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MÉMOIRE
P O U R le fieur M u n i e r , Notaire R o y a l à L u g n y ,
& fa femme , Ap pe lla n s :
%
C O N T R E le fieur B l a n c
& f a femme, Intimés.
,Notaire R oya l à Cluny ,
E
C T T E A f f a i r e , qui préfente au premier afp e ct la qu eifton de favoir fi la lefion eft un m o ye n de
reftitution en matiere d é c h a n g é , offre bientôt un au- •
tre pro blème à réfoudre.
C e n’eft vraiment point un échange que le fieur
B la nc & le fieur M unier ont fait entr’eux. Ils o n t , par
d e s raifons particulières, adopte la forme de re c h a n
g e : mais au f o n d , ce font deux ventes q u ’ils ont confommées refpectivement par le même contrat.
A i n fi le fieur Blanc peut bien , par rapport à l ' hér itage qu'il a vendu , pro pofer le m o y e n de léfion,
A
�M a is il r i n v o q u e r o i t en va in quant à celui q u ’il a
acheté. C e n’eit q u ’en fa v e u r du v e n d e u r q u ’a été
introduit le bénéfice de la reftitution p ou r caufe de
léiîon.
Il n’ y a donc que l’immeuble aliéné par le iîeur
B l a n c , qui d oive ici être eilim é , pour pa rvenir à
connoître il ce ve n d e u r a été lcfé d ’outre-moitié. Nul*
le eftimation à faire de celui qu ’il a acheté.
D u refte , l’héritage cédé par le fieur B l a n c , les
d e u x héritages m ê m e , s'ils étoient tous d e u x dans le
cas d’être e i î i m é s , d e v r o ie m l’ê t r e , eu égard à l’état
où iis étoient au momen t de l’aliénation.
Telie s font les réflexions que la décifion irréguliere des premiers Juges met le iieur M u n i e r dans la
néceflité de d é v e lo p p e r .
E x p o f o n s d ’abord les faits.
F A I T S .
L e fieur Blanc & la D e m o if e l le M ar tin fa fe mm e
pofiedoient au hameau de M a c h e r o n , dans le M â c o n n o i s , un domaine dont les bâtimens étoient en
très-mauvais état. C e qui dépré cioit en core ces b â
timens, c ’eit que les fieur & D a m e Blanc n’en étoient
pas feuls propriétaires : il neleur en appartenoit que les
de u x t i e r s , qui fe tro u v o ie n t confondus a v e c l’autre
tiers appartenant au fieur D e r p e r .
L a totalité du domaine a v o it même été dans l’o r i
gine indivife entre les auteurs de ce fieur D e r p e r &
c e u x de la D a m e B la nc , dans la mêm e pro portion
�des d e u x .tiers au tiers; & l'on n’étoit parvenu ¿ p a r
tager les fonds qu ’en les m o rc e la n t, au point que le
lot de la D a m e Blanc étoit com pofé d’une multitude
de pieces' de terre peu é te n d u e s , & gr evées prefque
toutes d’une fervitude de pacage pour la deiïerte du
fonds voifin ; ce qui ôtoit encore au domaine d e s S r
& D a m e Blanc une partie de fa valeur.
C e u x - c i cherchoient à le vendre, pour en acquérir
un dont la poiTeifion fût moins i n c o m m o d e , & qui en
même tems fût moins éloigné du lieu de leur d om i
cile.
Ils avoien t jetté la v u e fur celui que poiTédoient
les Sieur & D a m e M u n i e r , au V illa g e d’Igé , fitué
auiîi dans le Mâconnois.
L e s d e u x Propriétaires fe rapprochent ; ils m e t
tent chacun le prix à leur domaine. L e fieur Blanc
c ft im ele fien 10000 livres ; celui que poiTede le fieur
M u n i e r , n’eft évalué par lui que 5000 livres. C ’eft
fur le pied de cette eftimation que tous deux doivent
fe céder mutuellement leurs poileffions ; en forte que
le fieur M u n i e r , pou r donner la valeur de ce qu ’il ac
q u i e r t , fera obligé de p a y e r 5000 livres en argent.
M ais fous quelle forme réaliferont-ils leurs c o n
ventions ? C e l l e de l’échange leur paroît p r é fé r a b le ,
& v o ic i pourquoi. U n E d it du mois d ’A o û t 1 7 7 0 ,
rendu fur-tout pour la P r o v i n c e de M âc o n n o is , por
te , à l’article 5. « que pendant l’efpace de fixannées
P) les a&es d’échange des parties deterrein au deifous
» de dix a r p e n s , leront exempts des droits de centieroe denier & autres droits r o y a u x & feigneu*
�» riaux , à l’exc e p tio n du droit de contrôle , qui de» m e u r e r a fixé à l a f o m m e de dix f o l s , de quelque va» leur que foient les héritages échangés ».
Q u e l avantage n’y avoit-il pas pou r le fieur Blanc
& le fieur M u n i e r à traiter entr’eux par la v o i e de
l ’échange ? Mais ce n’étoitpas tout. P o u r profiter du
bénéfice de T E d i t , il falloit ne pas aliéner plus de
d i x a r p e n s à l a fois. O n prend e nconféquence le parti
de faire d e u x aftes féparés, au lieu d’un. C e s d e u x
a & e s , parfaitement femblables, ont été pafles le pre
mier & le fept A o û t 1 7 7 4 . Il eft dit dans chacun que
le fieur M u n ie r c e d e à titre d’échange au x fieur ô i
D a m e Blanc la moitié du dom aine d’ig é . C e u x - c i ,
de leur côté , ce dent au fieur M unier, au même titre
d ’échange, la moitié du domaine d e M a c h e r o n , c o n
finant , ce font eux-mêmes qui le d é c l a r e n t , en trèsmauvais bâtimens , grange & écurie, dont partie ejî en.
m afure, & le furplus tombant de toutes parts. L ’échange
efl fait pou r chaque moitié , fous le retour de 2,joo
livres que le fieur M u n ie r doit p a y e r , & dont il paie
m ê m e 13 00 livres comptant aux fieur & D a m e Blanc;
& chacun des deux aftes efl terminé par cette claufe : E flim an tles Parties , /a vo ir, la moitié du domaine
remis par ledit M i M u n ier valoir 1 5 0 0 livres , & la
moitié de celui remis par les mariés B la n c & M a rtin , va*
loir 5000 liv.
L e 4 S e p te m bre f u i v a n t , la D a m e M u n i e r , qui
n’a v o i t point paru dans ces deux a & e s , ainfi que la
D a m e B l a n c , qui étoit encore mineure au moment
où ils avoien t été pafTés, donnèrent chacu ne leur ra
tification.
�T o u t étant aiufi confômmé , le iieur M unier prit
les mefures nécefï'aires p ou r r e l e v e r les bâtimens du
domaine de M ac h e ro n : il y fit pour plus de z 5 00 J.
de réparations.Les terres, dont la culture n’a voit pas
été' ¡moins négligée que l’e n t re t ie n , des b â t i m e n s ,
lui coûtèrent aufïi en améliorations be aucoup de dépenfes & be au co u p de foins.
L e fieur M u n ie r chercha encore à améliorer fa pro
priété d ’une autre maniéré, en y réunifiant celle d u S r
D erper. Par-là, il donnoit un prix confidérable, &
aux bâtimens & aux terres qu ’il avoit achetés du
iieur B la n c , en faifant cefTer l’indivifion & les fervitudes qui les grevoient.
Il fe difpofoit à recueillir le fruit de ces améliora
tions de toutes e f p e c e s , lorfque les Sieur & D a m e
Blanc lui firent fignifier des Lettres de refcifion , où,
en ajoutant be auco up au prix qu'ils avoient mis au
domaine de M a c h e r o n , & rabaifTant au contraire
celui de l’autre d o m a in e , ils fe plaignoient d’avoir
é p ro u v é uneléfion confidérable, une léfion d’outremoitié.
