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( s v i i l iw
w k t i .»J8J J m 1.» M a a « « .i K m i E m m m a j ç j g u M f c M m i w a
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
POUR
C
a th er in e
MOLIN, et les S.r et dame VENDRIEZ
et BORNE, intimés;
c o n t r e
J e a n et autre J e a n
CHOUVENC,
appelans.
Q U E S T I O N S .
1 L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein,
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2. 0 S i elle n'est pas périm ée, p euve n t-ils, comme tiers acqué
reurs, repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix a n s , dans le même parlement ?
.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils rece-
3
vables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier resso rt, rendus
sur appointements entre leur vendeur et ses autres cohéritiers
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4. 0 Thérèse M olin a-t-elle eu 10 ou
3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l'ignorance de ses droits et sans être inform ée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
C elte question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
.° Catherine M olin a-t-elle perdu , p a r la prescription de
A
5
30
�ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine F er r a p ie, sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de Vordon
nance de 1735 ?
7.° L a première substitution qu'il co n tie n t, est-elle Jidéicom missaire ou fid u cia ire? L a seconde est-elle une substitution
pupillaire ? Est elle valable? ¿4 -t-elle transmis la succession à
M arie Mo Un , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo lin , qui a simplement légué
une légitim e à ses enfa n s puînés , est-il n u l pour vice de prér
térition ?
EL L E S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les pallies el qui ont occupé \a Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catheriue
Ferrapie, rapportée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée d elà minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est lapporlée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, el subi, pour faire juger un simple
p a ita g e, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Pierre Molin fivnit, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise et
Ignace Molin. Tous , excepté le dernier , s«nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l'embrouiller, les intimés se contentent
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié à Catherine Ferrapie. Ils ont eu six eufans.
�*3(è?
3
(
)
Pierre Molin , mort eri 1743.
Catherine Ferrapie, morie en 1735.
2.
JL
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Clxambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
1731 ;
,
2.e m a r i
N .. . Dejoux.
3 .e mari ,
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L e 20 mars i y
.
6
5.
3.
Catherine , J e a n n e ,
intimée.
m. s. p.
en 1770-
Thérèse.
Louis Borne.
I
.
,------- '------- «.
m ort s. p.
Jeanne Bo rn e,
le 3 novemb.
Louis Vendriez ,
174S.
35 , Catherine F en ap ie
intimés.
fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la charge de remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
« recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans distaction de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des f ruits de
« ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .... Fait et récité audit T e n c e , dans la maison d’autre
« sieur Pierre Molin, en présence d e ............. témoins soussignés.
« Ladite testatrice ille de ce enquise et requise.............»
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
«
«
«
«
«.
institue pour son héritier Pierre Molin son lils. . . . Il donne
et lègue ¿1 ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas ¿ïge de son héritier, il j^rie Ign ace M olin ,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa iille , de régir et
administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A a
�,
*
«•*
'
,( 4 )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur».
Pierre Molin. mourut le 21 du même mois de mai 1743. Alors
Marie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de ChamL o n , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux suc cessions > s’engagea aussitôt qu’il eu eut l’âge. Il
mourut à Lille le novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
3
Quelques années après, on trouva l'occasion de marier la plus •
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux a Ha ires
5
de la maison, et par le contrat de mariage du
juin 1705 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 fr. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du p è r e , de la m ère, de
la sœur décédée , et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n eut pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions , et s’obligea de la confirmer et ratiJ îer à sa majorité. On ne s’ est jaimis avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et ri ère. Quand le sieur Chambar
liac décéda, elle passa en de secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose près,
de dissiper la succession.
Thérèse M o lin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sac rifice qu’on .avait extorqué
de son inexpérience. L e 2.2 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son troisième mari, en partage des successions
de ses père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion all’éranle.
Après cette demande, elle Ht donation de ses biens à la dame
�Vendriez, sa fille, qui intervint. L e procès fut appointé à T e n c e ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du ch ef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le surplus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
■mère communs.
L es deux parties interjetèrent appel de celle sentence ; les pro
cédures se continuèrent en procès par écrit jusqu’a la révolution.
L e tribunal du district du J?uy fut choisi pour connaître de cet
nppe1.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 179^ 5 sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
1.° Que le te.-ta ment du père était nul par prétention; 2.0 que
la substitution, portée dans celui de la u ère, avait saisi Pierre
Molin de la success’on , et que ledit M o l¡11 'étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes ; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était nulle , comme n’étant
dirigée au profit de personne , comme faite par une mineure ,
avec convention de ratification non effectuée, et comme dirigée
âu profil d’une protutiice , et que l’action avait dure trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calc ulcc audit jugement.
De son côté, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lam bert'Lacroisière, son héritier, le 27 novembre de la même année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du chef de son père, et
seulement un douzième, du chef de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la croyance, que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle 11’avail jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour êlre
expedie un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père , et dans les mêmes proportions pour les successions col
latérales.
�'
‘
( 6 )
^ e s ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molfu
alors ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du chef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque lut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
Ou présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus, long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 février 17 9 3, et comme on le voit , en grande connaissance
de cause,
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
q u ’ il occupe , un domaine et un jard in, et déduiront les créances
q u ’il a acquittées en vers Jean-Antoine Molin, à la décharge de tous.
Et comme évidemment ces biens 11e suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouvenc , V raisse, C u o q , I io y c r ,
D e lc a g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin, à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
Enfin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 1793 , les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v ril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demande. L e moyen des
Chouvenc n’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , amis de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�7
C )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, x.° les biens libres, 2 ° ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demande comme acquéreurs de
bonne foi.
Depuis celte époque le tems d elà péremption s’accomplit: ce
n’ esf que le 9 vendémiaire an 8, que \e* Chouvenc signifient l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine Molin se u le , pour assister en la cause.
L e 16 g e r m i n a l a u 9 , les i nti mé* ont a ss i gné les C l i o u v e n c e n
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e de l e u r a p p e l .
C ’est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 179,3,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leur prétendue bonne foi : cependant ils ont acquis d’ une cohé
ritière qui avait une sœur dans la maison; ils ont fait plus, ils lui
ont paye le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lacroisière, ils
avaient eu le m o i n d r e soupçon de la vente faite aux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certes, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce procès , il est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa déc ision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’Arilêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le; ju
gement du 26 janvier 17 9 3 , et de faite rejuger 1111 procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eut indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui ftiire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le ionds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
s’agit d’examiner.
�C 80
PR E
il 1 È R E
Q U E S T I O N .
L a procédure des appelons est-elle périmée ?
L a loi Properatiduni et l’ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entretenus par
des procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrjt n’a eu d’eiï'et que dans son
ressort. A u parlement de Toulouse, au contraire, l’ordonnance
de Roussillon'était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien ressort de Toulouse, lu Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an 11 et 12 nivose an 12 , que la péremption
avait eu lieu de plein droit, même ^pendant la révolution , et la
suppression des avoués.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
Mais i.° cet exploit assigne les Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à celto
démission d’appel; il serait donc bizarre de dire q u e celui-là ap
prouve un appel , qui assigne l’appelant aux. fuis de s’en voir
démettre. Il faut bien q u e lu péremption même soit prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit oblige' de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablem ent, comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
de
�de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral M erlin , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur prdinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790»
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc , a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r Merlin , en sa discussion, ne s’occupe p a s , comme on
pourrait le croire , des péremptions de quatre m ois, qu’il ne cite
que pour comparaison. L ’ordonnance de Roussillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
«
«
a
«
périe, ensorte que nonobstant qiüon ail repris cette instance\
on peut faire juger la péremption............... L ’ordonnance de
Roussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
C ’est un droit public auquel on ne peut déroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s'affaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du 16.c siècle voyaient, dans
1 ordonnance de 1493 , ce que nous 11e voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
B
�£70
u
,
C i° )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein d roit, et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualité dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils, il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
DEUXIÈME
QUESTION.
L e s appel an s , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix ans ?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour lorcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers, qu’ il est CERTAIN que ces cohéritiers avaient
t r e n t e ans UTILES pour réclamer contre ¿o h /é v e n te J a itc par
l'u n d'eux.
Mais y continuent-ils, la question concerne t acquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ven tes, et de ne pas les avoir
contre l'acquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux
dire que les Chouvenc ont élé forcés de r e c o n n a î t r e l ’évidence
du princ ipe.
A u reste, en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�passé, l ’art. 2281 termine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription d e d ix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que '‘ usage est l'interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en laveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après 1 authentique malœ
Jidei qui l’explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malœ
Jid ei possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
1
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem faectam.
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienalarum rerum dom inus, non aliter hune exclu d i n isi per triennalem prescriptionern : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fide possidet, quandb ipse à ma/dJide
possidente hoc accepit. Novell. 119 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l ’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort a tt e s te nt, sans exception , que la prescription de dix ans n’y
est admise que p o u r l’hypothèque, et que le tiers p o s s es s eu r 11e
prescrit que par trente ans.
B a
�Boutaric, page 182, a , sur ce sujet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page 167 annonce la seule prescription de
trente ans comme un principe non contesté. Graverai et Larocheilavin, p. io; Catelan, p. ÎS07, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usueapion de dix ans, que
« Justinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l ’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
5
Furgole , en son traité des testamens, tom.
3 , pag. 4 17, s’ex
plique ainsi : « A u parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l ’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« vin titre, lequel n ’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan, livre 7 , chap. a i ; Lapeyrère , lettre P , n.°
;
5
83
58g ; Bretonier ,
hypothèque, §. i 3 , et la
Montvalon , page i o ; Decormis , tom. 2 , col.
v.° prescription ; M .r M erlin, v.°
maxime est tellement devenue triviale dans les parlemens du*
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix a n s ,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans 1111 parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Doinat y avait réfléchi lui-m êm e, et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le tems des
« prescriptions ne sont que des lois arbitraires, car la nature ne
« fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle difïé« remment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« sc régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. Il y en a où elles ont été
« réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.e question, que la Cour de cassation a
�3*2
'3
(
)
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T o u lo u se , et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons donc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i , en semblable cas , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a lo i, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N .
f
L a tierce opposition des appelons est-elle recevable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il ne suffît
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie néces« saire dans le procès jugé. »
y
Les Chouvenc étaient - ils donc parties nécessaires dans le
procès d ’entre les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’a
gissait-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers. A c t io fam iliœ erciscundœ solis liœredibus com
patit.
Les questions d’un partage sont tellement étrangères à tous
autres, que qnand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en ’partage est-elle , par sa seule définition , exclusive de
toule admission étrangère : A c t io fam iliœ erciscundœ est actio
a v ilis qiuî cohccredes i il T E R s e agunt de com m uai hœreditate
dii>idundd.
Jusque-la un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise
�( h )
cepit à ma/cz Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
011 leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A insi,
dit Rodier, un créancier, un acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u ff. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent le droit d’interjeter appel, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S i emptor de proprietale victus e s t , eo cessa n te, auctor ejus
appellare poterit y item si auctor egerit et rictus s i t , non est
deneganda emptori appellandi fa cilita s. . . . I d que ità con stitulum est in personâ créditons. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur; et quand celui-ci a lui- même interjeté a p p e l, la loi,
toujouis juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès , si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Qui/i etiam si auctor appellauerit , deindà in causai
dejénsionc suspectas visus e st, pennde defensio causa; emptori
committenda est, atquc si ipse appellassel. I j . ead.
L e Code civil s’est conformé ¿1 ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère, après le partage con
sommé', il n’admet les créanc iers qu’à inlcrvcnirà leurs fr a is ,
�y > j(
)
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice d’une opposition par eux formée (art. 882).
II y a plus ; car si , par l’efl’et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envahi tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer, l ’art.
lui répondrait « que chaque
'5
883
« cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement a tous
ce les effets compris en son lut, ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin ont, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties ne'cessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et 11e peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en p artage, de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et 011 n’eu citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tons les
livres, nous 11e puiserons que dans des sources indubitables,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien é*é s:iisie.
i.° M .r Cochin , en ses notes alphabétiques, tom.
dit ; « jugé par arrêt du
5, pag, 627,
3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur, assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
2.0
M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Gonflans était en procès
�\\*
«
«
«
«
«
«
«
avec un seigneur voisin pour mouvance de
. . tuie venait
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l ’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y forma tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pas intervenu : par arrêt du 3 i
mai j 742, il fut déclaré non recevable dans sa tierce opposition. »
Par le z .e arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur appel, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l ’arrêt par son vendeur , qu’en cette
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1760 , il fut déclaré non recevable. »
.° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un a rr êt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f . , le s.r Forestier se fit envoyer en
3
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
3
défaut du janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition, et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art.
5 et
11 du titre 27 de l ’ordon-
35
« nance de 1667, ct
1>er
•*tre
. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur G o d e t, comme créancier de L essa rt, était à cet égird
« son ayant cause. . . . que Lessart a été appelé. . . . q u e Godet,
« en qualité de son ayant cause , n ' a ur a it p û être recevable à
« attaquer ce j u g e m e n t , q u ’a ut a n t qu’il eût élé juslilié que Les
te sart aurait été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C an, ei \ admettant la tierce opposiliondu cit. Godet,
« ont violé l ’art.
5 de
l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chose ju g é e , et ont contrevenu formellement à l ’art. i . cr du
titre
�2>7Y
C *7 )
a titre 35, quï ne permet de rétracter, autrement que par requête
« civile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
a qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
V oilà donc la pleine confirmation de la loi 4 ff. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel,.aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier l'essortj par la requete civile , s îl
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts ne sont dans
l’espèce d’un procès de succession. Solis hœredibus cornpelit.
D eux autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tierces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793 ; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation ? quand ils l’en ont vu sortir ; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, 11’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d etre
condamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
�A "
!
C 18)
encore, d’exiger en règle générale, que tout'cohéritier d6Î sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derecheicher ses droits , cVstà-dirè fût leiiü de connaître les forces de la succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions èt
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues?
•■
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M olin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour?
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudençe
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouveric
à pénétrer, par une voie d’intrusion , dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on a annuité deux testamens : J e rn'y
op p o se; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos»
testainens, vos conttats de mariage, tout ce qui s’est pa^sé dans
votre maison depuis 1735 jusqu’en 1793. Vos cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugée avec eux , et
c’est moi seul qui veux faire r é g le r, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent} dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce système des Chouvcnc, qui cependant est toute la base
du procès a c tu e l, 11e révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ée et remise en litige doit êtro
rejugée.
Théièse Molin s’e'tait pourvue en 1783, contre une renoncià-
�75
C *9 )
tîon de i o i Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à cette durée, à la seule exception de.
3
L’action hypothécaire.
- L e s Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r, ont été séduits,
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l un de
$es articles; jusques là , la Cour d’appel ne s’était pas prononcéef
eton trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oublies.
Mais quand cela serait autrement, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose ju g é e ,
même des questions nées en 1783 , dans un parlement étranger f
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait I4
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mai^
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brusr
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans de§
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marchq
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de/lui, par le pouvoir que lege rcgid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d'après un auteur latin , vaut mieux que cc qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valere loges quee moribus comprobalœ surit,
(¡nam quœ scripto co n sta n t, v ér i té bien plus m a r q u é e encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�\
,
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est p is seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , Justitice habitus
practicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impérative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables. les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
-à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciæ ,
probatis his quæ in oppido, frequenter in eodem controversice
g eh ere, servata surit, causa cognilâ statuit. L . 1. cod. quæ s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant (porte un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ), que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts sem blables, le parlement de Tou« louse a ju g é y etc.» (Sirey , page 809).
2.0
Dans une autre cause, du floréal nn 12, la Cour de cas
sation n dit:« Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre prê
te sens, et 20 ans entre absens ; cependant, d'après la furispru-
5
« dence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêts ,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
« possession immémoriale, et que c'est ainsi q u 'il a entendu la,
« lo i , etc. casse et aimulie, etc. * (Bulletin, n.° 52).
�M
( \
( 21 ) ' 7
3.° Un arrêt du
du même mois a jugé de m êm e, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( S ir e y , p. 267).
■Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.0 elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait.
n’y a donc
11
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité j
ce n’est jamais qu’ une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
I l est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3
- .° Si on suppose qu’elle a approuvé les testamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre une destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m de/uncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a souvent ju gé, et notamment les
a i thermidor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1735 a été expédié par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C était donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r ecu eilli, 11e l’était pas. O r, non videntur qui errant consentire , et la prescription 11e court que du jour de la découverte
de la vérité.
5
.° Thérèse M olin, née en 1733, avait d e u x a n s nu décès de sa
mere , et dix ans au décès de son père en 1743. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans j car elle était née au mois de février
�*
-
(«)f
1.718. L e père levait chargée de r^zV <r/ administrer conjointetementavec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc.
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont,
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle,
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et inère, dont jo u issa it Marie M olin,
,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta->
ble depuis 174.3, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison, Le frère n’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fat traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testamens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.;
•
,
Q r, le parlement de-Toulouse n’a jamais hésité d’admettrea i
pareil cas le. renonçant non visis tiibnlis, à se pourvoir pen-j
dant trente ans. Q u ’on consulte May nard , liv. 2 j chap, 99 et
100^ DoJive , liv. 4 , chap. 16; Catelan, liv...<8 ; Bretonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les auteurs de c i
parlement , ou ceux qui mentionnent sa jurisprudence , on ne
trouvera nulle part q u e .l’art. i
de l ’ordonnance de i539 ait
34
qté jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Pari^, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-teins, comme le parlement de Toulouse a toujours jugé
Les auteurs du tems même de cette ordonnance , notamment
M .r D u v a l, de reùus dubiis , enseignaient qu’il ju’y a contre les
qctions^en nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
le parlement de Paris changea sa jurisprudence?, mais enfin ilia
changea de nouveau après l’ordonuance de 1667 ; et il a inva«
riablement jugé depuis que l’art. 1ÎJ4 de l’qvdonnanee de 1089
ne s ’ap p l i quai t q u’aux actions rescisoires.
Cette jurisprudence constante s’est maintenue jusqu’au Code
civil. On a vu encore, dans les discussions sur ce Code, les ellbrts
des sections réunies de la Coi^r d ’appel de Paris, pom luire muin-
�-b it
■'
• .... . • : .
tenir l ’action de trente a n s , et on n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entré les
Champoinier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en floréal an 5 , à la vérité il changea de .jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait'élé recevable pendant trente ans a se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
« Attendu que l ’art. i i de l ’ordonnance de i g , de'clare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra
it teurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
3
53
•« rendu, et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
.« personne qui administrait ses biens, présente un avantage
« indirect :7
«
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
•« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
« ses intérêts ;
34
« Attendu que l ’art. i
de l ’ordonnance de 1ÎS39 qui restreint
« le.délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres t
« casse et annulle , etc. »
Il est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r 11e mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de Riom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c ’est-àdire, depuis le Code c iv il, et par induction de l ’article 47λ. On
verrait même , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jug^
�( H >
encore que l ’action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse , il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix
a n s , avant le Code civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de P a r is , comme la Cour de casation elle-même.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L ’action de Catherine M olin est-elle ’p rescrite par trente ans ,
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
"
Les Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c iv il, art. 2243 se contente de
3
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. E n fin , L apeyrère , bien loin de vouloir la presci’iption, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfa'ns sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitime ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « idem , en matière départage»;
25
tet il se fonde sur Coquille , en la question
9.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs antres, c’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l ’auraient
trouvée.
•
r
Dolive en fait une question expresse au chap. i du liv.
3
5,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
a l’hérédité, cette prescription ne court pas contre e u x , en cette
« rencontre,
�3
5
% $
( ï )
« rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d éfu n t, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i o et 26 août i
.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap.
;Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, tom. 2, p. i ;
et L ebru n, liv. , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice presci’iraient 1 observa
63
3
636
36
33
tion, si les auteurs ne l’enseignaient pas.
,
L a Cour d’appel vient très-récemment de prononcer, dans
3
un arrêt du i3 ventôse an i , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Veschambe ,
a dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels , qui
ad hœreditatem veniunt ; et comme les portions advenues à
Calherlne Molin par le décès de scs sœurs , se sont accrues à
la-sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le. mort
jd is it le v if y Catherine Molin a été, dès cette époque, proD
�T
.
-
C 26)
.
priétaire d’une quotité plus con sid érable, et n’en a pas plu*
perdu une fraction que la totalité.
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
l e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testament, dit R ic a r d , est un acte dont tonte la valeur
k
est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« fermes. »
E n e l l e t , dans cet acte si im p o r ta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.®
il est dit fa it et récité en la maison de Pierre M alin ; maià rien
ne constate que la lecture ait élé faite à la testatrice.Cependant
la loi l’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a dicté , pour q u ’il soit certaia
que ce sont là ses véritables intentions;
2.° Il n ’e6t fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice
ille
de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 173 5 dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lec« t u r e , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’ il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
M i i s , disent les C h ouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l’ordoninnee de 1735 : cela est vrai.
Mais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« E t en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t mention de la réquisition par eux
�b i> 1 '
7
( 2 ) _
a faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
65
ordonnance de Blois , art. i .
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de i y .
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14 ,
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur A rto is ,
35
art. 74 ).
On cile souvent R i c a r d , comme ayant rapporté un arrêt de i a
validant un testament où i l était dit : « Lequel n’a pu signer ,
65
« interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence^que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
5
Aussi Ricard , n.° i 26 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé, ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaii’e , dit Ricard , au n.° i
, ne doit
« contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
568
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart. un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé uu
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n'avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce eticjuis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal , et
le a pluviôse an 7 , entre les héritiers V a c h i e r , d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur déD 2
3
�î
( 28 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas change', et la cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
Les Chouvenc se sont imaginé que les ordonnances d’Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité Dolive dit que de son tems on n’était pas rigou
reux sur les signatures de testamens , et que môme on n’exan iuait pas si le testateur avait signé ; mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. Furgole dit au contraire
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit p u b lic , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
la preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Chouvenc
se sont efforcés de persuader qu'ille veut dire illitéré , puis
illitéré veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours ime autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i
défend aux notaires d user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pus à l’essence de l’acte , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
685
Yinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, qui sont testatio m en tis, il faut écrire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�9
.
( a )
viations. Cœlerum litteris iisque usilatis et legîbilibus scribendum esse p la c u it, non sig n is, obscurisve n o tis, I. 6 , g. ult.
de bon. poss.
L e mot illité r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’Académie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n’y a pas dans le testament illité r é , il y a M e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot bizarre, une déclaration de la testatrice, qu’elle n’a
pu ou su signer. Allons plus loin même , le mot illitéré ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I ON .
Q u elle est la nature de la substitution,du testament de iy35 ?
a-t-elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’eíFet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par une expression inlidelle de l ’expédition, qu’ils a vaient d’abord
produite, de ce testament.
Les héritiers institués, disaient ils, étaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de rendre la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution , dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
sub stitu tu s su b stituto est substitutus in stitu to , Marie M o l i n a
recueilli l’hérédité directement des doux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l ’extrait vidimé du testament de
�3
( o )
Ï735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p osé, voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
. L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus, qui a fait un traité sur les fîdéicornmis, le définit
ainsi. Fiduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
aherius gratid institutus , eidem restituere hereditatem ,p o st
diem certain vel incertain , rogatus proponitur.
c< Ces substitutions, disent Henrys et Brelonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é c rit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l ’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerentur.........
« Quoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
« liberté, et n’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res« titulion. . . .
« O11 doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et ne l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
a l’a instituée que par In nécessité de leur bas Age, non ut filiis
jninoribus obesset , sed poilus ut eis consuleret. » ( henr. t.
X.er } p.
, t. , p. 69 ).
736 3
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du liduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�& (h \
( 8 0
1.° Catherine Ferrapie avait tin fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2.° Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédilé ù son
fils, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d’aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grévé de fidéicommis a le droit de retenir la quarte
§.5
trébellianique ( 1. i . er
, ad treb. ) ;
°. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
3
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut pa\entibus
obsequerentur. A cela p rès, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eut été vivante , sed potius ut eis consuleret.
A insi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-mèine de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u 'il vînt à mourir sans
pouvoir disposer, ou sans avoir recu eilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non exliterit hceres J iliu s ,
aut si impubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pis mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de dro't écrit le mineur avait testamenti fa ctio n cm
aussilot qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , ne
cil 1731 , eta;t pu ère en *74^ > et il n ’est décédé qu’en * ®Si ce moyeu n’était pas péremptoire , on opposerait aux
74
/
�52
C
)
Chonvcnc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l’enseignent les institutes , is subslituere potest liberis
impuberibus q u o s i n p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus cetatis sint
in quâ ip si testam entum facere non possunt.
Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
encore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règle substilulus substituto n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad 1. 41. de vul. et pup. sub.)
Ainsi le testament de 1735 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses soeurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son chef recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e teslament de 1743 e st-il n u l ?
s
Il
est évidemment-nul, mais cette nullité ne change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; el on ne s’en occupe
que parce qu’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin père a institué son fils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses eufans héritiers, ou les
exhe'réder nominativement, aut hceredem in stitu â t, aut exhœ. redem nominatim fa c ia t , alioquin inutiliter testabitur.
Cette disposition a été répétée dans l’art. o de l’ordonnance
de 1735 , qui dit que, dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers, au moins eu ce que
le leslateur leur donnera.
5
Mais l’héritier, institué par le testament de 1743 , étant décédé
ab in testa t, il importe peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
�33
C
)
^
ou ju r e s u o , à la succession de leur père, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
Les Chouvenc terminent l e u r mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession M olin; 2.0 qu’on accorde
à Marie Molin leur venderesse , les pi*élèvemens qurelle aurait a
faire, notamment trois qu’ils indiquent ; B.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait droit , en ordonnant que tous les bienS seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugement dont est appel.
A lo r s , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore a cette époque qu’ils au„ ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lie u , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans celte cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
Joule de papiers de la famille Molin , qu’ ils ne^pouvaient tenir
que*de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur celle famille avec
ta ni de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
st remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en cornmunicat ion
E
�34
(
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siége principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation- des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d’un partage, avec l’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et reformation.
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E ? avoué .
)WA^V'^VW 1 V W V \,W W \W \A ^ ,V W V \'W W ^
A RIOM,
De l ’imprimerie du Palais, chez J . C . S A L L E S . ( A n X I I I ) .
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Parlement de Toulouse
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Table Godemel : Renonciation : 8. la fille a-t-elle dix ans ou trente ans pour se pourvoir contre une renonciation surprise en minorité par des protuteurs, dans l’ignorance de ses droits et sans être informée que les testaments de ses père et mère étaient nuls ? Substitution : 3. substitution fidéicommissaire ou fiduciaire. substitution pupillaire. - validité. - transmission. Testament : 6. un testament sans signature ou déclaration négative du testateur est-il valable ? que résulte-t-il, pour ou contre sa validité, de ce qu’il est antérieur à l’ordonnance de 1735 ? Tierce-opposition : 3. des tiers, en qualité d’acquéreurs d’un cohéritier, sont-ils recevables à former tierce-opposition à des jugements en dernier ressort, rendus sur appointement, entre leur vendeur et ses cohéritiers, pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession commune ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1778-An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1611
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_G1610
BCU_Factums_G1612
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Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Rights
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Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
Parlement de Toulouse
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
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631c96a4009084c19508b208c739610f
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P
R
É
C
I
S
P O U R
P i e r r e ES P A R V I E R D ’ E S T R E S S E S , appelans;
J o s e p h
et
C O N T R E
J ea n -H ugu e s
L
SAIN T-PO L ,
in tim é .
E sieur Saint-P ol veut v e n ir sous deu x titres incom
patibles à la succession de ses bisaïeux.
Son aïeule é toit
dotée par e u x , et il a demandé sa dot après leur m ort.
V i n g t - s e p t ans après l’avo ir o b te n u e , sans alléguer
aucune vo ie de nullité ni de rescision, il a intenté un
procès p ou r demander le partage de ces mêmes suc
cessions.
P o u r l’intelligence de cette demande et des diverses
contestations qui y ont pris leu r s o u r c e , il faut a vo ir
A
�( O
sous les j e u x le tableau g énéalogique des familles Esparvier
et Saint-Pol.
François Lavolpilière,
Françoise de Volonzac,
eurent huit enfans.
r
laris.
Anne Lavolpilière eut deux maris.
2°. François Esparvier de Lodière.
Pierre Bonafos.
François.
I
Anne.
Françoise,
religieuse.
Marc-Antoine
Esparvier.
|
Joseph
Esparvier.
Charles.
Françoise,
Gabriel
Saint-Pol.
I l
I I
I I .1
Quatre de ces enfans sont représentés
par Joseph Esparvier.
Jeanne,
Fr.de Touret.
P ie rre
Esparvier.
Appelons.
Jean-Hugues.
Intim é.
Françoise E sparvier fut mariée au sieur G ab riel SaintP o l le 24 n o vem bre 1718 .
Ses p ère et m ère lui cons
tituèrent en dot 4000 francs , dont m oitié p ou r biens
paternels. L e contrat porte quittance de 1700 francs, dont
700 francs en immeubles : il fut pris des termes p ou r le
surplus.
A n n e L a v o lp iliè re avoit fait un testament le 17 mai
1 7 2 0 , par lequel elle instituoit p our héritier M a rcA n to in e E s p a rv ie r, son iils du second lit. Ce testament
ne se trouve plus q u ’au répertoire du notaire; on ignore
i\ quoi attribuer sa suppression, à moins que l’éclaircis
sement n’en vienne des faits ci-apres.
M a rc -A n to in e Esparvier alla en Espagne, et y contracta
mariage sans l’agréincnt de son p ère; ce qui. lui valut
une haine constant# > q llc François E sparvier conserva
contre lui jusqu’au toinbcau.
�( 3 )
A n n e L a v o l p i l i è r e , sa m è r e , vo u lu t faire nn second
testament la veille de sa m ort : elle fit appeler le sieur
Costerousse, v ic a ir e , et des tém oins, le n ayril 1735*,
et elle dicta un testament par l e q u e l , après quelques
legs et augmentation de dot à ses enfans p u în é s , elle
instituoit p ou r ses héritiers universels Hugues B o n a fo s,
son fils aîné du prem ier lit , et M arc-A n toin e E sparvier,
son fils aîné du second lit.
M ais lorsque le vicaire, rédacteur de ce testam ent, en
cominençoit la l e c t u r e , le sieur François E s p a r v ie r ,
instruit de ce qui se passoit , entra brusquem ent dans
la cham bre de sa fem m e , arracha le testament des mains
du vicaire, et en empêcha ainsi la clôture.
H ugues Bonafos seul rendit p la in te , et un grand
nom bre de témoins furent entendus ; ils déposèrent ce
qui vient d’être dit.
A p r è s décret et in terrogatoire, le procès fut civilisé.
O n mit en cause toutes les parties nommées au testa
ment et intéressées à ce q u ’il fût m ain ten u , c’est-à-dire,
A n n e B o n a fo s, fille à F ran çois, Charles E sparvier, M arcA n to in e E s p a r v ie r , P ierre et Joseph la V o lp iliè r e , frères
de la testatrice.
C e procès fut considérable , et défendu avec chaleur.
François E sparvier disputoit même üi M a rc -A n to in e , son
iils, le droit de succéder à sa mère à aucun titre, com m e
m arié hors de F r a n c e , et ayant perdu la qualité do
citoyen français, suivant une ordonnance de L ou is X I V .
