D ’un trente-sixième du chef de M arie , son autre
sœur, qui lui a cédé la moitié de ses droits;
40. Enfin, de sa portion, tant de son chef que de celui
de ses deux sœurs, dans le quart légué par le grandoncle : cette portion consiste dans les cinq seizièmes de
<1
ce quart.
- Les premiers juges ont méconnu ses droits aux troi
sième et quatrième articles j ils ne l’ont considéré que
�( 43 )
.1«»
Comme saisi de deux dix-huitièmes de la masse, l ’un
de son chef, l’autre du chef de Jacqueline; ils l’ont
ainsi p rivé , et de sa portion dans le quart légué ? et de
l ’excédant de lot, qu’il pourroit avoir à réclamer du chef
de Marie Bourgade.
• Troisième erreur. L e sieur Bourgade-Malaleuge, pour
obtenir la juste portion qu’il demandoit, avoit conclu
à un nouveau partage ; et sa requête avoit été signifiée
non-seulement aux autres intimés, mais à toutes les
autres parties.
. Dans ses conclusions, le sieur Bourgade avoit consenti,
pour la commodité du partage, à ce qu’on fît des lots
d’attribution.
Cela a fourni aux premiers juges un motif pour
éluder la demande en partage ; ils ont cru suppléer au
partage qui étoit nécessaire, en ordonnant d’abord, non
pas la vérification du lot de Bourgade-Malaleuge, pour
savoir s’il possédoit tout ce qui lui appartenoit, mais
seulement la vérification des lots des intimés, pour savoir
s’ils étoient plus forts qu’ils ne devoient être ; en ordon
nant eusuite, s’il y avoit excès dans les lots des intimés,
que ceux-ci abandonnassent non l’excédant entier, mais
seulement deux dix-huitièmes de cet excédant, au sieur
Bourgade-Malaleuge. '
Que produira cette opération ?
Rien de satisfaisant,
■ >
j
.. Bourgade-Malaleuge ne doit rien perdre de son lot.
Et cependant, d’un côté, si l’on ne lui accorde que les
deux dix-huitièmes de ce dont le lot des intimés excé
dera ce qui leur revient réellement ? il pourra se faire que
I
�( 44 )
ces deüx dix-huitièmes ne complètent pas le lot (Jüi doit.
lui appartenir.
D ’un autre côté, s’il n’y a aücun excédaut, BourgâdeMalaleuge ne recevra rien.
Et comment, dans ces deux cas, Connüîtra-t-on s’il a
tout ce qu’il doit a vo ir, puisque le jugement n’ordonne
pas même la vérification de son lot.
Il est évident que la vérification ordonnée n’est pas
celle qui devoit l’être, et qu’on devoit former le lot
de Bourgade - Malaleuge aux dépens de la masse entière,
en ordonnant, par conséquent, un nouveau partage,
sauf à faire échoir au lot de chacun ce qu’il possède
déjà. D e cette manière,- les intérêts de totls auroient
été ménagés.
4°. Les premiers juges ont aussi erré relativement
au siéur. Boürgade-Chèze, q u i, en supposant qu’il eût
fait des approbations dé son ch e f, aVoit acquiâ la moitié
des droits de M arie, sa sœur, k qui On ne pouvoit
pas opposer de fin de bon-recevoir.
O n auroit donc dû L’admettre au partagé , du chef
de celle-ci, et lui accorder un trente-sixième de la massé
totale, e t, de plus, une portion daüs les biens légués
par le grand-oncle.
Des erreurs aussi nombreuses obligeroietit de réformer
le jugement, en supposant même que la soôiété eût con
tinué après le décès d’Antoine.
Mais ces erreurs secondaires disparoïtrotit avec l’étreur
principale, relative à la coiïtinuatioti de la communauté.
La société avüit été dissoute au décès du premier as
socié : la loi en prononçôit la dissolution; les termes dé
�■ • < ( 45 )
‘
l’acte ne s’y opposoient pas ; et elle étoit indiquée par
l’intention qu’avoient manifestée les deux assossiés, en
instituant en 1 7 7 1 , des héritiers universels.
Les appelans ont donc eu le droit de réclamer un
nouveau partage, et de demander que dans la masse ne
fussent compris, ni les biens acquis depuis le décès d’A n
toine, ni les biens légués par Claude, grand-oncle.
La morale ne peut être offensée par une action que
la loi protège.
Les considérations ne peuvent être pour ceux qui,
par des fins de non-recevoir, veulent retenir ce qui ne
leur appartient pas ;
E t ceux dont les réclamations sont justes, n’ont à redouter, ni l’œil sévère du public, ni l’œil pénétrant des
magistrats.
Pleins de confiance dans la justice de leur cause, les
appelans attendront avec respect l ’arrêt d’une C o u r su
prêm e, destinée à rectifier les décisions des premiers
juges.
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
A RIOM, de l' imp, de THIBAUD, imprim de la Cour impériale et libraire,
rue des Taules, maison LANDRIOT. — Novembre 1812«
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bourgade-Chèze, Hugues. 1812]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
société universelle
coutume d'Auvergne
partage
communautés familiales
société ambulatoire
communautés tacites
coutume du Bourbonnais
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Hugues Bourgade-Chèze, habitant à Vollore ; Claude Bourgade-Malaleuge, habitant à la Dardie, commune de Vollore ; Claude et Hugues Bourgade-Roche, appelans ; contre Antoinette Bourgade, et Louis Bourgade, son mari, Marguerite Decouzon, veuve d'autre Louis Bourgade, tous habitant au lieu du Buisson, commune de Vollore-Ville ; et Michel Bourgade, prêtre, desservant la succursale de Vollore-Ville, intimés ; en présence de Claude Bourgade, prêtre, curé de Cusset ; d'Antoine Bourgade, ex-génovéfin ; de Jeanne Bourgade, veuve de Claude ; et de Marin Bourgade, propriétaire, tous habitans de la commune de Vollore.
arbre généalogique
note manuscrite : « arrêt jugement confirmé par arrêt du 11 xbre 1812. voir les motifs à la fin du mémoire et voir journal des audiences, 1813, p. 78. » « Ce mémoire aurait dû être présenté le second. »
Table Godemel : société : 7. en coutume d’Auvergne, et dans un contrat de société universelle entre deux frères, la clause qu’elle sera ambulatoire du premier au dernier comme frère germain, signifie qu’après la mort de l’un des associés, l’associé survivant est libre de révoquer la société ou de la continuer avec les descendants de l’autre ; mais s’il ne la révoque pas expressément, la société continue avec les descendants pour la portion qu’y avait le défunt.
arbre généalogique
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1812
1748-1812
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2206
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2207
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53435/BCU_Factums_G2206.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vollore-Ville (63469)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
communautés familiales
communautés tacites
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
partage
société ambulatoire
société universelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53297/BCU_Factums_G1623.pdf
5eb393156c7ae40667eb887f427c39d5
PDF Text
Text
P R É C I S
POU R
Jean -A n d re B R U N E L ,
prêtre, vicaire de
C h au d e s-A igu e s, en qualité d’héritier bénéfi
ciaire de J ea n , son p ère, appelant d 'un juge
ment rendu au tribunal civil du P u y , le 22,
ventôse an 1 2
CONTRE
E X P E R T O N fille majeure,
habitante de la ville du Puy intimée.
T o u ssa in te
L
,
’ o r d r e social et les mœurs sont intéressés dans cette
cause ; cette circonstance la rend importante et digne de
l’attention de la justice.
Une fille qui n’a point respecté l’honnêteté publique
qui a eu une même demeure, une cohabitation scandaA
�leuse avec un homme marié ; qui a passé avec lui un
contrat de mariage avant qu’il eût fait rompre ses pre
miers nœuds ; qui l’a épousé quatre heures après la pro
nonciation de son divorce avec sa femme légitime : cette
fille étoit-elle de bonne foi en l’épousant? doit-on lui
restituer la dot qu’elle s’est fait reconnoître ?
L e tribunal civil du Puy a jugé l’affirmative. L ’appelant
demande que le jugement soit infirm é, que la cour annulle
la quittance de dot et la reconnoissance postérieure, comme
simulées et frauduleuses, épuisant tout le patrimoine de
son père pour le faire passer à sa concubine.
Un exposé sincère de la conduite de l’intim ée, et les
principes qu’on y appliquera, lui enleveront la libéralité
dont elle est indigne, et qui n’est due qu’à la vertu.
F A I T
S.
Toussainte E xperton, intim ée, est fille d’un pauvre
charpentier de la ville du Puy. Des idées de plaisir et
de liberté lui firent abandonner de bonne heure la maison
paternelle. D e ce moment, elle n’eut que des affections
malhonnêtes; toute la ville du Puy a retenti de ses avantures galantes, de sa débauche avec un nommé D ****,
perruquier, dont elle a eu un enfant.
L e hasard ayant conduit chez elle Jean Brunei, père
de l’appelant, cette fille, consommée dans l’art de séduire,
l’attira par ses caresses, et lui inspira une passion dont
il ne put se défendre.
Aveuglé par cette passion , Jean Brunei réalise une
partie de sa fortune, quitte le séjour de M onlet, lieu de
�( 3)
70/
son origine, abandonne son épouse, et va au Puy faire
un mêrae ménage avec Toussainte Experton. .
Alarmée de cette connoissance, sa famille emploie
inutilement les remontrances, les sollicitations pour l’en
détacher; il n’écoute rien. On conseille à son épouse de
provoquer une demande en divorce, pour cause d’incom
patibilité d’humeur : elle l’entame et ne la suit point.
Toussainte Experton, s’apercevant des suites qui ré
sultaient de sa cohabitation avec Jean Brunei, conçoit le
projet de le faire divorcer pour l’épouser après.
Elle commence par lui faire signer un contrat de ma
riage dans lequel il reconnoît avoir reçu d’elle, ci-devant,
et à son contentement, une somme de douze mille liv.
Après cette clause, vient une donation réciproque de
tous leurs biens, pour le dernier mourant en jo u ir en
toute propriété et fr u its .
Ce contrat est du 27 vendémiaii’e an 3.
L a publication de mariage, du lendemain 28.
Le 29, on appelle chez un notaire quatre citoyens de
la ville du P u y , pour déclarer que Jean B runei, leur
voisin, habite cette ville depuis environ trois ans, et qu’il
y a vécu seul et sans fem m e.
A vec cette déclaration, Jean Brunei se présente à la
municipalité, le 2 brumaire suivant, et requiert l’officier
civil de prononcer son divorce , sur le motif cinq dé
terminé dans l’article 4 du §. i^r. de la loi du 20 sep
tembre 1792 , qui est l’abandon de la femme par le mari,
ou du mari par la femme.
Pour obtenir le divorce sur ce m otif, l’article 18 du
g. 2 de la même loi prescrit de se pourvoir devant d o s
A 2
�( 4)
arbitres de fam ille, en la forme indiquée dans le code de l’or
dre judiciaire, pour les contestations d’entre mari et femme.
Jean Brunei n’avoit pas rempli cette form alité; mais
l’officier civil ne s’arrête point à ce défaut, il prononce
le divorce de Jean Brunei avec Marie-Jeanne Reboul
à onze heures du matin ; à trois heures après m id i, il
l’unit en mariage avec Toussainte E xperton, qui accoucha
quatre ou cinq mois après.
Cette fille s’est fait consentir pendant le mariage deux
reconnoissances ; l’une de la somme de 300 liv ., l’autre
du mobilier et des ustensiles qui garnissoient sa chambx*e.
Jean Brunei est décédé le 14 pluviôse an 9. Toussainte
Experton a commencé par expolier sa succession ; ensuite
elle a formé demande en restitution de la dot qui lui a
été reconnue.
,
L ’appelant lui a opposé son indignité résultante du
concubinage dans lequel elle a vécu avec son p è r e , la
simulation de la reconnoissance de 12000livres, prouvée
par les termes dont on s’est servi pour en exprimer le
prétendu payement ; il en a demandé la n u llité, ainsi
que du d ivorce, du second m ariage, du don mutuel
stipulé dans leur contrat, et des deux reconnoissances
postérieures.
Sur ces demandes respectives, le tribunal civil du Puy
a rendu un jugement qui déclare nuls le divorce de Jenn
Brunei avec Marie-Jeanne R eboul, son second mariage
avec Toussainte E xperton, le don mutuel et la reconnois
sance des meubles.
M iis attendu ce qui résulte tant du contrat de mariage
de l’intimée que de la reconnoissance de 300 livres en
�ï o S
(S >
numéraire ; condamne l’appelant, eiÿ.sa qualité, d’héritier
bénéficiaire.de sou père, à rendre et rembourser à Toussainte.) Experton la somme'de 12000. livres d’une part,
suivant la réduction d’après l’échelle, celle de 300 livres
d’autre , sans réduction, à la charge par elle de rendre
le mobilier énoncé dans l’inventaire qui en a été fait,
ou d’en compenser le montant jusqu’à due concurrence, etc.
Les premiers juges ont motive cette condamnation sur ce
que le père de l’appelant paroissoit avoir abusé de k
crédulité de l’intim ée, en s’annonçant r dans leur con
trat de mariage, comme libre et majeur j
Sur ce qu’il l’avoit trompée en lui laissant ignorer les
empêchemens qui devoient rendre nulle l’union qu’il se
proposoit de contracter avec elle;;).
• .v
Sur ce qu’elle a voit été induite en erreur sur lj£tat dù
Jean Brunei , par une note écrite au dos de la citation
que lui avoit fait donner Marie-Jeanne R eb ou l, sa pre
mière femme.
Cette noie est ainsi conçue ; . .
« L e citoyen Brunei, depuis’plus de trots~âns~fiaTn tà111
» de cette commune du Puy , a paru suivant la citation
» ci-dessus, et a déclaré n’avoir ni titre , ni avoir passé
» aucun acte qui puisse prouver qu'il a été m atic
»"devant aucun notaire. La citoyejnne Reboul a paru
« le 29 ventôse,.et a déclaré de même n’avoir passé an» cun acte devantaucun notaire, qui puisse prouver qu’elle
» étoit mariée avec .le citoyen Brunei : les parties ren» voyées libres , et le divorce n’ayant pas lieu ,.en pré« sence de Matthieu Bertrand., maire , du citoyen M ich e,
« et de Berlioux , oilicier municipal j ainsi ù;Toi’iginul. »
A 3
�:p 4
* .< & •
(« )
* L e fils de’ Jean -Brunei ést appelant rde ce jugement \
quant au ‘chef qui le condamne à rembourser à l’intimée
la dot qu’elle s’est fait reconnoitre avant et après son
mariage.c
:u Jouir'î
iui;v 1:
' ^ ol.
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i-v
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M-'i -
. t/ i'n n
M O Y E N S. •*»•. ' v/hu--
<
(
Trois questions se présentent, et doivent être discutées
séparém ent.':!r,7,; 1
:rtrn '> »crqi. i
> mûr ol
‘ ■i®. L ’intimée à-t-elle vécu en concubinage avec Jean
Brunei?
■
: ^2 °. A v o it - e lle , avant de l’épouser, connoissance de
son premier m ariage?
;l
1 f‘
3°. D oit-on considérer comme simulées et’frauduleuses
la quittance de dot et lai reconnoissance postérieure ?
Il I
P
r e m i è r e
q u k s t i o
N:
L e concubinage est certain. ' M *' ■
' 11
^',n
^
Il est de notoriété dans la ville du Puy que Toussainte Ekperton et Jean Brunei ont i habité ensemble
avant' leur mariage : ce >fait, articulé devant les premiers
juges, n’a pas été désavoué ; et c’est la raison qui en a
Jfait faire mention dans l’exposé des faits q u i précèdent
“les m o t i f s du jugement dont est appel. ' '
Ü n e cohabitation aussi publique , et qui avoit causé
du scandale , mérite sans doute le nom odieux de con
cubinage.
IJné dernière preuve1,ts’il en falloit* encore, c’est la
'grosséàsè 'de Toussàinte Experton ;>avant son mariage.
�( 7)
Après cela , on ne doit plus doüter du ' mauvais àoifc+‘
merce que l’appelant lui oppose.- '1 ! - : : 1
ru, J.
:u. :
•
:'.r
f ,
Si E
^ «rj ) • • i r n r m Ji i r. vy’; . i M ' - v
vIj •'
C O N D E/<Î Q' t f - ErS T I O NT. 01'1 Hi’ ‘ j i , ‘ c a q
. Jdi;.ioq : ,10;:
Toussainte Experton conn8'iss6it le, premier mariage
de Jean B ru n ei, avant qu’elle l’é p o u s â t . 11
Jean Brunei et Marie-Jeaiine< Reboùl étoiërit: connu.«,,
dans la ville d u P u y -pour mari çt fémmô'v ité y ‘H^enoient assez; fréquemment poTur un- coïnmêi'CeJ'dé ttën-*
telles que faisoit la femm e, ou'pour y voir'sa'>sϟir qu i
y est'établie. Leur uiiion h’a;pu!être ignoi'ée de iT ous
sainte E xpertoh.:)' f.'.vi: -:3£>0‘m : ■!•(;!' . . ■
. 1 i
Diroit-elle , comme les! premiers juges^ qu’eHé')a été
trompée par la noter 'écrite au dos ü e 'la 'citatîdi* domi
née à Jean Brunei à la'requête de’ Marie-Jéànnë Réboûl ?
On lui répondroit que cette note devoit plutôt l’éclairer que : l’induire en -erreu r, puisqu’elle lui'apprenoit:
que si M arie-JeanneoReboul n’étoit pas l’épouse'de Jean
B ru n ei, du moins elle prétendoit,l’être;-G’dil’ éfoif :a'ssez
pourVqùé Toussainte- Experton dût prendre:des infor
mations ¿urr l’état de celui qu’elle’devoit époüsCr; elle
pouvoit s’en procurer facilement,:en s’adressant à ia sœiii*
de Marie-Jeânne R eb o ü l, à la •,rimnicip:a litéy ou au jugé
de paix du canton de M onlet $‘¡qui' in’est éloigné de1 làville du Puy que de quatre petites lieSufcs. pt ;r - v eiljr
Que Toussainte E xperton :eût été trompée par <iette
note , quoiqu'elle *n’eût aucun c a r a c t è r e d’authenticité ,
et qu’elle né .présentât qu’une déclaration ridicule ; quoi-J’
A 4
�. ( 8 )
q.u on ue put ciïr induire autre chose , si ce n’est què
Jean Brunei et Marie-Jeanne Rëboul n’a voien t point
passé cîe contrat par-devant notaire ( ce qui n’empêclioit
pas qu’ils ne, fussent unis en légitime mariage ) , la chose
seroit possible.
o'Mais que les juges du Puy s’en soient servis pour en
Taire un des"motifs de leur jugem ent, cela ne se conçoit
pa&;/d’iiiUant qu’ils '«avoient, £our se garantir de cette
faute y Jd certitude que Toussainte Exportons avant, dé
slit nfy b ;-Jpai%rBrunei r*;p.v.oi t . e u con noissance, de.,son d iMpree; avec Mârie-JeanneiJReboul.
- Cer'divorce détruisoit tout-l’effet de la>.note ; d’ailleurs»
l’absence des signatures nécessaires pour la faire ^présu
mer véritabj^ en dém oritiwtj la fausseté.
iioi^
_{Xia qualification,de.//¿re donnée à Jeun ‘B ru n ei, étant»
insolite dans les contrats' de m ariage, devoit inspirer à
Toussainte Experton plus de défiance que de sécurité •
ellç^a^di^vpir ,;dans ,çétte mention /extraordinaire , .unepryoautipajpy.udtmmçiit' ménagée pour mettre' le ,Notaire.
à ;.çq^vp)*t, de/tputq rpçpôn&abilité; '¡if-. , ,:ii ;,o , >
■
t.;Mais quand, on supposeroit que' cette fille d'été réelle-ment induite en erreur, y et fondée croire que Jean Bnrnql ,étoit'libre , sron crvcuii‘a,,dû .cëssciri& l’instant où l’oir,
ficipv civil .lui a;;ii|itileptui^j de l’acte 'de dissolution du
mariage de pet hpmmejayeciMàrierJeîmnc R e b o u l, de
puis quelques heures seiil.ejn.ient. i:
>
Apri\s la lecture de cet
, une fille qui auroit eu
de l’honnctç.té et des moeurs^ devoit renoncer à ;s’unir à
Jean Brunei',.et provoquer confi e lui lu sévérité des lo is,
�69 0 :
pour s’être permis de faire publier leur mariage ? de lui
en faire passer le contrat, quand il étoit encore retenu
dans les liens d’un premier engagement.
Il n’appartenoit qu’à une fille débauchée de prendre
pour ép o u x, au mépris des lois et de toutes les bienséances ,•
un homme q u i, quatre heures auparavant, étoit le mari,
légitime de Marie-Jeanne R eboul, avec lequel par consé
quent il ne pouvoit y avoir de mariage valable. En pas-)
sant dans ses bras, malgré ces considérations, Toussainte
Experton a fait preuve de mauvaise conduite. C’est le cas
de dire que, dans son union avec Jean Brunei', il n’y a
pas eu mariage, mais continuation du commerce adultérin
qu’ils avoient auparavant.
Q u’on.ne fasse donc plus valoir qu’elle a été induite en
erreur, qu’on lui a caché les empôchemens■
qui s’opposoientà ce qu’elle contractât un mariage valable. 11 est
évident que les moyens qu’on reproche à Jean Brunei
d’avoir e m p l o y é s pour tromper cette fille, ont été inven
tés par elle, ou d’accord avec elle, pour parvenir au ma
riage qu’elle désiroit.
;
T
r o i s i è m e
q u e s t i o n
.
L a quittance de dot est une donation en ofraude de
la loi.
Une quittance de dot n’est pas toujours un acte qu’on ne
puisse attaquer avec succès; son maintien dépend de la qua->
lité des personnes \ qui elle a été donnée. Si c’est à une con
cubine , on exige la preuve qu’elle a fourni les deniers.
�V?\
( 10 )
Cette .jurisprudence est fondée sur la défense de don
ner aux concubines, à quelque titre que cc soit. D e quel
que voile qu’on couvre les dons, sous quelque forme qu’on
lesidéguise, ils sont réputés simulés et frauduleux : la loi
les rejette et les anéantit, si on n’étabit pas qu’ils ont eu
une cause juste et légitime.
L a défense est écrite textuellement dans l’ordonnance
de 1629 •, l’article. 132 déclare toutes donations fa ites à
concubines nulles et de nul effet. = t
e: Cette ordonnance a été enregistrée librement au parle
ment de Toulouse , dans le ressort duquel étoit la ville
du Puy. L a sagesse et la pureté des motifs qui avoient
dicté l’article 132, le firent adopter dans tous les parle
m ent Nous pourrions en citer une foule d’arrêts , qui ont
déclaré nuls des actes de toute espèce, passés au profit de
concubines; nous nous bornerons à ceux qui ont annuité
des quittances de dot.
-¡L e 16 mars 1723 , Le parlement de Paris déclara nulle
une quittance de dot de 60000 livres , consentie îui profit
d’Elizabetli Tricot par le ci-devant marquis deSàintp-Eoy,
dont elle avoit été la concubine.
La quittance portoit que le sieiir de Sainte-Foy avoit
reçu les 60000 livres, tant en effets mobiliei's qu’en im
meubles : elle ne pouvoit indiquer un seul contrat, ni un
seul bien-fonds dont elle eût jamais été propriétaire.
Un second arrêt, du 24 janvier 1767 , au rapport de
M .l’akbé Tudert, et rapporté par Deni^ard au mot dot, a.
débouté Marguerite Massuet de sa demande en -restitua
tion d’une dot de 3000 livres, dont le sieur Borton luii
nvaitidonné quittance.
(j ' -i-_'
flr .. .i
�C h )
11 résultait des circonstances particulières de l’affaire,
que la dot n’avoit été ni pu être fournie au sieur Borton.
L e grand conseil a voit adopté la même jurisprudence.
Par arrêt du 13 mars 1743, la demoiselle Payen fut dé
boutée de sa demande en payement d’une dot de 5 ooooliv.
que le ci-devant marquis de Vieux-Bourg lui avoit
reconnue.
L e m otif de l’arrêt fut que la demoiselle Payen n’avoit
pas été en état de fournir une pareille d o t, et qu’elle avoit
varié sur les effets qui avoient, selon e lle , servi à la former.
En 1778 , un contrat de mariage sous seing privé fut
passé entre la demoiselle Leprêtre et le sieur Toutesmesnil, qui reconnut avoir reçu d’elle une somme de
, i 5 ooo livres. Toutesmesnil mourut avant le jour indiqué
pour la célébration du mariage.
Demande en restitution de la dot de lôooo livres.
L ’héritier de Toutesmesnil répondit à cette demande
que la reconnoissance portée au contrat de mariage n’étoit
qu’une donation déguisée, faite à une concubine qui n’avoit
aucun bien ; il demanda à faire preuve que depuis plusieurs
années elle vivoit en concubinage avec son futur.
La demoiselle Leprêtre soutint l’héritier non recevable
dans la preuve qu’il demandoit à faire , i°. faute de com
mencement de preuve par écrit ; 20. faute de’ circons
tanciel' suffisamment les faits, et de leur donner des épo
ques fixes, etc.
Ces raisons ne firent point impression ; et la sentence
qui avoit admis la preuve des faits de concubinage , fut
confirmée par arrêt du parlement de Normandie.
Dans l’espèce de tous ces ai’rêts, il n’y. avoit que con-
�'-
.
( 12 )
cubinage , et les concubines n’établissoient pas d’où leur
ctoit venue la dot dont elles demandoient la restitution.
Dans la nôtre, il y a concubinage et adultère, et nulle
preuve que l’intimée ait apporté les 12000 livres dont
elle s’est fait donner quittance.
La manière dont la quittance est conçue suffiroit pour
en prouver la simulation.
« La future s’est constituée en dot la somme de 12000 1.
» que Jean Brunei a déclaré avoir ci-devant reçue et à
» contentement. »
Ce langage n’est pas enigmatique ; il annonce claire
ment que Jean Brunei n’avoit rien touclié, et qu’il en
a été content.
Toussainte Experton étoit hors d’état de fournir les
12000 livres, valant en numéraire 4380 livres.
Son frère et clic n’a voient recueilli de la succession de
leurs pere et mère qu’ un champ qui fut vendu , en
l’an 2 , moyennant 600 livres.
C ’est apparemment cette vente quia servi de prétexte
à la reconnoissance de la somme de 300 livres en nu
méraire, au payement de laquelle l’appelant a été aussi
condamné.
lia reconnoissance porte que Toussainte Experton a
“'délivré , du vu du n otaire, à Jean B runei, la somme de
"'300 livres, provenant dé deux actes de ratification de
vente par elle consentis , les 5 ventôse an 2 , et 1 i nivôse
an 6.
Comment les premiers juges ont-ils p u , sur la simple
déclaration d’une fille , au moins suspecte, se déterminer
" à lui adjuger ces 300 livres ? 110 devoient-ils pas l’obliger
�( 13 )
à rapporter et les ventes et les ratifications ? leiir rapport
auroit pu prouver la fausseté de la déclaration, et ré
pandre quelque lumière sur les 12000 livresque l’inti
mée prétend avoir apportées en dot. L ’appelant demande
que tous ces actes soient produits ; il a le droit de l’exiger.
.
C O N'CLUSION.
Les trois questions que l ’appelant a proposées pour sa
défense, se décident en sa faveur.
i°. Toussainte Experton a* été la concubine de Jean
Brunei, et n’a été que cela, malgré leur prétendu mariage.
L e concubinage est prouvé par la notoriété publique,
par son silence au reproche qui lui en a été fa it, par la
mention insérée dans l’exposé des faits qui précèdent les
motifs du jugement dont est appel ; et sa grossesse avant
son mariage en est une preuve démonstrative.
L ’appelant offre de prouver, s’il en est besoin, tous les
faits qui constatent la débauche et le concubinage de
Toussainte Experton.
20. Cette concubine savoit que Jean Brunei étoit ma
rié à Marie - Jeanne Reboul ; c’est elle qui a forcé cet
homme à divorcer; c’est elle seule qui a tout dirigé pour
faire prononcer le d ivo rce, parce qu’il n’y avoit qu’elle
qui y fut intéressée; et la connoissance qu’on lui a don
née de ce divorce, avant de l’unir à Jean Brunei, répond
à tout ce qu’on pourroit dire pour excuser le désordre
de sa conduite.
3°. La preuve de la simulation de la quittance de dot
résulte du concubinage qui a existé entre Jean Brunei
�( 14 )
et Toussainte Experton. D e là la conséquence que cette
fille, pour obtenir la restitution des sommes qu’elle dit
avoir apportées en se m ariant, doit établir d’où elles lui
étoient venues.
j
. T elle a été la jurisprudence de tous les temps. L ’ordre
public, le repos des familles se réunissent ici pour deman
der que la cour la confirme par son arrêt.
M e , G I S C L O N , avocat.
M e M A R I E , avoué licencié.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Brunel, Jean-André. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gisclon
Marie
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
restitution de dot
concubinage
contrats de mariage
donations à concubine
fraudes
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Jean-André Brunel, prêtre, vicaire de Claudes-Aigues, en qualité d'héritier bénéficiaire de Jean, son père, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil du Puy, le 22 ventôse an 12 ; Contre Toussainte Experton, fille majeure, habitante de la ville du Puy, intimée.
Table Godemel : Dot : 2. la dot reconnue dans un contrat de mariage, du 27 ventôse an trois, en faveur de la future qui était en état de concubinage avec le futur, et lorsque le mariage civil n’a été célébré que le 2 brumaire suivant, quelques heures après la prononciation du divorce du futur avec sa première femme, et par le même officier public, doit-elle, ainsi qu’une reconnaissance postérieure au mariage, faire titre contre l’héritier du mari, ou n’être considérées, l’une et l’autre, que comme un avantage déguisé, frauduleux et prohibé par la loi contre la concubine, surtout si le divorce et le second mariage sont déclarés nuls ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
An 3-An 13
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1623
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53297/BCU_Factums_G1623.jpg
concubinage
contrats de mariage
divorces
donations
donations à concubine
fraudes
nullité du mariage
remariage hâtif
restitution de dot
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53489/BCU_Factums_G2503.pdf
181338465512a0752a39a52964da5ee6
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MÉMOIRE
PO U R
L e sieur P ierre - A ntoine C A P E L L E - P E U C H - J E A N ,
et les demoiselles S ophie et M a r ie C A P E L L E ,
frères et sœurs, habitans de la ville d’Aurillac ,
héritiers de M e A n t o i n e C a p e l l e , leur père,
appelans
CO NTRE
Sieu r F élix V A L E N T I N , - pro p riétaire,
et la dam e
son épouse , de lu i
autorisée h éritière, sous bénéfice d'inventaire
de sieur Joseph-Aym ard N ouveau , son o n cle, lesdits mariés V a le n t in , habitans du lieu et commune
de Calvinet intim és
S o p h ie - M arie
NOUVEAU,
EN PRÉSENCE
D e dame Marie - Sophie Langheac de Montlogis ,
religieuse} habitante de la v ille d ’A u rilla c ; MarieJudith Langheac, veuve de sieur P ia le s Marie-
�Honorée Langheac-Lignac, toutes d eu x propriétaires,
habitantes du lieu et commune du V^iviers y sieur
Brassat - M u râ t, docteur en m édecine, et dam e
Judith Langheac, son épouse¿ de lu i autorisée ,
habit ans de la v ille d ’A u b ie r ; autre Marie-Juclith
Langheac de Montlogis-Chanat, propriétaire„ habi
tante du lieu de la Rouquette} commune de Cassaniouse
canton de JSIontsalvy y sieur Mai’sillac ,
docteur en médecine ; Olympie-Silvie Langheac de
Montlogis, son épouse 3 de lu i autorisée y MarieChristine Langheac de Montlogis, Marie-Anne
Chaudesaignes de Turrein, veu ve de Claude L a n
gheac de Montlogis, tutrice de leu r f i l s mineur y
Joséphine - Judith Langheac de Montlogis, tous
propriétaires, habitans du lieu de Dov.sques, com
mune de J^ eza c; Pierre-Alexandre Rigobert, JeanAlexandre et Pierre-Honoré Langheac de Montlogis,
propriétaires 3 habitans du lieu de M o n tlo g is c o m
mune de Laden hac 3 susdit canton de JSIontsalvy }
■aussi appelans.
I l n’est pas de loi dont la cupidité n ’abuse, et dont
elle ne cherche à s’emparer pour favoriser une préten
tion injuste.
L a loi qui a aboli les substitutions fidéi-commissaires
est une de celles qui a fourni le plus de prétexte aux
arguties de l'intérêt personnel.
Cependant son but était marqué j elle avait celui
�( 3 )
de prévenir les fraudes, et de faire rentrer dans le
commerce une grande masse de propriétés qui en étaient
sorties.
Mais ce Lut a été méconnu. E n détournant le sens
de la lo i, on a voulu l ’appliquer k toutes les dispositions
conditionnelles, k celles même qui ne présentaient
aucun des caractères du fidéi-commis ; et delà sont
nées des discussions multipliées, des argumentations
subtiles, qui ont répandu le désordre et l ’obscurité sur
les idées les plus simples, et qui ont créé .une branche
fécondé de nouveaux procès.
E n vain les tribunaux ont-ils, par des décisions
nombreuses, tenté de ramener les esprits k la vérité
et a la justice ; en vain même, dans les cas douteux ,
se sont-ils décidés d’après la maxime équitable qui
veut que l ’interprétation tende k faire valoir l ’acte
plutôt qu’k l ’ a n n u lle r . L ’ in té r ê t p e rs o n n e l ne s’est pas
tenu pour battu j et des contestations toujours renais
santes apprennent aux magistrats que les leçons de
1 expérience sont ordinairement perdues pour les
plaideurs.
Les héritiers Capelle réclament des biens dont la
pioprieté leur a été assurée par le contrat du second
mariage de leur père.
Ces biens sont d’ une valeur assez considérable-, mais
ils ne sont pas le fruit d’une pure libéralité : de grands
sacrifices en ont été le prix.
La demoiselle Nouveau prétend que ces biens lui
appartiennent. Son titre est postérieur -, c’est une
�( 4 )
donation faite au sienr Josepli-Aymard Nouveau, son
oncle, et sur laquelle même cet oncle n’avait pas dû
compter 5 car elle porte avec elle la* preuve que la
donatrice doutait qu’elle eut le droit de disposer de
ce qu’elle donnait.
Ce titre équivoque, le seul que fasse valoir la
demoiselle Nouveau , est devenu puissant à ses y e u x ,
parce q u e , selon ses idées, une substitution , annullée
par la loi du il\ novembre 17 9 2? serait le seul fonde
ment des droits des héritiers Capelle.
C ’est donc sur les principes des substitutions, com
parés aux termes du contrat de mariage du sieur
Capelle père, que doit rouler la discussion.
F A IT S.
M* Antoine Capelle, avocat, avait épousé, en pre
mières noces, demoiselle Hélène Bastid.
T r o is e n fa n s é t a ie n t n és d e ce m a ria g e : ce so n t les
a p p e la n s .
L e sieur Capelle contracta, en 17.86, un second
mariage avec demoiselle Marie - Judith Langheac de
Montlogis.
Les illusions du goût et l ’espoir d’une paternité
nouvelle ne présidèrent pas à cette seconde union. La
demoiselle Montlogis était d’un âge avancé.
L e sieur Capelle y fut déterminé par sa tendresse
pour les enfans de son premier mariage.
L a demoiselle Montlogis n’avait elle-même qu’ un
�( 5 )
.
tnodique patrimoine ; mais une sœur opulente, enrichie
des dons d’un premier m a ri, assurait ses biens aux
deux époux, sous des réserves cependant, et sous des
charges très-onéreuses.
Le sieur Capelle croyait avoir assez de fortune pour
satisfaii'e aux charges. Il était dédommagé de ses sacri
fices par les richesses qu’ il devait laisser à ses enfans.
Telles furent les intentions qui dictèrent le contrat
de mariage, du a 3 septembre 17 8 G , dont on va faire
connaître les principales dispositions. <
« Ladite demoiselle future épousé Vtést constitué en
« dot tous Ses biens présens et à’ v e n ir, avec pouvoir
« audit futur époux d’en faire la recherche, traite r,
« t r a n s i g e r c é d e r , transporter, vendr'é1, engager,
« aliéner, toucher, recevoir, fournir quittance et dé« charge valable, îi la charge par lui de re c o n n a îtr e
« to u t ce q u ’ il re c e v ra s u r to u s ses biens présens et
« à venir ^ lesquels deméùrent dès à présent affectés
« pour la restitution, le cas arrivant-,
« E t aux présentes est intervenue dame Judith
« Langheac de Montlogis, veuve de sieur Jean-Pierre
« Jalinques de la Rouquette;, ancien gendarme, habi« tant en son château , paroisse de Cas'saniouse ,
« laquelle, de gré, pour l ’amitié particulière qu’elle a
« pour la future épouse, sa scèur, a , en faveur du
« picsent mariage, donne h titre de donation entre« 'v iis, pure, simple, et à jamais irrévocable, a sadite
« sœur, future épouse, ce acceptant, tous les biens
“ meubles, immeubles, et effets dépendant de la
�(6 )
«
«
«
«
«
«
«
«
succession dudit sieur Jalinques de la Rouquette,
son mari, dont elle est héritière testamentaire,
suivant son testament olographe, du 3 juillet 1782 ,
déposé ès-mains de Bouquier, notaire, le 1 1 février
suivant, en forme, en quoi que lesdits biens consistent et puissent consister , ensemble la somme de
3ooo francs, qui lui a été reconnue par ledit
sieur Jalinques, dans leur contrat de mariage, du
«, 10 avril 17 7 2 .
« Ladite donation ainsi faite, sous les réserves,
« charges et conditions ci-après 5
. : Savoir : i° de tous les meubles meublans, qui
« sont dans le château de la Rouquette........... \
« 2 0 D ’ u n e ju m e n t .................5
t
. « 3 ° De tout ce qui est dù par le sieur. Auriac de
« C alsary............., par le sieur Jalinques de Barsagol,
« tant en principal q u ’accessoires5 de tout ce qui peut
« être aussi dù par le sieur Delcamp , greffier de
« Calvinet.............. j
« 4° D e tous les -arrérages de rentes et revenus
« actifs, échus jusqu’à çç jour, ainsi que de tous frais
« et dépens dus à ladite succession, liquidés ou à
« liquider.
c 5 ° Sous la réserve de la somme de cent vingt
« m ille fr a n c s , que ladite dem oiselle fu tu re épouse }
« et ledit sieur fu t u r é p o u x , s o l i d a i r e m e n t Vun
« p o u r Vautre, sans division ni discussion, sous
« quelque prétexte que ce soit y seront tenus , ainsi
« q u ’ils s’y obligent, de payer îi ladite dame Lan-
�( 7 )
« gheac de la Rouquette, savoir : 20,000 livres dans
« six mois, à compter de ce jour-, 10,000 livres dans
« un an d’après, et les 90,000 livres restant, 'a raison
de 3 ooo liv. par a n , dont le premier terme écherra
un an après celui ci-dessus de 10,000 livres, avec
l ’intérêt de ladite somme totale de 120,000 livres,
à compter de ce jo u r , lequel diminuera à proportion
des paiemens qui seront faits sur le principal \
« 6° A la charge p a r ladite dem oiselle fu tu re
« épouse y et ledit fu t u r é p o u x , ainsi q u ’ils s’y obli« gent aussi solidairem ent, de payer la pension viagère
« de la somme de 600 livres, due à la dame Delom de
« Gironde, veuve du sieur Joseph Jalinques, à com« mencer au i er octobre 1787 , et ainsi continuer
« jusqu’au décès de ladite dame de Gironde, et ce,
« outre et au par-dessus la jouissance du domaine
« d’Agrovieille, sa vie durant, cjui lui a été léguée
« par le testament dudit sieur Joseph Jalin ques, son
«
«
«
«
«
« mari.............. • de loger, nourrir à leur pot et feu et
« compagnie; éclairer, chauffer et blanchir, tant en
« santé que maladie, sieur Antoine Bouquier de
« L abro, sa vie durant-,
,
« 70 A la charge encore, par lefcdits futurs époux,
«« d acquitter toutes les dettes de ladite succession }
« ainsi qu’ils s 'y obligent comme dessus;
(( 8° D ans le cas que ladite dem oiselle fu tu re
« épouse vienne à d écéder sans enfans du présent
« m ariage} audit cas seulem ent, les biens qui reste« ront de ceuçc ci-dessus donnés 3 seront remis et
�( 8)
appartiendront audit fu t u r é p o u x y et j en cas de
prédécès 3 à ses héritiers, ou à celu i d 'en tr’e u x
q u ’il aura choisi, avec néanmoins liberté à la de
moiselle future épouse de disposer de la somme de
trois mille livres, reconnue sur les biens dudit
sieur Jalinques, à ladite dame de Langheac son
épouse, en faveur de qui bon lui semblera; et au
moyen de tout ce que dessus, ladite dame de Langheac de la Rouquette s’est dessaisie et dévêtue
desdits biens donnés, et en a saisi et invêtu, tant
en propriété qu ’en usufruit, ladite demoiselle future
épouse, pour, par elle et ledit futur époux, en jouir
dès à-présent j avec liberté audit fu t u r épo u x de
vendre } alién er} en tout ou en partie lesdits biens
donnés, à tel p r i x , charges, clauses et conditions
q u ’i l avisera 3 du consentement de la d it e fu tu re
épouse y de recevoir le montant du p r ix , ainsi que
des sommes dues fa isa n t partie des biens donnés y
t r a i t e r t r a n s i g e r s u r to u s p ro cès^ in s t a n c e ; du
tout fournir quittance et décharge valables 5 à la
charge de la reconnaissance des sommes qu ’il rece
vra, pour le tout être rendu, le cas dé restitution
arrivant, à qui il appartiendra; et à cet effet, ladite
dame Langheac de la Rouquette promet remettre et
délivrer, audit sieur futur époux, les titres de
créances, jusques à concurrence de la somme de
quatre-vingt mille livres en principal, intérêts ou
frais, soit en rentes constituées ou autrement, pour
par lui en faire le recouvrement............. E t dans le
�( 9 y
_
y,
« cas que lesdites créances, en principal, intérêts et
« dépens, ne monteraient point à ladite somme de
« quatre-vingt mille livres, audit cas, la réserve de
« cent vingt mille livres ci-dessus demeurera d’autant
« réduite, jusques à concurrence de ce qu’ il se trou« vera manquer pour parfaire ladite somme de quatre« vingt mille livres, et lesdits futurs époux déchargés
« d’autant a prendre sur les derniers ternies de ladite
« somme de cent vingt mille livres. » '
Tel est l ’acte où l ’on croit trouver une substitution
fidéi-commissaire, grevant la demoiselle Montlogis en
faveur de M. Capelle ou de ses héritiers ; comme si le
principal caractère d’une telle substitution n’était pas
la charge de conserver et de rendre la totalité des
biens, et non celle de restituer seulement ce (jui res- '
lerait dès biens donnés; comme si un simple substitué
pouvait être lui-même partie c o n tr a c ta n t e clans l’acte
de d is p o s it io n , et d e v a it être astreint personnellement
à quelques obligations, à quelques charges, avant
meme que la substitution fût ouverte.
Oii n’aurait pas exigé, sans doute, du sieur C a
pelle, et celui-ci n’aurait pas contracté des engageméns aussi onéreux, s’il n’eut pas été considéré, et
s il ne se hit pas considéré lui-même comme donataire
direct, dans le cas prévu par le contrat.
Ses engagemens, il commença h. les remplir; mais
bientôt il s’aperçut qu’ils excédaient scs forces , et
qu’ ils compromettaient toute sa fortune personnelle ,
parce que
plupart des créances comprises dans
2
*
�les biens donnés étaient d ’une valeur nulle, à cause
de l ’insolvabilité des débiteurs, soit parce que les im
meubles n’offraient qu’une vente difficile.
Il voulut échapper à la rigueur de ses obligations et
h la vivacité des poursuites qu’exerçait contre l u i , à
raison des 120,000 livres qui lu i étaient dues, la dame
veuve Jalinques, alors remariée avec le sieur Murât j
il renonça donc à la donation, en ce qui le concernait,
par acte du 1 4 j uin 1 78S ; et réuni, à son épouse, il
dénonça sa renonciation à la donatrice, par acte du
25 février 1789.
Alors s’éleva, entre la donatrice et les donataires,
un procès sérieux, qui fut porté au bailliage du Palais,,
à Paris, et qui y fut jugé par une sentence du 28 août
179 0 .
L e sieur Capelle renouvela sa renonciation devant
la justice; il offrit de rendre tout ce qu’ il.avait reçu :
il demanda en conséquence à être affranchi de. toutes
ses obligations.
L a dame Capelle consentait à conserver le titre et
les droits de donataire; elle demandait que les objets
donnés lui fussent remis; elle offrait d ’acquitter les
charges de la donation.
L e but des deux époux Capelle était de dégager les
biens du mari. Dans ce cas, le,sieur Capelle aurait
consenti à ne profiter d’aucun des avantages que la
donation lui assurait.
,
Mais alors, réduite aux seules, ressources que présen
tait la dame Capelle, la donatrice eût été mal payée :
�)
aussi ré sista -t-e lle et k la renonciation du mari e t aux
offres de l ’épouse. Elle demanda, ou que la donation
f u t annulée pour le to u t, ou que l ’acte fut exécuté
dans toutes ses clauses.
C ’est cet qui fut décidé, le 28 août 1 7 9 0 , par les
magistrats du 'bailliage du palais.
Voici les termes de leur sentence :
« Sans nous arrêter aux répudiations faites par la
« partie de Me Rimbert (le sieur C ap elle), disons que
« la donation dont il s’agit sera exécutée selon sa forme
« et teneur ; en conséquence, ordonnons que les pour"« suites commencées seront continuées*, et à faute par
« les parties de Mc> Rimbert et Populus (1) de remplir
^ lès clauses et les conditions portées en ladite dona« tion, dans le tems et espace de trois mois, à compter
« du jout de notre présente sentence, disons qu ’en
« vertu ¿le la d it e s e n te n c e , e t sa n s cju ’i l en soit besoin
« d’autre, ladite* donation et tous actes postérieurs
« itératifs seront révoqués; en conséquence, autorisons
«^lesdites parties de Me ^le'unier (la dame «t le sieur
« Murât) a entrer en jouissance, possession et pro« priété de tous les biens immeubles, meubles et effets
« compris en 'ladite donation , etc. »
Cette sentence était juste-, car l ’acte de donation
était •indivisible.
Cependant les débats se prolongèrent par un appel;
ils furent terminés par une transaction du 20 dé(T) M Populus était Vavocat do la dumc Capelle,
y
�eembre 1 7 9 1 ? qui fut faite par la médiation et de
l ’avis de trois anciens jurisconsultes.
Le sieur Capelle se décida à ne plus persister dans
une répudiation qui eut privé son épouse, comme lu i,
de tous les avantages que pouvait présenter la donation.
Aussi cette donation fut-elle considérée comme com
mune à l ’un et à l ’autre.
On remarque dans l ’acte des expressions non équi
voques sur le sens et l ’eifet de la donation.
« Les parties, est-il dit dans l ’exposé, désirant ter« miner les différentes contestations pendantes entre
« elles en différons tribun aux, tant en première ins« tance que par appel, à raison de l ’exécution de la
« donation fa ite p a r ladite dame de Lan gh eac. de
a M urât , en fa v e u r de ladite dame de Langheac
« Lascom bes} et dudit sieui' Capelle son m ari 3 dans
« leur contrat de mariage du 23 septembre 1786. »
Plus b a s, et dans le corps de l ’acte, des expressions
semblables sont employées.
Ou y parle du domaine de Saint-Miçhel, comme
fa isa n t partie des biens donnés auxdits sieur et daine
C apelle.
On y rappelle la somme de 120,000 f r . , que la dame
de Langheac de Murât s’était réservée dans la dona
tion p a r elle fa it e en fa v e u r des sieur et dame Capelle.
O11 cède h compte le domaine de Saint-Michel, tel
et de même q u 'il f u t délaissé auxdits sieur et dame
C apelle , p a r la donation fa ite en leur fa v e u r.
On abandonne aussi en paiement une rente faisant
�( ' 3 )'
p a rtie, est-il ajouté, de la donation fa ite p a r ladite
dame de M urât a u x sieur et dame C apelle.
Nulle part la dame Capelle n’est déclarée, n’est
môme indiquée comme seule donataire.
E t cependant des jurisconsultes habiles concouru
rent au traité.
S ’ils s’exprimèrent ainsi, ne fut-ce pas parce qu’il
était juste j parce qu’ il était conforme à l ’intention des
parties et au sens bien entendu du contrat de mariage,
que le sieur Capelle , qui participait aux charges,
devait aussi participer dès-lor.s même aux bienfaits, et
avait le droit d’être considéré comme un codonataire ,
non comme un simple substitué.
Par cette transaction , après avoir retranché les
paiemens faits par le sieur Capelle à la dame M u rât,
la somme de 120,000 fr ., que s’était réservée celle-ci, 1
fut réduite a 100,000 fr. en principal, et à 9600 fr.
en intérêts.
L e sieur Capelle paya un,à-compte de 12 ,7 9 8 fr.
Il consentit au paiement d'une somme de 1 1 , 8 1 2 f r . ,
valeur des droits légitimaires de son épouse, en prin
cipaux et en întcrets, et cette somme fut aussi touchée
par la dame de Murât.
11 lui laissa le domaine de Saint-Michel pour le prix
de 8000 francs’ 5
.
. Il lui céda une rente foncière d’ un principal de
4 °°o francs j
.
Il lui remit 20,000 fr. de créances, faisant partie
des objets donnés.
�< *4 )
Tous ces paiemens réduisirent la dette k 5 3 ,ooo fr .,
qui furent stipulés payables par termes.
Le sieur Capelle a exécuté fidèlement, depuis, la
donation et le traité.
Il a payé les dettes qui grevaient les biens donnés.
<
Il s’est aussi acquitté en partie envers la dame
M u râ t, à laquelle, selon le sieur Nouveau lui-même,
il ne devait q u ’environ 3 4 >ooo fr. lorsqu’il décéda.
E t comme les ressources que lui offrirent les biens
donnés étaient insuffisantes; comme il ne put retirer
que 4ooo francs des créances comprises dans la dona
tion , il fut forcé, pour satisfaire k ses engagemens ,
d’aliéner à vil prix une partie de ses propres biens, et
notamment le domaine de Mallaret , vendu pour
21,0 0 0 francs, et qui en vaut aujourd’hui plus de
60,000'fr.
Cependant le sieur Capelle, qui devait se considérer
désormais comme propriétaire des biens donnés, y fit
de grandes réparations, augmenta les cheptels du bien
de la Rouquette, principal immeuble, et y plaça un
mobilier d’ une grande valeur.
Le sieur Capelle ne jouit pas long-tems d ’une for
tune qui lui avait coûté tant de sacrifices : il décéda
presque subitement , le i 5 janvier 1704*
Ses enfans du premier lit étaient mineurs.
Il n’avait pas eu d’enfans du second mariage.
Des scellés furent apposés huit jours après son décès:
un inventaire fut fait dans le mois suivant.
Ou a reproché k la veuve d’avoir soustrait l’argent,
�C. ‘5 )
les effets, u n e partie du mobilier. Des poursuites en
spoliation avaient même été dirigées contre elle. Mais
les tuteurs des enfans Capelle négligèrent ces pour
suites.
Cependant là dame veuve Capelle passa à de secondes
noces avec le sieur Joseph Aymar-Nouveau.
Leur contrat de mariage, en date du i 4 frimaire
an 3 , est le titre invoqué aujourd’hui par le sieur
Nouveau.
Voici les clauses utiles à connaître.
« L a citoyenne Langlieac, future épouse, donne et'
« lègue audit citoyen Nouveau, son futur époux, aussi
« en cas de survie, la propriété et jouissance des do« maïnes'et enclos de la Rouquette et dépendances,
« francs et quittes de toutes charges, dettes et hypo« thèques présentes et à venir, sous la réserve de tous
« ses autres droits, actions et prétentions, dont elle
« pourra disposer, ainsi et comme bon lui semblera. »
L a future épouse donne ensuite au sieur Nouveau
pouvoir de vendre ses immeubles, à la charge d’en
employer le prix en acquisitions, ou en paiement des
dettes auxquelles ils étaient affectés.
Enfin on remarque la clause suivante :
« 11 demeure encore convenu que, dans le ças où
*< ladite future épouse ne pourrait disposer ni aliéner
« ses biens immeubles, e t, par exprès, ceux par elle
“ donnés audit futur époux, à titre de gain de survie,
« comme il çst dit plus haut} en ce cas, elle donne,
« à titre de donation entre-vifs, pure^ simple et irré-
�« vocable, audit futur époux, tous ses autres biens
« mobiliers et immobiliers, présens et à venir. »
Cette donation secondaire indique assez l ’opinion
de la dame Langheac elle-même sur le droit qu ’elle
s’arrogeait de disposer de la terre de la Rouquette ,
objet principal des libéralités contenues dans son pre
mier contrat de mariage.
Cependant les sieur et dame Nouveau agirent en
propriétaires.
Ils remboursèrent d’abord à la dame Murât , en
assignats d’une valeur presque nulle, les sommes qui
lui restaient dues d’après la transaction de 17 9 1 •
Us s’adressèrent ensuite aux mineurs Capelle , et
firent a leur tuteur, par acte du 5 floréal an 3 , offre
de i i j 835 francs d’assignats, somme à laquelle ils
fixèrent, par leurs calculs, les rembourscmens dont
ils étaient débiteurs envers les mineurs Capelle, pour
les paiemens faits par leur père à la dame Murât.
Le tuteur refusa les offres, comme insuffisantes et
immorales. Il demanda un compte.
Le sieur Nouveau obtint, le 25 floréal, un jugement
par défaut qui déclara les offres valables.
Un second jugement par défaut débouta le tuteur
de son opposition.
Celui-ci reçut, comme contraint, ces valeurs idéales,
le 25 messidor an 3 , le jour même oii fut rendue cette
loi si connue, q u i, réprimant les spéculations peu ho
n o rab les de certains débiteurs, déclarait nids les remboursemens en papier-monnaie, si ruineux pour les
créanciers.
�( *7 )
E n l ’an 12 commença le procès principal.
Les sieur et dame Nouveau formèrent la première
demande.
Par un exploit du 27 nivôse an 12 , ils récla
mèrent , i° 6938 livres qu’ils disaient avoir été
touchées par le sieur Capelle sur les capitaux de la
dame Nouveau; 2° 80 livres pour les frais funéraires
du sieur Capelle; 3 ° i a 35 livres pour frais de la nour
riture et de l ’entretien des enfans pendant deux ans
et cinq mois; 4° 275 francs pour les dépenses du procès
de l ’an 3 ; 5 ° la remise des quittances justificatives des
paiemens faits par le sieur Capelle à la dame Murât.
Depuis, les sieur et dame Nouveau ont reconnu le
ridicule de plusieurs de ces réclamations, et les ont
abandonnées.
L e s héritiers Capelle s o u t in r e n t d a n s le u r s défenses
q u ’ ils é ta ie n t se u ls propriétaires des biens compris
dans la donation faite par le contrat de mariage de 1786.
Ils conclurent aussi :
i° A la restitution du mobilier de la Rouquette;
20 A la remise des papiers et livres-journaux de
leur père ;
3 ° Au paiement d’une somme de 3 oo fr. en argent,
et de Goo fr. en assignats, qu’avait laissés leur père;
4 ° Au compte des arrérages de rente et des intérêts
de créances, qui étaient dus au sieur Capelle à son décès,
et dont avaient profité la- dame et le sieur Nouveau.
L a cause ayant élé portée a l’ audience, il fut ordonné
qu’elle serait instruite par écrit.
3
�( .8 )
Tel était l’état (les contestations, lorsque la dame
Nouveau décéda, laissant pour héritières les demoiselles
de Montlogis, ses sœurs.
Celles-ci ont été mises en cause à la requête du sieur
Nouveau.
Elles ont comparu, et ont fait signifier, le 18 no
vembre 1 8 1 6 , une requête dans laquelle la dame
M u rât, l ’une d’elles, déclare qu’elle avait entendu ,
non pas substituer, mais associer le sieur Capelle à la
donation qu’elle avait faite dans le contrat de mariage
du a3 septembre 1786.
Les héritiers Capelle ont demandé, par requête du
i 5 fé v r ie r 18 17 , le désistement de tous les biens donnés
à leur père.
Le sieur Nouveau a soutenu qu’ ils lui appartenaient,
parce que le sieur C apelle, simple substitué , avait
perdu ses droits, à l ’émission de la loi du 2 5 octobre
1 7 9 2 , et que la dame Capelle, saisie dès-lors irrévo
c a b le m e n t de la propriété, avait pu la transmettre à
son second mari par leur contrat du 5 novembre 1 79A•
C ’est sur ces prétentions respectives, et sur quelques
autres, qu'a prononcé le tribunal d’Aurillac, par juge
ment du 3 i décembre 18 1 7 .
Ce jugement déclare « que la donation portée en
« l ’article 8 du contrat de mariage de la demoiselle de
« Montlogis avec le sieur Capelle, en date du a 3 sep« tembro 17 8 6 , contenait une substitution en faveur
« du sieur Capelle et de ses héritiers, abolie par la
« loi du 25 octobre 1 7 9 2 ; maintient et garde le sieur
�( *9 )
Nouveau clans la paisible possession et jouissance des
« deux domaines de la Rouquette, enclos et dépen« dances, composes de tous les héritages qui étaient
« attachés à la réserve du propriétaire. »
Les motifs de cette décision n’ont pas coûté beaucoup
de méditation.
« Attendu, disent-ils, que l ’on trouve dans la clause
« du contrat «de mariage charge de rendre, trait de *
« tems, et ordre successif, qui étaient les principaux
« caractères par lesquels on distinguait les substitutions
« fuléi - commissaires des autres espèces de substitu« lions ; que dès-lors la donation faite par la dame
« veuve Jalinques à sa sœur, contenait une véritable
« substitution iidéi-commissaire, du moins de eo quod
« supereritj en faveur du sieur Capelle et de ses
« héritiers ;
« Attendu que cette substitution n’était pas encore
« o u v e rte h l ’ époque de la publication de la loi du
« 25 octobre 17 9 2 , qui abolit les substitutions fidéi« commissaires qui n’étaient pas encore ouvertesj que
« dès-lors les biens qui étaient compris dans cette do« nation devinrent entièrement libres sur la tête de
« la dame Capelle, q u i, par une conséquence natu« relie, put en disposer à son gré, tant à titre gratuit
« qu’à titre onéreux5 et que par conséquent la dona« tion par elle faite, à titre de gain de survie, au
« sieurNouveau, dans le contrat de mariage, du /j dé
cembre 17 9 4 , doit être confirmée et maintenue. »
Le jugement prononce sur d’autres objets dont il
n est plus question dans la cause, à l ’exception d’ un
�( 20 )
chef relatif au mobilier qui garnissait les bàtimens (le
la Rouquette.
11 ordonne notamment un compte relatif aux sommes
payées et reçues par le sieur Capelle, compte qui sera
le germe d’une foule de difficultés, et que rendrait
inutile une décision contraire sur la question principale.
Les héritiers Capelle ont interjeté appel du jugement.
Les dames Montlogis se sont aussi rendues appe
lantes.
Depuis l ’appel, le sieur Nouveau est mort. Une
nièce, son héritière, a repris l ’instance ; et c’est contre
cette héritière collatérale, que les. enfans Capelle ont
déjà discuté leurs droits devant la C our, à plusieurs
audiences.
Un arrêt du 18 août dernier a ordonné que la cause
serait instruite par écrit.
Les héritiers Capelle démontreront :
i° Que le contrat de mariage ne contient pas de
substitution fidéi-commissaire;
a° Que, dans le doute même, la disposition devrait
être maintenue.
P
r em ièr e
p r o po sitio n .
L e contrat de mariage de 1786 ne contient pas de
substitution J i d e i -commissaire.
Nous n’entrerons-pas ici dans le détail des diverses
espèces de substitutions. Ce serait nous livrer à une
théorie aussi compliquée qu'inutile.
�Il suffit de savoir que les substitutions fidéi-commissaires sont les seules qu’ait abolies la loi des
oc
tobre et 14 novembre 179 2.
C ’est ce que déclare M. Merlin dans son Répertoire
de Jurisprudence (1).
C ’est aussi ce qu’a remarqué M. Bigot-Préameneu,
en présentant au Corps législatif le titre du Gode civil
sur les donations et le§ testamens.
« Parmi les règles communes à tous les genres de dis« positions, a-t-il d it, la plus importante est celle qui
« confirme l ’abolition cles substitutions jicléi-com m is« saires. »
Cet orateur, qui était en 1792 membre de l ’assem
blée législative, nous fait aussi connaître les motifs
qui dictèrent cette première innovation de nos lois
anciennes.
« L ’esprit de fraude introduisit les substitutions ;
« l ’ ambition se saisit de ce’m oyen, et l ’ a perpétué.......
« L ’expérience a prouvé que, dans les familles opu«
«
«
«
lentes , cette institution^ n’ayant pour but que
d’enrichir l ’un de ses membres en dépouillant les
autres, était un germe renaissant de discorde et de
procès..............
« Chaque grevé de substitution, n’étant qu’ un
« simple usufruitier , avait un intérêt contraire à
« toute amélioration.
(1) Voir lo Répertoire do M. Merlin , au mot Substitution Jidéi-commissaire, section i " , § i3.
�( 22 )
« Unetrès-grande masse de propriétés se trouvait
« perpétuellement hors du commerce.
« Ceux qui déjà étaient chargés des dépouilles de
« leur fam ille, avaient la mauvaise foi d’abuser des
« substitutions pour dépouiller aussi leurs créan« ciers...........
« Ce sont tous ces motifs qui ont déterminé à con« Jîrm e r l’abolition des substitutions, d éjà prononcée
« par la loi d’octobre 179 2. »
On voit qu’il y a conformité parfaite sur la matière
entre la loi de 1792 et le Code civil; en sorte que les
raisonnemens, les principes, les arrêts applicables à
l ’une des législations, peuvent aussi être invoqués pour
l ’autre.
L ’on doit faire une autre remarque très-importante,
que nous empruntons des auteurs les plus distingués (1).
Personne n’ignore qu’il y a des rapports sensibles
entre les substitutions et les conditions : mais il n’est
pas défendu de donner sous condition. Il faut donc bien
se garder de c o n fo n d re les conditions qui forment une
substitution fidéi-commissaire, avec celles qui n’en
ont pas les caractères; ce serait compromettre le sort
de dispositions que la loi respecte;
Ainsi les magistrats ne sauraient user de trop de
circonspection, lorsqu’ils ont à prononcer sur des ques
tions aussi délicates.
(1) Voyez le Commentaire de M. Chabrol, tome 2 , page 12G, et le
Traité des Donations de M. Grenier, observations préliminaires, n° 9 ,
tome i " , pages i i 3 , 114 , 2' édition.
�Mais examinons la nature de la disposition qiii a fait
naître le procès, et pour cela rappelons en analise la
principale clause du contrat de mariage.
« Dans le c a s, est - il d i t , que ladite demoiselle
« future épouse vienne à décéder sans enfans du p ré-
« sent m ariage ^ audit cas seulement, les biens qui
« resteront de ceux ci-dessus donnés, seront remis et
« 'appartiendront audit sieur futur époux*, e t , en cas
« de prédécès, à ses héritiers, ou à celui d’entr’ eux
« q u ’ il aura choisi, etc. »
Le
futur époux a la lib erté de vendre , a lié n e r,
en tout
ou e n . p a r t i e , lesdits biens donnés, à tels prix,
charges, clauses et conditions q u ’ il avisera, du con
sentement de la future épouse ; de recevoir le montant
du p r i x 3 ainsi que des sommes dues fa isà n t partie des
biens.
C e s s t ip u la t io n s c o n te n u e s clans le p lu s solennel des
contrats , ces stipulations qui furent la condition du
mariage même, ne pourraient être critiquées, q u ’ autant
q u ’on prouverait q u ’elles renferment nécessairement
une substitution fidéi-commissaire.
Toute
autre convention',
toute autre disposition
faite dans un lel acte doit être considérée comme in
violable.
Mais à quoi reconnaît-on
une substitution
fidéi-
commissaire ?
A ses expressions ou à ses caractères.
A ses expressions. C a r q u o iq u ’on ne fût pas obligé
autrefois d ’employer des termes m arqués, cependant il
�( 24 )
y en avait de consacrés par l ’usage, tels que ceux-ci :
J e substitue.. .. J e charge mon mandataire de con
server et de rendre......... J e le prie de rendre.
O r, aucune expression semblable ne se trouve dans
la clause; aucune charge n’est directement imposée à
la future épouse.
On lui donne dans un cas ;
Mais dans un -autre cas, dans celui où elle mourrait
sans enfans, les biens sont donnés au futur époux :
c’est à lui qu’ils appartiendront, est-il dit.
Cette observation serait peu considérable, s’il s’agissait d’une disposition faite depuis les lois nouvelles,
parce qu’on pourrait croire qu’on a cherché à. éluder
leur prohibition.
Mais elle est importante , si l’on considère qu’à
l ’époque du contrat de mariage, les substitutions étaient
permises; q u ’ainsi on n’élait pas gêné dans le choix des
expressions; qu’on n’aurait donc pas hésité à employer
les te rm e s usités, et à d ire : J e su b stitu e 3 o u j e c h a rg e
d e c o n s e r v e r et d e r e n d r e , si l ’on avait entendu réel
lement faire une substitution fidéi-commissaire.
-Fixons-nous aussi sur les caractères de cette sorte de
substitution.
Ces caractères sont indiqués dans la définition que
donne l’article 896 du Code civil, dont voici le texte :
« Les substitutions sont prohibées.
« Toute disposition par laquelle le donataire, l ’héri« tier institué, le légataire sera chargé de conserver
« et de rendre à un tiers, sera nulle.' »
�( 25 )
l û<)
Nous avons clioîsi cette définition comme la plus
claire et la plus juste; comme ayant été donnée par
le législateur lui-m êm e afin de prévenir toute équi
voque ; comme convenant aussi aux substitutions sur
lesquelles a frappé la loi d’octobre 1792 ; car nous
avons vu que cette loi et le Code civil s’appliquaient
à la même espèce de substitution.
L a définition du Code civil est d’ailleurs, à peu de
chose près, la même que celle donnée par M. Thevenot
d’Essoles, q u i, a p r è s y a v o i r l o n g - t e m s r é f l é c h i ,
définit la substitution fidéi-commissaire u n e d i s p o s i
tio n
de Vhom m e j
p a r l a q u e l l e 3 en g r a t if ia n t q u e l
q u 'u n , e x p r e s s é m e n t o u t a c it e m e n t } o n le c h a r g e d e
ren d re la ch o se à lu i d o n n é e ,
A
un
t ie r s
ou
une
a u tre
ch o se,
q u e l ’ o n g r a t if ie e n s e c o n d o r d r e ( 1 ) .
Quoique dans cette définition imparfaite ne soit pas
placée la charge d e c o n s e r v e r , il est é v id e n t que cette
charge résulte de la définition même ; la condition
de rendre la chose donnée suppose nécessairement
qu’on la conservera; aussi l ’auteur explique-t-il, au
même chapitre, n° 2 1 , que c e l u i q u i e st c h a r g é d e
ren d re
n ’a p o in t,
en
g é n é r a l,
la
lib e r t é
in d é f in ie
d 'a l i é n e r , p u i s q u e , s ' i l a v a i t c e tte l i b e r t é i n d é f i n i e ,
l a c h a r g e d e r e n d r e s e r a it p r e s q u e t o u jo u r s s a n s e ff e t .
On voit donc que la définition du Code c iv il, soit
par sa conformité avec les anciennes définitions, soit
(1) Voyez le Traité des substitutions fidéi-commissaires, par M. Tlievenot d’Essoles, section i re, chapitre 1 " , S 2.
4
�(
)
par sa simplicité et son exactitude, soit par le but que
se sont proposé les lois nouvelles en annulant les
substitutions, est la seule à consulter pour vérifier si
une disposition ancienne est comprise dans l ’abolition
prononcée par la loi de 1792.
De cette définition ressort avec évidence le principe
que l ’on va poser :
Ce qui constitue essentiellement une substitution
jidéi-com m issaire
est
la
D E R EN D R E A UN T IE R S .
ch arge
de
co n server
et
_
Ce principe, nous l ’avons puisé dans une source
abondante en doctrine (1).
O r, rien de ce qui constitue essentiellement une
substitution ne se rencontre dans la clause ci-dessus
transcrite.
Il n’y a pas charge de conserver.
Il n’y a pas aussi charge de rendre h. un tiers.
§ I er.
I l n’y a pas charge de conserver.
Cette vérité n’est pas douteuse, d’après les termes
du contrat de mariage.
Le futur époux a la liberté d’aliéner, en tout ou en
partie , les biens donnés ;
Il peut les vendre à tel p r ix } clauses ou conditions
q u ’il avisera;
(1) Voir le Traité «les donations, déjà cité, tome i*r, page n \ }
a® édition. Voir aussi le Droit civil de M. Toullier, tome 5 , n° 1.
I
�( 27 )
Seulement il faut le consentement de l ’épouse}
Mais avec le consentement de celle-ci, il est permis
de ne rien conserver, de faire dispaxaître, par des alié
nations , la totalité des biens donnés.
Comment reconnaître, dans une faculté aussi illi
mitée , le principal caractère d’une substitution fidéicommissaire, la charge de conserver, qui constitue
essentiellement une telle s u b s t it u t io n disent les au
teurs , et sans laquelle, par conséquent, il ne saurait,
y avoir de substitution ?
Par une conséquence du pouvoir indéfini d’aliéner,
l ’on dit seulement dans le contrat que les biens qui
resteront de ceu x ci-dessus donnés appartiendront au
futur époux ou à ses héritiers.
Singulière substitution, qui n’assure rien aux per
sonnes qu’elle indique, et de laquelle il résulterait que
celles-ci n’auraient pas la moindre chose à réclamer,
dans le cas où to u t aurait etc vendu !
Comment trouver aussi dans la clause l ’application
des motifs principaux qui ont dicté l ’abolition des substi
tutions, la crainte des fraudes envers les créanciers, le
but de faire rentrer les biens dans le commerce?
Les biens donnés îi la dame et au sieur Capelle
n’étaient jamais sortis du commerce, et leurs créan
ciers ne pouvaient être trompés, puisque le pouvoir de
s’obliger à leur égard était évidemment renfermé dans
celui de vendre, de traiter, transiger, recevoir toutes
sommes, etc.
Cependant l ’argumentation s’est emparée de ces
///
�( =8 )
expressions m êm e, qui resteront des biens donnés 3
pour y puiser diverses objections.
Prem ière objection. Si la clause ne s’applique qu’à
ce qui restera des biens donnés, la dame Capelle aurait
fait une disposition valable en faveur du sieur Nouveau,
son second mari.
L ’objection n’est qu’ une équivoque.
L a dame Capelle n’était pas propriétaire absolue des
biens compris dans la donation } elle n’y avait qu’un
droit subordonné à un événement} et cet événement
était l ’existence d’enfans nés de son premier mariage.
Propriétaire dans ce dernier cas, elle eut pu disposer
k son gré des biens donnés.
Non propriétaire dans le cas contraire, elle n’avait
aucune qualité pour en gratifier qui que ce soit.
Aussi, par le contrat même, la faculté de disposer
à titre gratuit fut-elle restreinte à une somme de
3 ooo francs.
Mais e lle p o u v a i t , c o n jo in te m e n t a ve c son premier
m ari, tout aliéner à titre onéreux} et c’est en ce sens,
que l ’on ne peut pas dire qu’il y eût dans le contrat
charge de conserver, ni par conséquent substitution.
»
D euxièm e objection. Dans l ’ancien droit, on con
naissait la substitution ejus quod supercrit; ainsi,
fût-elle de cette nature , celle dont il s’agit n’en
aurait pas moins été annulée par les lois nouvelles.
Deux réponses écartent l ’argument.
*
Dans l’ancien droit même, la substitution ejus quod
�( 29 ) '
supererit n’ était considérée comme fidéi-commissaire,
q u ’autant que le pouvoir d ’aliéner était restreint.
Lorsque l ’ acte gardait le silence sur la quotité de
l ’aliénation permise, cette mesure était à l ’ arbitrage
du ju ge; il le fallait ainsi, pour que le fidéi-commis
ne fût pas vain.
In totum diminuere non potest, dit C u ja s, alioquin
inane esset fideicom m issum . L e x ait posse diminuere
bond fid e et e x ju s tâ causa (i).
Mais la loi n’avait rien à régler, lorsque l’acte dé
terminait lui-même la faculté d’aliéner, et lorsqu’il la
déclarait indéfinie. Alors, qu’on qualifiât la disposition
conditionnelle de substitution ou de toute autre ma
nière, ce qui était indifférent dans l ’ancien droit, au
moins ne pouvait-elle pas être considérée comme J id é icommissaire (2). O r, nous avons vu qu’il n’y avait
que cette dernière espèce de substitution qui eût été
abolie.
Dans le contrat de mariage du sieur Capelle, la
donatrice ne s’est pas bornée aux premières expressions,
par lesquelles elle attribuait au sieur Capelle ou à ses
héritiers, seulement ce qui resterait des biens donnés;
elle y a ajouté expressément un pouvoir indéfini de
vendre, la lib e rté , est-il d it, d 'a lién e r, en tout ou
en p a rtie 3 les biens donnés, c’est-à-dire, qu’elle a
autorisé à rendre complètement illusoire le don éventuel.
(1) Voir Thcvenot «l’Essoles, section 3 , chapitre 22.
(2) Voir Thcvenot d’Essoles, section i re, chapitre 1 " , n° a i.
�( 3o )
Donc il n’y a pas de substitution fidéi-commissaire.
Au reste, si l ’on consulte la législation nouvelle, on
verra que la substitution ejus quod supererit n’est
pas comprise dans l ’abolition qu’elle prononce.
Les auteurs et la jurisprudence s’accordent sur la
question.
M. Tou llier, dans son droit c iv il, remarque, en
deux endroits différens ( i ) , que la charge de rendre
ce qui restera des biens, à la mort du d o n a t a ir e id
quod supererit y ne constitue pas une substitution
prohibée. Il rappelle l ’ usage de ces sortes de disposi
tions sous la coutume de Bretagne , qui cependant
n’admettait pas les substitutions. Il dit qu’on doit
les considérer comme valables aujourd’h u i, « parce
n qu’elles ne contiennent pas l ’un des caractères essen« tiels des substitutions prohibées, la charge de
« conserver. »
L ’auteur du dernier Traité des Donations cite un
a r r ê t r e n d u , le i 4 n o v e m b re 18 0 9 , par la Cour
de Bruxelles, qui a jugé qu’ il n’y avait pas de substi
tution fidéi-commissaire, dans une clause par laquelle
l ’institué dans la propriété de tous les biens était chargé
de rendrej a u x héritiers de Vinstituant} ce q u 'il 1 1 au
rait ni dépensé ni alién é.
Ce profond jurisconsulte, en approuvant l ’arrêt,
fait observer qu’il ne faut pas avoir égard,'au moins
(1) Voir tome 5 , a0* 38 et 47 1 première édition.
�( 3. )
sur ce point, aux lois romaines, dont le génie était de
favoriser et d’étendre singulièrement les substitutions.
« On doit ne v o ir, ajoute-t-il, de substitution fidéi« commissaire , que la où l ’on doit nécessairement
«< supposer une charge de conserver et de rendre à un
« tiers (i). »
On pourrait trouver quelques opinions contraires;
Mais ces opinions rigoureuses ne s’appliqueraient
qu’à des cas où le pouvoir d’aliéner aurait été limité ;
sinon elles seraient en opposition directe avec les termes
comme avec l’esprit de la législation nouvelle, qui a
aboli seulement les substitutions dans lesquelles il y
avait charge de conserver; qui les a abolies, principa
lement par des considérations politiques, afin de pré
venir les fraudes dont elles étaient le germe, et pour
faii'e rentrer dans le commerce des biens considérables,
que ces sortes de substitutions en avaient fait sortir.
Ni les termes, ni l ’esprit de cette législation ne
s’appliquent à la disposition qu’invoquent les héritiers
Capelle, puisque la totalité des biens donnés pouvait
être vendue, et par conséquent perdue pour eux.
Une troisième objection est présentée.
Ce qui restera des biens donnés, dit-on, doit s’en
tendre de ce qui restera, les charges remplies : or, il
y en avait un assez grand nombre.
L ’objection est peu sérieuse.
Ï1 eût été fort inutile de dire qu’ori rendrait seule(i) Voir observations préliminaires j pages 1 1 2 et J i 3.
�( 3> )
ment ce qui resterait après le paiement des dettes.
Cela était de droit. Personne n’ignore la maxime :
B ona non dicuntur nisi deducto œre alieno. Il n’y
avait de donné à la dame Capelle elle-même que ce qui
n’était pas dù.
Ainsi ces expressions du contrat, les biens qui resteront de ceu x ci-dessus donnés, ne peuvent s’en
tendre que de ce qui n’aurait pas été aliéné, en vertu
du pouvoir illimité accordé au sieur et à la dame
Capelle.
Au reste, ce n’est pas sur les mots les biens qui
resteront, etc. , qu’il faut seulement se fixer. C ’est
cette liberté indéfinie d’aliéner q u ’il faut considérer,
ce droit de vendre la totalité des biens, droit extraor
dinaire en matière de substitution fidéi-commissaire,
droit évidemment exclusif de la charge de conserver,
qui forme l ’essence d’une telle substitution.
Ici se présente une dernière objection qui pa
r a ît r a p lu s f u t ile e n c o r e , p o u r p e u qu’on l ’approfon
disse.
On oppose que, si le sieur Capelle pouvait vendre,
et toucher le prix des ventes, il était tenu de recon
naître, sur ses propres biens, les sommes qu’il rece
v ra it, p o u r le tout être ren d u , le cas de restitution
arrivant, à qu i i l appartiendra.
On veut trouver dans cette clause une charge de
conserver, puisque ce qui ne se trouverait plus eu
nature devait se recouvrer en valeur.
�On répondra que la stipulation pouvait bien être
quelque chose pour la daine Capelle elle-même.
Car si elle avait eu des enfans de son premier ma
riage, événement qui l ’eût rendue propriétaire des biens
donnés, elle aurait pu exercer ses reprises sur les biens
de son mari; et si celui-ci avait vendu ses propres
biens, elle aurait conservé, à l ’aide des précautions
prescrites par les lois, le droit d’agir hypothécairement .
contre les tiers-détenteurs.
Mais si l’on considère à qui devaient appartenir les
biens donnés, dans le cas où la dame Capelle n’aurait
pas d’enfans de son premier mariage, on s’apercevra
que la reconnaissance des sommes reçues par le sieur
Capelle devenait absolument insignifiante, et ne pou
vait équivaloir à une charge de conserver.
E n effet, ce n ’ est pas un tiers étranger au sieur
C a p e lle , à qui les biens donnés devaient appartenir
par l ’ événement.
C ’est au sieur Capelle lui-même 3 ou à ses héritiers.
Or, dans ce dernier cas., le seul où la prétendue
substitution aurait eu son effet, il est évident que la
dame et lesieur Capelle pouvaient tout dissiper, savoir,
l ’ un et l’autre, en vendant les biens donnés; ou le
sieur Capelle seul, soit en disposant du p rix, soit en
contractant des dettes qui auraient absorbé la valeur
des biens.
Quel effet aurait produit alors la reconnaissance des
sommes ?
�( 34 )
Que serait devenue cette
conserver ?
prétendue charge de
Le sieur Capelle lui-même n’aurait pu se plaindre
de ses dissipations.
Ses héritiers n’auraient pas eu plus de droits que
lui} car tenus de ses faits, en leur qualité d’ héritiers,
ils auraient été obligés ou d’acquitter ses dettes, qui
auraient absorbé les biens, ou de renoncer a leur titre
d’héritiers, ce qui eût été renoncer aussi à la donation.
O r, il n’y a charge de conserver, dans une substi
tution fidéi-commissaire, que lorsque c’est en faveur
du substitué lui-même que la charge est établie.
Donc l’on ne peut pas dire qu’il y a substitution,
si celui que l ’on indique comme substitué a cependant
pu être privé de tous les biens.
Comme la charge de conserver constitue l ’essence
des substitutions aujourd’ hui proscrites, les héritiers
Capelle ont dû s’attacher à démontrer que cette charge
n ’ e x is t a it pas dans le contrat du mariage de leur père}
ils croient avoir rempli cette tâche} et ils pourraient
sans danger se borner à cette première discussion ,
parce qu’en l ’absence du principal caractère d’ une
substitution, d ’autres caractères moins importuns ,
fussent-ils même reconnus dans la clause dont il s’agit,
ne suffiraient pas pour faire déclarer la disposition
nulle.
Mais les autres caractères indiqués par les auteurs
n'existent même pas.
�(35)
'
§ II.
I l ri y a pas charge de rendre à un tiers.
Il est dit dans le contrat qu’au cas où la future
épouse vienne ¿1 d écéder sans enfans du présent m a
riage , les biens qui resteront seront remis et appar
tiendront au fu t u r é p o u x y et en cas de p ré d é c è s, a
ses héritiers> ou à celu i d 'e n tr e u x qu il aura choisi.
Nous démontrerons bientôt que ces expressions n’ in
diquent pas une charge de rendre, plutôt qu ’un don
conditionnel ou tout autre convention, q u i , même au
jourd’hui , serait licite dans un contrat de mariage.
Mais remarquons que ce n ’est pas un tiers y c’est
une partie contractante, le futur époux à q u i, dans
le cas prévu, doit appartenir la chose donnée.
Cependant ce qui indique en général une substi
tution fuléi-commissaire, c’est qu’un tiers non présent
à l ’acte est appelé à en recueillir le bénéfice, après la
mort du grevé (i).
L e grevé seul accepte ; et son acceptation su ffit,
parce que l ’obligation de rendre étant la charge de la
libéralité qui lui est faite , produit une action en
faveur du substitué.
Mais aussi lorsque le subtitué meurt avant le grevé,
la substitution s’éteint; l ’ héritier du substitué ne peut
demander les biens au grevé qui demeure affranchi de
la charge (a).
(1) Voir llicvcnot d’Essoles, section i , chapitre i et, n® n .
(2) Voir Thcvcnot û’Essolcs, sect.
chap, 28 el 29 , u05 5a 1 , 534
^
�( 30)
Pourquoi cela ?
Le même auteur nous en explique les raisons (i).
C ’est que les fidéi-commis diffèrent des stipulations
conditionnelles.
Dans les stipulations conditionnelles, l’espérance se
transmet à l ’ héritier ; e t , même après notre m o rt,
celui-ci recueille si la condition s’accomplit.
Ex
condition a li stipulalione t a n t u m s p e s e s t
D E B I T U M j r i y eamque ipsam spem in hœredem
transm ittim us, s i, priusquàm conditio extet 3 mors
nobis contigerit. Instit. De verb. oblig. , § 4 Cela est fondé sur ce que, dans les contrats, on est
censé stipuler, tant pour soi que pour ses héritiers.
Quia plerum que tant j i æ r e d i b u s N O S T R IS quàm
nobismet ipsis cavemus. L . 9 , ff. De probat.
Il en est ainsi notamment dans les legs et les ildéicommis, où il n 'y a personne qui stipule.
In hœreditatibus et legatis 3 dit C u jas,
T R A N S m it titu r i n
sp es
non
h æ r e d e r i j qu œ tam en tra n sm it-
titur in stipulationibus et omnibus contractibus.
E t remarquons avec M. Thevenot d ’Essoles, que ce
principe de la caducité du fidéi-commis, par le pré
décès du substitué, 11e s’applique pas moins au fidéieoinmis par donation entre-vifs 3 qu’au fidéi-commis
par testament (2).
Aussi l ’article 20 du litre i er de l’ordonnance des
substitutions déclare-t-il, d’une manière générale et
(1) Voir aux n05 5 iG ,
, 5 18 , 528 , 529 , 53o.
(a) Numéros 5a8 et suivaus.
�absolue, que ceux qui sont appelés à une substitution,
et dont « le droit n’aura pas été ouvert avant leur
décès, ne pourront en aucun cas être censés en avoir
« transmis l ’espérance à leurs enfans ou descendans. »
E t M. Furgole, sur cet article, en rappelant le § l\.
aux instit. D e verb. o b lig a t.j qui établit la trans
mission de l ’espérance aux héritiers, dit que ce para
graphe peut bien « être appliqué aux stipulations et
« aux contrats à titre onéreux, ou bien aux donations
« entre-vifs, en faveur du donataire ; mais il ne peut
« pas être appliqué a u x substitutions. »
Tels étaient les principes en vigueur, lors du contrat
de mariage du sieur Capelle père avec la demoiselle
Montlogis.
D ’après ces principes, l ’idée d’ une substitution pré
sentait celles :
i° D 'u n tier-s appelé à recueillir après le grevé, mais
non partie au contrat qui renfermait la libéralité;
a° D ’une libéralité conditionnelle, mais gratuite,
et qui ne soumettait le substitué à aucune charge, à
aucun sacrifice anterieur au moment où son droit serait
ouvert.
3 ° D ’une simple espérance qui s’évanouissait par le
prédécès du substitué, et que celui-ci ne transmettait
pas à ses propres héritiers.
Recherchons si ces idées caractéristiques d’une
substitution fidéi-commissaire conviennent à la dispo
sition qui est l'objet de notre examen.
Nous l’avons déjà dit ; ce n’est pas un tiers : c’est le
futur époux, c’est le sieur Capelle lui-même, rune
�( 38 )
des parties principales du contrat, à qui est attribué
la propriété des biens donnés, si le mariage qu’il con
tracte ne donne le jour à aucun enfant.
Cette libéralité conditionnelle ne lui est pas faite a
titre g ratu it, mais elle est le prix de sacrifices consi
dérables qu’on lui impose, et auxquels il s’oblige ,
puisqu’ il se charge de payer les dettes nombreuses
auxquelles étaient affectés les biens donnés, et de plus
une somme de 120,000 francs à la donataire.
E n fin , en se soumettant à des obligations, il stipule
par réciprocité ses propres intérêts -, car dans tout acte
synallagmatique, et sur-tout dans un contrat de ma
riage, toutes les clauses, quelle que soit la forme de
leur rédaction, sont réputées corélatives, et être les
conditions les unes des autres.
Bien plus, non-seulement il stipule pour lu i, mais
il stipule aussi pour ses héritiers, puisqu’il est expres
sément convenu que le droit conditionnel qui lui est
a t t r i b u é a p p a r t i e n d r a , en c a s d e p r é d é c è s , à ses h é
r itie rs ,
ou
à
c e lu i
d 'e n
tr eu x
(¡u i l
a u r a c h o is i.
(Expressions littérales de la clause.)
Ces diverses circonstances n’écartent-elles pas toute
idée de substitution ?
Ne caractérisent-elles pas, au contraire, des conven
tions réciproques, dont les conditions ont été dictées
par toutes les parties, même par le sieur Capelle, qui
achetait h grand prix, pour lui ou pour ses enfans, un
droit encore incertain ?
Com m ent conciliera-t-on , sur-tout avec les principes
des substitutions, la transmission, stipulée dans le
�( 39 )
I 9fi>
contrat, du droit ou de l ’espérance du sieur Capelle
à ses héritiers, ou même à l ’héritier de son choix?
Supposera-t-on que la donatrice, quoiqu’étrangère
à la famille Capelle, et sans autre motif qu’une pure
générosité, ou un étrange caprice, eût préféré, nonseulement le sieur Capelle, mais encore l ’héritier que
celui-ci choisirait un jour} qu’elle eût préféré, disonsnous , un inconnu à sa propre fam ille, aux enfans
qu’aurait pu avoir sa soeur d’un second mariage, à
elle-même enfin , qui pouvait succéder à cette soeur, et
qui réellement lui a succédé ?
Que l ’on cesse donc de parler de substitution fidéicommissaire.
Que l ’on reconnaisse dans l ’ensemble des clauses du
contrat de mari.age du sieur Capelle le do ut i/eidu droit
romain , c’est-à-dire des obligations et des avantages
réciproques, et auxquels le s lo is n o u v e lle s n ’ o n t pu
p o r te r a t t e in t e }
Que l ’on y cherche si l ’on veut une libéralité con
ditionnelle, mais une libéralité de la nature de celle
dont parle le savant auteur du Traité des Substitu
tions } une libéralité dont le droit est censé avoir été
fo rm é dès Vorigine,, quand définitivem ent la condition
arrive ( i ) ; une libéralité q u i, dans l ’acte même, n’a
pu être déclarée transmissible aux héritiers du sieur
Capelle, que parce qu’on a considéré celui-ci comme
saisi dès-lors des biens donnés, si révénemen€Çprévu
avait lieu dans la suite.
Quoique conditionnelle, une donation n’en est pas
( i ) Numéro 53o.
*
�( 4o )
moins valable, et n’en doit pas moins être fidèlement
exécutée, si la condition s’accomplit.
« Car cette donation, qui est faite pour avoir son
« effet en un cas, ne laisse pas d’être parfaite en sa
« disposition, dès l ’instant de la donation, quoique
« la condition ne soit pas échue (i). »
L e Code civil indique, dans l ’article 1 1 7 9 ? l ’effet
de l’accomplissement de la condition.
« L a condition accomplie a un effet rétroactif au
« jour auquel l ’engagement a été contracté. Si le créan« cier est mort avant l ’accomplissement de la condi« tio n , ses droits passent à son héritier. »
Tels sont les seuls principes applicables à la dispo
sition faite en faveur du sieur Capelle et de ses héritiers.
Un don est fait dans le contrat de mariage.
On déclare, il est vrai, qu'il est fait à la future épouse.
Mais aussitôt cette déclaration est modifiée par une
clause expresse.
L a future épouse ne sera propriétaire, qu’autant
qu’elle aura des enfans nés du mariage même qu’elle
contractait.
Si elle n’a pas d’enfans de ce mariage, en eùt-elle
d’une seconde union , son droit s’évanouit.
Alors, est-il d it, les biens s e r o n t r e m is et a p p a r
t ie n d r o n t
a u f u t u r é p o u x e t à s e s h é r it ie r s .
A in si, dans l ’ un des cas , c’est l ’épouse qui sera
donatiiiure.
Dans l’autre cas, c’est à l’époux, que les biens ap
partiendront.
(1) Ricard, Traite des Donations, partie première, u° io44 >
�( 4* )
D o n c , dès l ’ instant même du contrat de m a ria g e,
l ’époux a été saisi conditionnellement aussi bien que
l ’épouse.
L ’événement seul devait apprendre quel serait le
propriétaire des biens donnés.
L ’époux était saisi, puisqu’il transmettait à ses hé
ritiers, et que nul ne peut transmettre un droit qu ’il
n’a pas.
Donc la disposition contestée est un don condi
tionnel , non une substitution iîdéi-commissaire.
Argumentera-t-on des expressions seront rem is, pour
en induire une charge de rendre ?
Mais des inductions hasardées, des interprétations
forcees ne suffisent pas pour établir une substitution.
C est moins aux mots qu’aux choses } c’est moins à
1 ecorce qu’à la substance, qu’on doit s’ari’êter pour
juger de la nature d’une disposition : potîüs 'voluntatem qucim verba spectari placu it.
Ici la volonté des parties n’est pas équivoque ; et la
substance de la disposition résiste, comme nous l’avons
démontré , a toute idée de substitution.
Les mots seront remis s’entendent de la cessation de
1 usufruit des biens*, car la dame Capelle devait en
jouir jusqu à son décès. On dit tous les jours, dans le
langage du droit, qu ’à la mort de l ’ usufruitier les
biens seront remis au propriétaire.
Aussi la clause porte-t-elle que les biens seront remis
et appartiendront , ce qui indique la remise comme
(levant être l’eifet de la condition, dont l’accouiplisseG
�ment atirait attribué cl’avancc la propriété au sîeur
Capclle et à ses héritiers. (Voyez l ’article 1 1 79 du
Code civil.)
La distinction que nous venons de faire entre les
substitutions fidéi-commissaires et les dons condition
nels, est écrite dans l ’ancienne comme dans la nouvelle
jurisprudence.
Autrefois, dans plusieurs de nos provinces, les cou
tumes prohibaient les substitutions iidéi-commissaires.
Nous rappellerons notamment les coutumes d’A u
vergne et du Bourbonnais.
E t cependant, sous l ’empire de ces coutumes, on
considérait comme valables des dispositions semblables
à celle qui nous occupe.
t
Nous citerons deux des exemples rapportés par
M. Chabrol, sur l’article 53 du titre 12 de la coutume
d ’Auvergne. (Pages 1 2 6 , 12 7 .)
P rem ier exem ple. Gabriel Dossandon, qui avait
deux fils, et plusieurs filles, avait légué le quart de
ses biens à celui de ses deux fils qui vivrait jusqu’à
l ’àge de vingt-cinq ans; et s’ils atteignaient tous les
deux leur majorité., il donna les trois quarts du quart
à l ’aine, et le reste seulement au cadet.
L ?un des frères décéda mineur; le survivant réclama
le quart entier.
Les sœurs le lui disputèrent , prétendant qu’il y
avait substitution réciproque.
L a sénéchaussée d ’Auvergne jugea que la disposition
-n’éiait qu ’un legs conditionnel.
�D euxièm e exem ple. U n testateur avait fait u n
legs conçu en ces termes : « Je lègue 100 liv. à Titius j
« et où il viendrait à mourir sans enfans ou désun
it Mans, ledit légat retournera à mon héritier ab in« testât. »
L a sénéchaussée décida aussi que la disposition de
vait avoir son effet.
On pouvait dire cependant qu’il y avait charge de
conserver et de rendre à un tiers, si le légataire mou
rait sans enfans.
Mais les magistrats pensèrent que l ’on ne devait
pas interpréter avec rigueur, dans le but d’anéantir
la disposition.
M. Auroux , sur l’article 3 2 $ de la coutume du
Bourbonnais, rapporte, au n° 1 8 , plusieurs sentences
qui déclarent valables des legs conditionnels , dont
l ’analogie avec des substitutions paraissait frappante.
La
sé n éch a u ssé e (le M o u lin s c o n fir m a u n legs fa it
par Madeleine Bidon à Jean Bechonnet, son m ari, au
cas que leurs enfans vinssent à m o u rir, et non au
trement.
Elle ordonna aussi l ’exécution de deux autres legs
semblables •,
L ’ un fait par Antoinette Poincet , en faveur de
Jacques Ilermant, son m ari, p o u r avoir lieu après le
décès de la disposante et de sa f i l l e ;
L ’autre par lequel Gervaise Martin avait aussi
donné le quart à son m a ri, après le décès de G ilbert
Ja rm et, leur fils,
�( 44 ;
Ces diverses dispositions prêtaient plus aux subti
lités de la critique, que celle invoquée par les héritiers
Capelle; et cependant elles furent maintenues.
Telle était la jurisprudence en Auvergne et en BourbonnaiSj lorsqu’à été publiée la loi du i4 octobre 179 2,
qui n’a fait que rendre commune à toute la France
une prohibition qui était restreinte à quelques pro
vinces.
Doit-on être plus sévère aujourd’ h u i, pour anéantir
des actes faits de bonne foi, q u ’on ne l ’était alors
contre des actes dont on pouvait croire que les expres
sions avaient été déguisées dans le but d ’ éluder la loi?
L a jurisprudence nouvelle a été aussi sage et aussi
juste.
L a Cour de Riom a donné, par un arrêt du 28 avril
18 0 6 , un des premiers exemples de l ’équité des déci
sions nouvelles en cette matière.
Par leur contrat de mariage, du 3 mai 1 7 7 8 ,
Marien Bâtisse et Marguerite Chaumelte s’étaient
d o n n é ré c ip ro q u e m e n t to u s leurs b ie n s présens et à
venir, pour, par le survivant, en jouir en toute pro
priété, avec convention que les biens qu’ils pourraient
avoir seraient partagés par moitié entre les héritiers
de chacun des contractans, après la mort du survivant.
Marien Bâtisse meurt sans enfans, le i 5 juin 1790.
Sa veuve reste en possession des biens qu’ il avait
laissés.
Elle décède elle-même en fructidor.
Ses héritiers veulent tout retenir, sous prétexte que
�la clause renfermait une substitution iîdéi-com m is
saire , non ouverte à la publication de la loi d ’ octobre
1 7 9 2 , et abolie par cette loi.
L e u r système, accueilli en première instance, fut
rejeté par la C o u r , qui ordonna le partage de tous
les biens, par moitié, entre les héritiers du mari et
ceux de la femme.
Voici les motifs de l ’ arrêt :
1; Attendu que la disposition réciproque portée au
« contrat de mariage du
3 mai 1 7 7 8 , n ’a aucun ca-
« ractère de la substitution, et que les lois abolitives
« des .substitutions ne s’y appliquent pas;
«
«
«
«
«
« Attendu que le but de la substitution, et son effet
sont de réserver à l ’appelé nominativement en second ordre, les biens confiés au grevé, et que, dans
l ’espèce, non-seulement le survivant p o u v a it tout
a lié n e r o u d is s ip e r , m a is même qu’il ne s’y rencontre
pas de vocation personnelle; qu’au contraire, les
« héritiers de l ’un et de l ’autre des époux doivent
« recueillir, aux termes de droit, ce qui restera ;
«
«
»
«
«
«
« Attendu que cette disposition, purement conditionnelle, a eu pour objet unique de confondre les
biens des époux, de n’en faire q u ’une seule masse,
de laquelle le survivant aurait eu la pleine propriété,
mais qu i, au décès de celui-ci, et pour ce qui en resterait, devait se répartir par égalité entre les héritiers des deux époux ;
'< Attendu que cette clause n’a rien de contraire
�« aux bonnes mœurs , et qu’elle est licite en elle« même. »
Trois circonstances ont décidé la Cour :
L e pouvoir qu’avait le survivant de tout aliéner ou
dissiper y
L e défaut de vocation personnelle d’ un individu
t
désigné ;
L a restriction de la disposition à ce qui resterait des
biens.
Ces trois circonstances se rencontrent dans la cause
des héritiers Capclle.
Aucun d’eux n’était personnellement appelé dans le
cas du prédécès du sieur Capclle.
Il y avait liberté indéfinie d’aliéner et de dissiper.
Les héritiers du sieur Capelle ne devaient avoir que
ce qui resterait des biens donnés.
Quoi de plus frappant qu ’ une telle similitude!
L ’espèce étant semblable, la décision pourrait-elle
être différente ?
U n arrêt de la Cour de Bruxelles, du 17 avril 180 6,
a décidé qu'il n’y avait pas de substitution dans la
disposition par laquelle un époux avait donné à son
conjoint l ’usufruit de ses biens, dans le cas où les
enfans que V époux donateur laisserait à son décès 3
mourraient avant le conjoint donataire (1).
L a Cour de Rouen, par un arrêt du 10 juin 1 8 1 4 >
a déclaré qu’il n’ y avait pas substitution dans une
( 1 ) Sircy, tome G, a* partie, page 271.
�disposition faite en faveur de plusieurs pérsonnes, avec
la condition que la part de ceu x qui seraient décéde's
sans postérité 3 et sans avoir disposé, accroîtrait a u x
survivans.
Pourquoi? Parce qu’ il n’y avait pas charge de con
server (i).
L a Cour de Poitiers a considéré comme un don con
ditionnel , non comme une substitution, une disposi
tion entre-vifs, par laquelle le donateur avait déclaré
qu’en cas de prédécès du donataire, il fa is a it la même
donation à un tiers (2).
rL a Cour de Montpellier n’a pas vu de substitution
dans un testament par lequel un héritier avait été
institué pour « par lui jouir et disposer de l ’hérédité
« en bon père de famille, et à la charge de la rendre
« à ses enfans légitim es. »
Le principal motif fut que l ’ héritier n’avait pas été
soumis à Vobligation de conserver.
L a Cour de cassation a respecté celte décision, par
arrêt du 12 mai 1 8 1 9 (3).
L a Cour de cassation a jugé aussi qu’il n’y avait pas
substitution dans un testament par lequel, en insti
tuant Pierre et Paul ses héritiers, le testateur avait
(1) Voir l ’arrêt dans le Journal du continuateur de Denevers, t. 12 ,
suppl. , page 63.
(2) L arrêt est du 3 avril 18 18 ; il est rapporté dans le J o u r n a l du
continuateur de Denevers, volume de 1818 , suppl., page
(3) Voir 1 arrôt dans le Journal de Sirey, tome 20 , première partie ,
page 79. •
�déclaré que si l'un (Veux venait à m ourir sans posté
rité, sa portion profiterait au survivant.
L ’arrêt est du 19 juillet' 1 8 1 4- (1).
La même Cour avait jugé, le 12 pluviôse an 4 >
sous l ’empire de la loi du \l± novembre 1 7 9 2 , que la
disposition par laquelle plusieurs propriétaires d ’un
immeuble se donnent mutuellement leur portion, avec
accroissement entr’euæ à mesure clu décès du prém ou
rant, ne contient pas une substitution prohibée (2).
On pourrait multiplier les citations, mais cela de
viendrait fastidieux autant qu’ inutile.
Peut-être argumentera-t-on de décisions différentes.
Il serait peu étonnant q u ’il s’en rencontrât sur des
questions où l'argutie des raisonnemens et l ’arbitraire
des opinions sont livrés à un vaste champ.
Cependant les héritiers Capelle ne croient pas qu ’on
puisse leur opposer un seul préjugé qui ait considéré
comme substitution fidéi-commissaire, une disposition
qui ne r e n fe r m a it p a s , au m o in s im p lic it e m e n t , la
charge de conserver} réunie à celle de rendre à un
tiers non présent à l ’acle, et à un tiers qui n’aurait pu
transmettre son droit à ses propres héritiers , avant
d’en avoir recueilli lui-même le bénéfice.
C ’est l’absence de toute charge de conserver, charge
incompatible avec la liberté indéfinie d ’aliéner;
(1) Voir le Journal du continuateur de Dcncvcrs, tome 1 2 , p.
(2) Voir cet arrôt dans lo Journal dcDencvers, vol.de 1791 à l’an ta,
page 3a8.
�m
49 )
C ’est le concours du sieur Capelle au contrat qui
renferme la disposition éventuelle*,
C ’est la stipulation expresse, d’après laquelle les
droits du sieur Capelle sont transmis à ses héritiers
ou à l’ héritier de son choix, s’il meurt avant son
épouse.
1
Ce sont toutes ces circonstances, si opposées aux
caractères distinctifs des substitutions fidéi-commissaires, qui ne permettent pas de donner un tel nom
à la disposition dont il s’agit, et qui doivent la faire
considérer, ou comme un don conditionnel, ou comme
toute autre convention, que l ’on devrait respecter clans
un acte quelconque, que l ’on doit maintenir sur-tout
dans un contrat de mariage, le plus favorable des
contrats, celui que la législation a toujours entouré
d’une protection spéciale, et dans lequel elle autorise
le s p a c t e s , quels qu’ils soient, lorsqu’elle ne les in
terdit pas formellement.
Les héritiers Capelle doivent donc espérer que la
Cour ne verra pas de substitution fidéi- commissaire
dans le contrat de mariage de leur père , et qu ’elle
ordonnera l ’exécution d’un pacte solennel, sous la foi
duquel deux familles s’étaient unies.
Mais si quelques doutes s’ élevaient, les principes et
les circonstances devraient faire pencher, en faveur
des héritiers Capelle, la balance de la justice.
7
AVI
�D E U X IÈ J IE
P R O P O S IT IO N .
D ans le doute > la disposition devrait être maintenue.
C ’est un principe de justice admis par la législation
de tous les tem s, que « dans le doute sur le sens d’une
« clause, l'interprétation qui tend à valider l ’acte
« dont cette clause fait partie, doit être préférée à
« l ’interprétation qui tendrait à le faire annuler (i). »
Tel était le langage que tenait M. Merlin , en exami
nant la validité d ’une disposition testamentaire, atta
quée comme contenant une substitution.
Ce langage était emprunté de la loi 1 2 , ff. D e rebus
dubiis.
1
»
Quotiès in actionibus aut in exceptionibu's ambigu a
oratio est} commodissimum est id a c c ip i, cjuo res 3 de
qu d agiturj magis v a le n t, quàm pereat.
Cette rè g le b ie n fa is a n te est ra p p e lé e p a r tous les
auteurs., comme devant servir de guide h la décision
des magistrats.
L ’auteur du dernier Traité des Donations dit que
l ’on ne doit voir de substitution fidéi-commissaire que
là oii l ’on doit nécessairement supposer une charge de
conserver et de rendre.
M. ToUllier, dans son Droit civil français, enseigne
(1) Voir le Répertoire tic Jurisprudence , aux mots Substitution fulci~
commissaire, sect. 8, n° 7.
�(50
'V
que l ’esprit général de la loi, et celui’*de la jurispru
dence est de n’annuler une disposition qu ’ a u t a n t
q x iid le p r é s e n t e
n éc essair em en t
u n e s u b s t it u t io n , et
q u ’ e ll e n e p e u t ê tr e s o u t e n u e d ’ a u c u n e m a n iè r e ( i ) .
L ’équité 'des Cours royales a rendu de fréquens
hommages à ce principe.
’
La Cour'de Riom (premièré chambre) l ’a'appliqué ,*
notamment par un arrêt rendu le 28 mai 1 8 1 9 , dans
la cause de la famille Maret.
*
Il
s’agissait d’un legs universel fait par Bonnet
Maret en faveur de ses trois neveux, mais grevé de
1 usufruit de leur père.
Le testament contenait la clause suivante :
« Je veux que si quelqu’un d’eux (des légataires)
« vient à d é c é d e r s a n s e n f a n S j sa portion soit r e v e r « s ib le sur les'autres héritiers ci-dessus institués.;»
L e testament avait précédé de quelques jours seule
ment la mort du testateur.
Les légataires étaient non m ariés, et mèche im pu
bères.
‘
*
Le décès d’u n ’des légataires sans enfans ne parais
sait pas devoir ¿’entendre du cas où ce légataire mour
rait avant le testateur; car les enfans, n’étant pas
institués eux-mêmes, n’auraieni pas recueilli la portion
donnée à leur père.
*
'* '• ,
Les circonstances, comme le''sens le plus naturel
de la phrase, indiquaient donc que, dans l ’ intention
«
'
I
(1) Voir lomc 5 , page 68, première édition.
‘ »1
�clu testateur, après l ’ouverture même du legs, si l ’uix
dos légataires qui aurait recueilli mourait sans enfans,
la chose léguée retournerait aux autres , ,c’est-à-dire
serait rendue, ce qui emportait charge de conserver.
Cependant la Cour pensa qu’on pouvait interpréter
(
la clause dans le sens d’une substitution vulgaire, et .
qu ’il suffisait qu ’elle pût être entendue dans un Sens
propre à maintenir l ’acte, p o u r cju o n .d ü t p ré fé rer
cette interprétation..........;
.'
« Parce qu’il est de principe que les'clauses d’ un
« acte susceptible de plusieurs sens, doivent être inter« prêtées dans celui qui tend à maintenir l ’acte, plutôt
« que dans celui qui en entraînerait la. n u llité, potiùs
* ut actus va lea t quàm ut pereat ; ,
« Parce q u e , dit aussi la Cour , 011 ne voit pas, dans
« cette clause, la condition expresse de conserver et
« de ren d re, caractère essentiel aux substitutions que
« l ’article 896 a voulu défendre. » . > _ .
Ces motifs remarquables.peuvent être littéralement
a p p liq u é s a la disposition contenue dans le contrat de
mariage de 1 7 8 6 , puisque la clause constitutive de la
libéralité peut s’entendre d ’un don conditionnel, plutôt
même que d’une substitution fidéi-commissaire; puisqu’aussi on ne trouve pas dans cette clause la condition
expresse de conserver et de rendre , caractère essentiel
des substitutions proscrites par la loi de 1792 comme
par le Code civil.
L a Cour de Limoges, dans un arrêt du 3 janvier
1 8 i G, eu déclarait valable uu legs, attaqué de nullité
�(
53 )
commeprésentantunesubstitution prohibée, s’était alissi
fondée sur le principe q u e, « lorsqu’un acte quelconque
m présente un sens qui peut le faire valoir , il doit être.
« préféré à celui qui l ’anéantirait. »
L e legs était conçu dans des termes qui prêtaient
singulièrement k la critique : « J e donne et lègue à
Joseph et à M arie M eu lliera t, mes petit-fils et petitef i l l e , la m oitié de tous mes biens.........; et dans le
cas ou l ’un de mesdits petits-enfans meure sans enfa n s j e lu i s u b s t i t u e Vautre survivant.
Ici le mot même j e substitue venait ajouter an
danger du sens* que présentait le surplus de la clause.
Cependant la Cour de Limoges décida qu’il n’y avait
pas de substitution fidéi-commissaire prohibée, mais
seulement une substitution vulgaire autorisée par la
loi •, et la Cour de cassation a confirmé cette décision,
par arrêt du 1 1 ju i n 1 8 1 7 , en rappelant la règle d’une
interprétation favorable à l ’acte.
«
«
«
«
«
«
«
« A tten d u , dit l’arrêt de rejet du pourvoi, què les
termes dans lesquels était conçue la clause, pouvant
se prêter à l ’une ou a l ’autre interprétation , la Cour
royale n’a vio lé, ni l'article1 896 du Code c iv il, ni
faussement appliqué l’article 898', en interprétant
la vo lon té du testateur dans le sens q u i donne
fo r c e et exécution à l ’acte testamentaire dont il
s’agit (1). »
f.
Les expressions de ce m otif de la Cour suprême rie
v
(1) Voir cet arrôt dan» lu Journal de Sirey-, t. ^ y !*• partio, p. 294*
�p*
"
( 54 )
bont-ils pas xinéi invitation indirecte aux Cours royales,
d ’éviter toute interprétation tendant h annuler i les
actes, et à autôriser les donataires à se jouer de la vo
lonté de leurs bienfaiteurs? .
Cqtte volonté si respectable sera-t-elle blessée par les
magistrats eux-mêmes, destinés par la loi à l ’entourer
d ?une protection spéciale?
Cette volouté ne doit-elle pas être au contraire le
principal guide des décisions de la justice?
O r, dans la cause des héritiers Capelle , rien de
moins équivoque que l ’intention de la donatrice.
A la simple lecture du contrat de mariage de 1 7 86,
on reconnaît qu’elle a voulu que sa fortune! appartînt
au sieur Capelle, ou aux héritiers de celui-ci, si des
enfans ne naissaient pas de ce mariage même.
Il est donc évident qu ’elle a donné , dans ce cas, ses
biens au sieur Capelle.
E t les doutes même ne seraient-ils pas dissipés par
la c o n s id é ra tio n d es c h a rg e s c o n s id é ra b le s imposées au
sieur Capelle?
Croira-t-on que le sieur Capelle eut consenti h con
tracter pour lui et pour ses héritiers, des obligations
aussi. grandes, si lui-même et ses héritiers n’avaient
pas dù être indemnisés de leurs sacrifices par le don
conditionnel, mais irrévocable, qui lui était fait?
Le vrai sens du contrat de mariage n’aurait-il pas
été fixé, sur-tout par cette transaction du 20 décembre
x 7 0 1 » lerine (l’ un procès qui durait depuis plusieurs
années; par cette transaction à laquelle concoururent
�(55)
toutes les parties'intéressées , i la donatricë, la< dame
Capelle et le sieur Capelle; par. cette transaction où
les deux époux furent, également qualifiés de dona
taires , et où il fut répété plusieurs fois que la dona
tion avait été faite au mari comme à la femmei^par
cette transaction sans laquelle la*contestationîactuèllë
n’existerait pas; car si le sieur Capolle avait persisté à
renoncer à la donation, afin de s’ affranchir des charges
qui pesaient sur lu i, la donation aurait été révoquée,
ainsi que l’ordonnait la sentence ,du 28 août 17 9 0 ’ ;
la donatrice serait rentrée en possession de ses biens;
la dame Capelle les aurait perdus; et si le sieur C a
pelle en avait été privé lui7m ème, au moins aurait-il
conservé et transmis à ses enfans les sommes qu ’il em
ploya et les biens qu’il vendit pour remplir les obliga
tions auxquelles il se soumit une seconde fois par-le
traité.
v.*
: 1 . 1
Serait-il juste que la demoiselle Nouveau, c’est-àdire qu’une étrangère à la donation;, aux; donataires ,
à toutes les parties contractantes, profitât seule aujqurd hui du prix de tant de sacrifices P^Yc vo s non
vobis. .
.
.
.
I, —
.1 •
.•!(* ;; 1 "
-La veuve Capelle elle-même, et le sieur NôuSveau ;
son second m ari, n’ont jamais cru à une aussi grave
injustice. Qu’on se rappelle, en eifel les doutes exprimés
par la veuve Capelle dans sou seOoiul contrat de 111*1r^ 8 e ) où, tout en donnant au sieur Nouveau le bien
de la Rouqaette, elle prévoit que ce don pourra ne
�^
•
( 56)
pas être valable, et lui fait une libéralité secondaire
de tous ses autres biens.
p i.
t .
Les plus puissans moyens, les plus grandes considé
rations protègent la demande dtís héritiers Capelle.
L a clause qu ’ils invoquent résiste à l ’idée d’une
substitution fidéi-commissaire.
E lle ne présente ni charge
d e ren d re
a
un
t ie r s
d e co n server> n i ch arge
.
On y remarque au contraire le pouvoir indéfini
d’ aliéner.
L e sieur Capelle, destiné, dans le cas prévu, à
profiter de la libéralité, n’est pas u n t i e r s ; il est une
des parties contractantes, et même une des parties
principales.
Bien plus, il stipule non-seulement pour l ui , mais
aussi pour ses héritiers; car s’il meurt avant son épouse,
il tr a n s m e t à ses h é r it ie r s n a t u r e ls , ou à l ’héritier de
son choix, les avantages qui lui étaient promis.
Com m ent dès-lors l’assimiler à un simple substitué,
dont les espérances incertaines disparaissent, si le grevé
lui survit, et qui ne transmet rien , s’ il n ’a rien re
cueilli lui-même avant son décès?
Comment ne pas reconnaître à cette transmission de
droits une disposition étrangère aux substitutions,
c’est-à-dire, un don conditionnel,qui, par l'accomplis
sement de la condition, avait saisi le sieur Capelle dès
�l’instant du contratj d’ un droit que son décès a fait
passer à ses héritiers ?
Comment concilier aussi avec l ’ idée d’ une substitu
tion ,
les engagemens
les sacrifices
auxquels s’ est
soumis le sieur C a p e lle , sous la foi de l ’ exécution de
l ’avantage éventuel qui lui était assuré ?
L a loi du 14 novembre 1.792 n’a pu atteindre une
pareille disposition-, elle n’a frappé que les charges de
conserver q\xi avaient placé les biens hors du commerce,
et les charges de rendre à des tiers qui n’ étaient saisis
de rien.
L a loi a respecté les conventions réciproques, celles
sur-tout qui , consignées dans un contrat de mariage,
avaient été le gage de l ’ union des deux familles.
Les héritiers Capelle pourraient-ils avoir à redouter
une d é c isio n fa ta le à le u r s d r o its , eux qui ont en leur
faveur les principes unis à une jurisprudence constante
qui ne permet pas d’annuler une donation, si elle ne
présente nécessairement une substitution, et s’ il n’est
impossible de l ’ interpréter dans un sens propre à la
maintenir ?
L ’acte serait-il plus rigoureusement interprété par
des magistrats, qu’ il ne l ’a été par la donatrice et par
toutes les parties intéressées, lors du traité de 1 7 91 ?
Les tribunaux douteraient-ils moins des prétendus
dioits de la iamille Nouveau, que n’en doutait la
dame Nouveau elle-m êm e, lorsque, cherchant à. les
attribuer à un second mar i , elle exprimait si ciairc8
�ment ses craintes sur l ’exécution de ses injustes vo
lontés.
Les lois, les opinions des auteurs, les arrêts, l ’équité,
tout ce qu’il y a de recommandable devant la justice,
semble inviter les héritiers Capelle à attendre avec
sécurité l ’arrêt qui prononcera sur leur sort.
S ’ils succombent cependant, malgré tant d’avan
tages, ils se résigneront avec respect. Mais leur exemple
ne prouverait-il pas qu’elle est un guide quelquefois
infidèle, cette fière raison dont on fait tant de bruit!
L eu r exemple ne rappellerait-il pas cette sentence d’un
philosophe romain, selon laquelle il n’y a , dans les
opinions des hommes, rien de certain que l ’incertitude :
Solum certum nihil esse certi.
Monsieur TA SSIN D E V I L L E P I O N , Rapporteur.
Me A L L E M A N D , A vocat.
Me M A R IE , L icen cié-A vo u é.
RIOM, IMPRIMERIE DE SALLES, PRÈS
PALAIS DE JUSTICE.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle-Peuch-Jean, Pierre-Antoine. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tassin de Villepion
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
donations
contrats de mariage
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
assignats
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Pierre-Antoine Capelle-Peuch-Jean et les demoiselles Sophie et Marie Capelle, frères et sœurs, habitans de la ville d'Aurillac, héritiers de maître Antoine Capelle, leur père, appelans ; contre sieur Félix Valentin ; propriétaire, et la dame Sophie-Marie Nouveau, son épouse, de lui autorisée, héritière, sous bénéfice d'inventaire, de sieur Joseph-Aymard Nouveau, son oncle, lesdits mariés Valentin, habitans du lieu et commune de Calvinet, intimés ; en présence de dame Marie-Sophie Langheac de Montlogis, religieuse, habitante de la ville d'Aurillac ; Marie-Judith Langheac, veuve de sieur Piales ; Maire-Honorée Langheac-Lignac, toutes deux propriétaires, habitantes du lieu et commune du Viviers ; sieur Brassat-Murat, docteur en médecine, et dame Judith Langheac, son épouse, de lui autorisée, habitans de la ville d'Aubier ; autre Marie-Judith Langheac de Montlogis-Chanat, propriétaire, habitante du lieu de la Rouquette, commune de Cassaniouse, canton de Montsalvy ; sieur Marsillac, docteur en médecine ; Olympie-Silvie Langheac de Montlogis, son épouse, de lui autorisée ; Marie-Christine Langheac de Montlogis, Marie-Anne Chaudesaignes de Turrein, veuve de Claude Langheac de Montlogis, tutrice de leur fils mineur ; Joséphine-Judith Langheac de Montlogis, tous propriétaires, habitans du lieu de Dousques, commune de Vezac ; Pierre-Alexandre Rigobert, Jean-Alexandre et Pierre-Honoré Langheac de Montlogis, commune de Ladenhac, susdit canton de Montsalvy, aussi appelans.
Table Godemel : Bestiaux : Pour l’ancien législateur, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi, ils ne faisaient point partie de la donation du domaine, s’il n’y avait clause expresse et spéciale. Instruments aratoires : sous l’ancienne législation, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi ils ne faisaient pas partie de la donation du domaine, s’il n’y avait point de clause expresse et spéciale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1786-1819
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
58 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2504
BCU_Factums_G2505
BCU_Factums_G2506
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53489/BCU_Factums_G2503.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Calvinet (15027)
Cassaniouze (15029)
La Rouquette (château de)
Agrovieille (domaine d')
Saint-Michel (domaine de)
Mallaret (domaine de)
Ladinhac (15089)
Vézac (15255)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
contrats de mariage
donations
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53253/BCU_Factums_G1513.pdf
abddf4fe23abe7e076db5b3557e42cb1
PDF Text
Text
. i; > i ‘>. , ?
P RÉCI S EN RÉPONSE
PO U R
M. F r a n ç o i s
,
C A P E L L E , a n c ie n magistrat
in tim é e t a p p e l a n t
CONTRE
Sieur E
léazard
ROSTANG
ÉTIENNE
D A U D I N ,:appelans et intimés;
e n c o r e
A
ntoine
M
:11
D E S P R A T S , et co n tre dame M
S O B R IE R
guerite
D
c o n t r e
au d in
,
veuve
, appelans et intimés.
de
ar
Jean
T
:M)
, propriétaire d’un domaine qu’il a
acquis et payé depuis vingt-cinq ans, se voit obligé de
défendre à une demande en désistement formée par le
fils de sa venderesse. L e plan d’attaque, concerté avec
,
A
C a p e lle
�k
( 2 )
perfidie, présente des circonstances singulières. On voit
d’abord figurer D audin, bientôt après Desprats, qui
vient officieusement se substituer, sous le prétexte d’une
prétendue cession. Tous deux veulent détruire un acte
authentique, avec des assertions qui choquent la vrai
semblance et la vérité : mais au moins ni l’un ni l’autre
n’ont aucun risque ù courir. Daudin a toute sa fortune
en porte-feuille, Desprats n’a rien.à perdre s’il succombe
dans sa prétention; et enfin la dame D audin, venderesse,
a commencé à vendre tous ses biens pour rendi’e illusoire
la garantie qu’elle devroit à son acquéi-cur.
c T o u t ce que la calomnie peut inventer de plus absurde
a été mis en œuvre contre le sieur Capelle. La question
la plus simple est devenue monstrueuse dans ses détails;
et quand on a parcouru les volumes énormes de procé
dures , on est tout étonné de ne trouver autre chose qu’une
vente authentique exécutée pendant plus de vingt ans,
line ratification de cette même vente contre laquelle on
n’a réclamé que plus de dix ans après, et qu’on voudroit
détruire par le roman le plus1 grossier et le plus invi’aisemblable.
Il est cruel pour un homme d’honneur de se trouver
ainsi compromis avec- des fourbes ou avec des sots: mais
la cour fera justice de toutes ces allégations, et s’em
pressera d’ordonner l’exécution de deux actes solennels,
qui sont ù l’abri de toute critique.
FAITS.
• L e I er. mars 1 7 8 2 , 1a dam e So b rier, v e u v e D a u d i n ,
�(3 y
vendit à M . Cap elle un domaine appelé du Vernet. Elle a
consenti cette vente en son n o m , avec pleine et entière
garantie, et moyennant la somme de 21600 francs, dont
le contrat porte quittance.
' Ce domaine étoit alors en mauvais état ; les bâtimens
en ru in e , la plupart des héritages en jachère, nécessitoient les réparations les plus urgentes, ainsi que les soins
d'un maître vigilant.
O n a souvent répété dans le cours de la procédure
que ce domaine étoit à la convenance de M . Capelle,
qui le convoitoit depuis long-temps. Ce qu’il y a de vrai,
c’est que le sieur Capelle étoit déjà propriétaire dans le
môme lie u , mais qu’il étoit bien loin du désir d’aug
menter ses possessions dans un pays de montagnes, qui ne
présente qu’un terrain aride et difficile à exploiter ; il a
des propriétés plus agréables et plus utiles, et il ne se
détermina à acquérir qu’après les plus vives instances de
la dame Daudin.
M . Capelle ignoroit alors, q u o iq u ’on en dise, que
cette propriété résidoit sur la tête du sieur Daudin; il ne
connoissoit pas le testament d’Etienne DescafFres, grandoncle maternel de Daudin; il étoit au contraire tout simple
de penser que la dame Daudin avoit succédé à son oncle :
d’ailleurs , la garantie de la venderesse, qui ofïïoit une
solvabilité suffisante, devoit mettre l’acquéreur à l’abri
de toutes inquiétudes.
Depuis long-temps la dame Daudin disposoit des biens
de cette succession comme de sa chose propre. Elle avoit
ven d u , le 28 février 1775, à un sieur C o m b e , un do
maine situé u R olliac, moyennant la somme de 11000 fr. ;
A 2
�(4)
elle avoit également vendu, le n novembre 1780, en
qualité d'héritière de son oncle, une terre située au même
lieu de R o llia c, à un sieur Bertrand Greilh. Comment
dès-lors le sieur Capelle a u ro it-il hésité d’acquérir?
Daudin fils étoit le négociateur de la vente, et Daudin
avoit alors plus de vingt ans. Il devoit connoître les droits
qu’il avoit à ces im meubles, et il se gardoit bien d’en
faire part au sieur Capelle.
L ë sieur Capelle ne dissimulera pas qu’il ne paya point
la totalité du prix de la ven te, quoique le contrat porte
quittance. 11 ne compta que la somme de 6000 francs, et
souscrivit trois lettres de changes tirées sur l’Espinat et
D om ergue, négocians à Aurillac. Les deux premières
étoient payables à une époque très-rapprocliée, mais la
troisième avoit des termes plus reculés.
Cette vente une fois consommée, le sieur Daudin nous
apprend lui-même qu’il étoit alors fort épris des charmes
d’une jeune personne qu’il a associée à son sort. Sa mère
avoit sans doute des motifs püissaüs pour s’opposer ù ce
m ariage; et le sieur Daudin , dont la passion ne connoissoit pas de bornes, partit pour A v ig n o n , où il se crut
libre de se marier sans le consentement de sa mere: mais
il avoue qu’il employa des moyens bien extraordinaires,
et il confessé sa turpitude. Il enleva chez sa mère les
deniers qu’elle avoit i*eçus, ainsi que les lettres de
change souscrites par le sieur Capelle, dont la-première
n’étoit qu’à une échéance de quiznaine.
L a dame D audin , irritée contre un fils rebelle, se porta
à des extrém ités violentes ; elle rendit plainte contre lui :
cette plainte fut suivie d’informations dans lesquelles on
�3#
( 5)
pourroit découvrir des renseignemens utiles; mais les in
formations ont disparu du greffe.
Cependant la plainte a été suivie d’une sentence rendue
au bailliage de Vie,le 18 juillet 1782, et dont le sieur Capelle
est porteur. Cette sentence, rendue sur les conclusions du
ministère public , et sur le vu des charges et informations,
condamne Daudin fils à payer à sa mère la somme de
21000 francs; le condamne pareillement à lui remettre
trois signatures en blanc qu’elle lui avoit confiées*, faute
de ce, les déclare nulles, et défend à Daudin d’en faire
aucun usage, ainsi que des actes qui auroient été ou pourroient être écrits au-dessus d’icelles.
La dame Daudin est autorisée à faire sa'sir et arrêter
entre les mains de l’-Espinat et D om ergue, négocians à
A u rillac, et de Bordeaux , négociant à Paris , toutes les
sommes qu’ils doivent ou devront à D audin, tant à raison
des lettres de change par eux tirées, acceptées ou autre
m ent, avec défenses de s’en dessaisir en d’autres mains
que celles de la dame D au d in , à peine de payer deux fois.
Depuis cette aventure, qui eut une grande publicité,
Daudin a trouvé les moyens de se réconcilier avec sa
m è re , et de lui faire oublier ses torts.
A son retour, et parvenu à sa majorité , Daudin apprit
lui-m êm e au sieur Capelle le contenu du testament
d’Etienne Descafl'res, son grand-oncle ; et pour rassurer
entièrement l’acquéreur de sa m ère, il ratifia par acte sous
seing p riv é , d u 21 mars 1788, l’acte de vente du I er.
mars 1782.
L e sieur Cnpclle a joui paisiblement du domaine du
Vernet. 11 s’étoit élevé quelques discussions entre le sieur
ff*
�sn *
w *
...
( 6 )
Cnpelle et un sieur Sistrières, qui se prétendoit seigneur
du V e rn et, et vouloit, en cette qualité , exercer le retrait
féodal. M ais, par traité du 8 juin 1789, les parties transi
gèrent , et se départirent respectivement de toutes pré
tentions.
L e sieur Daudin fils paroît avoir voulu régler toutes
ses affaires avec la dame sa mère. O n voit q u e , par traité
du 7 octobre 1790, la dame Daudin reconnoît avoir reçu
de son fils une somme de 14100 francs ; celui-ci se charge
de payer à différçns créanciers de la mère une somme
de 6900 francs; et enfin la dame Daudin se reconnoît
débitrice envers son fils d’une somme de 27000 francs.
L e sieur Daudin fit quelques tentatives contre le sieur
v R ou pon , acquéreur de sa m ère, le 18 fructidor an 5 ; il
se pourvut en restitution, pour cause de lésion, contre
la vente que sa mère avoit consentie le 11 novembre 1780.
Ce genre de demande annonçoit que son fils reconnoissoit
à sa mère la capacité de vendre , puisque l’objet vendu
à Roupon provenoitde la succession de Descaffres. M ais,
comme toute demande en lésion étoit alors supprimée
par la loi du 14 fructidor an 3 , le sieur Daudin se vit
obligé d’abandonner une entreprise téméraire : il se dé
partit de sa demande, par traité du 2.5 brumaire an 6.
lies demandes en restitution ne pouvant faire fortune,
le sieur Daudin fit d’autres spéculations : il forma le projet
d’attaquer de nullité toutes les aliénations qui avoient été
faites par sa m ère, comme des biens Descaifres; mais sa
mère avoit contracté l’engagement personnel de le faire
v a lo ir , et il en résultoit contr’elle une pleine garantie.
Que lui en coûtoit-il pour rendre cette garantie illusoire ?
�(7)
Il avoit un empire absolu sur l’esprit de sa mère ; il la
détermina à vendi’e tout ce qu’elle possédoit, et il mit la
plus grande rapidité dans l’exécution de ce projet ; car
depuis le 7 nivôse an 6 , jusqu’au 11 du même m ois,
toutes les propriétés de sa mère furent aliénées. On voit
que Je 7 nivôse elle vend à.un nommé Geraud-Lavignè
^ une grange, jardin , et terres situés à T liié za c, moyen
nant 1910 francs; le lendemain 8 nivôse, autre vente à
Guillaume Vergne et consorts de difïerens immeubles
situés au même lie u , moyennant la somme de 18000 fr. ;
le même jo u r, autre vente à François B erger, pour là
somme de 3000 francs ; le lendemain 9 nivôse, elle vend
encore pour 6000 fr. d’immeubles a Antoine Delmas ; le
même jo u r, autre vente au sieur Rame , pour 5ooo f r . ;
le même jour , autre vente au sieur D elm as, moyennant
i 5oo francs; le même jo u r, autre vente à Jean A u rus j
moyennant 1000 francs; le même jo u r , autre vente à
Agnès R ig a l, moyennant 600 francs : enfin la dernière
vente qu’on connoisse, est du 11 nivôse an 6 ; elle est
faite encore à L avig n e, moyennant 800 francs. Toutes
ces ventes partielles excèdent la somme de 30000 francs ;
elles comprennent toutes les possessions de la dame veuve
Daudin ; elles ont toutes été soumises à la transcription ;
et le sieur C apelle, qui étoit bien loin de penser qu’on se
préparoit des moyens contre lu i, fut tranquille spectateur
de ces manœuvres perfides.
Daudin n’a rien voulu précipiter dans ces démarches,
pour les rendre plus utiles. Ce n’est que le 2 vendémiaire
an S , qu’il a consenti à un sieur Desprats une cession de
tous les droits successifs qu’il pouvoit amender comme
�(8)
-
héritier d’Etienne Descaffres ; et ce qui doit surtout
étonner, c’est que Daudin , qui prétend que le domaine
du V e rn e t, faisant partie de cette succession a été vendu
par sa mère à vil p rix , a cependant cédé tous ses droits
universels, même les rescindans et rescisoires immobiliers
moyennant une somme de 6000 francs.
Il est vrai que le sieur Desprats , son cédataire , n’est
qu’un personnage officieux et interposé , lié d’intérêts
avec Daudin , faisant la banque avec l u i , et connoissant parfaitement les valeurs et le taux de la place.
Quoi qu’il en soit, il est stipulé que l’officieux Desprats
pourra agir contre les tiers, au nom du cédant, et que
l ’acte vaudra procuration à cet effet.
D eux jours après , c’est-à-dire le 4 vendémiaire , le
sieur Daudin fait citer M . Capelle en désistement du
domaine du Vernet par lui acquis de la dame veuve
Daudin le I er. mars 1782; les parties comparoissent au
bureau de conciliation ; le sieur Capelle fils se pi’ésente
pour son père , et après avoir combattu victorieusement
une prétention aussi inconvenante , il argumente de la
ratification souscrite par le fils Daudin le 21 mars 1788.
Il est dressé procès verbal de non conciliation , et le
sieur Daudin n’alloit plus en avant. M . Capelle fut
obligé de le faire assigner le 8 brumaire an 8 , pour voir
dire que , sans s’arrêter à la demande en désistement par
lui formée , M . Capelle seroit gardé et maintenu dans
son acquisition.
L e ton d’assurance de M . Capelle déconcerta un ins
tant le sieur D audin; mais bientôt on fait paroître Des
prats , qui cite à son tour M . Capelle en désistement,
et
�Ô 74
( 9)
et qui déclare que quoiqu’il ait le d ro it, en vértu de sa
cession, de procéder sous le nom de son cédant, il doit
se mettre à découvert à raison de la ratification du 21 mars
1788 dont M . Capelle a excipé.
L e 17 brumaire an 8 , assignation de Desprats au sieur
Capelle, au tribunal civil de Saint-Flour. < 5 -■ 5
L e 1 5 floréal an 8, jugement contradictoire qui ordonne
que l’acte sous seing p riv é , portant ratification par Daudin,
sera déposé au greffe.
1
\
Bientôt après, le tribunal civil est! supprimé ; Daudin
traduit alors M . Capelle au tribunal d’Aurillac , par
exploit du 23 therm idor an 8 ; et le 7 fructidor su ivan t,
M . Capelle dépose au greffe du tribunal d’Aurillac l’acte
de ratification dont il s’a g it, conformément au jugement
du i 5 floréal précédent.
M . Capelle, à toutes fins, forma , le 9 frimaire an 9 ,
sa demande en recours et garantie contre la veuve Daudin,
sa venderesse.
L e 25 ventôse, M . Capelle présenta une requête pour
demander permission de faire interroger sur faits et arti
cles, le sieur D au d in , la dame Sobrier, sa m ère, et le
sieur Desprats. 11 obtint une ordonnance conforme , et
présenta les faits et articles sur lesquels il entendoit faire
interroger chacun de ces trois individus.
Il demandoit au sieur D au d in , i° . s’il avoit eu connoissance de la vente du domaine du V ern et, lorsqu’elle
fut consentie par sa mère ; 20. si depuis celte époque il
n avoit pas vu le sieur Capelle jouir constamment de ce
domaine , et y faire dos l’éparations considérables ; 3(\ s’il
connoissoit des dettes actuellement existantes de la sucB
�(: *9 )
cession d’Etienne Descaffres; 40. d’où provenoitla créance
d’environ 48000 francs qu’il avoit fait inscrire sur sa
mère ; 5 °. s’il éloit vrai qu’il eût vendu ses créances mobi
lières au sieur Chaimac des Chazeaux.
Pou r Ja dame Sobrier , il lui dem andoit, i° . si elle
avoit connoissance de quelques dettes qui fussent encore
dues par la succession d ’Etienne Descaffres; 2°. pourquoi,
à différentes époques, elle a souscrit des actes qui la cons
tituent débitrice envers son fils de sommes considérables,
et d’où provenoient ces sommes; 30. si elle savoit que
son fils, eut vendu au sieur Desprats la succession de Descaifres, de laquelle dépendoit le domaine du Vernet par
elle vendu au sieur Capelle le i er. mars 178 2; 40. si
elle avoit connoissance que çon fils eût vendu ses effets
mobiliers.
A l’égard du sieur Desprats, M . Capelle désiroit sayoir,
i ° . si à l’époque de la vente à lui consentie par le sieur
D a u d in , il ne savoit pas que depuis long-temps le sieur
Capelle étoit acquéreur et possesseur du domaine du
V ern et; 20. s’il connoissoit aucunes dettes passives de la
succession d’EtienneDescaifres ; 30. d’expliquer comment,
après avoir vendu ses biens patrim oniaux de Thiézac , il
avoit acheté un petit bien dans la commune de V i e ,
sujet à contestation , éloigné de son domicile et de ses
nouvelles acquisitions.
L ’interrogatoire a eu lieu le 2 germinal an 9. Daudin
fils a répondu affirmativement qu’il connoissoit la vente
consentie par sa m ère; il a également vu jouir le sieur
Capelle du domaine du V ern et, mais il ignore s’il a été
fait des réparations, parce qu’il n’est pas allé dans ce
�3 /6
C ii )
domaine depuis dix-neuf ans : il dit connoître des dettes
encore existantes sur la succession Descaffres, mais'il n’est
pas en état de déclarer à quelle somme elles peuvent se
monter.
Il convient avoir pour 48000 francs de créances contre
sa mère ; elles résultent de diiférens actes souscrits en sa
faveur, qui ont eu pour motifs des arrangemens de famille
étrangers au sieur Capelle, et dont il ne doit lui donner
aucune connoissance : au surplus, lorsqu’il a fait sous
crire ces actes à sa m ère, ce n’étoit pas dans l’intention
de les opposer au sieur Capelle.
Il déclare avoir vendu ses créances mobilières au sieur
Chaunac,son beau-frère. Lorsqu’il a cédé au sieur Désprats
les droits qu’il amendoit dans la succession Descaffres, il
ignoroit l’existence de la ratification dont il s’agit : le
sieur Capelle en étoit nanti, disoit-il, depuis dix-neuf ans.
S’il a donné à si bas p tix ses droits immobiliers, c’est
que l’acquisition dont se chargeoit Desprats étoit trèsincertaine , et dépendoit d’un événement litigieux envers
une personne très-entendue en procédure et de difficile
discussion. L e sieur Desprats, qui prenoit la vente à ses
périls, risques et fortune, n’avoit pas voulu donner une
plus forte somme ; et le sieur Daudin s’étoit vu obligé
d’accepter ses offres à cause des besoins où il étoit dans
ce moment.
O n demande à Daudin pourquoi., malgré toutes les
ventes que sa mère a consenties, il n’a pas été payé des
sommes qu’elle lui de voit.
Il repond que ces ventes n’avoient pour objet que des
arrangemens de fam ille, et qu’elles n’ont jamais été sousB a
�crites par sa mère dans l’intention de les opposer au sieur
Capelle. C’est encore par des motifs d’arrangemens de
famille étrangers au sieur Capelle, qu’il a donné ù Chaunac
ses créances mobilières pour une somme de ioooo francs,
quoique celles qu’il a contre sa mère se montent à 48000 fr.
Si le sieur Capelle a été cité en son nom , de lui D audin,
■'la vérité est néanmoins que le sieur Desprats étoit le pour
suivant sous le nom .de D audin, en vertu d’une clause
-insérée à cet effet dans la cession. IL convient avoir payé
les frais de la vente mobilière par lui consentie à Chaunac,
mais c’est une avance qu’il a faite pour son acquéreur.
A u surplus, il ne défend dans la cause que pour lu i; il
s’étoit d’abord adressé à M e. Guittard pour le défendre ,
.mais celui-ci se trouva chargé par le sieur Capelle : il
choisit alors M e. Courbaise; et comme ses intérêts étoient
différens de ceux de Desprats, Courbaise, chargé pour
Desprats , a remis le dossier de ce dernier.
- Interrogé s i , lors de la cession par lui consentie à
Desprats, il n’étoit pas créancier du même Desprats d’une
: somme considérable, il répond que depuis plus de dix
ans il a fait des affaires avec le sieur Desprats; que tantôt
ils ont été débiteurs et créanciers mutuels, mais il ne se
: rappelle pas dans: ce moment si u cette epoque il étoit*
, créancier ou débiteur.
La dame Sobrier, veuve D audin, a connoissance qu’il
, est encore du quelques sommes à la succession d’Etienne
;.Descaffres ; elle convient avoir souscrit des actes qui la
constituent débitrice de son fils de sommes considérables,
;mais c’est pour certains arrangemens et conventions de
-famille dont elle ne doit compte à personne; elle n’a
�/
( 13 )
aucune connoissance des ventes qu’a faites son fils à
Desprats ou à Chaunac; elle a payé des legs et des dettes
de la succession Descaff'res, elle en a également payé pour
la succession de son mari ; mais ces payemens ayant été
faits à. différentes époques, elle n’en a pas conservé la
m ém oire, et ne peut en dire le montant. Elle désavoue
que son fils ait reçu le montant des ventes qu’elle a faites
de ses propres biens ; c’est elle qui a reçu et fourni quit
tance : elle convient que Chaunac lui a fait notifier la
vente que son fils lui a consentie de ses créances mobi
lières. Il n’est pas étonnant qu’elle n’ait point payé ses
dettes, quoiqu’elle ait vendu ses propres biens : les cir
constances de la révolution lui ont occasionné des dé
penses et des sacrifices considérables, et ont absorbé ses
fonds, de sorte qu’elle a été dans l’impossibilité d’acquitter
ses dettes.
V ien t ensuite l’interrogatoire de Desprats. Lorsqu’il
a acquis les droits immobiliers du sieur D audin, il avoit
ouï dire que le sieur Capelle jouissoit du domaine du
Yernet en vertu d’un acte n u l, comme n’ayant pas
acquis du vrai propriétaire. Il a oui dire que la suc
cession DescafFres étoit grevée de quelques dettes, mais
personnellement il n’en avoit point de connoissance par
faite.
On lui demande par quel m otif il a vendu ses biens
patrimoniaux de T h iéza c, pour acquérir un petit bien
dans la commune de V i e , sujet à contestation, éloigné de
son domicile et de ses nouvelles acquisitions.
11 trouve fort plaisant qu’on lui fasse une pareille ques
tion , il n’a presque rien vendu de Thiézac en compa-
�C *4 )
raison de ce qui lui reste ; et en achetant ce bien du
V e r n e t, il étoit certain de l’acheter du vrai propriétaire:
cependant s’il n’en a pas donné davantage, c’est parce
qu’il sa voit qu’il y avoit un procès à soutenir contre le '
sieur Capelle , et qu’il y avoit quelque difficulté d’arra
cher d’entrer ses mains un bien qu’il avoit su se pro
curer. Il déclare d’ailleurs n’avoir jamais eu connoissance
de la ratification consentie par Daudin fils ; il ignoroit
même si elle étoit enregistrée ou n o n , et il n’a su que
long-temps après son acquisition qu’elle n’étoit pas enre
gistrée. Il convient que les frais de vente ont été avancés
par Daudin fils ; mais il les lui a remboursés. Il ne de voit
pas grand chose à Daudin à l’époque de la cession ; il
a des comptes courans avec Daudin depuis longues années,
et se trouvant tantôt débiteur, tantôt créancier, il ne
peut pas fixer le montant de ce qu’il devoit lorsqu’il a
acquis.
Si le sieur Capelle a été assigné sous le nom de D audin,
c’est parce que Desprats s’étoit réservé cette faculté lors
de la vente ; mais voyant qu’il s’élevoit des contestations
entre les sieurs Daudin et C apelle, il avoit agi en son
propre et privé nom ; enfin il a été libi*e de faire trans
crire sa vente quand il l’a jugé à propos.
V oilà tout ce qu’ont produit ces différons interrogatoires.
O n voit qu’il y avoit un plan de réponses concerté entre
trois individus qui ne font qu’un. Cependant il résulte
de ces interrogatoires que la dame Daudin a vendu tous
ses biens sans payer aucune dette ; et quoiqu’elle ne pos
sède plus rien , elle doit encore 48000 francs à son fils;
elle est également débitrice de sommes considérables
�2>zo
( i5 )
envers Elisabeth et Louise Sobrier , et différens autres
particuliers.
Desprats n’a pas honte de s’avouer cédataire de droits
litigieux -, il a fait la loi à Daudin , quoiqu’il fût son débi
teur ; il n’a voulu donner qu’un prix m odique, parce
qu’il avoit à soutenir un procès , et il a été assez maladroit
pour ne pas s’apercevoir qu’on pourroit l’écarter par une
subrogation d’action, si d’ailleurs le sieur Capelle avoit
quelques risques à courir.
L e 2Ô brumaire an u , Daudin a reconnu l’écriture
et signature mises et apposées'au bas de l’acte sous seing
privé , portant ratification ; mais il a désavoué avoir écrit
en chiffres la date du 21 mars 1788 : il a demandé que
cette date fût soumise à une vérification. Un jugement
du i er. pluviôse suivant l’a ainsi ordonné : mais le sieur
Capelle a formé opposition à ce jugem ent, qui étoit abso
lument inutile ; il est convenu au procès que cette date
n’est pas écrite de la main de D au d in , et cette circons
tance est fort indifférente dans la cause.
Bientôt après on a vu éclore un tissu d’absurdités. L e
sieur Daudin a prétendu qu’on ne pouvoit lui opposer
la vente consentie par sa mère ; que cet acte lui étoit
étranger. Sa mère à la vérité avoit le pouvoir de vendre,
par le testament d’Etienne Descaffres, mais elle ne pouvoit le faire qu’i\ la charge de l’emploi ; et le sieur Capelle
etoit hors d’état d’établir que la mère eût fait un emploi
utile des deniers de cette vente.
La ratification personnelle de Daudin n’étoit, suivant
lu i, qu’une chimère ; il convient qu’il étoit majeur le 2
mars 1788 : mais le sieur G»pelle avoit cette ratification
jtf;
�(16\
dans les mains depuis le premier moment dé la vente;
il avoit eu la précaution de faire laisser la date en blanc,
et il lui a été facile de remplir ce blanc comme il a voulu.
Cette date a été visiblement mise après coup ; les chif
fres et le mot mars étoient écrits d’une encre et d’une
main différentes. Pour affoiblir le contraste, on avoit eu
la précaution de repasser la plume sur les lettres du corps
de l’acte, et de leur donner la teinte de l’encre de la
date ; mais la plume avec laquelle on avoit écrit la date
s’est trouvée plus fine que celle qui avoit servi à écrire
le corps de l’acte , et a laissé à découvert une partie de
l’ancienne écriture. Il paroissoit donc deux encres, con
tinue Daudin , et cette circonstance doit annuller la rati
fication ; elle est d’ailleurs donnée en minorité ; elle est
yague et générale ; elle n’a pas été faite double.
Enfin le sieur Daudin a dit que le sieur Capelle n’avoit
jamais p a y é , sur le pi'ix de la ven te, qu’une somme de
13800 f r . , dont le sieur Daudin a offert de faire raison.
L e sieur Capelle s’étoit servi de blancs seings que Daudin
avoit dérobés à sa mère , pour se donner une quittance du
surplus du prix de la vente.
C’est ainsi que Daudin veut détruire des actes authen
tiques.
'
Desprats a soutenu la sincérité de sa cession ; il a dit
que le sieur Capelle étoit sans intérêt pour la contester,
parce que s’il étoit propriétaire légitime du domaine du
V ern et, Desprats ne pourroit pas le lui ôter en vertu de
sa cession; si, au contraire, l’acte de 1782 est n u l , peu
importe au sieur Capelle que ce soit Desprats ou Daudin
qui rentre dans le domaine du Vernet.
La
�( *7 )
La dame veuve Daudin , de sa p a rt, a soutenu qu’eTle
ne devoit aucune garantie au sieur Capelle , parce qu’il
avoit connu le vice de la.vvüte lorsqu’il se l’é'toit fuit
consentir’, et qu’il avoit lui-même coopéré à la fraude.
L e sieur Capelle s’est défendu* avec toute la dignité qui
lui convenoit; méprisant les injures et les calomnies , il
a dit qu’il étoit:-porteur d’une vente valable’,’ ratifiée par
le fils , vrai propriétaire, et en connoissance dé Caùse. Le
contrat de vente porte quittance de l’entier-pn^’ i'il tn a
payé le montant en deniers du en lettres dé cluhige:1Les
'blancs seings que le fils Daudin avoue1avoir' dérobés h
sa m ère, ne pouvoient être d’aucune utilité au sieur
Capelle; il n’avoit pas besoin d’autre quittance que de
celle qui étoit portée au contrat de vente : une quittancé
particulière de la mère ne l’auroit^aà dispensé de payer
ses lettres de change à leur échéancé; Le sieur'Daudin fils
devroit donc imaginer quelque chose de plusVraisemblable.
Sa ratification n’avoit été donnée-qu’à sa'majorité : il-est
vrai que la date n’etoit pas écrito de sà main } mais c'étoit
à lui à se reprocher cette^ omission du sn négligence; En
supposant que la ratification eût été faite par lui en mi
norité, il auroit dû au moins revenir, dans lcs dix ans de
sa m ajorité, contre un engagement téméraire , ou contre
la surprise qu’il disoit faite à sa bonne foi. Cependant'H
avoit atteint plus de trente-six ans lorsqu’il a attaqué’,
pour la première fois le sieur'Capelle : il étoit donc abso
lument non recevable , quelque différence ‘qù’il puisse y
'avoir dans l’écriture de là date ou de celle de la ratifica
tion. Cet acte sous seing;privé n’avoit rien de vague ni
d’indéterminé, puisqu’il së rupportoit au seul objet vendu,
C
�( 18 )
au domaine du Vernet exclusivement. La ratification
n’avoit pas besoin d’être faite double, puisqu’elle ne contenoit pas d’engagement réciproque. Ce n’est point avec
des assertions ridicules qu’on anéantit des actes solennels;
mais dès qu’au mépris de sa. ratification le sieur Daudin
s’étoit permis de vendre ses droits à Desprats, il devenoit
garant de sa propre demande et de celle' de Desprats ,
-comme^teillionataire ;,et le sieur. Çapelle conclut expres
sément à cette garantie.
)
!
MaisjComment le sieux* Daudin étoit-il assez maladroit,
contre la teneur des actes, de soutenir que le sieur Capdle
n’avoit payé qu’une somme de 13800 fr. pour le prix de
sa vente, lorsque la dame.Daudin elle-même avoit fait
condamner son fils à lui payer la somme de 21000 francs,
par la sentence du 18 juillet, 1782 ? Quelle contradiction
ne résultoit-il pas du système de défense embrassé par le
sieur Daudin?
, Enfin, lesieur Capejle jouisçoit du domaine du Vernet,
*
i
avec titre et bonne fo i, depyis plus de dix ans; dès-lors
,il avoit acquis la prescription, puisque ce domaine est
situé en pays de droit écrit de la Haute-Auvergne.
Desprats ne valoit pas la peine qu’on daignât jeter un
i;egai*d,1sur sa prétention. Ce n’étoit qu’un p rête-n om
¡ou un vil cessionnaire, vilis htiurn redernptor, pour
se servir des expressions de la loi ; et sa cession ne pouvoit avoir aucune préférence sur la vente consentie au
sieur Cnpçlle.,
v
La dame, Daudin avoit vcnc]u avec pleine et entière
garantie. On lui faisoit jpuer,un rôle bien ridicule, lors
qu’elle cojivenqit avoir frauduleusement.vendu; elle ne
�»
( r9 )
pou voit argumenter de sa propre turpitiide , pour* sè d'f>~
penser de la garantie subsidiaire à‘ laquelle le sieur
Capelle avoit conclu contre tillef.
^ i (’ :i
L e sieur Daudin senti t ' touië1 la'1force ' de l’argitinent
résultant de la prescription dé dix ans! Pour s’y soustraire
il voulut se faire considérer comme une victime de1 la
révolution ; il prétendit avoir été mis en réclusion , et
invoqua la disposition de la ‘loi du 16 germinal ari 3 '
qui suspend là;prescription en faveur des détenu^/depiiis
le mandat d’arrêt jusqu’à la mise en liberté.
1
En cet état, la cause portée à l’audience-du tribunal
d’A urillac, le 1 r germinal an 1 1 , intervint jugement'eontradictoire',! q u i, en déclarant ihiïïe l a ‘vente fdu r'ermars 1782 , ainsi que la ratification du J2i mars 1788,
ordonne que le testament d’Etienne Descaffres,-ainsi que
la cession1 consentie par Daudin à Desprats, le 2 vendé
miaire an 8, seront exécutés suivant leur forme et teneur.
Le- sieur Capelle est condamne àtsë désister en faveur de
Desprats , céd^taire/dii domaine du Vernét •'comme fai
sait partie de là succession’ d’Ëticnne Descaffres, dont
Daudin est héritier , avec restitution des fruits et intérêts
d’iceux, i\ compter de la demande judiciaire,' ainsi que
des dégradations , s’il y en a ; t2t l e 1sieur Capelle est
condamne aux dépens envers’ Daudin et Desprats.
Î
*
v*»
• ' ** *
^a veuve Daudin est condam née'à; garantir lé sieur
Capelle des condamnations contre lui prononcées, avec
înterets et dépens; en conséquence , à rendre et rem
bourser au sieur Capelle la somme de 21660 francs, prix
princivil de la vente, les frais e t ’loyaux coûts d’icelle ,
avec intérêts du tout ¿ compter d e'la'-demande ; elle
C 2
�( 20 )
est condamnée aux dommages-intérêts résultans de l’évic
tion et de la vente faite par Capelle de la maison qu’il
avoit à son domaine du V ernet; elle est aussi condamnée
à payer les dommages-intérêts dûs au fermier pour la
résiliation de son b a il, suivant l'estimation qui en sera
faite par experts, lesquels estimeront en même temps
les dégradations, réparations et améliorations qui peu
vent avoir été faites par le sieur Capelle.
j ,
Daudin est condamné, suivant ses offres, à rendreet rem
bourser à Capelle, sur et en tant moins du p rix delà vente ,
la somme de 13800 francs, ainsi que les réparations et
améliorations, suivant l’estimation qui en sera faite, sauf
à lui à se régler avec Desprats pour la valeur des amé
liorations dont ce dernier doit profiter, et dont il peut
être tenu.
Sur la demande en garantie formée parle sieur Capelle
contre le sieur D audin, stellionataire, il est ordonné que
les parties contesteront plus amplement; la dame Daudin
est condamnée aux dépens envers toutes les parties.
Il-est indispensable de connoître quelques-uns des.
motifs de ce jugem ent, du moins quant à la nullité de
la vente et de la ratification.
Les premiers juges disent, d’une.part, que les biens
des mineurs ne peuvent être vendus sans observer, les
formalités prescrites; et que, d’apres les arrêts de règle
m ent, un testateur ne peut autoriser l’exécuteur testa
mentaire à vendre : ce seroit ordonner que les lois ne
seront pas exécutées.
Relativement à la ratification, toute vérification est
iuutile, dès que le sieur Capelle convient que la date n’est
�pas écrite de la même encre ni de là même main; mais
cette ratification est nulle, parce que Daudin a seulement
ratifié les actes que sa 'mère avoit consentis en faveur
du sieur C ap elle, relativement au domaine du Y ern et,
et que, d’après l’avis de Perrézius , toute ratification doit
être expresse et nominative. Il semble qu’elle s’applique
à plusieurs actes , tandis qu’il n’y a qu’un seul contrat
de vente; et la circonstance que la date n’est pas écrité
de la même main peut faire présumer que cette ratifi
cation avoit été donnée par Daudin avant la vente con
sentie par sa mère.
La vente de la mère n’avoit pu opérer aucune trans
lation de propriété j mais une simple obligation de
garantie.
1
L a ratification n’étant p'as faite double est insuffisante,
dès qu’elle est sous seing privé.
La prescription avec titre et bonne foi ne s’acquiert
que par dix ans entre présens , et vingt entre absens.
O n regarde comme absens ceux qui habitent dans des
ressorts de tribunaux différens.
Jusqu’à l’installation du tribunal de district d’A u rillac,
Daudin habitoit dans le ressort du bailliage de V i e , et
Capelle dans celui d’Aurillac.
Daudin a été majeur le 24 septembre 1787: jusqu’au
n décembre 1790, époque de l’installation du tribunal
de district, il ne s’est écoulé que trois ans neuf mois et
neuf jours, qui, réduits à m oitié, font un an sept mois et
vingt jours.
Depuis le 11 décembre 1790 , jusqu’au 4 vendémiaire
an 8 , il ne s’est écoulé que huit ans neuf mois et quinze
�( 22 )
jours, ce qui feroit en tout dix ans cinq mois et cinq
jours. Mais Daudin a été reclu comme suspect le 24
messidor an 2 ; il n’est sorti qu’en vertu d’un arrêté dit
comité de sûreté générale , du 17 pluviôse un 3 : il faut
distraire du temps utile celui qui s’est écoulé, pendant si
détention jusqu’à la publication de la l o i , qui est du 4
floréal an 3 ; alors il n’a couru que neuf ans cinq mois
et vingt-cinq jou rs, et Daudin s’est pourvu en temps
utile.
.
- Tels sont les seuls motifs qui ont paru utiles à rappeler ;
les autres font un volume assez considérable : mais ce
seroit entrer dans des détails bien fastidieux , si on vouloit entreprendre de les analiser.
Toutes les parties se sont rendues appelantes de ce juge
m ent; la dame Sobrier,' véuve Daudin, par acte du 13
messidor an 1 1 , interjette a p p el, en ce qu’elle est con
damnée à rembourser le prix de la vente du i er. mars
1782, quoique ce prix n’ait pas été reçu par e lle , mais
par son fils ; 20. en ce qu’elle a été condamnée en des
dommages-intérêts résultans de l’inexécution d’une vente,
lors de laquelle elle fut victime de la surprise pratiquée
envers elle par le sieur Capelle, qui connoissoit le vice de
la vente.
'
, Daudin , par acte du i 5 du même mois de messidor
an 1 1 , a interjeté appel de ce jugement, en ce que ,
par une disposition subséquente, il est dit que les par
ties contesteront plus amplement sur une demande engarantie solidaire que le sieur Capelle avoit cru devoir
former contre lui.
* Il n’y a pas jusqu’à Desprats qui ne sdsoit rendu aussi
�S %7
( 23 ) ,
appelant, par acte du lendemain 16 messidor, en ce que
le sieur Capelle n’a été condamné à restituer les jouis
sances du domaine d u V ern et qu’à compter du jour de
la demande judiciaire, tandis que ces jouissances lui sont
dues depuis l’indue détention du sieur Capelle, qui re
monte au i er. mars 1782.
E n fin, le 27 du même mois de messidor, M . Capelle s’est
aussi rendu appelant de ce jugem ent, pour les torts et
griefs qu’il a reçus par icelui, et qu’il se propose de dé
duire devant la cour. •
r
T e l est l’état de la cause. Daudin a cru devoir donner
une grande publicité à ses moyens, dans un memoire
qu’il a fait notifier, et auquel on va s’occuper de répon
dre sommairement.
L e sieur Daudin a étrangement abusé du droit d’écrire;
il s’est livré à des personnalités injurieuses envers un
ancien magistrat qui jou it, à juste titre, de l’estime pu
blique. 11 voudroit l’associer à ses extravagances et à ses
folies. Suivant lu i, M . Capelle auroit été le premier à
favoriser les écarts d’un jeune insensé qui oublioit tous
ses devoirs, le respect qu’il de voit à sa mère , sacrifioit
sa fortune et toutes les convenances à une passion dé
sordonnée. 11 avoit besoin d’argent pour épouser la jeune
personne dont il étoit épris, et il voudroit faire croire
que M. Capelle a profité de cette circonstance pour ac
quérir à vil prix un domaine qui lui convenoit. Il a
surpris des blancs seings à sa m ère, destinés à faciliter
la libération de M. Capelle. Mais comment cela est-il
possible, lorsque le contrat de vente consenti par sa inère
�'( M ) .
contenoit quittance de la totalité du prix? et quelle pou voit
' être la destination* de ces blancs seings? ■>
'•'C ’est trop s’arrêter à de pâveilles abs'urdités. M . Capelle
est porteur'd'une vente authentique,'au ier. jnars iy b s ,
d’après'laquelle il résulte que le s '21600 francs ont été
payés comptant ; et rien ne peut détruire un acte de cette
nature.
.1 . .;
Si le sieur Daudin a enlevé les lettres de changes sous
crites' pariM .- Capelle' au .profit dé’sa mère , : ainsi que
l’argent qu’elle avoit reçu, le siëur :Daudin l’avoit déjà
destiné aux frais de son voyage et de son établissement.
La dame Daudin alors n’accusa que son fils; c’est contre
lui seul qu’elle rendit plainte ; et jamais M . Capelle ne
fut compromis ni nommé dans cette- accusation.
La vente: consentie à M. Capelle étoit tellement pu
b liq u e, la sincérité en étoit tellement reconnue, que le
sieur Sistrières, se prétendant seigneur du V ern et, voulut
exercer le retrait féodal : mais comme le p rix de la vente
paroissoit exagéré au sieur de Sistrières, il imagina qu’on
l’avoit enflé pour empêcher l’eXereice de son droit; et
c’est à ce sujet que fut écrite la lettre de Daudin ; lettre
qui n’avoit de rapport qu’à la prétention du sieur de
Sistrières; lettre dont il sera encore question, puisqu’on
veut en tirer des inductions contre M . Capelle.
Pour! répondre5à ‘toutes les allégations de D audin,
M . Capelle doit se 1borner à d ire, 1^. qu’il est nanti
d’une vente consentie par la dame veuve Daudin avec
pleine et entière garantie; que cette vente doit avoir son
exécution, puisqu’elle a été-suivie d’une ratification-de
Daudin
�( 25 )
Daudin fils, propriétaire de l’objet vendu. Cette ratifi
cation, donnée en majorité, écarte toutes les prétentions
du sieur Daudin. E û t-il été mineur lorsqu’il a ratifié,
il n’a voit que dix ans pour se pourvoir con tre son enga
gement , d’après l’article 134 de l’ordonnance de 1539.
11 a laissé écouler plus de dix ans de majorité sans ré
clamer ; d’un autre côté, M . Capelle a joui avec titre et
bonne foi pendant plus de dix ans; et la prescription de
dix ans entre présens est admise en pays de droit écrit
de la Haute-Auvergnc.
Quels sont les argumens de Daudin pour i*epousser
des moyens aussi victorieux ? Il prétend, en premier
lie u , que la vente consentie par la dame veuve Daudin
est infectée d’une nullité absolue et viscérale. L a dame
Daudin 11’étoit pas propriétaire ; elle a vendu tout à la
fois, et la chose d’autrui, et les biens d’un mineur; elle
les a aliénés sans observer aucune des formalités pres
crites pour la vente des biens de m ineur; et d ès-lors
cette vente ne peut produire aucun effet.
Cette objection est absolument frivole. D ’aboi’d ce
seroit une grande question que celle de savoir s’il est
vrai que la dame Daudin ait vendu la chose d’autrui.
L e testament du sieur Descaffres étoit évidemment nul :
le testateur étoit atteint d’une cécité com plète, ce qui
obligeoit d’appeler un témoin de plus pour la validité
du testament ; et cette formalité est expressément recom
mandée, à peine de nullité, par l’ordonnance de 173^*
Si ce testament est n u l, la dame D au d in , héritière de
son oncle, étoit propriétaire exclusive du domaine dont
il s’a git, et par conséquent elle a pu aliéner valableD
�( a« )
frient. M . Capelle ne donnera pus plus de développe
m ent, quant à présent, ù ce premier moyen de nullité;
mais il observe que par ce même acte la dame Daudin
âvoit le pouvoir de vendre les biens du testateur ; elLe
avoit la faculté de vendre ou de délaisser des biens en
payement des dettes de la succession. Cette faculté n’a
rien de contraire aux lois ni à l’ordre public. La dame
D au d in , en vendant, a acquitté toutes les dettes de la
succession de son oncle, et il ne reste plus aucun créan
cier : c’est en vertu de ce pouvoir qu’elle a vendu à
M . Capelle; et, d’après le principe qu’on est toujours
présumç agir aux qualités qui peuvent rendre un acte
valable, il faudrait décider que le contrat de 1782 doit
avoir son effet.
Si la dame Daudin a vendu en son nom personnel,
personne n’ignore qu’on peut vendre la chose d’autrui
avec pleine et entière garantie; et la dame D audin, en
vendant de cette m anière, n’a pas eu besoin d’observer
les règles prescrites pour les ventes des biens des mineurs.
Il est vrai que le propriétaire de la chose vendue peut
dans ce cas la réclam er, et que l’éviction de l’acquéreur
ne donne lieu qu’à une indemnité en deniers contre le
vendeur-: mais comme le sieur Daudin a ratifié la vente
Consentie par sa m èi'c, il est lui-meme non recevable ;
il a contracté l’engagement personnel de la faire valoir.
L e sieur Daudin , embarrassé de cette ratification ,
s’attache principalement à soutenir qu’elle est nulle. Il
■est forcé de convenir que cet acte est écrit en entier de
sa m ain, et que la signature est la sienne; il n’y a que
la date qui ait été mise d?une main étrangère. Mais est-ce
�( *7 )
au sieur Capelle que Daudin peut faire un reproche, ou
de l’omission de la date, ou de ce qu’elle a été écrite
d’une main étrangère? L e sieur Capelle a reçu cette rati
fication telle qu’elle lui a été donnée, et n’a besoin de
descendre à aucune justification, parce que c’est à Daudin
à se reprocher, ou de l’avoir omise, ou de l’avoir fait
écrire par un tiers. Les actes sous seing privé ont la même
force que les actes authentiques; ils obligent irrévocable
ment les personnes qui les ont signés, et la foi leur est
due jusqu’à l’inscription de faux.
Q u’importe qu’on ait repassé de l’encre plus ou moins
noire sur l'ancienne écriture, pourvu qu’on n’ait point
altéré ou changé les termes dont s’etoit servi le sieur
Daudin : ces détails minutieux ne doivent point occuper.
Ce n’est point au sieur Capelle qu’on peut reprocher
d’avoir repassé une plume plus line, ou une encre plus
noire; c’eût été un soin inutile ou une grossière mala
dresse de la part d’un homme que D audin, Desprats,
et la veuve Daudin s’accordent à représenter comme trèsadroit et très-délié dans,les affaires.
Dans tous les cas, cette encre, cette plume ne détruisent
pas la ratification, n’empêchent pas qu’elle ne soit écrite
et signée par le sieur Daudin : ce ne pourroit être que
lui qui auroit fait ces altérations, pour se ménager à
l’avance des moyens d’attaquer cet acte. L e sieur Capelle
a dû la prendre comme on la lui a donnée, et n’est pas
présumé s’être amusé à répandre de l’encre plus noire
avec une plume plus fine, dès que cette précaution étoit
inutile.
L e sieur Daudin n’est pas plus heureux en rapportant
D 2
�( î8 )
cette date au temps de sa minorité. 11 avoit vingt ans lors
de la vente; il étoit par conséquent émancipé : dès qu’il
est domicilié en pays de droit écrit, la vente, s’il l’avoit
lui-même consentie, n’eût pas été nulle; elle n’eût été
que rescindable dans les dix ans de sa majorité. Il a donc
pu ratifier, comme il auroit pu vendre ; et il a dû se
pourvoir contre sa ratification dans les dix ans à partir
de sa majorité.
Mais le sieur Daudin ne se tient pas pour battu ; il
prétend que sa ratification ne seroit pas moins sans effet,
quand on supposerait qu’elle a été consentie en majorité.
E lle n’a pas été faite double; elle ne contient point
de prix ; elle est vague et générale, et ne s’applique pas
plus à la vente de 1782 qu’à tout autre acte.
L a ratification n’est pas faite double. Il n’en étoit nul
lement besoin. Les actes sous seing privé ne doivent être
faits doubles qu’autant qu’ils contiennent des conventions
synallagmatiques ou des engagemens réciproques; e t, par
exemple , lorsqu’il s’agit d’une v en te , s’il est imposé
quelques conditions à l’acquéreur, si le prix n’est pas
payé comptant, il y a nécessité que l’acte soit fait double,
parce que le vendeur contracte l’obligation de garantir
la chose vendue, et l’acquéreur s’engage, ou à exécuter
la condition, ou à payer le prix.
Mais lorsque la vente est pure et simple, que le ven
deur reconnoît avoir reçu la totalité du prix , alors il
n’y a plus d’engagement réciproque, l’acquéreur a rem
pli fous les siens; et la vente sous seing p rivé, quoique
non faite double, n’en est pas moins valable. Tels sont
les principes biens constans à cet égard; principes adoptés
�* 9 *
( 29 )
par la jurisprudence de la cour d’appel, qui a admis cette
distinction par plusieurs arrets, et notamment dans la
cause du sieur Berthier, de Brioude, pour lequel plaidoit
M e. P ages, de Riom.
D ’un autre côté, l’acte eût-il contenu des conventions
synallagmatiques, que le sieur Daudin ne pourroit plus(
opposer ce vice, dès qu’il a exécuté la convention portée
dans l’acte de ratification dont il s’agit. C’est ce qui est
textuellement décidé par l’article 1325 du Code c iv il,
qui porte que le défaut de mention que les originaux
ont été faits doubles, triples, etc., ne peut être opposé
par celui qui a exécuté de sa part la convention portée
dans l’acte.
L e sieur Daudin se trouve dans ces deux hypothèses.
D ’une part, sa ratification ne contenoit qu’un engage
ment personnel, le sieur Capelle n’en contractoit aucun
envers lui ; l’acte n’étoit donc pas synallagmatique : de
l’autre, le sieur Daudin a exécuté cette ratification, en
gardant le silence pendant plus de dix ans de majorité :
il 11e pourroit donc plus opposer ce prétendu vice, quand
bien même l’acte eût renfermé des engagemens réci
proques.
Et qu’on ne dise pas que le Code civil ne doit point
s’appliquer à l’espèce particulière. D ’une part, le Code
ne fait que rappeler les anciens principes; et de l’autre,
l’action étant encore entière et indécise sur la question,
le Code civil est la seule loi qu’on doive invoquer.
I-a ratification ne contient point de prix. Mais une
ratification est un acte de bonne foi qui ne fait que
confirmer un autre qui précèd e, et dout le prix se
�C 30 )
trouve dans la loyauté de celui qui le souscrit. D ’un
autre côté, le sieur Daudin n’étoit-il pas héritier de
sa m ère? ne devoit-il pas savoir qu’une demande en
éviction par lui formée auroit reflué contre sa mère ;
qu’il en seroit résulté une garantie coûteuse qui en
traîne des dommages-intérôts? Il a dû pour son intérêt
personnel confirmer la vente consentie par sa mère; il
l’a dû par respect et déférence pour elle : c’est autant
de procédé que de devoir; et le sieur Daudin l’a dit
d’autunt mieux qu’il convient avoir profité du prix de
la vente : comment oseroit-il donc prétendre que sa rati
fication a été faite sans prix.
E lle est vague et générale; et sur ce point le sieur
Daudin se livre à de longues dissertations. Pour appré
cier le mérite de ce m oyen , il est bon d’analiser l’acte
portant ratification. Il approuve et ratifie les actes que
sa mère a consentis en faveur de M . Capelle, du domaine
du V e r n e t, et de tout ce qu i en dépend, et promet
le f a ir e jo u ir en vrai propriétaire.
On demande si un acte de cette nature a quelque chose
de vague ou d’incertain, et s’il avoit besoin d’une plus
grande spécialité. L a ratification s’applique au domaine
du Vernet exclusivement : le sieur Daudin promet d’en
faire jouir Je sieur Capelle en vi’ai propriétaire : n’y
a-t-il pas intention bien expresse de confirmer la vente
de ce domaine , et de lui donner tout son effet ? Cepen
dant elle paroît insuffisante au sieur Daudin. Il invoque
la loi au code S i major foetus ratum habite rit \la loi 74 ,
au code S i m ajor fa ctu s altenationem factarn sine
decreto ratam habuerit; l’autorité de Perrézius sur la
�( 31 )
première loi; Dumoulin , l’Epine de (3 rainville, et le Code
civil.
Ces autorités ne sont pas choisies avec discernement.
Si les lois citées exigent une confirmation spéciale, c’est
en ce sens que celui qui approuve ait vraiment intention
de ratifier et de se soumettre à exécuter l’acte qu’il ratifie;
mais il n’est pas nécessaire de spécifier la nature, les
clauses ni la date de l’acte ; il suffit que la ratification
en rappelle/« substance, et fasse connoître suffisamment
l’acte qu’on approuve. D um oulin, qui a traité cette ques
tion s u r i’ancienne Coutume de Paris, au mot dénom
brem ent, nombres 88 et 89, distingue deux sortes d actes
confirmatifs; le prem ier, fuit en pleine connoissance de
cause, cum causœ cognitione et ex certa conscientia confrm a n tis quando enarrato loto tenore conjìrmati approbatur , recogniscitur et conjìrmatur. Cet acte, d it-il,
prouve autant, et fait foi comme le premier titre cons
titutif; il dispense celui qui le rapporte de produire le titre
primordial.
L ’acte qui est simplement confirm atif, et sans connois
sance de cause , confirm atiofacta in form a com m uni
quando non exprim itur ad longum ténor conjìrm ati,
ne dispense pas de rapporter le titre prim itif, et il faut que
la ratification s’y trouve conforme : voici comment il
s’exprim e, nombre 8 9 , Jn primo casu instrumentum
confìrrnalionis in fo rm a com m uni nonprobat ncc fa c it
Jìdem d e donatione privilegio vel. alio quovis jure c o t i Jìrinato , sed necesse est de ilio docere per instrumen
tum originale ,• secundo vero casu sufficit producere
instrumentum confi rniationis ex certa scientia et piene
�( 32 )
probat etiam s i non aliter doceatur de origin ali conJirniato.
V o ici donc la seule différence qui se trouve entre la
ratification faite en connoisance de cause, et où l’acte
qu’on ratifie est confirmé dans toute sa teneur , d’avec
la ratification qui n’est faite qu’en forme commune , et
où le titre prim itif n’est pas rapporté. La première fait
foi en justice , seule et sans qu’il soit nécessaire de rap
porter le titre originaire ; l’autre ne prouve qu’autant
qu’elle est accompagnée du titre prim itif-, mais c’est aussi
la seule différence qui s’y rencontre.
Eu appliquant cette autorité que le sieur Daudin invoque
lui-m êm e, quelle conséquence faut-il en tirer ? La vente
consentie par la mère , n’est pas rapportée dans son con
texte , ni avec sa date , et alors pour se servir de sa
ratification , M . Capelle doit rapporter la vente qui a été
consentie par la dame veuve Daudin , afin d’établir que
la ratification s’y réfère, et ne peut avoir d’autre objet.
L ’arrêt rapporté dans l’Epine de Grainville est abso
lument étranger à la question. Il s’agissoit de savoir si
une donation qui ne pouvoit avoir lieu que par contrat
de mariage , et qui étoit faite par un frère comtne se
"portant ¿fort pour sa sœur, avoit pu être ratifiée vala
blement par la sœur dans un acte postérieur au contrat.
L ’arrêt intervenu après partage déclare la ratification
nulle , ainsi que la donation , par cela seul que la dona
tion ne pouvoit être faite sans une procuration spéciale,
et qu’elle ne pouvoit avoir lieu qu’en contrat de mariage :
ce n’est pas là ce qu’il s’agit d’exam iner, mais seulement de
savoir si celui qui ratifie une vente consentie par une
personno
�A y
’ ( 33^)
.
^ ...
.
personne qui n’avoit pas le droit de vendre peut revenir
contre sa ratification. Les tuteurs ont toujours décidé le
contraire. B rillon , dans’ sort Dic’tiorinairë des arrêts, au mot
rotißention, s’exprime ainsi : Une'pêirsonne vend le bien
Jd’autrui, la vente fa’est pas bônriëi; mais si le propriétaire
ratifie, le contrat prend sq force du jour de la ratification'.
Il cite un arrêt du 7 février i;6 n , qui l’a ainsi jugé. rr
L e sieur Daudin n’est‘ pds plus lïeureüxPeii citant le
Code c iv il, qu’il ne traite encore qiié^de projet. L ’ar
ticle 1338 du Code civil ( loi 'du -17 pluviôse an 12 )
porte : L ’acte de confirmation ou ratification contre laquelle
la loi admet l’action en nullité ou en rescision , n’est
valable que lorsqu’on y trouve 'la substance de cette obli
gation. O r , la ratification du i^.^mdrs 1788 ne con
tient-elle pas la substance de la vente de 1782 ? Daudin fils
ratifie les actes que sa mère à consentis en faveur de M .
Capelle, du domaine du Vernet et de tout ce qui en
dépend, et promet le faire jouir en vrai propriétaire. Cet
acte s’applique essentiellement et exclusivement à la vente
de ce domaine et dépendances; il contient l’intention de
l’exécuter; il renferme l’obligation qu’entraîne la vente,
qui est de faire jouir l’acquéreur ; et il est ridicule d’exiger
une plus grande spécialité , de vouloir trouver du vague
dans des expressions qui ne peuvent s’appliquer qu’au
seul objet vendu , au domaine du Vernet.
L e sieur D audin, d’ailleurs, peut-il dire qu’il ne connoissoit pas la vente consentie par sa mère ? Dans sa
lettre du 28 mars 1782, il prouve qu’il dirigeoit toutes
les affaires de sa maison , et il donne à M . Capelle des
détails sur le cheptel des bestiaux, qui font voir évidem»
E
�\;v*
.
( 34)
ment qu’il connoissoit toutes les clauses de la vente. Dans
.celle du 10 août 1783, il reconnoît encore que M . Gapelle
a payé le prix soutenu au contrat. Il est bien déloyal de
la paît de Dqudin de vouloir abùsçr, des expressions de
cette lettre; elle n ’est point relative/aux conventions qui
avoient été faites entre M . Capelle et la dame Daudinr,
mais bien à l’interrogat que lui avoit fait subir le sieur
^S'strières , qui prétendoit que le prix de la vente-avoit
été exagéré; et lorsqu’ il a affirmé en justice, sous‘la foi
du serment, que M . Gapelle avoit payé l’entier prix ex
primé au contrat de ven te, ne doit-on pas être indigné
de le voir aujourd’hui avouer un parjure, le déclarer sans
_pudeur, pour avoir le plaisir d’inculper M . Gapelle, et
_se faire uu moyen contre lü i?jL a lettre du 25 mare 1787
est une ratification nouvelle de la vente; il reconnoît que
M . Capelle est propriétaire ; il l’engage à contester au
seigneur de V aladis, pour se dispenser par là de payer
60 fr. d’arrérages échus avant la vente ; et lorsqu’à la
suite de toutes ces lettres le sieur D audin, m ajeur, ratifie
.cette vente de 1782 , fera-t-il croire qu’il ii’a pas su ce
qu’il ratifioit, ce qu’il approuvoit, parce qu’il s’est servi
d’un terme générique , qu’il a parlé des actes consentis
,par sa m ère, quoiqu’il n’y eût qu’une seule vente ?
M . Capelle ajoute encore un autre m oyen, qui se tire
de la prescription de :dix ans entre présens : cette pres
cription , admise en droit é crit, demandç juste titre et
bonne foi. M . Capelle a l un et l’autre ; il a le titre, c’est
la vente de 1782 et la ratification de 1788 ; il est aussi en
bonne f o i , puisque la daine Daudin lui a vendu en son
nom personnel , et sans faire çoïinoîlre le testament
�( 3 5 );.
_ . . . .
.
d’Etíenne Descaffres. Ici D audia se ré crie , et prétend
que M . Capelle n’étoit pas en bonne fo i, parce qu’il a
su le vice de la ven te, et qu’il avoit connoissancë du tes
tament; il rappelle un passage de l’écriture signifiée le 8
floréal an 9 , dans laquelle le défenseur avoue que M .
Capelle avoit cette connoissancë. M . Capelle est étonné
lui-mêm e de cette déclaration, qui émane de son défen
seur : on ne peut l’attribuer qu’à l’inadvertance, parce que,
dans la vérité, M . Capelle n’á'connú le testamènt que
depuis la demande qui a été formée contre lui. Mais
M . Capelle n’a pas besoin de se livrer à d’autres réflexions
sur ce p oint, parce qu’on ne peut pas disconvenir qu’au
moins M . Capelleseroit en bonne foi du jour de la: rati
fication du I e r . mars 1788. Dès ce m om ent , il a eu le
titre du* véritable propriétaire. O r , depuis le I e r . mars
1788 jusqu’au 4 vendémiaire an 8 , date de la demande,
qui représentele 26 septembre 1799, il s’ést écoulé dix ans
six mois et vingt-six jours. M . Capelle auroit donc un
temps plus que suffisant pour préscrire ; et le sieur D audin
l’a si bien reconnu 4 qu’il a voulu recourir à un moyen
extraordinaire, pour prouver qu’il ne s’étoit pas écoulé
un délai emportant la fin de non-recevoir. Il invoque la
disposition de la loi du 1 5 germinal an 3 , qui relève de
la prescription les personnes qui ont été détenues à l'oc
casion de la révolu tion , ou du moins suspend le cours de
la prescription depuis le mandat d’arrêt jusqu’à la publi
cation de la loi. L e sieur Daudin prétend avoir été détenu
depuis le 24 messidor an 2 , et n’avoir obtenu sa liberté
que par arrêté du 17 pluviôse an 3. M a is le sieur Daudin
seroit bien embarrassé de prouver sa réclusion ; il n’a
E 2
�C 36; >*
jamais été détenu. L ’arrêté du comité de sûreté générale
dont il parle est un arrêté qui s’applique généralement à
tous les réclus, sans en désigner aucun; et M . Capelle est
porteur d’un certificat du secrétaire général de la préfec
ture du Cantal, qui constate que parmi les papiers des
ci-devant comités révolutionnaires qui existent dans les
archives de la préfecture, il n’est aucun registre qui date
les époques pendant lesquelles les reclus ont été détenus,
soit dans les maisons de reclusion, soit d’arrêt.
L e sieur Daudin voudroit encore écarter cette pres
cription , sur la circonstance qu’il n’étoit pas domicilié
dans le même bailliage que M . C apelle, et que dès-lors il
doit être réputé absent au moins jusqu’au moment où le
bailliage de V ie a été réuni au district d’Aurillac. Mais
le sieur Daudin est encore dans l’erreur. Suivant le droit
rom ain, on ne répute absens que ceux qui sont domiciliés
en différentes provinces ; et ici les parties doivent se régir
par le droit romain. A la v érité, quelques coutumes réputent absens ceux qui demeurent en différens bailliages -,
mais le statut de ces coutumes est réel, et ne peut s’étendre
au delà de leur territoire. On ne doit point considérer ces
dispositions particulières comme une règle générale du
droit français ; il faut toujours en revenir à la disposition
de la l o i , et on défie le sieur Daudin de citer une seule
loi du droit romain qui contienne une semblable dispo
sition : on verra qu’elles ne parlent que de ceux qui étoient
domiciliés en différentes provinces. D ’ailleurs, dans l’es
p èce, le bailliage de V ie ressortissoit au bailliage d’A u
rillac ; le domaine est situé dans le ressort du bailliage de
V ie , où étoit domicilié le sieur Daudin. Il pouvoit tous
�i
( 37' ) ’
les jours, à chaque instant, être témoin de la possession
et de la jouissance du sieur C apelle, et l’exception dans
laquelle il voudroit se placer n’est que ridicule.
M . Capelle daignera-t-il jetter un regard sur l’officieux
Desprats , qui convient avoir acquis des droits litigieux ,
qui n’a donné un prix modique que parce qu’il savoit qu’il
avoit un procès à soutenir, qui prétend avoir acquis lors
qu’il étoit déjà débiteur du sieur Daudin , et qui a osé se
plaindre du jugement, parce que M . Capelle n’est pas con„ damné à lui restituer les jouissances dépuis la vente d e i 782.
Il faut convenir que si, pour la somme de 6000 fr. payée ou
n on , Desprats obtenoit le désistement du domaine du V e rnet, acquis 21600 francs, et les restitutions de jouissances de
ce domaine depuis 1782, c’est-àdire, depuis vingt-trois ans,
ce seroit certainement une spéculation très-avantageuse :
on n’en fait pas d’aussi bonnes sur la place. Mais une pré
tention de cette nature n’est digne que du mépris : c’est
le comble de l’impudence ; et M . Capelle se doit à luimême de ne pas entrer dans une plus longue discussion
sur ce point. Il suffit de renvoyer aux motifs du juge
ment dont est appel.
La dame Daudin est aussi appelante; elle refuse de
garantir M . Capelle de l’éviction : on ne lui répondra
qu’un seul m o t, c’est que celui qui vend la chose d’au
trui est tenu de garantir. Lorsque le vendeur connoît
les vices de la chose, il est ten u , outre la restitution
du prix qu'il en a reçu , de tous les dommages-intérêts
envers l’acheteur. L ’article 1645 du Code civil n’est en
cela que la confirmation des lois anciennes et de la doc
trine de tous les auteurs. L a dame Daudin savoit mieux
�( '3 8 )
que personne qu’elle n’étoit pas propriétaire du domaine
du Vernet. Peu importe que M . Capelle le sût ou
l’ignorât ; il a pu se contenter de la garantie personnelle
de la vendéresse ; et cette dernière est tenue de tous les
effets qu’entraîne avec elle la garantie qu’elle a promise.
Il ne reste plus que la demande en garantie solidaii^e.
que M. Capelle a formée contre D audin, sur la demande
en désistement de Desprats. D audin, stellionataire, puis
qu’il avoit déjà ratifié au profit de M . C apelle, est
nécessairement garant de l’action intentée par Desprats.
L e jugement dont est appel a ordonné que les parties
contesteroient plus amplement sur ce chef. D o it - o n
regarder cette disposition du jugement comme purement
d’instruction, ou bien e s t-c e un déni de justice? Si
la cour pense que l’appel est recevable dans ce ch ef,
M . Capelle s’en plaint également, et prouvera dans ce
cas que sa garantie ne peut lui être refusée. Mais aupara
vant il faut décider si cet appel peut être examiné en
la co u r, et M . Capelle s’en rapportera sur ce point à
la prudence des magistrats. 11 ose même se flatter qu’il
sera inutile d’en venir à cette discussion , parce que M.
Capelle étant porteur de deux titres authentiques qui
Jui assurent la propriété inçommutable du domaine du
V e rn et, toutes les allégations de Daudin viennent se
briser contre ces actes. Les magistrats s’empressent tou~
jours d’accueillir tous les moyens qui tendent h confir
m er, à maintenir des actes solennels, ut potiùs actus
va ka t quàm ut perecit ; et la coiïr repoussera avec
indiguation des assertions calomnieuses et mensongères
qui ne peuvent atteindre un ancien magistrat dont l’exis-
�( 39 )
tence, la fortune et la probité sont à l’abri de toute
atteinte.
D audin, réuni à sa mère et à Desprats, peut-il espérer
quelque faveu r, lorsqu’on jette un coup d’œil sur la
conduite qu’ il a tenue jusqu’ici.
Ces ventes successives qu’il a fait consentir à sa m ère,
dans l’intervalle de trois jours, pour rendre sa garantie
illusoire; la reconnoissance de. 48000 francs qu’il lui a
fait souscrire à son profit; la cession de Desprats ; celle
faite à Chaunac, son beau-frère : toutes ces machinations
perfides, ne conviennent point à un homme délicat; et
lorsqu’il ose se permettre d’inculper M . Capelle, de lui
reprocher d’avoir manqué aux lois de l’honneur et de
la probité, on peut lui répondre avec le fabuliste : M utato
nom ine fabula de te narratur.
M e. P A G E S ( d e R io m ) , ancien avocat.
M e, M A R I E , avoué licencié.
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur d e la
Cour d ’a p p el.— Messidor an 13.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Fançois. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
ventes
abus de confiance
abus de faiblesse
prescription
éviction
minorité
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse pour M. François Capelle, ancien magistrat, intimé et appelant ; Contre sieur Eléazard Rostang, Etienne Daudin, appelans et intimés. Encore contre Antoine Desprats, et contre dame Marguerite Sobrier, veuve de Jean Daudin, appelans et intimés.
Table Godemel : Dol : 1. Vente du 1er mars 1782 critiquée de nullité comme ayant été surprise, à une femme, par des manœuvres concertées entre l’acquéreur et le fils mineur de la venderesse. Eviction : 2. si la vente d’un immeuble et la ratification qui en a été faite par son héritier, devenu majeur, sont nulles, le vendeur qui a contracté en son propre et privé nom et reçu le prix, peut-il être dispensé de garantir l’éviction sur le fondement que le vice du contrat même en est la cause, et que l’acquéreur connaissait l’incapacité du vendeur ? Exécuteur testamentaire : autorisé à vendre pour payer des dettes, peut-il vendre sans aucune formalité pendant la minorité de l’héritier ?... L’acquéreur doit-il surveiller l’emploi des deniers ? Prescription : l’acquéreur, dont le titre est vicieux, peut-il se prévaloir de sa possession, et opposer, en pays de droit écrit, de l’action en nullité et en désistement, la prescription de dix ans entre présents et de vingt ans entre absents ? Ratification : 1. l’acte par lequel l’héritier devenu majeur ratifie les actes passés par l’exécuteur testamentaire, soit-il, pour être valable, énoncer expressément les actes ratifiés ? cet acte, s’il est sous signature privée, doit-il être fait double ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1782-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1513
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1512
BCU_Factums_M0404
BCU_Factums_G1514
BCU_Factums_G1515
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vic-sur-Cère (15258)
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Domaine public
Abus de confiance
abus de faiblesse
éviction
minorité
prescription
testaments
ventes
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MEMOIRE
D’APPEL
SEANTE
EN R É P O N S E ,
A RIOM.
POUR
P
- An t o i n e - U r b a i n C A P E L L E ,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
Saint - C o n s ta n t , intim é;
i e r r e
CONTRE
Les
A
d m i n i s t r a t e u r s
d u
B
u r e a u
de
de la ville d’Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de Saint-Flour , le 20 floréal an I I .
b i e n f a i s a n c e
L es administrateurs du bureau de bienfaisance de là
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
�( 2 )
80000 francs , fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricorde de cette ville. Ils seront lus avec intérêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
Mais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordi’cs qui l’accompagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en dém ontrer
les inconvéniens, comme l ’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout entière, c’est au gouvernem ent,
qu’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’etre u tile,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
Être permanentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais linissent presque toujours par dégé
nérer.
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’ il rend
hommage aux vertus et h. la piété de ces dames respec
tables qui trou voient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoieut la chaumière du p a u v r e , soulageoient ses
�(3)
besoins, et lui donnoiént cet marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre respect, qui fut créé pour notre bonheur!
femmes vertueuses et tendres, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion? par qui avez-vous été remplacées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour eu obtenir
la délivrance?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orotliée Cabridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rillac dans le
courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de conuoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-Urbain C a p clle , fils aîné du sieur C apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent à la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent à une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 fr ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en usufruit, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�■ U ii
(4)
plusieurs immeubles en toute p ro p rié té , dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seu l, de la seconde classe,
et le plus considérable de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
«c P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« communiqués par feu M . Cabridens, mon fr è r e , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uvre de la miséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ uvre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funtanges est
« la su p érieu re, la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétienne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’A u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ uvre que 60000 fr. ; qu’il
« sei’a em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le revenu de ladite somme
« de 20000 fr. peut le com porter ; et que le revenu de
«
«
«
«
«
«
la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r .,
soit em ployé à assister et soulager le surplus des pauvres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
léguée, aux conditions mentionnées, soit payée auxdites dames administrant ladite Œ uvi’e, sur la quittance
�¿1> i
(5)
« qui en sera fournie par ladite dame de F ontanges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veu x et entends qu’au cas où ladite Œ uvre de la
« miséricorde v în t , dans le tem ps, à être réunie ù l’hô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je veux-, d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u vi'e, Ja sse
« retout à mon héritier. »
Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ uvre de la misé
ricorde ,• qui étoit administrée par des dames pieuses,
mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cétte même ville
qu’en 1777.
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l ’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C a y la , qui étoit chargé
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
de la succession, jusqu’à ce que l ’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e prix des ventes et des revenus de la succession devoit
•être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquitte
ment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Los legs de première classe, autres que celui qui fait
l’objet de la dem ande, devoient être payés dans l’année
du décès. L e prix du m obilier fut insuffisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�,r
.
<■6 )
' I l est probable qu’en 1789, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. 11 est au moins certain que cette Œ uvre n’a jamais
réclamé ni formé aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur G ayla, exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y lit môme
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u rillac, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque lé sieur A ntoine Capelle, père et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu , se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pou voit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sceurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit caduc, et beau
coup d’autres étoicut également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieur Gayla père vint à décé
der. Son iils, en vertu du môme testament, prit la jouis
sance des biens, qu’il a gardée jusqu’en 1796. Il n’est pas
exact de dire qu’il remit l’hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en clu rg e r; et ce n’est
(*) C ’est une erreur qui s’est glissée dans le» copies : il n’est point question
lie Sœuri-grises dans le testament,
�4 ^
i l )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, Voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit la succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Il est d it, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
(c et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse Être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant pou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« pour Tintérêt de son h éritier, et encore sans qu’il soit
« tenu de payer aux légataires aucun intérêt de leurs
« legs. »
lies employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait à une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alicu , pour le payement de cette somme
de 80000 ii'. L e 8 thermidor même année, ils firent un
nouveau commandement*, e t, sur l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Capelle avoit encore à discuter contre
)
�( 8 )
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulut faire de cette somme l’em ploi auquel elle étoit
destinée,
Bientôt après, l’hospice d’A urillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle.
Cette prétention ne tendoit qu’à faille exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice 11’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brum aire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres furent nom^
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer lo
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
miséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateursy disent que cette Œ uvre n’a jamais été supprimée x
qu’elle n’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749»
l’CEuvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespatentes.
L e cas p ré v u par la testatrice, p o u r le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r ., n’étoit pas a rriv é ; le
Ico-s devoit donc être versé dans leurs mains,
T els sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
citation devant le tribunal d’A u rillac. Le sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. E t comme on a paru
im prouver la récusation , il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D clorlz-L abarth e, l’un des juges, est membre
�( 9 )
«lu bureau de bienfaisance ; les sieurs L a val et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même v ille ; ils a voient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur Destaing , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julheset V e rn io ls, l’un étoit le défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u ïilla c , qui ne pouvoient remplacer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l’intérêt de tous
les liabitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : en
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
Ce jugement fut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse suivan t, les administrateurs citèrent euxmêmes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
6?étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou-;
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u rilla c, le legs dont il s’agit, et à en pour
suivre la délivrance devant les tribunaux; 20. d’un arrêté
B
�l-..
( 1 0 }
du conseil de préfecture, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les trib un aux, les poursuites com
mencées contre le sieur Gapelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S ain t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i° . Suivant eux , les legs faits pour cause pie devoient
recevoir leur exécu tio n , et être jugés favorablement.
Xi’incnpacité du légataire ne rend pas même nul le legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner
l’emO
ploi et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des legs , et
l’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
• 5°. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u vre de la m iséricorde, comme corps et communauté;
mais il fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de ¿'Œ uvre de la miséricorde >
�44&
( 11 )
cela n’a été que pour désigner l’espèce et la qualité- des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit eu
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n’a jamais été réunie i l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile, n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde; mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été conservées.
8°. L a condition du retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’avoit p révu e; et, en matièi’e favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. O n ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les p révo ir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’une grande révolution ,
surtout lorsque tout est rentré dans la ligue prescrite par
le fondateur.
io °. La réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges, et court tous les risques :
B a
�V ,H
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
Mes périt dom iho.
pertes considérables.
i i °. L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quarte falcidie. Elle n’a lieu qu’au profit
de l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n’a p;:s lieu pour les
legs pies. 11 im pliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuffisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son cô té, le sieur Capelle soutint, i° . que le legs fuit
u l’Œ uvre de la m iséricorde étoit cadu c, soit lors de sa
confection, soit au moment de fou vertu re de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation, aucune dotation, aucun établisse-:
ment avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée'
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établisseinens,*
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations
associations et hospices: d’où il résultoit que le legs auroit
cessé d’être e x igib le, du m oment que l'intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le coniioit exclusi
vem ent; et alors la réversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. L e patrimoine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g en re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée héri-
�4 4 /
( 13 )
Jtièrc par son m a ri, de qui elle tenoit la plu s'grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Ca pelle , son petit-neveu et
son liéritier présom ptif; et la dame Galieu dcvoit moins
se considérer comme p ro p rié ta ire, que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
etoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères m acédons, ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Gapelle
ne pou voit être tenu que d’en payer annuellement l’in
térêt.
6°. E n pays de droit é c r it, l'héritier institué ou
ab intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 174 9 , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à. acheter des rentes
sur l’état ; et le sieur C apelle, en ce cas, pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du leg s, en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
La cause portée en cet état au tribunal de Saint-Flour ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement con
tradictoire , qui déclare le legs fait par Françoise-D oro
thée de Cabridens, veuve de Geraud Galieu , à l’Œ uvrc
de la miséricorde de la ville d’ /Yurillae, par son testa
ment du 4 octobre i j 85 , nul et de nul eilèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette même ville non - recevables dans la
�* VU w
■ ■
t 14 ^
demande par eux form ée contre le sieur C ap elle, héri
tier de la dame G a lie u , en délivrance de ce môme
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
« i° . D ’après la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
P ar une exception néanmoins établie par la
jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
pie , les legs pieux faits au profit des communautés
illicites étaient appliqués aux pauvres ou autres
œuvres p ie s, et la disposition, même imparfaite ,
n’empêclioit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. M ais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1 7 3 5 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’édit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p ie , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
cc 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui ren ou cc 2 ° .
«
«
«
cc
cc
cc
cc
cc
a
cc
cc
«
cc
«
a
te
ce
«
velle les défenses de form er aucun établissement
de corps ou communauté quelconque , sans l’obtention préalable de lettres-patentes, sont nommément
compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u
nautés sous prétexte d’hospiçes. Par une disposition
rigoureuse et nouvelle , qui ajoute à celle des précédenies lo is , il est défendu de fonder de tels établis-
�/
44Ÿ'
( x5 )
« semens par disposition de dernière Volonté , quand
K même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
« des lettres-patentes.
« 4 0. L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
« dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
K que l’homologation du parlement pour fondation de
« messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pau« vres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
« d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut i*aiK sonnablement recevoir sou application lorsque la
« disposition est faite à un corps ou communauté non« approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
« contradiction avec l’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
« pleine exécution de l’article 1 e1' . , non - seulement
« déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
« mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
« sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
k faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
« sans qu’il soit besoin de lettres de rescision, nonobs« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné- à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
« 5°. Adm ettre l’exception portée en l’article 3, au
« profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
« moyen indirect de fonder l’éellem ent, contre le vœu
« de la lo i, des établissemens qui , quoique déjà exis« tans, n’auroient eu jusque-là qu’une existence éphé« m è re , faute de moyens suflisans.
« 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition infî—
« niment rigoureuse, veut que les enfaus ou héritiers
�( i6 )'
présomptifs , du vivan t même de ceux qui ont fait
les' dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
envoyer en possession , même avec restitution de fruit*?,
du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
de l’édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis
sement non-approuvé , en appliquoit le bénéfice aux
hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
'cause pie.
« 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774
1780 ,
qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela
tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger sui
vant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
fait à une corporation ou communauté non légale
ment établie , à l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
d’A u rilla c, qui n’avoit point obtenu de lettrcs-pntcntes.
S’il est dit que le legs a été lait aux pauvres de l’Œ uvre
de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-i
tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
des pauvres h laqitelle la testatrice entendoit faire du
bien. L ’Œ uvre de la miséricorde ayoit tous les carac
tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�44°)
C *7 )
« communauté , puisqu’elle uvoit une supérieure, une
« assistante , un receveur-, elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, ïŒ u v r e de la miséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister ; c’est l’Œ uvre
« que la testa.trice avoit envisagée, plus encore que les
■
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau* vres, eeelésia&tiques et séculiers, qu’elle avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l ’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à perpétuité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ uvre à l’hôpital
v g é n é ra l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses
v ne sont applicables ni aux pauvres in dividu els, tels
« "que les pauvres honteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l’Œ u vre de la m isé« ricord e, considérées comme individus.
« 90. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
« pour cette interprétation av«c l’arrêté des consuls,
« q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it , l’a qualifié de legs f a it à tQ iu v re
« de la m iséricorde , quoique le gouvernem ent ait eu
<c sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de TŒ uvre de la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
« ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres-patentes, l’a considéré comme légalement
C
�c
1
8
}
« représenté, par suite des lois des 16 vendémiaire et 7
« frim aii’e an cinq,
« Cet arrête d’ailleurs ne préjuge rien sur l’ invalidité
« ou la validité du legs, puisqu’en cas de contestation
« il renvoie les parties devant les tribunaux,
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana« lisees, le legs fait a l’Œ uvre de la miséricorde d’A u —
« rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;.
a e t, d’après l ’article 10 de l’édit de 174g , l’héritier seul'
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs, »
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
interjeté appel de ce jugement , et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Càpelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs ; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à'
propos de relëver quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
1
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpitaî
d’A u rillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, comme
l’ont prétendu lfcs appelans , on doit d ir e , d’après la
notox-iété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richement d oté, proportionnellem ent
à la population de la ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde. L e bailliage de V ie
n’auroit pas été compétent pour connoître de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas. •
L ’Œ uvre de la miséricorde n’étoit pas même une cor
poration. O n se souvient avec rcconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées daûs les villes p rin ci-
�( 19 )
pales. Les dames charitables qui en faisoient partie for«
moient une société particulière , et parfaitement lib r e ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le, n’ étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ieu x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m ê m e , faire respecter sa mémoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne peut l’espérer qu’autant
q u ’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernement.
' L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune de la tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelie
son neveu, père de l’intim é, et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelie p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelie
iils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœ ur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
i
-A- vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou, de la Bartassière, et du fief de Clavièx*es.
Ces deux premiers domaines ne s’élèvent point à une
C a
\
�1^ 5Z
!
I
¡
1
f.
( 20 )
somme de 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im píoprement de fief, puisqu’il ne l’a jamais été* ne vaut pas^
la même somme. Il n’a fait aucune disposition , et tout
ce qu’ont dit les appelans page 9 de leur m ém oire, ne
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
Pourquoi dire encore que la dame Galieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proches : elle n’en avoit
aucun dans la ville d’A u r illa c , qui fût au même degré*.
L e sieur Capelle p è r e , neveu du sieur Galieu , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la n atu re, pour se ser
v ir des expressions des appelans, appeloient personnellement le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G rialou , qui faisoitr partie de sefr
propriétés, et qui ydans l’état actuel , ne produit pas 800 fïv
de rente.
• A la page 12 du m ém oire, on prétend que l’Œ uvrede la miséricorde de la ville de Figeac avoit été payée d ti
legs porté par le testament , et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac avoient des lettres-*
patentes. Mais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que lrŒ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de filles d e l’éta»
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d*un siècle, jouissoit d’une existence légale, et envoyoifc
des sœurs de son ordre dans une foule de villes.
■ L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14» que-madame de Fontanges^se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, avoit fait des dé-»
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�(
21
)
absolument faux et controuvé : on peut m ême-assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G alieu , la
société des Dames de la miséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fait aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n’ont été remis au fils qu’après la mort du
p è re, et il n’en jouit que depuis 1795. Si le sieur Capelle
père s’opposa r en 179.2, à la vente de quelques immeu
bles , c’est que déjà le sieur Cayla en avoit vendu pour
58ooo assignats, dont il n’a fait aucun usage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papier-monnoie.
Les membres du bureau de bienfaisance préten dent,
page 19 , qu’ils ne peuvent offrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienfaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
charité ,.de leur piété : les quêtes , les aumônes , les dons
m anuels, doivent com poserprincipalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
Punique but de leur établissement.
_ Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le poin t de vue de l’intérêt p u b lic ;
car s’il faut en croire les adm inistrateurs, qui paroissent
•»voir des vu es,élevées, lewr cause est une question do
droit public.
�4M
' * «'
( 22 )
M a is com m ent Tordre et le droit public seroient-ils
en suspens ( pour se servir des ternies des appelans ) ,
parce que le legs de 80000 fr. fait à l’CEuvre de la misé
ricorde seroit contesté ?
Q u’étoit l’Œ uvre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établisseinens étoient bornés à certains lieux et à
certains temps-, ils n’entroient point dans le système de
l’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliers, lorsqu’il s’agissoit de remédier aux maux
d’une disette , d’une épidém ie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations momentanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portant, parce
qu’elles avoient des vues vraiment utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrement volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s, des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible q u e , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés ? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; c’est toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cessé, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’écrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�4 X*
C 23 )
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution ; et le'
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment,, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu l’empêcher pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se voir1
cc privées de leur fortune , par les dispositions que les
« hommes ont à form er des établissemens nouveaux qui
K leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos« térité avec le titre de fondateurs. L e m eilleur usage
w que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
a im portante, est de concilier autant qu’il est possible
cc l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
O u aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit •, mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit in com pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur m ém oire l’arrêté des consuls, en date
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. L ’article 5 de
cet arrêté p o rte , « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des-héritiers, les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablem ent
« autoriser dans les formes voulues par les précédens
« arrêtés. »
�( H 3
Il est bien é v id e n t, d’après cet article , que l ’arrêté ,
comme l’ont dit les premiers ju ges, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
<le renvoyer devant les .tribunaux, pour prononcer sur
\cs contestations qui pouvoient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvernem ent, comme on vent le prétendre,
eût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’emploi en cas que
l ’on reçoive.
I l en est de cet a rrê té ,* comme il en étoit
»
autrefois des lettres de bénéfice d’inventaire ou des let
tres de restitution.. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition-;
ncllem ent une succession, soit pour se pourvoir contre
y 11 engagement indiscrètement contracté. M ais pour
q u ’elles eussent leur exécu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les trib u n a u x , qui n’en prononcoient l'enté
rinement qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs,. A u roit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non communiquée , un arrêté qui les autorise
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en conuoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les tribunaux , en cas
de contestation , si le legs doit être ou non acquitté. T e lle
est
�¿ fit
C *5 )
est la seule idée raisonnable, le seul point dè vue s'oua
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoiei.it une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugnerait à tous les prin
cipes de liberté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le mérite de la;
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit?
de réform er les actes du gouvernem en t, que fce n’est
point à lu i à diriger le gouvernail de Tétùt. Ces expres-1
sions im propres sont absolument vides de sens. 11 faudrait1
au moins rayer l ’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vaitile gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
le droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il1
s-agit, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter!
Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce q u i1
a rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice», la quotité du legs
par exem ple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour i*ecevôir comme pour demander fait partie'1
de ce même droit publie.
Il est assez difficile de com prendre ce qùé les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. Ori ne conteste*
pas la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seixVîehf^
confiés depuis leur création. O u sait que le gou vern em en t1
D
-K |
1
�C 26 )
seul s’est réservi le droit de les y autoriser , et ce n’est pas
ce que les juges de Saint-Flour ont examiné. Ils ont seule
ment décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avoit été fa it, puisque ce bureau n’existoit.
pas lors du décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des dames pieuses à laquelle le legs avoit été
fait , étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelans eux-m êm es, les premiers juges avoient droit de
çonnoîtrie de la'valid ité du testament, d e là capacité do
disposer et de la quotité du le g s, on ne voit pns comment
ils n’auuoient pas eu le droit de prononcer sur la validité
de ce même le g s c o m m e n t il auroit été interdit à Thé—
ritier de discuter devant les tribunaux la capacité de la.
testatrice ou du légataire.
O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé-tence, pour s’occuper de la validité du legs ou fondation!
de la dame Galieu ; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en revenir à l’édit de 1749, qui fait la loi dans celte
matière..
D ’après l’article 1". de cet é d it, il ne peut être form e
aucun établissement qu’en vertu de lettres-patentes enre
gistrées dans les cours. Sous ce mot général d’établisse-ment , on y comprend nominativement les hospices ,
congrégations , confréries , h ô p ita u x , etc.
L ’art. 2 défend de faire ù l’avenir aucunes dispositions
par acte de dernière volonté pour fonder un nouvel éta
blissem ent, o ira u proiil des personnes qui scroicnt char-gées de le form er , le tout à peine de nullité , ce qui sera
observé quand même la disposition seroit faite à la charge
d’obtenir des lettres-patentes.
’
�•
( 27 )
L ’article 9 déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pourroient avoir été faits en faveur des établissemens non
autorisés., directement ou indirectem ent; et tous ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant toute prescription , tous consenteinens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnes à l'exécution de
ces actes ou dispositions.
Par l’article 1 0 , les en fans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions , à réclamer les biens par eux
donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,avec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’étoit qu’ une association libre non
approuvée , une congrégation sous prétexte d’ / u sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de lettres-patentes : donc
les dispositions faites à son p rofit, directement ou indi
rectem en t, à elle-même ou à ceux qui l’adm inistrent,
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pourroit en réclamer la restitution, si le legs a voit été payé*,
nonobstant tou te prescription, toute approbation expresse
ou tacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des
termes irritons des articles 9 et 10 de l’édit de 1749.
L es administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable, Ce n’est point à l'Œ uvre de la miséricorde quu
D a
�I .»'.
c
2
8
3
le legs a ét<? fa it, mais bien a u x pavores de’ l’Œ uvre. Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l ’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait à l’Œ uvre. Civibus
« cw itatis legatum, vel jîd e i cotnm issum , datum civitath
« relictum videtur, loi 2 , D e rebus dubiis. L a lettre
v. du testam ent, co n tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lé g u é , car ce n’est que les re cc venusdes 80000 ^ qui doivent être employés à soulager
a lés pauvres que l’GEuvre a- coutume d’assister ; et pai*
a qui doivent-ils être employés ? p a r l ’Œ u v re ,q u i a cou—
« turne- de les assister. Ce n’est point aux pau vres, mais>
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’une
vu rente annuelle'envers les Frères m acédons, d’une fon~
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la ville*
a d’A u rillac. Ce n’est] point aux pauvres qu’on a légué ,
a• puisque ce n’est point eux qui peuvent diemander /
« recevoir et1 quittancer: Il n’y a pas même fidéicom m is,
« car ils- n’auront jamais de droit et d’action pour possé«• der;-c’est> pour leur-soulagem ent, mais ce n’est pas su c
«- eux que l’on a fondé. Ils sont l’ôbjet et non lfe9 dépo—
«■sitaires de la fondation : ce n’est point eux qui forment’
<r le corps et là congrégation de l’Œ uvre de la- m iséri«< corde , mais bien les pieuses dames qui administroient
et’ cette Œ u v re ; car les pauvres n’auront jamais de puis—
sance et de droit?, ni' dansi l?adminislration , ni contre*
« les- administrateurs. »
Les, administrateurs invoquent1 l’article 3’ de l’édit de
*749 ? qui*excepte les fondations particulières, qui ne ten»
�46
i
c z9 y
droient à l’établissement cl’aucun nouveau co rp s, collège
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d’étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou séculiers, etc. A l’égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sur les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans
ces exception s, les appelans ajoutent : L a révolution n a
point permis aux tuteurs des puuvres de rem plir la for
malité de l’homologation-, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette homologation.