A p r è s avo ir oppofé aux Sie ur & D a m e Blanc des
a&es qui prouvoient le peu de fincérité de leur é v a
luation , les Sieur & D a m e M u n ie r renfermerent à
peu près leurodéfenfe dans ce dilemme. O u c ’eft un
échange que contient chacun des a & e s q u e les Sie u r
& D a m e Blanc veulent faire refcinder pour caufede
léfion ; o u c’eft une double vente , qualifiée feule
ment d e ch a n g e . D a n s le premier cas, point de léfion
à oppofer : elle n’eft point é coutée en matiere d'é -
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change. D a n s le f é c o n d , elle ne peut être pro pofée
par les S ie u r 6c D a m e Blanc q u ’à l’égard de l’objet
q u ’ils ont v e n d u ; & point du tout à l’égard de celui
q u ’ils ont acheté , parce que le m o y e n de léfion n’a
point été introduit en fa v e u r de l ’acheteur. Il n’y a
d o n c alors que le domaine de M a c h e r o n dont on
d o i v e or don ner l’eftimation , eu égard à l’état où il
étoit au m o m e n t de l’aliénation; & c ’eft d’après cela
q u e les Sie u r & D a m e M u n i e r nom merent Brunet
p o u r E x p e r t à l’eiFetd’eftim erfeulement le dom aine
de M ac h e ro n .
D a n s c e t état eft intervenu en la Juftice de Clu*
n y , le 1 0 Juin 1 7 7 7 , une Sentence qui or donne
qu e « par. Etienne D u f o q r , E x p e r t n om m é par les
» S ie u r & D a m e Blanc , 6c par Jacques B r u n e t ,
» E x p e r t nom mé par les Sieur & D a m e M u n i e r , il
« f e r a pro céd é à l’arpentage & eftimation des domai» nés des Parties , lefquels E x p e r t s feront la diftinc?> tion des réparations urgentes que les Sieur & Dam e
» M unier auront pu faire dans le domaine de M acheron,
X) détailleront lefdites réparations , & en feront l’ef» timation, eu égard à l’état où il étoit lors de lechan» g e , p o u r , fur le v u dudit r a p p o r t , être ftatué ce
» qu ’il appartiendra ».
C e t t e Sentence portoit un double p ré ju dic e aux
Sieur & D a m e M u n ie r : d’a b o r d , en ce q u e l l e o r
donnent indiftin&ement l’eftimation des d e u x domai
nes , & enfuite dans la maniéré dont l’eftimation
étoit ordonnée ; le prem ier Ju ge prefcri.vant feulejnent a u x E x p e i t s de déduire fur l’évaluation du do-»
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maine de M ac h e ro n le m o n t a n t , ou m ê m e l a f i m p l ç
appréciation des réparations urgentes.
Dererminés à fe p o u rv o ir contre ce Ju ge m ent,'
les Sieur & D a m e M u n ie r fe garderent bien de con
courir à Ton exécution. Leurs A d v e rfa ire s cherchoient au contraire à la hâter : ils firent p ro cé d e r à
la vifite & à l’eftimation des deux domaines ; les
d e u x E xperts s’étant même trouvés d’avis difFérens
fur plusieurs p o i n t s , ils firent nom mer un tiers E x
pert qui d e vo it les départager. C e t ie r s - E x p e r t a auiîî
donné Ton a v i s , & drefle l'on rapport.
M ais le tout a été fait par défaut contre les S ie u r
& D a m e M u n i e r , qui ont depuis interjetté appel de
la Sentence du 1 0 Juin 1 7 7 7 , & de ce qui l’a v o it
fuivie.
Ils ont auiTi, depuis leur a p p e l , fait une démar
che à laquelle cependant rien ne les obligeoit. Il
o n t , mais fubiidiairement, demandé a £ e de leurs
offres de reprendre le domaine d’Igé qu ’ils avoient
cédé aux Sieur & D a m e Blanc pour 5 000 l i v r e s , &
d’y fubftituer cette même fomme en argent.
C ’eft fur leur a p p e l , & en même tems fur cette
offre q u ’il s’agit de ftatuer.
O B S E R V A T I O N S .
Q UO IQ UE les Sieur & D a m e M u n ie r n’aient pas
befoin , pour établir le mal jugé de la Sentence dont
ils font A p p e l l a n s , de p ro u ve r le peu de réalité de la
prétendue léiion énorme dont fe plaignent leurs A d -
�,.
; . ^
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.
verfaires , il leur im porte c e p e n d a n t , pour ¿carter
la d éfa veu r q u ’on vo u d r o it jetter fur eu x , pour diffîper le préjugé que femblent autorifer les dédiio ns
des E x p e r t s , de préfenter là-delius quelques réfle
xions.
Selon les Sieur & D a m e B l a n c , leur domaine feul
v a l o i t plus que le double du p rix de i o o o o l i v r e s ,
p o u r lequel ils l'ont cédé.
C o m m e n t ofent-ils fe permettre une pareille affertion ? Il eil certain d ’abord q u e , fuivant un bail
paiTé én 1 7 6 6 , & qui n’a fini q u ’en 1772., ce qui
c o m p o fo it alors le domaine de . M a c h e r o n , n’étoit
affermé que 4 x 4 livres. Il eil certain aufîi que ce
n’eil pas l’intégralité des fonds qui en dépendoient
p o u r lors que les fieur & D a m e Blanc ont cé dée en
1 7 7 4 aux fieur & D a m e Munier. U n an auparavant,
en 1 7 7 3 , ils en avoien t détaché d e u x vignes q u ’ils
a v o ie n t vendues 1 0 1 1 livres au fieur M u n ie r luim ê m e , & ils s’étoient encore réfervé lors de la ceffion q u ’ils attaquent a u jo u r d ’h u i , une maifon qu ’ils
ont ve n d u e l’année fuivante 1 0 9 1 livres. Us avoien t
auffi v e n d u peu de tems avant de traiter a v e c les
fieur & D a m e M u n i e r , une c o u p e de bois dont ils
a v o i e n t retiré 500 livre?.
V o i l à donc 1 4 0 0 livres à retrancher fur le capi
tal , quel q u ’il foit, d ’un fonds qui ne produifoit en
1 7 7 1 que 4 1 4 livres de re v e n u ; ne peut-on pas
aiîurer déjà que ce fonds prifé 10000 livres en 1774,
ne l’a pas été au deiTous de fa v a le u r?
Mais ce n’cft pas tout : l’année même où le fieur
£lanç
�Blanc l a cédé pou r ce p r i x , il l ’a v o i t donné à ferme
pa r bail verbal à un iieur R o b e r j o t , & à un iîeur
G u i l l e m a u d , beau-frere de celu i- ci; & ce n’étoit
plus 4 x 4 livres de fermage que c e u x - c i lui en donnoient: le mauvais état des bâtimens, la dégradation
des terres étoient telles, q u ’ils avoient refufé de p o r
te r le prix du bail au deiTus de Z40 livres. C e fait
doit aujour d’hui être réputé pou r confiant. O n l a
articulé dans le cours de ri nftru£io n de la maniéré
la plus précife: on a p r o v o q u é le fieur Blanc p ou r
q u ’il eût à l’a v o u e r , ou à le nier. Son filence , après
tant d ’interpellations, équivau t fans doute à un aveu.
D o it - o n donc l’écouter lorfqu’il vient dire que ce
q u ’il a céd é p o u r 10000 livres, va loit plus que le
double ?
Il eft vrai que fon E x p e r t , que le tie rs-E xpert,
qu e l’E x p e r t même du fiéur M u n ie r l’ont évalué
be auco up plus/de 10000 livres. Il eft vrai encore
q u ’autant ces E xperts ont porté haut la valeur du
domaine du M a c h e r o n , autant à peu près ils ont
rabaiiTé celle du domaine d ’Igé.
M ais auiîï quelle eft la cauïe de ces évaluat ions,
fi fupérieures d ’un c ô t é , Ci inférieures de l'autre a u x
p rix réglés entre les Parties? C e f t principalement
la Sentence qui a or donné l ’eftimation.