E n fin , le 7 mars 1 7 3 6 , intervint sentence sur procé
dures respectives , q u i , « ayant égard h ce qui résulte
« des dépositions des témoins ouïs dans les inform aA
a
�( 4 )
'tions des 14 et 17 mai 173 5 , condamne François
Espai'vier de L o d iè re à se désister de l’indue possession
et jouissance par lu i faite des biens meubles et im
meubles dépendans de la succession de ladite A n n e de
L a v o l p i l iè r e , son épouse , et en délaisser la libre
jouissance audit Jean-H ugu es B onafos, sieur D alozier,
et audit M a rc -A n to in e E s p a r v ie r , sieur de B la zè re ,
fils de ladite dame, e n q u a l i t é D E s e s h é r i t i e r s ,
avec restitution des fru its, suivant l’estimation qui en
sera faite par e x p erts, sauf à faire distraction sur la
totalité des biens de ladite succession, de la légitim e
telle que de d ro it, qui doit appartenir audit Charles
E s p a r v ie r , autre fils dudit François E sparvier, et de
ladite défunte A n n e de L a v o lp iliè r e ; et attendu la
voie de fait pratiquée p ar ledit François Esparvier \
et l’enlèvem ent par lui fait du testament de ladite A n n e
de L a v o lp iliè r e ,
son
ép o u se ,
le déclare décliu et
p riv é du legs à lui fait par ledit testament ; et avant
faire droit sur les conclusions prises par lesdits P ierre
et Joseph de L a v o lp iliè re o n cles, de mêm e que sur la
part et portion prétendue par ledit François Esparvier,
sieur de L o d iè r e , en conséquence du tra n sp ort,
cession ou subrogation q u ’il prétend lui avoir été
consentie par François de L a v o lp iliè r e , il est ordonné
que les parties contesteront plus a m p le m e n t, dépens
quant à ce réservés : François Esparvier est condamné
en tous les autres dépens. »
François E s p a rv ie rd e L o d iè re m o u ru t le 7 fé v r ie r i7 3 8 ;
et pendant le procès ci-dessus , il avoit fuit un testament
olographe, ab irato ; exprès pour déclarer q u ’il déshé-
�C 5 )
ritoit M a rc -A n to in e E s p a rv ie r, son fils; il institua p o u r
héritier universel Charles E s p a r v ie r , son fils cadet.
Celui-ci se porta héritier bén éficiaire, et fit inventaire
le 28 avril 1738.
Charles E sparvier ne tarda pas à décéder ; et p ou r
dédom m ager son frère de l ’exhérédation du père com
m un , i l l’institua héritier universel, par testament du 18
m ai 1 7 3 8 , et fit à Françoise E sp a rv ier, sa s œ u r; un legs
<le 300 francs.
Com m e les biens de Charles E sparvier p e se compor
soient que de la succession de F ra n ç o is, M a rc -A n to in e
E sparvier imita son f r è r e , en ne se portant q u ’héritier
bénéficiaire ; en conséquence il fit un inventaire le io s e p r
le m b re 1 7 3 8 , consistant au récolem ent du p ré c é d e n t,
et auquel il appela notamment le sieur S a i n t - P o l ,
com m e créancier.
A p r è s la m ort de François E sparvier et A n n e L a •volpilière, le sieur Sain t-P ol auroit eu le droit certaine
m ent de demander le partage de leu r succession ; mais
il avoit aussi la faculté de s’en tenir à la dot constituée
par le contrat de m ariage de 1718.
C ’étoit une option à faire qui décidoit de la qualité
d ’héritier ou créancier; l ’une com m e l ’autre ne perm ettoit plus de varier.
Gabr ie l S a i n t- P o l , m or t en 1738 , avoit institué sa
sœur héritière fiduciaire. E n cette qualité, elle assigna
M a r c - A n t o i n e Esparvier en qualité d ’héritier de ses père
et m è r e , par exploit du 28 juin 1 7 3 8 , po u r payer la
dot constituée à la dame S ain t -P o l, en 1718.
J e a n - Gabriel S a i n t - P o l , fils et héritier de Françoise,
�( 6 )
E s p a r v ie r , loin de ré p ro u v e r ladite d em a n d e, la reprit
lu i-m ê m e , en 1748 , contre M a r c - A n t o i n e E sparvier ;
il conclut au p a yem en t, i° . de 2300 francs p ou r le
reste à payer de la dot de son aïeule ; 20. de 300 fr.
p o u r le legs à elle fait par le testament de Charles Espar
v i e r ; 3 0. au payement d ’ une provision de i 5oo francs,
sauf, a jo u ta -t-il, réserve de demander le partage.
L e 2 septembre 1749 il obtint une sentence qui con
damne M a rc - A n to in e E sparvier à lui payer lesdites
sommes de 2300 francs et 300 fra n cs, et qui lui adjuge
une provision dq 5oo francs.
M a r c -A n to in e en avoit interjeté a p p e l, com m e ne
se croyant pas tenu à payer les 2000 francs constitués par
François E sp a rv ier, dont il n’étoit qu ’ héritier bénéfi
ciaire , du chef de Charles ; mais il se départit de cet /
appel au m oyen du traité ci-après.
*
1
• L e 9 décem bre 1 7 4 9 , les parties transigèrent. M arcA n to in e E sparvier paya au sieur Saint-Pol les 5oo fr.
de p ro v is io n ; et p o u r le payement du surplus de la dot
de Françoise E sp a rv ie r, m ère du sieur S a in t-P o l, M a rc A n to in e E sparvier lui délaissa des fonds à dire d’experts,
ou moyen de quoi les parties se tinrent respectivement
quittes; et le sieur S a i n t - P o l se réserva tous autres
droits que ceux de la sentence , exceptions contraires
demeurant réservées au sieur Esparvier.
P a r une contre - lettre du même jour il fut con
ven u que le sieur Saint-P ol rendroit lesdits héritages au
s i e u r E s p a r v ie r , m oyennant le payement de la somme
u lui d u e , suivant ladite sentence.
< M a rc-A n to in e
E sp arvier m ourut en
1761 , après
�C7 )
a vo ir institué
bénéficiaire.
J o s e p h , qui se porta encore héritier
L e 12 avril 1.765 , trente ans et un jo u r après le
décès d ’A n n e L a v o lp iliè r e , le sieur S a i n t - P o l assigna
Josep h E sparvier en partage, 1°. de la succession de
ladite L a v o lp iliè i’e, son aïeule; 20. de celle de François
E s p a r v ie r , son aïeul ; 3 0. de la succession de Charles
E sp a rv ie r, son oncle.
E n 176 8 , il obtint une sentence par d é f a u t , qui adjuge
ses conclusions.
L e sieur Saint-Pol avoit vendu à un nom m é Coste
rousse , en i 759 et 1 7 6 1 , un p ré à lui délaissé par le
traité de 1 7 4 9 ; mais il avoit eu la précaution de stipuler
aussi une faculté de ra c h a t, p o u r le reprendre quand
le sieur Esparvier le demanderoit.
Le
I er.
juillet 1 7 7 8 , Joseph E sparvier demanda en
effet au sieur S a in t-P o l l ’exécution de la c o n tre-lettre
du 9 décem bre 1 7 4 9 , et le désistement de l ’im m euble
délaissé par le traité du môme jour. P o u r éviter un
circuit d’actio n s, il assigna Costerousse en rapport.
L e 6 septembre 1 7 7 9 , „il intervint une sentence q u i
condamne Costerousse à se désister, à la charge par le
sieur Esparvier d ’acquitter au sieur Saint-Pol les sommes
à lui dues en vertu de la sentence du 2 septembre 1 7 4 9 ,
en payement
desquelles ledit
p ré lui avoit
été
d é
laisse; condamne S a i n t - P o l à la restitution des fruits
perçus pendant sa jouissance et celle de Costerousse, à
dire d’expert 5 ordonne enfin q u ’il sera fait compte et
�.
.
.
.
.
(
8 '}
compensation desdites sommes, et in térêts, avec les jouis
sances , jusqu’à due concurrence.
C e désistement à eu lie u ; la sentence de 1779 a été
e x é c u t é e , et Joseph E sparvier s’est remis en possession
du p ré délaissé pignorativem ent en 1749.
L o r s de la demande de 1 7 7 8 , le sieur Esparvier avoit
pris un autre c h e f de conclusions, fondé sur un acte
étranger a u x successions jusqu’alors en litige.
Françoise E sparvier et G ab riel Saint-Pol a voient eu
Jean -G abrlël et H ugues Saint-Pol. Celui-ci ayant passé
au service d’Espagne avant la m ort de ses père et m è re ,
Jüan-G abriël S a in t-P o l rég it tous les biens.
Hugues S a i n t - P o l, revenù en F ra n c e, fit à Joseph
E sparvier une cession de droits, sous seing p r i v é , en 1760 ;
puis en 1761 il en fit une seconde à son f r è r e , par acte
notarié.
Joseph E sp a rv ier, inform é de ce stellionat, s’en plaignit
à IIu gues S a in t-P o l, qui se repentit sans doute de l ’avoir
t r o m p é , et offrit de l’en dédom m ager autant qu’il étoit
1
en lui.
E n e ffe t , il rem it à Joseph Espnrvier les billets que
lui avoit faits J e a n -G a b r ië l S a i n t - P o l , son frè re , p ou r
p r ix de 6a cession de 1761 ; il sollicita des lettres de
rescision contre cette m êm e cession, et les rem it aussi
au sieur E s p a rv ie r; enfin il ratifia à son p ro fit, par acto
notarié du z 5 avril 1 7 6 9 ,5 a cession de 1 7 6 0 , et lui céda
tous ses droits rescindans et rescisoires contre celle de 1761,
C ’est en vertu de ce dernier acte que Joseph Esparv i c r , par la demande ci-dessus, du icr, juillet 1 7 7 8 ,5 e
subrogea
�( 9 ° . ,
subrogea à la demande en nullité et rescision de Hugues
S a in t - P o l, conclut à la nullité de la cession du 9 janvier
1 7 6 1 , et au partage des successions de G ab riel SaintP o l et Françoise Esparvier', avec toute reddition de
compte et restitution de jouissances.
L e procès fut appointé en droit.
L e sieur Saint-P ol donna une écriture le 27 février
178 3 , p ou r persister dans la demande en partage q u ’ il
avoit form ée en 1 7 6 5 , des'trois successions de François
Esparvier de L o d iè r e , A n n e L a v o lp iliè r e , et Charles
E sparvier-d’Estresses ; il dit q u ’il n ’existoit aucun testa
ment d’A n n e L a v o lp iliè r e , et que quand les informa
tions de 1735 en tiendroient lie u , le testament projeté
seroit nul p ou r n’avoir pas été lu à la testatrice et aux
témoins ; il a r g u a aussi de nullité le testament de Charles
E sp a rv ie r, du 18 mai 1738 , com m e n ’ayant pas été écrit
par le notaire ; enfin il soutint n’avoir point a p p ro u v é
la destination de légitim e faite à Françoise E s p a rv ie r,
par son contrat de mariage de 1 7 1 8 , sons prétexte des
réserves insérées dans sa demande de 1748^ 20. relati
vem ent à la cession d’Hugues S a i n t - P o l , il prétendit
que celle de 1769 étoit un s t e l l i o n a t , et qu’ il n’y avoit
pas lieu à rescision contre la cession h lui consentie
en 1 7 6 1 , parce que Hugues Saint-Pol avoit approuvé
les testamens de ses père et mère.
Dans les écritures en rép o n se, Joseph Esparvier dé
montra que le sieur Saint-Pol avoit parfaitement connu
les informations de 1 7 3 5 , et la sentence de 17 3 6 , lors
qu’ il avoit traité en 1 7 4 9 , et lorsqu’il avoit réclamé la
dot de sa m è re , au lieu de demander le partage.
33
�( 1° )
A l o r s , et par requête du n décem bre 1 7 8 3 , le sieur
Saiut-Pol forma tierce opposition à la sentence du 7
mars 1736.
Il demanda en outre la vérification d’écriture du tes
tament du 18 mai 1 7 3 8 , p our établir que la minute
n’ étoit point écrite de la main du notaire; il demanda
la même vérification du testament de Françoise Espar
v ie r , sa m è re , de 1 7 4 7 , p our établir que celui-ci étoit
écrit de la main du notaire.
Cette double vérification demandée par l ’adversaire fut
ordonnée par sentence du 28 février 1784.
L es choses restèrent en cet état jusqu’au 7 prairial
an 6 , que Joseph Esparvier assigna en reprise.
L e 17 floréal an 7 , le sieur Saint-Pol cita aussi en
reprise des demandes en partage par lui form ées; mais
paroissant revenir ù des prétentions plus justes, il de
manda subsidiairement l ’exécution de la sentence du 2
septembre 1 7 4 9 , portant payement de la dot, et une
provision de 3000 franps, attendu, d it-il, q u ’au moyen
de l’éviction de Costerousse il étoit redevenu créancier du
m ontant des condamnations de ladite sentence.
M ais cette m odération ne fut pas de longue d u r é e ,
et bientôt le sieur S a i n t - P o l
prétendit mêm e s’être
trompé en ne demandant q u ’ un quart de la succession
de François E s p a r v ie r , son a ïe u l, parce q u e , d i t - i l ,
M a r c -A n to in e ayant été déshérité par le testament dudit
F ra n ço is, et le testament de Charles Esparvier se trou
vant n u l, il en i*ésultoit que la succession dudiL Fi’ançois
E sparvier devoit se partager par é g a lité , et par tiers,
entre C h a rle s, Jeanne
et
Françoise E s p a r v ie r , sans
�( 11 )
com pter M nrc - A n to in e qui n ’avoit rien à recevoir.
T e l étoit l ’état de la procédure et 'des prétentions
respectives lors du décès de J ea n -G a b riël S a in t-P o l,
arrivé en l ’an 9.
L es demandes fui’ent reprises le 20 th erm idor an 10.
11 fut question de satisfaire à la sentence de 1 7 8 4 , et
de faire procéder à la vérification requise par Jean G abriël S a in t - P o l; mais son fils notifia, le 1 5 ventôse
an 1 2 , qu ’ayant pris communication des deu x testamens
de 1738 et 1 7 4 7 , il i-econnoissoit que son père avoit
erré sur tous les deux : que le testament de Charles
E sparvier étoit écrit de la main du notaire recevant ;
mais qu ’au contraire celui de Françoise E sparvier étoit
d’ une main é tra n g è re , d ’où il s’ensuivoit q u ’il étoit
inutile de faire ladite vérification.
' P a r requête du 13 messidor an 12 , le sieur Snint-Pol
changea absolument toutes ses conclusions précédentes.
N e pouvant plus com pter sur un tiers , ni mêm e sur
un quart de la succession de François E sp a rv ie r, sonbisaïeul, il vit bien qu’ une légitim e de rigueur seroit
fort inférieui’e aux 2000 francs de dot constitués par
le contrat de 1 7 1 8 , du ch ef dudit François E sp a rv ie r;
en conséquence il imagioa qu ’il p ou vo it reven ir u n e
seconde fois sur ses pas, et déclarer qu ’il se contentoit
des 2000 francs donnés de cet estoc , sans se départir'
néanmoins du partage de la succession d’A n n e de L a v o lpilière ; en conséquence il con clu t, i ° . au partage desi
biens d’A n n e L a vo lp ilière ; 20. à être mis hors de cou r
sur les autres demandes en p artage, et à ce que Josep h
E sparvier fût condamné ù lu i payer a o o e f francs pour.
B 2
�( 12 )
la dot constituée par François E sp a rv ie r; 30. à lui payer
5 o francs p ou r le legs fait à la dame S a in t-P o l, par ledit
François E sp a rv ie r, par son testament du 3 août 173^»
4°. à lui payer 300 francs p ou r le legs fait à ladite dame
S a in t - P o l, par Charles E sp a rv ie r, suivant son testament
du 18 mai 1738.
Cette variation continuelle de conclusions et de m oyens,
et ce retour p o u r moitié à la sentence du 2 septembre 1749*
ne de vo ien t se r v ir, ce sem ble, qu ’à ramener les choses à
leu r prem ier p o in t; car cette sentence ne p ou vo it pas
être en partie chose ju g é e , et en partie chose inutile,
vis-à-vis celui-là même qui l’avoit sollicitée. Cependant
la cause ayant été plaidée au tribunal civ il de Saint-Flour,
le sieur Saint-Pol réussit dans tous les points.
L e jugement dont est ap pel, du 21 mars 1807, a besoin
d’être connu dans ses motifs , dont le grand nom bre est
une p reu ve assez claire de la peine q u ’ont prise les pre
miers juges p ou r donner quelque couleur à leur décision,
à force de raisonnemens.
C o n s id é r a n t q u e la p r e u v e d e la s u p p r e s s io n <Tun te s ta m e n t p e u t ê tr e fa ite
p a r t é m o in s , p a r c e
que c ’ e st u n p u r f a i t , m ê m e u n fa it q u i t ie n t d e la nature
du c r i m e , d o n t la p r e u v e n e p e u t ê t r e fa ite c o m m u n é m e n t q u e p a r té m o in s ;
Considérant qu’une preuve de ce genre doit être faite avec toutes les parties
Intéressées, pour pouvoir leur être légalement opposée ; qu’ainsi si celui qui
demande à faire cette preuve n’a d autre objet que d obtenir des dommagesintérêts contre l’auteur de la suppression du testament, et de le faire priver
de l’avantage que ce testament contenoit à son profit, il suffit qu’elle soit faite
contradictoirement; mais que si elle a également pour objet de faire remplacer
le testament supprimé, par la déposition des témoins, elle doit être faite avec
tous les héritiers présomptifs du testateur;
Considérant que ces principes ont été même reconnus dans l’instance, puisque
le sieur Dalozier, un des héritiers institués par le testament enlevé, appela dan*
la cause terminée par la sçütcnçc de 176 6 , non-seulement les enfans du pre-
�( i3 )
mier lit ¿ ’Anne de Lavolpilière, testatrice, mais encore 'Charles Esparvier-d’Estresses, un des enfans du second lit; d’où il suit que conséquemment au prin
cipe reconnu, il eût dû également appeler en cause, et la dame de T o u rret,
et la dame de Saint-Pol, comme héritiers présomptifs de ladite Anne de LavoJpilière, leur mère;
Considérant, sous ce rapport, que la dame de Saint-Pol n’ayant pas été
partie dans la sentence de 17 6 6 , eût été recevable à y form er tierce oppo
sition; que l’information convertie en enquête ne faisant pas foi à son égard,'
elle eût pu reprocher les témoins, contre-enquêter, demander même une nou
velle enquête; q u e cep end ant le s circon stan ces et les tem ps écoulés d ep u is
exig en t qu'aujourd'hui on ajou te f o i à la d ép o sition d es tém o in s, dès qu’à
raison de leurs dires il n’ est plus possible de les faire entendre de nouveau ;
Considérant que si la dame de Saint-Pol eût été recevable à demander tierce
opposition à la sentence de 1756, ses héritiers ont eu et ont incontestablement
le même d roit; qu’il ne peut résulter contre eux aucune fin de non-recevoir,
de ce que le sieur de Lodière , père de la dame de Saint-Pol, étoit partie
dans la sentence , soit que dans l’état a c tu e l de l’instance le sieur de SaintPol ne procède pas comme son h éritier, et s’en tient à la destination de
légitime faite à la dame de S a in t-P o l, sa fille , soit parce que la présence du
sieur de Lodière dans l’instance terminée par la sentence de 173 6 , n’empèchoit pas que la dame de Saint-Pol devoit y être appelée, celle-ci devant
l ’être comme héritière présomptive d’Anne de Lavolpilière , et le sieur de
Lodière l’ayant été pour les dommages et intérêts auxquels l’exposoit la voie
de fait par lui commise;
Considérant que si le sieur de Sain t-P ol est recevable à former tierce
opposition à la sentence de 17 3 6 , cette opposition peut être au fond bien
ou mal fon d ée, suivant que les dispositions testamentaires de la dame do
Lavolpilière, suppléées p a rla déposition des t é m o i n s , seront ou non jugées
valides et régulières;
Considérant qu’à cet égard il est juste de distinguer les formalités inobservées par le fait de l’enlèvement et suppression du testament , de celles
qui proviendroient du fait de la testatrice, ou de l’officier public chargé de
la rédaction du testament, et qui se trouveroient constatées par la déposition
des témoins; que s’il n’est pas juste que les héritiers institués souffrissent du
fait d’autrui et de l’inobservation de quelques formalités empêchées par l’en
lèvement du testament, il ne seroit pas juste non plus qu’ils se fissent un titre
pour déclarer valide un testament qui, avec l’accomplissement des formalités
empêchées, se trouveroit nul d’ailleurs par d’autres vices indépendans de la
voie de fait commise ;
Considérant qu’avant d’examiner si les dispositions testamentaires constatées
�( 14 )
par la déposition des tém oins, sont ou non valides et régulières sous' le rapport
précédemment envisagé, il convient d’examiner préalablement s i, comme le
prétendent les sieurs de Píiulhine , le sieur de Saint-Pol ou ses auteurs ont
approuvé et acquiescé á ces mômes dispositions ;
Considérant, quant à ce qu’on ne peut approuver ce qu ’on ne connoît
pas, qu’à l’époque de la sentence du a septembre 174 9, et du traité du 9
décembre de la même année, la sentence de iySG n’avoit pas été notifiée au
sieur de S a in t-P o l; qu’elle ne le fut qu’en 1779, long-tem ps après la de
mande en partage formée par le sieur de Saint-Pol ; que lors des sentences et
traité de 1749, il ne s’agissoit point d’une destination portée par le testament
d’Anne de Lavolpilière, mais de la constitution de dot faite à la dame de St.P ol, par son contrat de m ariage; qu’en réclamant le payement de cette dot,
le sieur de Saint-Pol ne donna point au sieur de Paulhine la qualité d’héritier
testamentaire de sa mère , mais la simple qualité d'h éritier et biens tenant d e
sa su ccession ; que lorsque le sieur de Paulhinc-Esparvier prétendit que la
qualité d’héritier testamentaire a lui attribuée par sentence , dont il ne donna
ni date ni copie, étoit suspendue par la voie de l’appel qu’il dit avoir in
terjeté de cette sentence, le sieur de Suint-Pol se restreignit à suivre l’effet
de la demande contre ledit de Paulhine, en la seule qualité de biens tenans
de sa succession ;
Q u’à la vérité tous le s droits du sieu r d e S a in t-P o l étant ouverts p a r le
d ècès d es père e t mère de la dame de Saint-Pol, le sieur de Paulhine eût pu
repousser sa demande, en le forçant à prendre qualité, à se dire et porter héri
tier, ou à renoncer à cette qualité, pour s’en tenir à la destination et constitution
dotale, dont le payement étoit réclam é; mais q u e , au lieu de cela, le sieur
de Paulhine, défendant à la demande par d’autres m oyens, fu t constamment
averti que le sieur de Saint-Pol n entendoit approuver aucunes dispositions
testamentaires , puisqu’il se fit constamment des reserves de se pourvoir en
partage de la succession de la dame de Lavolpilière ;
Considérant enfin que ces réserves expresses consignées dans l’acte de reprise
au g re ffe , du 6 décembre 1748» dans la requête du même jour, dans celle
du i*r. février 1749 > dans la signification de la sentence du 2 septembre
17/ff) , et encore i n d i r e c t e m e n t , dans le traite du g décembre de la mémo
année, excluent toute idée d’approbation de la part dudit sieur de Saint-Pol, d’où
il s’ensuit qu’il est r c c c v a b l c à proposer et faire valoir les nullités dont
peuvent ótre viciées les dispositions testamentaires ;
Considérant à cet égard que sans examiner si avant l’ordonnance de 1 7^5 ,
l e testament devoit ótre dicté et écrit en présence des'témoins, comme sembla
l’exiger l’arrét rapporté par H eiirys, rendu en forme de règlem ent, contre
le* notaires du F o rez, ou s’il suffisoit que les témoins fussent présens, pour
�( i5 )
tm'iir la lecture du testament, en présence du testateur, il est au moins certain
q u e, dans ce dernier cas, le testateur devoit, en présence des tém oins, dé
clarer que le testament lu étoit sa dernière vo lon té; qù’il est constant que
cette déclaration de la dame de Lavolpilière n’est attestée par aucun tém oin,
si ce n’est par le vicaire Costerousse, qui ne dit pas encore qu’elle ait été
faite après l’ expulsion et le départ des témoins; qu’il est également constant
qu’elle ne peut ê t r é suppléée par la réquisition faite par e lle au vicaire Coste
rousse, de faire lecture du testament; que cette déclaration devoit être re
nouvelée après la le cL u re , o u a u moins , dans l’espèce , a u moment où le
testament fut enlevé des mains du vicaire, comme ce dernier le donne à’
entendre dans sa déposition ;
C o n s i d é r a n t enfin que la déclaration du vicaire ne suffit pas pour constater
l’observation de cette essentielle form altié, qu’il faut encore celle de tous
les témoins ;
Considérant que ce vice n’est pas le seul dont fussent infectées les dispo
sitions de la dame de Lavolpilière ; qu’elles l’étoicnt encore du vice de prétérition, en çe que la testratrice n’avoit pas rappelé les dames de Tourret et
de Saint-Pol, ses filles; que la déposition du vicaire à cet égard est encore
contraire à la déposition uniforme de tous les autres tém oins, qui auroient
aussi bien dû retenir les legs faits aux dames de Tou rret et de Saint-Pol»,
que tous les autres legs qu ils mentionnent dans leurs dépositions; qu’au surplus y
d’après même la déposition du vicaire , le legs fait aux dames de Tourret et
de Saint - P o l, ne l’auroit pas été à titre d’institution d’héritier , à la différence
du legs fait au chevalier d’Estresses, également rappelé et par le vicaire et par,
tous les témoins ;
C o n s i d é r a n t que cette prétérition eût di\ suffire et suffit'encore pour faire
annuller les dispositions de la dame de Lavolpilière ; que dès-lors les sieurs de
Paulhine et Dalozier ont été mal à propos c o n f i r m a s ses héritiers par la
sentence de 17 3 6 , et qu’ en recevant le s i e u r de S ain t-P o l tiers-opposant
à ladite sentence, il y a lieu d’ordonner à son profit le partage de la suc
cession, comme ouverte ub intestat.
■E n ce qui touche le payement de la somme de 2000 francs pour la légi
time paternelle de Françoise Esparvier, aïeule du sieur de Saint-Pol, et du
legs de 5o francs à elle fait par le testament du sieur de Lodièrc ;
Considérant qu’outre que le sieur de Paulhine ni le sieur Esparvier do
Blazèdes n e se sont dans aucun temps légalement pourvus contre le te s ta m e n t
du sieur d e Lodière, d u 3 août 1735, ils s e r o ie n t non recevalles, comme l’eût
¿té le sieur d e Blazèdes, leur auteur, à l ’a tta q u e r de n u llit é , ledit d e Blazèdea
¿tant héritier pur e t simple d u sieur E s p a r v ic r - d ’ E s tr e s s c s , son fr è r e ; que
lui-méme avoit a p r o u v é le testament; quoiqu’il eût déclaré ne vouloir accepter1
�(i6)
l’hérédité que sous bénéfice d’inventaire, la succession à lui déférée par*
ledit testament;
Q ue les sieurs de Paulhine n’ayant pas plus de droit que le sieur de Blazèdes,
leur père et aïeul, et celui-ci que le sieur Esparvier-d’Estresscs, son frère ,
ne pouvoient, sous prétexte de l’inventaire fait à la requête dudit sieur d’Estrcsses,
en 173H, après le décès du sieur de L od ière, se prétendre simples héritiers
bénéficiaires de ce dernier, puisque lesdits sieurs d’Estresses n’ont pas usé
dudit inventaire v is -à -v is de la dame de Saint-Pol, sa sœ u r, so it pour ne
l'a v oir ap pelée à l'inventaire com m e créancière de la succession, soit pour
avoir compris dans ledit inventaire le mobilier de la succession d’Anne de
LavoJpilière , n’avoir pas distingué celui propre et personnel au sieur de
Lodière , et s’étre emparés de tout confusément ; jouissance et confusion
qui s’est perpétuée tant dans les mains du sieur de Blazèdes que dans celles
du sieur de Paulhine ;
Q ue la sentence de 1749 n’avoit condamné M arc-Antoine Esparvier, sieur
de Blazèdes, au payement de la dot de la dame de Saint-Pol, qu'en q u a lité
d ’ h éritier et bien tenant d’Anne de Lavolpilière, et ce à raison de la solidarité
d’obligation portée par le contrat de mariage de la dame de S a in t-P o l, et
qu’ elle ne prononce contre lui aucune condamnation, comme héritier du sieur
de Lodière ;
Considérant que l’effet de la condamnation portée par ladite sentence de
174 9 , n’étant plus qu’ un objet de rapport au partage de la succession d’Anne
de Lavolpilière, les héritiers de la dame de Saint-Pol ne peuvent être privés
du droit de requérir contre les héritiers du sieur de Lodière, la condamnation
tant du legs porté par son testament au profit de la dame de Saint-Po!, que de
la dot qu’il lui avoit constituée en la m ariant, et de reprendre, quant à la
d ot, l’effet de la demande qu’ils en «voient formée en 1748, dès qu’ils se dé
partent de leur demande postérieure au partage de lu succession du sieur de
Lodière.
En ce qui touche la demande en payement du legs de 3oo francs, porté par
l e d i t testament d e Charles E s p a r v i c r - d ’ E s t r e s s e s ;
Considérant que la sentence de i 74D 11 cn Pron°nce pas la condamnation ;
que sur la demande qui cn avoit été formée en 1748, elle ordonnoit, à cause
des qualités contestées, une plus ample instruction ;
C o n s id é r a n t , à c e s u j e t , q u e M arc-Antoine Esparvier d e Blazèdes n ’a y a n t
p a s f a it fa ir e d 'inventaire au décès de feu Charles Esparvicr-d’ Estresses, n’a pu
ïe d ir e e t p r é t e n d r e ê tr e s o n h é r it ie r b é n é fic ia ir e ; q u e l u i , e t après lu i les sie u rs
de Paulhine, n e p e u v e n t a v o ir d ’ a u tr e s qualiLés q u e c e lle s d ’ h é r itie r s p u r s e t
s im p le s d u d it c h e v a lie r d ’ E s trcs sc s ; q u e la d e m a n d e c n c o n d a m n a t io n c o n t r e
eux r e p r is e , à fin d e p a y e m e n t d p le g s d e 3oo francs, esi. b ie n f o n d é e , d è s
que
�C *7 )
sieur de Saint-Tol Se départ de la demande e n partage que lu i o u ses
auteurs avoient formi-e de la succession dudit d ’Estresses, sous prétexte de
nullité du testament de ce dernier; que le sieur de Saiiit-lJol ne doit encourir
d’autres peines, à cet égard, que celle des dépens mal à propos occasionnas
par ladite demande en partage.