Cette o b je c tio n s o u v e n t ren o u velée, et toujours dé-truite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l’exception portée par l’article 3 étoit
étrangère a la cause, puisque la disposition est faite au
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas., disent-ils., l’exception seroit en contradiction avec
l’article 9 de. Fédit;. ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœu de la l o i, des établissemqns q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de.moyens suflisans.
L ’article 3 11e dispense de la formalité des lettres-paten
tes , auxquelles il substitue l’hom ologation, que les fon
dations! particulières et les-actes, qui les contiennent, et
non les corps à qui elles- sont confiées. Dos fondations
confiées à un corps non approuvé tendent nécessairement
à établi n un nouveau corps-, coutru la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�( 30 )
On pourroit citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’héritier. M . de Séguiran,
évêque de N evers, fit son testament le 3 avril 178 9 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient employés
à l’execution des établissemens de charité qu’il avoit com
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’instruction et charité chrétienne, et des fonds nécessaires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif; ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible à ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans- le rapport qui fut
fait au conseil des Cmq-cents, le 21 germinal an 6 , par
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise i l’héritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
pouvoit être demandé, et le nouvel ordre de choses en ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie ; pf>r conséquent le legs doit être réversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu’ il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�4 6 2
( 3* )
mais le sieur Cnpelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande affinité entre cette espèce et celle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évéque de N evers, la testatrice n’est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivi’an ce, elles n’en
ont jamais été saisies ; le nouvel ordre de choses a changé
la destination d u'legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprimés; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legrs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pourroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontanges , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués h une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. 11 ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
D
7
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que lesappelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée eu acquisition
de rentes sur l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éral, comme les bureaux de bienfaisance,;
11e peuvent aujourd’hui recevoir îles capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’iutérêl à quatre pour cent; ou.
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il
n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u’importe que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la misé
ricorde assistaient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré q u’elle vouloit exé
cuter les pieux desseins de son frèx*e, elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les uxies ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
L es appelans, qui veulent faire triompher la vérité par
toutes les armes de la p a role, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’A u r illa c , sans autre explica
tion , personne ne doutei'oit qu’il ne fût valable. Mais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
L es pnxivx*es forment un cox*ps irrégulier, qxii n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoii-. Il faut un interm édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de l’état. Si le corps ou l’hos
pice n’est pas fondé en vertu de lettres-paferites, le legs
est caduc, et revient à l’ héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749* Bientôt les appelans s'égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué uu legs fuit aux pauvres , ilau ro it au
torisé
�4&
( 33 )
torisé les Dames de la miséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droit
p u b lic; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer son
choix.
'
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignox’e
où les appelans ont pu les puiser. La règle la plus cer
taine en matière de testamens, c’est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l’exé
cution , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a scs lim ites: comme elle doit respecter les p ropi’iétés , elle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit public , ce n’est qu’en ce sens , que la
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon-:
dation faite par la dame G a lie u , le legs ne pouvoit
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le recevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespa tentes.
'
L ’iE u vre de la m iséricorde n’avoit aucune existence
légale. Voudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs ; ils conviennent qu’il falloit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an d ix ; et vouloir qu’un arrêté, postérieur,
E
�(
'
3
4
)
de treize années à l’ouverture du legs, puisse fa're re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fortunes , supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner u n effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du
le g s , ou a présumé le consentement de l’héritier à en
verser le montant.
Il
est contre toutes les rè g le s, contre toutes les idées
reçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvert
en 1789 , puisse être réglé par les lois actuelles; qu’un
legs essentiellement nul dans l’ancien ordre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’une libéralité
faite à l’Œ uvre de la miséricorde depuis 1785 , puis, e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur C ip elle ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se trouve dans une position si dif
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? L a fortune
de sa bienfaitrice n épi’ouvë une diminution si considé
rable depuis la révolution , qu’elle sufiiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice ? eut-elle été aussi libéi’a le ,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son héritier; elle ne suppose aucune di
minution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
A l’acquittement des legs, pendant la m inorité de son lié r
�('35 y
ri lier. Si elle perm et de; ¡.vendre, quelques-im m eubles,
elle dés'gne les moins précieux ; encore a-t-elle.excédé
ses pouvoirs en ce poin t, parce que c’est éluder la dispo.sit'on des articles 1 4 , i 5 et 16 de l’édit de 1749.
- E t cependant, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’i.rquitler le ; legs de 80000 f r . , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
qu’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’ institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
; '
.
D ’après ce3 considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’afloiblissent pas les moyens principaux , le sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance , établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères maçédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours h dom icile *, dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
20. 11 y a encore à prendre: sur le legs pareille somme
de 20000 f r ., dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
�{ >Ù
v ''
( 3* )
3°. E t toujours dans l ’hypothèse que le surplus du '
legs pourroit être e x ig é , le sieur Capelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être em ployée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir qu’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes
ce n’est pas là ce qu’a entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l ’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoient dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose1que des réntes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l’article 13
de la déclaration du 20 juillet 1762, enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiex-s et représentant des|
donateurs ou testateurs à donner, en pavem ent, desrernboursemens des rentes de la nature de celles dont il est
perm is a u x gens de jnain-m orte de f a i r e T a cq u isition ,
p a r Varticle 18 de Tédit de 1749. Ce subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être i*efusé à l’in tim é; il a pour lui'
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vigueu r, et qui ont du r é g i r l e l e g s dont i l s’ a g i t .
40. L e sieur Capelle est encore le maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de .l’hérédité ; qu’elle se prend eu égard
h la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.
L o i 30, lo i 73, ad J'a ie.
4 , au Cod.
T o u t héritier testamentaire ou ab intestat a lç droit
�ét(û ü )
( 37 )
^
(le la distraire, lorsqu’ il a été fait inventaire ; et, dans
l ’espèce , cette formalité a été remplie. E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6, adfaie. §. i, au Cad. Et le sieur GtpeLle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
5°. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament; il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; 011
ne peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en première instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le i-emboursement ; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
Mais c’est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considéi'ation peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
sur une vaste m er, et dont l’utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les affections nobles et généreuses
s’opposent à ce q u ’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’ intérêt public. L 'hom m e d'état ne
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
E
3
�fondations particulières, qui absorberaient à la longue
toutes les propriétés. L 'h om m e religieux vient au secours
de ses semblables, et garde le silence sur ses bienfaits.
L 'h o m m e du monde pense que les fondations sont pres
que toujours des monumens de vanité et d’o rg u eil, et
les apprécié à leur juste valeur. L e m agistrat, impassible
comme la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
vention sur les questions qui lui sont soum ises, et ne
fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les h ommes sont véritablement égaux
-en droits.
r
s
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
f
M e. M A R I E , avoué.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Table Godemel : Legs : 4. un legs fait en 1785 aux pauvres de l’œuvre de la miséricorde, est-il fait aux pauvres ou à l’œuvre ? doit-il être classé dans les cas de prohibition prévus par les articles 1, 2, 9 et 10 de l’édit de 1749 ? est-il, au contraire, compris dans l’exception portée par l’article 3 de cet édit ?
La condition que ce legs ferait retour à l’héritier dans le cas de réunion de l’œuvre, soit à l’hôpital général, soit à tout autre hôpital, est-elle une preuve que le legs était fait à l’œuvre et non aux pauvres de l’œuvre ?
la réversion s’est-elle opérée dès le moment où le gouvernement a cumulé les revenus de toutes associations corporatives et administratives d’hospices ?
Legs considérable devant aller en partie à l’œuvre de la miséricorde à Aurillac. La Révolution survint et les biens des congrégations sont saisis. Le bureau de bienfaisance créé à Aurillac demande la délivrance du legs fait à l’œuvre de la miséricorde
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1311
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0218
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53200/BCU_Factums_G1311.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
legs
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53717/BCU_Factums_M0218.pdf
62acddb602fa7eba1dcf78cda40691d0
PDF Text
Text
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LA N U L L I T É D’ U N L EGS
DE 8 0 0 0 0 * ,
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F A I T A L ’Œ U V R E D E L A M IS É R IC O R D E
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DE
R I O M ,
L’ I M P R I M E R I E
IMPRIMEUR
DE
DE
LA
L A N D R IO T ,
COUR
Juillet 1804.
D’APPEL.
SEUL
�M E M O I R E
cour
D ’A P P E L
EN
RÉPON SE,
s£antk
A RI OM.
POUR
P
ierre
- A
ntoine
- U
rbain
CAPELLE,
propriétaire, habitant du lieu et commune de
S a i n t - C o n s t a n t , intimé ;
C O N T R E
Les A d m i n i s t r a t e u r s
b i e n f a isance
du
B ureau
de
de la ville d ’A u rilla c , appe
lans d ’un Jugement rendu au Tribunal d'arron
dissement de S a in t-F lo u r , le 20 flo réa l an 11.
administrateurs du bureau de bienfaisance de l a
ville d’A u rillac réclament la délivrance d’un legs de
A
L
ES
►
�( O
t
80000 fran cs, fait par la dame Galieu aux Dames de
la miséricoi’de de cette ville. Ils seront lus avec in térêt,
lorsqu’ils feront valoir le sentiment.
L e pauvre a des droits incontestables sur l’abondance
du riche. L ’humanité , la religion nous font un devoir
de soulager nos semblables dans le malheur.
M ais la politique doit mettre des bornes à ces libéralités
indiscrètes qui dépouillent les familles et m ultiplient les
pauvres au lieu d’en diminuer le nombre.
N ’a-t-on pas remarqué qu’en faisant vivre gratuitement
un grand nombre d’hom m es, on soudoyoit l’oisiveté et
tous les désordres qui raccom pagnent ? et lorsqu’on a
voulu exam iner l’ utilité des fondations particulières,
par rapport au bien public , on n’a fait qu’en démontrer
les inconvéniens, comme l’impossibilité d’en maintenir
l ’exécution.
C ’est à la société tout en tière, c’est au gouvernem ent,
q u ’il appartient de créer des établissemens durables pour
les besoins généraux de l’humanité.
L ’homme p r iv é , qui a la noble passion d’être u tile ,
et veut secourir les infortunés, doit dispenser ses bien
faits avec discernement. Il lui est interdit de verser ses
largesses sur des corporations illégales, qui ne peuvent
être perm anentes, dont les membres peuvent avoir des
vues louables, mais finissent presque toujours par dégé
nérer.
'
L e sieur Capelle applaudit à l’écrivain, lorsqu’il rend
hommage aux vertus et à la piété de ces dames respec
tables qui trouvoient le bonheur dans la bienfaisance,
visitoient la chaum ière du - p a u v r e , soulageoient ses
�( 3 )
t .
besoins, et lui donnoient ces marques de pitié touchante
qui consolent sans hum ilier. Sexe aim ab le, digne de
tout notre resp ect, qui fut créé pour notre bonheur !
femmes vertueuses et tend res, qui prodiguiez vos soins
à ces membres souffrans de la société ! comment vous
a-t-on traitées dans ces temps m alheureux de trouble et
de confusion ? par qui avez-vous été rem placées? dans
quelles m ains, grand D ieu ! seroit tombé le legs de la
dame G a lie u , si vous aviez eu qualité pour en obtenir
la délivrance ?
Ces cruels souvenirs font disparoître l’illusion ; le pres
tige s’évanouit, et on peut froidement discuter la ques
tion de la validité du legs que les administrateurs deman
dent au sieur Ca pelle.
F A I T S .
Françoise D orothée G abridens, veuve et héritière de
sieur Geraud G a lie u , est décédée à A u rilla c dans le
'courant de janvier 1789. E lle avoit fa it, le 4 octobre
1786 , un testament mystique et secret, dont il est néces
saire de connoître les dispositions principales.
E lle institue pour son héritier universel P ie rre -A n toine-U rbain Gapelle , fils aîné du sieur G apelle, son
neveu. E lle fait aussi des legs considérables, qui sont
divisés en trois classes. Les legs pieux s’élèvent a la
somme de 128600 fr. Les autres legs se portent a une
somme de 77300 fr. ; ce qui donneroit en totalité une
somme de 205900 f r ., sans y comprendre des legs par
ticuliers en u su fru it, de m obilier non apprécié , et de
A 2
�.
.
,{ 4 )
plusieurs immeubles en toute p ro p riété, dont on peut
porter la valeu r, sans exagération, à 64000 fr.
Parm i les legs p ie u x , un seul, de la seconde classe,
et le plus considéi'able de to u s, donne lieu à la contes
tation. Ce legs est fait en ces termes :
« P o u r exécuter les pieux desseins qui m’ont été
« com m uniqués par feu M . C abridens, mon frè re , je
« lègue a u x pauvres de VŒ uçre de la m iséricorde de
« la ville d’A u rillac, laquelle Œ u vre est administrée par
« de pieuses dames, et dont madame de Funta/iges est
« la supérieure , la somme de 80000 f r ., à la charge
« néanmoins que les administrateurs de ladite Œ uvre
« seront tenus de payer annuellem ent, et à perpétuité,
« aux Frères macédons de l’école chrétien ne, établis à
« A u rillac , la rente et pension annuelle que feu M.
« C abridens, mon fr è r e , s’étoit obligé de leur payer
« par les actes passés avec eux et avec les consuls et
« communautés d’Â u rillac ; sans laquelle condition je
« n’aurois légué à ladite Œ u vre que 60000 fr. ; qu’il
« sera em ployé 20000 francs pour assister messieurs les
« prêtres de la ville et communautés d’ A u r illa c , qui
« seront dans le besoin, et encore les autres prêtres des
« environs de la v ille , si le r even u de ladite somme
« de 20000 lr. peut le com porter; et que le revenu de
« la somme de 40000 fr. restant de celle de 60000 f r . ,
« soit em ployé à assister et soulager le surplus des pau« vres que ladite Œ u vre a coutume d’assister. Je veux
« en conséquence que ladite somme de 80000 fr. ci-dessus
« léguée, aux conditions m entionnées, soit payée auxa dites dames administrant ladite Œ u vre, sur la quittance
�.
.
c
5
« qui en sera fournie par ladite dame d e-F on tan ges,
« leur supérieure, et ce aux termes ci-dessous fixés.
« Je veux et entends qu’au cas où ladite Œ u vre de la
« miséricorde v în t, dans le tem ps, à être réunie à l’h ô« pital général de la ville d’A u rilla c , ou à tout autre
« hôpital; je v e u x , d is -je , audit cas, que le legs de la
« somme de 80000 f r ., que je fais à ladite Œ u v re , J'asso
« retour à mon héritier. »
- Il résulte d’une délibération du bureau de bienfaisance
d ’A u rilla c, du 16 pluviôse an 9 , que l ’Œ u vre de la m isé■ricorde, qui étoit administrée par des dames pieuses,
•mères de fam ille, ne s’étoit form ée en cette même ville
q u ’en 1777.
•
A p rès le décès de la dame Galieu , il fut procédé à
l’ouverture de son testament. E lle avoit nommé pour son
exécuteur testamentaire un sieur C iiyla, qui étoit chargé
■
de vendre son m obilier et divers immeubles désignés ,
et qui en même temps devoit jouir de tous les revenus
.de la succession, jusqu’à ce que l’héritier eût atteint sa
vingt-cinquièm e année.
L e p rix des ventes et des revenus de la succession devoit
être employé par l’exécuteur testamentaire à l’acquiLtcment des legs.
L e sieur Cayla se m it en possession des biens de la
testatrice, et il fut procédé à un inventaire du mobilier.
Les legs de prem ière classe, autres que celui qui lait
l’objet de la dem ande, dévoient être payés dans l’année
du deces. L e p rix du m obilier lut insuilisant pour les
acquitter : tout le surplus devoit donc être pris sur les
revenus de la succession.
�_
C6 )
II est probable qu’en 178 9, époque de l ’ouverture de la
succession, l’association des Dames de la miséricorde étoit
dissoute. Il est au moins certain que cette'Œ uvre n’a jamais
réclamé ni form é aucune demande en délivrance du legs
de 80000 fr.
M ais le sieur C a y la , exécuteur testamentaire, vouloit
faire procéder à la vente des immeubles désignés pour le
payement des legs de la seconde classe. Il s’y fit même
autoriser par un jugement du tribunal de district d’A u ril
la c, du 27 janvier 1792; et il en avoit vendu pour la somme
de 58ooo fr. lorsque le sieur Antoine Capelle, pore et tuteur
de l’héritier de la dame G alieu, se rendit appelant de ce
jugem ent, et fonda son appel sur ce que les intérêts de
son m ineur seroient blessés par l’aliénation d’autres biens.
Il y avoit des ressources suffisantes pour l ’acquittement
des legs, dans le remboursement des dîmes et autres droits
casuels, qu’on pouvoit alors espérer. D ’ailleurs, le sieur
Capelle père soutint que le legs de 80000 fr. avoit pour
objet rétablissement des Sœurs-grises (*), et une rente au
profit des Frères macédons; que dès que toutes congréga
tions étoient supprim ées, ce legs devenoit cadu c, et beau
coup d’autres étoient également susceptibles de réduction.
Pendant ces discussions le sieuv Cayla père vint à décé
der. S011 fils, en vertu du même testament, prit la jouis
sance des biens, qu il a gardée jusqu’en 179^. Il n’est pas
exact de dire qu’il rem it 1 hérédité au sieur Capelle père.
Ce dernier refusa constamment de s’en charger; et ce n’est
(*ï C ’est une erreur qui s’est glissee dans les copies : il n’est point question
de Sœ urs-grises dans le testam ent.
�( 7 )
qu’après son décès que le sieur Cayla fils, voulant se dé
barrasser d’une administration onéreuse, rendit La succes
sion au sieur Ray, tuteur du sieur Capelle fils.
Il n’y avoit aucune époque déterminée pour le paye
ment des legs de la seconde classe, dont celui-ci fait partie.
Ï1 est dit, dans le testament, « que ceux de la seconde classe
K seront payés suivant l’ordre qu’ils ont dans le testament,
« et seulement à fur et mesure que le sieur Cayla aura
« en main des fonds suffisans, soit au moyen des produits
« des ventes, effets, meubles et im m eubles, soit des reve« nus des biens de l’hérédité, sans que pour le payement
« des legs le sieur Cayla puisse être pressé pour la vente
« des immeubles que la testatrice veut être faite de ses
« biens d’A u v e rg n e , lui donnant p ou voir exprès de ne
« faire la vente qu’autant qu’il trouvera être plus utile
« p o u r T in té rêt de so n h é r it ie r , et encore sans qu’ il soit
« tenu de payer aux légataii-es aucun intérêt de leurs
« legs. »
Les employés de la régie nationale furent les premiers
à vouloir exiger un legs qui étoit nécessairement devenu
caduc par la suppression des corporations, ou qui étoit
nul comme fait ù une corporation illégale.
F ort expéditifs en la form e, les employés de la régie
décernèrent une contrainte contre le sieur C apelle, h éri
tier de la dame G alieu, pour le payement de cette somme
de 80000 fr. L e 8 thermidor même aim ée, ils firent un
nouveau com m andement; e t, s u r l’opposition qu’y forma
le sieur C ap elle, il s’engagea au tribunal de prem ière
instance une contestation qui n’a pas eu de suite.
Certes! si le sieur Cnpelle avoit encore à discuter contre
�.
•
,
•( 8 ) r
la rég ie, cette prétention bursale n’obtiendroit pas la fa
veu r des tribunaux. Il est permis de douter que la régie
voulû t faire de cette somme l’emploi auquel elle étoit
destinée.
Bientôt api'ès, l’hospice d’Aurillac voulut encore s’attri
buer le le g s, et en forma demande contre le sieur Capelle,
Cette prétention ne tendoit qu’à faire exécuter la clause
de réversion contenue au testament, au profit de l’héritier;
et l’hospice n’a pas cru devoir insister.
M ais, le 19 brumaire an 9 , on a organisé à A u rillac
un bureau de bienfaisance, dont les membres fuirent nom
més par le préfet du Cantal; et, le 16 pluviôse suivant,
les administrateurs prirent un arrêté pour faire citer le
sieur Capelle en payement de ce legs.
C ’est dans cet arrêté qu’on voit que l’Œ uvre de la
m iséricorde s’étoit form ée en 1777. Les administrateurs
y disent que cette Œ uvre n’a jamais été. supprim ée,
qu’elle 11’a fait que changer d’administration.
Suivant e u x , d’après l’article 3 de l’édit de 1749 ,
l’Œ uvre de la miséricorde n’avoit pas besoin de lettrespa tentes;
L e cas prévu par la testatrice, pour le retour à l’héri
tier de la somme de 80000 f r . , n’étoit pas ax-rivé ; le
legs devoit donc être versé dans leux-s mains.
Tels sont les moyens sur lesquels ils appuyèrent leur
cilation devant le tribunal d’A urillac. L e sieur Capelle
crut devoir récuser ce tribunal. Et comme on a paru
im prouver la récusation, il est de son devoir de rap
peler les motifs qui le déterminèrent à cette démarche.
L e sieur D e lo r tz - L a b a r th e , l ’un-des juges, est m em bre
du
�C9 )
du bureau de bienfaisance -, les sieurs L aval et Serieys,
juges, avoient déjà actionné le sieur Capelle , comme ad
ministrateurs de l’hospice de la même ville ; ils avoient eu
la délicatesse de se récuser.
L e sieur D esta in g , président, avoit ouvert son opi
nion sur la cause. Les trois suppléans, les sieurs G u ita rd ,
Julhes et V e rn io ls, l’un étoitle défenseur du sieur Capelle,
les deux autres étoient membres du bureau de bienfai
sance. Il ne restoit que deux défenseurs au tribunal d’A u rillac, qui ne pouvoient rem placer les juges, et qui d’ail
leurs refusoient d’en connoître comme juges, par des rai
sons particulières.
E n fin , cette affaire intéresse les pauvres de la ville
d ’A u rilla c, et devoit fixer l’attention ou l ’intérêt de tous
les habitans ; il étoit de toute nécessité de faire juger la
cause par des hommes dégagés de toute prévention : eu
conséquence, la cour de cassation, par arrêt du 4 plu
viôse an d i x , renvoya la cause et les parties devant le
tribunal civil de Saint-Flour.
'
Ce jugement lut signifié le 23 pluviôse an 10 ; et, le
3 ventôse su ivan t, les administrateurs citèrent eux
) memes le sieur Capelle devant le tribunal commis par
la cour de cassation.
Il est remarquable que jusque-là les administrateurs
s’étoient permis de procéder sans aucune autorisation.
Ils justifièrent postérieurem ent, i ° . d’un arrêté du gou
vernem ent, du 18 messidor an 10 , qui autorise le bu
reau de bienfaisance à accepter , au nom des pauvres
de la ville d’A u r illa c , le legs dont il s’agit, et à en p ou r
suivre la délivrance devant les tribunaux j 20. d’un arrêté
B
�( 10 )
du conseil de p réfectu re, qui autorise les administrateurs
à continuer, devant les tribunaux, les poursuites com
mencées contre le sieur Capelle, pour raison du même legs.
O n verra dans la suite que l’arrêté du gouvernem ent,
obtenu sur pétition non-com m uniquée, et toujours sauf
le droit d’autrui, est la pièce principale sur laquelle s’appuyent les administrateurs.
D evant le tribunal de S a in t-F lo u r, les administrateurs
entreprirent de prouver différentes propositions.
i . Suivant e u x , les legs faits pour cause pie dévoient
recevoir leur exécution , et être jugés favorablement.
I/incapacite du légataire ne rend pas même n u lle legs,
mais autorise seulement les tribunaux à en désigner l’em
p lo i et l’application.
2°. Les pauvres en nom collectif n’ont jamais été
regardés comme incapables de recevoir des le g s , et
l ’exécution des libéralités exercées envers eux a toujours
été ordonnée.
3°. L ’édit de 17 4 9 , et autres édits et ordonnances
antérieurs, en prononçant la nullité des legs faits au
profit des corps et communautés non patentées, ont
toujours excepté les legs qui avoient pour objet des
fondations particulières pour la subsistance des pauvres.
40. Ils vouloient faire considérer l’arrêté du gouver
nement comme une homologation suffisante pour sanc
tionner ces sortes de legs.
5 °. L e legs dont il s’agit n’avoit pas été fait à l’Œ u
vre de la m iséricorde, comme corps et com m unauté;
mais ¡1 fut laissé nominativement aux pauvres d’A u rilla c;
et si la testatrice a ajouté de VŒ uvre de la m iséricorde,
�'
( II )
cela n’a été que pour désigner l ’espace et la qualité des
pauvres auxquels elle vouloit que le revenu du legs fût
distribué , et les personnes auxquelles elle vouloit en
confier la distribution.
6°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
remplacent dans leurs fonctions les Dames de la miséri
corde, et sont les vrais administrateurs des pauvres en
faveur desquels le legs a été fait par la dame Galieu.
7°. L a M iséricorde n ’a jamais été réunie à l’hôpital
d’A urillac ni à aucun autre hospice. Les fonctions des
personnes chargées de la distribution des secours à dom i
cile , n’ont jamais été supprimées. L e corps législatif n’a
pas été à portée de statuer sur la fondation pieuse de
la M iséricorde •, mais cette fondation est du nombre
de celles qui ont été consei'vées.
8°. L a condition clu retour n’est pas arrivée telle
que la testatrice l’a voit p révu e; et, en matière favorable,
on ne peut étendre la condition d’un cas à un autre.
9°. On ne peut subordonner l’exécution d’une fon
dation pieuse, contre l’intention même du fondateur qui n’a
pu les prévoir, à des circonstances extraordinaires, illé
gales, momentanées, et qui n’ont dû leur existence qu’aux
orages et aux excès inséparables d’ une grande révolution ,
surtout lorsque tout est l'entré dans la ligne presci’ite par
le fondateur.
io°. L a réduction du legs n’est pas admise en général.
E n supposant qu’elle pût l ’être, elle doit être demandée
d’abord après l’ouverture de la succession, et les choses
étant entières. L ’héritier qui accepte une succession se
soumet à toutes les charges ; et court tous les risques :
B «
‘
�R e s périt domino.
C 12 )
L ’héritier n’a même pas fait de
pertes considérables.
i i ° . L ’héritier pur et simple ne peut être admis à la
distraction de la quai'te falcidie. E lle n’a lieu qu’au profitde l’héritier surchargé, qui établit les charges par un loyal
inventaire : d’ailleurs la distraction n ’a pas lieu pour les
legs pies. Il irapliqueroit de demander tout à la fois, et
la réduction du le g s , et la distraction de la quarte. Enfin
rien n’établit l’insuilisance de la succession pour faire face
aux legs.
D e son c ô té , le sieur Capelle soutint, i°. que le legs fait
â l’Œ uvre de la miséricorde étoit caduc, soit lors de sa
con fection , soit au m oment de l’ouverture de la succes
sion de la testatrice : le prétendu légataire ne form oit
aucune corporation , aucune dotation, aucun établisse-’
ïnent avoué par la loi.
2°. L a condition prévue par la testatrice étoit arrivée.
L e gouvernem ent, en supprimant tous les établissement,
même ceux qui n’avoient pas une existence lé g a le , a
cumulé l’actif et le passif de toutes les corporations,
associations et hospices : d’où il résultoit qxie le legs auroit
cessé d’être e x ig ib le , du moment que l’intention de la
testatrice ne pouvoit être rem plie, que le legs ne pouvoit
être versé dans les mains à qui elle le con/ioit exclusi
vem en t; et alors la reversion devoit avoir lieu au profit
de l’héritier institué.
3°. Le patrim oine de la dame Galieu avoit éprouvé
des diminutions de tout g e n re , des pertes considéra
bles , par l’effet de la force majeure.
4°. L a dame veuve Galieu n’a voit été instituée liéri-
�f 13 )
tière par son m a r i, de qui elle tenoit la plus grande
partie de sa fortune , qu’à la charge expresse de trans
mettre l’hérédité au sieur Capelle , son petit-neveu et
son héritier p résom ptif’, et la dame Galieu devoit moins
se considérer comme propriétaire , que comme usu
fruitière de son mari.
5°. Les administrateurs du bureau de bienfaisance
étoient sans qualité pour réclamer les 20000 fr. affectés
aux Frères macédons , ainsi que la même somme affectée
aux ecclésiastiques malades et pauvres ; et le sieur Capelle,
ne pouvoit être tenu que cl’en payer annuellement l’in
térêt.
.
6°. En pays de droit é c r it , l’héritier institué ou
ah intestat est autorisé à distraire la quarte falcidie ;
et la succession de la dame G alieu est ouverte en pays
de droit écrit.
7 0. L ’édit de 1 7 4 g , et la déclaration de 1 7 7 4 , auto
risent le débiteur de legs pieux à acheter des rentes
sur 1 état ; et le sieur C a p e lle, en ce c a s , pouvoit user
de cette faculté , et fournir des rentes sur l’état pour le
payement du legs ; en supposant qu’il y eût capacité
pour le recevoir.
L a cause portée en cet état au tribunal de Sain t-F lou r ,
le 20 floréal an 11 , il est intervenu un jugement contiddictoire , qui déclare le legs fait par F ran çoise-D o ro
thée d e C a b rid e n s , ve u ve de G eraud G alieu , à l’Œ u v r e
de la miséricorde de la ville d’AurillaC , par son testa
ment du 4 octobre 1785 , nul et de nul eiîèt : en con
séquence déclare les administrateurs du bureau de bien
faisance de cette mêm e ville non - recevables dans la
�.
( r4 )
#
demande par eux form ée contre le sieur C a p elle, héri
tier de la dame G a l i e u , en délivrance de ce même
le g s , et condamne les administrateurs en tous les dépens.
Ce jugement est fondé sur les motifs suivans :
' « i° . D ’api*ès la disposition des lois romaines, cons« tamment adoptée par la jurisprudence française, aucun
« corps ou communauté quelconque ne peut légalement
« exister sans l’approbation du gouvernem ent ; et de
« tels établissemens sont incapables de recevoir aucun
« legs.
« 2°. Par une exception néanmoins établie par la
« jurisprudence des tribunaux en faveur de la cause
« pie , les legs pieux faits au profit des communautés
« illicites étoient appliqués aux pauvres ou autres
« œuvres p ie s, et la disposition, même
imparfaite ,
«
«
«
«
«
«
«
n’empêchoit pas que les legs y contenus n’eussent
leur effet. Mais le privilège de la cause pie a reçu
une première restriction par les ordonnances de 1731
et 1735 , et il a reçu une restriction plus forte par
l’cdit de 1749. Les arrêts qui établissent une jurisprudence favorable à la cause p i e , sont tous antérieurs
à l’édit de 1749.
« 30. Dans les dispositions de cet é d it, qui renou« velle les défenses de form er aucun établissement
« de corps ou communauté quelconque , sans l’obtencc tion préalable de lettres-patentes, sont nommément
« compris les hôpitaux et toutes maisons ou com m u« nautés sous prétexte d’hospices. Par une disposition
k rigoureuse et nouvelle 5 qui ajoute a celle des precé-»
« dentes lo is, il est défendu de fonder de tels établis-
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( i 5 )
semens par disposition de dernière volonté , quand
même la disposition seroit faite à la charge d’obtenir
des leí tres-patentes.
•
tc 4 °' L ’exception portée en l’article 3 de l’édit qui
dispense de l’obtention des lettres-patentes, et n’exige
que l’homologation du parlement pour fondation de
messes ou o b its, la subsistance d’étudians ou de pauvres ecclésiastiques séculiers, et non l’établissement
d’aucun nouveau corps ou com m unauté, ne peut rai
sonnablement recevoir son application lorsque la
disposition est faite à un corps ou communauté non
approuvé , parce qu’en ce cas l’exception seroit en
contradiction avec l ’article 9 de l’é d it, q u i, pour la
pleine exécution de l’article i er. , non - seulement
déclare nuls tous établissemens du genre de ceux
mentionnés en cet article , mais encore déclare nuls ,
sans distinction, tous actes ou dispositions qui seroient
faits en leur faveur, directement ou indirectem ent,
sans qu’il soit besoin de lettres de rescision , nonobs-
« tant toute prescription et tout consentement exprès
« ou tacite donné à l’exécution des actes contenant la
« disposition.
«
«
«
«
«
«
« 5°. Adm ettre l ’exception portée en l’article 3, au
profit d’un corps non-approuvé , seroit fournir un
moyen indirect de fonder réellem ent, contre le vœu
de la l o i , des établissemens qui , quoique déjà existan s, n’auroient eu jusque-là qu’une existence épliém è r e , fa ute de moyens suilisans.
K 6°. L ’article 10 de l’édit , par une disposition inftniment rigoureuse, veut que les enfans ou héritiers
�( 16 )
« présom ptifs, du vivan t môme de ceux qui ont fait
« les dispositions mentionnées en l’article 9 , puissent
« réclamer les biens donnés ou aliénés, et s’en faire
« envoyer en possession , même avec restitution de fruits,
« du jour de leur demande. Cet article, innovant à celui
« de l’ édit de 1666, q u i, pour peine de l’inexécution
« de la lo i, en cas de disposition au profit de l’établis« sement non-aj>prouvé , en appliquoit le bénéfice aux
« hôpitaux , fait entièrement cesser le privilège de la
« cause pie.
‘
cc 7 0. Les déclarations de 1 7 6 2 , de 1774 et 178 0 ,
« qui contiennent quelques dispositions nouvelles rela« tivem ent aux biens dont on peut disposer au profit
« des h ô p ita u x , ne contiennent aucune innovation aux
« articles 1 , 2 , 9 et 10 de l’édit de 1749. Si les cir«
«
«
«
‘ «
‘
constances ont apporté quelques changemens aux
motifs qui ont dicté la loi de 1749 ; si la législation
même étoit changée d ep u is, elle ne pourroit avoir
d’effet rétroactif; et les tribunaux doivent juger suivant le droit acquis antérieurement aux parties.
« 8°. L e legs qui fait l’objet de la contestation a été
cc fait à une corporation ou com m unauté non légale-,
cc ment établie , h l’Œ uvre de la miséricorde de la ville
cc d’A u rilla c,q u i n’avoit point obtenu de lel tres-patentes,
« S’il est dit que le legs a été fait aux pauvres de l’Œ uvre
cc de la m iséricorde, il n’est pas raisonnable de pré-« tendre que ce soit uniquement pour désigner la classe
te des pauvres à laquelle la testatrice entendoit faire du
cc bien. L ’Œ uvre de la miséricorde avoit tous les carac->
ce tères qui peuvent faire distinguer un corps , une
com m unauté,
�( 17 ) _
^
« communauté , puisqu’elle avoit une su périeure, une.
« assistante, un receveur; elle étoit désignée et reconnue
« sous un titre particulier, l Œ uvre de la m iséricorde.
« Cette Œ uvre devoit toujours subsister -, c’est l’Œ uvre,
« que la testatrice avoit envisagée, plus encore que les
« individus qui la fo rm o ien t, puisqu’elle vouloit qu’il
« n’y eût que les revenus de 60000 fr. qu’elle léguoit,
« qui fussent employés à perpétuité à secourir les pau« vre s, ecclésiastiques et séculiers, -qu’elle .avoit en v u e ,
« et que l’Œ uvre avoit coutume de soulager ; puisqu’elle
« chargeoit l’Œ uvre de p ayer, en l’acquit de M . de Cabri« d en s, et à p erp étu ité, la pension à laquelle il s’étoit
« obligé envers les Frères macédons ; puisqu’elle avoit
« prévu le cas de la réunion de l’Œ u vre à l’hôpital
«r g é n é r a l, ou à tout autre hôpital. Toutes ces choses« ne sont applicables ni aux pauvres individuels , tels« que les pauvres lionteux que la testatrice avoit en
« vue , ni aux dames composant l ’Œ uvre de la m isé« rico rd e, considérées comme individus.
« 9 0. L a loi elle-m ême , comme la raison , s’accordent
cc pour cette interprétation avec l’arrêté des consuls,
c< q u i, autorisant le bureau de bienfaisance à accepter le
« legs dont il s’a g it, l’a qualifié de legs f a i t à ï Œ uvre
« de la miséricorde quoique le gouvernem ent ait eu
a sous les yeux la clause du testament p o rta n t, f a i t
« a u x pauvres de Y Œ uvre d e la m iséricorde.
« io ° . C ’est à ce titre que le gouvernem ent, qui a pu
ignorer que cet établissement n’avoit pas été précédé
« de lettres - patentes ; l’a considéré comme légalem ent
4
�.
c 1 8 -}
,
..
« représenté, par suite des lois des 16 vendém iaire et y
« frim aire an cinq.
« Cet arrêté d’ailleurs ne préjuge rien sur l'invalidité*
« ou la validité du le g s, puisqu’en cas de contestation:
« il renvoie les parties devant les tribunaux.
« E n fin , en appliquant les lois précédemment ana
« lisées, le legs fait à l ’Œ uvre de la m iséricorde d’A u « rilla c, est nul et caduc comme fait à un incapable;
« 'e t, d’après l’article 10 de Fédit de 17 4 9 , l ’héritier seuî
« doit profiter de la nullité ou de la caducité du legs. »■
Ees administrateurs du bureau de bienfaisance on t
interjeté appel de ce jugem ent, et insistent sur la déli
vrance du legs de 80000 fr. L e sieur Capelle va s’occuper
de répondre à leurs griefs; m ais, avant d’entrer dans la
discussion des moyens qui militent en sa faveur, il est à
propos de relever quelques inexactitudes qui ont échappé
aux administrateurs dans le récit des faits.
Q uoiqu’il paroisse peu im portant de savoir si l’hôpital
c^Aurillac ne jouissoit que d’un revenu m édiocre, com m e
Font prétendu les appelans , on doit d ir e , d’après lanotoriété p u b liq u e , que cet hospice étoit et est encore
convenablement et richem ent d o té , proportionnellem ent
à la population de îa ville. M ais on ne connoît pas les
sentences de V ie , qui ont ordonné la délivrance des legs
faits à l’Œ uvre de la miséricorde.. L e bailliage de V i e
n’auroit pas été competent pour connoitre de ces deman
des; et ces prétendus jugemens n’existent pas.
L ’Œ u v re de la m iséricorde n’étoit pas même une cor-,
poration. O n se souvient avec reconnoissance de ces r é u
nions pieuses qui s’étoient formées dans les. villes princi*-
�( 19 ) .
_
.
pales. Les daines charitables qui en faisoient partie form oient une société particulière, et parfaitement lib re ,
qui n’étoit assujétie à aucune règ le , n’étoit point établie
d’une manière perm anente, et dès-lors ne pouvoit re
cevoir aucun legs. O n doit supposer que l’intention du
testateur, lorsqu’il fait un legs p ie u x , cherche à main
tenir l’exécution de ses volontés ; il désire survivre à
lui -m êm e, faire respecter sa m émoire par des actes de
bienfaisance durables, et il ne 'peut l ’espérer qu’autant
qu’il choisit des corporations légales, dont l’existence est
nécessaire et protégée par le gouvernem ent.
'
L a dame veuve G alieu, que l’on représente comme ex
trêmement riche, et sans enfans, tenoit la plus grande par
tie de sa fortune delà tendresse de son époux : elle avoit été
chargée par lui de remettre leur hérédité au sieur Capelle
son n eveu, père de l ’in t i m é , et qui étoit aussi le cousin ger
main de la dame Galieu. Brouillée depuis long-tem ps avec
le sieur Capelle p è r e , et ne voulant point qu’il fût l’ob
jet de ses libéralités , elle crut tout à la fois pou voir satis
faire son propre penchant, et rem plir les intentions de
son m a r i, en faisant passer ses biens au sieur Capelle
fils. L ’abbé de Cabridens, frère de la dame G alieu , étoit
sans doute un homme recommandable par sa piété et par sa
charité; mais la fortune dont il jouissoit provenoit de sa
sœur, ou du moins de la donation qu’elle lui avoit faite en
1774. A la vérité on prétend qu’il étoit propriétaire de tous
les biens situés en A u v e r g n e , et auxquels madame de
Galieu avoit succédé. O n cite avec emphase les dom ai
nes de F aillitou , de la Bartassière, et du fief de Clavières.
Ces deux premiers domaines ne s’élèyent point à une
C 4
�C 20 )
Sommede 60000 fr., et le dernier, que l’on a qualifié im pro
prement de fief, puisqu’il ne l’a jamais é té , ne vaut pas
la même somme. Il n’a fait aucune disposition, et tout
ce qu’ont dit les appelans, page 9 de leur m ém oire, 11e
sont que des allégations dénuées de toute vraisemblance.
P o u rqu oi dire encore que la dame G alieu a préféré le
sieur Capelle à des parens plus proclies : elle n’en avo it
aucun dans la ville d’À u rilla c , qui fût au même degré.
L e sieur Capelle p è re , neveu du sieur G a lie u , étoit
cousin germain de la testatrice sa v e u v e , et son parent
le plus proche. A in si le sang et la nature, pour se ser
v ir des expressions des appelans , appeloient personnel
lem ent le sieur Capelle à la succession de la dame G alieu.
O n vante aussi le fief de G ria lo u , qui faisoit partie de ses
propriétés, et q u i, dans l ’état actuel, ne produit pas 800 fr„
de rente*
A la page 12 du m ém oire, on prétend que l ’Œ u v re
de la m iséricorde de la ville de Figeac avoit été payée du
legs porté p a r le testament, et on ajoute que l’héritier n’a
point demandé si les Dames de Figeac a voient des lettres**
patentes. M ais les administrateurs n’ignorent point sans
doute que l’Œ uvre de la miséricorde de Figeac est une
corporation patentée, une communauté de iilles de l’éta
blissement de saint V in cen t de P a u le , q u i, depuis plus
d>un siè cle, jouissoit d’une existence légale, et en voyoit
¿es sceurs de son ordre dans un© foule de villes.
L es administrateurs sont également inexacts, lorsqu’ils
disent, page 14? Q110 niadame deFontanges, se trouvant
à Paris après le décès de la testatrice, 'avoit fait des dé
marches pour obtenir la délivrance du legs. Ce fait est
�( 21 )
absolument faux et controuvé : on peut môme assurer
qu’à l’ouverture de la succession de la dame G a lie u , la
société des Dames de la m iséricorde étoit dissoute ; et les
administrateurs sont hors d’état de prouver que depuis
le décès il ait été fuit aucune démarche par qui que ce
soit pour obtenir la délivrance du legs.
L e sieur Capelle désavoue également que son père se
soit jamais immiscé dans la jouissance des biens de la dame
Galieu ; ils n ’ont été remis- au fils qu’après la m ort du
p è re, et il n’en jouit que depuis iy g 5 . Si le sieur Capelle
père s’opposa , en 179 2 , à la vente de quelques immeu
bles, c’est que déjà le sieur Gayla en avoit vendu pour
58ooo
assignats, dont il n ’a fait aucun u sage, et qui
n’ont été remis à l’héritier qu’en l’an 4 , époque de la
plus grande dépréciation du papiei'-monnoie.
L e s membres du bureau de bienfaisance p r é t e n d e n t ,
page 19 , qu’ils ne peuvent oifrir aux pauvres que du zèle
et des promesses ; cependant ils jouissent d’un revenu de
1000 f r . , ce qui présente déjà quelques ressources. M ais
les membres du bureau de bienlaisance peuvent-ils espérer
déposséder jamais des revenus considérables ? Ils doivent
tout obtenir de la confiance de leurs concitoyens , de leur
ch arité, de leur piété : les q u êtes, les aum ônes, les dons
m anuels, doivent composer principalem ent et exclusive
ment leurs revenus; ils en sont les distributeurs, et c’est là
l ’unique but de leur établissement.'
r
Maintenant il s’agit de présenter quelques observations
préliminaires sous le point de vue de l’intérêt public }
car s’il faut en croire les administrateurs , qui paroissent
avoir des v u es.é lev é e s, leur.cause ®st une question de
droit public.
�( 23 )
M a is com m ent Tordre et le droit -public seroievt-ïls
en suspens ( pour se servir des termes des app elon s),
parce que le legs de 80000 fï\ fait à l’Œ uvre de Ici misé
ricorde serait contesté?
■ Q u’étoit l ’Œ u vre de la m iséricorde? une association
libre , composée de dames distinguées par leur piété et'
leur bienfaisance, et qui recevoient de la confiance de
quelques citoyens généreux des souscriptions volontaires.
Ces établissemens étoient bornés à certains lieux et à
certains tem ps; ils n’entroient point dans le système de
l ’administration générale ; ils pouvoient obtenir des secours
particuliei’s , lorsqu’il s’agissoit de rem édier aux m aux
d une disette, d une epidemie , ou de pourvoir à l’en
tretien de quelques vieillards et de quelques orphelins.
Ces corporations m om entanées, qui pouvoient se dis
soudre à chaque instant, avoient cet avantage inestimable
qu’elles n’étoient sujettes à aucun abus im portan t, parce
qu’elles avoient des vues vraim ent utiles, comme la con
tribution de chacun étoit entièrem ent volontaire.
Mais pouvoient-elles recevoir des le g s , des fondations
perpétuelles, lorsqu’il étoit possible que , par la disso
lution de la société , les fonds fussent détournés de leur
destination ? N ’étoit-ce pas laisser aux fondateurs le regret
de les avoir confiés? et bientôt la source devoit tarir!
Dans ces sortes d’établissemens on ne considère que
l’utilité actuelle; cest toujours elle qui détermine la gé
nérosité des bienfaiteurs : mais le besoin cesse-t-il, la libé
ralité cesse, et son cours se tourne vers d’autres besoins.
Q u’on cesse donc de s’ecrier que les bureaux de bienfai
sance, comme autrefois l’Œ uvre de la m iséricorde, avoient
�C 23 3
capacité pour recevoir des legs et des fondations perpé
tuelles. Ce n’étoit pas là le but de leur institution et le
préambule de l’édit du mois d’août 1749 nous apprend
suffisamment, que le législateur a senti le danger de ces
fondations , et a voulu Fempêclier pour l’avenir. « Les
« familles, est-il d it, ont souvent le déplaisir de se vo ir
« privées de leur fortune , par les dispositions que les
« liommes ont à former des établissemens nouveaux qui
« leur soient propres , et faire passer leur nom à la pos
« térité avec le titre de fondateurs. L e meilleur usage
« que l’on puisse faire de l’autorité dans une matière si
« importante, est de concilier autant qu’il est possible
« l’intérêt des familles avec la faveur des établissemens
« véritablement utiles au public. »
On aura bientôt occasion de revenir sur les dispositions
de cet édit; mais pour suivre le même ordre de défense
des administrateurs, qui ont soutenu que le tribunal de
Saint-Flour étoit incom pétent, et n’avoit pu connoître
de la validité du legs , il convient d’abord de discuter
cette première proposition.
;
Les administrateurs du bureau de bienfaisance ont
transcrit dans leur mémoire l’arrêté des consuls, en date'
du 18 messidor an 6 , qui les autorise à recevoir le legs
contenu au testament de la dame Galieu. I/article 5 de
cet arrêté porte, « qu’en cas de contestation ou de refus
« de la part des héritiers , les administrateurs du bureau
« de bienfaisance poursuivront la délivrance du legs
« devant les tribunaux , en s’y faisant préalablement
« autoriser dans les formes voulues par les précédons
« arrêtés. »
’
�( 24 )
Il est bien évid en t, d’après cet article, que l ’a rrêté,
comme l’ont dit les premiers ju g es, ne préjuge rien sur
la validité ou invalidité du legs. Il étoit inutile sans doute
de renvoyer devant les trib u n au x, pour prononcer sur
les contestations qui pou voient s’élever à cet égard , si
l ’arrêté du gouvex-nement, comme ou veut le prétendre,
çût été im pératif et absolu.
C ’est un acte de simple adm inistration, qui autorise à
recevoir si le legs est dû , et en règle l’em ploi en cas que
l ’on reçoive. Il en est de cet a rrê té , comme il en étoit
autrefois des lettres de bénéiice d?inventaire ou des let
tres de restitution. Ces lettres , qui émanoient du souve
rain , étoient indispensables, soit pour accepter condition
nellement une succession, soit pour se pou rvoir contre
un engagement indiscrètement contracté. Mais pour
qu’elles eussent leur ex écu tio n , les faits devoient être
vérifiés par les tribunaux , qui n’en px’ononçoient l’enté
rinem ent qu’autant qu’ils reconnoissoient la légitim ité des
motifs. A uroit-on pu dire aux tribunaux , lorsqu’ils refusoient d’entériner de semblables lettres , qu’ils s’érigeoient
en réformateurs des arrêtés ou des ordres du gouverne
ment , qu’ ils refusoient d’admettre une demande que le
gouvernem ent autorisoit? T e l est cependant le vice du
raisonnement des administrateurs. Ils ont obtenu , sur
pétition non com m uniquée , un arrêté qui les* autorise,
à recevoir un legs. Cet arrêté n’est point donné en connoissance de cause: on ne voit aucune contradiction, et
on autorise à recevoir ; mais c’est toujours sauf le droit
d’a u tru i, sauf à faire juger devant les trib u n a u x , en cas
de contestation, si le legs doit etre ou non acquitté. T e lle
est
�c
*5 )
_
est la seule idée raisonnable, le seul point de vue sous
lequel on puisse faire considérer l’arrêté du gouverne
ment ; et les administrateurs n’ont pas voulu s’apercevoir
qu’en présentant cet acte d’administration comme im pé
ratif et absolu , ils transformoierit une simple form alité
en un acte de despotisme qui répugneroit à tous les prin
cipes de lDoerté si solennellement proclam és, si soigneu
sement maintenus. Q u’on ne dise donc plus que le tri
bunal de S a in t - F lo u r , en examinant le m érite de la
demande du bureau de bienfaisance, s’est arrogé le droit
de réform er les actes du go u vern em en t, que ce n’est
point à lu i ci diriger le gouvernail de f état. Ces expres
sions im propres sont absolument vides de sens. Il faudroit
•au moins rayer l’article 5 de cet arrêté, parce qu’en vain
le gouvernem ent auroit-il renvoyé devant les tribunaux
lë droit de prononcer sur la délivrance du legs dont il
s'a git, s’il n’avoit pas été permis aux juges de s’en écarter.
; Les appelans ont senti toute la force de cet argum ent;
mais ils veulent restreindre l’objection pour tout ce qui
a'rapport au droit c iv il, savoir: la validité du testament,
la capacité de disposer de la testatrice , la quotité du legs,
par exemple ; mais tout ce qui est de droit public est
au-dessus de leur atteinte, et, suivant eu x , la capacité des
pauvres pour recevoir com m e pour demander fait partie
de ce même droit public.
' Il est assez difficile de com prendre ce que les adminis
trateurs ont entendu par ce raisonnement. O n ne conteste
pàs la capacité en général des bureaux de bienfaisance
pour recevoir ou demander des legs qui leur seroient
confiés depuis leur création. O n sait que le gouvernem ent
D
�C
)
seul* s’est, réservé le droit de .les y autoriser, et ce n’est pas>
ce que les juges de Sain t-Flour, ont examiné. Ils ont seule
m ent décidé que ce n’étoit pas au bureau de bienfaisance
que le legs avo it été fait, puisque ce bureau n’existoit
pas l o r s - d u décès de la testatrice. Ils ont décidé que l’as
sociation des. dames pieuses à laquelle le legs avoit été,
fa it:, étoit incapable de le recevoir ; et s i , d’après les
appelons •eux-mêmes ,;les premiers juges avoient droit de
connpître de la validité du testament , de la capacité de
disposer et de la quotité ,du le g s, on ne voit pas comment,
ils n’auroient pas eu. le droit de prononcer sur la validité
de ce meme legs,, comment il auroit été interdit à l’iié-riticr de discuter devant les tribunaux la capacité de la'
testatriee ou. du légataire..
-, O n doit donc écarter ce premier moyen d’incompé—
tencej'pour s’occuper de la. validité du legs ou.fondation!
de la dam e-G alieu,; et, pour en apprécier le m érite, il.
faut en l’evenir, à i ’édit de 1749,, qui fait la loi dans cettematière.
■. ..
/
]D’a près l’article 1". de cet é d it, il ne peut être forméaucun établissement qu’en vertu- de lettres-patentes enre
gistrées .dans les cours. Sous ce mot gén éral,d’établisse
ment. , ■
on y: com.prend nominativement les Ziospices y,
congrégations ,, confréries hôpita ux ,. etc, .
.
L ’art. 2 défend de faire à l’avenir aucunes dispositions
par acte de derniere volonté pour, fonder un nouvel, éta
blissement,, ou au p,r°fit des personnes qui seroient ch ar-'
gées de le form er , le tout à peine de n u llité, ce qui sera,
observé quand même la disposition seroil faite à la ch arged’obtenir des lettres-patentes..
�( 27 )
. .
■ L ’article g déclare nuls tous les actes et dispositions qui
pouiToicnt avoir été faits en faveur des établissemens uon
autorisés, directement ou indirectem ent; et tons ceux qui
auroient été chargés de form er ou administrer ces établis
semens, sont déchus de tous les droits résultans des actes ou
dispositions, sans qu’il soit besoin de lettres de rescision,
nonobstant touté prescription , tous consentemens exprès
ou tacites qui pourroient avoir été donnés à l’exécution de
ces actes ou dispositions,
' Par l’article 10 , les enfans ou présomptifs héritiers
seront admis, même du vivant de ceux qui auront fait
lesdits actes ou dispositions, à réclamer les biens par eux
^donnés ou aliénés ; ils doivent en être envoyés en pos
session pour en jouir en toute p ro p riété,a vec restitution
des fruits ou arrérages, à com pter du jour de la demande
qu’ils en auront formée.
r Ces dispositions rigoureuses et prohibitives viennent
naturellement s’appliquer au legs dont il s’agit. L ’Œ u vre
de la miséricorde n’éloit qu’ une association libre non
a p p ro u vée, une congrégation sous -prétexte d’ h o sp ice,
qui n’avoit point été revêtue de leitres-patentes : donc
les dispositions faites ù son profit, directement ou indi
rectement , à elle-même ou à ceux qui l’administrent 7
sont nulles d’ une nullité viscérale. L e sieur Capelle pour-roit en réclamer la restitution, si le legs avoit été p ayé,
nonobstant tou te prescription , toute approbation expresse
Q.Utacite : c’est la seule conséquence qui puisse résulter des >
termes irritans des articles 9 et xo de l’édit dé 1749. ' .
' Les administrateurs prétendent que cet édit n’est point
applicable. Ce n’est point à ¥ Œ uvre de la m iséricorde que x
‘
D a
*
�.
.
. c 28
}
le legs A 6tê fa it,’ mais bien a u x pauvres dé l’Œ uvre.' Les
pauvres en nom collectif sont capables de recevoir.
r
L e sieur Capelle avoit déjà répondu en cause principale
à ce foible argument. « L e legs fait aux pauvres de l’Œ uvre,
« a-t-il dit dans son m ém oire, est fait â l’Œ uvre. Civibus
« civitatis legatum, velJldei com m issum , datum ciçita ti
« relictum videtur, loi 2 , D e rébus dubüs. L a lettre
« du testam ent, con tin u e-t-il, n’est pas moins expresse.
« C ’est au corps qu’il a été lég u é , car ce n’est que les re-*
« venus'dés 80000’^" qui doivent être employés à soulager
« les pauvres que l’Œ uvre a coutume d’assister; et p ar
« qui doivent-ils être employés ? par l ’Œ u v re ,q u i a cou—
a tume de les assister. Ce n’est point aux p au vres, mai»
« au corps que l’on a légué , puisqu’on le charge d’uner
« rente annuelle envers les Frères macédons , d’une fon
« dation perpétuelle envers les prêtres pauvres de la v ille
«
a
«
«
«
«
«
«
cc
d’A u rillac. Ce n’est point aux pauvres qu’on a légué ,
puisque ce n’est point eux qui peuvent dem ander,
recevoir et quittancer. Il n’y a pas même fidéicommis ,*
car ils n’auront jamais de droit et d’action pour posséder ; c’est pour leur soulagem ent, mais ce n’est pas sur'
eux que l’on a fondé. Ils sont l’objet et non les dépositaires de la fondation : ce n ’est point eux q u i forment
le corps et la congrégation de l’Œ u vre de la m iséri-:
c o r d e , mais bien les pieuses dames qui administroient
« cette Œ u vre ; £ar les pauvres n’auront jamais de puis« sance et de d ro it, ni dans ^administration , ni contre^
« les administrateurs. »
Xæs administrateurs invoquent l’article 3 de l’édit de
1749 ? cl u* excepte les fondations particulières, qüi ne ten.-* '
�( 29 )
droient à rétablissement d’aucun nouveau corp s, college
ou com m unauté, ou à l’érection d’un nouveau titre de
bénéfice , et qui n’auroient pour objet que la célébration
des messes ou obits , la subsistance d étudians ou de
pauvres ecclésiastiques ou seculiers, etc. A 1 égard des
quelles fondations, il ne sera point nécessaire d’obtenir
de lettres-patentes , il suffira de faire hom ologuer les actes
ou dispositions qui les contiendront, dans les parlemens
ou conseils supérieurs, chacun dans son ressort, sui les
conclusions des procureurs généraux. E n se plaçant dans.
ces exceptions , les appelans ajoutent : La révolution n a
point permis aux tuteurs des pauvres de rem plir la fo imalité de l’hom ologation, mais l’arrêté du gouvernem ent
doit tenir lieu de cette hom ologation.
Cette objection, souvent renouvelée , et toujours detruite, n’a pas échappé aux premiers juges. Ils ont sage
ment pensé que l ’exception portée par l ’article 3 étoit.
étrangère à la cause, puisque la disposition est faite au^
profit d’un corps ou communauté non approuvée. Dans
ce cas, disent-ils, l’exception seroit en contradiction avec
l ’article 9 de l’édit ; ce seroit fournir un moyen indirect
de fonder réellem ent, contre le vœ u de la l o i , des établissemens q u i, quoique déjà existans, n’auroient eu jusque-là
qu’une existence éphém ère faute de moyens suffi sans.
L ’article 3 ne dispense de la formalité des lettres-pnten
tes , auxquelles il substitue l’h o m o lo g a tio n , que les ion
dations particulières et les actes qui les c o n tie n n e n t , et
non les corps à qui elles sont confiées. Dos font ations
confiées à un corps non approuvé tendent n< cessai] <m< nt
à établir un nouveau corps, contre la prohibition expresse
de l’édit de 1749.
�(
30
)
t
^
O n poiuToît citer un exem ple particulier et très-récent,
pour établir que le legs fait à l’Œ uvre de la miséricorde
est caduc, et doit appartenir à l’hériLier. M . de Séguiran,
évêque de N e v e r s , fit son testament le 3 avril 1789 , et
m ourut le même jour. Par une clause de ce testament, il
veut et entend que les biens qu’il laissera soient em ployés
à l’exécution des établissemens de charité qu’il avoit coxn-r
m encés, et principalement de celui de la maison des Frères
de l’ instruction et charité chrétienne, et des fonds néces^
saires pour leur subsistance.
Les héritiers du testateur se pourvurent auprès du corps
législatif1, ils soutinrent que le legs étoit caduc, et par là
réversible a ses héritiers légitimes. Un de leurs principaux
moyens étoit que les légataires n’en avoient pas demandé
la délivrance. Cependant les Frères de l’instruction et les
Sœurs de la charité, que ce legs concernoit, étoient revê
tus de lettres-patentes, et dès-lors sembloient avoir capa
cité pour en réclamer la délivrance.
O n convient de tous ces faits, dans le rapport qui fut
fait au conseil des Cinq-cents, le 21 germinal an 6 , par.
le représentant Desmoulins. L e rapporteur est d’avis que
la succession doit être remise à l’h éritier; il se fonde
sur ce que le légataire n’a pas été saisi, lorsque le legs
p o u v o it ê t r e demandé, etle nouvel ordre de chosesen ayant
changé la destination, l’intention du testateur ne seroit pas
rem plie
p ;n' conséquent le legs doit être-reversible pour
les héritiers. Cet acte de justice lui paroît indispensable,
et le projet de décret qu il propose a été converti en loi
par le conseil des Anciens.
Cette loi particulière et locale n’a point été im prim ée;
�( 3T )
mais le sieur Capelle est nanti du rapport, et sans doute
on trouvera une grande aiïinité entre cette espèce etcelle
qui donne lieu à la contestation.
Comme M . l’évêque de N evers, la testatrice n est
décédée qu’en 1789; le legs fait à l’Œ uvre de la M isé
ricorde n’a point été réclam é; les dames à qui il étoit
destiné n’en ont pas demandé la délivran ce, elles n’en
ont jamais été saisies; le nouvel ordre de choses a changé
la destination du legs ; il n’existe plus de Dames de la
m iséricorde; les Frères macédons sont supprim és; les
intentions de la testatrice ne peuvent plus être remplies :
le legs est donc caduc ; il est donc réversible à l’héritier.
E t comment les intentions de la dame Galieu pou rroient-elles être rem plies? elle a principalement et exclusi
vement en vue les Dames de la m iséricorde, et notam
ment madame de Fontangcs , leur supérieure; les revenus
de la somme de 80000 fr. doivent être distribués à une
classe de pauvres particulièrement désignés, et que ces
dames avoient coutume d’assister. I l ne peut y avoir de
véritable substitution à une corporation de ce genre : ce
n’est plus le même objet ni les mêmes individus. L ’arrêté
du gouvernem ent même, que les appelans veulent regarder
comme absolu, change la nature du legs. L ’article 3 veut
que la somme principale soit employée en acquisition
de reu tessu r l’état. Etoit-ce à la décharge du gouverne
ment que la dame Galieu avoit légué cette som m e? Les
hospices en gén éra l, comme les bureaux de bienfaisance,
ne peuvent aujourd’hui recevoir des capitaux ou des
remboursemens qu’en les versant dans les mains du gou
vernem ent, qui en paye l’intérêt à quatre pour cent; oui
�( 32 )
en achetant des rentes sur l’état, qui ne représentent
point l’intérêt que la testatrice avoit stipulé.
Il n’est donc plus possible de maintenir l’exécution des
volontés de la testatrice. Dès-lors le legs ne peut plus
être exigé.
Q u ’im porte que l’abbé de Cabridens ait eu de pieux
desseins en faveur des pauvres que les Dames de la miséx-icorde assistoient ; il n’a manifesté ses volontés par aucun
acte. Si la dame Galieu a déclaré qu’ elle vouloît exé
cuter les pieux desseins de son fr è r e , elle a expliqué en
quoi consistoient ces pieux desseins. Comme elle, il avoit
en vue les Dames de la miséricorde , les Frères macédons. N i les unes ni les autres n’existent plus; il est donc
impossible d’ordonner la délivrance du legs, et l’héri
tier seul peut en profiter.
'
Les appelans, qui veulent faire triom pher la vérité par
toutes les arm es de la p a ro le, disent que si le legs
étoit laissé aux pauvres d’ A u r illa c , sans autre explica~
tion , personne ne douteroit qu’il ne fût valable. M ais
c’est précisément mettre en fait ce qui est en question.
Les pnuvres forment un corps irrégu lier, qui n’est suscep
tible ni d’adm inistrer, ni de recevoir. IL faut un inter
m édiaire pour la distribution , et 011 ne peut confier
cette même distribution qu’à un corps dont l’existence
est approuvée par les lois de letat. Si le corps ou l’hos
pice 11’est pas fondé en vert,u de lettres-patentes, le legs
est caduc, et revient à l’héritier en vertu de l’article 10
de l’édit de 1749- Bientôt les appelans s’égarent et tirent
des conséquences bien étranges. L e parlem ent, disent-ils,
auroit hom ologué un legs fait aux p a u vres, ilnuroit au
torisé
�( 53)
torisé les Dames de la m iséricorde à en faire la distribu
tion. Ce que le parlement auroit fait, la testatrice a pu
le faire. Dans tous les ca s, les fondations sont de droi(
public ; l’autorité peut changer les administrateurs nom
més par le fondateur, comme elle peut confirmer sou ..
choix.
•
.
Si ce sont là des maximes de droit p u b lic, on ignore
où les appelans ont pu les puiser. L a règle la plus cer-,
taine en matière de testamens, c'est que la volonté du
testateur fait la règle ; il n’est point permis d’aller contre
ses intentions ; e t, lorsqu’il y a impossibilité dans l ’exé
cu tio n , le legs devient caduc et retourne à l’héritier.,
V o ilà les vrais principes du droit public et social. L ’au
torité a ses limites : comme elle doit respecter les pro
priétés , efle est protectrice et non usurpatrice.
S’il est en usage parmi nous de dire que les fonda
tions sont de droit p u b lic , ce n’est qu’en ce sens , que l a ,
société est intéressée à leur conservation ; mais elles ne
peuvent exister sans la sanction de ceux qui agissent en
cette partie au nom de la société. A l’époque de la fon
dation faite par la dame G-alieu, le legs ne pouvoifc
avoir d’effet, qu’autant que la corporation désignée pour
le i-ecevoir eût été revêtue et autorisée par des lettrespatentes.
L ’G iuvre de la miséricorde n’avoit aucune existence
légale. V oudroit-on même raisonner dans le sens le plus
favorable aux administrateurs •, ils conviennent qu’il Fal—
loit au moins l’homologation du parlement : ils ne sup
pléent à ce vice de forme , que par l’arrêté du gouver
nement, de l’an dix j et vouloir qu’un arrêté, postérieur
'
E
'
*
�C 34 )
de treize années à l’ouverture du legs, puisse faire re
v iv re une disposition caduque, lorsque les choses ne sont
plus entières, après une révolution qui a bouleversé
les fo rtu n es, supprimé tous les établissem ens, c’est évi
demment donner un effet rétroactif à un acte de simple
administration , qui n’a rien décidé sur la validité du»
le g s , ou a présumé le consentement de l’héi’itier à en
verser le montant.
«
/ Il est contre toutes les règles , contre toutes les idées
l’eçues ,de prétendre qu’un legs dont l’effet s’est ouvertr
en 1789? puisse être réglé par' les lois actuelles; qu’ un,
legs essentiellement nul dans l’ancien oi*dre de choses,
puisse être valable dans le nouveau ; qu’ une libéralité
faite à l’Œ iivre de la miséricorde depuis 1785 , puis e
être acceptée, dix-sept ans après, par un bureau de bien
faisance , dont la création est toute récente. Ce seroit
succéder avant de naître , ce seroit renverser l’ordre de
la nature.
E t le sieur Câpellë ne doit-il pas espérer la faveur de
la justice, lorsqu’il se •trouve dans une position si dif->
férente de celle qu’il avoit le droit d’espérer? l^a fortune
de sa bienfaitrice a éprouvé une dim inution si considé
rable depuis la rév o lu tio n , qu’elle suffiroit à peine pour
le remboursement des legs des trois classes. Etoit-ce là
l’intention de la testatrice'? eû t-elle'été aussi lib érale,
si elle n’avoit pas été opulente?
E lle veut que les legs soient payés de la manière la
plus favorable à son h éritier; elle ne suppose aucune di
m inution dans ses revenus , qu’elle affecte spécialement
à l’acquittement des legs, pendant la.m inorité de son hé-
�( 35 h
#
ritier. Si cile, permet, de vendre quelques • im m eubles,
elle désigne les moins -précieux -, .encore a-t-elle excédé
ses pouvoirs en ce p o in t, parce que c’est éluder la dis-,
position des r.rt:cles 1 4 i 5 et 16 de l’édit de 1749.
(
.-E t cependant-, si le sieur Capelle pouvoit être tenu
d’acquitter l e ’ legs de 80000 f n , il seroit dans l’indispen
sable nécessité de vendre tout ce qu’il possède, tout ce
q u ’il a obtenu de la testatrice. O r , a-t-elle voulu le dé
pouiller ? L ’institution universelle seroit-elle donc un
titre illusoire?
, .
D ’après ces considérations m ajeures, le sieur Capelle
doit-il s’occuper de ses demandes subsidiaires? Comme en
cour souveraine elles sont sans conséquence , et n’affoiblissent pas les moyens p rin cip au x, le .sieur Capelle pro
posera quelques observations à cet égard.
L e bureau de bienfaisance, établi par une loi du 7 fri
maire an 5 , ne s’est pourvu qu’en l’an 10 pour obte
nir la délivrance du legs: il le demande en entier ; ce
pendant le capital de 20000 fr. destiné aux Frères macédons, et pour l’éducation de la jeunesse, n’est point
dans les attributions du bureau de bienfaisance, qui est
spécialement et exclusivem ent chargé de la répartition
des secours à dom icile ; dès-lors il est sans qualité pour
réclamer la somme destinée à l’instruction.
2°. Il y a encore à prendre sur le legs .pareille somme
de 20000 f r . , dont le revenu est affecté au soulagement
des ecclésiastiques; le sieur C ap elle, dans tous les cas,
ne pourroit être obligé que de payer le revenu de cette
somme , sans qu’on puisse le contraindre à en verser le
principal.
.
.
�( 35 3
.
3®. E t toujours dans l’hypothèse que le surplus du
legs pourroit être e x ig é , le sieur Gapelle au moins seroit
autorisé à le payer en rentes sur l’état. Il seroit assez
extraordinaire qu’on voulût le contraindre à verser la
somme pour être employée par les administrateurs en ac
quisition de rentes sur l’état; ce seroit vouloir q u ’il ver
sât les deniers dans les coffres du gouvernem ent, et certes 1
ce n’est pas là ce quTa entendu la testatrice. Il faut d’ail
leurs se reporter à l’époque de l’ouverture du testament
( 178 9) : alors , d’après l’article 18 de l ’édit de 1749 , les
gens de main-morte étoiènt dans l’interdiction d’acqué
rir autre chose que des rentes constituées sur le r o i , sur
le clergé, diocèses, villes ou communautés; et l ’article 13
de la déclaration du 20 juillet 176 2 , enregistrée au par
lement en 1 7 7 4 , autorise les héritiers et représentans des.
donateurs ou testateurs à donner, en payem ent, des rem
boursemens des rentes de la nature de celles dont if est
perm is a u x gens de m ain-m orte de f a i r e ta c q u is itio n ,
par Varticle 18 de Védit de 1749. C e subsidiaire, au
m oins, ne pourroit être refusé à Pintimé ; il a pour lui
la disposition expresse des lois qui étoient alors en
vig u eu r, et qui ont dû régir le legs dont il s’agit.
40. L e sieur Capelle est encore lé maître de distraire
la quarte falcidie sur une succession ouverte en pays de
droit écrit. , O n sait que cette quarte est la quatrièm e
partie des biens de l’hérédité; qu’elle se prend eu'égard’
à la valeur des biens au temps du décès, et non à ce
qui est arrivé depuis, soit diminution ou augmentation.'
h o i 30 , lo i 7 3 , ad J'aie. §. 4 , a u .C o d .
’
T o u t héritier testamentaire ou ah intestat a le droit
�( 37
'
e
de la distraire, lorsqu’il a été fait inventaire; et, dans
l ’espèce, cette formalité a été rem p lie.'E lle se distrait
des legs, quelle que soit leur nature; pour alimens, ou
à une com m unauté, ou pour legs destinés aux œuvres
publiques. L o i 6 ,a d fa lc . §. i , au Cod. E t le sieur Capelle
se réserve, dans tous les cas, de demander cette distraction,
s’il y a lieu.
:
5 °. E n fin , p o u rro it-o n obliger le sieur Capelle de
payer ce legs sur le cham p? Il n’est point encore parvenu
à la majorité prévue par le testament il n’atteint sa
vingt-cinquièm e année qu’en l ’an 13 : d’après le testa
ment , il ne doit aucun intérêt jusqu’à cette époque ; on
n e peut même exiger le principal. Il avoit conclu subsidiairem ent, en prem ière instance, qu’il lui fût accordé
cinq ans pour le rem boursement; et on rend assez de
justice aux administrateurs pour croire qu’ils accéderoient
à cette modification.
M ais c’ est trop s’arrêter à des subsidiaires auxquels
le sieur Capelle ne conclut qu’à toutes fins. Il n’est pas
un riche h éritier, et il étoit né pour l ’être. Pourquoi
donc vouloir lui ravir les foibles débris de la fortune
qui lui étoit destinée? D e quelle considération peut être
un legs de cette nature pour les besoins généraux d’une
classe aussi nombreuse ? c’est une goutte d’eau répandue
fiur une vaste m er, et dont l’ utilité ne sera jamais sentie.
Les bienfaits particuliers ne diminuent pas la pauvreté
générale. Toutes les fféctiotrs nobles et généreuses
s’opposent à ce qu’on dépouille un héritier légitim e,
sans nécessité pour l’intérêt public. L 'h om m e d ’état 11e
s’occupe que de grandes choses, et connoît les abus des
£3
�particulières, qui absorberoient à la longue
toutes les propriétés. L 'hom m e religieux vient au secours
de ses semblables ; et garde le silence sur ses bienfaits.
L ’ h o m m e d u m o n d e pense que les fondations sont presque toujours des-monumens de van ité et d’o rg u eil, et
les apprécie à le ur-juste valeur. L e m agistrat, impassible
com m e la loi dont il est l’organe, prononce sans pré
te n tio n sur les questions qui lui sont soum ises et ne
-fait point acception des personnes. C ’est dans le temple
de la justice que les hommes sont véritablem ent 'égaux
-en droits.
fondation
M e. P A G E S ( d e R iom ) ancien avocat,
M e. - M A R i E , a v o ué,
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Capelle, Pierre-Antoine-Urbain. 1804?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
legs
confiscation des biens d'Eglise
bienfaisance
doctrine
testaments
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité d'un legs de 80000 francs, fait à l’œuvre de la Miséricorde établie en la ville d'Aurillac. Mémoire en réponse pour Pierre-Antoine-Urbain Capelle, propriétaire, habitant du lieu et commune de Saint-Constant, intimé ; contre les Administrateurs du Bureau de Bienfaisance de la ville d'Aurillac, appelans d'un Jugement rendu au Tribunal d'arrondissement de Saint-Flour, le 20 floréal an II.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1804
1785-Circa 1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0217
BCU_Factums_M0219
BCU_Factums_G1309
BCU_Factums_G1310
BCU_Factums_G1311
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53717/BCU_Factums_M0218.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Constant (15181)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bienfaisance
confiscation des biens d'Eglise
doctrine
legs
testaments
-
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41286c982dbe0bfb5bb772fdc441d8c7
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Text
■ i I
COUR
1 '
--
MÉMOIRE
D'APPEL
SÉANT
A RIOM.
P
o
Jacques
u
r
C H A V E , appelant
;
C O N T R E
J e a n n e V A L L A , et E l i s a b e t h F E R R I E R ,
1
sa f i l l e
majeure , intim ées.
L A recherche de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœur s u n scandale de moins. D ans ce secret de
la nature , le législateur ne pouvoit que s’en rapporter à
la crédulité de l’hom m e, ou se jeter dans le vague des
conjectures : le premier parti seul étoit juste; la loi l’adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nommer son p ère
que celui qui a voulu se déclarer tel.
Nul acte ne doit donc être plus légal, plus libre, que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incomA
�O )
patible avec elle ; car si elle n’est pas clairement reflet
spontané de la réflexion , le but moral de la loi n’existe
plus*
L ’appelant réclame contre l’oubli de ces principes, et se
place sous la protection de la cour, pour faire annuller un
acte inform e} auquel on l’a fait participer par la violence ;
il demande à n’être par forcé de reconnoître un enfant
qui ne fut jamais le sien.
Les premiers juges, n’ont pas voulu admettre la preuvequ’il étoit à même d’offrir ; et si cette opinion pouvoit
prévaloir , il en résulterait que , contre le vœu de la loi,,
un homme donneroit son nom malgré lui à un enfant
naturel ¿seroit Contraint de prendre soin'd’un étranger^
et de lui laisser sa succession.
; n
v. ^ .
F A I T S .
C1
r
Jeanne V a lla , et Elisabeth Ferci.'er, sa fille, habitent lelieu de M azet, mairie de Chambon. Leurs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques Chave,.
qui demeure à la distance d’environ une lieue de leur
domiciLe.
Son âge, plus avancé même que celui de la mère, ne luii
eut donné aucun prétexte de se,rapprocher delà fille. U a
séducteur à cheveyx.blancs est rare ; au village-il ne connoît pas l'oisiveté qui nourrit les illusions, et la monotonie-,
de ses ti’avaux. rustiques avance l’amortissement de ses,
. sensations, en occupant toute son existence.
( Ces femmes étoient donc absolument étrangèresà Chnve,,
lorsque, tout d’un, coup il s’est trouvé mêlé à leur destinée;
�( 3 ;)
par une de ces sourdes manœuvres que l’enfer sçul.pçut
faire concevoir.;
yl . f
i;
. .!: •
■Un matin à huit heures ( le 21 germinal an 9 ) ’„ Jacques
C h a v e, malade, est brusquement arraché d,erson lit; par
deux frères de la fille Forrier ,.suivis de trqis.autres jeunes
gens armés de bâtons ou de iourch.es. Il se disent envoyés
par le sieur de Bannes, maire de Chambon , et comman
dent à Chave de les suivre dan^ la maison de ce sieur de
Bannes. Il Çs’habille
et les suit.
, itr.
'
1
. .
^
II. .
. ç
Là il trouve Jeanne Valla qui paroît en grande, co lère,
l’accueille par des.injures grossières, lui dit que sa fille est
accouchée , depuis |quinze jours , d’un garçon dont il est
le père , suivant le récit de sa fille et de Mv le maire ,de
Cham bon,, et qu’il'fautf,signer sur le champ l’acte de
naissance.
... .
Chave , étourdi d!uue, .vespériç aussi inattendue, pressé
entre les cris de la mère ,,les coups de poings des frères ,
et les menaces de leurs trois hommes d’escorte-,iveut élever
la vo ix , et invoquer la notoriété pyifyliquÇpdes¡bâtops sont
levés contre lui pour toute répons^ : il solli^itç la justice
du maire mais, le maire le prend à part pjsup lui dire
qu’il jÊ tÊ té céder à la circonstance, et q;ue sa vie n’é^#?
pas en sûreté. L ’avenir a appris AjÇhave quel intérêt pres
sant le maire lui-m êm e avoit à ce que la .calomnie eût
une direction certaine.,
On comprend alors que cette dernière insinuation a
ébranlé le courage de Chave. L e sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efface quelques mots, en subs
titue d’autres, et remet une plume à Chave : une seconde
résistance amène de nouvelles violences. Il fait enfin ce
quTon exige j il signe.
•
l
-
f
n
I
■' . i
j
.
. ••
/
�C4 )
En sortant de chez le ‘maire , *les satellites le inènëht ait
cabaret, se font donner à boire, le forcent à payer, mettent
Fehfant dans ses bras , lùi font les plus horribles- hlenaces^
s’il.dit un mot ; et èe'retirënt.
' Sans doute il’mâîiqùë'à.'ces füits beaucoup de circons
tances importantes; mais' Chave , glacé d’épouvante r
étoit-il1libre rde réfléchir'? La plupart de ces détails ont
échappé ;Ps;iJiVi^moirè/ou plutôt à son attention.
Enfin Chave, revenu de sdn étourdissement , put réflécliii* sûV lés cbn!st*qtfcnceâ‘ de 'Pacte'1qu’on vehoit de lui,
extorquer, ‘et ¿ur le p;a rti iju’il avoit» à prendre.-'
-:
X»a dém arche la plus pressée et la plus indispensable-,:.
ét6it‘id’é fsë d^ârraisier d e H ’innôceiitë* Créatü’re- qü’üriëmÔré'tdéniftüFéfe') avb itJire|é'tèc' ?dfe1^ës'^Biiàs^ pou r ’Pk'ban-i
donner aux soins d ’un étranger. Chave hésita «’ il las
rapj^brteroit1
, claris -la'1h u it,
la jp6rtexlés'Fert;ier!: cëpén-
darit lia r e lig io h ^ l’hündimit'é1, ‘peut-être- la térreUr pbuirlüi-Hlêittë / Péinipbrtëi’èht sur:son d'ég’cmt ,Jbt•il?1fït) '^drteifré iifa iit ;à.‘"iinfc‘ nourrice.., * 1'Ui5i'),: 1
" 10 t /;()V '
 ïaîs1a u s s it ô te t :en Signe* de sa pl&téstà tib ia il’ rendit
^ l'in te aii^juge 'de- paix d e'T én ce ; le juge^ ^ a ix lertÊiiroya au'magistrat'die 'sûreté : mais commë-wÇ|ainte*
etoit dirigée- ah^r'cOntre lé -¡Maire 7 ‘les autorités déli^
bérèrent¿t■
é
b,
: iî .
7 ’ne* itësôlüïehtr r
4î
Chave inquiet, et ne voulant pas'cjüe'sofr'¿{lfence put
déroger à son d ro it, sè décida- ;V citer, le 5 flol’éal iiri g ,
tant'Jeanne V alla' et'sa fille , que le maire Ihï -fncnie,
pour voir dire qu'il'kèrbit restitué contre la i'éiioniibissance dé paternité1qui ‘ltli‘ «voit été 6jitovipiéii!ipai;,'laviolence', et Ijùfe ïe maire seroit téüu de raycif du*registre
�( 5 )
ce qui çoEceVnoit' ladite ’ rèconnôissance y'èt la mere et
la fille pour être condaïnn^ès à Reprendre l’enfant, payer
ses alimens
chez la*1; '■nourrice
..avec
dommages-intéi’cts.
•
1. , j I J* : v“j ;
•
; J'
;
.' |
On pense bien .qu’au'bureau dé paix(la fille Ferrier
ne manqua pas de ¡faire, la réponse d’usage, qu’elle avoit
élé séduite et abusée sons promesse de mariage , et qu’elle
seroit en état de prouver les familiarités de Chave avec
elle j^cehii-cl l’on îdéfia^et¡ajouta même qu’il ofiroit de
prouver cëïtâ avèlc qui èïle avoitJeu fréquentation, i
T o u t cela étoit de trop de part et d’autre , puisqu’il
n’est permis de rien prouver ; et la fille Ferrier ne1
risquoit rien à faire bonne contenance. Quoi qu’il cri
soit, un premier jugement,' du 28 pluviôse an 10, mit
le inaire hors de procès, comme ne pouvant etre’ juge
sans autorisation , et appointa les autres parties en cjroit.
Cet appointement lie fburiyt’ pas plus d’eclaircissc-ment. Chave' persista toujours à offrir la .preuv.ç’ de la
violence exercée contre lui : et les femmes F errier, q u i,
y -ii.
■ -r"
•
’ . ' •
'.i;
.1. ■ i-.
au bureau de paix , n aVQient paru avoir aucune crainte,
firent leurs bil’orts pour soutenir cette preuve inadmis
sible. Leur système.j)rovaîut'; et le 14 fructidor an 10^
le tribunUl d’Yssengeaux rendit le jugement qui suit. ***
<r C orisîU étfan tqu e l^ à rticl^ i'tìu ' titre 20 de ¡’o rd o n n a n ce d e î GGj
ddfèttd’ ‘d e recevoir la preuve; pai1tditaoins c o n tre et ou tre le c o n te n u
a n x i é t é s ) p u b lic s ; q u ’à la vérité; la f o r c e , l a v i o l e n c ô , Sont u n
iï)o^erypo;qr ,leS fa ire rescin d er * m ais q u 'e n ce cas il fa u t a rtic u le r
d^. m çn a ce ç!g ra v e s, q ui fe ro ie n t cra in d re p ou r la-vie metus mords,
ou q u e la p a rtie o b lig é e a u ro it s o u ffe r t ch arte p riv é jî, ainsi q u e
l ’en seign en t D o m a i en ¿es L o is éiv ile s,, et! P o lliie r en son T r a i t é
<ì«'si ¿l'j^tidh’ÿj
• - ü» .
'
l'
c
il ?
.
u
�(S )
» Considérant que Jacques Chave n'a articulé qu’il lui ait été
fait aucune m çnace, ni qu’il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son dom icile, ni dans celui du maire où il s’étoit
rendu pour reconnoilre pour lui appartenir l'enfant dont s’éloit
accouchée Isabeau Ferrier; et qu’étant dans ce dernier dom icile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
éprouvés, contre ceux qui s ’en seroient rendus coupables envers
sa personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
r
Cependant Chave avoit offert expressément de faire
preuve de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il «toit privé alors d’un mo}ren important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite aimé au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de Bannes, m aire, qui avoit trop d’intérêt
à, en cacher l’irrégularité' pour la faire soupçonner. A u
reste, Chave s’est pourvu en la cour contre le jugement,
et il sera question d’examiner de quelle influence la forme
de cet acte doit être pour la décision du procès.
M O Y E N S .
*
L ’ancienne législation française étoit extrêmement dure
contre les enfans naturels; et cependant, par .une étrange
inconséquence, elle admettait les preuves de patèrriité
sans distinction. Aujourd’hui la loi a fait pour -eux
davantage : mais sans vouloir percer le mystère qui
couvre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences ; elle ne voit dans
l’enfant né hors le mariage qu’une innocente créature
�( 7 )
digne de la pitié de tout le m onde, mais ne tenant à la
société que par celle qui lui a donné le jour. Si cepen
dant un homme , guidé par des apparences qu’il aie droit
d’apprécier lui - même , et cédant à l’impulsion de sa
conscience, veut se donner le titre de père , la loi le
lui permet, s’il n’est engagé dans les liens du mariage :
mais comptant pour rien aujourd’hui toutes les démons
trations extérieures, elle exige une déclaration authenti
que et non équivoque ; elle prescrit à l’acte une solen
nité plus grande que pour la naissance même de l’enfant
légitime.
, L ’intention du législateur étoit si claire, qu’elle a ôté
tout prétexte à l’astuce, et n’a laissé de voies qu’au faux
ou à la violence. Mais à qui peut être réservée l’une ou
l’autre de ces voies criminelles ? Ce n’est pas à la fille timide
q u i, rougissant encore d’une première foiblesse, et par
tagée entre l’amour de son enfant et la honte de sa naissance, n’en ose nommer le père que dans le secret de son
cœur, et se fait l’illusion de penser que le mystère dont
elle s’enveloppe la protégera contre l’opinion qui fait
son supplice.
Mais que feront ces femmes déhontées , qui ne voient
dans la prostitution qu’une h abitudedan s leur avilisse
ment qu’un état, et dans leur fécondité qu’un accident?'
Incertainesi elles-mêmes d’une paternité qu’elles déféroient
naguères suivant leurs convenances, elles n’en arrachoient
pas moins des sacrifices pécuniaires aux hommes qui leu r
étoient souvent les plus étrangers,, mais qu’épouvantoit
la perspective d’une honteuse et publique discussion. Si
on leur laisse entrevoir aujourd’hui une tolérance quel-
�. r , .................. ■. . .
W ) .................. . .
coriqué, que Tevar cou fera-t-il de tenter d\iutres voies pour
en venir aux mêmes fins?'Et s’ il est près de leur demeure
un citoyen paisible, qui, par ses mœurs douces et réglées,
puisse passer pour pusillanime, quelle difficulté y aura-t-il
de rejoindre adroitement que c’est là le coupable, d’inté
resser contre lui quelque personne crédule, de l’effrayer
lui-même sur les’ dangers de’ sa résistance, d’ameuter s’il
le faut ceux qui ont un intérêt réel au succès de la négo
ciation ! Jadis il falloit des témoins,1aujourd’hui il ne faut
qu’une simple signature; tout cela peut s’exécuter avec
rapidité : ce n’est qu’un changement de complot.
Heureusement cette rapidité même ne laisse pas au
criminel le calme de la réflexion: souvent ses fautes le
trahissent, et, quelques légères qu’elles soient, il faut les
compter avec scrupule; car on est bien assuré qu’elles ne
sont pas un simple résultat de’ sa négligence, mais qu’elles
ont échappé à l’excès de sa précipitation.
Ceux qui ont guidé la fille Ferrier dans ses démarches
n’ont pas visé à l’exactitude ; la cour en sera convaincue
bientôt par la forme de l’acte de naissance qui fait son titre.
Une seconde découverte la convaincra encore qu’il ne
s’ agit point ici de réparer, envers une fille séduite, des
torts que' la malignité suppose toujours. La fille Ferrier
a , le 20 prairial an n , donné une nouvelle preuve de
sa continence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m ère, que l’acte apprend môme avoir
été sage-femme en cette circonstance.
Il ne paroît pas que pour cette fois la mère et la fille
Ferrier aient jugé à propos de réunir un conseil pour
disposer du nouveau n é , et lui élire un père à la plu
ralité
�( 9 )
ïalitc des suffrages; il est vraisemblable que la précédente
tentative lesavoit intimidées. .
Q u oiq u ’il en soit, et soumettant cette découverte pré
cieuse aux réflexions de la co u r, l’appelant ne s’en occu
pera pas plus long-temps, et se contentera d’observer
q u ’il n’y a rien de légal dans la prétendue déclaration de
paternité qu’on lui a fait signer, et au surplus que les faits
<3e violences articulés suffiront pour la détruire. C’est à
l’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i°. L a déclaration de -paternité ri est pas légale.
La loi du 12 brumaire an 2. s’occupoit de trois espèces
d’enfans naturels, après avoir décrété eu principe qu’ils
étoient successibles.
i°. Ceux dont le pèreétoit décédé, et il leur suffisoit
de prouver une possession d’état, par des soins donnés
à titre de paternité, et sans interruption ; 2°. des enfans
dont le père et la mère seroieut encore vivans lors du
Code c iv il, et leur état civil y étoit renvoyé; 30. de ceux
dont la mère seule seroit décédée lors de la publication
du C od e, et alors la reconnoissance du père, faite devant
l’officier public, rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’un enfant de la seconde espèce ; et le pré
tendu père , quel qu’il so it, de même que la m ère, sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle urgence y avoit~il de
prévenir la publication du Code civil , en faisant faire
«ne déclaration que la loi ne demandoit pas, et qu’elle
B
�C i° )
ajournoit au contraire ? N ’apercevroit - on pas déjà le
dol dans cette extraordinaire prévoyance ?
D ira-t-on que le Code civil prescrit aussi une décla
ration authentique, et qu’on n’a pas violé la loi en la
devançant? Mais qui blâmera les législateurs de l’an 2 ,
d’avoir voulu prévoir que leur système ne seroit peutêtre pas celui du Code civil ? qui leur reprochera d’avoir
supposé que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de m aturité, et de s’être défiés de leur
premier systeme sur une innovation aussi importante?
Ils voulurent régler le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la loi transitoire du 14 floréal an 11
nous apprennent assez qu’il n’y a eu , dans l’intervalle de
l ’an 2 à l’an 11 , 'aucune législation touchant les enfans:
naturels. Les bulletins de la cour de cassation sont aussi
remplis d’arrêts qui ont cassé tous les jugemens dans les
quels les tribunaux avoient voulu ré g le r, même provi
soirement , le sort de quelques enfans naturels , pendant
cette lacune de neuf ans.
Il ne pouvoit donc être question de fixer l’état de
l’enfant d’Elisabeth Ferrier qu’après le Code c iv il, dont
l’art. 334 porte que la reconnoissance sera faite par un acte
authentique, si elle ne l’a pas été par Pacte de naissance.
Mais fût-il indifférent que la reconnoissance contestée
¿lit été faite avant ou après le Code civil, malgré la sus
pension totale exigée par la cour de cassation ,-et rappelée
par la loi transitoire ; cette reconnoissance n’en est pas.
moins irrégulière} car elle n’est faite ni par Pacte de
naissance lui-mèm e, ni par un acte séparé authentique..
Voiei comment cet acte est littéralement écrit au registre*
�C II )
À'CTÏ
DE N A I S S A N C E .
n D u huitième four dit mois de germinal, l’an g de la répu
blique française. A cte de naissance de Jacques, f ili.e ( Ce mot
est effacé, et on y a substitué au-dessus , dans l ’interligne,
F e r r ie r , que Von a encore efface', et Von a écrit à côté C h a v e . ),
né hors de mariage, né le septième jour du mois de germ inal,
à sept heures du soir, fils d ’Isabeau F errier, non m ariée, domi
ciliée du lieu de la M arette, susdite com m une, et Isabeau Ferrier,
non mariée; le sexe de l’enfant a été reconnu une ( On a couvert
d’encre la lettre e. ) f i l s , né hors de mariage : premier tém oin,
Jean-Pierre Ferrier, demeurant à C h am b o n , département de
la H a u te -L o ir e , profession de cultivateur, âgé de tren te-n euf
an s; second tém oin, Pierre R u e l, demeurant à C h am bon, dé
partement d e la H a u te -L o ire , profession de tailleur d’habits,
âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite par
M arie R u e l, sage-fem m e de ladite accouchée, avons inscrit.le
sus-nommé Jacques F e rm e r ( Ce mot est raturé, et Von a mis
au-dessus, dans Vinterligne, C h a v e .) , portant l e nom de sa
mère ( Ces mots ont été rayés, et Von y a substitué ces mots :
l e nom du ri:nE. ) ; et ont la déclarante ne savoir signer, et les
témoins signé. F errier, R u e l, signé à Foriginal. »
u L ed it Jacques Chave père reconnolt ledit1Jacques son fils, de
» ladite déclaration de la présente, acte; le’ reconnoît pour son
» véritable fils, avoir droit à tous ses biens, en présence de Jean» Louis Riou. ( -{- Ic i est un renvoi. ) Constaté suivant la lo i, par
» moi A nn et de Bannes, maire de la commune de C ham bon, fai» sant les fonctions d ’officier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e Bannes, maire, signé.
»
Et de Pierre C a llo n , et de Jean-Pierre Frescliet, et de Jean» Pierre Ferrier ; et dit Jacques Chave a signé avec les témoins.
’
B 2
�(
12
)
» O n t s ig n é , le d it P ie rre C a llo n a d é c la ré n e sav o ir s ig n e r , C h a y e ,.
n
R i o u , F r e s c h e t, F e r r ie r . D e B a n n e s , m a ire » sig n é . »
( N ota. L ed it renvoi est en marge, en travers. )
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecturede la Haute-Loire ,
B A R R É S .
Il est aussi évident qu’il puisse l’ê tre , que cet acte se
Compose de deux parties bien distinctes , qtii ne sont pas
d’un même contexte , ne sont pas l’ouvrage du même
m o m e n t e t cependant ne sont pas deux actes absolu
ment séparés.
i°. Acte de naissance bien parfait et très en règle, d’ui*
enfant né d'Isabeau F e r rie r , sans mention du père*
O n lui donne le nom de sa mèi*e. Il y a deux témoinsde cet acte, Joseph Ferrier et Marie Ruel. L ’acte est
donc complet i le vœu de la loi du 20 septembre 1792
est rempli.
2°. Vient ensuite une déclaration de Chave, qui est à
la suite du premier acte, et qui a exigé des surcharges.
Mais peut-on , de bonne f o i , y voir un acte authen
tique , une reconnoissance de paternité telle que la loi
la commande et que la raison la conçoit ?
Cet acte n’a aucune date , parce qu’en effet il a eu lieu
le 21 germ inal, et a été ajouté a un acte terminé depuis,
le 8. Comment supposer en eflet que cette déclaration
finale fait partie de l’acte du 8? Les témoins dénommés au
premier ne signent pas la déclaration»
�( 13 )
On a rature et interligné le premier acte de naissance,
sans faire rien approuver aux premiers témoins. L e maire
seul approuve to u t, même ce qu’il lui plaii-a de raturer
encore; les autres tém oins, Chave lu i- m ê m e , ne font
aucune approbation. O r , il est de principe que les ratures
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n’y a appro
bation des parties et témoins.
. Il est un autre principe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’importance qu’ils aient, c’est que les témoins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le frè re, qui ont déclaré la naissance le 8 , n’ont pas signé
à la fin. Si c’est un seul et même acte, les uns Font signé
au m ilieu, et d’autres à la fin : chose bizarre et ridicule,
qui ne peut s’allier avec la gravité de l’acte qu’on prétend
maintenir.
Que p e u t-il résulter d’un acte de cette espèce, si ce
n’est de la pitié pour ses rédacteurs, et une conviction
intime que ce n’est pas Chave qui est allé déclarer la nais
sance d’un enfant comme s’en disant le père ?
L e but de la loi n’est donc pas rempli ; car dans quelque
forme que dût être une reconnoissance de paternité , il la
falloit dans l’acte même portant la déclaration de naissance,
ou bieta il falloit un acte particulier, daté lui-m êm e, et
qui ne fût pas rédigé dans une forme ayant pour but de le
rattacher à un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous que l’article 334 du Code civil d it
que la reconnoissance sera faite par l’acte de naissance,.
ou par un acte athentique ; à quoi l’article. 62 ajoute que
Pacte de reconnoissance sera inscrit sur les registres ¿1 sa
d ote, et qu’il en sera lait mention en marge de lVcte de
naissance..
�(( H l
RappelonsHnous encore que le but bien positif de la loi
est de ne compter pour rien les reconnoissancesantérieurea
au cod e, quand l’auteur est vivant. Il en est de cela comme
des testamens antérieurs à l’an 2, qu’il falloit refaire pour
les circonscrire dans les termes du droit' nouveau. La loi;
a eu ici un but plus .moral : les changemens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons' pas sur l'importance, des formes
dans une matière aussi délicate; : on est si scrupuleux
pour tant d’autres actes! Uri,seul mot équivoque en un
testament, détruit toute la volonté d’un père de famille-;
une donation exige encore des formes plus multipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importuns que celui où il s’agit
de transmettr^son nom et sa fortune ;,où il s’agit de plus
encore, de vaincre l’opinion et de surmonter sa propre
répugnance ? D ’ailleui's , pourquoi ne pourrions - nous
pas dire pour un tel acte ce que Ricard dit des testamens,
« que toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leur solennité consiste dans les formes ? »
A ujourd’hui il faut y ajouter, une vérité bien certaine,
c’est que la seule supposition qu’un homme est tenu et
obligé de se charger d’un enfant naturel sans sa libre
vo lo n té, est incompatible avec le système indubitablement,
reçu sur la législation des enfans naturels,
)
O
20. Cette déclaration de 'paternité est nulle , s’il y a
violence. L e s J'aits articulés suffisent. Z,a preuve en
est admissible.
On est extrêmement sévère dans le monde pour juger
�( i 5 '}
des effets de la peui’ d’autrui ; e t , quand on en com
mente les particularités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu’on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à régler pour soi-même;
car, en deux cas semblables , le même individu se con
duiront rarement deux fois de la même manière. Mais
celui qui raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il raisonne; tandis que le premier effet de la terreur
est d’absorber toutes les réflexions , pour ne laisser place
qu’à une seule idée dominante, la conservation de soi-même.
Quelques auteurs, partageant sur ce point les idées du
vulgaire, sembleroient aussi se montrer difficiles à ad
mettre la plupart des excuses fondées sur la crainte. Il
faut distinguer, disent-ils, la crainte grave et la crainte
légère , et on ne peut trouver de moyen rescisoire que
•dans celle qui suiïiroitpour ébranler la fermeté de l’homme
le plus intrépide, metus non vani horninis , sed q u i in
hominem constantissimum cada t, 1. 6 , ff. Quod metûs
causâ.
Ces auteurs, s?en tenant à une loi isolée démentie par
«■beaucoup d’autresy n’ont pas voulu apercevoir, dans cette
rigueur étrange, un monument de la fierté romaine plutôt
qu’une règle générale. Ce peuple, qui avoit détruit le
temple élevé parT ullus à la Crainte, n’étoit, en la pros
crivant par ses lois, que conséquent avec ltii-même. Sons
un système de conquêtes sans bornes, et avec une consti
tution toute militaire, quel romain pouvolt alléguer une
crainte légère! Elevé dans les camps, son excuse même
•eût consacré sa honte , et la'loi étoit rigoureusement juste«n exigeant de lui l’intrépidité d’un soldat.
'
�( 10 )
La France militaire ne réprouvera pas cette législation
sévère; elle l’eût créée elle-même, s’il falloit un code au
courage. Mais les actes civils des simples particuliers ne
se x'ègleut pas par des maximes nationales; la théorie
principale des lois consiste à les approprier aux mœurs
de ceux quelles doivent régir.
Gardons-nous donc de l’exaltation , quand elle est hors
de mesure; ne nous obstinons pas à trouver un Scévola
dans un laboureur tim ide, qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
Les auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D om at surtout, î\ qui les premiers juges ont fait
l’injure de prêter une opinion si contraire à son discer
nement , D o m at, dont l’ouvrage immortel n’est que le
précis des lois romaines, bien loin de se fonder sur la
, loi 6, ne la signale que pour en blâmer la rudesse.
« Nous avons vo u lu , dit-il, rétablir les principes na« turels , et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit romain parmi celles de cette sec« tio n .........Toutes les voies de fait, toutes les violences,
c( toutes les menaces, sont illicites ; et les lois condam« nent non-seulement celles qui mettent en péril de la
« vie ou de quelque tourm ent, mais toutes sortes de
« voies défait et mauvais traitemens. Et il faut remarquer
« que comme toutes les personnes n’ont pas la même
« fermeté pour résister à des violences et î\ des menaces,
« et que plusieurs sont si foibles et si tim ides, qu’ils ne
« peuvent se s o u t e n i r contre les moindres impressions,
« un ne doit pas borner la protection des lois contre les
• « menaces
�( *7 ) '
menaces et les violences, à ne réprimer que celles
qu i sont capables d'abattre les personnes les plus
intrépides ; mais il est juste de protéger aussi les plus
timides...........
« Il est très - juste, et c’est notre usage, que toute
« violence étant illicite, on réprime celles même qui
« ne vont pas à de tels excès, et qu’on repare tout le
ce préjudice que peuvent causer des violences qui enga« gent les plus foibles à quelque cliose d’injuste et de con
te traire à leur intérêt : ce qui se trouve même fondé sur
« quelques règles du droit ro m ain ...........et ces règles
* sont tellement du droit naturel, qu’il ne pourrait y
« avoir d’ordre dans la société des hom m es, si les
« moindres violences n'étaient réprimées. >3 ( Sect. 2,
des vices des conventions , préambule. )
Il est peut-être inutile, après avoir cité Domat, de faire
d’autres recherches -, mais les premiers juges ont encore
fait l’injure à Pothier de lui prêter des principes qui ne
sont pas les siens.
Cet auteur cite les lois romaines, et par conséquent
les rappelle telles qu’elles sont. Mais il termine son
article de la crainte par dire que « le principe qui ne
ce connoît d’autre crainte suffisante pour faire pécher un
cc contrat par défaut de liberté, que celle qui est capable
« de faire impression sur l’homme le plus courageux, est
cc trop rigide, et ne doit pas être suivi parmi nous à la
cc lettre ; on doit, en cette m atière, avoir égard à Page,
« au sexe et à la condition des personnes (1) ,* et telle
«
«
«
«
(^Expressions copiées mot pour mot en Fart. 1112 du Code civil.
c
�C iS )
« crainte qui ne seroit pas jugée suffisante pour avoir
« intimidé l’esprit d’un homme d’un âge mûr ou d’un
« militaii’e , et pour faire rescinder le contrat qu’il aura
« la it , peut être jugée suffisante à l’égard d’une femme
« ou d’un vieillard, etc. » ( Traité des obligations,
page i re. , chap. I er., n°. 2 5 , in fin .)
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
fortifiée par d’autres citations, on les puiseroit dans les lois
romaines elles-mêmes, qu’il ne faut pas juger par un
fragment unique, et qui, au contraire, nous enseignent
ce que Domat et Pothier viennent de nous apprendre.
T out consentement doit être lib re, disent plusieurs
lois; et, pour être restitué, il n’est pas besoin d’une vio
lence corporelle, mais seulement d’une crainte inspirée
à celui qui contracte; quoad justam restitutionis eau-,
sa/n niZiil refert utràm vi an metu quis cogatur. . ..
et quoad effectuai ju ris utrobi deest coiisensus, ac
libéra voluntas patientis, utveUe non vide a tur. L , 1 , 3 ,
7 et 8, ff. quod met. C. L . 116 , de reg.jur. ( in Corvino. )
Ces lois étoient bien moins dures que ne l’ont sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la crainte, quand même Chave auroit été
hors d’état de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
inspirée; non tarnen necesse est designare personam
quœ metinn in tulit, sed sujjficit p r o b a r e metum, quia
metus habet in se ignoranham. I .
cod.
E nfin, ce qui achève de convaincre que ces lois savoient
aussi se mettre à la porlée de la foiblesse des hommes,
c’est qu’elles expliquent qu’il n’étoit pas nécessaire de
prouver l’cxisteiicc d’uu danger réel , mais seulement
j
�( 19 )
la crainte de ce danger, qui en effet devoit détruire le
consentement. S i causa fu isset, cur periculurn timeret j ’
quamvis periculurn verb non f u is s e t . . . . non consideratur eventus, sed justa opinio. L . 14. j f . eod.
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc un guide bien sûr.
A u lieu d’adopter l’antique rigueur d’une loi oubliée par
les Romains eux-mêmes , il a jugé que la crainte inspirée
à Chave n’avoit pas été un m otif suffisant pour le con
traindre ; et cependant il ignoroit jusqu’à quel point
Chave avoit été contraint ou menacé ; il l’ignoroit et a
voulu l’ignorer toujours, en refusant de s’éclairer par une
preuve : cependant les faits articulés étoient graves. Chave
oiïroit et offre encore de prouver ces faits articulés , et
notamment, x°. que le 21 germinal les frères Ferrier et
d’autres hommes armés de bâtons sont venus chez lu i;
2°. qu’ils l’ont forcé de se lever et de les suivre, en lé
menaçant; 30. que chez de Bannes ils se sont opposés à
toute explication, l’ont injurié, menacé et frappé; 40. que
de Bannes l’a pris à part pour l’exhorter à céder à la lorce
et éviter un plus grand mal ; 5 °. qu’on l’a forcé de venir
dans un cabaret, où on lui a remis un enfant, avec de'
nouvelles menaces.
. . . . . . . .
M ais, a dit le tribunal d’Yssengeaux, Cliave, sorti de
sa maison et conduit chez le maire, pouvoit réclamer.
Ce seroit une réflexion bien naturelle, si les faits même
de la cause n’étoient déjà venus la détruire ; car ce maire
lui-même étoit si peu disposé à user de son autorité ,
qu’il est difficile de ne pas le juger au contraire intéressé
à l’événement.
Mais à quelle protection., il fout le dire, auroit pu
�(r 20 )
s’attendre un malheureux à la merci de cinq individus,
dans le domicile isolé d’un maire de village? Battu à ses
yeu x, Cliave pouvoit-il se croire dans un asile inviola
b le ? L e maire lui-même, l’exhortant à céder à la force,
mettoit le comble à sa terreur, etdéclaroit, ou sa propre
com plicité, ou au moins son impuissance.
L ’acte le moins important de la vie seroit vicié par une
semblable violence , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incompatible avec la moindre coutrainte. Un
père de famille a contracté un engagement sacré envers
ses enfans par son mariage; mais celui-là même qui
auroit proci'éé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien civil : son honneur et les sentimens de la
nature deviennent leur unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. Les enfans naturels n’ont point de
famille ; tel est le langage de la loi : elle ne veut pas qu’ils
çn aient une. Quand leur père se nommeroit hautement
dans le monde, il ne seroit tenu à rien; la loi lui permet
seulement de se déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volonté seroit donc se croire plus sage
qu’elle.
Mais si la loi n’exige rien d’un père , si elle consi
dère comme un vice moral de lui donner un lils que
sa propre volonté cependant n’a pas désavoué , peut-on
soutenir l’idée révoltante qu’un homme sera contraint
malgré lui d’adopter un enfant dont il n’est pas le père?
Qui lui donnera la force de supporter, dans sa de
meure, la vue habituelle d’une créature si étrangère,
placée là pour sa honte im muable, sans aucune com
pensation, satisfaisahte ? et qui oseroit répondre que dans
�( 21 )
cette situation de désespoir, aigri par un sentiment d’in
justice , il pût assez maîtriser une fureur convulsive,
qui seroit tout à la fois le tourment de l’innocence et
son propre supplice ?
Eloignons plutôt de vagues suppositions fondées sur une
pure chimère. L a prévoyance des magistrats distinguera
la vérité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. On ne donne point à un homme l’enfant
qu’il repousse avec mépris , quand la loi n’en fait pas
un devoir. La cour doit prononcer ici sur les consé
quences d’un acte lib r e , et tout prouve qu’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qui donne lieu au procès. Chave,
conduit par la forçe , menacé dans sa ro u te, a signe?
sous le bâton; et, pour se sevvir des expressions de Doinat,
§i un consentement de cette espèce étoit jugé valide , ce
seroit un attentat au droit naturel ; il n’y auroit plus
d’ ordre dam la société des hommes.
La conduite d’Isabeau Ferrier , l’époque de ses cou
ches, c’est-à-dire, de celles qui donnent lieu au procès,
le choix de ses croupiers, le lieu de la scène, la cir
constance qu’un acte de naissance a été changé, etc., tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , mais qui seroient oiseuses, tant que la preuve
de la violence ne sera pas ordonnée.
Cette preuve, sans contredit, e§t admissible; aucune
ordonnance ne la prohibe ; et ce qui étonne, c’est que
les premiers juges n’aient pas voulu prononcer en connoissance de cause.
Il est possible que la malignité toujours avide de calom
nie , et toujours difficile àdétrçynper, prétende que Chave
�( 22 )
n’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth Ferrier
de ce dont on l’accuse : mais il en prend le ciel à témoin,
cette femme lui fut toujours étrangère.
C h ave, maître de ses actions , célibataire, feroit sa
jouissance principale de se voir revivre dans un fils qu’il
croiroit le sien ; à son âge, et avec ses principes religieux,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans mobiles ne
peuvent donc être vaincus que par quelque chose de
plus puissant encore , une conviction intim e, une insur
montable répugnance.
Il ne demande pas à être cru sur parole ; et si son
premier moyen ne suffit p a s, il offre la preuve des vio
lences qui l’ont forcé à donner sa signature : et certes,
quand la cour se sera assurée que Chave a été forcé de
sortir de son dom icile, mené chez le maire par cinq
hommes , menacé et battu , elle appréciera alors toute
la valeur d’une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lo rsque la vertueuse Elisabeth Ferrier sera
convaincue qu’il ne lu i est plus libre de faire de sa pro
géniture une charge publique, peut-être s’efforcera-t-elle
de mettre un terme à sa fécondité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C our d ’appel. — Therm idor an 13.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
reconnaissance de paternité
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1801-Circa An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0307
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0705
BCU_Factums_G1502
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Chambon-sur-Lac (63077)
Rights
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Domaine public
reconnaissance de paternité
-
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b6c247e4fd66c5a717f15e6b498afd70
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
.
RECONNOISSANCE
DE
PATERNITÉ.
�COUR
D ’A P P E L
M
É
M
O
I
R
E
SÉANT
A RIOM.
P O UR
J a c q u e s C H A V E , appelant ;
C O N T R E
r
♦
Jeanne
V A L L A , et E l i s a b e t h F E R R IE R ,
sa fille y majeure, intimées.
' ’
L a recherche de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœurs un scandale de moins. Dans ce secret de
la nature , le législateur ne pouvoit que s’en rapporter à
la crédulité de l’h o m m e, ou se jeter dans le vague des
conjectures : le prem ier parti seul é toit juste; la loi l'adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nommer son père
que celui qui a v oulu se déclarer tel.
N ul acte ne doit donc être plus lé g a l, plus lib r e , que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incom
•
A
�( o
patible avec elle ; car si elle n’est pas clairement l’effet
spontané de la réflexion , le but m oral de la loi n’existe
plus.
L ’appelant réclame contre l’oubli de ces principes, et se
place sous la protection de la c o u r, pour faire annuller un .
acte in fo rm e, auquel on l’a fait participer par la violence ;
il demande à n’être par forcé de reconnoître un enfant
qui ne fut jamais le sien.
Les premiers juges n’ont pas voulu admettre la preuve
qu’ il étoit à même d’offrir ; et si cette opinion pouvoit
p révaloir , il en résulteroit que , contre le vœu de la l o i,
un hoinme donnerait son nom m algré lui à un enfant
naturel y seroit contraint de prendre soin d’un étranger>
et de lui laisser sa succession.
;i a T : •
F A I T S .
Jeanne V a lla , et Elisabeth F errier, sa fille, habitent le
lieu de M a z e t, m airie de Cliambon. Leurs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques C have,.
qui demeure à la distance d’environ une lieue de leu r
dopiicile.
Son âg e, plus avancé même que celui de la m ère, ne lui:
eût donné aucun prétexte de se rapprocher delà fille. U n
séducteur à cheveux blancs est rare *, au village il ne connoît pas l'oisiveté qui nourrit les illusions, et la m onotonie
de ses travaux rustiques avance l’amortissement de ses
sensations, en occupant toute son existence.
j.
Ces femmes étoient donc absolument étrangères à Cha vc,.
lorsque tout d’un coup il s’est trouvé mêlé ¿1 leur destinée
�(3 )
par une de ces sourdes manœuvres que l’enfer seul peut
faire concevoir.
•
. U n matin à huit heures ( le 21 germinal an.9 ), Jacques
C h a v e , m alade, eàt brusquement arraché^ d^son lit par
deux frères de la fille Ferrier , suivis de trois auti'cs jeunes
gens armés de bâtons ou de fourches. Il se disent envoyes
par le sieur de B annes, maire de Ghambon , et comman
dent à Chave de les suivj^ dans la maison de ce sieur de
Bannes. Il s’habille et le^uit.^,, ......
^
L à il trouve Jeanne V alla qui.¡paroît en grande.colère,
l ’accueille par des injures grossières, lui dit que sa fille est
accouchée, depuis quinze jours , d’un garçon dont il est
le p è r e , suivant le r é c it é e sa fille et de^Mv l,e maire (de
C h am b o n , et qu’il faut, ^igner, sur le champ l’acte de,
naissance.
■ ..
. -1.
C h a v e , é to u r d i d’une v e s p é r ie aussi in a tte n d u e , pressé
entre les cris de la m ère , les coups de poings des frères ,
et les menaces de leurs trois hommes d’escorte, veut élever
la v o ix , et invoquer la notoriété publique; des,bâtons sont
levés contre lui pour toute réponse : il sollicite la justice
du maire , mais le maire le prend à part pour lui dire
qu’il falloit céder à la circonstance, et que sa vie n’étoit
pas en sûreté. L ’avenir a appris à.Çhave quel intérêt près-,
sant le maire lu i-m êm e avoit à pe, que la calomnie eût
une direction certaine.
,
j’ *
, )
:l
O n compi’end alors que cette dernière insinuation a
ébranlé le courage de Chave. L e sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efface q u e lq u e s mots, en subs
titue d’autres, et remet une plume à Chave : une seconde
résistance amène de nouvelles violences. Il fflit enfin ce
qu’on exige \ il signe.
�(4 )
E n sortant de chez le m aire, les satellites le mènent au
cabaret, se font donner a boire, le forcent à p ayer, mettent
l’enfant dans ses b ras, lui font les plus horribles menaces
s’il.dit un m ot ; et se retirent:.
Sans doute il manque à ces faits beaucoup de circons
tances im portantes; mais Chave , glacé d’épouvante ,
étoit-il libre dû réfléch ir? L a plupart de ces détails ont
échappé 'à°sa; ta'érfibirè,1 ott pltitôt i\ son attention.
Enfin C h ave, revenu de srînJètoàrdissem ent, put i*éflé~
efrir sifr ïéy fcâtféfruëmîes' dé 'l’âcte* qu’ on venoit de lu i
extorquer ;'e t sütU’é parti qu’il avoit à prendre.
Lîï dém arche la ptus pressée et la plus indispensable,,
étoii de se débarrasser de' l’innocëüte créature* qu'uné'
irtèrë1dénritiitéë1avo it rejetée1'd e ses1 bras poufc l’aban-donner aux soins d’un étranger. Chave hésita s’il 1&
rap p o rtero it, dans la nuit , à la porte des F e rrie r: cepen
dant la religidû , l’hum anité', peut-être la terreur pour
Îirî-mêm’é , Fefri^ortèrent sur son d é g o û t, et il fit porter
Penfant à unë nourrice;
M ais aussitôt, et en signe de sa protestation, il rendit
plainte a a juge de paix de T en ce ; le juge de paix lerenvoya au magistrat de sûreté : mais comme la plainteétoit dirigée aussi contre le m aire, les autorités déli
b érèren t, et ne résolurent rien..
!:l '
Chave in q u ie t, et ne voulant pas que ¿on sileilce pût
déroger à son drrti't, se'décida à citer, le 5 floréal an 9
tant Jeanne V alla et sa fille , que le maire lu i-m ê m e ,
pour vôrr dire q u ’il scrôit r^ titu é côtitfü la reconnbissrince de paternité qüi lui avoit été extorquée par la
violen ce, et qtie le jnail'C seroit tenu de ra^çr du registre
�( 5)
ce qui concernoît ladite reconnoissance ; et la m ère et
la fille pour être condamnées à reprendre l’en fan t, payer
ses alimens chez la nourrice , avec dommiiges-intérêts.
O n pense bien qu’au bureau de paix la fille F errier
ne manqua pas de fqire la réponse d’usage, qu’elle avoit
été séduite et abusée sous promesse de m ariage , et qu’elle
seroit en état de prouver les familiarités de Chave avec
e lle ; celui-ci Pen d éfia, et ajouta même qu’il offroit de
prouver ce u x avee qui elle àvoit eu fréquentation.
T o u t cela étoit de trop de part et d’a u tre , puisqu’il
n’est permis de rien prouver ;. et la fille F errier ne1
risquoit rien à faire bonne contenance. Q uoi qu’il en
so it, un prem ier jugem ent, du 28 pluviôse an 10 , m it
le maire hors de procès, comme ne pouvant être jugé
sans autorisation , et appointa les autres parties en droit.
C e t a p p o in te m e n t ne fournit p as p lu s d ’é c la irc is se
ment. Chave persista toujours à offrir la preuve de la
violence exercée contre lui ; et les femmes F e r r ie r , qui
au bureau de p a ix , n’avoient paru avoir aucune crainte,
firent leurs efforts pour soutenir cette preuve inadmis
sible. L eu r système p ré va lu t; et le 14 fructidor an 1 0 ,:
le tribunal d’Yssengeaux rendit le jugement qui suitt■
« Considérant que Particlo 2 du titre 20 de l'ordonnance de 16G7
défend de recevoir la preuve par témoins contre et outre le contenu
aux acte6 publics; qu’à la vérité la fo rce, la violence, sont un
moyen pour les faire rescinder, mais qu’en ce cas il faut articuler
de menaces graves , qui feroient craindre pour Ja vi e metus mortist
ou que la partie obligée auroit souffert c h a r t e privée, ainsi que
renseignent Dom at en ses Lois civiles, et Polliier en son T raité
des obligations j
�( 6)
» Considérant que Jacques Chave n'a articulé qn’iî lui ait été
fait aucune m enace, ni qu’il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son dom icile, ni dans celui du maire où il s’étoit
rendu pour reconnoitre pour lui appartenir l’enfant dont s’étoit
accouchée Isabeau Ferrier; et qu’étant dans ce dernier dom icile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
éprouvés, contre ceux qui s’en seroient rendus coupables envers
sa personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
Cependant Chave avoit offert expressément de faire
preuve de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il étoit privé alors d’un moyen important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite alors au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de B annes, m aire, qui avoit trop d’intérêt
à en cacher l’irrégularité pour la faire soupçonner. A u
reste, Chave s'est pourvu en la cour contre le jugem ent,
et il sera question d’exam iner de quelle influence la form e
de cet acte doit être pour la décision du procès.
M O Y E N S .
L ’ancienne législation française étoit extrêmement dure
contre les enfans naturels', et cependant, par une étraijge
inconséquence, elle admettoit les preuves de paternité
sans distinction. A u jourd ’hui la loi a fait pour eux
davantage : mais sans vouloir percer le m ystère; qui
couvre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences ; elle ne voit dans
l’enfant né hors le mariage qu’ une innocente créature
�k
(7)
digne de la pitié de tout le m o n d e, mais ne tenant à la
société que par celle qui lui a donné le jour. Si cepen
dant un homme , guidé par des apparences qu’il aie droit
d’apprécier lui^ -m êm e, et cédant à l’impulsion de sa
conscience, veut se donner le titre de p è r e , la loi le
lui perm et, s’ il n’est engagé dans les liens du mariage :
mais comptant pour rien aujourd’hui toutes les démons
trations extérieures, elle exige une déclaration authenti
que et non équivoque ; elle prescrit à l’acte uue solen
nité plus grande que pour la naissance même de l’enfant
légitim e.
L ’intention du législateur étoit si claire, qu’elle a ôté
tout prétexte à l’astuce, et n’a laissé de voies qu’au faux
o u à la violence. M a is à q u i peut èti*e réservée l’uue ou
l ’a u tre de ces v o ie s c r im in e lle s ? C e n ’est pas à la fille tim ide
q u i, rougissant encore d’une première foiblesse, et par
tagée entre l’amour de son enfant et la honte de sa nais
sance , n’en ose nommer le père que dans le secret de son
cœ ur, et se fait l’illusion de penser que le mystère dont
elle s’enveloppe la protégera contre l’opinion qui fait
son supplice.
M ais que feront ces femmes déhon tées, qui ne voient
dans la prostitution qu’ une habitude, dans leur avilisse
ment qu’ un état, et dans leur fécondité qu’un accident?
Incertaines elles-mêmes d’ une paternité q u ’e lle s déféroicnt
naguères suivant leurs convenances, elles n’en arrachoient
pas moins des sacrifices pécuniaires aux hommes qui leu r
etoicnt souvent les plus étrangers , mais qu epouvantoit
la perspective d’une honteuse et publique discussion. Si
.on leur laisse entrevoir aujourd'hui une tolérance quel-
�CS )
conque, que le.ur coûtera-t-il de'tenter d’autres voies pour
en venir aux mêmes fins? Et-s’il est près de leur demeure
Un citoyen paisible, q u i, par ses mœurs douces et réglées,
puisse passer pour pusillanim e, quelle difficulté y aura-t-il
de répondre adroitement que c’est là le cou p able, d ’inté
resser contre lui quelque personne créd u le, de l’effrayer
lui-m êm e sur les dangers de sa résistance, d’ ameuter s’il
le faut ceux qui ont un intérêt réel au succès 'de la négo
ciation ! Jadis il falloit des tém oins, aujourd’hui il ne faut
qu’ une simple signature ; 'tout cela peut ¿’exécuter avec
rapidité : ce n’est qu’un changement de complot.
Heureusement cette rapidité même ne laisse pas au
crim inel le calme «de la "réflexion : souvent ses fa u te s le
trahissent, e t, quelques légères qu’elles soient, il faut les
com pter avec scrupule; car on est bien assuré qu’elles ne
sont pas un simple résultat de sa négligence, mais qu’elles
ont échappé à l’excès de sa précipitation.
Ceux qui ont guidé la iille T errier dans ses démarches
n’ont pas visé à l’exactitude ; la cour en sera convaincue
bientôt par la forme de l ’acte de naissance qui fait son titre.
Une seconde découverte la convaincra encore qu’il ne
s’agit point ici de rép arer, envers une fille sé d u ite , des
torts que la malignité suppose toujours. L a fille Ferrier
a , le 20 prairial an n , donné une nouvelle preuve de
sa continence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m è re , que l’acte apprend môme avoir
été sage-fenune en cette circonstance.
Il ne pnroit pas que pour cette fois la mère et la Cllo
T errier aient jugé à propos de réunir un conseil pour
disposer du nouveau n é , et lui elire un père à la plu
ralité
�( 9)
ralité des suffrages; il est vraisemblable que la précédente
tentative les avoit intimidées.
- Q u o iq u ’il en soit, et soumettant cettedécouverte pré
cieuse aux x-éilexions de la c o u r , l’appelant ne s’en occu
pera pas plus lon g-tem ps, et se contentera d’observer
qu’il n’y a rien de légal dans la’ prétendue déclaration de
paternité qu’on lui a fait signer, et au surplus que les faits
de violences articulés suffiront pour la détruire. C ’est à
l’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i° . L a déclaration de -paternité n e s t pus légale.
!La loi du 12 brum aire an 2 s’occupoit de trois espèces
d’enfans naturels, après avoir décrété en principe qu’ils
étoient successibles.
1°. Ceux dont le p èreéto it décédé, et il leur suffisoit
de prouver une possession d’ éta t, par des soins donnés
à titre de paternité, et sans interruption ; 2°, des enfans
dont le père et la m ère seroient encore vivans lors du
Code c i v i l , et leur état civil y étoit renvoyé; 30. de ceux
dont la mère seule seroit décédée lors de la publication
du C o d e , et alors la reconnoissance du p è re , faite devant
l’officier p u b lic, rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’un enfant de la seconde espèce ; et le pré
tendu père , quel qu’il s o it, de môme que la m ère, sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle u r g e n c e y a v o it - il de
prévenir la publication du Gode civil , en faisant faire
une déclaration que la loi ne demandoit p a s> et qu’elle
B
�( 10 )
ajournent au contraire ? N ’aperCevroit - on pas déjà le
dol dans cette extraordinaire prévoyance ?
D ira-t-o n que le Code civil prescrit aussi une décla
ration authentique, et qu’on n’a pas v io lé la loi en la
devançant ? Mais qui blâmera les législateurs de l’an 2 ,
d’avoir voulu p révo ir que leur système ne seroit peutêtre pas celui du Code civil ? qui leur reprochera d’avoir
supposé. que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de m aturité, et de s’être défiés de leur
prem ier système sur une innovation aussi im portante?
Ils voulurent régler le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la loi transitoire du 14 floréal a n n ,
nous apprennent assez qu’il n’y a eu , d an s l’intervalle de
l’an 2 à l’an 11 , aucune législation touchant les enfans
naturels. Les bulletins de la cour de cassation sont aussi
remplis d’arrêts qui ont cassé tous les jugemens dans les
quels les tribunaux avoient voulu régler , même p rovi
soirement , le sort de quelques enfans naturels, pendant
cette lacune de n eu f ans.
Il ne pouvoit donc être question de fixer l’état de
l’enfunt d’Elisabeth F errier qu’après le Code c i v i l , dont
l’art. 334 porte que la reconnoissance sera faite par un acte
authentique, si elle ne l’a pas été par l’acte de naissance.
Mais fût-il indifférent que la reconnoissance contestée
ait été faite avant ou après le Code c iv il, malgré la sus
pension totale exigée par la cour de cassation, et rappelée
par la loi transitoire; cette reconnoissance n’en est pas
moins irrégulière ? car elle 11’est faite ni par l’acte de
naissance lui-m êm e, ni par un acte séparé authentique«
V oici comment cct acte est littéralement écrit au registre*
�(-!■))
' ’
:
- ■
A c t !
de
n a i s s a
ü;-' . ■
■:
n ' c ' e . ,:
.
■
\l L '
rr Du huitième joyr du ntois de germinal, l’an 9 de la repui> blicjue frarçca^sç. A cte de naissance {Je Jacques, f i l l e ( Ce mot
» est effacé, et. on y a substitué au -dessus, dans Vinterligne,
» F e r r i e r , que Üon a encore effacé, et l ’on a écrit à côté C i i a v e . ),
» né hors de mariage., né le septième jour du mois de germ inal,
» à sept heures du soir, fils d ’isabeau Ferrier, non m ariée, domi» ciliée du lieu de la M arette, susdjte commune,.et-Isabeap Fermier,
» non mariée; le sexe de L’enfant a été reconnu u n ;e ( Qn a couvert
* ^*
» d’encre la lettre y.. ^f i l s , né hors de mariage : premier témoin,
» Jean-Pierre Ferrier, demeurant'^' Chambon , Méparte'merit de
» la H a u te -L o ire , profession de cultivateur, âgé de tren te-n eu f
» ans ; second tém oin, Pierre R u e l, demeurant ¿1 Ghambon , département de la H a u te -L p irp , profession ¡de tailleur d’habits,
» âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite pxjr
» Marie R u e l, sage-femm,ef<|e ladite accpucbqe, avons inscrit le
» sus-nom rué Jacques F e r m e r ( Ce mot est raturé, et Von a mis
» au-dessus, dans l’ interligne,
»
mère
»
le
C
iiave.
),
portant
le nom
de
sa
( Ces mots ont été rayés, et l ’on y a substitué ces mots :
nom
du
pere
.
) ; et ont la déclarante ne savoir1signer, et les
« témoins Signé. F e rrie r , R u e l , signé àtPoriginal. »
•' ■'1 >!'/ • ", ■
(t ,
« L ed it Jacques Ch ave pèretreconnoît ledit Jacques son fils, de
» ladite décl^ratioij de <la présente, lacté-; le rçcqnnolt pour ^sqn
» véritable fils, avoir droit à tous ses bien^, en p n v s c n c e . d e Jean» Louis Riou. ( -J- Ici est un renvoi. ) Constaté suivant la loi, par
» moi Annet de Bannes, maire de la,commune de Cham bon, fai—
» sant les fonctions d ’ofiieier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e B annes, maire, signé.
» ^ Et de Pierre C a llo n , et de Jean-Pierre Frescliet, et de Jeanj> Pierre F errier; et dit Jacques Chavc a signé avec les témoius.
B 2
�» Ont signé, ledit Pierre Callon a déclaré ne savoir signer, Chave >
» R io u , Freschet, Ferrier. D e Bannes, m aire, signé. »
( Nota. Ledit renvoi est en marge, en travers. )
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecturede la Haute-Loire ,
BARRÉS.
Il est aussi ¿vident qu’il puisse l’ê tre , que cet acte se
compose de deux parties bien distinctes , qui ne sont pas
d’un même contexte , ne sont pas l’ouvrage du m ême
m om en t, et cependant ne sont pas deux actes absolu
m ent séparés.
i ». A cte de naissance bien parfait et très en règ le, d*ua
enfant né d’Isabeau F e r r ie r , sans m ention du père
O n lui donne le nom de sa mère. Il y a deux témoins
de cet a cte , Joseph F errier et M arie R uel. L ’acte est
donc com plet : le vœ u de la loi du 20 septembre 1792
est rempli.
2°. V ien t ensuite une déclaration de C h ave, qui est à
la suite du prem ier a cte , et qui a exigé des surcharges..
M ais peut-on , de bonne foi , y v o ir un acte authen
tique , une reconnoissance de paternité telle que la lo i
la commande et que la raison la conçoit ?
Cet acte n’a aucune date , parce qu’en effet il a eu lieule 21 g erm in a l, et a été ajouté a un acte terminé depuis
le 8. Comment supposer en effet que cette déclaration
fiiinle fait partie de l’acte du 8? Les témoins dénommés au
premier ne signent pas la déclaration.
�( *3 )
On a raturé et interligné le prem ier acte de naissance,
sans faire rien approuver aux premiers témoins. L e maire
seul approuve to u t, même ce qu’ il lui plaira de raturer
en core; les autres témoins , Chave lu i- m ê m e , ne font
aucune approbation. O r , il est de principe que les ratures
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n’y a appro
bation des parties et témoins.
Il est un autre principe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’ importance qu’ils aient, c’est que les témoins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le fr è r e , qui ont déclaré la naissance le 8 , n’ont pas signé
à la fin. Si c’est un seul et même acte, les uns l’ont signé
au m ilieu , et d’autres à la lin : chose bizarre et rid icu le,
qui ne peut s’allier avec la gravité de l’acte qu’on prétend
m a in te n ir .
Q ue peut - il résulter d’un acte de cette espèce , si ce
n’est de la pitié pour ses rédacteurs , et une conviction
intime que ce n’est pas C have qui est allé déclarer la n a issance d’un enfant comme s’en disant le père?
L e but de la loi n’est donc pas rempli ; car dans quelque
form e que dût être une reconnoissance de paternité , il la
falloit dans l’acte m êm e portant la déclaration de naissance,
ou bien il falloit un acte p a rticu lier, daté lu i-m êm e, et
qui ne fût pas rédigé dans une form e ayant pour but de le
rattachera un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous que l ’article 334 du Code civil dii
que la reconnoissance sera faite par l’acte de naissance,
ou par un acte atlientique ; à quoi l’ a rtic le 62 ajoute que
la cté de reconnoissance sera in sc rit sur les registres () sa
date j et qu’il en sera lait mention en marge de l’acte de
naissance.
�C H )
'
Rappelons-nous encore que le but bien positif de la loi
est de ne com pter pour rien les reconnoissancesantérieures
au c o d e , quand l’auteur est vivant. Il en est de cela comme
des testamens antérieurs à l’nn 2, qu’ il falloit refaire pour
les circonscrire dans les termes du droit nouveau. La loi
a eu ici un but plus moi'al : les cliangemens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons pas sur l’importance des formes
dans une matière aussi délicate : on est si scrupuleux
pour tant d’autres actes! U n seul m ot équivoque en un
testam ent, détruit toute la volonté d’un père de fam ille;
une donation exige encore des formes plus multipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importans que c e lu i où il s’agit
de transmettre son nom et sa fortune ; où il s’agit de plus
encore, de vaincre l’opinion et de surmonter sa propre
répugnance ? D ’ailleurs , pourquoi ne pourrions - nous
pas dire pour un tel acte ce que Ricard dit des testamens,
« que toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leur solennité consiste dans les formes ? »
A u jourd ’hui il faut y ajouter une vérité bien certain e,
c’est que la seule supposition qu’un homm e est tenu et
obligé de se charger d’un enfant naturel sans sa libre
v o lo n té , est incompatible avec le système indubitablement
reçu sur la législation des enfans naturels.
2°. Cette déclaration de paternité est n u lle , S il y a
violence. L e s jfà its articulés suffisent. I ta preuve en
est adm issible.
On est extrêm em ent sévère dans le monde pou r juger
�( i5J
des effets de la peur d’autrui ; e t , quand on en com
mente les particularités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu’on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à régler pour soi-même;
ca r, en deux cas semblables , le même individu se conduiroit rarement deux fois de la m ême manière. Mais
celui qui raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il raisonne, tandis que le prem ier effet de la terreur
est d ’absorber toutês les réflexio n s, pour ne laisser place
qu’à uneseuleidéedom inante, la conservation de soi-même.
Quelques auteurs, partageant sur cc point les idées du
v u lg a ire , sembleroient aussi se m ontrer difficiles à ad
mettre la plupart des excuses fondées sur la crainte. Il
faut distinguer, disent-ils, la crainte grave et la crainte
légère , et on ne peut tro u ve r de m oyen rescisoire que
dans celle qui suffiroitpour ébranler la fermeté de l’homm e
le plus in trépid e, metus non va?ii hom inis , sed q u i in
hom inem constantissim um ca d a t, 1. 6 , ff. Q uod metûs
causa.
Ces auteurs, s’en tenant à une loi isolée démentie par
beaucoup d’autres, n’ont pas voulu apercevoir, dans cette
rigueur étrange, un m onument de la fierté romaine plutôt
qu’une règle générale. Ce p eu p le, qui avoit détruit le
temple élevé par T u llu s à la C rainte, n’étoit, en la pros
crivant par ses lois, que conséquent avec lui-m êm e. Sous
un système de conquêtes sans bornes, et avec une consti
tution toute m ilitaire, quel romain p o u v o it a llé g u e r une
crainte légère! E levé dans les cam ps, son excuse m êm e
«ût consacré sa honte , et la loi étoit rigoureusement juste
en exigeant de lui l’intrépidité d’ un so ld a t.
�( i6)
La France militaire ne réprouvera pas cette législation
sévère ; elle l’eût créée elle-méme , s’il falloit un code au
courage. M ais les actes civils des simples particuliers ne
se règlent pas par des maximes nationales; la théorie
principale des lois consiste à les approprier aux mœurs
de ceux qu’elles doivent régir.
Gardons-nous donc d e l’exaltation , quand elle est hors
de mesure; ne nous obstinons pas à trouver un Scévola
dans un laboui'eur tim id e, qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
Les auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D ornat surtout, à qui les premiers juges ont fait
l ’injure de prêter une opinion si contraire à son d is c e r
nem ent, D o m a t, dont l’ouvrage immortel n’est que le
précis des lois romaines, bien loin de se fonder sur la
loi 6 , ne la signale que pour en blâmer la rudesse.
« Nous avons v o u lu , d it-il, rétablir les principes na« tu rels, et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit romain parmi celles de cette sec« tio n ......... Toutes les voies de fait, toutes les violences,
<f toutes les m enaces, sont illicites ; et les lois condam« nent non-seulement celles qui mettent en péril de la
« vie ou de quelque to u rm en t, mais toutes sortes de
« voies défait et mauvais traitemens. E t il faut remarquer
« que comme toutes les personnes n’ont pas la meme
« fermeté pour résister à des violences et à des menaces,
tt et que plusieurs sont si foibles et si tim ides, qu’ils ne
k peuvent se soutenir contre les moindres impressions,
<c on ne doit pas borner la protection des lois contre les
« m enaces
�('17 )
a m en aces et les v io le n c e s ,
.
à ne réprim er q u e celles
« q u i so n t capables d'abattre
les personnes les pluà
« in trép id es; mais il est juste de protéger aussi les plus
« tim ides............
« Il est très - juste, et c'est n otre u sa g e , que toute
« violence étant illic ite , on réprim e celles m ême q u i
« ne vont pas à de tels excès, et qu’on répare tout le
a préjudice que peuvent causer des violences qui enga« gent les plus foibles à quelque chose d’injuste et de ccn« traire à leur intérêt : ce qui se trouve même fondé sur
« quelques règles du droit ro m a in ........... et ces règles
« sont tellement du droit n a tu re l, q u 'il ne p o u r r o it y
« a v o ir d'ordre dans la so c ié té des h o m m e s , s i les
« m oin dres violen ces Tiétoient réprim ées. » ( S e c t. 2 ,
d es v ic e s d es c o n v e n tio n s , p r é a m b u le . )
Il est peut-être inutile, après avoir cité D om at, de faire
d’autres recherches ; mais les premiers juges ont encore
fait l’injure à P oth ier de lui prêter des principes qui ne
sont pas les siens.
Cet auteur cite les lois rom aines, et par conséquent
les rappelle telles qu’elles sont. M ais il termine son
article de la crainte par dire que te le principe qui ne
«
«
«
«
connoît d’autre crainte suffisante pour faire pécher un
contrat par défaut de liberté, que celle qui est capable
de faire impression sur l’homme le plus courageux, est
trop rig id e , et ne doit pas être suivi parmi nous
la
«■ lettre ; on d o it , en cette m a tiè r e , a v o ir égard a P ag e ,
« ait sexe et à la con d itio n des personnes (1),' et telle
( 1 ) Expressions copiées mot pou'r mot en Fart. 1 1 1 2 du C ode civil.
c
�( 18 )
« crainte qui ne seroit pas jugée suffisante pour avoir
« intim ide l ’esprit d’un homm e d’un âge m ûr ou d’un
« m ilitaire, et pour faire rescinder le contrat qu’il aura
« f a i t , peut etre jugée suffisante à l’égard d’ une femme
« ou d’un v ie illa rd , etc. » ( T raité des obligations,
page i re. , chap. I er., n°. a 5 , i n f i n . )
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
fortifiée par d’autres citations, on les puiscroit dans les lois
romaines elles-m êm es, qu’il ne faut pas juger par un
fragm ent u n iq u e, et q u i, au con traire, nous enseignent
ce que Dom al et Pothier viennent de nous apprendre.
T o u t consentement doit être lib r e , disent plusieurs
lois ; e t, pour être restitué, il n’est pas besoin d’ une v io
lence corporelle, mais seulement d’une crainte inspirée
¿\ celui qui contracte; quoad ju sta m restitutionis cau
sant ni/iil refert utrhm v i an metu quis cog atur. . . .
et quoad effectum ju r is utrobi deest co n sen su s, ac
libéra roluntas p a tien tis, u tvelle non videatur. L . 1 , 3 ,
7
quod met. C. L . 116 , de reg.jur. ( in C orvino.)
Ces lois étoient bien moins dures que 11c l’ont sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la crainte , quand même Chave auroit été
hors d’élat de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
in sp irée; non tamen necesse est designare personam
quœ rnetum intu/it, sed sujficit p r o u a r e rnetum, quia
me tus habet in se ignorantiarn. L . 14. Jf. eod.
E n fin , ce qui achève de convaincre que ces lois savoient
aussi se mettre à la portée de la foi blesse des hom m es,
c’est qu'elles expliquent qu’il n’étoit pas nécessaire de
prouver l’existence d’uu danger réel , mais seulement
�C 19 )
la crainte de ce danger, qui en effet devoit détruire le
consentement. S i causa fu is s e t , cu r pericuîurn tim eret,
quam vis pericuîurn 'i crc non f u is s e t . . . . non considé
ra tur even tu s, sed ju sta opinio. L .
eod.
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc un guide bien sûr.
A u lieu d’adopter l’antique rigueur d’une loi oubliée par
les Romains eux-m êm es, il a jugé que la crainte inspirée
à Chave 11’avoit pas été un m otif suffisant pour le con
traindre ; et cependant il ignoroit jusqu’ù quel point
Chave avoit été contraint ou menacé ; il l’ignoroit et a
voulu l’ignorer Loujours,. en refusant de s’éclairer par une
preuve : cependant les faits articulés étoient graves. Chave
ollroit et offre encore de prouver ces faits articulés , et
notam m ent, i° . que le 21 germ inal les frères F errier et
il’ulitres liommcs armés île hfitous sont venus chez lui ;
2°. qu’ ils l’ont forcé de se lever et de les suivre, en le
menaçant ; 30.’ que chez de Bannes ils se sont opposés à
toute explication, l’ont injurié, menacé et frappé; 40. que
de Bannes l’a prisi\ part pour l’exhorter à céder à la force
et éviter un plus grand mal ; 5°. qu’on l’a forcé de venir
dans un cabaret, où 011 lui a remis un enfant, avec de
nouvelles menaces.
'
M a is, a dit le tribunal d’Ysscugeaux, C h av e, sorti de
si maison et conduit chez le m aire, pouvoit réclamer.
Ce scroit une réllexion bien naturelle, si les faits même
de la cause n’étoient déjà venus la d étru ire; car ce maire
lui-m em e étoit si peu disposé
user de son autorité ,
qu’ il est difficile de ne pas le juger nu contraire iutéressé
à l'événem ent.
Mais à quelle pro tectio n , il faut lo d ire , auroit pu
�( 20 >
s’attendre un m alheureux à la merci de cinq in d ivid u s,
dans le domicile isolé d’un maire de village? Battu à ses
y e u x , Chave pouvoit-il se croire dans un asile inviola
b le ? L e maire lu i-m êm e,l’exhorîMnt à céder à la fo rce,
m ettoit le comble à sa terreur, et ctéclaroit, ou sa propre
co m p licité, ou au moins son impuissance.
L ’acte le moins im portant de la vie seroit vicié par une
semblable v io le n c e , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incompatible avec la m oindre contrainte. U n
père de fam ille a contracté un engagement sacré envers
ses enfans par son m ariage; mais c e lu i-là même qui
auroit procréé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien civil : son honneur et les sentimens de la
nature deviennent leur unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. Les enfans naturels n’ont point de
famille ; tel est le langage de la loi : elle ne veut pas qu’ils
en aient une. Quand leur père se nom m eroit hautement
dans le m onde, il ne seroit tenu à rien; la loi lui perm et
seulement de se déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volonté seroit donc se croire plus sage
qu’elle.
M ais si la loi n’exige rien d’un père , si elle consi
dère comme un vice m oral de lui donner un fils que
sa propre volonté cependant n’a pas désavoué , peut-011
soutenir l’idée révoltante qu’un homm e sera contraint
m algré lui d’adopter un enfant dont il n’est pas le père?
Q ui lui donnera la force de supporter, dans sa de
m eure, la vue habituelle d’une créature si étrangère,
placée là pour sa honte im m uable, sans aucune com
pensation satisfaisante ? et qui oseroit répondre que dans
�(
21
)
celte situation dé désespoir, aigri par un sentiment d’in
justice , il pût assez maîtriser une fureur co n v u lsiv e,
qui seroit tout à la fois le tourment de l’innocence et
son propre supplice ?
Eloignons plutôt de vaguessuppositions fondées sur une
pure chimère. L a prévoyance des magistrats distinguera
la vérité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. O n ne donne point à un homme l’enfant
qu’il repousse avec m é p r is , quand la loi n’en fait pas
un devoir. L a cour doit prononcer ici sur les consé
quences d’ un acte lib r e , çt tout pvouve qu’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qui donne lieu au procès. C h ave,
conduit par la fo r c e , menacé dans sa route , a signé
sous le bâton; et, pour se servir des expressions de D om at,
si uu consentement de cette espèce étoit jugé valide , ce
serait un attentat au droit n a t u r e l i l n ’y auroit plus
d ’ordre dans la société des hommes.
L a conduite d’Isabeau F errier , l’époque de ses cou
ches, c’est-ùidire, de celles qui donnent lieu au proçès,
le choix de ses cro u p iers, le lieu de la rscène, la :c ir
constance qu’ un acte de naissance a été ch an gé, e tc ., tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , mais qui seroient oiseuses, tant que la preuve
de la violence ne sera pas ordonnée.
Cette p re u v e , sans contredit, est adm issible; aucune
ordonnance ne la prohibe ; et ce qui étonne, c’est que
les premiers juges n’aient pas voulu prononcer en connoissance de cause.
Il est possible que la malignité toujours avide de calom
nie , et toujours diilicile ù d étro m p er, prétClide que Chavc
�( 2 2 )
n’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth Ferrier
de ce dont on l’accuse : mais il en prend le ciel à tém oin,
cette femme lui fut toujours étrangère.
Chave , maître de ses actions , célibataire , feroit sa
jouissance principale de se voir .revivre dans un fils qu’il
cro iro it le sien ; à son âge et avec ses principes religieu x,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans mobiles ne
peuvent donc être vaincus que par quelque chose de
plus puissant encore , U n e conviction in tim e, une insurm ontable répugnance.
¡:
Il ne demande pas à être cru sur p a ro le; et si son
prem ier moyen ne suffit p a s , il offre la preuve des v io
lences qui l’ont forcé à donner sa signature : et certes,
quand la cour se sera assurée que Chave a été forcé de
sortir de son d om icile, mené chez le maire par cinq
hommes , menacé et battu , elle appréciera alors toute
la valeur d’une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lorsque la vertueuse Elisabeth F errier sera
convaincue qu’il ne lui est plus libre de faire de sa pro
géniture une charge p u b liq u e, peut-être s’efforcera-t-elle
de mettre un terme à sa fécondité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rappotteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat,
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R I O M , de l ’im prim erie de L a n d r iot , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel. — T h e r m i d o r an 13.
�
Dublin Core
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Factums Marie
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
reconnaissance de paternité
nullité
violences sur autrui
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1801-Circa An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0614
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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BCU_Factums_M0307
BCU_Factums_G1502
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Chambon-sur-Lac (63077)
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nullité
reconnaissance de paternité
violences sur autrui
-
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e69c6b6506b285ce5d41f1396d09c474
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COUR
M E MOIRE
D ’A P P E L
SÉANT
A RIOM»
P O U R
J a c ques C H A V E ,
appelant
C O N T R E
-
Jeanne
‘
}
rr
V A L L A , et E l i s a b e t h F E R R I E R ,
sa fille , majeure, intimées
l A recherch e de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœurs un scandale de moins. Dans ce secret de
la nature , le législateur ne pouvoit que s’en rapporter à
la crédulité de l’h o m m e, ou se jeter dans le vague des
conjectures :1e prem ier parti seul étoit juste; la loi l’adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nomm er son pèrç
que celui qui a voulu se déclarer tel.
N ul acte ne doit donc etre plus lé g a l, plus lib re , que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incomA
�C2 )
patible avec elle *, car si elle n’est pas clairement l’effet
spontané de la réflexion , le but moral de la loi n’existe
plus.
L ’appelant l’éclame contre l’oubli de ces principes, et se
place sous la protection de la c o u r, pour faire annuller un
acte in fo rm e, auquel on l’a fait participer par la violence
il demande à n’être par forcé de reconnoître un enfant
qui ne fut jamais le sien.
Les premiers juges n’ont pas voulu admettre la preuve
qu’il étoit à même d’offrir -, et si cette opinion pouvoit
prévaloir , il en résultèrent que contre le vœu de la loi ,,
un homme donnerait son nom malgré lui à un enfant
7
n a tu rel, seroit contraint de prendre soin d’un étranger T
et de lui laisser sa succession..
• .i : V:
F A I T S . .
Jeanne V alla,. et Elisabeth F errier, sa fille, habitent le
lieu de M a z e t, mairie de Chambon. Leurs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques Chave>
/ qui demeure à la distance d’environ une lieue de leu r
domicile.
... ■•
Son â g e , plus avancé même que celui de la mère,, ne lu î
eût donné aucun prétexte de se rapprocher de là fille.. Uni
séducteur à cheveux blancs est rare *, au village il ne connoît pas l’oisiveté qui-nourrit les illusions, et la monotonie'
de ses travaux rustiques avance l’amortissement de ses
sensations, en occupant toute son existence.
Ces femmes étoient donc absolument étrangères à Cbnve,,
lorsque tout d’un coup il s’est trouvé m êlé à leur destinée^
�(
3 )
par une de ces sourdes manœuvres que l’enfer seul peut
faire concevoir.
U n matin à huit heures ( le 21 germ inal an 9 ), Jacques
C h a v e , m alade, est brusquement arraché de son lit par
deux frères de la fille Ferrier , suivis de trois autres jeunes
gens armés de bâtons ou de fourches. Il se disent envoyés
par le sieur de Bannes, maire de Cham bon , et comman
dent à Chave de les suivre dans la maison de ce sieur de
Bannes. Il s’habille et les suit.
L à il trouve Jeanne V alla qui paroît en grande colère ,
l ’accueille par des injures grossières, lu i dit que sa fille est
accouchée, depuis quinze jo u rs, d’un garçon dont il est
le p è r e , suivant le récit de sa fille et de M . le maire de
Chambon , et qu’il faut signer sur le champ l’açte de
naissance.
Chave , étourdi d’une vespérie aussi inattendue, pressé
entre les cris de la m ère , les coups de poings des frè re s,
et les menaces de leurs trois hommes d’escorte, veut élever
la v o ix , et invoquer la notoriété publique;des bâtons sont
levés contre lui pour toute réponse : il sollicite la justice
du maire , mais le maire le prend à part pour lui dire
qu’il falloit céder à la circonstance „ et que sa^ie n’étoit
pas en sûreté. L ’avenir a appris à Cfcave quel intérêt pres
sant le maire lui - même avoit à ce que la calomnie eût
une direction certaine. .I
O n comprend alors que cette dernière insinuation a
ébranlé le courage de Chave. ¡Le sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efface quelques mots, en subs
titue d’autres, et remet une plume à Chave : une seconde
résistance amène de nouvelles violences. I l fait enfin ce
qu’on exige •, il signe.
�( 4 )
E n sortant de chez le m aire, les satellites le mènent au;
cabaret se fon t donnerii b o ire , le forcent h p ayer, mettent
l ’enfant dans ses bras , lui font les plus horribles menaces
s’il dit un m ot ; et se retirent.
Sa n s doute il manque à ces faits beaucoup de circons
tances im portantes; mais C h a v e , glacé d’épou vante»,,
étoit-il libre de réfléchir?- La plupart de ces détails ont
échappé'à sa m ém oire, ou plutôt à son attention.
Enfin C have, revenu de son étourdissement,, put réflé
chir sur lés conséquences de l’acte qu’ont venoit de lui.
e x to rq u e r, et sur le parti qu’il a voit à prendre;.
L a démarche la plus pressée et la plus indispensable,.
ëtoit de se débarrasser de l ’innocente créature qu’une
mère dénaturée avoit rejetée de ses bras pour l’aban
donner aux soins d’un étranger. Chave hésita s’il la
ra p p o rtera it, dans la n u it, à la porte des F e rn e r : cepen
dant la re lig io n , l’humanité , péüt-être la terreur pourhii-m Bm e, Tertiportèrent sür son: d égo û t, et il fit porter
Penfant à une nourrice.. j
’
^Mais, aussitôt, e t:en'sîgne de-sa protestation, il rendit
plainte au,1juge de- paix de Tence ; le juge de paix lerenvoya au magistrat de sûreté “. mais comme la plainteéto it dirigée auîssï C ontre'lél(h iaîre, les autorités déli—
’
1i
'' »
b é r è r e n t,:e t 'n e i'ésbhïrènt rien.,
Chave in q u iet, et ne voulant pas que son silence p u t
déroger à son d r o it, se d é c id a A citer, le 5 floréal an g r
tant Jeanne V aïla et sa fille , q u e le maire lu i- m e m e ,
pour v o ir-dire qu’ il serôit Vôstitué contré la réconnoissànce de paternité qui lu i''a v o it été extorquée par la
violen ce, et que le maire seroit tenu de rayer du registre
�ce qui concernoit ladite reconnoissance *, et la m ere et
la fille pour être condamnées à reprendre l’en fan t, payer
ses alimens chez la nourrice , avec dommages-mterets.
O n pense bien qu’au bureau de paix la fille Février
ne manqua pas de faire la réponse d’usage, qu’elle avoit
été séduite et abusée sous promesse de m ariage , et qu’elle
seroit en état de prouver les familiarités de Chave- avec
-elle; celui-ci Pen'-défia, et ajouta même qu’il offroit de
prouver ceu x avec qui elle avoit eu fréquentation.
T o u t cela étoit de trop de part et d’ç u tr e , puisqu’il
n’est permis de rien prouver ; et la fille F errier ne
risquoit rien à faire bonne contenance. Q uoi qu’il en
so it, un prem ier jugem ent, du 28 pluviôse an 10 , m it
le maire hors de procès, comme ne pouvant êti’e jugé
sans autorisation , et appointa les autres parties en droit.
Cet appointement ne fournit pas plus d’éclaircisse
ment. Chave persista toujours à offrir la preuve de la
violence exercée contre lu i \ et les femmes F e rrie r, q u i,
au bureau de paix.,, n’avoient paru avoir aucune crainte,
firent leurs efforts pour soutenir cette preuve inadmis
sible. L eu r système p réva lu t; et le 14 fructidor an 10 ,,
le tribunal d’Yssengeaux rendit le jugement qui suit..
« Considérant Ique l'brticfle a'du titre 20 de l'ordonnance de iGGy
défend de recevoir la p r e u v e p a r témoins contre et outre le contenu
aux actes publics; qu’à la vérité la fo rce, la violence, sont un
moyen pour les faire rescinder, mais qu’en ce cas il fqut articuler
de menaces graves, qui feroient craindre pour la vie metus mortis
ou que la partie obligée auroit souffert charte privée, ainsi que
l’enseignent Dom at en ses Lois civiles, et Pothier en son T raité
des obligations ;
�(
6
)
» Considérant que Jacques Chave n ’a articulé qu'il lui ait été
fait a u c u n e m e n a c e , ni qu'il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son dom icile, ni dans celui du maire où il s’étoit
r e n d u pour reconnollre pour lui appartenir l ’enfant dont s’étoit
a c c o u c h é e Jsabeau F errier; et qu’étant dans ce dernier dom icile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
¿prouvés, contre ceux qui s’en seroient rendus coupables envers
s a personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
Cependant Chave avoît offert expressément de faire
preuve de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il étoit privé alors d’un moyen important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite alors au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de Bannes, m aire, qui avoit trop d’intérêt
à en cacher l’irrégularité pour la faire soupçonner. A u
reste, Chave s’est pourvu en la cour contre le jugement,
et il sera question d’examiner de quelle influence la form e
de cet acte doit être pour la décision du procès.
M O Y E N S .
L ’ancienne législation française étoit extrêmement dure
contre les enfans naturels; et cependant, par une étrange
inconséquence, elle admettoit les preuves de paternité
sans distinction. A u jo u rd ’hui la loi a fait pour eux
davantage : mais sans vouloir percer le mystère qui
couvre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences ; elle ne voit dans
l’enfant né hors le mariage qu’ une innocente créature
�( 7 ')
digne de la pitié de tout le m o n d e, mais ne tenant à la
société que par celle qui lui a donné le jour. Si cepen
dant un homm e , guidé par des apparences qu’ il aie droit
d’apprécier lui - même , et cédant à l ’impulsion de sa
conscience, veut se donner le titre de p è r e , la loi le
lui perm et, s’ il n’est engagé dans les liens du mariage :
mais comptant pour rien aujourd’hui toutes les démons
trations extérieures, elle exige une déclaration authenti
que et non équivoque ; elle prescrit h l’acte une solen
nité plus grande que pour la naissance môme de l’enfant
légitim e.
L ’intention du législateur étoit si claire, qu’elle a ôté
tout prétexte â l’astuce, et n’a laissé de voies qu’au faux
ou à la violence. M ais à qui peut être réservée l’une o u
l’autre de ces voies criminelles ? Ce n’est pas à la fille timide
q u i, rougissant encore d’une première foiblesse^et par
tagée entre l’amour de son enfant et la honte de sa nais
sance, n’en ose nommer le père que dans le secret de son
cœ ur, et se fait l’illusion de penser que le mystère dont
elle s’enveloppe la protégera contre l’opinion qui fait
son supplice..
Mais que feront ces femmes déboutées , qui ne voien t
dans la prostitution qu’une habitu de, dans leur avilisse
ment qu’un éta t, et d ans leur fécondité qu’un accident ?
Incertaines elles-mêmes d’une paternité qu’elles déféroient
nnguères suivant leurs convenances, elles nTen arrachoient
pas moins des sacrifices pécuniaires aux hommes qui leur
étoient souvent les plus étrangers , mais qu’épouvantoit
la perspective d’une honteuse et publique d isc u ssio n . Si
on leur laisse entrevoir aujourd’hui une tolérance quoi-
�(B )
conque, q u elc.u r coûtera-t-il de tenter d’antres voies pou r
en venir aux mêmes lins? E t s’il est près de leur demeure
un cito3ren paisible, q u i, par ses mœurs,douces et réglées,
puisse passer pour pusillanim e, quelle difficulté y aura-t-il
de répandre adroitement que c’est là le-coupable, d’inté
r e s s e r , contre lui quelque personne crédule, de l’effrayer
lui-m êm e sur les dangers de sa résistance, d’ameuter s'il
le faut ceux qui ont un intérêt réel au succès de la négo
ciation ! Jadis il falloit des témoins, aujourd’h u i il ne faut
qu’ une simple signature ; tou t cela peut s’exécuter avec
rapidité : ce n’est qu’un changement de complot.
Heureusement cette rapidité même ne laisse pas au
crim inel le calme de la réflexion : souvent ses fautes le
trahissent, e t, quelques légères qu’elles soient, il faut les
compter avec scrupule; car on est bien assuré q u elles ne
sont pas un simple résultat de sa négligence, mais qu’elles
ont échappé à l’excès de sa précipitation.
Ceux qui ont guidé la fille F errier dans ses démarches
n’ont pas visé à l’exactitude ; la cou r en sera convaincue
bientôt par la forme de l ’acte de naissance qui fait son titre.
U ne seconde découverte la convaincra encore qu’il’ne
s’agit point ici de rép arer, envers une fille sé d u ite, des
torts que la m alignité suppose toujours. L a fille F errier
a , le 20 prairial an n , donné une nouvelle preuve de
sa continence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m ère, que l’acte apprendm êm e avoir
été sage-femme en cette circonstance.
Il ne paroît pas que pour cette fois la mère et la fille
F errier aient jugé à propos de réunir un conseil pour
disposer du nouveau n é , et lui élire un père à la p lu
ralité
�( 9 )
rallié des suffrages; il est vraisem blable'que la précédente
tentative les avoit intimidées.
Q u o iq u ’il en soit, et soumettant cette découverte precieuse aux réflexions de la c o u r , l’appelant n e s’en occu
pera pas plus long-temps , et se contentera d’observer,
quîil n’y a rien de légal dans la prétendue déclaration de
paternité qu’on lui a fait signer, et au surplus que les faits
de violences articulés suffiront pour la détruire. C ’est à
l’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i
'è
i° . L a déclaration de -paternité n e s t pas légale.
ï,a loi du 12 brum aire an 2 s’occupoit de trois espèces
d ’enfans naturels, après avoir décrété en principe qu’ils
étoient successibles.
i° . Ceux dont le p èreéto it décédé, et il leur suffisoit
de prouver une possession d’é ta t, par des soins donnés
à titre de paternité, et sans interruption*, 2°. des enfans
dont le père et la m ère seroient encore) vivans lors du
Code c i v i l , et leur état civil y étoit renvoyé; 30. de ceux
dont la mère seule seroit décédée lors de la publication
du C o d e , et alors la reconnoissarice du p è re , faite devant
l ’officier pu blic, rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’ un enfant de la seconde espèce ; et le pré
tendu père , quel qu’il s o it, de môme que la m è re , sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle urgence y a v o it - il de
prévenir la publication du Code civil , en faisant faire
une déclaration que la loi ne demandoit p a s , et qu’elle
B
�t IO )
ajournoit au contraire! ? 'N’apercevroit - on pas déjà le
dol dans cette extraordinaire prévoyance?
D ira -t-o n que le Code civil prescrit aussi une décla
ratio n authentique, et qu’ on n’a pas violé la loi en la
devançant ? Mais qui blâmera les législateurs de l’an 2 ,
d’avoir voulu p révoir que leur système ne seroit peutêtre pas celui du Code civil ? qui leur reprochera d’avoir
su p p osé.'que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de m aturité, et de s’être défiés de leur
prem ier système sur une innovation aussi im portante?
Ils voulurent régler le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la loi transitoire du 14 floréal an 1 1 ,
nous apprennent assez qu’il n’y a eu , dans l’intervalle de
l’an î à Fan 11 , aucune législation touchant les eufuns
naturels. Les bulletins de la cour de cassation sont aussi
l’emplis d’arrêts qui ont cassé tous les jugemens dans les
quels les tribunaux avoient voulu régler , même p rovi
soirement , le sort de quelques cnfans naturels, pendant
cette lacune de. n eu f ans.
1
11 ne pouvoit donc être question de fixer l’état de
l’enfant d’Elisabeth Ferrier qu’après le Code civil , dont
l’art. 334 porte que la reconnoissanee sera faite par un acte
authentique, si elle ne-l?a pas été par l’acte de naissance.
Mais fût-il indifférent que là reeonnoissance contestée
ait été faite avant ou après le Code c iv il, m algré la sus
pension totale exigée par la cour de cassation, et rappelee
par la loi transitoire; cette reconnoissance n’en est pas
moins irrégu lière, car elle -n’est faite ni par -l’acte;de
naissance lui-même, ni par un acte séparé authentique.
V o ici comment cot actetist littéralem ent écrit nu registre.
�« D u huitième joiif du mois de germinal, l’an g de la rcpu« blique française. A cte de naissance d e Jacques, f i l l e ( Ce mot
» est effacé, et on y a substitué au-dessus, dans l'interligne,
» F e r r i ë r , que Von a encore effacé, et Von a écrit à côte C i i a v e . ),
» né hors‘de m ariage, né le septième jour du mois de germ inal,
» à sept heures du soir, fils d’isabeau Ferrier, non m ariée, domi» ciliée du lieu de la M arctte, susdite commune ,-et-Isabçau Ferrier,
!i
•:.. i
r;
» non mariée; le sexe de L’enfant a çté reconnu u n e ( On a couvert
(
. 11
N
#
t
.
» d’ encre la lettre e . ) J i ls , n é h ors d e m ariag e : p rem ier t é m o in ,
» Jean-Pierre Ferrier , deméùraht
Cliam bon , département de
» la H a u te -L o ire , profession de cultivateur, âgé d e tren te-n eu f
» ans; second tém oin, Pierre R u e l, demeurant à C liam bon, dé» partement de la H a u te -L o ire , profession de tailleur d’habits,
» âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite par
» Marie R u e l, sage-fem m e de ladite accouchée, avons inscrit le
» sus-nommé Jacques F e r m e r ( Ce mot est raturé, et Von a mis
» au-dessus, dans Vinterligne, C i i a v e . ), portant l e n o m d e s a
» m è r e ( Ces mots ont été rayés, et Von y a substitué ces mots :
» l e n o m d u p è r e . ) ; et o n t la d é c l a r a n t e n e s a v o i r - s i g n e r , e t l e s
« témoins signé. F errier, R u e l, signé à l'original. »
u L ed it Jacques Cliave père reconnolt ledit Jacques Son fils, de
» ladite déclaration de la présente, acte; le reconnoît pour son
» véritable fils, avoir droit à tous ses biens, en présence de Jean» Louis Riou. ( -\J ci est un renvoi. ) Constaté suivant la lo i, par
» moi Annet de Bannes, maire de la commune de Cliam bon, fai» sant les fonctions d’officier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e Bannes, maire, signé.
»
E t de Pierre C a llo n , et de Jean-Pierre F rescbet, et de Jean» Pierre F errier; et dit Jacques Chave a signé avec les témoins.
B a
�( 12 )
j> Ont signé, ledit Pierre Callon a déclaré ne savoir signer > C h a v e ,
» R io u , Frescliet, Terrier. D e Bannes, m àire, signé. »
( N ota. L ed it renvoi est en marge, en travers. )
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecture
de la H aute-Loire,
BARRÉS.
I f est aussi évident qu’il puisse l’être, que cet acte se
compose de deux parties bien distinctes , qui ne sont pas
d’un même contexte , ne sont pas l’ouvrage du m ême
m om ent, et cependant ne sont pas deux actes absolu
ment séparés.
,
i° . A cte de naissance bien parfait et très en règ le, d’un
enfant né d’’Isabeau F e r r ie r , sans m ention du père.
O n lui donne le nom de sa mère. Il y a deux témoinsde cet acte, Joseph Ferrier et M arie Ruel. L ’acte est
donc complet : le vœu de la loi du 20 septembre 1792
est rempli.
2°. V ien t ensuite une déclaration de C h ave, qui est à
la suite du prem ier a c te , et qui a exigé des surcharges.
M ais p e u t-o n , de bonne f o i , y v o ir un acte authen
tique , une reconnoissance de paternité telle que la loi
la commande et que la raison la conçoit ?
Cet acte n’a aucune date , parce qu’en eiïet il a eu lieu
le 21 germ in al, et a été ajouté a un acte terminé depuis,
le 8. Comment supposer en effet que cette déclaration
finale fait partie de l’acte du 8? Les témoins dénommée, au
premier ne signent pas la déclaration»
�( 13 )
On a raturé et interligné le prem ier acte de naissance,
sans faire rien approuver aux premiers témoins. L e maire
seul approuve to u t, même ce qu’il lui plaira de raturer
encore -, les autres témoins , Cliave lui - même , ne font
aucune approbation. O r , il est de principe que les ratui’es
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n’y a appro
bation des parties et témoins.
11 est un autre principe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’importance qu’ils aient, c’est que les témoins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le frè re , qui ont déclaré la naissance le 8 , n’ont pas signé
à la lin. Si c’est un seul et même acte, les vins l’ont signé
au m ilieu , et d’autres à la fin : chose bizarre et rid icu le,
qui ne peut s’allier avec la gravité de l’acte qu’on prétend
maintenir.
Que p e u t- il résulter d’un acte de cette espèce , si ce
n’est de la pitié pour ses rédacteurs , et une conviction
intime que ce n’est pas C have qui est allé déclarer la naissance d’un enfant comme s’en disant le père?
L e but de la loi n’est donc pas rem pli ; car dans quelque1
forme que dût être une rcconnoissance de paternité , il la
falloit dans l’acte même portant la déclaration de naissance,
ou bien il falloit un acte p articu lier, daté lui-m êm e , et
qui ne fût pas rédigé dans une forme ayant pour but de le
rattacher à un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous que l’article 334 du Code civil dit
que la reconnoissance sera faite par l’acte de naissance,
ou par un acte athentique; à quoi l’article 62 ajoute que
l’acte de reconnoissance sera inscrit sur les registres à sa
d a te, et qu’il en sera fait mention en marge de l’acte de
naissance.
�( i4 )
Rappelons-nous encore que le but bien positif de la loi
est de ne com pter pour rien les reconnoissances antérieures
au code , quand l’auteur est vivant. Il en est de cela comme
des testamens antérieurs à l’an 2, qu’il falloit refaire pour
les circonscrire dans les termes du droit nouveau. L a loi
a eu ici un but plus moral : les changemens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons pas sur l’importance des formes
dans une matière aussi délicate : on est si scrupuleux
pour tant d’autres actes! U n seul mot équivoque en un
testament, détruit toute la volonté d’un père de famille-,
une donation exige encore des formes plus m ultipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importans que celui où il s’agit
de transmettre son nom et sa fortune ; où il s’agit de plus
en core, de vaincre l’opinion et de surmonter sa propre
répugnance ? D ’ailleurs , pourquoi ne pourrions - nous
pas dire pour un tel acte ce que Ricard dit des testamens,
« que toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leur solennité consiste dans les formes ? »
A u jo u rd ’hui il faut y ajouter une vérité bien certaine ,
c’est que la seule supposition qu’un homm e est tenu et
obligé de se charger d’ un enfant naturel sans sa libre
v o lo n té , est incompatible avec le système indubitablement
reçu sur la législation des enfans naturels.
/
2.0. Cette déclaration de paternite est nulle , s ’il y a
violence. L e s j à i t s articulés suffisent. l i a preuve en
est admissible.
O n est extrêmement sévère dans le m onde pou r juger
�( i5 )
des effets de la peur d’autrui ; e t , quand on en com
mente les particularités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu’on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à régler pour soi-même;
ca r, en deux cas semblables , le même individu se conduiroit rarement deux fois d e là m ême manière. Mais
celui qui raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il raisonne , tandis que le prem ier effet de la terreur
est d’absorber toutes les réflexions , pour ne laisser place
qu’à une seule idée dom inante, la couscrvation de soi-meme.
Quelques auteurs, partageant sur ce point les idées du
v u lg a ire , sembleroient aussi se montrer difficiles a ad
mettre la plupart des excuses fondées sur la crainte. 11
faut distinguer, disent-ils, la crainte grave et la crainte
légère , et on ne peut trouver de m oyen rescisoire que
dans celle qui suffiroitpour ébranler la fermeté de l’homme
le plus in trépide, m etus non va ni hom inis , sed q u i in
hom inem constantissim um c a d a l, 1. 6 , ff. Quod metûs
causâ.
Ces auteurs, s’en tenant à une loi isolée démentie par
beaucoup d’autres, n’ont pas voulu apercevoir, dans cette
rigueur étrange, un m onument de la fierté romaine p lu tôt
qu’une règle généi'ale. Ce p e u p le , qui avoit détruit le
temple élevé p a rT u llu s à la C rainte, n’étoit, en la pros
crivant par ses lois, que conséquent avec lui-m êm e. Sous
■un système de conquêtes sans bornes, et avec une consti
tution toute m ilitaire, quel romain pouvoit alléguer une
crainte légère! E levé dans les cam ps, son excuse m êm e
eût consacré sa honte , et la loi étoit rigoureusement juste
eu exigeant de lui l ’intrépidité d’un soldat.
�C 16 )
La France militaire ne réprouvera pas cette législation
sé vère; elle l’eût créée elle-m êm e, s’il falloit un code au
courage. M ais les actes civils des simples particuliers ne
se règlent pas par des maximes nationales; la théorie
principale des lois consiste à les approprier aux mœurs
de ceux qu’elles doivent régir.
Gardons-nous donc de l’exaltation , quand elle est hors
•de mesure; ne nous obstinons pas à trouver un Scévola
dans un laboureur timide , qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
L es auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D o m a t surtout, à qui les premiers juges ont fait
l ’injure de prêter une opinion si contraire à son discer
nement , D o m a t, dont l’ouvrage immortel n’est que le
précis des lois romaines, bien loin de se fonder sur la
loi 6 , ne la signale que pour en blâmer la rudesse.
« Nous avons v o u lu , d it-il, rétablir les principes na« t.urels, et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit romain parmi celles de cette sec« tio n ......... Toutes les voies de fa it, toutes les violences,
v toutes les menaces, sont illicites; et les lois coudâm
es lient non-seulement celles qui mettent en péril de la
« vie ou de quelque to u rm en t, mais toutes sortes de
«
«
«
«
«
«
voies défait et mauvais traitemens. E t il faut remarquer
que comme toutes les personnes n’ont pas la même
fermeté pour résister à des violences et â des menaces,
et que plusieurs sont si foibles et si timides , qu’ils ne
peuvent se soutenir contre les moindres impressions,
un ne doit -pas borner la protection des lo isco n tre les
a menaces
�« menaces et les v io len ces, à ne réprim er que celles
« q u i sont capables d’abattre les -personnes les pluè
« intrépides ; mais il est juste de p ro té g er aussi les plus
« tim ides............
*
« Il est tr è s -ju s te , et c ’est notre u sa g e, que tonte
« violence étant illic ite , on réprim e celles même q u i
« ne vont pas à de tels ex cès, et qu’on répare tout le
a préjudice que peuvent causer des violences qui enga« gent les plus foibles à quelque chose d-’injuste et de con« traire à leur intérêt : ce qui se trouve même fondé sur
« quelques règles du droit ro m a in ............et Ces règles
« sont tellement du droit n a tu re l, qu’ z'/ ne p o u r v o it y
« avoir d’ordre dans la société des h o m m es, si les
« moindres violences ri étoient réprimées. » ( Sect. 2 ,
des vices des conventions , préambùHi. )
I l est peut-être inutile, après avoir cité D om at, de faire
d’autres recherches ; mais les premiers juges ont encore
fait l’ injure à P othier de lui prêter des principes qui ne
sont pas les siens.
Cet auteur cite les lois rom ain es, et par conséquent
les rappelle telles qu’elles sont. M ais il termine son
article de la crainte par dire que « le principe qui ne
« connoît d’autre crainte suffisante pour faire pécher un
« contrat par défaut de liberté, que celle qui est capable
« de faire impression sur l’homme le plus cou rageu x, est
« trop r ig id e , et ne doit pas être suivi parm i nous à la
« lettre ; on d o it, en cette m a tière, avoir égard ci Page y
« au sexe et à la condition des personnes (i) ; et telle
(i)Exprcssions copiées mot pour mot en l’art. 1112 du Code civil.
C
�C i8 }
« crainte qui ne seroit pas jugée suffisante pour avoir
« intim idé l’esprit d’ un homme d’un age m ûr ou d’un
« m ilita ire , et pour faire rescinder le contrat qu’il aura
« f a i t , peut être jugée suffisante à l’égard d’une femme
« ou d’un v ie illa rd , setc. » ( T raité des obligations,
page i re. , chap. ie r>? no, 2 5 , i n f i n .)
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
f o r t i f i é e par d’autres citations, on les puiseroit dans les lois
romaines elles-m êm es, qu’il ne faut pas juger par un
fragm ent un ique, et q u i, au contraire, nous enseignent
ce que Dom at et Pothier viennent de nous apprendre.
T o u t consentement doit etre lib re , disent plusieurs
lo is; et, pour être restitué, il n’est pas besoin d’une v io
lence corporelle, mais seulement d’une crainte inspirée
à celui qui contracta ^ quoad ju sta m restitutionis cau
sant m in i refert utrimi v i an metu quis c o g a tu r .. . .
et quoad effectum ju ris ntrobi deest co n sen su s, ac
libera voluntas p a tien tis, u tvelle non videatur. L . 1 , 3 ,
rj et
quod met. C. L . 1 1 6 , de reg.jur. ( in Corvino.')
Ces lois étoient bien moins dures que ne l’ont sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la crain te, quand même Chave auroit été
hors d’état de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
inspirée ; non tamen nccesse est designare personam
quœ rnetum iiitu lit, sed su jjicit
probare
m etum , quia
inetus habet in se ignorantiann. J . 14- ff. e°d ‘
E n fin , ce qui achève de convaincre que ces lois savoient
aussi se mettre à la portée de la foiblesse des hom m es,
c’est qu’elles expliquent qu’ il n’étoit pas nécessaire de
prouver l’existence d’un danger réel , mais seulement
j
�( r9 )
la crainte de ce dan ger, qui en effet devoit détruire le
consentement. S i causa fu is s e t , cu r periculuni tim eret,
quam vis periculum ie r c non f u i s s e t . . . . non conside-
ratur eventus, sed ju sta opinio. L . 1 4 e°d ‘
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc tin guide bien sur.
A u lieu d’adopter l’antique rigueur d’une loi oubliée par
les Romains eux-m êm es, il a jugé que la crainte inspirée
à Chave n’avoit pas été un m otif suffisant pour le con
traindre ; et cependant il ignoroit jusqu’à quel point
Chave avoit été contraint ou menacé ; il l’ignoroit et a
voulu l’ignorer toujours, en refusant de s’éclairer par une
preuve : cependant les faits articulés étoient graves. Chave
offroit et offre encore de prouver ces faits articulés , et
notam ment, i° . que le 21 germ inal les frères F errier et
d’autres hommes armés de bâtons sont venus chez lui ;
2.°. qu’ils l ’ont forcé de se lever et de les suivre, en le
menaçant ; 30. que chez de Bannes ils se sont opposés à
toute explication, l ’ont injurié, menacé et frappé; 40. que
de Bannes l’a pris à part pour l’exhorter à céder à la foi’ce
et éviter un plus grand mal ; 5 °. qu’on l’a forcé de venir
dans un cabaret, où on lui a remis un en fan t, avec de
nouvelles menaces.
M ais, a dit le tribunal d’Yssengeaux, C h ave, sorti de
sa maison et conduit chez le m aire, pouvoit réclamer.
Ce seroit une réflexion bien naturelle, si les faits môme
de la cause n’étoient déjà venus la détruire ; car ce maire
lui-m êm e étoit si peu disposé à user de son autorité ,
qu’ il est difficile de ne pas le juger au contraire intéressé
à l’événement.
Mais à quelle p ro tectio n , il faut le d ir e , auroit pu
�(
20
)
s’attendre un m alheureux à la merci de cinq .individus,
dans le domicile isolé d’un maire de v i l l a g e ? Battu à ses
y e u x , C h a v e pouvoit-il se croire dans un asile inviola-'
ble ? L e maire lui-m êm e, l ’e x h o r t a n t à céder à la fo rc e ,
m ettoit le com ble à sa terreur, et déclaroit, ou sa propre
c o m p lic ité , ou au moins son impuissance.
L ’acte le moins important d elà vie seroit vicié par une
sem blable violence , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incompatible avec la moindre contrainte. U n
père de famille a contracté un engagement sacré envers
ses enfans par son m ariage; mais ce lu i-là même qui
auroit procréé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien civil : son honneur et les sentimens de la
nature deviennent leur unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. Les enfans naturels n’ont point de
famille ; tel est le langage de la lo i : elle ne veut pas qu’ils
en aient une. Quand leur père se nom m eroit hautement
dans le m onde, il ne seroit tenu à rien; la loi lui perm et
seulement de se déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volonté seroit donc se croire plus sage
qu’elle.
M ais si la loi n’exige rien d’un père , si elle consi
dère comme un vice m oral de lui donner un fils que
sa propre volonté cependant n’a pas désavoué , peut-on
soutenir l’idée révoltante qu’ un hom m e sera contraint
malgré lui d’adopter un enfant dont il n’est pas le père?
Q ui lui donnera la force de su p p o rter, dans sa de
m eure, la vue habituelle d’ une créature si étrangère,
placée là pour sa honte im m uable, sans aucune com
pensation satisfaisante ? et qui oseroit répondre que dans
�( 21 )
cette situation de désespoir, aigri par un sentiment d’in
justice , il pût assez maîtriser une fureur co n v u lsiv e,
qui seroit tout à la fois le tourm ent de l’innocence et
son propre supplice ?
Eloignons plutôt de vagues suppositions fondées sur une
pure chimère. L a prévoyance des magistrats distinguera
la vérité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. O n ne donne point à un homm e l ’enfant
qu’il repousse avec m épris quand la lo i n’en fait pas
un devoir. L a cour doit prononcer ici sur les consé
quences d’un acte l i b r e e t tout prouve qu’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qui donne lieu au procès. C h av e,
conduit par la fo r c e , menacé dans sa route , a signé
sous le bâton; et, pour se servir des expressions de D om at,
si un consentement de cette espèce étoit jugé valide ? ce
seroit un attentat au droit naturel ; il n y auroit plus
d’ordre dans la société des hom m es.
L a conduite d’isabeau F errier , l’époque de ses cou
ches , c’est-u-dire, de celles qui donnent lieu au p rocès,
le choix de ses croupiers , le lieu de la scène, la cir
constance qu’ un, acte de naissance a été changé * e tc ,, tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , mais qui seroieot oiseuses , tant que la preuve
de la violen ce ne sera pas ordonnée.
Cette p re u v e , sans contredit, est adm issible; aucune
ordonnance ne la prohibe ; et ce qui étonne, c’est que
les premiers juges n’aient pas voulu prononcer en connoissance de cause.
Il est possible'que la m alignité toujours avide de calom
nie } et toujours difficile àdétrom per prétende que Chave
3
�(
22
)
n’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth Ferrier
de ce dont on l ’accuse : mais il en prend le ciel à tém oin,
cette femme lui fut toujours étrangère,
C h a v e , maître de ses actions , célibataire , feroit sa
jouissance principale de se voir revivre dans un fils qu’il
cro iro it le sien ; à son âge et avec ses principes religieu x,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans-mobiles ne
peuvent donc être vaincus que par. quelque chose de
plus puissant en core, une conviction in tim e, une insur
m ontable répugnance.
• Il ne demande pas à être cru sur p a ro le; et si son
prem ier moyen ne suffit p a s, il offre la preuve des vio
lences qui l’ont forcé à donner sa signature : et certes,
quand la cour se sera assurée que Chave a été forcé de
sortir de son dom icile, m ené chez le maire par cinq
hommes , menacé et battu , elle appréciera alors toute
la valeur d’une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lorsque la vertueuse Elisabeth F errier sera
convaincue qu’il ne lui est plus libre de faire de sa pro
géniture une charge publiqu e, peut-être s’efforcera-t-elle
de mettre un terme à sa fécondité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rapporteur.
(
4
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licen cié avoué.
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Therm idor an 1 5
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
reconnaissance de paternité
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1801-Circa An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0705
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0307
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Chambon-sur-Lac (63077)
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Domaine public
reconnaissance de paternité
-
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909b27e6f454feb8207dae025e0f2c10
PDF Text
Text
ai
COUR
D ’A P P E L
SÉANT
%»' » iu<«k iir
A RI OM.
J a c q u e s C H A V E , appelant ;
C O N T R E
Jeanne
L
A
VALLA, et E l i s a b e t h FERRIER,
sa fille , majeure intimées.
,
recherche de la paternité est interdite , et c’est
dans nos mœurs un scandale de moins. D ans ce secret de
la nature , le législateur ne p o u v o it que s’en rapporter à
la crédulité de l’ h o m m e , ou se jeter dans le vagu e des
conjectures : le prem ier parti seul étoit juste; la loi l’adopte;
et aucun enfant naturel n’a le droit de nom m er son p è re
que celui qui a vo ulu se déclarer tel.
N ul acte ne doit donc être plus lé g a l, plus lib r e , que
cette déclaration. L e soupçon seul de contrainte est incomA
�1
( o
patible avec elle ; car si elle n’est pas clairement l ’eiTet
^
spontané de la réflexion , le bu t m oral de la loi n’existe
plus.
* - *'* -uXLî^ g\
L ’appelant réclam e contre l ’oubli de ces p rin c ip e s, et se
place sous la protection de la c o u r , p o u r faire annuller un
***'
acte in fo r m e , auquel on l’a fait participer par la violence ;
4
il demande à n’être par foi’pè île rçcpnnqître un enfant. ' ',
•
y* " '
■
U fX«rilÉi)
qui ne fut jamais le sien.
-y*
^
^
L es premiers juges n ’ont pas vo u lu admettre là jîreuve*«'^ >*u
q u ’il étoit à m êm e d ’o ff r ir ; et si cette o p in io p ,'p o y v o it ^ .*
p ré v a lo ir , il en résulteroit que , contx;e ,le-*vœu'de i« l a i f
un h o m m e donneroit son nom m algré lui à u n 'e n fa n t
**••?
n a tu r e l, seroit contraint de prendre soin d’un étrtfng^r,-' *- >
et de lui laisser sa succession.
. ;
*" '
F A I T S .
Jeanne Valla^ et Elisabeth F e rrie r, sa fille, habitent le
lieu de M a z e t , m airie de Cham bon. L eu rs habitudes et
leurs mœurs étoient à peine connues de Jacques C h a v e ,
qui demeure à la distance d ’environ une lieue de leur
domicile.
Son â g e , plus avancé m ôm e que celui de la m ère, ne lui
eût donné aucun prétexte de se rapprocher de la fille. U n
séducteur à ch e v e u x blancs est ra re ; au village il ne connoît pas l’oisiveté qui nourrit les illusions, et la m onotonie
de ses travaux rustiques avance l’amortissement de ses
sensations, en occupant toute son existence.
Ces femmes étoient donc absolument étrangères à Clia ver
lorsque tout d’ uu coup il s’est trouvé m êlé à leur destinée
**
�(3)
SU
p ar une de ces sourdes m anœuvres que l ’enfer seul peut
faire concevoir.
U n matin à huit heures ( le 21 germ inal an 9 ) , Jacques
C have , m a la d e , est brusquem ent arraché de son lit par
deux frères de la fille F errier , suivis de trois autres jeunes
gens armés de bâtons ou de fourches. Il se disent envoyés
par le sieur de B an n es, m aire de C h a m b o n , et comman
dent i'i C have de les suivre dans la maison de ce sieur de
Bannes. Il s’habille et les suit.
L à il trouve Jeanne V a lla qui paroit en grande ç o l e r e ,
l ’accueille par des injures grossières , lui dit que sa fille est
a c c o u c h é e , depuis quinze j o u r s , d’un garçon dont il est
le p è r e , suivant le récit de sa fille et de M . le m aire de
C ham bon , et q u ’il faut signer sur le cham p l’acte de
naissance.
C h a ve , étourdi d ’une vespérie aussi in a tten d u e, pressé
entre les cris de la m ère , les coups de poings des f r è r e s ,
et les menaces de leurs trois hom m es d’esco rte, veut éle ver
la v o i x , et in v o q u er la notoriété p u b liq u e; des bâtons sont
levés contre lui p o u r toute réponse : il sollicite la justice
du m aire , mais le m aire le pren d à part p o u r lui dire
q u ’ il falloit céder à la circonstance, et que sa v i e .n etoit
pas en sûreté. L ’avenir a appris à C h a v e quel interet pres
sant le m aire lu i- m ê in e avoit a ce que la calom nie eut
une direction certaine.
O n com prend alors que cette derniere insinuation a
ébranlé le courage de Chave. L e sieur de Bannes prend
aussitôt le registre des actes, y efFace quelques mots, en subs
titue d’a u tre s , et remet une plum e à C h ave : une seconde
résistance am ène de nouvelles violences. I l fait enfin ce
q u ’ on exige ; il signe.
�(4)
E n sortant de chez le m a ire , les satellites le mènent au
cabaret, se font donner ù b o ire , le forcent à p a y e r, mettent
l ’enfant dans ses bras , lui font les pins horribles menaces
s’il dit un m ot ; et se retirent.
Sans doute il m an gu e à ces faits beaucoup de circons
tances
importantes ; mais C h a v e , glacé d’épouvante ,
étoit-il libre de r é flé c h ir ? L a plupart de ces détails ont
échappé à sa m é m o ire , ou plutôt à son attention».
Enfin C h a y e , revenu de son étourdissem ent, p ut réflé
ch ir sur les conséquences de l ’acte qu ’on venoit de lui
e x t o r q u e r , et sur le parti q u ’il avoit à prendre.
L a dém arche la plus pressée et la plus indispensable,
étoit de se débarrasser de l ’innocente créature q u ’une
m ère dénaturée avoit rejetée de ses bras p o u r l'aban
don ner aux. soins d ’un étranger. C h a v e hésita s’il la
r d p p o r te r o it, dans la n u i t , à la porte des F e rrie r : cepen
dant la l’e l i g i o n , l’hum anité , peut-être la terreur pourlu i-m è m e , l’em p ortèren t sur son d é g o û t , et il fit porter
l’enfant à une nourrice.
M a is aussitôt, et en signe de sa protestation, il rendit
plainte au juge de p a ix de T e n c e ; le juge de p a ix le
ren voya au magistrat de sûreté : mais com m e la plainteéloit dirigée aussi contre le m a ir e , les autorités délibé r è r e n t , et ne résolurent rien.
C h a v e in q u ie t , et ne voulant pas que son silence p ût
d éroger a son d r o i t , se décida à citer, le floréal an 9 ,
5
tant Jeanne V a lla et sa fille , que le m aire lui - même-,
p o u r v o ir dire q u ’il seroit restitué contre la reeonnoissince de paternité qui lui avoit élé extorquée p:ir la
v io lé iit e , et que le m aire seroit tenu de rayer du registre
�3ï
XO>
( 5 >
ce qui concernôit ladite reconnoissance •, et la m ere et
la iille p our être condamnées à reprendre l’e n f a n t , payer
ses alimens chez la n ourrice , avec dommages-intérets.
O n pense bien qu’au bureau de p aix la fille F e rrie r
ne manqua pas de faire la réponse d’ u sag e, qu ’elle avoit
été séduite et abusée sous promesse de m ariage , et q u ’elle
seroit en état de p ro u v e r les familiarités de C h ave avec
elle ; celui-ci l ’en d é fia , et ajouta m êm e q u ’il offroit de
p ro u v e r c e u x avec qu i elle avoit eu fréquentation.
T o u t cela étoit de trop de part et d ’a u t r e , puisqu’il
n’èst permis de rien p ro u v e r
et la fille F e rrie r ne
risquoit rien à faire b onn e contenance. Q u o i qu'il
en
s o it, un p rem ier ju g e m e n t, du 28 p luviôse an 1 0 , m it
le m aire hors de p ro cès, com m e ne p o u v a n t être juge
sans au torisation , et a p p o in ta les autres parties en droit.
Cet appointement ne fournit pas plus d’éclaircisse
ment. C h a ve persista toujours à offrir la p reu ve de la
violence exercée contre lui -, et les femmes F e r r i e r , q u i ,
au bureau de p a i x , n’a voien t paru a vo ir aucune crainte,
firent leurs efforts p o u r soutenir cette p reu v e inadmis
sible. L e u r système p r é v a lu t ; et le 14 fructidor an 1 0 ,
le tribunal d ’-Yssengeaux rendit le jugem ent qui suit.
.1
« Considérant que l'article 2 du titre 20 de l'ordonnance de 1GG7
défend de recevoir la preuve par témoins contre et outre le contenu
aux actes publics; qu'à la vérité la force, la violence, sont un
moyen pour les faire rescinder, mais qu’en ce cas il faut articuler
de menaces graves, qui feroient craindre pour la vie nietus rnortis,
ou que la partie obligée auroit souffert ‘cliarte privée, ainsi que*
Renseignent Domat en ses Lois civiles, et Potlûtr en son T ra ité
des obligations;
�7
( 6 )
» Considérant que Jacques Chave n ’a articulé qu’il lui ait été
fait aucune menace, ni qu’il ait été commis aucun excès sur sa
personne, ni dans son domicile, ni dans celui du maire où il s’étoit
rendu pour reconnoilre pour lui appartenir reniant d o n t s’éloit
accouchée Jsabeau Ferrier; et qu’étant dans ce dernier domicile,
il pouvoit articuler sans crainte les excès ou menaces qu’il auroit
éprouvés, contre ceux qui s’cn seroient rendus coupables envers
sa personne. »
Jacques Chave est débouté de toutes ses demandes tant princi
pales que subsidiaires, et il est condamné aux dépens.
Cependant C h ave avoit offert expressément de faire
p reu v e de menaces et violences : ses écritures en font foi.
Il étoit p riv é alors d ’un m oyen important. L ’expédition
de l’acte de naissance produite aloi*s au procès, ne mentionnoit ni les surcharges ni les ratures ; elle étoit délivrée
par le sieur de B a n n es, m a ire , qui avoit trop d ’intérêt
à en cacher l’irrégularité p o u r la faire soupçonner. A u
reste, C have s’est p o u rv u en la cour contre le jugem ent,
et il sera question d’exam iner de quelle influence la form e
de cet acte doit être p o u r la décision du procès.
M O Y E N S .
L ’ancienne législation française étoit extrêm em ent dure
contre les enfans naturels; et cependant, par une étrange
inconséquence., elle admettoit les preuves de paternité
sans distinction. A u jo u r d ’hui la loi a fait p o u r eu x
davantage : mais sans v o u lo ir percer le mystère qu i
cou vre leur naissance, elle rejette désormais les proba
bilités et les fausses conséquences; .elle ne vo it dans
l ’enfant né hors le mariage q u ’ une innocente créature
�^ / 7
/
digne de la pitié de tout le m o n d e , mais ne tenant à la
société que par celle qu i lui a donné le jour. Si cepen
dant un hom m e , gu id é par des apparences q u ’il a ie droit
djapprécier lui - m êm e , et cédant à l’impulsion de sa
conscience,
veut se don ner le titre de p è r e , la loi le
lui p erm et, s’ il n’est engagé dans les liens du mai’iage :
mais com ptant p o u r rien aujourd’hui toutes les démons
trations exté rie u re s, elle exige une déclaration authenti
que et non éq u iv o q u e ; elle prescrit à l’acte une solen
nité plus grande que p o u r la naissance m êm e de l ’enfant
légitim e.
L ’intention du législateur étoit si claire, q u ’elle a ôté
tout prétexte à l ’astuce, et n’a laissé de voies q u ’au faux
ou à la violence. M ais à q u i peut être réservée l ’une ou
l ’autre de ces vo ie s criminelles ? Ce n’est pas à la fille tim ide
q u i , rougissant encore d ’ une prem ière foiblesse, et par
tagée entre l’am ou r de son enfant et la honte de sa nais
sance, n’en ose no m m er le père que dans le secret de son
c œ u r, et se fait l ’illusion de penser que le mystère dont
elle s’en velop p e la p rotégera contre l ’o pin ion qui fait
son supplice.
M ais que feront ces femmes d é b o u t é e s , qui ne voient
dans la prostitution qu ’ une h a b itu d e , dans leur avilisse
ment q u ’ un éta t, et dans leur fécondité qu’ un acciden t?
Incertaines elles-mêmes d’ une paternité q u ’elles déféroient
naguères suivant leurs convenances, elles n’en arrachoient
pas moins des sacriiices pécuniaires aux homm es qui leur
étoient souvent les plus étrangers , mais q u ’ép ouvanloit
la perspective d’ une honteuse et p ublique discussion. Si
on leur laisse en trevo ir aujourd’hu i une tolérance queU
�(; » )
c o n q u e, que leu r coûtera-t-il de tenter d’autres voies p ou r
en ven ir aux mêmes lins? E t s’ il est près de leur demeure
un citoyen paisible, q u i, p ar ses mœurs douces et réglées,
puisse passer p o u r pusillanim e, quelle difficulté y aura-fc-il
de répandre adroitement que c’est là le c o u p a b le , d’ip téresser contre lui qu elqu e personne c r é d u le , de l’effrayer
lu i-m êm e sur les dangers de sa résistance, d’ameuter s’il
le faut ceu x qui ont un intérêt réel <iu succès de la n é g o
ciation ! Jadis il falloit des témoins,«aujourd'hui il ne faut
q u ’une simple signature; tout cela p eu t s’exécuter avec
rapidité : ce n’est q u ’un changem ent de com plot.
Heureusem ent cette rapidité m êm e ne laisse pas au
crim inel le calm e de la réflexion : souvent scs fautes le
trahissent, e t , quelques légères qu ’ elles soient, il faut les
com pter avec scrupule; car on est bien assuré qu’ ellesne
sont pas un simple résultat de sa n égligen ce, mais q u ’elles
ont é c h a p p é à l’excès de sa précipitation.
C e u x qu i ont gu id é la fille F e rrié r dans ses démarches
n ’ont pas visé à l’exactitude ; la co u r en sera convaincue
bientôt par la form e de l’acte de naissance qui fait son titre.
U n e seconde décou verte la convaincra encore q u ’il ne
s’agit point ici de ré p a r e r , envers une fille s é d u ite , des
torts que la m alignité suppose toujours. L a fille F errier
a , le 20 prairial an n , donné une n ouvelle p reu v e de
sa con tinence, en faisant baptiser un fils sous les auspices
de son frère et de sa m è r e , que l’acte apprend m êm e avoir
été sage-femme en cette circonstance.
Il ne paroît pas que p our cette fois la m ère et la fille
Fen-ier aient jugé à propos de réunir un conseil p o u r
disposer du nouveau n é , et lui élire un père ù la p lu
ralité
�(?)
ralité des suffrages; il est vraisem blable que la précédente
tentative les avoit intimidées.
• Q u o i q u ’il en soit, et soumettant cette découverte p ré
cieuse aux réflexions de la cou r , l’appelant ne s’en occu
pera pas plus lo n g -te m p s , et se contentera d’observer
q u ’ il n’y a rien de légal dans la prétendue déclaration de
paternité q u ’on lui a fait sig n er, et au surplus que les faits
-de violences articulés suffiront p ou r la détruire. C ’est à
l ’examen de ces deux propositions que l’appelant réduit
sa défense.
i ° . L a d éclaration de "paternité n e s t pa s légale.
Ija lo i du 12 bru m aire an 2. s’occupoit de trois espèces
d ’enfans naturels, après a vo ir décrété en principe qu ’ils
^toient successibles.
i° . C e u x dont le p è r e é t o it d é céd é , et il leu r suffisoit
de p ro u v e r une possession d’ é t a t , par des soins donnés
à titre de p a te rn ité , et sans in terru p tion ; 2°. xles enfans
d ont le père et la m ère seroient encore vivans lors du
C o d e c i v i l , et leur état civ il y étoit re n v o y é ; 3 0. de ceu x
dont la m ère seule seroit décédée lors de la publication
d u C o d e , et alors la reconnoissance du p è r e , faite devant
l ’oilicier p u b l i c , rendoit l’enfant successible.
Il s’agit ici d’ un enfant de la seconde espèce ; et le p ré
tendu p ère , quel qu ’il s o i t , de m êm e que la m è r e , sont
dits vivans.
O r , quelle nécessité, quelle
urgence y a v o i t - i l de
p réve n ir la publication du Code civ il , en faisant faire
une déclaration que la loi ne demandoit p a s , et q u ’ello
B
�ajournent au contraire ? N ’a percevroit - on pas déjà le
do l dans cette extraordinaire p révoyance ?
D ira -t-o n que le Gode civ il prescrit aussi une décla
ration au th en tiqu e, et q u ’ on n’a pas v io lé la loi en la
devançant ? M ais qui blâm era les législateurs de l’an 2 ^
d ’a vo ir vo u lu p r é v o ir q u e leur système ne seroit peutêtre pns celui du C o d e civ il ? qu i leur reprochera d’a v o ir
supposé que les dispositions de ce code seroient déli
bérées avec plus de maturité , et de s’être défiés de le u r
p rem ie r système sur une innovation aussi im p o rtan te?
Ils vo u lu ren t rég le r le passé seulement ; et les débats
qui ont eu lieu sur la lo i transitoire du 14 floréal an 11 ,
nous apprennent assez q u ’il n’y a eu , dans l ’intervalle d e
l ’an 2 à l ’an 1 1 , aucune législation touchant les enfans
naturels. L es bulletins de la c o u r de cassation sont aussi
rem plis d’arrêts qu i ont cassé tous les jugeinens dans lestjuels les tribunaux avoient vo u lu r é g l e r , m êm e p r o v i
soirem ent , le sort de quelques enfans n a tu re ls, pendant
cette lacune d e n e u f ans.
Il ne p o u v o it donc être question d e fixer l ’état d e
l’enfant d ’Elisabeth F e rrie r q u ’après le Code c i v i l , dont
l ’art. 334 p orte que la recounoissauce sera faite par un acte
a uthentiqu e, si elle ne l’a pas été par l ’acte de naissance.
M ais fût-il indifférent q u e la rcconnoissance contestée’ „
•ait été faite avant ou après le Code c iv il, m algré la sus
pension totale e x ig é e par la cou r d e cassation , et rappelée
par la loi transitoire; cette reconnoissance n ’en est pas
moins ir r é g u liè r e , car elle n ’est faite ni par l’acte d e
naissance lu i-m êm e, ni par un acte séparé authentique*
V oici com m ent cet acte est littéralement écrit au registre*
�c » î
A c T I
D I
N à Î S S A S C I i
rt D u huitième jour du mois de germinal, l’an 9 de la répu« blique française. A cte de naissance de Jacques^ f i l l e ( Ce mot
» est effacé, et on y a substitué au-dessus, dans Vinterligne,
» F e r r i e u , que l’ on a encore effacé, et l ’on a écrit à côté G11 a v e . ),
» né hors de mariage, né le septième jour du mois de germinal,
» à sept heures du soir, fils d ’isabeiu Ferrier, non mariée, domi» ciliée du lieu de la Marette, susdite commune, et Isabeau Ferrier,
» non mariée; le sexe de l’enfant a été reconnu u n e ( On a couvert
» d’encre la lettre e . ) f i l s , né hors de mariage : premier témoin,
» Jean-Pierre Ferrier, demeurant à C iiam bon , département de
» la H a u te - L o ir e , profession de cultivateur, âgé de irente-neuf
» ans; second témoin, Pierre Rue], demeurant à C h a m b o n , dé-*
u partement de la H a u t e - L o ir e , profession de tailleur d ’habits,
» âgé de cinquante-quatre ans. Sur la réquisition à nous faite par
» Marie R u e l, sage-fem m e de ladite accouchée, avons inscrit le
» sus-nommé Jacques Feuuieu ( C e mot est raturé, et l’ on a mis
y> au-dessus, dans l’ interligne, C iia v e. ), portant l e n o m d e sa
» m è r e ( Ces mots ont été rayés, et l ’on y a substitué ces mots :
» l e n o m d u p è r e . ); et ont la déclarante ne savoir signer, et les
» témoins signé. Ferrier, R u e l, signé à l'original. »
« Ledit Jacques Chave père reconnolt ledit Jacques son fils, de
» ladite déclaration de la présente, acte; le reconnoit pour son
»> véritable fils, avoir droit à tous ses biens, en présence de Jean» Louis Riou. ( -f* Ici est un renvoi. ) Constaté suivant la loi, par
» moi Annet de Bannes, maire de la commune de Cham bon, fai» sant les fonctions d ’officier public de l’état civil. Ledit maire
» approuve toutes les ratures ci-dessus. D e Bannes, maire, signé.
“
Et de Pierre C allon , et de Jean-Pierre Fresclict, et de Jeanw Pierre Ferrier ; et dit Jacques Ghavd a signé avec les tcmoin$.
13 2
�_»
t
(
)
» Ont signé, ledit Pierre Callon a déclaré ne savoir signer , C liave,
» R io u , Freschet, Fcrrier. D e Bannes, m aire, signé. »
( Nota. L ed it renvoi est en marge, en travers. )
■
Pour copie figurée :
L e secrétaire général de la préfecture
de la Haute-Loire ,
BARRÉS.
Il est aussi ¿vident q u ’il puisse l ’ê t r e , que cet acte se
compose de deux parties Lien distinctes , qui në sont pas
d ’un m êm e c o n t e x t e , ne sont pas l’ouvrage du m ê m e
m o m e n t , et cependant ne sont pas deux actes absolu
m ent séparés.
i° . A c t e de naissance bien parfait et très en r è g le , d’un
enfant né dyls a b e a u F e r r ie r , s a n s m en tion d u p ère.
O n lu i donne le nom de sa mère. Il y a deu x témoins
de cct a c te , Josep h F e rrie r et M a rie R u el. L ’acte est
donc com plet : le v œ u de la lo i d u 20 septembre 1792
est rem pli.
,
2°. V ie n t ensuite une déclaration de C h a v e , qui est à
la suite du p rem ie r a c t e , et qui a exigé des surcharges.
M a is p e u t - o n , de bonne f o i , y v o ir un acte authen
t i q u e , une reeonnoissance de paternité telle q u e la loi
la com m ande et que la raison la c o n ç o it ?
Cet acte n’a aucune date , parce q u ’en effet il a eu
lie u
le 21 g e r m i n a l, et a été ajouté a un acte terminé depuis
le 8. Com m ent supposer en effet q u e celte déclaration
finale fait partie de l’acte du 8 ? Les témoins dénommés au
.prem ier u c signent pas la déclaration.
�/
37
( 13 )
O n a raturé et interligné le prem ier acte de naissance,
sans faire i*ien ap p ro u ver aux prem iers témoins. L e maire
se u l ap p ro u ve t o u t , m êm e ce q u ’il lui plaira de raturer
e n c o re ; les autres t é m o in s , C h a v e l u i - m ê m e , ne font
aucune approbation. O r , il est de p rin cipe que les ratures
et interlignes sont inutiles dans les actes, s’il n ’y a appro
bation des parties et témoins.
Il est un autre p rin cipe élémentaire en rédaction d’actes,
quelque peu d’ importance q u ’ils aient; c’est que les tém oins
dénommés en l’acte signent à la fin : ici la sage-femme et
le f r è r e , qui ont déclaré la naissance le 8 , n ’ont pas signé
à la fin. Si c’est un seul et m êm e acte, les uns l’ont signé
au m ilie u , et d’autres à la fin : chose bizarre et rid ic u le ,
qui ne peut s’a llie r avec la g r a v ite de l ’acte qu’on prétend
maintenir.
Q u e p e u t - i l résulter d’un acte de cette e s p è c e , si ce
n ’est de la pitié p o u r ses ré d a c te u r s , et une conviction
intime que ce n’est pas C h a v e qu i est allé déclarer la n a is
san ce d’un enfant com m e s’en disant le père ?
L e but de la lo i n’est donc pas rem pli ; car dans qu elqu e
form e que dût être une reconnoissance de p a te r n ité , il la
falloit dans l’acte m êm e portant la déclaration de naissance,
ou bien il falloit un acte p a rtic u lie r, daté lu i- m ê m e , et
qui 11e fût pas réd igé dans une form e ayant p o u r but de le
rattacher à un autre acte, auquel il ne peut appartenir.
Car rappelons-nous q u e l ’article 334 du Code civ il dilt
que la reconnoissance sera faite p a r l’acte de naissance,
«u p a r un acte ath en tiqu e; à qu oi l’article 62 ajoute que
la c té de reconnoissance sera inscrit sur les registres n sa
date y et q u ’il en sera lait m ention en m arge de l’acle de
naissance.
f-V
�7
C «*
B.appelons-nous encore que le but bien positif de la loi
est de ne com pter p o u r rien les reconnoissauces antérieures
au c o d e , quand l ’auteur est vivant. Il en est de cela com m e
des testamens antérieurs à l’an 2, q u ’ il falloit refaire p o u r
les circonscrire dans les termes du droit nouveau. L a loi
a eu ici un but plus m oral : les changernens apportés au
système passé justifient sa mesure dilatoire.
E t ne nous abusons pas sur l ’im portance des formes
dans une matière aussi délicate : on est si scrupuleux
p o u r tant d’autres actes! U n seul m o t é q u iv o q u e en un
testam ent, détruit toute la volon té d’ un père de fam ille;
u n e donation exige encore des formes plus m ultipliées.
Ces actes sont-ils donc aussi importans qu e celui où il s’agit
de transmettre sou nom et sa fortune ; où il s’agit de plus
e n c o r e , de vaincre l ’opinion et de surm onter sa p ro p re
répugnance ? D ’ailleurs , p o u rq u o i 11e p ourrion s - nous
pas dire p o u r un tel acte ce que R ica rd dit des tcstam ens,
« q u e toute leur force consiste dans leur solennité, et toute
« leu r solennité consiste dans les formes ? »
A u jo u r d ’hui il faut y ajouter une v é rité bien c e r t a in e ,
c'est que la seule supposition q u ’un h o m m e est tenu et
obligé de se charger d ’ un enfant naturel sans sa libre
v o l o n t é , est incom patible avec le système indubitablem ent
reçu sur la législation des enfans naturels.
20. Cette d écla ra tion de p a tern ité est n ulle , s 'il y
a
violen ce. L e s f a i t s a rticu lés suffisent. L a preuve en
est a d m issible.
On est extrêmement sévère dans le monde pour ju ger
�5
( i
)
des eiTets de la p eu r d’autrui ; e t , quand on en com
mente les p articu larités, on détaille très-ponctuellement
la conduite qu ’ on auroit tenue en pareille occurrence.
Cependant rien n’est plus difficile à rég ler p o u r soi-m êm e;
c a r , en d e u x cas semblables , le m êm e in d ividu se c o n dui roit rarem ent deux fois de la m êm e manière. M ais
celui q u i raisonne ainsi est de sang-froid , par cela seul
qu’il ra is o n n e , tandis que le p rem ier elfet de la terreur
est d ’absorber toutes les réflexions / p o u r ne laisser place
q u ’à une seule id éed om in an te, la conservation de soi-même.
Q uelques auteurs , partageant sur ce point les idées du
v u lg a ir e , sem bleraient aussi se m on trer difficiles à ad
m ettre la p lup art des excuses fondées sur la crainte. 11
faut d is t in g u e r , d is e n t - ils , la cra in te gra ve et la crainte
l é g è r e , et on ne peut tro u v e r de m oyen rescisoire q u e
dans celle qui su ffiro itp o ur ébranler la ferm eté de l’h o m m e
le plus in tré p id e , m etus n o n v a n i h o m in is , sed q u i in
1
h om in etn co n sta n iissim u m c a d a i, . 6 , fF. Q u o d m etus
causa.