Q uel eft le procédé qu’on doit fuivre en cas pa
re il, lorfque quelqu’un fe plaint d’avoir été énormé
ment léfé? Il y a toujours un intervalle entre le mo
ment de l'aliénation & celui de fa réclamation. C e t
intervalle peut être de huit a n s , de n e u f ans même*
B
�IO
N e i î - i l pas é v i d e n t q u e , p o u r conftater s’il a effec
t iv e m e n t é p r o u v é une léfion, c ’eit le prix que valoit
fon héritage quand il l’a a l i é n é , q u ’il faut connoître ?
C ' e f t donc ce prix qu ’il faut enjoindre a u x E x p e r t s
de d é t e r m i n e r , & non pas la va le u r a â u e l l e de l’hé
r i t a g e , qui ne peut jetter aucune lufniere lur l’o b je t
q u ’on c h e rc h e à éclaircir. Si l’on craint q u ’ils n’aient
pas une connoiiîance bien e x a â e de l ’ancien état
des c h o fe s , il faut leur p e rm e ttre , leur or don ner
m ê m e de fe faire aiîifter par. des perfonnes du l i e u ,
d e prendre leurs d é c la r a t io n s , fa u f enfuite à e u x à
les a p p r é c i e r , à en faire l’ufage con ve n a b le .
Eft ce ainfi que les premiers Juges ont enjo int *
a u x Experts de p r o c é d e r ? Prétendra-t-on que c ’eil
la va le u r que p o u v o ie n t a v o i r les d e u x domaines nu
m oment de l’a lié n a t io n , q u ’ils leur ont prefcrit de
d é t e r m i n e r , parce qu'après en a v o i r ordonné l’eftimation , ils ont ajouté « que les E x p e rt s feroient
» la d iilin â io n des réparations urgentes que les iieur
» & D a m e M u n i e r auroient pu faire dans le d o » maine de M a c h e r o n , q u ’ils détailleraient lefdites
» r é p a r a t i o n s , & en feroient l’eftimation , eu égard
» à l'état oïl i l étoit lors de £échange » ? C e s derniers
mots p e u v e n t d ’abord faire q u e l q u ’imprefiion.
M ais cette impreiîion s’efface entièrement après
le plus léger e xam en. D é j à , fi l'on v o u lo it que les E x
perts eftimaffent les biens dans leur prem ier état, il
ne falloit pas leur enjoindre de d iil in g u e r , & e n c ore
moins' d'eftimer les feules réparations urgentes qui
a v o i e n t pu être faites fur l’un des domaines depuis
�l ’aliénation. C e n'étoit point en appréciant un iq u e
ment les réparations de cette e f p e c e , q u ’on p o u v o i t
t r o u v e r Ja différence entre la valeur ancienne & la
va le u r a£hielle. Sans d o u t e , les réparations utiles
a voie n t auffi contribué à former cette différence.
D e p l u s , ces termes mêm e de la S e n t e n c e , eu égard
& c . , ne fe rapportent évidem m en t q u ’au feul d o
maine de M a c h e r o n ; & le domaine d ’Igé ne devoit-il donc pas également être é v a l u é , eu égard à
l ’état où il éto itlo r s de l’échange ? R i e n cependant,
aucune difpofition dans la Sentence ne prefcrit aux
E x p e r t s de le reporter à cette époque p our l’éva
luer. Les Juges auroient-ils donc ordonné pour l ’un
c e q u ’ils n’ont pas ordonné pour l’autre ? C e feroit
une bizarrerie des plus étranges. C r o y o n s p l u t ô t , &
la maniéré même dont la Sentence eit rédigée l’exi
g e , que c ’eit feulement fur l’évaluation des répara
tions urgentes que' frappent les expreiîîons dont il
s’agit. Les Juges auront apparemment vo ulu p r ê t
c r i î e a u x Experts de n’eftimer que celles qui pouvo ie n t être urgentes dans l'état où fe tro uvoie nt les
biens au moment de l’échange.; mais du refte, il étoit
toujours dans l’efprit,pour ne pas dire, dans la lettre
de leur Sentence que les d e u x domaines fuifent eftimés dans leur érat a&uel.
C o m b ie n le prix.-qu’a donné cette é v a l u a t io n ,
n’a-t il pas dû être éloigné de celui q u ’auroit pro
curé l’eilimation proportionnée à l’ancien état! En
eût-on même déduit ce qu’auroient à p e u - p r è s coûté
les réparations de toute eipece , une pareille évalua*
■ B ij
�Ï1
tion auroit e n c ore infiniment com pro m is le fort des
fieur & D a m e M u n ie r. L ’accroiiTement de valeur
q u ’a reçu le dom aine par les dépenfes q u ’ils y ont
faites, a pu e x c é d e r , & m ê m e de b e a u c o u p , ce que
ces dépenfes ont c o û t é : & cet e x c é d e n t de va le u r
auroit tourné par là au profit des anciens p ro pri é
taires ; il en auroit été de même de celui que le
tems auroit pu a m e n e r , de celui qui feroit réfulté
de leur feule induftrie. Q u e l l e va le u r e n c o re n’a pas
du acquérir tout le domaine acquis des iieur & D a m e
B l a n c , par la réunion q u ’y ont faite les fieur &
D a m e M u n i e r de la pro pri été des fieur & D a m e
D e r p e r , . q u i en étoit un d é m e m b r e m e n t! E t néan
moins ce que la confufion desbâtim en s p o u v o it au
paravant leur ô t e r de leur p r i x , n’aura point été
c o n f i d é r é , parce que ce tte confufion ne fubfiftoit
plus. D e s fonds qu i perdoient de leur va le u r p a r
l ’i n c o h é r e n c e , par l’éloig nem ent où ils étoient les
uns des a u t r e s , & par les fervitudes de paflage dont
ils fe t r o u v o ie n t g revés en fa veur des fonds v o i f i n s ,
de ces fonds q u ’y a depuis réunis le fieur M u n i e r ,
on les aura eftimés ce q u ’ils valoie n t dans ce t état de
réunion.
C ’eft ainfi, c ’eft par toutes ces raifons, qu e le d o
maine de M a c h e r o n a été porté b e a u c o u p au deiTus
du prix q u ’on a v o i t c ru d e v o i r y attacher au m o
ment de l’aliénation.
M a i s , d i r a - t - o n , le dom aine d*Igé auquel le tems
& l’induftrie des n o u v e a u x propriétaires ont dû d on
ner auifi q u e l q u a c c r o ifl e m e n t de v a l e u r , p o u r q u o i ,
À
�au lieu d ’être eftimé au deflus du prix p ou r lequel
il a v o i t été aliéné, 1 a-t-il au contraire été au deflous ?
Po u rquo i ? C ’eft que ce domaine doit effective
ment valoir moins aujourd’hui qu ’il ne valoir alors:
c ’e ll que l’induftrie des fleur & D a m e Blanc, loin
de fe tourner vers l’amélio ratio n, a dû fe diriger au
contraire vers la détérioration. C e langage peut d ’a
bo rd paroître étonnant; mais il ceflera de l’ê t r e ,
quand on considérera que les fieur & D a m e Blanc ,
occupés du projet de rentrer dans leur domaine par
la v o ie qu ’ils fe propofoient d’e m p l o y e r , ont dû ne
rien négliger pou r aflurer le fuccès de leur entreprife.
Ils ont dû faire tout ce qui étoit en eu x pour c h e r
c h e r à groflir la léiion. D è s lors , autant leurceiîîonnaire am é lio ro it, autant ils ont dû laiiTer d é p é r i r ,
autant ils ont dû dégrader eux-mêmes.
