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'
MEMOIRE
P O U R F ra n ço is-M a rie L éon
M arquis
d e
M a c l a s ,
A p p e la n t &
d e L a b e a u d e B er a r d ,
Seign eur d e l a
V e n e rie ,
In tim é;
C O N T R E
Dem oifelle
Souz i o n
T h erese - D o r o t h ê e
d e
époufe de Sieur Claude Cinier de Jaffant
,
.Appelante & Intimée.
D
e p u is
plus de quarante ans , la dam e C in ie r entaff e
les difficultés &
epuife les reffources , p o u r e n v a h ir
le tiers
d’une fucceff io n , d ont il ne lui revient que le fixieme ; mais
enfin le g rand jo ur approche , & b ie n tô t la juftice f a t i g u é e ,
ré vo lté e
m êm e
d’ une
co n teftatio n qui prolonge
depuis fi
lo n g -te m p s l’e x em p le effrayant de to u t ce que peut une c u
pidité act i v e co n tre l’ inexpérience & la bo n n e f o i , v a aff urer
au M arquis de M aclas une propriété légitim e &
une tra n A
�quillité précieufe : D ébet ejfe tandem Ihium fin is & fo llic ttudinüm<
F A I T S
.
y
En 1737 , G a b rie l du Sauzay , fieur de la V enerie, meurt
&
lai fie deux enfans; Jeanne-Marie, Marquife de M a cla s,
fo n héritier? , & Jacques , Vicomte d’A rnas, legiti maire.
Lç 17 Décembre 1 7 3 8 , la portion de celui-ci, c’eft-à-dire,
lé iixieme de la fucceifion, eft amiablement évalué à 17,494
livres, & il reçoit en paiement de cette fomme deux do
maines.
En 1745 »la demoifelle de Souzion ( aujourd’hui la dame
Cinier ) , coufine du Vicomte d’Arnas , & fon héritiere au
préjudice de la Marquife de M aclas, obtient des Lettres de
'i l f ë / k i i éomre le partage de 1 7 3 8 , fous prétexte de dol &
de léfion.
Elle en pourfuit l’entérinement ; & , par Sentence du 20
Juin 1 7 4 7 , l’eftimation des biens délaiffés par le fxeur de la
Venerie eft ordonnée.
Cette eftimation eft faite, en 174 8 , par des experts igna
res, vendus à la dame Cinier , & réeufés par la Marquife
de Maclas.
Il réfulte de leur eftimation, que la terre de la Venerie
vaut 122,000 livres, & les domaines cédés au Vicom te d’A r
nas , feulement 9,798 liv.
Il en rcfulte ainfi qu'il y a léfion dans le partage de
1738.
Vingt-cinq
ans s’écoulent : la dame Cinier reprend fes
poürfuites, & demande de nouveau l’entérinement de
Lettres de refeifion.
�3
Elle conclut à ce qu’en conféquence de cet entérinement,
les parties joient remijes au même état quavant l'acle de
*738 ; qu'il fo it procédé à un nouveau partage de la fuccej/ion , & à cet effet à un nouveau rapport.
Sur ces conclufions , intervient, le 3. Décembre 1779 »
Sentence , dont voici les difpoiitions. Elles font à remar
quer.
Il eft dit : et Attendu que le dol & la léfion dont fe plaine
» la dame Cinier, font établis par le bail du *9 A oû t 1 7 3 9 ,
» par le rapport d’experts de 174 8 , & par la quittance de
» 4,000 liv. du 4 A vril 1737. — Rendant droit fur les de» mandes formées par la dame Cinier , homologuant ledit
*> rapport de 1748 , & ayant égard aux Lettres de refeifion,
» que lefd. lettres font & demeurent entérinées.....; en confé» quence les parties remifes au
même &
femblable état
» qu’elles étoient avant le partage de 1738. — Ordonne
» qu’il fera procédé à un nouveau partage des biens immeubles qui compofoient la fucceiîion du fieur de la Venerie
» à l’époque de fon décès. — La dame de Maclas condamnée
» à relâcher à la dame Cinier une iixieme portion dans
» lefdits biens immeubles, à la charge par lefdites dames de
» Maclas & Cinier , de rapporter par fi&ioti les immeubles
m par elles vendus & aliénés, & qui doivent e n tr e r dans la
h compofition de ladite fucceiîion : — pour p r o c é d e r auquel
» partage les parties font réglées à nommer &
convenir
» d’experts; lefquels procéderont au rapport, viiîte & recon» noiflance defdits biens immeubles & à l’eftimation d’iceu x,
» fuivant leur valeur actuelle : — pour être enfuite procédé
» par lefdits experts au partage ci-defïus ordonné , & fixer
» la fixieme portion afférente à la dame Cinier dans lefdits
A ij
�4
» immeubles ; confidération faite néanmoins, lors du par» tage auquel ils procéderont, des améliorations &
dété-
» riorations provenantes du fait defdites dames de Maclas &
» Cinier. — Et au cas où aucun defdits immeubles ne feroit
» fufceptible de divifion , lefdits experts s’en expliqueront ; &
» où lefdits immeubles ou l’un d’eu?c feroit partageable, ils
» s’expliqueront fur le produit en nature & par année com» mune, des domaines Perroud & Lefpinafle ( c e font ceux
» cédés en 1738^ au Vicomte d’Arnas ) , & des autres fonds
» qu’ils auront afîignés pour compléter la fixieme portion
» afférente à la dame Cinier...................».
La Marquife de Maclas a de plus été condamnée à payer
à la dame Cinier la fomme de 7,644 liv re s, pour le fixieme
de la quittance du 4 Avril 1737 , & de divers autres objets
mobiliaires.
Cette Sentence , acquiefcée par les parties, d’ailleurs con
firmée par Arrêt de la Cour du 8 A oû t 1781 , eft devenue
une loi capitale de la conteftation.
Il s’elt donc agi de l'exécuter. En conféquence, la Mar
quife de Maclas a d ’abord payé la fomme de 7,644 liv. dont
nous venons de parler ; & ainfi les domaines cédés en 1738
au V icom te d’Arnas, pour fa légitime , c’eft à-dire pour le
fixieme de la fucceifion entière du (leur de la V e n e rie , fe font
trouvés entre les mains de la dame C in ier, pour faire face
au fixieme des immeubles feulement de cette fucceflîon.
Ces immeubles confiftoient en une maifon à L y o n t une
rente noble & des biens à la campagne.
La dame Cinier a reçu le fixieme du prix de la maifon &
celui de l’eftimation de la rente noble ; &
ainfi encore les
domaines cédés en 1738 , font reftés entre fes m a in s, pour
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faire face au fixieme des biens de campagne feulement.
Il s’agiiïoit uniquement, pour terminer le nouveau par
tage , de vérifier fi ces domaines excedoient le fixieme des
immeubles ruraux ^ou fi , pour former cette portion légitimairc , il falloit leur ajouter un fupplément.
Pour c ela , deux experts ont été nommés ; le fieur Petitjean par la dame Cinier , & le fieur Cuffinet, d’office , pour la
Marquife de Maclas.
Ils n’ont pas été d’accord dans leur opération. Le fieur
Petitjean a été d’avis , que la dame Cinier gardant les domai
nes cédés en 1738 , il lui revenoit un fupplément de 17,5 52
livres, pour former fon fixieme dans des immeubles ruraux
de la fucceflion. Le fieur CuiTmet, au contraire , a eftimé
q u ’elle étoit furpayée de 5>3 1 3 liv.
Il a donc fallu recourir à un tiers-expert , & le fieur C h o roel de M idon, choifi par la dame C in ier, a été appelé.
Mais avant de parler du réfultat de fon travail, il eft
à
propos de remarquer comment a eu lieu la difcordance ii
frappante des deux premiers experts.
Le fieur Petitjean , infpiré & conduit par la dame Cinier ,
a pris le rapport de 1748 pour baie de fon opération, & il
a regardé la léfion annoncée par ce rapport, comme certaine
& r e c o n n u e , comme acquife ï la dnme Cinier ; il n ’a en conféquence opéré que p o u r d é t e r m i n e r l’ a u g m e n t a t i o n progreffive de cette léfion depuis 1748 , à caufe de l’augmentation
auffi progreilîve de la valeur des immeubles depuis ce temps.