. E n ce qui touche la demande du sieur de Paulhine, à fin de nullité de la
cession faite à Jean-Gabriël de Saint-Pol par Jean-Hugues de S ain t-P o l, son
frè re , le g janvier 17 6 1, et à lin de partage des successions de père et m ère,
frère , oncle et tante dudit sieur de Saint-Pol ;
Considérant que l’acte de 17^1 renferme l’approbation la plus expresse des
testaméns d e s père et mère dudit cédant; que la nullité du testament du père,
résultante de ce qu’il avoit été reçu par M. le curé, postérieurement à l’ordon
nance de 1735, éto if une nullité apparente, qui devoit être d’autant moins
q u e le
ignorée de Jean-Hugues de S a in t-P o l, cédant, que M arguerite de Saint-Pol,
sa sœur, femme Azalbert, l’avoit déjà fait prononcer par arrêt rendu en 1749,
ainsi que l’ont annoncé les sieurs de Paulhine eu x-m êm es; que la nullité du
testament de la mère , résultante de ce qu’il n’est pas écrit de la main du notaire
recevant, pouvoit être considérée comme une nullité cachée; mais que c’ est
ici d’autant plus le cas de l’application de l’arrêt invoqué par le sieur de SaintP o l, rapporté par Chabrol, sur l’articlc 5o du titre ta de la coutume d’A u
vergne, rendu en semblables espèces, en i 76 8 , contre un sieur de Lavolpilière,
au profit du sieur de Chambona, qu il n’est ni c o n s t a n t ni vraisemblable que
Jean-Hugues de Saint-Pol n’ait eu connoissance de cette nullité qi,ic postérieu
rement à l’acte de 176 1, soit qu’on ne s’en est pas fait un moyen dans les lettres
de rescision prises sous son nom-, soit parce qu’il avoit les moyens de consulter
les minutes, puisque la quittance qu’il avoit antérieurement fournie à son frère,
le 14 mars 1769, d’ une somme de y 58 francs, à compte de ce qui lui avoit été
légué par le testament de ses père et m ère, attestant qu’il en connoissoit, et
la date, et le nom de ceux qui les avoient r e ç u s , soit enfin que d’après les
termes de l’acte de 1761 il est évident que Jean-Hugues de Saint-Pol n’avoit pas
seulement entendu approuver et céder les droits résultans en sa faveur des testarnens, mais tous scs droits successifs, d’après les anciens principes confirmés
par le Code c iv il, l’acte de 1761 n’est pas même susceptible de rescision pour
cause de lésion ;
Considérant encore que l’acte de cession de îyfîi > comme premier en d a te ,'
oit l’emporter sur celui de 176g, nu sieur de Paulhine, par Jean-Hugues de
,aint-Pol; que ce dernier acte suppose une première cession faite au sieur de
Paulhine, sous la date de 1760, dont l’existence à cette époque est d’autant
plus suspecte, qu’oulre que rien ne la constate légalement, c ’est qu’elle préjenteroit Jcan-Iiugues de Saint-Pol comme un stcüionatairc sans pudeur, qin
C
�fi8 )
fa r trois fo ’s se scroit alternativement fait un jeu de tromper son frère, et le
ticur de Paulhine, son cousin, sans cependant qu’aucune des parties ait osé
donner une telle idée de son caractère; que si la première cession de 1760 eût
existé , le fieur de Paulliine se fût empressé de l’opposer à la demande en par
tage du sieur de Saint-Pol, dès qu’elle fut formée; qu'enfin les termes de l’acte
de 176.9, les circonstances dans lesquelles la cession qu’il renferme a été re
cherchée, l’intervention de Jean-Hugues de Saint-Pol, même après la cession
fuite au sieur de Paulhine , la modicité du prix de cette cession , comparé à
celui de la cession de 1761 , le besoin que crut en avoir le sieur de Paulhine
pour combattre et atténuer la demande en partage formée contre lu i, tout
fait présumer qu’elle fu t feinte et simulée, ou que si elle fut réelle, elle ne fut
que le fruit de la suggestion et de la captation ; d’où il résulte que sans s’arrêter
à l’ acte de 17^9, les demandes, soit en rescision de l’acte de 1761 , soit à fin
de partage de la succession de la famille de Saint-Pol, doivent être rejetées.
Finalem ent, en ce qui touche la demande en provision de 3ooo fr. , formée
par ledit sieur de Saint-Pol ;
Considérant qu’ il est certain que scs auteurs ont perçu diverses sommes à
compte de la constitution de dot de Françoise Esparvier, son aïeule, ou intérêts
d’icclles; que sous ce rapport il est censé pourvu ; mais qu’au lieu d’une simple
destination de légitim e, ayant droit au partage égal d’une succession ouverte
dès 173 5 , les sommes reçues peuvent n’être considérées que comme une pro
vision insuffisante, si les contestations qui divisent les parties doivent encore
se prolonger.
Par ces divers m otifs,
L e tribunal faisant droit aux parties, sans s'arrêter ni avoir égard à la cession
prise par Joseph Esparvier, de Jean-Hugues de Saint-Pol, le 25 avril 176g, aux
lettres de récision prises sous le nom dudit de Saint-Pol, contre autre cession
par lui faite le 9 janvier i j Gi > a Jean-Gabriël do Suint-l’ol , son frè re , ni
à la demande en entérinement desdites lettres, formée sous le nom dudit
de Saint-Pol, au ci-dcvant bailliage de V ie , et reprise en ce tribunal par ledit
de Paulhine ; sans s’arrêter pareillement aux demandes de Joseph et Pierre
Esparvier, père et fils, tant à fin de nullité des testamens de Gabriel de SaintPol du Chnyla, et de Françoise Esparvier, son épouse, qu’à fin «le partage de
leurs successions, ainsi que de celle «le Iloch de Saint-Pol, Gabriel, FrançoiscBlizabelh et Anne de Saint-Pol; de toutes lesquelles demandes, fins et con
clusions lesdits Esparvier de Paulhine, pore et fils, sont déboutés; faisant droit
sur la demande contre eux form ée, à fin de jwrtage de la succession d’Anne de
la Volpilière , aïeule et bisaïeule des parties, reçoit, en tant que de besoin,
Jean-Hugues de Saint-Pol, lils et héritier de Je«n-Gabrü:l , tiers opposant n la
sentence du bailliage de V ie , du 6 mars 1756, qui a déclaré Charles Esparvier
�C T9 )
3 e Blazèdes , et Agnès de Pdnafos-Dalozier, héritiers testamentaires de ladite
Anne de Lavolpilière, déclare quant à ce ladite sentence nulle et comme non
avenue; ce faisant, condamne ledit Joseph Esparvier, et Pierre Esparvier fils,
et son donataire , tenancier des entiers biens de la succession d’ Anne de La
volpilière, à venir à division et partage avec ledit de Saint-Pol, de tous les biens
meubles et immeubles provenus de ladite succession, savoir du mobilier suivant
l ’inventaire qui en a été fait ou dû être fait à l’épo'que du décès d’Anne de La
volpilière, sinon, suivant l’état quclesdits dePaulhine seront tenus d’en fournir,
sauf tous contredits, même toute preuve en sus, et des immeubles en nature,
dans les formes voulues par le Code c iv il, pour du tout en être fait six lots
égaux , et l’un d’eux délaissé par la voie du sort audit de Saint-Pol, par re
présentation de Françoise Esparvier, son aïeule, avec restitution des fruits
et jouissances des im m eubles, et intérêts du mobilier , depuis le décès de
ladite Anne , et intérêts d es intérêts à compter de la demande formée au
bailliage de V ie , le 12 avril 17 6 5 , à la charge toutefois par ledit sieur de
Saint-Pol de rapporter audit partage ce qui sera établi avoir été par lui ou
scs auteurs perçu, tant en capital qu’intérêts, de la dot constituée à Françoise
.Esparvier, dans son contrat de mariage avec Gabriel de Saint-Pol du Chayla',
<lu ch ef d e là dame Anne de Lavolpilière, sa mère.;
O r d o n n e que jjour parvenir audit partage, estimation préalable des im
meubles sera faite par un ou trois experts dont les parties conviendront, dans
les trois jours de la signification dtr présent j u g e m e n t ; et faute par les parties
d ’ en convenir dans ledit délai , ordonne qu’il sera procédé à l a d i t e estima
tion par les sieurs Chyrol, Daude et R od ier, experts que le tribunal nomme
dès à présent d’office; lesquels experts procéderont à la division ci-dessus
ordonnée, pour être ensuite les lots formés de la manière voulue par le Code
civil , et estimeront en outre les dégradations et améliorations si aucunes
existen t, et encore année par année la restitution des jouissances du sixième
revenant audit de Saint-Pol, et ce depuis Je décès de ladite Anne de Lavol
pilière ; qu’ il sera procédé au partage ci-dessus, devant M, Loussert, jugccominissaire nommé à cet effet; qu’ il renverra ensuite, s’il y a lieu, les
parties devant tel notaire qu’ il avisera, et qui recevra le serment des experts ;
Au surplus, donne acte à toutes les parties de ce que ledit Jean-Hugues
de Saint-Pol s’est d ép a rti d es d em a n d es en partage formées au bailliage de
[Vie , tant de la succession de François de Lodière et de Charles EsparvicrU’ Estresses ; ce faisant, déboute ledit de S ain t-P o l desdites demandes en
partage ; et statuant sur les conclusions par lui prises le 3 messidor an 1 2 ,
précédemment prises au bailliage de V i e , et sur lesquelles la sentence de
1749 avoit sursis à faire d ro it, condamne lesdits Esparvier de Paulhinc,
père et fils ,
comme h éritiers purs e t sim p les de l'rançois Esparvier i[q
�(
20
)
Lodière , par représentation de Charles Esparvier-d’Estresses', à payer audit
de S.iint-Pol, en derniers ou quittances valables, la somme de 2000 francs,
formant Ja dot paternelle constituée par ledit François de Lodière à
Françoise Esparvier , sa fille , par son contrat de mariage avec Gabriel de
Saint-Pol du Chayla , avec intérêt de cette somme depuis la demande origi
naire qui en fu t formée au bailliage de V ie ; 20. celle de 5 o francs, montant
du legs fait à ladite Esparvier, épouse de Gabriel de S a in t- P o l, par ledit
François Esparvier de L odière, par son testamant du 3 août iy 5 5 , pareille
ment avec intérêt de ladite somme, depuis la demande qui en a été formée le
l 3 messidor an 1 2 ; condamne en outre lesdits Esparvier, comme héritiers
■purs et sim p les de Charles Esparvier-d’Estresses, par représentation de M arcAntoine Esparvier de Blazère, ¿p ayer audit de Saint-Pol, en deniers ou quit
tances valables, la somme de 3oo francs, montant du legs fait à ladite Espar
vier, épouse de Gabriel de Saint-Pol du Chayla, par ledit Charles Esparvierd’Estresses, son frère, par son testament du 18 mai iy 3 8 , avec intérêt de
ladite somme, depuis la demande originaire qui en fut faite au bailliage de V ie ;
C o n d a m n e e n f i n lesdits E s p a r v i e r , père et iils, en tous l e s dépens faits tant au
bailliage de V ie qu’au tribunal civil du département du Cantal, qu’en ce siège*
moins toutefois le cinquième des dépens, depuis la première demande du
partage, formée au bailliage de V ie , jusqu’au 3 messidor an 12, époque à la
quelle ledit de Sain t-P ol s’est départi des demandes en partage des succes
sions de François Esparvier de Lodière et de Charles Esparvier-d’Estresses;
lequel cinquième des dépens , ensemble le coût entier de la sentence du
bailliage de V ie , de 1784* demeurent à la charge dudit de Saint-Pol, suivant
la taxe qui e n sera faite en l a manière ordinaire ;
E t en cas d’nppel du présent jugement , fait audit cas provision audit de
Saint-Pol de la somme de mille livres ;
Ordonne que le présent jugement sera exécuté nonobstant l’appel, et sans
y préjudicier;
S u r le s u r p lu s d e s d e m a n d e s , fin s e t c o n c lu s io n s d e s p a r t i e s , le s m e t h o r s
d ’ in stn n e e.
Sur l’iippel de ce jugem ent, la cour a confirmé la dis
position relative à la provision.
A u jo u r d ’hui le sieur S t.-P o lse trouve payé absolument
de la dot de 4000 francs et des deux legs de 360 fraucs.
E n e f f e t , i° . son aïeul a reçu 1700 francs en argent,
ou biens fonds, dont l ’adversaire est encore détenteur;
�(
21
)
2 °. Son père a reçu 1225 francs, ainsi qu ’il est reconnu
en la sentence du 2 septembre 1 7 4 9 ;
3 0. Il a reçu encox-e une somme de
5oo
francs, suivant
le traité du 9 décem bre 1 7 4 9 ;
4 0. 11 étoit débiteur de Hugues Saint-Pol de 82 0 francs;
et Hugues Saint-Pol ayant cédé cette créance à Josepli
E s p a r v ie r , c e lu i- c i, porteur des effets, a le droit sans
difficulté de les opposer en compensation ;
5°. Il étoit débiteur des jouissances du pré et cham p
abandonné en 1749 , depuis ladite époque jusqu’au désis
tement ordonné par la sentence de 1 7 7 9 ; ces jouissances,
à 200 francs par a n , se porteront à 6000 fran cs, sauf la
déduction des intérêts dûs à l ’adversaire suivant ladite
sentence ;
6°. L e sieur E sparvier est porteur de quittances ou
billets pour prêts signés p n rle sieur Saint-Pol p è r e , p o u r
la somme d’environ 700 francs.
A in s i l’adversaire est nanti d’ une somme de 10945 fr.
lorsqu’ il demande un partage.
Il demande ce partage après avoir demandé et fait
payer une dot constituée à sa bisaïeule.
Sans doute si cette sentence avoit été obtenue pendant
la vie de ceux qui ont constitué la d o t, elle ne seroit
pas une fin de non-recevoir contre l’adversaire.
Mais c’est après la m ort de ceux qui ont fixé cette
d o t , qu’elle a été d em and ée, obtenue et p ayée; dès-lors
il faudroit oublier tous les principes p our admettre le
sieur Saint-Pol à revenir par une nouvelle a c tio n , in
com patible avec la première.
�( 22 )
E n effet, quand une succession s’o u v r e , tous les enfans
du défunt ont le droit d ’y ve n ir par action en p artage,
ou par action en payement de la dot ou légitim e fixée
p a r le défunt.
Dans le prem ier cas , on est héritier et chargé des
dettes ; dans le second cas , on est créancier, et affranchi
Lde toutes charges héréditaires.
Celui qu i ne se présente que p o u r réclam er une dot
con ven tio n n elle, q u i agnovit ju d iciu m d e fu n c ti, ne peut
plus ensuite se présenter com m e héritier et demander un
partage.
Seulement s’ il prétendoit n’a vo ir p a s , dans ce qu’ il a
r e ç u , une légitim e de r ig u e u r , il pourroit la demander;
mais son action ne seroit pas changée ; car ce seroit
encore à titre de créancier q u ’il viendroit à la succession,
et la demande en partage ne lui seroit pas ouverte.
Ici le sieur S a in t-P o l, à l’époque où il pou vo it opter,
après la m ort d’A n n e L a v o lp ilière et François E sparvier,
a choisi la qualité de créancier ; il a forcé Yhéritier de
le payer.
Com m ent auroit-il p u rester lui-m êm e héritier après
cette demande ? Il auroit été son p rop re débiteur.
L e sieur Saint-Pol a donc renonce au droit d’être coh é
ritier , dès l’instant q u ’ il s’est présente contre lh é r itie r
p o u r être payé d’une dot due p a r la succession .
E n vain a-t-il fait des réserves dans des procédures où,
le plus so u v e n t, elles sont de style : ces réserves étoient
démenties par sa demande m êm e, et elles ne peuvent le
relever de son p rop re fa it, qui les rend inutiles : Facta
potentiora su n t verbis , et actu s p rotestation i cojitra riu s
tolllt protcslationenix
�( *3 )
L e sieur Saint-Pol dira-t-il que lors du procès de 17 48 ,
il ne connoissoit pas l’étendue de ses droits ?
M ais on voit par une écriture signifiée par*le sieur
S a i n t - P o l , le 12 avril 1 749, que le procès
mations de 1 7 3 5 , lui étoient conn u s, ainsi
tence de 1736.
D ’ailleurs la sentence de 1748 règle ses
so llicité e, il ne l’attaque pas. 11 l ’a exécutée
et les infor
que la sen
droits; il l’a
par le traité
de 1749 ; et ce traité lui-m êm e n ’a point été attaqué dans
les dix ans.
Ce silence du sieur S a i n t - P o l n’étoit pas un simple
oubli.
A lo r s la
succession étoit
poursuivie par des
créanciers. L e sieur L a c a rriè re , ancien adjudicataire des
biens , ne les avoit rendus qu ’à la charge d ’être rem
boursé de t o u t ; il p o u vo it se remettre en possession;
et voilà pou rqu oi le sieur Saint - P o l laissoit tous les
dangers à la charge de l’héritier. L e sieur saint-Pol étant
m êm e assigné hypothécairem ent par le sieur L a c a r r iè r e ,
com m e détenteur d’immeubles à lui abandonnés p ar
le contrat de 1 7 1 8 , assigna en recours M a r c - A n t o i n e
E s p a rv ie r, et ainsi il se mit à l’abri de toutes recherches.
C ’est seulement après que ces dangers ont passé à force
de démarches et de sacrifices, q u ’il est venu a d p a ra fa s
e p u la s , renier la qualité qu ’il avoit prise p o u r se dire
héritier.
L e sieur S a in t-P o l, qui nedisputoit pas en 1748 au sieur
E sparvier la qualité d ’h éritier en ve rtu de la sentence
de 17 3 6 , veut aujourd’hui la contester, et p o u r cela il
form e tierce opposition à cette sentence.
P eu t - il y être éc o u té , après avoir connu et discuté
cette sentence avant le traité de 1749 ?
�( M )
Est-il môme recevable dans sa tierce opposition, sous
prétexte qu ’ il a dû être appelé à la p ro c é d u re ?
Il s'agissoit de la poursuite d’ un délit; les seuls intéressés
étoient d’une part l’auteur de la suppression du testament,
et d’autre p a r t, ceux qu i étoient nommés dans ce testa
m en t et qui perdoient à sa suppression.
L a dame Saint - P o l , dotée au-delà m êm e des forces
actuelles de la succession , n ’avoit pas d’intérêt d’être
appelée à discuter cette suppression.
Sa dot étoit présumée de droit la rem p lir de sa p ortion ;
et d’ailleurs elle n’étoit pas réputée héritière tant qu’elle
ne renonçoit pas ù cette dot. Com m ent d’ailleurs le sieur
S a i n t - P o l peut-il attaquer une sentence qui a passé en
force de chose jugée v is -à -v is François E s p a rv ie r? Il a
procédé comme héritier dudit E sp a rv ie r, depuis i j 65
jusqu’au 13 messidor an 1 2 , qu ’ il a changé ses conclusions.
O r , la qualité d’héritier est indélébile.
A u x’este, quand la sentence de 1736 to m b e ro it, les
informations de 1735 sufliroient p ou r donner à M a rcA n t o in e E sparvier et à François Bonafos la qualité d’h é
ritier d ’A n n e L a vo lp ilière .
L ’enlèvem ent du testament ne peut pas ôter à l’héritier
appelé le droit q u ’ il tenoit de la volonté du d é fu n t; et
c’est ici le cas d’appliquer la m axim e : P o tiu s id quant
action est quant quod scripturn est. En eiïet, il est de
principe qu’ un titre perdu par accident ou force m ajeure,
est suppléé par la p reu ve testimoniale.
O r , les témoins de 173^ déposèrent avo ir une par
faite connoissance de la teneur du testam ent, tenorem
in strum en ti au divissc (lut percepisse ; et le nom des
héritier^
�C *5 )
héritiers fut tellement co n sta n t, qu ’ils furent confirmés
com m e tels par la justice , en grande connoissance de
cause.
L es premiers juges o n t - i l s pu , sans un arbitraire
r é v o lta n t, ôter à ces héritiers un droit aussi ancienne
ment reco n n u , et réform er aussi légèrem ent une décision
contemporaine , fondée sur des élémens de vérité que
le temps a affa ib lis, mais q u ’il n ’a pas entièrement fait
perdre ?
Rem arquons l ’inconséquence, et des premiers ju g e s,
et de l’adversaire. C ’est en 1736 que la justice donna à
M a r c - A n t o in e Esparvier la qualité d’héritier. Elizabeth
Sain t-P o l la lui confirma dans l’exploit de 1738 -, le sieur
Sain t-P o l lui-m êm e la confirma dans l ’exploit de 1 7 4 8 ,
dans la sentence et le traité de 1749.
E t cependant il est admis , soixante ans a p rè s , h se
rétracter.
Q uant aux dépositions des témoins de 1 7 3 5 , n’est-il
pns d’ un scrupule m inutieux d’y chercher si les légitimes
ont été faites à titre d ’in stitu tion ? Ces témoins ne p o u voient pas connoître des subtilités de droit q u i , au
jo urd’ hui sont proscrites du Code c i v i l , parce q u ’elles
ont été jugées n’avoir aucune importance réelle.
L es témoins ont parlé des legs; et s’ ils y avoient ajouté
quelque chose de plus scientifique, on auroit p u , avec
ra iso n , se défier de leur témoignage.
Enfin il est ridicule d ’exiger que la lecture du testa
ment eût dû être faite, parce que l ’ordonnance l’exige.
Car précisément la suppression eut lieu lors de cette
lecture , et c’est ce que l’ordonnance n’a pas p révu .
Si donc la sentence de 1736 étoit annullée , la qua*.
D
�c
2
6
}
lité ¿ ’héritier se retrouveroit dans les informations, et
aucune prescription ne s’y opposeroit; car le sieur Es par
vi er et ses en fans ont toujours joui des biens et de la
qualité d ’héritier.
Quant à la succession de François Esparvier de L o d i è r e , il est difficile de concevoir comment l’adversaire,
âpres avo ir demandé sa légitime en 1 7 3 8 , puis le par
tage en 1 7 6 5 , a pu revenir h demander la légi tim e,
après avo ir plaidé trente-huit ans p o u r le p a r t a g e , et
surtout comment il a pu faire sanctionner cette étrangô
Variation.
Ce n’est pas qu ’on lui conteste le droit de prendre la
légitime conventionnelle; mais dans le système des pre
miers j u g e s , c’étoit une inconséquence; car si le traité
de 1749 n’étoit pas une fin de n o n - r e c e v o i r , la qualité
d ’héritier une fois prise ne p ou vo it pas être répudiée
p o u r en revenir à une dot qui n’étoit sujette ni aux dettes,
ni aux charges de l’hérédité.
Cette variation du sieur S a i n t-P o l, au lieu d’être prise
au m o t , d e v o i t tourner contre lui.
A u contraire, les premiers juges en tirent parti pour
dire que le sieur Saint-Pol n'étant plus héritier de Fra n
çois E s p a r v ie r , a qualité p o u r former tierce opposition.
Ils ont encore posé en règle générale q u ’on peut tou
jours diviser une d o t , et c’est une erreur.
H o u s s e a u - L a c o m b e , v°. dot , enseigne que la consti
tution dotale est indivisible; et que l’enfant doté ne
p e u t , après la m o r t , s’y tenir pour les biens maternels,
et répudier les paternels. Il cite un arrêt du i 5 juillet
"1745. 11 p ou vo it en citer un autre du 23 févri er 1 6 3 4 ,
�( a7 )
qu’ on trouve au tome i er. du Journ al des audiences.
S o u v e n t, en effet, avec des fortunes inégales, des pères
et mèi*es ont des motifs
égalité.
p o u r constituer une dot par
Ceci a voit lieu dans l ’espèce, où plusieurs actes anté
rieurs à 1700 p rou vent que la fortune du sieur E sparvier
étoit en litige avec celle d’A n n e L a v o lp iliè re , avant m êm e
son mariage : ce seroit un chaos que de v o u lo ir aujour
d ’hui séparer ces deux successions.
A u reste, si le sieur Sain t-P o l obtient 2000 francs'
du chef de son bisaïeul, il sera soumis au com pte du
bénéfice d’in v e n ta ire , et il y auroit m êm e de l’injustice
à obliger le sieur E sparvier à payer com m e héritier p u r
et simple.
M al
propos a-t-il été dît que les inventaires ont
été faits sans appeler les créanciers. Il eût fallu les lire
avant d’alléguer ce fa it; on y auroit v u que précisé
ment le sieur Sain t-P ol a été appelé à tous deux.
✓
Il reste à parler du partage de la succession Saint»
P o l , demandé
en vertu de la succession de H ugues
Saint-Pol.
Q uand on mettroit de côté la cession de 1 7 6 0 , celle
de 1769 suffit.
A lo rs H ugues S a i n t - P o l avoit obtenu des lettres de
rescision contre sa cession de 1761 , et elles étoient
fondées.
Il
n’avoit que cinq ans au décès de son père ; il avoit
quitté la maison en bas âge : il avoit traité avec son
protuleur.
<
Il s’étoit pourvu dans les dix ans.
�( 28)
• O n dit qu ’ il a a p pro uvé le testament de sa mère.
M ais il étoit n u l d’ une nullité latente, puisqu’il n’étoit
pas écrit de la main du notaire ; et l’approbation en.
ce cas n’em pêche pas d’attaquer ensuite le testament.
L a cour l ’a ainsi jugé en thèse dans la cause des
nom m és G rangeon et A c h a r d , par arrêt du 4 pluviôse
an 10.
O n a opposé au sieur E sp arvier qu ’il n’insiste sur ce
partage que par récrim ination de la demande du sieur
Saint-Pol. E h bien ! il avoue franchem ent qu ’on a ren
contré juste. Il ne p ou vo it pas m ieux se ven ger d’ un
procès de mauvaise f o i , qu ’en se défendant avec les
mêm es armes.
^
L e sieur de S a in t-P o l veut le tracasser en demandant
le partage de la plus inextricable des successions, après
avoir accepté une légitim e conventionnelle en temps utile :
il est donc bien licite au sieur Esparvier de le tracasser
l u i - m ê m e , p o u r lui m ontrer combien de tels procès
sont o n éreu x à celui qui est forcé de les soutenir.
L e sieur S a i n t - P o l aura bientôt la conviction qu’il
a intenté un fort mauvais procès , et qu’ il s’est attiré
une demande t r è s - fo n d é e ; accident qu’il faudroit
souhaiter à la plupart des p laid e u rs, pour les corriger
de la convoitise du bien d’a u t r u i, et de la manie des
vieilles recherches.
M e. D E L A P C H I E R , a ncien a vo cat.
Me . D A U D E ,
A
RIO M , de l'im p rim erie d E T
a vo u é licen cié.
h i b a u d - L a NDR i O T ,
im prim eur d e la C o u r d'appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Esparvier d'Estresses, Joseph. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
partage
successions collatérales
mariage hors de France
déchéance de nationalité
généalogie
testaments
Description
An account of the resource
Précis pour Joseph et Pierre Esparvier d'Estresses, appelans; Contre Jean-Hugues Saint-Pol, intimé.
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1718-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
28 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0315
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Flour (15187)
Deux-Verges (15060 )
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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déchéance de nationalité
généalogie
mariage hors de France
partage
Successions
successions collatérales
testaments
-
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M E M O I R E EN RÉPO N SE ,
POUR
i
C a t h e r i n e M O L I N , et les S .r et d a m e V E N D R I E Z
et B O R N E , i n t i m é s
1
CONTRE
J e a n et. autre J e a n
CIIOUVENC ,
appelans.
Q U E S T I O N S .
i.° L a procédure des appelans a-t-elle été périmée de plein
droit dans le ressort du parlement de Toulouse ?
2.0
S i elle n'est pas périm ée, peu ven t-ils, comme tiers acqué
reurs., repousser l'action des intim és par la prescription de
d ix ans , dans le même parlement ?
3.° S 'il n'y a pas prescription , les appelons sont-ils recevables en ladite qua lité d'acquéreurs d'un cohéritier, à form er
tierce opposition à des jugem ens en dernier ressort, rendus
sur appointem ent, entre leur vendeur et ses autres cohéritiers,
pour le règlement de leurs droits respectifs à la succession
com m une ?
4.° Thérèse M ol in a-t-elle eu 10 ou 3o ans pour se pourvoir
contre une renonciation surprise en m inorité par des protuteurs,
dans l ’ignorance de ses droits et sans être informée que les testamens de ses père et mère étaient nuls ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
5 .° Catherine Mol in a-t-elle p erd u , p a r la prescription de 30
A
�c o
ans, le droit de demander le partage, pendant sa cohabitation
dans la maison paternelle ?
6.° L e testament de Catherine Ferrapie , sans signature ,
ou déclaration négative de la testatrice, et sans lecture à ladite
testatrice , est-il valable? Que résulte-t-il pour ou contre sa
validité de ce qu’il est antérieur à la publication de l'ordon
nance de 1735 ?
7.0
L a première substitution q u il c o n tie n t, est-elle Jidéicommissaire ou jid u cia ire ? L a seconde e st-e lle u n e substitution
pupillaire ? Est elle valable? A -t-elle transmis la succession à
Marie Mo lin , dernière appelée ?
8.° L e testament de Pierre Mo/in , qui a simplement légu é
une légitime à ses enfatis puinés , est-il nul pour vice de prétérition ?
T P e l l e S sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé la Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catherine
Ferrapie, rapporfée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. La Cour s’est
vue forcée d’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
acte; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapporiée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans, et subi, pour faire juger un simple
partage, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Tierre TWoîin avait, dit-on, pour frères Marcelin, Biaise , et
Ignace Molin. Toi,is , excepté le dernier , s**>nt inutiles à la
cause; et pour ne pas l’embrouiller, les intimés se c o n t e n t e n t
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié a Catherine Ferrapie. Ils ont eu six enfans.
�C3 )
Pierre Molin , mort en 174)5.
Catherine Ferrapie, morle en 1735.
2.
3.
I
____ !____
Marie Molin.
Marguerite ,
Pierre ,
1 e r m ari,
N .. Chambarliac.
morte s. p.
né le 2 mai
en 1741.
i ? 3r ;
2.c marij
4.
<
^
;
*>
JL
Catherine , J ea n n e ,
intimée.
m. s. p.
Thérèse.
Louis Borne.
I
en I770.
N ... C cjoux.
mort s. p.
Jeanne B o rn e ,
3 .e mari ,
le 3 novemb.
C la u d e -L a m b e rt
Lacroisière.
L ouis Vendviez >
1748.
intim és.
L e 20 mars 17 3 5 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine FeiTapie institue pour ses héritiers universels Ign ace
M olin , curé de Chambon, son beau-frère, et Pierre Boyer, son
oncle, « à la chargede remettre, quand bon leur semblera, ladite
« hérédité à P ierre, fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« Molin vînt à mourir sans pouvoir disposer, ou sans avoir
«
«
«
«
«
«
«
«
a
«
«
recueilli ladite hérédité, elle lui substitue Marie. Ladite testatrice fait ladite institution sans distaclion de quarte et sans
qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des fr u its de
ladite hérédité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
enfans__ Fait et récité audit T e n ce , dans la maison d’autre
sieur Pierre Molin, en présence d e .............témoins soussignés.
Ladite testatrice ille de ce enquise et requise............ »
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
institue pour son héritier Pierre Molin son fils. . . . Il donne
et lègue à ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ign ace M olin,
curé de Chambon , son frère, et M a rie, sa fille , de régir et
« administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A 2
�U )
« de le faire......... Fait et récité à Tence , maison du testateur»;
Pierre Molin mourut le 21 du même mois de mai 1748. Alors
Ma rie Molin , majeure, et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de Cham
bón , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux successions, s’engagea aussitôt qu’il en eut l ’âge. Il
mourut à Lille le 3 novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, on trouva l’occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse Molin, avec le sieur Borne , d’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux aiïaires
de la maison , et par le contrat de maringe du 5 juin 1755 , le
sieur Chambarliac lui constitua 1,900 IV. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du père, de la mère, de
la sœur décédée, et même on ajouta celle du frère , quoiqu’on
n’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse Molin, m ineure, re
nonça à toutes successions, et s’obligra de la confirmer et raliJier à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son mari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur Chambarliac, n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n ère. Çi-nnd le sieur Chambar
liac décéda, elle passa ende secondes noces avec le sieur Dejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur Lambert-Lacroisière, qu’elle
institua héritier universel , et qui a ch e va , a peu de chose p rès,
de dissiper la succession.
Thérèse M olin , veuve, revint habiter près de sa famille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. Le 22 janvier 1783, elle assigna Marie Molin
et Lacroisière, son iroisième m a r i , en partage des successions
de sus père, mère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa por
tion aderante.
Après cette demande, elle fit donation de scs biens à la dame
�( 5 )
Vendriez, sa fille , qui intervint. L e procès fut appointé à T en te ,
et le 2 novembre 1784, il intervint sentence qui ordonna le par
tage du chef de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le sur
plus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
inère communs.
L es deux parlies interjetèrent appel de celte sentence ; les pro
cédures se conîinuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Pay fut choisi pour connaître de cet
appe!.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 1793, sur pro
ductions respectives, et jugea dans ses motifs :
i.° Que le testament du père était nul par prétention; z.° que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
Moün de la succe-s'on , et que ledit Molin étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes.; 3.° que
la renonciation de Thérèse Molin était n u lle, comme n’étant
dirigée ru profit de personne , comme faite par une mineure ,
ave-, ronvtut on de ratification non effectuée, et comme dirigée
au pi 'fil d’une piolut'ice , et que l’action avait duré trente ans.