N ’eft-ce point aiTez de ces confldérations pou r
écarter l’impreflion que pourroit produire le réfulrat
des eftimations déjà faites? O n en auroit encore
d ’autres à préfenter ; on pourroit faire v o i r c o m
ment le s'E x p e rt s ont été eux-mêmes plus injuftes
que la S e n t e n c e , en ne s’y conformant pas e x a & e m e n t , quant à l’eftimation des réparations urgentes;
c o m m e n t le tiers-Expert s eil écarté de fon d e v o i r ,
foit en s’occupant d’objets fur lefquels les premiers
E xperts n’avoient point été d iv ifé s, foit en fe p e r
mettant de porter fon appréciation p ou r certains
fonds au deiTus de la plus h a u te , & p o u r d ’autres
au deflous de la plus baiTe des d e u x eftimations.
Mais o n a préféré d ’inflfter lur les réflexions qui
�, 14
viennent d ’être p r o p o f é e s ; d’autant plus q u ’en les
développant on a obtenu un double avantage : on a
démontré fous un prem ier rapport le mal ju g é de la
Sentence dont les iieur & D a m e M u n i e r font A p
p e l o n s : on a p ro u vé com bie n il efl: néceiTaire de la
réform e r, Ôc d’ordonner, com m e auroient dû le faire
les premiers J u g e s , que les E x p e rt s qui p ro céd eron t
à la nouvelle eft im ation , n’auront égard q u ’à l’état
o ù étoient les objets q u ’ils ieront chargés d ’évaluer,
quand ils ont été aliénés, & que pou r le conflater,
cet é ta t, ils fc feront affifter par des perfonnes qui
en auront connoiiTance.
M ais ce n’eft-là que le plus lé ge r g r i e f des fieur
& D a m e M u n i e r contre cette Sentence. C e dont il?
ont fur-tout lieu de fe plaindre, c ’ eit de ce qu elle
prefcrit l’eftimation des d e u x domaines indiitin&ement.
L e feul domaine de M a c h e r o n auroit dû être é v a
l u é , pour calculer la léfion alléguée par les fieur &
D a m e Blanc. C ’eft ce q u ’il s’agit de démontrer.
E xp o f o n s, pour y pa rv enir, les principes qui ré~
glent le m o y e n de reilitution fondé lur la léiion. E x a
minant enfuite la nature des a&es contre lefquels ce
m o y e u eft pro pofé , nous verrons s’il peut s’y
a p p l i q u e r , & ju fq u ’à quel point il peut s’y appli
quer.
�'Principes concernant le moyen de reftitution fo n d é
fu r la léfion.
C e m o y e n , puifé dans le droir R o m a i n , n’y a pas
toujours été connu. Les feules caufes de reftitution
adinifes par l’ancien droit étoient le dol ou la v i o
lence. Surprife, ou défaut de liberté : telles étoient
uniquement les circonftances dans lefquelles un ma
jeur pou voit erre reftitué contre fes engagemens.
C ’eft une L o i du C o d e , qui la premiere a décidé
qu ’on pourroit auflî être reftitué pour caufe de léiion: la L o i i au titre de re/cind. vend. Mais dans
quel cas ? En faveur de qui ? C e t t e L o i même nous
l ’apprend. Rem m ajori pretii J i tu , velpatertuus mino
n s d ijlr a x ijti, humanum efl u t, vel pretium te reflituente
emptoribus, fundum venundatum recipias, v e l, f i empt o r elegerit, (¡uod deefl juflo pretio, recipias. M in u s
autem pretium ejfe videtur, fin e c dimidia pars veripretü fo lu ta fît. C e n’eft qu ’en cas de v e n t e , en cas de
ven te d’un immeuble , à l’égard du v e n d e u r , que la
léfion d ’outre moitié peut autorifer une demande
en reftitution. Les m o ts, f i tu diflraxijft t ne s’appli
quent ni à aucun autre c a s , ni à aucune autre perfon*
ne. C ’eft même par une efpece de grâce, de privilège,
que la Loi a accordé cette reiTource au v e n d e u r ,
humanum efl\ àc par cela feul que c'eft un privilège,
une déro gation aux principes gén érau x des contrats,
il ne peut , ni ne doit être étendu à aucune autre
perfonne , ni à aucun autre cas.
T o u t e exceptio n ve u t être renfermée dans fes bor-
�i6
nés ; on ne doit pas, fous pré texte de parité, o u même
d e fupériorité de raifon , en faire l’application à une
efp ece différente de celle qui eft déterm inée p a r l a
Loi.
E n faudroit-il davantage pou r réfuter c e u x q u i ,
fortant à tous égards des termes de cette L o i , ont
p e n f é , d’abo rd que l’achete u r p o u v o i t , ainii que le
v e n d e u r , p ro pofe r le m o y e n de l é i i o n , & enfuite
qu e ce m o y e n d e v o i t ê t r e é c o u té en matiere d’échan
g e c o m m e en matiere de vente ?
M ais d'où a pu p ro v e n ir cette double e rr e u r? C ’eft
principalement du m o t i f q u ’on a prêté à la Lo i. O n
a penfé q u ’elle a vo it fuppofé que le v e n d e u r p o u v o it
ig n o re r la vraie va leu r de fa c h o f e ; & cette i g n o
rance pou vantauifi fe rencontrer dans l’a c h e t e u r , on
en a co nclu q u ’il d e v o i t à c e t égard être ailimilé au
ven d eu r.
Dès-lors la L o i d e v e n o it aufîi applicable au cas
de l'échange -, un des échangiftes p o u v a n t de même
n’a v o i r pas connu la va le u r de la chofe q u ’il donnoir
ou de celle q u ’il re ç e v o it .
M ais c e u x qui ont fuppofé cette L o i , d i& é e par
un pa re il m o t if, fans doute n'ont pas lu une autre L o i
du m êm e t it r e , de rcfcindendà venditione ; la L o i 1 5,
cjui établit au contraire que nul n’ig n o r e , ou ne doir
ignorer la va le u r de fa chofe. N eque enim inanibus
immorari finatur objecîis , ut vires locorum Jîbimetcaufe tu r incognitas, qui fam iliaris rei fclre vires vel mérita
atque emolumenta ante debuerat.
C ’eil d on c par q u e lq u ’autre confidération qu ’&n
s’eft
�s’eft déterminé à r e g a r d e r , en cas de ve n t e , la îéfion
d ’outre-moitié com m e un m o y e n de reftitution en
fa veur du ven deur ; & cette confidération , la v o i c i :
on a p e n f é qu'il n’y avoit q u ’ un befoin preiTant qui
pou voit fo r c e r un propriétaire à aliéner fon héritage
p o u r un prix auffi inférieur à fa v a l e u r , & qu ’un
confentement donné dans une conjo n& ure auiTi déli
cate n’étoit pas un confentement tout-à-fait libre.
C ’eft ici même le défaut de liberté dans le confentem e n t , qui fait que la L o i vient au fecours de qui
conqu e é p r o u v e cette forte de violence.
O r l’acheteur peut-il jamais alléguer ce défaut de
liberté? L e befoin d ’a r g e n t , qui force quelquefois
de vendre , force-t-il jamais d’achetar ?
Il y a d ’ailleurs tant de raifons qui peuvent d é
terminer un acquéreur à furpaifer, dans le prix q u ’il
donne , la valeur abfolue de la chofe : Æ quum erat,
dit un célébré Interprete du D r o i t R o m a i n , C u j a s ,
Jiv. 1 6 , ch. 18 de fes O b f e r v a t i o n s , fubvenire venditori qui minoris vendidit, quem plerumque rei fa m iliaris necejfuas compellit vendcre pretio m inori, non
etiam emptori, ultro accedenti ad emptionem, Ô plerum
que ementi pretio immenfo & immodico, affectione opportunitatis , vel vicinitatis , vel cæ li, vel quod illuc
educatus f i t , vel parentes fe p u ld , vel quod ejus major u m fuerit. C 'e ft ainfi que l’acheteur met.fouvent un
prix d’affe&ion à l’objet qu’il a c q u i e r t ; & ce p rix ,
une fois promis & agréé , ne peut plus être rétra£lé.