L e fieur C u f f i n e t , a u c o n t r a i r e ,
a c o n f i d é r é les parties
c o m m e remifes au m ê m e état q u ’ a v a n t l’ a & e d e 1 7 3 8 , &
fiiire un
n o u v e a u p a r ta g e , p o u r fi x e r le fix ie m e
la d a m e C i n i e r dans les im m e u b le s r u r a u x
pour
revenant à
d e la fu cc eflio n
�6
du fieur de la Yenerie , il a eftiinc ces immeubles fuivant
leur valeur a&uelle &
indépendante de l’eftimation faire
en 1748.
Nous verrons laquelle de ces deux maniérés d’opérer fi
différentes, étoit juile & conforme à la nvffion des experts ;
mais ce n’efl: pas encore le moment de nous occuper de ceç
e x a m e n . Revenons au détail des faits.
Le fteur Chomel , tiers expert , a opéré félon le mémo
plan que le fijur Cufîinet : il a eftimé les immeubles fuivant:
leur valeur a&uelle & abfolue ; & le réfultat de fon opération
a été que la dame Cinier étoit , par les domaines cédés en
1 7 3 8 , furpayée d e z , z i } livres, pour fon fixieme dans les
immeubles ruraux.
Q u o i qu’il en foit pour ce m om ent, les trois rapports
ont été dépofés ; & d’un c ô t é , la Marquife de Maclas a demandé l’homologation du rapport du tiers expert: de l’autre,
la dame Cinier a demandé celle de celui du fieur Petitjean fon
expert.
Chofe étrange 1 Le 7^ Septembre 1 7 8 5 , il eft intervenu,
au Bailliage du B ourg-A rgentai, Sentence qui a homologué
le rapport du fieur Petitjean , & a en conféquence condamné
la Marquife de iMaclas à payer à la dame Cinier 1 7 ,5 5 1 liv.
pour complément de légitime fur les immeubles ruraux , avec
reftitution des fruits depuis 1738.
Mais cette Sentence , le fruit de la partialité la plus aveu
gle & des violations les plus criantes de l’ordre judiciaire , a
été cleclarée nulle par Arrêt de la C o ur du 7 Septembre
1786 , & les parties ont été renvoyées devant le plus prochain
juge royal de la fuuation des biens , devant la Sinéchaufléc
de VilMranchc.
i
�7
L à il eft intervenu , le 23 A v r i l 1787» & après une d ifcu fÎion fort ample , Sentence , d o n t v o ic i les difpofitions :
Il eft dit : « Rendant droit définitivement aux parties , &
» n’ayant aucunement égard aux rapports des fleurs Petirjean,
» C u ffin et, experts , & Chôm ai tiers exp ert, & rejettant la
» dédu&ion que ce dernier a faite d’un capital pour les fervis
» affe&és fur les immeubles compofans la fucceffion de G a *> briel du Sau zay, ainfi que d’ un autre capital qu’il a égale» ment dédu it, pour indemnité des lods auxquels font fournis
» lefdits immeubles; dêduÛion néanmoins faite de la fomme
» de 20,000 livres, pour le capital de la rente affeftée fur la
» dîme de Gleizé : ordonnons que le complément de la
M fixieme portion afférente à la dame C in ie r , dans les biens
w ruraux de Gabriel du S a u za y, demeure fixée à la fomme
« de 3 ,0 0 0 li v r e s , avec les intérêts tels que de d ro it , depuis
» le jour du décès dudit fieur de la Yenerie ; au paiement de
** laquelle fomme & intérêts, nous avons condamné la dame
» de Maclas, ii mieux n’aime la dame Cinier prendre ladite
» fomme en fonds héréditaires à dire d’experts , avec reftitu» tion de fruits depuis le jour du décès dudit Gabriel du
* Sauzay ; laquelle fera tenue d’opter dans la quinzaine de
» la figmfication de notre préfent jugement ; autrement, l’op*
* t io n d e m e u r e d é fé ré e à la d a m e d e M a c l a s ..................... ( l )
w . -, , c o n d a m n o n s la d a m j de M a c l a s a u x c i n q iïxie m e s des
» frais des ra p p o r ts ; l’a u tre iix ic m e d e m e u r a n t à la c h a r g e de
»> la d a m e C in ie r $ c o n d a m n o n s la d a m e d e M a c l a s a u x ciucj
( 1 ) l es difpofitions que nous omettons font relatives à la rente
¡noble.. «lks font déjà executees, 6c il ne peut plus e-ü cire queltiow
•ciai's le procès.
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» iïxicmes des dépens ; le furplus compenfe.................. Fait à
» Viliefranche , & c . »
Le Marquis de Maclas ( i ) & la dame Cinier p n t, chacun
de leur c ô t é , interjetté appel de cette Sentence.
' 11 s’agit d o n c aujourd’hui de ftatuer fur deux appels; & la
tâche que nous avons à remplir fc divife naturellement en
deux parties ; l’une relative à l’appel du Marquis de Maclas
dont nous avons à établir la légitimité; & l’autre , à celui de
la dame C in ie r , dont nous prouverons l’inconféquence.
Mais avant de nous occuper dire&ement de cette difeuff i o n , il eft indifpenfable de traiter une queftion qu’on peut
regarder comme Tellement principale dans l’ç fp s c e , que la
folution de toutes les autres en dérivera fans effort, &
pou*
ainii dire fans développement.
Q U E S T I O N
P R É L IM IN A IR E .
«
Quelle a été la mijjion des experts, & quel a été le but
de leurs opérations ?
La lettre & l’çfprit de la Sentence du 3 Décembre 1779 a
tranchent bien nettement ces queftions.
A vant cette Sentence , dans quelle fituation fe trouvoient
les parties? Elles étoient liées réciproquement par un a£te
authentique : elles n’avoient pas d’autres droits que ceux
ftipulés dans le partage de 1738 ; mais la dame Cinier demandoit la rcicifion de cet a&e.
Dans cette pofition , le Juge a accueilli la prétention de
la dame C in ier: il a donc refeindé le partage de 1738.
( i ) N o u s d ifoiw
le M a r q u is de M a c l a s , parce q u e depuis la S e n -
r e n c e , il a f u c c t d é à la M a r q u i f e fa tante.
Cette
�9
Cette refcifion une fois prononcée , que reftoit- ¡1 à faire ?
Il
falloit femettre
les
parties
au
même état qu avant
l’a&e refcindé ; les faire remonter à l’ouverture de la fuccef-'
fion ; leur ordonner de la partager comme fi elle ne la vo it
jamais été ; leur ordonner , en un m o t , de faire un nouveau
partage t afin que chacune fût juftement remplie de fes légiti
mes droits.
Q u ’eft-ce, en effet, que la reftitution contre un a&e ?
Voici la réponfe de tous les Jurifconfultes : ce fl le rétabliffement des parties^qui l'ont contracté, dans leur premier éta t,
celui où elles ètoient avant cet acle.
O n peut voir à cet égard L eb ru n , Argou * Lacombe,'
B rillo n , ü efp eiffes, D o m a t , & c . ; mais nous nous conten
terons de rapporter les exprefiions de ce dernier Auteur : fon
témoignage peut bien nous difpenfer de celui de tout autre.
« L a refcifion , d it-il, eft; un bénéfice que les loix accor» dent à celui qui a été léfé dans quelqu’a&e où il a été
.» partie, pour le remettre au même état qu'il ètoit avant'cet
h a8e , s’ il y en a de juftes caufes » , Liv. 4 , tit. 6 , fefit. 1 ,
n. 1.
« Si la refcifion ou reftitution eft ordonnée , les chofes
»
»
»
»
feront remifes, de la part de celui qui eft re le v é , au même
état où elles auroient dû être, fi l’afte qui eft annullé par
la refcifion 3 navoit pas été fait ; mais comme il rentre dans
fes droits & recouvre ce qui doit lui être rendu , foit en
» principal ou intérêts & fruits, s 'il y en a lieu ; il doit aufll
» remettre a fa partie ce qui pouvoit être tourné à fon pro» fit ; dejorte qu'il ne profite de la refcifion que le fimpie
.*» effet de rentrer dans fes droits , fa partie rentrant aufji de
» fa part dans les fiens , autant que l’effet de la refcifion
B
�IO
» pourra le permettre : Q u i rejlitmtur in integmm ficttt in
» damno momri non deba , n i nec in lucro. L . unie. C . de
» reput, qu æ f. in jud. Reftiœtio i i i facunda eft ut um fyuif» m t jus fu u n recipiat. L. 2 4 , §, 4 , ff- ^ M inor. » ( loco
citato, n. 1 0 ) .