Ces a u te u rs, s’en tenant à une lo i isolée démentie p a r
beaucoup d’autres, n’ ont pas v o u lu ap ercev o ir, dans cette
rigueur étrange, un m on u m ent de la iierté romaine plutôt
qu’une règ le générale. Ce p e u p le , qu i avoit détruit le
tem ple é le v é p ar T u llu s à la C ra in te , n’ éto it, en la pros
crivant p ar ses lois, que conséquent avec lu i-m êm e . Sous;
un système de conquêtes sans b o rn e s, et avec une consti
tution toute m ilitaire, quel rom ain p ou vo it allégu er u n e
crainte lé g è re ! E le v é dans les carpps, son excuse m êm e
eut consacré sa houle , et la loi étoit rigoureusement juste
en exigeant de lui l’intrépidité d ’uu soldat.
�L a France militaire ne réprouvera pas cette législation
sévère ; elle l ?c*ût créée e lle -m ê m e , s’il falloit un code au
courage. M ais les actes civils des simples particuliers ne
se règlent pas par des m axim es nationales; la théorie
principale des lois consiste à les a p pro p rier au x mœurs
de ceux q u ’elles doivent régir.
G ardons-nous donc de l’exaltation , quand elle est hors
de m esure; ne nous obstinons pas à tro uver un Scévola
dans un laboureur tim id e , qui ne connut depuis sa nais
sance que sa charrue et le hameau de ses pères.
L es auteurs les plus judicieux du droit n’ont eu garde
aussi d’appliquer sans distinction la sévérité des principes
romains. D o rn a t surtout, à qui les premiers juges ont fait
Finjure de prêter une opinion si contraire à son discer
n e m e n t, D om at , dont l’ouvrage im m ortel n ’est que le
précis des lois rom aines, bien loin de se fonder sur la
loi 6 , ne la signale que p o u r en blâm er la rudesse.
« N ous avons v o u l u , d it-il, rétablir les principes na« tu rels, et rendre raison de ce que nous n’avons pas mis
« cette règle du droit rom ain parmi celles de cette sec« t i o n ......... T o u tes les voies de fait, toutes les violen ces,
■
v toutes les m enaces, sont illicites; et les lois condam« lient non-seulement celles qu i mettent en p éril de la
k vie ou de quelque tourm ent , mais toutes sortes de
« voies défait et mauvais traitemens. E t il faut rem arquer
« que com m e toutes les personnes n ’ont pas la m êm e
« fermeté p o u r résister à des violences et â des menaces,
ce et que plusieurs sont si foibles et si tim ides, q u ’ils 11e
« peuvent se soutenir contre les moindres impressions,
« un n e d oit pas b o rn er la p rotection des lo is con tre les
« m en a ces
�/-«
4 ^
( ij )
« m enaces et les v io le n c e s , à ne réprim er que celles
« q u i so n t capables d ’abattre les personnes les plus
« intrépides ; mais il est juste de p rotéger aussi les plus
« tim id es............
« 11 est t r è s - j u s t e , et c ’est -nôtre u sa g e , que toute
« violence étant illic ite , on réprim e celles m êm e qui
« ne v o n t pas à de tels ex c è s, et qu’ on répare tout le
« préjudice que peu ven t causer des violences qui enga« gent les plus foibles à qu elqu e chose d’injuste et de con« traire à leur intérêt : ce qu i se tro u ve m êm e fondé sur
« quelques règles du droit r o m a i n ............et ces règles
« sont tellement du d ro it n a t u r e l, q u ’zV ne p o u rro it y
« a v o ir d ’ordre dans la so ciété des h o m m e s , s i les
« m oin dres violen ces
étaien t réprim ées. » ( Sect. 2 ,
des vices des c o n v e n t i o n s , p ré a m b u le .)
•’
Il est peut-être inu tile, après a vo ir cité D o m a t , de faire
d’autres recherches ; mais les prem iers juges ont encore
fait l’ injure à P o th ie r de lui prêter des principes qui ne '
sont pas lës siens.
•
Cet auteur cite les lois ro m a in e s , et par conséquent
les rappelle
lelles q u ’elles sont. M ais il termine son
article de la crainte par dire que « le p rincipe qui ne
« connoît d’autre crainte sufTisante p o u r faire pécher un
« contrat par défaut de lib erté, que celle qui est capable
« de faire impression sur l’hom m e le plus c o u r a g e u x , est
« trop r ig id e , et ne doit pas être suivi parmi nous à la
« lettre ; on d o it, en cette m a tiè r e , a v o ir égard à l'â g e,
« an se x e et à la con d itio n des personnes ( i) ; et telle
( «) Expressions copiées mot pour mot en l'art. 111 a du Code civil.
c
�C 18 )
« crainte q u i ne seroit pas jugée suffisante p o u r a vo ir
« intim idé l ’esprit d’un hom m e d ’un âge m û r ou d’un
« m ilita ire , et p o u r faire rescinder le contrat qu ’ il aura
« f a i t , peut être jugée suffisante à l’égard d ’ une fem m e .
« ou d ’ un v ie illa r d , etc. » ( T ra ité des
page i re. , cliap. I er. , n°. 2 5 , in fin .)
obligations,
Si l’opinion respectable de ces auteurs avoit besoin d’être
fortifiée par d ’autres citations, on les puiseroit dans les lois
romaines elles-m êm es, q u ’il ne faut pas juger par un
fragm ent u n iq u e , et q u i, au c o n traire, nous enseignent
ce que D om a t et P o th ie r vien nen t de nous apprendre.
T o u t consentement doit être l i b r e , disent plusieurs
lo is; e t, p o u r être restitué, il n’est p is besoin d’une v i o
lence c o r p o re lle , mais seulement d’ une crainte inspirée
à celui qui contracte; q u p a d ju sta m restitu tio n is ca u
sa/n n ih il refert u tràm y i an inetu q u is c o g a tu r . . , .
et q u o a d effecturn ju r is u tro b i deest c o n s e n s u s , a c
libéra volu n tas p a tie n tis , ut velle Ji,on videatur. L . 1 , 3 ,
7 e t ü , ff. q u o d m et. C. L . 1 1 6 , de r e g .ju r. ( in C o rv in o .)
Ces lois étoient bien- inoin§ dures, que nç l ’pnt sup
posé les premiers juges; car elles ordonnoient de recevoir
la preuve de la c ra in te , quand m êm e C h a ve auroit été
hors d’état de désigner aucun de ceux qui la lui avoit
inspirée;, n on tatne/i ne cesse est des ig n a r e, perso n am
q u œ m etum in t a lit, sed s u jjic it p r o u a r e in c tiu n , q u ia
7/ietus habet in se ignorantiar//. f , . 14. ff. eod.
En lin , ce qui achève de convaincre que ces lois savole,nt
aussi se mettre à la portée de la foi blesse des h o m m es,
cYst q u ’elles expliquent q u ’ il 11’étoit pas nécessaire de
p ro u v e r l'existence d’un danger- r é e l , mais seulement
�4 $
*
(* 9 )
'.
.
,
.
.
la crainte de ce d a n g e r , qui en elTet devoit detruire le
i)
consentement. S i ca u sa f u is s e t , c ü r p ericu lu m tim eret\
q u am vis p ericu lu m uerb n on f u i s s e t . . . . non con sid é-.
ra tu r e v e n tu s, sed ju s ta opin io.
e0l^‘
1
L e tribunal d’Yssengeaux avoit donc un guide bien sûr:1
A u lieu d’adopter l’antique rig u e u r d ’une lo i oubliée par*
les Rom ains e u x -m ê m e s , il a 4jugé que la crainte inspirée
à C h a ve n’avoit pas été un m o tif suffisant p o u r le con
traindre ; e t cependant il ig n o ro it jusqu’à q u e l'p o in tC h ave avoit été contraint ou menacé ; il l’ ignoroit ët ai
v o u lu l ’ignorer to u jo u r s , en refusant de s’ éclairer par uné'
p reu ve : cependant les faits articulés étoient graves. C h a v e
ofl’r oit et o iïïe encore de p ro u v e r ces f a i t s articulés", etnotam m ent,, i° . que le 21 g e rm in a l îcs frères F e r r ie r ’et*
d ’autres h o m m e s arm és de bâtons SOLlt'Venus c h e z 'l u i
2°. q u ’ils l ’ont forcé de se lev er et de les s u iv r e ,'e n le
m en açan t;
3 0.
que chez de Bannes ils se sont opposés
toute e x p lica tio n , l ’ont in ju rié, menacé et frappé*,
4°.
à*
que1
de Bannes l’a pris à part pour: l ’exhorter à céder à la fo r c e 1
et éviter un plus grand m a l; °. qu’on l’a fd rc é'd e Vëriir'
5
dans un cabaret, où on lui a remis un e n fa n t, avec de
nouvelles menaces.
M a is , a dit le tribunal d’Yssengeaux/, C lia v e 5, soiti dé'
sa m aison.et conduit chez le m aire, p o ù vü it récltfifrér.
■
C e seroit une réflexion b ieiyn atu rèlle, si les faits même'de la caiise n’ étoient déjà venus la détruire ; car ce m aire
lu i-m êm e étoit si peu disposé à user de son a u t o r ité ,'
qu’ il est difficile de ne pas le juger au contraire intéressé1
à l’événem ent.
’
I
1'
il
Muis à quelle protection , il faut' le d ire , auroit pu
�( ' 2 °- )
s’attendre un m alheureux à la m erci de c in q :individus ,
dans le domicile isolé d ’un m aire de v illa g e ? Battu à ses
y e u x , Chave p o u vo it-il se croire dans un asile in viola
b l e ? L e maire lu i-m êm e, l ’e x h o rta n t'à céder à la fo r c e ,
m.ettoit le com ble à sa terreu r, et déclaroit, ou sa p ro p re
c o m p lic ité , ou au moins son impuissance.
L ’acte le m oins im portant d e là v ie seroit vicié par une
semblable v i o l e n c e , à plus forte raison celui de tous les
actes le plus incom patible avec la m oindre contrainte. U n
p ère de famille a contracté un engagement sacré envers
m*s enfans par son m a ria g e; mais c e l u i- l à m êm e qu i
auroit p rocréé des enfans naturels, ne tient à eux par
aucun lien c iv il :.so n h o n neur et les sentimens de la
nature deviennent leu r unique titre , si la paternité lui
a semblé certaine. L es enfans naturels n ’ont point de
fam ille; tel est le langage d e là lo i : elle ne veut pas qu ’ils
en aient une. Q u an d leur père se nom m eroit hautem ent
dans le m o n d e , il ne seroit tenu à rien; la loi lui perm et
seulement de se. déclarer tel par un écrit libre et authen
tique : forcer sa volon té seroit donc se croire plus sage
qu ’elle.
M ais si la loi n’exige rien d’ un père , si elle consi
dère com m e un vice m oral de lui don ner un iils que
sa prop re vo lo n té cependant n’a pas désavoué , peut-on
soutenir l’ idée révoltante q u ’ un h o m m e sera contraint
m algré lui^d’adopter un enfant dont il n’est pas le p è r e ?
Q u i lui donnera la force de supporter , dans sa de
m e u r e , la vue habituelle d ’une créaLure si étra n g è re,
placée là p ou r sa honte im m u a b le, sans aucune com pensatioU'SatisiaisantQ ? et qui oseroit répondre que dans
�4 > '
( 21 )
^
cette situation de d é sesp o ir, aigri p a r u n sentiment d’in
justice , il p û t assez maîtriser une fu re u r c o n v u ls iv e ,
q u i seroit tout à la fois le tourm ent de l’innocence
et
son p ro p re Supplice ?
E loign on s plutôt de vagues suppositions fondées sur une
p u re chim ère. L a p révo ya n ce des magistrats distinguera
la v é rité et les convenances , et éloignera d’aussi sinis
tres présages. O n ne donne p o in t à u n h o m m e l ’enfant
q u ’il repousse avec m épris , qu and la lo i n’en fait pas
un devoir. L a c o u r doit p ron o n cer ici sur les consé
quences d ’un acte l i b r e , et tout p r o u v e q u ’il n’y a pas
eu de liberté dans celui qu i donne lieu au procès. C h a v e ,
con d uit p a r la f o r c e , m enacé dans sa r o u t e , a signé
sous le bâton ; et, p o u r se s e r v ir des expressions de D o m a t,
si un consentement de cette espèce étoit jugé validç , ce
■seroit un a tten ta t a u d ro it n a tu re l ; i l n y a u r o it p lu s
d ’ ordre dans la so cié té des hom m es.
L a conduite d’Isabeau F e rrie r , l ’ép oque de ses co u -ches, c’est-à-dire, de celles qu i donnent lieu au procès,,
le c h o ix de ses croupiers , le lieu de la scèn e , la cir
constance q u ’ un acte de naissance a été c h a n g é , e t c . , tout
cela donneroit lieu à des réflexions beaucoup plus éten
dues , m a is.q u i sei’oient oiseuses, tant que la p reu ve
de la violen ce ne sera pas ordonnée.
Cette p r e u v e , sans con tred it, est adm issible; aucune
ordonnance ne la p r o h i b e ; et ce qui é to n n e , c’est que
les prem iers juges n ’aient pas v o u lu p ronon cer en connoissance de cause.
Il est possible que la m alignité toujours nvide de calom
nie , et toujours difficile ù d é t r o m p e r , prétende que C h a v e
�%
,
. .
( 22 )
n ’a pas été tout à fait innocent envers Elisabeth F errier
de ce dont on l ’accuse : mais il en prend le ciel à tém o in ,
cette fem m e lui fut toujours étrangère.
C h a v e , maître de ses actions , célibataire , feroit sa
jouissance principale de se v o ir re v iv r e dans un fils qu ’il
croiroit le sien ; à son âge, et avec ses principes re lig ie u x ,
il s’en feroit un devoir. Ces deux puissans m obiles ne
peuven t donc être vaincus 'q u e par quelque chose de
plus puissant e n c o r e , une conviction in tim e , une insur
m ontable répugnance.
Il ne demande pas à être cru sur p arole ; et si son
p rem ie r m oyen ne suffit p a s , il offre la p reu ve des v i o
lences qu i l ’ont forcé à donn er sa signature : et certes,
quand la cou r se sera assurée que C h a ve a été forcé de
sortir de son d o m ic ile , mené chez le m aire par cinq
h o m m e s , menacé et battu , elle a p p réc ie ra alors toute
la valeu r d’ une signature donnée dans de telles circons
tances ; et lorsque la vertueuse Elisabeth F e rrie r sera
convaincue q u ’il ne lui est plus libre de faire de sa p ro
géniture une charge p u b liq u e , peut-être s’e fforcera-t-elle
d e mettre un terme a sa féco ndité et au scandale de sa
conduite.
M . G I R O T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat,
M e . M A R I E , lic e n c ié avoué.
~
A R IO M , de l'imprimerie de L andriot , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Therm idor an 15.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chave, Jacques. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Girot
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
enfants naturels
faux
menaces de mort
reconnaissance de paternité
code civil
actes de naissance
violences sur autrui
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jacques Chave, appelant ; contre Jeanne Valla, et Elisabeth Ferrier, sa fille, majeure, intimées.
Table Godemel : Paternité : 1. la déclaration de paternité d’un enfant naturel est nulle, si elle a été arrachée par la violence. quels caractères doivent avoir les faits de violence ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1801-An 13
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1502
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0705
BCU_Factums_M0307
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53242/BCU_Factums_G1502.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de naissance
Code civil
enfants naturels
Faux
menaces de mort
reconnaissance de paternité
violences sur autrui
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53756/BCU_Factums_M0308.pdf
93867ad41ff4b0b9ff94236e6ab2518c
PDF Text
Text
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2SS*
l r e . SECTION.
C O I F F I E R , docteur-médecin, et Ajuger
C l a u d e C H A L A M B E L , son gendre, le aoûtappelans d’un jugement du tribunal du Puy ;
u l i e n
C O N T R . E
GARDE , p rop riétaire,
B a r th é le m i-F e r r é o l
intimé.
----------“
tt<*éu
DE R I OM .
-----------
~
Une femme grevée de substitution a-t-elle pu instituer
/* s S f r * d
esétrangers? Les lois de 17 9 2 , abolitives des substitu/ ^ ^ ^ T L i o n s , en la rendant propriétaire non grevée, ont-elles
validé ses institutions antécédentes?
Etienne Galien et Françoise Reynaud ont eu cinq filles;
savoir, Marianne, qui épousa Jean Fontane, dont est
y.
issue la dame Coiffier, Françoise, Magdeleine, Gabrielle
e t A n n e L e s deux dernières ont été faites religieuses.
2
L e 4 m a i 1 7 3 3 Etienne Galien fit son testament. Il
'I
'
légua 4000 fr. à ses filles.
:
Il institua Françoise Reynaud, sa femme , son héri!
/n n
/ tière, a la charge de remettre l’hérédité à l’une de ses
<riquatre filles puînées, quand elle voudroit. E n cas de non
remise , il désigna Françoise.
A
�Il évalua son mobilier 4000 francs, et prohiba tout
inventaire.
En fin, il légua à sa femme la jouissance de ses biens
jusqu’à ce qu’elle eût fait remise de l’hérédité : il lui légua
aussi la plus-value de son mobilier.
Six jours après, Etienne Galien lit un codicile, par
lequel il déclara qu’il n’entendoit pas excepter Marianne,
sa fille aînée, de la remise de son hérédité.
Il déclara qui si celle à qui devoit échoir cette héré
dité mouroit sans enfans, ou scs enfyns avant la puberté r
il entendoit qu’elle ne pût disposer de l’hérédité en
faveur d’aucune personne étrangère , et qui fût hors sa
ligne, mais bien en faveur de ses sœurs, la primogéniture observée.
f
Etienne Galien mourut aussitôt après ces actes; et par
testament de 1749, Françoise Reynaud , sa veu ve, remit
la succession Galien à Magdeleine Galien, qu’elle institua
aussi son héritière.
L a dame Magdeleine Galien contracta mariage avec
Balthazard Pauze, le 7 novembre 17 5 4 ; et oubliant déjà
la nature de son titre, elle institua son futur époux héritier
de ses biens; à la vérité elle ajouta la clause suivante r
« et ce, au cas où elle décéderoit sans faire d’autres dis « positions valables, ou avoir des descendans, sansa cependant que ladite institution puisse^nuire ni préju« dicier à ses volontés. »
Bientôt elle eut l’occasion qu’elle s’étoit réservée; elle
se crut en d a n g e r de mort, et rédigea un testament olo
graphe, par lequel elle nominojt héritière la dame Foutane, sa sœur.
�(
3)
Mais sa destinée étoit de faire beaucoup d’actes inutiles;
elle a survécu quarante-cinq années à ce testament.
L e 23 octobre 17 9 0 , le sieur Barthélexni Garde, partie
adverse, neveu du sieur Pauze, contracta mariage avec
une demoiselle Vissaguet.
L e sieur Pauze, qui n’ignoroit pas le vice de l’insti
tution de 17 5 4 , et qui vouloit s’assurer quelque chose,
institua et fit instituer par Magdeleine Galien, sa femme,
le futur pour leur héritier commun.
Mais ce fut à deux conditions; la première, que le
survivant des deux instituans jouiroit des biens des ins
titutions; la deuxième, que luiBalthazard Pauze touche
rait la dot de la futui’e, sans être tenu à la rembourser.
Magdeleine Galien est morte sans postérité le 1 1 nivôse
an 8.
Balthazard Pauze, son m ari, lui a survécu, et a joui
de ses biens.
Les héritiers de la dame Fontane le voyant en pos
session, et ignorant l’institution de 179 0 , l’ont d’abord
assigué en remise de l’hérédité, en germinal an 8.
L e sieur Garde a été ensuite appelé, et il a été pris
contre lui des conclusions en nullité de tous les actes par
lui opposés.
Leurs moyens étoient fondés sur ce que la substitution
I733 avoit ôté à Magdeleine Galien tout pouvoir
d’instituer jusqu’en 17 9 2; et qu’après cette époque, elle
n’avoit fait aucun acte qui transmît sa succession.
Cependant le tribunal du Puy a débouté le sieur Coiilier
de ses demandes, par jugement du 16 pluviôse an 12 , dont
est appel.
A 2
�(
4)
M O Y E N S .
De trois institutions qu’a faites la dame Pauze, une
seule auroit été dans l’intention des testamens de 17 3 3 ;
c’est celle de 1756 : car la dame Pauze, décédant sans
enfans, devoit remettre les biens de son père à sa sœur.
Mais le sieur Coiffier n’a fait aucun usage de ce testament.
Il reste donc deux institutions qui s’entre-détruisent,
et que cependant le sieur Garde appelle au secours l’une
de l’autre : car s’il n’est pas héritier direct de la dame
Galien en 1790, il veut au moins retrouver sa succes
sion dans celle du sieur Pauze, héritier en 1764.
Mais comment le sieur Pauze auroit-il été valable
ment héritier de sa femme en 1764? elle n’entendoit rien
lui assurer, puisqu’elle se réservoit de disposer; puis
qu’elle n’entendoit pas que cette institution pût préjudicier à ses volontés.
Une institution ne donne pas une chose- présente ,
mais il faut qu’elle donne au moins une espérance irré
vocable : sans cela elle n’existe plus, car elle est aussi
une donation de succession et du nom d’héritier. O ï,
donner et retenir ne vaut.
L e sieur Pauze ne comptait pas lui-même sur cette
institution, puisqu’il a autorisé sa femme, en 17 9 0 , à
en faire une autre. On ne peut alléguer pour lui de ci’ainterévérentielle : il étoit le chef de la puissance maritale ; il
autorisoit l’institution..
Voyons donc si la dame Pauze a pu valablement ins
tituer en 1790,
�m( 5 )
Depuis 17 3 3 elle étoit grevée de substitution envers
une de ses sœurs ; il lui étoit défendu d’instituer un
étranger. O r, celui qui accepte un don conditionnel ne
peut s’affranchir de la condition.
On objecte que la dame Fontane étant décédée avant
la dame Pauze, n’a pas transmis îl ses enfans l’espoir de
la substitution, d’après l’art. 20 de l’ordonnance de 1747.
Mais l’article 55 du titre 2 porte que pour les substitu
tions antérieures on suivra les lois, et la jurisprudence qui
avoit lieu. O r , les biens de la succession sont situés dans
le parlement de Toulouse, où on a toujours jugé que
les substitutions passent, en cas de prédécès, aux enfans
de l’appelé. L e statut est réel ; et dès-lors les enfans de
la dame Fontane ont été saisis après elle de la substitu
tion. ( Furgole, sur l’art. 20 , injine. )
On objecte encore que la substitution de 17 3 3 est
nulle , faute de publication et enregistrement.
Mais c’eût été à Magdeleine Galien à remplir ces formes.
Celui qui se dit son héritier fait valoir ici un moyen
étranger, proscrit par les articles 32 et 34 du titre 2 de
l’ordonnance de 1747•
Magdeleine G alien, qui avoit accepté une succession
grevée, étoit donc dans l’incapacité absolue d’en disposer
autrement que dans l’intention du testateur, et surtout
d’en disposer contre sa prohibition.
Les aliénations qu’elle eût faites à de tierces personnes
auroient v alu , parce qu’elles auroient acquis de bonne foi?
n’y ayant pas eu de publication.
Mais un don quelconque, ù titre universel, n’a pas la
�( 6 )
même faveur. Magdeleine Galien n’en avoit pas le droit;
et son prétendu héritier, s’identifiant avec elle pour la
succession, ne peut en sépai-er ses intérêts pour faire
valoir des moyens étrangers.
Ainsi Magdeleine Galien n’étant pas , en 17 9 0 , pro
priétaire des biens substitués, n’a pas pu, à cette époque,
les comprendre dans son institution.
A cela on objecte que la loi du 14 octobre 17 9 2, en
supprimant les substitutions , l’a rendue propriétaire. O r,
ajoute-t-on, comme une institution n’est qu’un testament
irrévocable, l’effet ne s’en règle que par le décès : elle a
donc pu tester valablement d’une chose qu’elle n’avoit
pas, pourvu qu’elle l’eût à son décès.
L e moindre défaut de ce raisonnement est d’être fondé
sur une base fausse et captieuse.
Une institution n’est pas un testament ; c’est , dit
D elaurière, un don irrévocable de succession ,• et cette
définition est adoptée universellement.
L ’institution participe de la donation entre-vifs et de
la donation à cause de m ort; si elle n’avoit qu’un seul
de ces caractères, elle seroit dénaturée.
A in si, quand les lois ont prohibé aux pères d’avan
tager leurs enfans, une institution auroit été nulle de
plein droit, parce qu’un père ne pouvoit rien assurer
entre-vifs; il ne pouvoit pas alors faire un don irrévo
cable de sa succession.
De même Magdeleine Galien, enchaînée par une subs
titution , n’a pu disposer des biens grevés qu’après le 14
octobre 1792 ; mais elle n’a pas pu faire un don irrêvo -
�m
cable de ce qui s’en trouvèrent lors de l ’ouverture de sa
succession.
L a loi du 18 pluviôse est absolument dans ce système:
car l’article i er. ne maintient les institutions antérieures
au 7 mars 17 9 3 , en ligne directe, qu’en tant que ce sont
des actes irrévocables de leur nature. Elle ne valide
point du tout les institutions postérieures à la prohibi
tion, parce qu’alors un pore ne pouvoit pas instituer,
même en survivant aux lois prohibitives.
L e sieur Garde ne peut se créer un moyen qu’en com
parant son institution à un testament : il a raison; mais
cela seul le condamne sans retour.
Ce testament, qu’il est impossible de dire irrévocable
pendant la substitution , contient une disposition uni
verselle.
Il devoit donc être refait d’après la loi du 22 ventôse
an 2 , parce que la dame Pauze a survécu à sa publi
cation. II ne l’a pas été : donc la disposition antécédente
est radicalement nulle.
Enfin, on ne voit aucune apparence de liberté dans cette
institution, et tout prouve que la dame Pauze l’a ignorée.
Une signature fugitive, extorquée on ne sait comment,
pour une simple procuration, afin d’éviter la solennité
d’un contrat de mariage, est déjà un motif de suspicion.
Et quand on voit le sieur Pauze s’adjuger un usufruit
et la dot de la lu turc sans remboursement, 011 voit qu’il
dicte les conditions.
O r, son domicile étoit en coutume d’Auvergne. Ce
�(8),
statut régissoit la personne des époux, et prohiboit tout
don de la femme au m ari, directement ni indirectement.
Peut-être bien le sieur Pauze n’espéroit-il pas survivre
à son neveu, mais il prenoit des précautions actuelles.
L e premier bénéfice de l’institution étoit pour lu i, et
dès-lors la loi étoit violée.
En résumé, la dame Pauze a fait ce qu’elle ne pouvoit
pas faire, et n’a pas fait ce qu’elle pouvoit faire. Quand
elle a institué le sieur Garde, elle n’a pu lui donner que
ses biens personnels ; elle n’a pu lui assurer des biens
substitués, dont il lui étoit défendu de disposer au préju
dice des siens. Lorsqu’ensuite la substitution a été éteinte
en 17 9 2 , elle auroit pu en disposer, et elle ne l’a pas fait.
Les moyens de droit se réunissent donc aux circons
tances pour anéantir l’effet d’une institution évidemment
subreptice, ignorée peut-être par l’instituante, faisant
violence à la volonté d’un père qui eût réglé autrement les
affaires de sa descendance ; institution, enfin, qui blesse
les principes et les convenances, en trompant l’intention
d’une famille, pour faire passer tous ses biens dans une
famille étrangère.
«
M . B O N A R M E , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R ,
avocat.
M° . M A R I E , licencié avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L
andriot,
seul imprimeur d e l a
Cour d’appel. — Août 1806.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coiffier, Julien. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bonarme
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
testaments
coutume d’Auvergne
Description
An account of the resource
Précis pour Julien Coiffier, docteur-médecin, et Claude Chalambel, son gendre, appelans d’un jugement du tribunal du Puy ; Contre Barthélemi-Ferréol Garde, propriétaire, intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1733-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0308
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Germain-Lembron (63352)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53756/BCU_Factums_M0308.jpg
coutume d’Auvergne
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/28/54001/BCU_Factums_DVV02.pdf
536c1eb76f7cd39e1fc0fd9edc66e1b1
PDF Text
Text
**a u e*r-
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P
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É
C
I S
POUR
M' CONSTANT, AVOCAT.
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P R E C I S
DE RIOM.
( U iM m t w < v w w w » v \ '( W A W \ V
POUR
i re CHAMBRE.
Me J a c q u e s - F l o r e n t - G a b r i e l CONSTANT, A v o ca t,
habitant de la -ville d ’Issoire, appelant d ’un juge
ment rendu au tr ibun al civil de T hiers, le 19 janvier 1 8 3 1 , et intimé sur l ’appel d ’ un jugement
rendu au même tr ib u n a l, le 8 décembre 1 83o j
CONTRE
L e s héritiers D U P I C et la dame
C I I A L U S , cette
d e rnière , tant en q u a lité d ’héritière D U P I C , que
conune tutrice de ses enfans mineurs, tous habitant
au lieu du F
oulhouxy
com mune d ' E c o u toux , in
timés sur l ' appel du ju g em en t d u 1 9 ja n v ier 1 8 3 1 ,
et ladite
ment du
dame C I I A L U S
appelante
du j u g e
8 décembre i 8 3 o /
E T
CONTRE
L e s héritiers A N D R I E U X , tous habitans de la v ille
de T h i ers , intimés.
R I EN n’est plus simple que le fond de ce procès. Les héritiers
Dupic , comme représentant un sieur G randsaigne, jouissent à titre
pignoratif du domaine du Foulhoux. Cette jouissance, qui remonte
au mois d’octobre 17 56 5 a pour principe deux sentences, l’une du
�( * )
7 juillet 1753, et l’autre du 5 septembre i j 56 . Ces sentences con
damnent Clément Martin à payer à un sieur Philibert Grandsaigne
une somme de 4000 f r . , en conséquence permettent à ce dernier
de se mettre en possession , et de jouir des biens de son débiteur.
M e Constant représente Clément Martin. Ayant appris que le
domaine du Foulhoux était l’objet d’une poursuite en saisie immo
bilière , il a formé une demande en distraction , conformément à
l'article 727 du Code de procédure civile. M e Constant a conclu à
être reconnu propriétaire de l’immeuble saisi, et à sa mise en pos
session du domaine du Foulhoux.
11 se
fondait, d’une part, sur ce
que la créance Grandsaigne était éteinte, offrant d’ailleurs de donner
caution pour la somme de 4°oo fr., montant de cette créance, cl il
soutenait en second lieu qu’il y avait nécessité d’établir un séquestre
et d’enlever la jouissance du domaine du Foulhoux aux représentans Grandsaigne qui en abusaient, en y coupant les bois , et en
commettant des dégradations de tout genre.
L ’admission de cetle demande en distraction ne pouvait être
douteuse , puisqu’elle était fondée sur les titres mêmes rapportés
par les représentans Grandsaigne, les sentences de 17 5?> et 1756
qui apprennent que le vrai et seul propriétaire du Foulhoux était
îe sieur Clément Martin, et que Grandsaigne n’en jouissait qu’à litre
de nantissement jusqu’au moment où il aurait été payé du montant
de sa créance.
Aussi la difficulté ne s’est-elle point élevée sur le 'ond. Mais les
sentences de 1753 et 1756 avaient été précédées et suivies de pro
cédures volumineuses, et tissues avec art. Grandsaigne avait fait
intervenir dans ce procès des parties qui n’y avaient que faire ; il
avait élevé une foule d’incidens dans le but de l’obscurcir et de le
d Daturer ; c’est ce système que les héritiers Dupic ont agrandi et
suivi devant le tribunal de Thiers dans le but de retarder une dépossession, qui d’ailleurs est inévitable.
Les premiers juges se sont laissé abuser : un sursis a été prononcé
sous le prétexte que les sentences de 1755 et 1756 ne statuant pas
sur les intérêts de toutes les personnes qui y étaient parties, et que
ces sentences étant d’ailleurs attaquées par la voie de l’appel, il
�était nécessaire de vider ces différentes difficultés avant de faire
droit sur la demaude en revendication de Me Constant. Le tribunal
n’a pas vu que ces deux sentences avaient des dispositions intéres
sant exclusivem ent Clément Martin et le sieur Grandsaigne ; que
les droits de Grandsaigne , vis-à-vis Clément Martin , ayant une
origine et une cause déterminée entièrement distincte et séparée
de toutes les autres prétentions qui pouvaient s’élever dans le litige,
leur règlement ne pouvait dépendre de ce qui serait ultérieurement
décidé à l’égard des autres parties.
11 était évident
que Me Constant,
représentant Clément Martin , seul appelant, acquiesçant aux sen
tences de 1753 et 170 6 , les exécutant provisoirem ent, et se pla
çant ainsi dans la position la plus défavorable pour lui, avait le droit
de dire à ses adversaires : « les sentences de 1 r 55 et 1756 11e font
« outre chose , en votre faveur , que de vous reconnaître créan«■ciers de Clément M artin, que je représente, et de vous donner
« le droit de jouir de ses biens jusqu’au moment où vous serez
« désintéressés. Si la créance de 4000 lr. vous eût élé payée en 1755,
« vous n’auriez pas obtenu la jouissance du Foulhpux , il importe
« donc peu qu’un appel ait été interjeté de ces deux sentences
« par Clément Martin , puisque je les exécute aujourd’hui et vous
« accorde tout ce que vous pouviez exiger et
attendre
d’un
« arrêt. O r , je soutiens que vous êtes payés des 4000 fr. ; si
« vous 11c l’étes pas j'offre de vous désintéresser complètement :
« j’exécute donc ces sentences, qui 11c peuvent, quoi qu’il arrive,
« produire en votre faveur d’autre elî’ct que celui de vous re« connaître mon créan cier, e t , en cette qualité , de vous donner
« le droit de jouir de mes propriétés. Mais comme ces mêmes
« sentences ne vous accordent celle jouissance qu’à litre pigno« ratif ou de nantissement , et que le nantissement 11e peut
« continuer lorsque la créance est p a yé e , exécutez vous-mèmeces
« sentences , dont vous n’êtes point appelant, et qui sont votre seul
« titre, en me restituant ma propriété.»
C ’est pour ramener la cause à ces idées si simples , que l’on va
exposer les faits, et examiner les différons moyens qui peuvent s’e»
déduire.
�FAITS:
Un premier ordre de faits doit avoir pour objet de rechercher
les causes et la nature du litre qui ont fixé la propriété du domaine
du Foulhoux dans la famille M artin, aujourd’hui représentée par
M ' Constant.
Annet Treilhe et Jeanne-Marie Jolivet avaient eu 4 enfans : Jeanne
qui a épousé Pierre Martin (c ’est de ce mariage que sont issus C lé
ment et deux autres enfans, représentés aujourd’hui par M° Constant :)
G enest, dont la descendance est connue au pro cès, sous le nom de
Daiguebonne ; Jeanne-M arie, qui avait épousé un sieur D e L afoulhouse; enfin M arguerite, qui est décédée depuis long-tcms ,
sans laisser de postérité.
Un partage de la famille J olivet, sous la date du
5 mars
1G70 ,
avait constitué Annet T re ilh e , comme m a ri, créancier des Jolivet
d’une somme de
5 ,000
fr. Annet Treilhe et Jeanne-Marie Jolivet
étant décédés , leurs quatre enfans agirent contre Clément Jolivet
débiteur, et obtinrent le 18 août 1723 un arrêt qui déclara exé
cutoire le partage du
5 mars
1670, et condamna Clément Jolivet
à payer aux quatre enfans Treilhe la somme de 5 ,000 fr. avec
intérêts depuis le a 5 janvier 1698. L e compte de cette créance fut
réglé le
23
janvier 1724? des compensations qui avaient été
ordonnées par l’arrêt furent effectuées , et les Treilhe furent re
connus créanciers d’une somme de 9175 fr. 10 s.
En cet
état,
Louis D e Lafoulhouse, époux de Jeanne-Marie
Treilhe, alors déce lée, agissant, tant en son nom, que comme père
et légitime administrateur de ses enfans, céda à Pierre Martin ,
de Jeanne Jolivet, le quart de la créance due par Clément
Jolivet. Ce cédant donna à Pierre Martin pouvoir de se servir
mari
de son nom et d’agir conjointement avec les autres intéressés pour
faire procéder à la saisie immobilière des biens du débiteur. Celte
cession est sous la date du 11 avril 1701.
La saisie réelle fut effectivement pratiquée , le 26 mai suivant,
à la requête de Louis De Lafoulhouse 5 et ayant été confirmée par
un arrêt du ü 5 février 1734, il y eut bail judiciaire à Pierre Martin,
�sous la date du 21 mai 1740 > moyennant i 5o fr. par an, à dater
de la Saint-Martin 1759.
Pierre Martin est décédé le i 5 août j 7 4 1 • Genest Treilhe et
Louis De Lafoidhouse n’existaient p lu s, de manière que la saisie
immobilière dut cire poursuivie à la requête des héritiers de ces
différentes personnes.
Il est inutile de s’occuper des procédures qui ont eu lieu , tout
ayant été définitivemeu réglé par un arrêt du parlement de Paris
qu’il faut analyser avec soin.
Cet arrêt est sous la date du 27 juin 1 7 4 2•
On y voit figurer sur la même lig n e J e a n n e Treilhe , veuve de
Pierre Martin , agissant en son nom , exerçant ses droits e t en tant
que de besoin comme mère et tutrice de ses enfans mineurs ; M ar
guerite T reilh e, plus tard femme Daiguebonne , fille de Genest
T reilh e; J ea n C h è ze , époux de Marie De Lafoulhouse, fille de
Louis. Ces trois parties demandaient à être reconnues propriétaires
biens saisis, moyennant le prix qui serait fixé par experts.
En seconde ligne, se présente A n n eJ o liv et, lîlle et unique
héritière de Clément partie saisie.
des
Vient ensuite Marguerite T re ilh e , quatrième enfant d’Annet et
de Jeanne-Marie Jolivet , qui avait un intérêt commun avec ses
cohéritiers , mais qui préférait le paiement de sa portion de créance
en a rg en t, à la co-propriélé des immeubles appartenant à son
débiteur.
Enfin 011 trouve en qualité différons créanciers de la partie saisie,
parmi lesquels il convient de remarquer Gilberte Biozat , femme
Desholière ; plus tard on verra celle femme figurer sous le nom
de Grandsaigne , qui est devenu donataire de sa créance.
Il faut actuellement se fixer sur les dispositions de cel arrêt :
11 déclare
exécutoire contre Anne Jolivet les arrêts des
18 août 1725 et 20 février 1754 > et condamne en conséquence
A nneJolivet, en sa qualité d’héritière, à payer aux représentais
d’Annet Treilhe la somme de
5ooo
fr. avec intérêts et aux dépens;
20 L ’arrêt ordonne que quatre maisons situées à Thiers et le
domaine du F ou lh ou x, qui étaient tous les immeubles compris dans
�(G
)
la saisie « demeureront e n t o u t e p r o p r i é t é et possession aux
« représentans d’Annet T re ilh e , pour le p r ix porte en l’estimation
« qu i en sera fa ite p ar ex p erts ».
5° L ’arrêt
fixe dans quelles proportions les representans d’Annet
Treilhe doivent profiter du délaissement en propriété qui vient de
leur être fait. Il attribue les trois quarts de ces biens à ceux qui
avaient expressément conclu à être envoyés en propriété , c’est-àdire à la veuve de Pierre Martin ; à Chèze et à sa femme ( branche
Lafoulhouse ) ; et à la fille de Genest Treilhe (branche D aiguebonne ).
4° Quant à l’autre quart, l'arrêt l’accorde à Marguerite Treilhe ;
mais comme elle avait conclu au paiement de sa créance en argent,
l’arrêt fait dépendre son droit à la propriété, de l’option qu’elle sera
tenue de faire dans quinzaine , déclarant positivement qu’à défaut
par elle d’opter, cette faculté est référée aux cohéritiers de M argue
rite T reilh e; l’arrêt toutefois dit que celte dernière pourra prendre
le prix du quart de l’estimation en contribuant au quart des frais.
Tout cela réglé : l’arrêt, par une quatrième disposition, fait
main-levée de la saisie réelle et oppositions y survenues et en
ordonne la radiation.
5° L ’arrêt porte que si le prix de l’estimation excède les créances
des representans d’Annet Treilhe , ceux-ci paieront cet excédant
aux créanciers opposans, qui eux-mêmes pourront faire vendre
les immeubles en se chargeant de faire porter la vente à si haut prix
que les héritiers Treilhe soient payés du montant de leurs
créances,
condition pour l’exécution de laquelle les créanciers seraient
tenus
de donner caution , comme aussi d’user de cette faculté dans le
m ois, ou au moins de faire option dans ce délai, à peine de
déchéance.
G0 L ’arrêt est déclaré commun
à
tous les créanciers.
Cet arrêt a été signifié à procureur , le 17 juillet 1742. Dès cet
instant, le<lélai accordé pour opter a couru aux termes mêmes de
l’arrêt. Il
est
inutile peut-être de faire remarquer que les créanciers
n’ont point usé de la faculté qui leur était donnée ; mais Marguerite
Treilhe n’ayant pas fait son option dans le délai qui lui était imparti,
�a cto par cela même privée de toule espèce de droit à la propriété,
qui
a été irrévocablement acquise aux autres enfans d’Annet
T reilh e, et notamment à Jeanne, femme Marlin , qui fit cett^
option, option que scs enfans ont d’ailleurs plus tard renouvelée par
requête du 24 juillet 1 754*
11 paraît impossible de trouver un titre qui présente des caractères
plus certains de propriété. Aussi les Martin furent-ils obligés de
payer une somme de 2000 francs, pour droit de lods et ventes;
on rapporte les quittances qui sont sous les dates des 11 mai 1748
et 4 juillet 1752.
On doit, ici fixer un instant son attention sur les droits de chacun
des représentans d’Annet Treilhe , aux biens provenus d’Anne
Jolivct, et sur les causes qui ont fait que ces biens sont restés au
pouvoir des enfans de Jeanne Treilhe et de Pierre Martin.
D ’abord, on se rappelle que M arguerite, à défaut par elle d’avoir
fait l’option qui lui était déférée par l’arrêt de 1 742 > n’avait aucun
droit à la propriété de ces immeubles, cl que tout se réduisait,
pour elle , à recevoir le quart du prix de l’estimation.
E11 second lie u , Louis de la Foulhouse avait cédé scs droits
dans la créance Jolivct à Pierre Martin , par acte du 11 avril 1751.
Il résulte de ce fait, que le quart appartenant à de la Foulhouse,
était la propriété, ou de Jeanne Treilhe , pour qui Pierre Martin
son mari devait avoir acquis, 011 de Pierre Martin lui-m êm e, ce
qui est la même chose dans les intérêts actuels de M e Constant,
puisque les enfans Marlin n’en réunissaient pas moins, sur leur
tête, la moitié des biens délaissés en propriété par l’arrêt de 174 2E nfin, un quart devait appartenir à Genest T r e ilh e ( branche
d’Aiguebonne ) ; mais ce Genest était extrêmement obéré : il devait
à Pierre Martin des sommes bien plus considérables que la valeur
du quart de ccs immeubles ; aussi se garde-t-il bien de rien
réclam er.
On comprend donc actuellement les raisons qui ont fait que
tous les biens provenus d’Anne Johvet sont demeurés
dans la
famille de Pierre Martin, depuis le 28 mai 1740, époque du bail
judiciaire.
Ici se présente une nouvelle série de faits.
�Les deseendans de Pierre Marlin étaient en possession paisible du
domaine du Foulhoux, lorsqu’un sieur Philippe-Philibert De Grand«saigne tenta de les en dépouiller.
L e sieur De Grandsaigne avait fait souscrire, le 7 juillet 172 0 ,
à Pierre Marlin et à Genest Treilhe, une obligation de la somme de
4000 francs, payable dans un an , et causée pour prêt de 4 billets
de la banque ro ya le , de 1000 francs chacun. Cette obligation
n’avait point de cause réelle, les billets de la banque de L aw étant
absolument discrédités et n’ayant plus de cours au moment où
l ’obligation fut souscrite. O11 voit môme q u e, peu de jours après
cette obligation, un arrêt du parlement, du i5 août 172 0 , avait
annulé ces billets, en déclarant qu’ils n'auraient plus cours forcé
dans le commerce ni dans les recettes. Il était dès-lors évident que
le sieur Grandsaigne, avocat et homme très-délié on affaires, avait
abusé de l’influence qu’il pouvait avoir sur Pierre Marlin et Genest
Treilhe , pour leur faire supporter la perte de ces billets de banque
dont le prêteur n’avait peut-être point fait les fonds, ou qu’au moins
il avait bien certainement achetés à vil prix.
L e sieur Grandsaigne connaissait mieux que personne le vice
son tilre; il devait d’ailleurs craindre des explications peu hono
rables pour lui; aussi g a rd a -t-il prudemment le silence jusqu’au
de
décès de Pierre Martin et de Genest T reilhe, ses deux débiteurs.
Pierre Martin avait laissé quatre enfans : Clément, m ajeur,
Annet, Philippe-G enest, et Jeanne-Marie, mineurs, et qui étaient
sous la tutelle de Jeanne Treilhe leur mère.
C ’est contre ces personnes que le sieur Grandsaigne dirigea ses
poursuites, et obtint, le 17 août 174$ , u n e sentence par défaut
qui les condamna au paiement de sa créance. Le 25 du même mois
il y eut appel de cette sentence, et cet appel fut converti en opposi
tion, par acte du 19 novembre suivant.
Jeanne Treilhe est décédée en 1746.
L e sieur Grandsaigne devait éprouver quelques embarras pour
le recouvrement de sa créance. O11 a vu que Genest Treilhe était
extrêmement obéré ; qu’il deyait notamment à Pierre M artin, son
�beau-frère, des sommes bien plus considérables que la portion qu’il
avait à prétendre dans la créance Jolivet, circonstance qui l’avait
empêche de demander le partage des biens délaissés en propriété
par l’arrêt de 1 742 , et l’avait porté à les laisser au pouvoir de la
famille Martin.
Q u ’imagine le sieur Grandsaigne?
L e 8 octobre 17 4 6 , il fait souscrire à Jean Daiguebonne et à
Marguerite Treilhe sa femme
un acte par lequel ceux-ci lui
donnent en m andem ent leur portion dans la créance J o liv e t, sur
les immeubles délaissés par l’arrêt de la co u r, de 174 2 , pour le
paiement de l’obligation du 7 juillet 1720 : « Autorisant le sieur
« Grandsaigne a poursuivre le recouvrement de ladite part et
« portion par toutes les voies de justice-, contre les héritiers dudit
« Pierre M artin, détenteur desdlts biens. » Au reste Daiguebonne
se réserve d’intervenir.
Cet acte est aussi clair que positif. Il contient une délégation de
la part de Daiguebonne, en faveur de Grandsaigne; et cette délé
gation a pour objet de céder à ce dernier la créance Jolivet, pour
lui assurer le paiement de l’obligation du 7 juillet 1720; aussj
Grandsaigne 11c reçoit-L-il y par cet acte , d’autre pouvoir que
celui de poursuivre le recouvrement de la portion appartenant à
Daiguebonne, dans la créance Jolivet. Si Daiguebonne avait des
droits réels sur les ¡immeubles délaissés, il les conserve, et déclare
vouloir les exercer lui-même , en se réservant la faculté d’inter
venir.
L e procès mu entre le sieur Grandsaigne et les héritiers de
Pierre Martin prend ici 1111 caractère plus sérieux, et se complique
d’une foule de difficultés qui ont donné lieu à des procédures volu
mineuses. Les biens provenant des Jolivet appartenaient aux enfans
M artin, du chef de leur mère : ils avaient donc intérêt à ne point
t
représenter
leur
père;
v
•
aussi Clément Martin n’a c ce p ta -t-il la
succession de P ie rre , que sous bénéfice d’inventaire, et les deux
autres enfans répudièrent purement et simplement. Le sieur G rand
saigne, de son coté , pensant qu’il pourrait parvenir à faire décider
que les biens J o l i v e t appartenaient exclusivement à Clément Martin,
2
�(
'O )
comme héritier institué de sa m ère, et ne pouvant avoir l’espérance
de s’en emparer qu’autant que Clément serait considéré comme
héritier pur et simple de son p è re , critiqua la qualité d’héritier
bénéficiaire, que ce dernier avait prise. Sur cela, longs débats
dont aujourd’hui il est inutile de s’occuper, puisque la qualité
d’héritier pur et simple de Pierre Martin paraît reposer sur la tête
de Clément, et que d’ailleurs cette dificulté ne peut exercer aucune
influence sur la décision du procès actuel.
Mais cette procédure doit être examinée dans un autre intérêt.T
1
faut en extraire tout ce qui a le plus directement rapport à la mise
en possession que le sieur Grandsaigue a obtenue des biens appar
tenant à Clément Martin.
A cet égard ,
Un exploit du 19 décembre 1746 apprend que le sieur Grand
saigne fit dénoncer à Clément Marlin le mandement ou la déléga
tion du 8 décembre 174 6 , el qu’il conclut contre lui à ce qu’il fr t
condamné à lui p a y e r, comme possesseur du Foulhoux, la somme
entière de 4000 francs, y compris la portion pour laquelle D aiguebonne était tenu de cette d e tie , « si mieux n’aime Clément Marlin
ff délaisser à Grandsaigne la portion aflórente qui reviendra à la
« Daiguebonne dans le domaine du F oulhoux, suivant le partage
« qui en sera fait. »
Cette demande fut développée parle sieur Grandsaigne dans diffé
rentes
requêtes des 26 juillet 1748, 12 août et
23 décembre
i^So.
Les Daiguebonne , sur les sollicitations de Grandsaigne , inter
vinrent et cherchèrent à lui prêter leur appui.
Enfin Clément Martin combattit cas différentes prétentions par
des requêtes des 2 juillet 1748 et 26 juin 1751.
11 faut donner une esquisse rapide des systèmes qui étaient res
pectivement présentés.
D ’abord G rundsaigne, soutenant la validité du mandement de
174G, demandait que Clément Martin lût condamné par provision
à lui payer la somme de 4000 francs, se soumettant toutefois à
donner caution. Grandsaigne concluait aussi à ce que son adver-
�( 11
)
saire «• lui délaissât en hypothèque les immeubles provenant des
« Jolivet, pour, par lui Grandsaigne, en jouir ou les faire vendre
a sur simple placard. »
S’emparant plus tard de l’intervention des Daiguebonne qui
avaient donne leur consentement à ce que Grandsaigne les repré
sentât quant au partage des biens provenus des J o liv e t, et avaient
soutenu que leur amendement dans ces mômes biens était d’un
q u a rt, de leur chef, et de la moitié d’ un autre quart de la portion
acquise par Pierre Martin de Louis D e Lafoulhouse , dernière
portion pour laquelle les Daiguebonne déclaraient exercer la subro
gation légale , le sieur Grandsaigne concluait à cet égard à être
admis à représenter les Daiguebonne dans le partage à faire et à y
recevoir la portion qui revenait à ces derniers.
Clément Martin, de son côté, après avoir fait remarquer l’origine
odieuse de la créance du sieur Grandsaigne cl le silence qu’il avait
gardé pendant près de
5o
ans , soutenait que le mandement du
8 décembre
174G ne pouvait produire aucun effet; que lui-même ,
Clément Martin , était créancier des Daiguebonne de sommes
considérables dont il faisait connaître le chiffre et les titres. En
conséquence , tout en Concluant à ce que le sieur Grandsaigne fût
débouté de sa demande, Clément Martin soutenait que les immeubles
appartenant aux Daiguebonne devaient être affectés et hypothéqués
au paiement des créances personnelles qu’il avait contre e u x , et
demandait
même expressément qu’il lui fût permis de jouir pignora-
tivement de ces immeubles, si mieux il n’aimait les faire vendre sur
simplejplacard.
Quant à la prétention des Daiguebonne , ayant pour objet d’ob
tenir , par voie de subrogation légale , la moitié du quart vendu à
Pierre Martin par Louis De Lafoulhouse, la réponse de Clément
Martin était simple et péremptoire : Pierre Martin 11’avait pu
acquérir c t n’avait réellement acquis que uxorio nomine ; or
l’action en subrogation ne pouvait être légitimement exercée contre
Jeanne Treilhe-, co-pçppriétaire des biens provenus des Jolivet.
C ’est en cet état qu’est intervenue la sentence du 7 juillet 175 3 ,
dans laquelle figurent comme parties ,
%
�( 12 )
i 0Le sieur Grandsaigne; 20 les Daiguebonne;
5° Clément Martin;
4° Philippe-Genest
et Jeanne-Marie Martin.
Cette sentence a diiTérentes dispositions qu’il faut analiser.
i° E lle reconnaît que la renonciation faite par Philippe-Genest
et Jcanne-Marie Martin à la succession de Pierre leur père est
valable ; en conséquence, elle les met hors de cause;
2° Sans avoir égard aux lettres de bénéfice d’inventaire obtenues
par Clément M artin, elle le condam ne, comme seul et unique
héritier de Pierre , à payer à Grandsaigne la somme de 4000 fr.
3° Pour
parvenir au paiement de cette som m e, la sentence ayant
égard à une saisie-arrêt, qui avait été pratiquée p arle sieur Grand
saigne en i j 32 entre les mains des Jolivet, et à la délégation faite
par les Daiguebonne, le 8 décembre 1 7 4 6 , « permet au sieur
« Gandsaigne de se mettre en possession et de jouir des immeubles
îc compris en l’arrêt de délaissement du 27 juin 174 2 , provenant
«■des Jolivet, si mieux n’aime les faire vendre........ et même des
« biens propres dudit Martin. »
4°
Pour fixer la portion des Daiguebonne et celle de Clément
Martin sur lesdits biens, la sentence ordonne le partage entre C lé
ment Martin et les Daiguebonne.
5° Enfin celte semence ordonne que les Daiguebonne et Clément
Martin feront, lors du partage , leur prélèvement respectif, notam
ment , dit la sentence , « lors duquel partage Daiguebonne et sa
« femme feront raison à M artin, sur leurs portions, des sommes
« qu’il justifiera avoir payées en l’acquit de Genest T re ilh e , leur
« père et beau-père , et par exprès de celle de 2000 lit ainsi
v qu’ils sont ci-dessus adjugés. »
L e sens de cette sentence est facile à saisir :
Clément Martin est condamné à payer au sieur Grandsaigne la
totalité de l’obligation du 7 juillet 1720, souscrite par Pierre M ar
tin et Genest Treilhe.
L e sieur Grandsaigne n’esl point admis à représenter les D aigue
bonne au partage des biens provenant des J o liv e t, parce que le
jugement reconnaît que Clément M artin, 011 Pierre son p è re , ont
p ayé, à la décharge de Genest T reilh e, représenté par les D aigue-
�bonne, des sommes que ces derniers doivent tenir à compte sur
leur portion. C ’est, par cette raison qu’en constituant Clément Martin
débiteur de Grandsaigne de la somme de 2000 fr. due par les Daiguebonne , la sentence donne titre à Clément M artin, pour les pré
lever sur la portion de ces derniers, de la même manière que les
autres sommes qui auraient etc payées pour le compte de Genest
Treilhe.
Cette combinaison donnant à la délégation du 8 décembre 1746
tout l’eiTet qu’elle pouvait avoir; libérant en conséquence envers
Grandsaigne les D aiguebonne, qui devenaient par cela même dé
biteurs de Clément M artin, il convenait de donner à Grandsaigne,
qui n’avait plus qu’un seul débiteur (Clém ent M artin) , un titre qui
assurât le paiement de sa créance : c’est ce que la sentence fait en
envoyant Grandsaigne en possession non seulement des immeubles
compris en l’arrêt de délaissement du 27 juin if1’7 4 2 , mais encore
des biens propres à Clément Martin.
Ici donc tout est positif :
D aiguebonne, représentant Genest T reilh e, est libéré vis-à-vis
le sieur Grandsaigne, mais en même temps il devient débiteur de
Clément Martin.
Clément Martin est lui-même seul débiteur de Grandsaigne.
G randsaigne, à cause de sa créance , est dès-lors envoyé en
possession des biens qui sont au pouvoir de Clément Martin.
Si Clément paye Grandsaigne , ou si la créance de ce dernier est
éteinte par la perception des jouissances qu’il a faites, il y a nécessité
remette les immeubles qu’il a reçus en nantissement de Clément,
sans q u e, sous aucun prétexte, il lui soitpermis de retarder sa déq u ’ il
possession, même en excipant des droits des D aiguebonne, droits
qui, d’ailleurs , n’appartiennent pas à Grandsaigne, et auxquels la
sentence l’a reconnu entièrement étranger.
Mais c’est ainsi que le sieur Grandsaigne lui-même entendait la
sentence de 1753.
E ffectivem ent, le 0.8 août , Grandsaigne fit à Clément Martin
commandement de payer les 4000 f r . , lui déclarant que , faute de
ce faire, il se mettra en possession dns biens conformément aux
dispositions de la sentence du 7 juillet.
�(
Lo
5i
«4
)
du racine m o is, Grandsaigne se présenta au domaine du
Foulhoux avec un notaire ; on lit dans le procès-verbal que Grandsaigne avait cité envoyé en possession pignorative de ce domaine ,
et que voulant user de son droit pignoratif, il demandait à être mis
en possession réelle.
Cette tentative du sieur Grandsaigne ne réussit pas : il trouva au
domaine du Foulhoux Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin qui
s’opposèrent à sa mise eu possession, et soutinrent que les immeubles
provenus des J o liv e t, compris en l’arrêt du 27 juin 1742, ainsi
que les biens de Jeanne Trcilhe leur m ère, avaient cté partagés ;
que Clément Martin avait eu à son lot les maisons et les moulins
situés à Tliiers , et qu’eux-mêmes avaient obtenu le domaine du
Foulhoux. Pour preuve de leur assertion, Philippe- Genest et
Jeanne-Marie Martin rapportaient un bail à ferme consenti par eux
à un nommé S o v e r, sous la date du 29 août , mais qui avait com
mencé et pris cours depuis la Saint-Martin précédente.
Cette opposition fut l’origine de nouveaux débats, pendant le
cours desquels le sieur Grandsaigne fît intervenir plusieurs per
sonnes, et s’épuisa en efforts pour enlever à la famille Martin la
propriété du Foulhoux.
L e I er septembre 1 7 5 3 , G ra n d sa ign e fit. donner assignation à
Philippe-Genest et à Jeanne-Marie Martin ; il exposa que la sen
tence du
7
juillet
1753
lui permettait de jouir du domaine du
Foulhoux par droit pignoratif ; il demanda en conséquence main
levée de l’opposition qui avait été formée
à
sa prise de possession ,
et conclut expressément contre Philippe-Genest et Jeanne-Marie
Martin , à ce que, à tilre de dommages-intérêts, ils lussent tenus de
lui payer la créance à laquelle Clément Martin avait etc condamne
par la sentence de
1755.
De leur c o té , et par exploit du même jo u r, les Daiguebonne
dirigèrent une demande ayant pour objet de faire déclarer com
mune
à Philippe G enestet à Jeanne-Marie Martin la disposition delà
sentence du
7
juillet
1753,
qui ordonne le partage des biens prove
nus des Jolivet avec Clement Martin; et, par suite, les Daiguebonne
demandaient que les Martin rapportassent les jouissances du domaine
du Foulhoux depuis l’époque de leur mise en possession.
�Ces instances se compliquèrent par l'appel en cause ou par l’in
tervention de plusieurs parties.
Clément Martin figurait au procès.
Grandsaigne comparaissait, soit en qualité (le donataire de
D esholière, créancier des Jolivet, et qui était partie en l'arrêt de
174 2 ; soit comme subrogé aux droits de Marie De Lafoulhouse ,
femme Chèze ( sans toutefois produire aucun acte de cession ) ;
soit enfin comme cessionnaire des Daiguebonne.
Enfin Grandsaigne avait fait intervenir Anne Jolivet elle-m êm e,
qui avait été irrévocablement dépouillée de sa propriété par
l’arrêt de i'/42Quelles étaient les prétentions de ces différentes parties?
Grandsaigne, par sa requête du 19 août 175 4 , demandait à être
subrogé à l’exécution de l’arrêt de 174 2 , on conséquence, du con
sentement des M artin, à être autorisé à faire faire l’estimation o r
donnée par ledit arrêt ; et si le prix des immeubles délaissés en
propriété excédait le montant de la créance Martin , Grandsaigne
voulait que cette différence lui fût payée , comme représeniant
Desholière. Cette prétention de Grandsaigne était admissible; mais
il ajoutait que conformément à l’arrêt, il voulait que les immeubles,
objets de la contestation, lui appartinssent en tonie propriété pour
le prix de l’estimation , et qu’à cet effet l’arrêt fût déclaré exécutoire
contre les M artin, en leur qualité d’héritiers de Pierre leur père.
Cette demande de Grandsaigne était insoutenable: il essayait d’inter
vertir son titre ; mais cette tentative était repoussée par l ’arrêt de
1742, et plus fortement encore par la sentence du 7 juillet 1755 ,
qui reconnaît que Philippe-Genest et Jeanne-Marie M a r t i n ont
valablement renoncé à la succession de leur père , et qui n’accorde
à Grandsaigne qu’une simple jouissance à titre pignoratif sur les
biens compris en l’arrêt de 1742.
L a requête d’intervention d’Anne Jolivet est du 21 juillet 17 55 Cette intervention avait été requise par le sieur Grandsaigne.
Quoi qu’il en soit, Anne Jolivet conclut à l’exécution des arrêts
des 18 août 172^ et 27 juin 1742. E lle demande que le compte de
la créance ïr e ilh e soit réglé , que l ’on
en
déduise
les
jouissances
�( IG )
<lcs immeubles délaissés, et ce depuis 1731 : la Jolivet offre de
délaisser des immeubles jusqu’à concurrence de la somme qu’elle
restera devoir. E lle demande une provision alimentaire de i 5oo fr.,
et subsidiairement elle conclut à cire délaissée à se pourvoir en
interprétation dcl’arrêt de 1742.
Les demandes d’Anne Jolivet ne présentaient rien de sérieux.
L ’arrét de 1742 avait irrévocablement transmis la propriété de ses
biens aux Treilhe. Amie Jolivet n’avait donc plus qu’une chose à
surveiller, c ’était l’estimation des immeubles à l'effet de savoir si ,
les dettes payées, il n’y aurait pas un excédant de prix qui dut lui
revenir et lui cire payé par les héritiers Treilhe. L e droit de la
J o liv e t, resserré dans ces termes, ne pouvait lui être contesté.
Philippe-Genest et Jeanne Martin développèrent leurs moyens
dans des requêtes qui sont sous les dates des 10 mai, 24 juillet 1 7 54
et 12 août 1755.
j Ils soutenaient que le domaine du Foulhoux leur avait ete délaissé
pour leur portion héréditaire dans la succession de Jeanne Treilhe
leur mère , et demandaient que Clément Martin fût tenu de recon
naître que le domaine du Foulhoux leur avait été délaissé à titre de
partage.
S ’occupant ensuite
de la branche de Louis De
Lafoulhouse ,
Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin demandaient à être sub
rogés à la cession que ce Louis De Lafoulhouse avait faite , le
1 1 avril 1731 , à Pierre Martin leur aïeul, du quart de la créance
Jolivet.
Les Martin , examinant leur position relativement à M arguerite
Treilhe qui avait un quart d e là créance J o liv e t, renouvelaient,
à cet égard , l’option qui avait été faite par Jeanne Ireiliie leur
mère de p a y e r, en arg en t, le quart du prix de l’estimation qui
serait faite des immeubles délaissés par l’arrêt de 17^2.
Philippe-Genest
et
Jeanne-Marie Martin devaient peu s’occuper
des Daiguebonne et de l’intervention d’Anne Jolivet, tout étant,
sous ces deux rapports, réglé par l’arrêt de 1742 et la sentence
de 1753.
Sur ces différentes discussions, est intervenue la scntcnco du
�3 septembre 17 5 6 , qui 'ordonne que l’arrêt du 27 juin 1742 sera
exécuté selon sa forme et teneur ; qu’en conséquence, Grandsaigne,
les Daiguebonne, Clément, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin
feront procéder à l’estimation , tant du domaine du Foulhoux , que
des maisons de T h iers, dont le délaissement a été ordonné par
l’arrêt de 1742; que cette estimation comprendra les jouissances ,
dégradations et améliorations qui ont eu lieu depuis l’expiration du
bail judiciaire.
L a sentence porte que les trois enfans Martin nommeront un
e x p e rt, que Grandsaigne et Daiguebonne en choisiront un autre ,
et qu’Anne Jolivet assistera à l’estimation des experts pour y faire
scs observations.
La dernière disposition de cette sentence est ainsi conçue : «■et
« jusqu’après ladite estimation, avons sursis à faire droit sur les
« contestations des parties; et cependant, parprovision, permettons
«
«
«
«
«
à Grandsaigne de se mettre en possession du domaine du F oulhoux...... pour en jouir conformément audit arrêt et à la sentence
du 7 juillet 1755 , à la charge par lui de donner caution jusqu’à
concurrence des jouissances qu’il percevra à l’avenir, en payant
par lu i, toutefois, pour chaque année de sa jouissance, à chacun
« de Philippe-Genest et de Jeanne-Marie Martin, 100 francs jusqu’à
« fin de cause, à com m encera la Saint-Martin 1757.
Cette sentence fait naître plusieurs réflexions, sur lesquelles il*
convient de se fixer.
D ’a b o r d ,
on s’assure que les prétentions d’Anne Jolivet sont défi
nitivement repoussées par la sentence de 176 6, qui ordonne l’exécu
tion pure et simple de l’arrêt du 27 juin 1742 , ce qui est assez dire
que les immeubles provenant des Jolivet sont, depuis cette époque,
la propriété delà famille Martin; aussi Anne Jolivet n’est-elle point
admise à concourir à la nomination des experts qui doivent pro
céder a l’estimation : elle reçoit seulement la faculté d’assister à l’opé
ration , pour y faire des observations; et pourquoi? si ce n’est
parce que 1 arrêt de 1742 lui réservait implicitement le droit de
percevoir ce qui resterait du prix dos immeubles, la créance Treilhe
cl les autres dettes payées.
�Celte semence fait ensuite concourir à l’estimation des immeubles
provenant de la J o liv e i, d’un côté, les trois enfans de Pierre
Martin qui doivent choisir un expert; de l’autre, Grandsaigne et
Daiguebonne qui ont le droit de nommer le deuxième expert.
A cet égard , les intérêts de Grandsaigne et Daiguebonne étaient
de même nature : ils se rapprochaient sur plusieurs points; on peut
même dire que la délégation du
8
décembre 1746 était un lien
commun entre ces deux parties.
Effectivement, Grandsaigne, comme donataire de la dameBiozat,
femme D esholière, qui figurait dans la sentence de 17 4 2 ; comme
créancière des Jolivct, avait intérêt et droit de concourir à l'esti
mation des immeubles provenant de son débiteur puisqu’il était
possible que le résultat de cette opération lui fît obtenir le paiement
de sa créance. D’un autre côté , Grandsaigne se disait subrogé aux
droits de la branche de la Foulhouse, par l’effet de la cession que
lui avait consentie Jean Chèze , il est vrai que cet acte n’a jamais été
p ro d u it, que la date n’en n’est pas connue, qu’011 ne la rapporte
pas même aujourd’hui, mais si celte cession existe, bien certaine
ment elle ne peut comprendre les droits personnels de JeanneMarie T reilh e, femme de la Foulhouse, dans la créance due par
les J o li v e t, puisque Louis de la Foulhouse avait lui-môme vendu à
Pierre Martin son quart dans cette créance, par acte du 11 avril
• 17 5 1. La cession faite pas Chèze à Grandsaigne, jusqu’ici inconnue,
mais nécessairement d’une date postérieure à celle
de
la Foulhouse,
ne pouvait donc porter que sur le tiers du quart revenant aux de
la Foulhouse , du chef de Marguerite T reilh e, décédée ab intestat
et sans postérité. Sons ce rapport 011 comprend parfaitement que
Grandsaigne avait le droit de faire ce que Marguerite Treilhe aurait
fait elle-m êm e, c ’est-à-dire de concourir à l’estimation des biens
J olivct, à l’effet de connaître la somme qui lui revenait pour son
quart de créance, quart qu’elle ne pouvait au reste recevo ir, aux
termes de l’arrêt de 17 / p , qu’en contribuant suivant son
ment aux frais de l’estimation.
am ende
Quanta D aiguebonne, il a déjà été remarqué que la se ltence
de 17 5 3 , en ordonnant le partage avec Clément M artin, voulait
�que cc dernier préleyàtla somme de 2000 fr. due par Daiguebonne
à Grandsaigne pour moitié de l’obligation du 7 juillet 172 0 , plus
toutes les sommes qui auraient été payées en l’acquit de Genest
Treilhe , beau-père de Daiguebonne. On sent que le partage o r
donné par la sentence de 1753 se réduisait dès-lors, pour D aigue
bonne , à une estimation qui seule pouvait lui apprendre si son
quart dans les biens Jolivet était absorbé par les prélèvemens de
Clément Martin , ou si au contraire il pouvait encore y prétendre
quelque chose.
11 était
donc naturel que Daiguebonne se réunît ù
Grandsaigne pour cette estimation; d’ailleurs la délégation du 8
décembre 1746 semblait établir entre eux une espèce de commu
nauté d’intérêts.
Les trois enfans Martin avaient le droit de choisir un expert; aussi
étaient-ils liés par un intérêt commun et contraire à celui de toutes
les autres parties. Les Martin devaient effectivement désirer que la
valeur des biens provenus de la Jolivet n excédât pas le montant de
la créance qu’ils avaient contre cette famille, créance qui avait servi
de base à l'arrêt de 1742.
Mais la sentence de 17 56 a-t-elle apporté quelque changement
au mode de jouissance de Grandsaigne?
D ’abord, on voit qu’en 17 5G comme en 1753 la cause de celte
jouissance est la m êm e, et qu’elle a toujours pour objet le paiement
de l’obligation de 4°oo fr. Ensuite la sentence de i y 56 est loin
d ’intervertir le mode de jouissance accordé
à
Grandsaigne par celle
de 1753; au contraire, c ’est toujours à titre pignoratif que G rand
saigne est envoyé en possession; la sentence de 1756 impose même
à cette possession des conditions plus dures que celle de 17 5 5 ,
puisqu’elle exige que Grandsaigne fournisse caution pour le fait de
sa jouissance future, et paye annuellement
1O0
francs
à
chacun
de Philippe Genest et Jeanne-Marie Martin.
Pourquoi la sentence de 1756 imposait-elle ces charges à Grand
saigne?
Le motil eu est facile à découvrir. Grandsaigne
O avait été envoyé
J
en possession de propriétés appartenant à Jeanne T reilh e; les enfans
Martin avaient recueilli ces biens dans la succession de leur mère ;
�( 20 )
Grandsaigne n’était créancier que de Pierre Mariiu et de Genest
Treilhe; il ne pouvait donc être envoyé en possession des biens
provenant des Jolivet, que par deux motifs ; le premier résulte de
ce que Clémeni M artin, ayant fait acte d’héritier de P ie rre , était
tenu sur ses propres biens des dettes de son père; le second se
déduit de Ja délégation Daiguebonne, qui donnait à Grandsaigne le
droit de se faire payer de la moitié de son obligation sur le quart des
biens Jolivet appartenant à Daiguebonne. Ainsi Clément Martin et
les Daiguebonne étant les seuls débiteurs de Grandsaigne, et la
sentence de 1755 ayant même libéré les Daiguebonne envers
G randsaigne, en chargeant Clément Martin de payer la totalité de
cette créan ce, il est sans diiliculté que Grandsaigne, du chef de
Clément, pouvait être envoyé en possession des biens provenant
de Jeanne Treilhe.
Mais il n’en était pas de même relativement à Philippe-G enestet
Jeanne-Marie Martin: ceux-ci ne devaient rien à Grandsaigne, et
s’ils parvenaient à prouver qu’ils étaient propriétaires du domaine
du Foulhoux, il devenait certain que ce bien leur provenant du
chef de leur m è re , qui elle-même n’était pas débitr ce de Grand
saigne, ce dernier ne pouvait en être mis en possession sans fournir
Caution, et sans donner une portion des revenus aux co-propriétaires
présumés du domaine du Foulhoux.
O11 voit donc ici quel était l’objet du sursis prononcé par la sen
tence de 175G. La difficulté était de reconnaître le propriétaire
dudit domaine du Foulhoux. Etait-ce Clément Martin, ou au con
traire Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ? ces différentes
personnes avaient-elles des droits ? quelle était la proportion de
leur amendement ? tonies ces questions s’élevaient alors et pourraient
encore s’élever si les enfans Martin étaient eu présence, avec des
intérêts contraires. Mais aujourd’hui ces questions sont oiseuses et
inutiles, puisque M* Constant représente les trois enfans Martin, et
qu’il vient dire à Grandsaigne : « j’exécute provisoirement les
« sentences de 1753 cl 175G, en vous payant la somme de -jooo
»r francs, qui vous est due du chef de Clément Martin; vous êtes
« yous même dans la nécessité de les exécuter en me rendant les
�* propriétés que vous avez en nantissement du chef de Clément;
« il ne peut plus y avoir aujourd’hui de difficultés à reconnaître le
« véritable et l’unique propriétaire du Foullioux , puisque seul je
«■représente tous ceux qui y prétendaient droit. »
Grandsaigne fit signifier cette sentence par acte du 1 5 octobre
suivant, mais les Martin ayant interjeté appel, tant de la sentence
du 3 septembre 1756 que de celle du 7 juillet 1 7 5 5 , il intervint
deux arrêts des 2 et 22 du même mois d’octobre, qui reçoivent les
appels et accordent des défenses indéfinies.
C ’est dans cette position que Grandsaigne prit possession du d o
maine du Foulhoux : le procès-verbal, qui est sous la date du 25
octobre, constate que Clément M artin, qui était dans ce domaine,
s’opposait à la mise en possession , mais que le fondé de pouvoir de
Grandsaigne objecta à Clément Martin qu’il n’avait aucun droit à la
propriété de ce domaine , qu’il l’avait reconnu lui-même en ne con
testant pas que par l’événement d’un partage il était échu au lot de
son frère et de sa sœur. Ainsi Grandsaigne était réellement en pos
session, lorsque, le 19 janvier 1758, intervint un arrêt q u i, levant
les défenses indéfinies accordées contre les sentences du 7 juillet
1753 et 3 septembre 1756 et ordonne que ces deux sentences
seront exécutées, mais seulement dans deux de leurs dispositions,
la première celle qui permet à Grandsaigne de se mettre en posses
sion , la seconde celle qui ordonne qu’il sera procédé à l’estimation
des immeubles provenus d’Anne Jolivet.
V oici le tableau de cette opération qui a été faite, le
4
octobre
1758.
i° L e domaine du Foulhoux, déduction faite de
1679 francs 19 cent, de réparations, a été estimé
Ï1221 fr. ; c i.........................................................................
20 La maison Gourbine a été évaluée 2400 fr. ; mais
comme la sentence de 1755 ordonnait que pour cet
objet il ne serait, fait rapport que de 1800 fr. , on ne re
tiendra que cette dernière somme; c i...............................
11221 f.
1800
5° Les
deux maisons situées, rue de la M alprie, sont
estimées à 1200 fr. j c i..........................................................
j
200
14221 f.
�R eport. . . .
4°
1 4 2 2 1 f.
La maison située, rue du Piaure, est estimée à
1000 fr. : ci
5°
ÏOOO
A ccs différentes sommes il convient d’ajouter le
montant des dégradations estimées par les experts à
222 fr. c i.................................................................................
T o t a l ........................
222
1
544^
^
Dans celte estimation gén érale, on remarque celle du domaine
du Foulhoux, qui y figure pour la somme de 11,221 fr. Les
experts n’avaient à s’occuper que des biens provenus de la famille
Jolivel; aussi ont ils restreint leur estimation aux héritages qui
composaient ce domaine à l’époque de l’arrêt de 1 7 4 2 ; mais
Clément Martin , qui par lui ou par sa mère avait fait des acquisi
tions considérables fit remarquer ce fait aux experts qui en re
connurent la vérité, et déclarèrent que leur estimation du domaine
du Foulhoux était faite sans y comprendre aucune des acquisitions
qui auraient eu lieu depuis
17 4 2 .
Pour ne rien négliger, on doit dire qu’en 1770 les deux maisons
situées, rue de la M alorie, se sont écroulées, que les matériaux et
remplacement ont été vendus, qu’enfin le prix de celte vente a été
reçu, moitié par les héritiers G raudsaigne, et moitié par les Martin,
ainsi qu’il résulte d’une quittance du 8 juin i r}rj 5 .
L e résultat de cette estimation suilit pour faire apprécier l’intérêt
des Daiguebonne , et faire connaître les causes
qui
ont fait que celte
branche de la famille Treilhe n’a jamais fait effectuer le partage
qui était ordonné par la sentence du 7 juillet 1 7 5 f>.
On a vu que cette sentence admettait Clément Martin à prélever
sur la portion Daiguebonne, non seulement les sommes qu’il justi
fierait avoir payées en l’acquit de Gènest Treilhe , mais encore
de 2000 fr. faisant moitié des 400° ^r- > au paiement
celle
desquels
Clément Martin était condamné envers Grandsaigne.
11 faut
avec ces élémens établir la situation des Daiguebonne.
Les enfàns Martin avaient à reprendre contre eux
�i* L a moitié d’une créance due au sieur Barthélémy
Baudiment, et réglée par acte notarié , jlu G octobre
1742, à i 65 o 1.; moitié 825; c i...................................... .
20 La moitié de la créance G randsaigne, liquidée par
la sentence de 1753, à 4012 fr.; moitié 2006 fr. ; ci. . .
5° Pour le tiers , du par les D aiguebonne, des frais
825 f.
2006
ordinaires et extraordinaires de criées, et autres, 982 f.;
c i..................................................................................................
4 ° L e tiers de la somme de 5oo f r . , payé par Pierre
O82
Martin à Grandsaigne pour le compte de Marguerite
Treilhe , le 21 novembre 1740 , 100 fr. ; c i....................
Total èn capital,
3g i 3'fr .
; c i..........................................
100
5g i 3 f.
5° 11 faut ajouter les intérêts de cette somme depuis le
11 novembre 174 2 jusque à pareil jour de l’année 1768,
ce qui donne
3 1 5o
fr. ; c i . ..................................................
3 1 5o
6° Les Daiguebonne étaient aussi débiteurs d’une
obligation consentie par Marie-Anne C lu ze l, leur mère ,
à Clément M artin, le 26 janvier 17/17, se montant à
25oo fr. ; c i.............................................................................
,
25oo
70 Les intérêts de celte somme , depuis la dem ande,
qui est du mois de mai 1747) jusqu’au 11 novembre
17 5 8 , donnent un total de 1437 fr.; c i...........................
1437
8° Il faut ajouter le tiers des droits de lods et ventes
payés en 1748, pour les biens adjugés en 1 742, 700 lr.;
c i.................................................................................. ...
(j° Enfin les intérêts de ces droits de lods, depuis le 11
novembre 1748 jusqu’à pareil jour de 1758 , 55o fr. ; ci.
700
55o
---------- — »—
Total des sommes dues par les Daiguebonne, et dont
Clément Martin devait faire reprise lors du partage o r
donné par la sentence do 17 5 3 , c i...................................
I 2o 3o f.
11 convient d’opposer à ce tableau l’ensemble de tous les droits
et reprises que les Daiguebonne pouvaient avoir contre Clément
Martin.
i° Les Daiguebonne avaient droit au tiers des immeubles dé
laissés par l’arrêt de 1742 > c’est-à-dire au tiers de la somme
�R eport.
544
5 48
de i
^ ii'-j prix de l’cstimation, i
; ci. .
20 Ils avaient également droit au tiers des
jouissances du domaine du Foulhoux, éva
luées par les experts
743
à
. . .
5 14^ f-
la somme de 2120 fr.
pour les années i
, 1744 » 1 74^i *74^ »
1747 et 1748 , à raison de 424 fr. par an; ce
tiers montant à 707 fr ; c i...................................
°Pourle tiers d e s jouissances dudit domaine
5
estimées 420 f. pour 1749 , 14°
? ci. • . •
° Au tiers des jouissances du même do
4
maine , évaluées à 44° fr* pour chacune des
années 1750, l ' j S i , 17 a , 17 5 3 , 1754 et
1755, et formant un total de 2200 fr., somme
3
i a o o f.
/
707
*4°
5
dont le tiers est de 753 fr.; c i...........................
° L e tiers des mêmes jouissances, estimé
5
f annuellement à 420 fr. pour les années
733
1^ 5 6 ,
1767 et 1758 , formant un total de 12G0 f r .,
dont le tiers est de 420 fr.; ci...........................
6° L e tiers des intérêts de la maison vendue
au sieur G ourbine, moyennant 1800 fr. , ce
4 20
qui, à 90 fr. par an, donne pour 16 ans un total
de 144° f r , , dont le tiers est de 480 fr. ; ci. .
480
70 L e tiers des jouissances des deux maisons
situées rue de la Malorie , évalué par les ex
perts, à
45 fr.
par an : cequi forme pour
16
ans,
un total de 720 fr., dont le tiers est 240 fr. ; ci.
Enfin le tiers de i0 ans de loyer de la
maison située rue du Piaure, qui, à raison de
240
40 fr. par an, donne un total de 640 fr., dont
le tiers est de 2 1 3 fr. ; c i...................................
T o ta l
2 13
des droits et reprises des D aigue
bonne au 11 novembre 1758 .; 8081 fr. ci.
Calcul qui constitue les Daiguebonne débi
teurs dos Martin tic la souunc tic 3949 fr. ; ci.
8081 f.
8081
3949
�(
*5
)
Ce tableau explique parfaitement la cause du silence des D aiguebonne et le peu d’intérêt qu’ils avaient à donner suite à une action
en partage qui ne pouvait que leur devenir nuisible; aussi depuis
la sentence de 1 7 56 ne les voit-on plus figurer dans le procès ni
donner suite au partage ordonné en iqS'S.
L e sieur Grandsaigne représentait la dame Biozat , femme
Desholière, en vertu d’une donation du 28 novembre 1753. Il faut
se rappeler que cette créancière était partie en l’arrêt de 174.2,
et devait être payée si le prix de l'estimation des biens Jolivei.
excédait la créance de la famille Treilhe. C ’était tout l'intérêt que
Grandsaigne pouvait avoir du chef de la Desholière 3 lors de la
sentence de 1756.
O11 éclaircit ce point de difficulté en se mettant sous les yeux le
tableau du compte de la créance des enfans Treilhe contre les
Jolivet.
Cette créance se compose :
i° Du capital qui est de la somme de
5ooo f. ; c i..............................................................
20 Des intérêts de cette somme depuis le
5ooo f.
a 3 janvier 1698 jusqu’au 11 novembre 1742 >
jour de l’expiration du bail judiciaire, le tout
conformément à l’arrêt du 8 août 17 2 5 , et
déduction faite des compensations ordonnées
par ledit a r r ê t, 9073 fr.; c i...............................
9°7^
3° Les frais et dépens adjugés par l’arrêt
de 174 2 , et liquidés le 22 décembre 1761 ,
à la somme de 2946 fr. ; c i...............................
T
Si
otal
d elacréan ce Treilhe, 17109 fr.; ci.
2946
17 ,0 19 fr.
on rapproche le total de cette créance de celui obtenu par les
experts, lors de l'estimation des biens provenus des Jolivet, dernier
total qui se porte à 1 544 ^ fr*» on voit que les Treilhe étaient encore
créanciers des Jolivei de lu somme de 1576 0’-; q u ’ainsi, aux termes
de l’arrêt de 17/(2, la dame Biozat, femme Desholière, n’avait ri™
a prétendre sur le prix des immeubles délaissés en propriété à la
�( 26 )
famille T reilh e, puisque cette famille devait être payée avant tous
les autres créanciers.
Pour ne rien laisser à désirer , il faut dire un mot de la position
du sieur G randsaigne, dans le cas oii il établirait qu’il représente
Jeanne-Marie Lafoulhouse , femme C h èze, pour les droits que
celle-ci amendait dans la succession de Marguerite Treillie sa tante.
Cette Marguerite Treilhe a v a it, suivant l’option qui avait été
faite contre elle , conformément à l’arrêt de 1742^ droit au quart
du prix de l’estimation des immeubles provenant de Jolivet, quart
5 ü6 i
qui se monte à 386 1 fr. ; c i....................
Mais sur celte somme , il faut déduire ,
i
°L e quart des frais de criées ,
dont Marguerite Treilhe était
tenue aux termes de l’arrêt de
1 7 4 2 , 756 fr. 10 s .; ci. . . .
736 1. 10
20 Une somme de 5oo liv. que
Pierre Martin avait payée pour
1256 fr.
e lle , le 21 novembre 174°» au
sieur Grandsaigne ; c i...................
5° Les frais personnels
10 s.
3oo
adjugés
contre elle par l'arrêt de 174 2 >
liquidés à 200 liv. ; c i...................
200
Ainsi le quart de M arguerite Treilhe dans
le prix de l'estimation se trouve réduit à
2624 10 s.
Actuellem ent, Jeanne-Marie De L a fo u lh o u se , femme C lu z e ,
avait recueilli le tiers de la succession de Marguerite
Treilhe '-, si le
O
sieur Grandsaigne représente la femme C h i'ze, son droit se réduit
à 875 liv. , somme qui, comme le montant de sa créance contre
Pierre Martin et Genest T re ilh e , est plus qu’absorbée par les
jouissances que Grandsaigne a perçues du domaine du Foulhoux ,
depuis le
25 octobre
1756, époque de sa mise en possession, jusqu’à
ce jour.
Grandsaigne ne pouvait posséder le domaine du
F o u lh o u x
qu’en
exécutant la sentence de 1756 qui avait mis à sa jouissance la
�condition qu’il paierait 100 liv. par année à chacun de PhilippeGenest et Jeanne-Maric Martin. L e sieur Grandsaigne ne satisfai
sant point à cette obligation, il intervint sur les poursuites dos
M artin, le
5 1 juillet
1 760, arrêt qui le condamne à payer les arré
rages de cette provision annuelle.
En 1768 , Grandsaigne est décédé en possession du domaine du
Foulhoux : il 11’avait point d’enfans, et sa succession devait être
partagée entre deux branches de collatéraux , l’une, représentant
Philippe son frère , et l’autre, Marguerite sa sœur qui avait épousé
un sieur Delolz.
L e partage des biens Grandsaigne eut lieu le 20 décembre 1770.
L e domaine du Foulhoux échut au prem ier l o t , c’est-à-dire à la
Branche Philippe , et on lit dans le partage une convention ainsi
conçue : « que, dans le cas où ledit domaine éprouverait éviction de
« la propriété, le second lot lui rembourserait en deniers ou biens
« de la succession la somme de 8000 fr. , et alors les droits et
« créances que les co-partageans ont sur ledit domaine, leur appar« tiendraient en commun. » Les héritiers Grandsaigne connaissaient
donc parfaitement la nature de leur possession , ils savaient qu’à
chaque instant ils pouvaient être évincés du domaine du F oulhoux,
et fixaient à l’avan ce, si ce cas a rriv a it, quelle serait l’indemnité qui
serait duc à celui qui recevait ce domaine dans son lot.
Philippe Grandsaigne , auquel le domaine du Foulhoux était
échu , avait deux enfans , Jean-Baptiste Rémi et M aric-Anne qui
épousa un sieur Jean-Baptiste Delavigne.
Un partage qui eut lieu le 21 décembre 1770 fit échoir le
domaine du Foulhoux a Marie-Anne.
Celle M aric-Anne avait elle-même eu deux enfans , dont l’un ,
Antoinette, a épousé le sieur Dupic. Cette Antoinette était en pos
session d e là moitié du domaine du Foulhoux , et l’autre moitié
était jouie par Jean-Baptiste Rémi représentant de la branche des
Philippe.
L e sieur Dupic , déjà en possession, comme mari d Antoinette
D elavigne, de la moitié du F oulhoux, devint fermier de l’auire
moitié et jouit ainsi de la totalité.
�(
)
En cet état, Philippe-Genest et Jeanne-Marie Martin ou leurs
représentans furent encore obligés de recourir à la justice pour
conlraindre les Grandsaigne à leur payer la provision annuelle
accordée par la sentence de 17 5 6 ; ils obtinrent un arrêt, sous la
date du 20 niai 17 7 6 , qui condamne les Grandsaigne à payer les
arrérages de cette rente, et à la servir à l’avenir.
Plus tard, le sieur Dupic essaya de réunir sur sa tète la totalité
du domaine du Foulhoux et d’intervertir son titre.
Comment s’y prit-il ?
Anne J o liv e t, expropriée par l’arrêt de 1 74 2 s était encore
vivante ; cette femme fort âgée , habitait la ville de Clerm ont, et il
ne devait pas être difficile d’obtenir d’elle une cession de droits
tout-à-fait illusoires , et auxquels Anne Jolivet avait depuis longtems renoncé.
M e Dupic , avocat, assez connu en la Cour par ses singulières
combinaisons en affaires , fit former contre lui par Anne Jolivet
une demande ayant pour objet le désistement du domaine du Foul
houx. Celte demande qui fut introduite par requête du 29 novembre
et exploit du 10 décembre 1787, ne fut point contestée par Dupic,
q u i, immédiatement, et le 12 décembre (d eux jours après la
demande ) , se fit faire une donation par Anne Jolivet.
Q ue porte cette donation dont on a extrait les faits qui précèdent?
Anne Jolivet, prenant la qualité de maîtresse de scs biens paraphernaux, en considération de la parenté qui existe entre elle et
D u p ic , et pour lui donner une preuve de son affection, lui donne
le domaine du Foulhoux pour en jouir ainsi qu’elle avait le droit de
le fa ir e .
D upic , de son c ô té , déclare connaître l’objet donne pour eu
avoir jo u i comme m ari d ’A n toin ette Lavigne , héritière de
G randsaigne, qu i avait été
envoyé
COMME CRÉANCIER DE LA F AMI LLE M
en
possession
a RTI N.
LeS
de ce d o m a i n e
,
a u t l ’eS C o n d i t i o n s
et réserves contenues dans cette donation, sont au reste inutiles à
connaître.
Q u ’avait voulu faire Ma D upic? L ’arrêt de 1742 et la sen
tence de 175G ne laissaient aucun doute sur ce point de fait, que
�Anne
ainsi
Jolivet
n’avait plus aucun droit sur le Domaine du Foulhoux,
cette femme ne pouvait rien donner et ne donnait réellement
à D upic; d’un autre côté, le donataire ne recevait rien d’Anne
J o livet, puisque dans l’acte de donation même il reconnaissait qu’il
rien
du Foulhoux à la suite de Grandsaigne, qui en avait été
envoyé en jouissance pignorative au préjudice des Martin, ce qui
jouissait
était assez dire que le domaine du Foulhoux était la propriété de
ces derniers.
A ussi, en examinant de plus près les faits, voit-on que Dupic
n’avait pris cette donation que pour l’opposer aux représentans de
Jean-Baptiste-Réini Grandsaigne, du chef desquels il tenait à ferme
la moitié du domaine du Foulhoux.
Il paraît en effet que, le 4 février 179 0 , il fut fait un traité entre
Dupic et les Grandsaigne, par lequel Dupic s’engagea à faire juger
les contestations qui existaient entre les Grandsaigne et les Martin ;
Dupic supposant que le résultat de ce procès serait de constituer
les Martin débiteurs d’une somme de 16,000 f r . , s’obligea avec la
plus grande légèreté à p a y e r , en attendant etavantla fin du procès,
aux héritiers de Je an - 13a p iistc-R ém i Grandsaigne , ou pour leur
com pte, une somme de 7000 fr. ; au moyen de c e , Dupic atteignit
son but et demeura en possession de la totalité du domaine du
Foulhoux sans payer le prix du bail à ferme.
Plus tard Dupic reconnut fort bien l’erreur dans laquelle il était
tom bé, et le préjudice qu’il s’était causé à lui-même. Il voulut
résister à l’exécution du traité, du 4 février 1790; mais un jugement
du io janvier 1825, appréciant la conduite de Dupic dans cette
affaire , et donnant pour motif que le traité avait été désiré par lui
pour conserver la jouissance du F o u lh o u x, en se chargeant de la
poursuite du procès; que ce traité avait eu spécialement pour objet
de ne point déranger la situation de la famille Grandsaigne jusqu’à
décision définitive de ces contestations, ordonne l’exécution du
traité et condamne Dupic à payer la somme de 7000 fr.
Toutefois les M artin, entièrement étrangers à tous ces actes, fai
saient exécuter rigoureusement, les dispositions de la sentence de
l l $ 0 , et réclamaient le paiement d elà provision qu’elle leur avait
�(
3o
)
accordée; le 19 janvier i 8o 3 , ils obtinrent un jugement qui con^
damne les deux branches Grandsaigne, héritiers de Philippe Phi
libert et le sieur Dupic lui-même personnellement, au paiement de
cetle provision pour l’arriéré et pour l’avenir jusqu’au jugement
définitif.
L ’instance sur l’appel des sentences de 1753 et 1756 était pen
dante en la co u r: par exploit du
5
février 18 10 , les enfans de
Jeanne Trcilhe et Pierre Martin assignèrent en reprise d’instance
les héritiers Grandsaigne, qui à leur tour, par exploits des 17 avril
et 10 mai 18 13 , reprirent la même instance contre les M artin, et
conclurent au bien jugé des sentences.
T el est le dernier errement de cette procédure.
Un nouvel ordre de faits se présente : et c ’est celui qui est
spécialement relatif à la contestation pendante en la cour.
On a vu que Jeanne Trcilhe et Pierre Martin avaient eu quatre
enfans, trois seulement ont figuré dans les contestations qui se sont
élevées. Ces trois enfans sont Clém ent, Philippe-Genest, dont les
descendances sont inutiles à connaître, puisque M e Constant a
acquis leurs droits et les représente au procès , enfin JeanneMarie qui avait épousé Jacques-Antoine Constant , aïeul de
M e Constant, appelant.
Le sieur D upic ainsi que la dame son épouse étaient décédés ,
laissant trois enfans, parmi lesquels figurent Marguerite-MarieM ich elle, qui a épousé le sieur François Chalus : 011 dit même que
le sieur Dupic avait vendu au sieur Chalus, son gendre, le domaine
du Foulhoux.
L e 25 décembre 1828 , les héritiers A n d rieux, comme créanciers
D u p ic, et m êm e du sieur Chalus, poursuivirent la saisie
immobilière du domaine du Foulhoux , soit sur la tête de la veuve
des enfans
Chalus, soit sur celle des autres enfans Dupic. Les énonciations du
placard peuvent servir à faire connaître la valeur de la propriété
saisie, qui paye 242 fr. d’impositions foncières. L e 3 juin 18 2 9 ,
adjudication préparatoire en faveur des héritiers Andrieux saisissans,
qui dans celle procédure étaient tout à-la-fois parties saisissantes,
premiers créanciers inscrits cl adjudicataires provisoires.
�M* Constant, instruit de ces faits et de l’état de la procédure,
voulut user du droit qui lui était accordé par l’article 727 du
code de procédure, de former la demande en distraction; à cet
effet, le i
3
août, il déposa ses titres de propriété au greffe du
tribunal de I h ie r s , et le 17 il forma par requête sa demande en
distraction.
L e 8 décembre i 83 o intervint un prem ier jugem ent, lors duquel
les sieurs Andrieux déclarèrent qu’ils étaient désintéressés , et qu’ils
ne voulaient plus donner suite à la saisie. De leur côté la dame
Chalus et les Dupic soutenaient que la saisie immobilière n’existant
plus, la demande en distraction devenait sans objet, et qu’il ne
pouvait y élre statué. M e Constant demandait de sa part qu’il fût
plaidé au fond.
L e tribunal de Thiers rendit alors hommage aux principes , en
reconnaissant que la dénonciation de la saisie ayant été faite aux
débiteurs saisis et à tous les créanciers ne pouvait être rayée que du
consentement de ces derniers ou de l’autorité de la justice ; que dèslors il y avait nécessité d’examiner le mérite de la revendication
exercée par M* Constant avec les héritiers Andrieux, représentant
légalement tousles autres créanciers, à l’effet d’ordonner s’il y avait
lieu à la radiation de la saisie.
E n conséquence le tribunal, tout en donnant acte aux héritiers
Andrieux de leur déclaration, ordonne qu’ils demeureront dans
l’instance, et qu’il sera plaidé au fond.
L a dame Chalus a interjeté appel de ce jugem ent, par exploit
du iG décembre , c’est-à-dire , avant que la huitaine fût expirée.
C ’est dans cet état qu’a été ren d u , le 19 janvier j 85 i , nu tribunal
de Tliiers , le jugement contradictoire dont est appel.
^
11 faut se faire une idée nette des prétentions de chacune des
parties.
M" Constant soutenait que les D upic, représentant les Grandsaigne,
avaient été plus que payés de leur créance d e 4,000 1iv ., parla jouis
sance qu’ils avaient faite du domaine du Foulhoux : il disait également
que les sentences de 1755 et 1756 établissaient qu’il était le vrai
propriétaire du Foulhoux et quelesD upic n’en jouissaient qu’à titre
�(
3*
)
pignoratif : en conséquence M e Constant concluait principalement à
être reconnu propriétaire du domaine, et, comme conséquence, à la
main levée et radiation de la saisie im m obilière, se faisant au reste
toute réserve à l'effet de faire fixer ultérieurement avec les héritiers
Grandsaigne le montant des créances qu’il pouvait avoir à répéter
contre eux.
M e Constant prenait ensuite des conclusions subsidiaires, par
lesquelles il consentait à exécuter provisoirement les sentences de
1753 et 1766, en donnant caution pour la créance de 4000 liv. que
les Martin devaient aux Grandsaigne , et demandait en consé
quence à être envoyé en possession du domaine du Foulhoux.
Enfin, comme les Dupic abusaient de leur possession, coupaient
des bois et laissaient tomber la maison et les bâtimens dans un état
de dégradation absolu , et que ce dernier fait était prouvé par le
placard lui-même , le sieur Constant, par un second subsidiaire ,
demandait à être autorisé à jouir du domaine comme séquestre ju
diciaire, et concluait dans tous les cas à l’exécution provisoire du
jugement à intervenir.
Les héritiers Andrieux renouvelaient les conclusions qu’ils avaient
prises lors du jugement de i 83 o.
Quant à la dame Chalus., e l l e concluait
principalem ent
à la
nul
lité de la demande en distraction, ou à ce que M e Constant y fut
déclaré non recevable , ou qu’il en fut débouté; subsidiairement la
dame Chalus soutenait que le procès actuel se rattachant à une ins
tance pendante au parlement de Paris entre diverses parties, et
sur des contestations relatives
au
domaine du
Foulhoux
, il y avait
lieu à surseoir à faire droit sur la demande en distraction jusqu’au
m om en t où il aurait été statué sur ces difficultés.
Dans un autre subsidiaire , la dame Chalus, se disant héritière
bénéficiaire de son p è re , soutenait qu’elle le représentait comme
donataire d’Anne Jolivet; que sous ce rapport elle avait des intérêts
opposés à ceux de ses mineurs ; qu’ainsi il y avait nécessité
d’appeler le subrogé-tuteur dans l’instance.
Enfin la dame Chalus demandait que les héritiers Grandsaigne ,
qu’elle prétendait ne pas représenter, et les héritiers Duiguebounc
fussent mis en cause.
�Sur cela est intervenu , au tribunal civil de Thiers , un jugement
trcs-longuemcnt. motivé, et dont il est difficile de bien saisir le véri
table sens. Toutefois on croit y découvrir que les Daiguebonne,
comme représentant Genest T re ilh e , ont paru aux premiers juges
être propriétaires d’un tiers du domaine du F oulhoux, savoir, d’un
quart de leur chef, et d’un douzième comme héritiers de M argue
rite Treilhe , décédée sans postérité. Q u ’ils ont fait résulter la
preuve de ce fait, d'abord de la sentence de 17 5 5 , q u i, suivant
eux , ordonne le délaissement du tiers du domaine du Foulhoux
aux Daiguebonne, et ensuite de la sentence de 17 5 6 , q u i, outre
l'estimation des immeubles, ordonne également celle des jouissances
perçues, ensemble des dégradations et améliorations. Celte pre
mière idée longuement développée 3 les motifs du jugement
ajoutent que Me Constant ne représente pas les Daiguebonne; qu’il
y aurait danger à juger hors la présence de ces derniers; qu’il est
im portant, avant de statuer sur la demande en distraction, qu’il
soit, définitivement prononcé sur les contestations qui existaient en
176 6, contestations sur lesquelles il avait été sursis parla sentence
du 5 septembre, même année.
C ’est par ces motifs que le jugem ent, tout en rejetant les moyens
de nullité j proposés par la dame Chalus contre la demande en
revendication, et donnant acte aux héritiers Andneux de leur
déclaration, met ces derniers hors d’instance, et surseoit à faire
droit sur la demande en distraction jusqu’à ce qu’il aura été statué
avec toutes les parties intéressées sur les contestations existantes en
J7 5G, difficultés sur lesquelles la sentence du
sursis à faire droit jusqu’après l’estimation.
5
septembre avait
C ’est de ce jugement dont M B Constant a interjeté appel par
exploit du
5 février i 85 i.
�(
34
)
DISCUSSION.
Rien ne paraît plus facile que (le démontrer les vices nombreux
et le mal jvgé de celte sentence, qui tout à-la-fois a méconnu les
principes les plus élémentaires en matière de distraction sur saisie
immobilière, et complètement erré dans l’appréciation des faits. Et.
d’abord une poursuite en expropriation avait été dirigée contre le
domaine du Foulhoux possédé par les héritiers Dupic ; si celle
expropriation se fut consommée sans réclamation de la part de
M e Constant, 10 ans pouvaient suffire pour qu’il y eut interversion
de titre et anéantir le droit des héritiers Martin à la propriété de ce
domaine.
L a demande en distraction était donc une nécessité pour
M e Constant qui a dû user de celle action conformément à l’article
727 du Code de procédure, en la dirigeant contre toutes les parties
que la question de propriété pouvait intéresser, c’est-à-dire, contre
les héritiers Dupic et les héritiers Chalus , parties saisies, et contre
les sieurs Àndrieux qui figuraient dans la saisie immobilière, en
qualité de saisissans, de créanciers premiers inscrits et d’adjudi
cataires provisoires.
L ’eflèt. de la demande en distraction devait être de faire r e c o n
naître le véritable propriétaire de l’immeuble saisi et revendique ,
et de mettre la justice à même de restituer
la
propriété à celui
auquel elle appartenait et d’ordonner la radiation de la saisie.
Mais comment], et en présence de quelles parties, la propriété
pouvait-elle être reconnue , et la radiation de la saisie pouvait-elle
être opérée ? À cet é g a rd , l’article 696 du Code île procédure
dispose que la saisie ne pourra être ra y é e que du consentement des
créanciers , ou en vertu de jugement rendu contre e u x , lorsque la
notification prescrite par l’article Gq5 aura été enregistrée en marge
de la saisie au bureau de la conservation.
O r, ici la saisie immobilière était
à
un degré bien plus avancé
que
celui prévu par l’article Gq5 , puisqu’il y avait eu adjudication pré
paratoire; dès-lors comment opérer celte radiation sans le consentemenl des créanciers ou un jugement rendu contre eux?
�En fait, il est certain que les créanciers n’ont point donné de
: les sieurs Andrieux, tout à-la-fois saisissans, adjudi
cataires provisoires, premiers créanciers inscrits, no pouvaient lier
consentement
par leur consentement les autres créanciers qui conservaient le droit
de se subroger à la saisie; d’ailleurs les héritiers Andrieux n’ont pas
même donné ce consentement; dès-lors, en fait comme en droit,
il y avait nécessité que la radiation de la saisie fut ordonnée par un
jugement rendu contre les créanciers.
Mais comment rendre un jugement hors la présence des per
sonnes qui doivent y être parties? c’est bien vainement qugin se
demande ici ce que le tribunal pourrait décider, le cas arrivant,
relativement à la radiation de cette saisie, lorsque dans la personne
des héritiers Andrieux il a rnis hors d’instance le premier créancier
inscrit, repr.V. -.r- il lé al de tous les autres créanciers.
Le jugement du 8 décembre i 83 o était à cet égard tout-à-fait
rationnel et entièrement conforme aux principes. Il avait retenu
les héritiers Andrieux dans la cause par de très-bons motifs. La
dame Ghalus a interjeté appol de ce jugement; mais outre que cet
appel est non recevable comme prém aturé, et portant sur un juge
ment préparatoire exécuté, jl est encore victorieusement combattu
par les moyens que l’on vient de déduire; dès-lors impossible de
comprendre les motifs de l’infirmation que les premiers juges ont
eux-mêmes prononcée p a rleu r jugement du 19 janvier i 85 i.
Rien en effet ne pouvait autoriser le tribunal de Thiers à meure
les héritiers Andrieux hors d’instance. Ces créanciers premiers
inscrits déclaraient bien, il est vrai, qu’ils avaient été payés du
montant de leur créance, mais ils ne donnaient pas leur consente
ment à la radiation de la saisie: dès-lors il n’était point satisfait a la
première condition exigée par l’article 696, pour que la saisie fût
valablement rayée. En second lieu, le tribunal lui-même n’ordonnait
point cette radiation contre les créanciers, puisque le jugement
ne lait que surseoir à la décision de demande en distraction . Oèslors comment se fuit-il que les premiers juges n’aient pas vu qu il y
avait nécessité de conserver en cause les sieurs Andrieux , premiers
créanciers inscrit, jusqu’au jugement définitif, et qu’ils 11c se soient
�(
3G
)
pas aperçus qu’en mettant ces créanciers hors d’instance , ils
enlevaient à Me Constant la faculté de faire rayer cette saisie si en
définitive il réussissait dans sa demande en distraction?
On n’insistera pas davantage sur une erreur aussi manifeste qui
aurait pour résultat nécessaire d’anéantir l’action du sieur Constant;
car ce serait bien vainement, que les premiers juges n’auraient cru
prononcer qu’un sursis, si par le fait, en luisant disparaître du
p ro es la partie que la loi y juge indispensable, ils se sont mis
dans l’impossibilité de statuer plus tard sur la demande en distrac
tion 9 et d’ordonner la radiation de la saisie qui en est une consé
quence nécessaire.
Le tribunal dont est appel a donc déjà commis ou s’est mis dans
la nécessité de commettre un déni de justice.
A u fond, quel est l’objet tic la diiïïcùlté?
Il s’agit de statuer sur une demande en distraction, e’esi-à-dirc ,
de re che rch er q u i, do la partie saisie ou du demandeur en distrac
tion , est le vérilable propriétaire de l’immeuble revendiqué.
Si les titres de la partie saisie prouvent qu’elle n’est pas propriétaire
et qu’au contraire le droit de propriété repose sur la tète du de
mandeur en distraction, il n’y a plus rien à rech erch er, et la dé
cision ne peut être douteuse.
Dans l’espèce, les sentences de 1753 et 1766 établissent deux
faits positifs, le prem ier, que le sieur Grandsaigne était créancier
de la famille Martin de la somme de 4000 fr. ; le second, qu'en cette
qualité i l avait été envoyé en possession dudomaine du Foulhouxproyenant de son débiteur, pour en jouir jusqu’au paiement intégral de
ses créances. Ainsi Grandsaigne ou ses représentais ont donc un
titre pignoratif, q u i les rend dépositaires du domaine du Foulhôux
jusqu’à l'acquittement de leur créance. Ils jouissent donc pour la
famille Martin, ils ne peuvent prescrire contre elle : toutes ces vérités
n’ont besoin ni de démonstration ni de développement.
Dans cette position, que devait faire MBConstant, seul
représen
tant de la famille M artin, pour reprendre le domaine du Foulhoux?
Devait-il établir sa propriété? c est ce qu’d a fait, en prouvant
d’une part, qu’il représente Jeanne-Maric M artin, son aïeule, et,
\
�de
l’autre, qu’il est aux droits dcsdesccndans de Clément etPhilippeMartin. Devait-il prouver que les Grandsaigne soin payés de
G enest
de leur créance? C ’est ce que M e Constant a encore fait :
effectivement il a présenté en i re instance un compte qui n’a jamais
été critiqué , et qui établit deux faits, le prem ier, qu’au 25 octobre
1766 la créance du sieur Grandsaigne était entièrement éteinte en
capital et intérêts; le second que ses héritiers ou rep résen ta i seraient
aujourd’hui débiteurs envers la famille Martin de toutes les jouis
l’intégralité
sances duFoulhoux depuis et compris 1767.
Toutefois les conclusions de M e Constant ne se restreignaient pas à
obtenir l’adjudicadon de sa demande principale; voulant satisfaire à
toutes les exigences, M° Constant offrait encore d’exécuter provi
soirement les sentences de 1765 et 1766; il s’astreignait même à
donner caution pour le paiement de la créance Grandsaigne ; et
voulant mettre un terme aux dégradations et aux dilapidations tic
tout genre que les enfuus Dupic commettent journellement dans le
domaine du Foulhoux, M® Constant offrait de jouir de cette pro
priété comme séquestre judiciaire , jusqu’au moment où les comptes
auraient été définitivement réglés.
Cet étal de choses 11e pouvait laisser à la justice qu’un devoir à
remplir; examiner la demande en distraction, apprécier les moyens
qui lui étaient propres, la rejeter ou l'admettre : voilà ce semble
tout ce qu’il pouvait être permis de faire.
O r, qu’apprend le jugement? le tribunal néglige la cause qui lui
était présentée, il ne l’examine même pas, il l’efface entièrement,
et s’en crée une tout-à-fait étrangère à la famille Dupic et à M e Cons
tant; il lui devient dès-lors facile de 11e pas statuer sur la difficulté
réelle qu’il avait à résoudre , et de prolonger par un sursis la pos
session injuste des héritiers Grandsaigne.
Il faut reproduire le système adopté par les premiers juges :
La branche Daiguebonne, qui de son chef était propriétaire du
quart des immeubles provenus dos Jolivet, et du chef de M a r g u e
rite Ireilhe d un douzième du prix de l’estimation , figurait comme
partie dans les sentences de 1753 et 17 5G. Ces sentences avaient
ordonné le partage entre cette branche et les Martin, représentant
\
�(
38
)
les Treilhe créanciers des Jolivet. Les premiers juges s’emparent
de cette circonstance et posent en fait que M e Constant ne repré
sente pas les Daiguebonne; ils supposent ensuite qu’il y aurait dan
ger à juger la cause hors la présence des D aiguebonne, et tirent
de tout cela la conséquence immédiate qu’il doit être sursis à la
décision de la contestation pendante entre M* Constant et les re
présentais Grandsaigne, jusqu’au moment ou il aura été définitive
ment statué sur les difficultés nées en 1^56 entre la branche D a i
guebonne et la famille M artin, difficultés sur lesquelles la sentence
du
5 septembre
n’avait pas prononcé.
C ’est bien vainement que l’on recherche l’influence que pourrait
avoir la présence ou les droits des Daiguebonne sur le jugement de
la demande en distraction formée par M u Constant.
En effet, sous q u e lq u e rapport que l’on examine ce qui intéresse
les Daiguebonne , le résultat est le même.
E t d’abord une première idée saisit et fixe l’attention. Si M e Cons
tant représente les D aiguebonne, ou , ce qui est la même chose , si
ces derniers n’ont aucun intérêt à contester la demande en distrac
tion , cette demande doit être adjugée. O r , qu’est-il arrivé? depuis
1766 les Daiguebonne 11’ont fait aucune poursuite, ils ont laissé
prescrire leurs droits : on a m ê m e vu dans l’exposé du fait que les
D a ig u e b o n n e avaient intérêt à ne point agir, puisque, d’une part,
aux termes de la sentence de 17 5 ? , ils n'étaient admis au partage
qu’en laissant prélever les soijmies que Clément Martin aurait pavées
en l’acquit de Gcnest Treilhe , en exprès celle de 2,000 f r ., faisant
moitié du montant de l’obligation du 7 juillet 1720;
est prouvé qu’en 1758 , la portion des
et que
D a ig u e b o n n e
de l’autre il
dans les biens
Jolivet absorbée , ils étaient encore , à cette dernière époque,
débiteurs de la famille Martin d’une somme de 4 »°°° h'.
D ’ailleurs qui pourrait avoir qualité pour représenter les D aigue
bonne? serait-ce le sieur Grandsaigne? mais il n’a d’autre titre que
l’acte du 8 décembre 1746. O r cet a cte, par scs termes , et suivant
ce qui a élé décide par la sentence de 175 5 , 11’est qu’une simple
délégation, un moyen donne a Grandsaigne pour être payé du
montant de sa créance sur le domaine du Foulhoux ; mais sous
�(
3g
)
aucun rapport, il ne peut être considéré comme un dire propre à
donner à Grandsaigne le droit de repiesenter les Daiguebonne dans
la propriété du domaine du Foulhoux.
D ’ailleurs, quel effet a produit cette délégation? la sentence de
1755 l’apprend :
créancier
la qualité
tence
:
il
partage a été ordonné , non avec Grandsaigne,
délégu é , mais avec Daiguebonne, cohéritier des Martin;
de Grandsaigne n’est donc point changée par cette sen
un
reste toujours créancier et pas autre chose. Mais ce qui
est plus fort, c ’est que par l’cfTet de la sentence de 1753 , Grand
saigne devient en vertu de sa délégation créancier de Clément
M artin, et que les Daiguebonne sont libérés vis-à-vis Grandsaigne ,
d’une manière tellement absolue que Clément Martin doit reprendre
sur les propriétés provenues des Jolivet., et sur la part des Daigue
bonne, la somme de
derniers.
2000 fr.
qu’il doit payer à la décharge de ces
Cette dernière idée conduit immédiatement à reconnaître le vrai
représentant de la branche Daiguebonne. Ce représentant 11e peut
être autre que Clément M artin, qui a payé la dette Daiguebonne ,
et qui est devenu créancier de ce dernier, de la somme dont il l’a
libéré vis-à-vis Grandsaigne. Comment Grandsaigne pourrait-il
refuser à Clément Martin la qualité de représentant des D aigue
bonne, lorsque la sentence de 175 3 , contradictoire avec Grand
saigne, l’envoie en possession des biens Jolivet; que cet envoi en
possession est prononcé contre Clément M artin, comme débiteur
de la totalité de la créance Grandsaigne ; que Grandsaigne accepte
celte délégation, et plus tard l’exécute en se mettant en possession
du domaine du Foulhoux.
Sous un autre rapport il est également certain que Clément,
Martin représentait la branche D aiguebonne, pour tous les droits
qu’elle pouvait avoir dans les propriétés Jolivet. Effectivement la
portion des Daiguebonne , dans ces biens , devait être soumise aux
reprises de Clément Martin qui avait le droit de prélever toutes les
créances qui auraient élé payées pour Gencst Treilhe; or ces
reprises faisant plus qu’absorber la portion des Daiguebonne ,
dans les biens à partager, il est plus qu’évident que Clément Martin,
�(
4°
)
comme créancier des Daiguebonne, et en vertu même des disposi
tions des sentences, les représente complètement pour le fait du
partage ordonné par la sentence de 1755.
Mais cet examen peut paraître inutile pour la décision du procès,
puisque la contestation doit se resserrer entre le sieur Grandsaigne
et les enfans Martin.
Si on consulte les sentences de 1753 et 175 6 , qu’apprendra-t-on?
pas anire chose si ce n'est que les Grandsaigne ont obtenu la mise
en possession du Foulhoux, d’abord contre Clém ent, et plus tard
contre Philippe Genest et Jeanne-Marie Martin. Les Grandsaigne
avant reçu le nantissement des Martin doivent le leur rendre, si leur
créance est payée; et comment les Daiguebonne pourraient-ils
s’opposer à cette remise? ce n’est pas d’eux que Grandsaigne
t i ent
l e d o m a i n e d u F o u l h o u x 5 il n e les a p o i n t a p p e l é s p o u r f a i r e p r o n o n
cer contre eux l’envoi en possession? il ne l' a pas pris de leurs
m a i n s , a u contraire il a reconnu que Clément Martin était devenu
son débiteur de la totalité de l’obligation de 1720 , et c’est unique
ment comme créancier de ce Clém ent, qu’il s’est mis en possession
du domaine du Foulhoux.
Ici la véritable question du procès se représente dans toute sa
simplicité : c’est un débat de propriété entre les G randsaign e et la
famille Martin ; là est toute la cause ; les Daiguebonne sont étrangers
à
ces débats ; les Grandsaigne qui ne
peuvent dans aucun
lo r s ,
cas
les
représentent
pas,
ne
se prévaloir de leurs droits. Pourquoi dès-
dans l’intérêt de Grandsaigne, fixer
sonnes qui ne réclament rien ,
qui ont
son
attention
sur des p e r
intérêt à 11e rien demander?
pourquoi sur-tout en agir ainsi lorsque on s’assure que les Daigue
bonne 11e peuvent être représentés que par C lém en t M artin , qui a
payé leur dette et est encore leur créancier de sommes considéra
bles, sommes qui doivent être prélevées sur la portion des Daigue
bonne dans le
cas
où
les
biens des Jolivet pourraient être soumis à
un partage ?
il est donc évident que les premiers juges ont complètement erré;
qu’ils se sont même mépris sur le véritable sens de l’objection qu’ils
prit imaginée , puisque les droits des Daiguebonne , s’ils existaient
�( 4» )
encore, appartiendraient à la famille M artin, qui seule aurait le droit
de s'en prévaloir.
L ’erreur dans laquelle sont tombés les premiers juges fait sentir
la nécessité de jeter un coup-d oc il sur les mterêts de toutes les p er
sonnes qui figuraient dans 1’arrêt de 1742 et dans la sentence de
1 756, soit personnellement, soit sous le nom du sieur Grandsaigne.
L ’objet de cet examen est d’éviter que la dame Chalus crée une
nouvelle confusion à l’effet de retarder sa dépossession.
La dame Chalus exciperait-elle des droits de Jeanne-Marie De
Lafoulhouse, femme Chèze? D ’abord M 8 Constant, en vertu d’une
cession du 11 avril 1731 , représente celte branche pour le quart
qu elle avait à amender dans les biens Jolivet. L e sieur Grandsaigne
s est prétendu cessionnaire des droits de la dame C h èze, mais on a
vu dans les faits que le sieur Grandsaigne n’avait justifié d’aucun actoj
et cette cession existât-elle , comme elle ne comprendrait que
la portion que la femme Chèze pouvait avoir du chef de M argue
rite T re ilh e , c ’est-à-dire un douzième du prix de l’estimation, et
que ce droit purement mobilier n’affecterait en rien la propriété, il
est évident que Grandsaigne ne pourrait se servir de ce m oyen pour
changer la nature de son titre ^ qu’il n’en serait pas moins un créan
cier jouissant à titre pignoratif de la propriété d’un débiteur, débiteur
qui étant libéré doit cire réintégré dans le fonds qui lui appartient,
et qu’il avait donné en nantissement.
Grandsaigne figurait dans la sentence de 1756 comme donataire
de la dame Biozat, femme Desholière. Quelle était cette dame ?
l’arrêt de 174 2 apprend qu’elle figurait parmi les créanciers opposans de la famille Jolivet ; cette créancière devait être payée sile prix
de l’estimation excédait le montant de la créance T re ilh e , mais cette
estimation a été faite à la requête du sieur Grandsaigne lui-même j
le prix en est con n u, et comme il est prouvé que ce prix est plus
qu’absorbé par la créance Treilhe r la dame Desholiere pas plus
que le sieur G ra n d sa ign e son donataire 11e peuvent avoir rien a
réclam er.
On rencontre ici Anne Jolivet expropriée par l’arrêt de 1743» ct
G
�X
^
)
que Grandsaigne avait fait intervenir, suivant requête du 21 juillet
1755.
Quelle est la position de celte Anne Jolivet?
L ’arrêt de 1742 prononce contre elle une expropriation complctte et irrévocable. Effectivement les Treilhe sont envoyés en
toute propriété et possession des biens saisis; l’arrêt indique même
dans quelle proportion la propriété des biens délaissés doit être
partagée entre les différentes branches d elà famille Treilhe; et pour
qu’il ne manque rien à des caractères aussi positifs de transmission
de propriété, l’arrêt fait même main-levée de la saisie réelle et en
ordonne la radiation.
Il
est vrai que les Treilhe nouveaux propriétaires l’étaient à con
dition de faire estimer les bien s, et que si le prix de l’estimation
excédait les c réances, ce surplus devait appartenir à la femme J o
livet expropriée ; mais cette circonstance démontre déplus fort que
les biens avaient cessé d’appartenir à Anne Jolivet. Le droit de celte
dernière se réduisait dès*lors à requérir l’estimation des biens, et à
assister à cette opération, et c ’est précisément ce qui lui a été ac
cordé parla sentence du 5 septembre 1 75G.Il est vrai qu’Anne Jolivet
demandait davantage, mais la sentence, en repoussant ses préten
tions, a donné une nouvelle force à l’arrêt do 1 7 4 2 ; et c o m m e Anne
J o liv e t n’a point interjeté appel de cette sentence de 17 56 , qui
confirme son expropriation en faveur des Martin , on ne conçoit pas
quel moyen elle pourrait em ployer pour se prétendre propriétaire
du domaine du Foulhoux.
Que devient, des-lors, la donation que Dupic a obtenue de celte
fem m e, le 1 2 décembre 1787 ? La Jolivet ne pouvait conférer aucun
droit à la propriété du Foulhoux; aussi n’a-l-clle donné le domaine
qu’à la chargé d’en jouir ainsi (ju'elle avilit le droit de lè fa ir e ;
et D u p i c , de son cô té, reconnaissant dans le même acte qu’il ne
jouit du Foulhoux qu’à titre p ig n ora tif cl comme créancier des
M artin, il est également évident que la Jolivet n’a point entendu
donner un droit de propriété et que Dupic n’a point entendu
l’accepter.
Q u ’aurait-donc donné Anne Jolivet au sieur Dupic? tout au plus
�son droit au surplus de l'estimation des biens, les dettes payées ;
mais Anne Jolivet a été appelée à cette opération, qui a été laite à
la
requête et diligence du sieur Grandsaigne ; o r , le rapport prouve
que le prix de restimation est inférieur au montant de la créance
Treilhe. De plus , Grandsaigne, qui était chargé de faire faire res
timation , a continué depuis cette époque de jouir du Foulhoux ; et
comme la dame Clxalus et les Dupic sont aujourd’hui héritiers du
sieur G randsaigne, ils seraient inadmissibles à se plaindre de cette
opération, et à opposer quelle n’a point été homologuée.
La dame Chalus dirait-elle que ne représentant pas le sieur
Grandsaigne, mais bien la Jolivet, elle n’est point partie capable
pour recevoir les offres faites par M e Constant?
Celte objection serait détruite
i° Par le fait qu’Anne Jolivet n’étant pas propriétaire du
F o u lh o u x, ne pouvait, par sa donation, intervertir le titre de
D u p ic , qui ne jouissait que pignorativement;
20 Par la circonstance que Dupic n’a point fait notifier sa donation
aux Martin; qu’il a continué de jouir comme représentant le sieur
Grandsaigne, et qu’enfin il a été condamné par jugement de l’an
i i à payer, comme possesseur à titre pignoi’atif, la provision
accordée aux Martin par la sentence de i ,/56 .
Si la dame Chalus et les héritiers Dupic objectaient qu’ils ne sont
pas les seuls héritiers Grandsaigne, on leur répondrait que le
partage du 20 décembre 1770 fait dans leur famille prévoit le cas
d’éviction du domaine du Foulhoux, et que dans ce cas le second
lot doit rembourser au prem ier une somme de 8000 fr. en biens de
la succession. Ainsi le possesseur du Foulhoux représente vis-à-vis
les tiers, tous les héritiers Grandsaigne. L e possesseur a qualité
pour défendre à une demande en éviction; et s’il succom be, il a
une demande en garantie à exercer contre ses co-partageans, ga
rantie dont les effets sont à l’avance réglés par le pariage de 177o.
Enfin 011 peut prévoir que la dame Chalus ira jusqu’à soutenir
q u e , ne représentant que le sieur Dupic qui a vendu à son mari le
domaine du
l
oulhoux, elle n’a pas qualité pour répondre à la
demande en dis trac lion.
�(
44
)
Que signifierait cette objection ? II s'agit d'une demande en dis
traction sur saisie immobilière; on ne peut donc la diriger que
contre la personne sur laquelle la saisie est pratiquée, et que l’on
suppose propriétaire de l’immeuble. En pareille matière la pro
priété est tout, et celui qui possède l’immeuble revendiqué a
toujours qualité pour répondre à la demande en distraction. D ’ail
leurs la vente de M. Dupic au sieur Chalus n’a point été produite ;
tous les héritiers Dupic ont été poursuivis en expropriation à la
requête des sieurs Andrieux ; M° Constant devait donc former sa
demande en distraction contre toutes les parties saisies. Il est
possible que cette demande donnât lieu à une demande en garantie
de la part de la dame Chalus contre les D upic; mais sous aucun
point de v u e , la vente du sieur Dupic au sieur Chalus, étant étran
gère à M® Constant et lui étant absolument in c o n n u e, ne pourrait
paralyser son action contre le possesseur saisi du Foulhoux.
On suppose d’ailleurs que cette vente ne sera pas produite; si
elle l’éta it, qu’apprendrait-elle ? que D upic a abusé du nantisse
ment jusqu’au point d’en disposer et de le vendre , circonstance
q u i, suivant les principes, serait
à
elle seule suffisante pour lui faire
enlever la possession du Foulhoux et faire un devoir à la justice de
la remettre à M® Constant, seul propriétaire de c e domaine.
L ’exam en de cette cause est terminée. Quels sont les résultats
qui se présentent ?
L e domaine du Foulhoux est la propriété des héritiers Martin :
c’est un fait incontestable établi par les sentences de 1753 et
1756.
Un autre fait non moins certain et ressortant des mêmes sentences,
c ’est que les Grandsaigne ne sont en possession du
Foulhoux
qu’à
titre pignoratif et comme créancier de Clément Martin.
Aujourd’hui M BConstant, seul représentant des M artin, prouve
que la créance Grandsaigne est payée. Q u e l obstacle peut-il dont»
y avoir à lui remettre la possession du domaine dont il n’a jamais
cessé d’être propriétaire ?
Serait-ce parce que les Martin ont interjeté appel des sentences
4e
1753 et de 1756? mais aujourd’hui M* Constant exécute ces
sentences, et se met, relativement au domaine du F oulhoux, dans
�(
45
)
la même position que s’il n’y avait point eu d’appel; il accorde tout
ce que les héritiers Grandsaigne avaient demandé par leur assi
gnation en reprise, du 10 mars i 8 i 3 ; il ne se refuse à aucune des
conséquences d’un arrêt confirmatif, puisqu’il offre de payer l’entière
somme de 4000 fr. due aux Grandsaigne.
Sous tous ces ra p p o rts, où seraient do nc les difficultés?
Mais si l’on ajoute que les Dupic ont abusé de leur jouissance ;
que déjà l’immeuble donné en nantissement a été vendu par leur
père; que tous les arbres-chênes ont été coupés, et que les héritiers
Dupic en ont vendu pour 9000 fr. ; que les bâtimens tombent en
ruine; que la culture est négligée; que ce domaine a été saisi
réellement, ne serait-ce pas douter de la justice de la Cour que
de supposer qu’elle autorisera la continuation d’une possession aussi
préjudiciable à M* Constant, et qu’elle hésitera un instant ù
réformer le jugement dont est appel !
J acques- F lo r en t- G a b r iel
CONSTA NT, Avocat.
M° J . - C h . B A Y L E a în é , ancien A v ocat.
Me MARIE , Avoué-Licencié.
R10M,
I MP R I ME R I E DE SALLES F I L S ,
P RES LE PALAIS CE J U S T I C E .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums fonds privés
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Description
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<a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les Factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Constant, Jacques-Florent-Gabriel. 1832?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Jacques-Florent-Gabriel Constant
J.-C.H. Bayle aîné
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
saisie immobilière
successions
généalogie
bois
saisie réelle
domaines agricoles
experts
bois
métayage
témoins
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Précis Pour Me Jacques-Florent-Gabriel Constant, Avocat, habitant de la ville d'Issoire, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil de Thiers, le 19 janvier 1831, et intimé sur l'appel d'un jugement rendu au même tribunal, le 8 décembre 1830 ; Contre Les héritiers Dupic et la dame Chalus, cette dernière, tant en qualité d'héritière Dupic, que comme tutrice de ses enfans mineurs, tous habitans au lieu de Foulhoux, commune d'Ecoutoux, intimés sur l'appel du jugement du 19 janvier 1831, et ladite dame Chalus, appelante du jugement du 8 décembre 1830 ; Et Contre les héritiers Andrieux, tous habitans de la ville de Thiers, intimés
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1832 ?
1742-1832
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
45 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_DVV02
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Don Vendrand-Voyer
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Issoire (63178)
Escoutoux (63151)
Foulhoux (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
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bois
Créances
domaines agricoles
experts
généalogie
métayage
saisie immobilière
saisie réelle
Successions
témoins
-
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4a8a66f0916fa09e48d15ae8c866ee1f
PDF Text
Text
COUR
M
E
M
O
I
R
E
IMPERIALE
DE RIOM.
POUR
1er. CHAMBRE«;
Le sieur J e a n -J o s e p h COURBY-COGNORD,
appelant;
C ON T R E
Le sieur
J e a n -J o sep h
JO U B E R T intimé.
L E sieur Courby est obligé dé défendre son honneur
et sa liberté, contre un oncle, contre un parrain.
En considérant ces d eu x titre s , il devoit s’attendre à
tro u v e r un p ro tecteu r, d ans le sieur J o u b ert :
- I l n’a rencontré qu’un ennemi. ,
L e sieur Joubert prétend q u ’on lui a laissé ignorer,
dans divers contrats, des hypothèques conventionnelles
ou judiciaires, et des hypothèques légales.
L a réponse du sieur Courby est simple.
i
i
�r
- v
( O
Parmi ces hypothèques, les unes étoient inscrites, et
le sieur Courby, dans les contrats qu’il a consentis, n’a
pas déclaré que ses Liens étoient libres;
Les autres étoient connues du sieur Joubert.
Cela est prouvé par plusieurs actes : signataire du
contrat de mariage de son neveu ; acquéreur des con
trats de rente qui formoient une partie de la dot mo
bilière de la dame C ourby; averti de la vente des im
meubles dotaux de sa nièce par alliance, le sieur Joubert
n’ignoroit pas les hypothèques légales de celle-ci. L u ii même a indiqué les moyens de les faire disparoître, et
en a dirigé l’exécution.
f Cependant il crie au 'dol ; il accuse son neveu de l’a«v o ir ir o m p é ; il le poursuit Rêvant les tribunaux comme
stellipnataire; il demande que la liberté lui soit ravie.
Pour repousser unqragrçssiojpt.injuste, le sieur Courby
est dans la triste nécessité d’indiquer la source de ses
malheurs, et de parjeç des dangereux secours.qu’il reçut
du sieur Joubert.
Les faits démontreront combien l ’accusation fut irré
fléchie.
La discussion fera voir dans quelle erreur sont tombés
les premiers juges.
t
i
L e s i e u r : C o u rb y, né de parens dont la fortune paroissoit considérable, avoit contracté' un mariage avan
tageux,
•
Son contrat de mariage avec la demoiselle Cognord
est du 18 brumaire an 7 ( 8 novembre 1798 ).
On y voit .que la future épouse upportoit une riche
�( 3 )'
dot en Biens m eubles,et immeubles; elle ÿ y constitua le
domaine de la Maison-Nieuve, sitilé dans la'commune de
Celles, des meubles meubjans, de l’argent et des contrais
de rente : ces divers objets sont détaillés dans l’acte.
L e sieur Joubert,' oncle du futur,, et qui avoit été
un des négociateurs du m ariage, assista ^u Contrat et le
signa; et dès cet instant au moins il connut en quoi
consistoient les biens que la dame. Courby remettait à
son époux*
. i f
L e sieur Gourby reçut lui-même de son père 30,000 f»
en avancement d’hoirie^
, .
, •
Une carrière commencée sous de si brillans auspices
sembloit promettre un avenir heureux.
Les circonstances en ont décidé autrement.
o ^
L e sieur Gourby père se jeta dans dçs; affaires rui
neuses , et bientôt ses dettes s’àcçruiènt dans une pro
gression effrayante.
<
Il eut recours à son fils.
Celui-ci n’hésita pas à remplir un d evoir; il aida-son
p ère, et dejion argent, et de son crédit.
C essecours retardèrent la ruine absolue du p ère,
mais ils préparèrent celle du fils.
Dès 1806, le fils avoit payé ou emprunté pour le
père plus de 80,000 francs ; c’est ce que prouvent deux
actes de vente passés entr’eux , l’un le
xnars, l’autre
le 7 août 1806, et destinés à, acquitter lés dettbs d it
père envers le fils.
? Par l’acte du 13 mars, le père vend au fils le bien
de B icon, situé près d’A rtonne, à la charge de payer
en son acquit une rente viagère de 3,600 francs, et-en
�(
4
)
outre, moyennant 70,000 francs’ qu’il reconnaît avoir
reçus en différentes fois avant la vente.
!
»
Il déclare qu’ une partie du prix a été employée à
acquitter des effets sur place, souscrits par lu i, et que
l’autre partie recevra le meme'emploi ; il1s’engage même
à faire exprimer cet emploi dans les quittances.
L a vente n’indique aucune espèce d’hypothèque qui
grevât le bien vendu.
! ?
L ’acte du 7 août contient, i ° . un traité sur une con
testation qui s’élevoit entre ïe: père et le fils, touchant
la première vente; 20. une seconde Vente d’une maison,
d’un jardin et d’un pré.
r; '
L a contestation avoit pour cause la rente viagère de
3,600 francs, qui s’étoit éteinte dans les vingt jours qui
avoient suivi le 13 mars.
’ ' ’
-'L e vendeur >et l’acquéreur ! prétendoiënt chacun de
voir profiter du bénéfice de l’extinction de la rente; ils*
transigèrent moyennant 17,500 francs, que le fils s’o
bligea de payer à des créanciers du père, indiqués dans
l’acte.
.*
}
. ■1
'>
La seconde vente eut pour prix une somme de 23,000 f . ,
sur laquelle le fils se retint 12,000 f r ., qui furent reconnus
avoir été payés par lu i, Ü des créanciers du p è re , outre
les 70,000 f r . , prix de la vente de Bicon.
Les 11,000 francs qui restoient dûs, furent stipulés
payables à des créanciers désignés.
A in si, au mois d’août de l’année 1806, le fils avoit
payé ou s’étoit chargé de payer pour le père différentes
sommes q u i, réunies, formoient-un total de 110 , 5oo fr.
T o u t est acquitté depuis long-teuips.
�(5)
- On conçoit que le sieur Courby n’a pu trouver dans
ses propres ressources le moyen de fournir à une somme
aussi considérable.
Il a dû avoir recours à des emprunts.
; Tous ceux qui savent combien la voie des emprunts
a été désastreuse à cette époque, combien elle l’est en
core aujourd’h u i , doivent prévoir quel sort menaçoit
le sieur Courby fils.
"
Les emprunts étoient faits à un taux excessif.
L e sieur Joubert a été un des prêteurs , et son taux
ne fut pas plus modéré que celui des autres : c’étoit,
diso it-il, celui de la place.
‘ f
Souvent aussi il fut caution ; jamais son cautionne
ment n’a été gratuit (i).
■y
L e 16 n o vem b re 1806, le sieur C o u rb y so u scriv it, au
profit du sieur J o u b e r t, une lettre de chan ge de 10,000 f.
p ayable à la fin de m ai 1810 .
L ’intérêt étoit confondu avec le principal; et nous
verrons bientôt que le sieur Joubert trouva le secret,
avant l’échéance, d’exiger un supplément d’intérêt.
Quelque temps avant cette époque, le sieur Joubert
s’étoit fait céder par son neveu les rentes dotales de la
dame Cognord , épouse de c e lu i-c i, ces mômes rentes
portées par le contrat de mariage de l’an 7. L es actes
de ratification passés en faveur du sieur Cognoi’d père,
ne laissoient aucun doute sur leu r origine. .
■;
L e sieur Joubert perçoit encore ces rentes.
(x) Le premier cautionnement que le sieur Joubert fournit
à son neveu, fut pour une somme de 10,000 fr. : ce, service
lui fut payé 1,200 fr. •
•###*
�C6 J
En 180 7, il demanda à son neveu , et ârraclia à' sa
foiblesse ou à la nécessit é , une indemnité pour les cautionnemens qu’il lui avoit fournis ou qu’il devoit lui
fournir.
Cette indemnité fut l’abandon du jardin et du pré
que le sieur Gourby avoit achetés de son père, au mois,
d’août précédent.
L ’abandon fi*t fait par acte du 11 avril 1807, sous
la forme d’une ven te, dont le prix fictif fut porté à
8,000 livres ^tournois, que le sieür Gourby reconnut
avoir reçues avant ces présentes, est-il dît.
Il ne reçut r ie n / il n’a jamais rien reçii pour cela.
L ’a’cte contient promesse de garantir, fournir et faire
valoir de tous troublés, évictions, dettes et hypothèques,
clause d’usage; et il se termine par une clause hypo
thécaire ainsi conçue :
« Pour l’entière exécution des présentes, les parties,
« chacune en ce qui les concerne, ont obligé leurs biens
« présens et à venir, et spécialement ledit sieùr Courby
« un téuement de terre de la contenue d’entour cinq
« cent quarante-huit ares, ou douze septerées mesure
ec locale, appelé le champ de la Rousse, faisant partie
c du domaine de Bicon , situé dans la commune d’A r« tonne , arrondissement de R iom , tel qu’il se limite et
« comporte, les parties n’ayant pu en donner les confins. »
Cet acte est un de ceux qui sert de prétexte à Faction
en stellionat, et qui fait dire au sieur Joubert qu’on l’a
trom pé, en ne lui indiquant pas les hypothèques inscrites
et les hypothèques légales qui grevoicnt tant l’objet
vendu que l’objet hypothéqué.
'*
Les hypothèques inscrites : la loi n’en prescrivoit pas
�. < 7 )
la déclaration , et le sieur Joubert pouvoit facilement
les connoître.
Les hypothèques légales : il les "connoissoit si bien
qu’il les fit purger, en déposant une expédition de la
vente au greffe, en notifiant l’acte de dépôt à la dame
Courby et au procureur im périal, en un m ot, en em
ployant les formalités voulues par la loi.
O n rapporte l’exploit de notification.
L e second acte qu’invoque le sieur Joubert, est du 8
juillet 1808.
, Les circonstances qui ont précédé ou accompagné cet
acte sont utiles à connoître.
L e sieur Courby étoit débiteur envers le sieur Destradat du reste du prix de l’acquisition d’un bien situé
à Sarliève, acquisition qu’il avoit faite dans un temps
prospère, en messidor an 10 et en nivôse an 11.
L e sieuç Courby étoit,, d’un autre côté, créancier
d’une somme de 26,000 livres tournois, reste du prix
de diverses-ventes des .biens de son épouse, /qu’il avoit
Aliénés à cause de leur éloigrçement.
Pour payer le sieur. D estradat, le sieur Courby se
procura de l’argent chez le sieur D um ay, banquier à
Clerm ont, qui paya au sieur Destradat ce que celui-ci
cxigeoit (1 ), et à qui le sieur Courby çéda, pour s’ac
quitter, les a6,ocoo francs qui lui é t o i e n t dûs p a r les
acquéreurs des. biens de sa femme.
(1) Ce que reçut en cet instant le sieur Destraclat, n’étoit
pas-la totalité de sa créance ; mais le reste lui fut payé le i3
du même mois , par le sieur Courby» Celui-ri rapporte la quit
tance finale et authentique.
-------- — •-----
�( 8)
La cession fut faite devant un notaire de Clerm ont,
par le sieur Gourby et par le sieur Joubert, conjointe
ment et solidairement.
‘ L ’acte énonce que les biens vendus composent le do
mairie de M aison-N euve, sis commune de Celles; c’est‘à-dire, ce domaine que la dame Courby s’étoit constitué
sous la même désignation dans son contrat de mariage,
auquel avoit assisté le sieur Joubert.
c 'L e sieur Destradat subroge le sieur Dumay à son pri
vilège de vendeur, et l’autorise à subroger lui-même à
ce privilège les tiers indiqués de qui il recevra les 26,000 f.
E u fin , les deux cédans donnent pour hypothèque,
savoir : le sieur Joubert, son bien de Vinzelles, et le
‘sieur C ourby, son bien de Eicon.
L ’un* et l’autre gardèrént le silence sur les hypothè
ques légales qui grevoient ces deux biens.
Ce silence est aujourd’hui un sujet de reproche de la
part du sieur J o u b ert, qui ne veut pas s’apercevoir que
s’il y eût alors un oubli plutôt qu’une faute, il y participa
en ne déclarant pas lu i- même les hypothèques légales
gue sa propre épouse avoit sur son bien de Vinzelles.
A u reste,-le sieur Joubert, qui se plaint seul de ce
silence , ne fut pas trompé par cet oubli commun; car
il sa v o it, comme nous l’avons déjà remarqué, que la dame
Courby avoit des hypothèques légales; l’acte de cession
même lui en renouveloit le souvenir, en lui indiquant
quels étoient les objets vendus.
- On doit reconnoître que le Sr. Joubert n’avoit paru à cet
dcte’ que pour prêter au Sr. Courby son cautionnement.
'Mais il ne s’y étoit décidé qu’à des conditions fort
onéreuses au sieur Liouruy.~
�(9
)
Ì
Quatre jours auparavant, et devant un notaire de
L e z o u x , il avoit exigé que son neveu lui abandonnât
cinq années du prix de la ferme du bien de B ico n ,
prix de ferme qui étoit annuellement de 6 ,z 5o fr.
L e transport énonce pour prix une somme de 27,000 f.
payée comptant.
#
*
Dans la réalité, le sieur Joubert ne paya que i 5,ooo f.
en effets de commerce (1), et souscrivit des cautionnemens
sur cinq autres effets s’élevant à 10,000 francs, à un an
d’échéance, et datés des 12 et i 5 juillet 1808. ”
L e sieur Joubert a dans la suite exigé qu’on lui fit
compte de ces effets, ainsi qu’on le remarquera bientôt.
Les spéculations du sieur Joubert sur les embarras qu’éprouvoit le sieur Courby, se remarquent encore dans une
opération peu importante, sans doute, mais très-caracté
ristique , qu’il se permit en avril 1809., .
Son neveu lui avoit souscrit, le 16 novembre 1806,
un effet de 10,000 francs, payable à la fin de mai 1810;
L e sieur Joubert fait protester cet effet faute d’accep
tation, le 10 avril 1809.
I l donne sa procuration pour poursuivre par toutes
les voies de droit ; et le n eveu , pour éviter les pour
suites, est obligé de consentir une obligation payable à
la même époque, mais augmentée d ’un supplément d’in
térêt porté par un billet particulier.
______
On l’apporte le protêt et la procuration ; ils furent
(1) Un de ces effets étoit dû par le sieur M ailli, propriétaire
à Ris. Son échéance étoit au mois de décembre suivant. Le
tieur Courby le négocia chez le sieur D u m ay, banquier.
%
27
�( 10 )
remis au sieur C o u rb y , lorsqu’il fit l’obligation qui est
elle-m ôm e rappelée dans une contre-lettre dont il va
être parlé.
.
..
,
r
Le. dernier acte sur lequel se fonde le sieur Joubert,
dans son action en stellionat, est du 9 juillet 1809.
Par cet acte, le sieur Courby vendit a.u sieur Joubert,
i ° . le corps de bien situé à Sarlièv.e , tel qu’il l’avoit
acquis du sieur D estradat, à l’exception des parties qu’il
avoit précédemment vendues au sieur Dumay.
20. D ifférens héritages provenant d’autres acquisitions
particulières, qu’il avoit réunis au bien principal.
Les récoltes pendantes et le prix de ferme de l’année
courant e , furent compris dans l’aliénation.
_ -La vente fut faite moyennant 74,074 f.; savoir, 4,074 f.
pour les récoltes et le prix de ferm e, et le surplus pour
les immeubles»
, L ’acquéreur est chargé de supporter diverses inscrip
tions conservatoires, -prises sur les biens ci-dessus vendus,
est-il d it, par les nommés Cornet d’A u z o l, le sieur de
L a ch en a l , et autres , a y a n t p o u r o b j e t l a g a r a n
tie
DES VENTES CONSENTIES PAR LE SIEÜR C O U R B Y ,
DES BIENS DE L A DAME C OGNORD, SON EPOUSE.
. On énonce aussi quelques autres-inscriptions conser
vatoires que l’acquéreur doit souffrir*
On ne dit pas d’ailleurs que le bien vendu n’étoit
grevé d’aucune autre hypothèque.
IL en existoit réellement 'd’auFrës alors. L e sieur Jou-»
bert les connut; l’état lui en fut même remis par le
sieur Courby; et le sieur Joubert eut la précaution de
les vérifier au bureau de Clermon t, ce qui étoit facile :
�on étoit sur lès l i e u x c h e z le sieur Boutai, notaire à
Clermont.
A la fin de l’acte se trouve cette clause : « Le vendeur
« ............. a hypothéqué spécialement, pour la garantie
« de la présente ven te, son bien et domaine appelé
« Bicon , situé à . , ............lequel bien est déjà grevé de
« différentes hypothèques , dont l ’acquéreur déclare
avoir connoissance. »
T e l est l’acte que l’on présente encore comme ren-*
fermant un stellionat.
- •
La vente portoit quittance, quoique-le prix: ïi’dn eût
pas été payé. L ’emploi de ce prix fut fixé le même'jour
par une contre-lettre, (i)
(1) Voici cette contre:lettre : '
Nous soussignés, Jean-Joseph Joubert , propriétaire, ha
bitant au lieu du Brasset, commune de Vinzelles, et Joseph
Courby-Cognord, propriétaire , habitant de la commune de
Clerm ont, reconnoissons que la vente consentie cejourd’h u l,
par moi Courby, à moi Joubert, devant Boutai........ notaire,
du bien de Sarliève et dépendances, moyennant la somme de
soixante-quinze mille francs, dont l’acte porte quittance, a été
faite à la charge par moi Joubert, de payer en l’acquit de moi
Courby, i°. la somme de dix mille livres, montant de cinq lettres
de change souscrites par moi Courby, au p r o f i t de:moi Joubert,
et négociées par moi C ourby, au profit de différens individus,
par l’entremise de Grangeon fils , lesdites lettres de change
échéant le i 5 juillet présentmois; a°. la somme de a^Syliv. 12 s.,
due au sieur Souanen , en vertu de jugement rendu au tribunal
de commerce de Tliiers, 1q 18 avril dernier, et tant pour prin
cipal qu’intéréts et frais ;
'
3°. La somme de 2,325 francs, montant'd’une lettre de change
�(
1 2
)
> D e la lecture de cette contre-lettre naissent plusieurs
remarques.
i° . On s’aperçoit que les hypothèques inscrites sur
le bien de Sarliève étoient certainement connues du
sieur Joubert ; car celui-ci a la précaution de stipuler
qu’il conservera les titres des créances qu’il est chargé
de 2,000 francs, due au sieur Duffour, par moi Courby, sous le
cautionnement de moi Joubert;
4 °. io ,564 francs dûs par moi Courby, à la dame Forget-Lagrave, tant pour principal qu’intéréts et frais faits jusqu’à ce
jour;
5°. La somme de 10,216 francs , due par moi Courby, au sieur
Claude A lbert, de Riom , aussi pour principal, intérêts et frais,
jusqu’à ce jour; desquelles sommes, moi Joubert, promets et
m’engage à faire tenir quitte ledit Courby, et le garantir et indem
niser de toutes demandes ;
6°. A la charge aussi par moi Joubert, de tenir quitte ledit
Courby de la somme de 10,483 francs, montant du principal
d’une obligation de 10,000 francs, reçue Etournau, notaire,
consentie à mon profit par ledit Courby, échéant au mois de
mai de l’année prochaine, et le surplus pour frais ou différentes
autres avances faites par moi audit Courby;
70. Enfin, à la charge par moi Joubert, de me départir,
comme je me départs par ces présentes, en faveur dudit Courby,
de la cession qu’il m’a consentie devant Belligant, notaire à
L ezou x, le 9 juillet 1808, de la somme de 3 i , 25o francs, à pren
dre sur le fermage du bien de Bicon; laquelle cession, au moyen
des présentes , demeurera dès ce jour comme non avenue, ainsi
que la notification d’icelle faite à ma requête, au sieur Jouandon ,
fermier, autorisant ledit Courby à percevoir le prix dudit bail
à ferme, tout ainsi et de même qu’il avisera ; à l’effet de quoi je
lui en passerai à toute réquisition, acte de département, par-
�( i3 )
de payer, jusqu’à Veritière mainlevée de toutes les insc riptions sur le bien vendu.
2°. On y voit énoncé à l’art. 6 l’obligation de io,ooo f.
qui étoit le remplacement de la lettre de change du i 5
novembre 1806, et pour laquelle on retient 10,483 f . ,
devant notaire , ou lui fournirai procuration pour la percevoir et
toucher le prix chaque année sous mon nom , si bon lui semble,
le tout à ses frais.
Les titres desquelles créances, à l’exception néanmoins de
l’obligation consentie à mon profit, et l’acte de cession du prix
de la ferme de Bicon, resteront en mes mains jusqu'à l ’entière
mainlevée de toutes les inscriptions sur le bien vendu, à la
charge de rapporter les quittances desdits créanciers, dans les
deux années à compter.de ce jour.
En outre des sommes ci-dessus déléguées audit sieur Joubert,
ou quittancées par lu i, moi Courby reconnois aussi avoir reçu
du sieur Joubert, un billet de la somme de 3 , 3oo francs, payable
dans dix-huit mois, à compter de ce jour, sans intérêts, au sieur
Duffour-Riberolle, en acquit de moi Courby, et en diminution
de la créance à lui due en vertu des titres du 22 frimaire.an 1 4 ,
inscrite au bureau de Riom, le 3o frimaire an 14; le surplus de
laquelle créance restera à la charge de moi Courby.
J’ai aussi reçu, en addition du prix principal de ladite ven te,
la somme de 1,800 francs pour épingles, dont quitte.
Les présentes faites ëntrë'no'us, par forme de règlement définitif, et sans'qu’elles puissent donner lieu à aucuns nouveaux
comptes, reprises de part ni d’autre.
Car ainsi fait double entre nous et sous nos signatures, le g
juillet 180g.
Bon pour ce que dessus. Signé Joubert-Darrot.
Bon pour ce. que dessus. Signé Courby-Cognord.
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é n 'y comprenant "de prétendus frais "ou avances; les
483 francs se composent des .frais du notaire* e t 'd ’un
supplément d’intérêt.
3°. On y retrouve à l’art. I er. les 10,000 francs de
lettres de change cautionnées par le sieur Joubert en
juillet 1808, payables en juillet 1809, et dont le cau
tionnement avoit été en partie le prix du transport des
termes à écheoir de la ferme de Bicon.
4°. Il y est parlé à l’art. 9 de ce transport ; ie siéur
Joubert s’en départ.
L e sieur Courby doit à la vérité de déclarer que le
sieur Joubert réduisit pour cet objet sa créance appa
rente à la somme de 2.5, 5oo francs ou environ.
Il lui restoit encore un bénéfice énorme.
Cette vente du bien de S arliève, et l’emploi du prix
indiqué dans la contre-lettre, payoit tout ce qui étoit
clû au sieur Joubert, et délivroit lè sieur Courby du
plus dangereux de ses créanciers.
Les autres créances inscrites sur le bien Sarliève, ou
étaient déjà acquittées, ou étoient sur le^point de l’être.
Aujourd’liüi les dettes personnelles au sieur Courby
fils , et pour lesquelles des inscriptions avoient été prises
sur ses difï’érens biens, sont pour la plupart acquittées;
il a en son pouvoir les titres des créanciers.
* A insi , au mois de-juillet 1809,
au moyen de la
cession qu’il avoit faite en 1808 au sieur Dumay-j -sur
les acquéreurs des biens de son épouse, le sieur Courby
dcvoit se croire sur le point d’être libéré de la plus
grande partie de ses dettes hypothécaires. Il d e v o it, il
�( i 5 )
est v r a i, des sommes considérables à la dame Cognord ,
son épouse; mais il lui restoit pour le payement de
celle-ci le bien de Bicon.
L e sieur Joubert n’ignoroit pas la situation des af
faires du sieur C ourby; il connoissoit toute l’étendue
des créances de l’épouse ; aussi, à l’instant môme où il
acquéroit le bien de Sarliève, il demanda et il fut con*
venu devant le sieur Boutai, notaire, et devant M e. Si«monnet et M e. Bayle, avoués des parties, que le sieur
Courby céderoit à son épouse le bien de Bicon , pour
s’acquitter de tout ce qu’il lui devoit, et pour faire par
là disparoître les hypothèques légales.
Cette convention arrêtée ne put cependant pas rece
voir son exécution sur-le-cham p, parce que le sieur
Courby n’avoit pas les fonds nécessaires à l’enregistrement
d’un acte très-coûteux» :
, ,
, Pour se les procurer, il prit bientôt après, avec le
sieur Joubert, des arrangemens au moyen desquels Fa?
voué qu’avoit à Riom le sieur Jou bert, souscrivit pour
celu i-ci, le 5 novembre 1809, un bon de 2,720 francs,
à valoir, est-il dit, sur le montant de Tenregistrement
de la vente de B ic o n , à consentir par le sieur Courby,
à la dame Cognord, son épouse.
L e sieur C ou rb y, à qui le mandat fut remis, le porta
au sieur Boutai, notaire, qui fît l’acte de vente ou d’é
change, le 8 novem bre, qui le soumit à l’enregisfrement
le 18 , et qui reçut le 23 novembre 2 5 i 6 iivres 13 sous
à compte.
. . . .
L ’avoué, signataire du mandat, refusa-de .payer le sur
p lu s, comme étant un objet d’erreur entra le sieur
,
�J o u b e r t, pour lequel il Vavait f a i t , et le sieur Courby.
On rapporte le m andat, et la quittance à compte et
m o tivée, signée B outai, et écrite derrière le billet (i).
- Gomment, d’après un pareil acte de vente, auquel le
sieur Joubert a si évidemment participé, et qu’il a même
e x ig é , concevoir qu’il ait pu faire plaider , quelques
années après , qu’on lui avoit caché les hypothèques
légales de la dame Courby ?
Mais cet acte avoit besoin de l’homologation de la jus
tice; il n’a été homologué que le 22 mai 1812; e t, avant
ce jo u r, de nouveaux malheurs sont venus frapper le
sieur Courby.
(1) Ce mandat esc écrit de la main de Me. Simonnet. La
quittance, et l’observation qui la su it, sont écrites de la main
de Me. Boutai.
V oici la copie de l’un et l’autre : •
•
«
cc
«
«
te
«
te
cc
« Bon pour la somme de deux mille x vingt livres que je
payerai en l’étude et à Me. Boutai, notaire à Glermont, à
sa réquisition, et à valoir sur le montant de l’enregistrement
de la vente de Bicon, à consentir par M. Courby à la dame
Cognord , son épouse.
« Riom , le cinq novembre mil huit cent neuf, x sept cent.
« J’ai dit deux mille sept cent vingt liv. Signé Simonnet. »
I
cc Reçu de M. Simonnet deux mille cinq cent seize livres
treize sous, à compte du billet d’autre part.
« Ce 23 novembre 1809. Signé Boutai.
cc M. Simonnet n’ayant pas voulu acquitter le surplus du
mandat, comme étant un objet d’erreur entre le sieur Joubert
pour lequel il l’avoit fa it, et le sieur Courby qui m’a remis
ce mandat pour l’enregistrement de sa vente.
* te Cette erjreur provient d’une négociation d’effet. »
D ’un
�( 17 )
D ’un côté, les Acquéreurs des biens de la dame Courby
résistèreut au commandement de payer que leur fit faire
le sieur D um ay, cédataire du p rix; ils formèrent opposition à. ce commandement, sur le motif qu’ils étoient
en danger d’éviction, parce que les biens vendus étoient
dotaux; et ils furent autorisés, par un jugement, à sus
pendre leurs payemens.
Leur opposition avoit été dénoncée au sieur Joubert,
le i i août 1808 ; le jugement'lui fut notifié à la requête
du sieur D u m ay, le 11 juin 1809, avant même qu’il
achetât le bien de Sarliève.
D epuis, le sieur Dumay l’a poursuivi, comme cau
tion solidaire, en restitution du prix de la cession du
18 juillet 1808, et il l’a fait exproprier de ce même bien
de Sarliève, q u i, par adjudication définitive, du 13 dé
cembre 1 8 1 1 , a été vendu 56 ,100 francs.
11 est bon de remarquer que dans les immeubles saisis
et vendus, ne sont compris que ceux qui provenoient
du sieur Destradat, et non ceux que le sieur C ou rbyy
par des acquisitions particulières, avoit réunis au bien
de Sarliève.
L e sieur Joubert est encore en possession de ces héritages particuliers.
D ’un autre côté , les affaires du sieur Courby père
avoient em piré; son épouse fit jDrononcer la séparation
de biens; elle évinça des acquéreurs de ses biens dotaux
vendus par le m ari, et ceux-ci exercèrent leur recours
sur le prix du jardin et du pré que le sieur Courby fils
avoit acquis de‘ s o h 'p è fe , qu’il avoit vèndü luir-mêifTe
au sieur Jo u b ert, et que celui-ci avoit .revendu, le 4
"3
�c
1 8
\
octobre 1811 , au nommé Eloi G audicier, moyennant
'la somme de 6,913 francs 60 centimes.
Un ordre s’ouvrit pour la distribution du prix de
cette dernière vente; des créanciers du père seuls y pro
duisirent leurs titres, et y furent colloqués : c’étoient des
acquéreurs des biens de la mère.
Enfin, dans le même tem ps,la dame Courby-Cognord
fut elle-même troublée dans la propriété de Bicon, par
des créanciers du père; c’est-à-dire, par des acquéreurs
des biens d’une dame R ollat, épouse du sieur Courby
jeune ; acquéreurs qui avoient acheté sous la garantie
solidaire du sieur Courby père , et qui étoient aussi
menacés d’éviction.
1 La dam e Courby-Cognord dénonça au sieur Joubert,
comme possesseur alors de Sarlièvc, les poursuites di
rigées contr’elle.
’
Cette dénonciation n’a cependant pas eu de suites ,
les tiers acquéreurs s’étant désistés de leur action contre
_ la dame Courby.___
■
Telles furent Jes funestes circonstances qui vinrent
tout à coup accabler le sieur C ourby, et q u i, en excitant
dans le sieur Joubert une colère aveugle (1) contre son
n eveu , ont préparé l’action iujurieuse qui est soumise
à la Cour.
, .
'
~~
T
(1) On jugera de la haine du sieur Joubert, par un procédé
assez étrange. Afin de pouvoir contraindre son neveu par corps,
il avoit acheté contre lui une lettre de change du sieur Dumay ,
‘ et poursuivoit sous le nom de celui-ci. L e; sieur Courby alla
; payer le sieur D u m ay, et découvrit alors ces manœuvres.^
�( 19 )
.
^
L e 30 août 1 8 1 1 , le sieur Joubert cite le sieur
Courby en conciliation, et fait les réclamations les plus
exagérées.
Il dem ande,
i°. A raison de la vente du bien de Sarliève , pour prix
principal, frais ou dommages et intérêts. 97,680 fr.
20. A raison de la vente du jardin et
7,070
du pré.....................................
1
.
/>?/ fr. /s 10,970
l Jour dommages-intérêts. 3,000
j
3°. A raison de la cession de 18 0 8 ,
p o u r p rix p r in c ip a l............ 2 5,675 fr.
7
. . .
Pour dommages-intérêts. 10,000
}
- r
'
Il conclut à ce que le sieur Courby soit déclaré stellionataire, et condamné par corps au payement de toutes
ces sommes.
La conciliation n’a pas lieu.
L ’affaire est portée devant le tribunal civil de R io m ,
par exploit du 20 décembre 1811.
L e sieur Joubert, im patient,'ne veut pas attendre le
tour du rôle; il demande que la cause soit jugée comme
.cause urgente. Il obtient cet avantage, sur le motif que
la contestation présentoit ¿1 décider une question de
contrainte par corps, qui exige la plus grande célérité.
Bientôt ses autres vœux sont remplis; et un jugement
du 20 mai 1812 , en décidant qu’il y a stellionat, con
damne par corps le sieur Courby h payer des sommes
beaucoup plus considérables que les avances légitimes
du sieur Joubert.
.
La longueur des motifs de cette décision ne permet
3*
�pas de les transcrire. On les rappellera sommairement
dans la discussion, pour les réfuter.
Ils sont, au reste, indiqués par le dispositif, ainsi
conçu :
■ « L e tribunal, par jugement en premier ressort, fai« sant droit sur tous les objets de la contestation, et
« ayant égard à ce qui résulte des trois actes des 11 avril
a 1807, 9 juillet 1809, et 8 juillet 1808, déclare le
« sieur Coui-by stellionataire, comme ayant, dans lesdits
« trois actes, contracté envers le sieur Joubcrt des en« gageinens qu’il sa voit ne pouvoir pas rem plir, ne
« pouvant se dissimuler à lui-m êm e son insolvabilité,
« soit pour avoir caché à dessein les hypothèques dont
.« étoient grevés plusieurs des immeubles donnés en hya pothèque spéciale, soit principalement pour avoir dis—
« sim ulé, dans lesdits trois actes, l’hypothèque légale
« de sa fem m e, et avoir manqué d’en faire la décla« ration expresse; en conséquence, le condamne par
« corps et prise de sa personne, en vertu des art. z o 5g ,
« 2136 et 2Ï94 du Code Napoléon , h payer au sieur
« Joubert, dans la quinzaine de la signification du p ré -'
« sent jugement à personne ou à dom icile, la somme
« de 51,649 francs ( i ) , pour les créances liquides dues
« à ce dernier, ensemble les intérêts et frais tels que de
« droit ; à payer pareillement dans le même délai ,
« et aussi par corps, en exécution de l’article 126 du
« Code de procédure civile, la somme de 8,000 francs,
(1) Les 5 i , 64<^rancs qu’adjuge le dispositif du jugem ent,
comme créances liquides, se composent, d’après les moti/s ,
�'
t 21 )
à laquelle somme le tribunal évalue d’office les domr
mages-intérêts revenant audit sieur Joubert, ensemble
les intérêts depuis la demande, si mieux n’aiment les
parties faire estimer lesdits dommages-intérêts par. les
«
«
«
«
« sieurs Creuzet, Tantillon et Croisier, experts, habitant
« à R io m , lesquels resteront, aux termes de l’art. 305
« du Code de procédure civile, définitivement nommés,
« faute par les parties, dans les trois jours de la signir
« fication du présent jugement ù personne ou à dotni•« cile, de s’accorder sur le choix d’un seuliQU de tvois
« experts, e t, conformément à. l’article 305 du même
« Code, d’en passer leur déclaration au greffe dans le
« même délai de trois jours , laquelle option lesdites
« parties seront tenues de faire, aussi dan^ la quipzaine
« de la signification du présent jugement h personr^e oji
« à domicile , sinon et faute de ce faire par l’une ou par
« l’autre des parties, ladite fixation de donimages-inté« rêts à la somme de 8,000 francs, restera définitive ; et
« en cas d’option pour l’estimation par experts, le tri« bunal commçt M . le président pour veccyo.ir le serment
« desdits sieurs experts; et avant faire droit $uv le surplus
« des sommes qui pourront revenir au sieur Joubert.,
i°. D u prix de la vente du 11 avril 1807 . . . 7*900 fr.
20. Du prix de la cession du 8 juillet. 1808 . . . . 35, 675
û°. de la différence entre le prix de la. vente du
9 juillet 1809, et celui qu’a produit l’adjudication
du i 3 décembre 1 8 x 1 ................................., ? . * • '
*8.074
m T o t a l ................................................. ."v . . .
On démontrera l’erreur de cette liquidation.
51,649 fr.
�1«
«
«
«
«
«
«
«
«
'«
«
«
pour raison de la vente du domaine de Sarliève, sursoit
jusqu’après la confection de l’ordre qui se poursuit au
tribunal de Clerm ont, pour la distribution du prix de
ce domaine, pour, ledit ordre achevé, les parties venir
entr’elles à com pte, relativement aux sommes que le
sieur Joubert pourra reprendre, comme représentant
ceux des créanciers utilement em ployés, et qu’il a
payés ;
« Sur le surplus des demandes, fins et conclusions ,
met les parties hors de procès ; condamne le sieur
Courby aux dépens et coût du présent jugement, et
ordonne, attendu ce dont il s’agit , q u 'il sera exéculé nonobstant appel , et sans donner caution. »
A in si, ce jugement autorise à priver provisoirement
un citoyen de sa liberté, et à ne lui laisser qu’au fond,
'des prisons la faculté de faire entendre ses plaintes à la
Cour suprême.
L e sieur J o u b ert, prévenu qu’on étoit sur le point
*de demander des défenses contre une disposition qui
n’étoit fondée sur aucune lo i, a eu la prudence de ne
*pas en user.
„
<
■
. T e l est le jugement contre lequel s’est pourvu le sieur
Coui'by.
zi XI se propose d’examiner d’abord s’il y a stellionat ;
Ensuite- quelles sommes sont dues au sieur Joubert,
�c 23 )
<
:
P
.
rem ière
question
M s
.
Y a-t-il stellionat?
Cette question se subdivise.
: II y a stellionat, ont dit les premiers juges, parce
qu’on n’a pas déclaré les hypothèques inscrites.
Il y a stellionat, parce qu’on n’a pas déclaré les hy
pothèques légales et non inscrites.
Examinons la question sous ses .deux i-apports.
§ . I e1'.
Y a-t-il stellionat y à défaut de déclaration des créances
r
,
inscrites ?
La décision rendue sous le premier rapport doit éton
ner; elle nous prouve que l’érudition n’est pas toujours
une garantie sûre contre l’erreur.
Pour démontrer qu’il y àvoit stellionat, les premiers
juges se sont égarés dans des dissertations qui leur ont
fait oublier et les termes et l’esprit de la loi.
L ’article 2o 5g du Code a défini le stellionat ; ët cette
définition est tellement claire, qu’il est difficile de con
cevoir comment le sens a pu en être méconnu.
V o ic i de quelle manière elle est conçue :
« Il y a slellionat, lorsqu’on vend ou qu’on hypo
t h è q u e un immeuble dont on sait n’être, pas pro*« priélaire;
,
�(
( 44)
« Lorsqu’on présente comme libres des biens hypo« théqués, ou*qüè l’on déclare des hypothèques moindres
« que celles dont ces biens sont chargés.
L e premier cas est étranger à la cause; les deux
autres pourroient-ils s’appliquer au sieur C ourby?
Peut-on dire qu’il ait -présenté ses biens comme libres?
Peut-on prétendre qu’il ait déclaré que ses biens
étoient -seulement grevés d’hypothèques moindres que
les hypotlièques réelles ?
Peut-on soutenir, en un m ot, qu’il ait fait une décla
ration ‘mensongère ?
Car c’est dans le mensonge qu’est le délit.
O r , le silence ne constitue pas le mensonge.
Il faut une déclaration expresse, une déclaration con
traire à la vérité,»une déclaration q u i, trompant celui
avec qui l’on contracte , l’em pêche, par la confiance
qu’il accorde à l’assertion , de recourir aux registres
publics pour vérifier le fait.
C ’est cette fausse déclaration qui produit le stellionat.
Les termes de l ’article ie prouvent suffisamment.
La discufcsiôn qui eut lieu au Conseil d’état le démontreroit en core, s’il étoit nécessaire.
Plusieurs des conseillers d’état trouvoient même qu’il
'étoit inutile d'attacher une peine aussi sévère que la
contrainte par corp s , a l a f a u s s e d é c l a r a t i o n du
vendeur .
Mais on répondoit qu’à raison des inscriptions qui
-pouvoient survenir entre la vente et la transcription,
-et qui seroient quelquefois j frauduleusement ménagées
par le vendeur m êm e, on avoit intérêt d’exiger de lui
UNE
�C *5 )
UNE D ÉC L A R A T I O N q u i , le soumettant à la contrainte,
jp ar corp s, l'obligeât iVétre vrai.
On observoit que quoique dans le nouveau système
hypothécaire l’acheteur puisse vérifier les incriptions,
cette circonstance ne rédime point le vendeur de Vobli
gation de fa ire une DÉC LA RAT IO N EXACTE , n ii de la
peine attachée A LA FAUSSE DÉCLARATION.
On ajoutoit que quand le vendeur a des ‘ doutes, il
peut refuser la DÉC LA RAT IO N que Tacquéreur exige
pour payer.
r •;
r
- Mais que si on lui accorde un à-com pte, sur la DÉ
C L AR AT IO N qu’ il f a i t que son bien n’est engagé que
pour une certaine somme , . . . . . et que Vimmeuble sc
„trouve chargé d’une hypothèque beaucoup p lusforte, . . . .
il y a , de la part du vendeur, dol et escroquerie ; et
alors il est juste qu’il devieTine sujet à la contrainte
par corps.
A in s i, il a été reconnu au Conseil d’état que c’étoit
la fausse déclaration seule qui renfermoit le d o l, et
qui rendoit applicable la peine attachée à ce genre de
dol ou au stellionat.
Ne doit-on pas être surpris, d’après cela, de.ee qu’on
ait invoqué dans les motifs du jugement quelques ex
pressions de M . le conseiller d’état R é a l, pour en con
clure que les termes de l’article zo 5g du Code Napo
léon sont seulement indicatifs et non limitatifs des cas
du stellionat.
M . Réal d it, il est v r a i, que: « l’article ne prévoit pas
« tous les cas du stellionat ; qu ’il ne. parle pas de celui
* ou le vendeur? par une obÜgqtioa nouvelle, créeront
4
�(z6 )
«• üne hypothèque dans l’intervalle de la signature de
« l’acte de vente à la transcription. »
L e cas prévu par M. R é a l, pouvoit être dangereux
sous l’empire'de- la loi du n brumaire an 7 , d’aprèS
laquelle la transcription seule transféroit la propriété.
Il ne peut pas avoir lieu sous le Gode, la pïppriété étant
transmise, même à l’égard des tiers, dès l’instant où la
vente est signée.
A u reste, que répond-on à M . Real ? « M. Tronchet
« répond que l’article a été rédigé d’une manière gé-« n érale, afin de ne rien préjuger sur le régime hypok thécaire qui n’est pas encore fixé ; mais comme dans
« tous les systèmes il y aura toujours un intervalle où.
«c.il Sera possible au vendeur d’engager frauduleusement
«. la chose vendue, on a pensé que le remède contre
■
k ces fra u d es , seroit d’autoriser ï acquéreur à e x i g e r
« du vendeur UNE DÉC LARA TI ON qu i soumette celui-ci
* â '¡a wontrdinté par corps. »
: > Ainsi y c’èst toujours d’après la déclaration seule du
vendeur que doit se juger la fraude.
C’est i\ cette déclaration que sont réduits tous les cas
possibles du stellionat.
S’il déclare que son bibn eâtjfranc et q u itte, et qu’il
en impose, il est stellionatairc.
- S’il déclare que son bien n’est engagé que pour une
certaine som m e, et qu’il se trouve chargé iVune hy
pothèque beaucoup plus fo r te yil est encore stellionataire.
Mais s’il ne déclare rien, il n’est pas coupable,
La loi avertit l’acqüércur j elle l’autorise à exiger que
le vendeur s’explique.
• •
�C
î
S i l ’ocquéreur n?useopas de son droit’,; i l ia’h* pas 3îf sb
plaindre,; ,il n’est pas présumé avoir été trompé ; .iljest
présumé, au contraire, avoir vériiiéiles inscriptions exis
tantes, et n^avoir pas eu_besoin ^ d e m a n d e r au Ven
deur une déclaration.
»
!'i '
.-l vEn un ‘m ot, la loi est écrite, et cette loi est pénale.
Ses termes sont clairs, et n’attachent la pëitae qü’frune
fausse déclaration.
• i! ~
< -Les lois pénales ne s’étendent pas ; au contraire, odia,
r e s t r i n g e n d a i
i •.
On ne doit donc pas puiiirjle silence, qtièiüd la loi né
prononce de peine quë'contre le langage et lb mensonge;
Seroit-il nécessaire, d’après ces principes, de suivre
les premiers juges dans leurs dissertation^*, de .répondre
à l’argument qu’ils tirént de la prélènduè insolvabilité
du sieur Courbÿj, à Pépotjue des divers actes qu’il a
passés avec le sieur Joübërt; de réfuter l’application
de quelques anciens arrêts, qui avoient considéré comme
Btellionataires, des débiteurs ou dés'vendeurs qui n’avoient pas fait des déclarations de franc et qliitte? 1
-, Ces vains raisonnemens viennent tous se briser con tre
les termes de la loi.
*■
••
• Jr'îT •*!.
La loi ne punit pas de la contrainte par* corps l’in
solvabilité du débiteur.
C’est une faute, sans dotite, que de contracter quoique
insolvable;
•->
Mais ce n’est point un sfelliôhaf.
'
A u reste, le motif est même utië ‘èrreur d'e fait.
L e sieur Courby n’étoit pas insolvablb à l’époque des
divers actes; et ce qui le prouve ? c’est qit^il àlpnÿé, soit
4 *
�C 28 )
alors, soit".depuis', la plus grande partie de ce quMl'devoit| ¡personnellement à ses créanciers hypothécaires et
inscrits, et il a retiré les. titres de créance.
_ Aussi, aucun de ses créanciers personnels n’a produit
à l’ordre de la distribution du prix du pré et du jardin
venç^u au sieur Joubert, et revendu par celui-ci.
Ce sont les créanciers du père seuls qui ont réclamé
ce prix.
Aujourd’hui m em e^ il restera au sieur Joubert des
moyens d’être payé, soit à l’aide des 26,000 francs qui
sont encore dûs par les acquéreurs des biens de 'la dâme
Courby, soit sur la portion héréditaire du sieur Courby
dans la succession de sa mère. Ce dernier objet a même
été saisi par le sieur Joubert. .
Quant aux anciens arr.êts ,que l’on invoque, ces arrêts
se réduisent, à ce qu’il paraît,:à un seul,' du i^r. février
i 556 , rapporté, par- Louet sur Brodeaii, sommaire 18 ,
Ji.°. 8..
...
' , ¡îî
‘ 1•
• »
, Majs ,cet arrêt isolé,, et rendu sans doute dans de9
cii’constances particulières ,<.ne fa(isoit pas jui'isprudence.
( V oyçz ,ce, que dit A 11roux sur l’article 81 de la cou
tume du Bourbonnais, n°. 5. )
.
,|
D ’a ille u rs, ce n’est pas d ’après les anciens p rin cip e s,
mais d ’après la législation n o u v e lle , qu ’ on doit ju ger une
cause née sous l ’e m p ir e ,de cette législation.
Les lois romaines étoient fort vagues sur le stellionat.
Elles appeloient ainsi toute espèce 'de dol qui n’avoit
pas reçu d’elles un nom particulier; elles s’appliquoient
î\ upe foulejc^e cas.
[ it
. La jijrisprudpnce française a voit; restreint celte appli-
�■C
29
)
cation, et ne considéroit en général comme stellionataire que celui q u i, en obligeant son bien , le déclaroit
franc et quitte.
Mais comme aucune loi précise ne définissoit en France
le stellionnat, il ne seroit pas étonnant que quelques
arrêts, en l’absence de principes positifs, eus'sent varié
sur le sens attaché à ce mot.
Aujourd’h u i, une définition exacte ne permet plus
de variations.
Ces observations, nous les puisons dans les discours
même des orateurs qui ont préparé la loi.
. M . Bigot-Préameneu, dans l’exposé des motifs, après
avoir remarqué que jusqu’à présent aucune règlejixe
n'a voit été à cet égard établie , ajoute :
1
... « La contrainte par corps étant considérée comme une
« sorte de peine, il étoit nécessaire d e spécifier Ja faute
« qui la faisoit encourii’. L e stellionat a été réduit au
« cas qui avoit été le plus généralement reconnu comme
« distinguant ce genre de fraude. »
Il rapporte ensuite les termes de la loi;
M . Gax’xù, tribun, s’exprime ainsi : i'
t..
« Comme il s’agit ici d’une sorte de d élit, et d’une
« voie de.rigueur établie pour la plus grande sûreté du
« créancier, on ne peut qu’applaudir à l’idée qu’ont eue
« les auteurs du projet, de définir lé stellionat ; et là
« définition qu’ils en donnent résout tous les doutes
« et j i x e toutes les idées. »
Comment donc concevoir qu’on puisse négliger cette
définition, pour se jeter dans le vague et dans l’arbi-
�C< 30 }J
traire, que les législateurs ont voulu tprécisdment'faire
disparoître ?
•
' .
Remarquons, au reste, que le silence du débiteur ou
du vendeur n’est pas dangereux aujourd’h u i, -comme il
l ’étoit autrefois.
Autrefois, il étoit impossible aux tiers de connoîtreles hypothèques dont étoient grevés les biens de ceux
avec qui ils conlractoient ; en sorte que .s’ils oublioient
d’exiger une déclaration de franc et quitte, ils pouvoient
être facilement trompés par un débiteur insolvable.
A ujourd’h u i, grâce à la publicité des hypothèques,
introduite par le nouveau système, chacun peut-conn oitre,, en consultant les registres, la situation de celui
avec qui il veut contracter; et rarement on néglige cette
précaution, lorsque l’objet que l’on se propose est im
portant.
Cette considération puissante seroit >uni m otif suffisant
de la limitation apportée par la loi aux cas du stellionat.
E nfin, la loi est telle; il faut la respecter; et ce seroit la blesser., ce seroit vouloir être plus sage qu’elle^
m êm e, ce seroit ‘se montrer plus rigou reu x, que de
l’étendre à des cas qu’elle n’a pas prévus.
L a question de ste llio n a t, sous son p rem ier r a p p o r t ,
se réd u it donc à exam in er si , dans les trois actes qu e
l ’on oppose au sieur C ou rby, il y a eu de sa part une
jfausse déclaration.
Cet examen ne sauroit être long.
Dans les deux prem iers, celui du n avril 1807, et
eèlui du 8 juillet 1808, il y a" silence absolu sur les hy-
�-
,
( âI )
pothèques ; ainsi, point de prétexte pour dire qu’il y
a eu fausse déclaration.
Dans le troisièm e, du 9 juillet 1809, les premiers
juges ont cru trouver une déclaration implicite defr a n c
et quitte.
D éclaration implicite : que veut-on dire par là ? L e mot im plicite, signifie par induction.
*
O r , un délit tel que le stellionat ne se présume pas';
il faut qu’il soit évident. La l o i , pour le reconnoître,
ne se borne pas à des inductions ; elle veut une décla
ration formelle.
1
Mais quelle est la déclaration que présente l’acte du
9 juillet 1809?
E lle est relative à l’objet vendu.
'
L e sieur Courby charge l’acquéreur de supporter
quelques inscriptions conservatoires seulement, et qu’il
indique.
C ’est, d it-on , comme s’il lui avoit dit expressément
qu’il n’y avoit aucune autre inscription sur le bien vendu;
et, à l’appui de cette assertion, on cite la m axim e, qu i
dicit de u n o , 7iegat de altero.
Quel raisonnement!
L e sieur ‘Courby parle , cela est v r k i, de quelques
inscriptions conservatoires, dans l’acte de vente du' bieà
de" Sarliève.
Mais s’ il en p a rle, ce n'est pas pour dire que toutes
les inscriptions se réduisent à celles-là;
C ’est pour dire seulement que l’acquéreur ne pourra
pas en demander la radiation, et qu’il sèra tenu de les
supporter.
�( 32 )
En sorte q u e , relativement à toutes celles pour les
quelles l’obligation de les supporter n’est pas imposée,
l ’acquéreur a eu le droit d’exiger la radiation, et d’agir
à cet effet contre le vendeur ; et c’est en ce sens que
seroit vraie la maxime, qui dicit de uno, negat de altero.
Mais soutenir que parce qu’on a parlé au vendeur
de certaines inscriptions, pour un cas particulier, on a
entendu lui faire une déclaration implicite de fr a n c et
qiiitte pour toutes les autres inscriptions, en v é rité ,
c’est déceler son embarras dans la recherche des moyens;
c’est laisser apercevoir le peu de justesse de l’opinioa
que l’on défend.
A u x'este, ce foible argument est encore détruit par
la contre-lettre, où l’on vo it, i°. qu’il est parlé de plu
sieurs créances exigibles et inscrites, du payement des
quelles le sieur Joubert est chargé ; 2°. que le sieur
Joubert se réserve le droit de retenir les titres des
créances même qu’il payera , ju sq u ’il Ventière main
levée de toutes les inscriptions sur le bien vendu.
L e sieur Joubert connut donc toutes ces inscriptions.
Il les connut d’autant plus facilem ent, que l’acte se
passoit à Glermont m êm e, siège du bureau des hypo
thèques pour le bien vendu: l’état lui en fut remis, et
il les vérifia au bureau avant que l’acte de vente fût passé.
Ainsi disparoît le premier moyen adopté par le tri
bunal dont est appel.
Point de déclaration de franc et quitte, dé la part du
sieur Courby.
Point de déclaration que les hypothèques fussent
Vioipdres qu’elles ne l’étoient réellement.
Sous
�( 33 )
Sous; ce premier rapport ,, il n’a donc: pas .commis, d«
stellionat.
§? I I ,
Yt a -t-il stellionatfa u te de déclarattpn-,de$ hypothèques
légales 2
O n invoque les termes de l’article 2136, d.unCodp^
Napoléon.
Les termes de ce t article paroissent rigoureux.
Transcrivons-^les ; nous examinerons .ensuite quelle,en,,
doit êtreil’application.
A rt. 2136. « Sont toutefois,les, maris et les tuteurs.,
«.tenus de rendre publiques les,hypothèques dont.leura
« biens sont grevés, etjjà^cet effet,;do. requérir eux« mêmes, sans aucun d élai, inscription, aux bureaux à
«.ce établis, sur les immeubles à eux, appar.tenaqti,, et
« sur ceux qui pourront leur appartenir par. la suite*,
« Les maris et les.tuteurs q u i, ayant manqué, de, re«• quérir et de faire faire les inscriptions;oi;données pasi
« le présent article ,,auroient consenti ouilaissé prendre^
« des privilèges ou>des hypothèques sur leurs immeubles,
«r sans-déclarer expressément que lesditsimmeubles étoient
« aiFectés>à l’hypothèquer légale des femmes, et» des mi
te neurs, seront réputés- stellionataires:,.eb.cpn}me tels.
« contraignables par, corps. »
A in s i, à s’en tenir minutieusement h l’expression lit
térale de l’article, tous les maris, tous les tuteurs, qui
ne feroient pas une déclaration.eiigressp; des. hypqtUèquçs
légales, seroient stellionataires.
5
�.C 34 ^
Aucune considération, aucun m o tif, ne pourraient
les garantir de cette tache flétrissante.
•
^
Que de stellionataires en France ! que d’honnêtes gens'
confondus dans les prisons avec de vils criminels!
C a r, si l’on consulte les actes nombreux faits depuis
l’émission du Code, par les maris, par les tuteurs de tous
les rangs, de toutes les fortunes, à peine én rencontrerat-on quelques-uns où soit contenue cette déclaration ex
presse que paroît exiger la loi.
Tous -ces-maris, tous ces tuteurs, seront-ils également
réputés stellionataires? l’erreur sera-t-elle assimilée à la
mauvaise fo i? le silence qui n’a pas trompé sera-t-il puni
comme la fraude qui a nui ?
Non sans doute; on ne peut supposer dans le légis
lateur une injustice aussi choquante.
Si la lo i, dans sa lettre, présente une généralité qui ’
révolte, cherchons dans son esprit la restriction que
l’équité réclame.
’
Appliquons à cette loi ces principes immuables que
les lois romaines nous ont transmis, et que nous enseigne '
leur illustre interprète, le savant Dom at . 1
« Lorsqu’il arrive, dit ce grand jurisconsulte (i), que le
« sens d’une lo i, tout évident qu’il paroît dans les termes,
« conduirait à de fausses conséquences et à des décisions
« qui seraient injustes, si elle étoit indistinctement ap
te pliquée à tout ce qui semble compris dans l’expression»
« Car alors l’évidence de l’injustice qui suivrait de ce sens
(1) Lois civiles, livre préliminaire, titre i er. , section a , au
préambule»,
�k apparent, oblige à découvrir, par une espèce d’inter« prétation, non ce que dit la loi, mais ce qu'elle veut;
« et à juger par son intention quelle est l’étendue et
« quelles sont les bornes que doit avoir son sens. »
. C ’est surtout dans l’interprétation des lois pénales qu’on
doit appliquer cette sage règle.
~
Cherchons donc ce que veut l’article 2136 du Codé*
Napoléon, pour éviter Y injustice évidente qui résulteroit
du sens apparent.
Nos idées seront bientôt fixées, si nous considérons
l ’exposé des motifs de la loi sur le stellionat, et la dis
cussion que cette loi et l’article 2136 firent naître au
Conseil d’état.
« E11 matières civiles, la règle générale interdit la
« contrainte par corps ( Exposé des motifs. ). »
Cette règle si importante dans l’ordre de la soctfcté-jne doit recevoir d’exception que contre les débiteurs q u i,
par leur im m oralité, par leurs j fraudes, se sont rendus
indignes de toute protection.
Mais la fraude ne peut exister sans le concours de
deux circonstances.
Il faut, i° . qu’il y ait eu intention de trom per;
20. Que cette intention ait été rem plie, c'est-à-dire,
qu’on ait trompé réellement.
Il faut qu’il y ait eu intention de tromper.
Car c’est l’intention qui caractérise le d élit, qui eu
détermine la moralité ; c’est la mauvaise intention, le
inalurn consilium qui rend coupable : sans l’intention
frauduleuse, il ne sauroit y avoir de fraude, ni par con
séquent de stellionat.
#
�* ' « 'Lé^stellionat, dit M .'Portalis ( i ) , suppose toujours
« de la fraude ; ainsi tquand'il n’y a qu’erreur et bonne
« f o i ,’ il n’y a pas rde âtèllionat. »
Dans la cause, on ne pourrait reprocher au sieur Courby
q ue'd e l’erreur; sa ‘ bonne1foi d?ailleürs est'évidente.
^7 § i , dans les actes qu’il a passés'avec le sieur Joubert,
il n’a'pas déclaré expressément les'hypothèques légales,
ce " fut par oubli plutôt* que'parH'raude ; ce fut parce
qu’aucuns notaires n’avoient l’usage d’insérer> dans leurs
actes 'de pareilles'^déclarations ; ce fut par une erreur
commune, et que partageable sieur Joubert lui-m êm e,
ainsi que'nous l’avons déjà remarqué.
L e sieur Courby fut d’ailleurs de bonne fo i, et ce
qui1le p ro u ve, c’est que¿;*lors de ces divers* actes , il ne
toucha aucune somme.
Dans l’acte d u '8 juillet- 1808,1’le prix^de la cession
qü’il faisoit fut payé 'en entier là^M.^Destradat.
Dané l’acte du 9 juillet* 1809, les 70,ooosfrancs, prix
de la vente, furent laissés en totalité au -sieur Joubertr
‘qui fut chargé °de p ayer des créanciers qui n’étoient
pas présens.
Si le si eut Courby eût été de ^mauvaise f o i, ‘n’eût-il
pas exigé au moins une partie de ces sommes considé
rables? eût-il consenti à vendre au sieur Joübert« une
propriété d’une graride valeur, sans rien recevoir, et
précisément pour commettre:un stellionat, et pour s’ex
poser aux dangers‘et à la honte que traîne à sa1 suite
u n pareil délit ?
(i)Proc. verb. du Conseil d’état, séance du 16 frimairaan 12.
�C 37 )
Toutési les .circonstances yjtoutes le%présomptipns mo
rales se réunissent donc pour-démontrer qu’il n’y u eu
qu'erreur et bonne f o i , , e t;par conséquent, qu’il u’y a
'■pas'-de'Stelliouat.
, ■■ .
Mais quelle qu’eût été m ê m e .l’iq.tention, du sieur
-G ou rb y, il faudroit, pour queJe-sieur Jouberfe fût fondé
.♦à -se plaindre ^ qu’il^eût : été réellement trom pé, .parole
-silence du.sieur Gourby;sur.lesaliypothèques^légples.'
■
„Q u’on- parcoure ,,ien jçffet }es>d'iççuçsioiîs rqu^putt,pré
paré au Conseil d’état l’adoption;de 1’r.^ticlç? aig6.
L a : loi n’a pas entendu exjger sous: des peines aussi
rigoureuses, une déclaration qui 6eroitCjinutile ; elle* a
ordonné cette déclaration afin,[de,pourvoir à ce que des
tiers ne fussent^pas,,trompés (i). r
Si donc le tiers avec qui >Ie^mari< a traitéf.conaojssoit
l’existence des hypothèques légales ,f le défqut-de décla
ration ne lui a pas nui ; il nerpeut;p asen argumenter,
i -parce qu'il n’a pas été trompé.
Cette vérité est. indiquéenparj la, simple bon ¡sens^et
osiül’onddésire !des- exemples de son application, on .peut
* en trouver dan^des ¡auteurs ^pecta})lesnqui l’ont invo
quée dans un cas bien plus grave que jle simple silence,
dans lencas même d’unQ ^ fa u ^ déclaration.
L a déclaration de; franc et quitte jijquapd-eJle.jéJpit
‘'-»contraire ùi la. vérité ,r.étqit ¡autrefois, généralement ,Tegardée comme caractérisant . le;,.stc>llÎ0Euit de 4 ar niapière
. 'lajtmoina équivoque.
»Cependant, ,si ,le. créancier à, qui ella ¡6toit- faite-¡ea
'
, ■
■....... ■
■
■
— •------- 1- , ■
(i)' Exposé des motifs.
—
�C 38 )
avoit'coniiü'le ménsorige'ien la recevant, il n’avoit pas
le*droit dé s’en plaindre'.'
Pourquoi1? Parce qu’il n’avoit pas été trompé : non
videtur enim deceptus qu i credidit assertioni quam
scitbat esse falsain.
>
’
^ ‘ Telles 'étoient lés- règles du droit français ; règles équi
tables ‘. que la raison accu eille, et que nous attestent
M . Louet s u r!Brodeau ( sommaire 18 , n°. 4 ) , M . A u t o u x et M . le président D u re t, sur l’article 81 de la
coutume du Bourbonnais.
' Ainsi le mensonge même n’étoit pas pun i, lorsque ce
mensonge* 71'avoit pas trompé.
A plus forte raison le silence doit-il être pardonné,
lorsque ce silence n’a causé aucune erreur.
^..jEjcammons si le sieür Joubert a connu Pexistcnce des
hypothèques légales.
*
Il assure les avoir ignorées*
! 1
i
i
Cependant, oncle et parrain du sieur Courby, il a été
un des négociateurs de son mariage;
li a assisté au contrat de mariage, où la dot mobilière
de la dame Courby est détaillée article par article, et il
a signé ce contrat ;
'■
"■
■
Il a acheté, dès 1806, les rentes dotales désignées dans
le contrat de mariage ; on lui a remis les actes de rati
fication, consentis en laveur du sieur Cognord père, et
il perçoit encore ces rentes.
A nous arrêter même h ces premières circonstances,
ne p ou rro lt-on pas dire qu’elles sont suffisantes pour
démontrer la connoissance des hypothèques légales de
la dame C ourby, de la part d’un parent aussi proche,
�( (39
)
qui a signé Tacté mêmé constitutif de ces hypothéqués,
et qui est devenu acquéreur d’une partie de la dotim obilière pour laquelle elles existènt. . j
!■
Mais poursuivons.
;
ot /i»
[ " ¡i'i-'
L e i i avril 18 0 9 ,jle sieur Joubert achète du.,sieur
Courby umjardin et un pré. 1 ) 1 >
br; n')?. xOn ne lui déclare pas les hypothèques légales ; et
cependant il dépose son contrat au greffe; il fait noti
fier l’acte de dépôt à la femme et au procureur impérial.
En un m o t, il purge ces hypothèques l égales. : t>
< Il les connoissoit donc, quoique non déclarées.
Et n’est-ce pas un jeu, que de dire que les hypothèques
légales ont été purgées seulement pour l’immeuble vendu,
et non pour l’immeuble donné en hypothèque, comme
garantie de la re n te ? , •
:> :
v fi
. Que signifie ce raisonnement , quant à la question?
D étruit-il le fait de la connoissance des hypothèques
légales, connoissance prouvée par les formalités même
qu’on a remplies? . :r - - -x
‘ ( ; :
L e sieur Joubert pouvoit-il ignorer,que l’hypothèque
légale s’étendoit sur tous les biens du m ari; qu’elle
grevoit l’objet qui lui étoit donné pour gage, comme
l’objet qui lui avoit été vendu?
<
;
Pouvoit-il croire à une réduction de cette hypothèque
générale, tandis qu’aucune déclaration, aucun indice
même ne lui faisoit présumer cette réduction. . - ;
L e sieur Joubert ne sauroit échapper à une preuve
aussi forte, émanée de son propre fait. ;
' ,
Il a connu l’existence des hypothèques légales.
�............. C(4or))
L o llb i lui apprenoitique1ces hypothèques'grevoient,
tous; les biens du mari;
•:
Cette connoissance positive qu’iba eue dès le premier^
acte qu’il a passé avec le sieur Courby, ne lui permet
pâs'd’allëgüèruson ignorance^lorsi des .actesi postérieurs.
L e second acte, celui du 8 rjuillet‘>i8ô8,/ne'Contient)
rien qui'-pût détruirela connoissanceiacquiseï précédem
ment par le sieur iJouberti
A u contraire; on y parle: deà ventes consenties'par
le sieur Courby ; des biens qui-composent* le domaine
de M aison-N euve, sis commune de)Celles<; c’est-à-dire,
qu^om appreùd auLsieur Jôubert la- vente de ce. même
bieii' qu’il1 avoit entendu la dame Courby se constituer!
sous là' même désignation, dans» lé contrat-de» mariage
auquel il avoit assisté; en sorte qu’ont lui donnoit-. par
là'uninoüVeV avisd è l’existence des hypothèques,légales.
(Cet a v is 'lui? fu t renouvelé»; soit par Facteidu r i août
i8 o 8 y queMüii-fit notifier1 le* sieur D u m a y ,.p o u r lui.
apprendre la résistance des acquéreurs et le* motif sur
lfequell ils se foüdoient; soit par 1le jugem ent qui autoïifcoit ces acquéreurs à ne pas payer, jugement qui lut
fut signifié’ le 20 juin 1809.
Cet avis fut encore répété-avec lestexpressions les plus
formelles dans l’acte de vente du biem de> Sarliève, du
9 juillet 1809, puisqu’on^ soumet formellement le sieur
Joubert à supporter les inscriptions prises pour la gatantie des rentes consenties par le sieur Courby, des
biens de la dame Cognord, son épouse.
Quoi de plus positif que ces-expressions !
Quoi
�( 4i )
Quoi de plus clair et de plus propre à apprendre l’exis
tence des hypothèques légales qui étoient acquises à la
fem m e, sur les biens du m ari, par. le fait de la vente
des immeubles dotaux !
:
. N ’a-t-on pas même le droit de dire que l’on trouve
dans cette phi’ase la déclaration expresse des hypothèques^
légales, exigée par la lo i? .
,
j On remarque aussi dans cet acte du 9 juillet 1809, une
déclaration importante faite par le sieur Joubert.
1
. En recevant pour hypothèque et comme garantie de
la vente, le bien cfe B ico n , il déclare qu’il cpnnoît les
différentes hypothèques dont ce bien rét oit déjà grevé.
. « Lequel bien est déjà g re v é vde différentes liypothè« ques dont l’acquéreur tdéclare avoir connoissance. »
Dira-t-il, avec lespremiers juges, que cette déclaration
ne doit s’appliquer qu’aux hypothèques inscrites; tandis
qu’il parle de différentes hypothèques ; tandis, que, par
ces expressions générales, il les comprend* toutes, de
quelque espèce qu’elles soient ; tandis qu’il est prouvé
surtout qu’il connoissoit alors les hypothèques légales. ;
'E n fin , aura-t-il recours à une vaine subtilité, et sou
tiendra-t-il que s’il ne peut, en son nom , agir en stellionat, il le peut au moins au nom du sieur Dum ay,
créancier, aux droits duquel il est subrogé comme
caution.
Miserable et dernière •ressource, qu’il est facile de
détruire.
t .
On pourroit répondre d’abord que la caution n’est
subrogée que lorsque le payement est effectué.
O r , le sieur Dumay n’est pas encore payé.
6
�( 42 )
- M ais, sans employer même ce moyen de droit, deux
puissans motifs feroient disparoître la distinction.
Prem ièrem ent, il est un principe certain en «morale
et en législation :
•
Celui qui a participé à une fraude, ne peut en ar
gumenter contre le coupable. S i duo dolo m a lo jècer in t ,
invicem de dolo non agent.
' Si une faute a été commise le 8 juillet 1808, à l’égard
du sieur D um ay, par-le silence gardé sur les hypothè
ques légales qui grevoient les biens du sieur C ou rb y,
le sieur Joubert, qui s’engageoit solidairem ent, a par
ticip é'à cette faute, puisque les hypothèques légales lui
étoient connues à lui-même, ainsi que nous l’avons prouvé.
Il
en a commis en outre une semblable, et qui lui
ést personnelle, en gardant aussi le silence sur les hy
pothèques légales dont étoit chargé son bien de V in zelles, qu’il donnoit pour hypothèque de son propre
engagement.
•
*
■ A in s i, le sieur Joubert n’a le droit de faire aucun
reproche au sieur Courby.
Secondement, il a toujours été de principe que les
actions pénales ne se transmettent pas. ' '
' Les lois romaines présentent beaucoup d?exemples
de cette vérité.
*
■. f .
L ’héritier même à qui la loi accorde le ju s universum ,
n’a cependant pas le droit de poursuivre l’application
d’une p ein e, lorsque l’action n’a pas été commencée
^par le défunt.
L a subrogation aux droits, que. la lo i «accorde à la
çaution y n’emporte que les droits ordinaires, les droits
�¿
43)
pécuniaires, et non le droit extraordinaire d’agir'en
stellionat.
Lorsque le créancier direct n’exerce pas lui-même
l ’action pénale, il est présum é, ou remettre la peine ,
ou n’avoir pas de motifs réels de se plaindre.
. Qui pourroit, en effet, nous apprendre, si ce n’est le
sieur Dumay en personne, qu’il n’a pas eu connoissance
des hypothèques légales, qu’il a cru qu’il n’en existoit
pas; en un m o t, qu’il a été trompé. *
Un tiers ne peut tenir ce langage en son nom , et priver
ainsi celui qu’il accuse des moyens de faire tomber l’ac
cusation par les questions qu’il feroit devant la justice
au sieur Dumay lui-même.
' Toutes ces raisons démontrent que le sieur Joubert
n’auroit le droit d’agir en stellionat que s’il avoit été
trompé personnellement.
O r , il est prouvé qu’il ne l’a pas été par le silence
dont il se plaint.
•
- Il est prouvé qu’il connoissoit l’existence des hypo
thèques légales, et qu’une déclaration lui étoit par con
séquent inutile.
,
.
Il
est prouvé même qu’il a provoqué la vente du bien
de B ico n , par le sieur Gourby à son épouse , pour ac
quitter celle-ci de ses reprises dotales.
Cela est prouvé par les deniers qu’il a fournis pour
l’enregistrement de cette vente.
Cela seroit prouvé par témoins, s’il étoit nécessaire,
et avec des circonstances qui démonti’eroient l’odieux du
prétexte d’ignorance et de fraude qu’emploie aujourd’hui
le sieur Joubert.
6 *
�( 44 )
Comment donc le sieur Joubert a-t-il pu s’aveugler
assez lui-même pour croire qu’il en imposeroit à la jus
tice, pour crier au d o l, signaler le sieur Courby comme
stellionataire, le dénoncer à l’opinion et aux magistrats,
demander vengeance contre lu i, et attenter à sa liberté?
E t quel est celui qu’il attaque avec cet acharnement?
Un neveu ! un filleul ! ! !
C ’est trop nous occuper d’un stellionat imaginaire.
Examinons les condamnations pécuniaires.
i
Seconde
question
T
'l
.
Quelles sommes sont dues au sieur Joubert
L e tribunal dont est appel condamne le sieur Courby
à payer au sieur Joubert, i° . 51,649 francs en princi
paux liquidés par le jugement;
2°. 8,000 francs pour dommages et intérêts;
Et cela outre les sommes que le sieur Joubert pourra
avoir le droit de réclamer par Tévénement de la distri
bution du prix de l’adjudication du bien de Sarliève.
Les 51,649 francs liquidés se composent,
D u prix entier dé la vente du 11 avril 1809. 7,900 fr.
D u p r ix de la cession du 8 ju illet 1808. . . . 25,675
D e la différence entre le prix de la vente
du 9 juillet 1809, qui étoit de 74,074 f r . , et
le prix de l’adjudication du 13 décembre 1 8 11,
qui est de 56 ,100 fr. : cette différence est portée
à ............................................................................... 18,074
1 Ces divers principaux ont été alloués avec intérêts.
La liquidation renferme diverses erreurs.
�Première erreur.
Relativement aux objets acquis le n avril 1807, par
le sieur Joubert, et qu’il a revendus au nommé Gaud ic ie r, le 4 octobre 1811 , son acquéreur n’a pas été
dépossédé ; seulement il a été obligé de rapporter à un
ordre le prix de la seconde vente.
Ce p rix étoit de 6,913 francs 60 centimes.
' L e sieur Joubert a été privé de ce second prix , par
la distribution qui en a été faite aux créanciers du sieur
Courby père.
Mais il n’a été privé que de cela; il ne devoit donc
pas réclamer davantage; et le jugement a mal jugé en
lui accordant 7,900 fr.', au lieu de 6,913 fr. 60 centimes,
montant de sa perte réelle.
Quant aux 18,074 f r ., différence fixée entre le prix de
la vente de 1809, et celui de l’adjudication, il y a eu, de la
part des premiers juges, erreur de fait et erreur de droit.
Erreur de fait.
.
^ L a vente de 1809, faite au'm ois de juillet, comprenoit non-seulement les immeubles,‘ mais encore la récolte pendante, et le prix de fermé de l’année; et ces
derniers objets, dont a profité le sieur Joubert, étoient
portés dans le prix total pour 4,074 francs, ce qui réduisoit à 70,000 francs celui des immeuBles.
C’étoit donc cette dernière somme seulement que les
premiers juges, dans leur système inêm er devoient com
parer au prix de l’adjudication.
Encore devoient-ils déduire des 70,000 francs la valeur
de plusieurs héritages qui n’a voient pas été saisis, et
qui n’ont pas été vendus, comme nousTî>vons pré^XT
demment remarqué.
�Ces diverses déductions auroient réduit à beaucoup audessous de 18,000 francs, la différence des prix des deux
ventes.
Mais il y a erreur en droit dans la décision dont est
appel.
Cette décision est fondée sur l’art. 2 19 1, qui n’a pas la
moindre application à la question.
L e sieur Joubert n’a pas été évincé comme acquéreur;
il a été exproprié comme débiteur solidaire ou comme
caution, faute de payement.
,
Que peut-il donc exiger?
,
L e remboursement de ce qu’il aura payé pour le sieur
jCourby, débiteur,direct, et les intérêts de cette somme, à
titre de dommages et intérêts. (V o y . Code N apoléon,
art. i i 53 .)
Son bien vendu aux enchères est présumé avoir été
yendu à la vraie valeur qu’ il avoit à l’instant de la vente.
Dans tous les cas, s’il lui étoit dû des dommages et
intérêts, ce ne seroit que suivant la différence qui se
■trouveroit entre le prix de l’adjudication et la valeur
réelle du bien adjugé , considérée à l’époque de l’adju
dication ; o r , cette différence ne pourroit être appréciée
.que par des experts.
Une autre erreur du jugement est relative aux 8,000 fr.
de dommages et intérêts, qu’ils ont accordés au sieur
.Jou b ert, outre les 18,000 francs de supplément de prix.
C’est évidemment avoir accordé deux fois des dom
mages et intérêts pour le meme objet.
N i l’une ni l’autre somme n’étoient dues. L e sieur
Joubert n’a droit qu’à la restitution de ce qu’il aura payé,
et aux intérêts.
�'
^
(( A47 )ï
C’est par corps que le sieur Courby a été condamné
à payer les 8,000 f r ., et on s’est m otivé, pour prononcer
cette contrainte, sur le pouvoir discrétionnaire, accordé
aux juges par l’article 126 du Code de procédure.
Sans doute les magistrats ont ce pouvoir; mais la loi
ne leur a confié ce dangereux droit, qu’en leur recom
mandant la plus grande prudence, et la modération la pluà
scrupuleuse dans l’exercice d’une si puissante autorité.
: C ’est pour les cas d’un dol évident et d’un tort causó
par la fraude à l’homme confiant, qu’ils doivent réserveé
l’usage de l’arme que la loi a mise dans leurs mains.
- Nous avons démontré que le sieur Courby n’avoit
point trompé le sieur Jo u b ert, et qu’il étoit malheu
reux plutôt que coupable.
‘
A in si, quand il auroit dû des dommages et intérêts,
on ne devoit p^s l’y éondamner par corps.
Telles sont les erreurs nombreuses que renferme la
décision des-premiers juges.
' La plus grave est celle relative au stellionat. ‘
>•
* - Dépositaires de l’honneur et de la liberté de leurs
concitoyens, avec quel soin les magistrats ne doivent-1ils pas conserver ce précieux dépôt ?
Sans doute ils doivent punir les coupables ; mais ce
n’est qu’en apportant la plus sage circonspection à l’exa
men des preuves, avant de prononcer qu’il y a délit.
L e stellionat est un délit ; il ne peut donc y avoir
de stellionat sans intention criminelle , sans fraude.
^ L ’intention même ne sufliroit pas pour constituer le
d é lit, si cette intention perfide n’avoit pas été remplie
si le créancier n’avoit • pas été trom pé1 réellement.
�( 48 )
L e sieur Joubert se plaint de ce qu’on ne lui a pas dé
claré les hypothèques inscrites et les hypothèques légales.
Les hypothèques inscrites : il pouvoit les connoître.
Les registres publics lui étoient ouverts; il les a même,
vérifiés.
•
.
.. Les hypothèques légales.: il les a connues. Cette vérité
est démontrée, non par des présomptions vagues, mais
par des preuves écrites , consignées dans un grand
nombre d’actes où le sieur Joubert a été présent, ou qui
lui ont été notifiés.
A in s i, le sieur Joubert n’a pas été trompé.
'
,
E t comment l’auroit-il été par un jeune homme sans
expérience, lui d’un âge beaucoup plus avancé , lui
depuis long-temps exercé aux affaires? •
r .
Ses plaintes, ses allégations de fraude, son accusation,
ne sont donc que les cris d’une colère aveugle ;
Cris impuissans devant des magistrats impassibles;
Cris qui doivent indigner dans la bouchetd’un oncle,
d’ un parrain;- qui se déclare le persécuteur de celui-là
mêm e que la nature, la religion lui imposeroient le
devoir de protéger et de secourir.
j
•
Signé C O U R B Y .
M e. A L L E M A N D , avocat.
M e. M A R I E , avoué licencié.
A RIOM, de l’imp. de THIBAUD, imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison LANDRIOT,.— Mars 1813.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Courby-Cognord, Jean-Joseph. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
stellionat
hypothèques
fraudes
ventes fictive
saisie
dol
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean-Joseph Courby-Cognord, appelant ; contre le sieur Jean-Joseph Joubert, intimé.
note manuscrite : « jugement confirmé par arrêt du 5 mai 1813. Voyez les motifs à la suite du mémoire de l'intimé. Il y a pourvoi en cassation. »
Table Godemel : Stellionat. - existe-t-il : 1°. si le vendeur ne déclare pas les hypothèques auxquelles l’objet vendu était assujetti, et si le prix de la revente faite par l’acquéreur est absorbé par les créanciers inscrits du premier vendeur ? 2°. si le mari a cédé, comme lui appartenant, le prix des biens dotaux de son épouse ? 3°. si dans la vente d’un domaine on a compris nominativement des objets dont on n’était pas propriétaire ? 4°. si on a déclaré des hypothèques moindres que celles qui frappaient l’objet vendu ? 5°. Enfin, si l’on a hypothéqué des biens, sans déclarer les hypothèques particulières ou légales dont ils étaient grevés ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
1807-1813
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2218
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2217
BCU_Factums_G2219
BCU_Factums_G2220
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Thiers (63430)
Cournon-d'Auvergne (63124)
Petit-Sarliève (domaine du)
Artonne (63012)
Celles-sur-Durolle (63066)
Maison-Neuve (domaine de)
Brassets (domaine des)
Vinzelles (63461)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
dol
domaines agricoles
fraudes
hypothèques
saisie
stellionat
ventes
ventes fictive
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MÉMOIRE
C o u r ro yale.
E N
till
_ _
_______
_______
R E P O N S E
2« CHAMBRE.
POUR
L e s s i e u r s J e a n - G i lb e r t e t N ic o la s - F é l i x D U M A Y
et
le
s ie u r
C H A M B O R D O N , su b ro g é tu te u r
d u m i n e u r P R U N E Y R E tous intimes;
°
CONTRE
,
L es sie u rs C R O M A R IA S et R O U G I E R anciens A v o u é s,
d e m eu ran t à R l o m . a p p e l a n t s ,
•: ■!