C e c i p ro u ve même combien e f t p e u folide le m o
t i f par lequel un A u t e u r eftimé, P o th ie r , fe décide
�i8
à rendre c om m un à l’ach eteu r le m o y e n de reftitution fondé fur la lefion. L e contrat de ven te e f t , dit i l ,
un contrat c o m m u t a t if , où chacune des Parties fe
p ro p o fe de r e c e v o i r autant q u ’elle donne. C e l a eft
vrai ; mais n’eft il pas vrai auflî que cette c h o i e , à
laquelle l’ac heteur met un prix, fupérieur peut-être à
fa valeur in trinfeque , v a u t pour lui c e prix , à caufe
de la con ven an ce qu ’il y tro u v e ? N ’eft il pas vrai
en c o re que cette m axim e a va n c é e par P o t h i e r , doit
fe concilier a v e c cette autre qui p erm et au ven d eu r
c o m m e à l’acheteur de ch e rc h e r à faire fon profit, qui
tolere mêm e à ce fujet de part & d ’autre une iorre
d e c i r c o n v e n t i o n , e x e m p t e toutefois de fraude & de
diflimulation ? In p ra lo emptionis & venditlonis t licet
naturalïter contrahentibus Je circumvenire. L. 1 6 , § • 4 *
D . de min.
A j o u t o n s enfin que dans tous les contrats intéreffés,
de q u e l q u ’efpece q u ’ ils foie n t, contrats de v e n t e , o u
a u t r e s , le but de chaque Partie efl: éga lement de re
c e v o i r , fous une forme q u e l c o n q u e , l’é qu ivale n t de
c e q u ’elle donne. Il faudroit donc , d’après P o r h i e r ,
que la léfion énorme fût un m o y e n de reftitution
con tre tous ces c o n t r a t s , & cependant il n’en eft
rien.
M a i n t e n a n t , fi l’acheteur ne peut point être admis
à propofer le m o y e n de l é i i o n , l’échangifte ne doit
pas l’être d a va n tag e ; d ’abord il eft autant ach eteu r
q u e vendeur. Uterque em ptor, uterque venditor. D e
p l u s , & cette réflexion fur tout eft d é c i f i v e , il ne
p e u t point alléguer que ce l'oit la n é c e if it é , le mau-
�x 9. .
vais état d e Tes affaires, qui lui ait arraché le confentement qu ’il a donné à l’échange. C e n’eft point en r e
cevan t un immeuble à la place d ’un autre q u o n peut
fc mettre en état de fu bven ir à un befoin preffant,
de fatisfaire à des engagemens indifpenfables.
L ’échangifte d ’ailleurs cede preique toujours à
des raifons de con venan ce ÔC d’affeâion. Il n’eft
peut-être pas un fèul échange qui ne foit déterminé
par de femblables considérations; c ’eft alors fur-tout
q u e ratio viclnitatis, opportunitatis, fait faire des fa ori
fices. C e que chaque échangiile reçoit eft toujours
cenfé valoir à fes y e u x autant que ce qu ’il donne.
Il n y a donc ni r a i f o n , ni prétexte pour appli
q u e r au contrat d ’échange une L o i qui par elle-même
ne le concerne pas.
A u f îi n’ y a-t-elle point été étendue par la Juris
prudence. U n feul A r r ê t du z Mars 1 6 4 6 , rapporté
au prem ier vo lu m e du Journal des A u d i e n c e s , a
refeindé pour caufe de léfion un contrat d ’é c h a n g e ;
mais c ’étoit dans une circonstance pa rtic u li è re , ainii
que l’obferve G u e r e t fur L e p r ê t r e , Cent, premiere ,
chapitre 1 1 . C ’étoit un fonds de terre qui avoit été
échang é contre une rente con ftit u ée, & le m o y e n
d e léfion fut écouté , par la raifon, dit G u e r e t , que
le p rix de la rente qui ne peut être e jlim l plus que k
p rincipa l, étoit f ix e & certain.
V o i l à les vraisprincipes.
C ij
�Application de ces principes.
E n ne confidérant d ’abord les d e u x a&es dont la
refciiion eft demandée par les iieur & dame Blanc
q u e tels qu ’ils font e xtérieu rem e nt : la léfion ne feroit point un m o y e n à la fa ve ur duquel ils puffent
l ’ob tenir; car ces d e u x a â e s font en apparence des
a â e s d ’échange.
C e ne feroit point à la vérité bu ta but que l’ échan
g e auroit été fait ; il auroit été a ccom p agn é d’une
l o u l t e , & m êm e d ’une foulte égale à la va leur d ’un
des domaines é c h a n g é s ; ainfi nous ne fe rion s, ni
dans le cas o ù la foulte étant mo indre que le p rix
de l’héritage auquel on l’a pou r ainfi dire attachée ,
l'aliénation con fo m m é e entre les Parties ne c o n fe r v e
pas moins fon cara & ere d’échange ; ni dans celui où
cette foulte fe trouvant fupérieure fait d égén érer
l ’éch ange en une v e n t e , contre laquelle alors celui
qui a reçu la foulte , & qui cil: réputé v e n d e u r , peut
p r o p o f e r le m o y e n de léfion. N o u s ferions placés
dans un exa£t milieu ; ni l’é c h a n g e , ni la vente ne
p r é d o m in e r a i e n t , il y auroit autant de l ’un que de
l ’autre ; & , dans la rigu eur des p r i n c i p e s , il faudroit refcinder l'aliénation pour m o i t i é , s’il y a v o i t
l é fio n , & la laiiîer iubfifter pour l'autre moitié.
Mais ne raifonnons pas plus' long-tems dans la fuppofition d’un échang e ; il n’ÿ a ici de l’échange que
le n o m , que l’apparence , & même une très-légere
apparence. C eft une d o u b le vente qui a été con-
�2.1
fom mée fous la forme d ’un échange.
T o u t e s les fois qu'en cédant une chofe , on
prend le foin d’en déterminer la v a l e u r , c ’eil vrai
ment une vente que l'on fait de cette chofe. <k II
fuffit, dit H e n r y s , * d’abandonner une chofe pour
i> la valeur q u ’on lui d o n n e , pour en être réputé
ve ndeur ». D e - là , cette maxime ii c o n n u e , dos
ejîim ata, dos vendita.
11 importe peu d'ailleurs qu ’en paiement du prix
de l’objet c é d é , I o n r e ç o iv e une chofe qui rienne
lieu de cette valeur. C e t t e fécondé opération eft ellemême une autre ven te , faite par v o i e de dation en
paiement. L e même qui a d'abord été vendeur de
v ie n t enfuite acheteur , & vice verfâ. Q u o i q u e confo m m ée par un feul a & e , auquel on auroit même
donné le titre d’é c h a n g e , cette double aliénation ne
feroit toujours point un échange. « Si nous con ve» nions enfemble , dit Pothier , * que je vous don« nerai relie chofe pour un .certain p r i x , en paie» ment duquel vous me donnerez de vo tre côté
» une autre c h o f e , cette conventio n n’eil pas un
» contrat d’échange , mais elle renferme une vente
» que j ’ai faite de ma c h o f e , & une dation de la
» v ô t r e , que vous me faites en paiement du prix de
» la mienne *>.
Q u o n jette maintenant les y e u x fur chacun des
aftes dont il s’agit; on reconnoîtra , qu'en même tems,
q u ’il y eil ftipulé que le fie u r M u n ie r paiera au fieur
B la n c 25 00 liv. de r e t o u r , ce qui rie fait encore
q u ’annoncer un échange a ve c foulte , & point une
* L iv . 3 , ch. 5 ,
qu eft, 4 4 ,1 1 ° . a .
* T ra ité du co n tra t
de v e n t e , n ? . 6 17*
�Il
v e n t e , les Parties eft im entau iîî les objets qu'elles fe
cèdent re fp e & iv e m e n t. Eflim ant les Parties : fa v o ir ,
la moitié du domaine remis par ledit M e M unier valoir
1 5 0 0 liv. & la m oitié de celui remis par les mariés
B la n c & M a r tin , valoir 5 000 liv.