En conséquence, ce tribunal ordonna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
]>(■son còlè, Catherine M olin, sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœur, en 1788 , avait assigné Lambert-Lacroisière, son héritier, le 27 novembre delà même année pour venir
à partage, • t lui expédier un cinquième clu chef de son père, et
seulement un douzième, du chef’ de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans !,i croyance , que Marie Molin était héritière
par des testamens qu’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions collatérales.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m ère, un dixième des biens
du père, et dans les mêmes propulsions pour les successions col
latérales.
�,
( 6 )
ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine Molía
alcirs ayant eu connaissance du testament de sa mère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du ch ef maternel.
L e Puy était aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 1793.
On présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
Marie - Thérèse Molin , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent , le
19 fév rier 1793 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugement , en
dernier ressort, du 26 ja n v ie r, et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à Thérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine M o lin , mais avec con
vention qu’elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
II est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
qu’il occupe , un domaine et un jardin, et déduiront les créances
qu’ila’acquittées envers Jean-Antoine M olin, à la décharge de tous.
É t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés Chouuenc , Graisse, C u o q , B o y e r ,
B eléa g e , et laisse à Catherine et Thérèse M olin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu’elles aviseront.
E n fin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 179^, les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seuleinent ce traité, mais encore le jugement du 26 janvier,
pour qu’ils l’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 avril, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun; la plupart acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvcncn’était pas alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�^( 7 )
L e 19 prairial an 2 , un jugement ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, 1 les biens libres, 2.°ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiesces avant d ’en
venir aux Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulement depuis la demandé comme acquéreurs do
bonne foi.
Depuis cette époque le tems de la pérémption s’accomplit : ce
n’est que le 9 vendémiaire an 8, que les Chouvenc
l’ex
ploit de l’an 4 à Catherine IVlolin seule, pour assister en la cause.
L;; 16 g e n r r n a l an 9 , les i nt i mé s ont a ss i g n é les C h o u v e n c en
la c o u r , p o u r se v o i r d ém e t t r e d e l e u r a p p e l .
1 ..
C ’est en la cour , seuhment pour la première fois , que les
Chouvencont imaginé d ’attaquer lejugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Lt ui^ résistance soutenue est fondée sur
l e u r prétendue bonne foi : cependant il s ont acquis d’une’. cohé
ritière qui a v a i t une sœur dans la m a i s o n ; ils ont fait plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
Si, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lar'roisière, ils
avaient'éu le moindre'soupçon de la Vente laileaux Chouvenc,
le même procès aurait tout terminé: et certts, en voyant toute
la résistance du sieur Lacroisière , et combien le tribunal du Pu y
a approfondi les questions de ce proc<'-, ¡1 est aisé de voir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien c hangé à sa décision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Hante-Loire et de
L ’Ardêche, l’idée 11e leur est pas même venue d’attaquer le ju
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger un procès qui
leur était étranger , et dont l’issue eût indubitablement été la
même; mais à R io m , une diversité, ou plutôt une innovation
de jurisprudence a changé leur plan. Les Chouvenc veulent au
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le fonds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’il
»’agit d’examiner.
�T
P R E M I È R E
Q UE S T I O N.
P--
i'VV. '■ L a procédure des appelons est-elle périm ée?
-?ï. ;
v.
.
„
Jp.i 'P.i;opcrandurn et l'ordonnance de Roussillon veulent
que tous les procès'soient promptement jugés ou entretenus par
des:procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
u
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement! de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après; une ¡demande ; mais cet arrêt n’a eu d’efïet que daîîs son
ressort. Au parlement de Toulouse, au contraire, i’ordonnance
de.Iloussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontimmtion , était môme
devenue, un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppléait
si on ne la demandait pas.
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l'ancien resâôrt de Toulouse, la Cour a jugé, notam
ment les 18 pluviôse an.t i,et 12 nivps.e an 12, que-la péremption
avait eu lieu de plein droit, même pendant la révolution , et la
suppression des avoues.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
. Mais i.° cet exploit assigne les.Chouvenc pour se voir démettre
de leur appel, et cette e x p r e s s i o n générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à cette
démission d’appel ; il serait donc bizarre de dire que celuMà ap
prouve un a p p el, qui assigne l’appelant aux fins de s’en voir
démettre. Il faut bijen que la péremption même soit'prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit obligé de s’en tenir à ce moyen seul ; car en Cour
d’appel il n’y a pas d’exceptions sur lesquelles il faut statuer préa
lablement , comme l’exige, en première instance, l’ordonnance
�(9)
de 1667.. On sait assez qu’il faut, en Cour souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2.0
Cette question a été discutée par M .r le procureur géné
ral Merlin, en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. Les ordonnances , dit-il, le veulent ainsi,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m ois, Vinstance sera périmée de droit et Vaction
éteinte ; donc, a jou te-t-il, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M .r M erlin, en sa discussion, ne s’occupe pas, comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre mois, qu’il ne cite'
que pour compai'aison. L ’ordonnance de Houssillon lui semble
aussi claire, toutes instances discontinuées pendant trois ans
sont éteintes et péries. Avant son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
« péiie, ensorte que nonobstant qiton ait repris celte instance].,
« on peut faire juger la péremption...............L ’ordonnance de
« Houssillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C est un droit public auquel on ne peut deroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’aflaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du i6 .e siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 149^, ce que nous ne voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la môme chose.
�C 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de Toulouse; la péremption y était jugée de plein droit t et c’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
Les Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qüalilé dans
le jugement de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
venir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
QUES TI ON.
L e s appelons , tiers acquéreurs , peuvent-ils invoquer, à T ou
lo u se, la prescription de d ix a n s?
Les Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qui, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (pag. 9 de leur
m ém oire), que Marie M olin ne pouvait pas vendre la portion
de ses cohéritiers , qu’ il est c e r t a i n que ces cohéritiers avaient
TRENTE ANS UTlEES pour réclamer contre toute v e n t e f a it e par
l'u n d'eux.
M a is , continuent-ils, la question concerne l acquéreur ; on
leur demandera d’abord c o m m e n t il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les ventes, et de 11e pas les avoir
contre Vacquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut mieux:
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-m êm e, ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, car dans une grande
paille de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain, et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’avenir, et respecter le
�C I* )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
commencées seront réglées conformément aux lois anciennes.
Il faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que Yusage est l ’interprète
le plus sûr des l o i s , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement obscure, et si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malce
fid e i qui l’ explique et la commente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu, que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
ji d e i possessore a lién a n te, cessât longi temporis prescriptio ,
si verus dominus ignoret ju s suum et alienationem factam .
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présumant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce 11’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ignorât verus alienatarum rerum dom inus , non aliter hune excludi nisi per triennalem prescriptionem : non valente dicere eo qui res hoc modo
possidet quia ipse bond fid e p ossid et , quandb ipse à mald jid e
possidente hoc accepit. Novell. 119, ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugciit pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
�( 12\
Eoutaric , page 182 , a , sur ce su jet, une discussion très-ap
profondie. Serres, page
annonce la seule prescription de
trenfe ans comme un principe n'on contesté. Graverol et Larocheflavin, p. 5 io; Catelan , p. 5oy, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usucapion de dix ans , que
« Juslinien même avait transformée en prescription de trente
« ans; qu’ainsi le tiers acquéreur purge l’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
Furgole , en son traité des testamens , tom. 3 , pag- 4*7? s’explique ainsi : « Au parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l’acquisition ou la perte des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente ans, même à celui qui possède avec
« uii titre, lequel 11’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« comme ayant été consenti à non domino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
louse, A ix , Bordeaux et Grenoble. On peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.° 83 ;
Montvalon , page i o 5 ; Decormis , tom. 2 , col. 589 ; Bretonier ,
v.° prescription ; M .p M erlin, v.° hypothèque, §. i 3 , et la
ïnaximfe est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit écrit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix ans,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles ».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui ne s’y con
formait pas ; le docte Domat y avait réfléchi lui-même , et ne
s’en étonnait pas : « Les lois, disait-il, qui marquent le terus des
« prescriptions ne sont (pie des lois arbitraires, car la nature ne
«
«
«
«
k
fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle dilféremment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
t e m s de prescription du droit romain. Il y en a ou elles ont été
réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrons sur la 4.« question , que la Cour de cassation a
�( i 3 )
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de T ou lou se, et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons dnnc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix a n s , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i, en semblable Ctis , l ’ait jamais admise.
Dans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne fo i,
et il est impossible qu’ils le fussent.
L a loi, au reste, n’est nullement en leur faveur, et ce n’est
que surabondamment qu’il y a lieu d’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
QUESTION.
L a tierce opposition des appelans est-elle receuable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il nesuiTit
« pas d’avoir intérêt de l’attaquer, il faut avoir été partie
«
saire dans le
néces-
j rocès jugé. »
Les Chouvenc étaient-ils donc parties nécessaires dans le
procès d’en Ire les intimés et le sieur Lacroisière, de quoi s’agissnit-il ? d’un partage.
Mais un partage de succession ne pouvait être fait qu’entre
cohéritiers, A c tio ■familiœ erciscundæ salis hœredibus com -
p etit.
Les questions d’un partage sont tellement élrangères à tous
autres, que quand un tiers achète la portion d’un cohéritier ,
les autres peuvent l’expulser en le remboursant , pour l’empê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l’ac
tion en partage 681-0116”, par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c tio fa m iliœ erciscundæ est actio
civilis quâ cohœredes
dividundâ.
in te r s£
ag a n t de commun i hœreditate
Jusque-là un acquéreur n’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son vendeur, et quand la novelle
119 le répute acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�C «4 )
cepit à viald Jide possidente, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
Les Chouvenc n’ont pas dû être assignés nécessairement•
L ’ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
ou leurs ayant-cause.
Or comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. Ainsi,
dit R o dier, un créancier, 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u 1F. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent ledroitd’interjeteri/^tf/, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
Si emptor de proprietate victus e s t , eo cessan te, auctor ejus
appellare polerit ,• item si auctor egeiit et victus s i t , non est
deneganda emptori appellandi facultas. . . . I d q u e ità constitulinn est in persond creditoris. L . 4. ff. de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand c e l u i - c i a lui-meme interjeté a p p el, la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Quin e lia m si auctor ap pellaverit, deindè in causcv
dejensione suspectus visu sest, penndè de/ensio causæ ctnylori
comniittcnda est, atijue si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
sommé , il n’admet les créanciers qu’à intervenirà leurs frais ,
�( i5 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudic e d’une opposition par eux formée (art. 08a).
31 y 3 plus ; car si , par l’eil'et du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art 883 lui répondrait « que chaque
u cohéritier est censé avoir succédés«// et immédiatement à tous
« les effets compris en son lo t , ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine Molin o n t, dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
Chouvenc, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au partage, mais qui pouvaient seulement y intervenir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju gée, et ne peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
Si, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intimées, et on n’en citerait pas un seul qui fût favorable
aux Chouvenc.
Parmi le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous ne puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n’a pas bien été saisie.
i.° M .r Cochi» , en ses notes alphabétiques, tom. 5, pag,
dit ; « jugé par anêt du 3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Amelot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , ne peut y former tierce opposition, quoique son
« acquisition y soit antérieure. »
z.° M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Couilans était en procès
�( 16 )!
avec un seigneur voisin pour mouvance de fief. . elle vendit
sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
des droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet arrêt. . .
l’acquéreur y foîrna tierce opposition , on lui répondit qu’il
devait s’imputer de n’être pris intervenu : par arrêt du 3 i
mai 1742, il fut déclaré non recevable dans sa tierceopposition.»
Par le 2.° arrêt, « le marquis de Lusignan vendit, en 1720 ,
« des terres au sieur Dauriac. . . . Les héritiers de la dame de
« Monriquet firent, en 1727, confirmer , sur a p p el, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de Lusignan seul. M .r Dauriac
« soutint qu’on aurait dû l’appeler, et forma tierce opposition....
« On lui répondit qu’il devait intervenir. . . . qu’il était censé
« avoir été partie dans l’arrêt par son vendeur , qu’en cette
«
«
«
«
«
«
«
« partie il était l ’ayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1750 , il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e B u lletin officiel de cassation rapporte un arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s .r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du 3 janvier 1792. . . Godet, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art. 5 et 11 du titre 27 de l’ordon« nance de 1667, et l’art. i . er du titre 35. . . . Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes, ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessart , était à cet égard.
« son ayant cause. . . . que Lessart a été a p p elé ., . . que Godet,
« en qualité de son ayant cause , n’aurait pu être r e c e v a b l e à
« attaquer ce jugement, qu’autant qu’il eût été justifié que Les
te §art a u r a i t été lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en admettant la tierce opposition du cit. G odet,
« ont violé l ’art. 5 de l ’ordonnance concernant l'autorité de la
« Chosç ju g é e , et ont contrevenu formellement à l’art. i . er du
titre
�(
«7
)
<< titre 35 , qui ne permet de rétracter, autrement quepar requête
« c iv ile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause.................. Casse
« et annulle etc. »
Voilà donc la pleine confirmation de la loi 4 fï. de appellationibus et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
jugée, par la voie de l’appel, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête civile , s’il
est en dernier ressort.
Tout cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. Aucuns de ces arrêts 11e sont dans
l’espèce d’ un procès de succession. S olis hæredibus competit.
D eu x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo
sition des appelans. i°. Les tiei'ces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. Dans les circonstances d elà cause,
c’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
Les Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine Molin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un procès, ont-ils pu
se défendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital à une
femme séparée de biens.
A u reste, s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
cqjndamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
\
�( 18}
encore, d’exiger en règle génén e , que 'ont cohéritier dût sa
voir s’il y a des acquéreurs, avant derechercli r ses dro‘ts, c’està-dire lut tenu de connaître les forces ue iu succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
*ous lés actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
Jes notions reçues ?
»
!
Q U A T R I È M E
QUESTION.
Thérèse M ulin avait-elle d ix ans ou trente ans pour se pour
voir contre sa renonciation ?
Cette question doit-elle être décidée par une jurisprudence
autre que celle du parlement de Toulouse ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne marque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion, dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on. a ajinullé deux testamens: J e m ’y
o p p ose; je veux faire rejuger tout cela; je veux scruter vos
testamens, vos.contrats de mariage, tout ce qui s est passe dans
votre maison depuis i y 35 jusqu’en 179^' ^ os cohéritiers n’y
seront pas même appelés, car il y a chose jugee avec eux , et
c’ est rr.oi seul qui veux faire régler, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime.
Si ce s y s t è m e des Chouvenc, qui cependant est toute la base
c’u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, voyons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ee et remise en litige doit être
rejugee .
Thérèse Molin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C T9 )
tion de 1755. Elle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de Toulouse , et pendant plusieurs siècles , on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de 3o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actions y étaient réglées à celte durée, à la seule exception de
l’açtion hypothécaire.
Les Chouvenc ayant leur pi’ocès en cette C o u r, ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là, la Cour d’appel ne s’était pas prononcée^
et on trouverait même dans l’un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrement,. 11’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’appel, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence, même la.chose ju g é e,
même des questions nées en iy 83 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
comme lui. *
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju gée, mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était inconnue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de lu i, par le pouvoir que lege regid
il en a donné au prince. En les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l’usage , dit V in n iu s ,
d’après un auteur latin, vaut mieux que ce qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valcre leges quœ moribus comprobalce su tit,
qïiam quœ scripto con stan t, vérité biçn plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
C a
�I
(
20
)
interprète des lois. Consuetudo est legum optima interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est pas seulement un mode de
juger, mais d’après la définition de Vinnius , JustitL v habitus
praclicus , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impcrative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand Rome n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la ma
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lois
à la jurisprudence et de respecter les usages. Præses provinciœ ,
probalis bis (/i/æ in oppido, frequenter in eodem controversice
gen ere, servata s u n t, causé cognild statuit. L . 1. cod. quce s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exemple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for*
melle sur la question qui nous occupe.
« Considérant ( por-îe un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain ne font loi dans les pays même
« qu’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
«< été adoptés par la jurisprudence ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts semblables, le parlement de Tou« louse a jugé., etc.» ( S ir e y , page 809).
' 2.0 Dans une autre cause, du 5 floréal an 12 , la Cour de cas«
saiion a dit: « Considérant que quoique en générai on puisse par
v
«
*
«
•
«
le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre présens, et 20 ans enlre absens ; cependant, d'après la jurisprudence du parlement de Toulouse constatée par divers arrêls,
les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
possession immémoriale , et que c'est ainsi q u 'il a entendu la
lo i t etc. casse et aimulle, etc. *~^Lullctin, u.° 52).
�(
21
)
3.° Un arrêt du 2.1 du même mois a jugé de même, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( Sirey, p. 267).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec Lacroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 1755, cela est vrai; mais, 1.« elle
était mineure , et la convention porte qu’elle sera tenue de con
firm er et ratifier à sa majorité. Elle n’en à rien fait. Il n’y a doue
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’une mesure provisionnelle.
2.0 On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplément.
Il est évident qu’on lui fit entendre en minorité qu’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. Donc on la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .° Si on suppose qu’elle a approuvé lestestamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre u n e destination de légi
time , qui agnovit ju d iciu m defuncti. Tels sont les principes
invariables comme la Cour l’a
souvent
jugé, et notamment les
21 thermidor an 8, et 4 pluviôse an 10.
4.0 L e testament de 1705 a été e x p é d i é par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’était donc induire en
erreur les parties intéressées. T h é r è s e Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de Pierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis q u e celle de son décès, sans
avoir re cu e illiy ne l’était pas. O r, non videnlur qui errant consentire , et la prescription ne court que du jour de la découverte
de la vérité.
5 .° Thérèse Molin i née en 1733, avait deux ans au décès de sa
mère , et dix ans au décès de son père en 1748. Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de lévrier
�c 22} .
1718. L e père l ’avait chargée de régir et administrer conjoinletement avec Ignace Molin, curé de Chambon; et les Chouvenc
qui connaissent plus d'actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus, nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et m ère, dont jo u issa it Marie M olin,
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins compta
ble depuis 1743, envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n’avait
que douze ans, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17^5 , entre Marie
Molin qui, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
lç succession et le vice des testarnens, et Thérèse Molin qui
ignorait tout.
. O r, le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d’admettre en
pareil cas le renonçant non visis tahu lis, à se pourvoir pen
dant trente ansl Q u ’on consulte May'nard , liv. 2 , chap. 99 et
100 ; D olive, liv. 4, chàp. 16; Càtelan, liv. 8 ; Brefonnier, v.°
restitution ; ou plutôt qu’on parcoure tous les. auteurs de ce
parlement, ou ceux qui mentionnent su jurisprudence , on ne
trouvera nulle part que l’art. 134 de l’ordonnance de 1639 ait
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de Paris, après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-tcms , comme le p a r l e m e n t de .Toulouse a toujours ]uge
Les auteurs du tems môme de cette ordonnance , notamment
M .f D u v a l, de rebus dubiis , enseignaient qu’il n’y a contre les
actions on nullité que l ’action trentenaire. Quarante ans après
lo parlement de Paris changea sa jurisprudence', mais enfin il la
c h a n g e a do nouveau après l ’ordonnance dé 1667; et il a inva
riablement jugé depuis que l’art. 184 de l’ordonnance de i5o9
ne s ’ a p p l i q u a i t qu’aux actions rescisoircs.
Cette j u r i s p r u d e n c e c o n s t a n t e s ’est m a i n t e n u e j u s q u au Code
civil. O n a v u e n c o r e , dans les di s cus s ion s s u r c e C o d e , les efforts
des sections r é un i ç s de la Cour d ’a p p e l de P a r i s , p o u r faire m a i n -
�C *3 )
tenir l ’action de trente ans, et on n’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d’Orléans et de Liège.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme commença par suivre les
anciens principes. Il jugea le 28 pluviôse an 4 , entre les
Cliatnpomier et Sezel, que l ’action en nullité avait duré trente
ans, en. floréal an 5 , à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait jugé en thèse le 3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de mariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
«
«
«
«c
« Attendu que l ’art. i 3 i de l’ordonnance de i 53c), déclare
nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administrateurs. etc. directement ou indirectement, avant le compte
rendu , et qu’une vente , faite par une mineure en faveur d’une
personne qui administrait ses b iens, présente un avantage
« indirect ;
« Attendu qu’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art. i . er, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
« compte, c’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l’art. i 34 de l’ordonnance de 1539 fIu^restreint
« le délai à dix ans , n’est relatif qu’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de commun avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres f
« casse et annulle , etc. »
II est même remarquable que le Bulletin officiel ju sq u 'à ce
jo u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d’appel de Hiom ne s’est prononcée, pour les dix
ans , pour la première fois, que le 18 prairial an 11 , c’est-àdire, depuis le Code civil, et p ir induction de l’article 475. On
verrait m êm e , dans un arrêt du 25 nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�C*4 )
encore que l'action n’avait couru qu’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix;
a n s, avant le Gode civil.
Comment donc concevoir que la Cour pût infirmer le juge
ment du Puy qui a admis Thérèse M olin, après dix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-même.
!
)
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N , .
Inaction de Catherine M olin est-elle prescrite par trente ans t
quoiqu’elle ait cohabité la maison paternelle ?
Les Cliouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n’ont pas la moindre analogie.
i.° Dargentré qu’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s’occupe pas de la question. D om at, au tir. 7 du liv. 3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire qu’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a peyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce qui suit : « Tant que les enfans sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitimé ne court point contre
« eux». Son annotateur ajoute « idem , en matière départagé»;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M ais, outre Lapeyrère, on ne voit pas d’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrement, et si on en cite
plusieurs autres, c’est seulement pour convaincre les Cliouvenc
q u ’ils n’ont pas voulu chercher la question où ils l’auraient
trouvée.
Dolive en fait une question expresse au chap. 3 i du liv. 5 ,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l’hérédité , cette prescription ne court pas contre eux , en cette
« rencontre,
�C r f)
«
«
«
«
rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seulement qu’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
défunt, ils sont censés être en possession. »
Dolive cite deux arrêts des 10 janvier i 63o et 26 août i 636.
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l, liv. 2 , cliap. 36;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101; Despeisses, to m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b ru n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion, si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d’appel vient très-réceminent de prononcer, dans
un arrêt du i 3 ventôse an i 3 , le motif suivant :
« Attendu que l’habitation d’Antoine et Pierre Vescham be,
« dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con« servation de leurs droits. »
Ainsi Catherine Molin qui a habité la maison paternelle jus
qu’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la demande,
n’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
Chouvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n’avait pas
empêché de prescrire.
Les Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard , quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière,'
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce 11e
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J ea n n e , et celles de Marguerite et de Pierre Molin ; car l’ac
tion d’un cohéritier se compose de tous les droits partiels, q u i
ad hœreditalem ven iun t; et comme les portions advenues à
Catherine Molin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
9aisit le v i j , Catherine Molin a été, dès ceLle époque, proD
�C
26
)
priétaire d’une quotité plus co n sid éra b le, et n’en a pas plus
perdu une fraction que la totalitéT
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
I .e testameut de Catherine Ferrapie est-il valable?
« U n testam ent, dit R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n effet , dans cet acte si im p o rta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1735 est vicié par deux nullités textuelles : 1.0
il est dit f a i t et récité en la maison de Pierre Mo lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable qu'un
testament soit lu à celui qui l’a d i c t é , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
11 n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de 11’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L adite testatrice ILLE de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 178b dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en leront ensuite lec« ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... A près
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’il ne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 )• »
M u s , disent les Chouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l'ordonnance de 1735 : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d’Orléans et de Blois.
« Et on cas que les parties ou témoins ne sauront point
« s i g n e r , les notaires fe r o n t m ention de la réquisition par eux
�( 27 )
« faite aux parties ou témoins de sig n e r, et de leur réponse
« qu’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i 65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de xy 35.
E t les auteurs qui ont écrit avant l’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e Maitre , sur Paris , article 14,.
chapitre i . e r ; R a v io t, question 164; Maillart , sur Artois t
art. 74 ).
On cite souvent Ricard, comme ayant rapporté un arrêt de i 65z
validant un testament où il était dit : « Lequel n’a pu signer t
a interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que Ricard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence'que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
Aussi Ricard , n.° i 526 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l’avoir interpellé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n’a pu signer , parce qu’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... Car le notaire, dit Ricard , au n.° i 568 , ne doit
<c contribuer d’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
t- L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart un arrêt du 3 septembre 1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n’avait pu signer à cause de sa faiblesse, de ce enquis.
L e tribunal civil du Puy-de-Dôme a jugé deux fois de la
même manière , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal et
le 23 pluviôse an 7 , entre les héritiers V a ch ier, d’Arlanc.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art.. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur ddD 2
�. ( 2 8 )
clare ne savoir signer, il soit fait mention expresse de sa décla
ration ; ainsi la loi n’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce j:oint la jurisprudence.
Les Cliouvenc se sont imaginé cpie les ordonnances d'Orléans
et de Blois n’avaient pas été enregistrées au parlement de T ou
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D >!ive dit que de son teins on n’était p is rigou
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan iuait pas si le testateur avait signé; mais Serres, Boutaric
et F u r g o l e ne disent rien de p a r e i l . Furgole dit au contraire'
que les form alités que les lois prescrivent, pour la validité des
testamens , sont de droit public , et qu’un testament doit porter
la preuve avec lui-même; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
Dans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas même
1 1 j reuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Cliouvenc
se sont efforcés de persuader qu’///<? veut dire il/itéré , puis
i[u illile r é veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sait écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
Mais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce qu’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
Un arrêt de règlement de i 685 défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’acte, elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
T
Vinnius et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
to u t, cpii sont testatio mentis , il faut éc.rire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29^
viations. Ccvterum Htteris iisque usitatis et legibilîbus scribenduin esse p la c u it , non sig n is, obscurisve n o u s , l. G , § . ult.
de bon. p o ss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le dictiounaire de l’Acadéinie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferrière, ni dans le glossaire de Delaurière ; 011 n ou veau diction
naire de Trévoux le mot M étré, signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , if n’y a pas dans le testament illité r é , il y a ille , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver ,
dans ce mot biznrre , une déclaration de la testatrice, qu elle n a
pu ou su signer. Allons plus loin nieine , le mot illitcre ne lu
remplacei’ait pas.
SEPTIÈME
QUESTION.
Q u elle est la nature de la substitution du testament de 1735 ?
a-t elle transmis la succession à Marie M olin ?
Quand ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine Molin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ils accréditaient encore plus
par iine expression infidelle de l’expédition, qu’ils avaient d’abord
produite, de ce testâmes.
Les héritiers inslitués, disaient ils , etaient Ignace Molin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de r e n d r e la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre Molin est mort en 1748,
et Marie Molin était appelée à la substitution, dans le cas où
ledit Pierre Molin décéderait sans avoir remis la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la maxime
substitutus substituto est substituías instituto , Marie Molin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l’extrait vidimé du testament de
�( 3° )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , qu’au lieu du
mot remis il y a recueilli. Cela p o sé , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inoflicieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Péi’égrinus, qui a fait un traité sur les fidéicommis, le définit
ainsi. F iduciarius est hœres q u i, non sut contem platione sed
alterius gratiâ institutus , eidem reslituere hereditatem ,p o st
diem certam vel incertam , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent ïïenrys et Bretonier, sont corn
et munes dans les pays de droit é crit, sur-tout en faveur du sur
et vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
«c et l’obéissance hoc consilio ut parenti obsequerenlur.........
« Quoique le tems de la restitution, contiuuent-ils , ne soit pas
« marqué dans le testament, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ierait bon usage de cette
« liberté , et n’attendrait pas jusqu’a sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« On doit penser, dit ailleurs le même auteur, qu’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; qu’il vise plutôt à leur
« utilité, et n e l’avantage qu’à leur considération ; qu’ainsi il ne
« l’a instituée que parla nécessité de leur bas â g e , non ut /¿lus
minoribus obesset , sed potius ut eis consu/eret. » ( henr. t.
i . c r , p. 736, t. 3 , p. 69 ).
Tous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du fiduce, qu’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C 3f )
i .° Catherine Ferrapie avait un ills et des filles ; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2*0 Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l'hérédité à son
fils, sans distraction de cpiarte. Ces prétendus héritiersn’avaient
donc l’espoir d'aucun droit , de leur c h e f, à la succession ; car
tout héritier grevé de fidéicornmis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( 1. i . cr §. 5 , ad treb. ) ;
3 °. En remettant l’hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chose , sans
aucune stipulation ;
4.0 Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , ut parentibus
obsequerentur. A cela près, elle exigeait les mêmes soins pour
eux, que si elle eût été vivante , sed potius ut eis consuleret.
Ainsi disparaissent Pierre Boyer et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre Molin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre Molin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin } mais seulement au cas q u 'il vint à mourir sans
pouvoir d isposer, ou sans avoir recueilli ladite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , si non extiterit hœ resJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pas mort sans pouvoir disposer ; car
en pays de droit écrit le mineur avait testamenti fa ctio n em
aussitôt qu’il avait atteint sa puberté. Or , Pierre Molin , né
en 1731 , était pubère en 1746 , et il n ’est décédé qu’en 1748.
Si ce moyen 11’était pas péremptoire , on opposerait aux
�C 30
Chouvenc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o iesi liberis
inipuberibus q u o s IN p o t e s t a t e h a b e t , cùm ejus œtatis sint
in quâ ip si lestamentum fa cere non possunt.
, Il ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
«ncore par le principe enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règlesu b stitu tu s subslilulo n’a pas lieu en la subs
titution pupillaire , et le substitué au pupille n’est pas censé
l ’héritier du testateur. (C u ja s, ad j. 41. de vul. et pnp. su b.)
A insi le testament de
, valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q UE S TI ON.
L e testament de 1743 e st-il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité 11e change rien à
l’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre Molin,père a institue son (ils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses enfans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hæredem in s titu a i, aut exhœTedem nomi/iatim f a c ia t , ahocjum inutilitcr testabitur.
Cette disposition a etc répétée dans l’art. 5o de l'ordonnance
de 1735, qui dit que, dons les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M us l'héritier, institué par le testament de 174^ >étant décédé
ab in testa t, il importe.peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
/
�( 33 )
ou ju r e suo , à la succession de leur p ère, il n’est pas moins vrai
de dire qu’elle doit être partagée entr’elles par égalité'.
Les Chouvenc terminent leur mémoire par demander, i.o
q u ’on estime les biens de la succession Molin ; 2.° qu’on accorde
«à Marie Molin leur venderesse , les prélèvemens qu’elle aurait à
l'aire, notamment trois qu’ils indiquent ; 3.° qu’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances, s’il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugement dont est
appel, y a fait d r o it, en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intimés, avant d’en venir aux
Chouvenc.
Ainsi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient faire, pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l’exécution du jugement dont est appel.
A lors, seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible..
Quant au eornpulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n’est qu’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans motif; car
la fraude ne se présume pas.
Tout prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès, après en avoir perdu deux , et les
exclamations des Chouvenc, pour crier à la collusion , ne sont
q u ’une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
foule de papiers de la famille Molin , qu’ils ne pouvaient tenir
que de lui. Tout ce qu’ils ont expliqué sur cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de leur science personnelle, et il
s-t remarquable qu’ils n’ont jamais demandé en communication
E
�(
3 4
)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés qu’ils élèvent.
Mais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont qu’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour veut statuer
sur les questions d ’un partage, avec l ’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien jugé du jugement en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce juge
ment étaient sages et légales, et n’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M.* D E L A P C H I E R , avocat.
M .e D A U D E , avoué.