Par la refcifion de l’afte de 1738 , les parties ont donc dû
réciproquement rentrer dans tous leurs droits primitifs 3 c’eftà-dire, la dame Cinier dans celui de recevoir exa&ement le
fixieme de la fucceffion du fieur de la Venerie , comme légitimaire ; & la Marquife de Maclas, dans celui d’en retenir
les cinq iixiemes , comme heritiere.
C ’eft auffi l’eiFet que lui ont afllgné les Lettres de refeinon
impétrées par la dame Cinier ; celui quelle a demandé par fes
conclufions tendantes à la Sentence de 1 7 7 9 ; celui enfin qu’a
nettement déterminé cette Sentence.
Les premieres font conçues en ces termes : S 'il vous app e r t ..................remettiez les-parties en tel & femblable état
quelles étoient auparavant ledit traité.
Par les fécondés , la dame Cinier, car il paroît qu’alors
elle étoit de meilleure f o i , a demandé que les Lettres de ref
cifion fujfent e n térin ée sles parties remifes au même
état
quavant Vacle de IJ 3 S ; en confcquence, q u il f it ordmné un
nouveau partage, à l'effet de quoi un nouveau rapport.
Enfin la Sentence de 1779 , intervenue fur ces conclufions,
a t e x t u e lle m e n t remis les parties au même & femblable état
quelles étoient avant le partage de 1738 ; elle a ordonné un
nouveau partage ; & pour y parvenir, une nouvelle eftimation , Jutvant ¿a valeur actuelle , afin de fixer le fixieme re
venant à la dame Cinier ; au paiement duquel elle a con
damne la Marquife de Maclas.
�11
C ’eft don: un point bien certain que par la refcifion du par
tage de 1738 , les parties ont d û ê c re & o n té té effeûiveïîient rcmifes au même état qu’avant cet a&e , ceft à-dire, au meme
état qu’à l’ouverture de la fucceifion du fieur de la Venerie.
Cela pofé , il eft bien aiié de déterminer quelle a etc la
miifion des experts, quel a été le but de leurs opérations. Il
eft évident que leur million n’a pas eu d’autre objet »¡ue de
faire le nouveau partage , néceffaire après la refcifion du pre
mier ; & que le but de leurs opérations n’a pu être autre que
la fixation jufte du fixieme revenant à la dame Ciniér dans
la fucceifion du fieur de la Venerie.
Mais à cet égard , revenons plus précifément aux difpoiitions littérales de la Sentence de 1 7 7 9 : elles font fi claires
& fi poficives.
« Ordonné qu’il fera procédé à un nouveau partage des
» biens immeubles qui compofoient la fucceifion du fieur de
» la Venerie à l’époque de fon décès ; la dame de Maclas con» damnée à relâcher à la dame C in ie r, une fixieme portion
» dans lefdits biens immeubles ; pour procéder auquel partage
» les parties font réglées à nommer & convenir d’experts >?.
Telle eft la million des experts ; ils doivent procéder à un
nouveau partage.
Mais à l’époque de la Sentence de 1 7 7 9 ,1 1 s’étoit écoulé
plus de quarante ans depuis le décès du fieur de la Venerie.
Pendant cet intervalle , les immeubles avoient fans doute
éprouvé des changemens naturels, foie en bien, Toit en mal ;
& ces changemens devoient ¿tre partagés, ou fupportés pro
portionnellement par la Marquife de Maclas &
Cinier ; car des
la dame
cohéritiers font propriétaires com m uns,
jufqu à ce qu il ait été fait entre eux un partage défînitit &
B ij
�régulier. !1 falloit donc ordonner aux experts d’eftimér les
immeubles , non pas félon leur valeur en 1738 , mais fuivarit
leur valeur aftuelle. C ’eft auffi ce qu’a fait la Sentence de
« L e f q u e l s experts procéderont à l’eftimation defdits imm e u b l e s , fuivant leur valeur acluelle ; confidération fa’uô
» néanmoins des améliorations ou détériorations du fait des
r
» parties ».
....Voilà la loi que doivent fuivre les experts. Voici mainte
nant le but de leurs opérations.
. « P o u r enfuite être par lefdits experts, procédé au par-
»> tage ci-deffus, & fix é e la fixieme portion afférente à la
jj dame C in ier, dans lefdits immeubles ».
A in fi, & il ne faut pas le perche de v u e , les experts de:
voient procéder à un nouveau partage, & fixer la fixieme
portion revenante à l i dame C in ier, fuivant la valeur aftuellé
des immeubles..
Cela ne paroît pas fufceptible d’un doute raifonnable ; car
c e l a e f t , ainiî qu’on vient de le v o i r , littéralement ordonné
p a r la
Sentence de
1779 ,
& d’ailleurs une fuite inévitable
des principes de la matiere : principes également connus &
inconteilables.
Cependant la dame Cinier s’éleve hautement contre cette
conféquence. « Le rapport de 174 8 , dit-elle , a conftaté une
léfion de 1 1 ,1 7 3 liv. fur les immeubles ruraux compris au
partage de 1738 ; les jugemens qui ont homologué ce rap
port & qui l’ont donné pour m o tif à la refeifion , ont formé
en ia faveur un droit acquis par la chofe jugée , de récupérer
au moins la fomme de 1 2 ,17 3 liv. en réparation de léfion.
�*3
C/e droit acquis eft irrévocable , de même que l’autorité de
la chofe jugée qui le confacre.
' Mais plus de quarante ans s’étoient écoulés depuis le par
tage de 1 7 3 8 : les biens avoient dû obtenir , pendant cet
efpace de tem ps, un accroiflement de valeur; & il falloit
juger de la valeur de cet accroiflement, pour y faire participer
la dame Cinier à concurrence de fon fixieme. Voilà l’unique
objet de l’eftimation ordonnée félon la valeur a&uelle des
fonds ; enforte que la léfion doit être aujourd’hui de 1 1 ,1 7 3
livres , plus fon accroiflement progrefïif ; & que les experts
11’ ont dû opérer que pour eftimer cet accroiflement progreffif,
pour com pléter, en un m o t , le fixieme revenant à la dame
Cinier ».
Rien tout à la fois de plus extraordinaire & de moins
fondé qu’ un pareil fyftême. L ’admettre , nous ne craignons
point de l’aflurer , ce ne feroit pas feulement violer les difpofuions de la Sentence de 1779» qui fait la loi capitale des
parties, ce feroit fubvertir tous les principes du droit & c h o
quer dire&ement les premieres réglés de leqüité. O n va s en
convaincre.
Q u el a été le but du rapport de 1748 ? D e vérifier fi la
léfion , alléguée par la dame Cinier , étoit réelle, étoit capable
de faire refcinder le partage de 1738 (i)*
Q uel a été fon effet ? L ’anéantiiïement de ,ce partage,
préfumé inégal 8>: vicieux.
Enfin , quel a été celui d,e fon homologation ? D e lui
donner une fanttion judiciaire, de le revêtir d’un caraûcre
( i ) T o u t le monde fait que pour faire refcinder un partage fous
prétexte de 'tfion , il faut qu’elle excçde le quart.
�14
lég a l, & de le rendre ainfi capable de produire l’entérine
ment des Lettres de refeifion , de détruire un a&e authenti
que & obligatoire : pouvoir qu’il n’avoit pas par lui-même.
Ce rapport n’a donc jamais pu être confidéré que comme
un moyen de détruire le partage légalement fubfiftant de
1738 , que comme le m o tif de la refeifion , fuivanc les exp r e iïio n s de la dame Cinier elle-même ; enforte qu’il n’a pu
Jui a c q u é r ir autre droit que celui de faire refeinder ce par
tage , &
qu’il a. eu tout ion effet en produifant cette ref-.
cifion.
Suivons la progreiîion naturelle de la procédure; nous
trouverons tous les droits qui ont îucceflivemenc été acquis
à la dame C in ie r, & ainfi celui qu’elle 3 aujourd’hui comraq
le réfultat de tous les autres.