H!
E u présence de M B O N N E F O Y , A vou é à Is s o ire , a u s s i i n tim e .
L es sieurs Crom arías et R o u g ie r, cessionnaires du prix de cer
taines aliénations consenties p a r le sieur P ru n e y re , sont intervenus
dans un ordre ouvert sur le prix des biens de ce dernier;
Ils ont demandé la nullité de différents titres de créance des
frères D u m a y, notamment d’un acte du 29 mai 1 844 p a r lequel
ceux-ci ont é té subrogés à l'hypothèque légale du mineur P runeyre.
Ils ont cru voir dans ces actes le résultat d’un concert frau duleu x,
organisé entre les sieurs D um ay et les sieurs P runeyre et Chamb o rd o n , leurs beaux-frères. Ils ont indiqué e n c o re , comme prem ier
artisan de cette prétendue fraude , Me Bonnefoy, avoué à Issoire ,
�qui avail etc chargé par e u x de purger l'hypothèque légale du
mineur P runeyre , et q u i , depuis, a occupé pour les sieurs Dumay.
Cette demande a été accompagnée des imputations les plus mal
veillantes, mais, hûtons-nous de le d ire, les plus hasardées, soit
contre les frères D u m a y , soit contre le sieur Bonnefoy.
Attaqué devant le tribunal ou il exerce ses fonctions , le sieur
Bonnefoy ne pouvait laisser sans réponse les insinuations dirigées
contre sa délicatesse; il deyait aller au-devant des réserves dont ou
semblait le m e n a ce r, et il est intervenu dans l’instance en son nom
personnel.
Cependant, au jour fixé pour la plaidoirie, les sieurs Cromarias
et Rougier se sont bornés à prendre des conclusions; ils n'ont pas
été défendus, et le tribunal d’Issoire a adjugé les conclusions des
intimés. L e jugement dont est appel ne porte donc pas avec lui le
préjugé qui s’attache ordinairement à la décision d’une première
juridiction, puisque la cause n’a pas été discutée devant les premiers
juges. Mais les conclusions signifiées par les intimés, la communi
cation de leurs titres, auraient dû rectifier bien des erreurs de fait
et d’appréciation, commises par les adversaires dans l’exposé de leur
demande.
Devant la c o u r , on n'en a tenu aucun compte; les sieurs C r o
marias et Rougier ont fait imprimer, sous le titre d ’ Observations ,
un mémoire dans lequel les faits sont exposés d’une manière incom
plète et souvent inexacte.
j
On n’y reconnaît pas le véritable caractère des actes «soumis à
l’appréciation de la cour ; on y dénature les intentions des inti
m és; on in vo q u e , presque à chaque p a g e , la parenté qui existe
entr’eux et le sieur Bonnefoy, e t, pour constater une fraude qui
n’est nulle p ari, 011 va jusqu’à la calomnie, espérant, comme don
Basile , qu’il en restera quelque chose.
Les sieurs Dumay et Chambordon , connus jusqu’à ce jour sous
des rapports honorables, doivent aux magistrats et au public l’e x
plication de leur conduite; ils se doivent à eux-mèmes de réfuter
�-
3 -
les imputations odieuses , à l’aide desquelles on a essayé de les
ilélrir.
Après avoir exposé fidèlement les faits d e là cause, ils espèrent
démontrer deux choses : d’a b o rd , qu’il n’a existé ni concert frau
duleux, ni fraude , à l’occasion des actes attaqués; et qu’il ne peut
être question que d’exam iner, si les intimés se sont mépris sur la
véritable étendue de leurs droits ;
E t en second lieu , que leslactes attaqués, et notamment celui qui
a subrogé le sieur Félix Dumay à l'hypothèque légale du mineur
P ru n e y re , sont des actes valables, et doivent être maintenus.
!
FAITS.
ül
v
L e sieur P run eyre contracta mariage avec la demoiselle Thérèse
D u m a y , le 5 i mars 1825.
Les père et mère de la future lui constituèrent, en avancement
d’hoirie, un trousseau en valeur de 5 ,000 f r ., livré lors de la c é
lébration du mariage , et une somme de 20,000 fr . , exigible à la
volonté du futur.
Différents dons ou institutions d’héritier furent faits en faveur
du futur par la dame P u e l , sa m è r e , la dame M a lb e t, sa tante, et
le sieur Louis P runeyre , son aïeul.
L a dame D u m a y , épouse Pruneyre , décéda trois ans après son
m a riag e , laissant un seul enfant , mineur , sous la tutelle de sou
père. M. Jean-Baptiste Dumay , aïeul du mineur , fut nommé son
subrogé-tuteur.
Le sieur Pruneyre n’avait pas encore touché la dot de son épouse ;
mais peu d’années après il eut une occasion d’en faire emploi dans
son intérêt personnel.
11 acheta de M. de Séguin, une propriété située à Saint-GermainL em bron , connue sous le nom d’E n c lo s -d e -la -F o r ê t, moyennant
80,000 f r ., dont 20,000 fr, furent payés comptant, e lle s 60,000fr.
%€f
�%SS
- 4 -
restant, stipulés payables en cinq termes de 12,000 fr.lch a cu n ,
d’année en année.
L e sieur Pruneyre n’ayant pas les 20,000 fr. qu’il devait payer
immédiatement, réclama de M. D u m a y , son b e a u -p è re, la dot
promise à son, épouse, qui lui fut payée en argent ou en valeurs né
gociables ; il en donna quittance à M. Dumay le 20 octobre 1827,
par un acte sous seing-privé, soumis plus tard à l’enregistremerit ; et
les valeurs provenues de M. D um ay furent remises ou négociées
à M. de S ég u in , qui consentit la vente de l’E nclos-de-la-F orêt, le
a 3 du même mois.
1
Voilà donc , quand et comment a été payée cette dot que les
sieurs Croinarias et Rougier ont prétendu n’avoir jamais été reçue
par le sieur P r u n e y re ; cette somme de 20,000 fr. appartenait au
mineur P runeyre , et son père n’avait pu la toucher que comme
tuteur; d e là ^hypothèque légale du m ineur, dont il sera souvent
question dans le procès.
L e sieur P runeyre avait été obligé de contracter des emprunts
considérables, pour finir de payer le prix de son acquisition à
¡NI. de Séguin.
Notamment, le 17 février i 8 3 8 , il avait emprunté à M. Paul Roudelle, une somme de 2 5 ,000 fr. alors restée due à M. de Séguin ,
qu i, en la recevant, avait subrogé ce bailleur de fonds à scs p rivi
lèges et hypothèques, jusqu’à concurrence de la somme par lui
prêtée.
Cependant le sieur P r u n e y re , sur la fin de 184* j e t ,dans les
premiers mois de 1842, avait vendu, en détail, différents immeu
bles situés à Auzat-sur-Allicr. 11 avait accordé des termes éloignés
pour le payement des prix de ces diverses aliénations.
La dernière do ces ventes est du î q juillet 18 4 2 , et il parait que
dès cette é p o q u e , ou m ê m e auparavant, le sieur P runeyre avait
arrêté le projet d’une cession de ces prix de vente, aux sieurs C r o
inarias et R ougier , qui font assez volontiers des spéculations de
cette nature. Mais pour éviter un v o ya g e des deux associés, de
�Rioin à Saint-Germ ain-Lembron , le sieur R ouglcr fut chargé seul
de conclure cette affaire , et le sieur C-roniarias lui donna une p r o
curation datée, du 20 juillet i8/j2, qui l’autorisait à acquérir pour
lui et en<son nom, ou de compte ci-demi, diverses créances mon
tant à la somme de 17,8 11 fr., dues à M. Joseph Pruneyre par
plusieurs personnes , etc., dont il connaît les échéances ; p ro cu
ration qui l’autorisait à a cq u érir, à tel p r ix qu’ il aviserait , ci
p a yer comptant ,-ou à prendre des délais , etc.
En ellet, le 11 août 1842 , et par acte reçu V ern iè re , notaire à
Saint-Germain , P runeyre fit cession aux sieurs Rougier et C ro niarias d’une somme de 1 7 ,8 1 1 fr. à lui due pour divers prix de
ventes dont il est inutile de donner le détail ; ensemble des intérêts
desdites sommes, depuis qu’ils avaient pris cours jusqu’au payement
intégral;
L e sieur Rougier accepta la cession , tant pour lui que pour le
sieur CrOmarias.
./ J ç ..
11 est dit dans l’a c t c , que la cession est faite moyennant pareille
somme de 1 7,8 11 francs que ledit sieur Pruneyre déclare avoir
reçue de M. Rougier , ès-dite qualité , et dont il lui donne quit
tance..
\Y‘\ -uvi'süï
I/acte constate e niin , que le sieur P runeyre a remis au sieur
Rougier les grosses exécutoires des actes de vente dont le prix
faisait l’objet de la cession. ■
;
Ainsi d o n c , le sieur Cromarias donne pouvoir de p a yer comp
ta n t ; le sieur Rougier paye comptant le prix de la cession ; peu
importe qu’ils aient ou non réellement payé la somme entière de
1 7 ,8 11 francs;(peu importe le bénéfice que devait leur procurer
cette opération.
,n
Ce qu’il importe de retenir, c ’est qu’ils payaient comptant, quoique
les immeubles dont le* prix leur était cédé , fussent grevés de l’h y
pothèque légale du mineur P runeyre , de l’hypolhèque légale de la
dame Sadourny , seconde épouse du vendeur , et qu’ils ne pussent
pas l'ignorer. Llsl-cc par imprudence qu’ils agissaient ainsi? L ’on
�verra bientôt le contraire. D ’ailleurs , comment supposer une p a
reille imprudence de la part de deux anciens avoués ; aussi rompus
aux affaires que soigneux de leurs intérêts ?(Il faut donc le recon
naître , si les sieurs Cromarias et Rougier avaient payé com ptant,
c ’est parce que la position sociale du sieur P r u n e y r e , sa fortune ,
au moins apparente, le crédit dont il jouissait, leur avait inspire
comme à tous ceux qui le connaissaient, la plus solide confiance;
c ’est parce qu’ils étaient sans inquiétude sur sa solvabilité; et cepen
dant on les verra, plus la r d , prétendre que les frères Dum ay ne
devaient pas avoir la même confiance , et qu’ils devaient nécessai
rement connaître la situation fâcheuse de leur beau-frère
Q uoi qu’il en s o it , les sieurs Cromarias et R ougier voulaient
faire p urger les hypothèques légales qui grevaient les immeubles
aliénés par le sieur Pruneyre , et notamment celle de son enfant
mineur du premier lit.
'•»
■
C ’est en parlant de cette purge que les sieurs Cromariaset Rougier,
dans leurs observations, commencent à dénaturer les faits, à substi
tuer le mensonge à la vérité.
Ils disent d’abord , page 5 , que le prix de la cession du i1 août
18 4 2 , quoique quittancé dans l’a cte , ne devait être p a yép a r euæ
qu'après la purge de l’hypothèque légale du mineur. Comment
croire à cette allégation imaginée p our le besoin de la ca u se ,
si formellement démentie par les énonciations de l’acte authentique?
Ils disent ensuite :
« Le sieur P r u n e y r e , qu i était seul porteur des actes de vente,
sechargea de faire opérer cette p u r g e . . . L es pièces fu r e n t remises
à M* Bonnefoy , parent de la famille D u m a y , et avoué à Issoire. »
Les sieurs Dumay n’ont aucune connaissance personnelle de cette
partie des faits; mais il est évident pour eux , il le sera bientôt pour
la C o u r, que Pruneyre n'était pas chargé de faire opérer la p u rge ,
et que ce n’est pas lui qui en a donne la mission à M* Bonnefoy.
Il existe divers motifs pour le démontrer.
En g é n é ra l, le vend eu r, déjà payé du prix de la vente, n’a aucun
�intérêt à faire purger les hypothèques existantes sur l’immeuble vendu.
L e sieur Pruneyre nîétait pas se u l porteur des actes; la cession
constate qu’il en avait fait la remise au sieur Rougier.
i
L e sieur R o u g ie r , nanti des actes , était seul intéressé à p urger;
ce n’est pas le sieur P runeyre qui a fait choix de M e Bonnefoy ;
depuis long-temps , il avait pour avoué M* V ach er , et si la purge
eût été à sa charge , c ’est à Me V acher qu’il eut remis les pièces.
Lejsieur R o u g ie r , au contraire, avait alors de fréquentes rela
yons d’aflairesiavécM * Bonnefoy. C ’est lui qui chargea M e B o n
nefoy de faire cette p u rg e , et lui remit les actes. Une lettre du g août
18^2, écrite, de Riom, par le sieur R ougier à Ma Bonnefoy, ne laisse
aucun doute sur ce point."
M e Bonnefoy fit opérer la p u r g e , et suivant lui , c ’est d ’après
l’indication du sieur R o u g i e r , qu’il fit notifier l’acte de dépôt des
contrats de vente au .'sieur'Auguste D u m a y , receveur des hos
pices, oncle du mineur Pruneyre ,1 qui par erreur fut considéré
par le sieur R ougier
com m e subrogé-tuteur.
Celte notification était donc irrégulière en ce qu’elle était faite
au sieur Dum ay qui n’était pas subrogé-tuteur de son neveu ; elle
l’était encore, en ce que la damé D u m a y , première épouse du sieur
Pruneyre, n’y est pas indiquée sous son véritable prénom de T h crèze D u m a y , mais sous celüi de 'Joséphine.
Cependant les sieurs Cromarias et Rougier continuent ainsi : « le
sieur Dum ay n’avait pas cette qualité ; il garda cependant un
silence absolu sur Ferreur. I l avait ses projets , sans doute ; car
il était depuis ■
835 , caution avec son frère , et pour une somme
considérable , du sieur Pruneyre dont les affaires embarrassées
leur étaient nécessairem ent connues . »
t 1
La notification destinée au subrogé-tuteur n’avait pas été faite du
domicile du sieur D u m a y , mais bien au bureau des hospices dont il
était receveur , et en parlant à son em ployé ; le sieur Dum ay dé
clare que cette copie ne lui a jamais été remise, et voilà la cause na
turelle de son silence... Il est' cependant probable que s’il eût eu
�XI0
- 8-
connaissance de cette purge , elle iie>l’aurait nullement inquiété ni
pour les intérêts du mineur , ni pour les suites du cautionnement
qu’il avait donné personnellement au sieur Pruneyre; parce qu’alors,
comme les sieurs Crotnarias et R o u g ie r , il avaiu une confiance
entière dans la solvabilité de celui-ci , tandis qu’au contraire, s’il
eût eu connaissance des embarras et de la situationifâcheuse des
affaires du sieur Pruneyre, il aurait pris des mesures pour échapper
aux suites possibles de ce cautionnement ; il aurait dû faire plus ; et
quoique n’étant pas le subrogé-tuteur ; il aurait dû prendre une ins
cription pour conserver l’hypothèque légale du mineur j il y'/était
autorisé, comme p a r e n t , par l’art. 2 i 3 g du code civil, lir:-
r
i
L e sieur Dum ay n’avait donc pas ses p r o j e t s . . 11 ne pouvait en
avoir aucun. Ni lu i, ni son frère n’étaient e n c o r e les créanciers du
sieur P runeyre ; ils ne pouvaient avoiriaucun intérêt à ce que la
purge de l’hypothèque légale du mineur fût ou non faite régulière
ment. Pas d’intérêt, pas de fraude possible. Comment donc a-t-on pu
dire et imprimer que , dans un but d’intérêt personnel, et par suite
d’un concert frauduleux, l’un d’eux ci laissé croire aux acquéreurs du
sieur P runeyre qu’il était le subrogé-tuteur de son neveu , que tous
les deux ont vouluprofiter ensuite d’une erreur qu i est en quelque
sorte leur ouvrage ?
!-
: ;u
- ■
“.> i
ni'
Il faut donc le retenir ; puisque cctle.;nullitéide purge légale
est la base de tout système de fraude imaginé parles sieurs Cromarias
et Rougier , les frères Dum ay ont été complètement étrangers à
tout ce qui s’est passé à cet égard ; M. Bonnefoy n’a a g i, ni dû agir
pour eux qui n’avaient aucun intérêt ; il n’a point agi non plus pour
le sieur Pruneyre. Il n’a été l’instrumentique du sieur R ougier ; et
si la purge légale est nulle , le sieur Rougier ne peut l’imputer qu’à
lui-même.
;il
Nous devons maintenant ,' faire connaître les faits qui ont donné
naissance aux divers titres de créance des frères Dum ay contre le
sieur Pruneyre.
,j.
Ce dernier, grûccs ù une fortune apparente assez considérable, et
�à son second mariage avec mademoiselle S a d o u r n y , avait eu lo n g
temps un crédit très étendu ; il n’existait sur ses biens , aucune ins
cription ; et ces diverses circonstances lui avaient permis de faire de
nombreux emprunts , par lettres de change ou billets à ordre , dont
le plus grand nombre souscrit à la maison Comitis et Marche , qui
elle-même les avait donnés comme doublure , et par voie d’endos
sement, à ses bailleurs de fonds.
En avril i 843 * la maison Comitis tomba en état i de faillite ; les
nombreux créanciers de cette maison luttèrent de diligence pour la
conservation de leurs droits ; ceux qui étaient porteurs de la signature
du sieur P ru n e y re , d’abord rassurés individuellement, lorsqu’ils se
connurent tous , se trouvèrent si nombreux , que cette signature
devint presque sans valeur. L e sieur P runeyre était en état de décon
fiture; il devait plus de 25 o ,ooo fr.
'
;i, •
On conçoit qu’en présence d’un tel désastre , tous les créanciers ,
si cruellement désabusés sur.une solvabilité qui jusque-là n’avait été
douteuse pour p ersonne, durent prendre leurs mesures pour o b
tenir des titres authentiques, .d’ une manière amiable, ou par la voie
judiciaire, afin d’avoir des h ypothèques; et aucun d’eux n’y a
manqué.
.
Parmi les créanciers figurait la maison D u c h é -D u m a y -B o y e r , de
lliom , pour une somme de 14,000 francs, montant de trois lettres
de change souscrites depuis plusieurs années.
Quant aux frères D u m a y, ils n’étaient pas personnellement créan
ciers du sieur P runeyre ; mais ilsl’avaient cautionné , par voie d’aval,
pour une somme de 20,000 francs, montant de deux, lettres de
change par lui souscrites à M. Félix Ilouganne, le 20 novembre
i 8 5 5 ; ils avaient donc à courir la chance de p ayer le sieur Rouganne, sans obtenir un recours utile contre le sieur Pruneyre, prin_
cipal débiteur. 11 était de leur intérêt de prévenir un pareil résultat.
Ils payèrent donc la somme due au sieur R o u g a n n c , et deman
dèrent aimablement au s i e u r P r u n e y r e , ce qu’ils auraient obtenu de
la justice, sur une simple assignation : un litre hypothécaire.
�D ’un autre côté, le sieur Félix D um ay, qui avait fait prêter par la
maison dont il est l’associé, une somme de 14,000 francs au sieur
P r u n e y r e , voulait aussi un titre pour la somme qui était due à celte
maison ; mais par m alh eur, il ne lui était tombé suus la main que
deux des effets du sieur P runeyre , s’élevant à 10,000 francs; et
dans la persuasion qu’il n’étaitpas dù autre chose à la maison Duché,
il ne réclama de titre que pour les io',ooo francs. 11 avait oublié un
effet de 4 iOOO francs, dont le montant est absolument perdu pour
la maison D uché-D um ay-Boyer.
C ’est donc pour les 20,000 francs payés à II. R o u g a n u e , et pour
les 10,000 francs faisant partie de la somme due à la maison Duché,
que le 8 mai 1843 , le sieur Pruneyre souscrivit aux frères Dumay
une obligation de la somme de 3 o ,ooo francs, et cela, bien entendu,
sauf au sieur Félix Dumay à faire compte à sa maison de banque de
la somme de 10,000 francs.
,
A in s i, quoique l ’acte constate que l’obligation est causée pour
prêt fait des avant ce jo u r et hors la v u e des notaires , il ne faut
pas en conclure avec les sieurs Cromarias et Rougier, qu'il n’ était
rien dû a u x sieurs Dum ay , et qu’il s’agit d’un titre frauduleux ,
simulé entre le débiteur et ses deux beaux-frères, pour diminuer le
gage des créanciers légitimes.
r;>'
L e sieur Pruneyre avait donné une hypothèque sur scs immeubles
situés dans la commune d’Auzat, vendus depuis 1842 ( et q u i , par
conséquent, ne pouvaient plus êire hypothéqués par lui) et sur ses
immeubles de St.-Gcrmain-Lcmbron. Les frères Dumay prirent une
inscriptiou.
Quant aux autres créanciers du sieur P r u n e y re , ils avaient agi
judiciairement; trente-cinq jugements avaient été rendus à leur pro
lit par les tribunaux de commerce d’Issoire cl de C le r m o n t, qui
tous condamnaient le sieur Pruneyre au payement des effets qu’il
avait souscrits ; qui tous prononçaient contre lui la contrainte par
corps.
Il ne restait de disponible au sieur Pruneyre que la propriété de
�la Forêt, qu’il avait acquise de M. de Séguin ; la saisie immobilière
on fut faite en février 1844 > à l‘n requête du sieur P a p o n , l’un des
créanciers inscrits.
‘
f|' . ^
Les sieurs Dumay doivent ici déclarer hautemeut, que pour par
venir au recouvrement de leur créance, ils ont voulu faireUout ce
qui était permis par la l o i , tout ce qu’aurait eu le droit de faire lui—
même tel autre créancier du sieur P runeyre; et s’ils n’ont fait
qu’exercer un droit légitime , leur qualité de parents du sieur Pru
neyre et du sieur Cham bordon, ne saurait donner à leurs actes un
caractère de fraude qu’ils n’ont jamais eu.
L e sieur F élix Dumay a voulu exercer le droit qui appartient à
tout créancier de payer le créancier qui lui est préférable, à raison
de ses privilèges et h yp othèqu es, afin de se faire subroger aux
droits de ce créancier. Droit incontestable, puisé dans les lois r o
maines, connu dans notre ancienne législation sous le nom de droit
d ’ o ffr ir , et formellement reconnu par l’art. 125 i du code civil ;
droit qui peut être exercé contre tout créancier indistinctement,
majeur ou m ineur, capable ou incapable; droit enfin, pour l’exe r
cice duquel la loi n’a exigé aucune forme sacramentelle.
On a dit plus haut que le sieur Paul Roudelle avait été subrogé
aux droits de M. de Séguin sur la propriété de la F o r ê t , jusqu’à
concurrence d’ une somme de 2 5 ,ooo fr. Cette somme n’avait pas
été remboursée au sieur Roudelle ; et ce d e r n ie r , ne voulant pas
subir les lenteurs d’une saisie immobilière e t'd ’un o rd re , annonça
l’intention d’exercer son privilège de vendeur, et de demander lu
résolution de la vente consentie par le sieur Séguin à P ru n e y re , le
a 5 octobre 1827. Cette mesure eût été très préjudiciable à la masse
des créanciers.
Pour en prévenir les conséquences, le sieur Félix Dum ay fit des
offres amiables au sieur R oudelle, de lui payer sa créance avec
subrogation; sur le refus du s i e u r Roudelle, il lui fit faire des offres
réelles par le ministère d’huissier, e l l e 19 avril 1844 » le sieur
Roudelle lui donna quittance de la somme de 2G,4o5 fr. 5 o c ., qui
�lui était alors d u e , 'en principal, intérêts et frais, et le subrogea à
ses privilèges et hypothèques.
L e sieur Félix Dumay n’avait fait qu’exercer à l’égard du sieur
R o u d c lle , ce droit incontestable accordé par l’art. I 2 5 i du code
civil. Il crut qu’il était de son intérêt d’exercer le même droit à
l’égard du mineur P r u n e y re , et deise faire subroger à son h y p o
thèque légale. P o u r cela , il n’avait pas à s’inquiéter ni des droits
des autres créanciers du sieur P ru n e y re , ni de ceux des acquéreurs
des biens d’Auzut et des cessionnaires Cromarias et Rougier, ni de la
question de savoir si ces droits avaient été plus ou moins c o m p r o
mis par la négligence des tiers intéressés; il n’avait qu’une seule
chose à fa ir e , offrir réellement et payer la créance du m in e u r, et
en obtenir à l’amiable ou en justice, une quittance portant subro
gation.
Dans un état de choses ordinaire et n o rm a l, ces offres auraient
dû être faites au tuteur du mineur Pruneyre. L e sieur Dum ay
pensa q u e , vu les circonstances, il était plus prudent, et plus con
forme aux intérêts du mineur, de faire ces offres au subrogé-tuteur.
On en fera bientôt connaître les motifs.
Mais le mineur Pruneyre n’avait pas de subrogé-tuteur. L e sieur
Dum ay père , son aïeul m aternel, qui avait eu cette qualité , était
décédé en 1829 , et n’avait pas été remplacé. Aucune circonstance
impérieuse n’avait nécessité ce remplacement.
L e s choses ayant changé, il était urgent de nommer un subrogétuteur. Celte nomination , les frères D u m a y, et tous autres créan
ciers du sieur Pruneyre auraient pu la provoquer dans leur intérêt
personnel; mais avant tout, elle était commandée p a r le s intérêts
du mineur.
C e n’est pas les sieurs Dumay qui ont fu it procéder à cette no
mination; c ’est le sieur P r u n e y r e , c’est le luteur lui-même qui a
fait convoquer le conseil de fam ille, et si les deux frères Dumay y
ont figuré, c ’est comme plus proches parents maternels du mineur ,
désignés par la loi pour en faire partie.
�~
X>?
,3 _
Du reste, cette nomination d’un subrogé-tuteur était indispen
sable; l’article 420 du code civil exige qu'il y en ait un dans toute
tutelle.
t . >(!
Mais il y avait de graves motifs pour se presser.
1 ..!)■
‘
f v
L e sieur P r u n e y re , ruiné, exproprié de son dernier immeuble ,
courant le risque d ’ètre appréhendé au c o r p s , n’ayant plus rien à
sa disposition, ne pouvait plus subvenir aux charges de la tutelle ,
ni fournir aux besoins du mineur, à son entretien, à sa nourriture ,
à son éducation. L e sieur P runeyre était dans le cas d’ètre destitué
de la tutelle. Mais pourquoi cette humiliation inutile?
D ’une autre p a r t , il y avait évidemment opposition entre les inté
rêts du mineur Pruneyre et ceux de son tuteur. L ’expropriation du
sieur Pruneyre allait donner lieu à un ordre entre ses créanciers; il
fallait exercer à cet o rd re , dans l’intérêt du mineur, les droits r é
sultant du contrat de mariage de sa mère ; il n’était pas convenable
que le sieur P r u n e y r e , débiteur et partie-saisie, vînt en qualité de
tuteur, demander à cet ordre , et sur lui-m èm e, la collocation de
la créance de.son fils; il était encore moins prudent de laisser passer
entre scs mains le montant de la collocation. Il fallait enfin prendre
des mesures, pour qu’à l’avenir les revenus du mineur fussent e m
ployés à ses besoins et à son éducation.
Dans la délibération du 22 mai 1844 ; Pnr laquelle le sieur Cliambordon fut nommé subrogé-tuteur, on ne pouvait énoncer tous ces
motifs peu favorables au tuteur, mais le sieur Pruneyre y expose
nu conseil de famille, qu’il a des intérêts opposés à ceux de son fils à
exercer immédiatement, et qu’il y a lieu de procéder à la nomina
tion d'un subrogé-tuteur, leq u el devra être autorisé à exercer les
actions immobilières du m ineur, soit dans la recherche des biens
et droits de sa m è r e , soit pour tous actes d’administration ou
autres , dans lesquels il se trouverait lui-même empêché.
Après cet exposé, le conseil do famille nonune subrogé-tuteur le
sficur C h am b o rd o n , oncle par alliance du m iucur, qui accepte le
onctions et prête serment.
�T e l est cet acte nécessite par les intérêts du mineur
ont été l’ objet.
qui seuls en
i'
Laissons les sieurs Cromarias et Rougier chercher les moyens de
prouver à la Cour, q u e, comme ils le prétendent, cet acte est frau
duleux, et continuons le récit des faits.
Le conseil de famille du mineur Pruneyre avait du v o ir dans la
nomination du subrogé-tuteur, la substitution de ce dernier, comme
administrateur de laifortune du m ineur, à un tuteur qui ne pouvait
plus administrer. Dans son exposé au conseil de famille , le sieur
P runeyre l’avait compris, l’avait ainsi voulu lui-m êm e; après avoir
pourvu à la surveillance des droits et des intérêts de son fils, le sieur
Pruneyre , sans domicile comme sans profession , devait quitter
l’ Auvergne pour se soustraire à des menaces de contrainte par corps.
Il ne tarda pointa seifixer à Paris.
. ¡,
Mais le subrogé-tuteur n’avait à sa disposition aucune ressource
appartenant au mineur; ce jeune homme , depuis plusieurs années,
avait été placé par son père à Montpellier , dans la maison d’un mé
decin, chargé de soigner sa santé et de pourvoir aux frais de son en
tretien, de sa nourriture et de son éducation . les frais de sa pension
dépassaient 2000 francs par année.
Pour y p o u r v o ir , il fallait attendre les ressources lointaines qui
devaient provenir au mineur de sa collocation sur le prix des biens
de son p è r e , et subir les lenteurs ordinaires d’un ordre qui pouvait
se compliquer d’incidents ; le procès actuel en est la preuve.
D ’un autre côté, le sieur Félix Duinay avait le droit et la volonté
de payer le mineur Pruneyre , pour se faire subroger à son h y p o
thèque légale.
Pour y parvenir, il devait payer la créance du mineur P runeyre,
en l ’acquit du sieur Pruneyre qui en était le seul débiteur? Devaitil, pouvait-il convenablement l'offrir et la payer au sieur Pruneyre
considéré comme tuteur, ayant seul capacité pour administrer et pour
recevoir les capitaux mobiliers du mineur? 11 en pensa différemment;
il trouva plus p ru d en t, pour son intérêt personnel et pour celui du
�xyy.
-< i5 —
mineur, de s’adresser au subrogé-tuteur , sauf à prendre des garan
ties pour assurer au mineur la conservation de sa c r é a n ce , afin qu’il
pût la recevoir intacte au moment de sa majorité ; afin que les r e
venus du mineur pussent être annuellement perçus et employés à
ses besoins jusqu’à cette époque.
1
.
¡m n
Dans cette pensée, le sieur Félix Dumay s’adressa au sieur Cham
bordon, pour obtenir à l’amiable, de lui, une subrogation qu’il aurait
pu obtenir de la justice, après des offres,,réelles et sur assignation.
En conséquence , et le 29 mai 1844 > ^ ful
entre le sieur
Ghambordon agissant comme subrogé-tuteur , et le sieur D um ay,
un acte dans lequel :on l’appelle des faits incontestables , l’état de
déconfiture du sieur P runeyre , la position fâcheuse du mineur,
l’embarras o u , pour mieux d ir e , l’impossibilité du subrogé-tuteur
de faire les avances nécessaires à ses besoins et à son éducation , et
l’on ajoute :
. j.:
i° Q ue le sieur Dum ay , voulant aider le sieurn Chambordon,
dans les m oyens de faciliter les dépenses nécessaires à l’éducation et
aux besoins de leur neveu co m m u n , tout en assurant au mineur
la perception du capital de sa créance, à l’époque de sa majorité,
a présentement p ayé comptant , pour et en l’acquit de M. P r u
neyre père , son beau-frère, au sieur Ch am bordon, ce acceptant eu
qualité de subrogé-tuteur du mineur Pruneyre, la somme de 25 ,000
fr. e t, de laquelle somme ledit sieur Chambordon donne quittance
au sieur Dumay payant de ses deniers personnels, pour ledit sieur
Pruneyre père ;
ül
...
20 Q ue le sieur Chambordon , en la qualité qu’il a g i t , subroge le
sieur Dumay dans les droits, privilège etihypothèque légale du mi
neur Pruneyre contre led it sieur Pruneyre père , jusqua co n cu r
rence de ladite somme de 23,000 fr.;
5 " Q u e cette somme de 20,000 fr. sera immédiatement versée à
la caisse des consignations , par ¡VI. C h am bo rdo n , en qualité de su
brogé-tuteur , pour y rester jusqu’à l’époque de la majorité du
mineur , et avec déclaration que cette somme est la propriété du
�% r*
_
,6 -
m ineur, et que les intérêts annuels de ladite somme seront touchés
par ledit sieur C h am b o rd o n , pour les employer aux besoins ¡du
mineur jusqu’à sa majorité;
>J:- :ü
j.
iq
4® Enfin , que M. Chambordon se charge de faire compte au
mineur Pruneyre de la différence d’intérêts qui existe entre le taux
de la caisse des consignations, et le taux légal en matière du prêt.
E t en effet, le lendemain même de cet acte, le sieur Cham bordon
versa la somme de 25 ,ooo fr. à la recette générale de C le n n o n t ,
avec toutes les déclarations nécessaires pour en garantir la propriété
au mineur/'
r
•
■
' •'
>11
]N'ous devions faire connaître les clauses de cet acte que l’on
cherche à dénaturer , en le qualifiant de cession illégale des droits
du mineur P ru n e y re ’j par un subrogé-tuteur qui n’avait point capa
cité pour la faire. On y verra que les intérêts du mineur ont été
soigneusement conservés; que cet acte lui a procuré des ressources
immédiates ; qu’il ne s’agit pas d’une cession, mais d’un payement
accepté; que cet acte n’est entouré'd’aucune circonstance qui puisse
ressembler à la’fraude; ét'qu’en droit, il reste seulement à examiner
si le payement a été régulièrement fait, si la subrogation qui en a
été la suite est valable.
1(1
n , ¡n
Cependant la saisie-immobilière de l’enclos [de la F orêt avait cté
poursuivie à la requête du sieur Papou , par le ministère de M®
Bonnefoy, son avoué. L ’adjudication définitive était fixée au 6 juin
1844 > et trcs Peu d c temps avant cette époque le sieur Papon était
décédé. Il existait donc une saisie immobilière , sans créancier
poursuivant. Il importait d’éviter les lenteurs d’une nouvelle p r o
cédure , les frais de nouvelles appositions d’afiiehes, et le siéur Félix
Dtimay , conformément à la l o i , et le jour même fixé pour l’adju
dication, se subrogea à la poursuite com m encéc'par le sieur Papon ;
il ne crut pas devoir charger un autre avoué d’une procédure qui
louchait à sa fin, qui avait etc faite par i\I. Bonnefoy sous sa respon
sabilité, dont toutes les pièces étaient en son pouvoir; c’est pour cette
cause toute naturelle, que plus tard , lorsque les sieurs Cromarias
�c l Rougier.ont attaqué de fraude tous les titres de créance des frères
D u m a y , ceux-ci'ont chargé ¡VIe Bonnefoy du soin de leur défense;
comment donc les adversaires peuvent-ils voir un nouvel élément
de fraude dans cette circonstance insignifiante , en rappelant à chaque
ligne la parenté de M" Bonnefoy et des sieurs D u m ay? Q u a n ta
M* Bonnefoy y si violemment attaqué dans sa delicatesse , dans<sa
probité d’ofiiciér.iministcriel, par ses anciens clients, pouvait-il
avoir quelque motif sérieux ou même de simple convenance pour
ne pas accepter la confiance des frères Dumay ?
jXous ne pouvons terminer le récit des faits de cette cause sans
dire un meit d’une dernière circonstance que les sieurs Cromarias
et Rougier ont voulu rattacher au procès, quoiqu’elle soit fort indif
férente.
V r,n;3Î.:
. "¡•.S'
ils disent , p a g p 'io ,'que le payement fait au sieur Chambordon,
n’était pas utile au mineur, puisque les 23 ,o o o fr. versés n’ont
jamais servi à ses dépensesiquoique ce fût le prétexte donné dans la
quittance; et ils ajoutent, que ce prétexte était d’autant plus faux,
que le 26 janvier 1845, le conseil de fam ille, où assistèrent, soit le
sieur Chambordon, soit le sieur Félix D u m a y , autorisèrent le tuteur
à emprunter 1 , 3oo fr. pourifairc face aux dépenses de l’éducation
du mineur.
I
>oq
La circonstance de cet emprunt peut s’expliquer facilement ; la
somme de 25»ooo fi\ était un capital auquel le subrogé-tuteur ni le
tuteur lui-même ne devaient pas toucher; l’acte du 29 mai 1844-»
et la quiltance du versement, indiquaient même que celte somme
devait resterjù la/caisse des dépôts et consignations jusquà la ma
jorité du mineur Pruneyre. Les intérêts seuls de celle somme de
vaient être touchés par le subrogé-luieur, pour faire face aux besoins
et à l’éducation du mineur ; o r , celte somme 11’avait été versée que
le 5o mai 1844- > losjinlérêts ne pouvaient être exigés d e l à caisse
que le Zo mai 184 5 , cItI’oxi¡n’élail encore qu’au mois de janvier. Il
n’y avait aucune ressource présente applicable aux besoins du mi
neur. Voilà la t'ause de ce projet d’e m p r u n l, car il n’a point été
3
�H W °-
-
,8 -
réalisé. L e sieur Félix Dumay fit Fayanco de <ln pension de son
neveu ; il a fait depuis beaucoup d’autres avances dans l'intérêt de ce
dernier. ; > .ri ¡1
n — >vi)i.
-I unob juuuiiu«
Du reste ,1le sieur Félix Dumay n’ayant comparu que par un man
dataire à cette assemblée de famille, n’a pu y faire connaîti’e le paie
ment qu’il avait effectué au sieur Cliambordon, le 2g mai 1 844 î cl
quanti au sieur Chambordon , c ’est par erreur que: l’on a dit qu’ il y
était présent. Il ne faisait point partie du conseil de famille, ij u 1.
.jqoooi» <hr
Il nous reste peu de faits à rapporter. 'iir¡ifn«o
L ’adjudication de l’enclos de Laforêt avait'eu lieu l e 6 juin: 184 4 »
et un ordre avait été ou ve rt, sur le prix , aii* tribunal d’issoire:
Les frères Dumay y avaient produit pour demander la colloca
tion de l’obligation de 5 o , o o o , du 8 mai 1 8 /f5 ; le sieur Félix Dumay
avaitiaussi demandé la collocation de la somme par|lui pavée au
sieur Rondelle.
j . i:
;un
Il est vrai qu’il n’a point demandé à être colloqué en vertu de l’hypolhcque légale du mineur Pruneyre, pour la sommé de 23,000 fr.
à laquelle il avait été subrogé; agir ainsi eût été diamétralement
contraire à ses intérêts ; le sieur Dumay ne pouvait espérer la collo
cation de sa créance de 5 o,ooo f r ., qu’autant que l'effet de l’h yp o
thèque légale du mineur ne s’exercerait pas sur les biens dont le
prix était en distribution.
)■
"‘j i.
jiíó
Il est encore vrai que dans la même pensée, et sans s’occuper des
intérêts des tiers, mais dans le but de recouvrer unoicréance légi
time , qu’il était peu disposé à perdre , quoique beau-frère de son
débiteur, il a dégrevé l’enclos de Laforêt de l’inscription prise en
vertu de cette hypothèque légale, pour la faire peser uniquement
sur les autres biens du sieur P runeyre/¡ü: ■
»
Les choses étaient dans cet état, lorsque les sieurs! Rougier et
Crom arías, assistés de quelques-uns des acquéreurs des immeul.les
d’Auzat-sur-Allicr , sont intervenus dans l’instance d’ordre * par une
requête du 14 lllf|rs i8/(5 , suivie d’ordonnance et d’assignation aux
frères Duinny , au sieur Chambordon et au sieur P runeyre; aprè>
�— >9 —
avoir présente les f;iils dans le sens passionné de leur intérêt, en les
accompagnant d’allégations plus ou moins mensongères , ils ont de
mandé la nullité des différents actes qui constituent la créance des
frères D u m a y , comme faits en fraude de leur droit; cette fraude
aurait été concertée entre les quatre beaux-frères, assistés de M e Bon
nefoy , dès l’acteide notification fait par les soins de cet avoué , pour
p u rge r I’hypothcquo;légale du mineur P r u n e y re ; elle aurait été
consommée par la quittance du ag mai 1844, qu’ils qualifient de
cession illégale dqs.droits d é m in e u r P runeyre.
t u '.
Ils ont pareillement assigné l'adjudicataire de la propriété de la
Forêt et le premier créancier inscrit en assistance de cause.
r
L e 27 juin , 1,845 * les frères Dumay ont fait signifier des conclu
sions contenant, leurs ¡moyens de défense; ils ont demandé le rejet
de loutes¡les demandes formées par les sieurs Cromarías ot R o u g ier,1
et! la suppression de la -requête
du
14 mars
i 8 4 5 , comme
calomnieuse.¿ovin'' ib
■: ■ilitou
M. Bonnefoy est intervenu dans l’instance , et a pris des conclu
sions personnelles contre les sieurs Cromarias et Rougier.
C ’esL dans cet état ,•■que le 3 décembre i 8 4 5 , jour fixé pour la
plaidoirie, les adversaires firent prendre, p a r le u r a v o u é , des
conclusions contenant le développement de leur demande, et qu’a-*
près avoir entendu les plaidoiries des avocats des intimés et de
M. Boiinefoy , ainsi que le ministère public , le tribunal a rendu un
jugement qui déclare les sieurs Cromarias et Rougier purement et
simplement non recevables dans leurs demandes , et les en déboule ;
ordonne, en outre , la suppression de la requête du 14 mais 1 8 4 5 ,
en ce qui concerne les frères Dumay ; statue ensuite sur l’intervention
et la demande de M. Bonnefoy, et condamne les sieurs Cromarias
et Rougier aux dépens envers toutes les parties.
L ’appel de ce jugement fait r e v iv re , à la vé rité , toutes les ques
tions qui avaient été'soumiscs aux premiers juges ; mais les obser
vations que 11011s avons déjà faites nous permettront de nous expliquer
rapidement sur les imputations de fraude dirigées contre les frères
�D u m a y , et de consacrer principalement cette réponse à l’examen des
questions de droit posées par les adversaires.
D IS C U S S IO N .
'"
L ’exposé qui précède doit avoir démontré la certitude de plu
sieurs points qui doivent rester désormais liors de contestation ,
savoir :
i:
Q ue les frères Dumay n’étaient point créanciers du sieur P r u
n e y r e , lorsque les appelants ont fait p u r g e r , en 1842, l’hypothèque
légale du mineur Pruneyre ;
Q u e , n’ayant aucun intérêt à empêcher la purge de celte h y p o
thèque lé g a le , ils n’ont pu directement ni indirectement influer sur
la régularité de la procédure faite à cel égard par les appelants;
Q u e le sieur Auguste D u m a y , n’ayant pas reçu la copie de la
notification à lui faite sous une fausse qualité de subrogé-tuteur, n’a
pas même à se faire le reproche de 11’avoir pas prévenu les sieurs
Cromarias et Rougier de leur e rreu r;
Q ue le mineur Pruneyre était réellement créancier de son père ,
d’une somme de 23,000 francs; que celte somme avait servi aux
besoins personnels du sieur P runeyre , et que ce dernier avait fait
connaître l’hypothèque légale de son fils, soit aux appelants, lors
des ventes qu'il leur a consenties, soit aux frères D u m a y , lors de
l’obligation du 8 mai 184 5 ;
,i‘
Que cette obligation du 8 mai 1845 est sincère , et que les frères
Dumay étaient créanciers sérieux et légitimes du sieur Pruneyre ;
Que la nomination d’un subrogé-tuteur au mineur P runeyre était
devenue indispensable; qu’elle 11’cst pas l’œ uvre des frères D u m a y,
mais bien du tuteur lui-même , qu i, devant le conseil de famille , a
déterminé très-expressément la cause cl l’objet de celle nomination,
ainsi que les attributions ou les pouvoirs qu’il étail urgent de conférer
an subrogé-tuteur.
11 est donc inutile d’examiner, de discuter des questions de fraude
�qui ne sc présentent réellement pas dans la cause; qui ne sont décélées par aucun in d ice , par aucune présomption sérieuse ; et nous
devons aborder immédiatement les véritables questions du procès ,
qui consistent à rechercher i° si l’acte fait le 2g mai 1844 > entre le
sieur Chambordon et le sieur Félix Dumay , est un acte valable; si
le sieur Charbordon , comme subrogé-tuteur, a eu capacité pour
recevoir et quittancer la créance du mineur; s i, par suite , le sieur
Félix Dumay se trouve valablement subroge à l’hypothèque légale
du mineur ;
<
20 Quels sont les droits que cette subrogation à l’hypothèque
légale du mineur Pruneyre , a dû conférer au sieur Félix Dumay ?
,1»
;T
PREM IÈRE Q U E STIO N .
Sans contredit, le but et l’intérêt des sieurs Cromarias et Rougier
était bien d’affranchir les immeubles dont le prix leur a été cédé , de
l’hypothèque légale du mineur P runeyre; ils avaient payé comptant
le prix de la cession à eux faite, soit parce que c ’était un plus sûr
moyen de réaliser un gros bénéfice, traitant avec un vendeur qui
avait besoin d’a r g e n t, et qui en avait fait une condition de la cession ;
soit parce que la solvabilité apparente de ce vendeur les avait com
plètement rassurés; ils avaient purgé l’hypothcque légale du mineur,
avec la certitude que son tuteur ne ferait pas inscrire cette h y p o
thèque légale , quoique l’art. 2 «56 du Code civil lui en fit un devoir
impérieux. Ils agissaient donc en cela d’accord avec le sieur P ru
neyre , et en pleine connaissance de cause, d’une manière évidem
ment nuisible au mineur, puisqu’ils voulaient le priver des effets de
celte hypothèque sur les immeubles patrimoniaux de son p è r e , qui
en étaient le plus anciennement grev é s; c ’est-à-d ire, le priver de
son gage le plus certain et le moins sujet à contestation.
Cependant, les sieurs Cromarias et R ougier s’érigent aujourd’hui
en protecteurs, en sévères gardiens des intérêts du mineur P ru
n eyre; ils ne s’attachent p a s , dans leur m ém oire , à prouver que
�Pacte du 29 mai i 844 a porté-atteinte à leurs droits personnels, en
ce qu'il aurait rendu leur position plus mauvaise qu’elle n’était au
paravant, en ce qu’il aurait compromis quelque droit qui leur ap
partenait. Us attaquent cette convention , comme ayant compromis
les droits du m ineur, comme en étant une aliénation illégale, et
comme ne lui ayant pas profité.
r -
Les frères Dum ay soutiennent d’abord que les sieurs Cromarias
et Rougier n’ont ni droit ni qualité pour critiquer cet acte; les in
térêts du mineur Pruneyre ne sont point placés sous leur sauvegarde;
ils ne sont pas ses tuteurs; ils ne sont pas même ses créanciers , et
n’ont aucun caractère pour exercer les droits qui lui appartiennent.
Cet acte ne pourrait être valablement attaqué que par le tuteur
lui-même , par le conseil de famille ou par le ministère p u b lic , s i ,
pour e u x , il en résultait la preuve que les intérêts du mineur ont
été compromis.
-■ jvjOjflJ 1 J'î u -
Jü'
Les appelants ne peuvent pas se plaindre, d’ailleurs , que cet acte
ait changé leur position. Avant comme après cet a c t e , les immeu
bles par eux acquis étaient grevés de l'hypothèque légale du mineur;
en supposant que cet acte fût annulé, le mineur reprendrait certai
nement tous les droits que cet acte a conférés au sieur D u m a y , et
pourrait les exercer de la même manière que lui.
Sous aucun rapport, les adversaires n’ont donc qualité pour cri
tiquer l’acte du 2g mai 1844*
S i, cependant, nous admettons comme simple hypothèse que les
sieurs Cromarias et R ougier aient réellement qualité pour critiquer
cet a c t e , nous devons , pour établir sa va lid ité, l’examiner et le
discuter sous trois points de vue différents : respectivement au m i
n e u r, respectivement;iau sieur Chambordon , respectivement au
sieur Dumay.
• h ■
Respectivement au mineur, la seule chose à considérer, est de
savoir si le résultat de cet acte a été de compromettre scs intérêts ,
de lui enlever quelque partie de ses droits ou de sa créance; et si
telle est la position faite nu m ineur, la Cour doit s’empresser d’ané-
�-
tfg f
23 _
antir l’œuvre (l’un subrogé-tuteur qui a complètement méconnu ses
d evo irs, qui a sacrifié les intérêts de son pupille.
¡jMais le résultat de l’acte du 29 mai
*
1844
a été tout contraire ;
011 ne conteste pas que le mineur a'.reçu toute la créance qui lui
appartenait; qu’il l’a reçue immédiatement, tandis que les autres
créanciers Pruneyre attendent, pour recevoir leurs cré a n ce s, la
clôture définitive d’un ordre. Ou neiconteste pas la solvabilité de
la caisse des consignations, qui a reçu la créance du mineur en dépôt.
Ce que l’on conteste, c ’est la capacité de la personne qui a reçu la
somme pour la verser à la caisse ; le payement fait au subrogétuteur , la consignation opérée par l u i , ne suffisent pas aux appe
lants, pour garantir les intérêts du mineur; le payement devait être
fait.au tuteur, seul capable d ’administrer et de r e c e v o ir ;... et quand
cela serait, où serait donc le préjudice causé au mineur? sa créance
en est-elle moins assurée? le versement à la caisse des consigna
tions en est-il moins avantageux pour lui? qu’importe que la somme
ait été versée par la main du tuteur, plutôt que par celle du sieur
Chambordon , pourvu que la somme ait été réellement ve rsé e , et
qu’ elle soit la propriété du mineur? iComment peut-on dire , que
ce payement n’a point été utile au mineur 1 lorsque les intérêts de
la somme déposée , perçus annuellement par le subrogé-tuteur ,
sont employés à ses besoins? que même , il lui a été nuisible , en
ce que le taux de la caisse des consignations est inférieur au taux
lé g a l, lorsque le subrogé-tuteur, s’est obligé lui-même à payer au
mineur la différence , faisant un sacrifice personnel, pour garantir
à son pupille la conservation de tout ce qui lui appartenait?
Du reste le tuteur, lui-même , et le conseil de famille ont connu
l’acte du 29 mai 1844 > cl ne l’ont point attaqué ; cet acte avait réa
lisé les prévisions énoncées dans la délibération du conseil de fa
mille du 23 mai 1 8/j4Les intérêts du mineur n’ont donc été 111 sacrifiés , ni même lé
gèrement compromis ; aucun motif de ce genre
annuler l’acle du 39 mai 1844 j cl
ne peut faire
^aul 1° reconnaître, ce sont
�— 24 —
bien les intérêts du m ineur, qui doivent, dans celle question,
préoccuper le plus les magistrats.
Respectivem ent au sieur Cham bordori.., il avait capacité pour
re ce vo ir et quittancer valablement la somme due au mineur P runeyre.
Pour établir le contraire , les sieurs Cromarias et Rougier , fei
gnant d’ignorer les circonstances qui ont précédé la nomination du
sieur Chambordon , comme subrogé-tuteur , rappellent des prin
cipes que nous nous garderons bien de contester, mais ils en font
une fausse application à la cause.
A in si, disent-ils, page 7 , le subrogé-tuteur n’a point le pouvoir
d’aliéner , même une valeur mobilière appartenant à son mineur ;
d’après l’article 4 2o du code c i v i l , ses fonctions consistent à agir
pour les intérêts du mineur, lorsqu’ils sonl en opposition avec ceux
du tuteur; mais ce droit d’agir n’est qu’un droit de surveillance ,
qui ne l’autorise pas à s’immiscer dans l’administration des biens
du mineur.
Ils citent les paroles du tribun Muguet , et le tribun Leroi qui
disait : qu’il est possible que le tuteur ait des intérêts communs en
opposition avec ceux du m in e u r , et qui ajoute que le législateur
ne devait pas laisser ht jid élité a u x prises avec [intérêt ; ils
citent les opinions de MM. Magnin et de Frérninville , qui ne font
que confirmer la capacité du subrogé-tuteur dans l’espèce qui nous
occupe.
On ne saurait contester ces principes. Mais l’article 420 11’a fait
que poser une règle générale , lorsqu’il a dit que les fonctions du
subrogé-tuteur consistent à agir pour les intérêts du mineur lors
qu’ils seront en opposition avec ceux du tuteur. La loi n’a spécifié
aucun cas; elle a laissé à la sagesse des tribunaux l’appréciation des
circonstances dans lesquelles le subrogé-tuteur aurait agi. Rem ar
qu on s, toutefois, que ce n’est pas sans intention que la loi se sert
du mot agir ; elle n’accorde donc pas seulement au tuteur des fonc
tions de surveillance et de prétention ; elle lui a cco rd e , encore ,
�~ *5 _
% % y.
une action; et ccltc action, il peut l’exercer amiablement ou judi
ciairement, toutes les fois que les intérêts du mineur sont en oppo
sition avec ceuxtdu tuteur
non seulement il le p e u t , mais encore il
le d o it , et c ’est ce que M; de Frém inville, au numéro 160 cité par
les adversaires, qualifie d 'obligation imposée au subrogé-tuteur,
de défendre les intérêts d u 1m ineur , quand ils sont en opposition
avec ceux duituteuri
Ji
‘
u.
Le tribun Leroi donne cette action au subrogé-tuteur , lorsque
le tuteur a des intérêts communs en opposition avec ceux du m i
neur. A in s i, par e x e m p le , dans une instance en partage ou en
compte, le tuteur et son pupille peuvent avoir des droits respectifs,
des rapports et prélèvements à faire ; le tuteur pourrait a g i r , p ro
céder ou conclure dans un sens nuisible au m ineur, en servant son
intérêt personnel ; la loi veut que le mineur soit représenté et d é
fendu par un autre que le tuteur; elle p r é v o i t , dans sa sollicitude ,
i ;
#
j
‘.V
que le tuteur peut céder à des tentations coupables; elle ne veut pas
laisser sa fid élité a u x prises avec son intérêt; l’action du subrogétuteur peut seule empêcher ce résultat prévu par le législateur.
Si au lieu d’avoir des intérêts communs en opposition avec ceux
du tuteu r, le mineur a des intérêts absolument contraires ; si le
..
w,
ivui
.
tuteur ruiné doit au mineur des sommes considérables, devenues
exigibles^; s’il est urgent de prendre des mesures ^pour en assurer
la conservation et le remboursement, on ne doit pas s’attendre à ce
que le tuteur agisse contre lui-même; dans un cas semblable , il
1
° j /’
.
I i-l
doit cesser momentanément ses fonctions de tuteur, et le subrogétuteur doit en être investi. La loi ne permet pas que le mineur cesse
un seul instant d'être défendu ct( protégé ; le subrogé-tuteur doit
donc agir contre le tuteur empêché d’a g ir , de la même manière
que le tuteur agirait lui-même contre un étranger, dans l’intérêt du
m ineur. 11 peut et doit administrer toute aflairc dans laquelle le
mineur n’a à discutcrquc contre son tuteur; il peut, par conséquent,
4
�HW
-
»6 _
recevoir une créance; et la quittancer, lorsqu’elle est due par le
tuleur lui-même , tombé en faillite ou déconfiture,
h*1
îno-ii:
Si le tuteur est exproprié , et qu’umordre soit ouvert sur le prix
de ses biens , il est évident qu’il est du devoir du subrogé-tuteur
d’y produire ; et d’y demander la collocation des créances du mi
neur; c ’est à lui'que doit être délivré le bordereau de collocation ;
c ’est lui qui doit en recevoir le montant dans l’intérêt du mineur ;
il peut dès-lors le quittancer valablement. Dans un cas semblable ,
on ne saurait admettre , sans compromettre les intérêts du mineur,
que la collocation puisse être demandée et obtenue par le tuteur
qui eât en même temps débiteur et partie saisie; que la créance du
jnineur soit reçue et quittancée par le tuteur exproprié , qui ne
présente plus aucune responsabilité.
E n faisant l’application de ces principes à la c a u se , on trouvera
que le sieur Chambordon avait reçu de la loi la capacité de rece
vo ir et quittancer, en sa qualité de subrogé-tuteur, la créance due
au mineur P r u n e y r e , par son tuteur. Cette cap acité, il la tenait,
en co re, de la délibération du conseil de famille du 22 mai 1844 >
qui l’avait nommé; délibération q u i , d’après le vœu du tuteur luimême , l’autorisait à e x erc er les actions immobilières du m ineur ,
soit dans la recherche des biens, et droits de sa mère , soit pour
tous actes d ’administration , ou autres , dans lesquels le tuteur
se tiouverait lui-m èm e em pêché .
O r , qu’a'fait le subrogé-tuteur, autre chose qu’un acte de bonne
administration , en recevant la créance du mineur , amiablement,
et d’un tiers, au lieu d’en poursuivre le recouvrement en justice.
IS’a-t-il pas fait un acte de bonne administration , en versant cette
somme à la caisse des consignations, comme propriété du mineur?
L e résultat de l’acte du 29 mai 1844« a é t é , sans contredit,
d’asstucr au mineur la somme entière de 2},000 fr. qui lui était
d u c , tandis qu’à l’o rd re , sa créance pouvait être contestée, sans
aucun droit, sans doute; mais enfin, elle pouvait l’être, surtout si
quelque créancier eut imité les sieurs Cromarias et Rougier, q u i,
�— 27 —
«
sans aucun fondement, onl allégué dans leur demande et dans.leurs
conclusions, qu’il n’était rien du au mineur P n in eyre;!q u e son père
n’avait jamais reçu la dot de son épouse^ et qne'la quittance de
cette dot ,i fournie au sieur D u m a y , son beau-père, était fraudu
leuse ou simulée.
Les adversaires proclament le principe que le subrogé-tuteur
n’a le pouvoir ni de céder ni d’aliéner les droits du mineur; mais
ce qu’ils appellent une cession illégale, n’est que l’acceptation d’uu
payement que le subrogé~tuteur pouvait recevoir du débiteur luimêinc, et qu’il a pu re cevo ir d’un tiers, payant en l’acquit du d é
biteur. Au lieu d’aliéner la créance du m in eu r, il n’a fait qu’en
opérer le recouvrement; il l'a réalisée, et l’a certainement con
servée, en la déposant à la caisse des consignations.
Quant à la subrogation du sieur Félix D u m a y , à l’hypotbèque
légale du mineur, le sieur Chambordon avait le droit de l’accorder,
puisqu'il représentait le mineur, e lq u ’ilavait mandat de recevoir pour
lui; cette subrogation, môme purement conventionnelle, était au
torisée par les'art. 1249 et * 25 o du code civil; elle devait êlretune
condition expresse du payement fait par le sieur D u m a y , qui payait
pour le sieur P r u n e y re , et qui ne pouvait vouloir payer sans ob
tenir cette subrogation. Cette subrogation devait, d’ailleurs, s’o
pérer légalement et malgré le sieur Cham bordon, comme on va
le démontrer bientôt; cette subrogation , enfin, ne pouvait causer
le moindre préjudice au mineur, qui recevait en compensation le
montant intégral de sa créance.
En résumé, l’acte du 29 mai 1844 a etc , de la part du sieur
C h am b o rd o n , un acte de sagesse et de bonne administration dans
l’intérêt du mineur.
Respectivem ent au sieur F é lix Dumay , . . . . cet acte n’est pas
moins valable; le sieur Félix Dumay , tout en facilitant au subrogétuteur les moyens de réaliser les ressources nécessaires à son neveu,
a voulu exercer, dans son intérêt personnel, un droit qui lui appar
tenait ;
il
�%<f
-
23 -
Lorsqu’un débiteur est insolvable, c ’est-à-dire , -lorsque la valeur
des biens qu’il possède est de beaucoup insuffisante pour acquitter le
montant de ses dettes, il est indispensable que quelqu'un soit exposé
à perdre tout ou partie de sa créance; les créanciers examinent leur
position; la nature des créances et l’état des inscriptions leur ap-!
prennent les chances qu ’ils ont à courir; il leur est permis alors
d’exercer tous les droits que la loiimet à leur disposition pour amé
liorer leur sort, pour obtenir que leur créance soit utilement colloquée. Ils peuvent le faire sans être tenus d ’en prévenir les autres
créanciers, qui pourraient exercer les.mèmes droits avant eux , ou
concurremment avec eux. Ils peuvent le faire sans blesser la déli
catesse , et surtout sans pouvoir cire taxés de frau d e , parce qu’ils
n’agissent que pour la conservation de la chose qui leur est légiti
mement due.
r
II est aussi juste que naturel qu’entre deux créanciers, dont l’un
doit nécessairement perdre , chacun d’eux préfère que la perte re
tombe sur son adversaire.
10.
<
En payant le mineur pour se faire subroger à ses droits, le sieur
Félix D u m ay n’a donc pas voulu causer de préjudice à de mcilheu--
reitx cessionnaires ; mais, dussent-ils en souffrir, il a voulu éviter
une perte, un malheur pour lui-môme.
-ïi'
Sous l’empire des lois romaines et de l’ancienne législation fran
çaise , il a toujours été permis à un créancier, d ’offrir au créan
cier dont l’hypolhcque était antérieure à la sienne , le payement de
sa créance , afin d’etre subrogé aux droits de ce créancier; il pouvait
contraindre le créancier antérieur à recevoir sa créance ; (il pouvait
la consigner sur son refus; et le payement accepté p a r le créancier
antérieur, ou la consignation opérait de plein droit la subrogation
à son hypothèque, au profit du créancier postérieur. Une ordon
nance de Henri IV avait érigé ce principe en article de loi ( V o i r '
Ilen u sson , chap. /f , page g 3 et suivantes.— Ilousscau-Lacom be ,
■verbo Subrogation , n ° 6 , et verbo offrir. — G ren ier, Hypoth.
tome Ier, pages 179 et suivantes).
�Ces principes se résument dans les dispositions de l’article. 1201
du code civil;
.nmii;
La subrogation a lieu de plein d r o it , dit cet article, au profit de
celui qui, étant lui-même créancier, paye unj autre créancier qui
lui est préférable , à raison de ses privilèges ou hypothèques.
* Outre la subrogation conventionnelle, dit G r e n ie r , n° g i , il
« est plusieurs cas dans lesquels il était juste que celui qui payerait
» la créance fût subrogé aux privilèges et hypothèques du créancier,
» malgré lu i , et encore malgré le débiteur. C ’est alors une subro» gation légale; elle se fa it par le se u l ministère de la l o i , sans
» convention, sans stipulation ; l’emploi seul des deniers emporte
* avec lui la subrogation, et en tient lien. L a loi prend la place du
créandier et elle j a i t la cession pour l u i , etc. » ^
D u reste aucun créancier n’est à l'abri de l’exercice du droit
d'offrir, et chacun des créanciers postérieurs a le droit et la faculté
de l’exercer; ils ont quelquefois un grand intérêt à le faire, et alors
la subrogation légale devient le prix de la course; la loi l’accorde
au créancier le plus diligent; vigilantibus jura subveniunt.
Nous avons déjà fait connaître l’intérêt qu’avait le sieur D u m ay
à exercer ce droit résultant de l’art. 1 a 5 1 ; les sieurs Cromarias et
Rougier pouvaient avoir le même intérêt que lui à agir comme il
l’a fait; ils peuvent éprouver le regret d’avoir été prévenus; mais
la subrogation légale aux droits du mineur P runeyre , est irrévoca
blement acquise au sieur D um ay.
Dans leur mémoire, les adversaires n’ont pas accordé la moindre
attention à celle subrogation légale; ils ont oublié l’article i a 5 i ,
pour ne voir dans l’acte du 39 mai 1 844 > que la subrogation co n
ventionnelle autorisée par l’article i a 5 o.
Ils ne contestent p a s , et ne pourraient sérieusement contester le
principe de cette subrogation légale. Ils disent seulement que le
droit du sieur Dumay a été exercé irrégulièrem ent, en ce qu’il a
payé au subrogé- tuteur, tandis qu’il aurait dû payer au tuteur qui,
�•-
3o -
seul, avait le pouvoir (l’administrer, q u i , s e u l , pouvait valable
ment recevoir et quittancer.
Nous avons déjà fait connaître dans l’exposé des faits, les motifs
de prudence puisés tant dans l’intérêt du mineur, que dnns l’intérêt
du sieur D u m a y, q u i'o n t déterminé sa conduite, et pour ne pas
nous répéter, nous n’y reviendrons point; nous croyons avoir dé
montré , d’ailleurs , que le subrogé-tuteur avait (capacité pour
recevoir.
Supposons, cependant , qu’au lieu de payer au subrogé-tuteur,
le sieur Dum ay eût payé au tuteur lui-m êm e; il en serait résulté,
pour le mineur, vu l’insolvabilité du tuteur, un très-grand préju
d ic e , probablement m êm e, la perte absolue de sa créance; le mi
neur aurait perdu le rang de son hypothèque légale fixé par la
date du contrat de mariage de sa m ère, et celle de la quittance de
sa dot ; il aurait obtenu , en échange , une nouvelle hypothèque
lé g a le , si l’on v e u t , à la date du payement qu’aurait fait le sieur
D u m a y , mais une hypothèque légale complètement illusoire: et si
le sieur Dum ay s’était conduit ainsi, le mineur P ru n e y re , à sa ma
jorité, les sieurs Cromarias et Rougier , dès à présent, ne lui fe
raient-ils pas le reproche d’avoir imprudemment et irrégulièrement
p a y é ; d’avoir payé eh l’acquit du sieur P ru n ey re , au sieur P ruI ■ \
> J' 1 n cyrc lui-mcme.
L ’on a d it , enfin , que cet étal d’insolvabilité du tuteur ne devait
pas empêcher le sieur Dum ay de lui faire le p a y e m e n t, sauf à
exiger qu’il fil le versement de la somme à là caisse des consigna
tions. Mais ce que l’on aurait obtenu par ce moyen , savoir : la
conservation de la créance du mineur, ne l’a-t-on pas obtenu en
payant au subrogé-luteur? la somme n’esl-ellc pas déposée à la
caisse des consignations? Q u ’importe au mineur et à la cause des
adversaires, qu’importe à la justice, que celte somme y ait été
versée par le sieur Chambordon , subrogé-tuteur , plutôt que par
le tuteur lui-même?
Il faut donc reconnaître, en définitive, que sous tous les rap-
�p o r ls , l’acte du 29 niai 1844 est valable; que le subrogé-tuteur
avait capacité pour r e ce v o ir; que le sieur D u m a y , en payant le
mineur P runeyre, n’a fait qu’exercer un droit que tout autre créan
cier aurait pii exercer avant lu i, et de la même manière; que la
subrogation qui en a été la conséquence
,|C S t
valable; qu’enfin, le
sieur Dum ay n’est poinl devenu propriétaire de la créance du
mineur, au moyen d’une cession illégale; mais que la cession s’eu
est opérée à son profit, par la seule force de la loi.
3! D E U X I È M E Q U E S T I O N .
't • !
'
<
Les prétendues questions de fraude étant écartées, la validité de
l’acte du 29 mai 1844 étant démontrée , il doit résulter de tout ce
qui p ré c è d e , que, comme subrogé aux droits du mineur, le sieur
Félix Dum ay était créancier du sieur P runeyre d’une somme de
23,0 00 f r . , avec hypothèque légale ou générale sur tous les biens
de son débiteur ; et que les frères D u m a y , conjointement, étaient
créanciers d’une somme de 5o ,o o o fr , avec hypothèque spéciale
sur l’Enclos-de-la-Forèt ;
i<
Il reste à examiner, maintenant, si le sieur Dumay pouvait léga
lement et sans fra u d e , mais dans son intérêt particulier , déplacer
l’hypothèque légale du mineur P r u n e y r e , de l’Enclos-de-la-Forêt,
pour la faire peser uniquement sur les biens d’Auzat-sur-AIlier ,
ou, en d ’autres termes, s’il a pu donner main levée de cette h y p o
thèque lé g a le , en ce qu ’elle grevait l’Enclos-de-la-Forêt, et main
tenir son inscription , uniquement sur les autres biens.
En thèse g én érale, l’hjpothèque étant indivisible, et subsistant
en entier sur tous les immeubles affectés, sur chacun et sur chaque
portion de ces immeubles ( c o d e c i v i l . art. 2 1 14 ) , il est certain
que le créancier qui a une hypothèque générale , a le droit de
c h o is ir , de désigner l’immeuble snr le prix duquel il veut être
p ayé de sa créance.
Cette faculté qui ne lui est contestée ni pnr le droit ancien, ni
�par le droit nouveau , parce qu’elle est de l’essence même de l'h y
pothèque, peut cependant faire naître de très-graves inconvénients;
elle p eut, dans ün o rd re 1! conduire à des résultats contraires à l’é
quité. Il pourrait dépendre du créancier qui a une 'hypothèque
générale, en exerçant son choix de telle outelle manière, d’empôchcr
un créancier q u in ’aurait qu’ une hypothèque sp écia le , mais inscrite
en rang u t ile / d ’être colloqué pour sa créance, pour faciliter à un
créancier, n’ayant aussi qu’une hypothèque spéciale, inscrite à un
rang postérieur, le moyen d’obtenir une collocation, à laquelle la
date de son inscription ne lui aurait pas permis de prétendre. On
pourrait exploiter cette faculté de choisir, qui appartient au créan
cier qui a l'hypothèque g é n é rale , obtenir à prix d’argent qu’il en
fit un mauvais u s a g e , et par des manœuvres frauduleuses, changer
Tordre légal des collocations , et rendre sans effet les dispositions
de l’art. 2154 du code civil.
r
' v x. m
Aussi, dit ¿VI. Dalloz , les auteurs et les tribunaux ont essayé di
verses combinaisons pour atténuer les résultats du système consacré
par la loi ; mais leurs efforts ont été stériles. L a cour de cassation a
maintenu dans toute son étendue le droit de l’hypothèque générale ,
exercé même par subrogation. »
Les auteurs qui ont écrit sur les h yp othèqu es, et notamment
MM. G renier et T r o p lo n g , ont cherché à concilier les effets atta
chés à l’indivisibilité de l’hypothèque générale, avec les intérêts des
créanciers qui n’ont que des hypothèques spéciales. Ils ont cherché
à tempérer la rigueur du droit par l’équité ; telle a été aussi la ten
dance d’une partie des cours r o y a le s , en distinguant toutefois les cas
où tous les biens du débiteur sont l’objet d’un seul et même o r d r e ,
de celui ou il existe plusieurs ordres sur le prix de biens différents ;
de celui où une partie seulement des biens ayant été vend ue, l’b y potheque générale peut s’exercer en même temps sur ces biens et
sur d’autres immeubles non encore aliénés.
,
Les adversaires ont pu trouver un certain nombre d’arrêts de
cours royales, qui ont décidé que dans le cas où tous les biens du
�débiteur sonl l’objet d’un seul et même ordre , les droiis respectifs
des créanciers hypothécaires à hypothèques générales et à h y p o
thèques spéciales, doivent être combinés de manière à éviter tout
dommage non nécessaire , c ’est-à-dire, à faire colloquer les créan
ciers à hypothèque spéciale, dans l’ordre de leurs inscriptions,
après avoir assuré la collocation de l’hypothèque générale. L e motif
de cette jurisprudence, puisé dans l’équité, est que la justice ne
doit pas souffrir que le créancier qui a une hypothèque générale
puisse restreindre volontairement sa collocation, à tel ou tel im
meuble, de manière à priver, à son gré, et sans aucun intérêt pour
lui-m êm e , tel ou tel créancier à hypothèque spéciale, de la co llo
cation qu’il devrait obtenir à la date de son inscription,
u
Pour ce ca s, plusieurs arrêts ont décidé que le créancier ayant
une hypothèque générale, n’a que le droit de demander sa colloca
tion en ordre u tile , et qu’une fois cette collocation assurée, il ne
lui est pas perm is, en désignant l’immeuble sur lequel il veut être
colloque , de jeter la perturbation dans l’ordre légal des créances
à hypothèques spéciales, et de faire, pour ainsi dire, l’ordre lui-même.
Cette jurisprudence, dont nous ne cherchons point à combattre
l'autorité, est fondée sur ce grand principe de droit et d’é q u ité ,
qu'il n’est pas permis de nuire à autru i, sans avantage pour soim êm e; dans le cas prévu par celte jurisprudence, il semble que le
créancier qui a une hypothèque gé n é rale , n’a le droit d’exiger
qu’une seule chose, le payement intégral de sa créance; et s’il est
colloque de manière à l’obtenir, tout intérêt doit disparaître pour
lui; il semble qu’il ne doit pas lui être permis de se mêler de la
question desavo ir auquel des autres créanciers doit être attribué le
surplus du prix.
Voilà le molifde lu jurisprudence consacrée par les arrêts descours
royales de T o u lo u se , de Limoges cl de llio m , invoquée par les
appelants, page i5 de leur mémoire; quant à l’arrêt unique de la
�-
34 -
cour de cassation qu’ils citent également, et qui est du 16 juillet
1 8 2 1 , il suffit de le lire pour voir qu’il ne s’applique pas directement
à la question.
Mais les adversaires n’ont cité, de la jurisprudence, que les déci
sions favorables à leur système ; s’ils eussent tourné le feuillet, ils
auraient trouvé beaucoup d’autres décisions contraires, émanées
d'autres cours royales, et*notamment de la cour de cassation. On
peut voir l’indication do ces arrêts dans lé dictionnaire de jurispru
dence de D a llo z, verbo H yp oth équ é , n° 275 et suivants.
Malgré c-:s puissantes raisons d’é q u ité , la cour de cassation et
plusieurs cours<royales respectant le droit attaché à l’indivisibilité de
l’hypothèque, ont reconnu au créancier qui a une hypothèque g é
nérale, la faculté de choisir l’immeuble sur lequel il veut faire porter
sa collocation,quoique des créanciersà hypothèque spéciale puissent
en souffrir. L e motif de cette jurisprudence est que les créanciers
qui n’ont qu’une hypothèque spéciale devaient sa v o ir, lorsqu’ils
ont contracté avec le débiteur com m un, que ce résultat était pos
sible; que c ’était à eux de s’informer de la véritable situation de ce
débiteur; de faire réduire l’hypothèque légale ou générale qui exis
tait sur ses biens, ou enfin, d’exiger de plus amples sûretés.
Mais les adversaires n’ont pas voulu voir et discuter la véritable
question qui est soulevée p arleu r demande; ils se sont bornés à éta
blir avec la jurisprudence, ce qui doit se passer, selon e u x , lors
qu’un créancier ayant une hypothèque générale est en concours avec des créanciers à hypothèque spéciale, pour prouver que ce c r é a n
c ie r, pourvu qu’il soit utilement colloque, n’est point admissible à
causer aux autres créanciers un préjudice non nécessaire et sans
utilité pour lui-rnêmc.
La véritable question du procès, la voici : Lorsqu’un créancier qui
a en même temps une hypothèque légale ou générale est en con
cours avec des créanciers à hypoihèque spéciale, et lorsque le prix
�de tous les biens du débiteur n’est pas distribué dans un seul et môme
ordre, cc créancier a-t-il le droit de choisir l’irameuble sur lequel
il veut faire porter la collocation de son hypothèque générale, afin
de faciliter par cc moyen la collocation de son hypothèque spéciale,
et d’obtenir par conséquent la collocation de ses deux créances?
L ’aflirmative ne> paraît pas devoir souffrir la moindre difficulté;
Qui ne voit, en effet, la grande différence qui existe entre cette es
pèce et celle pour laquelle ont raisonné les appelants?
Dans le cas où le créancier qui a l’hypothèque générale, n’a pas,
en même temps , une hypothèque spéciale , les autres créanciers
peuvent lui dire avec un certain fondement : Pourvu que vous soyez
payé de voire créance, vous n’uvez pas le droit de causera d’autres
créanciers un préjudice qui ne peut être utile pour vous-m êm e,
vous n’avez plus d’intérêt.
;
Dans le c a s , au contraire, où le créancier à hypothèque générale
a , en même temps , une hypothèque spéciale, les autres créanciers
ne peuvent, sérieusement , lui tenir ce langage, car il peut leur r é
pondre : Mon hypothèque générale est indivisible , et j’ai le droit
de la faire porter sur l’immeuble qu’il me convient de choisir ; ce
droit dont la justice pourrait modifier l’exercice , si je voulais en
abuser , je ne viens pas l’excrcer pour nuire aux autres créanciers,
pour leur faire éprouver un préjudice non mécessaire , et sans uti
lité pour moi-même; je viens l’exercer pour ne pas perdre ma
créance à hypothèque spéciale, qui sans cela ne serait pas colloquée;
j’ai donc intérêt à le faire ; et si mon intérêt est conforme à mon
droit , vous n’êtes pas fondés à vous plaindre de la manière dont
j’entends
exercer ce
droit ; vous
ne pouvez m’empêcher de
l’ex ercer ainsi, qu’en me payant mes deux cré a n ce s, ou en me
laissant colloquer pour mes deux créances.
Dans le cas qui nous occupe , en effet , l’intérêt du créancier à
hypothèque g é n é rale , légitime cl justifie la manière dont il use de
�>
—
36 —
son droit de se faire colloquer sur tel immeuble , plutôt que sur tel
autre , et la jurisprudence n’admet plus de distinction quant à
l’exercice de ce droit,
L a cour de cassation, dans le cas dont il s’agit, a maintenu rigou
reusement le droit du créancier à hypothèque générale ; elle dit no
tamment, dans les motifs d’un arrêt du 4 mars 1835 (S ire y , l 3 5 .
i . 4 2 1 ) , __ qu’il suit du principe d’indivisibilité, que le prix de
chacun des immeubles sur lesquels frappe un droit d’hypothèque,
dem eure invariablement affecté à son ex ercice , sans qu’ il soit
au pouvoir , soit du d éb iteu r , soit de ses créanciers postérieurs
en hypothèque , d'en détourner Vapplication , contre la volonté
du créancier propriétaire de ce d ro it , seu l juge de son intérêt ¿1
cet égard ;
Et l’arrêt ajoute : que si dans des circonstances où cet intérêt n’é
prouverait manifestement aucune lésion , il peut être indifférent que
l’exercice de son hypothèque soit assigné sur la masse cumulée des
prix qui sont en distribution , il n’en saurait être de m ê m e , lorsque
le refus d’application du principe de l’indivisibilité de l’hypothèque,
entraînerait un préjudice, soit pour lui-m ême , soit pour d'autres
créanciers.
Q u e faut-il conclure de tout ceci ?... Q ue la jurisprudence ré
pugne à autoriser l’exercice du droit rigoureux qui appartient au
créancier à hypothèque générale, lorsque ce droit est exercé par
ce créancier, de manière à nuiie aux autres créanciers , sans intérêt
pour lui même ; qu'au contraire, elle autorise l’exercice de ce droit,
lorsque le créancier à hypothèque générale ne veut en user qu’en
vue d’ un intérêt sérieux et légitime.
Si ces principes sont vrais , s’ils concilient le droit cl l’équité,
l’application à la cause du sieur Dumuy en est facile Le sieur I)umay csl créancier tout à lu fois à hypothèque générale du chef du
mineur P ru n e y re , cl à hypothèque spéciale, de son clicl personnel.
�—
h
—
L e prix de lous les biens du sieur P runeyre , son débiteur, n’est pas
distribué dans un seul et même ordre; il n’y a d’ordre que sur le
prix des biens de Saint-Germain-Lembron ; il n’y en pas sur le prix
des biens vendus aux appelants. L e sieur Dumay n’a pas l’espérance,
vu la date de son inscription, d’être colloqué pour sa créance à h y
pothèque spéciale, sur le prix des biens de Saint-Germ ain-Lem bron,
s’il se fait colloquer sur ces biens pour le montant de sa créance à
hypothèque générale; il avait donc un intérêt incontestable à agir
ainsi qu’il l’a fait.
Remarquons, au surplus, que la question que nous venons de dis
cu ter, parce qu’elle a été soulevée par les adversaires, est intem
pestive et prématurée, et que leurs prétentions à faire modifier l’ordre
sont, au moins quant à présent, non-recevables.
Celte discussion, en effet, ne pourrait être discutée que par les
créanciers du sieur P runeyre, elles appelants ne sont pas créanciers;
ils ne demandent pas de collocation à l’o r d r e , et n’ont pas le droit
de critiquer l’ordre des collocations ; comme acquéreurs des biens
d’Auzat-sur-Allier, ils n’ont pas encore été troublés dans la posses
sion des héritages par eux acquis, et ce n’est qu’en cas de trouble
qu’ils pourront devenir créanciers du sieur P r u n e y r e , par suite de
la garantie qu’il leur a promise. Il semble donc que la cour ne peut
pas statuer sur un débat qui n’est pas né.
Du reste , qu’on les considère, si l’on v e u t, comme créanciers
dès à présent, puisqu'ils sont des tiers intéressés à surveiller les
résultats de l’ordre, l’application des principes devra toujours être la
même. L e sieur Dumay devra être maintenu dans tous les droits
qu’il a acquis et qu’il n’a fait qu’exercer comme l’auraient fait les
sieurs Cromarias et Rougier , s’ils s’étaient fait subroger à une
hypothèque générale.
Il est de toute évidence que dans la position où étaient les sieurs
Cromarins et Hougier, ils avaient intérêt à payer le mineur Pru-
�neyre pour être subrogés à son hypothèque légale , et que s'ils
l'eussent fait, ils auraient agi absolument de'Ia même'manicre que
le sieur Dumay ; ils n’auraient pas fait peser celle hypothèque légale
sur les immeubles par eux a cq u is, mais bien sur ceux de SaintG e rm a in -L e m b ron , afin d’en affranchir ceux d’Auzat-sur-Allier.
E t alors qu’arriverait-il aujourd’hui ?.... L e sieur Dumay ne serait
plus qu’un simple créancier avec une hypothèque spéciale ineffi
cace1; sa créance, étant primée par l’hypothèque légale du mineur,
ne serait pas colloquée ; réduit à la perdre, serait-il fondé à se
plaindre ; pourrait-il reprocher aux sieurs Cromarias et Rongier
qu’ils auraient employé des manœuvres frauduleuses; pourrait-il ,
enfin, contester leur droit et l'intérêt qu’ils auraient à l’exercer
ainsi ?... Il est évident que les adversaires feraient au sieur Dumay
la même réponse qu’il vient de leur faire lui-même.
Les sieurs Cromârias et Rougiër ont négligé de p ayer la créance
du mineur P ru n e y re , afin d’obtenir une subrogation qui eut mis
leurs intérêts à couvert ; ils ne sont pas fondés à se plaindre de ce
qu’un autre vienne exercer un droit qu’ils ont dédaigné.
Enfin, lorsqu’ils onl contracté aveclesieur Pruneyre, ils ont connu
ou pu connaître sa situation hypothécaire ; ils ont eu connaissance ,
notamment, de l’hypolhèque légale du mineur Pruneyre, mention
née dans leur contrat d’acquisition; ils pouvaient , d’après les arti
cles 2161 et suivants du C ode civil, obtenir la radiation de l’h y p o thcque légale du mineur , et en faire affranchir les immeubles par
eux acquis, pour la laisser subsister uniquement sur les immeubles
de Saint-Germain-Lembron ; ils ont encore négligé de le faire. Ils
ont e u , enfin, le tort très-grave de payer le prix de leur acquisi
tion avant d’avoir purgé l’hypothèque légale du mineur ; ils ont fait
ensuite une purge irrégulière. A qui doivent-ils s’en prendre, si ce
n’esl à eux-mêmes ?
Quant au sieur Dumay et au sieur Cham bordon, leur conscience
ne leur reproche rien; ils croient avoir démontré que le jugement
�-
39 _
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dont est appel a justement repoussé toutes les demandes de leurs
adversaires. Ils espèrent avec confiance que l'arrêt de la C ou r fera
justice des imputations calomnieuses dont ils ont été l’objet.
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Subrogé-Tuteur ,
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> Intimés.
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M* C H I R O L , Avocat des sieurs Dumay.
M* D U C L O Z E L , A vocat du sieur Chambordon.
M* M A R I E , A voué du sieur Dumay.
M* T A IL H A N D , Avoué du sieur Chambordon.
Riom. — Imprimerie de A. Jouvet, Libraire et Lith. près le Palais.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dumay, Jean-Gilbert. 1846?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
A. Dumay
F. Dumay
L. Chambordon
Chirol -Duclozel
Marie
Tailhand
Subject
The topic of the resource
créances
hypothèques
conseils de famille
tutelle
dot
minorité
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour les sieurs Jean-Gilbert et Nicolas-Félix Dumay, et le sieur Chambordon, subrogé tuteur du mineur Pruneyre, tous intimés ; contre les sieurs Cromarias et Rougier, anciens avoués, demeurant à Riom, appelants, en présence de monsieur Bonnefoy, avoué à Issoire, aussi intimé.
Annotations manuscrites. Question suivi de l'arrêt
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie A. Jouvet (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1846
1835-1846
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3011
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3010
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53628/BCU_Factums_G3011.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Auzat-la-Combelle (63022)
Saint-Germain-Lembron (63352)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conseils de famille
Créances
dot
hypothèques
minorité
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53337/BCU_Factums_G1810.pdf
6e42b156b7595e739df2e97e2fc906a3
PDF Text
Text
PRECIS
EN
RÉPONSE,
POUR
L e sieur E S Q U I R O N - L A V I G N A C , propriétaire
à Aurillac , appelant et intimé ;
c o n t r e
L e sieur R A G O U X , traiteur , h a b ita n t de la même
v ille, in tim é et appelant.
aP r acte du 1 5 décem bre 1 7 7 2 , les sieurs Croizetd Auterive vendirent au sieur A lexan d re - Laurent
"< $ ■
1
�Fornier , prêtre , une maison sise en la rue Neuve
de la ville d’Àurillac , composée de deux corps de
ilogis séparés par une co u r, confinée par 1» jardin
des vendeurs, de bise, elc., moyennant 5,ooo mille
livres.
Il-est convenu que l’acquéreur pourra entrer dans
le Jardin des vendeurs , et se servir de la ruelle ,
large de trois pieds et demi, pour réparer sa m a iso n ,
placer des contrevents aux fenêlres, les élever ou
élargir pourvu qu’elles soient grillées; comme aussi
que le m u r séparant Ladite nielle d u ja r d in , ne pourra
être élevé que de trois pieds et*demi, sans préjudice
aux vendeurs de pouvoir y placer des vases de fleurs;
et ¿i la charge qu'on ne pourra y jeter ni ordures,
ni eaux.
L a maison F o rm e ra été acquise par le sieur Ragoux,
qui en a fait une auberge, d even u e, grâces à son
talen t, la plus fréquentée d’Àurillac.
L e jardin des sieurs Croizet a passé , avec la
maison dont il dépend, au sieur Lavignac. L e sol de
ce jardin est plus élevé que les croisées du rez-dechaussée de la maison Ragoux ; et précisément c’est
à ce rez-de-chaussée, du côté du jardin Lavignac ^
que le sieur Ragoux a placé sa salle à manger prin
cipale.
Ce n’est pas le bruit de ce voisinage qui incommodait le plusile sieur Lavignac; mais, i^ 'le s fenêtres du
premier-îétogo ne sont pas barrées ; il'fallait que les
�( 3 )
tPûS
dames de sa famille' on de sa société renonçassent à se
promener dansson jardin, ou qu’il prit desmesures pour
faire cesser cette véritable communauté dhabilalion.
Avait-il le droit de se séparer du sieur Ragoux par y
iin mur? Il y aurait de la folie à dire absolument non;
et c’est bien l’avis despremiers juges. Mais, à quelle dis
tance et hauteur devait-il faire ce mur ? voilà la difficulté.
y L e sieur Lavignac n’ usa pas de son droit dans toute
«a latitude; on lui dit qu’il pouvait bâtir à six pieds de
distance; il préféra de s’éloigner de sept pieds et demi,
pour éviter toute espèce de discussion avec son voisin;
il laissa même une porte à la ruelle, pour que le sieur
Ragoux pût aller réparer sa maison, quand elle en
aurait besoin.
Ces précautions n’ont rien épargné au sieur Lavignac,
et le sieur Ragoux lui fit fa ir e , le i . er mai 18 0 6 , une
sommation de cesser la construction de son m ur, qup
le sieur Lavignac ne pouvait cependant pas disconti
nuer sans de grands frais, puisque ses ouviiers étaient
retenus,-et ses matériaux à pied d’œuvre.
Alors le procès a commencé, et le sieur R a g o u x ,
dans une .requête, a manifesté ses prétentions avec
exagération, et même avec humeur. Il a dit avo ir,
par sa vente , la servitude tout à la fois de passage
ci’aspcct et de prospect ; il a prétendu que pour éluder
la prohibition d’élever le mur alors existant, le sieur
Lavignac y en a substitué un nouveau, construit immé
diatement après, et en quelque sorte plaqué contre la
<
.premier ,■. que d^jà il dépasse de plus de douze pieds.
�(
4
)
Il assure que ce mur le prive de l’air, de la clarté, et
de toute espèce de salubrité; et là-dessus il reproche
au sieur Lavignac de traiter les lois et les conventions
comme les frêles tissus de l'araignée impuissante.
Les juges d'Aurillac ont voulu savoir jusqu'à quel
point cet exposé du sieur Ragoux était sincère; e t ,
le 9 août 18 0 6 , ils ont ordonné que des experts vé
rifieraient l’état des lieux; e t , après avoir demandé
toutes les dimensions de la ruelle et des murs, ils
ont chargé les experts d’aller sur les lieux, à quatre
heures après-midi , et là de vérifier si, malgré l’éléva
tion du nouveau m ur, les rayons du soleil peuvent
-aboutir aux fenêtres du rez-de-chaussée de la maison
Bagoux ; dans quelle proportion, si le nouveau mur
■intercepte le jo u r des appartemens du re%-de chaussée;
quel degré d’obscurité il leur donne relativement à
£ usage auquel ils sont destinés ; à quelle hauteur du
mur les appartemens doivent recevoir le jour néces
saire.
L e rapport des experts n'a pas confirmé ce.qu'avait
dit le sieur Lavignac. Us remarquent qu'au lieu de la
distance ancienne de trois pieds et demi, il y avait
sept pieds cinq pouces entre la maison l\agoux et le
nouveau mur.
L e nouveau mur, à partir du niveau ou accoudoir
des f e n ê t r e s , a n eu f pieds quatre pouces de hauteur
du côté du jardin, et dix pieds quatre pouces du côté
de la ru e lle , dont le sol est plus bas.
E l à partir du niveau de la ruelle, il a, d’un côté,
�( 5 )
treize pieds, et de l ’autre douze pieds cinq pouces.
Il excède l’ancien mur de 9 pieds 9 pouces et demi.
Les experts disent que l’élévation actuelle du mur
n ’empêclie pas les rayons du soleil d’aboutir aux fenê
tres du rez-de-chaussée. A deux heures et demie, il a
commencé à éclairer la façade de la maison en totalité ,
à l’exception de la première croisée de la cuisine.
A trois heures, le soleil a pénétré ensuite dans le rezde-cliaussée, par un ra3ron oblique de sept centimètres.
Cette lumière intérieure a duré un quart - d’heure.
( N ,. B. L a façade est au nord).
A quatre heures, les experts ont vu que les apparte
n o n s du rez-de-chaussée recevaient le Jo u r suffisant
pour L'usage auquel Us sont destinés.
Les experts pensent que le sieur I/avignac a pu
élever davantage son mur que le premier, puisqu’il l’a
fait plus éloigné ,* mais ils s’abstiennent de décider
jusqu’à quelle hauteur il l’a pu.
Enfin, comme la première visite avait été suivie d’une
médiation que rompit le sieur R agoux, les experts ont
voulu savoir quelle serait l’obscurité de son rez-dechaussée dans l’arrière-saison. En conséquence, ils y
sont allés par trois fois et par un tems sombre et
nébuleux, les 10 septembre , 2 novem bre et 9 dé
cembre , tantôt une heure après le lever du soleil,
tantôt une heure après son coucher. L à ayant pris
chaque fois un livre d’ un caractère assez m enu, ils ont
lu a une certaine distance des ienetres.
En somme , les experts disent bien que je mur a
�■ ï-V
( 6 )
donné de l’obscurité au rez-de-chaussée de la maison
B a g o u x , mais qu'il entre asse% de lumière dans ¿es
pièces de ce re% de chaussée pour L’usage auquel elles
sont destinées.
Cette relation des experts n’a pas satisfait le sieur
B a g o u x , qui a sollicité les premiers juges de voir le
local eux-mêmes ; et on pense aisément que , dans
cette visite, il a dû exagérer le détriment qu’il prétend
souffrir.
Quoiqu'il en soit, après cette descente non ordonnée
en jugem ent, le tribunal d’ Aurillac a condamné le
sieur Lavignac à réduire la hauteur de son mur à
neuf pieds.
Les motifs de cette décision, au nombre de douze}
se réduisent à dire que le vendeur de 17 7 2 ne s’était
pas interdit la faculté de faire un mur de séparation ,
sur-tout en s’ éloignant ; mais qu’il n’avait pas dû obs
curcir les appartemens d’une manière nuisible.
L e sieur Lavignac a interjeté appel de ce jugement ,
en ce qu’il l’oblige à démolir une partie de son mur.
L e sieur Bagoux en a aussi interjeté appel, en ce
qu ’il ne condamne pas le sieur Lavignac h le dé
molir tout entier.
M O Y E N S .
Tout le système du sieur Bagoux repose sur ce rai
sonnement : J ’ai le choit de vue ( lum inuni ) sur la
�( 7 )
ruelle, et p e u t-ê tre même la ruelle tout entière. J ’ai
de plus la servitude d’empêcher l ’élévation du mûr
de cette ruelle ( altiiis non tollendi). Doue j ’ai aussi,
par une conséquence nécessaire, la servitude d’aspect
et prospect sur votre jardin; et vous ne pouvez rien
changer à l’ancien état des lieux , parce que vous
m ’ôleriez non-seulement la quantité de lumière que
j ’avais, mais encore l ’agrément que portait à ma mai
son la vue de votre jardin. Car , dit le sieur R agoux,
à moins de contester l ’évidence, il est démontré qu’il
a élé concédé une vue de prospect, et que la perspec
tive du jardin a élé pour l’acquéreur un moyen de
séduction ou d'agrément qui a dû augmenter le prix
de la maison.
I l faut cependant que le sieur Ragoux soupçonne
que celle évidence prétendue ne soit pas sans réponse;
car il se plaint de ce que le sieur Lavignac ne lui a
présenté que des objections légères et dédaigneuses.
Sa fierté, dit-il, a souffert de descendre dans l ’arêne
avec un traiteur.
Ce reproche est bien dur, et le sieur Lavignac y a
été sensible. Loin de lui tout mépris pour un art pré
cieux qu’il honore, et dont il n’a garde de contester
1 importance. S il se fût senti coupable d’ un tel senti
ment, il l aurait certainement dissimulé avec précau
tion. C ’est déjà un adversaire assez puissant qu’ un
traiteur en réputation: tant d’intérêts s’unissent^au
sien , que tout ce qui peut le contrarier ou le disT
�traire, est exagéré par ceux qui en souffrent commo
une calamité publique, et le sieur Lavignac ne se le
cache pas (i). Ainsi loin de se plaindre envers le s.r R a goux de sa juste fierté, fondée , plus que sa prétention,
sur des autorités précises (2), le sieur Lavignac dé
clare en toute humilité qu’ il n’a à s’accuser d’avoir
traité avec légèreté, ni sa personne, ni ses objections.
I l y a répondu de son mieux ; les moyens qu’il a fait
valoir lui ont semblé très-solides3 et il ne croira s’êlre
bien défendu encore qu’en les reproduisant sans les
affaiblir.
Revenons donc à la maison du sieur R agoux, et à
l ’arêne où il nous convie. Voyons comment la servi
tude aUÎLis non tollenclL pourra le conduire à la ser( 1 ) Pour aggraver les torts du sieur L a v ig n a c envers ses con
citoyens, le sieur R a g o u x s’est obstiné à s’expatrier jusqu’à la
fin de son procès. M ais le sieur L a v ig n a c se liâte de dire , pour
sa justification, qu’ il n’a porté aucun obstacle à un prompt ju
g e m e n t , et que lorcé par ses affaires, de suspendre son départ,
il a mieux aimé s’abstenir d’être présent que de retarder d ’un
seul instant la plaidoirie de sa cause.
(2)
Faites cas de celui q u i, fier de son talent,
S'estime votre é g a l , et, d’ un air im po rtan t,
Près de son potager, que la flamme illumine,
D o n n e , avec dignité, des lois...... dans sa cuisine.
G astr.
Chant I I .
vilude
�( 9 )
vitude de prospept, et si elles dépendent nécessai
rement l’une de l’auIre.
E n matière de servitudes, il n’est pas permis de
raisonner par analogie ou par simples conséquences.
11 faut trouver dans le tilre qui les constitue tout ce
qu ’on v e u t ‘exig e r’ ou prohiber, sans que l'acte laisse
m êm e le soupçon du contraire; car les servitudes sont
de droit étroit; et comme elles font violence au libre
usage de la propriété du voisin, comme la tendance
naturelle est pour raflranchissem ent, il est de principe
que tout ce qui n'est pas mathématiquement compris
dans la clause.de servitude s’explique en faveur de celui
qu’on veut y asservir.
Ce n’est pas absolument aux lois romaines qu’il faut
recourir tpogr une question de servitudes urbaines. L a
coutume de Paris était, sur cette m atière,le droit com
mun de la F ran ce ; et qnand on compare les divisions
et subdivisions du digeste sur chaque espèce de servilude avec la briéveté de l’article 686 du code civil ( i ),
on demeure.convaincu de plus en plus que l’étendue
à donner à une servitude ne doit dépendre que du texte
littéral et non équivoque de la clause qui la constitue.
Les lois romaines , au reste, distinguent très-expres
sément ce que le sieur Ragoux veut confondre.
(i)
A rt.
686. II_est. permis
aux propriétaires d’établir sur leurs
propriétés telles servitudes que bon leur sem ble, pourvu que les
services établis. . . . n’aient rien de contraire à l ’ordre public.
• L ’ u s a g e et l'étendue d e s s e r v i t u d e s s e x’è g l c n t par le titre qui
les constitue , cl à défaut de titre, par les règles ci-apres.
2
�( 10 )
Il a , par son acte, la servitude de jour ( luminum),
et la servitude allias non tollendi, non pas pour un
édifice entier, ce qui est la plus fréquente supposi
tion des lois, mais bornée à un simple m u r, et pour
une distance convenue.
D e ces deux servitudes, il veut en faire quatre, car
il ajoute celle ne luminibus ojjiciatur , et même celle
ne prospectai ojjiciatur, qui sont très-distinctes dans le
droit, et qui portent une gêne bien différente.
;
A vec sa servitude de jour, et sans celle altiiis non
tollendi, le sieur Lavignac n’aurait eu nul besoin de
se reculer pour bâtir. Il aurait eu certainement la fa
culté d’élever le mur ancien de sa ruelle, d’après les
principes.
Car la servitude de jours {luminum') n’emporte que
- nécessité de souffrir des vues droites, sans rien laisser
au prospect : il suffit de voir le c ie l, tel est le texte
des lois 3 et i 5 du digeste de servit, præd. urb. et
l'interprétation générale des auteurs.
C ’est pourquoi ceux qui veulent une gêne moins
grande à leurs vues doivent convenir de l’ une ou
de l’autre des servitudes d’aspect; et alors ces lois,
elles-mêmes, marquent une différence sensible au ré
sultat de ces servitudes.
Elles portent avec elles une dénomination qui en
marque le sens ; ne luminibus ojjiciatur exprime au
tant que possible, que si l’acte porte expressément la
condition de ne pas offusquer la lumière, on ne pourra
pas la diminuer par un bâtiment, et de même ne pros -
�( ÏÏ )
pectui ojficiatur dénote assez que tout ce qui ôterait
le point de v u e , même dans l'éloignement, contrevien
drait à la convention.
Tout le tilre du digeste prouve que ces diverses
espèces de servitudes sont très-distinctes, et par con
séquent que l ’une ne supplée pas l’autre, à moins que
sa plus grande étendue ne comporte de plein droit la
servitude moindre.
Ainsi la servitude ne lurninibus ojjiciatur est à la
vérité comprise de plein droit dans celle ne pro spectui
ojjiciatur , qui est la plus étendue , parce que tout ce
qui tendrait à ôter la lumière d’une fenêtre , ôterait
bien, à plus forte raison, la perspective éloignée qu’elle
doit avoir.
Mais on ne peut pas, comme le sieur R a g o u x ,re n
fermer une servitude plus grande dans une servitude
moindre. Il fait beaucoup d’efforts pour prouver que
la servitude aitiùs toLlendi emporte avec elle les ser
vitudes ne Lurninibus, et prospectai ojjiciatur. C ’est
en effet de là que dépend toute sa défense.
Voyons sur quelles autorités cette prétention est
fondée : et pour ne pas mériter une seconde fois le
reproche de dédaigner ses moyens et ses objections,
le sieur Lavignac va les suivre pas à pas pour y r é
pondre.
I . re o b j e c t i o n .
P a g . 1 6.
Les lois rom aines, dit le sieur R ag o u x , ne font
pas de différence entre la servitude altiàs toLlendi, et
�'( 12 )
"celle ne Luminibus aul prospectai ojjîbîatür. L a loi 2 ,
^au J f. D e ser. pr. urb. le prouve.
r é p o n s e
.
Celte loi n’ est que la série des différentes espèces
de servitudes : elle les classe et les distingue: par con
séquent, elle ne les confond pas.
L e sieur Ragoux veut tirer d’ une simple conjonction
une conséquence fo rc ée , qu’il n’induit encore que
d’ un argument à contrario • car la loi parle des servi
tudes imposées par celui qui veut qu’on élève un mur
pour diminu'er sa lumière. Mais cette servitude affir
mative ne juge ni n’indique rien pour la servitude
contraire.
*
H Une preuve que la servitude altiÙs non tollendi ne
renferme pas cellé ne lum inibus o jjic ia tu r , c est que,
suivant cette dernière , il n’est pas me me permis de
planter des arbres qui diminuent la vue ; tandis que la
servitude*¿/¿mi non tollendi n'empêclie pas de planter
des arbrès;à toutédistance, A liu d est œ dijicare, a liu d
*cst arborem pbrièré}"'
r
On pouvait même',"cliefc lés Rom ains, en planter,
e n !cé 'cas,‘aii-de3sus même de l'édifice, dont: lii hauteur
était'cependant déterminée. Suprà eam altitudinem tandis que dans le cas des autres servitudes, cela aurait
été défendu.
II.* O B J E C T I O N . P a g . 1 7.
Toujours la loi régarcle la défense d'élever plus haut
�comme
Le s e u l
Ci3 )
moyen d’empêcher la lumière.
se rv itu s i m p o n ita r
ne
l u m in ib u s
o f f ic ia t u r
Cùm
, Aoc
m a x i m e a d e p t i v i d e t n u r , n e j u s f i l ç ic in o . i n v i t i s n o b i s
A L T iv s
æ d if ic a r e
j a t q u e ¿ta m i n u e r e L u m i n a æ d i f i -
c io ru tn n o s tr o r u m .
RÉPONSE.
Il faut faire une inversion des termes de la loi, pour
y donner le même sens que le sieur Ragoux.
Elle ne dit pas que celui qui aura la servitude ailiàs
tollendi aura aussi celle ne Luminibus officiatur • elle
dit, au contraire, que celui qui aura la dernière pourra
empêcher d’élever plus haut. Et le sieur Lavignac n’a
jamais nié ce principe.
Ainsi, le sieur Ragoux n’a que faire de s’approprier
le
m in u ere
L u m in a
qui termine cette loi
;
car il est
destiné à une autre espèce de servitude que celle de
son acte.
I I I . e o b j e c t i o n . P ag. 17 .
Les auteurs donnent le même sens à ces lois. M . de
Lamoignon a dit, en ses Arrêts, titre 2 0 , article 20 :
* S i, dans le titre de la servitude, i l ci é t é c o n v e n u q u e
« L'on n e p o u r r a o b s c u r c i r ou donner empêchement
« au mur du voisin, le propriétaire laissera les lie u î
* en Pélat où ils étaient lors de l’imposition, sans y
« faire aucun plant d’arbres ni bâtimens;nouveaux, et
« sans pouvoir aussi élever les anciens*bâtimens*. T el
est aussi le langage d’Auzanet , Ferrière, I/alaure3
Desgodets.
�RÉPONSE.
A v a n t cet article 20 (qui ne s’applique toujours qu’à
la servitude ne luminibus officiatur), M. deLam oign on
avait dit ce que le sieur R agou x a jugé à propos
d’omettre.
Art. 19. « L e propriétaire d’ un héritage, sur lequel
« le voisin a droit de v u e , peut élever sur son fonds
«• des bâtimens, et planter des arbres, pourvu qu’il y
. « a il six pieds de distance entre le mur faisant sépara« tion des héritages des parties , et le bâtiment nou« v e a u , et douze pieds de distance entre le mur et
«• le pied des arbres ■».
IV .®
objection.
P a g . 18 .
I l a été dans l’intention des parties de donner à
l ’acquéreur une vue de prospect, tant qu’elle pouvait
s’étendre; sans cela , il eût été inutile de stipuler que
le mur n’aurait que trois pieds et demi. La clause eût
.été sans in té r ê t , si le vendeur avait en le droit de
construire le lendemain un mur plus élevé à côté de
l ’autre ; il eût été inutile aussi de se réserver la faculté
de placer des vases de fleurs. S’il n’y avait eu que l’inJe n tio n de ne céder qu ’une simple vue droite, on se
serait réservé le droit de construire à une distance
déterminée. L a perspective du jardin a dû augmenter
le prix de la maison.
�'
( i5 )
RÉPONSE.
Qu’ y a-t-il dans tout cela? Des présomptions.
El c’çst par des présomptions que le s.r Ragoux veut
étendre une servitude au-delà des termes de son acte.
Il ne remarque pas que les présomptions, même'
de l’intention des parties, se tourneraient contre lui.
L a latitude qu’il prête à sa servitude serait une
grande injure aux sieurs d’A u le r iv e , et il faudrait
mettre en problème si leur raison aurait bien présidé
à une convention aussi étrange.
Non contens d’avoir vendu pour 5; ooo liv. une mai
son qui avait deux corps de logis, une cour au milieu,
et douze croisées d’un seul côté, se pourrait-il qu’ils
eussent ajouté à la souffrance de lumière de ces douze
croisées, une prohibition perpétuelle de bâtir chez
e u x , et de n’être, dans leur jardin, que sous la sur
veillance habituelle d’une multitude d’individus. Si
cela était supposable pour une maison de champs >
- comment admettre qu’un propriétaire en ait même
conçu l’idée à l ’égard d’ un jardin placé au milieu
d’ une ville populeuse?
N ’e st-il pas plus naturel de penser que le sieur
- F o rn ie r, prêtre, voyant un petit mur à trois.pieds ,
de la maison qu’il allait acquérir, eût à l ’instant la
crainte qu’il ne fût é le v é 'à une grande hauteur? E t
comme les parties doutèrent si le v e n d e u r aurait droit
de le lever à celle distance , le sieur Fornier demandà
t'\
c
5 (7
�que ce mur, si voisin, ne fût pas é le v é , et le vendeur
y consentit.
Alors le vendeur n’avait pas des projets de bâtir,
puisqu’il vendait une propriété. Ne s’occupant doue
que de jouir de ce qu’il avait, il ne voulut pas que
jon consentement, de ne pas changer la hauteur du
mur existant, s’opposât à ce qu’il y plaçât des fleurs,
tant qu’il le conserverait.
Voilà la seule pensée que durent avoir les parties,
et la seule qu’il faut leur supposer, puisqu'elle est la
seule de bon sens. Voilà le vrai pacte de quo cogita
tion est, et au-delà duquel il est clair qu'il n’y a pas
eu une ébauche de convention.
C ertes, si les sieurs Croizet eussent le lendemain
bâti un grand mur à côté de tl’ancien, et, comme le
disait d’abord le sieur Ragoux , plaqué contre le pre
m ier, il eût»élé répréhensible, parce qu’une conven• lion ne s’élude pas avec affectation.
Mais qui veut trop prouverjne prouve rien Car ce
n’ est pas.en se jouant ainsi de ses engagemens, que le s.T
Lavignac a bâti. Il a bâti à quatre pieds au-delà du pré
cédent m u r , Ci’ est à dire à 7 pieds et demi de la mai
son Ragoux.
•Sa.convention n’était restrictive que parce qu’il était
. ?en .17 7 2 : dansila distance habituelle de la loi. Mais. il
s ’est <conformé à la loi; il a exécuté ce que dit M. de
, Lanioi<rnon; et dès-lors, au-delà de 6 pieds, il retrouve
,le droit com m un, par-delà lequel sa convention n.V;st
pas allé, lui donner des .entrave&jimprévues.
Ce
�? 17 }
V.
■
Ce n’ est: pas assez , dit le sieur Ragoux, cl avoir sti
pulé qu’il ne bâtirait pas à trois pieds et d e m i, il fa l
lait qu’il se réservât de bâtir plus loin.
Disons plutôt que c’ était à l’acquéreur à stipuler
qu’on ne bâtirait pas à une plus grande distance.
Car c’ est lui qui avait besoin de la servitude, et par
conséquent du litre et de la clause.
O r, tout ce.qui n’est pas dans la prohibition rentre
de plein droit dans la loi commune.
Celle loi est l’arlicle 202 de la coutume de P a ris ,
qui veut six pieds de distance entre les vues droites et
les niurs voisins.
Et avec cette distance, la servitude ciltiùs non toi-
letidi doit être bien moins rigoureuse que cliez les ro
mains, dont les maisons, presque toujours séparées en
îles, n'avaient, de distance légale, que celle de deux
pieds ( 1 ) .
V .c
OBJECTION.
F a g- 2 1.
Mais , dit le sieur R a g o u x , s’il y a de l’incerlitude
dans l’acle de 1 7 7 2 , elle doit s’interpréter conte le ven
deur, qui potuit Legeni apertius conscribere.
Ré p o n s e .
Celle réglé de droit n’est applicable qu’à la re
cherche de la chose vendue et aux servitudes retenues
( 1 ) Si quis sepem propè alienum prœdiurn fixen t , ternu-
nuni ne exccdito, S i rnacerie/n, pedem relinqailo ; si verb domutn, pedes duos. L . ult. II’. iin. rcg.
3
�( i8; )
par le vendeur sur l’objet aliéné, mais pas du tout aux
servitudes qu’il s’impose.
Car d’après la maxime n o n jit extensio in prohibitor iis , c'est à celui qui fait constituer la servitude à son
profit, à.lui donner plus de latitude. C ’est le vœu d e là
coutume de Paris, art. 216 .
Avant de rechercher la règle de droit 1 7 2 , le sieur
•Ragoux pouvait s’arrêter à la 8 i .e qui paraît résoudre
pleinement la difficulté.
Quœ, dubitationis toLlendœ causâ, contractibus iri
ser uni ur , ju s c,oni mu ne non lœdunt. 1. 8 1 , de reg. jur.
Or comme la convention de ne pas élever un m u r,
qui n’était alors qu’à trois pieds et demi 4e la maison,
ne fut écrite .visiblement ,que pour lever le doute du
droit de bâtir à cette courte distance, il ne peut pas en.
résulter que les sieurs Croizet se soient abstenus à ja
mais d’ user du droit commun, c’est-à-dire.de bâtir à
six pieds, d’après la coutume de Paris qui était la loi
générale.
N ’y a u ra it-il donc pns une injustice évidente de
'forcer ainsi le sens d’ un acte, au point de restreindre
une propriété à une annulation absolue, pour le seul
avantage de donner une plus grande clarté à deux
pièces du rez-de-chaussée d’ une maison; et si un ven-dour était ainsi opprimé par le sens équivoque de sa
convention, ne se rait-ce pas le cas de s’écrier avec
la loi : iniquum est perimi pacto id de quo cogitatum
non est. L . 9> f f ' ^ 6 trans•
L e sieur Ragoux rejette fort loin l’art. 2 1 5 d e là
�( i9 )
coutume de Paîis.' Cependant c’est cet article qui veut
que le vendeur déclare spécialement quelles servitudes
il relient ou constitue tant pour V endrait, hauteur,
largeur, que l ’espèce j autrement quelques espèces gé
nérales de servitudes, sans les déclarer comme dessus ,
dit l ’article, ne valertt.
Cet article est donc une preuve que la clause de
servitude ne doit pas s’expliquer par analogie , ni
extension, ni présomption, mais spécialement et en
détail.
Or Y e n d r o i t marqué par la clause de 17 7 2 , est à
trois pieds et demi : donc il n’y a pas eu prohibition
de bâtir à sept pieds de distance.
V I.® o b j e c t i o n . P a g . 23 .
L e sieur Ragoilx revient à une idée qu’ il avait aban
donnée devant les premiers juges. Il voudrait la pro
priété de la ruelle, parce qu e, dit-il, il est confiné par
le jardin; cela étant , il en conclut que le sieur Lavignac ne devait au moins bâtir qu’a six pieds au-delà
de la ruelle.
h é p 0 n s E.
Voilà donc le sieur Ragoux forcé de s’emparer d’ un
mot, pour se faire un moyen.
E t quel mot encore ! quel faible m ol! Personne ne
l a mieux évalué que lu i; et il nous donne sa réfuta
tion lui m em e, à la fin de la page 22.
�( 20 )
Que signifierait alors la défense dé jeter de ¿'eau on
des ordures? 11 es! clair en effet que si la ruelle eût été
vendue au sieur R agoux, il était contradictoire que
le vendeur s'occupât de ce qu’on jetterait ensuite sur
lu chose vendue. Ce n’eût pas été immittere in alienum.
Ajoutons h cette réflexion : ijue signifierait aussi
la permission accordée au sieur Former de se servir
de la ruelle pour réparer sa maison?
Ôn ne lui en a donc concédé que Yusage momentané ;
e! l’ usage est exclusif de la propriété.
L e confin du jardin prouve seulement que la ruelle
éluit considérée comme partie du jardin, et non de la
maison , ni même comme commune. La suite de l’acte
explique parfailementl’inlenlion des parties,qui ne veu
lent accorder à l’acquéreur qu’ un usage ou tolérance.
CONCLUSION.
L a vente de 1 7 7 2 ne donne à l’acquéreur que lé droit
de vue et non de prospect.
Toute vue droite comporte avec elle une distance
de six pieds jusqu’au mur voisin:et cela explique loutà-la-fois la convention de 11e pas élever un mur alors
existant, parce qu’il n’était qu’à trois pieds et demi, et
la f a c u l t é demeurée au vendeur de bâtir à six pieus
de distance, par cela seul qu’il ne s'est pas départi spé
cialement de ce droit légal.
Ainsi il a été mal jugé en ce que la hauteur du mur
actuel a été diminuée, car un mur fait au-delà de la dis
tance voulue par la loi est hors d atteinte.
�S’il y a lieu de dire que le sieur Lavignac pouvait
batir à une dislance quelconque , il n’y a pas de raison
qui fusse penser que ce sera à quinze pieds, ou à dix,
ou à huit, car la loi n’indique aucune variation ni ar
bitraire. Il faut donc que ce soit à six pieds.
D ’après cela , il doit peu importer qu’il en résulie un
peu plus d’obscurité à un rez-de-chaussée voisin ; c’est
un mal nécessaire dans une ville. Tout ce qui tend à
empêcher la mitoyenneté des murs latéraux, et à peu
pler de jardins une rue publique, ne mérite pas de fa
veur.
Qu’est-ce d’ailleurs que cette obscurité, si, le 9 dé
cembre, les experts ont pu lire un caractère m enu, à
quelque distance des fenêtres, dans une salle plus basse
que le sol d’un jardin, par un tems nébuleux?
E t c’est pour une façade tournée au nord plein ,
qu’on veut ménager les rayons du soleil pour quelques
minutes de plus. Tout autre croirait gagner à l’élévation
d’un mur à cet aspect. Mais le sieur Ragoux avertit qu’il
a des raisons particulières, et qu’il a intérêt d’égayer ses
commensaux par la vue d’un jardin.
Voilà donc le secret principal du procès qu’il a sus
cité au sieur Lavignac. En esl-ce assez pour forcer le
sens d’une convention , et priver le sieur Lavignac du
bénéfice de la loi commune.
L ’appel incident du sieur Ragoux ne sert qu’à prouver
qu’il a cru en avoir besoin pour être c o n s é q u e n t avec
lui même.
Il fallait qu’il empêchât le sieur Lavignac de batir
�( 22 )
nulle part, ou qu’il avouât que le sieur Lavignac en
avait le d ro it, en reculant à six pieds. Alors il s’est
donné la servitude de prospect; et c’est là-dessus qu’il
a fondé son appel.
Mais son titre n’a rien qui ressemble à la servitude
de prospect ; et cette évidence achèvera de prouver que,
pour tâcher d’obtenir peu, il demande beaucoup.
L ’exagération de ses plaintes et du tort qu’il souffre
sera appréciée comme toutes les exclamations familières
aux plaideurs qui s’obstinent; ses moyens de fortune
sont fort indépendans du prospect d’un jardin qu’ on ne
veut pas qu’il montre à tout venant; et le tems qu’il
a perdu à plaider a dû lui être plus nuisible que ne le
sera jamais le mur qu’il voudrait détruire.
L e sieur Lavignac, au reste, a usé de son droit par
nécessité et avec modération. Il fallait qu’il renonçât à
son habitation et à son jardin, ou qu’il y fût libre et
indépendant. Il a fait ce que tout autre eût fait et dû
faire; et on n’est point un voisin inquiet et ambitieux,
quand, au lieu d’usurper la propriété de son voisin, on
Sacrifie à la décence et à son repos une partie de la
sienne.
,-
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M. e M A R I E , Licencié - avoué.
A
R I O M ,
DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�// gck- t'óol / • * / * & - .
' ^ \
4*<J’atj'-U ÿjL.L^A t' <—’ /« c<»M.>i' à«-»
v.'yíú„ pa^tu ¿o;7
<AA«ùüi de OÄW y i !«.y'cj~X
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esquiron-Lavignac 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
servitude de vue
auberges
experts
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour le sieur Esquiron-Lavignac, propriétaire à Aurillac, appelant et intimé ; Contre le sieur Ragoux, traiteur , habitant de la même ville, intime et appelant.
Particularités : Notation manuscrite : texte intégral de l'arrêt du 11 octobre 1807, 1ére section.
Table Godemel : Servitude : 3. la servitude de jour (luminum) et celle non altuis tollendi emportent-elles celle de prospect ? quelle est son étendue ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1806-1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1810
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53337/BCU_Factums_G1810.jpg
auberges
Conflit de voisinage
experts
servitude de vue
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53764/BCU_Factums_M0316.pdf
b0328e1e77ff78e17a5594ff548fab0a
PDF Text
Text
PRECIS
EN RÉPONSE,
POUR
L e sieur E S Q U I R O N - L A V I G N A C , propriétaire
à Aurillac , appelant et intim é ;
CONTRE
L e sieur R A G O U X , traiteur , habitant de la même
v ille, intimé et appelant.
P a r acte du 1
d ’A u terive
5 décem bre
vendirent
1 7 7 2 , les sieurs Croizet-
au sieur A lexa n d re - L auren t
�( o
F o r n i e r , prêtre , «ne maison sise en la rue N e u v e
de la ville d’Au'rilIac, com posée de deux corps de
logis séparés par une c o u r , çonfinée par le jardin
des vendeurs*, de b is e , e t c . , m oyennant
5,ooo
mille
livres.
I l est con ven u que l ’acquéreur pourra entrer dans
le jardin
des vendeurs , et se servir de la ruelle ,
large de trois pieds et d e m i, pour réparer sa m a iso n ,
placer des contrevents aux fen êtres, les élever 011
élargir pou rvu q u ’elles soient grillées ; com m e aussi
que le m ur scparant Ladite ruelle d u /a rd ifi, ne pourra
être é levé que de trois pieds et d e m i, sans préjudice
a u x vendeurs de pouvoir y placer des vases de fleurs;
et à la charge q u ’on ne ,pourra y jeter ni ordures,
ni eaux.
L a tnaison F orn iér a été aCqüise)par le sieur R a go u x,
qui en a fait une a u b e r g e , d e v e n u e , grâces à son
t a l e n t , la plus fréquentée d ’Aurillac.
Le
jardin
des sieurs
C roizet a passé ,
a vec la
maison dont il d é p e n d , au sieur Lavignac. L e sol de
ce jardin ,est plus é le v é que les croisées du rez-de«
(
_
f
chaussée de la maison R ago u x ; et précisémeut c ’est
a ce re z -d e -c h a u s s é e , du côté du jardin L a v i g n a c ,
q u e le sieur R a g o u x a placé sa salle à m anger prin
cipale.
C e n ’est pas le bruit de ce voisinage qui in co m m o
dait le plus le 'sieur L a v ig n a c ; m h is/ i.° les fen êtres‘du
p rem ie r;éta ge he*’sont'pàs; bhrréés 5 il’ fd lla it'q u e les
�(3)
dames de sa famille ou de sa société renonçassent à so
p ro m en er dansson jardin, ou q u ’il prît des mesures pour
faire cesser cette véritable com m unauté d'habitation.
A v a it-il le droit de se séparer du sieur R agoux par
un m u r? XI y aurait de la folie à dire absolument non;
et c ’est bien l’avis des premiers juges. M ais, à quelle dis
la n c e et hauteur devait-il faire ce m ur? voilà la difficulté.
L e sieur L avign ac n'usa pas de son droit dans toute
sa latitud e; on lui dit q u ’il pouvait bâtir à six pieds de
distance; il préféra de s’éloigner de sept pieds et d e m i,
pour é viter toute espèce de discussion avec son voisin ;
il laissa m êm e une porte à la ru elle , pour que le sieur
R ago u x pût aller réparer sa maison ^ quand elle en
a u r a i t besoin.
■ Ces précautions n ’ont rien épargné au sieur Lavignac,
et le sieur R a g o u x lui fit fa ir e , le i . er mai 18 0 6, une
sommation de cesser la construction de son m u r , que
le sieur L a vign ac ne pouvait cependant pas disconti
nuer sans de grands frais, puisque ses ouvriers étaient
reten us, et ses m atériaux à pied d ’œuvre.
Alors le procès a co m m e n cé , et le sieur R a g o u x ,
dans une re q u ê te, a manifesté ses prétentions a vec
exagération, et m êm e a vec hum eur. 11 a dit a v o ir ,
par sa vente , la servitude tout à la fois de passage
d ’aspcct et de prospect ; il a prétendu que pour éluder
la prohibition d ’élever le m ur alors exista n t, le sieur
L avign ac y en a substitué un nouveau, construit im m é
diatement après, et en quelque sorte plaqué contre te
pi entier; que déjà il dépasse de plus de douze pieds.
�(4)
Il assuré que ce m ur le prive de l ’a ir , de la clarté, et
de toute espèce de salubrité ; et là-dessus il reproche
au sieur L a vigu a c de traiter les lois et les conventions
comme les fr ê le s tissus de l ’araignée im puissante.
L e s juges d’Aurillac ont voulu savoir jusqu'à quel
point cet exposé du sieur R a g o u x était sincère; e t ,
le 9 août 1806, ils ont ordonné que des experts v é
rifieraient l ’état des lieu x; e t , après avoir dem andé
toutes les dimensions de la ruelle et des m u rs , ils
ont chargé les experts d’aller sur les lie u x , à quatre
heures après-m idi, et là de vérifier s i , malgré l’é lé v a
tion du nouveau m u r, les rayons du soleil peuvent
aboutir aux fenêtres du rez-de-chaussée de la maison.
R agou x ; dans quelle proportion, si le nouveau m ur
intercepte le jo u r des apparteniens d u re% de chaussée;
quel degré d ’obscurité il leur donne relativement à
Cusage auquel ils sont destinés ; à quelle hauteur du
m u r les apparteniens doivent recevoir le jour néces
saire. “
L e rapport des experts n'a pas confirmé ce qu'avait
dit le sieur L avign ac. Ils rem arquent qu’au lieu de la
distance ancienne de trois pieds et d em i, il y avait
sept pieds cinq pouces entre la maison R agou x et le
n o u ve au mur.
L e nouveau m u r, à partir du niveau ou accoudoir
des fen êtres, a n e u f pieds quatre pouces de hauteur
du côté du jardin, et dix pieds quatre pouces du côté
de la r u e lle , dont le sol est plus bas.
Et à partir du niveau de la ru elle, il 0, d ’un cô té,
�(5)
treize pieds, et de l ’autre douze pieds cinq pouces,
excède l ’ancien m ur de 9 pieds 9 pouces et demi.
L e s experts disent que Télé val ion actuelle du m ur
n ’em pêche pas les rayons du soleil d’aboutir aux fenê
tres du rez-de-chaussée. A deux heures et d e m ie , il a
com m encé à éclairer la façade de la maison en totalité,
à l’exceplion de la prem ière croisée de la cuisine.
A trois h eures, le soleil a pénétré ensuite dans le rezde-chaussée, par un rayon oblique de sept centimètres.
Cette lum ière intérieure a duré un q u a r t - d ’heure.
(iV. B. L a façade est au nord).
>
A quatre heures, les experts o n t,vu que les appartem ens du rez-de-chaussée recevaient le jo u r suffisan t
pour L'usage auquel ils sont destinés.
L e s experts pensent que le sieur L a v ig n a c a pu
élever davantage son mur que le premier, puisqu’il Ta
fait plus é lo ig n é ; mais ils s’abstiennent de décider
jusqu’à quelle hauteur il l ’a pu.
E n fin , com m e la prem ière visite avait été suivie d’une
médiation que rompit le sieur R a g o u x , les experts o nt (
voulu savoir quelle serait l ’obscurité de son r e z - d e chaussée dans l ’arrière-saison. E n co n s é q u e n c e , ils y
sont allés par trois fois et par un tems sombre et
n éb u leu x, les 10 septembre , 2 n o v e m b re et 9 d é
cem bre , tantôt une h eure après le lever du soleil,
tantôt une heure après son coucher. L à ayant pris
chaque fois un livre d’ un caractère assez m e n u , ils ont
lu à une certaine distance des fenêtres.
;
E n s o m m e } les experts disent bien que le m u r a
�(6)
donné de l ’obscurité au rez-de-chaussée de la maison
R a g o u x , mais qu'il entre asse% de lumière dans les
pièces de ce re%-de chaussée pour l ’usage auquel elles
sont destinées.
r
C ette relation des experts n’a pas satisfait le sieur
l l a g o u x , qui a sollicité les premiers juges de voir le
local eux-m êm es ; et on pense aisément que , dans
cette visite, il a dû exagérer le détriment q u ’il prétend
souffrir.
>
Q uoiqu’il en s o it, après cette descente non ordonnée
en jugem ent , le tribunal d’ Aurillac a condam né Ib
sieur L a vigu a c à réduire la hauteur de son mur à
neuf pieds.
-
I-es motifs de cette décision^ au nom bre de douze)
se réduisent à dire que le vendeur de 177 2 ne s’était
I;
*i! .
'*
i 'î
* ■
pas interdit la faculté de faire un mur de séparation
su r-to u t'en s’éloignant; mais q u ’il n’avait pas dû obs
curcir les appartemens d’une m anière nuisible.
:
L e sieur L avign ac a interjeté appel de ce jugem ent
3
en ce q u ’il l’oblige à dém olir une partie de son mur.
L e sieur R agoux en a aussi interjeté a p p e l, en ce
q u ’il ne condam ne pas le sieur L a vign ac à le déinolir tout entier.
M O Y E N S .
j
)
T o u t le système du sieur R agoux repose sur ce rai-
.aonuçment : J ’ai le droit de vu e { l u m i n u m ) sur
�( V)
ru e lle , e t p e u f - ê i i - e m êm e la ruelle tout entière. J ’ai
de plus la servitude d’em pêcher l ’élévalion du miir
‘ de celte ruelle (cilicàs non toLlendi). D o n c j ’ai aussi',
par une conséquence nécessaire, la servitude d ’aspect
'et prospect sur votre jardin; et vous ne p o u vez rien
changer à l’ancien élat des l i e u x p a r c e
que vous
m ’ôteriez non:seulement la ’ quantité d e 'lu m iè re que
j ’avais, mais encore l ’agrém ent que portait à m a mai
son la vue de votre jardin. C a r , dit le sieur R a g o u x ,
à moins de contester l ’é v id e n c e , il est dém ontré q u’il
a été concédé une vu e de prospect, et que la perspec
tive du jardin a été pour l ’acquéreur un m o yen de
séduction ou d’agrém ent qui a dû augm enter le prix
d e l à maison.
-
I l faut cependant que le sieur R ago u x soupçonne
que celte évidence prétendue ne soit pas sans réponse;
car il se plaint de ce que le sieur L a vig n a c ne lui a
présenté que des objections légères et dédaigneuses.
Sa fie r té , dit-il, a souffert de descendre dans l ’arêne
avec un traiteur.
C e reproche est bien dur, et le sieur L a vign ac y a
été sensible. L o in de lui tout mépris pour un art pré
cieux q u ’il honore, et dont il n’a garde de conteste^
l ’importance. S’il se fût senti coupable d’ un tel senti
m e n t, il l’aurait certainem ent dissimulé avec précau
tion. C ’est déjà un adversaire assez puissant q u ’ un
traiteur en rép u ta tio n :
tant d ’intérêts s’unissent au
s ie n , que tout ce qui peut le contrarier ou le dis
�(8)
traire, est exagéré par ce u x qui en gouffrent com m e
un e calam ité pu b liqu e, et le sieur L a vign ac ne se le
cache pas (i). Ainsi loin de se plaindre envers le S.r R a goux de sa juste fierté, fondée , plus que sa prétention,
sur des autorités précises (2 ), le sieur L a v ig n a c d é
clare en toute hum ilité q u ’il n ’a à s’accuser d’avoir
traité avec lég è re té , ni sa person n e, ni ses objections.
Il y a répondu de son mieux ; les m oyens qu'il a fait
valoir lui ont semblé très-solides; et il ne croira s’êlre
bien défendu encore q u’en les reproduisant sans les
affaiblir.
R evenons donc à la maison du sieur R a g o u x , et A
l ’arêne où il nous convie. V oyons com m ent la servi
tude a ltià s non toUendi pourra le conduire à la ser-
( 1) Pour aggraver les torts du sieur Lavignac envers ses con
citoyens, le sieur Ragoux s’est obstiné à s’expatrier jusqu’à la
fin de son procès. Mais le sieur Lavignac se liâte de dire , pour
sa justification, qu’il n’a porté aucun obstacle à un prompt ju
gem ent, et que forcé par ses affaires, de suspendre son départ,
il a mieux aimé s’abstenir d’être présent que de retarder d’un
seul instant la plaidoirie de sa cause.
» ( 2)
Faites cas de celui qui, fier de son talent,
S’estime votre égal, e t, d’un air im portant,
Près de son potager, que la flamme illum ine,
D onne, avec dignité, des lois.......dans sa cuisine.
G a str. Chant II.
?
vilude
�(9 )
Vitude de prospect, et • si elles dépendent nécessai
rement l’ une de l’autre.
E n matière de servitu d es, il n’est pas permis de
raisonner par analogie ou par simples conséquences.
Il faut trouver dans le titre qui les constitue tout ce
qu on veut exiger ou prohiber, sans que Tacle laisse
m êm e le soupçon du contraire; car les servitudes sont
de droit étroit ; et com m e elles font violence au libre
usage de la propriété du voisin, com m e la tendance
naturelle est pour l’affranchissement, il est de principe
que tout ce qui n’est pas m athém atiquem ent compris
dans la clause de servitude s’explique en faveur de celui
q u ’on v e u t,y asservir.'
C e n’est pas absolument aux lois romaines q u’il faut
recourir pour une question de servitudes urbaines. L a
coutum e de Paris était, sur cette m atière, le droit com
m un de la F ra n c e ; et qnand on compare les divisions
et subdivisions du digeste sur chaque espèce de servi
tude avec la brièveté de l ’article 686 du code civil ( i ),
on dem eure convaincu de plus en plus que l ’étendue
à donner à une servitude ne doit dépendre que du texte
liItérai et non équivoque de la clause qui la constitue.
L es lois romaines , au reste, distinguent très-expres
sément ce que le sieur R agoux veut confondre.
(i) Art. 686. Il est permis aux propriétaires d’établir sur leurs
propriétés telles servitudes que bon leur semble, pourvu que les
services établis. . . . n’aient rien de contraire à l’ordre public.
L ’usage et l'étendue des servitudes se règlent -par le litre qui
les constitue , et à défaut de titre, par les règles ci-après.
�C ro )
Il o , par son a cle , la servitude de jour (/u m in u m ),
et la servitude a ltius non toLlendi, non pas pour un
édifice en tier, ce qui est la plus fréquente supposi
tion des lois, mais bornée à un simple m u r , et pour
une distance convenue.
D e ces deux servitudes, il veut en faire quatre, car
il ajoute celle ne lurninibus officuatur, et m êm e celle
ne prospectai o jjicia tu r, qui sont très-distinctes dans le
droit, et qui portent une gên e bien différente.
A v e c sa servitude de jo u r, et sans celle a ltiu s non,
toLlendi, le sieur L avignac n’aurait eu nul besoin de
se reculer pour bâtir. Il aurait eu certainement la fa
culté d ’élever le mur ancien de sa ru elle , d ’après les
principes.
C ar la servitude de jours (lu m in u m ) n ’em porte que
nécessité de souffrir des vues droites, sans rien laisser
au prospect : il suffit de voir le c i e l , tel est le texte
des lois
et i du digeste de servit, prœd. urb. et
3
5
l'interprétation générale des auteurs.
C ’est pourquoi ceux qui veulent une gêne moins
grande à leurs vues doivent convenir de l’une ou
de l ’autre des servitudes d ’aspect; et alors ces lo is,
elles-m êm es, marquent une différence sensible au ré
sultat de ces servitudes.
Elles portent avec elles une dénomination qui en
m arque le sens ; ne lum inibus ojjiciatur exprim e a u
tant que possible , que si l ’acte porte expressément la
condition de ne pas offusquer la lum ière, on ne pourra
pas la diminuer par un b âtim en t, et çle m êm e ne p ros-
�( II
)
pectuí ojjlciatu r dénoie assez que tout ce qui ôterait
le point de v u e , m êm e dans l’éloignem en t, contrevien
drait à la convention.
T o u t le titre du digeste prouve que ces diverses
espèces de servitudes sont trè s-d istin ctes, et par con
s é q u e n t que l ’ une ne supplée pas l’autre, à moins que
sa plus grande étendue ne com porte de plein droit la
servitude moindre.
Ainsi la servitude ne lum inibus officiatur est à la
vérité comprise de plein droit dans celle ne prospectai
o fficia tu r, qui est la plus é te n d u e , parce que tout ce
qui tendrait ¿1 ôter la lumière d ’une f e n ê t r e , ôterait
bien, à plus forte raison, la perspective éloignée q u ’elle
doit avoir.
Mais on ne peut pas, com m e le sieur R a g o u x , ren
ferm er une servitude plus grande dans une servitude
moindre. Il fait beaucoup d’efforts pour prouver que
la servitude ciltiiis toLlendi em porte a v ec elle les ser
vitudes ne Luminibus , et prospectai ojjîciatur. C ’est
en effet de là que dépend toute sa défense.
V o y o n s sur quelles autorités celte prétention est
fondée : et pour ne pas m ériter une seconde fois le
reproche de,déd aign er ses moyens et ses objection s,
le sieur L avign ac va les suivre pas à pas pour y r é
pondre.
I . re o b j e c t i o n .
P a g . 16.
L es lois romaines, dil le sieur R.agoux , ne font
pas de différence e n tr ó la servitude aLtius ioL/endi,et
�( 12 )
celle ne Luminibus a u l prospectai ofjiciatur. L a loi 2 ,
a u / i D e ¿cr. pr. urb. le prouve.
RÉPONSE.
C e lte loi n’est que la série des différentes espèces
de servitudes : elle les classe et les distingue; par con
sé q u en t, elle ne les confond pas.
L e sieur R a g o u x veut lirer d’ une simple conjonction
une conséquence f o r c é e , q u’il n ’induit encore que
d’un argu m en t à c o n t r a r i o c a r ia loi parle des servi
tudes imposées par celui qui veut qu’on élève un mur
pour diminuer sa lumière. Mais cette servitude affir
m ative
ne juge ni n’indique rien pour la servitude
contraire.
U n e preuve que la servitude a ltià s non tollendi ne
ren ferm e pas celle ne Luminibus o jfîc ia tu r , c’ est q u e ,
suivant cette dernière ., il n ’est pas m êm e permis de
planter des arbres qui diminuent la v u e ; tandis que la
servitude altiiis non tollendi n'em p êch e pas de planter
des arbres à t o u t e distance. A l i u d est œ dificare, a liu d
est arborem ponere.
O11 pouvait m ô m e , chez les R o m a in s, en p lan ler,
en ce cas, au-dessus m êm e de l ’éd ifice , dont la hauteur
-était c e p e n d a n t déterm inée. Suprà eam a llitu d in em •
tandis que dans le cas des autres servitudes, cela aurait
été défendu.
II.* o b j e c t i o n .
P a g . 1 7.
Toujours la loi regarde la défense d ’élever plus haut
�(
*3
)
com m e le seul m o y e n d’em pêcher la lum ière. C àm
servitus im ponitur
ne
lu m in ib u s
o fficia tu r
, hoc
m a xim e adepti videtnur, ne j u s f i t vicitio invitis nobis
a ltiu s
æ d ifica re
, atqu.e ita rhinuere lum ina œ d ifi-
ciorum nostrorum.
RÉPONSE.
Il faut faire une inversion des termes de la lo i, pour
y donner le m êm e sens que le sieur R agoux.
Elle ne dit pas que celui qui aura la servitude a llia s
tollendi 'aura aussi celle ne Luminibus officiatur ■elle
dit, au contraire, que celui qui aura la dernière pourra
em pêcher d’élever plus haut. E t le sieur L a v ig n a c n ’a
jamais nié ce principe.
A insi, le sieur R a go u x n’a que faire de s’approprier
le minuere luminci qui term ine cette loi ; car il est
destiné à une autre espèce de servitude que celle de
son acte.
I I I .e O B J E C T I O N . P a g . 17.
L e s auteurs donnent le m êm e sens h ces lois. M . de
L am oign on a d it, en ses A rrêts, titre 20 , article 20 :
• S i, dans le litre de la servitude, il
cl
été convenu que
« l'on ne pourra obscurcir ou donner em pêch em en t
« au mur du voisin,, le propriétaire laissera les lieu x
« en l’élat où ils étaient lors de l’imposition, sans y
«< faire aucun plant d ’arbres ni bâtiniensjnouveaux, et
« sans pouvoir aussi élever les anciens biltimens-». T e l
est aussi le langage d’A u z a n e t , l e r r i é r e , L a la u r e ,
Desgodets.
�( i4 )
RÉPONSE.
A v a n t cet article 20 (qui ne s’applique toujours qu’à
la servitude ne lum inibus o jficia tu r) , M. de La moignon
avait dit ce que le sieur Rago ux a jugé à propos
d ’omettre.
Art. 19. « L e propriétaire d ’ un hé rita g e , sur lequel
« le voisin a droit de v u e , peut élever sur son fonds
* des bûlimens, et planter des arbres, pourvu qu’ il ij
« a it s ix pieds de distance entre le mur faisant sépara« tion des héritages des parties, et le bâtiment nou« v e a u , et douze pieds de distance entre le mur et
le pied des arbres ■
».
IV.e o b j e c t i o n .
P a g . 18.
11 a été dans l’intention des parties de donner à
l ’acquéreur une vue de prospect, tant qu’elle pouvait
s’ étendre; sans cela , il eût été inutile de stipuler que
le mur n’aurait que trois pieds et demi. La clause eût
. été sans i n t é r ê t , si le vende ur avait eu le droit de
. construire le lendemain un mur plus élevé à côté de
l ’aulre ; il eût été inutile aussi de se réserver la faculté
de placer des vases de fleurs. S’il n’y avait eu que l’in
tention de ne céder q u ’une simple vu e droite, on se
serait réservé le droit de construire à une distance
déterminée. L a perspective du jardin a dû augmenter
le prix de la maison.
�( i5 )
RÉPONSE.
Qu y a-t-il dans tout cela? D es présomptions.
E f c ’est par des présomptions que le s.r R a go u x veut
étendre une servitude au-delà des termes de son acte.
Il ne rem arque pas que les présom ptions, m êm e
de l ’intention des parties, se tourneraient contre lui.
L a latitude q u ’il prête à sa servitude serait une
grande injure aux sieurs d ’A u terive , et il faudrait
m ettre en problème si leur raison aurait bien.'présidé
à une convention aussi étrange.
^
5
N on conlens d ’avoir vendu pour ;ooo liv. une m ai
son qui avait deux corps de lo gis, une cour au milieu
et douze croisées d ’un seul c ô t é , se pou rrait-il q u ’ils
eussent ajouté à la souffrance de lum ière de ces d ouze
croisées, une prohibition perpétuelle de bâtir ch ez
e u x , et de n ’être, dans leur ja rd in , que sous la sur
veillance habituelle d’ une multitude d ’individus. Si
cela était supposable pour une maison de c h a m p s .»
com m ent adm ettre q u’ un propriétaire en ait m êm e
conçu l ’idée à l'égard d ’ un
d ’une ville populeuse?
jardin placé
au milieu
N e s t - il pas plus naturel de penser que le sieur
F o r n i e r , p r ê t r e , voyan t un petit m ur à trois pieds
de la maison q u ’il allait a c q u é rir, eût à l ’instant la
crainte q u’il ne fût élevé à une grande h au te u r? E t
com m e les parties doutèrent si le vendeur aurait droit
de le lever a ce lle d ista n ce, le sieur Forn ier demanda
�(
16
)
que ce m u r, si v o isin , 11e fût pas é l e v é , et le vendeur
y consentit.
Alors le ven deur n ’avait pas des projets de b â t ir ,
puisqu’il vendait une propriété. N e s’occupant doue
que de jouir de ce q u ’il avait, il ne voulut pas que
son con sen tem en t, de ne pas changer la hauteur du
m u r existant, s’opposât à ce qu’il y plaçât des fleurs,
1ant qu’il le conserverait.
V oilà la seule pensée que durent avoir les parties,
et la seule q u’il faut leur supposer, puisqu’elle est la
seule de bon sens. Voilà le vrai pacte de quo cogitatuni est, et au-delà duquel il est clair q u ’il n’y a pas
eu une ébauche de convention.
C e rte s , si les sieurs C roizet eussent le lendem ain
bâti un grand m ur à côté de l’an cien , e t , com m e le
disait d ’abord le sieur R ag o u x , plaqué contre le pre1m ie r, il eût été rép réh en sib le, parce q u ’une conven*tion ne s’élude pas a vec affectation.
Mais qui veut trop prouver ne prouve rien. Car ce
n ’ est pas en se jouant ainsi de ses engagemens, que le s.r
L a v ig u a c a bâti. Il a bâti a quatre pieds au-dela du pré
cédent m u r , c ’est à dire à 7 pieds et demi de la m ai
son Ragoux.
Sa convention n’était restrictive que parce q u ’ il était
en 1772 dans la dislance habituelle de la loi. Mais il
s’est conform e à la lo i; il a exécuté ce que dit M. do
T,amoignon ; et dès-lors, au-delà de 6 pieds, il retrouvo
le
droit
c o m m u n , par-delà lequel sa convention 11’cst
pas allé lui donner des entraves imprévues.
Co
�C 17 )
C e n’ est pas assez , dit le sieur R a g o u x , d’avoir sti
pulé q u’il ne bâtirait pas à trois pieds et dem i , il fa l
lait q u’il se réservât de bâtir plus loin.
Disons plutôt que c ’était à l ’acquéreur à stipuler
q u ’on ne bâtirait pas à une plus grande distance.
C ar c ’est lui qui avait besoin de la servitude, et par
conséquent du litre et de la clause.
O r , tout ce qui n’est pas dans la prohibition rentre
de plein droit dans la loi com m une.
C ette loi est l ’article 202 de la coutum e de P a r is ,
qui veut six pieds de distance entre les vues droites et
les murs voisins.
’
E l avec cette distance, la servitude altiics non toilen d i doit être bien moins rigoureuse que ch ez les ro
m ains, dont les maisons, presque toujours séparées en
îles, n’a v a ie n t, de distance lé g a le , que celle de deux
pieds (1 ).
V .e o b j e c t i o n .
P a g . 21.
M a i s , dit le-sieur R a g o u x , s’il y a de l ’incertitude
dans l’acte de 177 2 , elle doit s’interpréter conte le v e n
d e u r, q u i potuit legem apertiàs conscriberç.
RÉPONSE.
C ette règle de droit n ’est applicable q u’ci la r e
cherche (le la chose vendue et aux servitudes retenues
( 1 ) Si f/uis sepetn propè alienum prœdiurn fix e n t, tenninum ne excedilo. Si macerieïn, pedem relinquito y si verb do
nnait, pedes duos. L . ult. il', fin. reg.
3
�( i Q )
par le vendeur sur l’objet a lién é, mais pas du tout aux
servitudes q u’il s’impose. ;
i;
C a r d ’après la m a x im e non J i t eoçtensio in prohibitor i is , c ’est à celui qui fait constituerjla servitude à son
profit, à-lui donner plus de latitude. C ’est le vœu d e l à
coutum e de Paris, art. 216.
A v a n t de rechercher la règle de droit -1 7 2 , le sieur
R a g o u x pouvait s’arrêter à la 8 i , e qui paraît résoudre
pleiuem ent la difficulté.
Q u œ , dubitationLs toUendçe cçiusâ , contractibus in seru n tu r, j u s commune non Lœdunt. 1. 8 1 , de reg. jur.
O r com m e la convention de ne pas.élever un m ur ,
qui n ’élait alors, q u ’à trois'pieds et demi de la m aiso n ,
11e fut écrite visiblement que pour lever le doute du
droit de bâtir à cette courte distance, il ne peut pas en
résulter que les sieurs Croizet se soient abstenus à ja
mais d ’ user du droit c o m m u n , c ’est-à-dire de bâtir à
'six p ie d s , d ’après la coutume, $e Paris qui était la loi
générale.
N ’y aurait - il donc pas une injustice évidente de
forcer ainsi le sens d ’ un a c t e , au point de restreindre
une propriété à une a n n u la tio n absolue, pour le seul
avantage de donner une plus grande clarté à deux
pièces du rez-de-chaussée d’ une m aison; et si un v e n
deur étuil ainsi opprim é par le sens équivoque de sa
c o n v e n tio n , ne s e r a it- c e ' pas le cas de s’écrier a vec
la loi : iniquum . est périme pacto id de quo cogitaturn
non est, L . 9 ,
de trans.
L e sieur R a g o u x rejette fort loin l ’art, 2 1
5
de la
�I9
(
)
co u tu m e de Paris. Cependant c ’est cet article qui veu t
que le vendeur déclare spécialement quelles servitudes
il retient ou constitue tant pour Y en droit, h a u te u r ,
largeu r, que l ’espèce; autrem ent quelques espèces g é
nérales de servitudes, sans les déclarer comme dessus ,
dit l’article, ne valent.
■ Cet article est donc une preuve que la clause de
servitude ne doit pas s’expliquer par a n a lo g ie , ni
e x te n sio n , ni présom ption, mais spécialement et en
détail.
- O r Yendroit m arqué par la clause de 1 7 7 2 , est à
trois pieds et dem i : donc il n ’y a pas eu prohibition
de bâtir à sept pieds de distance.
V I.e O B J E C T I O N . P ag.
23 .
L e sieur R agoiix revient à une idée q u ’il avait aban
donnée devant les premiers juges. Il voudrait la pro-r
priété de la ru elle, parce q u e , dit-il, il est confiné(par
le jardin ; cela é t a n t , il en conclut que le sieur Lavignac ne devait au moins bâtir q u ’a six pieds au-delà
de la ruelle.
RÉPONSE.
. Voilà donc le sieur R ago u x forcé de s’em parer d’ un
m o t, pour se faire un m oyen.
E t quel m o t encore ! quel faible mot! Personne ne
l ’a m ieux évalué que lui; et il nous donne sa réfuta
tion lui m ê m e , à la fin de la page 22.
�( 20 )
Que signifierait alors la défense de je te r de l'eau oti
des ordures? 11 est clair en effet que si la ruelle eût été
ven d u e au sieur R a g o u x , il était contradictoire que
le ven deur s'occupât de ce qu’on jetterait ensuite sur
la chose vendue. C e n ’eût pas été immittere in alienum .
Ajoutons à cette réilexion : que sign ifierait a u ssi
la permission accordée au sieur F orm er de se servir
de La ruelle pour réparer sa m a ison ?
O n ne lui en a donc concédé que l’usage m o m en tané ;
et l’ usage est exclusif de la propriété.
l i e confin du jardin prouve seulement que la ruelle
était considérée com m e partie du jard in , et non de la
maison , ni m êm e com m e com m une. L a suite de l ’acte
explique parfaitement l’intention des parties, qui n e v e u lent accorder à l ’acquéreur q u ’un usage ou tolérance.
-j
CONCLUSION.
v l ia vente de 17 7 2 n e d o n n e à l ’acquéreur que le droit
de v u e et non de prospect.
" T o u te vu e droite com porte avec elle une dislance
de six pieds jusqu’au m ur voisin : et cela explique toutà-la-fois la convention dé ne pas élever un m ur alors
existant, parce q u ’il n ’élail q u ’à trois pieds et d em i, et
la faculté dem eurée au vendeur de bâtir à six pieds
de distance, par cela seul q u ’il ne s’est pas départi spé»
cia le nient de ce droit légal.
' Ainsi il a été m al jugé en ce que la hauteur du m ur
actuel a été d im in u é e , car un mur fait au-delà de la dis
tance voulue par la loi est hors d’atteinte.
�( 21 )
i
S’il y a lieu de dire que le sieur L a v ig n a c pouvait
bâtir à une distance quelconque , il n’y a pas d éra iso n
qui fusse penser que ce sera à quinze pieds, ou à d ix ,
ou à luiit, car la loi n’indique aucune variation ni ar
bitraire. Il faut donc que ce soit à six pieds.
D ’après c e la , il doit peu importer q u’il en résulte un
peu plus d ’obscurité à un rez-de-chaussée voisin ; c ’est
un mal nécessaire dans une ville. T o u t ce qui tend a
em p êch er la m itoyenneté des murs la térau x , et à peu
pler de jardins une rue p u b liq u e, ne m érite pas de fa
veu r.
.
Q u ’est-ce d’ailleurs que celte obscurité, si, le 9 dé
ce m b re , les experts ont pu lire un caractère m e n u , à
quelque distance des fenêtres, dans une salle plus basse
•que le sol d’ un jardin, par un teras n é b u le u x ?
E t c ’est pour une façade tournée au nord p l e i n ,
q u’on veut ménager les rayons du soleil pour quelques
m inutes de plus. T o u t autre croirait gagner à l ’élévation
d’ un mur à cet aspect. Mais le sieur R a g o u x avertit q u ’il
a des raisons particulières, et q u’il a intérêt d ’é g a y e r ses
commensaux par la vu e d’un jardin.
Voilà donc le secret principal du procès qu’il a sus
cité au sieur L avign ac. E n est-ce assez pour forcer le
sens d’une convention , et priver le sieur L avign a c du
bénéfice de la loi com m une.
L ’appel incident du sieur R agou x ne sert q u’à prouver
q u’il a cru en avoir besoin pour être conséquent avec
lui m ême.
Il fallait q u’il em pêchai le sieur L a v ig n a c de bâtir
�(
22)
nulle part, ou q u ’il avouât que le sieur L a v ig n ac en
avait le d r o i t , en reculant à six pieds. Alors il s’est
' donné la servitude de prospect ; et c’est là-dessus q u ’il
a fondé son appel.
M ais son titre n ’a rien qui ressemble à la servitude
de prospect ; et cette évidence achèvera de prouver que,
pour tacher d ’obtenir p e u , il dem ande beaucoup.
L ’exagération de ses plaintes et du tort q u’il souffre
sera appréciée com m e toutes les exclamations familières
aux plaideurs qui s’obstinent; ses m oyens de fortune
sont fort indépendans du prospect d’ un jardin qu’on ne
v eut pas q u’il m ontre à tout venant ; et le tems q u ’il
a perdu à plaider a dû lui être plus nuisible que ne le
sera jamais le m ur q u ’il voudrait détruire.
L e sieur L a v ig n ac , au reste, a usé de son droit par
nécessité et a v e c modération. Il fallait q u ’il renonçât à
son habitation et à son jardin, ou q u ’il y fût libre et
indépendant. Il a fait ce que tout autre eût fait et dû
fa ire; et
on
n ’est point un voisin inquiet et am b itieu x,
q u a n d , au lieu d’ usurper la propriété de son voisin, on
sacrifie à la décenc e et à son repos une partie de la
sienne.
M .e D E L A P C I I I E R , avocat.
M .c M A R I E ,
A
DE
licencié - avoué.
R I O M ,
L ’IM PRIM ERIE DU P A L A IS , CHEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esquiron-Lavignac. 1807?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
conflit de voisinage
servitude de vue
auberges
experts
Description
An account of the resource
En réponse pour Le sieur Esquiron-Lavignac, propriétaire à Aurillac, appelant et intimé ; Contre Le sieur Ragoux, traiteur, habitant de la même ville, intime et appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1807
1772-Circa 1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0316
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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auberges
Conflit de voisinage
experts
servitude de vue
-
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a8a900dd39f98ff7948f43f978aae65a
PDF Text
Text
lo t
P R É C I S .
l
I
XOJ
�PRECIS
<. ' *r •
EN R É P O N S E ,
! r*f
POUR
Le sieur B l a i s e G EN E IX , propriétaire, habi
tant de la ville de Clermont intimé;
c o n t r e
L e sieur J o s e p h B E S S E Y R E , propriétaire
habitant de la même ville , appelant d 'un
jugement rendu au tribunal civil de Cler
mont, le 8 juillet 1 8 1 2 .
■
I
LE sieur Geneîx n’a pas reconnu , dans le mémoire
de l a
' ppelant, la cause qu’il avoit plaidée en première
instance ; mais il y trouve de fausses assertions qu’il,
A
�¿y A
^ )
réduira à leur juste va le u r, des faits inexacts qu’il doit
rectifier, une confusion d’idées et de principes qui n’ont
rien de commun avec la question, quelques réticences,
et une oiiiissiôn importante qu’il faudra relever.
L ’intimé étoit loin de prévoir que le sieur Besseyre
auroit la prétention de rendre sa défense publique; cet
appareil est ordinairement réservé pour les causes d’uu
intérêt majeur, qui exigent de longs détails, ou qui
présentent des questions ardues.
I c i , rien de -plus-simple. L e sieur Geneix a vendu sa
propriété ; il* im reste <lù Sur ie prrx une somme de
10,000 francs en principal , et plusieui's années d’intérêts.
Son acquéreur a fait transcrire; le conservateur a fait
une inscription d'oiïice, au profit du vendeur, pour la
partie idü prix ¡dèfiftl il -étoit créancier.
;
Cette propriété a passë isudoessivement ein tplusieurs
mains; l’appelant en est actuellement détenteur. Le ven
deur originaire suit son immeruble entre les mains de
celui qui le possède; il réclame du sieur Besseyre, par
la force ‘de son privilégè, le payement de ce qui lui
veste dû en principal qt intérêts.
C o m m e n t concevoir qu’une demande de cette nature
puisse faire la matière d’ un procès?'Que le sieur Besseyre
soit péniblement afl’e cté-d’ime pareille atteinte; il a dû
la p ré v o ir, dès qu’il est porteur de tous les titres qui
constituent la créance* du sieur Geneix. Aussi a-t-il pris
le seul parti qui pût lui con venir, celui d’exercer son
recours contre ses vendeurs ; recours qu’il s’est fait adjugeripar le jugement dont est appel,
i 11 s’agit )donc d’examiner maintenant bî le sienr Bes-
�(3 )
seyre <ftst de bonne foi dans sa prétention ; o’est ce qu’on
aura bientôt la facilité d’apprécier, lorsqu’on connoîtra
plus particulièrement les faits et les circonstances qui
ont donné lieu à la contestation.
F A I T S .
>:
•
•
,
L e i i février 17 9 1, les administrateurs du. district de
Clermont adjugèrent au sieur M arlet, négociant a Clexm ont,'non deux propriétés, comme il plaît à.l’appelant
<3e le d ire , mais le bien des R oches, provenant du grand
séminaire de Clermont. On lit dans leijugement dont est
appel, qu’il est déclaré dans le procès verbal que ce bieo
est situé dans les dépendances de Clermont.
L e 17 du même mois , le sieur Marlet subrogea le
sieur G en eix, sans aucune garantie, à une partie de l’ad
judication qui lui avoit été faite du bien des R o ch es,
situé dans les dépendances de cette ville de Clerm ont,
appartenant ci-dc\>ant à M M . du grand séminaire do
cette ville.
« Ladite partie, à laquelle le sieur Geneix demeure
« subrogé, consiste en la m aison, bâtimens, etc. » Suit,
la désignation des héritages qui y sont également compris.
Le prix de l’adjudication est de 2 ^ 56 q francs.
Cette propriété est avantageusement située ; le sieur
Geneix y lit d’assez grandes réparations; il eut même
un démêlé avec la mairie de Clennont, à l’occasion des
eaux. Le grand canal qui conduit les eaux à Clermont
traverse cette propriété; et il se trouve un aquéduc, fait
A a
�( 4 )
dé main d’hom m e, par lequelMe séminaire prenoît le
trop plein du canal pour son usage.
L e sieur Geneix vouloit être maintenu dans ce droit;
et il est vrai qu’il expose que les Roches sont situées
dans la commune de Chamalières ,* mais on voit de
suite le motif : Chamalières étoit en pays de coutume,
où les servitudes s’acquéroient par trente ans de jouis
sance; le sieur Geneix n’avoit d’autre titre que sa pos
session ; en droit écrit elle eût été inutile : il avoit donc
besoin d’argumenter de la <coutume.
\
;
• Cette démarche, ou si' on veut cette déclaration,
tout indifférente qu’elle est dans la cause, a été relevée
•avec soin par le sieur Besseyre. Il observe aussi que le
sieur Geneix payoit l’impôt à Chamalières, ce qui n’est
pas plus déterminant; parce qu’il peut très-bien se faire "
qu’à l’époque de l’adjudication, les Roches fussent dans
les dépendances de Clermont, et qii’ensuite, par une
nouvelle division du territoire, pour l’assiette de l’im
p ô t, les Roches aient été comprises à,Chamalières, pour
raison de ce.
Cela même est d’autant plus vraisemblable, que la
situation des Roches - Galoubie , limitrophes de celles
du séminaire, a été vérifiée lors d’un procès qui s’éleva
entre la veuve Quayïon et le sieur Mallet de Lavédrine.
Cette situation pouvoit faire une très-grande diffé
rence, relativement au testament du sieur Quayron , qui
avoit institué sa femme son héritière universelle. Si les
Roches eussent été en coutume, l’institution auroit été
réduite au quart. E t il fut constaté qu’à l’exception
�C5 )
d’une très-petite partie basse, toute la partie en côte étoit
dans les dépendances de Clermont.
Mais pourquoi s’attacher à ces détails minutieux ,
lorsque déjà la situation étoit indiquée, comme dépen
dances de Clermont, par deux actes authentiques.
L e 24 prairial an 10, le sieur Geneix subrogea à son
tour le sieur Debens ¿1 son adjudication ; et comme il
remettoit les deux titres précédens, il dut s’y conformer,
et déclara encore que cette propriété étoit située dans
les dépendances de Clermont.
Personne n’ignore à Clermont que Debens n’étoit pas
le véritable acquéreur; il n’avoit aucuns moyens pour
acheter : c’étoit un jeune militaire sans fortune. L e gé
néral Joba, son vitric, cchetoit et payoit sous le nom
du fils du premier lit de sa femme. Cette circonstance
a donné lieu à un grand procès entre le général Joba
et son beau-fils; procès qui a été terminé, par arrêt de
la C o u r, en faveur du général.
Quoi qu’il en so it, la subrogation est faite à Debens
moyennant 36,697 francs 5o centimes. L e contrat porte
quittance de 26,697 : restoit du 10,000 francs, stipulés
payables dans quinze mois, sans intérêts jusqu’à ce, mais
avec l’intérêt à cinq pour cent, sans retenue, après le
terme.
Le 30 prairial, six jours après la vente, le sieur Debens
fait transcrire son contrat. Le conservateur fait une ins
cription d’oflice au profit du vendeur, pour la somme
restée due; et le conservateur dut suivre, pour la situa
tion , la désignation exprimée au contrat. Cette inscrip
tion, comme on voit, n’est pas du fait du sieur Geneix;
�maïs elle a e u , comme toute autre, son effet pendant
dix ans.
L e général Joba se repentît bientôt d’avoir été géné
reux ; et tout ce qu’il put obtenir de son beau-fils, ce
fut une cession de l’usufruit de ce même bien pendant
Sa vie et celle de son épouse : mais comme il restoit en
core dû 10,000 francs à G eneix, il fut stipulé que le
prix de l’usufruit étoit de cette somme de 10,000 fr.
O n doit remarquer, comme une circonstance essen
tielle de cet acte, qui est du 21 vendémiaire an 1 1 , que
le général Joba se charge expressément de payer et
porter au sieur G e n e ix , ci-d evan t propriétaire dudit
bien , cette somme de 10,000 fr a n c s qui lui est restée
due sur le prix de sa vente, et qu e, pour la sûreté de
Ce payement, le général Joba et la dame Bâtisse, son
épouse, hypothèquent spécialement tous les biens qui
leur appartenoient à l’époque de cet acte, qui leur ont
appartenu depuis, et qui leur appartiennent, situés dans
l'arrondissement de Clermont.
L e 5 pluviôse an 1 1 , inscription de Geneix sur tous
les biens du général J o b a , conformément à ce qui étoit
exprimé dans la cession du 21 vendémiaire précédent.
L e général Joba fut bientôt obligé de partir. Sa femme
fut assez adroite pour obtenir de lui une procuration gé
nérale, pour régir, administrer, faire toutes ventes, etc.
En conséqueD ce , le sieur Debens, et la dame Bâtisse,
f e m m e «îobn , stipulant tant en son nom que comme
f o n d é e de la p ro c u ra tio n de son mari, v e n d ire n t le bien
des Roches ou sieur G uillem in, receveur de Penregis'ti'cment à Clerm ont, par acte du 8 frimaire an 13 : le
�(7 )
premier vend la propriété , la seconde vend l’usufruit
Ce bien des Roches est encore indiqué comme pro
venant du sieur Geneix. On rappelle l’adjudication, et
les subrogations précédentes; il est fait remise de tous
les titres à l’acquéreur; le contrat en fait mention : mais
il est désigné c o m m e sis dans la C om m u ne de Chamalières.
Cette vente est faite moyennant la somme de 25 ,ooo f r .,
dont 10,000 fr. pour la jouissance, et i5,ooo fr. pour la
propriété. Il est dit que 10,000 fr. ont été payés à la dame
Bâtisse, avant ces présentes, pour 1a jouissance; et les
1 5.000 fr. sont stipulés payables h Debens pour la pro
priété , savoir, 5 ,ooo fr. dans deux années et demie, et
10.000 fr. dans trois ans, avec l ’intérêt à cinq pour cent,
sans retenue.
La dame Bâtisse donne mainlevée de l’inscription prise
par elle et son mari sur Debens; l’un et l’autre ensuite*
c’est-à-dire , Debens et la clame Bâtisse, donnent aussi
mainlevée de toutes inscriptions prises à Clermont ou à
Tliiers contre Geneix. On «’en étonne : mais tout an
nonce que ce ne pouvoit être qu’une inscription conser
vatoire qu’on avoit prise contre le vendeur.
Guillemin ne conserva pas long-temps cette propriété.
Le 10 fructidor an 13» il'la revendit au sieur Besseyre3
qu’on dit originaire de Marvejols, fort ignorant de tout
ce qui se passoit dans le département du Puy-de-Dôme j
et surtout ne connoissant aucune des propriétés de la L imagne.
«On ne sait pas pourquoi le sieur Besseyre se donne
cette origine étrangère, lorsqu’il appartient à une an
cienne famille de V iv c ro ls , et qu’on l’a vu passer sa vie
�(8)
à Clermont et à R io m , où il servoit dans la maréchaussée;
par conséquent, toujours sur les grandes routes. 11 connoissoit mieux qu’un autre les propriétés adjacentes et
l’iigréinent de leur sol, qu’il avoit tout le loisir de con
sidérer.
Il achète la propriété des Roches, telle que Guillemin
l’a voit acquise de Debens, du général Joba et de sa
femme ; il se fait remettre tous les titres de propriété
qui étoient entre les mains de Guillemin : la vente faite
à ce dernier y est relatée ; et le sieur Besseyre a dû y voir
que Guillemin n’étoit pas libéré, qu’il étoit encore dé
biteur de 1 5 ,ooo francs, dont le payement ne devoit être
effectué que dans cinq ans.
Il a dù voir encore, par les autres ventes qui lui ont
été rem ises, que le sieur Geneix étoit créancier de la
somme de 10,000 francs; et il n’a rien négligé dans ces
détails, puisqu’il a dans son dossier le procès verbal
dressé à l’occasion des eaux, en l’an 9, les inscriptions du
sieur G e n e ix , tant sur Debens que sur le général Joba.
Ainsi, le sieur Besseyre n’a pas dit la vérité, lorsqu’il
a prétendu qu’il ignoroit que Geneix fût encore créan
ci er ; il n’a pas dit la vérité , lorsqu’il déclare qu’il n’avoit trouvé aucune inscription sur cette propriété.
Il est vrai que le vendeur déclare qu’elle est située
dans les dépendances de Chainalières; mais il avoit entre
ses mains tout ce qui avoit été remis par les précédens
vendeurs à Guillemin , notamment l’adjudication et la
subrogation de 1791 , ainsi que la subrogation de l’an
• j o , qui établissoit Geneix créancier de 10,000 francs,
U vente du 7 frimaire au 1 3 , qui établissoit Guillemin ’
débiteuç
�débiteur de i5,ooo francs, enfin le bordereau de l’an 10.
Cependant, malgré toutes ces instructions, il paye
40,000 francs comptant à Guillemin. Il permettra , sans
doute, de le taxer d’imprudence, si cela est certain; car
l’argent n’est pas payé à la vue des notaires. Et d’ailleurs,
qu’importe à la question? a-t-il pu payer au préjudice
des créanciers? Voilà toujours ce qu’il faudra examiner.
L e 4 frimaire an 14 , Besseyre a fait transcrire son
contrat ; mais il n’a fait aucune notification aux créanciers.
Cette transcription est postérieure à la publication du
Code Napoléon.
A u milieu de tous ces arrangemens, 'sui*vient le gé
néral Joba, que personne n’attendoit, pas même sa femme.
Il se voit, en arrivant, dépouillé de tout ce qu’il possédoit.
On a voit vendu le bien des Roches qu’il affectionnoit,
sa maison de Clerrnont qui lui étoit précieuse : en un
m o t, il se plaint de ce que sa femme et son fils ont abusé
de sa procuration , et lui ont tout vendu sans rien payer.
Il forme la demande en nullité de tous ces actes frau
duleux. Il assigne le sieur Guillemin et le sieur Besseyre,
en désistement du bien des R o ch es, au moins quant
à l’usufruit qui lui appartenoit pendant sa vie. L ’affaire
traîne en longueur; mais elle est jugée par un jugement
contradictoire de Clerrnont, du 4 juillet 1807 , qui dé
clare les ventes nulles contre Debens et sa m ère, dé
clare le jugement commun avec Guillemin et Besseyre , et
condamne ce dernier à se désister du bien des Roches,
au profit du général Joba.
Guillemin , qui avoit pris le fait et cause de Besseyre,
se tient pour ba ttu , et garde le silence. Besseyre interB
�IU
(' IO )
jette appel du jugement, aux risques et périls de son
garant. Guillemin sent le danger de sa position ; il traite
avec le général Joba , le 8 mars 1808 : celui-ci se départ
de l'effet du jugement, et coDsent que Besseyre reste
en possession.
Ce département est fuit moyennant la somme de
19,000 fr. , sur laquelle somme le général Joba en dé
lègue expressément 10,000 fr. au sieur G en eix, que Guil
lemin s’oblige de payer, en acceptant la délégation.
Il est vrai que le général Joba se réserve, quant à
la somme déléguée, toute répétition contre Debens; et
c’étoit une suite des condamnations qu’il avoit obtenues
contre son beau-fils, qui étoit tenu de lui rendre compte
des sommes touchées.
Mais il n’en est pas moins vrai que le sieur Geneix
étoit toujours créancier de cette somme de 10.000 fr.
E h ! qui auroit donc payé Geneix? Etoit-ce Debens?
D ’une part, il n’en avoit pas les moyens, et son vitric
se plaignoit de ce qu’il avoit tout dissipé, sans payer
aucune dette. D ’un autre c ô té , Debens n’en étoit pas dé
biteur, puisque, par l’acte du 21 vendémiaire an 11 ,
le général Joba s’étoit expressément chargé de payer
cette somme au sieur Geneix. Cet acte avoit été remis
à ce d ern ier, puisqu’en vertu d’icelui, et notamment
de la clause par laquelle le général Joba s’obligea la
p a y e r, le sieur Geneix avoit pris une inscription contre
lui. Etoit-ce le général Joba ? Il reconnoît bien ne pas
l ’avoir p ayé, puisque, par le traité du 8 mars 1808,
le général délègue cette somme au sieur Geneix. Etoitce Guillemiü ? Mais cela est impossible, puisque, peu
�#01
(II )
de jours après ce traité, Guillemin est tombé en dé
confiture, et a présenté un passif q u i, par son énormité,
a épouvanté ses créanciers et le public.
Com m ent, d’après ces faits , peut-on présumer que le
sieur Geneix a été payé ? et les premiers juges n’ont-ils
pas eu raison de dire que des présomptions de ce genre
ne pouvoient détruire un titre authentique ?
Le sieur Besseyre a parlé dans son mémoire d’un acte
du 7 nivôse an 1 3 , portant vente de la part de la dame
Bâtisse, à Debens, son fils, de la maison appartenant
au général Joba ; il prétend que, parmi les conditions
de cette vente, Debens étoit délégué à payer à Geneix
les 10,000 francs qui lui étoient dûs. Cet acte ne se
trouve pas dans le dossier de l’appelant; on ne le connoît pas; mais ce qu’il y a de certain , c’est que le gé
néral Joba prétendoit que Debens n’a voit rien payé;
qu’il fit prononcer la nullité de la vente; que Debens
succomba en la C ou r, sur son appel ; et que , soit lors
du jugement, soit lors de l’arrêt, il fut démontré que
Debens ne prouvoit et n’établissoit aucun payement :
il a gardé le silence depuis l’arrêt.
Mais, dit-on , Geneix aussi a gardé le silence jusqu’au
17 octobre 1810 , et c’est un capitaliste exact. Que
pouvoit faire le sieur Geneix? pouvoit-il plaider contx*e
Debens, qui est sans ressource? pouvoit-il attaquer Guillemin, lorsqu’il étoit en déconfiture, poursuivi et em
prisonné pour dettes? qu’avoit-il à craindre avec son
privilège et son inscription.
L e défaut do poursuites pendant deux ou trois ans
n’a jamais été une présomption do payem ent, encore
B a
�moins une quittance. Il a pris à cette époque une ins
cription contre les sieurs Debens et Besseyre; cette ins
cription n’indique pas la situation ; elle est faite en re
nouvellement d’une inscription du 1e1'. messidor an 10,
qui n’a jamais existé.
Eli! qu’importe l’inscription de 1810 ! elle valoit bien
la peine d’occuper, lorsqu’il en existe une très-i’égulière, du 11 mars 1812, faite en renouvellement de celle
du 30 prairial an 10; inscription qui est venue dans les
dix ans, qui conserve le privilège du sieur Geneix, et
dont le sieur Besseyre n’a pas attaqué la forme.
, On verra bientôt si la transcription du sieur Besseyre,
du 4 frimaire an 14, a effacé ce privilège. Enfin, le
26 août 1 8 1 1 , le sieur G eneix, dont la patience est
lassée, qui a été si souvent délégué pour n’être pas payé,
fait un commandement à Debens, principal débiteur,
de lui payer la somme de 10,000 francs en principal,
et de 3,958 francs pour intérêts échus. .
L e 10 septembre 1 8 11, le sieur Geneix fait dénoncer
au sieur Besseyre, tiers détenteur, ce commandement
infructueux , lui donne copie de sa ven te, de la trans
cription , de l’inscription et de son numéro, et lui fait
so m m a tio n de payer la somme de 10,000 fr. en capital,
3,958 francs pour intérêts échus, si mieux il n’aim e
déguerpir les immeubles affectés au privilège du ven
deur, et que le sieur Besseyre possède.
L e 14 décembre i 8 r i , commandement, tant à Bes
seyre qu’à Debens, pour parvenir à la saisie immobilière.
L ’appelant qui, depuis sa mise en possession du bien
des Roches, u’avoit pas eu ua instant de repos, qui a
�US
( «3 ) .
■
' .
été acteur dans le procès du général J o b a , qui avoit
tous les titres dans les mains , qui a nécessairement
connu la transcription et l’inscription d’office, qui n’a pu
ignorer la créance du sieur Geneix, puisqu’il a connu
le traité du 8 mars 1808 , qui lui assure sa propriété,
et qui contient la délégation de 10,000 francs au profit
du sieur Geneix ; l’appelant, dit-on, a l’air de se ré
veiller d’aussi loin qu' Epim énide; il s’étonne qu’on ose
troubler son sommeil, et qu’un vendeur indiscret vienne
réclamer l’eifet de son privilège entre les mains de celui
qui possède l’immeuble qui en est le gage.
L e 24 décembre 1 8 1 1 , il présente requête pour former
opposition à ce commandement, et il dénonce en même
temps ce commandement à Debens, G uillem in, et au
général Terreyre, héritier bénéficiaire du général Joba:
il les assigne tous eu recours.
On en vient à référé sur cette opposition. Ordon
nance du président, qui ordonne que les poursuites com
mencées seront continuées.
L e 19 mars 1812, nouveau commandèment, tant à
Debens qu’à Besseyre.
.
,
L e 8 juin 18 12 ,saisie immobilière du bien des Roches,
dénoncée à Besseyre.
Le 26 ju in , dénonciation . à l’appelant, des procès
verbaux d’apposition du placard.
Debens et Guillemin, défendeurs en recours, font
défaut; mais le général Terreyre fournit ses défenses,
et rapporte le traité du 8 mars 1808, passé entre Je gé
néral Joba et Guillemin, ce dernier faisant tant pour lui
que pour Besseyre, par lequel acte Joba laisse entre
/
411
�( *4 )
les mains de Guillemin la somme de 10,000 francs, pour
éteindre la créance de G en eix, à la charge par Guil~
le min de rapporter ?nainlevée de Vinscription du sieur
G en eix.
L e général Terreyre soutient que Besseyre est mal
fondé dans sa demande en garantie, et qu’il n’a pas plus
de droit que n’en auroit Guillemin lui-même.
L e 11 mars 18 12 , inscription du sieur Geneix, en
renouvellement de celle du 30 prairial an 10, par con
séquent en temps utile. Il y a deux bordereaux, l’un contre
ü e b e n s , sur le bien des Roches, situé dépendances de
C ham alières; l’autre contre la succession J o b a ,su r sa
maison, spécialement affectée au payement de la somme
de 10,000 francs , par l’acte du 21 vendémiaire an 11.
• L a cause portée à l’audience du tribunal de Clermont,
le 8 juillet 18 12 , y est intervenu le jugement que l’ap
pelant a transcrit dans son mémoire. On n’en rappellera
pas les dispositions, pour éviter des répétitions inutiles;
cependant il est nécessaire d’observer que ce jugement
pose, en troisième question, celle que vo ici: « L ’ab« sence de D ebens, au service, est-elle une cause sufk fisante pour faire surseoir à la vente sur le sieur Bes« seyre? » Et ce jugement contient une disposition qui
valoit la peine d’être écrite : E t néanmoins sursoit de
quatre mois à Cexécution du présent jugement envers
toutes tes parties.
O n ne trouve pas cette disposition dans le mémoire
de l’appelant. On ne fera pas l’injure au défenseur de
l’avoir passée sous silence à dessein ; sans doute que sa
copie est ihexacte, ou que l’omission a été involontaire;
�c
15
)
#
elle auroit cependant abrégé la discussion du dernier
chapitre ; et si quelqu’un a i se plaindre de ce sursis,
c’est sans doute l’intimé, qui n’avoit pas réclamé.
Le sieur Besseyre s’est rendu appelant de ce jugement.
Ses moyens d’appel n’ont rien de spécieux ; ils roulent
sur un misérable équivoque , et on finit par ne pas
l’entendre. Il se plaint de l’imperfection de la loi sur
les hypothèques ; elle paroît cependant fort claire, au
moins sur la question qu’il voudroit élever.
11 dit avec v é r ité , que la vente consentie par Geneix
à Debens'a eu lieu sous l’empire de la loi du n bru
maire an 7 , puisque cet acte est du 24 prairial an 10 ,
et la transcription de D ebens, du 30 du même mois.
Mais quelle différence cela peut-il faire pour la dé
cision de la cause? L ’article 29 de la loi du 11 brumaire
an 7 porte : « Lorsque le titre de mutation constate
« qu’il est dû au précédent propriétaire, ou à ses ayans»< cause, soit la totalité ou partie du p r ix , ou des presv tâtions qui en tiennent lie u , la transcription conserve
« à ceux-ci le droit de préférence sur les biens aliénés,
« à l’effet de quoi le conservateur des hypothèques fera
« inscription sur ses registres, des créances non encore
« inscrites qui en résulteraient, sans préjudice, etc. »
L ’article 2108 du Code Napoléon porte : a L e vendeur
« privilégié conserve son privilège par la transcription
« du titre qui a transféré la propriété à l’acquéreur, et
« qui constate que la totalité ou partie du prix lui est
« due, à l’effet de quoi la transcription du contrat, faite
v par l’acquéreur, vaudra inscription pour le vendeur,
« et pour le p â le u r qui lui aura fourni les deniers payés ,
�4
( 16 )
« et qui sera subrogé aux droits du vendeur parle même
« contrat.
« Sera néanmoins tenu le conservateur des hypothè« ques, sous peine de tous dommages - intérêts envers
a les tiers , de faire d’office l’inscription sur son registre,
« des créances résultant de l’acte translatif de propriété,
« tant en faveur du vendeur qu’en faveur du prêteur,
« qui pourront aussi faire faire, si elle ne l’a été, la trans« cription du contrat de vente, ¿\ l’effet d’acquérir l’ins« cription de ce qui leur est dû sur le prix. »
La première idée qui se présente, en comparant ces
deux lois, c’est qu’elles s’accordent parfaitement sur le
point principal, que la transcription du contrat vaut ins
cription pour le vendeur, et lui conserve son privilège
pour le prix resté dû sur la vente. Et lorsque le vendeur,
sous la loi du n brumaire, comme sous le Code Napo
léon , a la certitude que l’acquéreur a fait transcrire son
contrat, il n’a plus aucune précaution à prendre ; il est en
pleine sécurité pour sa créance, ou la partie du prix
qui lui est due.
On sent aussi, à moins de se refuser à l’évidence,
que l’obligation imposée au conservateur de faire ins
cription d’office , n’tist pas dans l’intérêt du vendeur,
m ais bien dans l’intérêt des tiers qui pourroient dans la
suite contracter avec l’acquéreur.
Ils doivent être avertis que cet acquéreur, q u i, au
moyen de son acquisition, peut offrir un gage suffisant,
ne présenteroit qu’un gage trompeur, si on ne savoit pas
qu’il doit encore tout ou partie de son acquisition. Il faut
çlonc donner une grande publicité à cette créance, avertir
les
�(GÎ7))
t
lit)
■les tiers de.-çe tenir'en garde; et voilà l’unique but de
•la loi, en ordonnant ^auriconseryateur de faire-une ins
cription d’office.
'
Mais de ce que la loi impose cette obligqtion au con
servateur, elle ep débarrasse nécessairement le vendeur;
elle veille pour lui; elle ne l’assujétit;ù aucuue précaur
tion; elle lui «lit au-contraire que l'acquéreur, en trans
crivant,! lui assure ses créances; en même temps elle
veut aussi que les tiers soient bieni prévenus que cet
acquéreur n’est pas quitte du prix de l a t e n t e , et qu’en
hypothéquant sa nouvelle propriété, tceux qui contracteroient'envers lui seroient primés par le privilège du
.bailleur de fonds.
Voilà comment il faut entendre sainement les deux
lois; voilà comment on doit expliquer la disposition du
Code, qui rend le conservateur responsable de-sa négligence envers les tiers.
Comment élever des doutes sur un point aussi clair,
sur des expressions aussi positives, l’inscription conserve
au vendeur? Voilà qui est positif : un effet présent, ab
solu y qui n’est subordonné à aucune condition , le devoir
imposé au conservateur, n’a rien qui concerne le ven
deur; sans quoi le vendeur auroit été lui-même obligé
de veiller à ses intérêts, et de faire une inscription,
nonobstant la transcription.
Mais le sieur Besseyre s’inquiète peu que la loi dise que
la transcription conserve le droit de préférence au ven
deur; il veut trouver une très-grande différence entre la
loi du 11 brumaire, et le Code Napoléon ; il convient que
le Code ne laisse pas de doute, puisqu!il assortit le conC
Oj {
�(ill
' ( <8 )
'sérvàteur à une grande responsabilité envers les tiers :
‘Élors il avoue q u é le ’vëndeur'n^pàs besoin de faire ins
cription. Que le conservateur soit vigilant ou négligent,
il suffit qu’il y ait'transcription. ; n* ' . - '•>' :
Il n’en est'pas de même'dte la';lôi'du n brumaire a n '<7.
Sentez-vous la forcé de ces-mois, a l'effet de qu6i?~Q uëlle
puissance?magiqüe doivetit avoir ces expressions? Elles
ne peuvent dire autre chose, sinon que la transcrip
tion ne conserve les droits du'vendeur, qu’autant que
le conservateur fait une inscription d'office* de sorte
qu’il faut tout à< la fois ti'ânscription et inscription
d’office, quoique le vendeur ne ¿oit pas tenu d’inscrire ;
et cela est si v r a i, que cette loi du n brumaire n’assujétit le conservateur à aucune responsabilité.
;
Quoi! parce que le Conservateur omettroit'l’inscrip
tion d^ofïice, on voudroit en tirer la 'conséquencetque le
vendeur a perdu son privilège lorsque le contrat a été
transcrit? Mais*alors le conservateur pouvoit donc im
punément priver le vendeur de tout droit sur le prix
de sa vente, quoique la loi veuille que ce-vendeur soit
’dans une parfaite àécürité-, lorsqu’il a la certitude que
son a c q u é r e u r a transcrit. '
■ Voilà ce qui est absolument déraisonnable : ce sys
tème monstrueux seroit subversif de toute propriété.
La loi n’a-t-elle pas satisfait-à tout, lorsqu’elle a dit que
la transcription conserve, lorsqu’elle a assujéti le con
servateur à tenir un registre public des transcriptions
des actes de mutation, qui doivent être faites en entier,
de manière que tous les' tiers puissent connoître les
charges d’une vente et le- débet de l’acquéreur.
�( 19 )
M l
. On peut sans doute, tirer un argument . puissant de^
l’article Ô2 de la même loi du n brumaire; c’est celui
qui exprime les cas où le conservateur est responsable.
Cet article dit que « les conservateurs sont respon-,
« sables du préjudice qu’occasionneroit, 1?. le défaut^
« de mention sur leurs registres, des transcriptions des
« actes de mutation , et des inscriptions requises en leurs
« bureaux.
- 0u )(
;
Dès que cet article ne s’occupe pas des inscriptions
d’office, mais rend les conservateurs responsables du dé
faut de mention des transcriptions, il n’a donc atta
ché d’importance, il n’a donné d’effet qu’aux trans
criptions, pour conserver le p rivjlége, et ne considère
rinscriptionjd’office quecomme uneformalité plusample,
qui doit donner plus de, facilité, sans cependant qu’il
y ait de nécessité absolue; parce que la transcription
de l’acte en entier., donne encoi’e plus de lumières
qu’une inscription d’office, avec d’autant plus de raison
que cette loi regardoit la transcription comme le conplément de la vente : tant qu’elle n’étoit pas transcrite
elle ne pouvoit être opposée aux tiers qui auroient
contracté avec le vendeur (. art. 26 de la loi ) , au lieu
que, sous le Code, la transcription n’opère pas la tra
dition, et n’a d’autre objet que de purger les hypothèques.
L e sieur Besseyre ajoute : Il n’est pas douteux que,
sous la loi du 11 brumaire, tous privilèges, sauf ceux
exceptés par l’article 1 1 , ne se conservent que par l’ins
cription. E xceptio Jirm at régulant,
Cela est certain, mais il faut s’entendre. Si un acqué
reur n’a pas transcrit, qu’il revende à un autre, et que
C a
�..
...
..
ce dernier i rinsfcrivey1a1o ts les créniiCT'ers du secbntl ac
quéreur paSsèroiënt ‘avant le vendeur du premier, si
celui-ci n’a pas inscrit; maisi si le premier acquéreur a
transcrit, son vendeur auroit conservé son privilège;
et si M , Merliû a d i t , si les arrêts ont jugé que le pri
vilège ne pouvoit ‘sé"conserver sans inscription1, ce n’est
jamais que lorsque l’acquéreur avoit négligé de transcrire.
O n défie l’appelant de citer un préjugé qui’ ait décidé
que le vendeur perdoit <son privilège faute d’inscription,
lo rs q u e son acquéreurfavoit' fait ti^aïiscririe son‘ contrat;
et M. Merlin lui dira tbut le contraire.1'
,!
'■
Mais jusqu’ici l’appelant a créé des monstres pour les
combattre, et raisonne toujours dans l’hypothèse que le
conservateur n’a pais fait d’inscription d’ôffice. ’ "
CependantJil en existe une, du même jour que la
transcription, et dans ce Cas tous ‘les argumens^’évanouis
sent , le traité ex prôfesso de la hiatière n’est plus que
pour notre instruction. • * t 1
* J’
‘C ’est alors que Besseyre ‘d évient plxis ingénieux. Cette
inscription d’office n'est rîèn, s’écrie-t-il; elle est irrégu
lière, erronée; elledéclare le bien des Roches situé dans
les dépendances de C lerm on t, il est situé dans celles de
Chamalières; le*sieur Geneix le sa voit depuis l’an 9 : celii
est prouvé par sa requête contre la municipalité de
Clermont.
Si le sieur Besseyre le savoit, le conservateur des hy
p o th è q u e s le savoit-il? L e district vend l’objet, comme
situé dans les dépeüdances de Clermont ; Marlet su
broge, et déclare la même situation ; Geneix vend comme
ou le lui avoit déclaré : le conservateur de-voit faire
�( 21 )
t2 ,ô
une inscription conformément au contrat; il ne pouvoit
pas la faire autrement; il eût fait un acte irrégulier, si sont
inscription n’avoit pas été exacte et conforme à la vente.
; Le conservateur ju sq u e-là a donc fait son devoir;'
le vendeur a fait le sien aussi; car, subrogeant le sieur
Debens à son contrat, sans autre garantie que de ses
faits et promesses, il a dû s’expliquer suivant la décla
ration'faite daps son -contrat.
S’il a plu dans la suite à Debens de vendre, avec
toute garantie, à Guillemin, de déclarer.la situation
du bien des Roches à Chamalières, et si Guillemin a
fdit ensuite la même déclaration à Besseyre, l’un et l’autre
n’ont pu nuire au sieur G en eix, qui n’étoit pas présent
à ces actes; et Besseyre n’a pu ignorer l’identité du biea
qui lui étoit vendu, avec .celui que Geneix ayoit cédé
à Debens, puisqu’on lui remet tous les actes qui éta
blissent l’origine de cette propriété, qu’on n’oublie pas
même la pétition de Geneix pour les eaux., et la icon-*
cession que lui en a faite la municipalité de Clerinont.
Ge n’est donc -que sur une misérable équivoque .que
se défend l’appelant; et il n’est pas de bonne foi. Il existe
au surplus une inscription d’olïice très-régulière, et qui
ne pouvoit être faite autrement, puisqu’elle est éprise
sur la vente.
Les premiers juges ont donc sagement décidé que l’ins
cription d’office désignant la situation ¿elle qu’elle est
indiquée dans le contrat même, s’il y a erreur, c’est aux
parties à se l’imputer ; et comme Debens ne p o u r r o it pas
s’en prévaloir, Besseyre, qui le représente, pe peut pas
avoir plus de droit que lui.
s
�Suivant l’appelant, ce motif fourm ille ¿Terreurs, et
n’auroit de foudement qu’autant que Debens auroit fait
une indication erronée. On ne sent pas trop cette diffé
rence; on ne voit pas comment Geneix, qui avoit acheté
ce bien déclaré dans les dépendances de Clerm ont, qui
a subrogé avec la môme indication, pourroit être vic
time de ce que Debens en a indiqué une autre, lorsqu’on
ne conteste pas 1'‘ identité de l’objet, lorsqu’on s’est fait
remettre, comme condition de la vente, tous les titres
de propriété.
Mais est-il bien vrai qu’ une erreur dans la situation
rendroit l’inscription irrégulière ? La loi veut bien que
le bordereau indique Tespèce et la situation des biens
hypothéqués ; mais il peut se glisser des erreurs sur cette
situation , au moins pour les communes environnantes.
Les nouvelles divisions du territoire, pour l’assiette de
l’impôt, ont porté de grands changemens pour cette si
tuation. 11 est à croire q u e, lors de l’adjudication, le
bien des Roches étoït dans les dépendances de Clermont;
qu’il a pu être ensuite dans celles de Chamaliqres, lors
de la matrice des rôles. Et p ou rroit-on croire qu’une
in sc rip tio n seroit nulle , parce qu’on auroit dit situé à
R io m , quoique l’immeuble fût situé à M o za c, qui n’est'
qu’ un faubourg de cette ville, comme ChamalièresTest
de Clermont, s’il y avoit une désignation suffisante pour
faire reconnoitre l’immeuble? Il n’y a pas, dans l’espèce,
deux biens de même nom : celui qui est à côté s’appelle
les Roches -G aloubie; l’autre est les Roches du Sémi
naire. Il n’y a pas à s’y tromper; et ce n’est là qu’une
misérable chicane.
�n i
( 23 )
L ’arrêt de Santon, qu’on cite, est bien différent, ainsi,
que*celui de<l’A et de I’ e . Dans celui de Santon, une
inscription étoit faite sous le nom de M arie Santon ,*
‘l’autre l’étoit sous le nom de M arie-M atthieu Santon :
le conservateur jugea que ce n’étoit pas le même indi
vidu et il pouvôit avoir raison. Dans le second, un A
o u un E peut encore laisser des doutes sur l’identité de
l’individu. Ces deux arrêts n’ont donc aucun rapport à
l’espèce.
i Suivons encore l’appelant dans ses derniers débats. Il
faut surtout lui rappeler que lors de sa transcription de
■
l’an 1 4 , l’inscription d’office étoit encore dans toute sa
vigueur; elle 11’avoit que quatre ans de date; et ce
seroit encore une grande question à examiner, que celle
de savoir s i , lorsque la loi veille aux intérêts du ven
deur , lorsqu’elle conserve son privilège par la trans
cription, qu’elle le dégage de tous s o in s, cette inscription
a besoin d’être renouvelée dans les dix ans. Mais il ne
faut pas chercher des questions oiseuses, sur une matière
aussi fertile, et encore trop peu connue, puisque l’ins
cription du 30 prairial an 10 a été renouvelée le 11
-mars 18 12, c’est-à-dire, dans les dix ans.
■ C ’est alors que le sieur Besseyre s’écrie qu’il a fait
transcrire dans l’intervalle , et que sa transcription a
purgé les hypothèques non inscrites. C’est ce qu’on appelle
juger la question par la question. Besseyre a transcrit,
mais n’a pas notifié ; il n’a donc pas purgé les hypo
thèques. Pour y parvenir , il falloit faire notifier aux
créanciers inscrits. Si Besseyre vouloit le faire aujourd h u i, i\ devroit notifier à Geneix , sauf ensuite à con
tester à l’ordre la validité de son inscription.
�( H )
Mais on croît avoir* prouvé qu’ il existoit une inscrip
tion valable; et celle en renouvellement, dont on-n’a
pas contesté la régularité, ainsi que cela est établi par
le jugement dont est appel, conserve tous les droits de
Geneix.
L ’inscription de l’an 10 conserve l’hypothèque pour
les intérêts de deux ans; celle en renouvellement com
prend tous les-intérêts échus jusqu’au jou r; c’est un
accessoire du principal, que le tiers détenteur .ne peut
refuser, dès qu’il n’a pas purgé les hypothèques qui
grèvent son acquisition.
L e sieur Besseyre reproche au sieur Geneix la rigueur
de ses poursuites; plus haut il se plaignoit que le sieur
Geneix eût attendu si long-temps, et vouloit faire naître
de ce retard une présomption de payement : il tombe
en contradiction sans s’en apercevoir.
Il dit qu’il a fait des offres du principal : il a donc
reconnu qu’il le devoit. Mais il n’a pas réalisé ses offres;
le jugement dont est appel le constate : il falloit donc
bien le poursuivre pour parvenir ali payement.
Malgré ses offres, il soutient encore, et c’est par là
qu’il termine sa défense, que les circonstances ne per
mettent pas en ce'moment la mise à exécution du titre
sur les immubles qui ont appartenu à Debens, et qu’on
poursuit de son Chef.
Ces circonstances dérivent de l’absence de Debens,
militaire en activité de service. Il cite la loi du'6 bru
maire an 5 , le décret de Sa Majesté, du 16 mars 1807.
Mais q 11’ont de commun la loi et le décret avec les
poursuites exercées contre Besseyre, qui jouit, aux
Roches, d’un doux repos?
�<î
( 25 )
.....................................
La loi ne dit-elle pas que le créancier privilégié ou
hypothécaire a le droit de suivre son gage en quelques
mains qu’ il passe? Si Debens est débiteur, B esseyre est
tiers détenteur de l’immeuble hypothéqué. Geneix peut
donc , indépendamment de ses poursuites contre Debens,
exercer son action hypothécaire contre Besseyre : l’une
est absolument indépendante de l’autre; il n’a besoin que
de prouver qu’il est créancier; o r, il rapporte un titre
authentique qui l’établit, une inscription qui le conserve.
Il a donc eu le droit de poursuivre Besseyre , malgré
l ’absence de Debens. La faveur due à un militaire qui
verse son sang pour la patrie ne se communique pas au
tiers détenteur de ses biens.
L e sieur Besseyre ne s’étoit pas vanté d’avoir obtenu,
sous un aussi vain prétexte, un sursis de quatre mois :
certes, ce sursis n’avoit aucun fondement; et le sieur
G eneix s’en plaindroit, si ce délai n’étoit déjà expiré
depuis long-temps.
Mais , plus de retard ; il faut qu’un créancier soit
enfin payé d’une dette aussi légitime; et le sieur Geneix
a droit de l’espérer de la justice de la Cour.
^ Signé G E N E I X .
M e. P A G E S , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R i o m , de l’imp. de T H IB A U D , im prim . de la C our im périale, et lib raire,
ru e des T aules, maison L andriot. — Janvier 1 8 1 3 .
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Geneix, Blaise. 1813]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
hypothèques
possession de bonne foi
confusion de propriété
jouissance des eaux
biens nationaux
militaires
saisie immobilière
absence pour service de l’État
séminaires
jardins
maison de plaisance
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour le sieur Blaise Geneix, propriétaire, habitant de la ville de Clermont, intimé ; contre le sieur Joseph Besseyre, propriétaire, habitant de la même ville, appelant d'un jugement rendu au tribunal civil de Clermont, le 8 juillet 1812.
Table Godemel : Inscription hypothécaire : 4. l’erreur, dans une inscription en renouvellement, de la date de la première inscription, la vicie-t-elle ? l’erreur dans la désignation de la situation des biens hypothéqués vicie-t-elle l’inscription ? 5. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ? Militaire : 1. peut-on mettre à exécution un titre sur les immeubles appartenant ou ayant appartenus à un militaire ? Privilège : 2. le premier vendeur conserve-t-il son privilège contre un tiers-acquéreur, indépendamment de toute inscription, malgré la transcription de la vente faite à ce dernier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1813
An 13-1813
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
25 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2107
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2101
BCU_Factums_G2102
BCU_Factums_G2103
BCU_Factums_G2104
BCU_Factums_G2105
BCU_Factums_G2106
BCU_Factums_G2108
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53403/BCU_Factums_G2107.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Chamalières (63075)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence pour service de l’État
biens nationaux
confusion de propriété
hypothèques
jardins
Jouissance des eaux
maison de plaisance
militaires
possession de bonne foi
saisie immobilière
séminaires
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53854/BCU_Factums_M0543.pdf
f7f4f721ec93ea1fc216a4ad8db88faa
PDF Text
Text
C O Ü R D’A P P E t
PRÉCIS
i
DE
?
c
POUR
A
à
ju g e r
v—
Les
H
E S G O T , ;appelans ;
é r i t i e r s
CONTRE
R a i m o n d D E M O L E N et M a r g u e r it e R O Q U E LAURE
,
son épouse y intimés.
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; ;
»
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- 1
I •
,J i l .
'
!
')
:
' *
1
‘ •
, sie u r de G o u rd o n , président e n t
l’élection d’Issoire, est mort dans son château à Cheynat,
le 29 janvier 1767, laissant de son mariage avec Jeanne
Concheton, deux filles, Marguerite Garnaud, pour lors
veuve de Martin Chassaing décédée sans postérité le
EAN G
R IOM .
arnaud
6 février 1790, et autre Marguerite G arn aud , épouse
de Louis R oqu elaure, décédée elle-m êm e le 28 sep-
n
t
le
r
A
U B t E .
a
r
19
u
e
a o û t
18 0 9
�( 4 \ .
lémbre 1 7 9 2 , laissant pour héritiers les dames D em o len et de Lassale, ses deux filles.
Par actes des
3q.juin 1 7 1 3 , ¿0 décembre 1780, et
16 mars 17 3 3 , Jean Garnaud avait vendu h Barthé
lém y et Antoine Mathias de S a in t-À m a n d -R o c h e Savine, divers immeubles provenant de Jeanne Conchelon sa fem m e, et situés à Saint-Amand-RocjbeSavine.
*
Jean Garnaud a y a n t convolé en 1780 à de secondes
noces, avec A nne C u rie r, ses deux filles le firent priver
de l’usufruit des biens de Jeanne Concheton leur mère}
et cette privation d’ usufruit fut prononcée par sen
tence du 14 juillet 1750.
En cet état de choses, et du vivant de Jean Gar
naud, ven d eu r, Marguerite et autre Marguerite G ar
naud ses filles , héritières de Jeanne Concheton leur
m ère, fo rm e n t, par exploit du 28 juillet 17 5 7, contre
Joseph et Barthélémy Escot, représentant Barthélémy
et Antoine Mathias, acquéreurs, la demande en désis
tement des immeubles aliénés en 1 7 1 3 , 1780 et 1733.
Les sieurs E sco t, du vivant de Jean Garnaud leur
vendeur, ont un recours assuré contre lu i3 mais ils ont
aussMa faculté d’exercer sesMpCfits, conséquemmerit de
faire valoir ses reprises contre la succession de Jeanne
Concheton; et c ’est ce dernier parti qu’ils prennent par
u n e requête signifiée le 28 mars 1762.
'
Un acte notarié , du 3 mars 17^8, dont il n’a été
donné copie qu’en 1809, nous apprend que pendant
que Marguerite G arnaud, veuve Chassaing, poursui
�(5)
vait l’éviction des immeubles vendus par son père, elle
s'était fait souscrire par lui une vente de tous ses meu
bles meublans. Ils sont détaillés dans l’acte. L e père s&
réserve la jouissance de ces meubles; il déclare que la
majeure partie en est rompue et pourrie, et qu'ils ont
presque tous besoin de raccommoder. L e prix de la vente
est de la somme de 390 fr. dont l ’acte porte quittance.
Il paraît encore que par autre acte notarié, du i 5
mai 1 7 5 8 , signifié aussi en 1809, Jean Garnaud s’était
départi de l’usufruit réservé moyennant 190 francs,
dont L’acte porte également quittance.
Jean. Garnaud avait survécu près dè 9 ans à la date
de ces actes, puisqu’il n’est mort que le 29 janvier 1767;
et à son décès les dames Chassaing et Roquelaure, ses
deux filles, se mirent en possession de tout ce qu'il
avait laissé en biens meubles et immeubles.
Cependant la’ dame Chassaing fait au greffé>d e .la
châtellenie d ’O loy , le 9 février 1 7 6 7 , une déclaration
précieuse pour la cause. Elle déclare qu’elle répudie
la succession de Jean Garnaud son père; que si elle ne
fait pas d’inventaire , c’test que ce mobilier lui a été)
vendu par acte du 3, mars 176 8 , et que si elle con
tinue la jouissance des immeubles, ce sera uniquement
comme créancière.
Voilà donc la dame Chassaing e n possession de tout
ce que son père a laissé; possession antérieure h la ré
pudiation; possession continuée après la répudiation ;
possession qui continue encore dans les mains; d e! là
dame Demolen son héritière. •
�(6 )
Quant à autre Marguerite G arn au d , femm e Roquelaure;ielle répudie purement et simplement la succes
sion de Jean Garnaud son p è re , par autre acte du
mêm e jour 9 février 1767 ; mais elle n’en est pas moins,
com me la dame Chassaing sa sœur, en possession des
biens, avant^ lors et depuis sa répudiation. ’
Ces deux dames abusent de leurs répudiations, et
d ’une qualité de créancière de leur père qu'elles pren
nent et qu’elles n ’o nt jamais justifiée; elles en abusent
pour tourmenter ceux même qui ont acquis de Jean
Garnaud leur p è r e , des biens à lui propres; et diffé*rens actes rapportés établissent qu’elles sont parvenues
à évincer quelques acquéreurs.
Quoi qu’il en s o it, une sentence rendue le 26 no
vem bre 17.71, prononce contre la famille Escot le dé
sistement demandé en 17^ 7; la famille Escot interjette
appel de cette sentence par exploit du 4 mars 1 7 7 2 ;
et par requête signifiée le 3 i d écem b re, elle oppose
que les dames Chassaing et Roquelaure se sont empa
rées de tous les biens meubles et immeubles de leur
p è r e ; qu’elles en sont e n c o re ^ n possession; qu’elles
sont donc héritières dè leur père, vendeur, et qu’elles
sont dès-lors garantes de leur propre demande.
Les dames Chassaing et Roquelaure rapportent leurs
répudiations ; les répudiations sont contredites par
écriture signifiée le a mai 1 7 7 9 , et la copie de cette
écriturd* n’est pas dans la production de la dame D e m o le n , quoiqu’elle y ait répondu par autre écriture
du
3 août même année. -
'
�(7 )
L e procès demeure impoursuivi jusqu’en l ’an u ,
et pour l’honneur des sieur et dame D em o len , il eût
dû à jamais rester dans l’oubli. C ’est donc en l’an n ,
que la dame Demolen reprend, en qualité d’héritière
de la dame Roquelaure sa m ère, le procès commencé
en 1 7 ^ 7 , contre la famille Escot, et par acte du 22
mars 1809 3 elle le reprend comme héritière de la
dame Chassaing sa tante. ; • ■
•
L a famille Escot est sans pièces; elles se sont per
dues dans la succession du jurisconsulte L a p e y r e , e t i i
a fallu recourir à la com munication.de celles de la
dame Demolen. lia famille Escot a eu des inquiétudes
pendant quelque tem s, mais elle est aujourd’hui plei
nement rassurée, et elle se plaît à croire que tout son
malheur se bornera à la difficulté du recouvrement des
frais d’une procédure égarée.
La réclamation de la dame Demolen n’annonce rien
de noble, rien de délicat; elle est m êm e, on peut le
d ir e , révoltante.
Cette dame possède, ou a disposé des biens de Jean
Garnaud son a ïe u l, et elle ne veut pas en être héri
tière, afin de dépouiller des liers détenteurs qui ont
acquis sous la foi de la garantie promise par Jean
Garnaud.
E t d’abord elle s’est emparée de son m obilier; des
réflexions bien simples vont en convaincre. '
L a vente de 1758 est évidemment simulée; fût-elle
sérieuse? elle, ne comprend aux termes de l’acte quedes meubles meublans, rompus et pourris, au moment
de la convention. '
�(8 )
Mais Jean G arnauda survécu n eu f ans à celte vente.
Pendant:le long espace (assez long) de n euf années,
Jean Garnaud a dû nécessairement faire et a fait d’autres
meubles en remplacement des meubles rompus et pour
ris , à une époque remontant à plus de n e u f ans; et ces
nouveaux m e u b les, à son décès , ont été confondus.;
dans les mains de la dame Chassaing, sans inventaire.
Mais cette vente ne compr.end encore que des meu
bles meublans, et Jean Garnaud a laissé, en mourant,
du mobilier vif, des bestiaux dans son bien de Clreynat ;
il a laissé des papiers; mourant au mois de janvier, il
a laissé récolte ou grains, et la dame Chassaing s’est
emparée.de tout-; elle-a tout pris, sans, compte et sans,
mesure y elle a tout gardé. Il serait donc difficile de
concevoir, n’en déplaise à la répudiation, que la daine
Chassaing, et après elle la dame Demolen sa nièce, ne
soit pas héritière de Jean Garnaud son père et aïeul.
La dame Demolen , ou quoique ce soit la 'dame
Lassale sa sœur (elles ont fait partage des biens de leurs,
père et m ère), possède tous les immeubles laissés par
Jean Garnaud; elle en possédé même que Jean Gar
naud avait aliénés , et dont relie n ’a pas rougi d’évin
cer ses acquéreurs, par ¿îbus dç répudiation et d’une
qualité.de créancier, ou usurpée, ou insignifiante pour
effacer celle d’héritier.
Il faut croire que la dame Demolen persistera dans
cet le qualité de créancier, qui est le seul mo)?en d e cause
qu’elle puisse opposer à la famille Escot; niais le tenvs
dp l’illusion est passé.
�(
9
}
Et d’abord comment la dame Demolen justifie-t-elle
qu’elle est créancière de la succession de Jean Garnaud
son aïeul, soit du chef de la dame Roquelaure sa m ère,
soit du c h ef de la’ dame Chasssaing sa tante? Où sont
ses titres de créance? on n ’en voit nulle part dans sa
production; la sentence de 1760 ne porte autre chose
qu'une privation d ’usufruit ; il n’existe pas de sentence
de liquidation ; il ne fut même jamais nommé de cu
rateur à la succession de Jean Garnaud, et cela parc^
que dans aucun tems, cette succession n’a été vacante.
E n second lieu, la dame D em olen supposée créan
cière, n ’a d û , n’a p u , en cette qualité, s’emparer des
biens de Jean'G arnaud son prétendu d é b ite u r, sans
en ayoir obtenu la permission de la justice. L ’omission
de ce préalable, impérieusement exigé par la -lo i, a
rendu la qualité d’héritier inséparable de la main mise
sur les biens.
;
î •
I,a dame Demolen devait faire inventaire dû m o
bilier, n’e u t - c e été même qu’un simple récolement
pour justifier (chose impossible), que le mobilier mort
et v if de toute espèce, laissé par Jean Garnaud en 1 767,
ne se composait^que des meubles meublans, rompus et
pourris, qu’il possédait en 17 5 8 , et qu’il avait vendus
én 1768. '
Si la dame Demolen ne figurait au procès que comme
héritière de la dame Roquelaure sa; mère, et si elle se*
permettait de désavouer la mise en possession de tous
les biens de Jean Garnaud , dès le jour mêm e de son
décès, la famille Escot serait réduite à la nécessité de
�C 10 )
faire une preuve qui ne serait pas difficile, car le fait
est notoire dans le pays.
Mais la dame Demolen figure encore comme héri
tière de la dame Chassaing sa tan le; sous Ce rapport,
la famille Escot; a preuve écrite de la main mise, et
cette preuve écrite émane de la dame Chassaing ellem êm e.
i
Les termes de la répudiation du 9 février 1767 sont
e.ncore présens. « Je répudie la succession de Jean
« Garriaud'mon père ; je ne fais pas d’inventaire du
« mobilier qu’il m ’a laissé le 29 janvier 1 7 6 7 , date
« de son décès, parce qu’en 1768 il in’avait vendu
« les meubles meublans qu’il possédait en 1768. Je
a continuerai la jouissance de ses immeubles parce
« que je suis créancière de sa succession. » '
L es conséquences à tirer d’une déclaration si extra
ordinaire, sont faciles à saisir; et ce serait faire injure
aux magistrats qui la liro n t, que de les faire mieux
sentir.
E n troisième lieu , la dame Demolen toujours sup
posée créancière, on va plus loin , supposée non-hé
ritière, il faudrait, encôre connaître la date et l’objet
de ses hypothèques, par la raison’bien simple, que la
famille Escot a une hypothèque aussi; que les biens
Garnaud en sont le gage. Si donc cette hypothèque
de la famille Escot primait celles de la dame Demolen,
évidemment sa menace d’éviction serait ridicule et sans
intérêt, puisque la dame Demolen aurait dans les maius
le gage entier de la garantie de cette éviction.
�( 1 1 )
Si l’hypothèque, au contraire, de la dame D em olen
avait la priorité, il faudrait toujours en reconnaître et
fixer le quantum , pour s’assurer si le gage de cette h ypo
thèque en excède ou non la valeur, et laisser au moins
à la famille Escot la faculté de s’emparer de tout son
gage (car c ’est le sien aussi), en remboursant à la dame
Demolen toute créance antérieure en hypothèque; et
toujours serait-il vrai de dire que la dame Demolen
serait, quant à présent, non-recevable dans sa demande.