A
R I O M ,
D e l ’imprimerie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I )•
�
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Factums Marie
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Description
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Text
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
prétérition
prescription
testaments
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Catherine Molin, et les Sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0326
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0624
BCU_Factums_M0729
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
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new
x m a m i Ai9aLEMx?sjii£±t m m
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
POUR
C
a t h e r in e
M O L I N , et les S.r et dame V E N D R I E Z
et B O R N E , intimés ;
CONTRE
J e a n et autre J e a n
CH O U V E N C
, appellans.
Q U E S T I O N S .
1 .° L a procédure des app elans a -t-elle é té périm ée de p le in
droit dans le ressort du parlem ent de T o u lo u se ?
2 .° S i elle n'est p a s p érim ée, p e u v e n t-ils , com m e tiers acqué
reurs, repousser L'action des in tim és p ar la p rescrip tion de
d ix a n s , dans le m êm e parlem ent ?
3 .°
S 'il n y a p as p rescription , les app elan s so n t-ils rece
vantes en la d ite q u a lité d'acquéreurs d'un co h éritier, à form er
tierce op p osition à des ju g em en s en dernier r e s s o r t, rendus
su r a p p o in tem en t, entre leu r vendeur et ses autres co h é ritie rs,
p ou r le règlem ent de leurs droits resp ectifs à la su ccession
com m u n e ?
3
4 -° T hérèse M o lin a -t-e lle eu 10 ou o ans p o u r se pourvoir
con tre un e renoncia tion surprise en m in o r ité p a r des p rotuteurs,
dans l ' ignorance de ses droits et sans être inform ée que les testam ens de ses p ere et m ère étaien t n u ls ?
C ette question d o it-elle être décidée par une ju risp ru d e n ce
a u tre q u e ce lle du parlem ent de T o u lo u se ?
5 .°
3
C atherine M o lin a -t-elle p e r d u , p a r la p rescrip tion de o
A
�c o
a n s, le droit de dem ander le p a rta g e , pendant sa coh a b ita tio n
dans la m aison p a tern elle ?
6.° L e testam ent de Catherine F erra p ie , sans signature ,
ou déclaration nég a tiv e de la te sta tr ic e, et sans lecture à ladite
testa trice , e s t-il valable ? Q u e ré su lte -t-il p ou r ou contre sa .
v a lid ité de c e q u 'il est antérieur à la p u blica tio n de C ordon
n a n ce de 1735 ?
rj.° L a prem ière su b stitu tion q u 'il c o n t ie n t, est-elle J id é icom m issaire ou fid u c ia ir e ? L a seconde est-elle une su b stitu tion
p u p illa ire ? E st elle v a la b le? A - t- e lle transm is la succession à
M arie B iolin , dernière appelée ?
8 .° L e testam ent de P ierre M olin , q u i a sim plem ent lé g u é
u n e légitim e à ses en/ans p u in és , esi-il n u l p o u r vice de prétérition ?
F W W i 'V V % % V V W V X W W \ W % V % .‘W
I
V.
t.
W
%
r. t . fi sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé La Cour pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle 'du testament de Catheriue
F e rra p ie , rapportée-par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. L a Cour s’est
vue forcée d ’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
a c te ; aujourd’hui la nouvelle expédition est rapportée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 a n s, et s u b i , pour faire juger un simple
p a r ta g e , quatre degrés de juridiction. .
■ F: A I T S.
• r. ,
■ ...
Pierre M olin a v a it , dit-on , pour frères M a rc e lin , Biaise , et
Ig n a ce K o lin . Tous , excepté le dernier , s.*mt inutiles’ à la
cause; et pour 11e pas l’embrouiller , les intimés se contentent
d’en rappeler lts noms , pour passer'à lu descendance de Pierre,
m arié à Catherine Ferrapie. ils ont eu six enfuns.
.
■> ' 1
�C3 )
P ie r r e M o l i n , m ort en 1743.
C a t h e r in e F e r r a p i e , m orte en 1735.
2.
3.
I
4.
S.
a.e m a ri }
N ... D ejoux.
3.e m a r i ,
C laude- L a m b e rt
Lacroisière.
Jeanne Bor ne,
Louis V e n d r i e z ,
intimés.
L e 20 mars 1735 , Catherine Ferrapie fit son testament. Elle
légua à ses six enfans leur légitime de droit, à titre d’institution.
.Voici les dispositions et la forme de ce testament:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ig n a c e
M o lin , curé de Chain bon, son beau-frère, et Pierre B o ye r, son
o n cle , « à la charged e rem ettre, quand bon leur sem blera, ladite
« hérédité à P ie r r e , fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
« M olin vint à mourir sans p o u v o ir disposer, ou sans avoir
« recu eilli ladite hérédité, elle lui subslitue M arie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans d ista clio n de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com p te des fr u its de
« ladite hérédité , et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .. . . Fait et récité audit T e n c e , dans la
m a iso n
d’autre
« sieur Pierre M o lin , en présence d e ..............témoins soussignés.
« L adite testatrice ille de ce enquise et requise............. ”
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, lit son testament : « il
« institue pour son héritier Pierre M o lin son fils. . . . Il donne
« et leg u e à ses cinq autres enfans leur légitime de droit} . . . .
« et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ig n a c e M o lin ,
« curé de Cham bon , son frère, et M a r ie , sa lille , de régir et
a. administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A z
�,U )
'
« de le faire..........Fait et récité à T en ce , maison du testateur ».
Pierre M olin mourut le 21 du même mois de mai 1748. A lo rs
Marie Molin , m a je u re , et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de C liam bon , Pierre B oyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
" aux deux successions, s’ engagea aussitôt qu’il en eut l’âge. Il
3
mourut à L ille le novembre 1748, et on fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.
Quelques années après, 011 trouva l'occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse M olin, avec le sieur Borne , d ’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l’œil aux allaites
5
de la maison , et par le contrat de mariage du
juin
, le
sieur Cham barliac lui constitua 1,900 fr. de dot, en bien expri
mant que c ’ était pour les successions du père , de la mère , de
la sœur d é cé d é e, et même 011 ajouta celle du frère , quoiqu’on
n ’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse M olin, m in eu re, re
nonça à toutes successions , et s’obligea de la confirm er et ratiJ îc r à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander cette
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’apathie du sieur
Borne son m ari, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur C h a m b a rlia c , n’eût toujours persuadé que Marie Molin
était l’héritière de ses père et n è r e . Quand le sieur C h a m b a rlia cd é céd a , elle passa en de secondes noces avec le sieur D ejoux,
puis en de troisièmes, avec le sieur L am b ?rt-L a cro isière, qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose près ,
de dissiper la succession.
Thérèse Molin , veuve, revint habiter près de sa f.¡mille, et
ne connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. L e 22j<mvjer 17813, elle assigna Marie M olin
et L acro isière, son troisième m a ri, en partage des successions
de ses père, m è re, irère et sœurs, pour lui être délaisse sa p o r
tion adorante.
A p rè s cette dem ande, elle fil donation de ses biens à la dame
�.( 5 ) . .
V e n d rie z , sa fille, qui intervint' L e procès fut appointé à T e n c e ,
et le 2 novembre 1 7 8 4 , il intervint sentence qui ordonna le par
tage du c h e f de Jeanne seulement : et avant faire droit sur le surplus , ordonna une estimation préalable des biens des père et
mère commun?.
L e s deux parties interjetèrent appel de cette sentence ; les pro
cédures se continuèrent en procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Piry fut choisi pour connaître de cet
appel.
Ce tribunal rendit son jugement le 26 janvier 17 9 3 , sur pro
ductions respectives, el jugea dans ses motifs:
i.° Que le te>fanu'nt du père était nul par prétention; 2.0 que
la substitution, portée dans celui de la mère, avait saisi Pierre
M o in de la -iuccess’on , et que ledit M olin élant mort après
quMorze an s, les substitutions s’étaient alors éteintes ; .° que
la renoue iulion de Thérèse Molin était n u lle , comme n’étant
dirigée au profit de personne , comme faite par une mineure ,
3
a vec convention de ratification non effectuée, et com m e dirigée
au profit d’ une protutiice , et que l’action avait duré trente ans.
E n conséquence , ce tribunal q^donna le partage desdites suc
cessions, pour être délaissé à la dame V e n d riez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
D e son co té, Catherine M o lin , sortie de la maison paternelle
à la mort de sa s a \ ir , en 1788 , avait assigné Lambert-X-acroisière, son héritier, le 27 novembre d e là m ême année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du c h e f de son p ère, et
seulement un douzièm e, du chef de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la croyance , que M arie M olin était héritière
par des testamens q u ’elle n’avait jamais vus ; elle demanda éga
lement les successions colhjtérciles.
Une sentence du 17 août 1790 ordonna ce partage , pour être
expédié un douzième des biens de la m è re, un dixième des biens
du p è r e , et dans les mêmes proportions pour les successions col
latérales.
�/
(6)
^ c s ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine M olin
alors ayant eu connaissance du testament de sa m ère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du c h e f maternel.
L e F u y était aussi saisi de cet appel qui
s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci-dessus,
du 26 janvier 1793.
O n présume sans peine que Lncroisière, succombant vis-à-vis
M a r ie - T h é r è s e M o l i n , en dernier ressort, n’avait garde de
plaider plus long-tems contre Catherine, devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parlies traitèrent , le
19 février 1 7 9 3 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère nu jugem ent , en
dernier resso rt, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à T hérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’ elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
Il est convenu que les experts expédieront d ’abord la miiison
q u ’ il occupe , un domaine et un ja rd in , et déduiront les créances
q u ’il a acquittées en vers Jean-Antoine M o lin , à la décharge de tous.
E t comme évidemment ces biens ne suffisaient pas, il apprend
qu’il a vendu aux nommés C h ouven c , l'r a is s e , C u o q , B o y e r ,
JDcléage , et laisse à Catherine et Thérèse M o lin , à se pourvoir
contre eux , ainsi qu ’elles aviseront.
Enfin , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d’appel.
L e 26 février 17 9 3 , les intimés signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 ja n v ie r,
pour qu’ils l ’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v r il, ils les assignent tous en désistement et jugement
c o m m u n ; l a p l u p a r t acquiescent à la demaude. L e moyen des
Chouvenc n’était pas alors d’attaquer le jugçinent du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�_C 7)
L e 19 prairial an 2 , un jugem ent ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, i.° les biens libres, 2 ° ceux
abandonnes par les acquéreurs , qui ont acquiescés avant d 'en
venir a u x Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulem ent depuis la demande comme acquéreurs de
^ b o n n e foi.
~
D e puis celte époque le tems d e l à péremption s’accomplit: ce
n ’ est que le 9 vendémiaire an 8 , que les C h o u v e n c signifient l’ex
ploit de l’an 4 a Cat herine Molin s e u le , pour assister en la cause.
1 L e 16 ger ninul an 9 , les intimés ont assigné les Chouvenc en
la coui-, pour se voir démettre de leur appel.
C ’ est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Cliouvencont imaginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leu.i! prétendue bonne.foi : cependant ils ont acquis d ’une cohé
ritière qui avait l'ne sœur dans la maison; ils ont f¿iit plus, ils lui
ont payé le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
' S i, quand les intimés ont plaidé avec le sieur Lacroisière, ils
avaient eu le moindre soupçon de la vente faite aux C h o u v e n c ,
le même procès aurait tout term iné: e f c e r t e s ,e n voyant tonte
la résistance du sieu^Lacroisièrè^'et combién le tribunal clu P u y
a approfondi les questions de ce procès , ile s t aisé de v o ir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien i hang’é à sa décision. Quand
ils 1ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’A rd é ch e , l’idée 11e leur est pais même venue d ’attaquer le j u
gement du 26 janvier 179.3 , et de faire rejuger u n procès qui
lèur était étranger , et d o n t,l’issue eût indubitablement été la
rtiêtiie; mais a Riom^ une d iv e rs ité , ou plutôt une innovation
Jurisprudence a changé leur plan. L es Chouvenc veulent a u
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d ’aborder
lc>fouds , ils Sont arrêtés par des questions préalables
s’acit
:l ■
O d'examiner.”
qu’il
�C a )
P R E M I È R E
Q U E S T I O N .
L a p rocédure des a p p elo n s-est-elle p é r im é e ?
L a loi Properandum et l’ordonnance de R.oussillon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entrètenus par
des procédures, sinon l’instance est déclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt dé
règlement de 1692 , qui voulait que la péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrêt n’a eu d’eiïet que dans son
ressort. A u parlement de T o u lo u s e , au contraire, l’ordonnance
de Roussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des sentences; la pé
remption y a toujours eu lieu de p lein droit, et le juge la suppléait
si 011 ne la demandait pas.
!
1 ' "■
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue etl
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l’ancien ressort de T o ulo use, la Cour a ju g é , notam
ment l e s 'i 8 pluviôse an 11 et 12 nivôse an 1 2 , que la pérçrnption
avait eu lieu de plein droit, m ême pendant la révolution , et la
suppression d p avoués.
......
.
On objecte que lps intimés on.t couvert la péremption eu anti
cipant le 16 germinal an 9. ,
vt, ,
, [ ¡; - . ;i| ifj . ¡,
Mais 1.0 cet exploit assigne Içs Chouvenc p0u r,?,e;voir déme^lre
de leur a p p e l, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire à celte
démission d’appel ; il serait donc bizarre dç dire jqqe c e lu i- ^ a p prouve un a p p e l, qui assigne l’appelant aux.
s*en, v^irj
démettre., Il.f/JUt bien que la péremption mê ms f i i t , pr o noncçe.
en justice,
et
personne n’osera cxigçr qu e: ce ln i/p û -la prétend,
acquise, soit obligé de s ’en tenir à ce .moyen sç.gl, ;:.par en Cour
d’appel il p ’^.a,p,as d^exçeptjpns.s.ur lesquelles il.fjHM statuer.pr,\hi-\
la b iem en t, comine l’exige, en première instance, ro^dÿnnoncb:
de
�(9 )
de 1C67., On sait assez qu’il faut, en Cour so u v era in e , proposer
tons ses moyens à la fois.
2 .0
Celte question a été discutée par M . v le procureur géné
ral M e rlin , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le système
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit public tendant à l’abréviation des parties , et
qui 11e se couvre pas. L es ordonnances, dit-il, le veulent a in s i,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790,
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m o is , l'in sta n ce sera périm ée de droit et Ûaction
étein te ; d o n c, a jo u t e - t - i l, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée 11’y conclurait pas.
M . r Merlin , en sa discussion , ne s’occupe p a s , comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre m ois, qu’il ne cite
que pour comptiraison. L ’ordonnance de lioussillon lui semble
aussi c la ire , toutes in sta n ces d isco n tin u ées pendant trois ans
so n t éteintes et péries. A va n t son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, 11e se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
v périe, ensorte que nonobstant q u o n ait repris cette insta nce],
« on peut faire juger la péremption................ L ’ordonnance de
« Iloussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
« C ’est un droit p u b lic auquel on ne peut déroger».
P a r une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-lout
très - respectables ; mais à la longue ce respect s’allaiblit singu
lièrement. D e la vient que les auteurs du 16.c siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 14 9 3 , ce que nous 11e voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre très-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
B
�( 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de T oulouse; la péremption y ¿tait jugée de p lein d r o it, et c ’est
dire assez qu’elle y était un moyen de droit public.
L es C houvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est 1111 rêve de dire que Jeanne
Borne n ’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualité dans
le jugem ent de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
ven ir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la péremption , elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
D E U X I È M E
Q U E S T I O N .
L e s appelans , tiers acquéreurs , p eu v en t-ils in v oq u er, à T o u
lo u se , la prescription de d ix ans ?
L e s Chouvenc font des efforts incroyables pour l’établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse q u i , sans exce p tio n , sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir ( pag. 9 de leur
m é m o ir e ), que M arie M olin ne p ou v a it p as vendre la p o rtio n
de ses coh éritiers, q i i i l est
t r e n t e
a n s
UTILES
c e r t a in
que ces cohéritiers avaient
p ou r réclam er contre to u le V ü N T E fa ite par
Vun d'eux.
M ais , continuent-ils, la question concerne Vacquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les v e n te s, et de ne pas les avoir
c o n t r e V acquéreur ; comme ce serait inexplicable, il vaut mieux
dire que les Chouvenc ont été forcés de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en elle-même , ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit romain , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour ne pas faire de confusion à l’a ve n ir, et respecter le
�C i1 )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
com m encées seront réglées conformément aux lois anciennes.
11 faut donc chercher
ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
à la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obs
curité dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
1
drait dire avec la Cour de cassation que ''usage est V interprète
le p lu s sûr des lo is , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement o bscure,
et si 011 trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur, on voit aussitôt après l’authentique malœ
J id ei qui l’ explique et la com m ente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
J id e i possessore a lién a n te , cessât lon g i tem poris prescriptio ,
s i verus dom inus ig n oret j u s suum et alienationem fa c la m .
Si ce commentaire de la loi elle-rnême ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présum ant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite de l’authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce n’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i auteni ig n orâ t verus a lien a ta rum rerum dom inus, non a liter hune e x c lu d i n is i p er triennalem prescription cm : n on valente dicere eo q u i res h o c modo
p o ssid et quia ipse bond fid e p o ss id e t, quando ip se à m al à Jide
posfiidenle h o c a cccp it. Novell. 1 1 9 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous ne savions que la Cou
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant au parlement de T o ulo use, tous les auteurs de sou res
sort attestent, sans exception, que la prescription de dix ans 11’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
B a
�(
1 2
)
_ \
Bouiàric , page 182 , a , sur ce s u j e t , une discussion très-ap
profondie. Serres, page i 5 y annonce la seule prescription de
trente ans com m e un principe non contesté. Graverol et Laroc h e ila v in , p.
5 io;
Çatelan , p. Boy, disent « que le parlement
« de T oulouse n ’a pas reçu cette usucapion de d ix ans , que
« Justinicn m ême avait transformée en prescription de trente
« an s; q u ’ainsi le tiers acquéreur purge l ’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
F urgole , en son traité des test,-miens, loin.
3 , pag. 4 1 7 ,
s’ex
plique ainsi : « A n parlement de Toulouse , on ne connaît d’autre
« prescription pour l'acquisition ou la perle des droits person« nels ou réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente an s, même à celui qui possède avec
« un titre, lequel n ’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« c.mune ayant été consenti à non dom ino.
Ces principes sont élémentaires dans les pnrlemens de T o u
lo use, A ix , Bordeaux et Grenoble. O n peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lapeyrère , lettre P , n.°
5
83 ;
jflontvalon , page i o ; Decormis , loin. 2., col. ÎS89 ; Brelonier ,
v.° prescription ; M . r M e r lin , v.° hypothèque , § . i
3,
et la
m axim e est tellement devenue triviale dans les parlemens du
droit é c rit, que suivant Dupérier , » la prescription de dix a n s ,
« en ce cas, n’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui 11e s’y con
formait p a s; le docte Domal y avait rélléchi lu i-m ê m e, et ne
s’en étonnait pas : « L es lois, disait-il, qui marquent le teins des
« jjrescriptions ne sont que des lois arbitraires, car la nature ne
« iixe pas quel teins il faut pour prescrire----- Il se règle difle« remment en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. 11 y en a où elles ont été
« réduites à une seule prescription de trente ans. »
Nous verrous sur la 4;e question, que la Cour de cassation a
�>3
(
)
consacré, par trois arrêts, la nécessité de suivre la jurisprudence
du parlement de Toulouse , et expressément sur la matière des
prescriptions.
Concluons donc que les Chouvenc ne peuvent invoquer la pres
cription de dix ans , dans un ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou jugement q u i , en semblable cas , l ’ait jamais admise.
D ans leur propre système , il faudrait les supposer de bonne f o i,
et il est impossible q u ’ ils le fussent.
L a lo i, au reste, n ’est nullement en leur fa v e u r, et ce n’est
que surabondamment q u ’il y a lieu d ’invoquer l ’invariabilité
de la jurisprudence.
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N .
L a tierce op p osition des appelons est-elle recevable ?
« Pour être reçu tiers opposant, disent les auteurs, il ne suffit
« pas d’avoir inte'rét de l’attaquer, il faut avoir été partie n éccs« saire dans le procès jugé. »
L e s Chouvenc étaient - ils donc parties nécessaires dans le
procès d ’entre les intimés et le sieur L acro isière5 de quoi s’a
gissait-il? d’ un partage.
M ais un partage de succession ne pouvait être fait q u ’entre
cohéritiers. A .ctio fa m ilicc erciscundœ so lis hœredibus com p e lit.
'
L es questions d ’un partage sont tellement étrangères ;\ tous
autres, que quand un tiers achète la portion d ’un cohéritier ,
les autres peuvent l ’expulser en le remboursant , pour l ’einpôcher de pénétrer les secrets de la famille. Aussi en droit, l ’ac
tion en [partage est-elle , par sa seule définition , exclusive de
toute admission étrangère : A c t i o fa m iliœ e r c is c u n d œ est a ctio
c w ilis qud cohecredes
dividundâ.
1 JSTT £ R
se agunt de com m uai hœ reditate
Jusque-la un acquéreur n ’est pas partie nécessaire dans un
partage ; il a suivi la foi de son v e n d e u r, et quand la novelle
119 le réputé acquéreur de mauvaise f o i , par cela seul que ac-
�*4
(
)
c e p il à tnahî J id e p o ssid en te, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont nullem ent et inutilement
procédé pour avoir omis d ’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
L es C houvenc n’ont pas dû être assignés nécessairem ent•
L 'ordonnance de 1667 d’ailleurs ne donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêm es,
ou leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A i n s i ,
dit R o d i e r , un créancier , 1111 acquéreur sont des ayant cause.
Nous allons voir encore que le Droit romain les place sur la
m êm e ligne.
A u if. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles lui acccordent le droit d’interjeter a p p el, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S i em ptor de proprietate vie tus e s t , eo c e s s a n te , auctor eju s
appellare p o lerit / il cm s i auctor egerit et victu s s i t , non est
deneganda em ptori appellandi fa c u lta s . . . . I d que ità co n stitutum est in persond créd ito n s. L . 4. if- de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur ; et quand celui-ci a lui-même interjeté a p p e l , la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’ intervenir au
procès, si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Q uin ctiam si a u ctor a p p e lla v e r it, deindè in causa;
d ejen sio n e suspectus v is u s e s t, perindè defensio causœ em ptori
com m ittenda e s t , atque si ipse appellasset. L . ead.
L e Code civil s’est conformé à ces principes, sur-tout en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
s o m m é , il 11’admet les créanciers qu’à in terv en ir à leurs fr a is ,
�C 15 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice d’ une opposition par eux formée (art. 882).
Il y a plus ; car si , par l'effet du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l’immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tous acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’évincer , l ’art.
883
lui répondrait « que chaque
« cohéritier est censé avoir succédé sez// et im m édiatem ent à tous
« les effets compris en son l o f , 011 à lui échus par licitation. »
A in si Thérèse et Catherine M olin o n t , dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise e x causa an tiq u a , et qui est réputée
leur appartenir depuis l'o u vertu re des successions. Ainsi les
C h o u ve n c, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au pa rta g e, mais qui pouvaient seulement y in terven ir, trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju g é e , et ne peuvent
plus faire juger avec eux seu ls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
S i, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en faveur
des intim ées, et on n ’en citerait pas un seul qui lut favorable
aux Chouvenc.
Parm i le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
livres, nous 11e puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l’espèce de ladécicision n ’a pas bien été saisie.
i.° M . r C o c h in , en ses notes alphabétiques, tom.
dit; « jugé par arrêt du
5 , pag, 527,
3 i mai 17^6, en faveur des sieur et dame
« Miissol contre M . r le président A m elot et le comte de Tavanes,
« que le tiers détenteur , assigné en déclaration d ’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre son
« vendeur , 11e peut y former tiei’ce opposition, quoique so n
« a cquisition y so it antérieure. »
2.0
M .r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , cite
deux arrêts. P a r le premier, « la dame de Conllans était en procès
�(
1
6
}
« avec un seigneur voisin pour m ouvance de fief, .
'
elle vendit
« sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
« son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
«..de? droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet a rrê t. . .
« l ’acquéreur y forma tierce opposition , on lui répondit q u ’il
« devait s’imputer de n’êlre p is intervenu : par arrêt du
31
« mai 1742, il fui déclaré non i-eeovabledanssa tierce opposition.»
P a r le 2 .c arrêt, « le marquis de L usignan ve n d it, en 172 0 ,
« des terres au sieur D auriac. . . . L es héritiers de la dame de
M onriquel firent; en 17 2 7 , confirmer , sur a p p e l, une sentence
« de 1718 , contre le .marquis de L usign an seul. M . r D auriac
« soutint qu|on aurait dû l ’a p p e le r, et forma tierce o p p o sitio n ....
« O n lui répondit q u ’il devait intervenir. . . . q u ’il était censé
« avoir été partie dans l ’arrêt par son vendeur , q u ’en cette
•« partie il était l 'ayant eduse du marquis de L usignan. Par arrêt
« du 6 septembre 1760 ,.il fut déclaré non recevable. »
3 .° L e
B u lle tin o fficiel de cassation rapporte 1111 arrêt du 12
fructidor an g , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s.r Forestier se fit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort et par
défaut du
3 janvier 1792.
. . G o d et, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le fruit d ’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art.
5 et
11 du Litre 27 de l ’ordon-
« nance de 1667, et l’art. x.cr du titre
35 . . . . Attendu
que la
« reserve du droit des tierces p erso n n es, 11e concerne que celles
« qui n’ont pas été parties appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessurt , était a cet égard
« son ayant cause. . . . que Lessart a élé appelé. . . . que G odet,
« en qualité de son ayant cause , 11’aurait pû être recevable à
attaquer
c e
ju g e m e n t, q u ’autant q u ’il eût été justiiié que L es
te sari aurait élé lui-même admissible à se pourvoir. . . . q u e les
« juges de C a n , en adm ettant la tierce opposition du cit. G o d e t ,
« onl violé l ’art. 5 de l’ordonnance concernant P a utorité de la
« C hose j u g é e , et ont contrevenu formellement à l ’art. i . cr du
titre
�J7
C
)
* « titre 3 S , qui ne permet de rétracter, autrement que par requête
« civile , les jugemens rendus en dernier ressort , avec ceux
« qui y ont été parties, ou leurs ayant cause................... Casse
« et annulle etc. »
V o ilà donc la pleine confirmation de la loi 4 CF. de a p p ella tion ib u s et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent même attaquer la chose
ju g é e , par la voie de l’a p p e l, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugement est en premier ressort; par la requête c i v i l e , s’il
est en dernier ressort.
T o u t cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n ’y avait eu fraude évidente. A u cu n s de ces arrêts ne sont dans
l’espèce d ’ un procès de succession. S o lis hæredibus com p elit.
D e u x autres moyens résistent à l’admission de la tierce oppo«sition des appelans. i°. Les tierces personnes ne sont admises in
définiment à s’opposer, d’après l ’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugement. Mais il a
été signifié aux Chouvenc en 1793 ; et ils n’ont formé tierce op
position qu’après dix ans. 2°. D ans les circonstances de la cause,
c ’était de leur part une action principale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
L es Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. Cepen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite commune. Quand ils voyaient Catherine M olin
dans la maison paternelle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu sortir; quand
Thérèse est revenue de l’Ardèche dans son pays natal, n’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter 1111 procès, ont-ils pu
se defendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et qui sur-tout en a payé le prix capital a une
femme séparée de biens.
A u reste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
condamné sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
C
�( i8 )
encore, d’exiger en règle générs’ é , que '^ut cohéritier dût sa
voir s’il y a des a c q u ére u rs, avant d erecherch r ses iiro t ; , cYstà-dire lût tenu de connaître les forces de la succession , lors
qu’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action de
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues
% ?
;
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N .
T hérèse M o lin avait-elle d ix ans ou trente ans p ou r se p ou r
voir contre sa renonciation ?
C ette qu estion doit-elle être d écidée p ar u n e ju risp ru d en ce
autre que c e lle du p arlem en t de T o u lo u se ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne m arque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouvenc
à pénétrer, par une voie d’intrusion , dans une famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
régleiiK nt de vos droits, on a annullé deux testamens : J e m ’y
o p p o s e ; je veux faire rejuger tout c e la ; je veux scruter vos
testamens, vos contrats de m ariage, tout ce qui s’est passé dans
votre maison depuis i y
35
jusqu’en 1798. V o s cohéritiers n’y
seront pas môme a p p e lé s, car il y a chose jugée avec eux , et
c ’ est moi seul qui veux faire ré g le r, avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seu le partie légitime.
Si ce système des Ch ouvenc, qui cependant est toute la base
(7u procès a c tu e l, ne révolte pas au premier ap erçu ; s’il faut
trouver en eux le seul lég itim e contradicteur, voyons donc par
quelle juiisprudence la chose ju g é e et remise en litige doit être
reju g ee.
Thérèse M o lin s’était pourvue en 1783, contre une renoncia-
�C
)
tion de 1 7 . E lle y a été recevable, parce que dans tout le par
lement de T o u lo u se, et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
55
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de
3o ans. Nous avons vu
sur la z .e question que toutes les
a ctio n s y étaient réglées à cette d urée, à la seule exception de
l ’ac
tion hypothécaire.
L es Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r , ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n’a même pris quelque
consistance que depuis le Code civil et par induction de l’un de
ses articles; jusques là , la Cour d ’appel ne s’était pas prononcée
et 011 trouverait même dans l’ un deses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrem ent, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’ap p el, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose jugée ,
m ême des questions nées en 1783 , dans un parlement étranger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement ju g é
com m e lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui en serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju g é e , mais
encore quand elle serait pleinement en litige? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était in con n ue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n ’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une marche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de l u i , par le pouvoir que leg e regid
il en a donné au prince. E n les exécutant, il les explique, et la
manière d’expliquer les lois par l ’usage , dit V m in u s ,
d après un auteur lalm , vaut mieux que ce qu’011 lit dans la loi
elle-même. P lu s valere leges quœ m oribus com probalce s a u t,
quant quœ scripto c o n s ta n t, vérité bien plus marquée encore
par la maxime si connue, que la jurisdrudence est le meilleur
G a
�( 20 )
interprète des lois. Consuetudo est legum optim a interpres.
L a jurisprudence en ellet qui n’est pas seulement un mode de
ju g e r , mais d ’après la définition de Vinnius , J u stitiœ habit us
p ra cticu s , n’a pas cessé d’être une espèce de législation impérative, depuis que les anc iens ressorts des Cours sont confondus.
Quand R om e n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudentum fixaient la m a
nière de les interpréter, et cette jurisprudence, devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrit de soumettre les lais
à la jurisprudence et de respecter les usages. Prœ ses p ro v in ciœ ,
probatis h is q u æ in o p p id o , frequenter in eodem controversice
g e n e r e , servata surit, causa cognitd statu it. L . 1. cod. quœ s.
long. cons.
L a Cour d’appel donne tous les jours cet exem ple, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait croire, par le but de
son institution, plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
m elle sur la question qui nous occupe.
« Considérant (porte un i . er arrêt du 2 messidor an 11 ) , que
« les dispositions du droit romain 11e font loi dans les pays même
« q u ’elles régissent , que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la ju risp ru d en ce ; qu’il est constant que, par
« une longue suite d’arrêts sem blables, te parlem ent de T ou« lo u se a ju g é , etc. » ( S i r e y , page 3 0 9 ).
2.0
Dans une autre cause, du
5 'floréal
an 1 2 , la Cour de cas
sation a dit: « Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre prê
te sens, et 20 ans entre absens ; cependant, d’après la jurispru<1 dence du parlem ent de T ou lo u se constatée par divers arrêts ,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s’acquérir que par la
« possession im m ém oriale, et que c ’est ainsi q u ’i l a entendu la
« l o i , etc. casse et annulle, etc. » ( L u l l t l i n , n.° 92).
�3 .°
( 21 )
Un arrêt du 2 Í du même mois a jugé de m ê m e , « que la
* jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir législatif, pouvait être considérée comme
« fixant le sens des dispositions législatives. » ( S i r e y , p. 2 6 7).