; Les Lettres de refeifion lui ont donné le droit d’attaquer,
fous prétexte de léfion, le partage de 1738 , & de faire véri
fier cette léfion ; le rapport de 1748 , qui a fait cette vérifi
cation , lui a acquis celui de faire refeinder le partage ; l’ho
mologation de Ce rapport a produit l’entérinement des Lettres
de reicifion ; cct tntérinement, la refeifion elle-même, c’eftà -d ire, l’anéautiflement du partage; & cette reicifion, l'indivifion de la ft.ccefïion & la nécefiité de la partager de n ou
veau. C c i t - l à l e terme des prétentions de la dame Cinier.
La refeifion du partage de 1738 lui a rendu tous fes droits
originaires. La partie lefcs, nous a déjà dit D o m a t , ne profite
de la refeifion que le fim-ple effet de rentrer dans fes droits. Et
quels étoient ces droits ? Celui de faire compofer exa&ement
la maffe de la fucceffiondu lo u r d e la Venerie, & celui d’en
exiger le iixxm e pour fa légitime. La dams Cinier n’en a pas
d ’autres aujourd’hui : elle n’a donc p a s , comme elle le pré-
�M
tend , celui de réclamer la portion legicimaire qui lui a ete
donnée en 1 7 3 8 , plus unefomme de i a , i 7 3 livresi prétendue
léiion annoncée par le rapport de 1748 ■
>P^us encore 1 accroiffement progrefllf de cette léiion pendant quarante ans. Repetons-la: elle a droit uniquement à un nouveau partage qui
lui fafle avoir exaftement fa légitime , le fixieme de la fucceiïion.
Et effeftivement, dans quelle fituation fe trouve en ce
moment la fucceflion du iieur de la Yenerie?Elle eft indivife :
elle n’eft plus partagée par l’a&e de 1738 , puifqu’il ne fubfifte
plus ; & elle ne l’a pas été depuis, car il n’eft encore inter
venu 3 à cet effet, ni a£e , ni jugement définitif.
Mais fi cette fucceflion eft indivife, il faut la partager ; &
à cet égard il n’y a pas plufieurs réglés à fuivre : il faut en
donner le fixieme à la dame Cinier , &
en laiffer les cinq
fixiemes au Marquis de Maclas : ce qui ne feroit p a s , fi on
donnoit à la dame Cinier les domaines cédés en 1738 , un
complément de 1 2,173 l*vres »
l’accroiflement de ce com
plément depuis quarante ans.
N ’eft-il pas d’ailleurs bien inconcevable que la dame Cinier
avance hardiment qu’elle a un droit acquis à une, léfion de
12,173 liv re s, & que l’acquifition de ce droit eft chofe jugée
en fa f a v e u r ?
En vertu de quel titre , de q «J jugement peut-elle récla
mer cette fomme ? C e n’eft pas en vertu du rapport de 1 7 4 8 :
il n’a jamais eu le pouvoir de la lui adjuger. Ce n’eft pas non
plus en vertu de la Sentenca de 1 7 7 9 ; car il n’en eft q u e ftio n
dans aucune de fes difpofitions. En un m o t , cette fomme lui
a-t-elle été adjugée ? N on ; elle ne l’avoit même pas deinan-
�16
dce ( 0 - La Marquife de Maclas a-t-elle été condamnée à h
payer ? Non encore. Q u e la dame Cinier nous dife donc où,
eft la c h o f ô j u g é e dont elle fe-prévaut avec tant d’intré
pidité.
A-t-elle pu fe flatter que les Magiftrats ne liroient pas le
jugement de 1779 » ou qu’^s n>Y verroient pas qu’il a ‘ remis
les parties au même état qu’avant lafte de 1738 , & non pas
au même état qu’après le rapport de 1748 ; qu’il a refcindé
ce premier partage , & non pas fixé la quotité d’ une léiîon î
qu’il a ordonné un nouveau partage fuivant la valeur aôuelle
des immeubles , &
non pas fuppofé que ce partage étoit
déjà fait par le rapport de 1748 , ôc qu’il ne falloit plus
q u ’ e itim e r l’augmentation progreflive de la léfion annoncée
par ce rapport; qu’il a ordonné aux experts de fixer le ûxieme
revenant à la dame Cinier dans ces im m eubles, & non pas
d’ajouter aux domaines cédés en 1 7 3 8 ; enfin , qu’il a con
damné la Marquife de Maclas à payer ce fixieme une fois,
fixé , & non pas à la'fler à la dame Cinier les domaines cédés,
en
1738
vras , &
, à lui laifler de plus un complément de 12, 173 li
l’accroiflement progreflif de ce prétendu complé
ment depuis quarante ans.
Difons-!e donc avec aflurance , la dame Cinier n’a jamais
eu de droit acquis à une léfion de 12, 173 livres; & bien loin
qu’elle puifle à cet égard réclamer la force de chofe ju g é e ,
le contraire a
été prononcé
bien formellement, C ’eft
le
( 1 ) O n fe rappelle quelles ont cté les con clu ion s de la dame C i n i e r
avant la Sentence de 1 7 7 9 : cntérintitunt des Lettres de nfàfion ; remije
au même état qu'avant l'aclt de 1
7
nouveau rappott & nouvtaupartage.
Marquis
�.
i7
Marquis de Maclas qui peut invoquer contre elle cette puiffan te autorité.
Au furplus, & dans le f a i t , comment
la darne Cinier
ofe t-elle prétendre à une léfion de 12,173 livres) comme
conftatée par le rapport de 1748 ?
'
Dans ce rap port, !a terre de la Yenerie a ete eftimee
122,000 livres, & les domaines cédés en 1738 au Vicomte
d’ A rn a s, 9,798 livres : total , 1 3 1 , 7 9 8 liv.
Mais il eft conftant q u e , dans ce ra p p o rt, il n’a pas été
fait dédu&ion , fur l’eilimation de la terre de la V enerie, des
redevarces annuelles qui en diminuoient la valeur. Ces re
devances montent en total à 31,884 livres ; & les nouveaux
experts , celui même de la dame C in ie r , ont reconnu la lé
gitimité de cette dédu&ion.
D ’un autre côté , il eft encore conftant que les experts de
1748 ont porté deux fois en compte la valeur du domaine
des Mouilles : ils l’ont eftimé en particulier dans les articles
» 3 3 >34 j 3 5 , 36 , 37 &: 38 de leur opération , & con-,
fufément avec la dîme de Gleizé , dans le bail de laquelle il
étoit compris ; ce qui a produit une furcharge d’eftimation
de 16,044 liv.
Ces deux articles réunis forment une fomme de 48,928
livres, q u i, déduite de 131,79 8 '. ne laiiTe plus que 82,870
livres pour la valeur des immeubles ruraux ; & le fixieme
de 82,870
étant
13,811 ,
fur
quoi
il
faut
imputer
9,798 livres; il ne refte pour prétendue léfion que 4,013
livres, au lieu de 1 2 ,17 3
dame Cinier.
que demande fi leftemenc
la
Et remarquons que nous fuppofons reftimation faite par le
rapport de 1748 , jufte & impartiale ; cependant, combien
Ç
�i8
de reproches n’aurions*nous pas à lui faire. Bornons - nous
à quelques Exemples.
Les experts ont dirigé leur eftimation de la Venerie fur le
bail de 1739 ; & ils s’en ^ont ^erv* com me produifant près
de 7 'o c o liv res, tandis que la dédu&ion des charges le réduifoit à environ 4,000 liv.
Ils ont fuivi , pour celles des domaines cédés en 1738 , un
bail de 471 livres; & ce bail étoit iimulé.
Les bâtimens du domaine Perroud , l’un de ceux cédés
en 1738 , tous conftruits en pierres, confiftoient en chambres,
cuifine, greniers, écuries, cave voûtée , cellier garni de
deux cuves & un preffoir, & c . ; un pré & jardin de trentefix bicherées en dépendoient. T o u s ces objets ont été eftimés
600 livres de capital : on a calculé que cette fomme n’auroit
pas payé les tuiles qui couvroient la maifon. A u d i , en déduifant les trente-fix bicherées de terrein à raifon de 16 liv. 2 f.
2 den. la bicherée ,/uivant leur évaluation, il eft réfulté de
l’eftimation déjà révoltante , que les bâtimens, cuves & preff j i r 3 ne valoient entre les mains de la dame Cinier , que trois
livres dix-ftpt fo ls fix deniers.