Si la Cour n’était pas frappée des moyens de la
famille E sco t, pour faire proscrire la réclamation in
décente de la dame D e m o le n , moyens que l’on croit
sans réponse, il faudrait, dans ce cas, se livrer à l’examen
des reprises de la succession de Jean Garnaud, contre
la succession de Jeanne Concheton, dont le rembour
sement ne pourrait être qu’une charge de l’obtention
du désistement. Mais à cet égard, l’état de ces reprises
est détaillé par la requête du 28 mars 17 6 2 , et il n’a
souffert qu’une contradiction vraiment p ito y a b le ;l’état
lui-même est appuyé de pièces justificatives dont copie
est dans la production de la dame Demolen , et dont
la critique ne saurait dans tous les cas fixer l’attention
de la Cour.
M .r M A N D E T , Rapporteur.
M .e M A R I E , Licencié-Avoué.
À RIOM, DE L ’IMP. DU PALAIS, CHEZ J. C. SALLES.
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Héritiers Escot. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Mandet
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
répudiations de successions
Description
An account of the resource
Précis pour les héritiers Escot, appelans ; contre Raimond Demolen et Marguerite Roquelaure, son épouse, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
1713-Circa 1809
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0543
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ludesse (63199)
Saint-Amant-Roche-Savine (63314)
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répudiations de successions
Successions
-
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faefff63efe95fe13554161f1f73e19c
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M
E
M
O
I
R
E
POUR
D am e M a r ie - C a r o l in e L A C O S T E , ve u ve de M . J e a n -J a c q u e s.
R I X A I N , Doct eur en m éd ecine , T u tric e de ses E n fans
m ineurs , Appelante ;
CONTRE
M .A
n t o in e
BERARD
de
C H A Z E L L E S - L A B U S S I È R E , Iniimé;
E N C OR E CONTRE
M M . J a c q u e s - A m a b l e S O U B R A N Y DE B E N IS T A N T , et 'Pierre
F A R A D E S C H E S d e s R O N Z I È R E S , appelés en garantie;
E T CONTRE
M adam e de C H A M P E T I È R E , veuve de M . de P E N A U T I E R
épouse, en secondes noces , de M . de R A M O N D , Tuteurs
des mineurs de P E N A U T I E R , Intervenants.
- L A principale question que presente à juger cette c a u s e , est
d e savoir quel e s t , de d eu x a cquéreurs d u m ê m e o b je t , celui
q u i d o it avoir la p ré fé ren ce ; de M . R ixain , qui a acquis le
p re m ier, loyalem en t et su r la foi p u b liq u e , et qui a pris possession
d e l ’objet a c q u is,
O u de M. Berard , qui., postérieurem ent à la p re m ière vente qui
lui était parfaitem ent c o n n u e , s’est fait consentir u n e seconde
vente par un fondé d e p o u v o ir , qui ignorait la p r e m i è r e , et q u i
a outrepassé ses pouvoirs.
,< t% \
�*
9t
( O
L e T rib u n a l de p re m ière instance d e R io m a rejeté la p rem ière ;
X' n II a ord on n é l’exécution de la seconde.
;-,
M m0 v e u v e l\ixain a interjeté appel de ce Jugem en t dans
. ; l’intérét de ses mineurs.
'I
L e succès d e c e l appel ne p e u t pas c ire douteux.
FAITSt
M mc R o l l e t , épo u se de M . de C h a z e r a t , est décéd ée au m o is
d ’octob re r 8o 5 .
E lle a laissé de grands biens , et un grand n o m b re d ’h éritiers
ou de légataircs*universels.
C es héritiers form aient différentes b r a n d ie s , d ont tous les
m e m b re s avaient un intérêt c o m m u n .
T e lle était la b r a n d ie S o u b ra n y de B én is t a n t , com posée des
maisons
de
B cn ista n l ,
de
G ro u io n t,
Lausanne
et A rc lio n -
D e s p c r o u s e s , habitons de la ville de R i o m , et des m aisons
P cnautier de V o i s i n , cl M a lla rc t, qui habitaient le ci-devant
Languedoc.
L e T esta m en t de M rac d e Chazerat a d o n n é lie u ?» beau co up d e
discussions sur sa validité c l sur son exécution.
M M . de B é n is t a n t 'c l de G ro m o n t ont agi constam m ent dans
toutes ces d is c u ss io n s , lanl p o u r eux q u e p o u r leurs co h éritiers,
et spécialem ent p o u r ce u x du L a n g u e d o c , dont ils possédaient la
confiance au plus haut d e g r é , et dont ils avaient les pouvoirs.
Les discussions te rm in ée s, il a été p ro c é d é par. des experts au
partage de tous les biens de la succession.
Il a été form é autant d e lots q u ’il y avait de branches d ’héritiers
appelés au p a rta g e; ces lots ont été tirés au s o rt, et la terre de
SainUAgouIin esl échue au lot de M M . de Soubrany, d e ‘G ro m o n t,
c l de tous les coh érilers dont leur branche était com posée.
C e lle terre, n e convenait ;i aucun d ’entre e u x , et bien m o in s
encore à ce u x qui habitaient le L an gued oc.
-
�' (
3
)
Il fut donc arrêté par Ions les intéresses q u ’elle resterait dans
l ’indivision ; q u ’elle serait v en d u e en co m n u m ; et M M . de
B énislanl et de G r o m o n t, qui réunissaient la confiance de ions
les intéressés , lurent choisis p o u r recevoir- les enchères et
p ro céd er aux ventes.
O n voit dans leurs défenses q u ’ il leur fut en vo yé, par leurs
‘cohéritiers du m i d i , en janvier, février et mars 1816, de nouvelles
procurations qui contenaient les p ouvoirs les plus étendus, 7nnne
de vendre: ce sont les expressions de leurs .défenses.
K l on voit dans ces m êm es défenses qu e rien depuis n ’a altéré
cette confiance , et q u ’au contraire M M . de B én isla n l el de
G ro m o n t, qui ont entretenu avec eux une correspond an ce active,
n ’ont cessé d ’en recevo ir de n o uveaux lémoignages.
O n leur dit dans une des lettres n om breuses q u i com posent
c e lle c o rresp o n d an ce: « J ’ai e n v o y é .d a n s le tem ps 1111e p ro cu » ra tio n , el je vous p rie de croire que je tiendrai p o u r bon
» tout ce que vous ferez. »
O11 leur d il dans une autre : « Nos intérêts, sont co m m u n s ;
j> en faisant p o u r “v o u s , vous faites p o u r nous. »
E l dans toutes 011 retrouve le m ê m e style el le m ê m e abandon.
M M . de B én islan l cl de G ro m o n t, pleins de confiance dans la
pureté de leur conscience el dans leur bonne f o i , n ’ont pas
cru q u ’il lut nécessaire de représenter ces procurations el ces
lettres en cause principale ; mais ils doivent réparer ce lle omission
en cause d 'a p p e l, el m eltre toutes ces pièces sous les yeux de
la Cour* la justice l’c'xigç ; l’ho n n eur le u r en fait un d evoir ;
l'intérêt des m ineurs l\ixain le com m ande.
Q u o iq u ’il en s o it, au m o y e n de ce lle convention unanime des
cohéritiers , de laisser la terre de Sain l-A yo u lin dans I indivision
el de la m ettre e n v e n t e , il a été «apposé des affiches dans le
d épartem ent du P u y - d e - D ô m e cl dans celui d ’A llie r;
L e s annonces en o n t été insérées dans les feuilles périodiques
de C le r m o n l, I\iom et M o u lin s , du m ois de mars i S i G , el dans
V
�( 4 )'
io u lc s , M M . de B énislant et de G ro m o n t ont été désignés c o m m e
devant d o n n er les ren seign em en s nécessaires , et donner, p o u r les
p a iem en s, toutes les facilités que l'o n pourrait désirer; ce qui
supposait é v id e m m e n t que c ’était en eux seuls qu e résidait la pleine
puissance de traiter et de v e n d re tant p o u r eux que p o u r tous
leu rs cohéritiers.
Prè s d ’un an entier s’est écoulé sans qu e celte vente se soit
effectuée.
D ans ce lo n g in te r v a lle , p lu sieu rs personnes se sonl présentées
p o u r l ’a cq u isitio n du dom aine d e N e u fo n t, qui faisait partie de
cette terre d e S a in t-A g o u lin , et entre autres, M. B erard e tM . Rixaiu.'
M . B era rd n ’en n'offrait pas le p rix q u ’en dem andaient les
vendeurs ;
M . R i x a i n porl a plus l oin
les
e n c hè re s ;
il offrit
d ’aj oul or à
l ’acquisition d u d o ma i n e d e N e u f o n t , ccll c des boi s qui d é p e n
daient de celte te rre ; cè qui convenait beau co up aux vend eurs.
Ses offres furent acceptées cl la ve n te lui fut consentie sous se in g privé, le 16 fé v rie r 1818, à raison de 60,000 f. de prix prin cip al, et de
i,4 4 ° fr- p o u r épingles, le tout payable dans les term es convenus.
C e lle ven te lui fut consentie par M M . de So u bran y et d e
G ro m o n t, in d iq u é s dans les affiches, stip u lan s, « tant en le u r no m
» p ro p re et p r i v é , qu e se faisant c l se portant forts p o u r to u s
leu rs co h é ritie rs, dans la succession de feue dam e G ilb e rlc
» R o lle t , épouse de M . de Chazerat, a uxquels ils p rom ettent d e
» faire agréer et ratifier ces présentes à la p re m ière réq u isitio n
« de l ’a c q u é re u r» .
■.
Jj’indicalion de M M . d e B é n isla n t cl de G ro m o n t , dans les
affiches, co m m e ven d eu rs ; l e u r l oyaut é co n n u e , la considération
dont ils jouissent, leur grande fortune et le u r garantie personnelle,
n e perm ettaient pas à M. llix a in de p re n d re, sans incon venan ce,
d ’autres rtn s e ig u e m e n s sur les p o u vo irs q u ’ils avaient de traiter'
p o u r la famille P en a u lier et p o u r leurs cohéritiers qui habitaient
le L en gu e d o c ; toutefois, il apprit, sans s’en e n q u é r ir , qu e la p lu s '
parfaite intelligence régnait entre tous les c o h é r itie r s , cl qu e
/
�O jk t> '
( s )
M M . île B én islant et de G ro m o n t avaient la m ission la plus
étendue de lous ces cohéritiers p o u r gérer et ad m in istrer la terre
de SainL-Agoulin, la ven d re en tout o u en partie , et faire p o u r
eux tout ce q u ’ils feraient p o u r eux-m êm es.
C e lle r e n ie fut.à peine s ig n é e , qu e M. B era rd en fui instruit;
il sc transporta aussitôt chez M. Hc'brard , n o ta ir e , qui ayait
dans ses mains le sous-seing ; M . Ile b ra rd le lui m o ntre et lui en
donne lecture.
.11 prie alors M. Ilé b ra rd d ’être son m éd iateur auprès de
INI. R i x a i n , p o u r l ’engager à lui céder son m a r c h é , c l .l e charge
m êm e de lui offrir ju s q u ’à 6,000 fr. de bénéfice.
Non content de celte p re m ière d é m a r c h e , il se re n d de suite
à C lc r r n o n t, où était M . R ixain ; il fait a g i r , soit auprès de
M. R a y m o n d , curé de la C a th éd ra le , son o n c le , soit auprès de
ses autres parens et de scs a m is, les p ersonnes de la ville les
plus influentes, dans l ’esperance q u ’elles ob t i e nd ront de M. Rixain
le sacrifice q u ’il exige.
«
M. R ix a in , qui n ’avait pas acheté par sp éc u la tio n , niais par
c o n v e n a n c e , -croit d evoir conserver son acquisition.
M. B c r a r d , après avoir fait ces différentes dém arches sans
succès ,, p re n d un autre parli.
Il savait que M.",e de C h a in p é liè re , épouse de M . de Iiam ond ,
avait des biens personnels dans les environs de C o u rp iè rcs ; que
son h o m m e de c o n fia n c e , p o u r l'adm inistration de ces b i e n s ,
était le sieur P in a lc lle , qui avait e u , d i l - o n , des relations du m êm e
g e n re avec sa famille. 11 va le t r o u v e r ; il sc présente c o m m e
étant dans l’intention d ’a cquérir la m oitié du dom aine de N eufont,
faisant partie de la terre de. S a in t - A g o u lin , dans laquelle les
enfans de M .rac de C h a m p é tiè r e , de son p re m ie r mariage avec
M . <lt* B en ag u et de P en a u lier, avaient un intérêt q uelcon que.
Il*a soin de laisser ign orer au sieur P inalclle qu e ce dom aine
était déjà ve n d u en entier à M. R ixain par M M . de Bénistant
et de G r o m o n t , cl il se fait c o n se n tir, devant n o ta ire , le 22f é v r ie r , six jours après la v c n le consentie à M . Rixain , une vente
de la m oitié de ce
dom aine , en v e rtu d ’ une procurai ion de
-
�( 6 )
M .mc de Cli.nmpcl.icrc et de M . R am o n d , son mari , tuteurs
des m ineurs P e n a u lic r, en dalc du 5 du m ê m e m ois de fé vrier,
par laquelle M. c l M .1"0 de R a m o n d donnent p o u v o ir au .sieur
P in a leü e : « de p o u r e u x , c l en leurs nom s cl q u a lités, se réunir
» a u x copropriétaires des mineurs de Iîénngucl de •Penaulicr, rela- '
» tiv e m c n l aux biens com posant la succession d e M . mc de Cl taxerai ;
» lesdils biens consisl.mil, entre an 1res c h o se s , dans la lerre de
» S a in t- A g o u lin , à Irois lieues de R i o m , d é p a rlem eu l du P uy~
» d e - D ô m e ; ven d re à telles p e r s o n n e s , et aux p rix , clauses
» c l conditions les plus avantageux, les portions revenant auxdits
•» m ineurs de R énaguet de P e n a u lic r , dans la terre de Saint« A g o u lin et scs d é p en d a n ce s, etc. ».
L e p rix de ce lle v c n lc est fixé à 2:1,000” fr. et 5oo fr. d ’é p in g les,
p rix pro p o i’lionnellcnieiil inf érieur à ‘ celui que M . Ilixain avait
acheté la totalité du domaine.
O n verra bientôt ce q u ’il faut p en ser de cette p ro c u ra tio n ,
de la iialure des p o u vo irs q u ’elle co ntient, et de l ’abus q u ’ en
a fait le sieur Pinalelle.
C e lle seconde v c n lc consentie à M . R crard 11e larda pas à être
connue de M . R i x a i n , qui fil alors enregistrer sa v c n lc sous
seing-privé:
Cet en registrem ent fut fait le 4 mars ;
L ’acte fut transcrit au bureau des h y p o th èq u es de R io m le 5 ;
. . M. liixa in prit possession p u b liq u e de sou a cq u is itio n , et la
fil notifier aii ferm ier, par aclc notarié du 20 du m ê m e m o is;
E t , de su ite , il fil «les réparations urgentes aux balim cn s du
d o m a in e , des p la n lalio n s’et des améliorations de tout gen re dans
les fonds qui en étaient susceptibles.
L es choses étaient en cet étal lo r s q u e , le p re m ie r avril 18 1 4 ,
M . lierai(l fit notifier au fe rm ie r sa vente passée à C o u rp iè rc s
lè 22 février, avec défenses d e payer à d ’anlres q u ’à lui la moitié
du prix du bail du dom aine de Ncufont.
JLe i'G mai suivant , il fil citer M . R ixa in d evan l le Juge
�(lc poix d ’À i g u c p c r s e , p o u r v o ir (lire: « Q u ’ il serait gardé et
» maintenu dans la possession de son d o m a in e , o u , du m o in s ,
» de la m oitié dudit dom aine de N c u f o n t , avec défenses de l’y
» troubler à l’a v e n i r , et d e s’im m iscer dans la possession d u d it
» d o m a in e , à peine de tous d épen s, d o m m a g es-in lérèls ».
M . Rixain a pris cette action de M . B era rd p o u r trouble à sa
possession.
M. Berard a alors changé la dem ande q u ’il se proposait de
fo rm er en maintenue dans sa p o s s e s s io n , en dem ande en partage
du domaine de N e u fo n d , p o u r lui en être délaissé la m oitié.
La conciliation n ’ayant-pas eu li e u , M . B era rd a fait a ssig n e r,
par exploit du 3o mai, M . Hixain au T rib u n a l de p re m iè re instance
de R i o i n , p o u r v o ir ord on n er le partage de ce domaine.
M. R ixain a fait assigner en garantie, sur cette a c tio n , M M . de
Bénistant c l d e G r o m o n t , scs v e n d e u rs;
.M . B erard a aussi fait citer en garantie M. cl M .m‘ de Jlairiond,
q u i sont intervenus et ont pris son fait eL cause.
T outes les actions p rin c ip a le s , récursoires et in terv en tio n s,
ont été jointes.
La cause portée à l'aud ience des 8 et i o juin d e r n ie r , il
est interven u Jugem ent qui « ord on ne qu e la vente consentie
» au profit du sieur de C h azelles, par le sieur P i n a le l le , m an» (lataire des sieur c l dame de R a m o n d , devant G o n d r e , notaire
» à C o u rp iè res , le 22 février 18x8, sera exécutée selon sa forme
» et teneur.
». E n c o n s é q u e n c e , sans s’arrêter ni avoir égard à la v e n le
» faite par les sieurs de Bénistant et Faradesclies des R o n z iè re s,
» au profit du sieur R i x a i n , par acte sous se in g -p riv é , enregistrée
» le 4 m ars su iv a n t, laquelle est déclarée nulle et de m il effet,
■'» en ce q u ’elle co m p ren d la totalité; du dom aine de N eufond ,
» et ne d o i t ’ p ro d u ire effet que p o u r la m oitié dudit d o m a in e ;
» O rd o n n e qu e dans la q u in z a in e , à c o m p ter de la signification
» du Jugem en t à personne ou d o m ic ile , la dame v e u v e R ixa in ,
�1 »
, ( 8)
» aux qualités q u ’elle p ro cè d e , sera Icnuc de ven ir à division
» et partage, avec le sieu r de Cliazeiles , du dom aine de N e u fo n t,
»
»
»
«
»
»
»
»
»
«
»
»
auquel partage la daine ve u ve R ixaiu fera rapport des jouissauces par elle p erçu es ou son défunt inari; depuis et com pris
la reco lle de l’année r 8 i 8 , d epuis l’entrée en jouissance dudit
sieur R i x a i u , ainsi que des dégradations qui p o u rro n t y avoir
été c o m m is e s , avec intérêt du tout depuis qu e de d r o it , cl
sa u f la com pensation du m ontant des réparations et am éliorations qui y auront été fa ite s, p o u r m o ilié du tout être
attribué audit sieur de Cliazeiles.
» C o n d a m n e les sieurs Rénistant e l F aradesclies des R o n zières
à garantir la dam e v e u ve R ixaiu de toutes les condam nations
contre elle p ro n o n cées ci-dessus i au profit du sieur de C lia zeile s,
ainsi q u ’aux d o m m a g e s , intérêts résultant de l’éviction du
dom aine de N eu fo n t ».
L e Jugem en t n o m m e ensuite des experts p o u r p ro c é d e r , au
partage et à l'estim ation des jo u issan ces, d égrad atio ns, am élio
rations et d o m in agcs-intérèls adjugés.
C o n d am n e les sieurs de Rénistant c l Farradesclies des R onzières
aux dépens envers toutes les parties.
A u s u r p l u s , le T rib u n a l 'd o n n e acte au sieur de Cliazeiles de
ce q u ’il consent que les experts fassent tom ber au lot de la dame
Rixaiu la totalité ou partie des bâliinens du d om aine de N e u fo n t,
s’ ils l’estim ent nécessaire p o u r l ’exploitation de la partie du
d o m a in e , qui sera attribuée à la dam e R ixa iu ;
E l d onne acte à la dam e R ixa iu de sa ré se rv e d e fa ir e .p r o
n o n ce r la résiliation de la v e n te du 16 février 1 8 1 8 , p o u r cause
d ’e v i d i o n d u n e portion du d o m a in e , c l de se p o u r v o i r , ' à cet
e f f e t , ainsi q u ’elle avisera.
T e l est le J u ge m e n t d o n t est appel.
E a dame R ixaiu le d én o n ce à la C o u r co m m e contraire à Ions
les p rin c ip e s , dans la partie qui annulle la ven te consentie à
ÎVI. R ixaiu le 16 fé v rie r, el lui préfère celle consentie* à M. lin raid
le 22 du m ê m e mois.
�° lk /
(9)
'MOYENS.
D ’après les considérans du J u g e m e n t, le p re m ie r m oyen qui
a déterm iné le T rib u n a l de p re m ière instance à annuller la vente
d u 16 fé v rie r, et à accord er la préférence à celle du 22, résulte
de ce que , « suivant l'article i328 du C o d e c i v i l , l ’acte sous
» s e i n g - p r i v é , contenant ven te de la totalité du dom aine de
« N e u fo n t, au profit du sieur R ix a in , par les sieurs de Bénistanl
>> et F a ra d e s c h e s , n e peut avoir de date c e r t a i n e , à l’égard du
» sieur de Chazclles et des sieur et dam e R a m o n d qu e du jo ur
» de son enregistrem ent, le 4 mars 18 18 , c ’e s t - à - d i r e , douze
» jours après la ven te n o t a r ié e , au profit d u sieur de Chazclles
» du 22 février p ré céd e n t ».
O r , ce considérant est fondé sur u n e e rre u r palpable en fait
et en droit.
L ’erreur csl pal pabl e en p o i n t d e fait.
O n ne p e u t pas préten d re en eiTet qu e la vente consentie à
M . Rixain n ’eût pas de date certaine, resp ectivem en t à M. Berard,
lo rsq u ’il est constant q u ’il en a pris connaissance chez M. Ilébrard ,
n o taire, et q u ’il lui en a été d onné lecture ;
L o r s q u e , d ’après cette l e c t u r e , il a fait agir auprès d e M. R ixain,
à R i o m , M . H ébrard ; et à C l e r m o n t , toutes les personnes q u ’il
a cru avoir quoiqu'influence sur lu i p o u r l ’engager à lui céder
son m a rc h é , m ê m e en lu i faisant p ro p o ser un bénéfice de 6,000 fr.
F aits qui sont de n o to rié té , q u ’011 croit ne pas avoir été déniés
dans la cause par M. B e r a r d , et d o n t , au surp lus, M rac R ixain offre
la preuve.
L o r s q u ’un acte q u e lco n q u e est connu d ’un tie rs , cette c o n
naissance p ro d u it à l’égard de ce tiers le m em e eiïel que s’il
était a u th e n liq u e ; il a p o u r lui claie c e rta in e , et lorsque ce liers
s’est fait consentir une seconde v e n t e , celle q u ’il a co n n u e csl
nécessairem ent la prem ière à son ég ard , et l’art. i 328 d u Code
c iv il cesse de lui être applicable.
L ’erreu r du considérant est encore palpable en point de droit,
,
�(
10
)
en cc q u e , d ’après les princip es u n iversellem en t reconnus dans
celte m a liè re , c ’ est le p re m ie r des d e u x acquéreurs qui est cn;
possession d e l’objet v e n d u q ui doit c ire p r é fé r é , quel qu e soit
la dale de sa vente.
Quotiens du obus in solidum prœdium ju re disïrahkur : manifesti
ju ris est cum , cui priori traditum est, in detinendo domino esse
potiorem. Loi quotiens, au C o d e , l i v . 3 , litre 3 2 , de rci vindicatione.
C e texte de la L o i est si f o r m e l , tous les auteurs tellem ent
unanim es et la J u risp ru d en c e si invariable sur ce p o i n t s , q u ’on
croirait abuser des m o m e n s de la C o u r , qu e d e m u ltip lie r les
cilalions p o u r l’établir.
O r i c i , M. R ixain a pris possession solennelle du dom aine
de N eu fo n t c l des bois co m p ris dans sa v e n te , par aclc n o la r ié ,
d u 3 i mars 18 18 , avant qu e M . B era rd eut fail aucune démarche'
p o u r inc lire sa seco nd e v e n te à exécution ; il s’est m aintenu
dans c e lle possession tant q u ’il a v é c u , et elle s’eçl p e r p é t u é e ,
ju sq u ’à cc jour, dans la p e rso n n e d e sa v e u v e et de ses enfans.
11 n ’en faudrait pas davantage p o u r assurer aux m in eurs R ixain
la p référen ce de la v e n le faile à le u r p è r e , su r celle consentie
à M . B erard .
Mais cc n ’est pas se u lem en t sous cc p o in t de v u e q u e . cette
p ré fé re n c e le u r est assurée.
Q u a n d la L o i m e t en question la p ré fé ren c e e n lre d eu x
a c q u é re u rs, elle les sup po se tous d eu x d e b o n n e foi.
C ’est ce qui résulte de c e lle expression ju r e qui se trouve.
dans la L o i quotiens qu e nous ven o n s de citer.
J u r e , disent les glossalcurs sur cette L o i , id est non dolo.
J u r e , id est bond fu ie , vel sine dolo,
O r , on n e p e u t pas d ire q u e le second a c q u é r e u r , qui connaît
la p re m ière v e n t e , achète de bo n n e loi cl sans fraude , bon âfide,
vel sine dolo.
A u ssi , lous les
auteurs et la J u ris p ru d e n c e s’a cco rd enl-ils
dans cc cas , à rep o u sser l ’action en p ré fé ren c e de ce seco nd
a c q u é re u r sur le premier..
�C 11 )
M e y n à r d , Président du P arlem en t de T o u l o u s e , dans scs
notables et singulières questions , Yiv. 2 , chap. /f i , après avoir
décidé que la préférence entre d eu x acquéreurs du m ê m e objet,
est d uc h celui qui le p re m ie r en a été en possession , ajoute
ce qui suit :
« N ous ne voudrions toutefois ou blier ici ce que B a l d k et
» J a s o n auraient ailleurs an n o té, savoir : Q u ’en celle question
» de p ré fé re n c e , entre d eu x a cheteurs, appartenant au second
» par ladite co n slitu tio n , curn jà m res tradila f u i s s e l, il est besoin,
» et la faul ainsi tellement tem pérer, que si le se c o n d , quand il
» achetait les biens qui lui étaient vend us, savait; et avait éLédùm ent
» averti, iceux m êm es biens avoir été auparavant et p re m ière m e n t
« vend us au susdit autre p re m ier a ch e teu r; q u e c’ est alors et.
» p our la témérité et mauvaise f o i d ’icelui second , d ’avoir
» entendu nonobstant c e , à tel a c h a t, (pie le p re m ie r viendrait
» à p r é fé r e r , et être re çu à v e n d i q u e r lesdiis b i e n s contre ledit
» sec ond , quel l e tradition et p re m ière , réelle et effectuelle
« possession q u ’il y peut p rétend re ».
Il est im portant de re m a rq u e r qu e cet a u te u r, dans le cas
p ré v u , où la p re m ière vente était connue par le second acquéreur,
ve u t que ce p re m ier acquéreur soit re çu à v e n d iq u er lesdiis
biens contre ledit se c o n d , quelle tradition et première réelle et
effectuelle possession q u 'il y peut, prétendre ; et q u ’i c i , c’est le
p re m ie r acquéreur qui a la tradition et prem ière, réelle cl
effectuelle possession, n o n - s e u le m e n t de fa it, mais par acte
authentique.
Nous lisons également dans D esp eisses , tom e 1 " , titre 1." ,
de T A c h a t, page 5 8 , que « si le second acheteur a s ç u , lors de
« son c o n t r a t, la vente jà faite, bien qu’il eût le prem ier la
» possession de la chose vend ue, il est oblige de la rem ettre.
« T e l le m e n t , dit-il, que ladite L o i quoties n ’a lieu q u ’entre
j> deux acquéreurs de bonne f o i ».
11 ajoute encore plus bas que « le Jurisconsulte, en la question,
» quel des deux acheteurs doit être préféré? re q u ie rt en tous
�»
»
»
»
( , 2 ) )
deux bonne fo i; celui-là p e rd ra sans doute sa cause, p u isq u e
m ê m e il y a du doute à sçavoir qui sera p r é fé r é , lo rsq u e lo u s'
d e u x ont bonne f o i, et d ’abondant, à cause de celte mauvaise
fo i, le p re m ie r acheteur p o urrait faire casser la seconde vente,
» co m m e faite en sa fraude ».
D e s p e is s e s c ite , à l'appui de cette décision, l’autorité de
B aldes , de P accius , de R anohin , de G omes ;
U n A r r ê t du P arlem en t de D i j o n , du 26 juillet 15 6 4 » rappo rté
p a r B o u v o t , to m e 2 , sur le m o t Trente, question 68';
U n A r r ê t du Parlem ent de B o r d e a u x , cité par A n t o m n e , de
l ’année i582;
E t un troisièm e A r r ê t d u P arlem en t de P a r is , de l ’année iiig 5 ,
ra p p o rle par le m êm e auteur.
A u t o r i t é s a u x q u e l l e s o u p e u l a j o u t e r c e l l e de l \ ou ss EAT J- DEL a c o m iîe , dans son R e c u e il de J u ris p ru d e n c e , au m o l Trente,
section 5 , n.° 16.
D e sorte q u ’on p e u t co n sid érer ce p o in t c o m m e à l ’abri d e
toute contradiction ; q u e , dans aucun-cas, le second a c q u é r e u r ,
qui a connu la p re m ière v e n t e , n e p e u t être p référé au p r e m i e r ,
lors m ê m e q u e ce second a c q u é re u r aurait été le p re m ie r en
possession des biens v e n d u s , parce q u ’il n ’a pas acheté honâ.
f u i e , vel sine tlolo.
A plus forte r a is o n , l o r s q u e , co m m e dans l ’e s p c c e , c ’est le
pre m ier acheteur qui a la tradition et la prem ière, réelle et effectuclle
p ossession , de fait et par acte authentique ; possession dans laquelle
il s’est m aintenu lui et scs représentons ju s q u ’à ce jour.
\
A p r è s le p re m ie r considérant q u ’on v i e n t d e d i s c u t e r , on lit
dans ce J u g e m e n t, q u ’in d ép en d a m m e n t que la ven te consentie
à M . llix a in n ’avait une date authentique qu e du 4 m a r s , j o u r
de l’en registrem ent du sous s e i n g - p r i v é , tandis que la ven te
consentie à M . B e r a r d , par acte n o ta rié , est du 22 fé vrier: « L e s
» sieurs de B énislant c l Faradesches des R o n z i è r c s , q u o iq u e
» cohéritiers dans la succession de la dame de C h azerat, n'avaient
» alors aucun droit et qualité p ou r consentir la vente audit llix a in
�( .3
)
»
»
»
»
»
»
«
»
p u i s q u e , de le u r p ro p re a v e u , ils avaient v e n d u antérieurem ent
des im m eubles de ce lle succession p o u r bien au-delà de le u r
am endement ; et q u e , d ’un aulrc c ô té , ils ne justifient d ’aucun
p o u vo ir de v e n d r e , qui leur ait été donné par lesdils sie u r
et dame Ratnond ; et q u ’au co ntraire, il résulte de le u r défense
q u ’ils étaient instruits qu e le sieur Pinatelle a toujours été
leur seul mandataire p o u r v e n d r e , le seul qui eût une p ro c u ration de leur part a cet effet ».
O n ajoute : « q u ’en considérant la vente sous sein g-privé faite
« par les sieurs de B énislant et F a ra d e sc h c s , co m m e existant
» sous la date d u iG février 18 18 , cl en admettant que le sieur
» de Chazelîes en avait connaissancs lors de la vente n o ta r ié e ,
» qui lui fut consentie le
22
d u m ê m e m o i s , par
le
sieur
» P in a te lle , mandataire des sieur et dame R a m o n d , il en résul» terail seulem ent qu e le sieur de Chazelîes avait acheté du
» véritable p ro p riéta ire , qui seul avait droit de v e nd r e , la m oitié
» du dom aine dont il s ’a g it, q u ’il savait avoir été vendu précé» dem m enl p a r des personnes q u i n ’avaient n i droit n i (jualité
» p our vendre; qu e cela 11e changerait la nature ni de l ’une ni
» de l ’autre des deux ve n te s; celle faite par les sieur et darne
» de R.ainond ou leur mandataire , dont il a été touché la m ajeure
3> partie du p r i x , serait toujours v a lid é e , tandis que celle qu e
» les sieurs de Bénislant et Faradesches ont c o n s e n tie , serait au
» contraire n u ll e , parce qu'ils n ’avaient n i droit n i pouvoir de
» vendre ».
Il est bon d e re m a rq u e r q u ’on répète ju s q u ’à trois fo is, dans
ces c o ïisid é ra n s, que M M . de B én islan t et d e G r o m o n l n'avaient
n i droit n i qualité p our vendre à M . R ix a in ;
Q u e M . de Chazelîes savait que le d o m a i n e
d e N e u f o n t avait
été ven du précédem m en t p a r des person n es q u i n avaient n i droit
n i q u a lité p o u r vendre;
Q u e M . de Chazelîes savait que la vente que M M . de Bénistant
et Faradesches ont consentie à M. R ix a in , serait n u lle, parce
q u ils n ’avaient n i droit ni. pouvoir de vendre.
Q u o i! M . B era rd savait qu e M M . de B én islan t et de G rom ont
�( *4 )
n'avaient n i droit, n i q u a lité, n i p ouvoir, p ou r vendre le domaine
de N e u f ont; cl il s’csl adressé à eux , pendant une année entière ,
p o u r leur faire des o ffres, les r e t ir e r , en faire de n o u v e lle s,
traiter avec eux de ce lle v e n t e , et les presser de la lui consentir.
I l savait qu'ils n ’avaient n i d ro it, n i qualité, n i pouvoir p our
vendre, el que la veille q u ’ils avaient consentie à M. Rixain , était
nulle; et aussitôl qu e cette vente lui a clé c o m m u n iq u é e par
M. I lé b r a rd , qui en élait d ép o sitaire, il le p r i e , avec les plus
vives instances, d ’o btenir de M. Rixain q u ’il lu i cède son acquisi
tion , en lui offrant m ê m e 6,000 fr, de bénéfices.
I l savait que cette vente était n u lle; et non content de ces
p rem ières d é m a r c h e s , il se ren d d e suite à C lerin o n t où élait
M. Rixain ; il fait réitérer ses instances auprès de lui ; il em ploie
scs parens les plus p r oc he s et les personnages les plus influens ;
cl c e la , p o u r le déterm in er ù lui céd er c e lle v e n te , q u ’il savait
être nulle et sans conséquence.
C e p e n d a n t, ce lle vente était si p e u n u lle ; elle élait tellem ent
solide à scs y e u x , q u ’il o ffra it, p o u r en obtenir la c e s s io n , des
sacrifices tels, q u ’ils auraient p u tenter tout aulre qu e M. R ix a in ,
qui n ’avait acheté qu e par c o n v e n a n c e , et qui tenait à son
acquisition par affection.
A u s u rp lu s , 011 p e u t faire ici à M . B era rd un d ilcm n c :"
O u M. B erard savait que M M . de B é n isla n t e l G ro m o n d
n ’avaient n i droit, n i qualité, n i pouvoir p our vendre, el que
le u r v c n le élait n u lle; ou il ne le savait pas.
S ’il le sa v a it, quo p en ser de l ’in co n sé q u en ce de sa c o n d u ite ?
S ’il ne le savait p a s , q u e penser du J u g e m e n t qui lui suppose
ce lle connaissance, p o u r le justifier du re p ro ch e de s’être fait
consentir une seconde v c n l e , connaissant la p rem ière?
O n 11e voit pas quelle ré p o n se M. B erard p e u t faire à ce
d i'c a m e .
Il ne lui sera pas plus facile de ré p o n d re à un second d ilcm n c
q u ’on va lui proposer.
O n lit dans ce J u gem en t qu e la vente cons.cnlie à M . R ixain
�C *5 )
par M M . de Bénistanl c l de G r o m o n t, peut d ’aulant m oins êfr'c
m a in ten u e, q u e , « de leur propre aveu, ils m a i eta vendu anté->> ricurcment des immeubles de celle succession p our bien au-delà
» de leur amendement ».
S ’il est vrai q u ’il y ait eu des v e n le s antérieures dont M M . de
B énistanl et de G rom ont aient louché le p r i x , sans en taire p a ri
à leurs cohéritiers, que faul-il penser de M M . de Bénistanl et
de G ro m o n l?
S ’ils o n l louché ce p r i x , et q u ’ils en aient fait pari à leurs
cohéritiers, que faut-il penser de ce J u ge m e n t?
Car il est évident que si le p rix de ces venles antérieures a
clé distribué entre tous les c o h c rilic rs, M M . d e B énistant cl de
G ro m o n t n'ont p a s vendu, des immeubles de la succession a u-delà
de leur amendem ent, et qu e tous les cohéritiers s o n t, à cet égard,
sur la m ê m e ligne.
E t à qui fait-on de pareilles inculpations ? A u x hom m es les
plus reconnrïandables, dont la probité sé v è re , la loyaulé el la
délicatesse passent en p r o v e r b e , com m e a utrefois, chez les
A th é n ie n s, la justice d ’Aristide.
A la vérité , ces inculpations ne p e u ve n t atteindre MINI, de
Bénistant. et G ro m o n t ; ils sont invulnérables sous ce point de
v u e , mais ils ne sont pas seuls dans la cause.
O n les accuse d ’avoir trom pé la foi p u b liq u e , de s’etre désignés
dans des affiches, dans les feuilles p ério d iq u es , com m e vendeurs
du d om aine de N e u fo n t, sans droit, sans qualité, sans pom oir;
d ’avoir abusé de la confiance q u ’à eue en eux M . B ix a in pour
lu i consentir u n e v c n lc nu lle, illusoire ; scs en fans sont exposés,
pa r le u r f a it , à u n e éviction in év ita b le ; ils d o iv en t, d è s-lo rs,
p r e lc r le u r appui à ces orphelins q u ’on se p r o p os e de dépouiller,
el les d éf end re avec loule l ’énergie d ont ils sont capables.
M M . de lîénislant el G ro m o n t doivent d o n c s’em presser de
p r o d u ir e , sous les yeux de la C o u r , tous les p o u vo irs q u ’ils
o n l reçus de leurs cohéritiers du M i d i , d epuis la m o rt de M mc de
Chazerat, p o u r les re p résen ter dans les différons procès auxquels
�( >6 )
sa succession a donne lieu , et dans les partages qui en ont été
le résultat;
T o u s les po uvo irs q u ’ils en ont re çu depuis les p artages, et
spécialem ent , les procurations q u i le u r o nt été envoyées en
ja n v ie r , février et mars 1 8 1 6 , q u ’ils rappellent dans leurs
défenses c o m m e contenant pouvoir de vendre ;
E t e n fin , toute le u r correspond an ce qui contient une suite
lion in te rro m p u e de tém oignages d ’une confiance sans »bornes,
avec des expressions qui seules seraient autant de p o u vo irs
illim ité s , p ro p re s à justifier n o n -s e u le m e n t la ven te q u ’ils ont
consentie à M . R i x a i n , mais
auraient p u consentir.
toutes les autres ventes
q u ’ils
C ’est alors q u ’on repoussera avec indignation cette idée affli
g e a n te , que M M . de B é n i s l a nt c l G r o m o n t aient p u tro m p e r le
p u b lic cl les particuliers q u i se sont présentés p o u r acqu érir
le dom aine de Neufont. et les bois de S a in t- A g o u lin , et qu e les
actes qu'ils ont passés avec e u x ne soient q u e des feuilles de chêne.
S ’il y a dans cette aifaire u n e vente tout à-la-fois désavouée par
la loyauté et la bo nne f o i , c l vicie u se dans tous les s e n s , ce n ’est
pas celle consentie par M M . de B én isla n t et d e G r o m o n t à
M . R ix a in , mais bien celle consentie à M . B e ra rd pa r le sieur
Pinatelle.
O n a vu ci-devant q u e M. B e ra rd ayant u n e parfaite connais
sance d e la p re m ière ven te consentie à M. R i x a i n , il n ’a p u
s ’en faire consentir u n e s e c o n d e , de b o n n e foi et sans fraude,
bond fu ie et sine dolo.
Mais ce n ’esl pas se u lem en t en cela q u e celte seco nd e vente
est vicie u se et nulle.
E lle a é lé consentie pa r le sie u r P i n a t e ll e , seul et is o lé m e n t,
tandis q u e sa pro curatio n portait q u ’il serait tenu de sc réunir
a u x autres cohéritiers p ou r consentir ces ventes.
Le sieur Pinatelle a v e n d u à M . B erard la m oitié du dom aine
de N e u f o n t , c l les m in eu rs Bénaguel n ’avaient q u ’un sixièm e
de ce d o m a in e , c o m m e de loulos les autres p ro p riétés de la lerrc
«le S aint-A goulin.
�Cn )
L e sieur Pinatelle a m o r c e l é , par celte v e n l c , des biens
in d iv is, et peut-être in d iv is ib le s, c l sa procuration ne lu i donnait
pas le po uvo ir de faire ainsi des ventes p a rtie lle s , qui non-seule
m en t étaient contraires à l ’essence de la société existante entre
les c o h é ritie rs , . cl à leur convention p rim itiv e de laisser tout
dans l’ind ivision, mais qui entraîneraient p o u r "tous les consé
quences les plus funestes; d ’a b o r d , en nécessitant autant de
partages entre les acquéreurs et les cohéritiers, q u ’il y aurait eu
d ’objets vend us;
E n second l i e u , parce que la branche S o u b r a n y , étant co m p o sé e
de plus de vingt c o h é r itie rs , si chacun de ces vin g t cohéritiers
se donnait la licence de v e n d r e , à son grc et is o lé m e n t, des
p ortion s d ’héritages o u de dom aines à tout v e n a n t, chaque objet
p o u rra it, co m m e dans l ’e s p è c e , être v e n d u à plusieurs acquéreurs
à-la-fois , et il en résulter:»! un itesordre , une confusion et des
pro cès, d o n l l ’idée seule est effrayante, e l dont il est im possible
de calculer les résultats.
L e sieur Pinatelle a d onc fait un abus étrange de sa pro curatio n,
quand il s’est prêté aux sollicitations de M. B e r a r d , e l q u ’il lui
a ve n d u la m oitié du dom aine de Neufont.
L ’article 1989 du C o d e civil p o r t e , en term es fo r m e ls , que
;« le mandataire ne peut rien faire au-delà de ce qui est po rté
?i dans son m andat ». T o u t ce qui excèd e scs p ouvoirs est frappé
de n u llité , et doit d e m eu re r sans effet.
A la v é rité , M . et M .me R a m o n d , tuteurs des m in eu rs Bénaguet,
ont p orté la com plaisance, p o u r M . B era rd , ju s q u ’à intervenir dans
la c a u s e , p o u r ap p ro u ve r la cond uite de leur agent d ’a lïa ire s,
et c e la , contre l ’intérêt de leurs
mineurs;
C o n t r e toutes les c onvenance s s o c i a l e s ,
E t sans égard aux dangers auxquels ils exposent MM. de
Bénistanl e l de G ro m o n t, ( p ii, d epuis le décès de M"1' de Chazerat,
n ’ont cessé de s’o c c u p e r , avec zèle, de leurs intérêts , et d ’acquérir
jo urnellem ent des litres à leur reconnaissance.
Mais celle intervention ne change rien à l’étal des choses ; elle
3
�( 18 )
I
n e change pas la nature de la vente qu e s’ est fait consentir
M . B era rd par le sieu r Pinatelle ; elle n ’en est ni plu s fra n c h e ,
n i plus lo y a le , ni plu s co n fo rm e au m a n d a t, ni plus p ro p re à
co n cilier à M . B era rd la faveur d e la C o ur.
BOIROT ancien Jurisconsulte
MARIE, Avoué.,
A CLERMONT-FERR AN D , de l ’Imprimerie de Pellisson père et fils, au coin des rues
Saint-Gcnès et Saint-Esprit, ancienne maison'Giron.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lacoste, Marie-Caroline. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Marie
Subject
The topic of the resource
ventes
doubles ventes
successions
Chazerat (Madame de)
experts
actes sous seing privé
possession
jurisprudence
bonne foi
procuration
partage d'un domaine
équité
enregistrement
domaines
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour dame Marie-Caroline Lacoste, veuve de monsieur Jean-Jacques Rixain, docteur en médecine, tutrice de ses enfans mineurs, appelante ; contre M. Antoine Berard de Chazelles-Labussière, intimé ; encore contre messieurs Jacques-Amable Soubrany de Benistant, et Pierre Faradesches des Ronzières, appelés en garantie ; et contre madame de Champetière, veuve de M. Penautier, épouse, en secondes noces, de M. de Ramond, tuteurs des mineurs de Penautier, intervenants.
annotation manuscrite : « 9 octobre 1822, 1ére chambre, arrêt infirmatif. »
Table Godemel : concurrence : 3. le principe introduit par l’article 1328 du code civil pour prévenir les fraudes et non pour les favoriser, ne peut être appliqué qu’entre deux acquéreurs de bonne foi, et lorsque celui qui a acquis par acte authentique a ignoré la vente qui précédemment avait été faite, en faveur d’un autre, par acte sous signature privée. Spécialement la préférence peut être accordée à la vente faite sous seing privé, quoique son enregistrement soit postérieur à la date de la seconde vente, consentie devant notaire, lorsque cette dernière vente avait été faite par un mandataire, contrairement aux termes de la procuration, et lorsqu’il est établi que le second acquéreur avait une connaissance personnelle de la vente antérieure à celle qu’il a obtenue par acte authentique.
4. quelle doit être l’étendue de la garantie accordée au second acquéreur dont la vente reste sans effet par suite de la connaissance personnelle qu’il avait sur l’existence de la première vente, et de son silence à cet égard envers le mandataire ?
n’est-ce pas suffisamment pourvoir à ce qu’il peut prétendre, que de lui allouer le remboursement des sommes qu’il a payé sur le prix de la vente, ainsi que de ses déboursés pour frais et loyaux coûts, avec les intérêts à compter des époques de paiement ou de déboursés ; et, de plus, les dépens auxquels il est condamné ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Pellisson père et fils (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
1818-1822
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2526
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2527
BCU_Factums_G2528
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53512/BCU_Factums_G2526.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Saint-Agoulin (63311)
Neufonds (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bonne foi
Chazerat (Madame de)
domaines
doubles ventes
enregistrement
équité
experts
jurisprudence
partage d'un domaine
possession
procuration
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53492/BCU_Factums_G2506.pdf
5e71d9a8dd1c16f25591efdff1a820e8
PDF Text
Text
-U -.. i . . .
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MEMOIRE
COUR R OYALE
d e ri om .
EN RÉPONSE,
P o u r dame Marie-Sophie L
an g heac
I T® CHAMBRE-
de
M
o n tlo g is
,
procès par é c ri t
religieuse, habitante de la ville d’Aurillac: Marie- s—
^
.
M. Tassin de VillepionJ
Judith L a n g h e a c , veuve de sieur P i a l e s ; Marierapporteur.
Honorée L a n g h e a c - L i g n a c , toutes deux propriétaires,
habitantes du lieu et commune de Viviers , sieur
B rassat- M
urat
, docteur en médecine, et autres,
A p p e la n s ;
C o n t r e s ie u r F é l i x V a l e n t i n
p r o p r ié t a ir e , et la
d a m e S o p h ie -M a rie N o u v e a u , son épou se , d e lu i
autorisée
héritière , sous b én éfice d ’in ven taire ,
d e s ie u r Jo s e p h - A y m a r d N o u v e a u , son o n cle /
lesd its m ariés V a l e n t i n habitans d u lieu et c o m
m une d e C a lv in e t , In tim és ;
EN P R É S E N C E
De
s ie u r
P ie r r e -A n t o in e
C a p e lle -P e u c h -Je a n ,
et d es d e m o ise lle s S o p h ie et M a r ie C a p e l l e , f r è r e
et sœ urs
habitans d e la v i l l e d ’A u r i l l a c , héritiers
de M e A n to in e C a p e l l e , le u r p è r e , a u ssi Appelans.
L
es sieurs et dames de Montlogis n’ont dans la cause
qu un intérêt secondaire. Leurs droits sont subordonnés
à la décision d’ une question importante qui s’agite
entre les héritiers Capelle et les époux Valentin.
C est sur l'interprétation et l’effet d’une donation
�( » )
portée par 1111 contrat de mariage du 23 septembre 1 786,
que roule la difficulté principale.
Les héritiers de l ’époux réclament les biens donnés,
comme donataires directs dans un cas prévu, et qui
est arrivéLeurs adversaires présentent la condition comme
une substitution que les lois nouvelles ont abolie.
S ’ il n’y a pas de substitution, les sieurs et dames
de Montlogis n’auront aucun droit aux biens compris
dans la donation.
Au contraire , s’il y a substitution , une portion
des biens donnés, portion faible, il est v ra i, doit leur
appartenir.
Cependant ils ne prendront aucune part à la
discussion de cette question.
L ’intention connue de la donatrice ne leur permet
pas de s’élever contre les droits des héritiers Capelle.
Cette intention , manifestée dans une transaction
du 20 décembre 17 9 1 , exprimée de nouveau devant
les premiers juges, leur impose le devoir de s’en rap
porter à droit sur l ’objet principal , et d’examiner
seulement quelques questions subsidiaires.
Leur examen ne peut être ni long ni difficile.
Faire ajouter au jugement une disposition que l ’inat
tention seule a pu omettre, et réfuter deux prétendus
griefs, incidemment présentés par les époux Valentin :
tel est le but que se proposent les sieurs et dames de
Montlogis.
FA IT S.
Il serait inutile de retracer avec détail des faits que
l’on trouve dans deux mémoires déjà publiés. Les
�• .t
<»>
v
sieurs et dames de Montlogis ne rappelleront que ceux
qui se rattachent au développement de leurs droits.
On sait que la dame Marie-Judith Langheac de
Montlogis, leur sœur ou leur tan te, avait épousé le
sieur Capelle : le contrat de mariage est du 23 sep
tembre 1786.
L a future se constitua personnellement tous ses
biens présens et à venir. Les biens présens consistaient
en une somme de 10,000 liv. , due k la future pour
ses droits légitimaires paternels et maternels.
Au contrat intervint la dame Judith Langheac de
Montlogis, une des appelantes. Cette dame, qui était
alors veuve du sieur Jalinques, et qui depuis a épousé
le sieur M u râ t, répandit sur les deux époux des bien- faits qui sont devenus la source de la contestation
actuelle.
Le sieur Capelle décéda le i 5 janvier 1794*
U n inventaire fut dressé le 17 février et les jours
suivans, entre la veuve Capelle et le tuteur des enfans
mineurs du défunt.
Dans l’ inventaire sont détaillés divers objets mobi
liers dépendant de la succession Capelle ; certains
meubles réclamés par la veuve, comme sa propriété
particulière-, plusieurs livres-journaux du défunt-, des
papiers qui lui appartenaient, et un grand nombre de
titres, notamment ceux de diverses créances comprises
dans la donation faite eu 1786.
L ’année suivante , la veuve Capelle épousa en
secondes noces le sieur Nouveau.
Dans leur contrat de mariage, en date du i!\ fri-
�(4 )
maire an 3 , elle lui donna, en cas de survie, la
propriété et la jouissance d e s d o m a in e et en clo s d e la
Rouc/uette et d é p e n d a n ce s.
Mais comme ce domaine était un des objets donnés
par la dame M urât, en 1 7 8 6 , la veuve Capelle, incer
taine si elle en était propriétaire, prévit le cas où elle
ne pourrait en disposer; et, dans ce cas, elle fit don
au sieur Nouveau de ses autres biens meubles et
immeubles.
Dans la suite diverses contestations s’élevèrent entre
la dame Nouveau et les héritiers Capelle.
Alors on exam ina principalem ent h. qui devaient
appartenir en propriété les biens donnés par la dame
M u râ t, dans le contrat de mariage de 1786. Des
mémoires respectifs furent publiés. Dans celui des
héritiers Capelle, on invoqua l ’intention de la dame
M u rât, et l’on s’en référa à l ’attestation même de
celle-ci, pour dém ontrer q u ’en vou lan t que les biens
donnés
fussent a c q u is
au s ie u r
C a p e lle
ou
à ses
h éritiers , elle n’avait pas entendu les leur attribuer à
titre de substitution iidéi-commissaire.
Si elle eût été appelée en cause a lo rs, la dame
Murât eût été prête à dire la vérité toute entière y
même contre l’intérêt de sa propre sœur.
Depuis, son intérêt personnel n’a pu l’engager à la
dissimuler.
La dame Nouveau décéda le G avril 1 8 1 5 , laissant
pour héritiers des neveux et plusieurs sœurs, l ’une
desquelles était la dame de Murât elle-même.
11 fut fait, le 2 octobre i 8 i 5 , et les jours suivans,
�H
( ' >
en présence du sieur Nouveau, du sieur Capelle et de
la dame Judith Langheac de Montlogis,' un inventaire
descriptif du mobilier qui existait dans les biens
qu’avait possédés la dame Nouveau. On allait com
prendre dans l ’inventaire les divers titres de créances
et tous les papiers, lorsque le sieur Capelle et la
demoiselle de Langheac déclarèrent qu’ il était inutile
d ’en Taire un second inventaire, « d ’a p rès les o ffres
« présentem ent f a it e s par le sieur Nouveau, de faire la
« représentation de tous les titres d e cré a n ce s et
« p a p ie rs énoncés au premier inventaire, par nous
« fait au décès de feu sieur Capelle, et de justifier de
« l ’emploi des créances par lui levées et perçues, et
« de représenter tous les autres titres et p a p ie i's en
« nature. »
Telles sont les expressions même des offres faites par
le sieur Nouveau.
Les titres de créances et les papiers ne furent donc
pas inventoriés.
Cependant le sieur Nouveau assigna en reprise
d’instance les héritiers naturels de son épouse.
Au nombre de ces héritiers était la dame de Murât,
qui avait fait la donation portée au contrat de mariage
de 1786.
Cette donatrice connaissait mieux que personne les
intentions qui avaient dicté ses bienfaits. Elle savait
qu elle avait entendu donner au sieur Capelle et à ses
enfans'j et, dans cette conviction, réunie à s e s cohéri
tiers , elle s était contentée de la dot que sa sœur
s c ia it personnellement constituée en 178G, et de celle
*v»
{¿ fc
�I f 'k
( 6 )
qu’elle avait elle-même apportée au sieur Jalinques,
son premier m ari; (lots dont le sieur Capelle père
s’était chargé, et dont sa succession était par consé
quent débitrice-, dots sur lesquelles elle traita avec les
enfans Capelle.
Ces arrangemens, faits dans la pensée qu’il n’y
avait pas de substitution, et que les héritiers Capelle
étaient seuls propriétaires de tous les biens donnés en
1 7 8 6 ; ces arrangemens furent suivis d ’une déclaration
que la loyauté commandait.
D an s une écritu re signifiée le 18 novembre 1 8 1 6 ,
la dame de M u râ t et ses cohéritiers reconnurent les
droits des héritiers Capelle a u x biens p ro ven a n t d e la
su ccessio n J a lin que s , et f a is a n t p a rtie d e la donation
p o rtée p a r le con trat d e
m a ria g e d u
23
septem bre
1786.
Ils déclarèrent que leur seul intérêt était de se f a i r e
restituer les som m es apportées en d o t 3 soit p a r la d a m e
M u r â t 3 soit p a r la d a m e N o u v e a u , et reçu es p a r
leu rs p re m ie rs m a ris; m ais q u à cet é g a r d , le sie u r et
les d e m o ise lle s C a p e lle le u r en avaien t f a i t raison .
Ils en tiraient la conséquence qu’ ils devaient être
mis hors de cause.
Cette déclaration fut spontanée. Elle ne fut refFct
d’ aucune impulsion. L a vérité seule la d icta, quelque
favorable qu’elle put être aux héritiers Capelle.
Cependant le sieur Nouveau voulut en profiter,
pour s'affranchir de l ’obligation de rendre compte des
biens de la défun te, et notamment pour rétracter
�l'offre qu’il avait faite dans l'inventaire du 23 octobre
1 8 1 5.
Cet étrange système ^ proposé dans une écriture
du 26 avril 18 1 7 , fut repoussé par les héritiers de la
dame Nouveau, dans une réponse signifiée le G août
suivant.
Les sieur et dame de Montlogis firent observer
« qu ’il ne pouvait plus être question de leur mise hors
« de cause, dès que la déclaration qu’ ils avaient faite
« pouvait tourner au profit du sieur Nouveau , contre
« leur volonté hautement manifestée depuis long« tems. »
E n . .conséquence , ils demandèrent que le sieur
Nouveau fut condamné « à se désister en leur faveur,
« ou en celle des sieurs et demoiselles Capelle , de
* « tous les biens immeubles possédés par la dame
« Nouveau à son décès, provenant principalement de
« la succession Jalinques;
« Qu’il fût aussi condamné à leur remettre :
« i° Le mobilier existant à la Rouquette, au décès
« de la dame Nouveau, leur sœur et tante, constaté
« par les inventaires des 7 février 1794 5 et 2 octobre
« 18 15 ;
« 20 Les cheptels de la réserve et des domaines de
« la Borie-Basse , outils aratoires et autres objets
« mobiliers existant dans lesdits domaines et réserves,
« aussi d’après les susdits inventaires}
«
A représenter et remettre tous les titres de
« créances, papiers, livres-journaux , et documens
« appartenant à la succession Jiüinques, et par exprès
�KQ&
( 8)
«j ceux énoncés en l ’inventaire du 7 janvier 17 9 4 ; k
« justifier de l ’emploi des créances par lui perçues et
« levées, le tout en exécution de l!obligation qu’il a
« contractée dans le procès-verbal du 2 octobre i 8 i 5 ;
« à rendre ' compte de)( toutes les autres sommes non
« portées audit inventaire de 1794? appartenant k la
« succession Jaliuques. »
On voit que, par les conclusions que l ’on vient de
transcrire, la dame de Murât et ses cohéritiers deman
daient que les condamnations fussent prononcées en
faveur des héritiers Capelle; la raison en fut qu’ils
connaissaient le vrai caractère de la donation de 178G,
et l ’intention qui l’avait dictée.
Cette intention que la dame de Murât pouvait
d’autant moins méconnaître , qu’elle avait été la
donatrice; cette intention qu’elle avait exprimée for
mellement dans le traité de 1 7 9 1 , a dû être aussi
manifestée par elle, dès qu’elle a été appelée dans la
cause.
Les sieurs et dames de Montlogis lui rendront un
nouvel hommage, en répétant que leurs intérêts n’ont
rien d ’opposé à ceux des héritiers Capelle; que s’ils
ont rèr.u
de ceux-ci la restitution des deux dots,' c’est
s
parce qu’elles 11’étaient pas comprises dans la donation
éventuelle faite au sieur Capelle ou k ses héritiers ( 1) ;
( 1 ) L ’ une de ces dots appartenait à la (lame Nouveau ; elle était de
10 ,0 0 0 fr. L ’autre était celle <le la dame de M u r â t; elle ne s’élevait
qu’à 3000 fr. E lle en fit don pur et simple à sa s œ u r , par le contrat de
mariage même de 17 8 6 .
�(
9
)
et que s’ils réclament aujourd’hui de plus grands
droits, c’est en faveur des héritiers Capelle, auxquels
seuls ils entendent que ces droits soient attribués,
comme faisant partie des biens qui leur étaient donnés '
conditionnellement.
Les mêmes conclusions furent prises lors du juge
ment contradictoire du 3 i décembre 1 8 1 7 .
L e tribunal décida la question principale en faveur
du sieur N o u v e a u , et lui attribua en conséquence la
propriété du domaine de la Rouquette et de ses dépen
dances; mais il jugea en principe, par les motifs du
jugement , que les bestiaux et
les outils aratoires
n’ étaient pas compris dans le don d ’ immeubles que lui
avait fait son épouse.
L e dispositif condamne le sieur Nouveau « h resti« tuer aux sieur et demoiselle C apelle, ou aux héri« tiers naturels de son épouse, tous les meubles
« meublans qui garnissaient le château de la Rouquette
« au décès du sieur Capelle, compris dans l ’inventaire
«
«
«
«
de 1794? ainsi que ceux qui avaient été délaissés
par la dame Murât à sa sœur, distraction faite de
ceux qui avaient été remis au sieur R e y, tuteur des
enfans Capelle •,
« E t vu les offres faites par lui dans l ’ inventaire
» de 1 8 1 5 , et acceptées par les héritiers de son épouse,
« de représenter tous les titres et papiers compris dans
<i 1 inventaire de 17 9 4 ? de justifier de l ’emploi des
« créances par lui levées et perçues, et de représenter
« tous les autres titres et papiers en nature,
« Le tribunal le condamne à faire ladite représen-
�«
«
«
«
tation et remise, ou à faire raison aux sieur et
demoiselles Capelle, ou aux héritiers de la dame
Nouveau, du montant des titres qu’il ne représentera pas. »
Le dispositif est d’ailleurs muet sur les bestiaux et
outils aratoires, que les motifs attribuaient cependant
aux héritiers de la dame Nouveau.
Ceux-ci ont interjeté appel de ce jugement, par
exploits des 12 féyrier 1 8 1 8 , et 9 mars suivant.
Ils ont demandé l ’adjudication des conclusions qu ’ils
avaient prises en première instance.
L e sieur Nouveau a interjeté lu i-m êm e un appel
in c id e n t, dont les griefs sont développés dans son
mémoire imprimé.
L ’appel principal a pour but de faire dire que tout
le mobilier qui s’est trouvé dans le château de la
Rouquette et dans les domaines dépendant de la suc
cession Jalin q u es, sera attribué aux héritiers de la
dame Nouveau , sous l ’exception seulement des objets
que le sieur Nouveau a lui-même achetés.
Il tend aussi à faire exprimer que les bestiaux et
les ustensiles aratoires seront considérés comme faisant
partie du mobilier.
Par son appel incident, le sieur Nouveau a demandé :
i° Que les bestiaux fussent déclarés une dépendance
des immeubles donnés au sieur Nouveau , dans son
contrat de mariage du 14 frimaire an 3 .
, 20 Que le sieur Nouveau fut affranchi de l ’obligation
à laquelle il s’élait soumis par l’inventaire de 18 1 5 .
�( 11 )
L ’examen des deux
appels présente trop peu de
difficultés, pour exiger de longues réflexions.
S I er.
A P P E L P R IN C IP A L .
Quel est le mobilier que doit remettre le S r Nouveau >
E n épousant la veuve C ap elle, le sieur Nouveau
est venu habiter dans le château de la Rouquette,
dont celle-ci était en possession.
»
Ce château était garni de mobilier.
Les domaines qui en dépendaient, et les autres
domaines dont jouissait la veuve Capelle , étaient
aussi garnis de meubles, d’instrumens d’agriculture,
et de bestiaux.
L a consistance des divers objets q u i , par le second
mariage de la veuve, passèrent en la possession du
sieur Nouveau, pourrait être en grande partie déter
minée par l ’inventaire du
29 pluviôse an 2 , ou
17 février 1794*
Mais il se pourrait aussi que, dans l ’intervalle delà date
de cet inventaire à celle du second m ariage, d’autres
objets mobiliers eussent été placés par la dame Capelle
dans ses domaines.
r
O r, le second mariage est seulement du 14 frimaire
an 3 j et le sieur Nouveau ne prit alors aucune précau
tion pour faire constater ce qui lui était remis.
Dans de telles circonstances, 011 doit lui appliquer
une règle d’équité et de justice, qui est élémentaire
en droit, savoir : (jue tout le mobilier q u i , au' décès
�de la clame Nouveau, s’est trouvé dans les bâtimens
qui lui appartenaient, est présumé lui avoir aussi
appartenu, et doit être compris dans la masse de sa
succession.
Le principe est enseigné par M. Chabrol, sur l ’art. 4
du chapitre 12 de la coutume d ’Auvergne (tome i er,
page a 5 3 ). L ’auteur l’applique non-seulement aux
bestiaux, mais aussi au mobilier ordinaire.
1
« S i , la femme étant héritière, dit-il, le mari avait
« été demeurer dans sa maison, qu’il aurait trouvée
« meublée, le fonds de ce mobilier serait réputé
« appartenir à la femme , et le m a ri ne p o u rra it
« re tire r que les m eu b les q u ’il p ro u v e ra it avoir
« apportés ou acquis . »
M. Chabrol atteste sur ce point la jurisprudence
de la sénéchaussé d’Auvergne. Celle de la Cour y a
toujours été conforme, lorsque l’occasion s’est présentée.
Cependant les premiers juges n’ont condamné le
sieur N ou veau q u ’à la restitution des meubles meublans 3 compris dans l ’inventaire de 1794*
Ce n’est sans doute que par inattention, qu’ils n’ont
pas généralisé la disposition, en condamnant le mari
à rendre non-seulement les meubles meublans existant
en 17 9 4 , mais aussi tous les autres objets mobiliers
alors existant y de quelque nature qu’ils fussent5 mais
encore tout le mobilier qui s’est trouvé dans les bâti
mens, lors du décès de la femme, sous la seule excep
tion de ceux que le sieur Nouveau prouverait avoir
acquis pendant le mariage.
. Cette omission doit être réparée par la Cour.
�( i3 )
On conçoit que les observations que l ’on vient de
faire s’ appliquent aux bestiaux et aux outils aratoires,
sur lesquels le dispositif du jugement est muet.
Ce silence n’est sans doute que l ’eifet de l ’oubli j
car les motifs du jugement déclarent que les bestiaux
et les outils aratoires doivent appartenir aux héritiers
de la dame Nouveau. Aussi le sieur Nouveau a-t-il
considéré ce point comme jugé, puisqu’il en a fait un
des objets de son appel incident.
:
Cependant il est bon que l ’arrêt ajoute au jugement
une disposition formelle, qui puisse prévenir des
difficultés ultérieures.
Les sieurs et dames de Montlogis se borneront à ces
courtes observations, pour justifier leur appel prin
cipal.
L ’appel incident est facile à repousser.
§ II.
A P P E L IN C ID E N T .
Cet appel est fondé sur deux griefs :
L ’un relatif aux bestiaux et aux outils aratoires;
L ’autre ayant trait aux titres, papiers et créances
que le sieur Nouveau avait offert de représenter.
Pour justifier le premier grief, le sieur Nouveau fait
remarquer (pages 100 et 10 1 de son mémoire)
Que son épouse lui donna, par leur contrat de
mariage de frimaire an 3 , « les domaines et enclos de
« la Rouquette et dépendances........... •
« Que le mot domaine, employé dans sa significa» tion commune , ne saurait permettre même k la
�( *4 )
« pensée de séparer les bestiaux du labour des terres
« labourables-,
« Que le mot dépendances ne pouvait s’appliquer
« qu ’aux bestiaux ;
« Que la dame Nouveau l ’avait reçu de sa sœ ur,
« qu ’elle l ’a livré de même au sieur Nouveau. »
Ces diverses raisons sont peu solides.
On pourrait même se dispenser d’y répondre •, car le
sieur Nouveau prend soin de se réfuter lui-même, en
convenant qu ’autrefois , avant le Code c i v i l, on ne
connaissait pas les immeubles p a r destination.
C om m en t donc alors des objets mobiliers au raien t-
ils pu- être considérés comme une dépendance d’un
immeuble ?
Si les bestiaux, les ustensiles aratoires, sont aujour
d’ hui réputés dépendre des immeubles, c’est unique
ment parce que le Code civil (article 52 4) les a déclarés
im m eubles p a r d estin a tio n .
Auparavant , ils n’en dépendaient pas davantage
que les meubles meublans ne dépendaient du château
de la Rouquettej observation consignée dans l’un des
motifs du jugement, et à laquelle le sieur Nouveau a
cru superflu de répondre.
On lui a fait aussi remarquer que le sieur Jalinques,
premier mari de la dame M u râ t, en laissant à la
dame de Gironde la jouissance du domaine d ’AyrollesY ieilles, léguée à celle-ci par le père Jalinques, l ’avait
privée des cheptels et des ustensiles aratoires, parce
q u ils n avaient pas été nommément spécifiés dans le
�(•5 )
legs. Cet exemple de famille n’a pas excité l'attention
du sieur Nouveau.
Mais s’il le croit nécessaire, qu ’il consulte tous les
auteurs anciens, et tous les recueils de la jurisprudence
antérieure au Code civil $ il y verra qu’autrefois on ne
considérait jamais comme donnés, ni même comme
vendus avec un corps de domaine, les bestiaux et les
instrumens d’agriculture qui y avaient été p l a c é s à
moins qu’il ne fût expressément déclaré dans l ’acte
qu’ ils étaient donnés ou vendus (i).
L a Cour a jugé la question en thèse, par un arrêt
du 22 janvier 1 8 1 9 , rendu pour la famille Veyni. Le
père du marquis de Veyni l ’avait institué, par testa
ment du 9 août 1767 , héritier universel de tous ses
biens de droit écrit, et légataire du quart des biens
de coutume. L e testateur était domicilié à C lerm on t,
pays de droit écrit. L a Cour lui a attribué les bestiaux
qui servaient a la culture de plusieurs domaines situés
dans le territoire des coutumes d’Auvergne et de
Bourbonnais.
« L a Cour a considéré que par leur nature les
« bestiaux sont meubles \ que l’esprit général des
« coutumes les considérait comme meubles ; qu ’à la
«< vérité un petit nombre de coutumes les regardaient
« comme immeubles par destination, mais qu ’on ne
(1)
On peut consulter notamment M azuer, au titre des Successions;
Latliaum assière, sur la coutume de B erry , titre 4 , page 10 6 ; A u r o u x ,
sur l ’article a 85 de la coutume du Bourbonnais ; M e r l i n , au mot
b e stiau x, u° 4»
^
*
�( >G )
trouve point une disposition de ce genre dans les
coutumes d’Auvergne et de Bourbonnais; que par
conséquent, sous l ’empire de ces coutumes , les
bestiaux qui garnissaient les domaines et servaient à
la culture, conservaient leur qualité de meubles;
que cette espèce de biens, en quelque lieu qu ’ils
fussent situés^ était régie par la loi du domicile du
défunt ; que' le marquis de Yeyni père était domi
cilié dans un pays régi par le droir écrit; que dèslors les bestiaux, même existant sous les coutumes
d ’Auvergne et de Bourbonnais, appartiennent exclu
sivement au marquis de Y e y n i, héritier universel*
du mobilier de son p è re ; que l ’on ne peut invoquer
la disposition du Code civil , qui considère ces
bestiaux.comme immeubles par destination, parce
que ce serait donuer à cette disposition un effet
rétroactif. » .
-,
Ainsi la Cour a cru qu’ il, lui était permis de
S ép a rer las b e stia u x d u la b o u r des terres la b o u r a b le s ,
et de ne pas regarder les b e stia u x co m m e une d é p e n
d a n c e d e s d om ain es.
Il est à croire que la Cour se donnera encore une
semblable permission.
Les dépendances d’un corps immobilier ne peuvent
être que des objets de même nature , c’est-à-dire ,
immobiliers comme la chose principale; par exemple,
des héritages détachés qui ont été réunis au domaine.
L e sieur Nouveau’ a présenté largement cette idée
devant les premiers ju ges; il s’est fait attribuer,
comme d é p e n d a n c e s d u d o m a in e et d e l ’e n clo s d e la
�(
*7
)
des héritages qui étaient attachés à la ré
serve du propriétaire, et dont la donation ne parlait pas.
L a dame Nouveau avait re çu , dit-on , le domaine
R o u q u ette,
garni de bestiaux ?
Mais on ne fait pas attention que sa sœur lu i‘ avait
donné non-seulement les biens immeubles, mais aussi
tous les biens meubles, sous quelques réserves qui ne
s’appliquaient pas aux bestiaux ?
Qu’y a-t-il de semblable dans le don fait au sieur
Nouveau? L a comparaison n’est pas heureuse.
C ’est trop sans doute s’arrêter à l’examen d’un grief
futile.
. !
Passons au second chef de l’appel incident.
On se rappelle que, lors de l ’inventaire du 2 octobre'
i 8 i 5 , au moment où l ’on allait faire la description
des titres de créances et des papiers qui se trouvaient
dans la maison où était décédée la dame Nouveau, le
sieur Nouveau, pour éviter cette m esure, offrit de
f a i r e la représentation d e tous les titres d e créa n ces
et p a p ie rs én on cés au p r e m ie r in ven taire , f a i t
au
d é c è s d u sie u r C a p e lle ; d e ju s t ifie r d e l ’e m p lo i des
créa n ce s p a r lu i levées et p e rç u e s 3
s e n t e r
t o u s
l e s
a u t r e s
t i t r e s
e t
e t
d e
r e p r é
p a p i e r s
EN
n a t u r e .
Cette offre formelle empêcha le second inventaire.
Aujourd’ hui qu’ il a obtenu l ’avantage qu’il se pro
posait, le sieur Nouveau voudrait éluder l’exécution
de son offre.
Les pretextes ne lui ont m anqué, ni en première
instance, ni en cause d’appel.
3
�Il (lisait, devant les premiers ‘ juges, que l ’offre
n’avait été faite qu ’aux demoiselles de Montlogis; que,
si le sieur Capelle avait assisté à l ’inventaire, c’était
seulement en qualité de procureur fondé; que, les
demoiselles de Montlogis ayant déclaré être sans intérêt
dans la contestation ,i l ’offre devait disparaître, parce
qu’elles seules et non le sieur Capelle pouvaient exiger
qu ’elle fut remplie.
Il ajoutait que la veuve Capelle avait reçu beau
coup de créances pendant son veuvage , en avouant
cependant qu’il n’avait pas encore découvert ce qui
lui avait été payé (i). '
Il reconnaissait néanmoins avoir touché lni-même,
savoir, en assignats, une somme de 24,898 fr. 90 c .,
et, en numéraire, une somme de 2 2,39 4 fr. (2).
L a première objection est futile; car, en supposant
que les sieur et demoiselles de Montlogis eussent cédé
leurs droits au sieur C apelle, celui-ci devait être au
torisé à exercer toutes les actions des cédans. Mais les
demoiselles de Montlogis conclurent elles-mêmes à*
l’exécution de l ’offre : le prétexte dut alors disparaître.
Aujourd’hui le gieur Nouveau se réduit à une hy
pothèse.
S ’il prouve, dit-il, par des quittances, que la dame
Nouveau avait reçu, avant son convoi, certaines des
créances, il aura rempli son obligation.
( 1 ) V o i r , dans le dossier d u sieur N ou veau , une écriture signifiée
le aG avril 1 8 1 7 .
(2) V oir la môme écriture.
,
�(
)
L e sieur Nouveau, au reste, s’embarrasse peu de
prouver- Il ne rapporte aucune quittance. Son but est
donc d’obtenir la permission de faire des preuves quand
bon lui semblera, c’est-à-dire d’embarrasser de diffi
cultés futures la liquidation et les comptes.
N ’est-ce pas se jouer de la justice, que de demander
à rétracter ou à restreindre une offre solennelle, une
offre acceptée, sans chercher même à en démontrer
l ’erreur ?
M ais, produisit-il des quittances de son épouse, le
sieur Nouveau ne serait pas affranchi de l ’obligation
qu ’il a contractée par son offre ; car la dame veuve
Capelle n’était pas une dissipatrice-, et si elle a touché
quelques sommes pendant son court veuvage, elle a
dù les remetti’e au sieur Nouveau ; celui-ci en aurait
donc profité, et par conséquent il en doit compte.
Ces faits auraient été éclaircis lors de l ’inventaire
de 1 8 1 5 , si le sieur Nouveau eût laissé faire la des
cription des titres et des papiers. On eut trouvé peutêtre, ou des notes de la main de la dame Nouveau,
ou quelque état sous seing privé, constatant ce que
le sieur Nouveau avait reçu d’elle au moment du
convoi, et remplaçant l ’inventaire qu ’aurait dù faire
alors le sieur Nouveau. Celui-ci avait intérêt que rien
ne fût connu. Cet intérêt le détermina à offrir la
représentation de tous les papiers et des titres de
créances énoncés dans l’ inventaire de 179/j , ou à
rendre compte de leur valeur. L ’offre doit être rem
plie intégralement, parce que les choses ne sont plus
dans le même état où elles étaient en 1 8 1 5 ; parce
�( 50 )
q u ’il serait impossible aujourd’hui de rien vérifier, et
parce qu’il serait injuste d’abandonner les héritiers
Montlogis à la discrétion du sieur Nouveau ou de ses
représentans.
L e second grief est donc aussi illusoire que le
premier.
E t ne doit-on pas s’étonner de cet appel incident?
Ne sem blait-il pas que les époux Valentin avaient
^ obtenu auprès du tribunal de première instance un
succès assez brillant pour en être satisfaits? Ne devaitil pas leur suffire d’avoir fait adopter une interpré
tation rigoureuse et forcée, et d’avoir été déclarés ,
contre l ’ intention de la dame de M u r â t , propriétaires
de biens considérables, que la donatrice avait destinés
aux héritiers Capelle?
L ’appel incident, hasardé peut-être pour faire
diversion à l’objet important de la cause, sera facile
ment apprécié par la C o u r; et si, dans sa sagesse ,
la C o u r pensait q u ’ il y a substitution, au moins
n’ hésiterait-elle pas à repousser les griefs chimériques
de la dame V alentin, et à rectifier ou à expliquer le
jugement, en la condamnant à restituer les bestiaux,
les ustensiles aratoires, et en général tout le mobilier
compris, soit dans l'inventaire de 1 7 9 4 , soit dans
celui de 1 8 1 5 .
Me M A R I E , Licencié-Avoué.
RIOM , IM PR IM E R IE DE SALLES , PRÈS LE PALAIS DE JU S T IC E .
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Langheac de Montlogis, Marie-Sophie. 1819?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marie
Subject
The topic of the resource
donations
contrats de mariage
fideicommis
pensions viagères
renonciation à succession
assignats
élevage bovins
immeubles
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Marie-Sophie Langheac de Montlogis, religieuse, habitante de la ville d'Aurillac ; Marie-Judith Langhéac, veuve de sieur Piales ; Marie-Honorée Langhéac-Lignac, toutes deux propriétaires, habitantes du lieu et commune de Viviers ; sieur Brassat-Murat, docteur en médecine, et autres, appelans ; Contre sieur Félix Valentin, propriétaire, et la dame Sophie-Marie Nouveau, son épouse, de lui autorisée, héritière, sous bénéfice d'inventaire, de sieur Joseph-Aymard Nouveau, son oncle ; lesdits mariés Valentin habitans du lieu et commune de Calvinet, intimés ; En présence de sieur Pierre-Antoine Capelle-Peuch-Jean, et des demoiselles Sophie et Marie Capelle, frère et sœurs, habitans de la même ville d'Aurillac, héritiers de maître Antoine Capelle, leur père, aussi appelans.
Table Godemel : Bestiaux : Pour l’ancien législateur, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi, ils ne faisaient point partie de la donation du domaine, s’il n’y avait clause expresse et spéciale. Instruments aratoires : sous l’ancienne législation, les bestiaux attachés à la culture et les instruments aratoires n’étaient pas nécessairement considérés comme immeubles par destination, et accessoires du domaine. – ainsi ils ne faisaient pas partie de la donation du domaine, s’il n’y avait point de clause expresse et spéciale
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1819
1786-1819
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2503
BCU_Factums_G2504
BCU_Factums_G2505
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53492/BCU_Factums_G2506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Calvinet (15027)
Cassaniouze (15029)
La Rouquette (château de)
Agrovieille (domaine d')
Saint-Michel (domaine de)
Mallaret (domaine de)
Ladinhac (15089)
Vézac (15255)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
contrats de mariage
donations
élevage bovins
fideicommis
immeubles
pensions viagères
renonciation à succession
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53741/BCU_Factums_M0242.pdf
519907059d3ed7420d2a5a3744ec831f
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Text
• P OUR
L e sieur R O B E R T
d e
L E I G E , appelant;
C ONTRÉ
F r a n ç o i s A S T O R G et M a r i e V I G I E R , sa fem m e ,
~
intimés ;
ET
'Br i g i t t e
CONTRE
R O T Q U IE R
L A C R O IX ,
son
et
J
e a n
m ari ,
-B a p t i s
t e
in tim é s.
« . L o r s q u e les parties ont, stipulé que les fruits (d e
« l ’i m m e u b l e d o n n é à a n t i c h èse) , se c o m p e n se r o n t
«• av ec les . i n t é r ê t s , ou t o t a l e m e n t , ou j u s q u ’à due
« c o n c u r r e n c e , cette convention s 'e x ê c u le , c o m m e toute
« a utre qui n e s t point prohibée par les~Lois. ( C o d .
« civ. art. 2 0 8 9 .
A
�C
2 )
C e principe de la légïslalion actuelle, conform e au x
lois romaines , adopté par les auteurs du droit qui se
sont le plus élevés contre l ’usure , décide l a contesta
tion sur laquelle la C ou r aura à statuer. U n créancier
a joui pendant dix ans avant 1 7 1 4 , un très-petit pré
p o u r l ’in térêt légitim e de sa créance. L e débiteur r e n
trant dans son héritage à celte é p o q u e , a continué le
paiem en t de l’intérêt pendant quarante an s, et a retiré
vingt-trois q u itta n ce s, parmi lesquelles sont plusieurs
arrêtés de com pte. Q uand on lui a dem andé le capital,
il a refusé de p a y e r , sous prétexte de l ’ancienne anlich rèse, et a dem andé une vérification préalable pour
savoir si , lors de l ’antichrèse et avant m il sept cent
q u a to r z e , les jouissances de son pré avaient été ou non
d ’une valeur supérieure à l ’intérêt échu pendant leur
durée. V o ilà en précis tout l’objet de la prétention des
.Aslorg ; et si elle a été accueillie par les premiers jug es,
c ’est que la cause a été deux fois jugée par défaut contre
l ’appelant.
L a créance cédée a passé en plusieurs m a in s, et la
résistance du débiteur a occasionné une foule de re
cours et de procédures, qui ont occupé les tribunaux
depuis 1764* U n e partie de ces demandes en recours
est encore pendante devant les premiers juges, et il
n ’y a principalem ent eu litige actuel que l ’effet de l ’anlliicrèse. L ’appelant rendra donc com pte à la C our de
la convention qui a établi celle anliclirèse, et des actes
qui l’ont suivie.
�C
F A IT S
ET
3 )
PR O CE D U R E S.
. Guillaum e Soubie était créancier de G éraud Sales et
sa fem m e d’ une som m e de 600 fr. en cap ital, p r o v e
nant d’ une d o t, et produisant par conséquent intérêt
de sa nature. L es parties traitèrent sur cette créance
le i p a c û t i 6 8 3 , et elle fut stipulée payable en quatre
term eségaux a vec intérêt. I l fut co n v en u q u e , pour cet
in té rê t, ledit Soubie pourrait jouir du pré de L a v a l ;
mais cette convention n’ eut pas son exécution jusques
à un autre traité de 1703. Ainsi il est inutile de fixei*.
l ’alention de la Cour sur ce prem ier acte.
G uillaum e Soubie maria Pierre Soubie , son fils , en
1689 , et lui donna ladite créance pour légitim e. Celuici la céda au sieur D o u lé , curé de N oailles, par acte
du 10 septem bre 1 6 9 5 ,,et ce dernier obtint sentence
contre les débiteurs, le
5 octobre suivant. C ette sen-
tence.encore n’adjugeait q u 'u n e 1h ypo th èq ue indéfinie.
Les- héritiers du curé de Noailles cédèrent air sieur
E m e r y - R o b e r t, leur créance de 600 fr. et le droit de
jouir du pré L a v a l , par acte du 1 5 juillet 1703.
P ar ce m êm e acte on voit que M arie Sales, fem m e
Sartiel, d é b itric e , intervint a ve c ledit Sartiel r son mari,
pour s’obliger en outre de p a ye r audit sieur Robert une
somme de 194 liv. i
5 sous, provenant d arrérages de
ren tes, adjugés par trois sentences. L ’acte term ine par
la clause suivante,, q u’il faut transcrire littéra lem en t,
A 3"
�( 4 )
parce qne c ’est contre son exécu tio n que les sieurs
A storg veulent revenir (i).
.
F a u te de p a iem en t, Ledit Robert pourra jo u ir d u
su sd it pré de L a v a i, p o u r l e l é g i t i m e i n t é r ê t d e s
d i t e s sommes, tant et s i Longuement que Lesdits maries
seront en demeure d e r e n d r e i c e l l e s , ce qu Us pour
ront fa ir e qua nd bon Leur semblera , et Ju sq u es à ce ,
se réserve ledit Robert L'hypothéqué précitée et privilège1
de ses hypothéqués, jé in s i a été convenu et promis tenir
p ar lesdites parties sous Cobligation , etc.
A près cet acte le sieur E m e r y - R o b e r t se mit en
possession du pré L a v a l , et en jouit pendant les années
170 4 et suivan tes, jusques en 1 7 1 4 .
Alors M arie Sales était rem ariée à Pierre V i g i e r ,
et ce n o u vel ép ou x s’empara du p r é , sans autre forme.
L e sieur R obert aurait pu sans doule refuser la remise
de son gage jusqu’à ce q u ’il fût p a y é : mais il était fort
aise d ’en être débarrassé et d ’avoir le droit de dem an
der son revenu annuel 5 en conséquence il assigna les
dits P ierre V ig ier et M arie Sales par exploit du 18 jan
v ie r 1 7 1 6 .
11 exposa « que ladite Sales ne saurait ignorer être sa
« débitrice i.° de 600 fr.; 2 ° de 194 fr. i 5 s . pour les
«• causes portées par acte du i
5 juillet 17 0 8 ; que pour
( 1 ) Il y a une légère différence entre l ’expédition qu’en rap
portent les A s to rg , cote i . r e , et la copie signifiée cote
cette différence ne change rien au sens db la convention.
5 5 mais
�'
(' 5 j
0
« l ’intérêt desdites sommes elle n’a y e consenti engage« m ent des fruits d u 'p r é appelé de L a v a l, duquel led.
« inslant a joui paisiblem ent jusqu’au trouble».
- E u conséquence il conclut à ce que lesdiis mariés
V igier lussent solidairement condamnés à lui p a ye r ^la
«■somme de 39 fr. r i p . 9 d; , faisaiit'le reven u desdites
« sommes depuis le 'i 4 -juillet i'7 1 4 ¡"àu Lieu de La nori
« jo u is s a n c e 'd u d it p r é , avec condam nation de tous
«• dépens , dom mages et intérêts ».
I l prit d ’autres conclusions étrangères h l ’antichrèse,
et tendanfesvau paiem ent des arrérages d’ une rent'è en
g r a i n , ‘q u ’il évaluait pour le passé à 70 liv. 2 s. 6 d.1
C e lle dem ande fut accueillie par une sentence non
attaquée du 26 fé v rie r 1 7 1 6 .
P e u de tems après cette sen ten ce, le sieur E m e r y R ob ert céda sa‘ créance à Joseph* R o lq u ie r , a v e c le
droit de jouir du pré L a v a l , ou de se faire p ayer de
l ’intérêt de ladite créance.
-
C et intérêt fut p a yé par V ig ie r , et ses premières
quittances p ro u ven t, co m m e'les postérieures,■q u ’il 11e
s’agissait plus du passé:
! '!
-
L a prem ière quittan ce, du 16 mai 1 7 1 7 , est dé 8 0 fr.
pour Les- non jo u issa n ces d u pré de L a v a l engagé, et ce
pour Les• années i r]ï'b et 1 7 1 6 . ( ‘C o m m e ces 8d Ir. ex c é
daient de quelques sous l’intérêt légal, lé'Siëûr R o tq u ièr
ajouta h sa signature q u’il les imputait sur les1 70 francs
ci-dessus).
P a r la seconde,-du
:’ 1 ' ! ;
;
3 o juillet 1 7 2 4 , l é ;sieur R o tq u ier
reconnaît avoir reçu L’intérêt w Lui d û .dei la'sbmxHe'de
�.
794 liv. i
.
( 6 ) .
.
5 s. en, lieu*des, non jouissances du pré L a v a i
pour les armées, r 7,i'7 et suivantes , ju s q u e s et com pris
La présente, échu au 1.4; d u présentVi
'
M a rie Sales d é c é d a , laissant pour héritiers testamen
taires P ierre Vigier* son m a r i, et Françoise Sales, sa
sœur. Ils n e.fu iien tjp a sj^ a cts à dp a y e r , et le sieur R o tquier fit /îes'ppi}rsui;les en: se^servanfcdu nom du sieur,
Emery-ï^oberjt ,■son, cédant. Il assigna- par .exploit du.
1 1 mars 173 0 lesdits,Vigier et .Sales, «.pour voir décla«• rer c.pntre eux 'exécutoire la sentence de 1 7 1 6 .^ et
« p a y e r i..° 600 liv. d'une part; 2 °' 1 9 4 liv. i 5 s. d ’a u « tre 3.° 70 liv. 2. s. 6,d. d ’autre. 5 4.°-les intérêts adjugés
« par ladite sentence.» et ceu x échus depuis et>ceux
«■qui écherront à l’a v en ir, sa u f à tenir à com pte ceux
« que les assignés juslineront avoir/payés », ( parce que
l'intérêt des 70 liv. 2, s. 6,dfi était restér-en suspens).
Cette,,demande fut reprise err 173,5,; M arie.Sartier,
fille du prem ier lit de Marie,Sales et fem m e de; Joseph
y i g i e r , fu t mise en, cause $ et le 18 jan vier 1,786, il
intervint sentence açljudicalive,;et encore non atta q u ée,
laquelle condam ne au paiement desdits capitaux, efseu-r
le m e n t'à ;l’intérêt échu depuis Le i 5 ju ille t 1 7 1 4 .
C ette sentence est suivie de saisie exécution en 178 7.
A u lieu de contes.ler, lesfdébiteur^ présentent,un gar
dien vpjoptaire. Ils font plus, ils paient.
lie s A storg produisent six quit tances cJonnées,eii; 1 7 3 7 ,
1 7 3 8 , 1 7 4 0 , 1 7 4 1 et i744> à compte des in térêts.et
frai£. Elles sont sur Ja m êm e feujlle.
;
,A u bas d.Q cette m êm e feuille pp iVoit que les parties
�•
.
( 7 )
ont arrêté com pte à 88 liv. 16 s., y compris un billet
de 1 5 liv. 5 sur laquelle somme les Y ig ie r paient
53 'liv,’
l ë d i t j ô u r i i avril 1 7 4 6 ’. L a quittance est conçue en
ces termes : de compte arrêté entre nous de tous Les'reve
nus échus ju s q u ’ au 16 janvier 1 7 4 5 , de La rente qui
m ’est ‘due par Les dénommés de l ’autre part (P ierre et
Joseph V i g i e r ) , IL s’ est trouvé m ’ être d u La somme de
etc. , sans p r é ju d ice , etc.
■
'
_
Il paraît que le 28 août 1 7 4 5 , Jean et Josepli R o t •quier, père et fils, débileurs envers A n to in e R olq u ier
d ’une lég itim e , lui cédèrent-ladite créance avec pro
messe de garantir et faire valoir.
L e s V igie r agirent avec ce nouveau créancier com m e
avec les précédens • ils produisent huit quittances don
nées par l u i , à compte des intérêts pendant les années
1 7 4 7 et suivan tes, jusques-à 175 5.
Mais on vint h com pte le 22 n ovem bre *1756, non
seulement des intérêts éch u s, mais encore des condam
nations d’une autre sentence étrangère au sieur R obert }
tout fut réglé jusqu’au jo u r , à 241 liv. 1.2s. , ’a près avoir
d éd u it Les d ixièm es et vingtièm es, esl-ildit, depuis que
led it R o lq u ier avait droit des sieurs L ab ian clie e t'R o tq u ie r, sans p réjudice.de La somme principale de 864 Liv.
11 s., et des intérêts encourus depuis Le 28 aouldernier.
C e règlem ent fut tellem ent définitif que les sept
■quittances postérieures règlent positiveinent l ’intérêt
tinnuel à une som m e fixe, tantôt de
38 li v ., tantôt de
36 liv. 10 s.pour L’intérêt échu Le... ; vingtièmes déduits*
‘Ces s t p t : quittances 'ont toutes la imêiïie f o r m u l é ,
i
�.
.
depuis 1 7 5 7 jusques, au
^ 3 jan vier 1 7 6 4 , date de la
dernière. ■
'
.
'
8 }
.
.. •
•
;; x f; )
Il /est essentiel d ’observer à la C our que le ,co m p te
de 175 6 fut fait a vec M ich el Vigier.
:
•
,
A n to in e R ofq u ier désira êIre p a yé de son cap ital;
et par exploit du 4 juillet 1 7 6 4 , il forma dem ande en
la justice du D oign o n contre ledit M ich el V igier fils,
et héritier de Joseph, et de M arié Sartier, en e x é c u torialité de la sentence du 18 jan vier 17 3 6 , et en
paiem en t des som m esde 600 liv. d ’une p art, i9 4 l i v . i
5 s.
d ’a u tre , et 70 liv. d 'a u tre , portées par ladite sentence.
L e d it MicheL V igier dit en défenses << que sans a p ff prouver les sentences de 1 7 1 6 et 1736 , contre les
* quelles il se réservait de se p o u r v o ir , il devait lui
» être fait com pte des jouissances du pré de L aval qui
«■fut engagé par contrat du i
5 juillet 1 7 0 3 , pendant
« leur durée , pour être compensées pendant ledit
«• tems avec les intérêts des sommes qui en étaient sus
ceptibles, telles que celle de 600 liv., et subsidiaire« m ent sur le principal, pour être ensuite par lui faire
« des offres, etc..*.
-,
‘
,
C e langage évasif d ’un débiteur qui voulait éloigner
sa libération , s’est changé en un systèm e sérieux sur
leq uel on plaide depuis 1764. ,,
,
O n se disputa de cette manière assez long-tem s sous
le n om du sieur- E m e r y - R o b e r t . O n opposa à V igier
les arrêtés de com pte et les . quittances. Il résista le
plus q u ’il put à les m o n tr e r , en disant q u ’il n ’y était
pas ob ligé, q u’il n ’y avait aucuns arrêtés de c o m p t e ,
et
■
�(
9 )
'
et que s’il avait renoncé à son droit par quelque acte
qui réglât le passé, c'était an créancier à le produire.
Enfin un e sentence ordonna que V igier exhiberait
ses quittances, et en ferait le dépôt au greffe.
Quand les sieurs R o lq u ier
eurent assez plaidé à
l ’inscu du sieur R o b e r t , ils jugèrent à propos d’inter
v en ir dans leur propre procédure , et de conclure
contre le sieur R o b ert à ce q u ’il fût tenu de les garan
tir. C ette intervention eut lieu de la part de Joseph
R o f q u i e r , cédataire de 1745.
L e sieur R o b ert-D eleig e, successeur du sieur RobertL a b la n c h e , prem ier créancier, apprenant pour la p re
m ière fois q u’il existait sous son nom un procès re la lif
à u n e c r é a n c e du sieur E m e r y - R o b e r t - L a b k i n c h e ,
conçut un soupçon bien fo n d é , sur une m an œ u vre
dont il aurait dû être inform é plutôt. Il se défendit
d’abord avec quelque h um eur, parce q u ’on avait abusé
de son nom.
11 désavoua-toute participation à la pro
cédure déjà f a i t e , dit que si on s’était servi d’an
ciennes sentences oblenues par le sieur L a b la n ch e ,
elles lui appartenaient; et soutint dans tous les cas que
toute action était prescrite.
M ais quand on lui exhiba la cession souscrite par
le sieur R o b e r t - L a b la n c h e , il n’hésila pas en reco n
naître l’écriture.
N
U ne sentence du 10 juin 1766 appointa les parties
en droit, joignit la demande en recours du .sieur R otq u i e r à l a dem ande principale, et en m ê riie !teins réiB
�'
( 10 )
léra contre V igier les dispositions de celle de 17 6 4 qui
avait ordonné le dépôt au greffe de ses quittances.
Enfin-le procès fut jugé par forclusion contre ledit
V ig ier et contre le sieur R o b e r t, le 9 mai 17 6 7 . L ’ es
timation des jouissances du pré de L a v a l fut o rd o n n ée,
sous la déduction des charges foncières depuis le 1 5 juillet
17 0 8 , jusques et comprise l ’année 1 7 1 4 .
■ L e sieur R o b e rt-D e le ig e interjeta appel devant la
sénéchaussée d ’A urillac et in tim a , co m m e il le d e v a it,
les deu x parties de la c a u se ; c ’e s t - à - d i r e , les sieurs
R o t q u ie r et Vigier.
C e t appel fut suspendu pendant vingt ans. Il fut
repris en 178 7 par M a rie V ig ie r , fille de M i c h e l , et
par Astorg son mari. Elle interjeta m êm e appel inci
dent, de la sentence de 1 7 6 7 , fondé sur ce que les
ch arg es, disait-elle, n ’avaient pas dû être déduites de
l ’estimation ordonnée.
L e procès fut encore jugé à A u rilla c, co m m e il l ’a
vait été en la justice du D o ig t io n , c ’e s t - à - d i r e , par
forclusion, et toutes les conclusions des V ig ie r et Astorg
adoptées le i
3 août 1790. L a sentence du D oignon fut
confirm ée en ce q u ’elle ordonnait une estimation des
jouissances du pré L a v a l; elle fut infirmée en ce q u ’elle
ordonnait que les experts déduiraient les charges fon
cières.
L e sieur R o b ert interjeta appel de celte seconde sen
tence au parlement de Paris. L a suppression de cette
cour en déféra la connaissance au tribunal du district
�C ” )
de Mauriac. L à , les héritiers de Joseph R o lq u ie r colludant avec les V igier et Astorg , signifièrent, d it - o n ,
à c e u x - c i q u ’ils acquiesçaient au x sentences de 1 7 6 7
et 1790.
Pendant cette p ro céd u re, les R o lq u ie r entr’eu x en
introduisaient une autre; le sieur M e illia c , petit-fils et
héritier d’ A n toin e R o iq u ie r , cédataire de Pierre et
Joseph en 1 7 4 5 , ne voyan t pas rentrer sa c r é a n c e ,
quoique ces derniers eussent permis de fournir et faire
v a lo ir , assigna leurs héritiers (parties ad verses), pour
le p a y e r eux-m êm es.
C eu x -c i m irent encore le sieur R ob ert en cause, on
ne sait pourquoi. Après une procédure très-embarassée , dont il est fort inutile d’occuper la c o u r, les d é
bats se term inèrent par un jugem en t qui donna un délai
aux R o tq u ie r, par lies ad verses, pour faire finir le procès
actuel, sinon les condam na à p a y e r le sieur M eilliac;'
il fut sursis à faire droit sur les dem andes en recours
et contre recours.
:•
■
D é jà , et avant ce ju g e m e n t, le sieur R o b e r t, pour
n ’être plus harcelé de tant de débats étra n g ers, avait
repris en la cour son appel de 1 7 9 0 , contre les R o t quier et Vigier.
Ces deux adversaires tiennent a u j o u r d ’h u i un la n
gage bien différent.
L es R o lq u ier se prétendent follem ent intimés , et
disent que n ’ayan t pas interjeté appel de la sentence
d’A u rilla c, et ne voulant prendre aucun intérêt dans
la contestation, ils doivent être mis hors de cau se/sau f
B 2
�(
;
à plaider en prèm ière instance sur la dem ande en ga
rantie pendante. T elles sont les conclusions de leur
requête du 8 iherm idor an n , répétées et expliquées
dans une écriture postérieure.
L e s V igier et Astorg se défendent plus sérieusem ent,
et font les plus grands efforts pour prou ver q u ’il y a
lieu de revenir à exam en sur l ’anticlirèse de 1 7 0 3 , et
de confirm er la sentence de 1790.
'
•
M O Y E N S .
L
e
sieur R ob ert a intim é deux parties, et ce q u ’il
y a de bizarre ce sont ceux-là m êm e qui l ’ont appelé
au procès, et ont pris des conclusions contre l u i , qui
veulent q u ’il ait dû les regarder co m m e étrangers à
cette m êm e contestafion.
L e s sieurs R otqu ier et L a cro ix qui ont pris tant de
peine à prouver q u’on aurait dû ne les com pter pour
rien , mais q u ’on esl forcé de com pter pour quelque
ch o se, ne se sont plus souvenus que si le sieur R o b ert
p laid e, c ’est parce que le sieur Joseph R o lq u ier leur
a u te u r , l ’a assigné en g a r a n tie , le .28 octobre 176 5.
Ils ne se sont pas souvenus q u ’il y avait une sen
ten ce rendue le 10 juin 1 7 6 6 , qui joignait ce lte de
m ande à celle soutenue par V ig ie r ; et q u ’ainsi après
un e jo n ctio n , toutes les parties sont parties nécessaires,
tanL q u ’ une seconde sentence n’a pas prononcé de dis
jonction.
�( i3 )
Ils ne se sont pas souvenus que le m êm e R otqu ier
leur a u te u r , était en qualité dans la sentence définitive
du 9 mai 1 7 6 7 ; q u ’il était aussi en qualité sur Cappel
porté à Aurillac ; et aussi en qualité dans la sentence
confirm ative du i
3 août 1790. Ils en auraient conclu
eux-m êm es que celui qui a été partie nécessaire en
prem ière in stan ce, et sur un prem ier a p p e l } est aussi
partie nécessaire jusqu’à la fin du procès.
Q u ’im porte q u ’il ait été fait pendant l ’appel actuel
une procédure addition n elle, où les R o tqu ier ont de
n ou veau appelé le sieur R o b ert en garantie , et que
les premiers juges en soient encore saisis. C ette super
fétation n'est pas un m oyen .
O u l ’objet de celte nouvelle dem ande en gàrarrtie
est le m êm e que celui de 17 6 5 , et alors la cour en
est saisie com m e elle l ’est de toute cette p r o c é d u re :
ou il n ’est pas le m ê m e , et alors les premiers juges
n ’ont retenu q u ’un autre procès.
Mais qui pourrait dire que ces premiers juges ont
dem euré saisis de ce qui était de l ’attribution de la
cour : ils ne le pouvaient pas.
L ’acquiescem ent que les R o tqu ier ont donné en 1792
seulem en t, aux sentences de 176 7 et 1790 , n ’em pêclie
pas que le sieur R obert n’ait pu et dû les appeler en
cause.
,
11 l ’a p u , parce q u ’il avait intérêt d avo ir un ju g e
m ent con venu ; et que quand la cour aura statué sur
la garantie pendan te, les R otquier quelconques ne se
ront pas assez m a l -avisés pour 1 appeler ensuite en
�t
( 14 )
.
^
prem ière in s ta n ce , et conclure h la m ê m e garantie.
Il l ’a d û , parce que le parlem ent de P a ris, et par suite
la c o u r, étaient saisis du procès , et n’ont pas encore
prononcé sur l’effet de cet acquiescem ent.
A u resle le sieur R o b ert est si éloigné d ’élever a u
cunes con testation s, m êm e douteuses , q u ’il déclare
s’en rapporter à la prudence de la co u r, non-seulem ent
sur le renvoi dem andé par les R otqu ier et L a c r o i x ,
mais encore sur le fonds de la garantie e l l e - m ê m e ,
s’il y avait lieu d ’y statuer.
I l im porte peu au sieur R o b e rt d’être livré seul à
repousser la prétention des V ig ie r et Astorg ; elle est
si extraordinaire et mal co n ç u e , q u’il n ’y a véritable
m en t q u ’ un avantage certain à l ’exam in er pour la
com battre.
L e s V ig ie r et A storg ont recueilli beaucoup d’au
torités pour pro u ver que la co n ven tion de 1703 était
usuraire , et que la prescription n ’a pas cou vert cette
préten du e usure.
L e sieur R ob ert n ’a pas m êm e besoin d’in voq uer
la prescription; il lui suffit de rappeler le caractère de
l’antichrèse, pour dém ontrer que , sur-tout dans l ’es
p è c e , elle a été une convention très-com m une et trèslégitim e.
t
■ L ’anticlirèse est définie dans la glose de la loi
3 , au fF
de p ig n orib u s, un gage donné au créa n cie r, pour q u ’il
en compense l ’ usage et les fruits qui en naissent, a vec
l ’intérêt de l’argent q u ’il a prêté. P lg n u s quod sub
�( i5 )
' hoc nomine creditor a ccip it, u t eju s usuin
pro u su ris
sib i com puttt. D ’autres interprêles ont donné une d é
finition plus intelligible e n c o r e , en disant que l ’an tichrèse a lieu quand un im m euble esl donné au créa n
cier , ut p erapiat reí J r u c tu s
in
vicem
usurarum
donec debitor pecuniam solvcit.
C e contrat aussi com m un en F ra n ce avant le systèm e
de L a w , que les contrats de rente Tétaient avant r é
mission des assignats, avait été le sujet de beaucoup
de controverses pour ou contre sa légitim ité.
L e s auteurs les plus scrupuleux sur l'usure, s’accor
daient tous à justifier l ’antichrèse, quand les fruits de
vaient se com penser avec un intérêt lé g itim e , ou dû
de sa nature \ ils n ’y voyaien t de contrat usura ire que
dans le cas où le créancier percevait les fruits d ’ un im
m eub le pour l’intérêt du prêt ordinaire, parce que les
lois défendaient de stipuler l ’intérêt de l ’argent.
D ans le prem ier cas , il y avait encore une autre
distinction à faire , et c e lle - là se puisait dans les lois
romaines.
L e créancier pouvait avoir fait une stipulation évid em
m en t trop avantageuse. L 'im m e u b le pouvait produire
plus que l’intérêt Légal, et alors il était suspect d ’ usure.
M ais voici le tem péram ent que prenaient les lois ellesmêmes.
Si le créancier affermait à un autre l’im m euble im
p ign oré; alors, parce qu'il avait un revenu certa in , il
était clair qu'il y avait usure dans l ’excédant de ce
r e v e n u au -d elà de l'intérêt légal.
�.
( 1 6 }
.
M ais quand le créancier jouissait l u i - m ê m e , la loi
ne vo ya it aucune usure, dans le f a i t , m êm e p r o u v é ,
que les fruits de l'im m eu b le dussent surpasser l ’intérêt
lé g a l, à cause de Yincertitude des récoltes.
_
Ainsi s’exprim ent les lois 14 et 17 ,a u code de usuris.
L es auteurs du droit français confirment plein e
m en t ces principes. L e sieur D eleige rappellera le sen
tim ent de Cujas, et celui du D iction n aire canonique?
pou r m ontrer q u’il a choisi ses autorités parmi les plus
grands ennemis de l ’usure.
• Quce conventio l i c t t a e s t etiam si p l u r i s dom us loca ri soleat quant ejjicia l Legitimarum usurarum ra tio ,
çeL ut f u n d i oppignerati fr u c tu s omnes v i c e u s u r a r u m
creditor percipiat; quœ convenlio propter incertum eçentum fr u ctu u m adm issa est, et propter incertum f r u
m enti pretium. Observât. C u ja c ii in Lib.
3 , -ch. 35 .
L e D ictionnaire canonique au mot a ntic lire se, in
dique cet avis de Cujas , en l ’appliquant m êm e à l’intéi'êt du simple p r ê t, pro credito pig/ioris usus. A la
vérité il ajoute que le droit canon ne s’y conform e pas.
M a is j a j o u t e - t - i l « le droit civil n’a pas usé de la
« m ê m e rigueur. L ’incertitude des fruits qui p eu ven t
« être recueillis-,le risque m êm e que l ’on court jusqu’à
je la p e rcep tio n , d’en être p riv é ; enfin la tranquillité
« q u’acquiert le débiteur, par cet a cc o m m o d em en t, ont
« persuadé que celte convention n ’avait rien d ’illicite.
L e droit français n ’a donc vu q u ’un c o n tr at aléatoire
dans une convention qui présente en eflet des chances
aussi incertaines. C a r , à moins d ’une disposition clio*
q u a n le
�( *7 )
•quanfe entre l’étendue d ’un chqmp et les intérêts d ’ une
c r é a n c e , nul ne pourra assurer que le créancier sera
certain d’obtenir en produit net l ’intérêt qui lui est dû 3
sur-tout pendant plusieurs années consécutives.
S ’il s'agit de vignes , une année d ’humidité ou de
brouillards peut faire perdre un an de culture ; s’il
s’agit d’ nn p r é , un printems de sécheresse peut aussi
ruiner tout espoir de récolte.
>
C ’ est pourquoi un arrêt de 1 7 6 4 , rapporté par Ca-r
-telan, « a jugé que le contrat d’antichrèse devait être
« observé en la cause d’ une fe m m e villageoise qui avait
«
«
«
«
baillé à jouir à son créancier, une vigne à titre d ’ai>
tichrèse , avec cette co n v e n tio n , que le créancier
jo u ira it des fr u it s pour les intérêts , quoique c e lle
fem m e soutînt que les fruits excédaient au double \e
« légitim e intérêt.
L ’incertitude des f r u it s , q u i est
« la raison des lois f u t une des raisons de l ’ arrêt».
Catelan , liv.
5 , ch. I.er ; et Brillon , v.° antichrèse.
O r , Catelan qui était m agistrat, p o u va it, sans se trom
p e r , donner le véritable m o t if des arrêts de sa cour.
Ces ailleurs citent un autre arrêt de 1 6 5 9 , cl u^ or~
donna l’im putalion de l’excéda nt du légitim e intérêt
sur le capital, mais parce que le créancier avait donne
la maison im pignorée , à lô.y,er, et q u ’ainsi le rev en u
étant c o n n u , il n ’y avait plus pour lui d ’incerlilude..
A u r o u x , sur l ’art. 4 2 1 de la c o u t u m e de B o u r b o n
nais , dit q u e l ’antichrèse est un contrat t r è s - l i c i t e ,
q u a nd lés intérêts sont dus a u x créanciers.
L o u e l , q u’il a plu aux A slo rg de citer en leur far
C
�( 18 )
_
v e u r , on ne sait p o u r q u o i, va n te au contraire les
avantages d e l ’an tich rèse, et après avoir dit q ueD urnoulin n ’ admet l ’antichrèse que sous deux conditions , la
i . ere que le débiteur ait toujours le droit de reprendre
l ’im m e u b l e ; l a 2.* que les fruits n’excèden t pas année
co m m un e le quinzièm e du principal, « n éan m oin s, dit
« L o u e t , cet avis n ’a été suivi au pillais pour la r é « duction des antichrèses au denier quinze. C ar le d o
te maine du roi a été vendu au denier douze en an
o- tichrèse; et pou r juger des actions des liom m es se« Ion l ’ utilité p u b l i q u e , l ’antichrèse apporte plus de
« com m odité au débiteur que la rente con stitu ée, et
est plus tolérable. L ’antichrèse est sujette aux cas
« fortuits., g r ê le , g u e r r e ,
t e m p ê t e , f e u : pour telle
« année les fruits sont perdus par la violence des teins.
« S’il y a uberté de fruits, le créancier jouit de cet h e u r;
« si stérilité , il la faut supporter; s’il faut des répara«- lions, cela tom be sur le créancier. L e s débiteurs ont
« cet a v a n ta g e 'q u ’ils ne sont en arrière pour les ur« rérages qui est leur plus grande ruine. L e débiteur
r n ’est grévé de cautions, etc.-» L et. P. N.° 9.
V o ilà l ’auleur que les A storg ont supposé l ’ennem i
des anlichrèses; ils y ont recueilli cà et là plusieurs
arrêts relatifs à des réductions de rentes au taux de la
lo i , et pa r conséquent si dislans de la contestation que
ce serait s’en éloigner soi-m êm e de les réfuter parti
culièrement.
L es Astorg ont encore cité R o u sse a u -L a co m b e, mais
•seulement les principes q u ’il fait valoir au m ot usure.
�( 19 )
Ils ont évité de rappeler ce q u ’il dit au m ot antichrhse ,
pour établir que cet acte n ’est réputé usuraire que quand
il a eu pour objet de faire porter un intérêt illégitime à
un simple prêt d ’argent.
Ils citent un arrêt du 22 juillet 1 7 1 3 , du Journal des
audiences ; mais il s'agissait d’ un créancier qui faisait
porter intérêt à l’intérêt de son a rg en t, et on 11’y lit
pas un seul m ot d’antichrèse.
•
Enfin ils citent D enizart et M . r Chabrol. L e prem ier
11e fait que copier L a c o m b e sur l ’antiçlirèse ; mais M .r
C h a b r o l , bien loin d’être opposé à ce genre de contrat
dont il ne s’occupe qu’en parlant du contrat pignoratif,
fait une-grande différence entre l ’ un et l ’autre. Il regarde
l e contrat p ig n o r a t i f c o m m e u suraire, mais il dit que Les
antichreses sont plus favorables , en ce qu elles ri ont
rien de déguisé n i sim ulé. Il pense au reste que «le point
« décisif est de savoir si le créancier avait un titre qui
« lui assurât l’intérêt de son a rg e n t, ou s’il n’ a fait que
« prêter son argent lors de l ’antichrèse ».
A la v é r ité , car il ne faut rien dissimuler, M .r Chabrol
d’accord en cela avec L a co m b e et quelques autres au
teurs, pense que l ’excédant des fruits d e v a it, en cas
d ’an tich rèse, être im puté sur le ca p ita l; mais dan?
quel cas?
N on seulem ent ce n ’est pas quand les parties se sont
réglées volontairem ent lors de l’acte : encore moins
quand elles se sont réglées ensuite par plusieurs arrêtés
de compte. Mais co m m e dit L a co m b e : « Si en faisant
“ une année com m une de plusieurs, les fruits c x c é C 2
�^
(
20
)
« daient considérablement les intérêts o r d i n a i r e s T e x
te cédant serait im puté chaque année sur le capital ».
C e que dit L a c o m b e est recueilli de G o d e f r o i, q u i,
sur la loi 17 d e u s u r , ne s’occupe encore que du contrat
p ign ora tif, ou du cas où il y a v e n te : mais la G lo s e , sur
la m êm e lo i, s’explique d ’ une m anière à ne pas laisser
de doute sur la question.
. :
M-uUer obligavit m ih i vinecim, et in vicem usurarum
conven.Lt u t reciperem vindemiam. S i p lus emoliirnentL
consecutus sim e x fr u c tib u s quant etiam sit in u sa râ ,
an illu d revocari possit quœritur ? D ic itu r quod*non.
Quta potuerat evenisse quod m lxiLproçenisset, et tamen
necesse haberet stare conventioni, et propter incertum
non erit retractanda.
O p posera-t-on que les Rom ains adm ettaient lé prêt
à in té rê t, et que ce n ’est pas dans leurs lois q u ’il faut
chercher des principes ?
-
•
M a is -l’objection serait de mauvaise fo i, si on l’ap
plique au cas où il s’agil d’ une créance française ^ por
tant intérêt de sa n a tu re ; car alors c ’est précisém ent
co m m e s’il y avait eu stipulation permise.
L e s Romains perm ettaient le prêt ¿1 intérêt com m e
il est permis en F rance depuis le
3 octobre 1 7 8 9 ; mais
bien loin de tolérer l ’usure j qui est très-loin du prêt à
in térêt, on sait que leurs lois étaient sur ce point plus
restrictives que les nôtres.
U n seul exem ple le prouve. Nous souffrons la ruine
d’ un débiteur par une accum ulation criante d’intérêts.
A v e c quelques exploits nous autoriserions que cent
�C 'a i )
ans d’intérêts fussent dem andés, et lèsR o m a in s ne p e r
m ettaient pas que les intérêts accum ulés surpassassent
le capital.
L e s lois rom aines disaient com m e les ordonnances
françaises : P r o usuris stip u la ri tiemo supra m oduin
usurarum Licitum potest. L . 4 4 , f f . de usur.
P o u rqu o i donc les lois romaines ne seraient-elles pas
pour nous un règlem ent en m atière d ’anliclirèse quand
il s’agit'd’ y appliquer une créance portant intérêt de sa
nature ? Pou rqu oi la loi citée ne serait-elle pas ici ratio
scrip ta , lorsqu’elle n ’est pas un e loi arbitraire, lors
q u ’elle est m o tiv é e , lorsqu’ elle déclare que sa décision
est fondée sur une conven tion vraim en t aléatoire ?
C e n’est pas seulement dans les lois romaines q u ’il
faut rechercher les principes de l ’antichrèse ; puisque
tous les auteurs du droit français s’en o ccu p en t, et que
si plusieurs la regardent com m e prohibée dans le cas
d’ un intérêt illégitim e ,a u moins v o it-o n q u ’ils se r é u
nissent tous à penser que si le contrat ne présente pas
de détrim ent notable au d é b ite u r , il faut l ’exécu ter;
et q u ’il ne faut ordonner d’im p u lalio n q u ’au cas où la
conven tion serait évid em m en t usuraire, et les fruits
disproportionnés à l ’intérêt.
M ais com bien les A storg sont loin de celte dernière
h y p o th è se , malgré leurs exagérations ridicules sur la
valeur des fruits de leur h érita ge, q u’à la vérité ils ne
précisent pas.
■
L eu r-p ré de L a v a l , q u ’ils ont dénaturé depuis lo n
gues années parce q u’il était m aréca ge u x et plein de
�O O
'
jo n cs, avait en surface deux petits journ aux ; et certes,’
en 1703 il est bien difficile de voir dans un reven u
aussi m édiocre et aussi incertain , quelque chose de
supérieur au reven u de 864 livres.
.
Si des ex p e rtsy étaient e n v o y é s , com m en tfixeraien tils cette année com m un e sur d ix , que les auteurs et
l ’usage veulent être le seul mode de connaître le véri
table revenu appréciable? com m ent sauraient-ils s’il y
a eu des années sans récoltes? la tradition ne leur rappelera que 1709. C o m m en t encore sauraient-ils le prix
du fo in , puisque les m ercuriales n ’ont fixé que celui
des grains?
Eviteraien t-ils l’erreur en estimant ce prix annuel
à une époque critiq u e, où la rareté du num éraire fut
la prem ière cause de la création des billets de banque?
L e s Astorg ont com pté sur l ’arbitraire quand ils ont
v o u lu une estimation plutôt impossible que difficile ;
ils s’efforcent d’y voir de la possibilité, mais leurs bases
incertaines ach èven t de convaincre q u ’il n ’y aurait
rien qui éclairât la justice plus q u ’elle ne l ’est par elle
m ê m e et par les règles du droit.
.
S’il y a dans l ’acte de 1703 un contrât aléatoire qui
n e présente pas au créancier une chance certaine, une
chance u su ra ire, pourquoi ne faudrait-il pas l ’exécuter
plutôt que de jetter les parties dans le vagu e de l ’opé
ration la plus conjecturale.
U n intérêt de dot est un vrai capital susceptible luim êm e de produire intérêt e x ojjicio ju d ic ts : A v e c ce
capital rien n ’em pêchait d ’ail’e n n e r les fruits d’un iin-
�(
2 3 )
.
m euble pour un certain nom bre d ’années ; c’ était une
ven te de récoltes à prix fixe.
.
Pou rqu oi au parlem ent de Paris faisait-on im puter
les fruits sur le p rin cip al, quand l ’intérêt n ’était pas
dû. C ’est q u ’alors il n’y avait pas de ven te valable des
fru its, en ce que le prix con ven u n ’était pas réel^ il
n ’y avait plus r e s, consensus et p re tiu m , et alors pour
donner un prix aux fruits ven d u s, il fallait le retrouver
sur le cap ital, qui était la seule chose que ra cliete u r
eût pu oiîrir dans ce contrat de vente.
Mais quand l ’intérêt est lég a l, voilà un prix certain;
la ven te des fruits est donc légale et v a la b le , et jamais
personne n ’osa prétendre q u ’entre le prix et la chose
ven d u e , il fallût toujours une égalité m athém atique.
Si c ’était un contrat aléato ire, il était toléré et il
l ’est encore. L ’incertitude des fruits a été la règle des
lois et celle de la jurisprudence.
L e sieur D eleige a cité plus h a u t un arrêt de Catelan sur l’anticlirèse d ’une vigne ; le journal du parle
m en t de Toulouse en rapporte un autre plus récent ,
du
3 i juillet 1 7 1 4 ? qui dans le cas m êm e où un m ou
lin , tenu à antichrèse, avait été donné à ferm e par le
c r é a n c ie r , pour un prix supérieur à l ’intérêt de son
a rgen t, n ’a pas ordonné l ’im putation de l ’excédant sur
le capital ; par cela seul q u ’un m o u l i n est sujet à de
grosses réparations et à des cas fo rtu its, et q u ’ainsi
m algré la certitude d u pr ix a n n u el, il restait toujours
l ’incertitude du vrai revenu.
f
■
Si les arrêts du parlem ent de P a r is , dans des cir-
�,
.{ H )
.
constances d ’usure m an ifeste, n ’ont pas favorisé l ’antichrèse, au moins est-il certain , que dans les cas d ’in
térêts légalem ent d u s, il l ’a toujours regardé co m m e
un conlrat très-légitim e: L e rédacteur de ce m ém o irè
a sous les y e u x l'expédition en parch em in d ’un arrêt
rendu au rapport de M .r D u d o y e r , le
25 m ai 1781:,
en Ire le sieur G e ra u d -M a b it et les dames de Caldaguès, '
leq u el arrêt ne laisse pas le plus léger doute sur la ju
risprudence de ce parlem ent.
U n e Jeanne D éco ub lat s’élait reconnue débitrice du
sieur de C a lad ag u ès, pou r légitimes et autres objets ,
de 2.6,?>oo liv., le 5 avril 1667 , et lui avait donné deux
domaines à anticlirèse, pour en jouir tant et si longue
m ent q u’il serait en dem eure, de pa}^erlesd. 26,300 liv. ,
a v e c conven tion que les fruits en seraient compensés
a v e c l’intérêt de ladite somme.
.
L e sieur M a b i t , acquéreur desdits d om ain es, et
cédafaire des D é c o u b la t, en dem anda le désistement
par exploit du 2 juillet
1 7 7 4 , a v ec restitution de
jouissances depuis 1 6 6 7 , au x offres de com penser les
fruits jusqu’à due concurrence a vec les intérêts qui
se trouveraient légitim em ent d u s , et le surplus im
puté sur les capitaux.
L ’arrêt du 20 m ai 178 1 a condam né les dames de
C aldagu ès, à se désister au profit du sieur M a b it, des
héritages énoncés audit acte de 1 6 6 7 , à rendre et res
tituer Les fr u its d 'ic e u x , à compter d u 2 /juillet 1 7 7 4 ,
jo u r de La dem ande , lesquels seront compensés jusq u à due con cu rren ce, avec les intérêts de leur créa n ce,
échus
�.
.
.
,
(2 *'V.
é c h u s depuis Ledit J o u r 2 ju ille t 1 7 7 4 . S u r'le'su rp lu s
des dem andes, les parties sont mises hors de cour.
\
■ L e C od e civil n ’établit donc pas un droit n o u v e a u ,
lorsqu’il d it, article 2 0 8 9 , que Tanticlirèse doit être ;
exécu tée comme toutes'Les conventions qui. ne sont pas
prohibées par les lois.
”
'
! ■
O r il y a lieu de se régler par la loi .n ouvelle, toutes
les fois q u’elle n ’est pas en opposition à une loi an
c ie n n e , toutes les fois q u ’elle se r é fè r e , au co n tra ire ,
a u x anciennes lois qui existent. S i nempe declaret j u s
antiqu um nova constitutio ; s i declaret tanlum m odo
q uod anteà leges caverant. M orn . I n leg. 7 , j f . d&
legibus.
.
P o u rqu o i donc ici le Code civil ne serait - il pas la
loi des parties? L ’art. 2089 est la copie de la loi 17 au
code de usuris : il n ’y a pas de lois intermédiaires qui
aient disposé autrem ent.
L e s A storg ont voulu établir un e perpétuelle co m
paraison entre le contrat pignoratif et- l ’anlichrèse.
M ais personne n ’ignore què par le contrat pignoratif,'
le débiteur vend son im m eub le sous une faculté de
rachat l i m i t é e , et q u ’il
ferm ier.
■-••••.
d evien t aussitôt son propre
<
r '
‘
.
,
Ainsi n o n -se u le m e n t il court risque de perdre son
im m e u b le , faute d ’a rg en t, mais Y incertitude des fruits
tom b e encore sur lui seul annuellem ent.
L a différence des d eu x contrats prouve sëule la lé
gitim ité de l’ u n e t l ’usure de l’autre.
'
'
«D’après cela , il semble parfaitem ent inutile de re
D
�_ ( *6 >
_
chercher s’i l y a. prescription contrfe la préten tion des
A sto rg ; car s’ils l’avaient é le v é e 'e n 1 7 1 4 * ils auraient'
été déclarés non recevables à dem ander une co m p e n
sation.
M ais en .1 8 0 4 , c ’est véritablem en t une
folie de
vo u lo ir revenir contre cette compensation co n v e n u e
par un a c te , et ratifiée surtout par tant de p a iem en s
postérieurs..
Quand les parties ont plusieurs fois arrêté des com ptes,
soit en. 1 7 4 5 , soit depuis., n ’y a-t-il pas une présom ption
très-raison n able, que le débiteur a alors fait valoir tous
les excédàns de jouissances qui pouvaient m ieu x se véri
fiera ces époqu es, et que les rabais qui étaient de justice
ont été faits, s’il y avait lieu.
’
A cela les A s to r g ’ opposent -une bien, pitoyable r é
ponse. Ils n ’ont pas f a i t ni signé ces quittances, disentils; elles sont du fait du créan cier, et ne sont pas dou
bles ; on ne peut les le u r opposer;
M ais ce sont eu x -m ê m e s qui les op p o sen t, c ’est leur
libération ; sans elles iis d evraient p a y e r trente ans
d ’arrérages de plus q u ’ils n ’ offrent. D o n c ils s’app ro
prient. ces quittances , donc elles sont virtuellem ent
doub les, puisqu’ elles sont com m unes aux deux.parties,
puisqu’elles sont pièces, d u procès.
,
L a cour a jugé le 29 brum aire an 1 1 , contre le sieur
de Penautier, q u ’ une quittance à lui donnée désintérêts
d’ un capital, sans réserves, valait a c q u i e s c e m e n t à la
dem ande de ce capital. C ependant la quittance n ’était
pas double ; il n ’avait pas signé cet acquiescem ent.
�G
A u reste
37 )
et seulem ent , pou r ne négliger aucun
ï n o y e n , quand le sieur D eleig e n ’aurait pas p o u r lui
le point de droit , les circonstances et les réglem ens
multipliés qui font entre les parties ^ tran sa ctio n la plus
irréfragable., rien ne l'em p êch erait de faire valoir la
prescription de trente ans.
‘
.. •
,
,,i
. Il a p ro u vé que l'antichrèse n'était pas nsuraire ,
quand elle a pour objet des intérêts légitim em en t dus
¡; Cela seul répond aux A sto rg qui n e prétendaient
à rim prescriptibilité qu'en y supposant de l'usure.,
M ais encore la question n 'e s t - e ll e pas ju g ée par les
deux sentences de, 1 7 1 6 et 1 7 4 5 , qui n'on t ordonné
le paiem en t des intérêts, et par conséquent le com pte
des in té rê ts, que depuis 1 7 1 4 .
V igier sentit si bien q u ’elles étaient une fin de lion
recevoir contre l u i , que par ses défenses ,< du
3 août
1 7 6 4 , il se réserva de se pourvoir contre ces d eu x
sentences.
•-1
.
M ais il ne s'est pas p o u rv u , puisqu'il les a exécutées.
.
■ ■■
'
.
y1
.■ ;
^■
?:' ‘ :
F a u t-il encore parler de l’appel incident des A sto rg,
fondé sur ce que le juge du D o ign o n , en ordonnant
l ’estimation des- jouissances ? avait'prescrit aux experts
de déduire les charges.
'
-
f' '
L es Astorg supposent que le,propriétaire les p a y a it,
et non le créancier.
•
L e prouvent,-ils? ilsi;ne s'en sontjpas m is en p e in e ;
;mais ils prélen den t que cela a dû* être ;ainsi.
a Ainsi c e t ;appel est fondé sur une présom ption.
' *
D 2.
,
�(
23 )
^
C ependant les A storg auraient pu vo ir dans les a u
teurs déjà cités, que dans les antichrèses, le créancier
étant mis en possession pou r un tems indéterm iné pro
s u o , doit le paiement des charges. Mais cette n ou
velle question est si peu im portante q u ’il est inutile
de la discuter en point de droit.
C elui qui jouit est présumé p a y e r les ch a rg es, car
les charges sont une diminution des fruits annuels. Il
y a quelqùéfois exception pour des ferm iers, mais c ’ est
que le propriétaire reçoit un reven u annuel p a r le paie
m en t de la fe rm e ; et d’ailleurs le bail en fait toujours
le règlem ent.
. . . . . . . .
L e sieur D ele ige ne suppose pas que les A storg aient
opposé sé rieu sem e n t, q u ’aya n t subi deux degrés de
juridiction, il ne doit pas y en a vo ir un troisième.
Si cela était a in s i, il aurait fallu que l ’assemblée
constituante décrétât que tous les procès pendans a u x
parlem ens étaient é tein ts, parce q u ’ils étaient au troi
sième degré de juridiction. L a loi du 19 octobre 1 7 9 0 ,
a au contraire indiqué où seraient portés les procès
alors pendans aux parlemens. O r , celui des parties
était pendant au parlem ent de P a r is , par exploit du.
2.3 août 1790.
;
I l était pardonnable a u x Astorg d’opposer tant de
m o y e n s faibles et tant de prétentions bizarres dans lè
désespoir de leur cause; mais quand ils taxent
in dé
licatesse un h o m m e qui peut s’honorer de sa probité
§ans craindre de dém en ti de personne ;q u a n d ils écrivent
�( 29 )
q u e Leur réveil a été com m andé par la nécessité de n e
pas laisser perpétuer plus lo n g-tem s La rapine de ce
créancier altéré d ’ usure , les A storg ont ils cru se rendre
plus recom m andables par une injure grossière, q u ’ils
s’étaient bien gardés de se perm ettre en prem ière ins
ta n ce, où les deux parties étaient connues.
L à le sieur de L e ig e ne s’ en serait nullem ent offensé ;
là au contraire il aurait félicité Astorg sur un ch an ge
m e n t de principes que l ’opinion m édisante ou calom
nieuse ne suppose p as; et cette opinion m ê m e éta
blissait assez de distance entre la délicatesse du sieur
de L e ig e et celle d ’un A s t o r g , pour rendre inutile de
sa part toute espèce de justification.
Quoique le sieur de L e ig e ne soit pas très-sensible à
Tinsulle d’un tel h o m m e , il ne lui est pas moins pénible
d ’être accusé, loin de son dom icile , du vice le plus
opposé à son caractère. H eureu sem en t l’h om m e de
bien n ’est pas jugé par l’injure q u’il reçoit. L a raison
évalue l’injure et en scrute F a u te u r ; et quand un
A storg a du scrupule et f a it de la m o ra le , l ’expérience
apprend q u ’il n ’en fait que pour les autres, et la m é
m oire rappelle l’adage de tant de moralistes. V ideo
meliora , probo q u e , détériora sequor.
M . r M A R C H E I X , Rapporteur;
M .e D E L A P C H I E R , A v o ca t.
M .e M A R I E , L ic en cié-A v o u é.
,
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE PU PA LA IS CHEZ J.-C. SALLES,
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leige, Robert de. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
usure
créances
antichrèse
quittances
Description
An account of the resource
Mémoire pour le Sieur Robert de Leige, appelant ; contre François Astorg et Marie Vigier, sa femme, intimés ; et Contre Brigitte Rotquier et Jean-Baptiste Lacroix, son mari, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1714-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0242
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Laval (Pré de)
Pleaux (15153)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Antichrèse
Créances
quittances
Usure
-
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1f959743d90f37eb02b82bb3bc65be28
PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
POUR
L e sieur R O B E R T
d e
L E I G E , appelant;
CONTRE
François
ASTORG
et M a r i e
VIGIER,
sa f e m m e ,
intimés ;
«
ET
CONTRE
R O T Q U I E R et J e a n - B a p t i s
L A C R O I X , son mari , intimés.
B r i g i t t e
«
«
*
«
«
t e
L orsque les parties ont stipulé que les fruits (de
l'immeuble donné à a n tichrese) , se compenseront
avec les intérêts, ou totalement, ou jusqu’à due
concurrence, cette convention s’exécute, com me toute
autre qui n ’est point prohibée par les Lois. ( C o d .
« civ. art. 2089. ) »
A
�C2 )
Ce principe de la législation acluelle, conforme aux
lois romaines , adopté par les auteurs du droit qui se
sont le plus élevés contre l ’ usure , décide la contesta
tion sur laquelle la Cour aura à statuer. U n créancier
a joui pendant dix ans avant 1 7 1 4 , un très-petit pré
pour l’intérêt légitime de sa créance. L e débiteur ren
trant dans son héritage à cette époque, a continué le
paiement de l’intérêt pendant quarante ans, et a retiré
vingt-trois quittances, parmi lesquelles sont plusieurs
arrêtés de compte. Quand on lui a demandé le capital,
il a refusé de p a y e r, sous prétexte de l ’ancienne anticbrèse, et a demandé une vérification préalable pour
savoir s i , lors de l ’antichrèse et avant mil sept cent
quatorze, les jouissances de son pré avaient été ou non
d’une valeur supérieure h l ’intérêt échu pendant leur
durée. Voilà en précis tout l’objet de la prétention des
.Astorg ; et si elle a été accueillie par les premiers juges,
c ’e stq u e la cause a été deux foisjugée par défaut contre
Tappelant.
L a créance cédée a passé en plusieurs m ains, et la
résistance du débiteur a occasionné une foule de re
cours et de procédures, qui ont occupé les tribunaux
depuis 1764. Une partie de ces demandes en recours
est encore pendante devant les premiers juges, et il
n ’y a principalement eu litige actuel que l’eifet de l’anthicrèse. L ’appelant rendra donc compte
la Cour de
la convention qui a établi celle anticlnèse, et des actes
qui l’ont suivie.
�C
F A IT S
ET
3
)
PRO CED U RES.
Guillaume Soubie était créancier de Géraud Sales et
sa fem m e d’une somme de 600 fr. en capital, prove
nant d ’une dot, et produisant par conséquent intérêt
de sa nature. Les parties traitèrent sur cette créance
le 19 a o û t i
, et elle fut stipulée payable en quatre
iermeségaux avec intérêt. Il fui convenu que, pour cet
683
intérêt, ledit Soubie pourrait jouir du pré de L a v a l;
niais cette convention n’eut pas son exécution jusques
à un autre traité de 1703. Ainsi il est inutile de fixer
l ’atention de la Cour sur ce premier acte.
Guillaume Soubie-maria Pierre Soubie , son fils , en
1689 , et lui donna ladite créance pour légitime. Celuici la céda au sieur D o u lé, curé de Noailles, par acte
du 10 septembre 16 9 5 , et ce dernier obtint sentence
contre les débiteurs, le
5 octobre
suivant. Cette sen
tence encore n’adjugeait q u ’une hypothèque indéfinie.
lies héritiers du curé de Noailles cédèrent au sieur
E m e ry -R o b e rt, leur créance de 600 fr. et le droit de
jouir du pré L a v a l, par acte du i
5 juillet
1703.
Par ce même acte on voit que Marie Sales, fem m e
Sartiel, débitrice, intervint avec ledit S artiel, son mari,
pour s’obliger en outre de payer audit sieur Robert une
somme de 194 liv. i
5 sous,
provenant d ’arrérages do
rentes, adjugés par trois sentences. L ’acte termine par
la clause suivante, qu’il faut transcrire littéralement
A 2
,
�4
(
)
parce que c’est contre son exécution que les sieurs
Astorg veulent revenir (i).
Faute de paiem ent, Ledit Robert pourra jo u ir du,
su sdit pré de L a v a l, p o u r
le l é g it im e
in tér êt
des
tant et si Longuement que lesdits mariés
seront en demeure DE r e n d r e i c e l l e s , ce qu iLs pour
dites
sommes,
ront fa ir e quand bon Leur semblera , et Jusques à ce ,
se réserve ledit Robert l ’hypothéqué précitée et privilège
de ses hypothéqués. A in s i a été convenu et promis tenir
par lesdites parties sous C obligation , etc.
Après cet acte le sieur E m e r y - R o b e r t se mit en
possession du pré L a v a l, et en jouit pendant les années
1704 et suivantes, jusques en 1714.
Alors Marie Sales était remariée à Pierre V ig ie r ,
et ce nouvel époux s’empara du p ré , sans autre lorme.
L e sieur Robert aurait pu sans doule refuser la remise
de son gage jusqu’à ce q u ’il fût p a yé: mais il était fort
aise d ’en Olre débarrassé et d ’avoir le droit de deman
der son revenu annuel ; en conséquence il assigna les
dits Pierre Vigier et Marie Sales par exploit du 18 jan
vier 1716 .
Il exposa «• que ladite Sales ne saurait ignorer être sa
« débitrice i.° de 600 fr.; 2 ° de 194 ir. i
«• causes portées par acte du i
5 juillet
5 s. pour les
1708; que pour
( 1 ) Il y a une légère différence entre l’expédition qu’en rap
portent les A storg, cote i.rc , et la copie signifiée cote 5; mais
cette différence ne change rien au sens de la convention.
�.
(5 )
v
\
« l’intérêt desdîtes sommes elle n’a'ye consenti engage« ment des fruits du pré appelé de L a v a l, duquel led.
« instant a j o u i paisiblement jusqu’au trouble *.
En conséquence il conclut à ce que lesdits mariés
Vigier fussent solidairement condamnés à lui payer * la
«‘ somme de 3p fr. 14 s. 9 d . , faisant le revenu desdites
»■sommes ‘depuis le 14 juillet 1 7 1 4 , au lieu de La non
« jou issa n ce d u d it p ré , avec condamnation de tous
dépens , dommages et intérêts ».
<
, '
fj'j
# ‘
Il prit d’autres conclusions étrangères à l ’anticlirèse,
et tendantes au paiement des arrérages d’ une renie en
grain, qu’il évaluait pour le passé à 70 liv. 2 s. 6 d.
Cette deman.le fut accueillie par une sentence non
attaquée du 26 février 1 7 1 6 .
Peu de tems après cette sentence, le sieur E m e r y Robert céda sa créance à Joseph R otquier, avec le
#
,l
» •
droit de jouir du pré L a v a l, ou de sè faire payer de
l ’intérêt de ladite créance.
' Cet intérêt fut payé p a r Vigiér , ' et ses premières
quittances prouvent, comme les postéiieures, qu il ne
s’agissait plus du passé.
. .
•'
L a première quil lan ce, du 16 mai 1 7 1 7 , est de 80 fr.
pour les non jouissances du pré de Laval engage, et ce
pour les années l'-jiiJet 1716. (Com m e ces 80 lr. excé
daient de quelques sous l’intérêt légal, lesieur Rotquier
ajouta à sa signature qù’il les i m p u t a i t sur les 70 francs
ci-dessus ).
P a r l a seconde, du
3
*
.
o juillet 1724., le sieur Rotquiér
reconnaît aroir reçu l'intérêt à Lui d u (le la somme de
�794 h'v-
*5
( 6 )
s- en lieu des non jouissances du pré Laval
pour les années 1 7 1 7 et suivantes ,ju s q u e s et compris
la présente, échu au 14 du présent.
M arie Sales décéda, laissant pour héritiers testamen
taires Pierre V igier, son m ari, el Françoise Sales, sa
sœur. Ils ne furent pas exacts à payer, el le sieur R o tquier fit des poursuites en se-servant du nom du sieur
11
E m e ry -R o b e rt, son cédant.
assigna par exploit du
11 mars 1780 lesdils Vigier, et Sales, « pour voir décla«r rer contre eux exécutoire la sentence de 1 7 1 6 , et
« payer i.° 600 liv. d'une part; 2 0 194I1V. i s. d’au« tre ; .° 70 liv. 2 s. 6 d. d’autre ; 4.0 les intérêts adjugés
5
3
« par ladite sen ten ce, et ceux échus depuis el ceux
<r qui écherront à l'avenir, sauf à tenir à compte ceux
<f que les assignés justifieront avoir payés », ( parce que
l ’intérêt des 70 liv. 2 s. 6 d. était resté en suspens).
Cette demande fut reprise en 1735 ; M arie Sartier,
fille du premier lit de Marie Sales et fem m e de Joseph
V ig ie r , fut mise en cause; et le 18 janvier 1 7 3 6 , il
intervint sentenceadjudicalive,el encore non attaquée,
laquelle condamne au paiement desdits capitaux, et seu
5
lement à l ’intérêt échu depuis le i ju ille t 1714.
Celte sentence est suivie de saisie exécution en 1787.
A u lieu de contester, les débiteurs présentent un gar
dien volontaire. Ils font plus, ils paient.
Les Astorgproduisenl sixquiltancesdonnées en 1787,
1 7 3 8 , 17 4 0 , 1741 et 17 4 4 , a compte des intérêts et
frais. Elles sont sur la même feuille.
A u bas de celte m êm e feuille on voit que les parties
�(. 7 ) ,
•.
ont arrêté compie à 88 liv. 16 s., y compris un billet
de 1 liv. ; sur laquelle somme lesV igier paient
liv.
5
53
ledit jour n avril 1746- I-a quitlancc est conçue en
ces termes : de compte arrêté entre nous de tous les reve
nus échus ju sq u 'a u 16 janvier 1 7 4 5 , d e là rente qui
m ’est due par les dénommés de l autre pari (Pierre êt
Joseph V ig ie r), il s ’est trouvé ni être d u la somme de
etc. , sans préjudice, etc.
1
Il paraît que le 28 août 1 7 4 6 , Jean et Joseph R o t
quier, père et fils, débiteurs envers Antoine Rotquier
d’une légitim e, lui cédèrent ladite créance avec pro
messe de garantir et faire valoir.
L esV igie r agirent avec ce nouveau créancier com m e
avec les précédens ; ils produisent huit quittances don
nées par l u i , à compte des intérêts pendant les années
1747 et suivantes, jusques à 1755.
!
•
' **"J
Mais 011 vint à compte le 22 novembre 1 7 5 6 , non
seulement des intérêts échus, mais encore des condamr
' '
|
nations d’une autre sentence étrangère ausieurRobert :
■
*
‘
lout fût réglé jusqu’au jour, h 241 liv. 1 2 s ., après avoir
déduit les dixièm es et vingtièmes , est-il dit, depuis que
ledit Rotquier avait droit
des
sieurs Labianche et R o t
quier, sans préjudice de La somme principale de 864*//^,
I ' ' I(
***
' ■■ *")!J•i‘ •
11 s.) et des intérêts encourus depuis {e 28 août dernier.
Ce règlement fat tellement 'définitif .que^ les lsept
quittances postérieures règlent positivement l’intérêt
annuel à une somme fixe, lantôt de 38,liv. , Jantôt de
36 liv. 1 o s. pour l'intérêt échu.le. . . ; vingtièmes clèdiutsi
^ C e s sept quittances ont toutes la m ehie fo rm u le ,
�m
depuis 1757 jusques au a janvier 1 7 6 4 , date de la
dernière.
,
'! • • I! ( '
ix:?. - 1:
est essentiel d’observer à la Cour que le com pte
de 1766 fut fait avec M ichel Vigier.
3
11
Antoine Rotquier désira être payé de son capital;
et par exploit du 4 juillet 1 7 6 4 , il forma demande en
la justice du Doignon contre ledit M ichel Vigier fils,
et héritier de Joseph et de Marie Sartier, en exécutorialité de la sentence du 18 janvier 1736 , et en
5
paiement dessommes de 600 liv. d’une part, 194ÜV. i s.
d’autre, et 70 liv. d ’autre, portées par ladite sentence.
Ledit M ichel Vigier dit en défenses « que sans ap«• prouver les sentences de 1 7 16 et 17 3 6 , contre les* quelles il se réservait de se p ou rvo ir, il devait lui
« être fait compte des jouissances du pré de Laval qui
5
11 fut engagé par contrat du i juillet 170 3, pendant
«■leur durée , pour être compensées pendant ledit
«• teins avec les intérêts des sommes qui en étaient sus« ceptibles, telles que celle de 600 liv., et subsidiaipe* ment sur le principal, pour être ensuite par lui fairiç
« des offres , etc. »
C e langage évasif d’un débiteur qui voulait éloigner
sa libération , s’est changé en un système sérieux sur
lequel on plaide depuis 1764*
On se disputa de cette manière as^e^ long-tems sous
le nom du sieur E m e r y -R o b e r t. O11 opposa à Vigier
les arrêtés de compte et les quittances. 11 résista le
plus qu’il put à Les m o n trer, en disant qu’il n ’y était
pas obligé, qu’il n’y avait aucuns arrêtés dé c o m p te ,
'
et
�( 9 )'
et que s’il avait renoncé à son droit par quelque acte
qui réglât le passé, c'était an créancier à le produire.
Enfin une sentence ordonna que Vigier exhiberait
ses quittances, et en ferait le dépôt au greffe.
Quand les sieurs Rotquier eurent assez plaidé à
l ’inscu du sieur E o b e r t , ils jugèrent à propos d’inter
venir dans leur propre procédure , et de conclure
contre le sieur Robert à ce qu’il fût tenu de les garan-lir. Cette intervention eut lieu de la part de Joseph
R o tq u ie r, cédataire de 1745.
lie sieur Robert-D eleige, successeur du sieur RobertLablanche, premier créancier, apprenant pour la pre
mière fois qu’il existait sous son nom un procès relatif
h une créance du sieur E ru e ry -R o b e rt - Lablanclie ,
conçut un soupçon bien fondé, sur une manœuvre
dont il aurait dû être informé plutôt. Il se défendit
d’abord avec quelque humeur, parce qu’on avait abusé
de son nom. 11 désavoua toute participation à la pro
cédure déjà fa it e , dit que si on s’était servi d’an
ciennes sentences obtenues par le sieur Lablanclie ,
elles lui appartenaient; et soutint dans tous les cas que
toute action était prescrite.
Mais quand on lui exhiba la cession souscrite par
le sieur R o b e rt-L a b la n c lie , il n’hésita pas en reconnaîlre l’écriture.
Une sentence du 10 juin 1766 appointa les parties
en droit, joignit la demande en recours du sieur R o t
quier à la demande principale, et en m êm e teins réiB
�( IO )
léra contre Vigier les dispositions de celle de 1764 qui
avait ordonné le dépôt au greffe de ses quittances.
Enfin le procès fut jugé par forclusion contre ledit
Vigier et contre le sieur Robert , le 9 mai 1767. L ’es
timation des jouissances du pré de Laval fut ordonnée,
5
sous la déduction des charges foncières depuis le 1 juillet
170 3, jusques et comprise l’année 1714.
L e sieur Robert-D eleige interjeta appel devant la
sénéchaussée d’Aurillac et intima, comme il led evait,
les deux parties de la cause; c ’e s t-à -d ire , les sieurs
Rotquier et Vigier.
Cet appel fut suspendu pendant vingt ans. Il fut
repris en 1787 par M arie V igier, fille de M ich e l, et
par Astorg son mari. Elle interjeta mêm e appel inci
dent de la sentence de 1 7 6 7 , fonde sur ce que les
charges, disait-elle, 11’avaient pas dû être déduites de
l ’estimation ordonnée.
L e procès fut encore jugé à Aurillac, com me il l ’a
vait été' en la justice du D o ig n o n , c ’e s t - à - d i r e , par
forclusion, et toutes les conclusions des Vigier et Astorg
adoptées le i
3 août
1790* L a sentence du Doignon fut
confirmée en ce qu’elle ordonnait une estimation des
jouissances du pré Laval ; elle lut infirmée en ce qu’elle
ordonnait que les experts déduiraient les charges fon
cières.
lie sieur Robert interjeta appel de celte seconde sen-
1ence
au parlement de Paris. L a suppression de cello
cour en déféra la connaissance au tribunal du district
�( II )
de Mauriac. L à , les héritiers de Joseph Rotquier colludant avec les Vigier et Astorg , signifièrent, dit-on ,
à c e u x - c i qu'ils acquiesçaient aux sentences de 1767
et 1790.
Pendant cçtte procédure, les Rotquier enlr’eux en
introduisaient une a u t r e ;le sieur M eilhac, pelit-filset
héritier d'Antoine Rolquier , cédât aire de Pierre et
Joseph en 174Ü , ne voyant pas rentrer sa créan ce,
quoique ces derniers eussent permis de fournir et faire
valoir, assigna leurs héritiers (parties adverses), pour
le payer eux-mêmes.
Ceux-ci mirent encore le sieur Robert en cause, on
ne sait pourquoi. Après une procédure très-embarass é e , dont il est fort inutile d’occuper la cou r, les débatsse terminèrent par 1111 jugement qui donna un délai
aux Rotquier, parties adverses, pour faire finir le procès
actuel, sinon les condamna à paj’er le sieur M eilh ac;
il fut sursis à faire droit sur. les demandes en recours
et contre recours.
Déjà , et avant ce jugem ent, le sieur R obert, pour
n ’être plus harcelé de tant de débats étrangers , avait
repris en la cour son appel de 17 9 0 , contre les R o t
quier et Vigier.
Ces deux adversaires tiennent aujourd’hui un lan
gage bien diilerent.
Les Rolquier se prétendent follement intimés , et
disent que n’ayant pus interjeté appel de la sentence
d’Aurillac, et ne voulant prendre aucun intérêt dans
la contestation, ils doivent être mis hors de cause, sauf
B a
�( 12 )
à plaider en première instance sur la demande en ga
rantie pendante. Telles sont les conclusions de leur
requête du 8 thermidor an 1 1 , répétées et expliquées
dans une écriture postérieure.
Les Vigier et Astorg se défendent plus sérieusement,
et font les plus grands efforts pour prouver qu’il y a
lieu de revenir à examen sur l’antichrèse de 1703, et
de confirmer la sentence de 1790.
M O Y E N S .
L
e
sieur Robert a intimé deux parties, et ce qu’il
y a de bizarre ce sont ceux-là même qui l ’ont appelé
au procès, et ont pris des conclusions contre lu i, qui
Veulent qu’il ait dû les regarder com m e étrangers à
cette m êm e contestation.
L es sieurs Rotquier et Lacroix qui ont pris tant de
peine à prouver qu’on aurait dû ne les compter pour
rien , mais q u ’on est forcé de compter pour quelque
ch ose, ne se sont plus souvenus que si le sieur Robert
plaide, c ’est parce que le sieur Joseph Rolquier leur
au teur, l ’a assigné en garantie , le 28 octobre 1765.
Ils ne se sont pas souvenus qu’il y avait une sen
tence rendue le 10 juin 1 7 6 6 , qui joignait celte de
mande à celle soutenue par V ig ier; el qu’ainsi après
une jonction, toutes les parties sont parties nécessaires,
tant qu’ une seconde sentence n’a pas prononcé de dis
jonction.
�( i3 )
Ils ne se sont pas souvenus que le même Rotquier
leur au teu r, était en qualité clans la sentence définitive
du 9 mai 1 7 6 7 ; qu’il était aussi en qualité sur l'appel
porté à Aurillac ; et aussi en qualité dans la sentence
cofifirmative du i août 1790. Ils en auraient conclu
3
eux-mêmes que celui qui a été partie nécessaire en
p r e m i è r e instance, et sur un premier a p p e l, est aussi
p a r t i e nécessaire jusqu’à la fin du procès.
Q u’importe qu’il ait été fait pendant l’appel actuel
une procédure additionnelle, où les Rotquier ont de
nouveau appelé le sieur Robert en garantie , et que
les premiers juges en soient encore saisis. Celte super
fétation n’est pas un m o y e n .
Ou l’objet de cette nouvelle demande en garantie
est le même que celui de 1765 , et alors la cour en
est saisie comme elle l ’est de toute cette procédure:
ou il n’est pas le m êm e, et alors les premiers juges
n ’ont retenu qu'un autre procès.
Mais qui pourrait dire que ces premiers juges ont
demeuré saisis de ce qui était de 1 attribution d e l à
cour ; ils ne le pouvaient pas.
L ’acquiescement que
les
Rotquier ont donné en 1792
seulement, aux sentences de 1767 et 1790 , n ’empêche
pas que le sieur Robert n’ait pu et dû les appeler en
cause.
Il l’a pu,' parce qu’il avait intérêt d ’avoir un juge
ment convenu ; et que quand la cour aura slatué sur
la garantie pendanle, les Rotquier quelconques ne se
ront pas assez m a l-a v isé s pour l’appeler ensuite en
�( H )
première instance, et conclure à la m êm e garantie.
Il l’a d û , parce que le parlement de Paris, et par suile
la cour., étaient saisis du procès, et n’ont pas encore
prononcé sur l’efïet de cet acquiescement.
A u reste le sieur Robert est si éloigné d’élever au
cunes contestations, mêm e douteuses , qu’il déclare
s’en rapporter à la prudence de la cour, non-seulement
sur le renvoi demandé par les Rotquier et L a c r o i x ,
mais encore sur le fonds de la garantie e l l e - m ê m e ,
s’il y avait lieu d’y statuer.
Il importe peu au sieur Robert d'être livré seul à
repousser la prétention des Y igier et Aslorg ; elle est
si extraordinaire et mal conçue, qu’il n ’y a véritable
ment qu’un avantage certain à l ’examiner pour la
combattre.
Les Vigier et Astorg ont recueilli beaucoup d’au
torités pour prouver que la convention de 1703 était
nsuraire , et que la prescription n’a pas couvert celle
prétendue usure.
L e sieur Robert n ’a pas mêm e besoin d’invoquer
la prescription ; il lui suffit de rappeler le caractère de
l ’antichrèse, pour démontrer q u e , sur-tout dans l’es
p è c e , elle a été une convention très-commune et trèslégitime.
L ’antichrèse est définie dans la glose de la loi
3 , au fT
depignoribus, un gage donné au créancier, pour q u ’il
en compense l’usage et les fruits qui eu naissent, avec
l ’intérêt de l’argent qu’il a prêté. P ig n u s quod sub
�( i5 )
hoc nomitie credilor accipit, ut ejtts itsum pro
sibi cornputet. D ’autres interprètes ont donné
u s u r is
une dé
finition plus intelligible encore, en disant que l’antichrèse a lieu quand un immeuble est donné au créan
cier , ul percipiat rei fru ctu s i n v i c e m usuratium ,
donec dcbitor pccuaiatn soLçat.
Ce conlrat aussi commun en France avant
de L a w , que les contrais de rente Tétaient
le système
avant r é
mission des assignats, avait été le sujet de beaucoup
de controverses pour ou contre sa légitimité.
Les auteurs les plus scrupuleux sur l’usure, s’accor
daient tous a justifier l’anliclirèse, quand les fruits de
vaient se compenser avec un intérêt légitime , ou dû
de sa nature; ils n’y voyaient de conlrat usuraire que
dans le cas où le créancier percevait les fruiis d’un im
meuble pour l’intérêt du prêt ordinaire, parce que les
lois défendaient de stipuler l’intérêt de l’argent.
Dans le premier cas , il y avait encore une aulre
distinction à faire , et celle-là se puisait dans les lois
romaines.
Le créancier pouvait avoir fait une stipulation évidem
ment trop avantageuse. I/immeuble pouvait produire
plus que l’inlérêt légal, et alors il était suspect d’usure.
Mais voici le tempérament que prenaient les lois ellesmêmes.
Si le créancier affermait à un autre l’immeuble im pignoré; alors, parce qu’il avait un revenu certain , il
était clair qu’il y avait usure dans l'excédant de ce
revenu au-delà de l'intérêt légal;
�( 16 )
Mais quand le créancier jouissait lui-m êm e, la loi
ne voyait aucune usure, dans le fait, même prouvé,
que les fruits de l'immeuble dussent surpasser l’intérêt
légal, à cause de Yincertitude des récoltes.
Ainsi s’expriment les lois 1 4 et 1 7 ,au code de usuris.
Les auteurs du droit français confirment pleine
ment ces principes. Le sieur Deleige rappellera le sen
timent de Cujas, et celui du Dictionnaire canonique*
pour fnontrer qu’il a choisi ses autorités parmi les plus
grands ennemis de l’usure.
Quœ conventio l i c t t a e s t etiamsL p lu r i s do/nus Locari soLeat quam ejjiciat legitimarum usurarum ratio ,
çel ut f u n d i oppigneratifructus omnes
v i c e usu raru m
credUor percipiatj quœ conventio propter incertum eçentum fructuum adm issa est, et propter incertum f r u menti pretium. Observât. C u ja cii in lib. 3, ch. 35.
Le Dictionnaire canonique au mot antichrèse, in
dique cet avis de Cujas, en l’appliquant même à l’in
térêt du simple p rê t, pro credito pigtioris usus. A la
vérité il ajoute que le droit canon ne s’y conforme pas.
Mais, a jo u te -t- il « le droit civil 11’a pas usé de la
«• même rigueur. L ’incertitude des fruits qui peuvent
« être recueillisse risque même que l’on court jusqu’à
jt la perception, d’en être privé; enfin la tranquillité
« qu’acquiert le débiteur, par cet accommodement, ont
• persuadé que cette convention n’avait rien d’illicite.
Le droit français n’a donc vu qu’un contrat aléatoire
dans une convention qui présente en e i l e t des chances
aussi incertaines. Car, à moins d’une disposition cho*
quante
�*7
(
)
quante enlre l’étendue d’un champ et les intérêts d’ une
-créance, nul Ine jpourra assurer que-le créancier sera
certain d ’obtenir en produit net l’intérêt qui lui est dû,
sur-tout pendant plusieurs années consécutives.
S’il s’agit de vig n e s, une année d’humidité ou de
brouillards peut fairè perdre un an de „culture ; s’il
s’agit d’ nn pré , un printems de,sécheresse peut aussi
r u i n e r tout espoir de récolte.); '
C ’est pourquoi un arrêt de 1 7 6 4 , rapporté par Cat e la n ,« a jugé que le contrat d’anticlirèse devait être
r observé en la cause d’une fem m e villageoise qui avait
g baillé a jouir à son créancier, une vigne h titre d’an« ticlirèse , avec celte convention, que le créancier
« jo u ira it'd es fr u its pour.les intérêts , quoique celle
« femme soutînt que les fruits; excédaient ad double le
« légitim e'intérêt. U in certitu d e'■
des fn u its , qu i est
« la raison des lois f u t une des..raisons de l'a rrêt».
Catelan , liv.
5,
ch. I.er ; et Brillon , v.° antichrbse.
•Or, Catelan qui était magistrat, pouvait, sans se trom
p e r , donner le véritable m o tif des arrêts de sa cour.
Ces auteurs citent un-autre arrêt de 1 6 5 9 , qui or
donna l’imputation de l ’excédant du légitime intérêt
sur le capital; mais jSarce que le créancier’ avait donné
la maison im p ign orée, à lo y e r , et qu’ainsi,1e revenu
étant connu, il n ’y avait plus pour lui d’incerlilûdè.
A u ro ü x , sur l ’art. 421 de la coutume de Bourbon
n a is , dit que l ’anliclirèse est un contrat très-licite
quand les intérêts sont dus jauX'créanciers.
•
L o u e t , qu’il a'.pluiaux Astorg deiçiter fcn leur faC
�( i8 )
v e u r , on ne sait pou rq u o i, vante au contraire les
avantages d e l’anlithrèse, et après avoir dit que Dum ou
lin n’admet l’antichrèse que sous deux conditions , la
i . cre que le débileur ait toujours le droit de reprendre
l ’im m e u b le ;la 2.e que les fruits n’excèdent pas année
commune le quinzième du principal, « néanmoins, dit
« Loue! , cet avis n’a été suivi au palais pour la ré« duclion des antichrèses au denier quinze. Car le do
te
«r
«
«
maine du roi a été vendu au denier douze en anticlirèse; et pour juger des actions des hommes seIon l ’ u l il i lé p u b l i q u e , l ’a n t i c h r è s e a p p o r t e plus de
commodité au débiteur que la rente constituée, et
«■est plus tolérable. L ’antichrèse est sujette aux cas
« fortuits, g rê le , g u e r r e , tem p ê te , f e u : pour telle
« année les fruits sont perdus par la violence des tems.
« S’il y auberté de fruits, le créancier jouit de cet heur;
«
«
«
«
si stérilité , il la faut supporter; s’il faut des réparalions, cela tombe sur le créancier. Les débiteurs ont
cet avantage qu’ils ne sont en arrière pour les arrérages qui est leur plus grandë ruine. L e débileur
<r n ’est grévé de cautions, etc.-« Let. P. N.° 9.
Voilà l’auteur que les Astorg ont supposé l ’ennemi
des antichrèses; ils y ont recueilli çà et là plusieurs
arrêts relatifs à des réductions de renies au laux de la
lo i, el par conséquent si dislans de la contestation que
ce serait s’en éloigner soi-même de les réfuler parti
culièrement.
L e s Astorg ont encore cité Roussonu-Lacoinbe , mais
seulement les principes qu’il fait valoir au mot usure.
�19
(
)
Ils ont. évité dë rappeler ce qu’il dit aü mot antichrbse ,
p o u r établir q u e cet acte n’est réputé usuraire que quand :J
il *a eu pour objet *dè faire porter un.intérêt illégitime à
uii.sim pie prêt d’argent, te:
V. ^ ^
v r
( ■
>
Ils citent un arrêt du 22 juillet 1 7 1 3 , du Journal des
audiences 5 mais il s’agissait d un créancier qui faisait
porter intérêt à l’intérêt de son argent, etron n’y lit
pas un seul moi d’ànticlirèse. '
. v > v/
Enfin ils citent Denizart et M .r Chabrol. L e premier
ne fait que copier Lacom be sur l’anticlirèse ; mais M .r
C h a b ro l, bien loin d’être opposé à ce genre de contrat,
dont il ne s’occupe qu’en parlant du contrat pignoratif,
fait une grande différence entre l ’un et l’autrè. Il regarde
le contrat pignoratif comme usuraire, mais il dit que les
antickreses sont plus favorables , en ce quelles n ’ont
rien de déguisé n i simulé. 11 pensé au resteique «le point
« décisif est de savoir si le créancier avait un titre qui
et liii assurât l’intérêt de son argent, ou s’il n’a fait que
c prêter son argent loïs de Fantiçhrèse »;
A la vérité, car il ne faut rien dissimuler j M .r Chabrol
d’accord en cela avec L a c o m b e et quelques autres au
teurs, pense!que l ’excédant desjfriiils ¡dè.vaitij en cas
d’anticlirèse , être i m p u t é ¡sur le capital. 5 mais dan?
'quel cas?
I-,
' •*
-uaMiU f :
’ ;r
IiNon seulement ce n’est pas quancj les partiesise
Sont
réglées volontairement lors de l’acte : encore moins
(quand elles se sont réglées ensuite jiar plusieurs arrêtés
.de compte. Mais comme dit L a co m b e : « Si én'faisant
« une année commune- derr p lu s ie u r s le s fruits excé" C 2
�( 20 )
« chiient considérablement les intérêts ordinaires, Tex
te cédant serait imputé chaque année sur le capital ».
C e que dit Lacom be est recueilli de G o d e fr o i, qui,
sur la loi 17 cletisur, ne s’occupe encore que du contrat
pignoratif, ou du cas où il y a vente : mais la G lose, sur
la même loi, s’explique d ’une manière à ne pas laisser
de doute sur la question.
M ulier obligavit m ihi vineam, et in vicem usurarum
convertit ut recipercm vindemiam. Si plus emolumentl
consecutus sim e x fru ctibu s quam etiam sit in usurâ,
an ULud revocari p ossit quœritur ? IDicitur quod non.
Q uia potueratevenisse quod tuhil provenisset , et tatneri
necesse habe 'ret stare conventtoni} et propter -incertum
non erit retractanda.
Opposera-t-on que les Romains admettaient le prêt
à intérêt, et que ce n’est pas dans leurs lois qu’il faut
chercher des principes?
Mais l’objection serait de mauvaise foi, si on l’ap
plique au cas où il s’agit d’une créance française, por
tant intérêt de sa n atu re; car alors c’est précisément
com m e s’il y avait eu stipulation permise.
Les Romains p e r m e t t a i e n t le prêt à intérêt com me
il est permis en France depuis le
3 octobre
1789; mais
bien loin de tolérer l ’usure, qui est très-loin du prêt à
intérêt, on sait que leurs lois étaient sur ce point plus
restrictives que les nôtres.
Un seul exemple le prouve. Nous soufïrons la ruine
d’ un débiteur par une accumulation criante d’intérêts.
A v e c quelques exploits, nous autoriserions que cent
�C 21 )
ans d’intérêts fussent demandés, et lesHomains ne per-'
mettaient pas que les intérêts accumulés surpassassent
le capital.
>
Les lois romaines disaient comme les ordonnances
françaises : P ro usurls stipulari nerno supra modum
usurarum licitum potest. L . 44 'J F ' d e usur'
Pourquoi donc les lois romaines ne seraient-elles pas
pour nous un règlement en matière d’anlichrèse quand
il s’agit d’y appliquer une créance portant intérêt-de sa
nature ? Pourquoi la loi citée ne serait-elle pas ici ratio
scripta, lorsqu’elle n ’est pas une loi arbitraire, lors
qu’elle est m otivée, lorsqu’elle déclare que sa décision
est fondéé sur une convention vraiment aléatoire ?
Ce n’est pas seulement dans les lois romaines qu’il
faut rechercher les principes de l ’antichrèse ; puisque
/ tous les auteurs du droit français s’en occupent, et que
si plusieurs la regardent com me prohibée dans le cas
d’un intérêt illégitime ,a u moins voit-on qu’ils se réu
nissent tous à penser que si le contrat ne présente pas
de détriment notable au débiteur, il faut l ’exécuter;
et qu’il ne faut ordonner d’imputation qu’au cas où la
convention serait évidem m ent usuraire, et les fruits
disproportionnés à l’intérêt.
-i
. Mais combieniles Astorg sonl loin de cette dernière
h ypothèse, malgré leurs exagérations ridicules sur la
valeur des fruits de leur héritage, qu’à la vérité ils
.précisent pas.
r
ne
L eu r pré de L a v a l , qu’ils ont dénaturé depuis lonr
.gîtes années parce, qu’il était rnai'écagéux ôliplein de
�( 22 )
joncs, avait en surface deux petits journaux ; et certes;
en 1703 il est bien difficile de voir dans un revenu
aussi médiocre et aussi incertain , quelque chose de
supérieur au revenu de 864 livres.
Si des expertsy étaient en vo yé s, comment fixeraientils cette année commune sur dix, que les auteurs et
Tusage veulent être le seul mode de connaître le véri
table revenu appréciable? comment sauraient-ils s’il y
a eu des années sans récoltes? la tradition ne leur rappelera que 1709. Com m ent encore sauraient-ils le prix
du foin, puisque les mercuriales n’ont fixé que celui
des grains?
Eviteraient-ils l ’erreur en estimant ce prix annuel
à une époque critique, ou la rareté du numéraire fut
la première cause de la création des billets de banque?
Les Astorg ont compté sur l’arbitraire quand ils ont
voulu une estimation plutôt impossible que difficile ;
ils s’efforcent d’y voir de la possibilité, mais leurs bases
incertaines achèvent de convaincre qu’il n ’y aurait
rien qui éclairât la justice plus qu’elle ne l’est par elle
m êm e et par les règles du droit.
S’il y a dans l ’acte de 1703 un contrat aléatoire qui
ne présente pas au créancier une chance certaine, une
chance usuraire, pourquoi ne faudrait-il pas l’exécuter
plutôt que de jet ter les parties dans le vague de l’opé
ration la plus conjecturale.
U n intérêt de dot est un vrai capital susceptible luim êm e de produire intérêt e x ojjtcio Ju d icis. A v e c ce
capital rien n’empêchait d’aifermer les fruits d’uu im-
�.
*( a 3 )
m euble pour un certain nombre d’années ; c’était une
vente de récoltes a prix fixe.
Pourquoi au parlement de Paris faisait-on imputer
les fruits sur le iprincipal, quand l’intérêt n’était pas
dû. C ’est qu’alors il n’y avait pas de vente valable des
fru its, en ce que le prix convenu n’était pas réel ; il
n ’y avait plus res, consensus et pretium , et alors pour
d o n n e r un prix aux fruits vendus, il fallait le retrouver
sur le capital, qui était la seule chose q u e l ’aclieteur
eût pu offrir dans ce contrat de vente.
Mais quand l’intérêt est légal, voilà un prix certain;
la vente des fruits est donc légale et valable, et jamais
.personne n'osa prétendre qu’entre le prix et la chose
vendue , il fallût toujours une égalité mathématique.
Si c’était un contrat aléatoire, il était toléré et il
l ’est encore. L ’incertitude des fruits a été la règle des lois et celle de la jurisprudence.
L e sieur Deleige a cité plus haut un arrêt de Cater
lan sur l’anlichrèse d’une vigne ; le journal du parle
ment de Toulouse en rapporte un autre plus r é c e n t ,
"du 3 i juillet 1 7 1 4 , qui dans le cas meme où un mou
lin, tenu à autichrèse, avait, été donné a ferme par le
créan cier, pour un prix supérieur a l intérêt de son
argent, n’a pas ordonné l ’imputation de l ’excédant sur
.le capital ; par cela seul qu’un moulin est sujet à de
-grosses réparations et à des.cas fortuits, et qu'ainsi
.malgré la certitude du prix annuel, il restait toujours
l’incertitude du vrai revenu.
f
Si les arrêts du parlement de P a ris, dans des cir-
�( H )
constances d’usure manifeste, n ’ont pas favorisé l’anlichrèse, au moins est-il certain, que dans les cas d’in
térêts légalement dus, il l’a toujours regardé com me
un contrat très-légitime. L e rédacteur de ce m ém oire
a sous les y e u x l’expédition en parchemin d ’un arrêt
rendu au rapport de M .r Dudoj^er , le
25
mai 1 7 8 1 ,
entre le sieur Geraud-M abit et les dames de Caldaguès,
lequel arrêt ne laisse pas le plus léger doute sur la ju
risprudence de ce parlement.
U ne Jeanne Découblat s’était reconnue débitrice du
sieur de Caladaguès, pour légitimes et autres objets,
de 26,3oo liv., le 5 avril 1 6 6 7 , et lui avait donné deux
domaines à antichrèse, pour en jouir tant et si longue
ment qu’il serait en demeure, de payerlesd. 26,300 liv.,
avec convention que les fruits en seraient compensés
avec l’intérêt de ladite somme.
L e sieur M a b i t , acquéreur desdits domaines, et
cédataire des D écoublat, en demanda le désistement
par exploit du 2 juillet 1774 , avec restitution de
jouissances depuis 16 6 7 , aux offres de compenser les
fruits jusqu’à due concurrence avec les intérêts qui
se trouveraient légitimement d u s, et le surplus im
puté sur les capitaux.
L ’arrêt du 26 mai 1781 a condamné les dames de
Caldaguès, à se désister au prolit du sieur M ab il, des
héritages énoncés audit acte de 1 6 6 7 , à rendre et res
tituer les fru its d'iccLix , à compter du 2 ju ille t 1 7 7 4 ,
jo u r de la demande , lesquels seront compensés jus
q u ’à due concurrence, avec les intérêts de leur créance,
échus
�(25)
échus depuis Ledit j o u r 2 ju ille t 1774. Sur le surplus
des demandes, les parties sont mises hors de cour.
L e Code civil n’établit donc pas un droit nouveau,
lorsqu’il dit, article 2089 , que l’anticlirèse doit être
exécutée comme toutes Les conventions qui ne sont pas
prohibées par les lois.
Or il y a lieu de se régler par la loi nouvelle, toutes
les fois qu’elle n ’est pas en opposition à une loi an
cienne, toutes les fois qu’elle se réfère, au contraire,
aux anciennes lois qui existent. S i nempe declaret j u s
antiquum nom constitutio ,* si declaret tantummodo
quod anteà leges caverant. Morn. I n leg. 7 , jj\ d&
Pourquoi donc ici le Code civil ne s e ra it-il pas la
loi des parties? L ’art. 2089 est la copie de la loi 17 au
code de usuris : il n’y a pas de lois intermédiaires qui
aient disposé autrement.
N
Les Astorg ont voulu établir une perpétuelle com
paraison entre le contrat pignoratif et l ’anliclirèse.
Mais personne n’ignore que par le contrat pignoratif,
le débiteur vend son immeuble sous une faculté de
rachat limitée , et qu’il
devient aussitôt son propre
fermier.
*
Ainsi non-seulem ent il court risque.de perdre son
im m euble, faute d ’argent, mais l'incertitude des fruits
tombe encore sur lui seul annuellement.
,
La différence des deux contrats prouve seule la lé
gitimité de l’un, et l’usure de l’autre.*
D ’après cela, il semble parfaitement inutile de reD
�( 2 6 }
chercher s’il y a prescription conire la prétention des
Astorg; car s’ils l’avaient élevée en 1 7 1 4 , ils auraient
été déclarés non recevables à demander une com pen
sation.
Mais en 1 8 0 4 , c’est véritablement une folie de
vouloir revenir contre cette compensation convenue
par un acte, et ratifiée surtout par tant de paiemens
postérieurs.
Quand les parties ont plusieurs fois arrêté des comptes,
soit en 1 7 4 5 , soit depuis, n’y a-t-il pas unepiésom ption
très-raisonnable, que le débiteur a alors fait valoir tous
les excédans de jouissances qui pouvaient m i e u x se véri
fiera ces époques, et que les rabais qui étaient de justice
ont été faits, s’il y avait lieu.
A cela les Astorg opposent une bien pitoyable ré
ponse. Ils n ’ont pas f a i t ni signé ces quittances, disentils; elles sont du fait du créancier, et 11e sont pas dou
bles ; on ne peut les leur opposer.
Mais ce sont eux-m êm es qui les opposent, c ’est leur
libération ; sans elles ils devraient payer 1renie ans
d ’arrérages de plus qu’ils n ’oifrent. D onc ils s’appro
prient ces quittances , donc elles sont virtuellement
doubles, puisqu’elles sont communes aux deux parties,
puisqu’elles sont pièces du procès.
L a cour a jugé le 29 brumaire an 1 1 , contre le sieur
do l’ enautier, q u ’une quittance à lui donnée desinlérêls
d ’un capital, sans réserves, valait acquiescement à la
demande de ce capital. Cependant la quittance n’était
pas double ; il n ’avait pas signé cet acquiescement.
�C 27 )
A u reste et s e u le m e n t, pour ne négliger aucun
m o y e n , quand le sieur Deleige n ’aurait pas pour lui
le point de droit , les circonstances et les réglemens
multipliés qui font entre les parties la transaction la plus
irréfragable, lien ne l'empêcherait de faire valoir la
prescription de trente ans.
I l , a prouvé que l’anlichrèse n'était pas usuraire ,
quand elle a pour objet des intérêts légitim ement dus
Cela
seul répond aux Astorg qui ne prétendaient
h Timprescriptibilité qu'en y supposant de l ’usure.
Mais encore la question n’e s t-e lle pas jugée par les
deux sentences de 17 16 et 1 7 4 5 , qui n'ont ordonné
le paiement des intérêts, et par conséquent le compte
des intérêts, que depuis 1714.
Vigier sentit si bien qu’elles étaient une fin de non
recevoir contre lu i, que par ses défenses, du
août
3
1 7 6 4 , il se réserva de se pourvoir contre ces deux
sentences.
Mais il ne s’est pas p o u rvu , puisqu’il les a exécutées.
Faut-il encore
parler
de l’appel incident des Astorg,
fondé sur ce que le juge du Doignon , en ordonnant
l ’estimation des jouissances, avait prescrit aux experts
de déduire les charges.
Les Astorg supposent que le propriétaire les p ayait,
et non le créancier.
L e prouvent-ils? ils ne s’en sont pas mis en peine;
mais ils prétendent que cela a du être ainsi.
Ainsi cet appel est fondé sur une présomption.
D a
i
�( aS )
Cependant les Astorg auraient pu voir dans les au
teurs déjà cités, que dans les antichrèses, le créancier
étant mis en possession pour un tems indéterminé pro
s u o , doit le paiement des charges. Mais cette nou
velle question est si peu importante qu’il est inutile
de la discuter en point de droit.
Celui qui jouit est présumé payer les charges, car
les charges sont une diminution des fruits annuels. Il
y a quelquefois exception pour des fermiers, mais c*est
que le propriétaire reçoit un revenu annuel par le paie
m ent de la ferm e; et d’ailleurs le bail en fait toujours
le règlement.
Le sieur Deleige ne suppose pas que les Astorg aient
opposé sérieusement, qu’ayant subi deux degrés de
juridiction, il ne doit pas y en avoir un troisième.
Si cela était a in si, il aurait fallu que l ’assemblée
constituante décrétât que tous les procès pendans aux
parlemens étaient éteints, parce qu’ils étaient au troi
sième degré de juridiction. L a loi du 19 octobre 1790,
a au contraire indiqué où seraient portés les procès
alors pendans aux parlemens. O r, celui des parties
était pendant au parlement de P aris, par exploit du
2
3 août
1790.
Il était pardonnable aux Astorg d’opposer tant de
moyens faibles et tant de prétentions bizarres dans le
désespoir de leur cause; mais quand ils taxent d 'indé
licatesse un homme qui peut s’honorer de sa probité
sans craindre de démenti de personne ; quand ils écrivent
�( 2
9
)
que Leur réveil a été commandé par la nécessité de ne
pas laisser perpétuer plus long-tems la rapine de ce
créancier altéré d ’ usure , les Aslorg ont ils cru se rendre
plus recommandables par une injure grossière, qu’ils
s’étaient bien gardés de se permettre en première ins
tance, où les deux p a rt ie s étaient connues.
L à le s ie u r de L e i g e ne s’ en serait nullement offensé ;
là au contraire il aurait félicité Astorg sur un change
m e n t de principes que l’opinion médisante ou calom
nieuse ne suppose pas; et cette opinion même éta
blissait assez de distance entre la délicatesse du sieur
de Leige et celle d ’un Astorg , pour rendre inutile de
sa part toute espèce de justification.
Quoique le sieur de Leige ne soit pas très-sensible à
l'insulte d’un tel hom m e, il ne lui est pas moins pénible
d’être accusé, loin de son domicile, du vice le plus
opposé à son caractère. Heureusement l’homme de
bien n’est pas jugé par l’injure qu’il reçoit. L a raison
évalue l’injure et en scrute l’auteur ; et quand un
Astorg a du scrupule et f a i t de la morale, l’expérience
apprend qu’il n’en fait que pour les autres, et la mé
moire rappelle l’adage de tant de moralistes. Video
meliora , probo q u e , détériora sequor.
MARCHEIX, Rapporteur.
M.e DELAPCHIE R , Avocat.
M.e MARIE, Licencié-Avoué.
M .r
A RIOM, DE L ’IMPRIMERIE DU PALAIS, CHEZ J.-C. SALLES.
�
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Leige, Robert de. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
antichrèse
créances
Description
An account of the resource
Mémoire pour le Sieur Robert de Leige, appelant ; contre François Astorg et Marie Vigier, sa femme, intimés ; et Contre Brigitte Rotquier et Jean-Baptiste Lacroix, son mari, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1714-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0322
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pleaux (15153)
Laval (pré de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Antichrèse
Créances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53638/BCU_Factums_G3021.pdf
114d236d381df3ab9c9d56dde73937de
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Text
PRÉCIS
COUR D’APPEL
DE RIOM
( 2 ' Cham bre).
' pour
M
Jacques M AR IE, appelant ;
A lla r y.
CONTRE
M * PONS-POUZOI-
1° Clément GARDE, avoue au Puy, et Philibert
CHAUCHAT dont il se dit cessionnaire ;
M* D e b o r d .
Et 2° les époux Barthélémy CHAUCHAT, et
Henri SURREL, se disant leur cessionnaire
pour partie tous intimés.
O
S K &
t C
a a
L e sieur Marie a été condam né à faire rapport à la succession
de son b e a u - p è r e , Henri C h a u c h a t, d ’une som m e de
1 1 ooo fr. ,
q u ’on dit lui avoir été payée sur la dot d ’A ugustine C h a u ch a t sa
fem m e. Cette décision se base sur les énonciations contenues dans
i
une p réten du e quittance finale p roduite par le sieur G ard e, et q u i ,
d ’après le sieur M a rie , constitué un abus de blanc-seing. L e sieu r
Marie ne nie pas q u e différentes sommes aient été reçues par lui et
q u ’il en doive le rapport ; mais il dem ande q u e les q uitta n ces q u ’il
a do n nées et dont les ép oux B arth élém y C h a u c h a t sont en posses
s i o n , soient p r o d u ite s , et q u ’un com pte soit fait p our fixer le chiffre
d u rapport.
L ’exposé sommaire des faits prouvera q u e le sieur Marie n'a pu
don n er une quittance définitive et q u e le b illet de 4 0 0 0 f r Pr o
duit par le sieur Garde , n ’a é t é transformé en quittance finale q u e
dans un b u t d e spoliation.
�FAITS.
Henri C hauchat a laissé trois e n rants : À ugustine, épouse Marie ,
P h ilib ert et Joséphine , mariée à B arth élém y Chauchat.
P a r contrat de mariage du 18 juin 1827 , il a constitué à August i n e , épouse M a r i e , u ne dot de i 5 , o o o fr. L ’acte porte quittance
de 2,000 f r . , les i 3 ,o o o f r . restés dus furent stipulés payables en
treize termes é g a u x .e t annuels de 1,000 fr. , du a 5 juin 1828 au
25 juin 1840, sans intérêt q u ’à d é fa u t'd e paiem ent.
Henri C hau ch at ne remplit pas avec exactitude son engagement.
11 paya q u e lq u e s à-com ptes sur Tes termes échus, dans les première?
années qui suivirent le mariage. Bientôt il;fa llu tle poursuivre.
L e 25 février i 8 3 4 , les ép oux Marie lui firent com m andem ent
d e p a ye r les termes éch us eh capital e t a ccessfflresl'H enri'C hauchat
fit opposition le 27 février, mais il en fut dé b o u té par jugem en t du
12 août suivant, qui ordonna la continuation des poursuites avec
exécution provisoire, e n -lu i accordant toutefois un délai de trois
mois pour sa libération. C e jugem en t fut signifié le 27 novem bre;
q u e lq u e s à-com ptes furent payés et l’on suspendit les poursuites.
C epen d a n t H enri Chauchat
riche propriétaire foncier, s ’était
laissé .entraîner à de fausses spéculations sur des reventes d ’im m eub l e s . I I avait des dettes con sidérab les, lorsq u ’à la d^te d e s ( i 4 et
i 5 août 1 8 ^ 7 , tous les biens qu'il; possédait à A lle y r a s , Poutès et
àSt-Jean-Lacham p, furent saisis.
,
.,
■
Plusieurs ; termes d ç J a dot s’ étaient a rré. ra
gé s; le sieur Marie dut
i 10
re p ren dre les poursuites en son nom et celui de ses deujç;cnfanls
m in e u r s , sa fem m e étant d é c é d é e . — L e 29 novem bre « 837, il fit
co m m andem ent en vertu du contrat de mariage et du jugem en t de
i 8 3 4 , de p ayer les termes échus en capital el accessoires,
Ceç.
com m andem ent resté sans eljel^fut renouvelé l c (8 jan vier x 838 ., — Le
1 0 , Henri C hauchat fit op p o sitio n , soutenant au fond .« f]U*
sur les 1 5 ,o o o fr. rccfamcs par M a rie, 8,000 fr. avaient èiètpayés. »
— L e 12 , une-,saisie-exécution eut lieu sur son m obilier e t sur ses
bestiaux^ Dans ( l’acte on voit q u ’il s’étonne q u ’on., saisisse aprè»
son opposition et il ajoute : < Qu'au surplus il ne s'opposait point,
�—
3
—
attendu son impossibilité de payei" en ce moment. » P h ilibert Chauchbt
fils et son oncle P hilippe Chauchat furent établis gardiens. — Mo
8 avril, l’huissier constata q ue1 les gardiens ne pouvaient représen
ter les objets saisis ; assignation leur fut donné le 25 j u i n , pour
avoir à les représenter ou à payer la créan ce des époux Marie en
capital et accessoires.
L e 20 juillet une nouvelle saisie-exécution fut faite par le sieur
Marie sur son b e a u - p è r e , q u i , le lendem ain a i , en demanda la
n u llité , par le m o tif q u ê t a n t gardien judiciaire des imm eubles
saisis'sur l u i , les fruits né* pouvaient ôtre l’ob jet d ’une saisie-exécu
tion. — L e 3 a o û t, Henri Chauchat fait signifier des conclusions
dans lesquelles on lit : « Divers paiements ont été effectués...
s a n t NE D ISC O N V IE N T PAS Q u ’i L
UN S
SOIT E N R E T A R D
d ’e n
TAYER
le x p o -
QUELQUES-
; mais le sicur'M arie avait'déjà exercé des poursuites assez rigou
reuses, et
l ’e x p o s a n t s e s e r a i t
sans doute
l i b é r é s ’i l e u t p u p l u s t ô t
et
s ’ il n ’ avait été inopinément poursuivi par un créancier qui a dirigé
contre lui une procédure d ’expropriation... »
1
i!
L e 3 i août, Henri Chauchat donna procuration aux sieurs C h a u ssen'dè1; p rêteu r d ’argent',11 et G a r d é ’,’ 1clerc d ’a v o u é , de vendre ses
im m eubles et d en tou ch e r lé prixJ* Plusieurs ventes eu ren t lieu à
la date du l ’septem bre.
1
H enri C hau ch at’ ,' poursuivi par le sieur M arie, son g e n d r e , reçu ty
à c elte époqiïe^des tnàins de Chaussende u ne somm e de 4,000 fr.
q u ’il rem it au sieur Marie à condition q u ’il suspendrait ses poursui
tes (jt'q u ’il^garantirait le rëm bou rsem ent de cette somme à Chaus¿ende dans le das où Henri C hau ch at ne la paierait pas. C e lte pro
position fut acceptée. Marie signa un billet en faisant p r é c é d e r sa
signature de ces mots : Bon pour quatre mille francs. Ce 'b ille t fut
déposé ch e z M* L io g ie r ,'n o ta ir e , et ne devait être remis q u ’en p ré
sence de toutes les parties.
C ’èst ce billet de g a r a n tie , r e m is e n b la n c /et q ù ’on a transformé en
une quittance finale des i 5 ,o oô fr. constitués en dot à la dame Marie,
qui est la piè*ce principale dii procè-s. Nous la transcrivons en entier.
*' « Je soussigné Jacques M a rie, p rop rié ta ire , habitant
L a b o r i e , com m une de Ceaux-d'Allègre*,
p e r s o n n e l, q ue com m e
agissant
lieu de
tant en mon nom
tuteur> légal d e r mes cnl’ants
»
m in e u rs,
�déclarqjavoir r e ç a de M. G arde, clerc d ’avoué, .habitant au P u y , la
s^hime dc.iquatre m ille francs ,à moi restée'<lue ,,ta n t en capital
qu'intérêts ,çt frais sur la constitution de dot faite par INoël-IIenri
C hau cliat, lors de inon'contrat de mariage avec Augustine Chauchat,
en date du 18 juin 1827,, subrogeant l e d it,M . G arde,à mon lieu et
place. D é p l u s , dans le cas de non allocation en rang u tile -d e la
.susdite s o m m e , tant p our le c a p ita l’ que pour les intérêts q u ’elle
p r o d u i r a i partir de ce j<?ur, je m ’oblige , après la clôture de l ’ordre
qui pourra s ’ouvrir contre mon b e a u - p è r e , à rem bourser
audit
M. Garde la susdite som m e de, quatre, mille francs, avec les intérêts
à partir de c e jo u rd ’hui de m êm e que tous les* frais qui pourraient
être exposés.
,
•
» Au P u y , ce 6 septem bre 1 838 . ,
ï
B on p our quatre ¿mille fra n cs,,
Signé M A R I E , ,
» Yisé pour timbre e t enregistrem ent,
» le ¡4 avril 1848. »
. Le, 8 sep tem b re, Philibert. et^Philippe Chaucliat,! gardiens? firent
^.¡"nifipr, en réponse à l’assignation $ij-25 juin, des conclusion^dans
lesquelles ils soutiennent : q u ’on ne pouvait les faire condamne^,,fjà
défaut de représentation des objets saisis , « au paiement intcgrftl 4*
la créance M ariç qui se porte poutre
FKAPiCs
, tandis (¡ue lcs^objets,sa.i&is ne
A M- -somme .d e d i x
valant q u ’ une somme de
quaire je n is fra n cf___» ■
P a r acte j e ç u L jo g je r , notaire, le 4 -inovcxnbrc, II. Chai^çjiat, çqy
cqnm it devoir àjC baussende e t (Gar,de* ses. mnn.dataires,, u n e s o m m e
de a 5jO oq (fr., p o u r prêt fait ta n t,c i-d e v a n t q u e présentem ent.. 11
fut expliqué^que ce prêt lui était fait ta n t'p o u r ses besoins persorçr
ncls q u e pour l ’acqu ittem en t q u ’il se proposait dp faire de ses dette,}.
11 délùgue en paiem ent différentes c ré a n c e s , c l déclare approuver
les ventes faites p a s s e s m an dataires, le.,2 sep tem b re p ré cè d e n t’.)
L e 3 février i 83 g , Mariq;qui n ’avait point été c om p lètem en t d é
sintéressé p a r le
m ande eu
i>ai?mpp4()chi 6,£çptçiribj'e i 838 , forma .une d e
subrogation: i j a (.saisie im m obilière , e t la dénonça 4«
•() marSjMiivant.à M. Chauchat.
L e 19 février, il fil,un ,comtnatidpineu.t suivi d ’un.prQcès, verbal
�de carence. C et a c t e ,.s ig n é par, i\l.. Chanchat ^constate, qu il a(1r é pondu : ne pouvoir payer de suite n ’ ayant deniers en. mains, pour
se libérer.
’
C.
,,Le >3 juin 1 83 g,;II. C ha u ch a t signifie des conclusions sur la ,d e
mande en subrogation. O n,y trouve c e c i : « En supposant pour\ un
instant que,'le sieur M arie soit encore ,créancier de quelque petites
choses.,, il,n’aurait pas pour cela droit de demander la su brogation ...»
L e 23 août, Marie fait faire .un nouveau commandetnent;i/<? payer
le montant de tous les frais
échus.
,
t
■
L e 26 du même mois „ fut dressé un procèsr-verbal de carence).,
II. Chauchat reconnaît q u ’il n ’est point libéré et s’exprim e ainsi cru
réponse au com m an dem en t :
« A quoijil a répondu* qu'il n ’y, avait pas si lon gtem ps que M arie
» reçut de lui une somme de quatre mille francs ;
»
q u ’i l lu i d e v a it e n c o r e
q u ’i l
sa v a it
b ie n
; m ais que d 'ici à la Toussaint prochaine ,
» il le sortirait de chez lu i, comme il, a sorti les autres
mais qu’ il ne
» pouvait rien ,m ce m om ent, à moins, que,[Marie veuille s’arranger
», avec lui d ’ une manière satisfaisante,¡pour prendre quelques créances,
» que ledit sieur Chauchat lui déléguerait avec sa
».
prenne des biens fonds
g a ra n tie
,uou qu’ il
p o u r c e q u ’i l r e s t e l u i d e v o i r . . . »
, C elte réponse est signée par II. C hauchat.
II. C h a u c h a t(est d é c é d é vers la mois d ’avril iS^o.
P h ilibert Chauchat, après avoir accepté bénéficiairement. sa, suc
cession, introduisit une d e m a n d e e u partage, par acte des i 3 et 1 6 oc
tobre 1840. L e 17 avril 1 8 4 1 , les époux B arth élém y C hau ch at d é
clarent aus^i n ’accepter,1a succession q u e sous bénéfice d ’inventaire.
Q uant à Marie, h 9 août suivant, conform ém ent à la délibération,
du conseil de fa m ille , en date d u . 28 o c to b re 1 8 4 0 , il répudia, au
nom de ses m ineurs, la succession pour s ’en tenir à l’institution conr
• tfactuellç. du »8 juin 1827. L e partage fut ordonné par jugement
<Iu 10 août. L e s experts déposèrent leur rapport le 21 n o vem b re i 84 2 »
ej,.estimèrent les, valeurs im m obilières à 6 o ,o 5 2 fr.
•-
C e partage ne fut pas m ené à Gn. L a saisie ¡minobil'1^
rQ~
i
pcjse, e l l e iG.juillçt 1.845 , G arde devint adjudi,cataire des proprié
tés d ’II^nrj C b a u c h a t, m o yen nant 36 . 5 oo fr. Un ordre fut ouvert.,
Mmie, c o llo q u e dans l’ordre provisoire, ne le Ait pas.dans le r.églc-
�m ent définitif à cause de I’insuflîsance des fonds. L ’ordon nance de
clôture ne fut rendu e q u e le i 4 avril 1848.
i(' j
L e 3 o avril 1 8 4 6 , Garde avait retiré des mains de M. de Y e y r a c ,
notaire au P u y , successeur de M 'L io g ie r , le billet de 4 >°o ofr.<, signé
en blanc par Marie. Il en donna une déch arge ainsi c o n çu e :
« Je soussigné, G ard e, avoué, reconnais avoir retiré d e s mains de
M« de Y e y ra c , notaire , un billet de q uatre mille francs en ma faveur
par M. M a rie , lequel billet ne sera par moi exigé contre Marie que
dans le cas où je ne recevrais pas mon allocation utile en sous-ordre
de la créance de ce dernier contre la succession de N oël-lien ri
C h a u ch a t.
M. de Y e y r a c , en donnant copie de c e t t e ' q u i t t a n c e , reconnaît
q u ’il a remis ce billet en blanc. Nous allons voir dans q u e l intérêt il
a été rempli.
L e 2 d é c e m b r e , P h ilibert Chauchat fit cession à’G arde, par acte sous
seing-privé, de tout ce qui pouvait lui être dû par Marie s u r l ’action
en retran ch em ent de la dot, ainsi q u e de différentes autres créances.
L e montant de cette cession fut fixé h i , 5oo fr. p our la p e r c e p t i o n ^
des droits d ’enregistrem ent.
L e 17 août 18 4 7 , B arthélém y C h a u c h a t , com m e époux de José
p h in e, fit cession au sieur Surrel d ’une som m e de i , 35 o fr. à lui
due par Marie pour intérêt pendant n e u f ans de la som m e capitale de
3^000 fr., provenant du rapport q u ’il doit faire à la masse de la suc
cession.
•
L e 29 sep tem b re 18 4 7 , G ard e, c o m m e subrogé aux droits d e P h .
C h a u ch a t, par l’acte du 2 d é c e m b r e 1 8 4 6 , prit inscription sur les
biens d e Marie pour une som m e d e 9 ,7 7 7 fr. 7 7 c . , formant les trois
quarts de celle de i 3 , o o o f r . , reçue en avancem ent d ’hoirie sur celle
de 15 ,ooo fr.
P a r exploit du a 5 février 1848, les ép ou x B arth élém y C hau ch at
et le sieur S n rrel, firent assigner Marie , pour voir dire q ue la dot
constituée a August'me C h a u c h a t, serait réduite à moitié , tant pour
sa part virile q u e pour son p r é c i p u t , et se voir en c o n s é q u e n c e
con d a m n é à p ayer, i° 3 ,7 5 0 fr. p o u r un quart de la dot , et 20 les
intérêts depuis le décès de l ’auteur com m un. —
L e 21 mars, assi
gnation est donnée à P b . C hau ch at, pour voir s t a t u e r , co n join te-
�m on t avec lui sur la dem ande du a 5 févrierJ — ¡ l é i 4')uin, Garde ,
agissant com m e cessionnaire de P h . C ha u ch a t /'intervint dans l’ins
tance. ’
*r
L e s intérêts de* Marie ne furent point défendus en prem ière ins-'
tance. Un prem ier jugem ent par défaut fut r e i i d u , et lé-tribunal
statua sur l’opposition sans q u ’il y eût de plaidoirie!
Ifl
L e 3 o août 1 8 4 8 , le tribunal rendit un ju g em en t de défaut, par
lequel il joignit la dem ande du 25 fé y r ie r 1 1848 à ia demande en
partage de 1841 î dit q u e l’actif de ia'succe'ssiony'déduction'faite de
4,000 fr. qui doivent être rem boursés â G ardé, ^e réduit ‘à* 1 i 'b d o f r .
touchés par Marie ; ordon ne que''sur cette somm e Marie se retiendra
un quart par p r é c i p u t , plus sa réserve, c ’èst-à-dire la m ôitié, et q ue
l ’autre moitié sera divisée entre P h ilib e rt et J o s é p h in e 1C h a lic h af ;
condam ne , en c o n s é q u e n c e , Marie à payer à chacun de ses c oh éri
tiers 2 ,7 5 0 fr. formant le quart de x 1,000 f r . , avec intérêts depuis
le décès du sieur C hauchat p ère, sauf au sieur S u r r e l'à prélever sur
les intérêts le prix de sa cession; ordon ne enfin q u e les fra is’enitreront en frais privilégiés de p a rta g e , suivant l'a m e n d e m e n t de cha
q ue cohéritier.
,ri
f;
Marie forma opposition à ce j u g e m e n t, le \[\ octo b re , mais il en
f u t débou té par jugem en t du i 3 juin i 84 y ;* ce jugem en t, q u o iq u e
rendu contradictoirem ent, le fut, nous le répétons, s a n s q u ’il eût été
plaidé dans l'intérêt de Marie , et q u ’on eût fait connaître les actes
si importants q u e nous venons d ’analyser.
^
A ppel a été interjeté par Marie, le 19 septem bre 1 8 4 9 , des deux
j u g e m e n ts , en date d es. 3 o août 18^8 et i 3 juin 18/19.'Il soutient
q u e les sommes touchées par lui sur la constitution
dotnté sont
bien inférieures à celles m entionnées dans le j u g e m e n t, et qùiè les
condamnations doivent être réduites sans égard à une orétéridue
quittance finale qui constitue un abus de blanc-seing,
" '«• ....... D I S|i>'4
C U VS .S I O I Ï * "
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+
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-•Uj f j Jj c.
L exposé 'des f a i t s , le rap p ro chem ent des actes *sufliscnt' i démôtitrer—
q ue les prétentions du s ie u r 'M a r ié 1 sbrit fomdééfeV - ^ ' q ue
3’acte du ¿ 'se p tem b re Î 858 n ’efet pà!31& r ic u x V ‘-!-^*ll u ’i l 'i i est pas sîn-
�c è r e , : * - q u ’jil, n’est pas l ’expscssjon de la >;plonlé de^.pa^tîcs-^-et. rç.e
constitue q u ’un ipdi^ncjçt, coupa^lc^abua de^blanc-sejog dans un
b ut de spoliation.
•
i° La prétendue, quittance /inqlq. du 6 .septembre i838, n’a, ju if ¡c te
rédigée alors dans (a form e qu’ elle a aujourd’hui.
i
Marie le nie et soutient, u’av-oji; appos,é au-dessus d e sa signature
q ue ces mots;: Bon pou r quatre mille francs. .
.
L ’cta t.ip a té n el d p (l.’a|Cte.Ifi prouve
.1
-,
. -.,i
11 est rem pli d ’unp autre mai# q u e cçjle dp Marie
, y xj’ q été remis, à,Garde q u e le 3 o avril 1 8 4 6 ;
,'
,
, II.n’;a été enregistré,.que 16,14 avril ¡1848;
./
.... , . ^
I L Cfyouvy „ ancien avqué ç t représentant ,j déclare q u e le billet
.¡. M° <Je Yqyrac recor)naît,qu’il a remis un bqn.en blanc.
E n fin , or},£n coffre la prpiive sj’il y. a la m o i i ^ e incertitude.^ ...
2 0 L e billet en blanc n ’ a p o in té te rempli conformément à sa destin
i .
••'[ii<î. ;o ; 11c
i> r:-;
:
;1jL€S, ïnots, »»crits par Marie : S a n pour quatre mille francs * iq d ir
q u e n t un billet et non une quittance.
Çu on eût .vquliji f«nr<f une . qui.t.tapçe, pn eû t mis, : Bon, pour
q u itta n ce
de quatre mille francs.
.•Marie, maire depni^, i 5 ans de la com m un e de C e a u x , aurait
écrit luirmême la qu^'ttaijce.
Une quittance définitive aurait été passée par acte authentique r
où ç n aurait au m oins( exigé q u e Marie m entionnât q u ’il jdoonait
quittance finale ;
•
. <Z ->1; ............ .. . li;
Il est (itrange q ue ce qui est d û ç n capital, int^fûts et frais,..^é|i;vç
pxactenient à ^ ç o o fr.
.. ,
¡,
■3®.M arie y 'a donné qu ’ un billet, de garantie poufu Çhassendc, dans le
cas où ce \ >derniffi ne sçfa it pas remboursé,par Çhauçhat.
L a situation de Henri C h a u c h a t, poursuivi par Marie et qui avait
don né m andat à Chas$pnde e t Garde d « 'v e n d r e scs p r o p r ié té s , le
•
Il
, I
1
4
l
,t '
'
#
fait supposer, il paye pour arrêter Tes poursuites et avoir le temps
p ijjà , plusieurs,, v e n t e r o n t eu ;U c.u ;,d e s
S fip m çs Qnt,^,^
tKft<f-°l*
^
^
’a.iitipqs' lq
r w M ,i c n tô ^
billçt
d y rçosé/çh e* 1J* JL iogiçf, ^ q n ^ c , une ga ra n ^ e i.p o u c, Ç(iau<;sçnde
�—
9
-
qui a pu avancer les fonds (Garde, clerc d ’avou^alors^sans fortune,
n ’a pu rien d o n n e r ), et qui réglera ses avances en les compensant
avec les prix d ’immeubles q u ’il doit toucher ou les causes de l ’o b li
gation du 4 novembre 1 838. Tous ces faits seront prouvés s’ils sont
contestés.
4° Le billet en b l a n c d a t é du 0 septembre 1 8 3 8 , ne pouvait pas être
destiné à une quittance et surtout à une quittance finale.
Au 6 septembre 1 838 il restait deux termes à éch oir sur la dot :
mille francs le a5 juin i 8 3 g , et mille francs le a5 juin i 8 4 o .
Ilenri Chauchat poursuivi depuis long-temps par de nombreux
créanciers, dont les immeubles sont saisis, qui a donn é une pro
curation pour vendre ses biens, ne pouvait aivoir ni la v o lo n té , ni la
possibilité de payer par anticipation.
(
<
S’il eût payé par anticipation, après les poursuites nombreuses de
M arie, il eût voulu une quittance précise dans ses énonciations,
authentique, et ne se serait pas contenté d ’un bon en blanc.
■;
Enfin on rapporterait des quittances partielles, justifiant la possi
bilité d ’un paiement définitif, au lieu de se refuser à produire les
quittances q u ’on a en main.
5° Les poursuites de M arie, postérieures au paiement de 4 ,0 0 0 fr.
fait le G septembre 1 8 3 8 , prouvent qu’il n’était pas complètement désin
téressé.
3 février i 8 3 g , demande en subrogation à la saisie im m obilière;
19 février, commandement avec procès-verbal de carence par
lequel Chauchat se reconnaît débiteur.
19 mars, dénonciation de la demande en subrogation ;
23 août, com m andem ent de payer les termes échus;
26
■ ■
1
août, nouveau com m andem ent avec procès-verbal de carence,
de.payer les termes échus, par lequel Chauchat, indiquant q u ’il a payé
4,000 fr. se reconnaît encore débiteur et offre pour se libérer des
immeubles ou des c r é ? n c e s ;
3 0•,\février 1840,
» conclusions sur la demande en subrogation.
O.
Si Alarje est-désintéressé, osora-t-il poursuivre son beau-père?
..Si Chauchat cal libéré,j)erm etlra-l-il à son gendre ces poursuites
réitérées?
,
.¡¡i;-
lilil
6° Les aveux de Henri Chauchat démontrent qu’if est débiteur :et que
�10
—
—
le paiement de. 4,000 fr ., le G septembre 1838 , ne le libère pas complète
ment.
. '■
H a une position obérée.
11 a toujours été poursuivi depuis i 83 /j jusq u ’à son décès en i8'|f>
par son gendre.
‘
L e i o janvier 1 838 , dans son o p p o s itio n , il Soutient : « que sur
les 15,000 fr. réclamés par M arie, 8,000 fr. seulement avaient été payés.. »
L e 3 a o û t, il dit dans ses conclusions :
« ...... Divers payements ont été effectués...
v ie n t
pas
q u ’il
so it
en
retard
d ’e n
L ’e x p o s a n t
payer
ne
Qu e lq u e s- u ns
d isc o n
; mais le
sieur Marie avait déjà exercé des poursuites assez rigoureuses , et
posant
se
se r a it
sans doute
lib é r é
s ’i l e u t
pu
plus
t ô t
,
l ’e x
et s'il n’avait
été inopinément poursuivi par un créancier qui a dirigé contre lui une
procédure en expropriation___»
L e r g février r 83 g., il répond au com m andem ent qui lui est sig
nifié : « ne pouvoir payer de suite n’ayant deniers en mains pour se libé
rer,...» et signe sa réponse.
L e i 3 juin , il écrit dans ses conclusions : « En supposant pour un
instant que le sieur Marie soit encore'créancier de quelques petites choses,
il n’aurait pas pour cela le droit de demander la subrogation. »
Enfin , le 26 août 183c), il avoue dans le procès-verbal de caren ce
q u ’il reste déb iteu r malgré le paiement des 4,000 fr. reçus le 6 sep_
tem bre i 838 , et signe :
« A quoi il a répondu qu’ il n y a pas si long-temps que Marie reçut de
lui une somme de quatre mille francs ;
v a it en co re
q u ’i l
sa v a it
b ien
q u ’i l
lui
de
; mais q u e , d ’ici à la Toussaint prochaine, il le sortirait de
chez lui comme il a sorti les autres ; mais q u il ne pouvait rien en ce mo
ment, à moins que Marie veuille s'arranger avec lui d’une manière satis
faisante , pour prendre quelques créances que ledit sieur Chauchat lùi
déléguerait avec sa
q u ’i l
reste
loi
g a r a n tie
d e v o ir
, ou qu'il prenne des btèns fonds
pour
cf.
...»
O r, cette réponse est faite an com m andem ent du 26 août qui r e
nouvelle celui du i 3 , '¿t par lesquels on ne dem ande q ue le paie
ment des termes échut.< On reconnaît q u c l e s 4 >ooo fr. ne com plètent
pas la libération, et 011 s’explique q u ’il doit en fttre a in s i, puisque
dans l’opposition du 10 janvier 1 858 , on avouait n ’avoir payé q u e
�—
11
—
8.000 fr. sur les i 5 ,ooo fr. constitués en c l ô t , cV st-à-dire les an
nuités é c h u e s du 25 juin i 828 au 25 juin i 833 . En payant 4 ,0 0 0 fr.
le 6 septem bre 1 838 , on ne faisait don c que. payer les quatre an
nuités échues de i 834 à 18 37, sauf à tenir com pte .dès intérêts qui
avaient c o u r u , e td e .s fro is considérables qui avaien t été fait».
Si Chauchat est Jibéré ^ s’il >a une q uittance 'finale , fera-t-il ces
aveux? Se laissera-t-il poursuivre sans s e -p la in d re , sans p r o te s te r ,
sans justifier de sa libération ? u
il, -
•
’ ' ■
)
*' i
7* Les aveux de Philibert Chauchat, cédant de Garde, prouvent g u u n t
quittance définitive na.pas été,donnée par M arie.
En effet, le 8 septem bre 1 838 , d eu x jours après l e 'p a i e m e n t ,d e
4.000 fr. q u ’il,a d û !nécessairem ent connaître,,fil soutient!: qu!onaie
saurait le condam ner à défaut de représenter des objets saisis,et dont
il est g ardien , 1 au paiement intégral de la créance Marie qui se porte,
outre les accessoires,
A la. s o m m e 'd e d i x m il l e f r a n c s . . . .
»
8° Enfin, les aveux de Garde luùmême conduisent à la même solution.
L e 2g sep tem b re 1847»
prend une inscription c o m m e cession-
naire de Pli. Chauchat pour la som m e de 9 ,7 7 7 fr. 77 c . , formant
les trois quarts de ce lle de i 3 ,ooo f r . , reçue par Marie en avance
m en t d ’hoirie sur celle de 1 5 ,oo o fr.
O r, le 3 o avril 1 846 , il a retiré des mains de M. V e y ra c l ’acte du
6 septem bre i 838 .
Si cet acte n ’était pas un blanc s e i n g , si cet acte portait réelle
m en t quittance définitive de la d o t de
i
5» oqo , il ne pouvait l’ign o
rer. P o u r q u o i donc n’évaluc-l-il q u ’à i 5 ,o o o f. les sommes payées? Il
le fait sans doute parce q u e le blanc seing n’e it pas encore r e m p li,
q u ’il n’a pas songé à en
faire une quittance définitive et q u ’il ne
calcule, c o m m e p a y é s , que les termes é c h u s , tout devant faire sup
p oser, tout lui donnant la certitude que Chauchat n ’a pas payé par
anticipation à son g e n d re les termes à échoir.
Nous avons don c dém ontré ju sq u ’à l'évid ence l’indigne abus q u ’on
a fait du b la n c seing remis par Marie, et la n écessité, pour fixer le
rapport q u ’il doit faire à la succession de son b e a u -p è r e , d ’exiger la
production des quittances partielles q u ’il a do n nées et qui seules
p euvent et doivent fixer sa position.