C ’eft cette eftimation qui détermine la nature de
ces d e u x a&es , qui en f a i t , même e x t é r i e u r e m e n t ,
on peut le dire , de vrais contrats de vente.
Ici , en effet, il y a quelque chofe de plus q u ’un
«ch a n ge dégénérant en une vente. L ’a & e dont on
p o u rro it parlerainfi, feroit celui où, fans q u ’aucun des
objets aliénés eût é téeftim é , la fomme reçue à titre
de retour par un des C o n t r a â a n s , ferpit cependant
re co nn u e pour fupérieure à la v a le u r de l’im m eu b le
qui lui auroit d’ailleurs éré cédé. C e feroit de c e t
a â ë q u ’il faudroit dire que , la ven te dominant fur
l ’échange , le contrat entier d e v r o it être réputé c o n
trat de v e n t e , l’acceiïoire étant toujours g o u v e r n é
p a r l e principal : ab eo quod prœponderat totus contraclus judicatur.
Il n’en eft pas de m ê m e , l o r f q u e , c o m m e i c i , l’on
a expreifément déterminé le prix de chaque objet.
A l o r s v r a i m e n t , ch aqu e objet n’a point été é c h a n g é ,
mais vendu pour le p r i x q u o n y a attaché. C e l u i qui
vaut moins a été donné en paiement de celui qui vaut
plus , la convention , c o m m e le dit P o t h ie r , riejl pas
lin contrat d'échange , mais elle renferme une vente que
j ’ai faite de ma chofe , & une dation de la vôtre que vous
me faites en ce paiement du p rix de la mienne.
Il f a u d r o it d ’ailleursfe refufer à l 'é v id e n c e pou r ne
�*3
.
pas a ppercev oir par quelle raifon le fieur Blanc & le
fieur M unier ont donné à leur aliénation la cou le u r
d ’un échange. N e fe rappelle-t-qn pas ce t E d it de
1 7 7 0 , rendu fur-tout pou r la P rovince de Mâconnois,
dans laquelle il affranchit, pendant fix ans> les échan
ges « des parties de terrein au-deiTous de dix arpens
» des droits de centieme d e n i e r , & autres droits
» r o y a u x & fe ig n e u r ia u x , à l’exception du droit de
» contrôle fixé à dix lo is, de quelque valeur que
» foient les héritages échangés » ?. C ' e f i : , o n n’en
fauroit d o u t e r , pour profiter de l’exem ption portée
p a r c e t E d i t , que le fieur Blanc & le fieur M u n i e r o n t
préféré la forme d ’un échange, & même d’un double
échange ; parce q u ’un feul eut embrafle plus de d ix
arpens, & eût été fujet aux droits. Ils ont fait ce qui,
depuis 1 7 7 0 , fe pratique dans toute la P r o v in c e du
Mâco nnois. D e p u is cette ép o qu e , il ne fe fait prefque plus d’aliénation à titre de vente. T o u t e s fe font
fous le nom d ’échanges. O n échange , moye nnan t
4 8 8 0 liv. de r e t o u r , un ob je t valant 5000 liv.. contre
lin autre qui vaut quarante é c u s , & l’on ne s en fait
point de icrupule ; on ne craint point d ’être recher
ché , com me a yan t vo u lu frauder les droits du Roi ;
parce q u ’en exécut ion de l’Edit même de 1 7 7 0 , qui
n ’ac corde l’exemption q u ’à la charge,par la P r o v in c e ,
d ’indemnifer la F e rm e G é n é r a l e , il a en effet été
fixé & p a y é une indemnité au Fermier. O n ne le
craint plus fur-tout, depuis que quelques Prépofés
qui avoien t e x i g é les d r o i t s , c o m m e en cas de vente ,
ont re çu des ordres d ’en rendre le montant ; c ’eft ce
�24
qui a encore autorifé de plus en plus les babitans de
la P r o v i n c e à ufer fansréie rv e du bénéfice de l'Edic.
L e fieur M u n i e r , qui eft c o n t r ô l e u r , pourroit le
p r o u v e r par Ton r e g i f t r e , & par tous c e u x de la G é
néralité de B o u r g p g n e dont dépend !e M âc o n n o is :
mais,Mans produire tous ces v o l u m e s , il crc it luffifant de mettre fous les y e u x de la C o u r quatre a â e s
différens qui fourniirent la preu ve la plus c o m p l e t s
& la plus frappante de ce q u ’il avance. Par un de
ces quatre a£èes, le fieur Blanc l u i - m ê m e échan
ge des fonds eftimés 1 0 9 1 l i v r e s , contre une por
tion de bois évaluée 15 liv. ; & il p a y e 1 0 7 7 liv,
de retour.
Sont-ce donc là des échanges ? Ils en portent le
nom ; mais fous ce nom , ce font de vrais contrats de
vente.
I c i , é v i d e m m e n t , le fieur Blanc a ve n d u fon d o
maine de M a c h e r o n 1 0 0 0 0 liv. au fieur M u n i e r , qui
lui en a p a y é 5000 liv en arge nt; & pou r s’acquitter
des cinq autres mille l i v r e s , il lui a cédé fon. domaine
d ’Igé pour une pareille fomme.
C ’eft en vain que le fieur Blanc, après a v o i r d i t , enparlant de ces a â e s produits par le fieur M u n i e r ,
qu on a voulu y déguiferdes ventes fo u s le nom d'échan
ges , perfide à foutenir que les d e u x a&es des premier
& iept A o û t 1 7 7 4 n’ont pas feulement le titre d ’é
changes , q u ’ils en ont aufîi le ca ra& ere ; que
leur donner celui de v e n t e s , ce ieroitles dénaturer.
L ’échange fait a v e c foulte ne cefTe pas p ou r cela
1>A
d çtrç
�d ’être échange ; c ’ëil toujours un contrat différent de
la vente. « L a iîmulation p e u t , à la vérité , être em» p l o y é e p ou r ca ch er une vente fous l’apparence
» d ’un échange ; mais on ne peut pas le dire de l’a & e
» dont il s’a g it , dans lequel il y a réellement d e u x
» domaines échangés ».
Q u e l eil d o n c , nous le d e m a n d on s, l’a&e d e change , même fimulé , où l’on ne cede pas toujours
de. part & d ’autre un immeuble quelconque ? Sans
cela, il n’y auroit pas même fujet d ’e m p lo y e r le nom
d ’échange. C e qui conftrtue la ii m u latio n , c ’eft la dis
proportion entre la valeur de deux immeubles
échangés ; c ’eil 1 énormité delà foulte que l’un donne
& que l’autre reçoit.
A u reile , il n’eft point queilion ici d’a&es fimulés.
L e fieur Blanc & le iieur M u n ie r n’ont point eu l’in
tention de rien faire en fraude de la Loi. En même
tems q u ’ils ont cherché à ufer du bénéfice de l’E d i t ,
ils ont cru s y être fuffifammentconformés ; & ce qui
s’étoit déjà paiTé fous leurs y e u x les autorifoit à le
croire.
T o u t ce qu ’il faut v o ir i c i , ce font deux a&es qui
ont le nom d’é c h a n g e s , mais qui ont en même tems
tous les carafteres de la vente. 11 a été mis de part
& d ’autre un prix aux chofes cédées, & toute ceilion
f a it e , m o ye n n an t un p r i x , eft une vente. V o i l à l’idée
fimple & V r a i e à laquelle toute cette difcuffion doit
fe réduire.
Maintenant', & f i , au lieu d’iin é c h a n g e , c ’e il
une double vente qui a eu lieü entre Je iîeur M u n ie r
D
�z6
& le fieur Blanc, fi cc dernier eft v e n d e u r du domaine
de M a c h e r o n & acqu éreu r du domaine d’Igé, quelle
eft la con féq u ence qui en r e f a i t e , d’après les prin
cipes qu'on a e x p o f é s , fur le m o y e n de reftitution
tiré de la léfion ?