Mais ces c a lcu ls, ces remarques, étoient fans doute inu
tiles : tel qu’ait été le réfultat effetlif du rapport de 1748 , il
a produit tout l’effet qu’il pouvoir a v o ir , en opérant la relcifion du partage de 1 7 3 8 ; & il n’a acquis , non plus que
fon homologation , d’autres droits, à la dame C in ier, que
ceux qu’elle avoit au décès du fieur de la Venerie; celui de
faire compofer exactement la maffe de la fucceflion , & celui
d ’en exiger le fixieme pour fa légitime.
Dès lors il eft fenfible que les nouveaux experts n’ont pas
dû prendre ce rapport pour bafe de leurs opérations ; n’ont
�19
pas dû regarder comme acquife à la dame Cinier la lefion
qu’il annonçoit ; n’ ont pas dû en conféquence jfe .propoÇer
pour but de déterminer feulemeni raugmentation:prqgreiïive
de cette léfion depuis quarante ans.
D ’où il réfuke finalement qu’ils ont d û , ainfi. que cela
leur étoit prefcrit par la Sentence de 1779» confiderer les
parties comme remiies au même état qu’avant l’a&e de 1738 ;
qu’ils ont dû eftimer les immeubles ruraux ,-fuivant leur va*
leur aftuelle &: abfolue , afiri* de fixer juftement la portion
revenante à la dame C in ier, & ainfi de confommer un nou
veau partage.
Cela p o fé , nctre tâche préliminaire eft rem plie, & nous
pouvons paffer à la difcufïion que nous -nous fommes propofés , relativement aux appels interjettés de la Sentence du
2) Avril 1787 , tant par le Marquis de Maclas que par Ja
dame Cinier.
•!
P R E M I E R E
P A R T I E .
A ppel du Marquis de M aclas.
L e Marquis de Maclas fe plaint, i ° . de ce que la Sen
tence du 23 Avril l’a condamné à payer à la dame Cinier
un complément de 3,000 livres, & de ce qu’elle n’a pas ho
mologué l’avis du fieur Chom el tiers-ejepert : 20. de ce que
cette Sentence a rejette la déduftion d’un capital pour les
fervis afleftés fur les immeubles compofans la fucceiïion du
fieur de la V en erie, & d un autre capital pour l'indemnité
des lods : 30. enfin, de ce qu’elle l’a condamné aux cinq
iixiemes des dépens, l’autre iixieme comperifé.
C ij
�20
Parcourons fucceffivement ces trois griefs ; &
pour en
établir la légitimité, prouvons x°. que le rapport du iîeur
C h o m e l, tiers-expert , devoir être homologué : 20. que dé
duction devoit être faite d ’un capital pour les fervis & pour
les lods : 3°,
que
le Marquis de Maclas ne devoit pas être
condamné aux cinq fixiemes des dépens.
P r em ièr em en t.
L e rapport du fieur Chomel ,
tiers-
txpert , devoit être homologué.
Lorfque la déciiion d ’une conteftation dépend de quelque
opération étrangère aux fondions & aux lumieres des ju ges,
ils ont recours à des gens de l ’a r t , qu’on nomme experts ; &
ils fe déterminent d’après
l’examen &
le rapport de ces
experts.
Dans l’ufage, chaque partie choifît celui qui doit opérer
pour elle. S’ils font d’accord , leur avis eft fuivi; s’ils ne le
font p a s , on nomme un tiers qui fert d’arbitre, & c’eft fou
avis qui décide.
Nous difons que les juges doivent fuivre l’avis des experts ;
& à cet égard nous réclamons les principes de la matiere.
O n trouve effectivement dans les Loix romaines & dans
les Auteurs , qu’il faut croire tout expert choifi dans fon a r t ,
& que fou avis doit être regardé comme une efpece de ju
gement; d’où font venues ces maximes : In arte Juâ cuihbet
perito credendum ejl = ejlimatio, judicaiio.
Il faut cependant convenir q u e , fuivant une autre m a xim e,
l’avis des experts ne fait pas jugement: D iBum expertorum
nufcjïiam tranfit in rem judicatam ; que , fuivant même la
Coutum e de Paris, les juges doivent feulement avoir tel
égard que de raifon pour les rapports d’experts.
C e qui nous donne l’occafion de placir ici la diftinûion
�néceffaire pour concilier ces réglés apparemment contraires :
elle fe trouve dans [’Annotateur des Loix des bâtimens,
pag. 38.
« L e ju g e , dit-il, rend Ton jugement fuivant lavis des
» experts fans y rien changer , lorque le fait fur lequel les
» experts ont leur avis à donner eft totalement étranger aux
» lumieres du ju g e , & qu’il eft de la connoiflance des feuls
*» experts, comme font les ejîimations. Mais lorfque le
fü-
» jet de la vifite eft connu du juge , comme les fervitudes
» & autres, & que le juge ordonne que les experts donne3? ront leur avis aux fins des parties, ces rapports ne font que
» pour l’éclaircir & le mettre en état de porter un jugement
« plus certain ; pour lors il n’a égard à ces rapports qu'au» tant qu’il le juge à propos, & fouvent fon jugement eft
» différent de l’avis des experts ».
O r , de quoi s’agifloit - il dans la conteftation a&uelle ?
D ’une cflimation d’immeubles ruraux.
Le rapport du tiers-expert devoit donc être homologué.
Et inutilement, pour écarter cette conféquence, la dame
Cinier crie-t-elle à la révolte contre l ’ autorité de la chofe
jugée. O n fait maintenant quelle étoit la miflion des experts ;
& on fait par conféquent que le fieur Chom el s’eft ferupuleufement conformé à cette m iflion, écrite dans la Sentence
de 1779 : il a coniidéré les parties comme remifes au même
état qu avant la£te de 1738 ; il a procédé à un nouveau
partage fuivant la valeur aftuelle des immeubles r u r a u x , &
fixé le fixieme revenant à la dame Cinier
meubles.
dans ces im
Nous pourrions, fans contredit, terminer là notre difeufiion relativement à la néceflité d’homologuer le rapport
�du tiers - expert ; mais
la dame Cinier , pour qui toute
obje&ion cft bonne , lorqu’ il peut en réfulrer quelqu’embarras , qutlqu’obfcurité , nous oblige d’entrer dans une forte
de juftification de ce rapport.
Elle l’a attaqué dans fes détails & dans fon réfultat.
Il fu ffir o it fans doute , pour repouffer toutes les objeftions
r e la tiv e s aux détails, de remarquer que l’opération eft faite
a v e c une intelligence & une délicateffe peu com m u nes, & de
prévenir les Magiftrats qu’ils s’en convaincront très-aifément.
Cependant nous nous propofons d’entrer, à cc fu je t , dans
quelque développement : feulem ent, pour ne pas rallentir la
difcufiion plus dire&ement relative à la conteftation , nous le
placerons dans des obfervaûons féparées de ce mémoire , &
nous ne nous occuperons en ce moment que de juftiiier le
réfultat du rapport.
O n fe rappelle que ce réfultat a été que., la dame Cinier
gardant les domaines cédés en 1738 , elle étoit furpayée de
x , z i 3 liv. pour fon fixieme dans les immeubles ruraux.
O r , dit la dame C in ier, il a été jugé que j'étois léfée; il
a été jugé par confiquent qu’il me falloit un complément ; &
fi jlétois tenue de payer 2,213 livres , je rendrois au lieu de
recevoir; ce qui feroit contradiftoire avec la chofe jugée.
N ous pourrions dire à la dame Cinier qu’il r.’a jamais été
jugé t mais feulement préjugé, qu’elle étoit léfée ; que la feule
chofe qui dit été jugéet c 'c iï la refeifion de l’a&e de 1738.
Mais pénétrons dans les détails : ils lèvent toute équivo
que. Suppoions qu’il a été jugé que la dame Cinier avoit été
léfée. T o u t dépend de favoir fur quels objets tombe le juge
ment de cette lefioii.
�Q u ’a ordonné la Sentence de 1779 ^ ^ ar c e^- toujours
avec Tes difpofitions que nous nous prefentons.
Elle a ordonne q u il feroit procède a un nouveau partage
des biens immeubles qui compofoient la fuccejjion du (leur de
la Venerie, à l'époque de fon décès.
Et qu’on remarque foigneufement qu’il n’eil pas p arle,
dans cette difpofition , feulement des immeubles ruraux ; cela
eft effentiel.