Si donc la Cour admet les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au Puy avec L acroisière, elle ne les jugera
évidemment que par la jurisprudence du parlement de Toulouse.
Thérèse Molin a renoncé en 17 5 5 , cela est vrai; mais, i.° elle
était mineure , et la convention porte q u ’elle sera tenue dè con
firm er et ratifier àsa majorité. E lle n’en à rien fait.
11 n’y
a donc
pas de partage final là où il y a lieu de le confirmer en majorité;
ce n’est jamais qu’ une mesure provisionnelle.
2.° On fit renoncer Thérèse Molin à tous droits et supplém ent.
I l est évident qu’on lui Ht entendre en minorité q u ’elle n’avait
qu’une légitime de rigueur. JJonc 011 la trompait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .°
Si on suppose qu’elle a approuv é les testamens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. Celui-là
seul prescrit le droit de réclamer contre une destination de légi
t i m e , qu i agnovit ju d ic iu m d efuncti. T els sont les principes
invariables comme la Cour l’a souvent ju g é , et notamment les
21 thermidor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4«° L e testament de 17^5 a été expedié par le notaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’elait donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse Molin pouvait croire Marie
Molin substituée, puisque la condition du décès de P ierre, sans
avoir rem is, était remplie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r e c u e illi, ne l’était pas. O r , non vidèntur qui errant c o n
sentit e , et la prescription.ne court que du jo u r d e là découverte
de la vérité.
5 .°
Thérèse M o lin , née en 1733, avait deux ans au décès de sa
.
mère , et dix ans au décès de sou père en 1743 Marie Molin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au mois de février
�C 22 ) f
1718. L e père l ’avait chargée de régir et adm inistrer conjoinletement avec Ignace M o lin , curé de C ham bon; et les Ghouvenc
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais connus , nous apprennent que ledit Ignace Molin parle
dans son testament de scs droits légitimâmes sur les biens de ses
père et mère , dont jo u iss a it M arie M o lin .
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins c o m p ta
ble depuis 1 7 4 3 , -enversune sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n ’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien inégale, lorsqu’il fut traité en 17IS0 , entre Marie
M o lin qu i, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testameiis, et Thérèse M olin qui
ignorait tout.
• O r , le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d ’admettre en
pàreil cas le réuonçant non v isis ta b u h s , a se pourvoir pen
dant trente ans. Q u ’on consulte M a y nard , liv. 2 , cliap. 99 et
100 ; D o liv e , liv. 4 , chap. ï 6; Catelan, liv. 8 ; Iiretonnier, v.°
restitution ; -ou plutôt qu ’on' parcoure tous les auteurs de ce
parlement , ou cens (pii mentionnent sa jurisprudence , 011 ne
trouvera nulle 'part que l’art. i3 4 de l ’ordonnance de i r> ait
53
été jamais appliqué à cette espèce.
L e parlement de P a r is , après l ’ordonnance de i539 , jugea
long-teins , comme le parlement de T oulouse a toujours jugé
L e s ailleurs d u i e m s même de cette ordonnance , notamment;
M r D u v a l , de rebus dubiis , enseignaient q u ’il n’y a contre les
actions en nullité que l ’action trentenaire. Quaranlo ans après
le parlement de Paris changea sa jurisprudence', niais enfin il la
changea de nouveau après l’ordonnance de 1667 ; et il a inva
riablement ju g é depuis que l’art. 134 de l’ordonnance de i539
né s’appliquait q u ’aux actions rescisoires.
Cette jurisprudence constante s’est maintenue ju sq u ’au Code
civil. On a vu encore, dans les discussions sur ce Code, les clibrts
des sections réunies de la Cour d’appel de Paris, pour faire main
�C 23 )
tenir l ’action cle-trente a n s , et 011 n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d ’Orléans et de L iège.
L e tribunal civil du Puy-d é-D ôm e commença par suivre les
anciens principes.
11 jugea le
28 pluviôse an 4 , entre les
Cham pom ier et S e z e l, que l ’action en nullité avait duré trente
.ans, en floréal an
.
5,
à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lui donnait pas cet exemple;
elle avait ju g é 011 thèse le
3 messidor an 4 , que
Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de m ariage, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
3
« Attendu que l’art. i i de l’ordonnance de i
53(),
déclare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra« teurs. etc. directement ou indirectem ent, avant le compte
« rendu , et q u ’une vente , f lile par une mineure en faveur d ’une
« personne qui administrait ses b ie n s , présente un avantage
« indirect ;
« Attendu q u ’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente an s,
« parce que suivant l’art. i . e r, tit. 29 de l’ordonnance de 1667,
« le comptable 11e cessant de l ’être que par la reddition de son
« com pte, c ’est le compte seul qui peut éclairer le mineur sur
a ses intérêts;
« Attendu que l ’art. 134 de l ’ordonnance de i53 9 qui restreint
« le délai a dix ans , n ’est relatif q u ’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de com m un avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n ’était pas besoin de lettres ,
« casse et annulle , etc. »
,11 est
même remarquable que le Bulletin officiel ju s q u 'à ce
j o u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de Ilio m ne s’est prononcée, pour les d ix
ans , pour la première f o is , que le 18 prairial an 11 , c ’est-àdire, depuis le Gode c i v i l , et par induction de l ’article 475. On.
verrait même , dans un arrêt du
25
nivôse an 10 , que la pre
mière section avait admis une femme pendant trente ans, et jugé
�24
(
)
encore que l ’action n’avait couru q u ’après le décès du père, qui
avait constitué la dot maternelle par le contrat attaqué. Mais si
cet arrêt ne juge pas la question isolément et en thèse, il paraît
au moins certain que la Cour n’a jamais jugé en faveur de dix
a n s , avant le Gode civil.
Com m ent donc concevoir que la Cour put infirm er le ju g e
ment du P u y qui a admis Thérèse M o lin , après d ix ans , lors
que ce tribunal a jugé comme son parlement , comme le par
lement de Paris , comme la Cour de casation elle-iuême.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L 'a c tio n de Catherine M o lin est-elle prescrite par trente ans ,
q u o iq u ’e lle ait co h a b ité la m aison p atern elle ?
L e s Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir celte
prescription par des citations qui n ’ont pas la moindre analogie.
i .° D argentré q u ’ils invoquent sur l ’art. 276 de Bretague , ne
s’occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire q u ’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. Enfin , L a pëyrère , bien loin de vouloir la prescription, dit expressément
ce ciui suit : « T a n t que les enfans sont nourris sur les biens de
«’ l ’hérédité, la prescription de la légitime ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « id e m , en matière départagé » ;
et il se fonde sur Coquille , en la question 259.
M a is , outre L a p e y rè re , on ne voit pas d ’auteurs qui aient
traité la questio n , s’être expliqués autrem ent, et si on en cite
plusieurs autres, c ’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n ’ont pas voulu chercher la question où ils l ’auraient
trouvée.
D o liv e en fait une question expresse au chap.
3i
du liv.
5,
et décide que « si les enfans vivent en commun sur les biens de
« l ’hérédité , celte prescription ne court pas contre e u x , en cette
« rencontre,
�c 25>
a rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment q u ’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d é fu n t, ils sont censés être en possession. »
63o et 26 août i 636 .
Cette opinion est encore enseignée par Y e d e l , liv. 2 , chap. 36 ;
Serres, pag. 294; Dunod , p. ¡101 ; D espeisses, t o m .2 , p. 3 i 3 ;
et L e b r u n , liv. 3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
D o liv e cite deux arrêts des 10 janvier i
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion , si les auteurs ne l ’enseignaient pas.
L a Cour d ’appel vient très-récemment de p ro n o n c e r, dans
un arrêt du i
3 ventôse an i 3 ,
le m o tif suivant :
« A ttendu que l’habitation d ’Antoine et Pierre Vescham be ,
a dans la maison paternelle , a constamment réclamé la con
te servation de leurs droits. »
A insi Catherine M olin qui a habité la maison paternelle jus
q u ’en 1788 ; qui n ’en est sortie que pour former la demande ,
n ’a pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, comme les
C houvenc le font aujourd’h u i , que la cohabitation n ’avait pas
empêché de prescrire.
L es Chouvenc veulent que cette"prescription ait couru à
leur égard , quand elle n ’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est diiïicile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir h la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J e a n n e , et celles de Marguerite et de Pierre M olin ; car l’ac
tion d un cohéritier se compose de tous les droits partiels , qu i
ad hœreditatem v e n iu n t,* et comme les portions advenues à
Catherine M olin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne, aussitôt leurs décès, en vertu de la règle, le mort
ja is it le v i j , Catherine M olin a é lé , dès cette é p o q u e , proV
�Ci6)
priétaire d ’une quotité plus con sid érable, et n’en a pas plu*
perdu une fraction que la totalité.
S
i x i è m e
Q
u e s t i o n
.
l e testam ent de Catherine F erra p ie e s t-il v a la b le?
« U n testam ent, dît R ic a rd , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa so lennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n etYet, dans cet acte si im p o rta n t, îl faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d’après les ordonnances.
L e testament de 1,735 est vîcié par deux nullîtés textuelles : i.o
il est dit f a i t et ré cité en la m aison de P ierre M o lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a d ic té , pour q u ’il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
Il n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n’avoir su ou pu signer , car on
y■
lit seulement : « L a d ite testa trice i l l e de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de i y
35 dit
que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lecn ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’iTne sait ou ne
« peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . z 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
Mais , disent les Chouvenc , le testament de Catherine
3
Ferrapie est antérieur à l ’ordonnance de i y a : cela est vrai.
M ais cette ordonnance ne fait que répéter en cette partie les
dispositions des ordonnances d Orléans et de Blois.
« E t en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« sig n e r, les notaires f e r o n t m entioji de la réquisition par eux»
�27
(
)
a faite aux parties ou témoins de s i g n e r , et de leu r réponse
« qu ’ils ne savent signer. » Ordonnance d ’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i
65.
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de 178s.
E t les auteurs qui ont écrit avant l ’ordonnance de 1735 ,
enseignent que cette réponse ne peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e M aitre , sur Paris , article 1 4
,
chapitre i . e r ; R a v i o t , question 164; M aillart , sur A r to is ,
art. 74 ).
On cite souvent R icard, comme ayant rapporté un arrêt de i6 6 z
validant un testament où il était dit : « L e q u e l n’a pu signer ,
« interpellé de le faire. » Mais on pourrait voir que R icard le
désapprouve, en disant que cela est un peu subtil , et q u ’il y a
grande apparence’ que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
A ussi R i c a r d , n.° i 5 z 6 , citant un arrêt qui validait un testa
ment où le testateur a déclaré ne savoir signer , sans que le
notaire eût dit l ’avoir in te rp e llé , ajoute : « Il en serait toute« fois autrement , si le notaire déclarait de son nom que le
« testateur n ’a pu signer , parce q u ’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse du
« testateur.... C ar le notaire, dit Ricard , au n;° i
568 , ne doit
« contribuer d ’autre chose que de son oreille et de sa main ,
« dans la rédaction du testament. »
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans D enizart un arrêt du
5 septembre
1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n 'a v a it pu sig n er à cause de sa fa ib le sse , de ce en qui s.
XiC iribunal civil du Puy-de-D ôm e a ju g é deux fois de la
meuie maniéré , le 17 ventôse an 6 , sur appel du Cantal , et
le
23 pluviôse an 7 ,
erçtre les héritiers V a c h i e r , d ’A ria n e.
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la Cour»
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur dé
fi a
�.
( 2 8 )
cla ren e savoir signer, il soit fait m ention expresse de sa d écla
ration ; ainsi la loi n ’a pas c h a n g é , et la cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
L e s Chouvenc se sont imagine' cpie les ordonm nees d ’Orléans
et de Blois n ’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait que tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
sans dire nulle part que leur parlement ne les adopte pas.
A la vérité D o live dit que de son tems on n’était pas rigo u
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan inait pas si le testateur avait sigué ; ' mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. F urgole dit au contraire
que les fo rm a lités que les lo is prescrivent, p ou r la v a lid ité des
testam ens , sont de droit p u blic , et q u ’ un testament doit porter
la preuve avec lui-m êm e; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement observées.
D ans le testament de Catherine Ferrapie , il n’y a pas môme
11 preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. L es Chouvenc
se sont, efforcés de persuader q u 'ille veut dire illité r é , puis
cju'illité r é veut dire ne sa it écrire, puis enfin que les mots ne
sa it écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
M ais d’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une autre irrégularité ,
en ce q u ’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
U n arrêt de règlement de i
685
défend aux notaires d’ user
d’aucune abréviation ou interligne d ins toute espèce d ’actes. Si
elles ne touchent pas à l’essence de l’a c t e , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
V in n iu s et la loi nous apprennènt que dans les testamens sur
to u t , qui sont testa tio m e n tis , il fiu t écrire en toutes lettres
et d’une manière intelligible sans user de simples notes ou abré-
�( 29 )
via t ion s. Ccvterum îilteris iisq u e u sita tis et leg lb ilibus scribendum esse p la ç a i t , non s ig n is , obscurisve jio tis , L G , § . u lt.
de bon. p oss.
L e mot illilé r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’A cad ém ie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferr iè r e , ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de T rév o u x le mot M é tr é , signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n ’y a pas dans le testament i l l i l é r é , il y a i l l e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de tro u v e r,
dans ce mot biza rre, une déclaration de la testatrice, q u ’elle n ’a
pu ou su signer. Allons plus loin même , le m ot illité r é ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I O N .
Q u elle est la nature de la substitution du testam ent de i y
a -t-elle transm is la su ccession à M arie M o lin ?
35 ?
Quand ce testament serait valable en la fo rm e , il ne produi
rait pas encore l’effet de réduire Thérèse et Catherine M olin à
une légitime de rigueur.
C ar le système des Chouvenc à cet égard , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ ils accréditaient encore plus
par une expression infidelle de l’expédition, q u ’ils avaient d’abord
produite, de ce testament.
Les héritiers institués, disaient i l s , étaient Ignace M olin et
pierre Boyer. Ils étaient çhargés de rendre la succession à Pierre
M olin quand bon leur semblerait. Pierre M olin est mort en 174^,’
et M arie M olin était appelée à la substitution , dans le cas où
ledit Pierre M olin décéderait sans avoir rem is la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , d o n c , en vertu de la m axim e
su b slitu tu s substituto est su b stilu lu s in stitu to , Marie M olin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
- D ’abord il est prouvé par l ’extrait vidim é du testament de
�c 30 )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la C o u r , q u ’au lieu dit
m ot remis il y a recu eilli. Gela p o s é , voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d'une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution fidéicommissaire et la substitution
fiduciaire.
L a première fait passer réellement la succession sur la tête du
grevé : l’autre ne lui transmet qu ’un dépôt à titre de confiance,
et le grève d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus , qui a fait un traité sur les fidéicommis , le définit
ainsi. F id u cia riu s est hœres q u i, non su î con lem p la tio n e sed
alterins g r a liâ 'in s tilu tu s , eidem restituere hereditatem ,p o s t
diem certain v el in ce rta in , rogatus proponitur.
« Ces substitutions, disent Henrys et Bretonier, sont com
te munes dans les pays de droit é c r i t , sur-tout en faveur du sur« vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l’obéissance h o c co n silio ut parenti obsequerentur..........
« Q uoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pas
« m arqué dans le testam ent, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
0 lib e rté , et n’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
« O n doit penser, dit ailleurs le même a u te u r, q u ’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; q u ’il vise plulôt à leur
« utilité., et ne l’avantage q u ’ù leur considération ; qu'ainsi il ne
« l ’a instituée que par la nécessité de leur bas âge , non ut j i l i i s
m inoribus o b e s s e t, sed p o tiu s ut eis con su leret• » ( henr. t.
3
1 ,e r , p. 7 3 6 , t. , p» 69 )•
T o u s les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du iid u ce , q u ’011 retrouve tous dans le testament
de 1735.
�C
30
' i.° Catherine Ferrapie avait un fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2-° Ferx-apie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédité à son
fil s, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d’aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grévé de fidéicommis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( l. i . er § . 5 , ad treb. ) ;
3 °. E n
remettant l’ hérédité à Pierre , ils étaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les Fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre chosè , sans
aucune stipulation ;
4.0
Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , u t p a ren tibu s
obsequerefitur. A cela prè-8, elle exigeait les mêmes soins pour
eu x, que si elle eut été v iv in te , sed p o tiu s ut eis con suleret.
A in s i disparaissent Pierre B oyer et Ignace M olin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre M olin , impubère , vé ri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre M olin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était a la vérité grévé lui-même de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u i l vint à m ourir sans
p o u v o ir d isp o se r, ou sans a v o ir r e c u e illi la d ite hérédité.
O n voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non e x tite r it hceresJilius ,
aut si irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre M olin n’est pas mort sans p o u v o ir disposer ,* car
en pays de dro.t érr.t le m ineur avait testam enti fa c tio n e m
aussitôt q u ’ il avait atteint sa puberté. O r , Pierre M olin , né
en 1781 , était puioère en 1746 , et il n ’est décédé q u ’en 1748.
Si ce in o je n n ’était pas péreinptoire , on opposerait aux
�I
(3 0
Chouvenc que la mère ne pouvait pas Faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
comme l ’enseignent les institutes , is substituere p o te st h beris
im puberibus
q u o s
in
p o t e s t a t e
h a b e t
,
cùm e ju s œ tatis sin t
in quâ ip si testam.en.luni fa c e r e non p o ssu n l.
Il
ne reste donc que l’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloigne'e
encore par le principe-enseigné par Cujas sur cette matière ;
c’est que la règle su b stitu lu s substituto n’a pas lieu en la subs
titution p u p illa ir e , et le substitué au pupille n ’est pas censé
1
l ’héritier du testateur. ( C u j a s , ad . 4 1. de vul. et pup. s u b .)
A in si le testament de 1735 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière à Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab in testa t : donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son c h e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e testam ent de 1743 e s t- il n u l?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité ne change rien à
l ’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce q u ’elle a été agitée lors du jugem ent de 1793.
Pierre M o lin père a institué son iils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses eufans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hœredem in s titu â t, aut exhceredem nom inatini fa c ia t , a lioquin inuti/itcr testabitur.
Celte disposition a été répétée dans l’art.
5o de
l ’ordonnance
de 1 7 3 5 , qui dit q u e , dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
v droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M ais l'héritier, institué par le testament de 1748, étant décédé.
ab in te s ta t, il importe peu que ses sœurs viennent de son chef
ou
�33
(
)
ou ju r e suo , à la succession de leur p è r e , il n’est pas moins vrai
de dire q u ’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
L es Chouvenc terminent leur mémoire par d em an der, i.®
q u ’on estime les biens de la succession M o lin ; 2.0 q u ’on accorde
à Marie M olin leur venderesse , les prélèvemens qu ’elle aurait à
faire, notamment trois q u ’ils indiquent; 3.° q u ’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances , s’il en existe.
A l’égard des .deux premiers articles, le jugem ent dont est
a p p e l, y a fait d r o i t , en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intim és, avant d’en venir aux
Chouvenc.
'
A insi les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intéi’êts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et p o u v a i e n t f a i r e , pour conserver l ’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugem ent dont est appel.
A l o r s , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils au
ront droit et intérêt d ’en requérir, s’il y a lieu , et il ne leur
sex-a pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n ’est q u ’ une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité de
fraude qu ’ils n ’ont pas le droit de soupçonner sans m otif; car
la fraude ne se présume pas.
T o ut prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souffle
encore un tioisicme procès , après en avoir perdu deux , et les
exclamations des C h o u ven c, pour crier à la collusion , ne, sont
qu'une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audiencc avec une
loule de papiers de la famille M olin , q u ’ ils n e'po uvaien t tenir
que de lui. T out ce cpi’ils <>nt; expliquai siit cette famille avec
tant de détails, 11e peut être de ieur science personnelle, et il
st rem arquable q u ’ils n ’o n t ■jan^Ai d e n iitn d éW com m u n ich t'io n
E
\
�( 34)
les pièces du procès par écrit ju g é en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés q u ’ils elevent.
M ais tel est le résultat fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont q u ’un piège tendu aux
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour v e u t statuer
sur les questions d ’ un partage, avec l ’acquéreur d’ un cohéritier ;
si elle veut examiner le bien jugé du jugem ent en dernier res
sort de 1793 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce ju g e
ment étaient sages et lé g a le s , et n ’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M .e D E L A P C H I E R , avocat.
M . e D A U D E } avoué.
A
R I O M ,
D e l ’im prim erie du Palais, chez J.-C. S A L L E S . ( A n X I I I ) .
�
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Factums Marie
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Description
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1735-Circa An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0624
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0326
BCU_Factums_M0729
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53884/BCU_Factums_M0624.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume de Paris
jurisprudence
prescription
prétérition
Successions
testaments
tutelle
-
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48c083cd0127faf3e4727e2ff261e442
PDF Text
Text
M E M O I R E EN R É P O N S E ,
y
Pour
C
a t h e r in e
M O L I N , et les S.r et dame V E N D R I E Z
et B O R N E , intimés ;
CON TRE
Jean et autre Jean CHO U V E N C 3 appelans.
Q U E S T I O N S .
1 ° L a procédure des a ppelans a -t-elle é té périm ée de p le in
droit dans le ressort du parlem ent de T o u lo u se ?
; 2 ° S i e lle n 'est p a s p é r im é e , p e u v e n t-ils, com m e tiers a cqué
reurs, repousser l'a ctio n des in tim és p ar la p rescrip tio n de
d ix a n s , dans le m êm e parlem ent ?
3 .° S 'il n 'y a p as p rescription , les a ppelans so n t-ils recevables en la dite q u a lité d'acquéreurs d'un c o h éritier, à fo rm er
tierce op p osition à des ju g em en s en dernier r e sso r t, rendus
sur a p p o in tem en t, entre leu r vendeur et ses autres coh éritiers
pour le règlem ent de leurs droits resp ectifs à la su ccessio n
com m un e ?
4.0
Thérèse M o lin a -t-e lle eu 10 ou
3 o ans p ou r se p o u rv o ir
c o n tre une renonciation surprise en m in o rité p a r des p rotuteurs,
dans l ’ignorance de ses droits et sans être in fo rm ée que les testamens de ses père et mère étaient n u ls ?
C ette question d o it-elle être décidée par une ju r isp ru d e n ce
autre que ce lle du parlem ent de T o u lo u se ?
5 .° C atherine M o lin a -t-elle p e r d u , p a r la p rescrip tio n de 3o
A
�(*)
a n s, le droit de dem ander le p a rta g e, pendant sa coh a b ita tio n
dans la m aison p a tern elle ?
6.° L e testam ent de Catherine F e r r a p ie , sa ns s ig n a tu r e ,
ou déclaration nég a tiv e de la te sta tr ice, et sans lecture à la dite
testa trice , e s t-il v a la b le? Q u e ré su lte -t-il p o u r ou contre sa
v a lid ité de c e q u 'il est antérieur à la p u b lica tio n de Cordon
na nce de 1735 ?
7 .0
L a prem ière su b stitu tion q u 'il c o n t ie n t , e st-e lle J id é icom m issaire o u jid u c ia ir e ? L a seconde est-elle une su b stitu tion
p u p illa ire ? E st e lle v a la b le? A - t- e lle transm is la succession à
M arie M olin , dernière appelée ?
8.“ L e testam ent de P ie rre M o lin , q u i a sim plem ent lé g u é
un e légitim e à ses enfa n s p u in es , e st-il n u l p o u r v ice de prétériu o n ?
T .L L .S
sont les questions importantes et nombreuses qui
divisent les parties et qui ont occupé la C o u r pendant plusieurs
audiences. Une expédition infidelle du testament de Catherine
F e rra p ie , rapportée par les Chouvenc , contenait deux expres
sions, dont ils abusaient en faveur de leur cause. L a Cour s’est
vu e forcée d ’ordonner une collation vidimée de la minute de cet
a c t e ; aujourd’hui la nouvelle expédition est 1apportée, et les
intimés se verront enfin en possession de leurs droits successifs,
après avoir plaidé 22 ans , et s u b i , pour faire juger un simple
p a rta g e, quatre degrés de juridiction.
F A I T S .
Pierre M olin a v a it , dit-on, pour frères M a rc e lin , Biaise , et
Ignace Molin. Tous , excepté le dernier , sont inutiles à la
cause; et pour ne pas l’em bro uiller, les intimés se contentent
d’en rappeler les noms , pour passer à la descendance de Pierre,
marié ù Catherine Ferrapie. Ils ont eu six enfans.
�(
3 )
P ierre M olin , mort en 1743.
Catherine F e r ra p ie , morie en i y 35.
!
M arie M olin.
M arguerite ,
Pierre ,
i.e r m a r i,
N .. Cliam barliac.
m orte s. p.
né le 2 m ai
en 1741.
1731 ;
,
2.e m a r i
N ... D e jo u ï.
3 .e m a r i,
C la u d e-L a m b ert
L acro isiire.
■ 1
Catherine , Jea n n e ,
intim ée.
m. s. p.
eu 1770.
m ort s. p.
le 3 noyemb.
1748.
Jeanne B o rn e ,
L ou is V e n d r ie z ,
intimé«.
L e 2u m ars i y 35 , Catherine F errapie fit son testament. E lle
légua à ses six enfans leur légitim e de droit, à titre d’institution.
.V oici les dispositions et la form e de ce testam ent:
Catherine Ferrapie institue pour ses héritiers universels Ig n a c e
M olin* curé de C h a m b o n , son beau-frère, et Pierre B o ye r, son
o n cle , « à la charged e rem ettre, quand bon leur sem blera, ladite
« hérédité à P ie r r e , fils de la testatrice, et au cas que ledit Pierre
a M olin vint à mourir sans p o u v o ir disposer, ou sans avoir
« recu eilli ladite hérédité, elle lui substitue M arie. Ladite testa
it trice fait ladite institution sans d ista ctio n de quarte et sans
« qu’ils soient obligés de rendre aucun com pte des fr u it s de
a ladite héréd ité, et à la charge de faire entretenir et élever ses
« e n fa n s .... Fait et récité audit T e n c e , dans la maison d’autré
« sieur Pierre M o lin , en présence d e ..............témoins soussignés.
« L adite testatrice ille de ce enquise et requise............. »
L e 20 mai 1743 , Pierre Molin père, fit son testament : « ¡1
« institue pour son héritier Pierre M olin son fils. . . . Il donne
« et lèg u e à ses cinq autres enfans leur légitime de droit;
« et attendu le bas âge de son héritier, il prie Ig n a c e M olin
« curé de Chambon , son frère , et M a r ie , sa fille , de ré ‘n r et
« administrer ses biens , jusqu’à ce que son héritier soit en état
A 2
�;
( 4 )
« de le faire..........Fait et récité à T en ce , maison du testateur »;
Pierre M olin mourut le 21 du même mois de mai 1743. A lo rs
Marie Molin , m a je u re , et mariée dans la maison paternelle ,
s’empara des deux successions. Ignace Molin était curé de Gham bon , Pierre Boyer était mort en 1740; et Pierre Molin , appelé
aux deux successions, s’engagea aussitôt qu’il en eut l ’âge. Il
mourut à L ille le
3 novembre 174O, et 011 fut long-tems dans la
famille à douter de sa mort.'
Quelques années apiès, 011 trouva l'occasion de marier la plus
jeune sœur, Thérèse M o lin , avec le sieur Borne , d ’ une province
étrangère, moins capable par conséquent d’avoir l ’œil aux affaires
de la maison , et par le contrat de mariage du 5 juin 1755 , le
sieur Gliambarliac lui constitua 1,900 IV. de dot, en bien expri
mant que c’était pour les successions du p è re , de la m ère, de
la sœur d é cé d é e, et même on ajouta celle du lrère , quoiqu’on
n ’eût pas de nouvelles de la mort. Thérèse M olin, m in eu re, re
nonça à toutes successions, et s’obligea de la confirm er et rati
f i e r à sa majorité. On ne s’ est jamais avisé de lui demander celte
ratification. Mais , indépendamment de cela , malgré son éloi
gnement, elle aurait cherché à se pourvoir, sans l’ap ithie du sieur
Borne son m a ri, et si encore sa famille, flattée de l’alliance du
sieur C h a m b a r lia c , 11’eût toujours persuadé que M ir ie Molin
était l’héritière de ses père et n ère. Quand le sieur C h am barliac décéda, elle passa en de secondes noces avec le sieur Déjouv,
puis en de troisièmes, avec le sieur L a m b e r t- L a c r o i s i è r e , qu’elle
institua héritier universel , et qui acheva , à peu de chose p rè s,
de dissiper la succession.
Thérèse M o li n , veuve, revint habiter près de sa fam ille, et
11e connut qu’alors l ’étendue du sacrifice qu’on avait extorqué
de son inexpérience. L e 22 janvier 1783, elle a s s i g n a Marie Molin
et Lacroisière, son troisième m a r i, en partage des successions
de ses p ère, m ère, frère et sœurs, pour lui être délaissé sa p o r
tion rffïorante.
Après cette dem ande, elle fit donation de ses biens à la dame
�( 5 )
...
V e n d rie z , sa iilîe , qui intervint. L e procès fut appointé a T e m ’e ,
et le 2 novembre 1 7 8 4 , il intervint sentence qui ordonna le par
tage du c h e f de Jeanne seulement ; et avant faire droit sur le sur
p lu s, ordonna une estimation préalable des biens des père et
mère communs.
L e s druir parties interjetèrent appel'dé cette sentence ; les pro
cédures se continuèrent en-procès par écrit jusqu’à la révolution.
L e tribunal du district du Puy fut choisi pour connaître de cet
appel.
C e tribunal rendit son jugement le 26 janvier 1 7 cj3 , sur pro
ductions respectives, cl jugea dans ses motifs :
i.° Que le testament du père était nul par prétérition; 2.0 cjue
la substitution, portée d;:ns celui de la mère, avait s'isi Pierre
Mniin de la success on , et que ledit M olin étant mort après
quatorze ans, les substitutions s’étaient alors éteintes ; 3,° que
la rcnouuicition de Thérèse Molin était nulle , comme n’étant
dhigee nu profit de personne , comme faite par une mineure ,
avec i-o'ivent on dr ratification non effectuée, et comme dirio-ée
au pr<ur d’ une pioîutru-c , et que l’action avait duré trente ans.
E n conséquence , ce tribunal ordonna le partagé desdites suc
cessions, |iour etre délaissé à la dame Vendriez sa portion, expli
quée et calculée audit jugement.
I)c son côté, (.atlu-rine M o lin , sortie de la maison paternelle
à la mort de sa sœ u r, en 1 o8ii , avait assigné L am bert-L acroisière, son héritier, le ¿17 novembre de la même année pour venir
à partage, et lui expédier un cinquième du ch e f de son p è re , et
seulement un douzièm e, du chel de sa mère, parce qu’elle avait
aussi vécu dans la cro yan ce, que. Marie M olin était héritière
par dés testamens qu’elle n’avait jamais^vus ; elle demanda éga
lement les successions collaterciles.
: U ne sentence du 17 août 1790 ordonna c o p a rta g e , pour être
expédié un douzième des biens de la m è r e , un dixième des biens
du p è ra , et dans lus mêmes proporlions pour les successions col
latérales.
�,
( 6 )
*_es ueux parties interjetèrent encore appel ; Catherine M olin
alors ayant eu connaissance du testament de sa m ère, rectifia
ses conclusions, et demanda un seizième du c h e f maternel.
L e P u y ¿tait aussi saisi de cet appel qui s’instruisit en
procès par écrit par plusieurs écritures, et il était sur le point
de recevoir sa décision, lorsque fut rendu le jugement ci dessus,
du 26 janvier 179^*
O n présume sans peine que Lacroisière, succombant vis-à-vis
M a r ie - T h é r è s e M o l i n , en dernier ressort , n’avait garde de
plaider plus long-tems contre C a th erin e , devant le même tri
bunal. Il demanda accommodement ; les parties traitèrent, le
19 février 1 7 9 3 , et comme on le voit , en grande connaissance
de cause.