L e v e n d e u r , a-t-on d i t , a-t-on d é m o n t r é , eft le
feul qui puiiïe pro pofer ce m o y e n . N i la lettre , ni
l ’efprit de la L o i , ne perm ettent à l’acheteur de s’en
p révaloir. A i n f i , que le S r Blanc le préfente c o m m e
v e n d e u r , relativement à l’ob je t q u ’il a v e n d u ; c ’eftâ-dire , au domaine de M a c h e r o n : mais q u ’il ne le
faiTe pas valo ir à l’égard de celui qu ’il a acheté, à l’é
gard du domaine d ’Igé. C e domaine ne doit donc pas
etre eftimé : il nTy a que celui de M a c h e r o n dont on
d o i v e ordonner l’eftimation ,afin de favoir fi cet im
meuble , cédé pour j o o o o liv. en valoit plus de
v i n g t , quand il a été aliéné.
Ici encore on é p r o u v e , de la part des Sie ur &
D a m e B l a n c , la réfiftance la plus v i v e , mais non pas
la m ie u x m o tiv é e .
Q u a n d il feroitpoiTible, fuivant e u x , d ’admettre
ici la fubftitution de la vente à l’échange , on nq.
pou rro it toujours point em p ê c h e r le v e n d e u r , qui
fe prétend léfé , de faire eftimer a v e c fa ch ofe celle
q u ’il auroit reçue pour partie de la va leu r de cette
chofe. A u t r e m e n t , & tant qu ’il feroit incertain c o m
bien il a reçu en échange de fon i m m e u b l e , on ne
fauroit pas s’il a été réellement trompé. L e fieur
M u n i e r , fi l’on en croit fes a d v e r f a i r e s , fait de vains
efforts p ou r éluder cette vérité. Il obfe rve que le
�prix étant une fois con ven u en argent , la maniéré
de le p a y e r eft indifférente pou r la lefion ; que , pour
la calculer , ou ne doit pas confidérer Ci les objets
donnés en paiement au vendeur valoient ou non le
prix qui lui étoit dû.
« Mais il ne s’agit pas d ’un a â e dans lequel on ait
» ftipulé un prix en a r g e n t , dont une partie ait été
» p a y é e en un immeuble. Les Parties ont échangé
» deux d o m a in e s , & elles ont fuppofé que l’un des
» deux valoit 5000 liv. plus que l’autre , raifon
» pou r laquelle il a été convenu d ’une foulre de
» 5000 liv. qui a été p a y é e en a r g e n t . . . . On n a
» mis aucun p rix au domaine de M acheron, on l’a
» é c h a n g é , & non pas vendu ; on l’a échangé contfe
» un domaine de moindre v a l e u r , & c ’eit parce
» q u ’on a porté la différence à 5000 liv. qu'on a
» fixé la foulte à cette fomme. M a is J i les valeurs
» des domaines ont été fixées arbitrairement, & d’ une
» maniéré injuite , fi le domaine de M achero n a été
» porté beaucoup trop bas & celui d’ig é beaucoup
» trop h a u t , c'eil une double léfion pou r le fieur
» Blanc. Il faut donc connoître la vraie valeur des
» deux domaines; cela eft clair com me le jo u r » .
Il faut en effet que c e raifonnement ait paru bien
clair & bien frappant aux y e u x des A dverlâir es, car
ils n’en préfentent pas d ’autre ; c ’efl toujours cet ar
gum ent qui fait le fond de leurs réponfes.
Mais ils feront fans doute les feuls auprès defquels
il opérera la c o n v i â i o n ; tout autre qu’eux n’y
verra au contraire que l’inconféquence la PIus c^0'
D ij
�2.8
quanre ; tout autre remarquera com bie n il y a peu
de rapport entre la propoiition , au foutien de la
quelle ils préfentent ces r é f l e x i o n s , & ces réflexions
même. L e u r but étoit de p r o u v e r q u ’en transformant
mê m e l’échange en v e n t e , il faudroit t o u j o u r s , afin
d ’ap précier la léfion dont fe plaint le v e n d e u r , eftim er a v e c la chofe q u ’il auroit cédée celle q u ’il auro it reçue p ou r partie de fa valeur ; & c ’eft pou r d é
mon tr er cette propoiition q u ’ils difent « q u ’il ne
» s’agit pas d’un a a e dans le que l on ait itipulé uii
» prix en a r g e n t , dont une partie ait été p a y é e en
» im m e u b le s , qu ’on a échangé , & non pas ve n d u
» le domaine de M a c h e r o n , q u ’on l’a échangé
» contre un domaine de moindre va leu r ». . . .
M a i s , n’o n t - i l s donc point apperçu com bien leur
p r o c é d é bleiTe les réglés du raifonnement ? E n d e u x
mots le voilà : quand, i l Jeroit quejlion d'une vente . . .
M a is i l s'agit d'un échange & non pas d'une vente ;
donc , &c. Q u e l l e logiqu e !
R e n tre r o n s -n o u s, a v e c les adverfaires , dans la ditcufîîon q u ’ils vo udroie n t prefqu’engager de n o u
veau , iur le point de favoir fi c ’eft un échange ou une
v e n t e que renferment les a â e s des prem ier & 7
A o û t 1 7 7 4 ? O n n’en v o it pas la néceiîité : ils ne
donnent aucune n ou velle raifon pou r faire cro ire
que ce foit un échange. On n a mis, difent-ils , aucun
p r ix au domaine de Macheron. E t , q u ’eft-ce que c ’eit
donc que l’eftimation qui en a été faite, qui a été
portée à 10000 liv. ? L e s S r & D a m e Blanc avoienc
cTabord infinué que c ’étoit p o u r fixer la perception
des droits R o y a u x q u ’elle a v o i t été faite. O n leur a
�.
,
préfenté l’Echt cTe 1 7 7 0 , & ils n ont plus inililé ; cîc
maniéré q u ’a ujo u rd ’hui l’on 11e fauroit c q u i v o q u e r
fur Je but de cette eftimation. En la faifant pour c h a
que d o m a in e , c ’ef tle prix que les Parties attachoient
à chaque domaine q u ’elles ont vo ulu fixer.
M a i s , pourfuit-on , f i les valeurs des domaines ont
été fixées arbitrairement, & d'une maniéré injufte , ne
faut-il pas ch e rch e r à en connoître la vraie valeur ?
Mais, on le demande aux Adverfaire s, fi quelqu’u n ,
par un prem ier a â e , avoit cédé Ton bien pour une
f o m m e , que par un autre il eût reçu en paiement de
toute ou de partie de cette fomme un i m m e u b l e ,
dont la valeur auroit été déterminée , l’écouteroito n , lorfquefe plaignant d’avoir été léfé , & deman
dant qu a l’effet de conftater jufqu’à quel point il l’a
été , le domaine qu ’il auroit cédé & celui qui lui a u
roit été cédé fufient également eilim és; il diroit ,
c om m e dit aujourd'hui le fieur B l a n c , J i les valeurs
des deux domaines ont été fixées arbitrairement, & d ’une
maniéré injujîe , il fa u t chercher a en connoître la vraie
valeur ? N o n , fans doute , on l’o u t i e n d r o i t , & l ’on
feroit décider fans peine qu ’il n’y a que l’immeuble
par lui vendu ou cédé qui d oive être eflimé ; qu'à
l ’égard de l’autre qui lui eft parvenu par la voie de la
dation en p a ie m e n t, il en eft a c q u é r e u r , & que ,
quand il l’auroit acheté trop c h e r , il ne pourroit pas
s’en plaindre. C e langage, on feroit aufïi en droit de
le t e n ir , quand ce feroit urumême a â e qui contiendroit & la ceffion & la dation en paiement.