O r , d’après c ela , qu’eft-il arrivé ? Les immeubles compofans la fuccejjion du (leur de la Vénerie, à l'époque de fo n
décès , confiftoient en une maifon à L yo n , une rente noble
& les biens de la Venerie. Il revenoit à la dame Cinier un
fixieme de chacun de ces o bjets, & elle avoit entre fes mains,
pour ce fixieme, les domaines cédés en 1738.
Elle a d’abord reçu fon fixieme de la maifon à L y o n
( 10,000 liv.) , puis fon fixieme de la rente noble ( 1 ,6 6 6 1.) ;
enforte que les domaines cédés en 1 7 3 8 , qui d’abord fai*
foient face au fixieme des immeubles en général ,fo n t reftés
entre fts mains pour faire face au fixieme des biens de la
V en erie, ou immeubles ruraux feulement.
Eft il donc étonnant que la dame Cinier fe trouve furpayce
de fon fixieme dans les immeubles ruraux , par les domaines
cédés en 1738? N ’eft-il pas évident q u e , malgré ce furpaiement particulier , elle a ¿té dédommagée d’une léfion ;
qu’elle a reçu un complément fur les immeubles compofans la
fuccejjion du fieur de la Vmerie ; ce qui fuffit pour remplir
le vœu de la chofe jugée par la Sentence de 1779.
Rendons ceci encore plus fenfible par un exemple.
Titius & Mcevius ont une fucceflion à partager : Titius cil
héritier ; M œ vius, fimple légitimaire.
�24
La fucceflîon eft de 72,000 liv re s, dont 36,000 en biens
de cam pagne; 24,000611 maifons à la ville, & 1 2,000 en
biens réels.
Moevius traite de fa légitime , & il prend en paiement un.
domaine de 8,000 liv.
Il eft léfé , car il lui revient 11,000 liv. pour le fixieme dç
la fucceflîon : il fe p lain t, & le partage eft refcindé. Il rentre
en conféquence dans tous fes droits, & il demande ion fixiçme
dans tous les immeubles compofans la fucceflîon.
Il reçoit d’abord 4,000 livres pour le fixieme de la maifon
en ville , & 2,000 liv. pour celui des droits réels.
O r , dans cette pofuion, n’eft-il pas évident que s’il garde,
pour \e fixieme des immeubles ruraux qu’il a encore à re
cevo ir,
le domaine de 8,000 liv. qui lui a été originairement
cédé pour le fixieme de tous, les im m eubles, il fera furpayé
de 2,000 livres ; car le fixieme des immeubles ruraux n’eft
que de 6,000 liv.
Moevius eft donc furpaye de 2,000 livres fur les immeubles
ruraux ; & cependant la léfion dont il fe plaignoit eft rem*
plie. 11 a reçu 1 2,000 liv. au lieu de 8,coo.
C ’eft là précifément l’hypothefe où fe trouve la dame C inier. Q u e lle prenne la place de M œ v iu s , & le réfultat du
rapport du iieur C h o m eleft juftifié. Elle a reçu 10,000 liv.
fur la maifon à L y o n , & 1,666 livres fur la rente noble.
Q u o iq u e , par les domaines cédés eu 173£ , elle foit furpaycc
de 2,21 * livres fur les immeubles ruraux, elle a donc reçu
com P^‘ ment ^ r les immeubles compojans U
j'uccejjîon du fo u r d elà Venerie (1).
9,453
( i ) Nous ne par’ons pas de cç que 1* dame Cinier a reçu fur d ’autres
Mais
�« Mais y dira fans doute la dame C in ier, le rapport de 1748
a annoncé une léfion fur les immeubles ruraux feulement ; il
a annoncé que les domaines cédés en 173^ •> ne f ° rmo*ent
pas le fixieine de ces immeubles en particulier : ce rapport a
été hom ologué, & par conféquent il a été juge que je devois
recevoir un complément pour être remplie de mon iixieme
fur ces immeubles».
A cela , nous répondrons d’abord que le rapport de 1748
& fon homologation ont eu tout l’effet qu’ ils pouvoient
a v o ir , en opérant la refcifion du partage de 1 7 3 8 ; enforte
qu’il faut abfolument mettre ce rapport à l’écart: cela eft
établi.
En fécond lieu, que pour favoir ce qui a été jugé par la Sen
tence de 1 7 7 9 , c’eft à fes difpofitions textuelles qu’il faut
reco u rir, & non pas a des conje&ures hafardées, à des inter
prétations forcées ; que cette Sentence , en ordonnant un
nouveau partage des biens immeubles compofans la fucceffîon
du fîeur de la V enerie, n’a pas préjugé qu’il y eût léfion fur
les immeubles ruraux en particulier, mais feulement fur les
immeubles en général ; que cette léilon fe trouve aujourd h u i ; & qu’elle eft remplie : nous venons de le voir.
Mais nous ne nous bornerons pas à ces réponfes , quelque
décifives qu’elles puiffent être.
Des cohéritiers font propriétaires communs jufqu’ù un
partage définitif & régulier ; enforte que tous les change-,
m e n s, autres que ceux du fait des poffeffeurs, qui fur-
objets. Son c o m p lé m e n t, fur l’ a&e de 1 7 3 8 , fe p o r te ra , malgrc
jefjifion de i j i i j l iv r e s , à plus de 17 ,0 0 0 livres.
R
1*
�i6
viennent dans la chofe indivife, fe partagent ou fe fupportenC
proportionnellement.
Delà il arrive fouvent qu’un nouveau partage
n’ayant
lieu que long-temps après le rapport qui a conftaté la lotion
du partage primitif, il n’y a plus à gagner pour la partie
o r ig in a ir e m e n t léfée : la léfion eft
difparue par les chan-
gèmens furvenus ( i ) , & c’eft tant pis pour cette partie;
car , nous ne faurions trop le répéter : par la refcifion d’un
premier partage, fur tels motifs qu’elle ait été fondée, on
n’acquiert pas d’autres droits que celui de faire faire un par
tage nouveau ; & pour ce partage on n’en a pas non plus
d ’autre que celui de prendre dans la chofe indivife la por
tion qui revient de droit.
Il ne feroit donc pas extraordinaire que la dame Cinier
eût été , en 1748 , reconnue léfée fur les immeubles ruraux
feulement, & que cette léfion n’exiftât plus aujourd’h u i,
qu’elle n’exiftât même plus en 1779 3 époque où la dame Cinier
prétend cependant qu’elle lui a été acquife.
Mais il y a bien mieux : il eft confiant aujourd’hui qu’en
1748 même il n’exiftoi: point de léfion fur les immeubles ru
raux en particulier.
Peut-être cette propofition étonne ; mais qu’on veuille bien
nous fuivre & on va la voir démontrée par des faits, par le
rapprochement du rapport même du fieur Petitjean.
( 1 ) C e font de pareils evénem ens qui ont fouven t donne lieu à I*
queltion de fa v o ir , ft celui q ui a o b tena 6c fait entériner des L c r t r e s ' ^
refcifion , peut changer de fencim ent &
fe départir du bénéfice àc
ces L e ttr e s , malgré fa partie adverfe. V o y . les la ilic . au D r . ï f *T o m . 1 , pag.
377*
�17
O n fe rappelle que d’après le rapport de 1 7 4 8 , il n’exiftoit que 4,0 '3 livres de lé iio n , toutes deau£tions légitimes
& convenues une fois faites.
O n fe rappelle que cette léfion n’exiftoit que parce que
le fixiemc des immeubles ruraux étant de 13,8 1 1 livres, les
domaines cédés en 1738 n’avoient été eftimés que 9/79^ ^lV*
He bien ! s’il eft prouvé aujourd’hui que ces domaines
valoient beaucoup plus, ne fera-t-il pas certain qu’il n’y avoit
pas, en 1748 , léfion fur les immeubles ruraux ?
Interrogeons le fieur Petitjean , car nous ne voulons oppofer à la dame Cinier que des autoiités qu’elle ne puiffe re
çu fer.
Les domaines cédés en 1738 devoient , félon cet expert,
ren d re,à cette époque, 8x9 livres de revenu.
Ces domaines valoient donc au moins 16,580 livres de
capital;
ils excédoient donc
fixicme
ruraux.
revenant
alors, de 2,769
à la dame Cinier
fur
les
livres, le
immeubles
Sera-t-on maintenant furpris que le tiers-expert a i t , en
1 7 8 4 , trouvé la dame Cinier furpayée de 2213 livres?