11 u ôus resterait à re ch e rc h e r si les autres énonciations de la p ré-
�tendue quittance du 6 sep tem bre 1 838 sont sincères ; — si les fonds
ont été fournis par G a r d e , clerc d ’avoué^ alors, sans fo r t u n e ': —
l ’on est convenu
si
q u e dans le cas de non allocation en rang utile-
à un ordre qui ne devait s ’ouvrir que huit ans a p rè s , en 1 8 4 6 , sur
des biens adjugés le 16 juillet 1 845 , il pourrait réclam er les 4 o o o f.
en capital et in térêts; — si cette somme avancée p a r C h a u ss e n d e ,
ne lui a pas été re m b ou rsée par C h a u ch a t... Nous réservons cet
exam en et celui de q u e lq u e s questions accessoires pour la plai
doirie.
’
'
Nous n ’avons voulu, nous le répétons, dans c e t exposé somm aire;
q u e préciser les faits essentiels et rapprocher les actes les plus im
p o rtan ts, laissant à la c o n s c ie n c e du magistrat le soin d ’apprécier
•la moralité de ce procès.
.-
‘
M* F é l i x GRELLET ,
M* A L L A R Y , avoué.
a v o c a t
.
i'T;>
RIOM IMP DE E LEBOYER
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Marie, Jacques. 1848?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
F. Grellet
Allary
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
blanc-seing
saisie immobilière
experts
avancement d'hoirie
élections
opinion publique
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Jacques Marie, appelant ; contre 1 ° Clément Garde, avoué au Puy, et Philibert Chauchat dont il se dit cessionnaire ; et 2° les époux Barthélemy Chauchat, et Henri Surrel, se disant leur cessionnaire pour partie ; tous intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie B. Leboyer (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1848
1827-1848
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G3021
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G3022
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Coverage
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Le Puy-en-Velay (43157)
Alleyras (43005)
Saint-Jean-Lachalm (43198)
Chambarel (terre de)
Céaux-d'Allègre (43043)
Rights
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Domaine public
avancement d'hoirie
blanc-seing
élections
experts
opinion publique
saisie immobilière
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53547/BCU_Factums_G2710.pdf
96a21f5ce048a5414f6c226cdc28fb3e
PDF Text
Text
COUR ROYALE
DE
POUR
MARIE, Licencie-Avoué près la Cour
royale de Riom, appelant de jugement rendu au
tribunal civil de Riom , le 24 mai 1832
Jean -B ap tiste
CO NTRE
,
MM. CHIROL et H U G U E T intimés.
privilèges sont de droit étroit. Ils n’existent pas s’ils ne sont
établis par une loi positive, claire, formelle. S ’appuyer sur quel
ques expressions vagues et mal définies, pour accorder un privilège
L
es
qui n’est pas spécialement écrit dans la lo i, c’est créer un privilège i
c’est se rendre législateur; c’est se livrer à l’arbitraire.
Il est aussi de principe élémentaire que la cession ne transmet pas
au cessionnaire plus de droits que n’en avait le cédant lui-même ;
que par conséquent le cessionnaire 11e peut exercer que les actions
qui auraient appartenu au cédant ; que le représentant ne peut
obtenir plus que celui qu’il représente, ni autrement, ni par d’autres
voies.
Enfin les élémens du droit nous apprennent encore que celui qui
a possédé paisiblement, pendant plus de trente ans, un immeuble
qu’il avait acquis ; que ce possesseur , contre lequel aucune récla
mation ni directe ni indirecte n’avait été élevée pendant sa longue
possession , devait se considérer désormais à l’abri de toute action,
de tout trouble, de toute charge résultant de l’origine de l’immeuble
acquis; qu’il devait se reposer en paix sous la protection du régime
conservateur de la prescription.
Toutes ces régies salutaires ont été méconnues par les premiers
juges dans la cause des sieurs M arie, CHirol et H uguet. C'est ce que
le sieur Marie se propose de démontrer.
RIOM .
�FAITS.
L a contestation qui divise les parties est née dans l’ordre du prix
du domaine deLafont, vendu par Anne-Françoise de V eyny de
Villemont, veuve De M ariol, au sieur Massis.
L e sieur Marie demande à être colloque à son rang pour une
créance inscrite le 14 janvier 18 17 .
Les sieurs Huguet et Chirol veulent s’arroger un privilège pour
des frais faits en appel par Paul-Augustin de V eyny de Villemont,
leur client, sur une instance en partage dans laquelle plusieurs
arrêts ont été rendus par la C our, dont le plus ancien est du 22
janvier 18 19 .
L e domaine de Lafont dépendait de la succession de PierreGilbert de V ey n y, ouverte en 176 7, et qui, àson ouverture, était
divisible entre huit enfans.
Pour couvrir la dame Dauphin de Montrodcs, sa v e u v e , de son
douaire et de l’intérêt de ses créances et reprises , il lui avait été
fait un abandon de biens en jouissance, par un traité de famille, du
a 5 février 1778 . E t du surplus des biens de la succession il fut fait
un partage provisoire, le 23 juin 1779» à l’exception toutefois des
domaines de Lacombe et du Chancel, et d’un ténement de terre
appelé la G arenne, qui furent mis en réserve pour en appliquer ta
revenu au paiement des rentes et charges viagères dues par la
succession.
P ar ce partage provisoire, Paul-Augustin, fils aîné, seul majeur,
reçut un lot considérable, soit en raison des avantages que lui avait
faits le père commun, soit parce que tout semblait le favoriser pour
lui faire attribuer un lot de convenance. Au lot de GaspardMelchior de V eyn y de T c ix , l’un des enfans puînés, il échut un
domaine appelé de Lafont.
Mis ainsi en possession de ce domaine, le sieur de V eyny de
T cix en vendit des héritages détachés à divers particuliers, et le
surplus fut vendu par lui à la dame de M ariol, sa sœur, par acte
authentique du iG juillet 1784. Depuis celle époque la dame
�de Mariol en a joui sans trouble jusqu’au moment où elle l’a ellemême aliéné, comme nous le dirons bientôt.
Cependant le partage général de tous les biens provenus du
sieur de Veyny pcre ayant été démandé, il fut ordonné d’abord par
sentence du i 5 décembre 17 8 5 , ensuite par un jugement rendu au
tribunal civil de Clerinont, le 21 avril 1 8 1 5. Ce dernier jugement
a été confirmé dans la suite, sauf quelques modifications, par un
arrêt de la Cour , du 22 janvier 18 19 .
L ’on remarque, dans le jugement de 1 8 1 5 , que, tout en re
connaissant que le partage de 1779 n’avait été et n’avait pu être
que provisionnel, on en maintient cependant les effets. Car, comme
plusieurs des cohéritiers, et notamment le sieur de V eyny aîné , et
le sieur de V eyny de Teix avaient vendu des immeubles mis à leurs
lots , on ne les soumet pas à rapporter ou faire rapporter ces
immeubles en nature. On ordonne seulement qu’ils les rapporteront
fictivement. Voici les termes du jugement :
« Ordonne qu’au même partage tous les cohéritiers rapporte
ront les immeubles qu’ils ont reçus , ou leur valeur par fiction en
17 8 5 , d’après l’estimation qui en sera faite par les .experts qui
procéderont audit partagé »
J
Ce même jugement ordonne aussi que les experts feront échoir,
au lot de ceux des cohéritiers qui-ont vendu, les objets par eux
aliénés.
Enfin il renvoie les parties à un compte à faire entr’elles sur
toutes les demandes en rapports et préleveinens.
L ’arrêt du 22 janvier 18 19 confirme le jugementsur ces différons
points , et compense les dépens pour être employés en frais de par
tage , dépens dont il accorde la distraction à M'* H uguct, G a rro n ,
Doniol, Beaudcloux , Marie et Breschard, tous avoués dans la
cause. M* lluguet «'lait l’avoué du sieur de Vfcyny aîné.
Par suite de ces décisions judiciaires , un r a p p o r t d’experts fut
dressé ; il fut clos le 27 mai 18 2 1.
Ce rapport contient l’estimation, valeur de 17 8 5 , des immeu
bles délaissés à chaque cohéritier par leparlagc provisoire de 1779.
On y voit que ceux qu’avait reçus le sieur de V eyn y aîné , iiulé-
�pendamment même de la terre de Gannat, étalent d’une valeur de
i 63 ,c>4o fr. ( V oir le chapitre i er, section i r* du rapport).
L e domaine de Lafont y est aussi estimé, comme reçu et rapportable par le sieur de V eyny De T eix, et on l’évalue 26910 fr. (Voir
la seconde section du même chapitre ).
A la suite de l’état estimatif et détaillé des biens, les experts ont
fait la récapitulation de toutes les valeurs sujettes au partage , et
qui s’élèvent à 490,700 fr., valeur de 178 5.
Ce tableau général, qui est divisé en autant d’articles qu’il y à de
sections ou de subdivisions de sections dans l’état général des biens,
a eu pour b u t, disent les experts, de faciliter les comptes, en ce
qu’ il indique les objets attribués ci chacun des cohéritiers p a r le
partage de 17 79 j et p a r su ite, les rapports dont ils sont tenus.
Pour remplir ce b u t, les experts présentent aussi le résumé des
différentes mutations , en indiquant les biens qui ont été vendus
p a r chacun des cohéritiers , et ceuoc qui existent entre leurs
mains.
Ils indiquent notamment comme vendus par le sieur de V eyny de Teix les objets compris en la seconde section du chapitre premier,
c’est-à-dire, |û.domaine de Lafont, montant, disent-ils, à 2 6 ,9 10 fr.
Dans ce rap po rt, il n’est pas question de la dame de Mariol ,
quant au domaine de Lafont ; .il n’y est pas même dit qu’elle le
possède en tout ou en partie , encore moins qu’elle le rapportera
au partage. On ne parle de la dame de Mariol que relativement
à d’autres objets qu’elle avait reçus par le partage provisoire
de 17 7 9 , et qu’elle devait rapporter au partage définitif.
Ainsi les opérations des experts ne considéraient le domaine de
Lafont que comme attribue au sieur de V cyny de Teix seu l, et ne
déclaraient aussi que le sieur de V cyn y de Teix seul tenu du
rapport an partage de la valeur de ce domaine, fixée à 26910 fr .,
en sorte que ces opérations étaient en harmonie parfaite avec le
jugement de 1 8 1 5 , qui, en ordonnant le partage, avait soumis à un
rapport , fic t if seulem ent , et valeur de 17 8 5 , ceux des cohéritiers
qui depuis le partage provisoire de 1779 auraient aliéné les biens
qu’ils avaient alors reçus.
�(5)
La dame de Mariol n’avait donc p as, d’après ces opérations, pas
plus que d’aprcs le jugement de i 8 i 5 , à rapporter au partage ce
qu’elle avait acquis du domaine de Lafont, en nature ou en valeur.
Ce rapport ne concernait que le sieur de V eyny de Teix.
lie procès-verbal des opérations des experts a été homologué,
sauf quelques modifications, d’abord par un arrêt par défaut, du
5 janvier 18 2 4 , ensuite par un arrêt contradictoire , du 16 juin 182^;
et les parties ont été renvoyées aux comptes à faire entre elles ,
comptes qui devaient sur-tout porter sur les rapports fictifs à faire
en valeur de 17 8 5 , par chaque cohéritier, pour les biens qu’il
avait reçus lors du partage provisoire de 17 7 9 , et qu’il avait
aliénés depuis.
Les arrêts de 1824 et de 1828 ordonnèrent, comme celui de 18 19 ,
que les dépens seraient employés en frais de partage , lors d u q u el ,
disent-ils, il en serait f<iitprélèvem ent au profit de M '3 C h iro l ,
D ebord, L au ssedat , Tailhand et V eysset , avoués des parties.
On voit qu’aucun de ces jugement et arrêts ne soumettait la dame
de Mariol à rapporter en nature, ou fictivement, le domaine de
Lafont qu’elle avait acquis en 1784 , du sieur de V eyny de Teix ,
son frère \ ce rapport 11e lui avait jamais même été demandé, et le
sieur de V eyny de T e ix , seul, en avait été déclaré tenu.
Cependant la dame de Mariol a vendu au sieur Massis, par acte
du 5 novembre 18 2 9 , le domaine de Lafont, moyennant le prix
de 5o,ooo fr.
U11 ordre a été ouvert le 17 avril i 85o , pour la distribution de
ce prix.
A cet ordre se sont présentés divers créanciers inscrits de la dame
de M ariol, et notamment le sieur M arie, comme cédataire d’une
créance de 52, 3 10 fr. en principal, avec intérêt, due en vertu
d’une obligation du 25 décembre 1 8 1 6 , portant hypothèque spéciale
sur le domaine de Lafont, suivie d’une inscription hypothécaire du
14 janvier 1 8 1 7 , créance cédée au sieur Marie par la dame de.
Lachapclle, suivant acte notarié, du 2 février 1824. L ’inscription
a été renouvelée le G janvier 1827.
Les sieurs liuguet et Chirol ont aussi comparu à cet ordre mun;<;
�^
...............
(°)
d’inscriptions prises, les 5 février 1822 et 25 septembre 1 8 2 3 , ci
d’un exécutoire, ou plutôt d’un simple règlement de frais demandé
par le sieur Chirol, seul, et à lui délivré par le greilier de la Cour,
le 8 juillet i 85o , dépens adjugés, est-il dit, par arrêt du iG
juin 18 2 8 , lesquels dépens , porte ledit règlement, il prélèvera
( M* Cliirol ) lors du partage. Ces dépens s’élèvent à la somme de
5 ^ 7 fr. 10 centimes.
Cependant le partage n’est pas terminé; les comptes, les liqui
dations , lesprélèvemens ne sont pas réglés. L ’on ne sait pas encore
lequel des cohéritiers sera débiteur; et c’est dans de telles circons
tances, que les sieurs Huguet et Cliirol ont cru pouvoir se faire
payer aux dépens d’un prix de vente qui n’est pas même sujet au
partage, qui ne doit pas y être rapporté, et qui est la propriété
particulière de la dame de Mariol et de ses créanciers personnels.
Pour obtenir une collocation , les sieurs Huguet et Chirol ont
imaginé un prétendu privilège sur tous les biens provenus de PierreGilbert de V eyn y dont la succession est l’objet du partage à faire.
Ils ont présenté les frais qu’ils réclament comme des frais de justice
qui devaient être privilégiés sur tous les biens qui avaient fait partie
de l’hérédité ; et seuls entre tous les avoués q u i, comme e u x ,
avaient obtenu distraction des dépens, seuls entre toutes les parties
à qui les dépens étaient dus, sans examiner si ces dépens n’étaient
pas dus plutôt par le sieur Paul-Augustin de V eyny aîné, leur client,
qui les avait faits, que par les autres héritiers, et si au moins celui-ci
n’en devait pas personnellement une grande partie , ils ont obtenu
une collocation privilégiée sur le prix de la vente consentie par la
dame de Mariol au sieur Massis.
Cette collocation leur a été accordée par jugement du 2.{ mai
i 853
, dont voici les motifs :
(t Attendu que la c.-éance des sieurs Huguet et Cliirol se com
pose de frais faits pour arriver au partage judiciaire de la succession
du sieur de Veyny père, entre scs cohéritiers, au nombre desquels
se trouve la dame de Mariol ;
« Attendu que ces frais doivent être réputés dette de la succes
sion, puisqu'ils sont exposés dans l’intérêt de tous les cohéritiers et
de leurs ayant-droit ;
�( ’7
)
« Attendu, aux termes de l’article 873 du code civil, que chaque
cohéritier est tenu des dettes de la succession, personnellement pour
sa part et portion, et hypothécairement pour le tout, sauf son
recours contre ses cohéritiers ;
« Attendu d’ailleurs que les frais d’un partage judiciaire doivent
être considérés comme des frais de justice ; et qu’ainsi selon le vœu
combiné des articles 2 10 1 et 2 10 4 du même code, ils constituent
une créance privilégiée sur tous les immeubles soumis au partage;
Attendu que le domaine de Lafont dont le prix est à distribuer ,
et qui dépendait de la succession du sieur de V eyn y p ère, a été
compris dans le partage des biens de cette succession, et se trouve
ainsi passible du privilège attribué à la créance des sieurs Huguet
et Chirol ;
« Attendu que ce privilège hypothécaire a été conservé par une
inscription régulière, et que rien n’établit qu’avant celte inscription,
la dame de M ariol, comme acquéreur du domaine de Lüfont, en
eut purgé la propriété ;
'
« Qu’il suit de là que la collocation des sieurs Iluguet et Chirol
doit être maintenue. »
T el est le jugement rendu contre la dame de Mariol et contre scs
créanciers, contre le sieur Marie, notamment, dont une partie du
gage hypothécaire se trouve ainsi absorbée par une créance qui
n’aurait dù , qui n’aurait pu être réclamée que lors des comptes et
du partage de l’hérédité du sieur de V eyn y , père ; par une
créance au paiement de laquelle le domaine de L afo n t, ni le prix
de ce domaine ne pouvaient être, sous aucun rapport, affectés; par
une créance, enfin, qui n’existait même pas à l’époque de l’inscription
hypothécaire du sieur Marie, et dont le prétendu privilège ne sau
rait des-lors primer celte inscription.
Le sieur Marie a interjeté appel de ce jugem ent, tant contre les
sieurs Iluguet cl Chirol que contre d’autres parties qui y figurent.
Mais il ne s’occupera dans ce moment que de l’inférét qui le divise
avec les sieurs Iluguet et Chirol.
Avoir énoncé l'antériorité de l’inscription hypothécaire du sieur
trie à l’origine même de la créance des sieurs Huguet cl Chirol,
�cl, par suite nécessaire, du prétendu privilège de cette créance, c’est
avoir prouvé déjà tome la futilité de leurs prétentions.
Mais examiner encore la nature de la créance des sieurs Iluguet
et Chirol ; vérifier si elle est privilégiée sur la valeur de chacun des
biens sujets au partage de l’hérédité de V ey n y;
Prouver q u e, dans ce cas là m êm e, elle ne pourrait être exigée
aux dépens du prix du domaine de Lafont :
Telles sont les propositions à parcourir pour apprécier le mérite
du jugement attaqué par le sieur Marie.
§ 1"
E xam en de la nature de la créance des sieurs Huguet et Chirol.
Cette créance a pour objet une partie des frais faits pour parvenir
au partage définitif de l’hérédité du sieur de V eyny père.
Ces frais avaient été faits au nom du sieur Paul-Augustin de V eyny
aîné; et les co-héritiers de celui-ci en ont fait eux-mêmes.
Tous ces frais ont été compensés par les arrêts, dont le plus
ancien est de 1 8 1 9 , pour être employés en frais de partage, lors
duquel ces arrêts ordonnent qu’il en soit f a it prélèvement.
Que résulte-t-il de là?
Que c’est au moment du partage, lors des comptes et des liqui
dations auxquels ce partage doit donner lieu, que doivent êlre
payés ou prélevés non seulement les frais faits à la diligence du sieur
Paul-Augustin de V e y n y , mais encore tous ceux exposés par ses
co-héritiers. Par ce mode de paiement la masse entière de l’hérédité
souffrira la charge des frais; cl comme cette masse doit se distribuer
entre tous les co-héritiers, la diminution de la masse produite par
le prélèvement des divers frais faits par tous les co-héritiers se
distribuera aussi entr’eux dans la proportion des droits de chacun.
De cette manière personne n’éprouvera de préjudice, et chacun
ne paiera que ce qu’il doit p a y e r, puisqu’aucun des cohéritiers ne
sera obligé de supporter, indépendamment de ses propres frais,
ceux qu’auraient faits les autres cohéritiers, et qui devraient en dé*
iinilive rester à leur charge,
o ’
C ’est ainsi, 'sans nul doute, qu’il en aurait été si le sieur Paul?
�Augustin de V eyny aîné était resté créancier des frais faits par lui
ou en son nom. Certes il n’aurait pas été admissible à demander un
exécutoire contre ses cohéritiers, et à exiger d’eux le paiement de
ses frais. Une telle réclamation eût paru ridicule; on l’aurait repoussée
par les réflexions les plus simples; on lui aurait fait observer avec
beaucoup de vérité que les frais faits par lui n’étaient qu’une faible
avance sur les rapports considérables, soit en principaux, soit en
revenus et en jouissances, dont il était lui-même tenu; 011 lui aurait
dit que ses cohéritiers avaient aussi avancé des frais dont ils auraient
peut-être le droit d’exiger en grande partie le remboursement
contre le sieur de V eyny lui-même; mais que, pour les uns, comme
pour les autres, il fallait attendre la liquidation des comptes, des
reprises, des rapports respectifs, afin de connaître quel serait celui
des cohéritiers, qui, en résultat, serait débiteur, et qui aurait, ou
des frais, ou d’autres valeurs à restituer; qu’en un mot c’était sur
la masse seule que pourrait offrir cette liquidation, que devait être
fait le prélèvement de tous frais de partage, par ceux des cohéritiers
qui en auraient lait les avances.
Ce langage auquel il serait difficile au sieur de V eyn y aîné de
répondre, s’il était resté créancier des frais faits en son nom, ne
peut-il pas aussi être opposé avec avantage aux demandes des sieurs
lluguet et Chirol qui ont obtenu la distraction de ces frais?
Quels sont leurs titres? quels sont leurs droits contre les cohé
ritiers du sieur de V eyny aîné, leur client?
Leurs titres, ce sont les cessions que leur a faites leur client par
le ministère du juge.
Leurs droits par conséquent ne peuvent être que ceux qu’avait
le sieur de V eyny lui-même , au moment ou la distraction de
dépens a été prononcée en leur faveur.
Leurs titres sont des cessions. C’est en effet ce qu’enseigne
Polhier dans son Traité du M andat, n° 1 56 , en parlant de la dis
traction des dépens.
* Cette distraction , d it-il, est un transport que le client, au
profil de qui le jugement est rendu, est censé faire a son procureur,
de la créance qu’il acquiert contre la partie condamnée par celte
�(
10
)
condamnation de dépens ; et ce transport est censé fait par le client
à son procureur pour s’acquitter envers lui desdits dépens. »
Telle est aussi la doctrine de Pigeau dans sou Traité de la procé
dure civile , Itv. 2 , partie 5 , litre 5 , chap. 5 , § 5 , n° 6.
<( L ’eifet de la distraction , remarque l’auteur, est de rendre
l’avoue cessionnaire des frais , avec la garantie cependant contre
son client. »
Simples cessionnaires des droits de leurs cliens, que peuvent
demander les avoués qui ont obtenu la distraction?
Ils peuvent demander ce que leur client aurait pu demander luimêine : rien de plus , car le transport judiciaire qui leur a été ait
ne leur a pas transmis plus de droits que n’eu avait le cédant ,
nemo plus juris in alium transferre potest qiuwi ipse habet.
Or il est évident, et nous l’avons déjà pi’ouvé, que le sieur de
ny aîné, s’il était resté lui-même créancier des frais faits en sou
nom , ne pourrait pas en exiger le remboursement provisoire
contre l’un de ses cohéritiers, contre la dame de M ariol, par
exemple -, qu’il ne pourrait pas obliger celle-ci à lui payer la tota
lité de ces frais , sauf à les recouvrer en tout ou en partie dans la
suite, contre le sieur de V eyny lui-même , ou contre les autres
héritiers. Il est évident que le sieur de Veyny ne pourrait
obtenir de paiement de ces frais que lors du partage , au moment
des comptes et des liquidations , à ce moment même où la situa
tion de tous les héritiers serait fixée , à ce moment où chacun de
ses cohéritiers obtiendrait aussi le remboursement des frais qu’il
aurait lui-même avancés pour le partage.
S ’il en est ainsi, les cessionnaires du sieur de V e v n y , les avoués
subrogés à ses droits par la distraction des dépens, doivent subir le
même sort. C ’est au partage seulement, qu’ils doivent réclamer leurs
frais; ce n’est que lors du partage et lors des comptes et des liqui
dations de ce partage qu’ils devront les obtenir. Leur action contre
la dame de JNIariol en remboursement de la totalité de ces frais ,
relie action exercée dans un ordre étranger au partage , est une
illusion que l'irréflexion seule a pu présenter, que l'inattention seule
a pu accueillir.
�Il y a plus , les titres môme des sieurs Huguet et Chirol repous
saient leur prétention.
Elle était repoussée , notamment par les arrêts de 182/j. et de
1828 , dont le texte littéral dit seulement que, lors du partage , il
serait fait prélèvement de ces frais au profit de M '3 Chirol, Debord
et autres avoués.
Elle était repoussée aussi parles termes de l’exécutoire ou plutôt
du simple règlement qu’a obtenu le sieur Chirol, le 8 juillet i 85o.
Cet exécutoire ou règlement de frais autorise seulement le sieur
Chirol à prélever ses dépens lors du partage : lesquels il prélèvera,
lors du partage , y est-il dit.
Comment se fait-il donc que, contre leurs propres titres, les
sieurs Chirol et lluguet aient hasardé de réclam er, et soient
parvenus à obtenir, hors du partage , et dans une instance d’ordre
entièrement distincte de ce partage, contre la dame de Mariol , et
au préjudice de ses créanciers, des dépens dont le paiement, dont
le prélèvement était renvoyé par les arrêts, et par le règlement
même qui en a été fait, aux liquidations, aux comptes du partage;
des dépens que leur cédant, que celui dont ils exercent le droit,
n’aurait pu sous aucun rapport exiger lui-m êm e, antérieurement à
ces comptes, à ces liquidations.
L ’erreur d’une telle prétention est palpable.
M ais, a-t-on dit, ces dépens sont une dette de la succession, et
d’après l’article 875 du code civil, les héritiers sont tenus des dettes
et charges de la succession, personnellement pour leur part et
portion virile, et hypothécairement pour le tout, saufleur recours,
soit contrôleurs cohéritiers, soit contre les légataires universels.
Cet argument renferme une double erreur.
Les dettes et charges de la succession sont des dettes et des
charges qui grevaient le défunt, et qui de lui ont passé à scs héritiers.
Ces dettes et charges sont de deux sortes, les unes chirographaires,
les autres hypothécaires.
Elle sont hypothécaires lorsqu’elles ont pour base un titre authen
tique par lequel les biens du défunt avaient été affectés et hypo
théqués pendant sa vie au paiement de la dette. C ’est dans ce cas,
�( 12 )
et dans ce cas seulement , que les héritiers , ou celui d’entre
eux qui est détenteur des biens hypothéqués , peuvent être tenus
hypothécairement de la dette. Il ne peut y avoir d’hypothèque si
elle n’a pas été créée avant l’ouverture de la succession. Alors chaque
héritier n’est passible de la dette que pour sa part et portion virile ;
il ne saurait être obligé hypothécairement à la payer en totalité.
Toutes ces vérités sont élémentaires ( voir Chabot de l’A llie r,
traité des successions, sur l’article 875 du code civil). H n’y a
d’exception que pour les legs. Mais pourquoi? parce que le testa
ment même émané du défunt devient par la volonté de celui-ci un
titre hypothécaire qui frappe tous les immeubles qu’il laisse ( voir
code c iv il, article 10 17 ) .
Les frais d’un partage 11e sont pas une dette du défunt ; il ne
grevaient pas la succession à son ouverture ; ils ne grèvent les biens
que par suite de l’action judiciaire qui est intentée par l’un des
héritiers, action qui eut pu être évitée, ainsi que les li ais qu’elle
entraîne, si les cohéritiers, s’accordant entre e u x , avaient fait un
partage amiable.
Ces sortes de frais ne peuvent donc pas être assimilés aux dettes
et charges dont parle l’article 875 du code civil, et par conséquent
l’on ne peut pas dire que chacun des héritiers en est tenu hypocairement pour le tout.
Mais la similitude fût elle exacte , l’application ne serait pas plus
heureuse. Car s i , à l’égard d’un créancier de l’hérédité, et d’un
créancier porteur d’un titre hypothécaire, chaque héritier peut être
tenu hypothécairement <lc la totalité de la dette commune, il n’en n’est
pas ainsi pour les cohéritiers entre eux. «■ Les cohéritiers , dit
1 article 870 du code c iv il, contribuent entre eux au paiement des
dettes cl charges de la succession, chacun dans la proportion de ce
qu’il y prend. »
L ’héritier à qui il est dû, qu’il soit créancier personnel, ou qu’il
ait été subroge aux droits d’un créancier de la succession, dont il
a paye;, seul, la créance, cet héritier 11e peut réclamer contre ses
cohéritiers que leur portion dans la proportion de la part virile de
chacun d’eux. Il en est de ce cas comme d’une dette solidaire qui sc
�(
>3
)
divise de plein droit entre les débiteurs; cri sorte que celui qui l’a
p ayée, seul, ne peut répéter contre les autres que la part et portion
de chacun d’eux (v o ir code civil, articles 1 2 1 5 et 12 14 )On le voit, l’examen de l’objection tirée de l’article 873 du code
civil , la fait complètement disparaître. Il ramène par conséquent
à ce que nous avons dit précédemment; savoir : que les frais de
partage 11e peuvent être réclamés que lors du partage, et dans
l’instance même en partage, et que , ni l’héritier qui a avancé une
partie de ces frais, ni les avoués ses cessionnaires, qui en ont obtenu
la distraction, 11e peuvent en exiger le remboursement contre celui
des héritiers qu’il leur plaira de choisir. S ’ils veulent être payés
avant le compte, avant les liquidations, avant la composition de la
masse à partager, ils ne peuvent agir que contre leur client q u i,
seul, s’est obligé envers eux , en leur donnant un mandat a d lilem.
Ils n’ont, hors de l’instance en partage, aucune action contre les
autres héritiers. Et comment les sieursChirol et Huguet pourraientils avoir une action particulière contre la dame de M ariol, contre
laquelle les arrêts ne prononcent en leur faveur aucune condamna
tion personnelle, contre laquelle il n’a pas été obtenu d’exécutoire,
et à l’égard de laquelle , comme à l’égard des autres héritiers, il
11’y a qu’un prélèvement à faire lors du partage, et sur la masse
indivise que les comptes et liquidations pourront oflrir?
Terminons donc par dire avec confiance que l’examen de la
nature de la créance repousse la réclamation que les sieurs Huguet
et Chirol ont soulevée dans une instance d’ordre, étrangère au
partage de l’hérédité.
Examinons surabondamment encore s i, pour cette créance, il
existe un privilège sur la valeur de chacun des biens sujets au
partage.
§ II.
E xam en du prétendu privilège de lu créance des sieurs H uguet
et Chirol.
Le jugement dont est appel a déclaré que les frais du partage
judiciaire devaient être considérés comme frais de justice, et que ,
�comme tels, conformément aux articles 2 1 0 1 cl 2 10 4 du code
c iv il, ils constituaient une créance privilégiée sur tous les immeu
bles sujets au partage.
Ce que nous avons dit dans le premier paragraphe de notre
dissertation , signale déjà l’erreur du système des premiers juges ;
car s’il est vrai que les sieurs Chirol et J luguet qui réclament comme
ayant été , ou étant encore, l’un d’e u x , avoué du sieur de V eyny
aîné, ne soient que scs cessionnaires ; s’il est vrai qu’à ce litre, ils
n’aient pas plus de droit que n’en aurait le sieur de Veyny luimême; s’il est vrai que, par suite ils ne puissent exiger d’un seul
des cohéritiers le paiement de la totalité de frais faits au nom du
sieur de V e y n y , pas plus que chacun des autres cohéritiers
n’aurait le droit de répéter lui-même contre le sieur de V eyny aîné
la totalité des frais qu’il aurait aussi avancés; s’il est vrai enfin ,
comme le portent les arrêts, et même le règlement de dépens, que
les frais du sieur de Veyny aîné ne doivent, comme tous les autres
frais respectivement avancés , être payés ou prélevés que lors du
partage, c’est-à-dire , lors des comptes, des liquidations, et de la
consommation de ce partage; si tout cela est vrai, comme nous
croyons l’avoir démontré, il en résulte nécessairement que les frais
particuliers faits au nom d’un seul cohéritier ne constituent pas une
créance privilégiée sur chaque immeuble de l’hérédité, et que
celui à qui les frais sont dus ne peut avoir l’étrange privilège de
choisir à son gré une victime parmi de nombreux cohéritiers, et de
faire supporter la totalité de ces frais, même provisoirement, par
ce cohéritier seul, et sur l’un des immeubles de la succession que
ce cohéritier posséderait, ou aurait aliéné.
M ais abordons encore la difliculté directement, et démontrons
que des frais de partage 110 peuvent être rangés dans la classe des
frais de justice auxquels les articles 2 10 1 et a ïo .j du code civil
accorderaient un privilège général sur tous les immeubles de la
succession.
Qu’entend-on dans le langage du d ro it, par des fr a is de justice
privilégiés?
O11 entend des frais faits par des créanciers, et non ceux faits par
�des cohéritiers. Voici ce que dit à ce sujet M. Grenier dans sou
Traité des Hypothèques, tome 2 , page i 5 .
« U est essentiel de savoir ce qu’on doit entendre par fra is de
justice. La loi 11e le dit pas précisément; mais ces frais onl toujours
été si précisément déterminés par la jurisprudence et par l’usage ,
qu’on 11e peut douter que le législateur ne se soit expliqué dans les
mêmes idées. Basnagc, des hypothèques , chapitre 9 , disait que ce
sont les frais qui se font pour les scellés , confection d’inventaire ,
vacations , et tout ce qui est fait pour la conservation de la chose ,
et pour la cause commune des créanciers. Or tels sont encore les
frais qui sont compris sous cette dénomination de fr a is de justice,
et pour lesquels le privilège a lieu. »
Ainsi c’est respectivement aux créanciers d’un débiteur commun ,
que la loi parle de fra is de justice et de privilège. C ’est en faveur
de celui de ces créanciers qui a fait en justice des frais pour conser
ver le gage commun, pour le faire vendre, pour le convertir en
valeurs pécuniaires, et pour arriver à la distribution de ces valeurs,
entre plusieurs créanciers de la même personne , que la loi a établi
un privilégesurle prix de tous les biens conservés, saisis et vendus,
pour le remboursement des frais de justice; mais c’est à des créan
ciers seuls, non à des cohéritiers, ni à leurs représentons ni à leurs
cessionnaires, qu’un tel privilège appartient. Aussi 11e trouve-t-on
pas un seul auteur, 1111 seul arrêt qui classe parmi les frais de justice
aussi largement privilégiés, en faveur de l’un des cohéritiers, sur
les biens meubles ou immeubles héréditaires possédés par les autres
héritiers, de simples frais de partage dont cet héritier n’aurait fait
même qu’en partie les avances.
x En revenant aux frais de justice , dit plus bas le même auteur,
il faut se garder de leur donner une trop grande latitude , sans quoi
l’on tomberait dans des erreurs. L ’application de leur privilège doit
êlre restreinte aux frais qui étaient nécessaires pour assurer et pro
curer la rentrée de la créance. »
Ainsi c’est toujours relativement à une créance et à des tierscréanciers de celui contre lequel sont faits les frais , que doit êlre
employée la qualification de fra is de ju stice , dans le sens du pri-
�v?*
■
.
( ., 6 )
.
vilége. Appliquer ce privilège à des frais qui ont une autre cause ,
à des frais faits par tout autre qu’un créancier, c’est abuser du vague
des mots, fra is de justice; c’est mal en entendre le sens légal ;
c’est méconnaître le but du législateur; c’est étendre des privilèges
qu i, de leur nature même , sont de droit étroit, et doivent être
restreints plutôt qu’élargis; c’est cnlin violer la loi sous prétexte de
l’interpréter.
Qu’on consulte les auteurs sur l’acception des mots frais de
justice , d’après l’article 2 1 0 1 , et lorsqu’il s’agit d’une distribution
de deniers provenus, soit d’une vente de meubles, soit d’une vente
d’immeubles?
Ils vous diront que les frais dont il est ici question sont ceux faits
par le saisissant,
« i° Ceux de saisie-arrêt ;
« 20 Ceux de la consignation des deniers arrêtés , s’il en a été
fait;
« 5° Ceux de la poursuite de contribution. ( Voir P igeau , procé
dure civile , 2“ * édition , tome 2 , page 18 1 et suiv. ) ;
A quoi il faut ajouter les frais extraordinaires de poursuite de la
vente des immeubles, s’il en a été ainsi ordonné par jugement ;
Les frais de scellés et ceux de l’inventaire , s’ils n’ont pu être
payés sur le mobilier ( Voir le même auteur, page 267. )
Tels sont les frais de justice privilégiés sur tous les biens meubles
et immeubles, lorsqu’ils ont été faits par un créancier qui pour
suivait le paiement de sa créance, et non des frais de partage faits
par l’un des cohéritiers, qui , le plus souvent, a dans ses mains des
valeurs héréditaires beaucoup plus considérables que les frais qu’il
a faits, et q u i, par le résultat des comptes, peut être débiteur
plutôt que créancier.
lit comment concevoir qu’un cohéritier, ou son avoué, c’est-àdire , sou cessionnaire, puisse obtenir un tel privilège, lorsqu’un
créancier lui-même de l’héritier, q u i, pour parvenir à la vente des
biens de son débiteur, aurait fait procéder judiciairement au partage
de la succession, ne pourrait cependant obtenir, sur le prix même
du lot de ce débiteur, une collocation privilégiée pour les frais du
�(
'7
)
partage, s’il ne l’avait fait ordonner ainsi par jugement. On sait en
ciTet que les frais extraordinaires de poursuite ne sont payés par
privilège , dans un ordre , que lorsque cela a été ordonné par le
jugement même qui condamne aux frais (voir l’art. 7 16 du Code
de procédure civile).
Dans le cas qui nous occupe , les sieurs Huguet et Chirol eussentils été créanciers directs de la dame de Mariol ; eussent-ils, en cette
qualité, fait procéder au partage; eussent-ils ensuite fait vendre euxmêmes le domaine de Lafont par saisie immobilière sur leur débi
trice , ne pourraient cependant obtenir la collocation qu’ils réclament
s’ils ne présentaient un jugement antérieur à l’ordre qui leur eut
expressément attribué ce privilège sur le prix du domaine de Lafont.
Comment pouvaient-ils donc espérer le succès de leur étrange
réclamation, eux qui 11e sont pas les créanciers directs de la dame
De Mariol ; eux qui 11e sont que les créanciers et les représentans
du cohéritier ( le sieur de V eyn y aîné ) dont ils ont été les man
dataires; eux qui ne présentent aucun jugement qui leur accorde le
privilège extraordinaire qu’ils réclament!
Reconnaissons donc que la prétention que les sieurs Huguet et
Chirol ont élevée n’est qu’une illusion, que la décision qui l’a admise
n’est qu’une erreu r, et que les frais (1e partage, faits au nom de l’un
des héritiers , ne peuvent êlre assimilés à des frais de justice faits
par un créancier, et ne doivent pas assurer à celui qui les réclame
le privilège exorbitant d’être payé par préférence sur le prix d’un
seul immeuble possédé par un seul héritier , et au préjudice de
tous les créanciers de celui-ci.
Mais, dit-on , si de tels frais ne peuvent êlre assimilés à des frais
de ju stice , et jouir dos mêmes privilèges , quelle action aura-t-011
donc pour les recouvrer?
La réponse est simple. On aura une action en prélèvement lors
du partage, comme le disent les titres mêmes qui constituent ces
frais, les arrêts et l’exécutoire , ou règlement. O11 aura aussi le pri
vilège accordé par les articles a io 3 et 2 10 9 du Code civ il, aux
pohéiiticrs entr’eux pour la garantie du partage, pour le paiement
des sommes dont les uns sont créanciers envers les autres par suite
3
�( '« )
des opérations du partage, et des comptes et liquidations. Ce pri
vilège est juste, il ménage les intérêts de tous, et ne blesse les intérêts
de personne, puisque ses effets sont de faire payer à chaque cohé
ritier ce qu’il doit réellement, et rien au-delà. Ce privilège est
protégé par l’équité comme par la lo i, et il ne conduit pas à l’absurde
conséquence du système que nous combattons, celle de faire payer
provisoirement, à un seul des cohéritiers, des frais considérables,
dont il ne devrait peut-être rien en définitive; dele grever ainsi de
la dette d’un autre, et de le renvoyer à un recours, soit incertain,
soit éloigné, qu’il ne pourrait dans tous les cas obtenir que lors des
comptes et des liquidations définitives.
Une telle conséquence est eu opposition avec les notions les plus
simples du juste. Dans le partage qui a donné lieu à la cause actuelle
chacun des héritiers a fait des frais : chacun d’eux a des rapports à
faire, fictifs ou réels. L e sieur de V eyny aîné est celui même de tous
qui a le plus à rapporter, et qui aura le moins à retenir. Serait-il
convenable qu’en 11e payant pas ses propres avoués , en leur cédant,
par une distraction de dépens, les frais faits en son nom , dont il
sera peut-être le seul débiteur lors des comptes de la succession,
il leur eut transmis un droit qu’il n’aurait pas eu lui-même, celui de
contraindre la dame de M ario l, sa cohéritière, a acquitter seule
tous ces frais , et à ajouter ainsi cette perte à toutes les autres aux
quelles l’exposera la solvabilité fort équivoque du sieur de V eyn y
aîn é, s i , comme il est vraisemblable , les liquidations à faire
la constituent encore sa créancière.
Mais supposons même que ces frais de partage constituassent une
créance p rivilégiée, en général, sur chacun des biens sujets au
partage, dans ce cas-là même ils ne pourraient être exigés sur le
prix du domaine de Lafont; c’est ce que nous allons démontrer dans
le troisième paragraphe de notre discussion.
§ HI.
y ciif-il privilège sur les biens sujets au p a rtag e , le domaine
de I,ajout n’en serait pas grevé ?
Cette proposition peut être prouvée de deux manières :
�(
r9
)
i* L e domaine de Lafont n’est pas rapportable au partage , par
la dame de Mariol ;
2° Ce domaine aurait été affranchi par la prescription , dans la
nmin de la dame de M ariol, de toute contribution aux charges de
la succession et aux frais du partage.
L e domaine de Lafont n’est pas rapportable au partage par la
dame de Mariol.
Cette proposition est d’une démonstration facile.
Pour en reconnaître la vérité il suflît de se rappeler les faits ,
ainsi que les dispositions du jugement ou des arrêts rendus entre les
héritiers de V eyny.
On sait que par le partage du 23 juin 1 779, ce domaine avait été
attribué au sieur de V eyny de T e ix , et que celui-ci l’avendu en 1784
à la dame de Mariol. On n’a pas oublié que le jugement et les arrêts
qui ont ordonné le partage définitif ont respecté le partage pro
visoire , en ce sens, au moins qu’ils n’ont pas exigé le rapport en
nature des objets qui avaient été mis à chaque lot. Chaque cohéritier
a été seulement soumis à rapporter ce qu’il avait reçu , ou sa valeur
par fiction en 178 5.
C ’est ce que prescrit notamment le jugement du 25 avril 1 8 1 5 .
En effet, ce jugement, après avoir rappelé dans ses motifs le
partage de 1779 qu’il qualifie de provisionnel , seulement, ordonne
qu’au partage tous les cohéritiers rapporteront les immeubles
qu’ils ont reçus, ou leur va leu r p a r fiction en 17 8 5 , d ’apres l’es
timation qui en serait fa ite p a r les experts chargés de procéder
à ce partage.
D ’autre p art, il dit que les experts fe ro n t en sorte de faire
échi'oir, au lot de ceux qu i ont vendu, les objets p a r eu x aliénés .
O r, sur l’appel de ce jugement, l’arrêt confirmatif, rendu le 22
janvier 1 8 1 9 , ordonne aussi, relativement à d’autres immeubles,
qu’ils seront rapportés, valeur de 1785.
De ces décisions, qui sont inattaquables, découlent deux consé
quences :
L ’une , que ceux-là seuls des cohéritiers qui ont reçu des immeu
bles par le partage de 17 7 9 , sont tenus de les rapporter,
�(
20
)
L ’autre , que ce rapport môme ne doit pas être fait réellement,
mais seulement par fiction, valeur de 1 785 ; car le mode du rapport
et l’époque indiquée pour la fixation des valeurs doivent être les
mêmes pour tous. Il y aurait, en effet, injustice souveraine à exiger
de certains des héritiers qu’ils rapportassent aujourd’hui en nature
des immeubles de l’hérédité, tandis que les autres héritiers ne les
rapporteraient que fictivement, et valeur de 178 5. L ’inégalité des
rapports et de leur valeur serait choquante. Rapporter en nature,
c’est rapporter valeur actuelle, et les valeurs ont plus que doublé
depuis 178 5.
L e domaine de Lafont avait été reçu par le sieur de V eyn y de
T e ix , lors du partage provisionnel de 1779. Lui seul donc, aux
termes du jugement de 1 8 1 5 , et de l’arrêt confirmatif, doit le
rapporter au partage, et doit le rapporter, non en nature, mais
fictivement, et ne doit le rapporter que valeur de 17 8 5 , et ne doit
même le rapporter que pour le retenir, puisque les experts sont char
gés de meure les objets aliénés au lotdeshériliersquilesont vendus.
E t remarquons que les opérations des experts, faites eu exécution
de ces jugement et arrêt, sont en harmonie avec nos raisonnemens.
Les experts estiment les divers biens, valeur de 17 8 5 , et ils
fixent celle du domaine de Lafont à 2 0 ,9 10 fr.
Us désignent aussi les objets attribués ¿1 chacun des cohéritiers
p a r le partage de 1 7 7 9 , afin, disent-ils, de faciliter les comptes
entre les cohéritiers , et p a r suite les rapports dont ils sont tenus.
Us présentent enfin dans ce même but le résumé des différentes
mutations , en indiquant les biens qui ont été'vendus p a r chacun
des cohéritiers, et ceux qui existent entre leurs mains.
E t ces opérations d experts ont été homologuées , consacrées
définitivement par deux arrêts , l’un par défaut, du 5 janvier 1824,
l’autre contradictoire, du iG juin 18 2 8 , en sorte qu’il résulte de
l’ensemble et de la combinaison du jugement et des arrêts qui o r
donnaient le partage, du procès-verbal des experts qui l’a préparé,
cl des arrêts qui ont homologué ce procès-verbal, que le domaine
de Lafont 11c doit pas être rapporté au partage, parce qu’il n’existait
plus dans la main du cohéritier qui l’avait reçu ; qu’en remplace-
�(
31
)
A » ?
ment de ce domaine , il ne doit être rapporté qu’une somme
de 2 6 ,9 10 f r . , et que ce rapport même ne doit être fait que par le
sieur de V eyny de Teix , seu l; lui seul en était chargé par les
experts, par les jugement et arrêts, parce que lui seul en avait reçu,
et le fonds d’abord, et la valeur ensuite, lorsqu’il l’aliéna.
E t ce qu’il y a de remarquable, c’est que le sieur de V eyn yde Teix obtiendra nécessairement par le partage une valeur plus
considérable que celle des biens qu’il a vendus , et dont il doit le
rapport fictif.
Il n’a en effet vendu que pour une valeur de 2 9 ,16 0 fr. , y
compris le domaine de Lafont estimé
f r . , valeur de 1780
( voir le rapport des experts ). Ces 29 ,16 0 fr. n’égalent pas à ^eaucoup près le lot qui lui revient. Ses héritiers pourront conserver ,
en outre , mie partie assez considérable des héritages non aliénés
dont ils jouissent encore d’après le procès-verbal des experts , en
sorte qu’il existe dans leurs mains et dans les rapports qu’ils doivent,
nn gage suffisant pour le paiement des frais du partage. C ’est donc
sans intérêt comme sans droit, qu’on a exigé le paiement de ces frais
contre la dame de M ariol, et sur le prix d’un domaine qu’elle avait
acquis du sieur de V eyny de Teix.
C ’est surabondamment, au reste, que nous parlons du défaut
d’intérêt de la réclamation ; car qu’on y eût intérêt ou non , il
suffit qu’elle 11e fût pas fondée, pour qu’elle dût être repoussée.
Or il est certain que le sieur de V eyn y de T eix, ou scs héritiers ,
sont seuls tenus de rapporter au partage, non le domaine de Lafont,
mais son p rix , valeur de 178 5.
11 est certain, par cela m êm e, que d’après le rapport d’experts ,
et les arrêts qui l’ont ordonné , ou homologué , ce domaine de
Lafont n’était pas rapportable en nature ; par cela même aussi, il
ne pouvait être afi'ecté au paiement des frais du partage, de ces
frais qui devaient seulement être prélevés, lors du partage et sur
la masse active des valeurs à partager.
Il est certain que la dame de Mariol n’ayant pas été soumise par
le jugement de 1 8 1 5 et par les arrêts qui l’ont suivi, à rapporter au
partage, ni le domaine de Lafont ni sa valeur, devait être, comme
�acquéreur de ce domaine, à l’abri de loute réclamation relative
aux irais de ce partage.
Il est certain euiîi: que le prix de ce domaine qu’elle a vendu au
sieur Massis n’étant pas et ne devant pas être confondu dans la
masse à partager; que ce prix devant rester hors du partage et
dans les mains de la dame de INlariol, comme l’était le domaine
même , avant qu’elle Peut vendu ; il est certain , disons-nous, que
les avoués du sieur de V eyny aîné n’avaient aucun droit sur le prix
d’un immeuble que les arrêts même qui adjugeaient leurs frais
avaient retranché en quelque sorte de la masse , pour y substituer
une valeur rapportabl^ ^cailement par le sieur de V eyny de T e ix ;
que ces avoués ne pouvaient, sans l’erreur la plus g ra v e , sans
l’illusion la plus fausse, se présenter et être admis à l’ordre d’un
prix de vente qui n’appartenait qu’à la dame de Mariol ou à ses
créanciers, et non au sieur de V eyny de Teix.
Ces raisonnemens fondés sur la nature même des rapports
ordonnés, comme sur les termes des distractions de dépens obte
nues par les sieurs Huguet et C h irol, sont, il semble, sans replique.
Comment en effet pourrait-on supposer que les avoués du sieur
de V eyny aîné ont sur le prix de lávente du domaine de Lafont
plus de droit qu’ils n’en auraient eu sur le domaine m êm e, si la
dame de Mariol l’avait conservé? O r, auraient-ils été autorisés à
poursuivre l’expropriation de ce domaine contre la dame de
Mariol? Une telle poursuite n’eùt-elle pas paru bazardée, irréfléchie?
n’eùt-elle pas été repoussée à la simple lecture des arrêts et de
l ’exécutoire, ou règlement des frais, à la simple lecture de tous ces
titres des sieurs lluguct et Chirol, de ces titres qui ne portent
aucune condamnation personnelle contre la dame de M ariol, et qui
permettent seulement aux avoués, cessionnaires du sieur de Veyny
aîné leur client, de réclamer, de prélever lors du partage, lors do
la composition de la masse, sur l’actif qui s’y trouvera, les frais
dont ils ont obtenu la distraction.
Reconnaissons donc que les sieurs Iluguet et Chirol ne devaient
pas être admis à l’ordre du prix d’un domaine vendu par la darno
de M ariol, par cela seul qu’ils n’étaient pas les créanciers personnels
�Ad
( *3 )
et directs de cette dame; par cela seul aussi qu’il n’avaient de prise
et de droit de prélèvement que sur la masse à diviser, telle qu’elle
devait être composée d’après le jugement de i 8 i 5 et les arrêts
subséquens; par cela encore que dans cette masse ne devait pas
entrer le domaine de Lafont, mais seulement une valeur représen
tative rapportable par le sieur de V eyny de T e ix , seul, qui avait
depuis loug-tems cessé d’être propriétaire du domaine ; par cela ,
sur-tout, que la dame de M ariol, à laquelle ce domaine appartenait,
ne devait elle-même le rapport ni du domaine en nature, ni de son
prix actuel, ni même de sa valeur en 1 785. .
11 y a plus, une prescription de plus de trente ans avait affranchi
ce domaine, dans la main de la dame de Mariol, detoute contribution '
aux charges de la succession, et à plus forte raison aux frais du
partage.
C ’est en 1784 que la dame de Mariol l’avait acquis; et depuis
cette époque elle en a constamment jou i, comme tiers détenteur,
sans trouble, ni de la part des créanciers de la succession du sieur
de V eyny p ère , ni de la part de scs cohéritiers.
Elle a été appelée au partage, il est vrai ; elle a été partie au
jugement de 1 8 1 5 , aux arrêts qui l’ont su ivi, au rapport d’experts :
mais en quelle qualité? comme cohéritière, et non comme tiersdétenteur. Dans aucun des nombreux actes du procès, on 11’a pris
contre elle aucunes conclusions personnelles ou hypothécaires ,
relatives au domaine de Lafont; jamais on ne lui a demandé le
rapport de ce domaine , ni comme tiers-détenteur, ni même comme
cohéritière.
Au contraire, le jugement de 1 8 1 5 , le rapport d’experts, les
arrêts ont condamné, en sa présence, à faire ce rapport, par fiction,
valeur de 17 8 5 , le sieur de V eyn y de Teix seul, comme l’ayant
reçu lors du partage de 1779 , cK'omme l’ayant aliéné depuis.
Ce jugement, ce rapport, ces arrêts ont même ainsi consacré la
vente faite à la dame de M ariol, comme celles faites à tous les autres
tiers-détenteurs. Au moins ont-ils respecté sa possession, et n’ontil pas interrompu une prescription de /fi ans et plus, quia couru
en faveur de la dame de M ariol, depuis 1784 , date de son acquisi-
�( 24 )
lio n , jusqu’au 17 juin i 85o , jour de la production des sieurs
ITuguet et Ctiirol, à l’ordre du prix de la vente du domaine de
Lafont, c’est-à-dire, jusqu’à la date du premier acte de trouble
exercé contre la dame de Mariol, comme détenteur de ce domaine.
Prétendrait-on que la simple présence de la dame de Mariol, au
jugement et aux arrêts qui considéraient le domaine de Lafont
comme faisant partie de l'hérédité paternelle, a sufli pour inter
rompre la prescription à son égard? l’objection serait facilement
écartée.
i° Dans l’ancien, comme dans le nouveau droit, l’interruption
civile n’a lieu que par une citation en justice, un commandement,
ou une saisie signifiée à celui qu’on veu t empêcher de prescrire.
Il est clair que ces divers actes ne peuvent être interruptifs
qu’autant qu’ils sont dirigés contre la personne qui possède, dans le
b u t, avec l’intention exprimée de troubler sa possession, d’inter
rompre la prescription, et par conséquent en énonçant dans l’acte
judiciaire qu’on réclame un droit quelconque sur l’objet possédé.
O r , comme nous l’avons déjà d it, aucun acte semblable n’a été
signifié àla dame de M ariol; ni dans toutle cours de la demande en
partage, aucun droit n’a été exercé contre elle relativement au
domaine qui lui avait été vendu par son frère puîné, et qu’elle
possédait; aucune prétention n'a été soulevée, ni même indiquée à
son égard. Loin de là, c’est contre le sieur de V eyny de Teix seul ,
son vendeur, que portent les réclamations, les condamnations
relatives à ce domaine; et par conséquent il n’y a point eu d’inter
ruption de prescription à l’égard de la dame de Mariol.
2° Il est de principe que l’exercice d ’une action n’empêche pas
la prescription d ’une autre action , lors m êm e , dit Dunod , que
les d eu x actions seraient incompatibles , parce qu’elles peuvent
être exercées ensemble, p a r fins subsidiaires.
Cette doctrine n’est pos douteuse; ello est indiquée par la simple
réflexion. Elle est enseignée par d’Argcutré , sur l’article aGG de la
Coutume de Bretagne ; par Dunod, dans s q i i traité des prescriptions,
partie i re, chapitre y , pageGi ; par M, Merlin, dans son répertoire,
au mot, interruption , n° i/ j, et par beaucoup d’autres auteurs,
�M. Merlin s’exprime ainsi, en l’endroit cité : « L'effet de l'inter
ruption civile ne s’étend pas d’une obligation, ou d’une action à une
autre. Inlcrruplio inuno fa c to , in alio nonprodest.
Lapéreyre dansses Décisions sommaires, lettrcP., n° 4° 5»rapporte
un arrêt du parlement de Toulouse, qui décide que l’interruption
faite au rescisoire n’interrompt pas la prescription du rescindant.
Ces principes s’appliquent facilement à la question que nous
examinons. La dame de Mariol a été appelée au partage comme
cohéritière, et non comme tiers-détenteur, non comme ayant acquis
le domaine de Lafont. Elle y a été appelée pour rendre compte de
ce qu’elle avait reçu elle-même, lors du partage provisoire, et pour
y prendre son lo t , et non pour y rapporter ce qui aurait été reçu
lors de ce partagepar un autre cohéritier, et ce qui luiavaitété vendu
par celui-ci. L ’action en partage dirigée contr’elle, en sa qualité de
cohéritière , était donc toute autre que l’action en désistement , ou
en rapport, qu’on aurait pu former aussi contr’ellc , comme acqué
reur et détenteur. Non assignée en cette dernière qualité , non
attaquée ni directement, ni indirectement, sous ce dernier titre ,
l’utilité de sa possession n’a pas cessé ; et l’on ne peut pas dire que
la possession a été interrompue contr’ellc par une action essentielle
ment différente de celle qui aurait pu, qui aurait du l’être, et qui
ne l’a jamais été.
Ainsi la daine de M ariol, en sa qualité de tiers-détenteur du
domaine de Lafont, doit rester étrangère au partage ; elle doit par
conséquent être à l’abri, sous ce rapport, de toutes les réclamations,
de toutes les répétitions auxquelles ce partage donnerait lieu; et les
frais qu’il a occasionnés ne peuvent être exigés sur la propriété
d’un domaine qu’elle possède et qu’elle a toujours possédé , non
comme héritière , mais comme acquéreur, c’est-à-dire , à un titre
particulier qui ne permet pas plus de la rendre p assible des frais du
partage que tous autres tiers-détenteurs, dont la possession aurait
été, comme la sienne, consacrée par une prescription plus que
trentenaire.
Plus on réfléchit sur cette cause , plus 011 découvre de moyens
en faveur de la dame de Mariol et de scs créanciers.
�(
)
Ainsi la première remarque qui doit frapper, c’est que les frais
réclamés par les sieurs Huguet et Chirol n’avaient pas encore été
faits, et que leur prétendu privilège ne pouvait par conséquent pas
exister au moment où a été prise l’inscription de la créance du sieur
Marie.
Ainsi l’exécutoire ou règlement de dépens, titre principal des
sieurs Chirol et H uguet, n’avait pas même été obtenu par eux au
moment de l’ouverture de l’ordre. L ’ordre a été ouvert , le
17 avril i 85o , cl ce n’est que le 8 juillet suivant, que le sieur
Chirol a fait régler les dépens.
Ainsi on s’est présenté à l’ordre avec des inscriptions , des
5 février 1822 , et 5 septembre 1823 , et la plus grande partie des
frais réclamés n’ont été faits que postérieurement : ils 11’ont été
adjugés que par les arrêts des 5 janvier 1824 et 16 juin 1828. Or
l’on 11e prétendra pas sans doute qu’on a pu s’inscrire avant même
d ’être créancier. E n sorte que c’est sans inscription valable , que
pour tous les frais postérieurs, 011 s’est présenté à l’ordre, et cela
contre la lettre et l’esprit des lois sur le régime hypothécaire, et
sur l’ordre des prix de vente , lois qui ne permettent de distribuer
ces prix qu’entre les créanciers inscrits , qu’ils soient ou non pri
vilégiés ( voir notamment les articles 1 55 et su iv-, 775 et suivans ,
852 et 834 du code de procédure civile. ).
Il
doit suflirc d’indiquer ces trois derniers moyens , qu’on
pourrait même considérer comme inutiles d’après le développe
ment qu’ont reçu ceux qui précèdent.
La discussion principale prouve , il semble, jusqu’à l’évidence ,
l’erreur d’un jugement qui a méconnu la nature même de la créance
réclamée ; qui a accordé à des ccssionnaires plus de droit que n’en
aurait et que 11c pourrait avoir leur cédant; qui a confondu des frais
ordinaires (le partage avec des frais de justice privilégiés; qui lésa
colloqués dans un ordre étranger au partage, au lieu d’en renvoyer
h; paiement aux comptes, aux liquidations, et lors de la compo
sition d’une masse sur laquelle seule ils devaient être prélevés; qui
les a alloués sur un prix de vente qui 11’était pas rapportable au par
tage , sur la valeur d’un domaine qu’une prescription de plus do
�( 27 )
trente ans avait affranchi, racine clans la main de la dame de
Mariol , de toutes les charges de la succession ; qui a consacré la
prétention la plus extraordinaire, une prétention dont les annales
d u droit n'offrent aucun exemple , celle de faire supporter par un
seul des cohéritiers , sur un bien qui était devenu sa propriété
particulière, et par un cohéritier qui sera peut-être créancier , au
lieu d’être débiteur, en définitive, tous les frais faits dans une
instance en partage , par celui-là même des autres héritiers qui a le
plus à rapporter, et q u i, suivant toutes les vraisemblances , aura
beaucoup de sommes ou de valeurs à restituer à ses co-partageans.
Les injustes résultats d’une telle erreur ne permettent pas à la Cour
de confirmer le jugement dont est appel.
MARIE.
RI0M ,
IM PRIMERIE
DE
SALLES
F ILS,
P R ES
LE
PALAIS
DE
JUSTICE.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Marie, Jean-Baptiste. 1832?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
créanciers privilégiés
partage
ventes
successions
experts
collocation
émigrés
pays de droit coutumier
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Jean-Baptiste Marie, Licencié-Avoué près la Cour royale de Riom, appelant de jugement rendu au tribunal civil de Riom, le 24 mai 1832 ; contre MM. Chirol et Huguet, intimés.
Table Godemel : Privilège : 4. les avoués qui ont avancé les frais faits pour arriver au partage judiciaire d’une succession, entre les cohéritiers, et qui en ont obtenu la distraction, ont un privilège, pour cette créance, qui est une charge de la succession, sur tous les immeubles soumis au partage, aux termes des articles 873, 2101 et 2104 du code civil.
Mais s’il a été ordonné pour les jugemens ou arrêts, que les frais ne seraient prélevés que lors du partage, et qu’un ordre s’ouvre, dans l’intervale, sur le prix d’un immeuble provenant de la succession, vendu par un seul des héritiers, tiers-détenteur, alors il y a lieu de renvoyer l’éxercice du privilège des avoués sur le prix de cet immeuble, à la liquidation et au partage définitif de la succession, parce que l’immeuble dont le prix est en distribution ne peut être tenu exclusivement du paiement de ces frais, qui est une charge de la masse entière. en ce cas il y a lieu à n’autoriser les créanciers postérieurs aux avoués à toucher le montant de leur collocation qu’à la charge, pour eux, de donner caution jusqu’à concurrence de la créance des avoués en capital, intérêts et frais, et, en outre, d’une somme (déterminée par les juges) et suffisante pour garantie, à qui de droit, le remboursement des frais restant à faire pour arriver à la consommation du partage.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie De Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1832
1767-1832
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
1830-1848 : Monarchie de Juillet
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2710
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2711
BCU_Factums_G2712
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53547/BCU_Factums_G2710.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Vensat (63446)
Lafont (domaine de)
Lacombe (domaine de)
Chancel (domaine du)
Villemont (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
collocation
Créances
créanciers privilégiés
émigrés
experts
partage
pays de droit coutumier
Successions
ventes
-
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4559a3d3506156b6cf4419cb44fd21c9
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MÉMOIRE
POUR
!
Jean-A lexandre
M U R G E O N , et D
BOU
e n ise
C H A R D , sa fem m e, Propriétaires, demeurant à.
Vendat, appelans d’un jugement du tribunal de
première instance de Gannat, du 7 août 1 8 1 3 ;
CONTRE
L e sieur F r a n ç o i s P A S T I E R , employé à l a recette
générale des contributions d u département d u P u y d e-D ô m e } dem eurant à C lerm on t-F erran d in tim é
CONTRE
L e sieur J e a n - M i c h e l P A I L L A R D , receveur des
dom aines , et dam e F r a n c o i s e - G a b r i e l l e
D E B A R , son épouse, dem eurant à R iom , appe-
l ans du même ju g em en t
I
�EN P R É S E NC E
De J
ean
B O U C H A R D , et J
sa fem m e j A
l e x is
eanne
BOUCHARD,
B O U C H A R D , et
B O U C H A R D , sa fem m e ; et F r a n c ò i s
M a r ie
BOU
C H A R D , tous propriétaires, demeurant en ta com
mune de V erid a t, assignés ^en déclaration d ’arrêt
comm un.
I i E partage de la succession du sieur Gilbert Pastier,
ancien curé de C h a r r o u x , donne lieu à de grandes
discussions.
L e s sieur et dam e M u r g e o n , appelés par un pre
m ie r contrat de mariage à lui succéder, par représen
tation de Gilberte Mandosse, v e u v e M u r g e o n , et de
M a rie B a u d o n , v e u v e Bou ch ard , leurs d eu x m è r e s ,
réclament les droits héréditaires que ces deu x mères
auraient respectivement exercés si elles eussent survécu
au sieur Pastier, c ’est-à-dire la totalité de sa succession,
c o m m e étant ses plus proches parens au m omen t de
son d éc ès, tant dans la ligne paternelle que dans la
ligne maternelle.
L a dam e Paillard, appelée par un contrat de m a
riage subséquent, à représenter le sieur D e b a r , son
p è r e , v e u t , d ’ un autre c ô t é , en exercer les droits de
successibilité, quoique
cette seconde disposition s©
ê
�——— — —
l û ;
—
t r o u v e , par l ' é v é n e m e n t , en opposition a vec la pr em i è r e , qui forme la loi de la famille.
U n sieur François Pastier, de C le rm o n t , qui porte
le môme nom que le défu n t, mais qui n’est point p a
rent , paraît dans l’arène ave c un testament olographe,
et prétend s’em parer , ou de la totalité, ou au moins de
la majeure parlie de la succession, en détruisant ou
modifiant les
premières dispositions contractuelles,
dont il méconnaît Tirrévocabilité.
E n f i n , les frères et sœurs B o u c h a r d , originairement
associés au premier pacte de su ccéder, où ils n’ont pas
élé parlies contractantes, ont dem andé à en partager
le bénéfice avec la dame M u r g e o n , instituée, quoique
la charge d’associer ait été formellement r é v o q u é e
p a r le t e s t am e nt du d é fu n t.
L e s frères et sœurs M u r g e o n , et D e b a r , associés
c o m m e les B o u ch a rd , mais pensant autrement sur la
validité de cette rév oca tion , ont préféré le silence de
la p a i x , aux dangers des débats judiciaires.
Le
tribunal de G a n n a t , qui a jugé le procès en
première instance, a décidé que les dispositions du
testament postérieur devaient prévaloir sur les dispo
sitions antérieures des deu x contrats de m a r i a g e , q u ’il
a considérées c o m m e insignifiantes et révocables. Il a
attribué au légataire Pastier la majeure parlie de la
succession, et m ê m e les portions des associés déchus,
dont il a privé les héritiers contractuels.
%^
^
�-
\ i'k
—
------
En on ce r une telle décision, c'est proclamer que l ’er
reur a triomphé des principes les plus sacrés de la lé
gislation française.... Les sieur et dame Murgeon de
mandent à la C o ur la réforma lion de ce jugeme nt
extraordinaire. Ils se présentent devant les magistrats
distingués qui la com po sen t, avec d ’autant plus de
sécurité, que l ’appel est motivé sur la sagesse des ar
rêts no mbre ux q u ’elle a déjà rendus en cette matière.
Exposons d’abord les faits du procès; nous discute
rons ensuite les questions q u ’ils ont fait naître.
FA ITS.
J e a n - A l e x a n d r e M u r g e o n et Denise Bouchard ont
contracté mariage le
5 septembre 1 7 9 3 , par acte reçu
Poulain,, notaire à Charroux.
Gilberte Mandosse, v e u v e M u rg e o n , et Marie Baudon , veu ve Bo u ch a rd , ont réglé les conventions ma
trimoniales, de concert ave c le sieur Gilbert Paslier,
curé de C h a r r o u x , dont elles étaient alors héiitièies
au mo ins en partie, c o m m e ses plus
proches parentes.
présomptives,
lies deu x futurs é p o u x , et sur-tout le sieur M u r
ge on, avaient toujours été l’objet des plus tendres afiections de ce pa ren t, qui avait accordé des soins à
le u r
e n fan ce, et à qui Murgeon avait déjà rendu d’iin-
portans services dans le cours de la chh> révolution
naire : aussi ce bon parent voulu l-il leur donner une
�IJ
J------------------------ —
preuve de sa tendresse et de sa gratitude, en les pro
clamant ses héritiers.
\
L ’incertitude des circonstances politiques exige'ait
néanmoins quelques ménagemens envers la nombreuse
famille du sieur Paslier, qui aurait craint de s’attirer
la haine des parens q u ’il aurait ouvertement privés de
tout espoir de lui succéder pa rti el lem en t, en ras de
survie. L a prudence lui suggéra l’idée de stipuler sa
libéralité dans des termes qui pussent embrasser l ’ u
niversalité de sa succession, sans affliger ses autres
parens, en laissant dépendre l ’étendue de sa disposi
ti on, du nombr e des héritiers présomptifs que la loi
de la nature appellerait à lui survivre. Voici les termes
dans lesquels il s’expliqua :
« Est in l e r v e n u , au présent contrat, Gilbert Pas « l i e r , p r ê l r e , cu ré de la paroisse de Saint Sébastien
c< de cette ville ( C l i a r r o u x ) , cousin issu de germain
c< des mères desdits futurs, lequel, trouvant le présent
« mariage pour agréable, a rappelé, c o m m e par ces
« présentes il rappelle, lesdits futurs à sa future suc« cession, chacun pour ce qui les co ncer ne, par la re« présentation du chacune m è re , à la d i a r g e , par
« lesdits futurs, d ’associer audit rappel leurs frères et
« sœurs; ¡ceux futurs ont à 1 instant accepté et remer« cié ledit sieur Pasli er, leur cousin. »
Nou s remarquerons q u ’à ce ll e époque Gilbert Paslier avait [jour parens les plus proches, et conséquent-:;
ment pour héritiers présomptils :
�-------------------------------- ^ u j
D an s la ligne paternelle, Marie B a u d o n ,a lo rs v e u v e
de Jean-Baptiste B o u c h a r d , et mère de Denise B o u
chard, future épouse ;
Et dans la ligne maternelle, en remontant à la tige
de Gilberte Pralois, son a ïe u le:
Gilberte Mandosse, v e u v e de Jean Mu rgeon , et
mère de J e a n -A le x a n d r e M u r g e o n , futur é p o u x ;
An t o in e -M a ri e n D e b a r, père de la dame Paillard; la
dam e D e b a r - d e - l ’ I iô p ital, sœur d ’A n t o i n e ; et M a g d e laine Du bu isson, f e m m e d ’An toin e Monpied.
Marie L u c a s , épouse D e l e s v a u x ,
et mère
de la
dame Lois el -G u il lois , était alors déc édée depuis plu
sieurs années; de manière que la dame G u il lo is , sa
fille, était descendue d ’un degré.
L e 27 septembre m ê m e année ( 1 7 9 3 ) , A n t o i n e M arien D e b a r maria sa fille
(Françoise - Gabrielle
D e b a r ) à M . J ean -M iclie l Paillard. L e s invitations
pressantes que l ’on fit au sieur Pastier d ’assister à ce
m ar ia ge, produisirent une intervention de sa part dans
ce n o u v e a u contrat de mariagfc. Elle est stipulée en ces
termes :
« E n contemplation du présent m a r i a g e , Gilbert
a Pastier reconnaissant que ledit sieur Antoine-Marien
« D e b a r , père de la future, est l ’un de ses héritiers
« pr és omptif s
le plus près, et voulant prévenir toute
« discussion à sa succession sur le droit de représenta
it lion q u ’aurait la future si son père venait ù décéder
�-------------------------------------------------- m
------------------------------------------------
« avant ledit Pastier, il a , par ces présentes, volon« laireraent rappelé la future et les siens à sa succes« sion, audit cas de prédécès du sieur D e b a r , pour
« la m êm e portion q u ’aurait droit de prendre le sieur
« D e b a r s’il survivait au sieur Pastier, à la charge
« toute fois d ’associer Annet-Gabriel D e b a r , son frère,
« ou ses descendans, pour moitié au présent rappel.»
C e u x qui ont dicté ce second contrat de mariage,
n ’ont pu se dissimuler q u ’il ne devait point porter at
teinte au premier pacte de succéder, et q u ’il ne pro
duirait d ’effet réel que dans les cas et dans les chances
qui ne seraient point en opposition avec les disposi
tions primitives que la loi déclarait irrévocables.
Il est inutile de parler ici des évé ne men s subséquens
qu’a éprouvés la fortune de Gilbert Pastier, et d ’expli
quer les n o m b r e u x services q u e n ’ont cessé de lui
rendre les sieur et dame M u r g e o n , dans tout le cours,
de sa vie, et au milieu des persécutions auxquelles il
a
été m o m e n t a n é m e n t exposé. Nous nous bornerons
à rappeler les faits utiles à la décision du procès.
L a dame D e b a r - d e - l ’Hôpital est morte vers l ’an
né e 1795.
__
Magdelaine D u b u is s o n , f e m m e M o n p i e d , est d é
cédée le i 5 vendémiaire an 8 ( 7 octobre 1 7 9 9 ) .
M arie B a u d o n , v e u v e Boucha rd, le 28 ventôse
i 3 (ic) mars i 8 o 5 ).
Antoine-Marien D e b a r , père de la dame Paillard,,
le
5 germinal au i 3 (2 6 mars i 8 o 5 ).
�• Gilberte Mandosse, v e u v e M u r g e o n , est morte Ta
dernière, c ’esl-à-dire le 24 mars 1808.
C ependant le hasard fit rencontrer lé vieux curé
de C harroux avec le sieur François Pastier, de Clerm o n t , q u i , jusqu’alors, avaie nt été inconnus l’ un à
l'autre. L a conformité de nom établit entre eux des
com munications, et les sieur et
dame Paslier, de
C l e r m o n t , cherchèrent de concert à capter la bien
veillance du riche pasteur qui portait le m ê m e n o m ,
et sur la famille duquel ils feignaient de s’enter. Ils
firent jouer tous les ressorts pour envahir sa succession.
E n vain ce respectable octogénaire leur disait-il qu’il
était lié par la reconnaissance envers ses parens M u r
g e o n , et par des dispositions contractuelles q u’il n’é
tait pas en son pouvoir de détruire. L ’avidité ingé
nieuse des sieur et dam e Paslier trouvait toujours des
réponses et
des subterfuges; ils répondaient q u ’ils
avaient consulté des personnes qui leur avaient assuré
que les stipulations des contrats de mariages n ’étaient
pas tellement sacrées, q u ’il ne fût possible de les écar
ter par une vente simu lée, pour un prix fictif payé
co m p t a n t , mélangé avec une rente viagère ou une
réserve d ’usufruit, et m êm e par de simples dispositions
testamentaires qui , en restreignant les dispositions
contractuelles, auraient l’apparence de n ’en être que
le com m en taire ou l'interprétation.
Q u o i q u ’affaibli par son grand âge et ses infirmités,
le sieur Paslier eut encore assez de force pour refuser
�(
9 )
i
avec aigreur de signer la ve nte frauduleuse dont la
dame Paslier avait apporté le modèle de Clermont :
il ne voulut pas se dépouiller de sou vivant.
L a dame Paslier ne perdit pas courage; elle usa de
la ressource secondaire d’ un modèle
de testament,
q u ’à force d ’obsessions elle parvint à faire copier lit
téralement par le sieur Pastier, en ces termes ^ sous
l'antidate du i o m a i i 3 i o :
J e soussigné, Gilbert Paslier, prêlre et
ancien
« curé de Sainl-Sébaslien de C harroux , voulant met«. Ire de l’ordre dans mes affaires, prévenir toutes con«■leslalions qui pourraient naître après m o i, et profiter
« de la faculté que m’accorde le C ode N a p o lé o n , de
« disposer de tues biens ainsi que j’aviserai, en maina t e n a n t l e s d i s p o s i t i o n s l é g c i l e m e n l f n i i e s , a i f u i t mon
« testament olographe , que j'ai entièrement écrit f
« signé et daté de ma main,
« J e confirme le rappel porté par le contrat de mar liage du
5 octobre 1 7 9 3 , reçu Poulain, notaire à,
« C h a r r o u x , en faveur de J e a n - A l e x a n d r e Murgeon et
« de Denise B o u c h a r d , pour les portions héréditaires
« seulement que l’ un et l ’autre ont droit d ’am ender
* dans ma succession; je ve ux et entends que ledit.
rappel soit exé cut é chacun par l ê l e , en ce qui con« cerne les mariés; mais je ré voque la clause d ’asso*■ciniion faite au
prolit de
leurs frères et sœurs,
« attendu q u ’ils n ’e n ont ja m is été saisis, et q u ’uno
2
�\ o V
( I 0)
« pareille clause ne peut avoir son effet en faveur de
<r ce ux qui ne contractent point mariage.
« J e ré v oqu e en outre le rappel fait en fa ve ur
<t d ’A n n e t -G a b ri e l D e b a r , frère à demoiselle D e b a r ,
« épouse de M . Paillard.
« Je donne et lègue à M . François Pastier, ern* pl oyé à la recette générale de Clermont , sur tou s
« les biens non com pris d a n s Le rappel, une so m m e
«• de 40,000 fr., à prendre sur les plus clairs desdits
« bie ns, sans être tenu d ’aucunes charges ni dettes à.
« cet égard.
»
«• J ’institue en outre ledit sieur François Pastier +
,
<e m on héritier du surplus de mes biens, à la charge
« par lui de p a y e r , a vec les rappelés à ma succession,
« et par portion égale e n tr’eu x , toutes m es dettes,
« desquelles feront partie les arriérés des gages dus k
<r Catherine C h e n e v i è r e , v e u v e P a l r i n , ma dômes-,
« tiq u e , qui montent à une so m m e de 393 fr.
« D e laisser prendre et retirer de ma maison, par
« ladite C ath erine, son lit garni, non compris l'ul« c o v e , quatre draps de l i t , d e u x arches de sapin,
« un pot de f e r , une poêle et poêlon qui lui a p p a r « tiennent-, de lui d o n n e r , pendant sa vie durant , la
h
jouissance et usufruit d ’ une maison couverte à tuiles
» creuses, et de la moitié du petit jardin qui est a u <r delà de la r u e , le tout en celt e c o m m u n e ot près
« du puits d ’A n t a n l ; de p?iyer aussi à l a d i t e 'C a d j e « l i n e , chaque année et pendant sa vie d u r a n t , une
�( ii
Z & cy
)
<r pension viagère de trois setiers f r o m e n t , et un poin« çon de vin ; laquelle pension lui sera p a y é e , pour
«• la première a n n é e , dans les six premiers mois du
«■jour de m on décès, et ainsi continuer d ’année en
» a n n é e , à com pt er dudit p a i e m e n t , jusqu’au décès
* de ladite Catherine.
« D e p a y e r annuellement et p e rpétuellem en t, aux
« pauvres de cetle c o m m u n e , une reni e de
3 oo fr.,
« pour quoi demeurera un principal de 6,000 fr, , qui
« sera fo rm é par les capitaux qui me sont dus; savoir :
«
3 ,ooo fr. par le sieur Pierre D u b o n , en deu x c o n
te trats, et pareille som m e par le sieur Jean L e v e r t ,
« lesquels contrats de re ntes, à m on décès, seront dé« posés entre les mains du desservant l ’église de cette
« c o m m u n e , q u i , c o n c u r r e m m e n t a v e c le m a i r e d u « dit h eu el le sieur P a s l i e r , ou un de ses représen
te tans, feront la distribution annuelle, aux pauvres
« de cette c o m m u n e , du produit et intérêts desdits
« contrats de ren te, sans que mes héritiers soient t ê
te nus de parfaire les
3 oo f r . , dans le cas où lesdils
te contrats ne donneraient pas annuellement
te s o m m e de
ladite
3 oo f r . ; et enfin de p a y e r , pour mes ob-
« s è q u e s , funérailles et trois annuels, la somme de
« i , o 5 o fr.
te J e nom m e et désigne, pou r m o n ex écuteur tesK tam entuire,' le sieur François
Pastier.
i
*
J e casse et r é v o q u e tous autres tesfamens et co -
» dicilles que je pourrais avoir laits préc éd emm en t >
�X fo
( «
)
« voulant que le présent teslament ait seul son exécn« l io n , c o m m e contenant mes dernières intentions et
» vol on té s; et après J/avoir la et re lu , je déclare q u e
v j ’y persiste. Fait à C h a r r o u x , etc.»
Gilbert
Pastier est mort à C h ar rou x, le
1 « dé
ce mbre 1812.
D e grandes contestations se sont élevées pou r le
partage de sa succession , ouverte dans le dé parte
ment de l ’Allier (territoire du ci-devant Bourbonnais).
I-es scellés ont été apposés. T o u s les parens plus
ou moins éloig n é s, les rappelés, les légataires se sont
présentés; mais à la vu e des contrats de mariag es et
du testament, la plupart des prétendans se sont re
tirés, et il n’a resté sur la scène que les parties qui
plaident aujourd’hui.
U n jugement provisoire a n o m m é le sieur M u r g e o n
administrateur de la succession jusqu’à la décision du
procès.
U n second jugement
a fait délivrance provisoire
des legs pieux et rémunératoires.
L e s demandes respectivement formées ont été dis
cutées dans des mémoires et consultations imprimés.
L a dam e Paillard a demandé le quart de la succes
sion, en vertu du rappel inséré en son contrat de ma
riage, du 27 septembre 1 7 9 3 , sur le fondement q u ’elle
est autorisée à exer cer les droits héréditaires d ’A n -
«
�( *i3 )
foine-Mar ien D e b a r , son pè re, qui aurait hérilé de
la moitié des biens
dévolus à la ligne m at ern el le,
c ’est-à-dire du quart du total de la succession, s’il eût
survécu à Gilbert Pastier. Par cette disposition c o n Iractuelle, a-t-elle dit , le sieur Pastier s’est engagé à
laisser à mon é g a r d , c o m m e à l’égard des sieur et
dame M u r g e o n , sa succession ab intestat j il n ’a pu
la grever d ’aucune disposition testamentaire à m on
préju dice, et je dois parlager la moitié maternelle
a vec le sieur iVJurgeon, mon co -h é ri tie r, par re p r é
sentation de Gilberte Mandosse.
L e s sieur et dame M u rg eon ont soufenn au c o n
traire que la première disposition contractuelle devait
l ’em po rler sur toutes les autres; q u ’elle leur attribuait
l ’universalité de la succession , à raison du prédécès
des parens qui auraient été dans le cas de con c ou
rir avec eux c o m m e représentant leurs mères. Ils di
saient que si la succession eût été ouve rte ab in testat,
et que leurs deux mères eussent élé seules vivantes,
elles auraient recueilli, c o m m e plus proches en degré
dans les deux lignes paternelle et maternelle, la tota
lité des biens; q u’ils étaient autorisés à représenter
leurs mères par l ’effet de la représenta lion c o n v e n
tionnelle ;
Q u ’ une seconde fiction ne pouvait détruire l'effet
de la première fiction contract uelle, qui les reportait
a un degré de parenté plus pr oche; que le pacte de
succéder, stipulé ù leur profit, avait le caractère d ’ir
�lv£
( 14 )
révocabilité, et les effets utiles des institutions c o n
tractuelles,
et q u e , con séq ue m men t
c e ll e qualité
d ’héritiers conventionnels leur assurait toute la suc
cession , par la proximité du degré et la priorité de la
disposition ; que les charges d ’associer, révocables à
l ’égard des non contractons, élaient irrévocables dans
l ’intérêt des institués, et que le bénéfice de la r é v o
cation devait tourner à leur profit; et que ni les frères
B o u c h a r d , ni le légataire Pasiier n’avaient rien à y
p réten dre; que toutes les dispositions testamentaires
devaient disparaître devant les contrats e n t r e - v i f s ,
q u ’il n’était point possible d ’atténuer par des legs i m
menses ou de c o t e , mais seulement d é g r e v e r de quel
ques legs modiques du genre de ce ux expliqués en
l ’art. i o 83 du Code Nap oléon.
L e s associés Bouchard ont prétendu que les charges
d ’associer étaient irrévocables , m ê m e à l ’égard des
associés, et q u ’ils devaient profiler du bénéfice de l ’as
sociation ; mais peu confians dans la solidité de leurs
m o y e n s , ils ont fait défaut dans les plaidoiries.
François
Pasiier est c o n v e n u , dans son m ém o ire
i m p r i m é , que les rappels à successions, stipulés par
contrats de mariage, étaient de véritables institutions
contractuelles irrévocables; mais il a prétendu
que
les portions des associés au rappel étaient tom bée s,
par la r é v o c a t i o n , dans la succession ab in testa t, et que
le sieur Gilbert Pasiier en avait valablement disposé îi
son profil. Il a aussi ré clamé des portions d ’acquêts et
�( 15
)
de pr opre; il a fait des calculs compliqués des portions
qu'il lui plaisait d'attribuer, soit à l u i - m ê m e , soit à
chaque prétendant. Mais lors des plaidoiries, il a c o m
battu son propre sy stè m e, et prétendu que les rappels
à successions, écrits dans les contrats de mariages, ne
saisissaient point les rappelés du droit de succéder, et
n ’avaient d ’autre effet que de les placer dans un degré
d e parenté plus rapproc hé; que le rappelant pouvait
di sposera sa volonté de la totalité de sa succession. I l
a frondé et l ’opinion judicieuse du savant c o m m e n ta
teur de la coutu m e d ’A u v e r g n e , et l’arrêt rendu dans
l ’affaire des R a n d o i n , et tous les m on u m ens de la ju
risprudence.
C e dernier sy s tè m e , dont la bizarrerie fait tout le
m é r i t e , a été adopté par le tribunal de G an na t, quoi
q ue le long délai e m p l o y é à la délib ération dûl laire
espérer le triomphe des vrais principes.
V o i c i le dispositif du j u g e m e n t , qui porte la date du
y août 1 8 1 3 :
« L e tribunal, jugeant en premier ressort, donne
« défaut faute de plaider contre les parties de T r o n « n e t , et ,s ta t u a n t au principal, ordonne que le testa
it ment olographe
du sieur Gilbert Paslier, du
18
« niai i 8 r o , sortira son plein et entier effet, et q u ’à
« cet effet les parties viendront à partage des biens
« meubles et immeubles de la succession de Gilbert
« Paslier;
en co n séq uence , que les parties seront te-
« nues de n o m m er uu ou trois exp ci is dans les trois
�rrü -j
« jours de la signification du présent j u g e m e n t , pour
« procéder audit partage, co n fo rm ém ent à l'article
« 824 du Code N a p o l é o n , et suivans; sinon et faute
« d’en convenir dans ledit délai, n om m e M M . De« Iesvaux, notaire à C h a r r o u x ; R e n a u d e l , notaiie à
a Braussat, et L a p l a n c l ie , géom ètr e à Gannat; lesquels
« prêleront serment par-devant M. Chocheprat - D u « m o u c h e t , j u g e , commis à cet effet, qui, au besoin,
« remplira les fonctions de juge-commissaire; lequel
« fera la délivrance des lofs aux parties, suivant leurs
« droits, qui demeurent ainsi réglés; savoir : à Denise
« Bou ch ard , c o m m e représentant Mari e Ba u don, le
« quart de la moitié, équivalant au huitième de la to« talité des biens de la succession, q u ’aurait recueilli
a M arie Baudon , sa m è r e , du c h e f paternel ; à Alexan« dre M u r g e o n , du c h e f maternel, le tiers du q u a r t ,
« équivalant au douziè m e de la totalité des biens de
« la succession, qu'aurait recueilli Gilberte Mandosse,
« sa m ère ; à Françoise-Gabrielle D e b a r , f e m m e du
« sieur Pai llard, la moitié du qua rt , équivalant ail
« huitième de la totalité des biens, q u ’aurait recueilli
« A n t o i n e - M a r i e n D e b a r , son pè re , aussi du c h e f
« maternel. Sur le surplus des autres biens, ordonne
« que Îe sieur Pas!ier prélèvera la somme de 40,000 fr.,
« franche et quille de toute dette, conformément audit
c< testament ; ordonne q u ’il se mettra eu possession des
« autres biens, à la charge par lui de payer les dettes
« et legs de la succession, conformément au testament,
« avec les rappelés, en proportion de ce que chacun
�C 17 )
£ ?/
« y a m e n d e; que l ’administrateur provisoire sera (enu
« de rendre c o m p t e de sa gestion; ord on ne, e n f i n ,
« que tous les frais faits seront employés en frais de
« partage, m ê m e ce ux faits par les autres prétendant
« droits à ladite succession, révoqués par ledit testa« m e n t , ainsi que le c o û t , l e v é e et signification du
« présent ju g e m e n t ; et dans le cas où lesdits experts
« estimeraient que les biens ne seraient pas dans le cas
« d’être p a r t a g é s , ordonne q u ’ils seront licités paroc devant le tribunal. Fait et j u g é , e t c . »
L e s sieur et dame M u rgeo n ont appelé de ce juge
ment contre toutes les parties.
L e s sieur et dame Paillard en ont aussi interjeté
appel.
L e s frères et sœurs B o u c h a r d
o nt é t é assignés en.
déclaration d’arrêt commun.
L e s discussions respectives présentent à juger les
questions de savoir :
i ° Si le rappel à succession, stipulé par contrat de
m ariage,
sous l’empire de la coutum e de Bourbonnais,
avait 1’eiTet d ’ une institution contractuelle irré vo cable,
ou si, au contraire, l ’auteur de la disposition pouvait
l ’anéantir par une révocation entre-vifs ou testamen
taire ;
2° S i, dans le fa it , les sieur et dam e Mu rgeon ont
été saisis par leur contrat de mariage du droit de r e -
3
�( i8 )
cueillir éve ntuellement l ’ universalité de la succession
de Gilbert Pastier ;
3 ° Si les portions des associés au rappel doivent
tou rn er , par suite de la révoca ti on, au profit des rap
pelés, ou tomber au contraire dans la succession àb
in testa t;
4° Si la première disposition contractuelle était un
obstacle,soit à la dispositionsecondaire faitedansle co n
trat de mariage de la dam e Paillard, soit aux nouvelles
disposilions, à cause de m o r t , insérées dans le testa
m ent olographe du 18 mai 1810.
L a première question est la plus importante : elle est
le ger m e des autres difficultés; sa solution préparera la
décision des questions subséquentes qui se rattachent
plus ou moins aux principes que l’on établira dans la
discussion préliminaire.
Lu matière des rappels est fort aride par e l l e - m ê m e ;
les auteurs sont discordans sur divers points de doc
tr ine, dans leur application aux cas particuliers; mais
ils s’accordent presque tous sur les points fonda men
t a u x , et notamment sur les rappels stipulés par contrat
de mariage. Nous élaguerons
toutes les discussions
oiseuses, et nous les ramènerons aux seuls points de
controverse qui existent au procès.
«
�( '9 )
§
I".
L e rappel à succession , stipulé par contrat de m a
r ia g e , a L’effet d'un e in stitu tion contractuelle irré
vocable.
L e s auteurs définissent Le rappel en g én éra l, une dis
position de l ’h o m m e qui appelle ¿1 sa succession, to
tale ou partielle, une personne qui en serait exclue
par lu loi, ou n’y prendrait q u ’ une moindre part si la
succession s’ouvrait ab intestat.
Cett e définition s’applique ég alem ent aux quatre
espèces de rappel qui étaient usitées dans l ’ancienne
législalion, pour re m éd ier , i° à l ’exhérédation des en; 2° à l’exclusion coutumière des filles dotées; 3 ° à
la r e n on c i at i on a u x successions f ut ur es ; 4° au d éfa u t
fans
de représentation.
Nous ne parlerons ici que du rappel relatif à la re
présentation, parce q u ’il est le seul qui ait de l ’analogie
a vec les questions agitées au procès.
I l im p or te , pour la clarté de la discussion, de r e
m arqu er que le droit romain admettant indéfiniment
la représentation dans la l*jne directe, en avait fixé les
bornes a u x enfans des frères, dans la ligne collatérale,
par les deu x novelles 1 18 et 127.
T^a plupart dès cou tu m es , notamme nt celles de P a n s
et de B o u rb o n n a is, admettaient la représentation eu
directe et e n collatérale, d a n s les termes d u droit r'o-
�\S •
C 20 )
main. : c’était ce que les auteurs appelaient la repré
sentation in lrà terminos j u r i s , confirmée, a vec une
légère addition, par les articles 740 et 742 du Gode
Napoléon.
L e s successions qui s’ouvraient dans Les termes de La
représentation Légale, intrà terminas j u r i s , se parta
geaient par souch es, per stirpes, pour nous servir de
l ’expression textuelle de l ’article
3 o6 de la coutume
de Bourbonnais. L a représentation reportait les en fans du frère pr édécédé
au m ê m e degré que leur
p è r e , et tous ensemble ne formant q u ’ une souche, re
cueillaient la m ê m e part que leur père aurait eue s’il
eût réellement survécu au frère dont on divisait la suc
cession. L a fiction légale imitait la nature, et produi
sait les même s effets.
O n ne consultait, au contraire, que la proximité
réelle du degré de parenté, pour régler les successions
ouvertes hors des termes de la représentation d u droit
co m m u n , extra terminos j u r i s . L es héritiers les plus
proches venaient personnellement {ju r e suo ) à la
succession, et la partageaient entre eu x par tê te , per
capita.
L e s rappels avaient pour objet de suppléer au si
lence des coutumes qui ne connaissaient pas la repré
sentation, c o m m e de remédier à la rigueur des 'c ou
tumes qui rejellaient la représentation, soit dans la
ligne directe? soit dans la collatérale.
L es rappels étaient d ’ un usage fréquent, m êm e
�'
( 21 )
avant la réformation de nos anciennes coutumes. Ils
étaient tellement fa v o r a b l e s , qu’ il suffisait d ’en faire la
déclaration, par le plus simple acte capable de manifes
ter la volonté du rappelant , sur-tout lorsqu’il s’agis
sait d ’ une succession ouverte iatrà terminos j u n s . Ils
conféraient alors la qualité et les droits d'hé rilier; les
biens recueillis par le rappelé étaient réputés propres
sur sa tête.
Lorsque le rappel avait lieu hors des termes de la
représentation d u d r o it, extra terminos ju r i s , il était
considéré co m m e legs; il valait, c o m m e disent les au
te urs, per m oduni leg a ti, et attribuai! au rappelé la
quotité des biens , que la coutum e déclarait disponible
p ar testament. L es biens échus à ce litre avaient la
qualité d'acquêts.
Si l ’on trouve par fois quelque dissidence, sur di
vers points de doctrine, entre les auteurs qui
ont
traité des rappels faits par simple acte déclaratoire ou
par testament, on peut affirmer que la plus parfaite
unanimité règne parmi eux à l’ instant où ils parlent
spécialement d u rappel stipulé par contrat de mariage.
Il change alors de nature, et acquiert Joule la faveur,
tous les privilèges que la législation française accorde
aux conventions matrimoniales; il lait dans tous les
cas un héritier contractuel. « O n n Vx/unine plus ¿dors,
« disent Ihs éditeurs de l'ancienne collection fie ju n s « p r u d e n c e , si le rappel est fait intrà ou extra terminos
v. j u n s ; lu laveur de ce contrat esl si g ran d e, q u ’on
�Iti
^
, (
k
2
2
)
.
passe par-dessus les règles ordinaires pour faire valoir
.« loules les conventions qui ne sont pas contre les« bonnes mœurs. »
A C égard d 'a n rappel, f a it par contrat de m ariage,
dil de R e n u sso n , Tr aité des Propres, cliap. 2 , sect. 8 ,
pag. 1 63 : «S’il est fait dans une coutum e où il est per
te mis de disposer de tous ses biens en tre-vifs , il vaut
« in stitu tion d'héritier, et doit être exéc uté dans toute
« son éten due , quoiq u’il soit fait extra term in osJuris.
« Les conventions de succéder, les institutions d ’héri« lier ont été reçues et autorisées en France p o u r la
« conservation des familles, quand elles sont faites par
« contrat de mariage. »
« Quand le rappel est fait par contrat de mariage
« intrà vel e x tr a term inos ju r is , lit-on dans deLauriere,
a T r a i té des Institutions contractuelles , tom.
I er,
« pag. 1 1 7 , 1 1 8 , etc., n. 45 et suiv., il fait un héri« tier contractuel : il profile non-seulement à celui en
« faveur de qui il a été fait ; mais en cas de prédéces,
« il profite encore à son héritier comme C in stitution
« contractuelle, et,par conséquent,il est vrai dedire que
« le rappel en contrat de mariage est une institution
a qui fait un véritable h éritie r, etc. »
« Si le rappel a été fait par contrat de mariage
« (p ro fess e B rodea ti, sur L o u e t , lettre R , som. 9 ,
« n. i 5 ) , on peut dire, en ce cas, que le rappel est
« une espèce d ’institution contractuelle qui est irré« vocable, s a is it, et est tra n sm issible; sans q u ’il soit
�^LS\
( 23 )
« au po uvo ir de celui qui a fait ef établi la loi du rappel
« dans sa famille, par un contrat si solem nel, de le
« r é v o q u e r , ni m ê m e de le diminuer et affaiblir eti
faisant des dispositions avantageuses au profit des
« autres héritiers, au préjudice de ceux qui ont été
« rappelés. »
L e B r u n , parlant des rappels extra ierminos ju r e s ,
faits en f a v e u r d’arrière-neveux qui ne devraient héri
ter que per rnoclum le g a ti, a j o u t e , n. 1 8 , liv.
chap. i o , s e c t .
3,
3 : « q u ’ils viennent per m odum succes-
« sio n is, q u a n d ¿¿s sont rappelés par contrat de m ae riage; car alors leur appel est une institution co n
te tractuelle, et la succession se doit partager par souw ches , suivant un arrêt d ’audience du 6 mars 1660. »
Cet arrê t, r a p po r t é par de L ciuricrc, pag. 1 1 9 e t
su ivante, est conforme à une multitude d'aulres arrêts
recueillis
par B o u q u ier, B r o d e a u , de R e n u s s o n , et par
le Journal des Audiences, où l ’on remarque particu
lièrement les arrêts des 21 janvier i 6 o 5 , 6 mars 1 660,
et 12 janvier 1 7 1 2 , rendus après des discussions pro
fondes et lumineuses, qui n’ont pas laissé le moindre
doute sur le principe que Le rappel par contrat de m a
riage, întrà comme extra terrninos ju r i s } emportait
in stitu tion contractuelle
C o m b ie n cette m ax im e du droit général n ’acquiertelle pas de force, lorsqu’on agite la question sous une
des trois coutumes qui ont créé les institutions contrac-
�( H
)
tuelles, et servi de type à la jurisprudence universelle
sur cette matière!
Voici les termes textuels de Fart. 21 9 de la coutume
de Bourbonnais, qui régissait le domicile et la fortune
des parties, à la date du contrat de mariage des sieur
et dame M u r g e o n , du
5 septembre 179 3 :
«• Toutes d o n a tio n s, conventions, ava n tages, in sti« tutions cThéritier y et autres choses fa ite s en con« trat de m ariage , en fa v eu r d 'ic e lu i, au p rofit et
« u tilité des m a riés} de Cun d ’e u x , ou des descendans
*■d u d it m a riag e, Le m ariage f a i t par paroles de pré«• sen t, sont bonnes et valables, en quelque fo rm e q u elles
« soient fa ite s , etiam en donnant et retenant ; et posé
« qu elles soient im m en ses, inoffîcieuses et f u s q u à
« Cexhérédation des propres enfa n s d u d it d isp osa n t,
« soient icelles dispositions f a i t e s , apposées ou a fo u » tées a u d it contrat de m a ria g e, avant ou pendant les
ce fia n ça illes , réservé toutefois a u x d its en fan s leur
k
droit de légitim e ,• posé a u s s i que lesdites donations
tr et avantages soient fa it s à personnes étranges co n
te tractant led it m a ria g e, bâtards ou autres quelcon~
« q u es, et saisissent telles disp ositio n s, les cas avenus,
rr q u a n d lesdites donations et dispositions sont fa ite s
« p a r personnes habiles à contracter. »
L e s termes de la coutume sont si absolus, si g é n é
ra u x , q u ’il est impossible di* douter q u ’elle comprenne
les rappels à succession au nombre des d i s p o s i o n s con
tractuelles, puisque ces rappels n ’offrent q u’ un p a cte,
�( 2b J
Z %3
un morte, une con ven an ce de s u cc é d e r, un avantage
on cfio.'e quelconque fa it e en contrat de m a riag e, et
que la coutume enveloppe généralement toutes les
conventions, toutes les stipulations, toutes les choses
en général q u ’il est possible de stipuler dans lés contrats
de m ar ia ge, sous quelque nom et en quelque forme
q u ’elles soient rédigées. Peu importe que les c o n v e n
tions de succéder soient conditionnelles, é v e nt u elles ,
casuelles et inofficieuses j elles ne saisissent pas moins
les contractans lorsque les cas aléatoires se réalisent, et
s a is is s e n t, dit l’art ic le, telles d isp o sitio n s, les cas
avenus.
L e privilège de saisine et d ’irrévocabilité, attaché
aux dispositions contractuelles, qui n’avait jamais été
contesté dans l’ancienne législation, a été consacré de
nouve au par l’art. i er de la loi du 18 pluviôse an 5 , et
par l’art. i o 83 du C o d e Napoléon.
L es jurisconsultes les plus distingués de R io m et de
C le rm on t, au nombre de tr eiz e, qui ont écrit au pro
c è s , ont rendu de concert h om m a ge à ce principe f o n
damental de notre législation. O n lit, dans le mém oire
i m ^ ’imé du sieur Pastier, pag. 6 , les lignes suivantes :
« Lorsque le rappel est fait par contrat de mariage
« c o m m e celui des ép oux M u r g e o n , il est u n ei n s ti tu « tion contractuelle, irrévocable c o m m e toutes les dis« positions contractuelles, en ce sens que l’instituant
« ne peut plus disposer, à titre gratuit, des biens qui
a en sont l’objet, si ce n’est dans les bornes prescrites
* par la loi en pareil cas. »
4
H , r,
�M ô m e doctrine dans la consultation! imprimée à la
suite du m é m o i r e , pag.
38 .
C o m m en t po urr a-t -o n croire que le sieur Pastier,
se mettant en contradiction ouverte avec lui-même et
a v e c tous ses conseils, ait osé plaider ensuite devant le
tribunal de G a n n a l , que le rappel par contrat de m a
riage n’était q u ’ un vain mol qui laissait à son auteur la
faculté de disposer, à titre gratuit, m ê m e par testa
ment , de toute sa succession, au préjudice des rappelés
qui n ’étaient saisis de rien?
C o m m e n t , sur-tou t, pourra-t-on concevoir que des
erreurs si palpables aient pu séduite les juges de pre
mière instance, et leur faire considérer un rappel écrit
dans un contrat solem nel, c o m m e un chiffon qu'un
simple caprice 011 changement de volonté fut capable
de d é t r u i r e ? .. Quelles raisons ont-ils pu donner d'une
si étrange décision?... Ont-ils cité quelques lois, quelq u ’autorité respectable pour violer si ouvertement le
texte de la c o u t u m e , et les maximes les plus certaines
de la jurisprudence universelle?... N o n ; la chose était
impossible : aussi se sont-ils bornés à faire un pardlogistne, en résolvant la question par la question ellem êm e. Ils ont tout simplement supposé «■qu'en con
te tu me de Bourbonnais les rappels du genre de ceux
« des sieurs et d a m e ’Murgeon et Pail'aid, soit q u’ils
« fussent faits par contrat de mariage ou par q u r l q u ’acte que ce fût, n’avaient d ’autre effet que de
« me lire les rappelés en situation d’être dans un degré
>
�(
27 )
'¿ .’¿ S
« de représentation utile pour succéder au rappelant
a dans le cas où ils se trouveraient hors les termes de
« représentation coutumière à son décès; que par c o n
te séquent les rappelés avaient mal à propos soutenu
« que des rappels par cont rat de m ar ia ge, faits en
« Bourbonnais, avaient l ’effet des institutions contrac« tuelles, puisqu’ils (les rappels) n opéraient aucune
« saisine en Leur fa v e u r , tandis que
1 institution co n
te tractuelle d ’hérilier saisissait irrévocablement 1 insti« lué de la qualité d ’hérilier de l’instituant, et ne per
te mettait pas à ce dernier de s’en choisir un autre.
« que le rappel ne produisait d ’autre droit que l’e x p e c« tative de recueillir leur portion dans une succession
« q u ’ils pouvaient perdre par le fait d e l à descendance,
« hors des t e r me s de la représentation coutumière bora née aux enfans des frères , com m e p a r des d i s p o s i « tions contraires, soit par testament ou donation entre« v if s qu aurait pu fa ir e Le sieur P astier lu i-m êm e, etc.a
Q u e signifie la prétendue différence im aginée entre
l ’institution d ’hérilier et le rappel à succession? A p p e le r
un parent ou un étranger à sa succession, n ’ est-ce pas
lui pr om et tr e, lui donner cette succession, le déc larer,
le reconnaître héritier, ou, ce qui est la m ê m e chose,
l ’instituer héritier, puisque toutes ces expressions sont
synonimes, ainsi que le professent les auteurs cités,
notamment de L a u r iè r e , B r o d e a u , R ic a r d , B a q u e t,
L e B tu n 5 etc.
T ou t pacte de su ccéder, stipulé par contrat de ma-
'k s .
�t
k
V.
C 28 )
l i a g e , n ’est-il pas considéré c o m m e inslifulion contrac
tuelle, en quelque forme et sous quelque dénomina
tion q u ’il plaise de le rédiger? Le texle de l a c o u l u m e ,
art. 2 1 9 et 220, n’esf-il pas d ’accord en ce point a v e c
la législation générale?
N ’est-il pas ridicule d ’alléguer q u ’ un rappel à suc
cession n’est q u ’ un rappel à un degré de parenté, sans
effet utile? Les contrats doivent s’entendre cuni effectu,
dans le sens le plus large, le plus favorable aux é p o u x ,
ainsi que l’ont décidé les arrêts, et notamment celui
du parlement de Paris, du
5 avril 1 7 6 6 , rapporté au
Ré pe rtoire de M. M er li n , tom. 6 , pag. 285.
L e mot succession désigne la masse de tous les biens
d 'u n d é fu n t : rappeler
q uelqu’ un
à sa su ccessio n ,
c ’est donc l ’appeler à recueillir les biens q u ’on laissera
en mourant. Dans le fait, l’expression textuelle du
contrat du
5 septembre 1 7 9 3 , rappelle les ép oux Mur-
geon à la Juture succession d u sieur Pastier, et non
pas seulement à un degré vide de sens, à un mol illu
soire. La stipulation qui autorise les épo'ix ÎVIurgeou
à représenter leurs mères, n ’est que la v o i e , le mode
d ’exécution de la disposition, l ’indication de la quotité
des droits et portions q u ’ils sont appelés à recueillir
dans la succession.
Quelle absurdilé de dire que le rappel n’a va't d’antro
effet que de meltre les é p o u x ,Yluigeoii à un d e g i é <lc
repr ésent ation
ulile pour lui succéder, dans le cas où
ils se trouveraient à son décèa hors des t e n n i s de la
«
�(
29 )
z% y
représentalion! X>ü succession de Gilberl Pa stie r, qni
n ’avait ni frères, ni sœurs, mais seulement des cousins
aux sixième et septième d e g r é s , ne pouvait jamais
s’ouvrir dans les termes de la représentalion l é g a l e ,
b orn ée aux enfans des frères. U n e descendance ulté
rieure, de la part des parens, ne pouvait q u’aflaiblir
le lien de la pa renté , au lieu de le ressener. L e rappel
avait été stipulé ex tra terminos j u r i s ; il était donc
impossible qu'il rentrât intra terminos ju r is : il eût été
ex é c u t é c o m m e legs s’il eût été fait par testament; il
doit être ex écut é c o m m e pacte de su cc éd er , ou institu
tion contractuelle, parce q u ’il est écrit dans un contrat
de mariage. U n e multitude d ’arrêts, et spécialement
celui du 6 mars 1 66 0, ont jugé d’ailleurs que le ra p
pel contractuel conservait toujours ses eil'ets, m ê m e
après le décès de tous les frères ou oncles d ont l’existence aurait pu donner lieu au concours.
C o m m e n t supporter l ’idée de la révocabilité par un
changement de volonté du rappelant, lorsque la c o u
t u m e , les lois générales proclament unanimement l’irrévocabilité de toutes les dispositions, de toutes les
conventions, de toutes les choses écrites dans les co n
trats de mariage?
C o m m e n t concilier ce système de révocabilité, et
a vec la saisine pr ononcée par la coutu m e e l l e - m ê m e ,
et avec le principe de la transmission a u x enfans des
mariés, attesté par tous les auteurs, et consacré p a r l e s
arrêts?
�^
'
(
3o )
T e n o n s donc pour constant que le contrat de m a
riage des sieur et dame M u rgeo n n’était point un tilre
illusoire et r év o cab le, et q u’il leur a réellement conféré
la qualité et les droits d’héritiers contractuels des biens
que Gilbert Pastier a laissés à son décès; tenons pour'
constant que le pacte de succéder écrit dans ce p r e
m ier co n t rat, qui forme la loi de la famille, frappe
tous les biens meubles, immeubles, acquêts et propres
qui composent la succession, puisque la coutum e de
Bourbonnais et la jurisprudence générale permettaient
également au feu sieur Pastier de disposer, par c o n
trat de m ariage, de l’ universalité de sa fort u n e, sans
réserve ni modification, jusqu’à l ’exhérédation de ses
propres enfans, s’il en eût laissé.
§
II.
Æ e x a n d r e M urgeon et D en ise B o u c h a r d } sa fem m e,
ont été s a is is , par Leur contrat de m a ria g e, d u droit
de recueillir éventuellement Cuniversalité de la su c
cession de Gilbert P a stier. ■
I l suffit de lire la clause du contrat de m ar ia ge, du
5 septembre 1 7 9 3 , pour être convaincu de cette v é
rité : «Gilbert Pastier, y est-il dit, trouvant le présent
« mariage ( d ’Alexan dre M u rg eon et de Denise B o u « ch ard ) pour agréable, a r ap p elé, co m m e par ces précc sentes il rappelle, lesdits futurs ép oux à sa fu tu r e
« succession y chacun pour ce qui les concern e, par la
« représentation de chacun e m è re , à la ch a rg e , par
�r * 7 .
* * *
« lesdits futurs , d’associer audit rappel leurs frères e t
_/
« sœurs. I ce u x futurs ont à l’instant accepté et remerc ié
« ledit sieur Pastier, leur cousin. »
-i
Cette clause ne présente pas d’é q u ivo qu e : chacun
des deu x ép oux est appelé à recueillir tout ce que sa
mère y recueillerait si elle survivait au sieur Paslier.
Les
deu x mères sont dépouillées, par cette disposi-
l i o n , faite de leur agrément dans le contrat de m a
r i a g e , où elles sont parties figurantes, de l'espoir per
sonnel de succéder au sieur Pastier de c u ju s , malgré
la plus grande proximité du degré de parenté.
T o u s leurs droits successifs, présens, futurs et évei>
tu e l s ,s o n t transmis aux é p o u x , que le contrat de m a
riage investit du litre irrévocable d’héritiers c o n v e n
tionnels d ’ une succession q u i n e peut plus être g re v é e
de dispositions contraires.
L a convention contractuelle, formellement acceptée,
a établi en leur faveur un droit acquis et ind élébile,
quoique sa quotité fût susceptible de varier suivant les
cas et les évé ne mens qui pourraient arriver, c ’est-àdire suivant le nombre d héritiers naturels, au m ê m e
degré des deux mères représentées, que la loi aurait
app elés, lors du décès de Gilbert Pastier, au partage de
sa succession.
Du nsla ligne paternelle des Pastier, Marie B ando n,
v e u v e Bouchard, était la plus proche parenie de G il
bert Paslier de c u ju s ; nul autre parent n existait au
�(
32 )
m ê m e degré pour concourir avec elle ; conséq ue m m e n t , Denise B o u c h a r d , sa fille et représentante, avait
la certitude de recueillir seule la moitié de toute la
succession, déférée a u x parens paternels.
D an s la ligne maternelle (le côté d e s P r a l o i s ) , G il —
b e i t e Mandosse, v e u v e M u r g e o n , pouvait se trouver
en concours a v e c A n t o i n e - M a r i e n D e b a r , la dame
D e b a r - d e - l ’Hôpital, et Magdelaine Du buisson, fem me
M o n p i e d , qui étaient tous trois cousins au m êm e degré
q u ’elle de Gilbert Paslier de c u ja s .
Si ces trois cousins survivaient à Gilbert Pastier, elle ■
n ’avait à espérer que le quart des biens maternels ,
d’après l’art.
3 o 6 précité, qui prescrivait le partage
par tête, hors des termes de représentation , c o m m e le
prescrit encore aujourd’hui le C ode Napoléon.
Si l’ un de ces trois parens p r é d é c é d a i t , les portions
dessurvivans étaient susceptibles d ’augm enter dans la
proportion du nombre des prédécédés.
S i , enfin, les deu x frères D e b a r et Magde laine D u
buisson m ou ra ie nt tous trois avant Gilbert Paslier, Gilberte M ando ss e, c o m m e plus pro che p a r e i l l e , devait
recueillir seule tous les biens maternels, à l’exclusion
des enfans D e b a r et M o n p i e d , plus éloignés q u ’elle
d ’ un degré.
O r , toutes ces chances se sonl réalisées en faveur des
sieur et dam e Murgeon. L e sieur D e b a r - d e - l l l ô p i t a l ,
le sieur D e b a r , père de la dam e Paillard, et M u g d e-
�c 33 )
laine Dubuisson, f e m m e M o n p i e d , - s o n t morts tous
trois avant Gilbert Pastier de cu ju s.
Si donc GilberteMandoss e était v i v a n t e , elle recueil
lerait seule tous les biens maternels; si Marie Baudon
était v i v a n t e , elle recueillerait tous les biens paternels,
c o m m e plus proche parente du défunt.
D è s que les sieur et dame M u rg e o n sont plac és,. p ar
l ’effet de la représentation co nven tio nnelle , dans le,
degré et dans les droits de leurs deux mères , il est évi
dent q u ’ils doivent recueillir tous les droits q u’auraient
exercés leurs mères , c ’e s t - à - d i r e l’ universalité des
biens des deux lignes paternelle et maternelle qui com-"
posent la succession.
L e u r titre d ’héritiers rappelés n'était pas limité à
une m o i t i é , un tiers, un quart ou t o u te au tr e q u o l i l é j
il embrassait tous les droits éventuels, casuels et indé
terminés des deux mères; il frappait sur la généralité
de la succession, suivant le résultat futur des chances
et'des événemens. L e cas étant avenu, pour nous ser
vir des t ermes de Tari. 2 1 9 , 1 a disposition contractuelle
les a saisis de toul le bénéfice aléatoire qui en est r é
su lté, et la succession leur est exclusivement déférée,
f
On a vainem ent objeclé en première instance que
les sieur et dame Murgeon ne devaient exercer leurs
droits à la succession que pour la portion seulement
dont ils auraient hérité naturellement du c h e f rie leurs
mères, pcr ca p ila ? et quo le surplus des portions nm«
�''
femelles, originairement attribuées aux frères et sœurs
associés, n’était pas compris dans leur rappel.
Le
contrat
de mariage repousse victorieusement
celte objection. On y voit très-clairement que les é p oux
M u r g e o n ont été rappelés à la succession Pastier pour
tout ce qui concernait les droits de leurs mères; ils ont
été autorisés à représenter entièrement , et non pas
p a r tie l l e m e n t, chacune des deu x mères. L a charge qui
leur a été imposée, d’associer au rappel leurs frères et
sœurs, démontre de plus en plus l’universalité de leur
titre, qui leur attribuait d ’abord le droit de recueillir
toutes les portion^ de leurs mères, pour en partager
ensuite le bénéfice ave c les frères et sœurs associés.
L e s juges de première instance paraissent avoir re
connu celte vé rit é ; mais ils ont refusé d ’en faire l ’ap
plication en décidant que les parts des associés p o u
vaient être enlevées aux sieur et dame M u r g e o n , et
tourner au profit du légataire Pastier.
Nou s relèverons particulièrement cette erreur de
droit dans le paragraphe suivant.
No us terminerons celui-ci en faisant remarquer que
pour apprécier l’étendue et les effets des rappels ou
dispositions contractuelles, il faut se réfé rer , non à la
date du contrat de m ar ia ge, mais bien au tems du
décès du disposant, ainsi q u ’il a été jugé par l ’arrêt
déjà cité , du parlement de Paris, du
5 avril 1 7 5 6 , et
qu'on le pratique généralement dans les partages de
%
�(
3b )
successions, pour déterminer la quotité des légitimes et
des parts héréditaires.
§
III.
L e s portions des associés B o u ch a rd et M urgeon ap
partiennent entièrement a u x époux M urgeon.
L e s dispositions contractuelles saisissent les mariés
et sont irrévocables en leur faveur ; mais le disposant
peut améliorer leur condition par la révocation des
charges onéreuses, dont il les a primitivement g re v é s,
envers des individus non contractant mariage. C e u x - c i
ne sont point saisis par un contrat qui leur est étran
g e r , et ne peuvent contester la révocation q u ’il plaît à
l ’instituant de faire; mais le bénéfice de cette rév oca
tion ne peut être t ransporté à d ’autres p e r s o n n e s ;
l’instituant ne p e ut d o n n e r à l ’institué un nouvel as
socié. L a révocation éteint la c h a r g e , et en laisse tout
le bénéfice à l’héritier institué qui a pour lui le titre
général et irrévocable.
« L ’associé, dit M . Ch abrol sur la C o u tu m e d’ A u « v er gn e, tome 2 , pag. 3 3 7 , n’étant pas contract ant,
« n’est pas saisi; et s’il n’est pas saisi, la disposition faite
« en sa faveur ne doit être regardée que c o m m e une
« destination révocable a d n u tu m , c o m m e loute autre
« charge attachée à l’institution, dont l’instituant peut
* dispenser l’institué.... »
* L a révocation de la charge n ’autorise pas, c o m m e
�v
36 )
« le démontre encore M .
C h ab rol, une disposition
« nouvelle de la part de l ’instituant, au profit d ’une
« autre personne; elle assure au contraire à l’institué
« l’universalilé de la succession. Il semble, dit-il, que
« l ’instituant ayant donné un associé à l’institué, ne
« peut pas lui en donner un autre : on peut accepter
« tel associé, et refuser tel autre. Un instituant qui a
« imposé des charges, c o m m e de payer telle somme à
« un tiers q u ’il prétend gratifier, ne peut pas disposer
« de celte somme en faveur d’ un autre.
« D ’ailleurs, con tinue t- il, si l ’associé vient à m o u « rir avant l'instituant, l'instilué qui a le titre général
« pour lui, profile de l’entière institution ton ne peut
« le pi iver de l’espérance de cette survie en appelant
« un autre associé; et si l’associé venant à prédécéder
« l ’institué, ce dernier profite de toute la succession,
« p a r le m ê m e principe l ’instituant ne peut su broge r,
« par sa propre v o l o n t é , un associé à l’autre. »
M . G r e n i e r , qui a fortement critiqué les associations,
convient néanmoin s, dans son T r ai té des Donations
et T e s t a m e n s , lom.
3,
pag.
4 3 1 , « q u e , clans /’u sa g e,
« l’opinion de la révocabilité de ces ch arg es, dans 1’inûr térêt seulement
de l’institué, était généralement
« suivie dans les trois provinces d’ A u v e r g n e ,
Bour-
k bonnais ei M a r c h e , dans le sens expliqué par M .C h a « brol.»
M. Cliabot de l’ Allier, dans sesQuestions transitoires,
tom. .2, pag. 108, atteste aussi que cette jurisprudence
�était consacrée par un usage constant dans ces m êmes
provinces,
i
;
'
t
i.
^ '* * j!
j!
3 , chap 2 , n° i 3 , et
;
A u r o u x - d e s - P o m m i e r s , sur l’art. 224 de la cou tum e de
j|
B o u ib o n n a is , uos 8 et 9 , a l l e s t e u l les mêmes principes,
;
qui, d ’ailleurs, ne peuvent plus être sérieusement c o u -
|
testés, depuis que la Cour impériale de Riorn- les a so -
;
L e b r u n , des Successions, liv.
lemnellement consacrés par plusieurs a n ê t s , sur tout
par celui q u ’elle a rendu, le 18 déc em b re 1806. dans
l'affaire des Randoi n, de C r e u z i e r - l e - V ie u x , qui lut
j
discutée ave c les plus grands développemens.
II est essentiel de rappeler les motifs de cet a rrê t,
dont la sagesse est un monument précieux de la jurisprudence :
j
1
« Considérant q u e , suivant les termes de l’art. i fr de
« la loi du 28 pluviôse an 5 , r e l i e institution (celle faite
ce ail profit de Claude R a n d o i n , institué héritier univerv. sel d’ Antoinette T o n i e r , sa m è r e , à la charge d ’y
« associer ses frères) doit avoir tout son e f f e t , confo r« m ém ent aux anciennes lois;
« Considérant q u’il n’était pas ail pouvoir de la m èr e
« c o m m u n e de l’a n é a n t i r , ni m ê m e de l’a t t é n u e r ;
« q u ’elle avait seulement la faculté de restreindre, en
« faveur de son héritier institué, les charges q u’elle lui
« avait imposées; et que le dispensant de les remplir,
* l’institution, qui, par son essence, était i r r é v o c a b l e ,
« aurait eu l’eftet d’attribuer à l’héritier institué tout 1©
« bénéfice qui en pou vait résulter.
'
�(33 )
« Considérant que la mort des associés, donnés à
« Clau de Randoin par cette institution^ aurait produit
« le m êm e résultat que la décharge qui eût été sous«• crite par l ’instituante, et q u ’ainsi la mère c o m m u n e
« ne pouvait pas disposer au préjudice de son héritier
<r institué, ne pouvant pas m ê m e lui donner d’autres
« associés que ce ux auxquels elle l ’avait obligé de faire
«• part de sa libéralité^ il n’a resté aucun bien disponible
« dans sa succession;
» Considérant que la loi ne relranche de ces libéra« lilés que les légitimes de rigueur, revenant aux par« lies de Delap chierj
«■Considérant que l’institution de 178 1 est irrévo« cable dans son tout, dès que la mère c o m m u n e n ’a
a pas affranchi son institué des conditions et des charges
« sous lesquelles elle l ’avait gratifié de l’universalité de
g ses biens, et que ces charges doivent être exécutées
« respectivement à Louis et François R a n d o i n , le
« j e u n e , deu x des parties de Pa gès , q uo iqu’ils n’aient
« pas été mariés avant les lois nouvelles. »
Cet arrêt juge nettement toutes les questions qui s’a
gitent aujourd’hui.
Il décide que la disposition contractuelle, faite au
profil des mariés, les saisit irrévocablement du droit de
recueillir l ’ uuiversalité de la succession de l’instituant j
Q u e la charge d ’associer est révocable, mais seule
ment en faveur de l’institué, qui peut en être déchargé
par l ’instituant ;
�(
39 )
Que le bénéfice de cette révocation ne peut tour*
ner au profit d’aucun autre individu;
Et que l’instituant ne peut ni anéantir, ni atténuer
l’effet de l ’institution contractuelle par aucune disposi
tion nouvelle.
P o u r écarter l ’autorilé de l’arrêt, le sieur Pastier a
al l é g u é , dans son mémoire im prim é, que les R a n d o in
associés étaient morts avant leur m ere, instituante.
C ’est une fausse supposition; les Rando in associés
étaient vivans et vivent encore à Creimer-le-Vieux :
M e Pages plaidait pour e u x ; l ’arrêt le constate.
I i ’application se fait naturellement au procès actuel :
A le xa ndre M u rg e o n et Denise
tis par le pacte d e su ccéder,
de mariage, du 5 s e p t e m b r e
cable de recueillir la successiou
Bouchard ont été inves
écrit dans leur contrat
1 7 9 3 , d u droit irrévo
de Gilbert Pastier.
C e titre universel et illimité leur a év e ntuel lem en t
assuré toute la succession, sous la charge d ’associer
leurs frères et sœurs au bénéfice de ce lte disposition.
Cet te charge d’associer était révocable dans l ’intérêt
des sieur et dame M u r g e o n ; seulement Gilbert Paslier
l ’a ré v oqu ée par une clause formelle de son testament
olographe, du 18 mai 1810. C e teslament est revêtu
des formes légales; la clause d ’association doit donc
être réputée caduque ou c o m m e n ’ayan t jamais existé.
P e u importe que le testateur ait témoigné le désir do
�( 40 )
^
faire passer à un étranger le bénéfice de l ’association
ré v o q u é e , et q u e cette nouvelle disposition soit frappée
de nullité par la loi; la révocation légale n’en existe
pas moins, indé pendamment de toute autre disposition
subséquente. L ’article 1087 du Code N a p o l é o n , c o n
form e aux anciennes lois romaines de a dim en dis vel
transferendis Legates, et à la jurisprudence ancienne et
n o u v e ll e , ne permet pas d’éleve r de doute sur ce point'
de droit.
D an s cette partie du procès, les sieur et dame M u rgeon ont à lutter contre deu x classes différentes d ’ad
versaires. Les frères B ou ch a rd, primitivement associés,*
ont réclamé le bénéfice de l’associai i o n , en s o u t e n a n t
que cetle charge était irrévocable à leur égard co m m e
à l’égard des institués; mais ils n’ont pas osé soutenir à
l ’duHience ce sy stème, cond am né parla jurisprudence’
de la C o u r , qui a toujours jugé que les charges d’asso
cier étaient révocables dans le seul intérêt des institués.
' D ’un autre côté, le sieur Pastier, qui ne respecte ni.
le texte des lois, ni l’autorité des arrêts, a soutenu el a
fail décider , par le tribunal de G a n n a t , que les charges
d ’associés
étaient
révocables
in définim ent ,* que les
biens qui en étaient l’objet faisaient parlie des succes
sions ab in testa t, el que l’instituant pouvait en dispo
ser de n o u v e au , par testament, au profil d ’une autre
personne.
L ’arrêt d e s R a n d o i n , el la discussion de M. Chabrol
repoussent ce syslêm e avec tant dé f o r c e , - q u ’il est
�(
4* )
inutile d’en tr er , à ce sujet, dans de plus longs dé ve loppemens.
Si le sieur Pastier répète qu’ il était indifférent aux
ép o u x M u rg e o n de l’avoir pou r associé, plutôt q u e
leurs frères et sœurs, et taxe encore d ’absurdité la
doctrine professée par ce savant c o m m e n t a t e u r , il suf
fira de lui répondre que le suffrage imposant de la Cour
v e n g e honorab lement sa mémoire de cette critique
plus q u ’indiscrète.
Il
n’était pas indifférent, d’ailleurs, pour les mariés
M u rg e o n d’avoir pour associé le sieur Pastier, légataire,
plutôt que leurs frères et sœurs. L a v oix du sang parle
en faveur des frères, qui s’accordent plus facilement
que des étrangers. Il n ’est pas indifférent, non plus,
pour des é p o u x , en gé n é r a l, de voir leurs frères enri
chis par des libéralités, plutôt q u ’ un étranger : des
frères et leurs descendans ont respectivement l’espoir
d ’hériter les uns des autres, et l’intérêt
pécuniaire
s’ unit dans cette m alière à l’intérêt d ’affection. L e
pacte matrimonial étant irrévocable à l ’égard des m a
riés, ne peut subir aucun c h a n g e m e n t , aucune m odi
fication qui leur soit préjudiciable, m ê m e indirec-.
tement.
L e sieur Pastier a aussi s o u t e n u , en première ins->
tanc e, que les charges d ’associer, apposées aux insti
tutions contractuelles, étaient de véritables substitu
tions fidéicommissaires, dont la nullité d e va i t entraî
ner celle des dispositions elles -m êm es , d ’après la loi di\
6
�¡ w
- . v
.
J
r4 n o v e m b r e - 1 7 9 2 , et l ’article 896 du C o d e N a
poléon.
On lni a répondu que les charges d’associer, dont
l’effet est de rendre à l’instant m ê m e de l’ouverture de
la succession de l’instituant, le tiers associé, co-hérilier
et co-propriétaire avec l’institué, des biens compris
dans l’institution, différaient
essentiellement de la
substitution proprement d it e , qui ôte au gre vé la
qualité de propriétaire, pour en faire un simple usu
fru iti e r, obligé de c o n s e r v e r , pour remettre graduelle
ment , les biens compris dans- la disposition, aux indi
vidus appelés à les recueillir ordtne successlvo. L a
clause d ’association est év idem m ent une institution si
multanée qui saisit à la m ê m e minute l’institué et
l ’associé, à l’époqu e du d é i è s d e l’instituant, et qui ne
vaut au profit de cet associé, parce q u ’il n ’est pas c o n
tractant, que c o m m e une ch arg e, dette ou condition
de la disposition universelle, légalement faite au profit
de l’institué contractant mariage ; aussi M M . Chabrol
et Chabot de l’ Allier attestent-ils que ces charges d ’as
socier n’ont pas changé de caractère, et ont toujours
continué d ’obtenir les mêmes effets dans les trois pro
vinces d ’A u v e r g n e , Bourbonnais et M a r c h e , avant
c o m m e après l’ordonnance des substitutious, de 1 7 4 7 ,
et la loi abolitivo des substitutions, du
bre 179
2
14 n o v e m
*
M . M e r li n , R é p., t o m . 6 , p a g . 264 et 26 5, va m êm e
jusqu’à dire que
1 ait. 896 du Code Napoléon ne s’o p -
>
«
�^
4 U J------------
pose pas à ce que l ’on stipule, encore aujourd’hui, ces
clauses d ’association co m m e charge d ’une disposition
contractuelle; il s’appuie de l’art. 1 1 2 1 , qui paraît fa
vorable à son opinion.
A u reste, l ’article 896 du C o d e , qui annulle les dis
positions principales lorsqu’ elles sont grevées de substi
tutions, est introductif d’un droit nouveau. L a loi du
1 4 no v e m b re 1 79 2 ne prononçait point celt e p e i n e ,
qui ne pourrait jamais suppléer dans un contrat de m a
riage antérieur à la publication du n ou ve au Code. L e s
substitutions étaient seulement réputées non écrites, et
l ’héritier g re vé en acquérait la libération en conservant
tout le bénéfice de la disposition principale.
■
C ’est un point de droit clairement dém o ntr é par
M . C h a b o t , au mot S u b stitu tio n s, tom. 2., pag. 8 7 1 ;
p a r M . M e r l i n , Questions de D r o i t , m ê m e m o t , § 5 , et
textuellement jugé"par deu x arrêts q u ’ils rapportent,
l ’ u n , de la Cou r de cassation, du 19 nivôse an 1 2 , et
l ’a u t r e , de la C our d ’A g e n , d u 9 pluviôse an i 3 .
Ainsi le ju gement de Ga nna t ne peut éc ha ppe r à
riniirmation dans le c h e f qui prive les é p o u x M u rgeo n 1
des portions des associés, pour en attribuer le bénéfice
au légataire Paslier. L e titre des sieur et dam e M u r geon était gén éra l; il comprenait la totalité des droits
successifs q u ’auraient pu recueillir éve ntuellement les
deux mères, Gilberte Mandosse et Marie B a u d o n ; i l
était irrévocable et à l’abri de toutes variations de la
pan de 'l'instituant.
�S
XV-
L e s seconde et troisième dispositions fa ite s par Gilbert
P a s tie r , en fa v eu r de la dam e P a illa r d et de F ra n
çois P a stie r , sont m illes ou ca d u q u es, comme éversives de la première disposition contractuelle.
L e s institutions ou dispositions contractuelles, écrites
dans les contrats de m aria ge , sont essentiellement ir
révocables c o m m e ces contrats eu x -m êm es , qui on t
toute la force des actes entre-vifs. P e u impo rte que ces
dispositions soient pures et simples, ou subordonnées,
dans leurs effets et leur latitude, à des é v é n e m e n s , cas
o u conditions; elles n’en jouissent pas moins d e la fa
v e u r de l’irrévocabilité; elles opèrent, les cas aven us , la
m ê m e saisine que la donation actuelle et effective.
•
T o u t reg ret, tout change m en t de volonté sont in
terdits au disposant; il ne p e u t, sous aucun p r é te x te ,
détruire ni atténuer l ’effet de là première disposition.
E n vain protesterait-il dans la minute qui suit l e m a
r i a g e , en vain chercherait-il à varier par une inter
prétation dérogatoire à l’idée p r im it ive: la faveur due
au mariage, l ’iirévocabilité de ce pacte sacré repous
sent toute interprétation, l o u i e variation qui tendent
a modifier les conventions matrimoniales : toutes con
tre -lettres, tous actes préjudiciables à l ’institution sont
for m elle m ent proscrits.
C e sont là des maximes bien constantes de la juris-
�I «M )
-----
prudence française, attestées par les auteurs déjà cités,
f'.-
§ Ier, et consacrées d ’ailleurs par le texte des lois a n -
?
ciennes et nouvelles.
I
j
« Celui qui a institué aucun (art. 22a de la cou—
j
« tume de Bourbonnais) son héritier eu contrat de
f
* mariage en faveur des mariés 011 descendans dudit
&'j
cc m ariage, ne peu.t faire autre héritier par testament
■
1
t
K ou contrat subs éq ue nt, quel q u’il soit, au préjudice
* de l’héritier ou des héritiers institués par ledit con
te lrat de mariage. »
L'art.
jj
3 i du cliap. 1.4 de la co u tu m e d ’A u v e r g n e ,
•contient une disposition littéralement conforme.
T o u s les auteurs s’accordent à professer que le conse ntement, m êm e du
p re m ie r
institué, ne saurait vali-
;
j
ider la seconde disposition faite à son préjudice.
« L a d o n a t i o n , dans la f o r m e p o r t é e au p r é c é d e n t
I
* article ( q ui a pour objet la disposition par contrat de
*
mariage de tout ou partie des biens que les disposans
laisseront au jour de l e u r d é c è s , et qui n’est autre chose
j
que Tan cie n nei nt it uti on contractuelle), dit l ’art. i o 83
j
du C od e N a p o l é o n ’« sera irrévocable en ce sens seule« m e n t, que le donateur ne pourra plus disposer, à
« litre gratuit, des objets compris dans la donation, si
« ce n’est pour somme modique ou autrement. »
Il
est donc inc ontestable, sous l e rapport du d ro it,
que Gilbert Pastier ne pouvait donner un cohéritier
*Qonventionnet a u x sieur et dame M u r g e o n , ni atténuer^
j
i
�--------Ji)/j
%l 9
„,
par de nouvelles dispositions, les avantages fixes ou
aléatoires que le premier pacte de succéder leur assurait.
Sous le rapport du fait, nous avons dém on tré que le
rappel du
5 septembre 179 3 était susceplible d’embras
ser l’ universalité de la succession de Gilbert Pastier,
s’il n’existait à son décès aucun parent au m ê m e degré
que Marie Baudon et Gilberte Mandosse, fictiveme nt
réputées vivantes p a r l a force de la représenlation con
ventionnelle dans l’intérêt des sieur et d a m e M u r g e o n .
L e s prédécès successifs de Magdelaine Dubuisson,
f e m m e M o n p ie d , du sieur D e b a r - d e - l T I ô p i l a l , et
d ’A n t o in e - M a r i e n Debar, père de la dam e Paillard,
les seuls parens en degré u t i l e , ont fait accomplir la
condition éventuelle qui a saisi les sieur et dame M u r geon de la totalité de la succession, en écartant le co n
cours a v e c les parens du degré de leurs mères.
Sans doute An to ine-Mari en D e b a r aurait dû recueil
lir la moitié des biens maternels du d é f u n t , s’il se fût
tr ouv é vi vant au décès de Gilbert Pastier. L e premier
rappel ne s’opposait pas à l’exercice de ce concours,
puisque les rappelés ne devaient prendre dans la suc
cession que les droits héréditaires q u ’auraient eus leurs
mères vivantes.
Mais le sieur D e b a r étant mort avant l ’ouverture
de la succession, le cas du concours a été entièrement
écarté.
C ’est en vain que 1g sieur Pasiiôr a voulu rappeler
�(
47 )
la dame Paillard, et l ’au tori ser a représenter s o n père
prédécédé. C e l le seconde slipulaliou aurait pour objet
de donner un nouvel associé, un nouveau cohéritier
différent de celui qui était primitivement appelé au
concours; son effet serait de créer deu x cohéritiers au
lieu d ’ u n , et de priver les premiers institués du b é n é
fice de la chance de prédécès du sieur Debar père II
y aurait c o n s é q u e m m e n t , sinon destruction, au moins
éversion partielle de la première disposition. Elle était
irrévoc able; dès-lors la volonté du disposant était i m
puissante pour y déroger, pour la restreindre ou l ’atté
nuer dans aucune de ses chances présentes ou futures.
Gilbert Pastier ne pouvait plus exercer des droits
dont il s’était irrévoc ablement dépouillé par le p r e
mier contrat de m a r ia g e , devenu la loi im m uab le de
la famille; il ne p o u v a i t assurer des droits à la dame
Paillard, que dans le cas où le prédécès des é p o u x
M u r g e o n , sans postérité, rendrait caduc le rappel du
5 septembre 1793.
Ainsi, le second rappel de la dam é Paillard ne peut
lui conférer aucun droit à la succession litigieuse, puisqu il est en opposition, par le résultat des év éne mens
avec les droits éventue ls, mais irrévocables, du pre
m ie r pacte de succéder.
A plus forte raison les dispositions testamentaires
subséquentes .doivent-elles être rejetées c o m m e des
tructives d e l à première disposition contractuelle.
L e testament du 18 mai 1810 présente moins la
�ÎN>6
V
'
(
48 )
libre volonté d ’ un octogénaire environné de sugges
tions, que les rêves systématiques d’un h o m m e subtil
qui a cherché à colorer la violation du pacte de famille
par tous les prestiges de la chicane.
L e sieur Pastier, de C l e r m o n t , ne sVst retranché
sur ce mode d ’en vahissem ent, q u ’après avoir ho nteu
sement échoué dans le projet, bien autrement auda
c i e u x , de ravir toute la succession aux héritiers légi
t i m e s , par une vente fictive et frauduleuse.
D e u x dispositions sont écrites dans le testament :
P a r la p rem ièr e, le testateur lègue au sieur Pastier,
de C le r m o n t , sur tous les biens non compris dans le
ra ppe l, une so m m e de 40,000 fr., à prendre sur les
plus clairs desdits biens, sans être tenu d ’aucune charge
ni dette à cet égard ;
Par la seconde disposition, il institue en outre c e
m ê m e François.Pastier légataire, son héritier du sur
plus de ses biens, à la charge de p a y e r , par portion
égale et par tête, a vec les rappelés, toutes ses dettes et
charges, etc.
O n voit d ’abord que le legs de 40,000 fr. porte à
f a u x ; car il doit être pris sur les biens non compris
dans le ra p pel, et on a démontré que le premier ra p
p e l , indépendam ment du second, embrassait, dans ses
chances, l'universalité de la succession future de G i l
bert Paslier, et que le titre général d ’héritiers, par r e
présentation des deu x mères, avait acquis ce caractère
%
�d ’univers alité, au m o m e n t du décès d ’A n t o i n e - M a r i e n
D eb ar.
C o n s é q u e m m e n t, tous les biens que Gilbert Pastiera laissés à son décès étaient év entu ellement frappés de
la disposition prim itive ; il n’y a donc pas de biens non
compiis dans le rappe l; le legs de 40,000 francs, à
prendre sur ces biens chim ér ique s, devient donc caduc
à défaut d’existence de biens libres qui puissent lui
servir de base ou assignat.
L e legs de 40,000 francs est encore nul à raison de
son én orm it é, qui exc èd e le tiers de la masse nette de
la succession, et de son cumul a vec une institution
d ’héritie r, à titre universel, en fa veur du m ê m e indi
vidu. L a fraude en ce cas n’est pas douteu se, et le tes
tam en t ne peut être considéré que c o m m e une fraude
pratiquée pour d ét ru ir e ou ptténuer l ’effet d ’u n e dis
position c o nt r a c t u e l l e , que son irrévocabilité devait
garantir de toute atteinte.
L ’art. i o 83 du C od e Napoléon ne permettait au sieur
Pastier que des legs de sommes modiques, à titre de
récompense ou autrement. L e testateur a épuisé les
droits que la loi lui conférait, en donnant à sa domeslique la jouissance d une maison et d ’ un jardin, et une
pension viagère de trois setiers f r o m e n t, et d’ un poin
çon de vin ;
E n léguant aux pauvres de C harroux un capital do
6,000 fr. produisant rente perpétuelle de 3oo fr.;
En donnant à l'église, pour œuvres pies, une som m e
de i o 5 o fr.
Conséquemment, les deux legs immenses et inoffi7
'ÏÏoT '
�5ô
cieux fails à François Pastier., et qui fendent à lui attri
buer et le titre et les droits d ’un véritable cohéritier,
I
*
sont caducs, nuls et frauduleux.
On a o b j e c t é , en première instance, que la co u tu m e
de Bourbonnais, ou du moins l’opinion de ses c o m
mentateurs, semblait autoriser les instituans à donner
entre-vifs ou à léguer jusqu’à concurrence du quart des
biens de la succession, et que cette considération devait
conserver ou la disposition faite en faveur de la dame
P a i l l a r d , ou une partie du legs du sieur Pastier.
Da ns la rigueur des principes, le texte de la c o u
tu me et les auteurs les plus recommandables ne regar
daient c o m m e licites que les legs pieux ou r e m u n é r a loires de peu d ’ im porta nce , tels q ue ce ux dont parle
l ’art. i o 83 du C ode N a p o l é o n , qui n’a fait que confir
m er l’opinion la plus accréditée dans l’ancienne juris
prudence. Les dispositions de q u o l e paraissent sur-tout
plus particulièrement prohib ées; cependant les c o m
mentateurs de la co u tu m e de Bourbonnais étaient par
tagés sur ce point de doct rine, et plusieurs inclinaient
à penser que l ’ instiiuant pouvait indifféremment dispo
ser du quart de ses biens, soit par acte entre-vifs, soit
par testament.
Mais en supposant que cette opinion particulière
pût balancer l’autorité de la loi e l l e - m ê m e , le sort du
sieur Pastier, de C l e r m o n t , n ’en deviendrait pas plus
avantageux.
L e testament q u’il a surpris à la fragilité d ’un oct ogé
naire, ne pourrait soutenir la co ncu rrence avec la dis-
�( 5 1 )
'.position contractuelle faite au pr ofi L de,l a d a m e p ail- lard. C elle-ci mériterait l a préfè r e n c e 1 °
' t
parce qu'e l l e ,
a la priorité de dat e 20 parce q u ’elle est s t i p u l é e dans
u n c o n t r a t d e m a r ia g e , qui e s t b i e n plus f avorable
q u ’ un testament; 3° parce q u ’elle a été faite sous l e
rè g ne de la coutume de B o u r b o n n a i s ; 4° parce q ue la
dame Paillard , c o m m e p a r e n t e d u d e f u n t a p l u s d e
d r o i t s
à
la bienveillance d e l a justice.
‘
< v’
Ainsi le testament qui fait l ’uniqu e titre de François
P a s tier, doit ê t r e écartée comm e c o n t r a i r e a u x p r e - ,
. m i è res dispositions contractuelles, d o n t l'irrévoca b ilité ,
-ne saurait êtrë'problématique. L e s sie u r e t d a m e M u r ~geôn se sont plu à seconder l’e x é c ution-des volontés
'
de leur parent e nvers sa domest ique, envers l’église et,l
e
t
s pauvres de C harroux ; mais ils ont dû repousser l’é ranger avide qui a usé des mo y e ns l es plus o d ie u x pour ,
ravir, le p a t r i m o i n e d ’ une f a m ille ave c laquelle il n’a
d ' a u t r e rapport qu ' une sim ilitude de n om S’ils d o i v e n t
subir un retranchement qu elc o n q u e;i l s e r a m oins p é nible p our eu x d'e n v oir passer le bénéfice a une v é r i- ;
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Murgeon, Jean-Alexandre. 1812?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Givois
Marie
Subject
The topic of the resource
successions collatérales
estoc
coutume du Bourbonnais
testaments
conflit de lois
contrats de mariage
paterna paternis
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean-Alexandre Murgeon, et Denise Bouchard, sa femme, propriétaires, demeurant à Vendat, appelans d'un jugement du tribunal de première instance de Gannat, du 7 août 1813 ; contre le sieur François Pastier, employé à la recette générale des contributions du département du Puy-de-Dôme, demeurant à Clermont-Ferrand, intimé ; contre le sieur Jean-Michel Paillard, receveur des domaines, et dame Françoise-Gabrielle Debar, son épouse, demeurant à Riom, appelans du même jugement ; en présence de Jean Bouchard, et Jeanne Bouchard, sa femme ; Alexis Bouchard, et Marie Bouchard, sa femme ; et François Bouchard, tous propriétaires, demeurant en la commune de Vendat, assignés en déclaration d'arrêt commun.
note manuscrite. Texte complet de l'arrêt, 1ére chambre 6 février 1814.
Table Godemel : Rappel à succession, stipulé par contrat de mariage, sous l’empire de la coutume du Bourbonnais, a-t-il l’effet d’une institution contractuelle irrévocable ? Ou, au contraire, peut-il être anéanti ou modifié par dispositions entre-vifs ou testamentaires émanées de l’auteur de la disposition ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de J.-C. Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa 1812
1793-1812
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
51 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2114
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53411/BCU_Factums_G2115.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vendat (03304)
Clermont-Ferrand (63113)
Riom (63300)
Charroux (03063)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
contrats de mariage
coutume du Bourbonnais
doctrine
estoc
paterna paternis
successions collatérales
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53549/BCU_Factums_G2712.pdf
22750a9fd41b35ca133ea1c7f10a76ab
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
M . J e a n - M a r i é N E Y R O N - D E S A U L N A T S , pro
priétaire , habitant au lieu de St-Genès, a p pe la nt
d'un jugement par d éfau t} rendu au tribunal civil
d ’Issoire, le 27 juillet 1 8 2 7
CONTRE
M .
J
a c q u e s
D E L S U C , propriétaire et ancien no ta ir e,
h a b i t a n t d u lieu d e S t - P a r d o u x - L a t o u r , Intimé.
U n droit d’usage, réclame par M. D elsuc, dans une forêt appar
tenant à M.D ésaulnats , est l’objet du procès.
Le sieur Delsuc invoque un titre et une longue possession accom
pagnée de paiement de redevance.
Le titre sur lequel il s’appuie est tellement équivoque, qu’il s’en
est servi seulement devant la cour. Jusques-là il s’était fondé sur
un autre titre , qu’il est, aujourd’h u i, obligé d’abandonner.
Ce titre, au reste, et les droits qui pourraient en résulter ne lui
ont jamais été transmis, et ne l’avaient même pas été à ceux qu’il
prétend représenter.
Q u a n t à la possession qu’il allègue, elle n’est pas établie ; la déli
vrance prescrite par les lois forestières pour donner à la possession
un eff e t légal, le paiement de la redevance , exigé aussi pour faire
COUR ROYAL
D E IUOM.
I re CHAMBRE.
�( o
considérer cette possession comme le résultat d’un droit reconnu ,
la continuité nécessaire pour en consacrer les avantages, en un mot,
aucun des caractères propres à rendre, en pareille matière, une
possession valable et utile, aucune des conditions que veulent les
principes et la jurisprudence, ne se rencontrent dans les faits dont
déposent les nombreux témoins qu’a fait entendre M. Delsuc.
Tout ce que démontre clairement l’ensemble de cette cause ,
c’est que ce droit d’usage, qui était attaché , dit-on , à un domaine
appelé de Laguièze , était resté, pendant un demi-siècle au
moins, sans exercice ; que dans la suite un nouveau propriétaire
du domaine, qui cependant n’avait pas acquis l’usage, chercha à lui
donner une v ie , une consistance qu’il n’avait jamais eue, ou qu’il
avait perdue depuis long-tems; que ces tentatives furent, sur-tout,
réitérées , et accompagnées d’un commencement de succès dans un
tems où la forêt était frappée du séquestre national ; que depuis la
réintégration de cette forêt dans les mains du propriétaire, des rela
tions de voisinage et d'affaires avaient déterminé celui-ci à consentir
à quelques délivrances provisoires, en attendant que les titres eussent
été communiqués et les droits vérifiés , et que c’est à l’aide de ces
vagues élémens, et en abusant d’une tolérance que l’on devait croire
sans danger, qu’aujourd’hui le sieur Delsuc veut s’arroger un usage
auquel, il ne saurait se le dissimuler, il n’a réellement aucun droit.
Il fait plus; il cherche même à donnera ce prétendu droit une étendue
que ne comporteraient, ni le titre dont il argumente, ni la compo
sition de l’ancien domaine.
FAITS.
La forêt de Laroche, dans laquelle le sieur Delsuc veut exercer
un droit d’usage, était une dépendance de la propriété seigneuriale
de Laroche, et fut l’objet des deux actes qu’on a successivement fait
valoir dans le cours du procès. L ’un de ces actes est du i 5 janvier
1 56 1 ; l’autre du 17 décembre i 63 /f
Par le premier, le sieur Jean de Laroche, alors propriétaire de
cette forêt, concéda à Jean F umat, clerc du village du mas Del Tourr c,
le droit, ¡tour lui et les sien s, à perpétuité , de p ren d re, couper,
�( 3 )
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et emporter au villageDelm asDelTourreeta ses appartenances, du
bois de la forêt de la Malguièze et de Laroche, tant pour son chauf
fage d’un feu seulement, que pour clore et fermer ses héritages, et
pour tous autres usages, avec cette convention, qu’il ne pouvait
prendre du bois de sapin que pour bâtir, édifier et réparer maisons,
granges, étables, moulins, et autres édifices.
Le prix de la convention fut de 20 fr., dont l’acte porte quittance,
et de deux cartons de cens et rente annuelle.
Cette concession perpétuelle, mais restreinte au village Del Mas
Del Tourre, fut suivie en 1634-> l l décembre, d’une autre con
cession qui ne semblait que temporaire, qui est contenue, non dans
un acte authentique comme le premier, mais dans un acte sous seing
privé, par lequel le sieur De La Barge, alors propriétaire de la forêt,
investit le sieur J e a n Fumât son ferm ier, est-il dit, d’un droit
dans cette forêt pour son usage des maisons , pour ses tènemens
des villages de Guièze et Pis sol, soit pour son chauffage et
réparations qu’il pourrait faire dans lesdits ténemens, à la charge
de payer chaque année la quantité d’un setier d’avoine qu’ il
serait tenu de porter audit Laroche.
Cet acte qui n’est pas fait double, qui ne déclare pas la concession
perpétuelle, qui ne parle que de simples réparations et non de
constructions à faire, qui rappelle seulement les maisons de Fumât
dans les deux villages , sans indiquer d’autres bûlimens, tels que
granges, étables, moulins, etc., cet acte ne paraît pas avoir reçu
une exécution soutenue ; rien n’établit même qu’il en ait reçu
aucune; et ce qui est constant, c’est que de 1729 à 1773, l’on ne
trouve absolument aucune trace qui indique que personne ait songé
à l’exécuter.
C ’est, en effet, ce que démontrent plusieurs baux successifs du
domaine de la Guièze , dont le premier remonte au 4 avril 172g.
Par ce bail, le sieur François Fumât, procureur d’office au
bailliage de Montaigut-le-Blanc, et y habitant, donna à ferme pour
six années a Annet Plane et à Jean et Antoine G a y s, son domaine
de la Guièze et trente-deux têtes d’herbagès de la montagne de
Montaigut.
�Le preneur s’oblige à clore et à bien cultiver les héritages; on
le soumet aussi à entretenir les bàtimens de menues et légères
u
réparations.
Et cependant on ne lui parle pas du droit d’usage qui aurait été
attaché au domaine , d’un droit qui lui aurait fourni son bois de
chauilage comme celui dont il devait a voir besoin pour les réparations.
Aussi ce fermier n’est-il pas chargé de payer la redevance qui
aurait été le prix de l’usage.
C’est à la charge du bailleur seul, que, d’après une stipulation
expresse du b ail, demeurent les cens et les rentes comme les impôts
dont était grevé le domaine.
A l’expiration de ce premier bail, un second fut consenti pour
trois ou six années, par acte du 3o mars 1755 , par le même sieur
François Fum ât, eu faveur d’Annet Plane, l’un des précédons
fermiers. L ’on y remarque le même silence sur le droit d’usage et
sur la redevance , en même tems que la même charge imposée au
preneur de clore les héritages et d’entretenir les bàtimens.
Un troisième bail fut consenti pour trois, six ou neuf ans, le
17 mars 1750, par la demoiselle Gabrielle Fumât à Antoine Plane,
fils d’Annet, fermier antérieur.
Le preneur est chargé de clore les prés, d’entretenir les bàtimens
de menues et légères réparations , de payer les impôts, mais en
diminution du prix du bail.
On n’y parle encore, ni du droit d’usage, ni de la redevance.
11 est évident que si un droit d’usage avait été attaché au domaine,
ce droit, destiné au chauffage de ceux qui y auraient habité et aux
réparations à faire aux bàtimens, eût été déclaré au fermier pour
qu’il l’exerçât; il est évident encore que la redevance qui en était le
prix eût été aussi mise à sa charge.
Le silence de ces baux, dont le dernier à duré jusqu’en 1758 ,
démontre clairement que le droit n’existait pas, soit que la concession
de i6 7>4 fût seulement temporaire, soit qu’011 y eût renoncé depuis
long-tcms.
La lecture de ces divers baux donne lieu à une autre observation
fort importante.
�( 5 )
Le domaine de la Guièze est aflerme avec tous les héritages d é
pendant d’un autre domaine appelé d’A u z a t, le tout apparte'
teliant au sieur Fum ât, est-il dit.
Ainsi le domaine de la Guicze, qui ne se composait autrefois, et
notamment en iG 3/f, que d’héritages situés dans les dépendances du
village de la G uièze, avait reçu , dès 172 g, un accroissement consi
dérable par l’adjonction de tous les héritages qui composaient un
autre domaine situé à Auzat.
O11 concevra facilement que cet accroissement et la réunion dans
les mains du même fermier de trente-deux tètes d’herbages, objet
indépendant aussi du domaine et du ténement de la G uièze, durent
rendre nécessaire l’augmentation des bàtimens, et par conséquent
beaucoup plus onéreux pour la lorôt de la Roche, un droit d’usage
qui primitivement aurait été restreint aux besoins d’un très-petit
domaine.
Le bail de 1750 venait d’expirer, lorsque le domaine delà Guièze
changea de maître.
Par acte du 29 mars 1758 , la demoiselle G abri clic Fumât, alors
épouse d’un sieur Bonnet, vendit ce domaine et les trente-deux tètes
d’herbages à M. Jean Burin, seigneur de Saint-Pardoux.
Le domaine fut vendu avec ses servitudes dues et accoutumées ,
ses circonstances et dépendances, ainsi qu’il était composé , et que
la dame Bonnet et ses auteurs en avaient joui ou du jo u ir, ou leurs
jerm iers , et par exprès ledit sieur de St.-Pardouæ pour l’avoir
fa it exploiter l’année dernière, et Antoine P la n e , précédent f e r
m ier} suivant le bail du 17 mars 1760, reçu M oulin, notait e.
Il est dit plus bas que le sieur de Saint-Pardoux a déclaré avoir
une expédition du b ail, que lui avait remise la dame Bonnet, lors
de la retraite du fermier Antoine Plane.
Dans cette vente il n’est encore fait mention, ni d’aucun droi1
d’usage dans la foret de la Hoche, ni de la redevance qui en aui’ait
été le prix.
C’est dans un bail du 14 mars 1773 , qu’il est parlé pour la pre
mière fois d’un droit d’investison pour le domaine de la G u ièze,
dans la forêt de la Roche.
�(6 )
Par ce dernier b ail, ce même M. Burin , acquéreur en 1758 , à
qui il n’avait été vendu aucun droit d’usage, et qui n’avait reçu aucun
titre justificatif d’un tel d ro it, voulut s’en arroger u n , à l’aide de
quelques clauses qu’il inséra dans l’acte ; mais , comme il n’avait
aucun titre en son pouvoir, dans son ignorance, soit sur la consis
tance du droit m êm e, soit sur la redevance qui devait en être le
p r ix , les clauses qu’il dicta n’étaient en harmonie avec aucun des
actes de i 56 i ou de 1634.
Il soumit ses fermiers à lui délivrer chaque année quatorze chars
de bois à brûler, à prendre dans la forêt de la Roche ; comme s i,
en supposant même qu’un droit de chauffage eût été attaché à ce
domaine, il pouvait être permis de conduire et de faire consommer
ce bois ailleurs que dans le domaine même.
Les fermiers furent aussi chargés de payer au seigneur de Labro
un setier avoine et une poule, chaque année , pour droit d’investison du domaine dans la forêt de Laroche.
Et néanmoins, dans les actes que l’on invoque aujourd’h u i, s’il
était parlé d’uu setier d’avoine , il n’était pas au moins question de
poule.
L ’année même de ce bail, le domaine de la Guieze fut délaissé
par le sieur Burin à sa fille qu’il mariait avec le sieur Bléton. Dans
le contrat de mariage qui est du 17 octobre 1773, le domaine fut
cédé en paiement de la dot de la demoiselle Burin , avec le droit
d ’usage r e t prendre du bois dans lafo r e t de L aroche, tout ainsi
et de même que ledit Burin ou ses ferm iers en ont jo u i ou du
jo u ir , est-il dit.
D ’ailleurs , on n’énonce pas de redevance , quoique le prix du
domaine soit fixé à 19,860 fr., tandis que la dot n’était que de la
somme de 8,000 fr. Le gendre s’oblige à payer la différence.
Aussi le domaine est-il délaissé avec promesse de garantir,
fournir et fa ire valoir, de tous troubles et évictions généralement
quelconques , sans qu’aucune charge soit imposée pour le droit
d’usage ; circonstance qui indique combien peu étaient claires et
déterminées les idées du sieur Burin sur l'existence, l’étenduC et les
�Si)
conditions du prétendu droit qu’il déclarait abandonner avec
domaine.
L e sieur Bléton, nouveau possesseur, afferme le domaine le
g mars 1774? *1 charge le fermier R epayer, chaque année, la
rente due pour l’im estison du bois , sans en indiquer la nature
et la valeur.
La même charge est imposée dans un autre bail du 20 mars 1778 ;
mais cette fois-ci 011 déclare que la redevance annuelle consiste en
un setier d’avoine. Au reste, le titre constitutif du droit n’est visé
dans aucun de ces baux.
O11 verra dans la suite combien a été imparfaite la preuve qu’a
voulu faire le sieur Delsuc , soit de l’exercice du droit d’usage aux
époques de ces divers baux , soit du paiement regulier d’une rede
vance, ce qui aurait été le principal caractere dun véritable droit
de ce genre.
Oue des propriétaires de domaines voisins delà forêt aient tenté,
d’ailleurs, de s’attribuer de tels droits , on n’en sera pas surpris si
l’on considère que le propriétaire de la forêt, habitant assez loin de
là , ne pouvait que faiblement surveiller sa propriété et s’assurer de
la vigilance ou de la fidélité de ses gardes ; si l’on fait attention aussi
que le bois étant alors d’une valeur presque nulle et d’un débit
difficile , une surveillance rigoureuse présentait peu d’intérêt -, si
l’on remarque enfin que la forêt était réellement soumise à d’autres
droits d’usage; ce qui ne permettait pas toujours de vérifier si fous
ceux qui s’y introduisaient étaient de vrais usagers, et ce qui était
très-propre à favoriser les entreprises de ceux qui cherchaient à se
créer des usages.
La seigneurie de Laroche et la forêt qui en dépendait avaient été
vendues le 17 août 1784, par le sieur de Labro à un sieur Brassier.
Le sieurNeyronde la Tanière, parent du vendeur, exerça le retrait
lignager; il fut subrogé à la vente , par acte du dix janvier 1785.
L ’acte porte que l’acquéreur n’aurait à exercer aucune action en
garantie contre l’ancien propriétaire, à raison des droits d’usage qui
pouvaient êtx’e dus dans le bois de Laroche.
Le sieur Neyron la Tarlière, qui n’avait acquis cette propriété
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C S ).
q ne pour le sieur Noyron Désaulnalts, fut placé sur la liste des émi
grés ; et cette circonstance fit mettre sous le séquestre national la
forêt de Laroche : elle y est restée jusqu’à la fin de l’année 1809.
Durant cet intervalle, comme auparavant, il 11e paraît pas qu’il
ait été payé aucune redevance pour le prétendu droit d’usage que
l’on réclame 5 car l’on 11’en rapporte pas de quittance.
Cependant la forêt fut peu respectée par les habitans des lieux
voisins. Abondonnée en quelque sorte dans les premiers tems du
séquestre, beaucoup de prétendus usagers s’y introduisaient et y
prenaient du bois, sans délivrance, sans contrôle.
Dans la suite, et lorsque parut la loi du 28 ventôse an 1 1 , sur la
police des forêts de l’Etat, quelques-uns de ceux qui se croyaient
des droits d’usage déposèrent leurs titres au secrétariat du dépar
tement, comme le prescrivait la loi.
t
Parmi ces prétendus usagers , l’on doit remarquer AinableGabriel Ileboul, représentant de Jean et autre Jean Fumât, avec
lesquels avaient été passés les actes des i 5 janvier i 56 i et 17 dé
cembre 1654.
Le sieur Reboul, qui seul avait ces actes en son pouvoir, après
les avoir déposés dès le 8 décembre 179 1, dans l’étude du sieur
Chassagne, notaire à Clermont, en relira une expédition qu’il pré
senta au préfet et à l’administration forestière, afin de se faire atttribuer les droits d’usage que ces actes rappelaient. 11 obtint même du
conservateur des eaux et forêts de la 1o®division un avis favorable ,
ci la charge de verser, chaque année, entre les mains du receveur
des domaines, le prioc de d eu x setiers d'avoine, mesure de
Lalour, et même de payer tous les arrérages de celte redevance
qui pouvaient être dus.
Cet avis n’eut cependant aucune suite ; M. Reboul n’obtint rien,
et même ne réclama plus, à ce qu’il parait, soit que le droit lui parut
trop équivoque, soit qu’il considérât la redevance comme trop
onéreuse.
<
Mais le sieur Bléton père était alors receveur des domaines. Les
titres déposés par le sieur Reboul lui furent connus ; et comme le
Je droit d’usage lui avait été indiqué dans son contrat de Inariago
�de 177s , il crut pouvoir profiter de cette découverte, et il réclama
lui-méme ce droit pour son domaine de la Guièze. 11 réussit à se
faire comprendre, en i8 o5 , en 1807 et en 1808, dans plusieurs
délivrances accordées provisoirement, en attendant que les titres
des usagers lussent vérifiés et leurs droits reconnus.
Mais ces délivrances lurent laites sous la réserve expresse des
droits du gouvernement.
Quelqu’insignifianlcs qu’elles soient pour établir le droit d’usage ,
on les invoque néanmoins aujourd’hui, quoique l’inspecteur forestier
lut sans qualité pour reconnaître un tel droit, et quoiqu’il n’ait été
payé alors aucune espèce de redevance.
Ce fut à la fin de 1809, que le sieur Neyron-üésaulnats parvint à
faire lever le séquestre et à recouvrer sa propriété.
11 en ignorait et la consistance et les charges ; il savait vaguement
qu’elle était grevée de divers usages. Beaucoup d’usagers se pré
sentèrent ; la plupart n’avaient pas de titres , mais ils en certifiaient
l’existence ; ils promettaient de les rapporter incessamment. Le
sieur Ncyron-Désauhials ne crut pas devoir se montrer trop diffi
cile dans ces premiers terns. Il suivit l’exemple de l'administration ,
et fit comme elle quelques délivrances provisoires, mais sans tirer
à conséquence, et en attendant que les titres des usagers lui fussent
produits.
C ’est ainsi qu’il délivra du bois pendant pendant plusieurs années
à certains voisins, auxquels il en a , dans la suite, refusé, après avoir
assez long-tcms réclamé leurs titres, qu’ils ne lui ont pas produits
ou qui se sont trouvés vicieux.
C ’est ainsi qu’il a fait, notamment, diverses délivrances au sieur
Bléton, quoique scs titres ne lui fussent pas connus, mais avec lequel
il avait des rapports de voisinage et de bienveillance réciproque.
Les fermiers du sieur Bléton ont même conduit chez le sieur
Désaulnats quelques setiers d’avoine , en attendant que les droits
respectifs fussent réglés.
Dans ces circonstances , les immeubles du sieur Bléton furent
frappés d’une saisie immobilière; et, le 1 5 novembre 1819, le do
maine de la Guièzc et quarante-une tètes d’herbages de la montagne
�( 10)
de Montaigut furent vendus judiciairement, au faible prix de
17,100 fr., somme inférieure de plus de 2000 fr. à celle à laquelle
avait été évalué le domaine seul, près de 5o ans auparavant, dans le
contrat de mariage du sieur Bléton père, avec la demoiselle Burin ,
le 19 octobre 1773.
Dans le détail des objets vendus, il n’est pas fait la moindre men
tion du droit d’usage ;
Dans le cahier des charges, l’adjudicataire n’est soumis au paie
ment d’aucune rente, d'aucune redevance.
L ’adjudication avait été faite au duc de Castries.
Le sieur Delsuc lui fut bientôt après subrogé par un fondé de
pouvoir, au môme prix et aux mêmes conditions.
Le sieur Delsuc, devenu propriétaire du domaine de Laguièze,
invita le sieur Désauluats à lui délivrer du bois dont il avait besoin.
Celui-ci pouvait-il s’y refuser? Le sieur Delsuc était le plus proche
voisin du sieur Désaulnats. Il existait entr’eux journellement des re
lations de tout genre. Le sieur Désauluats consentit donc à lui faire
des délivrances provisoires, en attendant que les droits du sieur
Delsuc fussent examinés. C elui-ci fit, de son côté, porter chez.
M. Désaulnats quelques setiers d’avoine qui ne furent aussi reçus
que conditionnelleineut, et sans que le droit fût reconnu.
Cependant ce provisoire devait avoir un terme; et les droits du
sieur Delsuc ne paraissant pas justifiés au sieur Désaulnats, il y eut
refus de délivrance de bois : alors commença le procès.
Le 23 mars 1827 , le sieur Delsuc fait signifier au sieur
Désaulnats, 10 l’acte d’investison d’un droit d’usage, consenti le
i 3 janvier i 56 i , parle sieur de Laroche à Jean Fumât, ensemble,
est-il dit, l’acte de ratification de ce droit, du 17 décembre 16545
20le contrat de vente consenti au sieur Burin , le 27 mars 1758 ;
5 ° le contrat de mariage de la demoiselle Burin, du 19 octobre 1773.
Il expose ensuite que , par l’acie de i 56 i , Jean Fumât avait été
autorisé à prendre, dans la foret, du bois de sapin pour bdtir et
édifier ma ¿sons, granges, étcibles, moulins et autres édifices, etc.;
qu il est aujourd’hui auæ droits du sieur Fum ât ; qu’ il est sur le
point de construire un bâtiment dans le domaine de la Guièze ,
�et qu’ il a le droit, a u x termes de Pacte d’investison sus énoncé,
de prendre dans le bois de Laroche et de Malguièze , apparte
nant au sieur Désaulnats, tous les bois en sapin nécessaires
pour la construction dudit bâtim ent, auquel le sieur Delsuc se
propose de donner une longueur de 24 mètres 55 centimètres
(78 pieds), et une largeur de 11 mètres (55 pieds).
En conséquence, le sieur Delsuc somme le sieur Désaulnats de
lui délivrer les arbres nécessaires à cette construction.
Cette sommation fut suivie d’une cédule en conciliation , du
29 mars 1827 , fondée sur l'acte du i 5 janvier i 56 i , et tendante
à faire condamner le sieur Désaulnats à délivrer au sieur Delsuc le
bois nécessaire à la construction d’un bâtiment ayant les dimensions
qui viennent d’être indiquées.
Le sieur Delsuc ne comparut au bureau de paix que par son fondé
de pouvoir; et la conciliation n’ayant pas eu lieu, une assignation
fut donnée aux mêmes fins, toujours en vertu de celte prétendue
concession, du i 5 janvier i 56 i la seule qui soit rappelée dans
l’exploit d’ajournement, comme dans la cédule en conciliation.
Des conclusions sont signifiées dans les mêmes termes, le 27
juillet 1827 ; et un jugement par défaut, obtenu le même jour, par
le sieur Delsuc, lui adjugea sa demande, en se motivant aussi uni
quement sur l’acte du 1 5 janvier 1 56 r.
Le sieur Désaulnats interjeta appel de ce jugement devant la
Cour ; il a répondu à un interrogatoire sur faits et articles qu’a de
,
mandé le sieur Delsuc ; il y a parlé de quelques délivrances de bois
de chauffage ou autres qu’il avait accordées provisoirement au sieur
Delsuc ; il a reconnu aussi avoir reçu quelques setiers d’avoine ,
mais sans entendre attribuer aucun droit, seulement en attendant que
les titres fussent vérifiés et les difficultés résolues.
La cause portée à l’audience du i 5 mars i 85 o, le sieur Delsuc ,
q u i, jusqu’alors, avait invoqué seulement l’acte d’investison du 1 5
janvier i 56 i , parce que cet acte seul pouvait justifier l’exagération
de sa demande , se ravisant un peu tard , fit principalement usage
du second acte, du 17 décembre 1 634 î al° rs
C ou r, s’occupant
moins de l’étendue du droit que pouvait concéder ce second acte,
�que tie sa validité et de son exécution, ordonna, « avant de faire
« droit aux parties, et sans préjudice des moyens, tant de fait que
« de droit qui leur sont, est-il d it, respectivement réservés, que le
« sieur Delsuc prouverait, tant par litres que par témoins, que,
« dans le cours des trente années qui ont précédé la demande, il
<; avait, lui ou ceux qu’il représente, exercé le droit d’usage qu’il
« réclame sur le bois de Laroche , au v u , ou su et dre cousenle« ment du propriétaire du bois prétendu assujetti au droit, ou de
« ceux qu’il représente ;
« Que le sieur Delsuc prouverait également, et de la même tna<( nière, que, dans le même espace de teins , ledit sieur Delsuc, on
«• ceux qu’il représente, ont payé la redevance, prix du droit
« d’usage prétendu j sauf au sieur Neyron-Désaulnats la preuve con« traire. »
Les motifs particulièrement applicables à celte disposition inter
locutoire sont ainsi conçus :
« Considérant que, suivant la jurisprudence, ce titre (celui de
« iG34) ne suiïit pas pour l’établissement d’un pareil droit; qu’outre
« le titre, il (le sieur Delsuc) doit être fondé sur une possession
(<
■trentenaire, postérieure au titre ; parce qu’à défaut de cetie pos« session, le titre serait prescrit, et que (être prescription aurait
« opéré l'affranchissement du droit, quand même il aurait été établi
« long-tems auparavant ;
« Considérant encore q ue, suivant cette même jurisprudence ,
« pour que la possession soit valable et puisse opérer son effet, il
« faut qu’elle soit accompagnée de la délivrance du bois, faite du
« consentement du propriétaire , et de la prestation de la rede«■vance, moyennant laquelle la concession du droit d’usage a été
« faite dans le principe ;
« Considérant que le sieur Delsuc ne rapporte, ni la preuve par
« écrit du consentement donné à chaque délivrance par le pro« priétaire, ni la preuve du paiement de la redevance, à chaque
« délivrance, cl qu’il offre seulement de prouver par témoins, soit
« Je consentement à la délivrance , soit le paiement de la redevance,
« dans le cours des trente années avant la demande j
�A y
« O r , considérant que toutes les mentions contenues dans tous
« les actes ci-dessus énoncés doivent être regardés comme autant de
« commencemensdepreuveparécritduconsentementàladélivrance
« et du paiement de la redevance; qu’on doit encore attribuer le
« même effet aux décisions prises par l’administration , qui ont
« maintenu le sieur Blé ton ou ceux qu’il représente dans l’exercice
« du droit d’usage dont il s’agit, même quoique ces décisions n’aient
« été que provisoires et prises sous la réserve des droits du gouver« nement, puisque, d’après les circonstances, il ne dépendait pas
« du sieur Bléton, ou de ceux qu’il représente, d’exercer autre<f ment leurs droits. »
En exécution de l’arrêt, des enquêtes respectives ont été faites.
Nous aurons à les discuter.
Tels sont les faits d’après lesquels nous avons à examiner ,
i° Les titres et les droits du sieur Delsuc ;
20 S’il a exercé une possession légale du droit d’usage qu’il
réclame ;
5° Quels seraient, au reste, l’objet et l’étendue de ce droit
d’usage.
§ I"
E xa m en des titres et des droits du sieur Delsuc.
Le sieur Delsuc invoquait d’abord un seul litre, un acte d’investison du i 5 janvier 1 56 1.
C’est cet acte seul qui est rappelé, soit dans l’exploit introductifde
l’instance, soit dans les conclusions prises, soit dans le jugement
dont est appel.
Et cependant cet acte est absolument étranger au domaine de la
Guièze auquel le sieur Delsuc veut rattacher le droit qu’il réclame.
Car la concession du 1 5 janvier 1 56 1 est faite seulement pour des
propriétés situées au village Del Mas Del Tourres. Il y est dit que
le seigneur de la lloche investit, à titre de perpétuelle vestison
Jean Fum ât, du droit de prendre, couper et emporter par ledit
Fumât et les siens , à
ses appartenances ;
p erp étu el
, au village D el Tourres, et à
�Il rinSrcst.it aussi du droit de prendre du sapin dans la même forêt
pour bâtir et édifier maisons, granges, étables , moulins et autres
édifices , iceu x réparer, et fa ire dudit bois de sapin, tant pour
les réparations desdits bdtirnens, qu’autres ses affaires.
Cette concession e st, comme on le v o it, des plus larges ; elle
s’applique, soit au bois ordinaire pour le chauffage et la clôture des
héritagesj soit au bois de sapin nécessaire pour réparer; soit, et ce
qui est bien plus important, à tout le bois de sapin dont Fumât
pourrait avoir besoin pour bâtir et édifier m aisons, granges,
é tables, Moulins et autres édifices ; en sorte qu’il était loisible à
Fumât, d’après la généralité des termes de la concession, de faire,
aux dépens du bois de la forêt, toutes les constructions qu’il aurait
jugées utiles.
Mais le droit concédé est restreint au village Del Mas Del Tourres,
et à ses appartenances ; il ne s’étend pas au-delà des limites de ce
village; il n’y est aucunement question du village de la Guièze. O r,
ces deux villages et leurs ténemens étaient autrefois, comme aujour
d’hui, absolument distincts; donc, l’acte de i 56 i n’est pas appli
cable au village de la G u icze, où le sieur Delsuc est propriétaire.
Cet acte de i 56 i ne peut lui servir de titre. Comment se
fait-il donc qu’il n’ait agi pendant tout le cours de l’instance qu’en
vei'tu de cet acte? et qu’après s’être borne à rappeler dans la som
mation qui avait précédé le procès, un autre acte du du 17 décembre
i 634 > qu’il présentait seulement comme la ratification du premier,
il n’ait fondé ses réclamations dans la cédule en conciliation comme
dans l’exploit d’ajournement, dans ses conclusions et dans le juge
ment, que sur cet acte isolé de i 56 i , sur cet acte qui 11’attribuait
aucun droit d’usage pour le domaine de la Guièze ?
Cette singularité trouve son explication dans quelques obser
vations.
Par l’acte de i 65 /\, le seigneur de la Barge investit Jean Fumât
son fermier, des bois de Malaguièze et Laroche, pour en jo u ir
pour son usage des maisons , pour ses ténemens des villages de
Guièze cl Pissol, soit pour son chauffage et réparations.
|.l n’est pas dit dans cet acte, comme dans le premier, que la
�( .5 )
k f
concession est perpétuelle , et qu’elle est accordée pour le sieur
Fumât et les siens.
Il n ’y est pas stipulé, comme dans le précédent, qu’elle aura lieu,
non seulement pour l’usage des maisons et ténemens , ce qui ne
s’entend que du chauffage , mais encore pour bâtir et édifier
meusons, granges, ètables , moulins e t autres édifices.
Il n’y est parlé que de réparer , ce qui ne signifie évidemment
pas faire des constructions nouvelles et considérables, ce qui ne
peut s’entendre que d’entretenir les constructions déjà existantes.
Or, le sieur Delsuc voulait faire construire un nouveau bâtiment
et un bâtiment considérable , puisqu’il doit avoir 78 pieds de
longueur sur 33 pieds de large : car tel est l’objet du procès.
S’appuyer sur l’acte de 1634-» ç’eût été manquer son b u t, soit à
cause de l’obscurité de ses termes sur la durée de la concession,
soit parce qu’il n’y était parlé d’usage que pour réparer et non
pour construire. Pour éviter ces difficultés , c’est l’acte seul de
1 56 1 qu’il invoque; c’est d’après l’acte seul de 1 56 1 qu’il obtient,
par défaut, il est v r a i, ce qu’il demande.
Mais devant la C o u r, le change ne sera pas pris, et le titre de
ï 5 6 i sera nécessairement déclaré étranger au domaine du sieur
Delsuc , puisque ce domaine n’est pas situé dans les dépendances
Del Mas Del Tourres , auquel Mas s’applique exclusivement l’acte
de i 56 i .
Ainsi disparaît ce premier titre servant de base à la demande que
nous contestons.
A l’audicncc de la Cour, lesieur Delsuc a invoquél’actc de 1634.
Mais, en supposant même , ce que les circonstances rendent fort
douteux, que l’usage dont il est parlé dans ce second acte doive être
perpétuel, limité à de simples réparations à faire , le droit d’usage
concédé par ce titre n’autoriserait pas à réclamer du bois pour une
vaste construction, telle que celle qu’on se propose.
Au reste, tel qu’il est, le droit concédé par cet acte a-t-il été
transmis au sieur Delsuc? avait-il été transmis, avant lui, aux sieurs
Burin et Bléton?
La négative est démontrée par tous les baux qui ont précédé
-/0
v,
�( «6 )
l’époque à laquelle le domaine de la Guieze passa de la famille
Fumât aux familles Burin et Bléton. INous voulons parler des baux
des 4 avril 1729, 5o mars 1755 , 17 mars ly S o , baux qui se sont
prolongés pendant environ trente ans, et dans aucun desquels il
n’est fait mention, ni d’aucun droit d’usage attaché au domaine sur
la foret de Laroche, ni d’aucun paiement de redevance.
Ce silence est une preuve non équivoque que dans la pensée du
bailleur, comme dans celle du preneur, il n’était dû au domaine de
la G uieze, ni droit de chauffage ni droit d’usage pour réparations,
sur la foret de Laroche. Car si un tel droit avait existé, le fermier
en aurait été prévenu, puisqu’il en aurait dû jouir; et s’il eût été
autorisé à en user, il aurait été aussi nécessairement chargé de
payer la redevance annuelle qui aurait élé le prix de sa jouissance.
Cependant on ne lui impose aucune charge de redevance.
Au contraire , c’est le bailleur q u i, par les expressions vagues
cl générales de ces baux, demeure chargé de tous les cens et rentes
dont le domaine pouvait être grevé.
La conséquence de tout cela est simple ; c’est que le droit d’usage
n’était pas exercé ; c’est que la redevance n’était pas payée, soit que
la famille Fumât eût considéré comme temporaire seulement la
concession faite en 1654 par le seigneur de Laroche à Jean Fumât,
alors son ferm ier, est-il dit; soit que le prix annuel du droit
d’usage parût, à celte famille plus onéreux que n’était utile l’usage
même à un époque où le bois, sur-tout dans le voisinage des forêts,
était sans aucune valeur.
Quelle que soit, au reste, la cause du silence des actes et des
faits, il n’en est pas moins vrai qu’on ne trouve absolument aucune
trace de l’exercice de ce droit d’usage, pendant les cent années
antérieures au 29 mars 1758 , date de la vente que fit là demoiselle
Fumât, épouse Bonnet, au sieur Burin , du domaine de la Guieze ,
pour lequel ce droit est aujourd’hui réclamé.
Mais jetons les yeux sur cet acte de vente. Y trouverons-nous
quelque chose qui rappelle le droit, qui l’indique même, quoique
un peu vaguement?
l'ion; nous 11’y trouverons rien, absolument rien.
�Que l’on se fixe sur les termes de cette vente (nous les avons rap
portas dans l’exposé des faits); l’on y verra que le domaine est vendu
au sieur Burin dcSt-Pardoux, tel que celui-ci en avait jo u i l’année
dernière, et tel qu’en avait joui aussi Antoine Plane, précédent
ferm ie r, suivant le bail du 17 mars i^So , reçu Moulin, notaire.
Ainsi c’est au dernier bail de 1 qSo , que l’acquéreur est renvoyé
pour connaître la consistance du domaine ; et il est ajouté qu’une
expédition du bail a été remise à cet acquéreur.
O r, le bail est muet sur le droit d’usage et sur la redevance. Le
fermier ne jouissait pas de cet usage ; il ne payait aussi d’après le
bail aucune redevance.
Comment donc supposer que la dame Fumât ait entendu vendre,
et que le sieur Burin ait entendu acquérir un droit dont ils n’ont pas
parlé, un droit accompagné d’une charge à laquelle l’acquéreur n’a
pas été soumis?
Comment présumer aussi que le sieur Burin, qui avait joui du
domaine, l’année antérieure à la vente, n’y eut pas fait exprimer le
droit d’usage, si réellement il l’avait exercé ?
Certes, ce silence des baux de 1729, 1755 et iqSo sur l’usage
et la redevance, aurait frappé l’attention de la Cour , si ces baux lui
avaient été connus lors de l’arrêt interlocutoire (i); elle aurait, sur
tout, remarqué avec surprise qu’il n’en était pas fait la moindre
mention dans le dernier bail de 1760 auquel la vente se référait; et
considérant l'inexécution plus que séculaire de la concession pré
tendue perpétuelle de 1654, peut-être eût-elle regardé comme inutile
d’ordonner la preuve de l’exécution postérieure qu’alléguait le sieur
Delsuc.
Le silence de ce bail sur le droil d’usage, explique pourquoi il
11’a pas été produit par le sieur Delsuc , qui l’avait à sa disposition
aussi bien que la vente.
Ajoutons une observation importante.
Ces titres que l’on invoque aujourd’hui, ces actes de i 56 i et de
i 634 n’étaient pas dans les mains des familles Burin et Bléton ;
ils ne leur avaient pas été remis par la dame Fum ât, lors de la
(1) Le sieur D csaulnats s'est procuré des expéditions de ces baux à l'aide d’ uu couijK üioire,
�( 18}
vente. Ces actes se trouvaient au pouvoir de la famille Reboul qui
représentait la famille de Fumât pour d’autres propriétés. Ce fut un
sieur Reboul qui les déposa, le 8 décembre 1791 , dans l’étude de
M e Chassagne, notaire ; ce fut aussi un sieur Reboul qui, pendant le
séquestre de la forêt de la R oche, et lors de la publication de la loi
du 28 ventôse an 11 , déposa , dans son propre intérêt, et comme
représentant de Jean Fumât, au secrétariat de la préfecture du Puyde-Dôme , l’expédition de l’acte de dépôt constatant l’existence des
actes des i3 janvier i 56 i et 17 décembre i 63 /f. C’est ce qu’atteste
un avis donné, le 17 décembre 1806, parle conservateur des eaux
et forêts de la 10e division.
Et ce qu’il y a de remarquable, le sieur Reboul n’a rien obtenu et
ne demande rien, tandis que la famille Burin et Bléton, qui n’avait
pas de ttres, qui n’avait pas fait de dépôt a la préfecture, mais qui
fut instruite, sans doute, du dépôt fait par le sieur Reboul, réclama
et obtint quelques délivrances de bois, seulement provisoires, il est
vrai. Sic vos non vobis mcllijicatis opes.
Ce fut pendant la durée du séquestre national, que furent décou
verts par la famille Bléton ces actes de i 56 i et i 654 qui étaient
restés jusques là dans l’obscurité et sans exécution; qui ont été remis,
il y a peu d’années, au sieur Delsuc, devenu adjudicataire sur saisie
immobilière du domaine de la Guièze, et sur lesquels celui-ci se
fonde aujourd’hui pour réclamer un droit d’usage qui ne lui a pas été
vendu , pas plus qu’d ne l’avait été à la famille Burin, et pour oilrir
comme prix du droit une redevance annuelle dont il n’a pas été
chargé. Car l’adjudication du 1 5 novembre 1819 est aussi muette
et sur le droit et sur la redevance.
Ainsi point de transmission, ni au sieur Burin ni au sieur Delsuc,
des droits d’usage que pouvaient avoir les Fumât en vertu des actes
de 1561 et i 654 J point d’exécution d’ailleurs de ces actes, pendant
un siècle et plus, antérieurement à la vente faite au sieur Burin , du
domaine de la Guièze; point d’énonciation même du droit et de la '
redevance dans aucun acte authentique ou sous seing-privé, anté
rieur à 1770.
Comment le sieur Delsuc pourrait-il prétendre, et que ce droit
a cté conservé, et qu’il en est propriétaire ?
�( T9 )
Dirait-on qu’il est rappelé dans des baux de 177^ , de 1774* de
1778, et dans le contrat de mariage de la demoiselle Burin avec le
sieur Bléton ?
Mais tous ces actes, étrangers au propriétaire de la forêt de la
Roche, ne peuvent être invoqués contre lui.
Mais si l’usage avait été légalement exercé , si une redevance avait
été réellement et régulièrement payée 011 en trouverait quelques
traces écrites ; des quittances plus ou moins anciennes seraient rap
portées. O r, l’onne produit rien, on 11e présente aucun écrit, aucun
commencement de preuve écrite émanée des anciens propriétaires
de la forêt, qui indique soit l’existence du droit, soit le paiement de
la redevance. Et certes dans de telles circonstances les sieurs Burin
et Bléton avaient trop d’intérêt à retirer des quittances de la rede
vance comme preuve de leurs droits, pour ne pas en exiger s’ils
l’eussent réellement acquittée.
Cependant c’est à la preuve testimoniale seule , à laquelle le sieur
Delsuc s’ost vu dans la nécessité d’avoir recours pour se procurer
des argumens, afin de suppléer et aux preuves écrites que la loi
paraît e x ig e r, et même , en quelque sorte , aux titres dont il est
dépourvu.
Nous verrons si cette preuve est assez forte, assez caractéristique,
assez positive, pour attribuer au sieur Delsuc un droit qu’il a vai
nement cherché à faire ressortir de ses titres, qui le repoussent par
leur silence.
§ H.
L e sieur D elsuc a -t-il exercé une possession légale du droit
d’usage ?
Nous avons ci-dessus transcrit les termes de l’arrêt interlocutoire
rendu par la Cour.
Nous y avons vu que la Cour avait décidé q ue, suivant la juris
prudence , un titre ne suffisait pas pour l’établissement d’un droit
d’usage ; qu’outre ce titre, le droit devait être fo n d é sur une pos
session trentenaire, postérieure au titre, parce qu’ ci défaut de
cette possession , ce titre serait prescrit.
Que, suivant cette même jurisprudence} pour que lapasses-
�( 20 )
s ion soit 'valable et puisse opérer son e ffe t, il faut qu'elle soit
accompagnée de la délivrance du bois, fa ite du consentement
du propriétaire, et de la prestation de la redevance, moyennant
laquelle la concession du droit d’usage a été faite dans le principe.
Ainsi l’usager même qui a un titre positif doit prouver trois choses
pour en réclamer l’eiTet :
i° Qu’il a possédé le droit qu’il réclame ;
2° Qu’il a payé la redevance qui en était le prix ;
5° Qu’il a reçu du propriétaire la délivrance du bois.
La simple possession, non accompagnée des deux conditions
prescrites, serait sans force, sans eiTet légal, et n’empêcherait pas
le cours de la prescription, c’est-à-dire de l’extinction du droit.
Cette doctrine , consacrée par la Cour, a été empruntée, soit des
auteurs les plus recommandables, soit d’une jurisprudence qui n’est
pas équivoque.
Le paiement de la redevance est une condition nécessaire, indis
pensable pour la conservation du droit de l’usager. C ’est ce qu’en
seigne Fréminville dans sa pratique universelle des droits seigneuï’iaux, tome 5 , page 22G.
« Il est certain, dit-il, que le seigneur peut prescrire la servitude
« de l’usage , lorsque l’usager ne paye pas la redevance.
v Le droit d’usage est une véritable servitude, qui 11e peut se
«■soutenir qu’en remplissant régulièrement par l’usager ses obliga« lions annuelles ; il ne lui sert de rien de se maintenir en jouissance
« et en possession de son usage. Celte possession, par elle-même,
« ne lui donne aucun droit, c’est la redevance. Ce n’est donc pas
« la jouissance qui acquiert, et conserve le droit, c’est la prestation
«■de paiement qui renouvelle le titre, suivant la loi : qui enini in
v tam longo prohæoque spatio ju s minime consecutus e s t , serd
t< pæmtentid ad pristinam servitulem desiderat.
Selon Coquille, cité par l'auteur, il faut même, pour conserver
le droit, que la prestation soit faite au seigneur ou à, son receveur
comptable, qui en ait com pté, et non pas ¿1 un ferm ier, qui a
toujours les tnaius ouvertes pour recevoir, et n’ a pas grand in-
�térct au droitfon cier du seigneur, et dont le fa it ne peu t nuire
au seigneur pour la possession ou pour la prescription.
Ces principes sont d’une grande sagesse. Ils ont pour but de mé
nager les intérêts légitimes du propriétaire comme ceux de l’usager,
de faire connaître avec certitude au propriétaire du bois l’exercice
des usages qui grèvent sa propriété , et de prévenir les entreprises
obscures et les spoliations clandestines qui ne se pratiquent que trop
souvent dans les forets.
C ’est dans le même but qu’a été prescrite la délivrance que doit
obtenir tout usager, délivrance qui s’opère par une marque faite
avec le marteau du propriétaire sur le bois que celui-ci livre ou fait
livrer à l’usager.
Cette délivrance est d’autant plus indispensable, que l’usager peut
seulement exiger le bois qui lui est nécessaire ; qu’il faut donc véri
fier d’abord l’étendue de scs besoins, et que trop souvent il serait
disposé à prendre largement et à excéder de beaucoup le nécessaire,
s’il lui était permis d’agir sans contrôle , et si son arbitraire était sa
seule règle.
Aussi la nécessité de la délivrance préalable par le propriétaire à
l’usager a-t-elle été établie par diverses ordonnances de nos rois ;
aussi a-t-on toujours considéré comme délit le fait des usagers qui,
sans délivrance préalable, coupaient et enlevaient le bois auquel des
titres leur donnaient droit ; aussi de nombreux arrêts ont-ils con
damné à des amendes, à des dommages-intcrêls, les tisagers qui
négligeaient de se soumettre à cette importante condition.
On peut citer, sur cette question, une savante dissertation de
M. Merlin, dans son répertoire, au mot usage (droit d’).
On peut voir aussi, dans tous les recueils, de nombreux arrêts
qui ont puni comme délits des usages exercés sans cette formalité de
rigueur , quelque certains d’ailleurs que fussent les droits des
usagers (i).
L ’omission de cette formalité, impérieusement ordonnée, en
traîne la prescription du droit d’usage, parce que, quelque possession
(1) Voir notamment des arrêts.
�( 22\
défait qu’ail eue l’usager, celte possession, dépourvue descaracteres
propres à la rendre valable, cette possession qui n’aurait été qu’une
suite de délits , celte possession illégale, doit être considérée comme
n’ayant pu interrompre la prescription, ni empêcher l’extinction du
droit d’usage.
Telle est la conséquence que déduit M. Merlin de la doctrine
qu’il professe ; telle est celle qu’ont adoptée plusieurs arrêts de la
Cour de Riom, et qu’a consacrée la Cour de cassation elle-même,
par sa jurisprudence. On peut citer notamment l’arrêt Bertrand, du
a5 août 1826; l’arrêt Locard, du 4août 1828, et l’arrêt Romeuf, du
20 juin 1827. La Cour de cassation, par arrêt du 27 janvier 182g ,
a rejeté le pourvoi qui avait été formé contre l’arrêt Locard.
L ’application de ces principes à la cause de M. Désaulnats doit
repousser la prétention du sieur Delsuc ; car celui-ci n’a prouvé,
ni le paiement de la redevance , prix du droit d’usage dont il s’agit,
ni la délivrance faite par le propriétaire à l’usager.
Déjà, en discutant les litres du sieur Delsuc et des sieurs Bléton
et Burin, ses prédécesseurs, nous avons remarqué qu’antérieure
ment à 1773, il n’existait aucune trace de l’exercice du droit de
l’usage , ni du paiement de la redevance.
Nous avons vu en effet que pendant le siècle qui a précédé cette
époque, et notamment depuis 1729, aucun bail et absolument au
cun acte, même purement énonciatif, n’avait rappelé ni le droit
d’usage ni la redevance qui en était le prix.
Si l’on se fixe sur ce qui est postérieur à cet acte, l’on voit bien
que le droit est indiqué dans les baux de 1775 , de 1774, de 1778;
niais il reste encore incertain si réellement on a usé du droit; il
reste aussi incertain, et c’est le point principal, si la redevance an
nuelle a été payée ; aucune quittance 11’est produite pour constater
les paicinens ; aucun acte absolument ne les énonce.
Et cependant les anciens propriétaires de la forêt donnaient des
quittances aux usagers qui s’acquittaient. C ’est ce que prouve la
déposition du sieur Ilenoux, un des témoins de l’enquête contraire,
ancien usager de la forêt. Ce témoin déclare avoir parmi scs papiers
des quittances attestant le paiement de la redevance.
�( =3 )
Et cependant encore le sieur Delsuc n’a épargné aucun soin,
aucune recherche pour se procurer des preuves du paiement de
cette redevance; ils’est adressé, parl’intermédiaire d’un de ses parons,
au sieur Culhat, dépositaire des papiei’s de la famille Labro, de cette
famille à laquelle appartenait avant 1785 la forêt de Laroche; il a
examiné les registres, les papiers de cette famille, et néanmoins
il n’a rien découvert, ou au moins on doit le penser ainsi puisqu’il
n’a rien produit.
En vain, pour écarter ou affaiblir le défaut de représentation de
quittance, le sieur Delsuc a-t-il rapporté à l’audience de la Cour un certificat d’incendie attestant que la maison du sieur Bléton,
ancien prétendu usager, avait été la proie des flammes.
La présomption du brûlement des quittances disparaîtra aujour
d'hui que M. Bléton fils, deuxième témoin de l’enquête contraire,
a déclaré non seulement qu'aucun papier de la succession de son
père n'avait été brûlé, mais encore que lors de l'inventaire des
papiers de cette hérédité, il 11e se trouva rien qui eût rapport à la
redevance, prix du droit d’usage.
Ainsi, point de quittance de la redevance avant 1775; point de
quittance aussi depuis 1773 jusqu'au moment où l'émigration du
sieur Neyron de la Tartière fil séquestrer la forêt de Laroche ;
Point de quittance encore pendant la durée du séquestre qui
s'est prolonge de 1792 à 1809;
Poin d'émargement de paiement dans les registres des préposés
des domaines de l’Etat ;
Enfin aucune preuve légale du paiement de cette redevance n'est
produite, non seulement pour les trente années, mais encore pour
les cent ans qui ont précédé l'époque à lrquelle M. Désaulnats a
recouvré ses bois.
De là on doit conclure, si la doctrine ci-dessus développée est
exacte , que le droit d'usage était depuis long-tems prescrit et anéanti
au moment où M. Désaulnats, en 1809, est rentré dans ses bois. Nous
examinerons bientôt si ce droit perdu a été recouvré depuis.
Pour repousser l'argument, on invoquera sans doute quelques
dépositions de témoins qui parlent du paiement de la redevance.
�............... ( ?4 )
L'objection sera facile à détruire.
Cinq témoins de l’enquête directe et autant de témoins de l’enquête
contraire ont parlé de faits antérieurs à 1809.
Sur ces dix témoins, deux seulement que le sieur Delsuc à fait
entendre parlent du paiement de la redevance.
Trois des plus anciens témoins, qui sont restés, avant 1789,
dans le domaine de la G uièze, parens ou domestiques des anciens
fermiers, non seulement 11’ont pas vu payer la redevance ; mais ils
n’en ont pas même entendu parler. Ce sont les xer et 2e de la pre
mière enquête et le 1er de la continuation.
Semblable déclaration sur celte redevance par cinq témoins de
l’enquête contraire, les 5% 6e, 7% 9e de l’enquête contraire, et le
I er de la continuation de cette enquête. Deux de ces témoins sont
également restés dans le domaine à ces époques anciennes ; un autre
a été domestique du sieur Neyron ; cependant ils n’ont jamais vu
porter la redevance d’avoine ; ils n’ont même jamais entendu pai’ler
de cette redevance.
Le 9e témoin de l’enquête contraire dit qu’un ancien fermier lui a
déclaré qu’il ne donnait pas d’avoine.
Les deux seuls témoins qui parlent de la redevance , sont le 3e de
l’enquête directe , et le 3e aussi de la continuation d’enquête ;
L ’un d’eux , âgé de 5o ans, nommé Léger Dufaud; l’autre , âgé
de 67 ans, nommé Jean Bruglial. (1)
Léger Dufaud déclare qu’il était âgé de 8 ans, lorsque son père
devint fermier du domaine de la Guièze ou il resta 11 ans.
(t Quant à la redevance , d it-il, il sait qu’on la payait annuelle« m e n t , en hiver, ou au commencement du printems; parce que
« tantôt il a entendu dire à son père qu’il revenait de porter l’avoine
« due pour celte redevance à M. Manaranches, homme d’affaires
« de M. Désaulnats ; tantôt qu’il fallait prendre la jument du
« domaine, et aller porter cette avoine au même M. Manaranches.
Une telle déposition, fondée sur des souvenirs d’une personne
(1) Il y a un autre témoin , le /j1»*, qui <lit avoir vu deux fois les gariles Madceuf et Fa\i¡»ières venir chercher île l’ avoine. Ces parties étaient ceux de l’ Ëtat pendant le séquestre.
lie fait signalerait un abus, non un paiement légal.
�( >5 )
ftgée seulement de huirans lors des ouï-dire qu’elle retrace, une
telle déposition qui s’applique à une cliose qui devait peu fixer
l’attention et frapper l’esprit d’un enfant de liuit ans , peut paraître
assez extraordinaire. Elle surprendra sur-tout si on la compare à
celle du septième témoin de l’enquéle contraire, q u i, étant, à la
même époque, dans le domaine, où il servait comme domestique,
n’a cependant eu aucune connaissance de la redevance, et ne l’a
jamais vu porter.
Au reste , le témoin ne dit pas avoir vu porter l’avoine ; il déclare
seulement avoir entendu dire qu’on revenait de la porter ou qu’il
fallait aller la porter.
O r, quelle confiance aura-t-on dans un simple oui-dire, si l’on
se rappelle celte règle de Loisel : oui-dire va par vdle ; en un
muids de ouï-dire, il n’y a pas de plein. Un seu l œ il a plus de
crédit que d eu x oreilles n’ ont d ’a u d i vi.
Remarquons aussi que s’il était vrai que l’avoine eût élé portée
au sieur Manaranches, celui-ci eût donné une quittance; car elle
eût été nécessaire au fermier pour prouver au propriétaire du do
maine que la redevance avait été acquittée.
O r, aucune quittance n’est produite ; aucune quittance n’a été
trouvée dans les papiers du sieur Bléton père, lors de l’inventah'e
qui en a été fait. (Voir la déclaration du sieur Blélon fils, troisième
témoin de l’enquête contraire).
Remarquons enfin q u e, selon la déposition du témoin, il serait
entré au domaine de la Guièze en 1788 , et y serait resté onze ans ,
c’est-à-dire jusqu’en 1799 ; et que c’est pendant ces onze ans que la
redevance aurait élé portée annuellement au sieur Manaranches,
homme d’ailaires du sieur Désaulnats.
Mais la forêi de Laroche fut séquestrée à la fin de 1792 , à cause
de l’émigration de M. Neyron de la T anière, qui en était seul le
propriétaire apparent ; et depuis le séquestre qui s’est prolongé jus
qu’en 1809, c’est au bureau des domaines qu’aurait été payée la
redevance, si réellement 011 avait acquitté celte charge. O r, il
11’apparaît aucune quittance du receveur, et ses registres de celte
époque ne font mention d’aucun paiement ; c’est en effet ce qu’at-
�( *6 )
teste un certificat délivré à M. Désaulnats, par le receveur des do
maines.
Combien de motifs de suspicion s’élèvent contre cette étrange
déposition ?
Nous en ferons remarquer quelques autres encore dans la partie
de la déposition du témoin , où il parle de l’exercice de l’usage.
L ’autre témoin, Jean Brughal, qui parle aussi delà redevance, nous
apprend qu’il est entré au service du sieur Bléton, il y a trente-sept
ou trente-huit ans, ce qui remonte à 1792 ou 1795, c’est-à-dire à
l’époque même où la forêt de Laroche fut séquestrée, et où elle
cessa, par conséquent, d’être régie par le sieur Neyron-Désaulnats
ou par son homme d’affaires, pour être placée sous l’administration
des agens du domaine.
Cependant ce témoin parle de la redevance, comme l’ayant por
tée une fois à M. Manaranches, qui avait écrit à M. Bléton, pour se
plaindre de ce que son fermier Dufaud avait négligé de la payer.
11 ajoute qu’après la fin du bail de Dufaud, il régit deux ans le
domaine, et porta, ces deux années , l’avoine de la redevance au
sieur Manaranches.
Enfin il déclare que celui-ci lui donna des quittances qu’il remit
au sieur Bléton.
Pour faire apprécier la sincérité de cette déposition, quelques
observations seront suffisantes.
On remarquera, d’abord, sa contradiction avec celle de Léger Du
faud, précédent témoin, qui atteste l’exactitude du service annuel delà
redevance. Mais ce qui est plus digne d’attention, c’est la partie de
la déclaration de Brughal, où il parle de l’avoine qu’il aurait portée
au sieur Manaranches pendant deux années de suite , après l’époque
où le fermier Dufaud avait quitté le domaine.
Ce fermier, entré dans le domaine eu 1788, y était resté 11 ans,
c’est-à-dire jusqu’à 1799.
A lors, depuis long-tems la forêt de la Roche était sous le séquestre
national, et administrée par les préposés de l’Etat, c’est-à-dire par
le sieur Bléton père lui-même, en qualité de receveur des domaines.
O r, c’cst précisément pendant ce tems-là que le témoin, si on
�( 27 )
veut l’en croire, aurait porté de l’avoine , deux années de suite, au
sieur Manaranclies, qui lui en aurait fourni quittance.
Comment expliquer cette assertion? Et quelle confiance avoir
dans des dépositions de témoins qui ont si évidemment altéré la
vérité dans des points aussi essentiels? y/& uno disce omnes.
Le témoin, lorsqu’il a parlé, avait oublié le séquestre national; il
a hasardé tout ce qu’il a cru utile à celui dans l’intérêt duquel il dé
posait. Aveuglé par son propre zèle, il a voulu tromper la justice;
sa déposition est indigne de confiance.
Comment concilier, au reste, ce qu’il atteste sur les quittances
que lui aurait données le sieur Manaranclies , en 1799 et en 1800 ,
avec la circonstance qu’il ne s’en est pas trouve dans les papiers du
sieur Bléton p ere, inventoriés après son décès, quoique cependant
le sieur Bléton fils ait déposé que dans l’inventaire auquel il a pré
sidé , il peu t certifier que rien d’ essentiel n’a été omis , notam
ment des quittances de la redevance dont il est question, qu’il
n'aurait pas manqué d ’y faire comprendre s’ il s’ en f u t trouvé,
et quoique ce témoin irréprochable ajoute qu’il n’ a rien trouvé qui
se rapportât à celte redevance.
Cependant, c’est sur les dépositions de ces deux seuls témoins, que
le sieur Delsuc peut s’appuyer pour la preuve des paiemens de la
redevance.
Puisque toutes les circonstances signalent comme invraisemblables,
et plus que suspectes, ces deux dépositions isolées ; puisque l’allé
gation des deux témoins est démentie par la déclaration d’un grand
nombre d’autres témoins, plusieurs desquels étant au service des
anciens fermiers du domaine , étaient plus à portée de connaître ce
qui s’y passait, et qui n’ont cependant jamais entendu parler de la re
devance ; puisque cette allégation est détruite par le défaut de rapport
de toutes quittances de la redevance, par l’absence aussi d’émarge
ment, dans les registres des receveurs des domaines, de tout paie
ment qui leur aurait été fait, il faut reconnaître qu’il n’est pas prouvé
que la redevance ait été payée ; qu’il n’est pas établi, par conséquent,
que le droit d’usage ait été légalement execule, et qu’ainsi, comme
l’enseigne Fréminville, comme l’ont décidé les motifs de l’arrêt
�( =8 )
interlocutoire , le droit d’usage était éteint en 1809 , lorsque
M. Désaulnats a obtenu la main-levée d’un séquestre que l’erreur
avait fait mettre sur la forêt de Laroche.
Ce premier moyen suffirait au succès de la cause deM. Désaulnats.
Mais on peut y ajouter celui du défaut de délivrance du bois
destiné aux besoins de l’usager.
L ’on se rappelle la doctrine professée par tous les auteurs, établie
par la jurisprudence, adoptée par les motifs foi’mels de l’arrêt
interlocutoire sur la nécessité de la délivrance à faire par le
propriétaire à l’usager; et l’on n’a pas oublié que c’est en consé
quence de ces motifs, que la Cour a soumis le sieur Delsuc à
prouver que l’usage avait été exercé, au v u , au su et clu consen
tement du propriétaire de la fo ret de L a ro ch e, ou de ceucc qu’ il
représente.
O r , en nous fixant sur une longue série d’années antérieures
à 1809, époque de la cessation du séquestre, la preuve ordonnée
a-t-elle été faite ?
De nombreux témoins ont été entendus sur ce fait. Plusieurs
parlent du bois de cliauflagc pris par les fermiers du domaine de la
Guicze. Trois témoins parlent aussi du bois pris pour réparations ;
mais aucun de ces divers témoins 11e dit que le bois était marqué ou
qu’il ait été pris au vu, au su et du consentement du propriétaire.
T ou s, à l’exception de trois, reconnaissent qu’il 11’y avait eu ni
marque ni délivrance. Ils ne se rappellent pas si le bois pris pour
des constructions était marqué.
L ’un des témoins, le sixième de l’enquête contraire , dit qu’avant
la révolution, il a été domestique du sieur Désaulnats, et que celuici, qui était très-facile, laissait prendre du bois à tout le monde,
sans qu’il fût marqué ; il ajoute qu’il 11’a même jamais vu de marteau.
Le témoin dit aussi que, depuis la révolution, la forêt était au
pillage , et que prenait du bois de chauffage et d’usage qui voulait.
V
oilà à quoi se réduisent les preuves de l’exercice du prétendu droit
d’usage, soit avant la révolution, soit pendant son cours. Certes , il
serait dilïîcile d’y reconnaître l’exercice régulier et légal d’un droit
réel ; on 11e peut y voir que des actes de clandestinité, de tolérance,
�( 29 )
ou de voie de fait, qui ne peuvent pas fonder une possession
légitime.
Les témoins ne se rappellent pas davantage d’avoir rencontré le
garde.
Mais il est trois témoins isolés, dont les dépositions doivent
donner lieu à quelques observations.
On remarquera cependant que l’un d’eux, qui est le premier de
l’enquête , ne parle que dubois abbattu ou sec marqué par le garde,
non du marteau du propriétaire , mais seulement d’un coup de
hache; ce qui n’était ni légal ni propre à prévenir les abus de
l’usager ; car la marque d’un coup de hache n est pas fort difficile
à imiter.
Une telle délivrance, à laquelle rien ne prouve que le proprié
taire ait jamais consenti, une délivrance aussi peu soigneuse est
d’autant moins caractéristique d’un fait de possession de l’usager ,
qu’elle pouvait bien être un acte de complaisance du garde , q u i,
à ce qu’il paraît, d’après le témoin lui-même, mangeait de tems en
teins t'hez les voisins de la forêt, et sans doute chez les propriétaires
du domaine de la Guieze.
Le bois de chauffage, dont parle uniquement ce témoin, pouvait
paraître au garde d’une assez faible valeur pour ne pas se faire
scrupule d’en laisser prendre aux fermiers du domaine.
Quant aux deux autres témoins, qui disent que du bois de cons
truction a été marqué par les gardes pour l’usage du domaine, il
est à remarquer que ce soin ces mêmes deux témoins qui ont déposé
avec tant de complaisance sur le fait du paiement de la redevance ,
et dont il est impossible de ne pas considérer comme suspectes
autant qu erronnées les deux obligeantes dépositions.
L ’un de ces témoins, Léger Dufaud , entré dans le domaine
en 1788 , et qui en est sorti en 1 799, déclare que trois à quatre ans
avant sa sortie , du bois de construction fut délivré et marqué par
le nommé Tallet, garde de M. Désauliiats, pour réparer le sol de
la grange du domaine.
On reconnaîtra que cette déposition est d’une étrange vérité, en
remarquant, d’une part, qu’à l’époque signalée, le domaine était
�( 3° )
sous le séquestre national, et par conséquent sous la surveillance des
gardes forestiers de l’État, et en apprenant aussi que ce Tallet était
alors mort depuis plusieurs années ; il avait été assassiné, dès 1792,
dans la forêt même de Laroche; l’acte de son décès le prouve.