Il n’y auroit donc ici que la forme extérieure de
�l ’a&e qui favo rifer oit le ii eu f Blanc ; car on a déjà
fait v o i r q u ’à cette forme près tout y caraûérife la
ven te ou la dation en paiement ; & tant que le fieur
Blanc fe contentera d ’aifurer le c o n t r a i r e , fans jamais
le p r o u v e r , il ne fera que fe co nfum er en paroles
inutiles.
O r , que fait, q u ’importe cette forme e x té rie u re ,
• lorfqu’à travers on d é c o u v r e auffi aifëment le fon d ?
N ’eft ce pas à ce f o n d , c o m m e à la r é a l i t é , q u ’il faut
toujours s’attacher ? D è s - l o r s , point de différence
intrinfeque entre l’efpece attuelle & l’efpece iu p p o f é e ; la conséquence doit être la même dans l’une
que dans l’autre.
L e iieur M u n i e r d e v r o it terminer ici fa défenfe. Il
a démontré le double v ic e de la Sentence dont il eft
appellant. D ’un côté l’on auroit dû prefcrire l’eftimation , eu égar d au tems de l ’aliénation , & on ne l’a
pas fait. O n a ordonné d’un autre côté l’eftimation
des d e u x d o m a in e s , & il n’y en a q u ’un f e u l , le d o
maine de M a c h e ro n , cédé par le fieur Blanc , qui
foit dans le cas d’être évalué. Point d ’évaluation à
faire du domaine d ’ï g é , dont ce dernier eft a c
quéreur.
P o u r lui ô te r cependant ju f q u ’au p rétexte de fe
plaindre à c e t égard , le fieur M u n i e r lui a f a i t , d e
puis le Juge ment, une offre q u ’il p o u v o it aflurément
fe difpenfer de faire. Il lui a pro pofé de iubftituer à
c e domaine , qui lui a été donné en paiement de
5000 liv. cette mêm e foin me de 5000 livres en
argent.
�N o u s terminerons par quelques r e f l e x i o n s , qui
auront pour ob je t de répondre à la critique q u ’on a
pu faire de cette proportion.
R
é f l e x i o n s
S u r l ’offre de fubjlituer 5 000 liv. en argent au domaine
d'Igé. '
CE TT E offre dégénéré, dit-on, en une augmentation
de p r i x , dont le but eft tout à la fois, & de diminuer
la léiion , afin qu ’elle ne foit plus d’outre-inoitié, &
de difpenfer le fieur M u n ie r d'offrir le fupplément
entier du jufte prix.
Point du tout : le fieur M unier n’augmente point
par-là le prix qu’il a donné du domaine de M a cheron. C e p rix eil toujours de 10000 livres ; pour
l ’a u g m e n t e r , il faudroit qu ’il offrit de donner ou
onze ou douze mille livres , & ce n’eft pas là ce
q u ’il fait. S e u l e m e n t , com m e il n’a compté que la
moitié de ce prix en argent, & q u ’à l'égard de l’autre
moitié il l a acquittée avec un immeuble , eftimé
5000 liv., il offre aujourd’hui de réalifer encore cette
moitié en arge nt, & de reprendre l’objet q u ’on pré
tend valoir moins de 5000 liv. pourvu qu ’on le lui
rendedans le même état. C e n’eil point le prix en luimême , c’eft le paiement du prix que ceci regarde.
L e fieur Blanc fe plaint de ce qu ’on a fait entrer clans
ce paiement un effet inférieur à la va leur qui Jui a
�51
été donnée. P o u r faire ce fler fes plaintes on confent
de le reprendre & de lui c o m p t e r la va le u r mêm e.
Faire une pareille p r o p o f i t io n , n’eft pas non plus,
de la part du fieur M u n i e r , c h e rc h e r à affoiblir le
m o y e n de léfion. L a léiion fe calcule en raifon du
prix de la v e n t e , & non pas en raifon de la va leur
que peut a v o i r un effet donné en paiement de ce prix.
C e m ot ré po n d à tout.
Monfieur £ A R B I E R
D'INGRE VILLE,
Rapporteur.
M e B O U Q U E T D E L A M A R C H E , Avocat.
F a r é , Pro c u re u r ,
CONSULTATION,
�CONSULTATION.
î
j E C O N S E I L Souffigné qui a lu le M é m o i r e
imprimé p our les Sieur & D a m e M u n i e r ,
E s t d ’ a v i s qu’ils font bien fondés dans leur
appel.
S u r le premier g r ie f : il eft certain q u ’en matiere
de léfion , & pour la c o n f t a t e r , c ’eft la valeur des
b i e n s , au moment où ils ont été aliénés , q u ’il faut
uniquement confidérer. C ’eft donc cette valeur qu ’on
doit prefcrire aux Experts de déterminer ; & il eft
p r o u v é par le M é m o i r e que tel n’eft point l’e f p rit d e
la S e n t e n c e , dans la difpoiition qui a ordonné l’eftimation.
S u r le fécond g r ie f : on n’a pas feulement ordonné
l ’cftimation du domaine cédé par le iieur Blanc au
fieur M unie r : on a auiîi ordonné celle du domaine
céd é par celui-ci au f i e u r B l a n c ; & l’on ne devoit
pas le faire.
Si c ’étoit vraiment un échange qui eût été c on fommé entre ces deux Particulie rs, ni l’un ni l’autre
ne devro ient être admis à l’attaquer , fur le fonde
ment de la léfion. C e m o y e n de reftitution a eu pour
bafe une préfomption de droit que celui qui a aliéné
fon immeuble a voit été forcé p a r l e r a i de fes affaires,
�^
•
r
x
l ’appliquer q u ’à un v e n d e u r ; il eft étranger à un
éch ang ifte. .
M ais il n’y a ici de l’échange que le nom & la
forme extéri eure . A u f o n d , & quant à leur fubftanc e , les actes dont il s’agit font des act e s de vente. O n
y v o it que les d e u x domaines ont été e f t i m é s , l’un
1 o o o o l i v r e s , l’ autre 5000 livres ; d’où il eft réfulté
qu e ce dernier domaine a fait fonction de prix ; il a
été donné pour une f o m m e fixe , en paiement du p r i x
de l’autre domaine. C e font là des caracteres de
vente.
E t dans cet é t a t , le m o y e n de léfion ne peut être
p ro pofé par le fieur Blanc qu ’à titre de vendeur , &C
q u ’à raifon de l’objet dont il eft vendeur. L ’im meuble
c é d é par lui p ou r 10000 l i v . , vaut-il plus de 1 0 0 0 0
livres ? C ’ eft uniquem ent là ce q u ’il s’agit de v é r i
fier , p our favoir s’il a été léfé d ’outre-moitié. O n
n’a point à re c h e rc h e r la va le ur réelle de l’ im meuble
qui lui a été donné en paiement d’une moitié de fon
p rix. L o in d ’être ve n d e u r à cet é g a r d , c ’eft lui qui eft
achete ur ; & jamais l’acheteu r n’eft admis à a llé g u e r
la léfion,
A u r e f t e , l ’o f f r e que fait le fie ur M u n i e r de
reprendre cet i m m e u b le , & de le r e m p l a c e r , en
c om ptant au fieur Blanc la fo m me de 5000 liv. p o u r
laquelle il le lui avoir c é d é , défintéreffe e n t iè r e m e n t
c e dernier.
D élibéré à Paris , le 2 7 Juillet 17 8 0. L e G O U V É .
P c l’imprimerie de L. C E L L O T , rue Dauphine, 1780,
�
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Factums Vernet
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Title
A name given to the resource
[Factum. Munier. 1780]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Barbier d'Ingreville
Bouquet de La Marche
Faré
Le Gouvé
Subject
The topic of the resource
échanges
soulte
experts
lettres de rescision
doctrine
estimation
domaines agricoles
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Munier, notaire royal à Lugny, et sa femme, appellans : Contre le sieur Blanc, notaire royal à Cluny, et sa femme, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de L. Cellot (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1780
1766-1780
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_V0119
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Vernet
Language
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