Et s’il étoit encore befoin de quelque préfomption en faveur
du rapport de cet expert, & pour juftifier que les domaines
cédés en 1738 excedent réellement de beaucoup le fixieme
de la terre de la Venerie , ne pourrions-nous pas remarquer
qu’ils paient 1 1 4 livres de vingtièm es, &
la terre de la V e -
-nerie feulement 380; ce qui fuppofe qu’ils font au moins le
quart en valeur de cette terre.
Mais a quoi bon invoquer des précomptions, quand les
preuves abondent ? à quoi bon prolonger notre difcuifion
-pour juitiiier le réfultat du rapport du fieur C h o m e l? Il eïl
P U
�1$
déjà à l’abri de tout reproche raifonnable, & nous pouvon
fans doute conclure, avec ailurance, qu’il devoit & doit êtn,
homologué.
Second em ent.
L a déduction d'un capital pour les fervis s &
d ’un autre pour l'indemnité' des lods ne devoit pas être rejeitée.
C ’eft là une de ces propofitions qui s’établiflent d’ellesmêmes ; &
on
ne concevra
jamais fous
quel prétexte
les Juges de Villefranche ont rejeté les déductions dont il
s’agit.
Le payement annuel d’un cens n’eft-il pas une charge
qui diminue la valeur de l’immeuble qui y eft ailervi; les
profits de direCte t qui écheoient à chaque mutation de p ro
priété, ne diminuent-ils pas encore cette valeur ? cela eft lans
doute inconteftable.
Et n’étoit-il pas vraiment important, effentiellement jufte
de déduire les capitaux repréfentatifs de ces charges ; puifqu’il
étoic conftant que la terre de la V en erie, formant le lot du
marquis de iMaclas, eft aflujettie à des devoirs feigneuriaux
confidérables ; tandis que les domaines formant celui de la daine
Cinier font allodiaux en prefque totalité ?
Il ne peut donc y avoir de difficulté que fur la quotité
de la déduction pour l’indemnité des lods ; car celle pour les
fervis eft naturellement fixée à un capital au denier vingt de la
redevance annuelle.
O r , à cet égard , il eft bien facile de fe regler : il eft indu
bitable que l’indemnité pour la charge des lods doit être U
même que celle qur, le cas éch éant, fe paie aux feigneurs
p ou r la perte de et profit.
Q u elle eft donc cttte inde.nmité ? Elle e f t , fuivant le d oit
�*9
co m m u n , du tiers de la valeur pour les héritages féodaux , <5c
du cinquième pour le» héritages roturiers.
Mais cette fixation n’eft pas générale : elle n eft fuivie que
quand les coutumes ou ufages des lieux n ont pas réglé
autrement.
« L ’indemnité, dit Pocquet de Livoniere, page 18 , eft reglee
» différemment par les coutumes ; . . . mais de droit commun ,
» dans la coutume de Paris & autres qui n’en difpofent, l’in» demnité eft fixée au troifîeme denier du prix pour les fiefs,
» & au cinquième pour les ceniives ». O n peut voir auffi à ce
fujet le V eft , chapitre 78. =a la L a n n e , fur Orléans , 4 1.
= B a cq u et, chapitre 5 3 , n°. 9. =
La C o m b e , au m ot
indemnité , & c . &c.
T o u t fe réduit donc à favoir s’il y a quelque réglé parti
culière pour l’indemnité , dans le Beaujolois.
Il 11e paroît pas qu’ il y en a it, & fi 011 peut regarder comme
tel ce qui fe pratique le plus com m uném ent, la quotité de
l’indemnité revient à plus du iixieme pour les biens en ccniïve (1),
O n peut donc conclure qu’il falloit déduire pour l’indemnité
des lo d s, le cinquième de la valeur des héritages aflervis ( le
capital des charges foncières prélevé ) & c ’eft ce qu’a fait le
tiers-expert (2).
( 1 ) O n forrtie un capital du fcrvis , fur le pied d u denier t r e n t e ,
Sc 011 y ajoute un droit de lod , qui eft le fixierne du prix.
( 1 ) Si cette ded u & io n pouvoit être jugée trop fo rte , il eft fenfible
«ju elle ne pourrait etre m oindre que le ÎÎxiemej ce qui op^reroic, au
j-ïofit del à dame C i n i e r , une réfufion de 8 5 7 l i v . , enforce qu’ elle ne
ie r e it plus furpayee que de 1.3 5 6 ,
�3°
C e n'eil p a s, au rcfle, fans le plus grand étonnement que
nous voyons la dume Cinier v o u lo ir , car elle convient de la
légitimité de la dédu&ion , faire évaluer l ’indemnité dont il
s’agit à un foixantieme du Jîoçieme de la valeur principale » con
formément à l’ Edit d’Avril 1667 & à la Déclaration de 1722,
- C es loix n’ont de rapport qu’aux acquittions faites par le R oi
dans la dire&e desfeigneurs particuliers, & elles n’ont pas chan
gé les droits de ces feigneurs dans tout autre cas; elles n’ont
■pas changé la fixation, de droit commun ou d’ufage loçal * de
'l’indemnité : elles n’ont mêmepas changé cette fixation, lorfque
t ’eft le R o i qui reçoit, à caufe d’une acquifition faite dans fa
m ouvance; alors l’indemnité lui eft payée , comme à tout autre
fcigneur , fu r le pied fix é par les coutumes & ufages des lieux:
(art. 2 de la Déclaration du 21 N ovem bre 1 7 2 4 ) ,
TROISIEMEMENT.
L e Marquis de Nlaclas ne devoil pa$
être condamne aux cinq Jîxiemes des dépens.
Les dépens font la peine des téméraires plaideurs, &
c ’eft en conféquence la partie qui fuccombe qui doit y être
condamnée.
Mais fouvent les parties fuccombent chacune fur difT'-rens
chefs ; quelquefois les conclulîons entieres de l’une &
de
l’autre font reiettées ; & alors la condamnation fe divife entre
elLs félon le nombre Si l’importance des chefs fur lcfquels elles
ont refpe&ivciTicnt fuccom béjou bien fuivantque le jugement
qui intervient approche plus ou
moins des conclufions de
l ’ une ou de l’autre. C e font là des réglés bien certaines.
„
Q u e faut il donc penfer de la condamnation prononcée
contre le Marquis de Maclas ?
il demandoit l’homologation du rapport du tiers-expert,
�31
& ainii 2,213 livres de réfufion : 1a dame Cinier concluoit
de fon côté à l’homologation de celui de Petitjean , & demandoit un fupplément de 17 5 5 2- hvres* Dans cette poiition , fentence intervient, qui adjuge à la darne Cinier 3000
livres, & condamne le Marquis de Maclas aux cinq fixierfles
des dépens.
Y
a t-il quelque proportion dans cette condamnation ?
La fentence fe rapproche
infiniment plus des con clu ions
du Marquis de Maclas que de celles de la dame Ciniec
(e lle ne différé des premieres que de 5213 livres, tandis
qu’elle différé des autres de 14552 l i v r e s ) ; & cependant
elle le condamne aux cinq fixiemes des dépens. Sans con
tredit cela eft injufte.
Par quel motif au furplus les Juges de Villefranche ontils pu fe déterminer à une pareille difpofition ? Seroit-ce
qu’ayant condamné le Marquis de Maclas aux cinq fixiemesi
des frais
de rapport , ils auroient voulu fuivre la même
proportion pour les dépens ?
Mais des dépens ne font pas des frais de partage, ils f o n t ,
nous l’avons déjà d it, la peine du téméraire plaideur ; enforte
qu’ils ne peuvent pas tomber fous la proportion qui réglé ,
entre des cohéritiers , la diftribution des frais de partage.
Q uoi 1 la dame Cinier auroit, depuis longues années ,
multiplié les difficultés ; en définitif, il feroit reconnu que
c ’eft elle qui a induement occafionné une maffe énorme
de dépens: &
elle n’en fupporteroit que le fix ic m e , parce
qu elle n a droit qu’au fixieme de la lucceffion ! cela n eft
pas propôfable : le Marquis de Maclas ne peut pas être puni
pour les fautes de la dame' Cinier.
Et pour s’en convaincre ,• qu’elle fe rappelle que, lorfque
�3
*
le jugement du Bourg-A rg en ta i, du 7 Septembre 1785»
fut porté en la cour par l’appel du Marquis de M a cla s,
& que ce jugement fut déclaré nul par arrêt du 7 Sep
tembre fuivan t, elle fut condamnée en tous les dépens faits
fur l’appel.