Lacroisière, par cet acte , dit qu’il adhère au jugem ent , en
dernier re sso rt, du 26 janvier , et consent que des experts fassent
le partage des portions revenant à T hérèze Molin.
Il y consent aussi vis-à-vis Catherine Molin , mais avec con
vention qu’ elle ne réclamera les jouissances que depuis 1788.
Il est convenu que les experts expédieront d’abord la maison
q u ’il occupe , un domaine et’un jard in, et déduiront les créances
q u ’ila'acquittées envers Jean-Antoine M o lin , à la déchai’gedetous.
E t comme évidemment ces biens ne suffisaient p a s, il apprend
qu’il a vendu aux nommés C houvenc , I r a is s e , C u o q , lio y e r ,
D e lé a g e , et laisse à Catherine et Thérèse M o lin , à se pourvoir
contre e u x , ainsi qu ’elles aviseront.
E n f i n , celles-ci font le sacrifice de tous leurs dépens, tant des
causes principales que d ’appel.
L e 26 février 1 7 9 3 , les i n t i m é s signifient à ces tiers acquéreurs,
uon-seulement ce traité, mais encore le jugement du 26 ja n v ie r,
pour qu’ils l ’attaquent s’ils s’y croient fondés.
L e 11 a v r il, ils les assignent tous en désistement et jugement
commun ; la plupart acquiescent à la deinaude. Le moyen des
Chouvenc n’était pns alors d’attaquer le jugement du 26 janvier
1790 , mais de dire qu’ils avaient des lettres de ratification.
�C7 )
L e 19 prairial on 3 , un jugem ent ordonne le désistement en
expliquant que les intimés épuiseront, i .° les biens lib res, z.° ceux
abandonnés par les acquéreurs , qui ont acquiescés avant d ’en
venir a u x Chouvenc. Ils sont condamnés à rapporter les jouis
sances , seulem ent depuis la demande comme acquéreurs de
bonne foi.
Depuis cette époque le tem<? de la péremption s’accomplit : ce
n ’ est que le 9 vendémiaire an
3 , que les C h ou v en c signifient l’ex
ploit de l’an 4 a Catherine Molin s e u le , pour assister en la cause.
1 L e 16 germinal an 9 , les intimés on» assigné les C h ouvenc en
lu cour, pour se voir démettre de leur nppèl.
('/est en la cour , seulement pour la première fois , que les
Chouvenc ont inviginé d ’attaquer le jugement du 26 janvier 1793,
par tierce opposition. Leur résistance soutenue est fondée sur
leur nrétenduo bonne foi : t-ppendant ils ont acquis d’une cohén iic te qui avait une pcput dans la m aison, ils ont fait p lu s, ils lui
ont paye le prix de la vente, quand elle était séparée de biens.
M O Y E N S .
S i, quand les intimés ont plaidé avec le sieur L a c ro isière , ils
avaient eu le moindre soupçon de la vente fa îte a u x C h o u v e n c ,
le même procès aurait tout term iné: et certes, en voyant toute
la résistance du sieur Taci-oisière e t combien le tribunal du P u y
a approfondi les questions de ce procès , il est aisé de v o ir que les
moyens des Chouvenc n’auraient rien changé i sa déc ision. Quand
ils ont été appelés devant les tribunaux de la Haute-Loire et de
L ’A r d ê ih e , l’idée ne leur est pas même venue d ’attaquer le j u
gement du 26 janvier 1793 , et de faire rejuger un procès qui
leur était étranger ,
et
dont l’issue eut indubitablement été la
même- mais à R i o m , une d iv ersité , ou plutôt une innovation
d e j u r i s p r u d e n c e a changé leur plan. L e s Chouvenc veulent a u
jourd’hui faire tout remettre en question; mais avant d’aborder
le fonds , ils sont arrêtés par des questions préalables qu’ il
s’agit d’examiner.
�C3 )
P R E M I È R E
' QUE S T I ON.
L a procédure des* appelons est-elle périm ée?
‘
L a loi Properandwn et
i
...
1’ordonnance de Boussülon veulent
que tous les procès soient promptement jugés ou entretenus par
des procédures, sinon l’instance est d-îclarée périe.
L e parlement de Paris avait modifié ces lois par un arrêt de
règlement de 1692 , qui, voulait que la. péremption n’eût lieu
qu’après une demande ; mais cet arrit n’a eu d’eiiet que dans son
ressort. A u parlement d e .T o u lo u s e , au contraire, l’ordonnance
de Roussillon était suivie à la rigueur; la question de savoir si la
procédure avait été entretenue sans discontinuation , était même
devenue un formulaire dans le dispositif des senteuces; la pé
remption y a toujours eu lieu de plein droit, et le juge la suppleiiit
si on ne la demandait pas.
?
Cette jurisprudence a dû se maintenir, et s’est maintenue en
effet en la Cour. Quand des questions de péremption se sont pré
sentées pour l’ancien ressort de Toiilolise, la Cour a ju g é , notam
m ent les 18 pluviôse an.r 1 et 12.nivôse an 12 , que la péremption
avait eu lieu de plein droit, même pendant la révolution , et la
suppression des avoués.
On objecte que les intimés ont couvert la péremption en anti
cipant le 16 germinal an 9.
Mais i.° cet exploit assigne lés Chouvenc pour se voir démettre
de leur a p p e l, et cette expression générale et indéterminée com
prenait toutes les voies légales qui pouvaient conduire ¿1 cette
démission d’appel; il serait dpnc bizarre de dire que celui-là ap
prouve u n 'a p p e l, qui assigne l’appelant aux lins de s’en voir
déihetlre. Il faut bien que la péremption même soit prononcée
en justice, et personne n’osera exiger que celui qui la prétend
acquise, soit oblige de s’en tenir à ce rn jyen seul; car en Cour
d’appel il n’y a pas d'exceptions sur lesquelles,il faut statuer préa
lablement) connue l’exige, en première instance, l’ordonnance ’
de
�(9)
de 1667.. On sait assez qu’il faut, en
Cour
souveraine, proposer
tons ses moyens à la fois.
2 .0
Cette question a été discutée par M . r le procureur géné
ral M e r li n , en ses nouvelles questions de droit , v.° a p p e l, §. 9,
avec sa profondeur ordinaire, et il décide que d’après le systeme
de l’ancienne et de la nouvelle législation, la péremption est un
moyen de droit puhlijj tendant à l’abréviation des parties , et
qui ne se couvre pas. L es ordonnances , dit-il, le veulent a in s i,
les anciens arrêts y sont conformes, et la loi du 14 octobre 1790»
qui s’est occupée de la procédure des justices de paix, dit qu’a
près quatre m o is , C in sta n ce sera p érim ée de droit et V action
étein te ; donc, a jo u t e - t - i l, le juge doit déclarer la péremption
acquise, lors même que la partie intéressée n’y conclurait pas.
M , r Merlin , en sa discussion , ne s’occupe p a s , comme 011
pourrait le croire , des péremptions de quatre m o is, qu’il ne cite
que pour comparaison. L ’ordonnance de Pvoussillon lui sem ble
aussi c la ir e , toutes in sta n ces disco n tin u ées pendant trois ans
sont éteintes et péries. A va n t son arrêt de 1692 , le parlement
de Paris le jugeait ainsi. On trouve deux arrêts précis des 27
juillet 1604, et 27 août 1610. Menelet et Bouchel enseignent les
mêmes principes.
« L a péremption, dit B o u c h e l, une fois acquise, ne se couvre
« point par une procédure volontaire , depuis faite en l’instance
«
«
«
«
périe, ensorte que nonobstant qu'on ait repris cette in sta n ce
on peut faire juger la péremption................ L ’ordonnance de
Roussillon porte que toutes instances sont éteintes et péries.
C ’est un droit p u b lic auquel 011 ne peut déroger».
Par une fatalité attachée aux lois humaines , les auteurs con
temporains les trouvent ordinairement très-décisives et sur-tout
t r è s
- respectables ; mais à la longue ce respect s’afiaiblit singu
lièrement. De là vient que les auteurs du 16.e siècle voyaient, dans
l ’ordonnance de 149.3, ce que nous ne voulons pas y voir; tandis
que par une inconséquence bizarre, nous trouvons la loi du 14
octobre tiès-impérative, quoique ces deux lois disent positive
ment la même chose.
U
�( 10 )
A u reste, il s’agit ici de suivre la jurisprudence du parlement
de T oulouse; la péremption y était jugée de p lein d r o it, et c’est
dire assez qu’elle y était un moyeu de droit public.
L es Chouvenc ont cru trouver une interruption dans le chan
gement de personnes; mais c’est un rêve de dire que Jeanne
Borne n ’ait pas été en cause avant l’an 8; elle était en qualilé dans
le jugem ent de 1793. Quant à Chouvenc fils , il lui a plu d’inter
ve n ir comme donataire, sur l’appel, mais son père est toujours
en cause, et s’il a laissé accomplir la pérem ption, elle n’en est
pas moins bien acquise contre le légitime contradicteur.
DEUXIÈME
QUESTION.
I
L e s appelons , tiers acquéreurs , p eu v en t-ils in v o q u er, à T o u
lo u s e , la prescription de d ix a n s ?
L e s Chouvenc font des efforts incroyables pour
1établir, et
pour forcer à être de leur avis les auteurs même du parlement
de Toulouse qu i, sans exception, sont d’un avis contraire.
Cependant les Chouvenc débutent par convenir (p ag. 9 de leur
m é m o ire ), que M arie M olin ne p o u v a it p as vendre la p o rtio n
de ses coh éritiers, q u ’ i l est CERTAIN que ces cohéritiers avaient
TRENTE ANS u t i l e s p our réclam er contre / o m / c v e n t e f a i t e par
l'u n d'eux.
M a is, continuent-ils, la question con cern e T acquéreur ; on
leur demandera d’abord comment il est possible d’avoir trente
ans pour se pourvoir contre les v e n te s, et de ne pas les avoir
con tre l'acquéreur ; comme ce serait inexplicable , il vaut m ieux
dire que les Chouvenc ont été forcés-de reconnaître l ’évidence
du principe.
A u reste , en examinant la question en e lle - m ê m e , ce n’est
pas dans le Code civil qu’il faut la chercher, cardans une grande
partie de ses articles, et notamment sur les prescriptions, il a
adopté tantôt le pur droit ro m a in , et tantôt la Coutume de Paris.
Mais pour 11e pas faire de confusion à l ’a v e n ir, et respecter le
�£•
( ii )
passé, l ’art. 2281 lermine le Code par dire que les prescriptions
com m encées seront réglées conformément aux lois anciennes.
11 faut donc chercher ailleurs que dans le Code, s’il y a lieu
a la prescription de dix ans; et même si nous trouvions de l’obscurite dans les lois romaines qui régissaient les parties , il fau
drait dire avec la Cour de cassation que l’ usage est VinterprèLc
le p lu s sur des lo is , et s’en référer à ce qui a été jugé de tout
tems sur ce point par le parlement de Toulouse.
Mais la loi n’est nullement o b s c u r e , el si on trouve au
Code une loi qui établit la prescription de dix ans en faveur
du tiers possesseur , on voit aussitôt après l’authentique m alæ
f u le i qui l ’ explique et la com m ente, en déclarant que les dix
ans n’ont lieu que quand le vendeur a été de bonne foi. Malce
J îd e i possessore a lié n a n te , cessât lon g i tem poris prescrip tio\
s i verus dom in us ig n oret j u s suum et a lienationem fa cta m .
Si ce commentaire de la loi elle-même ne paraît pas assez clair,
si comme les Chouvenc le disent, il y avait moyen d’en torturer
le sens en présum ant que les intimés ont connu la vente, nous
trouverons la suite der l'authentique dans la novelle d’où elle est
tirée, et il sera très-clair alors que ce n ’est que la bonne foi du
vendeur qu’il faut considérer. S i autem ig n orâ t verus a lien a ta rum rerurn dom in us, non a liter hune e x c lu d i n isi p er tricn n a lem prescriptioneni : non valente dicere eo qu i res h oc m odo
p ossid et quia ipse bond fid e p o ssid et, quandb ip se à m ald Jid e
p ossidente hoc a ccep it. Novell. 1 1 9 , ch. 7.
Puisque la loi est si claire et si positive, il faudrait donc s’é
tonner que le parlement de Paris jugeât pour la prescription de
dix ans, en faveur de l’acquéreur, si nous 11e savions que la C o u
tume de Paris en a une disposition expresse, et que dans les moin
dres doutes, elle était la règle pour ce parlement.
Quant
au parlement de Toulouse, tous les auteurs de son res
sort attestent, sans exception , que la prescription de dix ans n’y
est admise que pour l’hypothèque, et que le tiers possesseur ne
prescrit que par trente ans.
B 2
�C 12 )
Boutaric , page 182 , a , sur ce s u j e t , une discussion très-ap
profondie. Serres, page 137 annonce la seide prescription de
trente ans comme un principe non contesté. Graverol et Larocheflavin , p.
5 io ; Catelan , p. 507, disent « que le parlement
« de Toulouse n ’a pas reçu cette usucapion de dix a n s , que
« Justinicn même avait transformée en prescription de trente
« ans; q u ’ainsi le tiers acquéreur purge l’action hypothécaire
« par dix ans , et non le droit de propriété pour lequel il faut
« trente ans ».
Furgole , en son traité des testam ens, tom.
3 , pag. 4 1 7 , s’ex
plique ainsi : « A u parlement de Toulouse , ou ne connaît d’autre
« prescription pour l’acquisition ou la perte des droits person« nels 011 réels que celle de trente ans. Ainsi un héritier pourra
« demander pendant trente an s, même ¿1 celui qui possède avec
« un titre, lequel 11’est pas capable de lui attribuer la propriété,
« com m e ayant été consenti à non dom ino.
Ces principes sont élémentaires dans les parlemens de T o u
lo use, A i x , Bordeaux et Grenoble. O n peut consulter là dessus
encore Catelan , livre 7 , chap. 21 ; Lnpeÿrère , lettre P , n.°
83 ;
M ontvalon , page i o 5 ; D econnis , tom. 2 , col. 589 ; Bretonier ,
v.° prescription ; M . r M e r lin , v .° hypothèque , § . i 3 , et la
m axim e est tellement devenue triviale d;ms les parlemens du
droit écrit, que suivant D upérier , » la prescription de dix a n s,
« en ce c a s, n ’est plus maintenant que pour les écoles».
Cela peut paraître étrange dans un parlement qui 11e s’y con
formait p a s; le docte D om at y avait réfléchi lui-m êm e, et ne
s’en étonnait pas : « L es lois, disait-il, qui marquent le tems des
« prescriptions ne sont (pie des lois arbitraires, car la nature 11e
« fixe pas quel tems il faut pour prescrire. . . . Il se règle difïe« reniaient en diverses provinces , et il y a même de celles qui
« se régissent par le droit écrit où l’on n’observe pas les divers
« tems de prescription du droit romain. Il y en a ou elles ont été
« réduites
à
une seule prescription de treille ans. »
N ous verrons sur la 4.« q u estio n , que la C our de cassation a
�( iS )
consacré, p a r trois arrêts, la necessitò de sui vr e la j u ri sp rud enc e
d u p ar le me nt de T o u l o u s e , et expresse'ment sur la matière des
prescriptions.
C o n c l u o n s "donc q u e les C h o u v e n c ne p eu ve nt i n vo q ue r la pres
cri pt ion de d i x ans , dans u n ressort où on ne citerait pas un seul
arrêt ou j u g e m e n t q u i , en s e mb la bl e cas , l ’ ait jamai s admi se.
D a n s leur propre système , il faudrait les suppose r de b o nn e l o i ,
et il est i mpossible q u ’ ils le fussent.
L a l o i , au r este, n ’est n u l le me n t en l eur f a v e u r , et ce n ’est
q u e sur ab o nd a mm en t q u ’ il y a lieu d ’i n v o q u e r l ’i nva ri ab il it é
de la jurisprudence.
T ROI S I ÈME
QUESTION.
L a tierce op p o silion des appelans, e s l-e lle re ce v a h le ?
« P o u r être reçu tiers o p p o s a n t , disent les a u t e u r s , il ne suffit
« pas d ’ avoir intérêt de l’a t t a q u e r , il faut a voir élé partie n éces« sairc dans le procès j u »
L e s i . l i o u v r n c étaient - ils donc pnrlies nécessaires da ns le
procès d ’entre les intimés et le sieur Lucroi si ère , de q u o i s’ugissait-il ? d’ un p a r t a g e .
M a i s un partage :1c succession ne p ouvai t être fait q n V n f r e
cohéritiers. A c lio fam ihœ ercisciuniœ solis hœredibus cotn-
pelit.
L e s questions d ’un p ar tag e sont tellement étrangères à tous
a ut re s , q u e q u a n d un li.u-s achète la porti on d ’un cohéri ti er ,
les autres p eu v en t l ’ex pul se r en le r embo ur sa nt , p o u r l ’e m p ê
cher de pénétrer les secrets de la famille. Au ssi en d r o i t , l ' a c
tion en 'partage e s t - e l l e , p a r sa seule d é fi n i t i o n , e x c lu s i v e de
toute admission étrangère : A c lio familiev crciscimdœ est aclio
ci vi lis qnâ cohœredcs i n t e R î>e agunl de com muni hœreditaie
dividundâ.
J u s q u e - l à u n a c qu é re ur n ’est pas partie nécessaire d a ns n n
p a r t ag e ; il a suivi la foi de son v e n d e u r , et q u a n d la n o v e l l e
1 1 9 le réputé a cq u é r e ur de m au v a i s e f o i , p a r cela se ul cple ac
�(H)
_
cep it à m a lâ J îd e p ossid en te, il est bien plus difficile encore de
supposer que deux cohéritiers ont
nullement et inutilement
procédé pour avoir omis d ’appeler un tiers possesseur, quand
toutes les affaires de la maison leur étaient inconnues.
L es Chouvenc n ’ont pas dû être assignés nécessairem ent’'
L ’ordonnance de 1667 d'ailleurs 11e donne pas la faculté de
tierce opposition à ceux qui ont été condamnés par eux-mêmes,
ou leurs ayant-cause.
O r comment expliquer l’étendue de ce mot ayant c a u s e , ce
sont, disent les auteurs, ceux qui représentent le condamné à
titre universel ou à titre singulier, pour la chose litigieuse. A in s i,
dit R o d ie r, un c réa n cier, un acquéreur sont des ayant cause.
Nons allons voir encore que le Droit romain les place sur la
même ligne.
A u if. des appels et au code des évictions , les lois entendent
si bien que le créancier et l’acquéreur soient des ayant cause du
propriétaire ou vendeur, et qu’il a pu être condamné hors leur
présence, qu’elles luiacecordenl le droit d’interjeter a p p el, comme
condamnés eux-mêmes en sa personne
S ie m p to r de proprietate v iclu s e s t , eo c e ss a n te , auctor eju s
appeliare poterit y item s i auctor egerit et v iclu s s i t , non est
deneganda em ptori appellandi fa cilita s. . . . l d que ità co n slitutuin est in persond creditoris. L . 4. ( f ■de appellat.
L ’acquéreur et le créancier sont donc identifiés avec le procès
du vendeur; et quand celui-ci a lui-même interjeté a p p e l , la loi,
toujours juste , permet encore à l’acquéreur d’intervenir au
procès , si le vendeur paraissait suspect dans les moyens qu’il
propose. Q uiu cliant si auctor appcLlaverit , deindù in causai
d ejen sion e suspectas v is u s e s t, pertndù dc/ensio caitsœ einj.tori
com m iltcnda e s t , atijue si ipse appeliasset. L . ead.
L e ( ’ode civil s’est conformé à ces principes,
sur-tout
en ma
tière de partage, et bien loin de vouloir que des cohéritiers soient
passibles d’aucune résistance étrangère , après le partage con
sommé , il n’admet les créanciers qu’à intervenirà leurs fr a is ,
�C 15 )
sans pouvoir ensuite attaquer le partage autrement que s’il y avait
été statué au préjudice cl’une opposition par eux formée (art. 882).
Il y a plus ; car si , par l’eflet du partage , un seul cohéritier
avait obtenu tout l'immeuble commun , à titre de licitation ,
envain tons acquéreurs ou créanciers des autres cosuccesibles
tenteraient de l’é v in c e r, l’art.
883 lui répondrait « que chaque
« cohéritier est censé avoir succédé seul et immédiatement à tous
« les effets compris en son l o t , ou à lui échus par licitation. »
Ainsi Thérèse et Catherine M olin o n t , dans la portion qui
leur est attribuée par un jugement en dernier ressort, une pro
priété qui leur est transmise ex causa antiquâ, et qui est réputée
leur appartenir depuis l'ouverture des successions. Ainsi les
C h o u ve n c, qui n’étaient pas parties nécessaires au procès relatif
au p a rta g e , mais qui pouvaient seulement y intervenir , trouvent
aujourd’hui un mur d’airain dans la chose ju g é e , et ne peuvent
plus faire juger avec eux seuls une demande en partage , de
successions qui leur sont étrangères.
S i, après s’être pénétré de toute la puissance de ces principes,
il fallait en venir à la jurisprudence, les arrêts abondent en fa veu r
des intim ées, et on n ’en citerait pas un seul qui fût favo rab le
aux Chouvenc.
Parm i le grand nombre d ’arrêts qui se trouvent dans tous les
liv re s , nous 11e puiserons que dans des sources indubitables ,
pour qu’on ne puisse pas même présumer que l ’espèce de lad écicision n ’a pas bien été saisie.
1.0 M . r C o ch in , en ses notes alphabétiques, tom.
dit ; « jugé par arrêt du
5 , pag, 5 2 7 ,
3 i mai 1726, en faveur des sieur et dame
« Massol contre M .r le président Am elot et le comte de T avan es,
que le tiers détenteur , assigné en déclaration d ’hypothèque
« par ceux qui ont obtenu des arrêts contradictoires contre sou
« v e n d e u r , ne peut y former tierce opposition, q u oiqu e son
« acquisition y soit antérieure. »
2.0 M . r Merlin , au répertoire, v.° tierce opposition , c jtc
deux arrêts. Par le premier, « la dame de Conllans était en procès
�(i6)
« avec un seigneur voisin pour m ouvance de fief. . . elle vendit
« sa terre. . . . on continua de plaider avec elle. . . . elle perdit
« son procès par arrêt de 1728 . . . son acquéreur ayant réclamé
« des droits seigneuriaux, l’autre seigneur lui opposa cet a rrê t. . .
« l’acquéreur y forma tierce opposition , 011 lui répondit qu’il
« devait s’imputer de n ’être pas intervenu : par arrêt du 3 i
« mai 1742, il fut déclaré non recevable dans sa tierce opposition. »
P a r le 2.° arrêt, « le marquis de L usignau vendit , en 1720 ,
« des (erres au sieur Dauriac. . . . L es héritiers de.la dame de
« Monriquet liront, en 17 2 7 , confirmer , sur a p p e l, une sentence
« de 1718 , contre le marquis de L usignan seul. M . r .Dauriac
« soutint q u ’on aurait dû l’appeler, et forma tierce o p p o sitio n ....
« O n lui répondit q u ’ il devait intervenir. . . . q u ’il était censé
« avoir été partie dans l’arrêt j)ur son v e n d e u r, q u ’en celte
« partie il était Vayant cause du marquis de Lusignan. Par arrêt
« du 6 septembre i~5o , il lut déclare non recevable. »
3 .° L e B u lletin o[ficiel de cassation rapporte un arrêt du 12
fructidor an 9 , dans lequel , pendant un bail à ferme , de
forges, moyennant 122,400 f. , le s.r Forestier se lit envoyer en
possession de ces forges, par jugement en dernier ressort cl par
défaut du
3 janvier 1792. . . G o d et, créancier, forma tierce oppo
sition , et dit que cette dépossession était le finit d ’une collusion.
Néanmoins l’arrêt, « vu les art. 5 et 11 du titre 27 de l ’ordonv nancc de 1667, et l’art. i . cr du litre
35 . . . • Attendu que la
« reserve du droit des tierces personnes , ne concerne que celles
« qui n’ont pas été parlies appelées ni représentées.. .. que le
« sieur Godet , comme créancier de Lessart , était à cet égard
« son ayant cause. . . . que Lessart a éléappelé. . • . que Godet,
« en qualité de son ayant cause , n ’aurait pû être recevable a
« a lla q u e rc e jugem ent, q u ’aulant q u ’il eût élé juslifié que Lcs« sai t atiK’ il été lui-même admissible à se pourvoir.
que les
« juges do Can , en admettant la tierce opposition du cit. G o d e t,
« oui violé l ’arl.
5 de l'ordonnance concernant l'a u to rité de la
« Chose ju g é e , et oui contrevenu ibmicllement a l’art. i . cr du
litre
�« titre
( *7 )
35 , qui ne perm et de rétracter, autrem ent que par requête
« c iv il e , les jugem ens rendus en dernier ressort , avec ceu x
« qui y ont été p a rties, ou leurs ayant cause...................Casse
« et annulle etc. »
V o ilà donc la pleine confirm ation de la loi 4 iï. de a p p ella tion ib u s et du code civil. L ’acquéreur ou le créancier peuvent
intervenir s’ils suspectent ; ils peuvent m êm e attaquer la chose
ju g é e , par la voie de l’a p p e l, aux risques et périls du vendeur ,
si le jugem ent est en prem ier ressort; par la requête civile , s’il
est en dernier ressort.
T o u t cela encore ne serait pas accordé contre un partage , s’il
n’y avait eu fraude évidente. A u cu n s de ces arrêts ne sont dans
' l ’espèce d’ uu procès de succession. S o lis hœredibus cornpetït.
D e u x autres m oyens résistent à l ’admission de la tierce oppo
sition des appelan». i°. L es tierces personnes ne sont admises in
définim ent à s’opposer, d’après l’ordonnance, que par la raison
bien naturelle qu’ils ne connaissent pas le jugem ent. M ais il a
été signifié aux C h ouvenc en 1798; et ils n’ont form é tierce op
position qu’après dix ans. z ° . D ans les circonstances d e là cause,
c’était de leur part une action p rincip ale, et ils devaient épuiser
les voies de conciliation.
L es Chouvenc objectent qu’ils ignoraient le procès. C epen
dant ils veulent que les intimés aient connu leur vente, bien plus
occulte sans doute qu’un procès , qui a duré depuis 1783 à 1793,
dans une petite com m une. Quand ils voyaient C ath erin e M o lin
dans la maison p atern elle, pouvaient-ils bien acheter de bonne
foi sans sa participation? quand ils l’en ont vu so rtir; quand
Thérèse est revenue de l’A rd èch e dans son pays n atal, 11’ont-ils
pas dû présumer qu’elles allaient intenter un pro cès, ont-ils pu
se défendre de l ’inquiétude naturelle à celui qui a acquis une
chose indivise, et q u riu r-to u t en a payé le prix capital à une
, fem m e séparée de biens.
,
A u re ste , s’il y a de l’inconvénient pour un acquéreur d’être
condam né sans être en cause, n’y en aurait-il pas un plus grand
G
�c
1 8
)
e n co re , d’ exîgèr en règle générale, que tout cohéritier dûf sa
voir s’il y a des acquéreurs , avant d e re ch e ich e r ses droits, cVstà-dirè fût tenu de connaître lès forces de la succession , lors
q u ’au contraire il a le droit de les puiser dans un inventaire, ou
dans une preuve de commune renommée.
Si les acquéreurs étaient parties nécessaires dans une action da
partage , serait-ce donc pour en discuter toutes les questions et
tous les actes de la famille? Une telle prétention résiste à toutes
les notions reçues ?
Q U A T R I È M E
Q U E S T I ON.
T hérèse M o lin avait-elle d ix ans ou trente ans p o u r se pour*
voir contre sa renoncia tion ?
C ette question doit-elle être décidée p ar u n e ju risp ru d en ce
autre que c e lle du parlem ent de T o u lo u se ?
L a nécessité de discuter ces deux points ne m arque que plus
fortement tout le danger qu’il y aurait d’admettre les Chouveric
à pénétrer, par une voie d’intrusion, dansune famille étrangère,
pour dire à des cohéritiers : vous avez péniblement obtenu un
règlement de vos droits, on a annullé'deux testamens: J e m 'y
o p p o se ; je veux faire rejuger tout c e la ; je veux scruter vos
testamens, vos contrats de m ariage, tout ce qui s’est passé dans
votre maison depuis i y 35 jusqu’en 1793. V o s cohéritiers n’y
seront pas même a p p e lé s, car il y a chose jugée avec eux , et
c’ est inoi seul qui veux faire r é g l e r , avec vous tous , vos droits
successifs, je suis à présent, dans la succession de vos ancêtres,
la seule partie légitime..
Si ce système des Ch ouvenc, qui cependant est toute la base
du procès a c t u e l , ne révolte pas au premier aperçu ; s’il faut
trouver en eux le seul légitim e contradicteur, v oy ons donc par
quelle jurisprudence la chose ju g ée et remise en litige doit être
rejugée .
T hérèse M o lin s’était pourvue en 178 3 , contre une renoncïa-
�C 19 >
tíon de 1755. E lle y a été re ce va b le , parce que dans tout le par
lement de T o u lo u s e , et pendant plusieurs siècles, on n’a pas un
seul exemple que les actions en nullité aient été prescriptibles par
moins de
3 o ans. Nous avons vu sur la 2.e question que toutes les
actio n s y étaient réglées à cette d urée, à la seule exception de
l ’action hypothécaire.
L e s Chouvenc ayant leur procès en cette C o u r , ont été séduits
par une innovation de jurisprudence , qui n ’a m ême pris quelque
consistance que depuis le Code civil et pa r induction de l’un de
ses articles; jusques là , la Cour d ’appel ne s’était pas prononcée
et on trouverait m ême dans l ’un de ses arrêts que les anciens prin
cipes en celte matière n’étaient pas oubliés.
Mais quand cela serait autrem ent, n’est-ce pas une folie des
Chouvenc de penser que la Cour d’a p p e l, par un nivellement
désastreux, ramènera à sa jurisprudence , même la chose jugée ,
m êm e des questions nées en 1783 , dans un parlement étran ger,
et à une époque où la Cour d’appel aurait indubitablement jugé
com m e lui.
Qui donc ne verrait pas le danger incalculable qui eu serait la
suite, et non-seulement dans le cas de la chose déjà ju g é e , mais
encore quand elle serait pleinement en litige ? Soumettre brus
quement un vaste pays à une jurisprudence qui jusqu’alors lui
était in con n ue, serait sans doute porter le trouble dans des
familles, dérouter tous les gens d’affaires qui n’auraient plus désor
mais que des conseils vagues à donner aux autres, et une m arche
incertaine à tenir pour eux mêmes.
Les lois ne sont pas un ordre donné au peuple ; elles sont
réputées être émanées de l u i , par le pouvoir que ïeg e regid
i l en a donné au prince. E n les exécutant, il les e xp liq u e, et la
manière
d’après
d’expliquer
un
les
lois
par
l ’usage ,
dit
V in n iu s ,
auteur la tin , vaut m ieux que ce qu’on lit dans la loi
elle-même. P lu s valere leges c/uce m oribus com probatee surit
quant ques scripto c o n sta n t, vérité bien plus marquée encore
j>ar la maxime si co n n u e , que la jurisdrudeace est le m eilleur
�( 20 )
interprète des lois. C onsuetudo est legurn optim a interpres.
L a jurisprudence en effet qui n’est pas seulement un mode de
ju g e r , mais d ’après la définition de Vinnius , J u s litiœ ha b ita s
p ra cticu s , n’a pas cessé d’êlre une espèce de législation impérative, depuis que les anciens ressorts des Cours sont confondus.