L ’aulre témoin, Jean Brughal, entré au service de M. Blélon, en
1792 ou en *795, c’est-à-dire au commencement du séquestre,
prétend aussi que dans le cours des onze ans de son service, des
arbres furent délivrés et marqués par les gardes , pour réparer une
grange abattue, et ce sur la demande de M. Bléton, et sur l’autori
sation du sieur Manaranches, agent d’affaires de M. Désaulnats. Et
cependant cet agent d’affaires n’avait évidemment aucune autorisa
tion à donner durant un séquestre, pendant lequel c’était le sieur
Bléton lui-même , qui, comme receveur des domaines, régissait la
forêt séquestrée.
On voit combien peu sont dignes de confiance ces dépositions
isolées, sur lesquelles cependant s’appuierait toute la preuve de la
délivrance exigée par la lo i, pour l’exercice légal du droit d’usage.
Ainsi l’on doit reconnaître que celte preuve n’est pas faite , et que
rien n’établit que ceux que représente le sieur Delsuc aient exercé
ce droit, avant 1809 , au v u , au su et du consentement clupro
priétaire de la forêt.
Et cependant l’arrêt a exigé celte preuve ;
Et cependant le sieur Delsuc s’y était soumis.
Donc, puisqu’il n’y a pas satisfait, sa réclamation doit être rejetée,
parce que son droit s’est éteint, faute du paiement de la redevance,
ou pour ne pas avoir obtenu du propriétaire de la forêt la délivrance
du bois qui lui était nécessaire, o u , enfin , pour ne pas avoir usé de
son d roit, au v u , au su et du consentement de ce propriétaire.
Le sieur Dclsuc argumenterait-il des délivrances qui lui ont élé
faites pendant la durée du séquestre ?
L ’argument tomberait devant quelques observations.
Ces délivrances ont toutes été provisoires seulement; toutes ont
été faites avant que les titres et les droits des usagers eussent été
examinés et confirmés par le conseil de préfecture ; toutes émanent
d’un inspecteur, trop instruit pour ne pas savoir qu'il n’était pas
�appelé à régler les droits et à être le juge de la validité des titres,
ni de la conservation ou de l’extinction de l’usage. Ces délivrances
précaires ne peuvent donc être d’aucune influence dans la cause ;
elles sont d’autant moins justificatives de l’usage, que dans les proccsverbaux même qui les contiennent, l’inspecteur forestier a eu la
prudence de faire , au profit du Gouvernement, telles réserves et
restrictions de droit} s i le cas y échet, est-il dit, après le jugement
qu’aura prononcé le conseil de préfecture sur les diverses pro
ductions de titres faites par les usagers.
Ainsi les délivrances provisoires laissent intacts les droits res
pectifs ; et si le droit d’usage n’avait jamais existé , ou s’il n’existait
plus, ces délivrances ne lui ont pas donné la vie.
O r , nous avons prouvé que, dès avant 1809 ou même dès avant
1789, le droit fort équivoque d’ailleurs du sieur Bléton, ou de ses
prédécesseurs, avait été anéanti, parce que jamais il 11’avait été lé
galement exercé, et que jamais il 11’avait été accompagné du paie
ment de la redevance qui en était le prix. Ce prétendu droit ne gre
vait donc plus la forêt de Laroche, lorsqu’à la fin de 1809, cette
forêt fut rendue à M. Neyron-Désaulnats, son ancien propriétaire.
Pour le faire revivre, il eût fallu à l’usager, ou un nouveau titre,
ou une possession légale de trente ans. Le sieur Dclsuc peut-il in
voquer l’un ou l’autre des deux moyens ?
Examinons ce qui s’est passé depuis 1809.
Lorsque M. Désaulnats recouvra sa forêt, un grand nombre de
personnes se présentèrent à lui comme usagers. Leurs droits
n’étaient pas établis, mais ils en certifiaient l’existence; ils disaient,
les uns, avoir égaré leurs titres , les autres les avoir déposés au
secrétariat de la préfecture; tous promettaient d’en justifier inces
samment ; beaucoup d’enlr’eux avaient reçu , pendant la durée du
séquestre, quelques délivrances provisoires qui pouvaient être
considérées comme un indice de leurs droits.
Le sieur Désaulnats, qui, privé depuis près de vingt ans de sa
propriété , n’en connaissait pas bien ni les droits ni les charges ,
pouvait-il se montrer trop sévère dans ces premiers teins? il eût
�( 3 0
craint d’ètre injuste. Il crut donc devoir accorder du bois en atten
dant qn’il pût vérifier les titres.
Parmi les réclamans était M. Bléton, alors propriétaire du
domaine de la Guièze. M. Bléton et M. Désaulnats avaient
entr’eux des relations créées et entretenues par un bon voisinage et
par des circonstances qui se rattachaient môme à la main-levée du
séquestre.
M. Bléton avait aussi obtenu des délivrances provisoires.
M. Désaulnats ne pouvait pas être rigoureux à son égard.
Mais il entendait que le provisoire ne serait maintenu définitive
ment qu’après la vérification des titres et des droits.
Le domaine de la Guièze ayant été vendu, et le sieur Delsuc en
étant devenu propriétaire, le sieur Delsuc qui avait journellement
avec le sieur Désaulnats des relations d’affaires , le provisoire se
prolongea entr’e u x, mais aussi sous la promesse réitérée que des
titres justificatifs seraient produits , examinés et appréciés, et sans
que, de part ni d’autre, on entendît, l’un s’attribuer, l’autre concédef
un droit définitif.
C ’est par suite de ce provisoire, que quelques setiors d’avoine
ont été portés à différentes époques, à Saint-Pardoux, chez le sieur
Désaulnats , presque toujours en son absence, par les métayers ou
fermiers de la G u ièze, les sieurs Bléton et Delsuc ayant voulu sans
doute envoyer cette légère indemnité pour le bois qu’ils recevaient
de teins en tems. Si des reçus n’ont pas été donnés, c’est parce que
le sieur Désaulnats était rarement présent lors de la remise de
l’avoine , ou qu’on ne lui en demandait pas; car il en aurait donné
sans difficulté, niais en expliquant dans les quittances les intentions
communes, et en se faisant les réserves nécessaires (i).
Ainsi se sont écoulées quelques années, pendant lesquelles une
confiance réciproque n’a pas permis de penser à prendre aucune
précaution contre les conséquences que l’on veut tirer aujourd’hui
de ce provisoire.
( i)C e p e n d a n i, peu <le lenis après l'acquisition du sieur Delsuc, le sieur Désauluals refusa
une quittance au fermier de celu i-ci, qui la demandait pure et simple.
*
�( 33 )
Mais enfin cela devait avoir un terme : des titres attributifs ou
conservatifs du prétendu droit, des titres formels n’étant pas pré
sentés , le sieur Désaulnats a refusé du bois , et alors est né le
procès.
Aujourd’hui, qu’a prouvé le sieur Delsuc, par son enquête? Que
du bois lui avait été accordé à différentes fois; qu’il avait aussi été
porté de l’avoine chez le sieur Désaulnats.
Mais tout cela était déjà connu dans la cause. Tout cela avait été
déclaré par le sieur Désaulnats lui-même dans son interrogatoire,
sauf les exagérations de certains témoins , q u i, comme ce n’est que
trop le malheureux usage, sont allés au-delà de la vérité , soit par
infidélité de mémoire, soit par toute autre cause.
Rien donc de moins important que cette partie de l’enquête. Car
ce n’est point pour des faits postérieurs à 1809, pour des faits déjà
constans dans la cause, que l’enquête avait été ordonnée par la Cour;
elle eût été absolument inutile. C ’est pour les faits antérieurs, c’est
pour la preuve du paiement de la redevance et de la délivrance légale,
soit avant 180g, soit avant 178g, que l’enquête a été jugée nécessaire,
parce que les faits étaient allégués avec insistance par le sieur Delsuc,
qui présentait à l’appui de ses allégations des baux qui pouvaient
leur prêter quelque appui.
Et cependant nous avons vu combien peu les allégations avaient
été justifiées, nous avons vu même que des baux plus anciens encore,
auxquels se rattachait la vente du 27 mai’s 17 58 ^ démontraient que
le droit d’usage réclamé 11’avait pas été vendu au sieur Burin, et
que celui-ci n’avait p u , en conséquence, le transmettre au sieur
Bléton ; nous avons vu enfin que ce prétendu droit n’avait jamais été
légalement exercé par la famille Burin et Bléton, et que , lorsqu’on
supposerait même que quelquefois du bois aurait été pris par leurs
métayers dans la forêt de Laroche, c’eût été sans que la délivrance
en fût faite, sans que cette délivrance s’opérât par l’cmpreiute du
marteau du propriétaire, et sans même que le prétendu usage eût
été exercé au v u , au su et du consentement du propriétaire de
la forêt, comme 011 avait offert de le prouver.
Dans de telles circonstances, le droit ayant été depuis long-tems
5
�(3 4 )
anéanti, pourrait-on considérer les faits postérieurs à 1809, comme
l’ayant fait renaître ?
Non , sans doute, à moins qu’un nouveau titre émané du proprié
taire ne l’eût renouvelé, ou qu’une possession trentenaire et légale
ne put tenir lieu d’une concession nouvelle.
Nous disons une possession légale; c’est-à-dire une possession
continue , non à titre précaire, mais à titre de propriétaire du droit,
une possession caractérisée par le paiement de la redevance et par
des délivrances annuelles faites par le propriétaire de la forêt, une
possession, enfin, qui se fût prolongée pendant tout le tems nécessaire
pour acquérir la servitude, c’est-à-dire pendant les trente ans que la
loi exigeait pour suppléer au nouveau titre.
O r, c’est évidemment ce que n’ofire pas l'enquête.
Nous avons déjà indiqué le résultat des dépositions relatives aux
faits antérieurs à 1809; et nous avons vu qu’elles n’établissaient rien
de positif en faveur du prétendu usager.
Quant aux faits postérieurs, quelque caractérisés qu’ils fussent,
ils seraient insuffisans pour rendre l’existence à un droit d’usage
antérieurement éteint, puisque ces faits ne remonteraient pas, à
beaucoup près, aux trente ans nécessaires pour acquérir le droit
par la prescription.
Mais parcourons ce que disent les témoins sur ce qui s’est passé
depuis 1809.
Le cinquième témoin de l’enquête directe parle d’un seul fait de
délivrance de bois, marqué, dit-il, par le sieur Désaulnats ou
Micliel, son domestique. Le témoin ne peut cependant affirmer la
présence de M. Désaulnats.
Le sixième témoin déclare que son père, fermier pendant deux
ans et demi à la G uièze, prit pendant deux années du bois de chauf
fage ; il le prit sans qu’il lui fût marqué ; il ne dit pas même que ce
fût du consentement du propriétaire. Il ajoute qu’il ne remit pas
d’avoine la première année ; qu’il en remit un setier la seconde,
parce qu’un garde nommé Guest refusa de lui délivrer du bois, s’il
ne payait pas cette redevance.
Cette déposition indique le peu d’exactitude du pVétendu paie
ment de la redevance , et fait voir qu’en supposant l’existence du
�( 35 )
d roit, le propriétaire de la forêt, qui n’avait aucun moyen d’exiger
la redevance, aurait été absolument à la discrétion de l’usager de
qui il dépendait de payer ou de ne pas payer cette redevance, selon
qu’il lui aurait plu de prendre du bois ou de s’en abstenir.
On doit conclure de là qu’un tel usage était nécessairement pré
caire ; carie propriétaire ne pouvait pas être lié, si l’usager ne
l’était pas lui-mêine. Si donc il y a eu quelquefois des délivrances
de bois et des paiemens momentanés de redevance , cela ne pouvait
être que provisoire, comme l’a déclaré M. Désaulnats.
Le septième témoin, dont la déposition a des vai’iations, parle
du refus que lit, dans une circonstance, M- Désaulnats, si on ne
lui payait pas de redevance. Il dit qu’il porta un setier d’avoine, et
qu’alors on lui donna du bois de chauffage.
11 parle aussi du bois de construction reçu par M. Bléton ; il
ignore par qui ce bois fut marqué et délivre.
D ’autres témoins parlent encore de bois de chauffage, et quelquesuns de bois de construction, qui aurait été pris dans la forêt. Peu
de témoins seulement disent que ce bois leur était délivré. Un d’eux
déclare qu’il était marqué à l’avance. Le neuvième dit avoir, la
première année, demandé du bois de son propre mouvement,
INI. Delsuc ne lui ayant pas donné d’ordre, parce qu’il n’avait pas de
titre.
Plusieurs disent aussi avoir porté de l’avoine. Aucun n’a reçu de
quittance. Le dixième dit en avoir demandé une fois, de crainte
que M. Blcton n’en exigeât.
11 est bien certain que le sieur Désaulnats se serait empressé à
donner cette quittance, mais en y insérant les conditions et les ré
serves nécessaires.
L ’on remarquera que la plupart des témoins qui parlent d’avoine
par eux portée au sieur Désaulnats avaient été les fermiers des
sieurs Bléton ou Delsuc, et qu’ils déposent en quelque sorte dans
leur propre cause sur le fait de l’avoine, s’ils s’en sont fait tenir
compte, quoiqu’ils ne l’eussent réellement pas remise à M. D é
saulnats.
Le dixième témoin de l’enquête directe dépose d’un fait qui
prouve combien le sieur Delsuc doutait lui-même de la réalité du
f/5
�( 3 6 )
droit d’usage qu’il réclame. Il avait des réparations à faire à sa
maison du domaine de la Guièze ; et, au lieu de se faire délivrer du
bois par. le sieur Désaulnats, il en prit dans une forêt dont il est luimêine propriétaire, appelée Bois de la Jarrige.
Ce fait est aussi attesté par le cinquième témoin de la continuation
de l’enquête directe, et par le deuxième témoin de la continuation
de l’enquête contraire.
Le onzième témoin, aussi fermier à la Guièze, demanda un jour
à M. Désaulnats de la rame pour clore les héritages. Le sieur Dé
saulnats lui dit ne pas en avoir, mais lui permit de prendre des
écoudards ou des croûtes de rouleau, enlevées par la scie.
Tous ces faits annoncent la facilité du sieur Désaulnats, tant qu’on
n’exigeait pas du bois de lui à titre de droit, tant qu’il espérait qu’on
justifierait enfin des titres annoncés.
Cette facilité, il la montrait à l’égard de plusieurs autres habitans
des lieux qui, cependant, n’avaient aucun droit d’usage. C’est ce
qui aurait été clairement démontré par l’enquête, si le sieur Delsuc,
a qui la connaissance de cette vérité de fait paraissait dangereuse s
ne s’était pas opposé aux interpellations que le sieur Désaulnats a
voulu faire faire sur ce point à plusieurs des témoins même de l’en
quête directe, notamment au prem ier, au cinquième et au huitième
témoins.
Le sieur Désaulnats désirait que l’on demandât aux témoins s’il ne
leur avait pas fait à eux-mêmes et ci d'autres personnes des déli
vrances de bois, sans qu’ elles eussent des droits d’uscige dans
la fo r ê t, et sans même en exiger de paiement, mais seulement
par des considérations de bon voisinage.
La question n’a pas été faite, parce que le sieur Delsuc s’y est
opposé, sous prétexte qu’elle ne se rattachait pas directement aux
faits retenus par l’arrêt.
Cependant un fait semblable est rapporté par les 4 e et 5®témoins
de l’enquête contraire. Il s’applique au noimné Antoine Gardelle,
qui , pendant le séquestre, avait été compris dans le tableau des
usagers auxquels l’inspecteur forestier avait fait des délivrances pro
visoires. Quoique ce Gardetle n’eût pas trouvé le titre,qu’il annon
çait , M. Désaulnats lui a délivré provisoirement du bois, cl cela,
�C 37 )
pendant plusieurs années ; et il a reçu aussi de lui la redevance qu’il
disait devoir. Mais le droit n’étant pas justifié, la délivrance à cessé.
C ’est ce qu’attestent, soit Gardette lui-même, soit le témoin qui
lui succède.
L ’exemple de Gardette est absolument conforme à ce qui s’est
passé avec le sieur Delsuc. Pour l’un comme pour l’autre, le sieur
Désaulnats a été officieux et facile ; pour l’un comme pour l’autre, il
n’avait entendu faire qu’une concession provisoire ; pour l’un comme
pour l’autre , il avait été convenu que l’usage cesserait si des titres
justificatifs et conservatifs du droit n’étaient pas rapportés. La con
vention a été exécutée à l’égard de Gardette; le provisoire a même
été interrompu. Le sieur Delsuc , au contraire , veut le rendre dé
finitif.
Y
parviendra-t-il? lui qui n’a acquis aucun droit d’usage par
l’adjudication de 1819, et qui 11’a aussi été chargé d’aucune rede
vance indicative d’un tel droit ; lui dont les prédécesseurs même
en propriété, les sieurs Burin et Bléton, n’avaient également acquis
aucun droit de ce genre, puisque la vente de 1758 11’en énonce pas,
et que le bail de 1750, auquel cette vente se réfère, écarte même
l’idée de tout droit d’usage attaché au domaine vendu ; lui qui n’a
pas prouvé que ce droit d’usage eût été légalement exercé dans
aucun tems, ni avant ni depuis 1789, puisqu’il 11e rapporte aucune
quittance du paiement de la redevance qui en était le p rix , puis
qu’il n’est pas établi qu’il ait été fait jamais de délivrance par le pro
priétaire au prétendu usager, ni même que celui-ci ait exercé ce
droit, au v u , au su et du consentement du propriétaire de la
foret ; lui enfin qui voudrait profiter d’une tolérance, d’une com
plaisance de bon voisinage , pour s'attribuer sur le sieur Désaulnats
un droit onéreux, 1111 droit q u i, en supposant même qu’il eût existé
dans le dix-septième siècle, aurait depuis long-temps été anéanti par
* la renonciation tacite de l’usager; celui-ci, à une époque où le bois
était sans valeur, ayant sans doute voulu s’affranchir de la redevaucc
annuelle qui en était le prix.
La réclamation du sieur Delsuc doit donc être rejetée.
Mais en supposant qu’il eût un droit d’usage sur la forêt, exami
nons en quoi ce droit devrait consister.
�(38
)
S iii.
Quels seraient l’objet et l’étendue du droit d’usage ?
C ’est dans le titre constitutif d’un droit d’usage qu’on doit re
chercher et cet objet et cette étendue.
Le sieur Delsuc présente deux titres, l’un du i 3 janvier i 56 i ,
l’autre du 17 décembre i 634 *
Nous avons démontré déjà que l’acte de i 56 i était étranger à la
cause ; qu’applicable seulement aux propriétés que Jean Fumât
possédait alors au village Del Mas Del Tourres, il ne pouvait être
invoqué pour un domaine situé au village de la G uièze, dont il 11e
parle pas.
C ’est donc sur l’acte seul de 1634 q116 l’on
se fixer, en con
sidérant même comme concédé valablement et à perpétuité le droit
d’usage qui y est énoncé.
O r , que porte cet acte? L ’investison de la forêt de Laroche en
faveur de Jean Fumât, pour son usage des maisons, pour ses ténemens des 'villages de la Guièze et Pissol, soit pour son chauf
fa g e et réparations , qu’ il pourrait fa ire dans lesdits ténemens.
II est inutile de nous occuper du village de Pissol, où le sieur
Dclsuc ne possède rien des anciennes propriétés de Jean Fumât (1).
Le village ou le ténement de la Guièze sont seuls à considérer,
parce que ce village ou ténement est dans la cause le seul objet du
droit réclamé.
Quant à l’étendue du droit, il est fixé par les termes mêmes de
l’acte : pour chauffage et pour réparations, y est-il dit.
O r c’est un principe élémentaire, que celui à qui une servitude
est due, ne peut en user que suivant son titre, sans pouvoir rien
faire pour l’aggraver (argument de l’article 702 du Code civil).
Ce principe s’applique notamment aux droits d’usages dans les
bois. L ’usage accordé pour une maison ne peut être étendu à plu
sieurs. L ’usage attribué à une mélaii’ie ou à un domaine ne peut être
(1) Les representans des Fumât) quant au domaine de Pissol, n'ont jamais considéré
JUcLe
de i 63 4 comme leur attribuant aucun droit d'usage,
�( 3g )
réclamé .que pour ce domaine , et seulement tel qu’il existait au mo
ment de la concession ; il ne peut être étendu à de nouveaux bàtimens , à de nouvelles propriétés qui auraient été réunies à l’ancien
domaine ; car ce serait évidemment aggraver la condition du fonds
dominant, c’est-à-dire du propriétaire de la forêt.
Toutes ces vérités élémentaires sont professées comme telles par
tous les auteurs qui se sont occupés de servitudes comme par tous
ceux qui ont traité des droits d’usage dans les bois.
Le sieur Delsuc paraît cependant les méconnaître; car le domaine
de la Guièze, pour la totalité duquel il réclame un droit d’usage ,
est beaucoup plus considérable aujourd’hui qu’il ne l’était en 1654.
En effet, les baux produits par M. Désaulnats, ces baux anté
rieurs à la vente faite le 29 mars 1768, par la demoiselle Fumât au
sieur Burin, tous ces baux nous apprennent que, des 1729, le sieur
Fumât avait réuni dans la main du même fermier à son domaine de
la G uicze, tous les héritages dépendant d’un autre domaine
appelé d’ A u za t, appartenant aussi au sieur Fumât. C’est ce
qu’on lit dans les baux des 4 avril 1729, 5 omai 1755, 17 mars 1750.
Et remarquons que le sieur Burin acheta en 1758 ces deux
domaines ; car la vente lui en fut faite en se référant au dernier bail
du 17 mars i j 5o.
Ainsi, ce n’est plus seulement pour le petit domaine primitif de
la Guicze que le droit d’usage est réclamé; c’est pour un gros
domaine qui s’est accru notamment de l’augmentation de tous les
héritages qui formaient autrefois le domaine distinct appelé d’Auzat.
D’autres adjonctions ont aussi été faites à cet ancien domaine par
des acquisitions successives qui embrassent la totalité du tellement
de la Guicze. Autrefois il existait un village dans ce tellement. Ce
village est rappelé dans l’acte même de i 634 - Dans ce village, se
trouvaient nécessairement plusieurs habilans ; car on ne donne pas
le nom de village à une propriété isolée. Ce nom 11e convient qu’à
une agglomération d’habitations. Les divers habilans devaient avoir“
chacun la propriété d’une portion quelconque du ténement. Le
contraire ne peut se supposer, sur-tout pour un pays de montagne.
Or aujourd’hui le ténement entier est la propriété du sieur Delsuc.
�( 40 )
Aujourd’hui tous les bâtimens qui sont sur ce ténement lui appar
tiennent; et c’est pour le ténement entier, c’est pour la totalité de
ces bâtimens qu’il réclame le droit d’usage en litige, sans remarquer
que nécessairement aujourd’hui il y a plus de bàtimens pour ce
domaine qui a reçu et qui reçoit encore de grands accroissemens,
qu’il n’en fallait pour les besoins du petit domaine que possédait
Fumât en i 634 Nous disons que ce domaine reçoit encore des accroissemens ;
c’est ce que nous apprend môme le onzième témoin de l'enquête
directe, qui parle d’un pré et d’une terre récemment acquis par le
sieur D elsuc, qui en a défriché, dit-il, trois septerées.
Il est fort bien, sans doute, que M. Delsuc augmente ses pro
priétés ; mais il ne serait pas juste que cette augmentation aggravât
le droit d’usage dû à l’ancien domaine, et que le sieur Désaulnats
dut fournir tous les bois nécessaires, soit à construire, soit à réparer
des bâtimens qui ont dû être augmentés dans la proportion de l’aug
mentation des héritages annexés au domaine.
Une autre observation est également digne d’attention.
Le sieur Delsuc a acquis avec le domaine de la Guicze quaranteune tètes d’herbages de la montagne de Montaigut. Ces quaranteune têtes d’herbages, il les fait consommer, en été, par des bestiaux
qu’il loge, en hiver, dans les bâtimens de son domaine de la Guièze;
et l’on conçoit que pour loger cette quantité assez considérable de
bestiaux étrangers aux besoins du domaine, il lui faut des bâtimens
plus vastes.
Les bâtimens ont dû même recevoir une grande augmentation
dès le tems où l’on avait réuni à l’ancien domaine, non-seulement
tous les héritages dépendant du domaine d’Auzat, mais encore
trenle-deux lêtes d’herbages de la montagne de Montaigut ; et celle
double réunion remonte au moins à 1729, ainsi que le constate le
bail de celte époque.
Comment pourrait-on soumettre le sieur Désaulnats à souffrir un
usage que l’on étendrait ainsi à tous les besoins que produisent et à
tous les bâtimens qu’exigent des accroissemens qui "ont plus que
�(4 0
double l’ancien domaine, et qui aggraveraient ainsi de plus du
double l’ancien droit concédé par l’acte de 1654 *
Telle est pourtant la prétention du sieur Delsuc. C’est, ce qu’an
nonce au moins la demande en délivrance qui a été l’origine et la
cause du procès actuel.
Par les actes qui ont précédé ou introduit l’instance, le sieur
Delsuc a déclaré qu’il était sur le point de construire un bâtiment
dans le domaine de la Guièze ; il a prétendu avoir le droit de prendre
dans la foret de Laroche le bois nécessaire à cette construction, et
il a demandé qu’on lui en délivrât la quantité suffisante pour un bâ
timent d’une longueur de 26 mètres 32 centimètres, ou 78 pieds,
et d’une largeur de 11 mètres , ou 53 pieds.
L ’acte de 1654 ne l’autorisait, sous aucun rapport, à faire une
telle réclamation.
En effet, i° l’ancien domaine de la Guièze, tel qu’il existait en
i 6 3 4 , avant tous les accroissemens qu’il a reçus, notamment en
1729, n’avait pour tout édifice qu’un seul bâtiment sous le même
toît, dont une partie servait de logement au fermier, et une autre
partie d’établerie ; la partie supérieure de cette établerie formant la
grange, ainsi que cela est d’usage sur les lieux. Ce bâtiment suffi
sait aux besoins d’un domaine alors peu considérable, et où l’on
ne plaçait ni les bestiaux nécessaires à l’exploitation du domaine
d’Auzat, ni ceux qui consomment, l’été, les têtes d’iierbages que
l’on a réunies au domaine.
Le sieur Delsuc, au moment actuel, a , dans le lénement de la
G u ièze, beaucoup plus de bâtimens qu’il 11e lui en faudrait pour
l’exploitation de l’ancien domaine. S’il lui plaît de faire de nouvelles
constructions dans ce ténement, il n’a pas le droit d’exiger de
M. Désaulnats qu’il lui en fournisse les matériaux; car, en supposant
même que le titre parlât de bois de construction, il est certain que
cela ne pourrait s’entendre que pour les bâtimens nécessaires aux
besoins du domaine, tel qu’il existait autrefois, et non pour ceux
d’un domaine beaucoup plus considérable.
a0II est à remarquer même que l’acte de 1634- n’accorde pas de
droit d’usage pour des constructions à faire ; il ne parle de bois que
�( 4* )
pour chauffage ou pour réparations. Une telle concession ne s’ap
plique évidemment pas à des constructions nouvelles et à des cons
tructions aussi considérables que celles que veut faire le sieur Delsuc.
Réparer n’est pas construire ; ce n’est pas établir de nouveaux biitiinens, c’est seulement entretenir les anciens.
La demande en délivrance du sieur Delsuc a donc été peu réflé
chie ; et l’on doit penser que s i, au lieu de s’appuyer comme il l’a
toujours fait, sur l’acte de i 5G i qui ne s’applique pas au domaine
de la Guièze, il se fût fixé sur le seul titre qui parle de ce domaine,
sur l’acte de i 634 » sans doute il aurait reconnu qu’il n’élait pas au
torisé à demander du bois pour construire , aux dépens du sieur
Désaulnats, un vaste bâtiment de 78 pieds de longueur sur 33 pieds
de largeur, et que le droit d’usage qu’avait obtenu Jean Fumât, ce
droit d’usage limité, soit par les termes même de l’acte, soit par le
peu d’étendue et de valeur du domaine de la Guièze, lors de la
concession, lui permettait seulement de réclamer du bois pour ré
parer la seule maison désignée dans l’acte de concession, où il n’est
parlé ni de grange ni d’autre édifice, ni même du droit de bâtir ou
de construire.
On le voit donc : le sieur Delsuc s’est fait illusion ; sa demande
en délivrance est contraire au titre même qu’il invoque ; cette de
mande, qui est cependant le fondement de tout le procès actuel,
devrait donc être rejetée , même lorsqu’il ferait considérer le droit
d’usage porté par l’acte de i 63 /|. comme lui ayant été réellement
transmis, et comme ayant été légalement conservé. Il devrait suc
comber dans l’action qu’il a formée, sauf à lui à user, dans la suite,
conformément et dans les limites de l’acte de i 634 >du droit d’usage
que cet acte confère.
T el serait, sans doute, clans l’instancc actuelle, le sort de la ré
clamation hasardée par le sieur Delsuc , lors même qu’on lui recon
naîtrait un droit d’usage.
Mais ce droit lui appartient-il? lui a-t-il été vendu? avait-il été
vendu au sieur Burin en 1758?
C ’est ce que la lecture des ventes ne permet pas de supposer.
En 1758, le sieur Burin achète le domaine de la G u icze, tel qu’il
�( 43 )
_ ctait designé dans un bail de 1750, tel qu’en jouissait l’ancien fermier.
O r, le bail était muet sur le droit d’usage, et le fermier n’en jouissait
pas.
En 1819, le duc de Castries devient adjudicataire du domaine;
et peu de tems après il le revend au sieur Delsuc; et l’adjudication
et la revente sont silencieuses aussi sur le droit d’usage et les rede
vances.
On n’en sera pas surpris, si l’on se rappelle les faits, et si l’on
reconnaît, en remontant à un siècle et plus , qu’il n’existe aucune
trace du paiement de la redevance ; que l’exercice légal du droit
n’est pas prouvé ; qu’aucune possession , caractérisée par une dé
livrance faite à l’usager, n’a été établie.
Ainsi, le sieur Delsuc veut obtenir ce qui ne lui appartient pas ;
il veut se procurer un bénéfice auquel il 11 a pas droit. C erlat de
lucro captando.
' Le sieur Désaulnats, au contraire, refuse de payer ce dont il n’est
pas débiteur. Il résiste à un droit d’usage, dont l’unique prix aurait
été une redevance annuelle que l’usager n’a pas servie; à un droit
dont sa foret n’est pas grevée ; à un droit dont elle aurait été af
franchie, par le fait de l’usager lui-même, depuis plus d’un siècle; à
un droit, enfin , auquel 0n voudrait même aujourd’hui donner une
extension arbitraire. L e sieur Désaulnats veut éviter une perte :
C ertat de damno vitando.
Quelle est celle des parties que la justice et l’équité protègent ?
NEIRON D E SA U L N A T S.
M e ALLEM AM D, Avocat.
M® MARIE , Avoué-licencié.
RI O M , de l'imprimerie de S A L L E S
fils
,
près le Palais de Justice.
�
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Title
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Factums Godemel
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Neyron-Desaulnats, Jean-Marie. 1828?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Neiron des Aulnats
Allemand
Marie
Subject
The topic of the resource
droit d'usage
séquestre
biens nationaux
bois
coupe de bois
droit de chauffage
pacage
droit de bâtissage
eaux et forêts
émigrés
témoins
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour M. Jean-Marie Neyron-des Aulnats, propriétaire, habitant au lieu de Saint-Genès, appelant d'un jugement par défaut, rendu au tribunal civil d'Issoire, le 27 juillet 1827 ; contre M. Jacques Delsuc, propriétaire et ancien notaire, habitant du lieu de St-Pardoux-Latour, Intimé.
Table Godemel : Usage (droits d') : 2. dans la contestation relative à un droit d’usage de prendre des bois de construction dans les forêts de la Malguièze et de Laroche appartenant au sr Désaulnats ; celui-ci prétend que ce droit ne résulte pas des titres produits, ni de la possession ; qu’il serait éteint par non usage ; et que, dans tous les cas, il ne pourrait être éxigé pour la réparation ou reconstruction de la grange qui fait l’objet de la contestation, parce qu’elle n’aurait été construite qu’après l’acte de concession du 17 décembre 1764, et après diverses augmentations faites au domaine de la Guièze, qui appartient à Delrue ; demandeur en délivrance. Quid ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie De Salles fils (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1828
1561-1828
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2712
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2714
BCU_Factums_G2710
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53549/BCU_Factums_G2712.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
La Tour-d'Auvergne (63192)
Auzat (domaine d’)
Lagièse (domaine de)
La Roche (forêt de)
Pissols (village de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens nationaux
bois
Coupe de bois
droit d'usage
droit de bâtissage
droit de chauffage
eaux et forêts
émigrés
pacage
séquestre
témoins
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53393/BCU_Factums_G2023.pdf
ed0f9a02400b65de987abd3dd7158125
PDF Text
Text
MÉMOIRE
E
N
R
É
P
O
N
S
E
,
POUR
Sieur J o s e p h D E LA R O C H E -L A M B E R T ,
habitant à Issoire, intimé et appelant;
c o n t r e
Dame F r a n ç o i s e - A g l a é - G a b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E , et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G O U R D O N , son m a r i; dame
A n g é liq u e - A r m a n d e - C am ille
D E LA
L U Z E R N E , et sieur A n a t h o c l e - M a x i m i l i e n H U R A U L T D E V I B R A Y E , son
mari, habitans de la ville de P a r i s , héritiers
bénéficiaires de madame de M ontm orin, laquelle
étoit héritière bénéficiaire du sieur EmmanuelFrédéric de T a n e , son fr è r e , appelans ;
c o n t r e
Sieur H
D U V E R G I E R , habitant à P a ris;
S i m o n T E R O U L D E , habitant à Daudeville;
P i e r r e - L o u i s L A I S N E , ancien sellier à
Paris, habitant à Sens; A n t o i n e - L o u i s
e n r i
,
�( 2 }
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; et J e A N
C H A R D O N , chapelier , habitant a P a r is ,
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,
aussi appelans ;
C O N T R E
Sieur
Am
D E TANE - SANTENAS ,
habitant a P a r i s , intimé;
édée
E T
S ie u r
L o u is
C O N T R E
N A T T H E Y , habita nt de N y o n en
Suisse
aussi intimé.
S a n s la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la plus grande simplicité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’ une t e r r e , chargé d’en payer
le p r ix à un notaire choisi par une direction de créan
ciers , lui en paye près de m oitié; ensuite il revend la
terre, et laisse dans les mains du second acquéreur une
gomme égale à ce q u’ il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second acquéreur, poursuivi par les opposans, produit des quittances de consignation, assigne
les créanciers en mainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces créanciers attaquent le premier acqué
re u r, qui met en cause son garant : c e lu i-c i emploie
�C 3 )
pour libération le jugement qui a validé sa consignation.
Alors l’acquéreur observe aux créanciers qui le pour
suivent , que leurs oppositions à des lettres de ratification
ont lié leurs intérêts à ceux du second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés, ils ne peuventipas demander à etre payés une
seconde fois.
quoi se réduit la question principale, et il
est évident que jusqu’ici elle ne présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse : mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du vendeur
originaire, qui comprennent que si la perte des assignats
n’étoit pas p o u r les c r é a n c i e r s e lle s e r o it p o u r euxmêmes, font cause commune avec e u x, pour que tout
r e t o m b e sur le premier acquéreur.
Alors tout s’exagère et se complique. L ’émigration de
l’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout : d’autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à mille'équivoques. Quand la matière est
élaborée, on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas, et le
tribunal même où il a trouvé justice. E n fin , après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la q u e s t i o n , et
d’arrôts assez bien choisis dans la m u l t i t u d e , niais plus
étrangers encore, on vient crier à l’injustice et à l’indé
licatesse, en disant f r o i d e m e n t : « Q u e m’importe si vous
« devez recouvrer 011 non 5ooooo francs que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas la votre ! Que
A 2
V o ilà à
�; •c 4 )
« m’importe encore si vous êtes ruiné par ce payement,.
« et si votre famille est respectable. Je veux de l’argent,
« et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose
« moins en mesure de me résister; d’ailleurs votre émi« gration se prête à tous mes sophismes : il y a tant de
a lois sur cette matière, qu’il est impossible de ne pas
« y voir que tout doit retomber sur vous. D ’ailleurs,
« quand je me suis donné la licence d’imprimer qu’une
« décision contraire à mon intérêt étoit un jugement de
« f a v e u r , j’ai calculé l’effet de cette injure sur l’esprit
« des magistrats auxquels j’en demande la réforme. Si
« je ne puis les forcer à croire qu’il faut sacrifier un
et émigré p a r p r é f é r e n c e , m o n a d r o i t e c e n s u r e sera t o u « jours d’un poids quelconque dans la balance ; elle
a achèvera probablement de me conquérir le suffrage de
« ceux dont l’opinion auroit été incertaine. »
Ainsi eût parlé Machiavel ; ainsi parlent les syndics,
des créanciers de T a n e , qui veulent, per J a s et nefas >
intéresser en se présentant comme des victimes.
Qu’ils tachent de prouver à la Cour que malgré leurs
oppositions à des lettres, malgré un jugement qui pro
nonce contre eu x la validité du payement que le sieur
Natthey a été chargé de leur faire, il leur reste encore une
action : voilà leur cause.
Mais que dans leur colère et dans leurs calculs ils fassent
semblant de supposer de l’adresse, des insinuations cl de
la faveur; que tournant tout du côté de l’émigration, ils
cherchent à insinuer que cette émigration deviendra aux
sieur et dame de la Roche-Lambert un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des créanciers do T a n e ,
�. ( 5 )
et que ce sera s'être,fait de ses propresjfautes un moyen
à?acquérir : voilà ce qui n’est ni la cause ni la vérité ,
mais une insigne et brutale calomnie.
Car personne ne sait mieux que les adversaires qu’il
n’y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la Roche-Lambert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en
écus sur une terre qu’ils n’ont pas : et on ose encore leur
demander plus de 5ooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
'
F A I T S .
Après la mort du sieur Emmanuël-Frédéric de Tane,
sa succession fut acceptée so u s b é n é f i c e d ’ i n v e n t a i r e par
Françoise -Gabriëlle de T a n e , épouse de M. de M ontmorin, ministre des affaires étrangères^.
Madame de Montmorin ne pouvoit vendre en cette
qualité les biens de la succession sans y appeler les
créanciers ; elle fit apposer des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyre, Chadieu, la ChauxMongros et le mobilier de la succession. Il y a eu pour
777400 francs de ventes avant 179.0.
L a terre de Chadieu fut vendue par madame de
M ontm orin aux sieur et dame de la R o c h e - L a m b e r t , par
acte du 17 juin 178 8 , moyennant 376000 francs, et les
frais et faux irais évalués à 5 deniers pa r livre, pioduisant
7812 liv. 10 S. Il fut dit que les 375000 fr. seroient
payés solidairement par les sieur et dame de la RocheLam bert entre ¿es mains de T ru ta t , notaire-séquestre ,
�( 6 }
ou au x créanciers q u i auront été délégués ’ savoir, un
quart au i 5 septembre, et le surplus dans le courant
des deux années, en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et q u e , s’il se trouve des oppositions du chef
de madame de Montmorin,. elle les fera lever dans les
six semaines ; mais hors ce cas, elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.’
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de Tane de Santenas, Teroulde, commissaire à terrier;
C h a r d o n , c h a p e l i e r ; Louis Laisné, sellier, et Toutain,
t a i l l e u r d ’h a b i t s , to u s sy n d ic s d es c r é a n c i e r s d e T a n e ,
lesquels, après avoir pris lecture de la vente, la con
firment et ratifient a u x conditions y exprimées. Ils font
élection de .domicile chez M. Pernot-Duplessis, procu
reur au parlement.
L e jour même de la vente, M . de la Roclie-Lambert
paya la somme particulière de 7812 liv. 10 s., à Trutnt,
notaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du môme notaire 170644 francs.
E n 1791 , les sieur et dame de lu Roclie-Lam bert,
voyageant en A l l e m a g n e , envoyèrent au sieur de SaintPoncy , leur beau-frère, deux procurations; celle du
sieur de la Roclie-Lambert porte pouvoir d’emprunter
les sommes nécessaires ¿1 ses affaires, gerer, liquid er,
vendre ; elle est passee devant Heidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 1791.
La procuration de la dame de la Roche-Lambert porte
pouvoir (Remprunter 60000 fr . pour placer sur Chadieu,
�• ( 7 )
régler compte avec M . T r u ta t, notaire ; recevoir ,
donner quittance, faire tous emprunts q u 'il jugera bon
être, pour !’arrangement des affaires de son mari. Cette
seconde procuration est passée devant Lutner, notaire à
W o r m s , le 25 octobre 1791 (0*
En vertu de ces actes, le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
L e 27 novembre 1791 , par acte reçu C a b al, notaire
à Paris, le sieur de Saint-Poney, comme porteur de prorcurations des sieur et dame de la R o ch e -L a m b e rt, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
p’avoit pas de pouvoir de la dame de la Roche-Lambert ),
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
Pa ris, moyennant ôooooo f r . , dont il reçut 120000 fr.
en assignats , et quant aux 375000 fr. , le sieur Sauzay
prom it les payer dans im an au x sieur et dame de la
B-oche-Lambert, ou, si bon lui semblait, aux créanciers
desdits sieur et dame de la R o c h e -L a m b e r t , et spé
cialement aux créanciers privilégiés sur ladite terre..
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la Roche-Lambert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations Répondent déj:\ aux imputations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dame de la Roche-Lambert quittoient la Fiance en s occup ant
plutôt de se fnire des ressources que de pnyer leurs dettes»
Personne n’a ignoré que leur première pensée a été de s o c cu p er
de leurs créanciers, et (pie tel a été l’vinique objet de la
sion donnée & M. de Saint- Poney.
mis
�( 8 ) .
s’oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
Enfin, pour l’exécution de ladite clause, le sieur de SaintPoney fait une élection de domicile à Paris.
L e 4 janvier 1792, il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellement; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics.
L e 22 avril 1792, le sieur Sauzay prit des lettres de
l’atifïcation sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de h u i t o p p o s i t i o n s , dont l’un e, du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la r e q u ê t e d es s y n d ic s d es c r é a n c i e r s de
Tane.
Dans la même année 1792, le sieur de la Roche-Lambert fut porté sur la liste des émigrés.
La dame de la Roche-Lambert n’a jamais été portée
sur aucune liste.
Sous prétexte d’une loi du 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens des absens du territoire, sans les
désigner encore comme émigrés', le sieur Sauzay fit
déclarer par le curé d’Autezat, à la municipalité du lieu,
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la R o ch e-L am b ert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il avoit pris des lettres de ratification, et que
les créanciers opposans aux lettres absorberont le p rix
et au del;\ : d’où il conclut qu’il a intérêt de conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, des que
la terre est hypothéquée. « E n sorte q u e , dit le sieur
« Sauzay, s'il f a i t f a ir e ladite déclaration, c'est moins
�'l'bS.
(9 )
ti cause des sommes dont il peut paroître débiteur, et
dont la république ne pourra jam ais profiter, puisqii elles doivent être absorbées par lesdits créanciers
hypothécaires opposans aux lettres de ratification,
que pour donner des preuves de son civism e, et enipécher qu'on ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence. »
Par acte du 25 juillet 1793? le sieur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux Martres, les mou
lins et fours banaux des Martres, dépendans de la terre
de Chadieu , moyennant la somme de 61100 francs,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
L e 7 nivôse an 2, par acte reçu Cabal, notaire à Paris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Chadieu
ou sieur W a llier, S u is se , p o u r lu i ou la p e r so n n e que
W allier se réserva de déclarer dans les six mois, moyen
nant 530000 fr. dont W allier paya comptant 40000 f r . ,
s’obligea de payer 136000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des 3Ô5ooo fr. restans, W allier
fut délégué à les payer, soit au x créanciers de T a n e,
précédent propriétaire, qui se sont trouvés o p p o s a n s
k
«
«
«
«
«
«
A U X L E T T R E S DE R A T I F I C A T I O N PRISES PA R S A U Z A Y ,
soit afin d’en f a ir e le dépôt et la consignation partout
où besoin sera , aussitôt après le sceau sans opposition
sur le sieur Sauzay des lettres de ratification à prendre
sur la présente vente.
XjesieurNatthey dit avoir été subrogé parle sieurWallier
à ladite vente, par acte sous s e in g privé du me me jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-Dôrno
fit décerner, le 24 ventôse an 2, une contrainte contre
B
�Tbl».
v
( 10 )
le sieur S a u za y , pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche-Lam bert en vertu du contrat de
' vente de 1791, sous prétexta que le vendeur étoit émigré.
Ensuite, e t à la date du 26 floréal an 2 , le sieur
Nattliey produit la pièce suivante :
*
« Je soussigné, receveu r de l’enregistrement et des domaines
« au bureau de Sain t-A m an t-T allen d e, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du C. Eticnne-Jean-Louis Nalthey, de N y o n ,
« au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
« suivant la déclaration de com m and en sa faveur par le
'« C. W a lli e r , du 7 nivôse dernier ) , la somme de trois cen t
« cin q u a n te-cin q m ille liv r e s, pour servir tant au nom des ,
et cit.
Nattliey et S a u za y, qu’en celui du C. Jean-Baptiste
« W a l l i e r , à la libération de C h ad ieu.
te D e quoi m ’a été demandée la présente déclaration , à l’effet
cc d ’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale sur ledit
cc Chadieu.
1
te Saint-Amant, le 26 floréal an 2. Signé Mauoue. »
Il paKoît qu’ un arrêté du département, en l’an 3 ,
annulla la vente faite au sieur Sauzay, et mit la terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre urrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Nattliey.
Dans la môme année, un procès eut lieu nu tribunal
de la Seine, entre les sieur Nattliey et W allier, se disant
tous les deux acquéreurs do Sauzay, et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que le sieur W allier avoit voulu se
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Nattliey prenoit pour son compte cette libération :
/
\
�( nO'
il fit des offres à W a llie r, et même une consignation en
mandats. Mais les lois sur la réduction du papier-monnoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de la Seine sus
pendit le procès, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de Tane produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes re gistre s du receveur de St.-Amant.
« D u 15 frimaire an 4 , reçu du C. J e a n -M a r ie W a l l i e r ,
et des deniers empruntés de J a q u e ro t, par acte d u ............. la
« somme de 355<ioo f r a n c s , à valoir sur le prix du domaine
« acquis par S a u z a y , des sieur et dame de la Roche-Lam bert,
é m ig r é s , suivant le contrat du 27 novem bre 1791 ; ladite
« somme de 355ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
ce
cc nationale sur le receveur du district de C lerm o n t, n°. 424 > en
« date du i 5 brumaire dernier ; dont quittance. S ig n é M augue. >*
I ,e s c r é a n c i e r s o n t r e t ir e d u m ê m e l'e g istre la p i è c e
suivante :
« D u 26 frimaire an 4» reçu de Jean -L ouis N a tth e y la somme
te de 3285i francs 25 centimes pour les intérêts restans du prix
principal du domaine de C h adieu, acquis de la Roche-Lamit b e rt, sa fem m e et Saint-Poney, émigrés, par le sieur Antoine
ce
« Sa u za y, lequel en a fait vente au C. W a lli e r , par acte reçu
« C a b a l, notaire à P a r is , le 7 nivôse an 2 , lequel W a llie r a
« passé déclaration au profit dudit N a t t h e y , par acte sous seing
« p riv é , du 7 nivôse an 2 , enregistré à Paris le 17 messidor
«
«
«
«
cc
cc
an 3 , par Pinault; ledit payem ent fait en conséquence de la
liquidation des intérêts faite par le sieur A lia s , directeur de
correspondance à la régie de l’enregistrement h Paria , le
12 frimaire présent mois; et ledit payement effectué en une
rescription de la tré s o re r ie n a tio n a l« s u r les domaines d érmgrés, n°. 4g 3 , et sous la date dudit jour 12 du présent mois.
cc Certifié conform e, le 8 v e n d é m ia ir e a n 11. Sig n é Màdgof.. >1
v
“B 2
�( 12 )
L e I e r . nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de T a u e , aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite qualité de
créanciers opposans aux 'lettres de ratification prises
par Sauzay, de se trouver le i 5 pluviôse suivant chez
le receveur de Saint-Amant, pour y recevoir le p rix de
CJiadieu. Il est constaté par cet exploit (resté au pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que Natthey y procède
comme obligé d’acquitter yjSooo fr a n c s en capital, et
3285 2. f r . en intérêts , tant pour se libérer lui-m êm e ,
que pour libérer le sieur S a u za y , ainsi que les sieur et
dame de la R o ch e-L a m bert , premiers acquéreurs j et
il fait la s o m m a t i o n au nom des uns et des autres.
Les créanciers ne se présentèrent pas ; et le sieur
Natthey fit dresser, le i 5 pluviôse an 4 , par le receveur
de Saint-Amant, la pièce suivante produite par lui.
« Je soussigné, receveur de l’enregistrement et des domaine«
« au bureau de Saint-Amant-Tallende, déclare, d’après le débat
« des comptes qui a eu lieu cejourd ’hui entre moi et le cit.
« Parades, des M artres, fondé de pouvoir du C. Etienne-Jeanct L o u is N a tth e y , propriétaire de Cbadieu , qu’il a été versé
«
«
«
cc
cc
«
dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Chad ie u , la somme de s ix cen t d i x - n e u f m ille s ix cent quatre
livres quinze sous en Vacquit d u d it d o m a in e, dont quittance
et décharge , sauf audit P a rad e s, qui en l’ait expresse réserve
pour ledit C. N atthey , de plus ample examen et apuratioa
« desdits c o m p te s , et de se pourvoir devant (|ui il appartiendra,
« pour la restitution des sommes q u i l prétend avoir payées en
« sus des sommes d u c s p a r le d it C. N a tth ey pour la libération
te d u d it dom aine de Chadieu.
« Saint-Amant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4. S ig n é Mauque. »
�*er
( *3 )
_
En marge est écrit :
« Sur l'invitation du C. P a ra d e s, je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. nivôse der« nier, n’a comparu cejourd’ hui en mon bureau.
« L e i 5 pluviôse an 4 * Signé Maugue. »
Jusqu’ici les créanciers de Tane n’ont formé aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la Roche-Lambert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulte, du 3 floréal an 10 , et
c’est le moment d’être attentif sur leur première dé
marche, pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 17 9 1 , les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises -par
S a u z a y , s u r sa v e n t e d u .27 n o v e m b r e 1 7 5 1 .
Par exploit du 11 brumaire an n , 1es s y n d ic s
des
créanciers de Tane font assigner Sauzay au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la vente de 1788; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente à lu i consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée, et qu’il soit con
damné audit payement. (Cette pièce est produite par le
sieur Natthey.)
lie 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
à Natthey.
Alors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal de Clermont, pour voir dire qu’il est v a l a b l e m e n t libéré au moyen
des vprsemens par lui faits, et pour être condamnés à lui
donner mainlevée de leurs oppositions.
1
�C î4 )
L e 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clermont rend
le jugement suivant :
« L e tribunal déclare Je demandeur (Nattliey) bien et
« valablement libéré du p rix de la terre de Chadieu •
« en conséquence, fait mainlevée de l’opposition faite
« par les défendeurs (les syndics) au bureau des hypo« thèques de Clermont, le 2 décembre; ordonne qu’elle
« sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
« présent jugement; condamne les créanciers aux dom« mages-intérôts de Natthey, à donner par déclaration. »
Eu vertu de ce jugement, le sieur Nattliey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
s u r C h a d ie u . L e s s y n d ic s n ’y o n t m is a u c u n o b s t a c l e ,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
T out d’un coup, en 1808 , ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire, Ambert et Cler
mont, sur tous les biens appartenans ou ayant appar
tenu au x sieur et dame de la R oche-L am bert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur Nattliey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de propos, jusqu’à présent, de dire
que pour verser 170644 francs en 1791 , il avoit été
emprunté pour les sieur et dame de la Roche-Lambert,
savoir, 44000 francs à la dame de Bourneville, mère de
madame de la Roche-Lam bert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de Tanc-Santenas, représenté par Ainédée.
�( i5 )
On a vu que le sieur de St.-Poney, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T a n e , m a is , encore.une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
Et comme les syndics n’avoient inscrit que pour leur
intérêt, il falloit grever Chadieu.du surplus de la somme
laissée entre les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la Roche-Lambert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
'
L e sieur Natthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
assigner les sieur et dame de la Roche-Lambert en main
levée de ladite inscription.
1
L e lendemain, Amédée deTane(très-d’accord, comme
on le voit déjà, avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la Roche-Lambert de payer les arré
rages de l’emprunt ci-dessus de 30000 francs.
L e 23 du même mois, il a été présenté requête au
tribunal de Clermont, sous le nom des sieur et dame de
la Roche-Lambert ; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de T a n e , et à ce que le sieur Natthey, se disant
lib é ré , fût tenu de faire valoir envers eux ladite libé
ration , sinon de garantir les sieur et dame de ln RocheLambert. Us ont conclu, en conséquence, à la x-ésiliation
des ventes de 1791 et suivantes, et au désistement de
Chadieu. Enfin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à la mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
Amédée de Tane à la mainlevée du commandement de
�(
)
payer par lui fait, attendu que Nattliey, chargé de payer
tout le m onde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a eu lieu, les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le u juillet
1809.
Par ce jugement, le tribunal de Clermont distingue
les intérêts des créanciers de Tane, d’avec ceux d’Amédée
de Tane. A l’égard des premiers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
Roche-Lambert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leui’s inscriptions.
Quant a u s ie u r A m é d é e d e T a n e , il c o n s i d è r e la s o m m e
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire Trutat,
comme obligation directe et indépendante de l’acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de la Roche-Lambert de leur opposition au commande
ment de payer (1).
Il y a appel de ce jugement, tant par les héritiers et
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheLambert, que par les sieur et dame de la Roche-Lambert
contre Natthey et contre le sieur Amédée de Tane. On a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ ils ont deux
actions distinctes-, l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la R oche-L am bert;
(1) C e jugement est transcrit en son çp tier, avec les m otifs,
à la fin du mémoire des créanciers de T a n o , c e qui a rendu
inutile d’en parler ayee plus de détail.
d’où
�( ¿7\ ) ‘
d’où ils concluent que le jugement de l ’an i 2 , t q u i , en
déclarant les acquéreurs libérés,‘‘les autorise à faire râdier
leurs inscriptions, ne les empêche'pas de se faire payer
par les sieur-'et dame de la Roche-Lambert.■
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Pour suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour être
clair, autant que'possibkr, dàris une discussion dénaturée
et obscurcie :p a r’de'fausses applications dé principes, il
est nécessaire de ’sepàrer les ïiibÿens dès. créanciers de
Tane d’avec ceux dès héritiers de Montmorin, quoiqu’ils
aient réuni leurs intérêts, sérieusement ou'nôn. On exa
minera, eh premier lie u ’ s’il est vrai que les'créanciers de
Tane aient, ainsi qu'ils" le p r é t e n d e n t , une double a c tio n
contre les acquéreurs de Chadieü' et contre les sieur et
damé de la Roche-Lambert, et si la libération du sieut
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an* 12,
a dû profiter -au'sieur de la Roche-Lam bert. :i ^
J : 20. Sur l’appel des héritiers de Montmorin il s’agira
"de savoir si7 ¿u cas ou le1versement du prix dé Chadieu
seroit jugé être lTeffet de'l'a1 confiscation nationale , et
n’avoir pas acquitté les créanciers de T an e, la perle de
ce versement doit être pour les héritiers de madame^ de
M o n tm o rin , comme condamnée à m o r t1, ou pour le
>
. ./
1
sieur de la Roche-Lambert, comme émigre«
3°« Quant à l’appel du sieur de la Roche-Lam bert
contre le sieur Amédée de Tane, il y aura lieu d’examiner
si le sieur Natthey, chargé défaire faceà'tout, a également
libéré le sieur de la Roche-Lambert de cetlèJdette.
C
�( 18 )
Enfin, l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir si> dans le cas où le sieur de la RocheLambert seroit condamné à payer des sommes quelconques
au\ créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A p p e l
d e s
c r é a n c i e r s
d e
T a n e .
La prétendue émigration du sieur de la Roche-Lambert
est le premier texte de la proposition des créanciers de
T a n e ; ils l’appuyent sur un arrêté du conseil d’état, du
3 floréal an 11 , portant que tout créancier d'émigré
non liquidé, a le d r o i t d e r e t i r e r ses titres du d é p ô t na
tional pour poursuivre l’émigré : ils en concluent que
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
,
Rien de plus incontestable que ce point de droit; mais,
aussi rien de moins applicable à la cause.
L ’arrêté de l’an 11 seroit applicable, si Chadieu ayant
été vendu nationalement r le sieur de'la Roche-Lambert
vouLoit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au grand
l iv r e , pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement.
Mais qu’y a-t-il de cpmmun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudrait s’obstinerà ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence.
i°. La terre de Chndieu , qui est le gage de la dette ,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lambert a
été débiteur, comrrfc détenteur, n’a point été vendue ;
�t (I9 ) ^
la nation ne s’en est point emparée : un séquestre aussitôt
mis que le v é , n’a pas empêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue, livrée, sortie des mains du
sieur de la Roche-Lam bert, au 27 novembre 1791 , et
le sieur de la Roche-Lam bert n’a été mis sur la liste
des émigrés qu’en 1792. La vente ayant une date au
thentique avant le 9 février 1792, devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’ a pas pu vendre
Chadieu ; et en etfet elle ne l’a pas vendu,
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des événemens , lors-qu’avant leur départ iis ont m is hors leurs m a in s l’im
meuble par eux acquis , et ont transporté 6ur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxième vente ; lorsque,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 1791 , et n’avoient rien
de commun avec Pémigration?
30. Il ne s’agit pas de créanciers d'émigré, qui, après
avoir eu la nation pour seul obligé, parce qu’elle s'étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposans qui c h a n g e a n t leur action,
laissent de côte l’acquéreur qui a pris des letties, et qm
possède, pour s’adresser h un a c q u é r e u r intermédiaire.
Les créanciers de T anc ont bien senti qu’il fallait
C 2
�/kV'
( 20 )
prouver, avant to u t, comment ils avoicnt une action
directe contre les sieur et dame de la Roche-Lambert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lambert.
Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, i°. les héritiers
de Montmorin ou d e T a n e , comme obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification,
ou Chadieu , à cause de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la Roche-Lambert, comme délégué envers eux par l’acte
de 1788.
P o u r a m e n e r à e u x l e s ie u r d e la R o c h e - X / a m b e r t ,
il y a une seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite sans novation,
c?esl-à-dire, sans l’extinction de la dette du premier obligé;
et de môme il n’y a pas de novation sans l’intention
formelle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r , qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788,
on n’y verra pas môme l’apparence d’une novation ; au
contraire y madame de Montmorin reste débitrice des
c r é a n c i e r s de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 375000 fr. que payeront les acquéreurs de
C h a d i e u ; ils conservent sans le moindre doute le droit
d e s’adresser à madame de M o n t m o r i n ; et cela est si
b i e n p rouvé, que n o u s voyons dans l’inscription du j i
janvier 1808, et en la Cour, les dames de la Luzerne,
héritières, de M o n t m o r i n , se réunir aux créanciers de
Tant* pour attaquer le sieur la Roche-Lambert, à cause
de l’intérêt qu’il a à, ne pas payer lui-mème.
�74 K
v,t
( 21 •)
Si les dames de la Liizerne n’étoient pas restées débi
trices envers les 'créanciers de Tane , elles ne seroient
pas là pour fa ire valoir la vente; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs; car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette somme, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la Roche-Lambert débiteurs personnels} comme
délégués envers les créanciers.
Mais, dit-on, les créanciers sont parties en l’acte
1788. Donc il y a délégation et obligation directe
personnelle des sieur et dame de la Roche-Lambert ;
Font même exécutée en partie par leurs payemens
170644 francs.
de
et
ils
de
II est v r a i q u e les sy n d ic s des c r é a n c ie r s d e T a n e sop.f
intèrvenus à la fin de l’acte de 1788 , p o u r r a t ifie r v
confirmer la vente. Mais pourquoi se dissimuler les moi s
de cette intervention, commandée par d’autres circons
tances»
Madame de Montmorin étoit héritière bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
La coutume de Paris ne permet à l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession ,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles; mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus nouvellement réformée, en est le supplément; et
suivant la jurisprudence constante A Paris, aucun héritier
bénéficiaire ne peut v e n d r e les immeubles sans appeler
les créanciers.
r
�C 22 )
A in s i, pour la solidité de l’acte de 1788, il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils a voient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
reur, pour éviter des enchères et d’autres contestations,
qui , bonnes ou mauvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il étoit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation ; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation, lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in form a communi d’un
acte qui ne contenoit qu’une indication de payement,
ne disoîent pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l ’e n g a g e m e n t des sieur e t d a m e la R o c h e - L a m b e r t , et
qu’ils éteignoient celui de madame de Montmorin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la vente, que les créanciers intervenoient;
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu’on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Quœ dubitationis tollendœ causa
in contractibus inseruntur, ju s commune non lœdunt.
Quant aux paycmens postérieurs faits par les sieur et
dame de la Roche-Lambert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus •simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’eii.gngemcnt personnel.
o Pour qu’il y ait délégation'(dit M . Pothier, n°. 564),
# il faut que la volonté du créancier de décharger le
a premier débiteur, et de se contenter de, Vobligation
« de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
N
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( *3 )
place du premier, soit bien marquée. C’est pourquoi
si Pierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
rente envers moi, a, par un partage, chargé Jacques,
son cohéritier, de me la payer à sa décharge, il n’y aura
pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
m o i, si je n’ai par q u e l q r C acte déclaré form ellem ent
que je déchargeois Pierre : sans cela, quoique j’aie
reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
considérable, on n'en pourra pas conclure que je Vaie
accepté pour mon seul débiteur à la place de P ierre,
et que j ’aie déchargé P ierre*. L. 40, §. 2, if. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
de la Roche-Lambert ont contracté une obligation per
so n n elle envers les c r é a n c ie r s d e T a n e , sous p r é t e x t e
d’une délégation qui n’existe pas, et substituons-y qu’ils
ont contracté comme acquéreurs e t d é t e n t e u r s ,
Tobligation de payer 376000 fr* pour le prix de la terre
de Chadieu.
Que va-t-il en résulter? Rien que de fort ordinaire;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les
créanciers opposans auront une action sur le p r i x , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellement.
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel'
contrat détruiroit a b s o lu m e n t tonte délégation anté
rieure ; car les conventions particulières de la vente
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi dicte, et dont elle ordonne l’exécution.
L e résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la Roche-Lam bert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ordre entre les soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de Tan e; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
personnels du sieur de la Roche-Lambert.
S ’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
Roche-Lambert, c’est qu’en effet ils ne le pouvoient pas;
car, i°. les syndics n’ont pas formé opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et daine de la RocheL am b ert, sur la vente de 1788, mais seulement ù la
vente faite au sieur Sauzay le 27 novembre 1791.
Ainsi ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur Sauzay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaquer les sieur
et dame de la Roche-Lambert.
Ils se sont jugés eux-mômes sur ce p o in t, par leur
exploit donné à Sauzay en l’an 4 y précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur rém i
gration , prouvent qu’il n’y avoit plus lieu ¡1 un ordre,
si un émigré étoit débiteur, parce que le gouvernement,
dans ce cas, forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-mome.
3°. Les créanciers pouvoient encore moins ouvrir un
ordre contre le sieur de la R o ch e-L a m b ert, après le
jugement
�ys\
( *5 )
jugement du 7 pluviôse an 12, qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. Natthey, son garant,
a répondu à leur demande en faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tane se croient dispensés de tout,
quand ils disent que cette chose jugée est un p iè g e , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils en sont les maîtres:
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à démêler au sieur de la Roche-Lam bert,
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réformer,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler les créan
ciers, et fa ite s u r t o u t c h e z u n r e c e v e u r d ’e n r e g i s t r e m e n t .
Ils en concluent que ce versement est pour un émigré,
et nullement pour libération envers eux.
Si les sieur et dame de la Roche-Lambert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveroient aisément, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose.
Il s’agit en ce point d’une vérité de révolution, où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à scs propres
forces. Pour être mieux écouté, en c h e r c h a n t le sens
de quelques lois de circonstance que le législateur ne
nous a pas données c o m m e r a tio s c r ip ta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d une autorité
prépondérante.
D
�(26)
Les créanciers de T a n e, en citant beaucoup d’arrêts,
ont prévu qu’on pourvoit leur opposer celui rendu en
la Cour de cassation entre les héritiers Lecomte et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvement réfuté, en disant que
l’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Us ont eu rigoureusement raison ; car quoique dans
cet arrêt il fut question d’une somme versée à la régie
par l’acquéreur d’un bien de condamné, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé ; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour mot la même.
Mais ce n ’est pas dans les m o t i fs d e l ’a r r ê t que
nous puiserons des moyens ; c’est dans le plaidoyer de
M. M erlin , qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des émigrés à verser les sommes par eux
dues, à la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion , ce magistrat n’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Teffet de ce versement, et pour q u i il est présumé
être fait. V oici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M . d’Ormesson, vendeur d’une ferme moyennant
426000 f r . , avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m o r t, et la régie se lit payer 89904 fr. restons sur le
prix de la vente.
Après la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame Bélanger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers Lecomte, créanciers opposons, pour
suivirent le payement du prix. La dame Bélanger se pré-
�C 27 )
tendit libérée malgré l’opposition, et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor p u b lic ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente, comme y étant
obligée à cause de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit pour le
compte des ayant d roit, et par conséquent des créan
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
j
C’est pour examiner cette prétention que M . Merlin
discute; et nous allons voir qu’il l’adopte entièrement.
'« Si au lieu de payer aux héritiers Lecomte (créanciers)
« le montant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir pour eux ( 1 ), leur
« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
cc u n p a y e m e n t fa it à e u x - m ê m e s .............
«
k
«
«
«
«
«
«
«
« Que reste-t-il ù examiner? Un seul point, celui de
savoir si en effet les héritiers Lecomte o n t , par les
mains d'un tier s, touché après la mort du citoyen
d’Ormesson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
« (A rticle 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débiteurs des émigrés, à quelque titre que ce soit, ne
pourront se libérer valablement qu’en payant à la
caisse du séquestre. )
« C’est donc par forme de séquestre, que la nation
va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nation
ne les recevra donc pas précisément pour son compte
personnel ; elle les recevra pour h compte de ceux qui
(1) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. Merlin ; ils sont conformes à l’art. 1259 du Code civil.
D a
�C 28 )
k pourront y avoir droit ; elles les recevra par consék quent pour les remettre a u x créanciers que les émigrés
« peuvent avoir laissés en France, sauf à en retenir le
« restant à son profit, s’il y a lieu...........
« ( Article 17. Les sommes déclarées en vertu des
« articles précédens.. . . seront versées.... dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrement, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« ém igré, et sans y préjudicier. )
« Voilà qui confirme, qui développe bien clairement
« les conséquences que nous tirions tout à l’heure de l’ar« ticle 14 de la loi du 8 avril 1792. L es oppositions des
c< créanciers d u n émigré 11c p e u v e n t ni e m p ê c h e r ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu’il doit;
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la somme que le receveur de Ven
ts. registrement aura touchée. Preuve évidente et sans
« réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans; preuve évi
te dente et sans réplique que les créanciers opposans
« sont censés recevoir par les mains du receveur de
« Venregistrement ; preuve évidente et sans réplique,
« enfin, que le d é b i t e u r , en se libérant outre les mains
« du receveur de l'enregistrement, est c e n sé payer, non
« pas seulement à la république, mais encore aux créan
ts. ciers même opposans. » Questions de d roit , tome 5 ,
v°. Lettres de ratification.
I l faut remarquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question ayoit été déjà jugée. Les créanciers d’ü r -
�C 29 )
inesson n’avoient été autorisés à attaquer l’acquéreur qiCcn
cas d?insuffisance des deniers versés, et le recours n’étoit
ouvert contre la succession iVOrmesson qu’au même cas
d’insuffisance. L e pourvoi des créanciers fut rejeté.
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roclie-LamLert ; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits, et en jouant sur les mots.
Quand ils ont poursuivi Sauzay pour les payer comme
leur débiteur, Natthey, son garant, a fait juger contre
eux qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru équivo
ques au£ créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la p r e u v e d ’u n p a y e m e n t , mais p l u t ô t d ’un v e r se r n e jït
pour un émigré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’émigré qui n’ont pas provoqué leur liquidation, et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payement.
Disons donc avec M . Merlin que si Natthey a payé
le prix de Chadieu, soit en l’an 2, soit en l’an 4 , ce n’est
pas pour le sieur de la Roche-Lambert qui n’avoit aucun
droit à ce p r i x , mais pour les créanciers hypothécaires.
Ainsi, quand les créanciers de Tane p o u r r o i e n t s’em
parer des lo is d’émigration qui ne les r e g a r d e n t pas, il
est b ie n prouvé qu’ils n’y g a g n e r o i e n t rien, puisqu aux
termes des lois on a v e r s é p o u r e u x : par conséquent
ils sont payés; e t , ne c r a ig n o n s pas de répéter, l’arrêté
�( 3° )
du 3 floréal an n , la seule loi de leur système, ne se
rapporte nullement à eux.
D e là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,
et bien se garder de commencer une attaque directe,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras.
Mais qui a autorisé, on le répète, les créanciers de
Tane à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
individu, pour prendre inscription sur ses biens. Et certes
ces c r é a n c i e r s q u i n ’e n a v o i e n t p a s e n 1791 c o n t r e le
sieur de la Hoclie - Lam bert, en avoient encore moins
en 1808.
A ppel
d e s
h é r i t i e r s
d e
M o n t m o r in .
A leur égard, il n’est pas douteux qu’une obligation
personnelle de la part des sieur et dame de la RocheLambert a existé.
Mais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
Les Héritiers de Montmorin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent concourir.
L e premier , en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposons aux deux lettres de ratification.
L e second, en prouvant que les acquéreurs postérieurs,
�767
( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur de la Roche-Lainbert,
n’ont pas payé.
L e troisième, en prouvant encore que la perte des
versemens faits pour la libération de Ghadieu doit être
plutôt pour le sieur de la Roclie-Lambert, à cause de son
émigration, que pour les héritiers de madame de Montm o rin , à cause de sa condamnation révolutionnaire.
Voilà ce que devoient justifier les héritiers de M ontmorin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû etre faits avec ou sans des offres,
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 1793,
c’étoit encore chez le notaire. Trutat que les deniers de
voient être versés, comme on 11e s’est pas fait un scrupule
d e le s o u te n ir .
Cependant les héritiers de Montmorin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la RocheLambert. En avoient-ils le droit?
. D ’abord ils ne rapportent ni mainlevée , ni consen
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
de première nécessité, quand il n’y auroit pas d’autre
obstacle.
En second lieu , comment prouvent-ils que les acqué
reurs postérieurs 11’ont pas pnyé ?
Tout ce qu’on vient de dite prouve avec évidence une
libération.
j
Les sie u r et d a in e d e la R o c h c - L a m b e r t o n t a c h e tq
d ’e u x et se s o n t e n g a g é s à paycr le p r i x , so it à Trutat,
)
.
*'•'
�( 32 )
soit aux créanciers', à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Cliadieu a été vendu à Sauzay, à qui on a
laissé l’option de payer 376000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement aux créanciers pri
vilégiés sur la terre.
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la Roche-Lambert n’a rien touché de ces 376000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des hypothèques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créanciers , de payer les 376000 francs.
C e c o n t r a t ju d i c ia i r e r é s u lt a n t des le ttre s , efï’a ce l ’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. au x créanciers
privilégiés seulement.
t A son tour, le sieur Sauzay vend au sieur W a llie r;
et il a si bien entendu que les oppositions formées ¿1 ses
lettres, par le syndic des créanciers de Tane, l’ont obligé
de ne payer qu’à e u x, qu’il délègue W allier ou Natthey
î\ payer 366000 fr. a u x créanciers de T a n e , opposans
au x lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposans aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qu'au nom des premiers acquéreurs : c’est
en cetto qualité qu’il verse le prix de sa vente.
Ensuite il les assigne, et fait juger contre eux, en qua
lité de créanciers de Tane ; qu’il est libéré.
Et
�* 38 )
?}nßt, 'Wo ftppßttei iQÇt jwgen^fl trfçs iiftie\; f< 7 / ; c w ; p n
difcquM iie;g,a ^ isw h d ß ,ftir? ()HgeiiUer 9giv$iziß<9jt yßlf'Wß
«gueidbtisMviatôrêt <IÏUf|) émigré.,\\ptrce;^ u ’iliest questjo#
rdßj ljai d an s Ifcs,jdires jdtf jsUiUr : JN-aUheyr/Majs
il est
i^ isi^question des jhijtiiiiQijß ^ iMoittmpfyti ,et ^le ljii^onfÆbcatjod de.-'létu-s îljie^s i; cMri j atth'ey ^, ,qüi jçh erçh 0tt à
dorisolider sa libérûtitfi? ,'neim ftoquöit1pas! tioijustifierjde
¿son ;mieux.,son -verseméiati*) par-levnari*é de^ toutes lies
,circonstances.\qui pou voient là rendre m eilleure, odrnoi
>Ce- qui prpu-ve;que de'jügemeot n’etQibpas/CQrtfre
-Immigré plutofjqupjGoatre.ttn'rautre, c^est-quejcet ém igré
rii’est ‘a i Ipartie',r)moQpjbelé> à-ce ¡jugement dont-oji veut
jlui) appliquer tout Fefiet.'') . . / «r jof-rr.q bb iioib ‘A
O r , vit-on jamais d é p lu s meon.ce>Vflblft
oqus e u le m e n t e n m a t i è r e d e c h o s e ju g é e , m a is e n c o r e en
'matière ¿ ’hypothèque: et'de leCtrßSrdeii^tftßciiiion
.r D ’un c ô té , cfe,sout des créanciers ôppbsaos qui veulentR a v o ir plus rien de connuuu',mi avée celui qui atpblenu
-les lettres y n i ¡avec saû niniinjdotaire,, changé de-Je! libéner
envers ces.mémescréancièrsiopposans^et qui\ne?vse<jlerit
^’«dresser ¿qu’au;¡premier; jocquérèur , apros avoir, ila^sé
juger contre aux la validité ,dè ;la libération ^suivie de la
m ainlevée de leurs oppositions; m ainlevééfqui lève toutes
le s 1éq u iv o q u es,« ^ ' VaffetvÀu payçincirLn\ iv>. '¡h oh
JD’un autre cuté^cejsoiïtitesliéritiiirs du vefideiiV quî ,
après une libération ijugécütoalaHeyiCkiWie' ,mhinlevée
des oppositions yön t la libnté de sè réuni* spontaném ent
av.ee les 'créanciérs id’uiJOf su cce ssio n bénéficiaire ,> pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
>(fo .
le jugement, -n
, rJi wi< ^ f vfnnnnotà
fi
�( 34 )
‘ ‘ N ?è&-ee pa’s un alius; du râisônnem>ent qup;deí¡soutenir
de^ tels paradoxes?' Si mott'1acquéreur ch-argó dé îvoùs
payer a fait j u g e r contre vous qu’il* a vo it valablement
\>ar¿ f qui pourra d ire , sans choquer le- bon sens, que
-jd'n?a-il páfc payé nïôi-meme, et; que ije' reste débiteur?
-Il d e v i e n t d o n c b ie n in u t ile d e ' r e c h e r c h e r si l e V erse’n i e n t a p u rê t r e r f a i t - c o m m e
il - l ?a été , 'quelle!^ v,toit la
caisse o ù il f a l l o i t v e r s e r , et s’ il y a v o i t su s p e n sio n des
; c a r rea judicata pro veritate\ hahetur,
u fr ip a y e m e h t q u i a u r o it été fa it en a s s ig n a ts ^ 'a p r è s l e u r
rem bo U rfcem ens
fitv p p re s frtô n ^ s è ro it ( C e r t a in e m e n t r é p u t é ê t r e e n ; tr è s bounG m b n n o i e , si un- j u g e m e u t l ’u v o i t d it r’ n ill n ’a u r ô it
le droit de parler des vices d’une telle libération ^ tant
qtté> ç e j u g e m e n t ’ lïïe -s e F o it pa& ¡attaqué;;
no f)70D:i‘> ¿¡¡ni: r
h 'b -jh
■ ! v t *' - '
n-> jn-»m
S ’f l r&ragissort n é a n m o i n s d^ertrainineri la .ju r i s p r u d e n c e
• ’q u ’ o n a p r é t e n d u si c o n s ta n te s u r la d é fe n s e des lo is d e
'C o n s ig n e r
sans
o ffre s p r é a l a b l e s ,
et sans a p p e l e r
les
■créaiiciVi’s,' il s e t r o u v e i vo it à c ô t é des c ita tio n s n o m ib r & is o s faites> p a r les a d v e r s a i r e s , d ’a u tre s c ita tio n s p lu s
ù ip p lic n b le s et> plus- précises- sur: la m a t i è r e des c o n s i g n a
t i o n s f o r c é e s , a p r è s des le ttre s d e 1 l’atification.
'M.iis ?» quoi-serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation j si ce n’est ¿Vgrossir un. ¿crit de chosés
. inptilt?»piiiscjne lés» créanoieus et les héritiers de Tane
ne veillent'ri«“»
de tout'ccla avec le mandataire
de Sauzny, chargé de fairfc: face à leurs oppositions ,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validité
de son payement. '
-i
11
>'
K t , c h o s e é t o n n a n t e , c e q u e les a d v e r s a ir e s ' n e p o u -
�C 3 Ê>
voient oppçsen quejSMVifcàpVPfi&i^sJlaPfJ&^t^ N^tl)ey,]r
ils Font ¿réservé ¡pour les ..sieur et.d.amç ,dq la.Roche-,
Lambert, après avoir, laissé juger, que le, payement étoit
régulier. *; fd
son £ m t ^-ruina et;t.. au- vuoq »
zrioiüov c j' ! înr.buüij o J*j ; /nq ol ‘¡ih
goi. ¿ in \• S’il n’y avoit pas. de jCpillu.siQn pn tre les, hé rjtiers,et les
créanciers, est-ce que les héritiers de Montmorin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créan cier
l’exception cedendarunt actionum^ et ne leur^diroien^
pas que s’il-leur a plu, de jlarsser juger ■
qut3(ileiir;.gagç
étoit perdu, et s’ils ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont jplus .de recours à exercer.
..j,
-n S ’il n’y avoit pas'collusion encore entre les créanciers et
Natthey, qu’ils expliquent donc pourquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi ils paroissent regarder
ses versemens de-l’an 2 6t de l’an 4 comme un chiffon
informe, sans le prouver^ s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers d e T a n e , le sieur de la Roche-Lam bert le fera , et
il en a le pouvoir. O n ne peut le forcer de payer sans
qu’ il ait le droit d’opposer aux c r é a n c ie r s do J a n e que
s’ils ne font pas tomber le jugement de Fan.1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles etoient
avant ledit jugement, ils «ni p e r d u tout recours contre
lui ; car il est d’une épouvantable injustice qu’011 puisse
�7ÜV
.(• ‘*
C 36 }
lcd0dite^î %j'^diis:'£ivfei?rincheté'] Chadieu et>;VQUS l’ave?
cff¥ti¥feSdlti üèih Change dé'nôus payer ; noua avons accëpté
« cette' eIièrge,pfllr"üneJhppositiôn. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu ,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
PêèVjpoÿé* jikr‘4 oïrs ■
}qui' n'éi lé'sëfez :par perso'nrie ç et
¿/Jquî n’at/rez ni' là chose ni [ie"jirix'«
•» , «’x9iDnSy™
8ÜQuelque Atroce que soit? ce système, on ipç<rougit pas
'
•
*
\
dè lè sotlttenir/ o n 1lé trotrveiqu Contraire
équitable5
ôn së^a&fbnhè1 mairie ïittj point'die> dire que« M l1jde^Td
Roché^L'àmhéït 'Ttiaiiqüe à:;îe£devqirs lorsqu’il n’ejt pa*
dirmème avîsi?A là vérité'çte’n’est ni ¡dans CondiUàc>ni
dans PtifFendorff qu’on va puîsOr pour justifier Vdqqifcé
fHifth’éïriati&iie c^cé^ràisôriïiemeBtl •<c’est; seulement! dims
r
•
..
*
lès'lôis su rléÿém fgi’ésj q.u^w»jirétendai troiavep la/prouve
tfôéyïe$vf>erit domino sign:i'fie'y,'e n ilangage delrévokvtian ^
que le prix d’un immeuble d& k des créancière opposons,
pour line vente antérieure^ à. toute émigration r a péri
portf ■f&rriigréi0'ti--ï r*
rip’n . :j ; .‘il coofi^£ r. . •>’ .
i‘°jÉ>ribVqiiloi iajbiiter:^ la idittcié des loiisrévolutionaires,
qutfrid éïlés'Tie isoht !pas ôOitpiables de cette subversion dè
Tous les'principes ?
Y* •' ■
Les lois de Ï79Î ordonnèrent'le »séquestre des 'biens
deà ém ïgtés, et chargèrent la régie de l'enregistrement
de ce séquestre* elles ’ofdonnèi’ent aux débiteurs des
'émigrés <ie verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais qu’y a-t-il; de commun entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte notarié, en 1 7 9 1 , et un bien d’ânigré?
Q u ’y a-t-il de commtin entre un acquéreur non ém igré5,
�( 37 )
qui »par des lettres de ratification a formé un contrat ju
diciaire avec des opposans non émigrés , et des délpi.tevirs
d)éniigrés?v
\ .lOŸÏUH.
.iK>i
A f -;. Iwi! -.1 Ü
>-•''>
.r: t‘Vr »; .
‘ ’ i i r -> ’ ■■ i 0 : ’ ■
Mais admettons en toute humilité qu’un répubjiqole n’a
dû souffrir de rien , et que tout le sacrifice doit tombe?
sur le proscrit, n’y a-t-il pas lieu de-s’étonner que les
héritiers de- Montmorin soient ici à l’unissonç avec, les
créanciers,, de <Tqne pourrir«? que /’émigré seul doit
p w k e le versement?
,
! “ bla-jrn
aviSi la Cour, partageant!l’opinion des adversaires, quQiqu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
Natthey, quatrième débiteur,>.ayaqt payé la dette,de
Sauzgy, trpisième débiteur., n’a pas libéré les sieur; et
d<une> de la Ruche -I,ainbert , secours débiteurs ,• il
fpudra b ien , pour être conséquent, arriver jusqu’aux
héritiers do M ontm O rinprem iers débiteurs, çt dire que
Je moins qui puisse résulter de çp cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur çes dçux derniers.
jM ais si M . dp la Roche>-Lambprt fi été sur la liste des
émigrés , madame de Montmorin a été condamnée r^volutionnairement : ainsi les lois sopt les mêmes pour les
deux circonstances,
,
.
L ’article I er. de>la’loi du 26 friniaii’e an 2 , dit que les
biens des condamnés devaient être régis et liquidés, et
vendus comme les biens d£$ émigrés.
La seule réponse quVu ait pu- foire à cette observa
tion , a été de dire que madame 4 o Montmorin fut con
damnée le 20 iloréfil an 2 , et que la nouvelle ^.’a pU
�n(*(
s
8
)
.
arriver en Suisse assez tôt poui' que Natthey revînt en
Auvergne consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état où il la trouve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le Natthey, de N yon,
qui a consigné à Saint-Amant?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
Natthey, sur la vraisemblance de ses versemens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lambert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
S i m a l g r é c e tte é v i d e n c e d e li b é r a t i o n il fu llo it en v e n i r
à imputer sur quelqu’un la perte de ses versemens, il
est évident que ce ne peut être sur celui à qui il auroit
p rofité, c’est - ù - d i r e , aux héritiers de T a n e , comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du prix, puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
11 11’y a eu effet aucune raison de préférer pour la
perte les sieur et dame de la R o ch e-L a m b e rt, et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W a llier; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur ou l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
domino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à eux , la somme consignée
�7 6 s.
( 39 )
pas pbnrHeiVx.:.Qu’elle ait été>,versée pour les hé■ritiers de JMontmprin ou pourries créanciers^tle‘T!an'e:,
c’est toujours a u x héritiers de Monlmorin que la^somme
dèvoit 'profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
• ' 'ti.ii
>'j
tfi'i ‘ r.
df ' : j
i i i(Domrtientfdonc a-t-on-pu espérer, ade prouver qu’une
sômme^evoit périr 'pourîles sieur et dame de la Roche-L a m b e rt, qui n’étoient propriétaires de cette somme
à aucun titre et e n aucune qualité, pas plus.qu’ilsI(ne
l’étoient de Chadieu ?
9! Il faut^conc-lure1plutôt'que si la libératijoiî dejNdtthey
'B’îi profitaiqii’à lui,seul'et n’a eu lieu quîà causeidursé
questre national, c’est le vendeur séquestré qui se retrouve
p a ss ib le d e s a 'd e tte , et n o n l’a c q u é r e u r * ,q u i n e s’est o b l i g é
i q u e c o m m e d é te n te u r., e b t ju L a d on né-.pou v o i i\à->u n îtieip
-d e'Iv erser fpo ur/lui..\> .J\
Vi
l i o i b < i u *•[ i
;i .Iir;j
Cum> jussu)m co' ià\qùod\ rnihi debes,\Soh>is creditori
met), et tu à me et ego à creditore mco lib ero r.lj. 64,,,
ff. D e sôlutionibifs.. * ilu =1?. ;?.ï ;* fiT ;'o n
1
* Souvenons-nous encore que M .iM erlin’n prouvé qu’uni
■¡versement fait'à la caisse du séquestre, étoit censé être
fait au x créanciers, et qud'c’est absolument-comme si’
ces créanciers avoient’eux-memes reçu jet donné quittance.
T o u t'ce quHl-à‘dit ■se1’Apporte parfaitement auxjhé'ri tiers de iVlontmorin;- qui viennent)ae présenter comme
ayant atù ctéoncier 3"ùo l’émigré pour lequel ils assurent',
que là somme étoit versée.
•! r : ! ‘
. ! •» i : ')' [■
.| •|
^’U n autre moyen s’applique cncorcraüx héritiers d e ‘
‘ :i;
�'I >4? )
Monimotin ; c’est que leur'sysfèrrie. de>seidirer créanciers
d ’uti émigré , c o n d u ite remarquer.que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’outre depuis le 2o floréid
un 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 j époque de ;la resti
tution des biens aux condamnés.
Or, la nation auroit été d é b itr ic e s créancière du prix
-de Chadieu : donc il y ;a:extinction de la dette par con
fusion. ( Code civil , art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal tm 10., art 17. )
' ' - ‘Ainsi, fet dans -toutes les liypofthèsesi, les héritiers de
'Moütiiionn sont pstyèsipar'fflùtthey:, :onti fl’ont'dô recours
tjuc c o n t r e N a t t h e y o u Saur,ay. I l s n e s’a p p l i q u e r o n t pas
l’arrêté du 3 floTéal an 1 1 , pour rev.enir.de la nation à
Fémigré , puisque la nation les a traités de .niôiney pt
leur a rendu leurs droits ut ex nunci 'Voiiàj, n’en jdoûtobs paâ , ce qui «st démontré jusqu’à l’évidence.
1
.
.Ap p e l
• i >'
c o n t r e
■'
le
.
s i e u r
A médée
jjb
T an e.
Iàî jugement ¡Üe Clermont ntest pas conséquent dans
ses dispositions : ,il juge d’ubord que le versement-fait
par le sium* Nntthey a éteint :lcs délégations dont Sauzay
a v o i t chargé W allier; et cependant il >condumue les «iour
-et dame de lu Roche-Lambcrt h payer la créance du iieur
ATrtédéë'de Tan e, qui prétend représenter pour le .tout
le sieur ¿le Soutenus, prftteui de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le -prix
entier de sa ven te, il est constant que le sieur Santenas
tfn plus d’action ; car -le sieur de la Roche-Iwmberl a
�( 4T )
laisse entre les mains de Sauzay une'somme suffisante
pour payer tout le prix par-eux d û , c’e s t - à - d i r e ,
376000 f r . , quoiqu’ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Nattliey une somme suffisante
■pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
A u reste, il suffit de renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà d it, et de se réserver contre Nattliey la ga
rantie que le tribunal de Clermont n’a pas voulu pro
noncer, par une autre inconséquence.
A ppel
c o n t r e
l e
, sieu r
N a t t h e y .
Cet appel n’a qu’ un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la Roclie-Lambert, il n’aura
r ie n à d e m a n d e r a u s ie u r N a t t l i e y , d an s son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la Roclie-Lambert,
qui n’a pas Cliadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Nattliey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 3 55 ooo francs aux créanciers de
T a n e , opposans au x lettres de ratification prises par
Sauzay, ou à consigner après le sceau de ses lettres.
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte; que sa
libération est jugée valable avec les créanciers ; q u ’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur; car il ne s u ffit ’pas qu’il dise, j’ai
payé; il doit être prêt à faire v a lo ir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché
/
*
F
�( 42 )
Lorsqu’un acquéreur s’est soumis à payer le prix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances, il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lu i, de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement délégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-monnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réduction, et ont rigoureusement
exigé q u 'i ls r a p p o r ta s s e n t le s q u i t t a n c e s d e s c r é a n c ie r s
d é lé g u é s p a r la v e n t e , même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel n’ayant rien payé lui-même, seroit privé
de tous moyens de défense.
E s t- il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
R oche-L am bert à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payement, et qui, malgré un jugement,
persisten t à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la Rochc-Lambert sera-t-il en
état d’éclaircr les héritiers et créanciers de Tane sur
leurs doutes, et de leur apprendre si le premier verse
ment de 355 ooo fr., que Natthey dit avoir fait^à Saint-
�( 43 )
Amant le 26 floréal an 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de. 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même x*eceveur le i 5 pluviôse an 4 ,
en appelant les créanciers opposans?
Aucun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du 1 5 pluviôse-an 4 est un versement ou
un compte , si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit m o is, lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits ; et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour savoir ce que Natthey a payé réellement.
Le sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un o r d r e d e la r é g i e , et qu’il n’a pas d’autre
compte à rendre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui compter 3 Ô5ooo francs, il faut au
moins convenir qu’une contrainte n’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la cotisignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin se ra ,
après le sceau des lettres de ratification ; mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme mandataire^
plus il lui sera aisé de faire valoir son payement j et il
ne s’cn dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F2
�( 44 )
a fait aux risques de son mandant, car il est obligé sans
exception, ou de faire valoir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclamation , ou de
garantir le sieur d elà Roclie-Lambert de l’eifet de leurs
recherches.
Que si le sieur Natthey prétendoit, ainsi qu’il en a
menacé, s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire? par plusieurs motifs.
i ° . P a r c e q u e l u i - m ê m e a s o u m is la v a l i d i t é d e ses
v e r s e m e n s à l ’a u t o r it é j u d i c i a i r e , et a o b t e n u j u g e m e n t
à c e t é g a r d le 7 p l u v i ô s e an 1 2 ; il a o p p o s é e n su ite ce
jugement comme un moyen péremptoire sur la cause
actuelle.
20. Parce que la demande en garantie a été jointe,
et que loin d’attaquer le jugement de jonction, le sieur
Nattliey a plaidé au fond.
30. Parce que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roclie-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont toujours statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus-d’émigrés ou con
damnés.
Daus tous les ens, les lettres du sieur Natthey suiïi-
�7 7( .
(
4
5
}
sent (1) ; l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la Roclie-Lam bert dans ses»
21 juin 1808.
(1) « J’ai reçu votre lettre, M onsieur, et je 11e veux pas un
« seul instant vous faire attendre ma réponse.
« J’ai d’abord été fort surpris des inscriptions que les créan« ciers de T ane ont prises sur vos biens; j’ai dû ensuite m e
« souvenir qu’ils avoient précédemment regretté de n’avoir pas
« pris cette voie d’abord, et de s’étre engagés dans une autre
« voie qui ne leur a pas plus réussi que celle-ci ne peut leur
« promettre du succès. V o u s croyez d’a v a n c e , je l’espère, que
« toutes choses sont parfaitement en règle vis-à-vis d ’eux............
cc Vous avez quelqu’apparence d ’ i n q u i é t u d e s u r Je vrai pro-
« priétaire de Chadieu. D ’un mot je vous tirerai de toute inquiè
te tude. I l n e t i e n d r a q u ’ a vous q u e N a t t h e y ou m o i , a v o t r e
te
«
C H O I X , OU TOUS D E U X « ¿ U N I S , N E VOUS OFFRIO NS DE NOUS SUBSt it u e r
a
vous
dans
cette
: je vous en passerai acte
a ffa iu e
ce public avec grand plaisir et sans inquiétude; c a r, encore une
« f o i s , toutes choses sont parfaitement en règle avec ces mes« sieurs et tous autres.
«
« Voilà un premier problème ré so lu , à votre satisfaction sans
doute. V ous v o y e z q u e N a t t i i e t n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
ce QUE M Ê M E NOUS VOUS OFFRONS , SOUS N O T R E G A R A N T I E ET C E L L E
C
de
cc
u
cc
te
ce
« Vous êtes encore dans l’e r r e u r , quand vous supposez que
les créanciers de T a n e avoient fait opposition aux lettres de
ratification obtenues par M. votre père sur MM. de Tane.
Fayon s’inscrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ciers non u n is, et ne fit point inscrire l’union...............H n ’y
eut aucun acte conservatoire de la part de l’ union.
h ad ieu
,
vous.....................
«
de
nous
su b stitu er
a
�u
o
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M . de
Batz, représentant Nattliey, et M . de la Roche-Lambert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre
« votre p è r e , l’union fit opposition, alors trop tardive si elle
« étoit nécessaire. En l ’an 4 > il Y eut des lettres de ratification
« prises sur S a u z a y , et l’union eut le tort extrêm e de ne pas
« prendre d’inscription, ni faire d’opposition.
« Ils n’ont donc que celle du 22 décem bre 1791 ; mais il y a
« condamnation contr’e u x sur c e p o in t, à l’occasion de l’ins« tance très-âpre et très-vive qu’ils avoient c o m m en cée à Paris
«
«
«
«
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils attaquoient, dans S a u z a y , W a llie r et N a tth e y , et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de n’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre famille, au lieu d e se
« faire condamner sur leur inscription de 1791. M a is, à dire
« v r a i , je n’aurois pas imaginé qu’après plusieurs années d e
a silence et d’inaction, ils auroient imaginé de finir par où ils
cc auroient voulu com m encer. Mais les actes subséquens, leur
et liquidation, leur p a ye m e n t, sont tels qu’ils ne peuvent chercc c h e r qu’à effrayer et à arracher quelqu’a r g e n t , du moins d e
« Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos b ie n s , ils en
ce ont également pris sur Cliadieu.................... Instruisez-moi de
cc tout ce qui s’est passé d ’e u x à vous dans cette insurgence, et
cc vous aurez de ma part, ou par m o i, instructions parfaites. J e
cc vous répète que m ’identifiant à N a t t h e y , je me mettrai a v e c
cc plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment à me
cc faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s’il y a
cc quelque demande formée. Voila de nia part, j ’e sp ère, francc ch ise, loyauté autant que vous pouvez désirer, et plus que
cc vous ne pourriez exiger.
ce Recevez l’assurance de mon bien sincère et 'invariable
�( 47 )
est aussi vnlable que s’il eût été souscrit par un acte en
forme-, car, d’après les principes, on contracte valable
ment per epistolarn aut per nuntium.
« a tta ch e m en t, et veuillez le faire agréer à M. votre père.
« Signé D e Batz.
« D ès que j ’aurai votre ré p o n se, je partirai ou vous écrirai
u sur-le-champ. Je ne suis nullement i n q u ie t , parce que je
« connois les faits, et qu ’ils sont réguliers. 33
Paris, 9 juillet 1808.
cc
ce
«
«
tt
te
«
« Je n’ai pas perdu de tem p s, M o n s ie u r, à prendre tous les
renseignemens et toutes les instructions utiles contre les créan
ciers de Tane. J’aurai une consultation des plus habiles gens.
L'affaire parolt inattaquable par les créanciers de Tane. Il est
heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
u tile , surabondance de précaution, pour acquitter à la fois
vous et m oi, et pour mettre dans tous les sens les créanciers
en demeure. Vous ne pouvez vous défendre que par mes
« pièces..................... M. votre père n’ auroit pas dû prendre ins-
« cription sur C h a d ie u , surtout sans m’en prévenir : il n’auroit
u pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
« créanciers. S on intérêt est de faire cause commune avec
« Chadieu : quiconque lui dira le contraire se trompera , l’in« duira en erreur. A u reste, je lui demande, et j ’e s p è re qu’il
« ne me le refusera pas , de vouloir bien faire r a y e r son ins« cription a u b u r e a u de Clermont. J’ai besoin, pour ma seule
« délicatesse vis-à-vis de deux personnes à qui i a* f*1*1 deux
«t emprunts, d’avoir leur c e rtif ic a t d'inscription avant le vôtre,
« parce qu’agissant de b o n n e foi et d’entière confiance en m oi,,
« ils ont reçu dans leur acte ma parole d honneur qu il n existoit
�( 4 8 )
M . de Balz, représentant Natthey, a toujours continué
d’agir en conséquence de ce nouvel engagement. IL a
envoyé au sieur de Laroche-Lambert la consultation
très-détaillée de M M . P o i r i e r et Bellard ( annoncée dans
la dernière lettre), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
11 y a donc impossibilité de délier le sieur Natthey de
son nouvel engagement, qui lève tous les scrupules des
lois de l’émigration, lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
cc pas d’liypotlièque sur Cliatlieu ; et , 'certes , je croyois la
« donner en toute vérité, et il se trouve que la vôtre
existoit
« le jour m êm e où j ’affirmois qu ’il n ’en existoit pas , ou du
« moins que celle du maire de V ie , qui est nulle de f a i t , et
cc celle de deux pauvres petits créanciers que j ’ai fait condamner
« à Riom , et que j ’espére faire rayer à tous inomens. M. votre
cc p è r e , après avoir fait rayer celle qu’il a déjà fa ite , pourra
cc au m êm e instant, s’il le juge à propos, la faire rétablir. Je
«
«
«
«
cc
n’y suis que pour nia délicatesse seulem ent, et j ’espère q u ’il
ne me refusera pas cette satisfaction légère, q u i, dans aucun
cas , ne peut lui être dommageable , et qui a été pour moi
le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
parlant.
cc Au surplus , je prends le parti d’aller porter cette lettre à
« 1\J. Vautrin, et je m’en rapporte à ce qu’il vous conseillera
cc à cet égard.
cc Je vous re n o u v e lle , Monsieur,
1assurance
de mon dévoue-
cc ment à vos in té rê ts, et de mon bien sincère attachement.
"
'V tg n é D u
IU tz.
»
x
II
�( 49 ) '
Il ne reste plus qu’un mot à dire sur l’elTet de cette
garantie, s’il falloit en venir à elle ; il est réglé par l e .
Gode civil, qui s’exprime ainsi:
Article 1142. « Toute obligation de faire se résout en
« dommages-intérets, en cas de non-exécution de la part
« du débiteur. »
Article 1184. “ La condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats sy nalla gma tiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été exécuté, a le ch o ix , ou de forcer l’autre à l’exé« cution d elà convention lorsqu’elle est possible, ou d’en
« d em an d er la réso lu tio n avec d o m m a g es et in térêts.
« La résolution doit etre demandée en justice, et il
« peut etre accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
L e sieur de la Roclie-Lambert a conclu ¿\ la résolution
de la vente de 1791 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-môme la somme
considérable qu’on lui demande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
que le sieur de la Roclie-Lam bert dût être obligé de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a point élevé une
prétention aussi immorale \ il est vraisemblable qu’il s’eu
G
�tiendra à ce qui est raisonnable et légitime ainsi, à son
égard , il suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payemens, puisqu’il s’y est engagé, ou qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendeur soit
à l’abri de toutes recherches.
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R IO M , de l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour im périale, et libraire,
rue des T aules, maison L a n d r iot. — Juillet 18 10
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
créances
émigrés
union de créanciers
assignats
émigrés
confiscation nationale
prête-nom
fraudes
ventes des biens d'émigrés
séquestre
fisc
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Table Godemel : Union (contrat d') : 2. les mariés de Laroche-Lambert sont-ils débiteurs des héritiers et créanciers d’Emanuel-Frédéric de Tane, pour raison de l’acquisition de la terre de Chadieu par eux faite le 17 juin 1788 ? sont-ils débiteurs de la rente de 1500 livres créée par l’acte du 31 janvier 1791, en faveur de Gabriel de Tane de Santenac ? Amédée de Tane peut-il demander, dans l’état actuel des choses, le paiement de l’intégralité de cette rente ? Nathey est-il garant, envers les mariés de Laroche-lambert, du paiement, soit de la créance d’Amédée de Tane, soit des emprunts personnels par eux faits pour la libération de Chadieu ? y a-t-il lieu de statuer, quant à présent, sur les réclamations des mariés de Laroche-Lambert et de Nathey, relativement au prix de la vente consentie par Sauzay à Feuillant, le 25 juillet 1793 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1783-1811
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2023
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_G2024
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53393/BCU_Factums_G2023.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
fisc
fraudes
prête-nom
séquestre
union de créanciers
ventes des biens d'émigrés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53797/BCU_Factums_M0413.pdf
28dce18cff8747d778589fa16f98bb5a
PDF Text
Text
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h a b ita n t à Is s o ir è / in t im e
et a p p e l a n t ;
CONTRE
Dame F r a n ç o i s e - A g l a é - G a b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G'OU R D O N i, son mari ; dame
A n g é l iq u e - A r m a n d e - C a m il l e D E L A
L U Z E R N E , et sieur A n a t h o c l e - M a x i ^ M IL IE N H U R A U L T D E nVI B R A Y E , son
mb éa nr i é, ,fhabitans
de la'ville de -Paris y héritiers
fic ia ir e s d e m a d a m e
M o n t m o r in la q u e lle
é toit héritiaire bénéficiaire du sieur EmmanuelFrédér ic -De Tane,s on f r èr e appel ans • ‘
C
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SieurHenriDuvergierhabitantàParis SimonTerouldeabitantàDauville
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P a r is -h a b it a n t à S en s
'An t o î n e - L o u i s
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D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; et J e AN
C H A R D O N y chapelier y habitant à P a risr
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,
aussi appelanSy
CONTRE
Sieur
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habitant à P a ris , intimé ;
A m édée
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1
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C
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T
R
E
Sieur L o u is N A T T H E Y , habitant de, Nyort en
Suisse y austsi intimé ,
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la plus gran d e simplicité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’uné terré, chargé d’en payer
lie prix à un notaire choisi par une direction de créan
ciers, lui en paye près de moitié;, ensuite il revend la
terre, et laisse-dans les‘¡mains du second acquéreur une
somme égale à ce qu'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second aciqUéreur/poursuivi par les opposans, produit.des quittances de consignation, assigne
les créanciers en mainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces, créanciers attaquent le premier acqué
reur, qui met en causç son. ga$an& : celui -ci. emploie
UANS
�C3 )
pôur libération le jugement qui a validé sa consignation.
Alors l’acquéreur observe aux créanciers qui le pour
suivent, qjieileurs oppositions à des lettres de ratification
ont lié leurs intérêts à ceux dit second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés, ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
Voilà à quoi âe'réduit la question principale, et il
est évident que jusqu’ici elle në présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse s 'mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du v e n d e u r
originaire , qui comprennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers-elle seroit pour euxmêmes, font cause commune avec eux, pour que tout
retombe sur le premier acquéreur.
Alors tout s’exagère et se complique. L ’émigration de
l’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout;: d’autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à mille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas , et le
.tribunal même où il a trouvé justice. Enfin, après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la multitude, mais plus
étrangers encore, on~vient crier à l’injustice et à l’indé
licatesse, en disant froidement : « Que'm’importe si vous
« devez recouvrer ou non 5ooooo francs: que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas-la vôtre ! Que
A 2
�(4.)
«. m’importe en.côjrè ,si vo u â tes ruiné par ce payement
« et si votre famille est respectable*..Je veux.de>Pargent,
«• et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose;
« moins en mesMve.;de me-résister’ ; d?aille.iirs voüreiémi« gration.se ¡prête à tous mes sophismes :*'jl y^ajjt.ant de;
« lois sur cette matière, qu’il est impossible dfej ne-'pasr
« y voir que tout doit retomber sur vous..pinailleurs.,;
« quand je me suis donné la licence d’imprimer qu’une
« décision contraire à}mon intérêt étoit unjjjugcmfint de
« fa v e u r , j’ai-calculé; Peffet 'dé ,cettje»in jurp sue, liesprit,
« des magistrats auxquels j’eri idemaïnde ' la réforme.::Si
« je ne puis le s ’forcer, à- croire gqu’il feu ti sacrifier uni
« émigré par préférence, mon .adroite censure sera*tou« jours d’un poids quelcqnque' dans, la i balance;;Vielle
a achèvera probablement de me conquérir le suffrage de^
« ceux, dont l’opinion auroit; été incertaine. ! »[ , *< < .
Ainsi eût parlé Machiavel?;, ainsi panlerit vies '.syndicsdes créanciers de T an e, qui veulent, pe?;\fas et nefas ,
intéresser en se présentant comme des victimes..
Qu’ils .tâchent de-prouver à la Gour que malgré leurs
oppositions à/des lettresy; malgré un jugement qui pro
nonce contre eux la validité du payement que le-sieur.
Natthey a été chargé'de-leur faire, il leur reste encore une,
action : voilà leur cause.
t ;
Mais que dans,leur colère et dans leurs calculs- ils fassent
semblant de supposer, de l’adresse, des insinuations et-de
la faveur; quo tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent ¿\ insinuer que cette émigration deviendra aux
sieur et dame de la'Roche-Lambert, un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s'être,fait de ses propresJautes un moyen
d’acquérir voilà ce qui n’est ni la cause ni la vérité 3
mais une insigne et brutale calomnie.
•Car personne ne sait mieux que les adversaires qu'il
n’y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la Roche-Lambert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en
écus sur une terre qu’ils n’ont pas : et on ose encore leur
demander plus de 5ooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
*
... ■i
■:
:
F
A
I
T
S
.
*
- Apres la mort dû'sieur Emmanuël-Frédéric de Tane*
sa succession1 fut acceptée sou& bénéfice d’inventaire par
Françoise- Gabriëlle) de Tane, épouse de M. de Montmorin, ministre des affaires étrangères.
Madame-de Montmorin ne-pou voit vendre en cette
qualité les .biens, de la succession sans y appeler les
créanciers ; elle fit apposer’des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyre, Chadieu, la GhauxMongros et le* mobilier de la succession. Il y a eu pour
7 7 7 4 0 o francs de ventes avant 1790:
La terre de Chadieu fut vendue' par madame de
Montmorin aux sieur et dame de la Roche-Lambert, par
acte du 17 juin 1788, moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a is évalués à 5 deniers par livre, produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000' fr. seroient:
payés solidairement par les sieur et dame de la RocheLambert entre ¡es mains de Trutaty notaire-séquestre ?
•
�( 6 )
ou aux créanciers qui auront été délégués• savoir, un
quart au i 5 septembre , et le surplus dans le courant
des deux années , en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et que, s’il se trouve des oppositions du chef
de madame de Montmorin, elle les fera lever dans les
six semaines; mais hors, ce cas , elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de Tane de Santenas, Teroulde, commissaire à terrier;
Chardon, chapelier; Louis Laisné, sellier, et Toutain,
tailleur d’habits, tous syndics des créan ciers de Tane,
lesquels , après avoir pris lecture de la vente , la con
firment et ratifient aux conditions y exprimées. Ils font
élection de domicile chez M. Pernot-Duplessis/procu
reur au parlement.
Le jour même de la vente, M. de la Roche-Lambert
paya la somme particulière de 7812 lîv. 10 s., à Tvutaty
notaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
• En 1791 , les sieur et dame de'la Roclie-Lambert,
voyageant en Allemagne, envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur beau-frère, deux procurations; celle du
sieur de la Roche-Lambert porte pouvoir $ emprunter
les sommes nécessaires à ses affaires , gérer , liquider ,
vendre : elle est passée devant Heidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 179 1.
La procuration de la dame de la Roche-Lambert porte
pouvoir d'emprunter 60000 fr , pour placer sur Chadieu ,
�(7)
régler compte avec M\ T ru tat , notaire ; recevoir ,
donner quittance , faire tous emprunts qu'il jugera bon
être 9pour Parrangement des affaires de son mari. Cette
seconde procuration est passée devant Lutner, notaire à
Worms , le 25 octobre 1791 (1).
En vertu de ces actes,.le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
Le 27 novembre 1791 , par acte reçu Cabal, notaire
à Paris, le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la Roche - Lam bert, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n’avoit pas de pouvoir de la dame delà Roche-Lambert ),
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
Pa ris , moyennant ôooooo fr ., dont il reçut 126000 fr.
en assignats, et quant aux 376000 fr. , le sieur Sauzay
promit les payer dans un an aux sieur' et dame de la
Roche-Lambert you , si bon lui semblait, aux créanciers
desdits sieur et dame de la R och e-Lam bert , et spé
cialement aux créanciers privilégiés sur ladite terre.
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la Roche-Lambert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux imputations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dame de la Roche-Lambert quittaient la Fiance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur première pensée a été de s’occuper
de leurs créanciers, et que tel a été' l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�( 8 .)
s’oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
Enfin, pour l’exécution de ladite clause, le sieur de SaintPoney fait une élection de domicile à Paris.
'
Le 4 janvier 179 2, il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellement; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics. .
/ •' ' '
1
L e 22 avril 1792., le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’une, du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
Tane.
Jn . -j
jrj *i> r .*ii oooooct ü; .«irr. /< m r ^-n,ci
Dans la même année 1793 > ^ sieur clejla Roclie-Lam
ber t fut porté sur la 'liste des émigrés, v/rv f\ ? A
La dame de la Roche-Lambfert n’a jamais été -portée
sur aucune liste. \ , ’ 1,
Sous prétexte d’une loijdu 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens desrabsens du territoire:,jsans ]e$
désigner encore comme émigrés,--le sieuib Séjuzayi^fit
déclarer par le curé d’Autezat, à la municipalité*jdu lieu,,1
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la Roche-Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il avoit pris des lettres dti^at ificéition^èt que
les créanciers opposâns* aux: rèttres1
prix'
et au delà : d’où il conclut qû’ii a iii(-eret^e 'conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre pst hypothéquée. « E n sorte que , dit.,1e sieur
« Sauzuy, s'il fa it fa ir e ladite déclaration , c'est moins.
« à
_
�a cause des sommes dont il peut paroître débiteur ,.et
dont la république nèipourra jamais p ro f ter ^ puisqii elles doivent être absorbées par lesdits créanciers
hypothécaires opposans aux lettres de ratification ,
que pour donner des preuves de son civisme y et empêcher qu!on ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence» »jJ . j *
i ->
Par acte du 25 juillet 1793 , le sîeur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux Martres, les mou
lins et fours banaux des. Martres, dépendans de la terre
de Ghadieu yumoyennanti la somme de 6 1100 francs ,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
" Le 7' nivôse an 2, par acte reçu Cabal, notaire à Paris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Cliadieu
^au ¡sieur .W allier, Suisse, pour lui ou la ‘personne que
W allier se réserva de déclarer dans les six mois, moyen
nant 5.30009 frrj dont^Wallie^paya comptant 40000 f r .,
s’obligea de payer 136000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des 355ooo fr. restans, W allier
-fut délégué à les_payer,-: soit aux 'créanciers de T ajie ,
précédent propriétaire \ qui se sont trouvés OPPOSANS
«
«
«
'«
«
«
«
A U X L E T T R E S DE R A T I F I C A T I O N PRISES PAR S A U Z A Y ,
soit afin d’en fa ir e le dépôt et la consignation partout
où besoin sera , aussitôt après, le sceau sans opposition
sur le sieur Sauzay des lettres de ratification à prendre
sur la présente .vente. ■ • !
,
‘LesieurNattheyditavoir été subrogé par le sieur W allier
à ladite vente, par acte sous seing privé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-Dôine
fit décerner , le- 24 ventôse an 2 , une contrainte contre
B
�( 10. )
le sieur Sauzay , pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche-Lambert-en vertu du contrat de
vente de 17 9 1, sous prétexte que le vendeur étoit émigré.
Ensuite, et à la. date du 26 floréal an 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
'
■
cc Je soussigné, receveur de l'enregistrement e t des domaines
ce au bureau de Saint-Am ant-Tallende, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G. Etienne-Jean-Louis Natthey, de N yon,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
ce suivant la déclaration de command en sa faveur-par le
« C. W allie r, du 7 nivôse d e rn ie r), la somme de trois cent
cc cinquante-cinq mille livres , pour servir tant au nom des
cc cit. Natthey et Sauzay , qu’en celui du C. Jean-Baptiste
cc W a llie r, à la libération dp Chadieu.
c< D e quoi m’a été demandée la présente déclaration
cc
cc
, à l ’effet
d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale' sur ledit
1
Chadieu.
U Saint-Amant, le 26 ilotéal àn 2. Signé Mavgue. h >
.
* -
1
w.
^
.
..
’ . :,
. •
.11 pavoît qu’ un arrêté du département , en l’an 3 ,
ànnulla la vente faite au sieur Sauzay , et mit ta terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et ‘Wallier, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay, et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que lo-sieur W allier avoit voulu se
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�Ci1 )
il fit des! offres à Wallier:, et même u n e - consignation, en
mandats. Mais les* loisjsurlla réduction ,.du papier-môunoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de'la„Seine sus
pendit le procès, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de Tane produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frimaire an
4 ? reçu du C . Jean-M arie W allier ^
cc des deniers empruntés de Ja q u e ro t, par acte d u ............ la
«c somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix du domaine
cc acquis par Sa u z a y, des sieur et dame de la Roche-Lam bert,
« ém igrés, suivant le contrat du 27 novembre 17 9 1 ; ladite
«c somme de 355 ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
« nationale sur le receveur du district de Clermont, n°. 42,4, eu
ce date du i 5 brumaire dernier; dont quittance. Signé Maugue. »
L e s créan ciers o n t retiré du m êm e registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an 4 , reçu de
cc de 3 2 8 5 1 francs
Jean-Louis Natthey la somme
25 centimes pour les intérêts restans du prix
ce‘principal dii domaine vde Chadieu, acquis de la Roche-Lam-
i< b ért, ’sa femme’ et Saint-P;oncÿ, émigrés; par le sieur Antoine
« Sa’uzay,"lequel en a fait vente au C. W allie r, par acte reçu
« C ab al, notaire à Paris, le 7 nivôse an 2 , lequel W allier a
ce passé déclaration au profit dudij: Natthey, par acte sous seing
cc privé , du 7 nivôse an 2 , enregistré il Paris le 17 messidor
cc an 3 , par Pinault ; ledit payement 'fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lias, directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrement à Paris , le
cc 12 frimaire présent mois; et ledit payement effectué en une
cc rescription de -la trésorerie nationale sur les domaines d’émi-
« 'g r é s , n ° / 4 g 3 , çt souô la date dudit jour 12 du présent mois.
« Certifié conform e, le 8 vendémiaire an 1 1 . Signé Maugue. »
’ '
B 2
�( 12 )
L e i ev. nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de Tane, aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite, qualité de
créanciers opposans aux lettres de ratification prisesr
par Sauzny; de se trouver le i 5 pluviôse suivant chez
le receveur de Saint-Amant, pour y: recevoir leprioo, de>
Ch adieu. Il est constaté par cet exploit (resté au. pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que l^atthey y procède
comme obligé d’acquitter 37 5ooo frauc^e^ cjap.ital^et^
32852 fr . en intérêts , tant pour se libérer lui^niéme y
que pour libérer'le sieur Sàuzay , ainsi que les,sieur'et
daine de la Roche-Lam bert , premiers acquéreurs et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers 11e se présentèrent pas ; et le sieur
Natthey fit dresser, le i 5 pluviôse an 4 , par le receveur
de Saint-Amant, la pièce suivante produite par lui.
« Je soussigné, receveur de l’enregistrement et des domaines
« au bureau de Saint Amant-Tallende, déclare, d’après le débat
<c des co m p tes qui a eu. lieu ce jo u rd ’hui entre m oi et le .ç it»
ce Parades , des Martres , fondé de pouvoir du C. Etienne-Jean cc Louis Natthey , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Cha?
six cent dix-neu f mille six cent quatre
cc livres quinze sous en l’acquit dudit domaine., dont quittance
cc dieu, la somme de
cc et décharge, sauf audit Parades, qui en Tait expresse réserve
cc pour ledit C. Natthey , de plus ample examen et apuration
r< desdits com ptes , et de se pourvoir d ev an t qui il appartiendra ,
« pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
« sus des sommes dues,par ledit, C. Natthey pour la libération
« dudit domaine de Chadieu.
« Saint-Amant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
�En marge est écrit :
( i3 )
« Sur l’invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. niyôse der« nier, n’a comparu cejourd’hui en mon bureau.
« Le i 5 pluviôse an 4. Signé M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers- de Tane n’ont formé aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la- Roche-Lambert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulter, du .3 floréal an 10 , et
^c’est le moment d’être attentif sur leur première dé
marche y pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 17 9 1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
Sauzay , sur sa vente du 27 novembre 1791Par exploit du 1 1 brumaire an 1 1 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauzay au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la* vente de 1788; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à(payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente à lui consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit payement. (Cette pièce est produite par le
sieur Natthey.)
Le 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
à Natthey..
Alors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal'de Clermontj.pour voir dire qu’il est valablement libéré au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés h lui
donner mainlevée de leurs oppositions.
�( ¿
4 )
Le 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clermont rend
le jugement suivant :
« Le tribunal déclare le demandeur (Natthey) bien et
« valablement libéré du prix de la terre de Chadieu ,*
« en conséquence, fait mainlevée de l’opposition faite
« par les défendeurs (les syndics) au bureau des hypo« thèques de Clermont, le 2 décembre ; ordonne qu’elle
« sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
« présent jugement; condamne les créanciers aux dom« mages-intérêts de Natthey, à donner par déclaration. »
En vertu de ce jugement, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu . Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
Tout d’un coup, en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire, Ambert et Cler
mont, sur tous les biens appartenans ou ayant appar
tenu aux sieur et dame de la Roche-Lambert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur Natthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de propos, jusqu’à présent, de dire
que pour verser 170644 francs en 17 9 1 ? ^ 3voit été
emprunté pour les sieur et dame de la Roche-Lambert,
savoir, 44000 francs à la dame de Bourneville, mère de
madame de la Roche-Lambert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de Tane-Santenas, représenté par Amédée.
�(
)
On a vu que le sieur de St.-Poncy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T an e, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
Et comme les syndics n ’ a voient inscrit que pour leur
intérêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre »les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la Roche-Lambert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
. .,
Le sieur Natthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
.assigner les sieur et dame de la Roche-Lambert en main
levée'd e ladite inscription.
Le lendemain, Amédée de Tane (très-d’accord, comme
. on le voit déjà, avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la Roche-Lambert de payer les arré
rages de l’emprunt ci-dessus de 30000 francs.
Le 23 du même mois, il a été présenté requête au
tribunal de Clermont, sous le nom des sieur et dame de
la Roche-Lambert; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de Tane, et à ce que le sieur Natthey, se disant
libéré,' fût tenu de faire valoir envers eux ladite libé#
ration, sinon de garantir les sieur et dame de la RocheLambert. Ils'ont conclu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 91 et suivantes, et au désistement de
Chadieu. Euiin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à:1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
Amédée de Tane à la mainlevée du. coin mandement, de
�( i6 )
payer par lui fait, attendu que Natthey, chargé de payer
tout le monde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a eu lieu, les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce jugement, le tribunal de Clermont distingue
les intérêts des créanciers de Tane, d’avec ceux d’Amédée
de Tane. A l’égard des premiers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
Roche-Lambert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur Amédée de T-ane, il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire Trutat,
comme obligation directe et indépendante de l'acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de' la Roche-Lambert de leur opposition au commande
ment de payer (1).
11 y a appel de ce jugement, tant par les héritiers et ,
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheLambert, que par les sieur et dame de la Rodhe-Lambert
contre Natthey et contre le sieur Amédée de Tane. On a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
"des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la Roche-Lam bert;
(1) Ce jugement est transcrit en son entier, avec les motifs,
à la fin du mémoire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( i7 )
d’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , qui, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lambert.
M O Y E N S .
Pour suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour etre
clair, autant que possible, dans une discussion denaturee
et obscurcie par de fausses applications de principes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
Tane d’avec ceux des héritiers de Montmorin, quoiqu’ils
^ient réuni leurs intérêts, sérieusement ou noni On exa
minera, en premier lieu, s’il est vrai que les créanciers de
Tane aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la Roche-Lambert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la Roche-Lambert.
2°. Sur l’appel des héritiers de Montmorin il s’agira
de savoir s i, au cas où le versement du prix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation nationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de Tane, la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
Montmorin, comme condamnée à m o rt, ou pour le
sieur de la Roche-Lambert, comme émigré.
30. Quant à l’appel du sieur de la Roche-Lam bert
contre le sieur Amédée de Tane ', il y aura lieu d’examiner
si le sieur Natthey, chargé de faire face à tout, a également
libéré le sieur de la Roche-Lambert de cette dette.
C
�( ï8)
Enfin, l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir si, dans le cas où le sieur de la RocheLambert seroit condamné à payer des sommes quelconquesaux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A ppel
d es
c r é a n c i e r s
de
T a ne*
La prétendue émigration du sieur de la Roche-Lambert
est le premier texte de la proposition des créanciers de
Tane ; ils l’appuyent sur un arrêté^ du conseil d’état, du
3 floréal an i l , portant que tout créancier à'émigré
non liquidé, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre rémigré : ils en concluent que
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
Rien de plus incontestable que ce point de droit; mais
aussi rien de moins applicable à la couse.
L ’arrêté de l’an 1 1 seroit applicable, si Chadieu ayant
été vendu nationalement, le sieur de la Roche-Lambert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au grand
livre, pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement.
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence;
i°. La terre de Chadieu, qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lambert a
été débiteur, comme détenteur y n’a point été vendue m
0
�C 19 )
la nation né s’en est point emparée : un séquestre aussitôtmis que le vé , n’a pas empêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée, sortie des mains du
sieur de la Roche-Lambert, au 27 novembre 1 7 9 1 , et
le sieur de la Roche-Lambert n’a été mis sur la liste
des émigrés qu’en 1792. La vente ayant une date au
thentique açant le 9 février 17 9 2 , devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Ghadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des événemens , lorsqu’avant leur départ ils ont mis hors leurs mains l’im
meuble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxième vente ; lorsque,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 17 9 1 , et n’avoient rien
de commun avec l’émigration ?'
3°. 11 ne s’agit pas de créanciers à'émigré, qui, après
avoir eu la nation pour seul obligé, ’parce qu’elle s'étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposans qui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur intermédiaire.
♦
t e s créanciers de Tane ont 'bien senti qu’il falloit
C 2
�(
20
)
p ro u v e r, avant tou t, comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la Roche-Lambert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement -personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lambert.
- Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, r°. les héritiers
de Montmorin ou de Tane,. comme« obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification,
ou Ghadieu, à cause' de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la Roche-Lambert, comme délégué envers eux par Pacte
de 1788^
Pour amener à eux le sieur de Ta Roche-Lambert,
il y a une-seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite'sans novation,
c’est-à-dire,.sans l’extinction de la dette du<premier obligé;
et de même il- n’y xa pas de novation sans, l’intention
formelle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r, qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788*
on n’y verra pas même l’apparence d’une novation ; au*
contraire-,, madame de- Montmorin reste- débitrice des
créanciers, de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 3760,00 fr. que payeront les acquéreurs deChadieu ; ils conservent sans le moindre-doute le droit
de s’adresser à madame de Montmorin et cela est si
bien prouvé, que nous.voyons dans l’inscription du 1-1
janvier 1,808, et en la Cour* les dames de la Luzerne,
héritières de Montmorin , se réunii’ aux créanciers de
Tnne pour attaquer le sieur la Roche-Lambert, à cause
de l’intérêt qu’il a à, ne pas payer lui-même..
�( 21 )
Si les daines de la Luzerne n’étoient pas restées débitrices envers les créanciers de Tane , elles ne seroient
pas là pour fa ire valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs*, car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette somme, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la Roche-Lambert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers#
'
M ais, dit-on, les créanciers sont parties en Facte de
1788. Donc il y a délégation et obligation directe et
personnelle des sieur et dame de la Roche-Lambert ; ils
l?ont même exécutée en partie par leurs payemens de
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de l’acte de 1788 , pour ratifier et
confirmer la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
de cette intervention, commandée, par d’autres circons
tances.
Madame de Montmorin étoit héritière bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
1
La coutume de Paris ne permet à1 l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles*, mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus nouvellement réformée, en est le supplément; et
suivant la jurisprudence constante à Paris, aucun héritier
bénéficiaire ne-peut vendre les immeubles sans appeler,
les créanciers.
�t A in si, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
reur , pour éviter des enchères et d’autres contestations,
q u i, bonnes ou mauvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il éloit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation, lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in form â communi d’un
acte qui ne contenoit 'qu’une indication de payement,
ne disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l’engagement des sieur et dame la Roche-Lambert i et
qu’ils éteignoient celui de madame de Montmorin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la vente, que les créanciers intervenoient;
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu'on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Quce dubitationis tollendœ causa
in contractibus inseruntur, jus cdmmune non lœdunt.
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la Roche-Lambert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
c< Pour qu’il y ait délégation (dit M. Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du créancier de décharger le
« premier débiteur, et de se contenter de Vobligation
de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�( *3 )
« place du premier, soit bien marquée. C’est pourquoi
« si Pierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers moi, a, par un partage, chargé Jacques,
« son cohéritier, de me la payer à sa décharge, il rfy aura
<< pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m oi, si je n'ai par quelqii’acte déclaré formellement
« que je déchargeois Pierre : sans cela, quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rten pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ierre9
« et que j raie déchargé pierre.. L . 40, §. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
de la Roche-Lambert ont contracté une obligation per
sonnelle envers les créanciers de Ta ne-, sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas 3 et substituons-y qu’ils
ont contracté , comme acquéreurs E T D É T E N T E U R S ,
l’obligation de payer 376000 fr. pour le prix de la terre
de Chadieu.
Que va-t-il en résulter? Rien que de fort ordinaire;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les>
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellement.*
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure ; car les conventions particulières de la vente
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi dicte, et dont elle ordonne l’exécution. '
Le résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la Roche-Lambert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ordre entre lés soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de Tane; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
■personnels du sieur de la Roche-Lambert.
^ 'S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
Roche-Lambert,'.c’est qu’en effèt ils ne le pouvoient pas^
car, 10. les syndics n’ont pas formé opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la RocheLambert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au sieur Sauzay le 27 novembre 17 9 1. ' ’
Ainsi ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur Sauzay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaqùer les sieur
et dame de la Roclie-Lambert.
Ils se sont jugés eux-mêmes sur ce point , par leur
exploit donné à Sauzay en l ’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
• 2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur l’émigration , prouvent qu’il n’y avoit plus lieu à un ordre,
si un émigré étoit.débiteur, parce que le gouvernement,
dans ce cas, forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
30. Les créanciers pouvoient encore moins ouvrir un
ordre contre le sieur do la Roche-Lam bert, après le
jugement
�( *5 )
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. Natthey, son garant,
a répondu à leur demande en faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tane se croient dispensés de tout,
quand ils disent que cette chose jugée est un piège , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils ' en’ sont les maîtres :
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
- * ■
'r
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à démêler au sieür de laf Roche-Lambert J
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réformer,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler lès créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est ¡pour un émigré,
* et nullement pour libération envers eux. 1 "
r
,\
\
Si les sieur et dame de la Roche-Lamliert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveroient aisément, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose. .
11 s’agit eu ce point d’une vérité de révolution, où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. Pour être mieux écouté, en cherchant le sèns
de quelques lois de circonstance que le* législateur ne
nous a pas données comme ratio scripta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d\me autorité
prépondérante.
D
�( »6 )
Les créanciers de Tane, en citant beaucoup d’arrêts,
ont prévu qu’on pourvoit leur opposer celui rendu en
la Cour de cassation entre les héritiers Lecomte et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvement réfuté, en disant que
l’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison; car quoique dans
cet arrêt il fut question d’une somme versée à la régie
par l’acquéreur d’un bien de condamné, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour mot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens ; c’est dans le plaidoyer de
M. M erlin, qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des émigrés à verser les sommes par eux;
dues, ¿1 la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion, ce magistrat n’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Feffet de ce versement, et pour qui il est présumé
être fait. Yoici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M. d’Ormesson, vendeur d’une ferme moyennant
425ooo f r . , avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m ort, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
prix de la vente.
Après la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame Bélanger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers Lecomte, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix. La dame Bélanger se prér
�( 27 )
{dudit libérée malgré l’opposition, ' et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente; comme y étantobligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit polir le
compte des ayant droit , et par conséquent des créant
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
'
v
C’est pour examiner cette prétention que M. Merlin
discute’; et nous ,allons, voir qu’il l’adopté entièrement.
- « Si au lieu de payer aux héritiersLecomte (créanciers)
« le montant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir pour eux ( i ), leur
« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eux-mêmes..
cc Que reste-t-il à examiner? Un seul point, celui de
« savoir si en effet les héritiers Lecomte on t, par les
c< mains d'un tiers , touché après la mort du citoyen
« d’Ormesson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
• « (Article 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débi
te tcurs des émigrés, à quelque titre que ce soit, ne
c< pourront se libérer valablement qu’en payant h la
cc caisse du séquestre.)
c< C’est donc par forme de séquestre , que la nation
ce va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nution
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
« personjiel ’ elle les recevra pour le compte de ceux qui
(1) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. Merlin ; ils sont conformes à l’art. 12 39 du Code civil,
D 2
�c
2
8
}
pourront y aÿoir droit ; elles les recevra par consé~
quent pour les remettre aux créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en France, sauf à en retenir le
restant à son profit, s’il y a lieu..........
>
« (Article 17. Les sommes déclarées en vertu des
« articles précédens.. . . seront versées.. . . dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrement, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« émigré, et sans y préjudicier. )
• « Voilà qui confirme, qui développe bien clairement
« les conséquences que nous tirions tout à l’heure de l’ar« ticle 14 de la loi du 8 avril 1792. Les oppositions des
« créanciers d'un émigré ne peuvent ni empêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il doit;
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la somme que le receveur de Ven« registrement aura touchée. Preuve évidente et sans
•c réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; preuve évi« dente et sans réplique que les créanciers opposans
« sont censés recevoir par les mains du receveur de
« Tenregistrement ,* preuve évidente et sans réplique,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé payer , non
« pas seulement à la république, mais encore aux créan~
« ciers même opposans. » Questions de droit, tome 5 ,
v°. Lettres de ratification .
Il faut remarquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’Or«
«
«
«
�( 29 )
messon n’avoient été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d'insuffisance des deniers versés , et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d?Ormesson qu’au même cas
d’insuffisance. Le pourvoi des créanciers fut rejeté.
>
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lambert; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits, et en jouant sur les mots.
Quand ils ont poursuivi Sauzay pour les payer comme
leur débiteur, Natthey, son garant, a fait juger contre
eux qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru, équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un payement , mais plutôt d’un versement
pour un émigré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’émigré qui n’ont pas provoqué leur liquidation, et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payement.
Disons donc avec M. Merlin que si Natthey a payé
le prix de Chadieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n’est
pas pour le sieur de la Roche-Lambert qui n’avoit aucun
droit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
Ainsi, quand les créanciers de Tane pourroient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien, puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eux : par conséquent
ils sont payés; et, ne craignons pas de répéter, l’arrêté
�( 3° )
du 3 floréal an n , la seule loi de leur système, ne se
rapporte nullement à eux.
De là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,
et bien se garder de commencer une attaque directe,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras.
Mais qui a autorisé, on le répète, les créanciers de
Tane à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
individu, pour prendre inscription sur ses biens. Et certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 179 1 contre le
sieur de la Hoche - Lam bert, en avoient encore moins
en 1808.
A ppel des h é r it ier s
de
M ontmorin.
A leur égard, il n’est pas douteux qu’une obligation
personnelle de la part des sieur et dame de la RocheLambert a existé.
Mais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
Les héritiers de Montinorin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent concourir.
Le premier , en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
Le second, en prouvant que les acquéreurs postérieurs ,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur de la Roche-Lambeït,
n’ont pas payé.
Le troisième, en prouvant encore que la perte des
versemens faits pour la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la Roche-Lambert, à cause de son
émigration , que pour les héritiers de madame de Montmorin'; à cause, de sa. condamnation révolutionnaire.
Voilà ce que dévoient justifier les héritiers de Montr
morin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres,
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Trutat que les deniers devoient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir. .
Cependant les héritiers de Montmorin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la RocheLambert. En avoient-ils le droit?
D ’abord ils ne rapportent ni mainlevée , ni conseil*
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
,de première nécessité, quand il n’y auroit pas d’autre
obstacle.
Eu second lieu , comment prouvent-ils que les acqué
reurs postérieurs n’ont pas payé ?
Tout ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la Roche-Lambert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le prix ; soit h Trutat,
�( 32 )
soit aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à Sauzay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement aux créanciers pri
vilégiés sur la terre.
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la Roclie-Lambert n’a rien touché de ces 375000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des hypothèques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créanciers , de payer les 375000 francs.
Ce contrat judiciaire résultant des lettres, efface l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. aux créanciers
privilégiés seulement.
A son tour, le sieur Sauzay vend au sieur W allier ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers de Tane, l’ont obligé
de ue payer qu’à eux, qu’il délègue W'allier ou Natthey
à payer %55ooo fr. aux créanciers de Tane , opposans
aux lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposajis aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qu'au nom des premiers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’il verse le prix de sa vente.
Ensuite il les assigne, et lait juger contre eux, en qua
lité de créanciers de Tane} qu’il est libéré.
Et
�( 33 )
Et on appelle ce jugement res inter alios acta . On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’intérêt d’un émigré, parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Natthey. Mais, i°. il est
aussi question des héritiers de Montmorin et de la con
fiscation de leurs biens; car Natthey, qui cherchoit à
consolider sa libération, ne manquoit pas de justifier de
son mieux son versement, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’émigré plutôt que contre un autre, c’est que cet émigré
n’est ni partie, ni appelé à ce jugement dont on veut
..lui appliquer tout l’effet.
O r, vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose jugée , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un côté, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de commun, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au premier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eux la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payement.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur qui,
après u n e Nlibération jugée valable, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire, pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
h jugement
E
�(34 r
N’est-ce pas un abus du raisonnement" que de soutenir
de tels paradoxes? Si mon acquéreur chnrgé de vous
payer a fait juger contre von* qu’il avoit valablement
pavé, qui pourra dire, sans choquer le bon sens, que
je n’ai pas payé moi-même, et que je reste débiteur?
Il devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse où il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re* judicata pro veritate habetur ,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression , serait certainement réputé être en trèsbonne monnoie, si un jugement l’avoit dit :■ nul n’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libération , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué..
' J
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a prétendu si constante sur la défense des lois de
consigner sans offres préalables , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des citations nom
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions forcées, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles, puisque les créanciers et les héritiers de Tanene veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validitéde son payement.
E t , chose étonnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de l’an 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de la RocheLambert, après avoir laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion entre les héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de Montmorin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l’exception cedendarum actionurn , et ne leur diroieut
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perdu, et s’ils ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
Natthey, qu’ils expliquent donc pourquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi ils paroissent regarder
ses versemens de l’an 2 et de l’an 4 comme un chiffon
informe, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers de Tane, le sieur de la Roche-Lambert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugement, ils ont perdu tout recours contre
lui *, car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E 2
�( 36 )
lui dire : « Vous avez acheté Chadieu , et vous l’avez
« revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
« être payé par vous , qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le soutenir, on le trouve au contraire fort équitable ;
on se passionne même au point de dire que M. de la
Roche-Lambert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnement; c’est seulement dans
les lois sur les émigrés, quron a prétendu trouver la preuve
q u e res périt domino signifié, en langage de révolution,
que le~prix d’un immeuble dû à des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute é m ig ra tio n a péri
pour t émigré.
Pourquoi ajouter à la dureté des lois révolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cette subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des émigrés , et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent aux débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais qu’y a-t-il de commun entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte notarié, en 179 1? et un bien d'émigré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré,
�C 37 )
qui par des lettres de ratification a formé un contrat ju
diciaire avec des opposans non émigrés , et des débiteurs
d’émigrés?
Mais admettons en toute humilité qu’un républicole n’a
dû souffrir de rien, et que tout le sacrifice doit tomber
sur le proscrit, n’ÿ a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de Montmorin' soient ici à l’unisson avec les
créanciers de. Tane 5 pour dire que Vémigre seul doit
perdre le versement ?
Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
Natthey,, quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche —Lambcrt , seconds débiteurs, il
faudra bien, pour être conséquentarriver jusqu’aux
héritiers de Montmorin, premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M. de la Roche-Lambert a été sur la liste des
émigrés, madame de Montmorin a été condamnée révolutionnairemept : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article i eiv de la loi du 26 frimaire an 2 , dit que lès
biens des condamnés devoient être régis et liquidés, et
vendus comme'les biens des émigrésLa seule réponse qu’on ait pu* faire à cette observa
tion, a été de dire que madame de Montmorin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu;
�( 38 )
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
Auvergne consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état où il la trouve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le Natthey, de Nyon,
qui a consigné à Saint-Amant?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
Natthey, sur la vraisemblance de ses versemens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lambert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur quelqu’un la perte de ses versemens, il
est évident que ce ne peut être sur celui à qui il auroit
profité ^ c’e s t-à -d ir e , aux héritiers de Tané, comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du prix, puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de préférer pour la
perte les sieur et dame de la Roche - Lambert , et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W allier; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur ou l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
dowino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à eu x, la somme consignée
�( 39 )
n’étoit pas pour eux. Qu’elle ait été versée pour les hé
ritiers de'Montmorin ou pour les créanciers de Tane,
c’est toujours aux hér'tiers de Montmorin que la somme
"devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
• :
Gomment'donc a-t-on pu. espérer de prouver, qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la Roche1Lam bert, qui n’étoient propriétaires de cette somme
à aucun titre et en aucune qualité , pas plus qu’ils ne
l’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si ta libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national,‘ c’est le vendeur séquestré1qui se retrouve
-passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur - et qui a donné pouvoir.à un tiers
de verser pour lui.
*
Y- .
Cum jussu meo id quod mihi debes sohns creditori
meo , et tu à me et ego à creditore meo liberor. L , 64,,
ff. De sohitionibus..
• .. r . ?
Souvenons-nous encore que M. Merlin a prouvé qu’un
versement fait à la caisse du séquestre, étoit censé être
fait aux créanciers , et que c’est absolument comme si
ces créanciers avoient eux-mêmes reçu et donné quittance.
Tout ce qu’il a dit se* rapporte parfaitement aux hé
ritiers de-Montmorin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils-assurent
que la somme étoit versee..
Un autre moyen s’applique' encore aux héritiers de'
�( 4° )
/
Montmorin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un émigré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
Or, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il-y a extinction de la dette par con
fusion. (Code civil, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 10 , art 17. )
Ainsi, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
Montmorin sont payés par Natthey , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Iis ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 1 1 , pour revenir de la nation à
l’émigré, puisque la nation les a traités de même, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V oilà, n’en dou
tons pas , ce qui est démontré jusqu’à l’évidence.
A
p p e l
c o n t r e
l e
sie u r
.
A iyiéd ée d e T a n e .
Le jugement de Clermont n?est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W allier; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roche-Lambert à payer la créance du sieur
Amédée de Tane, qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa vente, il est constant que le sieur Santenas
•w’a plus d’action ; car le sieur de la Roche-Lajmbert a
laissé
�( 4T )
laissé entre les mains dç Sauzay une somme suffisante
■pour payer tout le prix par eux d û , c’e s t - à - d ir e ,
3y5ooo fr. , quoiqu’ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
Au reste, il suffit dé renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà dit , et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clermont n’a pas voulu pro
noncer , par une autre inconséquence.
A ppel contre le s ie u r N a t t h e y ,
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la Roche-Lambert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la Roclie-Lambert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooq francs aux créanciers de
Tane , opposans aux lettres de ratification prises par
Sauzay , ou à consigner après le sceau de ses lettres.
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable avec les créanciers ; qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu’il dise, j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�(4 0
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le prix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances 3 il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lui , de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement délégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-monnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de.payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réduction, et ont rigoureusement
exigé qu’ils rapportassent les quittances des créanciers
délégués p a rla vente , même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel noyant rien payé lui-même, seroit privé
de tons moyens de défense.
E st-il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
Roche-Lambert à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payement, et qui, malgré un jugement,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o ch e-L am bert sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de Tane sur
leurs doutes, et de leur apprendre si le premier verse
ment de 355ooo fr., que Natthey dit avoir fait à Saint-
�C 43 )•
Amant le 26 floréal an. 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i 5 pluviôse an 4?
en appelant les créanciers opposans ?
Aucun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du i5 pluviôse an 4 est un versement ou
un compte, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit mois , lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits ; et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour sav.oir ce que Natthey a payé réellement.
Le sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la régie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à rendre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui compter 366000 francs, il faut au
moins convenir qu’ une contrainte n’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin sera ,
après le sceau des lettres de ratification ; mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme mandataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son payement; et il
ne s’cn dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son mandant, car il est obligé sans
exception, ou de faire valoir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclamation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lambert de l’effet de leurs
recherches.
Que si le sieur Natthey prétendoit, ainsi qu’il en a
menacé, s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i°. Parce que lui-môme a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen péremptoire sur la cause
actuelle.
20. Parce que lia demande en garantie a été jointe,
et que-loin d’attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. P a rc e que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel ; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont t o u j o u r s statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (r); l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la Boche-Lam bert dans ses
2 1 ju in 1 8 0 8 .
(r) « J ’ai reçu votre lettre, Monsieur, et je ne veux pas un
« seul instant vous faire attendre ma réponse.
cc J ’ai d abords été fort surpris des inscriptions que les créan
ce ciers de Tane ont prises sur vos biens ; j’ai dû ensuite me
« souvenir qu’ils avoient précédemment regretté de n’avoir pas
cc pris cette voie d’ abord, et de s’être engagés dans une autre
cc voie qui ne leur a pas plus réussi que celle-ci ne peut leur
« promettre du succès. Vous croyez d’avance, je l’espère, que
cc toutes choses sont parfaitement en règle vis-à-vis d’e u x ..........
cc Vous avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai pro« priétaire de Chadieu. D ’un mot je vous tirerai dô toute inquié<c tude. I l n e t i e n d r a , q u ’ a vous q u e N a t t h e y o u m o i , a v o t h e
<C CH OIX , OU TOUS DEUX R É U N IS , N E VOUS OFFRIONS DE NOUS SUI3S-
cc
cc
t i t u e r a vous d a n s c e t t e a f f a i r e : je vous en passerai acte
public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is, toutes choses sont parfaitement en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc Voilà un premier problème résolu, à votre satisfaction sanste doute. Vous v o y e z q u e N a t t h e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
cc QUE M EM E NOUS VOUS O FFR O N S, SOUS N OTRE GARA N TIE ET CELLE
CC DE CH AD IEU , DE NOUS SUBSTITUER A VOUS..................................
? ce
Vous êtes encore dans l’erreu r, quand vous supposez que
« les créanciers de Tane avoient fait opposition aux lettres de
te ratification obtenues par M. votre père sur MM. de Tane.
cc
ce
Fayon s’inscrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ciers non unis , et ne fit point inscrire l’union............. \\ n’y
« eut aucun acte conservatoire de la part de l’ union.
�(
4
6
}
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M. de
Batz, représentant Natthey , et M. de la Roche-Lambert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre
<c votre p è r e , l’ union fit opposition , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4, il y eut des lettres de ratification
cc prises sur Sauzay, et l’union eut le tort extrême de ne pas
cc prendre d’inscription, ni faire d opposition.
<c Us n’ont donc que celle du 2 2 décembre 17 9 1 ; mais il y a
cc
condamnation contr’eux sur ce point,
cc
tance très-âpre et trés-vive qu’ils avoient commencée
cc
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils attaquoient, dans Sauzay, W allier et N atth ey, et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de 11’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre famille, au lieu de se
cc
faire condamner sur leur inscription de
ce
v r a i, je n’aurois pas imaginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient imaginé de finir par où ils
cc
cc
cc
à
l’occasion de l’ins-
17 9 1.
M ais,
Paris
à
à
dire
auroient voulu commencer. Mais les actes subséquens, leur
<c liquidation, leur payem ent, sont tels qu’ils ne peuvent chercc cher qu’à e f f r a y e r e t à a r r a c h e r q u e l q u ’ a r g e n t , du moins de
cc Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos biens, ils en
cc ont également pris sur Chadieu...................Instruisez-moi de
cc
tout ce qui s’est passé d’eux à vous dans cette insurgence, et
cc
vous aurez de ma part, ou par moi, instructions parfaites. Je
cc
vous répète que m’identifiant à N atth ey, je me mettrai avec
cc
ce
plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment a me
faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s il y a
ce
quelque demande formée. Voilà de ma part, j espère, fran-
« chise, loyauté autant que vous pouvez désirer, et plus que
** vous ne pourriez exiger.
“ Keccvez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�( 47 )
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
forme; car, d’après les principes, 011 contracte valable
ment par epLstolam a ut per nuntium.
«attach em en t, et veuillez le faire agréer àJM . votre père.
« <Signc De Batz.
« Dès que j’aurai votre réponse, je partirai ou vous écrirai
« sur-le-champ. Je ne suis nullement in qu iet, parce que je
« connois les faits, et qu’ils sont réguliers. :»
Paris, 9 juillet 1808.
« Je n’ai pas perdu de tem ps, Monsieur, à prendre tous les
cc rëriseîgnernens et toutes les instructions utiles contre les créan-
« f.ciers de'Tane. J ’aurai une consultation des plus habiles gens.
« L/affàireparolt inattaquable par les créanciers de Tane. II est
et heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
« u tile , surabondance de précaution, pour acquitter à la fois
cc vous et moi, et pour mettre dans tous les sens les créanciers
cc en demeure. Vous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces. . . . . . . . .
ec
c<
cc
cc
«
M. votre père n’ auroit pas dû prendre ins
cription sur Chadieu, surtout sans m’en prévenir : il n’auroit
pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
créanciers. Son intérêt est de faire cause commune avec
Chadieu : quiconque lui dira le contraire se trompera , l’induira en erreur. Au reste, je lui demande, et j’espère qu’il
« ne me le refusera p as, de vouloir bien faire rayer 9on ins
ec cription au bureau de Clermont. J ’ai besoin, pour ma seule
« délicatesse vis-à-vis de deux personnes à qui j’ai fait deux
emprunts, d’avoir leur certificat d’inseription avant le vôtre,
parce qu’agissant de bonne foi et d^entu-rre confiance en m oi,
ce ils ont reçu dans leur acte ma parole d’honneur qu’il n’existoit
�-
,
(
4
8
}
M. de Batz, représentant Naüliey, a toujours continué
<T;igir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de Laroche-Lambert la consultation
très-détaillée de MM. Poirier et Bellard (annoncée dans
la dernière lettre), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
Il y a donc im p o s s ib ilit é de délier le sieur INÎatthey de
son nouvel engagement, qui lève tous les scrupules des
lois de rémigration, lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
cc j)as d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
cc donner en toute vérité , et il se trouve que la vôtre existoit
« le jour même où j’affinnois qu’il n’en existoit pas , ou du
cc moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de fa it , et
cc celle de deux pauvres petits créanciers que j ’ai fait condamner
ce à Riom , et que j ’esp ère faire ra y e r à tous momens. M. votre
cc p ère , après avo ir fait ra y e r ce lle q u ’il a déjà faite , pourra
cc au m ê m e in s ta n t , s’il le juge à p ro p o s, la faire rétablir. Je
ce n’y suis que pour ma délicatesse seulement, et j ’espère qu’il
ce 11e me refusera pas cette satisfaction légère, qui, dans aucun
cc cas , ne peut lui être dommageable, et qui a été pour moi
w le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc parlant.
ce Au surplus, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M . Vautrin, et je m’en rapporte à. c e qu’il vous conseillera
cc à cet égard.
cc Je vous renouvelle , Monsieur,
1 assurance de mon dévoue-
cc ment à vos intérêts, et de mon bien sincère attachement.
u S i g n e D e B a tz . »
II
�( 49 )
Il'n e reste plus qu’un mot à dire sur l’effet de "cette
garantie, s’il falloit en venir à elle ; il est réglé ,par le
Code civil, qui s’exprime ainsfÎ
: Article 114 2 . c< Toute obligation de faire se résout en
« dommages-intérêts, en cas'de non-exécution delà part
« du débiteur. »
Article 1184. « La condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été exécuté, a le choix, ou de forcer l’autre à l’exé« eution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en
« demander la résolution avec dommages et intérêts.
« La résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
Le sieur de la Roche-Lambert a conclu à la résolution
de la vente de 179 1 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi' ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui demande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
que le sieur de la Roche-Lambert dut être obligé de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a point élevé une
prétention aussi immorale; il est vraisemblable qu’il s’en
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitime : ainsi , à son
égard, il suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payemens, puisqu’il s’y est engagé, ou qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendeur soit
à l’abri de toutes recherches.
Me. D E L A P C H I E R , ancien avocat,
M e. M A R I E , licencié avoué.
A R I O M , de l’ imp. de T H I B A U D , imprim. de la C o u r impériale, et libraire,
rue dej T a u le s , maison
L a n d r i o t. —
Juillet 1 8 1 0 ,
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
receveurs de l'enregistrement
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0413
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0423
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53797/BCU_Factums_M0413.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
receveurs de l'enregistrement
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53807/BCU_Factums_M0423.pdf
7887ef65a97d1c066524297e3798aa67
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41
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r
j r .
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�COUR
r
MEMOIRE
EN
IMPÉRIALE
RÉPONSE?
POUR
Sieur J oseph DE L A ROCH E-LAM BERT,
habitant à Issoire, intimé et appelant ;
C O N T R E
Dame F r a n c o i s e - A g l a é - G A b r i e l l e D E
L A L U Z E R N E et sieur P i e r r e D E L A
G R A N G E - G O U R D O N , son m ari; dame
A n g é liq u e - A r m a n d e - C a m ille D E LA
L U Z E R N E et sieur A n a t h o c l e - M a x i m ilien H U RAU LT D E
V I B R A Y E , son
mari, habitans de la ville de P a r is , héritiers
bénéficiaires de madame d e M o w t m o r i n , laquelle
étoit héritière bénéficiaire du sieur EmmanuëlFrédéric de T a n e , son frère, appelans ;
CONT RE
Sieur HENRI D U V E R G I E R , habitant a P a ris;
S i m o n T E R O U L D E yhabitant à Daudeville;
P i e r r e - L o u is L A I S N E , ancien sellier à
Paris habitant à Sens; A n t o i n e - L o u is
A
DE RIOM.
CH A M BR Ï.
�( a )
D U C H A S T E L , apothicaire à Paris ; etJEÀN
C H A R D O N y chapelier y habitant a P a ris,
syndics et créanciers unis dudit sieur d e T a n e ,,
aussi appelans,
C ON TR E
Sieur
A
D E TANE - SA N T E N A S,
habitant à Paris y intimé ;
m é d é e
ET
C O N T R E
Sieur L o u i s N A T T H E Y , habitant de Nyon en
Suisse y aussi intimé.
la révolution et les assignats, cette cause seroit
de la p lu s grande s im p lic ité dans les questions qu’elle
fait naître. L ’acquéreur d’une te r r e , chargé d’en payer
S a n s
le p rix à un notaire choisi par une direction de créan
c ie r s , lui en paye près de m oitié; ensuite il revend la
te rre, et laisse dans les mains du second acquéreur une
somme égale à ce q u 'il doit : des lettres de ratification
sont prises. Ce second acquéreur , p o u r s u iv i par les opposans, produit des quittances de consignation, assigne
les créanciers en m ainlevée de leurs oppositions, et fait
juger sa libération valable à leur égard.
Cependant ces c r é a n c ie i’s attaquent le prem ier acqué
r e u r, qui met en cause son garant : c e lu i-c i emploie
�C3 )
pour libération le jugement qui a validé sa consignation.
A lo rs l’acquéreur observe aux créanciers qui le pou r
suivent , que leurs oppositions à des lettres de ratification
^ ont lie leurs interets à ceux du second acquéreur qui les
a obtenues, et que s’ils ont laissé juger qu’ils étoient
payés , ils ne peuvent pas demander à être payés une
seconde fois.
V o ilà à quoi se réduit la question p rin cip ale, et il
est évident que jusqu’ici elle ne présente en point de
droit aucune difficulté sérieuse : mais le payement a été
fait en assignats, et les créanciers veulent en rejeter la
perte sur autrui. Les héritiers bénéficiaires du vendeur
origin aire, qui com prennent que si la perte des assignats
n’étoit pas pour les créanciers elle seroit pour euxmêmes , font cause commune avec e u x , pour que tout
retom be sur le prem ier acquéreur.
A lo rs tout s’exagère et se com plique. L ’émigration de
l ’acquéreur s’ajoute au procès, comme un point capital
qui domine tout : d'autres circonstances étrangères vien
nent se prêter à m ille équivoques. Quand la matière est
élaborée , on se croit déjà assez fort pour injurier et
celui qu’on veut faire payer ce qu’il ne doit pas, et le
tribunal même où il a trouvé justice. E n fin , après avoir
présenté un faisceau de lois étrangères à la question, et
d’arrêts assez bien choisis dans la m ultitude, mais plus
étrangers en core, on vient crier à l ’injustice et à l’indé
licatesse , en disant froidement : « Q ue m’im porte si vous
« devez recouvrer ou non
5ooooo francs que je vous
« demande pour une dette qui n’est pas la vôtre ! Que
A 2
�(4 )
«
«
«
«
m’im porte encore si vous êtes ruiné par ce payem ent,,
et si votre famille est respectable. Je veux de l’argent,
et je ne veux en demander qu’à vous que je suppose
moins en mesure de me résister; d’ailleurs votre émi-
« gration se prête à tous mes sophismes : il y a tant de
« lois, sur cette m atière,, qu’ il est im possible.de ne pas
« y voir que tout doit retomber sur vous. D ’ailleurs ,
« quand je me suis donné la licence d’im prim er qu’une
«• décision contraire à mon intérêt étoit un, jugement de
« f a v e u r , j’ai calculé l’effet de cette injure sur l’esprit
« des magistrats auxquels j’en demande la réform e. Si
« je ne puis les forcer à croire qu’il faut sacrifier un
ém igré par préférence, m on adroite censure sera tou«■jours d’un poids quelconque dans la balance ; elle
« achèvera probablem ent de-me conquérir le suffrage de
« ceux, dont l’opinion auroit été incertaine. »
A in si eût parlé M achiavel ; ainsi parlent les syndicsdes créanciers, de T an e , qui v e u le n t, p e r jh s et n e fa s ,
intéresser en se présentant comme des victimes.
Q u ’ils tâchent de prouver à la Cour, que m algré leursoppositions à des lettres, m algré un jugement qui pro
nonce contre eu x la validité du payement que le sieur
Natthey a été chargé-de leur faire, il leur reste encore une
action : voilà leur cause..
Mais que dans leur colère et dans leurs' calculs ils fassent
semblant de supposer de l’adresse, des insinuations et de
la faveur; que tournant tout du côté de Immigration, ils
cherchent à insinuer que cette ém igration deviendra aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert un moyen de s’em
parer des plus clairs deniers des»créanciers de T a n e ,
�(5 )
et que ce sera s*être f a i t de ses propres J'a i! tes un m oyen
d?acquérir : voilà ce qui n’est ni la cause ni la. vérité r
mais une insigne et brutale calomnie;
Car personne ne sait m ieux que les adversaires qu’il
n?y a qu’à perdre dans tous les cas pour les sieur et dame
la R o ch e-L am b ert, puisqu’ils ont payé 178000 francs en>
écus sur une terre qu7ils n’ont pas : et on ose encore leu r
demander plus de ôooooo francs pour la même terre; et
on les signale comme des débiteurs de mauvaise fo i, parce:
qu’ils résistent à cette épouvantable injustice..
f a i t s
;
A p rès la m ort du sieur Em m anuël-Frédéric de Tane>,
sa succession fut acceptée sous bénéfice d’inventaire par
Françoise-G -abrièlle de T a n e , épouse de M . de M o n tm orin , ministre des affaires étrangères.
Madame de M ontm orin ne pou voit vendre en cette
qualité les biens de la succession sans y appeler- les
créanciers ; elle fit apposer des affiches pour vendre aux
enchères les terres de la Soucheyi’e , Chadieu, la ChauxM ongros et le m obilier de la succession. Il y a eu pour
777400 francs de ventes avant 1790.
L a terre de Ghadieu fut vendue par madame de
M ontm orin aux sieur et dame de la R oche-Lam bert, par
acte du 17 juin 178 8 , moyennant 376000 francs, et les
frais et faux f r a i s évalués à 5 deniers par liv re , produisant
7812 liv. 10 s. Il fut dit que les 376000 fr. seroient
payés solidairement par les sieur et dame de la R ocheLam bert eiitre les m ains de Trutat¿ notaire-séquestre,
�(6)
ou a u x créanciers q u i auront été délégués; savoir, un
quart au i 5 septem bre, et le surplus dans le courant
des deux années, en trois payemens. Il est ajouté que
les acquéreurs prendront à leurs frais des lettres de rati
fication , et q u e , s’il se trouve des oppositions du ch ef
de madame de M on tm orin , elle les fera lever dans les
six semaines ; mais hors ce c a s, elle ni les créanciers ne
seront tenus de garantir, et l’acquéreur n’aura son recours
que contre les créanciers qui auront touché le prix.
A la suite dudit acte on lit une intervention des sieurs
de T an e de Santenas, T ero u ld e, commissaire à terrier;
C hardon, chapelier; L ouis L a isn é , sellier, et T o u ta in ,
tailleur d’h ab its, tous syndics des créanciers de T a n e ,
lesq u els, après avoir pris lecture de la ven te, la con
firm ent et ratifient a u x conditions y exprim ées. Ils font
élection de dom icile chez M- P ern ot-D u plessis, procu^
reur au parlement.
L e jour même de la’ v en te, M . de la R oche-Lam bert
paya la somme particulière de 7812 liv. 10 s ., à T ru ta t,
n otaire; dans les années 1790 et 1791 il versa dans les
mains du même notaire 170644 francs.
E n 1 7 9 1 , les sieur et dame de la R o ch e -L a m b e rt,
voyageant en A lle m a g n e , envoyèrent au sieur de SaintPoney , leur b e a u -frè r e , deux procurations; celle du
sieur de la R oche-L am bert porte pou voir d'em prunter
les sommes nécessaires à ses a ffa ires, g érer, liq u id er,
vendre : elle est passée devant H eidz, notaire à Coblentz,
le 16 octobre 1791.
• L a procuration de la dame de la R oche-Lam bert porte
pou voir & em prunter 60000f t \ pour placer sur C ha d ieu ,
�(7 )
régler compte açec M . T r u t a t , notaire j recevoir ,
donner q u itta n ce, fa ire tous emprunts qiùil jugera bon
être, pour Varrangement des affaires de son m a ri. Cette
seconde procuration est passée devant L u tn e r, notaire à
W o r m s , le 20 octobre 1 7 9 1 ( 1 ) .
E n vertu de ces actes, le sieur de Saint-Poney se crut
autorisé à passer la vente ci-après :
L e 27 novem bre 1791 , par acte reçu C a b a l, notaire
à-Paris , le sieur de Saint-Poney, comme porteur de pro
curations des sieur et dame de la R o c h e -L a m b e rt, et
s’obligeant de faire ratifier dans le mois ( parce qu’il
n ’avoit pas de pou voir de la dame de la R oche-Lam bert ) ,
vendit la terre de Chadieu au sieur Sauzay, banquier à
P a ris, moyennant ôooooo f r . , dont il reçut i2Ôooo fiv
en assignats, et quant aux 376000 fr. r le sieur Sauzay
prom it les payer dans un an a u x sieur et dame de la
R oche-Lam be? t , o u y si bon lu i sem blait, a u x créanciers
desdits sieur et dame de la R o c h e - L a m b e r t , et spé
cialem ent a u x créanciers privilégiés sur ladite terre..
Il est dit ensuite que si au sceau des lettres de ratification
il survient des oppositions du chef des sieur et dame de
la R o ch e-L am b ert, le sieur de Saint-Poney les oblige et
( 1 ) Ces deux procurations répondent déjà aux im putations
injurieuses des créanciers de T a n e , qui ont dit que les sieur et
dam e de la Roche-Lam bert quittoient la F rance en s’occupant
plutôt de se faire des ressources que de payer leurs dettes.
Personne n’ a ignoré que leur prem ière pensée a été de s’o ccu p er
de leurs c ré a n c ie rs, et que tel a été l’ unique objet de la mis
sion donnée à M. de Saint-Poney.
�s’ oblige personnellement de les faire lever sous quinzaine.
E n fin , pour l ’exécution de ladite clause, le sieur de SaintP on ey fait une élection de dom icile à Paris.
L e 4 janvier 17 9 2 , il fut pris des lettres de ratification
sur la vente de 1788 ; elles furent scellées à la charge
des soixante-treize oppositions. Il est essentiel de remar
quer que plusieurs des créanciers de Tane sont opposans
individuellem ent ; mais qu’il n’y a pas d’opposition de la
part des syndics.
L e 22 avril 179 2 , le sieur Sauzay prit des lettres de
ratification sur son acquisition de 1791 ; elles furent frap
pées de huit oppositions, dont l’u n e , du 22 décembre
1 7 9 1 , étoit à la requête des syndics des créanciers de
•Tane.
Dans la même année 17 9 2 , le sieur de la R oche-L am bert fut porté sur la liste des émigrés.
L a dame de la R oche-Lam bert n’a jamais été portée
sur aucune liste.
Sous prétexte d’une loi du 30 octobre 1792, ordonnant
le séquestre des biens des absens du te rrito ire, sans les
désigner encore comme émigrés , le sieur Sauzay fit
déclarer par le curé d’A u tezat, à la m unicipalité du lieu ,
qu’en vertu de sa vente il devoit aux sieur et dame de
la R oche - Lam bert 376000 francs. Mais aussitôt il fit
mention qu’il a voit pris des lettres de ratification, et que
les créanciers opposans aux lettres absorberont le p r ix
et au delà : d’où il conclut qu’il a intérêt de conserver
les deniers ci-dessus, parce qu’ils sont sa sûreté, dès que
la terre -est h y po t h é q u é e . « E n sorte q u e , dit le sieur
a Sauzay, s 'il[fa itfa ir e ladite déclaration, c’est m oins
« à
�(9 )
«
«
«
«
«
«
«
à cause des sommes dont il peut paroître débiteur, et
dont la république ne pourra ja m a is profiter, puisq u elles doivent être absorbées pa r les dits créanciers
hypothécaires opposans a u x lettres de ra tifica tio n ,
que pour donner des preuves de son civ ism e, et empêcher qiüon ne lui fasse des reproches de négligence
ou intelligence. »
Par acte du 25 juillet 17 9 3 , le sieur Sauzay vendit au
sieur Feuillant un pré-verger sis aux M artres, les m ou
lins et fours banaux des M artres, dépendans de la terre
de Chadieu , moyennant la somme de 61100 francs,
payable après l’obtention des lettres de ratification.
L e 7 nivôse an 2, par acte reçu Gabal, notaire à P aris,
le sieur Sauzay vendit le surplus de ladite terre de Chadieu
au sieur W a llie r , Suisse, pour lui ou la personne que
W a llie r se réserva de déclarer dans les six m ois, m oyen
nant 530000 fr. dont W a llie r paya comptant 40000 f r . ,
s’obligea de payer 135000 fr. à Sauzay, après le sceau des
lettres, et enfin à l’égard des
355ooo fr. restans, W a llie r
fut délégué à les payer, so it a u x créanciers de T a n e ,
précédent propriétaire, q u i se sont trouvés o p p o s a n s
A U X L E T T R E S D E R A T I F I C A T I O N PR ISES P A R S A U Z A Y ,
soit afin d'en f a i r e le dépôt et la consignation partout
où besoin se ra , aussitôt après le sceau sans opposition
su r le sieur S a u za y des lettres de ratification à prendre
sur la présente vente.
L e sieur Na tthey dit avoir été subrogé par le sieur W a llie r
à ladite vente, par acte sous seing p rivé du même jour.
Il dit que le directeur de la régie du Puy-de-D ôm e
fit décerner, le 24 ventôse au 2 , une contrainte contre
B
�( ï° )
le sieur S a u za y > pour payer 5ooooo francs par lui dûs
au sieur de la Roche - Lambert eu vertu du contrat de
vente de 179 1, sous prétexta que le vendeur étoit ém igré.
E nsuite, et à la date du 26 floréal un 2 , le sieur
Natthey produit la pièce suivante :
3
cc Je soussigné, receveu r de l’enregistrem ent et des domaines
« au bureau 'de S ain t-A m a n t-T a llen d e, reconnois avoir reçu à
cc titre de dépôt, du G . E tienne-Jean-Louis N a t t h e y , de N y o n ,
cc au canton de Berne en Suisse ( propriétaire de Chadieu ,
,
te suivant la déclaration de com m and en sa faveur par le
■« C. W a llie r , du 7 nivôse d e r n ie r ) , la somme de trois cen t
ce cinquante - cinq m ille livres,, pour servir itant au .nom des
a cit. N atth ey et S a u z a y , qu’en ce lu i du C. Jean-JBaptiste
cc W a llie r , à la libération de Chadieu.
cc D e quoi m ’a été dem andée la présente déclaration , à l’e ffet
cc d’arrêter toutes poursuites et la mainmise nationale sur ledit
cc Chadieu.
ce Saint-A m ant, le 26 floréal an 2. Sig n é M a u g u è . »
Il
p a v o ît q u ’ un a r r ê té du d é p a r t e m e n t , e n l’an 3 ,
annülla la ^vente fa ite au sieur Sauzay, et mit la terre
de Chadieu en séquestre : mais ce séquestre fut levé par
un autre arrêté du 4 vendémiaire an 4 , et la restitution
de fruits fut ordonnée au profit du sieur Natthey.
Dans la même année, un procès eut lieu au tribunal
de la Seine, entre les sieur Natthey et W a llie r, se disant
tous les deux acquéreurs de Sauzay , et se disputant
Chadieu par la voie civile et par la voie criminelle.
Ce procès prouve que le sieur W a llie r avoit voulu 3e
libérer envers les créanciers opposans de Sauzay, et que
le sieur Natthey prenoit pour son compte cette libération :
�( 11 )
il fit des offres à W a llie r , et même une consignation en
mandats. Mais les lois sur la réduction du papier-monnoie
n’étant pas encore rendues, le tribunal de la Seine sus
pendit le p ro cè s, et on en ignore l’issue.
Les créanciers de T an e produisent à ce sujet la pièce sui
vante, tirée des mêmes registres du receveur de St.-Amant.
cc D u i 5 frim aire an
4j
reçu du C . J e a n -M a r ie T 'V a llier,
cc des deniers empruntés de J a q u e ro t, par acte d u ............. la
« somme de 355ooo francs , à valoir sur le prix .du domaine
« acquis par S a u za y , des sieur et dame de la R oche-Lam bert,
ce ém igrés , suivant le contrat du 27 novem bre 1791 ; ladite
« somme de 355ooo fr. payée en une rescription de la trésorerie
cc nationale sur le receveur du district de C lerm o n t, n°. 424, en
ce date du i 5 brum aire dernier ; dont quittance. S ig n é M a u g u e . «
/
Les créanciers ont retiré du même registre la pièce
suivante :
cc D u 26 frimaire an
a de 32851 francs
25
4 »reçu
de Jean-Louis N atbhey la somme
centim es pour les intérêts restans du prix
cc
principal du domaine de C h ad ieu , acquis de la R o ch e L a m -
cc
b e rt, sa fem m e et Saint-Poney, ém igrés, par le sieur Antoine
S au zay, lequel en a fait vente au C. W a llie r , par acte reçu
C a b a l, notaire à P a ris, le 7 nivôse an 2 , lequel W a llie r a
passé déclaration au profit dudit N a tth e y , par acte sous seing
p r iv é , du 7 nivôse an 2 , enregistré à Paris le 17 messidor
cc
cc
cc
ce
an 3 , par P in au lt; ledit payem ent fait en conséquence de la
cc liquidation des intérêts faite par le sieur A lia s , directeur de
cc correspondance à la régie de l’enregistrem ent à Paris , le
cc 12 frim aire présent m ois; et ledit payem ent effectu é en une
cc rescription de la trésorerie nationale sur les domaines d’ém i« g rés, n°. 493 ? e t sous la date dudit jour 12 du présent mois.
cc
« Certifié c o n fo rm e , le 8 vendém iaire an 11. Sig n é
M
B 2
augue
.
»
�( 12 )
L e iei\ nivôse an 4 , Natthey donna un exploit aux
créanciers de T a n e , aux domiciles par eux élus en leur
opposition ; il leur fait sommation en ladite qualité de
créanciers opposans a u x lettres de ratification prises
par Sauzay, de se trouver le i 5 pluviôse suivant .chez
le receveur de Saint-Am ant, pour y recevoir le p rix de
C hadieu. Il est constaté par cet exploit (resté au pouvoir
de Natthey, qui en a donné copie), que Natthey y procède
c o m m e obligé d?a c q u it t e r 376000 fra n cs en ca p ita ly et
3 2 8 5 2 / h en intérêts , tant pour se libérer lui-m êm e 9
que pour libérer le sieur S a u z a y , a in si que les sieur et
dame de la R o ch e -L a m b e rt? premiers acquéreurs j et
il fait la sommation au nom des uns et des autres.
Les créanciers ne se présentèrent p a s; et le sieur
Natthey fit dresser, le i5 pluviôse an 4 , par le receveur
de S ain t-A m an t, la pièce suivante produite par lui.
«
cc
«
cc
« Je soussigné, receveur de l’enregistrem ent et des domaines
au bureau de Saint-Am ant-Tallende, d éclare, d’après le débat
des com ptes qui a eu lieu cejourd’hui entre moi et le cit.
Parades, des Martres , fondé de p o u v o ir d u C. E tie n n e -J e a n L o u is N a tth e y , propriétaire de Chadieu , qu’il a été versé
cc dans ma caisse, tant par ledit Parades qu’en vertu de saisies
cc
tc
cc
cc
cc
te
«
cc
cc
nationales par moi faites avant la levée du séquestre de Chad ieu , la somme de s ix cent d ix - n e u f m ille s ix cent quatre c
là >res quinze sous en l ’acquit d u d it d o m a in e, 'dont quittance
et d éch arge, sauf audit Parades, qui en fait expresse réserve
pour ledit C. N atth ey , de plus ample e x a m e n et apuratiou
desdits com ptes , et de se pourvoir d e v a n t q u i il appartiendra ,
pour la restitution des sommes qu’il prétend avoir payées en
sus des sommes dues p ar led it C. N a tth ey pour la libération
dudit dom aine de Chadieu.
cc Saiut-Am ant-Tallende, le i 5 pluviôse an 4«Signé M a u g u e . »
�'
( I3 )
En marge est écrit :
« Sur 1 invitation du C. Parades , je déclare qu’ aucun des
« créanciers appelés par lui dans son exploit du i er. nivôse der« n ier, n a com paru cejourd ’hui en m on bureau.
« L e i 5 pluviôse an 4 * Sign é M a u g u e . »
Jusqu’ici les créanciers de Tane n’ont form é aucune
demande. Etoit-ce pour attendre la radiation du sieur de
la Roche-Lam bert? Ils veulent qu’on le croie ainsi. Mais
nous voici au sénatus-consulte, du 3 floréal an 10 , et
c’est le moment d’être attentif sur leur prem ière d é
m arche, pour apprendre d’eux lequel des acquéreurs ils
ont considéré comme leur débiteur.
Souvenons-nous qu’en décembre 179.1, les syndics ont
formé opposition aux lettres de ratification prises par
S a u z a y , sur sa vente du 27 novem bre 179 1.
P ar exploit du 11 brumaire an 11 , les syndics des
créanciers de Tane font assigner Sauza y au tribunal de
la Seine, pour leur payer 263980 francs qui leur restent
dûs sur la vente de 1788 ; en conséquence, ils concluent
contre ledit Sauzay, comme obligé à payer ladite somme
de 263980 francs , à ce que la vente ci lu i consentie
le 27 novembre 1791 , soit exécutée , et qu’il soit con
damné audit p a ye m e n t. (C ette pièce est produite par le
sieur Natthey. )
L e 22 pluviôse an 1 1 , Sauzay dénonce cette demande
h Natthey.
A lors Natthey assigne lesdits syndics au tribunal d e Clerm ont, pour voir dire qn’ il est valablement libère au moyen
des versemens par lui laits, et pour être condamnés ù lui
donner m ainlevée de leurs oppositions.
�C »4 )
le
«
«
«
«
«
«
«
L e 7 pluviôse an 1 2 , le tribunal de Clerm ont rend
jugement suivant :
« L e tribunal déclare le demandeur (N atthey) bien et
valablement libéré du p rix de la terre de Chadieu l
en conséquence , fait m ainlevée de l’opposition faite
par les défendeurs (les syndics) au bureau des h yp othèques de C lerm ont, le 2 décem bre; ordonne qu’elle
sera rayée des registres du conservateur, en vertu du
présent jugem ent; condamné les créanciers aux dom mages-intérêts de N atthey, à donner par déclaration. »
E li vertu de ce jugem ent, le sieur Natthey a fait rayer
toutes les oppositions prises par les créanciers de Tane
sur Chadieu. Les syndics n’y ont mis aucun obstacle,
et ont laissé passer quatre autres années sans hostilités.
T o u t d’un co u p , en 1808, ils ont pris une inscription
de 495369 francs aux bureaux d’Issoire , A m bert et C ler
m ont, sur tous les biens appartenans ou ayan t appar
tenu a u x sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert, en vertu
de la vente de 1788.
Les sieur et dame de la R och e-L am b ert, instruits de
cette attaque, ont pris de leur côté une inscription sur
le sieur N atthey, pour supplément à la précédente, qu’ils
ont considérée comme frappant sur Chadieu.
Il eût été hors de p ro p o s, jusqu’à p résen t, de dire
que pour verser 170644 francs en 1791 , il avoit été
emprunté pour les sieur et dame de la R oche-Lam bert,
savoir, 44000 francs à la dame de B ourneville, m ère de
madame de la R o ch e-L am b ert, et 30000 francs au sieur
Gabriel de T a n e - S a n t e n a s , représenté par Am édée.
�( x5 )
On a vu que le sieur de S t.-P on cy, vendant à Sauzay,
ne lui laissa pas seulement les 263000 francs dûs aux
créanciers de T.ane, mais encore une somme suffisante
pour rembourser les prêteurs ci-dessus.
E t comme les syndics n’a voient inscrit que pour leur
in térêt, il falloit grever Chadieu du surplus de la somme
laissée entre les mains de Sauzay; c’est pourquoi il a été
pris à la requête des sieur et dame de la R och e-L am bert,
inscription supplémentaire de 112000 fr. sur Chadieu.
Cette inscription supplémentaire a été le prétexte du
procès actuel.
L e sieur N atthey, par exploit du 17 août 1808, a fait
assigner les sieur et dame de la R oche-Lam bert en main
levée de ladite inscription.
L e lendem ain, Am édée de Tane (très-d’accord, comme
on le voit déjà., avec Natthey) a fait un commandement aux
sieur et dame de la R oche-Lam bert de payer les arré
rages de l’em prunt ci-dessus de 30000 francs.
L e 23 du même m ois, il a été présenté requête au
tribunal de C lerm ont, sous le nom des sieur et dame de
la R o c h e - L a m b e r t ; ils ont conclu à la mise en cause des
créanciers de T a n e , et à ce que le sieur Natthey, se disant
lib é r é , fût tenu de fa ir e valoir envers eux ladite libé
ration , sinon .de garantir les sieur et dame de la RocheLam bert. Ils ont co n clu , en conséquence, à la résiliation
des ventes de 17 9* ^ suivantes, et au désistement de
Chadieu. Enfin ils ont conclu contre les créanciers de
Tane à :1a mainlevée de leur inscription, et contre le sieur
A m édée de Tane à la mainlevée du commandement de
�(
i6
)
payer par lu i fait, attendu que N atthey, chargé de payer
tout le m onde, a dit avoir fait juger sa libération valable.
Cette mise en cause a .eu lieu , les demandes ont été
jointes, et la cause a été jugée sur le fond le n juillet
1809.
Par ce ju g em en t, le tribunal de Clerm ont distingue
les intérêts des créanciers de T a n e , d’avec ceux d’A m édée
de Tane. A l’égard des prem iers, il déclare valablement
libérés tant le sieur Natthey que les sieur et dame de la
R och e-L am bert, par suite du jugement non attaqué, du
7 pluviôse an 12 ; en conséquence, il ordonne mainlevée
de leurs inscriptions.
Quant au sieur A m édée de T a n e , il considère la somme
de 30000 fr. prêtée pour déposer chez le notaire T ru ta t,
comme obligation directe et indépendante de l’acquisition
non purgée par les lettres, et il déboute les sieur et dame
de la Roche-Lam bert de leur opposition au commande
ment de p a y e r (1).
I l y a appel de ce ju g e m e n t , tant p a r les héritiers et
créanciers de Tane contre les sieur et dame de la RocheL am bert, que par les sieur et dame de la Roche-Lam bert
contre Natthey et contre le sieur A m édée de Tane. O n a
déjà indiqué en commençant quelles sont les prétentions
des créanciers : elles se réduisent à dire qu’ils ont deux
actions distinctes; l’une contre les acquéreurs de Chadieu,
l’autre contre les sieur et dame de la R o ch e-L a m b ert;
(1) C e jugem ent est transcrit en son en tie r, avec les m otifs,
à la fm du m ém oire des créanciers de T a n e , ce qui a rendu
inutile d’en parler ayec plus de détail.
d’où
�( *7 )
<l’où ils concluent que le jugement de l’an 1 2 , q u i, en
déclarant les acquéreurs libérés, les autorise à faire radier
leurs inscriptions, ne les empêche pas de se faire payer
par les sieur et dame de la Roche-Lam bert.
M O Y E N S .
P o u r suivre cet appel dans toutes ses faces, et pour être
clair, autant que possible, dans une discussion dénaturée
et obscurcie par de fausses applications de prin cipes, il
est nécessaire de séparer les moyens des créanciers de
T a n e d’avec ceux des héritiers de M on tm orin , quoiqu’ils
aient réuni leurs intérêts, sérieusement ou non. O n exa
m inera, en prem ier lieu , s’il est vrai que les créanciers de
T a n e aient, ainsi qu’ils le prétendent, une double action
contre les acquéreurs de Chadieu et contre les sieur et
dame de la R o ch e-L am b ert, et si la libération du sieur
Natthey, jugée valable par jugement du 7 pluviôse an 12 ,
a dû profiter au sieur de la R o ch e-L am b ert.
20. Sur l’appel des héritiers de M ontm orin il s’agira
de savoir s i , au cas où le versement du p rix de Chadieu
seroit jugé être l’effet de la confiscation n ationale, et
n’avoir pas acquitté les créanciers de T a n e , la perte de
ce versement doit être pour les héritiers de madame de
M on tm orin , comme condamnée à m o r t, ou pour le
sieur de la R oche-Lam bert, comme ém igré.
30. Quant à l’appel du sieur de la R o c h e -L a m b e rt
contre le sieur Am édée de T a n e , il y aura lieu d’exam iner
si le sieur Natthey, charge de faire face à. tout, a également
lib éré le sieur de la R oche-Lam bert de cette dette.
C
�( .18)
E n fin , l’appel contre le sieur Natthey donnera lieu à la
question de savoir s i, dans le cas où le sieur de la Roche*
Lam bert seroit condamné à payer des sommes quelconques
aux créanciers délégués ou opposans, le sieur Natthey lui
devra une garantie, et quelle doit en être l’étendue.
A
p p e l
d e s
c r é a n c i e r s
de
T
a n e
.
La prétendue ém igration du sieur de la Roche-Lam bert
est le prem ier texte de la proposition des créanciers d e
T a n e ; ils l’appuyent sur un arrêté du conseil d’état, du
3 floréal an 1 1 , portant que tout créancier d'émigré
non liq u id é, a le droit de retirer ses titres du dépôt na
tional pour poursuivre l’ém igré : ils en concluent qu^
les émigrés sont rentrés avec la charge de leurs obliga
tions personnelles, quoiqu’ils aient perdu les biens soumis
à leurs dettes.
R ien de plus incontestable que ce point de d roit; mais
aussi rien de moins applicable à la cause.
L ’arrêté de l’an n seroit applicable, si Ghadieu.ayant
été vendu nationalement,, le sieur de la R oche-Lam bert
vouloit renvoyer le vendeur ou ses créanciers au gran d
liv r e , pour rechercher le prix versé par l’acquéreur du
gouvernement..
Mais qu’y a-t-il de commun entre cette espèce et celle
où sont les parties? Il faudroit s’obstiner à ne pas réfléchir
pour ne pas y trouver une prodigieuse différence.
i° . La terre de C h ad ieu , qui est le gage de la dette,
et à raison de laquelle le sieur de la Roche-Lam bert a
été débiteur, com me détenteur y n’a point été vendue;
�( r9 )
la nation ne s’en est point emparée : un séquestre aussitôt.,
m is que l e v é , n’a pas em pêché les acquéreurs de rester
propriétaires incommutables depuis 1 7 9 1 , et ils le sont
encore.
Cette terre étoit vendue , li vrée , sortie des mains du
sieur de la R o ch e-L a m b ert, au 27 novem bre 1 7 9 1 , et
le sieur de la R o ch e-L a m b ert n’a été mis sur la liste
des ém igrés qu’en 1792. L a vente ayant une date au
thentique avant le 9 février 179 2, devoit avoir tout son
effet aux termes des lois : la nation n’a pas pu vendre
Chadieu ; et en effet elle ne l’a pas vendu.
20. Dans quelle loi croit-on trouver l’horrible injustice
de rendre les émigrés victimes des évén em en s, lors
q u ’à vant leur départ ils ont mis hors leurs mains l ’im
m euble par eux acquis, et ont transporté sur un nouvel
acquéreur toute la dette dont l’immeuble étoit le 'gage;
lorsque les créanciers ont accepté ce transfert par une
opposition expresse sur la deuxièm e vente ; lo rsq u e ,
suivant toutes les idées reçues, l’acquéreur intermédiaire
étoit dégagé de toute dette ; lorsqu’enfin les choses
n’étoient plus entières depuis 1791 , et n’a voient rien
de commun avec l’ém igration?
30. 11 ne s’agit pas de créanciers d’ém ig ré, q u i, après
avoir eu la nation pour seul o b lig é, parce qu’elle s’étoit
emparée de leur gage, reviennent à leur propre débiteur;
ce sont des créanciers opposansqui changeant leur action,
laissent de côté l’acquéreur qui a pris des lettres, et qui
possède, pour s’adresser à un acquéreur interm édiaire.
Les créanciers de Tan e ont bien senti qu’il falloit
C 2
�C 20 )
prouver , avant t o u t , comment ils avoient une action
directe contre les sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
aussi ils débutent par dire rapidement qu’il y a envers
eux engagement personnel de la part des sieur et dame
de la Roche-Lam bert.
Ces créanciers-là ne veulent pas manquer de sûretés;
ils se donnent pour débiteurs solidaires, i° . les héritiers
de M ontm orin ou d e T a n e , comme obligés directement;
2°. le sieur Sauzay, à cause de ses lettres de ratification
ou C h a d ie u , à cause de l’hypothèque ; 30. le sieur de
la R oche-Lam bert, comme délégué envers eux par l’acte
de 1788..
P o u r amener à eux le sieur de la R o ch e-L am b ert,
#
il y a une seule chose à chercher : c’est une délégation.
Car il n’y a pas de délégation parfaite sans novation,
c’est-à-dire, sans l’extinction de la dette du prem ier obligé;
et de même il n’y a pas de novation sans l’intention
form elle de l’opérer. Ce sont là des principes élémentaires.
O r , qu’on lise et relise le contrat de vente de 1788,
on n’y verra pas même Papparence d’une novation ; au
\
contraire,, madame de M ontm orin reste débitrice des
créanciers de son frère. Ils se gardent bien de lui donner
quittance des 376000 fr. que payeront les acquéreurs de
C h ad ieu; ils conservent sans le moindre- doute-le droit
de s’adresser à. madame de M ontm orin ; et cela est si
bien p ro u v é , que nous voyons dans l’inscription du 11
janvier i8 o8 ‘, et en la C o u r, les dames de la L u zern e ,
héritières de M ontm orin , se r é u n ir aux créanciers de
Tane pour attaquer le sieur la R oche-Lam bert, à cause
de Tintérêt qu’i l a ù ne pas payer lui-mêm e.
�( 21 )
Si les dames de la- Luzerne n’étoient pas restées débi
trices envers les créanciers de T an e , elles ne seraient
pas là pour fa ir e valoir la vente ; elles n’auroient pas à
s’inquiéter s’ils seront payés des 376000 francs ; car l’acte
de 1788 leur vaudroit quittance de cette som m e, s’il y
avoit eu une réelle délégation qui rendît les sieur et
dame de la R oche-Lam bert débiteurs personnels, comme
délégués envers les créanciers*
M a is, d it-o n , les créanciers sont parties en Facte
1788. D on c il y a délégation et obligation directe
personnelle des sieur et dame de la R oche-Lam bert ;
l ’ont même exécutée en partie par leurs payemeus
de
et
ils
do
170644 francs.
Il est vrai que les syndics des créanciers de Tane sont
intervenus à la fin de Facte de 178 8 , pour ratifier et
c o n fir m e r la vente. Mais pourquoi se dissimuler les motifs
d e cette in terven tion , commandée par d’autres circons
tances.
Madame de M oütm orin étoit héritière1 bénéficiaire ;
elle habitoit Paris.
L a c o u tu m e de P a r is ne permet à l’héritier bénéfi
ciaire de vendre les meubles même de la succession,
sans les formalités judiciaires, auxquelles les créanciers
connus doivent être appelés. Cette coutume est muette
sur les immeubles; mais l’article 343 de celle d’Orléans,
plus n o u v e lle m e n t réfo rm ée, en est le supplém ent; et
s u iv a n t la ju ris p ru d e n c e constante à P a iis5 aucun héritier
bénéficiaire ne peut vendre les immeubles sans appeler
les créanciers.
�22)
A in s i, pour la solidité de l’acte de 178 8 , il falloit
leur concours. On eût bien pu faire valoir qu’ils avoient
coopéré aux affiches ; mais n’étoit-il pas plus sage de
leur faire approuver la vente, pour la sûreté de l’acqué
re u r, pour éviter des enchères et d’autres contestations',
q u i , bonnes ou m auvaises, ne sont que trop souvent
suggérées à des masses de créanciers ? Il étoit donc pru
dent ici d’avoir leur approbation; mais qu’avoit-elle de
commun à une délégation , lorsque ces créanciers, en
faisant une simple ratification in fo r m a com m uni d’un
acte qui ne contenoit qu’une indication de payem ent,
11e disoient pas dans leur intervention qu’ils acceptaient
l ’engagement des sieur et dame la R oche-Lam bert , et
qu’ils éteignoient celui de madame de M ontm orin ?
Ce n’étoit donc que pour lever une difficulté, et pour
la sûreté de la ven te, que les créanciers intervenoient";
mais point du tout pour une délégation qu’il ne faut
pas sous-entendre, et qu’on ne peut placer là sans cho
quer la loi elle-même. Q uœ dubitationis tollendœ causâ
in contractibus inseruntur, ju s com m une non lœdunt.
(
Quant aux payemens postérieurs faits par les sieur et
dame de la R oche-Lam bert aux créanciers, c’est encore
vouloir forcer le sens des choses les plus simples, que
d’y trouver une preuve de délégation parfaite et d’en
gagement personnel.
« P ou r qu’il y ait délégation (dit M . Pothier, n°. 564),
« il faut que la volonté du c r é a n c ie r de décharger le
« premier d éb iteur, et de se contenter de Vobligation
« de ce nouveau débiteur qui s’oblige envers lui à la
�< *3 )
« place du p rem ier, soit bien m arquée. C ’est pourquoi
« si P ierre, l’un des héritiers, pour se décharger d’une
« rente envers m o i, a , par un partage, chargé Jacques,
c< son cohéritier, de me la payer à sa décharge , il. riy aura
« pas de délégation, et Pierre ne sera pas déchargé envers
« m o i, si je ri*a i par q uel qu'acte déclaré fo rm ellem en t
« que je déchargeois P ierre : sans c e la , quoique j’aie
« reçu de Jacques seul les arrérages pendant un temps
« considérable, on rien pourra pas conclure que je Taie
« accepté pour mon seul débiteur à la place de P ie r r e 9
« et que j'a ie déchargé P ie r r e . L . 40, g. 2, ff. D e pact. »
Effaçons donc de cette cause que les sieur et dame
4 e la R oche-Lam bert ont contracté une obligation pertonnelle envers les créanciers de Tan e , sous prétexte
d’une délégation qui n’existe pas, et substituons-y qu’ils
ont contracté , com m e acquéreurs E T d é t e n t e u r s ,
l ’obligation de payer 375000 fr. pour le p rix de la terre
de Chadieu.
Q ue va -t-il en résulter ? R ien que de fort ordinaire ;
c’est que s’il y a eu ensuite des lettres de ratification, les
créanciers opposans auront une action sur le p r ix , et
n’en auront plus contre l’acquéreur personnellem ent.
Quand il y auroit eu délégation parfaite, elle seroit
anéantie par ces lettres de ratification qui ont opéré un
nouveau contrat entre l’acquéreur et les opposans, lequel*
contrat détruiroit absolument toute délégation anté
rieure \ c^r les conventions particulières de la vente-
�( 24 )
doivent cesser absolument pour faire place à celles que
la loi d ic te , et dont elle ordonne l’exécution.
L e résultat des lettres de ratification prises par le sieur
de la R o ch e-L a m b ert, sur la vente de 1788, devoit être
une procédure d’ ordre entre les soixante-treize créanciers
opposans.
Ce n’est pas ce qu’ont fait les créanciers de T a n e ; ils
ont commencé l’attaque par une inscription sur les biens
personnels du sieur de la Roche-Lam bert.
S’ils n’ont pas ouvert un ordre contre le sieur de la
R oche-Lam bert, e ’est qu’en effet ils ne le pouvoient pas;
car, i° . les syndics n’ont pas form é opposition aux lettres
de ratification prises par les sieur et dame de la R och eLam bert , sur la vente de 178 8 , mais seulement à la
vente faite au-sieur Sauzay le 27 novem bre 1791.
A in si ils ont transporté leur action en payement sur
le sieur S au zay, et ont laissé aux créanciers opposans
sur la vente de 1788, le droit exclusif d’attaquer les sieur
et dame de la R oche-Lam bert.
Ils së sont jugés eux-m êm es sur ce p o in t, par leur
exploit donné à Sauzay en l’an 4 , précisément parce qu’il
étoit obligé envers eux par ces lettres de ratification.
2°. Les lois invoquées par les créanciers , sur Immi
gration , prouvent qu’il 11’y avoit plus lieu à un ord re,
si un ém igré étoit débiteur, parce que le gouvernem ent,
dans ce c a s , forçoit la consignation en ses mains pour
distribuer les deniers lui-même.
3°. Les créanciers pouvoient encore moins ou vrir un
ordre contre le sieur do la R o c h e -L a m b e rt, après le
jugement
�(
25
)
jugement du 7 pluviôse an 1 2 , qui est rendu par suite
de leur provocation contre Sauzay. N atthey, son garant,
a répondu à leur demande ^n faisant juger qu’il avoit
payé valablement.
Les créanciers de Tarie se croient dispensés de tou t,
quand ils disent que cette chose jugée est un p iè g e , et
qu’ils ne veulent pas y tomber. Ils en sont les maîtres:
mais ce jugement est contr’eux; il n’est chose jugée pour
aucune autre personne.
'
L ’idée la plus bizarre des créanciers est de renvoyer
ce jugement à dém êler au sieur de la R och e-L am b ert,
qui n’y est pas partie, afin, disent-ils, de le faire réform er,
parce qu’on n’a pas pu valider une consignation faite sans
offres, sans permission de justice, sans appeler les créan
ciers, et faite surtout chez un receveur d’enregistrement.
Ils en concluent que ce versement est pour un ém igré,
et nullement pour libération envers eux.
Si les sieur et dame de la R oche-Lam bert avoient à
prouver sérieusement et nécessairement.que la somme
versée par le sieur Natthey a été pour le compte des
créanciers opposans, ils le prouveraient aisém ent, sans
rien contester des lois même qu’on leur oppose.
Il s’agit en ce point d’ une vérité de ré v o lu tio n , où il
ne seroit pas prudent de s’abandonner à ses propres
forces. P ou r être m ieux é co u té, en cherchant le sens
de quelques lois de circonstance que le législateur ne
nous a pas données comme ratio scr ip ta , il est plus
convenable d’emprunter le langage littéral d une autorité
prépondérante.
D
�c 76 )
L es créanciers de T a n e , en citant beaucoup d’arrêts/
ont prévu qu’on pourroit leur opposer celui rendu en
la C o u r de cassation entre les héritiers Lecom te et la
dame Bélanger; ils l’ont brièvem ent réfu té} en disant que
l ’espèce ne s’appliquoit pas à la cause.
Ils ont eu rigoureusement raison ; car quoique dans
cet arrêt il fût question d’une somme versée à la régie
par l ’acquéreur d’un bien de condam né, après des lettres
de ratification , les créanciers n’avoient de procès que
contre l’acquéreur qui avoit payé ; en sorte que minu
tieusement on peut bien dire que l’espèce n’est pas mot
pour m ot la même.
Mais ce n’est pas dans les motifs de l’arrêt que
nous puiserons des moyens j c’est dans le plaidoyer de
M . M e rlin , qui y a discuté avec sa profondeur ordi
naire le sens des lois qui ont obligé les débiteurs des
condamnés et des ém igrés à verser les sommes par eux
dues, à la régie de Venregistrement. Dans cette discus
sion , ce. magistrat n ’omet pas d’examiner aussi quel doit
être Veffet de ce versem ent, et pour q u i il est présumé
être fait. V o ici en peu de mots l’espèce de cet arrêt.
M . d’O rm esson , vendeur d’une ferme moyennant
425ooo fr. ? avoit reçu 340000 fr. ; il fut condamné à
m o rt, et la régie se fit payer 89904 fr. restans sur le
p rix de la vente.
A p rès la loi qui restitue les biens aux héritiers, la
dame B élan ger, acquéreur, prit des lettres de ratifica
tion. Les héritiers L ecom te, créanciers opposans, pour
suivirent le payement du prix, L a dame Bélanger se pré-
�( >7 )
iendit libérée m algré l’opp osition , et soutint que le
créancier n’avoit d’action que contre le trésor public ,
parce qu’ayant versé le prix de sa vente, comme y étant
obligée à cause.de la condamnation de son vendeur et la
confiscation de ses biens, son versement étoit pour le
compte des a yan t d r o it, et par conséquent des créan
ciers hypothécaires, en même temps que pour le compte
du vendeur.
C ’est pour examiner cette prétention que M . M erlin
discute; et nous allons voir qu’il l’adopte entièrement.
« Si au lieu de payer aux héritiers Lecom te (créanciers)
« le moatant de leur créance, la dame Bélanger l’eût
« payé à un tiers autorisé à recevoir p ou r eu x ( i ), leur
•« hypothèque se seroit éteinte ni plus ni moins que par
« un payement fait à eu x-m êm es... . . .
c< Q u e re ste -t-il à exam iner? Un seul point, celui de
-« s a v o ir si en effet les héritiers Lecom te o n t , par les
« m ains $ un tie r s , touché après la m ort du citoyen
cc d’Orm esson, ce qui leur étoit dû par la dame Bélanger.
cc (A rtic le 14 de la loi du 8 avril 1792. Les débicc teurs des ém igrés, à quelque titre que ce soit, ne
cc pourront se libérer valablement qu’en payant h 1$
,c< caisse du séquestre. )
« C ’est donc par forme de séquestre, que la nation
cc va recevoir les sommes dues aux émigrés. La nation
« ne les recevra donc pas précisément pour son compte
,« personnel,* elle les recevra pour le compte de ceux q u it
(i) Ces mots sont aussi en lettres italiques dans le plaidoyer
de M. M e rlin ; ils sont conform es à la r t. 1 ^ 9 du Code c iv il/
D 2
�'
( 28)
«
«
«
«
pourront y avoir droit ; elles les recevra par conséquent pour les remettre a u x créanciers que les émigrés
peuvent avoir laissés en F ran ce, sauf à en retenir le
restant à son p ro fit, s’il y a lieu..,. . . .
« (A rtic le 17. Les sommes déclarées en vertu des
c< articles précéd en s.. . . seront versées.. . , dans la caisse
« des receveurs de l’enregistrem ent, et ce nonobstant
« toutes oppositions de la part des créanciers de chaque
« é m ig ré , et sans y préjudiciel'. )
« V o ilà qui confirme , qui développe bien clairement
' « les conséquences que nous tirions tout à l ’heure de l ’ar« ticle 14 de la loi du 8 ‘.avril 1792. L e s oppositions des
« créanciers d’un émigré ne peuvent ni em pêcher ni
« dispenser son débiteur de verser à la caisse du rece« veur de l’enregistrement le montant de ce qu'il d o it,
« mais ces oppositions n’en souffriront point pour cela :
« elles tiendront sur la som m e que le receveur de Ven« registrement aura touchée. P reuve évidente et sans
„« réplique que le receveur de Venregistrement touche
« pour le compte des créanciers opposans ; p r e u v e évi
te dente et sans réplique que les créanciers opposajis
« sont censés recevoir par les m ains du receveur de
« Tenregistrement j preuve évidente et sans rép liq u e,
« enfin, que le débiteur, en se libérant entre les mains
« du receveur de l’enregistrement, est censé p a y e r , non
« pas seulement à la république, m ais encore a u x créan« ciers même opposans. » Questions de d ro it, tome 5 ,
y 0. Lettres de ratification.
Il faut rem arquer maintenant que c’est dans ce sens
que la question avoit été déjà jugée. Les créanciers d’O r-
�^
( 29 )
messon n’avoiënt été autorisés à attaquer l’acquéreur qu'en
cas d?insuffisance des deniers versés, et le recours n’étoit
ouvert contre la succession d!Ormesson qu’au même cas
d’insufiisance. L e pourvoi des créanciers fut rejeté.
Les conséquences de ce qu’on vient de lire sont toute
la défense du sieur de la Roche-Lam bert ; elles prouvent
que les créanciers de Tane ne se sont fait une cause qu’en
dénaturant jusqu’aux faits,' et en jouant sur les mots.
' Quand ils ont poursuivi Sauzaÿ pour les payer comme
leur d ébiteur, N atthey, son garan t, a fait juger contre
e u x qu’il étoit valablement libéré par deux quittances
de l’an 2 et de l’an 4. Ces expressions ont paru équivo
ques aux créanciers; ils ont dit qu’il ne s’ensuivoit pas
la preuve d’un p ayem ent, mais plutôt d’un versement
pour un ém igré.
Il falloit bien le dire ainsi pour s’emparer de l ’arrêté
du 3 floréal an 1 1 , qui ne se rapporte qu’aux créanciers
d’ém igré qui n’ont pas provoqué leur liquidation , et à
l’égard desquels il n’y a pas eu de payem ent. ?
Disons donc avec M . M erlin que si Natthey a payé
•le prix de C h ad ieu, soit en l’an 2 , soit en l’an 4 , ce n ’est
pas pour le sieur de la Roche-Lam bert qui n’avoit aucun
drçit à ce p r ix , mais pour les créanciers hypothécaires.
- A in si, quand les créanciers de Tane pourraient s’em
parer des lois d’émigration qui ne les regardent pas, il
est bien prouvé qu’ils n’y gagneroient rien', puisqu’aux
termes des lois on a versé pour eu x : par conséquent
ils sont payés; e t, ne craignons pas de ré p é te r, 1’arrçté
�( 3° )
du 3 floréal an n , . l a seule loi de leur système, ne-se
rapporte nullement à eux.
D e là est venu cet embrouillement de cause, de moyens
et de procédure. Il falloit se faire une qualité qu’on n’a
pas, épouvanter par une inscription de ôooooo francs,,
et bien se garder de'com m encer rune attaque d irecte,
pour mettre le prétendu débiteur dans un plus grand
embarras. ,
’
*
Mais qui a autorisé', on le ré p è te , les créanciers de
T an e à prendre cette inscription? car il faut avoir un
titre exprès et portant obligation directe de la part d’un
in dividu, pour ¡^rendre inscription sur ses biens. E t certes
ces créanciers qui n’en avoient pas en 1791 contre le
sieur de la R o c h e -L a m b e rt, en avoient encore moins
en 1808.
: t
A
ppel
des
h é r i t i e r s
de
M
o n t m o r i n
.
leur égard , il n’est pas.douteux qu’une obligation
personnelle de la part: des sieur et dame de lu R ocheLam bert a existé.
'
-
i
A
M ais existe-t-elle encore après des lettres de ratification
et un versement jugé valable? C ’est ce qu’il est difficile
d’adopter.
-'iL e s héritiers de M ontm orin n’auroient une action di
recte que dans trois cas qui doivent c o n c o u r ir .
L e p rem ier, en rapportant le consentement exprès
des créanciers opposans aux deux lettres de ratification.
L e sbçond,' en prouvant que les acquéreurs postérieurs,
�( 31 )
chargés de payer en l’acquit du sieur delà Roche-Lam bert,
n ’ont pas payé.
L e troisièm e, en prouvant encore que la perte des
versemeus faits p our la libération de Chadieu doit être
plutôt pour le sieur de la R oche-L am bert, à cause de son
ém igration, que pour les héritiers de madame de M ontr
m o rin , à cause de sa condamnation révolutionnaire.
V o ilà ce que devoient justifier, les héritiers de Mônt>
m orin, au lieu de se jeter dans les questions de savoir si
les versemens ont dû être faits avec ou sans des offres ^
avec ou sans permission de la justice, et si après les lettres
de ratification, et même après le 23 septembre 17 9 3 ,
c’étoit encore chez le notaire Xrutat que les deniers de
voient être versés, comme on ne s’est pas fait un scrupule
de le soutenir.
4
;
/
C e p e n d a n t les héritiers de M ontm orin ont fait une
inscription, non sur Chadieu dont ils ne veulent pas,
mais sur les biens particuliers du sieur de la R ocheLam bert. En avoient-ils le d ro it?
•
v
• D ’abord ils’ ne rapportent ni m ain levée, : ni consen
tement des créanciers opposans : ce seroit cependant chose
de prem ière n é c e s s ité , quand il n ÿ auroit pas .d’autre
o b sta cle .
::
:
:
En second lieu , comment prouvent-ils que les acqué*
reurs postérieurs n’ont pas p a y é ? ,
,
T o u t ce qu’on vient de dire prouve avec évidence une
libération.
Les sieur et dame de la R oche-Lam bert ont acheté
d’eux et se sont engagés à payer le p r ix , soit à T ru ta t,
�(
3*
)
soîï aux créanciers, à déléguer dans le cours de deux
années.
Ensuite Chadieu a été vendu à S au zay, à qui on a
laissé l’option de payer 375000 f r . , soit aux vendeurs,
soit aux créanciers, et spécialement a u x créanciers p ri
vilégiés sur la terre.
•
On ne peut pas tirer parti de cette option, car le sieur
de la R oclie-L am bert n’a rien touché de ces 376000 fr.
laissés dans les mains de son acquéreur pour faire face à
tout ; et le sieur Sauzay ayant mis son contrat au bureau
des h ypoth èques, a contracté Vobligation directe envers
les mêmes créa n ciers, de payer les 376000 francs.
• Ce contrat judiciaire résultant des le tt r e s e ffa c e l’al
ternative : c’est donc comme si la vente de 1791 contenoit
indication expresse de payer 376000 fr. a u x créanciers
privilégiés seulem ent.
A son to u r, le sieur Sauzay vend au sieur W a llie r ;
et il a si bien entendu que les oppositions formées à ses
lettres, par le syndic des créanciers d e T a n e , l’ont obligé
de ne payer qu’à eux , qu’il délègue W a llie r ou Natthey
à paj^er 355ooo fr. a u x créanciers de T a n e , opposans
a u x lettres de ratification.
Celui-ci appelle les créanciers en nivôse an 4 , pour
payer.en leur présence, se disant obligé de les payer.
Il les assigne comme opposans aux lettres de Sauzay, et
aux domiciles élus par leurs oppositions. Il procède tant
en son nom qiCau nom des prem iers acquéreurs : c’est
en cette qualité qu’ il verse le prix de sa vente.
; Ensuite il les assigne, et fait juger contre e u x y en qua
lité de créanciers de Tane> c£tv il est libéré.
Et
�( 33 )
E t on appelle ce jugement res inter alios acta. On
dit qu’il ne s’agissoit de faire juger le versement valable
que dans l’ intérêt d’un é m ig ré , parce qu’il est question
de lui dans les dires du sieur Nattliey. M ais, i° . il est
aussi question des héritiers de M ontm orin et de la 'con
fiscation de leurs biens ; car Nattliey’, qui clierchoit à
consolider sa lib ératio n , ne manquoit pas de justifier dé
son m ieux son versem en t, par le narré de toutes les
circonstances qui pouvoient la rendre meilleure.
2°. Ce qui prouve que ce jugement n’étoit pas contre
l’ém igré plutôt que contre un autre, c’est que cet ém igré
n’est ni p a rtie , ni appelé à ce jugement dont on veut
lui appliquer tout l’effet.
O r , vit-on jamais de plus inconcevable système, nonseulement en matière de chose ju g é e , mais encore en
matière d’hypothèque et de lettres de ratification ?
D ’un cô té, ce sont des créanciers opposans qui veulent
n’avoir plus rien de com m un, ni avec celui qui a obtenu
les lettres, ni avec son mandataire, chargé de le libérer
envers ces mêmes créanciers opposans, et qui ne veulent
s’adresser qu’au prem ier acquéreur, après avoir laissé
juger contre eu x la validité de la libération suivie de la
mainlevée de leurs oppositions; mainlevée qui lève toutes
les équivoques sur Veffet du payem ent.
D ’un autre côté, ce sont les héritiers du vendeur q u i,
après une libération jugée v a la b le, et une mainlevée
des oppositions, ont la bonté de se réunir spontanément
avec les créanciers d’une succession bénéficiaire , pour
demander qu’on annulle cette libération sans attaquer
la jugement.
E
�( 34, )
N ’est-ce pas un abus du raisonnement que de soutenir *
de tels paradoxes? Si mon acquéreur-chargé de vous
p n y e r a fait juger contre vous qu’ i l avoit valablement
p a yé y qui pourra d ire , sans choquer le bon sens, que
•je n’aiipas payé m oi-m êm e, et que je reste débiteur?
A II devient donc bien inutile de rechercher si le verse
ment a pu être fait comme il l’a été , quelle étoit la
caisse ou il falloit verser, et s’il y avoit suspension des
remboursemens ; car re - judicata pro veritate habetur,
un payement qui auroit été fait en assignats, après leur
suppression, seroit certainement réputé être en trèsbonne m onnoie, si un jugement l’avoit'dit : n u l n ’auroit
le droit de parler des vices d’une telle libéi’ation , tant
que ce jugement ne seroit pas attaqué.
S’il s’agissoit néanmoins d’examiner la jurisprudence
qu’on a p r é te n d u si constante sur la défense des lois de
c o n s ig n e r sans o ffres p ré a la b le s , et sans appeler les
créanciers, il se trouveroit à côté des c ita tio n s n o m
breuses faites par les adversaires, d’autres citations plus
applicables et plus précises sur la matière des consigna
tions fo rcé es, après des lettres de ratification.
Mais à quoi serviroit cette surabondance de doctrine
et de dissertation, si ce n’est à grossir un écrit de choses
inutiles , puisque les créanciers et les héritiers de Tane
ne veulent rien discuter de tout cela avec le mandataire
de Sauzay, chargé de faire face à, leurs oppositions,
qu’au contraire ils passent condamnation sur la validité
de son payement.
E t ; chose étoïlnante, ce que les adversaires ne pou-
�( 35 )
voient opposer que sur le procès de Pan 1 2 , et à Natthey,
ils l’ont réservé pour les sieur et dame de' la Roche-,
L am b ert, après avoir, laissé juger que le payement étoit
régulier.
S’il n’y avoit pas de collusion eçtre les, héritiers et les
créanciers, est-ce que les héritiers de M ontm orin ( qui
après les oppositions aux lettres ne sont plus que les
cautions du payement ) n’opposeroient pas aux créanciers
l ’exception cedendarum actionum , et ne leur diroient
pas que s’il leur a plu de laisser juger que leur gage
étoit perd u , et s’ils’ne sont pas en état de subroger à leurs
hypothèques, ils n’ont plus de recours à exercer.
S’il n’y avoit pas collusion encore entre les créanciers et
N atthey, qu’ils expliquent donc pou rquoi, se disant aussi
certains de la nullité de ses consignations, ils craignent
de s’adresser à lui ou à Sauzay, qui par'ses lettres de ra
tification a contracté l’obligation de payer aux créanciers
privilégiés 375000 fr. ; pourquoi iis paroissent regarder
ses versemens de Tan 2 et de l’an 4 comme un chiffon
inform e, sans le prouver, s’ils en savent si bien le secret?