A in fi fe t r o u v e d o n c établie la légitimité des griefs d u
M a r q u i s de M aclas contre la fentence du *3 A vril 1 7 8 7 , &
n o u s p o u v o n s paiïer à l’appel de cette fentence par la damQ
Çinier,
S E C O N D E
P A R T I E ,
A p p el de la dame Cinierf
L a dame Cinier fe plaint de ce que l’avis du fieur Pç-*
titjeao » f ° n exPert » na Pas été homologué , & de cq
quelle a été condamnée à fupportçr un ûxieme des frais
¿le ra p p o rt,
E ta b liro n s
^
.
la futilité de ces griefs,
PREMIEREMENT ,
le rapport, du Jieur Pctitjean ne pou -
voit pas tire homologué.
■
Ç e f t une co n féquen çe _néceffaire de la difeuifion dans
laquelle nous fommes déjà entrés. Si effe£ ivem ent les e x
perts o n t
actuelle &
dû faire un nouveau partage fuivant la
abfolue des immeubles , il eft
certain
valeur
qu e le
fieur P ctitjean , qui a règle fon eftimation fur une v a le u r
relative à
celle
a li g n é e
en
17 4 8 ,
a
dire&em ent o p éré
contre fa miffion ; & fi le rapport du tie rs -e x p e rt , c o m m e
lïpus l’a v o n s auffi p ro u v é , d e v o it être h p m o lo g u é , il eft
�3Î
clair que celui de l'expert .folitaire de h dame Cinier ne
p o u v o it pas l ’être.
Mais indépendamment de ces moyens généraux, & même
de tout développement des vices de détail que nous pourl
relever dans l’opération du
fieur Petitjean, il eft
ae réflexion particulière , qui en prefcrit formellement la
réprobation.
Cet expert, fur l’infpiration de la dame Cinier , a opere
dans l’opinion que
le réfultat du rapport de 1748 étoit
une léfion de 12,173 livres, &
il a eftimé de maniéré à
donner à cette léfion une valeur progreffive depuis
qua
rante ans.
O r , il eft reconnu , il eft maintenant certain que ce
rapport, en en admettant tous les détails, & ainfi en né**
gligeant toutes les défe&uofités particulières de l’eftimation,
n’a donné pour réfultat qu’une léfion de 4,013 liv.
Le fieur Petitjean , eût-il donc pu opérer füivant la réglé
vicieufe qu’il a adoptée,
auroit, malgré cela, induement
forcé fon eftimation, & fon opération feroit fouverainement injufte.
la dame Cinier doit fupporter un Jixieme
des frais de rapport.
Se c o
ndem ent
,
Lorfqu’il s’agit de partager une chofe com m une, les frais
du partage doivent être fupportés par chaque intéreffé , pro
portionnellement à fon lot dans cette chofe : c’eft un prin-*
cipe de droit naturel.
Et il en réfulte néceffairement que la dame C in ie r, pre
nant un fixieme de la fucceffion du fieur de la Venerie*
E
�34
doit fupporter un fixieme des frais faits pour divifer cetttf
fucceflion.
« M ais, dit-ell«, c’ eft le Marquis de Maclas ou fes au
teurs qui
ont
donné lieu à
donné lieu par leur dol :
ce partage , &
ils y
ont
cela eft j u g é , car la fentence
de 1779 porte: attendu que le dol & la léfion [ont éta
blis
& c . O r , c’eft à celui qui a donné lieu à une opé
ration , &
qu‘ d’ailleurs y a donné lieu en
part.culier
par fon d o l , à en fupporter tous les frais ».
Quand il feroit vrai que la Marquife de Maclas aurok
feule & formellement donné lieu au nouveau partage dont
il s V i t , qu’en réfulteroit-il ? N on pas qu’elle doit payer
tous les frais de ce partage, mais feulement qu’elle dévoie
les avancer; & elle l’a fait.
h Quant aux frais des experts, dit l ’Auteur de l’Inftit.
» au droit de Leg. tom. 2 , pag.
, la réglé eft qu’ils
» fe paient par les parties à proportion de ce que chacune
» prend à la chofe vifitée ; mais celui qui donne lieu à la
»> néceffité de l’eftimation en doit avancer les frais » : &
il cite à l’appui de fon opinion , Lalande , fur l’art. 9 de la
coutume d’Orléans.
Enfin , nous pourrions facilement établir que l’expreiTioiî
de dol (em plo yée dans la fentence de 1 7 7 9 ) , 'hafardée
dans le principe , eft devenue aujourd’hui vague &
fans
objet ; enforte qu’il feroit déraifonnable de lui donner un
effet quelconque au préjudice du Marquis de Maclas : mais
cela leroit furabondant.
. Suppofons que la Marquife de Maclas s’ eft réellement
rendue coupable de d o l, pour parvenir aux diff offrions de
�35
i’aû e de 1 7 3 8 ; partage refcindé. Q u ’en réfulteroit - il en
core ? quelle doit fupporter les frais de ce premier partage,
opération jugée vicieufe ; mais non pas ceux du fécond ,
ordonné pour fixer jufte^ent les droits de chacun ; partage
néceifaire, partage régulier, & à l’égard duquel il n’eft pas
poflible de s’écarter de ce principe général, que chacun
doit fupporter les frais de la divifion
dune chofe com
mune ,
prend
en proportion
de
ce
qu’il
dans
cette
chofe.
Ii n’eft donc pas douteux que la dame Cinier doit fupporcer un fixieme des frais de rapport.
Et en vain , pour écarter la difpoiition de la fentence
de Villefranche qui l’y a déjà condam née, argumente-telle du paiement qu’a volontairement fait la Marquife de
Maclas du falaire des fieurs Cuifinet & Chomel.
Elle a feulement avancé à cet égard les frais du partage ,
& fon droit de répéter la portion due par la dame Cinier eft
toujours le même.
Enfin , inutilement encore la dame Cinier cherche-t elle
à fc prévaloir d’un arrêt, du 3 Juillet 1 7 8 7 , qui a c o n
damné la Marquife de Maclas à payer le falaire du iieur
Petitjean.
Q u ’a jugé cet arrêt ? Uniquement que la Marquife de
Maclas devoit avancer les frais du partage y car il n’a pu
lui ôter fon droit bien conftant de répéter la portion na
turellement due par la dame Cinier ; ce qui eft fi vrai t
que la queftion relative à la charge de ces frais eft abfolument entiere devant les Magiftrats, qui ont à prononcer fur
l ’appel de la fentence de Villefranche. Ils on» à décider ii
la difpofition par laquelle ia dame Cinier a été condamnée
�36
à fu pporter un fixieme des frais de r a p p o r t , eft jufte ou
réform able ; &
il n’eft pas d o u te u x q u ’ils fe déterm ineront
à cet égard par des principes de droit &
que par
des m o y e n s vagues &
d’é q u i t é , p lu tô t
n o n - pertinens , tels que
ceux in v o q u é s par la dame C inier,
Il
eft donc démontré que la dame Cinier eft mal fondée
dans fon appel de la fentence du 23 A vril 1 7 8 7 ; & il
n’eft par conféquent pas douteux que fi la C our pouvoit
r e je t te r les griefs du Marquis de Maclas contre cette fentence >
ceux propofés par la dame Cinier ne feroient pas un obfta-«
cle à fa confirmation,
>
Monfieur
l 'Abbé
P E R R O T IN
DE
BARMONT%
Rapporteur.
Me D E F R E S S E N E L , Avocat.
L o m b a r d , Procureur»
“
— ....
M
D e l’Imp. de L. M. C E L L O T , ru d e s G r . A u g ., 1789.
�
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A name given to the resource
[Factum. De Labeau De Bérard, François-Marie Léon. 1789]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Perrotin De Barmont
De Fressenel
Lombard
Subject
The topic of the resource
experts
successions
lésion
lettres de rescision
Description
An account of the resource
Mémoire pour François-Marie Léon de Labeau de Bérard, marquis de Maclas, seigneur de La Venerie, appelant et intimé ; Contre demoiselle Therese-Dorothée de Souzion, épouse de sieur Claude Cinier de Jassant, appelante et intimée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de L. M. Cellot (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1789
1737-1789
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
36 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0103
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Bourg-Argental (42023)
La Venerie (terre de)
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