Quand R om e n’avait pour règle que la loi des 12 tables, les dé
cisions des jurisconsultes responsa prudenlum fixaient la m a
nière de les interpréter, et cette jurisprudence devint une législa
tion additionnelle; et lorsque des Proconsuls et des Préfets furent
envoyés dans les provinces, il leur était prescrifcde soumettre les lois
à la jurisprudence et de respecter les usages. Prœ ses p ro v in ciœ ,
probatis h is quœ in o p p id o , frcquenter in eodem controversiœ
g e n e r e , scrvata s u n t , cauàd cog n ild statu it. L . 1. cod. quœ s.
long. con s.
L a Cour d ’appel donne tous les jours cet exem p le, en décla
rant dans ses arrêts qu’elle est déterminée par la jurisprudence
du parlement de Toulouse.
L a Cour de cassation que l’on pourrait c ro ire , par le but de
son inslitulion , plus attachée à la lettre de la loi qu’aux diverses
jurisprudences, s’est souvent prononcée de la manière la plus for
m elle sur la question qui nous occupe.
« Considérant ( porte un i . er arrêt du 2 messidor an n ) , que
« les dispositions du droit romain 11e fon,t loi dans les pays même
« q u ’elles régissent, que dans les points et selon le sens qui ont
« été adoptés par la ju risp ru d en ce ; qu’il est constant q u e , par
« une longue suite d’arrêls sem b lab les, le parlem ent de T o u « lo ù se a j u g é , ètc. » (S irey , page 3 0 9 ).
2.0
Dans une autre cause, du
5 floréal an 1 2 , la Cour de cas
sation a dit: « Considérant que quoique en général on puisse par
« le droit romain acquérir les servitudes par 10 ans entre pré« sens, et 20 ans entre absens ; c e p e n d a n t, dCaprès la ¡u risp ru « dence du parlem ent de T ou lo u se constatée par divers arrêts,
« les servitudes discontinues ne pouvaient s acquérir que par la
« possession im m ém o riale, et que c est a in si qu i l a entendu l(X
« lo i , etc. casse et aunuile, clc. » (B u lle tin , n.° 9 2 ),
�( 21 )
3 .° U n arrêt du 2Z du m êm e mois a jugé de m êm e, « que la
« jurisprudence des arrêts rendus par une Cour souveraine, non
« étrangère au pouvoir lé g isla tif, pouvait être considérée com m e
«c fixant le sens des dispositions législatives. » ( S ir e y , p. 2 6 7 ).
Si donc la C our adm et les Chouvenc à discuter les questions
qui ont été agitées au P u y avec L a cro isière , elle ne les jugera
évidem m ent que par la jurisprudence du parlem ent de T oulouse.
Thérèse M olin a renoncé en 1 7 5 5 , cela est v ra i; m ais, i.° elle
était m ineure , et la convention porte q u ’elle sera tenue de co n
firm er et ratifier à sa majorité. E lle n’en à rien fait. Il n’y a donc
pas de partage final là où il y a lieu de le confix-mer en m ajorité;
ce n’est jam ais qu’ une m esure provisionnelle.
2.0
O n fit renoncer Thérèse M olin à tous droits et sup p lém ent.
I l est évident qu’on lui fit entendre en m inorité qu’ elle n’avait
qu’ une légitim e de rigueur. D o n c on la trom pait. Sa renoncia
tion d’ailleurs n’est dirigée au profit de personne.
3 .° Si on suppose qu’elle a approuvé les testam ens, une appro
bation tacite ne suffisait pas; car il fallait les connaître. C elui-là
seul prescrit le droit de réclam er contre une destination de légi
tim e , qu i agnovit ju d ic iu m defu n cti. T e ls sont les principes
invariables com m e la C our l’a souvent ju g é , et notam m ent les
31 therm idor an 8 , et 4 pluviôse an 10.
4.0
L e testament de 1735 a été expédié par le n otaire, avec
des expressions qui en changeaient le sens. C ’était donc induire en
erreur les parties intéressées. Thérèse M olin pouvait croire M arie
M olin substituée, puisque la condition du décès de P ie r r e , sans
avoir rem is, était rem plie , tandis que celle de son décès, sans
avoir r e c u e illi, ne l’était pas. O r , non videnlur qu i errant c o n sentire , et la prescription ne court que du jo u r de la découverte
de la vérité.
5 .° Thérèse M o lin , née en 17 3 3 , avait deux ans au décès de sa
m è r e , et dix ans au décès de son père en 1743. M arie M o iin
alors avait vingt-cinq ans ; car elle était née au m ois de février
�C 22 )
1718. L e père l ’avait chargée de régir et adm inistrer conjoinletement avec Ignace M o lin , curé de C ham bon; et les Chouvenc
qui connaissent plus d’actes de la famille que les intimés n’en ont
jamais c o n n u s , nous apprennent que ledit Ignace Molin parle,
dans son testament de ses droits légitimaires sur les biens de ses
père et m è r e , don t jo u is s a it M arie M o lin .
L a voilà donc évidemment protutrice , ou au moins c o m p ta
ble depuis 1 7 4 3 , envers une sœur de dix ans, qui naturellement
ne pouvait se mêler des affaires de la maison. L e frère n ’avait
que douze a n s, et s’absenta quand il put s’enrôler. L a chance
était donc bien in ég a le, lorsqu’il fut traité en 1755 , entre M arie
M o lin q u i, pendant douze ans, avait connu toutes les forces de
la succession et le vice des testamens, et Thérèse M olin qui
ignorait tout.
O r , le parlement de Toulouse n ’a jamais hésité d’admettre eu
pareil cas le renonçant non v isis ta b u h s , a se pourvoir pen
dant trente ans. Q u ’on consulte M a y n a r d , liv. 2 , chap.' 99 et
100 ; D o liv e , liv. 4 , chap. 16; C atelan , liv . 8 ; Bretonuier, v .°
restitu tio n ; ou plutôt qu ’on parcoure tous les auteurs de cè
p a r le m e n t, ou ceux qui mentionnent sa jurisprudence , on ne
trouvera nulle part que l'art. i 34 de l ’ordonnance dé i 53g ait
été jamais appliqué à celte espèce.
L e parlement de P a r is , après l ’ordonnance de i539 , jugea
lo n g -te m s, comme le parlement de T oulouse a toujours ju g é
L e s auteurs du tems même de cette ordonnance , notamment
M . r D u v a l , de rebus dubiis , enseignaient q u ’il n ’y a contre les
actions en nullité que l ’action Irentenaire. Quarante ans après f
le parlement de Paris ohangca sa jurisprudence!, mais enfin il la
changea de nouveau après l'ordonnance dé 1667 ; et il a inva?
riablement jugé depuis que l’art. 134 de l’ordonnance de i o 3g
ne s ’appliquait q u ’aux actions rescisoires.
C e lle jurisprudence constante s’est mainlenue jusqu’au Code
civil. O n a vu encore, dans les disoussions sur ce Code, les .efforts
des sections réunies de la Cour d’appel de Paris, ¡pour faire main-
�......................... '( 2 3 )
.
tenir l ’action de trente a n s , et on n ’y voit d’opposition que dans
les deux Cours d ’Orléans et de L iège.
L e tribunal civil du P u y-d e-D ô m e commença par suivre les
anciens principes. I l jugea le
28 pluviôse an 4 , entre lés
Cham pom ier et S e z e l, que l ’action en nullité avait duré trente
a n s, en floréal an
5 , à la vérité il changea de jurisprudence.
Cependant la Cour de cassation ne lu i donnait pas cet exemple;
elle avait ju g é en thèse le
3 messidor an 4 , que Gilberte Laporte
avait été recevable pendant trente ans à se pourvoir contre sa
renonciation faite par son contrat de m a ria g e, en faveur de son
beau-frère, et voici les motifs bien précis de son arrêt.
« Attendu que l ’art. i 3 i de l’ordonnance de 1 5 3 9 , déclare
« nulles toutes dispositions en faveur des tuteurs ou administra« teurs. etc. directement ou ind irectem ent, avant le compte
« r e n d u , et q u ’une vente , faitë par une mineure en faveur d ’une
« personne qui administrait ses b ie n s , présente un avantage
« indirect ;
« Attendu q u ’en pareil cas l ’action subsiste pendant trente ans,
« parce que suivant l’art.
tit. 29 de l’ordonnance de 16 6 7 ,
« le comptable ne cessant de l ’être que par la reddition de son
-« com pte, c’est le compte seul qui peut éclairer le m ineur sur
« ses intérêts ;
« Attendu que l ’art. 184 de l ’ordonnance de i 53g qui restreint
« le délai à dix ans , n ’est relatif qu ’aux actions rescisoires,
« qui n’ont rien de com m un avec celles en nullité qui durent
« trente a n s , et pour lesquelles il n’était pas besoin de lettres ,
« casse et annulle , etc. »
Il est même remarquable que le Bulletin officiel ju s q u 'à e t
jo u r ne mentionne aucun arrêt qui contrarie le précédent.
L a Cour d ’appel de R io m ne s’est prononcée, pour les d ix
ans , pour la première f o is , que le 18 prairial an 11 , c’est-àd ire, depuis le Code c iv il , et par induction de l’article 475. O u
verrait m ê m e , dans un arrêt du
25 nivôse an 10 , que la pre
m ière section avait admis une fem m e pendant trente a n s, et jug<r
�( H )
encore que l ’action n’avait couru q u ’après le décès du p è re , q u i
avait constitué la dot m aternelle par le contrat attaqué. M ais si
cet arrêt ne ju g e pas la question isolém ent et en thèse, il paraît
au moins certain que la C our n’a jam ais ju g é en faveur de d ix
a n s, avant le Gode civ il.
Com m ent donc concevoir que la Cour pût infirm er le ju g e
m ent du P u y qui a adm is Thérèse M o lin , après d ix ans , lors
que ce tribunal a ju g é com m e son parlem ent , com m e le par
lem ent de Paris , com m e la C our de casation elle-m êm e.
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L 'a c tio n de Catherine M o lin est-elle ‘p rescrite p ar trente ans ,
q u o iq u 'elle ait co h a b ité la m aison p a tern elle ?
L e s Chouvenc se sont attachés singulièrement à établir cette
prescription par des citations qui n ’ont pas la moindre analogie.
i.o
D argentré q u ’ils invoquent sur l’art. 276 de Bretagne , ne
s'occupe pas de la question. D o m a t, au tit. 7 du liv.
3 ne s’en
occupe pas davantage. L e Code c i v i l , art. 2243 se contente de
dire q u ’il y a interruption naturelle, quand ce possesseur est
privé pendant un an de la jouissance de la chose. E n f i n , L a peyrère , bien loin de vouloir la p rescription, ♦lit expressément
ce ciui suit : « T a n t que les enfans sont nourris sur les biens de
« l ’hérédité, la prescription de la légitim e ne court point contre
« eux ». Son annotateur ajoute « id e m , en matière départagé »;
et il se fonde sur Coquille , en la question z 5().
M a is , outre L a p e y r è r e , on ne voit pas d ’auteurs qui aient
traité la question , s’être expliqués autrem ent, et si on en cite
plusieurs a u tre s , c’est seulement pour convaincre les Chouvenc
q u ’ils n ’ont pas vo u lu chercher la question où ils 1 auraient
trouvée.
D o liv c en fait une question expresse au chap.
3 i du liv. 5 ,
et décide que « si les enfans vi v e n t en com m un sur les biens de
« l’Jiériidité , celte prescription ne court pas contre eux , en cette
« rencontre,
�( »5 )
f< rencontre, depuis la mort de leur père , mais depuis seule« ment q u ’ils ont cessé d’être nourris sur ses biens , parce que
« recevant journellement leur nourriture sur le patrimoine du
« d é fu n t , ils sont censés être en possession. »
D o liv e cite deux arrêts des xo janvier i 63o et 26 août i 636 .
Cette opinion est encore enseignée par V e d e l , liv. 2 , chap.
36 ;
S erres, pag. 294 ; D unod , p. }io i ; Despeisses , tom. 2 , p. 0 1 3 ;
et L e b r u n , liv.
3 , des successions. C ’est aujourd’hui un principe
incontestable, dont la raison et la justice prescriraient l’observa
tion , si les auteurs ne l’enseignaient pas.
L a Cour d’appel vient très-récemment de p i'ononcer, dans
un arrêt du i 3 ventôse an i 3 , le m o tif suivant :
« A l tendu que l’habitation d’Antoine et Pierre V e sch am b e ,
« dans la maison paternelle , a constamment réclam é la con
te servation de leurs droits. »
A in si Catherine M olin qui a habité la maison paternelle jus
q u ’en 1788; qui n’en est sortie que pour former la d e m a n d e ,
n'u pas un instant de prescription à redouter. Ce fait a été éclairci
dans le procès contre Lacroisière, qui soutenait alors, com m e les
Chouvenc le font aujourd’hui , que la cohabitation n ’avait pas
empêché de prescrire.
r
L es Chouvenc veulent que cette prescription ait couru à
leur égard ? quand elle n’aurait pas couru contre Lacroisière ,
il est difficile de concevoir sous quel prétexte, à moins que ce ne
soit pour en revenir à la prescription de dix ans , qui a déjà été
démontrée être sans application dans la cause.
Il est plus difficile de concevoir encore sur quoi serait fondée
la différence q u ’ils veulent établir entre les portions de Catherine
et J e a n n e , et celles de Marguerite et de Pierre M o lin ; car l’a c
tion d ’ un cohéritier se compose de tous les droits partiels , q U 'h
ad hœreditatem veniunt ; et comme les portions advenues à
Catherine Molin par le décès de ses sœurs , se sont accrues à
la sienne , aussitôt leurs décès, en vertu de la rè"le 1p ». ,
7
#
#
o >
m ort
fü is it le v if , Catherine M o lin a é t é , dès cette é p o q u e , p ro
�C 26 )
priétaire d’une quotité plus considérable , et n’en a pas plu»
perdu une fraction que la totalité.
S i x i è m e
Q u e s t i o n .
L e testam eut de Catherine Férrap te e s t-il v a la b le?
« U n testament, dit R ic a r d , est un acte dont toute la valeur
« est dans sa solennité, et dont toute la solennité est dans ses
« foi mes. »
E n e f f e t , dans cet acte si im p o r ta n t, il faut que toutes les
formalités aient été ostensiblement remplies : elles sont toutes
de rigueur d ’après les ordonnances.
L e testament de 1785 est vicié par deux nullités textuelles : i .°
il est dit f a i t e l ré cité en la m aison de P ierre M o lin ; mais rien
ne constate que la lecture ait été faite à la testatrice.Cependant
la loi l ’exige impérieusement; et il est bien indispensable q u ’ un
testament soit lu à celui qui l’a d ic té , pour qu'il soit certain
que ce sont là ses véritables intentions;
2.0
Il n ’est fait aucune mention de la signature de la testa
trice ou de sa déclaration de n ’avoir su ou pu signer , car on y
lit seulement : « L a d ite testa trice i l l e de ce enquise. »
O r , l’ordonnance de 1735 dit que « les notaires écriront les
« dernières volontés du testateur, et lu i en feront ensuite lec« ture , de laquelle il sera fait une mention expresse.... Après
« quoi le testament sera signé par le testateur , le notaire et les
« témoins ; et en cas que le testateur déclare q u ’il ne sait ou ne
«. peut sig n e r, il en sera fait mention ( a r t . 2 3 ) à peine de
« nullité ( art. 47 ). »
M iis , disent les Chouvenc , le
testament de Catherine
Ferrapie est antérieur à l’ordonnance de 17.35 : cela est vrai.
Mais cette ordonnance ne fait que répéter eu cette partie les
dispositions des ordonnances d ’Orléans et de Blois.
« Et en cas que les parties ou témoins ne sauront point
« signer , les notaires fe r o n t m ention de la réquisition par eux
�( 27 ) _
« faite aux parties ou témoins de s i g n e r , et de leu r réponse
« q u ’ils ne savent signer. » Ordonnance d’Orléans , art. 84 ;
ordonnance de Blois , art. i 65 .
Ces ordonnances exigent donc du testament une réponse
d ’une manière plus expresse encore que celle de xy 35 .
E t les auteurs qui ont écrit avant l ’ordonnance de i y 35 r
enseignent que cette réponse né peut être suppléée par ce que
dit le notaire en son nom. ( L e M aitre , sur Paris , article 14»
chapitre i . e r ; R a v i o t , question 164; M aillart , sur A r t o is ,
art. 74 )•
O n cite souvent R icard, comme ayant rapporté un arrêt de i 65 z
validant un testament où il était dit : « L e q u e l n ’a p u signer ,
« interpellé de le faire. » M ais on pourrait voir que R ica rd le
d ésappro uve, en disant que cela est un peu subtil , et qu’il y a
grande apparence^que la faveur des dispositions dont il s’agissait
contribua à faire rendre cet arrêt.
A u ssi R ic a r d , n.° 15 2 6 , citant un arrêt
ment où le testateur a déclaré ne savoir
notaire eût dit l’avoir interpellé , ajoute :
« fois autrement , si le notaire déclarait
qui validait un testa
signer , sans que 1^
« Il en serait toutede son nom que le
« testateur n ’a pu signer , parce q u ’encore le testament ne fait
« foi , ni de l’interpellation du notaire , ni de la réponse d u
« testateur.... Car le n o ta ire , dit R icard , au n.° i 568 , ne doit
« contribuer d ’autre chose que de son oreille et dé sa m ain ,
« dans la rédaction du testament. »
L a jurisprudence s’est conformée à cette rigueur; et on trouve
dans Denizart un arrêt du
3 septembre 1768, qui a annullé un
testament du Bourbonnais , dans lequel il était dit que le tes
tateur n 'a va it pu sig n er à cause de sa fa ib le sse , de ce en qu is.
Le
tribunal civil du Puy-d e-D ôm e a ju g é deux fois de la
m êm e m a n i è r e , le 17 ventôse an 6 , sur appel du C antal , et
le
23 pluviôse an 7 , entre les héritiers V a c h i e r , cl’A ria n e .
L a question ne paraît pas s’être encore présentée en la C o u r î
mais l’art. 973 du Code civil veut aussi que si le testateur déD 2
�.
, ( ? 8 )
clarc ne savolr'slgner, il soit fait m ention expresse de sa d écla
ration ; ainsi la loi n ’a pas change , et lu cause actuelle fixera
sur ce point la jurisprudence.
L e s Chouvonc se sont imaginé qfie les ordonnances d ’Orléans
et de Blois n ’avaient pas été enregistrées au parlement de T o u
louse ; mais on leur demanderait comment il se fait ([ne tous
les auteurs de ce parlement s’y réfèrent et les citent comme lois,
s m s dire mille part que leur parlement ne les adopte pas.
i
A la vérité l) jlive dit que de son tems on n’était pas rigo u
reux sur les signatures de testamens , et que même on n’exan i n it pas si le testateur avait signé ; mais Serres, Boutaric
et Furgole ne disent rien de pareil. F u rg ole dit au contraire
que les fo rm a lités que les lo is prescrivent, p ou r la v a lid ité des
testam ens , so n t de droit p u b lic , et q u ’un testament doit porter
la preuve avec lui-m êm e; que toutes les formalités de la loi ont
été religieusement
observées.
O
D ans le testament de Catherine F e r r a p le , il n’y a pas même
la preuve que le notaire ait parlé des causes de la non signature
de la testatrice ; car le mot ille ne signifie rien. Les Chouvenc
se sont efforcés de persuader q u 'ille veut dire HUtéré , puis
(\u H 'itéré veut dire ne sait écrire, puis enfin que les mots ne
sa it écrire équivalent à la réponse ou déclaration voulue par
les ordonnances.
M ais d ’abord quand cette pénible graduation pourrait mener
à quelque chose , il y aurait toujours une antre irrégularité ,
en ce q u ’une formalité rigoureuse aurait été substituée par une
simple abréviation.
U n arrêt de règlement de i 685 défend aux notaires d’ user
d ’aucune abréviation ou interligne dans toute espèce d’actes. Si
elles ne touchent pas il l’essence de l’a c te , elles sont seulement
elles-mêmes considérées comme nulles.
V in n iu s et la loi nous apprennent que dans les testamens sur
tout , qui sont testa tio m e n tis , il iaut écrire en toutes lettres
et d ’une manière intelligible sans user de siniples notes ou abré-
�( 29)
vial ions. Cœterum litteris iisq u e u sita tis et legibilibus scri
be n du m esse p la c u it , non s ig n is , obscurisve n o t is , /.
6 , § . u/t.
de bon. p oss.
L e mot illit é r é , au reste , ne se trouve , ni dans le diction
naire de l’A cad ém ie, ni dans le dictionnaire de pratique de Ferr iè r e , ni dans le glossaire de Delaurière ; on trouve au diction
naire de T rév o u x le mot illé tr é , signifiant celui qui ne connaît
pas les belles lettres. A u reste quand ce mot signifierait quelque
chose , il n’y a pas dans le testament il lit é r é , il y a i l l e , et par
conséquent ce serait mépriser évidemment la loi que de trouver
dans ce mot bizarre, une déclaration de la testatrice, qu’elle n ’a
pu ou su signer. Allon s plus loin même , le m ot illité r é ne la
remplacerait pas.
S E P T I È M E
Q U E S T I O N .
Q u e lle est la nature de la su b stitu tion du testam ent de 1-735?
a -t-elle transm is la su ccession à M arie M o lin ?
Q u a nd ce testament serait valable en la forme , il ne produi
rait pas encore l’eiFet de réduire Thérèse et Catherine M o lin à
une légitime de rigueur.
Car le système des Chouvenc à cet é g a r d , est fondé unique
ment sur une erreur de principes, qu’ ils accréditaient encore plus
par une expression infidelle de l’expédition, q u ’ils avaient d’abord
produite, de ce testament.
L es héritiers institués, disaient ils , étaient Ignace M o lin et
pierre Boyer. Ils étaient chargés de rendre la succession à Pierre
Molin quand bon leur semblerait. Pierre M olin est mort en 1 7 4 8 ,
et Marie M olin était appelée à la substitution , dans le cas ou
ledit Pierre M olin décéderait sans avoir rem is la succession ; or
il est décédé sans l’avoir remise , donc , en vertu de la m axim e
substitutus substituto est substitutus in stitu to , M arie M o lin a
recueilli l’hérédité directement des deux héritiers institués.
D ’abord il est prouvé par l'extrait vidim é du testament de
�( 3° )
1735 , fait en exécution de l’arrêt de la Cour , qu'au lieu du
mot remis il y a recu eilli. Cela pose', voyons maintenant quel
est le sens de la substitution ?
L e testament d ’une mère qui , ayant des enfans , instituerait
des étrangers , serait évidemment inofficieux et susceptible de
contradiction ; mais les principes y ont pourvu en faisant une dif
férence entre la substitution Rdéiconnnissaire et la substitution
fiduciaire.
L a pi’emière fait passer réellement la succession sur la tête d a
grévé : l’autre ne lui transmet qu ’un dépôt à titre de confiance,
et le grevé d’un fiduce ne compte pour rien dans les degrés de
la substitution.
Pérégrinus , qui a fait un traité sur les fidéicomrnis, le définit
ainsi. F id u cia riu s est hœres q u i, non s u î con tcm p la tio n e scd
alterius gratiâ in stitu tu s , eidem restituerc hcreditalem ,p o s t
diem certam v el incertain , rogatus propom tur.
« Ces, substitutions, disent Henrys et Bretonier, sont com « munes dans les pays de droit é c r i t , sur-tout en faveur du sur
it vivant des époux , pour maintenir les enfans dans le respect
« et l’obéissance h o c co n silio ut p arenti obsequerentur..........
k Q uoique le tems de la restitution, continuent-ils , ne soit pa3
« marqué dans le testam ent, néanmoins on doit présumer que
« son intention a été que le survivant ferait bon usage de cette
« lib e rté , et n ’attendrait pas jusqu’à sa mort pour en faire la res*
« titution. . . .
. « O n doit penser, dit ailleurs le même au te u r, q u ’un père
« chérit plus ses enfans que leur mère ; q u ’il vise plutôt à leur
« u tilité , et ne l’avantage q u ’à leur considération ; qu ’ainsi il ne
« l’a instituée que par la nécessité de leur bas â g e , non ut f ili is
m inoribus o b e s s e t, sed. p o tiu s ut eis consuleret. » ( hem\ t.
i , c r , p. 736 , L 3 , p. 69 ).
T ous les auteurs ont adopté cette distinction , et donnent
d’autres signes du fiduce, q u ’on retrouve tous dans le testament
de 1735.
�(
3i )
i.° Calherine Ferrapie avait un fils et des filles; cependant
elle paraissait instituer deux oncles ;
2-o Ferrapie chargeait ces oncles de remettre l ’hérédité à son
fils, sans distraction de quarte. Ces prétendus héritiers n’avaient
donc l’espoir d'aucun droit , de leur c h e f , à la succession ; car
tout héritier grevé de fidéicoinmis a le droit de retenir la quarte
trébellianique ( 1. i . « § . 5 } ad treb. ) ;
3 °. E n remettant l ’hérédité à Pierre , ils élaient dispensés par
la testatrice de rendre aucun compte des fruits. Si donc ils eussent
été de véritables héritiers , jouissant pro suo , les fruits leur
eussent appartenu de plein droit , sur leur propre c h o s e , sans
aucune stipulation ;
4.0
Enfin ils étaient institués à la charge d’élever les enfans :
le but de la testatrice était donc de maintenir seulement ses
enfans dans l’obéissance envers deux oncles , u t p arentibus
obsequerentur. A cela p r è s , elle exigeait les mêmes soins pour
eu x, que si elle eût été vivante , sed p o tiu s ut eis consuleret.
A in si disparaissent Pierre B o j e r et Ignace Molin , simples
dépositaires, pour faire place à Pierre M olin , impubère , véri
table héritier en premier degré de la succession de Catherine
Ferrapie.
Pierre M olin , propriétaire de la succession, l’ayant recueillie
dès 1735, était à la vérité grévé lui-mèine de substitution envers
Marie Molin , mais seulement au cas q u 'il v în t à m ourir sans
p o u v o ir disposer y ou sans a v o ir r e c u e illi la d ite hérédité.
On voit dans cette clause tous les caractères de la substitution
pupillaire , qui consistent comme on sait à faire soi-même le
testament de l’enfant impubère , s i non e x tite r it h œ resJ iliu s ,
aut s i irnpubes decesserit ( instit. ).
Pierre Molin n’est pas mort sans p o u v o ir disposer ,* car
en p a j s de droit écrit le mineur avait testam enti ja ctio n em .
aussitôt q u ’ il avait atteint sa puberté. O r , Pierre M olin , né
en 1781 , était p u ! ère en 174s , et il n ’est décédé q u ’en 1748.
S i ce m o je n n ’était pas pérem ptoire , on opposerait aux
�,
c 3 2 }
Chouvenc que la mère ne pouvait pas faire une substitution
pupillaire ; car il faut pour cela avoir la puissance paternelle ,
com m e l ’enseignent les institutes , is subslituere p o te st liberis
im puberibus
quos in p o t e s t a t e
iiâbet,
cùm eju s œ tatis sin t
in quâ ip si tcstam entum fa cere non p ossu n t.
Il
ne reste donc que l ’institution de Pierre Molin , sans charge
de substitution envers Marie. A u surplus elle serait éloignée
encore par le principe enseigné par Cujas sur celte matière ;
c’est que la règle substiluLus su b slilu to n’a pas lieu en la subs- ,
titution p u p illaire , et le substitué au pupille n ’est pas censé
l ’héritier du testateur. ( C u j a s , ad I. 41. de vul. et pup. su b .)
A insi le testament de i y 35 , valable ou non , a transmis la
succession maternelle toute entière ù Pierre Molin. Il est mort
pubère ; il est mort ab intestat-, donc ses sœurs lui ont succédé
par égalité , et ont de son ch e f recueilli cette succession.
H U I T I È M E
Q U E S T I O N .
L e testam ent de 1743 e s t- il n u l ?
Il
est évidemment n u l, mais cette nullité ne change rien à
l ’ordre de succéder dans les biens paternels ; et on ne s’en occupe
que parce qu ’elle a été agitée lors du jugement de 1793.
Pierre M olin père a institué son fils héritier , et a seulement
légué une légitime à ses filles ; or les institutes nous disent que le
père de famille doit instituer tous ses enfans héritiers, ou les
exhéréder nominativement, aut hæredem in s titu â t, aut exhœ redem norninatim f a c i a t , a lioquin in u tiliter testabitur.
Cette disposition a élé répétée dans l’art. 5o de l’ordonnance
de 1 7 3 5 , qui dit q u e , dans les pays de droit écrit, ceux qui ont
droit de légitime , seront institués héritiers , au moins en ce que
le testateur leur donnera.
M ais l’héritier, institue par le testament de 174^ j étant décédé
ab in te s ta t, il importe peu que scs sœurs viennent de son ch e f
�.
(
3
3
)
ou ju r e suo , h la succession de leur p è r e , il n’est pas moins vrai
de dire q u ’elle doit être partagée entr’elles par égalité.
L es Chouvenc terminent leur mémoire par d em an der, x.°
q u ’on estime les biens de la succession M olin ; 2.0 q u ’on accorde
à Marie M olin leur venderesse , les prélèvemens q u ’elle aurait a.
faire, notamment trois q u ’ils indiquent; 3.° q u ’ils leur soit ac
cordé un compulsoire pour chercher des quittances * s’il en existe.
A l’égard des deux premiers articles, le jugem ent dont est
ap p el, y a fait droit , en ordonnant que tous les biens seraient
épuisés pour former le lot des intim és, avant d’en venir aux
Chouvenc.
A in si les Chouvenc assisteront à la formation des lots pour
veiller à leurs intérêts ; c’était tout ce que les premiers juges
devaient et pouvaient fa ire , pour conserver l’intérêt de toutes
les parties ; ce que demandent les Chouvenc appartient donc à
à l ’exécution du jugem ent dont est appel.
Alors , seulement ils pourront s’occuper des prélèvemens et de
l ’estimation des biens, sans laquelle le partage serait impossible.
Quant au compulsoire , c’est encore à cette époque qu’ils a u
ront droit et intérêt d ’en re q u é rir, s’il y a lieu , et il ne leur
sera pas refusé ; mais leur réclamation actuelle n ’est q u ’une
inquiétude tracassière , fondée sur une simple possibilité Je
fraude q u ’ils n’ont pas le droit de soupçonner sans m otif; car
la fraude ne se présume pas.
T o ut prouve dans cette cause que c’est Lacroisière qui souille
encore un troisième procès , après en avoir perdu deux , et les
exclamations des C h o u ven c, pour crier a la collusion , ne sont
q u ’ une finesse de plus ; ils sont venus à l ’audience avec une
foule de papiers de la famille M olin , q u ’ils ne pouvaient tenir
que de lui. T o ut ce q u ’ils ont expliqué sur celte famille avec
tant de détails, ne peut être de leur science personnelle, et il
st remarquable q u ’ils n’on t jamais demande en com m unicat ion
E
�(34)
les pièces du procès par écrit jugé en 1793 , quoiqu’il soit le
siège principal des difficultés q u ’ils elevent.
M ais tel est le résultat Fréquent des tierces oppositions for
mées par les ayant cause; elles ne sont q u ’un piège tendu a u x
tribunaux et une voie tortueuse de la chicane pour éprouver la
•variation des jurisprudences. A u reste , si la Cour veu t statuer
sur les questions d ’un partage, avec l’acquéreur d’un cohéritier;
si elle veut examiner le bien ju g é du jugem ent en dernier res
sort de 1 7 9 3 , elle reconnaîtra que les dispositions de ce ju g e
ment étaient sages et lé g a le s , et n ’y trouvera rien qui mérite
censure et réformation.
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e D A U D E , avoué.
A
R I O M ,
De l’imprimerie du Palais, chez J.-C. SA LLES. (An XIII).
�
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Molin, Catherine. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Daude
Subject
The topic of the resource
tutelle
successions
testaments
jurisprudence
prétérition
prescription
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour Catherine Molin, et les sieur et dame Vendriez et Borne, intimés ; contre Jean et autre Jean Chouvenc, appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1735-An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0729
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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fre
Relation
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BCU_Factums_M0624
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Le Chambon-sur-Lignon (43051)
Tence (43244)
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