Mais l’exception que ne veulent pas opposer les héri
tiers d e T a n e , le sieur de la R oche-Lam bert le fera , et
il en a le pouvoir. On ne peut le forcer de payer sans
qu’il ait le droit d’opposer aux créanciers de Tane que
s’ils ne font pas tomber le jugement de l’an 1 2 , et s’ils
ne remettent pas les parties au même état où elles étoient
avant ledit jugem ent, ils ont perdu tout- recours contre
lu i; car il est d’une épouvantable injustice qu’on puisse
E a
�C 36 ) •
lu i'd ire : « V ou s avez acheté Chadieu , et vous l ’avez
»■
‘ revendu à la charge de nous payer; nous avons accepté
« cette charge par une opposition. Maintenant nous ne
« pouvons vous subroger ni à nos droits sur Chadieu ,
« ni à nos droits sur le prix ; et cependant nous voulons
* être-payé par v o u s, qui ne le serez par personne, et
« qui n’aurez ni la chose ni le prix. »
Quelque atroce que soit ce système, on ne rougit pas
de le sou ten ir, 011 le trouve au contraire fort équitable;
on se passionne même au point de dire que M i de la
Roche-Lam bert manque à ses devoirs lorsqu’il n’est pas
du même avis. A la vérité ce -n’est ni dans Condillac ni
dans Puffendorff qu’on va puiser pour justifier l’équité
mathématique de ce raisonnem ent; c’est seulement dans
les lois sur les ém igrés, qu’on a prétendu trouver la preuve
que res périt domino signifie, en langage de révo lu tio n ,
que le prix d’un immeuble dû à'des créanciers opposans,
pour une vente antérieure à toute émigration , a péri
p ou r Témigré,
.
Pourquoi ajouter,à la dureté des lois jrévolutionaires,
quand elles ne sont pas coupables de cettei subversion de
tous les principes ?
Les lois de 1792 ordonnèrent le séquestre des biens
des ém igrés, et chargèrent la régie de l’enregistrement
de ce séquestre; elles ordonnèrent a u x débiteurs des
émigrés de verser dans la caisse de ce séquestre.
Mais - qu’y a-t-il de c o m m u n entre Chadieu vendu à
Sauzay par acte n otarié, en 1 7 9 1 , et un bien d'ém igré?
Qu’y a-t-il de commun entre un acquéreur non émigré^
'
�( 37 )
qui par des lettres de ratification a form é un contrat ju
diciaire avec des opposans non ém ig rés, et des débiteurs
d’émigrés ?
Mais admettons en toute hum ilité qu’ un républicole n’a
dû souffrir de rien,* et que tout le sacrifice doit tom ber
sur le proscrit, n’y a-t-il pas lieu de s’étonner que les
héritiers de M ontm orin soient ici à l’unisson avec les
créanciers de Tan e , pour dire que rémigré seul doit
perdre le versement ?
■Si la Cour, partageant l’opinion des adversaires, quoi
qu’à notre sens elle déplace toutes les idées, jugeoit que
N atthey,. quatrième débiteur, ayant payé la dette de
Sauzay, troisième débiteur, n’a pas libéré les sieur et
dame de la Roche - Lam bert , seconds débiteurs, il
faudra b ien , pour être conséquent, arriver jusqu’aux
héritiers de M on tm orin , premiers débiteurs, et dire que
le moins qui puisse résulter de ce cahos, c’est que cette
dette a subsisté concurremment sur ces deux derniers.
Mais si M . de la Roche-Lam bert a été sur la liste des
émigrés , madame de M ontm orin a été condamnée révolutionnairement : ainsi les lois sont les mêmes pour les
deux circonstances.
L ’article I er. de la loi du 26 frim aire an 2 , dit que les
biens des condamnés devoient être régis et liq u id és, et
vendus comme les biens des émigrés.
L a seule réponse qu’on ait pu faire à cette observa
tio n , a été de dire que madame de M ontm orin fut con
damnée le 20 floréal an 2 , et que la nouvelle n’a pu
�( 3 8 }
arriver en Suisse assez tôt pour que Natthey revînt en
A u verg n e consigner le 26.
Cette réponse est-elle bien sérieuse contre celui qui
prend la chose en l’état 011 il la tro u ve, lorsque surtout
on sait fort bien que ce n’est pas le N atth ey, de N y o n ;
qui a consigné à Sain t-A m an t?
Que l’on dispute tant qu’on voudra contre le sieur
N atth ey, sur la vraisemblance de ses versem ens, sur
leurs dates et leur réalité; tant qu’il y a quittance et juge
ment de libération, le sieur de la Roche-Lam bert profite
du payement fait par son mandataire, qui ne peut être
libéré sans que le mandant le soit.
Si malgré cette évidence de libération il falloit en venir
à imputer sur q u e lq u ’ u n la perte de ses versem ens, il
est évident que ce ne peut êtrer sur celui à q u i il aurait
p ro fité, c’e s t - à - d i r e , aux héritiers de Tane , comme
vendeurs de la terre, comme propriétaires du p r ix , puis
qu’ils étoient propriétaires de Chadieu juqu’au payement.
Il n’y a en effet aucune raison de p r é f é r e r pour la
perte, les sieur et dame de la R o c h e -L a m b e r t, et de
s’arrêter à eux plutôt qu’à Sauzay ou W a llie r ; il y auroit
à cela une inconséquence tout arbitraire ; car il faut
opter entre le vendeur oli l’acquéreur, dont les lettres
sont grevées d’oppositions : l’un est le débiteur'personnel,
et l’autre le débiteur hypothécaire.
Les acquéreurs intermédiaires n’ont contracté qu’une
obligation transitoire : à aucun titre le principe res périt
domino ne peut être pour eux.
Car la terre n’étant pas à e u x , la somme consignée
�( 39 )
n’etoit pas pour eux. Q u’elle ait été versée pour-les'hé
ritiers de M ontm orin ou pour les créanciers de Tane,.
c est toujours aux héritiers de M^ontmonn que lu somme
devoit profiter, puisqu’elle étoit destinée à payer leurs
dettes.
Comment donc a-t-on pu espérer de prouver qu’une
somme devoit périr pour les sieur et dame de la R ocheL a m b e r t, qui n’étoient propriétaires ' de cette somme
à aucun titre et en aucune q u alité, pas plus qu’ils ne
l ’étoient de Chadieu ?
Il faut conclure plutôt que si la libération de Natthey
n’a profité qu’à lui seul et n’a eu lieu qu’à cause du sé
questre national, c’est le vendeur séquestré qui se retrouve
passible de sa dette, et non l’acquéreur, qui ne s’est obligé
que comme détenteur, et qui a donné pouvoir à un tiers
de verser pour lui.
Cum jussu meo id quod m ih i debes sohns creditori
m e o , et tu à me et ego à creditore meo liberoi\ L . 6 4 ,
ff. D e solutionibus.
S o u v e n o n s -n o u s e n c o r e q u e M . M e r lin a p r o u v é q u ’ u n
v e r s e m e n t fa it à la caisse d u s é q u e s tr e , é to it ce n sé ê tre
fa it a u x créa n ciers , et q u e c ’est a b s o lu m e n t c o m m e si
ces c ré a n c ie rs a v o ie n t e u x -m ê m e s re ç u et d o n n é q u itta n c e .
T o u t ce qu’il a dit se rapporte parfaitement aux hé
ritiers de M ontm orin, qui viennent se présenter comme
ayant été créanciers de l’émigré pour lequel ils assurent
que la somme étoit versée.
U n autre moyen s’applique1 encore aux héritiers de-
�C 4®)
M ontm orin ; c’est que leur système de se dire créanciers
d’un ém igré , conduit à remarquer que c’est la nation
qui les a représentés l’un et l’autre depuis le 20 floréal
an 2 , jusqu’au 21 prairial an 3 , époque de la resti
tution des biens aux condamnés.
O r, la nation auroit été débitrice et créancière du prix
de Chadieu : donc il y a extinction de la dette par con
fusion. (C o d e c iv il, art. 1300. Sénatus-consulte, du 6
floréal an 1 0 , art 17. )
A in s i, et dans toutes les hypothèses, les héritiers de
M ontm orin sont payés par N a tth e y , ou n’ont de recours
que contre Natthey ou Sauzay. Ils ne s’appliqueront pas
l’arrêté du 3 floréal an 11 , pour revenir de la nation à
l’ém ig ré, puisque la nation les a traités de m êm e, et
leur a rendu leurs droits ut ex nunc. V o ilà , n’en dou
tons pas , ce qui est dém ontré jusqu’à l’évidence.
A
ppel
contre
le
sieur
A
m édée
de
T
an e
.
L e jugement de Clerm ont n’est pas conséquent dans
ses dispositions : il juge d’abord que le versement fait
par le sieur Natthey a éteint les délégations dont Sauzay
avoit chargé W a llie r ; et cependant il condamne les sieur
et dame de la Roclie-Lam bert à payer la créance du sieur
A m édée de T a n e , qui prétend représenter pour le tout
le sieur de Santenas, prêteur de 30000 francs.
S’il est jugé que Natthey a valablement payé le prix
entier de sa v e n te , il est constant que le sieur Santenas
n’a plus d’action ; car le sieur de la R oche-Lam bert a
laissé
�(4 0
laissé entre les mains de Sauzay une somme suffisante
pour payer tout le p rix par eux d û , c’e s t - à - d i r e ,
375000 fr. , quoiqu ils eussent payé déjà 170644 fr. :
à son tour, Sauzay a laissé à Natthey une somme suffisante
pour désintéresser les ayant droit de ses vendeurs.
A u reste, il suffit de renvoyer sur cet appel à ce qui
a été déjà d it, et de se réserver contre Natthey la ga
rantie que le tribunal de Clerm ont n’a pas voulu pro
n o n cer, par une,autre inconséquence.
A
ppel
contre
le
sie u r
N
a t t h e y
.
Cet appel n’a qu’un objet subsidiaire, puisque, si on
ne demande rien au sieur de la R oche-Lam bert, il n’aura
rien à demander au sieur Natthey , dans son propre
intérêt.
Mais si, par impossible, le sieur de la R oche-Lam bert,
qui n’a pas Chadieu, étoit condamné à payer le prix de
Chadieu , alors bien évidemment le sieur Natthey ne
peut éviter une garantie, puisqu’il s’est engagé expressé
ment à faire payer 355ooo francs a u x créanciers de
Tane , opposans a u x lettres de ratification prises par
S a u za y , ou à consigner après le sceau de ses lettres,
Dira-t-il qu’il a payé en vertu d’une contrainte ; que sa
libération est jugée valable açec les créanciers,* qu’ainsi
il a rempli son obligation mot pour mot ?
Mais tout cela ne le délie pas de son engagement
envers le vendeur ; car il ne suffit pas qu il d ise , j’ai
payé; il doit être prêt à faire valoir son payement vis-àvis le vendeur, toutes les fois que celui-ci sera recherché.
F
�( 4» )
.
Lorsqu'un acquéreur s’est soumis à payer le p rix de
sa vente à des tiers, ce n’est pas assez qu’il rapporte des
quittances* il n’est pas dégagé pour cela de faire juger
en -présence de son vendeur qu’elles sont suffisantes pour
lu i, de faire en sorte qu’il soit quitte envers les créanciers
qu’il a spécialement d élégués, et d’arrêter à toutes les
occasions les poursuites qui pourroient le troubler.
Cet engagement est tellement de stricte justice, que les
lois sur le papier-m onnoie n’ont point assimilé les ac
quéreurs chargés de payer des délégations, aux autres
acquéreurs de cette époque : elles ne leur ont permis
de réclamer aucune réd u ction , et ont rigoureusement
exigé qiüils rapportassent les quittances des créanciers
délégués par la v en te, même lorsqu’il n’y avoit qu’une
simple indication de payement.
Toutes les difficultés du payement fait par un acquéreur
ne peuvent être levées et discutées que par lui : sans cela,
par une collusion coupable, il pourroit obtenir des créan
ciers délégués qu’ ils s’obstinassent à ne poursuivre que le
vendeur, lequel n’ayant rien payé lui-m êm e, seroit privé
de tous moyens de défense.
E s t - il proposable, en effet, d’assujétir le sieur de la
R o ch e-L a m b e rt à faire valoir seul les quittances d’un
payement qu’il n’a pas fait, vis-à-vis des créanciers qui
suspectent ce payem ent, et q u i, m algré un jugem ent,
persistent à dire que la libération est irrégulière?
Comment le sieur de la R o c h e -L a m b e rt sera-t-il en
état d’éclairer les héritiers et créanciers de T an e sur
leurs doutes, et de leu r apprendre si le prem ier verse
m ent de 3 55 ooo fr . 7 que N atthey dit avo ir fait à Saint-
�( 43 )
A m ant le 26 floréal an 2 , sans appeler personne, doit
être préféré au second versement de 619604 f r . , qu’il
dit avoir fait chez le même receveur le i5 pluviôse an 4 ,
en appelant les créanciers opposans ?
A u cun autre que Natthey ne peut dire aux créanciers
si sa quittance du 1 5 pluviôse an 4 est un versement ou
un co m p te, si la quittance de 32861 fr. en fait partie,
et enfin si les 264604 fr. qu’il a demandés à la régie pour
indemnité d’un séquestre de huit m o is, lui ont été tenus
à compte ; car rien ne donne la clef de tous ces faits *, et
cependant il faut savoir ce que la république a retenu,
pour savoir ce que Natthey a payé réellement.
L e sieur Natthey paroît vouloir dire qu’il a payé en
vertu d’un ordre de la r é g ie , et qu’il n’a pas d’autre
compte à ren dre, puisque sa quittance est un acte ad
ministratif.
Mais où auroit-il pris cette étrange doctrine ? elle
eût été très-commode pour payer ses dettes sans gêne;
car à supposer que la régie eût refusé une contrainte à
celui qui désiroit lui com pter 355ooo francs , il faut au
moins convenir qu’une contrainte 11’est pas un ordre, et
n’a rien de commun avec un acte administratif.
Que Natthey objecte aux créanciers opposans tout ce
qui lui semblera bon pour faire valoir la consignation
que son contrat l’oblige à faire partout où besoin s e r a ,
après le sceau des lettres de ratification ,* mais plus il
sera en règle pour ce qu’il a fait comme m andataire,
plus il lui sera aisé de faire valoir son »payement; et il
ne s’en dispensera pas en rejetant la validité de ce qu’il
F 2
�( 44 )
a fait aux risques de son m andant, car il est obligé sans
exception , ou de faire va lo ir ses payemens contre les
créanciers et de faire cesser leur réclam ation, ou de
garantir le sieur de la Roche-Lam bert de l’effet de leurs
recherches.
' Que si le sieur Natthey p réten d o it, ainsi qu’il en a
menacé , s’isoler de cette procédure , en disant que la
validité de ses versemens n’est pas de la compétence judi
ciaire, on lui répondroit qu’il ne peut pas proposer de
déclinatoire, par plusieurs motifs.
i° . Parce que lu i-m êm e a soumis la validité de ses
versemens à l’autorité judiciaire, et a obtenu jugement
à cet égard le 7 pluviôse an 1 2 ; il a opposé ensuite ce
jugement comme un moyen pérem ptoire sur la cause
actuelle.
2°. Parce que la demande en garantie a été jo in te ,
et que loin d^attaquer le jugement de jonction, le sieur
Natthey a plaidé au fond.
3°. Parce que dans des lettres missives adressées au sieur
de la Roche*-Lambert, le sieur Natthey a offert sa garantie
pour le procès actuel; en sorte que ce nouvel engage
ment a produit une nouvelle action qui ne peut être
soumise qu’aux tribunaux civils.
40. Parce qu’ il résulte des arrêts déjà cités de part et
d’autre, que les tribunaux ont toujours statué sur la vali
dité des versemens faits dans les caisses publiques par les
acquéreurs même des biens provenus d’émigrés ou con
damnés.
Dans tous les cas, les lettres du sieur Natthey suffi-
�( 45 )
sent (i) ; l’offre expresse de sa garantie a été acceptée ex
pressément par le sieur de la R oche--Lam bert dans ses
21 juin 1808.
(1) « J’ai reçu votre le ttre , M onsieur, et je ne veux pas un
cc seul instant vous faire attendre ma réponse.
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc
cc
« J’ai d’abord été fort surpris des inscriptions que les créan
ciers de T a n e ont prises sur vos biens ; j ’ai dû ensuite me
souvenir qu’ils avoient précédem m ent regretté de n’avoir pas
pris cette voie d’abord , et de s’ètre engagés dans une autre
voie qui ne leur a pas plus réussi que c e lle -c i ne peut leur
prom ettre du succès. V ous croyez d’a v a n c e , je l’espère, que
toutes choses sont parfaitem ent en règle vis-à-vis d ’eux...........
ce V o u s avez quelqu’apparence d’inquiétude sur le vrai propriétaire de Ghadieu. D ’un mot je vous tirerai de toute inquiétude. I l n e t i e n d r a q u ’ a vous q u e N a t t i i e y o u m o i , a v o t r e
te C H O I X ,
OU T O U S D E U X R E U N I S , N E V O U S O F F R I O N S D E NO US SU RS-
cc
a
titu e r
vous
dans
cette
a ffa ir e
: je vous en passerai acte
cc public avec grand plaisir et sans inquiétude ; c a r , encore une
ce fo is , toutes Choses sont parfaitem ent en règle avec ces mescc sieurs et tous autres.
cc
cc V oilà u n prem ier problèm e réso lu , à votre satisfaction sans
doute. V ous v o y e z q u e N a t t i i e y n i m o i n e n o u s e f f a ç o n s ;
te Q U E M E M E NO US VOUS' O F F R O N S , SOUS N O T R E G A R A N T I E E T C E L L E
CC D E
C H A D I E U , D E N O U S SU B S TI T U E R
A VOUS. . .......................
cc V ous êtes encore dans l’e r r e u r , quand vous supposez que
cc les créanciers de T an e avoient fait opposition aux lettres de
cc ratification obtenues par M. votre, père sur MM. de T ane.
cc Fayon s’in scrivit, fit inscrire aux hypothèques d’autres créan
ce ciers non u n is, et ne fit point inscrire l’union...............I I n ’y
<c eut aucun acte conservatoire de la part de l’union;
�( 4 <S )
réponses : ainsi ce nouvel engagement passé entre M . de
Batz, représentant JNultliey , et M . de la R o ch e-L am b ert,
« Mais aux lettres de ratification prises par Sauzay sur M. votre'
« votre p è r e , l’union fit o p position , alors trop tardive si elle
cc étoit nécessaire. En l’an 4 > il y eut des lettres de ratification
cc prises sur S a u za y, et l’union eut le tort extrêm e de ne pas
cc prendre d’in scrip tio n , ni faire d’opposition.
cc Ils n’ont donc que celle du 2 2 décem bre 1 7 9 1 ; mais il y a
cc. condam nation contr’eux sur c e p o in t, à l’occasion de l’inscc
tance très-âpre et très-vive qu’ils avoient com m encée à Paris
cc
contre Sauzay. Repoussés dans cette voie par laquelle ils atta-
ct
quoient, dans S a u za y, W a llie r et N a tth e y , et se trouvant à
bout de voie , c ’est alors qu’ils regrettèrent de n’avoir pas
attaqué d’abord M. votre père ou votre fam ille, au lieu de se
faire condam ner sur leu r inscription de 1 7 9 1 . M a is , à dire
v r a i , je n’aurois pas im aginé qu’après plusieurs années de
silence et d’inaction, ils auroient im aginé de finir par où. ils
auroient voulu com m encer. Mais les actes su bséqu en s , leur
liquidation, l e u r payem en t, sont tels qu’ils ne peuvent cherc h e r qu’à effrayer et à a r r a c h e r q u e l q u ’a r g e n t , du moins de
Sauzay : c ’étoit contre Sauzay leur plus solide projet.
cc
cc
cc
ce
cc
cc
cc
cc
cc
cc S ’ils ont pris des inscriptions folles sur vos b ie n s , ils en
ce
ont égalem ent pris sur Chadieu.................... Instruisez-m oi de
ce tout ce qui s’est passé d eux à vous dans cette insurgence, et
ce vous aurez de ma part, ou par m oi, instructions parfaites. Je
ce vous répète que m ’identifiant à N a tth e y , je me mettrai avec
cc plaisir à votre lieu et place. N e perdez pas un moment à m e
ce faire savoir s’il y a de simples inscriptions prises, ou s’il y a
ce quelque demande form ée. V oilà de ma part, j ’esp ère, fran« ch ise, loyauté autant que vous pouvez d ésirer, et plus que
« vous ne pourriez exiger.
cc Recevez l’assurance de mon bien sincère et invariable
�.
(
47)
est aussi valable que s’il eût été souscrit par un acte en
form e; ca r, d’après les principes, on contracte valable
ment per epistolam a ut per n un tium .
ce attach em en t, et veuillez le faire agréer à M. votre père,
te S ig n é D e B atz.
« D ès que j ’aurai votre ré p o n se , je partirai ou vous écrirai
cc sur-le-cham p. Je ne suis nullem ent in q u ie t, parce que je
ce connois les faits, et qu’ils sont réguliers. »
Paris, g juillet 1S08.
,
v*
te
te
«
ce
« Je n'ai pas perdu de tem ps, M onsieur, à prendre tous les
re.nseignemens et toutes les instructions utiles contre les créan
ciers de Tane. J’aurai une consultation dés plus habiles gens,
L ’a f f a i r e paroit inattaquable par les créanciers de T an e. Il est
heureux pour vous et pour moi que j’aye pris, dans le temps
u t ile , surabondance de p récau tio n , pour acquitter à la fois
ce
vous et m o i, et pour m ettre dans tous les sens les créanciers
c< en dem eure. V ous ne pouvez vous défendre que par mes
cc pièces.....................M. votre père n’auroit pas dû prendre inscc cription sur C h a d ie u , surtout sans m ’en prévenir : il n’auroit
et pas dû en prendre au nom d’autrui ; il ne devoit voir que les
cc créanciers. Son intérêt est de faire cause com m une a v e c
cc Chadieu : quiconque lu i dira le contraire se tro m p era , rin
ce duira en erreur. A u reste , je lui dem ande, et j ’espère qu’il
ce ne m e le refusera pas , de vouloir bien faire rayer son inscc cription au bureau de Clerm ont. J’ai b e so in , pour ma seule
« délicatesse v is-à -v is de deux personnes à qui j’ai fait deux
« em prunts, d’avoir leur certificat d’inscription avant le vôtre,
« parce qu’agissant de bonne foi et d entière confiance en m o ir
et ils ont reçu dans leu r acte ma parole d’honneur qu’il n ’existoit
�( 4 8 }
M . de Batz, représentant N atthey, a toujours continué
d’agir en conséquence de ce nouvel engagement. Il a
envoyé au sieur de L aroch e-L am b ert la consultation
très-détaillée de M M . P oirier et Bellard (annoncée dans
Ici dernière le ttre ), pour le rassurer sur ses risques, et
lui attester que les versemens de Natthey éteignoient la
créance.
11 y a donc impossibilité de délier le sieur Natthey de
son nouvel engagem ent, qui lève tous les scrupules des
lois de rém ig ratio n , lesquelles n’ont rien de commun à
une garantie offerte et acceptée en 1808.
te
a
pas d’hypothèque sur Chadieu ; e t , certes , je croyois la
donner en toute vé rité, et il se trouve que la vôtre existoit
le jour m êm e où j’affirmois q u il n’en existoit p a s, ou du
moins que celle du m aire de V i e , qui est nulle de f a it , et
celle de deux pauvres petits créanciers que j’ai fait condam ner
à Riom , et que j’espère faire rayer à tous momens. M. votre
p è r e , a p r è s a v o ir fait r a y e r celle q u ’il a déjà faite , pourra
au m êm e instant , s’il le j u g e à p r o p o s , la fa ir e r é ta b lir . Je
n’y suis que pour ma délicatesse seu lem en t, et j ’espère qu’il
cc
ne me refusera pas cette satisfaction lé g ère, q u i, dans aucun
cc
cc
«
«
cc
«
c<
cc cas , ne peut lui être dom m ageable , et qui a été pour moi
ce le sujet d’une véritable contrariété , honneur et délicatesse
cc
parlant.
A u su rp lu s, je prends le parti d’aller porter cette lettre à
cc M. V a u trin , et je m’en rapporte à ce qu’il vous conseillera
cc
cc à ce t égard.
Je vous re n o u ve lle , M onsieur, l’assurance de mon dévoue« m ent à vos in térêts, et de mon bien sincère attachem ent.
cc
«
S ig n é D e B a tz . »
II
�( 49 )
_
?f II,n e reste plus gu-un mütr àcdire sur l’elTet 'de cette
garantie, s’il tfaflloit eii’ Veriir à elle'; il est réglé par le
Code civil ^ iquiis’exprim e ainsi : ;
,* A rticle i ? 42 ^ c< T ou te ¡obligation de falrejse résout en
« dommages-intérêts, en cag de ;non-exécution.de:larpàr£
« du débiteur. »
A rticle 1184.
L a condition résolutoire est toujours
« sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour
« le cas où l’une des deux parties ne satisfera point à »
« son engagement.
« Dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein
« droit. La partie envers laquelle l’engagement n’a point
« été e x é c u te ra le c h o ix , ou de forcer l ’autre à l’exé« cution de la convention lorsqu’elle est possible, o ird ’cn
« demander la résolution avec, dommage^ et intérêts.
« L a résolution doit être demandée en justice, et il
« peut être accordé au défendeur un délai selon les cir« constances. »
L e sieur de la Roche-Lam bert a conclu à la résolution
de la vente de 1791 , si la condition de le faire tenir
quitte de 355ooo fr. n’est pas exécutée : la loi ne lui
permet pas de douter que cette résolution ne soit pro
noncée, s’il étoit condamné à payer lui-même la somme
considérable qu’on lui dem ande, et qu’il ne doit pas.
Comment le sieur Natthey pourroit-il soutenir l’idée
qlie lç sieur de la R.oche ~Lam bei t dut etie oblige de
payer Chadieu sans l’avoir, tandis que lui, Natthey, auroit
Chadieu sans le payer?
Jusqu’à présent le sieur Natthey n’a. point /«levé une
prétention aussi im m orale; il est vraisemblable qu’il s’en
G
�( 5o )
tiendra à ce qui est raisonnable et légitim e : ainsi , à son
égard , il ^suffit de s’arrêter à l’idée qu’il fera valoir ses
payem ens, puisqu’il s’y est én gagé, ou -qu’il s’arrangera
avec les créanciers de telle manière que son vendéur soit
à. l ’abri de toutes recherches;1
M e. D E L A P C H I E R , ancien avocat.
M e. M A R I E , licencié avoué.
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À o'
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A-RIOM, de l’imp. de T H I B A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire,
rue des Taules, maison L a n d r i o t . — Juillet 1810,
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche-Lambert, Joseph de. 1810]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
assignats
émigrés
confiscation nationale
créances
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour sieur Joseph de la Roche-Lambert, habitant d'Issoire, intimé et appelant ; contre Dame Françoise-Aglaé-Gabrielle de la Luzerne et sieur Pierre de la Grange-Gourdon, son mari, dame Angélique-Armande-Camille de la Luzerne et sieur Anathocle-Maximilien Hurault de Vibraye, son mari, habitans de la ville de Paris, héritiers bénéficiaires de la dame de Montmorin, laquelle était héritière bénéficiaire du sieur Emmanuel Frédéric de Tane, son frère, appelans ; contre sieur Henri Duvergier, habitant à Paris ; Simon Teroulde, habitant à Daudeville ; Pierre-Louis Laisné, ancien sellier à Paris, habitant à Sens ; Antoine-Louis Duchastel, apothicaire à Paris ; et Jean Chardon, chapelier, habitant à Paris, syndics et créanciers unis dudit sieur de Tane, aussi appelans ; contre Sieur Amédée de Tane-Santenas, habitant à Paris, intimé ; et contre Sieur Louis Natthey, habitant de Nyon en Suisse, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1810
1511-1810
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
50 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0423
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1413
BCU_Factums_M0424
BCU_Factums_M0412
BCU_Factums_M0413
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53807/BCU_Factums_M0423.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Authezat (63021)
Issoire (63178)
Paris (75056)
Daudeville
Sens (89387)
Nyon (Suisse)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
confiscation nationale
Créances
émigrés
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53786/BCU_Factums_M0402.pdf
bfa7b025f0708424ee40623748ceb1c3
PDF Text
Text
PRÉCIS SUR DÉLIBÉRÉ
SEANT
P O U R
F r a n ç o i s
.
R O C H E ,
D ’APPEU
A RIOM.
a p p ela n t ;
C O N T R E
A n t o i n e F A U R E , J o s e p h P I T O U , et B e n o i t
M A N D E T , intimés.
propriétaire réduit à la mendicité par une friponnerie,
fait un dernier effort pour inspirer, en faveur de ses malheureux
enfans, un intérêt qu’il ne réclame pas pour lui-m êm e, et que
les circonstances de sa cause forcent assez de sentir.
T o u s les élémens de la résistance semblent conjurés contre sa
misère; e t, chose inouie peut-être, c’est après avoir prouvé.clairement qu'il étoit volé , que pour la première fois il doute du
succès de sa réclamation.
E t d û t , cet aveu , paroitrc étrange lui-même , il n ’en contras
tera que davantage avec la conviction intime de cette foule de
témoins appelés par la cour pour l ’instruire de la vérité.
Roche, forcé par un enchaînement de faits connus de la cour,
A
�Co
de vendre sous un nom em prunté, consentit, le i 3 messidor
an 10, une vente simulée de tous ses biens , sans exception,
à F au re, moyennant 16000 fran cs, à employer à ses dettes; et
il fut fait une contre-letlre portant que Faure, en les revendant,
auroit pour indemnité de ses engagemens 3ooo francs de bénéfice,
moyennant qu o i, et après le prélèvement des igooo francs et
des frais , tout l ’excédant a p p a r t ie n d r o it à Roche.
C e l homme infidèle, se voyant maître d abuser de la confiance
d ’un a m i, proposa à ses beaux-frères d’acheter ces biens a vil prix,
à condition de l’associer lui-même dans le bénéfice; mais ils reje
tèrent Celle offre avec indignation. V oyant qu’il n’y avoit pas de
fripons dans sa fam ille, il fit la proposition a d’autres qui refu
sèrent encore : enfin, la totalité des biens de Roche a été vendue,
le
brumaire an 11
aux sieurs Pitou de illo m , et IVÏandet
de Domaise , par un acte passé dans une auberge de Billom ,
devant un notaire de Saint - D i è r , et un notaire de Cunlhat,
moyennant 20/^00 f . , qui couvrent assez exactement les iqooo f.
et les Irais et taux frais ; de sorte que l’excédant revenant à Roche
se rédiûl à zéro.
L e s d e u x a c q u é r e u r s , à qui l a c o n t r e - l e t t r e étoit connue, comme
la cour n ’en doute plus, semblèrent d’abord ne vouloir pas lutter
contre l ’indignation publique, et se contenter d ’un bénéfice. T on
bien t’appartient, dirent-ils à R o ch e, nous nous arrangerons :
mais ils vouloient 6000 francs ; Roche offrit 100 louis, puis 200;
13
toutes les personnes honnêles du pays s'intéressèrent à cet arran
gem ent: les acquéreurs ne se relâchèrent pas.
lis avoient mieux connu la valeur des biens. Un domaine à
la Valette , dont Faure lui-même avoit offert 3/,000.francs; des
biens à la Chapelle-Àignon, pour plus de 20000 francs, toul cela
biens patrimoniaux, leur paroissoit une assez belle proie. Ils signi
fièrent leur venle à R o ch e, qui notifia une protestation ; mais en
verlu d une ordonnance il fallut déguerpir.
■
Roche a donc élé obligé de plaider conlre cette usurpation. L e
{*) L e Jour mémo où ou (ut vrtvsau '¡ue llo ch e arrivait (lü l'a ris, et ou il arriva eu effet.
�( 3 )
.
f
tribunal de Clormont lui a refusé la preuve du dol ; mais maigre
tous les efforts des Faure et consorts, pour soutenir que cette
preuve n'étoit pas admissible, la cour n ’a pas pensé que les lois in
terdissent l’éclaircissement de la fraude, et la preuve a été ordonnée.
Cette preuve consistait à établir, i°. que Faure avoit toujours
dit n ’être pas sincèrement acquéreur de Roche , mais prête-nom ;
2°. qu’il avoit offert lui-même 24000 francs du seul domaine de
la Valette ; 3°. que lors de la vente faite à F a u re , il proposoit un
prix de 35ooo fra n cs, que Roche vouloit réduire à 16000 f r . ;
4°- qu’il avoit proposé à ses beaux-frères de leur vendre et les as
socier au bénéfice des reventes , malgré sa contre-lettre ; 5°. queles
sieurs Pitou et Mandet avoient eu connoissance de cette contrelettre; enfin qu’il avoit tenu le propos qu’ils étoient trois associés,
ayant chacun 8000 francs à gagner.
T rois enquêtes ont été respectivement faites; et dans une ma
tière o ù , comme le dit C oquille, tout est occulte , où les parties
s’étudient avec soin à cacher la fraude sous les apparences de
la vérité ; dans une matière où la loi se contente de simples pré
somptions , ces trois enquêtes prouvent, certes, bien plus que la
cour ne pouvoit s’y attendre.
L a vérité ne s’y cache p a s , on y voit sans détour et sans
ambiguité tout ce qu’ il faut savoir. Jamais peut-être un abus de
confiance n’a été plus à découvert. U n fourbe consommé rougiroit de n’avoir pas su rendre sa fraude plus occulte; mais de bons
Auvergnats ne sont improbes qu’en se faisant violence, et le
naturel perce malgré eux : ce qui prouve combien il est aisé d’éviter
la contagion de l’exemple par une sévérité bien entendue.
?Ce Faure, qui se disoit obligé de vendre, le lendemain de la
foire de Clerm ont, parce que Roche avoit fui à Paris , qu’il devoit à la veuve Cossandois , et que lu i, F a u re, étant sans res
sources, alloit être arrêté pour les dettes de R o ch e..,, ce Faure
cependant savoit du sieur Nicolas que Roche arrivoit. ( V . les
20c. et I2e. témoins.) Roche ne devoit pas un sou à la veuve Cos
sandois ; le sieur P rad ier, à quji il dçyoit, venoit de donner du
A
a
�.
(-4 }
tenips^, et Faure venoit d’em prunter, pour le compte de1R oche,
yooo francs le jour même de la vente. ( V . les Ier- et 2e. témoins
de l ’enquête Pitou . ),
C e F a u re , qui prétend avoir été acquéreur légitime, et avoir eu
la fa cu lté de vendre ou de ne pas vendre , a dit à qui a voulu
l'entendre, qu’il n’étoit que le préte-nom de Roche. ( V . les 6 v ,
io ''. , 120. , i 3e. et i 5e. témoins■de Venquête , et le 2e. de la
continuation. ) A d'autres il a dit qu’il étoit le maître de le duper;
qu’il le tenoit.
Faure avoit, disoit-il, acheté les biens par une vente sincère ,
et à toute leur valeur, pour 16000 francs ; et il a cependant
oitert lui-meme 24000 francs du seul domaine de la Valette*
( V . les 7e. , i 5" . , 22e. témoins de Venquêté directe; le 2eï
de la continuation. ) Ce domaine se u l, ont dit plusieurs témoins ,
valoit plus dé 3oooo francs; et son impôt le; prouve. L e bail
à ferme actuel va, en denrée ou argent, à g 5o francs,, sans-les
impositions. Les biens de la Chapelle, vendus ou à vendre, iront
à plus de 18000 francs.
L e troisième fait 'interloque est prouvé de même. Lors de la
vente fictive de l’an 10 , Faure proposoit un prix fictif de 35ooo f . ,
et Roche ne vouloit qu’un prix de 10000 francs, puisque, disoit-il,
il ne s’agissoitpas de vendre. ( V . les témoins Roche et Laver roux.)
Faure, qui devoit vendre pour des prix d ’accord avec R o ch e ,
(¡V. la déposition du sieur Pradier. ) qui ne devoit avoir que 3ooo f.
et laisser à Roche tout l’excédant ; Faure cherchoit à vendre
à; bas prix«, et à se faire associer par l’acquéreur dans les
bénéfices des reventes: il l’a proposé à trois personnes avant de
vendre aux sieurs Pitou et M andet. ( V . les 20. , i 3e. , i 4e**
17e. témoins de l’enquête directe; les i et- et ac. de la continuation,
le 5.0 témoin de Venquête P ito u .)
Qui donc pourra douter dfc bonne foi de l'infidélité de ce F a u re,
q u i, sachant ce que valent les biens de R o ch e, s’ arrange pour,
vendre de manière h ne rien laisser de cet excéd a n t convenu, et
cherche des complices jusqu’à ce qu’il en ait trouve ?
.
�' T o u t cela semble étrangér aux sieurs Pitoü et’ Mandet',- q u i,
moins parleurs que F aure, n ’ont pas fait autant de confidences,
et qui se retranchent à dire qu’ils ont acquis de‘ bonne foi1 parce
qu’ils ont une vente.
‘
L a cour se rappelle qii’à la première audience ils soutinrent
n’avoir vu que la vente consentie à F au re, et n ’avoir jamais connu
la contre-lettre; la copie de cette contre-lettre même ,' disoit Faurë
pour leur prêter son'secours,«n’étoit sortie de chez le'n o taire que
depuis le procès.
,
1
T o ü t cela est' mensonge; le clerc qui écrivit la contre-lettré’ en.
fit à l’instant deux copies: On a voulu équivoqüer sur leut desti
nation ; mais plusieurs' témoins disent que Faure étoït*nanti de la
siérine longtemps avant la seconde vente. ( V . les iô T. ,
, i 5' . ,
ï8 \ ,• tém. de Venq. directe, et lé 2*. de\l’eriqi P ito u .)
D ’autres témoins attestent avoir parlé eux-mêmfcs de la cdntre-r
lettre a u ‘ sieur M andet', avant cette vente. L ’un des' notaires 1qui
l’a reçue déclare qu’il en fut questionî
Iss
. et i8*’ tém. ).
Q uand'on est surpris à m entir, on fait to n n e contenance: les
sieurs.Pitou et M andet disent aujourd’hui que la connoissahce dè
cette contre-lellre ne les rend pas de mauvaise foi. A qui croientils donc en imposer? Com m ent auront-ils pu- v o ir\ dans cette
contre-lettre, qu'après avoir prélevé igooo francs et les frais , tout
l ’excédant appartiendra à Roche , sans croire qu'il dut y avoir un
excédant? comment auront-ils pensé que Roche faisoit à Faure un
don de 3ooo fra n cs, pour vendre ses biens de manière à ne pas
lui laisser un sou? ont-ils pu lire là'contre-lettre sans voir qu’il
- étoit’ impossible de vôir dans cette vente'une mutation sincère?
Les sieurs Pilou H Mandet prétendent être tout' à fait exempta
decollusion , parce qu’elle n ’est pas; disent-ils, clairement prouvéei
M ais comment expliqueront-ils ce propos de F a u re:N o iis sommes
trois, et c’est pour nous un bénéfice d e '8ooo francs chacun?
{ V . les 17*. et 210. tém. de l ’e n q ., et le 1" .d e la continuation.)
.
Comment se débarrasseront-ils de cette déposition'de V achier,
leur propre notaire, q u i, au moment de la vente ; et quand ou
�(
6
)
connolt la contre-lettre, rappelle Vultimatum de Faure? Je v e u x
que le p rix couvre les 3ooo francs qui me reviennent, avec les frais
et fa u x frais ; et en effet 20400 francs couvroient tout cela exac
tement.
j Com m ent expliqueront-ils ce hasard étonnant, qu’un homme
de Tours vende à deux personnes de B illom et de Dotnaise, des
biens situés à Oliergues et à la Chapelle-Aignon, par-devant un
notaire de S t.-D ie r et un notaire de Cunlhat, quoique la réunion
eut lieu dans une ville populeuse?
Quel sens donneront-ils à ce propos de l’u n .d 'e u x , à R o c h e ,
après la vente : Ton bien t’appartient? avoient-ils donc la con
viction d'être acquéreurs sérieusement et de bonne fo i?
’
. .N o n , il faut le dire avec cette profonde conviction que la vérité
inspire, tout cela n’est pas de la bonne foi. D e tels actes ne sont
pas des conventions sincères, et que là loi doive protéger.
II n’y a de prouvé, d it-o n , que le consiliumfraudis : y a-t-on
bien réfléchi, et n ’est-ce pas une sorte d’ironie contre un malheu
reux dépouillé de tout? et certes, si quelque chose est clair, c ’est
X’eventus fraudis p l u t ô t même q u e le c o n s iliiim . L ’u n est l ’e f f e t ou
le résultat ; car le dépouillement existe. L ’ au tre en est la cause
présumée. Si donc on avoue qu'elle existe, comment séparer l’effet
de la cause ?
Faure étoit forcé de vendre, d it-o n ; des huissiers le poursuivoient pour les créances de Roche. Ce n ’étoit que pour ses propres
créances, car c’étoit la Cossandois, créancière de Faure, et qui
a donné un certificat de ne l'avoir jamais été de Roche. Pradier,
seul créancier de celui-ci, avoit donné du temps. Faure savoit
que Roche étoit en route ; et il arriva en effet le même jour de
la vente. Faure venoit d’emprunter 7000 francs pour Roche : il
ne vendoit donc pas par nécessité, mais par suiLe de ses recher
ches d’associés, avec lesquels il partagea la dépouille de Roche.
Yoilà ce qui étoit plus évident que tant de présomptions de bonne
i;’oi qu’il faut chercher dans la charité chrétienne, et non dans les
enquêtes, où l’on ne voit que dol et mauvaise foi à toutes los lignes.
�La cour les a voulues, ces enquêtes ; seroit-il possible qu'elle les
comptât pour rien , quand leurs frais considérables ont achevé
d’épuiser un malheureux qui eût appelé toute sa contrée en
masse pour tout expliquer, et dire aux magistrats que ses enne
mis même partagent encore Tindignation générale contre, ses
spoliateurs?
..
Une seule chose est aujourd’hui à examiner. Résulte-t-il des
enquêtes que.Roche est volé?
On ne peut douter alors que les sieurs Pitou et M andet ont
colludé avec F au re; et il seroit dès-lors injuste de leur laisser
une propriété qui ne fut jamais celle de leur vendeur.
Mais s’il étoit possible que ces acquéreurs fussent m aintenus,
est il même douteux que Faure dût être tenu à indemniser R o ch e,
lui qui cherchoit des associés au vol qu’il m éditoit, lui qui est
démontré fourbe par tant de témoins? L a seule idée de son impu
nité révolte; et cependant il est aussi sur les r a n g s pour partager
la d é p o u ille de R o c h e , et re ce v o ir la r é c o m p e n s e de son infidélité.
E n résultat, les sieurs Pitou et Mandet auroient pour 20400 fr.
deux corps de bien qui valent, suivant les témoins, 5oooo francs.
Quand ils ont voulu traiter de gré à gré, ils offroient 18000 fr.
de plus; ils avoient même payé un à-compte et accepté une quit
tance avec réserves : ils en conviennent, et cependant ils n ’ont eu
garde de la représenter.
Mais on dit à Roche que l’acte par lui consenti donne tout pouvoir
à F a u re, et que Faure a pu se considérer comme propriétaire , et
vendre; tout cela étoit le moyen qui devoit empêcher les enquêtes;
la cour a jugé que le droit de Faure dépendoit de l3intention des
parties, et non de la simulation de Facto.
l L...
Cette décision de la cour étoit pleine de moralité et de justice :
la règle générale que les conventions des hommes font leur loi ,
n ’est exacte que par la supposition préexistante d’un consentement
libre et d'une intention conforme aux clauses. Mais quelle loi pour
voit dire à celui q u i , dupe de son imprudence, s’est exposé
à manquer de tout : cela sera parce que vous l’avez voulu? L a
�)8(
lo i, qui .n’a pu prévenir .cette imprudence, le protège encore, s’il
réclame son secours. Jamais l’être qui se noie n ’a été repoussé du
rivage j et quand il a été jeté au malheureux Roche une planche
dans son naufrage, quand elle lui a été si utile, est-il proposable
de l'avoir appelé au port pour le rejeter dans l’abîme.
■r
. ..
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e M A R I E , licencié avoue'
A R IO M , de l ’im prim erie de L a n d r io t , seul im p rim eu r de la
C our d ’appel. — F ru c tid o r an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Roche, François. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
contre-lettre
prête-nom
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Précis sur délibéré pour François Roche, appelant ; contre Antoine Faure, Joseph Pitou, et Benoit Mandet, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1802-Circa An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0402
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0736
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53786/BCU_Factums_M0402.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Billom (63040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Contre-lettre
domaines agricoles
prête-nom
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53931/BCU_Factums_M0736.pdf
485cc24e6501c6dfa1cf569dde1789fa
PDF Text
Text
PRÉCIS SUR DÉLIBÉRÉ
D ’A P P E L
cour
P O U R
SÉANT
A RIOM.
F r a n ç o i s
RO CH E,
appelant ;
C O N T R E
A n to in e
FAU RE
,
Jo se p h
M A N D E T
P IT O U
,
et B e n o i t
in tim é s.'
U n propriétaire téduit à la mendicité par une friponnerie,
fait un dernier effort pour inspirer, en faveur de ses malheureux
e n fan s, un intérêt qu’il ne réclame pas pour lui-m êm e, et que
les circonstances de sa cause forcent assez de sentir.
T o u s les élémens de la résistance semblent conjurés contre sa
m isère; e t, chose inouie peut-être, c’est après avoir prouvé clai
rement qu'il étoit volé , que pour la première fois il doute du
succès de sa réclam ation.
E t d u t, cet aveu , paroitre étrange lui-m êm e, il n’en contras
tera que davantage avec la conviction intime de cette foule de
témoins appelés par la cour pour l’instruire de la vérité.
R och e, forcé par un enchaînement de faits connus de la cour
A
�(
2
)
3
de vendre sous un nom em prunté, consentit, le i messidor
an 1 0 , nne vente simulée de tous ses b ien s, sans exception,
à F a u re , moyennant 16000 fra n c s, à employer à ses dettes; et
il fut fait une contre-lettre portant que F au re , en les revendant,
auroit pour indemnité de ses engagemens ooo francs de bénéfice,
moyennant q u o i, et après le prélèvement des 19000 francs et
des frais , tout l’excédant appartiendroit â Roche.
C et homme infidèle, se voyant maître d’abuser de la confiance
d ’un a m i, proposa à scs beaux-frères d ’acheter ces biens à vil p rix ,
à condition de l’associer lui-même dans le bénéfice; mais ils reje
tèrent celle offre avec indignation. V oyan t qu’il n ’y avoit pas de
fripons dans sa fam ille, il fit la proposition à d ’autres qui refu
sèrent encore : enfin, la totalité des biens de Roche a été vendue,
le
brumaire an 1 1 (*), aux sieurs Pitou de Billom , et M andet
de Doniaise
par u n 'a c te passé dans une auberge de Billom
devant un notaire de Saint - D ie r , et un notaire de Cunlhat,
m oyennant 20400 f . , qui couvrent assez exactement les igooo f,
3
,
,
et les frais et faux frais ; de sorte que Uexcédant revenant à Roche
se réduit à zéro.
L e s deux acquéreurs, à qui la contre-lettre étoit connue, comme
la cour n ’en doute p lu s, semblèrent d ’abord ne vouloir pas lutter
contre l’indignation publique, et se contester d ’un bénéfice. Ton
bien t’appartient, dirent-ils à R o c h e , nous nous arrangerons :
mais ils vouloient 6000 fra n c s; Roche offrit 100 lo u is, puis 2 0 0 ;
toutes les personnes honnêtes du pays s’intéressèrent à cet arran
gem en t: les acquéreurs 11e se relâchèrent pas.
Ils avoient mieux connu la valeur des biens. Un domaine à
la V ale tte , dont Faure lui-même avoit offert 24000 fran cs; des
biens à la Chapelle-A igucn, pour plus de 20000 fran cs, tout cela
biens patrim oniaux, leur paroissoit une assez belle proie. Ils signi
fièrent leur vente à R o ch e, qui notifia une protestation ; mais en
vertu d ’une ordonnance il fallut déguerpir.
Roche a donc été obligé de plaider contre cette usurpation. L e
( * ) L e jour rucme où. ou fut preveuu que Hoche arrivoit de i^aris, et où il arriva en effet.
�3
(
)
-,
tribunal de Clermont lui a refusé la preuve du dol ; mais malgré
tous les efforts des Faure et consorts, pour soutenir que cette
preuve n'etoit pas adm issible, la cour n ’a pas pensé que les lois in
terdissent l ’éclaircissement de lafrau d e , et la preuve a été ordonnée.
; Cette preuve consistoit à établir, i°. que Faure avoit toujours
dit n etre pas sincèrement acquéreur de Roche , mais prête-nom ;
2 . qu il avoit offert lui-même 24000 francs du seul domaine de
la Valette ;
. que lors de la vente faite à Faure , il proposoit un
prix de
ooo fra n c s, que Roche vouloit réduire à 16000 f r . ;
4°. qu’il avoit proposé à ses beaux-frères de leur vendre et les as
socier au bénéfice des reventes , malgré sa contre-lettre; 5°. queles
sieurs Pitou et Mandet avoient eu connoissance de cette contrelettre; enfin qu’il avoit tenu le propos qu’ils étoient trois associés,
ayant chacun 8000 francs à gagner.
35
3
T ro is enquêtes ont été respectivement faites; et dans une ma
tière o ù , comme le dit C oquille, tout est occulte , où les parties
s’ étudient avec soin ¿t cacher la fraude sous les apparences de
la vérité ; dans une matière où la loi se contente de simples pré
som ptions, ces trois enquêtes prouvent, certes, bien plus que la
cour ne pouVoit s’y attendre.
L a vérité ne s’y cache p a s , on y voit sans détour et sans
ambiguité tout ce qu’ il faut savoir. Jam ais peut-être un abus de
confiance n’a été plus à découvert. U n fourbe consommé rougiroit de n’ avoir pas su rendre sa fraude plus occulte ; mais de bons
Auvergnats ne sont improbes qu’en se faisant violence, et le
naturel perce malgré eux: ce qui prouve combien ¡lest aisé d ’éviter
la contagion de l’exemple par une sévérité bien entendue.
C e F a u re , qui se disoit obligé de vendre, le lendemain de la
foire de C lerm ont, parce que Roche avoit fui à Paris , qu’il de
voit à la veuve Cossandois , et que lu i, F a u r e , étaut sans res
sources, alloit être arrêté pour les dettes de R o ch e.... ce Faure
cependant savoit du sieur Nicolas que Roche arrivoit. ( V . les
20*. et 12 e. témoins.) Roche ne devoit pas un sou à la veuve Cos
sandois ; le eieur F ra d ie r, à qui il devoit, venoit de donner du
A
2
�(
4)
temps , et Fau re venoit d’em prunter, pour le compte dé R o c h e r
7000 francs le jour même de la vente. ( V , les i en et 2<\ témoins
de l’enquête Pitou. )
C e F a u re , qui prétend avoir été acquéreur légitime, et avoir eu
la faculté de vendre ou de ne pas v en d re , a dit à qui a voulu
l'entendre, qu ’il n’ étoit que le prête-nom de Roche. ( V . les \ ,
1 0 ° . , 12 e. , i e. et i e. témoins de Venquête , et le 2?. de la
continuation. ) A d'autres il a dit qu’il étoit le maître de le d u p er;
3
6
5
qu’ il le tenoit.
Faure avo it, d iso it-il, acheté les biens par une vente sin cère,
et à toute leur v a le u r, pour 16000 fra n c s; et il a cependant
offert lui-m êm e 24000 francs du seul domaine de la Valette»
( V . les 7S. , j ". , 22e. témoins de Venquête directe; le 2e.
de la continuation. ) C e domaine se u l, ont dit plusieurs tém oins,
valoit plus de oooo fra n cs; et son impôt le prouve. L e bail
à ferm e actuel v a , en denrée ou argent, à 9 ^ ° fran cs, sans les
impositions. Les biens de la C hapelle, vendus ou à ven dre, iront
5
3
à plus de 18000 francs.
L e troisième fait interloqué est prouvé de m êm e. Lors de la
vente fictive de l’an 10 , F au re proposoit un prix fictif de
ooo f . ,
et Roche ne vouloît qu’un prix de 10000 fran cs, puisque, disoit-il,
il ne s’agissoitpas de vendre. ( V . les témoins Roche et Laverroux
Fau re, qui devoit vendre pour des prix d ’accord avec Roche ,
( V . la déposition du sieur P radier.) qui ne devoit avoir que o o o f.
et laisser à Roche tout l’excédant ; Faure cherchoit à vendre
à bas prix et à se faire associer par l’ acquéreur dans les
bénéfices des reventes : il l’a proposé à trois personnes avant de
vendre aux sieurs Pitou et M andet. ( V. les 2e. , i <\ , i ®*>
17 ®. témoins de l’ enquête directe; les 1 et ae. de la continuation,
35
3
3
le
5
4
.« témoin de Venquête Pitou.)
Qui donc pourra douter de bonne foi de l’ infidélité de ce F a u re t
q u i, sachant ce que valent les biens de R o c h e , s’ arrange pour
vendre de manière à ne rien laisser- de cet e x cé d a n t convenu, et
cherche des complices jusqu'à ce qu ’il en ait trouvé?
�(
5)
T o u t cela semble étranger aux sieurs Pilou et M an d et, q u i,
moins parleurs que F a u re , n ’ont pas fait autant de confidences ,
et qui se retranchent à dire qu’ ils ont acquis de bonne foi parce
qu’ ils ont une vente.
L a cour se rappelle qu’à la prem ière audience ils soutinrent
n’avoir vu que la vente consentie à F a u re , et n ’avoir jamais connu
la contre-lettre; la copie de cette contre-lettre m êm e, disoit Fau te
pour leur prêter son secours, n ’étoit sortie de chez le notaire que
depuis le procès.
T o u t cela est m ensonge; le clerc qui écrivit la contre-lettre en
fit à l’instant deuæ copies. On a voulu équivoquer sur leur desti
nation ; mais plusieurs témoins disent que Fau re éloit nanti de la
sienne long-temps avant la seconde vente. ( V . les i o * ., 14’ . , i 5 \ ,
18*. , tém. de l’enq. directe, et le 2'. de l’enq. P ito u .)
D ’autres témoins attestent avoir parlé eux-mêmes de la contrelettre au sieur M a n d e t, avant celte vente. L ’un des notaires qui
l’a reçue déclare qu’il en fut question. ( V . les i/j*. èt 18'* tenu ).
Quand on est surpris à m en tir, on fait bonne contenance: les
sieurs Pilou et M andet disent aujourd'hui que la connoissance de
celle conlre-leltre ne les rend pas de mauvaise foi. A qui croientils donc en im poser? Com m ent auront-ils pu v o ir, dans celle
contre-lettre, qu’ après avoir prélevé 19000 francs et les frais , tout
l’excédant appartiendra à Roche , sans croire qu'il dût y avoir un
excédant? comment auront-ils pensé que Roche faiso ità Fau re un
don de 5ooo fra n c s, pour vendre ses biens de manière à ne pas
lui laisser un s o u ? ont-ils pu.lire la contre-lettre sans voir qu’il
étoit impossible de voir dans celle vente une mutation sincère?
L e s sieurs Pitou et M andet prétendent être tout à fa it exempts
de collusion , parce qu’elle n ’est pas, disent-ils, clairement prouvée.
M ais comment expliqueront-ils ce propos de F a u re : Nous sommes
trois , et c'est pour nous un bénéfice de 8000 francs chacun ?
( V . les 17". et 2 i p. tém. de l’enq . , et le 1 " . de la continuation.)
Comment se débarrasseront-ils de cette déposition de V ach ie r,
leur propre n o taire, q u i, au moment de la v en te , et quand on
�(
6
)
connoît la contre-lettre, rappelle Yullimatum de F a u re ? J e v e u x
que le p rix couvre les 5 ooo francs qui nie reviennent, avec les frais
et fa u x frais ; et en eifet 20400 francs couvroient tout cela exac
tement.
Com m ent expliqueront-ils ce hasard ¿ton n an t, qu ’un homme
de Tours vende à deux personnes de Billom et de Dornaise, des
biens situes à Oliergues et à la Chapelle-sîignon, par-devant un
notaire de S t.-D ie r et un notaire de Cunlhat, quoique la réunion
eut lieu dans une ville populeuse V
'
Quel sens donneront-ils à ce propos de l’un d’e u x , à R o c h e ,
après la vente : Ton bien t’appartient ? avoient-ils donc la con
viction d'être acquéreurs sérieusement et de bonne fo i?
N o n , il faut le dire avec cette profonde conviction que la vérité
in sp ire, tout cela n’est pas de la bonne foi. D e tels actes ne sont
“pas des conventions sincères, et que la loi doive protéger.
II n’y a de prouvé, dit-on , que le consilium fraudis : y a-t-on
bien réfléchi, et n ’est-ce pas une sorte d’ironie contre un malheu
reux dépouillé de tou t? et certes, si quelque chose est clair, c’est
Veventus fraudis plutôt même que le consiliwn. L ’un est l’effet ou
le résultat ; car le dépouillement existe. L ’autre en est la cause
présumée. Si donc on avoue qu ’elle existe, comment séparer l ’effet
de la cause ?
Faure étoit forcé de vendre, d it - o n ; des huissiers le poursuivoient pour les créances de Roche. Ce n ’étoit que pour ses propres
créances, car c’étoit la Cossandois, créancière de F au re, et qui
a donné un certificat de ne l’avoir jam ais été de Roche. P rad ier,
seul créancier de celui-ci, avoit donné du temps. Fau re savoit
que Roche étoit en ro u te; et il arriva en effet le même jour de
la vente. Fau re venoil d ’emprunter 7000 francs pour Roche : il
ne vendoit donc pas par nécessité, mais par suite de ses recher
ches d’associés, avec leisquels il partagea la dépouille de Rocho.
V oilà ce qui étoit plus évident que tant de présomptions de bonne
foi qu’il faut chercher dans la charité chrétienne, et non dans les
•enquêtes, où l ’on ne voitiju e dol et mauvaise foi a toutes les lignes.
�(
7
)
[ 'L a cour les a voulues, ces 'enquêtes; seroît-il possible qu?elle leç
comptât pour rien , quand leurs frais.considérables on t. achevé,
d’épuiser un malheureux qui eût appelé^ toute isa_ contrée en
masse pou r'tou t expliquer et dire aux magistrats que ses enne
mis même partagent encore, l’indigwation générale^contre ses,
spoliateurs?
U ne“ seule chose est aujourd’hui à exam iner. Résulte-t-il des
enquêtes^que Roche est v o lé ?T
Ôn ne peut douter alors que les sieurs Pilou et M andet ont
colludé avec F a u re ; et il seroit dès-lors injuste de leur laisser
une propriété qui ne fut jam ais celle de leur vendeur.
M ais s’il étoit possible que ces acquéreurs fussent m aintenus,
est il même douteux que Faure dût être tenu à indemniser R o ch e,
lui qui cherchoit des associés au vol qu’il m éditoit, lui qui est
démontré fourbe par tant de tém oins? L a seule idée de son impu
nité révolte; et cependant il est aussi sur les rangs pour partager
la dépouille de R oche, et recevoir la récompense de son infidélité.
En résultat, les sieurs Pitou et IVlandet auroient pour 20400 fr.
deux corps de bien qui valen t, suivant les tém oins, 5oooo francs.
Quand ils ont voulu traiter de gré à g ré, ils off'roient 18000 fr.
de p lu s; ils avoient même payé un à-compte et accepté une quit
tance avec réserves: ils en conviennent, et cependant ils n’ont eu
garde de la représenter.
M ais on dit à Roche que l ’acte par lui consenti donne tout pouvoir
à F a u re , et que F a u re « pu se considérer comme propriétaire , et
vendre; tout cela étoit le moyen qui devoit empêcher les enquêtes;
la cour a jugé que le droit de Faure dépendoit de F intention des
parties, et non de la simulation de l’acte.
Cette décision de la cour étoit pleine de moralité et de justice :
la rèj^le générale que les conventions des hommes font leur loi ,
n ’est exacte que par la supposition préexistante d ’un consentement
libre et d'une intention conforme aux clauses. M ais quelle loi pourroit dire à celui q u i , dupe de son imprudence, s’est exposé
à manquer de tout : cela sera parce que vous l’ avez voulu? L a
�(8)
loi, qui n'a pu prévenir cette imprudence, le protège encore, s’il
réclame son secours. Jamais l’être qui se noie n’a été repoussé du
rivage; et quand il a été jeté au malheureux Roche une planche
dans son naufrage, quand elle lui a été si utile , est-il proposable
de l’avoir appelé au port pour le rejeter dans l ’abime .
,
- r
M*. D E L A P C H I E R , avocat.
r.
M'. MARIE, licenciéavoué.
. -f
A , R IO M , de l ’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Fructidor an 1 .
3
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Roche, François. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
contre-lettre
prête-nom
ventes
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Précis sur délibéré pour François Roche, appelant ; contre Antoine Faure, Joseph Pitou, et Benoit Mandet, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1802-An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0736
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0402
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Billom (63040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Contre-lettre
domaines agricoles
prête-nom
ventes
-
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e5bf57299cbdeb3f55775dcb7de8fb8f
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PRÉCIS
EN R É P O N S E ,
POUR
Dame
F
r an çoise
R U P H Y , et le sieur
C
laude
B O U T A R E L , son m ari, intim és, et défen
deurs en opposition ;
C O N T R E
L e sieur L a u r e n t - L o u i s - A m a b l e
DELORT
appelant d'un jugement rendu au tribunal d ’A u rillac le 9 mai 1806, et demandeur en oppo
sition.
Auri sacra famés. Hor.
L
A dame Boutarel est héritière testamentaire du sieur
L o uis-Isaac D e lo r t, frère de l’appelant.
Elle a reçu cette dernière preuve de tendresse d’un
A
�oncle qui lui avoit tenu lieu de père, et qui l’a com
blée de ses bienfaits.
L e sieur Laurent-Louis-A m able Delort n’approuve
point le testament, et auroit bien voulu ajouter à son
opulence, la fortune de'son frère.
Q u’a-t-il fait pour la mériter ? Ennemi implacable du
défunt, il n’a cessé de l’outrager pendant sa vie. On ne
doit pas s’étonner qu’il attaque encore ses dernières vo
lontés.
L e testament est olographe ; il n’est assujéti à aucunes
formes. L ’appelant est obligé de convenir qu’il est écrit
en entier, signé et daté de la main du testateur; il n’étoit
donc pas possible de le faire annuler.
L ’appelant a imaginé d’attaquer sa nièce d?indignité.
Il l’accuse d’une indiscrétion qui n’est pas de son fait, et
croit avoir trouvé un moyen infaillible de s’approprier
les biens de son frère.
Les jurisconsultes auxquels il s’est adressé n’ont pas
été de son avis; les magistrats, le public, n’ont pas pensé
comme lui. Il en a été réduit à plaider lui-même sa cause
devant les premiers juges; il a,succombé dans sa pré
tention.
Il veut essayer s’il sera plus heureux en la cour; et
les intimés s’attendent bien que ce ne sera pas encore le
dernier degré qu’ils auront h parcourir.
F A I T S .
L e sieur Louis-Isaac D elo rt, ancien officier de cava
lerie , s’étoit fixé à Aurillac , auprès d’un sieur Isaac
D e lo r t s o n gjraad-oncle et son bienfaiteur.
�t
. ( 3 ) .
Il épousa dame Gabrielle Serieys; il n’en a pas eu d’enfans. L a 24 juin 178 7, il fit un testament au profit de
la dame son épouse. Ce testament contient un legs assez
considérable en faveur de la dame R u p h y , sa nièce ,
femme Boutarel, et fille de dame Louise D elo rt, sa sœur.
On remarque dans ce premier testament, que le sieur
D elort désire être enterré sans pom pe, dans le cime
tière de sa paroisse, à côté du tombeau où son grandoncle a été enterré ; il veut que son testament soit ou
vert Tinstant après son décès, pour prévenir et éviter
toute apposition de scellés, et toutes formalités de jus
tice.
L e testateur fait encore un legs à la dame Louise D e
lo rt, sa sœur, épouse du sieur de R uphy, mais il ne fait
aucune mention de son frère.
L e 27 pluviôse an 3 , il marie la demoiselle de R up hy,
sa nièce, avec le sieur Boutarel. Il est dit dans ce contrat,
que la demoiselle de Ruphy est originaire de T h o n o n ,
département du M ont-Blanc; mais qu’elle demeure de
puis plusieurs années auprès de son oncle. Il repré
sente les père et mère de la demoiselle de R u p h y , et
lui constitue de son chef une dot de 12000 fr.
L e 10 germinal an 7, la dame Serieys , épouse du sieur
D elort, a fait aussi son testament olographe-, elle a dis
posé de tous ses biens au profit de son mari : mais elle
n’oublie pas une nièce qui lui étoit chère; elle fait à la
dame Boutarel un legs de 2000 fr, et de six couverts
d’argent.
Après la mort de la dame Serieys, les sieur et dame
Boutarel ont habité avec leur oncle; il possédoit à BouA 2
�la i
v>
(
4
)
dieu, commune d’Y olet, une maison de campagne qu’il
se plaisoit à embellir.
Il y faisoit des réparations coûteuses, et souvent il avoit
recours à la bourse du sieur Boutarel, qui se faisoit un
devoir d’obliger son oncle, et de xie pas contrarier ses
goûts.
L e sieur D elort, d’ailleurs, ne cessoit de donner à sa
nièce et à son époux des preuves de tendresse et.d’affec
tion, et disoit à . ses amis que tout ce qu’il faisoit étoit
pour sa nièce.
.............
Il a effectué ses promesses. Un testament olographe,
fait à Boudieu, daté des I er. messidor et i er. thermidor
an
contient, après plusieurs.legs, une disposition
universelle au profit de la dame Boutarel.
Ce testament est surtout honorable,pour la dame Bou
tarel : son oncle, en lui donnant, contente les affections
de son cœur. Il répète ce qu’il avoit déjà dit dans son
premier testament pour ses funérailles; il ordonne qu’on
le fasse enterrer près de feu Isaac D d o r t , . son grandoncle et son bieiifaiteur, etc.
O n observe que ce testament est écrit sur une feuille
entière : le sieur Boutarel en produit une copie figurée.
Les dispositions ne contiennent que trois rôles, et quel
ques lignes sur le verso .de la seconde page.: il restoit
encore beaucoup de place, si le.testateur avoit eu l ’in
tention de faire d’autres legs.
Un mois après, le sieur D elort est attaqué d’une ma
ladie à laquelle il a succombé; il est décédé le samedi
28 fructidor, à cinq heures du matin.
D u premier moment qu’il -s’étoit alité, il avoit remis
y
�12?
C 5 }
toutes ses clefs à son neveu Boutarel. L a dame Boutarel
ne quittoit pas le chevet de son oncle; elle avoit pour
lui ces attentions touchantes, ces tendres soins qui con
solent des maux de la vie.
E lle fut témoin des derniers momens de son oncle ;
elle ne put résister à ce choc cruel; elle perdoit un père,
un bienfaiteur, un am i; elle fut atteinte d’une attaque
qui a fait long-temps craindre pour ses jours; elle étoit
Lien loin de s’occuper de ses intérêts.
L e m ari, alarmé de l’état de son épouse, ne songeoit
à autre chose ; mais sur les trois heures après m id i, une
ancienne domestique du défunt apprit au sieur Boutarel
que le sieur Delort avoit sans cesse manifesté le désir
d’être enterré auprès de son gran d-oncle; qu’il seroit
peut-être nécessaire de donner des ordres à ce sujet, et
de les donner promptement; qu’en cherchant dans les
papiers du défunt, on pourroit trouver quelqu’écrit re
latif à ce point.
L e sieur Boutarel fit alors des recherches, de l’avis et
en présence du .sieur abbé Usse, confesseur du défunt :
on trouva dans son secrétaire un paquet cacheté , avec
ces mots sur l’enveloppe : P o u r remettre à madame
Boutarel.
•Le mari en fait l’ouverture, sans y voir d’autre con
séquence : c’étoit le testament du défunt, contenant une
disposition universelle au profit de la dame Boutarel ;
mais en même temps l’ordre de le faire enterrer à A u rillac, près de son grand-oncle.
Pour exécuter cet ordre, il falloit bien connoître le
testament. L ’intention du testateur étoit donc qu’il fût
�( 6 )
ouvert aussitôt après son décès *, et on n’en peut plus
douter, lorsqu’on voit la même volonté dans le premier
testament de 1787.
L e sieur Boutarel remit le tout au sieur Boudier, juge
de paix du canton, en le priant de s’occuper des for
malités nécessaires pour la présentation du testament.
Ce testament, en effet, a été présenté au président du
tribunal, qui en a dressé procès verbal, et ordonné le
dépôt chez un notaire, conformément à l’article 1007 du
Code civil.
Ce procès verbal est du 30 fructidor-, il ne pouvoit
avoir lieu plutôt, quoi qu’en dise l’appelant, puisque le
testateur n’est décédé que le 28 : le 29 étoit un dimanche.
Lors de la présentation, on ne joignit pas l’enveloppe,
à laquelle on n’attachoit aucune importance.
Les sieur et dame Boutarel ont également présenté
requête pour se faire envoyer en possession des biens ;
ce qui a été ordonné, conformément aux articles 1008
et suivans du Code civil.
Survient, dix-sept mois après, le sieur D elort, frère
du défunt, qui prend une cédule du juge de paix d’Aurillac, dans laquelle il expose que les sieur et dame Bou
tarel se sont emparés de toute la succession de LouisIsaac Delort ; qu’il est habile à lui succéder pour moitié,
et qu’il entend demander à la dame Boutarel la restitu
tion du m obilier, les intérêts et les fruits : il n’entre dans
qucune autre explication.
A u bureau de paix, les sieur et dame Boutarel justi
fient du testament de leur oncle ; ils en déposent une
expédition sur le bureau. L e sieur Delort répond qu’il
�(
7
)
ne reconnoît pas le testament, et qu’il persiste dans sa
demande.
Dans son exploit du 22, février 1806, le sieur Delort
expose enfin que les dispositions faites par son frère étoient
caclietées ; que sur l’enveloppe étoient des caractères écrits
et signés par le testateur; que le prétendu testament que
lui ont opposé les sieur et dame Boutarel au bureau de
p a ix , ne fut pas présenté en cet état devant le président
du tribunal; qu’il lui fut porté sans enveloppe et sans
cachet : d’où il suit qu’il n’y a eu de la part de l’auto
rité légale r ni ouverture du testament, ni description de
son véritable état : conditions sans lesquelles il n’a pu
être mis à exécution.
Il en conclut que ce testament étant altéré, doit être
déclaré nul et comme non avenu ; que la succession de
Louis-Isaac Delort est ouverte ab intestat ; qu’ainsi il
doit avoir la moitié des biensSur cette demande, et le 9 mai 1806, jugement con
tradictoire du tribunal d’A urillac, dont suivent les motifs
et le dispositif ;
« V u les articles 970, 1 0 0 1 et 1 0 0 7 du Code civil r
« Considérant qu’en fait il est reconnu et avoué par
« les parties que le testament de Louis-Isaac Delort est
« écrit en entier, daté et signé de sa main ;
« Considérant que d’après l’article 970 du Code c iv il,
« le testament olographe n’est assujéti à aucune autre
« formalité ; que les dispositions de l’art. 1007, i re» par
ti tie , sont uniquement relatives aux précautions ordon« nées pour rendre public le testament olographe, et.
« que leur oubli ou leux défaut ne peut produire une-
�i
( 8 }
« nullité non prononcée par la lo i, et formellement
« rejetée par l’article 970 ;
« Considérant que la preuve offerte par le sieur Delort
« ne tend pas à établir, dans le testament dont il s’agit,
« le défaut de l’une des trois formalités exigées par l’ar« ticle 970, ni la suppression d’un testament postérieur,
et révocatoire de l’autre, mais seulement à prouver qu’il
« y avoit une enveloppe cachetée, avec des caractères
¿c écrits, qui a été ouverte avant la présentation au ma« gistrat; ce qui est absolument insignifiant, soit d’après
cr les faits avoués par le sieur Boiltarel et sa femme, soit
« paçce qu’il n’en résulterait pas la nullité du testament;
« d’où il suit que cette preuve est inutile et non recetr vab le, et que, par suite, le testament étant valable,
« la demande du sîfeur Delort est mal fondée ;
« L e tribunal, sans s’arrêter ni avoir égard à la preuve
« offerte par le sieur D elort, le déboute de ses demandes,
« et cependant lui donne acte de la déclaration faite par
« les sieur et dame Boutarel, qu'après le décès du sieur
« L o u is-Isa a c D e lo r t, le sieur B o u ta r e l, assisté du
et sieur li s s e , prêtre, cherchant dans les papiers du
« défunt une recommandation relative à son enterre« m ent, a trouvé un papier ca ch eté, sur lequel étaient
« écrits ces mots : Pour remettre à madame Boutarel ;
« que l’ayant ou vert, il a trouvé le testament dont il
« s’agit ; que le testament et l’enveloppe ont été confiés
« à M . B oudier, juge de p a ix , q u i, le jour de la pré« sentation du testament, n’a remis que celui-ci, regar« dant l’enveloppe comme inutile. »
Cette dernière disposition du jugement indiquoit asse£
au
�'( 9 )
au sieur D elort ce qu’il avoit à faire. En effet, s’il persistoit à prétendre que cette enveloppe renfermoit quelqu’autre chose que le testament produit ; qu’il y avoit
un testament révocatoire ou un codicille; prenant acte
de la déclaration des intim és, il pouvoit se pourvoir en
suppression de testament ou de codicille ; mais il n’avoit
pas pour cela une action en nullité contre un testament
régulier.
E t comme il étoit vraisemblable, sans doute, que le
sieur D elort auroit mis dans la même enveloppe deux
testamens contraires^ dont l’un auroit révoqué l’autre,
le sieur D elort, appelant, eût peut-être été admis à faire
cette preuve.
Système bizarre qui n’a pu sortir que d’un cerveau
mal organisé, ou d’un homme aveuglé par la colère et
la cupidité.
Quoi qu’il en soit, vivre sans -plaider rCest pas con
tentement : le sieur D elort a cette passion. Il a interjeté
appel du jugement d’Aurillac ; et à la veille de l’audience,
il a cru devoir donner au public une nouvelle preuve
de sa bizarrerie et de son ambition.
Ce qu’il y a de plus difficile, c’est de trouver dans
sa défense quelque chose de raisonnable ou de plausible,
un moyen qui mérite d’être réfuté.
Il cherche dans les lois romaines des argumens ou des
moyens d’indignité : et le moment est bien choisi.
L e testament est postérieur à la promulgation du Code.
L a loi du 30 ventôse an 12 , qui réunit les lois civiles en
un seul corps, sous le titre de Code civil des Français,
s’exprime en ces term es, article 7 :
3
[
�«
«
«
«
( 10 )
« A compter du jour où ces lois sont exécutoires,
les lois romaines, les ordonnances, les coutumes généraies ou locales, les statuts, les règlemens, cessent d’avoir
force de loi générale ou particulière, dans les matières
qui sont l’objet des lois composant le présent Gode. »
Indignités prévues p a rle Code c iv il, article 727.
« Sont indignes de succéder, et comme tels exclus
« des successions,
« ci°. Celui qui seroit condamné pour avoir donné ou
« tenté de donner la mort au défunt ;
« 20. Celui qui a porté contre le défunt une accusa« tion capitale, jugée calomnieuse;
« 30. L ’héritier majeur, qui, instruit du meurtre du
« défunt, ne l’aura pas dénoncé à la justice.»
Les orateurs du gouvernem ent, en présentant ce titre
du Code au eorps législatif, M . Treilhard portant la
p aro le, ont dit :
« Nous n’avons pas cru convenable d’étendre davan« tage les causes d’indignité; il ne faut pas, sous le pré« texte spécieux de remplir la volonté présumée du dék fu n t, autoriser des inquisitions qui pourroient être
« également funestes et odieuses. C ’est par ce m otif que
« nous n’avons pas cru devoir admettre quelques causes,
« reçues cependant dans le droit rom ain, com m e, par
« exem ple, celles qui seroient fondées sur des habitudes
« criminelles entre le défunt et l’héritier, ou sur la dis« position qu’on prétendroit avoir été fuite d’un bien
« du défunt avant son décès, ou sur l’allégation que l’héc< ritier auroit empêché lé défunt de faire son testament,
« ou de le changer. »
�1^3
( n
)
L e sieur Delort nous apprendra sans doute à l’audience
comment il peut y avoir dans l’espèce indignité de suc
céder , parce que le sieur Boutarel a ouvert un testament
olographe, contenant des dispositions au profit de sa
femme.
Maintenant y a-t-il nullité du testament, à raison de ce
que l’enveloppe n’a pas été produite devant le juge ?
A rticle 970 du Gode.
« L e testament olographe ne sera point valable , s’il
« n’est écrit en entier, daté et signé de la main du testa« teur ; il n’est assujéti à aucune autre forme. »
A rticle 1007.
« Tout testament olographe sera , avant d’être mis à
« exécution, présenté au président du tribunal civil de
« l’arrondissement dans lequel la succession est ouverte.
« Ce testament sera ouvert, s'il est cacheté ; le prési« dent dressera procès verbal de la présentation, de l’ou« verture et de l’état du testament, dont il ordonnera
« le dépôt entre les mains du notaire par lui commis. »
Il n’en est pas du testament olographe comme du tes
tament mystique, qui de sa nature est secret. D ’après
le même article, l’ouverture ne peut en être faite qu’en
présence des notaires et témoins qui ont signé l’acte de
suscription.
M . M aleville, sur la première partie de cet article,
dit que la loi suppose qu’on peut cacheter et tenir secret
son testament olographe ; mais qu’ il ne faut pas pour
cela lè confondre avec le testament m ystique, dont parle
la seconde partie.
Bernardi, ex-législateur, aujourd’hui chef de la division
civile du ministère du grand - ju ge, dans son commen-
�1
( 12 )
taire sur la loi du 13 floréal an 1 1 , des donations et
testamens, prévoit la question qui nous occupe, et s’ex
prime ainsi, page 187, sur l’article 1007:
On peut demander si un testament clos et cacheté
avoit été ouvert avant d’être présenté au président du
tribunal, cette circonstance le rendroit nul.
Il faut distinguer d’abord le testament olographe et le
testament mystique, et ensuite si c’est le testateur luimême ou un autre dépositaire qui en a fait l’ouverture.
L e premier n’est pas secret de sa nature ; ainsi, qu’il
soit ouvert ou fermé , il doit être exécuté, à moinsqu’on
ne prouve que le testateur l’a révoqué.
Annales du notariat, i 5e, question.
En parlant de l’ouverture du testament olographe avant
sa présentation au magistrat :
L e notaire qui feroit l’ouve rture .d’un testament olo
graphe, avant sa présentation , en opéreroit-il la nullité,
sous le prétexte qu’il n’avoit pas caractère pour cette
opération ?
Rép. Il n’y a pas de nullité là où la loi ne l’a pas
prononcée; ainsi, quand un notaire, ou tout autre dé
positaire d’un testament olographe cacheté, auroit l’im
prudence de l’ouvrir avant de le présenter au président
du tribunal, cela n’en opéreroit pas la nullité. Cette question ne peut former de doute à l’égard du
testament olographe, qui de sa nature peut rester ouvert,
et que la loi n’exige pas être secret. Si le testateur le
renferme sous une enveloppe cachetée, ce n’est de sa part
qu’une précaution qui ne tient pas à l’essence de l’acte
qui auroit pu exister sans elle : ainsi, quand on viendroit
h le décacheter avant de le présenter au président du
�,
C T3
.
/■>/
tribunal, ses dispositions ne seroient pas altérées par là ,
puisqu’il n’étoit pas de sa nature destiné à être secret, et que
même le dépositaire pourroit prétendre avoir été chargé
de l’ouvrir aussitôt après la mort du testateur, ou nier
qu’il eût été cacheté, etc.
En effet, comment le cachet seroit-il de quelque im
portance pour un testament olographe? Par cela seul que
le défunt a lesté en cette form e, il n’a pas voulu que
ses dispositions fussent secrètes. Lorsqu’il veut les laisser
ign o rer, la loi lui indique la forme du testament mys
tiqu e, dont la validité dépend des formalités attachées
à l’enveloppe et à la suscription qu’elle contient.
Aussi l’article cité du Gode, fait-il une grande différence
entre ces deux testamens. Celui qui est olographe, ca
cheté ou n on , doit etre présenté au président, qui en
dresse procès verb al, dans l’état où il est, sans avoir
besoin d’appeler personne-, au contraire, si c’est un tes
tament m ystique, il ne peut en faire l’ouverture sans
appeler les notaires ou les témoins qui ont signé la sus
cription de l’enveloppe.
Preuve certaine que le testament ologra p h e , cacheté
ou non , peut etre ouvert sans conséquence ; et pourvu
qu’il soit écrit, signé et daté du testateur, il ri est assujé ti à aucune autre fo rm e.
O n ne peut ajouter à la loi, ni suppléer des nullités
qu’elle ne prononce pas.
L ’indignité est restreinte aux cas prévus ; et la loi n’a
pas voulu l’étendre au-delà.
D ’ailleurs, l’indignité est personnelle. Ici ce n’est pas
même la dame Boutarel qui a été téméraire ou indis-
�( H )
crête •, et on ne peut qualifier ainsi l’acte le plus simple et
le plus naturel, dans la position où se trouvoient les
parties.
L e mari pourroit-il nuire aux droits de sa femme ?
Ce système seroit dangereux et inconvenant. Un époux
qui rie vivroit pas avec sa femme dans l’union que sup
pose le m ariage, pourroit donc la priver d’une succes
sion , parce qu'il auroit la témérité d’ouvrir un testament
qui la concerne?
Ce n’est pas raisonner sagement que de prétendre que
la femme devient responsable de la faute du m ari, quand
elle s’est présentée pour recueillir l’effet des dispositions
faites à son profit.
L a femme ne pouvoit-elle pas ignorer que le testament
avoit été ouvert, et ne pas savoir qu’il étoit cacheté?
L e mari étoit bien maître de son. secret : la femme nd
s’occupe que des dispositions faites à son profil.
L e sieur D elort n’est pas plus conséquent, lorsqu’il
dit que le testament n’a pas de véritable date : il est en
effet daté au commencement, du ier. messidor, et à la
fin, du I er. thermidor.
Mais de deux choses l’une : ou le testateur a employé
un mois pour rédiger son testament, ou la dernière date
est une erreur.
S’il a employé un m ois, ce qui est probable, parce
qu’on peut réfléchir sur ces dispositions, les deux dates
prouvent son exactitude.
Si au contraire ce n’est qu’une erreur, elle ne peut être
d’aucune importance. En effet, pourquoi la loi a-t-elle
voulu que le testateur datât son testament ? ce n’est que
�m
( 15 )
pour, s'assurer plus positivement de son intention et de
sa volonté.
Qu’importe que ce soit tel jour ou tel autre, si on ne
rapporte pas un autre testament fait dans l’intervalle.
Aussi le sieur D elort semble - t - il vouloir faire grâce
de ce m oyen, et ne le proposer que légèrem ent, pour
ne rien négliger.
Que le sieur Delort cesse donc d’y insister. E t pour
quoi vien t-il ambitionner la fortune de son frère, lu i,
héritier contractuel de ses père et m ère, et qui a fait
plaider si long-temps ses frère et sœur, pour obtenir leur
légitime ;
L u i qui depuis long-tem ps est séparé de sa fem m e,
qui n’a pas d’enfans, et jouit de plus de 12000 francs
de rente ;
L u i, enfin, qui n’a vu ou écrit à son frère que pour
l’outrager ou lui proposer des cartels ?
C’est à lui seul qu’on proposeroit des moyens d’indi
gnité , s’il étoit appelé à succéder au défunt ; et qu’il
sache qu’on peut p rouver, par ses écrits, tout ce qu’on
vient d’avancer.
Signé B O U T A R E L .
Me. P A G E S ( de Riom ) , ancien avocat.
M e. M A R I E , avoué licencié.
A. RIOM , de l’imprimerie de Landriot, seul imprimeur de la
Cour d'appel. — Mars 1807.
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ruphy, Françoise. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
testament olographe
legs
nullité du testament
testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour dame Françoise Ruphy, et le sieur Claude Boutarel, son mari, intimés, et défenseurs en opposition ; Contre le sieur Laurent-Louis-Amable Delort, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'Aurillac, le 9 mai 1806, et demandeur en opposition.
Particularités : notation manuscrite : 17 mars 1807, arrêt 2nde section. Confirme en rejetant la preuve offerte par Delort, parce qu'en la supposant faite, elle serait insignifiante quant à la nullité du testament olographe de Louis Delort, fait objet du procès, et ne serait relative qu'à la suppression d'un autre testament ou codicille postérieur, dont il ne s'agit pas.
Table Godemel : Testament : 7. le fait, par le mari de la légataire universelle, d’avoir ouvert l’enveloppe cachetée qui renfermait le testament olographe, écrit, daté et signé par le défunt, et de l’avoir présenté sans cette enveloppe considérée comme insignifiante, au président du tribunal qui en ordonna le dépôt chez un notaire, après constatation de l’état de la pièce, doit-il avoir pour effet d’admettre qu’il y a eu infidélité, violation du sceau et du secret du testateur, suppression d’un autre testament ou codicille révocatoire , et par suite nécessité d’annuler le testament comme ne présentant pas les caractères propres à assurer sa sincérité ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1787-1807
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1704
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1705
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53307/BCU_Factums_G1704.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Yolet (15266)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
legs
nullité du testament
Testament olographe
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53441/BCU_Factums_G2212.pdf
e2acd482897ab348b2ed44075fa67236
PDF Text
Text
i
~
-
ït
■;
RÉPONSE
.) *
C O U R
IM P É R IA L E
DE RIOM.
‘ )rî
I r e CHAMBRE.,
Aux observations de la dame K E M P F E R D E
PLO BSH EIM , appelante d’un jugement
rendu au Tribunal civil de cette ville de
R iom , le 28 août 1 8 1 3 ;
POUR
Le Général TERREYRE et la dame BEAUFRANCHET D'A YAT, son épouse }
intimés.
L e s s ieur et dame Terreyre ne se sont jamais flattés
qu’un premier jugement mît un terme aux débats qui
se sont élevés entr’eux et la dame K em pfer; ils s’attendoient dès l’origine à parcourir tous les degrés de juri
diction : mais ils sont disposés à la suivre, et ne craignent
pas un nouvel examen.
Les deux questions que fait naître la dame Kempfer
�( o
ont été résolues par les premiers juges, d’après les vrais
principes; les motifs du jugement font honneur à leur
sagacité; et la dame Kempfer, pour les réfuter, s’est plus
occupée de discussions grammaticales que du point de
droit.
L e don mutuel porté au contrat du 19 brumaii’e an
4 , et qualifié de donation entre-vifs, avoit-il un effet
présent? devoit-il etre réglé par la loi alors existante,
quoique la succession du général d’Ayat ne se soit ou
verte que sous l’empire du Code Napoléon?
Telle étoit la première question. Les premiers juges
ont pensé que la loi du 17 nivôse an 2 , qui étoit aloi's
en vigueur, devoit régler les conventions matrimoniales;
ils l’ont décidé en point de fait et en point de droit.
En point de fait, ils ont judicieusement remarqué que
la clause du contrat contenoit trois objets bien distincts.
« Par le premier, les époux sc donnent réciproque« ment tout ce dont la loi leur permet de disposer en
« faveur l’ un de l’autre, y ayant des enfans, soit du
« présent m ariage , soit d’un précédent; pour par le
« survivant en jo u ir à compter du décès du premier
« mourant, suivant et aux termes de la lo i, sans être
« tenu de donner caution ,* seulement à la charge de
k l’inventaire.
« 2°. Les époux stipulent que dans le cas où ln loi
te donneroit plus de latitude à ces sortes de dispositions
« ( toujours en cas d’enfans ) , la donation mutuelle re« cevra cette plus grande étendue, pour en jo u ir aux
« termes de la lo i, sans donner caution ,* mais à la
« charge de faire inventaire. »
�. (s,
..
3°. Enfin , et toujours par la même clause, « les
« époux conviennent que s’il n’y a aucun enfant lors
« du décès du premier m ourant, ils se donnent mu« tuellement tous leurs biens, pour par le survivant en
« jou ir et disposer en toute propriété , et comme de
« choses à lui appartenantes. »
De ces trois dispositions, ainsi spécifiées et distinctes,
les juges dont est appel ont tiré la conséquence que tant
qu’il y a voit des enfans, les époux avoient eu respecti
vement l’intention de ne se donner qu’un simple usufruit;
et qu’ils avoient fort bien prévu le prédécès des enfans,
seul cas où ils ont voulu se donner la propriété.
Ils ont ajouté que le mot unique jo u ir, la précaution
de dispenser du bail de caution , l’obligation de fa ire
inventaire , exprimoient sans équivoque leur intention;
qu’ainsi, en point de fait, la dame Kempfer ne pouvoit
rien exiger en propriété, dès qu’il existoit des enfans
des deux unions précédentes.
La dame K em pfer, dans les observations qu’elle vient
de publier, trouve ce raisonnement fort étrange. L e mot
jo u ir , dit-elle, s’entend d’un propriétaire ainsi que d’un
usufruitier; il exprime également l’eifet du droit dont
chacun use; il ne peut servir, isolément pris, à fixer
l ’étendue du droit même ; et c’est à la disposition prin
cipale qu’il faut recourir, pour connoître si c’est comme
propriétaire ou comme usufruitier que l’on jouit.
Sans vouloir suivre la dame Kempfer dans ses longs
raisonoemens sur la valeur et la fo rce des mots , on
6’étonne qu’elle ait passé sous silence la troisième partie
de la clause, qui contient le don en propriété des biens
i *
**''
"
�(4
),
en cas de prédécès des enfans,;., elle y auroit vu peutêtre que les époux, n’ont pas commis. d'erreurs d'in*
telligence, et qu’ils ont senti la valeur et la fo rc e des
m ots; car, dans cette dernière disposition, ils ne se
sont pas contentés de se servir de ce mot jo u ir , ils ont
ajouté, et en disposer en toute propriété, comme de
choses appartenantes a u survivant; ils ne se sont pas
dispensés alors du bail de caution , ni asservis à un in
ventaire : ils ont donc bien su faire la différence entre
l’ usufruit et la propriété.
D ’ailleurs, quel est le grammairien ou le juriscon
sulte qui osera soutenir que ces expressions pour en jo u ir
sans être tenu de donner caution , et à la charge de
fa ir e inventaire , valent un don en propriété? n’est-ce pas
au contraire manifester d’ une manière précise l’intention
et la volonté de ne faire qu’un simple don d’usufruit?
car le bail de caution-ne peut convenir qu’à l’usufruitier.
La charge de faire inventaire répugne à toute idée de
propriété.
1
Les époux ont trouvé sans doute que la loi les restreignoit dans leurs affections, en ne permettant de donner
que l’usufruit de moitié; ils ont pu espérer qu’ils seroient
autorisés peut-être à donner la jouissance du tout, et ils on£
voulu profiter d’une loi plus libérale, qui donneroit plus
d’étendue à leur jouissance; mais ni l’un ni l’autre n’ont
voulu dépouiller leurs enfans d’ une portion quelconque
de propriété, puisqu’ils ont prévu le cas de prédécès
de ces mêmes enfans, et que ce n’est qu’alors qu’ils se
font donation de la propriété.
La dame K.empfcr? pour appuyer le système bizarre
�( 5 )
qu’elle a adopté , est allé chercher le gain de survie
de 5o,ooo francs qui .précède le don mutuel, et veut y
trouver la preuve que les époux ont voulu se donner
line .propriété si la loi le permettoit.
*
, ' Les intimés n’ont pas assez $ intelligence pour sentir
la force de cet argument.
j' Ils ne conçoivent pas qu’un gain de survie à prendre
sur le m obilier, d’après la prisée de l’inventaire, et
sans crue, puisse faire1 croire que le don mutuel pos
térieur pou voit être en propriété. Pourquoi y auroitil un gain de survie, s’il y avoit une donation de pro
priété? car l’un est exclusif de l’autre; mais les intimés
diront toujours que les époux n’ont pas laissé ignorer
leur intention lorsqu’ils ont voulu se gratifier d’une pro
priété; car le gain de survie n’est pas accompagné d’une
dispense de bail de caution, ni de ¡’obligation de faire
inventaire.
i
Cette disposition, d’ailleurs, est isolée et distincte ;
elle n’a rien de commun avec les autres ; elle étoit il
lusoire, inutile, puisque tous les gains doivent se con
fondre dans la portion disponible; elle ne peut donc
servir d’exemple, encore moins d’argument, dès qu’il
n’y a aucune conséquence à en tirer.
En voilà bien assez sur les mots; il est temps de passer
aux choses.
'
'
• Les premiers juges ayant dit qu’en point de fait les
époux n’.ivoient voulu que se donner une jouissancef
ont décidé, en point de droit, que la loi en vigueur
au temps du contrat devoit régler les conventions ;
�C 6 )
qu’ainsi la dame Kempfer ne pouvoit exiger autre chose
que l’ usufruit de moitié des biens.
Ils l’ont ainsi décidé, d’après Dumoulin, Duplessis,';
l’auteur du nouveau Traité des donations, des arrêts
anciens, et des arrêts récens de la Cour de cassation ( i) ,
et par la raison que le don mutuel est une véritable do
nation entrç-vifs, qu’il en a le principal caractère, qui
est l’irrévocabilité, et qu’ il investit immédiatement les
époux de l’espoir successif, à l’instant du contrat^de
mariage.
. j
\
.
.. Les juges dont est appel ont d it , avec une grande
justesse, qu’aussitôt qu’ un-contrat de mariage a été con
senti entre des individus, la loi en vigueur s’en empare,
elle y met son empreinte, en détermine irrévocablement
les effets, et garantit par là Pimmuabilité des engogemens.
Si ce lien de droit pouvoit, par la convention ou
le caprice des époux, être subordonné à une loi future,
il n’existeroit plus, et les conventions seroient livrées
à une fluctuation indéfinie. -Agir ainsi, c’est appeler,
c’est introduire l’effet rétroactif d’une loi nouvelle, c’est
renverser la base fondamentale de notre législation.
L e Gode Napoléon ne peut donc influer sur un con
trat de mariage du 19 brumaire an 4 ; il a été passé
sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 , et ne peut
se soustraire à'son autorité. Les articles 13 et 14 de cette
loi fixent à l’usufruit de la moitié des biens toutes les
(1) Voir le mémoire, pages 18 et suiv.
�( 7 )
libéralités permises entre époux, en cas d’enfans. La loi
est impératiçe et irritante ; elle reçoit nécessairement
son exécution dans la circonstance.
Voilà ce que la dame Kempfer appelle un raisonnement étrange ,* est-elle plus séduisante dans son système?
De tels caractères, dit-elle, ne conviennent pas aux
libéralités portées en son contrat de m ariage; la dona
tion qu’elle réclame étoit subordonnée au décès du mari
donateur, quoique qualifiée de donation entre - vifs ,*
elle avoit été faite in contemplatione mortis ,* elle ne
devoit être prise que sur les biens que laisseroit le
donateur à son décès; il pou voit les aliéner, les dissi
p e r, etc.
V o ilà, il faut en convenir, des raisons déterminantes;
c’est comme si ou osoit soutenir qu’une institution d’hé
ritier, faite avant les lois prohibitives, doit être subor
donnée à l’article 9 13 du Code Napoléon , parce que
l’instituant n’est décédé qu’après la publication du Code.
En effet, une institution d’héritier n’est faite aussi que
in contemplatione mortis ,* elle est subordonnée au décès
de l’instituant, qui peut aliéner, dissiper pendant sa vie.
Cependant on a toujours pensé qu’une institution portée
en un contrat de mariage étoit une donation entre-vifs
de la qualité d’héritier; que les effets devoient en être
réglés par la loi en vigueur au temps du contrat, et
que le Code ne disposoit que pour l’avenir.
L article iert ¿Je la loi du 18 pluviôse an 5 ne d it-il
pas aussi que toutes dispositions entre-vifs et irrévocables,
antérieures à l’émission des lois nouvelles, doivent se
régler conformément aux anciennes lois?
�C 8 )
O r , le don mutuel porté au contrat de mariage est
aussi une donation entre-vifs, q u i, comme l’institution
contractuelle, porte sur la succession , q u i, comme elle;,
ne doit prendre effet qu’au décès du donateur, dont l’exé
cution est renvoyée à l’événement , mais qui saisit dès
l ’instant même, et ubi eaiiem ratio ibidem jus.
_ La dame Kempfer ne veut rien passer aux premiers
juges; leurs décisions dii>e?~ses sont autant d'erreurs ,*
ils se sont permis de dire qii’elle manquait de respect à
la loi existante : c’est une idée faus-se cachée sous de
grands mots. .
Mais il n’y a pas Ridée fausse ; omnis idea est vera :
voilà la première règle qu’on apprend en logique; et les
premiers juges n’ont-ils pas pu penser et dire, sans blesser
la dame K em pfer, que s’en rapporter à une loi future
c’est dire que la loi actuelle est mauvaise, qu’on ne veut
pas s’y conformer, et qu’on en attend une meilleure? Ce
sera , pour contenter la dame Kempfer , offenser le lé
gislateur , et non la loi. Mais il n’en sera pas moins vrai
qu’on est obligé de se soumettre à la loi existante ; que
s’en référer à une loi future c’est introduire un effet ré
troactif, ce qui seroit une monstruosité en législation.
I/O dame Kempfer cite, à l’appui de son système, un
arrêt de la C ou r, du 29 janvier 1 8 1 2 , qui ne reçoit
aucune application à un don mutuel. Il s’agissoit, dans
la cause de la dame C lary, d’une institution faite sous
la loi du 4 germinal an 8 : les père et mère instituoient
le contractant pour la portion en préciput que la loi permettoit de donner à l’ouverture de la succession.
L a Cour pensa que l’institution n’étoit pus faite sous
une
�( 9 )
une loi prohibitive; que la loi du 4 germinal an 8 per
mettait la disposition d’ une portion virile en préciput;
que la disposition n’étoit pas annullée, quoiqu’elle fût
excessive; qu’elle étoit seulement sujette à réduction , et
que cette réduction devoit s’opérer par la loi du décès.
La Cour n’auroit pas jugé ainsi, si l’institution a voit été
faite sous l’empire de la loi du 17 nivôse an 2 ; et, comme
on le v o it, l’espèce est bien différente , et n’a aucune
analogie avec une donation entre-vifs portée par contrat
de mariage.
M ais, dit la dame K em pfer, la loi du 17 nivôse an 2
n’est pas -prohibitive, et les premiers juges eux-mêmes
n’ont pas osé le dire; ils ont seulement dit que cetle loi
étoit impérative et irritante • et encore une discussion
grammaticale sur la différence qu’on doit faire entre une
loi prohibitive et une loi impérative. Mais on passe sur
la loi irritante ; car cette expression est encore plus forte
que celle de prohibitive , puisque tout ce qui est irritant
ne laisse rien subsister de contraire ; il casse et annulle
tout ce qui ne seroit pas conforme. C’est ainsi qu’on l’en
tend au palais; et on dira à la dame K em pfer, pour la
contenter, que c’est encore la définition qu’en donne le
Dictionnaire de l’Académie.
Les premiers juges se seroient-ils donc encore trom
pes, lorsqu’ils ont dit que la loi étoit irritante , c’està-dire, prohibitive ? Que porte l’article 1 3 , §. 2 ? « S’il
« y a des eufans de l’union, ou d’ un précédent mariage,
« ces avantages, au cas qu’ils consistent en simple jouis« sance, ne pourront s’élever au delà de la moitié du
a revenu des biens, etc. »
/
�( IO )
N e pourront : si ce ti’est pas là du proh ibitifj on ne
s’y connoît pas ; voilà pour les avantages déjà existans.
Pour ceux qui auront lieu à l’avenir, la loi leur donne
la plus grande latitude, tant qu’il n’y a pas d’enfans ;
mais, s’il ÿ en a , elle convertit ou l’éduit ces avantages
à l’usufruit de moitié, coiiformément à Varticle 13 cidessus.
D onc, s’il y a des enfans, les avantages autorisés ne
pourront excéder l’ usufruit de m oitié; donc la loi est
prohibitive.
Il est très-vrai qùe le système restrictif de la loi n’est
pas pour les libéralités entre ép o u x, tant qu’il n’y a
pas d’enfans; elle a voulu leur donner la plus grande
latitude, parce que les libéralités entre époux sont la
plus douce récompense de la tendresse et de l’affection
qu’ils se doivent mutuellement.
'
Mais la préseoce des enfans fait cesser cette latitude;
la loi les protège, elle veille à leurs intérêts, elle les
préfère aux époux, à qui elle interdit alors d’aliéner;
elle arrête les mouvemens de la séduction de la femme,
ou de l’empire du mari ; et tout rentre dans l’ordre,
du moment que l’intérêt des enfans est à couvert.
Car il faut bien remarquer ici que la loi ne fait au
cune différence entre les premières et les secondes noces;
la disposition est la même. Mais combien il eût été
dangereux de permettre des avantages en propriété, en
faveur d’un second époux! l’appât d’un nouveau lien
auroit souvent fait sacrifier les enfans d’une première
union. La loi a donc sagement prévu tous les excès aux
quels peut se porter une tendresse aveugle, plus sou-
�Vent un intérêt sordide, et n’a permis que des dispo
sitions de jouissance, en réservant toujours la moitié
libi’e pour les cnfans.
Il y a cette particularité dans la prétention de la dame
K em pfer, qu’on pouri’oit placer au chapitre des con
tradictions, c’est que tout en voulant la loi libérale du
17 nivôse an 2 , qui favorise les époux, qui leur permet
tout, sauf réduction en cas d’enfans, elle veut cepen
dant s’en référer à une loi restrictive, en haine des
secondes noces , et qui rappelle la loi romaine Hac
edictali actione , ainsi que l’édit des secondes noces.
Elle ne peut avoir que le quart , d’après le Code,
tandis qu’on lui offre la m oitié, d’après la loi qui régit
son contrat. Mais la dame Kempfer est opulente ; la
succession du général d’Ayat n’a pour tout immeuble
que la terre de ce n om ; elle ne peut se diviser com
modément : la dame K em pfer, en conséquence, veut
une propriété; elle fera liciter, elle se rendra adjudi
cataire du patrimoine de la dame T e rrey re , elle le
transmettra à ses enfans du premier lit. Voilà l’objet
de son ambition, voilà son unique désir ; elle compte
sur ses moyens bien au-dessus des facultés de la dame
T erreyre; et de là ces dissertations sur les mots employés
par les premiers juges, et sur les lois prohibitives ou
impératives.
La dame Kempfer termine sa discussion par la citation
d’un arrêt de la Cour, du 21 juillet dernier, qui n’a en
core aucune similitude. Un père avoit constitué à sa fille,
en la mariant, un avancement d’hoirie de 2,000 francs.
On doit toujours présumer qu’un avancement d’hoirie
2 *
�( 12 )
n’excède pas les facultés du constituant à l’épôque où il
est fait, qui est la seule qu’ il faut considérer.
Il est de principe généralement reconnu que l’héritier
peut s’en tenir à son avancement d’ hoirie, en abdiquant
la qualité d’héritier; mais si à l’époque de l’ouverture
de la succession la fortune a dim inué, si l’avancement
d’hoirie est excessif et blesse la légitim e, on peut l’atta
quer par la voie du retranchement jusqu’à concurrence
de la légitime. C’est ce qu’a jugé la Cour. La loi du
17 nivôse an 2 ne s’opposoit nullement à ce que le père
fît un avancement d’hoirie à sa fille en la mariant. Pour
juger s’il y a excès dans cet avancement, il faut néces
sairement attendre l’ouverture de la succession, et régler
l’eifet de cet avancement d’après la loi du décès, parce
que l’avancement d’hoirie n’est pas considéré comme un
avantage ou une donation, ce n’est qu’un délaissement
par anticipation d’une partie des biens du*constituant. La
Cour, en se conformant au principe qui veut que l’hé
ritier puisse s’en tenir à sa constitution, a décidé que la
fille Dumas étoit maîtresse de conserver son avancement
d’h o irie, ou que si les autres cohéritiers vouloient la
forcer à venir au partage, ils seroient tenus de lui dé
laisser le quart en préciput, parce q u ’ alors ils n’a voient
point à se plaindre, et qu’ils consei’voient la réserve de
la loi.
Quel rapport peut avoir cet arrêt avec le don mutuel
porté au contrat de l’an 4 ? On le cherche vainement;
on ne voit pas surtout comment la dame d’Ayat peut en
tirer la conséquence, ou qu’elle doit avoir le quart en
propriété, ou qu’011 doit lui donner 3,000 fi\ de rente,
/
�C 13 )
' 5 o,ooo fr. une fois payés; plus, la jouissance delà moitié.
On ne s’attendoit pas à cette conclusion , puisque, dans
•l’un comme dans l’autre cas, tous les avantages doivent
être restreints à la quotité disponible.
La dame Kempfer a-t-elle mieux raisonné sur cette
'question que les juges dont est appel ? C’est ce que la
fCour saura apprécier. On passe maintenant à la seconde
"question.
Par le premier contrat de mariage du sieur Beaufrancliet d’Ayat avec la dame Guyot de Mongran , du 2 août
17 8 3 , le sieur d’Ayat (article 8) « constitue à son épouse
« une somme de 4,000 fr. de rente de douaire préfix /
« dans le cas o ù , lors de la dissolution du mariage, il
« y auroit des enfans vivans issus d’icelui ; le fonds au
« denier vingt duquel douaire sera propre auxdits en « fa n s et aux leurs , de leur côté et ligne. »
C’est de ce mariage qu’est issue la dame Terreyre. Le
sieur d’Ayat a fait divorce avec la dame de M ongran,
qui est encore vivante; il a épousé bientôt après la dame
Kem pfer, qu’il a fort bien traitée par son contrat.
Mais aujourd’hui qu’il s’agit de faire le partage, la
dame Terreyre a demandé le prélèvement du fonds du
douaire de sa m ère, qui est hors la succession du père
du moment du contrat qui le constitue.
L a dame Kempfer s’oppose à ce prélèvement, sur le
fondement que la dame Terreyre est héritière de son
p ère, et qu’aux termes de l’article z 5 i de la coutume
de Paris, nul ne peut être tout à la J'ois douairier et
héritier .
�( H )
' Les premiers juges n’ont pas adopté cette nouvelle
prétention.
>'
■' « Ils ont pensé qu e, d’après la coutume de Paris,
le douaire est une créance établie par la lo i; que ce
n’étoit pas une légitime, puisque le douaire n’est sujet
ni aux hypothèques ni autres charges après le mariage;
« Que le père une fois dépouillé des objets du douaire,
n’en avoit plus la libre pi’opriété ; qu’elle étoit dévolue
aux enfans, puisque le douaire leur est propre.
a L e douaire jouissoit de la faveur la plus étendue;
il n’étoit pas sujet à prescription pendant la vie du père;
il n’étoit purgé ni par le décret intervenu sur les biens
du père, ni par les lettres de i*atificatiou obtenues contre
lui.
y
ce II n’éprouvoit aucun retranchement, soit pour former
la légitime des enfans du second lit, soit pour fournir
à la constitution du douaire du second mariage; il se
prenoit sur les biens substitués comme sur les biens libres;
et on ne peut concevoir qu’une propriété si privilégiée
en faveur des enfans du premier lit, ait pu être légè
rement anéantie par une donation postérieure au profit
d’une seconde femme.
« Si l’ imputation ou le rapport fictif que demande
la dame Kempfçr avoit lieu , tout le privilège du douaire
s’évanouiroit, la dameTerreyre seroit comme n’en ayant
jamais été saisie, et le sieur d’Ayat comme n’en ayant
pas perdu la propriété.
« L e douaire ne peut être confondu dans la succes
sion que dans le cas de partage seulement en ligne di-
�( r5 )
rcctc. La dame Kem pfer, en se mariant, a nécessairement
connu le douaire dont étoit grevé son mari par son
premier contrat; elle a su que cet objet éloit retranché
des biens de son époux, qui n’en étoit plus le maître;
elle n’a pu y placer un espoir successif, ni le comprendre
dans la donation qu’il lui faisoit.
« La dame Kempfer détourne de leur vrai sens les
articles de la coutume de Paris qu’elle invoque; c’étoit
une coutume d’égalité en ligne directe ; elle ne devoit
pas permettre de confondre entre cohéritiers la qualité
de douairier et d’héritier. La jurisprudence avoit quel
quefois admis ce principe en faveur des créanciers de la
succession , mais là se boruoit la rigueur de l’incompa-'
tibilité, ainsi que cela résulte de la note de Dumoulin (i).
L a dame Kempfer n’est ni héritière ni créancière de la
succession d’Ayat ; elle ne peut donc exiger le rapport
du douaire, etc. »
La question a été parfaitement appréciée par les pre
miers juges, et il est aisé de justifier leur décision. In
dépendamment des autorités invoquées dans le premier
mémoire des sieur et dame Terreyre (2), on-ne peut
s’empêcher de mettre sous les yeux de la Cour la disser-*
tation qui se trouve dans le Nouveau recueil de juris
prudence. On sait que l’article douaire a été composé
par M«. Levasseur, jurisconsulte distingué : on peut dire
qu’il a traité la matière ex pnyfesso dans cet article. Voici
comment il s’exprime, tome 7 , au mot D ou aire, § . 1 2 ,
( 1 ) V o ir le prem ier m é m o ire , page 29 .
(?) Ibidem, et pages suivantes.
�^
. t y 1 *'
( 16 )
page 2 13. Il rappelle la disposition de l’article 25 i d elà
coutume de Paris, nul ne peut élre héritier et douairier
ensemble. « L ’incompatibilité de ces deux qualités, dit-il,
« n’est pas considérée comme une incompatibilité abso« lue; c’est une incompatibilité relative aux seuls héri
te tiers , afin d’empèclier que les enfans qui réunissent
« les deux qualités ne soient pas plus avantagés que ceux
c< qui n’ont que le titre d’héritier. L ’héritier douairier
« est tenu de rapporter à ses cohéritiers le bénéfice qu’il
« retire du douaire : tenetur doariurn conferre , a dit
ce Dumoulin ; et ce rapport annulle son avantage.
« L ’incompatibilité des qualités d’héritier et douairier,
a n’étant que relative aux seuls héritiers , rien n’em« pêche l’héritier présomptif de réunir ces deux qua« lités contre les douairiers. L ’héritier présomptif qui
« accepte et la succession et le douaire, est tenu, comme
« héritier, au rapport des avantages qu’il reçoit comme
« douairier; mais il n’est tenu à ce rapport qu’envers
« ses cohéritiers .
Pour expliquer sa pensée, M e. Levasseur suppose un
exem ple: « Un père veuf laisse, dans la coutume de
« Paris, une succession composée de 40,000 francs de
« biens sujets au douaire, et exempts de toutes dettes;
« il laisse aussi 20,000 fr. d’autres biens. 11 s’y trouve
« 10,000 francs de dettes certaines, et 30,000 fr. d’uûe
« dette incertaine réclamée contre le père, mais sur la
« validité de laquelle il y a procès.
« Deux enfans sont appelés î\ la succession, et sont
« d’avis différons.
a L e prem ier, regardant la dette réclamée comme
valable,
�( 17 )
k valable, ne veut pas soutenir le procès, et renonce
« à la succession , pour s’en tenir à son douaire. Le
« second, au contraire, accepte la succession, et reprend
« l’instance. Il pourra cumuler, vis-à-vis de son frère
« renonçant, la qualité de douairier et d’héritier, parce
« qu’ il n’est tenu envers son frère d’aucun rapport.
« En vain son frère lui opposera la disposition de la
« coutume; il répondra : L ’effet de la réunion des deux
« qualités est de m’obliger à rapporter, comme liéri« tier, le bénéfice que je puis avoir comme douairier;
« mais ce rapport n’est dû qu'aux héritiers, et mon
c< frère n’étant pas h éritier , ne peut exiger aucun
« rapport ; je p u is, à son égard , cumuler les deux
« qualités. »
V o ilà, sans doute, qui est déterminant. L e douaire
n’est pas une donation, mais une dette du père. Si la
jurisprudence a étendu l’incompatibilité des deux qua
lités jusqu’aux créanciers, il n’y a pas d’autre raison,
sinon que le douairier, se rendant héritier pur et simple,
est tenu indistinctement de toutes les dettes. Ainsi il n’est
pas étonnant q u e, respectivement aux créanciers, on
ne puisse cumuler les deux qualités. En effet, le douai
rier qui renonce à la succession, pour s’en tenir à son
douaire, est dispensé du payement des dettes; celui, au
contraire, qui accepte la qualité d’héritier, est tenu des
faits du défunt qu’il représente in univers um jus.
Mais si le douairier, au lieu de se porter héritier pur
et simple, n’accepte la succession que sous bénéfice d’in
ventaire , alors il pourra cumuler les deux qualités,
même vis-à-vis des créanciers; il n’est dans ce cas que
3
�( rS )
créancier- comme e u x , et ne confond pas ses: àdtrons
personnelles avec celles de l’hérédité. f C’est ce qui a été
jugé par un arrêt de 17 8 2 , rapporté par M e. Levasseur,
à la saite de sa discussion, et sur les conclusions de
M . l’avocat général Seguier, dans la cause du comte de
Montzonne. Ce savant magistrat donne en maxime que
le douaire n’est ni une hérédité, ni une légitim e, ni
enfin un bien qui vienne aux enfans à titre successif ;
il établit cette différence entre l’héritier et le douairier,
en ce que l’hérédité consiste uniquement dans les biens
que le défunt a laissés à sa mort, et tels qu’il les a laissés,
chargés de toutes ses dettes. L e douaire , au contraire >
est une portion déterminée des biens que le père possédoit, non au moment de sa m ort, mais à L’instant de
son mariage ; portion que le père n’a. pas pu depuis
aliéner ou grever d’hypothèque; qui n’étoit plus' en sa
disposition au moment de son décès- : le douaire est
exempt et franc de dettes. Ces caractères sont diamé
tralement opposés à ceux de l’hérédité ; et l’on peut
dire avec vérité que les biens sujets au douaire sont
bien dans le patrimoine du père, pendant sa v ie ; mais
ne font pas partie de sa succession...........
Plus loin , ce magistrat s’étonne qu’on ose soutenir
que le douaire est une espèce d’hérédité, une légitime;
il lui paroît évident que le douaire n’a rien de com
mun avec l’hérédité; et après avoir poussé cet argument
jusqu’à' la démonstration, M . Seguier en conclut que
des créanciers n’ont aucun droit d’opposer à l’héritier
bénéficiaire l’incompatibilité des qualités d’héritier et de
douairier. L ’arrêt fut conforme à ses conclusions.
�î *9 )
i O n né craint pas de s’égarer avec d’aussi grands mon
idoles. On avoit soutenu en première instance que la dis*
position de la coutume, art. 2.51 , n’étoit pas plus forte
que celle qui dit que nul ne peut être héritier et dona
taire ; et que cependant le donataire n’étoit tenu au
rapport, que vis-à-vis de ses cohéritiers en ligne directe,
par la seule raison que la coutume de Paris étoit une
coutume d’égalité. On n’avoit pas dit, comme le prétend
ia dame Kem pfer, que le douaire préfïx étoit une do
nation, mais on avoit prouvé que le douaire, soit qu’on
le considère comme une créance, soit qu’on le regarde
comme une donation, étoit hors la succession du père;
que le rapport n’en étoit du qu’entre enfans, et non
envers tout autre : on croit avoir parlé le langage de la
raison , et énoncé les véritables principes.
On se doute bien que la dame Kempfer n’est pas dè
cet avis, et qu’elle commence par soutenir que la dis
position de la coutume de Paris est générale, absolue,
et ne souffre aucune exception; que c’est une espèce
de légitime, quoique M . Seguier ne conçoive pas com
ment on ose le prétendre.
' L a dame Kempfer cite Potliier, Lebrun, Ferrîères,
qui tous ont parlé en termes généraux et ont supposé
■le concours des enfans; car, hors ces cas, on a vu que
Pothier et Ferrières ne sont pas de cette opinion. Mais
il est rigoureusement vrai qu’entre enfan-s le douaire
■provenant de la substance du père, dort être rapporté
à sa succession, si on veut v e n ir en partage; sans quai
-l’égalité seroit blessée.
L e droit de demander le rapport ou la restitution^
3 *
�( 20 )
appartient même aux créanciers, s’ écrie la dame Kem'pfer;
et il n’y a rien d’étonnant, puisque, comme le dit Pothier,
l’enfant qui réunit les deux qualités de douairier et d’hé
ritier, ne peut pas être débiteur de lui-même; puisque
celui qui est héritier est tenu des faits du défunt, par
conséquent de toutes les dettes qu’il a laissées. Et qu’estce que cela prouve pour la dame Kem pfer, qui n’est
ni héritière ni créancière ?
Mais arrive une prétention nouvelle que la dame
Kempfer n’avoit pas encore fait éclore. Suivant elle, il
n’y a plus de douaire ; le Code Napoléon n’eri a pas
établi; la succession du général ne s’est ouverte que sous
ce Code; par conséquent l’héritier ne peut plus réclamer
de douaii’e, même vis-à-vis des tiers. Elle cite l’opinion
de l’auteur des Questions transitoires, et le nouveau
Traité des donations de M . Grenier.
A la v érité, elle convient que ces auteurs n’ont parlé
que du douaire couium icr , qui appartient à la femme
par la force de la l o i , et non par le fait de l’homme.
Mais la citation du nouveau Traité des donations n’est
pas bien choisie, au moins pour la première question ;
car l’auteur y prouve en principe qu’un contrat doit être
réglé par la loi du moment, et non par la loi du décès;
et lorsque le contrat est antérieur à la loi du 17 nivôse
an 2 , et au Code Napoléon, l’auteur accorde à la femme
même le douaire coutumier, quand bien même la suc
cession du mari ne s’ouvriroit qu’après le Code; seule
ment il ajoute que les statuts et coutumes étant abrogés,
les enfans ne pourroient par réclamer le douaire coutu
mier.
�2#
v
*X<t
Mais cette opinion peut-elle s’appliquer au douaire
préfix ou conventionnel, dont l’effet est de faire disparoître le douaire coutumicr? Une convention solennelle
portée par contrat de mariage, et sous la foi de laquelle
les enfans ont vu le jour, peut-elle recevoir la plus légère
atteinte par une loi postérieure, lorsque la convention
a eu un effet présent, lorsque le père a mis hors sa suc
cession un capital qui n’a jamais pu en faire partie, que
les enfans n’out pu recueillir à titre d’héritiers , mais
bien à un titre.particulier de créanciers, ou, si on veut,
<le donataires ? C’est ce qu’on n’oseroit soutenir sans
blesser la plus saine doctrine.
• L ’arrêt relatif au tiers coutumier de Normandie, rentre
¿ans les mêmes principes que ceux invoqués par les au
teurs cités : c’étoit un don .statutaire, où il n’y avoit rien
du fait de l’homme, et qui a été abrogé par la loi du
17 nivôse an 2 , ainsi que par le Code.
Cependant la dame Kempfer termine par dire que la
darne Terreyre doit cesser d’invoquer la vieille coutume
de Paris. L e reproche est plaisant! L a darne T erreyre,
loin de l’invoquer, n’a cherché qu’à répondre à l’appe
lante , qui la rappelle à tout propos.; elle a voulu que
cet article fût sainement entendu et sagement interprété;
et c’est encore une des contradictions familières à la dame
Kempfer. Elle est aussi fort mécontente des premiers
juges, à qui elle reproche une interprétation fo r c é e ,
des erreurs érigées en principes. La C o u r leur rendra
plus de justice ; elle a souvent reconnu la sagesse de leurs
décisions.
La dame Terreyre observera cependant qu’il s’est glissé
/
�(22)
dans le dispositif du jugement u n e erreur q u i pourroit
lu i être préjudiciable, et ce ne peut être que p a r une
confusion des conclusions de la dame Kempfer ; car le
tribunal, tout en jugeant que la dame Kempfer est une
simple usufruitière de la moitié des biens, que le douaire
est hors la succession du général d’A y a t, ordonne ce~
pendant que les biens seront visités par des experts, qui
diront s’ils doivent être licites, et, dans ce cas, ordonne
la licitation. Ce seroit accorder à la dame Kempfer tout
ce qu’elle désire. Mais s’il peut y avoir, lieu à licitation
entre cohéritiers, on ne peut l’ordonner avec l’usufrui-»tier, ni forcer le propriétaire à vendre son bien.
L a dame Terreyre se propose de faire rectifier cette
e rre u r, et se réserve même , s’il en est besoin , d’inter
jeter un appel incident quant à cette disposition.
'
P A G E S , ancien avocat.
—
M e. M A R I E , avoué licencié .
A RIO M , d e l’imp. de T H IB A U D , imprim. de la Cour impériale, et libraire i
r u e d e s Taules, maison L a h d r i o t . — Février 18 14 .
�
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A name given to the resource
[Factum. Terreyre, Denis. 1814]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Marie
Subject
The topic of the resource
successions
douaire
donations entre époux
coutume du Bourbonnais
conflit de lois
divorces
secondes noces
partage des enfants
contrats de mariage
séparation de biens
haras
scellées
arbitrages
bureau de paix
mobilier
coutume de Paris
usufruit
donations
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse aux observations de la dame Kempfer de Plobshein, appelante d'un jugement rendu au Tribunal civil de cette ville de Riom, le 28 août 1813 ; pour le Général Terreyre et la dame Beaufranchet d'Ayat, son épouse, intimés.
Table Godemel : Don mutuel : 1. le don mutuel par contrat de mariage étant irrévocable par sa nature, doit se régir par la loi en vigueur au temps du contrat : conséquemment, la disposition en faveur du survivant de tout ce dont la loi actuelle permet de disposer, et même de tout ce qui sera disponible d’après la loi existante lors du décès du prémourant, ne peut d’étendre au-delà de la quotité disponible au moment de l’acte, bien que celle du moment du décès soit plus forte Douaire : 2. selon la coutume de paris, les qualités de Douairière et d’héritier ne sont pas incompatibles à l’égard des tiers donataires. l’enfant d’un premier mariage est créancier du douaire stipulé lors du contrat de ce premier mariage, et il n’en doit, ni le rapport à la masse de la succession, ni l’imputation sur la part héréditaire que la loi lui réserve. Licitation : 1. entre le donateur ou l’héritier, et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles ? Usufruitier : 2. entre le donataire ou l’héritier et le simple usufruitier, il ne peut y avoir lieu à la licitation des biens indivisibles.
Publisher
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de l'imprimerie de Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1814
1783-1812
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2212
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2130
BCU_Factums_G2208
BCU_Factums_G2209
BCU_Factums_G2210
BCU_Factums_G2211
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ayat-sur-Sioule (63025)
Vichy (03310)
Paris (75056)
Blot (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
bureau de Paix
conflit de lois
contrats de mariage
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
divorces
donations
donations entre époux
douaire
haras
mobilier
partage des enfants
Scellées
secondes noces
séparation de biens
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53791/BCU_Factums_M0407.pdf
810cbd07c98a0078fd86b0cb3c26ca6c
PDF Text
Text
SUR
UNE
CONTESTATION
RELATIVE
A LA
P O S S E S S IO N
ET
P R O P R IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
A RI OM,
de
l ’im prim erie
IMPRIMEUR
de
de
l a
L A N D R IO T ,
cour
A oût 1804
d ’a p p e l .
se u l
�MEMOIRE
COUR
D ’ AP P E L
EN R É P ONS E ,
SÉANTE
A RIOM.
POUR
P
ierre
- J
ean
- B
aptiste
T R E IC H
LA
P L E N E , a p p e la n t;
CONTRE
.
,
T R E I C H - D E S F A R G E S veuve
Lachaud 9 Jean
COUDER , et L é o
n a r d CHA DE N I E R , intimés
M a r ie
A v e c des titres de propriété , et la garantie des lois,
le sieur Treich a été jusqu’à présent à la merci de tout
‘le monde. Un ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�(2)
à lui faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés, pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condamnée,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i-c i trouva en son che
min la révolution , qui lui ôta sa p ro ie, et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M ais, dans la rapide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la veille; et, après un cahos d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
gran d e, que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. Une cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avoir éclairci la difficulté , ou fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui doit le plus éto n n er, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent, non pas quant au jugement delà propriété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Quoi qu’il en soit, cette multitude d’ar
rêtés ne peut, plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une inine, qui l’a
vu exploiter pendant 45 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclamer uue c o p ro p riété contre un tiers déten-
�( 3
)
teur ; si encore il le* p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire revivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui' estj détruit par plusieurs
autres actes et circonstances ; l’appelant est obligé de pré
senter ces mêmes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
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•J ‘
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■■• F AI T S .
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A u village de là P le a u ’, dans le département de la>
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Je a n T re ic h ,
père de l’appelant, en étoit le p rin cip al propriétaire.
En 1747 , il'acquit de Pierre Beynes sa portion dans,
la terre appelée improprement le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires. '
L e 25 mars i j 5 5 , il acquit du même Pierre Beynes
tout le terrein où étoient ses mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. Ledit héritage vendu,,
est-il dit j tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon ? que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , moyennant 3000^; Il fut1dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le maréchal du,
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur
auroit lui-même sa provision annuelle dans les carrières
vendues,
A 2
�(4)
Cette terré de la Charoulière, qui a en surface trois
septerées , ayoit été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’Antoinette, femme Chadenier*
sa vo ir, deux septerées avant 1736 ? par un acte que
l’on ne connoît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte du I er. décembre 1736; et cette
septerée vendue y est confinée de jou r avec autre partie,
de la même terre , ci-deçant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
On y remarque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit vendeur, du consen
ti tement dudit acquéreur, de la moitié de tout le char« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« Charoulière, une des deux ci-dessus vendue, à la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrement du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais to u t p ro u v e que cette charge fut rédim ée b ien tô t
a p rè s , in dépendam m ent encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de i j 55.
Antoine Beynes, fils et héritier dudit François, tant en
son nom que comme cédataire de ses frères et sœurs, vendit
à Marianne la P lè n e , veuve dudit Jean Treich (mère de
l ’appelant ), par acte du 29 août 1768, un terrein appelé
Cliazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lles, les carrières communes dudit village de la
« Pleau, avec autres carrières et terrein de ladite de« moiselle la P lè n e , etc. ,* ensemble les carrières A cliar« bon de pierre, pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein} etc. \ comme aussi a vendu à ladite*
�m
derpoisdle-la rP5lène.jla pai:tf.et-portion .appartenante
« -audit vendeur^,çsdiiesrqualités ^$ur,les*camères. situées
« dans* le;,communal, jdç.Plpau ?re t c . fsans par. Je yendeun
- « se faire, aucune réserve de.sa portionjdans leditçom « munal ;jetc. ; derneure chargée ladite ac.quéreu^e.d’exé« guter.les ^conventions portées au contrat dA29„septem« bre 1766 , )etc. ^ de jn êm e aussi sera obligée ladite ac« rquéreu?e:>de délivrer, au vendeur et^auxf siens-la quan« tité de soixante quartes de charbon annuellement,
« tant et si longuement qu’il se recueillera du charbon
« dans lesdites «carrières ci-dessus vendues , à* la charge
que le vendeur}ou
les siens
seront-tenus
de
les creuser ,
•‘
S
-'
.) \
A V« eux-mêmes; ou faire\ creuser à leurs dépens, etc. ,»r
Cet, acte de 1766 { lequel seul Antoine Beynes voulut
rappeler’) étoit ,un traité p a r lui fait avec B ern ard ü o d e t
pour;extraire le|charbon de ladite terre, Chazalas, con
frontant-, disoit-il lui-.m êm e haudit,acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière,
des héritiers• du J'en ysieur Treich le cadet. - •
• Antoine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente 4e soixante 7quar tes de cjiarbon , qu’il fit. valoir,
quelque, temps ,Lsans ayoir g^rde de réclamer aucun autre
droit en yerÇu.de l’act^ de^S^.'jIlla.,vendit le 6 janvier
1771 , et Marianne la Plène latremboi^rsa par actç du 27'
du même mois.
.T o u t se..rgiinissoit donc à séparer, entièrement les in
térêts de .JViarianne la Plène d’avec ,çeux dudit Beynes,
lorsque Marie Treiçh-D ersfarges.? par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière duicommunal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps ,• après avoir
�n, ........ .,.C6)
essayé de faire à Marianne ld Plène-/en 1 7 7 5 , un pro
cès ériminel qu’elle fut forcée ¿ ’abandonner , découvrit
i’acte dé 1736, et, ne pouvant en user ellè-m êm e, elle
eut recours à un moyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. Elle se fit associer par ledit Beynes ,
en' 1777 /avec J e a n C ouder, à la ¿faculté de creuser
dans là t e r r e d e la Charoulière eh entier, et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
co?nmu?iah
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
riavoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Cha
roulière/la société ( évaluée à 4 **“) n’auroit aucun effet.
Les trois associés se mirent en œuvre âu mois d’août
1781 , firent une fouille dans le communal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière, qui domine ce
communal.
M arie la Plène aussitôt présenta une requête, de
m anda le transport du juge de S ain t-A n gel, lequel fit sur
les lieu x, le 8 août 178 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’iguorer comment le
premier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
Les Desfarges, Beynes et Couder, qui d’abord ne semb lo ien t se défendre qu’en soutenant que leur fouille
n’avoii pas pénétré sous la C h aro u lière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et d éclarèren t audit procès verbal
qu’ils pm ioient les démarches de la veuve la Plène pour
�(7)
un trouble*à leur-propriété ; que les .causes., dont se ser,voit et «y'etoit ci-devant-servie ladite demoiselle la Plène,,
pour tirer du charbon d e l à .terre de la Charonliere,
portaient.un préjudice notable audit Be'^rieç et autres^ au
droit de retirer du*charbon-de ladite terre, et que ladite
i .
'
\\ ' •> ■'
7 ‘ .1
j : , ou
demoiselle la Plène ne pou voit ^empêcher de leur faire
compte de la m oitié de.ce charbon depuis le temps qu'elle
m o ü acquis.
ui., - , I10(i,
Ils ajoutèrent la demande .qu’il leur,.fut donné-acte de
leurs .réquisitions, et réclamations , f sous, réserve. de la
restitution de la m oitié.du charbon çi-devaiit retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Vlene depuis so?i
acquisition , et autres que de d r o i t •
D e son côté, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
,qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
peinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,* mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application, et que, d’ailleurs il étoit doublement
prescrit.
Pendant cette première'diligence les intimés ne se-, liâtoient pas moins de fouiller le charbon , ils avancèrent si
rapidement, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veuve la P lèn e,
parce qu’ils ne se doimoi.ent pas .la, peine de mettre des
étais. La veuve Desfarges crut faire ,une heureuse diver
sion en rendant plainte., . . # .
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit ouï, et interrogés; mais la veuve Desfarges en fut
.pour su tentative, et la procédure fut civilisée.
On continua le, procès.civil; et les intimés prirent, le
�( 8 ).
20 novembre 1781, les conclusions qu’ils avoiént annon^
cées lors du procès verbal, c’est-à-dire, i°. qu’à Vavenir
le charbon fût partagé par moitié ; 20. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qtfelle a retiré et f a i t ' creuser
sous le champ de la Charoulière, et ce pour leur
m oitié, à quoi ils se restreignent ; 30. à la moitié dudit
charbon retiré de ladite terre depuis Vinstance] 40. en
¿000
de dommages-intérêts.
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du premier juge,
qui déclare les intimés propriétaires de moitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre dé la Charou
lière , et de moitié de celles du communal de la Pleau
(qui n’étoient pas en litige) ; mais, attendu, est-il dit, que
les intimés n’ont pas réclamé dans le temps contre Yex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la Plène , \publiquement et ouvertement, en
v e rtu de son contrat de i j 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations, la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
La veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M ais, 'Sic vos non nobrs, un nommé 'Saint-Victour
profita do ces querelles pour persuader que l’explôitation
de
�;(• 9 ).
de ces mines étoit en mauvaises mains ; il en obtint
d’abord de l’intendant de Limoges la concession pour
«un an; puis il fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration, son utilité, etc. Il-obtint en 1783 une
concession de quinze ans..
;
i La loi du 28 juillet 1791 expulsa xe .Saint-Victour,
qui néanmoins ne fut pas décourage, et qui, dans toutes
les phases d e 'la révolution, se tint aux avenues des
administrations et des ministères, pour solliciter quelquesr
uns des arrêtés ci-après, et en venir de .longue, main à
réussir.
r
•'
‘
Les mines étant seulement sous la surveillance admi~
nistrative , les propriétaires .de Pleau obtinrent , le
6 novembre 17.91, un arrêté du département de la Goi>
rèze, q u i les remettoit en possession de leurs carrières.
Saint-Victour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit il fallut des enquêtes
pour le vaincre. E n fin, en 179 3, il parut céder, et fit
faire par Bettinger, son associé, un traité avec Pierre-;
Jean Treich appelant, lequel 'concédoit, h prix fixe,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département homologua ce traité le 19 juin, 1793.
D ’autres cliangemcns.amenèrent d’autres intrigues. On
fit écrire au ministre de l’intérieur «par le ministre,de la
m arin e, pour les mines de Pleau; on eut des ¿ivis de,.la
commission des mines, d’autres de celle des travaux pu
blics. On fit ordonner quelles propriétaires exploiteroient en commun.
L e département de la Corrèze p rit, les 5 et i 5 plu
viôse an 5 , deux arrêtés qu’il crut etre en c.onforinité
.
!
\ B
�(io)
de ces règlemens ; mais ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
Les propriétaires des mines se réunirent, le 24 nivôse
an , pour organiser une exploitation en com mun, sous
la direction de Mazaud. On pressent que Treich appe
lant, et principal p ro p rié ta ire , ne pouvoit y participer à
cause du traité qu’il avoit fait avec Bettinger.
Un autre obstacle s’opposoit à cette union. Les arrêtés
6
des 6 novembre - 1791 et I 9 j11*11 I 793 subsistoient
en core, et étoient exécutés.
Mais le bien général ne permit pas sans doute à l’ad
ministration de la Corrèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des considérations
particulières. L e plus difficile ne fut donc pas de vaincre
ce léger empêchement :
JDiruit, cedificat, mutât quadrata rotandis.
lie département de l’an 6 cassa , le 23 ventôse, les
arrêtés du département ou plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut hom ologuée, et il fut enjoint à Treich de déclarer
sous quinzaine s’il entendoit s’y réunir, sinon il étoit
censé avoir renoncé à son droit.
Treich se pourvut près des autorités supérieures ; il
osa même élever sa voix jusqu’au chef de l’état; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T re ic h , fils et héritier
de Marie la Plène , fut porté à T u lles, comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu à la cour
d’appfel de Limoges.
�( ÏI )
■
Les a d v e rsa ire sfo rts d e là décision administrative,
contestèrent d’abord la compétence judiciaire : mais
comment un arrêté auroit - il pu suspendre un appel
pendant ? .D ’ailleurs l’arrêté ne régloit rien sur la pro
priété des parties : la cour de Limoges retint donc la
contestation.
•
i Les parties plaidèrent : au fond ; et le 28 -germinal
an 9 intervint l’arrêt suivant :
■
. « Considérant qu’il résulte du contrat du i^\ dccein« bre 1736 -une vente pure , simple •et parfaite de
« l’entier fonds.de la portion de la terre la ¡Charoulière,
« qui fut vendue par cet acte ; que la réserve énoncée
« à la suite de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su p p lé
ée ment du prix déjà stipulé ; q u ’ainsi cette clause n’avoit
« point fait retenir au vendeur la »propriété de la
« moitié de la mine de charbon existante sous le ter« rein aliéné ; qu’il n’en dérivoit contre l’acquéreur,
« qu’une simple action en réclamation de cette moitié
« de charbon ; que cette action en soi est prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps de trente années;
« que les intimés ont avoué et soutenu, au procès , que
« n i François Beynes , auteur à!Antoine , n i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
« à charbon , depuis ledit contrat de 1736 , ju sq iien
0 1780 ; ce qui embrasse un espace de quarante-quatre
« ans , plus que suffisant pour prescrire ;
« C onsidérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean Beynes, premier acquéreur,
« Jean Treicb, père de l’appelant; et l’appelant lui-même,
B 2
�( 12 )
«- ont possédé ladite moitié de m ine, avec titre suffisant
« pour en acquérir la propriété avec bonne foi et sans
te interruption pendant plus de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription se trouve acquise en faveur de l’acqué« reur ; que dès-lors l’exâmen et la solution des autres
« questions agitées au procès deviennent inutiles, etc.
« L e tribunal dit qu’il a été mal ju g é ;.... garde et
« maintient l’appelant au droit et possession de jouir
« des mines à charbon existantes dans la terre la Cha« roulière ; ... le relaxe* de l’accusation et plainte;...
« condamne les intimés à lui rendre le charbon par
« eux perçu dans ladite terre ,... depuis le trouble jus« qu’au jou r.... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et'
« 100
de dommages-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y éch et, du charbon
cc perçu depuis ledit jour 23 ventôse an 6 , etc. »
Les intimés se pourvurent en cassation sur quatre
moyens. Celui de l’incompétence fut rejeté à l’unanimité*'
en la section des requêtes. L e prétexte de la minorité de
Beynes , qu’il ne prouvoit encore pas régulièrement ,
fit réussir l’admission. La section civile rejeta à son
tour ce moyen , et s’attacha à l’incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit juges l’a emporté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qu’il en soit, les deux arrêts de Limoges ont été cas
sés le 14 nivôse an 1 1, pour avoir statué sur la possession
en même temps que sur la propriété, parce q u e, dit
l’arrêt, la possession dérivoit de l’arrêté du 23 ventôse
an 6
et cependant cet arrêté avoit été respecté à Lim o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�( 13 ) '
. _,
renvoyées à faire statuer sur leur appel én cette cour.
Les intimés se figurèrent que cet arrêt de cassation étoit '
un triomphe définitif, et ils allèrent.de suite se mettre en
possession des mines de Charoulière : ils y disposentJ
aujourd’hui en maîtres.
•
Mais bientôt les plaintes que Treicli avoit portées au
pied du trône ont été fructueuses. L e ministre a donne
ordre au préfet de la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven- ’
tôse an 6. Cela a été effectué par arrêté du 27 flo ré a lJ
an 12 , qui permet pour un an à Treich et autres d’ex
ploiter chacun dans sa p ropriété, à la charge de s’expli
quer dans ce délai pour régler le mode d’extraction u "
venir.
N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens adm inistratifs ,
l’appel a été suivi en la cour. Les intimés ne voudroient ‘
y plaider que sur la propriété ; ils prétendent que leur *
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de ‘
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pour prescrire.
M O Y E N S .
Ce n’est pas un très-grand malheur qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’ une cour d’ap p el, reconnue compétente pour le fo n d
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet arrêt, au fon d , soit
suspect d’aucun vice.
�( M )
A u reste, le sieur Treich se consolera aisément de
celte vicissitude , q u i, en jugement comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables \
car si son arrêt de Limoges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le moyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requêtes , ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dans tous ses motifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Limoges dans les ques^
tions de la propriété, et même de la possession antérieure
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition
à l’arrêté du département, du 23 ventôse an 6,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na**
turelle : car ils sont fondés, non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie Mazaud à la possession, mais sur la pos
sibilité qu’elle y eût droit, quand le gouvernement auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6,
- O r , Mazaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , nô
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus ?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événement, il n’y a aucun obstacle à ce que l’arrêt
de Limoges subsiste.
On répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se demanderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins h être persuadés que ç’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parties est remis en litige.
. D ’Argentrédéploroitla misère des plaideurs et l’éternité
des procès : M iseri litigantes ! de quitus m liil certi est
cotislitutmn , et qitôd ab arbitrio cujttsqiie et opincttione
potiàs pend e t, quàrn àcertis regulis, Mais qu’a uroit-il dit
�( i 5 .)
si, outre les tribunaux, il eût fallu parcourir un cercle d’ad
ministrations sans être plus certain le lendemain que la veil
le, et sans que ces administrations le-fussent elles-mêmes?
Quoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
poser , que les choses sont au même état que lors de la
cassation, et par conséquent qu’il existe un arrêté du
23 ventôse an 6.
Si cet arrêté subsistoit aujourd’hui, la cour auroit à exa
miner encore la même question de compétence relative
ment à la possession des mines; et il seroît bien difficile,
on ose le d ire , qu’elle se conformât mieux que la cour
de Limoges à la démarcation des pouvoirs; car pourroitelle faire plus, que d’arrêter ses condamnations à l’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
>
Mais , dans tous les sens possibles, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; les jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par la sentence de S ain t-A n gel, et par
l’appel de la veuve Treich.
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p el, et on ne peut pas invoquer l’art. i cr. de la
loi du 28 juillet 1791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance administrative, il n’ôte pas le fait de la pos
session , et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution , et ce
dernier arrêté ne les rapporte aussi que pour l’avenir.
Ainsi Lim oges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la cour, en statuant de m êm e, s’y conforineroit encore.
�( 'i 6 )
Mais elle n’a pas même l?empêcliement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les intim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui, à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du préfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
nistre, n’a pas borné cette infirmation à un seul ch ef,
comme ils le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste ? il est toujours vrai que la compagnie Mazaud
n’a plus le privilège exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirement\
et d’ailleurs encore il est véritablement oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intimés ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
compagnie Mazaud , qui n’existoit p as, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
emporte donc avec elle la question des jouissances.
A in s i, bien loin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im oges, il semble que la cour n’a aucun empêchement
à adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 5
car la com pagnie Mazaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l’appelant, seulement elle
y avoit une expectative au cas que Treich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. Mais l’arrêté de
l’an 6 n’est plus. La compagnie Mazaud r d’après même
les intimés ( page 14 de leur mémoire ) , n’a plus de
droits ; et s’il est vrai que la possession des mines ait
besoin d’une autorisation ? le sieur Treich l’a encore
obtenue. Ainsi reflet le plus immédiat de cotte. obtenT
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés malgré lui , doivent lui rendre compte.
A u reste , il s’agit ici de com pétence, et par consé
quent
�C *7 )
quent d’ordre public : la cour y statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer dans ses propriétés *, et:
il n’y voit d’autre ' obstacle que l’obstination de ses1
adversaires:
* ' /
• . t. '
■ * "i
* Soit que la cour juge toute la possession, ou seule
ment une partie de la possession , il est au moins cer
tain qu’il n’y a de vrai litige que sur la propriété.*
D ’après cela, si l’arrêt de Limoges est cassé, même pour’
ce qu’il avoit compétemmènt jugé , le sieur Treich ne
sera pas plus embarrassé de prouver à Riom- qu’à
Limoges qu’il est seul propriétaire* de la Charoulièreet des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
’ i° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. Elle
est vendue sans charges.
.
f •
2°. Son titre est fortifié par le fait même du pre
mier vendeur , q u i, achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de m in es, ne s’est fait aucune
espèce de réserve.
*
3°. Il a joui plus de io ans avec titre et bonne foi :
il a joui même plus de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. Cette jouissance est constante au procès.
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen -, aussi' ils s'efforcent de la
diminuer par des négations.
Ils n’ont jamais avoué, disent-ils, que M arie la P lèn c,
C
�( i8 )
veuve T reich , ait jo u i, et ils ne trouvent aucunes traces de
cet aveu ; et l’appelant, au contraire , a toujours d it,
suivant eu x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charou
lière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Pans les écritures de l’appelant ? il a toujours d it, ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C’est donc
dans les interrogatoires? Mais de quel interrogatoire a-t-on
voulu parler ? est-ce de celui de 1775? est-ce de celui de
1781 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
criminels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e premier interrogatoire est vraiment une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de 177^ , la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la sentence. L e juge demande à la veuve
la Plène s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
moitié du communal, et autres carrières ; ..... s’il n’est pas
vrai qu’elle tient sous son joug les liabitans du village; ...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon, etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de moitié du communal,
et de plusieui's autres carrières particulières ; ... qu’elle
n’empêche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veuve la Plène
ne joirssoit pas, on y voit au contraire qu’elle eu (.en
duit très-bien jouir seule doses carrières, envers et contre
tous ; elle ne s'en défendoit pas.
�C *9')
* Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? Cai* il'est parlé
de dix-huit mois dans rinterrogatôire de Martin Bêynës
et dans celui de sa fem m e, qui ont rendu compte de la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plaintè; Mais la
veuve la Plène explique, dans son interrogatoire du
même jo u r, que cette carrière n’est qu’une continua
tion de creusement ; et plus loin! elle parle encore de
ce nouveau creusement.
Comment la veuve la Plène auroit-elle , én effèt, menti
à' la" vérité contre elle-même ,- lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de' 1781 , qu’elle a toujours1
joui. « Les contrats de ven te, dit-elle ( dans là requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces« des intimés ) , ont toujours été suivis d?exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que là stip« pliante a eue seule des fonds ÿ mentionnés, notam« ment de la terre de1 la Charoulière , à l’exclusion dé;
« tous autres, et sans opposition. »
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en première instance. Leurs* réquisitions au procèî
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la-requête’
du 20 novembre suivant, qui en font le complément,*
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que“la coïir a dû së convaincre, par^
le seul récit des faits, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
* Q u ’y a-t-il encore de plus exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
G a
�( 2° )
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence ; donc le
débouté, motivé sur la jouissance exclusive à leur vu et su 7
demeure inattaquable : le motif et le dispositif ne peuvent
se séparer. Enfin, peut-on douter de la possession constante
de T reicli, après avoir vu les aveux faits devant la cour
de Lim oges, et rappelés dans les motifs de son arrêt?
Ainsi la jouissance des Treich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se tx*ouve au contrat de 1736. O r, avec ces
points de fait, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescription, indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 1771.
V e u t-o n considérer Antoine Beynes isolément, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la vérité, il faudroit une prescription de trente ans.
O r , cette prescription s’y trouve, car Antoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1781, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de Lim oges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en disant
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, outre qu’il
11’éloit pas seul héritier du vendeur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire (pag» 11 )? veulent trouver neui ans de
moins, c’est qu’ils ne comptent pas rintervaile de 1736
à 1755.
�( 2Í )
Pour justifier cette déduction, ils disent que c’est en
1755 seulement que la cause de la possession a été changée. '
Mais il n’est pas nécessaire de changer la cause d’une pos
session pour prescrire par trente ans; car cette prescrip
tion n’exige aucune autre condition que là possession à
titre de propriétaire; neque bona fides requiritur, sed sola
possessio per tricennium. Le Gode civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On peut prescrire contre son titre, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« contractée. » (A rt. 2241.)
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
vendeur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de Treich acquéreur en 1^5 5 ; et, sous
ce point de vue, il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
dix ans les charges auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que, dans la plupart des pays de droit
écrit, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de Bordeaux, d’où il paroît que ressortissoit l’ancien Limousin , admettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
Lapeyrère, lettre P , n°. 83.
A la vérité , son annotateur inconnu prétend que Bor
deaux n’admet que la prescription de (rente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré, nu
cas qu’il y eût lieu d'aborder cette question secondaire.
Lapeyrère «avoit d it, au n°. 60, que la prescription
s’ilcqnéroit par dix ans au tiers possesseur, suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
• Mais , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
avoir lieu dans la cause.
'
'
- i Q. Tous les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de dix ans se fondent sur l’Authentique M alœ
J id e i, et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présume pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présumer qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât longi temporis preescriptio, si verus do m inu s ignoret ju s suum et aliénationem facta?n, Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
Mais comment ne pas voir qu’ Antoine Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lui-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il n’a pas même ignoré la vente de i j 55 , car en 1766
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers Treich pour
propriétaires des carrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A u th e n tiq u e Ma?ce fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un immeuble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de dix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’immeuble lui-même est grevé, et que D unodm et
sur la même ligne quant à la prescription de dix ans.
O r , la réserve dé partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 1736? qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit h des fruits temporaires ?
E t 11’étoit-il pas ridicule que le juge de Saint-Angel
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimés,
même Couder et la veuve D esfarges, étoientpropriétaires
�< * 3 '?
pour, m o itié, comme si après une vente le vendeur demeuroit propriétaire ;, et comme si dans un fonds il y avoit
deux propriétés, l’une du tréfonds et l’autre de la super
ficie.
.
M ais, dans tous les cas, il est superflu de remonter à
cette réserve de 1736, parce que Jean Treich ayant acquis
en 1755 , sans qu’elle fût mentionnée, a joui avec bonne
f o i, au vu et su du vendeur, qui connoissoit son droit ;
ainsi l’appelant a prescription suffisante.
. Les intimés répondent que la .prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’abord, parce que
c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce quç
s’agissant de possession sous la terre, il y a clandestinité.
. Autant vaudroit avoir dit etia?n per jnille aniios ,
comme le dit Dumoulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en convenir, il seroit un peu dur de songer quq
de vieux titres portant réserve d’un droit peuvent tom
ber des nues à la vingtième génération, et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à 'aucun trouble.,
L ’espèce de Cancérius,rapportée par D unod, parmi les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’un des faits principaux de la cause; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les habitans, c’est parce qu’il
ne l’a pas réparé sans eu x; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la c¿mse d’une
manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�( H )
' « 11 faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
« fondement dans la nature, dans le droit public commun
c< à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
« liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses,
« sans aucune préexistence ou mélange de titre, de
« convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
« qu i tire son origine d'un co n tra t, qui est propre à
« celui qui a le titre, qui résulte d’un droit form é, qui
« produit une action , et qui peut être déduite en ju
te gement.
« La première de ces facultés n’est pas sujette à la pres
et cription, tant qu’elle n’est pas intervertie. M ais la se« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« rive d’une convention et d’une action qui sont pres
et criptibles et dans le commerce ordinaire, à moins
a qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne pouvoir être prescrites. » (D unod , pag. 90.)
' Ces principes s’appliquent sans effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Limoges.
Remarquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’enlredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le droit, non pas seulement d’attendre qu’on creusât
pour partager , mais de creuser lui-même.
La preuve, c’est qu’il a associé pour creuser ; la preuve,
c’est qu’on a creusé soi-même, et plaidé pour soutenir
qu’on en avoit le droit.
La preuve enlin , c’est que la sentence de 1782 adjuge
ce
�( *5
) ) ...............................................................
en droit; c'est qu’elle déclare les intimes propriétaires de
la moitié de la mine.
*
Une propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
concoit-on un propriétaire qui conserve son droit sans
prescription, quand un autre en jouit d’après lui-même
exclusivement?
.
’ 1 ■\-p1 >pv *.> ,
.
! -- --
•
"
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.
V
■
Mais cette jouissance, dit-on, a été clandestine.
A cela il n’y auroit qu’un jnot à répondre ; c’est
que la; sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu
au vu et su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
pas attaquée par les intimés. Dira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? Mais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le perd.
<
D ’ailleurs, il est de principe que les, aveux consignés
dans un acte subsistent malgré son annullation , comme
l’enseigne Cochin , tome 5 , page 274, et comme l’a jugé
la cour de cassation le 29 floréal an 7.
Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de Lim oges,
qui mentionne l’aveu de la possession.
Mais rappelant 11e veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fait ni dans le droit.
Dans le fait, aucun habitant de la Pleau n’a mieux su
que Beynes tous les tours et détours des.charbonnières ;
et quand il se fait un moyen de ce que la Charoulière
n’a pas eu d’excavation verticale, il sait bien qu’à la Pleau
D
*
�àn n’a'jamais.--comme en Flandre / exploité ces mines
par des puits.
X^a montagne ou est la houille est en cône régulier ;
par conséquent, pour creuser dans une surface, il faut
creuser par une tranchée1 horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m oyen, qui est le seul usité à la Pleau, rien
n’indique mieux où se dii’ige la fou ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
La procédure1prouve d’ailleurs que c’est dans un 'tertre
de la Charoulièrd quéi se trouve l’une des ouvertures ;
d’autres*- sont au com m unal, mais au pied de la Charouliêre y et' en direction~de cette mine.
!
/ .i i
•
.
A u x termes du d ro it, une possession clandestine sup
pose le dol ; c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt'de le saVoir. Il n’est pas besoin,
pour l’étirblir, d’aller rechercher d’autres principes que
ceux-là même consignés au m ém o ire des intim és :
Clàtii possidere eum die ¿m us , qui f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o queni sibi controversiam facturum s u s p ic a b a t u r j et ne facerct t im e . jja t . L. 6 , fï‘. D e acq, P o s s .
V oilà donc trois choses qu’il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Piène ait \ox\\fu rtivem en t,
2°. qu’elle ait craint une action de la part d’Antoine
Bcyncs; 30. qu’Antoine Beynes ait ignoré la possession.
La sentence de 1782 répond 'à tous ces faits, en disant
que Marie la Plèrie a joui publiquevidnt. La plainte de
177^ prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�C 27 ?
contestations ; et enfin les écritures des intimés, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur moyen.
• Mais quand tout cela n’existeroit p a s, vit-on jamais
Appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
La clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui a
voulu prescrire par 4e seul secours de la possession , et
parce que sans possession publique il n’a vraiment pas,
de possession.
'
" Mais celui qui a un titre n’a besoin d’avertir per
sonne qu’il joùit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lui est point appli
cable.
•
i !
Dunod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en vertu
<< d’un titre ne p e u t être regardé com m e possesseur clan« destin , son titre le faisant supposer de bonne; foi dans
« le commencement; ce qui suifit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
*. '
L e Code civil répète que la bonne f o i , quand il .y a
un titre , est toujours présumée , et que c'est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( Art. 2268. ) .•
Les intimés disent qu’on devoit avertir Bcynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’usage n’étoit pas de le fa ire 'par écrit : et d’ailleurs, on
le rép ète, ils se sont dits copropriétaires.
‘ Il n’y a donc aucun obstacle à ce que la prescription
ait eu son cours; et Treich ayant un titre e t’ bonne foi
depuis 1755 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777*
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�( 28
}
cessaire ; c a r, indépendamment de la présomption Lien
fondée , que la reserve de 1736 a du être rachetée comme
l ’a été celle de 1768 , par un acte que Treicli avoit dés
espéré de trouver; il doit demeurer, ce semble , pour
chose absolument évidente, quAntoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
Com m ent, en effet, Antoine Beynes, qni a toujours
habité le village de la P leau , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
Antoine Beynes , qui en 1766 faisoit un traité pour ex
trade du charbon dans ses propriétés, auroit-il manqué
d’y comprendre la Charoulière, s’il y avoit eu le même
droit d’extraction ?
Comment Antoine Beynes, qui vendoit en 1768 tous
scs droits aux mines, en se réservant du charbon, 11’auroit-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T out prouve donc
qu’elle n’existoit plus, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Limoges ,
et il étoit fondé; c’est q ue, dans tous les cas , n’y ayant
qu'une septerée de la Charoulière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors vendue, ci non sur celle
qui l’avoit été depuis long-temps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’il 11’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se feroit contre
le vendeur, in euju s potestate f u it Jegeni apertiùs diccre. La sentence de Saint-Angcl étoit donc encoye vi
cieuse, même sous ce rapport.
Cette défense se résume en peu de mots. La propriété
�( 29 )
de la Charoulière est sans difficulté à Jean Treich. Les
actes qu’il a passés avec les Beynes , prouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’Antoine Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T reich
et M arie la Plène ont joui exclusivement et publique
ment , au vu et su dudit Beynes, sans réclamation de
charges ni de copropriété.
Ainsi Beynes a -perdu son d ro it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur, par une possession
de trente ans.
Ainsi Treich a acquis la franchise de la terre la Cha
roulière, par la possession de dix ans entre présens, comme
acquéreur ; et même surabondamment, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire, il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem ment, sous tous les points de vue possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une-tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirmée par
la cour de Limoges.
M . B A R R E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Pleine, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0407
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Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
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Text
MEMOIRE
t
SUR
UNE C O N T E S T A T I O N
RELATIVE
A
LA
POSSESSION
ET
PR O PR IÉ T É
DE MINES A CHARBON.
i
A R I O M,
d e
l’ i m p r i m e r i e
IMPRIMEUR
d e
t)E L A
L A N D R I O T ,
COUR D ’ APPEL.
A o û t 1804.
s e u i
�MEMOIRE
COUR
EN RÉPONSE,
D’APPEL
SÉANT G
A RIOM.
POUR
P ierre - J ean - B aptiste T R E I C H L A
P L E N E , appelant
'
M a r ie
CONTRE
,
T R E IC H -D E S F A R G E S
L achaud ,
Jean
COUDER ,
veuve
et
Léo
n a r d C H A D E N I E R , in tim és.
A V E C des titres de propriété , et la garantie des lo is ,
le sieur T reich a été jusqu’à présent à la m erci de tout
•le monde. U n ancien vendeur qui se croyoit intéressé
A
�,
.
.
( 2 \
. . .
à luî faire un procès y associa deux autres individus
absolument étrangers à ce débat ; et pendant que les tri
bunaux en étoient occupés , pendant l’appel d’une sen
tence qui n’a besoin que d’être lue pour être condam née,
un intendant disposa du sujet de la querelle au profit
d’un inconnu. Bientôt c e lu i- c i trouva en son che
m in la révolution , qui lui ôta sa p r o ie , et la remit
aux mains du possesseur, sous la surveillance adminis
trative. M a is, dans la l'apide succession des surveillans,
ceux du lendemain détruisirent la volonté de ceux de
la v e ille ; e t, après uncalios d’arrêtés administratifs con
tradictoires , la confusion alloit devenir d’autant plus
g ra n d e , que le procès sur la propriété étoit encore en
suspens devant les tribunaux. U ne cour d’appel pro
nonça sur cette propriété : m ais, comme si c’étoit un
attentat d’avdir éclairci la difficulté , on fit un crime à
son arrêt d’avoir confondu l’accessoire avec le principal;
et, ce qui d o itle plus étonner, la cour de cassation, étourdie
sans doute par cette Babel de décisions et d’incohé
rences , a adopté ce système et cassé l’arrêt comme in
com pétent', non pas quant au jugement d elà p rop riété,
mais quant à celui de la possession , qui néanmoins étoit
aussi en litige. Q uoi qu’il en so it, cette m ultitude d’ar
rêtés ne peut plus aujourd’hui embarrasser la cause;
le ministre de l’intérieur les en a écartés ; et il s’agit
simplement de savoir si le vendeur d’une jn in e, qui l’a
vu exploiter pendant 46 ans sans y rien prétendre,
a p u , après ce long espace, et sous prétexte que dans
sa vente il existoit une réserve dont il n’a jamais fait
usage , réclam er une copropriété contre un tiers deten-
�.
( 3 \
.
tèur ; si encore il le p e u t, après avoir vendu le surplus
de ses droits sans aucune mention de ceux qu’il veut
faire x*evivre. Gomme cette cause est tout entière dans
les faits ; que les intimés nient aujourd’hui une posses
sion qu’ils ont avouée dans d’autres temps ; et qu’ils se
fondent sur un seul acte qui est détruit par plusieurs
autres actes et circonstances , l’appelant est obligé de pré
senter. ces mômes faits avec un certain détail absolument
nécessaire à l’intelligence de ses moyens.
F A I T S .
\ . . . i ;! »
■
• •i •
A u village de la P le a u , dans le département de la
Gorrèze , sont des mines de houille ou charbon de
terre appartenantes à divers particuliers. Jean T reich ,
père de l’ap p elan t, en étoit le principal propriétaire^
En 1 7 4 7 , il acquit de Pierre Beynes sa portion dans
la terre appelée im proprem ent le communal de la Pleau,
parce qu’elle appartenoit à quatre propriétaires.
L e 25 mars 1 7 55 , il acquit du même P ierre BeynesJ
tout le terrein où étaient ses-mines et carrières à charbon,
dans lequel fut comprise la terre appelée la Charoulière
qui fait l’objet de la contestation. L ed it héritage vendu^
est-il d i t , tant pour ce qui concerne les mines et car
rières à charbon , que pour les bois , terres et buges qui
sont au-dessus , m oyennant 3000
Il fut dit que l’ac
quéreur entretiendroit un marché fait avec le m aréchal du
lieu pour sa provision de charbon , et que le vendeur,
auroit lui-inême sa provision annuelle dans les carrières
vendues. ,
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,
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A a
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'( 4 )
.
Cette terre de la C h aro u lière, qui a' en surface troiâ
septerées , avoit 'été vendue audit Pierre Beynes par
François Beynes, aïeul d’A n to in ette, femme Chadenier;
sa v o ir, deux septerées avant 17 3 6 , par un acte que
l ’on ne conrioît pas ; l’autre septerée fut vendue avec une
autre terre par acte
du
I er, décem bre 1 7 3 6 ; et cette
septerée vendue y est conjïnée de jou r avec autre partie
de la même terre, ci-devant délaissée par ledit vendeur
audit acquéreur.
O n y rem arque encore la clause suivante : « Sous
« la réserve expresse que fait ledit v e n d e u r, du consen« tement dudit acquéreur, de la m oitié de tout le cliar« bon qui pourra se creuser dans ladite terre appelée la
« C haroulière, une des deux ci-dessus vendue, h la charge
« que les frais et dépens qui conviendront faire pour
« le déterrem ent du charbon , se répartiront également
« entre ledit vendeur et ledit acquéreur. »
M ais tout prouve que cette charge fut rédim ée bientôt
après, indépendamment encore de ce qui résulte de l’acte
ci-dessus de 1755.
.
A n to in e Beynes , fils et héritier dudit F rançois, tant en
son nom que com m ecédataire de ses frères et sœurs, vendit
à M arianne la Plène , veu ve dudit Jean T reicli (m ère de
l’app elant), par acte du 29 août 176 8 , un terrein appelé
Chazalas, « confrontant de toutes parts avec le chemin
« de T u lle s , les carrières communes dudit village de la
« P lea u , avec autres carrières et terrein de ladite de—
« tnoiselle la P lè n e , etc. ' ensemble les carrières à
« bon de p ie rre , pratiquées et à pratiquer dans ladite
« pièce de terrein , etc.; comme aussi a vendu à ladite
�a
«
«
a
te
«
«
«
«
«
«
.
,
( 5 }
demoiselle la rPlène la part et portion appartenante
audit vendeur, èsdites qualités, sur les carrières situées
dans le communal de P leau , etc. ; sans par le vendeur
se faire aucune réserve de sa portion dans ledit com
m u n a l, etc. ; demeure chargée ladite acquéreuse d’exécuter les conventions portées au contrat du 29 septem
bre 176 6 , etc.; de même aussi sera obligée ladite ac
quéreuge , de délivrer au vendeur et aux siens la quantite de soixante quartes de charbon annuellement^
tant et si l ong ue me nt qu’il se recueillera du .charbon
dans lesdites .carrières ci-dessus ven d u es, à la charge
« que le vendeur ou les siens seront tenus de les creuser
« eux-mem es ou faire creuser à leurs dépens, etc. »
Cet acte de 1766 (leq u el seul A ntoine Beynes voulu t
rappeler) étoit un traité par lui fait avec Bernard D odet
pour extraire le charbon de ladite terre C hazalas, con
frontant,, disoit—il lui - môme audit acte, d’une part la
charbonnière commune , et d’autre part la charbonnière
des héritiers du fo u sieur Treich le .cadet. ,
A n toine Beynes n’avoit guère d’autre ressource que sa
rente de soixante -quartes de charbon , qu’il lit valoir
quelque tem ps, sans avoir garde de réclam er aucun autre
droit en vertu de l’acte de 1736. Il la vendit le 6 janvier
1 7 7 1 , et M arianne la Plène la remboursa par acte du 27
du même mois.
T o u t se réunissoit donc à séparer entièrement les in
térêts de M arianne la Plène d’avec ceux dudit Bevnes,
lorsque M arie T reicli-D esfarges, par jalousie de voisi
nage , à cause de la charbonnière du communal dont elle
avoit acquis une partie depuis quelque temps, après avoir
�.
.
C 6 )
•
essayé de faire à M arianne la P lè n e ,e n 1 7 7 5 , un p ro
cès crim inel qu’elle fut forcée d’abandonner, découvrit
l ’acte de 17 3 6 , e t, ne pouvant en user elle-m êm e, elle
eut recours à un m oyen jusqu’alors inconnu pour chi
caner un voisin. E lle se fit associer par ledit Beynes ,
en 1 7 7 7 , avec Jean C o u d e r, à la fa c u lté de creuser
dans la terre de la Charoulière en entier , et en échange
on associa ledit Beynes au charbon à recueillir dans le
communal,
A la vérité on ne supposa pas tout à fait que le droit
de Beynes fût bien certain ; car il fut ditque si ledit Beynes
n avoit pas ce droit de creuser dans la terre de la Charo u liè re , la société ( évaluée à 4 t t ) n’auroit aucun effet.
L es trois associés se m irent en œ uvre au mois d’août
1781 , furent une fouille dans le com m unal, où la veuve
Desfarges avoit une portion, et de là ils poussèrent leurs
travaux sous la terre de la Charoulière , qui dom ine ce
communal.
M arie la Plèn e aussitôt présenta une re q u ê te , de
manda le transport du juge de S a in t-A n g e l, lequel fit sur
les lie u x , le 8 août 1 7 8 1, un procès verbal qui fixa les
prétentions des parties, et qu’il est essentiel d’analiser,
parce que les intimés feignent d’ignorer comment le
prem ier juge a constaté des dires qu’ils désavouent à
présent.
'
Les Desfarges, Beynes et C ou d er, qui d’abord ne sembloient se défendre qu’en soutenant que leur fouillo
n’avoit pas pénétré sous la C haroulière, essayèrent néan
moins le ton offensif, et déclarèrent audit procès verbal
qu’ils preuoient les démarches de la veuve la Plèue poui
�,
C7 )
un trouble à leur p ro p rié té ; que les causes dont se servoit et s'êtoit ci-devant servie ladite demoiselle la P lèn e,
pour tirer du charbon de la terre de la C h a ro u liere,
portoient un préjudice notable audit Beynes et autres, au
droit de retirer du charbon de ladite terre, et que ladite
demoiselle la Plène ne pouvoit s’empêcher de leur faire
compte de la m oitié de. ce charbon depuis le temps qiCetle
avoit acquis.
ajoutèrent la demande qu’il leur fût donné acte de
leurs réquisitions et réclamations , sous réserve de la
restitution de la m oitié du charbon ci-devant retiré de
la Charouliere par la demoiselle la Plene depuis son
acquisition , et autres que de droit.
Ils
D e son cô té, la demoiselle la Plène se plaignit de ce
qu’on avoit fait un chemin souterrein, pour venir, par cette
feinte adroite, dans sa charbonnière ouverte ,• mais qu’on
ne pouvoit s’aider du titre de 1736, parce qu’il n’avoitpas
d’application , et que d’ailleurs il étoit doublem ent
prescrit.
Pendant cette première diligence les intimés ne se liâtoient pas moins de fouiller le charbon ; ils avancèrent si
rapidem ent, et avec si peu de précautions, qu’ils pensèrent
se trouver pris sous la galerie de la veu ve la P lè n e ,
parce qu’ils ne se donnoient pas la peine de mettre des
étais. L a veuve Desfarges crut faire une heureuse diver
sion en rendant plainte.
. L a veuve la Plène et scs ouvriers furent décrétés de
soit o u ï, et interrogés ; mais la veuve Desfarges en fut
pour sa tentative, et la procédure fut civilisée.
O n continua le procès c iv il, et les intimés priren t, le
�c 8 }
.
•
20 novem bre 17 8 1, les conclusions qu’ils avoient annon
cées lors du procès verb al, c’est-à-dire, i° . qu à Vavenir
le charbon fût partagé par m oitié ; 2°. que pour le passé
la demoiselle la Plène fût condamnée à leur restituer
6000 cartes du charbon qu’elle a retiré et J a it creuser
sous le champ de la Charoulière , et ce pour leur
m oitié , à quoi ils se restreignent 30. à la m oitié dudit
charbon retire de ladite terre depuis Tinstance 4°* erl
^000
de dommages-intérêts.
j
L e 17 mai 1782 intervint la sentence du prem ier ju g e,
qui déclare les intimés propriétaires de m oitié des car
rières de charbon qui sont dans la terre de la Charou~
Hère , et de m oitié de celles du communal de la Pleau
(q u i n’étoient pas en litig e ); mais, attendu, est-il d it, que
les intimés n’ont pas réclam é dans le temps contre l’ex
ploitation de charbon faite avant Vinstance par la de
moiselle la P lè n e , publiquement et ouvertement , en
vertu de son contrat de i'/ 55 , au vu et su dudit Beynes et
de ses associés, sans réclam ations , la veuve la Plène est
renvoyée de la demande en décharge de tout compte du
charbon extrait, et ils sont renvoyés eux-mêmes de toute
demande. L e surplus de cette sentence règle le mode
d ’exploitation pour l’avenir.
Les Beynes, Couder et veuve Desfarges n’ont point
attaqué ce jugement.
L a veuve la Plène en interjeta appel en 1782. Cet appel
fut instruit en la sénéchaussée de T u lle : elle étoit sur
le point d’obtenir justice.
M a is, Sic vos non n o b is , un nomm é Saint-Victou*’
profita do ces querelles pour persuader que l ’ e x p l o i t a t i o n
de
�.
, .
< •* > )
de ces mines étoit en m auvaises„ rnains +ril çn
d’abord de l’intendant dei.Lim oges la concession poui;
un an ; puis-il ¡fit valoir ses dépenses, l ’excellence de son
administration^ spn0i^tUit;é ,
.p ^ in t éfi. 1783 une
concession,de q^m ze.jris.
ob ar»*: ' J S 15{
L L a •loi du .28 juillpt;fi ^9.1;e ^ u ^ a < ,Sa;nt-„yiCtour4
qui néanmoins ne fut pas découragé, -et q u i, dans toutes
les phases de la ré v o lu tio n , se f.t iiït ,iu x avenues des
administrations etTdes, ministère^, ppur solliciter quelquesuns des arrêtés ci-après,
en veniir.4pr,longue mfvin à,
réussir.
, ,
r> q
^ f, s;i{
.,_T '
Les mines étant seulement sous la surveillance, admir
nistrative , les propriétaires de Pleau obtinrent , le
6 novem bre 1791^ un arrêté du département de la.Gorrè z e , qui les remettpit en possession de, leurs carrières..
Saint-Yictour intrigua et prétendit que lui seul avoit mis
les charbonnières en état de produit; i l fallut .des enquêtes
pour le vaincre. E n fin , en 179 3 ,, il p aru t,céd er, et fit
faire par B ettinger, son associé ,..un,traifcé^avec Pierre-,
Jean T reich appelant , lequel, conçédoit, ¿1 p rj,x fixe ,
audit Bettinger, l’exploitation de ses mines pendant vingt
ans. L e département hom ologua ce traité le 19 juin 1793.
D ’autres cliangemens amenèrent d’autres intrigues. O n
fit écrire au ministre de l’intérieur .par le ministre de la
m arin e, pour les mines de Pleau ; pn eut des avis de la,
leommission des m ines, d’autres de celle des travaux pu
blics. O n fit ordonner que les, propriétaires ex;ploiteroient en commun. •
L e département de la Corrèze p r it, les
viôse on
5,
5
et i5 plu
deux arrêtas qu’il crut etrje en conform ité
.j ;; illf
'
�r,
.. , . ............. C ™ / ) .
.
.
_
de ces feglemèris-, maïs ils furent cassés par le ministre
de l’intérieur, le 8 floréal an 5.
‘
Les propriétaires des minés se réunirent, le 24 nivôse
an 6 j poiir Organise^ une* exploitation en-commun, sous>
là direction de Mazaud. O n prëssent que T reich appe
lant, ét principal propriétaire, ne pouvoit y ! participer à
cause du traité^qü’il avoit fait avec Bettinger.
U n autre obstacle s’opposôit à cette union. Les arrêtés
des 6 n o v em b re2 1791 et 1 9 " 'juin ' 1793 subsistoient
enbdre', et élloiént exécutés.’
' Mais le ‘bien ’général ne permit pas sans doute- à l’ad
ministration dé"la C oirèze de se laisser guider servile
ment par des décisions sous la foi desquelles on avoit
traité , et de se laisser maîtriser par des Considérations
particulières. L e pliis difficile né fut donc pas de vaincre
te léger empêchement ':'
;
:
D ir u it , œ d ijic a t, '■m u tâ t q u a d ra ta ro tu n d is .
L e département de l ’an 6 ' cassa, le 23 ventôse, les1
arrêtés du département 611 plutôt des départemens
de 1791 et de 1793. L ’union de la compagnie Mazaud
fut liom oiogu ée, et il f u t 1enjoint à T reich de déclarer
sous "quinzaine s’il entendoit s’y r é u n ir , sinon il étoit
censé avoir renoncé h son droit.
T reich se pourvut près des autorités supérieures; il
osa même élever sa vo ix jusqu’au chef de l’état ; et
bientôt nous verrons qu’il n’a pas supplié en vain.
Cependant cet arrêté de l’an 6 étoit le dernier état
des choses, lorsque l’appel de T r e ic h , fils et héritier
de Marie la P l è n e , fut porté ci T u lle s , comme tribunal
choisi par les parties : il fut ensuite dévolu a la cour
d’appel de Limoges.
�.
c n,
_
,; ■
Les
adversaires
,
forts
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la
.décision
adm
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» •j 'j \j! -.y' -;a i j i * '>1' ;um ; *¡J .- .)¿jinistrative.
. • ;•
contestèrent, ^d’abord la xpm pçtence .judiciairp ; mais
comment un arrêt^. ^ r o it - i l pu suspendre un aj>pél
pendant?
D ’ailleurs„rarrêfp.pe
régloit rien.sur
la .*];•
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j >V k> • *; v ! S \ > ¿ J : !
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priété des parties : la, çouç dp ,ïfifn p ges,retin t donc ,1a
J-c
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t Les parties. plai<lèreftt;(^u^fyn^0;
' } xi
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an g intervint Î’arrçt..suivait
’ *r . . . • .
k Considérant qu’il résulte du contrat.du i«”-. dccein•
• .
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'K.j,
•> m‘ \ ïi:!ir> h , h.} • •. r i ?:j i a
« bre 1736 ,une : y ^ t ç -¡pure tj siniple)} et parfcifeo.de
« Tentier fonds,de.la portion de la, terre la, Charoulière,
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« qui fut vendue,par cet acte,: que la réserve énoncée
• n
1 v ;'
■' !
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; i , . ; , i ,. ‘ . [ >' r : - ■ »
cc à la suite ,de cet acte , même du consentement de
« l’acquéreur, n’y est apposée que comme un su gplé« ment du p rix déjà stipulé ; qu’ainsi cette clause n’avoit
« point fait -retenir au vendeur; la. p r o p r ié té ( de. la
«1¡1
moitié
sous le tér. de la
1- mine- de
:'•/ charbon
il* 1. . II.èxistante.
-. ¡ :,v;
,
« rein aliéné ; qu’il n’en dériyoit contre: l’acquéreur
cc qu’une simple action en réclamation de cette m oitié
« de charbon ; que; cette action QU^soi, ^st; prescriptible
« comme toutes les autres , par le laps^de rtrerite annéès;
« que les in tim és.ont avoué et soutenu, au p r o c è s. que,’
« n i François Beynes , auteur d A n to in e ' , 7 i i ledit
« A ntoine lui-même , navoient jam ais jo u i de la mine
cc à ch a rb on , depuis ledit contrat d e i ^ 6 ,ju s q u e n
c* 178 0 ; ce qui embrasse un espace ^de quarante-quatre
ce ans , plus que suffisant pour prescrire ;
.
cc Considérant que cette action est prescrite par le
« non-usage; que Jean B eyn es, prem ier a cq u é re u r,
•
■*
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« Jean T reich , père de l’appelant, et l’appelant lui-même,
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. . . . . .... .
.
« ÀWt |)dskecl6 ïad^c'mciîtie1cl;éJnfaiïe 3 avec titre èiiifisant
« pour eri àcqütéWi*' ïa ^ropriiké^Wee b o û W f d r e t saris
« interruption pendant plus'de trente ans; qu’ainsi cette
« prescription së tro u ve acquise en faveur d e ‘ l’acqué-
« reür que dès-tors Tèxiiîioeii èï îü Solution dçÿ autres
« questions agitées au procès deviennent in u tile 1 etc.
r-. f - ...... . p „ ° „ r
. rK . f' } ....
... ' : ,r...
L e tribüntîl tfit'q u ’il a été friil ju g é;'....
et
« maintient l ’appelant aü d roit et possession de jouir 1
« d e s.m in e s a charbori existantes dans la terre la Cha« roülière [ ...' le ' ' rel'a'xô d 'e 'Î’aBcü^tioh ;et plainte;
condamne'" les intimes à-! lui Véùd'rë le ’ charbon par'
euX ^ e rç u dans ladite 'tërr'è ;./. depuis le trouble jus
te qu’au jo u r .... de l’arrêté du 23 ventôse an 6 ,... et
« ioo'ri~ de dommqges-intérêts ,.... sans préjudice à la
« restitution en temps et lieu , s’il y é c h e t, du charbon
'"«
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« ‘ perçu depuis ledit joür ¿ ¿ ' ventôse an 6 ,' etc. »
•
.Les intimes se pourvurent en cassation sur quatre
moyens: Celui de l’incompéteiice fut réjeté à l’unanimité
en la section des requêtes. L e prétexte de la m inorité de
B e yn esV cjù ’ il lie jirbuyoit encore pas régulièrem ent,
fit réussir Tàdriiission. L a "section civile rejeta à son
tour fce nVo'yfcn , et s’attacha à l’ incompétence : il en est
résulté que l’avis de huit j tiges l’a em porté sur celui de
vingt-trois.
Quoi qû’ilc n so it , Tes deu?i arrêts de Lim oges ont été cas
sés le T4'mvôsc an 1 1 , pour avoir statué sur la possession
en m êm e.tem ps ejue sur la p ro p rié té , parce q u e , dit
¿’a r r ê t, la possession dérivôit de l’arrêté du 23 ventôse
àn 6 ,\ ..e t cependant cet arrêté avoit été respecté à L im o
ges comme une barrière insurmontable. Les parties sont
�. V . . . . .-C'^ )
■ .
. ...
E n voyées à ’ faire statuer sûr leur appel en (cette cour.
* Les intimes seîigurèrent que cet arrêt de cassation étoit
un triomphe définitif, et ils allèrent de suite se mettre en
possession des/m ines de Charoulière : ils y disposent
aujourd'hui 'eri'’maîtres.
,
.
’
u M ais bientôt les plaintes que T reicli avoit portées au
pieçt du trôneront été’ fructueuses. L e ministre a donné
Ordre aupréfet>Jdè la Corrèze de casser l’arrêté du 23 ven
tôse an 6. Cela a‘ été effectué par arrêté du 27 floréal
a n 'lV ^ q u V permet polir un an à T reich et. autres d’ex
ploiter (illacuii dans sa p ro p rié té , à la charge de s’exp li
quer dan"sJce délai pour régler le m ode d’extraction à
venir.
' N ’y ayant donc plus d’em pêchem ens. administratifs ,
Fappel a été suivi en la cour. lies intimés ne voudroient
y plaider que sur la -p ro p riété; ils prétendent que leur
droit est im prescriptible, et qu’il ne s’est pas écoulé de
prescription , soit à cause de la clandestinité , soit quant
au délai suffisant pou r prescrire.
M O Y E N S .
v
Ce n’est pas un très-grand malheur' qu’une bonne cause
soit remise en jugement après avoir été gagnée en der
nier ressort , lorsque la cour suprême n’a blâmé cette
décision que dans un très-petit accessoire. Mais 011 ne
peut s’empêcher de s’étonner grandement que l’arrêt
d’une cour d’appel., reconnue com pétente pour h fond
du procès et pour la majeure partie des accessoires, ait
été pleinement cassé, sans que cet a r r ê t, au fond , soit
suspect d’aucun vice.
�.
( .H )
#
A u re ste , le sieur T re ic li se consolera aisément de
cette vicissitude , q u i, en jugem ent comme en adminis
tration , n’épargne pas les choses les plus irréfragables;
car si son arrêt de Lim oges a été cassé, il a au moins
l ’avantage que le m oyen de non-prescription, sur lequel
les intimés avoient insisté davantage, n’a pu être accueilli
ni à la section des requetes , 'ni à la section civile , et
que l’arrêt de la cour de cassation, dan^ tous ses m otifs,
n’attaque aucunement l’arrêt de Lim oges dans les ques-,
tions de la p ro p rié té , et m ême de la possession antérieure,
à l’an 6 , mais seulement pour s’être mis en opposition,
à l’arrêté du départem ent, du 23 ventôse an 6.
, ,
Les motifs de cassation font naître une idée bien na
turelle : car ils sont fondés , non pas sur le droit qu’avoit
la compagnie M azaud à la possession, mais sur la pos ■
*
sibilité qu’elle y eût d ro it, quand le gouvernem ent auroit
ratifié l’arrêté de l’an 6.
.
O r , M azaud n’ayant plus ni arrêté ni expectative , ne
faudroit-il pas dire que sublatâ sausâ tollitur effectus?
et que la cassation étant fondée sur une condition nonsuivie d’événem ent, il n’y a aucun obstacle à ce que l ’arrêt
de Lim oges subsiste.
O11 répondra qu’il y a chose jugée ; mais on se dem anderoit laquelle ? et cette réponse même nous con
duira au moins à être persuadés que c’est bien sans
nécessité, et surtout sans motifs existans , que le droit
des parlies est remis en litige.
D’A rgen lréd ép lo ro it la inisçre des plaideurs et l’étermte
des procès: M iscri litigantes ! de quibus n ih il ccrti est
constitulum , et quo i ah arhitrio cujusque et opuiationo
putiùs pendet, quàrn àccrtis regulis, M ais q u ’ a uroit-il dit
�■V
f.
•
(
)
.?•
■ ,
si, 'ouixë les tribunaux, il eût fallu parcourir u n cercle d’admirii'strations sans etreplus certain le lendemain que la veil
le', et!sans que,ces administrations le fussent elles-mêmes?
Q uoi qu’il en soit, supposons, car il faut bien le sup
p o ser, quë lés dioses sont au même état que lors de la
cassation ,'e t par conséquent qu’il existe un arrêté du
|
^I1 ' *f ! Jr' -J -| J '
>
¿3 ventôse an 6.
' Si cet arrêté subsistait aujourd’h u i, la cour auroit à exa
m iner encore la même question de compétence relative
m ent à lîr possession des m ines; et il seroit bien difficile,
o ï f oser le^dh-'e , qu’elle se conform ât m ieux que la cour
de Lim oges à la 'démarcation dès pouvoirs; car pourroitelle faire p lu s, que d’arrêter ses condamnations à l ’époque
où l’administration avoit disposé de l’avenir ?
M ais , dans tous les sens possibles,, le passé étoit dans
le domaine judiciaire ; lés jouissances de 1781 à 1791
étoient en litige par?la sentence de S a in t-A n g e l, et par
l’appel dë la veuve T reich .
Les jouissances de 1791 à l’an 6 étoient encore l’objet
de l’a p p e l, et on ne peut pas inyoquer l ’art, i^r. de la
loi du'28-juillet' Í791 ; car s’il place les mines sous la
surveillance adm inistrative, il n’ôte pas le fait de la posséssion", et d’ailleurs elle étoit autorisée par deux arrêtés
de 1791 et de 1793.
Ces deux arrêtés n’ont été rapportés que le 23 ventôse
an 6 ; mais jusque-là ils avoient eu leur exécution, et ce
dernier arrêté ne les i*apporte aussi que pour l’avenir.
'A in si L im o ges, loin d’être en opposition à des arrêtés
administratifs, s’y étoit au contraire entièrement con
formé : ainsi la co u r, en statuant de m êm e, s’y conform eroit encore.
�(*6)
_
M ais elle n’a pas même l’empêchement de cet arrête
de l’an 6 ; e t , quoi qu’en disent les in tim és, rien ne
s’oppose aujourd’hui à sa pleine compétence ; car l’arrêté
du p réfet, en cassant celui de l’an 6 par ordre du mi
n istre, n’a pas borné cette infirmation à un seul c h e f,
comme ils- le supposent. L ’arrêté est cassé.
A u reste, il est toujours vrai que la com pagnie M azaud
n’a plus le p rivilège • exclusif. L e droit d’exploiter est
rendu à chaque propriétaire, au moins provisoirem ent;
et d’ailleurs encore il est véritablem ent oiseux de recher
cher quel reste d’existence a l’arrêté de l’an 6 ; car si les
intim és ont joui avant l’an 6 , ils ne doivent rien à la
com pagnie M azaud y qui n’existoit p a s, mais à T r e ic h ,
qui avoit le droit de jouir. L a question de propriété
em porte donc avec elle la question des jouissances.
' A in s i, bien'ldin de se restreindre à moins que n’a jugé
L im o g e s, il semble que la cour n’a aucun empêchement
<Y adjuger même les jouissances postérieures à l’an 6 ;
car la com pagnie M azaud n’a jamais eu de droit ni de
possession sur les propriétés de l ’ap p elan t, seulement elle
y avoit une expectative au cas que T reich ne réussît pas
dans sa réclamation auprès du ministère. M ais l ’arrêté do
l’an 6 n’est plus. L a com pagnie M azaud , d’après même
les intimés ( page 14 de leur m ém oire ) , n’a plus (la
droits ; et s’il est vrai que la possession ' dés mines ait
besoin d’une autorisation , le sieur T reich l’a encore
obtenue. A insi l'effet le plus immédiat de cette obten
tion doit être que ceux qui posséderont dans ses pro
priétés m algré lui , doivent lui rendre compte.
.
A u reste , il s’agil ici de com pétence, et par conse:
quent
�.
t ij ^
.
quent d’ordre public : la.cour y>statuera dans sa sagesse.
Il suffit à l’appelant de rentrer, dans ses propriétés ; et
il n’y voit d’autre obstacle ' que l’obstination de ses
adversaires.
t ■ i j •! ’ . ’
: ’t
.
• ,•
- Soit que la cou r'ju ge toute la .possession,' ou seule
ment une partie de 1la . possession / il est au moins cer
tain qu’il n’y a ' de vrai litige que sur la propriété.
D ’après cela, si l’arrêt de-Lim oges est cassé, même pour
ce qu’il avoit com p’é temment jugé , le sieùr T reicli ne
sera pas plus embarrassé d é prouver à R iom q u’à
Lim oges qu’il est seul propriétaire de la Charoulière
et des mines qui en dépendent. Ses preuves à cet égard
ne sont pas équivoques.
•„
•
i ° . Il tient cette propriété de Pierre Beynes. E lle
est vendue sans charges.
'
2°.. Son titre est fortifié par le fait même du pre
m ier vendeur , q u i , achevant d’aliéner ses propriétés
adjacentes et droits de mines , ne s’est fait aucune
espèce de réserve. •
,
, 30. Il a joui plus de 10 ans avec titre et bonne foi :
il a’ joui même plus -de 30 ans sans trouble ni récla
mation.
40. , Cette jouissance est constante au procès,
Les intimés ne se sont pas dissimulés toute la puis
sance de ce dernier moyen ; aussi ils s'efforcent de la
dim inuer par des négations.
' Ils n’ont jamais avo u é, disent-ils, que M arie la P lè n c ,
.
/,
c
�. . .
ç la >
veuve T re ic h , ait jo u i, et ils netrôuyeh t aucunes traces de
cet a v e u ; et l ’ap p elan t, au co n tra ire, a toujours d it,
suivant e u x , au bureau de paix , et dans ses écritures,
n’avoir ouvert de carrière dans la terre de la Charo.ulière que depuis dix-huit mois.
A u bureau de paix ? les parties n’y sont jamais allées.
Dans les écritures de l’appelant ? il a toujours d i t , ab
ovo , qu’il y avoit jouissance et prescription. C ’est.donc
dans les interrogatoires? M ais de quel interrogatoire a-t-on
voulu p a rle r? est-ce de celui de 17 7 5 ? est-ce de celui de
.178 1 ? car la veuve Desfarges est armée de deux procès
crim inels qu’elle a soin de produire avec son procès civil.
L e prem ier interrogatoire est vraim ent une pièce
curieuse; e t, s’il faut juger la sentence de 1782 par les
interrogats de
, la comparaison ne sera pas trèsavantageuse par la senténce. L e juge demande à la veuve
la Plèn e s’il n’est pas vrai qu’elle est propriétaire de
m oitié du com m unal, et autres carrières ; ..... s’il n’eçt pas
vrai qu’elle tient sous son joug les habitons du v illa g e ;...
s’il n’est pas vrai qu’elle a coutume de lasser les parti
culiers qui ont essayé de creuser du charbon , etc. Elle
répond qu’elle est propriétaire de m oitié du com m unal,
et d e plusieurs autres carrières particulières ; ...q u ’elle
n’em peche pas les particuliers de creuser où ils ont droit,
mais qu’elle a toujours fait ses efforts pour les empêcher
de creuser dans ses fonds.
Ce ne sont là que des pauvretés , cela est vrai ; mais,
au lieu d’y trouver une preuve que la veu ve la PJene
11e jouissoit p a s, 011 y voit au contraire qu’elle enlendoit très-bien jouir seule de scs carrières, envers etconl*c
tous ; clic ne s’en défondoit pas.
�.
f 19
-"Sont-ce les interrogatoires de 1781 ? 'Car il est parle
de dix-huit mois dans l ’interrogatoire de M artin Beynes
èt dans celui de sa fem m e, qui Ont rendu compte de! la
derniere excavation qui donnoit lieu à la plainte. M ais là
veuve la Plène explique., dans son interrogatoire du
même jo u r , que cette carrière n’est .qu’une continua-,
îion 4e creusement ; et plus loin elle parle encore de
ce nouveau creusement.
'
*
Comment la veuve la P lèn e.au roît-elle, en effet, m ènti
à la vérité contre elle-m êm e, lorsqu’on lit dans les écri
tures de ce même procès de 1781 , qu’elle a »toujours
joui. « Les contrats de vente , dit-elle’( dans la requête
« copiée à la suite de ces interrogatoires dans les pièces
« des intimés ) , ont toujours été suivis d’exécution
« par la jouissance paisible et tranquille que la sup« pliante a eue seule des' fonds y m entionnés, notam
te meut de la terre de la Charoulière , à l’exclusion de
« tous autres, et sans opposition. »
’
Non-seulement la veuve la Plène a parlé de sa pos
session constante , mais les intimés ne l’ont jamais désa
vouée en prem ière instancè'. Leurs réquisitions au procès
verbal du 8 août 1781 , leurs conclusions dans la reqùêté
du 20 novem bre su ivan t, qui en font le com plém ent,
ne laissent aucun doute à cet égard. L ’appelant ne les
rappellera pas, parce que la cour a dû se con vain cre, par
le seul récit des fa its, que ce point de jouissance exclu
sive étoit constant dans la cause.
'
Q u’y a-t-il encore de plus .exprès et de plus concluant
que la fin de la sentence de 1782, pour prouver que cette
Ca
�.. .
C 20 )
.
.
.
possession a eu lieu au vu et su des adversaires, 'publi
quement et sans réclamation.
Ils n’ont pas interjeté appel de cette sentence; donc le
débouté, m otivé sur la jouissance exclusive à leur nu et su,
demeure inattaquable : le m otif et le dispositif n epeuven t
se séparer. E n fin , peut-on douter de la possession constante
de T re ic h , après avoir vu lés aveux faits devant la cour
de L im o g e s, et rappelés dans les motifs de son arrêt ?
A in si la jouissance des T reich est constante; ainsi les
Beynes n’ont jamais joui ni fait de réclamation de la
réserve qui se trouve au contrat de 1736. O r , avec ces
points de fa it, il sera aisé de prouver que l’appelant
doit être tranquille par la prescrip tion , indépendam
ment des moyens qui résultent des actes de 1768, 1769
et 177 1.
'
'
V e u t- o n considérer A n toin e Beynes isolém ent, et
comme s’il plaidoit contre Pierre Beynes son acquéreur?
alors, à la v é rité , il faudroit une prescriptioo de trente ans.
O r , cette prescription s’y tro u v e , car A ntoine Beynes
n’a jamais articulé avoir joui ; et , de l’époque de sa
vente en 1736 jusqu’à 1 7 8 1, il y a prescription, comme
l ’a jugé la cour de L im o ges, car il y a quarante-quatre
ans.
Les intimés essayent d’en diminuer la durée en di s a n t
qu’Antoine Beynes étoit mineur. D ’abord, oulre q u ’ il
n’étoit p:is seul héritier du ven d eur, il n’y pas moins
trente-deux ans utiles sur sa tête; et si les intimés, dans
leur mémoire ( pag. 1 1 ) , veulent trouver neuf ‘mS c^°
moins, c’est qu’ils 11e comptent pas l'intervalle de 1736
1705.
�.
( ' 2I )
#
1 P ou r justifier cette. Réduction, ils disent .que c’est en
i y 55 seulement que la cause de la possession a été changée.
M ais il n’est .pas né cessa ire‘de changer la cause d’une pos
session pour prescrire1par tyente ans; car cette pi*escription n’exige aucune autre condition que la possession à
titre de propriétaire; neque bonajîdes requiritur, sedsola
possessio per tricennium. L e Code civil encore rappelle
sur ce point les anciens principes.
« On, peut prescrire contre son titi-e, en ce sens que
« l’on prescrit la libération de l’obligation que l’on a
« Contractée. » ( A l ’t. 2 2 4 1 . )
’
Nous avons considéré la prescription du côté de Beynes
ven deur, et elle est acquise par trente ans; mais il reste à la
considérer du côté de T reich acquéreur en i y 5 5 ; e t, sous
ce point de v u e , il suffit de dix ans de prescription.
L a loi comprend expressément dans la prescription de
d ix ans les charges 1 auxquelles le fonds est asservi, et
personne ne doute que* dans la plupart des pays de droit
é c r it, cette prescription n’ait été constamment admise.
L e parlement de B o rd eau x,¡d ’où il paroît que ressortissoit l’ancien Lim ousin ,,açlmettoit la prescription de dix
ans en faveur du tiers possesseur, ainsi que l’enseigne
L ap eyrère, lettre P , n°. 83.
? .
A la v é r ité , son'annotateur inconnu prétend que B or
deaux n’admet que la prescription de trente ans. Mais la
cour jugera lequel des deux mérite d’être préféré , au
cas qu’il V eût lieu d'aborder,cette question secondaire.
Lapeyrère avoit di t, au n °.5>6 o , que la prescription
s’acquéroit par dix ans au tiers possesseur/suivant arrêt
de règlement de 1626.
�( 22 )
#
M a is , au reste , deux moyens prouvent qu’elle doit
«voir lieu dans la cause.
i ° . T o u s les parlemens qui ont refusé d’admettre la
prescription de d ix ans se fondent sur l’A uthentique Malœ
j i d e i , et en tirent l’induction que la bonne foi ne se
présum e pas contre le propriétaire, parce qu’on ne peut
pas présum er qu’il ait connu son droit et n’ait pas réclamé.
Cessât io/igi temporis prcüscr/ptio, si verus doniinus ignoret ju s suum et alienationem fa cta m . Dans ce
cas il n’y a que la prescription de trente ans.
M ais comment ne pas v o ir q u’A n to in e Beynes n’est
point dans le cas de cette lo i? Il n’a pas ignoré son droit,
puisque l’héritage vient de lu i-m êm e, puisque ce droit
est porté par un titre de son fait.
Il
n’a pas même ignoré la vente de 17 5 5 , car en 1 7 66
et en 1768 il reconnoissoit les héritiers T reich pour
propriétaires des catrieres voisines et du ténement de la
Charoulière.
E n second lieu , l’A uthentique Malçe fidei ne se rap
porte qu’à la vente d’un im m euble; et les parlemens qui
la reçoivent ont néanmoins continué d’adopter la pos
session de d ix ans quant aux charges et hypothèques
dont l’ iminoublo lui-m êm e est g re v é , et que D u n od m et
sur la môme ligne quant à la proscription de dix ans.
O r , la réserve de partager le charbon à extraire,
énoncée en l’acte de 17 3 6 , qu’est-elle autre chose qu’ une
charge, une servitude, un droit à des fruits temporaires?
E t n’étoit-il pas ridicule que le juge de Sainl-Angcl
appelât ce droit une propriété, et jugeât que les intimes,
même Couder et la veuve Desfarges, èlQiei\tpropriétaucS
�po u r moitié , comme si après une vente le vendeur dem euroit pi’opriétaire ; et comme si dans un fonds il y avoi,t
deux propriétés,, l’une du tréfonds et Fuutre de la super
ficie.
Mais.,, dans tous les cas, il est superflu de rem onter à
cette, réserve de 1736, parce que Jean T re iç li ayant acquis
en 1755 , sans, q u e lle fût m entionnée , a joui avec bonne
foi., au om et su du ven d eu r, qui connoissoit son droit
ainsi l’appelant a prescription suffisante,
.
Les intimés, répondent que la prescription n’a couru
dans l’espèce par aucun laps de temps; d’ab o rd , parce que
.c’est un droit de pure faculté ; en second lieu , parce que
s’agissant de possession sous la teri*e, il y a clandestinité.
. A u tan t vaudi’oit avoir dit etiam pet- mille annos ,
.comme le dit D um oulin sur le T itre vicieux. Cependant,
il faut en con ven ir, il seroit un peu dur de songer que
de vieux titres portant i-éserve d’un droit peuvent tom
ber des'nues, à la vingtièm e gén ération , et dessaisir ceuxlà même qui ont pour eux le titre et la bonne foi sans
s’attendre à aucun trouble.
L ’espèce de Cancérius, l'apportée par D u n o d , parm i les
exemples qu’il donne des droits de pure faculté, est déjà
contraire à l’ un des faits principaux de la cause ; c’est que
si le propriétaire d’un château ruiné n’a pas perdu la fa
culté de le faire réparer par les liabitans, c’est parce qu’ il
ne l’a pas réparé sans e u x ; sans quoi le droit seroit pres
crit. O r , ici Beynes avoue qu’on a joui sans lui.
M ais, à la page suivante, Dunod explique la cause d’une
-manière à épargner à l’appelant une discussion plus éten
due sur les droits de pure faculté.
�«
«
«
«
«
«
«
«
«
'
( 24 5 .
,
.
« Il faut distinguer entre la pure faculté, qui a son
fondem ent dans la n ature, dans le droit public commun
à tous ou à plusieurs d’une même société, et dans la
liberté de faire ou de ne pas faire certaines choses ?
sa?is aucune ’p réexistence ou m élange de t it r e , de
convention ou d’action; et celle qui vient d’un titre,
q u i tire son origine d'un contrat , qui est propre à
celui qui a le titre , qui résulte d’un droit fo rm é , qui
produit line action , et qui peut être déduite en jugement.
.- .
« L a prem ière de ces facultés n’est pas sujette à la pres
« cription , tant qu’elle n’est pas intervertie. M a is la se'-*
« conde se prescrit sans interversion , parce qu’elle dé« riv e d’une convention et d’une action qui sont pres
« criptiblcs et dans le com m erce o rd in aire, à moins
<x qu’elle ne tombe sur des choses qui sont d’une condi« tion à ne p o u vo ir être prescrites. » (D u n o d , pag. 90.)
Ces principes s’appliquent sons effort à la cause. L e
vendeur de 1736 avoit son droit dans son propre titre;
il a pu. le faire valoir ; il avoit une action : donc sa ré
serve étoit prescriptible, comme l’avoit jugé la cour d’appel
de Lim oges.
Rem arquons d’ailleurs qu’en cette partie les moyens
des intimés s’entredétruisent. Ils prétendent que Beynes
a eu le d ro it, non pas seulement d 'attendre qu’ou c r e u s â t
pour p a rta g er, mais de creuser lui-m êm e.
La p re u ve , c’est qu’il a associé pour creuser ; la p reu ve,
c’esl qu’on a creusé soi-même , et plaidé pour soutenu*
qu’on en avoit le droit.
L a preuve en fin , c’est que la sentence de 1782 ndjugc
ce
�¿■2 5 , h
'
ce droit; c’est qu’elle déclare lesj intimés propriétaires de,
la m oitié de4 la Imine.
.
,\
•* \
*
■ U ne propriété n’est donc pas une pure faculté ; et
conçoit-on un 'propriétaire qui conserve son droit sans
prescription'.quand un autre en jouit d’après lui-m êm e.
•exclusivement.or
> • : < •, . '
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.
.
•
M ais Cette jouissance', d it-o n , a été clandestine.
.
 cela il n’y auroit qu’un m ot à ré p o n d re ; c’est
qüe la sentence de 1782 dit que la jouissance a eu lieu.
au vuxet su d’Antoine Beynes. O r , cette sentence n’est
jjas attaquée par les intimés. D ira-t-on que cette, sentence
est annullée par l’appel ? M ais il n’y a appel nécessaire
ment par celui qui perd son procès, que pour la partie où
il le p ep d ., .
. ,}
^ ' '. .
.
•
D ’ailleurs, il est de principe que les aveux consignés
dans un acte subsistent m algré son annulation , com m e
F&nseîgne Cochin , tome 5 , page 2 7 4 , et com m e.l’a jugé
la cour de cassation’ le 29 floréal an 7.
*. Ce qui vient d’être dit s’applique à l’arrêt de L im oges,
q u i . mentionne l’aveu de^la possession.
jÿlais l’appelant ne veut pas écarter ce moyen de clan
destinité seulement par une fin de non-recevoir. Car ici
. [I 1 ' " '
’■! ' ‘t ' ' 1 >■
'
les parties sont loin de ce qu’on peut appeler une posses
sion clandestine : il n’y en a ni dans le fa it ni dans le droit.
Dans le fa it, aucun habitant de la Pleau n’a m ieux su
que. Beynes tous les tours et détours des charbonnières ;
et quand il se'fait un moyen de ce que la Charoulièrc
n’a pas eu d’cxcavalion verticale, il sait bien qu’à la Pleau
.
•' g V
.
' ‘
.
..
D
�26
on n’a jamais, comme en Flandre , exploité ces mines
(
par des puits.
.
) .
•
■ . •-
v
L a montagne où est la houille est,en cône ré g u lier;
p a r conséquent, pour creuser dans une surface, il fout
creuser par une tranchée horizontale au pied du plan
incliné. Par ce m o yen , qui est le seul usité à la P leau , rien
n ’indique m ieux où se dirige la fo u ille, et il est impos
sible de s’y tromper.
..
L a procédure prouve d’ailleurs que c’est dans un tertre
de la Charoulière que s'e trouve l’une des ouvertures ;
d’autres sont au corhm nnal, mais au pied de la Charou-r
l iè r e , et eu direction de cette mine.
.
"
. r;
A u x termes du d r o it, une possession clandestine sup
pose le d o l , c’est-à-dire , l’intention de cacher ce qu’on
fait à celui qui a intérêt de le savoir. 11 n’est pas besoin,
pour l’établir, d’aller rechercher d’autres principes c^iie
ceux-là même consignés au mémoire des intimés
Glcim possidere eum d icim u s, q u i f u r t i v e ingressus
est possessionem , i g n o r a n t e e o quern sib i controv ersia m fa ctu ru m s u s p i c a b a t u r , et ne fu c e r e t t j m E b a t . L . 6 , il’. D e a cq . P u ss.
V o ilà donc trois choses qu’ il faut regarder comme
constantes: i°. que M arie la Plène ait ]o\i\fr(7tive?nenll
2°. qu’elle ait cra in t une action de la part d’Antoine
Beynes; 30. qu’Antoine Beynes a it ignoré la possession.
L:i sentence de 1782 répond à tous ces faits, en disant
que Marie la Plène a joui publiquem ent. La plainte de
1775 prouve aussi qu’elle ne craignoit pas les mauvaises
�( 27 )
# <
^
contestations ; èt enfin les écritures des intim és, ci-dessus
rappelées, contiennent la meilleure réponse à leur m oyen.
M ais quand tout cela n’existeroit pas , vit-on jamais
appeler clandestine la possession de celui qui a un titre ?
■ L a clandestinité n’est réprouvée que pour celui qui'h
voulu prescrire par le seul secours de la possession, et
parce que sans possession publique il' n’a vraim ent pas
de possession.
'
v M ais celui qui a un titre n’a besoin d ’avertir per
sonne qu’il jouit ; car c’est en vertu de son titre qu’il pos
sède , et le vice de clandestinité ne lu i est‘point appli
cable.
'
'
lu i
. ■
D unod , invoqué par les intim és, après avoir cité la
loi 6 , dit à la page suivante : « Celui qui a joui en verlu
* d’un .'titre ne peut être regardé comme possesseur d a n
ce destin \ son titre le faisant supposer de bonne1foi dans
le commencement; ce qui suffit pour prescrire suivant
« le droit civil. »
;
:
. . .
. L e Code civil répète que la bonne f o i, quand il y a
.un titr e , est toujours présumée , et que c’est à celui qui
allègue la mauvaise foi à la prouver. ( A rt. 2268. )
'
Les intimés disent qu’on -devoit avertir Beynes pour
fouiller le charbon ; mais ils conviennent au moins que
l’ usage n’étoit pas de le faire par écrit : et d’ailleurs, ori
le répète , ils se sont dits copropriétaires.
•
Il
n’y a donc aucun obstacle à ce 'que la prescription
ait eu son cours ; et T reicli ayant-un’ titre et bonne foi
depuis 17 5 5 , a valablement prescrit contre les entreprises
des associés de 1777. -, ■
'•
;
Ce n’est pas que la prescription lui soit un moyen néD 2
�.
.
,
(
2
8
3
.
.
cessaii’e ; c a r, indépendamment de la présomption bien
fondée , que la réserve de 1736 a dû être rachetée comme
l’a été celle de 17 6 8 , par un acte que T reich avoit dés
espéré de trouver ; il doit d em eu rer, ce semble , pour
chose absolument évidente, qu’Antoine Beynes a renoncé
à cette réserve de 1736 par tous les actes qu’il a passés
ensuite.
•
C o m m en t, en e ffe t, Antoine B eyn es, qui a toujours
habité le village de la P le a u , qui a passé sa vie dans les
mines de l’endroit ( et on peut en offrir la preuve ) ;
A n to in e B e yn es, q u i en 1766 faisoit un traité pour ex-»
traire du charbon dans ses p ro p rié té s, aui’oit-il manqué
d ’y com prendre la C h aro u lière, s’il y avoit eu le même
d roit d’extraction ?
Com m ent A n toine B eynes, qui vendoit en 1768 tous
ses droits aux m ines, en se réservant du charb on , n’auro it-il pas rappelé l’ancienne réserve ? T o u t prouve dono
qu’elle a ’existoit p lu s, ou qu’il y renonçoit.
L ’appelant avoit proposé un subsidiaire à Lim oges ,
et il étoit fondé ; c’est q u e , dans tous les c a s , n’y ayant
qu’une septerée de la C h arou lière, vendue en 1736 , et
cette terre ayant trois septerées, la réserve ne pouvoit
frapper que sur la terre alors v en d u e, e: non sur celle
qui l’a voit été depuis long-tem ps : car les conventions 11e
se réfèrent qu’à l’acte présent, s’ il n’y a stipulation con
traire ; e t , dans le doute , l’interprétation se ièroit contre
le ven d eu r, in eu ju s potestnie fu it lisent, apertius di
cure. L a sentence do S a in l-A n gel étoit donc encore v i
cieuse, même sous ce rapport.
x Cette défense su résume en peu de mots. L a propriété
�( 29 )
,,
.
de la Charoulière est sans difficulté à Jean T re ic h L es
actes qu’il a passés avec les Beynes , p rouvent que cette
propriété est affranchie de toutes charges. Il est constant
d’ailleurs qu’A n toin e Beynes n’a jamais joui , depuis
1736 , du droit qu’il réclame. Il est constant que T re ic h
et M arie la Plèn e ont joui .exclusivem ent et publique
ment , au v u et su dudit B eyn es, sans réclam ation de
charges ni de copropriété.
A in si Beynes a -perdu son d r o it, soit contre son acqué
reur , soit contre le tiers-détenteur , par une possession
de trente ans.
A in si T reich a acquis la franchise de la terre la Cha
rou lière, p a r la possession de dix ans entre présens, comme
acquére u r; et m ême surabondam m ent, en ajoutant sa
possession à celle de son vendeur , comme il a droit de
le fa ire , il peut invoquer la prescription de trente ans.
Conséquem m ent, sous tous les points de vu e possibles,
la prétention des intimés n’est qu’une tracasserie , et la
sentence de Saint-Angel avoit été justement infirm ée par
la cour de Lim oges.
M . B A R B E T - D U C O U D E R T , rapporteur.
M e. D E L A P C H I E R , avocat.
M e. M A R I E , licencié-avoué .
�
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Treich la Plène, Pierre-Jean-Baptiste. 1804]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barret-Ducoudert
Delapchier
Marie
Subject
The topic of the resource
mines
charbonnière communale
charbonnière privée
propriété du sol
concession d'exploitation
charbon
intendants
Description
An account of the resource
Mémoire sur une contestation relative à la possession et propriété de mines à charbon. Mémoire en réponse pour Pierre-Jean-Baptiste Treich la Plène, appelant ; contre Marie Treich-Desfarges, veuve Lachaud, Jean Couder, et Léonard Chadenier, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1804
1747-1804
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0249
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0740
BCU_Factums_M0407
BCU_Factums_G1306
BCU_Factums_G1307
BCU_Factums_G1308
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Maussac (19130)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
charbonnière communale
charbonnière privée
concession d'exploitation
intendants
Mines
propriété du sol